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Version finale

36e législature, 1re session
(2 mars 1999 au 9 mars 2001)

Le mercredi 3 novembre 1999 - Vol. 36 N° 16

Audition du sous-ministre de la Solidarité sociale sur le Fonds de lutte contre la pauvreté par la réinsertion au travail conformément à la Loi sur l'imputabilité des sous-ministres et des dirigeants d'organismes publics


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Table des matières

Journal des débats


(Dix heures quatre minutes)

Le Président (M. Kelley): Je constate le quorum, alors je déclare la séance ouverte, en rappelant le mandat de la commission.

La commission est réunie afin d'entendre le sous-ministre de la Solidarité sociale en vertu de la Loi sur l'imputabilité des sous-ministres et des dirigeants d'organismes publics et, à cette fin, discuter de la gestion du Fonds de lutte contre la pauvreté par la réinsertion au travail.

M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des membres temporaires ou des remplacements pour la séance d'aujourd'hui?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. Mme Barbeau (Vanier) remplace M. Boucher (Johnson); M. Gautrin (Verdun), Mme Loiselle (Saint-Henri–Sainte-Anne) et M. Marsan (Robert-Baldwin) ont été désignés membres temporaires pour la séance.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup. On va faire l'ordre du jour. On va débuter maintenant, à 10 heures, avec les remarques préliminaires. Il y aura, suite à ça, un exposé d'une quinzaine de minutes du Vérificateur général. Il y aura l'audition avec le sous-ministre de la Solidarité sociale et des échanges. Moi, je propose qu'on ajourne vers 12 h 25 parce qu'il y a une autre rencontre dans cette salle à 12 h 30, alors ça va nous donner un cinq minutes au moins. On va recommencer tout de suite après la période de questions, ce qui est environ à 15 heures, plus ou moins, et on va ajourner la séance publique à 17 h 30, et il y aura une courte séance de travail pour les membres de la commission, qui va se terminer à 18 heures.

Est-ce que ça va, pour les membres de la commission, sur l'ordre du jour?

M. Gautrin: M. le Président, je serai obligé, moi, de quitter vers 15 h 30, 16 heures. Alors, ça ne sera pas un manque de courtoisie envers nos invités, c'est réellement que j'ai une obligation et, comme je ne voyage pas à la vitesse de la lumière encore, j'ai un problème de transport.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, M. le député. Alors, sur ça, je vais dire un mot de bienvenue encore une fois à M. Deroy et à son équipe, qui sont venus, je pense, la dernière fois, c'était le Centre de recouvrement, de mémoire; alors, rebonjour et bienvenue devant les membres de la commission. Je ne sais pas, est-ce qu'il y a des membres qui ont des remarques préliminaires? Parce que sinon je vais tout de suite céder la parole à M. Breton. Alors, M. Breton, la parole est à vous.


Exposé du Vérificateur général


M. Guy Breton

M. Breton (Guy): Merci, M. le Président. M. le Président, Mmes et MM. les membres de la commission, M. le sous-ministre de la Solidarité sociale, c'est avec plaisir que je participe aux travaux de la présente commission parlementaire et que je me propose d'assister ses membres dans le contrôle parlementaire de la gestion du Fonds de lutte contre la pauvreté par la réinsertion au travail.

Le chapitre II du premier tome de mon rapport pour l'année 1998-1999 fait état d'améliorations souhaitables concernant les paramètres de ce Fonds, c'est-à-dire ses orientations, objectifs, balises et indicateurs de mesure ainsi qu'en ce qui a trait à la délégation et à l'exercice des responsabilités afférentes à sa gestion, à l'évaluation des résultats, à la reddition de comptes.

Notre vérification visait à déterminer si les processus de gestion de ce Fonds créé en vue de favoriser l'intégration au travail des personnes démunies permettent une utilisation optimale de ses ressources, et ce, dans un contexte de gestion par résultats et tout en ne contrevenant pas aux grandes orientations déterminées par un comité aviseur et sanctionnées par le gouvernement.

Bien que la vie du Fonds de lutte soit limitée dans le temps, nous avons mené ce mandat non seulement en vue d'améliorer la gestion de ce Fonds, mais peut-être encore plus afin de tirer des leçons si on venait à créer d'autres fonds semblables.

En premier lieu, je me dois de souligner que le Fonds a parfois soutenu des projets allant à l'encontre des paramètres établis. Ainsi, il a servi à financer des emplois qui existaient déjà. Il a également absorbé les frais réguliers de fonctionnement de certains organismes. Enfin, il s'est substitué par moments à d'autres programmes gouvernementaux.

De plus, alors que le Fonds devait s'adresser de façon nettement prioritaire, du moins pour la première année, aux prestataires de la sécurité du revenu et que les femmes doivent bénéficier de la majorité des emplois, ces deux objectifs n'ont pas été assortis d'indicateurs permettant d'évaluer la performance du Fonds à ces égards. Ainsi, on n'a prévu aucune mesure susceptible d'assurer aux gestionnaires que les personnes participant aux projets du Fonds de lutte étaient bien celles que l'on visait. Dans le cadre de nos travaux, nous avons d'ailleurs relevé des cas indiquant que les participants n'étaient pas des personnes démunies.

Au chapitre des responsabilités attribuées à chacun dans le cadre de ce nouveau Fonds, j'ai pu constater que, bien que la structure de gestion et les principales responsabilités aient été définies globalement, certaines ne sont pas toujours exercées correctement, notamment parce qu'elles n'ont pas été suffisamment précisées. Il en découle, par exemple, que l'analyse des projets est plus ardue et que le gestionnaire du Fonds ne peut être certain que les projets acceptés de même que le profil des participants correspondent aux paramètres du Fonds et aux besoins prioritaires des régions. De plus, parce que les ententes contractuelles et le suivi des projets ne sont pas adéquats, le gestionnaire ne peut mettre en place les mesures qui s'imposeraient pour corriger les situations problématiques.

(10 h 10)

Considérant que le Fonds a été constitué pour aider un segment particulier de la population grâce à une contribution spéciale des contribuables, il est important de mesurer les résultats du Fonds en question. Or, la période couverte par nos travaux, pour cette période, cette mesure n'a pu être qu'incomplète étant donné que le système informatique ne contenait pas une information fiable et que les objectifs visés n'avaient pas été précisés clairement.

Le ministère a entrepris une évaluation des retombées du Fonds. Je l'encourage non seulement à poursuivre cet exercice, mais aussi à l'améliorer. Une telle démarche permettra, entre autres, d'effectuer une meilleure reddition de comptes quant à l'utilisation du Fonds. En effet, le premier bilan déposé dressait un portrait incomplet, qui pouvait même occasionner des méprises.

Les personnes qui m'accompagnent, MM. Bédard et Thomassin et Mmes Paradis et Petitclerc, sont bien sûr à votre disposition pour répondre à vos questions. En terminant, permettez-moi de remercier les autorités du ministère, les gestionnaires du Fonds ainsi que le personnel pour leur disponibilité et leur collaboration tout au long de nos travaux. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, M. Breton. Et, sur ça, je vais céder la parole maintenant à M. Deroy. C'est à vous la parole. Et, comme je dis, l'ère moderne arrive à l'Assemblée nationale; si j'ai bien compris, on a une présentation par ordinateur. Alors, peut-être qu'un jour on va avoir ça dans le salon bleu. À vous la parole, M. le sous-ministre.

M. Deroy (Alain): Oui. Merci beaucoup, M. le Président.

Mme Vermette: Même pas. On va être à nos bureaux personnels puis on va voir à nos affaires.

M. Deroy (Alain): Oui.

Le Président (M. Kelley): Nos bureaux de comté.

M. Gautrin: J'espère que... Mais vous ne l'êtes pas déjà?

Le Président (M. Kelley): Assemblée virtuelle.

M. Gautrin: Vous devriez déjà l'être.

Mme Vermette: Ah oui! Oui, oui.


Exposé du sous-ministre de la Solidarité sociale


M. Alain Deroy

M. Deroy (Alain): Merci beaucoup, M. le Président. Peut-être, avant de commencer la présentation qu'on vous a préparée, je voulais présenter mes principaux collaborateurs qui vont m'assister tout le long de nos entretiens de façon à mieux éclairer la commission. D'abord, à ma gauche, vous avez Mme Ghislaine Morin, qui s'occupe de la Direction de la recherche, de l'évaluation et des statistiques du ministère; M. Yvon Boudreau, qui est sous-ministre adjoint aux politiques; M. Paul Gagnon, qui est directeur du Fonds de lutte. On est aussi accompagnés de certains professionnels, dont Mme Riboty, de la Direction des communications, M. Gagné, M. Leclerc et M. Hamel.

On vous a préparé une présentation. Je me permettrais de la séparer entre moi et mon collègue, M. Boudreau. Alors, je voulais vous parler d'abord du contexte et du cadre de gestion du Fonds – il nous apparaît important de se le rappeler – qui constitue, en fait, une mesure exceptionnelle et une gestion singulière. Je voulais aussi vous rappeler un bref état de situation des résultats qui démontre qu'on a atteint les clientèles ciblées. Ensuite, on voulait vous entretenir des correctifs qui ont été mis en place par le ministère concernant les recommandations du bureau du Vérificateur général au niveau de quatre volets: les orientations et les objectifs, balises et indicateurs; la délégation de responsabilités; les mesures de résultats; et la reddition de comptes. Et, finalement, je vous reviendrai avec une brève conclusion.

Au départ, comme introduction, quand j'entendais le Vérificateur général faire état de ses recommandations, ce qu'il faut bien se rappeler, c'est que son intervention se situait entre mai 1998 et décembre 1998 et faisait état de ses commentaires sur le premier bilan. Depuis lors, le Fonds de lutte a eu des activités nombreuses. D'ailleurs, il y a eu un deuxième bilan qui tient compte de la majorité des recommandations du Vérificateur général, et le rapport annuel qui a été déposé à l'Assemblée nationale en juin dernier démontre que les recommandations du Vérificateur général ont été prises en compte. À ça se sont ajoutées un nombre important d'actions administratives dont je vais vous faire état tout le long de la commission et, au besoin, déposer certains documents de base pour information de la commission.

Et, finalement, je pense que ce qu'il est important de retenir – et c'est le premier objet de la présentation – c'est l'élément de contexte et le cadre de gestion qui démontrent que le Fonds de lutte a été créé pour générer des projets importants de lutte contre la pauvreté, mais dans un cadre de gestion novateur.

Donc, quel est véritablement le contexte dans lequel a été créé le Fonds de lutte à la pauvreté? D'abord, il faut se rappeler que le Fonds de lutte à la pauvreté vient du Sommet sur l'économie et l'emploi et a été décidé d'un commun accord avec le gouvernement et ses partenaires dans le but de lutter contre la pauvreté, mais aussi dans un contexte de réduction des dépenses publiques visant l'atteinte du déficit zéro.

La loi instituant le Fonds a été approuvée à l'unanimité à l'Assemblée nationale et, à son article 13, définissait un rôle précis du comité aviseur qui conseille le premier ministre sur l'utilisation des sommes constituant le Fonds. Le comité aviseur, dès sa mise en place, a proposé des orientations qui ont été approuvées par le gouvernement, et ces orientations ont clairement retenu le mode de gestion souple et peu normé. D'ailleurs, ces orientations mettaient l'accent sur quatre éléments: la décentralisation et le partenariat dans la gestion; l'approbation des projets confiés à des comités composés de représentants du milieu communautaire et du gouvernement; une approche par projets et une absence de normes strictes et restrictives; et, finalement, l'innovation et l'expérimentation. Les orientations, par la suite, ont été acceptées par le Conseil du trésor comme cadre général de référence.

Finalement, afin d'aider à leur tâche, le ministère a proposé aux comités d'approbation divers outils, des balises, des procédures administratives et opérationnelles relatifs à l'analyse des projets, à la définition des clientèles et au suivi des projets. Le ministère a, par la suite, fait des suivis constants sur l'évolution du Fonds, a été à l'écoute des besoins et des problèmes rencontrés et a informé et consulté le comité aviseur sur les différentes problématiques et apporté, lorsque nécessaire, des précisions et des correctifs appropriés.

Maintenant, en termes de résultats, quels sont les résultats importants qu'on peut soulever du rapport d'activité de juin 1997 à mars 1999 qui démontrent que le Fonds est intervenu dans ces clientèles cibles? D'abord, en moins de deux ans, le Fonds a accepté et financé plus de 2 000 projets générant quelque 17 000 postes en emploi et places en formation, en insertion et en stage. Ces engagements totalisant près de 170 000 000 $ ont permis à des milliers de personnes d'acquérir une expérience de travail ou de cheminer vers l'emploi. L'île de Montréal, qui était ciblée également dans les balises du Fonds de lutte, a bénéficié de plus de 33 % des crédits régionaux du Fonds, ce qui représente 399 projets acceptés, pour un total de 38 000 000 $. Selon les données préliminaires portant sur 11 577 personnes qui participent à l'un des projets, 65 % étaient des prestataires de la sécurité du revenu au cours des trois mois précédant leur participation. Ainsi, les estimés montrent qu'environ 40 % de ces personnes auraient passé au moins quatre ans à la sécurité du revenu. Le Fonds de lutte constitue donc un tremplin vers l'emploi et une étape importante dans la vie de ces personnes.

Globalement, 44 % des participants sont des femmes. Si on enlève les postes en aménagement sylvicole, la proportion des femmes représente 52 %. Notons également que 54 % des personnes ayant participé à des projets de formation sont des femmes et que 49 % d'entre elles ont adhéré à des projets d'insertion ou d'autres projets, notamment des stages. Les jeunes de moins de 30 ans représentent 36 % des personnes participantes. Près des trois quarts des participants et participantes déclarent une scolarité de niveaux primaire et secondaire et, finalement, 13 % des personnes participantes sont nées à l'extérieur du Canada. On peut donc constater que le Fonds a rejoint des personnes qui ont habituellement plus de difficulté à intégrer le marché du travail.

(10 h 20)

Maintenant, si on regarde quelques données préliminaires sur l'impact de la participation, cette étude a été réalisée avec la collaboration de 4 980 personnes. Elle révèle que 92 % des personnes salariées se disent satisfaites de l'emploi en général; 94 % de l'horaire de travail; 90 % du soutien reçu au début de l'emploi; et 77 % de leur salaire. 85 % des personnes participant à des projets de formation sont satisfaites de la formation en général, et 88 % du soutien des enseignants. Quatre personnes sur cinq estiment, de façon générale, que la formation reçue les a préparés suffisamment à occuper un emploi. Et, finalement, 65 % des personnes disent qu'elles ont amélioré leur confiance en elles, 62 % leur estime de soi et, dans une même proportion, leur situation économique.

Voilà des données très révélatrices, qui démontrent vraiment l'impact du Fonds. Je vais céder la parole maintenant à M. Boudreau qui va vous expliquer les ajustements administratifs qu'on a faits suite aux recommandations du Vérificateur général.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup. M. Boudreau.


M. Yvon Boudreau

M. Boudreau (Yvon): Bonjour. Merci. Le Vérificateur général formule quatre catégories de recommandations à l'égard de la gestion du Fonds, et on va les prendre une par une et dans l'ordre du rapport du Vérificateur général.

La première catégorie de recommandations a trait aux orientations, objectifs, balises et indicateurs de mesure. Le Vérificateur exprime le souhait que soient traduites dès l'amorce du Fonds la mission, les grandes orientations en objectifs précis et mesurables, en balises et indicateurs de mesure, et que ces informations soient communiquées promptement au personnel, au comité aviseur ainsi qu'aux promoteurs de projets.

D'abord, nous, on reconnaît d'emblée que la gestion par résultats a beaucoup de mérite et que c'est un mode de gestion tout à fait adéquat pour les programmes réguliers, récurrents du gouvernement. On était cependant d'avis que le Fonds de lutte contre la pauvreté ne se prêtait pas à ce type de gestion compte tenu notamment de son caractère transitoire, expérimental, etc. Le Vérificateur aurait souhaité que le ministère fixe des objectifs précis, quantitatifs, dès le départ. Puis, effectivement, on aurait pu dire que 70 % ou 75 % des personnes qui participent aux projets seraient effectivement des prestataires de la sécurité du revenu, ou que 50 % des participants seraient dans des activités de création d'emplois et que 35 % seraient en formation. On aurait pu effectivement fixer de tels objectifs quantitatifs, mais, à notre point de vue, ça se serait fait au détriment de la flexibilité du Fonds de lutte et de sa capacité de s'adapter aux réalités très variables et très changeantes des régions et des clientèles qu'on voulait rejoindre. Donc, on ne s'est pas donné de tels objectifs quantitatifs dès le départ, mais la préoccupation d'obtenir les meilleurs résultats a toujours été présente, bien entendu.

