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Version finale

34e législature, 2e session
(19 mars 1992 au 10 mars 1994)

Le mercredi 10 mars 1993 - Vol. 32 N° 33

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Consultation générale sur les thérapies alternatives


Journal des débats

 

(Neuf heures treize minutes)

Le Président (M. Joly): Bonjour! Il me fait plaisir de vous souhaiter la bienvenue à cette commission. Je vous rappelle que la commission des affaires sociales se réunit afin de procéder à une consultation générale et de tenir des auditions publiques sur les thérapies alternatives, et ce, afin d'examiner la reconnaissance professionnelle de certains thérapeutes alternatifs et les mécanismes de reconnaissance des thérapeutes non éligibles à un statut professionnel au sens de la loi; l'information au public; la contribution du réseau de la santé et des services sociaux pour qu'il favorise la liberté des choix thérapeutiques.

Mme la secrétaire, avons-nous des remplacements?

La Secrétaire: Non, M. le Président.

Le Président (M. Joly): Non. Alors, aujourd'hui, nous entendrons l'Association québécoise des phytothé-rapeutes, l'Association de médecine holistique du Québec, l'Association professionnelle des orthothérapeutes de la province de Québec inc., le Collège d'études ostéopathiques de Montréal et l'Association des diplômés en ostéopathie du CEO, le Registre ostéopathique du Québec-Canada, l'Association des chiropraticiens du Québec, l'Ordre des chiropraticiens du Québec, le Centre d'études et de documentation homéopathiques, le Collège des naturopathes du Québec.

Je vois que déjà nous avons les membres qui représentent l'Association québécoise des phytothérapeu-tes. Il me fait plaisir de vous souhaiter la bienvenue. Je vous rappelle que vous avez une vingtaine de minutes pour nous présenter un résumé de votre mémoire, lequel a déjà été reçu et lu. Par après, eh bien, le temps qui nous reste sera dévolu entre les deux formations pour des échanges, selon votre bon vouloir, ou des questions de M. le ministre ou de l'Opposition.

Alors, je demanderais à la personne responsable de bien vouloir s'identifier et d'identifier les gens qui l'accompagnent, s'il vous plaît.

Association québécoise des phytothérapeutes

M. Gervais (Guy): M. le Président, je me présente, Guy Gervais, président de l'Association québécoise des phytothérapeutes.

Le Président (M. Joly): M. Gervais, je vais juste vous demander, pour fins d'enregistrement peut-être, de demeurer assis...

M. Gervais: Ah, merci.

Le Président (M. Joly): ...de façon à ce que le son puisse être capté.

M. Gervais: Je le faisais...

Le Président (M. Joly): D'ailleurs, c'est bien apprécié, mais ce n'est pas nécessaire.

M. Gervais: D'accord.

Le Président (M. Joly): Alors, M. Gervais, c'est à vous.

M. Gervais: À ma gauche, Mme Nicole Forget, vice-présidente de l'Association, et M. Serge Vachon, trésorier de l'Association. À ma droite, M. Mario La-voie, qui est le secrétaire de l'Association. Nous avons aussi, dans l'assistance, le fondateur de notre Association, M. Marcel Vachon.

Le Président (M. Joly): Je vous remercie. Alors, je vous laisse la parole, M. Gervais.

M. Gervais: M. le Président, je veux d'abord remercier les membres de cette commission de nous accueillir ici ce matin et de nous permettre de faire connaître les vues de l'Association québécoise des phytothérapeutes sur les thérapies alternatives au Québec. L'opinion que nous exprimons dans notre mémoire n'est pas uniquement celle des dirigeants de l'Association. Notre association se caractérise par son esprit démocratique. Elle compte 869 membres répartis un peu partout au Québec. Les orientations et les conclusions du mémoire reflètent l'esprit qui anime nos membres. Cette commission a été créée, je pense, pour planifier l'avenir des médecines alternatives au Québec. Nous voulons donc apporter notre contribution pour l'avancement de ce mouvement si solidement amorcé et appuyé par 85 % de la population québécoise. Forts de nos 25 années d'existence en phytothérapie, nous avons acquis une expérience et un savoir-faire qui ne peuvent que contribuer à l'amélioration de la situation médicale au Québec. Encore une fois, merci de votre initiative.

Je demanderais maintenant à notre secrétaire de bien vouloir vous faire part des recommandations de notre association à la commission. M. Lavoie.

M. Lavoie (Mario): Merci, M. Gervais. M. le Président, je suis à la page 15 du mémoire. Il me fait plaisir de vous faire la lecture des recommandations de l'Association québécoise des phytothérapeutes.

Compte tenu que les Québécois sont massivement favorables, 85 %, à la reconnaissance par le gouvernement des thérapies alternatives; compte tenu que la

phytothérapie a un impact économique important et à la lumière des réflexions contenues dans notre mémoire, l'Association québécoise des phytothérapeutes recommande à la commission: 1. de reconnaître la liberté des usagers quant au choix du thérapeute; 2. de créer un office des thérapies alternatives qui réglementerait la pratique des thérapies alternatives et les organismes qui les regroupent, dont l'association québécoise des phytothérapeutes. à ce niveau, l'association québécoise des phytothérapeutes offre toute sa collaboration au gouvernement du québec lors de la création de cet office; 3. de déterminer des standards de qualité quant à la formation et à la pratique des thérapeutes alternatifs; 4. d'exiger des organismes voulant faire partie de l'office des thérapies alternatives un code de déontologie, un comité de discipline, un comité de surveillance et d'inspection professionnelle; 5. de reconnaître comme thérapeutes alternatifs les phytothérapeutes regroupés dans l'association québécoise des phytothérapeutes.

Voilà, M. le Président, les recommandations de l'Association québécoise des phytothérapeutes.

Le Président (M. Joly): Merci, M. Lavoie.

M. Gervais: Nous savons que vous avez pris connaissance de notre mémoire. Nous serions donc maintenant à votre disposition pour apporter des éclaircissements supplémentaires.

Le Président (M. Joly): M. le ministre de la Santé.

M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. le Président. C'est une approche pragmatique, donc une présentation très brève, de se limiter, bien sûr, aux recommandations.

Une première question: Phytothérapie, naturothé-rapie, c'est quoi la différence?

M. Gervais: Je connais très bien la phytothérapie, mais, pour définir la naturothérapie, je crois qu'il faudrait vous adresser à des naturopathes. (9 h 20)

M. Côté (Charlesbourg): C'est parce qu'on a fini hier soir un peu... On a passé la soirée avec des naturopathes, hier. Et, comme on est aussi dans un exercice d'éducation populaire en même temps, même si 85 % des gens souhaitent des thérapies alternatives, il faut quand même admettre que, au-delà de tout cela, les gens vont vers un mouvement, vers des choses qui peuvent leur apporter du bien-être sans pour autant pouvoir préciser ce que c'est. Vous avez été, à un moment ou l'autre, en contact avec un homéopathe et ça vous a apporté un certain soulagement ou des connaissances additionnelles pour mieux contrôler votre corps, ou avec d'autres spécialités. Les massothérapeutes, hier soir, ont fait la démonstration qu'ils peuvent, à l'occasion, appor- ter du bien-être à un individu. On a même, nous, de la difficulté à faire cette distinction entre toutes ces appellations et toutes ces techniques, toute cette science. Alors, c'est un petit peu pour ça que j'ai dit: Je vais commencer rapidement, ce matin, en demandant à des gens qui connaissent ça c'est quoi, la différence entre phytothérapie et naturothérapie parce que je suis moi-même un petit peu embrouillé. Comment?

M. Trudel: Entre naturopathe et naturothérapie.

M. Côté (Charlesbourg): Naturopathe et naturothérapie. Je ne sais pas si...

M. Gervais: Pour ce qui est de la phytothérapie, comme le nom l'indique, «phyto» veut dire plante et «thérapie», traitement; donc, c'est la thérapie qui s'offre aux gens qui est la plus naturelle possible, c'est-à-dire qui utilise les choses naturelles pour arriver à ses fins, par opposition, si vous voulez, à la médecine conventionnelle ou à la médecine chimique. Alors, c'est pour éviter les effets secondaires et tout ça.

Maintenant, pour ce qui est de la naturothérapie, c'est des gens, je pense — là, je le dis avec restriction parce que je ne veux pas, non plus, me faire leur porte-parole — qui s'adressent plus à l'alimentation. La phytothérapie touche aussi à l'alimentation, mais, eux autres, ils se spécialisent davantage dans l'alimentation. Est-ce que ça répond?

M. Côté (Charlesbourg): Un peu, mais il nous reste encore trois jours pour fouiller tout ça un petit peu. Il faut se rendre compte que, si on ne réussit pas, à notre commission, à ce moment-ci, à tenter de clarifier un certain nombre de choses, ça prendra probablement 5 ou 10 ans avant d'en avoir une autre. Alors, autant tenter de faire oeuvre utile pour faire progresser, parce que, vous le savez fort bien — ils ont probablement, dans certains cas, raison aussi — la médecine dite traditionnelle a des résistances assez importantes vis-à-vis des médecines alternatives. Mettons de côté l'aspect plus monétaire ou l'empire qui pourrait être attaqué ou s'effriter, mettons ça de côté. Chaque fois qu'ils en parlent, ils ont quand même toujours de l'argumentation qui n'est pas à dédaigner non plus.

En faisant du zapping un de ces soirs, à la télévision, j'ai vu une émission qui s'appelle «Droit de parole». Moi, je ne participe pas à ce genre d'émission parce que je pense que ça n'apporte rien. Tout ce que ça apporte, c'est de la popularité à l'animateur, pour augmenter ses cotes et ses cachets en même temps. Mais j'ai vu du monde y participer et j'ai vu qu'il y avait des courants bien différents. C'est M. Augustin Roy qui était là, avec d'autres aussi qui défendaient un point de vue et il y avait du questionnement. À ce moment-là, on parlait beaucoup de recherche. Donc, il y avait nécessité de faire, dans les thérapies alternatives, de la recherche pour être capable d'avancer davantage de preuves sur le plan scientifique. C'est pour ça qu'on va profiter de la commission pour tenter de s'informer et d'informer nos

concitoyens et concitoyennes. deuxième question. vous allez me trouver dur en partant ce matin, mais ce n'est pas particulièrement dirigé contre vous. 85 % des gens ont de l'ouverture vis-à-vis des thérapies alternatives. mon appréciation, à moi, je pense que les 85 % sont réels, mais, sans vouloir insulter nos concitoyens et concitoyennes, j'ai l'impression qu'ils ne savent pas toujours quelles sont les thérapies alternatives qu'on devrait reconnaître et celles qu'on devrait écarter. on parlait, lors de la commission parlementaire sur la réforme, de 100 et quelques; m. mulcair nous a parlé de 200 et quelques thérapies alternatives. je ne suis pas sûr qu'on serait très crédibles demain matin si on claironnait, de manière très claire: toutes les thérapies alternatives devraient être reconnues au québec. je pense qu'il y a un bloc qui est un peu plus connu, qui est un peu plus acceptable.

Est-ce que, dans votre esprit à vous, il en existe, des thérapies alternatives, qui ne devraient pas être reconnues? On va revenir à la phyto tantôt, je vais vous donner la chance de revenir à votre domaine particulier. Mais, quand on dit que 85 % des gens sont ouverts ou ont, à un moment ou l'autre, été en contact, par la connaissance ou par la pratique, avec les thérapies alternatives, dans votre esprit à vous, est-ce que ça veut dire que les gens sont prêts à accepter n'importe quoi? Je ne pense pas.

Le Président (M. Joly): M. Gervais.

M. Gîervais: Les gens ne sont certainement pas prêts à accepter n'importe quoi. C'est pour ça que, dans notre deuxième recommandation, on demande de créer un office des thérapies alternatives. Donc, cet office-là aurait comme travail, si vous voulez, justement de faire du ménage là-dedans, de voir à réglementer les thérapies alternatives et puis à protéger le public, finalement. Mario, tu voulais rajouter des choses?

M. Lavoie (Mario): Oui, peut-être, M. le Président. M. le ministre, ce qui nous préoccupe au plus haut point, c'est de légaliser la pratique courante selon certaines balises. Maintenant, est-ce qu'il y a des pratiques alternatives à bannir, d'autres à retenir? Je pense qu'il appartient au gouvernement de fixer ces balises. De quelle façon fixer les balises? C'est de regarder quelles sont les thérapies alternatives qui, au cours des années, ont eu la préoccupation de se structurer pour, finalement, protéger le public, pour donner au public un service de qualité, un service structuré, un service dispensé de façon compétente.

Donc, ce matin, je ne serais pas en mesure de dire: Telle ou telle thérapie ne devrait pas être reconnue, mais la préoccupation de l'Association québécoise des phytothérapeutes, c'est justement de participer au meilleur balisage, si on peut appeler ça ainsi, du secteur des thérapies alternatives. Autrement dit, c'est la protection du public. On sait que la population est de mieux en mieux et de plus en plus informée. Donc, je pense qu'il appartient au gouvernement de lui permettre, à cette population, de pouvoir choisir en toute connaissance de cause la thérapie ou le thérapeute.

Donc, je crois que le gouvernement devrait orienter son action sur deux plans. D'abord, les thérapeutes. On recommande à cette commission de déterminer certains standards, notamment, en matière de formation et également en matière de pratique. C'est mon premier élément. Le deuxième élément, c'est d'exiger des organismes, c'est-à-dire des associations, d'avoir certains critères minimums. Quand je parle d'une association, je parle d'une association dûment constituée et opérationnelle, donc avec des règlements généraux et tout ce qu'une telle opération exige en termes d'appareillage. En plus, de façon spécifique aux thérapies alternatives, je pense que — en tout cas, à l'Association, c'est ce qu'on croit — il est de première importance qu'une association se dote d'un code de déontologie, d'un comité de discipline et, finalement, d'un comité de surveillance et d'un comité d'inspection. Ce qui est sous-tendu derrière tout ça, finalement, c'est le principe de F autoréglementation de l'association qui, comme je l'ai dit tout à l'heure, est légalement constituée et possède les règlements généraux pour son fonctionnement.

Donc, je ne sais pas, M. le ministre, si je réponds à votre question, mais c'est en plaçant des standards minimums aussi bien sur les thérapeutes que sur les associations qui représentent ces thérapeutes qu'on pourrait y parvenir.

M. Côté (Charlesbourg): Vous êtes très habile, vous me ramenez sur votre terrain et, d'ailleurs, j'y arrivais. En parlant de formation, je trouve que, évidemment, un élément qui est très important sur le plan de la crédibilité, c'est la formation. Ce que vous souhaitez, c'est que, dans tous les cas, les gens soient détenteurs au moins d'un D.E.C. et qu'il y ait cinq sessions de cours suivis sur la connaissance du corps, qui est élémentaire à ce que j'ai compris. Dans l'esprit de quelqu'un qui a laissé le cégep depuis 1967, 5 sessions, ça veut dire quoi en termes de temps, pour être capable de l'évaluer? C'est l'équivalent du D.E.C, cinq sessions, pour vous, ou si c'est un D.E.C. plus cinq sessions dans des domaines plus spécifiques?

M. Gervais: C'est un D.E.C. plus... M. Côté (Charlesbourg): Plus.

M. Gervais: ...cinq sessions dans des domaines spécifiques.

M. Côté (Charlesbourg): Donc, un tronc com-mum qui est le D.E.C. de base...

M. Gervais: C'est ça.

M. Côté (Charlesbourg): ...plus cinq sessions spécifiques dans des domaines plus spécifiques et plus pointus qui vous mènent à votre profession. C'est ça? (9 h 30)

M. Gervais: Exactement.

M. Côté (Charlesbourg): Et ces sessions-là se donnent par des écoles privées, j'imagine?

M. Gervais: Oui.

M. Côté (Charlesbourg): Et c'est des sessions de combien de temps: 30 heures, 40 heures, 45 heures?

M. Gervais: 45 heures.

M. Côté (Charlesbourg): 45 heures. Et donnez-moi des exemples, là. Au-delà de ceux...

M. Gervais: Maintenant, ces sessions-là sont de 45 heures, mais ça comporte aussi des travaux que les gens doivent faire et puis ces travaux sont supervisés par le formateur.

M. Côté (Charlesbourg): Parce que ce que je n'ai pas dit, puis ce qu'on voit dans vos documents, vous existez depuis 1969.

M. Gervais: C'est ça.

M. Côté (Charlesbourg): Bon. Donc, on n'a pas affaire à des gens qui, dans la fièvre des dernières années, avec certaines possibilités qui pouvaient s'offrir, ont profité de l'occasion pour venir au monde, là. Bon.

M. Gervais: Exactement.

M. Côté (Charlesbourg): Donc, on fait affaire avec des gens qui sont sur le terrain depuis déjà fort longtemps et qui ont vécu, possiblement, toutes sortes de misères à se faire reconnaître, à se faire connaître et ainsi de suite, j'imagine, là. Et, donc, on a affaire à des gens qui, s'ils ne sont pas professionnels, disons, ont certaines habiletés à résister au temps. Bon.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Côté (Charlesbourg): C'est pour ça que la formation, c'est la base de tout. On se répète: minimum un DEC, plus des spécialités qui sont suivies dans des écoles. Est-ce qu'il y a beaucoup de monde qui suit ça de ce temps-là?

M. Gervais: II y a beaucoup de monde qui suit les cours. Nous en avons, actuellement, quelque 300 au Québec.

M. Côté (Charlesbourg): Bon. Ils font quoi, après, là? Ils se retrouvent où, là, pour pratiquer?

M. Gervais: Pour pratiquer, bien, ils pratiquent sous la surveillance du formateur. Le formateur surveille la pratique de ces gens, puis il voit si c'est adé- quat. Il voit à faire les corrections appropriées.

M. Côté (Charlesbourg): O.K. Ça, c'est dans la formation. Donc, c'est théorie et pratique...

M. Gervais: Exactement.

M. Côté (Charlesbourg): ...dans le cas de la pratique, mais laissons... Il est formé, là, il a son D.E.C., il a suivi ses cinq sessions et plus dans des domaines plus pointus et il peut donc voler de ses propres ailes.

M. Gervais: Oui.

M. Côté (Charlesbourg): II peut donc être, demain matin, installé sur la rue Saint-Denis, à Montréal. Je ne sais pas où c'est, par exemple, parce qu'il paraît que je ne connais pas Montréal. Alors...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Côté (Charlesbourg): ...je prends ça au hasard: sur la rue Saint-Denis. Ha, ha, ha! Au sud, au nord? Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Côté (Charlesbourg): Ce n'est pas la route qui mène à Rouyn, ça?

M. Trudel: Non, un petit peu plus vers le nord.

M. Côté (Charlesbourg): Donc, il s'installe et il pratique. Alors, il reçoit qui, puis qu'est-ce qu'il fait? Dites-moi la vie quotidienne d'un phytothérapeute qui a été reconnu par vous et comment ça se passe. Il a suivi ses cours, il est bon? Parce que, des médecins, il y en a qui suivent des cours pendant bien des années, puis il y en a de très bons, puis il y en a de moins bons. La plus belle preuve, c'est que ça prend une corporation pour être capable de suivre. Bon. Vous dites, vous autres: II faut encadrer pour éviter que des charlatans... Bon, dans un premier temps, il faut au moins qu'on se protège, on va éliminer les charlatans. À l'intérieur de ceux qui sont déjà diplômés, puis qui ont suivi tous les cours, il y en a qui sont corrects, il y en a qui ne sont pas corrects. S'il y en a dans les politiciens, il y en a dans les autres. Bon. Alors, disons que c'est ça, la vie, là. Comment ça se passe, après ça?

M. Gervais: Alors, Nicole, j'aimerais que tu répondes à ça, s'il te plaît.

Mme Forget (Nicole): D'accord.

Le Président (M. Joly): Mme Forget, s'il vous plaît.

Mme Forget: Moi, ça fait huit ans que je pratique

la phytothérapie; j'enseigne aussi la phytothérapie. C'est une thérapie qui est holistique. Disons qu'on s'occupe beaucoup... Premièrement, on ne fait pas de diagnostic. On n'est pas contre les médecins, on ne prétend pas prendre leur place, non plus. On ne fait pas de diagnostic. La personne arrive avec son diagnostic médical ou, des fois même, c'est juste pour entretenir sa santé.

M. Côté (Charlesbourg): Juste là-dessus. Vous dites: La personne arrive avec son diagnostic médical.

Mme Forget: Elle a déjà vu des médecins. M. Côté (Charlesbourg): O.K.

Mme Forget: La plupart du temps, ces personnes-là arrivent avec un diagnostic.

M. Côté (Charlesbourg): Est-ce qu'elle vous est référée par un médecin? Est-ce que ça arrive?

Mme Forget: Des fois, il y a des médecins qui nous envoient des personnes, oui.

Une voix: Exceptionnellement.

Mme Forget: Cela arrive de plus en plus. Nous, on regarde tout ce qui est les facteurs naturels de santé, que ce soit au niveau de l'attitude mentale, que ce soit au niveau de la diète alimentaire, bien sûr, que ce soit au niveau du mode de vie de la personne. Bien souvent, il y a des personnes, ça fait 15 ans qu'elles essaient de se faire traiter pour une maladie ou l'autre, puis il n'y a aucun résultat. Très souvent, c'est simplement dans leur mode de vie qu'il y a des modifications à faire. C'est très important. Et, depuis 25 ans que l'Association existe, je pense qu'on n'a pas eu de plaintes, en tout cas, nous, à l'Association, là. Ces personnes, on veut les éveiller pour qu'elles se prennent en main. On fait beaucoup de prévention, en phytothérapie, parce que, la santé, ça regarde tout le monde. Ça ne regarde pas seulement le médecin, ça commence par nous, ça commence par le client, justement; il faut qu'il commence à prendre soin lui-même de sa santé. La santé, ce n'est pas un cadeau. Disons que c'est là-dessus, nous, qu'on essaie le plus possible de conscientiser...

M. Côté (Charlesbourg): En tout cas, comme ministre, ce n'est pas un cadeau!

Mme Forget: Pardon?

M. Côté (Charlesbourg): Comme ministre, ce n'est pas un cadeau!

Mme Forget: Non? Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Forget: Donc, on essaie de conscientiser le plus possible la personne à ce qu'elle devienne responsable d'elle-même. Il y a des choses à changer, bien sûr, dans beaucoup, beaucoup de domaines. Nous, on est là pour superviser, en réalité, on est là pour guider la personne, encourager la personne. On a des plantes médicinales qui ne sont pas... Il y a beaucoup de personnes qui vont aller acheter toutes sortes de choses dans des magasins, qui ne savent même pas quoi faire avec. Nous, on est là, justement, pour superviser ces personnes-là dans ce domaine-là, au niveau des plantes médicinales.

M. Côté (Charlesbourg): Comme vous abordez le phénomène des plantes, moi, j'ai entendu —je ne sais pas si c'est des mauvaises langues, mais, vous savez, il y en a dans tous les domaines — que, des plantes, ça pouvait aussi être dangereux, que ça pouvait même être très dangereux pour des individus. Quel est le niveau de formation que vos gens ont pour bien s'assurer qu'il n'y ait pas de mélanges? Parce que j'imagine que c'est à partir de mélanges qui peuvent finalement altérer la santé de l'individu? Est-ce qu'à ce niveau-là vous offrez des garanties à ceux qui vont vous voir quant au niveau de connaissances et quant aux conséquences, aussi? Parce que, s'il y a des conséquences positives, il peut y avoir des conséquences négatives.

M. Gervais: Voici. C'est que, dans la phytothérapie moderne, nous n'allons pas cueillir nos plantes. Je ne dis pas que ce n'est pas une bonne façon, mais, nous, nous ne faisons pas ça, O.K.? Nous faisons affaire avec des laboratoires qui sont reconnus et puis qui ont fait une certaine expertise quant à la fabrication de ce qu'on appelle la médication naturelle. Donc, les plantes, les mélanges de plantes qui sont contenues dans la médication naturelle ont déjà fait leurs preuves. Alors, ce qu'on utilise, il n'y a aucun danger que ce soit des plantes dangereuses, si vous voulez. Maintenant, vous avez parfaitement raison en disant qu'il y a des plantes qui sont extrêmement dangereuses. L'opium, c'est une plante. Mais ce qu'on utilise, nous autres...

M. Côté (Charlesbourg): Mais, là, ne me mettez pas un écran de fumée!

M. Gervais: Ha, ha, ha! Ce n'est pas mon intention. Alors, ce qu'on utilise, c'est déjà sélectionné. Alors, nous n'utilisons pas des plantes que nous allons cueillir nous autres mêmes. Alors, c'est déjà sélectionné par des laboratoires reconnus, puis des chimistes reconnus.

M. Côté (Charlesbourg): O.K. Vous avez donc un certain nombre de personnes, actuellement, vous souhaitez qu'il y ait un office. Est-ce que c'est cet office-là qui accepterait ou ferait des démarches d'évaluation des thérapies alternatives qui pourraient être incluses dans le cercle? Vous savez, quand on regarde la résistance qu'on a à implanter des projets de sages-

femmes, des projets-pilotes — groupe pris au hasard — ...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Côté (Charlesbourg): ...il est bien évident qu'on va faire face à cette même résistance, et on fait face à cette même résistance quant à des thérapies alternatives. Un certain nombre de thérapies sont un peu plus reconnues aujourd'hui et, à travers les années, ont réussi à faire un bout de chemin à force de travailler très fort et à presque s'imposer.

Est-ce que cet office-là, dans votre esprit à vous, aurait toute la liberté d'action d'accueillir en son sein d'autres thérapies alternatives, et cela devrait se passer comment? Est-ce que c'est, tout simplement, le lobby de bons «chums», de connaissances, ou s'il n'y a pas un petit peu de travail à faire pour savoir les vertus et les bienfaits que pourrait procurer une thérapie alternative?

M. Gervais: Nous voyons l'office des thérapies alternatives comme étant un organisme qui régirait, si vous voulez, toutes les thérapies alternatives, qui ferait ses réglementations, qui créerait des standards de qualité, de formation, etc. Et cet office-là, bien sûr, ce serait l'office qui accepterait telle thérapie ou refuserait telle autre pour telle et telle raison. Maintenant, les normes seraient établies par l'office et nous serions, nous autres, disposés à collaborer avec cet office pour établir ces standards de qualité.

(9 h 40)

M. Côté (Charlesbourg): En réalité, ce que je comprends, c'est un Office des professions déguisé pour les médecines alternatives.

M. Gervais: En quelque sorte.

M. Côté (Charlesbourg): Pourquoi ça? Parce que vous n'avez pas confiance à l'Office des professions?

M. Gervais: Pas du tout. C'est que je pense qu'il n'est pas nécessaire d'être professionnel, si vous voulez, pour pratiquer une thérapie alternative. Ce n'est pas mauvais de l'être, mais ce n'est pas ça qu'on vise. Notre but principal, c'est la reconnaissance légale, ce qui n'existe pas actuellement puisque c'est exclusivement réservé à la médecine conventionnelle.

M. Côté (Charlesbourg): Est-qu'on pourrait aller jusqu'à dire que le but ultime, c'est un mécanisme qui permette la reconnaissance légale sous un certain nombre de conditions à être respectées?

M. Gervais: Exact.

M. Côté (Charlesbourg): Parce qu'on l'a dit tantôt, 200 et quelques, je ne pense pas que ce soit pour demain matin, mais il faut créer un processus qui va amener le dépassement. En amenant le dépassement, il faut qu'il y ait une certaine preuve scientifique du bien- être à recevoir pour des individus pour être capable d'y arriver. C'est un peu ça, c'est bien plus une démarche qui permettrait effectivement d'y arriver. C'est ça?

M. Gervais: C'est ça.

M. Côté (Charlesbourg): Et, dans votre esprit, l'office, ce serait ça?

M. Gervais: Oui, c'est exactement ça. Et puis, vous avez mentionné quelque chose d'intéressant, tout à l'heure, qui pourrait devenir un critère d'acceptation des thérapies alternatives: nous ne sommes pas nés d'hier et puis nous ne sommes pas dans la dernière poussée des quatre, cinq ou six dernières années où les gens ont vu qu'il y a des choses à faire là-dedans, même des revenus intéressants, et se lancent tout d'un coup là-dedans. Nous sommes là depuis longtemps; donc, nous ne sommes pas nés de la dernière pluie.

M. Côté (Charlesbourg): Savez-vous qu'en vous écoutant, si je vous reposais la même question que je vous ai posée au début, vous seriez plus habilité à répondre.

M. Gervais: Peut-être.

M. Côté (Charlesbourg): Y a-t-il des thérapies alternatives qui ne devraient pas être reconnues?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gervais: Sûrement, mais je ne sais pas lesquelles. Il faudrait établir des critères.

M. Côté (Charlesbourg): Ça va, merci.

Le Président (M. Joly): Merci, M. le ministre. Je vais maintenant reconnaître M. le député de Rouyn-Noranda—Témiscamingue, s'il vous plaît.

M. Trudel: Merci, M. le Président. Je souhaite la bienvenue, au nom de l'Opposition, aux représentants des phytothérapeutes et je vais essayer d'obtenir aussi un certain nombre de précisions quant à votre existence et à la reconnaissance que, très nettement, vous recherchez.

Ce que vous nous dites, dans les précisions que vous apportez en réponse aux questions du ministre, c'est: Nous recherchons d'abord une reconnaissance légale. On va prendre ça peut-être par la négative. Est-ce que vous avez été les victimes de poursuites pour pratique illégale de la médecine? Est-ce que vous avez eu des poursuites engagées par la Corporation professionnelle des médecins pour pratique illégale de la médecine?

M. Gervais: Oui, il y en a eu. Il y en a eu un nombre relativement restreint, mais il y en a eu.

M. Trudel: Bon, et pourtant... Vous avez eu des condamnations?

M. Gervais: Pardon?

M. Trudel: Est-ce qu'il y a eu des condamnations?

M. Gervais: C'est-à-dire que les condamnations n'ont pas eu lieu parce que, dans la plupart des cas, les gens ont plaidé coupables et ils ont payé l'amende qui était imposée. Légalement, tu ne peux pas t'engager dans cette chose-là parce que la loi prévoit que ce n'est que le médecin qui a le droit de faire ce genre de pratique. Alors, on n'est pas allé plus loin à cause de ça.

M. Trudel: Pourtant, vous défendez à vos membres de poser des actes diagnostiques, avez-vous dit, madame.

Mme Forget: Oui.

M. Gervais: Légalement, nous ne pouvons pas.

Mme Forget: Mais, maintenant, telle qu'est la loi, on n'a pas le droit de dire à quelqu'un: Prends quatre verres d'eau par jour, c'est bon pour la santé. Donc, ça devient une prescription médicale. Alors, c'est là qu'on est coincés. Mange plus de carottes, on n'a pas le droit de dire ça; c'est encore réservé aux médecins. Alors, c'est surtout là-dessus qu'on a beaucoup de difficultés. Au niveau diagnostique, il n'y a jamais eu de plaintes. On n'a pas eu de poursuites parce que, en phytothérapie, on ne fait pas de diagnostic médical.

M. Trudel: Est-ce que vous recherchez la reconnaissance et l'exclusivité de pratique dans un champ donné?

M. Gervais: Nous ne recherchons pas l'exclusivité en quelque domaine que ce soit; on le met, d'ailleurs, dans notre «rapport», si vous l'avez lu. On ne veut prendre la place de personne et on veut tout simplement apporter ou continuer d'apporter à la population qui nous fait confiance les services que nous lui offrons, mais légalement.

M. Trudel: C'est parce que j'essaie de voir comment l'État pourrait en arriver à rejoindre vos objectifs, à répondre à vos attentes de légaliser votre pratique. Ça s'entend que vous êtes là, ce matin, de façon illégale. Vous êtes dans l'illégalité. J'espère qu'il n'y a personne, qu'il n'y a pas d'espions qui vont vous dénoncer quelque part.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Trudel: Vous êtes ici dans l'illégalité. Et, pourtant, on sait, le gros bon sens nous le dit, que vous n'êtes pas dans l'illégalité, c'est-à-dire qu'on ne met pas les policiers à vos trousses quotidiennement là-dessus. Vous êtes dans une situation où on peut vous reprocher...

M. Gervais: Exact.

M. Trudel: ...par rapport à la Loi médicale actuelle, des actes qui s'apparentent à la pratique illégale de la médecine. Je réamorce la question: Comment l'État devrait-il vous reconnaître ou vous légaliser sans mettre au monde un appareillage, une bureaucratie monstre? Pourquoi on devrait mettre une superbe bureaucratie, des éléments de contrôle à n'en plus finir pour des actes qui, en tout cas, pour un grand nombre des thérapies alternatives, sont qualifiés par l'Office des professions comme ce n'est pas dangereux, ce n'est pas extrêmement dangereux et la sécurité du public n'est pas gravement en danger ou gravement en question? Alors, comment l'État devrait-il faire ça au minimum pour vous reconnaître, pour vous légaliser, pour vous donner le droit d'existence, pour que vous soyez ici en toute légalité comme phytothérapeutes?

M. Gervais: Mouille-toi donc, Mario.

M. Lavoie (Mario): Oui, M. le Président, peut-être quelques commentaires sur ce sujet. D'abord, je ne pense pas que l'Association québécoise des phytothérapeutes préconise l'établissement d'une très forte bureaucratie. L'Association préconise une autoréglementation des associations. Maintenant, je pense qu'il faut regarder ça en termes de protection du public, d'information du public. Et on pense que c'est le rôle du gouvernement d'assurer un minimum d'information, notamment sur les thérapies alternatives, à l'intention de la population. La création d'un office, je pense, pourrait, à notre avis, répondre à ces préoccupations.

M. Trudel: Prenons ce chapitre de la protection du public. Eu égard aux phytothérapeutes — on ne parlera pas des autres, là; on va parler des phytothérapeutes — pourquoi on devrait protéger le public? Je complète la phrase sous-entendue, si elle est fausse vous me corrigez. Pourquoi on devrait protéger le public contre les phytothérapeutes? Parce qu'ils pourraient être dangereux? Il pourrait y avoir des dommages, il pourrait y avoir des lésions, il pourrait y avoir des torts qui seraient causés?

M. Lavoie (Mario): Eh bien, c'est-à-dire qu'on veut avoir un statut légal pour la bonne raison que les membres, que les thérapeutes puissent avoir la tranquillité d'esprit, donc pratiquer en toute liberté, en fonction des exigences de l'Association, c'est-à-dire en fonction d'un code de déontologie, comité de discipline, de surveillance.

Vous savez que les phytothérapeutes sont des alliés naturels du gouvernement. Dans la philosophie du phytothérapeute, le phytothérapeute informe son client, l'incite à se prendre en charge, à se prendre en main.

Là-dessus, je pense qu'on rejoint très bien les préoccupations du gouvernement. Le phytothérapeute, c'est ce qu'il fait depuis plus de 25 ans. Maintenant, il n'a quand même pas de reconnaissance légale. Le phytothérapeute n'est pas un être dangereux; au contraire, il veut aider la population.

M. Trudel: Est-ce qu'on pourrait atteindre l'objectif de vous reconnaître, de reconnaître votre existence et votre pratique, en définissant un certain nombre d'actes que vous n'avez pas le droit de réaliser? Est-ce que ce serait une voie, ça, en disant: Vous ne pouvez... Je vais prendre l'exemple de madame, en réponse à une autre question tantôt: On ne pose pas d'actes diagnostiques. Il serait interdit aux phytothérapeutes de poser un acte diagnostique sur la santé et, je ne sais pas, de faire des interventions, des intrusions, des actes anesthésiques, des manipulations, etc. Est-ce que, si on y allait par l'exclusion des actes que vous n'auriez pas le droit de réaliser, ce serait un pas dans ce que vous appelez votre reconnaissance légale? (9 h 50)

M. Gervais: Sûrement. Ce serait un pas intéressant et ce serait une reconnaissance, si vous voulez, officielle. Il y a des choses qu'on pourrait faire et des choses qu'on ne pourrait pas faire; ça va dans ce sens-là. Je suis d'accord avec vous là-dessus.

M. Trudel: et, par ailleurs, est-ce que vous pensez que l'on pourrait atteindre, à peu près, encore une fois, ces objectifs de la légalisation et de la reconnaissance en réservant le titre — je ne parle pas de champ de pratique — en disant: pour porter le titre de phytothérapeute, il faut avoir tel type ou tel niveau de formation?

M. Gervais: Oui, sûrement.

M. Trudel: Ça, ça contribuerait aussi et ça répondrait pas mal à votre...

M. Gervais: Ça va dans le sens de ce qu'on veut avoir, exactement.

M. Trudel: Maintenant, parlons information et protection du public. Vous dites, dans votre mémoire, à la page 9, que, depuis 1970, vous avez un comité de discipline...

M. Gervais: Oui.

M. Trudel: ...sur le modèle de celui du Collège des médecins. Je ne suis pas sûr que c'est un modèle, là, moi, mais c'est vous qui le dites.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lavoie (Mario): À l'époque, c'était bon.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Trudel: À l'époque, c'était bon. Avec ce qui s'est dit récemment et ce qu'on a vécu depuis une quinzaine d'années, attention au modèle dans ce secteur, ce n'est peut-être pas le meilleur canon en matière de gestion des plaintes du public.

M. Lavoie (Mario): Mais, on l'a modifié depuis.

M. Trudel: Comment ça se passe dans votre comité de discipline? Comment se traitent les plaintes? Quelles sont les sanctions? Comment ça procède? Où sont les consommateurs, les utilisateurs? Le phytothérapeute, peut-il se défendre? Comment ça se passe?

M. Lavoie (Mario): O.K. Comment ça se passe? D'abord, le rôle du comité de discipline, c'est d'étudier toutes les plaintes reçues. Tout à l'heure, on a mentionné que, depuis 25 ans, il n'y avait eu que très peu de plaintes. M. le président, je pense que c'est une plainte?

M. Gervais: Deux.

M. Lavoie (Mario): Deux plaintes. Donc, le comité de discipline n'a quand même pas eu la chance de siéger très souvent. Mais, ce qu'on dit dans notre réglementation, c'est qu'il étudie, comme je le disais tout à l'heure, toutes les plaintes reçues, il analyse chacune attentivement et fait des recommandations.

M. Trudel: Mais, écoutez, je vais vous arrêter un peu. Si vous me dites que vous avez eu seulement une plainte en 25 ans, je ne suis pas pour prendre plus de temps pour faire décrire le processus que ça a pris de temps pour traiter la plainte là-dessus. Moi, j'en conclus tout de suite, écoutez, que vous n'êtes pas bien, bien dangereux, là...

M. Gervais: C'est vrai.

M. Trudel: ...si vous avez eu une seule plainte au cours des 25 dernières années. Vous êtes à peu près 1000 dans votre association, vous êtes répartis partout à travers le Québec. La conclusion que j'en tire pour l'instant, c'est: N'inventons pas l'armada des structures, ne mettons pas au monde un monstre bureaucratique pour dire que vous existez, que vous avez une approche qui est basée sur les produits que la nature, si j'ose dire, nous fournit, que vous avez une formation, que vous souhaitez être reconnue, qui empêche en quelque sorte que vous fassiez de la synthèse avec ces plantes pour produire des éléments dangereux pour la santé humaine. J'ai comme l'impression que les phytothérapeutes sont une approche exercée par un certain nombre de personnes qui cherchent tout simplement à dire: Dans ce créneau de la santé, à partir de ce que produit la nature, ça, c'est ce que nous faisons et nous n'avons aucune prétention qui atteint ce qui est généralement reconnu comme étant la pratique de la médecine scientifique. Et vous voulez avoir une reconnaissance qui vous soustraie

à d'éventuelles poursuites au niveau de la médecine, et le titre réservé pourrait peut-être amener cette reconnaissance, avec un registre pour ceux et celles qui ont tel niveau de formation. Est-ce que vous pensez, même là-dessus, que l'Association pourrait être responsable de la tenue du registre?

Moi, je vais vous dire, en matière de thérapies alternatives, ce que je cherche à regarder, c'est l'État minimaliste, le minimum du côté de l'État et le maximum du côté des individus responsables. Parce que, là, je peux bien avoir un office pour encadrer les musico-thérapeutes, mais, quand je suis chez nous et que j'écoute Bach, que je suis en train de me faire de la thérapie musicale, est-ce que j'ai besoin d'un encadrement et est-ce que j'ai besoin du gouvernement dans cette oreille et de la musique de Bach dans l'autre oreille pour savoir si ça me fait du tort? Liberté et responsabilité de l'individu doivent compter un peu dans ce monde-là. Alors, est-ce que vous pourriez, vous autres, assumer vous-mêmes cette responsabilité de tenir le registre et de le fournir éventuellement à l'État?

M. Gervais: Nous assumons déjà cette responsabilité. Nous possédons notre comité de discipline au cas où, nous avons notre code de déontologie, nous avons nos règlements généraux, nos règlements internes, notre façon de procéder et tout. Et puis c'est pour ça sans doute que le phytothérapeute ne se sent pas seul, non plus; il fait partie de l'Association, il est soutenu par l'Association. L'Association fait une espèce de rencontre continuelle avec ses gens, avec son congrès annuel. Alors, il y a de l'information qui parvient régulièrement aussi aux phytothérapeutes; donc, vous définissez exactement la bonne... Alors, ce que vous projetez, ça entre exactement dans notre façon de voir.

M. Trudel: Moi, je vais juste vous dire: Allez en paix, croissez et multipliez-vous! C'est tout.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Forget: Est-ce que vous pourriez le marquer sur un papier?

M. Trudel: Alors, moi, je vous remercie. C'est juste ça. Allez dans la nature, c'est le cas de le dire, croissez et multipliez-vous. Et on verra pour le minimum.

M. Gervais: Oui. Et je crois que ce «croissez et multipliez-vous» existe puisque la population nous fait confiance. Nous avons affaire à plusieurs personnes; on ne fait pas de publicité et les gens viennent nous voir. Ça se fait de bouche à oreille, si vous voulez. Alors, je pense que c'est la meilleure chose.

Le Président (M. Joly): Avant de vous libérer, j'aurais peut-être une ou deux petites questions aussi, M. Gervais ou Mme Forget, vous faites mention que vous avez un congrès annuel, vous faites mention que vous avez à peu près 1000 membres. Quelle est la réponse au niveau du congrès annuel? Vous avez combien de membres qui participent à vos congrès?

M. Gervais: nous avons à peu près de 40 % à 45 % des gens qui viennent assister au congrès annuel.

Le Président (M. Joly): Qui répondent, qui assistent au congrès.

M. Gervais: Oui.

Le Président (M. Joly): Est-ce que vous avez un journal interne qui informe vos membres sur une base mensuelle ou sur une base semi-annuelle, ou trimestrielle?

M. Gervais: Nous n'avons rien sur base annuelle ou sur base mensuelle, mais il y a régulièrement de l'information qui parvient à nos membres.

Le Président (M. Joly): Le développement continu de vos membres au niveau peut-être de ce qui se fait de nouveau, de ce qui se découvre, de quelle façon est-il communiqué? Strictement une fois par année lors des congrès?

M. Gervais: II y a des conférences qui se font dans les régions. Alors, l'Association donne des conférences un petit peu partout au Québec et réunit les phytothérapeutes d'une région donnée, les informe des nouveautés et puis de la mise à jour dans le domaine de la phytothérapie.

Mme Forget: On a du courrier.

M. Gervais: II y a le courrier, exactement. Il n'y a rien qui est établi d'une façon définitive, ça viendra sans doute avec le grossissement de l'organisation, mais, actuellement, c'est simplement organisé comme ça.

Le Président (M. Joly): Vous faites mention que c'est un climat de confiance qui amène le client chez vous, là, par le fait que déjà quelqu'un d'autre peut peut-être bénéficier, disons, de vos bon conseils et tout ça. Une visite chez vous ou une consultation chez vous, ça dure combien de temps et ça coûte combien?

M. Gervais: La première visite dure généralement assez longtemps parce que la personne fait un établissement du bilan de santé de la personne. Alors, il y a un dossier qui est ouvert et puis tout est conservé par écrit. Alors, cette première visite-là peut prendre une heure et quart, une heure et demie dans quelques cas. Et puis, après ça, lorsque ce questionnaire ou ce dossier, si vous voulez, est rempli, le phytothérapeute peut voir où sont les difficultés et peut venir en aide à la personne d'une façon beaucoup plus précise.

Le Président (M. Joly): Et ça coûte combien?

M. Gervais: Ça coûte combien? Il n'y a rien d'établi par l'Association. Il y a quelques phytothérapeu-tes qui chargent quelque chose, et il y a d'autres phyto-thérapeutes qui ne chargent rien. Maintenant, le phyto-thérapeute vend la médication; alors, c'est là qu'est sa source de revenus, ce n'est pas sur la visite elle-même. Mais la tendance semble vouloir que le phytothérapeute charge un certain montant par visite; maintenant, ce n'est pas encore établi définitivement.

Le Président (M. Joly): Merci. Moi, ça me satisfait. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Côté (Charlesbourg): Merci beaucoup. Évidemment, si vous avez la bénédiction de l'Opposition quant à la multiplication, vous pourrez y régner en roi.

Le Président (M. Joly): Ha, ha, ha! M. Gervais: On vous remercie.

Le Président (M. Joly): Merci beaucoup. Alors, au nom des membres de cette commission, à mon tour de vous remercier.

M. le député, parfait? Tout est bien?

M. Trudel: Tout est bien, merci beaucoup. (10 heures)

Le Président (M. Joly): Merci, alors nous vous libérons, c'est le cas de le dire.

Je demanderais aux membres de l'Association de médecine holistique du Québec de bien vouloir s'avancer, s'il vous plaît. Bonjour. Il me fait plaisir de vous accueillir. Dr Jean Drouin, c'est bien ça?

Association de médecine holistique du Québec (AMHQ)

M. Drouin (Jean): Oui.

Le Président (M. Joly): Je vous demanderais d'identifier les gens qui vous accompagnent, s'il vous plaît. C'est toujours pour les fins d'enregistrement des débats, de façon à ce que, quand les gens interviennent, ils puissent être identifiés au niveau de l'enregistrement.

M. Drouin: D'accord. À ma droite, il y a le docteur Michel Camirand, qui est le président sortant de l'Association; à ma gauche, le docteur Louise Comeau, qui est la vice-présidente actuelle de l'Association, et le docteur Pascale Lahaie, la secrétaire actuelle de l'Association.

Le Président (M. Joly): Merci. Je vous rappelle que vous avez une vingtaine de minutes pour nous présenter votre mémoire et, par après, les parlementaires échangeront avec vous. Alors, vous avez la parole, Dr Drouin.

M. Drouin: D'accord. Si vous le permettez, on voulait tout simplement présenter le mémoire sous forme, je dirais, de tableaux. On avait pensé le faire un peu sous forme audiovisuelle. Mais on a préparé ici un document d'une dizaine de pages qui est tout simplement un résumé. Si ça vous va, on pourrait y aller de cette façon-là.

Le Président (M. Joly): Sûrement, c'est une très bonne façon.

