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Version finale

36e législature, 1re session
(2 mars 1999 au 9 mars 2001)

Le mercredi 15 mars 2000 - Vol. 36 N° 24

Audition du président-directeur général de la Régie des rentes du Québec sur le rapport de gestion 1998-1999 conformément à la Loi sur l'imputabilité des sous-ministres et des dirigeants d'organismes publics


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Table des matières

Journal des débats


(Neuf heures trente-trois minutes)

Le Président (M. Kelley): Je constate le quorum des membres de la commission de l'administration publique. Je déclare la séance ouverte, en rappelant le mandat de la commission. La commission est réunie afin d'entendre le président-directeur général de la Régie des rentes du Québec en vertu de la Loi sur l'imputabilité des sous-ministres et des dirigeants d'organismes publics et, à cette fin, d'examiner le rapport de gestion 1998-1999 et cette unité autonome de service.

M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements ou des membres temporaires à la commission aujourd'hui?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Gautrin (Verdun) a été désigné membre temporaire pour la séance.

Le Président (M. Kelley): Maintenant, je vais juste très rapidement convenir d'un ordre du jour. Il y a quelques remarques préliminaires, mais un exposé, si j'ai bien compris, de M. Morneau, de 25 à 30 minutes pour le fonctionnement de la Régie des rentes du Québec. Ensuite, il y aura des échanges avec les membres de la commission. Il faut ajourner vers 12 h 20, plus ou moins, parce que le caucus du Parti libéral aura lieu ici à 12 h 30. Alors, ça va nous donner une dizaine de minutes pour libérer la salle pour ceux qui doivent quitter et d'autres qui vont rester.


Remarques préliminaires


M. Geoffrey Kelley, président

Juste une remarque très préliminaire de notre côté. Merci beaucoup, M. Morneau, pour avoir accepté notre invitation. Les unités autonomes de service, c'est le modèle dont le gouvernement parle dans le projet de loi n° 82 comme d'un modèle à privilégier à l'avenir. Alors, comme membres de la commission de l'administration publique, nous avons jugé bon de mieux connaître nos unités autonomes de service.

Alors, de mémoire, je pense que vous êtes la sixième. Je voudrais dire qu'il y a une grande logique scientifique derrière notre choix, mais ce n'est pas du tout le cas. On prend la liste et on dit: Le prochain va être celui-là. Alors, il n'y a aucune science, mais je pense que c'est vraiment dans le but d'avoir un exercice pédagogique, de mieux comprendre la différence entre une unité autonome de service et les systèmes qui existaient avant et mieux comprendre votre business. Alors, c'est vraiment dans cette optique que nous avons lancé l'invitation aujourd'hui.

Si j'ai bien compris, vous êtes en mesure de faire une présentation sur la business, le fonctionnement de la Régie des rentes du Québec. Alors, sur ce, je vais vous donner la parole, M. Morneau.


Exposé du directeur-général de la Régie des rentes du Québec


M. Guy Morneau

M. Morneau (Guy): Merci beaucoup, M. le Président. Je suis très heureux d'être parmi vous aujourd'hui pour échanger sur notre business, comme vous dites, notre centre d'activité, nos préoccupations quotidiennes.

Alors, si vous permettez, je présenterais les gens qui m'accompagnent. À ma droite, vous avez Mme Sylvie Barcelo, qui est vice-présidente à l'organisation, donc tout ce qui est ressources humaines, matérielles, financières et informationnelles; vous avez M. Marc Lacroix, qui est vice-président aux opérations – et on verra que c'est une grosse business d'opérations, la Régie des rentes; et vous avez M. Louis Duclos, qui est vice-président aux politiques et programmes, qui s'occupe plus particulièrement des régimes complémentaires de retraite également.

Derrière moi – je ne vous les nommerai pas tous – vous avez l'équipe de direction de la Régie, donc ceux qui, en vertu de la loi n° 82, comme vous le dites, vont avoir un rôle d'imputabilité puis de responsabilisation plus grand à jouer, une transparence également. Alors, je trouvais ça utile et pertinent, je pense, qu'ils vous entendent sur vos préoccupations, sur vos enjeux et qu'ils puissent, à l'occasion, vous donner leur point de vue si jamais vous en requerriez la nécessité.

Or, comme je l'ai dit, je suis assez heureux et fier de partager le quotidien de la Régie avec les parlementaires et on le fera abondamment au cours des prochaines heures. D'autant plus que c'est un lieu agréable, c'est un lieu un peu historique. C'est un peu ici, si ma mémoire est fidèle, qu'a été prise la décision de créer le Régime de rentes du Québec. Alors, c'est assez ironique, après tant d'années, qu'on se retrouve pour faire un bilan, et j'espère...

Mme Dionne-Marsolais: C'est symbolique.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Morneau (Guy): D'accord, disons que c'est symbolique, et on verra que ceux qui ont pris ces décisions-là avaient une grande capacité de visionnaires, et on verra pourquoi.

Alors, comme je vous l'ai dit, on aura l'occasion d'échanger tantôt sur les résultats et les performances de la Régie à plus d'un point de vue, et ça, je pense qu'on va le faire avec toute la transparence et, j'allais dire, la clarté que mérite l'exercice.

Mais avant, je pense, qu'on tombe dans l'analyse un petit peu plus pointue des résultats et des projets de la Régie, j'aimerais ça vous présenter, si vous le permettez, la vision de la Régie des rentes non seulement au chapitre des principaux programmes qu'elle administre, mais aussi en tant que vision future, parce que j'ai cru comprendre que vous étiez également membres de la commission parlementaire qui étudie le projet de loi n° 82 qui aura une grosse incidence. Alors, j'aimerais être capable de situer notre action et la vision future de notre organisation en regard de ce projet-là.

Alors, on y va, si vous voulez? Le plan de la présentation, je vais essayer de le faire très rapidement, même si on va aborder des enjeux et des problématiques qui sont assez lourdes et assez complexes, et je pense que ça défie l'imagination que de vouloir résumer en quelques mots et en quelques syllabes et même en un graphique des systèmes beaucoup plus complexes que c'est le cas.

Mais, en général, ce que j'essaierai d'aborder au cours de la présentation, c'est trois aspects bien clairs: les enjeux qui se dessinent, une vision qu'il est nécessaire de se donner si on veut être capable de garder le cap dans ces grands moments de tourmente et, finalement, un modèle de performance à instaurer parce qu'on va voir que les défis auxquels on va être confrontés sont énormes et que, à partir de ce moment-là, il va falloir compter sur une organisation qui est des plus performante pour être en mesure de relever ce défi-là sans heurt pour l'ensemble des Québécois.

Alors, le premier tableau que je voulais vous mettre à l'horizon...

Une voix: We're getting old.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Morneau (Guy): Pourquoi? Vous ne le voyez pas? C'est trop petit?

Mme Dionne-Marsolais: Non, non, non, je le vois très bien. C'est le titre que je n'aime pas.

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: Vous le voyez trop bien.

Mme Dionne-Marsolais: Avez-vous déjà vu une femme qui trouvait que c'était un beau titre, ça? Ha, ha, ha!

M. Morneau (Guy): Ha, ha, ha! Vous avez tout à fait raison.

Mme Dionne-Marsolais: C'est un commentaire très sexiste que je fais.

M. Morneau (Guy): Mais, nous, on est très business, comme on dit. Donc, on va appeler un chat un chat.

Le Président (M. Kelley): Les constats.

Mme Dionne-Marsolais: Les gars vieillissent mieux, c'est ça que vous allez me dire, là? Non?

M. Morneau (Guy): Je ne sais pas s'ils vieillissent mieux, mais ça fait aussi mal qu'à une femme, ça, je peux vous le dire.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Morneau (Guy): Alors, il y a un grand philosophe qui a dit qu'une société était souvent à l'image de sa démographie. Alors, c'est bien évident qu'une variable qui influence le plus lourdement possible, je pense, l'avenir d'une société, c'est sa démographie. Comme on le voit dans le tableau présent, on voit bien qu'on s'en va vers une situation passablement différente de celle qu'on connaît présentement en termes de répartition ou de caractéristiques de la population.

On voit, par exemple, que, actuellement, au Québec, on compte environ 4,7 travailleurs actifs, donc en âge de travailler – je veux dire, entre 18 et 65 – par rapport aux gens de 65 ans et plus, et on s'en va pour diminuer ça de façon spectaculaire. On va aller, en 2050, à 2,1.

(9 h 40)

On voit qu'on est pire, si on peut s'exprimer ainsi, que la tendance nord-américaine, reste du Canada, États-Unis. On voit qu'en Europe c'est déjà commencé et spécialement au Japon qui s'en va vers des sommets, 1,9 à 1,6. C'est un peu inquiétant. On voit que, depuis un certain temps, les Japonais ont quelques petits problèmes. Alors, si on veut s'inspirer puis être capable d'évoluer dans ce monde-là, bien, il va falloir être vigilant, actif et très proactif par rapport à ça.

Alors, le seul message que je voulais que vous reteniez là-dedans, c'est qu'on vit une rupture par rapport à une situation qu'on a connue depuis les années 1966, date de l'implantation du Régime de rentes. Et ça, c'est important d'en prendre acte, et c'est important que la population en général en prenne acte. Donc, un gros défi, pour la Régie, de communication, un gros défi de vulgarisation et un gros défi, j'allais dire, en termes de volume appréhendé. Parce qu'on est, comme vous le savez, dans une business où on parle de retraités, on parle de sécurité du revenu à la retraite.

L'autre caractéristique qui me semble fondamentale – on ne l'a pas oubliée également – qui va caractériser l'ensemble de nos opérations dans les prochaines années, c'est le rythme de ce vieillissement-là. On a beau penser, puis c'est vrai, que la tendance, elle est mondiale – tous les pays développés de l'OCDE, vivent ce même phénomène là – mais, si on regarde la réalité, c'est qu'on semble vouloir le vivre beaucoup plus rapidement et beaucoup plus intensément au Québec. Et ça, bien, ça veut dire qu'il va falloir s'adapter plus vite et mieux, et probablement les premiers, par rapport à d'autres phénomènes. Alors, seul le Japon a une expérience aussi courte – le fait de passer de 12 % de la population de 65 ans et plus, par rapport à la population totale de 18 à 64, à 24 % – seul le Japon l'aura fait dans une période plus courte que nous, soit 25 ans. Nous, le Québec, on le fera en 35 ans.

Une voix: ...

M. Morneau (Guy): Pardon?

M. Gautrin: ...le choc que ça a connu au Japon, que ça va connaître au Japon.

M. Morneau (Guy): Exact. Et ils le vivent encore très mal. Ils ont de la misère à trouver le modèle. C'est très rapide. Dans l'histoire d'un peuple, c'est très, très, très rapide. On n'a jamais vu ça. Alors, nous, on le fera en 35 ans; le Canada le fera en 45. On voit les Allemands, on voit les Français puis on voit les Britanniques qui ont une période beaucoup plus longue. On a souvent tendance à se comparer aux Européens en disant: Pourquoi on s'énerve? Eux autres, ils vivent ça, ce genre de phénomène là, de vieillissement. Bien, ils le vivent avec, je pense, une espérance de temps et d'adaptation beaucoup plus longue que nous. Et je ne pense pas, à ma connaissance, qu'ils ont trouvé, non plus, toutes les réponses, parce qu'ils cherchent encore. Je pense que le modèle français est un exemple assez criant de ce côté-là.

Une voix: ...

M. Morneau (Guy): Il est en répartition pure, c'est une caractéristique pure.

M. Gautrin: Il crée, à ce moment-là, des tas de difficultés.

M. Morneau (Guy): Il est en distorsion quand on vit un choc démographique, vous avez tout à fait raison.

M. Gautrin: Une distorsion, à ce moment-là. Ah bon!

M. Morneau (Guy): Alors, une des raisons, je pense, qu'il faut souligner, c'est effectivement que, quand on vit un tel choc démographique, nos systèmes, bien souvent, ne sont pas prévus pour vivre ça. Donc, il faut prendre acte du changement puis, deuxièmement, il faut voir les risques encourus par ce phénomène-là. Et un des risques, c'est l'équité intergénérationnelle. Parce que, quand on va vivre une période intense de changement dans un court laps de temps, ça va être difficile de préserver l'équité entre les générations. En tout cas, ça devient un critère beaucoup plus impertinent à mesurer et à évaluer.

Maintenant, avant d'aller plus loin, allons donc jeter un coup d'oeil, si vous le permettez, à ce qu'est le système de sécurité du revenu à la retraite en vigueur au Québec et au Canada plus particulièrement. Au Québec et au Canada, on se plaît à comparer le système de sécurité du revenu à un édifice qui comporte trois étages.

Au tout premier, dans les fondements, premier étage, au sous-sol même, vous avez des régimes qu'on appelle d'assistance, soit pension de vieillesse administrée par le gouvernement fédéral, supplément de revenu garanti et allocation au conjoint. Ce sont des régimes qui visent à assurer des besoins essentiels. Ils sont financés, comme vous l'avez dit, M. Gautrin, essentiellement par répartition, à même les taxes et les impôts, donc sensibles à une variation subite de la démographie parce que les coûts vont monter, c'est puisé à même les impôts, donc ça veut dire rationalisation des autres dépenses ailleurs.

Au deuxième étage, vous avez le Régime de rentes du Québec et son miroir, le Régime de pensions du Canada, qui est un régime qui vise à remplacer 25 % du revenu du salaire industriel moyen au Canada. Donc, c'est un régime mixte, dans le sens qu'il est entre la répartition puis entre la capitalisation pure. Tout ce qu'on cherche avec la formule de réserve, c'est de stabiliser le taux dans le temps pour faire en sorte que les variations à la fois économiques et démographiques, justement, ne soient pas de nature à amener des changements rapides, brusques et soudains du taux de cotisation.

Finalement, dans le troisième étage, où là on est dans le régime d'assurance pratiquement pur et intégral, vous avez les régimes complémentaires de retraite et les régimes d'épargne privés à la retraite, qu'on appelle les REER. Et ça, c'est plus une responsabilité individuelle.

Alors, dans ce seul tableau là, on voit très bien la distinction entre les régimes publics et les régimes privés, on voit très bien où commence la responsabilité de l'individu et où se termine celle de l'État, et on va essayer d'illustrer ça de façon un peu plus importante. Je vous resouligne, comme on l'a dit, la gradation dans le mécanisme de financement de ce système-là. Au bas, on a la répartition pure, donc vraiment «pay as you go», si on peut parler d'une technique bien connue, et en haut la capitalisation pure.

Alors, dans un régime, j'allais dire, où on est sensible à la démographie, bien, c'est bien évident que, quand vous êtes capitalisé, la démographie n'a pas d'impact. Par contre, quand vous êtes en répartition pure, et comme l'a souligné M. Gautrin, c'est évident que ça, ça a un impact un peu plus grand.

Mais quels sont les objectifs que poursuit chacun de ces étages-là? Et ça, je pense que c'est une question pertinente. En général, les gens qui travaillent dans le milieu de la retraite nous disent que, pour assurer un niveau de vie décent, et sans changements majeurs par rapport à votre situation avant la retraite, vous devriez pouvoir compter sur environ 70 % de votre revenu avant retraite pour être en mesure d'assurer le maintien de votre niveau de vie.

Alors, on vous a montré, dans une courbe qui distribue en fonction des salaires puis en fonction du pourcentage du salaire avant retraite, le rôle, la place et l'importance graduelle du régime public au début, vers un régime plus important et plus significatif du privé par la suite. Ce qu'il est important de constater dans ce tableau-là, c'est que, jusqu'à un salaire d'environ 20 000 $, les gens, en vertu des régimes publics, ont les besoins satisfaits par la simple utilisation des régimes publics, donc PSV, supplément de revenu garanti, Régie des rentes. Pour peu qu'on ait travaillé activement pendant sa vie, on a bien des chances que ça, ça couvre l'ensemble des besoins essentiels, donc le 70 %, 75 % ou 80 % qui est requis pour cette clientèle-là.

Beaucoup de monde nous dit: Oui, mais les gens ne peuvent pas cotiser à un REER. C'est normal, ils n'ont pas à cotiser. Le système est bâti pour que ces gens-là puissent maintenir leur niveau de vie avec le régime public. Alors, il ne faut pas se surprendre qu'ils ne cotisent pas au REER ou ne cotisent pas au régime complémentaire de retraite, c'est la finalité même du système. Et on voit que plus on avance dans le temps, plus la part des régimes publics diminue et plus la part des revenus de toutes sources privées augmente.

Une voix: C'est pas dans le temps, c'est dans le revenu.

M. Morneau (Guy): Plus on avance dans les revenus. Excusez. J'ai dit dans le temps. Je m'excuse.

Alors, à peu près au salaire industriel moyen, 37 000 $, 38 000 $, là, on s'aperçoit que les régimes publics vont compter pour à peu près 40 % des revenus à la retraite. Ce n'est quand même pas négligeable, là. C'est, comme on dirait, de façon principale et habituelle, le montant plus que la moitié. Mais il y a une partie qui s'appelle REER et régime complémentaire et même revenus de placements qui doit s'adjoindre à ces revenus-là pour être capable de maintenir un niveau de vie, d'où l'importance de laisser de la place dans le financement du régime public pour que ces acteurs-là puissent entrer en ligne de jeu.

Donc, la grande question qu'on peut se poser: Est-ce que ce système-là fonctionne même s'il est relativement récent? Parce que les grandes réformes – on le verra plus tard – ont été plutôt marquées dans les années quatre-vingt-dix et suivantes. Est-ce qu'il fonctionne? Bien, on s'est livré à une espèce d'évaluation de programme ou de réflexion sur le design de nos régimes, à certaines réflexions. On a compilé des données tirées du ministère du Revenu pour 1991 à 1996, les seules dates de disponibles, puis on a essayé d'estimer et de comparer les revenus avant la retraite puis après la retraite en fonction des tranches de revenus, et on voit les portraits que ça donne.

Effectivement, moins de 10 000 $: les besoins sont amplement couverts par les régimes publics, parce que, en jaune, vous avez tous les régimes publics. Entre 10 000 $ et 20 000 $: effectivement, les besoins sont couverts entièrement à ce stade-ci. On voit que, entre 20 000 $ et 30 000 $, là, on commence à voir que le régime public sort et le privé commence à embarquer, et ainsi de suite, et on voit qu'au salaire industriel moyen, par exemple entre 30 000 $ et 40 000 $, c'est effectivement...

M. Gautrin: Ça, c'est des moyennes que vous avez faites pour les gens qui sont retraités et qui sont dans...

M. Morneau (Guy): ...65 ans et plus. C'est ça. Alors, grosso modo, ce qu'on dit, c'est que les objectifs du système, tel qu'il a été conçu, il semble vouloir générer les objectifs poursuivis, parce que, en global, même si le régime n'est pas encore à maturité, on voit que, en moyenne, les gens ont une couverture d'à peu près 65 % de leurs revenus avant la retraite, alors que l'objectif est de 70 %, et les REER, comme on va le voir plus tard, et les RCR n'ont pas connu tout à fait leur pleine maturité au moment où on se parle. Donc... Oui?

Mme Dionne-Marsolais: Ça veut dire que ceux qui ont en bas de 10 000 $, eux autres, auraient 120 % de plus à la retraite...

M. Morneau (Guy): Oui.

Mme Dionne-Marsolais: ...que ce qu'ils n'ont jamais eu avant.

M. Morneau (Guy): C'est-à-dire 20 % de plus à la retraite.

Mme Dionne-Marsolais: Oui, c'est-à-dire 120 par rapport à 100.

M. Morneau (Guy): Exact, parce que...

M. Gautrin: À cause du poids des montants fixes qui est la part fédérale qui est la sécurité du revenu...

Mme Dionne-Marsolais: Non, c'est tout, ça...

M. Morneau (Guy): Oui, c'est le PSV, le supplément de revenu garanti et le Régime de rentes.

M. Gautrin: ...qui ne varie pas avec le salaire actuel.

M. Morneau (Guy): Vous parlez d'un revenu de 10 000 $, ce n'est pas...

Mme Dionne-Marsolais: Minimum minimorum.

M. Morneau (Guy): C'est vraiment minimum minimorum. On ne peut pas dire qu'ils sont dans le luxe même s'ils ont 20 %. Mais c'est vrai.

Mme Dionne-Marsolais: Non, non, mais ça me frappe.

M. Morneau (Guy): Et c'est une des raisons qu'on va voir plus loin, que c'est vrai que, parmi les gens qui s'en tirent le mieux depuis les 15 dernières années, c'est les gens de 65 et plus parce que leur revenu disponible s'est accru de 15 % à 20 %, ce qui n'est pas le cas pour les autres travailleurs. Mais on a eu à coeur de faire ce choix-là parce qu'il y avait un rattrapage à faire. Rappelez-vous, quand on a créé le régime de rentes, c'est la lutte à la pauvreté des personnes âgées, qu'on voulait éviter, et c'est le moyen qu'on a utilisé.

La question qu'on peut se poser est: Comment se comparent notre système de sécurité de revenu et ses résultats, grosso modo, que je viens de tracer avec le monde? Parce que c'est important de se situer dans le monde. On n'est pas les seuls. On commerce beaucoup. 57 % de notre production est exportée. Alors, il faudrait peut-être regarder.

(9 h 50)

Alors, il y a eu une étude qui a été faite par l'OCDE et le Bureau international du travail en 1998 qui comparait justement les performances du système de sécurité du revenu à la retraite dans ces différents pays là. Il y avait quatre indicateurs qui étaient utilisés: la proportion de retraités vivant sous le seuil de pauvreté, soit 50 % du revenu moyen parmi la population; le revenu des retraités en proportion de celui des non-retraités; les inégalités de revenu entre les retraités; et, finalement, la différence entre les hommes et les femmes. Il était considéré comme bon si l'écart était de moins de 20 %, il était considéré comme moyen si l'écart était entre 20 % et 25 %, et faible si c'était plus de 25 %.

M. Gautrin: Comment vous mesurez revenu de retraité sur non-retraité? C'est quoi? C'est le principe du 70 %?

M. Morneau (Guy): C'est ça, c'est le ratio, c'est le rapport qui existe entre les deux. Alors, en gros, ce que vient de dire cette comparaison internationale là, c'est que, parmi tous ces critères-là, le Canada est le pays qui performe le mieux en termes de finalité de régime.

Mme Dionne-Marsolais: Et le Québec, c'est pareil, pareil. Oui?

M. Morneau (Guy): On est mutatis mutandis. Bien oui, le Régime de rentes, c'est le miroir du RPC. La pension de vieillesse s'applique aux Québécois aussi puis c'est un régime fédéral, il s'applique à tout le Canada. Alors, tout ce système de sécurité là, les REER, les régimes complémentaires, c'est un modèle «coast to coast», comme on peut dire, pancanadien. Alors, à cet égard-là, le Canada figure parmi les pays qui performent le mieux.

Donc, morale de cette histoire, nous, on en conclut que, sur le design du régime, sur les objectifs poursuivis, beaucoup de pays envient la situation canadienne parce qu'on a eu le courage et j'allais dire la sagesse d'adapter notre système à cette réalité-là qui s'en venait. On va voir plus loin.

La question qu'on pourrait se poser: C'est beau, performer, mais est-ce que ça coûte cher? C'est une bonne question parce que, des fois, est-ce qu'on a les moyens? Je pense qu'il faut encore une fois saluer la sagesse et la brillance des gens qui ont pris ce genre de décision là ici, parce qu'on constate que, en matière de pourcentage des dépenses publiques consacrées à la sécurité du revenu pour la partie dite services publics, bien, le Canada et le Québec en particulier s'en tirent très bien par rapport à l'ensemble des pays de l'OCDE. Et, quand on se compare à l'Italie, l'Allemagne, la France et le Japon, bien on doit se dire: Dieu merci, on a un système qui répond et qui coûte heureusement beaucoup moins cher et qui permet d'obtenir des performances dignes de beaucoup de comparaisons. Donc, le financement de ce régime-là est très important ou l'équilibre qu'il a.

Je pense que l'OCDE et les pays... nous, en tout cas, on reçoit tellement de délégations qui viennent voir le système de sécurité du revenu qui sont en train de penser à des réformes, et ce qui les intéresse, c'est la gradation dans le financement de ces différentes couches de ce système là: répartition en bas, régime mixte dans le milieu, et c'est à peu près la formule optimale qu'on a trouvée tout en garantissant une stabilité.

Donc, c'est bien évident que, pour avoir ce genre de performance là, pour avoir ce dessein de régime là, il faut avoir en tête aussi qu'il faut ajuster ce système-là. On l'a fait dans le passé, on va y revenir, mais on va continuer de le faire, parce que c'est une question qui est continuellement à l'actualité, à l'ordre du jour, parce que le monde évolue, la situation évolue de façon claire et précise.

Alors, quelles ont été les récentes réformes? Juste pour vous les rappeler, parce que je présume que vous les connaissez assez bien, bien c'est bien évident qu'en 1998 on a eu une réforme majeure du Régime de rentes pour attaquer, notamment, la question de la pérennité du régime et de l'équité intergénérationnelle. C'étaient les deux grands objectifs: s'assurer que les prestations seront là pour les générations futures puis, autant que possible, stabiliser et, si possible, améliorer l'équité entre les générations, problème que je vous ai mentionné au tout début de ma présentation. Quand on vit un choc démographique, il faut adresser cet enjeu-là.

Alors, l'évaluation actuarielle qu'on vous a présentée – il y a une coquille dans l'acétate que vous avez, ce n'est pas en 1998 – a été présentée et déposée à l'Assemblée nationale en mars 1999 et est venue confirmer que le portrait de cette évaluation, selon les meilleurs estimés possibles, rencontrait l'objectif de garantir la pérennité et majorait la réserve de 2,5 à 3,2, tel qu'on l'observe.

M. Gautrin: ...

M. Morneau (Guy): Oui, on va y revenir. Vous voulez l'aborder tout de suite?

M. Gautrin: Non, non, c'est simplement... Je ne veux pas l'aborder tout de suite, ou on peut l'aborder tout de suite si vous voulez. La présentation que vous venez de faire, qui est tout à fait exacte, ne correspond pas aux hypothèses que vous avez prises dans l'évaluation actuarielle en ce qui a trait à la démographie.

