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Version finale

32e législature, 3e session
(9 novembre 1981 au 10 mars 1983)

Le mardi 19 octobre 1982 - Vol. 26 N° 179

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude du projet de loi no 90, du projet de réforme parlementaire et du nouveau régime de rémunération des députés


Journal des débats

 

(Dix heures dix-sept minutes)

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À l'ordre, s'il vous plaît. Je déclare ouverts les travaux de la commission de l'Assemblée nationale dont les membres, pour la séance d'aujourd'hui, sont: MM. Baril (Arthabaska), Bertrand (Vanier), Blank (Saint-Louis), Brassard (Lac-Saint-Jean), Chevrette (Joliette) remplacé par de Belleval (Charlesbourg), Fréchette (Sherbrooke) remplacé par Beaumier (Nicolet), Gratton (Gatineau), Jolivet (Laviolette), Lalonde (Marguerite-Bourgeoys), Leduc (Fabre) remplacé par de Bellefeuille (Deux-Montagnes), Levesgue (Bonaventure) remplacé par Marx (D'Arcy McGee), Marquis (Matapédia) remplacé par Guay (Taschereau), Ouellette (Beauce-Nord) remplacé par Desbiens (Dubuc), Pagé (Portneuf), Picotte (Maskinongé), Rancourt (Saint-François) et Vaillancourt (Jonquière).

À la suite d'un avis qui a été publié par le secrétariat des commissions parlementaires, je vous lirai le mandat de la commission, qui est le suivant: "À la demande du leader parlementaire, veuillez prendre avis que la commission permanente de l'Assemblée nationale, au cours de ses séances des 19, 20 et 21 octobre prochain, en la salle 81-A de l'Hôtel du Parlement, à compter de 10 heures, étudiera, outre le projet de loi no 90, le projet de réforme parlementaire et celui du nouveau régime de rémunération des députés." C'est donc là le mandat très précisément exprimé de la commission d'aujourd'hui et des jours qui vont suivre.

Il y aurait maintenant lieu de procéder à la nomination d'un rapporteur. Est-ce que quelqu'un aurait une motion à présenter?

M. Lalonde: Est-ce débattable?

M. Bertrand: M. de Bellefeuille, député de Deux-Montagnes.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Est-ce que cette motion sera adoptée?

M. Lalonde: Adopté.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Deux-Montagnes est désigné rapporteur de la commission.

M. Bisaillon: M. le Président...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Sainte-Marie, à moins d'un consentement unanime, je ne peux vous reconnaître le droit de parole puisque vous n'êtes pas membre de la commission.

M. Bertrand: Consentement, M. le président.

Droit de parole

M. Bisaillon: Mon intervention n'était qu'à l'effet de dire que la commission parlementaire siège pour étudier non seulement un projet de loi qui a été déposé mais aussi quelques modifications qui y seront apportées. C'est un projet de loi qui touche l'ensemble des députés et je me demandais si, dans les circonstances, il n'y aurait pas la possibilité d'obtenir à l'avance, comme on peut le faire au cours des débats, pour tous les députés qui voudront passer un commentaire, la permission de le faire.

M. Bertrand: Accordé, M. le Président.

M. Lalonde: Entièrement d'accord. J'allais le proposer. Nous en avions parlé.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Est-ce que quelqu'un pourrait en faire une motion au lieu d'un consentement unanime? C'est qu'une motion, pour être présentée...

M. Lalonde: Je propose une motion pour que tous les députés de l'Assemblée nationale puissent adresser la parole à cette commission et participer à nos débats sans avoir auparavant à demander le consentement des membres de la commission.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Et sans droit de vote, si vote il doit y avoir. Cette motion sera-t-elle adoptée?

M. Bisaillon: Adopté.

M. Lalonde: Pour la durée des travaux, naturellement.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À ce stade-ci, je me dois de

donner le droit de parole au leader du gouvernement.

M. le leader.

Projet de réforme parlementaire M. Jean-François Bertrand

M. Bertrand: Merci, M. le Président. Je voudrais d'abord indiquer aux membres de la commission parlementaire de l'Assemblée nationale que nous allons au cours des trois prochains jours non seulement regarder quelques-uns des aspects qui sont déjà contenus dans le projet de loi no 90, qui a été déposé à l'Assemblée nationale le 22 juin dernier, mais que nous allons, au-delà du projet de loi no 90, nous intéresser à deux dossiers fort importants, dont certains des aspects se retrouveront dans le projet de loi no 90 amendé et d'autres dans le règlement de l'Assemblée nationale. Je fais évidemment allusion à deux dossiers qui ont déjà fait couler beaucoup d'encre dans le passé et qui continuent d'en faire couler, le dossier de la réforme parlementaire et le dossier de la réforme du régime de pension des députés de l'Assemblée nationale.

Je voudrais ce matin déposer et expliquer, présenter aux membres de l'Assemblée nationale le projet de réforme parlementaire sur lequel ont travaillé bon nombre de personnes. Je voudrais, dans un premier temps, indiquer que cette réforme parlementaire a une longue histoire. On peut revenir très loin, on peut retourner en 1968, par exemple, à l'époque où il y avait un projet de loi qui portait le même titre, qui était le projet de loi no 90, et qui proposait l'abolition du Conseil législatif et la modification du nom de l'Assemblée législative en Assemblée nationale du Québec. Je relisais cela hier avec beaucoup de plaisir et je relisais même des interventions de collègues qui sont encore aujourd'hui membres de l'Assemblée nationale, dont le premier ministre du Québec, qui était député de Laurier à l'époque et qui avait commis un certain nombre d'interventions sur les modifications apportées, et le chef du Parti libéral du Québec, M. Gérard D. Levesque, qui, à l'époque, comme député de Bonaventure, avait aussi apporté un certain nombre d'éléments contribuant à faire en sorte qu'on entame un peu la réforme parlementaire mais, bien sûr, par des modifications à certaines des institutions ou à certains des noms que portaient nos institutions.

Il y a eu par la suite beaucoup de travail qui a été fait et sous le gouvernement Bourassa, et sous le gouvernement Lévesque. Cela a pris différentes formes. Il faut savoir que plusieurs parlementaires, à différentes époques, ont proposé des modifications non seulement à la Loi sur la Législature, mais aussi au règlement de l'Assemblée nationale. Je veux rappeler, entre autres, la contribution, à ce point de vue, d'un exprésident de l'Assemblée nationale, M. Jean-Noël Lavoie, qui avait apporté, avec le concours des parlementaires, des modifications substantielles au règlement de l'Assemblée nationale. J'en parlais d'ailleurs avec Mme Jeanne Sauvé, présidente de la Chambre des communes, il y a quelques jours, et elle me disait que nous avions probablement un des règlements les plus modernes et les plus souples en ce qui a trait au fonctionnement de l'Assemblée nationale et de ses commissions.

Il y a eu d'autres personnes aussi qui, du côté de l'Opposition, ont fait du travail. Je pense à l'ex-député de Saint-Laurent, M. Forget, qui, en 1977, avait publié un document assez imposant, important et substantiel faisant état d'un certain nombre d'éléments de réforme qu'on pourrait apporter à la Loi sur la Législature et au règlement de l'Assemblée nationale.

Il y a eu, en juin 1980, l'avant-projet de loi sur l'Assemblée nationale, déposé par votre prédécesseur, M. Clément Richard, qui a fait l'objet d'études par des sous-commissions de l'Assemblée nationale en août 1980 d'abord et en août 1981 ensuite. Cela n'a pas donné, par ailleurs, les résultats escomptés tant il est vrai que nous n'avons pas, à la suite des réunions de ces sous-commissions, adopté quelque modification que ce soit, soit à la Loi sur l'Assemblée nationale, soit concernant le régime des salaire et retraite, soit à ce qu'on pourrait appeler, d'une façon plus large, la réforme parlementaire.

Plus récemment - je crois que cela mérite d'être souligné parce que cela a été un élément très important dans la décision qui a été prise par le conseil des députés ministériels et par le Conseil des ministres pour aller de l'avant avec une réforme parlementaire - il y a eu le document préparé et présenté par le député de Trois-Rivières, M. Denis Vaugeois, document qui nous donnait un certain nombre de solutions possibles qui ont fait l'objet d'évaluation au conseil des députés ministériels et au Conseil des ministres depuis son dépôt en janvier 1982.

Aujourd'hui, le projet de réforme parlementaire que nous soumettons à l'attention des membres de la commission de l'Assemblée nationale est un projet qui fait consensus parmi l'ensemble des députés ministériels. Quand je dis l'ensemble des députés ministériels, je veux évoquer autant le conseil des députés ministériels que le Conseil des ministres.

Nous sommes tous des parlementaires. Nous avons, bien sûr, un certain nombre de responsabilités qui, à certains moments,

peuvent nous amener à nous distinguer les uns des autres. On peut parler du pouvoir exécutif, on peut parler du pouvoir législatif, mais il n'en demeure pas moins que nous sommes d'abord et avant tout, au premier chef, des parlementaires, des députés élus dans une circonscription électorale et que nous avons donc tous le même intérêt à faire en sorte que cette institution qu'est l'Assemblée nationale, puisse véritablement fonctionner le mieux possible, être la plus démocratique possible et permettre à l'ensemble des parlementaires d'y jouer un rôle utile et valorisant.

Avant de présenter la réforme comme telle, je voudrais aussi souligner dans un dernier temps que nous n'aurions pas pu arriver avec une réforme parlementaire à ce moment-ci si des députés du côté ministériel ne s'étaient pas préoccupés de cette question pendant un certain nombre de semaines durant l'été. Là-dessus je voudrais rendre hommage au président du comité spécial du conseil des députés qui a travaillé avec une dizaine de parlementaires ministériels pendant les mois d'août et de septembre, qui a permis d'arriver à présenter un projet substantiel de réforme parlementaire au Conseil des ministres.

Comme leader, je n'ai pas eu à me battre très longtemps auprès du Conseil des ministres parce que je dois le dire, même si cela peut surprendre à l'occasion, on peut avoir un préjugé à l'effet qu'un Conseil des ministres serait plutôt prudent et même rébarbatif à toute idée de réforme parlementaire, parce que effectivement une réforme parlementaire implique un meilleur contrôle de l'exécutif de l'administration publique, une distinction meilleure entre le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif, un meilleur équilibre de nos institutions.

Donc, cette réforme parlementaire n'est pas possible si, finalement, le Conseil des ministres n'y souscrit pas. Je dois dire que, sur la base des travaux que nous avons effectués avec les députés ministériels qui ont accepté, pour que le travail avance plus vite, d'adjoindre à leur comité le leader du gouvernement, de telle sorte que la jonction puisse se faire entre les députés et les ministres, cela a permis d'en arriver à un projet de réforme parlementaire, qui, finalement, a été accepté à 100% aux deux instances, soit le conseil des députés et le Conseil des ministres. C'est ce qui nous permet d'arriver aujourd'hui avec un projet de réforme parlementaire qui, du côté ministériel, fait consensus.

Cette réforme parlementaire est déjà en partie contenue dans le projet de loi no 90. Il faut rappeler très rapidement que le projet de loi no 90 contient déjà six éléments de réforme parlementaire qui ne sont pas tous aussi importants les uns que les autres, bien sûr, mais qui, pour certains d'entre eux, sont fondamentaux. Je veux évoquer, par exemple, la création du Bureau de l'Assemblée nationale qui, dorénavant, remplacera le Comité de régie interne où siégeaient essentiellement des ministres; dorénavant, ce sont des parlementaires, des députés qui siégeraient au Bureau de l'Assemblée nationale, présidé par le président de l'Assemblée nationale, où il y aurait quatre représentants du parti gouvernemental et trois représentants des ou de l'Opposition, évidemment, selon les circonstances. Cet élément est majeur dans le projet de réforme parlementaire et je crois qu'il consacre un des objectifs qu'on s'était fixés, soit d'en arriver à une plus grande indépendance de l'Assemblée nationale comme institution. (10 h 30)

II faut savoir aussi qu'à ce Bureau de l'Assemblée nationale, dorénavant, il y aura la possibilité que le bureau et le président de l'Assemblée nationale soient vraiment autonomes en ce qui a trait à une partie des prévisions budgétaires dont ils auront la responsabilité, c'est-à-dire toutes ces prévisions budgétaires qui sont relatives aux services professionnels directement liés aux fonctions des députés et aux responsabilités qu'ont à assumer les différentes commissions parlementaires. Évidemment, pour d'autres services plus techniques, plus administratifs, le ministre des Finances et l'Assemblée nationale continueront d'étudier les crédits de la présidence, comme ils le faisaient par le passé.

Le quorum de l'Assemblée nationale sera aussi diminué, il sera maintenant du dixième de ses membres donc, treize personnes. Cela - on le comprendra un peu plus tard - va aussi dans le sens d'une réforme parlementaire si on veut véritablement permettre aux députés, permettre aux parlementaires de jouer pleinement leur rôle au sein des nouvelles commissions dont je ferai état un peu plus loin. Il est très clair qu'en même temps, on ne peut pas maintenir un quorum qui était parmi les plus élevés, j'oserais dire le plus élevé de tous les Parlements que nous connaissons. Quand on fait une comparaison avec d'autres Parlements, comme avec la Chambre des communes à Ottawa, on se rend compte que notre quorum était très élevé et que le dixième de ses membres nous paraît suffisant.

Il y a aussi l'introduction de la fonction de jurisconsulte, poste qui est créé pour permettre à un député de prendre avis auprès du jurisconsulte sur toute question qui pourrait faire l'objet - comment dirais-je? -d'une petite crise de conscience relative à des conflits d'intérêts qui pourraient l'empêcher d'exercer ses fonctions parlementaires ou à une certaine incompatibilité de fonction qui pourrait

l'empêcher d'exercer son rôle de député. Je crois qu'il s'agit d'un élément de réforme important.

Il y a d'autres éléments qui, bien que moins importants, n'en demeurent pas moins des éléments de la réforme parlementaire, entre autres, l'accroissement et la précision des fonctions de l'adjoint parlementaire qui pourra, à l'avenir, présenter un projet de loi au nom du ministre dont il est l'adjoint parlementaire, peu importe que ce projet de loi ait ou non des incidences financières. Il pourra aussi, évidemment, débattre ce projet de loi à l'Assemblée nationale et le défendre en commission parlementaire.

Il y a aussi - cela est déjà fait, de toute façon, à la suite de l'adoption de la loi omnibus en fin de session - la fonction de leader parlementaire adjoint du gouvernement, non membre du Conseil exécutif, et la fonction de leader parlementaire adjoint de l'Opposition qui ont été créées, ce qui permet au leader maintenant officiel de l'Opposition probablement de se préparer à assumer ses nouvelles responsabilités.

Voilà pour les éléments qui étaient déjà dans le projet de loi no 90, mais qu'il convenait de rappeler puisque, pour certains d'entre eux, ils constituent des éléments fondamentaux.

Je voudrais maintenant présenter le projet de réforme parlementaire qui pourrait, dans certains cas, nous forcer à modifier le projet de loi sur l'Assemblée nationale du Québec et, dans certains autres cas, nous forcer à modifier le règlement de l'Assemblée nationale.

Je voudrais d'abord établir les prémisses sur lesquelles repose cette réforme parlementaire. Dans notre esprit, une réforme qui ne réglerait pas le problème des commissions actuelles ne serait pas une réforme. En effet, les commissions actuelles, réparties selon les ministères, représentent un mécanisme fort lourd et souvent fastidieux tant pour l'étude des crédits que pour l'étude des projets de loi. Si, après la réforme, les commissions devaient rester en place, les députés seraient, à toutes fins utiles, empêchés de participer avec l'assiduité voulue aux travaux des nouvelles commissions qui sont créées en vertu du présent projet de réforme parlementaire.

Deuxième prémisse. Une réforme parlementaire qui ne toucherait pas aux finances publiques de façon significative ne serait pas une réforme. Dans l'éventail des nouvelles commissions appelées à remplacer les commissions actuelles, il n'y a assurément pas lieu d'écarter les commissions devant traiter des finances publiques. Ce qui entoure la politique budgétaire de l'État est d'une telle importance dans la vie d'un Parlement qu'il y a lieu de s'interroger, non seulement sur le rôle des commissions en la matière, mais aussi sur le traditionnel débat sur le budget. Troisièmement, une réforme parlementaire substantielle n'implique pas nécessairement la remise en question du principe de la responsabilité ministérielle. Toutefois, la question de l'imputabilité, c'est-à-dire la façon dont les hauts fonctionnaires doivent eux-mêmes rendre compte de leur administration, devrait être appliquée aux organismes qui jouissent déjà d'un certain degré d'autonomie administrative.

Ces prémisses étant prises en considération, il nous faut aussi indiquer quels sont les objectifs sur la base desquels nous voulons asseoir la réforme parlementaire. Les objectifs, on pourrait les énumérer de la façon suivante.

Premièrement, il y a l'objectif de l'indépendance de l'Assemblée nationale qui est déjà atteint dans le projet de loi no 90 par, entre autres, la création du Bureau de l'Assemblée nationale du Québec. Il y a l'objectif du meilleur équilibre de nos institutions politiques. Si ma mémoire est bonne, c'était d'ailleurs le titre du rapport Vaugeois: Pour un meilleur équilibre de nos institutions politiques. Il y a un autre objectif qui est important, c'est celui d'en arriver à un meilleur contrôle du pouvoir exécutif; un quatrième, qui est un meilleur contrôle de l'administration publique; un cinquième, qui est un meilleur contrôle des finances et des dépenses publiques; un sixième, qui est la revalorisation du processus législatif et, finalement, un septième objectif, qui est celui de la modernisation du fonctionnement de l'Assemblée nationale et de ses commissions. Nous verrons donc que l'ensemble des recommandations et des propositions que nous soumettons à l'attention des membres de la commission de l'Assemblée nationale a pour effet de donner suite à ces objectifs que nous nous sommes fixés lorsque nous avons préparé notre projet de réforme parlementaire.

Donc, la proposition gouvernementale que nous soumettons aux membres de l'Assemblée nationale pourrait Se résumer en quatre points: Premièrement, l'abolition de toutes les commissions actuelles et leur remplacement par de nouvelles commissions. Deuxièmement, une modification substantielle de l'actuel débat sur le budget, qui deviendrait un débat privilégié.

Troisièmement, la modification dans le processus de nomination des présidents de commission et la création de la fonction rémunérée de vice-président. Quatrièmement, un objectif auquel on continue de souscrire et qui nous apparaît important, mais qu'il nous faudra traduire dans certaines modalités d'application qu'il reste à définir, la télédiffusion des travaux d'une commission parlementaire, en même temps ou à la place de ceux de l'Assemblée.

Voyons maintenant comment, concrètement, ces différentes propositions pourraient s'articuler autour d'un certain nombre de suggestions précises, quant aux nouvelles commissions parlementaires à créer et quant au nouveau type de débat sur le budget à avoir.

Je disais tout à l'heure qu'un des objectifs que nous voulons atteindre, c'est d'en arriver à un meilleur contrôle des finances publiques. En effet, le processus actuel qui s'étend du dépôt des crédits, en passant par le discours sur le budget jusqu'au vote final pour son adoption, plusieurs semaines plus tard, laisse les formations politiques sur leur appétit quant au contrôle et à la discussion de fond sur cette pièce majeure issue du pouvoir exécutif. On assiste même à l'érosion de l'intérêt pour tout ce qui entoure les discours qui suivent ceux du ministre des Finances et du critique de l'Opposition.

Une réforme de ce processus est au coeur de la réforme parlementaire, parce qu'elle a pour effet de solidifier le rôle du législatif, tout en multipliant l'intérêt de chaque membre de l'Assemblée.

L'effet secondaire qu'est celui de raccourcir en temps ce processus, et donc de libérer le parlementaire pour des innovations que contiendrait la réforme, n'est pas un détail sans importance.

Donc, pour arriver à un meilleur contrôle des finances publiques, nous proposons quatre types de moyens différents:

Premièrement, le débat sur le budget. Il est recommandé que soit concentré en 35 heures privilégiées, sur le parquet de l'Assemblée, le travail budgétaire actuellement étalé sur dix semaines, parfois dans trois ou quatre salles différentes en même temps. On traitera dorénavant spécifiquement et de façon privilégiée de la politique budgétaire du gouvernement. a) le caractère solennel de l'événement sera maintenu en réservant les dix premières heures du débat à une véritable période consacrée aux discours, comme le sont les 25 heures actuelles, toutes autres affaires cessant, évidemment. L'évolution récente du déroulement de ce débat à l'Assemblée fait qu'en pratique, les dix premières heures sont mises en valeur, alors que les autres sont éparpillées à travers de multiples séances subséquentes; b) les dix heures qui suivraient la période initiale des discours seraient réservées à une commission plénière sur le budget. Les parlementaires offriraient à leurs commettants l'occasion d'un véritable débat télévisé sur la situation économique et financière, sur la politique budgétaire et sur les choix qui auraient pu être proposés; c) la dernière période de quinze heures serait consacrée à l'étude des crédits des ministères dont le choix sera arrêté lors d'une conférence des leaders, sur recommandation des différents groupes parlementaires. Cette conférence des leaders est convoquée par le président de l'Assemblée.

Cette proposition, qui peut être vue comme une transformation radicale du processus budgétaire, peut aussi être vue comme un ajustement très modéré d'une pratique déjà installée. C'est parce qu'elle est les deux à la fois qu'elle nous apparaît être une réforme valable et faisable.

Le deuxième moyen que nous utiliserions pour en arriver à un meilleur contrôle des finances publiques, c'est la création de la commission des finances publiques. Cette commission s'inscrit dans le prolongement du nouveau débat sur le budget tel qu'évoqué précédemment. Son mandat serait d'étudier la situation budgétaire du gouvernement, son programme de financement pour l'année en cours ainsi que les incidences des choix et orientations retenus lors du budget ou du budget supplémentaire adopté par l'Assemblée. Elle se réunirait trimestriellement, à raison d'au plus deux jours à la fois, ce qui fait que la commission des finances publiques se réunirait quatre fois durant l'année, deux jours chaque fois, donc environ huit jours sur une période d'un an.

Troisième moyen pour permettre ce contrôle des finances publiques, c'est le maintien de la commission des engagements financiers, avec, bien sûr, toute la souplesse qu'elle a déjà au niveau de la définition de ses règles de fonctionnement. Il nous apparaît que, dans l'avenir, la commission des engagements financiers devrait même intensifier ses efforts pour adapter ses règles de fonctionnement aux objectifs qu'elle veut atteindre, c'est-à-dire bien scruter les dépenses publiques et les engagements financiers du gouvernement.

Quatrièmement, comme moyen pour permettre, encore une fois, d'atteindre cet objectif d'un meilleur contrôle des finances publiques, nous proposons la création de la commission du Vérificateur général. Cette commission entendrait le Vérificateur général sur son rapport. Elle serait convoquée à cet effet au plus tard le 15 septembre et ses travaux ne dureraient pas plus de cinq jours. Un ministre pourrait être appelé à comparaître sur un sujet relevant de sa compétence administrative. Ce dernier pourrait se faire accompagner de son sous-ministre, lequel parlerait, le cas échéant, en son propre nom. Un ministre pourrait aussi, de sa propre initiative, demander à être entendu. Cette commission aurait le pouvoir de faire des recommandations au gouvernement.

Voilà donc quatre moyens, quatre instruments que nous proposons à la commission de l'Assemblée nationale pour

nous permettre de répondre à cet objectif fondamental qui est celui d'un meilleur contrôle des finances publiques.

Il y a d'autres moyens que nous proposons pour atteindre un autre objectif qui est celui de la revalorisation du processus législatif. Les propositions à cet effet visent à concilier divers aspects du rôle du député. Celui-ci continuera d'assumer son rôle de législateur mais dans un cadre nouveau, tout en se voyant confier de nouvelles responsabilités faisant davantage appel à son sens de l'initiative.

Nous proposons donc, premièrement, de créer la commission des lois. Les commissions sectorielles actuelles étant abolies, la commission des lois aurait pour but d'étudier les projets de loi, les avant-projets de loi et procéderait aux auditions publiques s'y rattachant. Le leader du gouvernement déterminerait les mandats et l'organisation des travaux.

Lors de l'étude, article par article, d'un projet de loi, le ministre parrain ne serait ni membre de la commission ni intervenant à la commission, mais comparaîtrait à titre de représentant du Conseil exécutif à la barre de la commission pour défendre son projet. Il prendrait la parole aussi souvent qu'il le voudrait et pourrait, évidemment, proposer des amendements. (10 h 45)

Le choix des membres et des intervenants, pour la durée de l'étude d'un projet de loi, relèverait des whips. La décision de proposer que le ministre parrain d'un projet de loi puisse comparaître devant ia commission qui étudierait son projet de loi a évidemment pour but, pour objectif ultime d'en arriver à bien marquer la distinction qui doit être faite entre le législatif et l'exécutif. Évidemment, cela ne doit pas empêcher pour autant de répondre aux objectifs d'efficacité et de permettre au ministre de défendre, comme il se doit, son projet de loi. Mais il nous semble que la distinction entre le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif peut prendre un objet de concrétisation physique intéressant du seul fait que dorénavant le ministre qui défendra son projet de loi, article par article, comparaîtra à la barre plutôt que de s'asseoir où c'était l'usage, à la droite du président de la commission.

Comme deuxième moyen pour revaloriser le processus législatif, nous proposons la création de trois commissions d'initiatives parlementaires. Tout député non membre du Conseil exécutif pourrait, après consultation auprès de son groupe parlementaire, soumettre à l'un des trois présidents de ces commissions une proposition de mandat d'intérêt général. Je veux indiquer ici qu'il y a déjà une expérience qui a été vécue, à savoir celle des commissions spéciales, du type de la commission Bisaillon sur la Loi sur la fonction publique et de la commission Charbonneau sur la Loi sur la protection de la jeunesse. Dans ces deux cas, c'était le leader du gouvernement qui avait donné un mandat à la commission et l'initiative ne venait donc pas directement des parlementaires eux-mêmes, des députés non membres du Conseil exécutif. Dans le cas des commissions d'initiative dont nous parlons ici, toute l'initiative reviendrait directement aux députés non-membres du Conseil exécutif et le leader parlementaire n'aurait donc pas de responsabilité quant à la définition du mandat des commissions d'initiative parlementaire.

Le troisième moyen, c'est évidemment le maintien de la commission de l'Assemblée nationale. Cette commission est reconduite en vertu du projet de loi no 90. Elle conserverait son mandat actuel, mais elle ne s'occuperait plus des questions qui n'ont pas été confiées spécifiquement à une autre commission. En d'autres mots, il y avait une espèce de mandat résiduaire qui appartenait à la commission de l'Assemblée nationale. Ce mandat résiduaire tomberait, puisque maintenant d'autres commissions seraient appelées à remplir les différents mandats qui, auparavant, revenaient à la commission de l'Assemblée nationale.

Quatrième moyen proposé, nous suggérons de créer la commission ad hoc, à défaut pour l'instant de lui trouver un autre nom. Une commission ad hoc serait convoquée par le leader du gouvernement pour étudier toute question qui ne pourrait être confiée spécifiquement à une autre commission, par exemple la commission parlementaire qui étudie en ce moment le dossier du transport en commun dans le région de Montréal, la commission parlementaire qui étudiera le dossier Mirabel, la commission parlementaire qui étudiera le dossier d'Hydro-Québec. Alors, ce sont autant de sujets qui seraient confiés à la commission ad hoc.

Maintenant, pour répondre à d'autres objectifs que sont, par exemple, un meilleur contrôle de l'exécutif et un meilleur contrôle de l'administration publique, nous faisons les propositions suivantes: nous suggérons de créer d'abord, dès notre retour en Chambre, le 9 novembre prochain, une commission d'étude sur le contrôle parlementaire de la législation déléguée. Cette commission d'étude, évidemment, aurait un caractère temporaire. Ses recommandations pourraient conduire à la création d'une commission permanente sur la législation déléguée. D'ailleurs, c'est notre souhait que le résultat des travaux de cette commission d'étude nous amène à créer une commission permanente de la législation déléguée. Elle serait créée par voie de motion annoncée et ferait rapport à l'Assemblée au plus tard le 31 mars 1983, de telle sorte que nous

pourrions introduire cette nouvelle commission parlementaire permanente durant l'année 1983.

Nous proposons aussi de créer une nouvelle commission qui s'appellerait la commission des organismes autonomes. Cette commission serait autonome et se réunirait à la demande de ses membres. Elle pourrait entendre un des dirigeants figurant sur la liste qui suit. Les modalités relatives au choix et à la convocation des dirigeants d'organismes ainsi que celles relatives au fonctionnement de cette commission sont explicitées plus loin dans une annexe, soit l'annexe 7.

Voici les organismes auxquels nous faisons référence quand nous parlons des organismes autonomes. Nous évoquons le Protecteur du citoyen, le Directeur général des élections, le Directeur général du financement des partis politiques, le Directeur général de la représentation électorale, le président de la Commission de la représentation électorale, le président de la Commission des droits de la personne, le président de la Commission de la fonction publique, le président de la Commission d'accès à l'information et les présidents des régies, sociétés et autres organismes autonomes.

Pour ajouter à ces propositions de création de nouvelles commissions parlementaires, nous voulons aussi modifier le processus de nomination des présidents de commission et le travail de ces présidents. Pour toutes les commissions parlementaires, à l'exception de la commission des lois et de la commission ad hoc, les règles suivantes s'appliqueraient: Par exemple, au début de chaque session, le président de l'Assemblée nationale déposerait auprès de la commission de l'Assemblée nationale la liste des présidents de chacune des commissions. Ceux-ci sont nommés pour la durée de la session. Je veux ajouter ici que les présidents de ces commissions parlementaires non seulement rempliraient les fonctions qui sont attribuées à la présidence, c'est-à-dire diriger les travaux en conformité au règlement de l'Assemblée nationale, mais en plus, les présidents des commissions auraient le droit de participer aux travaux de la commission.

Quant aux vice-présidents, au début de chaque session, le président de l'Assemblée nationale déposerait auprès de la commission de l'Assemblée nationale la liste des vice-présidents de chacune des commissions. Ceux-ci seraient choisis parmi les députés de l'Opposition et seraient nommés pour la durée de la session. En l'absence du président, le vice-président assumerait les responsabilités de la présidence. Le vice-président pourrait recevoir une indemnité additionnelle. Là aussi, il s'agit d'indiquer que le vice-président, évidemment, participerait aux travaux de la commission et, lorsqu'il assumerait les fonctions de président de la commission selon les attributions dévolues au président de la commission pour faire respecter les règlements qui, normalement, prévalent en commission parlementaire, il pourrait, en même temps, participer au débat de la commission.

Quant à la commission des lois et à la commission ad hoc, elles n'auraient pas de président ni de vice-président permanent. Selon les règles actuelles, elles seraient formées de sept députés de la majorité et de quatre députés de l'Opposition, ainsi que de cinq intervenants de la majorité et de quatre intervenants de l'Opposition. Comme dans le cas des autres commissions, le bureau déterminerait le personnel et les ressources financières attribués à ces commissions.

Finalement, le dossier de la télédiffusion des travaux d'une commission parlementaire est un dossier sur lequel nous n'avons pas beaucoup avancé au cours des derniers mois. Nous devons travailler encore à préciser les mécanismes qui nous permettraient d'en arriver à faire un choix entre les commissions parlementaires qui seraient télédiffusées et celles qui ne le seraient pas, entre télédiffuser les travaux de l'Assemblée nationale et télédiffuser les travaux d'une commission parlementaire. Je crois que là-dessus nous devrons travailler au cours des prochaines semaines à définir des mécanismes qui nous permettraient de ne pas placer le président dans une situation où il aurait à trancher sans avoir permis aux parlementaires de s'entendre entre eux sur la meilleure façon d'effectuer des choix relativement à la télédiffusion des travaux des commissions parlementaires.

Donc, nous recommandons aux membres de la commission de l'Assemblée nationale, premièrement, d'entériner les prémisses sur lesquelles s'appuie la présente réforme parlementaire; deuxièmement, d'abolir les commissions élues permanentes actuelles et de les remplacer par un nombre limité de nouvelles commissions parlementaires telles que décrites précédemment, soit la commission de l'Assemblée nationale, la commission des lois, les trois commissions d'initiative parlementaire, la commission des finances publiques, la commission des engagements financiers, la commission du Vérificateur général, la commission des organismes autonomes, la commission d'étude sur le contrôle parlementaire de la législation déléguée et la commission ad hoc; troisièmement, d'abandonner l'étude des crédits des ministères selon la forme actuelle; quatrièmement, d'accepter, d'une part, le principe d'un nouveau type de débat sur le budget dont l'étude de 35 heures serait privilégiée et, d'autre part, la création d'une commission des finances publiques

s'inscrivant dans le prolongement de ce débat; cinquièmement, d'accepter les modalités proposées quant à la nomination des présidents et vice-présidents des commissions parlementaires et, sixièmement, d'accepter que les travaux des commissions parlementaires puissent être télédiffusés en même temps ou à la place de ceux de l'Assemblée.

