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Version finale

37e législature, 1re session
(4 juin 2003 au 10 mars 2006)

Le jeudi 27 novembre 2003 - Vol. 38 N° 23

Étude détaillée du projet de loi n° 7 - Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux


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Table des matières

Journal des débats

(Quinze heures dix minutes)

Le Président (M. Copeman): Alors, chers collègues, je déclare ouverte cette séance de la commission des affaires sociales, ayant évidemment constaté le quorum. Je vous rappelle que le mandat de la commission est de poursuivre l'étude détaillée du projet de loi n° 7, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux, et ça, selon l'ordre de la Chambre, jusqu'à minuit ce soir. Évidemment, il y a une suspension statutaire...

Une voix: D'usage.

Le Président (M. Copeman): Non, pas d'usage, mais statutaire, de 18 heures à 20 heures. Je vous rappelle, je vous demande respectueusement de bien vouloir fermer vos téléphones cellulaires. Et nous sommes...

Une voix: ...

Le Président (M. Copeman): Oh! pardon, excusez-moi. Bien sûr. Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Bachand (Arthabaska) va être remplacé par M. Dubuc (La Prairie); M. Valois (Joliette) par M. Dion (Saint-Hyacinthe).

Reprise du débat sur la motion proposant
d'entendre la Commission des relations du travail

Le Président (M. Copeman): Merci, Mme la secrétaire. Nous étions, si on se rappelle tous, sur une troisième motion préliminaire, celle-ci présentée par M. le député de Joliette. M. le député de Joliette avait malheureusement épuisé son temps de parole en tant qu'auteur de la motion, ce qui signifie pour M. le député de Saint-Hyacinthe que malheureusement on ne pourrait pas vous entendre sur la motion, parce que M. le député de Saint-Hyacinthe remplace M. le député de Joliette. Alors, pendant une certaine période de temps, M. le député de Saint-Hyacinthe, je ne pourrai pas vous reconnaître dans le cadre de cette motion préliminaire. Je sais que ça nous fait de la peine, tous ensemble, mais on va se remettre, on va se remettre.

M. Dion: M. le Président... préliminaire, j'aimerais savoir si les commentaires que vous venez de faire ont bien été enregistrés.

Le Président (M. Copeman): Bien sûr.

M. Dion: Oui. Merci beaucoup.

Le Président (M. Copeman): Toutes nos remarques sont enregistrées à partir du moment, M. le député, que j'ai déclaré la séance ouverte et que j'ai reconnu d'autres intervenants. Mais c'est sûr que mes remarques sont enregistrées.

Mme la députée de Pointe-aux-Trembles et porte-parole de l'opposition officielle a utilisé 20 min 5 s de son temps de parole. Alors, il vous reste, Mme la députée, 9 min 55 s. Et, M. le député de Vachon, vous n'avez pas encore pris la parole lors de la motion préliminaire. Alors, il va lui rester tout son temps d'intervention qui est, comme on le sait, à ce moment-ci, de 10 minutes. On le sait bien, on s'est habitués comme membres de la commission. Alors, je suis prêt à céder la parole à une prochaine intervenante. Mme la députée de Pointe-aux-Trembles et porte-parole de l'opposition officielle en matière des services sociaux.

Mme Léger: Merci, M. le Président. Vous avez l'air très en forme, M. le Président. Ça fait un bout de temps qu'on ne s'est pas vus. Je pense que ça se reflète.

Le Président (M. Copeman): C'est le plaisir de vous retrouver, Mme la députée de Pointe-aux-Trembles...

Mme Léger: Oui, j'imagine.

Le Président (M. Copeman): ...ainsi que tous mes collègues, évidemment, membres de la commission.

Mme Léger: J'imagine. Et vous avez dit qu'il nous reste de ce côté-ci quelques minutes, mais il reste aussi beaucoup de temps de l'autre côté aussi. Alors, ils ont chacun le droit à leurs 10 minutes. On peut rappeler ça aussi, M. le Président. Effectivement?

Le Président (M. Copeman): Effectivement, je crois que le ministre n'avait pas encore pris la parole sur la motion ni d'autres collègues à ma droite. Alors, ils jouissent de tout leur temps, selon le règlement.

Mme Nicole Léger (suite)

Mme Léger: Parce qu'on peut rappeler que chaque député a le droit à son temps ici, à son droit de parole.

Alors, M. le Président, effectivement, nous sommes sur le projet de loi n° 7, il faut le rappeler, qui est le projet de loi qui modifie la Loi sur les services de santé et les services sociaux. Et, dans ce projet de loi là, nous sommes ici parce que mon collègue de Joliette a fait une motion préliminaire que je rappelle:

«Il est proposé qu'en vertu de l'article 244 de nos règles de procédure la commission des affaires sociales tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 7, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux, des consultations particulières quant à tous les articles dudit projet de loi et qu'à cette fin elle entende la Commission des relations du travail.»

Donc, si on se souvient bien, lors de nos autres travaux parlementaires de la dernière fois, avant qu'on se retrouve ici aujourd'hui, nous avons demandé une motion... nous avons déposé une motion pour que nous puissions entendre la Commission des relations du travail. Nous avons eu quelques consultations particulières de certains groupes, et il nous apparaît, pour l'opposition officielle, qu'il y a certaines autres personnes ou certains autres groupes ou organismes qu'il serait intéressant d'entendre pour vraiment nous donner encore plus d'expertise et encore plus de leur avis pour ce projet de loi là n° 7.

On entend de partout... On se rappelle, M. le Président, je l'avais mentionné la semaine dernière, nous entendons un peu de partout les gens qui sont mécontents du gouvernement en face par rapport à toute la notion... je pourrais dire tous les éléments qui sont apportés du gouvernement, et j'espère... sur la syndicalisation d'une part, la négation de la syndicalisation. Et c'est notre... De notre point de vue ici pour le projet de loi n° 7, c'est encore une fois un projet de loi qui est irritant à ce niveau-là de ce dossier de syndicalisation d'une part. Mais aussi il y a beaucoup d'autres points qu'on aura l'occasion d'y revenir.

Je rappelle que la Commission des relations du travail, M. le Président, son mandat est d'entendre et de disposer de tout un éventail de recours reliés à l'emploi et aux relations du travail du Québec. Alors, c'est ce qui nous concerne aujourd'hui, la partie des relations du travail, entre autres dans ce projet de loi là, parce qu'on vient statuer et confirmer la thématique, je pourrais dire, là, de travailleur autonome.

Et on a des gens qu'on a demandés... outre la Commission des relations du travail, on a demandé au ministre du Travail d'être présent. Je sais qu'il est très, très occupé par l'article 45 présentement du projet de loi qu'il a déposé, mais il aurait été très intéressant de l'entendre. La même chose, le Pr Jean Bernier, qu'on a demandé. Je rappelle que le gouvernement a refusé, parce qu'on a voté ces motions-là qu'on avait déposées la semaine dernière, et le gouvernement a refusé d'entendre le ministre du Travail ici, à notre commission des affaires sociales, a refusé aussi d'entendre Jean Bernier, Jean Bernier qui est un professeur qui a beaucoup écrit ces derniers mois particulièrement sur toute la notion de faux occasionnel, la notion de ce que c'est, le travailleur autonome, et particulièrement pour ces projets de loi là, celui-là, 7, et son petit cousin, hein, le petit cousin qui est le projet de loi n° 8 sur les services de garde, particulièrement la loi à ce niveau-là, la modification à la loi qu'on apporte pour les responsables en milieu familial.

Alors, aujourd'hui, on demanderait pour cette motion-là préliminaire d'entendre la Commission des relations du travail. Cette Commission-là est évidemment chargée d'assurer l'application du Code du travail, alors d'exercer les fonctions qui sont prévues par le Code, d'une part... la Loi des normes du travail, ainsi que toutes les autres lois qui sont reliées par les relations de travail au Québec. Il aurait été intéressant dans les discussions de faire un débat encore plus en profondeur. C'est pour ça que c'est important pour nous d'entendre la Commission des relations du travail pour qu'on puisse entendre davantage, je pourrais dire, des experts, mais aussi comment le milieu de travail aujourd'hui se comporte.

Quand on fait une loi et quand on dépose une loi, et particulièrement à la santé, en santé et services sociaux, c'est important d'aller un petit peu plus en profondeur que juste faire une loi. Il y a des liens et il y a, je pourrais dire, des impacts sur l'ensemble, je pourrais dire, des relations de travail au Québec, mais aussi des impacts sur le comportement et la façon que le gouvernement va... le gouvernement agit par rapport au milieu de travail actuellement au Québec. Et là on voit qu'il y a une confrontation directe avec les travailleurs syndiqués au Québec.

Ce projet de loi là vient quand même nous dire que les gens seront des travailleurs autonomes, donc ils ne seront pas réputés ne pas constituer un contrat de travail. Donc, ils ne seront pas ce qu'on appelle des salariés du gouvernement. Il aurait été intéressant d'entendre la Commission des relations du travail, voir leur opinion sur ce que c'est vraiment, une relation de travail, mais aussi comment ils voient ce genre de contrat de travail là qui n'a pas lieu, mais comment qu'ils voient la constitution de ce projet de loi là, 7... qu'ils pourraient nous éclaircir sur l'ensemble, je pourrais dire, des relations de travail du Québec.

Il y a aussi... Je pourrais dire, la Commission est aussi responsable du régime d'accréditation syndicale, donc qui comprend toutes les requêtes en accréditation déposées par les associations. Vous comprendrez que, dans le projet de loi, il y a une partie importante qui est celle de la rétroactivité, ce qui veut dire qu'on enlève toutes les accréditations syndicales qui sont déjà... qui seront... qui ont déjà lieu présentement ou qui sont déjà syndiquées présentement. Donc, c'est un retour en arrière. C'est important, je crois, d'avoir des indications à ce niveau-là, sur cette négation de la syndicalisation d'une part. Bon.

n(15 h 20)n

La Commission des relations du travail traite aussi des demandes qui lui sont soumises par... je pourrais dire, selon les règles prévues par le Code du travail et selon les règles... selon celles qui sont prévues pour... règlement sur l'exercice du droit d'association conformément au Code du travail. Donc, c'est intéressant d'entendre aussi la Commission des relations du travail, particulièrement par cet exercice-là de droit d'association. Parce qu'on parle, dans le projet de loi, particulièrement que le ministre de la Santé et des Services sociaux a le pouvoir de «conclure avec un ou plusieurs organismes représentatifs». Quels seront-ils? Je lui ai posé la question la semaine dernière. Est-ce qu'un syndicat peut être un organisme représentatif? Je n'ai pas eu, de ce côté-ci de la Chambre, M. le Président, de réponse du ministre.

D'ailleurs, le ministre est assez silencieux, dois-je dire, sur l'ensemble de ce qu'on apporte ici comme opposition officielle. Alors, je suis la porte-parole des services sociaux, mais je pense que je n'ai pas la contrepartie de l'autre côté de la salle, ici, de la commission parlementaire. Alors, j'espère qu'aujourd'hui le ministre de la Santé et des Services sociaux pourra nous parler. J'espère qu'il va pouvoir nous éclairer sur comment il voit davantage le projet de loi, nous indiquer pourquoi qu'il refuse que le ministre du Travail soit ici, pourquoi qu'il refuse que M. Jean Bernier soit ici, pourquoi qu'il refuse que la Commission des relations du travail... que j'imagine qu'ils vont peut-être nous refuser encore aujourd'hui, parce qu'on n'a pas encore voté sur cette motion préliminaire là. Mais j'espère que, la fin de semaine et tous les événements passés, il va accepter de rencontrer la Commission des relations du travail. Mais, en tout cas, M. le Président, s'il n'est pas d'accord de rencontrer la Commission des relations du travail, j'espère qu'il va nous expliquer pourquoi. J'espère qu'il va nous dire pourquoi qu'il ne veut pas les rencontrer. Mais j'ose quand même espérer qu'il va peut-être accepter aujourd'hui puis qu'il va nous dire qu'il aimerait entendre la Commission des relations du travail.

Alors, je suis convaincue, avec les articles... Puis il y a quand même d'autres articles de journaux qui ont été mis à notre connaissance cette semaine. Alors, je suis un peu abasourdie de ne pas entendre le ministre de la Santé et des Services sociaux. Il aura l'occasion aujourd'hui, j'espère qu'il va prendre cette occasion-là, pour venir nous dire ce qu'il pense des motions que nous apportons ici présentement.

Le Président (M. Copeman): Merci, Mme la députée. Est-ce qu'il y a d'autres députés qui désirent intervenir à ce stade-ci? M. le député de Vachon, la parole est à vous pour un maximum de 10 minutes.

M. Camil Bouchard

M. Bouchard (Vachon): Merci, M. le Président. Alors, nous sommes à étudier le projet de loi n° 7. Et la motion présentée par mon collègue du comté de Joliette, M. Valois, porte sur une invitation à entendre la Commission des relations du travail. Comme la Commission est responsable du régime d'accréditation syndicale et que ce régime comprend l'analyse, l'étude des requêtes en accréditation qui sont déposées par des associations de salariés, il me semble tout à fait à propos, pertinent et même nécessaire qu'on puisse entendre la Commission à cet égard.

On pourrait poser plusieurs questions aux membres de la Commission. La première question serait à mon avis: Est-ce qu'une loi déclaratoire, telle la loi n° 7, représente quelque part, peut-être de façon analogique mais aussi peut-être de façon substantielle, et je prends «substantielle» dans son sens le plus profond, M. le Président... est-ce que ça représenterait de façon substantielle une entrave à la liberté syndicale et une entrave à un processus normatif, c'est-à-dire un processus que notre société a accepté comme faisant partie des normes de fonctionnement, processus d'accréditation déposé par des salariés? Autrement dit, quelle est la différence entre menacer un salarié de congédiement si il ou elle faisait état de son intention de se syndiquer, quelle est la différence entre une telle menace, ou alors quelle est la différence entre l'imposition d'un statut de non-salarié envers des personnes qui ont émis l'intention... ou qui ont émis l'intention de se prévaloir d'une possibilité de se syndiquer? Est-ce qu'il y a une différence du point de vue moral, du point de vue éthique, du point de vue social entre ces deux processus?

La Commission des normes du travail est habilitée et est habituée à rencontrer des situations où, par exemple, des organisations, des institutions ou des patrons viendraient parsemer le processus d'accréditation d'obstacles qui seraient jugés non conformes à la pratique dans les relations de travail et qui seraient jugés non conformes à l'exercice d'une liberté d'accréditation chez les salariés. Elle est habituée à ce genre de situation. Elle a développé une jurisprudence. Elle a développé des normes basées sur un certain nombre de dimensions qui à la fois relèvent des pratiques mais aussi à la fois relèvent des valeurs fondamentales de notre société.

Et, puisque la Commission, M. le Président, puisque la Commission a une longue habitude et une compétence certaine dans l'analyse de ces situations-là, nous pourrions demander à la Commission ce qu'elle pense d'une approche comme celle que nous présente le ministre de la Santé et des Services sociaux, qui, bien sûr, n'est pas en soi une menace à des personnes qui voudraient utiliser un droit de syndicalisation ou une possibilité de se syndiquer, mais qui vient quand même entraver quelque part et rendre impossible cette possibilité, alors que l'on sait qu'un certain pourcentage des personnes en question ont déjà fait des démarches d'accréditation, ou alors ont déjà vu leur statut accrédité, ou alors s'apprêteraient à le faire. Vous comprendrez, M. le Président, qu'il s'agit là d'une question qui ne relève pas seulement d'une jurisprudence dans les relations de travail mais qui relève d'une moralité, d'une moralité sociale, celle qui est rattachée à l'exercice d'un droit fondamental.

Alors, les droits fondamentaux, les libertés fondamentales sont un bien premier, M. le Président, pris dans le sens philosophique de la justice sociale chez John Rawls qui est un éminent philosophe, que vous avez sans doute étudié à McGill...

Le Président (M. Copeman): En effet, M. le député.

M. Bouchard (Vachon): ...et qui est un éminent... Vous savez, M. le Président, que John Rawls est mort à l'âge de 81 ans, il y a de cela un an et trois jours. Il a été un des grands philosophes de la politique ou des politiques. Et il a écrit un livre extraordinaire. Et il a écrit un seul livre dans sa vie. Et ensuite il a réédité ce livre. Avec des notes de cours aussi, il a complété sa pensée. Je ne sais pas si, M. le Président, vous avez eu l'occasion de lire John Rawls, c'est une extraordinaire lecture si jamais on arrive à passer à travers les cinq premières pages. John Rawls a écrit un livre extrêmement dense, extrêmement touffu autour de la justice sociale, très difficile à comprendre, élagué d'équations mathématiques, mais qui finalement tente de concilier deux concepts fondamentaux, celui de la justice... celui de l'égalité et celui de la liberté. Il a tenté, autrement dit, de réconcilier quasiment la théorie de Marx avec les théories capitalistes ou utilitaristes.

Et, dans sa conception de la justice, John Rawls nous dit qu'une société juste, c'est une société qui respecte les biens premiers. Et, parmi les biens premiers, il y a les libertés fondamentales. Alors, on peut s'interroger évidemment extrêmement longtemps, M. le Président, sur quelles sont les grandes libertés fondamentales dans une société comme la nôtre, et ce n'est pas un seul philosophe qui viendra les définir. Mais, quand même, j'imagine que, si on faisait une petite enquête parmi les membres de cette commission, la liberté de parole viendrait immédiatement à l'esprit de toutes et de tous, la liberté de penser viendrait sans doute à l'esprit de toutes et de tous, la liberté d'association viendrait sans doute aussi en tête de liste.

n(15 h 30)n

Et c'est pour ça, je pense, M. le Président, qu'il est important de revoir et de réexaminer le projet de loi n° 7 en le confrontant à des experts de la pratique de la liberté d'association qui ont... et qui sont guidés par cette notion de bien premier. Les parlementaires que nous sommes ont la prétention de renforcer quelque part une pratique de la démocratie qui viendrait favoriser le bien commun. Mais qu'est-ce que le bien commun, M. le Président, si ce n'est pas une préoccupation constante de répartir à travers tous les groupes sociaux, toutes les couches sociales, tous les individus notre richesse collective, mais aussi de donner accès à tout le monde sans égard à leur classe sociale, à leur groupe social, à leur sexe, à leur rang, de leur donner accès au bien premier, de leur donner accès à nos libertés fondamentales?

Alors, M. le Président, je ne sais pas si aujourd'hui... Là, j'interpelle à travers vous, évidemment, le ministre de la Santé et des Services sociaux, mais je ne sais pas si aujourd'hui le ministre serait prêt à rédiger une telle loi qui interdirait la liberté d'association chez, par exemple, les grands patrons industriels ou manufacturiers du Québec. Est-ce que, aujourd'hui, pour les mêmes raisons qu'il nous propose la loi n° 7... Est-ce que M. le ministre de la Santé et des Services sociaux serait prêt à rédiger une loi qui interdirait... qui décréterait, qui décréterait un statut qui empêcherait les patrons, les grands responsables de nos grandes sociétés industrielles ou commerciales de s'associer, d'appartenir à leur propre syndicat, à leur propre association?

Et la réponse, M. le Président, ne nous viendra sans doute pas de la bouche du ministre aujourd'hui, mais j'aimerais qu'on puisse réfléchir au type de traitement qu'on s'apprête à adopter envers un groupe de nos concitoyennes et de nos concitoyens qui sont un groupe qui sont placés très souvent dans une position de pouvoir très minime et de capacité très minime d'exercer un contrôle du pouvoir sur leur environnement social, et sur leur environnement économique, et sur leur environnement de travail, qui sont des petits salariés et qui ont besoin par conséquent d'une protection beaucoup plus importante de la part de l'État. Et, à ce titre-là ? et j'interpelle encore une fois le ministre à travers vous, M. le Président ? est-ce que la loi n° 7, en son âme et conscience, viendra protéger adéquatement les petits salariés qui n'auront plus, à cause du statut de travailleur autonome, un accès à un outil extrêmement important, celui de la syndicalisation ou de statut de salarié qui leur permet l'utilisation du Code du travail qui est une protection pour les travailleurs, M. le Président, et les travailleuses?

Le Président (M. Copeman): Merci, M. le député. Est-ce qu'il y a d'autres députés qui désirent intervenir à ce stade-ci? Oui, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Couillard: Bien, très brièvement, M. le Président. Le mandat de la commission est bien sûr l'étude article par article du projet de loi n° 7? Est-ce que c'est exact?

Le Président (M. Copeman): Effectivement, M. le ministre. Le mandat de la Chambre nous a convoqués pour poursuivre l'étude détaillée.

M. Couillard: Alors, je peux présumer qu'on va pouvoir débuter immédiatement l'étude de l'article 1 qui est le mandat fondamental de cette commission, parce que ce que dit notre collègue sur la liberté d'association se trouve contredit par la lecture de l'article 3 où la liberté d'association est non seulement reconnue, mais illustrée. Alors, lorsqu'on pourra commencer la revue article par article, la discussion du projet de loi, ce sera très intéressant, j'en suis sûr, d'en discuter. Donc, je m'attends à ce qu'on puisse donc de façon imminente commencer à discuter de l'article 1.

Le Président (M. Copeman): Évidemment, on va disposer de la motion du député de Joliette et on verra par la suite.

M. Couillard: Nous sommes prêts à discuter l'article 1, M. le Président.

Le Président (M. Copeman): Très bien. Alors, est-ce qu'il y a d'autres interventions à ce moment-ci? Non? Très bien. Alors, je mets aux voix la motion du député de Joliette. Je vais la reprendre parce que je ne l'ai pas fait au début de la séance:

«Il est proposé qu'en vertu de l'article 244 de nos règles de procédure la commission des affaires sociales tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 7, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux, des consultations particulières quant à tous les articles dudit projet de loi et qu'à cette fin elle entende la Commission des relations du travail.»

Est-ce que cette motion est adoptée?

Mme Léger: ...vote nominal.

Le Président (M. Copeman): Une demande d'appel par vote nominal est faite. Alors, Mme la secrétaire.

La Secrétaire: Alors, Mme Léger (Pointe-aux-Trembles)?

Mme Léger: Pour.

La Secrétaire: M. Bouchard (Vachon)?

M. Bouchard (Vachon): Pour.

La Secrétaire: M. Dion (Saint-Hyacinthe)?

M. Dion: Pour.

La Secrétaire: M. Couillard (Mont-Royal)?

M. Couillard: Contre.

La Secrétaire: Mme L'Écuyer (Pontiac)?

Mme L'Écuyer: Contre.

La Secrétaire: Mme Charlebois (Soulanges)?

Mme Charlebois: Contre.

La Secrétaire: M. Bernard (Rouyn-Noranda? Témiscamingue)?

M. Bernard: Contre.

La Secrétaire: M. Auclair (Vimont)?

M. Auclair: Contre.

La Secrétaire: M. le Président.

Le Président (M. Copeman): Contre. Alors, cette motion est rejetée. M. le député de Saint-Hyacinthe, oui.

M. Dion: Oui, M. le Président, j'aimerais présenter une motion préliminaire parce que... Bien, enfin, j'expliquerai ensuite, après parce que...

Le Président (M. Copeman): C'est logique, oui.

M. Dion: Alors, je peux en faire la lecture tout de suite?

Le Président (M. Copeman): Oui.

Motion proposant d'entendre
la Commission des normes du travail

M. Dion:«Il est proposé qu'en vertu de l'article 244 de nos règles de procédure la commission des affaires sociales tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 7, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux, des consultations particulières quant à tous les articles dudit projet de loi et qu'à cette fin elle entende la Commission des normes du travail.»

Le Président (M. Copeman): Très bien. Alors, la motion est recevable. En tant qu'auteur de la motion, M. le député de Saint-Hyacinthe, vous pouvez plaider pendant un maximum de 30 minutes.

M. Dion: De 30 minutes seulement?

Le Président (M. Copeman): Oui. Maximum, oui, bien sûr. Allez-y, M. le député.

M. Dion: Je vais me restreindre, M. le Président.

Le Président (M. Copeman): La parole est à vous.

M. Léandre Dion

M. Dion: Merci, M. le Président. Je comprends très bien, je comprends très bien et je respecte en plus la hâte exprimée par M. le ministre tout à l'heure de nous voir entreprendre l'étude article par article du projet de loi. Je pense, c'est une hâte que nous partageons d'ailleurs, mais il faut bien dire que l'étude de chaque article du projet de loi dépendra... Évidemment, ce qui en sortira dépendra de l'état d'esprit dans lequel on abordera cette étude-là et dépendra de notre niveau de cohérence global des deux côtés de la salle face à ce projet de loi là. Et, dans ce sens-là, évidemment, personne ne niera que le fait d'entendre des gens aussi importants, importants par la décision de l'Assemblée nationale que les gens de la Commission des normes du travail...

On sait bien que les normes de travail, c'est les normes minimales du travail. On souhaiterait parfois que ce soit un peu moins minimal, mais enfin ce sont les normes minimales du travail, c'est-à-dire ce qui fait en sorte que moins que ça, c'est inacceptable dans la société. C'est-à-dire ça prend donc des normes qui disent: Bien, là, on ne peut faire moins que ça, on ne peut pas offrir aux gens moins que ces normes-là, parce que offrir ça, c'est porter atteinte à la conception que nous nous faisons collectivement de ce qui est bon pour la société et ce qui est bon pour la cohérence sociale.

Parce qu'on sait très bien que, si, dans la société, tout le monde s'entremêle, lutte les uns contre les autres, qu'il n'y a pas de cohésion, eh bien, évidemment, dans un contexte comme ça, évidemment la société n'est pas intéressante, la qualité de vie n'est pas là. Alors, pour qu'il y ait de la qualité de vie, il ne suffit pas uniquement qu'il y ait de la richesse, ce qui est très important, qui est fondamental, et l'objectif du travail, c'est de créer de la richesse, mais il faut en plus qu'il y ait une attitude collective qui fasse que c'est agréable de travailler ensemble, c'est agréable de partager des objectifs communs, et ce qui fait que, quand on trouve ça agréable, bien on fait des efforts pour que le plaisir dure, M. le Président. Donc, si on veut que le plaisir dure, il faut s'entendre sur des normes, M. le Président, hein? Si on veut que le plaisir dure, il faut être d'accord sur un certain nombre de consensus dans la société. Vous êtes d'accord avec ça, madame...

Une voix: ...

M. Dion: M. le ministre semble être d'accord aussi. Alors, dans la société, c'est bien certain que le plaisir est une chose fondamentale.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Dion: Non, mais ça fait rire tout le monde, et j'en suis très heureux, M. le président, parce que le fait que tout le monde rie, déjà ça nous rapproche de la cohérence sociale. Avez-vous remarqué, M. le Président...

Le Président (M. Copeman): Mais, M. le député...

M. Dion: Oui, M. le Président, je vous écoute.

Le Président (M. Copeman): ...ça ne nous rapproche pas de la pertinence par contre, ce que je désire hautement.

M. Dion: Oui. M. le Président, je ne voudrais pas contester ce que vous dites. Je ne voudrais pas que vous preniez ça comme une contestation parce que je suis d'accord avec vous et vous avez un rôle que je respecte. Mais, imaginez-vous, imaginez-vous que le plaisir qu'on a à partager ensemble rende cette journée agréable, est-ce qu'on va le faire exprès pour la rendre désagréable? Jamais. Donc, si on ne le fait pas exprès pour la rendre désagréable, on peut penser qu'on va cheminer rationnellement sans doute, mais aussi émotivement vers une solution qui nous rapproche de l'objectif que l'on poursuit. C'est-à-dire quel est cet objectif qu'on poursuit?

Une voix: ...

M. Dion: Exactement. M. le ministre me souffle le mot, il m'enlève les mots de la bouche, l'objectif, c'est le projet de loi. Et pourquoi? Le projet de loi pour le projet de loi? Certainement pas. Je sais que l'objectif du ministre n'est pas d'adopter un projet de loi au plus sacrant pour s'en débarrasser. Certainement pas. L'objectif du ministre, c'est quoi? C'est faire en sorte que les services soient les mieux rendus possible, de la façon la meilleure possible pour les bénéficiaires. Parce que derrière nos discussions ici qu'y a-t-il? Il y a 28 000 personnes qui bénéficient des ressources intermédiaires et des ressources de type familial, et ces 28 000 personnes, tout le monde conviendra qu'elles sont parmi les plus vulnérables, parmi les plus fragiles dans la société et que, si nous, nous ne nous en occupons pas, qui va s'en occuper? Bon, bien sûr, bien sûr, on n'est pas les seuls. Il ne faut pas non plus tout ramener à nous ici, là. Il y a des gens sur le terrain qui travaillent, qui travaillent fort, qui travaillent ferme, et c'est justement pour que ces gens-là soient plus contents de leur travail, plus satisfaits et, je reviens à mon concept de tout à l'heure, pour qu'ils aient le plus de plaisir possible dans leur travail afin que, ayant ce plaisir-là, ils veuillent le communiquer aux bénéficiaires, qui sont fragiles, pour que ces gens-là se sentent respectés.

n(15 h 40)n

Alors, imaginez-vous, M. le Président, si on prend des décisions rapides, rapides, rapides et que tout ça, ça a comme conséquence d'indisposer profondément, de donner le message qu'on se fout un peu des droits des gens, qu'on règle ça vite, les droits des gens, et qu'on n'a pas beaucoup, beaucoup d'intérêt pour ce qui fait leur vie quotidienne, pensez-vous que ça, c'est bon pour leur qualité de vie, ces gens-là? Pensez-vous qu'ils vont être encouragés à faire encore davantage pour les bénéficiaires? Ma réponse, c'est que je crains que non, hein?

La qualité de vie dans les ressources intermédiaires et dans les ressources de type familial, M. le Président, ça me semble être une question fondamentale. Et, vous savez, la qualité de vie et la satisfaction qu'on a à travailler, ça dépend de beaucoup de choses, mais, entre autres, ça dépend du sentiment qu'on a d'être respecté réellement, hein? Et ça, on le vit, nous, ici. On est des êtres humains. Les parlementaires, on est des êtres humains. Si on se sent profondément respectés dans notre condition, dans notre travail, eh bien, on va avoir tendance à le faire encore mieux, hein, parce qu'on va vouloir ajouter au plaisir qu'on a déjà, que nous cause le respect mutuel qu'on se porte.

Et, d'ailleurs, on a dans l'Assemblée des règles extraordinaires qui semblent être une affaire de rien, mais qui sont très importantes. J'en veux pour preuve seulement un exemple, M. le Président. Par exemple, vous m'avez déjà rappelé à l'ordre ? pas ce matin, mais une autre fois ? et vous m'avez dit: Adressez-vous au président, vous devez vous adresser au président. Ça n'a l'air de rien, c'est une règle. Bon, pourquoi cette affaire-là? Pourquoi est-ce qu'on ne pourrait pas se parler? Ah, il y a une raison à ça, c'est que le fait qu'on s'adresse à vous, M. le Président, on évite que, dans la chaleur d'un débat, on se lance des invectives ou qu'on se manque de respect. Le fait de passer par une tierce personne, ça nous tempère la chaleur de notre tempérament et ça nous aide à faire des discussions plus correctes...

M. Bouchard (Vachon): Moins torrides.

M. Dion: ...moins torrides, oui, moins torrides, plus correctes, plus respectueuses, qui fassent que tout le monde sent qu'il est respecté dans sa fonction. Et je vois, par le regard de ma collègue en face de moi, qu'elle est d'accord avec moi sur ce point. Alors, voyez-vous, une petite règle qui pourrait être considérée comme quelque chose de superficiel, purement artificiel, uniquement là pour embêter le monde est importante, est importante, et c'est ce qui fait qu'on n'a pas vu souvent des gens se prendre au collet dans notre Assemblée. Pourquoi? Une des raisons, c'est celle-là, c'est cette règle-là, s'adresser aux parlementaires par l'intermédiaire de la présidence. Ça change tout.

Alors, parfois il peut arriver, M. le Président, que, dans une loi qu'on adopte rapidement, il se glisse des choses comme ça qu'on n'a pas vues, dont on n'a pas pris conscience, mais qui sont importantes. Par exemple, j'en veux pour preuve dans un article de loi, on dit que le ministre peut faire des choses, mais on ne dit pas qu'il en est obligé. Mais on sait très bien que, s'il fait cette chose-là, ça crée une obligation pour l'autre partie. Pourquoi il y a une personne qui a une obligation puis l'autre n'en a pas? Bien, ce n'est pas fair-play, ce n'est pas franc-jeu, ce n'est pas correct. Alors, voyez-vous, il y a toutes sortes de choses qui peuvent se glisser dans le projet de loi et dont, malgré tous nos efforts pour l'étudier à fond, on n'est pas nécessairement conscient parce qu'on le regarde de notre point de vue. Et, notre point de vue, par nécessité, il est limité. On voudrait bien que notre point de vue soit universel, que notre point de vue soit toujours de la plus grande envergure, qu'il soit détaché assez du réel pour qu'on puisse regarder les choses avec une certaine élévation et qu'il soit en même temps assez informé du réel pour qu'on tienne vraiment compte des personnes concernées.

C'est tout un défi, le travail qu'on a à faire. C'est pour ça qu'on demande à des gens de nous aider, on demande à des gens... Et la société a mis en place un tas de gens. Notre Assemblée nationale a décidé de constituer des organismes comme, par exemple, la Commission des normes du travail, entre autres, pour nous conseiller. Ce n'est pas la seule chose, mais elle peut, entre autres, donner des avis. Donc, elle pourrait, à partir de sa connaissance expérimentale de l'administration d'une loi, nous dire quelles seront les conséquences des articles de loi qui sont là et ainsi nous aider, nous éclairer pour qu'on puisse faire la part des choses et choisir, à travers tous les écueils du réel, des orientations, des dispositions qui soient le mieux ajustées possible aux conditions de travail des gens pour que ceux-ci soient contents, qu'ils aient du plaisir dans leur travail et qu'ils aient envie de faire mieux encore.

Je discutais, ce midi, avec quelqu'un qui a pas mal d'expérience dans ce domaine-là, et on parlait justement de la difficulté qu'il y a d'organiser, de mettre en place un système pour rendre des services à la personne. Si je fais des chaises, ça va encore. C'est sûr que, si ma chaise n'est pas belle, bien peut-être que le client ne l'achètera pas, mais le barreau de chaise ne s'en plaindra pas, lui. C'est vrai.

Une voix: C'est vrai.

M. Dion: Mais, si je fais des gestes qui ne sont pas courtois, qui sont vite faits un peu, bien non seulement mon service n'est pas très adéquat à la personne, mais la personne peut s'en plaindre, même si elle est fragile, parce que je ne l'ai pas attaquée seulement dans le service qu'elle voulait avoir, je l'ai attaquée dans sa personne, dans le respect que je lui dois. Et ça, c'est du travail difficile.

Il ne faut pas penser qu'être préposé aux bénéficiaires, qui est une fonction qui n'est pas nécessairement parmi les mieux payées dans la société... Ce n'est pas une des fonctions qui est la plus cotée dans la société. Elle n'est pas remplie, la plupart du temps, par les gens qui ont le plus de scolarité. Et, cependant, combien importante elle est, parce que ce sont ces gens-là qui sont au contact quotidien des hommes et des femmes qui ont eu toutes sortes de difficultés ou, enfin, qui ne sont pas nécessairement parmi celles pour qui la nature a été la plus généreuse. Et ces personnes-là ont besoin d'un respect profond, et je suis convaincu... Je vois M. le ministre qui me regarde, je suis convaincu qu'il est conscient de ça et qu'il est désireux comme nous de faire en sorte de faire le mieux possible pour que les services soient donnés avec la plus grande pertinence. Et pas seulement avec pertinence, soient donnés avec courtoisie. Mais pas seulement avec courtoisie, avec respect et, plus encore, avec affection et dévouement aux personnes qui en ont le plus besoin.

Alors, vous voyez, M. le Président, ce n'est pas une banalité. On ne fait pas ces motions-là juste pour les faire. On les fait parce que ce serait important qu'on soit tous bien éclairés. N'est-ce pas, Mme la députée, vous êtes d'accord avec moi? M. le Président, elle est d'accord avec moi, et je l'apprécie beaucoup. Alors, c'est important, c'est important qu'on fasse en sorte que toutes les dispositions qu'on va adopter soient bien considérées sous tous les points de vue.

On aurait souhaité qu'elles soient bien considérées du point de vue de tous les organismes, par exemple du ministre du Travail, qui a une responsabilité très importante dans le domaine, et puis de tous les autres acteurs. On souhaiterait que tout le monde vienne nous éclairer pour que cette petite modification, qui en est une immense, peut-être beaucoup plus grande qu'on pense à première vue, pour que cette petite modification, qui est peut-être très importante, beaucoup plus qu'on pense, eh bien, qu'elle soit faite correctement.

n(15 h 50)n

Et je ne nie pas qu'il se peut que, dans... D'abord, dans l'objectif... Je ne mets en question le fait que le ministre présente ça dans un objectif fort louable. Bon. Ça, je ne mets pas ça en question, parce que pourquoi est-ce qu'on questionnerait les bonnes intentions de M. le ministre, hein? Je pense bien que ses intentions, moi, au point de départ, sont excellentes et je ne mets pas ça en question. Ce que je mets en question, c'est la hâte qu'on a à l'adopter sans prendre le temps de réfléchir. Et je peux vous dire qu'après neuf ans de parlementarisme où j'en ai vu de toutes les couleurs, où j'ai eu parfois des moments d'impatience, je me disais: On perd notre temps ici à parler... Parce que j'étais habitué, M. le Président, avant d'être parlementaire, qu'on parlait brièvement et qu'on agissait beaucoup. Alors, s'habituer à un autre mode de comportement, c'est difficile. Pourquoi c'est difficile? Parce que ce n'est pas dans nos habitudes. Et, ici, chaque mot qu'on dit, chaque norme qu'on adopte ont des conséquences pour 7,5 millions de personnes. C'est important, ça. Et j'ai pu constater que parfois, alors qu'on se désespérait d'adopter une loi, le temps qu'on a mis pour le faire nous a permis de l'améliorer substantiellement.

Alors, je dis à M. le ministre: Il ne faut pas aller trop vite, il ne faut pas aller trop à la hâte. Il faut se hâter ? selon l'expression, je crois que c'est de Boileau ? se hâter lentement et vingt fois sur le métier remettre l'ouvrage, le polir sans cesse et le repolir, enlever beaucoup, mais parfois ajouter. C'était le conseil de Boileau, hein? Il faut se hâter parce que c'est important, ce qu'on fait, et le temps nous est compté. Mais se hâter lentement, ça veut dire se hâter avec sagesse, se hâter en prenant en considération l'importance de la chose.

Je vais vous donner un exemple, M. le Président, qui m'a été raconté par un ami et qui est extrêmement... qui illustre très bien ce concept, se hâter, mais lentement. Il s'agit de matelots qui, sur un bateau, doivent faire face à la tempête. Et le vent rugit dans les voiles, le bateau tangue, et les matelots sont apeurés. Ils vont frapper à la porte du capitaine: Venez, venez, nous allons couler! Alors...

Non, non, ça ne me dérange pas tellement, mais j'aimerais bien que vous compreniez mon exemple, M. le ministre. Mais ça ne me dérange pas tellement de... Alors donc, on est en pleine tempête, le vent rugit, ça fait beaucoup de bruit, ça peut même affecter les oreilles, et on frappe à la porte du capitaine: Venez, venez vite! Le capitaine sort sur le pont, sort sa pipe, sa blague à tabac et commence à bourrer sa pipe. Alors, les matelots lui disent: Mais, capitaine, il faut se hâter, nous allons couler. Le capitaine leur répond: C'est trop dangereux, ce qui se passe, pour qu'on se précipite.

Alors, vous voyez, c'est un vieux sage. Il savait qu'il y a des gestes qui... un seul geste peut avoir des conséquences néfastes et dramatiques. Donc, quand on fait des choses aussi importantes, quand on fait des choses aussi importantes, aussi importantes que de légiférer, il faut prendre le soin de bien les faire et ne pas avoir peur d'écouter les gens. Je sais bien que...