M. Drouin: On peut le faire circuler, à ce moment-là. C'est parce qu'on fonctionne toujours avec le principe des auditifs et des visuels.

M. Côté (Charlesbourg): Là, on va se faire donner la différence entre naturothérapie et phytothérapie.

M. Drouin: Est-ce qu'on peut y aller?

Le Président (M. Joly): Sûrement, Dr Drouin. Je vous reconnais.

M. Drouin: Alors, ce qu'on a pensé faire — même la présentation n'aura pas environ une vingtaine de minutes, on voulait plus échanger avec vous — c'est tout simplement situer les problématiques, notre réflexion, et, par la suite, y aller peut-être avec un échange.

Au départ, l'Association de médecine holistique a été fondée en 1984 autour d'un concept de santé holistique. On s'est regroupés vraiment autour du concept, et ça, c'est important, vous allez le comprendre à un moment donné, dans le sens que ce n'est pas les approches qui nous ont attirés au début, que ce soit l'homéopathie, peu importe; on s'est regroupés autour d'un concept de santé globale et on verra tantôt, en pratique, comment on travaille avec ça.

Si on va à la page 2, on s'est regroupés autour d'un concept qui, déjà, faisait son chemin en termes philosophiques. Certains se réfèrent à Smuts, à Pelletier et tout ça. Tout simplement pour y aller aussi simple, c'est que tout est relié. Alors, notre réflexion était autour de problèmes de santé où on semblait aller vers une spécialisation à outrance. Exemple, le mal de gorge qu'on prenait seulement pour le mal de gorge, sans peut-être vérifier l'environnement, l'état de santé de la personne. Il y a toute une question de réflexion sur la globalité, et ça nous a amenés à réfléchir sur cette pensée globale en santé, aidés de cette réflexion philosophique mondiale, à ce moment-là.

Donc, ce concept-là était surtout en réaction, jusqu'à un certain point, au réductionnisme analytique des sciences actuelles où on voulait prendre l'être humain séparé et, sans dire que ce n'est pas bon, on pensait aussi qu'il y avait une place pour une réflexion autre en santé globale. Et, à travers notre pratique aussi, on revoyait des gens avec soit des effets secondaires de médication; par des investigations, souvent, qui étaient plus exhaustives, on se retrouvait, finalement, avec cette

réflexion-là de globalité.

Les influences en santé, qu'est-ce qui a influencé ce concept-là? À la page suivante, on va voir aussi qu'il y a un courant oriental important. On pourrait penser à l'acupuncture, mais, évidemment, il y a tout ce courant de médecine qui a amené le nouveau concept, un concept d'énergie. Et on connaît déjà mieux l'énergie par rapport aux méridiens en acupuncture, mais il y a tout un concept qui est autour de ça, et on en parlera tantôt en recherche. C'est ce qui nous crée des problèmes, quand on parle d'énergie, pour la mesurer, pour l'évaluer, faire des recherches qui ont de l'allure.

Il y a la science aussi qui, avec la technologie, a influencé ce concept-là. On pourra y revenir aussi. Il y a surtout la demande des clients. A ce moment-là, on était dans les années soixante-quinze où il y a eu le concept biopsychosocial, les CLSC, les unités de médecine familiale, et les gens voulaient avoir une réflexion plus globaliste, plus humaine et non seulement une réponse à un symptôme, un médicament. Alors, c'est un peu autour de ce concept-là qu'on a amorcé notre réflexion.

Dans l'Association, il y a des membres réguliers qui sont des médecins. Donc, au départ, notre groupe était un groupe de médecins qui se sont réunis autour de ce concept et aussi de cette réflexion différente, tout en essayant de voir aussi comment elle peut pénétrer à travers les systèmes établis, et c'est loin d'être évident. Il y a aussi des membres alliés qui sont des pharmaciens, des dentistes, d'autres professionnels de la santé et des non-médecins qu'on décrit, nous, beaucoup plus comme des professionnels à reconnaître, ce qui est justement l'objectif de la récente commission parlementaire.

Nos actions, comme vous le voyez peut-être un peu plus loin, ont été multiples. Au départ, on a eu à discuter avec nos pairs, la corporation des médecins. On parlait d'illégal tantôt, on est aussi, nous autres, des illégaux. Même si on a l'air officiels, on ne l'est pas tant que ça. Il y a le code de déontologie auquel on s'accroche régulièrement en termes de réflexion, et on pourra y revenir aussi. On doit appliquer des principes reconnus par la science et, si on pense à l'homéopathie ou à d'autres approches, les recherches scientifiques ne sont pas terminées. On a initié certaines recherches là-dedans, mais il y a encore beaucoup de choses à prouver.

On a eu aussi des représentations importantes et il y a encore un certain travail à faire avec la Régie de l'assurance-maladie parce que, évidemment, on fait une médecine qui est beaucoup plus axée sur la prévention, et la prévention, on ne sait jamais trop comment charger ça, ce n'est pas vraiment de la psychothérapie. Donc, il y a eu des problèmes de reconnaissance, on voit, des actes qui sont faits par nos membres.

Aussi, on a travaillé beaucoup en termes d'enseignement. On a essayé de trouver des programmes d'enseignement de qualité qui, au départ, étaient tous un peu étrangers, européens, américains ou autres, et des écoles qui, au départ, sont privées, qui ont été parfois excellen- tes, parfois décevantes, et on pourra y revenir. Et on a toujours continué à faire une action populaire. On pense que le concept de santé globale, c'est avant tout la vraie médecine préventive. On l'a dit tantôt, les gens doivent prendre leur santé en main, faire une certaine réflexion avant de consulter. On a un enseignement à faire au niveau de la population, et cet enseignement-là était un enseignement qu'on a fait soit en termes de conférences, d'animation. On a un rôle. On pense que le rôle du médecin ne devrait pas être seulement dans son bureau. On pourrait rencontrer des groupes, on peut informer tout en donnant la pensée la plus juste possible. Toujours, dans tout ça, responsabiliser l'individu par rapport à sa santé.

Si vous prenez l'annexe que vous avez, la page séparée, c'est peut-être là qu'on peut voir comment on peut se retrouver en termes de santé globale, en termes de consultation, si on veut, dans un bureau. Comment ça se passe? On pourrait se le demander facilement. C'est un plan qui regroupe un peu le type de réflexion du médecin holiste à quelques variantes... Évidemment, ce n'est pas tout le monde qui est d'accord, mais il y a quand même un plan où on se retrouve.

Alors, on voit, au centre, le client avec ses symptômes; il présente un ou plusieurs symptômes. En haut, vous retrouvez un concept de santé, de prévention où l'individu devrait se poser ces questions-là sur sa santé, dans un bilan de santé annuel ou peu importe, et ces conseils-là touchent des activités autant... Bon, vous voyez apparaître le génétique. Le génétique, c'est sûr qu'il y a la notion du code génétique, mais il y a aussi la notion de l'énergie de la famille, comment ça s'est passé dans la dynamique familiale. C'est une chose qu'il faut aller vérifier et qui va souvent générer certaines pathologies. La nutrition, je pense qu'on s'entend tous: la qualité de la nutrition, mais aussi avec qui on mange, quel est le comportement. (10 h 10)

On voit aussi la notion de ce qu'on connaît sur le stress, l'évaluation en termes de son temps pour soi, de ses relations biopsychosociales dont on parle si souvent, nos relations affectives. La notion de mouvement, qui va être révisée. La notion d'environnement aussi, l'air qu'on respire, les symptômes d'allergie à l'environnement, de réaction, d'hypersensibilité, et on sait que, de plus en plus, notre habitat peut nous rendre malades.

Et le dernier qui, parfois, a créé certaines commotions dans les milieux médicaux, le côté spirituel, parce que ce n'est pas évident, en médecine, de commencer à parler de spiritualité. On pense toujours qu'on va vendre des cartes de secte, puis qu'on va partir quelque chose, alors que, nous autres, on voit ça fort simple, c'est le sens de sa vie. On sait que l'individu qui génère des énergies négatives, qui fonctionne de façon très négative, va aussi se mettre dans un potentiel de générer des maladies. Donc, dans un sens, il y a une évaluation préventive globale. Sans dire: C'est tes nerfs, c'est ta nutrition, on fait ça comme on ferait n'importe quel test, jusqu'à un certain point, médical.

En bas, vous retrouvez les traitements et les inves-

tigations et, de ce côté, vous avez deux pôles: d'un côté, la médecine scientifique, parce qu'on est médecin aussi et on pense que, si un individu a une fracture, bon, ce n'est pas le temps de faire des incantations, c'est le temps de lui mettre un plâtre. Ça, je pense qu'on s'entend tous là-dessus. Donc, il y a une notion d'investigation, d'ajuster les choses et, de l'autre côté, de recherche de médecines qui, pour l'instant, sont classées moins scientifiques, mais on va voir aussi qu'on va aller chercher des gens sur un processus. Et ces approches-là sont excellentes, elles ont toutes des actions, ça, c'est sûr, et la recherche, je pense qu'on la favorise, devra être faite, à mon avis, dans les années futures.

Mais ce qu'on vise à travers tout ça, ce n'est pas la promotion d'une approche — ce n'est pas de dire: Tout le monde devrait se traiter par telle approche — mais beaucoup plus un processus, qu'un individu comprenne un processus de guérison et ait un choix éclairé. Donc, le client est au centre, il y a une négociation thérapeutique à travers différentes approches qui peuvent être médicales, qui peuvent être d'autres approches, et le but de tout ça, c'est d'enrichir la médecine. On a souvent été perçus comme des gens qui voulaient détruire un concept médical actuel, alors qu'on pense que la médecine est correcte; il y a des choses à ajuster et il y a un concept, je dirais, de responsabilisation à donner au client. Ça, c'est notre façon de travailler sur la globalité. Si vous voulez, on y reviendra. Je vous l'ai présentée peut-être rapidement.

Et qu'est-ce que nous, à l'Association, on recommande? À ce moment-là, on se réfère aux deux dernières pages de notre mémoire où on voit les propositions à la commission. Évidemment, on a réfléchi sur notre déontologie, parce que c'est sûr que notre pratique actuelle nous met souvent dans le trouble avec la déontologie, mais on travaille aussi beaucoup à la naissance ou à la reconnaissance d'une nouvelle éthique, jusqu'à un certain point. On pourrait revenir là-dessus. Il y a des règles du jeu. On ne peut pas dire n'importe quoi à n'importe qui, et il y a des règles du jeu à aller faire, à travailler là-dessus.

On a à préciser notre place dans un système de rémunération du style Régie de l'assurance-maladie et compagnie, et on a surtout à avoir, à nécessiter et à favoriser de la recherche, des centres de recherche, à établir des groupes de chercheurs neutres. Vous allez me dire: II y en a de la recherche là-dedans. C'est sûr, il y a des études qu'on a citées dans notre mémoire, mais on a des groupes de recherche, d'évaluation des mécanismes, de certaines approches et, surtout, de l'éthique. Il y a une recherche aussi en éthique à faire. Ce n'est pas juste de savoir comment telle approche fonctionne. Il y a une éthique à développer.

Il y a un principe important aussi, en quatrième proposition. On recommande une banque d'informations. Actuellement, on dit: Bon, est-ce qu'on fait une nouvelle corporation, tout ça? Et on pense qu'on n'a pas l'information globale. Il y a de l'information de toute part. Pour avoir travaillé un certain temps dans le dos- sier, on a évalué, justement, que cette information-là, finalement, se retrouve à différents niveaux, mais on n'a pas l'information complète, et c'est heureux de voir la commission parlementaire, actuellement, en réflexion là-dessus, parce que cette information-là, conjointement, ajoutée à l'information que possède l'Office des professions par rapport à toute l'évaluation qu'il en a faite, c'est quand même intéressant et important.

Par la suite, on pense que, une fois que cette information est faite, il y a un consensus, il y a une réflexion sur des approches, et là, on pourra se prononcer sur la phytothérapie, l'homéopathie, les différentes approches. Il y a des approches aussi qui sont difficiles à tenir. Tantôt, M. le ministre demandait quelles approches seraient difficiles à tenir. Il y en a qui sont difficiles, mais je pense qu'il est encore très tôt, actuellement, pour le dire parce qu'on n'a pas toute l'information sur toutes les approches. Il y a des approches qui sont éthi-quement plus reconnues, jusqu'à un certain point, puis il y en a d'autres qui émergent à tous les jours. Et le dernier relevé nous donnait jusqu'à 255 médecines douces; alors, probablement qu'il s'en est inventé 2 ou 3 depuis le début de la présentation.

Aussi, on demande d'encadrer, de permettre un cadre, et c'est surtout un cadre éthique, je pense, jusqu'à un certain point, plutôt que de légiférer, parce qu'on pense que le danger n'est pas si grand que ça. Je dirais, le danger important est un danger éthique de quelqu'un qui abuserait et qu'on voit, nous, souvent comme médecins, puis ça ne veut pas dire qu'on est meilleurs que les autres, c'est-à-dire que, d'un certain point, on va voir des gens qui vont se faire promettre: Vous avez un cancer, il n'y a rien là, l'homéopathie ou telle approche va vous le guérir. Alors, ça, c'est, à mon avis, éthiquement important et presque criminel, jusqu'à un certain point, alors qu'on peut agir avec l'homéopathie si on la situe dans un bon niveau. Je parle d'homéopathie, mais toute approche pourrait être évaluée dans le même sens.

Alors, qu'est-ce qu'on suggère? C'est notre dernier tableau. On suggère plus une réflexion étapiste. Dans un premier temps, un certain moratoire qu'on plaçait de cinq ans, bon, qui pourrait être rediscuté, qui nous permettrait, premièrement, d'avoir une commission ou une réflexion sur l'information, d'avoir une banque, un groupe qui ramasse toute l'information pour être capable, par la suite, de faire une synthèse et d'amener les groupes à faire des consensus. Vous savez que, même les groupes entre eux, ce n'est pas évident, faire des consensus. Et on a connu la bataille et le problème de l'acupuncture. Moi, j'ai vécu ce dossier-là depuis 20 ans. Ça risque d'arriver en homéopathie, ça risque d'arriver dans les...

Alors, il y a des consensus importants à faire et on suggère, nous, des projets-pilotes qui seraient basés un peu sur l'image des unités de médecine familiale de certains CLSC, soins, enseignement, recherche, ou les comités de citoyens... Parce qu'on oublie toujours le client là-dedans. Les gens ont leur mot à dire. Il y a des gens qui sont abusés dans tout ça, il y a des gens qui

ont des bons résultats. Et, dans un projet-pilote, il y aurait des comités de consommateurs de ce style de soins là avec un mécanisme d'évaluation du processus, autant du processus éthique que de la recherche, des méthodes d'enseignement, et, par la suite, on essaie, des deux côtés, d'aller vers un consensus.

Et vous savez comme moi que la réflexion de fond, c'est sur la Loi médicale, jusqu'à un certain point. Un jour, il va falloir réfléchir à la fois sur le code d'éthique et sur la Loi médicale. Mais je pense qu'en termes de société, c'est peut-être un peu tôt pour dire: Aujourd'hui, on s'installe, puis on change la Loi médicale. Quoiqu'il y ait une réflexion qui va se faire à travers notre société actuelle et aussi à travers tout ce consensus. Mais, si on a l'information, on est capables de faire les bonnes propositions au bon moment.

Alors, voilà en quelques minutes ce résumé de notre réflexion. On est fort intéressés à échanger avec vous, surtout là-dessus.

Le Président (M. Joly): Je vous remercie, Dr Drouin. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. le Président. C'est rafraîchissant de vous entendre et c'est certainement l'une des bonnes contributions à cette commission, à ce moment-ci. Remarquez que ça ne me surprend pas, compte tenu de ce que vous avez fait. Si je ne m'abuse, vous avez été intimement liés à la recherche qu'a menée l'Office des professions aussi. Donc, on abordera cet aspect-là aussi. Ça me paraît être un des documents fouillés dont pourra prendre connaissance la commission, et c'est pour ça, je pense, qu'il faut prendre le temps de l'examiner. De la manière dont il est présenté aussi, c'est assez pédagogique, merci, et je pense qu'on réussit un peu à accrocher tout le monde.

Vous proposez qu'il y ait un moratoire. Commençons par ça. Mettons fin à la guerre, donc à la clandestinité, à l'illégalité et prenons le temps d'asseoir sur des bases scientifiques, autant que possible, un certain nombre de thérapies qui, en cours de route, pourraient faire l'objet de projets-pilotes, en espérant que l'accouchement soit plus facile dans ces cas-là que dans d'autres cas. (10 h 20)

Ça fonctionnerait comment, cette période de moratoire? Ça veut dire que tout ce qui existe actuellement — là, je porte un jugement de valeur; je ne serai pas pris avec, là — bon comme pas bon... J'imagine qu'il y a peut-être des choses qui ne sont pas très, très correctes. Que vous preniez soin de dire, vous aussi, que peut-être, au cours des derniers mois, des dernières années, il a pu en apparaître quelques-unes, compte tenu d'un moment propice, ça ne fait peut-être pas très, très sérieux non plus. Par contre, il ne faut pas jeter du discrédit sur ceux qui, depuis de nombreuses années, travaillent pour que, de manière scientifique et professionnelle, on puisse arriver à reconnaître la valeur et les bénéfices qu'on peut en tirer. Alors, ça marcherait comment, le moratoire?

M. Drouin: Au départ, si on revient toujours sur la réflexion étapiste, c'est qu'il y aurait, à mon avis, un an pour, justement, réfléchir. On a déjà tous une idée des thérapies qui sont, je dirais, plus majeures par rapport à celles qui sont mineures. Et, justement, pour donner à la réflexion le temps, parce qu'il y a peut-être une thérapie qui n'a pas l'air, pour l'instant, pour nous, majeure, mais qui pourrait l'être, je pense que, dans un étapisme, colliger l'information viendrait avant de partir le projet-pilote. Mais je verrais un délai d'un an; je pense que c'est faisable actuellement, surtout avec l'information qu'on possède, que les associations possèdent et que l'Office des professions possède. Finalement, ce serait réalisable en se disant: Oui, il y a six thérapies dites plus majeures qui ont un code d'éthique, qui ont un mécanisme surtout de fonctionnement. Parce qu'il y a d'autres thérapies. On peut parler de la relaxation, bien, c'est une thérapie en soi, mais il n'y a pas un système de pensée autour de ça comme pourrait en avoir l'ostéopathie, comme on pourrait en avoir en homéopathie ou dans différentes approches. Donc, il y a une grille d'analyse avec des thérapies qui ont aussi fait leurs preuves un peu partout dans le monde, jusqu'à un certain point. Donc, un an dans cet étapisme-là, on s'arrête tout le monde, on collige l'information et, par la suite, ces thérapies-là sont incluses dans les projets-pilotes d'après l'information qui a été recueillie à ce moment-là.

M. Côté (Charlesbourg): Lorsqu'on dit moratoire et qu'il faudrait mettre en place cette année de réflexion, et que vous évoquez le travail qui a été fait à l'Office des professions, ça veut dire qu'il faut inclure, dans ces gens qui réfléchiraient, l'Office.

M. Drouin: Oui.

M. Côté (Charlesbourg): Les ministères concernés, j'imagine.

M. Drouin: Oui. Exact.

M. Côté (Charlesbourg): La Corporation professionnelle des médecins?

M. Drouin: Oui, aussi.

M. Côté (Charlesbourg): C'est ce que je comprends parce qu'à partir du moment où ce sera un affrontement continuel et perpétuel il n'y a pas grand possibilités de salut.

M. Drouin: Exact.

M. Côté (Charlesbourg): Et l'approche que vous proposez, c'est davantage une approche complémentaire qu'une approche d'affrontement ou d'enlever le pain à Pierre, Jean, Jacques qui pratiquent une médecine dite conventionnelle, mais qui apporte aussi son soulagement.

M. Drouin: Exact.

M. Côté (Charlesbourg): Je me rappelle de ça, moi. Dans la réforme, quand on a tenté de changer des choses, je me suis aperçu que le citoyen consommateur, il se sentait davantage soulagé par le médecin, même si c'étaient des pilules, que par le ministre qui pouvait passer des lois.

M. Drouin: Oui. Des voix: Ha, ha, ha!

M. Côté (Charlesbourg): Ça, ça demeure toujours une réalité qu'il ne faut pas oublier. Et, à 16 000 médecins à travers le Québec, il y en a encore qui font du bien à du monde.

M. Drouin: Ah oui!

M. Côté (Charlesbourg): Comme vous en êtes, vous êtes à même de le constater. Mais ce qui est intéressant, c'est que vous dites aussi: Ce n'est pas une fin en soi; il faut qu'il y ait d'autres choses si on veut être capables de régler un certain nombre de problèmes. Et l'approche préventive, à ce moment-ci, peut occuper davantage de place. Donc, c'est bien plus un forum pas mal plus large de discussion où les acteurs seraient à l'intérieur et non pas exclus, menant à certains projets-pilotes dans des spécialités alternatives et qui, à ce moment-là, aboutiraient au bout de cinq ans, le temps de prendre le temps. Et avec cette reconnaissance plus scientifique et, finalement, reconnaissance légale par la suite.

M. Drouin: Oui.

M. Côté (Charlesbourg): À partir du moment où cela est fait, parce qu'il faut aller plus loin, que tout fonctionne dans l'huile, comme des projets-pilotes de sages-femmes, il n'y a aucun problème...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Côté (Charlesbourg): ...tout le monde marche de bonne foi, puis on y arrive, au bout de cinq ans, on dit: Bon, parfait, c'est concluant. Parce que, dans l'esprit de ceux qui s'opposent, c'est qu'à partir du moment où tu fais un projet-pilote, que tu commences, ils ont déjà conclu qu'on avait conclu que c'était concluant, bon, puis que c'était une question de gagner du temps pour finir par y arriver. Mais concluons tout de suite que c'est effectivement valable, avec modifications, ainsi de suite. Qui va chapeauter l'exercice et qui va être le juge de cette reconnaissance légalisée, parce que c'est ça qui va arriver, de cette pratique légalisée? Et qui va avoir cette responsabilité? Est-ce que c'est l'Office des professions?

M. Drouin: Actuellement, c'est la structure qu'on aurait pour chapeauter ou travailler avec ce projet-pilote. En tout cas, c'est une suggestion. Parce que l'information doit être colligée et, par la suite, il y a un mécanisme légal. Dans le fond, le mécanisme légal est la Loi médicale et le code de déontologie du côté médical, en disant: On a un projet-pilote avec une règle d'éthique, avec des thérapies, avec des thérapeutes reconnus et des thérapeutes à reconnaître, et ce projet-pilote peut être dans des CLSC, il peut être dans des centres privés avec des investissements privés, il peut être dans des unités de médecine familiale. Il y a un chapeau légal qui tient les règles du jeu et, pour l'instant, un peu comme on disait tantôt, créer un autre office... Je pense qu'il est très prématuré de dire: On crée un office des thérapies alternatives qui va chapeauter ça. J'irais avec l'Office actuel, l'Office des professions, qui pourrait travailler sur l'évaluation aussi, parce qu'il y a un mécanisme d'évaluation qui doit être mis en marche. Il y a un moratoire légal, ça, je pense que c'est un rôle de l'Office, et il y a un rôle de collaboration, que ce soit avec des groupes de chercheurs, des groupes universitaires qui mettraient en marche un mécanisme d'évaluation à la fois de l'éthique et aussi des thérapies, finalement. À mon avis, ce serait l'Office des professions qui le pourrait, en tout cas jusqu'à un certain point, s'il veut bien assumer ça.

M. Côté (Charlesbourg): Donc, de votre point de vue, vous qui connaissez très, très bien la pratique médicale scientifique par rapport à la médecine moins scientifique — si je reprends votre tableau — comme vous connaissez les deux, j'imagine que, pour vous, c'est le meilleur moyen de faire progresser les choses autrement que d'arriver avec une loi qui légaliserait et qui braquerait, finalement... Parce que la solution, à ce que je comprends, de votre point de vue à vous, si la loi intervient cinq ans après le début de l'opération, c'est que ce serait malvenu d'avoir une loi dès maintenant.

M. Drouin: Oui.

M. Côté (Charlesbourg): Est-ce qu'un avant-projet de loi déposé à l'Assemblée — on connaît la valeur d'un avant-projet de loi — serait de nature à faire progresser les choses?

M. Drouin: Moi, je pense que oui, mais il y aurait quand même une inquiétude sur l'affrontement. En tout cas, on se questionnerait là-dessus, sur l'affrontement: est-ce qu'on ne recule pas? En tout cas, je serais porté plus à tenter un consensus avec l'hypothèse du moratoire où les gens sont obligés, jusqu'à un certain point, de s'asseoir. On parlait des intervenants, de la corporation des médecins, et compagnie, et de tous les groupes concernés, l'Office des professions; les gens sont obligés de se parler pour arriver à un consensus. Un avant-projet de loi pourrait être intéressant dans le sens qu'on annonce les couleurs, qu'on dit: II va se passer quelque chose. Donc, il y a une énergie, il y a comme quelque chose qui s'en vient. Je craindrais,

jusqu'à un certain point, un affrontement qui pourrait revenir un peu à celui de la loi 120, finalement, parce qu'on touche l'essence en médecine, qui est la Loi médicale. Alors, ce n'est pas peu dire, finalement, dans ce domaine-là. Si je répondais, au départ, d'après mes convictions, je dirais oui. Si je le regardais d'une façon réaliste, je dirais: Bien, peut-être, soyons prudents là-dessus.

M. Côté (Charlesbourg): Mais ce n'est pas possible si on ne touche pas à la Loi médicale. Peu importe, que ce soit par des projets-pilotes ou que ce soit par une légalisation, dans la mesure où on retiendrait votre proposition, il me paraît évident qu'il faudrait apporter des amendements à la Loi médicale au minimum pour permettre l'exercice des projets-pilotes.

M. Camirand (Michel): Exact. Mais ce qu'on constate, nous autres, c'est qu'il y a une évolution des mentalités au niveau du corps médical comme tel par rapport aux thérapies alternatives. En tout cas, pour ce qui a trait à l'omnipratique, la pratique de médecine générale ou familiale, de plus en plus de médecins collaborent avec des thérapeutes non médecins. La Corporation, l'année passée, a intitulé son assemblée annuelle «La Corporation et les médecines douces». Il y a un intérêt qui est là.

M. Côté (Charlesbourg): Allez plus loin, parce que je ne me contente pas de cette déclaration-là. Donnez-moi des exemples quand vous dites qu'il y a une ouverture...

M. Camirand: O.K. Une ouverture, c'est-à-dire une ouverture, pas de la Corporation comme telle, pas du...

M. Côté (Charlesbourg): Pas des élus, là.

M. Camirand: Pas des élus. Bien, ils ne sont pas élus, mais... Oui, ils sont élus.

M. Côté (Charlesbourg): O.K. En tout cas, j'ai compris ça. (10 h 30)

M. Camirand: De la base, il y a une ouverture par rapport aux médecines douces. Les gens ne se braquent pas d'emblée contre ces choses-là. À titre personnel, j'ai été invité au Collège des médecins de famille, l'année dernière, à présenter ma vision de l'éthique médicale; alors, ça n'a pas soulevé un tollé de protestation. Un avant-projet de loi risque de braquer les médecins derrière leur profession, de dire: Là, on va suivre notre chef, on est menacés. C'est dans ce sens-là. Je pense qu'il y a quand même une évolution qui se fait au niveau des médecins et, comme le docteur Drouin le mentionnait, il faut plus forcer les gens à obtenir l'information. Nous autres, on pense que la Corporation professionnelle des médecins n'a pas toute l'information, non plus. Elle se ferme à certaines informations. Puis la forcer à participer à des séminaires, premièrement, va donner l'image, au niveau du gouvernement, qu'il y a une collaboration et, deuxièmement, va amener de l'information à un plus haut niveau, au niveau corporatif.

M. Côté (Charlesbourg): Est-ce que, dans votre esprit, faire de l'homéopathie, de l'ostéopathie, de la naturopathie, de la phytothérapie ou autres dans celles qui sont mentionnées là, ça devrait nécessairement être pratiqué par un médecin, un vrai docteur qui va se chercher des spécialités, ou si ça doit être pratiqué par quelqu'un qui est, disons, sous la surveillance d'un vrai docteur?

M. Drouin: Je pense qu'au départ on ne veut pas que toutes ces approches-là soient seulement médicales. Ce qu'on veut, sans nécessairement aussi qu'il y ait la surveillance d'un vrai docteur, c'est qu'il y ait une éthique. Il y a des thérapies qui n'ont peut-être pas besoin d'un diagnostic médical, si on est sur le conseil santé, alimentation, et tout ça. Il y a différents niveaux, finalement, mais on ne pense pas que la médecine devrait tout récupérer, finalement, les thérapies et essayer de les contrôler, un peu comme ce qui est arrivé en acupuncture et qui — en tout cas, à mon avis, c'est un avis très personnel et non de l'Association — a été difficile à vivre, finalement, pour tout le monde, autant pour les médecins que pour les gens qui y étaient. Alors, on ne verrait pas un concept où la médecine contrôle ou travaille sur la déontologie, mais plus un cadre qui s'établit.

M. Côté (Charlesbourg): Vous avez donc un problème et, vous l'avez dit, vous avez poussé l'honnêteté, dans votre présentation, à le dire, certains problèmes avec le code de déontologie. Dans la pratique de tous les jours, quand vous recevez quelqu'un — prenez-moi un cas et tentez de m'illustrer ça — c'est quoi la problématique que vous avez par rapport au code de déontologie et comment vous réussissez à vous en sortir sans vous faire poursuivre par la corporation professionnelle?

M. Drouin: Disons qu'au départ il y a eu des cas et, actuellement, il y a des cas aussi de médecins qui sont poursuivis par rapport au code de déontologie et qui sont relativement dans le trouble pour l'instant. Mais, si on le regarde de façon pratique, pour répondre à votre question, vous vous présentez au bureau avec une otite, un problème d'infection dans l'oreille. À travers tout ça, j'ai plusieurs choix, jusqu'à un certain point. J'ai le choix de faire le diagnostic médical — évidemment, mon diagnostic est un diagnostic d'otite — dans une grille où, médicalement, on se dirait: Cette personne-là devrait prendre des antibiotiques; elle devrait prendre des antibiotiques pendant tant de temps avec un décongestionnant ou peu importe. De l'autre côté, toujours dans la même grille, j'ai le choix de dire: Je pourrais travailler ou traiter en homéopathie, ou en

ostéopathie, ou avec différentes autres approches, en phytothérapie ou autres — je ne veux pas en prendre une plus que l'autre — et avoir un résultat aussi et basé sur des recherches.

Entre autres, il y a une recherche suédoise où on dit: L'otite traitée ou pas traitée, on arrive au même taux de complications. Parce que l'histoire, c'est toujours un problème de complications sur la mastoïde; on est toujours sur l'otite. Sauf que, si je la traite de cette façon-là, à ce moment-là j'applique des méthodes non scientifiquement reconnues, que ce soit en homéopathie, pour dire quelque chose, ou que ce soit en phytothérapie, par rapport à un traitement qui, actuellement, dans un consensus, est assez reconnu, qui est le traitement d'antibiotiques dans l'otite et on sait qu'il est fait abondamment.

Alors, d'un côté, je m'oppose à un article qui me dit qu'on devrait utiliser des principes actuellement reconnus par la science et, s'il y avait une révision, par le comité de discipline, de ma pratique, je pourrais avoir une poursuite au comité de discipline, à ce moment-là, là-dessus. Le même raisonnement s'applique sur toute autre pathologie. On nous dit actuellement, si on regarde les discussions qu'on a avec la corporation des médecins, qu'on peut utiliser des approches là où c'est le domaine de la médecine fonctionnelle ou psychosomatique. Or, ça, c'est très vague, parce qu'à notre avis l'interprétation de «psychosomatique», tout est psychosomatique, finalement, jusqu'à un certain point. Il y a toujours une partie des deux dans le raisonnement, et ça nous donne une zone grise. Et, actuellement, il y a des médecins qui sont en poursuite, qui sont en évaluation, justement à cause de ça, pour ne pas avoir respecté les principes de la science.

Je vous avoue qu'actuellement ce qui est le plus difficile par rapport aux médecins, c'est l'homéopathie. Un médecin qui pratique des médecines manuelles, qui pratique l'ostéopathie, on n'a pas de cas ou peu de problèmes, finalement, de ce côté-là. Par contre, du côté de l'homéopathie, actuellement, il y a comme une réflexion ou une répression. Il y a plus de répression si le médecin pratique des médecines dites plus énergétiques, à ce moment-là. Alors, ce sont ces articles, qu'on a cités dans notre «rapport», du code de déontologie qui nous rendent, dès qu'on utilise ces principes-là...

M. Côté (Charlesbourg): Est-ce que je comprends que, pour l'homéopathie pratiquée par un médecin, un vrai docteur, vous risquez d'être poursuivis par la corpo?

M. Drouin: Exact.

M. Côté (Charlesbourg): Parce que là, scientifiquement, il doit y avoir quelque part des preuves de faites. Lorsqu'on se retrouve dans certains pays européens comme la Hollande, l'homéopathie est reconnue lorsque pratiquée par un médecin.

M. Drouin: C'est exact.

M. Côté (Charlesbourg): II y a un premier problème, là. Deuxièmement, l'homéopathie pratiquée par quelqu'un d'autre qu'un médecin, ça, c'est une autre affaire. Mais, même dans le cas de l'homéopathie pratiquée par un médecin — ce qui se fait ailleurs à travers le monde, disons, règle générale, par des gens qui sont venus au monde avant nous autres, il faut bien se comprendre — la Corporation pourrait poursuivre?

M. Drouin: Oui, et elle poursuit effectivement. Dans des cas où c'est plus évident, dans des pathologies comme l'otite, on ne poursuivra peut-être pas si vous donnez un produit homéopathique pour aider quelqu'un à dormir ou quoi que ce soit. Mais, actuellement, au moment où on se parle, il y a une poursuite et il y a des révisions de dossiers du comité d'évaluation des actes de la Corporation où on dit aux médecins: L'homéopathie, ce n'est pas scientifique. Si on regarde, au départ, pourquoi, si on donne le bénéfice du doute, c'est que l'homéopathie n'a pas fait sa preuve d'efficacité. Comment ça fonctionne, l'homéopathie? On ne le sait pas. Finalement, c'est là le problème: de petites doses diluées qui auraient une action, et tout ça. Par contre, il y a des résultats cliniques, et même en médecine vétérinaire. D'un côté, on se dit: C'est l'effet placebo uniquement. Et toutes ces approches-là tournent beaucoup autour de cet effet placebo, finalement, qui est un effet majeur, l'effet thérapeutique.

M. Camirand: II faut bien comprendre aussi que le code de déontologie était supposé, à la base, équilibrer deux pôles — parce que l'article 2.02.01 dit que le médecin a le devoir de protéger le bien-être du patient et l'article 2.03.14 dit qu'il doit exercer sa profession selon des principes scientifiques — qui sont corollaires. Alors, le médecin, lui, est placé devant un dilemme. Son patient, au point de vue bien-être, réclame un traitement en homéopathie où les traitements antérieurs ont été inefficaces. Pour le bien-être du patient, le médecin décide d'offrir à son patient un traitement qui n'est pas reconnu par la science. Les jugements actuels ont montré que le principe no 1 qui vaut pour le bien-être du patient ne vaut plus à ce moment-ci. Il y a même un cas d'un médecin homéopathe qui a été poursuivi à cause qu'il avait donné une homéopathie pour une hyperthy-roïdie. L'hyperthyroïdie a guéri par elle-même, on va dire, mais le médecin a été poursuivi, même si le patient allait mieux, parce qu'il avait utilisé un traitement qui n'était pas reconnu par la science.

Donc, la science comme telle, c'est la base de la médecine moderne, et la Corporation ne veut pas démordre de ça. C'est facile à comprendre aussi parce que, si on axe la médecine sur une médecine plutôt axée sur l'individu comme tel, on dit: On va pratiquer une médecine globale où le médecin va être le propre juge de ce qu'il va donner à son patient, tout en éclairant son patient sur ce qu'il lui donne, à ce moment-là, ça enlève beaucoup de possibilité d'évaluer la pratique médicale. Les corporations craignent aussi une espèce de chaos et le retour de l'arbitraire. Alors, c'est un peu cette problé-

matique-là qui anime la Corporation actuellement. (10 h 40)

M. Côté (Charlesbourg): J'aurais eu d'autres questions, mais je vais donner une piste à mon ami, le député de l'Opposition. J'aimerais ça, en cours de route, si vous pouviez répondre, vous qui avez été un consultant au niveau de l'Office des professions. Je ne veux pas vous rendre mal à l'aise, mais l'avis qu'a émis l'Office va-t-il assez loin ou pas? Soyez bien à l'aise d'y répondre. Mais, compte tenu de l'excellent rapport qu'on a là qui tente de faire avancer les choses, que ce n'est pas en parfaite harmonie, cette proposition-là, avec ce que propose l'avis de l'Office, je veux juste comprendre où a été le bogue à l'Office pour ne pas aller dans le sens que vous souhaitez. Mais vous répondrez sur le temps de mon ami, le député de Rouyn-Noranda, je n'en ai plus, moi. Ha, ha, ha!

Le Président (M. Joly): Merci, M. le ministre. M. le député de Rouyn-Noranda—Témiscamingue, je ne sais pas si c'était la question que vous vouliez lui poser aussi.

M. Trudel: Répondez donc, là! Des voix: Ha, ha, ha!

M. Trudel: Allez-y! Répondez donc! Ça va nous épargner ce temps-là. Je commencerai après.

M. Drouin: Je pense qu'au départ, quand l'Office a fait ses recommandations, il l'a fait dans le cadre d'un organisme gouvernemental et dans le cadre aussi d'un étapisme. C'est-à-dire que, déjà, moi, j'étais satisfait de voir qu'un organisme officiel se penchait sur ces approches-là, acceptait de rencontrer tous les groupes et émettait une proposition en disant: Oui, peut-être qu'on pourrait aller plus loin, sauf que ces thérapies-là, pour l'instant, ne sont pas dangereuses avec l'information qu'on avait. Puis, si on regarde tout ça, d'un côté, les corporations reconnues pourraient chapeauter, puis ça, c'est un temps actuel. Alors, moi, j'étais très à l'aise avec ces recommandations-là dans un cadre d'un continuum, si on veut.

Maintenant, moi, je pense qu'on ne doit pas rester là et on dit: Bon, il y a une étape, il y a un organisme gouvernemental qui a regardé ça, il y a des recommandations d'un certain statu quo. Je pense, si on regarde les groupes, c'est un peu ça. On dit: Bon, bien, d'un côté, ce n'est pas dangereux; de l'autre côté, les corporations, réglez tout ça, puis il y a l'Office de la protection du consommateur, de l'autre côté, parce que c'est un service santé possible. Parfait. C'est excellent dans un début d'une réflexion, parce qu'on commence à réfléchir là-dessus, comme société plus large, avec le gouvernement actuellement. La commission parlementaire actuelle, à mon avis, nous permet d'aller à un cran supérieur avec l'information qu'on a là et de collaborer, si on veut, avec l'information de l'Office. Et, nous, notre «rapport» se situe dans le sens de dire: Oui, bien, allons donc de l'avant, passons à l'action, parce que, là, il y a des problèmes plus importants; sinon, on ne parlera plus de ces approches-là ou on va continuer la chasse aux sorcières.

C'est la raison pour laquelle je vois ça dans, peut-être, en apparence, une contradiction, mais dans un continuum où je me sens très à l'aise, et j'étais déjà, moi, pour qu'il y ait une commission à l'Office des professions sur ces approches-là. Moi, j'étais tout à fait heureux. Et il y a un bout à faire encore, c'est sûr.

M. Trudel: Merci. Alors, je veux vous souhaiter, au nom de l'Opposition, la bienvenue à cette commission parlementaire. Effectivement, jusqu'à maintenant, c'est une importante contribution que vous apportez à la réflexion qui a été amorcée hier matin en matière de reconnaissance et, disons, de classification des concepts, et d'ordonner à quelque part les objets qui sont soumis à notre attention. Ça nous permet de voir qu'on peut faire une certaine distinction quant aux objets qui sont traités et qui font l'objet de pratique de la part d'un certain nombre de thérapeutes, entre guillemets, eu égard à la santé des Québécois et des Québécoises. C'est important, votre contribution, parce que vous êtes membres de l'une des corporations qui, très nettement, est, ici, la plus remise en question et qui, disons-le, c'est de commune renommée au Québec, exerce un corporatisme le plus étroit que l'on peut constater dans l'ensemble de la reconnaissance. Ah, un chat s'appelle un chat, quoi! Il faut bien le dire. On constate même, avec un certain nombre de réponses que vous venez d'apporter au questionnement du ministre, que, probablement, les membres de la Corporation professionnelle des médecins, à tout le moins, évoluent plus vite que la Corporation elle-même.

Là, il faut poser la question très carrément. Au moment où l'Assemblée nationale a adopté un projet à l'unanimité, par exemple, pour la reconnaissance de projets-pilotes et de la pratique des sages-femmes — je le fais exprès pour extensionner le terme — où on s'entend, en général, entre Québécois et Québécoises, pour dire qu'on ne nie jamais les progrès scientifiques de la médecine ou les progrès de la médecine scientifique, à preuve, la réduction du taux de mortalité infantile, mais où, par ailleurs, il y a des femmes qui mettent au monde des enfants et qui voudraient que ça se passe dans d'autres conditions, il y a une corporation professionnelle, qui s'appelle la corporation des médecins du Québec, qui nous empêche de danser. Vous qui êtes de cette Corporation et qui nous présentez des avenues pour en arriver à une certaine reconnaissance d'une certaine approche, qu'est-ce qu'on va faire pour faire changer la Corporation professionnelle des médecins et l'élite qui s'y retrouve pour faire en sorte que le corporatisme ne prenne pas le dessus sur la protection du public, sur l'évolution, sur le développement et sur la prise en charge? Qu'est-ce qu'on va faire pour faire changer la corporation des médecins et ce corporatisme étroit que l'on pratique depuis un très grand nombre d'années?

M. Drouin: C'est un question assez majeure que vous posez là.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Drouin: Rapidement, je pense que, d'un côté, il y a un consensus social. Si l'on regarde les gens, il y a une réflexion et pas nécessairement sur les thérapies alternatives, mais sur la prise en charge de la santé, de mieux manger, et tout ça. De l'autre côté, il y a une réflexion légaliste, si on veut, pour dire: La Corporation devrait réfléchir sur peut-être certains règlements. Donc, il y a l'aspect légal de l'affaire. Comment la faire changer? À mon avis, je ne pense pas qu'il faut y aller de façon très brutale, mais y aller à travers des consensus à travers des groupes qui sont obligés de se parler. Je pense qu'actuellement c'est un peu ça, le problème, que la Corporation réglemente d'un côté, puis c'est sûr que la loi est là et toucher à la loi, finalement, ça amène, encore là, cet affrontement. Il y a une obligation, quelque part, d'un cheminement, d'avancer. Or, il y a un groupe, un peu comme on en parlait tantôt, qu'il faut réussir à faire asseoir ensemble et à se dire: Bon, il y a un consensus et des règles du jeu, même si c'est difficile et qu'il y a un problème. Je pense qu'on favorise beaucoup plus, nous, la notion de consensus que la notion d'affrontement légal.

Si on regarde de l'autre côté comment ça pourrait se régler, il y a la notion de moratoire. Mais ça peut se régler aussi d'une autre façon, en Cour suprême sur la Charte des droits et libertés. Je pense que c'est une autre action qui pourrait être faite. Nous, on ne la préconise pas, parce que je ne voudrais pas être la personne. .. Peu importe qui fait les frais de la cause, c'est très difficile à vivre tout le long et on est sur le combat. Donc, on essaie de se dire: II y a de l'information, comme le disait le docteur Camirand, qui n'est peut-être pas passée, et la Corporation n'a peut-être pas la notion complète du dossier. Puis on est portés à lui donner le bénéfice, tout en se disant qu'il y a aussi un establishment qui est là et qui ne bouge pas facilement. Mais, au départ, on favorise beaucoup plus ça, qu'un cas en Cour suprême, un consensus des groupes. On a l'information. On pose les questions.

La population, en général, dans certains cas, veut tel type de services et, souvent, par la Charte des droits et libertés, y aurait droit. D'autres ne veulent pas du tout de médecine alternative. Parfait. On n'est pas là pour embrigader, si l'on veut, un peu tout le monde. Mais il y a ce consensus-là à faire et on le favorise, et c'est la raison pour laquelle, nous, on maintient toujours les contacts. Après la commission parlementaire, on commence à discuter avec la Corporation sur l'homéopathie qui crée un problème. Comment on pourrait en arriver à une entente là-dessus? Nous autres, on veut en faire. On sait qu'il y a un code de déontologie, on ne peut pas le changer tout de suite. Qu'est-ce qu'on fait demain matin? Or, il y a ce travail qui est peut-être un travail plus ardu, mais que, nous, on voit plus qu'un travail de dire: On change la loi ou on va en Cour suprême.

Mais c'est les hypothèses actuelles qui sont là. Il y a certains groupes qui vont probablement vous en parler; ils sont prêts à dire: Nous autres, on prend un cas type et on s'en va sur la Charte des droits et libertés. Et là, la personne qui se dit: Moi, en connaissance de cause, je veux faire traiter mon problème de thyroïde par l'homéopathie, c'est le choix éclairé, c'est correct. Finalement, on est sur cette notion-là, de Charte des droits et libertés. Cette notion-là peut faire aussi changer la Loi médicale de leur côté.

Mais, nous autres, ce n'est pas ce qu'on préconise. On préconise surtout la notion de consensus, de travailler, de se parler, et on pense toujours que c'est un problème d'information de part et d'autre. Peut-être qu'il y a un problème de bonne foi. Mais, si ces gens-là sont obligés par une réglementation quelconque de s'asseoir ensemble et de dire: Là, vous avez un an pour arriver à un consensus; l'homéopathie, il va en exister, et c'est la façon de le faire qui est importante. On ne pose pas la question s'il en existera ou s'il n'en existera pas. C'est un peu une suggestion qu'on aurait, nous autres, pour faire avancer le dossier, avec difficulté, mais sans aller dans des combats majeurs où, je pense, tout le monde est perdant.

M. Trudel: Oui, mais, quand j'observe la réalité très concrète de ce consensus, de ce dialogue, moi, je vais vous classer dans les médecins optimistes...