M. Morneau (Guy): On y reviendra, monsieur. Voulez-vous qu'on en discute tout de suite? Moi, je n'ai pas de problème, parce que là on va arrêter un peu le fil...

M. Gautrin: Non, non, je ne veux pas arrêter, mais je vous dis ça simplement...

Le Président (M. Kelley): On va continuer la présentation et on va donner au député de Verdun l'opportunité de poser la première question.

M. Gautrin: Non, non, simplement, je ne veux pas faire de débat là-dessus. Mais vous êtes d'accord avec moi que...

M. Morneau (Guy): Pas du tout.

M. Gautrin: Ah non?

M. Morneau (Guy): On va échanger là-dessus, on va échanger.

M. Gautrin: Non, non, expliquez-moi. Ce que vous avez présenté comme démographie, ça ne correspond pas à ce que vous avez dans l'évaluation actuarielle.

M. Morneau (Guy): On va en discuter, si vous permettez, après, on prendra les chiffres de l'évaluation actuarielle.

M. Gautrin: O.K. très bien.

Le Président (M. Kelley): Je pense que je vais enregistrer que le député de Verdun va poser la première question.

M. Gautrin: C'est ça, mais j'ai beaucoup d'autres questions, là.

Le Président (M. Kelley): Continuez sur la présentation, M. Morneau, s'il vous plaît.

M. Morneau (Guy): O.K. Je savais que ma présentation soulèverait des débats, mais je pense que c'est important de poser ces contextes-là puis cet environnement-là. Ça va éclairer nos débats ou nos discussions à la fois sur la performance et sur le grand outil qu'est l'évaluation actuarielle.

Donc, l'important, rappelons-nous, on a fait des choix majeurs, on a majoré de 70 % le taux de cotisation pour le porter à 9,9 % en 2003. On a aussi réajusté certains bénéfices à la baisse, moins que le reste du Canada, cependant, parce que la situation dans le reste du Canada est un petit peu pire que celle du Québec, donc on a eu moins à jouer ou à ajuster le niveau de bénéfices.

Mais, ceci étant dit, il reste que c'est certain qu'il va falloir continuer à être vigilant, parce que le régime, à cause de la démographie, dont on a parlé tantôt, à cause de l'ouverture qu'on a sur le monde, à cause du contexte économique particulier au Québec, bien, c'est bien évident que ça va nécessiter un monitoring, si vous me permettez l'expression, puis un ajustement. Il y a des enjeux qui sont encore sous nos yeux puis qui pèsent lourd sur le Régime de rentes du Québec. Au-delà des grands équilibres dont on vous a parlé, on pense que, majoritairement, la pérennité est assurée, il ne faut pas rester insensibles à certains enjeux qui se dessinent.

On l'a vu, l'équilibre entre les générations va être une question sensible. Depuis un an, plus que jamais, vous voyez des gens qui critiquent le Régime de rentes, qui critiquent le taux de cotisation, qui trouvent qu'ils n'en n'ont pas pour leur argent, alors ça serait important d'avoir un débat puis une discussion là-dessus à un moment donné, mais montrer que ce qu'on a visé dans la réforme était justement de rétablir cette équité-là puis de faire en sorte que le monde paie à peu près le même prix pour les mêmes bénéfices. À partir du moment où, en 1966, on a créé quelque chose, il faudrait qu'en 1999-2000, autant que possible, ces bénéfices-là soient gelés ou, en tout cas, dans le temps puis le tarif approprié.

On va assister à une révolution sur le marché du travail dans les prochaines années. Il faut faire en sorte qu'on facilite puis qu'on permette les choix, donc il va falloir ajuster notre régime. Quand on dit qu'on a vécu des retraits hâtifs, vous allez voir des statistiques – je pense que vous les avez regardées dans ce qu'on vous a donné – on sort jeunes, nous autres, 60, 61, 62, on se met à la retraite. Moi, je pense que, dans un avenir prévisible, ça va être un comportement fortement atypique, parce que je pense que la rareté de la main-d'oeuvre... Je vous donne rien qu'un chiffre pour illustrer l'ampleur du phénomène démographique: dans les 50 prochaines années, on pense que la main-d'oeuvre active au Québec va baisser de 2 % sur 50 ans, alors que, dans le reste du Canada, elle va croître de 44 %.

Alors, c'est bien évident que, si on veut maintenir la main-d'oeuvre active, si on veut maintenir la capacité de produire, la capacité de créer de la richesse, il va falloir qu'on trouve des moyens. Donc, probablement qu'on va assister à l'allongement des périodes de vie active. Probablement que beaucoup d'employeurs vont tout faire pour garder le monde, contrairement à la tendance récente qui disait: Bien, c'est peut-être le temps de profiter du vieillissement pour faire un certain rajeunissement de nos effectifs.

Je vous l'ai dit tantôt, l'équivalence avec le Régime de pensions du Canada, qui est un régime miroir. C'est important de se comparer, on est en harmonisation, on est presque condamnés à vivre ensemble et de façon intégrée. Cependant, on n'a pas deux réalités qui sont identiques, on n'a pas la même démographie, on n'a pas la même croissance, on n'a pas les mêmes taux d'emploi, on n'a pas le même taux d'immigration, on en parlera abondamment.

Déjà là, c'est un défi parce que, si, les 30 dernières années, on était plus jeunes et on croissait plus vite en termes de population puis de main-d'oeuvre active, c'est l'inverse qui se produira dans les 30 prochaines années. Donc, si, dans les 30 premières années, le Régime de pensions nous poursuivait, là, c'est nous qui poursuivons le Régime de pensions du Canada. Alors, c'est un changement, ça aussi, c'est une rupture par rapport à ce qu'on a connu. Alors, c'est important d'en prendre acte.

Évidemment, bien là on a des atouts stratégiques aussi, mais il ne faut pas non plus penser que ces atouts-là peuvent, à tout le moins, annihiler et puis effacer – c'est lourd – l'hypothèque que constitue la démographie, et ainsi de suite. Alors, on a une Caisse de dépôt et placement qui gère nos avoirs et qui donne des rendements absolument très intéressants, qui se compare avantageusement – et on y reviendra plus tard, là – à beaucoup de gestionnaires privés. Dieu merci, il en est ainsi, et on va devenir un déposant assez actif dans les prochaines années.

C'est important d'engranger du rendement le plus vite et le mieux possible pour être en mesure de dire: Bon, on se donne des réserves puis on se donne un coussin pour maintenir le taux à 9,9, parce qu'il va falloir compenser. Et, à cet égard-là, bien, les 30 ans d'avance qu'on a, avec la Caisse de dépôt et placement versus l'Office d'investissement qui vient d'être créé 30 ans plus tard ou 35 ans plus tard au Régime de pensions du Canada, bien, on pense que ça peut nous amener un écart de rendement positif qui ferait en sorte qu'on pourrait être capables de maintenir l'équilibre ou l'équité ou l'harmonisation avec le reste du Régime de pensions du Canada. Ça, ça fait le tour du régime public, ce que j'appelle le Régime de rentes.

On va aborder, si vous le permettez, l'autre étage, la réforme du régime complémentaire de retraite. C'est sûr qu'il y a eu une démonstration importante de faite à ce deuxième étage là. Vous l'avez vu, on a procédé à des ajustements majeurs. En 1990, on a réécrit la loi pour se centrer sur trois, quatre grands objectifs: établir un système de droits minima pour tous les travailleurs au Québec; garantir, par des moyens appropriés, la sécurité financière des régimes de retraite, donc s'assurer que les approvisionnements des caisses sont suffisants pour payer les prestations et, si ce n'était pas le cas, de faire en sorte que les employeurs prennent leur responsabilité; et, troisièmement, on introduit un concept nouveau: la transparence, l'obligation d'être transparent, donc de donner de l'information. La caisse, ce n'est plus une affaire de l'employeur, c'est une affaire de fiducie, c'est géré par un comité de retraite où il y a des employés, il y a des retraités puis il y a des employeurs, autrement dit un employeur.

(10 heures)

Alors, c'était une réforme majeure qui nous a beaucoup distanciés par rapport au reste du Canada, et aussi il y a eu la réforme fiscale, en 1991, où les gouvernements se sont harmonisés pour dire: On va faire en sorte d'aider les gens qui veulent planifier leur retraite. On donne un crédit fiscal pour une cotisation et on permet que ces sommes-là soient accumulées en franchise d'impôts. Ce qui n'est pas rien, là. C'est probablement l'abri fiscal le plus important et le plus significatif que les États consentent actuellement aux salariés, aux particuliers.

Donc, l'effort était clair, le message était clair: Dorénavant, préoccupez-vous de ça. C'est votre responsabilité, sur le plan individuel, de vous assurer que vous gérez votre planification de retraite. On vous crée des incitatifs en vous donnant, j'allais dire, des incitatifs fiscaux. Alors, c'est important que les employés ou les citoyens comprennent cette réalité-là. Et ça, je pense que, dans un choc où on vit en changement, c'est important d'en prendre acte.

Alors, on va vous citer quelques chiffres sur les régimes complémentaires. C'est qui? De quoi on parle? On dit tout le temps, au Québec, que 45 % des gens cotisent à un régime de retraite, quatre sur 10 ont un régime de retraite. On serait porté à croire qu'on n'est pas si pire, même si on rêverait toujours d'être plus couvert. Mais on voit que, par rapport à l'Ontario, on est mieux, c'est vrai. Mais, quand on regarde le secteur privé pur, c'est 27 % seulement des gens du privé qui cotisent à un régime de rentes ou à un régime complémentaire de retraite. On a un gros secteur public qui est tout syndiqué, qui est tout dans un régime de retraite, alors ça vient grossir le global. Mais l'individuel, c'est-à-dire le régime... un sur quatre, seulement, cotise à un régime de retraite.

M. Gautrin: La part du secteur public est plus importante au Québec qu'elle n'est en Ontario.

M. Morneau (Guy): Exact, exact.

M. Gautrin: Alors, ça compense.

M. Morneau (Guy): Exact. Mais ça reste quand même qu'un travailleur sur quatre, au privé, cotise à un régime complémentaire, trois sur quatre ne le font pas. C'est inquiétant, là, parce que ça met beaucoup plus de responsabilités sur l'individu. A-t-il les moyens? Comprend-il le système? Et va-t-il le faire?

Deuxièmement, une autre donnée sur laquelle je voudrais attirer votre attention, c'est sur les sources de revenus des personnes âgées. On voit qu'en 1981 on était à peu près en situation comparable avec l'Ontario, la part des revenus privés à la retraite était de 12 % au Québec versus 13 % en Ontario. En 1995, quand on fait le même exercice, on constate que la situation change et pas nécessairement dans le bon sens, dans notre intérêt à nous. On voit qu'on passe de 12 % à 19 %, alors que, pendant ce temps-là, l'Ontario montait à 27 %. Et ça, c'est inquiétant un peu. Et ça, je pense que ça nous interpelle comme Régie et ça nous interpelle comme législateur pour dire... Posons-nous la question: Est-ce que nos règles sont claires? Est-ce que l'application est simple? Est-ce qu'on a tout fait pour rendre ça limpide et cohérent?

Mme Dionne-Marsolais: ...j'ai mal compris, moi. Votre pourcentage... Les sources de revenus des personnes âgées...

M. Morneau (Guy): Oui, 12 %...

Mme Dionne-Marsolais: Il veut dire quoi? C'est 12 % des personnes âgées...

M. Morneau (Guy): Quand je prends les revenus des personnes de 65 ans et plus, là, quand je prends la part...

Mme Dionne-Marsolais: ...qui ont un revenu.

M. Morneau (Guy): Qui vient soit d'un REER, soit d'un RCR...

Mme Dionne-Marsolais: Ou d'un régime complémentaire.

M. Morneau (Guy): ...ou soit d'un revenu de placement. C'est ça.

Mme Dionne-Marsolais: O.K. C'est beau. Merci.

M. Tranchemontagne: J'ai aussi une question. Est-ce que vous avez d'autres comparaisons comme, par exemple, les États-Unis ou... Dans votre première partie, quand vous parlez de la couverture de la population active, de 45 et de 41, est-ce que vous savez ce qui serait...

M. Morneau (Guy): On les a, ces chiffres-là, je pense.

M. Tranchemontagne: Aux États-Unis ou en Europe, quelques pays additionnels, peut-être, et puis aussi pour le secteur privé. On est...

M. Latulippe (Denis): Je peux peut-être rajouter, si vous voulez.

M. Morneau (Guy): Oui. M. Denis Latulippe, là, qui est l'actuaire en chef.

Le Président (M. Kelley): M. Latulippe.

M. Latulippe (Denis): Ce qu'il faut voir, c'est que différents pays ont différentes traditions. Comme on parlait tout à l'heure, en Europe continentale, notamment, les dépenses publiques sont plus importantes. Donc, on mise davantage sur les régimes publics pour couvrir les besoins à la retraite. Donc, dans ces pays-là, les régimes privés sont moins importants, même si, depuis quelques années, on vise à promouvoir le développement de ces régimes-là.

Dans les pays anglo-saxons, lorsqu'on parle des États-Unis ou de l'Angleterre, c'est une tradition similaire à ce qu'on a ici en termes de système, puis le niveau de couverture des régimes privés est comparable. On parle de quatre ou cinq travailleurs sur 10, là.

M. Morneau (Guy): Aux États-Unis, je pense que c'est...

M. Latulippe (Denis): C'est un peu plus haut, mais...

M. Gautrin: La différence entre les deux chiffres, ici, ça vient du fait que, quand vous prenez les personnes âgées, il y a celles qui travaillaient et celles qui ne travaillaient pas. C'est bien ça? C'est pour ça que vous avez ce type de différence. Mais l'important, c'est de comparer le Québec et l'Ontario, à ce moment-là.

M. Morneau (Guy): Oui, je pense que c'est un indicateur.

M. Gautrin: C'est l'indicateur.

M. Morneau (Guy): Mais, moi, je vais vous dire, on pourrait en débattre longtemps, on a plein de données.

M. Gautrin: Non, non, je ne débats pas.

M. Morneau (Guy): Mais l'idée, moi, je veux juste vous laisser une impression. Je voulais juste vous dire une tendance lourde, la réalité, d'où on part, puis ce qu'il faut faire. Il ne faut pas oublier qu'il faut que le monde comprenne, là, les 6 millions ou 7 millions de Québécois doivent comprendre la finalité du système. S'ils ne la comprennent pas, ils ne seront pas en mesure de livrer les attentes qu'on a par rapport à eux ou qu'on a dessinées pour eux.

De la même manière que dans le Régime de rentes, il y a des enjeux, il y en a également dans les régimes complémentaires, et vous vous en doutez. Ils sont majeurs, également. Vous voulez parler de la couverture insuffisante. Moi, je pense qu'il faudrait tout faire pour non seulement arrêter la diminution, parce qu'il faut constater que depuis un certain nombre d'années, 20 ans, 30 ans, le nombre de régimes étant relativement en baisse puis le nombre de participants baisse un peu, mais a plutôt tendance à être stable puis...

M. Gautrin: Quand vous avez une tendance d'aller vers le travail autonome et vous avez une forte croissance dans les travailleurs autonomes, ils ne vont pas aller dans des régimes complémentaires de retraite, mais plus aller vers des REER ou des investissements sur des REER personnels, voyez-vous.

M. Morneau (Guy): C'est vrai, tout à fait. Mais le temps partiel, il n'empêche pas qu'ils cotisent à un régime complémentaire, comme dans le gouvernement c'est le cas. Alors, pour tous ces motifs-là, moi, je pense que le travailleur autonome n'est pas encore le modèle pur qu'on observe.

M. Gautrin: C'est celui qui est le plus en croissance.

M. Morneau (Guy): C'est celui qui est le plus en croissance.

M. Gautrin: Si on regarde les croissances, c'est celui qui croît le plus actuellement.

M. Morneau (Guy): Mais il reste que c'est à peine 10 % de l'emploi, 10 % ou 15 % de l'emploi.

M. Gautrin: Oui, oui. Mais, si on regarde en termes des nouveaux emplois créés, c'est celui qui a eu le taux de croissance des emplois le plus important.

M. Morneau (Guy): C'est exact. Alors, comme je vous ai dit, la couverture des régimes n'est pas forte, ils sont en décroissance. Le nombre de cotisants ou de prestataires est également très faible ou en diminution. Il y a de la compétition. Les REER sont en compétition avec les régimes complémentaires. On a les mêmes avantages fiscaux quand on cotise à un REER ou on cotise à un régime complémentaire, sauf que l'un est plus immobilisé que l'autre. Des fois, ça va induire le changement et que l'individu dit: Moi, je ne veux plus cotiser à mon régime complémentaire, je veux rester avec mon REER parce que je suis autonome, je suis avec ma caisse. Mais il n'est pas prouvé que les REER servent essentiellement à la retraite puis qu'ils donnent les objectifs qui sont recherchés. C'est des études à faire et à mener pour être bien certain que ça amène cette finalité-là.

Alors, on a différents moyens qui ne sont pas sur le même pied, j'allais dire, en regard de la retraite puis en regard de la fiscalité, et ça, ça peut induire la population en erreur, à un moment donné, quant à un véhicule plus qu'à un autre. Parce qu'un REER, c'est une caisse. Une caisse, vous ne savez jamais ce que vous achetez. Ça dépend du moment où vous sortez. Quand vous sortez, si les taux d'intérêt sont bas ou sont élevés, votre degré de couverture va être bas ou élevé. Alors, bien souvent, les gens n'aiment pas ça et ils se disent: Bien là je suis à risque.

Et souvent le monde n'a pas idée de ce que ça représente, avoir une rente de retraite, mettons, de 30 000 $ ou 40 000 $ par année indexée. Ça prend des sommes importantes pour faire ça. On parle facilement de 600 000 $ à 700 000 $ si vous prenez votre retraite. Alors, souvent, dans notre culture populaire, les gens avec un REER de 100 000 $, 150 000 $ sont convaincus qu'ils vont être riches. Ils n'ont jamais été riches comme ça à la retraite. Alors, ils ont la surprise quand ils se présentent à une compagnie d'assurances puis qu'ils disent: Je transfère mon REER en FEER puis donne-moi ma rente. Bien, t'as le droit à 6 000 $. Hein? 6 000 $? Je pensais que... tu sais. Alors, ça fait partie de l'enjeu, ça, de l'éducation populaire qu'il faut se donner par rapport à ce défi-là, à la finalité de ce système-là.

L'incertitude quant au développement. Bien sûr, il y a beaucoup de judiciarisation dans les régimes de retraite. On conteste les congés de cotisation. Il y a eu les cas Singer, les cas Simons, qui ont noirci de façon assez notable la confiance et la perception des gens face aux régimes complémentaires. Ce que je trouve tout à fait malheureux parce que, dans l'ensemble, je ne peux pas dire que l'ensemble des employeurs sont du style Singer ou du style Simons. Loin de là, au contraire. Et on pourra échanger là-dessus, si vous voulez, dans le cadre de nos échanges.

Une voix: ...le gouvernement du Québec.

M. Morneau (Guy): Y compris le gouvernement du Québec.

Complexité de l'administration. Ce n'est pas simple, gérer un régime complémentaire, surtout un régime à prestations déterminées. Moi, je pense qu'il faut tout faire pour rendre ça beaucoup plus simple. C'est énormément compliqué.

Il y a le marché du travail qui évolue, vous l'avez souligné, le travail à temps partiel, le travail autonome, tout ce qu'on dit travail atypique, et c'est moins bien pris en compte dans nos régimes de droit minima quand on parle de prestation de départ, d'acquisition immédiate. On n'a pas toujours, je pense, adapté ce cadre-là pour cette réalité-là. Il va falloir trouver le moyen de le faire.

Donc, nous, on pense, et avec raison, que probablement tous ces facteurs-là nuisent au développement et même au maintien des régimes complémentaires. Il va falloir lever cette hypothèque-là, la sortir de là, sinon on risque de se préparer des lendemains un peu difficiles. Et vous savez tous que, de plus en plus, les travailleurs sont très sensibilisés à cette question-là, et ça va prendre un enjeu ou ça va prendre une importance nettement plus grande parce qu'on vieillit.

Alors, qu'est-ce qu'on peut retenir de tous ces... l'édifice, la finalité, les objectifs, les résultats et les réformes récentes? Bien, c'est que ça a été des gestes majeurs qui ont été très structurants. Je pense que le Régime de rentes peut afficher fièrement qu'au moins dans les 50 prochaines années la pérennité du régime semble assurée. Les régimes complémentaires avec les droits minimaux, la transparence et les objectifs qu'on poursuivait sont en place, sont bien compris. Les acteurs jouent bien leurs rôles. Cependant, je pense qu'il y a un effort à faire pour recrédibiliser, si vous me permettez, ce véhicule-là et le rendre plus attrayant et surtout cesser d'avoir cette mauvaise presse là.

L'aide fiscale. Très significatifs, les dépôts aux REER sont en croissance vertigineuse depuis 1993. On cotise maintenant beaucoup plus aux REER qu'on cotise aux régimes complémentaires. Alors, oui, l'incitatif a eu cette finalité-là.

Alors, ce serait important, je pense, qu'on vous précise un but face à tous ces défis-là – parce qu'on l'a vécu très rapidement – notre vision en regard de l'évolution du Régime de rentes du Québec compte tenu de tout ce qu'on vient de se dire.

(10 h 10)

Bien, c'est bien évident que, nous, on se donne comme mission de faire évoluer le Régime de rentes selon les tendances anticipées ailleurs dans le monde. On n'est pas les seuls, tout le monde vit des changements, tout le monde ajuste son système de sécurité du revenu à la retraite. Il ne faudrait pas se décrocher de façon importante de ce qui se passe ailleurs dans le monde, et, dans les prochaines années, c'est ce qui va le plus bouger dans le monde. Donc, il va falloir qu'on fasse une veille stratégique sur ce qui se passe pour être capable d'adapter notre régime à cette réalité-là.

Surtout, ne pas aller contre la démographie. Ce que je veux dire par là, tout simplement, c'est que, même s'il serait tentant, à court terme, de prendre des décisions d'introduire des critères de retraite plus faciles, plus bas, de grâce, ne faisons pas ça, parce que ça vient amplifier le phénomène de la démographie. Donc, les problèmes de main-d'oeuvre dont je vous parlais tantôt, les problèmes d'adéquation entre le travail, la production et tout ça ne vont rien que s'amplifier. Alors, c'est comme si on venait accélérer le choc démographique. Il me semble qu'il est déjà assez gros et assez important à gérer et à appliquer dans un contexte si court qu'il ne faudrait pas faire ce genre de choses là.

Être soucieux de l'équité entre les générations. Ça, c'est une question qui va revenir, qui est montante en termes de préoccupations. Donc, il va falloir être très transparent et très... autrement dit, dans notre grille d'analyse, ne jamais perdre de vue: Est-ce que ça améliore l'équité ou est-ce que ça la détériore? Donc, une capacité de montrer ou de caractériser l'impact de ces choix-là.

Maintenir l'harmonisation avec le Régime de pensions du Canada. En soi, c'est un défi. Comme je vous l'ai dit, on n'a pas la même démographie, on n'a pas la même croissance, on n'a pas... Bon. Pour toutes ces raisons-là, rien que de rester harmonisé, dans un contexte où on est désavantagé par rapport à ce qu'on a été dans le passé, ça met beaucoup de pression sur le Régime, sur la Régie et sur les citoyens en général.

Respecter la capacité de travailler des travailleurs. Il me semble que c'est fondamental – parce qu'on l'a probablement atteinte à 9,9 % – si on veut que les autres couches jouent.

Alors, je vois que le temps file, puis je pense que j'ai parlé beaucoup, là. Je vais juste accélérer sur ma vision des RCR. Je pense qu'il est important de stabiliser le cadre juridique. Si on veut s'assurer que le monde comprenne, il faut que les règles soient claires, il faut que les règles soient stables. Donc, il va falloir lever certaines incertitudes, il va falloir adapter la réalité au droit du marché du travail – je pense que je vous en ai parlé abondamment – et, finalement, simplifier l'administration – ça, je pense que c'est le leitmotiv qui devrait nous caractériser dans les prochaines années – puis, surtout, accentuer la croissance de la transparence. La retraite, c'est une business qui concerne les employés, qui concerne les employeurs, qui concerne le gouvernement. On doit le faire en toute transparence. Le monde doit le comprendre, doit l'assumer pleinement.

Je vous ai parlé des régimes. Voyons maintenant l'avenir ou la vision de l'organisation qu'est la Régie des rentes. Comme vous êtes aussi membres de la commission parlementaire sur le projet de loi n° 82 qui parle de l'administration publique, vous avez sûrement entendu parler et sûrement débattu de ces questions-là. Alors, on s'inscrit très largement dans cette réalité-là. Je vous rappelle juste le cadre qui est proposé dans ce projet de loi là... Pardon?

M. Gautrin: Ce n'est pas à cette commission qu'on débat de 82.

M. Morneau (Guy): Non, mais beaucoup des membres qui sont ici ont...

M. Gautrin: ...

M. Morneau (Guy): Alors, cette loi-là nous parle de l'encadrement général axé sur les résultats, de la gestion par résultats, de l'application d'un plan annuel, de l'application d'un rapport annuel de gestion. L'encadrement spécifique, on parle d'un contrat de performance et d'imputabilité. Tout ce qu'on veut vous dire, nous, c'est que, nous, on est dans ce mode de gestion là depuis bien longtemps. On a une charte des services depuis 1993, on a un plan stratégique depuis 1989. À tous les ans, on a un plan annuel, on a des indicateurs. Vous avez, je pense, été à même de les constater. Alors, on n'a pas de problème. Au contraire, je pense qu'on est rendu un petit peu plus loin.

Ce qu'on voudrait, c'est attirer votre attention sur le contrat de performance et d'imputabilité. On y voit là un moyen de se donner des règles ou des souplesses capables d'adapter notre organisation au défi majeur qui nous attend en termes de volume, en termes de défis organisationnels à relever, de communications, et ainsi de suite. Alors, il va falloir se donner des marges de manoeuvre, il va falloir se donner des outils nouveaux pour être capable d'adresser ces enjeux-là. On ne peut pas avoir du mur-à-mur partout, parce que toutes les organisations ne vivent pas toutes le même genre, et on pense que ce véhicule-là va être le véhicule qu'on veut utiliser pour être capable d'aller chercher les moyens qu'on se donne.