Une voix: D'avoir un bateau...

M. Dion: Et d'avoir... Oui, comme on me suggère, hein, d'avoir un bateau de rechange au cas où le premier voudrait couler. Alors, ce que je veux dire, c'est ceci: c'est qu'il est important que l'on réfléchisse bien. Et je sais qu'on est des législateurs... On a beaucoup d'expérience. On a beaucoup étudié avant d'être ici. Je sais qu'on a beaucoup de connaissances et surtout qu'on a beaucoup de considération pour les gens. Ça, je pense que c'est partagé des deux côtés. Mais est-ce qu'il se pourrait que des gens qui ne sont pas ici, mais qui sont, par exemple, comme les gens de la Commission des normes du travail auraient des choses à nous dire qu'on ne sait peut-être pas, auraient un point de vue à exprimer qu'on n'a peut-être pas pensé à considérer? Est-ce qu'il se pourrait, M. le Président... Évidemment, poser la question, c'est y répondre. Et c'est notre objectif. C'est notre objectif. C'est faire en sorte qu'on puisse être le mieux éclairé possible.

C'est sûr qu'on peut trouver des informations partout. On peut trouver des informations, par exemple, dans le dictionnaire. Le dictionnaire est une source d'informations, est une mine d'informations, M. le ministre... M. le Président, je dis ça pour M. le ministre, le dictionnaire...

M. Williams: ...filibuster...

M. Dion: Pardon?

M. Williams: ...le mot «filibuster»...

M. Dion: Filibuster, ah, je vais vous expliquer.

M. Williams: Oui, s'il vous plaît.

M. Dion: Je vais vous l'expliquer. Le filibuster, ça se réfère à une expérience vécue, hein, la flibuste, hein? C'étaient ces bateaux chargés de canons...

M. Bouchard (Vachon): C'est ton bateau de tantôt?

M. Dion: ...chargés de canons qui tiraient et qui étaient souvent ceux qui faisaient la différence. Alors, on nous dit que ça vient de là. Si ça vient d'ailleurs, je ne sais pas, mais je sais une chose, je sais une chose, c'est qu'il ne faut jamais sous-estimer, il ne faut jamais sous-estimer l'expérience, la connaissance et le service que peuvent nous rendre des gens que l'on peut trouver, à premier abord, un peu embêtants. Je le sais, je l'ai expérimenté dans mes neuf ans de vie parlementaire.

Alors donc, dans ce sens-là, M. le Président, je pense qu'il est important, il est important que nous prenions le temps qu'il faut et que nous écoutions les gens comme la Commission des normes du travail venir nous dire comment ils voient ça, eux, comment ils voient ça, eux, comment ils voient la question, par exemple, du «peut» et du «doit», et comment ils voient toutes les autres dispositions qu'on a dans la loi, et qu'ils nous éclairent de façon qu'on puisse améliorer le projet de loi. Parce que je ne doute pas que, dans un projet de loi qui a été travaillé, qui a été fouillé, qui a été recherché par les gens du ministère... C'est un projet de loi qui n'a pas été... Il n'est pas sorti comme ça, j'imagine, il a été réfléchi. Alors, j'imagine qu'il y a beaucoup de choses importantes là-dedans et qu'il faudrait approfondir. On demande justement que la Commission des normes du travail vienne aider.

On n'a pas la prétention d'avoir le monopole de la modestie, M. le Président. On ne demande pas juste de nous aider, nous, mais on pense que la modestie est partagée et de venir aider les deux côtés de la table, autant les députés du parti ministériel que les députés du parti de l'opposition, parce qu'on a... Je pense qu'on a tous besoin d'aide et que, si on pouvait écouter la Commission des normes du travail, bien ce serait une bonne chose et ça nous permettrait, tout le monde, de mieux travailler, de faire en sorte que les gens qui donnent les... Parce que, au fond, c'est ça qui compte, hein, c'est les services donnés aux personnes, et ces personnes vulnérables, on veut qu'elles se sentent bien dans les ressources familiales, qu'elles se sentent bien dans les ressources intermédiaires.

Pour ça, il faut que les travailleuses et les travailleurs qui sont là se sentent respectés, qu'ils ne se sentent pas exploités, qu'ils se sentent traités avec équité par le ministère, par son titulaire, qu'ils se sentent respectés et qu'ils se sentent considérés aussi par tout l'appareil d'État avec lequel ils devront négocier et faire en sorte de s'entendre sur leurs conditions de travail et qu'ils voient qu'eux autres... qu'ils sentent que, pour l'État, leur travail, c'est très important, c'est très important parce qu'on a pris le temps de bien réfléchir à tous les éléments. Il ne s'agit pas d'obliger personne à se syndicaliser, mais peut-être qu'il serait bon de ne pas les empêcher de le faire s'ils le veulent, question de les respecter.

Enfin, il y a toutes sortes d'aspects à la question. Alors, tout ça dans le but de faire en sorte que les gens seront mieux traités, seront encore mieux traités que maintenant, parce qu'on peut toujours faire mieux. On sait que, dans ces ressources-là, il y a beaucoup de générosité, il y a beaucoup d'humanité auprès des bénéficiaires, mais on pense qu'on peut faire encore mieux et qu'on peut surtout ne pas gâter ce qui existe en ayant une loi qui soit plus adaptée à leur situation.

C'est dans ce sens-là, M. le Président, que nous avons voulu présenter cette motion-là. J'aimerais ça que M. le ministre trouve ça intéressant, qu'il trouve que peut-être que ça pourrait l'aider, lui aussi, et que ça pourrait aider les députés du parti ministériel. Nous, on pense que ça nous aiderait et que ça permettrait d'avoir des gens plus contents sur le terrain. Des gens plus heureux, ça donne de meilleurs services, ça continue de se dévouer encore davantage et ça fait en sorte que les bénéficiaires seront encore plus contents, se sentiront traités avec courtoisie, avec respect, avec affection même. Alors, je vous remercie, M. le Président. C'était mon plaidoyer. J'espère qu'il sera entendu par M. le ministre.

n(16 heures)n

Le Président (M. Copeman): Merci, M. le député de Saint-Hyacinthe. Est-ce qu'il y a d'autres membres de la commission qui désirent intervenir à ce moment-ci? M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Philippe Couillard

M. Couillard: Oui. J'ai été vraiment charmé par l'éloquence de notre collègue, surtout lorsqu'il y avait des thèmes maritimes qui revenaient. J'ai trouvé ça extrêmement intéressant. Il a raison, il faut réfléchir. Ici, la particularité de ce projet de loi là, M. le Président: il y a deux partis politiques de suite qui ont réfléchi sur le même projet de loi, oui, parce que le projet de loi n° 7, c'est le projet de loi n° 151 sur lequel on avait réfléchi. Mais je me souviens que le député de Borduas n'était pas sûr qu'on avait réfléchi ou vraiment discuté ? on reprendra ses paroles plus tard dans la journée. Donc, tout ça pour dire qu'effectivement c'est important de réfléchir et de bien préparer les choses, Et l'on a ici un projet de loi qui, de toute évidence, traverse les lignes d'allégeance politique, puisque deux partis successifs le déposent dans des termes absolument identiques. Est-ce que ce n'est pas un exemple remarquable de cohérence, M. le Président?

Passons maintenant à l'article, à l'étude article par article, l'article 1...

Le Président (M. Copeman): En tout cas, le travail est positivement «titanique» devant nous, ça, c'est certain.

M. Couillard: Titanesque. Titanic, c'est le bateau. Titanesque, c'est...

Le Président (M. Copeman): Titanesque.

M. Bouchard (Vachon): M. le Président, ça dépend si vous pensez que ça va couler ou non.

Le Président (M. Copeman): Ah! Est-ce qu'il y a d'autres députés qui désirent intervenir à ce moment-ci? Mme la députée de Pointe-aux-Trembles, en tant que représentante du chef de l'opposition officielle, vous avez un temps de parole d'un maximum de 30 minutes évidemment.

Mme Nicole Léger

Mme Léger: Merci, M. le Président. Alors, j'aurais aimé entendre un peu plus longtemps le ministre. Il a l'air très... il semble être précipité à travailler l'article 1. Il est pressé. Il ne nous donne pas l'occasion nécessairement de débattre. Je ne sais pas non plus, je ne connais pas la vision du ministre de la Santé et des Services sociaux. Il ne nous explique pas pourquoi il met ce projet de loi là aux voix incessamment. On n'a pas du tout... on n'a pas entendu les interventions du ministre. Là, tout ce qu'il nous dit, c'est qu'il veut passer au projet de loi 1. Il nous rappelle, M. le Président... au projet de loi n° 7 tel quel, avec le premier article. Mais il nous rappelle le projet de loi n° 151. Il peut bien nous le rappeler le nombre de fois qu'il voudra bien, l'opposition officielle ne l'a jamais adopté, alors... Mais eux, ici, on est rendus à l'étude détaillée du projet de loi. Alors, c'est plus que de vouloir adopter. On sait qu'il va être adopté incessamment. La majorité ministérielle l'emporte sur l'opposition officielle au niveau du nombre de sièges. Alors, j'imagine qu'il peut quand même, en plus de la majorité, il peut au moins, en tout cas tout au moins, je dirais, entendre l'opposition officielle et entendre d'autres personnes qui ont l'expertise dans, je pourrais dire, les éléments qui sont apportés par ce projet de loi là.

Alors, M. le Président, je veux bien que le ministre veuille qu'on aille jusqu'à la... qu'on puisse commencer, pardon, le projet de loi par l'article 1, mais il y a quand même des gens... Il y a une motion ici, là, qui est sur la table, et la motion demande qu'on entende la Commission des normes du travail. Alors, j'imagine que l'opposition officielle a le droit de faire ce genre de demande là. J'imagine que l'opposition officielle utilise les droits parlementaires, comme députés, de vouloir déposer une motion préliminaire. J'imagine que, même si le ministre est quand même nouveau dans le... je pourrais dire, comme législateur tel quel maintenant au Parlement, il reste quand même que c'est important pour l'opposition de faire valoir son point.

C'est tout ce qu'il nous reste, M. le Président, d'écouter les gens, d'entendre les gens, de vouloir parlementer et de vouloir débattre, de vouloir discuter de la vision du gouvernement libéral présentement devant nous. C'est tout ce qu'il nous reste ici. Alors, je ne vois pas pourquoi que le ministre de la Santé et des Services sociaux décide, du revers de la main, de dire: Bien, on ne veut pas entendre nécessairement la Commission des normes du travail qui sont devant nous... que nous demandons ici, en motion, de vouloir les entendre.

Il nous dit: Passons à l'article 1. C'est tout ce qu'on entend, là, aujourd'hui, M. le Président: Passons à l'article 1, puis 2 et 3. C'est un projet de loi qui a huit articles, mais huit articles quand même assez importants. Quelques-uns d'entre eux sont... d'entre ces articles-là sont plus qu'importants et font appel à toutes les relations de travail au Québec, font appel à tout le statut de travailleur autonome, mais aussi de salarié, et de la relation employeur-employé, de toute la notion de rétroactivité, de toute la notion de droit d'association, de représentation d'associations. C'est de ça qu'on parle aujourd'hui, M. le Président, et tout ce que j'entends du ministre de la Santé et des Services sociaux, c'est: Allons à l'article 1. Pourquoi qu'il ne nous parle pas de la Commission des normes du travail, du ministre du Travail, de Jean Bernier, des relations de travail, de la vision qu'il a derrière ce projet de loi là? Je ne l'entends pas, M. le Président, nous parler de sa vision du projet de loi.

Pourquoi qu'il nous dépose ce projet de loi là? Tout ce qu'il a à me dire aujourd'hui, c'est qu'on avait déjà le projet de loi n° 151 de l'autre côté, de l'opposition officielle. Bien, en tout cas, M. le Président, je veux dire, je trouve que ce n'est pas des arguments très, très forts, et vous me voyez un petit peu, je pourrais dire, surprise des paroles du ministre de la Santé et des Services sociaux.

Ici, M. le Président, on parle des ressources d'hébergement public non institutionnel, on parle de familles d'accueil, on parle de résidences d'accueil, on parle de ressources intermédiaires. Dans les familles d'accueil, là, c'est plus de 5 500 ressources, ce dont on parle avec ce projet de loi là, ce qui touche pas loin de 10 000 enfants. On parle des résidences d'accueil, il y en a environ 2 700, ce n'est pas loin de 9 000 adultes ou personnes âgées. C'est de ça qu'on parle dans ce projet de loi là, M. le Président. Et, dans les ressources intermédiaires, on parle de 1 300 ressources, ce qui veut dire environ 9 000 personnes de tout âge et de toutes problématiques, M. le Président. Ce n'est pas des gens, dans ces milieux-là, qui ont toute l'autonomie et la grande autonomie qu'on connaît dans la société. Ce sont des gens parfois vulnérables, parfois démunis, qui ont besoin de soutien, qui ont besoin d'accompagnement. Alors, ce n'est pas loin de 10 000 ressources, ce n'est pas loin de 30 000 personnes, là, ce de quoi on parle présentement devant nous. Alors, je suis toujours surprise du ministre qui ne nous parle pas des personnes en qui il veut faire le projet de loi ici, qui concernent le projet de loi qui consiste... le projet de loi qui est ici, devant nous, le projet de loi n° 7.

Alors, c'est tout à fait normal et tout à fait correct dans le processus parlementaire qu'une opposition officielle fasse une motion et veuille entendre des gens. Et ce n'est pas... Je voyais juste celui des normes du travail, la Loi sur les normes du travail qui avait été présentée l'année dernière par le gouvernement du Parti québécois. On a entendu énormément de personnes juste pour les normes du travail telles quelles, qui étaient la révision des normes du travail. Je vous reviendrai tout à l'heure à ce niveau-là. Mais ça reste quand même, M. le Président, 30 000 personnes qui sont ici devant nous, devant ce projet de loi là, qui sont impliquées et engagées dans le projet de loi que nous avons là, devant nous, aujourd'hui. Alors, de rencontrer... de vouloir rencontrer la Commission des normes du travail, c'est tout à fait normal. Alors, qu'on nous demande, qu'on dit qu'on se... qu'on puisse se précipiter à vouloir tout de suite travailler l'article 1, M. le Président, je ne trouve pas ça très élégant de la part du ministre de la Santé et des Services sociaux.

J'apprécie ce que mon collègue... Parce qu'on est sur la motion de mon collègue député de Saint-Hyacinthe qui a été effectivement fort éloquent, qui nous ramène aux notions de plaisir, qui nous parle de capitaine et qui nous parle de bateau. C'était fort imagé. Intéressant et fort imagé. J'apprécie la participation de mon collègue ici, dans l'opposition officielle, qui est fort préoccupé par les gens qui sont concernés derrière ce projet de loi là. Mais, s'il n'y a pas l'opposition officielle pour penser à ces personnes-là, ce n'est pas le ministre devant nous actuellement qui a l'air à prendre acte, en tout cas, de tout l'impact chez ces gens-là pour qui nous parlons aujourd'hui.

Donc, l'opposition officielle fait son travail, M. le Président, l'opposition officielle insiste pour qu'on puisse entendre des personnes qui sont davantage experts et qui peuvent nous apporter, je pourrais dire, de meilleurs éclaircissements par rapport au projet de loi qui est devant nous. Alors, prenons le temps, M. le Président, prenons le temps de faire ce projet de loi, prenons le temps de bien débattre. Et j'apprécierais un peu plus de collaboration, M. le Président, du ministre par rapport à des motions que nous faisons devant nous et par rapport à notre droit de parlementaires de vouloir déposer des motions préliminaires.

Or, les normes du travail, M. le Président, on a décidé, et c'est entré... le 1er mai 2003, entrait en vigueur toute la Loi sur les normes du travail. Il y a eu un travail, je pourrais dire, très colossal de notre collègue, Jean Rochon, anciennement député de Charlesbourg, qui... Je me souviens des heures et d'un travail très, je pourrais dire, très impliquant, très intense au fil des derniers mois, l'année dernière particulièrement, pour réviser toute la Loi sur les normes du travail. C'est bien de travailler ainsi, M. le Président, pour entendre les gens, écouter les gens, revenir, refaire de nouveaux scénarios, pour être capables de vraiment déposer une révision d'une loi. Et c'est ce qu'on fait là aujourd'hui, M. le Président, là. C'est vraiment... On parle vraiment de la loi sur... pas de n'importe quelle loi, là, la loi modifiant sur les services de santé et les services sociaux. C'est de cette loi-là dont on parle aujourd'hui.

n(16 h 10)n

Si je regarde un petit peu ce qui était la Loi sur les normes du travail qui est entrée en vigueur, il y avait trois objectifs bien fondamentaux: celui d'élargir la protection de la loi à un plus grand nombre de salariés, celui de soutenir davantage la conciliation du travail avec la vie personnelle et familiale et assurer une meilleure protection aux salariés. Ce sont trois objectifs fort louables qui étaient sur la planche de travail, M. le Président, sur la table de travail pour mieux alimenter, je pourrais dire, tout l'ensemble de la vision du projet de loi sur les normes du travail.

Je rappelle ce qu'elle était aussi, la Loi sur les normes du travail. Je tiens compte d'un communiqué qui a été émis le 7 novembre 2002, qui présentait... que Jean Rochon avait présentée à l'époque, Des mesures pour améliorer la situation des travailleurs. Et je vais faire des liens, M. le Président, du travail important qui s'est fait pour cette révision-là des normes du travail et qui serait important avec notre projet de loi ici, qui touche les relations de travail, qui touche les conditions de travail des gens dans les milieux des ressources intermédiaires au Québec et des ressources de type familial.

Dans cette révision des normes du travail, on permettra à ce moment-là «d'améliorer les conditions de travail de plus de 1,6 million de travailleuses et travailleurs québécois[...] ? ce qui veut dire environ, près de 60 % de la main d'oeuvre, 58,3 pour être plus juste ? qui n'ont que la protection de la Loi sur les normes du travail pour l'établissement de leurs ? propres ? conditions de travail». Donc, ce sont des gens qui n'ont pas nécessairement de conventions collectives, qui ne sont pas nécessairement syndiqués, qui n'ont pas nécessairement toute la protection nécessaire. Et là la Loi sur les normes du travail leur permet... l'amélioration de cette loi-là leur permettra d'améliorer les conditions de travail. Tant mieux qu'on a des lois sur les normes du travail, tant mieux qu'on a un code du travail pour régir, je pourrais dire, les relations de travail et employeurs et employés au Québec. Beaucoup de ce groupe, dans le fond, où la Loi sur les normes du travail affectait particulièrement, il y avait une grande proportion qui était des jeunes de 15 à 29 ans, 15 à 30 ans, qui étaient davantage touchés, mais ça touche quand même tout l'ensemble de la société, cette nouvelle Loi sur les normes du travail. Alors, c'est pour ça qu'on veut entendre la Commission des normes du travail qui a travaillé aussi étroitement avec cette nouvelle loi là, qui sont venus donner leur opinion. Ça affecte aussi, je dois dire...

«La Loi sur les normes du travail doit être adaptée afin de tenir compte des nombreux changements survenus ces dernières années non seulement dans le monde du travail, mais dans l'ensemble de la société.» C'est ce que je disais tout à l'heure, M. le Président, au ministre, que le projet de loi n° 7 qui est devant nous, il y a un impact directement aussi sur cette cohérence-là de l'ensemble des lois du Québec, mais de l'ensemble du monde du travail au Québec. Juste la Loi sur les normes du travail vient le dire... Cette révision-là sur les normes du travail vient dire aussi l'impact de l'ensemble de la société. «Les mesures proposées par cette révision substantielle visent l'atteinte de trois objectifs: élargir la protection de la loi à un plus grand nombre de salariés», et les deux autres objectifs que je mentionnais tout à l'heure qui étaient de «soutenir davantage la conciliation du travail avec la vie personnelle et familiale».

On le sait, M. le Président, de plus en plus, on nous demande de concilier la vie familiale à celle du travail. L'ensemble des travailleurs au Québec, qui est à un niveau quand même de plus en plus... cela augmente. Je regarde juste l'implication des femmes dans le milieu de travail du Québec. On atteint... on est toujours dans les 60 %, près de 70 % des femmes qui sont sur le marché du travail au Québec. Je ne dis pas qu'elles ont nécessairement toutes les meilleures conditions de travail, c'est évident qu'il faut le travailler.

Je rappelle l'article que Michel David a écrit le 22 novembre dernier, en fin de semaine, qui rappelait, Michel David, ce que Jean Charest, le premier ministre, M. le Président, qui est notre député de Sherbrooke ici, en Chambre... qui parlait d'un commentaire de Jean Charest qui avait dit que «la compassion, chers amis, ce sera le mot d'ordre...» Je cite, là, Michel David, qui cite lui-même notre député de Sherbrooke, M. le Président: «La compassion, chers amis, ce sera le mot d'ordre, le cheval de bataille du Parti libéral du Québec.» C'est ce qu'on touche là, M. le Président, là, dans les ressources d'hébergement public non institutionnel dont le projet de loi n° 7 est devant nous présentement. C'est: «La compassion, chers amis, ce sera le mot d'ordre, le cheval de bataille du Parti libéral du Québec.» C'est ce que disait le député de Sherbrooke. Il avait dit ça le lendemain des élections de 1999 ? c'est ce que dit Michel David, et je le cite: «...après avoir constaté que le modèle Harris n'était pas très populaire auprès des Québécois. La sinistre farce continue. Après les femmes et les enfants, qui seront les prochaines victimes de la compassion libérale? Au risque de me répéter, les économies de bouts de chandelles sont souvent les plus coûteuses d'un point de vue politique parce qu'elles sont les plus incompréhensibles. Le gouvernement pourrait bien être en train de commettre sa plus grosse erreur depuis le 14 avril.»

M. le Président, l'article de Michel David est un article assez dur, je dirais, devant le gouvernement qui est devant nous présentement, le gouvernement libéral. Et, quand on parle, juste parler des enfants, des femmes et des enfants, «qui seront les prochaines victimes de la compassion libérale?», on a dans le projet de loi n° 7 qui est devant nous et aussi le projet de loi n° 8 qui est son petit cousin, comme on dit... ce sont des femmes et des enfants souvent qui sont impliqués, je pourrais dire, par un projet de loi comme celui-ci qui statue que ces gens-là seront des travailleurs autonomes. Ça peut être un choix, mais j'aurais aimé entendre le ministre sur pourquoi il fait ce choix-là. Selon les jugements des tribunaux qui ont confirmé que ce ne sont pas des travailleurs autonomes, mais que ce sont particulièrement des salariés, alors, quand un gouvernement vient mettre sur la table que, au-delà de ce que les tribunaux disent... nous déposons un projet de loi qui dit que ce sont des travailleurs autonomes.

Je peux continuer, M. le Président, dans cette voie-là, de dire que l'ensemble, je pourrais dire... De pouvoir entendre la Commission des normes du travail nous permettra aussi... pourrait nous permettre d'avoir l'expertise des normes du travail dans toute cette... je pourrais dire, ce projet de loi là qui est devant nous, qui appelle vraiment des modifications dans les relations de travail au Québec, et ça, jumelé avec tous les autres, je pourrais dire, les autres projets de loi qui sont sur la table, autant de l'article 45, autant que du projet de loi n° 8, autant le projet de loi n° 30 que le ministre de la Santé et des Services sociaux a mis sur la table, particulièrement au niveau des accréditations syndicales qu'on aura l'occasion d'en reparler.

Alors, si je revois la Commission des normes du travail, ce qu'elle pourrait faire, ce qu'elle pourrait nous donner comme expérience, si je regarde, je continue, je pourrais dire ce que Jean Rochon avait présenté à l'époque. Il disait que «cette révision concrétise l'engagement pris par le gouvernement de moderniser nos lois du travail afin de tenir compte des nouvelles réalités». Est-ce que c'est une nouvelle réalité du gouvernement de statuer qu'ils seront des travailleurs autonomes? Est-ce qu'on aura d'autres projets de loi sous cette même forme là qui vont statuer des travailleurs dans d'autres domaines ou d'autres activités... qu'on va statuer qu'ils sont des travailleurs autonomes?

«Le "Code du travail", qui régit les relations du travail pour les salariés syndiqués, a déjà été modifié et il convient maintenant, dans une démarche d'équité et de solidarité envers l'ensemble des salariés, d'assurer une meilleure protection et une meilleure qualité de vie aux travailleuses et aux travailleurs qui ne sont pas autrement représentés.» Alors, par chance qu'on a une loi sur les normes du travail qui va aider les travailleurs et travailleuses qui sont des travailleurs autonomes pour au moins avoir de quoi de base pour les protéger. Et cette révision-là des lois des normes du travail «s'inscrit de plus ? en plus ? en droite ligne avec le plan d'action du gouvernement qui vise le maintien et la création d'emplois de qualité». C'est ce qu'écrivait Jean Rochon à l'époque.

n(16 h 20)n

Vous conviendrez avec moi, hein, mes collègues conviendront avec moi que cette mesure-là ou cette modification-là, cet avancement-là de la Loi sur les normes du travail, s'inscrit aussi avec autre chose, c'est-à-dire la création d'emplois de qualité. Alors, je n'entends pas le ministre sur ça. Il n'est pas le ministre de l'Emploi évidemment, sauf que, quand on demande au ministre du Travail de venir ici, en Chambre, on pourrait tout aussi bien demander le ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale. Mon collègue député de Vachon qui est près de moi, qui est porte-parole de la solidarité sociale particulièrement, qui attend impatiemment le plan de lutte... on l'attend tous, là, mais le plan d'action de lutte contre la pauvreté... Alors, vous conviendrez que je fais le lien facilement entre la Loi sur les normes du travail, d'une part, et celle de la création d'emplois, mais de la création d'emplois de qualité aussi.

Donc, est-ce que le projet de loi n° 7, qui va statuer que ce sont des travailleuses autonomes, va aussi s'assurer, M. le Président, que les emplois seront des emplois toujours de qualité, qu'on maintiendra des conditions de travail décentes, qu'on pourra améliorer les conditions de travail de ces gens-là qui sont dans les ressources intermédiaires du Québec?

La présentation du projet... Je vois juste celui-là sur les normes du travail. Ça a été 40 groupes qui ont été concernés, qui sont venus présenter... qui ont vu le document de consultation à l'époque qui était Revoir les normes du travail: un défi collectif. C'est tout le capital humain du Québec, M. le Président, qu'on est en train de revoir par ce... on a revu, je veux dire, par cette Loi sur les normes du travail qui a été révisée. Donc, autant la Loi sur les normes du travail... qu'il est pour nous important d'entendre la Commission des normes du travail qui pourrait venir nous dire aujourd'hui toute cette réflexion-là qui a été apportée derrière la révision de la Loi sur les normes du travail. Alors, pourquoi ne pas les entendre, pourquoi ne pas réussir à les entendre? Ils auraient peut-être beaucoup de choses à nous dire, peut-être... Même pas «peut-être». Je suis convaincue qu'ils auraient beaucoup de choses à nous dire.

Je revoyais mon collègue... Si vous vous souvenez juste le nombre de travailleurs atypiques, c'est mon collègue le député de Joliette qui nous avait dit ça en commission dernièrement, le nombre de travailleurs atypiques qui augmente à un rythme effréné au Québec. En 1976, 16,7 % des gens sont travailleurs atypiques; en 1995, 29,3 %; en 2001, près de 37 %. Alors donc, on doit être pas loin de 40 % de gens qui sont des travailleurs atypiques au Québec présentement. Il serait intéressant de savoir aussi le nombre de femmes qui sont travailleuses autonomes ou travailleuses atypiques. C'est des questions intéressantes, des questions utiles, des questions importantes quand on vient faire un projet de loi de ce type-là devant nous, M. le Président.

Alors, c'est sûr que, je pourrais dire, l'incohérence gouvernementale qui nous amène un projet de loi comme celui-là et nous amène dans différents autres domaines d'activité ou d'autres domaines, que ce soit dans celui des garderies, que ce soit celui dans le milieu du travail et que ce soit, bon, celui dans la santé telle quelle, qui n'est pas celui-là qui est devant nous, mais les autres projets de loi nos 25 et 30, qui sont tous mis comme ça sur la table... Mais on ne voit pas cette cohérence-là, on ne voit pas la vision que le gouvernement a en tête.

Et, quand j'entends le ministre nous dire: Bien, allons à l'article 1, bien, je me pose des questions sur tout l'ensemble des impacts qu'il aura, ce projet de loi là. Que ce soit le rapport Bernier que Jean Bernier a déposé, le rapport Bernier, que ce soit celui de la révision des normes du travail, qui a été aussi mis sur la table, que ce soit l'ensemble du plan d'action de lutte contre la pauvreté, que ce soient toutes les mesures de solidarité sociale qui sont là et qui doivent avoir une cohérence avec celui des mesures d'emploi, des mesures de réinsertion que mon collègue ici, à côté de moi, est le porte-parole, tout le concept de la conciliation famille-travail ? j'inviterais d'ailleurs...

Aujourd'hui, à la période de questions, M. le Président, on parlait de la ministre de la Famille et de l'Enfance... de la Famille... La ministre déléguée parlait particulièrement de la conciliation famille-travail. Je l'inviterais à mettre «travail» après «famille», parce que c'est là qu'on voit l'importance de la famille au Québec. Donc, on dit en général conciliation famille-travail et non conciliation travail-famille. C'est juste une façon de dire les choses, mais qui apporte la primauté de la famille par rapport au travail. Tout l'aspect du congé parental derrière ça, toute la conciliation famille-travail mais dans l'aspect du congé parental, tout ce qu'on voit sur les centres à la petite enfance et toute l'évolution des centres à la petite enfance, ça a tout un impact, ça, M. le Président, dans une vision gouvernementale. Et, lorsqu'on dépose un projet de loi, qui est ici sur la table aujourd'hui, quand on dépose un projet de loi, il faut avoir en tête toute cette incidence-là, toute la profonde incidence dans le milieu du travail de l'impact des articles de loi qui sont devant nous. Et c'est pour ça qu'il est pour nous important d'avoir la Commission des normes du travail qui aurait pu venir donner toute son expertise ici, devant nous.

Je lis, entre autres... bon, il y a plusieurs articles que nous avons devant nous, mais je vois particulièrement ce que ma conseillère politique a sorti au niveau des normes du travail pour rencontrer la Commission des normes du travail, Mélanie, qui est devant nous, Mélanie Malenfant, qui travaille très fort et que j'aime beaucoup, parce qu'elle nous alimente aussi de toutes les recherches qu'elle fait. Elle nous a sorti d'ailleurs tout ce que le ministre du Travail à l'époque avait comme dispositions législatives devant lui, tout l'impact de la Loi sur les normes du travail, que ce soit dans le milieu agricole, dans le milieu domestique. Bon, il y en a plusieurs, vous savez.

La nouvelle loi... la nouvelle loi, mais la durée du travail, les pratiques, le recours à l'encontre d'une pratique interdite, le recours à l'encontre d'un congédiement sans cause juste et suffisante ? il y a beaucoup de gens qui se sont penchés sur ça ? les jours fériés, chômés, payés, le salarié habituellement au pourboire, bon, et plein d'autres, M. le Président, le paiement des outils, des frais de voyage, des coûts de formation exigée par l'employeur, etc. Alors, ce sont des éléments qui se sont retrouvés dans la nouvelle Loi sur les normes du travail qui a été révisée. C'est comme fondamental d'entendre la Commission des normes du travail venir nous parler de cette nouvelle Loi sur les normes du travail, l'impact chez les travailleurs au Québec, le lien avec... l'employeur-employé. Et, même si le ministre nous dit qu'il veut passer à l'article 1, moi, je pense que ça aurait été fondamental d'entendre la Commission des normes du travail dans un projet de loi qui est ici, un projet de loi qui est devant nous, et puis qui nous...

Je recitais M. Bernier la dernière fois, je vais le redire ici aujourd'hui, parce que c'est important de voir l'impact du projet de loi quand on parle d'une relation d'emploi. M. Bernier nous disait, puis ça a été mis dans les journaux un peu partout: «...une relation d'emploi soit objectivement ambiguë, soit à cause de l'autonomie dont jouit le travailleur dans l'exécution de ses fonctions ? ou ? soit à cause de la situation de dépendance économique dans laquelle il est placé face à[...] ? ses ? clients, voire face à un seul. Ce sont les "travailleurs économiquement dépendants" et dont le statut exact est parfois difficile à définir.» C'est ce qui nous touche aujourd'hui, le travailleur dans les ressources intermédiaires ou dans les ressources d'hébergement public non institutionnel, qu'on va statuer aujourd'hui qu'il est travailleur autonome et qu'on va lui dire aussi qu'il n'a pas le droit de se syndiquer.

Ce n'est pas un mal de se syndiquer au Québec, M. le Président. Il faut laisser le libre choix aux gens de vouloir se syndiquer. Ça ne veut pas dire que, parce qu'ils travaillent dans les ressources d'hébergement, dans les ressources intermédiaires ou les ressources de type familial, parce qu'on décide qu'ils sont des travailleurs autonomes... On n'est pas obligés de leur enlever le droit à la syndicalisation. C'est tout à leur avantage s'ils veulent l'être. Alors, qu'est-ce que le ministre a derrière la tête par rapport à un projet de loi comme celui-là? Et, pour nous, il est important que, quand on entend la Commission des normes du travail, on puisse l'entendre pour nous faire le lien avec la nouvelle Loi sur les normes du travail.

Il y a aussi, quand on parle... Les modifications sur les lois des normes du travail, ça a été regroupé particulièrement sous sept thèmes. Donc, c'est les principales modifications qui ont été proposées là. Le renforcement, évidemment, du caractère universel de la loi. Ça aurait été intéressant d'entendre la Commission nous parler de cet impact-là sur les salariés, peu importe qu'ils soient agricoles, ou gardiens, ou domestiques, là.

Beaucoup de discussions par rapport à la conciliation du travail avec les responsabilités familiales et la vie personnelle. Là, c'est encore plus important, puisqu'on se retrouve vraiment au coeur de milieux qui sont des milieux de vie plus familiaux. Quand on parle des familles d'accueil, les familles d'accueil reconduisent ou installent, instaurent un climat de vie familiale auprès des enfants, qui sont parfois démunis, que leurs parents ne sont pas en situation d'éduquer leurs enfants et qui sont dans les familles d'accueil, ces enfants-là. Et on reconstruit, dans le fond, ce même milieu, le plus proche possible du milieu de vie de famille. Ce serait important d'entendre, dans le fond ces conditions de travail là, la conciliation du travail avec les responsabilités familiales et la vie personnelle... que les normes du travail se sont penchées pendant plusieurs mois sur différentes conditions qui sont là et que la Commission des normes du travail aurait pu nous parler, M. le Président.

n(16 h 30)n

Alors, quant à nous, M. le Président, l'opposition officielle demande fermement ici, du côté de la Chambre... du côté de la commission, comme on peut dire, d'entendre la Commission des normes du travail, en vertu de l'article 244, comme motion préliminaire. Et j'ose espérer que le ministre va avoir le goût de les entendre, parce que ça va juste l'inspirer davantage et pouvoir mieux nous expliquer sa cohérence et sa vision d'un projet de loi n° 7 qui est mis sur la table présentement.

Le Président (M. Copeman): Merci, Mme la députée. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur la motion préliminaire? M. le député de Nelligan, la parole est à vous.

M. Russell Williams

M. Williams: Merci beaucoup, M. le Président, et chers collègues aussi, merci. J'ai écouté avec beaucoup d'intérêt les interventions de l'opposition officielle, et particulièrement quand un ancien ministre parle. Je suis pas mal étonné quand j'ai entendu la question: Pourquoi le ministre de la Santé et des Services sociaux dépose le projet de loi n° 7? C'est presque le même projet de loi de 151. Et il était membre du Conseil exécutif à l'époque. Mais j'ai compris pourquoi il doit... C'est la même loi, il doit avoir les mêmes raisons de déposer le projet de loi, mais je comprends pourquoi l'ancien ministre n'est pas au courant des raisons en arrière d'une loi. Et laissez-moi juste citer le député de Borduas. Parce que le député de Borduas a été très franc devant nous autres.

Une voix: ...

M. Williams: Et quand est-ce qu'il a été franc?

Une voix: C'est rare.

M. Williams: Rare. Et, même, j'ai entendu... pas de mettre que, de notre côté, c'était rare. Lui, il a été franc le 13 novembre.

M. Bouchard (Vachon): En quelle année?

M. Williams: En quelle année? Bien là, M. le Président, le député de Vachon, je pense, commence à questionner l'honnêteté du député de Borduas. Franchement, il met... J'ai dit que...

Une voix: ...des motifs indignes.

Le Président (M. Copeman): Je vous prie de poursuivre votre intervention, M. le député de Nelligan.

M. Williams: Je suis étonné. Et, même, je pense, je vais envoyer les questions du député de Vachon au député de Borduas. Peut-être qu'il peut discuter de ça au prochain caucus, parce que j'ai entendu que ça brasse, là, pas mal. En tout cas.

Laissez-moi citer, si je peux continuer mon intervention sans interruption, qu'est-ce que le député de Borduas a dit: «On ne s'excusera pas d'être nécessairement pas d'accord avec[...] ? le ? projet de loi qui avait été déposé, jamais adopté, jamais vraiment discuté au Conseil des ministres.»

Laissez-moi juste répéter ça: «Jamais vraiment discuté au Conseil des ministres et jamais discuté au niveau des caucus surtout, surtout jamais vraiment discuté. Discuté, mais pas discuté à fond comme on aurait dû le faire.» Et c'est quelque chose, là. C'est toute une admission d'improvisation. Et je comprends pourquoi, le 14 avril, la population avait choisi de changer le gouvernement.

Et, franchement, un projet de loi, au moins selon notre façon de faire, il y a les discussions au caucus, il y a les préparations, il y a les comités ministériels, ils ont des discussions et il y a...

Une voix: ...

M. Williams: Oui, oui, oui, mais, chez vous, peut-être vous avez passé les papiers, mais vous n'avez pas jamais... Vous n'avez jamais discuté, vraiment discuté le projet de loi, mais pas discuté à fond. Et c'est quelque chose qu'un projet de loi ait été déposé à la dernière session 2002...

M. Couillard: Peut-être qu'il faudrait convoquer le député de Rousseau.

M. Williams: Le député de Rousseau?

M. Couillard: C'est lui qui avait déposé.

M. Williams: Oui, c'est lui qui a déposé. Peut-être qu'il peut expliquer et aussi expliquer pourquoi ils n'ont pas vraiment discuté ça au Conseil des ministres. Mais, selon les mémoires que j'ai vus dans les autres projets de loi, il y a les explications d'un projet de loi. Et, si ça arrive ? et je pense que c'est très, très mince que ça va arriver bientôt, peut-être dans deux, trois ou quatre autres mandats ? que les députés devant moi peuvent avoir une chance d'être dans le Conseil des ministres, peut-être vous pouvez changer les règles. Et, quand un projet de loi est déposé devant le Conseil des ministres, peut-être que ça va être bon de lire ça, peut-être que ça va être bon de discuter de ça comme il faut, et particulièrement avant qu'on dépose ça pour débat à l'Assemblée nationale. Quand notre parti dépose un projet de loi, nous avons bel et bien discuté ça, et je présume, au Conseil des ministres, qu'ils ont bel et bien tout étudié le projet de loi. Mais, dans l'ancien gouvernement du Parti québécois, selon le député de Borduas, ils n'ont jamais étudié le projet de loi, jamais vraiment discuté... discuté, mais pas discuté à fond. C'est quelque chose.

Mais j'ai voulu aussi juste dire: chaque fois que mes amis devant moi prennent la parole, je comprends qu'est-ce qu'ils sont en train de faire, ils ont le droit de faire ça, mais, en anglais, on appelle ça «filibuster». On appelle ça «filibuster». C'est dans les règles. Je présume que les autres partis, peut-être dans les autres Parlements, ils ont même fait la même chose.

Une voix: M. le Président.

M. Williams: Et laissez-moi expliquer... Laissez-moi expliquer...

Le Président (M. Copeman): Oui, mais, M. le député de... S'il vous plaît. À l'ordre!