En terminant, M. le Président, je voudrais indiquer qu'il s'agit là d'un projet de réforme parlementaire. Il était important que le gouvernement fasse son lit, que le conseil des députés ministériels fasse son lit, que nous en arrivions à dégager un consensus du côté ministériel sur les objectifs de la réforme parlementaire et sur les propositions concrètes pour donner suite à ces objectifs et que, par la suite, nous déposions notre proposition à la commission de l'Assemblée nationale pour qu'elle puisse être discutée en long et en large avec tout ce que cela suppose de possibilités de modifications, d'amendements et d'ajouts qui iraient dans le sens d'une réforme parlementaire substantielle.

En d'autres mots, tout est négociable dans ce document. Ce qui n'est pas négociable, cependant, c'est la volonté politique très claire qui s'exprime du côté ministériel d'avoir une réforme parlementaire substantielle. Nous serons prêts à regarder positivement et avec ouverture d'esprit toute proposition qui pourrait permettre de rendre cette réforme parlementaire encore plus substantielle, mais nous ne sommes pas prêts à reculer sur l'objectif fondamental qui est d'apporter une réforme parlementaire substantielle.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci.

M. le leader de l'Opposition et député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Fernand Lalonde

M. Lalonde: M. le Président, la commission de l'Assemblée nationale est réunie sur décision de l'Assemblée nationale prise il y a quelques mois, après la première lecture du projet de loi no 90.

Normalement, on convoque la réunion de ces commissions pour entendre les intervenants, les groupes, les individus, les Québécois sur un projet mis de l'avant par le gouvernement, que ce soit un projet de loi, un avant-projet de loi ou un projet tout court.

Il semble que dans ce cas-ci le gouvernement ait voulu nous réunir non pas pour qu'on entende le public, mais plutôt le leader du gouvernement nous proposer deux réformes en plus du projet de loi no 90. J'ose penser que cela n'était pas décidé comme cela au départ parce qu'il me semble que le caractère important de la réforme qui nous est proposée ce matin, en plus du projet de loi no 90 et de l'autre qui sera proposé dans quelques jours, d'après ce qu'on dit, aurait justifié qu'elle se retrouve dans un projet de loi déposé à l'Assemblée nationale.

Pourquoi a-t-on décidé d'abord de faire le projet de loi no 90, de ne pas y inclure ces deux éléments importants et de nous réunir ici hors session pour, par le biais de la commission parlementaire de l'Assemblée nationale, nous demander de l'étudier? Je ne le sais pas. Le ministre pourra répondre à cette question un peu plus tard.

De toute façon, M. le Président, nous abordons de ce côté-ci de la table - je parle pour les membres du Parti libéral, de l'Opposition officielle, je n'ai pas de mandat qui aille au-delà de cela - avec beaucoup d'enthousiasme et d'espoir l'étude du projet de loi no 90.

La démocratie est au coeur même du type de société auquel le Parti libéral du Québec voue tous ses efforts. Or, le fonctionnement de la démocratie dans une société est largement tributaire des institutions politiques qu'elle se donne, et le Parlement est cette institution - au même titre que le tribunal et au même titre aussi que le gouvernement responsable - sans laquelle une société ne peut pas vivre la démocratie. Donc, nous devons prendre un soin infini à protéger cette institution, à la moderniser, à lui donner les outils et les instruments nécessaires pour qu'elle fonctionne de la façon la plus efficace possible. (11 heures)

C'est donc dans cet esprit que nous avons participé aux travaux de la sous-commission de l'Assemblée nationale auxquels le leader du gouvernement a fait référence en 1980 et en 1981, sous-commission appelée à étudier d'une façon moins formelle qu'une commission parlementaire un avant-projet de loi proposé par votre prédécesseur, M. Clément Richard. C'est aussi dans cet esprit qu'avec d'autres membres de l'Assemblée, des deux côtés de la Chambre, j'ai eu l'honneur de participer à deux missions d'étude à l'étranger depuis trois ou quatre ans. Une de ces missions était composée de parlementaires et était dirigée par l'ancien leader du gouvernement, M. Burns; elle a visité les parlements, et a rencontré les parlementaires, si mon souvenir est bon, de deux pays: l'Angleterre et l'Irlande. Je ne pense pas qu'on en ait rencontré d'autres à ce moment-là, mais c'est possible.

L'autre mission était formée des leaders des partis. Le député de Bonaventure m'avait demandé de le remplacer; je ne sais pas si c'était une prémonition de sa part. Cela a eu lieu en janvier 1980, je pense. Le député de Saint-Jacques, à ce moment-là, M.

Brochu, le leader d'un autre parti et moi-même avions visité les parlements. Nous étions accompagnés de M. Pierre Duchesne, secrétaire adjoint de l'Assemblée nationale, de Me Marc Cantin, qui était à ce moment secrétaire des commissions parlementaires, de Mme Danielle Proulx, directrice du cabinet du président de l'Assemblée nationale. Si je me permets de les nommer et de nommer leur fonction, c'est pour bien indiquer de quelle façon on avait décidé la participation de chacun et de chaque institution, y compris - je vais y revenir plus tard - la présidence de l'Assemblée nationale. À ce moment-là, nous avions visité les parlements de l'Angleterre, Westminster, de la Belgique et de la France.

Je pense que c'est Me Duchesne qui est, en grande partie, responsable du rapport de mission qui a été publié concernant le rôle et les pouvoirs des commissions parlementaires. Il aurait fallu que je le dise au départ. C'était justement pour examiner le rôle des commissions parlementaires que cette mission a été organisée. On voit, à la page 2 du rapport de cette mission, qui porte la date de mars 1980, le mandat en trois lignes. Je cite: "Étude du fonctionnement, méthode et procédure des commissions parlementaires au Royaume-Uni, en France et en Belgique."

Donc, nous avons fait notre boulot de parlementaires, des deux côtés de la Chambre, et nous voici réunis pour offrir notre modeste contribution, de ce côté-ci, à tous les membres de cette commission de façon à atteindre cet objectif qui dépasse les préoccupations partisanes qui, hélas, nourrissent trop souvent nos débats.

Mais c'est justement à cause d'une préoccupation partisane que nous sommes extrêmement déçus de la manière choisie par le gouvernement pour préparer la réforme parlementaire. Dans les prémisses que l'on retrouve au début du document du ministre, il en manque une qui aurait pu se lire comme suit: Une réforme qui n'aurait pas l'accord complet, l'accord total des partis et un large consensus des députés ne serait pas une réforme valable. D'ailleurs, c'est de cette façon que dans le passé on a procédé à réformer soit la loi, soit le règlement.

Je lis le texte de présentation du Code Lavoie, lequel code porte justement le nom d'un président de l'Assemblée nationale, M. Jean-Noël Lavoie, qui présentait, il y a presque une dizaine d'années maintenant, le nouveau Code Lavoie: "L'unanimité qui a entouré l'adoption du règlement nous paraît un gage qu'il sera respecté comme une sorte d'entente tacite entre les représentants de tous les partis et qu'il contribuera ainsi à l'amélioration des travaux parlementaires." M. Lavoie disait justement au tout début de sa présentation: "J'ai eu l'honneur de diriger le groupe de travail qui, à la demande de la commission de l'Assemblée nationale, a préparé un nouveau règlement, etc., et qui a été adopté à l'unanimité, le 27 mars 1972". De même, lors de la réforme électorale, depuis quelques années, le gouvernement avait décidé d'impliquer les membres de l'Opposition dans la préparation, dans le travail de déblayage. Un comité de députés, dont certains de l'Opposition, avait fait en sorte que lorsque le projet serait présenté à l'Assemblée nationale, il refléterait, mais de façon formelle, le consensus de tous les membres de l'Assemblée nationale.

Le ministre, que j'écoutais attentivement, tout à l'heure, parce que j'espérais qu'il allait nous donner l'explication à cette attitude, a référé aux travaux de la sous-commission et à l'avant-projet de loi de l'ancien président de l'Assemblée nationale, M. Richard, en disant - je ne veux pas le citer au texte, je n'ai pas pris de notes, mais essentiellement, on pourra vérifier dans la transcription - qu'il n'y a pas eu de suite à cette démarche. Voilà une sous-commission qui s'est réunie deux fois pendant plusieurs jours, qui a - j'ai la copie ici - fait un rapport considérable auquel, d'ailleurs, nous référerons régulièrement au cours des travaux, rapport signé par vous, M. le Président, qui porte la date du 17 septembre 1981, à peine un an, et on dit simplement que cela n'a pas eu de suite. Où est le président de l'Assemblée nationale dans cette démarche? Pourquoi a-t-il été mis de côté? Pourquoi le ministre a-t-il cru bon de récupérer tout ce qui a été fait et, en grande parade aujourd'hui, sans impliquer les membres de l'Opposition, je ne sais pas pour la présidence, mais en tout cas, je ne le vois nulle part ici dans les documents, avec tableaux comme si on était à la petite école, conférence de presse dans deux heures, de présenter un projet auquel nous avions commencé de contribuer?

Je regrette de devoir refroidir l'enthousiasme du gouvernement et du leader. Parce qu'il s'agit d'une réforme, d'un projet tellement important, qui nous tient tellement à coeur, je ne voudrais pas que les reproches que je fais et qui sont très sérieux - ce n'est pas strictement ou simplement du débat, cela va au fond de l'objectif que nous poursuivons tous - soient interprétés comme étant une opposition de notre part à toute réforme, au contraire. Je déplore le désir du gouvernement de récupérer cette réforme qui a été préparée depuis plusieurs années par tant de gens. Je dois dire immédiatement au leader, et j'espère qu'il le dira au cours de sa conférence de presse, que dans sa forme actuelle, cette réforme est inacceptable de la part des membres de l'Opposition. Je n'aurais pas été mis dans cette situation difficile de devoir lui dire cela, s'il nous avait consultés, s'il nous avait permis de contribuer aux travaux de ce groupe de

travail qui a engagé beaucoup de dépenses depuis plusieurs années. Nous ne parlons pas seulement de la commission, de la sous-commission de l'Assemblée nationale et des missions, nous parlons aussi du travail considérable fait - et il l'a mentionné - par le député de Trois-Rivières et par l'ancien député de Saint-Laurent, par les députés ministériels aussi qui ont sûrement, avec une très bonne foi, contribué à faire avancer ce dossier. Pourquoi avoir laissé tomber complètement la démarche qui avait été entreprise par l'Assemblée nationale avec le concours de l'Opposition et avoir changé la manière de procéder?

Donc, c'est cette manière de procéder qui me force aujourd'hui à dire au leader que la réforme, dans sa forme actuelle, est inacceptable, et je vais lui dire tout de suite pourquoi. C'est parce que sans l'expliquer, sans le justifier, il troque 250 heures d'étude des crédits pour 15 heures à l'Assemblée nationale. Sous cet aspect, sa réforme est très faible. Il traite avec une certaine... enfin, de façon insuffisante, pour ne pas dire de façon suffisante, ce travail énorme - le député de Trois-Rivières parle de 250 heures, mais, dans l'ensemble, c'est entre 200 et 250 heures par année - qui est fait non pas seulement par les députés de l'Opposition, mais par les ministres, leur cabinet et leurs fonctionnaires.

L'étude des crédits arrive tous les ans et est un événement pour chaque ministère. Le ministre a lui-même ses crédits à défendre. On sait ce que c'est. Il sait jusqu'à quel point les ministres, les cabinets politiques, les hauts fonctionnaires, tous se mettent en branle pour préparer les dossiers. Et d'une année à l'autre, l'étude des crédits est faite. Oans sa nouvelle réforme, c'est mis de côté. J'espère qu'il peut changer d'idée. J'espère que sa réforme ne dépend pas de l'élimination de l'étude des crédits, parce que nous ne l'accepterons pas. Nous sommes prêts à examiner d'autres manières de procéder à cet examen en détail, mais nous connaissons, nous savons...

Tous les membres de cette commission ont participé au fameux débat de cinq heures. À la fin du débat sur le budget, il y a un débat de cinq heures à l'Assemblée nationale. Je vois le député de Charlesbourg. On s'est même pris aux cheveux la dernière fois à cette occasion. On a seulement cinq heures et il faut choisir. On nous demande: Quel ministre voulez-vous avoir? Il y avait le ministre des Finances. Le député de Charlesbourg était à côté à ce moment-là. Tout est important - c'est vrai - mais quand même il faut choisir. Par exemple, pendant l'étude des crédits, on a 20 ou 25 heures. J'ai participé à l'étude des crédits du ministère de l'Éducation. On pourrait avoir 100 heures. On escamote des sujets très importants, mais il faut choisir. D'accord, on se limite à un certain nombre d'heures. Là, dans ces cinq petites heures, il faut choisir et on dit: Le ministre de l'Agriculture, de 10 heures à 10 h 30. Ensuite, ce sera le ministre de l'Éducation de 10 h 30 à 11 heures et le ministre des Finances de 11 heures à 11 h 30. Ce n'est jamais ainsi que cela se passe. Le ministre des Finances attend dans le corridor et le ministre de l'Éducation n'a pas commencé à finir la première phrase de sa réponse. Il prend toute la demi-heure pour ses réponses.

On nous propose de remplacer ces cinq heures par quinze heures. On va prendre trois fois plus le temps. C'est tout à fait insuffisant pour étudier les crédits, pour demander à chaque ministre pourquoi il a fait ceci et cela, pourquoi cette politique a été éliminée ou pourquoi il a fait un changement. On ne peut pas faire cela à l'Assemblée nationale. On peut le faire à l'Assemblée nationale. Si ce sont les caméras que vous voulez, parfait! On peut téléviser les travaux des commissions parlementaires qui étudient les crédits, mais on ne pourra pas remplacer les 250 heures qu'on y accorde actuellement par 15 heures. C'est impossible. Je demande au ministre de nous assurer que sa réforme ne repose pas entièrement sur ce changement. Elle nous est inacceptable pour cette raison. (11 h 15)

Est-ce que le projet est compromis? Non. Il n'est pas compromis, mais, désormais, l'Opposition devra être intimement associée à la démarche de réforme si ce projet veut voir le jour. Il serait très regrettable qu'il ne voie jamais le jour; trop d'efforts ont été investis, trop de propositions fort intéressantes, que nous-mêmes avons réclamées - je pense à la commission concernant le Vérificateur général, par exemple, et d'autres - sont faites pour ne pas, tous ensemble, faire en sorte qu'il soit un succès. Mais, pour ce faire, nous allons devoir modifier la procédure prévue. Nous devons former une sous-commission ou un groupe de travail - appelez-le comme vous le voulez - qui devra étudier dans les détails les éléments de ce projet et d'autres éléments que nous aurons à lui soumettre, et ce, avant même que nous nous soyons prononcés sur les principes, comme le propose le ministre, dans son projet. Il n'est pas trop tard, mais j'invite le gouvernement à se débarrasser de sa tendance à vouloir tout changer tout seul.

Je réfère le ministre à cette recommandation du rapport de mission, à laquelle participait sa formation politique; le chef de la délégation était quand même le leader du gouvernement, à ce moment-là. À la page 30, on dit: "Dans le but d'examiner si, au Québec, l'équilibre entre ces deux pouvoirs mérite d'être accentué par quelque réforme et après qu'il en aura été ainsi

convenu par les différentes formations politiques, les membres de la mission - les membres de la mission étaient Claude Charron, Fernand Lalonde, Yvon Brochu et tous les autres - recommandent au président de l'Assemblée nationale de constituer un groupe de travail visant à revoir le fonctionnement des commissions parlementaires et, le cas échéant, proposer une réforme de leur fonctionnement. "Ce groupe de travail pourrait être soit une sous-commission de la commission de l'Assemblée nationale qui pourrait s'adjoindre des fonctionnaires, soit un comité ad hoc composé de représentants de chaque parti politique et de fonctionnaires de l'Assemblée nationale". Pourquoi le gouvernement a-t-il mis cette recommandation de côté, qui est le résultat d'investissement de ressources financières et humaines considérables? Pourquoi? J'attends la réponse du ministre.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci. M. le député de Sainte-Marie.

M. Guy Bisaillon

M. Bisaillon: M. le Président, je n'ai pas, comme mes prédécesseurs, un texte écrit. Je vais plus laisser parler mon coeur que mes recherchistes, pour...

M. Lalonde: On verra si c'est mieux!

M. Bisaillon: ... peut-être résumer un bon nombre de commentaires par un mot qui serait "enfin".

Le leader de l'Opposition a commencé à expliquer que la réforme qui est devant nous, c'est l'aboutissement, dans le fond, d'un long cheminement qui a commencé un peu avant 1976, mais qui s'est intensifié, selon moi, à partir de 1976, dès le départ par un groupe de députés de toutes les formations politiques - y compris des indépendants, je tiens à le souligner - à l'époque et qui avaient amené des amendements - on s'en souviendra - au règlement de l'Assemblée nationale. C'est de ce groupe de travail qu'est sorti le texte dont on parlait tantôt - texte de Claude Forget - qui lui-même a servi de base au travail du député de Trois-Rivières, Denis Vaugeois. Il y a eu les sous-commissions auxquelles on a référé tantôt, au moment desquelles il y a eu aussi un certain nombre de consensus qui avaient été établis. J'ai moi-même participé à celle de 1981 où on avait établi un certain nombre de consensus qui normalement devaient se retrouver dans le projet de loi.

Par la suite, il y a eu une commission spéciale qui a siégé, où il y a eu la participation de députés de l'Opposition. Je voudrais vous ramener à une des recommandations de la commission spéciale de la fonction publique - c'est-à-dire la première commission spéciale qu'on ait eue à l'Assemblée nationale - la recommandation 144 qui se lisait comme suit: "Que l'on applique les recommandations du rapport Vaugeois proposant la création de quatre commissions spéciales permanentes d'initiative parlementaire, sans rejeter la formule des commissions spéciales ad hoc dont le mandat est limité dans le temps."

On retrouve ça dans ce qui nous est présenté, aujourd'hui. Cela avait fait l'objet d'études par des députés de l'Opposition de même que par des députés ministériels.

J'aurais cependant, M. le Président, au départ, un certain nombre de mises en garde à faire. La réforme proposée me semble aller dans le sens d'un renforcement du Parlement et de l'activité parlementaire. Par ailleurs, il faudrait faire attention, tout en renforçant le Parlement, de ne pas diminuer la force des parlementaires. On a parfois tendance à être pour les syndiqués contre les syndicats, pour les consommateurs contre la consommation. Il ne faudrait pas être pour le Parlement contre les parlementaires. J'indique cela parce que tout ce qui nous est présenté - ce sont des choses qu'il faudra préciser au moment des débats - semble être orienté sur les partis, c'est-à-dire le parti ministériel et le parti de l'Opposition. Chaque fois qu'on parle de mécanismes, on parle des partis et le mode de représentation est celui des partis.

Je tiens à vous souligner, M. le Président, qu'il y a déjà eu, dans le passé, plusieurs partis politiques à l'Assemblée nationale. Même s'il existe une tendance selon laquelle, avec les années, nous en revenons à deux partis, il ne faut pas négliger le fait qu'il puisse aussi y avoir, au-delà de plusieurs partis, des députés qui sont indépendants et qui ont autant de droits, comme parlementaires, que les parlementaires qui sont membres d'une formation politique. Dans ce sens, il y a un certain nombre de précisions qui devraient être apportées pour permettre que, si le règlement leur donne des droits, la loi, elle, ne les muselle pas quant à leur participation éventuelle.

Je voudrais aussi souligner, quant à la commission du Vérificateur général, qu'il y a eu une autre recommandation issue de la commission spéciale de la fonction publique qui parlait de deux commissions spéciales. Une commission spéciale devrait siéger normalement à tous les quatre ans pour vérifier la qualité des services fournis aux citoyens par l'administration publique. Je pense que cette commission pourrait être, à tous les trois ou quatre ans, une commission ad hoc et nous n'avons pas besoin d'en parler de façon particulière.

Il y avait cependant une autre

commission proposée dans le rapport déposé en juin dernier à l'Assemblée nationale. Cette commission devrait être chargée de vérifier l'imputabilité des hauts fonctionnaires, des sous-chefs. Déjà, le secrétaire général du Conseil exécutif ayant donné une orientation dans le sens de la mise en application de cette recommandation, il me semble qu'on devrait prévoir, au moment où on fait notre réforme, une place pour que, le jour où les sous-chefs seront vraiment imputables, il puisse y avoir un contrôle parlementaire de cette imputabilité. Il me semble que cela pourrait être fait par la commission du Vérificateur général. Il faudrait apporter une précision au niveau de cette commission qui nous amènerait à dire que cette commission pourrait vérifier l'imputabilité des sous-chefs. Je pense qu'il n'était pas inutile de le préciser à ce moment-ci puisque cela peut arriver dans le temps et plus rapidement qu'on ne le croit.

En terminant, M. le Président, je voudrais souligner les difficultés qu'on aura à étudier le projet de loi qui est déjà devant nous, le projet de loi no 90. Quant aux modifications que nous aurions probablement suggérées si elles n'avaient pas été apportées par le leader du gouvernement, je ne m'attache pas à la forme comme l'a fait le leader de l'Opposition. Le leader du gouvernement nous présente aujourd'hui un certain nombre de réformes qu'on aurait probablement demandées et dont certaines se retrouvent dans le rapport de la sous-commission de l'Assemblée nationale qui avait siégé en 1981. On aura donc deux éléments. Le leader du gouvernement en a annoncé un troisième qui est toute la vérification ou la remise en question du régime de pensions et probablement du traitement des députés. S'il n'était pas question du traitement, je vous annonce que moi, j'aurais l'intention d'en parler.

Il y a de plus le règlement de l'Assemblée nationale. Dans le projet de loi, il y a seulement un article qui dit que les règlements de l'Assemblée nationale demeurent tels qu'ils sont, à moins qu'ils ne soient en contradiction avec des articles de la loi. Je pense qu'on ne peut pas se permettre d'étudier le projet de loi tel qu'il est, avec les réformes amenées par le leader du gouvernement aujourd'hui, sans avoir en parallèle les effets ou l'influence que cela peut avoir sur le règlement de l'Assemblée nationale et la façon dont nos travaux vont se dérouler. Si j'avais à émettre un voeu, je demanderais qu'au moment où on va se pencher sur un document consolidé, on ait en parallèle les effets de chacun des articles du projet de loi sur le règlement de l'Assemblée nationale et sur notre fonctionnement quotidien.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le leader du gouvernement.

M. Jean-François Bertrand

M. Bertrand: M. le Président, je voudrais simplement brièvement, puisque le leader de l'Opposition m'y a invité, répondre à quelques-unes des questions qu'il a soulevées et tenter d'y apporter les réponses les plus correctes qui soient. Je souscris entièrement à ce qu'il a dit en ce qui concerne les prémisses. Je me rallie tout à fait à ce qu'il a dit, à l'effet qu'une réforme parlementaire valable ne peut pas se concrétiser si elle ne fait pas consensus, si elle ne permet pas à l'ensemble des partis politiques et des députés indépendants de donner leur opinion, de faire valoir leur point de vue, d'apporter des modifications, en d'autres mots, de considérer que le projet qui est sur la table est un projet initial et non pas un projet terminal.

Je l'ai dit tout à l'heure, c'est un projet qui est négociable, sauf, en ce qui a trait à la volonté politique de parvenir à accoucher d'une réforme parlementaire substantielle. Je crois que là-dessus, on se rejoint. Le leader de l'Opposition me faisait remarquer que dans le passé, dans la plupart des cas, l'Opposition a travaillé en très étroite relation avec des députés ministériels pour faire avancer un certain nombre de dossiers relatifs à certains des aspects de la vie de l'Assemblée nationale. Cela a été le cas, je l'ai évoqué moi-même lors de la préparation du règlement de l'Assemblée nationale, par l'ancien président, Jean-Noël Lavoie, qui avait associé à sa démarche des députés de l'Opposition et des députés du gouvernement. J'ai évoqué aussi le fait que le président de l'Assemblée nationale de l'époque, M. Richard, en juin 1980, avait déposé un avant-projet de loi qui avait été scruté de très près par des députés, autant de l'Opposition que du côté ministériel.

Je m'excuse si les propos que j'ai tenus semblaient faire croire au député de Marguerite-Bourgeoys, au leader de l'Opposition, qu'il n'y avait pas eu de suite dans le sens où il n'y avait pas eu de rapport, dans le sens où il n'y avait pas eu de recommandations et même de modifications concrètes suggérées sur la base de l'avant-projet de loi qui avait été soumis par M. Richard. Au contraire, j'ai moi aussi en main le rapport des travaux de la sous-commission qui a siégé à deux reprises et qui a effectivement apporté des suggestions de modifications à l'avant-projet de loi déposé par M. Richard. Ce que je voulais évoquer par là, c'est qu'il n'y avait pas eu de suite concrète, dans le sens où nous n'avions rien adopté comme tel qui s'était inscrit dans le fonctionnement de l'Assemblée nationale ou de ses commissions, après que

ce travail eut été fait par les membres de la sous-commission de l'Assemblée nationale. C'était uniquement ce que je voulais évoquer. Je ne voulais surtout pas évoquer le fait qu'il n'y avait pas eu de travail fait et de modifications suggérées, d'autant plus qu'on les retrouve dans le rapport que vous avez cité tout à l'heure.

Je voudrais indiquer que si nous avons décidé d'agir comme nous avons agi, c'est qu'il nous a semblé qu'à partir d'un certain moment la volonté de véritablement aller de l'avant avec une réforme parlementaire semblait s'estomper. Depuis la publication du rapport Vaugeois qui s'intitule "L'Assemblée nationale en devenir pour un meilleur équilibre de nos institutions", il n'y avait pas eu vraiment de geste qui avait été posé de quelque côté que ce soit, et je ne vise personne. En fait, le dépôt du rapport Vaugeois s'est fait et il s'est passé quelques semaines, quelques mois avant que, finalement, des réactions se fassent sentir. Je le dis en toute bonne foi, les députés ministériels eux-mêmes - je crois que là-dessus d'ailleurs, le président du conseil des députés ministériels, le député de Nicolet, ou le whip du gouvernement, le député de Lac-Saint-Jean, ou même le président du comité spécial qui a travaillé sur la réforme parlementaire, le député de Deux-Montagnes, pourront l'évoquer tout à l'heure - on a mis un certain temps avant de réagir très concrètement aux propositions qui étaient soumises par M. Vaugeois dans son document. (11 h 30)

C'est tellement vrai que je me rappelle un article - j'ai demandé qu'on aille me chercher la coupure - paru dans le Devoir du lundi 3 mai 1982. Le titre était libellé de la façon suivante: "Denis Vaugeois au Devoir. Le Parlement est trop faible pour se réformer lui-même". Ce n'est pas n'importe qui qui disait cela. C'était le député de Trois-Rivières, parrain du document fort important sur la réforme parlementaire. L'article se lisait ainsi: "Le Parlement est trop faible pour se réformer lui-même: l'impulsion à cet égard doit venir du gouvernement, du Conseil des ministres. "Telle est la constatation déprimante du député péquiste de Trois-Rivières, M. Denis Vaugeois, au terme d'un an d'études et de délibérations sur la réforme parlementaire à la demande même du premier ministre. M. Lévesque avait nommé l'ancien ministre au poste d'adjoint parlementaire du ministre délégué à la Réforme parlementaire à la suite des élections générales d'avril 1981."

Quand j'ai pris connaissance de cette déclaration de M. Vaugeois, je me suis dit que la réforme parlementaire, on en parlerait encore pendant des mois et des années si on n'arrivait pas, un beau jour, à travailler sur la base d'un document concret, bonifiable, certes, modifiable, j'en conviens, mais au moins travailler sur la base d'un document concret qui propose quelque chose. Qu'on soit pour ou qu'on soit contre, mais qu'on puisse avoir quelque chose et qu'on puisse travailler à partir de cela. J'ai donc senti, comme leader du gouvernement, la responsabilité première de déposer à l'Assemblée nationale du Québec un projet de loi qui, évidemment, n'était pas complet puisqu'il y manquait deux pans de mur fondamentaux que sont la réforme parlementaire et le nouveau régime de retraite et de salaire, mais tout de même déposer un projet de loi. Cela a été fait au mois de juin. Vous vous rappellerez qu'à cette époque, j'ai indiqué très clairement à l'Assemblée nationale que ce projet de loi était forcément incomplet, qu'il y manquait les éléments dont je viens de faire état et qu'en cours de travail, durant l'été, au moment de la convocation de la commission de l'Assemblée nationale, j'allais déposer à la commission parlementaire un document relatif à la réforme parlementaire et un autre document relatif au nouveau régime de retraite des membres de l'Assemblée nationale.

C'est vrai qu'entre cette période du dépôt du document de M. Vaugeois, député de Trois-Rivières, et le moment actuel où nous recevons ici à la commission parlementaire une proposition de réforme parlementaire, il n'y a pas eu d'échange entre les membres de l'Opposition et les députés ministériels. Mais je sais aussi que si nous voulions véritablement avancer et pouvoir enfin accoucher d'une réforme parlementaire, il était mieux de se revoir et de se remettre à travailler conjointement au dossier de la réforme parlementaire sur la base d'un projet. C'est pourquoi, à la suite des remarques qui avaient été faites par M. Vaugeois, il y a eu d'abord le dépôt du projet de loi no 90, mais, par la suite, il s'est manifesté, au conseil des députés ministériels - là-dessus, je laisserai le soin à mes collègues d'en faire état - une volonté de travailler de façon plus accélérée et plus intense au dossier de la réforme parlementaire, ce qui a donné naissance à un comité spécial du conseil des députés ministériels présidé par M. de Bellefeuille et formé d'une dizaine de parlementaires, ce qui a permis la production d'un document fort important sur la réforme parlementaire.

Pour l'essentiel, c'est sur la base de ce travail que j'ai soumis au Conseil des ministres des propositions qui ont effectivement été entérinées. Comme j'ai la responsabilité de parrainer le projet de loi no 90 à l'Assemblée nationale, il m'apparaît tout à fait normal que le leader s'acquitte de ses responsabilités et dépose donc officiellement la proposition ministérielle de réforme parlementaire.

Je comprends très bien que d'entrée de jeu le député de Marguerite-Bourgeoys,

leader de l'Opposition, veuille faire sentir à l'ensemble des parlementaires que si nous voulons véritablement réussir à présenter une réforme parlementaire substantielle, il faudra que l'Opposition y soit associée au niveau de la discussion, de la prise de décision et des éléments de modification qui pourraient y être apportés.

En d'autres mots, nous voulions que quelque chose de concret soit sur la table. Je pense que nous avons quelque chose de concret. À partir de maintenant, je crois que c'est notre responsabilité de faire en sorte que pour le reste, jusqu'à l'adoption finale de ce projet de réforme parlementaire et du projet de loi no 90, nous puissions, autant à l'Assemblée nationale qu'en commission parlementaire, fonctionner dans un cadre, un contexte où tous et chacun, comme vous le disiez vous-même, sans aucun esprit de partisanerie, nous puissions accoucher d'une réforme parlementaire convenable, faisable, et qui nous permette d'améliorer notre régime démocratique.

Voilà un peu ce que je voulais apporter comme élément de réponse à ce qu'a évoqué le député de Marguerite-Bourgeoys. Je veux donc l'assurer que c'est véritablement notre intention, sur la base du document que nous avons maintenant déposé officiellement ici en commission parlementaire, de travailler en très étroite collaboration. Si cela n'a pas été fait de cette façon entre la date d'aujourd'hui et le dépôt du document Vaugeois, c'est qu'il nous paraissait d'abord important de dégager un consensus chez nous, de faire notre lit, comme on nous le dit souvent, sur le dossier de la réforme parlementaire mais, dans le processus qui nous mènera à l'adoption de la réforme parlementaire, de travailler en très étroite relation avec nos collègues de l'Opposition avant d'en arriver à l'adoption finale de la réforme parlementaire.

M. Lalonde: M. le Président.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Le ministre tentait de répondre aux questions que j'avais posées, mais il en a laissé une importante de côté. Je ne sais pas s'il est prêt à y répondre. Est-ce que l'abandon de l'étude des crédits est une condition essentielle de sa réforme?

M. Bertrand: Nous allons en débattre, bien sûr, au cours des prochaines heures, mais je veux indiquer qu'au sein du comité spécial du conseil des députés et du Conseil des ministres l'argument a prévalu pour que ce moyen que nous avions retenu dans le passé pour étudier les crédits des ministères soit remis en question et réévalué...