On ne peut pas être performant si on n'est pas capable d'être reconnaissant vis-à-vis de nos employés. On ne peut pas être pérenne, comme organisation, si on n'a pas de plan de relève, si on n'a pas de plan de main-d'oeuvre. Pour faire ça, il faut être capable de non seulement promettre des choses à des employés, mais de faire la formation puis les investissements qu'il faut pour y arriver, et, pour ça, il va falloir se donner des marges de manoeuvre convenues avec le Trésor et les organismes centraux pour être capable de mettre ça en place.

Je vous rappelle que... Au niveau du service à la clientèle, je ne vous apprendrai rien, vous savez qu'on a gagné une mention aux Grands Prix québécois de la qualité au mois d'octobre dernier. Alors, on a une culture de service à la clientèle. On a documenté, on a instrumenté ça, je vais passer très vite là-dessus. Mais on gère en fonction de cette réalité-là. Et ce qu'on veut, comme organisation, compte tenu des défis dont je viens de vous parler, c'est ne pas perdre cet acquis-là qui est sacré pour nous autres, mais il faut passer d'une organisation qui gère les services à la clientèle vers une organisation axée sur la performance pour relever l'ensemble des autres défis qui ne manqueront pas de nous interpeller.

Donc, ce qu'on cherche, comme volonté organisationnelle – et je pense que l'équipe de direction est là pour en témoigner – c'est qu'on veut migrer vers un modèle de gestion intégrée de la performance. Intégrée, c'est parce qu'on ne peut pas être rien que bon sur les services à la clientèle, il faut être bon sur tous les aspects: sur le plan financier, sur le plan informationnel, sur le plan communication, sur le plan de nos ressources humaines, sur le plan de notre équipe de gestion et sur le plan, j'allais dire, de l'adaptation de nos meilleures pratiques. Alors, il va falloir mettre ensemble tous nos outils de façon plus intégrée pour rencontrer les objectifs qu'on se donne en regard du phénomène du vieillissement puis du service qu'on doit donner à l'ensemble de la population.

Alors, quand on parle de performance... Je vous le dis très rapidement. On échangera, si vous le voulez, dans le cadre de nos propos. Une gestion intégrée, ça veut dire l'intégration de l'ensemble de nos outils, ça veut dire un plan stratégique, un plan budgétaire, des mesures de performance et une reddition qui est dans un cycle continu et transparent.

Deuxièmement, la performance, ça veut dire que ce qui dépend de la performance d'une organisation comme la Régie, on n'est pas les seuls à en être tributaires, on dépend d'acteurs, on dépend de partenaires indispensables et, si on a un défaut ou un manque là-dessus, notre performance globale en subit les coups. Alors, que ce soient nos employés, que ce soient nos cotisants qui doivent en avoir pour leur argent parce qu'ils paient beaucoup, et que ce soient nos fournisseurs de services, que ce soient, j'allais dire, nos personnels, notre équipe de direction, tout ce monde-là doit faire de la valeur ajoutée pour faire en sorte qu'on soit une organisation performante.

Alors, on l'a illustré, schématiquement, ce que ça veut dire dans un cycle. Mais ce que je voudrais juste que vous reteniez, c'est peut-être le tableau sur lequel on se dirige. Et là je pense à... on va accélérer. C'est un modèle de performance, comme je vous dis, intégrée qui cherche à créer de la valeur ajoutée pour l'ensemble de ces quatre pôles d'acteurs là, et c'est à ce prix-là et à ces conditions-là, si on y parvient, qu'on va garantir la performance dans le temps et qu'on va garantir notre capacité de relever le défi que pose le phénomène du vieillissement et les enjeux que ça pose sur la sécurité du revenu à la retraite.

Donc, en conclusion – et je pense que c'est ça que je voudrais que vous reteniez en termes de vision – on veut migrer vers une organisation parmi les plus performantes. Dans mon esprit et dans l'esprit, j'espère, de l'équipe de direction qui est derrière moi, c'est bien évidemment... C'est quoi, une organisation performante? C'est une organisation qui a une vision claire des défis à relever et qui a des plans d'action globale pour les relever; une organisation qui est au service puis à l'écoute de ses clients et qui s'inspire des meilleures pratiques dans le domaine; une organisation qui dispose d'un personnel formé, compétent, responsable, impliqué dans l'actualisation de ces plans et qui comprend ces objectifs, ces moyens et ces plans d'action qu'on met de l'avant.

C'est une organisation qui est préoccupée d'optimaliser constamment ses processus d'affaires en s'inspirant des meilleures pratiques dans le monde et en prenant appui sur les possibilités offertes par les nouvelles technologies. Et ça, c'est un autre facteur qui va venir nous révolutionner de façon très magistrale. Ça prend une organisation qui a un réseau de partenaires actifs qui participent étroitement à l'atteinte de nos objectifs, des objectifs poursuivis, de même qui sont partagés avec les leurs. Le souci d'offrir à nos cotisants, donc aux gens qui paient, un bilan chiffré de la saine gestion et la garantie d'une utilisation judicieuse des sommes confiées.

Donc, c'est là un défi très passionnant et très stimulant qui nous interpelle et qu'on est en droit et obligé de relever si on veut être capable de servir adéquatement l'ensemble des employés ou l'ensemble des citoyens et citoyennes du Québec. Merci beaucoup de votre écoute. Je m'excuse d'avoir été un petit peu plus long que prévu.


Discussion générale

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, M. Morneau. Je sais que les enjeux sont fascinants. Alors, ça prend le temps surtout de nous situer dans l'évolution démographique, entre autres, qui est toujours un sujet que je trouve...

M. Morneau (Guy): Passionnant.

Le Président (M. Kelley): ...passionnant, exactement. Si j'ai bien compris, le député de Verdun a peut-être une question à poser. Alors, je cède...

M. Gautrin: J'ai plus d'une question.

Le Président (M. Kelley): Peut-être même deux. Alors, M. le député de Verdun, s'il vous plaît.


Tests de sensibilité aux facteurs économiques et démographiques

M. Gautrin: D'abord, je voudrais vous remercier sur cette présentation. C'est stimulant. Je veux faire état rapidement d'un point de désaccord entre vous et moi. Puis je ne voudrais pas qu'on passe toute la séance autour de ça.

La dernière analyse actuarielle que vous avez faite du régime, que vous avez déposée en mars 1999, et vous le savez parfaitement, faisait état, était basée sur les prévisions démographiques qui étaient celles de 1997-1998 et ne correspondaient plus à celles que l'Institut de la statistique du Québec faisait et que vous avez d'ailleurs reprises ici, à l'intérieur. Je ne voudrais pas revenir sur ça. On pourrait en faire un long débat qui serait très technique.

La chose que je voudrais vous demander, c'est... Je pense au futur et je voudrais être positif pour le futur. Vous n'avez pas inclus dans cette analyse actuarielle un test de sensibilité à l'ensemble des facteurs. Tous vos prédécesseurs... Et toutes les analyses actuarielles du Régime de rentes qui avaient été faites jusqu'à cette date-ci incluaient un test de sensibilité à l'ensemble des facteurs qui permettait de voir, de mesurer, enfin de donner une idée de ce qui pourrait arriver au régime s'il y avait des fluctuations à l'intérieur des hypothèses.

(10 h 20)

Est-ce que je peux vous demander que, dans la prochaine analyse actuarielle que vous allez faire assez rapidement, puisque ça doit se faire en 2001, il y ait un test de sensibilité à l'ensemble des facteurs, comme il y avait toujours eu dans toutes les analyses actuarielles jusqu'à maintenant?

M. Morneau (Guy): Alors, je vais reprendre en partie l'explication que vous donnez. Vous avez raison de dire: Si on se prend sur le modèle pointu, on ne se colle pas au modèle de prévision démographique des tendances récentes du Bureau de la statistique du Québec ou de l'Institut de la statistique du Québec, c'est vrai. La finalité du Régime de rentes, la finalité de l'évaluation actuarielle, ce n'est pas de projeter les dernières tendances. La finalité, c'est de dire quelle est l'hypothèse la plus probable dans un cycle de 50 ans.

M. Gautrin: C'est exactement la même chose que fait le Bureau de la statistique du Québec. Il projette sur 50 ans aussi.

M. Morneau (Guy): Le Bureau de la statistique, il dit: Voici ce qui arrive si on prend les dernières tendances observées dans les trois, quatre, cinq dernières années...

M. Gautrin: En projetant sur 50 ans aussi.

M. Morneau (Guy): ...et qui se projettent sur 50 ans. Dans l'histoire du Québec, nous, ce qu'on dit... l'objectif qui est poursuivi dans l'évaluation actuarielle, ce n'est pas de dire: Est-ce que les cinq dernières années vont être celles-là qui vont se projeter dans les 50 prochaines? On dit: C'est plus compliqué que ça, la réalité, dans un contexte comme celui-là.

M. Gautrin: Je n'ai pas dit... Reconnaissez quand même que la démographie, c'est aussi... On pourrait débattre très techniquement là-dessus.

M. Morneau (Guy): Exact. Alors...

M. Gautrin: Si vous voulez être très technique, vous avez utilisé, par exemple, qu'il y avait un point d'inflexion complètement sur l'indice synthétique de fécondité. Je n'ai jamais vu une société qui avait un point d'inflexion, comme vous l'avez vu, sur l'indice synthétique de fécondité. Mais je ne voudrais pas rentrer sur les détails techniques.

M. Morneau (Guy): Exact. On aura un autre débat là-dessus. Ça me fera plaisir d'en avoir un.

M. Gautrin: La question qui m'importe, c'est: Est-ce que vous pouvez, pour les prochaines analyses actuarielles, inclure un test de sensibilité à l'ensemble des facteurs, que vous n'avez pas inclus dans celle-là?

M. Morneau (Guy): Je veux répondre aussi à cette question-là. Pour le moment, je n'ai pas envie de me commettre, présentement, là-dessus, pour une raison bien simple. Je pense qu'on l'a fait dans le passé et ça a induit beaucoup de monde en erreur. Le monde, quand on fait des tests de sensibilité, ils prennent une partie d'une hypothèse puis une partie d'une autre, puis une partie d'une autre, puis ils composent avec le tout, puis ils disent: On n'aura pas assez d'argent.

Nous, ce qu'on produit quand on sort une évaluation actuarielle – et là je pense que je vais passer tantôt la parole à notre actuaire en chef – c'est le meilleur estimé probable d'un spécialiste qui se penche sur cette question-là, qui prend en compte la réalité, puis le vécu, puis les meilleures hypothèses. C'est sûr que ce n'est pas la vérité et la vie, il n'y a pas un degré de certitude d'accolé à ça, mais, quand on commence à dire: Bien là, si je prends une hypothèse optimiste puis une hypothèse... Le danger, c'est quand on en joue une, deux, trois. Il y a à peu près 40 hypothèses qui...

M. Gautrin: Mais, M. Morneau, tous vos prédécesseurs ont toujours jugé que c'était une information utile. Que vous la donniez en mettant tous les éléments de mise en garde dans ce cas-là, je suis d'accord, mais ne cachez pas une information que vous avez. À ce moment-là, c'est ça que je trouve inacceptable. Que vous disiez: Cette information doit être prise avec mesure et en expliquant comment il faut la prendre, moi, je pense que c'est tout à fait pertinent, et je sais exactement de quoi je parle, et je suis sûr que vous savez exactement de quoi vous parlez aussi.

M. Morneau (Guy): Tout à fait d'accord avec vous.

M. Gautrin: Mais ce que je trouve inacceptable, si vous me permettez, c'est que vous ne la donniez pas. C'est ça que je trouve malheureux quand vous dites, au contraire, que vous voulez être très transparent et très juste. Je sais tout à fait les limites qu'il faut prendre dans les tests de sensibilité à l'ensemble des facteurs, mais alors...

M. Morneau (Guy): Vous, vous le savez. La majorité du monde ne le sait pas.

M. Gautrin: Attendez! M. Morneau, justement, c'est ça que je n'accepte pas dans votre position actuellement. C'est quand vous dites: Vous, vous le savez, mais je ne le donne pas parce qu'il y a du monde qui ne le saura pas. Moi, je vous dis: Vous devriez donner toute l'information si vous voulez vraiment être transparent, quitte à ce que vous expliquiez clairement à l'ensemble des citoyens ce que veut dire l'information. Et ça, c'est votre travail de l'expliquer. Mais que vous disiez: Parce que les gens ne comprendront pas, je ne leur donne pas l'information, ça, je vous explique que j'ai beaucoup de difficultés à accepter ce point de vue là.

M. Morneau (Guy): Ce que je dis, M. Gautrin, avec tout le respect...

M. Gautrin: Bien, moi aussi.

M. Morneau (Guy): Dans le passé, on l'a toujours produit, on l'a toujours donné. Ça a toujours...

M. Gautrin: Et je souhaiterais que vous le fassiez dans le futur.

M. Morneau (Guy): Ça a toujours causé des problèmes d'interprétation et suscité des débats énormes.

M. Gautrin: Parce que vous n'expliquiez peut-être pas assez ce que c'était.

M. Morneau (Guy): C'est vrai, peut-être. On prend une partie du blâme, mais...

M. Gautrin: Alors, continuez à le donner et expliquez de quoi il s'agit.

M. Morneau (Guy): C'est parce que les forums pour l'expliquer, ils ne sont pas nombreux quand on travaille à la Régie des rentes. Alors, on dépose le rapport annuel. Est-ce qu'on veut déposer une évaluation actuarielle où il y aura 800 pages d'explication, de contexte?

M. Gautrin: Ce n'est pas ça que je vous dis. Non, non. Un instant, là! Ça vous prend une page. Vous avez démontré aujourd'hui – et vous me permettrez de vous féliciter – que vous étiez capable de vulgariser très bien une situation. Vous êtes parfaitement capable aussi de vulgariser... Et, si vous n'êtes pas capable, je vais le faire pour vous, vous faire une page de vulgarisation, vous expliquer ce que c'est.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Morneau (Guy): Je prends bonne note, M. Gautrin. Je vais le peser, le considérer. On s'est engagé à faire un certain nombre de choses à la...

M. Gautrin: O.K. Ça marche. Si c'est ça, je préfère ne pas pousser le débat là-dessus.

M. Morneau (Guy): Je ne sais pas si notre actuaire en chef veut rajouter. Non?

Le Président (M. Kelley): M. Latulippe, voulez-vous ajouter?

M. Latulippe (Denis): Bien, en fait, là, si je peux me permettre d'ajouter quelques mots sur ça, je pense que l'analyse actuarielle qui a été déposée au 31 décembre 1997, c'était la première depuis la réforme. Vous savez sûrement que ça a pris quand même un certain moment avant de réformer le Régime. C'est ce qui fait en sorte qu'on a amené le taux à 9,9. Si on avait réformé plus tôt, le taux aurait été plus faible.

M. Gautrin: Je suis d'accord avec vous.

M. Latulippe (Denis): Donc, dans la réforme, un des deux objectifs principaux, le premier étant de stabiliser le financement, le deuxième était de se donner des moyens de gouverne plus solides. Puis, comme le mentionne M. Morneau, le but de l'analyse actuarielle dans le cadre de ça, c'est de se prononcer sur la viabilité financière du régime à long terme. On se sent le devoir de vous informer: Est-ce que le régime est viable ou pas?

Puis on pensait, quand on a fait l'analyse actuarielle, que vous donner plusieurs scénarios, ça embrouille plus que d'autres choses puis ça n'amène pas à une sage prise de décision. On prend bonne note de votre demande.

M. Gautrin: Merci.

M. Latulippe (Denis): Puis on verra pour la prochaine analyse. Si je peux me permettre juste un commentaire supplémentaire: le RPC a produit des scénarios. Vous savez ce que ça a donné. Le Reform a pris son scénario puis a dit: C'est mon scénario. Le gouvernement avait le scénario qui était le meilleur scénario de l'actuaire en chef du RPC. En fait, là, ça a généré des débats qui ne sont pas sains pour le régime.

M. Gautrin: Ça, je comprends ça, mais...

M. Latulippe (Denis): C'est ce qu'on voulait éviter en présentant un seul scénario. Mais, comme je vous dis, on prend bonne note de votre demande.

M. Gautrin: Mais, vous permettez, expliquez quand même ce que c'est, parce que vous êtes capable de l'expliquer sans difficulté, je suis sûr. Mais, quand même, je pense que plus l'information est donnée aux parlementaires, meilleur c'est, si vous me permettez, pour comprendre la viabilité du régime.

M. Latulippe (Denis): C'est ça.

M. Gautrin: Moi, j'ai une autre question, si vous me permettez.

Le Président (M. Kelley): Peut-être que je vais passer la parole...

M. Gautrin: J'ai une question sur les régimes complémentaires de retraite.

Le Président (M. Kelley): Peut-être que je vais passer la parole à Mme la députée de Rosemont et je vais revenir à M. le député de Verdun. Mme la députée de Rosemont.

M. Gautrin: Parfait. Je vous remercie.

Mme Dionne-Marsolais: Alors, on a regardé vos documents, M. le président. Je dois vous dire d'ailleurs qu'on a été impressionné par la note du Vérificateur général qui dit qu'ils n'ont quasiment rien trouvé, à vrai dire. Ha, ha, ha! Je dis «quasiment» parce qu'ils ont quand même fait un effort avec nous pour essayer de nous expliquer, pour qu'on comprenne mieux la capacité que possède la Régie de remplir sa mission.

Dans le rapport annuel, vous parlez que votre mission, effectivement, c'est de contribuer à la sécurité du revenu des Québécois et des Québécoises à toutes les étapes de leur vie. Moi, j'ai deux petites questions qui sont reliées toutes les deux et qui m'apparaissent importantes dans le contexte de l'avenir.


Utilisation des surplus des régimes complémentaires de retraite

La première, c'est: Par rapport aux régimes complémentaires de retraite, de plus en plus, on voit effectivement – et je pense que notre collègue de Verdun en a parlé – des entreprises venir négocier avec leurs syndicats des arrangements – je pense que le mot est juste – qui, sur la base d'hypothèses actuarielles, permettent de part et d'autre de passer à travers une période, pour donner des ajustements ou des compensations financières, des ajustements même financiers – au lieu de donner des augmentations de salaire, par exemple – des réductions de contribution.

La question que les gens nous posent, comme députés, ceux qui sont à la retraite et qui dépendent finalement des revenus de ces régimes de retraite complémentaires, c'est: Oui, mais comment on peut empêcher ça? Parce que c'est notre épargne. Ce n'est pas parce que, nous, on a contribué, par exemple, pendant 35 ans – et on a tous des cas concrets en tête – qu'un employeur et le syndicat peuvent décider de prendre le soi-disant surplus actuariel, d'économiser une contribution. C'est à nous, cet argent-là. Pourquoi ils ne nous le donneraient pas? À la limite, là. Qu'est-ce que vous répondez à ça? Comment la Régie, dans son rôle de surveillance justement sur les régimes complémentaires... Vous dites, dans votre rapport annuel, qu'elle met au point des outils pour repérer les régimes qui comportent des risques sur le plan financier. Comment elle le fait, ça?

M. Morneau (Guy): Bien, la Régie, c'est une question très fondamentale que vous posez là, qui interpelle beaucoup la finalité du système et qui renvoie au rôle des parties en présence.

D'abord, la Loi sur les régimes complémentaires de retraite, c'est une loi-cadre. La responsabilité, c'est dans les parties négociantes, c'est-à-dire les patrons et les syndicats, de s'entendre sur un régime de retraite puis de le faire évoluer. On s'assure, nous, comme je vous l'ai dit, dans nos systèmes de vérification et de monitoring, qu'il y a toujours assez d'argent dans la caisse pour être capable d'honorer les bénéfices qui sont promis, qui sont engrangés. Ça, c'est le premier principe de base qu'on veut suivre.

Le deuxième principe de base, c'est que la loi prévoit des droits minimaux qui sont obligatoires d'offrir à tous les cotisants. On s'assure que ces droits-là sont bien compris, bien acceptés, bien vulgarisés et bien pris en compte dans l'évaluation actuarielle.

(10 h 30)

Finalement, le troisième volet qui est celui de la transparence dans l'administration, on veut commencer à mesurer de plus en plus cette volonté-là d'être transparent, ouvert, en termes de cotisation, de rendement, de bénéfices et d'évaluation générale du régime.

Mais je reviens à la question, plus particulièrement, de la disposition des surplus. On a eu un gros problème, au Québec. Moi, je pense qu'on peut parler de surplus en cas de terminaison de régime, pas avant. Entre les deux, c'est une modalité de financement, c'est une promesse, c'est... Moi, dans la mesure où il y a un contrat qui se passe entre un employeur et un syndicat, ou des employés, ou de leur personnel qui dit: Moi, regarde, là, tu vas payer 2 %, 3 %, 4 %, 5 % de ton salaire, ou même, des fois, pas pantoute; tu vas avoir droit à ce bénéfice-là si tu te rends à tel âge – c'est ça, le contrat qu'on a compris qui était dans la base entre les parties – en cours de route, comment on le finance? Parce que la loi est très claire là-dessus, la responsabilité du financement est à l'employeur. Si jamais, en cours de route, le régime devient déficitaire, il doit approvisionner le régime, et obligatoirement et très rapidement.

Je dois vous dire que, dans les surplus actuellement, au moment où on se parle – parce qu'il y en a, des surplus – l'histoire nous apprend que les deux tiers des surplus ont été utilisés non pas pour des congés de cotisation, ils ont été utilisés pour bonifier les régimes. Donc, par ricochet, nos gens, nos retraités ont eu des bénéfices soit par un programme de départ accéléré soit par une revalorisation des rentes, ainsi de suite. Donc, ils en ont eu beaucoup par rapport à ce qu'ils ont cotisé. Mais de là à dire qu'il faut commencer à équilibrer chaque piastre, chaque cent par individu avant, pendant, après, je suis là, je ne suis plus là, c'est ma femme, c'est mes conjoints, vous comprendrez que c'est la meilleure façon de faire en sorte que ce régime-là meure ou n'évolue plus, parce qu'on vient le figer, on vient le geler, on vient le rendre absolument incapable de s'adapter à la réalité.

Moi, je pars de ces grands chiffres là: j'ai 66 % des surplus qui ont été utilisés pour bonifier le régime. Il y a des congés de cotisation. Oui, ça en prend, puis c'est souhaitable qu'ils en prennent, parce que j'aime autant qu'il y ait des congés de cotisation qu'il y ait du monde qui dise: Je vais essayer de viser juste pour que ça soit bon. J'aime autant qu'il y ait des surplus dans le régime, ça garantit la prestation aux gens qui sont là. Moi, je pense que c'est un atout stratégique. Mais on a une mauvaise publicité autour de cas, de Singer par exemple. Mais c'est faux, comme je vous l'ai dit, de penser que tous les cas sont comme des Singer.

C'est vrai qu'il y a une concurrence déloyale, c'est vrai, et ceux-là, on va les détecter dans nos mécanismes de suivi de risques et on va prendre des actions pour qu'ils corrigent puis qu'ils redressent la situation. Mais l'équité pure, individuelle, mesurée piastre par piastre, rendement par rendement, dans un régime de retraite, ça devient faramineux comme coûts de gestion, comme coûts d'application, coûts d'administration. On se fie, j'allais dire, sur la bonne foi des parties pour convenir d'arrangements qui les servent mutuellement dans l'intérêt de tout le monde et pour respecter le cadre général qu'on s'est donné au-delà de ça. Passé ça, on a comme l'impression qu'on va tomber dans une guerre où, là-dedans, il n'y a pas de vérité, il n'y a pas de certitude, on vit dans un monde de probabilités puis de possibilités.

Alors, c'est un gros débat, puis ça restera un gros débat, puis je pense que c'est à chacune des organisations de l'assumer à sa place puis à son niveau. Sur des comités de retraite, vous le savez, ils ont des représentants des employés, il y a des représentants des retraités puis il y a des représentants de l'employeur. Qu'ils en parlent, qu'ils échangent, qu'ils discutent là-dessus. Mais je vois mal comment l'État, dans une loi-cadre, pourrait statutairement venir décréter comment ça se passe, parce que la réalité est tellement différente d'un régime à l'autre, il y a tellement une gamme de régimes différents qu'une solution mur à mur, moi, je n'y crois plus, je n'y crois pas du tout, parce que le monde est beaucoup plus complexe qu'une solution mur à mur.

Mme Dionne-Marsolais: En fait, ce que vous dites, c'est que l'entreprise est responsable, de toute façon...

M. Morneau (Guy): Toujours.

Mme Dionne-Marsolais: ...de contribuer à son régime en tenant compte des négociations qu'elle a faites dans le passé. Je pense que c'est intéressant comme commentaire, et c'est quelque chose que vous auriez avantage à faire connaître, surtout à des populations retraitées qui dépendent de ces... et qui s'inquiètent – je pense qu'il faut le dire – de cela.


Surveillance des régimes complémentaires de retraite

Vous avez aussi mentionné dans vos remarques préliminaires votre objectif de devenir un modèle d'organisation performante. Une des variables critiques de ça, c'est la rigueur dans la gestion. Est-ce que, dans ce même esprit, vous avez – par rapport, justement, à ce processus de surveillance dont vous avez la responsabilité – des directives qui existent, à la Régie, et qui déterminent justement les éléments que vous suivez dans les régimes? Est-ce que c'est quelque chose que vous pouvez rendre public? Est-ce que l'on pourrait connaître ça? Autrement dit, les éléments qui vous permettent d'affirmer que tel régime est à risque ou pas, est-ce que c'est quelque chose que vous pensez qu'on...

M. Morneau (Guy): Je vais vous donner une réponse globale et je vais passer, peut-être, la parole à notre directeur du régime de retraite dont c'est le métier quotidien, qui va vous expliquer un peu sa stratégie de surveillance et ses moyens. Et il sera à même de vous donner les commentaires qu'il juge à propos quant à la pertinence de divulguer l'ampleur et la nature des contrôles qu'on veut faire. On va vous en parler abondamment.

