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Version finale

37e législature, 1re session
(4 juin 2003 au 10 mars 2006)

Le mardi 8 février 2005 - Vol. 38 N° 97

Consultation générale sur le document intitulé Vers un nouveau contrat social pour l'égalité entre les femmes et les hommes


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Table des matières

Journal des débats

(Neuf heures trente-trois minutes)

Le Président (M. Copeman): Alors, bon matin! Et ayant constaté le quorum, je déclare ouverte cette séance de la Commission des affaires sociales.

Je vous rappelle notre mandat sur l'ordre de la Chambre. Nous sommes réunis afin de poursuivre la consultation générale et les auditions publiques sur le document intitulé Vers un nouveau contrat social pour l'égalité entre les femmes et les hommes.

Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. Alors, il y a M. Bachand (Arthabaska) qui va être remplacé par Mme Delisle (Jean-Talon); M. Girard (Gouin) par M. Létourneau (Ungava); Mme Lefebvre (Laurier-Dorion) par Mme Maltais (Taschereau); puis M. Marsan (Robert-Baldwin) par Mme Hamel (La Peltrie). Voilà.

Le Président (M. Copeman): Merci. Je vous rappelle, comme je le fais à chaque séance, chers collègues et ainsi tous ceux qui sont ici présents dans la salle, que l'utilisation des téléphones cellulaires est strictement interdite et je prierais tous ceux qui en font l'usage de bien vouloir les mettre hors tension.

Je vous souhaite un bon Mardi gras, aujourd'hui, hein? Bien oui, «Shrove Tuesday», comme on dit en anglais. Demain, c'est «Ash Wednesday», hein, mercredi des Cendres. Je ne sais pas si ça a une influence sur nos travaux, mais ça me tentait de le souligner ce matin, juste comme ça, oui.

Nous allons recevoir, ce matin, et échanger avec trois groupes: dans quelques instants, la Fédération des associations de familles monoparentales et recomposées du Québec, qui sera suivie par l'Institut de recherches et d'études féministes de l'Université du Québec à Montréal. Et nous allons terminer la matinée avec le groupe Promotion des Estriennes pour initier une nouvelle équité sociale. La suspension habituelle de 12 h 30 jusqu'à 14 heures. On va poursuivre dans l'après-midi, je vous ferai lecture de l'ordre du jour à ce moment-là.

Auditions (suite)

Alors, c'est avec plaisir que nous accueillons les représentantes de la Fédération des associations de familles monoparentales et recomposées du Québec. Mme Lévesque, bonjour. Je sais que ? sans exagérer ? vous êtes presque une habituée des commissions parlementaires; vous aussi, Mme Desjardins.

Je vous rappelle nos règles de fonctionnement. Vous avez une période de 20 minutes pour faire votre présentation qui sera suivie par un échange d'une période maximale de 20 minutes avec les parlementaires de chaque côté de la table. Sans plus tarder, je vous invite à débuter votre présentation.

Fédération des associations de familles
monoparentales et recomposées du Québec
(FAFMRQ)

Mme Lévesque (Sylvie): Merci beaucoup. Je ne pense pas de faire partie des meubles, mais je suis plus souvent de ce côté-ci que de votre côté. Alors donc, merci beaucoup pour le fait qu'on soit là aujourd'hui.

Ce que je voudrais dire d'entrée de jeu, on devait être aussi une troisième personne, Nancy Desnoyers, qui devait être avec nous. Malheureusement, un de ses enfants est très malade, donc elle a dû concilier famille-travail. Étant une femme monoparentale avec trois enfants, elle ne pouvait pas malheureusement trouver quelqu'un pour la remplacer. Alors donc, bon, c'est un bon sujet justement, on va pouvoir en parler tantôt, alors on est en plein dedans. Alors donc, elle est quand même avec nous en quelque part. Donc, dans ce sens-là, on va tenter, moi et Lorraine, de faire l'ensemble du travail.

Donc, dans un premier temps, oui, on a fait un mémoire, à la fédération, sur le sujet parce qu'on considérait important de pouvoir justement... On avait des choses à dire. La fédération existe depuis plus de 30 ans et travaille évidemment concrètement depuis plusieurs années avec les familles monoparentales mais évidemment en majorité avec des femmes monoparentales parce qu'encore aujourd'hui c'est près de 80 % ? évidemment ça tend à diminuer, mais c'est encore beaucoup des femmes qui sont seules avec leurs enfants ? qui sont dirigées par des femmes.

À la fédération, il y a aussi une évolution, comme il y a une évolution, je pense, des mentalités dans notre société heureusement, mais il y a encore beaucoup de travail à faire. Il y a aussi, à la fédération, des groupes de pères maintenant, depuis quelques années, qui sont membres de la fédération aussi. Et on a aussi, sur nos conseils d'administration et au sein de nos associations, des pères et des hommes aussi qui s'impliquent. Mais évidemment c'est encore très marginal, ce qui fait que, la situation des femmes et des familles monoparentales, il y a encore beaucoup de travail à faire donc.

Dans notre mémoire, on a voulu faire ressortir le fait que l'égalité entre les hommes et les femmes, comme plusieurs autres groupes avant nous ont dit aussi, c'est une égalité de droit, oui, mais dans les faits il y a encore beaucoup de travail à faire et que la pauvreté, entre autres, est beaucoup, beaucoup, beaucoup vécue par les familles monoparentales. Et c'est dans ce sens-là, lequel on a voulu faire ressortir, dans notre mémoire, des situations plus spécifiques concernant les familles monoparentales. Et, dans ce sens-là, on a plusieurs recommandations qui ont été touchées aussi par d'autres groupes. Et, aujourd'hui, on voulait plus faire ressortir celles qui touchent plus davantage la problématique qui nous concerne.