M. Drouin: Oui. C'est vrai.

M. Trudel: Vous êtes très optimistes par rapport à la réalité des faits, et il faut de ça dans la vie aussi.

M. Drouin: Oui, oui.

M. Trudel: Non seulement vous pratiquez une médecine holistique, tel que vous nous le décrivez, mais vous êtes dans le club des optimistes, définitivement, à cet égard-là. Et on va revenir sur les facteurs qui vont peut-être favoriser, quant à moi, l'optimisme là-dessus. (10 h 50)

Mais qu'est-ce qui fait qu'au sein de la Corporation professionnelle des médecins vous soyez susceptibles de poursuites lorsque vous avez une approche différente, un paradigme de travail qui est différent de la médecine dite scientifique? À la Corporation des psychologues du Québec, est-ce qu'on poursuit les gens qui pratiquent la «Gestalt»? Est-ce qu'on poursuit, à la Corporation des psychologues du Québec, les behavio-ristes? Est-ce que l'Ordre des chimistes du Québec poursuit les membres qui s'inspirent de Ludwig von Bertalanffy et qui sont systémistes? Qu'est-ce qui fait qu'à la corporation des médecins hors d'une école du traitement du symptôme et de la chimio, point de salut? Qu'est-ce qui fait qu'il y a un immobilisme dans ce secteur-là, dans cette corporation professionnelle, et quels sont les facteurs, encore une fois, qui nous permettraient de la faire changer pour, je dirais, s'aligner

sur des courants mondiaux de paradigme scientifique?

Je comprends qu'il y a un certain... Vous avez eu des termes très polis, tantôt, en disant: Une certaine élite fait en sorte qu'il n'y a pas beaucoup de changement. On va leur envoyer le volume de Thomas S. Kuhn, «La structure des révolutions scientifiques». Il va falloir que ce soit lu, ça, un jour, à la corporation des médecins du Québec. Qu'est-ce qu'on va faire pour qu'à l'intérieur de cette Corporation on s'aligne sur les grands courants mondiaux de prise en charge?

M. Camirand: Mais la médecine comme telle, ce n'est pas un bloc monolithique et, quand vous disiez tout à l'heure que la Corporation, c'est un bloc qui ne veut pas bouger, on vise toujours les mêmes personnes, on a toujours en tête les mêmes images, je pense. Mais, à l'intérieur de la profession médicale, il y a des luttes importantes et il y a des changements importants qui se produisent au niveau des traitements. On parlait tantôt de l'histoire des sages-femmes. Maintenant, c'est rendu que, dans les départements d'obstétrique, il y a des bains, et tout ça, il y a des salles de naissance. Voilà 10 ans, c'était impensable. Il y a eu des luttes de pouvoir qui se sont faites.

Au niveau de la Corporation, vous dites: Qu'est-ce qui va amener les gens à en venir là? C'est que l'omnipratique aussi, la médecine familiale a été progressivement éliminée de tout le champ de pratique hospitalier. Dans les centres universitaires, on n'entend plus parler de médecine familiale, alors que c'étaient des gens qui étaient peut-être un peu plus près de leurs patients, un peu plus près aussi d'une conception plus globale. Le concept de la globalité en médecine familiale, on n'a pas à le prêcher longtemps; on enseigne le concept de biopsychosocial. Mais allez parler de biopsy-chosocial à une table de la Corporation; là, on a l'impression de tomber des nues, parce que, là, il y a des gens qui ont le contrôle de ça, qui sont plus réfractaires à ce type de discours là, qui sont réfractaires aussi, pas en paroles, mais en actes, au discours humaniste. Bon, prendre soin d'une personne globalement, ça signifie prendre soin de toutes ces dimensions-là. Mais, quand on arrive au chevet du malade, à l'hôpital, qu'est-ce que ça signifie, ça? Mais, là, le médecin de famille, celui qui a la charge du patient, celui qui est le plus conscient...

Alors, une des solutions à long terme, moi, que je vois, c'est qu'on permette à l'omnipratique de réintégrer le champ de l'hospitalisation, et ça, c'est une lutte qui doit se faire au niveau de la Corporation, au niveau des institutions aussi, au niveau des CMDP. Si l'omnipratique ne va pas là, si on laisse le champ libre à toute la médecine spécialisée, scientifique, pure, stricte, à ce moment-là, on ne s'en sort pas; on a un seul paradigme, c'est le paradigme scientifique. Dans ce sens-là, quand on dit: La médecine est si étroite, il faut faire attention. Une certaine partie de la médecine est étroite et réfrac-taire à tout autre paradigme, parce que c'est ça qu'ils font. La médecine scientifique spécialisée est axée avant tout sur le symptôme, sur la maladie, et, dès qu'un symptôme sort du champ de la spécialité, on réfère à un autre spécialiste. On n'a pas le concept de globalité. Alors, il faut réintroduire le principe du généraliste. Il faut que le généraliste soit réintroduit à l'intérieur du système et soit valorisé aussi.

M. Trudel: C'est assez lourd, ce que vous nous dites là, c'est assez lourd et c'est important. Tournons les coins rond un peu pour faire image: on a évacué la médecine familiale, en termes de formation, de nos universités, du corps médical et de l'approche que cela représente, pour s'orienter vers une médecine très symp-tomatique, spécialisée — j'espère qu'on aura le temps de toucher aussi à l'aspect du chimique tantôt — médicamenteuse aussi, une médecine médicamenteuse. C'est assez lourd. Comment on va faire aussi pour modifier le curriculum de la formation dans les universités? Parce que, là aussi, c'est là que commence la bataille. Je ne sais pas comment ça s'est passé dans votre cas, mais vous avez probablement dû développer votre approche holistique hors les murs, hors la bâtisse sur le mont, à Montréal, hors la Faculté de médecine. Comment on va faire aussi, d'après vous, pour modifier l'approche de formation des médecins au Québec, non pas pour revenir, mais, je dirais, pour évoluer vers une médecine globale, familiale?

M. Camirand: Je pense que les départements de médecine de famille... Vous allez peut-être être surpris, mais mes premières notions d'ostéopathie, moi, je les ai eues à l'université par un médecin qui travaillait et qui s'était fait défendre par après de pratiquer la manipulation vertébrale à l'université...

M. Trudel: Des cours clandestins?

M. Camirand: Oui, mais il était professeur clandestin. En tout cas, Jean pourrait en parler parce qu'il est professeur, lui aussi, à l'université. Moi, je pense que la formation en médecine familiale est une formation qui est propice, parce que, premièrement, on sort hors des murs, on va travailler en cabinet ou en CLSC, et là on s'aperçoit que les problèmes, ça ne se passe pas comme on nous disait dans notre chaire universitaire. C'était différent. Alors, la formation en médecine familiale, c'est un pas qui a été accompli et qui est un pas de géant, et la médecine familiale a été reconnue, et ça aussi, c'est un pas de géant. Je pense qu'au Québec on est une des seules provinces au Canada où on a besoin de notre cours de formation de deux ans en médecine familiale avant d'accéder à la pratique. Ça, c'est un pas de géant. Maintenant, au niveau du curriculum prédoctoral, là, c'est une autre paire de manches, parce que, là, c'est plus difficile.

M. Trudel: Ce n'est pas parce que c'est difficile qu'il faudra passer à côté, quant à moi. Et, croyez mon expérience, je sais combien c'est difficile de modifier un curriculum dans une université. Ça, je sais ça aussi, c'est très difficile. Les chapelles et les châteaux forts

existent aussi, et les groupes, les écoles de pensée sont bien installées, en particulier dans les universités québécoises. Mais ce n'est pas infranchissable, j'en profite pour le dire, grâce à des individus comme vous autres qui venez dire publiquement qu'on peut pratiquer la médecine d'une façon autre que celle qui est généralement préconisée en Amérique du Nord et qui, souvente-fois, donne des résultats questionnables. Je ne suis pas ici pour évaluer, je ne suis pas médecin, je n'ai pas cette formation-là, mais on est capable de lire, au minimum, sur les résultats et sur les interventions qui ont fait l'objet de vérifications quant à leur efficacité. On serait peut-être surpris de constater combien de techniques d'intervention ont été vérifiées sur le plan de l'efficacité quant aux résultats, on aurait des surprises là-dedans. Et il ne faut pas hésiter à remettre en question ces approches, encore une fois, dites scientifiques.

Revenons sur la question de la reconnaissance de toutes les thérapies pratiquées hors chapelle, hors la Loi médicale. Vous dites, Dr Drouin: Ça m'apparaît difficile — il est peut-être un peu trop tôt — de modifier la Loi médicale. On va convenir, vous et moi, que ce n'est pas un geste facile, on ne fait pas ça du jour au lendemain comme ça, en disant: Bon, ce matin, je pique ma crise et je change la Loi médicale. Il y a de grandes questions là-dedans. Sauf qu'on semble inévitablement, comme mouvement de société au Québec, se diriger vers cela, une modification de la Loi médicale, encore une fois surtout avec ce que vous nous dites aujourd'hui. Cette suggestion d'un avant-projet de loi qui dirait à la société québécoise et qui dirait à un certains nombre de corps constitués — c'est un mot poli pour parler des corporations professionnelles: Nous allons modifier la Loi médicale dans le sens suivant, dans un délai de deux, trois ou quatre ans, est-ce que ça pourrait constituer l'élément déclencheur qui ferait en sorte que ça forcerait la réflexion chez un certain nombre de corporations professionnelles et chez un certain nombre de corporatistes professionnels, et qui serait de nature à faire nettement avancer le débat? Parce qu'on a l'impression, quelquefois, qu'il faut être moins sage que les sages-femmes et qu'il faut donner un coup de barre — je prends cette main-là, je devrais prendre l'autre; je n'aime pas bien, bien les coups de barre à droite — à gauche pour faire débloquer ces choses-là. Est-ce que vous avez l'impression que ça peut contribuer, ça?

M. Drouin: J'ai l'impression que de la façon dont vous le suggérez, il y a un certain étapisme, finalement, là-dedans, et ça peut être intéressant, c'est-à-dire que ça dit aux gens: On s'en va vers la Loi médicale. Nous, on était plus doux un peu là-dedans en se disant: Bien, la Loi médicale on pense qu'elle devrait être changée, et on voyait plus le moratoire et l'étapisme. Mais on sait que c'est là qu'il faut discuter, sur cette Loi médicale qui ne correspond plus... Et ce n'est pas parce qu'elle n'est pas bonne, c'est qu'il faut toujours que les lois s'ajustent avec notre société actuelle. C'est ça, actuellement, le problème; c'est que notre société a évolué différemment en santé, et il y a quand même toute cette réflexion-là sur la Loi médicale qui doit être amorcée. (11 heures)

Et faire un avant-projet de loi dans cet esprit-là en disant: On la modifie sur cinq ans ou dans cinq ans, ça force les gens à négocier, ça force les gens à s'asseoir, à faire des consensus et on touche le même effet, finalement, de notre moratoire où on dit: On doit regarder à la fois la Loi médicale et le code de déontologie. On parle des médecins, mais ça peut être le code de déontologie de toutes les professions aussi, finalement, qui touchent à la santé. Ça, évidemment, on ne connaît pas... Moi, je suis mal placé pour parler des autres professions, mais c'est un peu ça.

Alors, à un avant-projet de loi avec un certain étapisme, je dirais oui; je dirais: Pas facile. Par contre, si on regarde la réflexion sur les sages-femmes avec les comités, les consensus, il faut peut-être arriver à un certain coup de barre, à un moment donné, où on dit: Bien, il faut qu'il se passe quelque chose. C'est beau de discuter, de travailler et d'avancer, mais, à un moment donné, on s'aperçoit que, x années après, on est souvent rendus au même point. Alors, à un moment donné, il y a un coup de barre avec le risque du coup de barre aussi; on sait fort bien les enjeux en cause. Mais je pense que c'est une réflexion qui nous semble, en tout cas, très juste là-dessus.

Le Président (M. Joly): Je dois, malheureusement, mettre fin à cet échange. Peut-être une petite dernière...

M. Trudel: Non. Juste vous remercier... Le Président (M. Joly): Oui, sûrement.

M. Trudel: ...de ma part de votre importante contribution. je vous le dis franchement: je vous admire. vous dégagez la perspective pour l'avenir, quant à moi. je regrette de ne pas avoir le temps de vous questionner sur les liens aussi entre l'industrie pharmaceutique et la pratique médicale scientifique actuelle. comptez sur moi, on se rattrapera bien quelque part avec d'autres groupes. merci.

Le Président (M. Joly): Merci, M. le député. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Côté (Charlesbourg): Merci beaucoup. C'est très certainement une étape importante de la commission par votre mémoire et par vos propos qui vont inspirer, à n'en point douter, les suites à donner à la commission. Mais je comprends qu'il y a un message d'audace, de sagesse et de prudence.

M. Drouin: Vous l'avez bien. On vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Joly): Merci, M. le ministre. Alors, au nom des membres de cette commission, à mon tour de vous remercier. Je demanderais maintenant aux

gens représentant l'Association professionnelle des orthothérapeutes de la province de Québec inc. de bien vouloir s'avancer, s'il vous plaît.

Alors, M. Poirier, bienvenue. Alors, j'apprécierais si vous pouviez nous présenter les gens qui vous accompagnent, s'il vous plaît.

Association professionnelle des orthothérapeutes de la province de Québec inc.

M. Poirier (Roberto): Oui, monsieur. Vous avez, à ma gauche, M. Laurent Lebel, qui est notre conseiller spécial et le rédacteur du mémoire.

Le Président (M. Joly): Merci.

M. Poirier: À ma droite, M. Stéphan Lavoie, qui est le vice-président de l'Association et, à mon extrême droite, M. Lionel Paris, qui est le doyen de notre Association.

Le Président (M. Joly): Merci. Alors, je vous souligne que vous avez une vingtaine de minutes pour nous présenter votre mémoire; par après, eh bien, les parlementaires échangeront avec vous. M. Poirier.

M. Poirier: Merci. Je voudrais, d'abord, remercier la commission de bien vouloir nous entendre ce matin, vous, M. le ministre, vous, mesdames et messieurs, et vous, M. le Président. L'ordre de présentation va être le suivant: premièrement, une description de la profession; deuxièmement, la situation actuelle de la profession au Québec; troisièmement, les problèmes auxquels nous sommes confrontés et les avantages d'une reconnaissance légale et, quatrièmement, nos attentes face à la commission parlementaire.

Notre but, ce matin, c'est donc de vous présenter ce qu'on a appelé une autre façon de bien faire, c'est-à-dire l'orthothérapie qui, selon nous, se veut beaucoup plus qu'une thérapie alternative, car on n'est ici pour prendre la place de personne. On est ici comme élément thérapeutique complémentaire. Donc, ce qu'on fait, personne ne le fait. C'est surtout ça qu'on veut apporter.

Si on veut commencer avec la présentation de la profession, l'orthothérapie, c'est une version américaine de la kinésithérapie. Ça a été apporté en Amérique du Nord par le Dr Arthur Michèle, qui est un orthopédiste de la région de New York. On traite spécifiquement les affections musculo-squelettiques. Les outils utilisés, c'est surtout les mains et on travaille avec des techniques différentes comme le massage et comme l'activité physique sous différentes formes pour en arriver à un meilleur travail. On oriente toujours les gens vers un programme d'exercices thérapeutiques à la fois correctifs et préventifs.

Le déroulement du traitement, maintenant, chez nous. Premièrement, il y a une phase evaluative. La phase evaluative comprend et le bilan de santé et l'évaluation physique du patient. Advenant le cas où le pa- tient n'est pas un cas pour l'orthothérapie, on n'hésite pas à le référer tout de suite à d'autres spécialistes. J'entends par d'autres spécialistes d'autres spécialistes du corps médical, la plupart du temps.

Si vous voulez bien, il y a trois phases dans un traitement. Je vais vous les décrire sommairement. Premièrement, la phase préparatoire. La phase préparatoire consiste en différentes techniques de massage qui ont pour but de mettre en condition et de servir d'échauffement à la région qui va être travaillée. Vient ensuite la phase active de travail. Ce qu'on appelle la phase active, c'est la phase de kinésithérapie, c'est-à-dire la thérapie par le mouvement. On se sert ici de l'activité physique sous différentes formes, c'est-à-dire par des mobilisations, par des étirements, par un programme d'exercices correctifs pour en arriver à améliorer l'amplitude de mouvements de notre patient. Vient ensuite la phase préventive. La phase préventive, c'est un programme d'exercices physiques à faire à la maison. C'est vraiment un programme d'exercices préventifs qui va éviter la récidive au patient en palliant ses faiblesses articulaires ou musculaires. On corrige aussi, à ce moment-là, des habitudes et l'hygiène de vie du patient, c'est-à-dire qu'on va travailler sur les attitudes posturales, sur les habitudes alimentaires, sur différentes... C'est ce que les autres ont appelé, tout à l'heure, l'aspect globaliste de la profession. Le but de ces trois volets, c'est toujours de faire en sorte que le patient puisse se prendre en main et évite toute récidive à son problème.

Il est important de faire une distinction assez nette entre l'orthothérapie et la massothérapie. Le massage, pour nous, se veut un élément préparatoire. C'est un élément de travail. Ce n'est pas l'ensemble de la pratique. L'activité physique vient plutôt compléter cet aspect pratique, si on veut.

On va passer à la deuxième partie, qui est la partie sur la situation de la profession au Québec. Présentement, la profession compte environ 200 personnes qui revendiquent le titre d'orthothérapeute. Là-dedans, on comprend aussi ce qu'on a appelé, nous, les orthothérapeutes marrons. On vous expliquera plus tard, si besoin est. La profession, ça répond à un besoin au Québec. La preuve, ce sont nos clients. Ce sont eux, notre moyen publicitaire numéro un. Ce sont eux qui, par leur satisfaction, font nos lettres de noblesse. Ce sont eux qui vont apporter de l'eau au moulin, c'est-à-dire vont apporter une nouvelle clientèle, et ce sont eux, souvent, qui vont exiger de leur médecin d'aller voir un orthothérapeute parce qu'on suggère souvent à nos patients qui ont des problèmes d'ordre pathologique médical d'avoir un diagnostic et une référence du médecin. On a une belle collaboration du corps médical. Cette collaboration, elle se veut par la référence et le diagnostic, mais elle se veut aussi par le suivi médical qui est apporté à nos patients, c'est-à-dire qu'on va demander au médecin de revoir le client suite à un certain nombre de traitements pour lui assurer un suivi et pour rassurer cette personne dans sa démarche thérapeutique comme telle. L'encadrement de cette associa-

tion ou synergie entre les deux pratiques se veut, pour nous, très sécurisant pour le patient et on souhaite qu'il y ait un meilleur encadrement encore que celui qui existe présentement.

Un appui majeur à la profession d'orthothérapeu-te, c'est aussi la confiance qui est mise en nous par les compagnies d'assurances qui reconnaissent nos soins. Bien souvent, les soins d'orthothérapie sont payés de façon beaucoup plus supérieure que bien d'autres pratiques. Vous avez aussi la CSST et la SAAQ qui, à un moment donné, ont couvert les soins en orthothérapie, mais qui ont cessé depuis, car, selon ce qu'on a pu entendre dire, elles attendent une réglementation, justement, définitive pour pouvoir couvrir les soins.

Passons maintenant à la partie 3, les problèmes vécus par l'orthothérapeute au Québec. Le problème majeur en est un de reconnaissance légale. Ça nous a apporté cette réflexion, et on s'est posé la question suivante: Le citoyen consommateur, payeur de taxes, a-t-il vraiment le choix des soins qu'il veut recevoir, au Québec? On considère qu'il revient aux élus du peuple de constater que les lois et les règlements régissant la santé au Québec sont rendus inadaptés aux réalités de 1993. L'un de ces exemples le plus frappant, c'est peut-être la TPS et la TVQ qui couvrent nos soins, présentement. On est couverts comme un soin de luxe quand vous savez bien, autant que moi, que, la santé, ce n'est pas un luxe. (11 h 10)

Un autre de ces problèmes, c'est — et le docteur Drouin en parlait tout à l'heure — la quiétude que les médecins n'ont pas de référer des cas chez nous. On a des médecins qui vont nous appeler au téléphone pour nous dire: Je te réfère un cas, parce qu'ils n'oseront pas le marquer sur des papiers. Heureusement, on en a qui outrepassent ce champ-là et qui nous envoient des prescriptions bien détaillées avec une référence en orthothérapie. Mais ces gens-là le font toujours avec une épée de Damoclès au-dessus de la tête, comme on a pu le constater tout à l'heure.

En 1977 et en 1989, on a rencontré l'Office des professions. On pense que le message de l'Office a été très clair. Le message était le suivant: Organisez-vous. Ce qu'on a fait. On s'est basé sur différentes notions que nous avait données l'Office pour en arriver avec une transparence de gestion. La transparence de gestion, elle est représentée comme suit: premièrement, on a établi un programme de formation qui est de 1000 heures sans compter les stages qui sont obligatoires. Pour ce programme de formation là, les écoles ne sont pas reliées directement avec l'Association. L'Association est indépendante de toute école de formation, sauf qu'on reconnaît un certain profil. Suite à ce profil-là, l'individu qui se présente pour être membre de l'Association doit passer une évaluation. L'évaluation, elle se fait par un comité, qui est un comité de perfectionnement et d'évaluation, qui, lui, va faire passer des examens bien précis, autant théoriques que pratiques, pour évaluer les connaissances de l'individu qui se présente devant nous.

On s'est aussi assuré d'un cadre de fonctionne- ment très précis, c'est-à-dire qu'on s'est donné un code de déontologie avec un comité de discipline pour le gérer. On s'est donné aussi une police d'assurance-responsabilité professionnelle, qui est la même police qui couvre plusieurs médecins. Donc, on considère que ces gens-là n'ont quand même pas donné une police d'assurance sans s'assurer des soins et de la compétence des gens qui les donnaient. On utilise un lexique médical universel; on n'a pas un lexique qui nous est propre. On veut, lorsqu'on collabore avec les autres personnes, avec les autres médecins ou non-médecins, pouvoir utiliser un lexique qu'ils vont comprendre et que, nous, nous allons comprendre. Cependant, la profession n'a toujours pas de statut légal. C'est au gouvernement, selon nous, à jouer ce rôle d'arbitre.

Nos attentes face à la commission parlementaire. Lorsqu'on demande le droit de bien faire, c'est qu'on demande un encadrement juridique. Les orthothérapeutes demandent que l'État reconnaisse leur champ de pratique professionnelle et leur donne les moyens juridiques d'encadrer l'exercice de leur profession. Le rôle de l'État, c'est de gérer le bien commun. Il y a des limites, quand même, à injecter de l'argent du citoyen consommateur, payeur de taxes, dans une approche exclusivement curative. Ce serait important d'avoir une approche beaucoup plus préventive, une approche spécifique, personnalisée, efficace et non subventionnée.

Les solutions qu'on apporte. C'est sûr qu'on a entendu parler de toutes sortes de choses: par exemple, un office pour les médecines alternatives, une corporation-parapluie, l'utilisation de la corporation professionnelle présentement, de l'Office des professions présentement. Nous, on arrive avec une nouvelle option. Notre option, c'est une option qui a été apportée par l'Office des professions, c'est la Loi sur la protection du consommateur. L'Office de la protection du consommateur est le mieux placé pour définir les termes et donner un nom à chaque discipline. L'Office peut aussi établir des règles, imposer ces règles et accorder des attestations aux thérapeutes, toujours en accréditant les normes de compétence et de connaissance de ces individus. Il pourrait aussi donner des permis d'opération à des individus pour opérer une clinique.

L'Office de la protection du consommateur, selon nous, a le pouvoir et le devoir de renseigner le consommateur. Il est bien placé pour faire ce travail-là; il n'a pas à travailler dans des champs autres que la santé. Il peut le faire, aussi, dans un champ autre que la santé. C'est surtout le rôle de protecteur qu'on demande et c'est le rôle qu'il joue présentement. Ce n'est pas un rôle qui va coûter plus cher à la collectivité parce que l'Office de la protection du consommateur joue déjà ce rôle-là. C'est sûr que l'Office de la protection du consommateur devra travailler avec l'Office des professions dans l'élaboration de ces lois. Ce n'est pas à nous à dire à l'Office de la protection du consommateur ou à l'Office des professions comment faire leur travail. C'est à nous de dire: Comme outil, ce serait intéressant que ces gens-là se concertent, concertent les intervenants qui sont dans le domaine et en arrivent à un consensus.

C'est sûr que, si cette hypothèse était retenue, nous, comme association, serions très intéressés à jouer un rôle de consultation, de concertation et de définition du cadre de fonctionnement.

En conclusion, je dirais que c'est à vous, les membres de l'Assemblée nationale, à voir à ce que le gouvernement assume son rôle d'arbitre. Quand il s'agit du bien commun, et la santé est l'un des biens communs les plus importants pour la population, le dernier mot doit toujours revenir aux élus du peuple et non pas à un groupe professionnel plutôt qu'à un autre.

Le Président (M. Joly): Merci. M. le ministre.

M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. le Président. Commençons par clairer assez rapidement... Vous nous avez dit, dans votre présentation, «marron». Ça faisait partie de mes questions parce que je veux l'explication. On dit: 60 orthothérapeutes; selon eux, il y en a 200 qui revendiquent et on parle de marrons. Pour le bénéfice de la commission, qu'est-ce que c'est qu'un orthothérapeute marron?

M. Poirier: Si vous voulez, je vais laisser le rédacteur du mémoire vous répondre à cette question.

Le Président (M. Joly): M. Vachon, s'il vous plaît.

M. Lebel (Laurent): Lebel.

Le Président (M. Joly): Oh, excusez. M. Lebel, oui.

M. Lebel: D'abord, un orthothérapeute marron, c'est une personne qui se prétend orthothérapeute sans en avoir ni la formation ni les qualifications. Le terme «marron» est dans le dictionnaire; l'exemple qui est donné, c'est les avocats marrons. Vous en connaissez peut-être quelques-uns. Alors, dans le cas des orthothérapeutes, l'association professionnelle des orthothérapeutes regroupe 60 orthothérapeutes. Il y a une autre association au Québec et aussi on connaît une quarantaine de personnes qui peuvent exercer sans aucune formation ou sans association.

M. Côté (Charlesbourg): En termes clairs, «marron», c'est charlatan.

M. Poirier: C'est une autre façon de le dire. M. Côté (Charlesbourg): O.K.

M. Poirier: On pensait que, ce terme-là, vous étiez fatigués de l'entendre.

M. Côté (Charlesbourg): C'est original. Au moins, ça suscite l'intérêt. Un charlatan marron. On va s'entendre là-dessus. Qu'est-ce qui vous distingue d'un physiothérapeute ou d'un thérapeute en réadaptation physique?

M. Poirier: La façon de travailler. Dans la façon de travailler, on a toujours comme base, comme outil principal de travail, les mains. Comme on vous l'a dit tout à l'heure, on utilise le massage comme phase préparatoire et on se sert de programmes d'exercices, de l'activité physique comme élément curatif et comme élément préventif. Donc, la façon de travailler est complètement différente de ce qui se fait en physiothérapie.

M. Côté (Charlesbourg): Mais c'est uniquement la manière de travailler.

M. Poirier: La manière de travailler.

M. Côté (Charlesbourg): Dans les deux cas.

M. Poirier: Dans les deux cas. Ce que font les physiothérapeutes, on ne le dénigre pas. C'est très efficace, très bien fait. Ils ont la formation pour le faire et les compétences pour le faire. Sauf qu'on n'est pas une alternative à la physiothérapie. On est un complément thérapeutique pour ces gens-là et pour le corps médical, présentement.

M. Côté (Charlesbourg): Sur le plan de la formation, qu'est-ce qui est différent?

M. Poirier: Premièrement, la formation n'est pas accréditée par le gouvernement, par le ministère de l'Éducation. Deuxièmement, on a essayé de s'approcher le plus d'une formation universitaire, c'est-à-dire qu'on a donné une formation de 1000 heures. On a fait un profil de formation qui dure 1000 heures et on a aussi...

M. Côté (Charlesbourg): C'est 1000 heures à partir de quoi? À partir de rien? À partir d'un D.E.C.? Quels sont les prérequis nécessaires?

M. Poirier: Un D.E.C. en sciences de la santé ou l'équivalent.

M. Côté (Charlesbourg): O.K. Au minimum.

M. Poirier: Ça peut être une technique médicale, par exemple, infirmière, biologie ou autres, comme telle.

M. Côté (Charlesbourg): Et les 1000 heures commencent par la suite.

M. Poirier: Les 1000 heures commencent par la suite.

M. Côté (Charlesbourg): Dont 350 heures...

M. Poirier: De stage...

M. Côté (Charlesbourg): ...de stage.

M. Poirier: ...supervisé à la fin.

Une voix: En plus.

M. Poirier: C'est en plus.

M. Côté (Charlesbourg): Pour devenir membres chez vous, vos 60 membres ont nécessairement suivi 350 heures en pratique.

M. Poirier: Ce qui s'est fait avant, au tout début, n'était peut-être pas la réalité d'aujourd'hui, sauf que, pour pallier à cette différence, on a établi un programme de perfectionnement continu. Le perfectionnement continu est obligatoire, chez nous. Lorsqu'on parle de congres, chez nous, il est obligatoire. Quand bien même vous demanderiez combien de personnes participent au congrès, tout le monde est obligé d'y participer, au congrès. Donc, dans le congrès, il y a une partie de perfectionnement, justement. (11 h 20)

M. Côté (Charlesbourg): Dans son avis, que vous connaissez probablement, de mai 1991, l'Office des professions, à la page 18, lorsque ça vous concerne — vous allez voir pourquoi j'ai commencé à parler de formation; il n'y a pas grand cachette — le nombre est resté le même, donc, c'est toujours 60, et, quand on parle de pratique, on parle d'utilisation de table d'élon-gation. Est-ce que ça n'a pas un petit peu inquiété l'Office, compte tenu de l'utilisation'' Et comment est-ce que vous sécurisez votre public face à l'utilisation de tables d'elongation?

M. Poirier: Comme on l'a mentionné tout à l'heure, il y a deux organismes qui régissent les orthothérapeutes avec deux philosophies très différentes. Notre organisme ne privilégie pas l'utilisation des tables d'élongation. Les tables d'élongation, selon nous, c'est l'apanage et de la chiropratique et de la physiothérapie. Notre outil de travail demeure toujours les mains. On travaille avec les mains. Les tractions, les elongations peuvent être faites manuellement. On n'a pas besoin d'une table d'élongation pour pallier à ça.

M. Côté (Charlesbourg): O.K. Donc, ce que je retrouve dans l'avis de l'Office, quand il parle de la pratique...

M. Poirier: Ça ne s'applique pas à nous.

M. Lavoie (Stéphan): Ça ne nous concerne pas du tout.

M. Côté (Charlesbourg): Pourtant, c'était sous la rubrique Association professionnelle des orthothérapeutes de la province de Québec.

M. Poirier: Ils se sont trompés parce que ça ne s'applique pas chez nous. Ça s'applique à l'autre association.

M. Côté (Charlesbourg): Bon. Comme je sais qu'il y a des gens de l'Office et qu'ils prennent des notes depuis le début de la commission, alors, ils vont pouvoir prendre des notes là-dessus aussi.

M. Poirier: Parfait.

M. Côté (Charlesbourg): Ce n'était pas pour soulever les erreurs, mais pour tenter de vérifier.

M. Trudel: Quand l'autre groupe va passer, on va savoir à qui on s'adressse.

M. Côté (Charlesbourg): L'Ordre des orthothérapeutes.

M. Poirier: Ce n'est pas nous.

M. Côté (Charlesbourg): C'est les autres.

M. Poirier: C'est les autres.

M. Côté (Charlesbourg): O.K. Donc, j'y reviendrai.

M. Poirier: Vous les interrogerez.

M. Côté (Charlesbourg): J'ai vu quelque part dans votre mémoire que vous vous êtes joints à l'idée qui voulait d'une corporation-parapluie.

M. Poirier: On a étudié cette possibilité-là. C'est sûr que c'est une possibilité qui peut quand même être intéressante. On n'est fermés à aucune possibilité. Mais on a regardé aussi le côté pratique, c'est-à-dire le côté coût qui va être apporté avec ça. Est-ce qu'une corporation-parapluie ne va pas demander beaucoup plus de coûts que l'utilisation présentement de la loi de la protection du consommateur où les intervenants sont déjà là, sont déjà en place? Ils sont prêts à faire face à la musique en ce qui concerne l'établissement de règles, je pense.

M. Côté (Charlesbourg): Oui, mais je ne suis pas sûr de ça, là. Quand vous parlez de coûts, je vais vous dire ce que j'en pense tout de suite. Vous passez le coût à l'État alors que le coût pourrait être à vous autres, d'une corporation professionnelle.

M. Poirier: On n'est pas fermés à ça.

M. Côté (Charlesbourg): Non, non. Je vous le dis tel que je le pense, c'est mon impression. Je ne suis pas sûr que l'Office des professions soit outillé actuellement pour être capable de faire face à ça. Dans la mesure où on lui confierait cette responsabilité-là, ça veut dire nécessairement ajouter du personnel compétent pour le faire. Ils en ont aujourd'hui, mais dans des domaines bien reconnus qui sont les leurs. Je pense qu'en allant vers la protection du consommateur on peut effective-

ment protéger le consommateur, mais on n'aura pas nécessairement réglé tous vos problèmes. Je pense que l'idée d'une corporation-parapluie permettait, à mon point de vue à moi, de faire progresser les choses de la même manière que ce qu'on a eu comme proposition tout à l'heure permet aussi de faire progresser les choses, de, disons-le, forcer à bouger sans nécessairement que ça casse. Ça me paraissait être un peu... Mais, pour tout ça, il est clair qu'il faut faire une démonstration très claire et très nette que la formation est prise au sérieux. Quand on exige un D.E.C. ou l'équivalent d'un D.E.C. de base plus 1000 heures, 350 heures surveillées... Vous avez au moins le mérite, dans votre cas, à ce moment-ci, de faire en sorte que ce ne soit pas vous autres qui donniez les cours, ce que j'ai compris.

M. Poirier: Non.

M. Côté (Charlesbourg): C'est davantage d'autres. Vous pouvez davantage vous poser en gens qui peuvent évaluer, à ce moment-là, donc détachés de l'enseignement.

Vous avez évoqué tantôt: À l'occasion, des médecins nous en réfèrent par téléphone.

M. Poirier: Pas seulement par téléphone. On a aussi des preuves à ce niveau-là, on a des...

M. Paris (Lionel): Permettez-moi, M. le ministre, on a des prescriptions de médecins. Le Centre d'orthothérapie Paris, à Drummondville. C'est les médecins qui nous envoient des patients. En passant, je traite des membres du Parlement.

Des voix: Ha, ha, ha! M. Paris: Vos collègues.

M. Côté (Charlesbourg): Depuis le mois de novembre?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Poirier: Ce qu'on veut dire, c'est que ce n'est pas toujours de façon clandestine que les médecins nous réfèrent des cas. Il y a aussi des cas qui nous sont référés très ouvertement, comme ça. Mais aussi il y a certains médecins qui ont peur des représailles s'ils réfèrent des cas à des non-médecins comme tels.

M. Côté (Charlesbourg): Ce que je comprends, c'est que dans le cas... On me signale même qu'il y a des journalistes aussi. Ce que je comprends, c'est une pratique qui est à Drummondville, et vous avez des preuves en main, mais est-ce que c'est répandu? Oui.

M. Lavoie (Stéphan): On parle de M. Paris qui a un centre à Drummondville depuis énormément longtemps. Donc, on peut vous dire qu'au niveau de la province, c'est un centre qui est vraiment bien connu et bien coté. Dans la région de Québec, pour vous donner un exemple vite, vite vite, il faut que je me dépêche: à 13 heures, j'ai une patiente qui est gynécologue et qui vient prendre un traitement en orthothérapie cet après-midi. Donc, on a donné la chance à M. Paris d'amener une certaine forme d'éventail de prescriptions et de références, tout ça pour vous mentionner qu'à partir du moment où on va traiter une personne en orthothérapie, automatiquement, il y a une collaboration qui se fait avec le médecin parce que la personne qui vient nous consulter en traitement va retourner, au bout de quelques séances, revoir son médecin pour avoir une évaluation des résultats obtenus lors du traitement.

M. Lebel: Mais, malheureusement, c'est un fait que ce n'est pas à travers le Québec qu'on a une collaboration aussi belle qu'à Québec et à Drummondville. À Montréal, on se fait souvent dire qu'ils n'ont pas cette collaboration aussi facile, tandis que, nous, on prône toujours comme approche, à ce moment-là, au thérapeute lui-même d'établir son réseau de collaborateurs.

M. Côté (Charlesbourg): Je comprends donc que, sur le plan de la formation, elle est aussi continue de par l'obligation d'assister à vos assemblées annuelles. Quels sont les mécanismes que vous avez pour vous assurer d'un suivi? Parce que ce n'est pas tout d'être dans l'Association, d'être bien formé, il faut aussi bien pratiquer. Est-ce qu'il y a des mécanismes que vous avez de surveillance ou de règlement de plaintes éventuelles?

M. Poirier: Oui. On a un comité de discipline qui est là pour ça. Notre comité de discipline gère toute plainte qui peut être apportée à l'Association. Au niveau du perfectionnement, on a un comité bien précis, qui s'appelle le comité d'admission et de perfectionnement, qui, lui, voit à ce que le perfectionnement soit adapté aux réalités de 1993 pour l'instant ou de 1994 pour l'année suivante. Ce suivi-là est donné par des écoles de formation. Les méthodes d'évaluation... C'est-à-dire que, lorsqu'on donne du perfectionnement, on s'attend aussi à ce qu'on va créer une certaine évaluation qui suit le perfectionnement pour voir si le perfectionnement a été compris ou voir s'il y a lieu de le reprendre comme tel.

M. Côté (Charlesbourg): Une question très, très simple. Vous êtes des professionnels qui recevez donc des clients, je constate, référés par des médecins et même des médecins eux-mêmes. Vous devez quand même avoir des assurances-responsabilité, j'imagine?

M. Poirier: On a une assurance-responsabilité professionnelle, effectivement.

M. Côté (Charlesbourg): Pour l'ensemble ou si c'est individuel?

M. Poirier: C'est une assurance-responsabilité professionnelle qui nous couvre individuellement pour

une poursuite de 1 000 000 $ par année, au même titre que les médecins, les omnipraticiens, par exemple, l'ont de base.

M. Côté (Charlesbourg): Est-ce qu'il y a déjà eu des poursuites?

M. Poirier: Aucune.

M. Lavoie (Stéphan): Et cette assurance professionnelle là — c'est important de le mentionner, parce qu'il y a certains groupements en médecine alternative qui ont une assurance professionnelle comme la nôtre — dans notre groupement, cette assurance-là est absolument obligatoire pour chaque membre. C'est absolument un prérequis, au même titre que la formation, au même titre que le perfectionnement obligatoire. Donc, en étant un nombre restreint au niveau de notre groupement... M. Paris a une preuve de cette police d'assurance là...

M. Paris: À mon âge, il faut des preuves.

M. Côté (Charlesbourg): Lorsqu'ils vous ont présenté comme doyen, tantôt...

M. Paris: Ça m'a blessé un peu. M. Poirier: Doyen en sagesse.

M. Côté (Charlesbourg): Ça va. Merci beaucoup.

Le Président (M. Joly): Merci, M. le ministre. M. le député de Rouyn-Noranda—Témiscamingue, s'il vous plaît, c'est à vous.

M. Trudel: Très bien. Vous savez, j'ai déjà dirigé une université et le doyen dans une université, c'est celui qui est chargé d'empêcher le recteur de dire un certain nombre de choses, généralement, de par la sagesse qu'il recèle.

Alors, on va vous souhaiter la bienvenue à cette commission parlementaire, au nom de l'Opposition, comme association professionnelle, même si vous regroupez un nombre relativement restreint par rapport à d'autres thérapeutes alternatifs au Québec. On a entendu, depuis deux jours, un certain nombre de ces associations et de ces thérapeutes, et il y a des regroupements ayant jusqu'à 1000, 2000 personnes, mais le nombre n'est jamais le gage de l'efficacité et de... (11 h 30)

M. Poirier: La quantité ne reflète pas la qualité.

M. Trudel: Tout à fait. Mais, dites-moi, je voudrais que vous m'expliquiez un peu plus votre origine. Vous êtes sorti de la cuisse de la kinésithérapie américaine. Qu'est-ce qui fait que vous existez de façon différenciée par rapport aux massothérapeutes, par exemple, par rapport aux physiothérapeutes, par rapport à d'au- tres spécialistes de l'ortho? Qu'est-ce qui fait votre stricte différence et que vous ayez la prétention de dire — je pense que oui, là — que vous constituez une discipline particulière? Qu'est-ce qui vous différencie?

M. Poirier: L'utilisation de l'activité physique comme élément thérapeutique, à la fois correctif et préventif; c'est vraiment ça qui nous distingue de ce qui se fait. Lorsqu'on parle des origines, effectivement, c'est le Dr Michèle qui a écrit le premier écrit sur l'or-thothérapie en Amérique du Nord et de lui a découlé la formation, à partir de ce texte-là, de ce qu'il a gardé, lui, comme principales composantes de ce qui se fait en Europe. Parce que ce qui se fait en Europe est beaucoup plus large; ce qui se fait en Europe regroupe ce qu'on fait, nous, et ce que fait la physiothérapie, finalement. Nous, on s'est distingués de par l'utilisation de la mas-sokinésithérapie, c'est-à-dire le massage communément préparatoire et la kinésithérapie, l'activité physique thérapeutique, comme éléments actifs de travail. Suite à ça, on a aussi un volet que pas beaucoup de monde pratique, qui est le volet préventif. Lorsqu'on parle d'un volet préventif, on ne parle pas d'un volet préventif en clinique; on parle d'un volet préventif à la maison, c'est-à-dire un programme d'exercices que la personne a à faire à la maison pour se prendre en main et pour éviter la récidive de son problème. C'est vraiment là qu'on est distincts des autres.

M. Trudel: Avec ce que vous venez de me dire, je dirais: Qu'est-ce qui vous différencie d'un éducateur physique, formé avec un baccalauréat à l'université? Parce qu'il fait ça aussi, l'éducateur physique, il me donne des avis, il me dit: Mon Trudel, quand tu cours tes kilomètres le matin, fais des exercices de réchauffement, fais attention, étire-toi un peu. Il me donne des conseils.

M. Poirier: Personnellement, je suis éducateur physique, formé par l'Université de Sherbrooke.

M. Trudel: Oui.

M. Poirier: La réalité est tout autre que ce que vous nous dites là, présentement, dans le rôle de l'éducateur physique. Vous avez l'éducateur physique en gymnase, en salle de conditionnement physique, qui va vous donner des conseils, comme ça, effectivement. Mais ça se tient au niveau des conseils. On n'a jamais pu appliquer directement à un niveau thérapeutique les connaissances en activité physique; c'est nous qui faisons ça, présentement. On applique les connaissances en activité physique à un niveau thérapeutique, à la fois correctif et préventif. L'éducateur physique fait ça de bonne foi lorsqu'il vous dit de faire de l'exercice, mais il n'a pas le poids, pour vous, qu'un thérapeute ou qu'un spécialiste de la santé va avoir lorsqu'il vous donne ces conseils-là. Bien souvent, les conseils, on dit: Bah!

M. Trudel: Ça veut dire que, si un conseil vient d'un médecin, c'est encore plus pesant?

M. Poirier: C'est plus pesant, effectivement. C'est la réalité, ça, malheureusement, mais c'est la réalité.

M. Trudel: Dans toute cette question de la reconnaissance — parce que c'est le secteur recherché, c'est l'objectif: la reconnaissance — il faut être capable quelque part de distinguer ce qui est une différence entre une approche, une discipline en soi, une spécialité, qui est quelque chose qui est différencié par rapport à une autre discipline. Sans cela, même à l'intérieur — et je vais vous questionner là-dessus — d'une corporation-parapluie ou d'un office-parapluie ou d'un organisme-parapluie pour réglementer tout ça, on risque d'avoir autant de groupements qu'il y a d'approches. Je n'ai pas dit de disciplines, là, d'approches. Tantôt, on a eu les médecins holistiques. On pourrait dire aussi: Ce n'est qu'une approche de la pratique de la médecine, c'est une façon d'être, dans la pratique médicale, qui est autre que celle généralement reconnue en Amérique du Nord. Comment on va distinguer ça? Dans un éventuel mécanisme de reconnaissance, par exemple, des orthothérapeutes, là, comment on va distinguer ce qui est une discipline différente d'une approche différente?

M. Poirier: Premièrement, par une définition des termes et de la discipline comme telle; deuxièmement, par des critères d'évaluation que l'organisme qui sera chargé de le faire fera passer à tous les revendicateurs du statut d'orthothérapeute ou d'une autre technique. Donc, ce qu'on veut dire, c'est qu'il devra y avoir, premièrement, établissement des normes, des règles et, ensuite, des critères d'évaluation, le processus d'évaluation, évaluer tous les intervenants, autant individuellement que collectivement, de façon à arriver avec quelque chose de rassurant pour le public.

M. Trudel: Je vais revenir un peu en arrière, j'en avais oublié un petit bout tantôt. Vous m'avez expliqué l'origine de votre — je vais dire — discipline, mais qu'est-ce qui est absent chez les autres, chez les physios, chez les éducateurs physiques, qui fait que vous êtes constitués en discipline? Qu'est-ce qu'il y a de différent pour que vous vous soyez donné une structure particulière, un titre aussi et une façon d'être particulière dans le monde des thérapies et aussi, bien sûr, en termes de formation? Qu'est-ce qui était insatisfaisant? Je ne veux pas que vous critiquiez les autres, là.

M. Poirier: Non, on ne le fera pas, non plus.

M. Trudel: Mais votre naissance doit procéder, j'imagine, d'une anomalie, d'une brisure, d'une insuffisance dans la formation ailleurs?

M. Poirier: Ou appelons ça d'une non-existence dans ce qui se faisait déjà. Il n'y a personne qui fait ce qu'on fait. Les physiothérapeutes ne font pas le travail qu'on fait. Les éducateurs physiques ne font pas le travail qu'on fait. Ce créneau-là, c'est nous qui l'avons développé, c'est nous qui le faisons, présentement. Le fait de joindre l'activité physique sur une base thérapeutique, il n'y a personne qui le fait. C'est nous qui le faisons. La réalité, c'est ça. C'est sûr qu'en théorie... On a de belles théories. Je vais entendre des gens dire: Bien, nous, c'est notre champ d'action, on a le droit de le faire. Mais, en réalité, c'est tout autre chose. Ce que nous faisons, il n'y a personne d'autre qui le fait parce que, si les autres le faisaient, les gens ne viendraient pas chez nous. On n'aurait pas de clientèle, on n'existerait pas.

M. Lavoie (Stéphan): Ce que l'éducateur physique fait, lui, c'est de la gymnastique préventive. Nous autres, on fait de la gymnastique corrective, au niveau d'un problème particulier, au niveau d'un «tennis elbow» au niveau du coude, au niveau d'une bursite au niveau de l'épaule, au niveau d'une lombalgie au niveau des muscles lombaires au niveau du dos d'une personne. Notre gymnastique est vraiment une gymnastique corrective qui se traite de façon manuelle, avec des techniques de massage et des techniques complémentaires qu'on utilise avec nos mains, des exercices d'étirement progressif au niveau du dos, pour donner l'exemple des muscles lombaires, ce que les autres techniques ne pratiquent pas. Donc, on pourrait mentionner tout de suite que le chiropraticien va utiliser la subluxation vertébrale pour faire une correction; ce n'est absolument pas notre champ d'action. On pourrait dire que la physiothérapie travaille avec un appareillage beaucoup plus sophistiqué que le nôtre, parce que l'appareillage le plus sophistiqué que l'on retrouve dans nos cliniques, bien, c'est la main droite et la main gauche, en excluant, bien sûr, les tables d'élongation dont on a fait mention tout à l'heure et les appareils à ultrasons ou autres types d'appareillage quelconque.

