L'utilisation du calendrier requiert que Javascript soit activé dans votre navigateur.
Pour plus de renseignements

Accueil > Travaux parlementaires > Travaux des commissions > Journal des débats de la Commission des affaires sociales

Recherche avancée dans la section Travaux parlementaires

La date de début doit précéder la date de fin.

Liens Ignorer la navigationJournal des débats de la Commission des affaires sociales

Version finale

35e législature, 2e session
(25 mars 1996 au 21 octobre 1998)

Le vendredi 16 mai 1997 - Vol. 35 N° 85

Interpellation : Les services de santé au Québec


Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Journal des débats


(Dix heures deux minutes)

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Alors, bonjour! Je vous rappelle le mandat de cette interpellation. La commission des affaires sociales se réunit dans le cadre de l'interpellation du député de Brome-Missisquoi au ministre de la Santé et des Services sociaux sur le sujet suivant: Les services de santé au Québec.

Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce) sera remplacé par M. Brodeur (Shefford); M. Désilets (Maskinongé), par M. Blais (Masson); Mme Loiselle (Saint-Henri–Sainte-Anne), par M. Poulin (Beauce-Nord); et M. Williams (Nelligan), par M. Bissonnet (Jeanne-Mance).

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci beaucoup. Alors, je vous rappelle les règles. Le député qui a donné l'avis de l'interpellation, soit le député de Brome-Missisquoi, intervient le premier pour 10 minutes. Le ministre interpellé, soit le ministre de la Santé et des Services sociaux, intervient pour 10 minutes et, ensuite, il y a alternance entre les députés de l'opposition et les députés du gouvernement et on termine par un 20 minutes réparti en 10 minutes de la même façon, c'est-à-dire M. le ministre et le député de Brome-Missisquoi, qui termine les travaux.

Alors, M. le député de Brome-Missisquoi, vous pouvez débuter.


Exposé du sujet


M. Pierre Paradis

M. Paradis: Oui, comme vous l'avez souligné, M. le Président, ce matin je suis accompagné du député de Shefford, du député de Beauce-Nord, ainsi que du député de Jeanne-Mance. Plusieurs autres députés auraient aimé se joindre, mais les règlements font en sorte qu'on est limité sur le plan du nombre.

Dans un premier temps, je voudrais adresser mes remerciements au leader du gouvernement qui, dans le cadre de la réforme parlementaire, a compris l'importance d'amener en Chambre les ministres qui ont des tendances à oublier qu'il s'agit là d'un devoir qu'ils ont dans leurs tâches. La semaine dernière, la députée de Saint-Henri– Sainte-Anne avait convoqué le ministre de la Santé. Il s'était défilé. Moi, je le souligne, M. le Président, parce que ça m'apparaît, sur le plan du respect des institutions, comme un manquement. Mais, lorsqu'on ne respecte pas les patients dans un réseau, on ne respecte pas non plus les institutions qui doivent légiférer et réglementer pour le mieux-être des patients.

Mais ce n'est pas la première fois, là. Le ministre est en train, là, tranquillement, de fuir ses responsabilités. Tout le monde se souvient de cette prise de vue à la télévision où, à l'hôpital Laval, devant 12 infirmières qui voulaient lui parler, le ministre a embrayé la limousine à reculons, ou l'a fait embrayer à reculons, et c'est devenu un petit peu caricatural. Des gens ont utilisé des quolibets. Moi, j'en ai entendu de toutes sortes, là, «O.J. de Charlesbourg», ou «le Fuyard de Charlesbourg», etc. Je suis content, moi, que le leader ait amené le ministre de la Santé pour répondre à des questions de l'opposition et des ministériels, ici, aujourd'hui. Je sais que les ministériels se joignent à moi pour remercier le leader du gouvernement.

Dans le domaine de la santé, M. le Président, nous faisons face présentement à une crise sans précédent qui va s'aggraver au cours des prochaines semaines, des prochains mois et des prochaines années. Tout le monde est conscient, sauf le ministre, du manque flagrant autant de ressources humaines que de ressources physiques dans le domaine de la santé au Québec. Tout le monde est conscient des listes d'attente qui s'allongent. Moi, lorsque j'ai évoqué, à l'Assemblée nationale, qu'il y avait quelque 50 000 personnes sur des listes d'attente en attente de chirurgie, le ministre m'a traité de démagogue pour, quelques jours après, émettre un communiqué corrigeant le député de l'opposition et indiquant qu'il y en avait plus de 70 000. Finalement, M. le Président, c'est une situation, qu'elles soient à 50 000 ou à 70 000, qui est inacceptable et intolérable.

Les salles d'urgence débordent. On a vu la semaine passée, sur le réseau de télévision Quatre-Saisons, la salle d'urgence de l'hôpital de Laval. Ce matin – je ne sais pas si le ministre a eu le temps ou s'en soucie – on mentionnait du débordement dans les salles d'urgence ici, à Québec: l'Hôpital de L'Enfant-Jésus, l'Hôpital du Saint-Sacrement. On avait des images de personnes âgées, alitées, en attente dans les corridors de la salle d'urgence, salle d'urgence qui peut en aliter 12, il y avait 30 personnes en attente, ce matin même, M. le Président, au moment où on nous tenons ce débat à l'Assemblée nationale du Québec.

Il y a également des gens qui sont complètement abandonnés par le système. Encore ce matin, dans les nouvelles fraîches: «La curatrice publique sonne l'alarme». Le ministre ne l'a peut-être pas lu ou n'y prêtera pas attention. On veut juste lui montrer ce matin qu'après les médecins, les infirmières, les associations d'hôpitaux, les interventions des centrales syndicales, tout le monde dans le réseau, les associations de patients, on sonne encore l'alarme ce matin. La curatrice publique du Québec et je cite au texte, M. le Président: «Juliette Bailly, stupéfaite de constater la situation déplorable dans laquelle se trouvent plusieurs de ses protégés vivant à domicile, a dénoncé hier les ratés du virage ambulatoire.» Ce n'est pas l'opposition officielle, là, c'est la curatrice publique qui prend soin ou qui est chargée de gens démunis dans la société québécoise.

M. le Président, ça donne quoi comme résultat? Vous le savez, les gens le savent, un système de santé qui est de plus en plus à deux vitesses au Québec: d'un côté, les gens qui n'ont pas de moyens et qui doivent choisir entre s'acheter des médicaments ou s'acheter de la nourriture; de l'autre côté, les gens plus fortunés, les cliniques VIP qui s'ouvrent un petit peu partout, surtout dans la région de Montréal. Si vous êtes une personne riche, influente et importante, vous pouvez avoir des traitements de santé en priorité. Des hôtels qui transforment des étages en centres d'hébergement luxueux parce que, quand on met le patient en dehors de l'hôpital, s'il a les moyens, il peut aller à l'hôtel à ce moment-là. Mais, s'il n'a pas les moyens, on l'abandonne carrément.

Le problème, M. le Président, c'est que le ministre dit qu'il n'y a pas de problème. Il se ferme les yeux. Il ne regarde pas la TV, il ne lit pas les journaux, et il ne va pas dans le milieu. Il se bouche les oreilles, il ne veut pas entendre ce que l'opposition a à lui dire et ça va même un petit peu plus loin. Le ministre dit qu'il y a trop de docteurs, qu'il y a trop d'infirmières. Il y a trop de ressources finalement dans le système et il en enlève encore cette année alors que tout le monde s'entend pour dire que présentement, au moment où nous parlons, il manque de ressources dans le système.

À preuve, il a demandé moins d'argent, M. le Président, dans les crédits que l'Assemblée nationale est appelée à voter ici même. Hier, on a eu l'occasion de s'en entretenir. Le ministre semblait un petit peu mélangé dans ses chiffres. Ses conseillers couraient un peu partout. On a repris le tableau et on va ajouter un élément là pour tenter que le ministre se retrouve parce qu'il a dit que c'était de la désinformation. Voyons les chiffres, M. le Président, à partir non pas des chiffres de l'opposition mais des chiffres du ministère des Finances comme tels.

Les dépenses de l'année passée s'élevaient, au niveau du gouvernement, à 34 678 000 000 $. Au niveau des crédits qu'on demande à voter cette année, y inclus les crédits supplémentaires, c'est 34 059 000 000 $. Il y a une différence. Au niveau du gouvernement, on compresse de 618 000 000 $. Ça donne, en pourcentage, et vous pouvez le retrouver dans le document du ministre des Finances c'est lui-même qui l'a calculé – 1,8 %.

Au niveau de la santé, M. le Président, on a également les chiffres du ministre des Finances. L'an passé, les dépenses, 12 961 000 000 $; cette année, 12 550 000 000 $. Faites le calcul. C'est rapidement fait, des coupures de 411 000 000 $, 3,2 % de compressions à la santé alors qu'il y a 1,8 % pour l'ensemble du gouvernement. Ça représente combien, ça, 411 000 000 $ à la santé sur 618 000 000 $ total au gouvernement? C'est 67 % des compressions. Le ministre disait hier: C'est de la désinformation parce que l'éducation également n'a pas constitué une priorité, elle a été coupée.

(10 h 10)

Le ministre a sans doute eu le temps hier de consulter un livre émanant du président du Conseil du trésor où toutes ces explications sont contenues. J'invite le ministre à ouvrir son livre du Conseil du trésor, qui s'intitule Budget des dépenses 1997-1998, Volume II, Message du président du Conseil du trésor , à la page 46. Qu'est-ce qu'on retrouve à la page 46, M. le Président? Oui, il y a des ministères qui ont diminué; mais il y en a d'autres qui ont augmenté. Quels sont les ministères qui ont constitué une priorité plutôt que la santé au Québec? Le plus important, postes centraux, administration et fonction publique, augmentation des crédits de 67,9 %.

Un autre poste qui a augmenté: ministère du Revenu, augmentation des crédits de 24,2 %. Quand vous avez des ministères qui augmentent puis que d'autres diminuent, puis que les priorités vont dans l'administration centrale plutôt que les services à la population, ça donne un résultat net quand vous les mettez ensemble – et les chiffres sont confirmés par le président du Conseil du trésor et le ministère des Finances – c'est la santé qui absorbe plus des deux tiers des compressions totales du gouvernement du Québec, cette année, ce qui est inadmissible dans la situation actuelle. M. le Président, au-delà des chiffres, il y a des humains, il y a des personnes, puis il y a des listes d'attente.

On a parlé des listes d'attente pour les gens qui attendaient des chirurgies, les gens qui attendent dans les salles d'urgence. On n'a pas encore eu le temps de s'entretenir avec le ministre des listes d'attente pour les jeunes à la Direction de la protection de la jeunesse. On va prendre les chiffres du ministère parce qu'il n'a pas confiance aux chiffres du ministère des Finances ni aux chiffres du Conseil du trésor de son gouvernement. On va prendre les chiffres de ses fonctionnaires à lui dans l'étude des crédits de cette année, tome I, à la page 525. Qu'est-ce qu'on découvre, M. le Président, à la page 525? Puis on va parler simplement, là, des cas les plus pathétiques, puis des cas les plus graves. Des cas qui sont décrits, les urgences: situations où la vie de l'enfant est en danger, les situations d'abus physiques et sexuels. La situation des 0-6 ans – la petite enfance – quand on dit qu'on a ça à coeur au Québec, ça veut dire quoi pour ces gens-là qui sont dans ce type de problèmes là?

En 1995-1996, M. le Président, il y avait 1 134 cas en attente dans la catégorie que je viens d'énumérer. Pas les cas légers, les cas les plus lourds et les plus pénibles. En 1996-1997, 1 263; une augmentation de plus de 10 % à cause du manque de ressources dans le milieu. Le ministre, lui, il demande moins d'argent. S'il avait voulu demander juste comme les autres ministères, cette année, il aurait fallu qu'il demande 200 000 000 $ de plus. Il a oublié de le demander. Il n'y a pas de problème, il ne pense pas à le demander. Dans la région du Saguenay–Lac-Saint-Jean, la région du premier ministre et de députés représentés ici, à l'Assemblée nationale, du côté ministériel, l'augmentation est passée de 26 enfants en attente, dans les cas les plus criants en 1995-1996 à 68 en 1996-1997; une augmentation de 160 % dans la région du premier ministre, comme telle.

Devant ces situations, M. le Président, le ministre de la Santé n'ose même pas demander au gouvernement de faire de la santé une priorité. Il accepte des diminutions de budget supérieures à l'ensemble des diminutions du gouvernement comme tel: 1 800 000 $ pour l'ensemble du gouvernement; 3 200 000 $ à la santé, deux tiers des compressions assumées par les gens au Québec, comme si le système fonctionnait bien.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie, M. le député. J'invite maintenant M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.


Réponse du ministre


M. Jean Rochon

M. Rochon: M. le Président, c'est un peu malheureux de voir comment la population du Québec est mal desservie par l'opposition qui, au lieu de jouer son rôle de façon compétente et de faire son travail de façon sérieuse, de discuter des contenus et de la substance des différents dossiers, d'amener le gouvernement à donner plus d'information, à aller plus loin, à corriger plus vite les problèmes... On comprend que c'est ça qui est le rôle de l'opposition, que c'est de critiquer, mais de critiquer de façon intelligente, je pense, M. le Président. Et c'est un peu malheureux qu'on ait une opposition qui ne rentre pas dans les contenus, qui reste en surface, qui fait du surf avec la nouvelle du matin dans le journal, qui ne va jamais faire le tour d'une question de façon complète. Il y a des demi-vérités tout le temps. Je le maintiens, c'est une opposition qui ne fait pas son travail et qui fait de la désinformation de façon systématique.

Je vais donner quelques exemples, puis en même temps ça va me permettre... Tout ce que je veux essayer de faire ce matin, c'est de donner l'information à la population sur ce que sont les problèmes. Parce qu'il y a des problèmes, il y en aura toujours dans un système de santé et de services sociaux. Il n'y a pas de formule magique, ça, je suis très conscient de ça, M. le Président. Mais ce que je dis, ce n'est pas qu'il n'y a pas de problème, c'est que, s'il y a des problèmes, il y a aussi des solutions. Et, depuis deux ans et demi, je pense qu'il y a pas mal de problèmes qui ont trouvé des solutions, il y en a pas mal qui ont trouvé une amélioration; où il y a encore du travail à faire, il y a du travail important qui se fait.

On a parlé de la dernière interpellation. Je pense qu'il y a là un assez bel exemple de la non-collaboration totale de l'opposition. Parce qu'on parle des deux côtés de la bouche en même temps. On dit au ministre qu'il devrait être sur le terrain. Ça devrait être le monde qui prennent les décisions, les professionnels, les gestionnaires, ceux qui travaillent avec les patients. L'opposition savait très bien, la semaine passée – et, en temps de session, on a une journée par semaine, c'est le vendredi, où le ministre peut vraiment être sur le terrain – qu'il y avait des rencontres très importantes que je devais avoir à Montréal, que j'ai eues à Montréal, avec les directeurs généraux des établissements, les directeurs financiers, les directeurs des ressources humaines, pour s'assurer qu'on attachait bien nos canons partout, aussi, d'abord sur le terrain, que j'avais une bonne connaissance de la situation, de façon directe. On a proposé à l'opposition n'importe quelle autre journée pour faire ça – la veille, pour faire l'interpellation, je pouvais m'organiser – sauf cette journée-là, par respect pour les gens qui attendaient à Montréal qu'on règle un certain nombre de problèmes. Ils ont refusé.