M. Williams: Quel règlement?

Le Président (M. Copeman): M. le député de Vachon, oui, allez-y, pour faire un appel au règlement, oui.

M. Bouchard (Vachon): J'ai comme l'impression que le député de Nelligan nous prête des intentions.

M. Williams: Non, laissez-moi expliquer...

Le Président (M. Copeman): Oui, bien, écoutez, pas à ce moment-ci, M. le député. On va voir.

Une voix: On surveille de près, oui.

Le Président (M. Copeman): Écoutez, votre collègue le député de Saint-Hyacinthe nous a parlé, de façon très intéressante, sur le mot «filibuster», et je crois que M. le député de Nelligan poursuit dans cette veine. On va voir où s'en vont ses commentaires. Oui, M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Dion: M. le Président, juste une question de clarification. Vous n'avez pas voulu laisser entendre que j'avais dit ou j'avais laissé entendre qu'on faisait un filibuster.

Le Président (M. Copeman): Absolument pas, M. le député.

M. Dion: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Copeman): Ce n'était pas ça que j'ai dit, M. le député de Saint-Hyacinthe. M. le député de Nelligan, la parole est à vous. Évidemment, ces appels au règlement...

M. Williams: La parole est à moi, là, c'est évident de comprendre ça.

Le Président (M. Copeman): Oui. Et les appels au règlement n'enlèvent pas votre temps sur la motion.

M. Williams: Peut-être que je peux même commencer, comme mes collègues devant moi disent souvent: Combien de temps il reste pour mon intervention? Non, je n'ai pas besoin de tout le temps, comme ils ont utilisé. Mais, en parlant du mot, sans prêter des intentions, parler du mot «filibuster», où on a dit «filibuster», laissez-moi commencer en anglais parce que j'ai sorti ça d'un dictionnaire, là.

«Filibuster. The use of obstructionist tactics, especially prolonged speechmaking for the purpose of delaying legislative action. An instance of using... The instance of use of this delaying tactic.» It's also, by chance ? c'est une autre définition ? «an adventurer who engages in private military action in a foreign country». Mais je pense que ce n'est pas nécessairement ça. Dans le dictionnaire de Robert & Collins, français-anglais, j'ai cherché le mot «filibuster». Je m'excuse, j'ai pensé que... Je n'ai pas mes lunettes. Pardon?

Une voix: ...

M. Williams: Ah! L'autre page. Merci beaucoup. Excusez.

«Filibuster: Obstruction parlementaire; flibustier; faire de l'obstruction parlementaire.

«Filibusterer: Obstructionniste.»

Et, même quand je retourne dans une autre définition de «filibuster», M. le Président: «A lawless military adventurer, especially one in quest of plunder, a freebooter; originally applied to buccaneers ? je sais que ça intéresse beaucoup le député de Saint-Hyacinthe ? infesting the Spanish-American coast ? "infesting", "infesting", it's an interesting word ? infesting the Spanish-American coast but introduced, in common English, to designate the followers of López in his expeditions to Cuba in 1851 and those of Walker in his expedition to Nicaragua in 1855.»

Il y a une autre définition: «To act as a filibuster, a military freebooter; a legislator who gives long speeches in an effort to delay or obstruct legislation that he or she ? he or she ? opposes; a tactic of delaying or obstructing legislation by making long speeches; to obstruct deliberately by delaying a legislation.»

M. le Président...

Le Président (M. Copeman): I think we get the point, Mr. Member.

M. Williams: Oui, mais «long and boring in some cases». Mais je peux continuer, M. le Président, si vous voulez.

Le Président (M. Copeman): Évidemment, tout en référant à la motion, M. le député, vous avez, là encore...

n(16 h 40)n

M. Williams: Oui, j'ai fait toute la référence à la motion et j'explique qu'est-ce que mon interprétation de ça. Il me semble que je ne mets pas en doute qu'est-ce que l'opposition est en train de faire, ils ont le droit, mais, quand le monde nous écoute, je pense que ça va être bon de dire qu'est-ce qui se passe et d'expliquer. Il y a une définition, ça ne vient pas de moi. Et merci de me... lire les définitions en anglais parce que je pense qu'elles sont assez claires comme ça. Il me semble que... J'ai pensé juste dire, pour ceux et celles qui suivent le débat, comme nous avons eu avec le projet de loi n° 8, que nous sommes en train de... un exercice qui est certainement... qui inclut les «long speeches», plusieurs interventions. I'm not sure about «infesting» but... Et c'est certainement une tactique pour un délai, parce que, chaque fois que le ministre essaie de commencer le débat sur l'article 1, on arrive avec une autre motion. Et le fait, sans jugement sur ça, sans jugement: c'est un délai de l'article 1.

Et j'ai pensé que ça va peut-être être utile aujourd'hui. Et j'ai quelques autres citations, peut-être pour plus tard, sur les actions que j'ai devant moi. Merci pour cette opportunité de faire une courte intervention aujourd'hui pour expliquer qu'est-ce qui se passe devant la commission des affaires sociales. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Copeman): Merci, M. le député de Nelligan. M. le député de Vachon, pour une intervention d'un maximum de 10 minutes.

M. Bouchard (Vachon): Oui, mais j'aurais quand même, M. le Président, une question de règlement à soulever.

Le Président (M. Copeman): Allez-y.

M. Bouchard (Vachon): Puisque le député de Nelligan a parlé d'une tactique de délai, est-ce qu'il ne vient pas en contravention avec notre règlement qui empêche les collègues de cette commission de s'attribuer des intentions qui seraient malvenues? Et je demanderais que vous puissiez réfléchir à cette question, s'il vous plaît, et, si nécessaire, le rappeler à l'ordre.

Le Président (M. Copeman): Oui. Bien, écoutez, cher collègue, je pense que, oui, dans un premier temps, le député de Nelligan avait, je crois, atténué ses remarques en suggérant qu'il ne portait pas de jugement, n'est-ce pas? Et, étant donné que le député de Nelligan lui-même nous a indiqué qu'il ne voulait pas prêter d'intentions ? parce que je pense que le député l'a dit de façon catégorique pendant son intervention ? il faut prendre la... il faut accepter la parole du député quand il dit qu'il ne voulait pas prêter des intentions. Ceci est également une de nos règles fondamentales, M. le député.

Évidemment, le tout se joue dans l'interprétation des interventions, des mots. La présidence ne semble pas... n'est pas à l'aise à ce moment-ci de statuer que le député de Nelligan a prêté des intentions, ni des intentions ni des motifs indignes, à l'opposition officielle. Alors...

M. Bouchard (Vachon): M. le Président, je comprends que vous avez aussi une vaste expérience parlementaire et que le député de Nelligan en a une également et qu'il a pris toutes les précautions requises pour attirer votre jugement généreux à cet égard. Et je pense que...

M. Williams: Question de règlement.

Le Président (M. Copeman): M. le député de Vachon est toujours sur une question de règlement, on va le laisser terminer, puis je vais venir à vous, M. le député de Nelligan. Alors, si vous voulez terminer, M. le député de Vachon.

M. Bouchard (Vachon): Donc, je conçois que votre jugement là-dessus est sage, mais j'invite quand même... je nous invite quand même à la plus grande prudence quant aux intentions qu'on pourrait, entre collègues, s'attribuer, hein!

Le Président (M. Copeman): Merci. Alors, M. le député de... Non, ça va? O.K. Alors, je suis prêt...

M. Williams: ...un filibuster est un filibuster.

Le Président (M. Copeman): Je suis prêt maintenant à reconnaître un prochain intervenant. M. le député de Vachon, pour un maximum de 10 minutes, sur la motion préliminaire de votre collègue le député de Saint-Hyacinthe.

M. Camil Bouchard

M. Bouchard (Vachon): Merci, M. le Président. Je voudrais au point de départ évoquer la mémoire de Maurice Duplessis. M. le Président, je veux évoquer la mémoire de Maurice Duplessis parce que cette mémoire, que le ministre en face de moi pense reliée à une statue relativement lointaine dans les parterres de la colline parlementaire, cette mémoire est évoquée juste derrière lui. Et le ministre ne se sentait pas sous aussi bonne protection, alors qu'il est assis sous le regard de Noblet Duplessis. Et, M. le Président, je fais cette remarque du fait que c'est comme si, jusqu'à maintenant, le ministre et ses collègues avaient été frappés de la vindicte, de l'ordre de Maurice Duplessis, à l'époque, qui avait dit: «Toé, tais-toé». On ne les entend pas. C'est comme si, de l'autre côté, on faisait ? de par le mutisme, de par mutisme, de par absence de débat ? une obstruction systématique au parlementarisme, dans le fond, puisque le parlementarisme demande que l'on puisse interagir, débattre, échanger sur le fond des choses. Et le mutisme systématique pourrait être interprété, M. le Président ? sans que je le fasse, vous comprendrez bien que je ne fais pas cette interprétation-là, je m'en défends bien ? mais il pourrait être interprété comme une obstruction systématique vis-à-vis de l'objectif ou des travaux de la commission.

Ceci dit, une remarque que je fais en passant, M. le Président, mais qui, quand même, nous ramène au fond. Dans Le Journal de Montréal du 25 novembre 2003 ? bon, alors, le ministre lit dans ma pensée ? dans Le Journal de Montréal du 25 novembre 2003, nous lisons ceci à propos du projet de loi n° 7 et du projet de loi n° 8, et je cite ? j'ouvre les guillemets ? c'est Mme Claudette Carbonneau qui parle: «On est en train d'enlever à ces personnes le droit de se syndiquer. Pire encore, on veut annuler rétroactivement des syndicats. Même Duplessis n'est pas allé jusqu'à ? désertifier ? décertifier les syndicats» ou désertifier la classe des travailleurs, quant à elle. Alors, même Duplessis ne l'aurait pas fait, prétend la présidente de la CSN. Et vous aurez remarqué que j'ai fermé les guillemets depuis un petit bout de temps quand même, M. le Président.

Alors, cette remarque de la présidente, on pourrait penser qu'elle peut être corporatiste, qu'elle peut être quelque part évoquée par un rôle social que doit assumer la présidente, mais c'est une façon de nous rappeler... C'est une façon, M. le Président, de nous rappeler que ce qui est en train de se passer dans cette commission, c'est que nous sommes à étudier un projet de loi qui effectivement retire à un ensemble important de travailleuses et de travailleurs la possibilité de choisir. La possibilité de choisir. De choisir quoi? De choisir d'utiliser ou non le Code du travail qui serait accessible autrement que si on les empêchait d'y accéder.

Or, ce qu'on est en train de faire, c'est ce que Claudette Carbonneau souligne, c'est que le ministre de la Santé et des Services sociaux serait en train de faire ce que même Duplessis n'aurait pas songé à faire. Et je répète, même Duplessis n'est pas allé jusqu'à décertifier les syndicats. Alors, on est quand même rendus dans une partie de notre histoire nationale où un ministre de la Santé et des Services sociaux prendrait sur lui, de par un petit projet de loi qui a l'air comme ça tout à fait banal, avec ses quelque huit articles, prendrait sur lui de modifier nos conduites de gestion des relations de travail en décrétant...

n(16 h 50)n

Pourtant, dans un contexte de démocratie libérale, c'est-à-dire dans un contexte de démocratie ? et là je ne parle pas du Parti libéral, bien sûr ? mais dans un contexte de démocratie libérale, c'est-à-dire dans un contexte où les libertés individuelles sont un bien à chérir, n'est-ce pas, où les libertés telles les libertés de parole, les libertés d'association, les libertés d'expression, les libertés de pensée sont un droit à chérir, où donc on respecte la voix de chacun et de chacune dans sa capacité d'influencer les décisions, donc dans une démocratie libérale, on viendrait adopter ? et vous me permettrez, M. le Président, d'insister là-dessus, et je suis persuadé que ça vous intéresse ? on viendrait adopter des conduites d'une société strictement hiérarchique. Et j'imagine, à la façon d'approuver mes propos, que vous comprenez que je fais... que je mets en opposition une société qui se prétend démocratique et qui prétend respecter les libertés fondamentales en opposition à une société qui serait hiérarchique. Et là, dans la hiérarchie, évidemment, on en a plusieurs nuances de sociétés, plusieurs sortes de sociétés hiérarchiques, la plus exigeante de ce point de vue là étant la société totalitaire. Mais là je ne fais pas référence à ce bout-là du continuum, bien sûr, mais, quand même, dans une société hiérarchique où le législateur viendrait, au-delà des faits, imposer sa volonté, imposer ses souhaits, imposer ses désirs, peu importe ce que les tribunaux auront éventuellement décidé.

Et là, M. le Président, c'est d'un impact et c'est d'un effet extrêmement important dans notre société, dans notre communauté. Et vous vous souviendrez sans doute que le Pr Bernier s'en inquiétait. Il disait: Bien, oui, mais alors là, si l'institution de notre communauté, de notre société, qui est la protectrice de nos libertés individuelles, se comporte comme un employeur qui vient déguiser quelque part les faits, qui vient déguiser un statut de salarié en statut de travailleur autonome, si cette institution que l'on respecte et que l'on veut que nos concitoyennes et concitoyens respectent, si cette institution prend sur elle d'aller au-delà, d'ignorer, de bafouer jusqu'à un certain point des décisions qui auraient été prises par des tribunaux dûment constitués et dûment reconnus par notre communauté, où est-ce que nous allons?

Alors, la Commission des normes du travail qui, elle, par ailleurs, se préoccupe de la protection de nos travailleurs vis-à-vis d'un plancher indispensable quant à notre capacité de protéger les conditions de travail et les conditions que je dirais de dignité, et de participation égalitaire des travailleurs au développement à la fois individuel, familial, communautaire et social, cette Commission des normes du travail, me semble-t-il, serait la bienvenue pour commenter à partir... surtout à partir de la révision des normes du travail qui a été faite par le ministre Jean Rochon à l'époque, qui s'est préoccupé du fait que les travailleurs devraient être protégés. Les travailleurs qui ne sont pas protégés par le Code du travail pourraient être protégés par les normes minimales du travail dans le cas où un employeur travestirait leur statut, où ils perdraient leur statut de salarié au profit d'un statut d'entrepreneur que quelqu'un viendrait reconnaître abusivement.

Alors, moi, j'aimerais bien entendre la Commission des normes du travail venir statuer sur le comportement du gouvernement, peu importe l'histoire de ce projet de loi qui pourrait remonter aux temps antiques, M. le Président, puis aux décisions qui auraient été prises par des gouvernements antérieurs. Nous sommes sous une nouvelle administration. Nous sommes sous une nouvelle gestion, sous une nouvelle gouverne, et le gouvernement actuel a à prendre ses décisions avec les conséquences qui lui sont propres, et il n'a pas à continuellement référer à des décisions qui auraient été prises ? ou qui auraient pu être prises, plutôt ? par d'autres gouvernements antérieurs. C'est sa responsabilité et c'est sa responsabilité d'en débattre avec les gens qui connaissent ça et qui sont mandatés pour protéger les travailleurs et les travailleuses, M. le Président. J'en aurais long à dire là-dessus.

Le Président (M. Copeman): Merci. Je vous comprends, M. le député, mais malheureusement votre temps est écoulé.

M. Bouchard (Vachon): Déjà?

Le Président (M. Copeman): Oui. Est-ce qu'il y a d'autres interventions à ce moment-ci? Non. Alors, je mets aux voix...

M. Bouchard (Vachon): Je demande le vote nominal, M. le Président.

Le Président (M. Copeman): Bien, je vais le lire, hein!

M. Bouchard (Vachon): Oui, mais juste au cas où j'oublie.

Le Président (M. Copeman): Que moi j'oublie? Non.

M. Bouchard (Vachon): Non, moi.

Le Président (M. Copeman): Ah, O.K., non. Mais vous avez d'autres collègues. Je suis sûr qu'ils vont vous le rappeler.

«Il est proposé qu'en vertu de l'article 244 de nos règles de procédure la commission des affaires sociales tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 7, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux, des consultations particulières quant à tous les articles dudit projet de loi et qu'à cette fin elle entende la Commission des normes du travail.»

Est-ce que cette motion est adoptée?

M. Bouchard (Vachon): Je demande un vote nominal, M. le Président.

Le Président (M. Copeman): Très bien. Alors, une demande de vote par appel nominal. Mme la secrétaire, s'il vous plaît.

La Secrétaire: M. Dion (Saint-Hyacinthe)?

M. Dion: Pour.

La Secrétaire: Mme Léger (Pointe-aux-Trembles)?

Mme Léger: Pour.

La Secrétaire: M. Bouchard (Vachon)?

M. Bouchard (Vachon): Pour.

La Secrétaire: M. Couillard (Mont-Royal)?

M. Couillard: Contre.

La Secrétaire: M. Williams (Nelligan)?

M. Williams: Contre.

La Secrétaire: Mme L'Écuyer (Pontiac)?

Mme L'Écuyer: Contre.

La Secrétaire: Mme Charlebois (Soulanges)?

Mme Charlebois: Contre.

La Secrétaire: M. Bernard (Rouyn-Noranda? Témiscamingue)?

M. Bernard: Contre.

La Secrétaire: M. Auclair (Vimont)?

M. Auclair: Contre.

La Secrétaire: M. le Président?

Le Président (M. Copeman): Contre. Alors, la motion est rejetée.

Chers collègues, je sais que j'ai les pouvoirs de le faire, mais je souhaite peut-être discuter avec vous de la possibilité d'une courte suspension. Est-ce que ça vous convient? Est-ce qu'il y a des objections? Non?

M. Williams: ...

Le Président (M. Copeman): Non, plus courte que ça, M. le député de Nelligan.

M. Bouchard (Vachon): Tout à fait. Le temps d'une petite opération.

Le Président (M. Copeman): Est-ce que ça vous... Oui? Oui. Alors, je suspends les travaux de la commission pour cinq minutes.

(Suspension de la séance à 16 h 56)

 

(Reprise à 17 h 9)

Le Président (M. Copeman): Alors, la commission des affaires sociales reprend ses travaux. Et, hypothétiquement, les membres seront prêts à aller à l'étude de l'article 1, à moins qu'il n'y ait d'autres interventions à ce moment-ci. M. le député de Vachon.

Motion proposant d'entendre
la Commission des droits de la personne
et des droits de la jeunesse

M. Bouchard (Vachon): Je vous en prie, M. le Président. De fait, je propose «qu'en vertu de l'article 244 de nos règles de procédure la commission des affaires sociales ? c'est-à-dire notre commission ? tienne, avant d'entendre l'étude détaillée du projet de loi n° 7, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux, des consultations particulières quant à tous les articles dudit projet de loi et qu'à cette fin elle entende la Commission des droits de la personne et de la jeunesse».

Le Président (M. Copeman): C'est bien. Alors, il va de soi que, à ce moment-ci, la motion est recevable évidemment.

n(17 h 10)n

Une voix: Je vois que ma leçon a porté fruit.

Le Président (M. Copeman): Et vous avez, en tant qu'auteur de la motion, M. le député, un temps maximum de... Est-ce que c'est «maximum» ou «maximal»?

Des voix: Maximum.

Des voix: Maximal.

Le Président (M. Copeman): Bien là, le ministre me dit «maximum», le député...

Des voix: ...

Le Président (M. Copeman): Un temps maximum, une durée maximale. Alors, vous avez un temps maximum de 30 minutes. La parole est à vous, M. le député de Vachon.

M. Camil Bouchard

M. Bouchard (Vachon): Bon, alors, écoutez, je vous remercie beaucoup. J'imagine que «maximal» ou «maximum», M. le Président, ce sera le même temps. Alors, d'abord qu'on ne dit pas «fataux» au lieu de «fatals»...

Alors, M. le Président, je veux, par la présente, défendre durant quelques brèves minutes ? j'essaierai de contenir durant les 30 que vous me donnez, là ? le pourquoi de cette proposition à l'effet d'entendre la Commission des droits de la personne et de la jeunesse.

Comme vous le savez, la Commission s'assure de par... enfin, de par sa mission, en tous les cas, mais par toutes les mesures qui sont appropriées, elle assure la promotion et le respect des droits et libertés qui sont affirmés par la Charte des droits et libertés de la personne. Alors, la Commission, qui était connue antérieurement sous le nom de Commission des droits de la personne et qui a été transformée durant les dernières années en Commission des droits de la personne et de la jeunesse, est en mesure de recevoir les suggestions ? ça peut être des suggestions, ça peut être des demandes, ça peut être des recommandations ? enfin, touchant les droits et libertés des personnes. Et elle peut le faire en tenant des auditions publiques au besoin. Et elle peut adresser les recommandations appropriées au gouvernement quand cela s'impose.

La raison principale qui motive ma proposition, M. le Président ? et je pense que ce ne sera pas la première fois que j'évoquerai cette raison ? c'est qu'il y a un certain nombre d'organisations, de nos partenaires, je dirais, de nos partenaires du développement social et du développement économique qui se sont montrés extrêmement inquiets, pour ne pas dire offusqués et en même temps ébranlés de ce projet de loi qui est déposé devant nous. Vous le savez, M. le Président, vous y étiez et nous y étions, il y a eu des mémoires présentés devant cette commission, notamment par la CSN, la Confédération des syndicats nationaux, par la FTQ, par d'autres syndicats qui ont fait état du fait que ce projet de loi, tout comme le projet de loi n° 8, viendrait en contradiction avec les fondements mêmes du droit international concernant l'exercice de la liberté syndicale.

Le Bureau international, M. le Président, a, de fait, qualifié ? le Bureau international du travail, j'entends ? a qualifié le fait de déguiser des salariés, de déguiser des salariés en travailleurs autonomes comme étant le geste de donner une apparence différente de la réalité afin d'annuler ou de dissimuler la protection qui lui est offerte par la loi. L'opération à laquelle se livre le gouvernement à travers ce projet de loi... Et le gouvernement agit à travers son ministre dans ce cas-ci. Ça pourrait être par d'autres, là, mais, dans ce cas-ci, c'est par le ministre de la Santé et des Services sociaux qui ne s'attendait sans doute pas à faire ça comme premier travail de mission et qui doit s'inspirer de toutes sortes de faits historiques pour se remonter le moral, M. le Président. Mais le ministre ne devait sans doute pas s'attendre à devoir consacrer autant de temps qui lui est précieux. Il administre quand même 20 milliards, tout près de 20 milliards, 19,2, parce que le Parti libéral n'a pas tenu sa promesse d'augmenter au-delà de ce que... Mais alors il administre quand même 19,2 milliards et il investit beaucoup de son temps à défendre le projet de loi... Bien, à le défendre, on ne l'a pas encore entendu, mais il nous propose, en tous les cas, le projet de loi n° 7. Le ministre ne devait sans doute pas s'attendre à devoir investir autant de temps sur un projet comme celui-là qui interdit, qui ferme la porte à la syndicalisation à des milliers de personnes.

Bon, est-ce que c'est si terrible que ça de fermer la porte à la syndicalisation? Le ministre n'a pas l'air à s'en soucier outre mesure, mais je suis certain que, quand même, il doit se poser des questions sur le fond et sur ses responsabilités en matière de protection des droits fondamentaux et qu'il aurait... Il a un intérêt, j'en suis certain, le connaissant, à entendre les membres de la Commission des droits de la personne et de la jeunesse sur cet aspect de la question.

Le législateur, quand il intervient à travers l'énoncé d'un projet de loi, ce n'est pas bénin, ce n'est pas banal. Il risque, dans certains cas ? et là c'est un cas évident ? il risque, dans certains cas, même si telle n'est pas son intention, de bafouer des droits de la personne, des droits fondamentaux et, notamment, le droit à s'associer, le droit à se donner des instruments de protection contre des... ou bien contre des abus ou bien contre des situations qui pourraient ressembler à des situations abusives et, notamment dans le Code du travail, qui pourraient être le fait de certains employeurs.

La Commission des droits de la personne, dans le fond, c'est sans doute une de nos institutions les plus importantes quant à la vie législative dans une société de démocratie libérale, dans une société de droit, dans une société où la confiance ? et le député de Saint-Hyacinthe sera sans doute intéressé par ce propos ? mais dans une société où non seulement le plaisir, mais la confiance qui doit exister entre les citoyens vient quelque part forger un capital extrêmement important qu'on appelle le capital social sur lequel reposent à la fois le développement social, mais aussi le développement économique.

Il y a un livre extraordinaire, M. le Président, qui a été écrit pas par quelqu'un de la gauche, non, non, mais par un très grand historien social et qui s'appelle Francis Fukuyama. Francis Fukuyama a écrit un livre qui s'appelle Trust. Et c'est un livre fascinant dans lequel Fukuyama fait la démonstration que les sociétés où la cohésion est affaiblie, où la cohésion n'existe pas ou très peu, ce sont des sociétés où le développement économique est mis en péril.

n(17 h 20)n

Alors, Fukuyama, notamment, réfère à des travaux d'un économiste que le ministre de la Santé et des Services sociaux connaît sans doute. On le lit un peu partout, même dans les avions, dans les trucs qu'on distribue, là, pour nous distraire, mais... Un économiste extraordinaire qui s'appelle Putnam et qui a fait des études, à la demande du gouvernement italien, sur ce qui pourrait expliquer les écarts de développement entre, par exemple, le nord de l'Italie et le sud de l'Italie. Et Putnam, dans ses études, a fait la démonstration que les communautés où le capital social est le plus fort... Pas le capital économique au point de départ, le capital social, c'est-à-dire la qualité des interactions comme on peut avoir, vous et moi, M. le député de Saint-Hyacinthe, la qualité des interactions. L'interaction, très important. Ne pas perdre l'autre de vue, continuer à avoir des interactions avec quelqu'un pour maintenir un lien associatif, c'est fondamental. Donc, la qualité des interactions, mais aussi la qualité de... le niveau de confiance qu'on maintient même quand l'autre n'est pas là. C'est ce qu'on appelle une relation primaire. Autrement dit, notre capacité de se représenter l'autre sous son aspect le plus positif et qui vient faire en sorte que quelque part, lorsqu'on est mis en présence de l'autre, il a tout de suite notre confiance. Bien, les sociétés où cela existe, ce sont les sociétés qui sont les plus prospères au niveau économique. Alors, évidemment, on fait affaire à des sociétés où la confiance et l'interaction, elle est alimentée par des institutions, elle est alimentée par des organisations, elle est alimentée par des preuves que les uns et les autres manifestent au fil des jours, au fil des mois, au fil des années.

Alors, la découverte de Putnam, qui est absolument fascinante, c'est que... Alors, il avait un indice qu'on a éventuellement traduit très fautivement sous le nom d'«indice bohémien», ça n'a rien à voir. Alors, vous savez que l'indice bohémien, c'est plus un indice de combien il y a d'artistes dans une communauté; ça n'a rien à voir avec l'indice de Putnam sur le capital social. Alors, oui, mais Putnam...

Une voix: ...

M. Bouchard (Vachon): Ah, vous voulez que je commente? Non, non. Mais Putnam, à la fin de son étude, a dit: Finalement, la société américaine est condamnée à une dérive économique et à une décroissance économique parce que son capital social n'est pas très fort, parce que les gens ne se font pas confiance les uns dans les autres, parce que les interactions sont réduites au minimum, les gens transportent leur carabine avec eux, sont méfiants, etc.

Alors, il a écrit un livre qui s'appelle ? il a un nom extraordinaire ? qui s'appelle Bowling alone. Alors, Putnam a fait des observations. C'est que, dans la nouvelle société américaine, la nouvelle civilisation américaine, le bowling est revenu à la mode. Mais quelle sorte de bowling, M. le Président, je vous le demande? Seul. Alors, la personne part avec son sac, arrive là-bas et commence à jouer au bowling contre lui-même, contre elle-même, enregistre ses scores, retourne à la maison sans aucun contact, sans aucun contact avec les autres. Alors, vous pensez que ça fait une société forte, ça, M. le Président? Non, ça ne fait pas un gros party. Alors, à l'opposé, à l'opposé...

M. Dion: Pas beaucoup de plaisir.

M. Bouchard (Vachon): Non, pas beaucoup de plaisir. Mais, à l'opposé, M. le Président, dans certains villages du nord de l'Italie, Putnam a découvert que, là où on avait de la prospérité économique, c'est là où on avait les plus grandes chorales, c'est là où on avait le taux de participation...

Le Président (M. Copeman): M. le député, ça m'aiderait beaucoup avec la règle de pertinence si parfois vous prononciez les mots Commission des droits de la personne et droits de la jeunesse.

M. Bouchard (Vachon): Oui. Alors, une certaine chorale. Il y en a même une qui s'appellerait la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bouchard (Vachon): Alors... Non, non, mais, M. le Président, vous m'avez ouvert une porte, une clé dans une partition que je ne pouvais pas ignorer. Non, non, mais, attention, hein! Là on parle de Putnam, mais Putnam dit, dans le fond: Lorsque vous entrez dans un village et que vous comptez le nombre de personnes qui, dans ce village, fait partie d'une chorale, la proportion, hein, le taux de participation des personnes à une chorale peut quasiment... pas avec certitude, mais peut quasiment vous indiquer la richesse du capital social de cette communauté-là qui est associé à son développement économique. C'est quand même extraordinaire. Et ça nous rappelle peut-être certains coins du Québec, la Beauce, par exemple, où les gens ont beaucoup d'interactions, se font confiance les uns aux autres, font partie d'associations volontaires, font partie d'organisations, etc.

Alors... Non, mais alors, M. le Président, pour ne pas perdre le fil, j'aimerais... Enfin, pour ne pas que vous perdiez le fil, j'aimerais vous rappeler que nous parlons de la pertinence d'inviter la Commission des droits de la personne et de la jeunesse devant cette commission. Et, pour ne pas perdre le fil, j'aimerais aussi vous dire que je vous parle de Putnam parce que je vous parlais de Fukuyama. Alors, Fukuyama a écrit un livre que je vous invite... que j'invite le ministre par votre entremise, M. le Président, à lire durant ses temps libres, et il en a quand même un peu.

Fukuyama a écrit un livre fantastique sur le «trust». Et, de fait, ce «trust» nous empêche, nous prémunit contre le fait de lire les petites lignes en minuscules dans un contrat avant d'adhérer au contrat. Autrement dit, si quelqu'un vous propose un projet, hein... Et, à supposer que, puisqu'on parle...

Une voix: ...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bouchard (Vachon): Puisque... M. le Président...

Une voix: C'est écrit en gros. C'est écrit en gros.

M. Bouchard (Vachon): M. le Président, M. le ministre a de ces rougeurs. J'ai comme l'impression qu'il est un peu désarçonné par son propre comportement.

Le Président (M. Copeman): Chers collègues, il...

M. Bouchard (Vachon): M. le Président, est-ce qu'il neige dehors?

Le Président (M. Copeman): Oui, pas encore...

M. Bouchard (Vachon): Ou est-ce qu'il neige en dedans? Je ne le sais pas...

Le Président (M. Copeman): Mais il n'est que 17 h 25, et on en a, selon l'ordre de la Chambre, pendant quelques heures de plus. Alors, si on peut au moins se limiter à la discussion du sujet, là. Je pense qu'on va faire un effort, en tout cas. Je pense que j'appelle... Comme notre Président de la Chambre le fait, j'appelle à votre collaboration.

M. Bouchard (Vachon): Merci, M. le Président, parce que j'étais en train de perdre le fil. Et j'allais rappeler aux membres de cette commission que je suis en train d'intervenir en faveur de ma proposition qui veut inviter la Commission des droits de la personne et de la jeunesse, n'est-ce pas, et...

Alors, dans le fond, Fukuyama nous dit ceci, c'est qu'il y a certaines sociétés dans lesquelles... Lorsque se présente une occasion d'affaires, par exemple, il y a des sociétés où... À supposer qu'on veut faire une fusion entre des hôpitaux, hein, bien il y a des coins du monde ou il y a des cultures dans lesquelles on ne regarde pas le «fine print». On dit: Là, il y a une bonne opportunité, on la fait. Puis il y a d'autres cultures, qu'on ne nommera pas, où là les gens commencent à regarder le «fine print», puis tout ça, puis ils ne la font pas, la fusion. Alors, vous voyez, ça arrive comme ça dans certains... Et puis là je ne fais pas référence à quelque chose de connu, là. S'il y a des ressemblances avec une situation connue, c'est fortuit. Alors...

Une voix: ...

M. Bouchard (Vachon): Non, non, mais c'est vrai. Mais donc il y a des communautés où le «trust» est présent, et ça fait en sorte que les gens profitent d'une occasion, d'une opportunité qui leur est donnée pour avancer. Mais d'où vient ce «trust»? D'où vient ce «trust»? Alors, laissez-moi commenter quelque peu là-dessus. Il vient du fait que les uns et les autres tentent le plus possible de respecter deux choses. Premièrement, la perspective de l'autre. Alors, autrement dit, il y a une forme d'empathie dans le «trust» qui fait que, lorsqu'on parle à quelqu'un, on se sent, quelque part, compris. Même si l'autre n'adhère pas complètement à notre point de vue, on sent qu'il est à l'écoute. On sent qu'il n'est pas à dessiner n'importe quoi sur une feuille pendant qu'on parle, on sent qu'il ne se met pas à l'abri d'une influence, il est ouvert à l'influence, il ne s'obstrue pas lui-même systématiquement contre des propositions qu'on lui fait. Donc, il y a un ingrédient, là, d'empathie, de capacité de se mettre dans les souliers de l'autre, dans les... Enfin, je pense que les anglophones diraient plutôt dans les habits de l'autre, je ne sais pas, mais une capacité de se mettre dans les souliers de l'autre, à la place de l'autre.

Et ça, ça fait toute la différence entre une attitude de méfiance puis une attitude d'ouverture, entre une attitude de prêter des intentions à l'autre ou une attitude d'écouter l'autre en tout respect. Et ça fait partie, M. le Président, des pratiques organisationnelles et institutionnelles, parce que, là, je le ramène maintenant non pas... Là, je suis parti des relations individuelles, mais c'est en analogie... hein, une métaphore comme celle d'ailleurs dans... fort belle métaphore qu'on peut retrouver dans l'oeuvre de Skarmeta, Une ardente patience. Peut-être que les membres de cette commission auraient intérêt à lire ce petit livre de 83 pages de Skarmeta, qui s'appelle Une ardente patience donc, en attendant qu'on puisse écouter la Commission des droits de la personne et de la jeunesse, et qui a été traduit dans un film qui s'appelle Le postier. Mais, dans Une ardente patience ou qui porte sur la métaphore, c'est fantastique comme roman, et l'auteur nous pose la question essentielle. C'est dans la bouche du postier qui demande: Qu'est-ce qu'une métaphore? Et le poète lui répond: Mais une métaphore, c'est quand on dit: Comme si, comme si c'était cela, comme... Et, au bout du compte, le postier dit: La vie, c'est la métaphore de quoi? Ce n'est pas beau, ça?

n(17 h 30)n

Alors... Mais là on s'égare. Mais ce que... ce sur quoi je veux insister, ce sur quoi je veux insister, M. le Président, c'est que les institutions, les organisations peuvent contribuer au «distrust» ou au «trust», peuvent contribuer à la méfiance ou à l'ouverture à l'autre. Et les institutions... les institutions qui contribuent à l'ouverture à l'autre, qui contribuent à ce que chacun puisse se sentir en confiance dans ses relations avec l'autre, ce sont des institutions qui ne changent pas les règles du jeu de façon abusive. Ce sont des institutions qui disent: Il y a un certain nombre de biens premiers, un certain nombre de lois fondamentales, de biens, de... qu'il faut respecter, et je ne mettrai jamais en cause, dans la pratique de mon institution, de mon organisation, je ne mettrai jamais en cause ces droits fondamentaux. Je ne les bafouerai jamais. Et, si les gens et la population, en l'espèce, a l'impression, quelque part, que vous ne changerez pas les lois, vous ne changerez pas les règlements, vous ne changerez pas les règles en plein milieu de la joute, M. le député de Saint-Hyacinthe, si j'ai confiance que vous n'allez pas changer, je vais jouer avec vous. Mais, si... mais, si, en cours de route, vous dites: Non, non, non, ça, finalement, le deux de pique, ça vaut plus que l'as de pique, mais, hein, qu'est-ce qu'il va arriver? Je vais arrêter de jouer, je n'aurai plus confiance en vous. Mais non, bon, je n'aurai plus confiance au député de Saint-Hyacinthe. Alors, c'est la même chose pour les organisations et les institutions.

Nous avons devant nous... nous avons devant nous, M. le Président... On n'a pas simplement des dictionnaires devant nous, on a aussi la jurisprudence ? des décisions qui ont été prises par les tribunaux sur l'observation des faits ? et qui vient dire: Les règles à partir desquelles on joue, ce sont des règles très nettement établies, c'est celles de l'observation des faits. Et ce que j'observe des faits, nous dit un juge, et nous dit l'autre ensuite, et nous dit l'autre ensuite, ce que j'observe des faits, c'est que ces personnes, dont on parle et qui sont des... qui font partie des ressources intermédiaires, ce sont des salariés. Et ces faits viennent, quelque part, assurer... assurer un fondement à partir duquel ces personnes pourront exercer leurs capacités.

Armatya Sen, M. le Président, qui est un grand économiste, que vous connaissez sans doute, et qui a gagné le prix Nobel de l'économie il y a quelques années, M. Sen ? S-e-n ? parlait des capacités ou des «capabilities», donc permettre aux citoyens d'exercer leurs capacités, aux travailleurs et aux travailleuses d'exercer leurs capacités à partir de leur statut de salariés que les faits... que les faits viennent corroborer et non pas que les perceptions, les souhaits ou les désirs d'un quelconque ? mais là je ne dis pas «quelconque» de façon péjorative, je veux dire d'un ministre qui ne serait pas connu, là, qui ne serait pas identifié ? d'un quelconque ministre viendraient éventuellement nier.

C'est très important que la Commission des droits de la personne et de la jeunesse, je le répète, vienne commenter la décision que veut prendre ce gouvernement en vertu de la loi n° 7 de nier le droit à la syndicalisation. Parce que, voyez-vous, M. le Président, on pourrait éventuellement... éventuellement ? et là je le cite quasiment à mon corps défendant ? mais on pourrait éventuellement penser que le gouvernement, avec un tel projet de loi, est injuste. Je répète: On pourrait quasiment penser ? et ce n'est pas quelque chose que je veux absolument porter très loin ? mais on pourrait quasiment penser qu'avec un tel projet de loi le gouvernement, s'il devait... s'il devait poursuivre dans la trajectoire où il s'est placé, pourrait être injuste. Alors, ce n'est pas une présomption, même, ce n'est même pas une présomption, mais c'est une crainte que l'on pourrait avoir, en tant que parlementaires, que le gouvernement se place dans une trajectoire d'injustice.

Et qu'est-ce que l'injustice? Alors, qui est injuste? Et qui est juste? Alors, il y a des philosophes qui se sont penchés là-dessus ? je ne les connais pas tous, bien entendu, parce que ce n'est pas ma formation ? mais il y a des philosophes qui se sont penchés là-dessus et il y en a un qui a dit quelque chose de très intéressant. Il a dit: La justice ne peut résulter... ne peut résulter d'un calcul utilitaire. La justice ne peut résulter d'un calcul utilitaire.

Alors, supposons que le ministre de la Santé et des Services sociaux décide de déposer son projet de loi n° 7, parce qu'il calcule que, quelque part, ça va lui coûter trop cher, parce qu'il calcule que, si jamais le statut de salariés était confirmé, les conventions collectives qui sont en vigueur dans le réseau de la santé et des services sociaux pourraient être applicables et que ça pourrait coûter, je ne le sais pas, moi, 850 millions, 750 millions, 650 millions. Qui dit mieux ou pire? Si ? je dis «si» ? le ministre de la Justice... le ministre de la Santé et des Services sociaux nous amenait son projet du fait d'un calcul utilitaire, c'est-à-dire qu'il dirait tout simplement: Je veux que soit reconnu et j'impose le statut d'autonomes à ces personnes, parce que... parce que je calcule que ces personnes pourraient éventuellement revendiquer les mêmes conventions collectives que dans le réseau et que ces conventions collectives pourraient coûter cher à ma cagnotte ? qui n'est pas par ailleurs négligeable ? bien, ce serait injuste, parce que la justice ne peut pas être fondée sur un calcul utilitaire. La justice doit être fondée sur une considération des capacités des personnes à exercer leurs droits fondamentaux sans que ces droits fondamentaux ne viennent nuire à l'exercice d'un droit fondamental de quelqu'un d'autre. C'est ça, la justice.

