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Version finale

34e législature, 2e session
(19 mars 1992 au 10 mars 1994)

Le vendredi 26 novembre 1993 - Vol. 32 N° 48

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Interpellation : La situation budgétaire du réseau de la santé


Journal des débats

 

(Dix heures cinq ninutes)

Le Président (M. Poulin): À l'ordre, s'il vous plaît! Donc, nous allons débuter nos travaux. Je vais rappeler le mandat de la commission. La commission des affaires sociales se réunit afin de procéder à l'interpellation du député de Rouyn-Noranda—Témiscamingue au ministre de la Santé et des Services sociaux sur le sujet suivant: La situation budgétaire du réseau de la santé.

Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplaçants?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. Mme Vermette (Marie-Victorin) sera remplacée par M. Bertrand (Portneuf).

Le Président (M. Poulin): Donc, je vais rappeler les règles de l'interpellation. Le député qui a donné l'avis d'interpellation intervient le premier pendant 10 minutes; le ministre interpellé intervient ensuite pendant 10 minutes; les membres de la commission ont ensuite un temps de parole de cinq minutes par intervention. Oui?

M. Trudel: Fidèles à notre habitude, nous pouvons convenir que, comme nous débutons à 10 h 7, et le temps est toujours très précieux, nous allons terminer deux heures plus tard, à 12 h 7.

Le Président (M. Poulin): Si vous me donnez la chance de finir, je vais justement, au dernier point, rappeler ce sujet.

M. Trudel: Très bien. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Poulin): Vingt minutes avant la fin de la séance, le président accorde un dernier temps de parole de 10 minutes au ministre et un droit de réplique de 10 minutes à l'interpellant.

Donc, le député de FAbitibi vient justement de le rappeler, nous avons débuté nos travaux à 10 h 5, donc ça me prend un consentement pour terminer à 12 h 5.

M. Côté (Charlesbourg): C'est la règle, M. le Président. Je n'ai pas d'objection.

Le Président (M. Poulin): Donc, M. le député de l'Abitibi, on vous écoute.

Exposé du sujet M. Rémy Trudel

M. Trudel: M. le Président, je vais d'abord vous féliciter pour votre nomination à la vice-présidence de la commission des affaires sociales et vous rappeler, comme je l'ai fait à votre prédécesseur, sans malice, que je suis le député de Rouyn-Noranda—Témiscamingue. Mes commettants ne me le pardonneraient pas de toujours oublier cette magnifique région qui s'appelle le Témiscamingue. Mais vous êtes déjà pardonné, puisque plusieurs autres ont fait l'erreur auparavant, il faut le rappeler.

M. le Président, nous avons, en vertu de nos règles, ce matin, demandé, donc, d'interpeller le ministre de la Santé et des Services sociaux sur le thème de la situation budgétaire dans le réseau de la santé et des services sociaux au Québec. Il apparaît assez évident que le système a subi, comme je l'ai mentionné, au cours des 15 derniers jours, le moins que l'on puisse dire, des soubresauts au cours de ces derniers jours, et, il faut le dire carrément, beaucoup plus que des soubresauts, notre système de santé et de services sociaux a subi, au cours des derniers jours, des assauts qui réapparaissent tellement graves qu'il faille, bien sûr, utiliser à tout le moins les règles de l'Assemblée nationale pour demander au ministre responsable de la Santé et des Services sociaux — et sans jeu de mots... Je ne veux pas que cette interpellation porte à confusion de celui qui a annoncé qu'il allait quitter son siège, ce n'est pas l'objet de cette interpellation. Il est le ministre responsable, il est le ministre qui tient les cordons et qui tient les guides à la Santé et aux Services sociaux. C'est lui que nous allons interroger aujourd'hui, et qu'il n'y ait pas de quiproquo dans nos interrogations, même si nous savons qu'il s'est passé un certain nombre d'événements. Mais le principal, pour nous, ce sur quoi nous devons nous concentrer et nous voulons nous concentrer, du côté de l'Opposition, c'est de protéger l'intégralité de notre réseau, de notre régime de santé et de services sociaux, au Québec, qu'on s'est donné depuis 1970. Et c'est à cet égard-là qu'on veut interroger le ministre de la Santé et des Services sociaux.

Donc, le régime a subi un certain nombre d'assauts au cours des 15 derniers jours. Il y a eu un grand nombre de remises en question qui font en sorte que, le minimum que l'on puisse dire, il y a de la confusion dans le réseau de la santé et des services sociaux. Il est utile, je pense, de rappeler les principales dimensions de ces soubresauts, de ces assauts: d'abord, une annonce, qui, pour le début de cette période, nous est venue du Bas-du-Fleuve. Une régie régionale de la santé et des services sociaux a communiqué aux médias qu'il y aurait donc, dans ce réseau, des compressions de 1 000 000 000 $ au cours des prochaines années. Ça augurait bien mal l'espèce de discussion publique que nous espérions voir prendre place au Québec en matière de protection de notre régime de santé et de services sociaux. À la fin, donc, de l'été, c'est du Bas-du-Fleuve

que nous est venue la nouvelle qu'il y aurait des compressions de 1 000 000 000 $. (10 h 10) nous avons, par ailleurs, appris, quelques moments plus tard, qu'il y aurait davantage dans le réseau de la santé et des services sociaux, puisqu'en juin dernier, pour toutes sortes de raisons, mais qui apparaissent d'abord comme étant des raisons de faire plaisir à un certain nombre de députés d'arrière-ban qui ne sont pas satisfaits de la performance de leur propre gouvernement, on a décidé de faire voter une loi, qui s'appelle la loi 198, avec un certain nombre d'articles qui sont apparus plus alambiqués que moins au cours des derniers jours, loi 198 qui, essentiellement, prévoit qu'il y aura, d'ici 1996, réduction de 20 % du nombre de cadres dans la fonction publique, et en tenant compte de cela dans le réseau de la santé et des services sociaux, et réduction de 12 % d'ici 1998 des autres catégories de personnel qui ne sont pas des personnels d'encadrement dans le réseau de la santé et des services sociaux, je le répète, avec un certain texte alambiqué qui a fait en sorte que c'était comme une position qui voulait démontrer qu'on avait bien en main la gestion du gouvernement et que nous allions procéder avec un bras de fer pour effectuer des réductions des dépenses publiques. mais, dès le moment où on arrive pour appliquer cette démonstration, eh bien, on fait marche arrière. on nous indique qu'on a alambiqué le texte, que ce n'est pas sûr que le texte veuille dire ce qu'il dit, que ce n'est pas automatiquement des réductions de 20 % chez les cadres et de 12 % chez le personnel dans le réseau de la santé et dans le réseau de l'éducation, mais qu'il y a des objectifs à atteindre et que ça se rendra peut-être là. est-ce qu'il y aura 21 500 mises à pied dans le réseau de la santé et des services sociaux? encore ce matin, le journal la presse nous informe que la régie régionale de la santé et des services sociaux de montréal-centre a indiqué à ses établissements qu'il y aurait des réductions de personnel qui pourraient atteindre jusqu'à ce seuil de 12 % chez les personnels autres que l'encadrement et 20 % chez les personnels cadres, ce qui voudrait dire au total pour le plan de compressions, incluant la fonction publique, pour la région de montréal, au-delà de 19 000 pertes d'emplois dans une région qui est déjà fortement affectée.

Il faut ajouter à cela, à ces compressions, à ces soubresauts, à ces assauts, ce qui a été fait il y a une quinzaine maintenant, c'est-à-dire à l'occasion d'une annonce d'un plan visant à améliorer le dépistage du cancer du sein chez les femmes, cette fameuse annonce, donc, maintenant, de l'abolition de la circulaire, la circulaire «malades sur pied», visant essentiellement à supprimer un certain nombre de médicaments, qui jusqu'à maintenant étaient payés par l'État, pour les gens souffrant de fibrose kystique, pour les gens souffrant de diabète insipide ou encore de cholestérol élevé et dans d'autres catégories, comme par exemple pour les sidéens, question sur laquelle nous allons revenir, bien sûr, pendant cette interpellation parce qu'il faut savoir.

On a vu que le recul a été effectué là-dessus. Ce qu'on n'a pas vu encore, entre autres choses, c'est le recul sur cette annonce que comportait l'abolition de la circulaire, c'est-à-dire l'introduction d'une tarification dans le domaine de la santé. Pour toutes les personnes souffrant de cancer et qui ont besoin de traitements de chimio ou de radiothérapie, nous allons maintenant introduire la notion de: Tu vas payer un ticket de 20 $ pour d'autres malades qui, eux, ont besoin d'autres médicaments. C'est un principe tout à fait nouveau, donc, l'introduction de la tarification dans le domaine de la santé et des services sociaux, faite subrepticement. Il y a eu recul sur l'abolition du paiement des médicaments pour certaines catégories de malades sur pied, et, dans ce sens-là, il va falloir que le ministre nous donne un certain nombre de réponses aussi quant à l'introduction de la tarification. Nous allons y revenir largement pendant cette période.

Ce qui est intéressant aussi de noter — et il faut que le ministre de la Santé et des Services sociaux nous donne des réponses là-dessus, et c'est fondamental: Le ministre de la Santé et des Services sociaux, en effectuant tous ces mouvements de recul dans notre régime, répondait à une commande. Il a indiqué cette semaine que, déjà le 22 juin, le président du Conseil du trésor et le Conseil des ministres amorçaient une opération de réalignement de l'appareil public au Québec. À cet égard, c'est très curieux de voir le comportement du gouvernement, ces derniers jours, ces dernières semaines, puisque, très clairement, on nous a indiqué que la remise en question de l'universalité des programmes, d'un certain nombre de programmes dans le domaine de l'éducation, de la santé et d'autres secteurs allait être amorcée sous la supervision d'un comité présidé par le ministre de la Sécurité publique, M. Ryan. Le ministre de la Sécurité publique a-t-il donc effectivement recommandé la fin de l'universalité de nos programmes en matière de santé?

Deuxièmement, et plus grave encore, le comité politique présidé par le président du Conseil du trésor, M. Johnson, avec la vice-première ministre, Mme Bacon, et également M. Ryan, a-t-il donné l'ordre de mettre fin à l'universalité de nos programmes de santé? Les colonnes de notre régime de santé et de services sociaux sont-elles hypocritement remises en question et est-on en train de faire en sorte, de façon insidieuse, de démanteler notre réseau?

L'opération de réalignement de l'appareil public au Québec est-elle devenue une opération de dérapage incontrôlé, comme on a pu l'observer au cours des trois derniers jours? Le groupe de pilotage politique — Johnson, Ryan, Bacon — a-t-il, en catimini, pris la décision de laisser aller le gouvernement fédéral dans sa gestion et de faire payer aux Québécois, par des compressions...

Le Président (M. Poulin): En conclusion, s'il vous plaît.

M. Trudel: ...l'argent qui ne vient pas et que nous avons bien observé, en termes de montants, à l'occasion du débat de février 1992?

En conclusion, M. le Président, le ministre de la Santé va-t-il tout laisser faire ça? Le ministre de la Santé va-t-il laisser le gouvernement du Québec aller au Forum national sur la santé, après les fêtes, avec une position qui ne serait pas une position de défense de l'intégralité de notre régime de santé et des services sociaux? Merci, M. le Président.

Le Président (M. Poulin): Merci, M. le député. M. le ministre.

Réponse du ministre M. Marc-Yvan Côté

M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. le Président. Vous qui me connaissez bien savez très bien, ce matin, que je suis très heureux d'être là, dans un face à face civilisé qui a pour objectif d'échanger sur notre système de santé, et cela, à la demande de l'Opposition. Et le thème est clair, tel qu'il apparaît à la motion, c'est la situation budgétaire du réseau de la santé. En premier lieu, je me suis dit: Peut-être il y a aussi les services sociaux dont il faudra s'occuper. Et, compte tenu de la nature même du député, je suis convaincu que c'est probablement un oubli dans le libellé, mais cette partie-là aussi fait partie de notre quotidien et est extrêmement importante en terme de système.

Donc, je me suis dis: Est-ce qu'on veut discuter du budget actuel, en cours, ou si, au contraire, on veut discuter de l'avenir? Ce n'est pas indiqué tel quel sur le plan du libellé, mais, de toute façon, c'est une discussion de système que nous entreprenons ce matin, à la lumière des derniers événements, qui, j'en conviens, ont occasionné des soubresauts, disons-le carrément, insoupçonnables au moment de certaines annonces, qui ont été, à mon point de vue, très nettement amplifiés, où il y a de la démesure dans les propos tenus, dans les écrits tenus, même si, sur certains aspects particuliers, ça peut inquiéter des gens de manière très honnête. Je pense qu'il y a eu de la démesure et de la démagogie, et la démagogie n'est pas toujours le lot des politiciens. Et je pense qu'on a pu le constater de manière admirable par certains écrits au cours des dernières semaines qui, même à l'occasion, pouvaient attaquer des individus. Mais ça, l'individu s'en porte bien. (10 h 20)

Donc, deuxième affirmation de M. le député: Nous sommes donc ici, ce matin, pour protéger, dit-il, l'intégralité du système. Impossible. Je le dis depuis deux ans, M. le Président, et ça fait quatre ans que j'occupe les fonctions que j'ai présentement. Nous avons travaillé d'arrache-pied pour apporter des modifications au niveau du système, plus souvent qu'autrement avec le concours de l'Opposition, voulant faire en sorte qu'on apporte des améliorations à nos propositions pour qu'elles reflètent davantage les corrections dont notre système avait besoin. Ça s'est fait par la commission Rochon, ça s'est fait, par la suite, par la réforme déposée par Mme Lavoie-Roux; par la réforme que nous avons adoptée ensemble dans la loi 120, avec les paramètres que nous avions à l'époque, les estimés que nous pouvions envisager à l'époque sur le plan budgétaire. La crise économique persistant, il est évident que nous devons à nouveau, sur le plan des paramètres financiers, revoir ce dont on a les moyens. Et, de ne pas se le dire aujourd'hui, je pense que c'est se cacher une vérité qui va rattraper n'importe quel politicien, de n'importe quelle couleur politique, et il devra ou ils devront vivre avec la réalité financière des gouvernements, tant à Ottawa qu'à Québec. Et ça, je le dis depuis trois ans de manière particulière.

