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Version finale

35e législature, 2e session
(25 mars 1996 au 21 octobre 1998)

Le mardi 5 novembre 1996 - Vol. 35 N° 44

Consultation générale sur le document intitulé «Pour vous et vos enfants : garantir l'avenir du Régime de rentes du Québec»


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Table des matières

Auditions

Remarques finales


Autres intervenants
M. Rosaire Bertrand, président
Mme Lyse Leduc, présidente suppléante
M. Russell Copeman
* M. Denis Savard, AIAPQ
* M. Alain Poirier, idem
* M. Tahar Mansour, Écofin (1995) inc.
*Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats


(Quinze heures trente-sept minutes)

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, je vous souhaite à tous une bonne fin de commission. Je ferais remarquer qu'il nous reste deux groupes à entendre sur ce sujet aussi important, et permettez-moi de souligner la présence d'électrices et d'électeurs de Charlevoix, que je salue de façon particulière.

Mme la secrétaire, est-ce que nous avons quorum?

La Secrétaire: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Alors, je vous rappelle le mandat de la commission. La commission des affaires sociales se réunit afin de procéder à une consultation générale et de tenir des auditions publiques sur le document de consultation sur la réforme du Régime de rentes du Québec intitulé: «Pour vous et vos enfants: garantir l'avenir du Régime de rentes du Québec».

Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. Mme Loiselle (Saint-Henri–Sainte-Anne) sera remplacée par M. Gautrin (Verdun).

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci beaucoup. Chaque membre de la commission a l'ordre du jour. Est-ce que l'ordre du jour est accepté? Accepté.

Alors, nous recevons le premier groupe, et je vous rappelle que vous avez 20 minutes de présentation, 20 minutes d'échanges avec le côté gouvernemental et 20 minutes d'échanges avec le côté de l'opposition. Nous recevons comme premier groupe l'Association des intermédiaires en assurance de personnes du Québec. Bienvenue.


Auditions


Association des intermédiaires en assurance de personnes du Québec (AIAPQ)

M. Savard (Denis): M. le Président de la commission, Mme la ministre, Mmes et MM. les parlementaires, je vais me présenter, mon nom est Denis Savard, je suis président du conseil de l'Association des intermédiaires en assurance de personnes du Québec et j'exerce la profession d'intermédiaire en assurance de personnes depuis plus de 25 ans. Je suis assureur-vie agréé et planificateur financier.

Permettez-moi de vous présenter les personnes de l'Association des intermédiaires en assurance de personnes du Québec qui m'accompagnent ici aujourd'hui: à ma droite, M. Alain Poirier, qui est premier vice-président de l'Association; à ma gauche, Me Anne-Marie Beaudoin, qui est conseillère principale à la direction générale. Au nom des membres de notre Association, j'aimerais vous remercier de nous accueillir lors des audiences publiques de cette commission parlementaire. L'AIAPQ est heureuse de contribuer à la réflexion sur l'avenir du Régime de rentes du Québec.

(15 h 40)

Permettez-moi de vous présenter l'Association comme telle. Cette Association, l'Association des intermédiaires en assurance de personnes du Québec, regroupe près de 13 000 agents et courtiers en assurance de personnes. Elle a été créée en 1989 par la Loi sur les intermédiaires de marché, et l'Association s'est vu alors confier une double mission: protéger le public investisseur et épargnant ainsi que de développer et de contrôler la qualité des services professionnels offerts aux consommateurs par ses membres et de s'assurer le respect, par chacun, d'une déontologie rigoureuse. Notre rôle s'apparente à celui d'une corporation professionnelle. Nos membres sont de véritables conseillers financiers polyvalents et aptes à protéger le patrimoine financier du consommateur québécois.

De par la nature de notre profession, nous sommes en contact quotidien avec des Québécois de tous les âges et de tous les milieux, intéressés à se protéger face à la retraite et aux risques financiers menaçant leur patrimoine et la sécurité de leur famille. Au cours de cette courte intervention, nous décrirons, dans un premier temps, la place occupée par les différents programmes du Régime de rentes du Québec dans notre travail quotidien. Nous dresserons ensuite un portrait sommaire du marché des produits d'assurance et de rentes offerts aux Québécois. Enfin, nous réagirons aux hypothèses du document de consultation et nous proposerons quelques pistes de solution additionnelles.

Les conseillers financiers que nous sommes connaissent bien les programmes du Régime de rentes du Québec, puisqu'ils les expliquent à leurs clients au moment de calculer la couverture d'assurance-vie dont ils auront besoin. Compte tenu de la fréquence de nos contacts professionnels avec les Québécois, il se pourrait bien que nous soyons la principale interface entre la Régie des rentes et la population. Nous avons constaté que les Québécois connaissent peu les programmes de la Régie, notamment les prestations de survivant. On le sait, la confiance des Québécois envers la capacité du Régime de rentes du Québec de faire face à ses engagements en a pris un dur coup ces derniers temps. Une majorité de nos clients ne s'attend pas à ce que la Régie soit en mesure de leur offrir une rente au moment où ils prendront leur retraite. Cette perception est particulièrement ancrée chez les moins de 40 ans.

En 1996, les Québécois peuvent trouver, sur le marché privé, des produits financiers aptes à les protéger contre tous les risques couverts par le Régime de rentes du Québec. Aujourd'hui, plus de quatre Québécois adultes sur cinq ont une forme quelconque d'assurance sur la vie, ce qui n'a pas toujours été le cas. Ce niveau de protection varie sensiblement parmi les Québécois. En matière d'assurance-invalidité, on estime que, même si ce taux a doublé dans les 25 dernières années, il n'atteint pas encore un Québécois sur quatre. Toutefois, malgré la protection que nous avons connue, nos concitoyens à faibles revenus ne consomment pas encore suffisamment de produits d'assurance pour leur assurer un niveau de protection acceptable. Ainsi, les régimes publics de protection ont donc toujours leur raison d'être. Mais ils n'ont pas nécessairement à prendre la même forme ni la même ampleur qu'en 1966.

Venons-en aux recommandations relatives à la réforme du Régime de rentes du Québec. Un vigoureux coup de barre s'impose pour restaurer la capacité financière du régime et la confiance qu'il devrait inspirer au public, compte tenu de l'énorme passif actuariel du Régime de rentes du Québec, qui, selon l'Institut de recherche C.D. Howe, est deux fois plus important que la dette totale du gouvernement du Québec. Remettre à plus tard ne fait qu'amplifier le problème et en rendre la solution plus douloureuse. Le législateur doit prendre maintenant les décisions difficiles qui s'imposent.

Les recommandations, maintenant, quant aux prestations. Nous recommandons que les prestations s'inspirent de deux orientations fondamentales. Premièrement, nous estimons que la Régie des rentes doit intervenir pour compléter la protection qu'assure le marché privé et non pour la remplacer lorsque le marché fonctionne adéquatement. En second lieu, comme second principe, nous croyons que le Régime de rentes du Québec doit continuer de redistribuer la richesse des Québécois les plus aisés vers ceux qui le sont le moins comme il l'a toujours fait. La situation financière du régime nous amène à proposer d'accentuer cette progressivité en comprimant les bénéfices que tirent les Québécois les plus aisés de ce régime. Voyons rapidement chacune des propositions qui découlent de ces principes.

À l'égard de la rente d'invalidité, la rente d'invalidité n'est pas encore suffisamment entrée dans les moeurs financières de tous les Québécois, nous l'avons déjà dit. Pour cette raison, nous recommandons au gouvernement de ne pas comprimer le volet invalidité du Régime de rentes du Québec au-delà de ce que pourrait justifier la saine administration du régime.

À l'égard des prestations de survivant, même si le gouvernement préfère reporter à plus tard la réévaluation de la rente de conjoint survivant, nous estimons qu'elle ne devrait pas être soustraite à la présente réévaluation. Ce programme a été conçu en fonction d'une époque révolue. Depuis l'implantation du Régime de pensions du Canada et du Régime de rentes du Québec, la population canadienne a évolué à plusieurs égards: baisse considérable de la fécondité, accession des conjoints à l'autonomie professionnelle et effondrement de la famille traditionnelle. Nos données indiquent que le marché privé de l'assurance-vie répond de mieux en mieux, voire adéquatement, aux besoins de protection des travailleurs. Cette question doit être creusée davantage. C'est pourquoi nous recommandons au gouvernement, à ce stade-ci, d'ouvrir une enquête visant à déterminer le nombre et le portrait des Québécois couverts par une police d'assurance-vie individuelle ou collective de même que la qualité de leur protection. S'il s'avère que la presque totalité des travailleurs sont couverts par une assurance-vie privée, on pourrait envisager l'abolition complète de la rente de conjoint survivant, sous réserve d'une clause de sauvegarde des bénéficiaires actuels.

À l'égard de la prestation de décès, pour tous les Québécois dont la vie est assurée sur le marché privé, la prestation de décès représente un montant marginal. Cette prestation de 3 540 $, cette année, du Régime de rentes du Québec s'apparente davantage à une subvention indirecte à l'industrie des services funéraires qu'à une maille essentielle de notre filet de sécurité sociale. Nous estimons donc qu'on peut abolir cette prestation à condition que l'État vienne en aide aux Québécois à revenus modestes, qu'ils soient travailleurs ou non, en leur assurant les moyens d'une inhumation dans la dignité.

La rente de retraite. L'AIAPQ ne croit pas opportun de réduire le taux de remplacement du revenu, car près de 40 % des Québécois n'ont aucune source de revenu à la retraite autre que les prestations gouvernementales. La société doit protéger les plus démunis parmi les siens. Nous préférons donc demander un effort additionnel aux 60 % des retraités qui ont d'autres moyens. Pour cette même raison, l'indexation partielle des prestations n'est pas, à notre avis, une bonne solution. Dans le cas du relèvement de l'âge de la retraite, nous croyons que c'est là une mesure qu'il est possible d'envisager, dans la mesure où un préavis important est donné à la population. Cette mesure refléterait l'évolution des attitudes et refléterait aussi la meilleure espérance de vie des Québécois.

En plus du relèvement graduel de l'âge de la retraite du régime, l'AIAPQ invite le gouvernement à considérer la récupération des prestations versées aux retraités aisés. Cette récupération progressive, bien sûr, devrait être mise en place rapidement. Le gouvernement pourrait restreindre l'application de cette mesure de récupération fiscale aux cas très avantagés par le Régime de rentes du Québec actuel et la limiter dans le temps en fondant l'applicabilité de la mesure sur un critère objectif comme celui que nous proposons. Le gouvernement l'asseoirait sur un solide argument d'équité intergénérationnelle.

Nos recommandations relatives aux cotisations, maintenant. Précisément, en matière de cotisation, les choix que nous ferons comme société doivent se faire en fonction de considérations d'équité intergénérationnelle. Plus l'augmentation est étalée, plus la prochaine génération de retraités reporte le coût de sa retraite sur sa génération cadette. À l'inverse, plus l'augmentation est rapide, plus la génération du baby-boom a le temps d'améliorer sa contribution à sa propre retraite.

Par ailleurs, nous savons déjà que la population, et particulièrement les jeunes, a largement perdu confiance en la capacité du Régime de rentes du Québec de lui verser éventuellement des prestations à moyen et à long terme. Il importe de restaurer cette confiance. Or, envisager un taux de cotisation de plus du double du taux actuel nous apparaît complètement irréaliste. Il inciterait les employeurs du Québec à réduire leur contribution au régime collectif, ce qui contribue à une déresponsabilisation.

(15 h 50)

Donc, l'AIAPQ recommande au gouvernement d'adopter le scénario d'une hausse rapide du taux de cotisation, qui produise un taux, à long terme, inférieur ou égal au taux de pleine capitalisation. Le gel ainsi que la réduction proportionnelle de l'exemption générale nous apparaissent sensés dans la mesure où ces deux actions vont de pair.

Nous proposons aussi une cotisation spéciale de rattrapage. Puisque le régime a besoin, de toute façon, de cotisations additionnelles à court terme pour améliorer sa capitalisation, l'AIAPQ invite le gouvernement à considérer l'imposition d'une cotisation spéciale de rattrapage au régime. Temporaire, cette cotisation ferait porter le fardeau de cette amélioration aux participants qui tireront le plus grand bénéfice du régime. Ainsi, le taux de cette cotisation spéciale de rattrapage serait plus élevé pour les personnes s'apprêtant à prendre leur retraite et décroîtrait par la suite à mesure qu'augmente l'année de naissance.

À titre de conclusion, dans le discours que prononçait, à l'ouverture du sommet économique, le premier ministre, M. Lucien Bouchard – je vais citer ce que disait M. Bouchard – il disait: «Les Québécois qui sont à l'université et au cégep, ceux qui s'apprêtent à faire leur premier choix de carrière au secondaire doivent savoir que, cette année, la société québécoise a décidé de consentir d'importants efforts pour leur garantir la retraite qu'ils prendront dans 40 ou 50 ans. Ce n'est pas anodin. Cette année, la solidarité intergénérationnelle prend corps au Québec dans la réforme du Régime de rentes, dans nos sacrifices. Ainsi, pour mettre fin à l'endettement public, ce sont là deux conditions, il me semble, qui favorisent l'autonomie et la confiance en l'avenir.» Fin de la citation.

Donc, un examen même sommaire de la situation du Régime de rentes du Québec fait ressortir l'ampleur du problème. Nos choix doivent être guidés par un souci de protéger les plus démunis de notre société, par une volonté de responsabiliser les individus face aux risques de l'existence et, comme le disait le premier ministre, par un souci d'équité entre les générations de participants au régime.

Si le gouvernement choisit la voie de la responsabilité fiscale, celle qui demande aux bénéficiaires et aux cotisants de faire des sacrifices aujourd'hui en vue de jours meilleurs demain, il pourra compter sur les professionnels que nous sommes pour défendre auprès des consommateurs la nécessité de faire des choix difficiles mais responsables. M. le Président, Mme la ministre, je vous remercie.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci. J'invite maintenant Mme la ministre à commencer l'échange.

Mme Harel: Alors, merci, M. le Président. Bienvenue, Mme Beaudoin et MM. Savard et Poirier. Alors, vous représentez l'Association des intermédiaires en assurance de personnes. Vous en êtes le président, M. Savard, et je comprends que vous avez à la fois une perception d'ensemble comme citoyen, mais aussi à titre d'assureur.