M. Poirier: Ce n'est pas notre apanage. Notre apanage, notre champ d'action, c'est l'utilisation des mains et c'est la massokinésithérapie, c'est-à-dire le massage et l'utilisation du mouvement comme élément thérapeutique. Ce qu'on appelle la kinésithérapie, c'est la thérapie par le mouvement.

M. Trudel: Écoutez, je questionne moins votre existence en soi que la différence qui vous a amenés à exister pour que vous soyez là, et comment l'État, en termes d'encadrement, devrait «dealer» avec ça. Dans votre mémoire, les orthothérapeutes demandent que l'État reconnaisse leur champ de pratique professionnelle. Là, il y a des mots importants: «leur champ de pratique professionnelle». Là, vous ne demandez pas des actes. Ce que vous demandez, c'est que ce soit un peu sur le modèle de la Loi médicale, c'est-à-dire qu'on vous réserve un champ d'intervention et non pas des actes précis à l'intérieur d'une éventuelle législation. C'est bien ça que vous demandez?

M. Poirier: Ce qu'on demande, c'est de regrouper l'ensemble de ces actes pour en faire un champ de pratique, effectivement. Les mots «champ de pratique» se veulent très larges, jusqu'à un certain point. Vous m'en donnez une version, je pourrais vous en donner une autre version. Un champ de pratique, ça ne veut pas nécessairement dire un champ de pratique comme la Loi médicale. Ça peut être aussi restreint à un champ de pratique d'ordre musculo-squelettique, ce que vous allez probablement appeler une spécialité, et on peut appeler ça un champ de pratique aussi. C'est un terme qui peut être utilisé à différentes sauces, sur quand même un éventail assez large. (11 h 40)

M. Trudel: Oui. On voit ça dans le domaine de la santé que ça peut être utilisé à toutes les sauces.

M. Poirier: Oui, effectivement.

M. Trudel: C'est tellement à toutes les sauces que...

M. Lavoie (Stéphan): Les recommandations qu'on fait dans notre mémoire...

M. Trudel: ...hors de cela, tout le monde peut être poursuivi, y compris vous autres.

M. Poirier: Exactement.

M. Trudel: Vous êtes d'autres illégaux, en quelque sorte.

M. Poirier: Heureusement, on semble avoir une politique de tolérance envers nous qui fait que...

M. Trudel: Ne parlez pas trop fort, vous allez vous faire photographier.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Poirier: Ce n'est pas grave.

M. Trudel: Ce que vous recherchez, donc, c'est une reconnaissance. Est-ce que vous êtes capables de nous dire: Quant à l'encadrement, à la discipline chez nos membres et au traitement des plaintes, on va s'occuper de ça?

M. Lavoie (Stéphan): L'encadrement, on peut déjà s'en charger parce qu'on l'a fait déjà depuis 1975. C'était de là aussi l'origine d'un regroupement. Si on parle de M. Paris, vous êtes en pratique depuis combien de temps, M. Paris?

M. Paris: 36 ans.

M. Lavoie (Stéphan): 36 ans, et le regroupement professionnel dont on fait partie est là depuis 1975. Donc, il y a eu un besoin, à un moment donné, pour certains praticiens, dans la province de Québec, de se regrouper parce qu'ils se sont rendu compte qu'ils faisaient un travail qui était similaire.

M. Trudel: Est-ce que ça vous apparaîtrait comme suffisant de dire: II existe au Québec un titre réservé qui s'appellerait orthothérapeute et qui correspond à tel niveau de formation, point, «period», à la ligne?

M. Poirier: Ça nous conviendrait très bien comme élément de départ, bien sûr. C'est sûr. Nous, ce qu'on veut, c'est... Ha, ha, ha!

M. Trudel: Un coup parti.

M. Poirier: Ce qu'on veut, c'est avoir un cadre sécurisant de travail et pour l'orthothérapeute et pour le patient qui consulte, qu'il n'y ait plus d'épée de Damocles au-dessus de la tête de l'individu qui va donner certains traitements.

M. Trudel: II faut éclaicir ça parce que, l'étapis-me, on aime bien l'utiliser, mais pas en être victime, voyez-vous? Quand vous dites: C'est un point de départ, il faut nous donner, si possible, comment vous voyez cela. C'est-à-dire que vous existez comme orthothérapeutes ou vous vous êtes créés en quelque sorte, vous vous êtes constitués en discipline parce que ça répond d'évidence à un besoin du public. Votre principale préoccupation, je le répète, me semble être celle de la reconnaissance. À partir du moment où on vous reconnaîtrait par un titre réservé correspondant à une formation, est-ce que tout le restant n'est pas de la boursouflure bureaucratique, de l'enflure inutile, du grossissement qui, à toutes fins utiles... Il ne faut pas en donner plus que le client n'en demande, quoi!

M. Poirier: Le titre réservé, c'est très intéressant comme optique, à condition que le titre réservé soit quand même accompagné de mécanismes d'évaluation des personnes à qui on va donner le titre réservé. C'est-à-dire que, si on donne un titre réservé à des individus qui ne méritent pas le titre, on juge que ce n'est pas suffisant. Si on donne un titre réservé à des individus qui ont été évalués et qui répondent aux normes et aux critères d'admission, à ce titre-là, bien, on peut juger que ça peut être suffisant, effectivement. Ça enlève l'épée de Damoclès dont on parlait tout à l'heure.

M. Trudel: Oui, oui. C'est évident que, si on va dans la direction du titre réservé, avec une norme, bien, ça prend quelqu'un pour faire respecter la norme et ça prend une limite pour trancher. En deçà, on n'est pas membre, on ne peut pas porter le titre et, au-delà, on peut porter le titre. Est-ce que vous pensez que tous ces aspects de la gestion du titre réservé et de la norme fixée, vous pourriez, comme association professionnelle, gérer ça? Soyons clairs, l'État dirait, dans un texte législatif quelque part: Le titre d'orthothérapeute est

réservé aux gens qui ont tel type de formation. Ayant ces deux articles ou cet article à deux volets dans un règlement ou dans une loi, tout le restant des responsabilités serait entre vos mains et vous seriez chargés de donner à l'État la liste de celles et de ceux qui correspondent à cette association-là. Est-ce que, ça, c'est viable?

M. Poirier: Si on nous donnait ce pouvoir-là, on serait prêts à faire ça à partir de demain matin. On a l'encadrement pour le faire à partir de demain matin, dans le sens qu'on est déjà organisés, on a déjà un code de déontologie, on a déjà un comité de discipline qui gère le code de déontologie, on a déjà un comité d'admission et de perfectionnement qui évalue les nouveaux membres. On est prêts à faire face à cette musique-là, mais donnez-nous-en les pouvoirs.

M. Lavoie (Stéphan): C'est exactement le mandat que les compagnies d'assurances nous ont donné, donc, les compagnies d'assurances qui vont couvrir les soins en orthothérapie. C'est le mandat qu'on a reçu de ces compagnies d'assurances, de leur prouver qu'on avait des exigences minimales, de leur prouver qu'on avait une formation adéquate, de leur prouver que les membres qui étaient dans notre groupement étaient des gens qui avaient été évalués, des gens qui étaient surveillés par un comité de discipline et, par la suite, on nous demande, à tous les ans, de leur envoyer une liste à jour des membres de notre groupement. Donc, ça fonctionne déjà comme ça, si on parle des compagnies d'assurances qui vont couvrir les soins en orthothérapie. Moi, je trouve ça très simple, comme processus. En fin de compte, nous, on a déjà la structure en place. À partir du moment où on aurait l'équivalent d'une reconnaissance — appelez ça reconnaissance ou permis de travail — comme dirait l'autre, on n'est pas exigeants là-dessus.

M. Trudel: Bon. En tout cas, moi, je reçois bien ce que vous nous dites là, parce qu'il ne faut pas, encore une fois, que l'on soit à mettre au monde une superstructure quand on a besoin d'un mécanisme léger pour reconnaître l'existence, si tant est que c'est la volonté de reconnaître l'existence. Je ne veux pas préjuger de la volonté de personne et de ce qui va se passer, mais c'est deux choses: la discipline à l'intérieur du corps constitué qui s'appelle ici, le cas échéant, les orthothérapeutes et la reconnaissance. Encore là, on vient de se donner une définition pratico-pratique de ce que pourrait être la reconnaissance, avec l'application que vous nous illustrez par rapport aux assureurs qui acceptent de vous référer des clients pour les fins de leurs bénéficiaires. Bon.

Je reviens sur le volet formation. La formation après le D.E.C., donnée par un organisme ou un établissement qui est autre que le vôtre, c'est qui, ça? Qui donne la formation?

M. Poirier: Des écoles de formation qui existent.

On en a à Montréal, il y en a un petit peu partout dans la province. On en reconnaît vraiment trois avec le profil des orthothérapeutes dont on a fait mention, c'est-à-dire les 1000 heures. S'il nous arrive quelqu'un d'une autre école de formation et qu'on juge qu'une certaine partie de sa formation peut être accréditée, par exemple, quelqu'un qui arriverait avec une formation en massage où on peut accréditer une certaine partie du massage, on va le référer à une des écoles de formation de sa région et lui dire: Bien, effectivement, il te manque une partie de ta formation que tu pourrais aller prendre là. On agit, à ce moment-là, comme rôle d'informateur et non pas comme rôle de formateur.

M. Trudel: Si j'avais eu le temps, mais je n'ai plus le temps, M. le Président, je vous aurais demandé si vous avez déjà été victimes de poursuites pour pratique illégale de la médecine.

M. Poirier: Est-ce que j'ai le temps de vous répondre ou est-ce que...

Le Président (M. Joly): Ah, je vais vous le laisser, oui. Oui. Je vous l'accorde.

M. Poirier: Pardon?

Le Président (M. Joly): Je vous accorde le temps.

M. Poirier: II y a eu une poursuite, depuis 1975, contre l'Association; c'est dans le début des années quatre-vingt et, si je me souviens bien, la poursuite est encore en suspens.

M. Trudel: J'en conclus que vous n'êtes pas très dangereux.

M. Poirier: Merci.

Le Président (M. Joly): Merci. J'aurais peut-être une petite question. Je pense que...

M. Côté (Charlesbourg): Est-ce que je dois comprendre que ceux qui n'ont pas eu ce jugement-là sont dangereux?

Des voix: Ha, ha, ha! M. Trudel: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Joly): D'entrée de jeu, ce matin, M. le ministre a fait refléter que, pour le profane, pour le grand public, c'est difficile d'établir, souvent, les différences entre un masso, un physio ou un ostéo ou un ortho et...

Une voix: Etc.

Le Président (M. Joly): ...j'en passe. Il y en a

quand même un paquet, là. Il y en a beaucoup.

M. Lavoie (Stéphan): II y a même des totos.

Le Président (M. Joly): Vous avez quand même apporté, en fait, des explications sur les différences majeures entre les massothérapeutes, les physios et vous-mêmes. Alors, compte tenu de tout ça, moi, il y a une question qui me fatigue. Est-ce qu'il y a des dédoublements de spécialités? Exemple: qu'est-ce qu'un ostéothérapeute fait que vous ne faites pas ou l'inverse?

M. Poirier: Je pourrais très mal vous répondre en ce qui concerne l'ostéopathie. Je vais laisser ces gens-là répondre, vu qu'ils passent après nous autres, ce matin. Mais je peux vous répondre sur ce que, nous, on fait. C'est-à-dire que ce que, nous, on fait, c'est différent de ce que les autres font. On vous l'a expliqué tout à l'heure, là.

Le Président (M. Joly): Non, non. C'est parce que vous semblez ajouter un volet de masso, en plus de ça, là.

M. Poirier: Oui, mais ce n'est pas de l'ostéopathie, qu'on fait. L'ostéopathie, on laisse ça aux ostéopathes. Nous, on fait de l'orthothérapie; ça comprend la massothérapie et ça comprend la kinésithérapie: l'activité physique comme moyen thérapeutique. C'est vraiment ça, la définition de l'orthothérapie. On ne veut pas s'ingérer dans le domaine des autres. Ce n'est pas à nous à le faire. Chacun à sa place. (11 h 50)

M. Côté (Charlesbourg): Vous êtes-vous retrouvé dans les traitements, M. le Président?

Le Président (M. Joly): Bien, j'essaie de savoir c'est qui le meilleur, moi là.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Trudel: Je pensais, M. le Président, que vous cherchiez où vous aviez mal.

Une voix: On peut peut-être répondre à ça.

Le Président (M. Joly): Si on est à la recherche constante, si vous voulez, disons, des meilleurs spécialistes, des meilleurs traitements... Tantôt, il y a un médecin qui a dit: Nous autres, on cherche à sortir du traditionnel: un symptôme, un médicament. Tandis que, vous autres, bien souvent, il n'y en a pas, de médicament. Il n'y a rien de ça. Donc, vous corrigez quand même. Mais, en plus, il y en a d'autres qui font de la prévention, d'autres qui font, disons, du correctif. Moi, ce qui me fascine, c'est de savoir que vous avez ouvert une avenue qui est quand même intéressante au niveau des assurances, de la façon dont on vous traite au niveau des assurances. Je pense qu'on vous fait peut-être plus confiance qu'à certains autres. Comment en êtes-vous arrivés à négocier ça avec l'assurance pour qu'on vous fasse confiance à ce niveau-là? Est-ce que ça se mesure, ce que vous faites? Parce que vous retournez toujours votre patient à un médecin, par après. Donc, c'est là que ça se mesure.

M. Poirier: Ça, c'est quelque chose d'intéressant parce que, notre pratique, elle est palpable, elle est objective, elle est mesurable. Ce n'est pas un principe, notre pratique; c'est quelque chose de mesurable, d'évaluable. C'est-à-dire qu'on peut évaluer le patient avant et après selon des normes scientifiques, selon des normes accréditées par le corps médical, par des tests bien précis. C'est évaluable, notre pratique, effectivement.

Le Président (M. Joly): Est-ce que, dans vos thérapeutes, il y a seulement des hommes ou s'il y a des femmes aussi?

M. Poirier: II y a des femmes aussi. Ah oui.

Le Président (M. Joly): Oui? Parce que, si je regarde en ostéopathie, c'est beaucoup, beaucoup de femmes.

M. Lavoie (Stéphan): Dans les dernières années, si on regarde les écoles de formation, au niveau des demandes d'admission, le prorata femmes-hommes, au niveau des femmes, c'est plus élevé. Mais c'est un événement qui date peut-être de quatre, cinq ans.

Le Président (M. Joly): Je pense que M. Lebel voulait ajouter quelque chose. M. Lebel.

M. Lebel: Oui. C'est à propos des assurances. Je vais vous parler de mon cas personnel. Moi, j'ai connu les orthothérapeutes parce que j'avais mal au dos. On appelle ça une entorse lombaire récidivante, ça faisait des années que je traînais ça. Les médecins me donnaient des pilules: un mal, une pilule; un mal, une pilule. J'en ai eu pour des centaines de dollars, de ces pilules-là, et j'avais toujours mal au dos. Par hasard, un de mes amis m'a dit: Va donc voir Roberto et tu vas voir. Ça m'a pris quatre séances, j'ai fini d'avoir mal au dos, fini.

Le Président (M. Joly): Plus de pilules.

M. Lebel: pas de pilules. mais ça me prend 10 minutes avant de sortir de la chambre le matin parce que j'ai mes exercices d'étirement à faire, qui sont très spécifiques à mon mal de dos, et c'est fini. c'est comme ça que la compagnie d'assurances, chez moi, paie pratiquement 100 % des coûts, là, parce que, en 4 fois, 5 fois, 6 fois, ça va être terminé, alors que, pour d'autres traitements, ils ne paient pas 100 % des coûts parce qu'après 25 fois ce n'est pas fini. en tout cas, si vous avez mal au dos, je vais donner l'adresse en...

Le Président (M. Joly): Merci, M. Lebel. M. le député de Berthier, vous avez une question.

M. Houde: Merci, M. le Président. J'aimerais savoir, lorsqu'il y a des gens qui viennent nous voir parlant de problèmes, de mal qu'ils ont à différents endroits, ils me disent: On va voir un chiro et on va voir un orthothérapeute, puis, en bout de ligne, on va arriver à ce que notre mal se passe. Mais il y a une différence entre les deux, c'est que, vous autres, vous ne faites pas mal du tout et, l'autre, il nous fait mal... Je ne dirai pas le mot, mais...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Houde: Qu'est-ce que vous pouvez expliquer? C'est les gens qui nous disent ça. Qu'est-ce que vous faites?

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: Ça ne leur fait pas mal de dire Ça.

M. Houde: Non, mais je veux le savoir, je veux savoir pourquoi.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Joly): Ça lui fait peut-être plaisir.

M. Houde: En tout cas, je veux le savoir. Us vont me le...

Le Président (M. Joly): C'est difficile, un rôle d'arbitre.

M. Paris: C'est beaucoup plus long chez le chiro que chez nous. Ça prend plus de temps. Le type va aller là trois fois par semaine pendant quoi? Nous autres, trois fois par semaine, on serait...

M. Houde: Non, mais ils me disent que ça ne fait pas mal du tout. C'est un plaisir d'aller vous voir, à la place.

M. Paris: Oui. On n'a pas à faire mal du tout. M. Houde: C'est ça. C'est quoi, le...

M. Poirier: On ne travaille pas de la même façon. Nous, on travaille d'une façon qui est beaucoup plus douce, on prend le temps. Un traitement, ça peut durer une heure par séance. On prend le temps de le faire. On peut faire la même chose très rapidement en donnant un coup brusque, ça va faire mal. Mais on ne le fait pas, le coup brusque. On y va avec une elongation progressive, faite en douceur, qui va donner exactement le même résultat.

M. Houde: C'est les commentaires qu'on a, mais le conseil qu'il vient de nous donner, ça va peut-être aider pour la CSST avec les problèmes de dos.

M. Poirier: On l'espère, on l'espère. M. Houde: Merci. Merci de votre...

M. Poirier: II faut dire aussi, ce que M. Lebel disait, que, lorsqu'on parle de programme d'exercices, ce n'est pas un programme, comme le député de Rouyn-Noranda—Témiscamingue disait tout à l'heure, que peut donner un éducateur physique. C'est un programme qui est adapté à la réalité du mal de dos de M. Lebel et à M. Lebel lui-même. C'est surtout ça, la différence.

M. Houde: Merci beaucoup. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Joly): Merci. Alors, en conclusion, M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Côté (Charlesbourg): Je veux vous remercier de votre présentation. Je veux juste dire: Albert, il ne faut pas partir de chicane. Chacun pourra venir parler de sa spécialité et on sera toujours très heureux de vous entendre. Vous êtes en train de nous éclairer. Alors, merci. Je peux confirmer que, effectivement, il y a chez vous des gens qui ne sont pas abuseurs. Il y a un de mes amis qui a été référé chez vous. Après quatre traitements, on lui a dit: On ne peut plus rien faire avec toi. Ça a été clair et il s'en est retourné. Je pense que ça fait partie de l'honnêteté de la pratique, ça. C'est tout à votre honneur. Merci.

M. Lavoie (Stéphan): Je peux glisser un mot? Le Président (M. Joly): Oui, M. Lavoie.

M. Lavoie (Stéphan): Le sigle officiel de notre regroupement, c'est une colombe. Donc, peut-être pour répondre à la question de monsieur, pour terminer, en fin de compte, l'orthothérapie, c'est de redonner l'amplitude du mouvement du corps humain et en y mettant le plus de douceur possible.

M. Trudel: J'allais vous demander la question en terminant. Je pensais que c'était un message à la corporation des médecins en disant: La paix, la paix, la paix, s'il vous plaît!

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Joly): Que la paix soit avec vous! Au nom des membres de cette commission, nous vous remercions. Maintenant, je demanderais au Collège d'études ostéopathiques de Montréal et à l'Association des diplômés en ostéopathie du CEO de bien vouloir s'avancer, s'il vous plaît.

Nous allons suspendre nos travaux pour deux petites minutes, s'il vous plaît.

(Suspension de la séance à 11 h 58)

(Reprise à 12 h 1)

Le Président (M. Joly): Nous reprenons nos travaux. Je demanderais à la personne responsable de bien vouloir s'identifier, s'il vous plaît.

Collège d'études ostéopathiques de Montréal et l'Association des diplômés en ostéopathie du CEO

Mme Beaulieu (Marielle): Bonjour. Marielle Beaulieu.

Le Président (M. Joly): Ça me fait plaisir, Mme Beaulieu. Maintenant, nous introduire les gens qui vous accompagnent, s'il vous plaît.

Mme Beaulieu: Oui, à mon extrême droite, Mme Denise Laberge, diplômée en ostéopathie et professeur au Collège d'études ostéopathiques de Montréal; le docteur Paul Lépine, étudiant de cinquième année en ostéopathie, membre du conseil académique. Il est aussi médecin de famille. À ma gauche, le docteur Roger Hobden, étudiant en cinquième année, membre du conseil académique. Il enseigne aussi en médecine familiale au CLSC Centre-Sud de Montréal. Et M. Michel Therrien, qui est finissant, qui a complété ses études et qui est actuellement en préparation de thèse de fin d'études, et il est secrétaire de l'Association des diplômés en ostéopathie.

Le Président (M. Joly): Merci. Comme il y a deux groupes qui représentent votre spécialité, on peut dire, à ce moment-là, que le temps est divisé en deux. Donc, vous avez 10 minutes pour présenter votre mémoire et, par après, les parlementaires échangeront avec vous.

Mme Beaulieu: C'est ça. Nous, on va surtout couvrir, à ce moment-là, le volet de la formation, étant donné que nous sommes du Collège d'études ostéopathiques de Montréal.

Le Président (M. Joly): S'il vous plaît, je vous reconnais la parole, madame.

Mme Beaulieu: M. le Président, M. le ministre, Mmes et MM. les membres de la commission, le Collège d'études ostéopathiques de Montréal et l'Association des diplômés en ostéopathie sont honorés de vous adresser ce mémoire afin de promouvoir la nécessité de créer une profession d'ostéopathes indépendante et autonome à partir de la formation dispensée, du maintien de la qualité de la formation actuelle.

Définition de l'ostéopathie. L'ostéopathie est une médecine naturelle, une thérapeutique et un art basés sur des actes palpatoires précis ayant pour objectif de dégager les différents tissus et constituants de l'organisme des mécanismes de contrainte qui les empêchent d'accomplir leurs fonctions normales. L'ostéopathie est une science de la santé et décrit les interrelations entre les systèmes, les lois qui assurent l'équilibre et la santé de l'être humain dans sa globalité. Notre travail s'apparente à ce qu'on pourrait appeler un ingénieur du corps humain.

Le Collège d'études ostéopathiques de Montréal, le CEO, a été fondé en mars 1981 par M. Philippe Druelle, ostéopathe. Le Collège regroupe actuellement 28 professeurs québécois, français, anglais et américains. Le CEO donne actuellement une formation en ostéopathie à 192 étudiants. 53 finissants préparent leur projet de recherche clinique de fin d'études, la thèse d'ostéopathie et, aussi, le Collège offre une formation continue pour les diplômés en ostéopathie qui sont présentement au nombre de 77.

Le CEO est autonome financièrement, sans subvention de l'État depuis 12 ans. Il a pu réinvestir pour donner un meilleur service dans le domaine de l'éducation des étudiants, voire bibliothèque, vidéothèque et la formation continue pour les diplômés. Il soutient aussi la Fondation canadienne pour l'enseignement et la recherche en ostéopathie, organisme sans but lucratif qui soigne bénévolement 50 enfants par année.

L'Association des diplômés en ostéopathie, l'ADO, regroupe les professionnels et étudiants en ostéopathie pour promouvoir et défendre leurs intérêts. L'Association compte actuellement 240 membres.

Dans son rapport, en page 19, l'Office des professions reconnaît que l'ensemble des facteurs énoncés à l'article 25 du Code des professions s'applique à l'ostéopathie. La recommandation de l'Office des professions visant l'intégration des théraphies alternatives au champ de pratique des corporations professionnelles déjà existantes est inapplicable et refusée par l'ensemble des ostéopathes et des praticiens en voie de le devenir. Une telle intégration créerait une ingérence dans le curriculum des études, une ingérence dans la vie professionnelle et dans la spécificité des actes ostéopathiques, de la confusion au niveau du public, le citoyen se trouvant perdu devant la multiplication des intervenants en ostéopathie.

Ça créerait aussi le morcellement de l'ostéopathie entre les différentes corporations. On assisterait à une dilution des connaissances, de la qualité et de la recherche, à une perte, aussi, de la cohérence de groupes face au public, face aux autres corporations, face aux institutions. La protection du public ne pourrait être assurée de façon uniforme. Il ne faut pas répéter l'erreur des Américains où l'incorporation des ostéopathes à la profession médicale a dilué la formation et la pratique de la thérapeutique spécifique ostéopathique, ce qui laisse actuellement un nombre très réduit d'ostéopathes pratiquant l'ostéopathie. Ils cherchent maintenant à récupérer les connaissances et la thérapeutique perdues en allant chercher des professionnels européens.

Les corporations n'ont pas les compétences pour gérer l'ostéopathie et les ostéopathes. La compétence en ostéopathie ne peut être assurée que par des ostéopathes complets ayant satisfait aux exigences menant au diplôme. La sécurité du public est assurée par l'intermédiaire de l'inspection professionnelle et le syndic, et seuls les ostéopathes complets peuvent assurer cette fonction sans conflit d'intérêts. Ainsi, pour éviter tout conflit d'intérêts avec les corporations existantes, pour assurer la sécurité du public, la qualité de la formation et l'efficacité des services rendus auprès de la population, nous réclamons l'établissement d'une profession indépendante des ostéopathes du Québec.

Les objectifs poursuivis par le Collège depuis 12 ans répondent aux critères de compétence de toute formation professionnelle. Les objectifs pédagogiques du CEO se retrouvent en page 11 du mémoire. La spécificité thérapeutique de l'ostéopathie est une réponse efficace aux dysfunctions de l'organisme, car elle s'adresse aux causes et non pas aux symptômes. Au niveau de la spécificité thérapeutique manuelle de l'ostéopathie, il n'existe donc pas de différence entre la tradition québécoise, américaine et européenne. Cette spécificité est manifestée au niveau de la formation. Aucune autre formation dans le domaine de la santé ne dispense la philosophie, les connaissances, la thérapeutique et la méthodologie d'intervention de l'ostéopathie.

La médecine ostéopathique fonde son diagnostic sur la palpation de la mobilité des tissus et de leurs structures. L'ostéopathe, par sa formation, utilise ses mains pour percevoir les sensations tissulaires au même titre que le médecin allopathique va, par exemple, utiliser ses oreilles lors de l'auscultation. Toutes les formations professionnelles dans le domaine de la santé présentent deux volets bien distincts. Le premier volet, le volet des sciences de base de la santé considérant l'ana-tomie, physiologie, kinésiologie, pathologie, sémiologie, qui représentent un bloc commun ou semblable entre les professionnels selon le niveau de responsabilité du praticien auprès des patients. Le deuxième volet, le volet de la thérapeutique spécifique, est particulier à chacune des professions.

Au Collège d'études ostéopathiques de Montréal, l'admission des étudiants se fait à partir du critère des sciences de base de la santé, niveau du bac universitaire, qui doivent avoir été complétées. La thérapeutique ostéopathique y est alors enseignée, totalisant 1200 heures de formation théorique, pratique et clinique échelonnée sur 5 ans. La formation se complète par la suite par un travail de synthèse clinique, la thèse d'ostéopathie.

Notre formation est souvent comparée à la formation américaine. Voici quelques faits. La formation américaine est avant tout une formation médicale à laquelle un supplément variant de 200 à 400 heures est donné en principes et pratique en ostéopathie. Par exemple, au College of Ostéopathie Medicine of the Pacific, le cursus de cours comprend 15,5 crédits-heures, ce qui représente 232 heures de formation en principes et pratique ostéopathiques. Après une telle formation, seulement de 8 % à 10 % des ostéopathes américains formés de cette façon pratiquent en ostéopathie. Les autres font de la médecine conventionnelle. Ceci démontre bien que la formation américaine est plutôt médicale qu'ostéopathique. On juge son arbre à ses fruits. (12 h 10)

La crédibilité de la formation du Collège d'études ostéopathiques peut être examinée selon quatre aspects. Le premier aspect, le programme du CEO, totalisant 1200 heures de cours, est détaillé à partir de la page 37 dans le document. Vous avez ensuite les examens. La formation est validée chaque année par un examen oral et écrit, théorique et pratique. En troisième et en cinquième année, il s'agit d'examens récapitulatifs, autant théoriques que pratiques, sur l'ensemble de la matière. Les examens pratiques oraux se passent devant un jury international.

Le deuxième aspect, les professeurs. Les professeurs et conférenciers viennent de partout dans le monde. Le Québec, actuellement, a une chance unique: 128 professeurs du monde entier, européens et américains, sont venus, pendant 12 ans, apporter le meilleur de leur potentiel et leur savoir au Québec. Parmi ces gens, nous notons des présidents de registre, des directeurs de collège,- etc., qui participent par la même occasion au Symposium international d'ostéopathie qui se tient à chaque année. Vous avez donc une liste des professeurs à partir de la page 56.

Le troisième aspect, ce sont les étudiants. Depuis les 8 dernières années, la moyenne des admissions en première année est de 50 étudiants et, depuis 6 ans, nous observons une constance entre les admissions et les étudiants qui graduent. Ceci démontre l'intérêt des participants, malgré la récession. Le CEO reçoit des étudiants étrangers pour la formation complète. Nous avons des étudiants de France, une personne d'Argentine et une personne de Suisse, ainsi que des étudiants diplômés de France qui viennent passer l'examen de fin d'études et présenter leur thèse à Montréal. Le CEO reçoit aussi des chiropraticiens.

Le quatrième aspect est la recherche. La formation en ostéopathie du CEO est la seule formation au Québec parmi les professionnels de la santé qui réclament une recherche clinique appelée thèse en ostéopathie, à la fin du cursus des études. Ceci permet à chaque futur professionnel de confronter ses connaissances et la qualité de leurs applications à travers des gestes thérapeutiques précis dans le cadre de la rigueur scientifique du projet de la thèse. Tous les frais engagés pour ces recherches sont la responsabilité de l'étudiant. Vous avez en page 80 la liste des thèses remises au CEO depuis 1986.

La contribution du réseau des services de santé à l'ostéopathie. L'intégration des ostéopathes au sein d'institutions de recherche et du réseau de santé s'avère indispensable pour élargir l'apprentissage clinique des ostéopathes au sein d'une équipe multidisciplinaire. Son apport thérapeutique doit être considéré, car il serait important.

Pour terminer, nous avons une pétition signée par

209 diplômés et étudiants pour obtenir une profession indépendante des ostéopathes au Québec. Merci de votre attention.

Le Président (M. Joly): Je vous remercie beaucoup, Mme Beaulieu. Maintenant, M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. le Président. Il faut l'admettre, sur le plan de la formation, ce qu'on a vu jusqu'à maintenant n'est pas à la hauteur de ce que vous nous présentez; avoir comme exigence de base minimale un bac, ça donne un peu le ton à l'importance de la formation et, par conséquent, à la qualité qui doit nécessairement être au bout de la ligne.

Ce qui non pas m'inquiète un peu, mais m'étonne un petit peu, c'est votre insistance dans la présentation à ne pas vous inspirer des États-Unis. J'avais fait venir quelques petits détails des États-Unis, 33 000 ostéopathes aux États-Unis, et je comprends que ça ne pourra pas me servir beaucoup. Si je comprends votre présentation, c'est davantage devenu l'affaire médicale aux États-Unis, et vous voulez qu'on évite ça au Québec. Vous ne nous avez pas parlé de l'Europe. Vous n'avez parlé que des gens d'Europe qui viennent chez nous, même passer des examens. J'aimerais peut-être vous entendre davantage à ce niveau-là, chez nous par rapport à l'Europe et encore un petit peu davantage par rapport aux États-Unis.

Mme Beaulieu: Roger.

M. Hobden (Roger): C'est ça. Sans faire un long historique de ce qui s'est passé aux États-Unis, au XIXe siècle et au XXe siècle, en ostéopathie, c'est quand même intéressant de tirer des conclusions, c'est-à-dire qu'au début le fondateur de l'ostéopathie, c'était même un médecin de famille, un médecin des frontières américaines, qui faisait de la petite chirurgie et d'autres formes de traitement, qui a créé de toutes pièces, en s'inspirant des traditions des «bonesetters», une médecine naturelle basée sur les techniques manuelles.

Par la suite, dans un souci d'élever le niveau pédagogique, ils ont voulu s'inspirer des écoles américaines de médecine et ont bâti au fil des années un cursus tout à fait identique qui fait qu'en 1950, par exemple, le Missouri a reconnu aux D.O., aux ostéopathes américains, le droit de pratiquer la médecine dans les hôpitaux, ainsi de suite. Ce que nous, on constate, c'est que, par la suite, au fur et à mesure que l'ostéopathie a été reconnue et intégrée — et elle est actuellement dans le système médical américain — les ostéopathes ont commencé graduellement à abandonner ce qui leur était spécifique, c'est-à-dire le travail manuel et la guérison, la relance des tissus. Ce qui fait qu'à l'heure actuelle toutes les statistiques et, même récemment, le dernier document de la corporation des médecins sur la question reconnaissent qu'il n'y a que 10 % des ostéopathes qui travaillent avec leurs mains.

Alors, nous, on dit que ce n'est pas la peine. On ne veut pas refaire une deuxième gang de médecins, numéro 2, qui s'appellent des D.O.; on ne veut pas s'inspirer de cet exemple-là. On veut partir de ce qui est spécifique aux ostéopathes, le travail avec les mains, la relance des tissus.

Mme Beaulieu: Parle-leur des Européens, des Anglais.

M. Hobden: En fait, notre modèle est plus le modèle européen et, en particulier, le modèle britannique, par exemple la Bristish School of Osteopathy qui a fait adopter, récemment, en deuxième lecture, un projet de loi qui vise la garantie de l'indépendance professionnelle des ostéopathes.

M. Côté (Charlesbourg): Je trouvais quand même les chiffres — et vous constaterez mon ignorance, que je vous confesse dès à présent — intéressants: aux États-Unis, 33 000, dans 140 institutions hospitalières, donc accrédités. Ça paraissait quand même comme un endroit où c'est largement reconnu, mais il y a des bémols. Vous nous mettez des bémols quant à la pratique là-bas et quant aux dangers.

Évidemment, lorsqu'on cherche à se faire reconnaître de manière légale, que ce soit à titre exclusif ou réservé, j'imagine qu'on a une petite idée dans quoi on s'embarque demain et de ce que ce serait au Québec à partir du moment où on le ferait. On a, au niveau de la médecine dite conventionnelle, des plans d'effectifs, des ratios. Ça prend tant de médecins pour tant de gens dans la population. Pour desservir le Québec, ça prendrait combien d'ostéopathes?

Mme Beaulieu: II n'y a pas vraiment...

M. Côté (Charlesbourg): C'est parce qu'il faut y penser. Lorsqu'on parle de formation et qu'on parle de ce que vous avez jusqu'à maintenant et d'un certain engouement, il faut l'admettre, 50 par année... Tout ce monde-là défraie ses études?

Mme Beaulieu: Oui.

M. Côté (Charlesbourg): Bon, ce n'est pas donné, après avoir, dans certains cas, ai-je bien compris, fait un cours de médecine, de s'orienter là. Après avoir fait un bac sur le plan universitaire, ça coûte des sous, même si notre premier bac est en partie défrayé par l'État. Disons que ça ajoute de la qualité aux années que vous ajoutez à votre âge. Mais, à partir de ça, il y a quand même des coûts.

Mme Beaulieu: Bien, disons que, par rapport à une évaluation du besoin du nombre d'ostéopathes en rapport avec la population, on n'a pas vraiment fait d'études en ce sens, pour l'instant.

M. Côté (Charlesbourg): Je vais aller plus loin que ça. Vous pourrez répondre, là... Est-ce qu'une plus

grande présence d'ostéopathes au Québec diminuerait la pression quant à la demande des actes posés par les médecins?

Mme Beaulieu: Je pense que je vais passer la parole à Paul qui est lui-même médecin.

M. Lépine (Paul): Définitivement. Je pourrais vous citer plusieurs exemples cliniques de gens qui ont consulté de multiples praticiens, autant reconnus dans le réseau comme des médecins, des physiothérapeutes que d'autres non actuellement reconnus dans le réseau, et qui, finalement, aboutissent en ostéopathie et qui, en quelques traitements, obtiennent la guérison qu'ils recherchaient depuis des années.

J'ai en tête le cas d'une patiente qui souffrait d'une névralgie du trijumeau, une douleur au niveau du visage, et c'est mes connaissances et mes aptitudes ostéopathiques qui m'ont permis de comprendre que ça découlait d'une chirurgie au niveau d'un sinus qui n'avait pas du tout été mal faite, mais c'est une conséquence qui arrive à l'occasion. Et, pendant cinq ans, cette dame a souffert, a pris des médicaments qui lui ont coûté très cher et qui ont coûté cher à ses assurances et à l'État, en partie. Elle a vu des spécialistes de tout acabit, elle a eu des infiltrations au niveau du nerf, etc., tout ça sans soulagement. Elle a fait une dépression, elle a pris des antidépresseurs, elle a vu un psychiatre, bon.

Et je suis toujours un peu gêné de le dire, mais c'est la réalité, en un traitement, après une heure de traitement, en se relevant de la table, elle n'avait plus de névralgie, elle n'avait qu'une douleur locale à la cicatrice, qui est partie avec trois autres traitements supplémentaires. Pendant cinq ans, cette dame-là a souffert, a dépensé de l'argent, a consommé des soins, a eu une qualité de vie perturbée, et tout ça parce qu'elle ne connaissait pas l'ostéopathie.

Alors, oui, effectivement, si les ostéopathes étaient beaucoup plus présents dans le réseau et à un niveau de première ligne, en collaboration avec les autres intervenants de première ligne, on pourrait éviter plusieurs actes, des souffrances et des frais inutiles. (12 h 20)

Mme Beaulieu: Michel aurait quelque chose...

M. Therrien (Michel): Oui, oui.

Mme Beaulieu: ...à ajouter à l'intervention.

M. Therrien (Michel): Pour répondre à votre question, M. le ministre, concernant combien d'ostéopathes ça prendrait, on n'a pas fait d'étude prospective dans ce sens-là. Mais, dans la mesure où ça pourrait vous donner une indication, je vous donne, à titre d'exemple, le fait que ce n'est peut-être pas les 70 et quelques ostéopathes diplômés actuellement au Québec qui sont dans cette situation-là, mais il y a des ostéopathes qui ont des listes d'attente de 6 mois à un an. Alors, ça vous donne comme une idée de la demande et de notre difficulté, parfois, à répondre à la demande en ce sens-là.

M. Côté (Charlesbourg): Dans son avis, l'Office des professions ne recommande pas de créer de corporation professionnelle des médecines douces, mais, à la page 20, «recommande de réserver les titres d'homéopathe agréé et d'homéopathe agréée et d'ostéopathe agréé et d'osthéopathe agréée».

Une voix: E.

M. Côté (Charlesbourg): Évidemment, si vous êtes ici aujourd'hui pour vous exprimer sur le volet formation, j'imagine que vous n'êtes pas, non plus, indifférents à ces recommandations-là, parce qu'on ne forme pas uniquement pour le plaisir de former. Il faut aussi que ça pratique à l'occasion. La base de la recommandation de l'avis, c'est d'être sous le chapeau d'une autre corporation. Vous réagissez comment à cela, autrement que par le document que vous nous avez produit, avec vos exigences? Et est-ce que la proposition de l'Office n'est pas la voie la plus sécuritaire d'un processus qui évolue, pas rapidement, mais qui évolue?

Mme Beaulieu: Donc, elle n'est peut-être pas nécessairement sécuritaire par rapport à tous les arguments que j'ai amenés tantôt, mais je veux laisser...

M. Côté (Charlesbourg): Oui. Ha, ha, ha!

Mme Beaulieu: ...la parole à Paul et, ensuite, à Roger qui ont des arguments.

M. Lépine: Elle peut à... C'est une solution qui est attrayante, au premier abord, parce qu'elle paraît simple, du moins pour l'État, il y a peu de frais, peu de législations à modifier, etc.

Par contre, nous, il y a plusieurs choses qu'on craint énormément. D'abord, à voir comment, par exemple, la corporation des médecins réagit à la demande que le gouvernement et vous lui faites, en particulier, au point de vue des sages-femmes, comment vont-ils réagir à l'ostéopathie? Dans le document qu'ils ont publié sur les médecines douces, ils ont clairement énoncé que, pour eux, l'ostéopathie, c'était musculo-squelettique, un point, c'est tout, alors que l'ostéopathie, c'est en partie musculo-squelettique, mais c'est aussi les rythmes crâniens, c'est aussi les rythmes physiologiques, c'est aussi tous les autres tissus du corps humain, quels qu'ils soient.

Une de nos craintes, ça serait que la corporation des médecins dise: Les médecins agréés en ostéopathie n'ont le droit de faire de l'ostéopathie que dans le musculo-squelettique. Même chose pour les physiothérapeutes. On craint que la corporation des physiothérapeutes nous dise: Les physiothérapeutes agréés en ostéopathie n'auront le droit de faire de l'ostéopathie que dans le cadre du musculo-squelettique, ce qui est une aberration pour nous. Il y a des problèmes qui, à première vue, sont musculo-squelettiques et qui originent d'un viscère,

d'un organe, d'un autre tissu, et tant qu'on n'aura pas libéré les contraintes dans ce tissu-là à distance, les problèmes au niveau musculaire et squelettique vont récidiver. C'est le fondement même de l'ostéopathie.

Un des dangers énormes, c'est celui-là, que, et par l'ingérence dans le cursus du cours et, ensuite, l'ingérence dans la façon de pratiquer l'ostéopathie, on nous limite et on dénature l'ostéopathie; et on perdrait ce que l'ostéopathie a de plus riche, de plus beau, d'essentiel à apporter et qu'elle apporte déjà à l'ensemble de la société québécoise.

M. Hobden: Je pense que notre proposition est plus réaliste, compte tenu de l'état actuel des effectifs médicaux, aussi. Dans le fond, si on regarde — comme, moi, je suis médecin, alors je vais parler pour ma corporation d'origine — qui s'occupe du locomoteur chez les médecins? Il y a environ 85 physiatres. Il y a à peine le tiers, le quart de ces gens-là qui manipulent un peu. Des 325, 340 orthopédistes, il n'y en a à peu près aucun qui manipule, peut-être une dizaine. Qui sont nos pairs? Qui va aller nous dire: Les actes ostéopathiques que vous posez sont corrects ou non? Moi, je considère que les 70 diplômés qui ont été formés par l'école où j'ai étudié, c'est eux, mes vrais pairs, et on est au moins aussi nombreux que les physiatres ou les rhumatologues, ou d'autres spécialistes. Moi, je pense que ce ne serait pas une mesure qui serait applicable.

Mme Beaulieu: II y a aussi un autre élément à apporter sous cet aspect, à savoir: vous parlez des médecins, vous parlez des physiothérapeutes, mais ce ne sont pas les seules professions qui ont le cursus de sciences de base de la santé. Vous avez les ergothéra-peutes qui ont le même cursus, vous avez les infirmières, niveau bac, qui ont le même cursus dans les sciences de base de la santé, et on a aussi les gens en diététique et nutrition, qui ont le même cursus des sciences de base de la santé. Donc, on a des gens qui ont été formés dans ces différentes corporations, et diviser les ostéopathes en six ou en sept, parce qu'on a aussi des chiropra-ticiens qui n'ont pas complété encore leur formation, à ce moment-là, ça divise en un nombre croissant les intervenants.

Alors, imaginez le client devant ça. J'ai un médecin ostéopathe, un physio osthéopathe, une infirmière ostéopathe, un chiro ostéopathe. Qui je vais aller voir? C'est quoi, la différence? C'est quoi, la ressemblance entre les différents intervenants? Je pense que c'est plutôt multiplier les modes d'évaluation, les modes d'inspection, c'est multiplier les processus plutôt que de les réduire et de les concentrer en une seule profession.

Le Président (M. Joly): Merci, M. le ministre. Merci, madame. M. le député le Rouyn-Noran-da—Témiscamingue, s'il vous plaît.

M. Trudel: Merci, M. le Président. Bienvenue, au nom de l'Opposition, à ces premiers représentants de l'ostéopathie. Bon, c'est un mouvement et c'est une appproche importante au Québec et dans le Nord-Amérique, et il faut être capables d'examiner et de voir comment, éventuellement, l'État serait appelé à dire que vous existez légalement.

Dr lapine, vous avez une formation en médecine, d'abord.

M. Lépine: Oui.

M. Trudel: Est-ce que, vous, là, vous avez été amené à l'ostéopathie davantage par une approche ou comme à une discipline différente de votre formation médicale? Vous avez cette formation de base d'omnipra-ticien, mais, par ailleurs, si je comprends, vous avez pris cette formation en ostéopathie au Collège, là, et parce que le curriculum de formation en médecine est insuffisant.

Alors, mes questions, c'est: Est-ce que, pour vous, c'est une discipline distincte ou complémentaire? Et pourquoi vous êtes allé, par exemple, dans cette direction-là en plus de votre formation médicale?

M. Lépine: II ne fait aucun doute dans mon esprit que l'ostéopathie est une profession tout à fait distincte de la profession médicale, dans ses concepts, dans sa façon d'aborder un client, dans sa façon de raisonner, dans sa façon de rechercher les causes et dans les méthodes d'intervention qui sont au niveau du toucher, de la palpation, de redonner la mobilité aux tissus, ce que ne fait pas du tout un médecin. Alors, pour moi, c'est clair, c'est une profession tout à fait distincte.

Qu'est-ce qui m'a amené là? Plusieurs choses. D'abord, voir que le modèle médical qui explique toute les maladies par des désordres hormonaux, par des influences de virus, de microbes, de trop d'hormones ou pas assez, de biochimie déréglée, c'est vrai, ça fonctionne, mais c'est très limité comme modèle. Il y a des gens qui sont malades et pour qui ce modèle-là de rechercher un déséquilibre biochimique ne fonctionne pas, n'a pas de réponse, ne fait pas de sens. Et il y avait aussi le besoin de toucher les gens, d'intervenir avec mes mains, ce qu'on ne fait pas en médecine. On touche du bout des doigts pour examiner de façon vraiment minimale par rapport à comment on touche et on examine en ostéopathie. Je ressentais un besoin de développer cette palpation-là, et ça a tout à fait répondu à mon besoin, l'ostéopathie.