La justice, M. le Président, est évidemment nécessaire pour la stabilité sociale. S'il n'y avait pas de justice, il n'y aurait pas de confiance et, s'il n'y a pas de confiance, il n'y a pas de prospérité, et la prospérité, dans notre monde, elle est indispensable. Pourquoi la prospérité est-elle indispensable? Parce qu'elle amène chacun des individus à sa capacité de s'approprier une partie de la richesse pour participer à la vie collective, pour se développer. Alors, dans ce sens-là, M. le Président, vous comprendrez que les gens qui sont les mieux habilités à manier ces concepts à la fois de liberté, à la fois de justice, à la fois d'exercice des droits fondamentaux, ce sont les membres de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse.

De fait, les membres de la Commission iraient bien au-delà de la législation. La Charte des droits et libertés, ce n'est pas une charte de règlements, c'est quasiment, oui, c'est quasiment une charte d'éthique et de moralité dans une démocratie qui est fondée sur des valeurs, des vraies valeurs libérales, prises dans le sens noble du terme. Et donc, ils iraient au-delà de la législation pour nous informer des grands enjeux éthiques, moraux auxquels on est confrontés en votant ou en ne votant pas pour cette loi.

Si on en croit... Si on en croit les philosophes contemporains sur la question, la Commission des droits de la personne serait appelée à nous dire si ce projet de loi... si ce projet de loi vient à l'encontre des biens premiers auxquels devraient avoir droit tous les concitoyens et les concitoyennes. Et, sans en faire une liste exhaustive, j'énumère quand même que ces droits premiers comprennent, je l'ai dit déjà, les droits et libertés fondamentales ? je n'ai plus beaucoup de temps, M. le Président, mais je vais essayer de comprimer ? la liberté de mouvement, le libre choix d'une position dans un contexte d'égalité des chances, le libre choix de position dans un contexte d'égalité des chances ? ça, ça comprend, M. le Président, bien sûr, toute la capacité de s'associer à d'autres personnes ? les pouvoirs et les prérogatives attachées aux différentes positions dans les institutions politiques et économiques. Alors, les pouvoirs et les prérogatives. Mais il y a des responsabilités avec ça, et la Commission pourrait nous en informer.

n(17 h 40)n

Les revenus monétaires et la richesse, c'est un bien premier aussi. Alors, les revenus monétaires et la richesse. Est-ce que la syndicalisation n'est pas un des moyens qu'on a trouvé pour répartir la richesse à travers... à travers la société, à travers notre communauté? La Commission pourrait nous dire: Votre loi contrevient-elle à cette accessibilité qui devrait être acquise pour toutes et tous dans notre communauté à un bien premier qui est la richesse, l'accès à la richesse, les revenus monétaires et les bases sociales du respect de soi?

Alors, les bases sociales du respect de soi. M. le Président, on pourrait toujours considérer les syndicats souvent comme des adversaires, les empêcheurs de tourner en rond, mais, quelque part, une de leurs grandes... une de leurs grandes dimensions qu'ils défendent toujours, c'est le respect de soi dans sa capacité de négocier avec quelqu'un d'autre.

Alors, M. le Président, j'espère que j'aurai convaincu les membres de cette commission du bien-fondé d'inviter la Commission des droits de la personne et de la jeunesse.

Le Président (M. Copeman): Merci, M. le député de Vachon. Est-ce qu'il y a d'autres interventions à ce stade-ci? Mme la députée de Pointe-aux-Trembles.

Mme Nicole Léger

Mme Léger: Oui. Je laissais la place, là, au ministre s'il avait quelque chose à répondre avant moi, mais je vois que, actuellement, il ne nous dit pas s'il a le goût d'entendre la Commission des droits de la personne, si l'ensemble du gouvernement a le goût d'entendre la Commission des droits de la personne. C'est pour ça que nous sommes ici en ce moment et que mon collègue député de Vachon apporte cette motion préliminaire, très importante d'ailleurs, celle qui est proposée en vertu de l'article 244 de nos règles de procédure, celui d'entendre la Commission des droits de la personne et de la jeunesse.

Tout à l'heure, le ministre, M. le Président, nous disait qu'il était sûr qu'on était pour le demander. J'imagine que c'est parce qu'il croyait que c'est important d'entendre la Commission des droits de la personne et de la jeunesse, un organisme fort pertinent dans notre société québécoise. Quand on sait le... Quand on sait, je pourrais dire, tout ce que la Commission peut assurer par toute mesure appropriée: la promotion, le respect des droits et libertés affirmés par la Charte des droits et libertés de la personne. La Commission doit aussi recevoir des suggestions, recommandations et demandes touchant les droits et libertés de la personne en tenant compte des auditions publiques au besoin et adresser au gouvernement les recommandations appropriées.

Il y a beaucoup de jurisprudence au Québec, évidemment au Canada aussi, dans le droit international, sur l'exercice de cette liberté syndicale. C'est de ça que nous parlons aussi présentement avec le projet de loi n° 7 qui est devant nous...

M. Bouchard (Vachon): Avec documentation à l'appui.

Mme Léger: ...avec documentation à l'appui, effectivement. Cet exercice-là de liberté syndicale, je rappelle un article dans LeDroit, le 21 octobre dernier, où il est cité dans cet article-là: «Il est clair que l'objectif premier de ces projets de loi est de nier ? on parle de 7 et de 8 ? aux personnes concernées le droit de se prévaloir du recours à la représentation syndicale et à la négociation collective.»

On va demander un petit peu d'ordre, M. le Président.

La Présidente (Mme Charlebois): Oui, s'il vous plaît, chers collègues.

M. Bouchard (Vachon): Oh boy, il a changé de voix!

Mme Léger: Mme la Présidente...

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Léger: Vous rapetissez, en tout cas.

Des voix: Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Charlebois): Allez-y, Mme la députée.

M. Bouchard (Vachon): Il s'est fait transformer, hein?

Une voix: Il a dû manger quelque chose...

M. Dion: On vous offre notre collaboration, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Charlebois): S'il vous plaît, chers collègues. Poursuivez, Mme la députée de Pointe-aux-Trembles.

Mme Léger: Merci, Mme la Présidente. Parce que je ne m'entendais plus, là, moi-même, alors... Il y avait de l'ordre à demander.

Une voix: On n'est pas rendus à minuit.

Une voix: Audi alteram partem.

Une voix: Tu dis que ton moteur ne part pas...

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Léger: Alors, je poursuis, Mme la Présidente. Je citais un article du Droit, parce qu'on est toujours dans la Commission des droits de la personne, la demande d'une motion préliminaire à ce qu'on puisse entendre la Commission des droits de la personne et de la jeunesse effectivement, organisme qui a été fusionné dernièrement. Et j'aimerais qu'on rappelle un peu cet article-là du Droit, le 21 octobre.

Une voix: ...

Mme Léger: J'entends le mot fusion, puis ça excite l'autre côté, M. le Président, le ministre de la Santé...

M. Bouchard (Vachon): Ils sont divisés, eux autres, là-dessus.

Mme Léger: Bien oui, ils sont divisés là-dessus.

M. Bouchard (Vachon): ...les défusionnistes, les...

Mme Léger: Alors, je recite l'article du Droit du 21 octobre 2003, où il est dit... Le sous-titre est Détournement de sens: «Il est clair que l'objectif premier de ces projets de loi est de nier aux personnes concernées le droit de se prévaloir du recours à la représentation syndicale et à la négociation collective. Cette démarche va à l'encontre des principes de notre société, au mépris de la jurisprudence québécoise et canadienne ainsi que du droit international en la matière.» Alors, Mme la Présidente, je pense que c'est un article qui vient confirmer notre désir, notre désir de vouloir entendre la Commission des droits de la personne et de la jeunesse ici, devant nous. Et je tiens à rappeler que cette commission-là est intéressante.

Bon, on se rappelle... on peut se dire que le président, le président de la Commission, qui est un ancien parlementaire ici, au Parlement, qui est Pierre Marois, qui est le président de la Commission des droits de la personne et de la jeunesse présentement et des droits de la jeunesse, qui a été ici, comme parlementaire, dans les années soixante-dix, il a été... qui est une personne qui aurait beaucoup à dire sur... autant sur les relations de travail que sur la main-d'oeuvre, que sur la sécurité du revenu, mais aussi tout l'apport de la Commission des droits de la personne, l'évolution de la société québécoise.

Et je vois un petit peu le curriculum de Pierre Marois. Bon, effectivement, il a été membre du Conseil exécutif du Parti québécois, mais il a été surtout... ce qui est important pour nous, pour la commission, c'est qu'il a été ministre d'État au Développement social dans le cabinet de Lévesque, de 1977 à 1980, ministre du Travail et de la Main-d'oeuvre, de 1980 à 1981, ministre du Travail, de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu jusqu'en 1982. Et, maintenant, depuis 2001, il a été nommé à titre de président de la Commission des droits et de la personne et des droits de la jeunesse.

Alors, c'est une sommité du travail ici, c'est-à-dire au Québec, M. Marois. Alors, il aurait été intéressant de l'entendre, avec les membres de son équipe aussi à la Commission des droits de la personne évidemment, l'équipe formée par la Commission des droits de la personne. C'est leur travail, parce que la Commission, si on se rappelle, a été constituée par la Charte des droits et libertés de la personne. Son nom et ses mandats actuels proviennent de la fusion, en 1995, entre les mandats auparavant dévolus à la Commission des droits de la personne et ceux de la Commission de protection des droits de la jeunesse, donc cette fusion-là qui, maintenant... on l'appelle la Commission des droits de la personne et de la jeunesse, ensemble.

Au niveau de toute la protection de l'enfant, parce qu'on sait très bien que, dans le projet de loi qui nous touche ici, on touche énormément d'enfants ? quand même, c'est près de 10 000 enfants qui sont dans nos familles d'accueil plus particulièrement, des enfants qui sont en situation aussi plus vulnérable que d'autres ? la Commission a également la mission de veiller à la protection de l'intérêt de l'enfant et au respect des droits qui lui sont reconnus par la Loi de la protection de la jeunesse et par effectivement le système de justice pénal, pour les adolescents plus particulièrement.

La Commission aussi doit assurer, par toute mesure appropriée, la promotion et le respect des droits et libertés affirmés par la Charte des droits et libertés de la personne et, en même temps aussi, la promotion et le respect des droits de l'enfant reconnus par la Loi sur la protection de la jeunesse et la Loi sur les jeunes contrevenants.

Alors, la Commission assume aussi des responsabilités: elle peut mener des enquêtes en vertu de la Charte des droits autant sur la personne, autant dans le cas de discrimination, de harcèlement et d'exploitation des personnes âgées ou handicapées. Beaucoup de personnes âgées et handicapées se retrouvent dans nos ressources, nos résidences d'accueil ou ressources intermédiaires. Alors, évidemment, c'est aussi autant pertinent de pouvoir recevoir la Commission des droits de la personne et de la jeunesse, qui a ce mandat et cette responsabilité-là de mener ce genre d'enquête.

On a aussi, je peux dire... la Commission élabore et applique un programme d'information et d'éducation. Je pense que c'est intéressant de savoir tout le travail que fait la Commission des droits de la personne, tant en matière des droits qu'en matière de protection. Elle dirige et encourage les recherches, les publications sur les libertés et droits fondamentaux et sur les droits de la jeunesse. Donc, il y a sûrement beaucoup de pertinence à la Commission des droits de la personne et de la jeunesse... qui aurait pu venir nous parler de liberté syndicale. Alors, il doit y avoir des recherches et des publications sur les libertés syndicales d'une part, ce qui nous touche particulièrement aujourd'hui.

Aussi, elle peut recevoir des suggestions, des recommandations et des demandes touchant les droits et libertés de la personne, en tenant compte des auditions publiques, au besoin. Donc, elle peut tenir des auditions. Elle veille aussi à l'élaboration et à l'implantation de programmes d'accès à l'égalité et coopère avec toute l'organisation vouée à la promotion des droits et libertés de la personne au Québec, et même à l'extérieur du Québec, Mme le Présidente. La Commission aussi...

Il y a, je pourrais dire, toute la partie de formation dans la Commission des droits de la personne et de la jeunesse. Elle peut élaborer et appliquer des programmes d'éducation destinés à faire comprendre et à accepter l'objet et les dispositions de la Charte ainsi qu'à sensibiliser la population, et les jeunes en particulier, sur leurs droits.

Je rappelle encore que c'est quand même près de 10 000 enfants, là, qui sont concernés dans les familles d'accueil. Et, souvent, ces enfants-là n'ont pas toujours toutes les possibilités de recours ou de droit. Et je pense que c'est intéressant de faire le lien avec la Commission des droits de la personne et de la jeunesse qui aurait pu... en tout cas, c'est ce qu'on demande, dans le fond, dans cette motion préliminaire là, de les entendre.

n(17 h 50)n

Et mon collègue député de Vachon, c'est très pertinent, sa motion qu'il apporte aujourd'hui pour entendre la Commission des droits de la personne. Il nous a indiqué... Bon, parfois, il nous a fait aussi un peu de pédagogie sur l'ensemble de ses lectures, de plusieurs de ses lectures, ce qui fut fort intéressant. Il apporte beaucoup à notre commission, mon cher collègue. Et je suis contente d'appuyer sa motion pour voir à ce que la Commission puisse être ici pour qu'on puisse davantage l'entendre.

Je peux dire aussi que la Commission, bon, élabore et applique des programmes d'éducation, comme je vous disais tout à l'heure, pour faire comprendre et accepter l'objet des dispositions de la Charte. Et la Commission offre des services de formation à l'ensemble de ses clientèles et elle élabore... c'est là que c'est intéressant, ce qui aurait été intéressant parce qu'elle élabore et applique également des programmes d'éducation et de sensibilisation pour promouvoir et défendre les droits de groupes spécifiques.

La Commission intervient, entre autres, dans les milieux de travail ? alors, c'est intéressant ? dans les milieux de l'éducation, auprès des organismes communautaires aussi, mais aussi et particulièrement dans les milieux de travail. Donc, ça aurait été intéressant de voir la Commission, d'entendre cette Commission-là pour venir nous parler particulièrement de son expérience, de son expertise, des formations qu'elle peut donner dans les milieux de travail.

Et, avec toute, je pourrais dire, l'évolution du milieu de travail québécois aujourd'hui, avec l'adoption de la nouvelle Loi sur les normes du travail et toute la cohérence des lois, autant celle de la santé et des services sociaux, autant celle de l'assurance emploi, la CSN nous rappelait que ce projet de loi irait à l'encontre de la Charte canadienne des droits et libertés et aussi de la Charte québécoise des droits et libertés de la personne, irait à l'encontre des conventions internationales et de la protection du droit international, irait à l'encontre de l'Organisation internationale du travail, ce qu'ils ont... ce qu'ils nous ont dit ici, en commission parlementaire.

Tout à l'heure, un de mes collègues a cité la présidente de la CSN. Il y a eu un élan de l'autre côté par rapport à la présidente de la CSN, en disant: Bon, c'est sûr que, de ce temps-ci, on entend beaucoup parler de notre présidente de la CSN et les autres formations syndicales. C'est clair. Elle est très, très claire. Et elle est même vindicative, je pourrais dire, en disant que c'est ni plus ni moins un déni de droit. Il faut quand même rappeler que c'est les propos de Claudette Carbonneau, la présidente de la CSN. Elle dit que ce projet de loi là «restera comme une infamie dans l'histoire des relations de travail au Québec», que c'est «une importante régression de la qualité démocratique de notre société», estime la présidence de la CSN. Alors, c'est sûr que ce n'est pas n'importe qui qui nous dit ça, c'est la présidente de la CSN du Québec qui parle du projet de loi n° 7 qui est devant nous présentement, qui fondamentalement fait ce déni de droit là.

J'ai aussi devant moi certaines lettres qui ont été communiquées aussi au ministre. Je parle, entre autres, de Bruce Schneider qui expliquait, qui parle de toute cette liberté syndicale là et ce droit à la syndicalisation au Québec. Je cite M. Schneider qui disait: «Les familles accueillant des personnes déficientes intellectuelles sont épuisées, et le projet de loi n° 7 nous fera reculer énormément pour l'atteinte des meilleures conditions de travail. Je suis l'un de ces responsables et, par surcroît syndiqué, qui exerce son travail au domicile familial. Nous hébergeons des personnes déficientes ? trois ? intellectuelles, confiées par l'établissement public, un centre de réadaptation pour les personnes présentant une déficience intellectuelle.

«Nous sommes des milliers à exercer ce métier au Québec dans l'isolement et le silence. La part de la contribution qu'apportent pourtant ces familles au sein de notre collectivité est indéniable. Un petit groupe d'à peine 60 travailleurs des Basses-Laurentides, lors de la toute première requête au Bureau du Commissaire, en septembre 1999, de la CSN, représente aujourd'hui au-delà de 1 250 de ces travailleurs oeuvrant dans le giron des établissements des services sociaux du ministère de la Santé et des Services sociaux au Québec. Et notre accréditation nous sera tout bonnement retirée par l'adoption du projet de loi n° 7. N'est-il pas légitime d'aspirer à de meilleures conditions de travail? Il l'est tout autant pour ces futures travailleurs qui hébergeront nos aînés.»

Il poursuit dans une autre lettre: «Pourquoi notre gouvernement persiste-t-il dans sa volonté de consacrer à tous ces travailleurs le statut de travailleur autonome lorsque le Tribunal du travail, de par le jugement de l'honorable juge Claude Saint-Arnaud, a pleinement reconnu et accordé, le 3 octobre 2002, le droit à l'association et à une toute première accréditation syndicale au Québec pour ces travailleurs?

«Cette décision du Tribunal du travail, d'autant plus qu'elle fut entérinée en appel par la Cour supérieure du Québec, nous rappelait à tous et d'une façon claire et sans équivoque la subordination juridique et économique qu'exerce l'établissement public chez ces travailleurs. L'établissement est tenu par des obligations légales, morales et sociales d'offrir à la personne désignée des services professionnels, tels que le stipule l'article 84 de la Loi des services de santé et des services sociaux. Celui-ci confère aux CRPDI ? qui est les centres de réadaptation pour les personnes présentant une déficience intellectuelle ? la mission d'offrir des services d'adaptation ou de réadaptation ou d'intégration sociale à des personnes déficientes intellectuellement, de même que les services d'accompagnement et de support à l'entourage de ces personnes, et il s'assure que leurs besoins soient évalués et que les services requis leur soient offerts à l'intérieur de ces installations ou dans leur milieu de vie.»

Déni de droit, comme dit mon collègue, qui me rappelle... mais aussi sans compter la gêne, la honte que nous vivrons devant les observateurs des droits, de l'exercice syndical au niveau international. Quelle réputation voulons-nous donner au Québec: un État de droit ou un État autoritaire?

Alors, c'est un questionnement fort pertinent, Mme la Présidente, parce qu'on ne sait pas ce qui va arriver avec le projet de loi n° 7, Mme la Présidente. Je ne sais pas si on va pouvoir voter ce projet de loi là d'une façon bien correcte ou si on va s'en aller dans le bâillon. On ne le sait pas, Mme la Présidente, ce qui va arriver, parce que ce gouvernement-là nous a quand même dit que ce qu'on a fait...

Puis c'est mon collègue député de Borduas qui a amené en séance du mercredi le fait de vouloir réitérer... entériner, je pourrais dire, encore une fois la possibilité de changement... de changement des procédures parlementaires, à ce qu'on puisse faire... s'il y avait un bâillon fait par le gouvernement, et que ce bâillon-là soit fait projet de loi par projet de loi. Alors, c'est sûr que je verrais d'un très mauvais oeil que le projet de loi n° 7 soit dans le bâillon, dans le bâillon, Mme la Présidente, il est trop important pour qu'on ne puisse en discuter. Surtout que, là, il est important pour nous d'avoir la Commission des droits de la personne et de la jeunesse.

Alors, je poursuis. Combien de temps qu'il me reste? Je poursuis encore parce que c'est important, au niveau du droit, de la liberté syndicale d'avoir l'expertise de la Commission, parce qu'elle nous permettrait aussi de lui poser des questions et de voir à tout cet exercice-là de liberté syndicale qui est complètement déniée par ce projet de loi là qui est devant nous.

M. Schneider continuait. Il disait dans sa lettre, je le cite: «Par cette loi, vous nous pénaliserez de ce droit fondamental à se regrouper en syndicat avec l'association de notre choix.» Parce que, encore là, Mme la Présidente, on ne sait pas qu'est-ce que le ministre va décider par rapport à quelles seront les associations qui seront représentatives parce que c'est comme ça qu'il est écrit dans le projet de loi, que c'est le ministre de la Santé qui, d'autorité, qui pourra faire cette décision-là d'une façon qu'on ne connaît pas.

Une voix: Unilatérale.

Mme Léger: Unilatérale, oui, peut-être unilatérale, mais qui va avoir des organismes représentatifs, on ne sait pas lesquels. Alors, M. Schneider nous le répète, qu'on lui enlève le droit de cette association là de son choix et qui nous dit: «Vous nous fixerez d'autorité nos conditions de travail. De plus, vous nous priverez de tout régime de protection. Ainsi, vous maintiendrez tous ces travailleurs dans des conditions de travail déjà précaires et sans espoir de changement tout en les gardant soumis à l'établissement public.»

La Présidente (Mme Charlebois): Je m'excuse, Mme la députée de Pointe-aux-Trembles. À ce moment-ci, comme il est 18 heures...

Mme Léger: ...je peux finir ma phrase, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Charlebois): Je m'excuse, je ne voyais pas la fin. Mais vous aurez, à notre retour à 20 heures, l'occasion de poursuivre, et il vous restera 12 minutes d'ailleurs.

Une voix: Mieux vaut tard que jamais.

La Présidente (Mme Charlebois): Je profite de l'occasion pour rappeler aux collègues si vous voulez récupérer vos documents, parce qu'il va se tenir une autre rencontre ici entre le moment où nous... entre 18 et 20 heures. Alors, je vais suspendre les travaux jusqu'à 20 heures. Merci, chers collègues.

Une voix: Merci, Mme la Présidente.

(Suspension de la séance à 17 h 59)

 

(Reprise à 20 h 11)

Le Président (M. Copeman): Alors, la séance... la commission des affaires sociales reprend ses travaux. Nous étions évidemment, chers collègues, sur les motions préliminaires, cinquième motion préliminaire, celle du député de Vachon.

Ça vaut la peine, je pense, que je relise la motion, n'est-ce pas, pour le bénéfice de tout le monde? D'ailleurs, je dois utiliser les pouvoirs qui me sont conférés par le règlement pour corriger légèrement la forme de la motion. C'est la deuxième fois que je suis obligé de le faire, en particulier avec le député de Vachon qui a la fâcheuse tendance de dire... d'appeler la Commission des droits de la personne et droits de la jeunesse, tel qu'il a écrit dans sa motion, mais le vrai nom de la Commission est: Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse. Alors, je vais utiliser les pouvoirs qui me sont conférés par le règlement d'ajouter, à l'avant-dernière ligne, entre «et» et «de», les mots «des droits». Et ça va se lire comme suit:

«Il est proposé qu'en vertu de l'article 244 de nos règles de procédure, la commission des affaires sociales tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 7, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux, des consultations particulières quant à tous les articles dudit projet de loi et qu'à cette fin elle entende la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse.»

Alors, au moment où on s'est quittés sous la très capable présidence de Mme la députée de Soulanges, il restait 12 minutes à Mme la députée de Pointe-aux-Trembles. J'imagine, Mme la députée, que vous voulez poursuivre votre intervention. C'est une hypothèse que j'émets.

Mme Léger: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Copeman): Alors, la parole est à vous pour un maximum de 12 minutes.

Mme Léger: Très bonne hypothèse, M. le Président. Alors, je vous rassure, je vais poursuivre, M. le Président, sur la motion de mon collègue député de Vachon qui voudrait que la commission puisse entendre la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse.

Or, évidemment, j'avais plaidé tout à l'heure le fait que la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse serait fort pertinente... fort pertinent d'entendre cet organisme-là, parce que, d'une part, il y a jurisprudence au Québec, au Canada, et dans le droit international sur l'exercice tel quel de la liberté syndicale. Donc, toute la notion de liberté syndicale est fondamentale dans la discussion que nous avons sur le projet de loi n° 7.

Je rappelais tout à l'heure un article du Droit, du 21 octobre 2003, qui est intitulé: Salariés et autonomes: deux projets de loi à retirer. Et, dans cet article, nous voyons un sous-titre qui est Détournement de sens, et on parlait de la jurisprudence québécoise particulièrement: «Il est clair que l'objectif premier de ces projets de loi ? qui est le 7 et le 8 ? est de nier aux personnes concernées le droit de se prévaloir du recours à la représentation syndicale et à la négociation collective. Cette démarche va à l'encontre des principes de notre société, au mépris de la jurisprudence québécoise et canadienne ainsi que du droit international en la matière.»

Et, de même que la CSN nous rappelait aussi en commission parlementaire, alors en consultation, à ce moment-là, voilà quelques semaines que... elle aussi nous disait que... la CSN nous disait qu'on irait à l'encontre aussi de la Charte canadienne des droits et libertés, de la Charte québécoise des droits et libertés de la personne, des conventions internationales et la protection du droit international et ainsi aussi de l'Organisation internationale du travail. Donc, il y a eu plusieurs, je pourrais dire, débats internationaux à ce niveau-là, sur le droit à la syndicalisation, sur la liberté syndicale, sur les relations de travail telles quelles qui existent à travers le monde. Donc, il y a des comparatifs intéressants qu'on peut y voir dans le droit international, d'une part.

Donc, la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse aurait été un organisme... nous plaidons que c'est un organisme intéressant pour venir nous donner son expertise et sa vision et comment elle voit les droits de la personne et de la jeunesse, mais particulièrement du point de vue de la liberté syndicale. Nous voyons aussi... je voyais aussi l'opportunité de la CSN qui nous disait, qui nous demandait, de toute façon, instamment la tenue d'une commission parlementaire afin que soient évaluées les conséquences de ces projets de loi là.

Donc, c'est sûr, avoir une expertise comme la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse pourrait nous permettre davantage d'étudier le projet de loi dans son ensemble mais aussi en relation avec l'ensemble du droit international, mais, particulièrement, associé avec celui de la liberté syndicale, celui du droit des travailleurs, celui de la relation de travail et celui particulièrement de ce qui nous préoccupe aujourd'hui, le travailleur autonome autant que le travailleur atypique, les faux occasionnels. Ce sont toutes des appellations qui font partie de l'évolution de la société québécoise au niveau de la charge de travail, au niveau de ce que c'est un travailleur maintenant, aujourd'hui, avec les multiples possibilités qui s'offrent à lui.

Je rappelais... Tout à l'heure, j'avais commencé mais dans le brouhaha... On a terminé un peu dans le brouhaha, lors de la fin de mon allocution sur Bruce Schneider, où que je lisais la lettre qu'il a fait parvenir au ministre et dont j'ai eu copie et qui nous rappelait certains, je pourrais dire, certains éléments de l'ensemble de la problématique que le projet de loi n° 7 aura comme conséquences.

Entre autres, il disait que: «Par cette loi...» J'avais terminé à ce niveau-là tout à l'heure avant qu'on reprenne... qu'on parte pour le souper, M. le Président: «Par cette loi, vous nous pénaliseriez de ce droit fondamental à se regrouper en syndicat avec l'association de notre choix.» Parce que, là, on parle d'association, évidemment, parce que le projet de loi donne la possibilité au ministre de conclure avec un ou plusieurs organismes représentatifs des ressources intermédiaires.

Évidemment, quand nous serons à l'étude des articles, il va être intéressant d'entendre le ministre par rapport à ce qu'il entend par «l'organisme représentatif», tout à l'heure, mais, évidemment, là, par la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, il aurait été intéressant aussi d'entendre le ministre sur cette possibilité-là de ce que veut dire effectivement «l'association de notre choix».

Et je complète la lettre de M. Schneider: «...l'association de notre choix. Vous nous fixeriez, d'autorité, nos conditions de travail. De plus, vous nous priveriez de tout régime de protection. Ainsi, vous maintiendriez tous ces travailleurs dans des conditions de travail déjà précaires et sans espoir de changement tout en les gardant soumis à l'établissement public.» Alors, il y a des références, particulièrement avec M. Bernier, le professeur au Département des relations industrielles de l'Université Laval. C'est une lettre fort intéressante, j'espère que le ministre a pu en prendre connaissance.

Et il continuait, et je cite M. Schneider qui disait: «Ne serait-il pas plus juste et approprié de reconnaître l'immense contribution qu'exercent tous ces travailleurs au sein de la collectivité québécoise et qu'ils puissent tous aspirer un jour à de bien meilleures conditions de travail qui, conséquemment, auraient un impact certain sur la qualité de leur vie individuelle et familiale? Les conditions de travail actuelles de ces travailleurs sont déplorables, et ceux-ci sont laissés sans protection et pour compte par les gestionnaires de l'hébergement public du ministère.»

«Voilà maintenant 13 années ? M. le Président, je cite plus loin ? que j'exerce cette profession, et toutes ces années m'ont permis de faire le point avec discernement sur la situation qui prévaut dans nos milieux, de partager avec mes confrères et consoeurs, d'en tirer mes propres conclusions et de me faire un portrait bien précis du rôle et de notre place dans ce réseau de l'hébergement public.

«Ces travailleurs pratiquent leur profession dans l'isolement et la marginalisation, sont réduits au silence, alimentant ainsi les préjugés à leur égard et donnant une mauvaise perception du travail accompli dans ce réseau. Pourtant, nous sommes les premiers répondants auprès de la personne désignée et la personne la plus significative en présence, et ce milieu que nous lui offrons est dans la poursuite de cette volonté politique de votre ministère de désinstitutionnaliser et d'offrir un milieu naturel stable et convivial.»

n(20 h 20)n

Il nous dit aussi: «Il est grandement temps que notre travail soit encadré. Sortons ces travailleurs de l'isolement, humanisons leurs rapports, redonnons-leur la formation qui a été abolie, donnons-leur des conditions de travail adéquates et assurons la promotion et la visibilité du réseau. Après tout, ne relevons-nous pas d'un service public? Pourquoi ce service n'est-il pas soutenu d'un support médiatique comme le sont les centres à la petite enfance et...»

Et le dernier passage que j'aimerais vous lire, c'est sur particulièrement... «La désinstitutionnalisation fut un très bon choix de société, et les valeurs véhiculées dans nos maisonnées resteront toujours fondamentalement humaines, souples et chaleureuses pour la personne hébergée.»

Cela vient un peu, un peu, je pourrais dire, appuyer ce que le député de Joliette nous apportait ici, en commission parlementaire, sur toute la syndicalisation, d'une part, et que syndicalisation ne veut pas... n'est pas nécessairement contraire à une mission qui peut être tout aussi flexible, humaine et chaleureuse, comme le dit M. Schneider ici, dans sa lettre.

Alors, c'est les arguments de mon collègue député de Joliette qui a maintes fois intervenu ici, en commission parlementaire, pour nous... je pourrais dire, enlever les préjugés que certaines personnes ont par rapport à la syndicalisation de nos travailleurs. Et là, vous voyez, une personne qui est syndiquée nous rappelle qu'on peut fondamentalement avoir des maisonnées, c'est-à-dire, bon, des familles d'accueil, des résidences ou des ressources intermédiaires qui peuvent, elles, être aussi fondamentalement humaines, souples et chaleureuses.

«Mais cela ne doit aucunement se faire au détriment de la qualité même de nos vies individuelles et familiales. Voilà pourquoi il est impératif d'obtenir des conditions viables afin d'assurer notre qualité de vie familiale et une qualité optimale des services que nous dispensons auprès de la personne.»

Alors, évidemment, il y aura des gens qui ont beaucoup de choses à nous dire, qu'il aurait été intéressant aussi d'entendre, et la motion particulière de mon collègue le député de Vachon, pertinemment à la Commission des droits de la personne, nous rappelle qu'il est intéressant d'approfondir notre réflexion sur le sujet qui nous intéresse ici, qui est particulièrement la relation de... les relations de travail, relations employeur-employé, le travailleur autonome lui-même et les autres formes de travail ou de travailleurs au Québec.

On nous dit aussi que, dans le fond, le Bureau international du travail a qualifié le fait de déguiser les salariés en travailleurs autonomes en nous disant que «déguiser une relation de travail consiste à lui donner une apparence différente de la réalité afin d'annuler ou de dissimuler la protection qui lui est offerte par la loi». Alors, c'est assez gros comme, je pourrais dire, argumentaire ou comme citation, que je vous lis aujourd'hui, ici, venant du Bureau international du travail.

Alors, c'est important, cette dimension ou cette... je pourrais dire, ces références qu'on peut faire à l'ensemble du droit international, mais particulièrement toutes les lectures qu'on peut... qu'on aurait pu nous faire partager ici par la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse sur toute la notion de liberté syndicale. Parce que, si on attaque... Avec le projet de loi n° 7, on attaque de front cette liberté syndicale là en niant ce droit à la syndicalisation, et, tout en se disant, derrière tout ça, que c'est tout simplement pour confirmer le statut de travailleur autonome.

Alors, on aurait très bien pu ? je le disais tout à l'heure, très bien pu ? confirmer le statut de travailleur autonome, si tel peut être le désir de plusieurs dans le milieu mais n'est pas le désir nécessairement de tout le monde, mais qu'en plus on leur enlève ce droit à la syndicalisation... Donc, il y a beaucoup de questionnement à ce niveau-là, M. le Président, et je trouve fondamental que la motion que mon collègue le député de Vachon nous apporte sur la Commission des droits de la personne... D'entendre la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse aurait été fort pertinent.

Donc, je réitère et je viens appuyer mon collègue le député de Vachon à ce qu'on puisse entendre la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, ce qui aurait été fort pertinent dans la discussion que nous avons sur le projet de loi n° 7, M. le Président.

Le Président (M. Copeman): Merci, Mme la députée. Est-ce qu'il y a d'autres interventions à ce moment-ci? M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Dion: À moins que, de l'autre côté, on veuille parler... Je ne veux pas enlever la parole...

Le Président (M. Copeman): Mais, pour l'instant, je vous ai reconnu, M. le député.

M. Dion: Ah oui! C'est vrai.

Le Président (M. Copeman): Je reconnais dans vous la galanterie habituelle, mais vous avez la parole.

M. Léandre Dion

M. Dion: Je vous remercie, M. le Président. Je ne veux surtout pas mettre en cause, là, votre décision, hein? Et puis...

La question qui nous occupe aujourd'hui est importante. J'ai devant moi un tableau, un tableau qui montre que, parmi les ressources intermédiaires ou de type familial, il y en a une qui s'appelle les familles d'accueil. Ces familles d'accueil comprennent 5 500 familles qui reçoivent, à 96 %, des jeunes en difficulté.

Et qu'est-ce que c'est, des jeunes en difficulté? C'est généralement les jeunes les plus malheureux du monde. C'est sûr que des gens qui ont des problèmes de déficience intellectuelle ou physique ont des malheurs à supporter, ont des souffrances à supporter. Mais la souffrance la plus grande est celle qui est à l'intérieur et surtout qui n'est pas apparente. Et c'est encore plus pénible parce que personne n'y porte attention. Et être un enfant de huit ans, de sept ans, de cinq ans, de 12 ans et d'avoir le sentiment qu'on n'existe pas pour personne, qu'on n'est important pour personne, que, en fait, on est là planté et que, la plupart du temps, ce qu'on se fait dire: Fais pas ci, fais pas ça, t'es comme ci, t'es comme ça... C'est un peu la situation des jeunes dans ces foyers d'accueil.

Et ces jeunes-là sont les jeunes qui ont le plus besoin non seulement de bons soins, non seulement d'un toit et de la nourriture et des vêtements, mais qui ont besoin d'une attention particulière, une attention personnelle et émotive qui va les reconnaître, qui va leur donner comme un droit à vivre, comme une importance à être là et qui va faire en sorte que, au moment de l'adolescence, au moment où ils se reconnaissent eux-mêmes, ils doivent avoir envie de surmonter les difficultés de la vie, parce qu'ils sont importants au moins pour une personne ou pour deux. Mais, s'ils ne sont importants pour personne, pourquoi est-ce qu'ils se donneraient ce trouble-là? Aussi bien en finir. Et, malheureusement au Québec, vous connaissez, le taux de suicide qu'on a chez nos adolescents est malheureusement un drame.

C'est sûr que c'est un peu lourd de rapporter ça dans une commission parlementaire où on parle d'une loi, bon. Mais ? mais ? le fond de la question, il est là. C'est-à-dire que les conditions de travail dans les familles d'accueil, c'est très important pour que les familles d'accueil soient heureuses d'accueillir des jeunes et qu'ils soient capables de passer par-dessus toutes les difficultés.

Pour tous les parents du monde, ce n'est pas facile parfois, quand on a à gérer un phénomène d'identification adolescente où il faut que l'enfant rejette son père et sa mère pour s'identifier, et, cependant, il ne faut pas qu'il perde l'affection de son père et sa mère, et il est constamment dans une situation de contradiction interne qui lui prend quelques années à résoudre et pendant lesquelles les parents ont leur part d'efforts à faire.

Alors, imaginez-vous, pour les enfants qui sont en foyer d'accueil, en famille d'accueil, la difficulté de la chose. C'est pour ça que les conditions de travail de ces gens-là sont très importantes, et, ce que je dis, moi, c'est que... Et, d'ailleurs, j'ai des citations très intéressantes là-dedans... là-dessus. Ce que je dis, c'est qu'il est très important que les gens qui sont dans cette situation-là sentent qu'ils ne sont pas manipulés et conduits de l'extérieur d'une façon absolue sans qu'ils puissent rien n'y faire, hein?

Regardez, j'ai ici l'exemple d'un Foyer au bord de la crise de nerfs. Et ça ne fait qu'illustrer le propos que je viens de vous tenir. «Vivre pour les autres, soit. Kathleen et Serge Laroche, qui servent de famille d'accueil à neuf enfants atteints d'un lourd handicap, jurent de ne pas demander mieux.» Qu'est-ce qu'ils disent? Ils ont lancé hier un message sans équivoque ? sans équivoque: Si le financement de leur maison n'est pas révisé à la hausse, leur maison l'Ami doré devra fermer ses portes, faute de pouvoir fonctionner efficacement.

Et qu'est-ce qu'ils disent plus loin: «Dans les conditions présentes, nous ne pouvons donner beaucoup plus que le salaire minimum à nos employés[...]. On est rendu au bord de l'épuisement.»

Alors, pour occuper 13 postes, savez-vous combien de gens ils ont été obligés d'engager? 31 personnes. Les autres ont tous quitté. Pourquoi? Parce qu'ils ne peuvent pas leur donner des ressources minimales... des revenus... des conditions de travail minimales.

Alors, vous voyez que c'est important. Et là on les place dans une situation où on va continuer à décider pour eux d'une façon absolue. Je comprends que l'employeur a le droit de négocier puis de juger de ce qu'il peut faire. Ça, je... je ne le nie pas. Ce que je ne comprends pas, c'est qu'on ne veuille pas donner un petit peu de voix au chapitre à ceux qui font face aux difficultés quotidiennes. C'est ça, le gros problème, et c'est pour ça que, évidemment, moi, je pense qu'on ne devrait pas aller si vite là-dedans et y aller à corps perdu comme ça, sans calculer les conséquences du geste qu'on va faire.

n(20 h 30)n

Je pense que c'est très dangereux, c'est très dangereux. Dans un article paru dans Le Devoir du 22 octobre 2003, on peut lire ceci ? et il se réfère au travail qui a été présenté par le professeur Bernier: «Il est clair que l'objectif premier de ces projets de loi ? le n° 7 et le n° 8 ? est de nier aux personnes concernées le droit de se prévaloir du recours à la représentation syndicale et à la négociation collective telles que définies au Code du travail comme moyen ? écoutez bien ça, comme moyen ? de participer à la détermination de leurs conditions de travail.»