Pour ce qui est de la façon dont les orientations ont été connues, elles ont été d'abord très largement diffusées. On a voulu d'abord les exprimer avec le maximum de clarté, même si elles n'étaient pas normées. Elles ont été largement diffusées auprès de l'ensemble du personnel du ministère, l'ensemble, comme le dit le Vérificateur, des organismes qui étaient appelés à soumettre des projets et des comités d'approbation qui avaient été constitués dans les régions.

On a tenu aussi des sessions de travail, des sessions de formation de l'ensemble de notre personnel sur la manière dont il conviendrait de gérer, et on a mis à sa disposition des outils, des guides pour gérer les projets. Et, de par le suivi périodique qu'on faisait et les rapports qu'on faisait... On est à la page 6, à peu près, M. le...

Une voix: ...

M. Boudreau (Yvon): Nous sommes à la page 6, qui concerne les orientations. Ça va? Bon. Et on a organisé – ça a été très, très salutaire – trois rencontres de l'ensemble des représentants dans les régions qui participaient à la gestion – donc, ça représente nos employés et les membres des comités d'approbation – pour qu'on puisse bien comprendre la dynamique du Fonds, la manière dont c'est géré, la manière dont on doit appliquer les orientations. Donc, tout ça demeure perfectible, mais on pense qu'il y a eu des efforts importants de faits pour communiquer les orientations, ajuster au besoin lorsqu'on voyait qu'il y avait des interprétations qui étaient appliquées de façon peut-être un peu moins rigoureuse, donc il y a eu des rappels de faits périodiquement.

La deuxième série de recommandations du Vérificateur général a trait à la délégation et à l'exercice des responsabilités. Le Vérificateur dit qu'il faut préciser davantage les responsabilités exercées par chacun, offrir le soutien et l'encadrement nécessaires aux régions et s'assurer que les projets ne vont pas à l'encontre du cadre normatif qui est établi. À cet égard-là, il y a eu beaucoup de gestes administratifs, et même politiques, qui ont été posés pour donner suite aux observations du Vérificateur général. Il y a d'abord eu une entente qui est intervenue entre le ministre de la Solidarité sociale et la ministre d'État au Travail et à l'Emploi, qui apportait beaucoup de précisions. Dans ce sens-là, les observations du Vérificateur général ont été très utiles, et on a traduit avec le maximum de clarté les responsabilités à tous les paliers de l'administration.

Il faut dire aussi qu'on a véhiculé avec beaucoup d'insistance dans l'ensemble de l'organisation les observations du Vérificateur à l'égard de l'importance du suivi, et toutes les directions régionales ont produit, à notre demande, un plan de suivi pour les prochains mois pour s'assurer que les projets correspondent véritablement aux objectifs que le Fonds poursuit.

Troisième série de recommandations du Vérificateur général. Elles ont trait à la cueillette des données. Bon. Essentiellement, le Vérificateur dit qu'il faut recueillir et analyser les données nécessaires à la mesure des résultats du Fonds de lutte, s'être assuré de leur exactitude et prendre les mesures qui s'imposent pour améliorer l'efficacité de cette opération, intensifier les efforts pour mieux évaluer les retombées du Fonds.

Alors, le ministère tient à rappeler en premier lieu que, dès le tout début, le Fonds de lutte a développé des moyens, a mis en place des mécanismes pour mesurer les résultats et suivre les résultats. Il faut dire que le ministère avait en place une infrastructure dans toutes les régions, dans beaucoup de localités, pour accueillir les projets, les enregistrer et enregistrer les données sur les participations. Mais, au fil du temps, il a fallu – et les observations du Vérificateur ont été utiles dans ce sens-là – insister pour que les données soient inscrites plus hâtivement dans les systèmes, qu'une vérification plus rigoureuse soit faite encore sur la fiabilité des données qui étaient inscrites pour faire en sorte que l'information de gestion soit disponible plus rapidement.

Je signale que le Fonds de lutte fait l'objet d'une évaluation, dans le sens d'une évaluation de programme, qui est extrêmement détaillée. Il n'y a à peu près pas de programmes au gouvernement qui ont fait l'objet d'une évaluation aussi étendue et aussi rigoureuse, et même étendue dans le temps. Et, déjà, certains résultats ont été communiqués, dont le bilan qui a été déposé à l'Assemblée nationale, et les études d'évaluation se poursuivent.

Quatrième série de recommandations, elles ont trait, cette fois-ci, à la reddition de comptes, et le Vérificateur exprime le souhait que soit améliorée la reddition de comptes relative au Fonds. D'abord, je dois dire que la gestion du Fonds informe régulièrement... Le comité aviseur dont on a parlé, dont M. Deroy a parlé tout à l'heure, se réunit à peu près tous les trois à quatre mois, et à chaque fois on fait état de façon très, très transparente de l'état d'avancement des projets et des résultats d'avancement des objectifs. Et c'est à ce moment-là, par exemple, que parfois des correctifs sont apportés. Donc, il y a beaucoup de transparence dans les informations qui sont rendues publiques, là, pour le Fonds.

(10 h 30)

Le Vérificateur soulignait que certaines définitions qui avaient été utilisées dans le premier bilan n'étaient pas tout à fait adéquates. Nous lui avons donné raison. Essentiellement, ça venait du fait qu'on avait parlé, dans le premier bilan public, de personnes qui étaient déjà en emploi ou déjà en processus, alors qu'il aurait fallu parler, pour être plus rigoureux, de postes qui avaient été autorisés. Alors, nous lui avons donné raison dans le bilan qui a été déposé subséquemment à l'Assemblée nationale. La cueillette des données se fait de façon plus systématique, et, là-dessus, les remarques des vérificateurs étaient tout à fait pertinentes.

Nous avons insisté beaucoup auprès surtout des organismes externes qui ne voient pas la nécessité de transmettre. Ils trouvent que c'est un peu de la paperasse, tout ça, de transmettre ces informations qui sont essentielles à la gestion. Donc, on est revenu à la charge. L'ensemble de l'organisation est mobilisé pour améliorer la qualité des données qui sont inscrites dans nos systèmes. Alors, voilà en gros les gestes qui ont été mis en place dans la foulée du rapport du Vérificateur général. Je tiens à dire que certains gestes ont été... d'abord, qu'on a des relations continuelles avec les représentants du Vérificateur général et que des actions avaient été prises bien avant le dépôt du rapport, étant donné bien sûr qu'on avait des échanges soutenus et harmonieux avec les représentants du Vérificateur général.


M. Alain Deroy

M. Deroy (Alain): Bon. En conclusion, je dirais que le ministère considère qu'il a assumé la gestion du Fonds en respectant les orientations approuvées par le gouvernement, tout en adaptant certaines réalités et principes énoncés par le Vérificateur général. Pour nous, le Fonds a un bilan positif sous quatre aspects. Puis je pense qu'on pourrait discuter davantage. D'abord, il a permis à plusieurs milliers de personnes de s'engager dans des démarches de formation et d'insertion. Je vous ai présenté tantôt les principales données. Il a démontré l'avantage de la souplesse dans la conception des programmes et a eu un effet bénéfique sur d'autres mesures, et surtout le développement social de chacune des régions. Il a favorisé, et, pour nous, c'est une première au gouvernement, le rapprochement et la concertation étroite entre l'administration et le secteur communautaire. Et, finalement, il a suscité la concertation interministérielle par la réalisation de projets destinés aux personnes les plus démunies.

Le ministère reconnaît qu'il a dû apporter, depuis le début de l'implantation du Fonds, des correctifs sur certains points. Je vais vous indiquer les principales corrections qu'on a apportées suite aux commentaires du Vérificateur général. D'abord, il y a eu une entente de service entre le ministère et Emploi-Québec dans l'administration du Fonds, il y a eu un meilleur suivi des projets, une demande aux différentes directions régionales d'exercer une stratégie de suivi de projets, il y a eu une stratégie complète d'évaluation du programme qui a été déposée puis qui est actuellement en cours de travail, on a amélioré le système informatique et on a transmis différentes notes aux régions pour s'assurer du respect des orientations de base.

Finalement, je tiens à vous indiquer que, pour nous, c'est une expérience novatrice. Et le Fonds comporte à cet égard un mode de gestion très particulier reposant notamment sur le partenariat dans la prise de décision. Merci.

Le Président (M. Kelley): Merci, M. Deroy. Je pense, M. Breton, que vous avez quelque chose à ajouter.

M. Breton (Guy): Oui, M. le Président. J'aimerais attirer votre attention sur l'objectif que nous poursuivions quand nous avons fait cette vérification. Bien sûr, nous avons vérifié un nouveau projet qui a débuté en juin 1997, et nous l'avons vérifié jusqu'en date de décembre 1998. Et c'était en développement, alors on savait déjà à l'origine qu'on trouverait des faiblesses, parce que tout ne peut pas être parfait dès le premier jour. Mais notre objectif, c'était d'attirer l'attention de l'administration publique sur un fait de base, à savoir, lorsque vous aurez un autre projet du même type, pourriez-vous partir cette fois-là avec l'expérience acquise dans celui-ci et ne pas répéter? Et c'est pourquoi nous avons senti le besoin d'énumérer les faiblesses qui existaient dans un projet de ce type qui débute de la façon qu'il a débuté. Faire autrement était peut-être techniquement impossible. Mais laisser passer l'occasion de réfléchir sur comment faire la prochaine fois, sachant que, la première fois, l'ayant fait de cette façon-ci, on a eu toute une série de faiblesses, peut-on tirer des leçons de ces faiblesses en prévision du prochain? Et, en ce sens-là, on trouvait faire oeuvre utile.

Simplement dresser que, quand quelqu'un part et que ce n'est pas parfait, c'est utile, mais ça ne fait pas avancer beaucoup les choses. Si on en tire une leçon pour ne pas répéter, on fait avancer les choses. Et que maintenant le ministère nous dise: Bien sûr, on a atteint une vitesse de croisière avec un certain nombre de qualités, on est très heureux de l'entendre, mais l'objectif de base, c'était: peut-on mémoriser les erreurs de base, peut-on en tirer des leçons de sorte qu'à l'avenir on ne répète pas? C'était l'objectif de notre vérification, et il serait peut-être bon, dans la discussion, d'en tirer des conclusions ou des leçons.


Discussion générale

Le Président (M. Kelley): Et je pense, pour faire écho à ça, pour les membres de la commission aussi... On a vu la création de plusieurs fonds à travers l'administration publique et la gestion – comme ancien étudiant, il y a d'autres ici qui sont dans le milieu des sciences – mais chaque expérience, si on est expérimental, il faut quand même tirer des leçons, tirer des conclusions. C'est pourquoi on fait les expériences expérimentales. Sur ça, ce n'est pas une grande surprise, parce que, dans notre caucus, sans trop faire une brèche dans la confidentialité de nos discussions, en caucus, un de mes collègues a souvent questionné les fonds, c'est mon collègue le député de Verdun, et ce n'est pas une surprise qu'il ait une question à poser. M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Merci. Bon, ce n'est pas seulement les fonds que je questionne.

Le Président (M. Kelley): Entre autres.


Mécanismes d'attribution et de gestion des subventions

M. Gautrin: D'abord, je vais revenir avec vous. Je ne suis pas contre, du tout, la flexibilité qui était peut-être nécessaire à l'intérieur. Vous avez insisté dans votre présentation sur la nécessité de la gestion par résultats et sur le fait que le Fonds était quelque chose de nouveau mais ne devait pas remplacer des programmes existants, qui existaient soit dans votre ministère, soit dans d'autres ministères; je pense au ministère de l'Éducation ou des ministères comme ça. Alors, moi, je vous pose la question: D'abord, gestion par résultats, c'est quoi, les balises que vous avez faites, quand vous appelez la gestion par résultats, premièrement? Et, deuxièmement, la question: Comment vous êtes-vous assuré que les subventions que vous donnez, à ce moment-là, ou les montants qui ont été transmis n'allaient pas en contradiction, ou ne remplaçaient pas, ou n'allaient en même temps que des programmes existants, déjà, du gouvernement? Autrement dit, est-ce que vous ne dédoublez pas des programmes existants du gouvernement?

Le Vérificateur, je vous le dis tout de suite, en a retrouvé certains. Bon, par exemple, des gens qui... des bourses qui étaient données et que les personnes pouvaient aller au régime de prêts et bourses, etc. Bon, ce n'est pas impossible non plus qu'il y ait des choses qui passent à travers la passoire. Je ne suis pas en train de vous chercher des poux, mais ce qui m'intéresse, moi, c'est les mécanismes que vous vous êtes donnés, d'une part, les mécanismes de gestion que vous vous êtes donnés actuellement. Et je comprends la flexibilité de la gestion par résultats.

Et, après qu'on m'aura répondu, j'aurai une deuxième question là-dessus. Et comment vous êtes-vous assurés au départ, alors que vous avez décentralisé – regardez la situation, vous avez extrêmement décentralisé l'attribution des subventions – que vous ne dédoubliez pas localement d'autres programmes qui existent au gouvernement? C'est quoi, les mécanismes que vous vous êtes donnés?

M. Deroy (Alain): Je peux commencer, mon collègue complétera. D'abord, il faut rappeler que le Fonds avait un comité aviseur, puis il y avait un partenariat important à instaurer dans l'administration du Fonds, et il y avait le gouvernement et les organismes communautaires.

Donc, dans un premier temps, je pense qu'il fallait définir contre quoi on voulait lutter. On voulait s'attacher à quoi? Et là il y a eu un grand débat au départ sur les orientations de base, qui ont été largement diffusées, et qui, à notre point de vue, définit les clientèles visées puis donne certaines orientations de base, ces prémisses essentielles, dont le non-dédoublement des programmes existants. Or, ça a fait l'objet quand même de diffusion large au comité d'approbation, et il y a eu par la suite des rencontres de formation de ces gens-là. Il faut dire aussi qu'il y avait toujours des fonctionnaires de notre ministère qui étaient plus habitués à ces modes de fonctionnement. Ce choix-là a été fait, d'une part, parce que c'était le consensus qui sortait du partenariat que le gouvernement avait même décidé d'instaurer, donc il y avait ce consensus-là, puis il fallait définir aussi la pauvreté, ce sur quoi on devait attaquer. Puis, je pense, les gens se sont vite aperçus qu'il y avait différentes facettes de la pauvreté, il y avait des réalités régionales qui étaient différentes d'une région à l'autre.

(10 h 40)

Donc, l'objectif était vaste, et je pense qu'on ne voulait pas contrer les réalités régionales par des résultats plus précis que les orientations de base. Donc, c'est la stratégie de départ qui a été adoptée. Et aussi, on voulait que ça soit le milieu qui décide des projets et qui soit générateur des projets, on ne voulait pas que les balises du départ conditionnent des projets qui auraient été viables en soi et que les normes de programme n'auraient pas été acceptées.

M. Gautrin: Ça, vous plaidez pour le fait que ça soit un programme avec une grande flexibilité. Peut-être que je me suis mal exprimé. Mon questionnement est: Votre gestion par résultats, c'était quoi, à ce moment-là, la mesure de l'atteinte des résultats que vous vous êtes donnée, premier élément, et, au départ, de quelle manière, par quels moyens vous vous êtes assurés qu'il n'y avait pas dédoublement avec des programmes existants? C'est ces deux éléments-là que je voudrais savoir. Je comprends la flexibilité. Ça, je n'ai pas de problème là-dessus. Mais, sur ces deux questions-là...

M. Deroy (Alain): Bien, il fallait que le projet d'abord ait une réalité régionale importante et un rayonnement important dans la lutte contre la pauvreté. C'était un des critères importants et c'était le comité régional qui devait statuer, les instances régionales, sur ce rayonnement-là.

M. Gautrin: Et comment vous êtes en mesure de mesurer a posteriori, puisque vous faites de la gestion par résultats? Que je ne conteste pas. Faites attention, je ne suis pas en train de contester votre... Mais ce que nous, ici... c'est comment vous vous êtes assurés que les résultats ont été atteints sur chacun des projets? Je pourrais préciser aussi un autre élément de ma question. Dans le rapport du Vérificateur général... Je sais qu'il devait y avoir des rapports d'étape. Semble-t-il, bien souvent, le rapport d'étape est parfois incomplet, parfois non... Les deuxièmes versements sont versés même si les rapports d'étape étaient incomplets; ça a été dit dans certains cas qui ont été soulevés par le Vérificateur général. Peut-être qu'on pourra leur poser la question tout à l'heure, si vous voulez avoir des exemples à cet effet-là. Alors, moi, je me pose la question: La gestion par résultats, ça voulait dire quoi pour vous?

M. Boudreau (Yvon): Je vais apporter un complément. D'abord, on n'a jamais prétendu qu'on pratiquait de façon systématique ou rigoureuse une gestion par résultats. On dit que justement le caractère très particulier, très singulier du Fonds de lutte contre la pauvreté ne se prêtait pas formellement à ce qu'on entend d'habitude par «gestion par résultats».