Sachant ça – j'avais dit que je ne pouvais pas être là – j'ai un collègue qui connaît parfaitement bien ce dossier qui est venu, qui a travaillé comme éducateur, qui a été sur la commission d'enquête sur la santé et les services sociaux, qui a directeur général d'une commission. Alors, ils ont eu peur. Ils n'ont pas pris le débat. Ils se sont sauvés du débat. Ce n'est pas nous qui avons refusé le débat. Nous, comme gouvernement, on a respecté la règle du jeu. Un ministre peut se faire remplacer par un collègue. J'avais un collègue qui connaissait le dossier parfaitement, qui était assisté par des députés qui connaissaient parfaitement le dossier. Ils ont eu peur parce qu'ils surfent sur des détails. Ils n'ont pas été capables d'entrer dans le débat et ils se sont sauvés. Ce n'est pas nous qui n'étions pas en Chambre. C'étaient eux qui n'étaient pas en Chambre pour faire l'interpellation. Ils ont lancé leurs demi-vérités un peu partout. Ils n'ont pas pris la réplique et ils sont partis. Qui a la frousse? Qui se sauve? C'est ceux d'en face. Là, je pense qu'on a un beau cas d'arroseur arrosé, M. le Président.

Dans le réseau, présentement, il faut faire la distinction entre... Par exemple, dans les listes d'attente, systématiquement – un autre exemple de désinformation – l'opposition refuse de regarder de la façon dont il faut voir des listes d'attentes: le nombre de personnes en attente et le temps d'attente. Le nombre de personnes en attente reflète en bonne partie le nombre de gens qui ont des problèmes et qui demandent des services. C'est sûr. Et, dans toutes les attentes, que ce soit pour des services aux jeunes, que ce soient des urgences, que ce soient des opérations, l'opposition sait très bien – ou devrait savoir – que tout ce qui est urgent est traité directement. Il n'y a pas d'attente pour les situations urgentes. Dans les salles d'urgence, quand on regarde l'évolution de la situation comparativement à ce que c'était il y a cinq ans, il y a trois ans, il y a une amélioration régulière. Ce sont des situations lourdes à corriger mais, régulièrement, le temps d'attente baisse.

Il fût un temps – l'opposition va s'en rappeler, ils étaient au pouvoir, eux autres, à ce moment-là – où c'était à peu près à tous les mois, quand ce n'était pas plus souvent que ça, qu'une couple d'urgences sautaient en l'air parce que ça débordait. Maintenant, c'est beaucoup plus rare que ça arrive. Il y aura toujours – c'est dans la nature d'une urgence – des moments forts auxquels il faut faire face à un moment donné; mais les situations urgentes pour les jeunes, pour les chirurgies, sont traités immédiatement.

Parmi les gens qui sont en attente, reflétant le volume de la demande, ce qu'il faut regarder, c'est le temps. Pour savoir jusqu'où c'est raisonnable ou pas, il y a une espèce d'attente naturelle. En attendant qu'un patient soit opéré, il y a une préparation à faire, il y a des examens à faire, parfois il faut confirmer un diagnostic. Si la situation n'est pas urgente, c'est souvent préférable de prendre le temps de bien préparer les choses avant de faire une intervention. Alors, ce n'est pas des études qu'on a faites. J'ai donné souvent l'information publiquement et à l'opposition mais on n'en tient pas compte. On répète les demi-vérités tout le temps, M. le Président. On désinforme.

Une étude faite par le Fraser Institute qui a été publiée à la fin de l'année dernière, en automne 1996, montrait que c'est au Québec où, pour tous les services médicaux confondus, le temps d'attente était le moins long. C'était à peu près quatre semaines et demie, 4,7, je pense, alors que c'était jusqu'à cinq semaines en Ontario. Dans les autres provinces canadiennes, ça variait entre sept et huit. Alors, c'est sûr qu'il y a toujours de l'amélioration à apporter. C'est sûr qu'il y a toujours des problèmes à corriger. Mais, quand on se compare à d'autres, je pense qu'on est dans une situation où, globalement, les choses vont en s'améliorant, les problèmes sont réglés.

(10 h 20)

Quand on demande à la population – pas ceux qui ont été impressionnés par ce genre de désinformation, mais ceux qui ont eu à recourir aux services – c'est jusqu'à 90 % et au-delà, dans toutes les régions du Québec, que les gens reconnaissent qu'ils ont eu un service excellent et souvent ils en sont surpris et renversés, avec tout ce qu'ils se sont fait donner comme désinformation. Parce que, sur le terrain, dans les établissements, des gens qui font la gestion des établissements, des professionnels, des employés qui donnent des services, qui ont une très grande compétence, ont, eux aussi, comme au ministère et comme le ministre, le souci du service au patient et de la satisfaction du patient.

Malgré les difficultés d'une transformation qu'il faut vivre, des problèmes qu'il faut régler, malgré la tension que crée un système qui est en changement, on a là des professionnels qui font leur travail de façon superbe, qui ont le souci du patient. On le sait très bien, tout ce travail-là qu'on fait et qu'on est obligés de faire, dans des contraintes budgétaires très sérieuses – je ne reviendrai pas sur tout ce qui a causé cette situation avec laquelle on est obligés de vivre – on le fait en y mettant beaucoup de soin, en étalant le mieux possible, en ajustant. Et, à mesure qu'on avance, on ajuste à la situation.

Là, certains vont appeler ça de l'improvisation mais ce n'est pas de l'improvisation. Quand on sait où on s'en va, quand on a une bonne approche pour le faire, si ça ne se présente pas comme c'était tout à fait prévu sur le terrain, on est capable de s'ajuster, on s'ajuste et on règle les choses. Mais il n'y a pas de pensée magique là-dedans. Il y a des situations qui prennent plus de temps que d'autres à régler, mais ce qui est important de voir, c'est le résultat, la tendance et la perception de cette tendance par la population.

Alors, je pense qu'à la limite, là, c'est de la démagogie qu'on fait en constamment donnant une information qui n'est pas la bonne. On va continuer à rectifier les chiffres parce que la manipulation de données que fait le député de Brome-Missisquoi... Quand on regarde les données budgétaires, il sait très bien, M. le Président, il ne peut pas ne pas savoir que des données de crédits, qui sont un portrait instantané, et qu'on mélange, comme il le fait, des dépenses probables avec des crédits qui sont des portraits instantanés d'une situation financière à un certain moment donné, ça ne peut pas se comparer.

Si on veut comparer, il faut regarder des données des budgets et, quand on regarde le budget du gouvernement, le système de santé et de services sociaux, cette année, tout le secteur, c'est 5,7 % d'effort budgétaire. L'ensemble des autres ministères font 7,4 %, c'est presque 2 % de plus. C'est ça, la vérité. La manipulation de données du député de Brome-Missisquoi donne la conclusion loufoque que, s'il regarde que la santé fait 90 % des compressions, l'éducation qui en fait 100 000 000 $ à 150 000 000 $ de plus, ça veut dire qu'ils font 125 % des compressions, puis s'il continue à additionner de même, là, tout en faisant... Ce n'est pas 3 000 000 000 $ de compressions, c'est 3 000 000 000 $ de surplus qu'on va faire cette année, parce qu'en virant les chiffres, c'est ce que ça donne.

Maintenant, je ne suis pas surpris de ça, M. le Président. Ils ont géré comme ça puis, pendant six années, en gérant comme ça, ils ont défoncé de 1 000 000 000 $ par année puis, sur une période de sept ans, en gérant comme ça, ils ont doublé la dette du Québec. Alors, c'est bien sûr, ils continuent à calculer de cette façon-là, ils voient les chiffres tout de travers et, où il y a un effort qui a été réajusté dans le domaine de la santé, lui, il ne voit pas ça, il voit ça différemment parce qu'ils sont habitués aux chiffres de la catastrophe, puis à rouler ça.

Je terminerai pour cette première intervention en faisant référence – parce qu'on fait toujours du surf sur la manchette du matin, de la part de l'opposition – à la déclaration de la Curatrice publique. Je pense que ce que la Curatrice a dit, le ministère l'a dit il y a quelques mois. Il a dit, il y a quelques mois, qu'il y avait une situation surtout pour des gens qui avaient un problème de déficience intellectuelle ou de maladie mentale, les gens qui ont été désinstitutionnalisés, et où on a très bien vu que le plan qui avait été fait par le gouvernement précédent, le Vérificateur nous l'a dit, ils n'ont pas complété la job, ils ont sorti ces gens-là des établissements et ils les ont laissés sans services.

On l'a dit. On a des orientations ministérielles qui sont sorties et qui vont corriger cette situation-là et commencer à le faire dès cette année. C'est déjà commencé dans plusieurs régions et la Curatrice publique, elle le sait très bien, elle a été invitée à travailler avec les équipes du ministère. Elle est déjà en lien avec elles et sa grande sensibilité pour la situation va nous aider beaucoup à bien s'assurer que la collaboration avec elle corrige la situation. Mais on l'avait annoncé avant, pas juste le problème mais aussi la voie de solution, M. le Président. Merci.

Le Président: Merci, M. le ministre. J'invite maintenant M. le député de Shefford.


Argumentation


M. Bernard Brodeur

M. Brodeur: Merci, M. le Président. On n'en revient tout simplement pas de ce côté-ci de la Chambre d'entendre dire le ministre que l'on surfe sur les détails pendant que les cardiaques attendent six mois avant de se faire soigner, pendant que les cancéreux attendent trois mois. J'imagine qu'il va dire à mes gens aussi, à Granby, qu'ils surfent aussi sur les détails.

M. le Président, j'imagine que le ministre doit se douter du pourquoi de ma présence ici. Je veux tout simplement lui rappeler qu'il manque des anesthésistes à Granby. Nous avons présentement, au centre hospitalier de Granby – je le rappelle, le centre hospitalier de Granby dessert environ 100 000 personnes – et nous avons présentement trois anesthésistes. C'est déjà très peu et le ministre sait très bien que nous allons en perdre deux d'ici le mois de juillet, puis – le ministre, je suis certain qu'il va m'écouter à un moment donné, là – que, dans le fonctionnement actuel, les trois anesthésistes au centre hospitalier de Granby, en plus de leur travail régulier sur les heures régulières, reçoivent en moyenne, chaque année, 450 appels hors des heures régulières. Ça fait en sorte que nous avons des anesthésistes qui travaillent, à part leurs heures régulières, qui travaillent la nuit, qui travaillent les fins de semaine. C'est pour ça, M. le Président, qu'il y en a deux, tout simplement, qui ont décidé de quitter.

C'est évident que la qualité de vie d'un anesthésiste à Granby n'est pas la même qu'un anesthésiste qui travaille dans les grands centres. Ils n'ont même pas le salaire de ceux qui travaillent dans un centre éloigné avec une somme de travail, j'oserais dire, plus élevée qu'un anesthésiste en zone éloignée.

On a, M. le Président, dans la région, signifié cette problématique-là, au ministre. Les médecins disaient, il y a quelques semaines que, si ce problème-là n'est pas résolu à court terme, on aura des problèmes en salle d'opération, des problèmes graves. On devra déménager des patients ailleurs. On va avoir des problèmes d'accouchement. M. le Président, j'ai posé la question au ministre de la Santé, en commission. Je lui citais tout simplement un chirurgien de Granby qui disait: Un jour, on perdra peut-être un patient. Il m'a fait comme réponse qu'on était pour faire peur au monde avec ce genre de propos.

M. le Président, on est intervenu au mois de mars là-dedans. On est intervenu au mois d'avril. On intervient au mois de mai. Il reste seulement 45 jours avant qu'on perde nos deux anesthésistes. Et je ne crois pas, M. le Président, que c'est nous qui faisons peur au monde dans cette histoire-là. C'est le ministre, à force de ne pas grouiller, là, qui fait peur aux gens.

Les médecins du Centre hospitalier de Granby ont fait circuler une pétition et, en l'espace d'une semaine, il y a eu au-delà de 17 000 personnes de la région de Granby qui ont signé cette pétition-là et nous sommes allés la porter à la régie régionale la semaine dernière. Ce qu'on a eu, c'est encore la même réponse: On va voir à ça, on devrait avoir une réponse incessamment. Sauf qu'on l'a dit en mars, on l'a dit en avril. Puis là, on nous dit de ne pas créer de panique. Mais là, il reste 45 jours, et on n'a toujours pas de solution, M. le Président.

Donc, après nous avoir dit, à Granby, qu'il n'y avait pas de problème de médecins, qu'il n'y avait pas de problème d'infirmières, là, on nous dit que les anesthésistes, ça ne presse pas. Dans ses réponses qu'il nous a données, il a dit: Oui, on verra ça, peut-être que dans un an on aura une chance, là, de régler l'affaire.

Le ministre nous propose une complémentarité avec l'hôpital Brome-Missisquoi. Imaginez-vous, M. le Président, s'il reste un anesthésiste à Granby, et deux dans Brome-Missisquoi. Les trois étaient déjà débordés. Imaginez-vous, trois anesthésistes pour couvrir deux hôpitaux à plein temps. Tout ce qu'on fait, c'est exporter le problème dans un autre centre hospitalier. Donc, M. le Président, il m'apparaît que le ministre n'est pas conscient des problèmes de la région. Comme on le disait la semaine dernière à M. Boily, à la régie régionale: Le problème est pressant.

On a nommé un comité – un comité! – pour étudier le problème. M. le Président, il y a un médecin, le médecin en charge des pétitions, me disait, la semaine passée, que le vrai comité, c'était la population, que la population s'inquiète. On a 17 000 pétitionnaires et tout ce qu'on attend, c'est que le ministre bouge. On connaît le problème; ce qu'on lui demande, c'est de réagir rapidement, dans les prochaines semaines. Je me suis laissé dire que même cette semaine on perdrait déjà un anesthésiste. Donc, il en resterait deux jusqu'au 1er juillet.

Donc, M. le Président, je sais qu'il me reste très peu de temps, sauf que les citoyens s'inquiètent, les médecins s'inquiètent. Et, lorsqu'on nous dit que l'on «surf» sur les détails, M. le Président, c'est une insulte à la population, puis c'est une insulte aux gens qui s'occupent du dossier des anesthésistes au Centre hospitalier de Granby.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci, M. le député. J'invite maintenant M. le ministre.


M. Jean Rochon

M. Rochon: Oui, M. le Président. On vient d'avoir effectivement un bel exemple, pendant cinq minutes, de se faire parler d'une situation que connaît très bien le député et des exemples de désinformation. J'aurais dit que peut-être dans un an on va avoir une solution. Non.

J'ai très bien expliqué, M. le Président, qu'on sait que dans le cas des anesthésistes on a, pour à peu près un an, une situation qui va être difficile parce qu'il manque un peu d'anesthésistes. Et, sur la trentaine de spécialités qui existent au Québec, c'est des petits nombres de personnes. On a à peu près 7 000 à 8 000 médecins spécialistes au Québec, mais répartis en 30 spécialités, et ça prend 10 ans à former un spécialiste. Alors, la planification de la main-d'oeuvre médicale, c'est une opération qui est très délicate. Il s'agit qu'une année ou deux il se passe des départs de façon plus importante ou, pour différentes raisons, que dans certaines cohortes de diplômés il y en ait qui changent d'orientation à un moment donné, et ça créé facilement, une année, à un moment donné, où dans une spécialité ou l'autre il y a une difficulté.

Et c'est ça que j'ai expliqué: on savait que pendant une année on serait dans une situation difficile mais qu'avec les diplômés qui sont prévus dans un an déjà, avec la prochaine graduation, on aurait une meilleure situation, et après ça que ça va se normaliser. Donc, c'est un problème aigu, à court terme, ce n'est pas quelque chose qui est grand, c'est ça que j'ai dit. Là, le député répète ça, que j'ai dit que peut-être dans un an on aurait une solution. Un bel exemple de façon de dévier l'information.