On a quand même été assez surprises par rapport à l'avis qui a été présenté, de vouloir... Bien qu'on sait, comme je disais tantôt, que les mentalités ont évolué au Québec concernant la situation entre les hommes et les femmes, il reste que pour nous on trouvait que, dans l'avis, ce qui ressortait, c'est le fait qu'on veuille éventuellement, même si ce n'est pas dit clairement... qu'on sent qu'au niveau du Conseil du statut de la femme il y a des choses sur lesquelles on veut modifier et qu'on est assez inquiètes par rapport à l'orientation qui était, dans l'avis, de vouloir élargir et qu'éventuellement les structures puissent être modifiées.

Pour nous, on dit: Il y a énormément... il y a eu des choses qui ont été faites depuis 30 ans, mais il y a encore beaucoup de choses à faire. Donc, dans ce sens-là, comme beaucoup d'autres groupes, on se demandait comment ça se fait que le conseil... le ministère et l'orientation de la ministre d'aller vers éventuellement des changements à ce niveau-là nous apparaît dangereuse à ce moment-ci. Alors, peut-être, Lorraine, pour continuer.

Mme Desjardins (Lorraine): Oui. Alors, moi aussi, je vous remercie de nous donner l'occasion de venir nous exprimer devant la commission. On n'aura pas le temps, étant donné le temps imparti, de tout couvrir, là, ce qu'il y avait dans le mémoire, et le mémoire lui-même ne couvrait pas tout ce qu'il y avait dans l'avis, là. Il y a d'autres groupes qui sont venus s'exprimer sur des points très précis. Cependant, la première orientation de l'avis du CSF, celle qui parle de favoriser la transformation des rôles sociaux par la lutte aux stéréotypes et par la promotion des valeurs et de comportements égalitaires, à la fédération, ça nous interpelle particulièrement d'une part parce qu'on croit qu'il existe encore beaucoup d'obstacles à l'exercice d'une parentalité responsable et qu'il existe encore beaucoup de stéréotypes.

n (9 h 40) n

Alors, le premier des obstacles qui est mis devant l'exercice d'une parentalité responsable, c'est une revendication... ça vise une revendication que notre fédération porte depuis de nombreuses années, c'est-à-dire faire en sorte que la pension alimentaire pour enfants soit totalement exemptée du calcul de la prestation d'aide sociale de même que du calcul de l'aide financière aux études. Alors, on considère que c'est inadmissible qu'un parent qui paie une pension alimentaire, qui assume des responsabilités en payant une pension alimentaire voie ses revenus servir à d'autres fins que le bien-être de ses enfants. On trouve ça vraiment inadmissible. D'ailleurs, on attend toujours la mise en place du comité qui doit être mis sur pied pour étudier cette question, la question des pensions alimentaires, le traitement des pensions alimentaires dans les programmes sociaux, et on espère que ce comité-là va pouvoir arriver assez rapidement avec une solution efficace.

Alors, juste pour vous donner une petite idée, on va vous rappeler qu'en juillet 2004 il y avait 52 000 familles monoparentales québécoises qui étaient à l'aide sociale, et il y avait autour de 6 000 étudiants et étudiantes universitaires qui étaient monoparentales, qui étaient responsables de famille monoparentale, et, sur ces 6 000 là, il y en avait 5 500 qui étaient des femmes.

D'autre part, la fédération est aussi assez préoccupée par le discours antiféministe, là, qu'on entend beaucoup, que vous avez d'ailleurs entendu devant cette commission et qui laisse entendre qu'un grand nombre de mères vont considérer leurs ex-conjoints comme de simples guichets automatiques et que les tribunaux accordent, par exemple, trop souvent la garde exclusive aux femmes plutôt qu'aux hommes puis favorisent les hommes de façon... favorisent les femmes, pardon, de façon systématique. Alors, nous, on dit que c'est clair que ce discours-là relève davantage de conflits mal gérés entre les ex-conjoints que de la réalité.

Dans la réalité, on rappelle que la majorité des cas de garde se règle à l'amiable, là. Et, au niveau du guichet automatique, ça aussi, c'est un préjugé parce que, dans la loi, la loi sur la perception automatique, ça implique que les deux parents doivent contribuer financièrement au bien-être de leurs enfants. Donc, ce n'est pas vrai que c'est simplement les pères, là, qui doivent contribuer. Puis aussi on va vous rappeler que ce n'est pas en ayant la garde exclusive d'un enfant qu'on s'enrichit. Au contraire, les statistiques le démontrent clairement, quand on se sépare, on s'appauvrit. On a deux logements à payer, alors qu'on en avait seulement qu'un avant, puis on a plus de dépenses.

Alors, maintenant en ce qui concerne la fin des stéréotypes et des préjugés, on dit que, s'il est évident que les stéréotypes sexuels existent ? sexuels et sexistes ? puis qu'ils sont générateurs d'inégalités et de préjugés sociaux, les préjugés sociaux aussi ont des effets très dévastateurs sur les personnes. On pense ici, par exemple, à ce qu'on entend des fois dans le discours populaire de dire: Ah oui, on sait bien, c'est une famille monoparentale, les enfants sont garrochés d'un bord puis de l'autre, puis ils ne sont pas capables de s'en occuper, puis... Ça, c'est ce qu'on entend, mettons, souvent dans les milieux de travail ou dans le discours de M. et Mme Tout-le-monde. Ce qui est plus grave encore, c'est qu'il y a certaines études qui vont cibler les familles monoparentales et qui vont, mettons, dire que les enfants qui sont élevés ou qui sont nés dans des familles monoparentales vont être plus susceptibles de développer des comportements déviants.