Mais, dans un premier temps, je veux juste revenir sur votre remarque préliminaire, que c'est important de communiquer. On saisit toutes les opportunités qui nous sont données pour aller expliquer ces choses-là, et le rôle du gouvernement ou le rôle de la Régie par rapport au rôle d'un administrateur, par rapport au rôle d'un employeur, par rapport au rôle du syndicat. On est allé rencontrer, et je pense que M. Le May qui va prendre la parole dans quelques instants est allé rencontrer, j'allais dire, les retraités qui étaient en phase de consolidation pour se former une organisation pour revendiquer, comme à Hydro, comme au gouvernement du Québec, des droits. On a porté ce message-là.

C'est bien évident que, quand on est impliqués dans une cause comme celle-là, des fois, on aime moins le messager. Mais, nous autres, on dit: Regardez, on ne privilégie ni le retraité, ni l'actif, ni celui qui est parti. L'équilibre général nous donne à peu près cette impression-là, le droit dit à peu près ça. C'est bien évident, vous pouvez faire changer le droit, on peut ne pas être d'accord sur le plan individuel avec le droit, mais il faut qu'il y ait un consensus social pour le faire, il faut qu'on soit d'accord pour aller dans un sens ou dans l'autre, il faut qu'on ait constaté une situation à ce point-là déraisonnable qu'elle commanderait une action corrective. On ne voit pas ça dans l'horizon, on ne trouve pas que nos retraités sont super maltraités par rapport aux actifs, par rapport aux autres, par rapport au respect des règles générales qui ont été suivies, de base.

J'arrête là mon commentaire, puis je passe la parole à M. Le May qui est le directeur, comme je vous ai dit, de la surveillance des régimes de retraite et qui va vous expliquer la mécanique, les outils et les moyens.

Mme Dionne-Marsolais: Avant que vous lui passiez la parole, je ne souhaite pas obtenir des détails...

M. Morneau (Guy): ...confidentiels sur...

Mme Dionne-Marsolais: ...confidentiels au niveau des différents régimes, mais j'imagine que, avec tout ce que vous nous avez présenté, vous avez quand même des critères.

M. Morneau (Guy): Bien oui.

Mme Dionne-Marsolais: Sans les identifier, vous avez des critères très précis...

M. Morneau (Guy): Très clairs.

Mme Dionne-Marsolais: ...qui, eux, ne doivent mettre en péril aucune confidentialité, aucun fonds particulier ou aucun régime en particulier. C'est plutôt ça qui m'intéresse, moi, parce que...

M. Morneau (Guy): D'accord. Alors, il va vous donner la réponse, puis après ça on complétera la réponse, on vous l'enverra.

Le Président (M. Kelley): M. Bernard Le May.

M. Le May (Bernard): Oui, merci. Alors, voici. Actuellement, lorsqu'on surveille la planification financière des régimes de retraite pour s'assurer que le régime aura bien, au moment voulu, les argents nécessaires pour remplir les promesses qu'il a faites à ses participants, on surveille différents aspects sur la planification financière, notamment le financement du régime, le versement des cotisations par l'employeur et par les employés – lorsque les employés contribuent – les placements – est-ce que les règles générales de saine planification financière au niveau des placements sont respectées? – les liquidités – est-ce que le régime a assez de liquidités pour respecter ses promesses à court terme, dans le courant de la prochaine année par exemple? – et les mesures de contrôle interne qui sont assurées pour vérifier les entrées et les sorties de fonds au niveau des régimes.

Donc, actuellement, les volets que l'on vérifie dans la planification financière ou dans la gestion financière des régimes traitent de ces cinq aspects-là. Pour cela, on a programmé un ensemble d'environ 27 indicateurs qui, eux, sont confidentiels. Je dois vous dire que l'industrie a bien essayé de les avoir, les autres provinces ont essayé de les avoir aussi, pour savoir ce sur quoi faire bien paraître les régimes. On ne les dévoile pas pour le moment, sauf que ces indicateurs-là nous permettent, à partir des rapports financiers annuels que chaque régime de retraite doit transmettre à la Régie des rentes, non seulement de comparer la situation financière d'un régime par rapport à lui-même dans le temps – donc on voit comment un régime évolue dans le temps – mais ça nous permet aussi de le comparer par rapport à l'ensemble des autres régimes qui évoluent à peu près dans un contexte économique comparable.

Alors, avec ça, on est en mesure d'identifier les régimes qui présentent peut-être des risques sur le plan de la gestion financière, on intervient auprès de l'administrateur pour s'assurer que ces risques-là sont bien concrets et, en général, je vous dis, on s'entend très rapidement avec les administrateurs de régimes de retraite pour qu'ils puissent rétablir la situation dans des délais qui sont quand même très rapides. Ça, c'est pour le volet de la planification financière. C'est en place depuis octobre 1997 et ça nous permet vraiment de concentrer notre attention sur les régimes qui peuvent présenter des risques.

On a implanté en janvier 1999 la protection des droits des participants. La Loi sur les régimes complémentaires de retraite prévoit un ensemble de droits minima, qui sont les droits que chaque régime doit assurer. Bien sûr, la plupart des régimes peuvent être plus généreux s'ils le désirent, il n'y a pas de problème avec ça, mais la Régie des rentes a comme mandat de surveiller les régimes pour s'assurer que les droits minima prévus à la loi sont bien livrés par les régimes.

Ça, c'est une opération qui s'avérait très coûteuse, de regarder en détail si les droits minima sont respectés par les quelques 2 200 régimes de retraite actifs au Québec. On a trouvé, en 1999, une façon originale de le faire. Chaque régime était obligé d'émettre annuellement, à chacun de ses participants, des relevés de droits, un relevé qui lui dit: Voici les cotisations que vous avez versées au régime, voici qu'est-ce que ces cotisations-là vous ont accumulé jusqu'à maintenant, puis voici, si vous continuez au même rythme, qu'est-ce que vous allez avoir comme prestation, un jour.

Donc, nous, on fait l'analyse des relevés de droits – qui sont des documents que, de toute façon, l'administrateur doit produire – on demande un échantillon de relevés de droits aux administrateurs et, à partir de ça, on est à même de voir si les droits minima qui sont prévus à la loi sont respectés, parce qu'ils doivent être reflétés dans les relevés de droits. Et on s'aperçoit évidemment qu'il y a certaines choses qui méritent d'être ajustées. On fait les interventions requises auprès des administrateurs, parfois auprès des conseillers – parce que ces relevés de droits là sont confiés à contrat à des firmes de conseillers, c'est bien ça – et on a, en général, une très bonne collaboration des administrateurs pour interpréter correctement les droits minima qui sont prévus à la loi, et les ajustements sont faits dans des délais normaux.

Donc, c'est de cette façon-là qu'on assure que les régimes de retraite sont à la fois bien financés et bien gérés sur le plan financier et qu'en même temps ils respectent les droits minima prévus à la loi pour chacun des participants du régime.

(10 h 40)

Mme Dionne-Marsolais: Je peux continuer?

Une voix: Tu changes de sujet?

Mme Dionne-Marsolais: Non, non, non, toujours sur ce sujet.

Le Président (M. Kelley): Le député de Verdun a un complément de question, mais...

Mme Dionne-Marsolais: Oui. Bien, je sais que c'est un sujet qu'on partage et pour lequel on a une préoccupation qui est complémentaire. Je reviens là-dessus. Pourquoi est-ce que vous considérez que les critères qui traduisent vos cinq facteurs de suivi, c'est confidentiel, ça?

M. Le May (Bernard): Ce que je vous mentionnais, les cinq critères que je vous ai énoncés, ce n'est pas confidentiel et, suivant votre suggestion, ça pourrait très bien être publié puis rendu connu à l'industrie.

Mme Dionne-Marsolais: Mais vous les traduisez par 25 indicateurs.

M. Le May (Bernard): C'est ça, oui.

Mme Dionne-Marsolais: Bon. C'est beaucoup, 25 indicateurs. On sait tous, en gestion, qu'on a trois, quatre tests, là, puis, si ça coule, ces tests-là, on est dans le trouble.

Alors, ma question, c'est: Est-ce qu'il y aurait... En fait, ma préoccupation, c'est – j'aimerais ça, le comprendre: Pourquoi il vous apparaît important de protéger la confidentialité de ces critères-là, de ces indicateurs-là? Je vous donne un exemple. En finances, à un moment donné, dans certains secteurs, on regarde, on a des tests... Je ne sais pas si on... Ça doit être les tests... Au niveau du financement, du roulement des opérations, on a des tests pour s'assurer qu'une entreprise est capable de payer ses intérêts à même ses revenus nets.

Enfin, il y a un tas de critères reconnus financièrement pour s'assurer qu'une entreprise n'est pas en péril – je ne dis même pas «qu'elle est saine», là, je dis «qu'elle n'est pas en péril» – et il me semble que, pour assumer votre mandat de surveillance des régimes complémentaires, vous devriez être en mesure de déposer aux élus, en tout cas, quatre ou cinq indicateurs cruciaux – on appellerait peut-être ça des «variables critiques de survie ou de responsabilité» – au niveau de certains régimes, puisque, finalement, c'est vous qui avez le mandat de vous assurer que ces régimes privés, que vous encouragez, se comportent correctement.

Je pose la question avec un double objectif, parce qu'on vit actuellement dans un contexte économique très volatil où des ventes d'entreprises, des changements d'actionnaires se font à un rythme fou. Je lisais le Business Week hier, puis il y avait une très bonne blague. Je la partage avec vous parce que, moi, je l'ai trouvée très bonne. C'est un président qui s'en va voir son président de holding puis qui dit: J'ai une grosse nouvelle, on vient d'acheter l'entreprise qu'on a achetée il y a trois ans. Ha, ha, ha! Pour vous montrer le genre de rapidité avec laquelle les changements de propriété se font. Et ces changements-là ont une incidence sur les employés et sur leurs épargnes pour des fins de retraite et sur les régimes de rentes.

Moi, vraiment, j'aimerais ça que vous me rassuriez en me disant: Bien, on ne peut pas vous les donner, les 25, parce que, si c'était ça... Bon. Remarquez que je ne les comprends pas, vos raisons. Vous ne les avez pas dites, vous avez juste dit que c'est parce que les gens voudraient paraître mieux. Mais, si ça peut les aider à mieux expliquer aussi à leurs employés que leurs épargnes sont protégées... Parce que le régime de retraite, par essence, c'est mon épargne. Donc, j'ai le droit de savoir ce qu'il y a dedans, j'ai le droit de savoir si c'est protégé. Vous avez certains relevés que vous nous donnez, mais là je me place à un autre niveau, au niveau de l'État.

M. Morneau (Guy): Exact.

Mme Dionne-Marsolais: On devrait, il me semble...

M. Morneau (Guy): On est dans un niveau de contrôle, à ce moment-là.

Mme Dionne-Marsolais: Bien, de contrôle...

M. Morneau (Guy): La loi...

Mme Dionne-Marsolais: Vous avez un rôle de surveillance.

M. Morneau (Guy): Exact.

Mme Dionne-Marsolais: Moi, je n'ai pas rêvé ça, là, c'est écrit ici.

M. Morneau (Guy): Exact. Je vous dis que la loi crée des obligations à l'employeur en termes de divulgation du rapport annuel, des rendements et des cotisations à son comité de retraite. Il n'a pas le choix, il le fait, là. C'est ce moyen-là. Il y a une assemblée annuelle où l'administrateur du régime explique à l'ensemble des gens qui participent à ce régime-là le vécu et la réalité quotidienne de ce régime-là. Donc, c'est comme ça qu'on garde, j'allais dire, vivante, entre guillemets, la flamme de la compréhension des enjeux.

Nous, comme organisme de contrôle, on est là pour s'assurer... Et c'est un peu la grille d'analyse qu'on se donne pour se dire: Regarde, selon l'expérience qu'on a, selon le vécu qu'on a, voici les critères qu'on veut tenter de suivre et de monitorer dans le temps pour être en mesure d'être capables de se faire une opinion sur la validité et la solidité, j'allais dire le caractère sain, de ce régime-là et de sa parfaite harmonisation avec la loi qui, je vous le rappelle, n'est pas simple. Elle est vraiment d'une complexité, parfois, pas toujours... Je pense que l'équivalent de la Loi de l'impôt n'est pas trompeur à cet égard-là.

Alors, ceci étant dit, on peut vous donner le rapport annuel, la demande de déclaration annuelle, voici toutes les informations qu'on demande. Mais, quand on analyse le risque dans un régime, c'est souvent pas toujours les mêmes critères qui sont utilisés. Il y a une perspective historique, il y a une perspective de continuité et il y a une perspective de position, par rapport à des entreprises dans ce secteur-là, qui influencent notre choix et notre décision.

Je peux vous en donner un exemple. Si vous avez un taux de capitalisation qui est de 101 %, 102 % ou 103 % par rapport à vos éligibilités, vous êtes dans un secteur qui est en forte turbulence, par exemple le réseau de la distribution qui est en voie de rejet, en réengineering global, c'est bien évident que, ces années-là, on va avoir des petites questions plus pointues à poser à du monde, des fois. On va dire: Regarde, là tu es sur le bord de devenir moins solvable, tu es dans un secteur à risque, c'est quoi que tu fais, où est-ce que tu t'en vas? Explique-nous ça, là.

On est plus du côté de la prévention parce que l'outil est moins un outil de pénalité, c'est un outil de dire qu'on veut gérer les problèmes avant qu'ils arrivent. On veut être solidaire des gens qui vivent cette réalité-là. Parce que, quand vous le vivez, ce n'est pas facile, là. La presse, les journaux, tout le monde est là. Alors, nous, on se range résolument du côté de la prévention. Et ces outils-là, ils servent à la fois à nous guider dans nos actes de prévention et dans nos approches à faire auprès de certaines entreprises et à raffiner aussi ce modèle-là qui est à construire constamment parce que ça évolue d'heure en heure, de journée en journée. La réalité n'est jamais arrêtée.

Une voix: ...

M. Morneau (Guy): Bien, quand je suis à la Bourse, j'ai l'impression que, d'heure en heure, je deviens millionnaire ou que je perds des millions.

Mme Dionne-Marsolais: C'est une question de secondes, des fois.

M. Morneau (Guy): Des fois, c'est des questions de secondes.

M. Gautrin: ...Les régimes de retraite ont une pérennité...

Mme Dionne-Marsolais: Justement, dans le contexte de cette prévention et dans votre effort de monitoring dont vous parlez, nous aussi, notre responsabilité, c'est... Je veux bien croire tous les technocrates qui existent dans le gouvernement du Québec – et il y en a pas mal – mais j'aimerais ça aussi, puisque c'est l'objectif de la commission, avoir des informations précises sur un certain nombre d'éléments et de ratios, une grille de chiffres – je vais utiliser les mots que je connais – des ratios qui sont des ratios cruciaux – je répète le mot – pour le suivi, justement.

Vous, vous parlez de contrôle; moi, je parle de surveillance. Ça peut être interprété dans le même sens. Mais, tantôt, on a mentionné 2 200 régimes. On a parlé de 25 indicateurs de performance, je trouve que c'est court comme réponse. Je comprends l'effort d'accompagnement que vous faites pour aider les entreprises, mais je reviens avec ma question: Aujourd'hui, une entreprise qui disparaît – et il y en a à tous les jours – et elle peut disparaître pour toutes sortes de raisons, que ce soit parce qu'elle se fonde dans une autre ou... On est dans une mouvance extrêmement volatile et j'aimerais ça savoir comment, en plus de ce bel effort d'accompagnement que vous faites et que je valorise, que je trouve important, mais j'aimerais ça savoir en plus les outils que vous avez développés pour vous assurer que mes épargnes ou celles de mes électeurs sont bien protégées.

(10 h 50)

C'est plus que juste de dire le financement, les versements, les placements. À titre d'exemple, est-ce que vous faites automatiquement une rencontre avec les comités de placements de tous les régimes de retraite? Un. Est-ce que tous les régimes de retraite complémentaires ont des comités de placement? Si la réponse, c'est non, est-ce que vous faites des recommandations pour que ce soit le cas?

M. Morneau (Guy): Oui.

Mme Dionne-Marsolais: Tu sais, je veux dire, c'est ça, la...

M. Morneau (Guy): Oui, on peut vous en jaser...

Mme Dionne-Marsolais: Bon, bien...

M. Morneau (Guy): ...si vous précisez votre besoin, on va en jaser amplement.

Mme Dionne-Marsolais: ...bien, mon besoin, c'est, dans chacun des cinq éléments...

M. Morneau (Guy): Je vous donne l'exemple.

Mme Dionne-Marsolais: Bien, il y a deux choses: Qu'est-ce qui est en place pour respecter la loi? Qu'est-ce que vous pensez qu'on devrait mettre en place dans la conjoncture? Parce que votre modèle, il est très interne. C'est beau, satisfaire le client, là, mais le monde autour, il met de la pression, lui aussi, sur le client, et le monde autour, il modifie la relation de l'employé avec et son fonds et son employeur qui, lui, le change à peu près à toutes les trois semaines.

M. Morneau (Guy): Mais cet employeur-là, je vous le rappelle...

Mme Dionne-Marsolais: Il est obligé de...

M. Morneau (Guy): ...l'obligation de l'employeur est de produire son rapport annuel, de donner cette information-là à son monde, et, nous, on surveille ça. Donc, en théorie, à moins d'avis contraire...

Mme Dionne-Marsolais: J'aime bien votre mot «théorique».

M. Morneau (Guy): Non, mais, en pratique, c'est bien évident que de la malversation puis de la fraude, il y en a à des places, là, puis des fois on ne peut pas garantir de façon absolue et ex cathedra que ce qui est écrit là, c'est vraiment le portrait fidèle et réel de ce qui s'est passé, puis qui est là, puis qui est vraiment auditable, si vous me permettez l'expression très comptable.

Mais, de façon générale, la loi dit: L'employeur est responsable du financement du régime, il doit avoir en tout temps les provisions requises pour être capable de faire face aux exigences de la loi, aux exigences du paiement de ses prestations. S'il est en défaut, la loi lui crée des obligations d'amortir sur quatre ans, cinq ans, 10 ans, dépendamment du type de déficit: initial, courant, ou ainsi de suite. Il a des obligations. Alors, on s'assure que ce soit fait.

C'est évident qu'une entreprise qui ferme demain matin, mettons... On dit: Regarde, je fais faillite, là, moi, je fais faillite, là. Alors, on prend la lecture au moment où elle se passe. Le régime, il est là. Il va avoir des surplus, il va être réparti, puis il va s'entendre avec les syndicats, il va dire à qui appartiennent ces surplus en cas de terminaison de régime, puis, s'ils s'entendent, il va se faire selon ces règles de l'art là, puis on va terminer le régime. Mais, moi, je peux vous dire que, dans la chaîne des actions, les obligations de la loi sont suivies et respectées pour tous les régimes qui sont inscrits chez nous.

Dans les gens... On vous a donné les trois grilles qui nous préoccupent. Le respect des exigences légales sur le financement du régime: intraitable là-dessus; sur le respect des droits: intraitable là-dessus; on s'assure qu'ils sont bien compris, bien acceptés – parce que ça ne menace pas nécessairement ces droits-là, là, le fait que l'employeur en ait une connaissance pas tout à fait totale, instantanée – et on s'en va vers ça, vers la transparence. On forme les membres de comités de retraite, on donne des cours à n'en plus finir sur les droits, les devoirs, les responsabilités, l'éthique et ainsi de suite, à tout ce monde-là. On donne même des cours sur la fiscalité des régimes de retraite avec Revenu Canada, Revenu Québec et ainsi de suite. Tout ça pour que ce monde-là se prenne en main.

C'est-à-dire que les partenaires, là, on voudrait que les gens des comités de retraite assument leurs responsabilités et cessent de penser que, nous, de la Régie des rentes du Québec ou l'État, pour ce que nous en personnifiions, soyons les garants de l'orthodoxie éternelle. Occupez-vous de vos affaires, c'est vos affaires. Mais, nous, on va gérer les affaires qui nous semblent les plus grosses et les plus majeures. Parce que, encore une fois, je vous donne le contexte général. Vous avez dit qu'on était un peu tournés... Ça m'étonne que vous ayez décodé ça de la présentation parce que j'ai voulu plutôt vous montrer comment la Régie est en osmose avec l'univers avec lequel elle transige. Et cet univers-là, il est mouvant, il est changeant, vous l'avez tout à fait raisonné.

Mais je vous donne l'exemple des fermetures d'usines. Alors, on est toujours présent, dès qu'il se produit un événement, pour rétablir les droits et rassurer le monde. Alors, je peux vous en donner, des exemples, à n'en plus finir, des actions qu'on pose. Je vous rappelle que l'avoir ou les frais qu'on perçoit pour gérer ces régimes-là, c'est une équation aussi, là. Tous les frais qu'on assume pour gérer la loi doivent être chargés, dans un principe de tarification, aux utilisateurs, aux 2 200 régimes. Alors, il y a une pression pour que les frais soient au plus bas. Il y a des critères qu'on suit de façon marginale et de façon très pointue et il y en a d'autres... Donc, c'est cet équilibre-là qui est constamment à tenir. Et je vous garantis que ce n'est pas une job facile.

Mme Dionne-Marsolais: Je comprends que c'est une job...

Le Président (M. Kelley): Une dernière question.

Mme Dionne-Marsolais: Mais je ne lâcherai pas le morceau, c'est ça. Parce que vous dites que vous êtes intraitable sur le financement du régime, sur les conditions de versements. Dans votre propre rapport, vous dites que vous avez mis au point les outils nécessaires pour repérer les régimes qui comportaient des risques sur le plan financier. Bien, moi, tout ce que je vous demande, c'est: Est-ce que c'est possible d'obtenir ce qui vous permet d'être intraitable, c'est-à-dire les critères que vous utilisez et les critères traduits en indicateurs précis? Je ne vous les demande pas, les 25, je vous en demande trois ou quatre cruciaux.

M. Morneau (Guy): Vous voulez la liste des critères, je vais vous les envoyer avec plaisir.

Mme Dionne-Marsolais: Bon. Deuxièmement, est-ce qu'il existe une liste des régimes à risque financier? Vous dites ici, là, que vous avez développé les outils nécessaires pour repérer les régimes qui comportaient des risques sur le plan financier.

M. Morneau (Guy): Oui.

Mme Dionne-Marsolais: Est-ce qu'elle existe, cette liste-là?

M. Morneau (Guy): Elle existe à l'interne.

Mme Dionne-Marsolais: À l'interne. Et, évidemment...

M. Morneau (Guy): C'est comme si je vous demandais, madame...

Mme Dionne-Marsolais: Non, je ne vous la demande pas, la liste.

M. Morneau (Guy): ...le revenu moyen des entreprises de 500 et plus, là. Je peux vous donner une strate, comme ça, mais c'est de nature confidentielle, ces informations-là qu'on a eues. Elles ne sont pas publiques dans ce sens-là.

Mme Dionne-Marsolais: Ah! vous savez, la confidentialité, vous avez quelqu'un qui sait ce que c'est, ce que ça veut dire.

M. Morneau (Guy): Oui, je sais pourquoi vous êtes sensible à ça. C'est pour ça que je l'invoque.

Mme Dionne-Marsolais: Mais je sais aussi qu'on peut utiliser... Oui, mais enfin, embarquez-moi pas là-dessus, parce que je ne suis pas sûre que vous allez gagner.

M. Morneau (Guy): Non, non, non.

Mme Dionne-Marsolais: Sur 2 200 régimes, est-ce que vous pouvez nous dire actuellement, sur l'année passée, par exemple, quel était le pourcentage de ceux pour lesquels vous avez fait un constat de risque financier et que vous suivez sérieusement?

M. Morneau (Guy): Oui, on va vous donner les trois dernières années, si vous voulez.

Mme Dionne-Marsolais: C'est quoi, le pourcentage? Est-ce que ça a changé? C'est intéressant, effectivement, les trois dernières années.

M. Le May (Bernard): Bien, d'abord, disons que la technique de détection des régimes à risque a été mise au point en octobre 1997. Donc, on était en mesure de faire notre premier exercice financier complet en 1998 et on a eu les résultats en 1999.

Mais, si on regarde, par exemple, pour vous donner un exemple, là, les résultats de l'année 1997 à partir des rapports financiers qu'on a eus – dans le temps, on surveillait 2 249 régimes – alors il y a 84 régimes pour lesquels on a identifié un risque suffisant pour que la Régie fasse une action auprès de l'administrateur, et il y a 34 régimes pour lesquels une action correctrice a dû être apportée par l'administrateur. Et, dans plus de 50 % des cas, cette action correctrice là était simplement un retard dans le versement des cotisations aux régimes. Je dis «simplement», c'est important...

Mme Dionne-Marsolais: Absolument!

M. Le May (Bernard): ...ça contribue au financement du régime. Si l'entreprise fait faillite dans le courant de l'année, il faut que les cotisations soient là, parce que, à un moment donné, quand l'entreprise fait faillite, elles ne sont plus là.

Mme Dionne-Marsolais: Ça ne sera pas «simplement», ça va être «terriblement».

M. Le May (Bernard): Je le crois. Mais, quand je vous dis «simplement», je veux dire que c'est quelque chose qui n'est pas difficile à percevoir, qu'on peut très bien traduire dans les résultats. Ce que je vous donne là, c'est le sommaire du tout premier bilan qu'on est en mesure de faire de notre surveillance financière. Donc, c'est quand même un bon indice à l'effet qu'on est en mesure de repérer les régimes qui ont présenté des risques. Nos interventions ont permis de les corriger et, dans certains cas, ça a permis le versement de prestations que tout simplement, je crois, l'employeur retardait de faire pour des raisons qui lui étaient propres.

Dans certains cas, même dans un régime, on a fait le versement de cotisations qui était en retard de 3,1 millions de dollars. C'est un régime de 600 participants. Donc, c'est important. Dans un autre cas, ça a été les cotisations de 0,25 million de dollars, mais c'était entre deux régimes pour 7 000 participants. Alors, c'est dans des cas comme ceux-là où est-ce que la Régie intervient avec le plus d'efficacité, prend entente avec l'administrateur, détecte une situation déviante à partir des rapports financiers et exige que l'administrateur prenne des actions correctrices appropriées. Alors, c'est un exemple de résultats concrets de mesures.