(10 h 30)

On bouge, le député le sait très bien, M. le Président, il y a un travail énorme qui se fait. Le ministère, la régie régionale, la Fédération des médecins spécialistes et l'Association des anesthésistes travaillent très fort. Le député a été tenu au courant. Quand il a voulu avoir de l'information, il a toujours pu l'avoir directement. Puis je lui avais même dit, s'il avait de la difficulté à avoir de l'information dans sa région, qu'il m'en parle puis je vais le tenir au courant.

Alors, il y a là une situation où il y a un problème – c'est un bel exemple – mais où tous les partenaires sont à la table, travaillent ensemble pour trouver une solution et il va se trouver une solution. On a réglé des problèmes difficiles comme ça dans trois ou quatre autres endroits du Québec, au cours de la dernière année, pour les anesthésistes et, dans certains cas, pour d'autres types de spécialistes, et tout le monde collabore pour le faire. À toutes les semaines, ça travaille régulièrement. Et encore lundi prochain, il y aura une rencontre de travail où les gens vont voir où ils en sont rendus, les éléments se solution qui ont été trouvés.

L'approche qui est prise, c'est d'amener une collaboration avec les médecins de différentes spécialités pour qu'ils travaillent, pas juste sur leur établissement, mais pour l'ensemble d'une région, et, même en amenant des régions à collaborer entre elles, que le groupe de médecins dans une spécialité répartissent leur temps, collaborent ensemble pour s'assurer de couvrir correctement tous les établissements et tous les points de service. Alors, c'est un bel exemple où on a des éléments de solution qui sont appliqués et qui vont nous amener à trouver une solution.

Toute la question de la main-d'oeuvre d'ailleurs est une question très importante dans le réseau de la santé et services sociaux, un réseau où on a dit qu'on veut maintenir et même améliorer la qualité des services, et continuer à adapter les services selon les besoins de la population, ce qui demande des changements de pratique très importants de la part des professionnels et des employés. Et les gens sont très impliqués dans une réorientation parfois importante, entre autres les médecins. Et, présentement, avec les médecins, on a des négociations qui avancent très bien. Les médecins au Québec ont une très grande conscience sociale et, depuis le tout début de la transformation, ont manifesté une très grande collaboration et ont permis de régler pas mal de problèmes.

Je pense qu'à moins que les choses se compliquent de façon inattendue, d'ici quelques semaines, on pourra en arriver à conclure des ententes avec les médecins qui vont nous apporter non seulement de meilleurs outils pour faire face à des situations comme celle des anesthésistes, à court terme, mais qui vont surtout mettre en place des mécanismes qui vont tenir compte des changements de fonctionnement dans notre réseau, qui vont tenir compte des nouvelles pratiques professionnelles et qui vont amener une bien meilleure collaboration entre les médecins dans leurs cabinets et le réseau de la santé et des services sociaux.

C'est à ça que tout ce monde-là travaille présentement, sur le terrain, M. le Président. Alors, je pense que je maintiens... Oui, c'est là encore un exemple de nous ramener un problème, de ne pas reconnaître tous les efforts qui sont faits par les partenaires pour régler le problème et de biaiser certains éléments d'information pour maintenir un courant qui reconnaît le problème mais ne tient pas compte des éléments de solution qui sont en place. Et tout ce que je voudrais bien demander, c'est que, si on ne peut pas nous aider, si ce n'est pas dans le rôle de nous aider, au moins on «peut-u» demander, M. le Président, d'appliquer un grand principe qui est connu dans la formation médicale, qu'on nous apprend les premiers jours de notre formation médicale: d'abord, ne pas nuire. C'est tout ce qu'on leur demanderait, M. le Président. Merci.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci, M. le ministre. J'invite maintenant M. le député de Masson à s'exprimer.


M. Yves Blais

M. Blais: Merci beaucoup, M. le Président. Si vous le permettez, je vais revenir à la première intervention du côté de l'opposition, de notre critique de l'opposition, notre bon ami de Brome-Missisquoi. Dans son intervention, il blâme le gouvernement et surtout le ministre pour les coupures dans le domaine de la santé et il compare les coupures dans la santé avec des augmentations, au ministère du Revenu, de 24 000 000 $. C'est vraiment démagogue de prendre une comparaison comme celle-là et il le sait très bien. Je n'en parlerai pas longtemps; on a besoin absolument au Revenu de regarder le travail au noir, de faire payer des gros qui ne paient pas leurs impôts, et ça a pris un peu plus de personnel. Et vous le savez très bien.

Cependant, nous sommes élus dans cette Chambre, M. le député de Brome-Missisquoi le sait très bien, pour défendre d'abord les intérêts du peuple québécois et de l'ensemble de la population, autant de ce côté-ci de la Chambre que de l'autre côté. Et, quand un gouvernement a des budgets à administrer ou a à donner la nomenclature de ses dépenses, il faut regarder d'où viennent les revenus et quels sont les moyens. Il y a eu consensus à un sommet, pour arriver au déficit zéro, de taxer le moins possible et de dépenser moins, bien entendu. On ne peut pas demander de ne pas taxer, d'arriver à un déficit zéro et, en même temps, nous reprocher de dépenser moins. Surtout que nous avons dans l'élection fédérale, actuellement, un premier ministre de qui l'on dit – le premier ministre Chrétien – qu'il parle deux langues secondes. Et il ne faudrait tout de même pas dire que le député de Brome-Missisquoi aurait une connaissance seconde de deux sortes de comptabilité.

Il faut que l'on sache qu'une grande partie de l'argent que l'on paie à Ottawa... Il y en a une partie qui nous revient. Dans les deux dernières années, les coupures qui nous viennent par Parti libéral interposé à Ottawa, des coupures dans la santé de façon directe de 900 000 000 $ sur deux ans, 1996-1997 et 1997-1998. En plus de vouloir régler le déficit de 5 700 000 000 $ que vous nous avez laissé – le déficit annuel – il nous faut en plus, par Parti libéral interposé, trouver 900 000 000 $ de plus sur deux ans et arriver à notre déficit. On est arrivé, les trois premières années; dans l'année qui vient, il faut absolument que nous arrivions aussi. Comment peut-il nous dire, de son siège ici, et avec une façon très élégante et très noble, qu'il défend les intérêts du peuple québécois quand jamais, ni d'un côté ni de l'autre de ses deux connaissances, il ne blâme les coupures dans ce domaine venant du fédéral? Il faut absolument que nous tenions compte de ça.

Il y a une campagne électorale actuellement. Regardez M. Manning, regardez Mme Alexa, regardez M. Duceppe, regardez M. Charest; qu'est-ce qu'ils disent? Ils blâment M. Chrétien d'avoir trop coupé des transferts aux provinces. Là, ce n'est pas au Québec seulement. Et la campagne tient sur ce problème. Comment se fait-il que les grands défenseurs de la population québécoise qui sont de l'autre côté n'y font jamais aucune allusion? On a le sens du devoir de défendre les Québécois. Et, quand on a le sens du devoir de défendre les Québécois, il faut qu'on les défende, même si on se doit d'attaquer les gens du même parti qui sont au pouvoir à Ottawa.

C'est un tout petit reproche que je vous fais, de l'autre côté. Jamais vous ne reprochez ces coupures du fédéral. Au contraire, vous les encensez! Et vous êtes dans le champ, actuellement, la plupart de vos députés, pour aider le Parti libéral à reprendre le pouvoir pour mal servir le Québec, comme il l'a fait depuis tant d'années. C'est un petit blâme que je vous fais et je le fais avec une grande politesse, comme vous le savez. Et je ne m'étonnerais pas que vous le comprenassiez, mais que vous n'en parlassiez pas.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie, M. le député. M. le député de Shefford.


M. Bernard Brodeur

M. Brodeur: Merci, M. le Président. Premièrement, en réaction aux propos du député de Masson, je dois lui dire qu'en Ontario, cette année, le budget de la Santé est égal à celui de l'an dernier; et celui de l'Alberta est augmenté. Et, lorsque le gouvernement fédéral offre 185 000 000 $ au Québec pour le système de santé, le ministre ne le réclame même pas. C'est réclamé par les municipalités, la voirie, etc. Donc, M. le Président, c'est toujours la faute au fédéral. Mais je rappellerai que, dans le dossier de la santé, le chauffeur d'autobus, c'est le ministre de la Santé.

Donc, M. le Président, pour revenir à un autre propos du ministre de la Santé tantôt, il nous dit qu'il nous donne des informations, et toujours des informations. Les citoyens de ma région, M. le Président, ce n'est pas des informations qu'ils veulent, c'est des anesthésistes. Et, depuis trois mois, tout ce qu'on a, c'est un semblant d'information. On est à la régie régionale, la semaine passée, je demande des explications au président de la régie régionale, mais il dit: On n'est pas sûr encore, on attend le rapport du comité. Si c'est ça, des informations – qu'ils ont formé un comité – M. le Président, ce n'est pas ça qu'on recherche. Ce n'est pas des informations, c'est des anesthésistes et puis ça presse, M. le Président.

(10 h 40)

Je voulais vous entretenir aussi des infirmières. J'ai eu la chance de questionner le ministre, en commission parlementaire, sur une probabilité de pénurie dans le domaine des infirmiers et des infirmières. J'avais posé la question, suite à un article paru dans un quotidien, au Québec, qui disait qu'on pourrait manquer d'infirmières d'ici deux ou trois ans. C'était une directrice du chef de département de soins infirmiers dans un collège. La directrice nous disait que les candidats potentiels étaient plutôt désintéressés de la profession. Même chose, l'Ordre des infirmières nous disait que, possiblement, à cette époque-là, peut-être un manque d'infirmières d'ici l'an 2000, 2005.

J'ai questionné le ministre, le 23 avril, à ce sujet-là. Et, le 23 avril, le ministre nous a dit tout simplement, puis le titre du journal ici nous le donne: «10 000 infirmières en trop au Québec». Donc, on a su qu'il n'y avait pas de problème de médecins, il n'y avait pas de problème de salles d'attente, il n'y avait pas de problème dans les urgences puis on dit qu'il y a des infirmières en trop.

M. le Président, quelques jours après, je me suis mis à feuilleter le programme du Parti québécois, de 1994, pas de 1984 – 1994, ça fait deux ans et demi – et j'imagine que, dans le domaine de la santé, je suppose que le ministre de la Santé a participé à l'élaboration, étant un des stratèges en santé pour le Parti québécois. Et j'ai été surpris d'apprendre, dans le programme du PQ, qu'on appréhendait une pénurie d'infirmières. Le ministre me disait qu'il y en avait 10 000 de trop et on dit, dans Des idées pour mon pays : «Actuellement, la profession d'infirmière est en difficulté et il y a une pénurie de personnel des soins infirmiers dont les causes sont nombreuses: précarité des conditions de travail, surcharge de travail.» On sait maintenant qu'il y a un manque de motivation. Donc, encore là, pas de problème, il nous répond qu'il n'y a aucun problème.

Il y a un tas d'articles qui sont apparus depuis. On voit: «Les inscriptions en soins infirmiers chutent des deux tiers, on appréhende une pénurie, moitié moins d'étudiants». Encore, on pense à une pénurie. Encore, le 14 mai: «On appréhende une pénurie encore avant l'an 2000.» Et ça, c'est des gens de l'Ordre des infirmiers et des infirmières qui nous disent ça. Donc, M. le Président, il semble qu'il n'y a pas de problème, on ne s'inquiète pas. Il nous disait, il y a deux ans, qu'on était en pénurie. Il nous dit, il y a trois semaines, qu'on en a 10 000 de trop. Les infirmières nous disent qu'il n'y en a pas assez. Donc, M. le Président, on s'inquiète.

Je parlais avec une infirmière du Centre hospitalier de Granby – M. le ministre sait que j'affectionne particulièrement ce centre – et, là, on va mettre encore des infirmières à pied suite au programme de départs volontaires. Simplement, si on pense en chirurgie, à mon centre hospitalier, on va perdre les cinq meilleures infirmières sur 12, dans le Centre, puis les plus expérimentées et sans compter... Tantôt, M. le Président, on a parlé de santé familiale, on nous fait un écran de fumée d'un ministère de la Famille, vous savez que les infirmières de 50 ans et plus qui travaillent dans les CLSC, secteurs petite enfance, famille, 38,5 % des infirmières vont probablement prendre leur retraite et, dans les secteurs santé des jeunes, santé scolaire, 35,5 %.

Donc, M. le Président, on va assister à une improvisation totale dans le domaine infirmier. Les gens s'inquiètent. Les gens de mon centre hospitalier s'inquiètent autant pour les anesthésistes, autant pour la salle d'urgence et maintenant pour les infirmières. Puis le ministre nous dit tout simplement: Il y en a 10 000 de trop, ne vous inquiétez pas. Alors que tous les autres s'inquiètent, il nous annonce une pénurie.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci, M. le député. J'invite maintenant M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.


M. Jean Rochon

M. Rochon: M. le Président, on continue, deux, trois petits chiffres à gauche puis à droite, on met ça ensemble puis on dit: Il y a un problème. La situation, en ce qui regarde les infirmières... Puis je vais continuer à parler du personnel, parce qu'on en parle beaucoup, tout le système de santé et de services sociaux, c'est du personnel, 80 % du budget est là, on a des équipements qui sont très impressionnants quand on les montre à la télévision mais, dans la réalité de tous les jours, c'est du monde qui donne des services à du monde, c'est un réseau de monde, les clients et les autres, et c'est avec eux autres qu'on travaille.

Parlons spécialement des infirmières. Il y a présentement – on verra dans les départs qui vont se faire combien d'infirmières peuvent partir – des gens qui peuvent penser qu'il faut être vigilants pour être sûrs qu'on gère bien la situation. Qu'est-ce qu'on a en réserve, si vous voulez, comme potentiel? Il y a présentement 4 500 personnes qui sont sur la liste qu'on appelle, dans le réseau, des sécuritaires: des gens qui ont une sécurité d'emploi et qui n'ont pas trouvé encore un poste dans le réseau; il faut qu'il y ait une place qui se libère pour qu'ils puissent prendre une fonction. Sur ces 4 500, il y a 1 250 infirmières à peu près, de 1 200 à 1 250 infirmières, qui sont des infirmières qui ont cinq ans, 10 ans, voire 15 ans de pratique et d'expérience, qu'elles ont continué à avoir tout le temps en faisant du remplacement, d'abord qui étaient dans leurs fonctions jusqu'au moment où on a fait la transformation du réseau, et qui attendent un poste, des infirmières de grande expérience, sans compter toutes celles qui faisaient du remplacement avant de toute façon.

En plus de ça, on a révisé, pour voir de façon la plus conservatrice possible, quelles étaient les estimations que la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre pouvait faire, entre autres, du nombre d'infirmières qui sont sans travail. Je ne dis pas que toutes ces infirmières-là voudraient prendre un travail demain matin, mais on sait qu'il y en a un grand nombre là-dedans qui souhaiteraient un travail, parce qu'on a aussi beaucoup dit qu'il y a des infirmières qui ne trouvent pas – qui ne trouvent pas – de travail présentement. En la faisant de la façon la plus limitée possible, là, comme estimation, la moins optimiste possible, c'est au moins 7 000 infirmières, qu'on nous dit, qui sont présentement sans travail.