Alors, nous, on pense qu'au lieu de remettre la responsabilité sur le dos des jeunes et des familles on devrait plutôt s'occuper des problèmes structurels de la pauvreté. Alors, par conséquent, la FAFMRQ recommandait, dans son mémoire, la mise en place de mesures de soutien aux familles qui répondent aux besoins réels des personnes, dans le respect des parents et de leurs enfants et en tenant compte et en agissant sur les causes structurelles de la pauvreté. Alors, on rappelle aussi que, dans les besoins essentiels, il y a d'autres besoins que celui de se nourrir ou de se loger adéquatement. On pense aussi que, dans les besoins essentiels, il y aurait l'accès à l'éducation, à des loisirs et à l'exercice d'une citoyenneté véritable.

La deuxième orientation présentée dans l'avis, celle qui vise à promouvoir l'égalité économique entre les femmes et les hommes et à corriger les inégalités qui persistent, nous interpellait aussi beaucoup. Les statistiques des dernières années le démontrent clairement, on l'a dit à plusieurs reprises devant toutes sortes de commissions ici, les familles monoparentales, particulièrement celles qui sont dirigées par les femmes, sont encore aujourd'hui parmi les plus pauvres au pays. On pense qu'un des moyens de sortir de la pauvreté, c'est d'avoir accès à une bonne éducation, d'autant plus que 80 % des emplois qui sont créés aujourd'hui exigent des études postsecondaires ? ça aussi, on l'a déjà dit devant plusieurs autres commissions. Donc, on pense que c'est important de favoriser l'accès aux études pour les responsables de famille monoparentale, et pas simplement les études postsecondaires, mais aussi les études professionnelles, parce que ce n'est pas toutes et tous qui ont nécessairement le désir et les capacités d'aller à l'université.

Vous avez vu passer devant cette commission des représentants de la Fédération étudiante universitaire, la FEUQ, qui vous ont un peu fait la démonstration que les femmes monoparentales vivent une discrimination systémique en ce qui a trait particulièrement à leurs dettes d'études. Je ne vais pas vous reprendre tout l'argument de la FEUQ parce qu'ils l'ont fait de façon très éloquente, mais j'ai quand même été très agréablement contente de voir que la FEUQ véhiculait ce message-là, alors mais quand même pour vous rappeler que l'exemple qui était donné par la FEUQ, c'est qu'une mère monoparentale qui est sur les prêts et bourses depuis qu'elle est au cégep, qui a accumulé une dette d'études d'environ 20 000 $, se ramasse, à la fin de ses études, si elle gagne 30 000 $ par année, à la fin d'un bac, en payant, en remboursant 200 $ par mois puis, après impôts, elle se ramasse avec des revenus de 16 000 $ par année pour se faire vivre elle-même et faire vivre son enfant.

On croit aussi qu'il devrait y avoir des améliorations substantielles apportées aux services d'insertion en emploi offerts aux responsables de famille monoparentale prestataires de la sécurité du revenu. On a, dans nos associations, des personnes qui ont fait des parcours d'insertion, et qui étaient orientées vers des types de parcours qui ne correspondaient ni à leurs goûts ni à leurs aptitudes, et qui étaient malheureusement mises dans des situations d'échec. Alors, on croit que ce serait préférable d'améliorer ces conditions-là.

On continue encore avec la deuxième orientation. En ce qui concerne le partage équitable de la richesse, nous, on croit qu'une des façons d'atteindre l'égalité économique entre les hommes et les femmes, ce serait par le biais d'un partage équitable de la richesse collective. Ici, on pourrait penser à des avenues comme la dernière... la récente mesure de Soutien aux enfants ou Prime au travail, ce sont des mesures... Dans le cas de Soutien aux enfants, c'était une mesure fiscale intéressante, et l'aspect de son universalité était aussi intéressant. Malheureusement, même si cette mesure-là est intéressante, il y a plusieurs familles qui ne ressentent pas vraiment les bénéfices de cette mesure-là de Soutien aux enfants, étant donné l'augmentation, la récente augmentation aussi des services de garde à contribution réduite.

Encore cette année, pendant la période des fêtes, on a entendu, à la radio, à la télévision, le battage autour de la campagne la Grande Guignolée des médias, puis on fait appel, à tous les ans, à la générosité des gens pour permettre aux familles en situation de pauvreté de vivre un beau Noël. Ce qu'on oublie souvent, c'est que ces personnes-là vivent aussi pendant tous les autres mois de l'année. Et d'ailleurs on fait appel aux entreprises pour contribuer à des organismes comme Jeunesse au soleil ou le Club des petits-déjeuners. Mais, si les mesures fiscales et les mesures de protection sociale, peu importe ? et là je cite une expression qui est reproduite dans l'avis, «la mouvance de l'environnement social et économique» ? si ces mesures-là visaient en priorité le partage équitable de la richesse collective, les personnes en situation de pauvreté ne dépendraient plus de la charité des mieux nantis pour vivre. Alors, je vous remercie. Je vais repasser la parole à Sylvie.

n (9 h 50) n

Mme Lévesque (Sylvie): La troisième orientation, concernant toute la conciliation famille-travail, nous interpelle aussi beaucoup. Et, d'ailleurs, dans le cadre des consultations que le gouvernement aussi a faites sur la conciliation famille-travail, on avait aussi présenté un mémoire en collaboration avec d'autres groupes familles et d'autres groupes de femmes pour justement aussi indiquer des mesures plus spécifiques, notamment pour les familles monoparentales parce que c'est souvent absent de l'ensemble des mesures, des politiques et des programmes du gouvernement. On parle des familles en général, des familles qui travaillent les deux... les deux travaillant, c'est correct, et c'est souhaitable, et on est bien d'accord, mais encore faut-il que, pour justement les familles monoparentales en particulier... très peu de mesures et très peu... C'est plutôt absent dans l'ensemble des discours et dans l'ensemble des programmes. D'ailleurs, ce n'est pas très présent non plus dans l'avis qui nous a été présenté.