M. Gautrin: Excusez-moi, j'ai cru... Ah! J'ai mal compris votre intervention.

M. Boudreau (Yvon): Exactement. Ce qu'on a dit, c'est qu'on pratiquait ce qu'on appelle une gestion par projet. Dans le fond, on disait aux comités d'approbation qui avaient été constitués dans chacune des régions... Ces comités-là étaient composés de trois représentants de l'administration, qui venaient d'ailleurs de trois organisations différentes, et de deux représentants du secteur communautaire. On leur disait: Vous regardez le projet pour sa valeur même, dont sa capacité d'atteindre les objectifs de faire sortir des gens de la pauvreté par l'emploi. Si le projet en question concourt à cet objectif-là, il devrait être acceptable à vos yeux. Bon. Donc, on a essayé de limiter autant que possible les balises.

Pour répondre plus précisément à votre question, comment – parce que le risque évidemment est toujours présent – s'assurer qu'il n'y ait pas de substitution? Il y a différents moyens qu'on a mis en place dès le départ. Le premier, c'était de dire... On donnait comme consignes aux analystes... Puis on avait des analystes qui venaient de trois ministères différents: un du ministère de la Sécurité du revenu, un de la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre, de l'époque, et un du ministère des Régions. Et on disait: La première question que vous vous posez: Est-ce qu'il y a un programme du gouvernement qui peut financer ce projet-là? Si oui, vous le référez à l'organisme public responsable. Deuxièmement, on s'était donné un mécanisme, un droit de regard, si on peut dire, sur les projets. Avant que le projet ne soit formellement approuvé, assez rapidement, on s'est donné un mécanisme par lequel on disait au ministre: Oui, ce projet-là répond, d'après les informations qu'on a, aux objectifs du Fonds. Et donc, ça nous a permis de détecter parfois des situations où effectivement le projet a été référé à un autre programme du gouvernement. On a beaucoup insisté là-dessus parce que ça nous apparaissait très, très important, et, quand les partenaires avaient accepté de s'engager dans un fonds de lutte contre la pauvreté, ils en avaient fait une condition expresse, de dire: On veut s'assurer que c'est vraiment une contribution supplémentaire et qu'il n'y a pas de substitution. On n'économise pas d'un bord parce que le Fonds est présent.

Pour revenir à la question de la formation – parce que je pense que c'est très important d'apporter un éclairage additionnel là-dessus – il faut se rappeler que, quand le Fonds a été mis en place, il n'existait pas dans les programmes québécois de possibilité de ce que j'appellerais «acheter de la formation», c'est-à-dire de constituer des activités de formation, généralement dans les institutions publiques, mais adaptées spécifiquement à un groupe particulier. Je prends un exemple très clair. C'est: il y a des travailleurs immigrants, des immigrants, c'est-à-dire, qui sont en chômage, qui sont même à l'aide sociale, qui ont une formation, une technique très développée mais qui n'est pas reconnue ici, le cas des ingénieurs roumains, par exemple. Or, on a constitué, avec le Fonds, des groupes particuliers puis on a conclu une entente avec un cégep pour leur donner une formation spéciale en informatique pendant un an. Cette possibilité-là, qui existe maintenant à Emploi-Québec, elle n'existait pas en 1987, quand on a commencé à travailler avec le Fonds de lutte.

M. Gautrin: En 1997.

M. Boudreau (Yvon): En 1997, pardon. Et, dans le fond, les activités de formation soutenues par le Fonds de lutte, c'étaient essentiellement des activités de ce genre-là.

Pour ce qui est de la référence aux prêts et bourses, il y avait une vérification qui était faite pour savoir si les individus qui participaient à ces activités de formation étaient admissibles aux prêts et bourses. On les référait. Il a pu nous en échapper, mais je vous signale que certains individus qui théoriquement auraient pu être admissibles à des prêts et bourses, pour différentes raisons, n'y avaient pas droit. Par exemple, il est arrivé des cas où l'individu avait atteint le maximum d'endettement possible au régime de prêts et bourses, il n'était techniquement pas qualifié aux prêts et bourses. Donc, on a soutenu cette candidature-là parce que ça nous apparaissait néanmoins une intervention pertinente, parfaitement compatible avec les objectifs du Fonds de lutte. Mais on n'a pas encouragé, avec le Fonds de lutte, la référence d'une personne dans le système régulier d'éducation. Ça ne s'est pas fait.

M. Gautrin: M. le Président, je voudrais quand même poursuivre. Je vous remercie de la précision que vous venez de nous donner, M. Boudreau, c'est ça? Mais je reviens sur la question... Vous faisiez la gestion par projet. Alors, je vais essayer de bien comprendre comment ça se passe.

Vous aviez dans chacune des régions un comité qui recevait des projets. Il avait une enveloppe, j'imagine, à dépenser, budgétaire, et il gérait... Ma question est importante, là: Est-ce qu'il gérait au premier arrivé, premier servi, ou il y avait une date limite pour les projets et il répartissait l'enveloppe aux meilleurs projets possibles? Et je vous resignalerai, avant que vous me répondiez, qu'il y a eu déjà un autre fonds, qui était le Fonds de développement technologique. On avait vu ce dangereux biais où on avait pris les projets au fur et à mesure qu'ils arrivaient, au point que certains projets, même plus valables que ceux qu'on avait financés, se trouvaient sans avoir possibilité de financement. Comment vous avez fonctionné, vous autres, à ce moment-là? Est-ce qu'il y avait une date fixée? Vous regardiez chacun des projets au mérite et vous choisissiez les meilleurs en fonction des balises avec lesquelles vous fonctionnez, ou vous y alliez au premier arrivé, premier servi, etc., compte tenu des enveloppes qui, j'ai compris, ont été réparties en fonction de l'indicateur de pauvreté sur les différentes régions? C'est bien ce que je comprends?

M. Boudreau (Yvon): Exactement. Bon, la première chose qu'on a demandée aux régions, c'est d'effectuer dans leur milieu et dans les instances de concertation dans les régions une réflexion sur ce que j'appellerais «les orientations stratégiques». Quel type d'intervention il faudrait privilégier pour lutter contre la pauvreté dans la région donnée par le travail? Sur quels véhicules on devrait tabler davantage? Donc, il y a eu une réflexion généralisée dans toutes les régions du Québec sur les meilleurs moyens d'atteindre les objectifs que le Fonds poursuivait. Et ça, ça a donné lieu à des stratégies variées, à des stratégies de promotion du Fonds de lutte auprès de certains types d'organismes qui étaient plus susceptibles de développer ou de présenter le type de projet. Par exemple, si on disait: Chez nous – et la région de Montréal, ça a été un peu le cas – on privilégie la formation parce qu'il y a des carences importantes et puis parce qu'on a une infrastructure... Et donc, il y a eu de la promotion de faite par les gens du ministère, par les gens du comité d'approbation auprès d'organismes qui étaient susceptibles de présenter des projets. Bon. Donc, ça a orienté un peu le débat. Et donc, quand on regarde d'ailleurs la nature des projets présentés dans les régions, on voit que c'est très variable.

(10 h 50)

Il n'y a pas eu de date de tombée comme telle de projets. Les comités se réunissaient périodiquement, à peu près tous les mois ou tous les deux mois, et ils analysaient les projets qui étaient retenus. On n'a pas vécu, jusqu'à cette année du moins, de situation sérieuse où on aurait dépensé hâtivement les budgets en début d'année et on se serait retrouvé devant l'impossibilité de financer des projets très valables en fin d'exercice. Ce qui nous a aidés beaucoup dans ce sens-là, c'est que c'était un fonds sur trois ans. Donc, ce qui était alloué à une région pour un exercice financier donné, s'il n'était pas dépensé, on pouvait évidemment... Donc, il n'y a pas de course aux périmés, pour éviter les périmés, comme on le fait avec les budgets réguliers. C'est un grand avantage des fonds.

Alors donc, les gens se sont donné le temps de recevoir les projets, très souvent de les bonifier, de les améliorer. Ce qu'il y a eu de particulier avec la gestion du Fonds de lutte, c'est qu'on a essayé d'éviter des situations où on refusait parce que ce n'était pas conforme, etc., des projets. On essayait beaucoup de les bonifier, de les améliorer. Évidemment, il y a des projets qui demeurent inacceptables, mais dans l'ensemble il y a eu une démarche, des efforts réellement très forts de déployés pour bonifier les projets, les améliorer. Mais il n'y a pas eu de course...

M. Gautrin: Je n'ai pas le même son de cloche que vous, si vous me permettez. Et on pourrait regarder... Réellement, j'aimerais avoir les statistiques à cet effet-là. Si je comprends bien, il n'y avait pas de date de tombée, à ce moment-là, des projets. Et il y a des régions... Je prends un exemple qui vient de ma propre circonscription. J'ai un organisme qui a eu 2 000 000 $, enfin quatre projets de 900 000 $... un, c'est-à-dire, qui a été chercher 2 000 000 $ au Fonds de lutte, ce qui a hypothéqué, d'après les autres organismes communautaires, leur potentiel de pouvoir faire des demandes à ce moment-là. Je ne remets pas en question la valeur des projets, mais il y aurait peut-être pu y avoir une comparaison entre les différents projets.

Et l'inquiétude que j'ai – je reviens sur la question de gestion – c'est, lorsqu'on n'a pas de limite, de date de tombée, vous avez de la difficulté à comparer les différents projets et à financer ceux qui sont les plus pertinents, puisque vous gérer par projet. Ça, c'est la crainte que j'ai sur la manière dont vous avez fonctionné. Je ne sais pas si...

M. Deroy (Alain): Comme disait M. Boudreau, en tout cas, à ma connaissance non plus, on n'a pas vu de grosses problématiques de cette nature-là.

M. Gautrin: De cette nature-là.

M. Deroy (Alain): Il y avait une gestion budgétaire que j'appelle même «ministérielle», à savoir si vraiment une région était en problème dû à la surabondance de projets. Il y avait des réflexions qui se faisaient par rapport à d'autres régions qui n'allaient pas. Alors, à ma connaissance, il n'y en a pas eu beaucoup.

Maintenant, pour compléter peut-être l'information sur l'harmonisation de l'intervention des régions, bien, on vous a parlé qu'il y a eu de la formation importante. Il y a eu plusieurs notes qui ont été envoyées pour baliser certaines interventions qu'on voyait. Ensuite, il y avait quand même un processus de révision au niveau central. Les dossiers remontaient au central, en bout de piste, ce qui nous permettait d'avoir une vision globale. Et, par la suite, on pouvait intervenir en région pour dire que la nature du projet qu'ils avaient transmis n'était pas tout à fait correcte.

M. Gautrin: M. le Président, j'aurais une demande à vous faire. Bien sûr, nous avons reçu ici de votre ministère les projets qui ont été acceptés, avec les dates d'acceptation. Et je ne conteste pas ce que vous me dites comme information. Est-ce qu'on pourrait avoir aussi les projets qui ont été refusés? Ce qui nous permettrait de suivre ce que vous nous dites, qu'il n'y a pas eu de problème, de refus de projets. Si, par contre, je vois une accumulation de dates de refus de projets à la fin, je me permettrais de questionner ce que vous me dites à l'heure actuelle. Si les refus, par contre, sont, disons, statistiquement répartis par rapport aux acceptations, ça ne causerait pas de problème.

M. Boudreau (Yvon): Je veux apporter une précision. J'ai dit tout à l'heure que jusqu'à cette année on n'avait pas eu de difficultés. Nous sommes présentement... D'abord, on a moins de budget cette année qu'on en avait l'année précédente. Et, deuxièmement, on est en fin de processus. O.K.? Alors, depuis quelques mois, effectivement, on est en situation où, dans le fond, on termine. Ces semaines-ci, on va épuiser les dernières réserves du Fonds, là, parce que le Fonds de lutte se termine. On ne peut pas avoir des arrangements au-delà du 31.

M. Gautrin: Je comprends tout ça.

M. Boudreau (Yvon): Donc, on est dans une dynamique un peu différente. Mais, jusqu'ici, à part cette année, là, on n'a pas eu de problèmes aigus et, comme l'a dit M. Deroy, on avait même la possibilité de faire un peu de transferts à partir d'une enveloppe nationale.

M. Gautrin: Si vous nous donnez ceux qui ont été refusés, ça me permettrait de voir ça aussi.

M. Boudreau (Yvon): Oui, on peut... On vous le transmettra.

M. Gautrin: Je reviendrai plus tard, moi.

Le Président (M. Kelley): Avant de passer la parole à Mme la députée de Rosemont, juste pour les membres de la commission, on a parlé du nombre de projets retenus. C'était sur combien de projets qui étaient proposés? Parce qu'on parlait de 2 000 subventionnés sur...

M. Deroy (Alain): Oui, c'est ça. Là, vous voulez savoir le total...

M. Boudreau (Yvon): Je lis dans une information de gestion qu'il y aurait eu 5 786 projets déposés – mais «déposés», des fois, c'est une page, là – et, bon, il y en a eu 2 000 d'acceptés.

Le Président (M. Kelley): Plus ou moins un sur trois.

M. Boudreau (Yvon): Mais souvent les gens viennent aussi déposer...

M. Gautrin: C'est 50 %, à peu près, le taux de succès.

M. Deroy (Alain): Oui, mais il faut voir aussi les refusés. Ça peut être des dossiers incomplets, des dossiers référés ailleurs.

M. Gautrin: Non, non, écoutez, je comprends ça, je ne conteste pas ça.

Le Président (M. Kelley): Mme la députée de Rosemont.

Mme Dionne-Marsolais: Merci. Pour poursuivre dans la même ligne que mon collègue de Verdun, vous avez dit que parmi les critères que vous avez utilisés il y avait celui... si le projet pouvait être réalisé dans le cadre d'un autre programme. Est-ce que, dans le cas où vos gens éliminaient un projet parce qu'il pouvait être financé par un autre programme, vous vous préoccupiez de la disponibilité budgétaire de l'autre programme, et suiviez-vous le projet pour qu'il se réalise par l'autre programme? C'est peut-être une question de détails, mais ça m'apparaît important par rapport à ce que vous avez énoncé.

M. Deroy (Alain): On le faisait pour les programmes internes au ministère, au niveau d'Emploi-Québec entre autres, qui avait vraiment une analyse, voir comment on pouvait, dans le cas où les disponibilités à Emploi-Québec étaient plus difficiles, comment le Fonds pouvait suppléer à ces besoins-là. Maintenant, pour les autres programmes, je vais laisser à Yvon...

M. Boudreau (Yvon): En complément, on l'a fait aussi beaucoup pour les projets qui pouvaient être soutenus par le SACA, par le Secrétariat à l'action communautaire autonome. Il y a beaucoup de projets qui ont été référés au SACA, parce que ça relève du même ministre effectivement, parce qu'on avait le souci de ne pas créer, en tout cas, des organismes à partir d'un programme provisoire. Ça, c'était temporaire. Ce qui s'est produit le plus souvent, c'est qu'il y avait une exploration de faite auprès des autres programmes, des autres... Et, quand cette exploration-là n'était pas couronnée de succès, il y avait un retour assez rapide du promoteur auprès du ministère pour dire: Bon, bien, j'ai effectué telle démarche. Et donc, on complétait aussi l'information avec la collaboration des collègues des autres ministères pour voir s'il y avait possibilité que ce soit pris en charge.

(11 heures)

Donc, très souvent, on a eu aussi des avis sectoriels de demandés à des ministères sur la pertinence de telle intervention, sur la capacité de soutenir tel projet. Donc, il y a eu des va-et-vient dans ce sens-là, et il y avait un retour assez rapide. Vous pouvez comprendre aisément, lorsqu'on pouvait prétendre qu'il y avait des possibilités de financement ailleurs puis que ces possibilités-là s'avéraient non correctes, donc il y avait un retour assez rapide.

Mme Dionne-Marsolais: Parce qu'on a souvent entendu sur le terrain que des projets arrivaient là et recevaient une fin de non-recevoir parce qu'ils pouvaient être couverts par d'autres programmes, mais que, dans les faits, ces couvertures-là n'existaient pas toujours, soit parce qu'il n'y avait plus de budget, soit parce que ce n'était pas tout à fait le critère de l'autre programme. Alors, à votre avis, ce que vous nous dites, ce que je comprends, il n'y en aurait pas, à votre avis, qui n'auraient pas...

M. Boudreau (Yvon): Non, je n'ai pas dit ça. Prenons, par exemple, le cas de...

M. Gautrin: ...veulent se protéger. Ha, ha, ha!

M. Boudreau (Yvon): Non, non, non. Mais prenons, par exemple, le cas du SACA, hein. Il y a eu, à une certaine période dans le temps, plusieurs projets qui étaient carrément de la consolidation des emplois dans les organismes communautaires. Et une des orientations du Fonds était à l'effet qu'il fallait éviter que le Fonds serve à soutenir les activités régulières des organismes communautaires. Alors, dans ce sens-là, s'il y avait persistance, effectivement, il y a eu des refus. Ça, je ne vous cache pas ça. Parce qu'on avait la préoccupation de ne pas créer une situation où les organismes développeraient toutes sortes d'activités financées à partir d'un fonds qui avait une durée de vie limitée dans le temps.