La question est là: leur donner un moyen, un moyen qui n'est pas un moyen arbitraire, à la merci de la bonne volonté de qui que ce soit, mais un moyen qui est inscrit dans la loi et qui est un droit, un moyen de pouvoir participer à la détermination de leurs conditions de travail.

Moi, ça me semble une question importante. Évidemment, il ne s'agit pas de dire: On va les obliger à se syndiquer. Moi, je ne pourrais pas marcher là-dedans, parce que, il me semble, ce serait porter atteinte à la vision qu'ils se font du service qu'ils rendent à la société et de la façon de l'organiser. Mais leur laisser au moins la liberté de s'organiser comme ils l'entendent, de choisir...

Une voix: ...

M. Dion: Oui, merci, madame. Alors, je vois que le temps passe très rapidement, je vais me limiter. Mais je pense que l'enjeu, il est là. Je pense que l'enjeu, il est là. C'est pour ça que, nous, on pense qu'il faudrait prendre ça au sérieux, cet enjeu-là, Je sais bien, moi ? je suis convaincu ? que les intentions de l'autre côté de la table sont bonnes. Je ne mets pas en cause les intentions, mais il me semble qu'à aller vite on risque de se tromper beaucoup.

Regardez, ce qui est demandé par la motion, c'est tout simplement que la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse vienne nous dire qu'est-ce qu'elle en pense de ça, elle. Qu'est-ce qu'elle pense de ces droits-là? Est-ce qu'elle pense que c'est vraiment fondamental et que ça s'applique à cette situation-là? Si elle dit le contraire et qu'elle nous convainc du contraire, bien, on en tiendra compte. Et, si elle réussit à convaincre M. le ministre que, non, c'est très important, je suis convaincu que M. le ministre va en tenir compte et tous les collègues de l'autre côté aussi.

Alors, vous voyez, ce n'est pas une discussion oiseuse qu'on fait. C'est parce qu'il y a des droits importants qui sont en jeu et qui risquent d'être niés ? d'être niés. Voyez-vous, la loi telle qu'elle est là, elle prive... cette situation des faux travailleurs indépendants, comme on l'appelle dans l'article de M. Bernier... Non?

L'article de M. Bernier, on dit: Ce sont des «faux travailleurs indépendants», parce que, comme l'ont dit deux décisions du tribunal, ce sont des vrais travailleurs salariés. Alors, si ce sont des vrais travailleurs salariés, ce sont des faux travailleurs indépendants. «Elle les prive aussi des contributions des employeurs aux caisses de retraite publiques et privées.» Avez-vous vu ça? Le fait de les priver de la syndicalisation, c'est de les priver de leurs caisses de retraite, c'est de les priver des avantages sociaux.

Vous souvenez-vous la guerre qu'on a faite... pas la guerre, mais, enfin, la dispute qu'on a eue sur toute la question de: est-ce que tous les revenus doivent être soumis à l'impôt? Est-ce que les revenus de tout le monde doivent être soumis, par exemple les travailleurs à pourboire? On a tous des gens dans notre famille quelque part, là, qui travaillent à pourboire. Est-ce que les pourboires sont considérés comme des revenus? Est-ce qu'ils sont soumis à l'impôt? Bien, la question fondamentale par-derrière l'impôt, c'étaient les avantages sociaux et les régimes de retraite. C'était ça, le problème fondamental.

Alors, vous voyez, la difficulté n'est pas simple. C'est sûr qu'on ne peut pas faire plaisir à tout le monde, mais, nous, on pense qu'il faut essayer de faire en sorte de protéger les régimes de retraite. Quand on a 20 ans, 30 ans, ça nous passe un peu par-dessus la tête. En tout cas, moi, ça me passait par-dessus la tête, M. le Président. Mais, à mesure que les années passent, bien, ça revient au niveau de la tête. Ça revient au niveau de la tête, ça redescend, et les régimes de retraite, ça nous intéresse. Ça nous intéresse.

Une voix: ...

M. Dion: Ah! oui, oui. Ça nous intéresse, puis on regarde ça d'une façon plus... bien qu'il reste encore plusieurs années on se dit: ça viendra un jour.

Le Président (M. Copeman): M. le député, j'ai essayé tranquillement de vous faire signe que votre temps est écoulé.

M. Dion: Ah! il est écoulé?

Le Président (M. Copeman): Bien, c'est ça.

M. Dion: Alors, M. le Président, je vous remercie.

Le Président (M. Copeman): Ça va? Merci. Alors... Oui. M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Philippe Couillard

M. Couillard: Oui, très brièvement, M. le Président. Je me surprends encore devant le tableau apocalyptique qu'on nous peint... qu'on nous dépeint de ce projet de loi. Qu'il ait été déposé par le Parti québécois lors de son dernier mandat, c'est vraiment surprenant.

Une voix: ...

M. Couillard: Oui. Mais, en tout cas, on y reviendra à de nombreuses reprises. Mais c'est pour moi un sujet d'émerveillement, d'émerveillement dans le sens de Montesquieu qui, dans les Lettres persanes disait: Comment peut-on être Persan? Moi, je dirais: comment peut-on être contre ce projet de loi, puisqu'il est le vôtre? Bien, voilà une question d'une complexité probablement insondable, M. le Président.

Une voix: ...

M. Couillard: Mais, maintenant, je voudrais quand même corriger certaines choses et rassurer la population, parce qu'on a parlé des familles d'accueil, et je pense que c'est très important de se rappeler que, dans la grande majorité des cas, on parle de gens qui fonctionnent dans un contexte familial, avec 5 000 familles d'accueil, 10 000 enfants.

Et, vous savez, M. le Président, on a rencontré la Fédération des familles d'accueil du Québec. Et, afin de rassurer tout le monde, je crois utile de citer les extraits de leur mémoire. Premier extrait: «Ce projet de loi vient en quelque sorte témoigner des efforts investis et consacrer toute l'importance de la ressource de type familial et de son intervention unique dans une société qui a à coeur l'épanouissement de ses enfants et de ses jeunes. La Fédération juge difficile, voire impossible, de concilier un statut de salarié avec les activités et les services rendus. La Fédération est d'accord avec le projet de loi, car il contribue au respect de l'esprit des familles d'accueil. Et la ressource de type familial a un statut particulier qui s'apparente davantage à celui des médecins ou des sages-femmes, par exemple.»

Donc, en d'autres termes, la Fédération des familles d'accueil du Québec, qui regroupe 5 000 familles d'accueil de 15 régions administratives du Québec, où 10 000 enfants sont actuellement logés, est en entier accord, M. le Président, avec ce projet de loi. Merci.

Le Président (M. Copeman): Merci, M. le ministre. Est-ce qu'il y a d'autres interventions à ce moment-ci? M. le député de Borduas et vice-président de la commission des affaires sociales, la parole est à vous pour un maximum, vous le savez bien, de 10 minutes.

M. Jean-Pierre Charbonneau

M. Charbonneau: Alors, merci, M. le Président ? mon président. La commission des... La raison pour laquelle mon collègue de Vachon a présenté sa motion, c'est que la Commission des droits de la personne et de la jeunesse ? mais je vais surtout m'intéresser à l'aspect des droits de la personne ? c'est elle qui, à quelque part, a la responsabilité de surveiller l'application de la Charte des droits et libertés de la personne.

Or, dans cette Charte des droits et libertés, il y a un droit fondamental qui est le droit d'association. Et c'est la raison pour laquelle on veut que cette Commission des droits de la personne vienne devant la commission parce que la... notre prétention et la prétention de beaucoup de spécialistes qui ont étudié cette question-là, c'est que finalement la proposition gouvernementale qui, dans les faits, là, est beaucoup ? puis je reviendrai peut-être, dans cette intervention aussi ou plus tard, dépendant du temps que j'utiliserai à ce moment-ci, là, parce qu'on sait que 10 minutes, ça passe vite... Mais c'est une intention du ministère de la Santé et des Services sociaux, donc de l'appareil administratif ou bureaucratique ? et je l'ai dit sans préjugé et d'une façon qui n'est pas négative ? et une réaction que les gens du ministère de la Santé et des Services sociaux ont eu face à des décisions de tribunaux du droit du travail qui pouvaient les amener à penser qu'ils auraient à payer très cher la reconnaissance de droits qui avaient été accordés.

Alors, dans ce contexte-là, là, ce qu'on a en balance... et c'est la raison pour laquelle, même si le projet de loi avait été préparé sous l'ancien gouvernement, jamais il n'avait été discuté à l'Assemblée nationale et que l'Assemblée nationale existe, autrement, ce serait tellement facile. Et je comprends que souvent, des ministres, de quelque côté qu'ils soient d'ailleurs, quand les gens se retrouvent ministres, le Parlement, c'est, disons, comment je pourrais dire, une institution avec laquelle on est obligés de vivre. Mais, si on n'en avait pas, là, puis, si on pouvait passer par-dessus, ce serait donc commode. Ce serait beaucoup plus efficace, beaucoup plus rapide. On a des bonnes idées, on a été élus, on se dit, bon: On a un mandat de gouverner, alors qu'on gouverne et puis qu'ils ne nous empêchent donc pas de gouverner. Finalement, on a un mandat du peuple de gouverner.

Mais le Parlement existe justement parce qu'on a la responsabilité, comme représentants du peuple, de regarder les propositions gouvernementales qui sont souvent les propositions des appareils administratifs, puis on leur demande ça. Il ne s'agit pas de blâmer les fonctionnaires de faire des propositions à leurs ministres respectifs. Puis, souvent, c'est les mêmes propositions d'un ministre à l'autre, quel que soit... même si les partis gouvernementaux changent.

n(20 h 40)n

Autrement dit, malgré l'alternance politique au pouvoir, il y a une permanence politique où c'est l'administration publique. Et, quand des fonctionnaires pensent qu'une conséquence pourrait survenir, alors ils continuent de prétendre... de tenir le même discours, souvent même après un changement de gouvernement. Donc, il ne faut pas que le ministre se surprenne que, tout à coup, aujourd'hui, des députés de notre côté ont la position que nous avons. Et on ne se sent pas particulièrement mal à l'aise parce que le gouvernement précédent... et, comme je l'ai déjà dit, même si j'étais membre du gouvernement puis que ma collègue de Pointe-aux-Trembles également était membre du gouvernement précédent, que le Parlement fasse son rôle, fasse son travail.

J'ai été plus longtemps président de l'Assemblée nationale d'ailleurs que ministre, et ma première fidélité, c'est celle d'être le représentant du peuple. Moi, mon premier mandat, là, je ne le tiens pas de personne d'autre que du peuple puis des gens qui m'ont élu. Et ça, c'est un mandat plus fort qu'un mandat qui peut être donné par un premier ministre quand il te demande finalement, à un moment donné, de siéger au Conseil des ministres. Et, à des moments donnés, c'est un mandat tellement fort que tu peux être appelé à choisir en fonction de ta conscience entre les deux intérêts.

Et, dans ce cas-ci, on a un projet de loi ? puis il y en a un autre semblable ? qui heurte de front le droit d'association. Je reprends ici le texte que M. Bernier a publié dans Le Soleil du 28 octobre dernier. Il dit: «Il est clair que leur objectif ? c'est-à-dire aux deux projets de loi dont on parle, dont celui sur la table actuellement ? est de nier à ces travailleurs le droit à la représentation syndicale et à la négociation collective, tel que défini au Code du travail, une démarche, dit-il, qui va à l'encontre de l'exercice de la liberté syndicale, au mépris de la jurisprudence québécoise et canadienne ainsi que du droit international en la matière.»

Je comprends que nous avons choisi de faire obstruction à l'adoption de ce projet de loi, et que, dans ce contexte, nous présentons des motions, mais ces motions-là ne sont pas farfelues. Ces motions ne sont pas farfelues, parce que la motion du député de Vachon concerne exactement la problématique qui nous confronte.

On a un projet de loi qui... Non, il n'y a pas de question de règlement, là.

M. Bouchard (Vachon): Non, non, non. Tu veux dire s'opposer au projet de loi, plutôt que faire obstruction.

M. Williams: ...

Le Président (M. Copeman): Vous avez la parole. Vous avez la parole. On vous écoute.

M. Charbonneau: Oh!

M. Bouchard (Vachon): Plutôt que de faire obstruction, on s'oppose.

M. Charbonneau: On s'oppose au projet de loi et on fait obstruction à son adoption rapide, comme vous voulez...

M. Williams: ...en anglais...

M. Charbonneau: Oui, je l'ai... Oui, oui, c'est ça. C'est exactement ce que nous faisons, puis c'est...

Des voix: ...

M. Charbonneau: Et le filibuster, pour les députés qui semblent sortir des nues, qui l'ont utilisé abondamment... Je me rappelle du député de Nelligan qui était un spécialiste des filibusters, M. le Président; vous d'ailleurs également.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Charbonneau: Les autres collègues de votre côté, à la table ce soir, non, parce qu'ils sont des nouveaux. Ils n'ont jamais vécu cette expérience. Mais c'est un peu ironique de voir mon collègue de Nelligan se scandaliser qu'on utilise l'instrument parlementaire.

Des voix: ...

M. Charbonneau: Et, moi, j'appelle un chat par un chat, M. le député de Nelligan. Un chat, c'est un chat; un filibuster, c'est un filibuster, et un filibuster, c'est un instrument parlementaire au...

M. Williams: ...vous êtes en train de faire!

M. Charbonneau: Exactement, nous faisons un filibuster. Et nous faisons un filibuster...

Des voix: Bon!

Le Président (M. Copeman): Chers collègues, je...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Charbonneau: J'espère que ce n'est pas pris sur mon temps de parole, M. le Président.

Le Président (M. Copeman): Non, non, les...

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Copeman): Chers collègues... À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Charbonneau: Non, mais...

M. Bouchard (Vachon): Moi, je ne sais pas ce que c'est, un filibuster.

M. Charbonneau: Non, mais, c'est parce que... Écoutez...

M. Dion: Ce n'est pas un arrêt. Ce n'est pas un arrêt.

Le Président (M. Copeman): À l'ordre, s'il vous plaît! Chers collègues... M. le député, un instant! Bon.

Une voix: ...

M. Charbonneau: Notre collègue qui présente la motion est un nouveau député.

Le Président (M. Copeman): M. le député, s'il vous plaît! M. le député de Borduas, s'il vous plaît! On va revenir au calme, nous allons revenir au calme. Je sais qu'on écoute très attentivement le député de Borduas, avec raison d'ailleurs, mais il n'y a qu'un député qui a la parole à ce moment-ci, et c'est le député de Borduas. Alors, allez-y.

M. Charbonneau: Merci, M. le Président, de faire respecter mon droit fondamental de parole dans cette enceinte parlementaire.

Donc, je disais que, en réplique à mon collègue qui n'avait pas le droit de parole... Mais je prends, d'une façon bienveillante, mon temps de parole sur le fond pour lui répliquer sur la forme, et la forme, c'est qu'effectivement nous faisons un filibuster.

La dernière fois que je suis venu en commission, on était au début du processus d'étude en cette commission. Et j'avais, là aussi, dit clairement que nous faisons cela. Pourquoi? Parce que nous nous objectons. Nous avons voté contre au niveau du principe, et nous nous objectons, et nous nous objectons parce qu'on n'a aucuns signaux, de l'autre côté, que la discussion se fait dans une dynamique constructive, c'est-à-dire que dans...

Il y a deux façons de faire l'étude de projets de loi: on convient que la vérité n'est pas d'un côté ou pas de l'autre et puis on essaie de trouver finalement le meilleur accommodement au niveau de l'intérêt public ou on se rend compte qu'il n'y a pas possibilité de se parler et qu'on n'arrive pas à établir des ponts de communication puis des ponts de dialogue pour établir... pour mettre en place une législation qui convienne non pas pour nos intérêts partisans, non pas même, à la limite, pour les intérêts gouvernementaux, mais pour les intérêts des citoyens puis des citoyennes.

En l'occurrence, là, on parle de quoi, là? On parle du droit d'association. Il y a un des droits les plus fondamentaux à la liberté... régis par la Charte des droits et libertés, et on nous refuse la possibilité... et on nous refuse la possibilité de faire entendre l'organisme paragouvernemental, parapublic qui a la responsabilité de veiller à la protection des droits fondamentaux qui sont établis dans la Charte des droits et libertés. Alors, dans ce contexte-là, vous comprendrez, M. le Président, que c'est très choquant pour nous. Et c'est évidemment un message qu'on nous envoie de continuer notre approche qui est celle que nous utilisons actuellement, parce qu'il n'y a pas de volonté de prendre en considération les propos...

Après tout, je me rappelle très bien l'attitude... en fait, les filibusters que mon collègue de Nelligan a menés avec brio. Je pense que je pourrais ressortir ce soir des discours enflammés, passionnés qu'il a faits pour justifier son comportement à l'époque. Et je suis convaincu ? en tout cas, je lui prête cette bonne foi là ? que, au-delà du fait qu'il avait choisi cette stratégie parlementaire, légitime dans notre système parlementaire britannique ? que je déteste d'ailleurs profondément et je l'ai souvent dit ? mais, comme on est dans ce système-là, on fonctionne avec et, dans ce contexte-là, je présume que notre collègue de Nelligan, quand il présentait des motions comme celle que mon collègue de Vachon a présentée, qu'il le faisait en tenant compte qu'il y avait un bien-fondé à la motion.

Et ce que j'ai essayé de vous démontrer, c'est que, à partir du moment où on invite la Commission des droits de la personne parce qu'on s'attaque à un problème de droit fondamental, je pense que c'était justifié. Et on va, j'espère, de l'autre côté, prendre acte du bien-fondé de l'argumentation que je viens de présenter.

Le Président (M. Copeman): Merci, M. le député. Est-ce qu'il y a d'autres interventions à ce moment-ci? M. le député de Vimont.

M. Vincent Auclair

M. Auclair: Oui. Merci, M. le Président. Moi, dans le fond, je suis heureux d'avoir entendu le député de Borduas, aujourd'hui, qui s'objecte directement au projet de loi n° 7. Parce que la seule question que je me pose, M. le Président, c'est: qu'est-ce qu'il en était lorsque le projet de loi n° 151 a été déposé? Aujourd'hui, on soulève beaucoup le volet... le respect des droits des travailleurs, et tout ça, mais, lorsque ça a été déposé, jamais on ne l'a entendu parler, se soulever contre le projet de loi n° 151 qui a été déposé ? quand même pas si longtemps que ça ? en décembre 2002. Donc... Il a été présenté, il a été quand même débattu, même...

Des voix: ...Conseil des ministres...

Une voix: ...le Parlement, c'est le gouvernement.

M. Auclair: ...Conseil des ministres. Mais on... Même... Mais, de toute façon, à ce moment-là...

Le Président (M. Copeman): Chers collègues, chers collègues, je vais vous arrêter, M. le député de Vimont...

M. Charbonneau: J'ai été influencé, M. le Président, par l'attitude de mon collègue de Nelligan.

Le Président (M. Copeman): Oui. Je vais faire une observation. La salle dont on occupe présentement, 1... qu'on occupe ? pardon, merci ? présentement prête à des échanges entre parlementaires parce qu'on est à proximité, c'est une grande table, et ainsi de suite.

Des échanges entre parlementaires, c'est tout à fait pertinent et même approprié et même encouragé. Mais il faut que les parlementaires soient reconnus par la présidence avant d'effectuer ces échanges-là. Et je comprends qu'on veut de tous les côtés réagir à des propos. C'est tout à fait normal. Nous avons un mécanisme: si un parlementaire désire réagir, il a juste à signaler à la présidence qu'il veut parler, je vais accorder les temps de parole qui sont prévus dans le règlement.

Mais je vous supplie, chers collègues, je vous implore ? j'implore? ? j'implore... je vous implore de suivre le règlement, de collaborer avec moi pour qu'on puisse passer le temps selon l'ordre de la Chambre dans une atmosphère agréable et respectueux l'un de l'autre.

Alors, M. le député de Vimont, je m'excuse de cette interruption de ma part, mais je tenais à faire le point. La parole est à vous.

n(20 h 50)n

M. Auclair: Merci beaucoup, M. le Président. Donc, c'est juste pour revenir, dans le fond, au député de Borduas qui, au niveau du dépôt... parce que ça été quand même débattu lors de leur Conseil des ministres, et jamais il ne s'est amené en Chambre en 2002... Malheureusement, bon, on sait que la période n'a pas permis à débattre peut-être plus loin, mais, toutefois, il a quand même été présenté comme projet de loi, et, de là, lorsque les conseils de ministres amènent un projet de loi, généralement, si ça arrive pour être débattu en Chambre, c'est très rare qu'il peut y avoir des amendements, des modifications. Ça, c'est très certain, c'est sûr. On ose espérer qu'il va y avoir des amendements dans certains cas ? mais, en tout cas, je parle de votre côté, parce que la députée de Pointe-aux-Trembles semble avoir une démocratie différente de la nôtre ? et donc plus ouverts, semble-t-il, parce que, lorsque c'est passé au bureau du ministre, des ministres, au Conseil des ministres, c'est censé être débattu quand même, parce que les députés ont leur mot à dire, en tout respect, hein? C'est la réalité, tout ça.

Donc... et c'est de là qu'il serait intéressant justement de pouvoir arrêter le filibuster à l'égard des mises en situation, et parlons du projet de loi. Si on veut amener de la plus-value au projet de loi, donc pourquoi ne pas commencer à en discuter au lieu de toujours tourner en rond? Donc, c'était là le commentaire.

Ou, peut-être, j'aimerais citer un ancien président de l'Assemblée nationale, quelqu'un quand même qui a de l'expérience, qui disait: «On ne s'excusera pas d'être nécessairement pas d'accord avec un projet de loi qui avait été déposé ? d'ailleurs ? jamais adopté, jamais vraiment discuté au Conseil des ministres et jamais discuté au niveau des caucus surtout, surtout jamais vraiment discuté. Discuté, mais pas discuté à fond comme on aurait dû le faire. Et c'est la raison pour laquelle aujourd'hui on se sent très à l'aise de faire ce qu'on fait.»

Donc, savoir qu'est-ce qu'on fait exactement aujourd'hui, c'est là la question. Mais, au moins, le député de Borduas a eu le respect de la présente commission en reconnaissant que c'était un filibuster et que, dans le fond, on n'arriverait pas plus à fond, on ne mènerait pas plus à fond les discussions.

Le Président (M. Copeman): Alors, merci, M. le député de Vimont. Est-ce qu'il y a d'autres interventions à ce moment-ci? Bon. Il n'y en a pas.

Alors, je mets aux voix la motion du député de Vachon. Est-ce... Oui?

Une voix: Vote nominal.

M. Bouchard (Vachon): Oui. J'aimerais avoir un vote nominal.

Le Président (M. Copeman): Oui? Alors, une demande de vote par appel nominal. Mme la secrétaire, la parole est à vous.

La Secrétaire: M. Bouchard (Vachon)?

M. Bouchard (Vachon): Pour.

La Secrétaire: Mme Léger (Pointe-aux-Trembles)?

Mme Léger: Pour.

La Secrétaire: M. Dion (Saint-Hyacinthe)?

M. Dion: Pour.

La Secrétaire: M. Charbonneau (Borduas)?

M. Charbonneau: Évidemment pour, Mme la secrétaire.

La Secrétaire: Madame... pardon. M. Couillard...

M. Couillard: Contre.

La Secrétaire: ...(Mont-Royal)?

M. Couillard: Ah oui, contre!

La Secrétaire: Après ça, M. Williams (Nelligan)?

M. Williams: Contre.

La Secrétaire: Mme Charlebois (Soulanges)?

Mme Charlebois: Contre.

La Secrétaire: M. Dubuc (La Prairie)?

M. Dubuc: Contre.

La Secrétaire: M. Auclair (Vimont)?

M. Auclair: Contre.

La Secrétaire: M. Bernard (Rouyn-Noranda? Témiscamingue)?

M. Bernard: Contre.

La Secrétaire: M. le Président?

Le Président (M. Copeman): Contre. Alors, la motion est rejetée, malheureusement. M. le député de Borduas, oui?

M. Charbonneau: M. le Président, je voudrais présenter, à mon tour, une motion.

Le Président (M. Copeman): Très bien.

M. Charbonneau: Toujours dans l'esprit de faire en sorte que le gouvernement reconnaisse le bien-fondé de l'attitude de l'opposition et des motions qu'elle présente et de l'importance de faire les choses d'une façon différente.

Le Président (M. Copeman): Oui. Bien, M. le député, vous êtes un parlementaire avec beaucoup d'expérience. Vous savez qu'il ne faut pas commencer à plaider votre motion avant qu'elle ne soit déposée.

M. Charbonneau: C'est pour ça que je vais vous faire la lecture immédiatement.

Le Président (M. Copeman): Très bien.

Motion proposant d'entendre
la Protectrice du citoyen

M. Charbonneau: Alors: «Il est proposé qu'en vertu de l'article 244 de nos règles de procédure, la Commission des affaires sociales tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 7, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux, des consultations particulières quant à tous les articles dudit projet de loi, et qu'à cette fin elle entende ? bien sûr la commission ? la Protectrice du citoyen.»

Le Président (M. Copeman): Merci. De toute évidence, la motion est recevable. Et, comme auteur de la motion, M. le député de Borduas, vous avez un 30 maximum ou une durée maximale...

M. Couillard: ...je voudrais préciser, parce que Mme la députée avait raison tantôt. «Maximum», c'est un nom; «maximal», l'adjectif. Donc, c'est... un maximal ou temps maximal ou d'une durée maximale, mais un maximum ou...

Le Président (M. Copeman): Mais je regrette. Tout ce que vous avez réussi à faire, M. le ministre, c'est de me mêler. Alors, d'un temps maximum?

M. Couillard: Non, maximal.

M. Dion: Un temps d'une durée maximale.

Le Président (M. Copeman): Bon. En tout cas, M. le député, vous avez 30 minutes. Alors, la parole est à vous.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Charbonneau: Ah! D'accord, M. le Président, on va essayer de...

Une voix: ...on pourrait...

Le Président (M. Copeman): Malheureusement... De consentement, ça se fait.

Des voix: Ah oui! Ah oui!

Le Président (M. Copeman): Mais je vais appliquer le règlement jusqu'à l'épuisement du 30 minutes. Si le député désire à ce moment-là demander du temps supplémentaire, je vais demander le consentement, puis on verra. Alors, M. le député de Borduas, la parole est à vous.

M. Jean-Pierre Charbonneau

M. Charbonneau: Bien. Alors, M. le Président, mes chers collègues, et, dans ton cas évidemment, cher ami, puisque nous avons siégé longtemps ensemble et même que nous nous connaissions avant que le député de Nelligan fasse son entrée dans cette illustre Assemblée... Malheureusement, il n'a pas compris un certain nombre de choses que je voulais lui enseigner à l'époque, et, bon, qu'est-ce que vous voulez.

Ceci étant, revenons à l'objet de la motion: pourquoi entendre la Protectrice du citoyen d'abord. Alors, la Protectrice du citoyen, voilà une autre institution importante de notre système parlementaire, de notre système démocratique ? système qui, comme je le disais, est loin d'être parfait. Mais l'instance du Protecteur du citoyen, c'est une instance qui, là aussi, vise à faire en sorte que les citoyens qui sont protégés par des droits et libertés et qui ont des droits et des privilèges puissent s'assurer que leurs droits soient respectés.

Protecteur du citoyen. Le terme de l'institution le dit: d'entrée de jeu, c'est une mission de protection. Quand les députés, donc les législateurs, s'apprêtent à légiférer et qu'à l'évidence l'objet de leurs délibérations, de la législation qu'ils étudient met en cause des droits, il est important que, à ce moment-là, le Parlement, les députés fassent le nécessaire pour que les institutions qu'ils ont eux-mêmes créées pour s'assurer et assurer surtout aux citoyens la protection de leurs droits, c'est important qu'ils aient recours aux conseils, aux avis, aux opinions de ces instances-là.

Tantôt, c'était le cas de la Commission des droits de la personne et protection de la jeunesse... ou des droits de la jeunesse, et ça procède de la même logique, cette motion-ci. C'est-à-dire que nous avons une institution que nous avons créée, et le problème dans notre façon de légiférer ? et ça a été souvent le cas et c'était vrai sous tous les gouvernements ? au Québec, on légifère trop vite. On légifère trop vite, et... on légifère trop vite parce qu'on oublie que le Parlement a une responsabilité.

C'est comme si, une fois que les élections sont passées, la seule chose qui compte finalement, c'est le gouvernement, sa volonté, sa volonté d'agir, sa volonté de changer des choses, sa volonté de donner suite à ses engagements, sa volonté d'aller de l'avant. Et, en général ? puis c'est légitime ? les gouvernements veulent être jugés positivement, veulent donc que les gens concluent que leur action est efficace. Et on est dans une période, dans une ère où la notion d'efficacité se conjugue par la rapidité. Alors, on a l'impression qu'on va être très efficaces, et donc qu'on va bien faire les choses, et donc qu'on va apporter une plus-value à l'intérêt public puis au bien-être de la collectivité si on légifère rapidement.

n(21 heures)n

Et, quand on légifère rapidement ? et le problème, c'est que tous les partis qui ont eu la responsabilité de gouverner ont tombé dans le même piège ? à chaque fois, on veut aller trop vite, et, à chaque fois, on est résistants, sinon réticents, sinon opposés à l'audition d'organismes, d'individus et de groupes qui ont des points de vue à exprimer sur les débats qui sont en cause et qui ont des responsabilités aussi, qui ont des responsabilités en fonction de leur mandat.

Les citoyens peuvent être intéressés à venir devant une commission parlementaire, à être entendus, les organismes concernés aussi, et d'autant plus, les organismes concernés, que le Parlement a pris la peine d'instituer et de créer de toutes pièces, par son pouvoir législatif, des organismes à qui il a confié un mandat complémentaire au sien, en fait, un mandat, quelque part, conseil.

Le Protecteur du citoyen, ce n'est pas pour rien qu'il dépose son rapport à l'Assemblée nationale, c'est parce que sa responsabilité, c'est d'éclairer les députés, les législateurs sur les situations et en même temps d'éclairer les législateurs sur les actions qu'ils s'apprêtent à poser pour s'assurer que ces actions-là sont dans l'intérêt public, respectent les balises des droits d'une société de droit, celle que nous nous sommes donnée, des droits que nous nous sommes donnés au fil du temps, et il s'assure que les prises en considération des questions fondamentales sont bientôt faites.

Si on n'avait pas voulu faire ça... Parce que, au-delà du fait que les gouvernements ont de la réticence à agir de cette façon-là, il n'en demeure pas moins que, à certaines périodes ? et pas uniquement des volontés gouvernementales; à ce moment-là, c'étaient des volontés unanimes du Parlement ? ils ont créé, on a créé des institutions qui ont une responsabilité de soutenir, de complémenter l'action du Parlement, l'action législative et la définition des règles du jeu dans notre société.

Et là ? je le disais tantôt puis je vais reprendre un peu ? on est devant un projet de loi qui, d'un côté, concerne les droits des citoyens, les droits des travailleurs, les droits des individus et une crainte légitime mais pas démontrée quant à un coût exorbitant qui serait la conséquence du respect de ces droits, de ces droits des travailleurs et des travailleuses. On le sait très bien... Je l'avais cité déjà. Certains des collègues qui sont ici ce soir, pour des raisons très correctes, n'étaient pas là à ce moment-là. On ne peut pas tous être à toutes les séances de la commission. On appartient à d'autres commissions. Il y a d'autres débats à l'Assemblée aussi. Mais j'avais à ce moment-là cité l'état de situation, une note qui avait été préparée par les fonctionnaires du ministère. C'est en date du 25 septembre 2002, puis on voit très bien la séquence. Cette note-là a eu de l'influence parce que, par la suite, le précédent gouvernement avait préparé dans son appareil administratif un projet de loi, puis, bon, on l'avait même annoncé au feuilleton, sauf que ce n'était pas venu en débat devant le Parlement. Et on voit...

Je vais vous lire un peu la note, parce que, finalement, c'est ça, le coeur du litige qui nous amène ici, c'est ça, le coeur du débat, et c'est deux conceptions d'une situation qui actuellement se débattent, une conception qui tourne autour de droits et une conception qui tourne autour d'une crainte du gouvernement puis de l'appareil gouvernemental, au-delà même du gouvernement au plan de l'instance politique, une crainte de l'appareil gouvernemental de voir arriver une facture exorbitante.

Alors, qu'est-ce qu'elle disait, la note? Elle disait la problématique. «Deux décisions récentes du Tribunal du travail et du Bureau du Commissaire général du travail accordent une accréditation syndicale aux responsables des ressources intermédiaires et des ressources de type familial en les liant aux conventions collectives du réseau.» Ça, c'est important. Donc: «...en les liant aux conventions collectives du réseau.» Et on sait très bien de quel réseau on parle et de quelles conventions collectives on parle, on parle du réseau de la Santé et des Services sociaux et des conventions collectives qui, ma foi, même si actuellement elles sont en renégociation ou vont l'être bientôt entre le gouvernement et les syndicats concernés, des conventions collectives qui ne traitent pas si mal les employés de l'État et qui coûtent effectivement des sommes importantes à la société, donc aux citoyens et aux citoyennes à travers leur taxation.

Et la problématique. On ajoutait: «Ces décisions ont pour effet d'obliger les établissements à appliquer pour ces ressources d'hébergement les conventions collectives en vigueur dans le réseau de la santé et des services sociaux.» Alors, ça, c'est la problématique.

On dit: le Tribunal du travail puis le Bureau du Commissaire général du travail ont accordé des décisions et donc confirmé ou consacré des droits. Et, si ces droits-là sont respectés, bien, ça va faire en sorte que les ressources d'hébergement qui ne sont pas régies par les mêmes types de relations de travail, les mêmes conventions collectives vont dorénavant l'être et qu'à toutes fins pratiques ces gens-là vont devenir des fonctionnaires de l'appareil d'État et être rémunérés et être traités avec les mêmes standards que les autres.

Et on dit un petit peu plus loin, bon, les impacts: «Par rapport aux orientations ministérielles, l'assujettissement de ces deux types de ressources à la notion de salarié menace le maintien et le développement de ce type de ressources visant l'intégration de la personne dans une organisation se rapprochant d'un milieu de vie naturel. On s'éloigne de la notion de services offerts dans un milieu naturel au profit de la notion de salarié.» Comme si les salariés ne donnaient pas de services. Autrement dit, les salariés... Il y a une notion de salarié puis une notion de services offerts en milieu naturel. En fait, ce qu'on aurait dû dire, c'est qu'il y a des services offerts par des salariés de l'appareil d'État, puis tu as des services offerts par des salariés qui ne sont pas régis par les mêmes conventions collectives. Mais, dans un cas comme dans l'autre, il n'y a rien qui empêche d'offrir des services dans un contexte d'un milieu naturel, parce que c'est de ça dont on parle, et ça n'a pas de rapport. Je veux dire, déjà, l'interprétation des fonctionnaires du ministère de la Santé et des Services sociaux était erronée et, à mon avis, une mauvaise interprétation, mais on en a déduit des conséquences ou des conclusions qui elles aussi peuvent être questionnables.

On disait sur les... L'impact par rapport aux orientations ministérielles, par rapport aux décisions interministérielles: «Ces jugements présentent une incohérence face à la décision récente du ministère des Finances, avril 2001, Revenus non imposables des ressources d'hébergement se rapprochant des milieux de vie familiale.» Alors là on voit, dans le fond, un problème, c'est-à-dire: il y a une question de droit puis il y a une vision administrative d'un ministère des Finances. Alors, on se dit: Le ministère des Finances a une certaine conception des choses reliées à la problématique budgétaire d'État, c'est sa responsabilité, et ça heurte des droits. Les tribunaux ont accordé des droits, mais les droits doivent être mis de côté et être assujettis à une question budgétaire qui est invoquée par le ministère des Finances. Comme si, dans une société démocratique, les droits devaient être subordonnés à des intérêts pécuniaires. Je comprends qu'on ne dispose pas de ressources illimitées puis qu'il faut en tenir compte, mais, encore là, il y a une espèce de dichotomie qui est un peu curieuse.

Sur les ressources intermédiaires de type familial, on disait: «Il y a un risque important sur l'ensemble de ce réseau en raison de l'imposition des revenus découlant du fait qu'ils recevront une rémunération plutôt qu'une rétribution, risque...» C'est quoi, la différence? C'est comme si finalement on donnait l'impression que, dans les ressources intermédiaires, on n'était pas rémunéré, mais on était rétribué. Dans le fond, les gens reçoivent un salaire pour ce qu'ils font. Et la vraie question, encore là, c'était de savoir: est-ce qu'ils reçoivent un salaire correct? Et, s'ils font un type de travail qui correspond à ce qui se fait ailleurs, est-ce qu'ils n'auraient pas le droit, eux aussi, d'avoir le niveau de salaire que d'autres ont même si les autres, eux, sont syndiqués dans l'appareil d'État?

Et sur la clientèle, on disait ? ça aussi, c'est une analyse d'impact: «L'augmentation importante des coûts n'apporte aucun service supplémentaire aux usagers, ne contribue pas à développer des réponses adaptées à leurs besoins.» On ne parle pas des droits, là, on dit: Les usagers. C'est comme si on mettait en opposition les usagers et les droits des travailleurs. On dit: «Sur les établissements, des changements majeurs sont à prévoir, notamment en regard de l'encadrement des ressources de même qu'en ce qui concerne des coûts d'opération des ressources qui seront assujettis aux conditions de travail. Il y a aussi risque d'engorgement d'occupation des lits de courte et de longue durée dans l'éventualité d'un désistement des ressources. De plus, l'obligation de transformer plusieurs ressources en unités d'hébergement de l'établissement, foyers de groupes dans certains cas...» Ça, je n'ai pas trop compris, parce que finalement la démonstration n'a pas été faite dans le document puis la note. Et, encore une fois, on part du prérequis que les mêmes conventions collectives auraient été appliquées et elles auraient été appliquées parce qu'elles auraient été demandées.

n(21 h 10)n

Est-ce que j'ai besoin de vous rappeler qu'on a tenu des audiences publiques en cette commission, qu'on a entendu notamment le milieu syndical, qui sont venus clairement... les centrales syndicales qui sont dans le secteur public, donc dans le réseau, et donc qui sont concernées par les conventions collectives du réseau dont parle la note, l'état de situation du ministère de la Santé et des Services sociaux? Donc, les centrales sont venues nous dire: Écoutez, on est bien conscients que la façon de fonctionner dans ces ressources intermédiaires, qui ne sont pas des ressources propriété de l'État mais sont des ressources intermédiaires qui ont une entente de service, à la limite, qui sont presque sous-traitants de l'État, on est bien conscients qu'on ne pourra pas appliquer les mêmes conventions collectives. Et là, dans le fond, ce qu'on a vu, c'est que, là, il y a un problème de confiance. C'est comme si la parole des centrales syndicales n'est pas crue.

Autrement dit, on a devant nous un gouvernement qui, dès que les centrales syndicales importantes viennent devant les parlementaires expliquer des points de vue ou même prendre des engagements formels ou prendre des engagements importants en regard de la suite des choses... ils sont suspectés. Ils sont suspectés de ne pas dire la vérité. Ils sont suspectés, dans le fond, d'exagérer. Ils sont suspectés de ne pas donner l'heure juste. Et, dès le départ, leurs propos sont mis de côté, leur crédibilité est entachée et... On ne peut pas fonctionner dans une société comme ça. On ne peut pas organiser le bien commun dans une société autour de ces questions-là de relations de travail, de liberté d'association, de reconnaissance des droits des travailleurs et travailleuses, de fonctionnement si, dès le départ, le gouvernement qui dirige l'État a une attitude et une considération très faibles, sinon méprisantes, à l'égard de ces forces syndicales là et de ces associations légitimes de citoyens et de travailleurs qui s'organisent et qui se sont organisés, avec le temps, pour justement défendre leurs droits.