Je trouvais qu'en filigrane de votre mémoire il y avait cette idée que le régime public venait supplémenter l'assurance privée plutôt que l'inverse, à moins que je me sois trompée. Est-ce que vous concevez qu'il y a un régime de base universel transférable à partir duquel il peut y avoir de la supplémentation par diverses formes d'assurance ou de compensation de revenu?

M. Savard (Denis): Je pense qu'à l'origine, Mme la ministre, le Régime de rentes du Québec a été conçu comme étant un régime de base universel qui devrait ou qui nécessiterait d'avoir des compléments acquis sur une base individuelle. C'est le grand changement de société. Maintenant, les gens, les citoyens du Québec, parce qu'ils ont pris conscience et confiance dans leurs moyens propres, se dotent personnellement de couvertures, et la Régie des rentes du Québec, ce qui est offert arrive plutôt en supplément de leur prise en charge individuelle.

Donc, on dit: Étant donné qu'on doit réaffecter des ressources, il est important de les réaffecter aux endroits où les individus n'ont pas encore assumé totalement, ou pleinement, ou de façon suffisante leur responsabilité, parce qu'avant d'être la responsabilité de l'État c'est une responsabilité personnelle de s'assumer lors de la retraite ou lors d'une invalidité. Je ne sais pas si je vais dans la bonne direction avec votre question, Mme la ministre.

Mme Harel: Alors, écoutez, je demandais justement au président de la Régie des rentes de me repréciser combien, parmi les travailleuses et travailleurs québécois, pouvaient compter sur un régime complémentaire au régime public, et on m'indiquait environ la moitié. Donc, il y a une moitié, c'est-à-dire à peu près 1 500 000 de travailleuses et de travailleurs, qui n'auront, comme remplacement de revenus à la retraite, que la rente de retraite. Alors, c'est donc là encore, finalement, une réalité qui s'ajoute aussi au fait qu'on demande aux gens de se préparer à changer d'emploi, on dit maintenant sept fois dans leur vie, et qu'un régime comme celui du Régime de rentes du Québec garantit la transférabilité, l'universalité et la pleine indexation. Il n'y a pas beaucoup de régimes privés qui, successivement, peuvent donner, finalement, la même garantie aux travailleuses et aux travailleurs qui ont à se préparer à ces changements du marché du travail dans leur vie.

Alors, vous dites: On s'en va dans cette direction-là, mais je comprends que ça va nous prendre encore une génération, peut-être deux ou trois, pour y arriver. Est-ce que vous partagez cette analyse-là?

M. Savard (Denis): Je vais demander à M. Poirier de compléter.

Mme Harel: Très bien.

M. Poirier (Alain): Vous avez parfaitement raison sur la partie retraite. Le point qu'on mentionnait se trouvait surtout sur la rente de conjoint survivant, où le marché privé de l'assurance sur, principalement, les travailleurs couvre à peu près tous les travailleurs. Et le point qu'on mentionnait, c'était: Pourquoi ne pas faire une étude pour voir vraiment c'est quoi, la couverture que ces gens-là possèdent? Parce qu'on a une moyenne globale des couples québécois qui sont assurés selon les statistiques, mais on n'a pas de chiffres précis sur la façon dont les travailleurs sont couverts. La rente de conjoint survivant, qui représente, si je ne me trompe pas, 23 % des déboursés de la Régie des rentes dans une année, c'est-à-dire 1 000 000 000 $, c'est quand même une source où on pourrait aller vérifier s'il n'y a pas une certaine mesure d'économie, si le marché privé, lui, compense déjà pour cette partie-là.

Mme Harel: En fait, c'est une bonne idée, là, d'avoir un portrait plus complet que celui qui est à notre disposition présentement. Et je comprends qu'il va s'imposer, vous savez, ce portrait-là, parce qu'on ne peut pas s'écarter de regarder la question de la rente de conjoint survivant, d'autant plus que les changements survenus sur le marché du travail ont justement amené l'irruption des femmes comme travailleuses et cotisantes à la Régie des rentes, ce qui n'était pas nécessairement le cas de ce qui se passait il y a 20 ou 30 ans. Il y a eu une progression vertigineuse. On dit que 75 %, actuellement, des femmes dont les enfants ont moins de six ans sont sur le marché du travail.

Alors, c'est un taux d'activité extrêmement important, malgré qu'on doive prendre en considération une sorte de contrat tacite avec une partie des femmes qui sont restées à la maison et qui peuvent ainsi bénéficier d'une rente de conjoint survivant dans le cas du décès de leur conjoint. D'autant plus qu'on m'indique, là, pour des chiffres préliminaires, pour ce que je peux en connaître présentement, qu'il y aurait 40 % des conjoints survivants qui appartiennent... en fait 40 % de ceux dont les revenus du couple avant le décès étaient inférieurs à 20 000 $... Là, malheureusement, je ne peux pas vous préciser combien ils sont. Mais certainement qu'on aura ces informations-là et qu'elles pourront être utiles pour les fins de l'examen que vous pourriez faire. Et je crois qu'il serait souhaitable de le faire aussi pour élargir le plus possible la couverture de la rente de conjoint survivant.

(16 heures)

Vous voyez, il y avait ces 40 % qui n'avaient pas d'assurance-vie. Alors, c'est quand même 40 %, dans le groupe des personnes qui appartenaient à un couple, avant le décès, avec un revenu inférieur à 20 000 $, qui n'avaient pas d'assurance-vie. Et on m'indique que, pour ceux des couples qui en avaient, dans la grande majorité des cas, elle équivaut à peu près à 50 000 $, donc un montant nettement insuffisant pour avoir une rente viagère, et elle servirait très souvent pour payer des dettes. Alors, ça devient, à partir de ce moment-là, finalement, une assurance-vie qui ne sert pas à ce à quoi, à l'origine, elle devait servir. Je pense qu'il y a un examen à faire de ce côté-là, parce que c'est évident que le retrait de la Régie, même si c'est très graduellement, puis progressivement, puis pas brutalement et puis que tout ça s'étale dans le temps, va devoir être compensé certainement par un élargissement de l'assurance-vie collective ou individuelle.

L'autre aspect – je suis convaincue que c'est de bonne foi – dans votre mémoire, vous citez le document de l'Institut canadien des actuaires, qui était à l'effet que les cotisants nés en 1960 allaient recevoir 2,6 fois, en prestations, les montants de cotisation versés. Mais, en fait, ça s'applique plutôt aux cotisants nés en 1940. En fait, il y a une erreur dans le mémoire de l'Institut canadien des actuaires qui est reprise. Ne vous inquiétez pas, vous n'êtes pas les premiers à faire, finalement, la même erreur. Mais, en fait, on voit bien qu'il s'agit des premiers cotisants à la Régie des rentes lorsqu'elle a été mise en place, il y a 30 ans.

Mais, en même temps, c'était un peu un contrat, là, de société. À l'époque, remarquez, le Québec voulait, dans la négociation avec Ottawa, que ça prenne 20 ans de cotisation avant d'avoir pleinement accès à la prestation. Et, dans la négociation, le fédéral a choisi que ce soit plutôt 10 ans. Alors, d'autre part, c'est une génération qui a quand même eu beaucoup d'autres choses à payer, c'est la génération qui travaillait dans les années cinquante, soixante et qui nous a quand même équipés, sur le plan des grandes écoles, des grands réseaux universitaires. L'UQAM n'existait pas. Quand la Régie des rentes est créée, l'UQAM ne sera fondée que l'année d'après. Les réseaux de cégeps balbutiaient. Les réseaux de santé aussi, hein, l'hospitalisation était déjà acquise en 1960, mais l'assurance-maladie ne le sera qu'en 1970, donc deux ans après la Régie.

Donc, il y a une foule de considérations qui font qu'il ne faut pas mettre, dans la balance, seulement ce que les retraités actuels ont payé à la Régie des rentes, mais ce qu'ils ont mis aussi comme investissements dans l'ensemble de la société. À défaut de quoi c'est un peu comme un couple qui, précautionneusement, calculerait chacun la part qu'il a à la cent près. Ça ne fait pas des couples très heureux, ça. Si on fait la même chose dans une société, ça ne fait pas finalement un sens des responsabilités entre générations qui est bien développé.

En fait, ceci dit, vous avez raison, par ailleurs – ça, je vous appuie à 100 % – quand vous dites qu'il faut que la génération du baby-boom fasse sa part et puisque c'est maintenant qu'elle peut la faire parce que dans 15 ans, si elle ne la fait pas maintenant, elle va laisser ça à ses enfants puis à ses petits-enfants.

Vous avez introduit l'idée de modulation de la cotisation en fonction de l'âge. Moi, je dois vous dire modestement que j'avais espéré qu'il y ait une solution dans ce sens-là. J'avais fait analyser aussi par la Régie des rentes, et ça pose, en fait, des problèmes. Selon le ministère de la Justice, ça pourrait être considéré comme discriminatoire. Ce serait une discrimination en fonction de l'âge. Ça nécessiterait un «nonobstant» à la charte. Bon, on peut... Si la société décidait de s'orienter dans ce sens-là, on pourrait toujours l'envisager. Là, évidemment, ça ne pourrait être que du côté du cotisant, parce que, pour l'employeur, il faudrait que ce soit neutre, à défaut de quoi, là, on vient vraiment introduire un biais qui ferait que bien des gens pourraient être mis de côté au profit d'autres, finalement. Mais je comprends que vous, M. Savard, c'est la présence des jeunes courtiers qui vous a amené à ça? C'est quoi, le rationnel derrière ça?

M. Savard (Denis): Non, on pense que les personnes... et précisément les gens de la génération du baby-boom ont aussi été gâtés dans cette société et que le peu de temps qu'il reste – les premiers baby-boomers ont à peine 15 ans avant d'atteindre 65 ans, donc on a un minimum de 15 ans, là, pour les premiers baby-boomers, de 1946, qui ont 50 ans cette année, donc de 50 à 30 ans, à peu près – on a une période où les gens... Toute l'étendue du baby-boomer, en règle générale, on la met sur une vingtaine d'années, donc ces personnes-là qui ont été... Je dirais qu'il y a peut-être deux groupes de baby-boomers, d'une certaine façon, répartis à peu près dans deux périodes de 10 années. Le premier groupe n'a jamais eu à chercher d'emploi ou à peu près, ou en tout cas il y a toujours eu une période où ces personnes-là ont été privilégiées par la société au Québec, particulièrement. On dit qu'ils doivent, de façon responsable, cotiser davantage. Et, effectivement, une cotisation en fonction de l'âge, on s'était fait dire aussi que ça pouvait être discriminatoire. Mais ce n'est pas le seul au Québec.

On pense qu'il y a les allocations familiales au Québec qui sont discriminatoires en fonction de l'âge – pas au Québec, mais au Canada. Donc, ça existe déjà, c'est déjà une réalité avec laquelle on vit. Et, d'avoir une discrimination qui fait que le cotisant, à qui il reste un nombre très bref d'années avant de prendre sa retraite, va cotiser peut-être pendant quelques années de plus... Mais étant donné que c'est réparti sur une courte période de temps, effectivement, la personne qui aujourd'hui a 25 ans va contribuer beaucoup plus longtemps et ne récupérera pas ses cotisations si on laisse aller le régime de la façon dont il évolue actuellement. Donc, je pense que c'est un geste de responsabilité par ceux qui sont les plus choyés.

Mme Harel: C'est évident qu'il faut agir rapidement. Dans la balance, vous comprenez aussi, pour l'avoir d'ailleurs écrit, qu'il y a une nécessité d'harmoniser avec le Régime de pensions du Canada, compte tenu de la mobilité souvent non seulement des travailleurs, mais des entreprises. Alors, ce n'est pas nécessairement harmoniser au sens d'être identique, mais d'être équivalent. Alors, est-ce que cette question de modulation de cotisations vous apparaît un élément qui pourrait nous distinguer, sans qu'il soit retenu aussi par le Régime de pensions du Canada?

M. Savard (Denis): Il pourrait ne pas être retenu. Cependant, leurs problèmes ne sont pas moindres que les nôtres. Au contraire, je pense que la gestion que le Régime de rentes du Québec... le niveau de rendement que la Régie a obtenu est supérieur à ce qu'ils ont obtenu du côté du Régime de pensions du Canada. Donc, leur problème, leur déficit actuariel est même supérieur à celui que rencontre le Régime de rentes du Québec. Donc, ils vont devoir, eux aussi, envisager, s'ils veulent être responsables, de mettre en place des solutions. Et je pense que, s'il y a des solutions qui sont avancées par le Québec, ils n'hésiteront pas. Si on prend l'initiative de solutions qui peuvent apparaître difficiles, mais qui sont responsables, je pense que, au contraire, ils vont profiter de l'occasion pour dire: Voilà, ça se fait déjà au Québec, on va le faire. Je pense qu'on n'est pas obligé d'attendre que le gouvernement fédéral prenne l'initiative de certaines démarches pour les initier nous-mêmes.

Mme Harel: Vous avez aussi suggéré une autre démarche, qui, toujours avec l'objectif de réduire les coûts, est celle de récupérer une partie du montant de la rente de retraite, donc une récupération par le ministère du Revenu qui serait versée à la caisse du régime et qui, dites-vous, en fait, permettrait de faire cotiser les retraités qui reçoivent des prestations dont la valeur a été nettement plus élevée que les cotisations qu'ils ont versées. Vous parlez, en fait, d'une récupération auprès de 40 % des personnes retraitées qui, dites-vous, sont les plus riches.

J'obtenais les chiffres concernant justement les revenus des retraités, et 75 % des personnes âgées de 65 ans et plus – ça, c'est pour 1994, là – avaient un revenu inférieur à 17 450 $. Alors, vous voyez à quel point, même si globalement, collectivement, on considère que cette catégorie d'âge a amélioré son sort par rapport aux 20, 30 dernières années, pris individuellement, les revenus ne sont quand même pas très élevés. Ça signifie donc que 25 % avaient un revenu inférieur à 17 450 $. Je n'ai pas les chiffres, par exemple, pour les revenus de moins de 25 000 $, ou de moins de 30 000 $, mais j'imagine que ce serait assez éloquent d'avoir ces chiffres-là. Alors donc, je répète: 75 % ont un revenu inférieur à 17 450 $. Alors, c'est donc dire qu'il n'y en a pas beaucoup, de riches, en fait, à moins que vous ayez des chiffres différents, là. Mais ceux qu'on me transmet, qui originent de la Régie des rentes, il n'y en a pas beaucoup de riches dans cette catégorie-là.

(16 h 10)

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. Poirier.