Alors, oui, ça s'est produit, mais ce que je vous dis, c'est que, lorsque la quête de fonds, surtout dans les autres ministère – et je vous signale qu'il y a plusieurs ministères qui ont contribué de leurs propres fonds à la réalisation de projets en complémentarité avec le Fonds de lutte – cette contribution s'avérait insuffisante, il y avait soit une contribution complémentaire du Fonds de lutte – c'est arrivé très souvent – ou soit une prise en charge totale. Mais, effectivement, il s'est produit des cas.

M. Gautrin: Là, vous soulevez réellement le problème qui me préoccupe, avec les derniers mots que vous avez dits, «une contribution complémentaire du Fonds de lutte». Et là je ne suis pas sûr que vous étiez réellement dans votre mandat. Et on a vu ça aussi dans d'autres fonds, et je vais vous dire dans quel endroit je l'ai vu, c'est le Fonds de développement de la métropole où bien souvent des projets sont financés avec une contribution du Fonds de la métropole, qui a exactement les mêmes restrictions que vous, il ne doit pas remplacer d'autres programmes existants. Puis après, vous voyiez un programme qui était financé un tiers par le Fonds de développement de la métropole, un tiers par le... et un tiers par ça.

Là, je ne comprends pas. Pouvez-vous m'expliquer comment vous pouvez me dire que vous avez une contribution complémentaire du Fonds de lutte dans un projet qui est financé, par ailleurs, par d'autres programmes gouvernementaux et que vous n'êtes pas, à ce moment-là, en contradiction avec ce qui pourrait être financé par un programme gouvernemental? Enfin, je vous explique. Moi, j'ai du mal à comprendre ça, et je voudrais bien vous entendre là-dessus: Comment vous pouvez justifier le fait qu'en faisant ça vous n'allez pas contre la norme qui était de ne pas remplacer un programme existant?

M. Boudreau (Yvon): O.K. Bon. Il y a certains programmes des ministères qui s'adressent à une clientèle spécifique...

M. Gautrin: Ça, c'est général.

M. Boudreau (Yvon): ...et souvent une clientèle très, très spécifique.

M. Gautrin: Mais je lui ai demandé la permission de...

Mme Dionne-Marsolais: Oui, oui, ça va, cher collègue.

M. Boudreau (Yvon): Donc, les programmes sont souvent très normés, et il arrive qu'un programme qui est destiné à une clientèle aussi spécifique pourrait servir à d'autres, pourrait être élargi à d'autres clientèles, mais effectivement ça déborde les normes du ministère. Prenons le cas de certains programmes de subventions salariales, et surtout financés par Emploi-Québec, et surtout à l'époque de 1997, où ce n'était pas possible de financer des programmes de subventions salariales pour ce qu'on appelle les sans-chèque, les personnes qui ne sont ni prestataires de la sécurité du revenu ni prestataires de l'assurance-emploi mais qui sont des personnes relativement démunies. Il y a eu des cas pathétiques, par exemple en Gaspésie ou aux Îles-de-la-Madeleine, des gens qui ne peuvent plus pêcher parce que les stocks de poissons se sont effondrés, mais qui ont un actif, qui ont en quelque sorte leur bateau qui est un actif important qui les rend inadmissibles à la sécurité du revenu. Donc, les subventions salariales qui sont destinées normalement aux prestataires de la sécurité du revenu, c'est un programme qui peut être avantageusement offert à ces personnes-là. Donc, voilà un exemple d'une intervention complémentaire au budget régulier d'un ministère.

M. Gautrin: Mme la députée de Rosemont va continuer, mais j'interviendrai plus tard.

Le Président (M. Kelley): Mme la députée.

Mme Dionne-Marsolais: Bien, pour ce même sujet là, parce que j'ai un autre sujet après, j'ai une petite question très pointue, moi. J'ai regardé le document que vous nous avez remis ce matin, et, pour la région de Montréal, vous avez... J'ai regardé les différents comtés, parce que c'est présenté par comtés. Vous avez 21 projets à Outremont. La majorité des comtés reflètent assez bien l'impression... Je dis «l'impression» parce que je ne connais pas profondément chacun des comtés, sur le plan des données. Vous avez 21 projets à Outremont sur 559 projets dans la région. Est-ce qu'il y a eu une crise de pauvreté à Outremont?

M. Gautrin: Bien oui, Côtes-des-Neiges.

Mme Dionne-Marsolais: Ah! D'accord. Bien, j'apprécie, parce que ça m'a frappée, cette statistique-là.

Le Président (M. Kelley): ...j'imagine, entre autres.

Mme Dionne-Marsolais: Donc, tous ces projets-là sont généralement dans Côte-des-Neiges? Je pose la question.

M. Boudreau (Yvon): Je vais vérifier.


Gestion par résultats

Mme Dionne-Marsolais: Pouvez-vous me le vérifier, puis vous reviendrez tantôt? Bon. Maintenant, moi, je voudrais qu'on aborde la question de fond qui est une question de... Notre rôle ici, c'est de nous assurer qu'il y a une certaine rigueur à la gestion de ces fonds-là, et, dans ce contexte-là, j'étais un peu étonnée quand vous avez présenté que la gestion... Je reprends un peu ce que mon collègue a dit tantôt, mais je vais être un peu plus détaillée: la gestion par résultats ne peut pas s'appliquer intégralement.

Ensuite, vous dites: On ne peut pas déterminer les objectifs précis, ça ne convient pas au cadre du Fonds, mais, malgré tout ça, on veut l'atteinte de meilleurs résultats. Mais vous allez mesurer quoi? On ne peut pas avoir de meilleurs résultats si on ne sait pas ce à quoi on s'attend puis comment on va le mesurer.

M. Deroy (Alain): Comme on disait tantôt, il est sûr qu'au départ du Fonds il fallait vraiment définir ce à quoi on devait s'attaquer. Le comité aviseur a défini un champ vaste dans ses orientations, ça a été diffusé, et c'est à partir de ça puis de cette réflexion qui disait que la pauvreté avait différents visages, avait une réalité régionale différente, que pour permettre de générer des projets novateurs dans les régions il ne fallait pas baliser tout de suite dans des objectifs précis de résultats.

Mme Dionne-Marsolais: Je m'excuse de vous interrompre, mais est-ce que ces constatations-là que vous avez dans votre acétate tiennent encore?

M. Deroy (Alain): Oui. Bien...

Mme Dionne-Marsolais: Vous êtes encore convaincu que la gestion par résultats ne peut pas s'appliquer, mais vous savez certainement que, sur le plan administratif, on peut avoir des résultats quantitatifs, on peut avoir des résultats qualitatifs.

M. Deroy (Alain): Bien, là, on a un cadre d'évaluation assez précis qu'on pourrait vous présenter. La première partie, c'était au moins l'exploration des résultats de clientèles, dont je vous ai fait part. Puis, les résultats qu'on a présentés tantôt, c'est révélateur: quelque 60 %, c'est des prestataires de la sécurité du revenu qui avaient un risque d'être à l'aide sociale pour quatre ans. Il y avait un résultat que majoritairement les femmes devaient être représentées; on atteint ce résultat. On ne l'a peut-être pas quantifié, mais on voit...

Mme Dionne-Marsolais: Oui, oui, vous l'avez quantifié.

M. Deroy (Alain): Oui, mais, dans les balises, on n'avait pas le chiffre, mais on parlait de majoritaire, que la région de Montréal devrait être, tout en étant équitable pour les autres, bien représentée; on vous parle de 33 %.

Maintenant, pour les impacts, on a une première évaluation, que je vous ai présentée, qui est plus qualitative, qui disait que les gens qui ont participé se trouvaient aidés, se trouvaient satisfaits de leur participation. Puis là on est dans la deuxième évaluation: Quelle est vraiment la retombée du Fonds dans la création d'emplois ou dans la mise en mouvement de ces gens? Et c'est le résultat de ces évaluations-là qui va nous apporter un éclairage global sur la performance du Fonds.

On pourrait peut-être vous présenter...

Mme Dionne-Marsolais: Mais, est-ce que ce que vous dites: Le ministère estime... Vous le dites, là. Est-ce que c'est encore vrai, ça, que, globalement, la détermination d'objectifs précis et mesurables ne convient pas au cadre et au mode de gestion du Fonds? Vous le maintenez, ça?

(11 h 10)

M. Deroy (Alain): Si on fait un bilan du Fonds depuis juin 1997, je pense que c'est notre réflexion. Maintenant, quant à l'avenir du Fonds par rapport à l'expérience qu'on a puis les évaluations qu'on va avoir après trois ans – c'est un programme jeune – je pense que, si le gouvernement décide d'aller dans une autre voie, peut-être qu'il faudra réfléchir sur comment cibler davantage certaines clientèles. Mais il reste que la réalité régionale – puis ça, c'est une opinion personnelle – devra demeurer. Et il me semble que, s'il y a des objectifs de résultats, il va falloir que ça soit plus orienté vers des objectifs régionaux de résultats, parce que la réalité est complètement différente à Montréal qu'en Gaspésie. Puis ça, au début, compte tenu que...

M. Gautrin: Ça, ce n'est pas contradictoire avec gérer par résultats.

M. Deroy (Alain): Non, non. Mais, comme le Fonds de lutte est quand même parti rapidement, qu'on voulait une intervention rapide aussi, des projets...

Mme Dionne-Marsolais: Mais je vous interromps, M. le sous-ministre, nous vous entendons très bien. La question que je pose et à laquelle vous répondez: Oui, c'est encore l'opinion que j'ai comme administrateur public: la détermination d'objectifs précis et mesurables ne convient pas au cadre et au mode de gestion du Fonds. Vous le maintenez. Et, moi, ça m'inquiète quand j'entends ça.

Que vous ayez dit ça au début, je peux le comprendre parce qu'il y avait un apprentissage, puis il y a toujours une courbe d'apprentissage quand on crée un nouvel outil qui vise quelque chose d'assez qualitatif, bien qu'il y ait des unités de référence, même si c'est qualitatif. Mais, quand vous me dites que c'est difficile de le traduire aujourd'hui en résultats, moi, je m'inscris en faux, je ne peux pas... Et je souhaiterais que vous réfléchissiez davantage à la question, et rapidement, parce que je pense que ce qui... Il y a un dicton en anglais... bien, peut-être en français aussi: Ce qui se mesure est fait. Bon. Alors, encore faut-il le mesurer, mais il y a une valeur... Tout n'est pas en termes d'unités de mesure, tout n'est pas quantitatif; il y a des unités de mesure qui sont qualitatives et qui sont tout aussi importantes, particulièrement dans le champ d'action où votre Fonds opère. On le comprend, je pense. Il n'y a pas un député qui ne comprend pas ça, ici.

M. Deroy (Alain): Oui. Mais peut-être pour répéter ce que j'ai dit: Si je fais un bilan du Fonds depuis juin 1997, et compte tenu du contexte particulier de partenariat qu'on avait, je pense qu'il n'y avait pas meilleure solution que celle qui a été adaptée.

Mme Dionne-Marsolais: Ceci dit... cela dit, c'est-à-dire...

M. Deroy (Alain): Oui, mais ce que j'ai dit tout de suite, j'ai dit: Si on pensait à prolonger le Fonds, c'est sûr qu'avec l'expérience des évaluations qu'on a maintenant, avec l'expérience des projets du milieu, c'est sûr qu'un ciblage de clientèle est plus envisageable maintenant. Les projets, maintenant qu'on a l'expérience de quelques années, peuvent être plus ciblés. Et ce que j'ai dit en bout de piste: S'il y avait un ciblage, il faudrait que la réflexion régionale soit mise en valeur davantage qu'un ciblage global. Donc, je suis un peu d'accord avec vous, disant que maintenant, après une expérience de quelques années, peut-être qu'on est rendu à cette étape-là.

Mme Dionne-Marsolais: Alors, j'apprécie ce que vous dites, et je pense que ce que vous avez écrit au point 3a de votre allocution ne traduit pas ce que vous nous dites aujourd'hui. Et je crois que le seul commentaire que je peux faire, c'est qu'il serait important, un peu dans le même esprit que le Vérificateur général, pour l'avenir, si un autre fonds de cette nature était mis en place et qu'on vous demandait de l'implanter, je crois qu'il serait dans l'intérêt public qu'une approche plus structurée et plus rigoureuse... Ça ne veut pas dire seulement quantitative. Je le répète, il y a du qualitatif là-dedans, parce qu'on est dans un champ d'action qui est qualitatif par nature, celui de convaincre, encourager les gens à se réintégrer dans une société de laquelle ils sont marginalisés.


Partage des données avec Emploi-Québec

Cela dit, dans votre présentation, vous dites aussi que... Je voudrais qu'on parle, moi, de l'entente de services avec Emploi-Québec, et j'ai une question très précise, encore là, qui est du niveau de l'administration de votre ministère, je voudrais que vous nous donniez votre jugement. Est-ce que les systèmes d'information – on se comprend? vous savez ce que je veux dire? – de votre ministère et d'Emploi-Québec étaient ou sont ou seront... Est-ce qu'ils sont compatibles? Est-ce que vous pouvez utiliser ensemble les données qui viennent de part et d'autre? Ces données-là, sont-elles compatibles? Sont-elles opérationnelles? Parce que, sur le terrain, les gens qui sont là avec l'information que vous leur donnez, la formation que vous leur donnez, tout ça, je crois qu'ils font le travail qu'ils peuvent faire avec les outils qu'ils ont. La question qui me préoccupe, c'est: Les outils qu'ils ont, est-ce que ces outils-là sont opérationnels? Est-ce qu'ils facilitent leur travail ou pas?

M. Deroy (Alain): Bien, au niveau du Fonds de lutte – mes collègues me compléteront – il y a eu d'importants développements pour s'assurer que l'information de base soit colligée et qu'on puisse avoir de la bonne information de gestion. Donc, ça a été un commentaire du Vérificateur général, et je pense qu'il y a eu des développements importants. D'ailleurs, la production du rapport de juin 1999 nous permet de donner des données plus intéressantes. Celles que je vous ai données, bon, c'étaient des sommaires de documents que vous avez en votre possession. Vous avez vu qu'il y a beaucoup d'information de gestion, donc on peut maintenant y répondre.

Maintenant, la relation du ministère avec Emploi-Québec dans ses systèmes d'information, c'est sûr que le ministère, avec la réforme de la sécurité du revenu et la réforme de l'emploi, a eu un bouleversement majeur tant au niveau humain que des systèmes, de la technologie. Mais la stratégie de développement informatique, c'est une stratégie qui vise qu'on partage les mêmes systèmes, donc les systèmes d'identification des individus sont les mêmes, qui nous permettent de faire des appariements d'information.

Alors, oui, nos systèmes sont compatibles. Maintenant, ils ne sont pas tous maintenant conviviaux, puis on a beaucoup de croûtes à manger encore, mais, depuis un an, on a fait d'énormes efforts. Puis d'ailleurs, la direction de Mme Morin, c'est une direction qui est commune aux deux, qui offre des services à Emploi-Québec pour de l'évaluation, recherche et statistiques, et on diffuse des informations intégrées de tout le ministère.

Le Président (M. Kelley): Je pense que M. Breton veut...

M. Breton (Guy): Après que madame aura terminé.

Mme Dionne-Marsolais: Donc, la question que je pose, vous dites: On a fait beaucoup d'améliorations, mais, au moment où on se parle, est-ce que les engagements... D'ailleurs, le ministre a été très clair dans les commentaires qu'il avait faits au mois de juin, quand il a présenté, justement, votre approche. Est-ce que, au moment où on se parle, ces systèmes-là, aujourd'hui, se parlent et se comprennent? C'est une question très, très importante, ça.

M. Boudreau (Yvon): Oui. Je dirais que la principale lacune qu'a décelée le Vérificateur général, avec raison, c'est la rapidité avec laquelle les informations nous provenaient des organismes qui recevaient, et surtout des informations sur les participants, et la rapidité avec laquelle elles étaient saisies dans les systèmes. Alors, ça, là-dessus, effectivement il y a eu des efforts déployés au cours des derniers mois pour améliorer la situation, pour avoir les informations les plus complètes possible. Mais, pour ce qui est de la compatibilité des systèmes, effectivement, on enregistre les données dans les mêmes systèmes. Mais on est très capable de les distinguer, il n'y a pas de problème de confusion, de double comptabilité, ou enfin...

Mme Dionne-Marsolais: Merci.

Le Président (M. Kelley): M. Breton.


Mécanismes d'attribution et de gestion des subventions (suite)

M. Breton (Guy): J'aimerais revenir sur le facteur de substitution des programmes. J'ai entendu les réponses qui ont été données tout à l'heure et qui démontraient qu'à l'occasion c'était essentiel. Mais nous avons d'autres cas que nous n'avions pas publiés dans le rapport et dont nous avons saisi les membres de la commission en séance de travail, par exemple le financement de centres de la petite enfance qui a été fait par le Fonds à la place de Famille et Enfance; ou encore le maintien pendant six mois du financement de Ressourcerie de Montréal en attendant que le ministère de l'Environnement et de la Faune se décide à continuer le financement ou pas, ce qu'il a laissé tomber, de toute façon.