Mme Dionne-Marsolais: C'est très bon, ça, parce que ce n'est pas élevé.

Le Président (M. Kelley): M. Morneau.

M. Morneau (Guy): Non, c'est pour ça que je ne voulais pas vous laisser sur l'impression qu'on a des déviants terribles, au contraire.

Mme Dionne-Marsolais: Non, non, mais c'est ça, c'est important de le savoir.

M. Morneau (Guy): On a les outils, on a les moyens, puis la prévention donne des fruits, parce que, moi, ça fait un an et demi maintenant que je suis à la Régie, je n'ai pas eu à intervenir de façon, j'allais dire, musclée auprès d'un employeur ou d'un régime pour corriger une situation qui est aberrante. Au contraire, je pense qu'on a le temps, on le fait, on le fait avec rigueur puis on le fait avec, je pense, sympathie, puis, j'allais dire, la collaboration de tout le monde. Puis souvent ce n'est pas de la mauvaise foi, c'est de l'ignorance des fois ou c'est un manque de rigueur.

Alors, on les rappelle à l'ordre, on fait ça. Puis la nature des fautes n'est pas du genre de celle à laquelle on pourrait s'attendre normalement dans un organisme de contrôle, parce qu'on est dans un mode de prévention. C'est rien que ça que je voudrais... Juste attirer... C'est pour ça qu'on n'a pas l'idée de sortir un indicateur du taux de conformité, par exemple, des entreprises à la loi, parce que ça nous priverait d'un moyen... Tant que je ne serai pas là, je ne ferai rien. Nous, on veut agir avant pour prévenir des situations dramatiques.

Le Président (M. Kelley): Juste pour clore l'échange, il y a un engagement que vous allez transmettre à la commission les critères et peut-être, dans la mesure du possible, un bilan de ce rôle de surveillance, tout en respectant la confidentialité, et tout ça. Mais peut-être, pour l'intérêt des membres de la commission, si on peut avoir un complément d'information sur ces deux volets. Maintenant, je vais passer la parole au député de Verdun pour un complément de question, si j'ai bien compris.

M. Gautrin: Brièvement, toujours sur les régimes complémentaires de retraite. Vous avez un rôle de surveillance. Quels sont les moyens que vous avez à votre disposition pour intervenir, à part l'intervention directe verbale qui est, disons, bona fide? Est-ce que vous avez d'autres moyens à votre disposition?

M. Morneau (Guy): Oui. Il y a des moyens légaux d'intervention, d'enquête, il y a des moyens de prise de contrôle, d'administration provisoire du régime.

(11 heures)

M. Gautrin: O.K. Donc, le cas échéant, vous pourriez nous transmettre aussi dans la note quels sont les moyens que vous avez à votre disposition.


Utilisation des surplus des régimes complémentaires de retraite (suite)

Moi, j'ai une autre préoccupation sur les régimes complémentaires de retraite. Vous êtes conseiller du gouvernement pour les modifications à la loi, et c'est plutôt la prospective, moi, qui m'intéresse à l'heure actuelle, de ce qu'on a à faire pour le futur. La majeure partie de nos régimes complémentaires de retraite sont en train de dégager des surplus actuariels parfois importants et, évidemment, on respecte les droits minimaux, chaque régime respecte les droits minimaux à ce moment-là.

Mais il peut y avoir conflit, du moins discussion, quant à la manière dont sont utilisés ou sont utilisables ces suppléments d'actif sur le plan actuariel, soit en augmentant les bénéfices des pensionnés soit en diminuant les cotisations ou en prenant des congés de cotisation. Vous connaissez les allures dans ce sens-là. La loi est relativement peu précise à ce moment-ci sur la manière dont on doit agir pour respecter les droits de chacun, les droits des actifs, les droits des pensionnés et les droits des employeurs, puisque, dans le fond, il y a une trilogie entre les trois.

Je me demande s'il n'y aurait pas lieu à l'heure actuelle, de votre part, de réfléchir à des modifications à apporter à la Loi sur les régimes complémentaires de retraite pour tenir compte de ce qui devient de plus en plus réel, à savoir que les régimes de retraite dégagent des surplus actuariels et comment les surplus actuariels peuvent être dépensés. Je pense que ma collègue de Rosemont avait soulevé la question. Vous connaissez bien sûr...

M. Morneau (Guy): Vous n'étiez pas là. Je pense que j'ai répondu en partie à ces questions-là. Je vais reprendre.

M. Gautrin: Non, mais je connais le problème, donc j'imagine la réponse que vous avez dû lui donner.

M. Morneau (Guy): O.K. Je ne suis pas sûr.

M. Gautrin: Ah bon! Eh bien, je lui dirai, à moins que vous vouliez me la répéter à ce moment-là.

M. Morneau (Guy): Je vais vous la répéter avec plaisir. J'ai situé le régime. La loi, c'est une loi-cadre...

M. Gautrin: Absolument.

M. Morneau (Guy): ...une loi de surveillance, une loi de moeurs publics quasiment. L'équité pure sur une base individuelle dans le financement puis dans les bénéfices, c'est à peu près impensable dans un régime collectif. Il va falloir accepter de voyager avec un groupe, tu sais. J'ai dit que les surplus, quant à moi, ils n'existent qu'au moment où on parle d'une terminaison de régime, parce que là on connaît de façon claire les engagements du régime et on connaît, clair, la caisse.

M. Gautrin: Et on sait comment ça se passe.

M. Morneau (Guy): Exact!

M. Gautrin: Mais, néanmoins – et vous le savez parfaitement – ...

M. Morneau (Guy): En cours de régime. Alors, c'est ça, là, j'arrive là.

M. Gautrin: ...en cours de régime, le gouvernement, par exemple dans le Programme de départs volontaires a, disons, pris des suppléments d'actif qui étaient dans le RREGOP.

M. Morneau (Guy): Oui, oui, oui.

M. Gautrin: Bon. Alors, ils ont quand même considéré qu'ils existaient quand même.

M. Morneau (Guy): Une fois qu'il a fait ça, le gouvernement ou l'employeur, ou que les parties font ça, ça ne les soustrait pas à l'obligation de toujours correctement approvisionner le régime, sécuriser les bénéfices puis les droits des individus.

M. Gautrin: Je sais. Non, non, attendez un instant, vous ne m'avez pas compris là.

M. Morneau (Guy): En termes de conclusion, juste pour dire – parce que c'est le bout que vous n'avez peut-être compris, que j'aimerais répéter devant vous – c'est qu'on parle beaucoup des congés de cotisation, mais peu de gens savent que, depuis les dernières années, la majorité des surplus en question – même si on peut parler de ça entre parenthèses, surplus, parce qu'un soir, vous avez un surplus puis, le lendemain, vous pouvez avoir un déficit terrible – ont servi à bonifier les régimes. 66 % selon les études qu'on a ont servi à bonifier le régime. Puis, quand je bonifie le régime, règle générale, je valorise les rentes. Alors, ça touche les retraités et ça touche les futurs retraités aussi. Alors, dans cet esprit-là, moi, je pense qu'on ne voit pas de signe annonciateur d'une inéquité barbare entre les trilogies dont vous parlez.

M. Gautrin: Vous n'avez pas compris du tout, du tout. Je n'ai ni utilisé le terme...

M. Morneau (Guy): Non, non.

M. Gautrin: J'ai dit simplement – et je me permets de vous retourner ma question – je vous ai dit: Cette situation semble exister dans beaucoup de régimes actuellement, au point que, d'après moi – et je m'adresse à vous comme conseiller du gouvernement – il y aurait lieu dans la Loi sur les régimes complémentaires de retraite de mieux baliser la manière dont sont utilisés ces surplus d'actif actuariels. C'est exactement tout ce que je vous dis. Je vous demande...

M. Morneau (Guy): J'ai compris la question très bien, M. Gautrin. J'ai de la misère à baliser ça ou à recommander un moyen de baliser parce que ça renvoie à une notion d'équité individuelle ou collective, là. Moi, à partir des chiffres que j'ai – c'est ce que j'essaie de vous expliquer – les surplus actuellement ont été utilisés pour valoriser les rentes, donc ont servi aux retraités. Les autres ont servi à des congés de cotisation pour...

M. Gautrin: Permettez-moi de reprendre encore avec vous, quand je dis baliser, je ne dis pas à l'heure actuelle que ça a été bien fait ou... Je le sais, ce que vous me dites, que ça a servi à bonifier en général les rentes. Ce que je débats avec vous, c'est que je pense que la loi sur les régimes de retraite, actuellement, devrait prévoir, le cas échéant, lorsqu'on voit un surplus d'actif actuariel important, comment on peut en disposer et suivant qui en dispose et qui prend la décision. Je ne dis pas que les décisions qui ont été prises dans le passé ont été pénalisantes ou ont favorisé tel groupe par rapport à tel groupe, ce n'est pas ça que je dis. Je dis: Comme c'est une situation qui a tendance à se répéter, il me semblerait que la loi devrait baliser comment on attribue ceci. Et je ne dis pas que ça a été fait de manière inéquitable, ce n'est pas ça que j'ai dit.

M. Morneau (Guy): D'accord, on se comprend, là.

M. Gautrin: On se comprend là-dessus? Je n'ai pas dit ça, je ne suis pas rentré dans un jugement là-dedans.

M. Morneau (Guy): Non. Je décodais de ce que vous disiez que vous souhaiteriez qu'on soit plus respectueux de la trilogie, donc qu'on donne des règles qui respectent cette trilogie-là. Moi, je vous dis...

M. Gautrin: Ou des moyens dans lesquels cette trilogie-là doit...

M. Morneau (Guy): Doit opérer.

M. Gautrin: ...opérer...

M. Morneau (Guy): Voilà.

M. Gautrin: ...et, le cas échéant, comment ils peuvent se consulter, etc.

M. Morneau (Guy): D'accord. D'accord, on se...

M. Gautrin: Moi, c'est dans ce cadre-là que je verrais les modifications à la loi, et je pense que ça peut se faire.

M. Morneau (Guy): Prochainement – je pense que vous aurez le plaisir, parce que vous allez être sur notre commission parlementaire – on aura peut-être l'occasion d'échanger.

M. Gautrin: Vous savez, je suis sur beaucoup de commissions parlementaires.

M. Morneau (Guy): Alors, prochainement, ça se pourrait qu'on ait l'obligation d'échanger, puis on va expliquer des moyens, justement, pour dire... Mais c'est sur un thème plus particulier, là; peut-être les congés de cotisation.

M. Gautrin: Bon. Mais on pourra revenir sur ça le cas échéant.

M. Morneau (Guy): On aura des beaux échanges à ce moment-là.

M. Gautrin: C'est bon.

Mme Dionne-Marsolais: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup. M. le député de Mont-Royal.


État des régimes de retraite des employés du gouvernement du Québec

M. Tranchemontagne: Merci, M. le Président. J'aimerais poursuivre sur les régimes complémentaires de retraite.

M. Morneau (Guy): Je suis heureux que ça préoccupe beaucoup de monde, parce que...

M. Tranchemontagne: Bien oui, mais vous allez...

M. Morneau (Guy): ...parce que, des fois, j'ai l'impression que je suis tout seul à faire des... Ha, ha, ha!

M. Tranchemontagne: Et je voudrais aussi poursuivre sur votre rôle de surveillance. Vous allez voir que c'est important pour nous aussi. J'aimerais vous entendre parler sur quelle est votre perception de votre rôle face à un régime complémentaire particulier, celui du gouvernement du Québec, comme employeur.

Je ne sais pas si vous le savez, mais le Fraser Institute, qui fait des études régulières sur les fonds de pension au Canada, estime que le fonds du Québec pour ses employés est déficitaire, sur une base actuarielle, de 41,6 milliards de dollars. Il dit même que c'est à peu près 50 %, 60 % plus élevé que l'ensemble des neuf autres provinces, dont le déficit serait de 26,4 milliards, et aussi si on le compare avec le gouvernement du Canada, qui, lui, est en situation de surplus actuariel à 27 milliards.

Alors, ma question est double. Un: Comment vous voyez votre rôle comme surveillant de ce régime particulier là, complémentaire? Et, aussi: Qu'est-ce que vous pensez des chiffres qui sont avancés par le Fraser Institute? Est-ce que vous les partagez?

M. Morneau (Guy): Je peux vous donner une opinion personnelle, là, parce que ce n'est pas en qualité de président de la Régie des rentes que je pourrais vous donner une opinion là-dessus parce que les régimes créés par loi en vertu de la Loi de l'Assemblée nationale ne sont pas couverts par les régimes complémentaires de retraite, premièrement. Deuxièmement, j'ai déjà oeuvré longtemps pour la partie patronale au Conseil du trésor en négociation, donc c'est une question que je connais un peu.

Je ne partage pas la version de l'Institut Fraser sur l'interprétation à donner. Je pense que, par rapport à la situation observée dans le reste du Canada, on est dans la bonne moyenne et comparable en termes de comptabilisation, en termes de transparence puis en termes d'engagements sur les régimes de retraite et en termes de transparence. C'est juste des techniques comptables, des fois, qui diffèrent d'un pays à l'autre ou d'une province à l'autre. Mais, dans l'ensemble, le manque de provisionnement qu'on dénote au Québec, au Canada, c'est la même chose dans le reste du Canada aussi.

On a écrit aux livres une dépense à un moment donné puis on suit cette dépense théorique là. On fait la même chose. Nous autres, on avait décidé d'amortir sur 40 ans les déficits des vieux régimes, du RRE et du RRF, par exemple, et, à un moment donné, le Vérificateur général disait, depuis 20 ans, que ça n'a pas de bon sens, ça, il faudrait l'amortir plus rapidement. Alors, ils l'ont passé dans les réformes comptables, la dernière fois, tout d'un coup, tout le passif est passé dans un livre à un moment donné.

Je sais qu'il y a d'autres débats présentement autour de la façon de l'écrire, mais, dans l'ensemble, moi, j'ai l'impression que le gouvernement du Québec n'est pas pire, n'est pas mieux que l'ensemble des autres provinces et l'ensemble du régime canadien, en termes de déficit. Je pense que, même, à certains égards, le gouvernement du Québec a été le premier à vouloir provisionner dans ses dépenses courantes l'ensemble des coûts réels du régime de retraite dès 1979, parce que peu de pays faisaient ça.

Moi, à ce moment-là, j'étais à la Commission administrative des régimes de retraite et, quand je parlais avec mes collègues des autres provinces, je leur disais: Vous ne passez pas aux livres les vrais coûts. Ils disaient: Voyons donc! Pourquoi tu dis ça? Bien, je dis: Bien, regardez, vous ne mettez pas le coût de l'indexation dans le coût du régime. Ah! mais ils disaient: Ce n'est pas promis dans notre loi, qu'on va payer. On décide à tous les ans si on indexe. Je dis: Ça fait combien de temps que vous indexez? Ils disent: Ça fait 30 ans. Bien, je dis: Il me semble que vous cachez quelque chose. Ah, non, non, non! On ne veut pas montrer ça. Ah non! Ce n'est pas ça, ce n'est pas ça, ce n'est pas ça!

Alors, vous voyez bien que ça a changé puis ça a évolué dans le temps, puis ça va continuer à évoluer. Alors, moi, je pense qu'on n'est pas dans une zone de sous-performance puis on n'est pas dans une situation pire que les autres, au contraire. Au contraire, depuis l'historique de 1979, j'ai comme l'impression qu'on est sur une bonne pente, on passe aux livres les vrais chiffres.

Et, de plus en plus, les vrais chiffres, c'est lourd – je ne le cache pas, là – c'est très lourd pour l'État parce que, dans ses dépenses, c'est un poste budgétaire drôlement important. Puis je pense que le plus grand créancier, au moment où on se parle, de la dette du Québec, c'est les employés de l'État avec – quoi? – 24 milliards, 25 milliards minimum qui est reconnu comme dû aux régimes de retraite des employés du gouvernement, c'est ça, là. C'est comme une obligation qu'on a émise au nom de... Bon. Moi, sous cet angle-là, je ne suis pas très alarmiste en autant qu'on reste transparent puis on reste capable d'expliquer les principes qui sont à la base de cette façon de comptabiliser ces coûts-là. Merci.

(11 h 10)

Le Président (M. Kelley): Mme la députée de Rosemont.


Ententes de partenariat

Mme Dionne-Marsolais: Oui. Alors, ma prochaine question concerne les ententes avec les partenaires. Dans votre rapport annuel, vous parlez que vous avez conclu plusieurs ententes d'échanges de renseignements avec plus de 20 organismes du secteur public et, vous dites, pour vous procurer des renseignements dont vous avez besoin pour assumer pleinement et efficacement sa mission.

Après ça, vous dites: Des ententes de partenariat ont été signées en février 1979 avec le Fonds de solidarité des travailleurs du Québec, l'Institut québécois de planification financière et la Corporation des thanatologues. Est-ce que vous pouvez nous donner les objectifs que vous poursuivez dans ces ententes-là et qu'est-ce que ça va vous donner, combien, à ce jour vous en gérez? Je vais, évidemment, vous poser la question au niveau de la protection de certains renseignements – ça, je suis certaine que vous vous êtes préparé à ça parce que c'est certainement une question préoccupante.

Une voix: ...

Mme Dionne-Marsolais: Oui. Et le troisième volet de la question, c'est par rapport aux systèmes d'information que vous avez à la Régie. Vous avez des systèmes d'information de gestion, est-ce qu'ils sont à niveau pour vous permettre de réaliser, dans certains cas, les contrôles de certaines données dans le cadre de la réalisation de certaines de ces ententes d'échanges de renseignements?


Objectif d'information, de vulgarisation et d'éducation

M. Morneau (Guy): O.K. Alors, à trois niveaux. Donc, je parlerais de façon générale, vous avez vu les enjeux qu'on a en termes de défis de communication, d'enjeux de faire comprendre la finalité des systèmes, le mode de fonctionnement, donc il faut sensibiliser la population en général à ces enjeux-là, à ces phénomènes-là; il faut donner beaucoup d'informations, il faut vulgariser, il faut parler de plein de questions financières. Beaucoup des échanges qu'on a avec nos partenaires ont cette finalité première.

Mme Dionne-Marsolais: De communication.

M. Morneau (Guy): De communication, d'aller rejoindre une clientèle qu'eux autres chapeautent, c'est des relayeurs d'informations plus privilégiées, que ce soit l'Institut des planificateurs financiers, que ce soient les syndicats.

Mme Dionne-Marsolais: Les modificateurs d'impact.

M. Morneau (Guy): Les modificateurs d'impact, c'est ça, pour minimiser nos coûts puis faire en sorte d'avoir un plus grand rayonnement puis peut-être être, je ne dis pas, plus ou moins crédible mais, du moins, quand c'est dit par d'autres, le message des fois passe mieux ou il passe plus naturellement. Alors, on utilise ces véhicules-là pour dispenser beaucoup, beaucoup d'informations.

Dans d'autres situations, avec d'autres ententes plus pointues, que ce soient les médiateurs familiaux, par exemple, que ce soient les thanatologues, qui transigent avec le monde qui décèdent et qui ont droit à une prestation, bien, on leur fait signer une procuration avec le client pour qu'il fasse sa demande, puis ça accélère le traitement. Alors, il y en a une série comme ça, je vais passer la parole, tantôt, à M. Lacroix qui va vous donner un peu l'esprit puis les objectifs globaux qu'on suit pour chacun, je vous donnerai une liste et un aperçu aussi de ces gens-là, des gens avec qui on a une entente.


Protection des renseignements personnels

Mais je voudrais juste vous dire que la question de la protection des renseignements personnels, comme on travaille beaucoup avec des renseignements à incidence fiscale, parce que la partie III du Régime de rentes sur la cotisation, c'est une loi fiscale, alors c'est bien évident que ça, c'est très strict là-dessus, autant pour nos préposés aux renseignements que pour les autres, on ne peut pas échanger rien si ce n'est avec le consentement de la personne. Puis il faut s'assurer que c'est bien de la bonne personne qu'on parle, ça, c'est le devoir et l'obligation.

Quant à l'aspect sécurité de nos systèmes d'information, là encore, on adresse l'enjeu de façon très pointue de la sécurité, de la protection des renseignements personnels et de l'accès. Il y a un comité qui relève du secrétaire du conseil d'administration et de la Régie, et de s'assurer que les normes de sécurité dans tous les systèmes, les échanges de renseignements et j'allais dire toutes les normes de journalisation pour vérifier qui a eu accès puis pourquoi puis dans quels faits... On fait ça assez régulièrement.

On peut dire qu'on respecte non seulement l'esprit, mais la lettre, puis on y investit beaucoup de temps, et d'efforts, et d'énergie pour s'assurer que c'est une préoccupation qui est constante dans notre organisation, qui se partage à tous les niveaux, que ce soit de l'équipe de direction jusqu'aux préposés aux renseignements qui répondent, et ça nous cause des problèmes. Les gens se font engueuler des fois en disant: Je veux régler mon cas, là, puis règle-le-moi, puis il me l'a donnée, sa parole, puis il m'a dit... Ça arrive des fois que c'est des députés, mais c'est le même problème qu'on a, les gens ont bien de la difficulté à comprendre les limites de leur intervention quand vient le temps de parler de renseignements personnels et souvent c'est perçu comme de la bureaucratie.

Alors, beaucoup d'éducation, beaucoup de mécanismes à mettre en place, beaucoup de réflexions à faire. On l'a adressé, cet enjeu-là, depuis un certain nombre d'années et je pense qu'on a un bilan qui est assez avantageux là-dessus. D'ailleurs, on s'est livré à une évaluation par la firme KPMG de ces éléments-là, qui ont porté un jugement, somme toute, très positif sur l'ensemble de ces systèmes-là et l'ensemble des mécanismes et des moyens.

Ils nous ont fait des recommandations qui débouchent sur un plan opérationnel de mise en oeuvre ou de mise à niveau pour garder, j'allais dire, cette bonne cote-là et on va s'y attaquer. On va investir tout près de 400 000 $ à 500 000 $ dans la prochaine année pour être capable de s'assurer que cette préoccupation-là, elle est non seulement bien vue, bien comprise, mais bien appliquée, bien administrée par chacun des directeurs et chacun des employés chez nous. Alors, je passe la parole à Marc qui va vous donner, parce que c'est un peu le père de la philosophie des partenariats notamment à cause du message de communication dont on parlera.

Le Président (M. Kelley): Marc Lacroix.

M. Lacroix (Marc): Oui, merci beaucoup. Alors, évidemment, la question de protection des renseignements personnels se pose surtout dans le domaine des échanges d'informations avec nos partenaires gouvernementaux: la CSST, la Société de l'assurance automobile du Québec, le Régime de pensions du Canada, on parle ici d'informations très sensibles, mais tout ça se fait dans le cadre que vous connaissez.


Objectif d'information, de vulgarisation et d'éducation (suite)

Moi, j'aimerais vous dire un mot sur un autre type de partenariat qui est extra gouvernemental. Vous avez donc lu dans le rapport annuel, vous avez cité le Fonds de solidarité, l'Institut québécois de planification financière. Il y en a beaucoup d'autres, il y en a une dizaine. Il y a la Confédération des syndicats nationaux, la Centrale des syndicats démocratiques, les médiateurs familiaux, l'Association des groupes d'intervention en défense des droits en santé mentale du Québec, l'Institut de réadaptation en déficience physique du Québec, les partenaires accrédités de services aux nouveaux immigrants également.

Donc pourquoi on a signé de telles ententes de partenariat? C'est d'abord parce que la Régie a pris conscience que, à tous les jours, il y a des professionnels de ces associations qui sont en contact direct avec nos clients et qui sont appelés à leur parler du Régime de rentes. Par exemple, prenons l'Institut de réadaptation en déficience physique du Québec. Bien, nécessairement, tôt ou tard, ils vont discuter avec ces gens-là de la rente d'invalidité. Il nous apparaissait important que ces intervenants-là sur le terrain soient bien informés sur les caractéristiques du régime. Ou prenons les gens du Fonds de solidarité qui vendent des parts à chaque année dans leur campagne pour le Fonds de solidarité, ils sont amenés, lorsqu'ils conseillent, dans le cadre de leur programme Virage, leur clientèle, ils les conseillent sur la planification financière à la retraite et leur parlent du régime public de rentes. Alors, nous, notre désir, c'est de nous assurer que, sur le terrain, des intervenants externes à la Régie connaissent, si on veut, les grandes caractéristiques du régime.

Donc, quels sont les types d'activités qu'on mène avec ces partenaires? D'abord, des activités d'information. Nous étions, en octobre dernier, avec 800 représentants du Fonds de solidarité dans le cadre d'une journée spéciale organisée à cette fin pour leur donner de l'information. Il y a eu une dizaine d'ateliers sur le régime public de rentes. Nous serons, à la fin du mois, au 31 mars avec le Regroupement des conseillers en avantages sociaux du Québec aussi pour leur parler du régime public parce que eux-mêmes ont des clients dans leurs bureaux, et ça a été la même chose avec l'Institut québécois des planificateurs financiers. Tous les jours – il y en a 3 000 – ces gens-là rencontrent des gens et on s'est aperçu que, bon, il y a des déficiences dans la connaissance du régime public.

Alors, c'est notre rôle de les informer et même, je vous dirais, à certains égards, parfois de les former. Il y a aussi des mécanismes de liaison qu'on établit dans certaines situations. Tantôt, je disais: L'Association en défense des droits en santé mentale du Québec, on a donc là une clientèle vulnérable. Alors, ou bien on leur dit: Faites comme tout le monde, téléphonez au numéro central et votre client parlera à un préposé aux renseignements ou encore dans une approche, je dirais, plus humaine, c'est un de nos axes d'intervention comme plan directeur des services à la clientèle, l'humanisation des services, on leur crée un mécanisme de liaison spécifique, bien établi avec des intervenants dans toutes les régions du Québec pour faciliter cette relation-là entre la Régie des rentes et ses clientèles dans des situations particulières.