M. Poirier (Alain): On est d'accord avec vous là-dessus. On n'a pas ces chiffres-là et on vous croit sur parole. Qu'est-ce qui arrive? C'est qu'il faut aussi voir dans le temps. Peut-être que présentement, c'est la situation. Dans 15, 20 ans, ça va être quelle situation? Tout argent qu'on peut récupérer maintenant pour augmenter la capitalisation de la caisse va être profitable à long terme. Plus la caisse va être capitalisée rapidement – exemple, par la cotisation spéciale des baby-boomers et ces gens-là – moins les générations qui vont nous suivre, dans 40, 50 ans, vont avoir à cotiser des sommes énormes à la Régie des rentes.

L'objectif qu'on poursuivait, c'est d'essayer de donner quelques pistes au gouvernement pour trouver des solutions pour ne pas avoir une hausse de cotisation rapide et, en même temps, être équitable envers toutes les générations. Il faut aussi faire très attention de protéger les plus démunis. Si on utilise... Si vous me dites, là: 75 % ont des revenus inférieurs à 17 500 $, je ne pense pas qu'ils rentrent dans des catégories de personnes où on pourrait aller récupérer des sommes. Mais des catégories qui en recevraient beaucoup plus, qui auraient des revenus annuels beaucoup plus élevés, je pense que, oui, on pourrait aller faire une certaine sorte de récupération chez eux.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci. Ça termine cette intervention ici. M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Je veux d'abord m'excuser de ne pas avoir été présent au début de votre présentation. J'ai été retenu au salon bleu, où le président devait rendre une décision me concernant – et qui n'a pas été, d'ailleurs, ce que j'aurais voulu qu'il rende.

Je vais revenir avec vous sur votre mémoire, mais votre dernière intervention me gêne un peu. Vous dites et vous avez, semble-t-il, pris la position qu'il faudrait toujours capitaliser au maximum un régime de retraite. Ça veut dire que vous êtes opposés à tout régime de retraite par répartition?

M. Poirier (Alain): Non...

M. Gautrin: C'est bien à cause de la situation actuelle, compte tenu des paramètres économiques actuels, où le taux de croissance a été faible, c'est ça que vous...

M. Poirier (Alain): Le commentaire que je faisais, c'est que plus le régime va être capitalisé maintenant, moins on va avoir plus tard à augmenter les cotisations pour s'assurer que le régime dure. Si on augmente les taux de cotisation à 10 % ou 12 %...

M. Gautrin: Oui.

M. Poirier (Alain): ...d'ici dix ans, les jeunes qui vont arriver à 20 ans, à cette époque-là, vont payer des taux de cotisation très élevés pendant une très longue période, pour ne pas recevoir les mêmes avantages que leur prédécesseurs vont avoir eus. Et c'est cette équité-là qu'il faut peut-être... Il faut trouver un équilibre. Ça fait que c'est pour ça qu'on dit: Plus la caisse est capitalisée maintenant, moins les gens vont avoir à cotiser des sommes énormes dans le futur.

M. Gautrin: Mais vous acceptez avec moi que, s'il y avait eu un taux de croissance accéléré dans l'économie, s'il y avait plus de gens qui travaillaient, votre argument tomberait d'autant et qu'il commence à perdre de son importance lorsque les taux d'intérêt réels vont en diminuant.

M. Savard (Denis): C'est un ensemble de facteurs conjoncturels, effectivement, et plus le revenu d'intérêts est élevé, effectivement, plus la capitalisation est rapide. Ça, on en convient.

M. Gautrin: Je comprends.

M. Savard (Denis): Mais le taux de rendement moyen du régime au Québec a quand même été supérieur à 9,4 %, je pense, donc c'est un excellent taux de rendement. Et ce n'est pas un handicap. Et je pense que ce qui a été un handicap majeur depuis 10 ans...

M. Gautrin: Ce que vous entendez par taux de rendement, c'est le taux de rendement de la Caisse. C'est ça?

M. Savard (Denis): ... – oui, c'est ça – ...

M. Gautrin: Merci.

M. Savard (Denis): ...c'est la faiblesse de la capitalisation, c'est-à-dire qu'on n'a pas suffisamment mis d'argent dans le régime depuis les 10 dernières années. La réforme qu'on s'apprête à faire, elle a 10 ans de retard. Et c'est la principale constatation à laquelle on arrive.

Et, à ce moment-ci, il y a des choix qui ne sont pas des choix faciles, mais qui sont des choix qui s'imposent si on veut être en mesure que les niveaux des déboursés des travailleurs au Québec demeurent inférieurs à ce qu'ils pourraient se procurer sur une base individuelle. Dès qu'on excède 10 % des revenus à 25 ans, pour un travailleur qui commence maintenant, il pourrait s'acheter, sur une base individuelle, l'ensemble des régimes qu'offre le Régime de rentes du Québec et se retrouver avec de meilleures prestations à long terme, sur base individuelle. Donc, ça, il faut éviter à tout prix que ça se produise. Alors, il faut protéger les jeunes travailleurs du Québec pour qu'ils aient la garantie... Et, en plus, si on leur enlève la confiance qu'on va être capable de payer, en plus de dire: Je pourrais, comme individu, m'acheter l'équivalent, si je suis jeune travailleur maintenant au Québec, sur une base individuelle, de l'ensemble des prestations que me procure le Régime de rentes du Québec... Si on lui enlève la confiance en plus de dire: Je pourrais acquérir, sur une base individuelle, l'équivalent en payant moins, là, on a un problème, un fichu problème.

M. Gautrin: Vous n'êtes pas sur un sujet qui est couvert dans votre mémoire. Vous représentez l'Association des assureurs de personnes, hein? Le Régime de rentes couvre évidemment toute une partie qui est retraite et – vous l'avez bien expliqué – toute une partie qui est assurances. À votre estimé, si on avait un plan qui ne touchait strictement que les assurances – autrement dit, oublions tout ce qui est retraite – la cotisation nécessaire pour bénéficier des assurances prévues dans le plan, autrement dit ce qui touche la rente d'invalidité, la rente de conjoint survivant, qui est une forme d'assurance-vie, les prestations de décès, etc., ça serait combien?

M. Savard (Denis): C'est un calcul que nous aurions aimé faire, mais qui, étant donné que l'ensemble des variables... C'est différent pour quelqu'un qui est un homme ou une femme de 25 ans ou de 26 ans...

M. Gautrin: C'est exact.

M. Savard (Denis): ...et, effectivement, dépendant de son travail, quel pourcentage ça représente en fonction de son revenu; il y a trop de paramètres. On peut le faire pour un individu, dire: Voilà pour un âge donné, pour une situation précise, on peut faire ce calcul-là, mais vous donner un chiffre général pour l'ensemble de la population du Québec, je ne peux pas vous fournir cette donnée-là.

M. Gautrin: Bon. Alors, simplement pour ma culture personnelle et les débats qu'on aura à faire, une rente d'invalidité, par exemple, supposons que, comme individu, on achète une rente d'invalidité à 25 ans, lorsqu'on rentre sur le marché du travail, à un salaire correspondant à la moyenne des salaires canadiens, c'est-à-dire 35 000 $, le taux de cotisation est combien?

M. Savard (Denis): Encore là, je ne pourrai pas vous donner de réponse précise...

M. Gautrin: Ah bon!

M. Savard (Denis): ...parce que la prime varie en fonction de la profession que vous exercez, plus le risque que vous représentez. Si vous êtes un camionneur, si vous êtes considéré comme un col bleu, ou par rapport à quelqu'un qui est considéré comme un col blanc dans cette société, les primes vont être très différentes, parce que vous savez qu'il y a beaucoup de catégories au niveau de l'assurance-invalidité.

M. Gautrin: Je comprends ça. Mais vous comprenez aussi qu'il y a une partie, comme vous l'avez d'ailleurs très justement rappelé dans votre mémoire, qui est couverte par la CSST ou la Société de l'assurance automobile dans ce qui touche les rentes d'invalidité, donc c'étaient les risques supplémentaires que j'essaie... Mais, là encore, vous n'êtes pas capable de me donner une réponse.

M. Savard (Denis): Pour un individu, je pourrais vous le donner très rapidement, tenant compte de sa profession, de son niveau de revenus...

M. Gautrin: Autrement dit, il faudrait que quelqu'un vienne à vous, entre guillemets, se déshabille et, à ce moment-là, vous êtes en mesure de pouvoir faire les calculs pour lui. Mais, avoir une idée générale, vous ne pouvez pas.

M. Savard (Denis): L'ensemble des paramètres est trop compliqué.

M. Gautrin: Est trop complexe, hein. Parce que j'essaie de bien distinguer la partie réellement Régime de rentes de la partie assurances, tout en maintenant évidemment l'ensemble...

M. Savard (Denis): Oui.

M. Gautrin: ...des bénéficiaires.

M. Savard (Denis): Quoi qu'il en soit, ce que nous recommandons, c'est de dire: Voilà, les deux principaux bénéfices les plus importants du Régime de rentes actuellement, c'est le bénéfice de retraite...

M. Gautrin: Exact.

M. Savard (Denis): ...et le bénéfice d'invalidité.

M. Gautrin: Exact.

M. Savard (Denis): Ce sont les deux bénéfices les moins assumés individuellement.

M. Gautrin: C'est ça.

M. Savard (Denis): Donc, ce qu'on doit faire, comme société, c'est veiller à ce que ces deux bénéfices continuent d'être rendus à la population...

M. Gautrin: Et...

(16 h 20)

M. Savard (Denis): ...par l'entremise... et qu'on mette tous les efforts pour déplacer les sommes d'argent pour capitaliser le niveau nécessaire pour procurer le revenu de retraite aux travailleurs québécois et aussi leur garantir le revenu d'invalidité nécessaire, étant donné que c'est encore très marginal, les couvertures à l'égard à la fois de la retraite et de l'invalidité.

M. Gautrin: Ça, j'ai compris. Et, moi, j'essaie de poursuivre – tout en acceptant totalement votre raisonnement – de faire une espèce de petit pas un peu plus... d'avoir un régime de retraite qui soit financé à même les cotisations sur la masse salariale pour les entreprises et puis avoir un régime d'invalidité à caractère universel et général qui serait financé à même le fonds consolidé. C'est ça que j'avais comme piste que j'essayais d'explorer avec vous, et je n'ai pas l'impression que je peux aller beaucoup plus loin parce qu'il vous manque, à ce moment-là, des éléments.

M. le Président, mon collègue de Notre-Dame-de-Grâce avait une question, et je reviendrai après, si vous me permettez.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Copeman: Merci, M. le Président. Messieurs, madame. Il y a dans votre mémoire la notion qui est, je pense, une notion nouvelle qui est une cotisation spéciale de rattrapage. À ma connaissance, on n'a pas entendu parler de cette possibilité avant aujourd'hui. Alors, c'est un peu innovateur. Ma question se pose au niveau de la préoccupation, s'il en est une, de la parité avec le Régime de pensions du Canada. Est-ce que, pour vous, la parité, dans les taux de cotisation, avec le RPC est importante? Et, si oui, comment est-ce qu'on peut inscrire une cotisation spéciale de rattrapage à l'intérieur de cette notion de parité? Il me semble que, si c'est important, ça peut causer certaines difficultés de fonctionnement.

M. Savard (Denis): Il est bien sûr que c'est préférable qu'il y ait une parité. Quand on parle de cotisation de rattrapage, elle ne s'applique pas aux employeurs. Il ne faut pas qu'il y ait de distinction au niveau des employeurs, mais au niveau des individus uniquement. Et il est bien sûr que le choix d'initier une cotisation de rattrapage au Québec va influencer – parce que partout au Canada, on cherche des solutions pour arriver à une pleine capitalisation du régime, et les choix, ils ont beau être douloureux...

Et ce que je disais tout à l'heure, c'est qu'il est important que, les personnes qui sont les baby-boomers, on leur donne le temps de capitaliser le régime avant qu'ils se retrouvent à la retraite, et, plus on retarde... C'est pour ça qu'on a favorisé une hausse rapide parce qu'une hausse rapide des cotisations de base avec, en plus, une cotisation de rattrapage vont nous permettre d'aller chercher chez les individus qui vont profiter le plus du régime des cotisations avant qu'ils se retrouvent eux-mêmes à la retraite.

Donc, votre question à l'égard de la parité avec le Régime de pensions du Canada est une question très importante à cause de la mobilité de la main-d'oeuvre, et aussi on ne souhaite pas que le niveau de taxation... Parce que, même si c'est une assurance, entre guillemets, on peut l'assortir à une taxation; il ne faut pas qu'il y ait des niveaux trop différents. Je comprends cette préoccupation. Mais la conclusion à laquelle nous sommes arrivés, c'est qu'il est tellement évident que, autant le Régime de pensions du Canada, et même davantage le Régime de pensions du Canada, a besoin de trouver des formules innovatrices, toute solution mise de l'avant va être très rapidement copiée ou récupérée par tous ceux qui ont à capitaliser de tels régimes.

M. Copeman: Oui, je dois comprendre que – c'est un élément que je n'avais pas saisi – la cotisation spéciale de rattrapage s'applique uniquement aux employés.

M. Savard (Denis): Oui.

M. Copeman: C'est clair. Vous êtes préoccupés par la question de la mobilité de la main-d'oeuvre. Il ne faut pas, il me semble, que le taux au Québec, en particulier pour les employeurs, soit beaucoup plus élevé qu'un taux dans nos provinces voisines...

M. Savard (Denis): Tout à fait.

M. Copeman: Mais ce n'est pas nécessairement une solution à écarter. Mais on a depuis quelques semaines beaucoup utilisé le terme «équité». Qu'est-ce qui est équitable? La question peut se poser également: Une mesure spéciale qui s'applique uniquement à des employés, est-ce qu'elle est équitable dans le financement d'un régime? C'est peut-être une... Comme je vous dis, ce n'est pas à écarter a priori, mais il me semble que ça peut poser des questions. Également, ça devient une taxe essentiellement pour les travailleurs et travailleuses et ça brise la notion d'une certaine égalité dans le financement, les cotisations employeurs-employés, qui pourraient... En tout cas, ça peut être innovateur, mais ça peut aussi être la première brèche dans une digue là, qui...

M. Savard (Denis): Il y a une chose que nous craignons, c'est que, si les cotisations du côté des employeurs deviennent trop élevées, ça fasse une désengagement du côté de la contribution des employeurs, par exemple aux régimes de retraite individuels qu'ils ont et qu'il y a, sur place, dans les entreprises, de sorte que, finalement, ce qu'on va chercher d'une main, le travailleur le perd d'un autre côté. Je pense qu'il ne faut pas amener un désintéressement de ce côté-là. Il faut veiller à ce que...