On n'a donc pas amorcé, au mois de juin, en catimini une réflexion; nous avons fait une réflexion dans la foulée de la loi 120, à la demande de l'Opposition, une commission parlementaire portant spécifiquement sur le financement du réseau de la santé et des services sociaux au Québec, de laquelle ont découlé un certain nombre de mesures prises dans le budget suivant et qui ont apporté certains soulagements au niveau du régime, davantage au niveau de ce qui est complémentaire au régime que ce qui est à l'intérieur même du régime, protégé tant par la loi fédérale que la loi du Québec.

Et, M. le Président, il faut se le dire, 5 000 000 000 $, 6 000 000 000 $ de déficit annuel, c'est des niveaux que le Québec ne peut pas se permettre, que nos enfants ne peuvent pas se permettre, pour la simple et bonne raison que nous n'en avons plus les moyens. Le gouvernement, donc, a amorcé une réflexion très importante et a demandé le concours d'un ministère qui va chercher plus ou moins 31 % du budget du Québec. Et c'est dans ce sens-là que nous avons cru bon de prendre nos responsabilités et d'amorcer une réflexion très importante à partir de décisions prises au central, qui demandait au ministère, finalement plaçait au ministère un certain nombre de commandes, et, sur le plan de la solidarité ministérielle, elle est, à ce niveau-là, à toute épreuve.

Les quanta ont été déterminés, et, à partir du moment où le gouvernement a décidé que c'étaient des quanta qui nous étaient impartis, nous nous sommes mis à l'oeuvre en nous disant que nous devions respecter une démarche ouverte de consultation avec nos partenaires privilégiés que sont les régies régionales. Et c'est ce que nous avons fait avec le «Défi qualité-performance». Ce travail-là — le député y a fait allusion tantôt — a, à travers un certain nombre d'événements, semé de l'inquiétude un peu partout à travers le Québec, de gens qui se voyaient soit menacés dans leur emploi, soit menacés au niveau d'un service qu'ils pouvaient avoir, qui, jusqu'à maintenant était accessible, universel et presque totalement gratuit, selon la version moyenâgeuse de la gratuité et non pas la réalité du payeur de taxes.

Donc, on est dans une situation, M. le Président, où certains autres événements... On a parlé pendant une

journée du règlement du dossier de la radiothérapie qui était critiqué depuis trois ans, le règlement des listes d'attente ou la mise en place d'un système qui réglerait les listes d'attente. On a salué une journée le premier programme de dépistage du cancer du sein au niveau du Québec. On a décrié pendant deux semaines la mesure de la circulaire «malades sur pied» qui n'est à peu près pas comprise par grand monde, au moment où on se parle. Bien des gens en parlent et ne savent même pas ce dont ils parlent. Et nous avons été, nous comme ailleurs, au fait de la réaction publique et des individus. Et, dans ce sens-là, ça fait deux semaines qu'on en parle. Et ça, c'est le propre même de ceux qui veulent créer la controverse que de l'alimenter et de s'abreuver à différentes sources qui veulent toujours, dans ce système que nous connaissons maintenant, tirer profit du système au maximum. Et c'est un système qui a été conçu comme ça, avec lequel on a eu à vivre depuis des décennies. Nous n'en avons plus les moyens. Et, oui, effectivement, la loi 198 est venue ajouter, en termes de comment, mais aussi intégrer.

Et c'est pour ça, M. le Président, que, effectivement, dans le document «Défi qualité-performance», l'équipe sous-ministérielle, avec mon accord, a entrepris une démarche avec les régies régionales responsables afin d'impliquer les régies régionales sur le plan de l'administration et de tenter de trouver les voies de passage les moins douloureuses, qui s'appliquent un peu partout à travers le réseau, et en tenant compte de l'équité interrégionale qui est revendiquée par plusieurs régions à travers le Québec. Ce travail a été fait en harmonie. Je ne dis pas en total accord avec les régies. Ce travail a été fait de collaboration. J'ai moi-même présidé quatre réunions avec la table des présidents de régies régionales, pour avancer avec eux, alors que mon sous-ministre, lui, présidait la table des directeurs généraux des régies régionales, de telle sorte qu'on puisse progresser dans la prise de conscience, dans la connaissance de l'état de situation et progresser dans les moyens de faire en sorte qu'on puisse répondre au plan triennal qui nous est donné comme orientation.

Et c'est la première fois, la première fois dans l'histoire du gouvernement que le Trésor accepte de discuter avec le gouvernement d'une vision de trois ans, budgétée sur trois ans, et que notre réseau pourrait connaître d'avance, au lieu de toujours se retrouver dans une situation où ses budgets lui sont confirmés six, sept, huit, voire même neuf mois après le début de l'année budgétaire. C'est donc une opération dont l'objectif premier est une opération de stabilité, de bonne information et de réalisme aussi sur le plan économique, demandant à ce qui est 31 % du réseau de faire sa part, en intégrant, à l'intérieur de cette démarche, la volonté manifestée par les députés à l'Assemblée nationale en votant la loi 198, sans que ce soit une volonté —je l'ai exprimé à plusieurs reprises — au niveau du ministère de la Santé et des Services sociaux.

Prise au pied de la lettre, la loi 198, c'est une indication de nos députés disant que les citoyens du

Québec en ont ras le bol de payer des taxes et qu'il nous faut nous adresser à ce problème qu'est le déficit. Dans la mesure où on s'adresse au déficit, il faut, bien sûr, toucher, dans le réseau, ce qui est 77 % de notre budget, soit la rémunération.

Donc, c'est avec grand plaisir que j'échangerai très ouvertement avec les députés, puisque je suis encore ministre de la Santé et des Services sociaux pour un certain temps et que j'entends assumer mes responsabilités jusqu'à l'extrême limite, jusqu'au moment où j'aurai choisi moi-même de m'en aller. Dans ce sens-là, nous discuterons de chacun des sujets particuliers, en vous transmettant toute l'information, la vérité, ce que j'ai toujours fait depuis quatre ans, et je pense que l'Opposition peut en témoigner, sur le plan du nombre de dossiers que j'ai pu lui transmettre, à sa demande, pour que la discussion se fasse ouvertement et très clairement.

Le président (M. Poulin): Merci. Le député de Portneuf maintenant.

Argumentation M. Roger Bertrand

M. Bertrand: Merci, M. le Président. En fait, j'aimerais aborder, de façon un peu plus large que simplement la question d'une directive, toute la question de la tarification des services et du mode de financement des services de santé et des services sociaux.

On a assisté, depuis quelques semaines, à tout un étalage de mesures qui me semblent, en tout cas, faire fi, souvent, de la vocation première de différents ministères. On l'a vu hier, dans le domaine des forêts, par exemple, où le ministre annonçait qu'il se retirait carrément des activités des écoles forestières. Mais on constate que ce retrait intempestif, ou les mesures, des fois, un peu bizarres qui sont proposées de ce temps-ci, touche également le domaine de la santé et des services sociaux.

Le ministre soulignait, il y a quelques instants, toute la rigueur de la démarche qu'il a amorcée avec une perspective de trois ans, et je pense que c'est tout à son honneur. Il faut reconnaître, effectivement, qu'il y a des efforts valables, avec une perspective de temps, qui permettraient de poser des gestes qui ne remettent pas en cause, je pense, l'essentiel même du système dans lequel nous sommes présentement.

En parallèle, on voit apparaître des initiatives qui, elles, semblent être farcies de... disons que je qualifierais d'incongrues, dans les circonstances, avec, pour exemple, justement, la série de mesures conséquentes à l'abolition, que le ministre avait annoncée, de la circulaire «malades sur pied», une circulaire qui permet, ou qui permettait, à certains types de malades de recevoir, en clinique externe, les médicaments que requièrent leur condition. Alors, ça s'appliquait, par exemple, à des personnes qui ont des problèmes de tuberculose, de

diabète insipide, de fibrose kystique, de cancer, etc. Donc, le gouvernement, par son initiative, abolit ce programme pour ceux qui souffrent de ces problèmes. Ça représente des dizaines de milliers de personnes qui sont touchées et des sommes de plus de 20 000 000 $, ou aux alentours de 20 000 000 $, dans les différents volets de la mesure concernée. (10 h 30)

Alors, on pourrait, bien sûr, poser une série de questions relativement à cette initiative qui concerne une circulaire. Par exemple, relativement aux personnes atteintes de problèmes psychiatriques, comment on peut justifier une décision relativement à cette clientèle? Est-ce qu'il y a eu une étude d'impact, par exemple, d'une telle décision sur cette clientèle-là? Même chose au niveau des médicaments contre le sida. Qu'en est-il du rôle là-dedans des compagnies d'assurances? Le ministre dit qu'elles devront assumer leurs responsabilités. Est-ce qu'on peut les contraindre à le faire? Quels en sont également les effets sur le coût pour les usagers de telles mesures? Est-ce qu'au total il en coûtera plus cher à l'ensemble des Québécois et des Québécoises de procéder de cette façon? Le fonds de secours, comment ça va marcher éventuellement? 3 000 000 $. Comité d'experts, pourquoi ne pas l'avoir institué avant l'annonce des modifications, de façon à savoir un peu plus où l'on va avec de telles mesures? Donc, toute une série de questions qu'on pourrait très bien adresser au ministre sur cette seule, sur la seule base de ce qui a pu être cette initiative.

Mais je pense que l'initiative du ministre, dans ce cas-là, pose une question beaucoup plus sérieuse, beaucoup plus globale, la question du régime et du maintien du régime dans lequel nous sommes. Les observateurs et les commentateurs de l'action du gouvernement ne sont pas dupes de ce qui se passe dans le moment. On se rappellera, dans les jours qui ont suivi l'annonce, la réaction dans les journaux des différents milieux: «Santé: un pas de plus vers le ticket», «La gratuité des soins qui tire à sa fin», un article du Soleil. «Des primes d'assurance collective qui coûteront sans doute plus cher au total.» Et on pourrait passer comme ça des réactions, par exemple: «Coup dur pour l'universalité des soins de santé», alors que le Dr Ayoub se prononçait sur l'effet des mesures qui étaient envisagées. Il dit, entre autres, et je cite: «Ce n'est pas simplement la gratuité de ces médicaments qui est en cause, mais aussi l'universalité des soins qu'on touche par de telles mesures».

M. le Président, ce que je dis au ministre c'est... Il a été démontré à plusieurs reprises, dans différents forums, que le morcellement du financement du système de santé était loin d'être une solution, qu'au total il en coûterait plus cher, il en coûterait beaucoup plus cher à l'ensemble des citoyens en procédant de cette façon. Ce que je demande au ministre: Est-ce qu'il compte continuer ses intentions ou son mouvement vers un système qui sera franchement plus inefficace et plus inéquitable à l'égard des citoyens?

Le Président (M. Poulin): Merci, M. le député. ..

M. Bertrand: Et comment le ministre peut-il justifier, s'il décide de continuer, son entêtement à introduire des mesures qui signifieront la fin du système à plus ou moins brève échéance?

Le Président (M. Poulin): M. le ministre. M. Marc-Yvan Côté

M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. le Président. J'ai eu l'opportunité de travailler avec le député de Portneuf dans d'autres circonstances et je vous avouerai franchement que je préférais l'autre circonstance à celle de ce matin. J'imagine que lui aussi d'ailleurs.

M. le Président, c'est un petit peu étonnant . pour... Un député, disons, néophyte, qui n'arrive pas du réseau de la santé et des services sociaux, qui me poserait une question comme celle-là, je serais un petit peu plus à l'aise pour lui répondre, mais, compte tenu du passé et de l'engagement envers le système du député de Portneuf actuel, parce que ça a toujours été manifeste, je pense, dans toutes les rencontres que nous avons eues, sa question m'étonne, sa question m'étonne. Il est dommage que l'on ne puisse pas, nous aussi, poser des questions en retour, puisqu'on aurait beaucoup de plaisir ce matin.

D'abord, qu'est-ce qu'est la circulaire «malades sur pied»? Il faut au moins savoir dire au monde ce que c'est, avant même de poser des questions fondamentales concernant le régime. Ce n'est pas n'importe quoi, hein? Fait-elle partie du système lui-même en termes d'assurances, oui ou non? Est-ce que, fondamentalement, les questions, du régime, d'accessibilité, d'universalité, de gratuité s'appliquent à la circulaire «malades sur pied»? C'est non. C'est non. Ce sont des choses additionnelles qu'on s'est données en cours de route et qui ne font pas, d'aucune manière, partie de ce qui est reconnu comme assuré. Ça a été mis sur pied pour la simple et bonne raison que ça permettait d'éviter une hospitalisation plus coûteuse, et que ça permettait aux gens d'être chez eux, dans leur milieu, et que ça permettait au réseau d'avoir des économies.

Il faut aussi dire à la population que, lorsqu'on évoque l'oiseau absolument épouvantable de la tarification — et il y a une tarification pour ces différents... Bah! 2 $. Ce qui était, j'imagine, à l'époque, catastrophique lorsqu'on a inclus, à votre point de vue, le 2 $ au niveau des médicaments des personnes âgées doit être aussi catastrophique actuellement. Et, quand on remonte à l'origine, 1981, ce n'était pas un gouvernement libéral qui était là, lorsqu'on a créé cette circulaire «malades sur pied»; c'était vous. C'est vous qui étiez là et qui avez imposé un ticket modérateur de 2 $, et il était, d'après moi, justifié, et c'était une circulaire «malades sur pied» qui était justifiée et qui a toujours sa justification. Que de

dire à la population du Québec qu'on l'abolit sans dire qu'on la remplace par une nouvelle n'est pas non plus dire à la population la vérité. Que de dire à la population que des médicaments pour sidéens sont dorénavant exclus n'est pas non plus la réalité. La réalité, je vous l'ai expédiée, à votre demande, au cours de la semaine. Elle concerne les maladies qui sont très clairement identifiées au niveau des malades sur pied, et vous avez évoqué le montant tantôt de plus ou moins 20 000 000 $. C'est la réalité.