En plus de ça, les programmes de formation, dans les 40 et quelques cégeps au Québec qui ont des programmes de formation en sciences infirmières, diplôment à chaque année à peu près 1 500 infirmières. Alors, il y en a à peu près 1 200 qui attendent, là, qui ont un poste régulier et qui sont payées, qui attendent de prendre une fonction. Il y a un grand nombre d'infirmières – 7 000 – qui sont sans emploi et, là-dedans, il y en a qui travaillent, de temps en temps, comme occasionnelles, depuis 10, 15 ans, qui ont une très bonne formation, et des diplômées, là, qui ont une formation toute fraîche, complète, 1 500 par année. Alors, ça nous fait un total, effectivement, même avec l'estimation la plus pessimiste possible, la plus restrictive possible du nombre d'infirmières sur le terrain, à peu près un bassin de 10 000 infirmières pour remplacer celles qui pourraient partir. Celles qui pourraient partir? C'est 2 000 ou 3 000. Il y a 10 000 infirmières qui se qualifient pour les critères du programme assisté et, selon toutes les prévisions, ça pourrait être de 20 % à 30 % qui vont partir.

Je vais terminer, M. le Président, moi aussi, en regardant le journal, ce que dit une responsable du programme de soins infirmiers du Collège de Sherbrooke – ce n'est pas loin, là, du comté du député – qui nous dit: Nous avons environ 200 finissantes des dernières années qui n'ont pas trouvé d'emploi dans leur domaine. Il y en a beaucoup, de ces 200 infirmières-là, toutes formées, qui cherchent un emploi, qui sont obligées de travailler dans des restaurants, puis de prendre toutes sortes d'autres fonctions, qui sont très honorables en soi, mais qui ne sont pas dans leur domaine, qui ne trouvent pas ça.

Alors, il y a un bassin de personnel formé qui attend pour prendre du travail et ce que va faire ce transfert de personnel là, avec les départs, c'est que ça va permettre de rajeunir nos équipes, d'amener du sang neuf et de consolider nos équipes de travail avec du sang neuf, M. le Président. Merci.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie, M. le ministre. J'invite maintenant Mme la députée de Rimouski à intervenir.


Mme Solange Charest

Mme Charest: Merci, M. le Président. Je suis toujours étonnée d'entendre l'opposition jouer les vierges offensées par rapport aux problèmes qui peuvent exister dans le domaine de la santé. Parce que, quand ils nous font l'énumération, là, puis ils nous accusent, le ministre de la Santé et le gouvernement actuel, de fuir nos responsabilités, je me demande bien qu'est-ce que le gouvernement précédent a fait si ce n'est pas d'être – et je ménage, et je mesure mes mots – si ce qu'il a fait n'a pas été de l'ordre de l'irresponsabilité, parce que, quand ils nous parlent des problèmes des salles d'urgence, des listes d'attente, les problèmes de la santé mentale qui n'ont pas été résolus lors de la désinstitutionnalisation, ils nous parlent même des ressources médicales qui peuvent être en surplus ou en manque dans certaines régions, c'étaient des problèmes qui existaient sous leur régime et, malgré tout ça, ce gouvernement précédent nous en a laissé beaucoup plus à régler qu'il nous a proposé de solutions.

La différence entre le gouvernement précédent et nous, c'est que, nous, on sait où on s'en va, on a une vision, une vision à long terme et ce qu'on propose, c'est une restructuration du système pour mieux répondre aux besoins de la population. Je pense que le gouvernement précédent, il était trop pressé et il était trop occupé, en quelque sorte, à dilapider les fonds publics, parce qu'il faut se rappeler qu'entre 1989-1990 à 1994-1995, lorsque le déficit est passé de 1 700 000 000 $ à 5 700 000 000 $, ils n'avaient pas l'air à avoir grand problème pour tirer l'argent par les fenêtres, puis, hein, en voulez-vous? En v'là! Il y en a, de l'argent. Ce n'était pas un problème pour eux, à ce moment-là. Alors, je pense que, là-dessus, il faut rappeler que le contexte budgétaire dans lequel la restructuration se fait est un contexte difficile, nous en convenons, mais ça ne nous empêche pas de nous retrousser les manches et de passer à l'action.

Ce qu'il faut rappeler aussi, c'est que le gouvernement précédent a systématiquement raté ses cibles pour diminuer le déficit et, ça, ça a un impact sur la résolution des problèmes actuels, parce que ça nous a enlevé de l'oxygène, de la marge de manoeuvre pour pouvoir rajuster le système en fonction des nouveaux besoins, par rapport à la population.

(10 h 50)

Ils n'ont eu aucun contrôle sur les dépenses. Ça, il faut se rappeler que, là-dessus, les dépenses, ça ne les fatiguait pas beaucoup. En voulez-vous, des exemples de dépenses folles? Il suffit de penser à la publicité qu'on payait pour les Nordiques, sous prétexte que le ministre d'alors était le petit copain du propriétaire de l'entreprise. On peut parler aussi du transfert de l'Hôtel-Dieu à Montréal, qui a coûté 2 000 000 $, juste pour en parler. On peut parler aussi du show de Charlesbourg pour annoncer une pensée, une idée qu'il avait mais qui ne s'est jamais réalisée dans les faits, qui a coûté au-delà de 500 000 $, quelque chose comme 650 000 $. Je pense que là-dessus l'opposition n'a aucune leçon à nous servir sur la gestion des deniers publics.

Alors, je pense que là-dessus les dépenses de programmes du gouvernement du Québec, si elles avaient évolué au même rythme que dans les autres provinces depuis les années quatre-vingt, bien, je suis certaines qu'elles auraient été inférieures de beaucoup à ce qu'elles sont présentement. Et nous, on doit rattraper ce retard pour donner au système de santé l'oxygène dont il a besoin pour maintenir l'accessibilité des services et répondre aux nouveaux besoins de la population. Alors, je pense que là-dessus, on peut dire, de façon très claire, que la population du Québec peut compter sur le fait que nous sommes conscients qu'il y a des problèmes dans le domaine de la santé mais que nous sommes là pour les régler et que, depuis deux ans et demi, nous avons procédé avec une rapidité qui ne s'était jamais vue auparavant.

Et je voudrais faire une parenthèse avant de terminer pour rappeler au député de Shefford que son vieux programme, on en a des nouvelles versions depuis ce temps, et je me ferai un plaisir de lui donner la dernière version. Comme ça il ne pourra pas divulguer des informations passées date et il pourra se recycler avec les bons documents en date de 1997.

Il faut rappeler que le gouvernement du Parti libéral, lorsqu'il était au pouvoir, en un seul mandat, ce qu'il a réussi à faire, c'est doubler la dette. Quand on est passé de 42 000 000 000 $ à 75 000 000 000 $, ça, ça ne s'était jamais vu. Et je pense que là-dessus on peut dire que le gouvernement actuel, lorsqu'il se fixe un objectif d'éliminer le déficit, c'est pour mieux répondre aux besoins de la population.

Je reviendrai tout à l'heure parce que je vois que mon temps est terminé. J'aurais eu beaucoup d'autres choses à rajouter mais je pense que rappeler le contexte dans lequel évolue le système de santé, ce n'est quand même pas inopportun. Au contraire, ça donne l'heure juste sur plusieurs problèmes que nous avons à régler.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie, Mme la députée de Rimouski. J'invite maintenant M. le député de Beauce-Nord à intervenir.


M. Normand Poulin

M. Poulin: Merci, M. le Président. Permettez-moi de vous faire part de ce que vivent les gens de la Beauce actuellement dans les soins de santé. Simplement pour vous donner un aperçu de la gravité chez nous, je prends l'exemple de la MRC Robert-Cliche, par exemple, où il y a deux ans on avait un budget de 23 000 000 $ en soins de santé et actuellement on a un budget de 8 000 000 $. C'est pour dire comment on a pu être affectés par la réforme du ministre.

Entre autres, depuis deux ans, dans la grande région de la Beauce et toute la région, il y a eu 577 fermetures de lits. On peut penser par exemple à la fermeture du Centre hospitalier de Beauceville, au foyer de Saint-Gédéon, au foyer de Saint-Odilon. Il y a eu 40 lits qui ont été perdus en Nouvelle-Beauce, dans la MRC de la Nouvelle-Beauce, 74 dans la MRC des Etchemins, 85 dans les MRC Beauce-Sartigan et Robert-Cliche. Au total, ça, c'est 200 lits de soins de longue durée qui ont été fermés. Je dois vous dire, M. le Président, que la population n'est plus capable d'en prendre. Elle n'est plus capable de subir ces coupures-là. C'est trop rapide, ce virage-là. Vraiment, il dérape.

M. le Président, le ministre a participé à des émissions publiques, à l'émission de Montgrain. Il nous disait: C'est fini, les coupures; c'est fini, les fermetures. Encore cette semaine, on apprenait que, dans la Beauce, il y aurait encore des nouvelles coupures qui s'apprêtaient. Il y a eu des coupures, on va dire, qui ont été engagées dans l'exercice 1997-1998 pour un montant de 15 700 000 $, mais on nous annonce une coupure additionnelle de 5 800 000 $ qui serait absorbée totalement par les soins de longue durée, c'est-à-dire le programme PPA.

On veut réduire la norme de 5 lits à 4,3. Ces coupures, ça suscite beaucoup d'inquiétudes auprès de la population, des municipalités, des utilisateurs de soins de santé. Le ministre et le premier ministre ont reçu des lettres d'ailleurs des municipalités, entre autres de la municipalité de Saint-Joseph-de-Beauce, et je vous en lis un extrait: «Si les compressions budgétaires annoncées s'effectuent comme prévu dans les programmes des personnes en perte d'autonomie, ce sont uniquement les personnes âgées qui en feront les frais. Nous voulons dénoncer cette injustice qui s'exerce à l'endroit des démunis, c'est-à-dire de ceux et celles qui dépendent le plus de l'aide de l'État pour vivre et mourir dans la dignité.» C'était le maire de Saint-Joseph, M. André Spénard, qui nous a envoyé ça le 14 mai et qui l'a dirigée au ministre.

Le 14 mai, le maire de ville de Beauceville et préfet de la MRC, M. H.-Marcel Veilleux nous dit ceci: «Nous questionnons sérieusement sur les motifs cachés en arrière de cette décision où la même région est toujours au centre des coupures, où ces mêmes coupures ne sont pas expliquées et justifiées aux élites régionales et à la population, où les processus de décision font l'objet de tractations de coulisses à l'insu des principaux intéressés, et souvent au détriment de la population, où des décisions régionales de rationalisation sont contrecarrées par des dépenses supplémentaires dans le même domaine. Bref, nous trouvons bien respectueusement que les décisions sont prises à la pièce, sans concertation régionale et, malheureusement, toujours concentrées négativement au même endroit.»

La crainte des deux maires, c'est la perte de 45 lits, c'est la fermeture d'institutions. On veut suspendre ce processus de décision là. On veut que ça cesse, la fermeture de nos institutions. On n'a pas les moyens de perdre ces services-là auprès de notre population. Hier encore, je recevais un appel d'une personne qui est au foyer de Saint-Joseph, une Mme Lessard, qu'on veut sortir du foyer pour l'envoyer à 40 km de chez elle parce qu'on n'a plus de place, on n'a plus de budget pour la servir. Mais ça n'a pas de sens.

M. le ministre, pouvez-vous nous dire quand ça va arrêter? Qu'est-ce que vous allez faire pour répondre aux attentes des Beaucerons? Je pense que le message a été clair. Il y a eu une partielle dans la Beauce et les gens sont tannés de ces politiques-là de coupures. Qu'est-ce que vous allez faire, M. le ministre, pour répondre aux besoins de soins de santé des Beaucerons et des Beauceronnes?

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Avez-vous fini, M. le député? Merci, M. le député. J'invite maintenant M. le ministre.


M. Jean Rochon

M. Rochon: M. le Président, je vais répondre rapidement au député parce qu'on est dans le même style et je veux parler d'un autre sujet. Le député doit très bien savoir, ou bien il est temps qu'il fasse ses classes, que, effectivement, comme je l'ai dit à Mongrain, les fermetures d'établissements – c'est de ça dont on parlait – étaient ou bien faites, ou bien en voie de se faire, ou se faisaient, ou se feraient selon ce qui est prévu, selon les paramètres qu'on a prévus dans les plans de transformation pour cette partie de l'absorption de nos dépenses. Il doit très bien savoir que dans la Beauce, dans toute la région de Chaudière-Appalaches comme ailleurs au Québec, on applique les mêmes paramètres et que, pour les lits d'hôpitaux de courte durée, on travaille avec une norme de deux lits par 1 000 personnes de population, et ce, partout dans le monde. C'est comme ça que ça se fait et c'est ça qui s'applique dans la Beauce. Quand il y a eu la fusion, on n'a pas fermé, on a intégré Beauceville et l'hôpital de Saint-Georges-de-Beauce. Ça donne un établissement qui a une vocation pour cette partie de la région et des moyens pour le faire. Quand il va avoir complété cette intégration, il va donner encore un bien meilleur service aux gens qui vont avoir le nombre de lits qui correspond à la population, comme partout au Québec. C'est ça la réalité.

En ce qui regarde les lits de longue durée, le député doit savoir, comme tout le monde de la région le sait, que, s'il y a un endroit au Québec où il y avait trop de lits de foyers qui avaient été bâtis dans les années soixante, dans un contexte complètement différent de ce que sont les soins de longue durée présentement, et qui étaient des lits qui, de toute façon, n'étaient plus capables du tout de donner l'intensité de services et le type de services dons les gens avaient besoin... Ce qui se fait dans l'ensemble de la région, c'est un rééquilibrage entre le littoral de cette région où il manque de lits, où on en a développés et il va y en avoir plus, et la Beauce où il y avait trop de lits de longue durée.

Effectivement, dans tout le réseau de la santé, on s'est aperçu que, si on développe du maintien à domicile, de plus en plus comme ça se fait, on a besoin de moins de lits de longue durée pour les personnes âgées de 65 ans et plus. La norme qui, il y a 15 ans, était de cinq pour 100 personnes âgées de 65 ans et plus est appliquée partout, dans toutes les régions du Québec, autour de quatre. Parce que, pour le lit qu'on a enlevé, on a donné du maintien à domicile. Et les gens préfèrent avoir des services à domicile, des soins à domicile, plus longtemps pour être moins longtemps, moins d'années, dans un milieu de vie substitut. Un autre bel exemple d'information qui sort distordue, hors contexte, et qui ne tient pas compte que les choses se passent là avec les mêmes principes d'équité qu'ailleurs au Québec.

Évidemment, il y a des difficultés et il faut comprimer des budgets. Mais je ne reviendrai pas sur ça. Ce n'est pas à eux autres de nous reprocher d'être obligés de diminuer nos dépenses quand ils nous ont fait vivre pendant des années en empruntant pour payer l'épicerie et en dépensant au-dessus de nos moyens. Mais on le fait avec équité et on le fait en se préoccupant et en s'assurant que les gens continuent à recevoir des services et, dans bien des cas, dans la plupart des cas, des services mieux adaptés à leurs besoins. C'est ce que les gens nous disent quand ils utilisent les services. Ils constatent que c'est ça qui se passe.

(11 heures)

Je voudrais vous montrer, M. le Président, que dans toute cette transformation où on avait dit qu'en plus d'adapter mieux les services, d'en améliorer la qualité et d'en améliorer l'accès, on mettrait de plus en plus l'accent sur la prévention, on verrait de plus en plus qu'on prenait le contrôle en remontant en amont sur les problèmes.

Puis là je vais profiter de cette interpellation pour informer la population du Québec que ce qu'on a en préparation depuis quelque temps devient une réalité; c'est un programme pour l'ensemble du Québec d'intervention pour l'infection par le VIH – le virus du sida – au moment de l'accouchement, pour les femmes qui sont enceintes. C'est un problème qui est important et pour lequel jusqu'à tout récemment on n'avait pas de moyen de prévention. Maintenant, il y a des moyens de prévention et on sait que le risque de transmission du VIH de la part d'une femme qui est infectée, qui a une grossesse, va jusqu'à 70 % comme risque d'infection de l'enfant. C'est un problème qui a une certaine importance au Québec. Il y a à peu près 85 000 naissances au Québec. On calcule qu'il y a peut-être une naissance sur 2 000 qui est celle d'une mère qui a l'infection; dans la région de Montréal, c'est encore plus grand que ça, c'est 1 pour 500.