Il ne faut pas qu'il y ait non plus une discrimination que l'employeur, s'il a à contribuer davantage pour ses employés âgés que pour ses employés jeunes... ou si, à ce moment-là, il va dire, il va vouloir mettre à pied ou ne pas engager d'employés plus âgés. Donc, ça, c'est pourquoi on veut que cette cotisation soit uniquement pour les employés comme tels, tous ceux qui travaillent, de sorte que, à ce moment-là, c'est eux directement qui vont obtenir le fruit de cette cotisation spéciale. Et c'est juste équitable parce que, plus ils sont âgés, plus la contribution sera élevée, c'est-à-dire, à ce moment-là, ils vont avoir moins... le nombre d'années va être plus court, au niveau de la cotisation, et c'est là-dessus que l'équité va se rétablir.

M. Copeman: Merci, monsieur.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci. Madame, messieurs, merci beaucoup pour la préparation et la présentation de votre mémoire.

J'invite maintenant le représentant d'Écofin (1995) inc. à venir se présenter.

(16 h 30)

La Présidente (Mme Leduc): Oui, alors ça me fait plaisir d'accueillir le groupe Écofin représenté par M. Tahar Mansour, qui est le président. Vous avez 20 minutes pour faire votre exposé, et ensuite il y aura un temps d'échange équivalent entre les deux parties présentes. Alors, M. Mansour.


Écofin (1995) inc.

M. Mansour (Tahar): Merci, Mme la Présidente. Messieurs, mesdames, merci beaucoup. D'abord, juste un petit mot pour dire que le groupe Écofin (1995) inc., c'est une toute petite boîte de rien du tout, qui a un très petit nombre de collaborateurs, où nous nous spécialisons surtout pour conseiller dans les services-conseils des PME: financement et aide administrative. Le président du groupe, c'est moi-même, et j'ai une formation en économie et en finance. Je ne parle donc au nom d'aucun groupe de pression en particulier, sauf peut-être un peu d'Écofin, qui pense qu'une réforme de la Régie des rentes est plus que due, et cette réforme-là, dans notre esprit, doit contenir à la fois une modification des taux de cotisation et une modification de la grille des prestations. Pourquoi? Nous pensons... Et ne comptez pas beaucoup sur moi pour vous inonder de chiffres. En fait, je ne veux parler surtout que de principes. Mais la première raison simple, c'est qu'un tout petit coup d'oeil sur le rapport annuel, par exemple, de la Caisse de dépôt et placement du Québec, je pense qu'il révèle quelque chose comme 13 000 000 000 $, 14 000 000 000 $ de placements, là, quelque part, de telle sorte que, si vous laissez le régime s'épuiser, en réalité ça équivaut à vendre tout simplement des actifs, soit des actions soit des obligations, pour sortir ces fonds-là.

Alors, maintenant il ne faut pas que... Je pense qu'il est temps que la solution soit plus une solution à long terme qu'une solution à court terme, et nous pensons que la solution durable serait à peu près en sept points: premièrement, un relèvement graduel mais inévitable du taux de cotisation – et nous insistons beaucoup sur le mot «graduel»; deux, une désindexation partielle des prestations; trois, un réajustement des prestations; quatre, une revue globale de ce que doit être la masse salariale assurable; cinq, une revue en profondeur de la notion d'assurance lorsque le risque est certain – et, comme nous le démontrerons, le risque l'est; six, une refonte complète du système de redistribution du revenu au Québec pour le remplacer par la notion de revenu minimum garanti; et finalement une réflexion profonde sur la politique familiale québécoise.

Bon. La situation actuelle de la Régie des rentes n'est pas, bien sûr, dramatique, si vous voulez, mais le temps presse quand même pour qu'il y ait une certaine réforme. On en parle à cause de l'équité intergénérationnelle; on en parle aussi parce que, dit-on, il y a un manque de confiance des jeunes. Nous reviendrons là-dessus, mais nous pensons que ce manque de confiance là est beaucoup plus dû à un manque d'information qu'à autre chose. Trois, il y a un problème d'exclusion, dans le Régime de rentes, des travailleurs à faibles revenus, alors que le Régime de rentes est effectivement supposé les protéger. Quatre, il y a une divergence, à la Régie des rentes, entre les bases de calcul des cotisations et celles des prestations, et nous reviendrons là-dessus.

Ce que le gouvernement nous propose comme objectifs de la réforme, ce sont essentiellement les choses suivantes. Le gouvernement nous propose une équité intergénérationnelle. En d'autres mots, les générations successives doivent avoir un taux de cotisation comparable si elles veulent avoir des prestations comparables. Et nous utilisons bien le mot «comparables» et non le mot «identiques». Deux, on nous propose une certaine solidarité sociale. En d'autres mots, on nous dit: Si, pour diverses raisons, une génération ne peut se garantir une protection adéquate à la retraite, les générations successives doivent lui venir en aide. Trois, on nous propose une responsabilité sociale partagée. En d'autres mots, on nous dit: La société ne peut se substituer à l'individu dans la prise en charge de ses responsabilités vis-à-vis de sa retraite, mais elle doit lui fournir les mécanismes nécessaires qui lui permettront d'atteindre ses objectifs. C'est ce que, à peu près, nous avons compris, là.

Pour cela, le gouvernement envisage quatre options: un, une forte hausse des taux de cotisation; deux, un élargissement de l'assiette de cotisation – en réalité, c'est à peu près, à quelques choses près, l'option 1; trois, une réflexion sur le choix du niveau de la réserve par rapport aux sorties de fonds – vous pouvez l'avoir, en d'autres mots, à deux, à trois, à quatre ou même à une demie si vous voulez ou, à la limite, très peu; quatre, le réaménagement des prestations. C'était à peu près la dernière option envisagée.

Nous avons quelques commentaires sur les objectifs. Le mot qui est peut-être le plus difficile dans le langage économique, c'est le mot «équité», et nous disons que l'équité au sens strict et encore plus l'équité intergénérationnelle ont toujours été des sujets de discussion plus ou moins philosophiques. Comme vous le savez, il y a toutes sortes d'équités: intertemporelle, intergéographique, horizontale, verticale, comme vous voulez. Et le mot «équité» est un mot subjectif, il n'est pas un mot objectif. Et, par conséquent, il demande une prise de décision politique. Ça, c'est définitif.

Deux, nous disons que, donc, la question qui se pose est la suivante: Si l'évolution sociétale fait en sorte qu'il y a inéquité intergénérationnelle, est-ce la faute de la société ou celle des générations concernées? Comme nous le soulignerons plus loin, une réponse doit être fournie à une telle question de fond si nous voulons trancher le litige et éviter de nous reposer la même question plus tard. En d'autres mots, puisque c'est une question qui est difficile et philosophique, tranchons-la une fois pour toutes.

Il y a le terme «solidarité sociale». Le terme «solidarité sociale» est un terme qui a été utilisé à peu près à différentes sauces, et le terme a été popularisé voilà quelques années pour souligner le soutien mutuel que s'accordent les différents groupes sociaux face à une situation socialement non désirable et/ou non acceptable, en d'autres mots une situation d'entraide. La notion de solidarité sociale implique-t-elle que le système de marché est si erratique qu'il ne peut permettre à un participant de se doter de réserves nécessaires à sa période d'inactivité, de telle sorte que la société se doit de pallier cette lacune en mettant à contribution ceux qui ont pu tirer leur épingle du jeu?

Et ça, j'ouvre juste une parenthèse pour vous dire qu'il y a deux grosses tendances dans les régimes de retraite. Il y a Martin Feldstein, qui a été un des plus gros penseurs là-dessus, qui dit: Laissez le système de marché s'arranger avec la retraite. En d'autres mots, il faut que l'individu soit capable d'épargner pour sa propre retraite, lui, plus tard. C'est ce qu'on appelle l'école de droite. Puis vous avez la Harvard School, elle, qui tourne autour de Steve Marglin, entre autres, qui vous dit: Effectivement, le système de marché ne donne pas assez, ne donne pas l'opportunité à l'individu de subvenir à ses besoins immédiatement et plus tard et, donc, pour accumuler une caisse de retraite. Et, par conséquent, il faut que la société le fasse pour lui en payant moins aujourd'hui, mais en recevant plus demain. Et, par conséquent, la notion de capitalisation complète dans les régimes publics de retraite, ça devient tout simplement une question désuète, là; ça n'a absolument aucun sens.

Le troisième point est la responsabilité partagée. Par cette simple phrase, le gouvernement vient de reconnaître que la contribution du travailleur à l'évolution et au développement du système s'étend au-delà de sa vie active, mais que l'employeur ne reconnaît pas toujours cette contribution. Il faut donc agir pour responsabiliser le travailleur et l'employeur. Que veut faire le gouvernement? On ne le sait pas vraiment. On peut toujours avoir sa petite idée, mais on ne le sait pas. Ça, c'est un constat qui découle tout simplement, à peu près, de ce que les régimes privés de retraite font. Les régimes privés existent parce que, généralement, l'employeur reconnaît la contribution de l'employé à l'enrichissement des actionnaires, pendant sa période de vie active aussi bien qu'inactive. Et, par conséquent, on le rémunère partiellement même lorsqu'il est inactif. Ce que le gouvernement dit, en d'autres mots, c'est que les individus à faibles revenus font exactement la même chose pour la société, sauf que l'employeur ne reconnaît pas toujours ça ou qu'il n'a pas toujours ces moyens-là. Et, par conséquent, nous, société, nous allons le faire pour lui.

Les options. Maintenant, nos commentaires sur les options. Les options du gouvernement du Québec tournent autour de deux variables importantes, soit la hausse des cotisations ou la réduction des prestations. Vous pouvez approcher ces deux variables comme vous voulez, le résultat va toujours rester le même. Que vous haussiez les cotisations ou que vous élargissiez l'assiette de cotisation ne changera pas grand-chose. En d'autres mots, 5 % sur 10 000 $ ou 6 % sur, admettons, 9 000 $ et quelque chose, ça va revenir à peu près à la même chose.

Par ailleurs, baisser la prestation ou reculer l'âge de la retraite revient à peu près à la même chose aussi. Mais ça, c'est des technicalités mathématiques, de toute façon. Ce que j'essaie, ou, du moins, chez Écofin inc., ce que nous essayons, c'est tout simplement de lancer vraiment, si vous voulez, une discussion sur des idées de fond. Il nous semble que le gouvernement du Québec peut être un peu plus innovateur et attaquer le problème à ses racines. Avant d'étaler nos suggestions, qu'il nous soit permis de faire quelques commentaires sur les hypothèses utilisées par la RRQ pour arriver à ses prédictions dans son étude actuarielle. Je n'irai pas vraiment sur toutes les hypothèses.

(16 h 40)

Moi, les hypothèses, je vais dire ceci: les projections au-delà de deux ans, j'y crois tellement fortement... j'y crois autant que je crois aux tireuses de cartes. C'est aussi simple que ça. Si vous sortiez des projections pour un an, deux ans, à la limite ça se défend. Mais, sur 40, 50 ans, là... Par ailleurs, les hypothèses, bien sûr, en autant que les hypothèses soient un peu, comment je dirais ça, raisonnables, entre guillemets, vous les acceptez ou vous les refusez, ça n'a pas à se justifier. Mais, généralement, l'expérience montre que des projections sur 40, 50 ans, ça tient beaucoup plus de la gymnastique que d'autre chose.

Maintenant, nos recommandations. La première recommandation – et nous pensons que c'est peut-être une des plus importantes – c'est d'abolir l'indexation complète des rentes de retraite. J'écoutais la semaine dernière, si ma mémoire est bonne, le président de la Régie des rentes du Québec qui nous parlait, qui disait à peu près, si je ne me trompe pas, qu'il n'était pas tout à fait d'accord qu'on désindexe les prestations de la Régie des rentes du Québec, admettons, à P moins 1 % ou à P moins 2 %. En d'autres mots, ce qu'on demande, c'est de les indexer peut-être au taux d'inflation moins 1 %, 1,5 % et 2 %.

Lorsqu'on me dit désindexer, en fait – surtout si je retiens les chiffres de Mme la ministre tout à l'heure, que 75 % des personnes à la retraite gagnent moins de 17 500 $ – je comprends l'argument du président de la Régie des rentes lorsqu'il nous dit qu'en réalité ce que vous êtes en train de faire, c'est que vous êtes en train de pénaliser les gagne-moins. Par contre, moi, l'argument que je vous dis est le suivant – pensez-y comme ça: lorsque vous indexez les prestations plus vite que les salaires ne sont indexés, c'est l'équivalent d'une augmentation d'une charge sur les salaires. En d'autres mots, c'est comme si, indirectement, vous étiez en train d'instaurer, si vous voulez, un taux de taxation.

À la limite, si le gouvernement n'accepte pas la désindexation à P moins 1 % et à P moins 2 %, une solution qui serait peut-être raisonnable serait de prendre – et celle-là, elle n'est pas écrite dans notre rapport – un taux d'indexation qui serait égal au taux moyen d'augmentation des salaires dans l'économie. En d'autres mots, par exemple l'année dernière, les salaires dans l'économie ont augmenté de 0,7 % et le taux d'inflation a été de 1,6 %. Au lieu d'avoir une indexation des prestations de la Régie des rentes du Québec de 1,6 %, vous les mettez à 0,7 %. Ça vous donne 0,9 % de marge, et 0,9 % de marge sur 5 000 000 000 $ et quelque chose, ça donne, à quelques choses près, comme 46 000 000 $, 47 000 000 $, 50 000 000 $, aux alentours de 50 000 000 $, quelque part. Mais là, au moins, vous dites: C'est une indexation sur la base de l'ensemble des salaires. Bien, ça, c'est un.

Deux, nous ne comprenons pas... Au fait, personnellement, j'ai travaillé à la Régie des rentes deux ans et deux semaines, du 13 août 1984 au 29 août 1986. Je n'ai jamais compris – je l'ai toujours demandé, je n'ai jamais eu de réponse – le rationnel qui existe derrière le fait qu'une prestation de conjoint survivant est supérieure au maximum de la prestation de retraite. En d'autres mots, si, moi, je suis retraité, que j'ai le maximum et que je crève avant, juste avant, est-ce que mes ayants droit, admettons ma conjointe, vont recevoir une rente de retraite supérieure à la rente que j'aurais reçue, moi, en ayant le maximum à cause, si ma mémoire est bonne – et je peux faire des erreurs là-dessus – de quelque chose qu'on appelle la «prestation à taux uniforme»? Ça, je l'ai laissé comme ça. Moi, je dis: Il faut revoir cette grille-là. Parce que, si le gouvernement ne revoit pas cette grille-là, il faut faire attention parce que, là, nous ne parlons plus d'assurance, nous parlons de programmes d'assistance, et ce sont deux choses différentes.