Mais le système s'est donné d'autres médicaments fournis à différentes maladies, parce qu'il y avait cette utilité-là, et je pense que c'est une bonne affaire. Donc, nous avons fait quoi? On a dit: II faut la remplacer parce qu'elle est devenue inéquitable. Je n'ai pas entendu personne reprendre ça. La circulaire «malades sur pied» a été dénoncée par les hôpitaux. On voit beaucoup les papiers de M. Nadeau, là, de l'AHQ, de ce temps-là, là. Vous pourriez peut-être voir des lettres aussi qu'il a expédiées au réseau disant qu'il était intervenu vigoureusement auprès du ministre pour faire en sorte que la circulaire «malades sur pied» soit modifiée, soit changée, pour la simple et bonne raison qu'elle était difficilement applicable avec de l'équité. Elle était inéquitable, et ce que nous souhaitons encore, c'est faire en sorte que ce soit une circulaire équitable.

J'ai admis des erreurs. Ce n'est pas la première fois, d'ailleurs, et ce n'est probablement pas la dernière fois dans ma vie. J'ai dit qu'au niveau de la fibrose kystique je pense que nos évaluations ne tenaient pas compte que c'est une maladie que l'on a à la naissance. Même si on tentait d'avoir une modération de la médication, ça aurait des effets considérables sur l'individu. Ce n'est pas l'objectif qui était recherché. Donc, c'est une circulaire qui sera remplacée, M. le Président, et j'ai demandé au Dr Demers de Sainte-Justine, à M. Fran-coeur et à Mme Dolores Lepage-Savary, présidente de l'Association des pharmaciens des établissements, des gens très responsables...

Le Président (M. Poulin): En conclusion, s'il vous plaît.

M. Côté (Charlesbourg): ...de faire des propositions et des recommandations au gouvernement au cours de l'hiver 1994, de telle sorte qu'en avril 1994, lorsqu'elle sera modifiée, elle tienne compte de certaines réalités et d'observations qui ont pu être véhiculées sur la place publique qui, pour certains, ont des fondements.

Le Président (M. Poulin): Merci, M. le ministre. Maintenant, au député ministériel de Matapédia.

M. Henri Paradis

M. Paradis (Matapédia): Merci, M. le Président. C'est toujours un petit peu délicat de parler de la santé et d'en parler comme certains de l'Opposition semblent le faire depuis un certain temps. C'est un sujet sensible auprès de la population, et de se faire du capital politique sur la santé, c'est assez spécial, merci. Je trouve ça un peu étonnant de la part de certains individus qui sont supposés avoir une rigueur, ont supposé-ment une rigueur intellectuelle, se faire du capital politique avec la santé, donc sur ceux qui sont les plus démunis de notre société.

On a évoqué tout à l'heure la loi 198. Je suis un des «backbenchers», pour reprendre une certaine expression, qui ont travaillé sur la loi 198, et je n'en ai surtout pas honte, parce que l'esprit de la loi 198, au-delà des discours de nos députés d'en face, ça n'a rien à voir. Ce qu'on a voulu faire dans la loi 198, c'est d'être capables de vivre selon nos moyens. C'est de dire au gouvernement... Parce que, à l'expérience, on a vu que, même si on parle de compressions — et ça a commencé sous votre temps; rappelez-vous, depuis 1981, 1982, 1983 qu'on parle de compressions budgétaires — on a de la difficulté à le faire, parce que le réseau ou la machine gouvernementale fait en sorte qu'elle croît d'elle-même, et c'est très difficile de diminuer ou, du moins, d'essayer de contrecarrer la hausse des coûts du gouvernement, de telle sorte que les députés en sont venus à la conclusion qu'on devait baliser davantage — le gouvernement, donc le Conseil des ministres — pour les obliger à réfléchir très, très, très sérieusement sur la diminution des coûts, diminuer le déficit, parce que c'est de ça qu'il s'agit. À toutes les fois qu'on offre un service nouveau à une population, c'est parce qu'on va fouiller dans les poches de cette même population pour lui offrir ce service-là. Alors, quand on parle de notion de gratuité, c'est bien relatif. On ne paie pas quand on va chercher le service, mais on le paie sur le chèque d'impôt ou sur les taxes. C'est ça. Alors, quand on parle de gratuité, il faut faire bien attention. On dit que le système de santé est gratis. J'ai des réserves quand on dit ça. De façon absolue, ce n'est pas vrai. Sur.mes impôts que je paie, il y en a 30 % qui payent la santé, même si je ne consomme pas. Alors, quand on me parle de gratuité, il faudrait peut-être y réfléchir à deux fois. (10 h 40)

La loi 198 voulait donc faire en sorte de diminuer ou d'encadrer davantage pour diminuer nos coûts. Alors, ce n'est pas une coupure absolue, comme la CSN semble vouloir le faire, et c'est repris par vous autres. Ça, c'est quand même désolant. Travaillez-vous pour la CSN ou si vous travaillez pour la population du Québec? Parce que vous avez les mêmes chiffres. C'est drôle, hein? Alors, il faudrait se poser la question.

Ceci étant dit, c'est que ce n'est pas une coupure radicale de 20 % et de 12 %. Ce n'est pas ça qui est marqué dans la loi 198. C'est des balises qu'on donne, puis c'est très, très, très clairement identifié que, pour la santé, l'éducation, il peut y avoir une modulation et on peut... Parce que, ce qui est visé, c'est la masse totale. Ce n'est pas les individus que l'on vise sur leur chèque de paie. Ce qu'on veut, c'est de maintenir les services. Ce qu'on a vu dans le passé, c'est simple. Aussitôt qu'on demandait des coupures — moi, je suis un gars de

région — quand il y avait des commandes du Trésor dans chacun des ministères, on disait: II faut que vous dégraissiez. C'était quoi, le dégraissage? On coupait le fonctionnaire à Mont-Joli, on en coupait un autre à Amqui ou à Sainte-Anne-des-Monts. C'est ça qui arrivait. Pendant ce temps, eh bien, les tours d'ivoire restaient à Québec.

Ce qu'on veut, c'est de maintenir les services à la population, le service à la clientèle et d'être capable de diminuer nos coûts, parce qu'on est capable. Il y a de l'espace. Si les Québécois ont été capables de se construire cet appareil politique, cet appareil gouvernemental au fil des ans, on est capable encore d'être créatifs, d'êtres imaginatifs, de faire des choses et de les faire mieux. C'est ça qu'on doit faire, et c'est ça l'esprit de la loi 198. Ce n'est surtout pas l'abolition arbitraire, bête et méchante de 20 000 emplois, comme vous le laissez supposer, comme la CSN le laisse supposer. Ce n'est pas vrai. C'est faux. C'est carrément faux. Et on le verra à la lumière des décisions gouvernementales à venir que...

Le Président (M. Poulin): En conclusion.

M. Paradis (Matapédia): ...ce que vous véhiculez, ou la peur que vous véhiculez auprès des individus qui dispensent des services et de ceux qui les reçoivent, que vous avez peut-être un petit peu dénaturé la vérité. Et on verra ce que la population dira.

Le Président (M. Poulin): Merci, M. le député. Maintenant, au député de l'Opposition, de Rouyn-Noranda—Témiscamingue.

M. Rémy Trudel

M. Trudel: Merci, M. le Président. Je vais inviter aussi le ministre, si possible, à revenir sur quelques questions de mon collègue, sur lesquelles il faut avoir des réponses, sur le sida en particulier. À cet égard-là, la directive, le communiqué no 6, sur l'abolition de la circulaire «malades sur pied», est nuageux; il est nuageux, le moins que l'on puisse dire. Le ministre disait tantôt qu'on ne l'a pas abolie, qu'on a remplacé ça par autre chose. Il faudrait savoir l'autre chose. Il me semble que, dans le titre, si je me souviens bien, c'était: La circulaire «malades sur pied» est abolie. Il me semble que c'était ça le terme, «abolie».

M. le Président, j'aimerais aussi — donc, en invitant le ministre à aborder cette question-là au retour — noter qu'il faut en dire davantage à la population du Québec en matière d'intégralité de notre régime de santé et de services sociaux, dans le sens suivant. L'abolition de la circulaire «malades sur pied», par exemple, complétée d'un décret sur la révision du remboursement par la RAMQ des orthèses et prothèses, ça, ça veut dire 22 000 000 $ de plus qu'on va chercher; 19 000 000 $ pour «malades sur pied» et 3 500 000 $ pour orthèses et prothèses. Il faut que ça se paie, ça, en quelque part. Ce n'est pas parce qu'on fait disparaître ça de la circulaire «malades sur pied» ou qu'on fait sortir ça par décret que les dépenses disparaissent. il faut que quelqu'un continue de les payer. l'orthèse dont j'ai besoin, la prothèse dont j'ai besoin, ça prend quelqu'un pour la payer. je vais la payer de ma poche. j'aimerais que le ministre revienne sur cet élément-là.

Revenons aussi maintenant, fondamentalement, sur l'application de la loi 198 dans le réseau de la santé et des services sociaux. On commence à être un très grand groupe à faire les mêmes erreurs, paraît-il, et à ne pas lire la loi 198. Ce dont on se rend tous compte, en tout cas, c'est qu'il y avait une écriture alambiquée de la loi 198 et que, maintenant, on essaie d'expliquer qu'on avait, en fait, utilisé la théorie Charlottetown, c'est-à-dire: on va voter, comme on a fait sur le plan constitutionnel, une loi qui, en apparence, est massue, en avant les braves! mais, quand on arrive: Sauvons-nous, les voilà! C'est ça, le comportement de ce gouvernement-là. En avant les braves! Sauvons-nous, les voilà! On va voter le rapport Allaire, 22 juridictions sur le plan constitutionnel. On veut que le Québec ait la totalité de ces responsabilités en matière de gestion de son avenir, mais, quand on arrive à la table, on dit: Bien, excusez-nous, c'était comme un bluff. Attention, on va reculer, on va s'écraser. On a l'impression que, sur 198, c'est exactement cela qui se passe. qu'est-ce que c'est que cette écriture? et que le ministre nous l'explique. on dit dans la loi 198: une réduction de 12 % de toutes les catégories de personnel et de 20 % chez les cadres dans les périodes qui sont reconnues, c'est-à-dire: pour les cadres, avant le 1er avril 1996 et le 1er avril 1998 pour les autres catégories de personnel. et on dit que tout ça doit se faire, se réaliser dans le secteur de la santé et de l'éducation, en particulier, en tenant compte des objectifs fixés pour le secteur public et de ce qui est indiqué à l'alinéa 3 de l'article 1 de la loi 198.

Qu'est-ce qu'il dit, 198, au troisième alinéa de l'article 1? Il dit que ça s'applique à toutes les catégories d'organismes publics et parapublics dont les conventions collectives sont autorisées par l'État. On ne voudrait pas faire dire à la loi plus que ce qu'elle ne dit, mais, quand la régie de Montréal-Centre, quand les régies régionales confirment cette peur de 21 500 postes dans le réseau de la santé, comment ça va s'appliquer? Va-t-il y avoir modulation régionale? Est-ce qu'on va appliquer le même régime à l'Abitibi-Témiscamingue, à l'Outaouais, au Bas-Saint-Laurent—Gaspésie, aux Îles-de-la-Madeleine par rapport à Québec et à Montréal? Et Québec et Montréal vont-elles devoir payer pour les autres régions? Comment ça va s'appliquer? Le ministre va-t-il répondre à la demande des services de première ligne des CLSC? Est-ce que le ministre considère la demande de notre réseau de première ligne d'être exempté de la loi 198? Le ministre a-t-il reçu aussi, dans la foulée de la remise en question de notre régime de santé et de services sociaux, les commandes et les ordres de remettre, de dessiner le réseau d'une nouvelle façon...

Le Président (M. Poulin): En conclusion, s'il vous plaît.

M. Trudel: ...et de faire en sorte que, maintenant, le financement, non pas la gratuité mais le financement public de ce régime va passer par la tarification? Est-ce que c'est clair? Est-ce que c'est le gouvernement? Est-ce que le comité de pilotage politique a effectivement émis la directive que, maintenant, on va passer par la tarification dans le domaine de la santé et des services sociaux? Et aussi, à travers la loi 198, est-ce qu'on va comprimer tellement qu'on risqué un démantèlement de notre réseau de santé et de services sociaux?

M. le ministre, il nous faut avoir ces réponses pour conserver dans notre réseau de santé et de services sociaux le degré de motivation nécessaire chez nos cadres et nos personnels. Et va-t-il y avoir, en terminant, d'autres coupures dans ce réseau, comme, par exemple, dans les services optométriques, dentaires, etc.?

Le Président (M. Poulin): M. le député, je voudrais juste vous rappeler qu'il faut respecter le temps, je crois, parce qu'à la fin je serai obligé de couper dans les interventions des deux dernières périodes de 10 minutes. Donc, M. le ministre.

M. Marc-Yvan Côté

M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. le Président. Évidemment, j'aimerais autant que possible qu'on puisse, dans la mesure où c'est possible... Ce n'est pas à moi de dicter à l'Opposition ses questions, mais, lorsqu'on m'arrive, à la fois, dans la même question, avec circulaire «malades sur pied», avec la loi 198, avec l'optométrie, je pense que ça ne donne pas grand temps, M. le Président, si on veut tenter de donner des réponses. (10 h 50)

J'oublie, pour le moment, la circulaire «malades sur pied»; on y reviendra, mais pour évoquer davantage la loi 198. Personne, mais personne, jusqu'à présent, dans le réseau de la Santé et des Services sociaux, n'est autorisé, d'aucune manière, à annoncer des choses que seul le ministre de la Santé et des Services sociaux pourra annoncer quant à l'application de la loi 198, et, au préalable, il faut travailler pour dire aux gens exactement ce que ce sera. Et ce que ce sera sera déposé au Trésor, tel que le stipule la loi, pour le 15 décembre, soit dans quelques semaines. Que Pierre, Jean, Jacques, Arthur, de quelque région qu'il soit à travers le Québec, circule avec des chiffres, que ce soit Robinson de la FAS, que soit Trudel de l'Opposition ou qui que soit, Perron dans Duplessis, qu'on aille annoncer aux citoyens partout à travers le Québec une application bête et méchante de la loi 198 ne reflète d'aucune manière la réalité telle que perçue par nous au niveau du ministère de la Santé et des Services sociaux.