Quand la CSN vient ici puis ils nous disent qu'ils n'ont pas l'intention, qu'ils n'ont jamais eu l'intention de faire en sorte que les mêmes conventions collectives s'appliquent, ça voulait dire... Tu sais, ils l'ont dit publiquement, là. Ils l'ont dit publiquement. Et c'était une prise de position publique; ce n'est pas une discussion entre le président de la CSN ou le vice-président de la CSN puis le ministre de la Santé. Puis, comme le ministre de la Santé n'est pas très porté sur le milieu syndical, il n'a pas le goût, dans le fond, de donner crédit à son interlocuteur puis a des doutes raisonnables. Alors, il dit: Écoute, tu peux bien me dire ce que tu voudras, je ne te crois pas.

Le problème, c'est que, là, je veux dire, les propos ont été tenus publiquement. Et j'en arrive à l'importance de ces propos tenus publiquement parce que les derniers éléments de l'analyse d'impact de la note de service qui avait été préparée pour le prédécesseur du ministre actuel qui est devant nous ce soir et que, sans doute, le ministre qui est devant nous a lue, on disait: «Une augmentation importante des coûts est à prévoir, minimum ? en caractères gras, là, tu sais, en caractères gras, là, ce n'est pas moi qui l'ai... c'est la note du ministère qui soulignait ça en caractères gras ? minimum de 850 millions de dollars additionnels par année, résultant de l'application des normes minimales du travail en vigueur, sans ajout de services à la clientèle ni amélioration des services offerts aux usagers.»

Donc, tout le problème, tout le problème tournait autour de ce chiffre-là qu'on a souligné puis qu'on a inscrit en caractères gras. On dit: M. le ministre, on vous le dit, là, si vous respectez les décisions des tribunaux, si vous respectez les décisions récentes du Tribunal du travail et du Bureau du Commissaire général du travail, ça va vous coûter la rondelette somme, dans votre budget, de 850 millions de plus par année, parce qu'on vous dit... Et pourquoi on fait ce calcul-là? Parce que, là, on a dit: Vous voyez, ils vont prendre les mêmes conventions collectives que dans le réseau public puis ils vont les appliquer au niveau des ressources intermédiaires, puis voilà ce que ça va nous coûter. C'est comme ça qu'ils ont fait leur calcul. Leur calcul, c'est: On va accorder le même type de conventions collectives qui sont celles qui lient actuellement les fonctionnaires ou, en fait, les employés du réseau public, on va les accorder aux employés puis aux personnes qui sont concernées dans les ressources intermédiaires dont on parle et puis, finalement, la facture va être celle-là. Mais, la réalité, c'est que les gens sont venus nous dire que, non, ce n'était pas le cas. Ce n'est pas ce qu'ils demandaient. Ce n'est pas ce qu'ils demandaient, ce n'est pas ce qu'ils demanderaient. Et, en conséquence, l'évaluation puis le pronostic catastrophiques, apocalyptiques du ministère de la Santé ne tenaient pas.

Mais, comme on ne croit pas le milieu syndical, comme on ne croit pas la CSN, comme on ne croit pas les représentants des centrales syndicales en général depuis le 14 avril, bien, on a finalement une attitude... Vous allez dire: Oui, mais, vous autres aussi, vous étiez sceptiques à l'époque; vous n'étiez pas sûrs. Effectivement, il y en a qui étaient sceptiques. Et c'est pour ça qu'on s'était laissé convaincre par les fonctionnaires que ça pourrait être catastrophique. Et c'est la raison pour laquelle, aujourd'hui, parce qu'on a le temps de regarder ça, parce que ni vous autres ni nous autres, personne, ni du côté libéral, ni du côté du Parti québécois, ni du côté de l'Action démocratique, ni lors de la dernière législature ou de la législature actuelle, personne n'avait vraiment regardé ça au niveau du Parlement, c'est là qu'on le fait, là, maintenant. Le travail se fait maintenant. C'est notre responsabilité parlementaire de le faire, et nous le faisons.

Et, dans ce contexte-là, ce que l'on dit au gouvernement, ce qu'on dit au ministre de la Santé: Écoutez, pourquoi avoir pris cette approche-là? Pourquoi ne pas avoir pris une approche de concertation? Pourquoi ne pas avoir pris une approche d'établir une relation cordiale, correcte, de partenariat avec les centrales syndicales concernées? Vous avez peur qu'elles vous arrivent avec des demandes exagérées. Pourquoi, au départ, n'a-t-on pas pris la précaution d'entamer un dialogue avec le monde syndical puis de vérifier si effectivement les craintes qui étaient présentées par les fonctionnaires du ministère étaient fondées? Peut-être que la conséquence de ce dialogue-là et la découverte de ce dialogue-là, ça aurait été de se rendre compte que ce n'était pas l'intention des centrales syndicales et qu'on pouvait finalement arriver à respecter les décisions du Tribunal du travail puis du Bureau du Commissaire général du travail en ayant une facture, en bout de piste, qui serait acceptable pour l'État, pour la société, et qui ne nous amènerait pas à devoir faire un geste très odieux, dans un contexte d'une démocratie, dans un contexte d'une société de droit, dans un contexte où la société de droit s'est donné des instruments dont je parlais tantôt, mais aussi des instruments qui sont des instruments d'arbitrage et de définition de certaines règles.

C'est ça, la responsabilité du Tribunal du travail. C'est ça, la responsabilité du Bureau du Commissaire général du travail. Leur responsabilité, c'est de se pencher sur certaines de ces questions-là. Pourquoi c'est un tribunal plutôt que le gouvernement qui tranche ces questions-là? Parce qu'on a considéré que, dans une société de droit, tout ne devait pas être décidé par le gouvernement, tout ne devait pas être décidé par les ministres, tout, à la limite, ne devait même pas être décidé par les parlementaires. Certaines questions devaient être décidées par des forums différents. C'est d'ailleurs la base de notre système de démocratie.

Il y a trois pouvoirs au niveau de l'État: il y a le pouvoir gouvernemental... le premier pouvoir étant le pouvoir législatif, le pouvoir du Parlement, le pouvoir du gouvernement, puis le troisième, c'est le pouvoir judiciaire. Et le pouvoir judiciaire, ça comprend justement des tribunaux administratifs, ça comprend le Tribunal du travail, ça comprend le Bureau du Commissaire général du travail. Ça comprend donc des instances qui sont reliées au fondement de l'État démocratique que nous avons.

Et, dans ce contexte-là, de ne pas tenir compte des décisions des tribunaux, de faire comme si ces décisions-là pouvaient être mises de côté pour des intérêts pécuniaires, mais, en plus, parce qu'on a peur d'avoir peur, là, on se retrouve à agir d'une façon dangereuse, dangereuse pour les gens qui sont concernés mais dangereuse pour l'avenir. Parce que quel type de fonctionnement va-t-on adopter dans l'avenir? Est-ce que, dans notre démocratie, à chaque fois qu'une décision du tribunal ne sera pas satisfaisante, le gouvernement va utiliser sa majorité parlementaire et sa situation de force dans notre système politique pour changer les règles du jeu à sa façon? Encore que, s'il était fondé dans ses craintes et ses préoccupations...

C'est ça, le coeur de l'affaire. Parce qu'on pense que ça va coûter 850 millions de plus par année, parce qu'on pense que les conventions collectives qui sont dans le réseau vont s'appliquer aux ressources intermédiaires, on en arrive à la conclusion que la facture va être trop grosse, qu'on est déjà poignés. Alors, on met ça de côté puis, finalement, au yâbe! les droits, au yâbe! les tribunaux, au yâbe! dans le fond, la structure de droit qu'on s'est donnée, au yâbe! le fonctionnement même de l'État québécois et de la présence du pouvoir judiciaire dans notre société, puis faisons comme si finalement on est dans une espèce de système monarchique électif, là, tu sais. Le monarque a décidé, et finalement tout le monde doit se brancher, tu sais. Le monarque a décidé, puis c'est ça.

Et, en plus, ça, je l'ai dit, j'étais président de l'Assemblée nationale, je l'ai dit comme ministre de la Réforme des institutions démocratiques: on est dans un système parlementaire de type britannique qui consacre ça. On est dans un système où le pouvoir maximum est entre les mains du premier ministre puis du Conseil des ministres. Puis, dans le Conseil des ministres, n'en déplaise au nouveau collègue député, il y en a quelques-uns qui pèsent plus lourd que d'autres. Et je suis convaincu que, dans le Conseil des ministres actuel ? ça fait plaisir au ministre, c'est bon pour son ego, mais, je veux dire, c'est aussi dans l'ordre des choses ? il est un de ces poids lourds du gouvernement actuel qui est dans la cour immédiate du monarque actuel. Alors, c'est ça, la situation.

Et j'ajouterais une autre chose, M. le Président, sur laquelle probablement, ici... J'ai combien de temps encore, M. le Président?

n(21 h 20)n

Une voix: ...

M. Charbonneau: Combien?

Le Président (M. Copeman): Pardon?

M. Charbonneau: Il me reste combien de temps encore?

Le Président (M. Copeman): Quatre minutes, M. le député.

M. Charbonneau: Quatre minutes. Bien, écoutez, moi...

M. Couillard: Avec le consentement, on serait prêts à poursuivre l'envolée oratoire.

M. Charbonneau: Je n'ai pas de problème, avec consentement, je peux développer jusqu'à demain.

Une voix: Cinq minutes.

M. Charbonneau: Cinq minutes?

Une voix: Ah oui!

M. Charbonneau: Bon. Je vais essayer donc de résumer ça dans les neuf minutes qu'il me reste, M. le Président.

M. Bouchard (Vachon): Le monarque a décidé.

M. Charbonneau: Hein?

M. Bouchard (Vachon): Le monarque a décidé.

M. Charbonneau: Le monarque a décidé, puis on se plie à la décision monarchique.

M. Couillard: Non, c'est despotique.

M. Charbonneau: Alors, parfois, le monarque prend des bonnes décisions. L'histoire nous a enseigné que même les abus monarchiques ont parfois été balancés.

Une voix: Bien oui.

Une voix: Le despotisme éclairé.

Le Président (M. Copeman): Mais, à vrai dire, M. le député... À vrai dire, là, avec votre analogie, vous me faites penser que nous n'avons pas un monarque ici, à la commission des affaires sociales, et je dois demander le consentement de tous les membres de la commission afin de poursuivre, parce que ça prend, comme vous le savez fort bien, M. le député, ça prend le consentement unanime. Alors, est-ce qu'il y a consentement pour que le député de Borduas poursuive au-delà de ses 30 minutes, d'un maximum de cinq minutes, son intervention? Consentement?

Des voix: Consentement.

Le Président (M. Copeman): Consentement. Alors, allez-y, M. le député.

M. Charbonneau: Alors, je... (panne de son) ...mes conseils dans un élan de générosité démocratique, dont je me rappellerai très longtemps, même quand je serai en centre d'accueil, en espérant que ce soit le plus loin possible.

Je voulais ajouter une autre dimension. La peur du gouvernement et du ministère s'inscrit aussi dans une autre dynamique: dans la dynamique d'un gouvernement puis d'un État qui a un gros problème budgétaire sur les bras, et qui a un gros problème budgétaire sur les bras parce qu'il a choisi de ne pas faire le seul combat fondamental qui devrait être le combat de tous actuellement, c'est le combat de la récupération de nos ressources financières qui sont actuellement à Ottawa. Je ne rentrerai même pas dans le débat de l'indépendance politique, je veux juste rentrer dans le débat du déséquilibre fiscal qu'un autre poids lourd du gouvernement actuel connaît bien.

Tout ce dossier du déséquilibre fiscal, pourquoi il est si important? Parce que, actuellement, on aurait les ressources nécessaires pour donner les services aux québécois, avec le niveau de taxation que nous imposons... que les pouvoirs publics au Canada imposent aux Québécois. Donc, quand on dit que les Québécois sont surtaxés, l'ironie, c'est qu'ils génèrent des surplus à l'autre niveau de gouvernement, et ces surplus, qui sont à l'autre niveau de gouvernement, ne sont pas utilisés par le niveau de gouvernement qui a des besoins et qui, selon l'Acte constitutionnel, a la responsabilité de répondre à ces besoins-là.

C'est clair que de reconnaître des droits des travailleurs dans le secteur de la santé, ça implique des coûts. Je pense que les centrales syndicales ont dit que les coûts qui étaient avancés par le ministère de la Santé étaient exagérés, mais il y aurait des coûts. Et, pour payer ces coûts-là, il faut des revenus. Mais les revenus, ils existent. Ils existent; ils sont à Ottawa. Si le ministre de la Santé qui est devant nous ce soir, attentif, je le sais, attentif de sa santé autant que du débat, donc, si le ministre prenait au sérieux ce débat-là, c'est-à-dire le débat politique des ressources financières qu'il a besoin, lui, pour relever les défis et puis assumer les responsabilités qu'on lui a confiées...

On lui a dit avant les élections, on lui dit aujourd'hui: On sait que vous avez un sacré problème. Vos prédécesseurs avaient un sacré problème; vous avez le même problème puis vous avez le même défi. Et le défi, si vous ne le prenez pas au sérieux, vous et vos collègues du Conseil des ministres, vous allez vous retrouver, je vous le prédis, dans six mois, dans un an, dans un an et demi, dans deux ans, dans deux ans et demi, avec le même genre de dilemmes avec lesquels vous êtes confrontés actuellement. Vous allez vous faire faire des notes comme celle-ci, sur toutes sortes de problématiques dans le secteur de la santé, puis vous allez vous faire dire par vos fonctionnaires: Attention! On ne peut pas faire ci, on ne peut pas faire ça; il faut couper ci, il faut couper ça; on n'a pas d'argent, ça va nous coûter trop cher.

Dans le fond, vous ne seriez pas poigné avec ce genre de notes de service si on faisait collectivement, ensemble, le débat politique fondamental dans ce pays-là, qui est: On paie des taxes et des impôts là et on a droit à voir l'utilisation de ces taxes et de ces impôts dirigée vers les services les plus fondamentaux. Vous êtes ministre de la Santé et des Services sociaux; c'est vous qui êtes devant nous pour présenter ce projet de loi là parce que vos fonctionnaires vous ont dit que ça va vous coûter 850 millions par année.

Dans le fond, un, les centrales vous disent que ce n'est pas vrai, c'est exagéré. Puis, deuxièmement, faisons l'hypothèse que ça vous aurait coûté 200 millions ou 150 millions, mais le montant que ça vous aurait coûté de plus pour respecter les droits ? on est dans une société de droit ? les droits qui ont été établis, confirmés par des tribunaux, qui sont les rouages de notre appareil d'État démocratique, bien, ces revenus-là, que vous n'auriez peut-être pas eus encore, même 200 millions, vous allez peut-être dire: Ça aurait été trop; même 150 millions, ça aurait été trop.

Alors, dans ce contexte-là, la seule façon de sortir de cette impasse-là, celle pour ce projet de loi, et des autres impasses avec lesquelles vous êtes confrontés, c'est de faire le combat. Mais le problème, c'est que vous ne voulez pas le faire, le combat, que vous n'êtes pas capable de le faire. Vous n'êtes pas capable de le faire parce que, si vous faisiez ce combat-là...

Le Président (M. Copeman): Bon. M. le député de Borduas, vous, avec votre expérience parlementaire...

M. Charbonneau: Oui.

Le Président (M. Copeman): ...en tant que député, ministre et président de l'Assemblée nationale...

M. Charbonneau: Oui.

Le Président (M. Copeman): ...vous savez que vous n'avez pas le droit de vous adresser directement à un autre député.

M. Charbonneau: Ah, bien, j'avais l'impression que c'était à travers vous, M. le Président, que je m'adressais au ministre. J'ai toujours... Je voyais toujours le miroir de mes paroles vers vous et...

Le Président (M. Copeman): Oui, mais, malheureusement, après plusieurs exemples, je me suis rendu compte que ce ne fut pas le cas. Alors, je vous prie...

M. Charbonneau: Vous auriez dû me rappeler à l'ordre plus tôt, M. le Président.

Le Président (M. Copeman): Je sais. J'ai essayé par geste, par...

M. Charbonneau: Je n'avais pas décodé votre langage non verbal.

Le Président (M. Copeman): Alors, avant de vous arrêter, j'ai essayé par toutes sortes de gestes, ainsi de suite, mais là vous avez le message, et je sais que vous allez respecter le règlement.

M. Charbonneau: Alors, M. le Président...

Le Président (M. Copeman): Oui.

M. Charbonneau: ...je vous prie de dire au ministre, et je vous implore de dire au ministre ou de répéter au ministre ce que je viens de lui dire directement, mais que je n'avais pas le droit de faire. Je vous implore maintenant de reprendre à votre compte mes propos et de les transmettre au ministre. Et prenez pour acquis que tout ce que je vais dire à partir de l'instant, c'est à vous que je m'adresse.

Alors, je vous dis encore une fois... Bien sûr, on le fait un peu sur le ton badin, mais, au-delà de l'humour qu'on peut y mettre, le fond des choses est fondamental. Le fond est fondamental, et on n'y échappe pas. Si vous n'engagez pas le combat politique de récupérer les moyens financiers que nous payons... Ce n'est pas comme si c'étaient les autres provinces, là, qui généraient des surplus budgétaires, là. Ce sont nos taxes et nos impôts qui génèrent des surplus budgétaires qui sont à Ottawa et qui ne sont pas utilisés pour les priorités des Québécois, notamment celle de la santé, et qui ne sont pas utilisés aussi pour respecter les droits des citoyennes puis des citoyens du Québec, qui ne sont pas non plus utilisés pour respecter des décisions de tribunaux qui sont des instruments que le Parlement a créés, que l'instance démocratique a créés pour justement faire en sorte que notre société de droit fonctionne correctement. Autrement, là, abolissons les tribunaux, abolissons le Parlement, abolissons le Protecteur du citoyen qu'on veut faire entendre, abolissons la Commission des droits et libertés de la personne, puis finalement abolissons donc le gouvernement du Québec. Donnons tout ça à Ottawa, hein? Donnons tout ça à Ottawa, hein, de toute façon, puisque ça ne veut rien dire, on est une province comme les autres. C'est maintenant votre leitmotiv. Vous êtes rentrés dans le rang.

n(21 h 30)n

Alors, M. le Président, quand... Je vous dis ça, là, parce que c'est ça qui est fondamental. Tout ce débat tourne autour d'un enjeu central qui est un enjeu qu'on avait identifié déjà quand on était au gouvernement, sur lequel la vertu a fait en sorte que tous les députés de l'Assemblée avaient voté unanimement derrière le constat. Le problème, c'est que ça donne quoi de voter une motion à l'Assemblée nationale ou plusieurs motions à l'Assemblée nationale pour dire et dénoncer le gouvernement fédéral si on n'est pas prêt à faire le combat, si on n'est pas prêt à faire la bataille, si on n'est pas prêt à faire ce qu'il faut pour récupérer son butin? Ça, tu sais, en quelque part, il y a comme quelque chose qui est quasiment hypocrite, qui est une espèce de double langage qu'on envoie aux citoyens en leur disant: Nous votons des motions vertueuses, nous vous disons que nous sommes prêts à défendre les intérêts du Québec, mais nous ne sommes pas prêts à faire le combat. Ça veut dire quoi, ça, voter des motions que l'on ne veut pas mettre en opération, voter des motions que l'on ne veut pas voir se concrétiser par des gestes politiques?

C'est ça, la dynamique. On est dans une situation où ce serait plus simple si on avait un niveau de gouvernement, mais on en a deux. Puis le deuxième niveau, au moins, s'il collectait juste ce qu'il a de besoin, selon la Constitution, de taxes et d'impôts puis qu'il laissait au Québec le soin de ramasser le reste des taxes et des impôts, les Québécois ne paieraient pas une cent de plus, M. le Président. Ils ne paieraient pas une cent de plus de taxes et d'impôts, mais on en aurait assez pour faire en sorte que les besoins dans le secteur de la santé soient utilisés et accomplis.

Alors, M. le Président, vous me faites signe que mon temps est terminé, y compris le temps additionnel qu'on m'avait généreusement consenti. Écoutez, je ne sais pas si j'ai réussi à convaincre le ministre et nos collègues. J'espère que je vous ai convaincu, mais là aussi j'ai des doutes raisonnables. Vous me permettrez de le dire avec toute l'amitié que je vous porte.

Le Président (M. Copeman): Merci, M. le député. Bon. Est-ce qu'il y a d'autres collègues qui désirent intervenir sur la motion du député de Borduas? Mme la députée de Pointe-aux-Trembles et porte-parole de l'opposition officielle en matière des services sociaux, vous avez un temps maximum de 30 minutes.

M. Bouchard (Vachon): ...un max.

Le Président (M. Copeman): La parole est à vous, Mme la députée.

Mme Nicole Léger

Mme Léger: Merci, M. le Président. En tout cas, on aura appris beaucoup de nouveaux mots ou de nouvelles définitions ici, en commission parlementaire, M. le Président. Vous nous permettez d'évoluer dans notre langue française.

D'abord, je viens appuyer évidemment la motion préliminaire de mon collègue député de Borduas qui a pris certaines minutes assez importantes et assez pertinentes de notre commission parlementaire dans l'étude détaillée du projet de loi où nous sommes actuellement en motion préliminaire, particulièrement celle d'entendre la Protectrice du citoyen, M. le Président, qui a un rôle important dans notre société, mais qui pourrait nous apporter beaucoup de nouveaux éléments et son expertise à elle aussi concernant le projet de loi n° 7, que je rappelle encore que ce projet de loi modifie la Loi sur les services de santé et les services sociaux.

Et, dans ce projet de loi là, M. le Président, comme il y a beaucoup d'éléments absolument importants pour la suite des choses dans l'évolution du réseau de la santé et services sociaux, particulièrement dans tout le réseau des ressources intermédiaires, ressources de type familial, le Protecteur du citoyen a un rôle important, celui de surveiller ou de faire corriger les négligences, les erreurs, les injustices, les abus des ministères et organismes du gouvernement du Québec. Et il reçoit aussi et traite toutes les plaintes des personnes, des corporations ou des associations qui s'adressent à lui et qui est de son ressort, évidemment. Alors, il peut aussi intervenir de sa propre initiative, le Protecteur du citoyen. Donc, c'est, je pourrais dire, l'organisme qui est en lien direct avec le citoyen au Québec.

Ça me rappelle un peu le rôle que voulait donner, attribuer le ministre de la Santé et des Services sociaux par rapport au commissaire de la santé, qui était une promesse électorale, de mettre le commissaire de la santé. Il a été retiré. Je ne sais pas s'il reviendra ou qu'est-ce qui va se passer avec le commissaire de la santé, mais, en tout cas, actuellement on n'a pas d'échos de la suite des choses. Le ministre nous corrigera si le commissaire de la santé reviendra sur la place publique, mais on n'en entend plus parler nécessairement, le commissaire de la santé.

Est-ce que le commissaire de la santé aussi aura un rôle important dans la protection, dans le fond, du citoyen aussi qui a accès au réseau de la santé et des services sociaux? On aurait eu l'occasion de pouvoir connaître un peu ce que le ministre avait en tête quand il voulait déposer un projet de loi sur le commissaire de la santé. Mais il est intéressant, par exemple... toute la partie du rôle de la Protectrice du citoyen qui aurait pu nous éclairer aussi par rapport à tout son rôle de surveiller puis de corriger toutes les négligences qu'il peut y avoir ou les abus, les injustices dans le réseau de la santé et des services sociaux au Québec, M. le Président.

Fort pertinent aussi de... tout l'apport, je pourrais dire, des personnes qui sont dans le réseau, des ressources intermédiaires, d'une part, mais aussi des familles d'accueil. Il y a un article qui a paru dans Le Soleil, le 20 novembre 2003, dont le titre était Foyer au bord de la crise de nerfs, qui nous rappelle un peu ce que vivent au quotidien des gens qui ont une ressource qui est particulièrement celle aussi d'une famille d'accueil. Alors, c'est un article de Jean-François Cliche, qui a paru dernièrement, comme je disais, le 20 novembre 2003, fort pertinent parce qu'on a même une déclaration du député libéral de Montmorency, M. Raymond Bernier, qui a été cité dans cet article-là, M. le Président.

Mais, tout d'abord, je veux mentionner un peu ce que... Kathleen et Serge Laroche, qui sont mentionnés dans cet article-là, qui servent de famille d'accueil à neuf enfants atteints d'un lourd handicap, jurent de ne pas demander mieux que de vivre pour les autres. «Mais vivoter pour les autres en se battant chaque année pour avoir la rallonge de subvention qui leur permettra de rabouter tant bien que mal leur budget, c'est une autre paire de manches. Et le couple de Beauport ne veut plus la porter. Profitant de la visite chez eux...» Bon, elle a pu voir la lieutenant-gouverneur, qui était là, et elle lui a lancé un message sans équivoque: Si son financement n'est pas révisé à la hausse, leur maison, qui est l'Ami doré, devra fermer ses portes faute de pouvoir fonctionner efficacement.

Il mentionne un petit peu plus loin dans l'article, le journaliste Jean-François Cliche, du Soleil, que «le salaire ne suivant pas la charge de travail, une grande partie du personnel se pousse dès qu'il trouve mieux ? c'est-à-dire très rapidement, la plupart du temps. Depuis janvier dernier, Mme Laroche dit avoir embauché 31 personnes pour combler ses... 13 postes.»

Alors, c'est sûr que, dans le milieu, actuellement, des familles d'accueil, et particulièrement celui-là du couple de Beauport, c'est assez effarant de les voir si démunis par rapport à la charge de travail qui est demandée, particulièrement dans cette famille d'accueil là. Et le député de Montmorency, qui est un collègue du ministre de la Santé et des Services sociaux dans sa formation politique, a annoncé chez les Laroche qu'une somme de 30 000 $ serait allouée rapidement à l'établissement, ce qui lui permettra de fonctionner jusqu'en avril. «L'avenir demeure incertain, bien que le député fasse pression sur le ministre de la Santé pour que les fonds nécessaires soient débloqués.»

Alors, le ministre de la Santé, je ne sais pas s'il a répondu à son collègue le député de Montmorency qui l'interpelle directement dans cette problématique-là que vit ce foyer-là de famille d'accueil. Et M. Bernier est cité un peu plus loin: «"Le problème, dit M. Bernier, c'est qu'il n'y a pas de ressources cadrées ou de référence. (La maison l'Ami doré) est une ressource très, très spécifique. C'est à cela qu'il faudra travailler avec le ministère (de la Santé) au cours des prochains mois pour s'assurer qu'elle aura les fonds nécessaires pour opérer." M. Bernier espère aller chercher les 80 000 $ à 100 000 $ dont Mme Laroche dit manquer. Les parents devront donc encore patienter avant de connaître ce qu'il adviendra de leurs petits.

«La maison l'Ami doré est le seul établissement de la région qui se consacre à l'hébergement d'enfants handicapés mentaux.»

n(21 h 40)n

Alors, M. le Président, même un collègue du ministre de la Santé faisait part de la problématique d'un foyer d'accueil qui est ici qu'on... On relate dans les journaux présentement leur situation. Alors, problème de subvention, mais problème aussi qu'on voit de conditions de travail de leur personnel, d'une part. Est-ce qu'ils ont été entendus par le ministre? Est-ce que, lorsqu'il y a... individuellement, comme ça, que les particularités plus spécifiques d'un foyer qui est devant nous demandent au ministre une aide, que ce soit au niveau de subventions, mais aussi de la problématique de ce que peut vivre le personnel dans le foyer d'accueil, qui semble assez flagrante dans ce qu'on voit comme article de journal ici, devant nous. Donc, s'ils ne sont pas entendus par le ministre par cet article-là et si le ministre n'entend pas non plus l'écho du député de Montmorency, qui est son collègue face à cette problématique-là, s'il veut aller chercher 80 000 $ à 100 000 $... Comment a répondu le ministre à cet appel de son collègue?

Quels moyens auront-ils, les travailleurs, si d'autant plus ils se retrouvent travailleurs autonomes? J'imagine qu'en étant des travailleurs autonomes... Ce que dit le ministre: On va statuer qu'ils seront travailleurs autonomes, donc ils auront une meilleure écoute, et je pourrai répondre à leurs demandes d'une façon plus précise, puis le projet de loi identifie vraiment que, bon, ils seront... on conclura une entente avec les organismes représentatifs. Là, ça ne répondra pas nécessairement que... parce qu'ils seront travailleurs autonomes, qu'on va répondre nécessairement à la problématique que vivent Mme Kathleen et M. Serge Laroche.

Alors, M. le Président, quand il y a une situation comme ça, c'est sûr que les conditions de travail sont importantes et c'est sûr que la syndicalisation où ils sont... les gens qui sont syndiqués ont la possibilité, par leur association, de négocier avec le ministre et de vouloir faire évoluer leurs conditions de travail. Alors, ça, c'est un exemple, pour moi, flagrant qui peut peut-être être particulier parce que c'est un foyer d'accueil. Mais il reste quand même, M. le Président, que c'est évident que, si déjà, par un article de journal... Je ne sais pas si le ministre a répondu, mais est-ce que juste par cet article de journal là les gens seront entendus? Et est-ce qu'ils seront mieux s'ils sont des travailleurs autonomes ou s'ils ne seraient pas mieux entendus s'ils étaient dans une association, membres d'une association syndicale qui pourrait revendiquer avec toute leur expertise, avec toutes leurs forces et avec tout leur désir de persuasion, d'être à une table de travail pour négocier avec le ministre?

On voit qu'avec un projet de loi comme c'est là, devant nous, le ministre craint cette syndicalisation-là. Il est clair. Alors, soyez travailleurs autonomes, je vous donne cette confirmation-là de statut. Alors, en étant travailleurs autonomes, on va régler ça. Mais là, déjà, ils ne sont même pas travailleurs autonomes et ils ont des problématiques. Est-ce qu'il laisse rêver les gens dans cette situation-là en disant: Comme travailleurs autonomes, nous réglerons votre situation? Alors, laissez-moi douter, M. le Président. Mais on peut agir... on peut penser que la bonne foi du ministre va vouloir régler la situation des travailleurs dans le milieu des ressources intermédiaires et que probablement ils auront de meilleures conditions de travail. Peut-être. C'est ce qu'il nous laisse croire, le ministre, présentement.

Alors, la Protectrice du citoyen en a plusieurs, exemples comme ça. Il y a... Des citoyens ont recours à la Protectrice du citoyen et peuvent, par cette possibilité-là, ce lien-là que le citoyen a avec l'État, qui est la Protectrice telle quelle, qui peut défendre et qui peut apporter son sens d'aide aux citoyens du Québec et qui... peuvent être écoutés par la Protectrice du citoyen qui a le pouvoir de vraiment surveiller puis traiter des plaintes des personnes qui viennent la voir pour mieux se faire... mieux faire protéger leurs droits et mieux faire protéger ce qu'ils donnent comme services ou comme ressources à la population du Québec.

Alors, M. le Président, je regardais, le ministre doit vraiment connaître le cadre de référence des ressources intermédiaires, entre autres. Les ressources intermédiaires, c'est sûr qu'ils n'ont pas... qu'ils ont un cadre de référence, mais il y a aussi les ressources de type familial qui ont aussi leur cadre de référence. Donc, elles ne sont pas similaires entre les ressources intermédiaires et les ressources de type familial, n'ont pas le même cadre de référence devant nous, et ça m'amène une interrogation au ministre, M. le Président. Si les ressources intermédiaires ont leur propre cadre de référence, les ressources de type familial ont aussi leur propre cadre de référence, comment il va répondre aux groupes par une entente?

Une voix: Bien, une seule.

Mme Léger: Une seule entente. Il y a une problématique ici, devant nous, M. le Président. Alors, les ressources intermédiaires ont un cadre de référence, les ressources de type familial ont un autre cadre de référence, mais il est clairement dit que, dans le projet de loi, il y aura une entente. Moi, depuis le début, M. le Président, je suis... je regarde ce bout de note explicative là, et, dans les articles de loi, on le voit, qu'il y aura une entente, vraiment, qui va déterminer les conditions générales d'exercice des activités de ces ressources et prévoir... il va aussi prévoir diverses mesures relatives à la rétribution de leurs services.

Alors, c'est sûr, M. le Président, quand on regarde ça, je reste un petit peu perplexe de comment on va solutionner les attentes de tous ces groupes qui viennent... qui sont venus déjà en commission parlementaire. Je voyais le ministre citer cette partie-là tout à l'heure. Il nous disait qu'il y a... qu'on était un petit peu, l'opposition officielle, apocalyptique et que les familles d'accueil sont venues ici, en commission parlementaire, en consultation, puis ils sont venus dire qu'ils sont d'accord avec le projet de loi. Ils sont d'accord, M. le Président, on les a entendus. Des groupes, ils sont d'accord; il y a d'autres groupes qui ne le sont pas. Évidemment, ce n'est pas tout le monde qui était en accord, ici, en commission parlementaire, par rapport au projet de loi. mais les familles d'accueil étaient d'accord. Mais je ne sais pas comment il va solutionner...

Je ne sais pas si les familles d'accueil ont vraiment vu dans le projet de loi qu'il n'y aura qu'une entente, parce que, en discutant un peu avec eux après l'exercice des consultations générales, ils sont sûrs qu'ils vont être entendus par le ministre, ils sont sûrs qu'ils vont être représentés, et qu'il va y avoir une association représentative et c'est la leur, et ça va être leur cadre de référence effectivement, à eux, qui va être... qui va être peut-être conservé et qui va évoluer avec le ministre. C'est ce qu'ils pensent.

Alors, quand le ministre nous dit que les familles d'accueil sont d'accord avec le projet de loi, je ne suis pas sûre qu'on a connaissance de tout ce qu'il y a dans ce projet de loi et tout l'impact de ce projet de loi qu'il va y avoir. Alors, chacun des représentants qui sont venus ici représenter leur organisme, qu'ils soient familles d'accueil, ressources de type familial, les centres jeunesse, etc., chacun dit qu'ils ont... qu'ils vont avoir une entente. Ils pensent tous que ce sera leur entente.

Alors, il y a un problème ici, M. le Président, avec le projet de loi. Je n'ai pas entendu le ministre sur ça. Probablement qu'on va l'entendre un petit peu plus loin, mais il reste que c'est flagrant. Pourquoi une entente pour tous ces organismes-là? Alors, peut-être qu'il apportera un amendement puis qu'il nous dira qu'il y aura plusieurs ententes ou l'entente sera divisée. Je ne sais pas ce qu'il a en tête, mais déjà là...

M. Bouchard (Vachon): S'il t'entend.

Mme Léger: Effectivement, s'il m'entend ? merci, mon cher collègue ? s'il m'entend bien. M. le ministre, il va falloir répondre à M. et Mme Laroche qui, eux, veulent régler leur problème à eux. Et j'imagine que, tous les foyers d'accueil, ils ont tous chacun leur histoire, ils ont tous chacun leur problématique. Est-ce qu'ils vont tous penser que leur association va les représenter et que ce sera celle-là qui va signer l'entente avec le ministre?

Alors, si je regarde le cadre de référence, ça nous rappelle un petit peu, pour la Protectrice du citoyen qu'on demande d'entendre... Ça nous rappelle un peu aussi comment se sont développées les ressources intermédiaires du Québec. On dit, dans le cadre de référence, que ça remonte à une vingtaine d'années environ, et c'est le mouvement de désinstitutionnalisation touchant différents secteurs d'activité qui a entraîné la création d'un nouveau type de ressources d'hébergement substitut.

«Il faut savoir qu'il n'existait alors, outre l'hébergement privé ? je cite le cadre de référence ? que l'hébergement en institution ou en ressources de type familial. Progressivement, de nouvelles approches ont été retenues, faisant ressortir l'importance de maintenir dans la communauté les personnes ayant besoin d'être hébergées tout en favorisant leur réinsertion sociale[...].

«Au fil des ans, des ressources intermédiaires ont été mises en place suivant des modèles diversifiés et selon des modalités financières très différentes d'une région à l'autre[...]. Le ministère de la Santé et des Services sociaux a dû tout mettre en oeuvre afin d'assurer l'équité tant à l'égard de l'accès à ces services qu'à l'égard de l'encadrement et du financement de ces ressources. Il a alors entrepris, il y a quelques années, une réflexion sur les ressources intermédiaires afin de préciser les niveaux de responsabilités et les cadres de gestion tout en favorisant une réglementation souple et adaptable aux paliers local et régional.»

n(21 h 50)n

Alors, quand je revois l'article... quand je vois le projet de loi, je vois la finesse et la souplesse d'une réglementation qu'on dispose dans ce cadre référence là, j'ai de la difficulté à voir comment on va réussir à faire une entente pour tout ce genre de... pour toutes les sortes de ressources intermédiaires que nous avons au Québec. On voit que le ministère, par ses actions, reconnaît l'importance de favoriser la réinsertion sociale en privilégiant les interventions dans le milieu et en misant sur des ressources d'hébergement dans la communauté reconnues pour leur souplesse, soit, évidemment, les ressources intermédiaires.

Je voyais un petit peu plus loin dans le cadre de référence toutes... je pourrais dire, sur le document, qu'on tenait à préciser qu'est-ce que c'était vraiment, le cadre de référence. Ce cadre-là définit... «légale d'une ressource intermédiaire; la gamme des services qui sont offerts; les types d'organisation résidentielle à l'intérieur desquels les services peuvent être offerts; la classification des services offerts et les taux de rétribution qui y sont associés; les orientations générales balisant les modalités d'accès aux services d'une ressource intermédiaire; les rôles et fonctions dévolus à la régie régionale et aux établissements».

Puis des principes directeurs importants, c'est bon de se les rappeler parce que ça nous amène à voir comment les ressources intermédiaires... quel est leur milieu de vie et comment le cadre de référence est là pour venir encadrer la vie de tous les jours des ressources intermédiaires. Dans les principes directeurs, on parle de: «l'équité tant à l'égard de l'accès aux services d'une ressource intermédiaire que des modalités de financement et d'encadrement de cette ressource; la flexibilité ? aussi ? nécessaire à la transformation des ressources existantes et à la création de nouveaux modèles de ressources afin que les uns et les autres puissent: répondre aux besoins évolutifs des usagers, s'adapter aux particularités régionales, s'intégrer dans les plans régionaux d'organisation des services». On voit aussi: «le respect et la valorisation de tous les partenaires potentiels[...]; l'intégration harmonieuse de ressources intermédiaires[...]; la poursuite des objectifs d'intégration sociale dans le respect des principes de la valorisation des rôles sociaux».

Donc, M. le Président, ces principes directeurs là nous aident à pouvoir voir tout ce qui sous-tend, dans le fond, le cadre de référence des ressources intermédiaires et de voir jusqu'à quel point qu'il peut facilement y avoir une certaine distorsion dans tout ça qui peut permettre d'entendre la Protectrice du citoyen face à ces grands objectifs là du cadre de référence, qui peut nous permettre de savoir qu'il y a des éléments peut-être importants qui peuvent être apportés.

Je vois aussi l'ensemble de la problématique. Quand on a parlé... Je voyais mon collègue tout à l'heure, le député de Saint-Hyacinthe, dans une autre des motions qu'il a apportées. Il a parlé du type de clientèle, des gens qui sont dans les ressources intermédiaires. Il nous a parlé de la vulnérabilité des gens qui sont là. On voit, juste dans l'identification des usagers de l'établissement dans le cadre de référence qui est là, il y a des éléments qui nous traduisent très bien les problématiques que peuvent vivre les personnes qui sont dans les ressources intermédiaires.

Il y a... Je pense qu'ils l'ont classifié en huit formes de problématiques qui peuvent correspondre à l'usager tel quel des ressources intermédiaires, donc les bénéficiaires qui sont là. Il y a particulièrement le besoin de protection sociale, donc qui concerne une situation de vulnérabilité due à une perte d'autonomie ou à un environnement familial et social inexistant, inadéquat ou menaçant ? abus sexuels, négligence, isolement social ou violence, par exemple.