Trois, la notion de masse salariale assurable doit être revue en profondeur et plus particulièrement à sa base. Effectivement, la Régie des rentes cherche à couvrir surtout ceux qui ne gagnent pas assez. Alors, là, il y a un problème épineux parce que... Qu'est-ce que vous enlevez comme minimum en bas duquel vous n'imposez pas de taux de cotisation? Est-ce que c'est 3 500 $? Est-ce que c'est 2 500 $? Est-ce que c'est 2 000 $ ou 3 000 $? Nous, chez Écofin (1995) inc., nous ne le savons pas, mais nous pensons qu'un plus grand nombre de personnes gagne-petit doivent être couvertes. Jusqu'où le gouvernement veut aller? Nous ne le savons pas.

Quatre, nous proposons un relèvement graduel mais inévitable des taux de cotisation. Pourquoi inévitable? Ça, c'est certain parce que, sinon, de toute façon, la caisse est en train de se vider. Là où nous disons «graduel»... Et, si vous acceptez, si le gouvernement accepte notre proposition d'une indexation en fonction du taux moyen d'augmentation des salaires dans l'économie... Pourquoi le mot «graduel»? Parce que, en fait, les taux américains, les taux de nos concurrents, surtout américains... Le système américain est tellement complexe – c'est un vrai fouillis, là – que, moi-même, j'ai eu de la misère à chiffrer ce qui est dû aux rentes de retraite elles-mêmes. Mais, après tout, qu'on en dise ce qu'on veut, les chiffres économiques sont là: les entreprises ont un certain avantage dans le domaine de la taxation sur la masse salariale au Québec. Et nous utilisons le mot «graduel» pour garder ce qu'en anglais on appelle «the competitive edge». «No matter how small, you have to have it», c'est-à-dire que, même si j'ai un avantage de 0,1 % ou de 0,05 %, je veux quand même le garder. C'est pour cela que nous disons...

Alors, le gouvernement nous propose peut-être un 0,4 %. Moi, je dis: Avec les autres mesures que nous proposons, peut-être qu'un 0,3 % donnerait ce petit avantage de plus aux entreprises québécoises et surtout, entre autres, aux PME, d'autant plus que vous allez chercher un peu plus d'argent en indexant selon la masse salariale, un peu plus d'argent en augmentant la base. Si jamais on essaie que le minimum soit d'un peu moins que 3 500 $, un peu plus en essayant de calibrer – j'utiliserai le mot «calibrer» – les prestations de conjoint survivant et les prestations de retraite, etc., je pense que ça pourrait permettre au gouvernement de relever le taux de cotisation au lieu de 0,4 % par année, possiblement un 0,3 % par année. Et ça donnerait cet avantage-là aux petites entreprises.

Cinquièmement, Écofin inc., recommande au gouvernement du Québec une revue complète de la notion d'assurance lorsque le risque est certain. On nous parle effectivement, dans le document du gouvernement, et la Régie des rentes parle souvent du fait que le régime de la Régie des rentes du Québec, c'est un régime d'assurance. Moi, j'ai toujours compris qu'il y a assurance lorsqu'il y a un risque, et à un risque sont rattachées des probabilités. Or, sur cette planète-là, nous sommes à peu près certains, en fait, de vieillir... soit de crever, ou de prendre notre retraite, ou alors de payer des impôts. C'est à peu près les trois choses dont nous sommes à peu près certains. Donc, la notion de risque en tant que telle, elle n'existe pas. Si on veut rattacher la Régie des rentes à la notion de risque, il faut que la cotisation représente le risque.

La Présidente (Mme Leduc): M. Mansour, je vous inviterais à conclure rapidement, votre temps est à peu près écoulé. Si vous avez un point précis que vous voulez faire ressortir... ou vous pourrez le faire ressortir lors de la période des échanges.

M. Mansour (Tahar): Il y a peut-être un dernier point...

La Présidente (Mme Leduc): D'accord.

M. Mansour (Tahar): ...Mme la Présidente, si vous permettez, en 30 secondes.

La Présidente (Mme Leduc): Oui, ça va.

M. Mansour (Tahar): Il y a un point majeur, je pense, dont le gouvernement devrait tenir compte. La façon dont ça se passe aujourd'hui, c'est qu'on paie la Régie des rentes à toute personne qui prend sa retraite, sauf que, étant donné que la personne peut avoir quelques revenus, il peut arriver que cette personne-là paie de l'impôt sur le revenu, sur cette rente de retraite de la Régie des rentes. Moi, ce que je dis: Pourquoi ne pas prendre le taureau par les cornes et établir ce qu'on appelle un «earning test», un test de gains? Je n'ai pas besoin de 17 000 $, peut-être de 20 000 $, de 25 000 $. À partir de là, vous dites: Je coupe votre rente de retraite de x % par dollar gagné. Autrement, ce que le gouvernement est en train de faire actuellement, c'est tout simplement de prendre, via la Régie des Rentes, l'argent de la caisse du fonds consolidé de l'État via l'impôt sur le revenu. Les deux autres points, si vous permettez, je reviendrai là-dessus tantôt.

(16 h 50)

La Présidente (Mme Leduc): Alors, je vous remercie. Mme la ministre.

Mme Harel: Alors, merci, M. Mansour. Vous avez vous-même indiqué que vous aviez déjà travaillé à la Régie des rentes du Québec. Alors, je comprends que le mémoire que vous nous présentez est le fruit de votre réflexion et de votre expérience. Peut-être juste un mot – mon collègue à côté de moi me le mentionnait – dans votre mémoire, à l'avant-dernière page, vous abordez la question de la politique familiale. Vous avez dû certainement être heureux d'apprendre que, dans le cadre du Sommet, le premier ministre avait rendu publics les éléments des grandes orientations de la politique familiale, y compris une politique de garderies abordables, comme vous le signalez dans votre mémoire, qui est certainement un élément qui, selon vous en tout cas, favorise au premier chef une politique de naissance qui a un impact, même si c'est par incidence, sur les grands équilibres, notamment à la Régie des rentes du Québec. Et vous mentionnez que ce n'est pas d'une politique nataliste que les couples québécois ont besoin, mais d'une politique familiale. Alors...

M. Mansour (Tahar): Et, si vous permettez, là-dessus, ça, c'est un point qui est, je pense, très intéressant. C'est une réflexion, bien sûr, de plusieurs années. Moi, je n'ai jamais fait autre chose – puisque je sors d'un système d'éducation français – ni au secondaire, autre chose que de l'économie. Donc, c'est une réflexion d'il y a quelques années. Ce dont les couples ont besoin... Ce que les gens, en tout cas la population, devraient comprendre, c'est qu'aller travailler lorsqu'il y a des enfants, pour la femme, et surtout la femme monoparentale, ça coûte les yeux de la tête. Pas en sortie d'argent, mais en manque à gagner, ce que nous, en économie, on appelle le coût d'opportunité. Alors, nous, ce que nous proposons au gouvernement, c'est quoi? C'est d'accepter... de mettre tout ça dans le cadre d'une politique familiale qui minimiserait le coût d'opportunité de travailler et surtout pour les personnes monoparentales, qu'elles soient hommes ou femmes, je ne suis pas sexiste là-dessus. Bon. Mais c'est ça qu'il faut faire. Alors, donner des montants de 500 $, de 200 $ ou de 1 000 $, de 5 000 $, ce n'est pas ça qui va faire des enfants.

Par contre, il y a autre chose aussi: il y a cette fameuse question d'équité intergénérationnelle. Lorsque vous parlez d'équité intergénérationnelle, pourquoi les jeunes d'aujourd'hui ne veulent pas faire des enfants? Vous les pénalisez. J'ai lu et j'ai entendu des mémoires où vous dites: C'est les jeunes d'aujourd'hui qui vont avoir, à la retraite... donc il faudrait qu'ils paient plus. Mais attendez un peu, là! Pourquoi il faudrait qu'ils paient plus? Est-ce que c'est leur faute s'ils ne peuvent pas avoir d'enfants et que leurs enfants ne peuvent pas avoir d'enfants parce que le coût pour avoir des enfants est excessivement élevé? Alors, pourquoi ne pas avoir une politique?

En fait, ce qu'il faudrait – mais ça, c'est beaucoup plus complexe que ça et je pense que ça mériterait une étude beaucoup plus large que ça – c'est une réflexion profonde sur comment amalgamer l'ensemble des programmes qui touchent de près ou de loin à la famille. Et je pense – vous me corrigerez, Mme la ministre – que, si ma mémoire est bonne, il y en a à peu près 15 ou 17, quelque chose comme ça. Les confondre en un seul programme qui pourrait même englober, à la limite, les rentes.

Mme Harel: Voilà, c'est exactement l'objectif poursuivi: intégrer, dans une allocation qui va s'appeler «aide intégrée des enfants», l'ensemble des allocations qui sont dispersées, entre 10 ou 12, dépendamment aussi...

M. Mansour (Tahar): Oui.

Mme Harel: ...de l'état de santé des enfants, ce qui est versé actuellement aux parents.

À la page 2 de vos recommandations, vous abordez le relèvement graduel mais inévitable des taux de cotisation, nous dites-vous, et vous suggérez une augmentation du taux de cotisation de 0,3 % par année, pour l'employeur et l'employé, jusqu'à l'an 2015, date à laquelle le taux sera aux alentours de 11,5 %. Alors, vous voyez, il y a là vraiment une proposition qui, à bien des égards, pourrait avoir des effets assez pervers, d'une certaine façon, parce que les jeunes générations auront pour environ 10 % de bénéfices et auront à payer 11,5 % de cotisations, alors que, dans la proposition gouvernementale, la vitesse de croisière permet un taux permanent de 10 % autour de 2007. Et donc, à ce moment-là, ça permet à la génération qui nous suit d'être convaincue qu'elle en aura pour son argent.

Et je comprends que c'est là une différence assez fondamentale. En fait, vous en faites un programme d'assistance et non plus d'assurance, mais ce n'est pas là la mission propre de la Régie des rentes. Le régime est quand même une assurance contributoire qui permet un remplacement de 25 % du revenu. Alors, cette assurance contributoire, dans la mesure où on n'incite pas, on n'encourage pas, on ne favorise pas l'épargne-retraite, mon Dieu, les gens vont simplement attendre que, à partir des impôts, les gouvernements qui vont nous succéder voient à leur sécurité du revenu. Il y a là quelque chose de très, très inquiétant parce que ça supposerait que les gouvernements aient des moyens qu'ils n'auront plus. Alors, comment se fier sur ce qui apparaît, disons, assez fragile?

J'aimerais peut-être vous entendre sur cette question-là parce que ce n'est pas évident qu'une telle augmentation... En fait, à mon point de vue, elle passe à côté de tous les objectifs qu'on peut avoir: à côté de l'objectif d'équité, à côté de l'objectif de sécurité du régime. Et le plafond devient très élevé et pourtant n'assure pas, ne garantit pas d'une façon absolue qu'il y ait équité dans les bénéfices.

M. Mansour (Tahar): Mme la ministre, si je lis l'analyse actuarielle du Régime de rentes du Québec, 31 décembre 1994... C'est vrai que j'ai 1994, là...

Une voix: Il y en a eu depuis?

M. Mansour (Tahar): Pardon?

Mme Harel: Non, il n'y en a pas eu depuis, justement. Mais, M. Mansour, si on est réunis, là, depuis trois semaines et demie, c'est justement pour que l'analyse actuarielle que vous avez entre les mains ne s'applique pas. Parce que, si on avait laissé les choses dans leur état, elle s'appliquerait, alors on en serait à...

M. Mansour (Tahar): Oui, oui.

Mme Harel: ...13 %, hein, en l'an 2030...

M. Mansour (Tahar): L'an 2050.

Mme Harel: ...tandis que justement l'objectif, c'est de ne pas en arriver là, donc d'agir maintenant.

M. Mansour (Tahar): O.K. Mme la ministre, là vous allez me permettre, s'il vous plaît, quelque chose. J'ai essayé, lorsque j'ai travaillé à la Régie des rentes du Québec – parce que vous avez utilisé un mot clé tout à l'heure, ce qu'on appelle les effets pervers des hausses des taux de cotisation sur l'économie québécoise, entre autres – pendant 24 mois et deux semaines – et, là-dessus, j'ai pris deux ou trois semaines de vacances – j'ai essayé de trouver une réponse claire, simple, nette et précise à la question: Quel serait l'effet d'un relèvement graduel des taux de cotisation sur l'économie? et je ne l'ai jamais trouvée. J'ai consulté les meilleurs économistes, les meilleurs économètres, les meilleurs tout ce que vous voulez. La littérature existe; à la Régie des rentes, elle est là; les textes que j'ai utilisés sont là. Il n'y a jamais eu personne qui a prouvé quelque chose. Alors, les effets pervers, ça, vous permettrez que... disons que ce n'est pas prouvé. Ça, c'est un.

(17 heures)

Deux, lorsque vous dites qu'il y a une certaine inéquité intergénérationnelle, il est bien certain que les choses qui existent, les propositions qui existent aujourd'hui ou qui sont mises de l'avant vont possiblement bénéficier à une certaine génération pendant une certaine période de temps, mais ne bénéficieront pas à une autre génération pendant une autre période de temps. Mais, si les conditions économiques changent et que la situation se renverse complètement... Parce que les conditions économiques changent. On est passé des années fastes aux années néfastes. Tout le monde nous dit que la période de restructuration de l'économie québécoise et canadienne est pratiquement finie, j'ose croire qu'on entre dans une période, disons, meilleure. Dans ce cas-là, il est fort possible que les personnes qui pensent qu'elles vont être pénalisées aujourd'hui seront plutôt avantagées demain.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député de Salaberry-Soulanges. Ça va? M. le député de Vaudreuil. Verdun, excusez.

M. Gautrin: Excusez, Vaudreuil, je ne suis pas encore le chef du Parti libéral.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Vous avez peut-être des ambitions.

M. Gautrin: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Je vous remercie de votre présentation. Vous avez probablement dépassé votre pensée dans votre présentation, à un moment, lorsque vous avez dit: Les prévisions, c'est quelque chose que je ne crois pas sur...

Une voix: À long terme.