M. Trudel: Alors, vous, comme médecin qui avez cette formation à l'université, vous contestez l'exclusivité du modèle médical nord-américain, dit scientifique, en particulier, et vous dites, en matière de santé, qu'il n'est pas vrai qu'il y ait un tel monopole qui doit être maintenu par cette école de pensée que vous venez de nous décrire et qui est l'apanage des facultés de médecine, disons, nord-américaines et occidentales, probablement.

M. Lépine: Absolument. Je ne veux pas du tout réduire l'apport de ce modèle-là qui a été absolument

extraordinaire, mais c'est un modèle qui a ses limites et auquel on est de plus en plus confrontés depuis 15 ou 20 ans. C'est sûr qu'au début du siècle le modèle scientifique et le modèle biochimique ont apporté des découvertes absolument extraordinaires, mais maintenant les découvertes extraordinaires sont de plus en plus rares. On voit de plus en plus les limites et même les aberrations ou les fautes de ce modèle, et il existe effectivement d'autres modèles qui fonctionnent, qui correspondent à la réalité. Eh oui, je conteste le monopole de la médecine avec cette vision, actuellement, qui, de par la Loi médicale, régit tout dans ce qui est du domaine de la santé. (12 h 30)

M. Trudel: Dans ce contexte-là, vous en arrivez donc à la conclusion qu'il faudrait modifier la Loi médicale pour briser en quelque sorte ce monopole sur la santé des citoyens et des citoyennes au Québec. Est-ce que vous arrivez à cette conclusion-là?

M. Lépine: La mécanique de le faire, je ne suis pas un spécialiste des lois et de ces choses-là. Ce que je sais, c'est qu'il faut absolument assurer un exercice professionnel de l'ostéopathie de façon indépendante des autres professions actuellement existantes.

M. Trudel: Fondamentalement, donc, dans votre mémoire et dans l'annexe, le résumé que vous nous avez donné, vous voulez être reconnus. C'est ça la base et vous donnez très bien la définition, pour vous, de ce qu'est être reconnu comme discipline, comme professionnels de la santé.

Vous venez, par ailleurs, de nous décrire le corporatisme assez étroit qui est pratiqué par la Corporation professionnelle des médecins eu égard à ce que vous êtes devenu. Et là, je ne veux pas vous faire témoigner contre votre profession, votre corporation première, pas du tout, sauf que je m'étonne que vous réclamiez semblable modèle pour vous. Et je vais ajouter ceci... Non, non, allez-y. J'aurai une question après.

Une voix: D ' abord...

M. Trudel: Je m'étonne beaucoup que vous réclamiez d'être reconnus par le même modèle qui, à bien des égards, semble assez inadéquat parce que monopolistique, parce que très conservateur, très protecteur et passéiste à bien des égards.

M. Lépine: Là-dessus, le registre d'ostéopathes qui va nous suivre, qui est l'organisme de contrôle de l'exercice de la profession d'ostéopathe existant actuellement, va pouvoir vous répondre beaucoup plus. Ce que je peux, par contre, vous dire dès maintenant, c'est que le modèle qui existe actuellement au Québec, c'est le Code des professions, et l'Office des professions reconnaît lui-même dans son document que l'ostéopathie satisfait aux cinq critères légaux de la reconnaissance d'une profession. On a simplement pris la loi existante et dit: Nous, on rentre dans cette loi-là, on est soumis à l'application de cette loi-là.

Si, par contre, le gouvernement modifie la loi et ouvre de nouveaux modèles, on est tout à fait ouverts à d'autres modèles qui, par ailleurs, assureraient un exercice exclusif indépendant de l'ostéopathie ou de l'ostéopathe.

M. Trudel: C'est dans ce sens-là que je dois dire que je m'étonne un peu que vous n'accompagniez pas la recommandation de l'actuel Office des professions qui dit oui au titre réservé, c'est-à-dire sera ostéopathe au Québec la personne qui a tel niveau de formation, tel qu'entendu, et ce sera par règlement. Supposant, par ailleurs, que la Loi médicale soit modifiée pour vous mettre à l'abri de poursuites pour pratique illégale de la médecine en excluant un certain nombre d'actes que vous ne pourriez pas pratiquer, est-ce que ce n'est pas là la reconnaissance que vous recherchez et que, quant au fait de vous policer entre vous, le rôle des pairs, vous êtes capables de vous policer entre vous autres sans l'aide de l'État? Est-ce qu'une reconnaissance, en quelque sorte, de votre titre et le fait de vous réserver ce titre n'est pas une mécanique suffisante, dans le cas de votre discipline, pour vous permettre d'exercer librement votre profession et d'avoir votre place dans la société québécoise?

M. Lépine: Je voudrais d'abord apporter la distinction. De ce que je comprends de la recommandation de l'Office, c'est bel et bien que le titre soit réservé à l'intérieur des corporations existantes. C'est ça qu'on rejette de la proposition de l'Office. Par ailleurs, si le gouvernement décidait d'accorder aux ostéopathes une corporation des ostéopathes avec titre réservé, mais pas de champ d'exclusivité ou de choses comme ça, c'est une chose qui, effectivement, nous conviendrait et avec laquelle on serait capables de fonctionner, avec l'ajout, comme vous disiez, d'une modification à la Loi médicale qui préviendrait qu'on soit poursuivis pour exercice illégal de la médecine.

Une voix: On est en retard.

M. Trudel: C'est toujours trop rapide ici. Merci de la réponse. En tout cas, moi, je note très précieusement cette dernière réponse. Comment envisagez-vous la correction inéluctable au mécanisme de traitement des plaintes dans les corporations professionnelles? Je veux bien croire à la nécessité de la sanction par les pairs. Comme disait Gravel dans La Presse, il y a 15 jours, écoutez, le public ne croit plus à cela. Le public ne se sent pas protégé. Il y a peut-être de la justice, là, mais le public dit: Au minimum, il n'y a pas apparence de justice. On n'est pas entendu. Ce mécanisme de traitement des plaintes, en général, dans la population, on n'y croit pas. Il ne faut pas se conter d'histoires entre nous, là. Le public, il dit: C'est un groupe, ils s'organisent entre eux autres. Je ne touche personne en disant cela, là. Vous le savez que c'est le sentiment général.

Comment on va en arriver, dans votre optique, à

l'intérieur de votre profession, à corriger cette difficulté-là non seulement pour qu'il y ait justice, pour qu'on traite en toute équité les plaintes, mais pour qu'il y ait apparence de justice, que l'équité soit apparente, également, et que ça corresponde à ce que le public attend de nos professionnels?

Le Président (M. Joly): Une réponse très brève serait appréciée, s'il vous plaît.

Mme Beaulieu: Très brève, parce que la question s'adresse particulièrement bien au Registre qui nous suit, tout de suite après, parce que c'est vraiment le gros travail du Registre qui a été fait, jusqu'à date, qui est de travailler dans le cadre de cette optique...

Le Président (M. Joly): Merci.

Mme Beaulieu: ...au niveau de la protection du public, des plaintes et tout ça. Alors, j'espère ne pas vous froisser...

M. Trudel: Pas du tout.

Mme Beaulieu: ...mais c'est vraiment le travail au niveau du Registre.

M. Trudel: Ça va.

Le Président (M. Joly): Merci, madame. M. le ministre, merci. Alors, merci beaucoup.

Maintenant, je demanderais aux gens représentant le Registre ostéopathique du Québec-Canada de bien vouloir prendre place, s'il vous plaît. Bonjour, mesdames, bonjour, monsieur. Alors, Mme la présidente, s'il vous plaît.

Registre ostéopathique du Québec-Canada (ROQ-C)

Mme Babin (Constance): Oui. Je suis Mme Constance Babin, présidente du Registre, et je vous présente mon collègue, Yves Lavallée, trésorier du Registre...

M. Lavallée (Yves): Bonjour.

Mme Babin: ...et Anne-Marie Cossette, qui est membre du comité sur la reconnaissance des ostéopathes pour le Registre.

Le Président (M. Joly): Merci beaucoup. Vous avez une dizaine de minutes, madame, pour nous présenter un résumé de votre mémoire et, par après, des parlementaires échangeront avec vous.

Mme Babin: m. le président, mesdames et messieurs de l'assemblée nationale, mesdames et messieurs de la presse et mesdames et messieurs du public, le registre ostéopathique du québec représente plus de 90 % des diplômés en ostéopathie au québec, issus de 2 collèges accrédités: le Collège d'études ostéopathiques et le Centre ostéopathique du Québec. Outre la demande de reconnaissance professionnelle, le principal mandat du Registre est de protéger le public en lui garantissant des ostéopathes qualifiés et compétents. Avec peu de moyens légaux, le Registre s'est donné des outils pour contrôler la compétence des membres par la création d'un code de déontologie et de différents comités tels que discipline, inspection professionnelle, formation et autres. De plus, le Registre a obtenu et exige des membres une assurance-responsabilité professionnelle.

Malgré toutes ces actions et à cause du contexte de la loi actuelle, le Registre ne peut assurer une protection suffisante à la population, et la population n'est pas à l'abri de tous ceux qui n'ont pas de formation complète en ostéopathie, ou voire même aucune formation, et qui se disent ostéopathes. Paradoxalement, sous cette même loi, malgré tous nos efforts et notre souci de professionnalisme, nous ne sommes pas à l'abri de poursuites pour pratique illégale de la médecine. la reconnaissance professionnelle des ostéopathes. depuis 1990, nous avons fait une demande de reconnaissance professionnelle. les ostéopathes diplômés au québec sont, pour la très grande majorité, soit 84 %, des professionnels de la santé qui ont choisi d'étudier et de pratiquer une autre profession tout à fait distincte de leur profession d'origine. selon certaines déclarations du président de la corporation des médecins, la réglementation de l'ostéopathie est une affaire réglée, ce qu'il a dit à l'émission de télévision que m. le ministre a écoutée. en principe, le québec pourra même recevoir 10 médecins ostéopathes américains par année. ce qu'il faut se demander vraiment: avons-nous besoin d'ostéopathes américains au québec? pourquoi faire de la place aux américains, alors que nous avons plus de 100 ostéopathes québécois qui soignent environ 15 000 personnes par année? les ostéopathes québécois sont en clinique privée, pour la très grande majorité. en plus de ne rien coûter à l'état, ils sont responsables du plus haut taux d'efficacité, soit 67 % selon le rapport de l'office des professions, et du plus haut taux de satisfaction des médecines alternatives, selon un sondage crop publié dans la presse. (12 h 40)

La Régie de l'assurance-maladie du Québec a-t-elle les moyens financiers de payer des honoraires de plus de 100 000 $ annuels à chaque ostéopathe américain qui viendra au Québec? En vertu de la Loi médicale, on reconnaît que la médecine et l'ostéopathie sont des disciplines tout à fait distinctes et on reconnaît que l'ostéopathie n'est pas une spécialité de la médecine, mais une discipline médicale.

Les recommandations de l'Office des professions de demander d'intégrer les ostéopathes dans leur corporation sont inacceptables pour tous les ostéopathes. Les corporations professionnelles sont constituées pour régir leur profession. Elles ne peuvent et ne doivent pas régir une autre profession sous le seul prétexte que quelques-uns de leurs membres se sont qualifiés pour pratiquer l'ostéopathie. De plus, ces corporations ne pourraient

accorder ce titre d'ostéopathe agréé qu'aux membres de leur profession qui se sont qualifiés.

Ceci veut dire que les professionnels des autres corporations ayant reçu la même formation en ostéopathie se verraient exclus automatiquement de leur profession d'ostéopathe. L'injustice et les discriminations qui en résulteront sont clairement inacceptables et préjudiciables au public. En constatant que l'ostéopathie satisfait à tous les critères de l'article 25, l'Office a constaté qu'il s'agit d'une profession autonome et distincte. Il se devait donc d'appliquer la loi, c'est-à-dire de recommander la création d'une corporation professionnelle des ostéopathes.

La reconnaissance et le contrôle de la formation. Actuellement, les programmes d'études en ostéopathie ne sont pas officiellement reconnus au Québec. Cette situation engendre une difficulté de contrôle de l'enseignement. Comme l'ont expliqué nos collègues précédemment, la compétence d'un professionnel dépend d'une formation rigoureuse, et une non-réglementation de l'enseignement de l'ostéopathie ouvre la voie à tout opportuniste de l'enseigner sans en avoir la compétence, ni le corps d'enseignement requis. Les collèges d'ostéopathie du Québec et le ROQ-C ont défini les critères de base de la formation des ostéopathes. Cette formation est finalement comparable à toute autre formation à travers le monde. Il est grand temps, pour le grand bien du public, de la population, que ce travail de pionnier soit reconnu par l'État et que ce dernier se penche sur le bien-fondé et la nécessité d'une formation de niveau universitaire à temps complet.

Pour toutes ces considérations, nous soumettons les propositions suivantes: la reconnaissance immédiate par l'État de la formation de tous les ostéopathes membres du Registre; la reconnaissance immédiate des critères de base sur la formation tels que définis par le Registre comme étant les critères de base minimaux obligatoires à l'enseignement de l'ostéopathie au Québec; la création d'un comité conjoint formé des représentants du ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science et des membres du comité de formation du ROQ-C afin de statuer sur la formation actuelle en ostéopathie au Québec et d'envisager une formation universitaire à temps plein en ostéopathie, soit privée ou publique, dépendant de... Le comité en discutera.

En conclusion, la réglementation sur la formation est la seule solution qui garantirait au citoyen qu'il a recours à un professionnel compétent. Depuis maintenant 10 ans au Québec, des enseignants compétents en la matière ont transmis un enseignement de qualité. Le citoyen a le droit et devrait pouvoir utiliser les services d'ostéopathie en toute sécurité. la place dans le réseau. c'est évident que reconnaître une profession, c'est aussi opter pour une politique d'accessibilité dans le réseau. les ostéopathes ne prennent la place d'aucun autre professionnel. ils répondent à un besoin de la population en matière de santé. s'ils sont consultés de plus en plus, c'est parce qu'ils sont efficaces et que les résultats obtenus sont reconnus et importants. la demande est croissante; 70 % consul- tent pour des références de bouche à oreille, 10 % proviennent des autres professionnels de la santé qui, eux-mêmes, se font soigner en ostéopathie.

Pour ce faire, nous demandons une politique favorisant la complémentarité des professions et de l'ostéopathie. Les solutions que nous proposons peuvent être efficaces et très peu coûteuses. Le public a le droit à l'accessibilité à une thérapeutique efficace et qui préconise la prise en charge du client, de sa santé et de sa guérison. Le citoyen veut se prendre en charge, donnons-lui les outils nécessaires.

Le ROQ-C demande donc d'établir des mécanismes de consultation et d'échanges entre les professionnels du secteur privé et du secteur public — il faudrait, entre autres, favoriser un mécanisme de référence et d'accès direct entre les ostéopathes et les autres spécialistes de la santé; d'ouvrir des postes d'ostéopathe consultant dans les différents établissements du secteur public: gouvernement, hôpitaux, CLSC, SAAQ, CSST, etc.; d'accorder des crédits d'impôt ou des déductions à la source plus substantielles aux utilisateurs des services privés en matière de santé, car ces derniers ne se prévalent pas de leur droit au régime universel — cette mesure aurait pour résultat de désengorger le système public et, par conséquent, en diminuerait les coûts; d'accorder les mêmes privilèges aux démunis, assistés sociaux que ceux offerts aux services soit d'optométrie, de dentisterie, etc.

En conclusion, M. le Président, c'est avec confiance que le Registre ostéopathique du Québec soumet ce mémoire à la commission parlementaire sur les médecines alternatives. Nous remercions respectueusement le gouvernement du Québec de permettre aux ostéopathes d'exprimer leurs demandes et leur avis concernant la pratique de l'ostéopathie et sa place dans le système de la santé. Puisse-t-il adopter, pour le grand bien de la population, une politique d'accès à l'ostéopathie. Merci beaucoup.

Le Président (M. Joly): Merci bien, Mme Babin. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, évidemment, nous tenons cette commission parlementaire sous l'initiative du ministère de la Santé et des Services sociaux pas uniquement parce que c'est un engagement qui a été pris, mais parce que c'est une réalité qui est de plus en plus réelle sur le terrain. Je pense que les sondages nous démontrent l'intérêt du public. Vous avez évoqué des chiffres concernant l'ostéopathie, qui sont assez clairs et qui ressortent dans les sondages et même dans l'étude qu'a faite l'Office.

Je veux juste dire, à ce moment-ci, que ça va être une question gouvernementale et non pas uniquement du ministère de la Santé et des Services sociaux. Vous le faites vous-mêmes, par le biais de votre mémoire, en interpellant tantôt le ministère de l'Enseignement supérieur, tantôt mon collègue responsable des professions. Il va donc falloir, au sortir de cette commission-là, qu'il y ait une action gouvernementale et non pas uniquement

du ministère de la Santé et des Services sociaux.

Mais, au moins, notre initiative permettra de rendre public le débat et, finalement, de constater, au fur et à mesure que défilent devant cette commission certaines spécialités, qu'elles confirment presque la nécessité de leur existence, puisque je comprends qu'à chaque fois on a toujours des exemples de médecins de médecine conventionnelle qui utilisent vos services. Vous avez pris soin vous-mêmes de le dire. Donc, il faut croire qu'il y a certains bénéfices pour l'être humain, à l'occasion, de vous consulter, et ces gens-là pourraient apporter des témoignages. Il semble que c'est toujours plus percutant, des témoignages, au moment où vous en avez eu besoin. C'est moins théorique et c'est toujours plus intéressant.

J'avais une première question qui était: Combien y a-t-il de personnes au Registre? Mais peut-être m'avez-vous donné la réponse en me parlant de 100 ostéopathes qui rencontrent 15 000 personnes par année.

Mme Babin: Oui. Il y a 112 membres. Des ostéopathes diplômés, il y en a 74, je pense?

Une voix: C'est ça.

Mme Babin: 74. Mais il y a aussi des gens en fin de formation qu'on appelle les postulants au D.O. C'est parce qu'ils ont fini leur formation, mais ils n'ont pas fait soit la dernière année de clinicat ou la thèse. Et il y a des étudiants, aussi, qui sont membres du Registre.

M. Côté (Charlesbourg): Bon. Le Registre existe depuis...

Mme Babin: 1984.

M. Côté (Charlesbourg): Bon. Si j'ai compris tantôt, ceux qui vous ont précédé accueillent une cinquantaine d'étudiants par année.

Mme Babin: Oui.

M. Côté (Charlesbourg): Où sont les autres?

Mme Babin: Dans une autre école. Il y a un autre collège, le Centre ostéopathique du Québec, qui fait aussi la formation en cinq ans.

M. Côté (Charlesbourg): Bon, O.K. Parfait. Je comprends, là, mais ma question n'était pas ça, mais elle était probablement mal formulée. En formation dans une autre école, bien sûr, mais à 50 par année dans 2 écoles, vous en avez 74, plus un certain nombre qui sont en formation finale. Où sont les autres ostéopathes qui ne sont pas au Registre?

Mme Babin: II y en a qui commencent leurs études et qui ne les finissent pas. Il y en a qui prennent plusieurs années avant de finir leurs études, parce que c'est des études qui sont longues. Souvent, ce sont des gens qui travaillent en même temps. Alors, des fois, ils prennent une année de plus, ils arrêtent un an et ils recommencent une autre année. Alors, souvent, ça prend plus que cinq ans pour faire un ostéopathe. Ça fait que c'est pour ça.

M. Côté (Charlesbourg): Est-ce qu'on peut être dans une situation où des médecins de médecine traditionnelle allant chercher le cours font le clivage des Américains? Donc, ça fait une bonne formation complémentaire pour un médecin qui va d'abord pratiquer la médecine, puis qui va se servir de ça en complément. Est-ce que c'est un peu le cas aussi de certains cas au Québec, qui ne seraient pas au Registre, à ce moment-là?

Mme Babin: Je ne le sais pas. Je ne le sais pas ça. Je ne peux pas vous répondre à cette question-là, M. le ministre.

M. Côté (Charlesbourg): O.K. Je veux juste essayer de voir parce que, si on en forme tant par année et qu'on en donne 100 au Registre, où sont les autres? Bon, je comprends que...

Mme Babin: II y en a qui n'ont pas fini leur formation. C'est la seule chose. C'est long. C'est cinq ans.

M. Côté (Charlesbourg): Oui, c'est ça.

M. Trudel: Est-ce qu'il y en a qui pratiquent sans être chez vous? (12 h 50)

Mme Babin: II y en a, oui, il y en a. À ma connaissance, j'ai fait les statistiques. Il y a sept diplômés du CEO, par exemple, parce que l'autre école est plus jeune, qui ne sont pas membres du Registre, qui ont fini leur formation. Il y en a seulement sept qui ne sont pas membres du Registre. Tous ceux qui ont fini leur formation selon les critères du Registre sont membres du Registre, sauf sept.

M. Côté (Charlesbourg): Parfait, ça va pour ça. Vous parlez beaucoup, et vous vous êtes introduits comme ça, de protection du public. Ça me paraît très important. Le seul moyen d'être capable de progresser, c'est de s'assurer que le public, en toute circonstance, est protégé; sinon, vous êtes voué à disparaître. Ça me plaît. Vous avez parlé de code de déontologie, d'assurance-responsabilité. Les gens qui pratiquent actuellement, vous les suivez, est-ce qu'ils ont fait l'objet de plaintes? Et comment est-ce que ça fonctionne s'il y une plainte chez vous? Si vous n'avez pas de plaintes, on sait déjà l'étampe que sortira mon ami Rémy à la fin. C'est: Allez en paix et multipliez-vous.

Une voix: Ha, ha, ha!

M. Côté (Charlesbourg): Mais est-ce qu'il y a eu

des poursuites? Est-ce qu'il y a eu des plaintes?

Mme Babin: Je peux vous dire, d'abord, que ce n'est pas parce qu'on n'a pas de plaintes que, quand la formation n'est pas complète, ce n'est pas dangereux. C'est peut-être parce qu'on n'a pas de plaintes qu'on est bon, entre autres. On a eu une plainte depuis le début, depuis que je connais, depuis que je suis présidente du Registre, et il n'y en a pas eu avant, non plus. Ça fait trois ans que je suis là. Une plainte, et la plainte était que la personne de qui on se plaignait faisait d'autres techniques que de l'ostéopathie, sous le couvert de l'ostéopathie, et on a eu une plainte là-dessus. Elle a passé devant le comité de discipline, et il y a eu sanction. Mais les seules sanctions, si on avait des plaintes graves, ce serait la radiation, vu qu'on n'est pas légal. On ne peut pas faire plus que ça.

M. Côté (Charlesbourg): J'ai compris que vos moyens juridiques étaient limités, dans votre présentation. Mais, à tout le moins, ça donne une indication si les gens ont accès à un processus de plainte.

Mme Babin: Oui.

M. Côté (Charlesbourg): À tout le moins, quel est le niveau de performance, si ça peut être un instrument de mesure, là?

Mme Babin: Les rares plaintes qu'on a, c'est surtout au niveau coût. Les gens téléphonent au syndic pour savoir: un tel ostéopathe charge 60 $, un autre charge 50 $, est-ce que c'est correct? C'est plus de ce genre-là qu'on a des plaintes.

M. Côté (Charlesbourg): Plus du domaine de l'information.

Mme Babin: Oui.

M. Côté (Charlesbourg): Vous suggérez que ce soit l'État qui poursuive pour exercice illégal de la médecine au lieu de la Corporation.

Mme Babin: Oui.

M. Côté (Charlesbourg): Ça se passerait comment, ça, dans votre esprit, à vous? Bien sûr que vous seriez sortis des pattes de la Corporation professionnelle des médecins du Québec, mais poursuivre pour poursuivre, pensez-vous que l'État, dans un processus comme celui-là, serait plus clément que la Corporation?

Mme Babin: Bien, je pense à l'État, avec aussi des citoyens, des représentants de citoyens et des représentants des professionnels aussi. Rien n'empêche qu'il faut qu'il y ait des professionnels sûrement là-dessus, mais je pense qu'avoir — comment on appelle ça? — une juridiction à part des corporations enlèverait tout conflit d'intérêts qu'on peut trouver à l'intérieur des corporations; on reproche beaucoup aux corporations, actuellement, qu'elles ne sont pas capables de s'autodis-cipliner là-dessus.

M. Côté (Charlesbourg): C'est parce que vous trouvez qu'il y a conflit d'intérêts, à ce moment-là, possiblement conflit?

Mme Babin: Oui, possiblement. Ça pourrait. C'est plus facile.

M. Côté (Charlesbourg): Bon. Là, après ça, un coup bien formés, vous dites: Bon, parfait, vous allez nous reconnaître maintenant dans le réseau de la santé et des services sociaux. Je vous donne des exemples: CLSC, CSST, Société d'assurance automobile. Société d'assurance automobile, CSST, ça me dérange un peu moins, ça émarge sur le budget de quelqu'un d'autre qui doit nécessairement s'autofinancer, hein!

Lorsqu'on ouvre de nouvelles professions au niveau du ministère de la Santé et des Services sociaux, là, ce n'est pas du fait qu'on refuserait les 10 ostéopathes américains à 100 000 $ qu'on fait des économies, on se comprend bien. On a dit tantôt: Non, la RAMQ n'a pas d'argent à payer pour ça. Et, si on a des postes réservés, je pense qu'ils vont servir à d'autres spécialités dont le Québec a besoin. Et, encore, aller à l'étranger, c'est définitivement constater qu'au niveau du Québec on a des échecs à quelque part. Ce n'est pas normal qu'on aille chercher des psychiatres à l'étranger pour combler des postes au niveau des régions, au niveau de la psychiatrie. Ça n'a pas de bon sens. Ce n'est pas normal qu'on soit obligé d'aller chercher des anesthésistes à l'étranger pour combler des postes chez nous. Il y a quelque chose qui ne marche pas dans le système. Le député de Rouyn-Noranda—Témiscamingue parlait tantôt de nos universités. Nos facultés de médecine ont quelques examens de conscience à faire à ce niveau-là, mais c'est après changer.

Mais, à ce que je comprends, pour revenir à nos ostéopathes bien formés, compétents, au public protégé, là, vous nous dites: Vous auriez avantage, M. le ministre, à les inclure comme des professionnels et aussi à les rémunérer, parce que je ne suis pas sûr qu'ils vont aller faire du bénévolat dans les CLSC. À ce que je comprends, ça serait des salariés de l'État qui iraient dans un CLSC offrir des services, et vous nous dites: Bon, il y aurait des économies parce que, avec ce que l'ostéopathe va faire, possiblement que l'individu ne se retrouvera pas chez le médecin à l'acte et, à ce moment-là, vous allez sauver des sous. C'est un peu ça, votre base.

M. Lavallée: II y a deux volets à cette demande-là. Un premier volet, c'est un volet d'information, je veux dire au niveau des gens qui prennent des décisions. C'est important qu'on puisse leur dire ce qu'on peut faire, ce qu'on peut apporter, notre contribution, au réseau. C'est important qu'on puisse échanger, peut-être même influencer les politiques. Il y quand même certains CLSC aussi où il n'y a pas de médecins qui peu-

vent y aller. Il me semble qu'il y aurait peut-être, à certains endroits, des postes qu'on pourrait combler, notamment, pour aider les personnes qui sont plus démunies. Ce n'est pas nécessairement de tous se faire engager par le ministère, mais il y a ces deux volets-là qu'on voulait explorer avec cette demande-là.

M. Côté (Charlesbourg): Parce que, en réalité, là...

Mme Babin: C'est davantage des postes de consultant. C'est important que les ostéopathes, si, un jour, on reconnaît l'ostéopathie... Je pense que, pour reconnaître l'ostéopathie, il faut la rendre accessible, aussi. Si on reconnaît l'ostéopathie, puis qu'elle n'est accessible à personne, je ne vois pas pourquoi on la reconnaîtrait. C'est comme la formation. Tout va ensemble.

M. Côté (Charlesbourg): Oui, mais c'est parce que, finalement, sur la plan des équilibres financiers, ça a une importance.

Mme Babin: Oui, je vous comprends.

M. Côté (Charlesbourg): Je comprends le principe que vous avez. D'ailleurs, comme vous avez des revenus, vous payez suffisamment de taxes et vous faites probablement partie de la catégorie de ceux qui en ont par-dessus la tête. Et, à chaque fois qu'on ajoute, évidemment, on ajoute des doigts à la main du ministre des Finances pour aller puiser dans vos poches. Et ceux-là sont de moins en moins nombreux à payer. Donc, à partir du moment où on embarque dans cette dynamique-là, il faut être conscient que, si les gens veulent avoir davantage de services, il va falloir qu'ils paient davantage.

Au-delà de ça, à partir du moment où la profession est reconnue qu'elle apporte du bien-être à un individu, je pense que c'est déjà une étape extrêmement importante. On ne fait pas d'économie du fait — je n'en ai pas vu encore et ça fait trois ans et demi que je suis au ministère, là — qu'on introduit une nouvelle profession ou une nouvelle technique. Des hôpitaux sont venus nous dire, par exemple: La chirurgie d'un jour, c'est extraordinaire, c'est la solution de l'avenir, vous allez sauver de l'argent. Oui, c'est vrai. Au lieu d'être 4 jours à l'hôpital, si vous y êtes 1 journée, vous pouvez faire un ratio: 400 $ par jour par individu; s'il y a 3 jours de moins, vous sauvez 1200 $, supposément. C'est de l'argent qui ne vaut pas cher, parce que l'hôpital ne te rembourse pas, il ne renvoie pas l'argent au ministère. Il y a quelqu'un d'autre qui va... Donc, on ajoute à la facture qui est à 13 000 000 000 $, actuellement. C'est un petit peu ça qui est inquiétant. Je ne dis pas que ce n'est pas une solution possible. À tout le moins, dans la variante que vous proposez, il y a peut-être un certain intérêt à dire: Peut-être consultations contractuelles pour une période x, qui pourraient soulager. Ça, c'est des opportunités qui peuvent être regardées.

Mme Babin: Nous sommes ouverts, M. le ministre.

Le Président (M. Joly): Merci, M. le ministre. M. le député de Rouyn-Noranda—Témiscamingue.

M. Trudel: Merci. Je dois vous dire, au départ et rapidement, compte tenu du temps, que, moi, j'apprécie la façon dont vous posez les éléments de solution. Vous dites à l'État: II y a deux voies. Je ne sais pas si c'est vrai, mais j'aime comprendre que, dans la première voie, vous dites: Reconnaissez-nous comme une corporation professionnelle puisque c'est le mécanisme actuel. Bon, il faut bien qu'on opère, qu'on ait un modus ope-randi à travers le corpus des lois actuelles. Je vous dis tout de suite là-dessus: Je ne suis pas très corporatiste professionnaliste, compte tenu de l'expérience que nous en avons. Mais vous dites: Deuxième voie, cependant, à défaut, et ça pourrait être le choix de l'État, une réforme en profondeur du Code des professions, incluant la Loi médicale, afin de rendre possible un système d'accréditation des thérapies alternatives par le gouvernement. Je l'ai mentionné à plusieurs groupes, quand vous dites que vous recherchez la reconnaissance... (13 heures)

Et je fais une parenthèse en disant que, surtout, l'Office des professions nous a dit, hier, qu'il n'est pas là pour reconnaître. L'Office n'a pas ça comme responsabilité. Il a comme responsabilité l'encadrement des professions. S'entend que, lorsqu'on a le mécanisme d'encadrement, on est derechef, de ce fait, reconnu. Est-ce que vous croyez que, pour les ostéopathes, le titre réservé, donc, les critères de formation, ce pourrait être suffisant en autant, évidemment, que les modifications idoines à la Loi médicale soient apportées? Est-ce que ça serait suffisant dans votre cas?

Mme Babin: Le titre réservé, effectivement. Puisqu'on répond aux critères de l'article 25, c'est tout à fait ce qu'il nous faut comme profession: avoir le titre réservé, selon l'article 25 du Code des professions.

M. Trudel: À cet égard-là, tout de suite, l'autre dimension qui suit, c'est la protection du public. Alors, là, je vous pose la question que je voulais poser, que j'ai posée à vos prédécesseurs: Les comités disciplinaires, tels que vécus à l'intérieur du système des corporations professionnelles actuellement, le public n'y croit pas. Il n'y a personne qui croit à ça. Tout le monde croit plutôt que c'est un syndicat pour protéger le groupe des membres là-dedans, soyons clairs. Comment on peut en arriver au Québec à contourner cela?

Mme Babin: Comme j'ai répondu à M. le ministre Côté tout à l'heure, c'est qu'il faudrait que la juridiction au niveau des causes disciplinaires soit en dehors des corporations, que ce soit un autre groupe, un autre système judiciaire qui règle ce problème-là et non les corporations elles-mêmes.

M. Trudel: Alors, vous dites: Sortir le système disciplinaire...

Mme Babin: Des corporations.

M. Trudel: ...des corporations et pas nécessairement les corporations du système disciplinaire en soi. Parce que vous avez dit, tantôt, si j'ai bien compris: Mais il faudrait qu'il y en ait, des disciplinaires là-dedans au niveau des comités d'examen ou des jurys...

Mme Babin: Oui, oui.

M. Trudel: ...chargés d'examiner les plaintes.

Mme Babin: Pour ce qui est des plaintes du public.

M. Trudel: Dans ce sens-là, vous accompagnez, donc, la recommandation du Protecteur du citoyen du Québec qui dit: Sortez...

Mme Babin: C'est ça.

M. Trudel: ...les systèmes disciplinaires des corporations professionnelles.

Mme Babin: Parce que, présentement, par exemple, la Corporation professionnelle des médecins, c'est un peu... Moi, je dis: C'est l'État dans l'État en matière de santé. C'est elle qui régit et elle a la suprématie sur tout.

M. Trudel: Des fois, je suis tenté de dire: C'est l'État avant l'État, quand on regarde le cas des sages-femmes. C'est l'État avant l'État en ce qui regarde un certain nombre de comportements de ces corporations professionnelles.

M. Côté (Charlesbourg): S'il y a quelqu'un qui le sait...

M. Trudel: Vous pensez? Est-ce que ça va amener à agir?

M. Côté (Charlesbourg): Comment?

M. Trudel: Est-ce que ça va amener à agir?

M. Côté (Charlesbourg): Juin 1990.

M. Trudel: Ça semble un petit peu plus urgent, là, mais enfin! Vaut mieux tard que jamais.

M. Côté (Charlesbourg): J'accepte vos explications.

M. Trudel: Et je surveille. Je vous préviens, M. le ministre: Je surveille. Écoutez, je pense que vous nous avez donné toutes les explications nécessaires sur la nécessité de votre présence dans le réseau de la santé et de votre participation au mieux-être des Québécois et des Québécoises. Il reste l'énorme problème que le ministre soulevait tantôt que votre inscription, par exemple, dans le réseau public de la santé et de services sociaux correspond à des coûts. Il est assez curieux qu'on ne repose jamais la question, cependant: Si on n'a pas de fric pour vous inclure dans le réseau, est-ce que la masse de 2 100 000 000 $ de la médecine traditionnelle pourrait être remise en cause quelquefois?

Mme Babin: Probablement. Si, avec certaines médecines, on diminue les coûts de la médecine traditionnelle, on peut transférer certaines sommes d'argent. Notre deuxième solution est aussi, quand on demande des crédits d'impôt ou des déductions à la source à chaque professionnel qui travaille en privé, bien, on augmente ainsi les revenus du privé. Si on augmente les revenus du privé, on augmente les impôts aussi, et c'est des solutions qui ne coûtent pas cher, ça.

M. Lavallée: Dans le fond, si tous les gens vont au privé pour se faire traiter, il y a des chances qu'il y ait moins d'achalandage au niveau public. Ça, c'est l'économie pour le gouvernement...

M. Trudel: Oui.

M. Lavallée: ...s'il y a cause à effet là-dedans.

M. Trudel: Ce raisonnement-là, il va falloir, un jour, comme disait le ministre, tantôt...

M. Lavallée: Qu'on le vérifie.

M. Trudel: ...aller jusqu'au bout tout le temps comme citoyens, là. Ça pourrait amener une baisse de consommation dans le système public, sauf que ce n'est jamais ce qui est observé. On pourrait aller jusqu'à dire que, tant qu'il y aura un lit d'hôpital au Québec, là, il va se créer un malade pour l'occuper.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Trudel: On s'entend, là, hein? Alors, si vous le sortez trois jours par la chirurgie d'un jour, il y a quelqu'un d'autre qui entre. Je ne sais pas si, dans la nuit ou dans les trois jours, il y a eu comme une espèce d'effet épidémiologique qui fait qu'il y a une augmentation soudaine de la maladie, là, mais, tant qu'il va y avoir un lit d'hôpital, au Québec, on dirait qu'il y a un malade qui va se créer pour l'occuper. Donc, ça ne baisse pas les coûts. Il va falloir qu'on soit capables de vérifier à quelque part que, quand on diminue par des approches qui seraient plus légères et aussi efficaces, cela va de soi, ça ne permette pas à l'autre niveau de demeurer à ce même niveau, parce qu'à ce moment-là on ne vient que d'augmenter les coûts globaux.

C'est comme l'illusion que nous avons toujours. Ça a été démontré au financement de la santé, et je

conclus là-dessus, M. le Président. On disait: Quand on privatise, ça coûte moins cher. Faux, ultra-faux, démontré super-clairement par les documents au ministère. Ça fait que tous les chevaliers de la privatisation, là, puis de la modération et des tickets, là, hein, bien, on n'a qu'à regarder nos voisins, là, et ça coûte beaucoup plus cher, parce qu'on n'a pas la main haute sur notre système de santé et de services sociaux, avec toutes les possibilités et les impossibilités. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Joly): Merci, M. le député.

M. Trudel: Merci, madame.

Le Président (M. Joly): M. le ministre.

M. Côté (Charlesbourg): Je veux juste dire que c'est deux niveaux différents que de privatiser et de parler de tickets.

Une voix: Oui.

M. Côté (Charlesbourg): Oui, c'est parce que ça serait gros, un peu, là. Ça serait gros, un petit peu.

Le Président (M. Joly): Je pense que tout le monde a compris. Alors, la commission ajourne ses travaux sine die.

(Suspension de la séance à 13 h 7)

(Reprise à 16 h 14)

Le Président (M. Joly): La commission reprend ses travaux. Ça me fait plaisir de souhaiter la bienvenue à l'Association des chiropraticiens du Québec, ainsi qu'à l'Ordre des chiropraticiens du Québec. Tel que convenu, au lieu de faire ça sur une base séparée, l'un à la suite de l'autre, chacun des groupes va présenter le mémoire, soit combiner une vingtaine de minutes. Par après, la balance du temps sera répartie pour l'échange avec les parlementaires. Ça vous va, M. le ministre? M. le critique de l'Opposition? Oui. Parfait. Alors, j'apprécierais si la personne responsable du premier groupe pouvait s'identifier et nous introduire les gens qui l'accompagnent, s'il vous plaît. ~

Association des chiropraticiens du Québec et Ordre des chiropraticiens du Québec

M. Danis (Normand): Dr Normand Danis, président de l'Ordre des chiropraticiens du Québec. M. le Président, M. le ministre, Mmes et MM. les commissaires, c'est avec plaisir que je vous présente ceux qui m'accompagnent. Alors, à ma droite, le docteur André-Marie Gonthier, vice-président de l'Ordre des chiropraticiens du Québec et également responsable du dossier universitaire à l'Université du Québec à Trois-Rivières; à ma gauche, Me Louise Taché-Piette, procureure de l'Ordre des chiropraticiens du Québec; le docteur Richard Giguère, président de l'Association des chiropraticiens du Québec; et le docteur Guy Dubé, secrétaire-trésorier de l'Association des chiropraticiens du Québec.

L'Ordre des chiropraticiens du Québec est heureux de participer et de collaborer à cette commission parlementaire. Nous espérons que nous pourrons apporter un éclairage quant à la problématique des thérapies alternatives. Mais, tel que mentionné dans notre mémoire, c'est un peu avec déception que nous avons pris connaissance du processus qui avait été choisi et qui, selon nous, limitait cette commission à la discussion de mécanismes de reconnaissance, de publicité et de collaboration entre le réseau de la santé et des services sociaux et les différents thérapeutes alternatifs. Nous aurions, de beaucoup, préféré un débat de fond, qui aurait permis une meilleure compréhension du phénomène des médecines douces, ainsi qu'une meilleure connaissance de la formation et des limites des divers intervenants qui évoluent dans ce domaine.

Nous aurions sans doute préconisé une démarche telle que celle utilisée par le législateur en 1963, lors de la mise sur pied de la Commission royale d'enquête sur la chiropraxie et l'ostéopathie. D'ailleurs, 30 ans plus tard, la chiropratique a maintenant une loi et sera enseignée, dès septembre, à l'Université du Québec à Trois-Rivières. Il y avait également l'ostéopathie qui, même à cette époque, avait déjà 4200 heures de formation. Il y a 30 ans, cette commission royale, présidée par le juge Lacroix, avait pu déterminer la formation nécessaire à un professionnel de la santé afin de s'assurer qu'il puisse exercer sa profession et assumer la responsabilité de l'état de son patient. On aurait pu apprendre, également, qu'il existe maintenant des critères universitaires internationaux quant à la formation moderne nécessaire pour un professionnel de la santé de première ligne.

Je me permets donc de vous faire lecture de la brochure récemment produite par l'Université du Québec à Trois-Rivières et qui, selon ces critères, a ciblé les objectifs du programme. La préparation de l'étudiant à exercer ses futures responsabilités professionnelles de chiropraticien exige l'acquisition des compétences de base suivantes. L'aptitude à établir un diagnostic précis de l'état d'un patient à la suite des actes suivants: l'entrevue préliminaire, les examens physiques, neurologiques et orthopédiques du patient, parmi lesquels les examens vertébraux et articulaires, les examens radiolo-giques, les analyses de laboratoire dans le but de rechercher des signes d'anomalie et de pathologie sous-jacen-tes, et de vérifier l'efficacité du traitement.

L'aptitude à déterminer l'approche thérapeutique appropriée. L'aptitude à exécuter des traitements selon les procédures et techniques reconnues par la science chiropratique, parmi lesquelles les ajustements et les techniques manuelles de correction vertébrale et articulaire. L'aptitude à exécuter diverses formes de thérapie physique, telles les tractions, la diathermie, les courants galvaniques, l'infrarouge, etc., dont l'objet est de compléter et d'optimaliser les effets du traitement chiropratique proprement dit. L'aptitude à conseiller les patients

dans le but de les amener à corriger certaines habitudes de vie par le repos, l'exercice, l'alimentation adéquate, l'hygiène posturale afin d'assurer l'efficacité du traitement chiropratique ou de prévenir les affections. L'aptitude à communiquer à divers groupes les informations utiles pour la promotion de la santé et la prévention. L'aptitude à diriger un patient vers d'autres professionnels de la santé pour consultation, ainsi que pour d'autres types d'évaluations et de soins. (16 h 20)

Alors, à la lumière de ces critères et n'ayant d'autres données sur le sujet que l'avis de l'Office des professions du Québec, pour l'Ordre des chiropraticiens du Québec, au chapitre de la reconnaissance professionnelle de certains thérapeutes alternatifs, il existe une situation très particulière pour deux professions, soit les homéopathes et les ostéopathes. Leur situation particulière vient du fait qu'elles occupent des créneaux connexes de corporations professionnelles déjà existantes et, parfois, leurs activités chevauchent des champs d'exercice exclusif.

Dans le mémoire que nous présentons, nous préconisons que l'homéopathie soit pratiquée uniquement par des professionnels de la santé déjà membres de corporations professionnelles, que leurs noms soient inscrits à un registre et que, pour ce faire, ils aient réussi un examen préparé par un comité conjoint des professions concernées, en l'occurrence, la médecine, la chiropratique, la dentisterie, la pharmacie et la médecine vétérinaire. Les plaintes du public à l'égard des homéopathes seraient transmises à ce comité conjoint qui les aiguillerait vers la corporation concernée.

Les ostéopathes devraient, par ailleurs, recevoir leur reconnaissance légale lorsqu'ils sont de formation américaine seulement. Ces ostéopathes américains ont une formation similaire à la chiropratique et à la médecine en cumulant, sur 5 ans, entre 4000 et 5000 heures de cours. Étant donné que la corporation des médecins, à qui le législateur a confié, en 1973, le soin de les accueillir et qui se disait prête à leur conférer un doctorat en médecine, n'en a accueilli aucun, l'Ordre des chiropraticiens du Québec est tout disposé à prendre la relève, à accueillir ces ostéopathes de formation américaine au sein de sa Corporation et à leur décerner un permis de pratique après avoir réussi l'examen professionnel. Étant donné que les chiropraticiens sont du domaine privé, il y aurait là une économie incroyable. De plus, l'Ordre considère que cet accueil devrait être temporaire, que l'on devrait permettre aux ostéopathes de formation américaine d'être autonomes et de posséder leur propre corporation dès que leur nombre le permettra.

Par ailleurs, l'Ordre des chiropraticiens demande que soit retiré le titre usurpé d'ostéopathe aux personnes qui ont suivi 1200 heures de cours au Québec, durant 5 ans, les fins de semaine, au dire même de l'Office des professions, car il s'agit d'une usurpation pure et simple de titre et, par voie de conséquence, de fausse représentation auprès du public.

En ce qui concerne les autres thérapies alternati- ves, la naturopathie se retrouve dans une situation similaire à celle des ostéopathes. Il existe, aux États-Unis, une formation professionnelle qui, de l'avis, encore une fois, de l'Office des professions, est quasi médicale, ce qui signifie environ 5000 heures de cours. Ces personnes, lorsque le gouvernement décidera de faire un débat de fond sur l'ensemble des thérapies alternatives, devraient bénéficier d'une attention toute particulière. Nous croyons que ces professionnels devraient éventuellement se retrouver au sein d'une corporation professionnelle, en vertu de leur formation et de la portée de leurs actes thérapeutiques.

Par ailleurs, l'Ordre des chiropraticiens demande que l'on interdise l'utilisation du titre de naturopathe aux personnes qui ont reçu, au Québec, une formation ne dépassant pas 1000 heures, de l'avis même de l'Office des professions. Il s'agit ici, comme pour les ostéopathes, d'une usurpation de titre pure et simple, avec toutes les implications qui se greffent à une telle action.

En ce qui a trait au mécanisme de reconnaissance des autres thérapeutes, de nombreuses questions sont soulevées du fait même de l'utilisation que font ces personnes des termes «thérapeute», «thérapie», «thérapeutique» et du suffixe «pathe». Tous ces vocables ont, dans leur acception, «guérir et soulager des malades». Or, aucun d'entre eux n'a la compétence académique voulue pour distinguer les problèmes de santé des personnes qui les consultent et, de ce fait, ils peuvent mettre en péril la santé du public. Le danger ne vient pas de l'acte que posent ces thérapeutes alternatifs, mais de leur ignorance des pathologies dont pourraient être affectés leurs clients et, de ce fait, ils ne les dirigent pas vers les professionnels de la santé appropriés. Ce qui cause problème dans ces circonstances vient des termes «thérapeute», «thérapie», «thérapeutique» et du suffixe «pathe» employés par ces personnes et qui, de ce fait, incitent les gens malades à les consulter. Une législation sur l'usage de ces termes s'impose pour la protection du public.