Alors, on a maintenant un moyen qui existe, qui a été développé récemment, et le Québec, grâce aux économies qu'on a pu faire, grâce à la réorganisation de notre système, grâce à un déploiement différent des médecins – parce qu'il y a une bonne collaboration avec l'ensemble des partenaires professionnels et notamment les médecins dans ce cas-là – les femmes, à partir d'aujourd'hui, au Québec, dans toutes les régions, vont être informées, vont se voir offrir le test de dépistage pour l'existence possible du VIH et, s'il y a un VIH, le traitement et l'intervention vont leur être offerts pour prévenir que leur enfant ne soit infecté avec ce moyen efficace. C'est ça que ça donne, une réorganisation du système de santé. C'est difficile à faire quand on comprime des budgets, mais non seulement on améliore les services puis on les rend plus adaptés, on développe de nouveaux services et qui sont de plus en plus préventifs, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci, M. le ministre. Mme la députée de Rimouski.


Mme Solange Charest

Mme Charest: M. le Président, permettez-moi, en quelque sorte, suite à l'annonce du ministre, de lui dire merci au nom de ces femmes qui sont aux prises avec ce problème de santé, parce que je dois vous dire que les conditions de vie des femmes me préoccupent au plus haut point et, pour avoir été militante sur le terrain avec des groupes de femmes, il me semble que ce type de programme va les aider parce que, vous savez, ce n'est pas tout que de corriger des situations mais il faut aussi avoir une préoccupation en termes de prévention.

Il faut reconnaître, quand on parle des conditions de vie des femmes et des problèmes qui leur sont particuliers, que leur profil de santé n'est pas du tout le même que pour celui des hommes, ça c'est reconnu, c'est connu, et je pense que là-dessus il y a certaines problématiques qui sont vécues par les femmes, qui interviennent de façon directe et même indirecte sur leur état de santé. À titre d'exemple, prenons la violence conjugale et les agressions sexuelles. C'est deux types de situations qui sont des graves problèmes de société mais qui sont des problèmes qui affectent beaucoup la santé et les conditions de vie des femmes au Québec. Et, pour ça, on se doit comme gouvernement de chercher à les prévenir, on doit avant tout s'attaquer à leurs causes et savoir reconnaître les facteurs qui favorisent l'apparition de ces types de problèmes là.

Comme gouvernement responsable, je suis persuadée et je sais d'office que les gens vont reconnaître que le ministère de la Santé et des Services sociaux, c'est un intervenant qui est particulièrement interpellé dans tout le dossier de la violence qui est faite aux femmes. Je pense que là-dessus il faut que la prévention, le soutien aux organismes dans le milieu, ça, c'est fondamental, et que ces organismes-là, une fois qu'ils ont développé des expertises et des services qui répondent aux problèmes spécifiques des femmes, se concertent entre eux, que leurs tâches et que leurs services soient concertés.

Là-dessus, je pense qu'il faut rappeler qu'il n'y a pas tellement longtemps le ministère a mis en place des mesures qui vont favoriser la concertation des différents partenaires. La violence conjugale fait appel autant aux services sociaux qu'aux services judiciaires et communautaires, et, à tous les niveaux, que ce soit au plan local, régional ou national, il faut que les intervenants établissent des mécanismes pour mieux se concerter et offrir les services partout sur le territoire, à la grandeur du Québec. En vertu de leur mandat, il faut rappeler que les régies régionales ont un rôle à jouer là-dessus et que d'ici la fin de 1997 elles doivent voir à ce que ces services-là sur le territoire soient concertés. C'est pourquoi, d'ici l'automne, dans quelques mois, on va voir une campagne de communication qui va s'adresser particulièrement aux jeunes. Parce que la violence conjugale, ce n'est pas de la génération spontanée. Très tôt, les signes avant-coureurs de la violence, autant chez les hommes violents que chez les femmes victimes de violence, apparaissent. C'est cette clientèle des jeunes de 13 et 14 ans qui va être l'objet d'une campagne de communication pour les sensibiliser et les amener à réfléchir sur ce problème-là.

Le ministre de la Santé, le ministre actuel de la Santé, a accordé 500 000 $ pour consolider les ressources en termes d'hébergement. Parce qu'une femme violentée, il faut la sortir de son milieu, il faut lui donner du support et des moyens pour la protéger et pour lui donner le temps de réfléchir sur sa situation pour qu'elle puisse prendre les décisions qui s'imposent. Ce 500 000 $ là était bienvenu. Les régies régionales ont eu aussi le mandat d'augmenter de 2 000 000 $ les ressources pour l'exercice financier 1996-1997. Je pense que là-dessus c'est parce qu'on a une préoccupation et on prend les moyens pour aider à solutionner ce problème que l'on connaît de plus en plus fréquemment.

Vous savez, le ministère de la Santé et des Services sociaux se doit de contribuer au financement des regroupements de femmes tels que les CALACS, les maisons d'hébergement et les centres de femmes. Cette année, c'est-à-dire pour l'année financière 1996-1997, c'est 31 500 000 $ qui ont été consacrés. Alors, je pense que là-dessus il faut se rappeler que les organismes du milieu ont développé des expertises et ils sont souvent à la base de nouvelles pratiques dans le domaine de la santé pour solutionner des problématiques qui sont propres aux femmes.

Il y a une autre réponse du ministre de la Santé et des Services sociaux qui a été faite pour répondre aux besoins des femmes...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci.

Mme Charest: ...c'est celle de légaliser la pratique des sages-femmes.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci, Mme la députée, je m'excuse.

Mme Charest: Alors, je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci, Mme la députée. M. le député de Beauce-Nord.


M. Normand Poulin

M. Poulin: Oui, M. le Président. Je reviens un peu sur la réponse du ministre. Le ministre nous fait des beaux calculs qui ramènent des ratios, puis, etc. Puis il veut ramener tout le monde égal. Par contre, je dois lui dire, moi, qu'en région où on est, en Beauce, par exemple, nos services de réadaptation, pour lesquels on est servis par Québec, ils ne viennent pas souvent, mous autres, chez nous.

Le ministre semble voir seulement un côté des choses. Il y a des services vraiment où on est déficients. Puis ça, ça ne s'en vient pas. Puis on l'a demandé à plusieurs reprises, d'amener ces services-là dans notre région. À tout le moins, pour compenser pour les pertes d'emplois, puis les pertes de soins de santé qu'on donne à notre population, on pourrait à tout le moins récupérer ces services-là. De plus, là, quand le ministre dit que ce n'est pas la réalité... Appelez Mme Lessard, qui est déracinée de son milieu, puis qui est envoyée à 40 km de chez elle, là. Je pense que le ministre, il va comprendre ce que vit cette famille-là, par quelles émotions, par quelle situation elle passe.

Il faut dire au ministre aussi que ce n'est pas seulement les Beaucerons qui vivent des situations difficiles dans le domaine de la santé. Prenons, par exemple, la région du Saguenay–Lac-Saint-Jean: actuellement, elle n'accepte pas les décisions du ministre. Pour vous faire part un peu, là, de ce qui se passe actuellement dans cette région-là, on peut lire des titres qui ne sont pas vraiment à rendre hommage à la réforme du ministre: «La région ne peut se permettre de perdre La Baie». C'est tout dans les soins, ça, des unités de réadaptation, des soins de santé. «Entre le ministre de Dubuc et le ministre de la Santé, le torchon brûle.» Député péquiste, M. Paradis. «Un des quatre établissements de la santé fermera ses portes dans cette région-là.» «Le ministre Rochon sème la frustration à La Baie.» «Drapeau en berne à l'Hôpital de la Baie.» Ces gens-là, ils ont l'air d'être heureux des décisions qui ont été prises par le ministre, vraiment, dans cette région-là.

«La décision du ministre Rochon sonne le glas aux services de la santé.» Je vais vous lire des extraits. «Des consultations bidons. Faut-il mettre sur le compte du hasard la présentation du plan de réadaptation physique du ministre Rochon, à Jonquière, en même temps que l'inauguration à Chicoutimi du pavillon des humanités? En donnant à Jonquière de nouveaux lits, par l'annonce de l'implantation d'un centre de réadaptation physique, au même moment où le premier ministre inaugurait le pavillon de l'UQAC, on se mettait à l'abri des critiques, longtemps formulées à l'égard du député de Jonquière, qui n'en a que pour Chicoutimi. Dans le cas du centre hospitalier Jonquière, par exemple, la grille d'évaluation confiée à des experts en réadaptation place l'institution en dernière place.»

(11 h 10)

Encore un article du Progrès-Dimanche : «Incompétence et partialité: La SINEQ dénonce la décision du ministre. Le syndicat des infirmiers et infirmières de l'Hôtel-Dieu de Roberval dénonce l'incompétence et la partialité du ministre de la Santé dans le dossier des lits URFI. Le CRPDI vit une grande déception.» Encore là, c'est un article dans le Progrès-Dimanche du mois de mai: «Le président du Centre de réadaptation physique et de déficience intellectuelle, Me Michel Larouche, s'est dit plus que déçu de la décision du ministre de la Santé de donner à l'hôpital de Jonquière toute la mission en réadaptation physique.» «Roberval entend poser des questions au ministre dans le dossier de l'URFI.» J'en ai, j'en ai... «Le ministre imposeur.»

Entre autres, aussi, il y a un article qu'on peut voir, qui n'était pas vraiment d'avis avec les députés péquistes, parce que le député de Dubuc ne le prend pas. «À La Baie, le député de Dubuc réagit amèrement devant la décision du ministre concernant l'implantation des lits d'unité de réadaptation fonctionnelle intensive. Il y va d'une charge à fond de train contre la régie régionale. Le député souligne que la décision de son confrère va dans le sens contraire à ce qui se fait ailleurs au Québec. Il se demande si cette nouvelle philosophie en faveur du critère de proximité ne contribuera pas à diminuer la qualité des services. Le député va encore plus loin. il s'interroge à savoir s'il s'agit d'une formule pour tenter de sauver la face de la régie régionale. Le député péquiste qualifie même de scandale toute la perte de temps, d'énergie et d'argent qui se fait sous la gouverne de la régie régionale depuis deux ans. Le député conclut que certains organismes, de nombreux intervenants et la population ont été victimes de manipulation par la régie régionale. Et il ajoute que les responsables devront se reconnaître et faire face au seul choix qui s'offre à eux, soit celui de présenter leur démission.

«Le ministre de la Santé et des Services sociaux peut-il justifier la décision de regrouper les services de réadaptation dans le comté du premier ministre? Le premier ministre s'engageait à voir les plans de la régie régionale de la santé et des services sociaux en février 1996. Est-ce que le premier ministre a influencé le ministre de la Santé pour rapatrier les services de réadaptation dans son comté alors que les autres établissements étaient reconnus pour leur expertise?»

Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci, M. le député. J'invite maintenant M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.


M. Jean Rochon

M. Rochon: Ça continue. Évidemment, on va commencer à croire que c'est génétique, leur affaire, M. le Président. Je pense que le parrain du Saguenay–Lac-Saint-Jean devrait, de temps en temps, passer un peu plus de temps à parler au monde que juste lire et parceller les manchettes et les articles des journaux, puis se fabriquer un discours en prenant des phrases un peu partout dans trois ou quatre articles de journaux, dont certains étaient avant la décision du ministre, d'autres après, tout ça mêlé. Il ne les a même pas mis en ordre chronologique à part ça.

Mais, s'il était allé sur le terrain, M. le Président, après la première réaction des gens, il s'apercevrait d'abord qu'il y a eu dans la région, ce qu'il sait peut-être, là, un long débat sur la question, et que, dans ce cas-là, comme c'est arrivé dans certaines discussions, dans l'ensemble du Québec, avec les gens du milieu, avec la régie régionale, le ministre a dû effectivement faire un arbitrage. Il n'y avait pas de consensus qui menait à l'unanimité. Le ministre a dû faire un arbitrage et, quand il y a un arbitrage, il y a une décision qui est prise; c'est sûr qu'il y a des gens qui sont un peu moins satisfaits que d'autres de la décision. Parce que, s'il y avait eu moyen d'avoir une unanimité, comme dans 80 % à 90 % des décisions que la régie a prises, les gens l'auraient fait localement. Alors là, si on prend la réaction immédiate de tous ceux qui n'ont pas eu une décision qui était ce que eux auraient souhaité complètement, c'est bien sûr que ça donne ça. Mais qu'est-ce qui s'est passé en réalité, pour la région? C'est ça qui est important, là. Puis, quand le parrain retournera dans le comté, il pourra aller voir ce que j'ai dit pour voir si c'est ça qui se passe ou pas. Puis, il viendra nous le redire si ce n'est pas ça.

Ce qui s'est passé comme décision, c'est que d'abord les six établissements hospitaliers couvrant toute la région et du Saguenay et du Lac-Saint-Jean vont avoir une unité de base et un programme de base de réhabilitation fonctionnelle intensive. Il travaillait avec le mot URFI qu'il avait de la difficulté à prononcer parfois, c'est «réhabilitation fonctionnelle intensive» dont on parle. Et tous les hôpitaux vont avoir ça, ils vont avoir un programme de base qui va avoir la partie dans l'établissement, dans l'hôpital, et la partie en traitement ambulatoire, en consultation externe, et à domicile. Un programme intégré partout, près de la population, comme le fait partout ce fameux virage ambulatoire.

En plus, pour la région qui doit venir chercher présentement des services spécialisés et surspécialisés à Québec, à François-Charon, en plus, on a décidé de leur permettre de développer sur les cinq prochaines années des services spécialisés qui vont éviter aux gens de la région de venir à Québec pour certains services spécialisés. Ils vont avoir des équipes qui vont leur donner ce service dans la région. Et, en développant cette unité surspécialisée de services de réadaptation fonctionnelle intensive, ça va donner un appui technique aussi aux six établissements qui, localement, donnent le service aux gens.

Alors, ceux qui ont vu l'ensemble de la décision, et le député pourra voir quand il va retourner dans le comté un jour, dans l'ensemble, les gens trouvent que c'était une bonne décision. Et les gens, présentement, ont dit ce qu'ils pensaient. Ceux qui auraient souhaité que ce soit un peu autrement l'ont dit. Et c'est correct, on est dans une démocratie. Mais, là, les gens sont sur le terrain de travail à mettre en oeuvre cette décision-là. Bon. Quand on ne sait pas ce que c'est que prendre des décisions, on est surpris de voir que des gens réagissent quand on en prend une. Mais, quand on en prend, et qu'on la prend correctement avec les gens, comme ça a été fait dans ce cas-là, voilà comment ça s'applique.

Alors, M. le Président, je vais dire un petit mot, puis je continuerai tout à l'heure là-dessus. On va parler peut-être un peu, d'ici la fin, à une couple de reprises, de l'exonération financière. Parce que, hier, on a eu une étude de crédits. Et, typiquement, comme l'opposition le fait régulièrement, on n'a pas discuté de ce qui était des nouveaux crédits additionnels d'exonération financière pour que les gens puissent avoir des services domestiques; on a repris des discussions qu'on avait faites pendant 20 heures pour avoir le temps de passer autour de la question sur l'ensemble des crédits du ministère, puis on a pu le faire de façon partielle, par morceaux un peu distordus, comme l'opposition aime le faire.