Donc, on croit que les mesures qui permettraient de concilier la vie personnelle, la vie familiale, la vie étudiante et la vie professionnelle... Parce que souvent, nous, on parle de travail, mais en même temps, quand on parle des familles monoparentales et des femmes monoparentales, on l'a souvent dit et redit, il y a aussi tous les aspects des études qui nous apparaissent importants, puisque, si éventuellement ils veulent avoir une job qualifiante, et intéressante, et importante, bien on sait que, quand on a des enfants, on doit quitter, il y a des périodes où on ne peut pas... on est complètement inactive, donc, pour des familles monoparentales, ça prend du temps et souvent on revient plus tard aux études. Donc, dans cet esprit-là, il faut que les exigences des emplois aussi puissent s'adapter à la situation des familles monoparentales.

Donc, aussi, pour nous, il est primordial que toute politique et mesure en matière de conciliation famille-travail soit soumise à une analyse différenciée selon les sexes. Une telle analyse constitue le seul moyen d'assurer que les mesures proposées auront des effets bénéfiques pour la population qui assume toujours le plus gros fardeau de la conciliation des responsabilités familiales et du travail, c'est-à-dire les femmes. Je pense que je ne vous apprends rien dans ce sens-là.

Les récentes coupures effectuées à l'aide sociale, la hausse des coûts du transport en commun, des frais de garde et des tarifs d'électricité sont autant d'éléments qui sont venus alourdir le fardeau des familles québécoises. Une politique familiale globale digne de ce nom devrait donc s'appuyer sur les principes d'universalité et de responsabilité collective, reconnaître les droits aux familles, leur donner la capacité de faire des choix, s'appuyer sur l'expérience des parents et favoriser l'accomplissement de leur potentiel, respecter la diversité des familles, viser toutes les familles et l'ensemble de leurs membres à toutes les étapes de la vie, interpeller l'ensemble de la société, englober l'ensemble des domaines qui concernent la famille, la santé, l'éducation, le travail, l'habitation, les loisirs, l'économie, l'environnement et les milieux de vie ainsi que favoriser leur interaction.

Exemple concret de difficultés accrues de conciliation famille-études-travail. Pour les femmes responsables de familles monoparentales, comme je parlais tantôt, c'est encore plus difficile parce que, quand on est tout seul, bien on doit assumer 24 heures sur 24 l'ensemble des tâches. Alors, c'est comme un défi encore plus grand de concilier tout ça. Alors, la fédération recommande la mise en place ? évidemment par le gouvernement du Québec ? d'une politique familiale globale à portée transversale qui aurait évidemment des effets sur l'ensemble des mesures et des programmes, peu importe dans quel ministère on est.

Dans la même orientation, concernant quand la violence perdure au-delà de la rupture, on le voit ? puis Lorraine en a parlé aussi un peu tantôt ? on le voit de façon régulière, on dit souvent que la rupture a des impacts importants et chez les enfants et évidemment chez les familles aussi et les personnes, autant les hommes que les femmes. Les femmes responsables de famille monoparentale vivent des situations particulières par rapport à la violence et aux agressions sexuelles. Il n'est pas rare de voir, dans les associations membres de la fédération, des femmes qui, en raison de leur important état de pauvreté, tolèrent des relations plus que difficiles avec un nouveau conjoint dans l'espoir d'avoir accès à des revenus additionnels pour subvenir aux besoins de leur famille. On voit effectivement de plus en plus, en raison d'une... importante de pauvreté, des femmes monoparentales qui n'ont pas nécessairement... vont se retrouver dans des situations avec des nouveaux conjoints, pour justement réussir à donner à manger à leurs enfants plutôt que d'être dans une relation égalitaire.

En effet, certaines femmes se retrouvent devant le choix impossible de dénoncer un conjoint violent ou de permettre à leurs enfants de manger à leur faim. Comme on le sait, la violence s'exprime de diverses façons, et celles qui en sont victimes sont souvent également la cible de manipulations plus ou moins subtiles de la part de leurs agresseurs. Les femmes qui vivent de graves insécurités financières sont encore plus vulnérables à ce type de chantage et peuvent encore plus difficilement échapper au cycle infernal de la violence conjugale.

Nous aimerions également parler de la problématique de la violence en lien avec la médiation familiale. La FAF a été parmi les premiers intervenants à militer en faveur de l'instauration de séances de médiation gratuites pour les couples avec enfants en instance de rupture. Nous croyons sincèrement que, depuis sa mise en place, cette procédure a véritablement contribué à améliorer des négociations entre ex-conjoints, et ce, dans le meilleur intérêt des enfants. Cependant, il est clair que, dans les cas où il y a violence conjugale, ce type d'intervention est à proscrire complètement. La loi sur la médiation familiale le reconnaît d'ailleurs.

Mais, comme nous l'avons mentionné précédemment, il arrive que la violence prenne des formes moins facilement décelables et qu'elles ne soient pas ouvertement dénoncées par la personne qui est victime. Comment agir? La situation est d'autant plus problématique que les médiatrices et médiateurs actuels ne sont pas systématiquement habilités à déceler ces formes de violence ni à intervenir auprès des personnes concernées. Un récent drame familial reflète les conséquences dramatiques que ce genre de situation et susceptible d'engendrer: les ex-conjoints avaient convenu que, pour le bien de leur enfant, ils habiteraient le même immeuble, dans des appartements séparés; quelques mois plus tard, l'homme assassinait son ex-conjointe. À la lumière de cet événement, la notion même de «pour le bien de l'enfant» est à revoir, de même que les mécanismes qui encadrent les démarches de médiation familiale.

Exemple concret de violence familiale... Oui?