Je veux bien qu'on fasse de la politique, mais j'imagine que votre objectif n'est pas de la faire sur le dos des syndiqués non plus. Que vous vouliez défendre les syndiqués à travers le Québec, qui sont aujourd'hui inquiets, compte tenu de l'ampleur de ce qu'on leur annonce, c'est normal, mais qu'on véhicule tous azimuts toute une série d'informations qui sont fausses, on ne mérite pas, d'aucune manière, d'être retenu comme chef. Je m'attends davantage à ça de Robinson de la FAS d'aller partout à travers le Québec, et de tenter de faire une règle simple, et d'appliquer ça dans chaque établissement partout à travers le réseau. Je ne lui demande pas de comprendre ce qu'on est après faire. Qu'il le fasse sur le plan syndical, en termes de comportement syndical, on a été habitué à ça dans le passé, mais qu'il y ait un comportement comme celui-là de la part de l'Opposition, qui prétend demain être au pouvoir, m'inquiète grandement, surtout compte tenu de son propre passé.

La réalité est la suivante. La loi 198, et mes collègues députés le savent, je suis intervenu à plusieurs reprises dans l'échange pour ne pas que ça devienne d'application bête et méchante, mais qu'elle tienne compte de réalités de réseaux comme ceux de l'éducation et comme la santé et services sociaux, où on est dans des services à la population, où ils ont un coeur de système qu'il nous faut à tout prix protéger. Que le budget du ministère soit accaparé à 77 % par les salaires et tout ce qui entoure les salaires, si on veut tenter de redresser les finances publiques, il faut, bien sûr, discuter de tout cela. On a fait, au cours des dernières années, du chemin avec les syndicats. Il y a des syndicats qui ont accepté les gels, où ça a été des démarches responsables face à la situation, et je pense qu'il faut rendre hommage à ces syndicats-là. Hier, ou il y a deux jours, on signait avec la FTQ et la CEQ des ententes qui peuvent nous amener dans la voie d'économie au niveau de chacun des réseaux. C'est ça la voie la plus raisonnable.

Chez nous, la loi 198, elle est claire, et, dans ce sens-là, nos échanges avec le Trésor et avec les différents intervenants ont toujours été clairs. Et nous avons entre les mains une lettre du secrétaire du Conseil du trésor, M. Dicaire, du mois de mars, qui est claire, qui dit: Pour le personnel qui dispense des services de première ligne, il faudra tenir compte de la nécessité de préserver la qualité des services aux citoyens. C'est dans cet esprit-là qu'il faut appliquer la loi 198, en se disant que c'est un problème financier que nous avons. Mais, pour régler notre problème financier, il faut examiner ce qu'on peut faire sur le plan du personnel. Et, dans ce sens-là, ça se traduit, pour ceux qui veulent avoir une application méchante, par un nombre de postes équivalents à temps plein, alors que ce que nous cherchons, c'est une masse financière qui nous permettra d'aller vers l'équilibre des comptes publics. Comment est-ce que ça se traduit? Écoutez, moi, je suis tout disposé à échanger avec vous ce matin sur certaines pistes qui peuvent aboutir, mais en convenant que, ensemble, ce sont des pistes que nous examinons.

Le Président (M. Poulin): Merci, M. le ministre. M. le député de Nelligan.

M. Russell Williams

M. Williams: Merci, M. le Président. Le ministre de la Santé et des Services sociaux a dit qu'on veut avoir un débat civilisé, mais plus j'écoute, moins je suis intéressé. Je suis tellement frappé par le manque de contenu, ce matin. J'ai annulé plusieurs rencontres dans mon comté, qui étaient avec des citoyens impliqués dans le réseau de la santé, pour discuter de notre question. Aujourd'hui, on continue le théâtre devant les caméras, des questions basées sur des demi-vérités.

Pour moi, le contenu est tellement faible. Il avance encore une guerre de peur. Malgré les premières remarques de l'Opposition, pour moi, il y a une guerre sur la réputation du ministre et du ministère. Je pense qu'il a tellement mal demandé les questions. S'il veut discuter de 198, qu'il mette ça dans l'interpellation. S'il veut avoir une consultation privilégiée sur le programme «malades sur pied», tel que déjà annoncé par le ministre, que nous allons discuter en préparation pour le mettre en vigueur en avril 1994, qu'il appelle l'interpellation comme ça. Mais, s'il veut discuter du système budgétaire de notre système de santé, et j'espère des services sociaux aussi, je pense qu'on peut retourner dans les faits. j'ai eu le privilège, m. le président, quelquefois, de représenter le québec dans les rencontres interprovinciales. souvent, le québec est cité en exemple. il comprend les enjeux, il comprend les façons de contourner les coûts, mais toujours en respectant le principe de base de l'accessibilité pour les citoyens. les démagogies que nous avons entendues depuis deux semaines, et ce matin aussi, ça n'avance pas le dossier. de donner l'image au peuple québécois que tout est gratuit, c'est faux. vous le savez, ça, vous savez mieux que ça. on doit mettre les faits sur la table. juste maintenant, environ, des chiffres très généraux, dans le système de santé, déjà, on paie 23 % de poches privées. c'est 77 % qui vient du secteur public. le secteur public paie beaucoup plus que dans les autres provinces. avec ça, de questionner, d'avancer quelques autres modèles, je pense que ce n'est pas nécessairement une abolition de notre système, mais que c'est un ajustement de notre système.

Je pense aussi qu'on doit rappeler à la population québécoise que nous avons une histoire dont on peut être fier, particulièrement pendant les derniers quatre ans. C'est dommage, c'est la première interpellation sur ça depuis quatre ans, mais nous avons un record assez, je pense, exceptionnel. Quand nous avons voulu avancer des idées, nous avons eu des commissions parlementaires. Vous avez participé. Nous avons entré dans des consultations avec les associations. Et, oui, pour les mesures d'avril 1994, nous avons dit que nous allons continuer de faire des consultations. On n'arrive pas avec les choses à la toute dernière minute.

Nous avons aussi respecté la voix du peuple qué- bécois de faire plus dans les régions. Nous avons passé une loi qui appuie la régionalisation. Mais, M. le Président, nous n'avons jamais dit, dans toutes les mesures que nous avons avancées, que nous allons frapper les défavorisés. Nous n'avons jamais dit, dans toutes les mesures, que nous allons charger des frais à des personnes qui ne sont pas capables de payer. Je pense qu'avancer cette idée devant la population québécoise, c'est faux et c'est dégueulasse. Je pense que c'est une vieille stratégie politique, que, si tu répètes une fausseté assez souvent, les personnes commencent à croire ça.

Au Canada, nous avons un système protégé par la loi C-3. On doit continuer à travailler avec nos partenaires sur ça. Les annonces que nous avons annoncées... Et nous allons continuer de discuter avec la population québécoise. Je respecte ces affaires-là.

J'ai entendu toutes les mêmes choses que quand nous avons annoncé les 2 $ pour le système des médicaments. Mais, selon nos chiffres, maintenant, ça marche très bien. Ça aide nos dépenses, mais aussi ça encourage la participation de toute la population.

M. le Président, je pense que c'est plus une question, ici, de qui mène. Est-ce que c'est les syndicats? Est-ce que c'est les directeurs généraux des régies régionales? Est-ce que c'est les directeurs généraux des hôpitaux? C'est qui qui mène? Je pense que la population a décidé. C'est le gouvernement libéral qui mène, c'est le ministre de la Santé et des Services sociaux. On doit prendre des décisions qui respectent tous les enjeux et qui réconcilient le non-réconciliable.

Le Président (M. Poulin): En conclusion, s'il vous plaît.

M. Williams: M. le Président, je vais continuer mes remarques un peu plus tard. Merci beaucoup. (11 heures)

Le Président (M. Poulin): Merci, M. le député. Maintenant, M. le député de Rouyn-Noranda— Témiscamingue.

M. Rémy Trudel

M. Trudel: Si ce n'est pas le directeur général de l'Association des optométristes qui dirige le ministère de la Santé, on se demande c'est qui. Ce qu'on sait, c'est qu'on a de la misère à trouver qui dirige ce gouvernement-là. Ça, on a bien de la misère à trouver ça par les temps qui courent. C'est qui qui conduit le gouvernement? Qui est aux guides, M. le député de Nelligan? Si on pose ces questions ce matin, c'est parce que le peuple est inquiet. Les gens veulent avoir des réponses. C'est assez évident, les soubresauts sont suffisamment grands pour qu'on pose des questions.

M. le Président, j'aimerais aborder, avec le ministre, la question du «Défi qualité-performance» — donc, compressions de 1 000 000 000 $ dans le réseau de la santé sur trois ans, nous dit-on, avec une petite poche de 250 000 000 $ qu'on se crée ainsi pour

réinjecter dans le réseau — un document qui a été distribué, qui a été... comme je l'ai dit à l'époque de la réforme, on a passé par le système de 1-17-400. On a pris les décisions. On a distribué ça aux 17 contrôleurs régionaux ou régies régionales pour que les 400 directeurs généraux d'établissement puissent l'imposer dans le réseau.

Il y a, dans ce document qui s'appelle «Défi qualité-performance», donc, toute l'articulation de ce que, nous, en tout cas de notre côté, nous avions dit en février 1992. On avait dit, à l'époque, que nos chiffres n'étaient pas très, très bons. Tel que le confirme Le Soleil de ce matin — c'est exactement nos chiffres du 22 février 1992 — il va y avoir, au cours des quatre prochaines années, enfin si on inclut 1992-1993, des compressions de 5 561 000 000 $ dans le réseau, au total, accumulées sur cinq ans. C'est exactement ces chiffres-là. Ça ne marchait pas à l'époque, mais, aujourd'hui, on s'en rend bien compte quand on regarde les revenus, les paramètres, les hypothèses.

Ce qu'il faut demander au ministre, aujourd'hui, c'est d'expliquer un certain nombre d'affirmations inquiétantes dans le document «Défi qualité-performance». D'abord, le ministère impose son dictionnaire. Au début, à la page 5 de ce document-là, pour dire que, dans toute cette opération, ça va marcher sous le principe de la transparence, la transparence étant de jouer cartes sur table, communiquer une information claire et complète, de manière franche et directe, faire connaître toutes les règles du jeu. Ce n'est pas tout à fait ce dont les acteurs ont l'impression au cours des 15 derniers jours. On a l'impression qu'il y a plusieurs personnes qui tiennent le jeu de cartes, que les véritables meneurs du jeu distribuent des cartes autrement ou ont envie de les distribuer autrement.

Autre question supplémentaire, et ça m'apparaît fondamental, il faut que le ministre de la Santé et des Services sociaux nous dise ce qu'il va laisser comme recommandations. Même si les choix s'opéreront en 1994, il faut qu'il dise, lui, ce qu'il va laisser sur la table. Il dit, à la page 10 de ce document: «La partie des économies à réaliser via une tarification et une révision du panier de services assurés, par voie de désassurance éventuelle de certains services non essentiels, ne relève pas de la responsabilité du réseau». Le ministre peut-il nous dire qui et quand on saura quels sont les services de santé qui sont non essentiels au Québec? Est-ce que le dictionnaire Côté va s'appliquer dans ce cas? Est-ce que la transparence va fonctionner?

Le ministre doit nous dire — question suivante — comment il faut interpréter, à la page 26, l'objectif de réviser le panier de services. Le ministre a-t-il eu la commande du comité de pilotage de M. Johnson? A-t-il eu l'aval du comité politique présidé par M. Ryan pour remettre en cause les services actuellement compris dans le panier de services? Détient-il un mandat du gouvernement ou s'il a pris l'initiative d'inclure une réduction de la couverture des services assurés dans notre régime d'assurance-maladie, actuellement? Est-ce que les ci- toyens, M. le ministre — une réforme axée sur le citoyen — en conclusion, va être finalement concerné par les choix cruciaux qui sont faits? Quand on a l'impression que notre système s'égrène, est-ce que le citoyen va en être, dans ce défi performance? On ne le voit pas beaucoup, sinon qu'on ne le voit pas du tout.

Le Président (M. Poulin): Merci, M. le député. M. le ministre.

M. Marc-Yvan Côté

M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. le Président. Très bonne question. Très, très bonne question. Ça m'étonne toujours un peu lorsque le député de Rouyn-Noranda—Témiscamingue évoque la transparence. On ne peut pas lui reprocher, à lui, d'être transparent. Évidemment, comme c'est moi qui suis dans la situation de décision, c'est à moi de l'être.

M. le Président, on m'accuse de ne pas être transparent alors que le document a été discuté avec les partenaires privilégiés qu'on a déterminés ensemble dans la loi, que sont les régies régionales, au cours de cinq réunions. Par la suite, entendus avec les régies régionales, nous avons rencontré les partenaires patronaux pour leur expliquer ce vers quoi on se dirigeait dans la mesure où il y avait entente, et il y a eu discussion de fond. On a convenu ensemble que je prenais le document, que je signais une lettre à chaque président de conseil d'administration d'établissement à qui j'ai expédié le document avant même de prendre des décisions quant aux moyens pour arriver aux quanta qui nous sont fixés. On ne reviendra pas sur les quanta, ils sont là. Ils sont décidés. Si vous n'êtes pas satisfait des quanta, vous faites comme certains ministres dans le passé, vous démissionnez et vous avez, sur la place publique, toutes les solutions, ce qui n'est pas le cas quand on est en dedans. Ce n'est pas mon style, à moi.