Lorsque le gouvernement a décidé, en rajoutant des crédits dans le secteur de la santé et des services sociaux, 80 000 000 $ de crédits qui sont rajoutés – 79 400 000 $ exactement – pour qu'on puisse permettre à des gens, en donnant une exemption de base à tout le monde de 3,00 $ et pouvant aller jusqu'à 10,00 $ selon les revenus qu'a une personne, que quelqu'un puisse demander et recevoir des services domestiques quand il en a besoin... Pour les personnes de 65 ans et plus, d'abord, qui sont ceux qui ont le plus besoin de ce genre de services là; mais aussi pour des gens de tous âges qui auraient besoin de services à domicile qui viennent compléter ce que les CLSC font comme soins. Les CLSC, de plus en plus, vont pouvoir cibler leur travail et leur intervention sur les soins de santé ou sociaux avec des professionnels et leur personnel; et des services vont être disponibles dans la communauté pour compléter ces services-là, pour toute l'aide domestique dont les gens ont besoin.

Et ça, en plus de donner, par exonération financière, l'accessibilité financière à ces services, ça va permettre de créer de véritables emplois. Parce que les gens qui faisaient ça jusqu'à présent avec des groupes communautaires étaient dans une situation d'emploi très instable et ne réussissaient pas vraiment à revenir sur le marché du travail. Alors, au lieu d'être sur un programme d'employabilité qui dure neuf mois, 12 mois, ces gens-là vont avoir un emploi stable, un emploi durable. Les groupes communautaires vont être consolidés en entreprises d'économie sociale; et on va avoir, dans la communauté, en lien avec le CLSC, un développement d'entreprises d'économie sociale qui donnent le service complet à la population. C'est de ça qu'il fallait parler, hier. Et c'est ça qu'on fait dans le domaine de la santé. On commence même à réinvestir, là.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci, M. le ministre. J'invite maintenant la députée de Rimouski.


Mme Solange Charest

Mme Charest: Bon. Moi, j'entends l'opposition depuis tantôt. Ils ont commencé en nous accusant d'improviser, de ne pas savoir où on allait, de ne pas savoir ce qu'on faisait. Alors, à la question: Est-ce qu'on improvise? Non, on n'improvise pas; on a un plan d'action; on sait très bien où on va; et on sait ce que l'on doit faire; et je suis persuadée que nous allons bien le faire aussi. Nous planifions, dans le fond, pour demain puis après-demain, là; pas juste pour la minute présente et pas juste pour un secteur donné, mais pour l'ensemble des activités qui relèvent du domaine de la santé et des services sociaux.

Et ce qu'il faut se rappeler, au moment où on se parle, c'est que la restructuration, c'est vrai qu'au départ ce n'était pas évident pour tout le monde sur le terrain. Parce que, lorsqu'on a le nez collé sur la vitre, parfois, on peut oublier de regarder certains autres éléments. Mais ce qu'on peut dire, c'est que la restructuration, elle commence à donner des résultats. Dernièrement, lors du Sommet sur l'économie et l'emploi, on a fait un bilan de la restructuration, jusqu'où les accusations dont étaient victimes le ministre de la Santé et le ministère, à l'effet que, dans la restructuration, il y avait plus de problèmes que de solutions, jusqu'où c'était fondé ou pas.

Alors, la restructuration, le bilan qu'on en a fait nous permet de dire qu'il y a beaucoup de choses qui ont été faites; il en reste encore à faire. Tout n'est pas parfait. Il y a même certaines choses que nous devrons revoir. Parce que, vous savez, quand on planifie à une si grosse échelle, pour un aussi gros organisme ou un aussi gros ministère, c'est certain que l'atterrissage parfois peut être différent de ce qu'on avait planifié. Mais, ceci étant dit, on peut dire que grosso modo la transformation se poursuit très bien et que, de plus en plus, les gens se sentent sécures par rapport à ce qui se passe dans leur milieu.

(11 h 20)

La restructuration, elle nous a permis de développer de plus en plus des services qui sont plus adaptés aux nouveaux besoins de la population. Je pense, entre autres, au service Info-Santé. Et le service Info-Santé existait très peu. Enfin, il existait dans certaines régions du Québec mais, maintenant, aujourd'hui, ce qu'on peut dire, c'est qu'il existe à travers tout le Québec. Et, suite à cette transformation du réseau, les CLSC qui deviennent en quelque sorte des interlocuteurs très privilégiés pour offrir les services de première ligne ont maintenant des services étalés sur une plage horaire d'au-delà de 60 heures par semaine, dans bien des cas, ce qui n'existait pas ou à peu près pas auparavant. Il y a même certains CLSC – quelque chose comme une demi-douzaine de CLSC – qui donnent des services d'urgence là où il n'y a pas de service hospitalier de courte durée. Ils donnent des services d'urgence 24 heures par jour, sept jours par semaine, 365 jours par année, 52 semaines par année aussi. Alors, je pense que, là-dessus, il y a des services qui sont de plus en plus présents, proches de la population et qui répondent aussi aux voeux des intervenants et des partenaires de la santé qui voulaient que les services soient de plus en plus proches de la personne, du patient comme tel.

J'aimerais rappeler aussi que les budgets des CLSC, dans le cadre de la restructuration, ont vu certaines augmentations se réaliser, et ça, c'est dû à la réallocation des budgets comme tels. À titre d'exemple, les budgets qui ont été augmentés, surtout dans les CLSC, c'est celui du maintien à domicile, pour offrir des services à la population chez elle, soit aux personnes âgées, soit à des personnes qui, en post-opératoire, dépendamment des types d'intervention, sont chez elles et peuvent recevoir des services de maintien à domicile. Alors, il y a eu une augmentation de ces budgets-là de l'ordre de 20 %. Ce n'est pas terminé, mais nous continuons à travailler sur la réallocation des différents budgets comme tels.

J'aimerais aussi regarder, en quelque sorte, les services de deuxième ligne. On nous dit qu'il y a un certain nombre de personnes qui attendent dans les salles d'urgence et que c'est terrible, c'est la catastrophe. Vous savez, il y a aussi encore des périodes d'attente mais on peut confirmer que c'est diminué de 50 %. Là-dessus, je n'entrerai pas dans le détail mais diminuer de 50 % les difficultés dans les urgences, ça, c'est une réalité nouvelle.

On n'a jamais le temps de dire tout ce qu'on voudrait dire, M. le Président, et je vois que vous me faites encore signe comme quoi mon temps est écoulé. J'aurais aimé parler des temps d'attente en chirurgie parce que, là aussi, on a réussi à diminuer les listes d'attente et c'est environ 8,5 % des personnes qui sont sur les listes d'attente comparativement au passé.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie, Mme la députée. En effet, le temps passe très vite.

J'invite maintenant M. le député de Jeanne-Mance.


M. Michel Bissonnet

M. Bissonnet: M. le Président, je voudrais remercier le député de Brome-Missisquoi de me permettre d'intervenir dans le cadre de cette interpellation. Comme ça fait 16 ans que je suis député, M. le ministre, et, chaque fois qu'un citoyen vient de me rencontrer, j'essaie toujours de me placer dans sa peau et j'apporte toujours la sensibilité à son dossier, me mettant à sa place.

J'ai reçu deux personnes, une à la fin de mars et une au début de mai. À la fin de mars, il s'agit de Mme Denise De Rosa qui a une fille qui a un handicap qui est une encéphalopathie sévère, qui ne peut pas écrire, qui ne peut pas parler, qui a 22 ans. J'ai reçu également Mme Rea qui a un fils qui a 22 ans, qui s'appelle Alberto, qui a une myopathie congénitale. Ces deux enfants ont besoin de services de réadaptation et les deux ont fait application au centre d'intégration socioprofessionnel À la croisée qui relève du centre de réadaptation Gabrielle Major. Les deux ont fait leur demande parce que, vous savez, en conformité avec notre loi, dès que vous avez 18 ans, vous devez faire votre liste parce que, quand vous n'allez plus à l'école, le gouvernement, par ses centres de réadaptation, doit les prendre en charge.

Dans le cas du jeune Rea, il est sur la liste depuis le 13 septembre 1993. Il a été évalué durant une période de 15 heures par un conseiller en adaptation au travail. Il a été à l'école jusqu'au mois de juin 1996 et, depuis juin 1996, sa mère communique avec le centre de réadaptation et on lui dit: Ne vous inquiétez pas, ne vous inquiétez pas, il va rentrer le mois prochain... le mois prochain... le mois prochain... Nous sommes aujourd'hui en 1997, ça fait 10 mois qu'il attend pour des services de réadaptation au centre À la croisée.

Dans le cas de la jeune fille, plus que ça, on a écrit à la mère pour lui indiquer que, le 15 janvier, son «jeune homme» – son fils – serait intégré au centre À la croisée. Mais, depuis le 15 janvier, même si elle a reçu une lettre écrite: «Un intervenant communiquera avec vous, afin que ce service vous soit dispensé au plus tard le 15 janvier 1997»... Dans le cas de Mme De Rosa – cas très lourd – j'ai rencontré cette jeune handicapée, M. le ministre. En septembre 1996, en janvier 1996: Nous allons accepter votre fille au centre de réadaptation. Il y a eu une fusion entre trois centres: le centre Charleroi, À la croisée et Gabrielle Major. Ce dont on informe ces deux parents – je sympathise avec eux, M. le Président – ce qu'on leur dit: Bien, il y a eu des coupures. Il nous manque des éducateurs.

On est en présence, M. le ministre, de citoyens qui ont des handicaps majeurs, qui ont des services qui leur sont offerts, mais ils ne peuvent pas y accéder. Je vous demande de regarder ça attentivement, pour permettre à ces jeunes handicapés d'avoir les services que le gouvernement doit leur donner. Dans le cas de Mme Réa, elle a fait une plainte, en bonne et due forme, au directeur de la qualité des services pour cette région de l'est de Montréal.

Je regardais un article dans le journal du 16 avril: il y aura 3 000 lits de moins en psychiatrie, qui seront coupés. Alors, quels seront les services qui vont être offerts à ceux que les parents ont à la maison, qui prennent soin de leurs enfants qui ont malheureusement un handicap? Suite à la fermeture de ces lits, qu'est-ce qui va se passer avec ces enfants? Où vont-ils avoir les services auxquels ils ont droit?

Alors, ce matin, suite à la rencontre de mes deux concitoyennes, c'est avec émotion que je vous dis, M. le ministre: Ce n'est pas le temps de faire de la politique. C'est le temps d'agir. Merci.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci, M. le député. J'invite maintenant M. le ministre.


M. Jean Rochon

M. Rochon: M. le Président, ça dépend ce qu'on entend par «faire de la politique». J'ai l'impression qu'il y en a qui ont un drôle de concept de ce qu'est faire de la politique. Pour nous autres, faire de la politique, et spécialement dans le domaine de la santé, c'est faire de la politique de santé et de santé publique, c'est agir. Faire de la politique, quand on est des élus, c'est agir dans l'intérêt du monde et c'est agir en prenant compte de leurs besoins, de l'évolution de leurs besoins, en gérant, le plus efficacement possible, les ressources qu'on a, en tenant compte de notre niveau de richesse et en s'assurant qu'on maintient et qu'on rétablit, quand c'est nécessaire, l'équité entre les régions, entre les territoires du Québec, entre les populations et entre les groupes.

Équité, ça ne veut pas dire égalité; équité, ça veut dire qu'on a même... Si on fait vraiment de la politique correctement, M. le Président, c'est qu'on s'assure qu'on en fait plus pour les plus vulnérables dans notre société, ceux qui en ont le plus besoin. Alors, là, je dirais au député que c'est le temps de faire de la politique, mais dans le sens que, nous, on comprend ce que ça veut dire, faire de la politique: c'est que des élus travaillent pour le monde, améliorent leur sort. Je ne sais pas ce qu'il veut dire quand il dit: Ce n'est pas le temps de faire de la politique. C'est le temps d'agir. Drôle de concept de la politique.

Dans le domaine de la réadaptation, c'est sûrement un des secteurs où on a encore beaucoup à faire. Déjà, en plus de maintenir les ressources qu'on a déjà, je rappellerais, M. le Président, qu'au cours des deux dernières années il y a des ressources additionnelles de l'ordre de 7 000 000 $ à 8 000 000 $ – jusqu'à 8 000 000 $ – qui ont été faites dans le domaine de la réadaptation pour s'assurer que tous les gens qui étaient en attente d'une prothèse, ou d'une aide motrice, ou de quoi que ce soit comme besoin, trouvaient... On pouvait vraiment vider les listes d'attente et s'assurer que chacun des programmes soit transféré à différents organismes qui peuvent les administrer, compte tenu de leur mission générale, soit la Régie de l'assurance-maladie du Québec, le ministère, dans certains cas, la Société de l'assurance automobile du Québec, où on a vraiment fait une réorganisation, une bonne stabilisation de tous ces programmes-là.

(11 h 30)

Alors, c'est un domaine dans lequel on va continuer de plus en plus à s'assurer, au cours de la prochaine année, qu'ayant réglé un peu mieux le problème des gens qui étaient en attente d'une aide quelconque on puisse mieux les soutenir. Et je l'ai dit qu'à partir de 1997 ça doit être un des groupes de la population, avec les jeunes et avec ceux qui souffrent de toxicomanie et d'alcoolisme, les personnes handicapées, où on va aller aider plus au niveau des familles, au niveau de leurs proches pour voir tout ce qui peut être fait pour soutenir des familles qui gardent quelqu'un avec eux et aussi améliorer l'accès aux services de réadaptation spécialisée. Ça, c'est quelque chose qui est très actif dans les régions, sur laquelle on travaille de façon importante.

Les deux personnes identifiées ce matin, évidemment, je ne peux pas en parler. On m'en parle, là. Je ne connais pas la situation. Le député sait très bien que s'il pense que le système, d'une façon ou d'une autre, crée des difficultés dont il faudrait qu'en tant qu'élus on s'occupe, il sait très bien, il l'a déjà fait dans le passé, qu'il peut m'en parler, des cas spécifiques. On va regarder ça avec lui, on va faire ce qu'on peut faire. Et on le fait pour la population, peu importe la couleur de son député. Il n'y a pas de partisanerie là-dessus parce que, quand on fait de la politique, encore une fois, nous, on s'occupe du monde. C'est ça que ça veut dire pour nous, faire de la politique. M. le Président, ça, je peux assurer ça.

Dans le même genre de difficultés et de personnes qui ont des problèmes, parlons des gens qui ont un problème de santé mentale – c'est un autre genre de difficulté – soit de déficience intellectuelle ou des gens avec des problèmes de santé mentale. Je voudrais rappeler que, aussi, là, comme pour les personnes qui ont un handicap physique, c'est exactement ce qu'on a commencé à faire. À mesure que le système se réorganise et se stabilise, on peut aller au-devant des coups et s'assurer qu'on complète les travaux qui ont été faits.

Pour les orientations qu'on a sorties, les orientations de la transformation des services de santé mentale, je veux bien dire, M. le Président, que dans ce cas-là on peut le faire grâce à tout le travail fait dans la transformation, sans être obligé d'avoir un objectif budgétaire. Les ressources en santé mentale vont demeurer. On ne va pas diminuer, on va réorganiser. Les lits dont on aura moins besoin, on ne va pas enlever des lits pour avoir besoin d'argent ailleurs. On va donner des services aux gens qui sont déjà dans la communauté, qui sont déjà dans la rue. On l'a dit, là, dans les années quatre-vingt, on a fait la désinstitutionnalisation, les gens sont déjà dans la rue, ils n'ont pas les ressources qu'il leur faut. Leurs familles n'ont pas le soutien pour les aider à fonctionner. Les communautés n'ont pas assez d'aide pour les aider à retrouver un travail et à faire une vie normale. C'est ça qu'on va faire, aussi pour les gens qui ont une problème de santé mentale ou de déficience intellectuelle comme pour la déficience physique. Mais, dans ce cas-là, pour la santé mentale, on a vraiment, sur le terrain... Ce n'est pas une consultation pour savoir quoi faire, on le sait quoi faire, c'est une consultation qui est très active et qui, dans chacune des régions, met en place des services pour s'occuper des gens qu'on ne va pas sortir des établissements, qui sont dans la rue et qui n'ont pas les services, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci, M. le ministre. J'invite maintenant M. le député de Masson à faire son intervention.