M. Lalonde: L'abandon?

M. Bertrand: ... mais que cela ne pouvait pas se faire si nous ne tentions pas de trouver des moyens nouveaux qui nous paraissent plus adéquats pour atteindre cet objectif qui est de permettre aux parlementaires de mieux contrôler les finances publiques. Le budget est un élément, les crédits sont un autre élément, mais il y a bien autre chose. La création, par exemple, de la commission des finances publiques qui se réunirait quatre fois par année à raison de deux jours, cela fait huit jours de travail. La commission du Vérificateur général se réunirait cinq jours par année, cela fait cinq jours de travail. Huit et cinq font treize.

Évaluons une moyenne d'environ dix heures par journée de travail, cela fait 130 heures de travail au niveau de la commission du Vérificateur général, au niveau de la commission des finances publiques, sans compter les 35 heures du débat sur le budget, ce qui fait 165 heures, et sans compter, bien sûr, toutes les heures que nous passerons à la commission des engagements financiers. En d'autres mots, pour donner une réponse à votre question, les députés ministériels souhaitent effectivement remettre en question la façon dont nous abordions l'étude du budget et, en particulier, l'étude des crédits en commission parlementaire, mais nous ne voulons pas que cela se fasse sans qu'en contrepartie nous trouvions des instruments, des outils, des moyens nouveaux pour arriver à atteindre l'objectif qui, de toute façon, se trouvait derrière cette étude des crédits en commission parlementaire, qui est d'en arriver à un meilleur contrôle des finances publiques, à un meilleur contrôle des dépenses publiques, à un meilleur contrôle des choix, des orientations qui sont retenues par le gouvernement en matière budgétaire, aussi en matière de financement, d'emprunt, etc. C'est toute l'économie générale autour d'un objectif, qui est le meilleur contrôle des finances publiques, que nous avons décidé de revoir ensemble. Là-dessus, nous avons dégagé un consensus du côté ministériel.

Je n'ai pas besoin de vous dire que je prévoyais la remarque du leader de l'Opposition à savoir que l'abandon des crédits signifiait, à toutes fins utiles, l'abandon d'une tradition qui était celle des commissions parlementaires permanentes qui prenaient chacun des ministères, un par un, et regardaient comment, en fait, étaient prévus les budgets des Affaires sociales, de l'Éducation, des Travaux publics, des Transports ou quelque autre. Nous avons effectivement décidé de remettre toute cette question de l'étude des crédits sur la table et de l'aborder d'une tout autre façon. Évidemment, nous aurons à en débattre et

nous espérons arriver à convaincre l'Opposition, au cours des prochaines heures, que l'abandon de l'étude des crédits dans sa forme actuelle et son remplacement par de nouveaux moyens peut très bien nous permettre, comme parlementaires, d'atteindre, je dirais même de mieux atteindre l'objectif que nous nous fixons, soit de contrôler les finances et les dépenses de l'État.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Charlesbourq.

M. Denis de Belleval

M. de Belleval: M. le Président, rapidement, je voudrais plaider à titre de parlementaire et non pas à titre de représentant soit du gouvernement ou, comme on vient de l'entendre, de l'Opposition, étant entendu, évidemment, qu'un parlementaire peut être un parlementaire et s'exprimer, bien sûr, au nom du gouvernement ou de l'Opposition. Je voudrais le faire exclusivement à titre de parlementaire.

Je comprends les réactions de l'Opposition ce matin qui portent tant sur des questions de forme que sur une question de fond, du moins en ce qui concerne les remarques préliminaires qui touchent à la question de l'examen des crédits.

Pour ce qui est de la forme, certains diront que le gouvernement met la charrue devant les boeufs en procédant de cette façon, c'est-à-dire en ne procédant pas d'une façon parfaitement collégiale à toutes les étapes du processus. Je pense, là-dessus - et je veux en rendre témoignage comme parlementaire - qu'on admettra, des deux côtés de la Chambre, que le processus semblait s'enliser depuis plusieurs mois. Finalement, ce sont des députés de la majorité ministérielle, d'accord, mais ce sont d'abord des députés qui, en tant que députés, ont décidé non pas de mettre la charrue devant les boeufs, mais de sortir le tracteur pour labourer le champ de façon définitive -en tout cas, en ce qui nous concerne, à notre point de vue - pour faire aboutir quelque chose, d'abord, et avant tout au nom des parlementaires.

C'est le travail qu'a réalisé le comité du caucus sous la responsabilité du député de Deux-Montagnes. Dans ce sens, le tracteur, nous l'avons d'abord sorti entre nous, mais nous l'avons aussi sorti face au gouvernement, à notre propre gouvernement, à qui nous avons proposé une réforme qui est largement, sinon presque exclusivement le fruit des travaux de députés, de simples députés, et de parlementaires. (11 h 45)

Je pense aussi qu'on admettra, les observateurs de bonne foi admettront que si certains députés n'avaient pas pris sur eux de faire aboutir les choses, probablement qu'encore ce matin on serait en train de discuter de l'opportunité de la réforme, on continuerait à mettre sur pied des comités, d'autres commissions, d'autres groupes de travail, peut-être qu'on irait faire d'autres voyages encore à l'étranger; mais finalement, est-ce qu'on serait rendu aussi loin qu'on est rendu ce matin, je ne pense pas. De ce côté je me rallie au point de vue du gouvernement qui est de dire: Eh bien, des députés ont fait leur lit du côté de la majorité ministérielle - cela aurait pu être d'ailleurs des députés du côté de l'Opposition, mais en tout cas, cela s'est fait comme ça - le gouvernement a fait son lit de ce côté; on présente quelque chose. Au moins, on a quelque chose de concret sur lequel on peut travailler, quelque chose qui est perfectible, quelque chose à quoi l'Opposition n'est pas étrangère puisqu'on s'est servi, effectivement, des travaux qui ont été faits auparavant, auxquels ont participé des gens de l'Opposition et des travaux aussi auxquels l'Opposition ne sera pas étrangère dans les jours qui vont venir quand, effectivement, ce premier jet sera discuté et sera, finalement, je l'espère, approuvé après des amendements et des suggestions opportunes de l'Opposition.

Je pense que de ce côté, on peut discuter sur la forme, mais il faut admettre qu'au moins on a avancé, peu importe la forme et peu importent les critiques que je ne trouve pas illégitimes, en principe, mais peut-être un peu idéalistes ou théoriques de la part du leader de l'Opposition dans le concret.

Deuxièmement, sur le fond. Sur le fond, il nous est apparu à nous en tout cas, aux parlementaires qui ont travaillé au comité du député de Deux-Montagnes qu'il fallait que la réforme réponde favorablement aux critiques et aux frustrations très profondes des parlementaires, comme parlementaires, tant du côté ministériel que du côté de l'Opposition, quant à la forme actuelle de nos débats. Ce n'est pas par hasard qu'entre autres, nous avons proposé très fortement l'abolition du système actuel de fonctionnement tant en commission des lois, d'ailleurs, que dans les différentes commissions, que dans ces 27 commissions sectorielles chargées d'étudier les crédits, où au fond, admettons-le, nous avons un ou deux ténors du côté de l'Opposition, un ou deux ténors du côté du pouvoir, souvent et même presque toujours un seul, très souvent aussi du côté de l'Opposition un seul, et par ailleurs des pions, à toutes fins utiles, des faire-valoir, des figurants autour d'une table. Soyons de bon compte, admettons la réalité des choses telle que la voient les journalistes tous les jours quand ils nous suivent: des gens sont ici pour faire quorum, à toutes

fins utiles, et souvent ce quorum est extrêmement déficient.

Si ce quorum est déficient, c'est parce que sur la substance des choses il n'y a pas d'intérêt pour un parlementaire de travailler dans un pareil contexte. Nous avons dit, donc, il faut faire un travail fondamental, il faut que les députés participent d'une façon significative à ce travail. D'où les suggestions que l'on fait quant à la réorganisation de la présidence, de la vice-présidence des commissions quant à l'organisation du débat où le ministre est à la barre de la commission et aussi quant à l'abolition de la façon absolument stérile, la plupart du temps, d'étudier les crédits en Chambre. Ce n'est pas une question de parti au pouvoir ou de parti de l'Opposition; après tout, dans notre système, peu importent les périodes de temps qui existent entre les différents partis, un parti de l'Opposition finit par être au pouvoir et un parti au pouvoir finit par être dans l'Opposition. Ce n'est pas une question d'Opposition ou de pouvoir. C'est la question de savoir, d'abord et avant tout si les parlementaires, comme parlementaires, font un travail constructif. Admettons-le, on ne fait pas un travail constructif actuellement, de la façon dont on étudie les crédits en Chambre. La plupart de nos débats ne sont même pas rapportés dans les journaux et pourtant, on a maintenant la télédiffusion. On a un journal qui rapporte toutes ces paroles. On le sait très bien, une fois les premiers éléments importants passés en Chambre, une fois que certains ministères plus particulièrement névralgiques de notre vie parlementaire, à un moment donné, ont été touchés, pour presque tout le reste, ce sont des discussions très générales.

On ne va pas en détail, justement, lors de l'étude des crédits. Je ne pense pas que la qualité de nos débats, de la vie démocratique ou du contrôle même parlementaire soit amélioré par le genre de travail que l'on fait. On s'est dit: Changeons les choses de ce côté, d'autant plus que si nous voulons vraiment changer les choses et si nous voulons mettre sur pied des commissions vraiment nouvelles et vraiment fortes, il va falloir aussi que les parlementaires aient le temps de travailler à ces commissions. Il va falloir que les présidents de ces commissions aient le temps de préparer leurs travaux avec leurs vice-présidents, que les parlementaires aient le temps d'étudier ces dossiers et prennent aussi le temps de se réunir, parce qu'on a aussi une limite de temps pour nos réunions. Peut-on faire tout en même temps, ajouter des étages à notre édifice, un édifice déjà chambranlant et critiquable ou ne faut-il pas repartir de zéro et créer ces commissions? Si on crée ces commissions et si on prend le temps de faire ce travail comme il faut, il faut laisser des chos' de côté. On a pensé qu'il fallait laisser de côté, dans sa forme actuelle, en tout cas, l'étude des crédits. D'ailleurs, on remplace cette étude des crédits par un débat quand même privilégié, toute affaire cessante devant les caméras de la télévision pendant 25 heures. Ce n'est pas rien. Ce travail est prolongé... Pardon?

Une voix: 30 heures.

M. de Belleval: 30 heures. Pardon?

Une voix: 35 heures.

M. de Belleval: 35 heures, toute affaire cessante.

Une voix: Bingo!

M. de Belleval: C'est le chiffre qui est retenu, 35 heures, toute affaire cessante, devant les caméras de la télévision. On sait très bien, justement, pour la qualité de notre vie démocratique, combien ce média d'information directe de la population est important, comparé à ce qui se fait dans la commissions sectorielles d'étude des crédits. Je pense qu'il est facile de voir que le "trade off", comme on dit, est en faveur de ce que nous proposons. Ce travail est prolongé par d'autres commissions et, en particulier, par la commission du budget ou des finances publiques. À cet égard, ce que nous proposons est fort valable et, de toute façon, cette proposition peut aussi être aménagée de façon que, malgré tout, lorsqu'on en sent le besoin les commissions que nous mettons sur pied fournissent amplement d'occasions pour répondre à ces besoins - on puisse étudier plus en profondeur des crédits et des programmes particuliers d'un ministère. Mais de grâce, soyons réalistes et admettons que si nous voulons mettre sur pied ces nouvelles commissions, et les mettre sur pied de façon efficace, il faudra sabrer de façon considérable dans le système actuel de commissions.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Deux-Montagnes. Par la suite, le député de Portneuf puis, le député de Taschereau.

M. Pierre de Bellefeuille

M. de Bellefeuille: Merci, M. le Président. Je voudrais revenir en bonne partie sur des questions qui ont été soulevées ce matin par le leader de l'Opposition, par le leader du gouvernement et, il y a quelques instants, par le député de Charlesbourg.

La méthode selon laquelle une série de commissions parlementaires sectorielles établies selon la répartition des ministères -

ce qui fait qu'il y en a plus de deux douzaines - est une méthode qui nous a semblé constituer un mécanisme lourd et peu efficace. Évidemment, quand on parle d'efficacité, cela dépend des objectifs qui sont visés. Nous nous sommes placés dans la perspective d'une amélioration du Parlement. Ce n'est pas une question de rendre les heures que nous passons dans des salles de commissions, à Québec, plus intéressantes pour nous personnellement, ça n'a aucun rapport. Un député qui ne s'intéresse pas à ce qui se passe en commission, c'est son problème à lui et il ne faut pas changer l'institution seulement parce qu'un député ne s'intéresse pas à ce qu'il a à faire. C'est l'efficacité du Parlement qui a été notre règle. Il nous a semblé que ce mécanisme, du point de vue du Parlement, du point de vue de l'Opposition, du point de vue du gouvernement, du point de vue du législatif par opposition à l'exécutif, et aussi du point de vue de l'exécutif, est lourd et peu efficace.

On peut juger de ça de plusieurs façons. Par exemple, on peut s'interroger sur la qualité et la quantité des informations qui passent dans les médias, à partir des travaux de ces commissions. Lorsqu'on examine cette question, on se rend compte que l'examen des crédits, tel qu'il se pratique traditionnellement, soulève ou provoque assez peu d'information dans les médias et ne provoque pas nécessairement les informations les plus significatives quant à ce qui se passe vraiment dans le Parlement. Il peut souvent arriver qu'il se dise des choses fort pertinentes en commission parlementaire et que ça ne se reflète pas dans les médias, tout simplement parce que le mécanisme en lui-même est lourd, peu adéquat, suscite peu d'intérêt de la part des médias. Évidemment, s'il y a une prise de bec entre le ministre et son vis-à-vis de l'Opposition, là, il y a des possibilités que ça se reflète dans les débats, mais il n'est pas sûr que ce soit ça, en soi, qui soit le plus significatif quant à la remise en valeur du rôle du Parlement.

Le leader de l'Opposition nous demande si l'abandon de cette méthode est essentiel à la réforme. Là, on ne va pas se braquer. Je pense que, quand on discute entre parlementaires d'une réforme parlementaire, il faut justement éviter de se braquer, il faut plutôt chercher les terrains d'entente possibles. La réponse a déjà été donnée, à la fois par le ministre et par le député de Charlesbourg; ce n'est pas une question d'écarter, c'est une question de modifier, de remplacer. On remplace par quoi? On remplace par la nouvelle conception du débat sur le budget et on remplace aussi par la commission des finances publiques. Mais, là, je pense qu'il faut éviter de comparer strictement des nombres d'heures, parce qu'il n'est pas du tout sûr que les droits du

Parlement soient vraiment une question de nombre d'heures de débat. Il se peut qu'un débat mieux conçu, mieux réglé dans une commission correspondant mieux aux besoins des parlementaires en fonction des finances publiques, qu'un nombre d'heures beaucoup plus restreint donne entière satisfaction aux parlementaires, plutôt que des centaines d'heures consacrées à des débats fastidieux et peu productifs.

Il faut aussi tenir compte d'un autre facteur, qui est celui du degré d'autonomie des commissions, des commissions jouissant d'une plus grande mesure d'autonomie, qui tient en partie à la création de la fonction de vice-président de commission, fonction confiée à des députés de l'Opposition. Il se peut que cette plus grande autonomie des commissions soit aussi un facteur important lorsqu'on cherche à comparer le régime actuel et le nouveau régime qui est proposé. C'est un des facteurs qui font qu'un nombre total d'heures moins considérable puisse permettre une plus grande efficacité et, par conséquent, puisse être aussi satisfaisant et même plus satisfaisant, tant du point de vue des députés de l'Opposition que du point de vue des députés ministériels. (12 heures)

À ce point de vue, la commission des finances publiques, jouissant d'une plus grande autonomie, dotée d'un président qui soit du gouvernement et d'un vice-président qui soit de l'Opposition, ayant le mandat très vaste d'examiner tout autant les grandes questions économiques et financières relatives au gouvernement et à l'ensemble du Québec que les points particuliers dans les crédits des ministères. La commission des finances publiques aura toute l'autonomie voulue pour décider si elle veut étudier tel ou tel point dans les crédits de tel ou tel ministère. On retrouve là le souci très louable qu'ont les parlementaires de remettre en question les dépenses particulières des ministères. La commission des finances publiques aura toute la latitude voulue pour décider lesquels de ces crédits elle entend étudier de façon plus détaillée.

Je pense qu'il faut faire la comparaison entre deux ensembles. Le premier ensemble est celui qui existe à l'heure actuelle comprenant plus de deux douzaines de commissions sectorielles, mécanisme lourd et peu efficace et, d'autre part, un autre ensemble qui représente un nombre total d'heures de débats moins élevé mais qui permet de concevoir et de mettre en place des débats beaucoup plus féconds, des débats qui donneront une plus grande satisfaction aux parlementaires de quelque côté de la Chambre qu'ils soient.

Je pense que la réponse à la question posée par le leader de l'Opposition est que, du côté ministériel, nous avons cherché une méthode pour améliorer la fécondité et

l'efficacité de ces débats, tant à l'Assemblée nationale qu'en commission parlementaire. Nous en sommes venus à proposer cet ensemble. Il est sûrement modifiable. Suite à l'examen qui en sera fait, nous trouverons, peut-être, des façons de le modifier sur lesquelles nous nous mettrons d'accord. En choisissant le meilleur de ces deux ensembles, nous pourrons arriver à une conception qui représentera une réforme des mécanismes actuels.

Merci, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Portneuf.

M. Michel Pagé

M. Pagé: M. le Président. Je souscris aux propos de mon collègue de Marguerite-Bourgeoys et d'autres de mes collègues qui sont intervenus, de façon préliminaire, sur le projet présenté par le leader du gouvernement.

Tout le monde reconnaît l'importance de la réforme parlementaire. C'est d'ailleurs dans cet esprit que, depuis plusieurs années, des actions ont été menées par des groupes de députés, à la demande du président de l'Assemblée nationale, à la demande des leaders et avec la participation des partis d'Opposition. Aujourd'hui on se retrouve avec un projet déposé par le leader du gouvernement, en addenda au projet de loi no 90 déposé au mois de juin dernier.

M. le Président, on ne peut que souscrire aux objectifs fondamentaux de toute démarche visant une réforme de notre Parlement et de ses institutions qui amènera, je présume, une revalorisation du rôle de député. Ce n'est pas la première fois qu'on entend parler de la revalorisation du rôle de député, cette volonté de faire du député un véritable législateur, si on siège au Parlement depuis quelques années. J'ai été un député parmi 102 dans la majorité en 1973. Du côté de la majorité, aujourd'hui, on jurerait que vous avez sorti de vieux discours de nos pupitres...

M. Bertrand: ... au caucus.

M. Pagé: Aussi. Je crois que la démarche du projet de loi no 90, comme la démarche des rapports qui ont été présentés tant par les missions que par la sous-commission de l'Assemblée nationale qui a siégé à quelques reprises et qui a impliqué beaucoup de capital humain et financier, vise à faire de nous des représentants du peuple un peu plus législateurs que nous ne l'étions dans le passé. Par contre, vous aurez remarqué, dans les commentaires du leader de l'Opposition, qui sont tout à fait justifiés et qui traduisent l'expression unanime de ceux de notre parti qui ont étudié de façon un peu plus exhaustive ce document qui nous a été présenté il y a quatre-vingt-seize heures seulement, que notre leader s'inquiète de la façon que l'Opposition officielle a été associée à la démarche. J'ai toujours compris, par le travail de la sous-commission de l'Assemblée nationale, que l'Opposition officielle et le parti, parce que nous sommes seulement deux partis - si nous étions davantage, les autres partis auraient aussi été associés - qu'on se devait de travailler étroitement, non seulement d'étudier ensemble, mais de participer à la rédaction d'un document comme celui-là. Aujourd'hui, on constate que c'est un produit qui est presque fini qui nous arrive sur la table, un produit qui est très spécifique, très détaillé et on nous dit: C'est présenté par nous, du gouvernement. M. le leader du gouvernement nous dit: Voici l'état de la réflexion du gouvernement, du Conseil des ministres et qui a repris quelques-unes des recommandations ou toutes les recommandations, je ne pourrais pas dire, du caucus des députés. Messieurs, voilà nos intentions, c'est négociable, c'est discutable et nous allons tenter ensemble de modifier tout notre système, nos commissions, notre mode de fonctionnement, les droits des parlementaires, etc.

Le premier grief qui a été soulevé par le leader de l'Opposition est justifié. Il est fondé et j'ose espérer que le leader du gouvernement en prendra non seulement bonne note, mais qu'il saura y donner suite, dans le sens du propos qui a été tenu par notre leader. Il est important que la réforme soit le résultat d'une expression unanime, non seulement des partis, mais des députés. Je me rappelle, depuis quelques mois, plus particulièrement depuis peut-être une dizaine de mois, combien il était important pour le gouvernement d'avoir l'unanimité des partis à l'Assemblée nationale.

Une voix: Bien oui!

M. Pagé: Aussitôt qu'on a un petit problème quelconque, le gouvernement, par la voix de son leader, par la voix du premier ministre, est toujours là pour venir quérir et parfois même quémander l'unanimité des partis à l'Assemblée nationale. S'il y a quelque chose d'important aujourd'hui, c'est la Loi sur la Législature. C'est beaucoup plus important que toutes les questions qui sont discutées à l'Assemblée. C'est le fondement même de l'institution. C'est la loi et l'unanimité des partis, l'unanimité de tous les membres est primordiale. C'est d'ailleurs dans ce sens-là qu'on s'attendait, qu'on aurait été en droit de s'attendre, tout au moins, que le projet soit présenté par le président de l'Assemblée nationale, qui est le gardien des droits de l'Assemblée, le gardien des droits du Parlement et de ses membres.

J'ai beaucoup plus confiance, M. le Président, comme député, au président de l'Assemblée nationale comme gardien des droits des parlementaires que je n'ai confiance au leader du gouvernement pour assurer mes droits comme parlementaire. Jamais le président de l'Assemblée nationale n'a voulu passer sur le corps de qui que ce soit. C'est un exemple qui est assez éloquent. Sans malice aucune. On se rappelle cela.

Aujourd'hui, le leader nous arrive avec un projet qui est très spécifique, qui va dans les limites. Si vous aviez vraiment souhaité une association de l'Opposition à la démarche, vous auriez été moins précis. Je m'attendais que vous proposiez des modifications aux commissions parlementaires, au nombre de commissions, aux mandats des commissions, etc., mais c'est devenu très très précis. On y prévoit même le nombre de jours où ces commissions devront siéger. On y prévoit même le nombre de fois dans l'année où une commission devra siéger. On prévoit la formation de ces commissions, le mandat précis de ces commissions.

Le leader de l'Opposition a mis en relief toute la question de l'étude des crédits. C'est un exemple particulièrement important où le gouvernement vient, de façon définitive, détaillée et même très précise, nous dire: Les trente-cinq heures de débat, les 250 heures d'études et de travaux des députés en commission, les cinq heures de débat qui peuvent s'ensuivre, les cinq heures de débat prévues pour les crédits supplémentaires, ce qui totalise environ 290 ou 295 heures, tout cela est changé pour un débat privilégié limité à une quinzaine d'heures; c'est spécifié. Le lit est fait, le cas est réglé. Ensuite, on aura une commission, la commission des finances publiques, qui pourra se réunir à quelques reprises durant l'année avec un mandat d'étudier, pendant deux jours, une question qui pourra être posée par les députés.

Mon intervention sera peut-être marquée au coin de la méfiance, M. le Président, mais lorsqu'on voit que le tout est préparé d'avance, lorsque le tout est déposé seulement pour discussion, on a l'impression que c'est seulement pour discussion. On n'a pas l'impression que c'est vraiment pour une participation étroite et une association de notre part que c'est fait. C'est tellement spécifique tout cela, c'est tellement détaillé, cela va tellement jusqu'à la limite même du fonctionnement qu'on se dit: À quoi bon s'associer et quel est l'objectif du leader du gouvernement pour les deux prochaines journées?

On a l'impression, M. le Président, que le plat est prêt pour tout ce qui fait l'affaire du gouvernement, malheureusement. Les commissions parlementaires, c'est réglé.

Les crédits, c'est réglé. Le député de Charlesbourg, tout a l'heure, faisait référence à la commission des finances publiques qui pourra se réunir, qui pourra présenter les sujets. Je veux bien. Cela va certainement avoir de l'allure, mais les votes à cette commission vont être pris sur la base de la majorité tout simplement. Je ne suis pas convaincu que le rôle du député de la majorité, qui en a été un dans le passé, de s'associer beaucoup plus à la majorité qu'à son rôle de parlementaire va être modifié d'autant avec un nouveau mode de fonctionnement de notre Parlement.

On est prêt pour ce qui semble faire l'affaire du gouvernement: moins d'étude de crédits, nouveau système de commissions, etc., mais on n'est pas prêt pour ce qui est le plus important, je pense, pour le parlementaire. On n'est pas prêt et on n'est pas aussi précis à l'égard de cette brèche combien importante dans le travail d'un parlementaire qui est la législation déléguée. On n'est pas prêt pour cela. À cet égard, on crée une sous-commission, un comité ad hoc qui aura comme mandat de se réunir, d'étudier les différents aspects de la question et de faire rapport le 31 mars 1983. Cela veut donc dire que ce rapport sera étudié, pris en considération en avril ou en mai, à la prochaine session, et, concrètement, pas avant l'automne 1983; donc pas d'application avant 1984 ou à peu près. C'est un des éléments importants de la réforme parlementaire.

Combien de fois, à l'Assemblée nationale du Québec - et ce, de quelque côté que ce soit de la Chambre, que le gouvernement ait été formé de quelque parti que ce soit - malheureusement, les députés se sont retrouvés dans la position délicate de voter des projets de loi où il y avait l'ossature, mais pas la chair, et, finalement, les députés - souvent, pas de la majorité -se retrouvaient, six mois après que la loi fut adoptée, avec une loi qui ne représentait pas ce qu'on avait voulu voter au Parlement ou la façon dont on envisageait l'objet pour lequel on légiférait. La législation déléguée, c'est peut-être l'élément premier sur lequel le Parlement et ses députés devraient se pencher. Alors que les commissions parlementaires sont définies, précisées, le nombre de membres, le mandat, le nombre de fois où elles siégeront dans une année, le nombre d'heures où elles pourront délibérer, il a été facile de faire son lit pour le gouvernement avec l'aide de commissions et de comités du caucus, mais l'essentiel, ce qui nous affecte le plus dans nos droits de parlementaires, la législation déléguée, on ne touche pas à cela pour le moment, on défère cela en comité. Je n'ai pas besoin de vous dire que cela suscite chez moi et chez mes collègues beaucoup d'inquiétude. (12 h 15)

Je constate aussi, M. le Président, qu'on n'a pas abordé toute la question des revenus, des salaires, des fonds de retraite, etc. Je crois que le gouvernement profitera d'un autre moment pour annoncer ses intentions à cet égard, mais je dois vous dire encore une fois, sans malice, qu'en voyant tout cela, j'ai l'impression qu'il va vous manquer une couple de députés pour combler les jobs. Quant à moi, je ne serais pas surpris...

Je ne veux pas présumer de ce que le leader du gouvernement nous annoncera dans quelques jours, mais je ne serais pas surpris qu'on en arrive éventuellement à une annonce avec beaucoup de publicité, peut-être même dans les journaux, de la part du gouvernement, disant que ces pauvres députés ont accepté un gel ou une réduction des salaires ou je ne sais pas trop, quelque chose de cette nature et que, finalement, au bout de l'exercice, on constate que les 72 députés de la majorité se sont vu... Combien sont-ils?

M. Lalonde: 77.

M. Pagé: C'est parce que vous en perdez régulièrement, peu importe.

Une voix: ...

M. Lalonde: De moins en moins.

M. Pagé: On constate donc que tous les députés de la majorité ont comme revenu net, à la fin de l'année 1983 ou 1984, un revenu beaucoup plus appréciable que ce qu'ils auraient eu normalement, que ce qu'ils auraient normalement reçu comme traitement, compte tenu des nombreuses fonctions additionnelles de président, de vice-président...

M. Bertrand: Vice-président de l'Opposition.

M. Pagé: ... qui pourrait être rémunéré, pas qui sera, mais qui pourrait l'être.

M. Lalonde: On n'est pas encore...

M. Pagé: Les adjoints parlementaires qui pourraient aller selon le nombre... Le salaire du whip, on le réglera avant longtemps, vous verrez.

M. Bertrand: L'indemnité du...

M. Pagé: On discutera de cela jeudi, on sera prêt, ne soyez pas inquiet.

C'est donc une inquiétude que j'ai aussi. Tout cela, M. le Président, pour vous dire que je ne connais pas le modus operandi de nos travaux ici, je ne connais pas les intentions du leader du gouvernement, on pourra y revenir tout à l'heure, mais il y a une chose certaine, c'est qu'on a beaucoup de réserves. Notre grande inquiétude, c'est que la réforme ne vienne pas à la suite d'une initiative commandée par le président de l'Assemblée nationale. Pour moi, quel que soit le parti qui forme le gouvernement, quel que soit le ou la députée qui agisse comme président de l'Assemblée nationale, le meilleur gardien de mes droits, comme parlementaire, et des droits du Parlement, selon moi, sera toujours le président de l'Assemblée nationale, beaucoup plus que le leader du gouvernement, quel qu'il soit.

M. Bertrand: Et les députés. M. Pagé: Je vous remercie.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Taschereau.

M. Richard Guay

M. Guay: M. le Président, j'ai écouté religieusement le député de Portneuf parler des députés qui seraient gelés.

Effectivement, avec la climatisation dans cette salle, c'est exact que les députés commencent à être gelés. Pour ce qui est de l'autre gel qu'il évoquait...

Une voix: Dans quel sens?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Des instructions ont été données en conséquence.

M. Guay: Je vous remercie, M. le Président.

M. Lalonde: On ne parle pas de député gelé, là!

M. Guay: Sur le fond de la question, le député de Portneuf a une argumentation assez curieuse. Voilà que des députés du côté ministériel, qui ont vu le projet de loi no 90 lorsqu'il a été déposé, ont trouvé qu'on pouvait aller plus loin que le projet de loi no 90 ne le faisait. On en a parlé au caucus, c'est un fait. Le caucus a dit: On va mettre un comité sur pied pour regarder cela, il y a peut-être moyen d'aller plus loin. De fait, avec ce qui est présenté ce matin par le leader du gouvernement, c'est aller pas mal plus loin que si on s'en tenait au projet de loi no 90 uniquement.

Au cours de ses délibérations, le comité présidé par le député de Deux-Montagnes, dont j'ai eu le plaisir de faire partie, s'est penché très sérieusement sur les implications que chaque proposition avancée pouvait avoir. En d'autres mots, il ne s'agissait pas seulement de lancer des idées en l'air et de placoter autour de cela pour en arriver à

faire un beau rapport et à dire: On pourrait faire telle ou telle chose et, si on ne fait pas cela, on pourrait faire autre chose. De sorte que la réforme parlementaire, que nous souhaitons tous depuis bon nombre d'années, serait encore une chose dont on parlerait dans un an, dans deux ans et peut-être encore dans cinq ans. Tout le monde serait convaincu de l'urgence et de l'imminence de la réforme parlementaire. Il y aurait encore du monde pour placoter de la réforme parlementaire, mais il n'y aurait toujours pas de geste concret qui serait posé allant suffisamment loin pour qu'on puisse appeler cela une véritable réforme du Parlement.

Ce que le député de Portneuf nous reproche, lorsqu'il dit que le document arrive tout préparé jusque dans les moindres détails, c'est d'avoir bien fait notre travail. Je trouve cela étonnant. Nous nous sommes posé la question: Si nous proposons telle chose, qu'est-ce que cela aura comme implications? Cela veut dire quoi en termes d'horaire? Cela veut dire quoi comme effets de "bumping" sur le reste des travaux législatifs? Comment cela peut-il former un tout cohérent au cours d'une année? Est-ce que cela peut fonctionner et à quelles conditions?

Il dit: Vous avez même prévu que la commission des finances se réunisse une fois par trimestre. Bien oui, parce que c'est important de prévoir ce genre de chose. On n'a pas seulement proposé de mettre sur pied une commission des finances publiques et ne rien préciser, de mettre sur pied une commission du Vérificateur général et ne rien préciser; des propositions comme celles-là, il y en a eu, il continue d'y en avoir et il pourra y en avoir, mais encore faut-il à un moment donné s'arrêter et se pencher concrètement sur les faits. Bon, fort bien, mais cela va fonctionner comment, quand, à quelle fréquence et ça va faire quoi? C'est ce qu'on a essayé de faire.