Donc, on est dans une situation où, effectivement, j'ai accepté, étant responsable, de travailler avec mon équipe, avec mes partenaires sur le terrain pour identifier les meilleurs moyens. Et on a convenu qu'il y avait un quantum financier, au niveau des compressions, qui était de 500 000 000 $ sur trois ans; qu'il y avait un objectif de tarification qui avait été fixé et qui était central, suite à un comité qui analysait l'ensemble de l'universalité de la gratuité, présidé par M. Ryan, et dont le rapport sera remis au moment opportun, après les fêtes, quant aux décisions à prendre. Mais la compression de 500 000 000 $, dans une discussion avec les régies régionales, on a convaincu... on s'est convaincu ensemble que nous avions besoin de répondre à des besoins nouveaux et qu'on ajoutait 250 000 000 $ pour les 750 000 000 $ de compression. Donc, 250 000 000 $ qui retourneraient. En réalité, c'est 500 000 000 $ de compression nette, au niveau du réseau, au cours des trois prochaines années; 500 000 000 $ sur un budget de 13 000 000 000 $ annuel, donc, sur trois ans, sur 39 000 000 000 $. C'est l'effort qui est demandé.

À cela, bien sûr, il faut comprendre que 198 était inclus en termes d'effort à faire.

Cartes sur table? Oui, c'est ce que nous avons fait. Transparence? Oui, c'est ce que nous avons fait en mettant sur la table un défi performance... Non, un défi qualité-performance, parce que tout ce que j'ai entendu depuis quatre ans, de l'AHQ à aller à la Fédération des CLSC, des individus, de l'Opposition, de citoyens qui nous téléphonent, c'était: II y a de la place, il y a des abus, il y a des gestes posés, aussi, par des dispensateurs de services, qu'il faut interpeller. Donc, il faut travailler dans ce sens-là.

Qu'est-ce qu'on s'est dit? On s'est dit: II ne faut, mais d'aucune manière, toucher à l'essentiel du système qui est le coeur des soins. Examinons en périphérie, donc dans les services d'hôtellerie. C'est quoi, l'hôtellerie? C'est les buanderies, c'est l'entretien ménager, c'est les cafétérias. Regardons l'administratif. Et on s'est dit: Regardons aussi au niveau des laboratoires. Moi, je veux bien que des gens me servent, comme l'AHQ et comme M. Duplantie l'a fait hier, des exemples. Chirurgie d'un jour, ce qui est supposé être miraculeux, je n'ai pas encore vu un établissement venir me suggérer, à chaque occasion qu'on dirait oui, le nombre de lits qui fermeraient, de courte durée. Puisque, si c'est si efficace que ça, ça doit avoir un impact sur le nombre de lits qu'il faut fermer. Et, dans ce sens-là, moi, je suis ouvert. Et, s'il y a un centre hospitalier, demain matin, qui se présente, en termes d'économie puis d'efficacité, qui vient me dire: On est prêt à faire de la chirurgie d'un jour, c'est payant, puis c'est dirigé vers le citoyen, puis rapidité de service, il accompagnera ça du nombre de lits de courte durée qu'il ferme, et je pense qu'on va faire un «deal» assez vite, assez vite merci. (11 h 10)

Alors quand... Oui, en conclusion, M. le Président. Lorsqu'on dit que le citoyen n'est pas impliqué, le citoyen, il est impliqué, mais il est aussi interpellé comme citoyen payeur, puisqu'il y a le citoyen consommateur, il y a le citoyen décideur, mais il est aussi interpellé comme citoyen payeur parce qu'il a dit au gouvernement: Je suis tanné de payer des taxes, tanné de payer des impôts et des déficits que je vais transmettre à mes enfants. Et c'est dans ce sens-là que nous devons tenter de rééquilibrer les choses. Démarche très ouverte, très, très ouverte, où ça circule partout. Et on va continuer dans ce sens-là, soyez-en sûrs. C'est l'esprit de mon équipe et c'est mon esprit aussi.

Le Président (M. Poulin): Merci. M. le député de Matapédia.

M. Henri Paradis

M. Paradis (Matapédia): Oui. Merci, M. le Président. J'aimerais revenir à la loi 198. Si on a dit beaucoup de faussetés, la vérité a aussi ses droits, puis on va la lire, la loi 198.

À l'article 4, M. le Président, il est clairement indiqué, clairement indiqué que les ministres de la Santé, de l'Éducation, de l'Enseignement supérieur doivent, dans leur secteur respectif, «soumettre au Conseil du trésor, avant le 15 décembre de chaque année, un plan tenant compte des objectifs de réduction des effectifs». Ça ne veut pas dire de couper, ça veut dire d'en tenir compte. Alors, si on peut soumettre au Conseil du trésor un plan de réduction sans toucher aux emplois, qu'on est capable de le faire, ça veut dire qu'on garde nos emplois. «C'est-u» clair, ça, là? Bon.

Puis, après ça, à l'article... Allons plus loin. À l'article 7, c'est clairement dit que le Conseil du trésor peut accepter ce genre de chose là. Le Conseil du trésor peut prendre une décision pour exempter, dans la mesure qu'il détermine, bon, l'application de tout ou partie de la présente section. C'est clair, ça. Bon. Arrêtez donc de dire qu'il y a 21 000 emplois qui vont être perdus à cause de la 198. C'est faux. J'espère que c'est clair. C'est faux. Puis, posez-vous la question: Pour qui travaillez-vous? La CSN ou pour la population du Québec?

Et, puisqu'on parle des coûts de la santé, j'aimerais rappeler aux gens qui nous écoutent aujourd'hui ce qui est arrivé depuis 1986. J'ai ici le livre des crédits de 1986 et ceux pour l'année en cours, 1993-1994. Et, si on regarde les crédits qui sont dévolus à la santé et aux services sociaux en 1986, c'étaient 6 200 000 000 $ et, aujourd'hui, on est à 9 900 000 000 $. Et, à ça, il faut ajouter le budget de la RAMQ qui paie les médecins, les pharmaciens, les optométristes, les dentistes, et c'est 3 000 000 000 $. Alors, quand on dit que le gouvernement coupe, fait des coupures, il faut mettre des bémols. C'est parce que les budgets ont augmenté de plus de 50 %. C'est ça que ça veut dire. De 6 000 000 000 $ à tout près de 10 000 000 000 $ en santé et services sociaux.

Prenons des exemples. Les CLSC sont passés de 380 000 000 $ à tout près de 700 000 000 $; le soutien aux organismes bénévoles, que soutenait encore récemment notre collègue de Rouyn-Noranda— Témiscamingue, qui est passé de 25 000 000 $ à 88 000 000 $, et, s'il y a des gens qu'il faut soutenir, c'est bien les organismes bénévoles. Il font un travail tout à fait exceptionnel dans notre réseau comme partenaires à plusieurs égards. Les centres hospitaliers sont passés de 3 800 000 000 $ à 6 000 000 000 $.

Alors, moi, je suis toujours étonné d'entendre que le gouvernement a coupé. Il a coupé, oui, parce qu'on a peut-être freiné l'augmentation des dépenses, mais, à coup sûr, on les a augmentées. C'est clair. Les chiffres sont là, ils le disent. Et ce qu'il ne faut pas oublier, ces chiffres-là ne disent pas non plus qu'on a investi plus de 1 000 000 000 $ en immobilisations. Toutes les régions du Québec, et notamment depuis les quatre dernières années... Depuis que le député de Charlesbourg est ministre de la Santé et des Services sociaux, on a vu que les régions sont dépoussiérées, on a vu que des centres hospitaliers, des services se sont ajoutés dans nos régions parce qu'on avait été négligés un petit peu dans le

passé. Et c'est tout à l'honneur du ministre actuel d'avoir permis aux régions, enfin, de pouvoir se doter d'immobilisations, de centres hospitaliers ou de centres d'accueil neufs pour mieux desservir les populations concernées.

Dans mon comté, j'en ai eu, puis j'en suis fier qu'on ait porté une attention particulière. C'est vrai aussi à Rimouski. Le centre de cancer qui a été annoncé, c'est 40 000 000 $. C'est exceptionnel que l'on puisse enfin doter une région d'un centre aussi important que la cancérologie.

Alors, M. le Président, remettons dans son contexte réellement ce que le gouvernement a fait et ce qu'on a pu réaliser au fil des ans, et c'est non négligeable. On peut parler de compressions ou de frein à nos dépenses en santé et services sociaux, mais il n'en demeure pas moins que le gouvernement a fait des pas tout à fait exceptionnels, et on a même négligé, jusqu'à un certain point, certains autres ministères pour permettre à la Santé et aux Services sociaux, au ministre de la Santé et des Services sociaux, au ministère, de pouvoir desservir et donner des services à la population. Je reviendrai tout à l'heure, peut-être, sur un sujet qui me... dont «malades sur pied». On en reparlera un petit peu tout à l'heure.

Le Président (M. Poulin): Merci, M. le député de Matapédia. M. le député de Portneuf.

M. Roger Bertrand

M. Bertrand: Merci, M. le Président. Prenant appui sur ce que vient de dire le député de Nelligan en ce qui regarde ce qu'il qualifie d'un manque de contenu des interventions, j'aimerais qu'il soit particulièrement attentif à la réalité suivante: nous sommes devant un gouvernement et un ministre qui semblent fonctionner, je dirais, à deux vitesses; d'une part, avec un processus très intéressant, je pense, dans l'ensemble, en se donnant une perspective de long terme, en appelant tous les experts, toutes les forces vives d'un réseau à réfléchir sur la façon de faire un virage et, en même temps, posant un certain nombre de gestes, en cours de route, que je ne qualifierais pas d'irréfléchis, mais qui relèvent, je pense, de l'improvisation. Et cela me surprend du ministre, qui nous avait habitués, pendant toute cette discussion sur la réforme, à des choses beaucoup plus mûries.

Et il en est ainsi, par exemple, de l'abolition de la directive. Ça a des effets tels et tellement imprévus que le ministre doit lui-même revenir sur ses pas. Et il faut comprendre, et ceci, à l'adresse du député de Nelligan, M. le Président, si vous le permettez, qu'il s'agit là, que ce qu'il faut voir là, c'est bien vrai qu'il ne s'agit pas de services qui sont, je dirais, dans le panier. Le ministre a tout à fait raison, mais c'est le cheval de Troie aux portes de la cité. On a parlé, il y a quelques années, d'un 2 $. On parle d'un 20 $. On parlera de quoi, dans quelques années, et à l'intérieur même du panier? C'est ça qui est dangereux, et ce sont les précédents qui font en sorte qu'on s'habitue à l'existence de ce genre de chose là, indépendamment de ses effets, et on finira par introduire ces dispositions-là dans d'autres cas qui, là, à ce moment-là, seront directement à l'intérieur du panier de services.

Un autre exemple de ces mesures plutôt improvisées concerne justement l'entente ou le projet d'entente avec les médecins spécialistes et le ministre, un autre exemple de ce qui apparaît pour le moins incongru. Alors, de quoi est-il question? Donc, d'une entente négociée entre le ministre et les spécialistes qui prévoit des revenus financiers de 25 % aux médecins quand des économies atteindront un certain montant. Et cette mesure-là, dès le moment où elle a été mise, je veux dire, sur la table, a rapidement, encore une fois, été commentée par, pas des quidams, là, mais par des gens qui sont quand même des observateurs très avertis du système. Entre autres, je réfère ici à ce que Jean-Claude Deschênes disait récemment, il y a quelques jours: C'est le genre de système qui peut avoir des effets pervers. On met directement en compétition la conscience professionnelle du médecin et son intérêt économique. On parle de gratifier des médecins à même les fonds d'un système extrêmement serré pour des compressions additionnelles qu'ils réussiraient à lui assener. En fait, le résultat de la mesure pourrait se solder par une récompense en échange de moins de services. On se trouve à récompenser des choses non faites, à développer un intérêt à ne pas faire et à ne pas agir. Donc, sur le fond même, ça m'apparaît être une initiative que j'oserais qualifier d'improvisée, dont les effets seront éventuellement catastrophiques, sur le fond même.

Maintenant, allons-y sur la mécanique. Si j'employais une image: Est-ce qu'on va demander au médecin, désormais, d'avoir deux calepins, un calepin pour les services qu'il dessert et qu'il dispense et un autre pour ceux qu'il n'aura pas desservis? Et la rémunération totale sera l'addition de ce qu'on aura tarifé et dispensé comme services, plus un pourcentage de ce qu'on n'aura pas donné? Je veux dire, c'est un système complètement alambiqué, qui n'a aucun sens et qui, encore une fois, témoigne d'une certaine incongruité ou d'une certaine improvisation. Alors, je demande au ministre: Entend-il là-dessus aussi faire marche arrière? Est-ce qu'il entend, je dirais, revenir à un processus beaucoup plus sérieux et systématique de façon à pouvoir poser des gestes, effectivement, qui puissent permettre au réseau d'atteindre un meilleur équilibre, éventuellement dégager des marges de manoeuvre, mais certainement pas au détriment de nos concitoyens et de nos concitoyennes? (11 h 20)

Le Président (M. Poulin): Merci, M. le député de Portneuf. M. le député de Charlesbourg... ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Marc-Yvan Côté

M. Côté (Charlesbourg): Encore. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Poulin): Et j'en suis très heureux, pour ma part.

M. Côté (Charlesbourg): Ah! comme voisin, M. le Président, je ne peux pas demander mieux.

Bon. Très bonne question. Je remercie d'abord pour le compliment. Je pense que ça s'inscrivait dans la continuité de ce que nous avons fait, de ce que Rochon a initié, la commission dans laquelle vous étiez à l'époque l'un des rouages très importants, et je pense qu'à ce niveau-là on a fait un cheminement extraordinaire depuis quatre ans, et j'en suis très heureux. Première observation.