Ça peut être des usagers qui ont une problématique plutôt de mésadaptation sociale, donc qui concerne les problèmes de comportement ou d'ajustement social ? troubles de comportement ou d'alcoolisme, par exemple.

Nous avons aussi des personnes qui peuvent avoir une problématique de perte d'autonomie due nécessairement au vieillissement ? beaucoup de personnes âgées sont dans nos ressources intermédiaires au Québec ? donc, qui concerne tous les problèmes d'ordre biopsychosocial liés au processus de vieillissement normal ou prématuré d'une personne.

On parle, quatrièmement, aussi des usagers qui peuvent avoir des problèmes de santé mentale tels quels. Je rappelle le ministre que c'est une de ses priorités, la santé mentale. Alors, beaucoup d'usagers dans ces ressources intermédiaires là, dans ces résidences d'accueil peuvent souffrir d'un problème de santé mentale. Donc, ça concerne toutes les maladies mentales, les troubles de la personnalité, les perturbations de l'équilibre psychoaffectif.

Il y a aussi des problèmes de santé physique tels quels, donc qui concernent les maladies physiques et les déficiences organiques.

Aussi, des problèmes de déficience sensorielle, qui concernent une perte ou une anomalie permanente d'un organe sensoriel.

Septièmement, déficience motrice telle quelle, qui concerne une perte ou une anomalie permanente d'un membre tel quel.

Et la huitième... je pourrais dire, le huitième problème que les usagers peuvent vivre, c'est celui de déficience telle quelle, déficience intellectuelle, qui concerne la présence concomitante d'un déficit intellectuel important et de problèmes au regard des comportements adaptatifs.

Ça, là, M. le Président, là, ce sont vraiment les problématiques très spécifiques que peuvent vivre les usagers dans les établissements des ressources intermédiaires. Donc, c'est des gens, M. le Président, qui ont besoin d'aide, qui sont très vulnérables, qu'il faut aider et qui peuvent effectivement avoir besoin particulièrement de la Protectrice du citoyen en problème de difficulté.

On a aussi soulevé quelques irrégularités observées que les ressources nous parlent. Donc, il y a peut-être des choses importantes que le ministre doit entendre: la méthode de calcul telle quelle qui est établie par l'établissement lors de la mise en application du nouveau système de rétribution. Donc, M. le Président, le ministre doit connaître ce que je lui apporte ici, devant moi, tout le système de rétribution aux ressources intermédiaires. Les gens du milieu me rapportent comme quoi qu'il y a des difficultés présentement avec le ministère de la Santé et des Services sociaux sur la façon qu'on calcule la rétribution. Donc, c'est important que le ministre soit au courant. Parce que j'ai rencontré, M. le Président, des gens qui sont des ressources intermédiaires ou qui sont des ressources de type familial, alors cette méthode de calcul là, là, elle est regardée d'un oeil plus ou moins positif présentement.

Même chose, l'évaluation de départ des services requis par la ressource semble déficiente dans plusieurs cas: une sous-évaluation de la réalité et des caractéristiques de l'usager et des caractéristiques de l'intervention. Même si la ressource participe lors de l'évaluation, on tient peu compte de ses observations ou commentaires. Si une réévaluation est demandée, la réponse est: Si on fait une réévaluation, cela risque fort de faire baisser le pointage et, par la même occasion, votre rétribution. Donc, c'est une deuxième irrégularité qu'on peut observer dans les ressources, actuellement, intermédiaires, particulièrement les ressources intermédiaires, qu'on nous a rapportée présentement.

Donc, ce sont des éléments qui peuvent se retrouver à la Protectrice du citoyen, M. le Président, ou qui ont déjà fait appel à la Protectrice du citoyen qui aurait pu nous soulever ça, parce que, en commission parlementaire, ils ont l'heureuse chance de parler directement au ministre. Donc, c'est sûr qu'il aurait été intéressant d'entendre la Protectrice du citoyen qui nous apporterait peut-être d'autres irrégularités comme celles-là, ce qui peut être intéressant.

Il y a aussi... On me rappelle la forme, certains termes employés ainsi que certaines clauses abusives du contrat, entre autres, le modèle commercial. Ce n'est pas un contrat de travail ni d'affaires, c'est un milieu de vie, mais on parle de modèle commercial dans les ententes qu'il peut y avoir avec le ministère, dans les clauses de contractuels avec le ministère. Les termes reliés à l'effet que nous avons des employés ou du personnel qui doit être compétent. Par contre, on ne reconnaît pas cette compétence aux ressources intermédiaires et aux ressources de type familial.

De même, on demande aux ressources de faire leur propre recrutement. Comment l'établissement peut-il s'assurer que les services seront de qualité? L'obligation qu'il y ait présence d'une personne 24 heures sur 24. Ça, ce sont, M. le Président, des irrégularités ou des problématiques que vivent les ressources intermédiaires et qui peuvent facilement être acheminées, et que, j'imagine, la Protectrice du citoyen a ce genre de problématiques là devant elle et qui auraient pu... qu'on aurait pu discuter et voir, échanger avec la Protectrice du citoyen par rapport à ces problématiques-là qu'ils ont devant eux. Et, le ministre étant là, on aurait pu discuter avec le ministre de ce genre de problématiques là.

C'est vrai que le ministre est très pris par le projet de loi n° 25 aussi, le projet de loi n° 30 et tout ce qui se passe présentement, le 11 aussi qu'on verra ultérieurement, là. Je pense qu'il est retardé un petit peu. Je pense qu'il est trop occupé par d'autres projets de loi, mais il y a celui de l'adoption internationale effectivement que j'ai hâte de pouvoir jaser et d'avoir quelques consultations particulières avec certaines personnes qui aimeraient ça être entendues. Alors donc, si on a des consultations particulières, M. le ministre, le projet de loi n° 11, on a le temps de revenir, ça pourrait être même intéressant.

n(22 heures)n

Je pourrais voir aussi, M. le Président, la partie de l'enfant. Parce que, là, on a regardé particulièrement les personnes âgées, mais il y a toute la partie des enfants que je pourrais élaborer, mais qu'on aura l'occasion de le faire un petit peu plus tard.

Mais vous me permettrez de revoir un peu toute cette vulnérabilité-là que nous avons dans la clientèle qui est devant nous. Et je rappelle, pour les besoins de l'écrit, ce que Michel David nous a dit tout à l'heure par rapport à... nous a écrit par rapport à... un article qu'il a fait hier, bien, le 22 novembre dans Le Devoir. Et, avec ce que je viens de vous dire, effectivement il faut de la compassion.

Alors, le premier ministre du Québec a dit, en 1999: «La compassion, chers amis, ce sera le mot d'ordre, le cheval de bataille du Parti libéral du Québec.» Alors, M. le Président, j'espère que le ministre de la Santé et des Services sociaux, ça fait aussi partie de ce que son premier ministre dit: La compassion est importante, c'est un cheval de bataille. Et il avait dit ça au lendemain des élections de 1999 après avoir constaté que le modèle Harris n'était pas très populaire auprès des Québécois.

«La sinistre farce continue. Après les femmes et les enfants, qui seront les prochaines victimes de la compassion libérale?» Espérons que ce ne seront pas les ressources de type familial et ressources intermédiaires.

Et je conclurais, M. le Président, avec aussi ce discours de M. Charest qui... du député de Sherbrooke, du député de Sherbrooke et premier ministre du Québec lorsqu'il a fait sa lettre ouverte dans les journaux. Il a clairement dit, par rapport au projet de loi n° 7 qui est ici, là, qu'on parle de syndicalisation: «Tout en débattant de ces questions, nous réviserons certaines lois pour actualiser le fonctionnement du Québec. C'est ainsi que nous permettrons le recours à la sous-traitance pour que nos hôpitaux ou nos villes, par exemple, aient la possibilité de livrer des services de qualité avec différents partenaires si cela peut se faire le plus rapidement et à meilleur coût.»

Et, un peu plus loin: «Sans surprise, les groupes d'intérêts qui bénéficient du statu quo, et devant qui le gouvernement précédent a reculé, font du bruit. Je leur demande aujourd'hui de faire preuve d'ouverture et d'avoir la grandeur de ne pas faire passer des intérêts corporatistes au-dessus des intérêts historiques du Québec et de tous les Québécois.»

Quels sont, M. le Président, les intérêts historiques du Québec et de tous les Québécois quand on arrive avec un projet de loi qui est devant nous, ici, un projet de loi n° 7 qui nie le droit à la syndicalisation, qui statue qu'ils sont des travailleurs autonomes? Et j'ose espérer, M. le Président, que ce ne sera pas dans le bâillon, ce projet de loi là. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Copeman): Alors...

M. Bouchard (Vachon): Non, non, M. le Président, on...

M. Couillard: J'ai été tellement généreux.

Une voix: On a le droit, bien oui...

M. Bouchard (Vachon): Non, c'est un consentement pour...

Une voix: Pour les nouvelles. On va regarder les nouvelles...

Le Président (M. Copeman): Bon, je constate, chers amis, après avoir consulté un expert médical, quelque chose qu'on connaissait, je pense, intuitivement: il est très mauvais d'être resté assis pendant quatre heures de temps à ne pas bouger. Compte tenu de cela, je suspends les travaux de la commission pour une quinzaine de minutes.

Une voix: 15 minutes?

Le Président (M. Copeman): Une quinzaine.

Une voix: Ça a de l'allure.

(Suspension de la séance à 22 h 3)

 

(Reprise à 22 h 29)

Le Président (M. Copeman): Bon. La commission des affaires sociales reprend ses travaux. Et, si je me souviens bien, sur la motion du député de Borduas, Mme la députée de Pointe-aux-Trembles avait terminé son intervention. Et je croyais que le ministre avait désiré intervenir. Allez-y, M. le ministre.

M. Philippe Couillard

M. Couillard: ...M. le Président, j'ai trouvé l'intervention de la députée de Pointe-aux-Trembles intéressante parce qu'une grande partie de son intervention était dédiée à un débat portant finalement sur quoi? sur les articles du projet de loi. Et je vois qu'elle est très bien préparée à débattre des articles parce qu'il y avait plusieurs de ses arguments qui faisaient directement allusion à certains des articles du projet de loi. Donc, je crois que nous allons commencer de façon imminente l'étude article par article par l'article 1.

n(22 h 30)n

Et j'ai également entendu dans son discours et celui de ses collègues des élans de compassion. Et je ne doute pas que la compassion soit réelle, M. le Président, soyons clairs là-dessus, mais encore eût-il fallu que, pendant les années d'exercice du pouvoir, si exigeant nous le savons, que cette compassion se traduisît en termes concrets. Alors, par exemple, si on regarde... Bien, on a parlé des rétributions des ressources intermédiaires, depuis 1993, M. le Président, elles ne furent jamais augmentées outre que l'indexation du coût de la vie. Quel est le gouvernement qui les a soudainement augmentées de façon majeure pour 8 millions de dollars? C'est le gouvernement du Parti libéral du Québec, M. le Président, cette année.

M. Bouchard (Vachon): C'est quoi, le dénominateur?

M. Couillard: Pardon?

M. Bouchard (Vachon): Le dénominateur?

M. Couillard: Le dénominateur de...

M. Bouchard (Vachon): 8 millions par rapport à quoi en termes de budget?

M. Couillard: Non, mais je vous explique que cette année c'est une grosse augmentation de... Autant le barème de base que le barème éclaté, là, il n'y a jamais eu une augmentation de même depuis 1993. On vous donnera des détails ultérieurement. Mais ce que je veux dire par là ? puis on aura les mêmes discussions dans le dossier des personnes âgées, dans le dossier de la maladie mentale, dans le dossier des patients atteints de cancer, dans le dossier des populations autochtones ? c'est qu'il y a eu un gros problème entre 1994 et 2000 surtout où... avec un arrêt presque complet des investissements qui nous met actuellement dans un gouffre difficile à remonter et un système de santé qui a été blessé pendant ces années-là.

Et on a plein d'exemples comme ça. On en trouve tous les jours. Et ce sera intéressant dans le cours des prochains mois de le discuter non pas toujours, M. le Président, pour, de façon vaine et stérile, remettre toujours la responsabilité sur le gouvernement précédent, mais savoir exactement d'où on vient. Parce que Cicéron disait: Si on ne sait pas ce qui est arrivé avant notre naissance, on est condamné à rester toute sa vie un enfant. Donc, il faut savoir d'où on vient, pourquoi on est dans les situations où on est actuellement, autant pour les personnes âgées, encore une fois, que pour les ressources intermédiaires et d'autres situations. Et c'est un poids finalement, un fardeau, une couronne d'épines que le parti aujourd'hui dans l'opposition doit assumer pour les prochaines années devant la population. Mais nous aurons l'occasion d'y revenir à de nombreuses reprises, c'est sûr.

Une voix: ...

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Copeman): Est-ce qu'il y a d'autres députés qui désirent intervenir sur la motion?

M. Dion: ...

Le Président (M. Copeman): Le député de Saint-Hyacinthe, pour une intervention d'une durée maxi...

Une voix: Maximale.

Le Président (M. Copeman): ...maximale de 10 minutes.

M. Léandre Dion

M. Dion: M. le Président, je sais que, si vous me réduisez à 10 minutes, c'est à votre corps défendant. Parce que votre générosité proverbiale est bien connue, mais sans doute vous ne pouvez pas faire davantage pour le moment. Mais je vais m'adresser, M. le Président, à travers vous à M. le ministre.

Le Président (M. Copeman): Excusez-moi...

M. Dion: Alors, je vais m'adresser à... Parce que c'est difficile, parler au président lorsqu'il... Il nous demande de parler au président, on doit parler au président. Or, le président est occupé. Que fait-on dans une situation comme celle-là, M. le ministre?

Surtout que nos minutes...

M. Couillard: ...rattraper.

M. Dion: Non, mais nos minutes courent toujours.

M. Couillard: On va les rattraper.

M. Dion: On va les rattraper? Alors, je m'adresserai donc à M. le Président, mais mes propos s'adressent principalement à M. le ministre ? mais pas uniquement, mais principalement ? et ils portent sur le fait que M. le ministre nous dit qu'il y a des choses qui se sont passées avant lui et que maintenant ça va être différent. Je l'espère bien. Je l'espère bien. Parce qu'il semble manifester une certaine impatience à commencer à étudier l'article 1, je le comprends.

Je le comprends, qu'il soit impatient, mais tout à l'heure le député de Borduas a dit une parole qui est beaucoup plus vraie que ce que vous pouvez croire, il a dit: «À Québec, on légifère trop vite», et c'est très important. Moi, je ne suis pas un adorateur de ce qui se passe à Ottawa, vous le savez, mais je peux dire ceci: Les projets de loi sont étudiés beaucoup plus longuement, et souvent un projet de loi... bien, peut-être pas souvent, mais de temps en temps un projet de loi qui a été étudié pendant des mois...

M. Bouchard (Vachon): Il reste au feuilleton...

M. Dion: ...va au Sénat et revient à la Chambre pour être modifié. Alors, je pense qu'on n'a peut-être pas à imiter tout ce qui se fait ailleurs, mais on peut s'interroger sur ce qu'on fait, nous. Écoutez bien, M. le ministre, je vais être intéressant, et je vais être intéressant pour vos collègues qui sont là. La façon dont ça se passe, si j'ai bien compris ? c'est sûr qu'il y a beaucoup de choses que je n'ai pas comprises après neuf ans, neuf ans, c'est bien sûr, mais peut-être quelques-unes ? c'est que le ministre arrive en Chambre avec un projet de loi. Son projet de loi a été préparé par une armée de fonctionnaires de haut calibre ? on le sait bien, s'ils sont dans cette situation-là, ce sont des fonctionnaires de haut calibre ? et ils expliquent au ministre tout le court et le long de ce projet de loi là pour lui montrer ? parce que, quand ils ont fait le projet de loi, ils l'ont fait avec toute leur bonne volonté, leur science et leur expérience, hein ? alors, pour démontrer au ministre que le projet de loi, il est bon, il est presque parfait. Alors, le ministre, il a écouté ça avec beaucoup d'attention, et ça le rassure. C'est rassurant d'avoir une équipe de fonctionnaires de haut calibre derrière soi.

Il arrive ensuite devant les députés de son parti et des autres partis, et là les députés, comme par hasard, ils ne viennent pas de la fonction publique, ils viennent du terrain où est le vrai monde. Non pas que la fonction publique ne soit pas du vrai monde à d'autres égards, mais, en tant que fonction publique, ils sont dans un milieu, dans un milieu qu'on appelle l'appareil d'État et qui a à réaliser un certain nombre de travaux. Donc, là, les députés, même de votre parti, vont vous poser un certain nombre de questions, et là vous êtes pris entre deux choses: la sécurité que vous donne votre appareil d'État et l'insécurité que vous apportent les députés qui ont un point de vue différent. Forcément, forcément, ils ont un... Et là vous allez choisir quoi? Je ne sais pas, M. le ministre. Je souhaite que vous allez choisir la voix du peuple. Pourquoi? Parce que c'est très difficile, c'est très difficile.

Je me souviens, moi, d'avoir proposé... Je vais vous dire une expérience que j'ai faite, vous allez voir à quel point ça peut être difficile. Vous savez que, quand on parle d'article pénal dans une loi, l'objectif, c'est une peine. La peine, c'est de décourager les gens de faire quelque chose, hein? Alors, c'est rare qu'on voit une peine de 299,75 $, c'est 280 $ ou c'est 270 $. C'est l'ordre de grandeur qui décourage, ce n'est pas le 0,25 $ de plus. Alors, on discutait d'une loi en Chambre, ici, d'une loi où on avait décidé d'augmenter, je pense, c'est de 20 % les pénalités qui existaient dans la loi, et on arrivait avec des montants comme ça, 75,29 $. Alors, moi, j'ai dit: Ça n'a pas de bon sens. J'ai dit: Ça n'a pas de bon sens, il faut aller à l'ordre de grandeur. Eh bien, j'ai fait scandale. Tout l'appareil d'État s'est levé, est allé parler au ministre: Arrêtez ça, cette affaire-là. Tellement que le ministre a suspendu l'étude du projet de loi.

Une voix:...

M. Dion: Non, non, a suspendu le projet de loi en disant: On reviendra demain. Et, le lendemain, il a dit: Bien, vous savez, c'est peut-être une bonne idée, mais, pour le moment... On verra pour la prochaine fois, mais là, na, na, na, na. Alors, vous voyez, M. le ministre, vous allez avoir à choisir entre la sécurité que vous donne votre appareil et l'insécurité que vous apportent vos députés. Je ne vous dirai pas, moi, de mépriser l'avis de votre appareil. Au contraire, c'est très important de le prendre. Mais c'est aussi important de ne pas en être prisonnier.

Or, les députés, ils sont placés dans une des deux situations suivantes: ou ils sont des députés ministériels, puis là, bien, s'ils font trop de questions, ça a l'air quasiment qu'ils sont en train de scorer dans leur propre but... excusez l'anglicisme, ils sont en train de marquer des buts dans leur propre...

Le Président (M. Copeman): M. le... ça me va, ça me va, oui.

n(22 h 40)n

M. Dion: Dans leur propre filet, dans leur propre filet. Alors, évidemment, ils ne sont pas pour faire ça. Alors, ils se retiennent de trop intervenir en commission ou autrement pour ne pas passer pour des gens qui rallongent le temps et puis qui font des buts dans leur propre filet. Et, s'ils sont à l'opposition, bien, il ne faut pas qu'ils rallongent trop non plus parce qu'on dit: Ils font de l'obstruction.

Alors, à la limite, vous avez les projets de loi, à la fin, qui sont très peu influencés par ceux que le peuple a élus pour les influencer. Et c'est très grave. C'est extrêmement grave parce que, vous savez, en pratique... en théorie, si on regarde comment ça se passe, le poids... la conséquence, c'est que le poids de la législation porte uniquement ou presque sur les épaules de l'appareil d'État. Et, s'il se trompe, le gouvernement va payer le prix peut-être longtemps. Mais ceux qui, en fait, en portent le poids face à l'opinion publique, ce sont les députés. Vous voyez, M. le ministre, comme ça n'a pas de bon sens de travailler comme ça. Vous voyez bien que ça n'a pas d'allure. Vous voyez bien que ce n'est pas...

Vous, vous arrivez, M. le ministre... M. le Président, M. le ministre arrive dans le système. Il n'a pas d'histoire derrière lui. Il peut faire différemment. Il peut faire différemment. Il peut dire: Je vais écouter davantage ce que les députés ont à dire et je vais essayer d'en être influencé davantage. Je vous garantis, M. le ministre, que, si vous acceptez de faire ça, votre appareil d'État va être encore plus fort et encore meilleur parce qu'il va avoir à se mesurer constamment à l'opinion qui vient du terrain, des élus.

Alors, M. le ministre, quand vous avez ces mouvements d'impatience ? ça ne vous est pas arrivé encore, mais ça vous arrivera, ne craignez pas ? en disant: Trop de temps, on va essayer de court-circuiter ça, aller vite, bâillonner les gens, souvenez-vous de cela. Souvenez-vous qu'il est très important que les députés soient influents, et qu'ils influencent vos projets de loi, et qu'ils prennent le temps d'expliquer très bien leur point de vue pour pouvoir influencer.

Je sais qu'il y a toutes sortes de réactions qu'on peut avoir pour ne pas être influencé comme, par exemple, ne pas écouter. Je sais que vous ne faites pas ça, M. le ministre. Ou faire diversion, je sais que vous ne faites pas ça. Mais je vous mets en garde et je pense que vous pouvez, si vous le décidez, vous pouvez, M. le ministre, changer des choses. Vous pouvez faire en sorte que vos projets de loi ne soient pas des tours intouchables. Mais laissez pénétrer parfois la voix du peuple à l'intérieur de vos projets de loi. Laissez-les changer un peu.

Il y a différents articles... Madame, je n'ai pas relevé les... mais j'aurais beaucoup de choses à dire sur les articles de loi. Mais ce que je veux vous dire, c'est que, pour écouter, expliquer et étudier correctement les articles, je pense qu'il est important d'être bien informé, et c'est pour ça qu'il y a la motion qui est devant vous présentement. Merci, M. le ministre.

Le Président (M. Copeman): Merci, M. le député de Saint-Hyacinthe. Je ne vous ai pas interrompu, mais vous avez tombé dans une mauvaise habitude, que vous-même vous avez dénoncée au début de la commission, en vous adressant directement au ministre évidemment. Alors, je vous rappelle simplement. Vous avez même d'ailleurs invoqué un très vibrant plaidoyer pour le respect de notre règlement afin d'éviter des échanges directs, pour qu'on puisse un peu contrôler et avoir un débat serein et constructif autour de cette table.

M. Dion: Puis-je reprendre la parole au moins pour m'excuser?

Le Président (M. Copeman): Oui.

M. Dion: Merci. Ah, c'est déjà fait.

Le Président (M. Copeman): Oui, c'est ça. Comme on dit en anglais, «consider it done, consider it done».

Je crois qu'à ma gauche il ne reste plus de temps d'intervention. Oh, pardon! Je me suis trompé. Je me suis trompé et, évidemment, s'il le désire, je suis prêt à reconnaître le député de Vachon pour une intervention d'un maximum de 10 minutes.

M. Bouchard (Vachon): Je le désire, M. le Président.

Le Président (M. Copeman): Je vous reconnais, M. le député.

M. Camil Bouchard

M. Bouchard (Vachon): Alors, revenons à l'origine de la proposition. La proposition est à l'effet d'entendre devant cette commission la Protectrice du citoyen. De fait, le Protecteur du citoyen ou la Protectrice du citoyen a un mandat, M. le Président, de surveillance de l'administration publique. Et mon collègue du comté de Saint-Hyacinthe a très éloquemment et avec beaucoup de ferveur fait la différence entre l'administration publique et l'appareil législatif, mais il reste que l'administration publique traduit aussi dans un certain nombre de services les desiderata, les décisions qui sont prises par le législateur.

Donc, la Protectrice du citoyen a le mandat de surveillance. Elle intervient lorsqu'elle a «des motifs de croire, lit-on dans son rapport, qu'une personne ou un groupe de personnes a été lésé ou pourrait l'être». Oh là! «Pourrait l'être.» Nous avons la prétention, de ce côté-ci, que les travailleuses, les travailleurs qui sont visés par le projet de loi n° 7 pourraient être, pourraient être lésés dans leurs droits. Et on en a suffisamment parlé antérieurement sans que je recommence à faire la liste très longue des droits qui pourraient être mis en cause dans cette situation, bien que je pourrais me laisser tenter. Mais je ne le ferai pas.

Alors donc, la Protectrice est en même temps chargée de recevoir les plaintes, mais, dans notre cas, c'est plus une question de prévention qu'une question de recevoir des plaintes à propos d'une législation, puisqu'elle n'a pas encore été adoptée. Mais reste que la Protectrice a une mission de prévention. D'ailleurs, elle le dit, s'il y a lieu, la Protectrice «intervient auprès des ministères et des organismes dans le but de corriger la situation préjudiciable et d'éviter qu'elle ne se reproduise. Dans le but de prévenir des préjudices[...] ? elle ? fait des propositions ayant pour but d'éliminer d'éventuelles sources de problèmes.»

Alors, on est dans le topo, là. On est... C'est pertinent que d'inviter la Protectrice du citoyen, puisque non seulement elle réagit à des plaintes de citoyens qui auraient été lésés dans leurs droits étant donné des décisions ou des façons de faire de l'appareil administratif ou des services, mais elle peut aussi, de par sa mission, intervenir préalablement de telle sorte à ce qu'elle puisse éliminer d'éventuelles sources de problèmes. Et, des sources de problèmes, on en voit abondamment dans ce projet de loi n° 7, sur le fondement même du projet. On a évoqué ce problème très grave de soustraire des milliers d'individus à un droit fondamental d'exercice de leur liberté d'association et de la liberté d'exercice syndical.

Alors, il y aurait pertinence. Et je sais, M. le Président, que ça vous concerne, étant donné votre rôle, que je démontre la pertinence. Il y aurait pertinence d'inviter la Protectrice, puisque son action pourrait, de fait, nous protéger contre d'éventuels problèmes dans la gestion des relations de travail au Québec, et des problèmes qui seraient introduits par un projet relativement mineur, non pas que le ministre qui le présente le serait lui-même, mais par un projet relativement mineur qui ne concerne pas directement... ou qui n'est pas porté directement, plutôt, par le ministre du Travail, mais qui le concerne directement.

Alors, vous voyez, M. le Président, à titre d'exemple, il peut y avoir dans les décisions qui sont prises par des gens qui ont une autorité... il peut y avoir de l'arbitraire. Or, l'arbitraire se présente dans des situations où celui ou celle qui est en autorité a un large pouvoir d'interprétation et emprunte à une interprétation ou à une autre, à un moment donné de l'exercice de son pouvoir, étant donné les circonstances, sans qu'il ait pour autant besoin de se justifier, hein? C'est ça, l'arbitraire. C'est qu'on décide. On a le pouvoir de décider, on n'a pas besoin de se justifier, et voilà, c'est fait.

Et, simplement à titre d'analogie ou de démonstration: l'histoire de la cravate, hein, l'histoire de la cravate. Quand je suis arrivé ici tout à l'heure, le président, avant qu'on soit même en séance, a fait deux choses. Il a fait comme un... entre un Protecteur du citoyen et un président dans le fond. On n'était pas encore en séance, donc le règlement ne s'appliquait pas encore, mais il m'a prévenu que, si je n'allais pas mettre ma cravate, j'allais avoir des problèmes. Ce n'était pas une menace, c'était une description des conséquences possibles d'un comportement qui serait inadmissible, totalement inadmissible, hein? Bon. Alors qu'une pointe de chemise qui dépasse d'un habit, ce ne serait pas inconvenant aux yeux du président.

Une voix: À peine coincé.

M. Bouchard (Vachon): À peine coincé. Ce ne serait pas inconvenant aux yeux du Président. Alors, voilà. Alors, voyez, M. le Président, voyez, ce simple incident...

Une voix: ...

n(22 h 50)n

M. Bouchard (Vachon): Oui. Ce simple incident, à titre de métaphore, est très instructif parce que le président, qui n'était pas dans sa séance encore de travail, m'a prévenu que je pourrais avoir des problèmes. Donc, il a fait le Protecteur du citoyen. Il m'a protégé contre d'éventuelles représailles, puis ça aurait été grave pour ma formation que je ne sois pas capable d'intervenir durant...

M. Dion: Bien sûr.

M. Bouchard (Vachon): Hein?

M. Dion: Ah, non, non. Ça, c'est sûr. C'est sûr, j'en rends témoignage.

M. Bouchard (Vachon): Mais, M. le Président, je pensais qu'on n'avait pas le droit de mettre la parole d'un député en doute.

Le Président (M. Copeman): M. le Président... Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Copeman): Je crois que la suspension a servi à pas grand-chose. Excusez-moi. Effectivement, personne n'a le droit de mettre la parole d'un député en doute, mais il y a une vieille tradition ici, dans les régimes parlementaires britanniques: Une parole qui n'est pas enregistrée n'est pas prononcée. Allez-y, M. le député.

M. Bouchard (Vachon): Est-ce que c'est une invitation à me taire, ça, M. le Président? Alors, ça, c'était la première partie de la métaphore ou de l'analogie, le président en tant que Protecteur du citoyen.

La deuxième partie, c'est le président en tant qu'administrateur d'un règlement qui a tout un pouvoir, une autorité non contestable, puisque nous le reconnaissons comme président, et une très large possibilité d'interprétation de ce que c'est qu'une tenue vestimentaire convenable. Alors, aux yeux du président, étant donné le contexte, étant donné l'éducation qu'il a reçue dans sa propre famille, dans sa culture, hein, étant donné peut-être également son taux d'irritation à un moment donné de la séance, étant donné les souvenirs peut-être de collège, étant donné toutes sortes de facteurs... décide qu'une tenue vestimentaire, c'est la cravate. Alors, à partir de son autorité qui n'est surveillée de nulle part autrement que par lui-même d'une certaine façon...

Une voix: ...

M. Bouchard (Vachon): Oui. Oui, peut-être, mais il est seul maître à bord, pour continuer dans l'analogie de mon collègue de Saint-Hyacinthe. Alors, à partir tout simplement de sa capacité d'autorité, il a décidé d'imposer arbitrairement...

Une voix: ...

M. Bouchard (Vachon): Pas tout à fait, puisqu'il l'a fait d'une façon que je dirais «benevolent» en anglais avant même que la séance ne débute, mais il a quand même décidé d'imposer un critère pas universel, que je dirais un critère particulier, probablement particulier à son éducation, à sa culture, et il l'a fait d'une façon incontestable, incontestable.

Et c'est la caractéristique...

Une voix: ...son enfance.

M. Bouchard (Vachon): Non, non, mais c'est la caractéristique même... Écoutez, il y a un jugement qui s'est fait... Pas un jugement... il y a un cas qui a été rapporté, là, à la Protectrice du citoyen à propos ? et ça va intéresser le ministre, M. le Président ? à propos de l'esturgeon noir. Étant donné le rapport avec le caviar, etc., je suis sûr que le ministre va écouter ça attentivement.

Alors, la Protectrice du citoyen a eu un rapport devant elle d'une situation où on imposait deux critères pour mettre fin à la saison de pêche dans le fleuve Saint-Laurent. Malheureusement, je ne pense pas avoir le temps de vous raconter ce fait-là au complet, mais les deux critères, c'était, d'une part, le poids et, d'autre part, le nombre de poissons. Alors, imaginez la déconfiture de ce pêcheur qui, un beau matin, se présente dans l'estuaire pour pêcher l'esturgeon tout bonnement et se voit empêché de le faire, se voit empêché de le faire parce que le nombre, parce que le poids avaient été atteints, alors que le nombre de prises était inférieur à celui qui avait été prévu par le législateur. Le législateur avait dit 1 400 prises, 15 000 kilos, il y avait seulement 843 esturgeons de... Alors, vous voyez très bien, M. le Président, qu'on peut aller très loin avec le Protecteur du citoyen.

Le Président (M. Copeman): Très bien, M. le député. Merci. Est-ce qu'il y a d'autres députés qui désirent intervenir à ce stade-ci? Non? Bon. Alors, je mets aux voix la motion, la motion du député de Borduas qui se lit comme suit:

«Il est proposé qu'en vertu de l'article 244 de nos règles de procédure la commission des affaires sociales tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 7, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux, des consultations particulières quant à tous les articles dudit projet de loi et qu'à cette fin elle entende la Protectrice du citoyen.»

M. Charbonneau: M. le Président.

Le Président (M. Copeman): Monsieur... Oui, M. le député de...

M. Charbonneau: Comme c'est la possibilité de le faire, je voudrais demander un vote par appel nominal.

Le Président (M. Copeman): Très bien. Alors, étant donné qu'un vote par appel nominal est demandé, je demanderais à la secrétaire de la commission de procéder au vote.

La Secrétaire: M. Charbonneau (Borduas)?

M. Charbonneau: Je vais voter en faveur de ma motion, Mme la secrétaire.

La Secrétaire: Mme Léger (Pointe-aux-Trembles)?

Mme Léger: Je vais accompagner le député de Borduas. D'accord. Pour.

La Secrétaire: M. Bouchard (Vachon)?

M. Bouchard (Vachon): Oui. Pour, pour.

La Secrétaire: M. Dion (Saint-Hyacinthe)?

M. Dion: Pour.

La Secrétaire: M. Couillard (Mont-Royal)?

M. Couillard: Contre.

La Secrétaire: M. Williams (Nelligan)?

M. Williams: Contre, contre.

La Secrétaire: Mme Charlebois (Soulanges)?

Mme Charlebois: Contre.

La Secrétaire: M. Dubuc (La Prairie)?

M. Dubuc: Contre, contre.

La Secrétaire: M. Auclair (Vimont)?

M. Auclair: Parce que c'est le député de Borduas, contre. Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

La Secrétaire: M. Bernard (Rouyn-Noranda? Témiscamingue)?

M. Bernard: Contre.

La Secrétaire: M. le Président?

Le Président (M. Copeman): Contre. Alors, la motion est rejetée. M. le député de Nelligan, oui. Oui, allez-y, M. le député de Nelligan.

Motion proposant de passer immédiatement
à l'étude détaillée du projet de loi

M. Williams: Merci beaucoup, M. le Président. Je voudrais proposer la motion suivante:

«Que la commission des affaires sociales procède immédiatement à l'étude de l'article 1 et des articles suivants du projet de loi n° 7, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux.» Est-ce que...

Le Président (M. Copeman): J'aimerais avoir copie si...

M. Williams: J'ai quelques copies de préparées.

Débat sur la recevabilité

Le Président (M. Copeman): Très bien. Est-ce que, M. le député, vous désirez plaider la recevabilité de votre motion?

M. Russell Williams

M. Williams: Avec votre permission, M. le Président, je voudrais utiliser quelques minutes du temps de la commission d'expliquer pourquoi j'ai proposé la motion que j'ai juste proposée. Je voudrais peut-être commencer avec la dernière intervention que j'ai juste entendue, une intervention fort...

M. Bouchard (Vachon): Pertinente.

M. Williams: Non, je ne peux pas dire pertinente, mais fort intéressante sur les cravates et les saisons des pêches. Particulièrement, cravate. Et le procès-verbal va bel et bien expliquer, montrer que nous avons eu 10 minutes de... une intervention fort intéressante, mais particulièrement sur une cravate.

M. Bouchard (Vachon): Une métaphore.

M. Williams: Une métaphore? Whatever, là, mais c'était sur une cravate. Deuxième chose...

M. Bouchard (Vachon): Non, une métaphore.

M. Williams: ...n'oubliez pas, n'oubliez pas, M. le Président, que plusieurs des députés devant moi, incluant les députés de Pointe-aux-Trembles et Saint-Hyacinthe, ont bel et bien dit qu'elle et il veulent étudier les articles de la loi. Vous avez dit ça. Peut-être pas tout de suite, mais...

M. Dion: Tôt ou tard.

M. Williams: Je dis que vous...

Une voix: Bien, il est tard.

M. Williams: Ça commence à être tard. M. le Président.

Le Président (M. Copeman): Oui, M. le député.

M. Williams: Les députés ont bel et bien dit ça. N'oubliez pas aussi que le Parti québécois a eu une chance, en 2002, de même pas juste étudier les articles de la loi, mais ils ont étudié ça au Conseil des ministres, au Comité ministériel, au Comité de législation. Ils ont tout étudié ça. Je ne citerai pas encore le député de Borduas qui a dit qu'ils ont étudié ça, mais pas vraiment, pas vraiment, et surtout, surtout jamais vraiment discuté. Il dit qu'il n'a pas été discuté de fond, mais ils ont eu cette opportunité.

De plus, M. le Président, le député de Saint-Hyacinthe a parlé de notre fonction publique. C'est la même fonction publique, et ils ont dit que c'est de haut calibre, je pense. Moi, je peux dire même brillante. Comme nous avons dit, ils ont préparé un projet de loi fort intéressant. Avec ça, c'est le même... En principe, c'est le même projet de loi que nous avons vu en 2002: 151.

J'ai déjà entendu la dernière intervention qui a parlé en métaphore de la cravate. Nous avons déjà une chance... Le Parti québécois a déjà eu une chance, sur le Conseil, d'étudier le projet de loi n° 151.

Je n'ai pas le procès-verbal de la dernière intervention de Saint-Hyacinthe, mais il a plus ou moins dit qu'il y a beaucoup de choses à dire sur les articles de la loi. Je voudrais lui donner la chance. Et la députée de Pointe-aux-Trembles a même souvent... dans les motions d'entendre les groupes, a glissé un peu dans les discussions des articles par article.

n(23 heures)n

Avec ça, il me semble, M. le Président, même le côté de l'opposition veut commencer l'article par article. Et, il n'y a aucun doute, M. le Président, de commencer une étude d'un projet de loi article par article, ce n'est pas bâillonner, c'est donner la chance de parler sur le fond de ce projet de loi.

Mais j'avais vraiment espéré ce soir, par l'intervention du député de Borduas, et je cite... Oui, M. le député de Borduas, je vous cite de plus en plus souvent. Et le député, cet après-midi, quand j'ai discuté ça que vous avez dans le passé fait les interventions très franches, le député de Vachon était un peu étonné, un peu surpris, quand... «Nomme les dates.» Parce qu'il a pensé peut-être que vous ne faites pas souvent les députés francs. Mais, moi, je vous connais pour les années, les années. J'ai apprécié beaucoup votre franchise, votre intervention tellement candide. Parce que j'ai parlé cet après-midi... vous n'avez pas une chance de répliquer cet après-midi, mais j'ai parlé du mot «filibuster». J'ai même eu quelques définitions, je ne le répète pas ce soir. Mais j'ai parlé des faits...

Une voix: ...

M. Williams: Excusez-moi, là, pas trop vite, pas trop vite, pas trop vite, cher ami. Parce que le député de Borduas a dit: Il y a tout le problème... Et je vais avoir le plaisir de citer mon ami, le député de Borduas qui a parlé avec franchise, avec une ouverture que je n'ai pas vu cet après-midi. Il a...

Une voix: ...

M. Williams: Ah, j'espère que, votre parti, il était... Oui, on a fait un filibuster, c'est un filibuster, c'est de l'obstruction, c'est des délais. Non, je pense qu'il a parlé pour votre équipe, M. le député de Vachon. En tout cas...

Des voix: ...

Le Président (M. Copeman): S'il vous plaît!

M. Williams: Je m'excuse, M. le Président. Et j'ai même dit: S'il doit régler ça en caucus, je lui souhaite bonne chance de régler les différentes opinions en caucus. J'ai entendu... Ce n'est pas facile en caucus, mais je voudrais être... en public...

Une voix: ...