(11 h 20)

Alors, bien sûr, je comprends qu'il y avait des gens qui travaillaient là pendant ces six mois-là, ils ont continué à travailler, mais ce sont des exemples de substitution, quand même, ou de complément à des programmes qui m'apparaissent majeurs et qui me semblent un peu dans le même contexte que pour le Fonds de la métropole. C'est étirer beaucoup le concept, et j'aimerais que peut-être vous reveniez là-dessus, parce que c'est un peu différent que d'aider quelqu'un qui était étudiant ou des Gaspésiens qui n'ont plus de poisson.

Le Président (M. Kelley): M. Boudreau.

M. Boudreau (Yvon): Oui. En fait, j'ai dit tout à l'heure, et c'est sûr que c'est un grand défi, on a beaucoup insisté auprès des gestionnaires du Fonds pour qu'on évite cette substitution. Et on a même invité avec insistance les autres ministères à ne pas se servir du Fonds justement pour allonger leur marge mais, au contraire, à ajouter de leurs propres crédits. Et, dans ce sens-là, c'est assez intéressant. On l'avait dit dans le rapport qui a été publié à l'Assemblée nationale, que plusieurs autres ministères avaient contribué pour plusieurs dizaines de millions de dollars, ce qui avait été rajouté, dans le Fonds, aux 250 000 000 $.

Le cas de la petite enfance, c'est qu'au début... Ça nous apparaît un cas isolé, mais, dans les tout premiers temps du Fonds, alors que démarraient les projets d'économie sociale – et puis les centres de la petite enfance faisaient partie de ça – il y a eu un cas effectivement qui a fait l'objet d'un financement dans le cadre des projets de Fonds de lutte puis pour lequel, par après, notamment, il y a eu des dispositifs de financement de ces centres-là. Donc, on a évidemment arrêté de financer ce genre de projet là.

Ressourcerie, c'est un cas un peu singulier également. Il y avait des possibilités pour un certain nombre de personnes qui étaient sans emploi et qui étaient des démunis de participer à une expérience de travail dans un organisme à but non lucratif qui s'appelle une ressourcerie. Il y avait, quand on a accepté le projet, dans l'air une politique de financement à moyen terme de ces organismes-là, et ça rendait la pérennité des emplois potentiels plus probable. Alors, évidemment, comme il n'y a pas eu de suite concrète de donnée à cet énoncé de politique, les individus n'ont pas pu conserver leur emploi au sein de l'organisme, mais l'intervention nous apparaît quand même correcte parce qu'elle a servi en quelque sorte d'emploi tremplin. L'individu ou les individus en question, qui étaient des personnes démunies, sans emploi, ont acquis une expérience de travail qu'ils ont pu faire valoir par après auprès d'un autre employeur. Alors, dans ce sens-là, on peut toujours qualifier ça comme on veut, mais ça demeure une intervention qui est pertinente, même si elle s'est déroulée dans un contexte qui a changé en cours de route.

Le Président (M. Kelley): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Je comprends bien... comprenez-moi bien, le cadre dans lequel on fonctionne... On n'est pas ici nécessairement pour faire de la chasse aux sorcières, on est réellement en train d'essayer de poser des balises qui nous semblent nécessaires, si jamais un tel fonds doit se faire pour le futur.

Moi, je vous dis déjà deux premières balises. Pour moi, il me semblerait important qu'il y ait des dates butoir pour pouvoir comparer chacun des projets à pertinence égale, et non pas comme vous l'avez fait. Enfin, c'est une position personnelle.

Deuxième question, comme l'a soulevé ma collègue de Rosemont, il me semblerait important que vous assuriez des mécanismes pour vous assurer qu'il n'y ait pas dédoublement, tout simplement de dire: Nos fonctionnaires devraient connaître les programmes et s'assurer qu'il n'y ait pas dédoublement.


Analyse des rapports d'étape

J'en arrive à un troisième élément. Le troisième élément, pour moi, c'est le rapport d'étape. Vous savez à l'heure actuelle que, dans le Fonds, lorsque des subventions sont données à des organismes, elles ne sont pas données en un seul versement. Il y a un premier versement, il y a des versements qui viennent après. Et il y a des rapports d'étape qui sont faits. L'information qui nous vient du Vérificateur général – et je pourrai tout à l'heure peut-être demander qu'il nous donne les exemples qu'ils nous ont présentés – c'est que, bien souvent ou presque tout le temps, le rapport d'étape est reçu et n'est pas vraiment analysé par le comité, c'est-à-dire il est reçu, il est mis sur une tablette: Bon, il y a un rapport d'étape. Le deuxième versement... et on nous a signalé des exemples où les versements subséquents étaient versés même si le rapport d'étape ne contenait pas toutes les informations que vous auriez souhaité avoir à l'intérieur du rapport d'étape. Je ne sais pas si vous voulez avoir des exemples. Le cas échéant, on pourrait demander les exemples au Vérificateur général. Ça fait référence, si vous voulez, aux paragraphes 270 à 278 du rapport du Vérificateur général.

Encore là, je tiens à vous le signaler, ce n'est pas ici une chasse aux sorcières que je fais – je ne suis pas ici pour... – mais une réflexion qu'on fait ensemble pour améliorer éventuellement une gestion d'un... Alors, je m'étonne beaucoup que les rapports d'étape ne soient pas formellement analysés par les comités qui ont fait les attributions, et deuxièmement, que, si le rapport d'étape... comme ils ne sont pas analysés, vous autorisez souvent les versements subséquents sans vous être assurés, en quelque sorte, que ce pourquoi le projet est financé est bien en train de se réaliser.

Je comprends que vous faites les éléments par projet, mais, une fois que je vous soumets un projet, bien, vous me financez la première tranche, j'imagine... Normalement, dans ma petite tête, je me dirais: Peut-être, avant de financer la deuxième tranche, il faudrait regarder si j'ai déjà fait bien la première tranche. Alors, vous me financerez peut-être la deuxième. J'ai l'impression que ce n'est pas fait, puisque vous n'analysez pas complètement les rapports d'étape. Si vous voulez qu'on demande au Vérificateur général quelques exemples, ils les ont avec eux. Ils nous ont soumis... Dans la séance de travail que nous avons eue ici, on a eu quelques exemples là-dessus.

Mais, vous comprenez, le problème que je vous soumets, il m'a l'air extrêmement important en termes, justement, de gestion de l'administration publique.

M. Deroy (Alain): Non, je pense que toutes les recommandations du Vérificateur général ont été prises en compte, puis des correctifs ont été apportés, y compris à cette question-là. Puis, à ma connaissance – puis Yvon complétera – il y a les protocoles d'entente qui ont été ajustés en conséquence pour mettre un peu plus conditionnelles des informations de base dont le ministère avait besoin par rapport au dernier versement.

Ensuite, le ministre a demandé, dès le dépôt du rapport du Vérificateur général, qu'il y ait une stratégie de suivi par région. Toutes les régions ont développé une stratégie de suivi de leurs projets pour permettre d'avoir une bonne évaluation. Et ça, c'était...

M. Gautrin: Je me permets de vous interrompre, excusez-moi, M. Deroy. Vous avez à l'heure actuelle les stratégies de suivi par région?

M. Deroy (Alain): Oui.

M. Gautrin: Est-ce que vous pouvez nous les transmettre, à la commission? Parce que nous ne connaissons pas, à l'heure actuelle, quels sont les suivis.

M. Deroy (Alain): Oui.

M. Gautrin: Autrement dit, est-ce qu'il y a... Je comprends ce que... Mais c'est important, c'est très important pour moi. Est-ce que, par exemple, il peut y avoir, je ne dirais pas un enquêteur, mais quelqu'un qui peut aller sur place s'assurer que ce que vous êtes en train de financer est réellement en train de se faire?

M. Deroy (Alain): Tout à fait. Je pense qu'on pourrait vous déposer même la demande du ministre, qu'il a faite là-dessus. Et, pour chacune...

M. Gautrin: Surtout comment vous satisfaites à la demande. Je suis sûr qu'il a fait la demande, moi.

M. Deroy (Alain): Oui, oui, puis à chacune des régions. On l'a mis conditionnel, même, à la distribution du budget cette année. C'est à la fin de l'été, en août... en juin, plutôt. Et chaque région pourrait vous déposer le rapport. Et il y a des visites sur place qui sont prévues pour s'assurer de l'adéquation des...

M. Boudreau (Yvon): Bon. Juste pour donner un exemple, on a signifié aux régions qu'il fallait qu'il y ait un suivi systématique et complet de chacun des projets, ce qui comprend, je cite: des visites sur les lieux des projets; une vérification de la conformité dans l'application des protocoles; une vérification de l'encadrement des participants par le promoteur; une vérification que la formation prévue a effectivement été donnée; une vérification de l'admissibilité des participants – s'agit-il de personnes démunies? – et la mise en oeuvre des correctifs qui s'imposent, le cas échéant. Et puis, à partir de cette instruction, si on peut dire, chacune des régions a produit son plan, comment elle entendait appliquer ces dispositions-là chez elle. Et ça constitue un engagement formel.

M. Gautrin: Dans les régions, vous avez fractionné Montréal en sous-régions, compte tenu de la taille de la région 06.

M. Boudreau (Yvon): Montréal nous a produit son plan conformément... comme les autres. Évidemment, c'est adapté à sa situation particulière.

M. Gautrin: Et vous allez pouvoir le déposer à la commission, M. le Président?

(11 h 30)

M. Boudreau (Yvon): Oui, tout à fait. Ça existe, on peut... On l'a sur place, alors...

Le Président (M. Kelley): Oui, on peut accepter ça tout de suite, si vous voulez le déposer, M. Gagnon ou...

M. Boudreau (Yvon): Bon, je reviens, sur le plan plus fondamental, à la question que vous avez posée, c'est très important. Dans un système de décentralisation, c'est sûr que les organismes considèrent que tous ces bilans provisoires, c'est de la paperasserie, c'est... Et il a fallu... Et, dès le départ, on s'est buté beaucoup à ça, les gens voulaient qu'on sorte des normes. On vivait à ce moment-là dans un régime qui était celui de la sécurité du revenu, donc qui est très normé. Donc, les gens voulaient avoir un peu d'oxygène.

M. Gautrin: Quand je voulais dire... On ne conteste pas ça.

M. Boudreau (Yvon): Et dans certains milieux ça a été interprété comme étant: Bon, maintenant, vous allez nous lâcher un peu...

M. Gautrin: Oui, mais il ne faut pas tomber de l'autre côté.

M. Boudreau (Yvon): Il ne faut pas tomber dans l'autre excès. Alors, il a fallu effectivement insister, et les remarques du Vérificateur sont pertinentes à cet effet-là, pour dire: Il faut des rapports d'étape. Bien, vous avez tout à fait raison. Et d'ailleurs, les contrats prévoient explicitement qu'avant de verser l'autre étape il faut s'assurer qu'un minimum d'information soit entrée.

Le Président (M. Kelley): Avant de continuer, M. Deroy...

M. Gautrin: Ah! excusez-moi. Allez-y.

M. Deroy (Alain): C'est dommage que Mme Marsolais ne soit pas ici, ça compléterait l'information que je voulais donner à une de ses questions. Ce qu'Yvon vient de soulever est important. Il y a un partenariat avec le communautaire. C'est important, si on veut établir un partenariat, de faire évoluer notre partenaire...

M. Gautrin: Absolument.

M. Deroy (Alain): ...au même rythme que nous. Et, au niveau de la gestion des résultats, on est des administrateurs publics, on connaît l'importance de ça, mais il faut établir des modes qui conviennent à ces organismes-là et, je pense, il faut faire évoluer, entre guillemets, ces gens-là au même rythme que... Et, je pense, le Fonds a permis d'avoir ce type de discussion fort intéressant. Je me souviens, au niveau des balises au départ, les balises qu'on dit, bien, c'est général, mais ça a suscité tout un débat dans les organismes communautaires. On allait beaucoup trop dans le détail quand on disait... Par exemple, la liste – vous l'avez tous examinée – des clientèles, sécurité du revenu, bon... Le Fonds d'adresse aux démunis, il s'agit des prestataires de la sécurité du revenu, des situations en dénouement, des personnes en perte d'accessibilité de l'assurance-chômage; juste le fait de décrire ces éléments-là, pour ces organismes-là, c'était déjà un pas important qu'ils venaient de franchir. Alors, c'est pour ça qu'on disait: Le mode de gestion qu'on a adopté dans les circonstances, c'était vraiment le seul possible. Maintenant, je pense que tout le monde a évolué dans ce contexte-là, puis maintenant peut-être on peut aller dans une autre étape un peu plus détaillée, si on doit aller dans un...

M. Gautrin: Pour poursuivre dans ce que vous dites, M. Deroy, M. Boudreau, suite à la demande du ministre, les régions se sont donné, à ce moment-là, donc des mécanismes, si je comprends bien. Les comités locaux, vous dites... Est-ce que, vous, vous êtes assurés que les comités dans chacune des régions étudient ces rapports-là, des rapports... Il y a des réunions formelles où les rapports sont étudiés? La crainte qui avait été signalée par le Vérificateur général, c'est qu'une fois que le rapport est là on le met sur une tablette puis on continue comme ça. Là, maintenant, est-ce qu'ils sont vraiment étudiés?

M. Boudreau (Yvon): Il faut faire attention. À quelques exceptions près, les comités locaux ou comités régionaux n'ont pas, et ce n'était pas dans leur prérogative non plus...

M. Gautrin: Bien sûr, oui.

M. Boudreau (Yvon): ...assuré un suivi systématique des projets. C'est une tâche, c'est une responsabilité qui incombait à l'administration, d'assurer que le projet qui avait été approuvé par un comité dont on a parlé tantôt se réalisait conformément à ce qui avait été convenu. Donc, il y a une responsabilité un peu administrative, un peu technique, qui était effectuée par les fonctionnaires. Donc, mais, évidemment...

M. Gautrin: Mais faites attention...

M. Boudreau (Yvon): ...l'information est disponible, et le comité d'approbation pouvait en tout temps demander un état de situation sur l'état d'avancement d'un projet.

M. Gautrin: Qui autorise le deuxième versement ou le troisième versement?

M. Boudreau (Yvon): C'est l'administration.

M. Gautrin: C'est l'administration.

M. Boudreau (Yvon): Exact.

M. Gautrin: Et là vous avez maintenant... C'est l'administration qui étudie, à ce moment-là, le rapport de suivi que vous faites. C'est bien ça?

M. Boudreau (Yvon): Exact.

M. Gautrin: Tout en étant conscients que vous êtes dans une situation non normée et avec une certaine flexibilité... Comprenez-moi bien, il n'est pas question de remettre en question la flexibilité et l'adaptation nécessaires dans chacune des régions. Mais, actuellement, maintenant, il y a quelqu'un qui étudie les rapports d'étape de chacun des projets.

M. Boudreau (Yvon): Oui, c'est quelqu'un de l'administration. Exactement.

M. Gautrin: Qui le fait. Ça, vous pouvez me le garantir?

M. Boudreau (Yvon): C'est-à-dire qu'on a donné toutes les instructions voulues, et je pense qu'on s'est beaucoup amélioré sur ce point de vue là par rapport à la situation qui existait au tout début.

M. Deroy (Alain): Écoutez, je pense que les gestionnaires vont devoir rendre compte de leur plan.

M. Gautrin: C'est ce qu'on fait, là.

M. Deroy (Alain): Alors, là, ils l'ont déposé en juin, puis là on va faire une reddition de comptes à cet égard-là.

M. Gautrin: Dernière question sur ce sujet-là. Après, j'aurais d'autres sujets, mais je pense que d'autres collègues voulaient intervenir aussi. Vous pourrez nous transmettre... Parce que, quand quelqu'un a une note de 100 %, je me dis toujours que quelque chose est peut-être bizarre là-dedans. Alors, est-ce qu'il y aura des... Vous êtes dans les suivis, vous avez peut-être trouvé quelques projets qui ne satisfont pas, si vous faites le suivi. Je ne veux pas avoir les noms, je ne veux pas faire d'enquête mais simplement m'assurer qu'il y a un suivi. Donc, il y a certains projets sur lesquels vous n'allez pas autoriser le deuxième versement parce qu'ils ne satisfont pas aux normes que vous avez faites. Ce que, moi, j'aimerais savoir, c'est, j'imagine qu'il va y en avoir quelques-uns, si vous faites la vérification, parce que, sur le comité de projets que vous avez, ça serait un peu miraculeux en quelque sorte qu'ils soient tous totalement conformes. Alors, savoir... me dire, par région, que vous, après analyse, n'autorisez pas le deuxième versement, ça m'intéresserait, moi, de savoir ça et ça me sécuriserait, en disant à ce moment-là que vous avez bien fait l'analyse du suivi.