Deuxième, donc, pour revenir à la partie plus critique de l'intervention, votre crainte est que le cheval de Troie soit aux portes. Il est aux portes depuis 1981, concernant la circulaire «malades sur pied», puisque le principe des 2 $ est allé avec la circulaire en 1981. Donc, il est toujours là. Il s'agit de savoir s'il prend de la proportion ou pas, si je comprends votre logique, mais, si j'admets que le cheval peut grossir, vous admettez en même temps qu'il existait même en 1981. Ce n'est pas votre responsabilité, vous n'étiez pas là à ce moment-là.

Mais, sui le sujet plus précis abordé au niveau de la rémunération des médecins, je suis un petit peu étonné. Évidemment, dans ce genre d'échanges là, on se prépare toujours un petit peu, et on examine qui peut être en face de nous, et il est bon de retourner sur ce qu'on a dit, chacun, dans le passé. Et, lorsqu'il y a eu la commission parlementaire, il y a deux ans — admettons que c'était dans une autre fonction — où on échangeait très librement avec les régies régionales, le président d'alors, de la Conférence, qui était M. Fortin, nous disait, et je cite, le 12 février 1992: D'ici à ce que les mesures à plus long terme portent, nous recommandons le maintien de l'IPC des coûts hospitaliers et médicaux, tout en permettant une certaine croissance de la rémunération des médecins à même des économies qu'ils pourraient certes générer par des ajustements dans leur pratique.

Et, dans la même foulée, on continuait, et vous preniez la parole alors, et vous nous avez instruit, à ce moment-là, et vous nous disiez: Là-dessus, les médecins réagissent ou agissent de façon tout à fait rationnelle et économique — ce qui est vrai; ils ne sont pas pires ni meilleurs que les autres. En fonction des incitatifs qui sont présents, ils se comportent de la façon qu'on voit dans le moment. Il suffit de jouer sur ces incitatifs-là pour que, structurellement, à moyen terme, on puisse en retirer des bénéfices.

On s'est donc inspiré de tout ça, d'un vécu assez extraordinaire, et on a par conséquent échangé avec les médecins dans cette négociation, et on a conclu une entente qui n'est pas totalement finalisée et acceptée par le Trésor et qui a été la première qui ait été négociée suite à l'annonce de mesures par mon collègue, M. Johnson. Et, ce qui est assez étonnant — vous n'êtes pas le seul à tomber dans ce panneau de l'interprétation — hier, hier, dans un grand journal, un grand quotidien, qui, à l'occasion, doit quêter aussi pour rester en vie, même sujet. On voit un titre: «Entente "historique" Québec-CEQ-FTQ», un article de Michel Venne, le point de vue de quelqu'un qui est à Québec et qui suit de manière très près... Donc, une «entente historique» avec la CEQ, où on va partager: premier 1 % au gouvernement; deuxième 1 % aux employés et, par la suite, une entente où on conviendra comment ça va se faire.

Même journal, donc la même grande boss qui s'occupe de tout ça, de tout gérer ça, qui donne des leçons à tout le monde à travers le Québec, même journal, même jour, même page, M. le Président: «Un bakchich institutionnalisé?», lorsqu'elle parle de l'entente avec les médecins, qui est exactement dans le même esprit, et peut-être encore plus exigeante vis-à-vis des médecins que celle qu'on a signée avec la CEQ et la FTQ.

Bon. Évidemment, je comprends que le peuple qui lit ce genre d'articles, il ne comprend plus rien. Et qu'on fasse de l'interprétation de cette manière-là, que des médecins abuseraient de leur situation professionnelle pour couper des services essentiels à des individus qui sont en face d'eux pour espérer avoir une rémunération augmentée, mais dans quelle société est-ce qu'on vit? Est-ce que les médecins sont si mal formés que ça dans nos universités pour avoir une réaction comme celle-là, ou si, au contraire, eux-mêmes ne nous ont pas proposé des choses qui pourraient être intéressantes, sans aller dans la désassurance?

Le Président (M. Poulin): En conclusion.

M. Côté (Charlesbourg): Nous conviendrons, comme on a convenu de convenir avec la CEQ et la FTQ, qu'il me semble bien, là, qu'il y a des discours qu'on peut tenir sur la place publique, et je le comprends, à la fois pour vous comme pour nous, et tenter de faire des choses correctement sans que le citoyen ne soit pénalisé, mais qu'on puisse avoir des incitatifs qui nous permettent de progresser.

Le Président (M. Poulin): Merci, M. le ministre. M. le député de Nelligan.

M. Russell Williams

M. Williams: Merci, M. le Président. Je voudrais retourner peut-être au titre de cette interpellation sur la situation budgétaire de notre système de santé. Je voudrais peut-être essayer d'introduire quelques faits. Nous avons eu une question en Chambre, la semaine passée, par le député de Rouyn-Noranda—Témiscamingue, sur la question des médicaments.

Voilà, nous avons un exemple très intéressant du comportement de notre gouvernement. Nous avons donné les médicaments pour les personnes de l'assistance sociale et les personnes aînées. C'est un pro-

gramme qui a coûté 660 000 000 $ l'année passée, environ. Nous avons une augmentation de presque 15 % chaque année dans ce programme, mais nous avons décidé, avec quelques démarches, de faire des coupures, de contrôler les coûts, mais avec aucun impact sur les citoyens. Avec le système de PVG-PRA, nous avons sauvé plus que 55 000 000 $. Avec le nouveau système que nous avons tout juste établi, avec le prix le plus bas pour les médicaments pour les plus de 15 ans, nous allons sauver un autre montant de 30 000 000 $, avec le gel, aussi, des prix. Avec ça, nous avons établi un système qui peut garantir à la population québécoise l'accès au meilleur type de médicaments possible, mais un système accessible à tout le monde. Voilà, juste avec cet exemple-là, on peut sauver presque 100 000 000 $ sans toucher l'accessibilité. Je sais que c'est complexe, des dossiers comme ça, mais on peut trouver les solutions sans avoir de démagogie sur des questions comme celle-là.

Le même exemple dans les médicaments. Je retourne avec les 2 $. Dans le même budget, M. le Président, quand nous avons annoncé la participation de 2 $ par ordonnance, nous avons annoncé une participation de notre gouvernement d'environ 80 000 000 $ pour les centres d'hébergement pour nos aînés.

Pour les personnes qui ont besoin d'hébergement, je pense que le gouvernement a plus de responsabilité là que d'assurer qu'on paie les médicaments pour les personnes, malgré leur capacité de payer. Est-ce que c'est juste qu'une personne qui a un salaire, un revenu beaucoup plus élevé qu'un autre paie la même chose? Je pose la question, et on recherche les réponses à cette affaire-là.

Sur la question du programme des «malades sur pied», tel que questionné par les deux députés ici, je demande la question: Est-ce que c'est juste que, dans un hôpital, une personne paie 2 $ et, dans un autre hôpital, les personnes paient 8 $? On cherche l'équité. On cherche à donner un sens de même accessibilité à tout le monde. Est-ce que c'est juste, M. le député, qu'il y ait quelques maladies qui sont couvertes et les autres ne sont pas couvertes? On cherche l'équité. Est-ce que c'est juste, M. le Président, que, pour une raison administrative, des personnes ne sont pas assurées et d'autres sont assurées? Je pense que ma réponse est non. Je préfère demander un «partnership» à la population québécoise. Et j'ai entendu par les sondages que la population québécoise est prête à faire ça. Qu'on demande la participation. Nous n'allons jamais mettre une famille québécoise en faillite à cause de la nécessité de soins de santé. (11 h 30)

On doit protéger leur avenir dans ça, mais on peut demander la participation de tout le monde. Nous allons toujours assurer qu'il y ait un plafond à cette participation. Je sais que l'Opposition aime continuer — et j'ai commencé là — à faire une guerre de peur. Mais, si on demande une participation individuelle de tout le monde, je pense que la population québécoise est prête à payer pour ça, si on peut continuer, comme nous avons fait pendant 20 ans, à assurer que, au Québec, quand vous êtes malade, quand vos enfants sont malades, quand vos grands-parents sont malades, ils vont être protégés, ils vont avoir les "meilleurs services disponibles possible. Si ça prend des ajustements, si on peut annoncer ça pour 1994 et on peut continuer des discussions afin d'assurer que nous ayons le meilleur modèle possible, je pense que c'est exactement la façon dont on veut continuer.

M. le Président, en cinq minutes, c'est très difficile de faire avancer les dossiers. J'ai essayé d'utiliser mes dernières cinq minutes pour donner l'exemple dans la question des médicaments, qu'on peut assurer le contrôle budgétaire mais aussi le meilleur accès et le meilleur service disponible. Merci beaucoup.

Le Président (M. Poulin): Merci, M. le député de Nelligan. Maintenant, M. le député de Rouyn-Noranda—Témiscamingue.

M. Rémy Trudel

M. Trudel: Oui, c'est vrai, cinq minutes, ça passe rapidement, M. le Président. Je suis renversé d'entendre le député de Nelligan dire que toute cette directive visait à protéger les plus démunis, à aider les familles, lui qui a présidé un comité, qui a laissé 40 000 000 $ supplémentaires dans la poche des compagnies pharmaceutiques, des fabricants des médicaments d'origine. C'est lui qui a été l'intermédiaire, la courroie du transmission du lobby des entreprises et qui a fait dire au ministre de l'Industrie et du Commerce que le gouvernement cédait constamment à des lobbys. C'est carrément renversant.

Deuxième élément, M. le Président, toujours dans le thème de ce matin, il faut revenir un peu aussi sur cette entente avec les médecins spécialistes pour noter l'introduction d'un nouveau principe à travers ce projet de lettre d'entente avec les médecins spécialistes. Il faut se souvenir de la mécanique. Sauf erreur — et on me corrigera s'il y a lieu, et j'en serai content, si on peut me corriger là-dessus — c'est le ministère qui a proposé au printemps dernier aux médecins spécialistes de dire: On voudrait en couper pour 30 000 000 $ de services assurés. Dans une négociation, on répond: Combien ça coûte? On a demandé la collaboration des médecins spécialistes. Ce ne sont pas les médecins spécialistes qui ont demandé à avoir une prime à la coupure, c'est le ministère qui a voulu introduire une prime à la réduction de services publics. On vient d'adopter un nouveau principe au gouvernement du Québec. Le député de Vaudreuil impose un nouveau principe dans le domaine de la santé: La gratuité, le financement public universel est un frein à l'accessibilité, et maintenant il faut réduire et on va le faire en récompensant, en donnant de I'«incentive» pour ceux et celles qui veulent faire oeuvre avec nous.

M. le Président, on ne pouvait pas m'empêcher de faire cette remarque là-dessus, mais il faut que j'y aille à l'intérieur de ma période. Je veux aussi, comme situation financière à l'intérieur du réseau de la santé et des services sociaux — et comme je ne pense pas avoir beaucoup d'occasions de le faire d'ici à ce que le ministre quitte ses responsabilités... Il faut aborder un autre dossier qui a longuement occupé son temps pendant son mandat, celui de l'Hôtel-Dieu de Montréal, parce que, ça aussi, il y a des conséquences budgétaires. M. le Président, ce projet raté, ce projet avorté, ce projet de bâtir, de déménager l'Hôtel-Dieu du centre-ville de Montréal dans le secteur nord-est aura non seulement coûté beaucoup d'énergie, mais coûte beaucoup d'argent. Et, que l'on sache, on ne sait pas encore sur quel pied danser, et dans le nord-est de Montréal, et à l'Hôtel-Dieu, et chez tous les intervenants dans ce dossier. M. le ministre, pouvez-vous nous dire aujourd'hui, puisque vous avez dit que, avant les fêtes, nous aurions une nouvelle définitive, combien ça a coûté jusqu'à maintenant? Combien de millions? Est-il vrai de dire que, jusqu'à maintenant, les architectes ingénieurs, la firme chargée de faire les sondages de terrain sur un terrain qui n'existe pas, ça aura coûté 2 000 000 $ au trésor québécois? L'Hôtel-Dieu de Montréal au centre-ville pourra-t-il enfin pouvoir dire, d'ici quelques jours: Le ministre nous invite à développer un plan de relance, un plan de développement de l'établissement au centre-ville de Montréal? Le nord-est de Montréal peut-il enfin dire: Nous allons pouvoir compter sur un hôpital...

Le Président (M. Poulin): En conclusion.

M. Trudel: ...de première ligne de 150 à 200 lits? Toutes ces questions doivent trouver réponse. Ça fait partie de la problématique budgétaire du réseau de la santé et des services sociaux. M. le ministre, des réponses, s'il vous plaît!

Le Président (M. Poulin): Merci, M. le député. M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Marc-Yvan Côté

M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. le Président. Je vais le prendre dans l'ordre de l'intervention du député puisque c'est un pot-pourri de questions, puis je comprends que l'action-réaction suscite un certain nombre de questions additionnelles qu'on n'avait peut-être pas prévues.

Donc, mon ami le député de Nelligan a été, oui, un conseiller au cours des exercices, et il faut dire toute la vérité — lorsqu'on réclame la transparence, il faut donner toute la transparence — une première action du gouvernement au niveau du prix réel d'acquisition des médicaments, du prix de vente garanti des médicaments a procuré au gouvernement du Québec des économies de 60 000 000 $. La proposition qu'a faite, suite au budget de M. Levesque du printemps dernier, mon collègue de

Nelligan, en collaboration avec Finances, avec Santé et des Services sociaux et avec Industrie et Commerce, va procurer au gouvernement du Québec, à compter du 1er janvier 1994, des économies de 30 000 000 $ additionnelles pour l'année, ce qui fait 90 000 000 $, en faisant en sorte que l'industrie pharmaceutique, qui est aussi créatrice d'emplois... au moment où vous intervenez en Chambre pour toujours parler d'emplois, c'est un phénomène très important, très réel, une grappe industrielle extraordinaire, et on doit avoir cette vision-là aussi globale du gouvernement et des emplois créés, et c'est aussi ça que ça a procuré comme travail au niveau de mon collègue de Nelligan.