Le Président (M. Copeman): Mme Lévesque, excusez-moi. Nous sommes rendus à 20 minutes, il va falloir que vous passiez à votre conclusion assez rapidement.

Mme Lévesque (Sylvie): O.K. Donc, je disais que, par rapport à ce phénomène-là qui est la médiation familiale, bien qu'on trouve que c'est un processus intéressant et important, il reste qu'il y a des situations problématiques qui se vivent dans ce contexte-là.

En conclusion, ce que je dirais, c'est que, comme on disait dans notre mémoire, comme beaucoup d'autres groupes, on réitère le maintien, le renforcement des structures en matière de condition féminine. On considère que c'est important de garder ces structures-là, puisqu'elles ont eu des résultats concrets sur les femmes, et sur les familles, et sur les familles monoparentales. Et, dans ce sens-là, bien que, comme on disait et plusieurs féministes ont dit, on est justement d'accord avec l'égalité entre les hommes et les femmes et la justice sociale, on pense qu'il faut continuer dans ce sens-là. Merci.

Le Président (M. Copeman): Merci beaucoup, mesdames. Alors, afin de débuter l'échange, je reconnais Mme la ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration.

Mme Courchesne: Merci, M. le Président. Alors, mesdames, bienvenue, merci beaucoup pour la qualité de votre mémoire et de votre présentation. Permettez-moi aussi de saluer l'immense travail que vous accomplissez. On a eu l'occasion d'échanger à plusieurs reprises, au cours des derniers mois, et je tiens à vraiment saluer l'importance du travail que vous faites, de même qu'à vos équipes.

Vous abordez un sujet qui est revenu à plusieurs reprises au cours de cette commission parlementaire, et c'est tant mieux. Je pense que la situation des femmes monoparentales... des familles, je veux bien, mais je parlerai davantage des femmes monoparentales. Je suis certaine que vous êtes d'accord, et moi aussi. Donc, vous faites bien de nous... Et votre mémoire est très clair et précis à cet effet-là, vous soulignez un certain nombre d'enjeux qui touchent plus particulièrement, moi, je vais dire la discrimination des femmes monoparentales. C'est-à-dire qu'on est bien conscients et conscientes que, dans le type de vie qu'elles ont à vivre, trop souvent, les femmes monoparentales vivent presque une double discrimination, et c'est ressorti au cours de plusieurs mémoires qui nous ont été présentés. Mais c'est une situation qu'on connaît bien et qui est souvent mise de l'avant, mais ce que vous nous dites, c'est «pas suffisamment».

Vous nous dites aujourd'hui: Dans toutes les politiques, les programmes, pas suffisamment on met l'emphase sur les conséquences additionnelles que peuvent vivre des femmes monoparentales. Vous nous dites aussi: Bien, le gouvernement devrait adopter une politique familiale globale. Il faudrait se pencher sur tout l'aspect de la fiscalité, vous revenez sur l'importance de ça. Vous nous parlez des femmes, et ça, j'avoue que j'ai aussi beaucoup d'intérêt pour cette question-là, les femmes aux études, les femmes monoparentales aux études. Moi, je voudrais savoir...

Puis, nous, on parle de l'égalité, de comment faisons-nous pour atteindre l'égalité de fait dans notre société, donc y compris pour les femmes monoparentales. Il y a beaucoup de marrons au feu actuellement, il y a beaucoup de projets de réforme, il y a une politique conciliation travail qui est en cours, il y a une politique familiale, on parle beaucoup de fiscalité.

n (10 heures) n

Moi, j'aimerais que vous m'éclairiez, que vous nous éclairiez, nous, les parlementaires, sur la meilleure façon, le meilleur moyen d'atteindre plus rapidement les objectifs ou d'enrayer, si vous voulez, cette discrimination ou d'enrayer les difficultés qui sont constantes pour les femmes monoparentales. Est-ce que c'est à travers ? et je vais à l'essentiel parce qu'on n'a pas beaucoup de temps donc ? est-ce que c'est à travers une politique familiale? Est-ce que c'est à travers conciliation famille? Est-ce que c'est à travers l'égalité? Comment on organise, d'un point de vue gouvernemental? Par où on commence?

Oui, on peut tous les mener simultanément, puis j'en conviens, là, puis je pense que c'est ce qu'on essaie de faire, mais, très sincèrement, après 21 mois, 22 mois où on essaie de mener sur tous les fronts ces enjeux pour ces femmes monoparentales, je ne suis pas certaine que, comme gouvernement, peu importent les gouvernements, peu importent les partis politiques... Moi, je pense que c'est une difficulté qui est inhérente à l'appareil gouvernemental. Comment faisons-nous pour avoir une force plus grande, plus rapide, plus efficace à travers l'ensemble du gouvernement, ou à travers les différents ministères, ou à travers les différents organismes? Comment voyez-vous cet aspect-là, là, d'un point de vue plus gouvernemental, au-delà des demandes que vous énumérez dans votre mémoire?

Mme Lévesque (Sylvie): J'aurais un peu de difficultés à dire au-delà des demandes qu'on a dans notre mémoire parce que concrètement... Pour nous, ce sont des mesures concrètes et simples, il nous semble. Même si ça entraîne des coûts, à notre avis, ça n'entraîne pas des coûts si astronomiques que ça. On a juste à regarder la saga du CHUM puis je pense qu'on vient de répondre à plusieurs questions. Je pense que, s'il y a des investissements...