M. Gautrin: À long terme.

M. Mansour (Tahar): Je m'excuse. Oui, 50 ans.

M. Gautrin: Mais vous comprenez quand même néanmoins que c'est... Vous avez lu l'analyse actuarielle. Les analyses actuarielles font des prévisions où, bien sûr, il y a des variables purement économiques sur lesquelles vous pouvez douter. Mais les variables démographiques, ce sont des variables qui ne changent pas à court terme; ce sont des variables à mutation à très long terme. Je ne voudrais pas revenir dans un débat qu'on a pu avoir quant au sens des analyses de sensibilité. Les analyses de sensibilité, ça veut dire quoi? Ça veut dire que, si on prend les hypothèses les plus mauvaises, les hypothèses les meilleures sont faites aussi dans les analyses actuarielles pour donner une certaine idée de ce qu'on peut prévoir.

Alors, j'en reviens à votre taux de cotisation. Le taux de cotisation que vous choisissez, est-ce qu'il n'entraînerait pas une forte décaisse du régime? Vous savez qu'on est en situation de décaisse actuellement...

M. Mansour (Tahar): Oui, oui.

M. Gautrin: ...au régime. Les décaisses de régime, c'est quelque chose de... Ça veut dire qu'on vend une partie de ce qui se trouve à la Caisse de dépôt. La Caisse de dépôt, ce n'est pas de l'argent, c'est de l'argent qui est investi...

M. Mansour (Tahar): Absolument.

M. Gautrin: ...qu'on est obligé... Qu'on décaisse 1 000 000 $... Ah, excusez-moi! 1 000 000 $! Ha, ha, ha! Que l'on décaisse 500 000 000 $, c'est 500 000 000 $ d'obligations. Si c'était 1 000 000 $, on n'en discuterait même pas.

M. Mansour (Tahar): C'est 60 %.

M. Gautrin: Ça veut dire des obligations qu'on remet sur le marché, etc., une difficulté de refinancement. Vous ne voyez pas un problème à ce niveau-là?

M. Mansour (Tahar): O.K. Merci, M. le député, pour votre question. Il y a une première remarque sur ma critique des hypothèses démographiques, et c'est le meilleur exemple que vous auriez pu prendre: vous êtes tombé droit dessus. C'est vrai que les hypothèses démographiques sont du moins prévisibles à moyen et long terme. Sauf que ça agit aussi avec un décalage d'une certaine...

M. Gautrin: Absolument.

M. Mansour (Tahar): ...période de temps. Alors que les hypothèses économiques, avec des taux d'inflation, des taux d'augmentation de masse salariale, des taux d'intérêt, ça, ça agit le lendemain, ça.

M. Gautrin: Mais oui, je connais. Si vous regardez l'ensemble des tendances, il y a des tendances qui permettent...

M. Mansour (Tahar): Oui, oui! Oui, oui!

M. Gautrin: ...d'avoir des projections. Alors, évidemment, il y a des oscillations locales. Je suis parfaitement au courant, comme vous, des oscillations locales, mais ça n'empêche pas qu'on peut percevoir des tendances généralement à la hausse ou généralement à la baisse. Et vous le faites, vous-même, comme économiste.

M. Mansour (Tahar): Oui, oui, bien sûr, les tendances lourdes, ça, ça a toujours existé. Elles sont plus stables quelques fois que d'autres fois; pour d'autres... Cela étant dit, le 0,3 % que je privilégie – par rapport à un taux qui serait beaucoup plus rapide, comme à 0,4 %, ou un taux qui serait beaucoup plus faible, comme 0,25 % ou 0,2 % – effectivement pourrait entraîner une continuation du décaissement de la Caisse de dépôt. La Caisse de dépôt décaisse de toute façon. L'année dernière... Là, je ne veux pas...

M. Gautrin: Oui, on est d'accord, au fond. On a dit qu'on ne ferait pas un débat de chiffres, mais on sait...

M. Mansour (Tahar): Parfait! Sauf que...

M. Gautrin: ...qu'il y a eu une décaisse importante.

M. Mansour (Tahar): ...au lieu d'arrêter la chose dans deux ans, trois ans, vous allez l'arrêter dans quatre ans. Votre augmentation du taux de cotisation va tout simplement être plus faible mais, à la limite, sur une période plus longue.

Cela étant dit, je vais juste revenir un tout petit peu en arrière. Moi, en tant qu'économiste, et chez le groupe Écofin en tant que conseiller économique, nous aimons mieux travailler avec des hypothèses réalistes et, à la limite, qui tendent vers le pessimisme, mais avoir d'agréables surprises, plutôt qu'à l'inverse travailler avec des hypothèses qui sont plutôt vers le sens optimiste, mais être obligés de réenligner nos calculs à tous les trois ou quatre ans.

M. Gautrin: Je vous dirai que les actuaires ont le même discours que vous, en général.

M. Mansour (Tahar): C'est super. On s'entend, d'abord. Donc, le problème des décaissements de la Caisse n'est pas énorme. Là où ça serait vraiment important pour la Caisse, c'est que, si vous laissez la Caisse se vider, là, c'est 13 000 000 000 $. Mais une affaire de 0,1 % – juste, si vous me permettez, là – combien ça va donner comme manque à gagner, 0,1 %? Vous ne parlez même pas d'une dizaine de millions, à peu près, si jamais au lieu d'augmenter votre taux de cotisation de 0,3 % à 0,4 %... Je pense que je ne me suis pas trompé dans mes chiffres, là.

M. Gautrin: On va regarder, voir.

M. Mansour (Tahar): C'est peut-être un peu plus que ça.

M. Gautrin: Je comprends. Je voudrais aborder avec vous deux autres points.

M. Mansour (Tahar): Allez-y.

M. Gautrin: Un point que vous avez plaidé sur le principe d'indexer les rentes sur la moyenne des salaires canadiens. La tendance est évidemment d'indexer sur la moyenne de l'IPC. J'ai posé bien des fois la question aux gens qui sont venus témoigner ici avant vous. Ils nous ont toujours dit... Bon. Il y avait un argument de ne pas appauvrir en quelque sorte les pensionnés et, de plus, il y a des périodes où l'IPC était supérieur à la moyenne des salaires canadiens, puis des périodes où la moyenne des salaires canadiens était supérieure à l'IPC. Alors, vous avez évidemment pris l'exemple de 1994 – et vous l'avez bien choisi pour le cas, parce que je l'ai utilisé bien des fois aussi cet exemple-là – où l'IPC était bien inférieur à la moyenne des salaires canadiens, et vous avez des périodes où l'IPC était nettement supérieur à la moyenne des salaires canadiens, c'est-à-dire que 1995 a donné une indexation à l'IPC à 2,8 %, pour une moyenne des salaires à 0,9 %. Alors, bon, est-ce que vous aurez réellement des changements importants sur le fonctionnement du régime, d'après vous...

M. Mansour (Tahar): Oui.

M. Gautrin: ...à part la logique que j'ai très bien comprise, la logique économique que vous avez explicitée?

M. Mansour (Tahar): Non, c'est-à-dire que... Je vais commencer par ce point-là, mais, si vous permettez, vous avez soulevé un autre point qui est excessivement intéressant.

M. Gautrin: Oui.

M. Mansour (Tahar): Ce point-là est largement reconnu en économie, si vous augmentez les coûts. C'est comme si ce que vous étiez en train de faire à long terme... Vous ne pouvez pas avoir une hausse constante des salaires plus vite que le taux d'inflation: votre économie ne serait plus compétitive. C'est aussi simple que ça.

Donc, ça, c'est ce qu'on appelle un argument par l'absurde. À fortiori, à long terme, le taux d'augmentation de l'inflation va être un tout petit peu supérieur au taux d'augmentation des salaires, mais vous allez pouvoir avoir, à court terme, quelques petits points où les salaires vont augmenter un peu plus vite. Ça, c'est votre deuxième point.

Votre premier point que je trouve excessivement intéressant – et c'est là où sont les faux arguments – on vous dit que, si vous n'indexez pas les prestations de la Régie des rentes au taux d'inflation, vous appauvrissez les retraités. La vraie vérité... C'est faux, et ça, je peux l'affirmer: c'est faux. La Régie des rentes a dans ses poches une étude qui a été faite par une certaine Mme Louise Lessard, si ma mémoire est bonne, qui a été finie en 1995 et elle est publiée et elle s'appelle «La structure de la consommation des personnes âgées au Québec». Et cette étude-là prouve que la structure de consommation des personnes retraitées change. C'est la structure, M. le député. Nous ne parlons plus...

M. Gautrin: Autrement dit, vous parlez de... Le panier de provisions est...

M. Mansour (Tahar): Bien sûr, bien sûr. Ce n'est plus le même panier, et, par conséquent, vous ne lui appliquez plus le même taux d'inflation. Je regrette.

M. Gautrin: C'est-à-dire que la manière de calculer l'IPC est un peu basée sur un panier de provisions différent, là, du panier de provisions pour les personnes retraitées. C'est ça que vous nous dites.

M. Mansour (Tahar): Non. Je m'excuse. L'IPC, son moyen de calcul, à moins que ça ait changé dernièrement, est basé sur le panier moyen d'un salarié industriel moyen.

M. Gautrin: Oui.

M. Mansour (Tahar): C'est comme...

M. Gautrin: Oui. Ça, je comprends ça. Et vous dites à ce moment-là: Ce panier moyen est différent du panier de consommation d'un retraité.

M. Mansour (Tahar): Je dis: Il n'est pas nécessairement représentatif.

M. Gautrin: Est-ce que vous avez cette étude de Mme Lessard? Je pourrais m'adresser au président de la Régie? L'étude de Mme Lessard, est-ce que vous l'avez?

M. Mansour (Tahar): Moi, j'en ai une copie.

M. Gautrin: Qui aurait été faite chez vous, là?

(17 h 10)

M. Mansour (Tahar): C'est une étude sur la structure de la consommation des personnes âgées. Je pense que c'est Louise Lessard. M. Ménard, peut-être, pourrait nous le dire.

Une voix: Je ne le sais pas.

M. Gautrin: Bon. Alors, c'est parce que, si jamais ça avait été là, j'aurais peut-être été heureux de la connaître.

Mme Harel: On va vérifier, puis...

M. Gautrin: On va vérifier si ça existe, parce que ça pourrait être un...

Mme Harel: ...si tant est que...

M. Gautrin: Si tant est...

Mme Harel: ...on puisse l'avoir, on la remettra au Secrétariat des commissions.

M. Gautrin: Ça serait intéressant. Alors, je vais prendre le temps qu'il me reste avec vous pour aborder le dernier point, que vous n'avez pas eu la chance d'aborder, dans lequel vous dites: Puisqu'une partie de ce qu'on obtient de la Régie des rentes est taxée, vous avez un circuit où ça part de la Régie des rentes pour retourner après au fonds consolidé. Remarquez, quand même, il y a une différence, le fonds consolidé et ce qui était dans les comptes de la Régie. Mais il y a aussi un phénomène que ce qui est taxé comme tel, il y a une partie qui s'en va au Québec et une partie qui s'en va au fédéral, parce que, dans le régime fédéral, on paie des impôts et au provincial et au fédéral. Donc, vous, ce que vous nous suggérez, c'est qu'au lieu que le Régime des rentes soit taxable, vous dites: Il ne serait pas taxable, mais on le diminuerait en fonction des revenus des personnes. C'est à peu près ça que je comprends.

M. Mansour (Tahar): Moi, ce que je vous dis: Qu'on divise les personnes retraitées, si vous voulez – et ça, c'est un jugement politique et non économique, c'était notre jugement subjectif – en «haves» et «have-nots»...

M. Gautrin: Non, mais tu sais, on fait de la politique aussi.

M. Mansour (Tahar): ...entre ceux qui en ont et ceux qui n'en ont pas. Alors, on définit une limite. À partir de cette limite-là – supposons que ce soit 10 000 $, O.K., supposons...

M. Gautrin: Oui.

M. Mansour (Tahar): ...c'est un chiffre farfelu, mais prenez-le comme ça – ...

M. Gautrin: Non, non, c'est correct, allons-y.

M. Mansour (Tahar): ...bien, pour 10 000 $, vous dites: Toute personne qui gagne plus de 10 000 $, je n'ai pas besoin de lui donner sa rente de retraite de toute façon. Ce qu'il faut comprendre, c'est que ce travailleur-là, en contribuant toute sa vie d'actif, d'employé, à la Régie des rentes, il n'aura contribué qu'une minime partie de ce qu'il recevra. Par conséquent, pourquoi pouvez-vous lui donner une rente lorsqu'il n'en a pas nécessairement besoin, d'après la définition que vous, vous avez mise de ceux qui en ont et de ceux qui n'en ont pas?

M. Gautrin: Est-ce que vous me permettez de poursuivre le débat avec vous, si j'ai encore un peu de temps? Faites attention, là. Vous connaissez quand même la structure des régimes privés de rentes, parce que la personne qui va être retraitée va souvent avoir un régime privé. Or, une bonne partie des prestations, dans les régimes privés de retraite, tiennent compte...

M. Mansour (Tahar): Oui.

M. Gautrin: ...de l'apport du Régime de rentes. Alors, si on allait tel que vous le suggérez, vous auriez un effet de débalancement sur la structure des régimes privés de retraite. Je pensais, moi, que vous proposiez – et c'est peut-être ce que vous proposez aussi – d'imposer éventuellement le taux marginal d'imposition tout de suite à la sortie...

M. Mansour (Tahar): Non!

M. Gautrin: ...du Régime de rentes et d'affirmer au départ que les prestations du Régime de rentes ne sont pas taxables et, en contrepartie, de les diminuer de l'équivalent du taux marginal d'imposition, ce qui serait en quelque sorte retirer au fédéral...

M. Mansour (Tahar): Non, non, non.

M. Gautrin: ...une partie de ce qu'il – ha, ha, ha! – recevrait.

M. Mansour (Tahar): Un seul petit mot. Bien, ce que je dis, vous vous rappelez, on a eu un livre vert sur la fiscalité des Québécois, je pense, en 1985 ou en 1986...

M. Gautrin: Oui.

M. Mansour (Tahar): ...et il y a la structure d'impôt négatif là-dedans. C'est cette structure-là. Ce que je propose, c'est la chose suivante: il est bien certain que vous allez pénaliser ceux qui ont des régimes privés de retraite, quoique le calcul, je pense, de la Régie des rentes tienne compte des régimes privés de retraite. Mais c'est normal parce que les régimes privés de retraite sont des régimes qui sont pleinement capitalisés, alors que les régimes publics de retraite sont des régimes qui sont partiellement capitalisés, et, par conséquent, vous ne payez jamais le coût. Et c'est pour cela qu'au début je dis: Je m'excuse, mais il n'y a pas d'assurance, c'est un régime d'assistance.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie beaucoup pour la préparation...