Je ne dis pas que ce qu'on a fait est parfait, loin de là, il y a probablement encore des fils à raccrocher par moments, mais je pense qu'il est mal à propos de venir nous reprocher de faire une proposition qui va dans le détail parce que, justement, on a eu le souci d'aller dans le détail, on a eu la volonté d'aller dans le détail pour en faire une proposition concrète, qui se tienne. En ce sens, on a eu le sentiment de faire un bon travail. Que le résultat soit discutable, c'est précisément le but de notre rencontre d'aujourd'hui. Encore là, je comprends mal tout le plat que font le leader et le whip de l'Opposition sur la forme que prend cette proposition. Les députés ministériels ont jugé à propos de former un comité du caucus qui a travaillé là-dessus en profondeur, comme je viens de le dire, qui a fouillé toute la question, et pas juste d'une manière générale, et qui a fait rapport au caucus.

Cela est allé au Conseil des ministres et voilà une proposition qui couvre à peu près, enfin, de la façon dont on a pu le prévoir, tous les champs d'activité. Là on nous dit: L'Opposition n'a pas été associée. Écoutez, c'est un comité de notre caucus. Quand vous faites un comité de votre caucus, on ne demande pas à y être associés non plus. Ne nous reprochez pas, par contre, comme députés, ensemble, de nous être penchés sur cette question.

Entre nous, c'est quand même notre droit, comme c'est votre droit le plus strict. Si le Parti libéral, dans son caucus, veut créer un comité du caucus sur la réforme parlementaire, c'est son droit le plus fondamental, et ce n'est pas moi qui vais aller contester cela. Qu'une fois le rapport soumis au caucus du Parti libéral, par la voix du leader de l'Opposition, dont je salue la nomination, en passant, le Parti libéral nous dise: Voilà, il y a un comité du caucus qui s'est penché là-dessus, il a fait rapport au caucus et voilà ce que le caucus du parti pense de cela, je ne vais pas dire: Vous auriez peut-être pu nous associer en cours de route. On va nous associer. On nous présente à un moment donné le fruit des réflexions des députés du Parti libéral, comme nous présentons le fruit des réflexions de notre formation politique sur la question et les propositions qu'il nous a paru possible de faire pour bonifier encore davantage le projet de loi no 90. On dit: L'Opposition doit être associée. Bien sûr, tout le monde est d'accord. À quel moment? Voilà, c'est maintenant, mais à partir de quelque chose de concret, de précis, pas juste des idées en l'air qu'on pourrait peut-être créer une commission et une autre commission. Cela ferait quoi ces affaires-là?

Le député de Portneuf, d'autre part, dit que le gouvernement trouve son compte dans le projet de réforme que nous proposons. J'attire son attention sur le fait qu'il l'a peut-être eu depuis seulement 96 heures, comme il le dit, mais il ne l'a pas lu bien souvent pendant ces 96 heures à mon avis. Si le gouvernement, que ce soit le nôtre ou un autre, voulait y trouver son compte, d'abord, probablement qu'il n'en ferait pas de réforme parlementaire, parce que pour un gouvernement, fonctionner comme un gouvernement, dans bien des cas, cela veut dire le moins de contrôle législatif possible.

À partir du moment où un gouvernement est d'accord pour accroître le contrôle du pouvoir législatif sur ses activités, il n'y trouve pas son compte comme tel. C'est plutôt le contraire. Un gouvernement qui serait uniquement soucieux de dire: Je fonctionne, le Parlement c'est le Parlement, il est bon, et qui mépriserait le Parlement ferait exactement l'inverse de ce que l'on fait aujourd'hui. Il n'en ferait même pas de réforme parlementaire. La réforme

parlementaire que nous proposons prévoit la création de la commission des finances publiques. Cela n'existe pas à l'heure actuelle. Ce n'est quand même pas le fait d'un gouvernement qui veut y trouver son compte et cacher des choses. Au contraire, il veut qu'il y ait des débats sur les finances publiques, les orientations budgétaires. Nous proposons la commission du Vérificateur général. Le Vérificateur général, à chaque année, fait un rapport dans lequel il dit: II y a telle affaire, telle affaire dans l'administration publique qui marche mal, qui pourrait être corrigée.

Si le gouvernement ne voulait pas de réforme ou si le gouvernement voulait y trouver son compte, la dernière chose qu'il ferait serait de créer une commission du Vérificateur général qui se pencherait, en public, sur le rapport du Vérificateur général en présence de celui-ci et qui pourrait même convoquer les ministres ou les sous-ministres pour venir s'expliquer. Je ne vois pas en quoi le gouvernement trouve son compte en la matière. Au contraire. Il cherche - c'est louable, d'ailleurs, de sa part - à accroître le contrôle que le pouvoir législatif a sur l'administration publique. C'est un souci que nous avons tous, je pense, comme parlementaires, de quelque formation politique que nous soyons. Si bien que seulement avec ces deux organismes et la commission des organismes autonomes, un gouvernement qui ne veut pas de réforme parlementaire ou un gouvernement qui veut y trouver son compte va-t-il aller proposer de mettre sur pied une commission parlementaire pour entendre des présidents de sociétés d'État, de régies et de commissions, en plus des organismes qui sont nommés par l'Assemblée nationale? Il me semble que c'est la dernière chose que ferait un gouvernement qui voudrait y trouver son compte.

Un gouvernement qui voudrait également y trouver son compte, c'est-à-dire un gouvernement qui légifère par réglementation - et c'est un problème qui existe dans toutes les sociétés modernes, le problème de réglementation du pouvoir de législation déléguée - continuerait à le faire et il dirait: Ce ne sont pas les affaires du Parlement de s'occuper de la législation déléguée et de la réglementation. Cela finirait là. Au contraire, nous proposons - il y aura une motion en ce sens qui sera faite dès le 9 novembre - la constitution d'une commission qui va faire rapport le 31 mars -ce n'est pas si loin que cela, nonobstant ce qu'a dit le député de Portneuf - parce qu'il y a quand même... Il faut définir le contrôle de la législation déléguée. Est-ce avant? Est-ce après? Est-ce que cela a uniquement un pouvoir de recommandation ou cela a-t-il un pouvoir d'empêcher l'entrée en vigueur de la réglementation? Autant de choses fort complexes qui méritent qu'on s'y arrête de manière plus approfondie; d'où cette commission. Mais enfin, si le gouvernement voulait y trouver son compte - comme le dit le député de Portneuf - il n'y aurait pas de commission sur la législation déléguée. Il n'y aurait pas de commission des organismes autonomes. Il n'y aurait pas de commission du Vérificateur général. Il n'y aurait pas de commission des finances publiques. C'est aussi simple que cela. Le gouvernement continuerait de fonctionner tel quel. Le Parlement continuerait à dire, s'il n'y avait pas de réforme du Parlement: "C'est effrayant: II faudrait faire une réforme parlementaire et le gouvernement n'est donc pas gentil de ne pas faire une réforme parlementaire." On en propose une, une où le gouvernement ne trouve pas son compte, strictement parlant, comme gouvernement et où il trouve son compte dans cette volonté qu'il a de modifier le pouvoir législatif, d'amener le pouvoir législatif à exercer un meilleur contrôle sur l'administration publigue parce que finalement, au bout du compte, c'est seulement là que le gouvernement y trouve son compte: surtout avec l'ampleur que prend l'administration publique, il est rendu nécessaire, pour quelque gouvernement que ce soit, qu'il y ait un chien de garde de l'administration publique, en plus de ce qu'il peut faire, lui. En ce sens, il y trouve son compte en accroissant le rôle du Parlement sur l'administration publique. Mais, certainement pas dans le sens que le dit le député de Portneuf.

Le député de Portneuf nous dit également qu'il n'est pas convaincu que le rôle des députés de la majorité sera modifié par l'institution de nouvelles commissions et leur nouveau fonctionnement qui s'inspire, comme on l'aura remarqué, de commissions à l'américaine, c'est-à-dire avec un président, leader de la majorité, et un vice-président, leader de la minorité, devant lesquelles commissions le ministre comparaît plutôt que d'en faire partie. Il dit: Cela ne changera peut-être pas la façon de fonctionner des députés de la majorité. C'est possible, mais, enfin, je ne sais pas. Ce que je dis, par contre, c'est que ça mérite d'être essayé. Mais, ce que je sais, c'est que le rôle du député de la majorité ne changera sûrement pas si on ne fait pas la réforme en question.

En d'autres mots, dans le système actuel, il est évident - le député de Portneuf l'a vécu, à l'époque des 102 ministériels -tant qu'une commission parlementaire est un débat entre le ministre assis là et le ou les deux critiques de l'Opposition, les autres députés de la majorité, s'ils ont des choses à faire valoir - exceptionnellement, vont les faire valoir en commission, mais ça va plutôt être au caucus ou en conversation privée -qu'il y a moyen de changer ça. Je pense qu'effectivement si on en arrive à un

fonctionnement des commissions parlementaires comme celui qui est proposé -soit dit en passant, je souhaite que le rôle de président et celui de vice-président soient étendus aux commissions des lois aussi; cela m'apparaît fondamental - si on en arrive à ce changement-là, peut-être qu'on ne changera pas les choses. Cela mérite cependant d'être essayé. Je pense qu'on les changera, mais je sais à coup sûr qu'on ne les changera pas si on ne fait pas de changements parce que, dans le système actuel, il n'en est pas question. (12 h 30)

Finalement - mes collègues en ont parlé - il me semble important de souligner de nouveau que l'Opposition y trouve aussi son compte. On nous dit que cela est inacceptable à cause des crédits. Il nous est apparu évident - en cela, nous sommes allés dans le détail de ce qu'on nous reproche -que, dans la mesure où nous laissons 27 commissions sectorielles, il est impossible de faire fonctionner les nouvelles commissions que nous proposons. On ne voit pas très bien comment - peut-être que les gens du Parti libéral pourront nous faire d'autres propositions à ce sujet; bien sûr, vous allez l'étudier en caucus, je l'espère bien, c'est normal que vous le fassiez comme c'était normal qu'on le fasse - il est possible de faire siéger 27 commissions sectorielles et en même temps de demander aux députés de faire le travail qu'impliquent les nouvelles commissions, les commissions d'initiative parlementaire et toutes les autres lois énumérées. Il y a là un conflit d'horaires. Si on veut vraiment faire la réforme que l'on propose, il faut trouver une façon plus efficace - ce n'est pas difficile d'être plus efficace - de contrôler les finances publiques, pour l'Opposition, en particulier, de contrôler les finances publiques.

Or, à l'heure actuelle, nous avons un débat sur le discours sur le budget qui dure 25 heures plus les 5 heures de la fin. Tout le monde sait - soyons honnêtes, cessons de nous conter des histoires - que les cinq premières heures du débat sur le discours sur le budget sont peut-être d'intérêt et sont à des heures où les gens peuvent l'écouter. Le reste du débat sur le discours sur le budget, vous le savez comme moi, c'est au mois de juin, quelque part entre une heure et deux heures du matin, en fin de session, on dit: On va faire un petit peu de budget ce soir.

M. Lalonde: C'est la faute du leader du gouvernement.

M. Guay: C'était la même chose auparavant. Il est évident que, dans la mesure où il y a de la législation qui doit être adoptée, on ne peut pas faire un débat sur le discours sur le budget, d'autant plus -cela aussi, vous le savez - que les discours, dans le cadre du débat sur le discours sur le budget, à compter du sixième discours, parlent de tout, sauf du budget. Nous avons le droit de parler de notre grand-mère, de notre grand-père, des routes de gravier dans le comté et du voisin qui a marié sa fille. Cela n'a aucun intérêt, c'est une perte de temps monumentale.

M. Pagé: On sait tout cela.

M. Guay: J'attire l'attention du député de Portneuf sur le fait que le dernier débat sur le discours sur le budget auquel j'ai participé remonte à quelques années. Mais j'écoute les discours de part et d'autre et -ce n'est pas une accusation que je porte à l'endroit de qui que ce soit - j'avoue - je pense que je ne suis pas le seul à penser cela - que c'est une perte de temps monumentale. Il y a donc cinq heures qui sont valables au début et cinq heures à la fin. Cela représente 10 heures sur 30. Quand le député de Marguerite-Bourgeoys dit qu'on étudie les crédits 250 heures par année, je m'excuse, mais la moyenne, depuis 1976, est de 180 heures.

M. Lalonde: Vous en parlerez avec le député de Trois-Rivières.

M. Guay: Le député de Trois-Rivières est en campagne électorale. Je ne peux pas lui parler.

M. Lalonde: L'honorable citoyen de Sillery...

M. Guay: Quand j'en aurai l'occasion, il me fera plaisir de lui en parler. Donc, 250, c'est exagéré. On ne me fera jamais croire, pour avoir participé à des débats de commissions parlementaires sur l'étude des crédits, notre pensum annuel, que ces 180 heures sont toutes d'un intérêt égal, que tout ce qui s'y dit est d'un intérêt débordant pour la nation et que c'est la faute des journalistes si cela ne se retrouve pas dans les médias d'information. Au fond, hormis quelques commissions sur l'éducation et les affaires sociales - justice, me dit le critique de l'Opposition en matière de justice - les commissions siègent en même temps, d'autres sujets passent à l'Assemblée, la presse couvre autre chose et le reste est noyé dans le décor. Ce sont des heures qui ne sont pas des plus utiles et des plus essentielles. J'invite l'Opposition à regarder de très près ce qu'implique concrètement la réforme proposée. Lorsqu'on parle d'avoir dix heures de discours en Chambre sur le budget, pas sur les routes de gravelle dans le comté, sur le budget, suivies de dix heures de commission plénière en Chambre, pas dans trois commissions parlementaires réparties dans le décor que personne ne suit, en

Chambre, quinze heures d'étude des crédits en Chambre, devant les caméras de télévision, devant la population qui regarde, pas dans cette salle-ci ou dans d'autres salles quasiment à l'abri du public, forcément à l'abri du public, parce que les journalistes ne suivent pas, quand, en plus de cela - ils ne sont pas là effectivement - on ajoute la commission des finances publiques à coups de huit réunions par année, la commission du Vérificateur général, cinq heures, on en arrive déjà...

Une voix: ...

M. Guay: Justement, je n'ai même pas mentionné les organismes autonomes et je n'ai pas mentionné les questions avec débat non plus, qui sont toujours au règlement. Juste là, on a plus de 100 heures. C'est ce qu'on appelle en bon anglais du "prime time". Mais bien sûr c'est en Chambre.

M. Pagé: Pas nécessairement maintenant, avec cela.

M. Laionde: ... marqué l'un ou l'autre.

M. Guay: On dit: Le discours sur le budget, toute affaire cessante, M. le Président. L'Opposition n'a peut-être pas lu le "toute affaire cessante", mais "toute affaire cessante" veut dire qu'il n'y a pas autre chose et que ce débat est privilégié. Il ne se déroule que cela pendant ce temps. Dans ces circonstances, il me semble que, si j'étais dans l'Opposition, je serais drôlement tenté de regarder cela de plus près. Peut-être qu'il y a moyen de l'adapter, mais je trouverais cela singulièrement plus intéressant que d'aller dans 27 commissions dont une bonne partie sont au fond, par moments, de singulières pertes de temps. En tout cas, je voulais apporter ces arguments; il me semble utile de les rappeler. Si une formation y trouve son compte dans ce projet de réforme, c'est l'Opposition. Le gouvernement n'y trouve pas son compte au sens habituel où un gouvernement serait tenté d'y trouver son compte. Il y trouve son compte parce que cela assure un meilleur contrôle de l'administration publique. Finalement, au bout de tout cela, ceux qui y trouvent le plus leur compte dans ce projet de réforme, ce sont les députés, nous tous, de quelque côté de la Chambre que nous soyons. Ce sont les parlementaires et, si les parlementaires y trouvent le plus leur compte, c'est la population qui le trouve aussi.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Gatineau.

M. Michel Gratton

M. Gratton: M. le Président, je serais presque tenté de remercier le comité du caucus du Parti québécois d'avoir réussi, dans son altruisme, à nous proposer ce matin le projet qui vient de nous être décrit par le député de Taschereau, où finalement les seuls qui y trouvent leur compte, ce sont les députés, mais surtout les députés de l'Opposition au détriment du pouvoir exécutif et des députés ministériels. J'éviterai de remercier et de féliciter ledit comité du caucus péquiste, parce que j'ai plutôt l'impression qu'il y a d'autres considérations dans la formulation du projet qui nous a été déposé ce matin de façon officielle à la commission parlementaire par le leader du gouvernement.

Du côté des porte-parole ministériels, on fait beaucoup d'efforts pour expliquer comment on en est rendu au dépôt de ce projet très précis de réforme parlementaire par le leader du gouvernement. En juin dernier le projet de loi no 90 sur la réforme de la Loi sur la Législature a été déposé. Un certain nombre de députés péquistes ont regardé cela et ont dit: Mon Dieu, c'est l'occasion idéale d'y incorporer une réforme parlementaire qui est souhaitée depuis si longtemps, dont on parle depuis si longtemps. Dans leur magnanimité et leur altruisme, ils ont pondu ce projet qu'ils nous présentent maintenant ce matin comme étant "la" solution qui reste, bien entendu, à être discutée avec les membres de l'Opposition et éventuellement le président de l'Assemblée nationale, je suppose. Pour le moment, cela n'a pas semblé recueillir plus d'attention que cela de consulter les autres députés de l'Assemblée nationale, puisque le comité du caucus péquiste l'a fait en pensant d'abord à l'institution, au rôle du député qui travaille forcément de façon presque bénévole au jour le jour.

Je me dis que le même processus, on aurait pu le suivre et, plutôt que de déboucher sur le dépôt d'un document officiel, par le leader du gouvernement, à la commission parlementaire, dans lequel on retrouve des recommandations très précises qu'on demande aux membres de cette commission parlementaire d'adopter, je présume, en cours de route, il me semble qu'on aurait dû faire ce qu'on a toujours fait, de mémoire non seulement des députés, des membres de l'Assemblée nationale qui sont présents ce matin, mais de mémoire d'un député qui est le doyen de l'Assemblée nationale, le député de Bonaventure, qui est ici depuis 26 ans, qui n'a jamais vu une démarche semblable à celle qu'on voit ce matin être suivie par quelque gouvernement que ce soit, qu'il ait été libéral, de l'Union Nationale ou péquiste, depuis 1976, c'est-à-dire confier au protecteur des droits des

parlementaires, le président de l'Assemblée nationale, le pouvoir, les possibilités de mener à bien un projet de réforme parlementaire.

Les députés péquistes, à leur comité du caucus, on ne leur reproche pas d'avoir réfléchi à la question. Au contraire, on les félicite. D'ailleurs, on sait bien qu'il y a d'autres questions qui ont retenu l'attention des députés péquistes depuis quelques années, outre la réforme parlementaire; j'y reviendrai tantôt. On ne leur reproche pas d'avoir réfléchi. On ne leur reproche pas non plus d'avoir pondu un projet, si imparfait puisse-t-il être. Je suis loin de mettre en doute l'ensemble et même la majorité des propositions du projet. Mais ce à quoi on s'oppose, c'est que cela nous soit présenté comme cela, par le leader du gouvernement, à quelques jours d'avis, et ce n'est pas parce que c'est le caucus de l'Opposition. C'est parce qu'on reconnaît, de part et d'autre, pour une fois - le leader du gouvernement le reconnaît - que la réforme parlementaire, il faut que ce soit le résultat d'un consensus très large sinon de l'unanimité des partis sans doute et même, si possible, des membres de l'Assemblée nationale. Donc, il n'est pas question de privilégier l'Opposition parce que c'est l'Opposition, mais bien de tenter de s'assurer qu'on ait l'unanimité des députés sur la réforme de nos coutumes parlementaires.

Donc, je dis, M. le Président, qu'on aurait pu faire ce qu'on a toujours fait. D'où que provienne l'initiative, que ce soit d'un groupe de députés péquistes comme c'est le cas présentement, que ce soit d'un député, d'un individu, qu'il soit indépendant ou qu'il soit même parti, si on pense à l'ex-député de Saint-Laurent qui a quand même fait un travail - tout le monde le reconnaît - très valable dans ce domaine, le gouvernement devra, finalement, présenter un projet de loi. C'est la façon d'en arriver à réformer le parlementarisme. C'est en présentant soit un projet de loi ou une motion à l'Assemblée nationale. On ne nie pas au leader du gouvernement le droit, la responsabilité, l'autorité de faire cette proposition, mais de la faire seulement après le travail de négociation, le travail de discussion, une fois que l'unanimité aura été faite grâce aux bons offices de qui? Du président de l'Assemblée nationale.

Qu'on prenne l'exemple du Code Lavoie qu'on a évoqué ce matin. C'est bien sûr que la motion qui a été introduite à l'Assemblée nationale - je pense que c'est en 1973 - pour que ce règlement devienne le règlement de l'Assemblée nationale, ce n'est pas le président de l'Assemblée nationale qui l'a présentée. C'était bel et bien le leader du gouvernement qui, à l'époque, était le chef actuel du Parti libéral du Québec. Mais tous les travaux qui ont mené à un texte précis qui s'appelle maintenant le Code Lavoie avaient été faits sous la direction du président de l'Assemblée nationale. Il s'agit simplement de lire les notes de présentation du Code Lavoie, dans la première phrase, où le président d'alors, Jean-Noël Lavoie, écrivait: "J'ai eu l'honneur de diriger le groupe de travail qui, à la demande de la commission de l'Assemblée nationale, a préparé un nouveau règlement qui a d'abord été adopté à l'unanimité, le 27 mars 1972, comme règlement sessionnel et qui, avec quelques modifications, est devenu, le 13 mars 1973, le règlement permanent de l'Assemblée nationale. (12 h 45)

On voit bien que c'est le leader du gouvernement qui avait fait le travail pour que cela devienne le règlement permanent de l'Assemblée nationale, mais c'était le président de l'Assemblée nationale qui avait présidé à la préparation du contenu du règlement.

Quand on regarde l'énumération que fait M. Lavoie des personnes qui avaient participé de façon active à la préparation de ce règlement, on y lit que "le nouveau règlement est l'aboutissement de près de dix ans de travaux qui se sont poursuivis sous la direction des présidents qui m'ont précédé et auxquels ont participé, dans la dernière phase, un certain nombre de collaborateurs que je crois nécessaire de nommer et de remercier dans cette présentation."

On y voit les représentants des quatre partis politiques reconnus. Il y en avait quatre à ce moment-là. Certains me diront qu'au point de vue de l'efficacité, ce n'était pas fameux, c'était moins bien que maintenant qu'on n'a que deux partis. Peut-être bien qu'au point de vue efficacité c'était moins bien, mais peut-être qu'au point de vue de la qualité du produit qui en est sorti c'était beaucoup mieux. Il me semble que lorsqu'on joue avec les institutions parlementaires, ce n'est pas l'efficacité qui doive primer, mais bien de s'assurer que le produit final est applicable et répond vraiment aux besoins de l'heure.

Or, il y avait quatre leaders parlementaires à ce moment-là: Gérard D. Levesque, Rémi Paul pour l'Union Nationale, Fabien Roy pour - avec lui on ne sait jamais trop où il se retrouve - le Parti créditiste, et Me Robert Burns qui était alors leader de l'Opposition. On voit que les vice-présidents avaient été associés à la démarche, le secrétaire général, le secrétaire associé, les secrétaires adjoints de l'Assemblée, le secrétaire des commissions, le secrétaire associé des commissions, enfin les conseillers juridiques, le secrétaire du Conseil exécutif et le greffier adjoint du conseil, tous ces gens-là avaient travaillé sous la direction du président de l'Assemblée nationale pour en arriver à un texte qui, éventuellement, a fait

l'objet d'une motion du leader du gouvernement et qui est devenu le règlement permanent de l'Assemblée nationale.

On a amendé ce règlement depuis et notamment depuis l'élection du Parti québécois en 1976. Comment avons-nous procédé? De la même façon. Par des comités de travail, des sous-comités de travail. Présidés par qui? Par le président de l'Assemblée nationale. Pas par un groupe de députés quelconques qu'ils soient ministériels ou de l'Opposition.

On a réussi à faire l'unanimité, les consensus voulus, et c'est seulement après que ce travail de déblayage eut été fait - et c'est beaucoup plus qu'un travail de déblayage, c'est un travail de rédaction - on en est venu, éventuellement, comme il se doit, à ce que le leader du gouvernement fasse une motion à l'Assemblée nationale pour amender le règlement.

Cela a été le cas, par exemple, dès 1976, en ce qui a trait à la télédiffusion des débats. Malgré que nous, de l'Opposition, ayons eu à certaines occasions, à regretter certaines anicroches dans le déroulement des choses, il demeure qu'on n'a jamais nié le principe que cela devait relever de l'autorité non seulement morale mais de l'autorité réelle du président de l'Assemblée nationale.

C'est donc cela qu'on reproche à la démarche d'aujourd'hui. Je ne parlerai pas au nom de mes collègues de ce côté-ci de la table, M. le Président. Quant à moi, il me sera impossible, au cours des trois prochains jours, de me prononcer sur les cinq ou six recommandations du projet que nous présente ce matin le leader du gouvernement sans avoir même eu l'occasion d'en discuter non seulement avec les membres du caucus de l'Opposition, mais peut-être bien, à l'occasion, avec les membres de la députation ministérielle. Pourquoi pas?

Il y a lieu d'associer pas seulement un comité de députés, qu'ils soient de l'Opposition ou du parti ministériel, mais l'ensemble des députés. Je ne me sens pas habilité ce matin à me prononcer, tout au moins au nom du groupe parlementaire dont je fais partie, sur les six recommandations qui vont aussi loin que faire disparaître des commissions parlementaires pour les remplacer par un certain nombre d'autres, d'abandonner l'étude des crédits selon la formule qu'on connaît, etc.

Il me semble qu'il n'est pas trop tard pour que le gouvernement s'amende, il n'est pas trop tard, car on l'a fait, par exemple, dans le cas de la législation déléguée. Il semble que le comité du caucus - et je ne lui en fait pas reproche - n'a pas réussi à faire un consensus, en tout cas, n'a pas réussi à nous faire une proposition concrète pour régler la question de la législation déléguée autre que de recommander la création d'un sous-comité qui devra faire rapport avant le 31 mars. Rien ne nous empêche de faire la même chose quant à certains autres aspects de la réforme.

Je disais, au début de mes remarques, qu'on n'a pas de reproche à faire à des députés ministériels d'avoir réfléchi sur la question de la réforme parlementaire et d'en être arrivés à pouvoir mettre un projet sur papier. Je répète que le seul reproche qu'on peut leur faire, ce n'est pas au comité des députés comme tel mais bien plus au gouvernement dans son ensemble qu'on doit le faire, c'est la démarche qu'on a suivie à partir du moment où on avait un projet à soumettre à l'attention de l'ensemble de la députation, c'est-à-dire de ne pas passer par là où on a toujours passé depuis plus d'une centaine d'années, c'est-à-dire par le président de l'Assemblée nationale.

Il y a une question qui me préoccupe et le député de Portneuf y a fait allusion tantôt. Il y a d'autres sujets qui ont occupé les discussions du caucus du Parti québécois au cours des dernières années. On n'a qu'à prendre à témoin les articles de journaux qu'on a lus depuis 1976, notamment la question des salaires, la rémunération des députés. Si j'avais l'assurance - et je doute de pouvoir l'obtenir de quiconque - si on me jurait, du côté des membres du comité du caucus des députés péquistes, que, lorsqu'on a parlé de réforme parlementaire, on n'a jamais songé à la question de la rémunération des députés, qu'on n'en a même jamais parlé, je serais peut-être plus à l'aise ce matin pour dire: Allons au fond des choses, discutons des propositions.

J'en prends à témoin - ce n'est pas moi qui y ai pensé le premier - le journaliste Normand Delisle qui, dans une dépêche de la Presse canadienne que j'ai découpée dans un journal ce matin, fait un lien qui mérite au moins d'être étudié entre la question du salaire, de la rémunération des députés, le projet de loi no 90 et le projet de réforme parlementaire qu'on a déposé ce matin. Cela s'intitule, pour les députés: "Des titres qui rapportent bien". Le journaliste Normand Delisle y fait une brève énumération des changements que comportent le projet de loi no 90 de même que le projet - peut-être pas en détail dans ce cas - de réforme parlementaire et des postes qui seront à combler par des députés ministériels. C'est lui qui s'est limité à cela à la suite de l'adoption éventuelle du projet de loi no 90 et peut-être bien de ce projet de réforme. "On constate - c'est le journaliste qui conclut - que 72 des 77 députés ministériels qui siègent actuellement à l'Assemblée nationale pourraient se voir confier des tâches qui leur rapporteraient une rémunération supérieure à la rémunération de base d'un député." Quand on fait le bilan du fait que, dans le projet de loi no 90, on ne

limite plus à 12 le nombre d'adjoints parlementaires, qu'on permet même d'en avoir plus qu'un pour chaque ministre, on peut s'imaginer que cela pourrait aller jusqu'à 27. C'est ce que le journaliste fait. On constate qu'aux commissions parlementaires, où il existait une banque de huit présidents, ils seront maintenant remplacés par un nombre supérieur, surtout avec l'addition des vice-présidents qui, j'en conviens, pourraient être rémunérés. À ce moment-là, le journaliste en conclut que c'est 72 des 77. Je pourrais vous le passer, si cela vous intéresse. Pardon?

M. Guay: Les leaders adjoints de part et d'autre.

M. Gratton: Ceux-là existent déjà de toute façon. C'est inclus là-dedans.

M. Guay: Oui, dans le projet de loi no 90.

M. Gratton: Non, cela existe déjà depuis le mois de juin.

M. Guay: Pas rémunérés.

M. Pagé: C'était dans le bill omnibus que vous n'avez pas vu passer.

M. Lalonde: Cela faisait partie des coquilles. C'était l'eau dans le vin. Cela fait partie des coquilles.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Gatineau.

M. Guay: C'est ce que le député de Lac-Saint-Jean m'avait dit.

M. Gratton: Sans en faire une question très importante de nos débats ce matin, j'aimerais quand même qu'on me rassure du côté du gouvernement et qu'on me dise que la réforme parlementaire qu'on nous propose ce matin n'a rien à voir avec le règlement du problème de la rémunération des députés.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le ministre.

M. Bertrand: Ma phrase sera courte pour répondre effectivement à la question du député de Gatineau. Il n'y a eu aucune relation dans la discussion du dossier de la réforme parlementaire et du dossier de la rémunération des députés. Il n'y a eu aucune relation qui a été faite de l'ordre de celle à laquelle fait référence le journaliste dans l'extrait que vient de citer le député de Gatineau, je peux l'en assurer.

M. Lalonde: Est-ce que le ministre faisait partie du comité?

M. Gratton: Oui, j'allais demander au ministre s'il nous dit que cela a été le cas du cabinet de son ministère et du comité des députés?

M. Bertrand: Je siégeais au comité spécial des députés et je peux assurer le député de Gatineau qu'il n'en a jamais été question.

M. Lalonde: Quelle coïncidence!

M. Gratton: M. le Président, je suis très heureux qu'on ait cette assurance. Il ne restera plus à la commission qu'à trouver une façon, et ce sera évidemment le gouvernement qui devra la trouver, à moins que l'Opposition lui fasse des suggestions dans ce sens, de faire en sorte que ce soit le président de l'Assemblée nationale qui soit chargé de mener à bien cette réforme parlementaire et, quant à nous, je réitère ce que disait le leader du gouvernement au début de ses remarques ce matin: nous en sommes d'une réforme parlementaire. Je pense que nos actes passés à titre de gouvernement sont garants de l'avenir là-dessus. Nous en sommes d'améliorer le processus législatif, d'améliorer le rôle du député et cela commence d'abord, M. le Président, par le respect des traditions, par le respect des choses établies, c'est-à-dire que le président de l'Assemblée nationale en soit responsable et non un ministre, membre du gouvernement ou un comité de députés, qu'il soit ministériel ou de l'Opposition.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Les travaux de la commission de l'Assemblée nationale sont suspendus jusqu'à 15 heures avec droit de parole aux députés de Sainte-Marie, Dubuc, Marguerite-Bourgeoys et Vanier.

(Fin de la séance à 12 h 58)

(Reprise de la séance à 15 h 13)

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Sainte-Marie.

M. Guy Bisaillon

M. Bisaillon: M. le Président, même si cela peut sembler décousu, ce que j'ai à ajouter au débat de ce matin fait suite aux interventions faites par des députés de l'Opposition, en particulier, celles des députés de Portneuf et de Gatineau. Je voudrais souligner que la réforme parlementaire est pour moi avant tout un changement de mentalités. On pourra changer

toutes les structures et tous les mécanismes, si les parlementaires ne sont pas dans des conditions favorables, cela ne donnera rien. J'écoutais, ce matin, un député qui disait que les débats au moment du discours sur le budget sont sans contenu parce qu'on peut parler à peu près de tout. Ce n'est pas parce que cela est écrit dans le règlement, mais parce que les députés ont choisi de parler à peu près de tout. Le député aurait pu faire le choix d'intervenir sur des questions fondamentales du budget. Ce que je veux souligner, c'est que c'est d'abord et avant tout une question de mentalités.