Quand on parle de pension alimentaire, par exemple, vous parliez de discrimination, bien c'en est des discriminations pour nous. Parce que justement comment se fait-il que les familles monoparentales ou les femmes monoparentales qui sont à l'aide sociale subissent une discrimination pour recevoir la pension alimentaire pour enfants? Ce n'est pas de l'ordre de milliards qu'on parle, là, c'est quelques millions. Donc, déjà, si on répondait, de un, à ça... Et ça fait des années et des années qu'on le demande, et pas juste à votre parti, à tous les partis qui ont été au pouvoir. Et tout ce qu'on a donné maintenant, c'est un premier 100 $. Donc, déjà ça, à notre point de vue, il y aurait ça, première réponse.

Prêts et bourses, ça fait des années... Lorraine l'a bien illustré, et ça fait des années qu'on l'illustre. Le ministre Reid en commission parlementaire, à plusieurs reprises, a dit: Oui, oui, oui. On n'a toujours pas de réponse.

La politique familiale globale. À notre point de vue, il y a des choses concrètes aussi à faire par rapport aux familles monoparentales, ne serait-ce que, comme je disais tantôt, quand on parle de mesures globales pour l'ensemble des familles, comme se fait-il... Dans les statistiques, on n'arrête pas de nommer justement... Oui, on en parle beaucoup des femmes monoparentales, on en parle beaucoup des familles monoparentales, mais qu'est-ce qu'on fait? Je veux dire, on répète les statistiques. On le dit, toutes les études le disent, ce n'est pas nous qui le disent, ça, toutes les études le disent que les familles monoparentales, particulièrement celles qui sont dirigées par des femmes, sont pauvres. Mais, maintenant qu'on le sait, là, est-ce qu'il y a moyen de faire quelque chose?

Donc, je pense que c'est ça aussi. Quand vous dites «au-delà de l'ensemble des choses», c'est concret. Et déjà il nous semble que tout le phénomène de la pauvreté dans laquelle elles se retrouvent encore en majorité, bien il nous semble que déjà ces mesures-là, là, bien déjà ça aiderait au chemin de l'égalité. Parce que, si déjà au départ... Quand tu es dans une situation vraiment de besoins essentiels, comment tu veux réussir à être dans une marche vers l'égalité?

Et on parlait tantôt justement aussi de violence ou de violence conjugale. Bien, c'est sûr que, ça aussi, ça rentre en ligne de compte. Donc, comment, si on est déjà en déséquilibre à tous les points de vue, comment on peut réussir à s'en sortir? Alors, dans cet esprit-là, ce n'est pas juste des mots, ce n'est pas juste des phrases, mais c'est aussi des gestes concrets. Je ne sais pas si, Lorraine, tu veux compléter.

Mme Desjardins (Lorraine): Bien, effectivement, Sylvie vous l'a bien démontré, je pense que, s'il y aurait un mot d'ordre à lancer aux parlementaires, ce serait: trouver des moyens d'assurer la couverture des besoins essentiels, que ce soit pour des personnes à l'aide sociale ou aux études. Les personnes aux études, là... Quand on vous donnait l'exemple, tout à l'heure, de la mère monoparentale qui est passée à travers un D.E.C. et un bac puis se ramasse avec 20 000 $ de dette à la fin, c'est une chanceuse, c'est parce qu'elle a réussi à se rendre jusqu'au bout. Il y en a des tonnes qui commencent puis qui ne sont pas capables de se rendre parce que c'est trop demandant.

Alors, c'est ça, c'est assurer... avoir dans l'esprit que le principal problème, le nerf de la guerre, c'est ça, c'est l'argent, hein? C'est mieux être riche et en santé que pauvre et malade, là. Ce n'est pas compliqué, c'est simple de même. Donc, s'assurer que ces personnes-là ont la couverture des besoins essentiels. Mais les besoins essentiels, ce serait déjà un bon départ, mais, si on parle de besoins essentiels, simplement manger, se nourrir et se loger, nous, on va au-delà de ça, c'est-à-dire que l'éducation aussi fait partie des besoins essentiels selon nous, ce à quoi démocratiquement tout être devrait avoir droit, peu importe son sexe, son origine ethnique ou son origine sociale.

Mme Courchesne: Ce que je comprends de vos propos et de votre mémoire, c'est que, dans une approche spécifique, il faut, il doit obligatoirement y avoir un chapitre sur les femmes monoparentales. C'est un peu ça que vous nous dites. Parce que ce que vous nous dites, c'est qu'on en parle, on en parle dans les statistiques, on en parle, on en parle dans les ministères, mais, quand il s'agit d'élaborer ces programmes et ces politiques, bien elles font partie de l'ensemble. C'est un peu ça que je comprends de votre message, là. Je généralise, là, mais c'est un peu ça que j'entends et que je lis dans votre mémoire.

Mme Lévesque (Sylvie): Ce que j'ajouterais, c'est que, quand on disait dans notre mémoire que, quand il y a une rupture, l'ensemble de la famille s'appauvrit, ce qu'il faut dire, c'est: Particulièrement, les femmes s'appauvrissent encore plus parce qu'on sait que la majorité d'entre elles, juste au niveau du travail, n'ont pas évidemment le même niveau de revenus. Donc, c'est sûr qu'elles sont encore plus en situation de pauvreté quand il y a rupture, c'est bien sûr.

Je veux dire, si c'est encore 80 % des familles monoparentales qui sont dirigées par des femmes, surtout dans une situation de pauvreté, bien, si c'était l'inverse, c'est-à-dire, si on imposait, lors de la rupture, obligatoirement aux hommes, qui en général ont un revenu plus élevé, la garde ou... en tout cas, ce serait beau à voir éventuellement, mais il reste quand même que peut-être que les enfants seraient moins dans une situation de pauvreté. Donc, c'est dans ce sens-là qu'il faut peut-être travailler à responsabiliser aussi davantage les hommes et les pères, mais il faut les responsabiliser pas après la rupture, avant la rupture.