M. Williams: Ah oui, il faut que je dise que le député de Borduas a dit que c'est bel et bien... c'est un filibuster. Il est en train de faire... Il a le droit de faire ça. Je n'étais pas scandalisé cet après-midi. J'ai juste dit: Qu'est-ce qui se passe ici, en cette commission parlementaire? Les autres ont dit: Non, non, non, non, non, ce n'est pas ça. Merci, M. le député de... merci M. le Président, pour la franchise du député de Borduas, parce que, oui, il utilise les règles, il a le droit de faire ça, mais c'est de l'obstruction, c'est un délai, c'est retarder. Et, pour cette raison, je pense que c'est assez. Si c'était vraiment d'autre chose, je pense, peut-être, je n'aurais pas nécessairement déposé ça ce soir. Mais avec... Un, plusieurs députés ont déjà dit qu'ils souhaitent entrer dans le débat sur les articles; deux, ils ont déjà étudié le projet de loi n° 151. Mais, d'abord et avant tout, après l'intervention du député de Borduas qui a admis que...

Une voix: Il avoue.

M. Bouchard (Vachon): Non, non...

M. Williams: Oui, oui. Et il a dit: C'est la stratégie d'un filibuster de l'équipe. Et, avec ça, c'est de l'obstruction, c'est un délai. Je voudrais avoir un débat sur le fond du projet de loi, et la meilleure façon de faire ça, il n'y a aucun bâillon dans ma motion, je voudrais commencer l'article 1. Je voudrais commencer dans le plus bref délai parce que le temps presse. Et je voudrais mieux entendre l'opposition sur le fond, pourquoi ils étaient pour le projet de loi quand ils étaient au pouvoir et maintenant contre le projet de loi dans l'opposition. Et merci, M. le député de Borduas.

Le Président (M. Copeman): Merci, M. le député de Nelligan. Est-ce qu'il y a d'autres députés qui désirent intervenir sur la recevabilité de la motion? Mme la députée de Pointe-aux-Trembles.

Écoutez, chers collègues, normalement, ça revient à la présidence de statuer à quel point ils sont assez éclairés pour prendre une décision. Moi, je suis... Pour l'instant, là, je suis disposé peut-être à entendre deux interventions de chaque bord. Évidemment, à la suite de ça, si vraiment il y a des députés qui désirent ajouter des éléments nouveaux, on verra, mais... Alors, j'aurais tendance à croire que, peut-être avec deux interventions de chaque bord, au maximum, dépendamment de la teneur des événements, je serais assez éclairé pour prendre une décision.

M. Williams: ...à temps égal?

Le Président (M. Copeman): Oui, oui, à peu près temps égal, M. le député de Nelligan. Bien sûr, on ne souhaite pas bâillonner personne ici, en cette commission. Mme la députée de Pointe-aux-Trembles.

Mme Nicole Léger

Mme Léger: Oui, M. le Président. Alors, nous parlons sur la recevabilité de cette motion là. Il est absolument pour nous inadéquat d'arriver présentement avec une motion de vouloir étudier l'article 1 tel quel sans que l'opposition ait eu le temps de s'exprimer sur toutes les personnes nécessairement qu'elle aurait voulu voir ici, en commission parlementaire.

Alors, il est difficile d'entendre, M. le Président, le député de Nelligan nous apporter cette motion-là de procéder immédiatement à l'article 1, un projet de loi qui a huit articles, M. le Président. Il nous parle de vouloir aller sur le fond. Je vous mets au défi, M. le Président, de relire tout ce qui s'est dit ici de l'opposition officielle et le pourquoi que nous voulons entendre les gens. Un ministre du Travail, ce n'est pas n'importe quoi, ça, M. le Président, hein! C'est un collègue du ministre de la Santé et des services sociaux que nous avons demandé d'entendre ici. On a demandé aussi le Pr Jean Bernier, qui a écrit de nombreux articles, qui a fait le rapport Bernier qui a été soumis au gouvernement précédent, que... Je suis convaincue que le ministre aurait des choses à dire sur le rapport Jean Bernier qui nous parle des faux occasionnels, qui nous parle de toutes les relations de travail, la relation d'emploi entre l'employeur et l'employé. On a demandé une protectrice du citoyen, la Commission des normes du travail, la Commission des relations de travail, la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, M. le Président. On a encore d'autres personnes qu'il serait important d'entendre ici, en commission parlementaire.

Alors, quand on parle presque d'obstruction que le député de Nelligan nous allègue ici, de ce côté-ci de la commission parlementaire, M. le Président, je ne sais pas qu'est-ce que c'est, si l'obstruction ce n'est pas de nous empêcher ici de faire des motions préliminaires pour écouter les gens puis d'écouter davantage.

Alors, s'il parle de fond, d'aller sur le fond du projet de loi tel quel, je pense que ça aurait été intéressant d'entendre le ministre du Travail, ça aurait été intéressant d'entendre Jean Bernier qui est... s'il y a bien une personne réputée pour aller dans le fond des choses de ce que c'est, les relations de travail au Québec. Je ne sais pas ce que le député de Nelligan a en tête quand il nous parle... quand il nous parle d'obstruction, quand c'est plutôt le contraire qui se passe ici.

Alors, pour moi, M. le Président, elle n'est pas du tout recevable, la motion du député de Nelligan. Je veux bien croire qu'il veut aller à l'article 1, c'est un projet de loi qui a huit articles, et c'est fondamental, ce projet de loi, ces articles-là qui sont devant nous. On a l'occasion d'avoir le temps. On a un processus parlementaire qui nous permet de faire des motions préliminaires. On a un processus parlementaire qui nous donne l'occasion d'aller faire l'article 1 jusqu'à l'article 8. On va prendre le temps de les faire, les articles 1, M. le Président. Il n'y a rien qui nous empêche ici de faire l'article 1, M. le Président, puis l'article 2, puis l'article 3. On va les faire, les articles. Un après l'autre qu'on va les faire.

Alors, c'est sûr qu'on est ici pour étudier. L'opposition officielle se pose des questions sur le projet de loi n° 7. Entendons... On peut parler pour ceux qu'on ne veut pas entendre, pour qu'au moins l'opposition officielle parle pour eux à ce moment-là.

Alors, pour moi, M. le Président, ce n'est absolument pas recevable, cette motion-là. Puis qu'on nous donne le temps de vouloir écouter les personnes qu'on aimerait amener ici pour venir faire ces... pour venir nous donner leur expertise et ce qu'ils... comment ils voient la suite des choses. Parce que ce n'est pas n'importe quel projet, là, de loi qu'on a devant nous, M. le Président, ça remet en question tout le statut du travailleur autonome. Il remet en question aussi tous les précédents, les précédents que ce projet de loi va apporter. Les précédents, les gens parlent même: Est-ce que ce sera une attitude du gouvernement à chaque fois pour nier certains droits et de statuer puis d'adopter un projet de loi comme on a devant nous ici présentement, puis que ça va devenir une habitude de faire ce genre de projet de loi, puis qu'on n'entende pas les motions préliminaires?

Pourtant, M. le Président, le député de Nelligan est habitué. Ça fait des années qu'il est ici, au Parlement. Et je me souviens très bien aussi des motions préliminaires que lui aussi a apportées puis qu'il y a des gens... Il a toujours voulu... Il a toujours été conscien-cieux, M. le Président, le député de Nelligan, de vouloir aller au fond des choses. Alors, je ne vois pas pourquoi d'abord qu'il a refusé ? et tous les collègues ministériels ont refusé ? d'entendre toutes les personnes qu'on a proposées ici, M. le Président.

Alors, si on veut parler du fond des choses, M. le Président, un des droits, comme parlementaires, c'est celui de faire des motions préliminaires et celui de vouloir entendre des gens pour venir davantage nous exprimer leur opinion, leur expertise et comment ils voient dans leur quotidien, eux qui ont l'habitude d'entendre les gens, qui ont l'habitude de parler...

J'avais encore, M. le Président, la protection des malades qui aurait été intéressant, le Conseil pour la protection des malades, le regroupement des RIRTF, rattachés au CRDI de Québec, qui sont vraiment dans le coeur, dans le coeur du projet de loi qu'on a ici devant nous, qu'il aurait été intéressant de les entendre.

Le Président (M. Copeman): Merci, madame...

Mme Léger: Alors, M. le Président, je trouve que cette motion-là, elle est pas mal trop tôt, elle est très prématurée. Et je trouve dommage qu'on ne veuille pas entendre des gens qui ont des choses à dire ici, en commission parlementaire.

n(23 h 10)n

Le Président (M. Copeman): Merci, Mme la députée. Toujours sur la recevabilité de la motion, est-ce que quelqu'un à ma droite ou... M. le député de Borduas.

M. Jean-Pierre Charbonneau

M. Charbonneau: M. le Président, je pense qu'à cette étape-ci cette motion-là est irrecevable parce que, d'abord, il y a une jurisprudence qui a été établie. Et, encore récemment, dans une autre commission ? je pense que, si mes informations sont bonnes, c'est la commission des institutions... où on a rappelé que, finalement, la règle non écrite mais une espèce de jurisprudence, c'est qu'il y a au moins trois séances qui peuvent être consacrées à l'étude de motions préliminaires comme celles que mes collègues et moi avons déposées depuis le début des travaux de la commission. Et c'est important parce que, finalement, c'est le droit de l'opposition, pour les raisons qui lui appartiennent, et on les a expliquées, je pense, longuement, à chaque fois que nous sommes intervenus sur les différentes motions, donc c'est le droit fondamental des députés de l'opposition d'utiliser du temps de travaux parlementaires, du travail en commission, pour présenter des motions préliminaires avant d'entreprendre l'étude détaillée.

Si... Dans le fond, qu'est-ce qui presse à ce point-là? Il n'y a rien qui presse, sauf, dans le fond, la volonté du gouvernement d'avoir tous ses projets de loi avant Noël. Si ce n'est pas ça, là, bien, qu'on respecte la tradition puis qu'on respecte l'usage qui veut que l'opposition, qui est déjà minoritaire dans le Parlement, et dans un système parlementaire où le gouvernement est en plus dans le Parlement, où les ministres sont membres du Parlement, ce qui augmente le poids de l'Exécutif sur le pouvoir législatif, alors il y a... La tradition dans ce système parlementaire là veut qu'on fasse beaucoup attention aux droits de l'opposition, aux temps de parole de l'opposition, aux usages et aux jurisprudences qui ont consacré le droit strict des députés de l'opposition d'utiliser un temps particulier pour déposer des motions, débattre de points de vue avant d'entreprendre l'étude détaillée d'un projet de loi. Et nous avons le droit de vouloir faire ça avant d'entreprendre l'étude article par article.

Dans un autre contexte, sur d'autres questions, l'opposition peut aussi très légitimement, c'est son droit, décider, de concert avec le côté ministériel, d'aller immédiatement à l'étude article par article. Mais là on a choisi d'utiliser le droit que nous avons de présenter des motions, de les débattre, d'essayer de convaincre le côté ministériel et le ministre qui siège comme membre de la commission pour les fins de l'étude détaillée du projet de loi. Nous avons la responsabilité et le droit de tenter de les convaincre que leur façon d'aborder l'étude n'est pas acceptable. Nous avons le droit de tenter de les convaincre et, sinon eux, tout au moins de marquer le coup dans l'opinion publique.

Parce que le débat est public, même si ce soir, on n'a pas l'impression que ça l'est parce qu'on est dans une salle de commission un peu particulière où les places réservées au public sont peu nombreuses et où la télévision est absente, donc les travaux ne sont pas télédiffusés. Mais une chose est claire, c'est que nos débats sont enregistrés et, éventuellement, que ce soit demain, dans quelques jours, les médias peuvent s'intéresser aux travaux de la commission, indiquer que les députés de l'opposition ont choisi de plaider plusieurs motions.

Pourquoi encore? Et ma collègue de Pointe-aux-Trembles a été très claire, parce qu'il y a une pertinence pour chacun des organismes qu'on a voulu entendre et qu'à... Non seulement il y a une pertinence, mais ce qui est choquant, c'est de voir que... Peut-être qu'il y a un degré ou un niveau de pertinence, on pourrait dire... Parmi la liste des motions que l'opposition a présentées, il y a certainement des motions qui étaient peut-être ... qui auraient été à prioriser, le problème, c'est qu'on n'a eu aucuns signaux positifs de l'autre côté.

Écoutez, s'il y a quelqu'un qui aurait dû être entendu, c'est M. Bernier. Il fait un rapport, toute son approche est liée aux décisions administratives qui sont à l'origine, dans le fond, du projet de loi qu'on retrouve devant nous, puis on décide de ne pas l'entendre. Moi, je dis: Il y a quelque chose de complètement aberrant, inacceptable. Et on peut bien s'amuser puis rigoler de part et d'autre puis, je veux dire, c'est de bonne guerre parce qu'on n'est pas obligé, je veux dire, de se crisper constamment, mais il y a une chose qui est claire, c'est que ce projet de loi concerne des droits fondamentaux, et les gens qu'on voulait entendre puis qu'on... en présentant nos motions, sont liés aux problématiques qui sont concernés par le projet de loi.

Et donc, encore une fois, cette motion-là est irrecevable parce qu'elle va contre la jurisprudence. Elle brime un droit qui est consacré de l'opposition d'utiliser un temps raisonnable. Ça ne fait pas 15 séances que nous faisons pour présenter des motions préliminaires, on en est à la troisième. Le minimum qu'on pourrait faire, c'est de nous laisser faire en sorte que la troisième séance se déroule comme elle devrait se dérouler, puis qu'on ait le temps, puis qu'on termine la séance en nous laissant débattre des motions qu'on veut présenter.

Ils ont la majorité, ils peuvent les battre, les motions. Une chose est claire, c'est que, nous, on veut marquer le point puis on veut clairement indiquer que les organismes qu'on voulait entendre, ils sont... ils étaient justifiés d'être entendus. Et ce n'est pas acceptable et normal qu'on ait refusé systématiquement toutes les motions qu'on a présentées. Alors, c'est ça, là aussi la réalité. La réalité, c'est que nous avons le droit de faire ce que nous faisons. Nous utilisons notre droit. Nous sommes minoritaires dans le Parlement, et la tradition parlementaire veut que le président et que les décisions de jurisprudence penchent en faveur du droit des minorités puis du droit de parole des députés de l'Assemblée nationale.

Une voix: Ça, c'est le principe de la différence.

Le Président (M. Copeman): Merci, M. le député de Borduas. M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Philippe Couillard

M. Couillard: Oui, M. le Président. Bien sûr, pour un néophyte comme moi, j'aurais besoin de votre guidance experte dans ce débat un peu sibyllin, là. Et ce qui m'apparaît quand même clair, c'est qu'on est effectivement rendu à la fin de la troisième séance sur ce thème, donc plus de 11 heures de débat ? on aura le décompte plus exact éventuellement ? et on n'a toujours pas commencé l'étude article par article, alors que de nombreux arguments qui ont été mentionnés pendant les différentes motions consistaient précisément en des débats de fond sur plusieurs articles du projet de loi qu'il aurait été fort utile de faire dans le cadre de véritables débats de fond article par article du projet de loi.

Et, bien sûr, c'est le choix de l'opposition de procéder de cette façon, et ce choix est tout à fait légitime, et j'irais dans le sens du député de Borduas, sauf que, et là je crois, M. le Président, que c'est un point majeur sur lequel vous devrez porter votre attention, plus tôt dans les débats aujourd'hui, le député de Borduas a clairement indiqué qu'«on ? pas "je", "on" ? fait du filibuster, de l'obstruction». Et ça, ce sera...

M. Charbonneau: On utilise notre droit de parole, comme le règlement le permet.

M. Couillard: ...et ça ce sera à retrouver, si nécessaire, au Journal des débats. Et peut-être voudrez-vous prendre une suspension pour consulter le Journal des débats, étant donné la gravité des propos qui sont mentionnés ici. Donc, à partir du moment où on est dans ce cadre-là, on ne peut plus vraiment parler de bonne foi ou de procédure normale. Et c'est... Et je m'interroge énormément sur ce type de remarques là qui, à ce que je sache, ont rarement été prononcées dans cette enceinte, M. le Président. Alors, je m'en remets à votre sagesse.

M. Charbonneau: M. le Président, ça, c'est une question d'éclairage pour le...

Le Président (M. Copeman): Oui, M. le député de Borduas.

M. Charbonneau: ...ce ne sera pas très long, là, mais je voudrais, je pense, donner une réplique à ce que le ministre vient de dire. Bon, il reconnaissait, puis je ne veux pas lui en faire grief, là, qu'il est un peu néophyte dans la vie parlementaire. Bon, moi, disons que c'est un peu l'inverse, je suis un des vétérans de l'Assemblée. Et ce qu'il n'a pas l'air à saisir et ce que j'ai dit plus tôt, c'est que c'est notre façon d'utiliser notre droit de parole.

Dans le système parlementaire britannique, l'opposition a un droit de parole, et ce n'est pas illégitime d'utiliser notre droit de parole et de le faire comme nous le faisons. Qu'on utilise les qualificatifs qu'on voudra, nous faisons ce que nous avons le droit de faire et nous le faisons pour de bonnes raisons.

Le Président (M. Copeman): M. le député, je comprends très bien, et, d'ailleurs, avec beaucoup de respect, ce n'est pas au ministre de la Santé et des Services sociaux de saisir ça, mais c'est à la présidence, parce que c'est, et ça, on en convient, je pense, c'est ultimement la présidence qui doit décider de cette question-là. Et je comprends très bien votre argumentation, M. le député de Borduas.

M. Williams: ...clarification.

Le Président (M. Copeman): Oui, allez-y, M. le député de Nelligan.

M. Williams: Le député de Borduas a cherché une clarification. Il a bel et bien dit que c'est un filibuster: «obstruction», «délai». Il peut essayer de changer le sens, mais c'est ça qu'il a dit. Vous pouvez consulter le procès-verbal, si vous voulez.

Le Président (M. Copeman): Oui, on verra, là, en temps et lieu. J'étais ici, j'étais dans le fauteuil à ce moment-là, alors j'ai bien écouté les paroles du député de Borduas. Est-ce qu'il y a d'autres députés qui désirent ajouter des éléments nouveaux, là? J'insiste beaucoup là-dessus, là. On a eu deux de chaque part. Mais des éléments nouveaux. M. le député de Chicoutimi, oui.

M. Stéphane Bédard

M. Bédard: Ça va être très bref, M. le Président. Et effectivement, je me réfère aussi à votre sagesse. Vous êtes le président de cette commission et vous avez, M. le Président...

Des voix: ...

M. Bédard: ...et vous avez, M. le Président, toute ma...

M. Williams: Mais question de règlement.

M. Bédard: Allez-y.

Le Président (M. Copeman): Oui, M. le député de Nelligan. Un instant, s'il vous plaît!

n(23 h 20)n

M. Williams: Je m'excuse. Nous avons commencé le débat sur la recevabilité de la motion et nous avons décidé qu'il va y avoir deux interventions sur chaque côté. Nous avons quatre membres de la commission aujourd'hui. Et, aujourd'hui, nous avons eu quatre membres. Il y a un cinquième député qui est ici, qui n'est pas membre de la commission. Nous avons bel et bien dit: C'est deux. Nous avons eu deux, vous avez eu deux. Même le député de Borduas et moi avons eu une certaine souplesse parce que le président nous l'a fait le clarifier. C'est ça que vous avez dit. Je voudrais que les deux côtés respectent qu'est-ce que vous avez déjà dit sur les règles de...

Une voix: ...sur la question de règlement.

Le Président (M. Copeman): Bien, écoutez...

M. Bédard: ...pas sur la recevabilité.

Le Président (M. Copeman): Non. Un instant, M. le député de Chicoutimi. Ça a été vraiment... Pas strictement question de règlement, M. le député de Nelligan. J'ai indiqué que j'étais disposé au début d'entendre deux députés de chaque côté mais, compte tenu des interventions, je pourrais... Et j'étais assez clair là-dessus: il y avait une certaine ouverture à poursuivre le débat sur la recevabilité. J'insiste beaucoup, M. le député de Chicoutimi, que vous m'amenez des éléments nouveaux... des éléments nouveaux pour que je puisse prendre une décision éclairée. Brièvement, M. le député de Chicoutimi, s'il vous plaît. M. le...

M. Bédard: Et très brièvement...

M. Williams: Est-ce que ça prend le consentement?

M. Bédard: Et très brièvement... Non, bien...

Le Président (M. Copeman): Non...

M. Bédard: ...sur la question de règlement. Je vais parler...

Le Président (M. Copeman): Non, non. Et écoutez...

M. Bédard: ...tout d'abord sur la question de règlement...

Le Président (M. Copeman): Non, non, mais...

M. Bédard: ...parce qu'on veut brimer mon droit de parole. M. le Président.

Le Président (M. Copeman): M. le député de Chicoutimi.

M. Bédard: Il y a une règle générale, mais permettez-moi...

Le Président (M. Copeman): Monsieur... Non.

M. Bédard: ...parce qu'il y a une question de règlement...

Le Président (M. Copeman): Monsieur, M. le...

M. Bédard: M. le Président.

Le Président (M. Copeman): M. le député de Chicoutimi.

M. Bédard: J'ai le droit quand même à une réplique sur le droit de parole.

Le Président (M. Copeman): C'est moi qui ait la parole à ce moment-ci.

M. Bédard: Alors, je vous la donne, mais...

Le Président (M. Copeman): Non, non. Ce n'est pas à vous...

M. Bédard: ...il y a quelqu'un ici qui veut brimer...

Le Président (M. Copeman): Non.

M. Bédard: ...mon droit de parole.

Le Président (M. Copeman): M. le député de Chicoutimi.

M. Bédard: Ce n'est pas n'importe qui, c'est un député.

Le Président (M. Copeman): Vous êtes un parlementaire assez expérimenté...

M. Bédard: Moins que vous, moins que vous d'ailleurs...

Le Président (M. Copeman): ...vous savez... vous savez...

M. Bédard: ...et moins que le député de Nelligan.

Le Président (M. Copeman): ... que ce n'est pas à vous de me donner la parole.

M. Bédard: Non. Je...

Le Président (M. Copeman): C'est la présidence qui donne la parole au député. La question du règlement n'en était pas...

M. Bédard: Par contre...

Le Président (M. Copeman): M. le député de Chicoutimi.

M. Bédard: ...c'est une règle, lorsque quelqu'un fait appel au règlement...

Le Président (M. Copeman): Je vous demande...

M. Bédard: J'ai le droit de répliquer à des...

Le Président (M. Copeman): Je vous demande...

M. Bédard: ...à des questions de règlement.

Le Président (M. Copeman): ...de...

M. Bédard: Ça, c'est une règle qui me semble...

Le Président (M. Copeman): M. le député de Chicoutimi.

M. Bédard: C'est une règle de justice naturelle, M. le Président. Et vous devez appliquer ici...

Le Président (M. Copeman): M. le...

M. Bédard: ...en cette Assemblée, les règles de justice naturelle.

Le Président (M. Copeman): M. le... je vous rappelle à l'ordre...

M. Bédard: Et vous le savez.

Le Président (M. Copeman): ...pour la première fois, M. le député de Chicoutimi.

M. Bédard: Alors, et M. le Président...

Le Président (M. Copeman): Je... Je vous rappelle à l'ordre...

M. Bédard: ...je vous rappelle aussi à l'ordre...

Le Président (M. Copeman): ...pour la première fois.

M. Bédard: ...sur la question des règles de justice naturelle...

Le Président (M. Copeman): ...M. le député de Chicoutimi.

M. Bédard: ...sur les règles de justice naturelle.

Le Président (M. Copeman): J'étais en train de dire que la question soulevée, la question de règlement soulevée par le député de Nelligan n'en était pas une, compte tenu du fait...

M. Bédard: ...

Le Président (M. Copeman): Non, mais si vous m'écoutez, M. le député de Chicoutimi, ça va aller mieux. je vous l'assure.

M. Bédard: J'adore vous écouter.

Le Président (M. Copeman): Alors, compte tenu que ce que j'ai dit au départ... J'étais disposé à entendre deux de chaque côté mais compte tenu de... Dépendamment des interventions, j'étais disposé d'entendre d'autres députés. Je vous ai reconnu, M. le député de Chicoutimi. M. le député de Chicoutimi n'est membre d'aucune commission parlementaire. Alors, en vertu de l'article 132 de notre règlement, M. le député de Chicoutimi a droit de parole à n'importe quel moment dans n'importe quelle commission. Je suis très conscient de cela et je vous le dis, M. le député de Chicoutimi, que si vous m'aurez donné l'occasion de m'expliquer, j'aurais arrivé à la même conclusion que je viens de donner, là. Je vous ai reconnu pour une brève intervention pour tenter de m'éclairer sur la question de recevabilité de la motion du député de Nelligan et je m'attends à ce que vous amenez des éléments nouveaux.

M. Bédard: Parfait, M. le Président. Et, simplement pour briser le quiproquo que nous avons eu sur l'article 132, c'est le même argument que je vous aurais amené. Et pourquoi je voulais répliquer seulement sur cette question? et je vais être très bref, c'est simplement pour vous éviter... Vous auriez pu prendre une décision et commettre une erreur en ne connaissant pas cet article. Mais, comme vous le connaissez, je n'aurais fait...

Le Président (M. Copeman): M. le député de Chicoutimi.

M. Bédard: ...que soulever cet article. Alors...

Le Président (M. Copeman): Là j'ai été assez patient.

M. Bédard: ...et c'était mon but...

Le Président (M. Copeman): Là, je...

M. Bédard: Non, là, M. le Président, il ne faudrait pas...

Le Président (M. Copeman): ...je vous interromps à ce moment-ci.

M. Bédard: Vous pouvez m'interrompre.

Le Président (M. Copeman): Je vous interromps.

M. Bédard: Vous pouvez m'interrompre.

Le Président (M. Copeman): J'ai été assez patient et je comprends que vous êtes un visiteur bienvenu à cette commission.

M. Bédard: Et je suis heureux de le savoir.

Le Président (M. Copeman): Je vous suggère de parler avec vos collègues, à savoir si le président connaît les règlements ou pas. Vous serez grandement rassuré, je pense, par les commentaires de vos collègues. Alors, sans plus tarder, M. le député de Chicoutimi, je vous demande d'aller directement à la question sur la recevabilité de la motion. Est-ce que c'est clair?

M. Bédard: Totalement, M. le Président.

Le Président (M. Copeman): Très bien.

M. Bédard: Mais, moi, moi, je suis très serein, ce soir, là, et j'espère que ma sérénité est partagée par la vôtre, là. C'est la première fois que j'interviens à cette commission, il ne faudrait pas, vous l'avez dit, on ne souhaite pas bâillonner personne et, j'espère, ça inclut le député de Chicoutimi. Alors... Et je pense que j'ai le droit effectivement de faire valoir ma question de règlement. Tout le monde a plaidé. J'ai écouté le député de Nelligan qui est revenu à deux reprises, et nous sommes ici d'ailleurs pour faire valoir notre droit de parole, et je vais le faire.

Alors, sur la question ? et je suis déçu d'ailleurs que le député de Nelligan ait tenté de me soustraire de mon droit de parole.

Alors, quant à... et très rapidement sur la...

M. Williams: Je m'excuse, hein. C'est une question de règlement.

Le Président (M. Copeman): Sur une question de règlement...

M. Williams: Je n'ai pas...

Le Président (M. Copeman): M. le député de Nelligan.

M. Williams: Je n'essaie rien, je n'essaie rien. J'ai voulu...

Le Président (M. Copeman): M. le député, si vous avez une question de règlement...

M. Williams: Je m'excuse, là, monsieur...

Le Président (M. Copeman): ...vous l'adressez à moi...

M. Williams: Oui, oui. Mais...

Le Président (M. Copeman): ...je vais en disposer.

M. Williams: Oui. Je voudrais écouter le député, parce que je n'ai jamais essayé de faire ça. Pas du tout, là. Et j'espère qu'il va entrer tout de suite dans son argument parce que je n'ai jamais... J'ai demandé une question: est-ce qu'il a le droit? Parce qu'il est juste arrivé. Comme vous avez dit, il est certainement bienvenu à la commission. Mais j'ai voulu juste savoir: est-ce qu'il a le droit sans le consentement? Parce que j'ai voulu lui donner le consentement pour parler, mais j'ai voulu vérifier: est-ce que c'est nécessaire ou non? C'est tout, là. S'il vous plaît, n'interprète pas mes affaires, là.

Le Président (M. Copeman): M. le député de Chicoutimi, on revient, je l'espère ardemment.

M. Bédard: Je n'ai pas voulu prêter d'intentions à mon collègue, M. le Président. Alors, c'est le cas. Et je suis content de voir effectivement ...

Le Président (M. Copeman): Très bien. À la question de recevabilité.

M. Bédard: Alors, sur la question, et ça va être très bref d'ailleurs, j'aurais pu le faire tantôt très brièvement parce que le cas qui a été soulevé par mon collègue a été plaidé il y a... a été soulevé il y a de cela environ deux semaines et demie, et c'est un cas très, très clair. Et un président, je pense, que vous connaissez bien, qui a une expérience parlementaire comparable à la vôtre et qui a, je pense, les mêmes qualités ? et je vous dirais surtout: pas plus, parce que je vous estime comme parlementaire ? a jugé que la règle générale est le droit de parole en cette Assemblée et le droit de l'opposition de justement tenter de faire comprendre au gouvernement à travers des motions, mais à travers les groupes qu'il souhaite faire entendre... de faire en sorte que le gouvernement soit recule, amende ou corrige, en faisant entendre ces groupes. Et c'est un droit... Lorsque vous empêchez les membres de l'opposition de faire ces motions, c'est comme si, vous aussi, vous vous trouviez à bâillonner.

Et la règle... Évidemment, il peut arriver qu'on doit bâillonner. Et c'est vrai même en notre Assemblée nationale. Il peut arriver effectivement que le gouvernement, peu importe le parti, va juger qu'il va faire une exception à la règle, c'est celle de bâillonner. Mais c'est possible, mais ça demeure l'exception. Et, vous savez, notre code, nos règles sont établis, sont assez clairs; par contre, on doit les interpréter avec nos us et coutumes. Et, dans nos us et coutumes, ce qui sort clairement de la jurisprudence, M. le Président, c'est que normalement il faut laisser le temps, et, ce temps, évidemment, on ne peut pas le définir avec une rectitude parfaite, mais, en général, la jurisprudence a déterminé, et les présidents de commission ont déterminé en général, que trois séances étaient une règle minimale pour faire en sorte que les gens... de présenter par l'opposition les arguments concernant un projet de loi.

Alors, je vous invite simplement peut-être à consulter... Peut-être que vous la connaissez, cette décision qui est toute récente. Je pense que c'est la plus récente sur la question. Et elle faisait d'ailleurs l'inventaire, je pense ? je ne sais pas si elle apparaît à la décision ? de la jurisprudence concernant les motions telles que présentées par le député de Nelligan. C'est tout à fait son droit, que je lui reconnais d'ailleurs. Mais cette décision était très claire à cet effet-là.

Alors, je vous invite tout simplement à donner suite à la règle générale, celle du droit de parole des membres de l'opposition, et ces droits de parole s'expriment justement par le biais de motions qui ont été, à ma connaissance... et celles ? parce que j'ai pris connaissance des motions aujourd'hui mais aussi dans le passé ? qui ont été en tout point pertinentes.

Et simplement un dernier point sur cette question. Nous étions pris, lors de la décision du député de Richelieu, qui était président de la commission des institutions, dans la même situation où il y avait eu un rapport. Et là c'est le rapport Bernier; dans notre cas, c'était le Rapport sur la mise en oeuvre de la justice administrative, qui n'avait pas été étudié par la commission et qui concernait le coeur du projet de loi qui était à l'étude par la commission. Et le président a déterminé effectivement qu'il y avait motif à continuer les motions. Alors, je vous invite, avec votre sagesse habituelle, M. le Président, à donner suite aux arguments qui ont été si brillamment élaborés par ma collègue de Pointe-aux-Trembles et mon collègue de Borduas.

Le Président (M. Copeman): Très bien.

M. Bédard: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Copeman): Je me considère, je pense, assez éclairé sur la question. Je vais suspendre les travaux de la commission afin de me renouer avec la jurisprudence, nos us et coutumes et je reviendrai avant minuit afin de rendre une décision.

Une voix:...

Le Président (M. Copeman): Non, bien, écoutez... Bien, il faut... De toute façon, il faut que la présidence... il faut que la commission reprenne ses travaux avant minuit. Si je rends une décision ou pas ce soir, on verra, mais il faut qu'on revienne avant minuit afin d'ajourner les travaux de la commission. Alors, s'il vous plaît, tenez-vous assez proches. Je vais me retirer avec la secrétaire de la commission, et certainement la présidence sera de retour avant minuit. Alors, je suspends les travaux de la commission.

(Suspension de la séance à 23 h 30)

 

(Reprise à 23 h 49)

Le Président (M. Copeman): Alors, la commission des affaires sociales reprend ses travaux.

Décision de la présidence

Chers collègues, c'est la deuxième fois en peu de temps que je suis appelé à rendre une décision quant à la recevabilité d'une motion préliminaire de passer immédiatement à l'étude de l'article 1.

En effet, j'ai rendu une décision le mardi 4 novembre 2003, ici, devant cette même commission, dans le contexte d'un autre projet de loi qui était le projet de loi n° 8.

Toutes les décisions de la présidence doivent être effectivement basées sur la jurisprudence, les us et coutumes. La difficulté avec une décision quant à la recevabilité d'une motion de passer immédiatement à l'article 1 est la suivante: la jurisprudence n'est pas claire. C'est ça, la difficulté.

Je vous donne deux exemples. Une décision rendue le 11 juin 1986 par le président Robert Thérien. C'est la décision 244/6. Et le contexte était similaire. «Lors de l'étude détaillée d'un projet de loi, après trois séances de débat, la commission de l'éducation en est toujours à l'étape des motions préliminaires. Un député ministériel présente la motion préliminaire suivante: "Que la commission passe immédiatement à l'étude détaillée de l'article 1 et des articles suivants du projet de loi."»

n(23 h 50)n

La décision rendue: La «motion est recevable et ne vise pas à clore le débat, mais propose plutôt de passer à une autre étape de l'étude détaillée du projet de loi. Il appartient aux membres qui s'opposent à cette motion de convaincre leurs collègues qu'il n'est pas opportun de commencer immédiatement l'étude de l'article 1.

«Considérant que l'opposition a eu l'occasion ? je cite toujours la décision de la présidence, du président Thérien ? de présenter plusieurs motions préliminaires, la motion du député ministériel proposant de passer à une autre étape est recevable.» Par contre, et j'avoue, la décision indique «après trois séances».

Par contre, il y a également une décision ? que je cherche. Je ne pense pas que c'est... Excusez-moi. Oui, pardon. 244/26, où... Je vous lis la décision, le contexte. Ça a été donné le 8 décembre 1997. Alors, après la décision du président Thérien. Et c'était rendu par feu Camille Laurin. Et la décision, je vais la lire.

«Lors de la première séance de l'étude détaillée d'un projet de loi, à l'étape des motions préliminaires, un député ministériel présente une motion préliminaire afin que la commission passe immédiatement à l'étude de l'article 1 et des articles suivants du projet de loi. Auparavant, une première motion préliminaire avait été débattue et rejetée. Cette motion vise à entendre un des quatre organismes entendus la semaine précédente dans le cadre des consultations particulières sur le projet de loi tenues par la commission suivant un ordre de l'Assemblée.»

La question: Est-ce que la motion est recevable? «La motion est recevable ? c'était selon le président Laurin ? car elle ne vise pas à clore le débat, mais propose plutôt de passer à une autre étape de l'étude détaillée d'un projet de loi.»

Le député de Chicoutimi invoque une décision du président Simard, à la commission des institutions, qui effectivement, lui, dit, selon lui: La règle non écrite d'après trois séances s'applique. Mais, manifestement, chers collègues, nous ne pouvons pas réduire l'appréciation d'une telle motion par un simple calcul mathématique du nombre de séances. C'est impossible. Compte tenu que le président Laurin a décidé après une séance, compte tenu que d'autres présidents ont rendu des décisions après trois séances, compte tenu de la durée des séances, hein... Il y a des séances des commissions qui durent à peine une heure, il y a d'autres séances qui durent cinq, six ou sept heures. Alors, il est très clair, chers amis, qu'un calcul purement mathématique ne peut pas guider la présidence dans l'appréciation d'une motion de passer à l'article 1.

L'autre élément qui est intéressant, c'est de tenter d'apprécier la teneur des motions préliminaires et le débat qui entoure ces motions. Et je dois avouer que, en écoutant attentivement les interventions sur les motions préliminaires, il y avait une certaine tendance, des deux côtés de la table, à commencer à invoquer des arguments de fond. Une certaine tendance. On se glissait, si vous me permettez l'expression, tranquillement vers une discussion de fond du projet de loi.

Par contre, je suis également très sensible à l'argumentation que le rôle du président, c'est d'assurer les droits et libertés de chacun des parlementaires, qu'ils soient membres d'un groupe ministériel, d'un groupe parlementaire formant le gouvernement ou d'un groupe parlementaire formant l'opposition officielle, ou des députés indépendants. Et, ayant une certaine expérience assis à ma gauche, je suis très sensible à la notion qu'il faut donner à l'opposition tout le temps nécessaire pour faire valoir leurs points de vue.

Les motions préliminaires à date suivent un certain ordre logique. Il y a une pertinence de ces motions. On demande à la commission des affaires sociales non pas d'entendre des groupes qui ont déjà été entendus lors des audiences particulières, mais plutôt d'autres groupes. Tout ça mis ensemble, chers collègues, et compte tenu de l'heure, je considère à ce moment-ci ? à ce moment-ci ? la motion du député de Nelligan irrecevable, car elle est légèrement prématurée.

Alors, est-ce que nous sommes prêts à passer à l'étude de l'article 1?

Une voix: Oui.

Le Président (M. Copeman): M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Dion: J'aurais une motion à présenter, M. le Président.

Une voix: ...

M. Dion: Non, non, mais ça peut être très intéressant, très intéressant. Ça va vous surprendre même. Pour peu que je...

Le Président (M. Copeman): Allez-y, M. le député de Saint-Hyacinthe. Il reste très peu de temps. Alors...

M. Dion: Je n'aurai peut-être pas le temps de vous surprendre. C'est vrai.

Le Président (M. Copeman): Au moins le temps de...

M. Dion: De lire.

Le Président (M. Copeman): ...de déposer la motion, sinon...

Motion proposant d'entendre le Conseil
pour la protection des malades

M. Léandre Dion

M. Dion: Alors, la motion se lit comme suit:

«Il est proposé qu'en vertu de l'article 244 de nos règles de procédure, la commission des affaires sociales tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 7, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux, des consultations particulières quant à tous les articles dudit projet de loi et qu'à cette fin elle entende le Conseil pour la protection des malades.»

Le Président (M. Copeman): La... La... Effectivement, on est bouche bée. La surprise est tellement généralisée que je ne sais plus quoi dire. Alors, la motion est recevable. Avez-vous des copies, M. le député de Saint-Hyacinthe?

M. Dion: Oh! certainement. Est-ce que vous voulez qu'on attende que les copies soient distribuées avant de commencer à en discuter?

Le Président (M. Copeman): Je vais vous dire très franchement, M. le député de Saint-Hyacinthe, que je préfère, compte tenu de l'heure, qu'on vous donne l'occasion de faire votre plaidoyer à une séance ultérieure de la commission. J'ai par contre l'habitude, chers collègues... Nous avons adopté l'habitude de nous laisser avec des petites citations. Alors, j'en ai une autre pour vous. J'en avais deux de préparées. Compte tenu de la décision et de mes états d'âme, je vais vous livrer la deuxième.

M. Couillard: Est-ce que j'ai le droit d'en faire une après?

Le Président (M. Copeman): Ça dépend de l'heure, M. le ministre. J'en avais une de préparée d'un poète, Émile Nelligan, en l'honneur du député de Nelligan. Mais je vais mettre celle-là de côté et je vais y aller avec une citation d'Oliver Cromwell. Vous allez m'excuser, c'est en anglais évidemment. It was an address of Oliver Cromwell to the Rump Parliament of 1653. Those of us who know a little English history will know what the Rump Parliament of 1653 was. And the quote is thus: «You have sat too long here for any good you have been doing. Depart, I say, and let us have done with you. In the name of God, go!»

Compte tenu de l'heure, j'ajourne les travaux de la commission sine die.

(Fin de la séance à 23 h 59)

 


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