M. Yves Blais

M. Blais: Merci, M. le Président. C'est bien sûr que, dans n'importe quel domaine de la vie, en éducation, en santé, en agriculture, en environnement, les meilleurs programmes qui sont installés, il y a toujours des petites failles. Et, si on pousse en exergue une petite faille, même si un système va bien, je crois que c'est curieux de sortir en exergue des cas qui vont mal comme ça. C'est un cas, ce n'est pas l'ensemble. On parle ici de politique d'ensemble.

Mais il y a une chose que j'aimerais dire. Dès qu'il y a une réforme amenée dans ce Parlement pour le mieux-être de l'ensemble de la population, toujours et de tout temps, les libéraux se sont dressés contre, en y faisant des batailles de titan. Prenons, dans le passé, le gouvernement péquiste de 1976, prenons deux exemples: le zonage agricole et l'assurance automobile. Ils ont provoqué des manifestations de toutes sortes. Ils s'y sont opposés de toutes les façons possibles et imaginables. Qui, aujourd'hui, voudrait que le zonage agricole ne soit pas une loi en force et qui aujourd'hui ne voudrait pas que la Loi sur l'assurance automobile soit en force?

Cependant, les libéraux se sont dressés de façon ferme contre ça. Aujourd'hui, on fait encore la même chose. Tout ce qui est réforme, on s'y oppose. On fait le même, même scénario que dans les années 1976. Le virage ambulatoire s'est fait partout dans le monde. On s'y oppose de façon totale et absolue de l'autre côté, sans en regarder les bons effets. L'assurance-médicaments, on en a fait un tollé. On a forcé des gens même à aller dans la rue pour protester. C'est très nouveau. On n'entend à peu près plus aucune, aucune discussion négative à ce sujet. Mais les libéraux s'y sont opposés. La garderie à 5 $, ils s'y opposent. La maternelle à cinq ans, ils s'y opposent. Eh bien, c'est très normal qu'ils s'opposent à la restructuration des institutions et des services de santé pour les adapter à la science moderne d'aujourd'hui. Ils se sont toujours opposés à toutes les réformes qui apportaient du mieux-être à la population.

Après coup, quand ces systèmes-là sont bien installés, bien sûr que, s'ils prennent le pouvoir, ils ne les changent pas. Parce que le peuple ne veut pas qu'on les change. Mais ce sont des spécialistes, des provocateurs de manifestations. Ils vont chercher un petit peu partout des gens qui sont un peu partisans, ils les font manifester, signer des pétitions, s'objecter à ça, tout en sachant – j'en suis persuadé – que ce virage ambulatoire, cette réadaptation des institutions, ils le savent que c'est pour le mieux-être des patients et des malades en général. Ils le savent. C'est pour ça que je trouve curieux, M. le Président, qu'on mette autant de frime pour venir essayer de saper à la base des systèmes nouveaux qu'on adapte à la situation moderne et qu'on laisse croire de façon un petit peu curieuse qu'on s'y oppose foncièrement. Ce n'est que de la frime, d'après moi. Une job d'opposition qu'on se doit de faire.

Mais là, je pense qu'on s'y prend mal. Ça sort un peu d'une sorte de démagogie, d'éteindre le gouvernement en place. Ce n'est pas en étant des éteignoirs à tout prix qu'on éclaire la population que l'on se doit de renseigner, qu'on soit au pouvoir ou dans l'opposition. Serrez vos éteignoirs. Faites une critique positive. Nous sommes prêts à recevoir vos critiques quand elles sont sensées, rationnelles et acceptables.

Cependant, jouer au Bonhomme Sept Heures, jouer au chevalier de l'épouvante, jouer aux apôtres de l'Apocalypse à tous les coins de rue et à toutes les réformes qu'on apporte, vous ne nous discréditez pas de cette façon. Vous attaquez peut-être votre crédibilité. Je ne le voudrais pas, parce que dans cette Chambre on est tous des amis et on doit tous ensemble travailler pour le bien de la population. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie, M. le député. J'invite maintenant M. le député de Jeanne-Mance à faire son intervention.


M. Michel Bissonnet

M. Bissonnet: M. le Président, je pense que vous m'avez écouté tantôt. Si je joue au Bonhomme Sept heures en soulignant au ministre de la Santé, qu'on dit souvent un technocrate – je vous donnerai la définition de «technocrate» en finissant mon intervention – si c'est jouer au Bonhomme Sept Heures d'apporter ici à l'Assemblée nationale des préoccupations de deux de mes électrices qui vivent un problème particulier, qui ont des enfants qui ont malheureusement un handicap et qui attendent patiemment depuis quatre ans que leurs enfants puissent être inscrits dans un centre de réadaptation au travail, si j'ai été élu pour faire un travail de député, je m'occupe des cas de mon comté et je vais m'en occuper. Ne soyez pas inquiet, le rôle d'un député est souvent mal perçu, mais je tiens à vous dire que tous mes cas, j'essaie de les vivre et de les penser avec l'émotion que j'ai. Les propos que vous avez tenus, ça déshonore la fonction d'un député, de quelque côté qu'il soit.

(11 h 40)

J'ai un autre de mes électeurs, M. le Président, M. le ministre, je vais vous raconter un peu son cas parce que ça m'a frappé. J'ai même communiqué avec sa travailleuse sociale. C'est un monsieur de 50 ans qui demeure dans la ville de Saint-Léonard, dans une résidence d'accueil. Il a des troubles glandulaires et des troubles auditifs. Il est sur l'aide sociale depuis 1979. Il reçoit 699 $ par mois et il y en a 506 $ qu'il doit payer pour la résidence d'accueil. Donc, il lui reste un montant de 45 $ par semaine. Il a un appareil auditif qui lui a été fourni par la Régie de l'assurance-maladie du Québec. Il a eu cet appareil en 1993. Et il a par mégarde perdu cet appareil auditif. Il a appelé à l'aide sociale. On lui dit: Le règlement ne nous le permet pas. Il a appelé à la Régie de l'assurance-maladie: Vous devez attendre sept ans. Vu qu'on vous a donné cet appareil en 1993, il faut attendre à l'an 2000. Il a communiqué avec sa travailleuse sociale qui a fait les démarches aussi pour lui. C'est un M. Gauthier. Elle dit: M. Gauthier, la seule façon que vous pourriez peut-être avoir une prothèse audio, c'est qu'il faudrait qu'un organisme sans but lucratif comme les clubs Optimistes ou le club Lions puisse vous avancer une telle somme, sans ça la société ne peut pas vous permettre d'entendre correctement. Alors, il a rencontré un audioprothésiste et celui-ci lui a fait un prix pour un appareil usagé de 350 $.

M. le ministre, vous qui êtes en charge de la Régie de l'assurance-maladie par votre ministère, j'ai remarqué que vous aviez, vous, un budget discrétionnaire qui est assez important et je remarque – ce n'est pas pour critiquer des contributions que vous faites dans votre budget discrétionnaire – mais je remarque que, Les Harfangs de Beauport , vous leur avez donné 5 000 $, ce qui n'est pas un organisme sans but lucratif. Quand une personne comme M. Gauthier, qui est sur l'aide sociale, n'a pas les moyens de remplacer son appareil orthopédique pour ses oreilles, selon vous, qu'est-ce que vous suggérez à M. Gauthier de faire, M. le ministre, pour qu'il puisse entendre correctement? Vous savez, quand on parle d'un technocrate, on parle d'un ministre haut fonctionnaire tendant à faire prévaloir les conceptions techniques d'un problème au détriment des conséquences sociales et humaines. Je vous demanderais, dans votre réponse, s'il y a une façon humanitaire d'aider ce M. Gauthier qui n'a pas d'appareil auditif. Alors, qu'est-ce qu'on va dire à M. Gauthier, M. le ministre?

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci, M. le député. Avant de permettre à M. le ministre de continuer, je vous ferais simplement remarquer que nous entreprenons la dernière partie de cette interpellation-là. Alors, on a 10 minutes du côté de M. le ministre et 10 minutes du côté du député de l'opposition qui fait l'interpellation. Alors, M. le ministre, si vous voulez débuter votre dernier 10 minutes.


Conclusions


M. Jean Rochon

M. Rochon: Bon. À la question précise qui a été soulevée, M. le Président, je voudrais redire au député de Jeanne-Mance que je suis tout à fait disposé, comme je l'ai toujours fait dans le passé, et je continue à le faire... S'il y a un citoyen du Québec qui a une difficulté quelconque dans le fonctionnement de nos systèmes et de nos services qui, pour une raison ou pour une autre, n'a pas pu être réglée sur place, les élus ont un rôle à jouer là-dedans à un moment donné pour aider à faire certaines interfaces plus délicates entre un système qui se veut le plus accessible possible. Mais, sur une population de 7 000 000, sur 80 000 000 actes qui sont faits dans un système de santé, 80 000 000 par année, c'est sûr qu'à un moment donné il peut y avoir des situations qui n'ajustent pas tout à fait à ce que sont les modes de fonctionnement de nos systèmes. Mais, à chaque fois que ça s'est présenté, on a toujours regardé la situation d'une personne. Dans le cas des prothèses auditives, il y a des règles du jeu pour le remplacement des prothèses auditives. Si pour une raison un citoyen a de la difficulté, on va s'asseoir, on va faire comme toujours, on va regarder la situation, mais je ne pense pas que c'est ce matin dans ce genre d'exercice-là qu'on puisse correctement, pour la personne impliquée, là, aller plus loin là-dessus.

Je voudrais peut-être aussi, M. le Président, apporter une petite précision sur l'intervention que j'ai faite tout à l'heure au sujet du programme québécois sur l'infection du VIH – du virus du sida – pour les femmes enceintes, pour corriger. Je pense que je n'ai pas été précis dans une information que j'ai donnée. On sait que le risque pour un enfant dont la mère serait infectée est d'être lui-même infecté dans un cas sur quatre. Ça, c'est ce qu'on connaît comme incidence ou risque d'incidence de la maladie pour l'enfant. Les nouveaux moyens qui ont été développés d'intervention au moment de la grossesse permettent de réduire de 70 % ce risque-là. Alors, je pense que j'ai dit tout à l'heure que c'était 70 % de risque. C'est un cas sur quatre, mais on peut diminuer ça de 70 % et c'est ce qui va être fait par le programme préventif qui est mis en place dans toutes les régions du Québec .

En terminant, M. le Président, je voudrais rappeler que, quand on regarde l'ensemble, là, de ce qui s'est passé depuis deux ans et demi et ce qu'il y a devant nous, je veux bien redire et que la population comprenne qu'on est très conscient que la situation est difficile, que tous les problèmes n'ont pas été réglés.

Et quand je tiens le discours de rappeler, par contre, qu'il y a pas mal de problèmes qui ont été réglés... Et ça, nos bilans qu'on a produits il y a quelques mois le montrent clairement. On n'a pas fait ça seulement avec des chiffres. On parle au monde. On va voir ce que les gens nous disent quand ils ont obtenu des services. On étudie les plaintes qui sont faites quand des gens ne sont pas satisfaits des services reçus. Et on voit, globalement – puis ça c'est important de se le dire, là, parce qu'il ne faut pas perdre confiance vis-à-vis ce qu'on sait qui est bon – à un moment donné qu'on tient et qu'on maintient qu'on a un système de santé et de services sociaux qui fonctionne toujours bien, que, dans l'ensemble, on a beaucoup plus d'éléments positifs, et que, malgré le couloir très serré et difficile qu'on passe présentement, non seulement on maintient le cap mais on améliore et on peut commencer à faire des services préventifs qui n'existaient pas, à développer de nouveaux services que les personnes n'avaient pas auparavant. Ça commence à pouvoir se faire.

On a augmenté d'à peu près 20 % les services à domicile. Les budgets des CLSC ont été augmentés de 7 %, dans l'ensemble. C'est des augmentations réelles. C'est encore au-delà des besoins mais on voit, là, que c'est passé de l'autre côté, qu'on arrive tranquillement de l'autre côté de la montagne et qu'on va commencer de plus en plus à sentir les bons effets de ce qu'on fait. Alors, ce que je dis, c'est qu'il faut voir les problèmes, il ne faut pas se les cacher, surtout pas. Il faut être capable de les prendre puis de les régler. Mais il faut aussi voir que, dans l'ensemble, on a une confirmation qu'on va dans la bonne direction et qu'il faut surtout maintenir le cap. On n'a pas de raison de se décourager. Il faut surtout maintenir le cap.

Bon, maintenant, présentement, on sent, là, qu'il y a un peu d'inquiétude parce qu'il se passe une autre opération importante: des gens vont partir dans le cadre de l'entente qui a été convenue entre les syndicats et le gouvernement. Des gens vont pouvoir prendre leur retraite sur une base volontaire, ce qui va permettre de faire la réduction du coût de la main-d'oeuvre, mais qui va permettre aussi de faire des modifications dans l'organisation des équipes sur le terrain. Il y a des changements, là, qui étaient voulus et qui étaient souhaités, qu'on n'avait pas toujours la possibilité de faire rapidement parce qu'il fallait attendre que certaines personnes partent ou que d'autres puissent être déplacées. Et là, ça va se produire. Il y a donc aussi, au moment où on va avoir à gérer sur le terrain une opération importante avec les effectifs, de bien s'occuper de ceux qui partent pour qu'ils partent correctement. Parce que ce n'est pas du monde qu'on met dehors, c'est des gens qui acceptent de partir dans le cadre du programme qu'on leur offre.

On est conscient, quand un système se réorganise comme ça, qu'il y a une perte de connaissances, une perte d'expérience avec les gens qui s'en vont. Alors, ça, on est très conscient de ça. Il faut bien gérer ça avec ces gens-là, il faut travailler avec eux, et aussi, beaucoup, peut-être même surtout, avec tous ceux qui restent et tous ceux qui vont venir remplacer ceux qui veulent partir. Maintenant, comme j'ai essayé de le montrer tout à l'heure, dans le cas des infirmières, il y a des gens qui sont sur les listes d'attente, qui attendent pour prendre un travail. Et on a bien dit que, s'il y a des départs au-delà de ce qu'il est nécessaire de viser comme objectif budgétaire, il y aura du remplacement. Nous, on va remplacer en santé, de toute façon, où les gens doivent être remplacés. Et, au-delà de l'objectif budgétaire, il y aura aussi du remplacement. On voit donc même se profiler, là, la possibilité qu'en donnant une chance à tout le monde de retrouver sa place, de même de créer, dans les prochaines années, plus rapidement qu'on aurait pu le faire autrement, de donner des emplois à des gens qui attendent actuellement, et qui n'ont même pas la chance de travailler à temps partiel sur une base occasionnelle ou, quand ils le font, c'est de façon très minime et de façon très précaire.

Donc, dans tout ça, ce changement-là qui se passe présentement, qui, encore une fois, il faut le reconnaître, est un défi sur le plan de la gestion des ressources humaines, c'est quand même quelque chose qui va nous placer dans une situation où on va être capable de mieux consolider ce qu'on fait présentement et de rentrer du sang nouveau. Alors, pour ceux qui partent et dont on perd l'expérience, on rentre du sang nouveau, des gens qui ont aussi de l'expérience et des jeunes qui cherchaient un emploi et qui vont pouvoir en avoir un.