Au niveau des médecins, il y a une lettre d'entente. Vous l'aurez quand elle sera approuvée par le Trésor, mais qui dit des choses. Ces gains — parce que la liste que vous avez évoquée tantôt, c'est que vous mêlez différentes choses — nous avons toujours dit, et la lettre d'entente à ce niveau est claire, que les gains ne doivent pas provenir de la désassurance. C'est clair. Je peux vous rassurer là-dessus, ces gains-là au niveau de l'entente ne doivent pas provenir de la désassurance, pour rassurer tout le monde. Je pense que c'est assez rassurant. Ce n'est pas ça qu'est l'objectif de l'entente que nous avons conclue verbalement sans pour autant qu'elle soit signée.

Quant à l'Hôtel-Dieu, j'ai dit avant les fêtes, ce sera avant les fêtes, M. le Président, et j'ai toujours compris que nous étions davantage dans la période des fêtes quand on arrive en décembre. Et, lorsqu'on sera en décembre, on entrera dans la période des fêtes. Il ne vous reste donc pas beaucoup de temps à espérer, et, dans ce sens-là, s'il y en a un qui a prêché pour Rivière-des-Prairies, c'est bien celui qui vous parle, avec le député de LaFontaine. Vous êtes inquiétants, parce que vous êtes rendus, maintenant, plus à 300 lits à Rivière-des-Prairies, vous êtes rendus à 150 lits, si je vous ai bien compris tantôt. Ça devrait être très inquiétant pour les gens de Rivière-des-Prairies qu'on veuille les diminuer à ce point dans un petit hôpital, pour bien faire en sorte que sur le plan politique on réussisse à combler tous les besoins. Mais il faut de manière très claire que ce ne soit pas en ajout. C'est clair?

On n'est pas dans une situation où on peut, sur le plan financier, ajouter, il faut rationaliser, il faut être dans une situation où la réponse à ces questions, tant du dossier de l'Hôtel-Dieu que du dossier de Rivière-des-Prairies, de Laval, que de la Montérégie, qu'on soit dans une situation juste et équitable envers tout le monde, qu'on puisse tenter de régler des problèmes, mais on va davantage vers de la réallocation que vers de l'ajout net dans le système. Et c'est comme ça qu'on va réussir tous ensemble à passer à travers et à conserver le coeur du système, ce que nous voulons tous. Et je pense que vos intérêts et vos intentions sont les mêmes que nous autres. À l'occasion, on peut diverger sur les moyens.

Le Président (M. Poulin): En conclusion, s'il vous plaît!

M. Côté (Charlesbourg): On peut diverger sur les moyens, ça se comprend. Vous voulez être le pouvoir, on veut continuer d'être le pouvoir, et, dans ce sens-là, c'est la démocratie qui s'exprime. La vérité de tout ça, c'est ça, et je peux vous dire une chose, c'est que — tous ceux et celles qui, à La Presse de Montréal, ont fouillé pendant des mois et des mois, des fois à l'occasion 17 journalistes, sur ces dépenses absolument somptuaires dans le dossier de l'Hôtel-Dieu — à l'origine ce qui avait été prévu, c'étaient des honoraires de 9 000 000 $, et qu'on n'en est pas là du tout, et qu'on a fait du travail constructif à partir d'un PFT qui lui n'a jamais fait l'objet de contestation par personne, sauf au niveau de certains ajustements de besoins si l'Hôtel-Dieu de Montréal allait à Rivière-des-Prairies. Et il y a du travail qui a été fait et qui sera productif pour l'avenir.

Le Président (M. Poulin): Merci, M. le ministre. M. le député de Matapédia.

M. Henri Paradis

M. Paradis (Matapédia): M. le Président, tout à l'heure, je vous ai dit que j'aimerais revenir à la problématique de «malades sur pied». J'aimerais, peut-être, souligner à cette Assemblée que je suis aussi pharmacien, donc j'ai eu le plaisir de travailler en centre hospitalier et d'appliquer cette circulaire, bien avant, même, qu'il y ait circulaire, en 1981, puisque ce dont je parle, c'est 1976, 1977 et 1978, où ce programme-là existait chez nous et permettait à des patients de se procurer certains médicaments en psychiatrie, ou pour la tuberculose, ou pour d'autres maladies. (11 h 40)

Alors, cette expérience m'a amené à réfléchir là-dessus, et d'autres de mes collègues, parce que TAPES a appuyé le ministre dans cette modification de directive de circulaire pour permettre que d'autres maladies puissent être couvertes par cette circulaire. On se rappelle que, finalement, l'ancienne circulaire, c'était pour les médicaments pour le cancer — certains médicaments, pas tous, évidemment — pour la tuberculose, les troubles psychiatriques, la fibrose kystique, l'hyperprotéiné-mie et l'hypoprotéinémie et pour le diabète insipide. Alors, évidemment, ça excluait des classes de médicaments tout à fait importantes pour d'autres personnes qui souffraient et qui avaient besoin du soutien de l'État.

Moi, je suis tout à fait d'accord à ce qu'on puisse enfin modifier cette circulaire pour permettre, justement, à ceux qui sont les plus démunis, ceux qui sont plus affectés par certaines maladies d'être couverts par certains médicaments qui pourraient être donnés par les centres hospitaliers dans toutes les régions du Québec. Parce qu'il ne faut pas se le cacher, il y a des patients qui ont été laissés pour compte, ceux, entre autres, qui souffrent du cancer, ceux qui devaient être dialyses, entre autres, et qui devaient prendre de l'éry-thropoïétine ou ceux qui ont eu à être transplantés avec la cyclosporine. Évidemment, on ne parlera jamais assez des sidéens. Il y en a qui se ruinent littéralement, vendent leur maison, se ruinent pour pouvoir se payer des médicaments pour rester en vie, parce que c'est de ça qu'il est question.

Mon expérience m'a aussi porté à faire des constats tout à fait intéressants. Il y a des patients qui... Bon. Il faut se rappeler dans quel contexte ça a été fait. Quand on parle de psychiatrisés ou d'ex-psychiatrisés, la directive était pour les cas lourds, qu'on appelle, ceux qui étaient vraiment démunis. Alors, au fil des ans se sont ajoutés d'autres patients qu'on peut considérer comme légers. Bien souvent, c'était parce qu'ils étaient gênés d'aller chercher leurs médicaments dans une pharmacie du coin de rue. Alors, il y avait une espèce de complaisance qui s'installait entre le médecin traitant et le patient. Il disait: Bon, va donc à la pharmacie de l'hôpital, personne ne va te voir. Je veux dire, ça a été complètement dénaturé, cette circulaire-là, de telle sorte qu'on a laissé pour compte des gens qui en avaient vraiment besoin avec de nouveaux médicaments. On a laissé s'instaurer une espèce de système de complaisance pour certains individus.

Alors, cette nouvelle approche va permettre de couvrir les personnes qui en ont le plus besoin, tout en maintenant, je pense, pour ceux qui sont vraiment démunis, un fonds de dépannage qui va leur permettre de continuer d'avoir la gratuité de leurs médicaments et de se les procurer dans les centres hospitaliers.

Le Président (M. Poulin): Merci beaucoup, M. le député de Matapédia.

M. Trudel: M. le Président... Le Président (M. Poulin): Oui?

M. Trudel: ...est-ce que je pourrais vous demander de laisser intervenir le député de Portneuf pour deux minutes? Je retrancherai ce temps de ma période de conclusion, avant que le ministre puisse donner ses remarques terminales.

Le Président (M. Poulin): S'il y a consentement d'une part et de l'autre, je ne vois aucun problème.

M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, je pense que c'est toujours des agréments; le principe même, c'est le fair-play, à l'intérieur de cette Assemblée. Je suis en accord avec cette proposition. Je ramasserai tout ça dans mes 10 minutes à moi.

Le Président (M. Poulin): Je voudrais vous dire, tout simplement, deux minutes exactement.

M. Bertrand: O.K.

Le Président (M. Poulin): Je serai sévère parce que vous savez que nous ne devons pas dépasser 12 h 6. Donc, M. le député de Portneuf, vos deux minutes.

M. Roger Bertrand

M. Bertrand: Alors, l'invitation au fair-play, je l'accepte, M. le Président.

Ma question. Tout d'abord, dans le contexte, la situation budgétaire du réseau de la santé et des services sociaux semble telle qu'il faut de plus en plus s'inquiéter quant à la capacité du ministre, de son successeur ou du gouvernement de rencontrer leurs objectifs en ce qui regarde l'application d'éléments que je considère essentiels dans la réforme — et j'en appelle ici aux décisions qui n'en finissent plus d'aboutir en ce qui regarde toute la question des centres hospitaliers universitaires, des instituts, tant en santé que sociaux, des centres régionaux affiliés, etc. — l'objectif étant, je le rappelle brièvement, de faire cesser la dispersion dans ce secteur-là, dans ce réseau-là; d'atteindre les plus hauts standards en ce qui regarde la formation, la recherche et l'évaluation des technologies et de faciliter également l'installation de médecins en région via les affiliations. Alors, je constate, M. le Président, qu'il n'y a pas grand-chose qui bouge là-dedans, en tout cas, à ma connaissance, pour autant que je puisse me tenir au courant de ces choses-là, et que le peu qu'on entend n'est pas toujours rassurant. Ce qu'on entend nous amène à penser ou à conclure qu'on se retrouvera, le cas échéant, devant une espèce de statu quo déguisé ou à peine amélioré, tout le monde voulant conserver son statut.

Alors, ma question est la suivante, au ministre: Est-ce que la situation budgétaire compromet, à ce stade-ci, les objectifs de la réforme à cet égard? Comment entend-il faire en sorte de ne pas céder aux pressions de ceux-là qui ne veulent que protéger leur statu quo? Qu'en est-il également pour les régions? Et, enfin, combien va coûter la désignation des centres? Entend-il financer les impacts de cette opération par d'autres tarifications ou autrement?

Le Président (M. Poulin): Merci, M. le député de Portneuf. Donc, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux, vous avez 10 minutes.

Conclusions M. Marc-Yvan Côté

M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. le Président. Je vais tenter de simplement ramasser un certain nombre de choses qui ont pu être évoquées à ce moment-ci et de répondre très simplement à la question du députe de Portneuf. Si les CHU ne sont pas déterminés aujourd'hui, c'est que le ministre a tenu à consulter, et peut-être qu'il a trop consulté. S'il y a dispersion, ce n'est certainement pas la volonté du ministre; c'est davantage la volonté d'autres intervenants qui occupent des espaces à l'intérieur du réseau de la santé et des services sociaux. Et je vous rappelle que Sherbrooke est décidé et qu'il est en opération depuis déjà un certain moment. Nous aurons définitivement l'occasion de revenir. Quant aux instituts, le processus est en cours. Déjà, un institut, sur le plan social, a été reconnu, et je vous dirai que, là où il y avait zone grise en ce qui concerne la réadaptation, on est dans un processus pour tenter de clarifier les choses très, très prochainement.

Donc, M. le Président, on a eu l'opportunité ce matin d'échanger très rapidement et, malgré le fait que ce soit deux heures, beaucoup trop sommairement pour être capable de bien situer la population du Québec sur les enjeux de ce que nous vivons actuellement. Je retiens de nos échanges que la vision projetée dans la réforme est toujours la bonne. La situation financière est différente aujourd'hui de ce qu'elle était au moment où on a enclenché le processus de la réforme, beaucoup plus exigeante, à la fois pour les établissements, à la fois pour les dirigeants des établissements et pour le ministre, par le fait même. Et un ministre de la Santé et des Services sociaux fait aussi partie d'un gouvernement qui, lui-même, a des obligations. Et c'est le sens de la solidarité ministérielle que nous devons respecter et observer.

Je conviens aussi que, dans le quotidien, il y a des gestes qui ont été posés, et qui peuvent être interprétés de manière différente, et qui peuvent laisser croire que le cap où nous nous dirigeons depuis déjà trois ans peut être changé et qu'il peut y avoir un certain nombre d'interprétations, principalement pour ceux qui n'ont pas été associés de manière très intensive à la problématique santé et à la réforme — et services sociaux, bien sûr — depuis le tout début. Et, chaque jour, les gens doivent s'abreuver d'un téléjournal où l'obligation, pour un journaliste, est de passer sa cote de 30 secondes ou de une minute, ou, pour quelqu'un, d'écrire un papier quotidien dans un domaine qu'il connaît très rarement. Le réseau manque beaucoup, sur le plan de l'information, de Jean Francoeur, qui connaissait très bien le système. Il y a toujours Michelle Coudé-Lord, qui connaît très bien le système, et je pense que des médias d'information doivent davantage avoir ce genre de personne pour bien informer le public. Il y a, à la tribune de la presse, des gens compétents, des gens qui veulent bien informer le public. Il y en a d'autres qui ont d'autres objectifs, et c'est leur problème, ce n'est pas le mien. (11 h 50)

M. le Président, nous avons, il y a à peine deux semaines, rendu public un plan qui était exigé par la population depuis déjà fort longtemps: radiothérapie; programme de dépistage du cancer du sein, qui a été salué par tout le monde. Nous avons voulu régler un problème qui perdure depuis plusieurs années — depuis une décennie — dans le réseau, avec la circulaire «malades sur pied». Peut-être avons-nous choisi un mauvais terme en parlant d'abolition de circulaire, mais il était clair dans le communiqué no 5, comme dans tous les documents qui l'accompagnaient, que cette circulaire serait remplacée par une autre circulaire. Qu'on m'accuse de cacher des choses... Quand c'est vrai, je le prends. Qu'on m'accuse de cacher des choses, au moment où je donne tous les documents, et qu'on m'accuse

de ne pas consulter, au moment où on dit que ça s'appliquera cinq mois plus tard, pour laisser le temps ainsi aux gens d'intervenir sur la place publique, d'interpeller le ministre sur la signification, l'application d'une telle directive... C'est ça le processus démocratique dans lequel nous sommes. Mais cette circulaire, elle a été charriée autant comme autant, et je ne suis pas convaincu, malgré les efforts faits, que la population du Québec est plus informée aujourd'hui qu'elle ne l'était au début de la circulaire «malades sur pied».