Si on se demande si les éléments de la réforme parlementaire qui ont été déposés ce matin changeront les mentalités, je prétends, à partir d'une expérience vécue, que cela amènera forcément les parlementaires à changer de mentalités. Cela les amènera à faire un certain nombre de débats en fonction de besoins qu'ils ont eux-mêmes identifiés. Si on pense, par exemple aux commissions d'initiative parlementaire, c'est par le choix propre des députés, qu'ils soient ministériels ou de l'Opposition, qu'une question sera étudiée par une commission parlementaire. Elle sera probablement étudiée par les parlementaires d'une façon bien différente qu'elle le serait à la suite d'une proposition gouvernementale qu'on a à traiter d'une façon différente selon qu'on est du côté ministériel ou dans l'Opposition.

Je suis convaincu que les éléments de réforme apportés sont susceptibles d'amener des changements de mentalités chez les parlementaires. Ceux qui ont eu la chance de vivre une expérience qui ressemble à une commission d'initiative parlementaire, même si à l'origine elle n'est pas d'initiative parlementaire, c'est-à-dire une commission spéciale, se rendent compte que le genre de débats qui se faisaient à l'intérieur d'une telle commission ne sont pas les mêmes. Par la force des choses et par l'implication même des parlementaires, ils ne peuvent pas être les mêmes que ceux auxquels nous sommes habitués lorsqu'on siège de façon traditionnelle aux commissions parlementaires telles qu'on les connaît.

Évidemment, j'ai retenu ce matin, des commentaires qui ont été faits en particulier par les députés de l'Opposition, qu'il y avait une question de forme qu'on pourrait distinguer, de trois types. D'abord, sur la façon dont cela a été amené ici en commission de l'Assemblée nationale, je dois vous dire, M. le Président, que si on n'avait pas eu ce document de travail devant nous, ce matin, dans le cadre de l'étude préalable que j'avait faite du projet de loi 90, je m'étais bien promis de ramener un certain nombre des recommandations qui étaient contenues dans le rapport Vaugeois ou encore dans le rapport de la commission spéciale sur la fonction publique ou encore dans les discussions qui avaient eu lieu dans les sous-commissions. Donc, de toute façon, on aurait été amenés pendant les débats sur le projet de loi 90, article par article à rediscuter de réforme parlementaire. J'aime autant que cela soit clair et qu'on l'ait devant nous. Je retiens, cependant, qu'il aurait été préférable, pour ménager toutes les susceptibilités et aussi peut-être pour donner une orientation plus parlementaire à ces discussions que cela origine de la présidence de l'Assemblée nationale.

Par ailleurs, je trouve que, si on perd trop de temps à discuter de ces questions de forme et de présentation, on risque fort de s'éloigner de la question de contenu. Depuis 1976, M. le Président, j'attends une réforme parlementaire. Depuis 1976, j'attends des mécanismes qui vont permettre aux parlementaires de prendre enfin le pouvoir ou une forme de pouvoir. J'ai donc faim, j'ai besoin de manger et je trouverais dommage qu'à cause d'une question de forme on passe à côté du contenu.

D'ailleurs, les questions qu'on a à se poser, d'après moi, ce n'est pas tellement: Est-ce que, dans les éléments qui nous sont apportés ce matin, l'Opposition trouve son compte, est-ce que le gouvernement y trouve son compte ou est-ce que les ministériels y trouvent leur compte? Plusieurs hypothèses ont été avancées. Il y a des méchantes langues qui disaient: Bon! c'est peut-être un projet de réforme parlementaire qui a été amené par des députés ministériels parce qu'ils se voient déjà dans l'Opposition et peut-être que les députés de l'Opposition ne voudront pas le prendre parce qu'ils se voient déjà au pouvoir. On pourrait faire toutes sortes d'évaluations là-dessus. Il faudrait plutôt se poser la question suivante: Est-ce que le Parlement y trouve son compte et est-ce que les travaux parlementaires y trouvent leur compte? Si on répond à cette question de façon positive, on peut alors commencer à discuter du détail.

Un autre argument qui a été soulevé ce matin, c'est la trop grande précision du document qui nous est présenté. Une très courte expérience des travaux parlementaires m'amène à comprendre qu'il est beaucoup plus facile d'enlever des choses dans un projet que d'en ajouter en commission parlementaire. Dans ce sens-là, non seulement cela ne me choque pas que le projet qui est devant nous soit très précis; cela me rassure parce qu'on peut toujours enlever des choses, on peut toujours les modifier. Mais il aurait été beaucoup plus difficile - j'en suis convaincu - d'arriver à un résultat identique s'il avait fallu, au cours de nos discussions, en ajouter constamment.

En terminant, M. le Président, je voudrais souligner que, ce matin, sans en faire de proposition formelle puisque je n'en ai pas le droit, j'ai quand même soulevé un

certain nombre de problèmes que je voyais absents, y compris du document qui nous a été présenté. Je me pose des questions et si je n'ai pas de réponses à ce stade-ci, je vous indique tout de suite que cela viendra à un autre moment. Je trouve étrange que cette réforme ne s'accompagne pas d'une autre recommandation qu'on retrouvait dans le rapport Vaugeois qui était l'organisation des travaux parlementaires. Il y avait une proposition, à mon sens, fort intéressante dans le document Vaugeois sur la façon d'organiser les travaux parlementaires, c'est-à-dire une conférence des présidents avec la participation du leader du gouvernement, du leader de l'Opposition, des whips, pour autant que je me souvienne, qui assurait, là aussi, non seulement la priorité pour le gouvernement quant à la législation qu'il veut faire adopter, mais aussi un souci de faire en sorte que les projets mis de l'avant par les parlementaires eux-mêmes puissent être discutés à l'Assemblée nationale. Je n'ai pas beaucoup de réponses, non plus.

On nous a, dans la réforme, expliqué le nouveau rôle des présidents de commissions et l'introduction de la notion de vice-président, mais on a eu peu de précisions, sinon pas du tout, quant aux adjoints parlementaires. Je ne pense pas seulement à leur nombre, mais aussi à leur rôle. Il y a aussi toute une discussion à faire sur le rôle d'un adjoint parlementaire et est-ce que, en termes de réforme, ce n'est pas aussi le moment d'en discuter?

Quant à la législation déléguée, il y a eu des commentaires ce matin. Quant à moi, une première étape de commission d'étude avec mandat ad hoc et limité dans le temps pour nous permettre d'en arriver à quelque chose de positif, cela ne m'effraie pas. La seule chose que je ne voudrais pas qu'on laisse de côté, ce sont les recommandations qui ont déjà été faites par d'autres groupes de travail. Je réfère en particulier à une recommandation de la commission spéciale de la fonction publique qui avait trait, par exemple, à la notion de couperet législatif. Par exemple, en termes de réglementation, à une époque où on parle encore davantage de déréglementation, est-ce qu'on ne devrait pas envisager la procédure qui voudrait qu'après deux ou trois ans, de façon automatique, si on ne l'a pas révisé, un règlement devienne caduc? J'espérerais que, si on donne un mandat à une commission ad hoc de l'Assemblée nationale, ce mandat comprenne l'étude de recommandations déjà faites par des groupes qui ont déjà travaillé sur des questions identiques.

Finalement, il me semble que tout cela amène aussi la question des moyens. On peut difficilement parler d'une façon nouvelle de travailler, on peut difficilement parler d'une augmentation non seulement de la quantité, mais de la qualité du travail des parlementaires, sans nécessairement vouloir déboucher sur les moyens qui sont à leur disposition. Par exemple, est-ce que les commissions nouvelles qu'on veut mettre de l'avant seront équipées d'un personnel? Est-ce qu'elles auront les ressources pour effectuer leur travail? De quelle façon cela se fera-t-il?

Vous savez, M. le Président, que dans l'expérience vécue l'an dernier les deux commissions spéciales ont eu énormément de difficultés, justement, à cause de l'imprécision qu'il y avait dans le règlement. Est-ce qu'on ne devrait pas profiter du moment où on met de l'avant une réforme pour prévoir ces choses-là soit dans la loi, soit plutôt peut-être dans le règlement?

Cela me pose aussi, avant de commencer nos travaux, une question non seulement d'échéance, à savoir de quelle façon on va procéder pour en arriver à l'adoption d'une loi de l'Assemblée nationale, mais aussi à quel moment vais-je avoir le portrait complet?

Ce matin, le leader du gouvernement a annoncé qu'il manquait un bout à sa réforme. Il me semble qu'avant d'amorcer des discussions sous une forme ou sous une autre j'insisterais pour avoir le portrait complet. Et le portrait qui manque, c'est celui de toute la question des conditions de travail, des salaires et du fonds de retraite des députés. Je trouve que c'est une question qu'on ne peut pas balayer, qu'il faudra traiter en même temps ou simultanément pour, justement, ne pas se faire reprocher ultérieurement par les citoyens ce qui était implicitement compris ce matin dans un certain nombre de remarques du député de Gatineau.

Autrement dit, est-ce qu'on fait des réformes pour contourner quelque chose qu'on ne peut pas faire autrement ou est-ce qu'on fait une réforme justifiée, en sachant fort bien quelle est l'autre partie du portrait? Je pense qu'il ne serait pas malhonnête, mais hasardeux de commencer des discussions sans avoir un portrait complet de la situation, c'est-à-dire le bout qui nous manque et peut-être éventuellement aussi les répercussions que pourraient avoir sur notre règlement de l'Assemblée nationale les nouvelles propositions et celles qui étaient déjà contenues dans la loi 90.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci. M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Jacques Brassard

M. Brassard: Merci, M. le Président. Je serai assez bref dans mes remarques générales; je pense que pas mal de choses ont été dites de part et d'autre. Je souligne, cependant, que jusqu'à maintenant, en tout

cas, la principale inquiétude de l'Opposition porte sur la démarche qui a été privilégiée de ce côté-ci. On nous dit: Vous n'avez pas choisi la bonne façon. À ce sujet, je me pose un certain nombre de questions. Quelle aurait été la vraie bonne façon de procéder? Aurait-il fallu continuer, poursuivre ou refaire des missions à l'étranger, comme il s'en est fait dans le passé? Ce matin, on nous remettait un rapport de mission concernant le rôle et les pouvoirs des commissions parlementaires à Londres, Paris et Bruxelles, en janvier 1980. Je ne l'ai pas lu au complet, mais je suis allé aux recommandations. La recommandation majeure de ce rapport était que le groupe proposait de faire une réforme parlementaire. Il ne proposait pas une réforme parlementaire, il proposait d'en faire une. Si on continue dans la voie des missions, on ne sera pas tellement avancé; je ne pense pas que ce soit la bonne voie pour aboutir concrètement et dans des délais relativement brefs à une véritable réforme, en profondeur, du Parlement, même si c'est très agréable, c'est évident, et sans doute très instructif de participer à des missions à l'étranger, j'en conviens.

La bonne voie aurait-elle été de continuer à réunir la sous-commission qui s'est déjà réunie à quelques reprises? Il faut dire que cette sous-commission a dégagé un certain nombre d'éléments intéressants de réforme, de changement, mais je ne pense pas qu'on puisse dire qu'elle ait proposé un projet cohérent, articulé, global de réforme parlementaire. On est très loin de cela avec les travaux de la sous-commission. Donc, je pense que les autres voies possibles, qui ont été soulignées ce matin par le leader de l'Opposition - il a fait référence à des missions, il a fait référence à la sous-commission - ne nous conduisaient pas - en tout cas, ce n'était pas visible - à une véritable réforme du Parlement. C'est pourquoi, du côté ministériel, du côté du conseil des députés du Parti québécois, faisant suite au rapport Vaugeois, on a pris des décisions très claires au niveau du conseil des députés du Parti québécois et, en particulier, on avait décidé - je pense que c'était unanime - de s'entendre d'abord entre nous, parce que je me souviens, quand le rapport Vaugeois a été déposé pour la première fois devant le caucus ministériel, qu'il était loin de faire l'unanimité. Je ne pense pas que ce soit révéler un secret du caucus que de dire cela. Il y avait des réserves chez plusieurs et il était loin de faire consensus. Il fallait donc, d'abord, préalablement, s'entendre entre nous.

Il y a une autre constatation qui était aussi claire chez les députés ministériels, à cette époque; c'était qu'il est impensable de faire aboutir une réforme du Parlement sans la participation active de l'Opposition. C'est pour ça que l'inquiétude exprimée ce matin par certains députés de l'Opposition ne m'apparaît pas justifiée puisque ce projet de réforme n'en est pas à son étape finale, même s'il y a eu des étapes qui ont été franchies préalablement. Il n'en est pas à son étape finale. Il est loin d'en être à son étape finale. Il a encore bien des étapes à franchir et c'est, évidemment, à ce moment que la participation de l'Opposition est tout à fait et même nécessairement requise. C'est donc dans cette voie, c'est par ce biais, c'est en arrivant, de notre côté, avec un projet précis, détaillé, cohérent, articulé de réforme parlementaire qu'on a cru que les choses pouvaient véritablement avancer. (15 h 30)

Je me posais la question, d'ailleurs, en écoutant certains intervenants de l'Opposition, ce matin, et je me demandais une chose. Si ce matin, le leader du gouvernement était arrivé avec des principes, uniquement des beaux principes, comme on a pu le voir sur un des cartons, des principes généraux seulement, je me demande quelle aurait été la réaction des députés de l'Opposition. J'ai l'impression qu'on nous aurait dit: Mettez un peu de chair autour de ces beaux principes, autour de ce squelette. Précisez, détaillez, explicitez davantage. Vous n'êtes pas prêts à venir nous rencontrer. J'ai l'impression que cela aurait été la réaction de plusieurs députés de l'Opposition. Au contraire, on se présente avec un projet précis et détaillé de réforme parlementaire. Il nous apparaît évident que l'Opposition doit participer à la réforme entreprise et la présidence aussi. On s'est inquiété ce matin de l'absence de la présidence dans le processus de réforme. Je pense qu'à partir de maintenant la présidence se doit de participer au processus de réforme, de même que l'Opposition.

Il s'agit maintenant de savoir comment on va, concrètement, engager le dialogue et la discussion entre parlementaires de diverses formations. Ce matin, dans son introduction, le leader de l'Opposition a lancé l'idée d'une sous-commission de la commission de l'Assemblée nationale qui pourrait entreprendre la discussion sur le projet présenté par le leader du gouvernement et élaboré par un comité du conseil des députés ministériels. Je pense que c'est une idée qu'il faut retenir - et non seulement il faut la retenir, mais s'entendre là-dessus - parce qu'on peut bien, pendant quelques jours encore, discuter en commission de l'Assemblée nationale, comme on le fait depuis ce matin, mais je ne pense pas qu'on puisse aboutir à des consensus très précis sur le projet de réforme qui est devant nous. Il faut, je pense, qu'un groupe plus restreint ou une sous-commission entame des discussions et essaie, justement, de dégager des consensus entre diverses formations

politiques. C'est aussi le moment, je pense, de faire participer la présidence, d'impliquer la présidence.

Motion pour déférer

le projet de réforme

à une sous-commission

C'est à cette fin, M. le Président, que j'aurais une motion à présenter à cette commission et j'aimerais qu'on la distribue. Cette motion aurait pour effet, à mon sens, de faire avancer les choses et de vraiment faire en sorte qu'à partir de maintenant la réforme soit la responsabilité de toutes les formations politiques en présence à l'Assemblée nationale. Elle se lit comme suit: "Que le projet de réforme parlementaire proposé par le leader du gouvernement - à ce moment, on part d'une base bien précise; il ne s'agit pas de discuter de principes, mais on a à discuter d'un projet bien précis - sauf en ce qui concerne, cependant, la commission d'étude sur le contrôle parlementaire de la législation déléguée qui devra faire l'objet plutôt d'une motion à l'Assemblée nationale, soit déféré à une sous-commission de la commission de l'Assemblée nationale pour étude et recommandations; qu'elle soit présidée par le président de l'Assemblée nationale - je pense qu'alors le président entre en scène et jouera un rôle actif et important - et qu'elle fasse rapport au plus tard le 15 février".

Je pense qu'il faut limiter ça dans le temps aussi, parce qu'il ne s'agit pas de faire traîner les choses encore des mois et des années, mais il faut fixer une date bien précise à la remise du rapport pour que l'Assemblée nationale puisse ensuite être saisie d'un certain nombre de recommandations et de modifications au règlement. Oui, il est peut-être bon de préciser en disant que "cette sous-commission" soit présidée par le président de l'Assemblée nationale, et qu'elle fasse rapport au plus tard le 15 février.

Voilà la motion que j'avais à faire, M. le Président. Je pense que ça rejoint une idée qui avait été exprimée par le leader de l'Opposition et je pense que c'est une bonne façon de faire avancer efficacement les choses en ce qui a trait à la réforme parlementaire.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Motion déclarée recevable. M. le député de Dubuc.

M. Desbiens: M. le Président, est-ce que ça signifie qu'on doive discuter de la motion en cours uniquement?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Oui.

M. Desbiens: Alors, ce que j'avais à exprimer de façon générale, je trouverai un autre moyen de l'exprimer. J'imagine qu'il y aura un projet de loi qui viendra devant l'Assemblée nationale.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À moins qu'il n'y ait consentement des membres de l'Opposition.

M. Lalonde: Oui, consentement. D'ailleurs, s'il y en a d'autres qui veulent s'exprimer dans les remarques générales.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Dubuc.

M. Hubert Desbiens

M. Desbiens: II y a un de nos collègues qui se demandait, au cours de la journée, si ça va servir les intérêts des députés du gouvernement. Est-ce que ça va servir le gouvernement lui-même? Est-ce que l'Opposition va y trouver son compte? Est-ce que les parlementaires vont aussi y trouver leur compte? J'ajouterais surtout: Est-ce que la population du Québec va y trouver son compte?

Quand le citoyen Hubert Desbiens a pensé à se présenter comme député à l'Assemblée nationale pour représenter ses concitoyens, c'est une des questions qu'on se posait et des idées qu'on avait derrière la tête. Je ne sais pas si c'est la même chose pour tout le monde, mais, moi, je trouvais que c'était un poste fort important que de venir siéger à l'Assemblée nationale, parce que je croyais que j'aurais à débattre de projets de loi, des projets de règlement, de questions budgétaires ou financières qui avaient des retombées directement sur les 30 000 ou 35 000 citoyens et citoyennes que je représente à l'Assemblée nationale, et dont j'aurais à refléter très exactement l'opinion.

Une des premières expressions qui m'ont frappé lors des débats, c'est d'entendre, par exemple, "jeu parlementaire". Ma première réaction a été de dire que je ne m'attendais pas à venir ici pour jouer; je m'attendais plutôt à venir travailler pour l'ensemble des citoyens. À la longue, et assez rapidement, je me suis rendu compte que c'était véritablement un jeu. Je trouve hypocrite, au fond, de faire croire à la population que nous avons des pouvoirs. Les citoyens ont exactement la même réaction. Même si cela peut flatter notre ego, lorsqu'ils nous rencontrent, en tout cas, ils ont toujours l'impression que nous avons des pouvoirs. Je me suis vite rendu compte que nous en étions loin et que, finalement, un député à l'Assemblée nationale, c'est plutôt une parure, un pion sur l'échiquier. Il me semble que ce n'est pas cela vraiment la

démocratie. Ce n'est pas comme cela que je la vois. Comme le disait le whip de l'Opposition ce matin, on pourrait tous ressortir des tas de beaux discours - je pourrais prendre le sien et le répéter - il y en a plusieurs qui ont été prononcés sur le sujet depuis bien des années et ils concourent tous au même objectif. C'est pour cette raison que j'ai été heureux et presque honoré de participer au comité de mon parti pour tenter d'améliorer une situation et faire en sorte qu'il y ait un meilleur équilibre entre les pouvoirs des hommes publics élus par la population.

Il y a des questions de forme qui ont été soulevées avec lesquelles je pourrais être d'accord jusqu'à un certain point. Je me dis, au fond, et peut-être que je rejoins la motion en même temps. On a un document qui est le fruit du travail d'un comité, mais ce comité n'a pas inventé les boutons à quatre trous. Il est parti de travaux effectués par d'autres parlementaires avant nous, par de nos collègues ici présents, pour en arriver à une proposition concrète. C'est cette proposition, comme le veut la motion, qu'on doit étudier au plus tôt ensemble pour se donner un nouveau mode de fonctionnement qui réponde mieux à cette notion que j'ai de la démocratie. Merci.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Fernand Lalonde

M. Lalonde: M. le Président, je voulais réagir à quelques-unes des remarques qui ont été faites lorsque le whip du gouvernement a fait sa motion. Il se demandait, avant de faire sa motion, quelle aurait été la bonne façon de procéder puisque l'Opposition n'est pas d'accord sur la façon avec laquelle le gouvernement procède actuellement. Est-ce que ce sont les missions? Non. Je n'ai jamais suggéré qu'on doive retourner en mission. Je sais qu'on a eu plusieurs missions. Je pense que le député, qui avait été spécifiquement nommé par le premier ministre, a lui-même fait sa tournée. Je pense que nous avons vu tout ce que nous avions à voir à l'extérieur, il est temps de procéder.

Une fois le consensus atteint du côté ministériel, il aurait été très simple de former un comité - on se parle tous les jours - et peut-être même d'inviter le président à convoquer la sous-commission qui a été convoquée en 1980 et 1981, et d'arriver à la sous-commission avec des propositions plus précises que celles faites lors des deux dernières séances de la sous-commission de l'Assemblée nationale. Par exemple, j'ai le rapport du président de l'Assemblée nationale du 17 septembre 1981 sur les séances des 20, 21, 22 août 1980, ainsi que des 30 et 31 août et du 1er septembre 1981. À cette sous-commission, étant donné qu'on ne siégeait pas pour adopter les articles, ceux qui étaient là se souviennent qu'on les acceptait. On disait: Accepté. C'est à peu près le consensus de la sous-commission.

L'avant-projet de loi disait, à l'article 3: "L'Assemblée a un pouvoir de surveillance sur tout acte de l'exécutif". On l'a modifié, on a dit: "L'Assemblée a un pouvoir de surveillance sur tout acte du gouvernement et des organismes publics - on voulaitétendre cela un peu plus loin - et elle l'exerce conformément aux règles qu'elle adopte." De là l'importance de revenir à la sous-commission de l'Assemblée nationale pour voir quelles sont ces règles. C'est ce qui est contenu dans le projet.

Un peu plus loin, à l'article 13, la proposition était: "L'Assemblée nationale peut constituer une ou plusieurs commissions, - à peu près 99% du contenu du projet qui nous est proposé aujourd'hui - composées de députés, chargées d'étudier un projet de loi, les crédits et toute question relevant de la compétence qui leur est attribuée par l'Assemblée". On l'a changé ça; il y a eu consensus. Le député de Sainte-Marie a assisté à la dernière série, le député de Portneuf, le député de Saint-Louis. On l'a changé et on a dit: "L'Assemblée nationale peut constituer une ou plusieurs commissions - là, il n'y a pas de changement - composées de députés - il n'y a pas de changement -chargées d'examiner un projet de loi - je ne sais pas pourquoi on a changé le mot "étudier" pour "examiner" - un règlement, les crédits et toute question relevant de la compétence qu'elle leur attribue - et là on a ajouté - et d'exécuter tout mandat qu'elle leur confie, notamment à l'égard du pouvoir de surveillance des organismes publics prévu à l'article 3." Mais les crédits sont encore là et je ne sache pas qu'une démarche ait été faite - en ce qui nous concerne on n'en a pas connu - modifiant la décision de la sous-commission de l'Assemblée nationale. J'imagine qu'on n'était pas là seulement pour jouer au golf; quand on décidait cela, c'était une volonté politique exprimée unanimement par tous les gens autour de la table. Jamais on ne nous a dit - c'est la première fois que je l'entends depuis 96 heures, comme le disait le député de Portneuf - que les députés n'auraient plus le droit d'exercer ce devoir de surveillance des dépenses du gouvernement. (15 h 45)

Le Parlement y trouve-t-il son compte demandait, je pense, le député de Sainte-Marie. On a dit: Bon! est-ce que c'est l'Opposition qui y trouve son compte, est-ce que c'est le parti ministériel? On a demandé si le Québec y trouvait son compte aussi. Le Parlement y trouve-t-il son compte? Non, si

on enlève le pouvoir des députés d'examiner les dépenses de tous les ministres dans tous les programmes au moins une fois par année et pendant tout le temps nécessaire. C'est là, je pense, que le gouvernement s'est mis les pieds dans les plats parce qu'il a pris un pari qu'il vient de perdre. Il était, d'ailleurs, fort périlleux, ce pari. Il fallait, en effet, être fort présomptueux pour présumer que les députés de l'Opposition - cela me surprend que les députés ministériels n'aient pas fait d'objection; il y en a peut-être eu à vos caucus - accepteraient de renoncer à leur droit, qui est un devoir, de poser des questions tous les ans à tous les ministres sur toutes les dépenses.

Je ne veux pas présumer ou avoir une attitude pessimiste quant à la réforme, mais en lisant assez attentivement, par exemple, le projet de la commission des finances publiques - ne parlons pas de la commission des engagements financiers; elle existe déjà, elle fait une autre "job", elle complète ce travail - je ne vois pas comment cette commission, qui va se réunir deux fois tous les trois mois avec un mandat d'étudier la situation budgétaire du gouvernement - on parle de grandes politiques budgétaires, des choix budgétaires du gouvernement, de son programme de financement pour l'année en cours, des incidences des choix et orientations retenus lors du budget et du budget supplémentaire adoptés par l'Assemblée - puisse remplacer l'étude des crédits. Ce n'est pas par la commission des engagements financiers qu'on le fera non plus, ni par la commission du Vérificateur général, parce que le Vérificateur général son mandat général, sa capacité c'est de pouvoir réellement donner le tableau exact de la situation financière. Est-ce qu'il aura le pouvoir qu'il a ailleurs, mais qu'il n'a pas ici, de calculer, d'évaluer l'efficience, l'imputabilité? Ce sont toutes ces questions qu'on va se poser quand on va parler au Vérificateur général qui, j'en suis convaincu, a grand-hâte de nous rencontrer lui aussi pour savoir s'il aura des pouvoirs additionnels. On ne pourra pas demander au Vérificateur général ou à un ministre de venir expliquer comment il se fait que le Vérificateur général a trouvé que cela allait mal dans son ministère ou dans une direction générale quelconque. On ne pourra pas examiner en long et en large les politiques, les raisons pour lesquelles le ministre a changé tel énoncé de politique et quelle est son intention en ce qui concerne tels programmes. Il y a une augmentation ou une diminution de crédits, pourquoi? Et là, on a tout ce qui arrive lors de l'étude des crédits, qui, à mon sens, est une institution essentielle dans un Parlement.

Je lisais encore hier soir - le député de Trois-Rivières me le pardonnera - son rapport. Je ne suis pas d'accord avec un certain nombre de considérations au début mais il a étudié assez bien - il le rend bien le développement du gouvernement responsable, comment cela est-il arrivé. Cela a été le résultat de batailles sérieuses. Comment le Parlement exerce-t-il son pouvoir? Comment un gouvernement est-il responsable? Envers qui? Au Parlement, pas seulement à la commission des finances publiques. C'est important d'étudier les grands choix budgétaires. Pourquoi le gouvernement investit-il davantage, met-il plus de ressources dans l'économie que dans les mesures sociales cette année? Enfin, si on a des budgets de cinq ans, c'est encore mieux. C'est très bien, mais la responsabilité, c'est pour toutes les dépenses. Cela a commencé de cette façon, le gouvernement responsable. C'est de répondre à des élus et non pas à Londres, à Westminster. C'est de répondre ici à des gens qui sont élus.

Remarquez que ce devoir-là est exercé de façon inégale d'un député à l'autre. Il y en a des deux côtés qui n'aiment pas ça. Je parle de l'étude des crédits. C'est très astreignant et j'imagine que c'est encore moins agréable de la part d'un député - je voulais dire plus plate, mais ce n'est pas parlementaire - ministériel à qui le whip vient dire: Écoute, aujourd'hui, tu vas passer ton temps à la commission parlementaire pour étudier les crédits de l'Éducation. Il a sûrement quelques questions à poser, mais il sait que c'est surtout l'Opposition qui pose les questions.

Je me souviens - je ne sais pas s'il y a des députés présents ici qui étaient là - de la dernière étude des crédits du ministère de l'Éducation. Plusieurs députés de l'Opposition ont pris un certain nombre de minutes, dix, quinze ou même trente pour poser des questions - ils avaient des préoccupations tout à fait non partisanes - au ministre de l'Éducation: Pourquoi telle ou telle chose dans leur comté, etc., ou, enfin, des politiques générales. Mais dans l'ensemble, c'est long. Ils attendent que cela finisse.

Je ne pense pas qu'on doive se laisser impressionner par ces sentiments, cette frustration d'un certain nombre de députés qui croient être là pour faire le nombre, et dire que l'exercice lui-même est inutile et qu'on doive s'en défaire. C'est l'objection de fond que nous avons à l'égard de la proposition. L'objection de forme est plus que de la formalité. On veut atteindre un objectif essentiel et c'est convenu d'un côté comme de l'autre, l'unanimité et on prend les moyens.

C'est dans cet esprit-là que j'accueille avec plaisir la motion du whip en chef du gouvernement, à savoir que le tout soit déféré au forum où cela aurait dû commencer. Je vous dis tout de suite que je comprends que, lorsqu'on dit que cette sous-

commission soit présidée par le president de l'Assemblée nationale, je ne vois pas le président simplement assis pour donner des droits de parole. Je vois le président proposer aux membres de la sous-commission un calendrier de travail et une participation active aux délibérations, comme il l'a fait, d'ailleurs, l'an dernier aux trois jours de séance que nous avons tenus en août et en septembre.

En ce qui concerne le 15 février, tant mieux si on est prêt à faire rapport à cette date. Si on n'est pas prêt, on demandera un prolongement du mandat, mais on doit présumer que trois mois et demi nous permettraient de le faire. Dans l'évolution des choses, on est assez avancé, d'un côté et de l'autre de la table, sur certaines réformes à apporter. Je pense qu'on devrait pouvoir faire notre rapport avant ou au plus tard le 15 février. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci.

M. le leader du gouvernement.

M. Jean-François Bertrand

M. Bertrand: M. le Président, je voudrais enchaîner sur les propos du député de Marguerite-Bourgeoys et leader de l'Opposition et lui dire que je suis très favorable à la proposition soumise par le député de Lac-Saint-Jean et whip en chef du parti ministériel. De toute façon, je crois que, si la proposition n'était pas venue de notre côté, elle serait probablement venue du côté de l'Opposition. Peu importe le côté d'où elle vienne, dans le fond, je pense que c'est l'objectif qu'on cherche à atteindre qui compte.

M. Lalonde: C'est très bien que cela vienne de vous.

M. Bertrand: Je ne suis pas fâché que cela vienne de nous.

M. Lalonde: C'est très bien, c'est vrai. Cela ne veut pas dire que c'est un aveu, mais...

M. Bertrand: Non, non. Je vais vous dire pourquoi. De toute façon, il était évident que, si nous voulions faire avancer le dossier de la réforme parlementaire, ce n'est pas en commission de l'Assemblée nationale où nous sommes très nombreux et où le cadre est beaucoup plus formel qu'en sous-commission que nous pouvons discuter, point par point, de chacun des éléments de la réforme parlementaire.

Je dirai aussi au député de Marguerite-Bourgeoys que, lors d'une conférence de presse que nous avons tenue à 14 heures, on m'a posé des questions relativement à la façon dont on s'y était pris pour présenter ce projet de réforme parlementaire. Je n'ai pas devant moi le texte intégral de la conférence de presse, mais je sais qu'il y avait un émissaire de votre formation politique qui était là et qui peut témoigner de la véracité des propos que je vais tenir.

M. Lalonde: Un émissaire. Est-ce péjoratif?

M. Bertrand: Non, c'est parlementaire.

M. Lalonde: C'est parlementaire?

M. Bertrand: Oui.

Une voix: Bouc, c'est plutôt...

Des voix: Ah! Ah! Ah!