Nous avons également, dans ce mémoire, apporté une attention spéciale aux masseurs et masseuses qui constituent au Québec un groupe important, et dont l'utilisation du titre «massothérapeute» porte nécessairement à confusion. Nous connaissons les raisons qui les ont motivés à prendre ce titre, désirant se démarquer de certaines personnes oeuvrant dans des salons de massage. Pour contrer cette attaque contre la réputation de ces gens, nous proposons que l'on s'inspire du système de reconnaissance qui a cours chez les maîtres électriciens et que les personnes inscrites à ce regroupement reçoivent le titre de «masseur licencié». Nous croyons qu'un examen conduisant à ce titre devrait sanctionner la compétence des gens qui le détiennent.

La publicité qui entoure l'activité de ces thérapeutes alternatifs n'appelle aucune législation particulière. Elle tombe tout simplement sous la Loi sur la protection du consommateur. Toute publicité mensongère n'est-elle pas proscrite? Devant le nombre de ces personnes, le ministère responsable de l'application de cette loi aurait avantage à former une section spécifique à cet égard.

Quant à la dernière question soulevée par la Commission des affaires sociales sur la contribution du réseau de la santé et des services sociaux, nous croyons qu'elle devrait se limiter à ne pas entraver inutilement les professions de la santé déjà reconnues par l'existence d'une corporation, mais non mentionnées dans la Loi sur l'assurance-maladie, tels les chiropraticiens qui doivent, chaque fois, obtenir un ordre de la cour pour pénétrer en milieu hospitalier, auprès de leurs patients. Alors, ça termine mon exposé et je passerai la parole au Dr Giguère.

Le Président (M. Philibert): Alors, M. le docteur Giguère.

M. Giguère (Richard): Oui. Merci, M. le Président. M. le ministre, membres de la commission, je tiens tout d'abord, à mon tour, à vous remercier d'avoir invité l'Association des chiropraticiens du Québec à vous soumettre ses représentations sur les thérapies alternatives.

Les 15 dernières années ont vu se développer, au sein de la collectivité québécoise, un intérêt croissant pour les thérapies dites naturelles. On a vu, graduellement, la population prendre conscience des dangers que peut représenter l'abus de médicaments et manifester son intérêt pour des approches non agressives et plus susceptibles de faire appel aux pouvoirs naturels de récupération du corps humain. On a vu également s'accroître le degré d'intérêt de la population envers la prévention et les mesures susceptibles de favoriser le maintien de la santé en général.

La chiropratique n'a certainement pas été étrangère à ce changement d'attitude. Même avant leur constitution en corporation professionnelle, en 1973, les chiropraticiens prônaient déjà l'importance de la prévention et de l'intégrité du système nerveux, de même que tous les systèmes qui en dépendent, dans le maintien d'une santé optimale.

Il n'est pas étonnant, dans un tel contexte, que l'on ait vu se multiplier de nouvelles approches dites naturelles et plus axées sur la récupération et le maintien de la santé que sur le traitement des maladies comme telles. Les thérapies alternatives répondent donc à un besoin de la population de se prendre en charge et de s'occuper de sa santé, besoin qu'il y a certainement lieu d'encourager.

Le législateur doit, cependant, se demander dans quelle mesure il est opportun de reconnaître les thérapies alternatives et dans quelle mesure certaines d'entre elles peuvent représenter un danger pour les personnes atteintes de problèmes de santé graves et, par conséquent, plus vulnérables.

Dans un avis adressé au ministre responsable de l'application des lois professionnelles, l'Office des professions recommande que ne soient pas créées de nouvelles corporations professionnelles dans le domaine des thérapies alternatives. L'Office appuie ses recommandations sur un constat à l'effet que la plupart de ces thérapies ne comportaient aucun acte dangereux. L'Associa- tion des chiropraticiens du Québec estime que, dans la décision qu'il devra prendre à l'endroit des thérapies alternatives, le législateur devrait dépasser le simple constat du caractère dangereux ou non. À notre avis, une distinction doit être faite entre les thérapies qui ont pour objet de procurer la détente et de favoriser le bien-être de la personne, et celles qui ont pour objet de traiter des problèmes de santé.

En ce qui concerne les thérapies qui visent à la détente et au bien-être, nous estimons qu'elles ne représentent pas de dangers véritables et qu'elles devraient effectivement continuer à être exercées librement. Si certaines d'entre elles exigent l'acquisition de techniques particulières, telles les techniques de massage, il serait possible d'assujettir leurs membres à l'obtention d'un certificat de compétence.

Il n'en est pas de même pour les thérapies qui ont pour objet de traiter des déficiences de la santé. Celles-ci doivent faire l'objet d'une réglementation particulière quant au contrôle de la compétence de leurs membres. Pour cette raison, nous recommandons qu'elles soient confiées aux corporations professionnelles dont les membres peuvent recevoir une formation dans ces disciplines particulières.

L'Association des chiropraticiens du Québec estime que la reconnaissance des thérapies alternatives ne devrait, en aucun cas, permettre aux praticiens de ces disciplines d'exercer illégalement une profession en posant certains actes réservés aux membres de corporations professionnelles. Dans la mesure où certaines thérapies alternatives, notamment l'ostéopathie, prônent la pratique d'actes réservés exclusivement aux membres d'une corporation professionnelle, elles devraient être réservées exclusivement aux membres de cette corporation. (16 h 30)

En matière d'information et de publicité, l'Association recommande que les thérapies alternatives soient régies par la Loi sur la protection du consommateur et qu'elles se voient interdire de faire de la publicité susceptible d'induire en erreur le public. Les praticiens alternatifs ne devraient pas pouvoir prétendre, entre autres, traiter des problèmes de santé.

Par ailleurs, le législateur, par l'intermédiaire du Code des professions, devrait interdire aux praticiens alternatifs d'utiliser des titres laissant croire qu'ils sont habilités à traiter des problèmes de santé. L'Association des chiropraticiens du Québec recommande également que le réseau des services de santé et des services sociaux mette fin au monopole médical dont il fait encore l'objet et qu'il permette aux bénéficiaires un accès plus libre aux professionnels non couverts par la Loi sur l'assurance-maladie.

Présentement, un professionnel qui ne fait pas partie du réseau des services de santé et des services sociaux et qui n'est pas un professionnel de la santé au sens de l'article 1 b) de la Loi sur l'assurance-maladie n'a aucun droit d'accès aux établissements du réseau, à leurs équipements et à leurs services. Ainsi, par exemple, les chiropraticiens, dont le statut professionnel et le

droit de traiter sont reconnus depuis 20 ans, dont le diplôme de doctorat est reconnu par le gouvernement du Québec et sera, à partir de cette année, décerné à l'Université du Québec à Trois-Rivières, n'ont aucun accès aux établissements du réseau et à leurs services.

Par voie de conséquence, un patient hospitalisé qui désire recevoir des traitements chiropratiques doit d'abord obtenir à ses frais une ordonnance du tribunal enjoignant l'établissement en question d'autoriser le chiropraticien à y dispenser ses soins. Cette situation, aussi discriminatoire qu'injustifiée, consacre, à l'intérieur du réseau de la santé et des services sociaux, un monopole dont ne veut plus l'ensemble de la population du Québec.

La Loi sur l'assurance-maladie a également des répercussions sur le statut professionnel des chiroprati-ciens qu'elle n'inclut pas comme étant des professionnels de la santé. Même si, dans les faits et dans le quotidien, les chiropraticiens sont légalement habilités à traiter des problèmes de santé, plusieurs lois sectorielles, telles la Loi sur les accidents du travail et la Loi sur l'assurance automobile, font référence à l'article 1 b) de la Loi sur l'assurance-maladie pour refuser de reconnaître les chiropraticiens comme des professionnels de la santé de premier contact. En ce faisant, l'ensemble de ces lois perpétue un monopole fermé qui empêche définitivement l'accès des bénéficiaires de ces régimes aux soins chiropratiques et aux autres soins qui ne font pas partie de ce monopole.

En conséquence et compte tenu de ce qui précède, l'Association des chiropraticiens du Québec recommande que tout acte relevant d'un champ exclusif d'une corporation professionnelle demeure sous le contrôle et la juridiction exclusive de cette corporation; que la réglementation proposée par l'Office des professions dans le but de restreindre l'usage de certains titres s'applique spécifiquement au terme «thérapeute» et aux termes équivalents; qu'il soit mis fin au monopole médical qui persiste présentement dans le réseau des services de santé; et qu'une législation plus conforme aux réalités sociales et professionnelles soit adoptée sans délai, avec la modification qui s'impose aux lois déjà existantes. Merci.

Le Président (M. Philibert): Alors, M. Giguère, merci. On est prêts maintenant à passer à la participation des ministériels.

M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. le Président. Je suis envahi par un double sentiment. Je vous dis tout de suite que j'ai déjà eu affaire à des chiros. J'en ai eu des bons, j'en ai eu des moins bons. C'est comme les politiciens, c'est comme toute sorte de monde. J'ai eu du soulagement pour des problèmes précis; j'en étais très, très heureux. Donc, je n'ai absolument rien contre les chiros, au moment où ils peuvent faire quelque chose.

Mais, vous faisiez état tantôt que, depuis 1963, ça aura pris 30 ans pour reconnaître à une université la possibilité de dispenser la formation. Ce n'est pas pire, il y a au moins ça. En même temps, j'entends parler du monopole de la corporation des médecins, on entend parler de ça depuis le début. Il faut bien admettre qu'il y a un monopole qui est réel, on vit avec, j'en sais quelque chose depuis trois ans et demi. Je n'ai jamais caché mes couleurs quant à faire l'impossible pour aérer un petit peu tout ça et travailler sur l'ensemble de la personne.

L'impression que j'ai, c'est qu'à partir du moment où vous arrivez à un niveau de reconnaissance aussi important que le vôtre actuellement vous êtes pareils. Et, si je me trompe, ne vous gênez pas pour me le dire. J'ai pris soin de vous répéter, au départ, que je n'ai rien contre les chiros. J'avais vu à l'époque un médecin. Il m'a donné à prendre 32 pilules par jour, et me coucher 48 heures sur le plancher, pas d'oreiller. Je suis sorti de là, j'étais aussi pire, probablement pire, parce que j'avais les pilules en plus. Alors, je suis allé voir un chiro. Il a réglé mon problème dans l'espace de deux ou trois traitements. Donc, j'ai toutes les raisons du monde de vous aimer.

Mais, sur le plan de l'attitude, à partir du moment où vous êtes rendus où vous êtes, après des batailles qui ont dû être féroces au fil des années, il me semble que vous êtes passablement durs pour les autres, bon, et vous avez probablement raison d'être durs pour un certain nombre de thérapies dites alternatives. Je pense que, là-dessus, on a été quand même passablement clairs. Je regarde celles dont vous avez parlé à l'intérieur de votre mémoire: homéopathie, ostéopathie, naturopathie, ta, ta, ta, ta. J'y reviendrai pour chacune, parce que ça m'apparaît important de clarifier les choses. Pour celles qui n'ont pas raison d'exister ou d'être reconnues, on ne se chicanera pas longtemps. Ce que je souhaite, c'est que vous ayez la même ouverture d'esprit, même encore davantage, vis-à-vis de celles qui sont là aujourd'hui et qui peuvent apporter du soulagement à l'individu. Est-ce que je me trompe en pensant que vous êtes un peu durs vis-à-vis ceux et celles qui, aujourd'hui, attendent et que vous...

M. Danis: Permettez-moi de vous dire que, peut-être, vous vous trompez...

M. Côté (Charlesbourg): Oui, oui.

M. Danis: ...dans le sens suivant. Nous, tout ce qu'on essaie de faire, c'est d'apporter de la cohérence. Et, vous avez raison, il y a eu de fortes batailles, par la chiropratique, pour gagner ses epaulettes. Ça, tout le monde est au courant, mais les critères de base — et c'est là que je suis tout à fait surpris — avaient été, en 1963, balisés par une commission royale d'enquête. Alors, nous, ce qu'on dit, et j'ai été, dès le début de mon intervention... Où sont ces données où on peut se prononcer? Et, en l'absence de ces données, comment voulez-vous qu'on se prononce sur des intervenants, dans le monde de la santé, qui disent faire des choses, quand ces intervenants-là n'ont pas, et de façon approfondie, démontré leur formation — peut-être parce que

personne ne leur a demandé — et, également, leur champ d'intervention?

M. Côté (Charlesbourg): Soyons clairs, parce que c'est un exercice pour ça. Je comprends votre étonnement. Trente ans après avoir écrit la bible, qu'on se requestionne sur la bible, je comprends ça, là. Moi, je comprends tout ça. Il faut remettre à jour nos choses. Il faut tenter de progresser. Je ne souhaite pas que ça prenne 30 autres années pour arriver à ce à quoi ça vous a pris 30 ans à arriver.

Quand je regarde le cas particulier des homéopathes, ils étaient là avant vous autres, à ce que j'ai compris, parce que, moi, dans mes notes, à moins que j'aie eu des mauvaises notes, en 1865, ça existait et c'était reconnu. Us ont perdu leur statut en 1973 pour une question de nombre. L'homéopathie, ça existe ailleurs. D'ailleurs, vous lui faites un traitement spécial dans votre mémoire, on en convient.

Je ne veux pas qu'on parle, pendant le temps qui nous est imparti, de ce qui existe, mais ne sera pas reconnu, parce que ce n'est pas ça, l'objet de la commission. L'objet de la commission, c'est de parler de choses qui, demain, ont des chances d'être reconnues parce que efficaces. Je ne veux pas embarquer dans des débats d'où on ne sortira jamais. Je n'ai pas de temps à perdre. Je l'ai dit ce matin, la «pipithérapie», oubliez-moi, il n'y a pas grand danger qu'on parle de ça.

On parle de celles qui sont là, et on va avoir des questions précises sur chacune d'elles pour dire: Demain matin, qu'est-ce qu'on fait? Comment est-ce qu'on procède? Parce qu'on va procéder et on va poser des gestes. Je ne dis pas que ce seront ceux qui sont souhaités par l'Opposition, mais ça va se faire d'un commun accord, pour être capables de faire progresser les choses et de briser des monopoles qui n'ont pas leur raison d'être. Parce que, quand on parle d'un citoyen qui a besoin de traitements... Moi, j'ai entendu et j'ai vécu des expériences — pas rien que personnelles là-dedans — dans notre entourage, dans nos connaissances, de gens qui ont été en contact avec des thérapies alternatives et où ça les a soulagés. La preuve scientifique n'est pas toujours facile à démontrer, mais il s'agit d'arriver de manière décente et progressive à faire cette démonstration-là, et à mettre ce qu'il faut pour protéger le public contre les charlatans. Moi, je me dis que, compte tenu de ce que vous avez vécu pendant 30 ans, vous devez être une ressource de première importance pour nous guider dans cette démarche-là. (16 h 40)

M. Danis: C'est, d'ailleurs, l'objectif de notre intervention. Mais, lorsque vous me parlez d'homéopathie, il y a de nos membres qui pratiquent l'homéopathie de façon complémentaire. On n'a aucun problème avec ça, mais comment voulez-vous, de façon responsable, qu'on arrive et qu'on dise: Nous allons dire oui à quelqu'un qui se dit homéopathe? Quelle est sa formation? Quels sont les critères? Nous, on ne peut pas répondre. Peut-être que, vous, vous pouvez répondre. Mais, à ce moment-là, comment voulez-vous qu'on dise: On va les aider? On va les aider lorsque nous aurons des données sur leur formation et toute la question de l'encadrement, de ce que ça prend. Il faut bien déterminer si... Quand quelqu'un de malade se présente chez un professionnel de la santé, les critères de formation sont déjà établis par des agences d'accréditation universitaire internationales. S'il n'a pas cette formation-là, comment peut-il, de façon précise, déterminer le problème du patient? C'est dans ce sens-là qu'on regarde ça, et ce n'est pas une critique sur l'homéopathie. C'est qu'avec les données que l'on a on ne peut pas donner le feu vert à ceux qui se disent homéopathes. On ne sait pas d'où ils viennent.

M. Côté (Charlesbourg): Alors, je vous ramène à l'objet de la commission, qui disait formation. Qu'est-ce que ça prend comme formation? C'est ça, la question de la commission. Qu'est-ce que ça prend comme formation? Qu'est-ce qu'on fait pour protéger le public? C'était ça exactement, la portée de la commission. Donc, on n'est pas là pour rien. On est là pour tenter d'établir ces choses-là. Moi, je me dis: Vous, qui avez traversé trois décennies de misère, de batailles, par l'expérience que vous avez, je souhaite une ouverture plus grande de votre part vis-à-vis un certain nombre de thérapies. Je ne vous les impose pas, je ne pourrais pas vous les imposer. Alors, qu'est-ce qu'on fait et qu'est-ce que vous conseillez au gouvernement, sur le plan de la formation, au-delà de toutes les études qu'ils ont pu faire? Si j'avais voulu étirer le débat pour 10 ans encore, comme il faut, on aurait dit: On fait une commission royale d'enquête. La plus belle preuve, ça fait 30 ans, c'est au bout de 30 ans que vous arrivez. Pendant ce temps-là, il y en a d'autres... L'ostéopathie, ils sont encore à côté, eux autres, et ils ont fait l'objet de la même commission. À partir de ça, si on veut être utiles dans notre commission, c'est sur le plan de la formation. Vous dites dans votre document, si je ne m'abuse: Naturopathe, au moins 1000 heures — c'est ça que vous dites? — pour être reconnu.

M. Danis: Naturopathe? Non, il existe une formation de 5000 heures aux États-Unis. C'est ça qui est le problème. Est-ce qu'il peut exister deux sortes de natu-ropathie, deux sortes d'ostéopathie?

M. Côté (Charlesbourg): Pour le naturopathe, retirer l'utilisation du titre de naturopathe aux personnes qui ont reçu au Québec une formation de moins de 1000 heures. Donc, à partir du moment où vous fixez le barème à 1000, c'est que 1000 heures devraient normalement être un minimum, disons, au moins, là, oui?

M. Danis: En fait, c'est que... Je m'excuse, mais, pour l'Office des professions, il n'y avait pas d'entre-deux. C'était 1000 heures de formation ou 5000. Alors, on dit 1000 heures parce que l'Office dit: II y a du 1000 et il y a du 5000. C'est dans ce sens-là.

M. Côté (Charlesbourg): Oui, mais, dans un cas

comme celui-là, quand vous dites 1000 heures, vous l'achetez, parce que vous l'avez dans votre mémoire. Alors, c'est une base minimale pour être reconnu ou pour pratiquer, oui ou non? Si ce n'est pas ça, c'est plus ou...

M. Danis: Bon! Écoutez, les 1000 heures... Il faut bien comprendre la responsabilité de cet intervenant de la santé. Si c'est un patient qui vient de la rue, qui arrête et dit: J'ai mal au ventre — ou j'ai mal au dos — aidez-moi, la personne se doit de faire un diagnostic différentiel de la condition. C'est là la problématique, parce qu'il y a 200 causes répertoriées pour les maux de dos. Alors, il faut savoir c'est quoi. Alors, c'est dans ce sens-là. Les naturopathes américains, c'est clair, ils sont bienvenus au Québec. Les soins naturels sont bienvenus au Québec pour nous. On ne s'est pas battus pendant 30 ans pour dire: Retournons à la médicalisation et à la chirurgie. Ça, c'est clair, mais ce que je veux dire, c'est: Comment, sans une commission royale d'enquête, nous, on peut déterminer quelle est la responsabilité de cet intervenant et les besoins de formation? Nous, on vous dit ceci: Notre expérience, pour avoir maintenant un programme universitaire, c'est que ça prend une formation en diagnostic différentiel, et cette formation-là prend environ 4000 heures. Ça, c'est la réalité universitaire internationale.

M. Côté (Charlesbourg): J'ai compris ça dans le mémoire, qu'il y avait une exigence minimale au niveau du diagnostic, qui était la base; le reste est en supplément pour te permettre de... J'ai tout compris ça. J'ai même été frappé, parce que, ce matin, je vous ai vu à l'arrière — d'ailleurs, depuis le début — entendre les débats de la commission... J'imagine que les oreilles ont dû vous réagir un peu, lorsque des gens, les ostéopathes, sont venus nous dire, ce matin, que, quant à eux, il ne fallait surtout pas copier le modèle américain.

M. Danis: Oui.

M. Côté (Charlesbourg): Alors, vous, vous nous dites: Oui, mais le modèle américain. Bon! Pour un néophyte, je ne comprends plus rien.

M. Danis: Écoutez, nous, c'est strictement une question d'intégrité intellectuelle. Comment peut-il exister deux ostéopathies? Alors, on veut parler de ce matin, on va parler de ce matin. On entend des gens qui disent: C'est venu des États-Unis, ça s'est médicalisé, ce n'est plus bon. Quelqu'un d'Europe est venu nous montrer la lumière, et il nous dit: Maintenant, c'est ça, l'ostéopathie. Celui d'Europe, il vient d'où? Des États-Unis?

Ce qu'on dit: S'ils ont des techniques, des interventions qui aident les gens, s'il vous plaît, ne vous appelez pas ostéopathes, parce que l'ostéopathie, c'est une profession reconnue, pratiquée par 33 000 personnes aux États-Unis. Je ne sais pas si vous êtes au courant, mais c'est un phénomène québécois, l'ostéopathie européenne. Ça n'existe pas en Ontario, ça n'existe pas en Colombie-Britannique et ça n'existe pas au Nouveau-Brunswick. Même, l'ostéopathie a une réglementation particulière dans ces provinces. Alors, pourquoi usurper un titre? Appelez-vous autre chose, mais ne venez pas dire que c'est de l'ostéopathie. Il ne peut pas y avoir deux chiropratiques, il ne peut pas y avoir deux médecines. C'est de la médecine ou ça n'en est pas, et c'est de l'ostéopathie ou ça n'en est pas. C'est dans ce sens-là. De faire des jeux de mots comme D.O., diplômé en ostéopathie au lieu de doctorat en ostéopathie, on trouve ça un peu frauduleux sur les bords. Alors, c'est dans ce sens-là. Ce n'est pas l'intervention qui est mauvaise. Par contre, s'ils veulent faire des actes qui sont réservés au champ exclusif des chiropraticiens, ils vont devoir nous montrer leurs compétences. C'est dans ce sens-là.

M. Côté (Charlesbourg): Évidemment, je ne voudrais pas vous laisser croire qu'au sortir de la commission on va embarquer dans un processus qui va nous amener, à très court terme, dans la reconnaissance de... Ce qu'on essaie, c'est de voir la lumière, de voir comment on peut progresser. Il y a des constats. Depuis deux jours, là, il y a des tendances qui peuvent se dégager, assez claires. J'en souhaite encore davantage, parce qu'on aura besoin davantage de lumière. Qu'elle vienne d'Europe ou des États-Unis, je m'en fous, mais on va avoir besoin davantage de lumière. Je pense que le genre d'exercice qu'on mène peut nous aider à ce niveau-là, et à voir quelle sera la suite de ces événements-là.

Il reste quand même qu'on a un phénomène au Québec où une personne sur deux, selon les sondages — c'est ce qu'on a peut-être de plus fiable, à ce moment-ci — a été en contact avec des thérapies alternatives. C'est quand même beaucoup de monde. Il reste aussi qu'il est maintenant de plus en plus clair que des médecins de médecine, disons, traditionnelle ou conventionnelle réfèrent de plus en plus à des thérapeutes alternatifs dans différentes spécialités, au moment où, j'imagine, ils ont atteint leurs limites, quant à eux. Donc, eux-mêmes aussi reconnaissent les limites de leur propre médecine.

Si j'ai bien saisi et bien compris la base de votre argumentation, ça prend donc une base très claire, de très haut niveau. Ce n'est que sur le plan de la complémentarité que peuvent intervenir ces autres professions-là ou autres spécialités, au niveau des thérapies alternatives, dans la liste des cinq mentionnées dans votre mémoire. Aussi, on peut être dans une situation où un thérapeute... Bon, prenons, prenons...Je cherche là, mais je vais y arriver. Bougez pas.

Une voix: Phyto.

M. Côté (Charlesbourg): Non, non, pas phyto là, pas phyto, parce que je veux prendre un exemple précis de ce matin. Les orthothérapeutes. Il faut prendre cet exemple-là, parce que je pense que c'est l'exemple qui nous a été démontré ce matin, avec la pile de petits

papiers où des médecins ont référé à des orthothérapeutes. Alors, les orthothérapeutes, à ce que j'ai compris ce matin, ce ne sont pas des gens qui sont des docteurs, donc ils n'ont pas un cours de médecine de base. Où est-ce que vous les situez là-dedans?

M. Danis: Strictement comme... En fait, les orthothérapeutes, quant à nous, ça entrerait dans le massage, tout simplement. Comme un masseur.

M. Côté (Charlesbourg): Non, mais avec un permis d'électricien.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Danis: Une carte, un permis de compétence.

M. Côté (Charlesbourg): Ouais.

M. Danis: Et là, vos 1000 heures deviennent intéressantes, M. le ministre, parce qu'il n'y a pas d'intervention qui est dirigée vers une pathologie.

M. Côté (Charlesbourg): Oui.

M. Danis: C'est du bien-être et c'est excellent. Par contre, posez-moi la question: Est-ce qu'il y a des orthothérapeutes qui débordent leur champ de connaissances? La réponse est oui. Nous, on est bien placés pour le savoir, parce qu'on les reçoit chez nous. Il y a la pratique illégale, comme processus, pour mettre fin à ces choses-là. (16 h 50)

M. Côté (Charlesbourg): C'est pour ça que, ce matin, je n'étais pas de l'avis de mon ami Albert sur un qui fait mal et un qui soulage.

M. Houde: Justement. Ce que vous dites, c'est ce qu'eux font.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Houde: Us sortent après un examen... Là, je ne discuterai pas sur le nombre de visites. Trois visites à chaque place, puis la personne va sortir de là enchantée de sa visite, et l'autre qui va sortir va dire: II m'a fait mal en maudit, pour ne pas dire d'autres mots que ça. C'est quoi, l'affaire entre vous deux?

M. Danis: Ma question, c'était: C'est quoi, votre affaire? Quelle était votre condition? Je ne le sais pas.

M. Côté (Charlesbourg): On est dans la journée des affaires aujourd'hui.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Danis: Je vais vous dire ceci: Si vous aviez une hernie discale, vous auriez préféré que ce soit le chiropraticien qui vous voie et qu'il vous recommande peut-être une chirurgie, si c'était une hernie discale dans un état avancé. Ça vous a fait mal, ce que vous dites, et l'autre, ça ne vous a pas fait mal. Peut-être que tout le travail était déjà fait; c'est une autre hypothèse. Mais, ce qui est à déterminer, c'est que... Vous pouvez avoir une douleur musculaire, Forthothérapeute va être excellent. Par contre, s'il y a un complexe neuro-musculo-squelettique, à ce moment-là, le chiropraticien va être en mesure de l'évaluer.

M. Houde: Pour les mêmes maux, le même malaise, un chiro et l'autre, c'était complètement différent pour le traitement. Ça ne se comparait pas. C'est comme le jour et la nuit, et il faut qu'il fasse bien noir ou bien clair. Ça ne se comparait pas. Pour le même malaise, c'est arrivé au moins 10 fois, S fois chez un chiro et S fois chez l'autre. Ça a fait mal S fois, puis «en maudit», et l'autre, ça été un charme. C'est quoi, là?

M. Danis: Lui avez-vous dit que ça vous faisait mal? C'est parce que, là, vous m'apportez un cas d'espèce.

M. Côté (Charlesbourg): Oui, oui, c'est ça. D'ailleurs, je voulais prendre la parole, parce que, moi, je pourrais vous parler de mon cas aussi. Je rejoins exactement ce que vous avez dit tantôt: un diagnostic posé au niveau d'une hernie et référé à un chirurgien. J'ai vu tout ça, moi.

M. Danis: J'aimerais rassurer M. le député. Si vous croyez que la chiropratique n'a pas agi avec...

M. Houde: Elle a agi. Ça a été correct après. Aux deux endroits, ça a été correct. Mais ce que je veux vous dire, c'est que ce n'était quasiment pas endurable chez un chiro comparativement à l'autre. C'est ça que je veux vous dire.

M. Danis: Ha, ha, ha! C'est sur le coup que ça fait mal, c'est ça?

Le Président (M. Philibert): À l'ordre! S'il vous plaît! M. le député de Berthier.

M. Danis: De toute façon, s'il y a un problème, le syndic de la Corporation est à votre service. N'hésitez pas.

M. Côté (Charlesbourg): Ce que je comprends avec...

M. Houde: Non, mais, pas rien qu'à une place, c'est trois chiros différents.

Le Président (M. Philibert): M. le député de Berthier, je vous recommande de prendre un rendez-vous avec un spécialiste qui pourra vous soulager. Ici, on est là non pas pour poser des diagnostics, mais pour

se faire une idée sur la pertinence de reconnaître certaines professions.

M. le ministre, très rapidement, parce que le temps est...

M. Côté (Charlesbourg): Oui, oui, en terminant, j'allais dire à mon ami Albert: Après l'hypnose d'hier soir, faites une petite séance d'hypnose avant d'y aller, il n'y a aucun problème.

M. Houde: Pas de problème. Merci, mon ministre.

M. Côté (Charlesbourg): Juste en terminant, M. le Président. Ce matin — vous étiez ici — on a reçu l'Association de médecine holistique du Québec, où il y avait une présentation... Là, on ne parle pas d'un flyé qui est arrivé de quelque part, on ne sait trop où, qui pourrait se présenter ici et nous faire une démonstration très claire. On parle de médecins du Québec, reçus, qui ont une préoccupation globale de la personne, qui, eux, souhaitent qu'on aille plus loin. Ils proposent, par exemple, qu'on travaille pendant un an à tenter de définir un certain nombre de choses, qu'on aille davantage vers des projets-pilotes, sur une période de cinq ans, pour tenter probablement de répondre aux questions que vous vous posez, que tout le monde doit se poser, et qu'on doit se poser. Est-ce qu'une démarche comme celle-là vous apparaît être une démarche plus raisonnable et plus vivable au moment où on se parle? Dans ces conditions-là, est-ce qu'on aurait à se frotter au corporatisme très dur, très fermé...

M. Danis: Parlez-vous de nous?

M. Côté (Charlesbourg): Pas tout de suite, mais, si la tendance se maintient, on va être obligés de vous inclure dans le club.

M. Danis: Je vais vous rassurer tout de suite. Cette démarche-là nous apparaît essentielle. Lorsqu'on a dénoncé l'absence de débat de fond, c'est exactement de ça qu'on parlait. Il faut qu'il y ait un débat de fond sur la question. C'est aussi simple que ça.

M. Côté (Charlesbourg): Merci. M. Danis: Ça me fait plaisir.

Le Président (M. Philibert): Alors, M. le député de Rouyn-Noranda—Témiscamingue.

M. Trudel: Et diplômé de l'Université du Québec à Trois-Rivières.

Merci, M. le député de Trois-Rivières et président de la commission. On va vous souhaiter la bienvenue, au nom de l'Opposition officielle, à cette commission.

Je veux tout de suite poursuivre sur la même lancée. Mais quel débat auriez-vous voulu mettre sur la place publique? Quel débat auriez-vous souhaité qu'il se fasse au Québec? Parce que, là, vous nous avez dit que — en tout cas, moi, je n'ai pas saisi — ce débat-là, il ne vous plaît pas. Quel débat vous auriez voulu que le gouvernement mette sur la place publique ou institue, pour les fins de l'évolution positive dans le domaine des soins, des services de santé au Québec?

M. Danis: Alors, encore une fois, je vais vous ramener 30 ans en arrière. Lorsqu'il y a eu la commission royale d'enquête qui a fait un débat de fond sur l'ostéopathie et la chiropraxie, ça ne s'est pas fait après une réglementation. La réglementation, via l'Office des professions, s'est faite en 1973, donc 10 ans plus tard. Le débat que l'on demande, c'est une analyse de la formation nécessaire, des critères nécessaires pour qu'un intervenant puisse voir un client. Quelle est la limite de l'intervention? C'est ça que la commission royale d'enquête avait déterminé, quand ils disaient: Ça prend tant de formation, parce que, ce que vous voulez faire, c'est dangereux si vous n'avez pas cette formation-là. À ce moment-là, les professionnels, les intervenants s'organisent, se donnent ces cours-là. Alors, la démarche que la médecine holistique préconisait ce matin, nous sommes tout à fait d'accord, mais il faut faire une démarche de connaissance sur la formation et les interventions avant d'arriver à une réglementation. Comment voulez-vous réglementer une chose sur laquelle vous vous questionnez? C'est ça, notre point de vue. On trouve que parler de mécanisme de réglementation avant d'avoir les données nécessaires sur la formation, c'est un peu inverser la procédure.

M. Trudel: Mais c'est parce que, quand je vous entends le dire sous cette forme-là, en tout cas, j'ai l'impression qu'il faudrait assez souvent protéger le public contre lui-même. Il faudrait fixer des critères sur la compétence de ceux et celles qui sont appelés à intervenir au niveau de la santé, au-delà du fait que le résultat de bien-être d'autres pratiques, chez d'autres personnes, ça amène une demande — disons-le comme ça — de reconnaissance quant à l'existence. Pourquoi vous insistez tellement pour qu'on fixe les critères d'avance, qu'on fixe les canons d'avance, quand on sait qu'actuellement il y a un certain nombre... Écoutez, une thérapie complètement inefficace, une thérapie qui n'a aucun résultat, qui ne vise qu'à faire dépenser du fric au monde ordinaire, qui ne vise qu'à faire gaspiller, qui ne procure pas de santé et de mieux-être, ça existe encore, ça? Et pourquoi ça existerait?

M. Danis: Ça existe encore, selon votre lecture même. En psychothérapie, il y avait certains cas où c'était vraiment une question de fraude. Mais, moi, je vais vous dire, comme analogie, et elle va être très simple: Est-ce que quelqu'un peut se déclarer député sans avoir remporté des élections? Alors, si vous voulez être intervenant de la santé, c'est quoi, le bagage? Pas de bagage, un peu de bagage ou beaucoup de bagage? Ces balises-là se doivent d'être déterminées. Est-ce que vous traverseriez un pont qui est signé par un ingénieur

qui a étudié les fins de semaine — cinq fins de semaine par année, pendant cinq ans — et qui se dit ingénieur? Qui va déterminer qu'un ingénieur doit avoir les compétences nécessaires pour que le pont ne tombe pas?

M. Trudel: Est-ce qu'on peut aller dans la direction... Est-ce qu'on peut faire confiance au public et dire: À telle dénomination correspond telle formation, et à vous de juger? Est-ce qu'on peut, en général, faire confiance au public et dire: Oui, nous allons définir les termes, nous allons mettre à la disposition du public un office, un organisme ou faire en sorte que des instruments puissent donner des informations pour dire: Quand vous faites affaire avec un ostéopathe, eh bien, ça peut être un patenté, selon vous autres, aux États-Unis ou ça peut être avec telle autre formation? Est-ce qu'on peut faire confiance au public en matière de jugement de la compétence pour poser tel geste, ou encore le dire de la façon suivante: Est-ce qu'on peut faire confiance au public pour juger de la capacité de quelqu'un, avec sa formation, de procéder à telle pratique, d'utiliser telle pratique professionnelle? (17 heures)

M. Danis: Ce que vous me demandez, c'est de traiter le domaine de la santé de façon différente des autres domaines. Est-ce qu'il y a une formation de base pour être avocat? Ce que vous me dites, c'est: Un avocat pourrait avoir deux mois de cours et remporter la cause. Si ça prend quatre ans pour être avocat, il y a des raisons pour ça. Est-ce que c'est le gouvernement qui doit veiller à ce que l'avocat ait quatre ans de formation? C'est dans ce sens-là. J'ai de la difficulté à saisir que, lorsque c'est dans le domaine de la santé, il n'y a pas tellement de problèmes avec la formation, mais, dans les autres domaines, que ce soit dans l'ingénierie, dans le droit, là, c'est important d'avoir une bonne formation. C'est ça qu'on saisit mal dans votre...

M. Trudel: Mais vous convenez avec moi que tout ça est relatif quant au degré de danger qui est couru par le public en général. Je veux dire... Un musicothé-rapeute, entre vous et moi, on n'a pas besoin d'une commission générale d'enquête pour savoir si on va l'autoriser à porter le titre avec telle formation. Ça dépend du degré...

M. Danis: Je sais que c'est à l'université. Alors, là, j'aurais confiance, personnellement.

M. Trudel: Non, je dis... Quand vous disiez, tantôt: II faut faire attention à une mauvaise utilisation et à l'usurpation des termes, bon, bien, les ostéopathes ou l'autre catégorie qui utilise «diplômé en ostéopathie», moi, je vous dirai, par rapport au docteur, que j'ai un doctorat en administration publique. Ce n'est pas un premier cycle, ça, un doctorat. Un doctorat, c'est un troisième cycle. Alors, les mots dans notre société aussi, ils correspondent à une définition, à une réalité. Les gens sont capables de juger de ce que ça veut dire. Moi, enfin, je dis ça. Ça m'amène, là-dessus, au niveau de ce que nous examinons ici, à vous demander: Pourquoi vous affirmez... Je ne sais pas si c'est vous autres ou si c'est l'Association. C'est ça, c'est l'Association, je m'excuse. Vous dites, à la page 6 de votre mémoire: «La reconnaissance des thérapies alternatives ne devrait pas consacrer le droit, pour les praticiens de ces disciplines, d'exercer illégalement une profession déjà existante.»

M. Giguère: Leur champ exclusif.

M. Trudel: Qu'est-ce qui vous laisse croire que le législateur s'apprêterait à reconnaître des thérapies, donc des thérapeutes, et à les laisser pratiquer illégalement une profession déjà existante en posant des actes qui font partie du champ exclusif de celle-ci? Qu'est-ce qui vous laisse croire ça?

M. Giguère: C'est que, actuellement, ce n'est pas légalisé, et les professionnels exercent des actes qui ne font pas partie de leur champ de pratique, qui font partie des champs de pratique déjà en place. Il faut, à ce moment-là, avertir le gouvernement que ces choses-là peuvent se répercuter dans le futur et faire une législation en vertu de cela. Ça se fait actuellement. Il y a des poursuites qui sont faites pour pratique illégale de la chiropratique. Je veux dire, ce n'est pas des choses qu'on sort des nuages, c'est vraiment quelque chose qui existe dans le monde actuel. Une autre chose: tantôt, vous parliez de musicothérapie...

M. Trudel: Non, non, mais, attention, attention là-dessus. Mais quelqu'un qui pratique illégalement la chiropraxie, vous êtes là pour surveiller, pour intenter des poursuites?

M. Giguère: L'Ordre, oui.

M. Trudel: Oui? L'Ordre. Excusez-moi. Alors, est-ce qu'il y a quelqu'un dans le gouvernement ou, actuellement, dans la société, qui a dit: On s'apprête à reconnaître certaines thérapies alternatives et ça va leur donner le droit — c'est vous qui le dites, là — d'exercer illégalement une profession?

M. Giguère: Mais si...

M. Trudel: Ça ne veut pas dire...

M. Giguère: ...on se fie à la façon dont les lois sont écrites...

M. Trudel: La reconnaissance d'un certain nombre de thérapies alternatives ne signifie pas qu'on va donner le droit d'aller s'introduire et d'exercer, de faire des pratiques qui sont déjà reconnues dans des champs reconnus à des professionnels reconnus.

M. Giguère: Qui, à ce moment-là, va déterminer le champ de pratique des différents professionnels?

M. Trudel: Si on fait une législation et si on fait une mécanique pour les reconnaître...

M. Giguère: Oui.

M. Trudel: ...c'est l'État qui va le déterminer, si telle est la notion retenue, avec des professionnels concernés. Si c'est la notion retenue, là.

M. Giguère: C'est ce qu'on dit à l'État. On dit à l'État de faire attention pour ne pas que ces choses-là se produisent.

M. Trudel: Ah bon! Le sens de la phrase, ce n'était pas tout à fait celui-là, à vrai dire. Ça disait que la reconnaissance des thérapies alternatives, ça donnerait le droit d'aller pratiquer illégalement dans le champ d'autres.

M. Giguère: Pas du tout.

M. Trudel: Bien, c'est ça qui est indiqué à la page 6. Alors, il faut que ce soit bien compris.

M. Giguère: On va le lire ensemble.

M. Trudel: Quant à moi, que l'on puisse dire, au Québec, qu'il n'est pas illégal de pratiquer certaines thérapies alternatives qui n'empiètent pas sur des actes, et je précise, réservés à un certain nombre de professionnels avec les qualités requises pour les réaliser, il me semble que c'est un système qui peut parfaitement se vivre, à partir du moment où on peut définir — je ne sais pas ce que vous en pensez — qu'un certain nombre d'actes ne peuvent pas être réalisés par d'autres personnes que par tel type de professionnels qui ont tel type de formation. Vous pensez que ça peut se vivre comme système?

M. Giguère: Oui, absolument.

M. Trudel: Bon. Alors, à ce moment-là, ça implique, pour l'État, une capacité de reconnaître certaines thérapies alternatives, puisqu'il faut employer le mot par lequel on les identifie généralement au Québec, mais pas d'aller au-delà de ce qu'on demande comme qualités aux autres pour réaliser leur pratique professionnelle.

M. Giguère: Absolument.

M. Danis: Je crois que ça fait allusion à la nouvelle réglementation ontarienne qui définit des actes pour chaque profession et tout ce qui n'est pas inclus là peut être fait par les autres. Le système n'est pas testé, si vous me permettez l'expression encore, mais, déjà, il peut y avoir des lacunes. Il faut être prudent dans cette approche-là. Je peux vous donner juste un exemple. Dans le champ exclusif, dans la série d'actes exclusifs réservés aux chiropraticiens, il y a correction vertébrale faite avec impulsions rapides et à faible amplitude. Alors, la question, c'est: À quelle vitesse l'intervention est-elle donnée quand on dit «rapides et à faible amplitude»? Plus on décrit de façon spécifique, plus c'est facile de contourner la loi. Alors, c'est dans ce sens-là qu'il y a une prudence à être exercée, mais c'est un modèle qui apparaît intéressant.

M. Trudel: En matière de protection du public et, donc, de dangers, on vient de procéder à une série d'autres consultations pour réviser ces mécanismes-là. À tort ou à raison, je n'ai pas ma découpure avec moi, mais j'ai cité souvent Gravel, de La Presse, qui dit qu'il n'y a à peu près personne qui croit à ça au Québec, en général, dans le commun des mortels, au système disciplinaire chez les corporations professionnelles. Comment on va en arriver à ce que non seulement il y ait un traitement équitable, mais qu'il y ait apparence de traitement équitable des plaintes du public en matière de compétence professionnelle et d'actes reconnus par l'Office des professions?

M. Danis: Nous nous sommes déjà prononcés à l'autre commission traitant particulièrement de ce sujet-là, mais une chose qu'il faut bien comprendre, c'est quand on dit: Les gens n'y croient pas, pourquoi les gens n'y croient pas? D'un, on a demandé au ministre et à l'Office des professions de nous démontrer le constat d'échec comme quoi les gens n'y croient pas, à ce système-là. Il y a des données très intéressantes également qui sont ressorties. Les gens commencent à connaître le système professionnel. Les gens n'étaient pas au courant qu'il y avait des recours et, à ce moment-là. .. Je peux vous dire, moi, que, dans le pourcentage des plaintes — et ce n'est peut-être pas comme ça partout, il y a peut-être quelques corporations qui vivent des cas très médiatisés — lorsque l'on présente notre carte de route à l'Office, nous en sommes très fiers parce qu'on a entre 15 % et 36 % des plaintes qui vont en discipline chez nous, et ça, sur les 5 dernières années. Le public n'est pas mal servi, il faut bien comprendre ça, et je crois que, peut-être...

M. Trudel: Mais le problème, M. le Président...

M. Danis: Gravel a trop de cas médiatisés en tête et il n'a pas réalisé que le système professionnel arrive à maturité. Il commence à être connu par le public et c'est justement bon qu'il y ait une commission, ça le publicise encore plus. C'est bon qu'il y ait des cas médiatisés parce que ça sensibilise le public à avoir recours aux corporations professionnelles pour s'interroger et même poursuivre un professionnel qui aurait mal agi. Mais c'est un début, on arrive à maturité, là. Alors, je pense que c'est un peu exagéré de dire que les gens n'ont pas confiance en ça.

M. Trudel: Le problème n'est pas celui, précisément, de l'efficacité du mécanisme, mais c'est la perception de son efficacité...

M. Danis: Exactement.

M. Trudel: ...ce qui est assez grave aussi. La phrase qu'on répète à propos de la justice: Ce n'est pas tout qu'il y ait justice, il faut qu'il y ait apparence de justice aussi pour les justiciables. Est-ce que, à cet égard-là, vous trouvez que l'on pourrait retenir la recommandation du Protecteur du citoyen de dire: Le système disciplinaire doit sortir des corporations professionnelles et non pas sortir les corporations professionnelles du système disciplinaire?

M. Danis: Là, je vous parle au nom d'un consensus des 41 corporations via le conseil interprofessionnel. Nous avons déposé des recommandations. Un des éléments majeurs était qu'il aurait dû y avoir une concertation avec toutes les corporations avant d'arriver avec des tentatives de solution. Je crois que beaucoup d'organismes ont d'excellentes solutions à proposer, mais, lorsqu'on commence à les analyser, on commence à voir les lacunes, les coûts et comment, contrairement à l'objectif visé, ça peut retarder tous les mécanismes. Et, à ce moment-là, le public est encore plus lésé parce qu'il porte plainte en 1993 et sa cause passe en 1995. Alors, je crois que la commission a fait un excellent travail à départir les différentes solutions possibles pour cette question d'apparence de justice. (17 h 10)

M. Trudel: Est-ce que vous êtes en faveur de la réouverture de la Loi médicale et, éventuellement — vous l'avez soulevé il y a quelques secondes — d'aller dans la direction, dans la dynamique générale du système que l'Ontario s'apprête à vivre là, après l'avoir discutée pendant cinq ans? Mais, fondamentalement, avant la piste ontarienne, compte tenu de tout ce que vous avez vécu...

M. Danis: Oui.

M. Trudel: ...est-ce que vous êtes en faveur et est-ce que vous souhaitez la réouverture de la Loi médicale pour traiter d'actes exclusivement réservés à des professionnels avec tel type de qualifications plutôt que de champs de compétence...