Mme Courchesne: Vous m'amenez, là, totalement dans ma prochaine question. Vous avez mentionné, dans votre mémoire, l'importance de favoriser justement l'apprentissage du rôle parental dans cette perspective égalitaire puis vous en parlez particulièrement, là, dans la situation de rupture. Moi, j'aimerais que vous nous disiez comment vous voyez l'organisation d'un tel apprentissage, c'est-à-dire, tu sais, pour que ce soit sur une large échelle puis que ça puisse donner des effets. Qu'est-ce que vous entendez par cet apprentissage-là? Puis à qui et comment on pourrait rendre accessible cet apprentissage-là?

Mme Lévesque (Sylvie): Bien, je pense qu'il y a beaucoup de nos groupes qui travaillent sur le terrain, comme je vous disais, avec autant des mères que des pères. C'est sûr que la situation, comme je disais, c'est lent, c'est long parce qu'on parle de changement de mentalités. En même temps, j'aurais le goût de dire que ce n'est peut-être pas en mettant sur la place publique des situations extrémistes de pères qui vivent des situations ou de mères qui vivent des situations de part et d'autre qu'on va y arriver. Je ne pense pas.

J'aurais le goût de dire aussi que, depuis à peu près 10 ans, on est passé de 10 % de garde partagée à 19 %, sans imposition de quoi que ce soit. Donc, je pense qu'il faut suivre aussi les mentalités, il faut suivre le processus normal. Souvent, les lois sont en retard sur l'évolution de la société. Donc, dans ce sens-là, je me dis: Oui, il y a du travail à faire, mais je pense que c'est à long terme qu'il faut faire ça. Quand vous dites: Qu'est-ce qu'il faut faire? Je pense qu'à long terme on doit travailler évidemment sur l'éducation, comme je disais tantôt, pas après la rupture, mais avant.

Il y a aussi des situations où, dans 80 % des cas, les gens s'entendent aussi quand il y a... Donc, en quelque part... Donc, avant... Ce n'est pas une rupture parentale, mais une rupture conjugale. Donc, si ça, ça existe, bien, à ce moment-là, il y a moyen aussi par la suite que les deux parents se responsabilisent. Mais je pense qu'il n'y a pas nécessairement, je dirais, de recette miracle, mais par contre il y a peut-être aussi à faire plus de la promotion, de la sensibilisation des choses qui vont bien. Parce que c'est sûr que, dans les médias, les gens qui sont heureux, qui n'ont pas d'histoire, ce n'est pas intéressant. Donc, dans ce sens-là, je pense qu'on a un travail à faire.

Mme Desjardins (Lorraine): J'ajouterais...

Le Président (M. Copeman): Mme Desjardins, allez-y.

Mme Desjardins (Lorraine): Merci. J'ajouterais aussi que les mentalités, effectivement c'est un processus qui est lent, mais je pense qu'il y a des choses facilitantes qui peuvent aider à faire évoluer les mentalités. C'est sûr que, si les femmes avaient l'équité salariale, avaient une plus grande équité salariale, ce serait peut-être moins tentant pour les couples de laisser la femme se prévaloir des mesures de conciliation, des congés parentaux, des congés de maternité, et tout ça, que ce soit l'homme, puis que l'homme pourrait en prendre une partie aussi.

n (10 h 10) n

C'est pour ça que, quand on parle de politique familiale puis de politique de conciliation famille-travail, on demanderait à ce que ce soit également adressé aux hommes et aux femmes. Mais, comme beaucoup de groupes sont venus vous le présenter ici, on est encore loin, là, derrière, les femmes sont encore loin derrière au niveau de l'équité salariale. Elles occupent des emplois précaires plus souvent que les hommes. Donc, c'est plus facile, si on parle de budget familial, de rester à la maison puis de s'occuper des enfants plutôt que ce soient les pères qui fassent ce bout de chemin là.

Mais c'est intéressant quand même. Il y a des choses qui sont en train de sortir. Il n'y a pas juste des cas extrêmes, mettons, il y a aussi d'autres documentaires qui se font sur la paternité. En tout cas, j'en ai vu un très bon récemment à Télé-Québec, pour ne pas le mentionner. Mais il y aussi de la place, par exemple, pour montrer d'autres façons d'aborder la maternité et la paternité. Je pense que c'est en train d'évoluer. Puis, dans les associations membres chez nous, effectivement il y a beaucoup de travail qui se fait à ce niveau-là, là.

Le Président (M. Copeman): Merci, madame. Je sais que ma collègue la députée de La Peltrie, désire intervenir, mais j'ai une question à vous poser, profiter de votre passage devant la commission et de votre expertise peut-être pour m'éclairer sur la situation avec la mesure Soutien aux enfants dans le cas des gardes partagées.

Je ne veux pas vous embarquer dans une discussion sur le bien-fondé de Soutien aux enfants. On sait que ça prend une certaine ampleur. Ce n'est peut-être pas suffisant, selon vous, trop modeste, ces mesures-là, ça, j'en conviens. Mais quelle est la situation actuelle avec une garde partagée? Est-ce que vous êtes au courant? Est-ce que la mesure, est-ce que l'aide apportée est automatiquement divisée selon la garde? Est-ce qu'il faut faire application? Êtes-vous au courant du régime actuel?

Mme Lévesque (Sylvie): Ce n'est pas simple. Ça n'a jamais été simple, la garde partagée, de toute façon. Mais je dirais que c'est sûr ? comment je dirais? ? comme il y a une bonification puis que ça change la donne par rapport aux crédits d'impôt, c'est sûr qu'il y a... Je dirais que, dans certaines situations, on a certains membres chez nous qui nous ont dit que ça a créé certaines tensions.

Donc, il y a des effets bénéfiques, oui, parce que c'est un chèque visible, sauf que, là, à ce moment-là, il y en a qui font plus de négociations: À ce moment-là, bien là je vais prendre une partie, ou bien, non, je vais peut-être diminuer ma pension alimentaire parce que tu en as un peu plus puis... Bon. Disons que ça...