M. Bertrand: Les journalistes m'ont effectivement demandé pourquoi nous avions décidé de fonctionner comme cela et qu'est-ce qu'on pensait de la réaction de l'Opposition ce matin. J'ai dit à peu près ceci - j'aimerais avoir le texte, mais c'est à peu près ce que j'ai dit - que je trouvais légitime la réaction de l'Opposition telle qu'exprimée ce matin, que je la comprenais dans le sens que l'Opposition voulait indiquer qu'elle souhaitait, à chacune des étapes du processus menant à la réforme parlementaire finale, y être associée et y participer pleinement. En d'autres mots, elle voulait recevoir des suggestions du parti ministériel, mais aussi pouvoir en faire de son cru, amender nos propositions, proposer des alternatives, proposer des hypothèses sur lesquelles nous ne nous sommes peut-être même pas arrêtés; autrement dit, se donner le plus de possibilités possible pour arriver, d'ici au 15 février, à un projet de réforme parlementaire qui soit véritablement le fruit de délibérations où tout le monde aurait eu le sentiment d'être entendu, où tout le monde aurait eu le sentiment d'apporter sa contribution et cela, indépendamment de la formation politique à laquelle nous appartenons.

Je veux indiquer au leader de l'Opposition que, si nous avons décidé de procéder comme nous l'avons fait, c'est que, premièrement, nous avons très bien senti, dès la publication du rapport Vaugeois, en janvier 1982, que ni de ce côté-ci de la table, ni de l'autre il n'y avait véritablement une sensibilité particulière pour aller de l'avant et donner suite aux recommandations qui étaient faites dans le rapport Vaugeois. Le député de Trois-Rivières doit prendre la parole après moi, si j'ai bien lu votre feuille, M. le Président. Il pourra dire ce qu'il pense de tout cela et comment, avec le recul du temps, il apprécie la façon dont le conseil des députés et le gouvernement se sont

acquittés de leurs responsabilités. Je peux vraiment dire au député de Marguerite-Bourgeoys que l'intention du gouvernement n'était certainement pas, loin de là, d'arriver avec un projet de réforme parlementaire qui soit du type crois ou meurt, sinon une réforme parlementaire, il n'y en aura pas. Au contraire, il fallait faire quelque chose.

Le conseil des députés, à une séance du mois d'avril dernier, a reçu du leader du gouvernement un premier rapport qui était très succinct, qui comportait neuf points. C'était ramassé sur une feuille 8 1/2 x 11, les députés se le rappellent. Cinq de ces neuf points ont été incorporés au projet de loi no 90: les points sur le quorum, sur la création du bureau de l'Assemblée nationale, sur les fonctions de l'adjoint parlementaire, sur la création du poste de leader parlementaire adjoint et sur la télédiffusion des débats. Quatre autres points avaient été laissés de côté au conseil des députés parce que, justement, c'étaient des points sur lesquels on n'avait pas consensus. (16 heures)

En plus, les députés disaient: S'il n'y a que ces cinq points dans le projet de loi no 90, c'est mince comme réforme [parlementaire. À partir de là, je leur ai dit: Écoutez, si on veut vraiment avoir une réforme parlementaire, il faut qu'on se mette au travail. Là, le conseil des députés a décidé de créer un comité spécial, présidé par M. de Bellefeuille, député de Deux-Montagnes, pour que nous fassions de notre côté notre réflexion sur tout le dossier de la réforme parlementaire, et ce comité spécial a fait son travail, particulièrement durant les semaines du mois d'août et du mois de septembre. Là, on voyait bien que les délais étaient très courts, parce que la commission parlementaire des 19, 20, 21 octobre s'en venait. Moi, j'ai dit aux gens du comité spécial: II va falloir que vous vous dépêchiez de produire un rapport pour que je puisse en discuter au Conseil des ministres et voir quelle est la réaction du Conseil des ministres. Effectivement, le 30 septembre, lors de la dernière réunion, le comité spécial a donné son approbation à un projet de réforme.

Ce projet, je l'ai, dans ses grandes lignes, soumis au Conseil des ministres du 6 octobre. À ce moment, il a été entériné, à toutes fins utiles, à peu près à 95%. Il y avait quelques petits points sur lesquels on ne s'entendait pas tout à fait. Le président du comité spécial a fait rapport au caucus des députés le 12 octobre dernier, mardi soir dernier. Sur place, j'ai indiqué quelles étaient les réserves qu'avait le Conseil des ministres sur quelques-uns des aspects proposés par le comité spécial. Dès le lendemain, soit le mercredi 13 octobre, je soumettais au Conseil des ministres un certain nombre de modifications et dans les heures qui ont suivi on s'est vite rendu compte que finalement il y avait consensus, unanimité entre le conseil des députés et le Conseil des ministres sur le projet qui est aujourd'hui devant les membres de la commission de l'Assemblée nationale.

On a travaillé dans ce contexte. Si, en avril ou mai derniers, on avait décidé de créer un nouveau comité mixte constitué de parlementaires venant à la fois de l'Opposition et du parti ministériel, moi, je pense - je peux me tromper, mais c'est mon opinion personnelle - que nous serions encore en train de fixer le calendrier des réunions à venir pour la réforme parlementaire, pour la raison suivante, et qui peut se comprendre, c'est qu'au moment où on se parle il y a des questions qui préoccupent la population et qui ne sont pas liées très directement à la réforme parlementaire. En d'autres mots, s'il y a une période où le dossier de la réforme parlementaire, pour toutes sortes de bonnes raisons, aurait pu être enterré, mis sur les tablettes ou, en tout cas, n'aurait pas sollicité l'attention des parlementaires, c'est bien depuis le printemps dernier, au moment où nous avons à traverser une crise économique, à trouver des solutions pour régler cette crise économique, en d'autres mots à mettre la priorité sur des questions sociales, des questions économiques et, entre autres, la négociation des conventions collectives dans les secteurs public et parapublic.

Donc, nous avons fait notre travail de notre côté du mieux possible. Nous avons fait consensus sur un projet de réforme parlementaire et il était clair, dans mon esprit - je l'ai dit au leader de l'Opposition - qu'à partir du moment où le conseil des députés et le Conseil des ministres s'entendaient sur un projet de réforme parlementaire concret, précis, cohérent, articulé, détaillé il fallait absolument que nous remettions l'ensemble de notre réflexion et de notre projet aux parlementaires et que le travail, à partir de maintenant, s'effectue dans un cadre différent où le président de l'Assemblée nationale deviendrait, à toutes fins utiles, l'animateur de la sous-commission de la commission de l'Assemblée nationale. Il ne serait pas simplement là pour faire respecter le règlement, mais aussi pour intervenir, pour participer, pour suggérer, pour apporter, en d'autres mots, sa contribution de président, au nom même de l'institution qu'il représente, aux travaux de la sous-commission, de telle sorte que la réforme parlementaire que nous soumettrons à l'Assemblée nationale quelque part en 1983 soit une réforme parlementaire à laquelle il ait, lui aussi, pleinement participé et à laquelle aussi aient pleinement participé nos collègues de l'Opposition qui, tout en tenant compte des opinions qu'ils ont exprimées ce matin relativement à la forme que nous

avons retenue dans la préparation de ce projet, ont tout de même, dans l'ensemble, quant à moi, émis un certain nombre de remarques qui m'apparaissent très positives et très constructives.

Il y a, bien sûr, toute cette question de l'étude des crédits sur laquelle le député de Marguerite-Bourgeoys est revenu à quelques occasions. Nous n'étions pas nai'fs au point de croire qu'un bouleversement aussi substantiel du fonctionnement des commissions telles qu'on les connaissait n'allait pas créer un certain nombre de réactions, mais nous avons la conviction que les propositions qui sont maintenant connues peuvent répondre, de façon adéquate, aux objectifs que nous partageons. Ce qui, pour moi, compte à ce moment-ci, c'est de savoir que les trois prémisses qui sont contenues dans le projet de réforme parlementaire me semblent acceptées par l'Opposition, si on ajoute une quatrième prémisse qui est celle qu'évoquait le leader de l'Opposition, à savoir qu'il faut arriver à un consensus sur le projet de réforme parlementaire.

Quant aux objectifs, je ne pense pas que l'Opposition ait indiqué, ce matin, quelque objection que ce soit. Au contraire, je pense qu'elle souscrit aux objectifs de la réforme parlementaire, c'est-à-dire l'indépendance de l'Assemblée nationale, la modernisation du fonctionnement de l'Assemblée et de ses commissions, un meilleur contrôle des finances publiques, un meilleur équilibre de nos institutions, un meilleur contrôle de l'exécutif, un meilleur contrôle de l'administration publique, etc. Tout cela m'apparaît positif. Sur cette base, on peut construire. Sur cette base, on peut progresser.

Quant aux propositions que nous avons soumises, je suis convaincu que, pour une bonne part d'entre elles (la commission du Vérificateur général, la commission des finances publiques, la commission d'étude sur la législation déléguée, la commission des organismes autonomes, la commission des lois, les commissions ad hoc, la commission de l'Assemblée nationale, la commission des engagements financiers, les commissions d'initiative parlementaire) très rapidement, on va pouvoir faire un consensus.

Tout en tenant compte des remarques -et je l'ai dit en conférence de presse - qui m'apparaissaient compréhensibles et qui ont été évoquées ce matin par le leader de l'Opposition, j'ai tenté d'expliquer pourquoi on a fonctionné comme on a fonctionné et je pense qu'en fin de compte ce dont tout le monde se félicite, c'est qu'on puisse, à partir de maintenant, travailler sur la base d'un projet de loi concret, détaillé, précis, cohérent, articulé et bonifiable, qu'on peut améliorer, qu'on peut changer, où il y aura place pour la discussion et la négociation pour les éléments qui nous permettraient d'en arriver à un consensus.

Dans ce contexte, M. le Président, en indiquant très sincèrement à l'Opposition ma volonté, comme parlementaire, avec mes collègues, de contribuer à ce que nous ayons un projet de réforme parlementaire en vigueur en 1983, et le plus tôt possible en 1983, je peux dire que je souscris entièrement à la motion du député de Lac-Saint-Jean et whip en chef du parti ministériel, que je n'ai absolument aucune objection, loin de là, à ce que le président de l'Assemblée nationale anime nos travaux et qu'à partir du moment où nous aurons, tous ensemble, dégagé tous les consensus qui nous permettront d'en arriver à une réforme parlementaire substantielle, comme c'est ma responsabilité, je parraine devant l'Assemblée nationale non seulement, bien sûr, le projet de loi no 90, Loi sur l'Assemblée nationale du Québec, mais aussi le projet de modification au règlement, puisque, essentiellement, la réforme parlementaire dont nous discutons en ce moment va s'inscrire dans le règlement de l'Assemblée nationale et c'est à ce niveau qu'il nous faudra apporter un certain nombre de modifications.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci. M. le député de Trois-Rivières.

M. Denis Vaugeois

M. Vaugeois: Merci, M. le Président. Dans le rapport qui a été souvent cité et que j'avais l'occasion de remettre aux collègues parlementaires en janvier dernier, j'avais cherché, au fond, à faire un peu la synthèse des critiques que des parlementaires avaient formulées au cours des 20 dernières années. J'ai pris six mois à lire à peu près tout ce que j'ai pu trouver, à retourner même au journal des Débats le plus souvent possible et à relever des remarques de l'époque de Jean Lesage, alors qu'on avait créé une commission Bonenfant. Les parlementaires de cette époque avaient beaucoup de critiques à faire vis-à-vis du fonctionnement de l'Assemblée nationale ou de l'Assemblée législative, comme on disait à l'époque.

Tout au long des années, des réformes ont été apportées: l'abolition du Conseil législatif, le règlement de la Chambre a changé à deux ou trois reprises. Mais on sentait que plusieurs parlementaires restaient très critiques vis-à-vis de l'institution. Encore ce matin, j'avais l'occasion de rencontrer un ancien parlementaire, le Dr Goldbloom, qui me disait: Justement, dans les jours prochains, je vais faire une conférence pour dire ce que je pense du Parlement. Des mots comme vétuste, etc., reviennent. Des parlementaires qui nous ont

quittés restent encore inquiets de l'évolution de l'institution dont nous sommes membres.

À la lumière de toutes ces critiques qui viennent de parlementaires de toutes les formations politiques, il se dégageait un certain nombre d'objectifs qui ont été rappelés depuis ce matin. Je crois que les modalités qui sont retenues dans la proposition qu'a présentée le leader du gouvernement nous permettent de nous dire: C'est une façon d'atteindre les objectifs qui se dégagent de toutes ces réflexions et critiques qui ont pu être formulées.

À ma connaissance, on n'est jamais allé aussi loin en termes de formulation de propositions et de modalités. Il y a d'autres modalités, mais là, il y en a qui se tiennent, il y en a qui sont assez complètes et, si vous me le permettez, M. le Président, qui sont même assez audacieuses.

Je peux évoquer des discussions que j'ai eues avec des gens de l'exécutif, des ministres qui sont là ou qui ne sont plus là, et qui étaient assez réticents - je le dis franchement - à certaines propositions qui sont dans la proposition gouvernementale qu'on a devant nous. L'imputabilité, ça ne réjouissait pas tout le monde. La façon pour le Parlement de s'approprier un projet de loi. On comprend maintenant que, quand un projet de loi est confié à l'Assemblée nationale, il devient la responsabilité de l'Assemblée nationale et c'est aux parlementaires de travailler sur ce projet de loi.

La législation déléguée, on s'ouvre là-dessus. Il y a longtemps qu'on en parle, il y a même eu un projet de loi soumis par un député de l'Opposition et qui est resté lettre morte. Aujourd'hui, tout ça est récupéré, est articulé, ça se tient. Mais, comme vient de le dire le leader du gouvernement, ça peut être amélioré.

Au cours des dernières semaines, on a eu l'occasion, du côté de la majorité, d'améliorer des propositions qui traînaient, propositions qui étaient venues de gauche et de droite. Je crois qu'effectivement on peut encore améliorer ça, même si, de l'avis de certains malins, on pourrait penser, à certains moments, qu'on n'est pas loin de l'Opposition; on n'y est pas encore et ça se pourrait qu'on n'ait pas tout à fait les réflexes qu'on puisse avoir quand on est vraiment député de l'Opposition.

Il y a certainement, de ce côté, en termes de responsabilité de contrôle des finances publiques, des choses qu'on peut dire quand on vit la réalité de l'Opposition, mais qui sont plus difficiles à dire quand on est du côté de la majorité.

Mais je reviens aux propos du député de Marguerite-Bourgeoys. Les critiques les plus dures que j'aie entendues et que j'aie lues sur le système actuel de défense des crédits et d'engagements financiers, etc., ont été formulées par des députés libéraux, alors qu'ils étaient d'un côté ou de l'autre de la Chambre. À cet égard, j'ai trouvé des pages extrêmement instructives, très révélatrices, qui remontent d'ailleurs à au moins une quinzaine d'années. J'ai en mémoire certains propos tenus par un ancien premier ministre libéral, M. Bourassa, également par un député qui nous a quittés récemment, Claude Forget, qui a eu des pages, d'ailleurs, admirables pour indiquer les limites de la responsabilité ministérielle et un peu le ridicule dans lequel on s'inscrit lorsqu'on joue le jeu de certaines démarches parlementaires qui nous grugent 200 heures de notre temps, pour des résultats assez minces. Je souscris aux préoccupations du député de Marguerite-Bourgeoys. Il reste à trouver ensemble les modalités qui pourraient le mieux nous permettre d'atteindre ces objectifs et de répondre à ces préoccupations. (16 h 15)

Au cours des derniers mois, on a essayé de créer ce comité mixte qui est proposé maintenant. Je pense qu'on n'a pas joué de chance, d'un côté comme de l'autre; il y a eu du va-et-vient, il y a eu des changements de personnes. En ce qui nous concerne, cela nous a donné un leader parlementaire qui est arrivé à l'aboutissement de ce cheminement. Je tiens publiquement à lui dire combien, personnellement, à titre de parlementaire, je suis content qu'on en soit arrivé là. Il y a eu des échanges de lettres auxquels j'ai participé. Je me souviens, entre autres, que l'ancien chef de l'Opposition, au moment où je recevais mon mandat du premier ministre dans des circonstances peu plaisantes, étant donné le partage des responsabilités entre l'exécutif et ce qu'on appelle le législatif, avait eu une lettre fort gentille à mon endroit. Il me disait toute l'importance qu'il attachait, comme nouveau parlementaire, comme observateur de la chose politique, à la réforme de l'institution. Il disait qu'il prenait très au sérieux le mandat qui m'était confié et qu'il avait hâte de voir où je me retrouverais.

Le chef actuel de l'Opposition, que je connais depuis fort longtemps, m'a tenu des propos semblables, disant que même s'il est un peu habitué à l'institution, il est bien conscient qu'il y a des choses à faire.

Lorsque le rapport a été prêt, je tiens à rappeler que, avant même que le premier ministre, le leader du gouvernement ou quelque ministre l'aient entre les mains, il était entre les mains des porte-parole de l'Opposition. Il était, en même temps, distribué à tous les parlementaires. Dans les jours qui ont suivi, j'ai rencontré plusieurs députés de l'Opposition. Je leur disais que j'essaierais d'amener les députés du côté ministériel à travailler là-dessus et que je comptais sur eux pour faire la même chose. Je pense que le député de Marguerite-

Bourgeoys se souviendra que j'ai eu ce genre de discussion avec lui et avec plusieurs autres.

Les circonstances n'ont pas permis d'articuler le groupe mixte de travail, encore qu'on en ait discuté à certains moments. Le député de Marguerite-Bourgeoys avait bien raison de rappeler les séances de travail d'une commission parlementaire. Je me souviens fort bien de ce qui était dit à l'article 3 parce que je me méfiais de la surveillance de l'exécutif. Je voulais être sûr d'attraper tout le monde. J'avais demandé la surveillance du gouvernement, parce que cela peut être différent, et des organismes publics. Quand notre projet de loi no 90 est revenu, je l'ai regardé et me suis rendu compte qu'on en avait perdu en cours de route. Je dois dire que, dans les modalités qui nous sont proposées aujourd'hui, on le retrouve sous une autre forme. Il y a quand même une commission qui est prévue - cela sera nouveau pour nous - pour contrôler les organismes publics.

Je crois que, dans les modalités retenues, on retrouve l'esprit de l'article 3 que nous avions formulé. Si cela n'était pas le cas, il faudrait reprendre ces questions. Si le Parlement, à l'occasion de cette réforme, ne trouve pas les moyens de jouer vraiment un rôle de surveillance, de contrôle de l'administration, de ce que fait le gouvernement, de la ventilation des crédits, des engagements financiers, des dépenses publiques, nous n'aurons pas réussi notre réforme.

Regardons cela ensemble. Nous n'avons pas encore réussi à le faire. On est venu avec quelque chose de concret sur la table, on peut partir de ça. Je pense que la proposition vaut d'être retenue. Elle invite le président à jouer un rôle assez neuf. J'ai vu le leader parlementaire de l'Opposition souscrire d'emblée au rôle que le président pourra jouer. Il s'inscrivait déjà dans un type de présidence que la réforme proposée retient. On sent que cela correspond à quelque chose. J'étais un peu pessimiste après avoir rédigé le rapport que quelques-uns d'entre vous ont peut-être lu. J'étais vraiment inquiet parce que je me rendais compte plus que jamais qu'on avait bien parlé de cela et que cela n'avait pas donné grand-chose. Je disais à la fin à la page 169: "Enfin, si le premier ministre doit accepter et favoriser la réforme..." Cela est une évidence, je pense bien, si le premier ministre ne veut pas, la ligne de parti existe encore, même chez nous.

M. Bertrand: Chez vous, Guy?

M. Vaugeois: II y a encore des choses qu'on traîne comme la solidarité ministérielle, la responsabilité ministérielle. Je disais donc: "Enfin, si le premier ministre doit accepter et favoriser la réforme, si les présidents des groupes parlementaires doivent diriger leur caucus dans cette voie - et je suis certain que le caucus libéral en a discuté ces derniers temps; ce n'est pas possible, ils sont des parlementaires comme nous et ils s'inquiètent du travail qu'on leur fait faire ou qu'ils ont à faire - il appartient par-dessus tout au président de l'Assemblée nationale et à son personnel de lui donner ses moyens et son sens." Je crois qu'on est arrivé là.

Je crois, M. le Président, que vous comprendrez que des parlementaires s'adressent à vous à ce moment pour dire: Nous avons fait un bout de chemin. On a eu de bonnes discussions, on ne l'avoue pas trop, avec les gens de l'exécutif. On a cheminé et un comité de parlementaires présidé par mon collègue de Deux-Montagnes a fait un travail absolument admirable, a récupéré des choses. J'avais un peu lancé la serviette à un moment donné en disant: Commençons avec cela. Les parlementaires ont dit: Non, on va regarder plus attentivement ce qui est mis de côté et les membres de l'exécutif ont accepté de revoir certaines positions et on comprendra facilement lesquelles. Je pense qu'on n'a pas de grandes révélations à faire, on devine que l'imputabilité ne plaît pas nécessairement. On devine que s'asseoir à la barre plutôt que de venir piloter son projet de loi cela plaît moins, etc. D'un autre côté, il y a eu des choses salutaires dans les dernières années. Comme les ministres savent qu'ils peuvent devenir de simples députés et que des députés ministériels savent qu'ils peuvent devenir députés de l'Opposition et inversement, je crois que c'est le commencement de la sagesse.

M. Lalonde: Inversement.

M. Vaugeois: Bien sûr, pourquoi pas? Justement, si on accepte de travailler dans cet esprit, au-delà de la solidarité ministérielle, on pourra développer une solidarité de parlementaires, pas trop longtemps, mais le temps qu'il faut pour affirmer l'institution qui a un rôle important à jouer. En période de crise, on nous reprocherait, à nous, de ne pas mieux surveiller les dépenses publiques, de ne pas mieux contrôler ce qui se passe dans l'administration. Du côté législatif, on est pas mal tous d'accord pour regretter que ce Parlement légifère trop rapidement. À mon avis, il légifère trop légèrement. On est assez d'accord en général, je crois, pour trouver que la réglementation est devenue trop lourde et que ce qu'on appelle la législation déléguée, c'est devenu peut-être trop important. Il est grand temps que le Parlement récupère un minimum de responsabilité et d'action à cet égard.

À ce moment-ci, nous avons fait un

bout de chemin comme députés de la majorité. C'est certain que les députés de l'Opposition ont également des choses à faire valoir et des choses que nous ne pouvions pas aussi bien faire valoir qu'eux en termes de contrôle et même d'enquête. Pourquoi pas à certains moments? Je crois qu'il faut se réunir, avec les moyens dont dispose la présidence, avec la neutralité qui est celle de la présidence, avec cette responsabilité première de la présidence qui est de défendre l'institution, une institution qui, il faut le reconnaître, était à moins une, à mon avis. Qu'à moins une on se ressaisisse et qu'on donne ce coup de barre, avec, encore une fois, le leadership de la présidence, je trouve qu'il n'est jamais trop tard. C'est heureux que ça se présente à ce moment-ci et j'y souscris d'emblée. Je suis disponible, bien sûr, pour faire partie de cette sous-commission avec d'autres, parce que j'aurai le temps. Je suis même prêt à aller un peu plus mollo ailleurs, parce qu'évidemment ce qu'on pourra faire au niveau de la réforme de l'institution est sans aucune mesure avec d'autres actions qu'on peut mener ailleurs. Merci.

M. Lalonde: M. le Président, j'aimerais simplement lui demander s'il sera disponible le 7 novembre. Nous aurons sûrement une séance

M. Vaugeois: M. le Président, j'avais déjà prévu utiliser le vote par anticipation.

M. Lalonde: On a remarqué qu'il n'a pas été amer.

La Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Gatineau.

M. Michel Gratton

M. Gratton: M. le Président, avant de traiter de la motion que nous a présentée le député de Lac-Saint-Jean, vous me permettrez peut-être une dernière remarque générale qui m'est inspirée un peu par les propos que vient de tenir le député de Trois-Rivières, aussi bien que par ceux du député de Sainte-Marie et à un certain égard par le député de Dubuc. Je comprends fort bien, pour avoir été moi-même un député ministériel d'arrière-ban pendant très exactement quatre ans, du 15 novembre 1972 au 15 novembre 1976, que lorsqu'on se place dans ce contexte-là, on pense beaucoup plus à l'efficacité du Parlement comme institution qui vote des lois, qui prend des décisions au nom de la collectivité. Il n'y a rien de plus frustrant que d'être le matricule 122 - dans mon cas, j'étais le matricule 108, puisque nous étions 108 à l'époque - et de constater les interminables débats qui peuvent se faire autour de questions qui, souvent, paraissent de caractère plutôt anodin à un député d'un comté donné. Le sentiment qu'on éprouve à ce moment-là c'est de dire: II doit y avoir moyen de réformer ça, de moderniser ça pour que ça aille un peu plus vite, pour qu'on puisse voter un peu plus de lois et, forcément, de meilleures lois.

Par contre, pour être depuis maintenant six ans dans l'Opposition, je comprends également la préoccupation de mes collègues qui disent: II faut, à titre de membres de l'Opposition, disposer de tous les moyens pour poser des questions au gouvernement afin de s'assurer que les choses qui sont utiles pour l'information du public, pour lui permettre de juger son gouvernement, se fassent. Ce que je voudrais qu'on évite dans l'exercice qu'on entreprend, soit d'adopter une réforme substantielle sur le plan parlementaire, c'est d'oublier la dimension du membre de l'Assemblée nationale, du député d'une circonscription électorale.

Le député de Trois-Rivières le mentionnait tantôt, la règle de la solidarité existe, la règle de la ligne de parti aussi. J'entendais tantôt le député de Sainte-Marie dire que cela prend un changement de mentalités, en se servant de l'exemple du débat sur le discours sur le budget. On asouvent entendu des députés, des deux côtés de la Chambre, évoquer cette tradition, cette règle qui permet à un député de parler de tout et de rien lors du débat sur le discours sur le budget. Il faudrait que cela change. Il faudrait peut-être aller plus au fond des choses, poser des questions plus fondamentales.

Mais il ne faut pas oublier que chacun d'entre nous, les 122 que nous sommes, est là, sinon d'abord, en tout cas sûrement, de façon aussi importante pour représenter les gens qui l'élisent. Si on devait, par souci d'efficacité et aussi par souci de faire en sorte que tous les gestes du gouvernement soient scrutés de façon convenable pour l'Opposition, priver les députés, les représentants de circonscriptions, de la possibilité de parler au nom de leurs commettants, d'avoir des occasions de s'exprimer au nom d'intérêts qui sont souvent très localisés et qui ne sont peut-être pas d'importance provinciale, je pense qu'on risquerait de faire fausse route dans notre démarche de moderniser et de réformer le Parlement. Le député de Sainte-Marie n'a peut-être plus ce problème maintenant, mais on sait combien il est difficile pour un député, membre d'un parti, qu'il soit du côté ministériel ou de l'Opposition, de parler au nom de ses électeurs lorsque dans certaines situations cela vient en conflit avec la ligne de parti.

Je dis donc que ce sous-comité qui étudiera, au cours des prochains mois, le projet qui est devant nous devra nécessairement réunir des éléments qui

feront l'objet d'une attention particulière concernant cet aspect du rôle du député. Comme le seul personnage qui n'est membre ni de la majorité ni de la minorité, c'est justement le président de l'Assemblée nationale, peut-être bien que vous aurez un rôle tout à fait spécial à jouer à ce point de vue, M. le Président.

Cela dit, j'aimerais poser une ou deux questions soit au parrain de la motion ou au leader du gouvernement concernant la motion qui nous est présentée pour déférer ce projet de réforme à une sous-commission.

D'abord, la date du 15 février 1983. J'aimerais savoir une chose pour que cela soit bien clair pour tout le monde. Le leader de l'Opposition disait tantôt: Si on devait se rendre compte que le 15 février on n'a pas terminé, forcément, on devra demander à la commission de l'Assemblée nationale de prolonger l'échéance. Est-ce que le gouvernement, au moment où on se parle, si on devait pouvoir fournir un rapport à la commission de l'Assemblée nationale tel que prévu, le 15 février 1983, a l'intention de faire en sorte que tous les changements nécessaires soient apportés tant au règlement de l'Assemblée nationale qu'à la Loi sur la Législature pour que le prochain budget soit étudié à partir des nouvelles dispositions ou si on tient pour acquis que cela devra attendre un an de plus? (16 h 30)

M. Bertrand: Dans notre esprit, la date du 15 février 1983 nous donne la possibilité, en faisant rapport à la commission de l'Assemblée nationale, de permettre à ladite commission de préparer son rapport pour l'Assemblée. Il faut savoir qu'on est redevable devant l'Assemblée nationale qui nous a envoyés ici pour siéger. Dans notre esprit, donc, on ne pourrait faire ce rapport à l'Assemblée nationale qu'au début de ses travaux, lors de la prochaine session. On ne sait pas la date, cela peut être la fin de février, le début de mars ou la mi-mars. À ce moment-là, l'Assemblée nationale devra disposer du rapport de la commission de l'Assemblée nationale et, partant de là, implanter la réforme parlementaire dans ses différents aspects.

C'est probablement aussi là-dessus que portera notre discussion en sous-commission. Il s'agit de savoir, une fois le consensus fait et le rapport fait à la commission et, ensuite, à l'Assemblée nationale, quel calendrier d'implantation retenons-nous pour faire en sorte que la réforme parlementaire puisse entrer en vigueur. Je crois que la question que pose le député de Gatineau en est une à laquelle et la sous-commission et la commission et l'Assemblée nationale devront répondre au cours des prochains mois.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Gatineau.

M. Gratton: La réponse me satisfait. Je constate qu'on n'est pas coulé dans le béton du côté ministériel et, je pense, du côté de l'Opposition, non plus. On pourra jouir d'une collaboration totale à ce point de vue.

Une dernière question, M. le Président. Il s'agit de la formulation de la motion elle-même. Quand on propose que le projet de réforme parlementaire soit déféré à une sous-commission de la commission de l'Assemblée nationale pour étude et recommandations, est-ce qu'il n'y aurait pas lieu, avant de le déférer à une sous-commission, d'instituer ou de constituer cette sous-commission et d'en nommer les membres? Autrement, on peut le faire immédiatement après, mais je présume qu'il est du ressort, de la compétence de la commission de l'Assemblée nationale de décréter immédiatement qui seront les membres de cette sous-commission et peut-être même de fixer la date de la première séance.

M. Bertrand: On pourrait très bien, M. le député de Gatineau, avoir un deuxième alinéa à la motion qui dirait: Que cette sous-commission soit formée des membres suivants. Et là, on déciderait ici, en commission, des membres que nous voudrions voir siéger à cette sous-commission.

J'échangeais tout à l'heure avec le whip en chef du parti ministériel et on voyait une formule pour qu'on puisse vraiment travailler de façon très efficace. Il pourrait y avoir six membres à cette sous-commission: trois membres du parti ministériel, dont le leader parlementaire du gouvernement, le whip en chef du gouvernement et le président du comité spécial du conseil des députés qui a travaillé sur le projet avec d'autres parlementaires et, bien sûr, le président qui en serait l'animateur. À ce moment-là, il resterait deux membres pour représenter l'Opposition. Un groupe de six nous paraissait convenable pour faire ce travail au cours des prochaines semaines, mais on serait prêt à accepter...

M. Bisaillon: M. le Président...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: Avant d'aller trop loin dans cette voie, est-ce qu'on ne pourrait pas...

M. Lalonde: Ou pas assez loin.

M. Bisaillon: ... attendre qu'un certain nombre d'interventions soient faites sur la motion?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): J'ai encore des interventions qui sont prévues.

M. le député de Taschereau, vous aviez demandé la parole.

M. Richard Guay

M. Guay: M. le Président, il y a des éléments de mon intervention qui iraient mieux devant la sous-commission, mais comme elle n'entendra pas les députés, j'imagine, puisque forcément le temps peut être limité, je les ferai très rapidement immédiatement.

Dans son intervention que j'ai trouvée fort intéressante, le député de Gatineau disait que, d'après son expérience de député d'arrière-ban, il souhaitait, à l'époque, que les choses aillent plus vite. D'après mon expérience, je trouve que les choses vont lentement, mais l'idée que je me fais de la réforme parlementaire n'est pas de faire en sorte que les choses aillent plus vite dans le sens que le Parlement légifère plus vite. Je suis un de ceux qui pensent que le Parlement légifère, d'ailleurs, déjà trop vite et qu'entre le moment du dépôt d'une loi et le moment de son adoption on est probablement un des Parlements qui fonctionnent le plus rapidement au monde. Je ne suis pas sûr que ce soit toujours la méthode la plus sage.

M. Lalonde: On vous invitera à notre prochain "filibuster".

M. Guay: Par contre, il n'est pas plus sage de faire perdre le temps de l'Assemblée par des "filibusters" et autres discussions interminables et inutiles. Comment trouver non pas le moyen d'aller plus vite, mais le moyen de faire plus et mieux, non pas nécessairement de faire plus de lois, mais d'avoir un meilleur contrôle du Parlement sur l'administration publique?