M. Deroy (Alain): O.K. Moi, théoriquement, ça se conçoit comme ça. Maintenant, dans la pratique, il va falloir qu'il y ait, moi, j'appelle ça des actions, à tout le moins, de suivi. Puis les actions, ça peut être qu'on ne donne pas le dernier versement, ou: Enligne-toi maintenant pour corriger.

M. Gautrin: Oui, oui. Attention! Ça... Dites-moi, les actions, soit vous ne donnez pas le deuxième versement, soit qu'il y ait une action ou une action...

M. Deroy (Alain): Parce que, ne pas donner le dernier, il y a quand même un contrat, il y a des engagements financiers.

M. Gautrin: M. Deroy, vous avez raison, je me suis peut-être mal exprimé. J'aurais dû préciser quelles suites vous avez pu... Autrement dit, quel est le nombre de projets pour lesquels vous n'avez pas automatiquement donné le deuxième versement? Vous avez demandé soit un correctif, un réalignement, je comprends bien, ou un non-versement du... J'aurais dû préciser ma question dans ce sens-là.

M. Deroy (Alain): O.K.

M. Gautrin: Si vous me dites qu'il n'y en a aucun...

M. Deroy (Alain): Il y a un problème, là.

M. Gautrin: ...je me poserai la question. Il y a un problème quelque part dans la manière dont vous faites le suivi.

M. Deroy (Alain): Je suis d'accord.

M. Gautrin: Si vous me dites qu'il y en a un certain nombre, je dirai: Correct, vous avez fait le suivi, puis il n'y en a pas beaucoup parce que c'est bien géré.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, M. le député Verdun. Avant de passer la parole à Mme la députée de Marie-Victorin, je pense qu'il y a un complément ou un commentaire du Vérificateur général.


Mécanismes d'attribution et de gestion des subventions (suite)

M. Breton (Guy): Oui. J'aimerais revenir, si vous permettez, à nouveau sur la substitution. Nous avions dit, au paragraphe 2.36, qu'à notre avis il y avait 25 % des projets examinés qui sont admissibles à des mesures gouvernementales déjà existantes. J'ai probablement mal compris quand M. Boudreau nous a dit que, dans le cas de la petite enfance, c'était un cas d'exception. Peut-être qu'il voulait dire que c'était un cas d'exception parmi plusieurs types. Mais mes adjoints me faisaient remarquer que nous avons déjà, dans Bertrand, deux garderies, celle de Bambouli et celle de Barbouille – Bambouli, pour 46 000 $; Barbouille, 37 000 $ – que, dans Groulx, il y a le centre de la petite enfance, pour 10 000 $, que, dans Prévost, il y a le centre de la petite enfance l'Abri-doux, avec une décision de février 1999, pour 28 000 $. Donc, c'est un cas exceptionnel, mais il me semble que c'est peut-être un créneau exceptionnel.

Le Président (M. Kelley): J'ai trouvé également les éducatrices à Kuujjuaq. Alors...

M. Deroy (Alain): Je ne suis pas un grand spécialiste de tous les projets, mais je me demande si, juste par le titre, on peut vraiment mesurer la nature de la subvention.

Le Président (M. Kelley): M. Boudreau, peut-être...

(11 h 40)

M. Boudreau (Yvon): En tout cas, je ne veux pas avoir de polémique, mais il faut faire attention, et puis je ne veux pas généraliser. Et puis peut-être que, sur un cas d'espèce, on peut... Mais ce n'est pas parce qu'un type d'organisme obtient son financement de base en vertu d'un programme gouvernemental que ça ne constitue pas des lieux importants de formation, de stage ou même de création d'emplois pour des personnes démunies. Bon, j'ai à l'esprit, par exemple, des organismes qui font le maintien à domicile, dont des entreprises d'économie sociale, et effectivement le Fonds a versé des subventions à ces organismes-là dans certains cas pour permettre à des individus d'acquérir une expérience de travail qui serait transférable ailleurs. Alors, ce qui est important, c'est que le Fonds ne vienne pas prendre en charge des éléments de dépenses qui sont déjà couvertes par d'autres programmes.

Alors, c'est un souci qui a été largement répandu, de dire: S'il y a un programme gouvernemental pour couvrir les immobilisations ou l'encadrement, tâchons de faire en sorte que les interventions du Fonds, si elles rentrent dans ces milieux-là, servent essentiellement et très, très majoritairement à verser des salaires à des personnes dans un processus d'insertion. Alors, c'est la nuance que j'apporterais.

Le Président (M. Kelley): Mme la députée de Marie-Victorin.


Éligibilité des participants aux projets

Mme Vermette: Oui, merci, M. le Président. Alors, écoutez, moi, j'aimerais comprendre la perception qu'ont les gens en général dans le milieu communautaire par rapport au Fonds de lutte. Parce que très souvent on a eu l'impression que le fait que ça soit basé sur des projets, donc, la plupart du temps, il y avait des organismes communautaires qui devenaient des promoteurs et ils ne s'inquiétaient pas nécessairement de la nature des gens, en tout cas s'ils répondaient réellement aux critères du Fonds de lutte, pour finalement partir le projet. Bon, ils arrivaient... Et, moi, j'aimerais savoir comment, justement, ils avaient le contrôle par rapport à ça, les gestionnaires par rapport aux promoteurs, à l'intérieur du projet? Est-ce que, finalement, on s'interrogeait nécessairement sur la qualité de ces gens-là? Est-ce que réellement ces gens-là avaient à remplir des formulaires et est-ce que, dans leurs formulaires, on pouvait simuler certaines choses ou apporter certains renseignements qui n'étaient pas tout à fait complets? Est-ce qu'il y avait une analyse en profondeur de certains formulaires par rapport non pas au projet, mais aux gens qui étaient à l'intérieur du projet?

M. Boudreau (Yvon): Dans les informations... d'abord, on avait donné des instructions assez claires pour dire, effectivement, qu'il peut y avoir... parmi des personnes démunies, il n'y a pas seulement les prestataires de la sécurité du revenu, des gens qui ne sont pas prestataires puis qui sont dans des situations de relative pauvreté. Et puis on avait donné comme indications, comme balises, les seuils de faibles revenus de Statistique Canada, en disant: Si vous vous situez dans ces balises-là, ça apparaît correct, ça demeure compatible, à notre point de vue, avec les objectifs du Fonds de lutte. Et puis, parmi les formulaires qui ont été distribués aux organismes et qui devaient être retournés au ministère, il y avait des informations très précises qui étaient demandées sur le revenu familial, et ces informations-là devaient être vérifiées aux niveaux local et régional.

C'est sûr qu'on n'est pas à l'abri d'un cas isolé ou de quelques cas, où il a pu y avoir des cas d'exception, mais, de façon générale, on pense que ces critères-là et on a passablement d'assurance que ces critères-là ont été admis, on a même eu des récriminations à l'effet que ces critères-là étaient appliqués de façon parfois un peu trop rigoureuse, c'est-à-dire que des gens qui avaient un seuil de revenu familial de quelques centaines de dollars au-dessus du seuil de faibles revenus étaient refusés parce qu'on considérait qu'ils n'étaient pas pauvres. Donc, de façon générale, ces critères-là ont été bien appliqués et bien compris, mais évidemment il peut y avoir des cas d'exception. C'est sûr qu'on a beaucoup insisté auprès des comités d'approbation pour que l'esprit du Fonds de lutte s'applique.

Il y a peut-être une information qui est importante, c'est que, dans certains cas, ils avaient besoin d'engager, pour que le projet se réalise dans des conditions correctes, notamment au plan de l'encadrement, il était nécessaire d'embaucher, par exemple, un coordonnateur ou un formateur, et là ça requérait des formations ou des niveaux de compétence qui n'étaient pas nécessairement très présentes chez les personnes très démunies. Alors, là, le Fonds de lutte a pu financer, plus exceptionnellement, des postes d'encadrement ou de supervision des personnes qui n'étaient pas nécessairement parmi les plus démunies. Mais, de façon très, très, très majoritaire et très nettement dominante, c'est clair que la préoccupation de rejoindre des clientèles démunies était très présente. D'ailleurs, les chiffres que M. Deroy a cités dans son début de présentation à l'effet qu'un pourcentage très élevé de personnes étaient prestataires de la sécurité du revenu, et, parmi elles, des personnes qui étaient présentes à la sécurité du revenu pendant quatre ans et plus, ça souligne quand même ce souci de rejoindre les personnes démunies, ce qui était quand même l'objectif fondamental du Fonds.

Mme Vermette: Ma question, je vais la poser encore plus large. Comment se fait-il que beaucoup d'organismes communautaires, maintenant, ont très peur que, si le Fonds de lutte n'existe plus, beaucoup d'organismes communautaires disparaissent? Donc, effectivement, ça a dû soutenir, quelque part, des gens qui déjà avaient une certaine formation par rapport aux démunis, qui était l'objectif du Fonds de lutte.

M. Deroy (Alain): Ça a quand même permis, le Fonds de lutte, de financer des services additionnels dans des organismes communautaires pour lesquels ils n'auraient pas pu rendre service s'il n'y avait pas eu le Fonds pour les financer, ça, c'est sûr. Et donc, c'est surtout à cet égard-là que, moi, j'interpréterais ces craintes-là. Ça a permis de développer des services, là, en utilisant des prestataires de la sécurité du revenu pour leur donner une formation, ou un emploi, ou un tremplin pour l'emploi. Pour les formulaires...


Effets sur les organismes communautaires

M. Bédard: Il n'y a pas un mélange, à cet effet-là, entre la clientèle visée et les personnes recherchées? Dans le sens qu'un organisme communautaire qui donne des soins aux plus démunis, oui, effectivement, mais est-ce que finalement on s'est servi du Fonds pour financer les activités de ces organismes-là plus que les... Est-ce que c'est ça que vous...

M. Deroy (Alain): Bien, c'est un heureux mélange des deux. On finançait d'abord pour une formation et puis un emploi d'un individu, mais cet individu-là faisait quelque chose, il rendait un service. Et puis là les organismes communautaires ont développé leur offre de services, c'est sûr.

M. Bédard: C'était dans vos objectifs, ça?

M. Boudreau (Yvon): C'est-à-dire que, quand on intervient dans le secteur communautaire, surtout pour des fins de création d'emplois, on cherche deux objectifs: le premier, c'est que l'organisme puisse être en mesure éventuellement de pérenniser cet emploi-là. Ça, c'est possible, surtout dans les entreprises d'économie sociale. On place quelqu'un dans une entreprise, ça génère des revenus autonomes et, au bout d'un certain temps, l'entreprise d'économie sociale, qui est un organisme à but non lucratif, peut maintenir cette personne-là à son emploi après la durée de la subvention.

Le deuxième objectif, qui est beaucoup plus répandu, c'est de dire que l'individu acquiert au sein de l'organisme communautaire une expérience de travail qui est transférable. Et c'est pour ça qu'on a beaucoup insisté pour dire aux organismes: Dans les derniers temps de la subvention, vous devriez mettre l'individu en contact avec des employeurs potentiels, libérer pendant quelques heures par semaine l'individu pour qu'il cherche activement de l'emploi, etc., pour que réellement ce soit une activité tremplin. Mais c'est tout à fait vrai que l'organisme ne peut pas, compte tenu de ses modes de financement, protéger l'emploi. Mais, comme l'a dit M. Deroy, pendant qu'il est au sein de l'organisme, il fait des choses utiles. Donc, il contribue, même si c'est de façon indirecte, à élargir les services de l'organisme ou à bonifier ces services. Alors, c'est sûr que, le jour où une source de financement de plusieurs dizaines de millions de dollars peut se tarir, parce que le Fonds a une durée limitée sur le plan... Bon, les gens expriment des préoccupations quant à leur capacité de maintenir ce niveau de service là.

Mme Vermette: Est-ce que vous avez donné, je ne sais pas, moi, des consignes pour aller vérifier l'exactitude des renseignements? Est-ce que vous vous êtes aperçu qu'il pourrait y avoir, à ce moment-là, certaines problématiques au niveau des promoteurs par rapport aux gens qui travaillent à l'intérieur? Est-ce qu'on est allé vérifier ou on a fait un suivi, par rapport à certains résultats, là-dessus?

(11 h 50)

M. Deroy (Alain): Je pense qu'on pourrait déposer le formulaire qui nous permet de recueillir ce type d'information là, à la commission, et c'est essentiellement basé sur une déclaration de l'individu et du promoteur.

Mme Vermette: Oui, mais comment se faisait le contrôle par rapport à l'information reçue? Qui faisait le contrôle, comment se faisait le contrôle? Est-ce que l'ensemble des formulaires étaient bien remplis, est-ce que... Bon, parce que, en fait, c'est important aussi, c'était important.

M. Deroy (Alain): Bien, là, je pense qu'il y a un contrôle qui se faisait au comité d'approbation au niveau régional, puis, dans certains milieux, bien, les milieux sont assez étroits, donc il y a une forme de contrôle du...

Une voix: ...

M. Deroy (Alain): Oui, peut-être pas dans des grandes régions, mais dans les petites régions, là. Et, par la suite, ces formulaires-là sont transmis au central qui fait une certaine validation du contenu et demande des correctifs lorsque c'est requis.

Une voix: ...

Mme Vermette: Oui. Non, c'est ça, mais c'est parce qu'il y avait, sur certains comités de vérification, au niveau local ou même au niveau régional... souvent ce n'était pas tellement paritaire, je veux dire, il y avait beaucoup plus de communautaire qu'autre chose. Donc, finalement, ils étaient un petit peu comme juge et partie, jusqu'à un certain point, par rapport à certains projets, non?

M. Boudreau (Yvon): Bon, au niveau des régions, la composition était de trois représentants de l'administration publique et de deux représentants des secteurs communautaires, puis, à Montréal, sur les comités locaux, c'était deux, deux, donc deux représentants dans chacune des catégories. Donc, il n'y a pas monopolisation des groupes, mais c'est clair, et c'était souhaité dès le départ, qu'il y avait une implication très grande des secteurs communautaires et qu'ils ont joué un rôle actif dans la promotion des projets, dans la présentation des projets et dans la conduite des projets. Et, globalement, le résultat est quand même très, très satisfaisant.

Le Président (M. Kelley): Oui, mais, si je peux poser un complément de question. Comment est-ce qu'on les choisit, ces représentants communautaires? Parce que je trouve qu'il y a pas mal de politique également entre les groupes communautaires, si je peux dire ça comme ça. Alors, comment est-ce qu'on a décidé les deux représentants sur l'île de Montréal, ou dans l'Ouest-de-l'Île de Montréal, ou dans la Montérégie, comment est-ce qu'on a arrêté le choix des membres des comités?

M. Boudreau (Yvon): Je me rappelle qu'il y a eu une consultation auprès – en tout cas pour les représentants des régions – d'un certain nombre de regroupements d'organismes. Les gens n'assistaient pas là à titre de représentants d'une coalition d'organismes communautaires, ils étaient là comme des représentants assez représentatifs, là, de ce milieu-là, mais ils étaient là comme des individus. Mais il y a eu une consultation, ils étaient nommés par la ministre, au début de 1997, mais après consultation de...

Une voix: ...

M. Boudreau (Yvon): Oui?

M. Gautrin: C'est un document public...

M. Boudreau (Yvon): Je crois qu'ils sont...

Une voix: Dans les débats... la liste des membres des comités.

M. Boudreau (Yvon): Non, non, ils ne sont pas là.

M. Gautrin: La liste des membres des comités est dans le rapport?

M. Boudreau (Yvon): Oui, oui, on peut vous transmettre cette information-là.

Le Président (M. Kelley): Oui, merci beaucoup. La prochaine question, c'est Mme la députée de Vanier.

Mme Barbeau: Bien, j'en avais quelques-unes qui ont été posées, mais ça serait plus une question de compréhension. J'imagine que ça vient de chez vous, les tableaux, là?

Des voix: Oui.

Mme Barbeau: Il y en a dans toutes les pages, mais, comme je ne vois pas les numéros de pages... Il y a une date de la décision, il y a un nom d'un organisme, après ça, il y a un numéro de projet, description, nombre de postes, nombre de participants, le montant, puis là il y a une lettre, puis je ne sais pas ce que ça veut dire. C'est juste pour bien comprendre le tableau.

Une voix: Bon, Paul peut...

M. Boudreau (Yvon): Paul Gagnon va répondre.

M. Gagnon (Paul): Bien, à la fin, la lettre i, c'est le projet initial, la lettre a, c'est lorsqu'il y a eu un addenda au projet, une extension du projet, et la...

Mme Barbeau: La r, je pense.

M. Gagnon (Paul): ...lettre r, c'est une reconduction, la deuxième année, par exemple, du projet.

Mme Barbeau: Pourquoi, des fois, il y a des noms de projets puis on n'a pas la description du projet?