M. Gautrin: Je vous remercie. On aurait pu en avoir à échanger beaucoup plus longtemps sur votre intéressante présentation.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): ...et la présentation de votre mémoire. Ça termine nos interventions concernant les groupes. Permettez-moi de déposer des mémoires avant de procéder à la conclusion.

M. Gautrin: M. le Président, une minute pour pouvoir aller saluer notre...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Si vous me donnez une seconde, je vais le faire.

M. Gautrin: Excusez.


Mémoires déposés

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): J'aimerais procéder tout de suite pour rendre publics, comme s'ils avaient été présentés devant la commission, pour déposer les neuf mémoires des personnes et des organismes qui n'ont pas été entendus par la commission dans le cadre de la présente consultation, soit: Association des banquiers canadiens, division du Québec; Association canadienne des compagnies d'assurance de personnes inc.; Chambre de commerce du Québec; Fédération indépendante des syndicats affiliés; Mme Joan Gross; Office des personnes handicapées du Québec; Parlement étudiant du Québec; Projet Genèse; M. Brian Welsh.

Avant de procéder aux remarques finales, justement, j'ajourne pour deux minutes.

(Suspension de la séance à 17 h 16)

(Reprise à 17 h 17)

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, nous procédons aux remarques finales. Vous avez chacun 15 minutes, M. le député de l'opposition, porte-parole du dossier, et Mme la ministre. Et nous procéderons, évidemment, tout de suite après aux remerciements. Alors, M. le député de Verdun.


Remarques finales


M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Je voudrais d'abord commencer par remercier tous les gens qui sont venus témoigner devant cette commission. Ça a démontré un effort de participation et de recherche important de beaucoup de gens qui sont intéressés par le Régime de rentes. C'est un processus démocratique éminemment enrichissant. Et je dois dire que les consultations que nous avons menées ont permis de préciser certains points de vue, de mieux comprendre les préoccupations des gens qui sont venus témoigner devant nous.

J'aurais un souhait néanmoins, parce que je reviens à une question que j'avais soulevée dans les remarques initiales: Est-ce que l'exercice que nous faisons ici est un exercice purement vain et que, de fait, ce sont les négociations du ministre des Finances avec ses partenaires, les autres ministres des Finances, qui vont arrêter les orientations du Régime de rentes? Je souhaite que ça ne soit pas le cas.

(17 h 20)

Et, pour que ça ne soit pas le cas, il y aurait peut-être lieu que cette commission, à un moment, voie s'il n'y a pas certains grands consensus que nous aurions pu établir dans cette commission et qui pourraient être transmis au ministre des Finances. Car il est clair que l'harmonisation – et on aura probablement à en débattre cette semaine – entre le Régime de rentes du Québec et le Régime de pensions du Canada est quelque chose que nous cherchons à maintenir, que, je crois, le gouvernement cherche aussi à maintenir et qu'il y a lieu de maintenir. Mais, pour harmoniser les deux régimes, il n'est pas inutile de bien préciser quelle est notre position, quitte à devoir la négocier ensuite.

Le Régime de rentes du Québec, suite à l'étude actuarielle, avait besoin qu'on se penche sur son taux de cotisation. Je ne ferai pas ici de petites politicailleries en disant: Bon, c'est à cause d'untel ou d'untel, on aurait dû augmenter avant ou pas augmenter avant. C'est certainement nécessaire qu'on procède à une augmentation de la cotisation.

Le taux d'augmentation de la cotisation, je ne suis pas convaincu, et je n'ai pas été convaincu non plus par les personnes qui sont venues témoigner devant nous, qu'il faut... certainement pas ce qu'on appelle le taux d'accroissement rapide. Et j'ai des doutes encore. Et j'aurai à étudier plus en détail les études économiques qui ont été et qui seront déposées, j'imagine, par la Régie, sur les effets économiques d'un taux d'accroissement, même rapide, dit-on. On peut facilement l'anticiper, mais, même un taux d'accroissement, le scénario moins rapide, les effets économiques de ce scénario doivent être étudiés.

Grandes conclusions à tirer de ces consultations: il y a une volonté manifeste, de la part des gens qui sont venus témoigner devant nous, de garder certains ou presque tous les bénéfices du régime. Certes, pour ce qui touche le régime de pensions, c'est-à-dire la dimension pension, il est clair que personne ne l'a remise en cause. Il importe aussi que, dans toute réforme du régime de retraite, même si on pouvait envisager une séparation entre la dimension retraite et la dimension assurance, la protection des personnes invalides soit maintenue. Et je crois que ça a été un consensus qui a été établi dans cette commission, la protection de la rente d'invalidité.

La question de conjoint survivant – et le gouvernement a ouvert la porte dans son intervention cet après-midi – va être réétudiée avec les modifications qu'il y a dans, disons, la structure des couples et la participation des femmes au marché du travail. Faudra-t-il l'inclure dans la loi maintenant? Je pense qu'il y a matière à débat autour de cela. J'insiste quand même sur le fait que c'est sujet à débat et à discussion avec la partie fédérale ou les représentants du Régime de pensions du Canada.

Personnellement, je n'ai pas été convaincu, et je ne le suis toujours pas, de l'importance de faire disparaître ou de ne pas indexer l'exemption annuelle de base. J'ai besoin de refaire un certain nombre de calculs. On a débattu, on a échangé là-dessus. Je crois que la non-indexation de l'exemption annuelle de base est pénalisante, mais je suis ouvert quand même à modaliser et à regarder ce qu'il y a à faire là-dessus, avec l'objectif de mieux protéger ou de ne pas pénaliser les personnes qui gagnent les salaires les plus bas. Je pense que l'objectif est partagé, tel que je l'ai compris, de part et d'autre de cette Chambre. Et il s'agit réellement d'une question purement calculatoire à vérifier les effets de l'un ou de l'autre des scénarios sur ces populations.

Des pistes intéressantes ont été amenées par certaines personnes qui ont témoigné devant nous, qui n'étaient pas présentes dans le livre vert et qu'il y aurait lieu d'envisager. Je pense à l'augmentation du maximum des gains admissibles, une possibilité d'augmenter les gains admissibles en ne suivant plus à ce moment-là le principe du 25 % de retour sur les cotisations pour cette partie du gain admissible. Certaines personnes sont venues témoigner dans ce sens-là. Ce n'était pas dans le livre vert. Il y a lieu de se repencher peut-être sur les pistes qui ont été amenées à ce moment-là.

À mieux préciser aussi la question sur... du moins je le crois, tout en protégeant les droits des personnes et des individus, ce qui est de nature assurance, de nature retraite, tout en protégeant, et je le répète parce que c'est un consensus qui a eu lieu dans cette commission... de ne pas vouloir diminuer les bénéfices que les gens obtiennent. Mais on peut débattre, et il y aura peut-être lieu de le débattre, à savoir si tous ces bénéfices doivent être obtenus à même le Régime de rentes ou pourraient l'être à même d'autres programmes, avec une protection analogue.

Je vais terminer ici, M. le Président, mes remarques préliminaires. Je pourrai les augmenter un peu en offrant ma collaboration à la ministre sur ce travail qui devrait être non partisan. Le Régime de rentes, et c'est le propre, d'ailleurs, de tout ce qui touche l'actuariat, a une pérennité qui, certainement, dépassera le temps de vie de votre gouvernement. Et, un jour ou l'autre – et, je le souhaite, le plus rapidement possible, et, vous, vous pensez que ce sera le plus tard possible – les gouvernements changeront, le Régime de rentes restera. Et, dans ce cadre-là, je souhaite, M. le Président, qu'on soit en mesure d'avoir une approche, en ce débat, qui soit la moins partisane possible, et je vais certainement, de notre côté, essayer de collaborer à toute amélioration qui est possible pour le régime, tout en ayant déjà balisé un petit peu quelles étaient les conclusions sur lesquelles je souhaiterais que le régime aille.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci, M. le député de Verdun. J'invite maintenant Mme la ministre d'État de l'Emploi et de la Solidarité à faire la conclusion.


Mme Louise Harel

Mme Harel: Alors, merci, M. le Président. D'entrée de jeu, je voudrais vous transmettre la remarque que le député de Verdun, dans toute sa sagesse, me faisait il y a quelques minutes, à l'effet que la pérennité du Régime de rentes va même survivre à notre propre existence. Alors donc, c'est, d'une certaine façon, aussi pour d'autres, hein, que l'on prendra des décisions.

Je pense que le cadre du salon rouge, c'est le cadre plus formel et approprié pour justement le genre d'examen que l'on fait. Un des figurants au premier plan, là, dans ce qui est devenu la Régie des rentes et la Caisse de dépôt et placement, en fait l'ancien premier ministre du Québec, m'a raconté que c'est ici même dans cette enceinte, au salon rouge, que la Conférence fédérale-provinciale avait débuté. Je crois que ça s'est poursuivi au Château Frontenac, mais que, finalement, c'est ici qu'à l'époque – c'était sous le gouvernement de M. Pearson et c'était Mme Judy Lamarsh – le Québec a fait des gains considérables qui, malheureusement, se seront abruptement interrompus avec l'arrivée de M. Trudeau. Mais ce sont des gains qui ont favorisé à la fois la croissance économique – je pense en particulier à la Caisse de dépôt, qui soutient plus de 400 entreprises au Québec – et puis ont permis aussi de réduire l'appauvrissement des Québécois et leur taux d'assistance.

Alors, nous en sommes donc arrivés au terme de la consultation et, par-delà certaines divergences sur les mesures à appliquer, je constate avec beaucoup d'enthousiasme qu'un très fort pourcentage des participants qui sont venus devant la commission ont appuyé l'opération de consolidation du Régime de rentes du Québec. On n'a pas assisté, d'aucune façon, à ce qu'on pourrait penser, à une remise en question du Régime de rentes, bien au contraire. Je prends la liberté de citer le président du Conseil du patronat, M. Ghislain Dufour, qui a déclaré au tout début de nos travaux, et je cite: «La réforme du Régime de rentes est nécessaire pour assurer sa viabilité. Je pense qu'il y a un consensus entre les patrons, les syndicats, les travailleurs non syndiqués, le gouvernement et l'opposition.» Fin de la citation.

(17 h 30)

M. Dufour poursuivait sur la nécessité de tenir compte des conséquences économiques de la réforme. Il faut évidemment y revenir, et j'aurai l'occasion d'y revenir tout de suite. Par ailleurs, le Syndicat de la fonction publique du Québec a qualifié le Régime de rentes d'instrument exceptionnel sur le plan économique. La Fédération canadienne de l'entreprise indépendante a rappelé que le Régime de rentes était extrêmement important pour les propriétaires des petites ou moyennes entreprises. La Confédération des caisses populaires et d'économie Desjardins a présenté le régime comme l'un des piliers de notre système de sécurité du revenu pour les personnes à la retraite. La Fédération étudiante universitaire du Québec, à l'instar de plusieurs autres participants à la consultation, a enjoint en fait le gouvernement d'agir rapidement.

J'aurais pu citer beaucoup d'autres participants. Une chose est sûre: rarement a-t-on pu observer une telle unanimité autour d'un projet gouvernemental. Quelles que soient les opinions émises sur les solutions proposées dans le livre vert, je crois pouvoir affirmer qu'un consensus s'est réalisé tout de suite autour des principes d'équité entre les générations, de solidarité et de partage des responsabilités et autour des objectifs qui consistent à établir rapidement un taux de cotisation constant sur une très longue période, évidemment toute la modulation étant de savoir ce que signifie «rapidement», et puis à garantir qu'au cours de cette même période les personnes âgées, les travailleuses, les travailleurs et les générations futures pourront, hors de tout doute raisonnable, bénéficier de leurs rentes de retraite.

Il y a eu également un examen – je ne parle pas d'un consensus – sur la question d'une capitalisation accrue. Et, à cet égard, je comprends qu'il faille écarter le taux de cotisation de l'analyse actuarielle de 1994, et cela s'impose pour favoriser l'équité entre les générations. Du côté gouvernemental, nous pensons qu'une capitalisation accrue du Régime de rentes aura des effets bénéfiques importants sur l'économie à long terme.

D'abord, l'augmentation de la réserve et de l'épargne domestique occasionnée par des cotisations plus importantes va se traduire par un accroissement du capital d'investissement disponible pour les entreprises, ce qui entraîne à ce moment-là une diminution du coût du capital et ça a comme résultat une augmentation des investissements et de la production. Puis un tel filet d'épargne-retraite, qui est universel, transférable et pleinement indexé, favorise la nécessaire mobilité de la main-d'oeuvre qui est exigée par les transformations du marché du travail dans le contexte de la mondialisation. Plutôt que d'être un frein, plutôt que d'être une force d'inertie, à l'inverse, ce genre de filet d'épargne, ce genre de filet d'épargne-retraite, ce genre de filet de protection sociale est au contraire un plus dans la nouvelle économie. Et nos voisins américains nous envient, eux qui doivent, à la pièce, se doter de régimes de santé, d'assurance-maladie, d'assurance-accident, de retraite, régimes qui, à la pièce, leur coûtent beaucoup plus cher et ne produisent pas les mêmes effets bénéfiques que le régime public qui assure le caractère de transférabilité et d'universalité.

Également, je voudrais tout de suite, là – et je me reproche de ne pas l'avoir fait – souligner l'excellente collaboration du député de Verdun, sa participation active, intelligente, éclairée à nos débats. Et, d'une certaine façon, je l'envie parce que lui procède à partir de ses propres études – je sais qu'il a une collaboratrice sur laquelle il peut compter – mais, moi, j'ai pu compter sur une équipe chevronnée de collaborateurs: M. Legault, le président de la Régie de rentes, qui a participé à tous nos travaux; M. Ménard, l'actuaire, qui est aussi à la disposition de la commission pour les travaux que nous poursuivrons; et puis M. Émond, M. Tremblay, de la Régie, et Mme Monette. Alors, je veux les en remercier ainsi que Monique Thériault, qui travaille au cabinet et sur laquelle j'ai pu compter pour préparer et les fiches-synthèses, les analyses des mémoires et les différents dossiers.