M. Danis: Oui.

M. Trudel: ...et d'exclusivité, évidemment?

M. Danis: La piste est très intéressante et ça réglerait sans doute beaucoup de problèmes que l'on vit dans ce domaine-là. Si vous voulez savoir notre avis, oui, on trouve que la Loi médicale est abusive, mais j'ajouterai que le gouvernement s'en est servi pendant des années pour régler le problème sur le terrain parce qu'il demandait aux médecins: Bien, poursuivez-les. Alors, c'était un peu un échange de pouvoir qui se faisait là, parce que les médecins s'en occupaient et le gouvernement les laissait s'en occuper et leur laissait leur loi très globale du domaine de la santé. Alors, je pense que, si le gouvernement est prêt à, peut-être, assumer plus de responsabilités, il va pouvoir retirer aux médecins une certaine partie qui... En fait, c'est ridicule de croire qu'un médecin peut tout faire, surtout pas en 1993.

M. Trudel: Finalement, dans l'éventualité d'une reconnaissance d'un certain nombre de thérapies dites alternatives, est-ce que vous estimez que la Loi sur la protection du consommateur et le Code criminel aussi, il faut le dire, il existe toujours pour tout le monde...

M. Danis: Oui.

M. Trudel: Abus de confiance, c'est au Code criminel, ça; fausses représentations, c'est au Code criminel. Est-ce que vous jugez ces lois et les dispositions légales actuellement dans nos lois suffisantes pour protéger les consommateurs des abus possibles dans ce secteur comme ailleurs?

M. Danis: II y aurait sans doute quelques modifications à apporter. J'aimerais céder la parole à Me Piette, là-dessus.

Mme Taché-Piette (Louise): À certains égards, oui, je pense qu'il y a des dispositions qui sont très intéressantes, notamment en ce qui concerne la publicité, notamment en ce qui concerne les contrats qui peuvent lier les clients à certains intervenants. La Loi sur la protection du consommateur constitue vraiment un cadre qui est très intéressant et qui peut s'appliquer à plus d'organismes, à plus de groupes de personnes et certainement à plusieurs groupes d'intervenants.

Est-ce que la Loi sur la protection du consommateur peut convenir à tout le monde? Elle ne peut certainement pas convenir aux professionnels. Je pense que, dans la mesure où l'exercice d'une profession comporte des dangers particuliers, il est important qu'on conserve les lois professionnelles et le Code des professions avec la protection qu'ils impliquent et qu'ils prévoient. Mais, pour certaines autres activités qui comportent moins de dangers, ça me semble évident que la Loi sur la protection du consommateur est adéquate.

M. Trudel: Très bien.

Mme Taché-Piette: On pourrait certainement l'élargir encore davantage et lui faire couvrir plus d'activités.

M. Trudel: C'est une bonne base, vous dites... Mme Taché-Piette: Oui.

M. Trudel: ...mais il faudrait renforcer un certain nombre de dispositions pour s'assurer que...

Mme Taché-Piette: Oui.

M. Trudel: ...c'est plus et anche...

Mme Taché-Piette: C'est ça.

M. Trudel: ...spécifiquement dans le domaine des thérapies relatives à la santé.

Mme Taché-Piette: Mais c'est certainement un cadre intéressant, oui.

Le Président (M. Philibert): Alors, le temps qui nous était réservé est maintenant épuisé. S'il y a des considérations de dernière minute...

M. Trudel: Bien, je vais en profiter, M. le Président, pour vous remercier, vous souhaiter bonne rentrée en septembre, la première au niveau universitaire, dans une très bonne université. Je n'y suis pas, malheureusement, docteur; je ne suis que maître de l'Université du Québec à Trois-Rivières. Mais sans l'ombre d'un doute vous allez trouver là une équipe extrêmement compétente pour faire en sorte que vous allez pouvoir continuer à contribuer au mieux-être des Québécois d'une façon différenciée de la médecine traditionnelle.

Le Président (M. Philibert): Vous me permettrez d'ajouter que le député de Trois-Rivières est passé maître pour travailler dans le développement des dossiers de l'Université du Québec à Trois-Rivières.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Côté (Charlesbourg): Et, M. le Président, pour ne pas être en reste, je peux vous dire que je suis le seul, autour de cette table, diplômé de l'Université du Québec à Trois-Rivières.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Trudel: Et là, on revient...

M. Côté (Charlesbourg): Ha, ha, ha!

Le Président (M. Philibert): Alors, sur ce...

M. Côté (Charlesbourg): Non, on n'a pas fini, M. le Président.

Le Président (M. Philibert): Allez-y.

M. Côté (Charlesbourg): Je veux vous remercier. Même si cet échange a été un peu plus viril, le fond était là. Je pense que ça permet de faire progresser les choses. Je sais que vous aurez un oeil très ouvert sur ce qui va se passer, en pensant qu'à la fin, finalement, on poursuit à peu près tous les mêmes buts: éviter que le public soit entre des mains de charlatans, et qu'on y mette les exigences qu'il faut pour que les thérapies alternatives s'implantent de bonne manière. Avec la formation qu'il faut, avec l'encadrement qu'il faut, je pense qu'on finira par réussir. En terminant, je veux vous dire que je suis celui qui a aussi signé l'avis quant à l'enseignement de la chiropractie à Trois-Rivières. Je l'ai fait avec grand plaisir et, inévitablement, du fait que j'avais signé, j'attendais la réaction d'Augustin. Merci bien.

Le Président (M. Philibert): Merci. J'appelle maintenant le Centre d'études et de documentation homéopathiques. Alors, je vous invite, pour les fins du Journal des débats, à vous identifier et à procéder à la lecture de votre mémoire.

Centre d'études et de documentation homéopathiques

M. Picard (Philippe): Merci. M. le ministre, M. le Président, mesdames, messieurs, je m'appelle Philippe Picard. Je suis docteur en médecine et je suis coordinateur ou coordonnateur, si vous voulez, de l'enseignement du CEDH Canada. CEDH veut dire Centre d'études et de documentation homéopathiques. J'utiliserai le sigle CEDH, ce sera plus court.

Comme ma fonction l'indique, je coordonne l'enseignement. Nous avons quatre départements différents s'adressant à des corporations professionnelles différentes. Je vais vous citer les noms des responsables de ces départements. Bien qu'ils ne soient pas avec moi, ils sont à côté de moi en pensée, ils me soutiennent puisque je suis tout seul, au front, aujourd'hui. Responsable de l'enseignement médical, Dr Ginette Varin, qui est une omnipraticienne québécoise de Cookshire; responsable de l'enseignement pharmaceutique, M. Yvan Bourgault, qui est pharmacien de l'industrie; responsable de l'enseignement vétérinaire, Dr Andrée Ledoux, qui est vétérinaire à Québec; responsable de l'enseignement dentaire, Hervé Cocaud, qui est dentiste à Hull. Nous envisageons, dans les mois qui viennent, d'ouvrir l'enseignement aux chiropraticiens et aux infirmières, d'adapter cet enseignement, et à d'autres corporations si elles le souhaitent, bien sûr.

M. Côté (Charlesbourg): Si j'ai bien compris, adapter aux chiros, là.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Picard: Je n'avais pas commencé le débat, mais... J'ai, en effet un peu tiqué sur ma chaise tout de suite. Enfin, bon. Rassurez-vous tout de suite: je souhaite qu'on passe une heure ensemble de détente. Je suis tout seul et mon intervention va être — en dehors du fait que je vous remercie de l'honneur que vous me faites de m'écouter, d'avoir choisi le «rapport» du CEDH — une intervention basée sur l'information. Je suis, depuis hier matin, en train de suivre les débats de façon extrêmement attentive. J'ai entendu parler d'information, de formation, de comment on fait, quel est le niveau, est-ce que les gens sont assez pointus, ceci, cela.

Pour ce qui a trait à l'homéopathie, je pense que le CEDH... De temps en temps, je parlerai à la première personne parce que je suis très, très impliqué depuis 25 ans, 30 ans maintenant dans l'histoire du

CEDH et, automatiquement, je déborde un petit peu; dès que je parle d'homéopathie, je me passionne. Vous n'oublierez pas de me couper si je parle trop longtemps parce que je suis d'origine française et, comme tout Français, je placote un peu longtemps par moments.

Information sur ce qui se passe au niveau de l'enseignement de l'homéopathie et qui me paraît important au Québec depuis quelques années. Il y a quelque chose qui se passe au Québec; ce n'est pas quelque chose qui vient d'arriver la semaine dernière sous l'effet de la mode. Depuis 1984, le CEDH est là. Alors, il a été nommé CEDH Canada au cas où ça se développe ailleurs qu'au Québec, mais l'essentiel de l'action du CEDH se fait au Québec. Et puis information sur le plan général, sur l'homéopathie en général, et là je vous laisserai le choix de me poser toutes les questions que vous voulez, sur l'homéopathie, sur sa place dans la thérapeutique, sa situation, enfin, sa définition, si vous voulez. J'ai remarqué que ce n'était pas toujours très facile d'entendre des définitions précises. (17 h 20)

Je témoigne simplement d'un fait qui correspond à ma façon d'avoir vécu. Je suis un médecin normal qui a pratiqué l'homéopathie quand même pendant 25 ans, en pratique quotidienne. J'ai été impliqué dans tout un tas de dossiers au niveau français et européen. Je vis ici. Je travaille pour des Québécois. Ce sont des Québécois qui font le travail, mais je les aide à mettre en place un certain nombre de choses. Mon âme est au Québec. Comme tous les Français, bien sûr, je suis en amour avec une Québécoise, ce qui est normal. Bon.

Je vais simplement vous dire, vous lire, pour les gens qui n'ont pas mon mémoire, ce que le CEDH Canada, d'une part, est, ses objectifs et, ensuite, ce qu'il a pu réaliser ici. Donc, il est présent au Québec depuis 1984 et il propose aux différents professionnels de la santé une structure d'information et d'enseignement de l'homéopathie. Il contribue également à la recherche sur l'homéopathie au plan scientifique et socio-économique. Son action actuelle est centrée sur la formation des professionnels de la santé membres d'une corporation existant déjà: les médecins, les pharmaciens, les vétérinaires et les dentistes. Il est prévu d'ajouter, éventuellement, les chiros et les infirmières, comme je vous l'ai dit.

La spécificité, qui est liée à son historique, du CEDH, c'est d'enseigner exclusivement l'homéopathie en tant que technique de soins et en tant que conception particulière de la santé et de la maladie. C'est un choix volontaire de ne pas intégrer d'autres thérapeutiques alternatives dans l'enseignement que l'on fait pour des raisons de rigueur. Quand on apprend une méthode, une technique, il faut les apprendre une par une. On n'apprend pas à jouer du piano en même temps qu'on apprend à jouer de la guitare. On peut apprendre le solfège en même temps, tout seul, mais, ensuite, l'instrument est différent. Cette rigueur indispensable permet d'éviter, aussi bien au niveau de l'enseignement que de la pratique, ce qu'on appelle la «cafouillothérapie», c'est-à-dire le mélange de thérapies plus ou moins bizar- roïdes les unes par rapport aux autres, sans grande méthode de prescription. C'est une spécificité du CEDH. Ça ne veut pas dire qu'on ne reconnaît pas l'intérêt des autres thérapies alternatives, que ce soit la phyto et les approches différentes dont on a parlé et dont on parlera encore. Ça veut dire qu'au niveau de l'enseignement le CEDH enseigne l'homéopathie et pas autre chose. D'accord?

Dites-vous également que je vous parle de ce qui me paraît le plus souhaitable pour un médecin. Étant docteur en médecine, je suis, bien sûr, marqué à l'encre rouge et il y a pas mal de gens qui pensent que je ne peux pas comprendre la globalité d'un individu, mais j'essaie de voir ce qui est intéressant pour le patient, parce que c'est quand même le patient qui est au centre des discussions, il ne faut pas l'oublier. Enfin, on ne l'oublie pas, bien sûr, mais c'est quand même le patient qui est au centre des problèmes et il faut voir ce qui est intéressant pour lui et sans danger.

Donc, les objectifs de l'enseignement, c'est de donner à chaque praticien, à l'intérieur de sa corporation, les moyens d'utiliser, dans le champ d'action qui est le sien, l'homéopathie à un certain niveau. C'est une question de niveau de compétence et ce sera différent, le niveau d'utilisation de l'homéopathie, selon la pratique que l'on a de façon quotidienne. De même, on peut faire de l'automédication homéopathique; comme on prend certains médicaments homéopathiques pour des choses courantes dans la journée. Comme on peut prendre des médicaments classiques en automédication, il est possible de le faire en homéopathie, à la condition de connaître bien ses limites.

Le pharmacien, lui, aura un rôle de conseiller en homéopathie pour les gens qui viendront lui demander des renseignements sur l'homéopathie et éventuellement quelques soins du même genre. Le médecin pourra utiliser l'homéopathie, parce qu'il existe une homéopathie médicale. Au Québec, le problème n'est pas près d'être résolu, mais on peut pratiquer de l'homéopathie en étant médecin, dans un certain nombre de pathologies, si vous voulez, y compris lésionnelles, mais, ça, c'est une autre question.

Les vétérinaires, eux, utilisent l'homéopathie de plus en plus, au Québec, parce que leur corporation a pris une position extrêmement claire et très intelligente, à mon avis, ce qui ne veut pas dire que les autres positions ne sont pas intelligentes. Je veux dire que celle-ci est claire, tout au moins, ça a l'avantage d'être clair. On leur dit: Écoutez, vous êtes des grands jeunes gens, vous avez fait de belles études, vous avez été sélectionnés, ça a été très difficile, vous avez été reçus, vous connaissez votre métier. Faites votre métier et, si vous voulez faire de l'homéopathie en plus, on ne vous tapera pas sur les doigts, sauf si vous avez fait une erreur professionnelle. Ca me paraît clair et lumineux. Si tout le monde pouvait fonctionner comme ça, ce serait très bien.

Alors, au Québec, qu'est-ce qu'on a fait? De 1984 à 1988, les cours de formation du CEDH ont été dispensés en collaboration avec l'AMHQ, l'Association de

médecine holistique du Québec dont on a entendu le «rapport» ce matin avec mon ami Jean Drouin, et il y a un certain nombre de gens de l'AMHQ, d'ailleurs, qui sont diplômés du CEDH. C'est peut-être pour ça qu'ils ont de bonnes visions des choses, je n'en sais rien. Tout ça a été fait dans le cadre d'enseignements privés. Depuis 1988, l'AMHQ a demandé au CEDH de se débrouiller tout seul, si je puis dire, pour ne pas être trop marquée par l'image d'une association qui serait centrée sur l'homéopathie. Vous aurez remarqué, ce matin, que Jean a dit: On promeut un concept, une approche, sans privilégier une approche particulière. Donc, si vous voulez, l'homéopathie est une des approches qui peuvent être à l'intérieur du mouvement holistique.

Actuellement, les cours sont dispensés au Québec par des praticiens québécois qui ont une expertise théorique et pratique de l'homéopathie, pour ceux qui enseignent actuellement, depuis maintenant une huitaine d'années. Pour chaque professionnel de la santé, on adapte donc la formation. Le modèle suivi pour les médecins est celui qui est le plus proche de ce qu'on fait en France, qui correspond à un diplôme universitaire en France. Alors, on propose ce genre d'enseignement dans le cadre d'un enseignement privé puisque, pour l'instant, il n'y a rien d'officiel. On le propose et, en l'adaptant à la pratique québécoise, on suit sensiblement ce qui est officiel, si vous voulez, à l'Université de Bordeaux, en France, et dans six autres universités françaises.

Pour les pharmaciens, nous avons fait des séminaires d'introduction et de perfectionnement à la pratique homéopathique à la pharmacie dans le cadre de la Faculté de pharmacie de Montréal et de l'extension de l'enseignement de l'Université Laval. Je précise tout de suite que ça ne veut pas dire que la Faculté de pharmacie de Montréal ou l'Université Laval cautionnent l'homéopathie. Ça veut dire que, puisque le public vient demander au pharmacien, qui est en première ligne: Dites donc, vous n'auriez pas un truc homéopathique et qu'est-ce que c'est que l'homéopathie? le pharmacien est bien obligé de répondre et ça veut dire qu'il faut qu'il soit informé. L'Ordre des pharmaciens a conseillé aux pharmaciens de se renseigner, de s'informer, mais les cours qu'on donne à Laval et à Montréal ne sont pas des cours officiels, si vous voulez, ce sont des cours infor-matifs.

En dehors de ça, sur le plan du CEDH lui-même, nous faisons passer un examen qu'on appellera national, si vous voulez, qui est un examen annuel, écrit et oral, qui aboutit à la délivrance, pour les médecins et les vétérinaires, d'un diplôme de thérapeutique homéopathique qui est l'équivalent du diplôme universitaire d'homéopathie et de thérapeutique homéopathique délivré en France de façon officielle et dans d'autres pays d'Europe où il y a une équivalence, si vous voulez, au niveau de la qualité du diplôme, puisqu'il y a des gens... Enfin, moi, je fais partie de l'équipe des examens, bien sûr, mais c'est aussi fait par les Québécois qui ont été formés de cette façon-là.

Pour les pharmaciens et les dentistes, on délivre un diplôme de conseiller en homéopathie du CEDH, de façon à éliminer pour l'instant le problème du diagnostic. Vous savez qu'en principe un pharmacien n'a pas le droit de faire de thérapeutique. Si on met le mot «thérapeutique» quelque part, ça veut dire qu'il a fait un diagnostic médical et qu'il fait une thérapeutique. Donc, il est sous le coup de la loi. Le fait d'être conseiller en homéopathie, c'est autre chose; c'est pouvoir donner un conseil de santé à quelqu'un qui vient le demander dans l'exercice de la pratique normale d'un pharmacien. D'accord? Voilà ce que j'ai à vous dire.

Je vous donne simplement quelques chiffres pour terminer. Au niveau pharmaceutique, depuis 1984, on a formé 467 pharmaciens, peut-être un peu plus, je n'en sais rien; au niveau de l'enseignement médical, 115 médecins ont suivi les cours du CEDH; au niveau vétérinaire, 14 seulement. Vous me direz que, 14, ce n'est pas beaucoup, mais il y a moins de vétérinaires que de médecins. L'enseignement vétérinaire, pour moi, est tout à fait important pour l'homéopathie parce que, d'une part, il permet de mettre un peu de côté ce qu'on reproche trop souvent à l'homéopathie, c'est-à-dire l'histoire de l'effet placebo. L'effet placebo sur un chien ou une vache ou un chat, ça peut exister, si vous voulez, mais c'est quand même nettement diminué, y compris sur la diarrhée du veau, si vous voulez, quand il naît, quand il a un jour; l'effet placebo sur un veau d'un jour, on peut toujours en discuter. En plus, les vétérinaires apportent énormément à la connaissance de l'homéopathie. Au niveau dentaire, 29 dentistes ont suivi la formation homéopathique du CEDH.

Pour terminer, je vous dis simplement que, quand je vous parle du CEDH, je vous parle d'une des écoles qui parlent d'homéopathie historiquement, puisque le CEDH est né en 1972, j'étais à la fondation du CEDH en 1972, le CEDH parle de l'homéopathie historique, si vous voulez. Il parle de l'homéopathie discutable, c'est-à-dire qu'on peut discuter, c'est-à-dire qu'il y a une base à l'homéopathie qui est une base scientifique basée sur un principe de biologie tout à fait simple et, ensuite, il y a aussi une conception particulière de la santé et une conception particulière de la maladie. Autrement dit, il y a les deux en même temps. Il y a à la fois un médicament et une façon de réfléchir pour trouver le médicament et pour appréhender le malade dans son ensemble. Ça, c'est une position qu'a le CEDH; ça permet d'éviter les conflits d'écoles, si vous voulez. Il faut savoir également qu'il y a un certain nombre d'écoles qui pensent que l'homéopathie est une philosophie a priori et que tout ce qui découle de la philosophie fait partie de la philosophie homéopathique. Voilà. Je pourrais être un peu plus long, mais, enfin, je vais répondre à vos questions, si vous en avez.

Le Président (M. Philibert): Merci, M. Picard, M. le ministre.

M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. le Président. Lorsque je vais à l'annexe I de votre document et que je regarde l'enseignement universitaire en France...

M. Picard: Oui.

M. Côté (Charlesbourg): ...on constate que c'est quand même relativement jeune.

M. Picard: Oui.

M. Côté (Charlesbourg): On parle de 1981, 1983, 1984 et ainsi de suite. Donc, c'est à ce moment-là que, en France, on l'a introduit au niveau universitaire et donc reconnu.

M. Picard: Exact. (17 h 30)

M. Côté (Charlesbourg): Ma question est toute simple: Qu'est-ce qui fait que ce n'est qu'au début des années quatre-vingt que l'on a introduit en France le cours universitaire? Parce qu'on conviendra tous que la formation de base, c'est l'essentiel.

M. Picard: Absolument. Alors, là, il y a une réponse qui est simple, puis une qui est plus compliquée. Moi, celle qui m'intéresse beaucoup, c'est la compliquée parce que ça a trait aux faits sociaux et aux faits historiques.

La réponse simple, c'est que l'enseignement de l'homéopathie du CEDH qui est rentré dans les universités en France, il existait depuis 1970, si vous voulez, et la qualité humaine des professionnels, des gens qui le faisaient dans les différents endroits de France où ça se faisait a fait que c'étaient des universitaires qui faisaient de l'homéopathie. Ils avaient des amis universitaires dans l'université et puis ça a mis quelques années avant que les conseils de facultés décident que l'enseignement de l'homéopathie allait rentrer dedans, autour des années quatre-vingt. Alors, le tour des années quatre-vingt, ça a correspondu, en France et en Europe, à une espèce de démarrage de l'homéopathie qui s'est fait vers 1975, si vous voulez. Il y a quelque chose d'important, c'est qu'il semble —j'en ai l'impression — que le rôle des universitaires a été très, très important pour l'acceptation de l'homéopathie, c'est-à-dire que les professeurs d'université, sous la pression de leurs étudiants, d'ailleurs, dans bien des cas, ont dit: Écoutez, nous, on ne va pas se contenter de penser que l'homéopathie ne marche pas, on veut voir.

Le fait historique qui peut exister, c'est que vous vous rappelez comme moi que, mai 1968, en France, ça a été une époque où il y a eu de grosses bagarres. Il ne faut pas oublier, non plus, que les professeurs agrégés, en 1975, 1980, c'était qui? C'étaient les étudiants des barricades de 1968, c'étaient des gens qui étaient dans le système, dans l'establishment 10 ans après et qui ont retrouvé une occasion, dans une certaine mesure, de rigoler un petit peu, de contester un petit peu. Alors, certains ont contesté intelligemment et, comme ils ont vu que ça marchait dans un certain nombre de cas, ils ont continué. C'est une explication qui est la mienne; elle n'est pas forcément fausse, elle n'est pas complètement vraie, non plus.

Il y a également eu le fait que la population l'a demandé. Vous parliez des courants sociaux, quand quelque chose change dans la conception de la santé. L'histoire de l'homéopathie est une histoire assez extraordinaire. Elle suit les Courants des grands mouvements sociaux en Europe, par exemple; la montée de l'homéopathie à la fin du XIXe siècle, ça a suivi le courant des utopistes socialistes, Saint-Simon, Fourier et les autres, et ça a suivi des demandes particulières du public. C'est redescendu après, au début du XIXe, et puis c'est remonté ensuite. Il y a eu des mouvements comme ça de yin et de yang. C'est, en effet, un peu jeune, 10, 12 ans, mais ça existait depuis longtemps. Je réponds à votre question?

M. Côté (Charlesbourg): Non, mais, en tout cas, c'est une explication qui me semble valable.

M. Picard: Elle doit être fausse, mais elle est valable.

M. Côté (Charlesbourg): Non, pas nécessairement fausse parce que j'ai fait partie de l'époque des contestataires de 1968. Alors... Comment?

M. Trudel: Ça fait longtemps que tu es contestataire.

M. Côté (Charlesbourg): Pas mal, pas mal.

M. Picard: Et ça ne vous paraît pas absurde, ce que je vous dis, là?

M. Côté (Charlesbourg): Non, pas du tout, pas du tout. Deuxième petite question. Dans la présentation, on retrouve des notes qui disent que «le Centre d'études et de documentation homéopathiques a été fondé en France en 1972, à l'initiative des deux plus grandes compagnies pharmaceutiques». Oh! Je ne les nommerai pas, là.

M. Picard: Je peux vous les nommer, si vous voulez.

M. Côté (Charlesbourg): Non, non, pas de problème. De toute façon, ils sont dans le document. Bon. Je me dis: On trouve qu'on a passablement de pilules au Québec — j'imagine que c'est la même chose en France ou en Europe — qu'on traite pas mal par le chimique. Quand je vois l'intérêt de compagnies pharmaceutiques dans l'homéopathie, je me dis: Est-ce qu'on n'est pas après créer, dans un autre monde, ce que l'on dénonce dans le monde que nous vivons aujourd'hui, le traitement par la pilule, puis que l'intérêt des compagnies pharmaceutiques est de vendre des pilules sous un autre vocable qui serait, probablement, beaucoup plus humain, davantage du courant social d'aujourd'hui?

M. Picard: II est bien évident que je m'attendais à votre question. Je n'ai aucun problème. J'aurais dû

spécifier que c'étaient des compagnies pharmaceutiques homéopathiques. Ce sont des gens qui fabriquent uniquement des médicaments homéopathiques et qui distribuent uniquement des médicaments homéopathiques. C'étaient les deux grandes compagnies de l'époque en France, qui ont fusionné ensuite. C'est exclusivement de l'homéopathie. D'accord? Ce matin, les phytothérapeu-tes vous disaient: Bien, nous, on ne prend pas de consultation, puis on vend nos produits et nos produits sont faits par une compagnie pharmaceutique dont le président était là. C'est sur le même système, sauf qu'il y a plusieurs compagnies pharmaceutiques homéopathiques qui fabriquent du médicament homéopathique et qui le distribuent. Ça, c'est très clair depuis le départ, si vous voulez.

Mais pourquoi? Parce que, en 1972, le CEDH a été créé pour donner une information et un outil supplémentaires aux médecins qui voulaient se renseigner sur l'homéopathie pour voir, dans leur pratique quotidienne, comment ça allait pouvoir fonctionner. Qui voulez-vous qui paie ça? Alors, je ne vous dis pas que c'est évangé-lique et puis que c'est de la philanthropie pure et simple. C'est bien évident. Enfin, on ne peut pas reprocher ça à l'homéopathie quand on voit ce qui se passe ailleurs, si vous voulez. Donc, que les laboratoires, qui étaient d'ailleurs ingénieux à ce moment-là, en regroupant des intérêts économiques à 50-50 pour ne pas qu'il y ait de pressions d'un côté ou de l'autre, aient créé un centre d'information qui, ensuite, s'est développé, ça ne me paraît pas forcément malsain, si vous voulez.

Il y a une chose qui est très importante — et, moi, je ne travaillerais pas au CEDH s'il y avait une pression financière de la part de ces laboratoires-là sur moi — c'est qu'intellectuellement on n'a jamais aucun, aucun problème par rapport à ce qu'on dit dans nos cours. Et, moi, même s'il y a des arrangements, d'une certaine façon, avec ces laboratoires pharmaceutiques, je ne fais jamais un cours d'homéopathie dans lequel je parle d'une spécialité homéopathique dans mon cours lui-même. Que j'en parle dans les couloirs si les gens me posent des questions, c'est une autre histoire, mais j'ai suffisamment la réputation de ne pas avoir très bon caractère pour vous dire que je ne peux pas travailler dans ces conditions-là si j'avais une pression là-dessus. Le CEDH — je vais dire quelque chose qui n'est pas forcément gentil — c'est peut-être une des rares écoles qui soit la moins commercialisée, si vous voulez.

M. Côté (Charlesbourg): Est-ce qu'à votre point de vue, pour pratiquer l'homéopathie, il faut être un vrai médecin, au sens...

M. Picard: Un vrai médecin?

M. Côté (Charlesbourg): ...véhiculé chez nous?

M. Picard: Oui, je comprends.

M. Côté (Charlesbourg): J'ai un pharmacien à côté de moi.

M. Picard: Oui. Quel type d'homéopathie? C'est ça, si vous voulez. Moi, je reviens quand même à une petite définition: l'homéopathie, qui est une façon de soigner particulière, va utiliser des médicaments sous forme de granules, qui sont préparés d'une certaine façon et qu'on choisit avec un raisonnement particulier, dans un secteur d'activité particulier, et avec un raisonnement, également, pour prendre, en principe, en compte l'ensemble de la réaction du sujet en général. Donc, si vous voulez, l'homéopathie, comme concept et comme utilisation, c'est tellement vaste qu'on peut l'appliquer à différents niveaux et on va l'appliquer à différents nvieaux selon ce qu'on est capable de faire. C'est là qu'il faut faire de l'information et qu'il faut, je dirais, que chaque personne prenne conscience de ses limites. On peut donner des limites aux gens quand on fait de l'automédication, quand on fait de l'information et autres. On peut donner des limites, mais, si les gens ne veulent pas les respecter, qu'est-ce que vous voulez y faire? C'est là qu'il faut faire confiance à l'intelligence humaine, qu'il faut faire confiance à l'information au niveau des gens.

Pour répondre à votre question, ce n'est pas du tout obligatoire d'être médecin pour pratiquer l'homéopathie dans un certain nombre de cas. Alors, je m'entends. Pour des choses banales, quand vous prenez, dans une pharmacie en OTC, un médicament — je ne vais pas citer de nom, mais, enfin, des formules chimiques, acétaminophène, etc., si vous voulez — vous n'avez pas fait un acte médical, vous le prenez sur la tablette, comme ça. Eh bien, on peut le faire également avec des médicaments homéopathiques en automédication. Je sais que certains homéopathes un peu idéalistes vont dire: Picard, il est fou; il dénature l'homéopathie et il la réduit, et puis ceci, et puis cela. Mais, ça, c'est la vie courante, c'est comme ça que ça se passe. Quand les gens ont les bleus, quand ils se tapent, ils prennent Arnica en dilution homéopathique et les bleus évoluent plus vite et ça va mieux. On n'a pas besoin d'avoir fait 15 ans d'études pour le savoir. On a le devoir, en tant que médecin, en tant que professionnel de l'homéopathie, de le dire aux gens, ça.

Ensuite, au niveau du pharmacien, vous le savez comme moi, je ne sais pas si ça vous intéresse, mais le conseil du pharmacien en homéopathie, il va être dans le cadre de ce qui est sa compétence professionnelle. Alors, si l'homéopathie l'intéresse, il va aller suivre des cours de formation et puis il va voir comment il peut intégrer ça à son conseil. Mais il ne fait pas une homéopathie médicale. Par contre, s'il y a un diagnostic absolument indispensable à poser, je prends le cas d'une hypertension artérielle, par exemple, et qu'on peut soigner conjointement avec des médicaments homéopathiques et, bien sûr, la médecine conventionnelle, là, il faut un suivi et un contrôle d'un médecin qui connaisse l'homéopathie de préférence, bien sûr, s'il y a un traitement homéopathique en même temps. Donc, vous voyez, ce n'est pas absolument obligatoire. Oui.

M. Paradis (Matapédia): Je voudrais peut-être

ajouter. Au moment même où l'Ordre des pharmaciens, et même c'est un très large consensus des pharmaciens eux-mêmes, veut essayer de freiner, justement, l'automédication et de rapatrier derrière le laboratoire beaucoup de produits...

M. Picard: Oui.

M. Paradis (Matapédia): ...est-ce que vous êtes en train de me dire que, vous, vous voulez libéraliser l'accès aux médicaments? (17 h 40)

M. Picard: Alors, l'Office des professions et différentes personnes, on donnait comme conseil de mettre les médicaments homéopathiques en vente libre et de les distribuer un peu partout, si vous voulez. Ça, c'est une décision qui ne m'appartient pas, ce n'est pas à moi d'intervenir là-dedans. Je peux vous donner mon opinion en tant que médecin ayant pratiqué l'homéopathie. C'est qu'un médicament homéopathique n'est pas toujours pas dangereux, ce n'est pas vrai. Il y a certains médicaments homéopathiques qui peuvent être dangereux. Je vous donne un exemple simple: il y a des venins de serpent qu'on utilise en dilution homéopathique qui peuvent modifier le taux de prothrombine, c'est-à-dire modifier la coagulation du sang chez quelqu'un qui est sous anticoagulant. Alors, c'est là qu'on s'aperçoit que, l'homéopathie, ce n'est pas de l'eau sucrée, que ce n'est pas une histoire, comme ça, pour faire rire les gens.

Donc, il y a, en effet, un besoin d'information absolu. Il y a des médicaments homéopathiques qui ne devraient pas être en vente libre. Ça, j'en suis absolument persuadé, mais il y en a d'autres qui peuvent l'être sur le conseil du pharmacien, d'autres qui doivent être derrière le comptoir, vraisemblablement, et d'autres qui peuvent être comme des spécialités qui peuvent être en vente libre, comme ça. Pourquoi pas?

Mais, là, je parle de la vie, je ne parle pas de ce qui serait faisable, si vous voulez. L'Ordre des pharmaciens, quand il parle d'automédication, il parle d'une automédication allopathique. Moi, quand je vous dis automédication, je dis automédication homéopathique. Pour ceux que ça intéresse, j'ai écrit un bouquin là-dessus, je ne l'ai pas amené. Je n'ai pas eu l'impudeur de vous l'amener. Mais, si on donne bien les limites aux gens, toute mère de famille ou tout père de famille qui a des enfants qui ont mal aux oreilles a forcément utilisé, un jour, de l'homépathie tout seul. Un enfant qui a des poussées dentaires, je ne connais personne qui n'a pas essayé certain médicament homéopathique là-dessus et qui ne l'a pas vu marcher.

M. Paradis (Matapédia): Je voulais quand même mettre en relief le fait que, même si on peut qualifier ça de médecine alternative ou de thérapie alternative, ce n'est pas sans danger et il faut être restrictif pour l'accès à ces médicaments-là...

M. Picard: Je pense, oui.

M. Paradis (Matapédia): ...même si on ne les appelle pas médicaments, jusqu'à un certain point.

M. Picard: Oui, c'est ça. J'utilise le terme «médicament» volontairement parce que ce n'est pas très habituel qu'on parle de médicament quand on parle d'homéopathie. C'est un médicament. Ça a des DIN. Ça porte des DIN, des Drug Identification Number. C'est un médicament. Alors, qu'on en conteste la réalité ou pas, c'est une histoire, ça. Moi, je suis d'accord avec vous qu'il faut faire attention à l'utilisation des produits homéopathiques, ce n'est pas sans danger, de même que la phytothérapie n'est pas sans danger. Quarante grammes de certaines substances phytothérapiques qui contiennent des alcaloïdes peuvent être dangereux, c'est bien évident. 70 % des médicaments classiques sortent de la phytothérapie, enfin, des plantes de façon directe ou indirecte, par synthèse ou hémisynthèse. Donc, c'est un faux débat, tout ça. Le pétrole aussi, c'est naturel.

M. Paradis (Matapédia): Oui, sauf que, si on est ici, c'est parce qu'on veut encadrer...

M. Picard: Voilà!

M. Paradis (Matapédia): ...des thérapeutes, on veut encadrer la pratique de certaines thérapies pour ne pas laisser à n'importe qui le soin d'utiliser ces thérapies. Si la pharmacie a évolué, si la pharmacologie a évolué, puis que de plus en plus on a un code de déontologie sévère, c'est parce qu'on en sent le besoin du côté médical, du côté médicament, et c'est la même chose pour vous.

M. Picard: Absolument.

M. Paradis (Matapédia): C'est ça que je voulais mettre en relief.

M. Picard: Je le comprends bien. D'ailleurs, le propos du mémoire que nous avons déposé, c'est pour vous dire qu'il y a quelque chose de sérieux qui existe, qui a une expertise, qui a été fait ailleurs et qui se fait ici et qui marche bien, qui semble bien marcher. Je ne vous l'ai pas dit, mais, dans les cours qu'on fait, notamment pour les pharmaciens, on a des évaluations avec des taux de satisfaction de plus de 90 %. Bon, vous me direz que, les chiffres, on peut toujours les discuter.

M. Paradis (Matapédia): J'ai quelques pharmaciens qui travaillent pour moi, que vous avez convertis, effectivement.

M. Picard: Ah! Je ne les ai pas convertis. Je les ai informés. Ha, ha, ha! Alors, il se trouve que, peut-être du fait que je suis passionné, ça a peut-être fait bouger des choses ailleurs. Mais, enfin, je vous en remercie. Ça démontre au moins que je sais de quoi je parle. Merci.

M. Paradis (Matapédia): Au plaisir!

Le Président (M. Joly): Merci, M. le député. Maintenant, je reconnais M. le député de Rouyn-Noran-da—Témiscamingue.

M. Trudel: Merci, M. le Président. Bienvenue, docteur et cher homéopathe. C'est comme ça qu'on vous appelle. Je note, d'abord... Non, une petite question d'information, d'abord. En fait, vous êtes une maison privée...

M. Picard: Oui.

M. Trudel: ...de formation qui, en quelque sorte, a contribué, dans le cadre des curriculums universitaires au Québec, à la formation en homéopathie sur appel, disons, des facultés, soit en pharmacologie, soit en pharmacie ou en médecine. C'est exact, ça?

M. Picard: Non, pas en médecine. Ça a été à la demande de... Notre action principale s'est faite au niveau de l'extension de l'enseignement de l'Université Laval pour l'École de pharmacie. C'est surtout là qu'on a cette ouverture. Pour la Faculté de pharmacie de Montréal, ça a été fait. Pour l'instant, je ne vous en parle pas parce qu'il y a des réponses qui vont être données dans les jours qui viennent. Mais, pour les médecins, non, on n'a aucune ouverture. Donc, on fait un enseignement privé, on propose un enseignement privé — le programme est d'ailleurs dans les annexes que je vous ai données ici — qui est un enseignement CEDH, si vous voulez, adapté aux médecins, et aux omnipraticiens québécois.

M. Trudel: Si bien que les médecins qui sont homéopathes au Québec, c'est parce qu'ils ont décidé d'aller chercher dans le secteur privé une formation.

M. Picard: Absolument, que ce soit chez nous ou ailleurs. Il y a d'autres écoles d'homéopathie, bien sûr. Au CEDH, pour le dernier cours des médecins, on a eu des crédits. Nous ont été accordés des crédits de la FMOQ, de la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec, qui a donc accordé des crédits pour cet enseignement-là.

Pour les vétérinaires, par contre, ce n'est pas en accord avec la faculté de Saint-Hyacinthe, si vous voulez. C'est simplement le fait que les vétérinaires qui suivent le cours CEDH dans le privé ont le droit de dire à leur corporation: On a suivi des cours, et ça rentre un peu dans leurs crédits de formation continue, si vous voulez. Mais il n'y a rien d'officiel par rapport aux vétérinaires.

Là, on est dans une situation où ça se fait gentiment, tranquillement pas vite en se disant: Bien, est-ce que ces gens-là sont raisonnables? Je vous donne un exemple. Excusez-moi si je suis bavard, mais un petit exemple.

M. Trudel: Vous avez l'approche douce. M. Picard: Ha, ha, ha! On vient... M. Trudel: Le mode alternatif.

M. Picard: ...de commencer un cours pour les vétérinaires, spécifiquement pour eux, et on a vu arriver dans la liste des inscrits un professeur de Saint-Hyacinthe. Alors, tout le monde a grimpé dans les rideaux en disant: Ça y est, bon. Moi, j'ai dit: Doux, doux, tout doux. Ça ne prouve pas grand-chose. Peut-être que ce monsieur-là est curieux. En réalité, il nous a dit carrément, après: Écoutez, un jour, en discussion comme ça, j'ai dit à mes collègues: II faudrait peut-être aller voir ce qu'ils racontent, les gars du CEDH, pour voir si c'est des rigolades. Et puis tout le monde a dit: Oui, oui, il faut y aller. Qui est-ce qui y va? Personne ne voulait venir. Alors lui, il a été désigné et il est venu. Il nous l'a dit, tant mieux. Alors, il vient. Il a l'air d'être plutôt intéressé. Enfin, je ne veux pas anticiper sur la suite. Il est plutôt intéressé, ce qui est normal. On lui parle comme à un être humain. On lui parle comme à un vétérinaire normal, qui va ajouter quelque chose de spécial à sa pratique.

M. Trudel: II n'a pas de comportement animal, là.

M. Picard: Ah oui, mais, vous savez, ça se rapproche bien souvent. Regardez les parallèles entre les animaux et leurs maîtres, vous verrez un petit peu comment ça se passe. Oui, excusez-moi.

M. Trudel: À la page 2 de votre document, quand vous décrivez les objectifs de votre organisation, vous nous dites: C'est de «donner à chaque professionnel de la santé la possibilité de se former à l'approche homéopathique et à sa méthodologie». Dans le paragraphe suivant, vous utilisez les termes «intégrer l'homéopathie comme outil de travail». Alors, est-ce à dire que, pour vous, la profession d'homéopathe, ça n'a pas à exister, ça n'existe pas? Ce qui existe, c'est une approche à l'intérieur d'une discipline. Vous comprenez ce que je veux dire.

M. Picard: Je comprends exactement ce que vous voulez me dire. Ça me gêne beaucoup parce que, sur le fond, je suis d'accord avec vous, mais je ne voudrais pas être aussi sévère que ça.

M. Trudel: Moi, il y a un point d'interrogation. Je ne suis pas sévère, je pose la question.

M. Picard: Non, mais, juste avant moi, j'ai entendu des choses qui bloquent quelque part, comme ça. On a parlé d'esprit d'ouverture, d'éviter le monopolistique étroit, ce qu'on veut. Il ne faut pas faire la même chose avec les homéopathes. Je pense que l'homéopathie est plutôt une attitude devant les choses de la médecine

ou devant les choses de la santé, qu'on a ou qu'on n'a pas, si vous voulez, et qu'on va pouvoir développer au cours de son existence de pratique professionnelle. C'est une attitude et une conception des choses, c'est sûr, mais c'est aussi un outil thérapeutique. C'est les deux en même temps.

C'est-à-dire qu'on n'a pas besoin de se poser des questions sur le sens de l'existence quand on prend certains médicaments pour soigner un rhume, par exemple, des médicaments homéopathiques, mais, par contre, pour soigner la personne qui fait des rhumes à répétition, dans son environnement socioculturel et héréditaire, qu'est-ce que vous voulez? biologique, militaire et le reste, là, on a besoin d'une vision particulière. Et ça, c'est la vision de l'homéopathe. Et ça, ça ne peut pas s'apprendre en fin de semaine ou en deux mois ou en trois mois. Ça va s'apprendre sur quatre ans ou cinq ans de formation, la formation d'un vrai homéopathe, entre guillemets. (17 h 50)

Mais je ne pense pas, en effet, que ça justifie une corporation d'homéopathes, si vous voulez. Par contre, un titre d'homéopathe agréé, agréé du fait de sa compétence basée sur des critères d'évaluation bien déterminés, ça, je pense que c'est intéressant, de même que c'est intéressant d'avoir des critères pour pouvoir dire: Bien, dans telle corporation professionnelle, telle personne qui veut avoir une espèce de compétence en homéopathie, si elle va suivre un cours accrédité dans une école qui est reconnue comme étant sérieuse, bien, on va considérer qu'elle peut s'appeler homéopathe agréé à l'intérieur de notre corporation. C'est un petit peu une des idées que vous avez données hier matin, je pense, où vous disiez: Pourquoi ne pas trouver des accréditations d'écoles privées, ce qui ne coûterait pas cher? Excusez-moi, je ne sais pas si ça coûterait cher. Je suis un ignare dans ce genre de domaine.

M. Trudel: Le ministre va vous dire: Quand c'est dans l'Opposition, ça ne coûte jamais cher.

M. Picard: Mais, si le ministère de l'Éducation, par exemple, avec le ministère de la Santé disaient, pour l'instant, avant d'enclencher des choses importantes: Telle école d'homéopathie ou d'autre chose est accréditée et les gens qui sortent de là sont des gens qui peuvent se dire homéopathes raisonnables dans tel domaine de leur pratique, pourquoi pas? Et puis, sur le plan plus global, vous nous parliez de l'homéopathe plus homéopathe avec un grand H, si vous voulez, là, je crois qu'il faut envisager des choses comme l'université pour les chiros. Il faut, en effet, une base très, très forte, une base très solide de sciences de la santé et de signes différentiels à ce qu'on veut. Mais, pour tout le reste, je ne vois pas.

M. Trudel: En fait, ce que vous me dites, c'est que ça pourrait avoir comme deux paliers, l'agrégation. Suivant que c'est une formation complémentaire à l'intérieur d'une discipline scientifique qui porte un titre professionnel déjà reconnu avec ses exigences en propre et lorsqu'il s'agirait d'être un praticien de l'homéopathie en soi, là, vous dites que ça nous prendrait quasiment comme deux séries de normes pour être agréés.

M. Picard: C'est tout à fait possible. D'ailleurs, il y a une idée qui me vient. En France, ça n'existe plus maintenant, mais à une époque, dans certaines spécialités médicales qu'on fait après avoir fini sa médecine, il y avait des spécialités où il y avait des compétences et la spécialité. Je vous donne un exemple: un gynécologue, par exemple, pouvait être compétent en gynécologie; ça voulait dire qu'il ne faisait que de la gynécologie médicale. Il s'occupait des maladies des femmes, des prélèvements, si vous voulez, mais il ne faisait pas du tout de chirurgie. Par contre, un gynécologue spécialiste avait le droit de faire de la chirurgie gynécologique. À un moment donné, il y avait deux niveaux à l'intérieur de la gynécologie: il y avait le compétent qui était déjà bien compétent, qui faisait beaucoup de choses intéressantes, qui était plutôt vers l'endocrinologie, vers les maladies, puis le gynécologue chirurgien, si vous voulez, qui était le spécialiste gynéco. Quelqu'un qui était compétent en gynéco n'avait pas le droit de se dire spécialiste en gynéco. Ça pourrait rejoindre ce que vous dites là. C'est une hypothèse.

M. Trudel: Je fais tout de suite une remarque, c'est que toute votre vision est empreinte d'un certain réalisme, je trouve...

M. Picard: J'essaie.

M. Trudel: ...c'est-à-dire: N'essayons pas d'inventer un supermodèle et de créer des choses qui n'ont peut-être pas besoin d'exister pour reconnaître une pratique professionnelle qui, d'évidence, correspond à des besoins chez le public, en termes de façon de traiter à l'aide du chimique — et on critiquera ça dans un autre cadre, s'il y a lieu — mais de façon différente de la pharmacopée habituelle généralement reconnue en Amérique du Nord et qui donne lieu à la formation en pharmacie. C'est ça?