Alors, voilà, je dirais, le sens de ces ententes: c'est de profiter d'abord du réseau d'entreprises et d'institutions en contact avec nos clients. Maintenant, on en est, je dirais que ça va faire maintenant une année complète, on fait un premier tour de roue. On est en train de procéder à l'évaluation de toutes les activités qu'on a faites, mais surtout des résultats que ça donne et ce bilan-là va être présenté au conseil d'administration de la Régie ce printemps.


Modernisation des systèmes d'information

Mme Dionne-Marsolais: Sur cette question, merci beaucoup. C'est très utile. En moyenne, M. le Président, les investissements en modernisation de vos systèmes d'information, ils ont été de combien entre 1990-1995 et 1995-2000? Vous investissez combien pour moderniser ou pour ajouter des mécanismes de contrôle justement, incluant la protection des systèmes?

(11 h 20)

M. Morneau (Guy): Il y a beaucoup de volets à la question que vous posez.

Mme Dionne-Marsolais: Il y a deux périodes.

M. Morneau (Guy): Oui, il y a deux périodes, mais il y a deux...

Mme Dionne-Marsolais: Non, les investissements moyens en informatique, si vous voulez, autant systèmes que services, 1990-1995, 1995-2000.

M. Morneau (Guy): Vous avez, dans la pochette qu'on vous a remise, la liste des projets d'entreprise, ce qu'on appelle les grands projets d'entreprise – ce qui n'est pas des activités courantes – qui sont soit de la mise à niveau stratégique sur le plan du volet informationnel, soit des volets de sécurité...

Mme Dionne-Marsolais: Et c'est en dollars, ça, là-dedans?

M. Morneau (Guy): C'est en dollars, ce qu'il y a là-dedans. Alors, on a des sommes faramineuses, si on... Je pense vous, donner rien que dans les deux, trois dernières années...

Mme Dionne-Marsolais: Vous ne l'avez pas avant, là. Moi, ce qui m'intéresse, c'est de voir comment on a évolué.

M. Morneau (Guy): Mais je vais vous la donner, là. Je pense que notre ami de l'informatique n'est pas ici, hein? Mais je vais vous donner le chiffre global, mais je vous parle rien qu'en termes de projets d'entreprise, là, on en a pour à peu près 70 millions qui est en roulant depuis les deux ou trois dernières années. Là-dedans, il y a de la mise à niveau, il y a du développement, Programme d'allocations familiales, Programme de régime d'assurance parentale éventuellement, et, c'est-à-dire, pour amener la Régie à un niveau pour être capable de saisir les opportunités pour le renouvellement de la prestation de services, il y en a une série.

Alors, vous avez la liste, là, il y en a à peu près huit ou dix, il y a du «workflow», il y a des centres d'appels, on veut développer des centres intelligents, des centres d'appels, pour être capable de faire face à ce volume-là, parce qu'on a 1,2 million de téléphones, mais ça va monter à 2 millions puis à 3 millions, ça ne sera pas trop long, alors il faut être capable d'optimaliser, de réduire nos coûts. Alors, je vais passer la parole à M. Denis Garon qui est le responsable des projets d'entreprise, donc il les gère au sein de notre entreprise. Mais j'aurais aimé que notre responsable de l'informatique puisse vous donner les questions plus pointues.

Mme Dionne-Marsolais: Ça m'intéresse, parce que ce qu'on a constaté dans d'autres unités au ministère, c'est que, de 1990 à 1995, les investissements en informatique ont été plus que modestes, puis de 1995 à 2000, là, on voit qu'il y a un redressement et, moi, ça m'a frappé...

M. Morneau (Guy): C'est vrai.

Mme Dionne-Marsolais: ...quand on est arrivé au pouvoir de voir la faible, enfin...

M. Morneau (Guy): Mise à niveau, là. Le retard.

Mme Dionne-Marsolais: ...mettons le retard, voilà...

M. Morneau (Guy): D'un patrimoine informationnel.

Mme Dionne-Marsolais: ...impressionnant dans la nature et l'action au niveau des systèmes d'information, j'ai trouvé ça pourri. Je n'en revenais pas.

M. Morneau (Guy): Vous avez raison.

Mme Dionne-Marsolais: Je comprends qu'on était dans une situation budgétaire difficile, il y avait des déficits, et tout ça, mais c'est pour ça que le rattrapage est probablement d'autant...

M. Morneau (Guy): Plus difficile.

Mme Dionne-Marsolais: ...plus coûteux et important puis ça m'intéresse de voir comment on corrige ça, là.

M. Morneau (Guy): Je pense que la Régie n'échappe pas à cette grande tendance là.

Mme Dionne-Marsolais: Non, hein?

M. Morneau (Guy): Ça a été la mode effectivement dans les années quatre-vingt-dix, on vivait une récession assez majeure.

Mme Dionne-Marsolais: C'est ça. Il n'y en avait pas, d'argent.

M. Morneau (Guy): Il n'y en avait pas, d'argent, mais je pense que ça aurait été très mal vu, même si c'était un organisme extra-budgétaire, de se lancer dans des dépenses un peu somptuaires.

Deuzio, je dois vous dire aussi que les systèmes sont lourds, sont costauds, puis c'est dérangeant...

Mme Dionne-Marsolais: C'est gros.

M. Morneau (Guy): ...puis c'est compliqué de se mettre à niveau là-dedans, c'est l'architecture technologique, l'architecture des données, les bases de données, tout ça est en migration. Ça a bougé vite et bien, des fois, mais pas de façon tout à fait continue et linéaire. Des fois, il y a eu toutes sortes de... Alors, on a eu une stratégie un peu de prudence inspirée de ce qui prévalait au Québec ou au gouvernement du Québec, inspirée aussi de la réalité financière dans laquelle on vivait. Mais c'est certain que, depuis 1992, 1993, 1994, la mise à niveau, le développement, les mandats nouveaux nous amènent à vivre le choc de l'«upgrading», si vous me permettez, encore une fois, là.

Mme Dionne-Marsolais: De la modernité des systèmes.

M. Morneau (Guy): La modernisation de ces systèmes-là et les processus d'affaires, et ça, bien, je pense que, rapidement, M. Garon va vous faire un portrait puis je pense que vous l'avez déjà. Vous avez une vague idée de ce que ça veut dire, parce que, en plus de gérer les opérations, il faut gérer toute la mise à niveau de ces systèmes-là.

Mme Dionne-Marsolais: Oui, oui, oui.

M. Morneau (Guy): C'est beaucoup d'ouvrage pour l'équipe de gestion puis pour le monde.

Le Président (M. Kelley): M. Garon.

M. Garon (Denis): Oui. Alors, bonjour. Bien, il faut dire que, pour la période de 1990 à 1995, je n'ai pas le chiffre exact, mais de l'ordre de grandeur, on a investi tout près de 30 millions de dollars de 1990 à 1995 dans les systèmes d'information...

Mme Dionne-Marsolais: Total, pas par année.

M. Garon (Denis): ...total pour cette période-là.

Mme Dionne-Marsolais: 6 millions par année.

M. Garon (Denis): Ce qu'il faut ajouter à ça, c'est que, à chaque année, bon an, mal an, on a investi au-delà de 2 millions de dollars par année pour entretenir les systèmes. Ça, c'est juste pour mettre à niveau, apporter les corrections qu'il faut, faire évoluer les systèmes selon les modalités, les nouvelles modalités de fonctionnement, des modifications législatives, et ainsi de suite. Ce qui a coûté le plus cher, de 1990 à 1995, c'était la réforme de notre système payeur, ce qu'on appelle dans notre jargon, chez nous, le système «pension», c'est le système qui émet les chèques puis qui assure le maintien de l'admissibilité de nos prestations.

Alors, durant les périodes, là, je me rapporte aux alentours des années 1992-1996 ou à peu près, on a refondu le système, on a fait une refonte du système qui a coûté à peu près 25 millions de dollars. Depuis 1995, pour faire l'autre période de 1995 à 2000, c'est la période active qu'on a présentement avec des projets majeurs. On a des projets majeurs qui sont dus parce qu'on veut se mettre à niveau au niveau de la technologie, on veut utiliser les nouveautés un peu dans la foulée du gouvernement, lorsqu'on dit utiliser les technologies de l'avenir, profiter des nouvelles technologies, alors c'est un peu ce que qu'on fait.

On a aussi des projets qui sont apportés par des nouvelles législations, des législations qui peuvent concerner soit les prestations familiales ou encore le Régime de rentes. On se rappelle les modifications à la Loi sur le régime de rentes qui ont amené une refonte de nos systèmes majeurs. Au niveau de la mise à niveau de nos systèmes, tantôt on parlait notamment des appels téléphoniques, de l'augmentation de ces appels-là, donc on est en train de développer un système qui nous permet d'être moderne au niveau de la téléphonie, de pouvoir répondre à plus d'appels avec le même nombre de ressources qu'on a actuellement, faire face à cette augmentation-là qui permet aussi, bien sûr, de mieux gérer notre Charte des services à la clientèle lorsqu'on veut faciliter les choses, être plus accessibles aux clients du Régime de rentes et des prestations familiales.

On a parlé des régimes complémentaires de retraite tout à l'heure. On a aussi mis en place un système qui aide à supporter le suivi de ces régimes-là pour faciliter encore là, être proactif, pour mieux détecter ces régimes à risque dont nous a parlé tout à l'heure M. Le May. On a aussi des projets qui nous permettent d'implanter des technologies modernes – là, je ne veux pas aller trop dans le détail – ce qu'on appelle souvent des clients serveurs où on a une interrelation entre l'écran et l'ordinateur qui fait en sorte qu'on peut avoir immédiatement une information à jour du client. Lorsque le client nous appelle, on va pouvoir lui parler directement de son dossier, savoir quelle lettre on lui a envoyée hier, être en mesure de lui donner la bonne réponse. Et, bien sûr, tous ces systèmes-là, bien, ça permet aussi la qualité, l'intégrité de nos paiements, l'intégrité de nos traitements de tous les jours.

Mme Dionne-Marsolais: Vous avez dit 30 millions sur cinq ans, ça veut dire 6 millions par année, à peu près 50 %, c'était pour la partie payeur, là, mais de 1995 à 2000, ça représente combien comme enveloppe monétaire?

M. Garon (Denis): De 1995 à 2000, là...

Mme Dionne-Marsolais: Ou par année. Donnez-le-moi par année, en moyenne, ça ne me dérange pas, là...

M. Garon (Denis): Bien, c'est difficile à dire par année parce que...

Mme Dionne-Marsolais: ...mais je veux juste faire la comparaison.

M. Garon (Denis): O.K. Écoutez, on pourrait dire que, de 1995 à 2000, on aura dépensé à peu près 40 millions de dollars lorsque ces systèmes-là seront rendus à terme. Là, je déborde un peu 2000, là, parce qu'il y a des systèmes qu'on est en train de moderniser au niveau des prestations familiales qui vont être livrés plutôt en 2001, là. Mais, si je peux prendre l'enveloppe globale de nos projets qu'on gère présentement, au niveau des projets d'entreprise, ça va aller chercher tout près de 40 millions de dollars. Et il faut ajouter à ça, mettre toujours le 2 millions, 2,5 millions à chaque année, là, qu'on met en place pour pouvoir toujours entretenir. Ça veut dire que, de 1995 à 2000-2001, on aura dépensé tout près de 50 millions de dollars durant cette période-là incluant l'entretien annuel, et de 1990 à 1995, ça tournera plutôt autour de 40 millions. Donc, pour cette période-là, on n'est pas loin du 100 millions de dollars d'investissements dans la modernisation de nos systèmes.

M. Gautrin: Sur la question, strictement, de l'informatique, j'ai une question à vous poser. Les communications sont de plus en plus par courrier électronique. Est-ce que vous avez mis la possibilité qu'on communique avec la Régie par courrier électronique, comme le ministère du Revenu l'a fait, plutôt que d'attendre au téléphone, d'expliquer plus ou moins clairement? Ça serait, à mon sens, beaucoup plus rapide et beaucoup plus efficace.

M. Garon (Denis): Il y a tout un projet qui est sur le chantier présentement, qui est sur la table à dessin, je devrais plutôt dire, qui vise un peu l'utilisation d'Internet et la fameuse inforoute de l'information pour laquelle le gouvernement fait sa place à cet égard-là, et on est en train de regarder l'ampleur de ça, les conséquences d'implanter ça chez nous au plan de la sécurité, au plan de toutes sortes de volets. On pourrait envisager éventuellement que, par un processus comme celui-là, une personne pourrait très bien faire une demande de rente puis nous l'acheminer via Internet, ce que vous appelez courrier électronique, et on pourrait avoir une interrelation directe avec le client.

Présentement, le client, ce qu'il peut venir chercher par Internet, c'est un formulaire. Il veut faire une demande de rente de retraite, il peut aller sur notre site Internet, il peut aller chercher un formulaire qu'il remplit, il nous l'envoie. Il ne peut pas actuellement nous l'envoyer pour qu'on le traite et qu'il y ait un échange interactif avec nous.

M. Gautrin: Mais vous réfléchissez à cette question parce que vous allez être obligés forcément d'y arriver à court terme. Bon. Je comprends qu'il y a des questions de sécurité mais qui sont résolubles, et vous allez dans cette direction.

(11 h 30)

M. Morneau (Guy): C'est certain que, dans la vision de la Régie des rentes, l'aspect services électroniques va être un virage majeur à prendre parce qu'on a une clientèle, comme vous le savez, à la grandeur du Québec. Donc, les moyens techniques sont les seuls qu'on envisage pour être capables d'adresser le flot d'informations et de demandes qu'on aura à gérer. On a un site électronique, actuellement, qui est plus un site classique...

M. Gautrin: D'information.

M. Morneau (Guy): ...où on donne l'information, mais où on peut faire, comme l'a dit Denis, certaines demandes: une rente de retraite, un changement d'adresse, demander un formulaire, un état du participant. Et, nous, quand on reçoit ça, là on le traite puis on l'envoie, pas par électronique, par courrier, à la personne en question, pour respecter la sécurité puis la confidentialité.

Mais c'est certain que, d'ici les cinq prochaines années, l'essentiel du renouvellement de la prestation de service va venir du côté de cet axe-là, ça me semble évident, et ça va impliquer des investissements majeurs.


Transfert éventuel de responsabilités du gouvernement fédéral

Mme Dionne-Marsolais: Alors, ma dernière question. Vous avez dit à plusieurs reprises: Le Régime de pensions du Canada, c'est un régime miroir. J'aime bien cette expression-là. Mais, actuellement, les gens âgés reçoivent la rente du Québec plus la pension de vieillesse. Si le gouvernement fédéral décidait, dans sa grande générosité, de transférer les fonds globaux en enveloppe à la Régie – au Québec, en fait, et que vous les donniez à la Régie pour fins d'administration – êtes-vous en mesure de me dire quel effort marginal ça représenterait pour vous pour livrer ce service-là?

M. Morneau (Guy): Non, parce qu'il faudrait analyser le cas: il faudrait analyser la clientèle, il faudrait analyser le volume, il faudrait analyser les systèmes qu'on pourrait rapatrier ou pas avant d'être capable de prendre en charge une telle responsabilité. Mais c'est dans l'ordre du possible, du faisable. On n'aurait pas de misère à envisager un scénario comme celui-là si on nous le demandait, et avec une rapidité assez surprenante.

Mme Dionne-Marsolais: Quand vous dites «une rapidité», ça pourrait prendre combien de temps? Parce que c'est miroir, donc ça doit tout être le même monde.

M. Morneau (Guy): Vous parlez du Régime de pensions du Canada, là...

Mme Dionne-Marsolais: Oui.

M. Morneau (Guy): ...ou le PSV?

Mme Dionne-Marsolais: Bien, je ne sais pas, moi...

M. Morneau (Guy): Nous, on est miroir. Autrement dit, le Régime de pensions...

Mme Dionne-Marsolais: ...le chèque que les gens âgés reçoivent.

M. Morneau (Guy): Le chèque? Ils en reçoivent beaucoup, de chèques.

Mme Dionne-Marsolais: Non, non, mais, en principe, ils en reçoivent deux.

M. Morneau (Guy): Ils reçoivent la pension de vieillesse...

Mme Dionne-Marsolais: Oui, c'est ça.

M. Morneau (Guy): ...il y en a qui peuvent recevoir le supplément de revenu garanti, puis il y en a qui peuvent recevoir le Régime de pensions du Canada, qui est l'équivalent de la Régie des rentes. Mais ce n'est pas la même chose, là. Un est...

Mme Dionne-Marsolais: Bon. Alors, la pension de vieillesse, ça, ils la reçoivent avec la...

M. Morneau (Guy): Ils la reçoivent toute seule, un chèque comme ça à tous les mois.

Mme Dionne-Marsolais: Oui, c'est ça.

M. Morneau (Guy): Alors, ça, c'est envoyé par le gouvernement fédéral, DRHC Canada...

Mme Dionne-Marsolais: Oui.

M. Morneau (Guy): ...et ça, il n'y a pas de test de revenu, il n'y a rien. Il n'y a pas besoin que tu aies travaillé ou pas, c'est...

Mme Dionne-Marsolais: Alors, ça, vous pourriez prendre ça facilement, c'est le même monde.

M. Morneau (Guy): C'est plus que les travailleurs, là, c'est tous les citoyens.

Mme Dionne-Marsolais: Ah, oui! Je vois la différence.

M. Morneau (Guy): Alors, nous, le Régime des rentes, c'est les travailleurs qui ont cotisé au régime entre 18 et...

Mme Dionne-Marsolais: Les travailleurs ou les survivants.

M. Morneau (Guy): Oui, c'est ça...

Mme Dionne-Marsolais: Vous, dans votre cas, c'est les travailleurs et les survivants.

M. Morneau (Guy): ...mais les femmes ou les conjoints des travailleurs ou les invalides.

Mme Dionne-Marsolais: O.K. Je vais poser ma question différemment: Quel serait celui que vous pourriez prendre sans coûts autres que l'augmentation, peut-être, de la capacité de traitement des systèmes?

M. Morneau (Guy): Bien, je ne pourrais pas gérer le Régime de pensions du Canada pour les autres provinces.

Mme Dionne-Marsolais: Non, non, non, juste pour nous, là, juste pour nous!

M. Morneau (Guy): Je pourrais le faire. Je pense que je serais plus efficace qu'eux autres.

Mme Dionne-Marsolais: Non, non, non, non! Dieu me garde de vouloir envahir le reste du Canada. Ha, ha, ha!

M. Gautrin: ...

M. Morneau (Guy): Bien, je peux vous montrer des chiffres, M. Gautrin. Je pense qu'on coûte moins cher, toutes proportions gardées, que le Régime de pensions du Canada. On réussit à le faire...

Mme Dionne-Marsolais: Bon! Alors, on peut publier ça avec des chiffres à l'appui.

M. Morneau (Guy): Oui, oui.

Mme Dionne-Marsolais: Est-ce qu'on peut avoir la démonstration de ça? C'est une bonne...

M. Morneau (Guy): Mais là on parle d'un autre programme. Vous parlez du programme de pensions de vieillesse et du supplément de revenu garanti, qui est un programme qu'on n'a pas ici, au Québec, et qui est administré exclusivement, pour le Canada, par le DRHC Canada, qui est un programme fédéral. Il y a beaucoup de sommes là-dedans, C'est quoi, 12 milliards, 13 milliards? Il est pas mal: 20 milliards d'argent, c'est de l'assistance. Alors, si, un jour, ils veulent nous le confier puis ils veulent se sortir de l'administration de ces programmes-là, il nous fera plaisir d'en débattre et d'en discuter avec nos représentants fédéraux, mais on va leur dire: Voici à quel prix puis à quelles conditions on pourrait le faire.

Mme Dionne-Marsolais: O.K. Mais celui que vous pourriez prendre au coût minimal, c'est...

M. Morneau (Guy): C'est parce que je n'en ai pas à prendre.

M. Gautrin: Il n'y en a aucun.

M. Morneau (Guy): C'est ça.

Mme Dionne-Marsolais: Non. Mais, si jamais on décidait d'économiser sur la gestion puis de concentrer à un seul endroit, on pourrait transférer une somme globale à la Régie puis dire: Voici, vous allez l'administrer.

M. Morneau (Guy): Bien, il n'y a pas de duplication au moment où je vous parle, c'est rien que ça que je veux vous dire. Nous, on a le Régime de rentes, eux autres ont le Régime de pensions. Je peux gérer le Régime de pensions du Canada pour les autres provinces, si elles me l'offrent, dans un contrat de gestion. Je pourrais.

Une voix: Bon.

M. Morneau (Guy): Bon. Mais je ne pense pas que ça arrive.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Dionne-Marsolais: Ha, ha, ha! Bien, on ne sait jamais. Ha, ha, ha!

M. Morneau (Guy): C'est vrai qu'ils se départissent des ponts puis des affaires de même, peut-être qu'ils vont se départir de quelques infrastructures de même.

Mme Dionne-Marsolais: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Kelley): Sur ça, je vais céder la parole à M. le député de Verdun.


Traitement des demandes de rente d'invalidité

M. Gautrin: Je voudrais entrer sur un autre sujet qui me préoccupe puis sur lequel on a déjà eu la chance d'échanger – je pense que c'était dans le cadre des crédits, bien que vous soyez un organisme non budgétaire – qui est la question de la rente d'invalidité. Déjà, en termes de temps de réponse, l'endroit où vous avez la moins bonne performance, si je regarde, elle est à... Vos objectifs étaient 60 % des demandes de rente d'invalidité complète dans 60 jours, vous ne les aviez pas atteints en 1998-1999.

On avait déjà échangé, à l'époque, sur la difficulté que vous aviez avec le corps médical quant à la définition ou la bonne compréhension du concept d'invalidité. Vous étiez en période de réflexion il y a un an. En partie, vous aviez choisi de ne pas aller sur une liste exhaustive des maladies qui entraînaient une invalidité complète, mais plutôt de rester sur un jugement qui était propre à chacun de vos médecins.

Il y a toujours une certaine insatisfaction, comme vous le savez, dans la population. C'est peut-être l'endroit où on a le plus de critiques, quant à la Régie des rentes, sur des gens qui se considèrent comme invalides ou qui sont considérés comme invalides au sens, disons, de certaines lois, par exemple la Loi sur la sécurité du revenu, et qui ne sont pas invalides au sens de la Régie des rentes.

Vous étiez, il y a un an, en discussion avec les médecins de la Fédération des médecins spécialistes pour mieux faire comprendre aux médecins la manière dont vous perceviez l'invalidité. Est-ce que vous avez évolué dans ce dossier-là? Où en est-on? Qu'est-ce qui se passe sur ce sujet-là? Donc, c'est plus une question qui est un état de situation...

M. Morneau (Guy): Un état de situation. C'est comme ça que je le prends.

M. Gautrin: ...compte tenu d'un problème qui continue à perdurer.

M. Morneau (Guy): Je suis très content que vous posiez cette question-là, parce que c'est vrai que c'est, je ne dis pas la bête noire, mais la partie la plus difficile dans la gestion.

M. Gautrin: Oui, absolument.

M. Morneau (Guy): C'est sensible, c'est des coûts importants puis c'est des questions émotives. On vit dans une réalité qui évolue de façon assez magistrale sur le plan médical. Rappelez-vous, il n'y a pas trois, quatre, cinq ans, les sidatiques, c'était assez facile de déterminer qu'ils étaient admissibles à une rente d'invalidité. Mais aujourd'hui c'est le contraire, ils ne sont plus admissibles à une rente d'invalidité, beaucoup, parce qu'ils restent encore capables d'assumer des fonctions. Je ne veux pas soulever un débat ici, mais je vous donne un exemple pour démontrer la rapidité avec laquelle l'évolution se passe.

Alors, ça, c'est un enjeu majeur pour la Régie, et je vais demander à Marc, qui est le responsable de cette opération, de vous montrer un peu l'ensemble des actions qu'on a menées et l'état où on est rendu dans chacune de ces actions-là.

M. Gautrin: O.K.

M. Morneau (Guy): Et je pense que vous allez mieux saisir les efforts qu'on a faits, un peu à l'instar de ce qu'on a fait au service à la clientèle, aux renseignements, pour que vous voyiez que, même si on a des statistiques qui laissent croire qu'on n'est pas très satisfait de l'atteinte des objectifs qu'on se donne, ça ne veut pas dire qu'on ne met pas les objectifs puis les moyens pour y arriver. Mais ça prend du temps à changer les mentalités, l'esprit, puis à se donner un système qui runne.

M. Lacroix (Marc): Je ne sais pas si c'est clair pour tout le monde, le cheminement d'une rente d'invalidité, ou si... On peut prendre le temps de distribuer le tableau et d'expliquer un peu.

M. Gautrin: Peut-être que ça serait bon que tu le distribues, Marc, parce que...

M. Morneau (Guy): On a-tu des copies?

M. Lacroix (Marc): Oui, on en a des copies.

M. Morneau (Guy): Donc, on va les distribuer.

M. Gautrin: Ça permettrait aux gens qui ne le savent pas de comprendre.

M. Morneau (Guy): Je pense que c'est important de le comprendre. Ce n'est pas simple, là, je vous le jure. Ha, ha, ha!

M. Gautrin: Puis surtout entre 60 puis 65...

M. Morneau (Guy): Exact, ce n'est pas les mêmes notions.

M. Gautrin: ...avec la différence, la notion qui change.

Le Président (M. Kelley): Et je sais que ce n'est pas un échantillon scientifique, mais c'est souvent les personnes qu'on voit le plus souvent dans nos bureaux de comté.

M. Morneau (Guy): Dans vos bureaux, effectivement. Mais c'est bien légitime, là.

Le Président (M. Kelley): Et c'est évident que...

M. Morneau (Guy): Je me mets dans la peau de M. et Mme Tout-le-monde, là.

Le Président (M. Kelley): ...je suis toujours prudent, parce que les citoyens qui sont satisfaits, règle générale, n'appellent pas leur député pour dire: Je suis satisfait.

M. Morneau (Guy): Voilà.

Le Président (M. Kelley): Et c'est les personnes qui sont insatisfaites qui viennent cogner à nos portes.