Et qu'on continue de persister à dire aux gens que nous coupons 20 000 000 $ dans la circulaire «malades sur pied», plus 3 500 000$ au niveau des orthèses et prothèses, et de ne pas dire la vérité au public... Les 20 000 000$ restent là. On a même dit qu'on voulait ajouter de l'argent, au niveau de cette circulaire, pour permettre à des gens, qui, aujourd'hui, sont dans des situations désespérées, désespérées sur le plan financier, d'avoir accès à des médicaments. Il faut dire à la population qu'aujourd'hui il faut avoir le bon cancer pour être admissible à la circulaire «malades sur pied». Est-ce que c'est ça, la société équitable que nous voulons? Est-ce que quelqu'un a dit, quelque part, que, dans cette circulaire, très clairement manifestée dans les intentions, nous protégions les démunis au niveau de l'accès à ces médicaments? Bien sûr, ce n'est pas ça qui a été évoqué. Au-delà de la fibrose kystique, où l'aveu public a été fait sur une erreur que nous avons pu commettre, il est nécessaire que cette circulaire «malades sur pied» soit revue en toute équité pour les gens qui sont aux prises avec des maladies et qui ont besoin de médicaments. On verra ce que ça donne, puisque des spécialistes sont à l'oeuvre, qu'ils consulteront et qu'ils proposeront des choses autres que ce que nous avons proposé.

M. le Président, il est évident que, lorsqu'on parle de révision du panier de services, ça choque des gens. Nous nous dirigeons carrément vers la révision du panier de services. C'est une nécessité. C'est une nécessité. Même Rochon le disait. M. le Président, on ne l'a pas caché. Successivement, dans la réforme, dans le document sur les finances publiques, dans la politique de santé et de bien-être, à chaque fois, il a été évoqué une obligation de révision du panier de services. Rochon lui-même l'a évoqué. Rochon le disait lui-même, celui que vous voulez présenter comme mon successeur au niveau de Charlesbourg. Je vous le souhaite. Je vous le souhaite. Il y aura une continuité dans la réforme, si jamais il est élu, sur le plan de la pensée. Donc, j'ai hâte de voir la décision. Évidemment, ça ne laissera pas de place pour vous deux au niveau du ministère de la Santé et des Services sociaux! Mais ça, ce sera votre problème, que vous réglerez si jamais tel est le cas.

Donc, M. le Président, nous avons partagé, travaillé en partenaires avec les régies régionales depuis le début, dans ces défis d'application de la loi 198, dans ces défis de la qualité et de la performance. Hier, les régies régionales émettaient un communiqué de presse pour rectifier des choses écrites hier dans les journaux. J'ai vérifié dans les journaux, ce matin: pas un seul mot du rectificatif du président de la Conférence, qui a appelé au téléphone les présidents des régies, hier, pour corriger le titre. Pas un seul mot, alors que ces gens qui écrivent sont les premiers à nous reprocher de ne pas être transparents et de ne pas dire la vérité au public.

La loi 198, j'aurais espéré avoir plus de temps pour en discuter avec vous sur le plan de l'application. Jamais de la vie, mais jamais de la vie, votre vision de la loi 198 ne s'appliquera, et j'ose espérer que vous en serez heureux. Jamais vos 21 500 équivalents à temps plein ne seront appliqués dans le réseau, jamais, et c'est une situation impossible. Elle sera appliquée avec toute la rigueur dont on est capable avec nos partenaires, en protégeant la qualité des services. J'oserais même vous dire qu'en équivalents à temps plein le résultat que nous déposerons au Trésor à la mi-décembre sera pas mal moins lourd, au minimum trois fois moins que ce que vous avez évoqué comme chiffre, alors que 1'attrition annuelle actuelle du ministère, de 3 % sur 174 000 personnes, signifie qu'il y a plus ou moins 5000 postes équivalents temps plein qui sont en attrition au cours de l'année et qui nous permettraient, sur une période de trois ans, d'absorber l'équivalent salarial, donc, en masse monétaire, des économies dont nous avons besoin pour équilibrer les comptes.

Notre objectif n'est pas de compter les quarts; notre objectif est d'équilibrer les comptes, et, dans ce sens-là, il est très important de resituer le débat là où il doit être pour calmer ces inquiétudes véhiculées partout par différents communiqués de presse, que ce soit de la FAS ou les vôtres, à ce niveau-là, pour faire en sorte que la réalité redevienne la réalité, et ce qu'elle sera en termes de réalité, en disant aux citoyens et aux citoyennes du Québec que l'objectif est toujours le même: de faire en sorte que ce que nous avons acquis au fil des années, à coups de milliards de budgets, que le coeur du système soit protégé, que le coeur du système soit protégé, et que nous travaillions ensemble à trouver des voies de passage dans ce qui est davantage apparenté à des services, étant des gens responsables. Et c'est ce que la population exige de ses hommes et de ses femmes politiques, des gens responsables dans les discours, dans les gestes et dans les équilibres financiers pour protéger les générations futures.

Le Président (M. Poulin): En conclusion.

M. Côté (Charlesbourg): Et, en conclusion, M. le Président, je serai toujours très heureux, au cours des prochaines semaines, d'échanger avec mes collègues de l'Opposition sur la justesse, et je serai toujours capable d'admettre des erreurs, puisque c'est le propre de l'humain que de commettre des erreurs, et ce n'est pas humiliant d'aucune manière, ni pour moi ni pour personne, d'admettre qu'à l'occasion on est imparfait — il y a bien des gens pour nous le rappeler —et qu'on puisse l'admettre. C'est comme ça que la société peut progresser, et jamais, jamais je n'ai dévié des objectifs de la réforme: le citoyen au centre.. Qu'il y ait des soubresauts,

c'est normal, M. le Président. Qu'il y ait des correctifs, c'est aussi normal. Merci.

Le Président (M. Poulin): Merci, M. le ministre. Je rappelle au député de Rouyn-Noranda— Témiscamingue qu'il lui reste huit minutes.

M. Rémy Trudel

M. Trudel: Très bien, M. le Président. Nous allons respecter, bien sûr, l'entente que nous avons proposée. Ça va de soi.

M. le Président, je voudrais remercier le ministre d'avoir accepté cette interpellation ce matin, parce qu'il y avait un très grand nombre d'inquiétudes parmi tous les acteurs du réseau de la santé et des services sociaux et dans la population. Et, M. le Président, compte tenu de la formule et des réponses obtenues, je dois bien le dire, je suis loin d'être totalement rassuré. Si on veut boucler la boucle, je demeure profondément inquiet quand le ministre, d'entrée de jeu, dit, à propos de l'intégralité de notre régime de la santé et des services sociaux au Québec qu'on s'est donné... Est-il possible de protéger l'intégralité de notre régime de santé et de services socia iX? La réponse du ministre est claire, ce matin: C'est non. Nous n'avons plus comme engagement de gouvernement de protéger ce qui constitue l'un des acquis majeurs, et le dernier morceau de ces acquis majeurs qui n'a pas été touché par le gouvernement: notre régime de santé et de services sociaux. Nous avons l'intention, au nom des impératifs administratifs, de continuer, sans faire davantage de débats, nous avons l'intention de continuer à nous hâter. (12 heures)

Nous avons l'impression, M. le Président, très clairement, et c'est confirmé ce matin, quand on part du 22 juin 1993, quand on passe par le mois de septembre, quand on passe par le comité piloté par M. Ryan, quand on passe par le comité présidé par M. Johnson, qu'on ne sait pas où est-ce qu'on s'en va, mais on fonce en avant. On ne sait pas dans quelle direction on doit aller. On ne sait pas c'est quoi, l'objectif terminal, mais on fonce en avant, à toute vitesse.

Le ministre admet que, par rapport à un élément, il a pu y avoir dérapage. Il fait ses actes de contrition. Il fait ses mea-culpa et il dit: J'ai le droit de me reprendre. Mais nous en convenons et nous l'apprécions. Mais il y a plus grave que ça, M. le Président! Il y a plus grave que ça. C'est sur l'objectif global de notre régime de santé et de services sociaux. Sommes-nous en train de commettre la même erreur, globalement, par rapport à notre système de santé et de services sociaux? A-t-on, globalement, au gouvernement, obtenu le mandat de remettre en cause l'universalité de notre régime? A-t-on obtenu le mandat de remettre en cause l'accessibilité et le financement public? La réponse, on le sait, c'est: Non. La réaction du public à la partie de la directive sur la fibrose kystique est un indice de ce qui va se produire et de ce que les Québécois exigent comme débat public.

Le ministre peut casser du sucre sur le dos de l'ex-ministre du Revenu, mais peut-être que F exministre du Revenu, avec les régies régionales, avec les établissements, avec la CSN, avec l'Opposition, avec de plus en plus de groupes... Peut-être que, lorsqu'on touche à la santé, c'est de faire exploser la cohésion sociale. On a ce risque-là, et nous n'avons pas le mandat de procéder ainsi.

Je demeure très inquiet parce que le ministre me décrit de façon fine comment la coupe va se faire, comment on va réussir à dépecer tel morceau ou tel autre morceau. Mais la question principale, fondamentale, c'est: l'intégralité de ce régime; les principes fondamentaux; l'universalité; l'accessibilité; et pas la gratuité, mais le financement public de ce régime. Est-ce que c'est ça la position avec laquelle on va s'en aller à Ottawa?

M. le Président, j'ai apprécié aussi un très grand nombre de débats avec l'actuel ministre de la Santé et des Services sociaux. Je lui demande un temps d'arrêt, comme au baseball; M. le ministre, un temps d'arrêt pour tout ce qui se produit actuellement. N'allons pas plus vite que la société québécoise ne l'a exigé, ne l'exige. Il y a urgence du débat social, au Québec, sur la remise en cause des fondements de notre régime de santé et des services sociaux.

M. le Président, je demande au ministre de la Santé et des Services sociaux de se ressaisir — on le sait, il en est capable — de se ressaisir et de laisser comme message à ce gouvernement, que lui va laisser dans quelques jours, dans quelques semaines, d'arrêter ce train, d'arrêter ce dérapage incontrôlé pour l'une des parties les plus essentielles de notre vie collective: notre régime de santé et de services sociaux. Très peu de sociétés — si peu, que point — à travers les siècles, s'étaient donné un régime aussi important que celui-là. Quiconque, peu importe qu'il soit de Sainte-Anne-des-Monts, de Rouyn-Noranda, de Montréal ou de Québec, qu'il soit pauvre, qu'il soit riche, qu'il soit de condition modeste ou plus fortunée, allait pouvoir recevoir des soins médicaux, des soins de santé et des services sociaux, peu importe sa condition. C'est ça qui est remis en cause pour un objectif qui, à court terme, peut sembler extrêmement noble: la réduction, administrative-ment, d'un certain nombre d'indicatifs, d'un certain nombre de résultats recherchés sur le plan financier.

Il ne suffit pas, M. le Président, de passer par une simple étape administrative et de dire que c'est une simple opération administrative que nous sommes en train de conduire. Non. Nous sommes en train de remettre en cause les bases de notre régime. Je demande au ministre de la Santé et des Services sociaux de se ressaisir, de demander ce temps d'arrêt, d'avoir ce moratoire sur l'ensemble de l'opération, de laisser au gouvernement des indications extrêmement précises et des recommandations musclées, comme il aime et qu'il est capable de faire, et de dire: Ne vous présentez pas au Forum national sur la santé à Ottawa, après les fêtes, avec une position aussi faible, de ne pas vouloir défendre l'intégralité de notre régime de santé et de services sociaux, malgré que ce soit vous qui soyez la principale cause de

nos difficultés. M. le ministre, vous êtes capable de faire cela. Vous êtes capable de vous ressaisir.

Et je dis, en conclusion, M. le ministre, que le premier projet de loi que vous avez déposé comme ministre de la Santé et des Services sociaux, c'a été celui de la reconnaissance des sages-femmes au Québec. Si vous vous ressaisissez, si vous demandez ce temps d'arrêt, si vous laissez ces recommandations au gouvernement, on pourrait se souvenir aussi de vous comme celui qui non seulement a foncé dans le domaine de la reconnaissance des sages-femmes... Et nous aimons beaucoup mieux nous souvenir que celui qui est en train de laisser, au niveau de l'histoire, l'un des acquis les plus importants pour notre régime de santé et de services sociaux...

Le Président (M. Poulin): En conclusion, s'il vous plaît.

M. Trudel: ...et des acquis sociaux... M. le Président, c'est une invitation au ministre de la Santé et des Services sociaux. Il reste peut-être peu de temps, mais il peut faire beaucoup avec ce peu de temps. Merci.

Le Président (M. Poulin): Donc, la commission...

M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, je voudrais vous demander du temps additionnel, mais je sais que c'est impossible. Juste tout simplement...

Le Président (M. Poulin): Consentement pour...

M. Côté (Charlesbourg): Une minute, M. le Président.

M. Trudel: Consentement. Le Président (M. Poulin): ...une minute. M. Marc-Yvan Côté

M. Côté (Charlesbourg): Une minute. C'est un élément que j'aurais aimé passer dans ma conclusion, mais tout se passe tellement vite. Désassurance, tarification devront nécessairement faire l'objet de lois qui amènent des débats publics. Il m'apparaît évident que ce débat-là va devoir venir à un moment ou l'autre en 1994. Et on en a eu plusieurs débats publics, à différentes époques, sur le financement, sur la réforme, et ainsi de suite. C'est le seul élément que j'ai oublié de mentionner tantôt, mais ce débat public, qui aura lieu ici, il aura aussi lieu sur la place publique.

Le Président (M. Poulin): Donc, merci beaucoup. La commission ayant rempli son mandat, j'ajourne les travaux sine die.

(Fin de la séance à 12 h 7)

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