Donc, en voyant ce portrait-là d'ensemble, je pense qu'on est dans une situation où, si on fait la balance, comme on dit, des inconvénients mais qu'on regarde aussi les avantages, globalement – puis ça je pense qu'il faut se le dire comme population – globalement, on est dans une situation qui est loin d'être désespérée. On est après se remettre un système de santé et des services sociaux qui va être plus performant que ce qui était auparavant.

(11 h 50)

À l'automne, on aura un autre rendez-vous, parce qu'il y aura, pour la transformation 2, on complète le premier cycle de trois ans, les régions préparent présentement un autre cycle, parce qu'on veut toujours travailler en ayant trois ans devant nous pour justement prévoir, pour être capable d'ajuster – pas improviser mais ajuster – quand les choses ne se passent pas comme on avait pu les prévoir sur la base d'informations qu'on avait. Alors, on se redonne un autre plan de trois ans; mais là, on aura complété les premiers trois ans, à peu près stabilisé tous les grands départs et là on va pouvoir voir comment on va un peu plus loin. On sait que, du côté des services de soutien, des services administratifs, on peut avec des approches nouvelles faire autrement et, encore là, pouvoir réaliser les dernières économies qu'on devra réaliser, mais le faire sans affecter les services et en s'assurant qu'on améliore la performance de notre système.

Alors, je veux rassurer la population et tout le monde dans le réseau. On est très conscient de la difficulté de la situation, on est déterminé à maintenir le cap sur les objectifs qui sont d'améliorer la qualité, de rendre plus accessibles les services et de les adapter aux besoins de la population. Et on compte beaucoup sur le fait qu'on travaille avec des ententes signées, avec des accords qui ont été faits avec nos partenaires, qu'on n'est pas en situation conflictuelle et de bataille. Au contraire, on est des partenaires sur le terrain, il faut qu'on se parle, il faut qu'à chaque fois qu'il se présente une situation nouvelle ou qu'elle se présente différemment de ce qu'on pouvait s'attendre on trouve en temps réel la solution. Et c'est dans cet esprit-là que le ministère, avec les régies régionales et avec les établissements, travaille et va continuer de travailler dans les prochains mois.

Là, M. le Président, les règles de ce genre d'exercice donnent les dernières 10 minutes à l'opposition. Je ne veux pas enlever le scoop au député de Brome-Missisquoi mais je préviens la population: on va ravoir, en finissant, une pétarade – probablement – de chiffres qui vont venir d'un peu partout, de citations, de différentes choses un peu hors contexte. Et on va revoir ce genre d'exercice de désinformation un peu systématique qui ne rentre pas dans les contenus, qui n'essaie pas de voir des critiques qui nous obligent à améliorer encore plus nos services mais où on surf sur le détail, où on pratique le grand art de la désinformation. Alors, on va être obligé d'entendre ça pour la fin. Mais moi, je fais confiance à la population, la population sait écouter, sait faire la différence, sait regarder autour ce qui se passe et je peux les assurer qu'au-delà de tous ces exercices on va continuer à leur donner l'information complète sur les problèmes, sur les solutions, sur les difficultés qu'on rencontre, et à travailler en étroite collaboration avec tous nos partenaires pour s'assurer que ce système-là est un système qu'on veut garder, qu'on veut maintenir, qu'on veut améliorer et on a toute la volonté pour le faire, M. le Président. On dit que, quand il y a une volonté, il y a un moyen pour y arriver. On en a trouvé, des moyens, on va continuer à en trouver.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie beaucoup, M. le ministre. J'invite maintenant l'interpellant, M. le député de Brome-Missisquoi, à procéder à son 10 minutes.


M. Pierre Paradis

M. Paradis: Oui, M. le Président, je me sens drôlement pas seul ou isolé dans ce dossier pour dénoncer les manquements du ministre de la Santé. Avec les infirmiers, les infirmières, les médecins, les administrateurs d'hôpitaux, la curatelle publique, le Protecteur du citoyen, le coroner, dans les cas les plus désespérés – c'est le cas de le dire – les médias d'information qui, encore aujourd'hui, nous donnent un portrait réel de la situation, les députés de ce côté-ci de la Chambre et, également, les députés du Parti québécois qui osent parler. Le vice-président de la Chambre et député de Chauveau est sorti de son devoir de réserve quand on s'est attaqué à la santé des gens de son comté. Comme l'a exprimé ce matin le député de Beauce-Nord, le député péquiste de Dubuc a pris fait et cause pour sa population contre le ministre de la Santé et contre son système, M. le Président. Ça fait que, lorsqu'on est entouré des députés de l'Assemblée nationale des deux côtés de la Chambre et des différents intervenants, on ne se sent pas seul pour intervenir.

Ma première remarque sera à l'attention de Mme la députée de Rimouski qui nous a parlé de violence conjugale en lisant correctement les notes de l'attaché de presse du ministre de la Santé. Je vais recommander pour lecture à Mme la députée de Rimouski, plutôt que de lire les notes de l'attaché de presse du ministre, le rapport du coroner qui a été déposé cette semaine à l'Assemblée nationale, suite à des incidents survenus à Baie-Comeau, sous l'administration du gouvernement du Parti québécois. Le coroner qui signe son rapport, Jacques Bérubé, le 21 avril 1997, suite au décès de trois personnes, mentionne ce qui suit quant au décès de l'enfant: «L'enfant a payé de sa vie parce que le système en place s'est montré incapable d'agir pour l'aider et le protéger.» Ça, M. le Président, c'est un extrait d'un rapport du coroner. Mme la députée de Rimouski aurait avantage à lire tout le rapport du coroner et, après ça, venir parler de ce que le gouvernement n'a pas fait en matière de violence conjugale depuis qu'il est au gouvernement, depuis deux ans et demi, M. le Président.

Je reviens rapidement sur les chiffres du début, parce qu'on va les prendre globalement, puis on va les comparer à d'autres ministères et on va voir quelle utilisation ou quelle priorité donne le gouvernement à la santé, au Québec. Le ministre n'a nullement contredit le fait que c'est le ministère de la Santé qui a été coupé de 411 000 000 $ cette année et que tout le gouvernement, lui, a été coupé de 618 000 000 $. 1,8 % de coupure sur l'ensemble du gouvernement, M. le Président; 3,2 % au ministère de la Santé et des Services sociaux. Le ministre, étant donné qu'il considère qu'il n'a pas de problème, ne demande pas les budgets qui sont nécessaires aux centres hospitaliers, aux centres d'intervention, aux groupes bénévoles, pour régler les problèmes criants.

On a tenté de nous faire croire qu'il s'agissait d'un effort de rationalisation budgétaire et que nous allions récolter les dividendes bientôt. M. le Président, hier, en cette Chambre, le ministre admettait que le déficit accumulé des hôpitaux – pas pour d'autres choses que les opérations courantes – l'an passé, se situait à 168 000 000 $. Il a prévu un 200 000 000 $ additionnel pour l'année en cours. On est rendu qu'au lieu de faire assumer le déficit par le gouvernement du Québec on le fait assumer par les établissements de santé.

On ne s'en va pas vers un déficit zéro, on s'en va vers des déficits cachés. Vous le savez, M. le Président, quand c'est l'établissement qui le supporte, ça affaiblit l'établissement en santé. Vous savez qu'on ne paie plus les routes comptant au Québec, on les hypothèque pour l'avenir. On envoie une facture de 500 000 000 $ aux municipalités. On est en train de pelleter le déficit sur le dos des gens. Puis, pendant ce temps-là, on ne priorise pas le ministère de la Santé. 33 % des dépenses du budget du Québec vont en santé, au Québec. Cette année, le ministère de la Santé a pris 66,67 % des coupures, deux fois plus que son importance. Puis, pendant ce temps-là, M. le Président, il y a des ministres – puis pas des poids-lourds – qui se sont occupés de leurs affaires.

Mon prochain argument m'a été inspiré par un chroniqueur qui est bien connu. Il est à la télévision à tous les matins puis il écrit dans La Presse pratiquement à tous les jours: Claude Piché. Ce n'est pas un député de l'opposition libéral qui vous parle. Il se joint aux autres. Il y a déjà huit mois, il dénonçait ce qui suit: «Les histoires d'horreur se multiplient. Visiblement, notre réseau de santé, qui engloutit 13 000 000 000 $ par année, est malade.» Et il ajoute, à titre de comparaison, M. le Président, et elle est dure, comme comparaison, mais elle est réelle et les gens qui nous écoutent vont nous comprendre – les gens dont on a parlé ici, ce matin, puis dont le ministre ne voulait pas entendre parler, ce n'était pas la place pour en parler, d'après lui – et je cite Claude Piché, M. le Président: «Si vous êtes propriétaire d'un chat ou d'un chien, vous savez qu'il a des chances d'être mieux traité dans un clinique vétérinaire qu'un humain dans un hôpital québécois. Dans les cliniques vétérinaires, il n'y a ni liste d'attente, ni engorgement, et les patients à quatre pattes reçoivent rapidement toute l'attention dont ils ont besoin.»

M. le Président, cette citation de Claude Piché m'a incité à aller vérifier les crédits du ministre de l'Agriculture, qui n'est pas le plus fort des ministres au gouvernement du Québec comme tel. Et qu'est-ce qu'on découvre dans les budgets de santé animale? Là, on sait que les budgets de santé humaine sont coupés comme tels. Les budgets de santé animale, M. le Président, vous allez voir: aucune coupure dans les budgets de santé animale pour l'année en cours. Ça, ça indique le genre de priorités que ce gouvernement-là met de l'avant: pas de coupure dans la santé animale, des coupures dans la santé pour les gens. En santé animale, il n'y a pas de liste d'attente. En santé pour les gens, des gens attendent pour se faire soigner, il manque de personnel, il manque de ressources; le ministre ne les demande pas.

Tantôt, le ministre a dit quelque chose que j'ai retenu: Il faut au moins ne pas nuire. M. le ministre, quand on est ministre de la Santé, on est l'avocat du système de santé, on est le représentant de tous les malades au Québec. Et, présentement, parce que vous n'allez pas chercher l'argent, le 185 000 000 $ offert par le fédéral en début de campagne électorale, tous les autres ministres sont en train d'essayer de l'arracher. Vous ne l'avez même pas réclamé. Vous n'avez même pas eu le culot de le réclamer.

Les crédits additionnels, cette semaine, qui ont été déposés à l'Assemblée nationale du Québec, vous savez, il y en avait combien de crédits additionnels de déposés, M. le Président? Il y en avait pour un montant de 195 000 000 $. Vous savez combien de ces millions-là sont allés à la Santé? 15 000 000 $, M. le Président, 7 %, alors que le budget de la Santé, c'est 33 %. Le ministre n'en veut pas. Il n'y a pas de problème selon lui. Ça fait qu'il ne va pas chercher les argents qui sont dus au ministère de la Santé. Le ministre de l'Agriculture, lui, maintient ses budgets. Les vétérinaires ne manifestent pas, là. Mais les docteurs, eux autres, vont être coupés, les infirmières vont être coupées, le personnel va être coupé, puis les listes d'attente vont aller en augmentant.

(12 heures)

M. le Président, vous m'indiquez que le temps achève. Deux citations pour terminer, M. le Président. Le scalpel du Dr Rochon , un éditorial de Jean-Jacques Samson dans Le Soleil : «L'opération est chirurgicale et bien organisée, disait-il. Il a répété ça ici, ce matin, le ministre docteur Jean Rochon, au sujet de la phase II du virage qu'il impose au système de santé québécois. À ce compte, si M. Rochon était chirurgien, il pratiquerait sans doute ses interventions à la tronçonneuse plutôt qu'au scalpel.» C'est un jugement qui n'est pas porté par un député de l'opposition, c'est un jugement qui est porté par quelqu'un qui est éditorialiste, bien réputé, dans un grand quotidien québécois qui est crédible.

Un autre titre, M. le Président, qui est écrit par des représentants des travailleurs du secteur de la santé: Comment anémier un système de santé modèle? «Ce gouvernement avait promis de faire autrement. Manifestement, on a oublié d'en informer Jean Rochon.» Signataire: Claude Saint-Georges. Je vous donne une brève citation, M. le Président: «Nous assistons aujourd'hui au naufrage de ce système qui a été vanté partout dans le monde.»

M. le Président, il s'agit du plus important joyau de la réforme tranquille au Québec. Ça fait 30 ans qu'on se bâtit un système. Dans les autres provinces, on a arrêté de couper. En Ontario, on a arrêté de couper. En Alberta, on a ajouté des sommes d'argent. Au Québec, le per capita qu'on dépense pour soigner notre population est au neuvième rang parmi les 10 provinces canadiennes. On est égal à l'Île-du-Prince-Édouard. On ne se compare même pas aux provinces dites plus modernes. Si on se compare à la Colombie-Britannique, c'est à peu près 600 $ de moins par personne qu'on dépense par année. On dépense moins qu'en Ontario. On dépense moins qu'ailleurs. On coupe dans les services puis on bâtit un déficit sur le dos des institutions comme telles. Le ministre est content de tout ça, lui. Il accepte que le budget de la santé soit le budget qui soit le plus coupé de tous les budgets du gouvernement du Québec. Il laisse passer le ministre de l'Agriculture avec la santé animale puis, lui, il coupe dans la santé dont il a la responsabilité de s'occuper, celle des êtres humains au Québec.

M. le Président, je ne pense pas qu'on ait fait progresser le ministre ce matin. J'ai déclaré au début: Il fait la sourde oreille et il se ferme les yeux. Tant qu'il va continuer à faire la sourde oreille et à se fermer les yeux devant les problèmes qui sont là quotidiennement dans le réseau de la santé et des services sociaux, les gens qui nous écoutent et qui sont des patients vont continuer à souffrir de son manque de leadership, de son manque de combativité, de sa passivité devant les problèmes.

M. le Président, les problèmes que nous avons décrits ce matin sont à la veille de la deuxième phase des coupures. Tous les intervenants du milieu, tous les observateurs nous disent que ça va être pire la semaine prochaine, que ça va être pire le mois prochain, que ça va être pire l'année prochaine et le ministre est en train de nous le confirmer en disant: Moi, je n'ai pas besoin de fonds additionnels. Moi, je vais couper ça, les budgets de la santé. Je vais bâtir des déficits sur le dos des hôpitaux comme tels puis je vais m'arranger pour que le monde, s'il crie, de me boucher les oreilles puis de me fermer les yeux.

M. le Président, tout ce qu'il nous reste à souhaiter, en vous remerciant d'avoir présidé ces débats de la façon dont vous l'avez fait, en remerciant votre personnel, c'est simplement de souhaiter aux gens du Québec la meilleure des santés parce que, quand on est malade aujourd'hui, on risque d'être obligé de donner un préavis au ministère de la Santé qu'on va être malade dans quatre ans pour qu'il nous mette déjà sur une liste d'attente comme telle. Ça fait qu'en terminant, M. le Président, à tout le monde: La meilleure des santés pour ne pas que le ministre ait besoin de s'occuper de votre santé.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci, M. le député.

Je veux remercier M. le ministre, M. le député et porte-parole de l'opposition, Mme et MM. les députés, pour votre excellente collaboration à faire cette interpellation et surtout la faire dans le grand respect de nos institutions. Merci à nos collaborateurs et collaboratrices.

La commission ayant rempli son mandat, j'ajourne les travaux sine die.

(Fin de la séance à 12 h 4)


Document(s) associé(s) à la séance