M. Morneau (Guy): Toujours.

Le Président (M. Kelley): Mais, quand même, si on peut mieux comprendre cette problématique, je pense que ce sera très utile pour les membres de la commission.

M. Lacroix (Marc): D'accord. Alors, on part, ici, d'un client qui nous achemine son dossier. Alors, si on va à l'extrême gauche, on reçoit la demande et on l'assigne à un agent. Alors, on voit que, dans 58 % des cas, on est en attente du rapport médical, le client ne nous a pas envoyé son rapport médical. Pourquoi? On l'encourage, je veux dire, à nous envoyer sa demande pour protéger, si on veut, sa date. Par exemple, il nous téléphone et nous dit: Voici ma situation. On lui dit: Monsieur, madame, voilà, on vous envoie un formulaire, ou: Procurez-vous un formulaire dans votre localité à tel endroit et envoyez-nous ça au plus tôt, et, par la suite, vous nous ferez parvenir votre rapport médical. D'accord?

(11 h 40)

Mais, dans 58 % des cas – et c'est ici que le compteur des délais commence à tourner, d'accord, même si on n'a pas toutes les pièces au dossier – le rapport médical n'est pas encore là. Alors, ceux-là, ils restent un peu sur la glace. Et, pour les autres dont le rapport médical ou le dossier est complet, c'est-à-dire qu'on a reçu le rapport médical, le dossier s'en va à un agent de rente, dans notre jargon, où on détermine l'admissibilité administrative: Est-ce que la personne, le demandeur, le requérant, le citoyen a cotisé suffisamment? Avant même de faire l'étude du dossier médical – c'est un régime d'assurance – il faut savoir s'il a cotisé le bon nombre d'années. Donc, quand le dossier... on a reçu... Oui.

M. Gautrin: «15 jours» qui est en dessous du rapport médical, ça veut dire quoi, ça?

M. Lacroix (Marc): C'est-à-dire que c'est le délai moyen pour recevoir la pièce médicale manquante.

M. Gautrin: O.K.

M. Lacroix (Marc): Par la suite, le dossier s'en va au service de l'évaluation médicale, donc à une infirmière, où on vérifie la suffisance de l'information médicale. C'est aussi à cette étape-là qu'il y a un prétraitement, parce que, vous le savez, il peut y avoir des cas urgents, des gens en phase terminale. À ce moment-là, on ne leur fait pas suivre tout le circuit; autrement dit, ces cas-là sont pris, on les sort de la pile puis on les traite de façon prioritaire. Mais je ferme la parenthèse.

Donc, on vérifie s'il y a une suffisance de l'information médicale. Dans 73 % des cas, il y a suffisamment d'information médicale et, dans 27 % des cas, il faut aller soit vers l'hôpital demander le dossier de l'hôpital, il faut aller vers un médecin spécialiste ou retourner au médecin traitant, mais il nous manque de l'information pour envoyer le dossier au médecin.

Pour les 27 % de cas où il y a de l'information médicale manquante, le délai moyen de traitement, c'est 135 jours, tandis que, dans le 73 %, là où toute l'information médicale y est, c'est 78 jours, le délai moyen. Alors, vous voyez que...

M. Gautrin: Attends un instant. Je ne comprends pas ce que tu dis, parce que j'ai 44 jours sur ce qu'il y a en bas.

M. Lacroix (Marc): O.K.

M. Gautrin: Alors, si je comprends ce délai moyen à partir de la réception...

M. Lacroix (Marc): Mais c'est 44 jours pour obtenir l'information médicale. Moi, ce dont je vous parle...

M. Gautrin: Pour obtenir. Mais, si je commence à partir du début du processus en haut, c'est combien de jours, tu as dis?

M. Lacroix (Marc): Regarde. Du début à la fin, en moyenne, au moment où on se parle, c'est environ 90 jours, complètement.

M. Gautrin: Quatre-vingt-dix jours.

M. Lacroix (Marc); Le compteur tourne le jour où le dossier arrive à la Régie.

M. Gautrin: O.K, ça marche.

M. Lacroix (Marc): Puis on n'a pas toute l'information, mais le compteur, en jours civils... Oui.

M. Gautrin: Si je prends le chemin avec des morceaux rouges, c'est 135 jours. C'est ça?

M. Lacroix (Marc): Exact.

M. Gautrin: O.K. Ça marche, j'ai compris.

M. Lacroix (Marc): Et, si vous le prenez de gauche à droite, mais, lorsque l'information médicale est suffisante, bien, c'est...

M. Gautrin: Quatre-vingt-dix jours.

M. Lacroix (Marc): ...un délai moyen de 78 jours. Ça va?

M. Gautrin: Ah! 78 jours?

M. Lacroix (Marc): Oui. Ce qui fait monter la moyenne, autrement dit, à 90 jours, c'est notre 27 % de cas où il y a de l'information médicale manquante.

Le Président (M. Kelley): Puis notre clientèle aussi.

Une voix: Notre clientèle aussi, oui.

Le Président (M. Kelley): Ha, ha, ha!

M. Lacroix (Marc): Alors, quand le dossier médical est complet, ça s'en va évidemment au médecin évaluateur de la... C'est apprécié, donc, par le médecin évaluateur de la Régie. Dans les cas où il y a des refus – puis on sait qu'il y en a beaucoup, c'est quand même 51 % des cas, où on refuse les requérants – on téléphone – d'accord, ce n'est pas un simple avis automatisé – on dit: Monsieur, madame, on s'apprête à vous refuser. Voici ce qu'on a au dossier. Avez-vous un plus récent rapport de spécialiste, ou: Êtes-vous allé à l'hôpital dernièrement?

Alors, c'est une approche, quand même, qu'on veut très humaine. Nous, on pense que quelqu'un qui se croit invalide qui fait une demande, qui attend après ce revenu-là, on n'a pas le droit de lui répondre uniquement par un avis automatisé de huit lignes en disant: Voici, c'est réglé, tu peux aller en appel si tu n'es pas d'accord. Alors, c'est une infirmière qui téléphone systématiquement pour prévenir qu'on s'apprête à refuser. Et il arrive à l'occasion que le client nous dise: Oui, mais mon spécialiste, je suis allé le voir la semaine dernière, il y a un fait nouveau, je vous l'envoie. Alors, à ce moment-là, il est possible de reconsidérer le cas avant de rendre la décision en question.

Alors, une fois que c'est traité au médical, ensuite, la décision est intégrée par un agent au plan administratif et l'avis, la lettre de décision est posté au demandeur. Alors, c'est le processus.

M. Gautrin: Mais la décision est basée uniquement sur savoir si la personne a une invalidité, est incapable de faire quelque travail pour le reste de sa vie. C'est ça qui...

M. Morneau (Guy): Totale, permanente. Ça, c'est avant 60.

Une voix: Avant 60.

M. Morneau (Guy): À 60, c'est sa job.

M. Gautrin: Avant 60, oui, je sais. Après 65 ans, je sais que c'est changé.

M. Morneau (Guy): O.K.

M. Gautrin: Mais vous ne voyez jamais, vous, la Régie... Est-ce que vous voyez une fois le patient ou vous vous basez toujours sur les avis des médecins traitants?

M. Morneau (Guy): Soit du médecin traitant soit du spécialiste pour lequel on demande une expertise, tout.

M. Gautrin: Et le spécialiste, est-ce qu'il voit le...

M. Morneau (Guy): Oui.

M. Lacroix (Marc): Oui.

M. Morneau (Guy): Quand on requiert une expertise médicale, on assigne cette expertise-là à un médecin spécialiste, on prend le contact avec l'employé ou la personne qui fait la demande et, à ce moment-là, on organise la rencontre. On paie ses frais de déplacements, on paie ses frais de voyages, on l'envoie faire son rapport. Et, quand le médecin nous retourne son expertise médicale... Bien, on va vous parler un peu de tout l'effort qu'on a fait avec ces médecins traitants là, ces spécialistes-là pour qu'ils nous envoient rapidement la meilleure information dont on a besoin, compte tenu du contexte dans lequel on opère, les principes de notre loi ou les rigidités de notre loi.

Alors, c'est ça quand on requiert une expertise médicale – dans quoi, 27 % des cas – avant de statuer sur l'admissibilité. Alors, c'était une grosse partie. Ça justifie 44 % puis, souvent, 44 jours. Et souvent on s'apercevait à l'analyse que, quand il nous recevait, l'expert médical, il avait mal cerné l'enjeu. Là, on se disait: Maudit! On va recommencer. Le téléphone reprenait avec l'expert: Je t'ai payé, puis... Alors, Marc va vous donner un peu l'exercice qu'on a essayé de faire pour emmener nos expertiseurs à mieux comprendre les enjeux, leur donner un cadre pour que, quand le rapport nous rentre, il soit complet, il soit à jour puis on soit capable de prendre une décision vite, là.

Le Président (M. Kelley): M. Lacroix.

M. Lacroix (Marc): Vous le savez, on en a déjà parlé en commission parlementaire, on avait conçu, en 1996, un Guide du médecin traitant . C'est le premier médecin que le requérant va voir en disant: Regarde, je ne file pas...

M. Gautrin: Ça serait bon, peut-être...

M. Lacroix (Marc): Oui.

M. Gautrin: ...pour les collègues qui n'ont pas eu l'occasion de le voir si tu pouvais leur en donner quelques copies.

M. Lacroix (Marc): On pourra l'expédier, parce qu'on n'en a pas...

M. Gautrin: L'expédier par copie, parce que c'était un...

M. Lacroix (Marc): ..avec nous.

Alors, tous les médecins traitants ont reçu de la Régie des rentes de l'information, à savoir qu'est-ce qu'ils doivent nous envoyer, comment ils doivent remplir, enfin, nos... On a fourni des balises pour que les médecins nous fournissent de l'information adéquate. On a essayé d'encadrer davantage le processus, parce qu'on est dans une business de traitement de l'information médicale. Alors, vous comprenez que, si on veut bien faire du premier coup, éviter les retours en arrière, il faut éviter d'avoir à rappeler les médecins, à leur réécrire pour leur dire que c'est incomplet, parce qu'à ce moment-là le compteur des délais tourne évidemment et ce n'est pas avantageux pour le requérant.

Pour les médecins experts, nous n'avions pas agi sur la situation jusqu'à tout récemment, où on a produit un guide aussi à l'intention des experts médicaux, des médecins spécialistes – c'est ça – à travers le Québec, enfin, qui transigent avec nous, et il y en a 260 qui transigent avec la Régie, avec qui on fait affaire, dans 36 spécialités différentes. Alors, c'est un guide qui justement leur parle de la rente d'invalidité, des particularités qui concernent l'invalidité avant 60 ans, après 60 ans, le choix de l'expert, le rôle de l'expert, les lois et règlements qui s'appliquent à l'expertise, le degré de preuve requis, les éléments à considérer dans la rédaction de l'expertise, etc., pour mieux encadrer l'expertise médicale.

De plus, de concert avec la CSST, la Société de l'assurance automobile du Québec, la Régie des rentes, en collaboration avec l'Université de Montréal, a aussi développé une formation pour les experts. Alors, les experts peuvent s'inscrire à une formation. Ceux qui, je dirais, font carrière dans ce domaine et collaborent avec les trois organismes dont je viens de vous parler, maintenant il y a une formation en bonne et due forme qui leur est offerte depuis l'automne dernier et il y a des ressources de la Régie des rentes qui collaborent à cette formation-là. Donc... Oui.

M. Gautrin: Vas-y, continue. Je suis heureux de ce que tu fais au niveau des experts. Il reste néanmoins que le Guide du médecin traitant , je me demande jusqu'à quel point... Enfin, ce que, nous, on a – et ça ne s'est pas tellement amélioré de la part des cas qu'on voit en bureau de comté qui sont refusés – c'est souvent qu'un médecin traitant – d'après moi, puisque je connais le Guide – ne remplit pas correctement la formule qu'il vous transmet, mais il refuse même d'en discuter, parce qu'il dit: J'ai déclaré que... Je suis X, Y et je dis que le monsieur est invalide.

Je sais à quel point ça serait inacceptable pour vous dans ce cadre-là. Mais le partenariat dont vous parliez avec la Fédération des médecins spécialistes ou des médecins traitants pour, au premier niveau, avoir une meilleure présentation des dossiers, il y aurait, à mon sens, encore amélioration à faire. Je sais bien que ce n'est pas tellement à vous que je devrais m'adresser plutôt qu'à la Fédération des médecins spécialistes.

M. Morneau (Guy): Les médecins spécialistes, je peux dire qu'on a de très bonnes coopérations et collaborations en général. Je pense que ça, ils souscrivent à cette démarche. La formation continue, ils applaudissent – bravo! – puis on se tient mutuellement informé du défaut de l'un et de l'autre. Si on s'aperçoit, par exemple, que, malgré tous les efforts qu'on a mis, un de nos médecins expertiseurs ne nous renvoie pas l'information dont on a besoin, on prend action tout de suite, on lui dit: Regarde, là, c'est le dernier avertissement. C'est réglé!

M. Gautrin: Non, non. Ça, je comprends. Mais, sur les expertiseurs, ce n'est pas ça, mais c'est les médecins de première ligne.

M. Morneau (Guy): Mais le problème, c'est le médecin traitant. Là, nos 2 000...

M. Gautrin: C'est le médecin traitant de première ligne d'un monsieur qui prétend qu'il est invalide.

M. Morneau (Guy): Voilà, voilà!

M. Gautrin: Il va voir un médecin qui dit: Oui, monsieur est invalide, puis il ne remplit pas exactement les raisons, etc.

M. Morneau (Guy): Voilà! Alors, celui-là, comme vous le savez, c'est souvent un médecin omnipraticien qui n'est pas féru de la Loi du régime de rentes du Québec, qui en remplit une ou deux par année, de ces formules-là, au pire; au pire, comme je vous dis, là. Ça l'écoeure, il n'est pas payé toujours pour ça, ou bien donc il est gêné de charger. Alors, morale de cette histoire... Des fois, il ne veut pas se mouiller non plus.

(11 h 50)

Alors, quand je vois ça, là, il y a 16 500 demandes puis il y a 16 000 médecins au Québec. Alors, mettons qu'on ait une distribution géographique des demandes, il en remplirait une par année. Il n'a pas un gros incitatif à s'améliorer. De toute façon, il se dit tout le temps: La Régie va décider de toute façon. Ça fait qu'il sait qu'il va se faire rappeler par le médecin traitant ou le médecin spécialiste. C'est difficile, sur le plan culturel, de changer ça, parce que le volume n'est pas là puis, je veux dire, la volonté non plus.

Ce n'est pas toujours plaisant de dire à quelqu'un que vous voyez depuis 20 ans, dont vous savez qu'il souffre, qu'il est malade, que vous aimeriez bien qu'il se qualifie mais que vous savez très bien qu'il ne se qualifiera pas. Mais vous n'êtes pas capable de lui dire: Regarde, là, fais ta demande, on ne sait jamais! Tu laisses un peu d'espoir, puis... C'est toujours plus anonyme, un fonctionnaire dans un bureau, qu'un médecin qui traite quelqu'un depuis 20 ans, qui connaît son état de santé.

Alors, je ne porte pas de jugement. Je pense que, si j'étais dans leur situation, je ferais probablement la même chose. Mais, nous, il nous semblait qu'on était allé au maximum de ce qu'on pouvait faire à ce chapitre-là en donnant des guides puis en donnant de l'information aux médecins traitants. Celui qui est consciencieux va le lire, va essayer de s'y conformer; celui qui va l'oublier, on va le faire rappeler.

Mais, là où on avait un gros facteur de coûts, c'était les 44 jours pour l'expert. Et ça, ce serait frustrant, en plus de payer un gros montant, de ne pas avoir la qualité qu'on attend. On dit: Ça, ça ne marche pas, là. Alors là on dit: Regarde, on va te donner le kit, on va te donner tout ce qu'il faut. Mais, si jamais tu ne fais pas bien ta job, on va te rayer de sur notre liste, c'est fini. Là, on va faire affaire avec un autre qui s'engage à respecter des normes de qualité professionnelles ajustées. Et ça, je pense qu'on peut réduire beaucoup ce 44 jours là si on est capable de mettre en relation rapidement les attentes et le besoin.

M. Gautrin: Merci.

Le Président (M. Kelley): M. le député de Chicoutimi.


Frais d'administration par bénéficiaire

M. Bédard: Oui. Sujet plus aride, un petit peu, c'est concernant les frais d'administration. Dans votre rapport, vous faisiez état des objectifs que vous aviez dans votre plan d'action, aussi, de ramener les coûts par bénéficiaire à des montants qui... On parle de 52,62 $ pour 1998-1999. Et, évidemment, moi, je me disais, par rapport à ça: Établir le coût par bénéficiaire, c'est intéressant, effectivement. Je vois la proportion, d'ailleurs, des coûts qui ont augmenté – évidemment, le nombre de bénéficiaires a augmenté – mais il y a un nombre de coûts fixes... Je veux dire, que tu aies plus de... C'est comme, d'ailleurs, dans l'entreprise: si tu en as plus, normalement ça n'occasionne pas les mêmes déboursés. Donc, comme tu as une structure, ça fait en sorte que, plus tu as de bénéficiaires, moins ça va te coûter cher par bénéficiaire, normalement; plus tu produits, moins le coût de revient est élevé par rapport à la production.

Moi, j'aurais aimé savoir un peu, pour vraiment avoir une idée de votre performance là-dedans: Avez-vous regardé dans d'autres secteurs ou dans d'autres régimes de même nature – vous faisiez état, là, que vous aviez des miroirs – quels étaient les frais d'administration, que ce soit par bénéficiaire, mais, encore là, je trouve que ce n'est peut-être pas le plus significatif... Mais, du moins, d'avoir un comparable avec d'autres organisations de même nature.

M. Morneau (Guy): C'est vrai, vous avez raison que, en principe, quand le volume est là, tu réduis tes frais fixes puis ça amortit un peu mieux ou ça réduit tes coûts unitaires. C'est vrai en général puis c'est vrai souvent, souvent. Mais il y a aussi des coûts d'infrastructures à «upgrader», comme on a dit tantôt, à mettre à niveau, et ce n'est pas élastique éternellement.

M. Bédard: Oui, oui, c'est sûr.

M. Morneau (Guy): Alors, à un moment donné, il faut faire des gros investissements, alors c'est pour ça qu'on voit les variations dans les coûts unitaires. Mais ce n'est pas le seul indicateur de la performance, effectivement, opérationnelle puis sur la base des coûts administratifs. Alors, on veut se comparer. On s'est comparé avec le fédéral, on va se comparer avec les Américains. On a des échanges, là, sur une base régulière, et, assez curieusement, le problème qu'on a, c'est qu'ils n'aiment pas ça, eux autres, donner leurs chiffres, parce qu'ils n'aiment pas ça, montrer leur non-performance.

M. Bédard: Ils n'aiment pas se faire comparer aussi.

M. Morneau (Guy): Voilà. Alors, ça, c'est un peu délicat, puis ils nous disent: Si, un jour, je te les donne, tu vas me promettre de ne jamais les dire à personne. C'est un peu gênant, là. Mais, nous, on veut l'avoir, parce que c'est très important pour nous autres de savoir si on est dans l'univers des performants ou bien donc si on est dans l'univers des pas bons. Mais, ceci étant dit, je pense que Sylvie, qui en fait une profession, maintenant, de gérer les coûts unitaires, va vous parler un peu des quelques comparables qu'on a pu ramasser, mais qu'on va vouloir raffiner de plus en plus.

Le Président (M. Kelley): Mme Barcelo.

Mme Barcelo (Sylvie): Oui. Alors, effectivement, la comparaison faite avec le Régime de pensions du Canada, qui est notre comparable pour l'instant, si je regarde sur deux années, donc l'année 1997-1998 et ensuite 1998-1999, avec ce même ratio dont vous avez parlé, du 52,62 $, donc nos frais d'administration par bénéficiaire, c'est vraiment plus petit au Régime de rentes du Québec qu'au Régime de pensions du Canada. En 1997-1998, on avait 52,38 $; au Régime de pensions du Canada, 66,79 $...

M. Bédard: Pour combien de bénéficiaires?

M. Morneau (Guy): Par bénéficiaire?

M. Bédard: Oui. Mais il y a beaucoup plus de bénéficiaires, j'imagine, là.

M. Morneau (Guy): Au Canada? Beaucoup plus.

Mme Barcelo (Sylvie): Ah oui, définitivement!

M. Bédard: Donc, ça nous donnerait encore plus d'arguments...

Mme Barcelo (Sylvie): Leurs coûts sont plus élevés puis leur nombre de bénéficiaires est plus élevé.

M. Morneau (Guy): C'est pour ça que je vous dis que je serais très à l'aise de gérer le Régime de pensions du Canada ici à ce prix-là.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bédard: Ah! Bien, c'est une bonne proposition, mais on l'a prise en note. Ha, ha, ha!

M. Morneau (Guy): À ce prix-là, je serais très à l'aise.

Mme Dionne-Marsolais: On l'a prise en note et on y travaille activement. Ha, ha, ha!

M. Morneau (Guy): Je serais très à l'aise. Regardez, on ferait une économie nette de 200, 300 $ par bénéficiaire.

M. Bédard: Le budget nous a donné des idées de grandeur. Alors, on pourrait...

Mme Dionne-Marsolais: Ha, ha, ha!

M. Bédard: Ha, ha, ha!

Mme Barcelo (Sylvie): Pour l'année 1998-1999, donc l'année que vous avez dans le rapport annuel, on a 52,62 $ pour nous comparé à 66,77 $. Si je prends un autre type de ratio aussi, on peut regarder nos frais d'administration sur la dépense totale de rentes qui est versée. C'est un autre découpage. Donc, pour l'année 1998-1999, pour le Régime de rentes, ça représente 1,31 %; pour le Régime de pensions du Canada, c'est 1,67 %. L'année précédente, c'était 1,33 %; et 1,70 % pour le Régime de pensions du Canada.

M. Gautrin: Vous décomptez ce qui est du Régime de rentes par rapport aux fonctions de prestations familiales.

Mme Barcelo (Sylvie): Pardon?

M. Gautrin: Vous impliquez...

M. Morneau (Guy): Le Régime de rentes seulement.

Mme Barcelo (Sylvie): C'est le Régime de rentes.

M. Gautrin: Le Régime de rentes, c'est séparé?

Mme Barcelo (Sylvie): Ah! oui, oui, définitivement!

M. Gautrin: Par exemple, votre salaire de président, il est fractionné en parties dans...

M. Morneau (Guy): Il est à 40 % ou 60 % dans les rentes...

M. Gautrin: 40 %? O.K., merci.

M. Morneau (Guy): ...20 % dans le Fonds de RCR, puis 10 % dans les prestations familiales, puis 3 % dans le RAP, dans le Régime d'assurance parentale, éventuellement.

Mme Barcelo (Sylvie): Oui, parce que autant notre budget que nos états financiers sont par fonds, c'est vraiment distingué, et toutes les dépenses sont imputées au prorata des efforts qui sont mis.

Il y a une autre possibilité aussi de comparaison. Si on regarde avec les régimes privés, les régimes à prestations déterminées, quand on regarde nos frais par cotisant et bénéficiaire, on a 17 $ par année, mais, pour les régimes à prestations déterminées, c'est 60 $ par participant. Ce sont toujours des comparaisons qu'il faut prendre avec toute la prudence nécessaire, mais on essaie de voir avec les données qui nous sont disponibles pour voir si, effectivement, on est dans une bonne voie de saine gestion.

M. Bédard: Alors, merci.

Mme Barcelo (Sylvie): Bienvenue.

Le Président (M. Kelley): M. le député de Mont-Royal.


Traitement des demandes de rente ordinaire

M. Tranchemontagne: Merci, M. le Président. Moi, je voulais poursuivre sur la demande des rentes. Tantôt, vous avez expliqué sur les rentes d'invalidité... Puis je comprends, ça ne m'effraie pas de voir 90 jours, parce que je sais que vous n'avez pas toutes les informations, vous devez y retourner.

Ce qui me fascine, par contre, dans vos chiffres, c'est les demandes de rentes ordinaires, tu sais, et vous atteignez des résultats de 73 % en moins de 30 jours. Vos objectifs étaient de 85 %; là, vous le baissez à 80 %. Ça, c'est toutes des questions qui me viennent à l'esprit. Et aussi je ne comprends pas que ça ne soit pas 100 %. Je veux dire, en 30 jours, vous avez, il me semble, amplement de temps pour vous revirer de bord.

M. Morneau (Guy): C'est très intéressant, ces questions-là, parce qu'on pense que c'est simple. Il faut quasiment faire exprès pour ne pas avoir des standards de qualité presque instantanés.

M. Tranchemontagne: «Right».

M. Morneau (Guy): Mais il faut comprendre la complexité de ça.

M. Tranchemontagne: Alors, vous allez me l'expliquer.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Morneau (Guy): Alors, qui, mieux que Monique, va vous expliquer toute la complexité? Parce qu'elle a à le gérer à tous les jours.

M. Tranchemontagne: Parfait.

M. Morneau (Guy): Alors, on traite beaucoup de données, sur le registre des cotisants, sur des périodes exclues, que ce soit la période où ils ont eu des enfants, vous pouvez exclure 15 % de vos données les plus faibles. Alors, c'est tous des critères qu'il faut prendre en compte pour mesurer si vous êtes admissible, puis à quoi, puis comment. Alors, je laisse aller Monique, qui va vous donner le point de vue d'un vrai gestionnaire opérationnel. Ha, ha, ha!

Le Président (M. Kelley): Mme Monique Maheu.

Mme Maheu (Monique): Bonjour, messieurs, mesdames. La rente de retraite, en général, c'est un traitement simple. Mais il y a des situations plus complexes, et c'est pour ça qu'on ne peut pas se rendre à 100 % traitées très rapidement.

D'abord, là-dedans, on a des demandes de rentes de retraite qui sont liées à des ententes internationales. On peut avoir les cas de...

Une voix: L'Italie, l'Espagne.