J'ai écouté avec beaucoup d'intérêt ce que le député de Marguerite-Bourgeoys a dit sur l'étude des crédits. Je comprends parfaitement ce qu'il vise. Il est vrai que l'étude des crédits - je l'ai souligné ce matin - est fort inégale d'une commission à une autre, fort inégale aussi quant à l'intérêt que les députés y portent. Ce que je retiens des crédits, pour y avoir participé depuis six ans, puisqu'on est tous tenus d'y participer, c'est que, finalement, on parle fort peu de crédits et beaucoup d'énoncés de politique. En d'autres mots, c'est un échange qui permet de fouiller un certain nombre de choses: qu'est-ce que le ministre entend faire, pourquoi le ministre a-t-il fait ceci, pourquoi va-t-il faire cela? Finalement, une fois qu'on a répondu à ces questions adéquatement ou inadéquatement, les crédits sont adoptés unanimement ou sur division. Je ne me souviens pas, de mémoire, qu'on ait vraiment fait porter les débats sur l'étude des crédits sur le quantum des crédits, sur le montant qu'on affectait à telle chose; c'est plutôt sur les énoncés de politique, me semble-t-il.

En ce sens, il y a peut-être moyen d'arriver à la même solution ou à une meilleure solution. J'imagine que la sous-commission aura à se pencher là-dessus. Je pense qu'on a beau dire que l'étude des crédits est un droit, un devoir, c'est vrai, mais on est parfaitement conscient aussi que, même dans la meilleure des hypothèses, on passe rapidement sur un ministère. Cela demeure quand même, règle générale, assez superficiel; on n'a pas le temps, parce qu'il y en a 26 autres à étudier, parce qu'il y a un menu législatif, de fouiller en profondeur ou de passer au peigne fin un ministère. On pourrait d'ailleurs se demander s'il n'y a pas davantage d'intérêt à prendre un certain nombre de ministères et à les passer au peigne fin une fois par quatre ans, par exemple, avec une rotation, pour vraiment aller au fond des choses, pour trouver -j'essaie de me souvenir de l'expression que le ministre des Finances a utilisée dans un de ses discours sur le budget - les lagons où l'eau s'est immobilisée parce que, depuis la nuit des temps, il y a du monde et des programmes dont on ne sait pas très bien à quoi ils servent et ce qu'ils font.

Il me semble que telle qu'elle est à l'heure actuelle, en tout cas, l'étude des crédits ne permet pas ce contrôle sur l'administration publique. En plus, elle paralyse d'une certaine manière - je n'utilise pas le mot péjorativement - elle bloque le temps et il n'est pas certain que ce temps ne pourrait pas être utilisé plus utilement d'une autre manière.

Je voulais le dire parce que c'est un peu à partir de cela qu'on en est arrivé à la proposition que l'Opposition trouve à l'heure actuelle inacceptable sur les crédits, mais qu'il y a peut-être moyen de travailler. C'est notamment aussi à la lueur de l'expérience d'un certain nombre de nos députés et j'imagine que, de votre côté, ce serait probablement intéressant de faire la même vérification. Ceux qui ont participé à la commission de la fonction publique et ceux qui participent à la commission sur la Loi sur la protection de la jeunesse nous disent: Si vous implantez des commissions d'initiative parlementaire, si vous faites la réforme que vous voulez faire au niveau des commissions parlementaires et si vous laissez les 27 commissions par ailleurs, c'est physiquement impossible, ne nous demandez pas de faire les deux, on ne peut pas. À l'expérience, c'est absolument impossible de faire les deux.

On n'y avait pas pensé auparavant, effectivement. La sous-commission ne s'était pas posé la question. Le député de Marguerite-Bourgeoys y a fait allusion. À la

sous-commission, on disait simplement qu'on n'avait pas aboli l'étude des crédits. Effectivement, on ne faisait pas une réforme en profondeur de cela, on proposait des modifications. Forts de ce que nos gens nous ont dit, nous nous sommes posé la question: Est-ce que ce qu'on tient pour acquis, c'est-à-dire qu'il doit y avoir 27 commissions qui étudient les crédits de 27 ministères, cela doit se faire comme cela ou si ça ne peut pas se faire autrement, de manière plus utile, plus intéressante, plus efficace? C'est à partir de là qu'on est arrivé avec la proposition qui a été dévoilée aujourd'hui. En ce sens, j'imagine que l'Opposition voudra faire le même travail, dans la mesure où on n'est pas figé à l'idée que ce soient les 27 commissions, de la façon que ça se fait à l'heure actuelle qui, finalement, n'est pas très efficace et demeure superficielle. En ce sens, j'imagine qu'il y a moyen d'arriver à une solution acceptable pour tout le monde.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Sainte-Marie.

M. Guy Bisaillon

M. Bisaillon: M. le Président, trois commentaires rapides. Mes premiers propos voudraient se référer à des choses qu'a dites le député de Marguerite-Bourgeoys lorsqu'il rappelait les travaux de la sous-commission de Pointe-au-Pic. On pourrait prendre les consensus qui sont ressortis des travaux de cette sous-commission comme un plancher ou une borne inférieure et prendre ce qui est là aujourd'hui comme une espèce de borne supérieure; entre ça, les travaux de la sous-commission qui nous est proposée ont une marge de manoeuvre. Autrement dit, d'après moi, ce qui est proposé, ça ne rejette pas ce qui avait fait l'objet de consensus à Pointeau-Pic. Cela fait tout simplement une borne inférieure et une borne supérieure. À l'intérieur, on pourra aménager des choses.

Si on retrouvait dans la sous-commission de Pointe-au-Pic des choses qu'on voudrait revoir dans un projet final, cela devrait faire l'objet des discussions en sous-commission. Pour moi, cela ne s'exclut pas. Par ailleurs, je me pose trois questions sur la motion telle qu'elle est formulée. La première, c'est que cela me semble restrictif. Autrement dit, M. le Président, j'ai fait deux interventions aujourd'hui pour indiquer qu'il y avait autre chose qui existait que le document qui nous est soumis aujourd'hui. Il y avait, par exemple, le rapport Vaugeois. Il y a des recommandations dans la commission spéciale de la fonction publique qui ont trait aux sujets qui sont à l'étude aujourd'hui. Il me semble qu'il y a des choses qui étaient placées dans le rapport de la sous-commission et il ne faudrait pas limiter cela uniquement au projet de réforme parlementaire proposé par le leader du gouvernement. Si on comprend que la sous-commission va pouvoir aussi alimenter ses discussions des autres documents existants, cela me va. Il me semble qu'il y aurait moyen de l'inclure pour que cela ne limite pas les discussions des membres de la sous-commission, d'autant plus qu'un certain nombre de choses auxquelles je viens de référer traitent des mêmes sujets que les documents qui ont été déposés devant nous aujourd'hui. C'est peut-être quelque chose qu'il faudrait qu'on précise dans la motion.

Deuxième question, cela a été un peu soulevé par le député de Gatineau. Moi, j'avais aussi posé des questions sur le 15 février, mais dans un sens différent. Est-ce que cela veut dire, l'échéance qui est placée dans la motion, que la loi 90 serait quand même adoptée avant le 15 février? Si on adopte la loi 90, je veux juste émettre un certain nombre de réserves et de craintes. À la lumière de l'expérience du passé, il me semble que, quand on a adopté quelque chose et qu'on l'a fermé, c'est assez difficile d'y revenir.

Si le rapport de la commission spéciale doit être intégré à la loi 90 qui sera adoptée, là, je serais d'accord. Mais il me semble qu'il faudrait que ce soit précisé parce que ce ne sont pas deux choses différentes, M. le Président. Ce n'est pas la Loi sur l'Assemblée nationale d'un bord et la réforme parlementaire ailleurs. Il va falloir que ce soit intégré un jour ou l'autre ou bien à l'intérieur du règlement ou encore à l'intérieur de la loi comme telle.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Ou les deux.

M. Bisaillon: Ou les deux. Il me semble que cela devrait être précisé. Le dernier aspect, par rapport à la motion, réfère aussi à des propos qui ont été tenus ce matin. On a souvent parlé d'unanimité, d'une réforme qui était faite pour renforcer le Parlement et permettre à chaque parlementaire de jouer son rôle.

Mes propos, en terminant, M. le Président, s'adressent davantage au leader du gouvernement pour lui rappeler que l'unanimité, ça commence d'abord par la communication. Il est très difficile d'obtenir l'unanimité quand on ne communique pas. Ce matin, j'ai, par exemple, pris connaissance que, depuis 96 heures, les membres de l'Opposition ont en main le projet qui a été dévoilé ce matin en commission spéciale. Je vous indique, M. le Président, et j'indique au leader du gouvernement que, quant à moi, je n'en ai pas pris connaissance 96 heures avant. Il y a une coutume bien établie à l'Assemblée nationale qui fait en sorte qu'un député qui ne participe pas à une formation

politique reconnue reçoit à peu près le même traitement que ceux de l'Opposition. Cela s'est même développé dans l'organisation du temps dans les débats. Je n'apprends rien à personne. Tous ceux qui ont vécu cela depuis 1976, M. le Président, le savent. (16 h 45)

J'indique aussi au leader du gouvernement que, dans son langage et dans sa façon de fonctionner, il ne semble pas avoir encore pris conscience qu'il existe autre chose qu'un parti d'Opposition et que je ne me situe pas au même endroit que le parti d'Opposition. Il me semble qu'il devrait, à la fois dans son langage, dans sa présentation des choses et aussi dans sa recherche de l'unanimité, tenir compte du fait qu'il existe autre chose qu'un parti d'Opposition et qu'éventuellement il pourrait exister autre chose qu'un député indépendant et un parti d'Opposition. Il pourrait peut-être y avoir un autre parti d'Opposition, un deuxième. Il pourrait y en avoir trois. Il pourrait y avoir plus d'un député indépendant. Il me semble qu'on doit tenir compte de cela si on parle de réforme parlementaire et si on y croit vraiment.

Cela m'amène, M. le Président, à vous indiquer que j'ai été membre de la commission de l'Assemblée nationale en 1977, en 1978 et en 1979. J'ai participé aux travaux de la sous-commission de l'Assemblée nationale sur la loi 90 en 1981. J'ai animé un comité de travail sur la réforme parlementaire en 1976-1977, dont le député de Gatineau était membre, d'ailleurs. Je trouverais donc étrange d'être exclu de ce débat sous le seul prétexte que je n'appartiens pas à une formation politique enregistrée.

Je termine en soulignant que j'ai déjà indiqué au leader parlementaire, de même qu'au président de l'Assemblée nationale, qu'à l'ouverture de la Chambre j'entendais faire mon choix de commissions parlementaires, comme la coutume le veut. Ce n'est pas un privilège que je demande. C'est une coutume qui reconnaît qu'un député indépendant doit faire un choix de commissions parlementaires. La coutume a toujours reconnu, d'ailleurs, qu'en fonction du choix de commissions que le député indépendant fait, normalement, on ajoute à ces commissions un membre de l'Opposition pour maintenir l'équilibre des forces en présence au niveau des commissions.

J'avais indiqué au leader parlementaire que mon choix de commissions était déjà fait, qu'il s'agissait de la commission de l'Assemblée nationale, de la commission du travail et de la main-d'oeuvre, de la commission de la fonction publique et probablement de celle des engagements financiers. Je laisse cela à la considération du leader du gouvernement en lui rappelant, cependant, que ce n'est pas un blâme que je lui faisais, M. le Président; c'était seulement une attitude que je voudrais lui voir développer davantage. J'aimerais qu'il parle, de temps en temps, à trois plutôt qu'à deux, et lui rappeler que l'unanimité, il y a des périodes de l'année où on en a davantage besoin, mais que cela se prépare aussi.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Saint-Louis.

M. Harry Blank

M. Blank: Seulement une très courte intervention. J'ai entendu les discussions de part et d'autre ce matin et cet après-midi et je trouve que le mot qui a été utilisé le plus souvent est le mot "efficacité". On veut un système efficace. C'est en contradiction, à mon avis, avec le mot "Parlement", pour commencer.

Des voix: Ah! Ah!

M. Blank: Le système démocratique n'est pas efficace du tout. Si vous voulez un système efficace, le système dictatorial est le plus efficace au monde, mais il n'est pas démocratique. Un système démocratique -Churchill a dit que c'était le pire au monde, mais le meilleur qu'on avait - doit être inefficace, parce que c'est démocratique de gaspiller notre temps à parler. L'apparence de gaspiller notre temps, c'est cela, le système démocratique. Si on doit parfois, comme on dit ici, gaspiller 250 heures pour l'étude des crédits, je dis: Oui, on doit le faire, parce que le problème que j'ai vu ici autour de la table aujourd'hui, c'est qu'on parlait comme des politiciens et non pas comme des parlementaires. Qu'est-ce qu'on gagne durant cette période de l'étude des crédits? Va-t-on gagner des points de politique? Le gouvernement va-t-il passer quelque chose sur le corps de l'Opposition ou est-ce l'Opposition qui va trouver de petites choses ici et là?

Mais on a oublié quelque chose de très important. C'est la population du Québec qui est protégée par ce système de l'étude des crédits, parce que le ministre et les autres fonctionnaires ne savent jamais ce qu'on peut leur demander. Cela veut dire que, durant toute l'année, ils ont un oeil sur ce qu'ils font et un autre oeil sur l'étude des crédits, parce qu'ils ne savent jamais ce qui peut arriver à cette commission. C'est la garantie de l'efficacité et de l'honnêteté du ministre et de ses fonctionnaires. Quand je parle d'honnêteté, je ne parle pas de malhonnêteté dans le sens courant; je parle dans le sens politique; de malhonnêteté politique. Et c'est le fait qu'ils savent qu'on va avoir une commission parlementaire qui peut ouvrir n'importe quelle petite porte qui est une protection, pas nécessairement ce qui se

passe en commission. Si vous regardez la commission parlementaire qui fait l'étude des crédits, suivez-la de la première année d'un Parlement jusqu'à la quatrième, la dernière. C'est tellement différent, ce qui se passe la quatrième année, comparé à la première. On commence à ouvrir des portes ici et là, mais la grande protection du public, c'est ce qui ne passe pas. Je suis sûr que le ministre et les fonctionnaires savent qu'ils peuvent être questionnés sur n'importe quel sujet que le Vérificateur général ne trouvera jamais, parce que, lui, il cherche des chiffres, des détournements de fonds, etc. Mais il y a plus que ça dans le budget d'un ministère et c'est la commission d'étude des crédits qui est le chien de garde de ces choses et l'épée de Damoclès pour ces gens-là.

Si on veut la changer, on doit trouver quelque chose dans le même sens, mais pas la mettre de côté et avoir un discours en Chambre sur des choses générales ou, comme le député de Taschereau l'a dit, peut-être tous les quatre ans. C'est trop long. On doit avoir ce contrôle pour la protection des citoyens du Québec, pas pour les politiciens ou pour marquer des points. C'est là qu'est l'importance de la commission d'étude des crédits.

Adoption de la motion

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci. Est-ce que la motion du whip du gouvernement sera adoptée?

M. Lalonde: M. le Président, juste un point. Je veux réagir à ce que le député de Sainte-Marie a dit - une partie, au moins -quant au libellé de la motion. J'ai pensé aussi que c'était peut-être un peu restrictif, mais ça ne m'a pas traversé l'esprit que ça voudrait dire qu'à la sous-commission on ne pourrait parler que des propositions contenues dans le projet de loi. S'il y a d'autres propositions, d'autres suggestions qui ne sont pas contenues dans le projet de loi, il n'y a aucun doute qu'on pourra en parler.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Adopté?

M. Lalonde: Adopté.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Adopté. À ce stade-ci, j'aimerais peut-être faire une petite intervention, si vous me le permettez.

M. Lalonde: Maintenant qu'il est devenu le "boss"!

M. Bertrand: Mais oui, M. le Président, puisque, maintenant... Appliquez-vous la réforme parlementaire!

Remarques du président M. Claude Vaillancourt

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À la suite des propos qui ont été tenus depuis dix heures ce matin, j'aimerais d'abord dire que je suis très heureux de l'adoption de cette motion qui confie à une sous-commission - dont on nommera les membres probablement demain ou après-demain - le mandat d'étudier le ou les différents projets de réforme parlementaire qui pourront être soumis.

Je dois vous dire que le président de l'Assemblée nationale du Québec a l'intention de jouer pleinement son rôle, qui est non seulement de présider les débats - ce qui est généralement très simple, lorsqu'on préside les débats d'une commission qui a pour objet de modifier la Loi sur l'Assemblée nationale, qui intéresse tous les parlementaires - mais aussi d'être l'animateur et le proposeur de certaines réformes.

Je n'ai pas vu - je suis sûr que ce n'est pas le cas - dans les propos de certains députés qui ont été tenus aujourd'hui un blâme envers la présidence de l'Assemblée nationale parce qu'elle n'a pas pris l'initiative de proposer d'elle-même une réforme parlementaire. Vous comprendrez que toute réforme parlementaire doit venir au préalable des députés. La présidence de l'Assemblée nationale n'a jamais senti, de la part des deux partis politiques, cette sensibilisation, elle n'a jamais eu de demande très précise de mettre de l'avant une réforme parlementaire. Je peux vous dire que, aujourd'hui, je sens, des deux côtés de l'Assemblée nationale, une volonté très ferme d'en arriver à une réforme parlementaire dont les modalités et les détails seront arrêtés plus tard.

Prenant conscience de cette volonté réciproque des deux partis politiques à l'Assemblée nationale du Québec, il m'appartient maintenant, en collaboration avec l'ensemble des députés de l'Assemblée nationale, de faire en sorte que la sous-commission et, par la suite, la commission de l'Assemblée nationale respectent le ou les mandats qui leur ont été confiés.

Je voudrais donc que ce soit très clair. Je comprends que les députés ne l'ont pas fait dans ce sens, mais je tiens à dire que, malgré la sous-commission de 1980, malgré la sous-commission de 1981, si la présidence ou l'Assemblée nationale n'a pas pris, justement, l'initiative de penser elle-même à une réforme globale du parlementarisme québécois, c'est justement que la présidence n'a jamais senti, comme elle le sent aujourd'hui après les discours et les interventions des deux côtés de la Chambre, une volonté aussi évidente et aussi réelle de faire quelque chose dans ce domaine. Dans

ce sens, vous pouvez être assurés de la collaboration entière de l'Assemblée nationale, de ses cadres et, évidemment, du président de l'Assemblée nationale.

Je dois le dire, même si l'Assemblée nationale avait senti cette volonté il y a quelques mois, tout le monde comprendra que, à titre d'institution, elle n'a pas les moyens techniques qui lui auraient permis d'aller aussi loin que de présenter une réforme globale et détaillée du système parlementaire québécois ou d'une réforme parlementaire en général. Je dois même avancer l'hypothèse que, pour jouer pleinement son râle au cours de la sous-commission de l'Assemblée nationale, l'Assemblée nationale devra, possiblement, procéder à l'engagement de certaines personnes expertes en la matière.

Vous savez tous que Dominique Lapointe est actuellement hospitalisé et que sa maladie est très grave, de sorte que l'Assemblée nationale, n'ayant pas les moyens, justement, d'aller aussi loin dans une réforme, devra, pour jouer pleinement son rôle au cours de la sous-commission de l'Assemblée nationale et de la commission, procéder, par voie de prêts d'autres ministères, à l'engagement de quelques contractuels ou autrement pour jouer pleinement le rôle qu'à bon droit les membres de la commission de l'Assemblée nationale souhaitent voir jouer par l'Assemblée nationale du Québec.

Là-dessus, je pense qu'il serait maintenant de mise, compte tenu de l'horaire de nos travaux, d'entreprendre une autre partie de notre programme, c'est-à-dire le projet de loi no 90 lui-même. Il y a la réforme parlementaire. Je comprends que salaires et pensions viendront jeudi, M. le leader du gouvernement? Il y aurait maintenant le projet de loi no 90 qui a été déposé par le leader au mois de juin dernier. M. le leader du gouvernement.

Ordre des travaux

M. Bisaillon: M. le Président...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: ... j'avais compris que les questions du député de Gatineau, tantôt, de même que l'emballement avec lequel le leader du gouvernement était entré par cette porte ouverte nous amèneraient à choisir les membres de la sous-commission. Par ailleurs, j'ai indiqué tantôt au leader du gouvernement qu'il y avait des documents que je n'avais pas reçus. Je sais que jeudi il doit s'ajouter quelque chose. Est-ce que je peux penser recevoir cela avant jeudi? Deuxièmement, est-ce que dans la tête du leader du gouvernement une sous-commission doit absolument exclure les députés qui n'appartiennent pas à des formations politiques reconnues?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: M. le Président, pour répondre à la question du député de Sainte-Marie, je suis, comme parlementaire tout court, extrêmement sensible à ses représentations relativement aux droits des députés indépendants. Je crois que les membres de la commission de l'Assemblée nationale n'auront certainement pas d'objection, lorsque viendra le temps de former la sous-commission de l'Assemblée nationale, à permettre au député de Sainte-Marie, qui siège à titre de député indépendant, d'en faire partie.

Ce que je souhaite - le député de Sainte-Marie le comprendra probablement -c'est que nous puissions avoir un nombre de parlementaires à cette commission qui ne dépasse pas un maximum de six ou sept, parce qu'il me paraît qu'au-delà de six ou sept, à toutes fins utiles, on redevient la commission de l'Assemblée nationale - et qu'il ne serait pas facile de travailler.

M. Bisaillon: M. le Président, est-ce que je peux risquer une suggestion?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: Tantôt, le leader du gouvernement a proposé six membres. Est-ce qu'on ne pourrait pas maintenir cette proposition excluant le président de l'Assemblée nationale, ce qui ferait sept?

M. Bertrand: Oui, mais, de toute façon, M. le Président, de notre côté, on va s'en parler aujourd'hui et une partie de la journée demain. Je sais que le leader de l'Opposition veut faire de même de son côté. Alors, on pourra probablement regarder comment il y aurait moyen de constituer une sous-commission de l'Assemblée nationale qui respecte les droits de tout le monde et qui permette, quand même, d'en arriver à un nombre pas trop élevé pour que le travail soit le plus efficace possible. (17 heures)

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Naturellement, le chiffre 6 ou 7 a été lancé. Là-dessus, je n'ai pas d'idée préconçue. Je voudrais simplement, à titre de précédent, peut-être, rappeler que la sous- commission qui a étudié l'avant-projet de loi comprenait onze députés. Je vais les nommer. Il y avait le président et les deux vice-présidents, le leader du gouvernement à

ce moment-là, celui de l'Opposition officielle, le whip en chef du gouvernement, le whip de l'Opposition et les députés de Trois-Rivières, de Sainte-Marie, de Saint-Louis et votre bien dévoué. Alors, c'est à peu près l'ordre de grandeur, on était onze. Cela a été bien aussi, on a bien travaillé. Les discussions allaient rondement. Il y a un tas de membres de l'Assemblée qui sont intéressés à ce travail-là; cela a été engagé depuis quelques années et cela prend une nouvelle allure. Je ne veux pas enlever la chance à quiconque pourrait apporter une contribution valable à ces travaux d'y participer. On va y songer, mais j'aimerais qu'on attende à demain avant d'en déterminer le nombre, afin qu'on puisse consulter chacun des membres de la commission de notre côté et déterminer demain matin peut-être le nombre et les membres.

M. Bertrand: M. le Président, est-ce que c'est la tradition de faire en sorte que les débats de la sous-commission soient enregistrés, c'est-à-dire que nous travaillions dans un cadre formel, ou bien si les sous-commissions...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Non. La coutume est généralement le contraire.

M. Lalonde: C'est exactement pour cela que ça existe, parce que ce n'est pas formel.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je n'ai pas l'expérience de nombreuses sous-commissions, mais dans les quelques sous-commissions auxquelles j'ai assisté les débats n'étaient généralement pas enregistrés...

M. Lalonde: Si le débat est enregistré, on va rester en commission.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): ... quoique ça puisse l'être; généralement, ils ne sont pas enregistrés. D'autre part, cela se déroule généralement dans un cadre qui est tout à fait différent du cadre d'aujourd'hui.

M. Lalonde: À huis clos, pas de journaliste.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): C'est à huis clos généralement.

Une voix: C'est surtout cela qui est important.

M. Bisaillon: Par ailleurs, M. le Président, le fait que les débats ne soient pas enregistrés en sous-commission, cela ne devrait pas enlever la possibilité d'un suivi plus systématique des discussions.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Mais remarquez que les débats peuvent être enregistrés. Dans le passé, ils ne l'étaient pas. Mais il n'y a absolument rien qui empêche la sous-commission de décider que ses débats seront enregistrés.

M. Bisaillon: Je veux juste souligner, pour y avoir participé au moins à deux reprises, qu'il arrive souvent qu'on fasse des discussions et qu'il se dégage un consensus, mais parce qu'il n'y a pas d'outil de travail pour le prendre ou le consigner, deux ou trois mois après on se demande si vraiment la discussion a eu lieu et s'il en est sorti quelque chose.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À ce moment-là, si les débats ne sont pas enregistrés, il y a une chose qui est sûre, c'est que l'Assemblée nationale peut fournir, avec le secrétariat des commissions parlementaires ou autrement, des personnes qui pourraient tenir lieu de ...

M. Bertrand: On pourrait parler de cela demain.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): On pourrait parler de cela demain, oui.

Une voix: Y penser chacun de notre bord.

M. Lalonde: Est-ce que je peux demander au leader du gouvernement, si on a terminé là-dessus, l'ordre des travaux, le calendrier de travail d'ici à jeudi matin. Si je comprends bien, il nous reste les dispositions de la loi 90 qu'on n'étudie pas article par article, mais sur lesquelles on a des remarques générales à formuler. Est-ce qu'on a suffisamment de matière pour remplir deux heures ce soir, une heure jusqu'à six heures cet après-midi et, ensuite, six heures demain?

M. Bertrand: Dans un premier temps, effectivement, je voudrais indiquer au député de Marguerite-Bourgeoys, comme à l'ensemble de mes collègues, que ce n'est pas notre intention - d'ailleurs cela ne réapparaîtrait pas correct - d'aborder l'étude du projet de loi 90 article par article, puisque nous en sommes à la première lecture seulement. Il faudra qu'on ait notre débat en deuxième lecture à l'Assemblée nationale, et qu'on revienne ensuite faire l'étude article par article. Par ailleurs, si les députés voulaient poser un certain nombre de questions relativement à certains principes ou articles qui sont contenus dans le projet de loi no 90 pour

permettre au leader du gouvernement de gratter un certain nombre de points qui feraient problème, cela me donnerait la chance, comme leader du gouvernement, de me préparer en conséquence pour le retour à l'Assemblée nationale.

M. Lalonde: Oui, c'est cela.

M. Bertrand: Ce serait uniquement dans cette perspective. Donc, dans cet esprit, la proposition que je ferais est la suivante. Je pense qu'on pourrait terminer à 18 heures, ne pas tenir de séance ce soir et, demain matin, pendant trois heures, de 10 heures à 13 heures, travailler sur le projet de loi no 90...

M. Lalonde: On verra.

M. Bertrand: ... et libérer l'après-midi. Je vais vous dire pourquoi. Le Conseil des ministres siège à 14 heures et, comme je devrai probablement me rendre au Conseil des ministres pour un ou deux dossiers particuliers...

M. Lalonde: Lequel? Des voix: Ah!

M. Bertrand: La loi sur l'accès à l'information vous donnera la possibilité, lorsqu'elle sera appliquée, de connaître l'ordre du jour du Conseil des ministres.

M. Lalonde: Elle n'est pas si mauvaise que cela.

Une voix: Pas complètement mauvaise.

M. Bertrand: Remarquez que cela n'empêche pas les députés de continuer à travailler en commission parlementaire demain après-midi, mais ce que je veux indiquer...

M. Lalonde: On verra à 13 heures.

M. Bertrand: ... c'est que de 10 heures à 13 heures, je pense qu'on pourra probablement faire le tour des questions qui nous préoccupent concernant le projet de loi no 90. La commission ne siégerait pas mercredi après-midi et on reviendrait jeudi matin pour le dossier du nouveau régime de retraite. Est-ce que cela irait?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Est-ce que vous avez des remarques préliminaires?

M. Bertrand: Oui.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le leader du gouvernement.

Projet de loi no 90 Remarques préliminaires

M. Bertrand: Très brèves. Le projet de loi no 90 a été en préparation depuis très longtemps. Effectivement, on peut remonter à l'avant-projet de loi qui avait été soumis par l'ex-président de l'Assemblée nationale, M. Clément Richard, lequel avait ensuite fait l'objet de discussions au niveau de sous-commissions de la commission de l'Assemblée nationale en août 1980 et en août 1981. Nous avons effectivement pris connaissance des différentes remarques qui avaient été faites par les parlementaires à ces sous-commissions et qui sont colligées dans un rapport dont a fait état le leader de l'Opposition, ce matin.

Alors, le projet de loi no 90, pour les éléments qui y sont contenus, reprend essentiellement ces différentes dispositions, en ajoute quelques-unes qui ont été apportées en cours de route, surtout depuis que j'assume les fonctions de leader parlementaire du gouvernement. S'il y avait des questions que les parlementaires voulaient me poser ou des opinions que les parlementaires voulaient exprimer relativement au projet de loi no 90, je crois qu'on pourrait le faire maintenant, M. le Président, sans qu'il y ait de discussion vraiment formelle du projet de loi article par article.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

Le serment

M. Lalonde: M. le Président, nous avons étudié le projet de loi no 90 qui contient un certain nombre de dispositions fort intéressantes. Nous avons des questions à poser sur quelques dispositions. Ce n'est pas exhaustif. Ce sont les problèmes que nous voyons actuellement. Il pourrait y en avoir d'autres éventuellement.

Il y a la question du serment qui, sûrement, soulève le problème de la constitutionnalité. On a vu dans les journaux récemment qu'un de nos députés s'était penché sur la question et avait soulevé les questions que je voudrais communiquer. Je ne veux pas entrer dans la discussion constitutionnelle. Cela peut se faire entre juristes. Cela devrait se faire, en fait, entre juristes. Mais j'aimerais simplement faire part de la préoccupation suivante. J'en ai une qui me vient à l'esprit et elle est très claire dans ma mémoire, elle concerne le chapitre de la loi no 101 qui traite de la langue des tribunaux. Nous avions, lors de l'étude article par article, dans cette salle, soulevé le problème de la constitutionnalité

de ces articles et le ministre parrain nous avait dit qu'il y avait des avis juridiques disant que tout était correct. Quelques années plus tard, un jugement de la Cour suprême a déclaré ces articles non constitutionnels. Cela a créé les problèmes qu'on a connus. Il a fallu faire adopter d'autres lois, une loi omnibus durant la nuit. Qu'est-ce qu'on a gagné, au fond, comme législateurs? Qu'est-ce que l'Assemblée nationale et le Québec ont gagné à cela?

Dans l'esprit qui doit animer, justement, les parlementaires lors de l'étude d'un projet de loi qui réforme le Parlement, là où on doit rechercher le consensus le plus large, l'unanimité même, dirait le député de Sainte-Marie, serait-il possible que le gouvernement, avant d'aller plus loin, s'il insiste pour maintenir sa proposition de changement...

Je le dis en passant, quoique c'est très important: En ce qui me concerne, je n'ai aucune objection de principe au texte proposé. Les sentiments monarchistes des uns et des autres varient. Celui qui vous parle, lorsqu'il a, à quelques reprises, prêté le serment qui existe actuellement et qui s'adressait à Sa Majesté, y voyait un symbole qu'on a hérité de l'histoire, mais avait le sentiment le plus clair possible qu'il prêtait son serment au peuple du Québec. Donc, il n'y a aucune objection sur le fond en ce qui me concerne, mais il y aurait un problème de constitutionnalité. Si le ministre me disait qu'une consultation juridique a été tenue, que des avis juridiques ont été obtenus, je lui demanderais si ce sont les mêmes avocats qui avaient conseillé le ministre-député de Bourget. À ce moment-là, je lui suggérerais de changer.

De toute façon, je pense qu'on doit mettre au départ, comme première priorité, l'efficacité de ce que nous faisons. Nous ne légiférons pas simplement pour exprimer des voeux ou des souhaits qu'on pourrait faire pour remplacer ce qui existe actuellement. Il m'apparaît désirable que la commission, le gouvernement ou l'Assemblée nationale consulte même, s'il insiste pour maintenir sa proposition, formellement le plus haut tribunal du territoire, c'est-à-dire la Cour d'appel du Québec, comme les lois le prévoient.

C'est une première préoccupation. Je ne sais pas si le ministre préfère que je donne la liste de nos autres questions avant de réagir ou s'il veut réagir maintenant.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le ministre.