M. Gagnon (Paul): Oh! c'est parce qu'il y a certains projets qui sont assez vieux – c'est possible que ça soit ça – pour lesquels on n'avait pas encore toute la mécanique de cueillette d'information aussi précise qu'on a maintenant, là.

Mme Barbeau: Puis le nombre de postes, nombre de participants, pourquoi il y a beaucoup de zéros puis juste...

M. Gagnon (Paul): Bien, le nombre de postes, c'est des postes de création d'emplois, et les participants, c'est soit de la formation ou de l'insertion. Donc, il peut y en avoir à des endroits où il y a des... de la création d'emplois, il n'y a pas nécessairement de participants, parce que c'est de la formation.

Mme Barbeau: O.K. Ce n'est pas le même...

M. Gagnon (Paul): Pas la même nature de projets.

Mme Barbeau: O.K. Puis, bon, je pense que c'est tout, là. Quand il y a une date, puis il n'y a rien d'écrit, puis il y a un montant, c'est quoi?

M. Gagnon (Paul): Quand il y a une date puis il n'y a rien d'écrit, allez jusqu'au bout, c'est souvent un addenda.

Mme Barbeau: À celui d'avant?

M. Gagnon (Paul): Oui.

Mme Barbeau: O.K. C'est comme la suite, là. C'était juste pour bien comprendre les tableaux. Les autres questions ont été posées, alors...

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup. M. le député de Verdun.


Complémentarité du Fonds et des mesures actives en emploi

M. Gautrin: Je vais revenir sur un document, je ne sais si vous l'avez. C'est des documents qui viennent de chez vous et qui sont relativement très bien faits: un qui vient du ministère de la Solidarité sociale, Direction des rapports d'étape, janvier 1979, et puis j'en ai un autre qui est une étude, qui me pose des problèmes, sur le Fonds de lutte. Et je veux soulever ces deux problèmes-là. Il s'appelle, le document, attendez, je vais avoir son titre, c'est Évaluation format type des processus de gestion du Fonds de lutte contre la pauvreté – Tableau synthèse . Alors, dans un document qui est le document du rapport d'étape janvier 1999, je vais revenir toujours sur la préoccupation qu'on a sur la complémentarité... Et, dans la conclusion, vous dites, vous soulevez les questions que vous devez vous poser et quels exemples de questions qui devront guider la réflexion à venir sur les pistes de solution. Et une des solutions, vous dites: «Quelle complémentarité le Fonds de lutte doit-il avoir avec les mesures actives, et en quoi se distingue-t-il de ces mesures actives?» Et ça, c'est toute la recherche que, nous, on a essayé de faire avec vous.

Moi, je ne suis pas convaincu – je vous le dis très franchement – que vous avez vraiment assuré de la complémentarité entre ce que vous faites puis ce qui existe déjà. Je ne voudrais pas rentrer sur les détails, etc. Et vous soulevez cette piste de réflexion, et je trouve tout à fait valable que vous la souleviez. Je voudrais vous poser la question. Ça, c'était en janvier; j'imagine que vous avez réfléchi, depuis janvier 1999 jusqu'à novembre, que nous sommes aujourd'hui. Où en est votre réflexion quant aux mécanismes de vous assurer, sur la complémentarité entre ce que... Je vous lis votre phrase: «Quelle complémentarité le Fonds de lutte doit-avoir entre les mesures actives, et en quoi se distingue-t-il?» Où en est votre réflexion là-dessus, entre janvier et aujourd'hui?

M. Deroy (Alain): Je pense, il va falloir, s'il y a eu une réflexion plus précise, qu'on le fasse dans le cadre de la reconduction du Fonds et puis voir quelles suites on va y donner.

M. Gautrin: Sachez que, de notre côté, nous sommes extrêmement intéressés à vous assurer... Parce que, comme je vous l'ai dit bien des fois, je ne suis pas ici pour faire de la chasse aux sorcières. Je pense qu'il y a eu lacune à ce niveau-là par certains endroits. Vous permettez?

M. Boudreau (Yvon): Non, non, non.

M. Gautrin: On peut diverger d'opinions là-dedans. Je pense que, pour le futur, vous devez réellement insister là-dessus.


Taux de réintégration des participants au marché du travail

J'ai deux autres questions, M. le Président, qui viennent sur un autre document qui a été un document de recherche, qui est dans le même cahier pour nous, et qui me pose des problèmes. Il y a un sondage qui a été fait auprès des bénéficiaires du Fonds, sondage qui est bien fait, qui a un échantillon... la taille de l'échantillon est assez valable pour justifier les réponses qui sont là. Et, parmi ce sondage-là, il y a une question qui est posée et qui m'inquiète. On parle évidemment des programmes de formation, etc., et on dit... Il y a, l'échantillon, 1 274 personnes qui ont répondu. C'est un échantillon qui est relativement suffisamment valable pour justifier une réponse: «Vous a-t-on parlé de possibilité d'emploi à la suite de votre formation?» Alors, vous allez me dire: C'est bon, il y a 76 % à qui on a parlé de possibilité d'emploi à la fin de la formation. Mais, les autres 24 %, ça veut dire qu'on ne leur a pas parlé qu'ils pouvaient avoir une possibilité d'emploi avec la formation. Moi, ça m'inquiète.

(12 heures)

Je m'excuse de vous dire que ça m'inquiète. Ce qui m'inquiète, c'est que, dans un cas comme le Fonds de lutte, où justement on est à l'heure de dire qu'on essaie de donner une formation en vue d'améliorer l'accès au marché du travail, il y a 76 %, sur un échantillon de 1 274 – faites attention, c'est un échantillon qui est très représentatif – qui disent: Oui, on m'a parlé que ma formation pouvait déboucher sur un emploi. Vous allez me dire: C'est 76 %. Bon Dieu! il y en a 24 % à qui on n'a même pas parlé qu'ils avaient une chance de pouvoir avoir accès au marché du travail avec leur formation. C'est ces 24 % là qui m'inquiètent. Je vous pose la question: Est-ce que vous ne trouvez pas inquiétant de voir 24 % à qui on donne une formation, mais on n'apporte pas d'entrée sur le marché du travail?

Le Président (M. Kelley): Mme Morin.

Mme Morin (Ghislaine): Bien, si vous permettez, quand vous dites que ça vous inquiète et qu'on voit ce genre de résultat là, ça démontre finalement que, même s'il n'y avait pas d'indicateur de résultats ou de cible de résultats d'établie, il y avait une très grande préoccupation de suivre les résultats. Et on peut mesurer de façon rigoureuse les résultats sans que ça soit établi.

M. Gautrin: Je suis d'accord avec vous.

Mme Morin (Ghislaine): Alors, tous les documents que vous avez entre les mains...

M. Gautrin: Qui est très bien fait.

Mme Morin (Ghislaine): ...ils sont dans notre stratégie d'évaluation. C'est qu'on avait à la fois des évaluations sur les processus... L'exemple auquel vous avez...

M. Gautrin: Qu'on a soulevé avant.

Mme Morin (Ghislaine): ...référé juste avant, c'était au niveau des processus, puis ici c'est au niveau des résultats. Et on a fait en sorte qu'il y ait un lien très, très étroit entre tous les travaux d'évaluation puis le comité aviseur. Et tous ces documents-là ont été transmis au fur et à mesure pour que justement il y ait des interrogations, qu'on pose les bonnes interrogations puis qu'il y ait, si nécessaire, des actions qui soient entreprises.

Quand vous dites qu'il y en a, bon, un certain nombre à la fin de la formation... Parce que c'est sûr qu'il faut qu'il y ait, à un moment donné, un lien entre... On a une formation, mais, par la suite, il faut qu'il y ait un lien avec le marché du travail. La même chose quand c'est une subvention salariale qui n'a pas un objectif de création d'emploi à l'intérieur même de l'entreprise, mais que ce soit un passage. Il faut aussi qu'il y ait des passerelles, il faut qu'on facilite ça. Et c'est ce genre d'information là qui permet d'apporter des correctifs tout au long.

M. Gautrin: Et je ne conteste pas, Mme Morin, la qualité de l'information que vous donnez aux gestionnaires actuellement avec ça. Ma question n'est plus maintenant au niveau de la gestion du Fonds, c'est au niveau de ce que... a posteriori, quand je regarde ce qu'on a financé, qui est... Nos programmes de formation sont essentiellement pour de la réinsertion de personnes démunies, et quand je vois que trois personnes sur quatre, on ne leur a pas parlé de lien entre la formation et le marché du travail, ça me permet de me poser quelques questions. Puis j'imagine, M. Deroy, que vous devriez vous poser aussi quelques questions dans ce sens-là. S'il n'y a pas de lien entre la formation puis le marché du travail, je me pose quelques questions.

M. Deroy (Alain): Moi, je pense que ce que Ghislaine vient de dire, là...

M. Gautrin: Mais c'est bon. C'est bon de l'avoir.

M. Deroy (Alain): Oui. C'est qu'il y a eu quand même un souci, vraiment, d'évaluation. Puis, moi, j'ai quand même vogué dans quelques ministères, et je pense qu'au ministère de la Solidarité il y a vraiment une forte tendance dans l'évaluation de programmes. Et, pour le Fonds, il y a un cadre d'évaluation qu'on pourrait vous présenter, qui a été déposé au comité aviseur puis discuté. Donc, qu'on ait ces informations-là, je pense que c'est très bon.

M. Gautrin: C'est bon, mais il faut corriger.

M. Deroy (Alain): C'est sûr que, maintenant, les informations révèlent des choses, et puis il faut les traiter. Puis, à ma connaissance, ça, ça a été discuté au comité aviseur, et je ne sais pas si c'est à partir de ce moment-là qu'il y a eu des instructions très claires. Il y a eu des notes qui ont été envoyées, là, qu'on pourrait même vous déposer, disant que la formation, l'accompagnement et puis surtout, en bout de piste, comme disait Yvon tantôt, dans les derniers mois, de s'assurer qu'on a accompagné l'individu jusqu'à la fin. Il y a eu des instructions très claires qui ont été envoyées, puis c'est à partir de la réflexion du comité aviseur puis de ces données-là qui ont été...

M. Gautrin: Vous pouvez déposer ces éléments-là?

M. Deroy (Alain): Oui, on pourrait. La note qui accentue ça.


Niveau de scolarité des participants

M. Gautrin: Un autre questionnement que j'ai, si vous me permettez, et là, si les chiffres sont exacts, ils me posent des problèmes, c'est... Regardez, il y a une annexe pour les gens qui ont... Portrait des personnes participant au Fonds de lutte contre la pauvreté. Et je me pose la question sérieusement. Je sais que ce n'est pas directement à vous, mais je me pose la question, comme société. Alors, je fais référence à une annexe, à un tableau qui s'appelle Tableau des caractéristiques des personnes participant au Fonds de lutte contre la pauvreté par type d'activités . Et je ne vais pas regarder leur âge, je vais me concentrer sur la formation des gens. Et vous regardez, sur la formation des gens, les gens qui ont une... Le tableau que j'avais, attendez, qui était...

Une voix: C'est la dernière page?

Le Président (M. Kelley): Vous le montrez, peut-être? Pour la gang à droite, c'est la page 8.

M. Gautrin: Excusez-moi. Non, non. C'était l'annexe A.

Le Président (M. Kelley): ...le bon document.

M. Gautrin: Si vous me permettez, M. le Président, c'est: Sondage auprès des personnes ayant participé au Fonds de lutte contre la pauvreté par la réinsertion à l'emploi. Données préliminaires, annexe A. Dans le document que nous avons en liste, c'est l'annexe A. Ça marche?

Regardez l'annexe A. Donc, c'est un sondage qui est fait, un sondage assez important aussi, avec un nombre de participants, et je dois dire à Mme Morin, qui est... fait un échantillonnage correct du nombre, donc sondage qui vous donne un résultat significatif. Et regardez avec moi. Vous trouvez que, très justement, des gens qui ont... Je prends la scolarité: 131 personnes qui ont participé avaient une formation primaire simplement; 1 353 une formation secondaire sans diplôme, donc tout à fait justifié qu'il y ait des compléments de formation.

Mais regardez ce qui m'inquiète. J'ai 496 personnes qui participent au programme de formation qui sont d'une formation universitaire avec diplôme. J'en ai 443 qui ont une formation collégiale avec diplôme. Alors, je me pose des questions ici, et ça m'interpelle, moi, comme homme politique, et je n'en ferai pas de partisanerie ici. C'est qu'on se rend compte que, lorsqu'on met un programme de lutte à la pauvreté, je comprends bien que les gens qui n'ont pas de formation, qu'une formation primaire simplement ou une formation secondaire sans diplôme – c'est-à-dire ceux qui ont décroché au secondaire 2 ou au secondaire 3 – soient une partie importante, mais que le deuxième groupe le plus important, ce soient des gens qui ont une formation collégiale, donc qui ont un DEC, qui ont déjà le diplôme de formation collégiale, ou des personnes qui ont un diplôme universitaire, et que ça, ce soit la deuxième cohorte la plus importante que vous avez traitée dans vos programmes de formation, ça m'interroge et ça m'interpelle. Je ne sais pas si vous pouvez m'expliquer ça. Réellement, je suis rendu maintenant à ces chiffres-là. Quand je les ai vus, ils m'ont sauté à la face – excusez le terme – et je me dis: Bon Dieu! Où on en est?

Lorsqu'on fait un fonds de lutte à la pauvreté, on met sur pied un programme de formation, et 1 353 plus 151, ça, c'est des gens qui n'ont pas de diplôme secondaire, je comprends, mais j'ai 1 121 personnes qui ont participé à vos programmes de formation et qui ont déjà un DEC ou qui ont déjà un diplôme universitaire. Je me dis: Ouais, il y a comme un problème quelque part. Je ne sais pas si vous partagez mon point de vue. Et je sais bien que ce n'est pas une critique que je vous envoie, là, mais c'est réellement un échange d'informations qu'on a entre nous ici. Quand c'est rendu que, dans vos programmes de formation, il y en a 40 %, à peu près, qui sont des gens qui avaient déjà un DEC ou déjà un diplôme universitaire, ça m'interpelle terriblement, moi.

Le Président (M. Kelley): Mme Morin.

Mme Morin (Ghislaine): Je veux juste d'abord vous dire que, par rapport aux nombres, il faudrait prendre les nombres en fonction de la colonne «formation» et non pas «universitaires avec diplôme», pas 496 mais 269. Ça, c'est juste une petite précision.

M. Gautrin: Alors, je compare 269 à 423, si vous voulez. Ça marche.

Mme Morin (Ghislaine): Ceci dit, est-ce que... Ça fait un petit peu moins...

M. Gautrin: Remarquez, avec tout le respect que je vous dois, c'est vrai, ça baisse de 169, mais, de la même manière, 1 353 baisse à 423.

Mme Morin (Ghislaine): C'est ça.

M. Gautrin: Donc, le rapport relatif, en quelque sorte, des gens qui n'ont pas fini leur secondaire 5... j'ai quand même 372 personnes qui ont un diplôme DEC ou un diplôme universitaire quand elles participent à vos programmes de formation. Vous me dites: C'est la réalité de notre société. On a comme un problème quelque part.

Mme Morin (Ghislaine): Mais, ce qu'on peut voir, c'est que – parce qu'on le voit aussi lorsqu'on fait des études de clientèles à la sécurité du revenu – il y a beaucoup de diplômes universitaires qui... Bien, les gens qui détiennent ces diplômes-là ont des difficultés à se trouver un emploi, à s'insérer sur le marché du travail. Et ça, on en a plusieurs. Si on fait juste penser au domaine des arts, c'est des secteurs où l'insertion est très, très difficile. Alors, nous autres, quand on a vu ces données-là, ce n'est pas surprenant. Ça peut être inquiétant, mais ce n'est pas surprenant, par rapport à ce qu'on observe en fonction de ce type de clientèle là.

(12 h 10)

M. Gautrin: Non, madame, je comprends bien. Je comprends bien que, vous, ça ne vous surprend pas, parce que vous vivez régulièrement avec ces clientèles-là. Remarquez que, nous, parlementaires qui siégeons aujourd'hui à la commission de l'administration publique mais qui siégeons aussi dans d'autres commissions et d'autres états, on se pose la question sur notre ministère de l'Éducation. Et ces chiffres-là, si j'avais une suggestion à vous faire – ou je pourrais le suggérer au président – c'est de les envoyer au ministre de l'Éducation.

Et, sans vouloir faire de partisanerie ici, parce que je ne crois pas que ça ait rien à voir avec le parti qui est au pouvoir, et je pense que, lorsque nous étions au pouvoir, les chiffres étaient de même nature, mais il y a un problème de se questionner actuellement... lorsque je vois que, dans les mesures de formation d'un fonds de lutte à la pauvreté, à peu près 40 % des gens qui vont chercher la formation ont déjà un diplôme collégial ou un diplôme universitaire, ça m'interpelle, moi, terriblement. Ça m'interpelle terriblement.