Mme Maheu (Monique): Oui. On peut avoir les cas où il faut tenir compte des périodes d'allocations familiales et on a de la difficulté à obtenir les bonnes périodes. Alors, il faut communiquer avec le client. Le temps qu'on communique, qu'il nous réponde, ça prend du temps. Il y a les cas où, par exemple, il y a des paiements à faire au MSS dans certaines situations, le ministère de la Solidarité sociale. Alors, pour les gens qui ont entre 60 et 65 ans qui reçoivent une rente de retraite, il peut y avoir des paiements à faire, il faut aller vérifier ce qu'ils reçoivent au MSS. Donc, il y a un certain nombre de cas où il y a des traitements un petit peu plus longs. C'est ce qui explique qu'on ne peut pas être à 100 % rapidement.

M. Tranchemontagne: O.K. Je vais nuancer mon propos, dans ce cas-là, et je vais passer de 100 % à, je ne sais pas... Quel pourcentage, par exemple – aidez-moi, comme vous m'avez aidé ici, à comprendre – sont des cas particuliers comme ceux que vous venez de soulever? International, il ne doit pas y en avoir tant que ça.

Mme Maheu (Monique): Non.

M. Tranchemontagne: Au ministère... MSS, vous appelez ça?

Mme Maheu (Monique): Le ministère de la Solidarité sociale.

(12 heures)

M. Tranchemontagne: Merci. Je ne sais pas. Ça, il y en a peut-être un peu plus. Mais, en tout cas, pouvez-vous m'exprimer, sur 100 % de cas, combien? Y en a-tu 90 % qui sont normaux, ordinaires, purement faciles à régler?

M. Morneau (Guy): En fait, ce que vous diriez c'est le même...

M. Tranchemontagne: Le même scénario aussi...

M. Morneau (Guy): ...déroulement en termes de jours, comment se distribue le 73 jours.

M. Tranchemontagne: Il y en a combien où il faut aller faire une attente, ou une vérification, ou des choses comme ça, ou... Tu sais, parce que, de toute façon, le 73 m'apparaît être encore faible même avec vos explications parce que ça m'apparaît être une petite proportion finalement, les cas particuliers que vous venez de soulever là, par exemple. Je ne sais pas.

M. Morneau (Guy): On va regarder si on peut vous donner la grille puis les jours où la distribution de ces jours-là dans le 73. Et, d'entrée de jeu, je voudrais juste nuancer ou contexter un peu votre requête en disant: Nous, on envoie des états de participants à tout le monde six mois avant une date d'admissibilité, mettons.

M. Tranchemontagne: Absolument.

M. Morneau (Guy): Alors, on les incite à faire une demande le plus vite possible. Alors, le monde, là, ils envoient quatre puis six mois d'avance. Donc, le 73 ou le 80 jours, là, ils ne s'énervent pas trop avec ça parce qu'ils disent: Je vais l'avoir dans quatre mois, ma rente. Ce n'est pas si dramatique que ça dans ce contexte-là.

Deuzio, on veut se donner comme objectif de valider auprès des clients quelles sont leurs attentes. Et on va faire des sondages prochainement en disant: À quel niveau? Parce que ça coûte cher des fois, tu sais, de répondre au téléphone 20 secondes, si ce n'est pas ça que le client veut. Il y a un prix qu'on peut mettre là-dessus: Si on monte à 21 ou si on baisse à 18, ça coûte combien?

M. Tranchemontagne: Absolument.

M. Morneau (Guy): Alors on va essayer de tester le besoin des clients pour être en mesure de mieux cerner ça. Mais je vous avoue candidement que, moi, je m'attends à ce que les gens qui demandent une rente de retraite vont nous dire: Moi, pourvu que je n'aie pas de continuité à... Ma demande, des fois, je la fais six mois avant. Ce n'est pas grave. Alors, on va essayer de composer avec ça, mais, ceci étant dit, on va essayer de vous donner l'information que vous voulez sur les jours, autant que possible, parce qu'on va la colliger, on va essayer de vous la donner, en termes de volume: Quels sont les cas qui brisent la moyenne, autrement dit, puis quels sont les cas simples?

M. Tranchemontagne: O.K. Ma dernière question à laquelle vous n'avez pas répondu, c'est: Qu'est-ce qui vous a motivé de passer de votre objectif de 85 % à 80 %?

M. Morneau (Guy): Oui.

M. Lacroix (Marc): Je peux?

M. Morneau (Guy): Oui, oui.

Le Président (M. Kelley): M. Lacroix.

M. Lacroix (Marc): De 85 % à 80 %?

M. Tranchemontagne: Bien, c'est ça que j'ai vu. L'an passé, c'était 85 % et cette année votre objectif, si je regarde ici à la page 14, c'est 80 % pour les mêmes 30 jours.

M. Lacroix (Marc): C'est une excellente question puis on n'a pas cherché à le camoufler. On vous a dit tantôt qu'on avait pour 70 millions de projets, à part les activités courantes. C'est une autre demi-Régie de plus à gérer pendant quelques années. Penser que toutes ces refontes de systèmes là vont se faire, donner des micro-ordinateurs aux agents, les former, leur faire apprendre comment employer des lois qui sont modifiées sans que ça ait un impact sur les objectifs de performance, c'est rêver en couleur.

Donc, on s'est dit: Pour les deux ou trois prochaines années, le temps qu'on passe à travers, je dirais, la tempête de changements à la Régie des rentes, on va baisser l'objectif. On aurait pu aussi le laisser à ce niveau, mais visiblement, de toute façon, vous avez remarqué une dégradation là. On est quoi? Je pense à 78 % en date de fin février. Alors, on n'a pas atteint non plus le 80 %, mais la raison fondamentale, c'est cette panoplie de projets. On a eu, juste avant les vacances cet été, l'implantation du nouveau système Lettres modèles. C'était juste avant les vacances estivales. Alors, les inventaires ont monté, on a formé les agents. Puis ensuite ils sont partis en vacances, ça, ça nous a rentré dans le corps, comme on dit, et donc ces réalités, je dirais...

M. Morneau (Guy): Nous, on ne veut pas jouer au yoyo avec le niveau de services, on veut être franc puis on veut être honnête. On se dit tout simplement: On va vivre et on vit, depuis deux, trois ans, des changements majeurs à l'interne, en termes de développement, qui taxent très lourdement les agents de rentes, l'équipe de gestion. Parce que c'est ce monde-là qui sont au coeur du changement. Ils doivent apprendre de nouvelles techniques, de nouveaux procédés de travail, ils doivent recevoir de la formation.

On ne veut pas multiplier les ressources non plus à l'infini pour un an ou deux ans. On se dit: Regarde, là, on va essayer d'optimaliser le cycle. Et l'impression, comme je vous ai dit, c'est que nos clients ne souffrent pas de ce délai-là, entre guillemets. On va nous le confirmer, mais des «focus groups» nous ont laissé entendre que ce n'était pas un problème, 73, 78, 80, 82 jours, ce n'était pas tellement ça, leur enjeu. Donnez-nous ça dans ces termes-là, puis on va être heureux.

Nous, on se dit: Bien là on veut se donner une chance de passer la gestion du changement qui est très, très pénalisante pour l'équipe dans les activités courantes. Et ça, on pourrait, bien sûr, mettre beaucoup d'argent, donner du temps supplémentaires, forcer notre monde à travailler jour et nuit pour dire: On a un objectif de 80. Quand on a balisé ça, bien on a dit: Pour deux, trois ans, on va essayer de se ramener à un niveau qu'on est capable d'atteindre sans taxer plus lourdement nos ressources. Et, dans deux, trois ans, quand on aura roder nos affaires, bien on est à peu près certains qu'on pourra revenir à 85 et probablement à... plus rapide là, descendre à...

M. Tranchemontagne: Est-ce que c'est une garantie?

M. Morneau (Guy): Bien, c'est un espoir, en tout cas, c'est un espoir. Mais ce qui va déterminer ça, M. le député, ce serait moins les objectifs de fabulation du président que l'attente du client.

Le Président (M. Kelley): Ça va?

M. Tranchemontagne: Oui, ça va. Philosophiquement, par contre, on pourrait discuter si, à l'interne, au niveau motivation des employés, orientation et message qu'on veut laisser aux employés, si une baisse d'objectif est vraiment la façon de procéder. Ça ne veut pas dire qu'on ne peut pas analyser l'atteinte ou la non-atteinte des objectifs et, à ce moment-là, l'expliquer par les changements technologiques qui arrivent et puis...

M. Morneau (Guy): Je l'ai fait, ça.

M. Tranchemontagne: ...la pression que ça donne sur le système. Mais, à ce moment-là, il me semble que vous laissez votre objectif, idéalement, à 85 %. Ça, c'est une question de philosophie plutôt que...

M. Morneau (Guy): Bien, je vous rappelle que, nous, on est très transparents, dans le sens que tous ces chiffres-là, le plan d'action, ces données-là sont sur le site Internet à tous les mois. Le résultat est à tous les mois, les employés le voient. Ils ont à coeur de livrer les attentes, mais ils me disent: Écoutez bien, là, si vous nous fixez comme objectif, en norme de services, de livrer ça en 85 jours, vous n'êtes pas réalistes, parce qu'on gère des changements, on gère des projets, on gère ci, on gère ça. Il manque de ressources, mettez-en. Là, le boss, il dit: Regarde, ça coûte trop cher, on n'en mettra pas, là.

M. Tranchemontagne: Oui. Ils n'ont pas d'argent.

M. Morneau (Guy): Bien là ils disent: Vous n'êtes pas corrects. Puis, moi, je suis capable de vivre avec un contrat de solidarité comme ça entre les employés en disant: Je vais mettre le chiffre que je suis capable de livrer. Je n'accepterai pas de façon continuelle que ce chiffre-là baisse, parce qu'on se dit, à un moment donné: Là, ça, c'est plus payant, ça coûte moins cher, on va y aller. On balise ça avec les «benchmarkings», on balise ça avec les meilleures pratiques, on balise ça avec les sondages des clients.

Mais on est respectueux de nos employés puis de nos équipes de gestion en leur disant: On a un contrat, là. On se dit: Regarde, on se lie à cette performance-là, on met le niveau de ressources approprié pour y arriver. On ne peut pas demander la lune et ne pas mettre les ressources. Alors, on s'est dit: On n'est pas prêts à mettre des ressources additionnelles permanentes, on n'est pas prêts à mettre des ressources temps supplémentaire, gros frais, pour maintenir notre 85 %. On va le baisser, pour ces motifs-là, parce qu'on pense qu'on a une bonne raison.

Le Président (M. Kelley): Il me reste deux demandes de question. Alors, si je peux demander la discipline des deux collègues de prendre à peu près cinq minutes chacun, je vais commencer avec Mme la députée de Rosemont puis, après ça, M. le député de Verdun.

Mme Dionne-Marsolais: Je veux continuer sur ça, juste pour terminer. Vous dites que vous n'êtes pas prêts à mettre les ressources supplémentaires. Mais est-ce que vous avez évalué ce que ça vous aurait coûté de plus pour maintenir cet objectif-là?

M. Morneau (Guy): Oui.

Mme Dionne-Marsolais: Et c'est quoi, combien?

M. Morneau (Guy): Monique, tout ce qu'on t'a refusé au comité de budget...

Mme Dionne-Marsolais: Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Dionne-Marsolais: C'est à peu près ça, la question. Ha, ha, ha!

Une voix: C'est le temps de me le dire. Ha, ha, ha!

Une voix: C'est la réponse.

Mme Maheu (Monique): Disons que c'est l'équivalent de, sans doute, cinq ou six personnes de plus pour la rente de retraite uniquement. Mais, évidemment...

Mme Dionne-Marsolais: Puis, en termes de coûts, là, ça représentait combien?

Mme Maheu (Monique): En termes de pourcentage... La rente de retraite, ça prend, pour le traitement de la rente de retraite, au total, une quinzaine de personnes, 15 à 20 personnes. Donc...

Mme Dionne-Marsolais: Oui, mais, en dollars, ça veut dire combien?

M. Morneau (Guy): Bien, c'est à peu près 50 000 $, 60 000 $ par personne.

Mme Maheu (Monique): En dollars, c'est 30 000 $ par personne...

M. Morneau (Guy): Tout compris, avec l'équipement, le matériel, le logement, tout, c'est 50 000 $, 55 000 $ par personne...

Mme Dionne-Marsolais: Bon. Alors, mettez-les...

M. Morneau (Guy): ...donc 250 000 $, 300 000 $.

Mme Dionne-Marsolais: 300 000 $ de plus pour garder cet objectif-là au niveau, puis vous avez pris une décision de ne pas le faire?

M. Morneau (Guy): Exact.


Traitement des plaintes

Mme Dionne-Marsolais: Alors, c'est une bonne introduction à mon sujet: les plaintes. Ha, ha, ha!

M. Morneau (Guy): Voilà. Parlons-en, des plaintes!

Mme Dionne-Marsolais: Alors, j'ai vu que vous aviez une... vous avez utilisé...

M. Morneau (Guy): Une commissaire.

Mme Dionne-Marsolais: Oui, oui, là, on en parlera après, du commissaire aux services, parce que ça, c'est votre amélioration continue. Mais vous dites que, sur l'ensemble des plaintes reçues, 19 % ont été considérées comme étant fondées. C'est une sur cinq, ça. J'avoue que, moi, je trouve ça gros, mais c'est beaucoup moins qu'au Revenu, où c'était une sur deux, ce qui était horrifiant.

M. Morneau (Guy): Mais je ne pense pas qu'on ait la même définition de «plainte fondée».

Mme Dionne-Marsolais: Non.

M. Morneau (Guy): Je ne pense pas qu'on ait la même définition qu'au Revenu de la plainte...

Mme Dionne-Marsolais: C'est bien possible. Mais, dans ce cas-ci, justement, votre définition qu'une plainte soit fondée ou pas, elle est basée sur quoi? Qui est-ce qui décide si elle est fondée ou pas?

M. Morneau (Guy): C'est le commissaire qui reçoit la plainte, parce que, règle générale, quelqu'un se plaint, au téléphone, à la première ligne, on va le référer au commissaire en disant: Regardez, vous n'êtes pas satisfait, vous avez tout à fait le droit, et c'est légitime. Vous pouvez faire un appel ou vous pouvez adresser votre plainte au commissaire, qui va la prendre en charge et vous donner, dans les meilleurs délais, des réponses.

Mme Dionne-Marsolais: Vous avez un commissaire depuis combien de temps?

M. Morneau (Guy): Quatre ans, quatre ou cinq ans. C'est ça?

Une voix: Depuis 1992.

Une voix: Depuis 1993.

M. Morneau (Guy): Non, 1993.

Mme Dionne-Marsolais: Depuis 1993.

M. Morneau (Guy): Alors, on a un commissaire dont c'est le mandat premier, de prendre en charge rapidement, dès la première ligne, les plaintes, et, à partir de ce moment-là, il les traite avec un délai assez rigoureux. Comme vous pouvez voir, il doit donner la réponse dans quelque 20 jours. Assez curieusement, vous dites: Sur les délais – la commissaire vous le dira – il y a peu de questions, il y a peu de plaintes sur les délais de traitement des rentes en particulier. Alors, c'est ça qui nous laisse croire que 300 000 $ de plus versus un respect d'un objectif, qu'on n'a pas validé auprès du client mais qu'on veut aller valider auprès du client, nous semblait un coût additionnel que ce n'est peut-être pas nécessaire d'encourir dans un contexte où on est en régime sous tension. C'est rien que ça que je veux vous dire.

Alors, qu'est-ce qu'on entend par «plainte fondée»? Elle est large, notre définition de «plainte fondée», puis je pense que le commissaire va vous la donner en peu de mots et beaucoup plus brillamment que, moi, je pourrais le faire.

(12 h 10)

Mme Dionne-Marsolais: Bien, vous l'avez dans votre rapport annuel, là, vous avez quatre critères. Mais...

M. Morneau (Guy): Voilà. Alors, si on a manqué à la charte de services qu'on s'est donnée... Puis, des fois, on parle d'attitude, là. Si on pense qu'un employé a eu une attitude irrespectueuse, du point de vue du client, bien, on fait une petite enquête, puis dire: On va la considérer comme plainte fondée. Quand un client va dire: Je suis en désaccord, par exemple, avec des coupures que vous faites aux prestations familiales suite au discours du budget fédéral, mettons, bien, on va dire: Oui, vous avez raison, mais ça, on ne peut rien y faire, la loi nous oblige à l'appliquer de cette manière-là. Mais on n'arrêtera pas notre plainte pour autant, on va la référer aux autorités politiques pour qu'elles sachent que ces gens-là ont trouvé que cette façon de faire n'était pas la meilleure.

Alors, je vais laisser Mme Bouliane qui va vous donner... Parce que c'est son pain puis son beurre quotidiens. Elle va vous en parler avec beaucoup plus d'émotion et de transparence que moi.

Mme Bouliane (Michèle): Bonjour, mesdames, messieurs. La Régie a une définition large de la plainte. Pour nous, une plainte, c'est tout commentaire qui peut servir à améliorer nos services, faire évoluer les lois. Quant à la plainte fondée, on s'est inspirés de la définition de plainte fondée du Protecteur du citoyen, c'est une plainte non seulement où il y aurait eu erreur, mais également où il y aurait eu un manquement dans nos services.

Comme le disait M. Morneau, la Régie a une charte de services à la clientèle, c'est notre guide de travail quotidien. Lorsqu'un client s'estime lésé, qu'il se dit victime d'un manque de courtoisie, d'un manque de rapidité dans sa demande d'explication, sa demande de rente, nous, si on a les preuves qu'il y a eu des délais indus ou que, effectivement, on a passé outre à notre charte, nous considérons – l'équipe du commissaire – que cette plainte est fondée.

Alors, il ne faut pas croire qu'une plainte fondée indique nécessairement qu'il y a eu erreur dans un paiement, ou dans un montant, ou dans le traitement. C'est également, nous, un manquement dans la qualité du service, et ces statistiques-là nous aident – parce qu'on les compile dans un système – à déceler les tendances où la Régie peut améliorer ses services.

Mme Dionne-Marsolais: Vous êtes combien dans cette équipe du commissaire?

Mme Bouliane (Michèle): Six personnes. Il y a le commissaire aux services, dont le poste existe depuis 1993, avec l'adoption par le conseil d'administration de la Régie d'une politique de gestion des plaintes. C'est un cadre d'action qui est bien intégré aux activités courantes de la Régie.

Mme Dionne-Marsolais: Je vous remercie.

M. Morneau (Guy): Le commissaire a des gros pouvoirs, les pouvoirs de faire des recommandations...

Mme Dionne-Marsolais: Oui, j'ai vu ça, effectivement.

M. Morneau (Guy): ...et qui se ramassent au conseil d'administration.

Mme Dionne-Marsolais: Est-ce qu'il y en a beaucoup? Je serais curieuse... Donnez-nous donc deux, trois exemples d'améliorations que votre équipe a faites et qui ont été implantées. Ha, ha, ha!

M. Morneau (Guy): Ils sont tous implantés, madame. Ha, ha, ha!

Mme Bouliane (Michèle): Je dois distinguer... On joue toujours sur deux types de recommandation. Alors, il y a les cas particuliers, le cas par cas où le commissaire a le pouvoir d'intervenir pour représenter le client et demander réparation pour un client. Sur 1 200 plaintes par année, on peut intervenir environ une centaine de fois. Alors, le client, souvent, ça se règle par des explications. Ce n'est pas dans tous les cas où on va demander qu'une action réparatrice soit posée par la Régie pour son cas. Alors, voilà pour les recommandations puis les cas particuliers.

Il y a également les autres recommandations qui sont plus d'ensemble, qui visent plus... ce qu'on appelle systémiques. Celles-là, nous en faisons rapport au conseil d'administration ou au comité des services à la clientèle. Ça peut jouer dans l'ordre d'une quinzaine par année, mais là il faut voir que c'est vraiment des recommandations qui touchent des communications, des pratiques, des procédures. Alors, ça permet de solutionner souvent le problème à la source.

Pour vous donner des exemples: nous, ce ne sont pas des refontes de systèmes à coup de millions, ce sont des points de services à la clientèle. Un exemple, lorsque la Régie refuse d'accorder à un client l'allocation pour enfant handicapé, il y a une lettre qui était destinée au client. Et on s'est rendu compte, par des témoignages de clients, que, dans ce qu'on appelle les avis d'acceptation, on ne mentionnait pas au client ce droit qu'il a de demander la révision de la décision de la Régie. Bien sûr, on se disait: On l'accepte. Mais il a quand même droit à de la rétroactivité et c'est là-dessus que le client peut, des fois, vouloir demander la révision ou contester. Alors, le commissaire a recommandé qu'il y ait un paragraphe d'ajouté dans la lettre pour que le client puisse exercer son droit en révision et faciliter l'exercice de ses recours, de ses droits.

Alors, nous, nous intervenons dans toutes sortes de... Ça peut être dans des pratiques opérationnelles, ça peut même aller jusqu'à des recommandations à la Direction générale pour faire évoluer les lois.

Mme Dionne-Marsolais: Merci.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup. M. le député de Verdun, une dernière question?


Traitement des demandes d'allocation pour enfant handicapé

M. Gautrin: Dans la dernière question, je vais aborder les questions des prestations familiales pour enfant handicapé, où là aussi donc vous avez... on est encore dans la même nature de situation qui est éminemment difficile. Mais vous justifiez la lenteur de temps que vous prenez pour traiter les demandes par le fait que les demandes doivent être traitées par une équipe de trois médecins qui parfois est surchargée considérablement. Est-ce qu'il y a moyen d'améliorer cela ou comment les choses peuvent fonctionner? Est-ce que, dans ce cas-là, vous ne faites pas référence au médecin traitant ou il faut réellement qu'il y ait une rencontre avec le médecin de la Régie? Est-ce qu'il y a un moyen de faciliter ou d'améliorer cette situation?

M. Lacroix (Marc): Oui. C'est un peu exceptionnel, ce qui est arrivé. Cet objectif est atteignable. Maintenant, il y a trois médecins dans l'équipe et il y a eu une absence longue durée. Donc, en plus, un autre médecin, parmi les deux qui restaient, a dû travailler activement au contenu du nouveau règlement sur l'allocation pour enfant handicapé qui était nettement à contenu médical.

Ça ne pouvait pas être délégué à une ressource sans compétence médicale, ce qui a fait qu'on a connu, la reine dirait, annus horibilis. C'est ça, à cet égard, mais les dispositions ont été prises par le directeur des programmes d'aide à la famille, M. Lévesque – qui est juste ici derrière – pour, je dirais, répartir le risque et d'avoir des médecins qui ne seront pas avec nous cinq jours-semaine, mais peut-être deux ou trois jours, de telle sorte que, si...

M. Gautrin: Vous pourriez prendre des contractuels que vous ne pourriez pas...

M. Lacroix (Marc): ...un qui tombe au combat, bien, on puisse, comme on dit, livrer la marchandise. Mais, en termes de force de travail, par rapport à ce qu'on aurait dû avoir cette année pour atteindre les résultats, nous étions en termes de jours qui ont été consacrés au traitement, aux opérations, à 41 % de la force de travail disponible dans les opérations au traitement des dossiers. On a, malgré tout, atteint... Je pense qu'à date ce que vous avez dans votre rapport, 60 %...

M. Gautrin: 55, 54 %.

M. Lacroix (Marc): ...64 % ou 65 %. L'objectif est 70 %. Alors, vous comprenez que, si on avait eu toutes les forces disponibles en présence, on l'aurait atteint sans problème. Quand le dossier nous arrive de la part des demandeurs, 50 % exigent une information médicale additionnelle, pour répondre à votre interrogation.

M. Gautrin: Mais est-ce que, dans le futur, ceci va s'améliorer, c'est-à-dire vous aller changer... Au lieu d'avoir des permanents, si je comprends bien, vous allez pouvoir y aller par voie contractuelle, comme vous le faites, par exemple, pour les cas de rente d'invalidité.

M. Lacroix (Marc): Bien, ça peut être des permanents aussi qui travaillent en bureau, en clinique, mais qui viennent avec nous à la Régie deux jours-semaine. Ce n'est pas nécessairement des contractuels. C'est du temps partiel, des réguliers temps partiel.

M. Gautrin: Oui, oui, je comprends... des réguliers temps partiel. Je ne voudrais pas rentrer dans le détail.

M. Morneau (Guy): Vous avez raison, M. Gautrin. Notre objectif, ce n'est pas de se contenter de ça. On pense que c'est temporaire, on va le redresser l'année prochaine. On est convaincu qu'on va y arriver.

M. Gautrin: Je vous remercie.

Le Président (M. Kelley): Je ne sais pas, M. Morneau, en guise de conclusion, si vous avez des remarques à formuler ou...

M. Morneau (Guy): Bien, je veux juste dire que je vous remercie d'avoir pris tout le temps de nous entendre sur notre vécu, notre quotidien. J'espère avoir essayé de vous montrer la difficulté, puis la complexité, puis la vision que ça prend pour gérer ce projet-là dans les prochaines années. Et vous êtes capables d'imaginer mieux que moi ce que ça implique sur l'équipe de gestion puis sur le personnel. Je peux vous garantir, moi, parce que ça ne fait quand même pas une éternité que je suis à la Régie, ça fait maintenant un an et demi que je vois là du personnel dévoué et dédié qui a à coeur de prendre, je pense, le service à la clientèle au bon sens du terme puis de gérer de façon très prudente et de façon responsable en faisant la démonstration de son efficacité et donner un exemple, à ce moment-là, à l'ensemble de l'appareil public, de ses moyens de gérer intelligemment et efficacement. Merci beaucoup de votre temps et de votre écoute et j'espère qu'on a su répondre à vos questions.

Le Président (M. Kelley): Et, de notre côté, je veux juste... Premièrement, merci beaucoup pour la disponibilité, vous-même, les membres de votre équipe, la qualité des documents qui ont été préparés. Je veux aussi dire merci beaucoup à l'équipe du Vérificateur général, qui aussi nous a aidés un petit peu pour préparer les pistes de réflexion. Mais c'est fort utile de voir comment la Régie des rentes, c'est des enjeux très importants et je pense qu'on a tout intérêt à suivre vos travaux. Alors, merci beaucoup pour votre disponibilité et la présentation aujourd'hui, et, sur ça, j'ajourne les travaux de la commission.

Des voix: Merci.

(Fin de la séance à 12 h 20)


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