M. Bertrand: Là-dessus, si le député de Marguerite-Bourgeoys me le permet, je peux peut-être réagir. J'ai effectivement pris connaissance, avec beaucoup d'intérêt, d'une entrevue accordée par le député de D'Arcy

McGee, M. Marx, relativement au nouveau serment dont il est fait état à l'article 15 du projet de loi no 90 qui se lit comme suit: "Un député peut siéger à l'Assemblée dès qu'il en est devenu membre conformément à la Loi électorale et qu'il a prêté le serment ou fait la déclaration solennelle prévus à l'annexe I." L'annexe se lit comme suit: "Je, Jean-François Bertrand, jure que je serai loyal envers le peuple du Québec et que j'exercerai mes fonctions de député avec honnêteté et justice dans le respect de la constitution du Québec." (17 h 15)

J'ai bien entendu le député de Marguerite-Bourgeoys et j'ai aussi pris connaissance de certaines des remarques du député de D'Arcy McGee. Je cite au texte ici le rapport qui en est fait dans la Presse du lundi 18 octobre 1982, dans un article sous la signature de M. Jacques Bouchard. Il est dit ceci: "Si Herbert Marx se déclare favorable à l'abolition des symboles monarchiques tant au niveau fédéral qu'au niveau provincial, il suggère cependant au gouvernement de procéder de manière légale et constitutionnelle afin d'éviter les problèmes et les tracasseries juridiques." Donc, on comprend très bien dans quel état d'esprit le député de D'Arcy McGee émettait des doutes relativement à ce serment. Je vois que le leader de l'Opposition reprend dans le même esprit les interrogations du député de d'Arcy McGee.

Ce que nous visons, tous ensemble, c'est d'en arriver à une forme de serment ou de déclaration solennelle qui, effectivement, pourrait correspondre - on pourrait toujours l'amender - à l'esprit de celui qui est proposé ici, à savoir un serment de loyauté envers le peuple du Québec et une déclaration disant que le député agira en toute honnêteté et en toute justice dans le respect de la constitution du Québec. Je pense que ce serment, cette déclaration est tout à fait convenable. En tout cas, cela me paraît correspondre beaucoup mieux à ce qu'est la réalité vécue, c'est-à-dire que nous sommes les représentants du peuple souverain; c'est à lui qu'on est redevables de nos actions, de nos gestes, de nos attitudes à l'Assemblée nationale du Québec.

Mais il y a des gens dans notre société qui ont des compétences en matières légale, juridique et constitutionnelle et qui, à l'occasion, sur une question ou sur une autre, nous amènent à réfléchir sur la portée d'amendements que nous voudrions voir apporter à nos lois. J'ai pris connaissance d'un document fort intéressant, le journal des Débats de la commission permanente de l'Assemblée nationale qui a siégé le 9 septembre 1970, dont le président était l'honorable Jean-Noël Lavoie, et qui avait pour sujet la prestation du serment. On retrouve là, à la page B-1280, des noms

assez familiers: Laurin, Bertrand, Samson, Paul. Deux personnes avaient été invitées à comparaître devant la commission de l'Assemblée nationale à titre d'experts, il s'agissait de M. Morin...

M. Lalonde: Jacques-Yvan?

M. Bertrand: ... Jacques-Yvan Morin et de Me Bernard. Ils avaient été invités par les membres de la commission pour faire connaître leur point de vue sur ce dossier. Je lis quelques extraits: "M. Morin: II convient donc de se demander qui, du Parlement fédéral ou de l'Assemblée nationale du Québec, peut modifier l'article 128." C'est un article auquel on se réfère d'ailleurs pour émettre des doutes. Il faut considérer également l'article 92, paragraphe 1, qui énumère les compétences des provinces. Or, ce premier paragraphe de l'article 92 dit clairement que la Législature du Québec, comme on l'appelait à l'époque, c'est-à-dire l'Assemblée nationale, peut modifier la constitution provinciale, la constitution du Québec, sauf en ce qui touche la fonction du lieutenant-gouverneur. C'est la seule limitation, cette fonction de lieutenant-gouverneur."

Un peu plus loin, M. Morin dit: "Le serment d'allégeance ne fait pas partie de la fonction du lieutenant-gouverneur, donc, ne se trouve pas inclus dans l'exception de l'article 92, paragraphe 1, qui dit: "Sauf la fonction du lieutenant-gouverneur". Ergo, conclusion générale sur laquelle, peut-être, nous pourrons nous entendre, l'Assemblée nationale du Québec possède le pouvoir, la compétence voulue, agissant seule, par elle-même, sans le concours d'Ottawa et sans le concours de Londres, pour modifier la constitution du Québec en ce qui concerne le serment prêté par les députés. Est-il besoin d'ajouter qu'à la conférence constitutionnelle de 1950 tous les experts, toutes les provinces et le gouvernement fédéral ont été d'accord pour dire que cet article 128 peut être modifié, en ce qui concerne les provinces, par les provinces agissant seules et, en ce qui concerne le serment des députés fédéraux, par le Parlement fédéral agissant seul? C'est une conclusion unanime des provinces et du gouvernement fédéral."

Plus loin, M. Bernard dit ceci: "II est clair, cependant, que le fait qu'un député ou un lord aient voté sur un projet de loi sans avoir au préalable prêté serment n'invalide en rien cette loi si elle a reçu par la suite la sanction royale." Un peu plus loin, il dit: "Par exemple, je donne une citation de Paul Gérin-Lajoie, qui a fait l'étude la plus complète du pouvoir d'amendement et qui affirme bien catégoriquement que la Législature a tous les pouvoirs constituants sur la constitution interne du Québec." Un peu plus loin: "Finalement, il est intéressant de noter que la Colombie britannique a modifié les exigences de l'article 128 en permettant à certaines personnes de faire une déclaration solennelle à la place du serment. Personne n'a jamais contesté la validité de cette disposition."

Un peu plus loin, Me Bernard dit: "Enfin, je vous donne l'opinion de 1950 en vous citant les principaux experts constitutionnels qui faisaient partie des travaux de la conférence constitutionnelle à ce moment, M. Varcoe, M. Ollivier, M. Driedger, M. Magove, M. Arthur Beauchesne, le professeur Frank Scott, le doyen Cronkite. À l'unanimité, sans hésitation, ils ont convenu que l'article 128 relevait en partie du Parlement fédéral pour les députés fédéraux et en partie des Législatures provinciales pour les députés provinciaux." Plus loin, M. Morin revient: "II est évident que si jamais il y avait une contestation sur la validité d'une loi, et je ne vois pas d'autres questions qui pourraient surgir à ce propos, cela serait porté devant les tribunaux compétents. Dans ce cas, je n'ai aucune hésitation à dire que les tribunaux, étant donné la jurisprudence - et là elle va dans notre sens, elle ne va pas contre nous -n'iraient pas, comme le veut l'expression, "look behind the legislation". Ils ne vont pas considérer le processus par lequel la loi a été adoptée. Cela est une règle de droit qui est admise dans l'ensemble des pays qui ont hérité du droit britannique. Donc, je n'ai pas la moindre hésitation à dire que le tribunal se déclarerait incompétent, disant: J'ai devant moi une loi sanctionnée par Sa Majesté - puisque nous sommes encore sous ce régime - et je n'ai pas à m'interroger sur la façon dont elle a été adoptée, sur la compétence de tel député ou sur son état d'esprit au moment où il a voté."

Me Bernard: "Pour une prochaine Législature, si des députés siégeaient sans avoir prêté serment, je pense que la première conséquence serait de donner un moyen à des avocats qui veulent contester les lois. Ce serait possible, je pense, de soulever cette question devant un tribunal. Je suis certain que le tribunal répondrait: La procédure parlementaire, jamais une cour dans notre système ne s'en occupe. S'il y a une sanction royale, s'il y a eu adoption par l'Assemblée nationale, on ne se préoccupe pas de la procédure parlementaire."

M. Bernard toujours: "Je cite Halsbury, par exemple, qui dit que les tribunaux ne vont jamais examiner la procédure parlementaire. Halsbury donne une longue série de causes où des avocats, comme je viens de le mentionner, soulèvent la question, mais ça ne va pas plus loin parce que les tribunaux disent: Nous ne nous introduisons pas dans la procédure parlementaire."

M. Morin, plus loin: "La question en est une de moyens. Tout le monde s'accorde

pour dire que ce serment est vieillot, que c'est désuet." Je pense que ce sont des choses qu'on dit encore en 1982, que cela n'a plus sa place dans le système parlementaire actuel. Le moyen que nous vous proposons, et il y en a plusieurs, est très simple: Une simple loi de la Législature et Me Bernard a dit également qu'une simple modification au règlement de la Chambre suffit pour abolir. Plus loin, Me Bernard parle: "Je pense que le premier obstacle ou la première conséquence qui arrivera est que cette doctrine universellement reconnue, où il n'y a réellement pas d'exception, cette doctrine que les tribunaux ne s'ingèrent pas ou n'examinent pas ou ne revisent pas la procédure parlementaire pour savoir s'il y avait eu véritablement trois lectures, s'il y avait quorum, etc., c'est une doctrine qui entrera en jeu."

Les deux experts qui témoignaient étaient amenés à émettre toute une série de commentaires sur cette question du serment et, ensuite, de la capacité plus ou moins grande des tribunaux de se prononcer sur une loi qui aurait été adoptée par l'Assemblée ou une Législature et sur des modifications qui auraient été adoptées à la procédure parlementaire. On dit - et c'est le dernier extrait que je voudrais donner - "La conclusion que l'on peut tirer - c'est M. Morin qui parle - de tout cela est qu'il y a plusieurs façons de résoudre le problème. Premièrement, c'est de ne pas insister pour que les députés prêtent le serment. C'est une solution qui était possible, mais qui a été écartée. C'était la plus simple et celle que les députés péquistes proposaient. Comme elle a été écartée, il y a un second moyen qui est d'amender le règlement, moyen également beaucoup moins compliqué que le troisième qui fait appel à une loi spéciale. Enfin, il y aurait le recours aux tribunaux qu'a suggéré Me Paul. Personnellement, je trouve que cela risquerait de faire traîner en longueur un problème pour lequel il ne semble pas y avoir de doute raisonnable. Il ne semble pas y avoir un tel doute qu'on ait à faire appel aux tribunaux de la sorte. C'est une question qui, il me semble, relève de la prudence du gouvernement."

Donc, parlons-en, de la prudence du gouvernement. Effectivement, dans le projet de loi 90, a l'article 15 avec l'annexe 1 propose un nouveau serment ou une nouvelle déclaration solennelle qui ne ferait pas allusion à la reine. Je dois dire très franchement aux députés de l'Opposition que des avis à la fois verbaux et écrits sur cette question m'amènent, comme parrain du projet de loi, à être prudent dans l'introduction de ce nouvel article 15, non pas que les quelques extraits que je viens de lire, qui sont de Me Jacques-Yvan Morin et de Me Bernard, n'aient pas toute leur valeur, mais je crois qu'il conviendrait probablement qu'avant de revenir à l'Assemblée nationale avec le projet de loi 90 pour discussion en deuxième lecture, je puisse véritablement, à la lumière des propos qui ont été émis par le député de D'Arcy McGee et à la lumière de la question qui m'est posée par le député de Marguerite-Bourgeoys, à la lumière aussi des commentaires qui avaient été faits dès 1970 par deux experts en la matière, demander à des juristes de gratter davantage cette question pour être en mesure d'apporter une réponse claire et définitive relativement au caractère plus ou moins légal, plus ou moins constitutionnel de ce nouveau serment d'allégeance. Dans ce contexte, je pense répondre à la question du député de Marguerite-Bourgeoys en lui indiquant que je comprends très bien que des constitutionnalistes et des juristes puissent nous inciter à une certaine prudence. C'est notre rôle, je crois, comme gouvernement, d'évaluer la portée de l'article 15.

Il y a quelque chose que je dois indiquer, pour terminer. C'est aussi assez intéressant. Si on appliquait à la lettre l'article 128, je crois, le député devrait prêter le serment d'allégeance devant le lieutenant-gouverneur, en présence du lieutenant-gouverneur. Or, on sait très bien que, depuis de nombreuses années, nous prêtons serment devant le secrétaire général de l'Assemblée et cela... Pardon?

M. Gratton: Souhaitons qu'on n'agisse pas illégalement.

M. Bertrand: C'est pour vous dire qu'il y a des traditions qui ont été modifiées et à mon avis, la question demeure totale puisque, effectivement, si on avait suivi à la lettre les dispositions de la constitution à cet effet, c'est toujours devant le lieutenant-gouverneur que les députés auraient dû prêter serment. C'est un autre aspect qu'il faut considérer et là-dessus, je m'engage à faire en sorte que d'ici à ce que nous revenions à l'Assemblée nationale et que nous discutions en deuxième lecture le projet de loi no 90, j'aie davantage de renseignements de la part des juristes qui s'y connaissent en la matière.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Sur le même sujet?

M. Lalonde: Oui.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Marguerite-Bourgeoys. (17 h 30)

M. Lalonde: Sur le même sujet. La suggestion que je faisais, c'est justement pour éviter ce que le ministre est en train de faire, à savoir de nous lancer nous-mêmes

dans l'argumentation juridique. Non pas que je n'accorde aucune importance à l'opinion de celui qui est devenu ministre du Parti québécois et de l'autre qui est devenu secrétaire général - je pense que Me Bernard, c'est le même à qui vous vous référez - du Conseil exécutif. Non pas que je croie que leur opinion puisse n'avoir aucune valeur parce qu'ils sont membres du Parti québécois; mais vous savez que nous pourrons trouver cinq éminents juristes d'un côté et cinq éminents juristes de l'autre pour nous dire le contraire. Afin d'éviter ce qui est arrivé, je faisais la suggestion de demander à la Cour d'appel, comme la loi le prévoit, son opinion. Seul le Procureur général du Québec pourrait le faire. Est-ce que le ministre exclut cette possibilité? Ce serait la "Prudence" avec un grand "P".

M. Bertrand: Pour l'instant, je préfère indiquer au député de Marguerite-Bourgeoys qu'il m'apparaît plus convenable que nous continuions de faire notre travail en utilisant les services de ces juristes - que ce soit au ministère de la Justice ou ailleurs - qui sont en mesure de nous éclairer.

M. Lalonde: Dites-moi combien vous allez en consulter. J'en aurai un nombre semblable...

M. Bertrand: C'est souvent une phrase qu'on répète: Vous pouvez prendre une centaine de juristes, il y en a 50 qui vont vous dire une chose et 50 qui vont vous dire une autre chose. Mais je crois que c'est important de discuter d'abord de cette chose entre nous. Il ne m'apparaîtrait pas approprié, à ce moment-ci, de prendre une décision relativement à une demande qui serait faite auprès d'un tribunal, de quelque nature qu'il soit.

M. Bisaillon: C'est sur le même sujet.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Les deux sont sur le même sujet. M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: Très brièvement. Comme le leader du gouvernement vient de s'engager à gratter, dans son grattage, est-ce qu'il ne pourrait pas aussi poser la question différemment? La question s'est toujours posée: Est-ce qu'on peut, au plan constitutionnel, enlever ce qu'il y a déjà pour remplacer ça par autre chose? Est-ce qu'on ne pourrait pas en même temps poser cette question: S'il y avait le choix? Autrement dit, si, dans la loi, le serment tel qu'on le connaît était encore là, mais qu'il y avait une possibilité de choix par les députés, est-ce que ça modifierait les renseignements qui pourraient nous être fournis? Parce que c'est une autre question pour laquelle on attend depuis longtemps, ça aussi.

M. Bertrand: Retenu!

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Gatineau.

M. Gratton: M. le Président, simplement pour insister un peu auprès du leader du gouvernement, non pour qu'il s'engage aujourd'hui à référer la chose à la Cour provinciale, mais pour lui souligner l'importance que pourrait revêtir une décision de conserver l'article 15, tel qu'il le propose, dans le projet de loi no 90. S'il devait y avoir contestation devant les tribunaux sur la constitutionnalité, comme le soulignait le député de Marguerite-Bourgeoys, on a déjà l'avis d'un expert en la matière, soit le député de D'Arcy McGee, qui ne conclut pas à l'inconstitutionnalité de la chose, mais qui émet des doutes sérieux à cet égard. Il donne deux exemples de ce que pourraient être les conséquences de l'adoption de l'article 15, si quelqu'un devait s'aviser de contester devant les tribunaux la légalité des lois adoptées par l'ensemble des parlementaires. En supposant que les tribunaux devraient éventuellement trancher et décider qu'effectivement le nouveau serment n'est pas constitutionnel, un peu comme dans le cas de la loi 101, dans le chapitre qui touche les tribunaux, à l'Assemblée nationale, donc que cette section est inconstitutionnelle, on pourrait faire invalider toutes les lois votées par l'ensemble des parlementaires.

Ce n'est peut-être pas un problème immédiat, puisque ça prend un certain temps, mais le député de D'Arcy McGee faisait allusion aussi à ces nouveaux membres de l'Assemblée nationale qui viendront nous rejoindre, probablement au printemps prochain, comme résultat des élections partielles qu'il y aura dans au moins deux ou trois circonscriptions électorales.

Une voix: Peut-être quatre.

M. Gratton: Peut-être quatre, cinq, six, selon le résultat de l'élection du 7 novembre à Trois-Rivières, sait-on jamais. A ce moment-là, ces nouveaux députés pourraient être placés, en supposant que la loi 90 est déjà adoptée et cela sera sûrement le cas, dans une situation où leur immunité parlementaire ne serait pas assurée. On pourrait leur faire des procédures en cour s'il devait s'avérer que la chose est anticonstitutionnelle, ce qui priverait ces députés de leur immunité. Ce sont des choses quand même assez graves. Il me semble qu'il y aurait lieu d'être très prudent. Je réitère ce que disait le député de Marguerite-Bourgeoys. On me considère un

peu partout comme une espèce de fédéraliste inconditionnel, ce que je me garde bien d'être, mais je ne suis sûrement pas un royaliste, loin de là. Il me semble que cela est tout à fait dépassé que ce serment d'allégeance à la reine d'Angleterre et je serais le premier à voter à deux mains pour qu'on fasse disparaître toute espèce de référence à cela. Je voudrais bien qu'en faisant cela, on s'assure qu'on le fasae dans la légalité.

M. Vaugeois: C'est intéressant, cela, M. le Président.

Une voix: Ne pensez pas que ce n'est pas beau!

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le leader.

M. Bertrand: C'est correct.

M. Lalonde: Je comprends qu'on en rediscutera.

Une voix: La Cour d'appel vient de rendre sa décision!

Le Présidant (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Trois-Rivières.

M. Vaugeoia: M. le Président, j'ai failli être sauvé par les micros... Je voudrais profiter de ces experts qu'il y a autour de la table pour poser une question d'information. Comment est prévue la façon de prêter serment? Est-ce qu'on a prévu dans nos lois, nos pratiques une façon de prêter serment? On me répond: sur la Bible. Est-ce qu'il est prévu quelque part qu'on doive prêter serment sur la Bible?

Une voix: Vous voulez le prêter sur quoi?

M. Vaugeoist Ce matin...

M. Lalonde: Voulez-vous une opinion juridique? Cela va coûter cher.

M. Vaugeois: Non, je veux une opinion de parlementaire.

Une voix: Sur quoi voudriez-vous prêter serment?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Devant les tribunaux, vous avez la possibilité soit du serment, soit de la déclaration solennelle.

M. Blank: Non, mais ce dont il parle c'est sur quoi prêter serment, soit sur la Bible, etc. Dans mon cas, est-ce que c'est sur l'Ancien Testament seulement ou est-ce que c'est sur le Nouveau Testament? Je vais vous donner une opinion personnelle. Le mot serment, c'est un acte de foi envers quelque chose: le bon Dieu, Mahomet pour l'Islam, une chose religieuse. Cela veut dire que la personne qui prête ce serment a peur que quelque chose lui arrive si elle ne dit pas la vérité. Un serment, c'est quelque chose de religieux suivant la religion de la personne: la Bible, le Nouveau Testament, l'Ancien Testament ou le Coran. N'y a-t-il pas un groupe de Chinois qui le prêtent en faisant tourner des poulets au-dessus de leur tête? Cela dépend de la foi de la personne. Voilà mon opinion.

M. Vaugeois: M. le Président.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Trois-Rivières.

M. Vaugeois: Puisque le député de Marguerite-Bourgeoys offrait ses services tout à l'heure, est-ce qu'il serait d'accord avec l'interprétation de son collègue?

M. Lalonde: "On a one hand." Non, j'écoute ce que mon collègue dit, je vais y réfléchir et je pourrai vous donner une réponse demain.

M. Vaugeois: Je repose la question, M. le Président. Est-ce que le député de Saint-Louis a prêté serment sur la Bible ou sur l'Ancien Testament?

M. Blank: J'avais demandé au secrétaire général de retourner la Bible du côté de l'Ancien Testament. Du côté droit, c'est le Nouveau Testament et de l'autre côté, c'est l'Ancien Testament. J'ai demandé de retourner la Bible et de prêter serment sur l'Ancien Testament.

M. Vaugeois: La question peut paraître légère, M. le Président, mais c'est qu'il y a déjà un député de Trois-Rivières qui n'a pu siéger pour cette question du serment. À deux reprises, on l'a expulsé. Moi, évidemment, je suis bien installé, mais, si je vérifie mes arrières de tout côté actuellement... Je pose la question suivante: Si un parlementaire de religion musulmane arrivait, est-ce qu'on accepterait le Coran? Est-ce que c'est prévu quelque part dans nos lois? C'est la question que je posais, car le problème s'est déjà posé au Parlement.

M. Lalonde: On fera une recherche.

M. Blank: Savez-vous que dans l'ancien Code civil, qu'on a amendé récemment, on ne devait pas seulement prêter serment, mais on devait déclarer qu'on avait une croyance en Dieu et qu'on croyait aux punitions et aux "rewards" après le décès. Si un témoin

disait qu'il ne croyait pas en cela, il n'avait pas le droit de témoigner. On a changé le Code civil en 1964 et c'était là jusqu'en 1964.

M. Lalonde: Cela va. Des voix: Ah!

M. Vaugeois: J'aimerais continuer avec le député de Marguerite-Bourgeoys, mais privément. (17 h 45)

Le quorum

M. Lalonde: M. le Président, le leader du gouvernement nous a demandé de lui transmettre nos questions. Il y a la question du quorum - du quorum, pas du Coran - à l'Assemblée. J'attire votre attention sur le rapport daté du 17 septemre 1981 de la sous-commission de l'Assemblée nationale où, à l'article 11, on prévoyait que le quorum de l'Assemblée ou de sa commission plénière serait du quart de ses membres, y compris le président, et on disait en plus: "Lorsqu'une commission de l'Assemblée siège, le quorum de l'Assemblée ou de sa commission plénière est du sixième de ses membres, y compris le président." Cela avait été accepté par notre sous-commission avec la remarque suivante: "Cependant, la sous-commission s'interroge sur la possibilité d'introduire un quorum obligatoire seulement pour l'ouverture des séances et lors des décisions de l'Assemblée." Mais on n'avait jamais suggéré de réduire le quorum à la si simple expression d'un dixième des membres, 12,2, c'est-à-dire 13, comme le prévoit le projet de loi no 90. J'aimerais que le ministre, aujourd'hui ou demain, nous fasse la démonstration ou prenne note de notre préoccupation là-dessus.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le ministre.

M. Bertrand: Effectivement, M. le Président, la question du quorum est un des éléments, quant à nous, qui doit être intégré à toute la réforme parlementaire. Si on demande aux députés d'assumer de nouvelles responsabilités dans le cadre de nouvelles commissions parlementaires qui, pour la plupart d'entre elles, vont être autonomes et qui auront beaucoup de boulot à accomplir, il ne faudrait pas fixer un quorum à l'Assemblée nationale qui soit à ce point élevé qu'à toutes fins utiles, on empêcherait les députés de vaquer à d'autres occupations en commission parlementaire dans le cadre du projet de réforme parlementaire qu'on a soumis.

Évidemment, si le quorum est très élevé, on risque d'empêcher l'Assemblée de siéger ou de paralyser le travail des commissions. Par ailleurs si on le met très bas, on pourrait donner une image, à un moment donné, de laisser-aller ou laisser planer des doutes, en tout cas, sur notre capacité comme parlementaires d'être assidus aux travaux de la Chambre. Mais il faut tout de même savoir que, maintenant - enfin, je dis maintenant; je devrais dire depuis une quinzaine d'années - il y a eu une accentuation du travail en commissions parlementaires, ce qui a amené les députés à participer beaucoup plus aux travaux des commissions parlementaires et à avoir le sentiment de travailler beaucoup plus lorsqu'ils sont en commission parlementaire que lorsqu'ils sont à l'Assemblée nationale, surtout avec le pourcentage qu'on avait pour maintenir le quorum. C'est évident qu'avec la réforme parlementaire, il m'apparaît que maintenir le quorum au niveau où il est en ce moment, c'est hypothéquer, à toutes fins utiles, la réforme parlementaire.

Le pourcentage de 10% nous paraît raisonnable. J'ai des exemples. La Chambre des communes à Ottawa: 282 sièges, le quorum est de 20 députés plus le président, ce qui fait nettement plus bas, à peu près 7%. À la Chambre des communes de Londres: 635 sièges, 40 députés.

M. Lalonde: II n'y a pas de place pour tout le monde, vous le savez. Vous y êtes déjà allé.

M. Bertrand: 40 députés sur 635, on doit être aussi à peu près autour de 7%. L'Assemblée nationale de France: 491 sièges, jamais de quorum, sauf lors des votes. On demande la majorité absolue sur le nombre de sièges effectivement pourvus. Il n'y a donc pas de quorum. À l'Assemblée législative, en Ontario: 125 députés, donc à peu près le même nombre qu'ici et le quorum est de 20 députés avec le président, 16%. L'Assemblée législative, en Colombie britannique: 57 sièges, 10 députés plus le président, ce qui fait à peu près 16% et en Alberta, c'est plus élevé, il y a 79 sièges, 20 députés plus le président, soit 25%.

Le pourcentage de 10% nous apparaît convenable si on compare à d'autres Parlements et surtout - c'est surtout là l'élément important - si on arrive avec une réforme parlementaire qui forcera les députés à beaucoup plus d'assiduité, de présence et de participation dans les nouvelles commissions parlementaires que nous créerons.

M. Lalonde: Est-ce que vous êtes conscient que la proposition que vous faites prévoit un moins grand nombre de membres aux commissions parlementaires?

M. Bertrand: C'est exact. On s'est amusé là-dessus, on a émis des hypothèses.

M. Lalonde: Je pensais que c'était sérieux.

M. Bertrand: On a fait des simulations.

M. Lalonde: Là, c'est de la dissimulation.

M. Bertrand: Non, parce qu'on va vous le raconter, on n'a rien à cacher.

Une voix: Là-dessus.

M. Bertrand: On a fait des simulations. Par exemple, trois commissions siègent, deux commissions étudient des lois article par article et une commission porte sur des initiatives parlementaires. Nombre maximum de députés retenus par ces travaux: parti ministériel 34, Opposition 23, ce qui fait 57 membres.

Une voix: Peut-être un de plus.

M. Bertrand: 58. Ajoutez un à chaque fois. Une autre hypothèse: quatre commissions siègent. Deux commissions étudient des lois article par article, une commission porte sur des initiatives parlementaires et une commission où l'on a convoqué le Vérificateur général. Parti ministériel 41; Opposition 26, plus un indépendant, ce qui fait 68.

Hypothèse c): neuf commissions siègent...

M. Lalonde: 250 députés.

M. Bertrand: ... mais pas la Chambre. Neuf commissions siègent: une commission des lois, pour étude article par article, deux commissions d'initiative parlementaire, une commission des lois pour audition publique, une commission des finances publiques, une commission des engagements financiers, une commission du vérificateur, une commission des organismes autonomes et une commission ad hoc. Parti ministériel: 76 personnes; Opposition: 46, ce qui donne 122. Plus un, cela fait 123!

M. Blank: Puisqu'on parle de téléviser les commissions, où allez-vous trouver tout cet équipement?

M. Bertrand: Le dossier de la télédiffusion est loin d'être réglé. Vous avez d'ailleurs vu dans le mémoire que la phrase est assez sibylline: selon des mécanismes à déterminer.

M. Lalonde: Bon, voilà pour le quorum. Ce n'est pas accepté.

M. Bisaillon: Est-ce que je pourrais passer une remarque? Tantôt, quand on a demandé le partage du temps et le fonctionnement, on avait compris qu'en trois heures, demain, on pourrait probablement passer à travers le projet de loi no 90. Est-ce que je pourrais vous faire une suggestion sur le fonctionnement? J'ai des commentaires à faire sur 18 articles. Ne pourrait-on pas les prendre par section pour que les députés fassent leurs commentaires sur chacune des sections et qu'après, le leader du gouvernement réagisse globalement? On pourrait peut-être le faire plus rapidement. S'il y a des commentaires qui ont déjà été faits par un député, cela nous évite de les faire.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Est-ce que cela vous va?

M. Bertrand: Ce que je préférerais, M. le Président, si cela peut faciliter les travaux de la commission, c'est que chaque député fasse les remarques qu'il juge approprié de faire sur le projet de loi no 90, tel qu'il est en ce moment rédigé, et qu'à la toute fin, prenant en note les différentes remarques qui auront été faites, je puisse me garder un certain temps pour relever un certain nombre de choses.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): D'accord?

M. Lalonde: Alors, on recommence?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Je comprends, les analystes ont des préoccupations particulières. Voilà. Il y a l'endroit où pourront siéger l'Assemblée nationale et les commissions parlementaires, à l'article 7.

M. Bertrand: Et l'article 14.

M. Lalonde: Cette question a été soulevée à propos de la commission des transports qui siège actuellement à Québec. Malgré notre désir de satisfaire aux souhaits des membres, de la population, de nos militants, etc., nous avons cru ne pas pouvoir accéder à cette suggestion et je me souviens d'en avoir discuté avec le leader du gouvernement. Sans un cadre de fonctionnement bien précis, il est assez difficile de voir comment même le leader du gouvernement pourra fonctionner. Si la demande de tenir une commission parlementaire dans une région venait de chacun des ministres, dans le cadre actuel des commissions parlementaires, qui veut aller visiter sa région ou des députés qui veulent aussi aller dans les régions, on se trouverait en fait à éparpiller énormément

les travaux. Ce serait difficile à gérer et je pense qu'on doit dans l'hypothèse où on adopterait l'article tel qu'il est suggéré, on doit prévoir et même formuler un cadre de fonctionnement qui contiendra les critères sur lesquels le leader du gouvernement et les commissions elles-mêmes, lorsqu'elles seront plus autonomes, devront s'appuyer pour décider d'aller siéger à l'extérieur.

Il y avait aussi les adjoints parlementaires. On avait, à la sous-commission, décidé d'enlever le deuxième alinéa - je ne me souviens plus du numéro -de l'article 24 de l'avant-projet: Le nombre d'adjoints parlementaires ne doit toutefois pas excéder douze. On avait dû retrancher le deuxième alinéa. Je ne pense pas que cela voulait dire, en tout cas, en ce qui me concerne, comme membre de cette ancienne sous-commission, qu'on prévoyait que le gouvernement allait nommer deux adjoints parlementaires à chacun des ministres. Si on laisse la porte ouverte, il va falloir qu'on nous explique pourquoi on devrait ouvrir cette porte. Donc, le leader du gouvernement doit s'attendre que nous ayons de très sérieux doutes, très sérieuses préoccupations quant à cet article.

Il y a aussi le rôle de l'adjoint parlementaire. Fort bien, sauf qu'il n'est pas ministre. Il ne peut pas engager le gouvernement lors de l'étude d'un projet de loi. Et même si on a eu certaines expériences agréables, d'autres moins, mais certains précédents... Je me souviens du député de Mercier, alors qu'il était adjoint parlementaire au ministère de la Justice, qui avait défendu un projet de loi. Cela va, on en a fait l'expérience, mais je vois mal que l'habitude se prenne que ce soient les adjoints parlementaires désormais qui viennent défendre leur loi.

La question du bureau, c'est fort bien, le jurisconsulte aussi.

Une voix: ...

M. Lalonde: On n'est pas dans la réforme parlementaire, on est au projet de loi 90. Il y a d'autres questions que les autres membres pourront soulever. En ce qui me concerne, ce sont les principales préoccupations que j'ai à ce stade-ci.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Les travaux de l'Assemblée sont ajournés à demain matin, 10 heures. On va faire le tour, conformément à l'entente. Chaque député aura le droit de parole sur le projet de lai. Merci.

(Fin de la séance à 18 heures)

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