Et je suggérerais, M. le Président... Je ne serai malheureusement pas là ce soir, à la fin de nos débats, mais que ça soit quelque chose qu'au minimum vous nous confirmiez. Autrement dit, je vous pose ma question, c'est la suivante. Vous me confirmez que, dans les programmes, les gens qui sont dans des situations de pauvreté, qui ont besoin de complément de formation par le Fonds de lutte, il y en avait... je n'ai pas calculé le pourcentage exact... ce pourcentage-là, qui est de l'ordre de 30 % ou 35 % à 40 % qui avaient déjà un diplôme universitaire ou déjà un diplôme collégial.

Le Président (M. Kelley): M. Deroy...

M. Gautrin: C'est interpellant, comme société. Je m'excuse de vous le dire, c'est terriblement interpellant.

Le Président (M. Kelley): M. Deroy.

M. Deroy (Alain): Oui, mais je pense qu'il faudrait aussi le...

Mme Dionne-Marsolais: Je peux faire un commentaire au député là-dessus, peut-être pour ajouter aussi à la réflexion? Si vous faites des comparaisons croisées, vous voyez aussi qu'il y a l'autre... Dans le type de ménages qui sont concernés par ça, là, la majorité, ce sont des familles monoparentales et des couples avec enfants. Donc, il faut aussi tenir compte de ça, je crois que ça peut être une des explications. Parce que, malgré ça... Et regardez, encore là, les plages d'âges et faites le recoupement – je ne sais pas si ça a été fait dans le sondage; des fois, quand on fait nos sondages, il y a toujours des analyses croisées qu'on demande, là – et on constaterait que la plage d'âges, c'est vraiment toujours, M. le député, je pense, les gens qui ont des enfants et qui sont entre 30 et 40 ans. C'est là, dans la société, où c'est difficile. C'est un fait. Ce n'est pas tant par rapport à l'éducation, parce qu'il y a des...

M. Gautrin: Mais c'est une variable aussi.

Mme Dionne-Marsolais: Oui, mais il y a des spécialités, au niveau de l'éducation, qu'il faut regarder. Il y a toute une série de formations universitaires ou collégiales qui ne sont pas arrimées nécessairement avec les besoins du marché.

M. Gautrin: Alors, c'est peut-être...

Le Président (M. Kelley): Je pense que, sur ça...

M. Gautrin: ...la question qu'on se pose à ce moment-là, Mme la députée, c'est essentiellement la question que collectivement on a à se poser: Jusqu'à quel point ne faut-il pas un meilleur arrimage entre nos programmes de formation...

Le Président (M. Kelley): Je pense que la question est maintenant posée...

M. Gautrin: Excusez-moi.

Le Président (M. Kelley): ...on va laisser le ministère de la Solidarité sociale...

Mme Dionne-Marsolais: Laisser répondre.

Le Président (M. Kelley): ...répondre à la question.

M. Deroy (Alain): Non, je pense... les questions que vous posez sont fort justes. Je me souviens même qu'on a déposé ça au comité aviseur, une question analogue. Les gens étaient troublés par ces données-là. Il faut voir aussi qu'à la sécurité du revenu on a cette clientèle-là, hein. Je serais curieux de voir le pourcentage. On me dit que c'est moindre, mais vous avez des diplômes universitaires à la sécurité du revenu, et collégiaux aussi. Alors, il faut voir dans quelle mesure la sécurité du revenu, par rapport à ça, on peut voir un parallèle. Mais vous...

M. Gautrin: Ça arrive occasionnellement, je le comprends facilement. Mais que le poids, relativement, si je compare le 423 de gens qui n'ont pas de diplôme secondaire par rapport à 300 qui ont déjà un diplôme collégial et universitaire, le rapport entre les deux poids, c'est ça qui... Qu'il y ait des gens qui y soient occasionnellement pour des programmes de formation, ça, je le comprends.

Le Président (M. Kelley): M. Boudreau.

M. Boudreau (Yvon): Il faut apporter une précision, cependant, qui, en tout cas, peut peut-être expliquer le ratio dont vous parlez. Les interventions qu'on a privilégiées en matière de formations soutenues par le Fonds de lutte, justement pour éviter le problème de substitution par rapport aux programmes réguliers, c'étaient des formations adaptées à des groupes particuliers. Donc, ce genre d'intervention qu'on a privilégié, ça s'applique plus à des gens qui ont une certaine formation de base. Et le cas que je donnais précédemment, des ingénieurs roumains qui ont une formation de base très correcte... Non, non, je comprends, mais...

M. Gautrin: Ils ne sont pas comptés là-dedans. Parce qu'ils sont à part dans la statistique, je ne les ai pas cités.

M. Boudreau (Yvon): Parce que les gens qui étaient au primaire et au secondaire, ils avaient accès plus facilement ou en plus grand nombre aux programmes réguliers du ministère de l'Éducation ou aux programmes soutenus par le ministère de la Sécurité du revenu. Ça peut expliquer le biais.

M. Gautrin: Je comprends, mais...

Le Président (M. Kelley): M. Breton, avez-vous quelque chose à ajouter? Après ça, je vais passer la parole à Mme la députée de Rosemont.

M. Breton (Guy): Effectivement, j'apporterai de l'eau au moulin en vous rappelant que, dans le rapport tome 2 de l'an dernier pour 1998, il y avait un chapitre qui portait justement sur la formation et dans lequel on voyait que quelquefois l'absence de contingentement ou une certaine facilité faisait qu'on distribuait des diplômes dans des environnements où il n'y a pas de marché, et donc on retrouve peut-être ces mêmes personnes maintenant ici.

Le Président (M. Kelley): Mme la députée.

Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. Je pense que le constat que fait le député de Verdun est intéressant, et ce qu'il pose comme question, c'est: Souvent, la pauvreté, c'est une question de marginalité, et c'est souvent aussi concentré dans certains secteurs géographiques, dans certaines régions géographiques ou certains secteurs d'une ville.


Exemples de projets réussis

Je voudrais vous poser une question qui est plus générale. Dans tous les projets que vous avez eus et qui ont été autorisés, quels sont, disons, les deux projets qui vous apparaissent les plus intéressants, par rapport au jugement que vous vous êtes fait sur les objectifs que devrait poursuivre ce Fonds-là? De quoi êtes-vous le plus fier?

M. Boudreau (Yvon): Un projet fétiche! Ha, ha, ha!

Mme Dionne-Marsolais: Non, non. Pas fétiche, mais quel est le projet qui vous apparaît vraiment... un ou deux... Je dis un ou deux parce qu'il y en a sûrement en milieu urbain puis sûrement en milieu rural ou plus régional. Non, rural et urbain, là. Un projet qui vous semble être: c'est à ça que ça doit servir, et ça a permis tellement une belle réussite de réinsertion sociale. Ne donne pas d'idées, là!

M. Boudreau (Yvon): Moi, je vous dirais – puis c'est très subjectif, évidemment – un des projets qui m'apparaissaient les plus intéressants, c'est celui qu'on a conclu avec le CAMO, le Comité d'adaptation de la main-d'oeuvre, pour les personnes immigrantes. Ça consistait à faire affaire avec un organisme qui était en liaison avec beaucoup d'organismes qui desservaient cette clientèle-là et à organiser des stages dans les entreprises pour mettre en contact les personnes immigrantes avec la réalité du marché du travail québécois. Et on sait très bien que c'est la barrière principale pour ces gens-là, pour l'intégration.

Et le projet a été conclu. On l'a d'ailleurs reconduit parce que c'était extrêmement valable. Donc, on a réussi un maillage là qui est fort intéressant, et on a rejoint des clientèles qui parfois sont très scolarisées mais qui vivent un phénomène d'exclusion extraordinaire du fait qu'elles n'ont pas accès au marché du travail. Et ça, pour moi, c'est un excellent exemple de ce que le Fonds de lutte a pu débloquer comme horizon qui était bouché jusqu'alors. Puis c'est un très bel exemple.

L'autre, je...

M. Deroy (Alain): Ça a donné... C'était 225 stages pour une durée d'un an, pour un montant de 1 100 000 $, et on a eu un taux de rétention en emploi de 77 %. Alors, c'est intéressant.

Mme Dionne-Marsolais: Ça, c'est bien, ça.

M. Boudreau (Yvon): Je dirais la même chose avec – puis j'ai l'air d'avoir une préférence pour cette clientèle-là – les formations adaptées qu'on a développées pour les immigrants, c'est aussi une façon remarquable de lutter contre la pauvreté. Ces gens-là étaient hautement qualifiés, ils vivaient à l'aide sociale, et on en a fait, par exemple, des informaticiens. Puis il y a eu un maillage extraordinaire avec les entreprises; les entreprises ont collaboré avec les institutions d'enseignement à la sélection préalable des candidats, et puis un pourcentage extrêmement élevé de personnes ont obtenu des emplois à des salaires de 40 000 $, 45 000 $. Alors, ça, c'est vraiment une intervention extrêmement utile.

(12 h 20)

Mme Dionne-Marsolais: Forte valeur ajoutée.

M. Boudreau (Yvon): Forte valeur ajoutée, effectivement.

Mme Dionne-Marsolais: Et, en milieu rural, en avez-vous un dont vous pouvez nous donner un exemple?

M. Boudreau (Yvon): Oui, celui avec la Coopérative forestière du Québec.

Mme Dionne-Marsolais: Ah bon!

M. Boudreau (Yvon): Pendant des années, on a eu des programmes de subventions pour soutenir des emplois dans le domaine sylvicole, puis on intervenait pendant un an. Et, généralement, la formation acquise au terme d'une année est utile, mais elle n'est pas suffisante pour faire de ces gens-là des véritables travailleurs sylvicoles. Alors, on a conclu un contrat avec la Coopérative forestière pour dire: Les personnes, au terme de cette première expérience de travail en milieu forestier – qui est un travail assez dur, comme vous le savez – on va leur faire faire une deuxième année, mais là dans un champ d'application qui est plus adapté aux réalités réelles – excusez le pléonasme – de ce marché du travail...

Mme Dionne-Marsolais: On veut être cru.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Boudreau (Yvon): ...c'est-à-dire du marché du travail... Par exemple, les gens travaillaient pendant la deuxième année à forfait au lieu de travailler à l'heure parce que c'est le régime qui s'applique. Et, là aussi, on a eu un taux de succès remarquable. Après cette deuxième année, les gens étaient devenus, à plus de 70 %, des travailleurs réguliers de la Coopérative, membres de la Coopérative, et ils n'étaient plus des assistés sociaux comme ils l'étaient deux ans avant. Ça, c'est le genre de...

M. Deroy (Alain): C'est un projet important, c'est 185 travailleurs sur 270; il y a eu un taux de rétention, c'est 69 %. C'est un projet d'au-delà de 7 000 000 $.


Imputabilité des directeurs régionaux

Mme Dionne-Marsolais: Bon, ça, en fait, c'est très encourageant.

Dans ce même esprit, vous avez mentionné effectivement deux – ce que j'ai saisi au vol – qualités importantes de vos gestionnaires, j'imagine que vous les exigez d'eux: le jugement et l'implication dans le milieu. Et j'attire votre attention sur un commentaire que le Vérificateur général a fait, et qui n'est pas clairement présent dans le communiqué du ministre, mais qui est là indirectement, quand il a dit qu'il voulait baser l'initiative sur une gestion régionalisée, donc responsabiliser pas mal plus les gestionnaires sur le terrain. Le Vérificateur général avait soulevé quelque chose qui, à mon avis, est assez important, puis j'aimerais ça vous entendre sur ce que vous avez amélioré. Si c'est le cas, comment vous l'avez fait? Il disait, concernant la surveillance des projets par le gestionnaire – donc, j'en déduis que c'est l'homme ou la femme qui est sur le terrain – «le gestionnaire ne se soucie pas toujours de son rôle de surveillance». Il disait plus loin: «Des postes sont comblés, à l'occasion, par des personnes qui ne sont pas démunies.» Ça, tout est relatif. Ça, c'est le volet que j'appelle jugement, puis là on parle de vos immigrants qualifiés.

C'est peut-être un exemple, mais, dans le contexte du rôle de surveillance, pourquoi je soulève ce point-là? Parce que le volet implication dans le milieu, du geste que l'on pose quand on travaille à la réinsertion de ces gens... Et je sais que c'est très difficile; la responsabilité des fonctionnaires du ministère et des gestionnaires et de vous tous est excessivement difficile parce que vous travaillez dans des secteurs où il y a énormément de préjugés, à commencer par ceux que nous avons, bien humblement, devant vous. Mais, néanmoins, la responsabilité du gestionnaire par rapport au mandat que l'État lui donne, c'est de s'assurer que les programmes pour lesquels il reçoit du financement produisent les résultats attendus. Qu'est-ce que vous avez mis en place depuis ce diagnostic-là pour vous assurer que le gestionnaire, effectivement, non seulement appliquait ses qualités de jugement – vous pouvez vous en assurer – mais, en plus, assurait la surveillance de ces projets et rendait compte à quelqu'un là-dessus? Parce que, pour moi, c'est de la responsabilité de l'administration du ministère, ça.

Le Président (M. Kelley): Considérez ça comme la dernière question pour l'avant-midi.

M. Deroy (Alain): Oui, vous posez une grande question.

Mme Dionne-Marsolais: Voulez-vous y penser, puis on reprendra cet après-midi? Moi, ça ne me fait rien si vous voulez y réfléchir.

M. Deroy (Alain): On pourrait reprendre tantôt, mais je voulais simplement vous dire que la question de la reddition de comptes, au niveau des directeurs régionaux, pour mon équipe et le ministère, c'est une grande préoccupation, parce que, bon, c'est une réflexion un peu plus générale au niveau de la réforme de l'administration publique. Je pense qu'il y a une réflexion à accentuer de ce côté-là, parce que les modes de reddition de comptes ne sont pas nécessairement évidents. C'est sûr qu'ils rendent compte au sous-ministre, à leur sous-ministre associé, mais je pense qu'il y a un mode de reddition de comptes d'un directeur régional dans sa communauté à instaurer, puis je pense qu'il y a une réflexion à faire. Et je sais que le ministre est très préoccupé de cette question-là, puis je pense que c'est une question qu'il va falloir débattre.

Maintenant, pour le ministère, au niveau du suivi, on l'a dit tantôt, on a demandé aux directeurs régionaux de se compromettre par écrit sur leur stratégie de suivi. On a dit tantôt que c'était au mois de juin ou juillet qu'ils avaient déposé leur... Donc, c'est sûr qu'au courant de l'année, sur un mode à convenir, ils vont devoir maintenant définir ce qu'ils ont fait puis faire état de cette situation.

Vous parliez de l'implication dans le communautaire. Le ministère est un grand ministère...

Mme Dionne-Marsolais: Dans le quartier.

M. Deroy (Alain): Dans le quartier. Il y a deux niveaux. C'est un ministère à fort déploiement, chez nous. C'est, je pense, le plus grand ministère décentralisé qu'il y a. Il y a deux zones au niveau d'Emploi-Québec. Avec l'élaboration du plan d'action d'Emploi-Québec régional, je pense qu'il y a une implication, déjà, dans la loi puis dans les moeurs. Au niveau de la Sécurité du revenu, généralement, je pense qu'il y a eu des belles expériences d'implication dans le quartier du directeur de la Sécurité du revenu. Avec le projet du ministère de développer l'offre de services au niveau de l'action communautaire puis de l'aide à la sécurité du revenu, il va y avoir des attentes bien spécifiques au niveau des gestionnaires de la Sécurité du revenu pour s'impliquer davantage. Mais, déjà, moi, j'ai la conviction que les gens de la Sécurité du revenu sont déjà très présents dans leur milieu. Alors, essentiellement, c'est ça.

Le Président (M. Kelley): Je pense que, ça, c'est un sujet qui va nous amener sur plusieurs questions complémentaires. Alors, sur ça, on va revenir, mais je vais suspendre nos travaux à ce moment jusqu'à la fin de la période des affaires courantes, qui est vers 15 h 15, règle générale, 19 fois sur 20. Merci beaucoup.

(Suspension de la séance à 12 h 28)

(Reprise à 15 h 21)

Le Président (M. Kelley): À la demande du ministre de la Solidarité sociale et dans le contexte de la situation dans la Gaspésie et l'usine de Gaspésia, j'ai reçu une demande de suspendre nos travaux pour cet après-midi, pour libérer, entre autres, le sous-ministre et les autres membres de son équipe pour travailler ce dossier fort important pour la Gaspésie. Je juge la demande tout à fait recevable.

Alors, je vais suspendre ou ajourner pour aujourd'hui en disant qu'on va compléter notre séance d'imputabilité le 16 novembre prochain, de 9 h 30 à 12 h 30, y compris une demi-heure pour la séance de travail des membres de la commission. Merci à la fois aux membres, à l'équipe du Vérificateur général, pour la disponibilité cet après-midi, mais c'est des choses qui arrivent, des fois, dans la vie. Merci beaucoup, et au 16 novembre prochain, merci.

(Fin de la séance à 15 h 22)


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