C'est donc dire que les membres de cette commission – je le dis immédiatement parce que je suis certaine que c'est à l'unamité qu'on va vous remercier – ont pu travailler, je pense, de façon sérieuse et presque amicale à la recherche de solutions. On n'est pas en collision sur les objectifs. On pourra peut-être l'être sur les modalités. Et, là encore, c'est prématuré de penser qu'on puisse ne pas s'entendre. Il est possible aussi qu'on s'entende sur les modalités. Mais, chose certaine, M. le Président, vous avez une façon de présider nos débats qui incite, qui en fait favorise, je pense, un échange sous forme de dialogue plutôt que sous forme de confrontation.

Alors, nous avons en fait à, sans doute, dissiper aussi une question qui a été posée par le député de Verdun, qui est celle de la mission du régime à l'égard de son rôle d'assurance pour d'autres prestations que celles de la retraite. Je comprends cependant que le député de Verdun écarte maintenant le transfert de la rente d'invalidité dans un régime financé par les impôts. Ah! Bon. Alors donc, je comprends que c'est encore là un sujet de discussion.

M. Gautrin: Si vous me permettez, il vaut mieux préciser. Je pense qu'il y a eu consensus ici sur la nécessité de maintenir l'intégralité des prestations d'un régime d'invalidité. Reste ouvert néanmoins à savoir s'il doit être financé à même ce qu'on pourrait appeler une taxe sur la masse salariale – si tant est qu'une contribution au Régime de rentes est une taxe sur la masse salariale – ou à même le fonds consolidé du Québec. C'est un débat qui est ouvert et que peut-être on aura à poursuivre ici. Ce que je voulais bien préciser, c'était que la partie qui était sur les prestations – et je crois que, de part et d'autre, le consensus a été très clair de la part des gens – il ne fallait pas toucher à l'ensemble des bénéfices qui étaient inclus dans ce régime d'assurance.

Mme Harel: Bon. À cet égard, c'est évident que tout ce qui aurait pour effet d'augmenter le fardeau fiscal des contribuables ne pourrait pas être retenu par le gouvernement, tout au moins pour les années subséquentes. Et je ne pense pas que la proposition du député soit non plus d'encourager une hausse des impôts.

Cependant, je pense qu'on doit regarder la mission, le rôle d'assurance pour les autres prestations. Moi, je crois que le Régime de rentes, c'est un régime public qui est un régime d'assurance pour des prestations et je voudrais citer la firme Towers, Perrin devant la commission, qui a dit que le régime était, et je cite, «un contrat social entre le gouvernement et la population». Alors, ce contrat social vise à protéger les travailleuses et travailleurs et leur famille contre la perte de revenus occasionnée par la retraite, mais aussi, jusqu'à maintenant, contre la perte de revenus occasionnée par l'invalidité et le décès. Dans la perspective où ce ne serait plus le cas, c'est évident qu'il faudrait une alternative. Si ce n'est pas une alternative, disons, contributoire à un régime d'épargne et d'assurance, il ne peut pas y avoir, j'imagine, un vide. Alors, c'est une autre sorte de régime, là, qui serait à ce moment-là imputé, si vous voulez, au fardeau fiscal des contribuables. Mais on aura sans doute l'occasion – et je le souhaite, là – de revenir en séance de travail sur cette question-là, notamment pour aborder la question de la rente de conjoint survivant.

Le Régime de pensions du Canada a reporté, dans une phase ultérieure, dans une phase II, cette question de la rente de conjoint survivant. Je pense qu'il est de notre intérêt de ne pas fermer le dossier, nous, avant de l'avoir mieux exploré. Le principal argument en faveur de la modification de la rente de conjoint survivant est que, pour l'avenir, le taux de participation des femmes au marché du travail a considérablement augmenté depuis la création du Régime de rentes, en 1966. C'est une réalité, mais en même temps cette progression a ralenti au cours des 10 dernières années, et une étude effectuée par la Régie des rentes en 1992 montre que les femmes se trouvent, pas tout autant mais encore plus qu'avant, plus démunies que les hommes à la suite du décès du conjoint. Dans toute révision future de la rente de conjoint survivant, il faudra tenir compte de ces données.

Une voix: ...équité salariale.

(17 h 40)

Mme Harel: C'est ça. Alors, dans quelques années, évidemment.

Il en va de même quant à l'examen qu'on doit faire pour la prestation de décès. Des intervenants ont recommandé des changements. Je crois qu'il est même opportun qu'on se penche sur ce type de prestation pour, à mon point de vue, la conserver, mais sous une forme différente, notamment pour examiner la forme qu'elle pourrait prendre, d'une prestation uniforme et non pas modulée comme c'est le cas présentement.

D'autre part – je pense qu'il a été le premier à en parler, et plusieurs participants l'ont fait aussi – le député de Verdun a rappelé la nécessité de vérifier périodiquement l'évolution du régime. L'intention du gouvernement est à l'effet de procéder à une analyse actuarielle à tous les trois ans et d'émettre une opinion publique sur la pertinence des taux de cotisation fixés par la loi de manière à ce que, si les objectifs concernant les niveaux de réserve n'étaient pas atteints, des correctifs puissent être suggérés et qu'à tous les six ans, donc à toutes les deux fois ces analyses actuarielles, une commission parlementaire permette à ceux et celles qui veulent se prononcer sur l'évolution du régime de le faire. Cette surveillance constante du régime obligera le gouvernement à corriger le tir aussitôt que la situation l'exigera. L'inaction des dernières décennies ne pourra se répéter, et cela contribuera grandement à redonner définitivement à la population la confiance qu'elle doit avoir dans son régime public de retraite.

Plusieurs intervenants ont examiné, soit pour l'appuyer soit au contraire pour la critiquer, cette proposition fédérale de mettre fin à l'indexation complète des prestations à l'indice des prix à la consommation. L'indexation partielle, oui, réduirait de façon importante les coûts du régime, mais il faut prendre en considération les conséquences d'une telle mesure sur le pouvoir d'achat non seulement des retraités, mais en particulier des femmes à cause d'une espérance de vie beaucoup plus longue.

Le Régime de rentes est un régime de base, et les prestations qu'il accorde sont modestes. Pour ceux et celles d'entre vous qui avez bénéficié du service que la Régie offre de faire connaître quel est le niveau de nos prestations, vous avez sans doute, comme moi, tiré la leçon que c'était là un remplacement du revenu modeste. Je crains que la désindexation alimente le manque de confiance de la population envers le régime. On perd de l'intérêt à cotiser dans un régime dont la valeur des prestations risque de diminuer.

Et je souligne à la commission que les groupes de jeunes, en majorité, acceptent la charge additionnelle d'un taux plus élevé raisonnable. En fait, ce qu'ils ne veulent pas, c'est participer à un régime tronqué par la désindexation, parce que c'est eux, finalement, qui seraient les premiers à en souffrir. Il faut envisager la possibilité que le Régime de pensions du Canada adopte la désindexation partielle, et le Régime de rentes du Québec, pour maintenir la meilleure équivalence possible, devra envisager d'autres mesures pour ne pas avoir à recourir à la désindexation.

Au cours de la consultation, nous avons aussi abordé la question du maximum des gains admissibles. Le livre vert ne formulait aucune recommandation à ce sujet. Comme on sait, la Colombie-Britannique a depuis proposé, au cours des discussions avec les autres provinces et le fédéral, de porter le maximum des gains admissibles, qui est actuellement de 35 400 $, à 50 000 $ de manière à ce que cette hausse du plafond permette de diminuer le taux de cotisation et contribue à créer plus vite une réserve importante. Les experts de la Régie des rentes vont approfondir cette question, dans la perspective – je le dis immédiatement – où le Régime de rentes doit rester un régime d'assurance et qu'il doit exister un lien entre les cotisations payées et les prestations versées. Par exemple, il ne serait pas question pour nous d'envisager de hausser le maximum des gains admissibles en n'ayant pas, à l'équivalence, un remplacement du revenu à la retraite sur les cotisations versées.

M. Gautrin: Mais le taux pourrait varier. Le taux de remplacement du revenu pourrait varier.

Mme Harel: Voilà. Alors, logiquement, une hausse du maximum des gains admissibles devrait donc s'accompagner d'une hausse des prestations versées, l'un des aspects intéressants de cette option. Et, comme nous l'avait fait remarquer la Coalition des aînés du Québec, elle entraîne une diminution du temps supplémentaire avec l'effet positif sur la création d'emplois que cela suppose. Évidemment, je rappelle aussi que cette hausse du maximum des gains admissibles peut permettre de réduire le taux de cotisation permanent.

Une autre mesure – et je termine – qui n'était pas contenue dans le livre vert, mais qui mérite aussi un examen beaucoup plus attentif parce qu'elle est susceptible de favoriser la création d'emplois, est celle de la retraite progressive. Elle a été amenée, entre autres, par les trois centrales syndicales, la CSN, la FTQ et la CEQ, et par le Conseil du patronat. Cette proposition était à l'effet de permettre à un travailleur qui se retire progressivement de cotiser sur le plein salaire jusqu'à sa retraite définitive. Il semble, d'après les premières informations que j'ai obtenues de la Régie des rentes, que la Loi sur les régimes complémentaires de retraite pourrait être modifiée pour permettre le versement d'une rente afin de compenser une partie de la baisse du revenu résultant de la réduction du temps de travail. De plus, l'ouverture d'un nouveau droit n'occasionnerait aucune dépense supplémentaire pour l'employeur, puisqu'il s'agit d'un simple transfert de droit.

Quant au Régime de rentes, quelques amendements à la loi seraient nécessaires pour permettre de verser une rente de retraite à un travailleur de 60 ans et plus qui réduit ses heures de travail et aussi pour permettre à un travailleur âgé de 55 à 60 ans de cotiser sur son salaire d'avant la réduction des heures de travail. En fait, cette recommandation est assez intéressante pour qu'on fasse une étude approfondie de la question. Je pense que le Régime de rentes, M. le Président, ce n'est pas un frein à l'emploi, et le taux de cotisation peut même servir à moduler nos politiques d'aménagement du temps de travail et de retraite progressive qui favorisent l'emploi. Et, dans cette perspective, je crois qu'il faut maintenir l'âge de la retraite à 65 ans. D'ailleurs, le gouvernement fédéral et les autres provinces nous facilitent la tâche, puisqu'ils semblent avoir maintenant écarté toute hausse de l'âge de la retraite dans le Régime de pensions du Canada.

Je n'ai abordé que quelques-unes des mesures discutées lors de cette consultation et je termine en rappelant, en fait, le consensus sur la nécessité et l'urgence d'agir et en rappelant que le taux de cotisation va passer de 5,6 % à 6 % en 1997. C'est déjà annoncé; le projet de loi est déposé. Nous présenterons un projet de loi sur la réforme, comme je dis, dès que possible à l'Assemblée nationale, vraisemblablement, si tant est que cela soit possible, avant la fin de la présente session, mais pour adoption sans doute au printemps ou dépôt au printemps pour adoption à la prochaine session.

Cependant, j'accueille en tout cas avec beaucoup, beaucoup d'intérêt la proposition du député de Verdun. M. le Président, je pense que ça serait peut-être à vous d'examiner de quelle façon on pourrait y donner suite. Moi, je pense qu'il est de notre intérêt de fournir aux membres de la commission parlementaire, députés ministériels et de l'opposition, les conclusions qui seront tirées des examens plus approfondis qui se feront. Notre objectif est de ne pas dépasser un taux de cotisation qui équivaille à 10 %. Alors, il va s'agir, dans le fond, de jouer avec les équilibres puis de faire des choix qui peuvent être déchirants, qui peuvent être différents, mais de les faire en connaissance de cause.

Alors, je crois que je peux vous dire immédiatement que tout ce qu'on peut mettre à la contribution de la commission – en autant que vous m'acceptez comme membre, parce qu'à partir de la clôture de nos travaux je ne suis plus membre de votre commission, mais... Ah! Bon. Bien, alors, là, on est garants l'un de l'autre que si on peut... à condition qu'on soit acceptés tous les deux comme membres.

Une voix: Ha, ha, ha! On va négocier.

M. Gautrin: ...accepte tous les deux comme membres. Ha, ha, ha!

Mme Harel: Ha, ha, ha! Mais j'apprécierais qu'on puisse poursuivre sous la forme que vous nous proposerez.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je peux vous dire, Mme la ministre et M. le député, que tous les membres de cette commission-là veulent en faire toujours, et toujours, et toujours davantage pour l'efficacité. Alors, nous allons analyser avec beaucoup d'attention cette possibilité-là. Je pense qu'on peut dire déjà que ça sera fait. Il s'agit tout simplement de déterminer sous quelle forme, je pense.

Alors, je vous remercie, Mme la ministre. M. le député de Verdun, vous voulez procéder à vos remerciements?

(17 h 50)

M. Gautrin: Bien, M. le Président, je n'ai pas eu la... J'ai peut-être omis ou... parce que vous nous aviez permis la possibilité de remercier à la fin. Je voudrais d'abord vous remercier. Je pense que vous avez mené ces travaux de main de maître, avec la souplesse et la rigidité qui sont de mise: souplesse pour permettre l'expression d'opinions, mais une certaine rigidité pour éviter qu'on s'épivarde dans toutes les directions, ce qui parfois arrive. Je voudrais remercier Mme Rivard pour sa contribution, ce qui nous a aidés ici, du côté de l'opposition; remercier aussi mon collègue de Notre-Dame-de-Grâce pour le soutien qu'il nous a apporté dans ce débat. Je voudrais aussi remercier les parlementaires ministériels, je pense qu'on a travaillé de concert dans ce travail; la députée de Hochelaga aussi, je pense que comme ministre elle a été une ministre ouverte; les représentants de la Régie des rentes, le président et l'ensemble des actuaires. Vous nous avez peut-être trouvés un peu grognons, mais ça fait partie de ce que nous sommes. Mais soyez assurés qu'on vous apprécie pour ce que vous faites.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci. Alors, à titre de président de la commission, moi aussi, je voudrais me joindre à vous, remercier chacune et chacun d'entre vous: Mme la ministre – s'il vous plaît, M. le député, on a respecté votre parole – M. le député de Verdun, Mme la députée, MM. les députés, chacun et chacune des personnes qui nous aident à faire si bien notre travail.

Et je retiens la demande de la part de Mme la ministre et de M. le député pour que la commission se penche à nouveau sur l'analyse, en commission ou en travail, pour aller un peu plus pointu dans ce régime, qui est si important pour toute la population.

Alors, merci. Et, la commission ayant rempli son mandat, j'ajourne les travaux sine die.

(Fin de la séance à 17 h 52)


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