M. Picard: Oui, tout à fait. Il est sûr que le fait que les médecins soient tellement achalés en permanence ou mis sous la pression, si vous voulez, au niveau de l'homéopathie, ça ralentit, au fond, la vérification que l'homéopathie puisse être intéressante, parce qu'il y a beaucoup de médecins qui ne veulent pas venir apprendre l'homéopathie ou qui voudraient bien et qui se disent: Je ne veux pas aller dépenser de l'argent pour apprendre quelque chose qui fait que je vois moins de clients parce que je suis obligé de passer plus de temps. Je gagne moins d'argent et, en plus, je vais me faire taper sur le dos par ma corporation. Quel est le genre de saint, saint François d'Assise ou autre, qui ferait ce genre de chose? Franchement! Là, il y a quelque chose aussi qui... Ce n'est pas à moi de juger de ce que fait la Corporation ici, ce n'est pas le problème, mais ça joue

très certainement. Il suffirait d'un tout petit truc. L'idée de l'AMHQ, ce matin, l'histoire du moratoire de dire: On va vous obliger à travailler ensemble, c'est bien parce que ça éliminerait un petit peu, je dirais, la déception d'un médecin d'être obligé de travailler avec des homéopathes, par exemple, si on l'obligeait.

M. Trudel: Là-dessus, on peut peut-être vérifier par une question prospective. On sait qu'il y a des gens qui vont venir nous parler, l'Association médicale canadienne, de l'évaluation des thérapies alternatives avant de... On verra dans quel cadre, mais, si je comprends bien, dans le cas de l'homéopathie, parce que vous êtes spécialiste dans ce secteur-là, ça ne vous apeuré pas, cette perspective de l'évaluation.

M. Picard: Excusez-moi. Non seulement ça ne m'apeure pas, mais c'est absolument indispensable et puis ça a déjà été fait. Alors, ce qu'on a fait ici, il y a eu des problèmes qui n'ont pas marché au niveau de la recherche tout simplement, mais, dans les évaluations, il y a eu des évaluations sur les traitements. Il faut choisir certains types de pathologies qui peuvent répondre à l'évaluation elle-même de l'homéopathie. Je pense au syndrome de fatigue chronique, par exemple. Ça, ce serait relativement simple à vérifier. Il y a les otites à répétition. Il y a des schémas à faire. C'est faisable, et l'expérience de l'homéopathie est telle, si vous voulez... On a tellement de recul sur l'efficacité de tout ça. On sait très bien que... On a d'abord le devoir de le faire, mais, en même temps il faut absolument le faire pour montrer que, l'homéopathie, ce n'est uniquement de l'effet placebo, si vous voulez. C'est une action thérapeutique comme une autre thérapeutique.

M. Trudel: Sur la question de la mise en vente libre des médicaments homéopathiques...

M. Picard: Oui.

M. Trudel: .. .tout juste vous étirer un peu...

M. Picard: Oui, oui.

M. Trudel: ...quant à votre raisonnement.

M. Picard: Ça ne me dérange pas.

M. Trudel: La recommandation de l'Office des professions, c'est de dire: Bon, mettez ça libre et puis, bon... C'est inspiré, je pense et je ne veux pas me tromper, du premier paragraphe de l'avis qui dit: II n'y a pas de danger là-dedans.

M. Picard: Oui.

M. Trudel: On ne surveille pas beaucoup. La Société des alcools n'est pas sous surveillance.

M. Picard: Bien non.

M. Trudel: Pourtant, Dieu sait que 26 onces de cognac d'un coup sec, ça...

M. Picard: Oui.

M. Trudel: ...allume la patate.

M. Picard: C'est une plante également, vous savez.

M. Trudel: Ça tue les microbes. Enfin... Certains vont dire...

M. Picard: C'est de la phytothérapie.

M. Trudel: ...que des bonnes ponces de gin, ça guérit la grippe. On sait que ça ne guérit pas la grippe, mais ça fait un virus heureux, toujours.

M. Picard: Et on oublie qu'on a la grippe, ce qui est un peu différent de...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Trudel: Vous y voyez des dangers qui sont au-delà, bien au-delà de cette limite généralement reconnue.

M. Picard: Pour certains médicaments homéopathiques. Je ne peux pas vous donner des détails ici, mais il y a certains médicaments homéopathiques... Et ça, il faut le savoir, il faut le voir pour le croire, il faut le savoir en tant que médecin. Il y a certains médicaments homéopathiques qui peuvent aggraver certains états pathologiques aigus, notamment... Je vous parlais des venins de serpent, tout à l'heure; je vous parlais de certains médicaments au niveau des oreilles, par exemple, qui peuvent faire péter un tympan. Si on donne certains médicaments homéopathiques à dilution qui ne sont pas adaptés au début d'une otite inflammatoire, on perce le tympam, point final. C'est pour ça que c'est quand même important de ne pas faire n'importe quoi, en homéopathie. Vous comprenez? Alors, le traitement de fond, le traitement de terrain de l'enfant qui fait des otites à répétition, ça pose moins de problèmes, ça, mais le traitement d'un aigu, ça pose des problèmes de diagnostic.

M. Trudel: Je vous remercie, Dr Picard, de votre contribution. Vous êtes le premier membre à ne pas réclamer de corporation professionnelle distincte.

M. Picard: Mais je n'ai pas de solution miracle après 30 ans de pratique; vous voyez comme quoi c'est simple.

M. Trudel: Et vous dites: Nous sommes prêts à continuer notre pratique et, évidemment, à la développer et à respecter un certain nombre de critères au niveau de la formation, et le mécanisme de l'agrégation pourrait

être un mécanisme qui s'applique. Je vous remercie de votre contribution, c'est important.

M. Picard: Merci beaucoup.

Le Président (M. Joly): Merci. Je crois que les parlementaires sont appelés pour un vote qui se déroule en Chambre actuellement. Alors, nous allons suspendre nos travaux quelques minutes.

(Suspension de la séance à 17 h 56)

(Reprise à 18 h 12)

Le Président (M. Joly): La commission reprend ses travaux. Nous accueillons maintenant le Collège des naturopathes du Québec. Bonjour, messieurs.

Collège des naturopathes du Québec

M. Lesage (Jacques): Bonjour.

Le Président (M. Joly): Alors, M. Jacques Lesage.

M. Lesage (Jacques): Oui, effectivement. C'est ça, oui.

Le Président (M. Joly): C'est ça. Et M. P. Wil-brod Gauthier.

M. Gauthier (P. Wilbrod): C'est exact.

Le Président (M. Joly): II nous fait plaisir de vous souhaiter la bienvenue. Vous savez un peu comment ça procède. Je pense que vous avez assisté à nos travaux.

M. Lesage (Jacques): C'est ça.

Le Président (M. Joly): On vous donne le temps nécessaire, 15 à 20 minutes au maximum, pour présenter votre mémoire et plus de temps on aura pour échanger avec vous par après selon la cédule de temps qui nous est répartie par la Chambre.

M. Lesage (Jacques): M. le Président, M. le ministre, commissaires de la commission parlementaire, en tant que membres du Bureau des gouverneurs du Collège des naturopathes du Québec, ça nous fait énormément plaisir d'être ici et d'essayer d'aider le gouvernement à résoudre ce problème qu'on appelle des «médecines alternatives», problème qui date depuis plusieurs années, à ce niveau-là. Déjà, en 1976, le gouvernement faisait des études sur les médecines douces, à l'époque.

Et puis, quand on regarde ça de près... J'étudiais justement l'enquête de Multi-Reso, qui avait été commandée par le MSSS en avril 1992, sur les médecines alternatives. évidemment, ils démontraient dans ce rapport que 45 % des québécois consultaient en médecines alternatives. un peu plus loin, on remarque que 32 % consultent des chiros, 12 % consultent des acupuncteurs. alors, les chiros sont déjà reconnus par l'office des professions; les acupuncteurs sont déjà sous tutelle médicale. tout ça pour dire que, quand on parle des naturopathes, des homéopathes, des phytothérapeu-tes, évidemment, on parle de médecines douces, on parle de médecines non dangereuses.

D'ailleurs, ici, l'Office des professions mentionne que la naturopathie ne présente pas de danger pour le public. Après avoir ainsi analysé le travail des naturopathes, l'Office des professions concluait que la naturopathie faisait partie des médecines douces étudiées qui «ne présentent pas de danger pour le public et dans la plupart des cas font du bien à leurs utilisateurs et celles-ci devraient pouvoir être exercées sans crainte de poursuite pour pratique illégale».

Évidemment, c'est tout ça qu'on veut mentionner, qu'on peut aider la commission. Le but, c'est surtout de mentionner que, comme naturopathes, évidemment, les gens qui nous consultent, comme M. le ministre le mentionnait tantôt au niveau des chiropraticiens, ce sont souvent des gens qui nous sont référés par des amis, par des gens qui ont eu des résultats de la naturopathie. Et les gens, comme on dit, sont assez brillants aujourd'hui pour faire la différence. Les gens ne sont pas, comme on dit, des gens qu'on tente de protéger, qu'on veut surprotéger; les gens sont assez brillants pour faire la différence et voir où il y a danger ou non.

Évidemment, tout ça pour vous dire que je ne vois pas la possibilité de reconnaissance comme telle. C'est drôle de vous mentionner ça, je verrais plutôt que les personnes intéressées, qui ont des problèmes à régler et qui auraient certains commentaires ou des actes naturo-pathiques non satisfaisants, pourraient se plaindre ou faire une demande à l'Office de la protection du consommateur et, éventuellement, l'Office de la protection du consommateur pourrait en arriver à régler ce problème-là. Voilà.

Je ne vois pas véritablement... Comme on l'a mentionné ici, s'il y a une médecine qui peut aider énormément pour les coûts du gouvernement, c'est bien la naturopathie, parce qu'on traite les gens par l'alimentation, et beaucoup de gens nous sont référés par les... Souvent, les gens ont consulté des médecins, ont consulté des spécialistes. Ils viennent nous voir en dernier ressort et nous disent: Écoutez, bon, vous êtes mon dernier espoir. Qu'est-ce que vous pouvez faire pour moi? Et, souvent, dans ces cas-là, bien, il s'agit de corriger l'alimentation. Et, souvent, les résultats ne se font pas attendre. Immédiatement, on a des résultats qui sont assez intéressants, parce qu'on sait très bien qu'il y a beaucoup de maladies, aujourd'hui, qui sont reliées à une mauvaise alimentation. On sait le coût énorme des soins de santé des gouvernements. Des sommes énormes sont dépensées, effectivement, par le phénomène de mauvaise alimentation, de mauvaises habitudes de vie.

Alors, on a soumis ce mémoire-là dans un but de

renseigner le gouvernement. On parle ici que la naturo-pathie est une pratique, la philosophie, l'art et la science qui visent à apporter à l'être humain le plus haut degré de santé possible. En partant des principes que la nature répare tous les tissus pourvu que le corps humain soit traité avec respect et le plus naturellement possible, le naturopathe se refuse à intervenir dans le maintien de la santé et la guérison des maladies par le recours à des moyens ou à des substances allopathiques, c'est-à-dire étrangères à ce que la nature met à la disposition du corps. Alors, c'est ça. C'est une médecine qui est douce, c'est une médecine qui est non agressive et qui a d'excellents résultats. On en parle ici: L'art et la science qui visent à apporter à l'être humain le plus haut degré de santé. L'Office des professions, comme je le mentionnais, dans un avis donné en avril, disait que celle-ci devrait pouvoir être exercée sans crainte de poursuite pour pratique illégale.

Afin d'atteindre le but mentionné dans l'avis de convocation, soit d'examiner les mécanismes de reconnaissance des thérapeutes qui ne prétendent pas à un statut professionnel au sens de la loi, il importe de rectifier la situation existante et d'aplanir certains irritants. À cet égard, le mémoire examine d'un oeil critique le rôle ambigu que joue l'Office des professions et les obstacles créés par les pharmaciens, les diététistes et les médecins. Quant à cette dernière profession, il suggère de limiter la portée de la définition de l'exercice de la médecine dans la Loi médicale en la faisant reposer sur des actes bien définis.

On doit laisser au citoyen le libre choix des soins de santé qui lui conviennent et il lui appartient de se renseigner sur les pratiques de son choix. Si ce praticien fait de fausses représentations ou fraude le public, les mécanismes très sévères du Code criminel et de la Loi sur la protection du consommateur s'appliqueront avec toute leur rigueur. Ces mesures devraient amplement servir à protéger la société. Voilà, messieurs, mesdames, si vous avez des questions, ça me fera énormément plaisir d'y répondre. (18 h 20)

Le Président (M. Joly): Oui, s'il vous plaît, M. le ministre.

M. Côté (Charlesbourg): Merci. Évidemment, le mémoire est signé par un personnage assez connu.

M. Lesage (Jacques): Oui, effectivement.

M. Côté (Charlesbourg): Ça n'a pas été dit, mais c'est la réalité. Il est très visible, disons-le, depuis au moins une quinzaine d'années.

M. Lesage (Jacques): Ah oui!

M. Côté (Charlesbourg): Vous avez presque terminé votre intervention par ce que je voulais vous poser comme question. Vous dites carrément que l'Office protège davantage ceux qui pratiquent que les citoyens. Ce n'est pas tout à fait ça ou...

M. Lesage (Jacques): Oui.

M. Côté (Charlesbourg): Dans cette mesure-là, si on veut être capables de protéger le citoyen, il faut quand même un minimum d'encadrement. Ça ne peut pas être la liberté totale. C'est ce que je constate de votre mémoire là, et je ne remets pas en cause du tout ce que l'Office a pu constater. Vous avez commencé avec ça.

M. Lesage (Jacques): C'est ça.

M. Côté (Charlesbourg): Vous avez dit: L'Office a conclu que la naturopathie ne représente pas de danger public.

M. Lesage (Jacques): Effectivement, oui.

M. Côté (Charlesbourg): O.K. Mais, il faut quand même un minimum de structures pour être capables de constater des choses. Parce que, le principe, c'est que ça ne crée pas de tort; bon, il faut quand même qu'il y ait quelqu'un, à quelque part, qui soit capable de juger si, effectivement, il y a tort ou pas, et vous ne proposez pas, dans votre mémoire, de structure qui pourrait remplir le rôle qui n'est pas rempli, à votre point de vue, par l'Office. Parce que la protection du public, c'est ça. Le constat est sévère, vous n'êtes pas les seuls à le faire. J'ai entendu mon ami, le député de Rouyn-Noranda—Témiscaminque, reprendre des propos d'autres qui disent la même chose, donc, vous n'êtes pas les seuls à penser ça, mais est-ce qu'il n'y a pas un effort à faire de ce côté-là? Et, dans la mesure où on veut protéger le public, il n'y a pas uniquement la protection du consommateur qui peut ou qui doit faire ça.

M. Gauthier: Tout à l'heure, j'entendais le représentant des chiropraticiens parler de naturopathie et je l'entendais vous dire que, dans la mesure où quelqu'un, ici, s'appelle naturopathe, c'est un usurpateur. Ce n'est pas un usurpateur, il n'usurpe les pouvoirs de personne. Dans la mesure où il n'empiète pas sur les champs médicaux réservés exclusivement à la profession médicale et à celle de la chiropraxie, par exemple, il n'usurpe rien à personne. Qu'il s'appelle naturopathe, il a le droit de le faire; dans la mesure où on est dans un pays libre, il peut bien s'appeler naturopathe, pourvu qu'il ne fasse pas de fausses représentations quant à ce qu'il propose à l'individu qui vient le voir pour être aidé dans ses problèmes de santé.

Le problème de l'encadrement de la naturopathie devenait d'autant plus évident, à écouter ce représentant des chiropraticiens, que, si on parle d'encadrement relié à la formation universitaire reconnue, il n'y en a pas au Québec; cet enseignement-là n'est pas reconnu au Québec. Les médecins, les membres de la Corporation professionnelle des médecins ne reconnaissent pas la naturopathie comme ayant quelque valeur que ce soit. Ils s'en sont même moqués très longtemps. Ils ne le font plus parce qu'ils n'ont plus de salive, peut-être, mais ils

n'abandonneront jamais là-dessus. Us disent: Ça ne donne rien d'aller voir un naturopathe. Donc, ce n'est pas eux qui vont enseigner la naturopathie à l'université.

Les naturopathes américains? Ça voudrait dire qu'il faudrait avoir un naturopathe américain pour venir enseigner ici, pour pouvoir former des naturopathes? On verse dans le ridicule quand on va de ce côté-là. Alors, comment encadrer la pratique de la naturopathie? Ça devient extrêmement difficile. Le Collège des naturopathes dispense des cours et, lorsque les cours sont terminés, l'individu est un diplômé en naturopathie. Il est obligé de suivre, sur une période de 4 ans, 3600 heures de cours et il passe des examens. Mais ces cours-là ne sont pas enseignés à l'université et, à moins que le gouvernement puisse ordonner aux universités de l'enseigner, ce n'est sûrement pas la Corporation professionnelle des médecins qui va encourager ça, ils sont contre. Il faudrait une intervention dramatique de l'État pour dire: Ça va s'enseigner, pour pouvoir avoir des naturopathes qui peuvent dire aux gens: On a un diplôme universitaire. Ils en ont, pour la plupart, des diplômes, mais ce ne sont pas des diplômes universitaires du Québec.

Le Dr Brunet, auquel vous faisiez allusion et qui a signé le mémoire au nom du Collège, il a des doctorats en naturopathie d'universités étrangères; il ne peut pas en avoir ici. Il faudrait lui dire ou il faudrait dire aux gens: N'allez voir que ceux qui ont des diplômes étrangers en naturopathie? Ce serait ça, l'encadrement? Je le vois mal, là aussi. C'est pour ça qu'en dernière analyse, le Collège des naturopathes et le Dr Brunet qui a signé le mémoire, ont dit: On est mieux de suggérer qu'il n'y a pas lieu d'encadrer les naturopathes, et ce n'est peut-être même pas possible. Si, évidemment, ils empiètent — et, d'ailleurs, lorsqu'il y en a qui l'ont fait, ils se sont fait taper sur les doigts devant les tribunaux par le Collège des médecins — s'ils posent un acte médical précis qui est réservé aux médecins, d'accord, que la loi les empêche de le faire. Mais, si tout ce qu'ils font, c'est d'enseigner aux gens des bonnes habitudes alimentaires, des bonnes habitudes de vie et l'exercice pour les aider à éviter la maladie, est-ce que n'importe qui ne peut pas faire ça dans un pays libre? C'est la question qu'on se pose, et c'est pour ça que le mémoire est présenté de la façon dont il l'est.

M. Côté (Charlesbourg): Mais, si je comprends le sens de votre intervention — et si j'interprète mal, vous me corrigerez — vous n'êtes pas fermés à une formation universitaire au Québec, pourvu qu'elle se donne.

M. Gauthier: Pourvu qu'elle se donne.

M. Côté (Charlesbourg): Bon. Par le fait même, vous reconnaissez qu'une formation de base est nécessaire. Même, elle se donne au Québec. Et, lorsqu'on parle de 3600 heures, c'est quand même passablement d'heures par rapport à d'autres qu'on a entendus en cours de route depuis 2 jours. Donc, il y a nécessité d'une formation de base pour être capable de pratiquer, si je comprends bien.

M. Lesage (Jacques): Effectivement, oui. M. Gauthier: D'accord.

M. Côté (Charlesbourg): Sinon, à quoi servent les 3600 à part de la culture personnelle?

M. Gauthier: D'accord.

M. Côté (Charlesbourg): Bon. Par rapport aux chiros, ce qu'eux disent — il y a pas mal d'expérience aux États-Unis — elle est d'inspiration très médicale ou dominée par le médical, si j'ai bien compris, et toutes ces médecines alternatives s'ajoutant à la base qui est médicale, ce n'est pas forcément mauvais. Ça ne veut pas dire que c'est totalement bon non plus, mais je comprends, on s'entend bien, que ça prend au moins une formation de base qui est très importante. Ça ne peut pas être universitaire au Québec parce qu'il n'y a pas eu l'ouverture qu'il fallait au niveaux des universités pour développer ces cours-là, ils se sont développés hors murs des universités.

M. Gauthier: C'est ça.

M. Côté (Charlesbourg): Bon. Votre présentation, je pense qu'elle paraissait claire: il y a des champs exclusifs. C'est très clair, si quelqu'un met ses pattes là, qu'il soit poursuivi. Vous n'êtes pas contre ça, ça m'apparaît assez clair. Vous êtes, quand même, d'après moi, à la lecture de ça, assez durs vis-à-vis de l'Office. Parce que, c'est un constat: l'Office défend ceux qui sont dans des corporations, membres des corporations et non pas nécessairement l'usager, le bénéficiaire de ces services-là. J'aimerais vous entendre un petit peu plus là-dessus parce que l'Office, quand même, n'a pas été trop méchant vis-à-vis de vous autres, là. Quand l'Office dit: Vous ne faites peut-être pas grand bien, mais vous ne faites pas de tort. C'est déjà pas pire. (18 h 30)

M. Gauthier: Ah oui. On le cite même dans notre mémoire. Alors, on n'est pas entièrement négatifs à l'endroit de l'Office des professions. Ce qui, évidemment, a froissé les naturopathes, c'est cette tentative par les diététistes, qui est très récente d'ailleurs, de vouloir s'intituler nutritionnistes pour pouvoir, en somme, s'accaparer tout le domaine du conseil aux gens sur leur alimentation.

Or, le docteur Brunet, pour un, par exemple, est un docteur en naturopathie et en nutrition. Il a des doctorats. J'ai vu les thèses. J'ai vu sa thèse en trois volumes pour obtenir son doctorat à l'Université d'Edimbourg, ce n'est pas de la foutaise. Mais lui ne pourrait plus s'appeler nutritionniste, s'il le voulait, parce que les diététistes, qui ne sont plus contents du terme qu'ils ont choisi lorsqu'ils ont été intitulés et qu'ils ont eu le titre réservé de nutritionniste au moment

de l'adoption du Code des professions, veulent maintenant dire: Bien, on devrait s'appeler autre chose. Mais c'est finir par jouer sur les mots.

Évidemment, je trouve que la recommandation que vous a faite l'Office des professions là-dessus allait à rencontre, d'abord, de la portée des dispositions du Code des professions et puis voulait aussi, au fond, déjouer un état de choses établi pour essayer de donner aux diététistes un champ d'action qu'ils n'ont pas exclusivement, eux, de toute façon. Alors, pourquoi ne pas les laisser comme diététistes, point?

Pour ce qui est de l'Office des professions, on a comparu devant lui récemment. J'étais là moi-même et on a comparu sur la question de la réglementation des produits pharmaceutiques, la vente des médicaments, à savoir la vente libre, la vente non libre, etc. Et, encore là, évidemment, on a eu un débat assez acrimonieux, mais on s'est présentés là et on a fait valoir nos prétentions avec fermeté. On s'est très bien compris. Je ne sais pas quel sera le résultat de ce qui a été fait comme travail en collaboration avec l'Office des professions. Nous ne sommes pas contre l'Office des professions comme institution, mais nous allons continuer à nous battre pour ne pas nous faire abattre par l'Office des professions si, de fait, il pose des gestes qui ne sont pas conformes au rôle que lui a donné le Code des professions. C'est tout. On n'est pas contre le principe de l'Office des professions.

M. Côté (Charlesbourg): Je ne sais pas si vous étiez ici ce matin. L'Association de médecine holistique...

M. Gauthier: Non, nous n'y étions pas.

M. Côté (Charlesbourg): ...nous a proposé une démarche. Je ne sais pas si elle a été portée à votre connaissance.

M. Lesage (Jacques): On l'a entendue tantôt avec les chiropraticiens. Sur cinq ans, vous disiez?

M. Côté (Charlesbourg): Oui, une première année de mise en forme et de concertation ou de préparation du terrain avec reconnaissance d'un certain nombre de projets-pilotes qui mèneraient à une connaissance encore plus accrue, bon, au point de vue scientifique avant même d'en arriver à une loi dans cinq ans. Ça me paraît être une démarche intelligente dans le contexte actuel parce que de vouloir défoncer la porte, il faudra définitivement, au lendemain, soit refaire une porte ou la retravailler, alors que, si on réussissait à l'ouvrir un tant soit peu, ça nous permettrait peut-être de l'ouvrir graduellement et de cheminer tout le monde ensemble pour le plus grand bien-être de ceux qui attendent après. Je ne sais pas si vous avez une opinion sur cette démarche-là.

M. Gauthier: J'aimerais savoir: Est-ce que ces gens-là veulent une corporation professionnelle à champ exclusif ou simplement à titre réservé? Parce qu'il y a une grosse différence.

M. Côté (Charlesbourg): Évidemment, ce que je comprends dans cette démarche, qui était inspirée par des médecins déjà reconnus comme médecins souhaitant intervenir de manière beaucoup plus globale... Alors, ce n'est pas un nouveau mouvement. Ce n'est pas d'aujourd'hui que ça se parle, ça, la vision globale de la personne, mais disons qu'on en parle un petit peu plus aujourd'hui, c'est un peu plus médiatisé. Ils souhaitaient davantage que tout le monde soit impliqué dans ce bateau-là au-delà et en complément de ce qu'a fait l'Office; parce qu'il ne faut pas oublier que l'Office a fait beaucoup, beaucoup de travail en termes d'écoute. On regarde les rapports des avis, il y a quand même passablement de monde qui a été écouté. J'allais dire «entendu», mais ça dépend du point de vue de chacun.

Mais il y a cette démarche-là qui a été faite et ils la proposaient dans la continuité de ce qu'a fait l'Office, dans le but d'en arriver à créer, et ça, ça reste à déterminer, éventuellement un office ou un chapeau, un comité-parapluie, une corporation-parapluie. Bien des choses restent à être déterminées. Je ne me souviens pas, dans le document, si c'était spécifié carrément à titre de champ exclusif ou à titre réservé; je n'ai pas vu ça en termes de réponse dans leur document. Je ne peux pas vous répondre. À mon souvenir, je ne l'ai pas vu. Je n'ai pas vu si c'était...

(Consultation)

M. Côté (Charlesbourg): Non, ce n'est pas précisé. Donc, je ne peux pas vous répondre là-dessus, mais je peux vous en donner une copie toujours. La démarche me paraissait une démarche plus souple, tentant de nous mener à un résultat éventuellement et à une loi qui, elle, pourra évoluer.

M. Gauthier: Je pense que nous favoriserions une démarche souple au départ, certain. On dit, d'ailleurs, qu'on voudrait une approche souple et simple. Cependant, s'il existait une loi, soit parallèle à la Loi sur la protection du consommateur ou, alors, un ajout à cette loi-là, qui venait exiger des gens qui pratiquent ces thérapies alternatives et qui ne posent pas de gestes à proprement parler médicaux qui relèvent de la profession médicale traditionnelle, et que cette loi-là, dis-je, imposait aux thérapeutes alternatifs de rendre tout à fait transparents leur formation, leurs degrés, qu'ils soient universitaires ou autres, pour qu'au moins les gens qui vont les consulter puissent savoir à qui ils ont affaire, il me semble que ce serait suffisant.

M. Côté (Charlesbourg): Vous ne croyez pas que ce serait une charge additionnelle très importante pour l'Office de la protection du consommateur que de recevoir cette responsabilité-là? Moi, c'est la partie de l'avis de l'Office des professions... Mon impression, c'est qu'on a fait rapidement et qu'on a passé le bébé à quel-

qu'un d'autre en se disant: Bien, la protection du consommateur, ça va bien, ça; ça protège le consommateur sous toutes ses formes. Passons ça à la protection du consommateur et ça se réglera plus facilement. Si, nous autres, on n'est pas capables de le régler, probablement qu'eux autres... Il me semble que c'est facile d'envoyer ça à la protection du consommateur, d'exiger que le gars ait un certificat, qu'il ait un permis et qu'on dise: Parfait, à partir du moment où tu as ça, le public est automatiquement protégé ou la protection du consommateur va le poursuivre. Quand on dénonce la bureaucratie, il me semble qu'on devrait mettre en place, au niveau de la protection du consommateur, une bureaucratie très importante pour être capable de surveiller tout ça.

M. Gauthier: Mais est-ce qu'il ne faudra pas faire la même chose si on fait surveiller ça par l'Office des professions?

M. Côté (Charlesbourg): Moi, je me dis qu'il y a un certain nombre de prérequis. Il faut s'entendre et savoir ce qu'on exige sur le plan de la formation. Ça, ça me paraît être le premier élément. Si on s'entend là-dessus, il est bien clair que le public en sera d'autant protégé. On aura affaire probablement à moins de charlatans. À partir du moment où on sera exigeants à ce niveau-là, hors de cela, point de salut, il va falloir que ce soit clair. On ne pourra pas maintenir un système très exigeant et quelqu'un dans le champ qui pratique et qui ne répond pas aux exigences. Donc, il me semble que le préalable, c'est ça.

Par la suite, il y aura à décider s'il y a une corporation-parapluie. Si jamais il y en avait une de celles qui pourraient être reconnues, à ce moment-là, ce sera son devoir à elle de défendre l'intérêt public, et non pas uniquement l'intérêt de ses membres. Mais, plus globalement que ça, dépasser l'intérêt des corporations par rapport à l'intérêt public, la question déborde très largement les thérapies alternatives. On l'a évoqué, que ce soit les avocats, que ce soit les médecins, que ce soit les comptables, ainsi de suite, le public n'y est pratiquement pas représenté et il y a beaucoup plus de travail à faire. (18 h 40)

M. Gauthier: Là, j'aimerais comprendre une chose que vous venez de dire. Si on parle de corporation-parapluie, est-ce qu'on pense à une corporation-parapluie totale, comme celle du Collège qu'a créé la nouvelle loi ontarienne et qui, donc, englobe aussi la profession médicale traditionnelle, les chiropraticiens, les acupuncteurs, etc., ou si vous parlez d'une corporation-parapluie pour les thérapies alternatives à celle-là?

M. Côté (Charlesbourg): C'est davantage ça qui était proposé dans les différents mémoires. C'est ça. Alors, évidemment, il n'y a pas de solution miracle, non plus, mais il y a une évolution, il y a une étape à franchir qui m'apparaît importante et, au lendemain de la commission, on aura des décisions à prendre. On va tenter de les prendre en collégialité avec l'Opposition.

C'est le meilleur moyen d'avancer; sinon, si on est campés dans des positions: l'Opposition d'un côté, nous, de l'autre côté, je ne pense pas qu'on aura fait oeuvre utile à la commission, on aura pratiquement perdu quatre jours. Je pense que je peux vous dire dès à présent que mon intention est d'impliquer très nettement les membres de la commission qui le voudront dans une solution future. Il faut, peut-être, être innovateur au niveau d'une commission de ce type-là.

M. Trudel: Oui, c'est pour ça qu'on a commencé à suggérer des choses dès l'ouverture, comptant sur votre ouverture d'esprit.

M. Côté (Charlesbourg): Ça, c'est proverbial, mon ouverture d'esprit.

M. Trudel: Alors, maintenant, nous allons espérer que votre proverbialité soit aussi rapide.

M. Côté (Charlesbourg): On verra. Il nous reste encore deux jours!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Trudel: Moi, ce n'est pas le temps de la commission qui m'importe, c'est votre temps à vous. Ha, ha, ha!

M. Côté (Charlesbourg): Parce que vous pensez que quelqu'un d'autre, à ma place, pourrait avoir des visées différentes? Vous tenez à moi autant que ça?

M. Trudel: Je tiens aux résultats. M. Côté (Charlesbourg): Ha, ha, ha! Des voix: Ha, ha, ha!

M. Trudel: Je ne veux pas de corporatisme, je veux du résultat.

Le Président (M. Joly): Merci, M. le ministre. M. le député de Rouyn-Noranda—Témiscamingue, s'il vous plaît, c'est à vous.

M. Trudel: Merci, M. le Président. Bienvenue, au nom de l'Opposition, au Collège des naturopathes. Effectivement, on vous connaît beaucoup par Jean-Marc Brunet. J'ai eu l'occasion, par rapport à d'autres questions, d'avoir des contacts avec vous également et je dois dire qu'au départ, moi, je reçois assez bien l'espèce de pensée qui habite votre mémoire, c'est-à-dire à partir du moment où on peut... Comme le dit l'Office des professions, d'ailleurs, et vous le notez au départ, on peut constater qu'il n'y a pas là de danger. Le degré de dangerosité, si je peux employer l'expression, pour le public n'est pas... Ce n'est pas nucléaire, l'affaire là. Je dis: Bon, écoutez, le meilleur principe qui peut nous habiter, c'est celui de la liberté et du respect de la capa-

cité de juger de la population.

Je me fais un tout petit peu l'avocat du diable pour dire: Si la pratique de la naturopathie ne comporte pas de danger le moindrement soulignable ou, enfin, à un degré élevé, il peut arriver cependant que des gens qui se disent naturothérapeutes posent des diagnostics, prescrivent à titre de thérapie pour guérir — j'emploie ce mot-là — des personnes... Vous avez dit tantôt, M. Lesage, que très souvent les gens arrivent chez vous et disent: Bien, écoutez, vous êtes notre dernier recours. On est passés partout là, on a tout essayé là et ça ne marche pas. Donc, vous accueillez un certain nombre de personnes qui sont dans un état de détresse certaine. Et, à cet égard, donc, la vulnérabilité de la personne est assez élevée. Ça peut être tentant pour un être humain — vous savez où il y a de l'homme, il y a de l'hommerie — de commencer à dresser un diagnostic et de prescrire. C'est donc moins la naturopathie que je veux questionner que ceux et celles qui sont naturothérapeutes et qui pourraient, eu égard à cette situation de détresse de cette catégorie de personnes, être tentés d'abuser. Comment on peut contrôler ça dans la mécanique actuelle ou dans la mécanique à venir?

M. Gauthier: Ça, on ne peut jamais le contrôler parce qu'il y a même des médecins qui font des diagnostics qui sont mauvais. Ça ne se contrôle pas. Mais il reste que le naturopathe, en principe, ne dira pas à l'individu: Je décide ou je te dis que tu souffres de telle maladie. Ce n'est pas ça qu'il va faire. Il va d'abord lui demander s'il est allé voir son médecin, si le médecin a fait un diagnostic et, là, il va faire parler l'individu. Il va lui faire décrire son mode de vie, son passé de santé et, de ça, il va faire une évaluation globale de l'individu et de son état de santé, et là il va lui donner des conseils sur ses habitudes de vie, alimentaires et autres. C'est ça qui se passe entre le naturopathe et celui qui vient le consulter. Il ne lui dira pas: Vous souffrez d'appendicite. Il ne lui dira pas: Vous avez mal à la tête parce que vous avez un cancer du cerveau. Il n'osera pas dire ça.

M. Trudel: Oui, mais Me Gauthier, là, vous me décrivez le travail type du naturopathe type, de l'honnête naturopathe type...

M. Gauthier: Oui.

M. Trudel: ...comme, par rapport à la moyenne, tous les autres professionnels de n'importe quelle autre profession.

M. Gauthier: Oui.

M. Trudel: Parce que, vous avez raison, il y en a des bons, il y en a des moins bons, en politique, en médecine, en droit, etc.

M. Gauthier: Oui, en tout.

M. Trudel: La notion de protection du public s'intéresse, évidemment, à cette partie de ceux qui dévient, aux déviants, et c'est impossible, théoriquement parlant du moins, qu'il ne s'en glisse pas chez vous, parce qu'on est aussi dans un monde commercial, avec l'appât du gain, bon, enfin, les tendances normales de la nature humaine en pays capitaliste, ta, ta, ta, etc. Comment on contrôle ça dans le cadre de la reconnaissance de certaines thérapies alternatives ou encore de la liberté de pratique dans certaines disciplines qui ne présentent pas, à prime abord, de degré de danger très élevé pour les Québécois et les Québécoises?

M. Gauthier: Mais comment le contrôlez-vous chez le médecin qui a prescrit de la thalidomide aux femmes enceintes? Comment ça se contrôle? Ça ne se contrôle pas, même chez le médecin. Ça ne se peut pas, c'est tout. Les gens qui sont mal traités n'ont qu'à se plaindre, mais c'est tout ce qui peut se produire. Le charlatanisme ou l'erreur grossière ou appelons-la ce qu'on veut, ça fait partie de la nature humaine et on ne peut pas l'empêcher automatiquement avant même qu'elle se produise. Il faut en accepter les conséquences une fois que ça s'est produit. La structure de la Loi médicale, la structure du Code des professions n'empêchent pas les mauvais conseils d'avocats, de médecins, de notaires, d'architectes ou d'ingénieurs; ça ne les empêche pas de faire des erreurs. Bien au contraire. Si on prend seulement les médecins de médecine traditionnelle comme exemple, ces gens-là prescrivent des médicaments dont ils ne connaissent même pas la composition, parce que les «pharmaceutiques» ont des brevets et ils ne peuvent pas dévoiler la composition du médicament. Ils leur disent un mot long comme le bras, mais ils ne leur diront pas en quoi ça consiste chimiquement, ce médicament-là. Et, pourtant, les médecins le prescrivent parfois, et plus souvent qu'autrement, peut-être avec succès, mais parfois aussi ils prescrivent un médicament qui a des effets désastreux.

M. Trudel: Ce que vous voulez dire, c'est comme dans n'importe quelle profession: on peut garantir les moyens, mais le résultat n'est jamais garanti chez personne.

M. Gauthier: Voilà!

M. Trudel: Et vous dites: Cette règle peut très bien présider à la pratique, à l'exercice de certaines thérapies alternatives, comme ça se passe, d'ailleurs, dans le monde des professions encadrées par une loi qui s'appelle le Code et par un organisme qui s'appelle l'Office.

M. Gauthier: Oui.

M. Trudel: À cet égard-là, vous dites: Ne chargez pas trop et, surtout, ne surréglementez pas...

M. Gauthier: C'est ça.

M. Trudel: ...quelque chose qui, actuellement, se passe de façon assez bien en général. (18 h 50)

M. Gauthier: Cet exactement la position que nous avons prise.

M. Trudel: Est-ce que chez les naturopathes, les gens que vous formez — vous êtes le collège de naturo-pathie — comme on Ta demandé à d'autres groupes aujourd'hui, vous avez des références? J'allais dire beaucoup, mais, pour commencer, est-ce que vous avez des références des médecins? Et aussi, dans la même question, est-ce que vous avez des références des compagnies d'assurances?

M. Lesage (Jacques): Oui, effectivement. Il y a des membres du Collège des naturopathes qui ont des références des médecins.

M. Trudel: Mais est-ce que c'est un épiphénomè-ne, là, ou si c'est...

M. Lesage (Jacques): Non, non. C'est occasionnel.

M. Gauthier: C'est occasionnel, oui. M. Trudel: C'est très occasionnel.

M. Lesage (Jacques): C'est très occasionnel, oui. Et plusieurs compagnies d'assurances vont reconnaître la naturopathie, vont payer pour les traitements ou une partie des traitements, par exemple.

M. Trudel: Et ça, c'est assez répandu ou... M. Lesage (Jacques): Assez répandu. Oui, oui. M. Trudel: Oui. M. Lesage (Jacques): Très, très répandu, même.

M. Trudel: Vous en formez combien de naturopathes, chez vous, au Collège? Donnez-moi ça annuellement, puis il s'en est formé combien depuis l'existence du Collège?

M. Lesage (Jacques): Présentement, au Collège, nous sommes 60 naturopathes, membres du Collège des naturopathes du Québec. Mais il faut faire la différence avec les...

M. Trudel: Oui.

M. Lesage (Jacques): ...naturothérapeutes. Nous, c'est les naturopathes. Tantôt, vous mentionniez «naturothérapeute»; alors, ce n'est pas tout à fait la même chose. C'est différent.

M. Trudel: On a vu ça. On a vu ça aujourd'hui.

Est-ce que vos membres détiennent, pour la très grande majorité, par ailleurs, des assurances contre la «malpractice»? Vous connaissez ça, Me Gauthier?

M. Lesage (Jacques): «Malpractice», non. Ça n'existe pas pour nous.

M. Trudel: Ça n'existe pas. Les compagnies refusent?

M. Lesage (Jacques): Refusent, oui, exactement, oui. Moi-même, je l'ai tenté à plusieurs reprises, mais, vu que ce n'est pas une profession, entre guillemets, reconnue par le gouvernement, alors, c'est la raison qu'ils nous donnent pour dire qu'ils ne peuvent pas nous assurer. Mais, étant donné que c'est une médecine très douce, qui est très peu agressive, alors, on a rarement de problèmes à ce niveau-là. On n'a jamais...

M. Trudel: Vous n'avez pas de poursuites.

M. Lesage (Jacques): Non. La seule poursuite, c'est le Collège des médecins envers ses membres.

M. Trudel: Oui. Je comprends, de ce côté-là.

M. Lesage (Jacques): Mais de moins en moins, quand même.

M. Trudel: De moins en moins de poursuites... M. Lesage (Jacques): C'est ça.

M. Trudel: ...du Collège des médecins pour pratique illégale de la médecine?

M. Lesage (Jacques): C'est ça, oui. Ils ont compris que chacun avait sa place, effectivement.

M. Trudel: Naturopathe ou naturothérapeute. Chez vous, naturopathe, là, ça correspond à combien d'heures de formation?

M. Lesage (Jacques): II y a 3600 heures de cours réparties sur 4 ans.

M. Trudel: Sur quatre ans?

M. Lesage (Jacques): Ça, c'est à l'Institut de naturopathie.

M. Trudel: Oui.

M. Lesage (Jacques): II y a également, aussi, l'autre école d'enseignement que l'on reconnaît, c'est l'Académie de naturopathie. Ce sont les deux écoles que le Collège reconnaît comme formation.

M. Trudel: En somme, vous dites: Les lois de protection du consommateur et les dispositions du Code

criminel sont suffisantes, actuellement, pour protéger les consommateurs.

M. Gauthier: Oui, monsieur.

M. Trudel: Vous estimez, donc, que les consommateurs sont suffisamment informés pour utiliser ce dispositif-là, de l'une ou l'autre de ces lois en matière de transaction ou d'infraction dans certaines pratiques?

M. Gauthier: Bien, en matière d'infraction en droit criminel, d'abord, s'il y a un endroit ou nul n'est censé ignorer la loi, c'est bien en droit criminel. On pourrait répondre ça, mais c'est une réponse bête, je le reconnais. Il reste que, si quelqu'un veut porter une plainte au criminel, il sait qu'il est mieux d'aller voir un avocat de la couronne pour lui expliquer ce qui s'est passé. O.K.? Pour ce qui est de la protection du consommateur, je pense que l'Office de la protection du consommateur a fait assez de publicité quant à son existence et à son rôle pour que la majorité des citoyens le connaissent très bien, quand même.

M. Trudel: Comme nous sommes en matière de santé, de façon large, et comme il s'agit, évidemment, de — inutile de le préciser quelquefois — ce qui est de plus précieux pour l'être humain, les possibilités d'abus sont multiples; c'est très grand comme ouverture. Est-ce que vous jugez que, à cet égard, compte tenu du domaine concerné, une espèce d'organisme-parapluie — là, je ne parle pas de la protection des membres de différentes catégories — devrait fournir de l'information sur ce que sont les différentes thérapies alternatives et, d'autre part, informer les consommateurs sur les possibilités, les mécanismes de recours un peu sous la forme — je dis bien un peu sous la forme — des «advocacy groups» qu'on connaît aux États-Unis dans certaines matières, dans certaines législations où on subventionne des groupes non seulement pour donner de l'information, mais pour supporter et aider les consommateurs à exercer des recours et à obtenir justice? Est-ce que ça vous apparaît quelque chose qui, compte tenu du secteur d'activité qui s'appelle la santé, devrait être mis sur pied ou à tout le moins être examiné?

M. Gauthier: En principe, je n'y vois pas d'objection, mais j'y vois, cependant, un ajout qui n'est peut-être pas d'une très grande utilité, un ajout à ce qui existe déjà. Vous comprenez que, pour contrôler, il faudrait commencer par en haut, et je suis sûr que les naturopathes n'auraient pas d'objection à ce que des gens viennent les voir pour dire: Pourquoi conseillez-vous telle chose à un tel pour résoudre tel problème de santé? Qu'ils viennent, s'ils le veulent. Ils vont voir qu'il n'y a rien de bien malin à ce que... Au fond, ce que le naturopathe fait vis-à-vis de son patient, c'est de jouer un rôle d'enseignant de façon un peu plus savante que les parents vont le faire vis-à-vis de leurs enfants pour ce qui est de leur alimentation. C'est tout, ce n'est pas plus malin que ça, ce qu'ils font.

M. Trudel: On n'a pas besoin de mettre sur pied une corporation pour encadrer les parents et...

M. Gauthier: oui, bien, justement. alors, il faut tirer la ligne quelque part. nous, on dit: on n'a pas besoin d'encadrement, mais, s'il en faut un, bien, qu'il soit simple et souple. c'est tout ce qu'on a dit dans notre mémoire, et je pense que ça demeure la position que les naturopathes veulent prendre. il reste ceci. je parlais tout à l'heure des médecins et des médicaments brevetés qui sont prescrits; ça, c'est régi, en principe, par les lois fédérales et la réglementation fédérale. mais vous imaginez-vous que le citoyen moyen, et même, je dirais, 95 % et plus des citoyens du pays — pas seulement au québec, à la grandeur du pays — sont capables de comprendre quelque chose à la réglementation sur la loi sur les aliments et drogues? il y en a presque 12 pouces d'épais de réglementation. elle change. à tous les 15 jours, il y a des modifications, etc. le consommateur est à la merci totale de qui? du bureaucrate qui, lui, ne prend comme expertise que l'expertise des compagnies pharmaceutiques, de sorte que la médecine aujourd'hui, en terre d'amérique, ce sont les compagnies pharmaceutiques qui la pratiquent, et les médecins leur servent d'intermédiaires. c'est ça qui arrive. c'est bien plus grave ça que les quelques risques minimes qu'il pourrait y avoir dans la pratique d'une discipline comme celle de la naturopathie.

M. Trudel: Quand vous comparez la tisane à côté de...

Une voix: Ha, ha, ha!

M. Trudel: ...l'arsenal chimique, ça vous apparaît bien peu...

M. Gauthier: Oui.

M. Trudel: ...et vous n'êtes pas très dangereux sur...

M. Gauthier: Non.

M. Trudel: ...le marché de la santé par rapport à d'autres.

M. Gauthier: Et ce n'est pas pour rien que l'Office des professions, après avoir entendu le docteur Bohémier, qui, malheureusement, est absent, qui ne pouvait être ici, qui est président du Collège, expliquer dans les détails — je sais qu'on ne peut pas prendre des heures ici pour le faire — ce que comporte le geste du naturopathe vis-à-vis de l'individu qui vient le consulter, a dit: Ils font du bien, et il n'y a pas de danger. Alors, pourquoi les encadrer? (19 heures)

M. Trudel: Merci.

Le Président (M. Joly): M. le ministre.

M. Côté (Charlesbourg): Merci bien. C'est toujours intéressant d'avoir des points de vue qui sont différents, mais aussi basés sur les expériences des uns et des autres, même si nous ne sommes pas, d'aucun côté de cette table, ni de votre point de vue, obligés de les partager. Je pense que, dans ce sens-là, c'est comme ça qu'on réussit à faire progresser les choses, et je vous remercie.

M. Gauthier; Merci beaucoup.

Le Président (M. Joly): Alors, les membres de cette commission vous remercient.

Nous ajournons nos travaux à demain, 9 heures, dans cette même salle. Merci et bonne soirée.

(Fin de la séance à 19 h 1)

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