Je dirais que ce n'est pas simple parce qu'aussi il y a des impacts, le fait que la première année est de transition, ça va avoir des impacts. Les gens avaient oublié ça, là, que, comme il n'y aura plus de crédit d'impôt puis que... bon, la première année, ce ne sera pas évident, sur leur chèque, il y a une diminution aussi. En fait, dans les faits, là, il y a eu, à mon point de vue, un manque de préparation là-dessus. Mais, pour la garde partagée, tout ça pour dire qu'on voit que, sur le terrain, ce n'est pas évident.

Mme Desjardins (Lorraine): Au niveau de la mécanique, effectivement, j'ai parlé récemment à quelqu'un du RRQ puis on me disait qu'il fallait que les personnes fassent une demande écrite, là, remplissent un formulaire, au niveau de la mécanique. Je ne pourrais pas vous dire, là, c'est quoi dans le détail, mais il faut effectivement que les personnes... Ça ne se fait pas automatiquement, là, dans les cas de garde partagée.

Le Président (M. Copeman): Et, si la demande est faite, est-ce que le Soutien aux enfants est distribué selon la période de garde partagée, selon vous, ou...

Mme Lévesque (Sylvie): Habituellement, ça se fait six mois-six mois, dans le sens... C'est un peu comme avant, c'est moitié-moitié, là, dans le sens que ce n'est pas, tu sais, un mois ou l'autre, c'est comme six mois un, six mois l'autre.

Mais, comme je disais tantôt, comme il y a quand même des... Encore une fois, c'est la majorité des mères et des femmes qui sont plus pauvres. Bien, c'est sûr que c'est envoyé directement à la mère. Mais ça provoque des situations qui n'étaient plus là, mais que, là, ça suscite d'autres types de tensions, ce qui est un peu plate, mais... Des fois ? comment je dirais? ? il y a des mesures qui peuvent être intéressantes, mais des fois les impacts, on ne les mesure pas tout le temps. Puis celle-là, on ne l'a pas mesurée.

Le Président (M. Copeman): Compte tenu que vous travaillez beaucoup avec évidemment des familles monoparentales et recomposées qui sont largement celles... les chefs de familles monoparentales sont en forte majorité des femmes, est-ce que vous voyez un problème avec la possibilité d'une division de cette mesure Soutien aux enfants selon les critères d'une garde partagée ou est-ce que c'est une mesure qui devrait selon vous normalement demeurer chez la mère, et le partage serait l'exception à la règle ou... Comment vous voyez ça?

Mme Lévesque (Sylvie): Bien, c'est sûr qu'on a souvent plus défendu, je dirais... Comme je disais tantôt, pour les raisons que j'ai expliquées, à cause justement que la majorité des mères sont pauvres ? mais, dans quelques cas, ce n'est pas ça ? je pense que ce serait... nous autres, on a été plus en faveur de dire que ce soit donné majoritairement à la mère et que, dans des cas d'exception, effectivement il pourrait y avoir des négociations et des ententes. Comme on disait, c'est très peu de toute façon qui ont la garde partagée vraiment égale. Donc, dans cet esprit-là, ce serait peut-être mieux effectivement que ce soit majoritairement aux mères.

Le Président (M. Copeman): O.K. Merci, mesdames. Mme la députée de La Peltrie.

Mme Hamel: Merci, M. le Président. Bienvenue, mesdames, merci pour votre mémoire et votre présentation. Vous avez mentionné les efforts que vous avez faits dans le cadre de l'application de la médiation, là, avant la rupture, mais là vous demandez certaines... à proscrire, là, dans le cas de violence conjugale. Pouvez-vous élaborer plus là-dessus, s'il vous plaît?

Mme Lévesque (Sylvie): Bien, c'est déjà proscrit dans la loi, au moment... en 1997, quand a été mise en place la médiation familiale. Dans le cas de violence conjugale nommément dépistée, identifiée, ce n'est pas supposé d'avoir de médiation familiale. Sauf que, là, on se rend compte évidemment, après plusieurs années de mise en place de la médiation familiale, bien c'est sûr que ? comment je dirais? ? ce n'est pas une panacée, la médiation familiale, donc ce qui fait qu'il manque de clients, entre guillemets. Donc, souvent, il y a des médiateurs qui vont essayer, dans des situations quand même... Pour eux autres, ils croient que, même dans des cas de violence conjugale, il y a moyen de faire de la médiation. Nous, ce qu'on dit, c'est qu'il faut avoir une expertise pour pouvoir faire ça puis être capable de dépister même, en violence conjugale. Donc, ça nous apparaît dangereux, s'il y a déjà un déséquilibre entre les deux personnes, bien ça peut avoir des effets et des impacts majeurs.

Donc, dans cet esprit-là, c'est pour ça qu'on revient à la charge, parce qu'on sent une tendance actuellement auprès des médiateurs à vouloir justement aller chercher des clients puis en faire quand même. Parce qu'il y en a qui croient, comme intervenants, qu'il y a moyen de faire de la médiation, pas nécessairement en présence des deux parties, mais un sort puis l'autre rentre, donc de faire de la médiation familiale. D'où, nous autres, ce qu'on appelle... Ce n'est plus de la médiation, c'est de l'intervention, à ce moment-là. Donc, ce qu'on dit: Il faut faire attention à ce niveau-là.

Mme Hamel: O.K. Est-ce qu'il reste du temps, M. le Président?

Le Président (M. Copeman): Très rapidement, un bref échange.

Mme Hamel: Très rapidement. Je voudrais vous entendre sur l'approche sociétale. Parce que, si j'ai bien compris, dans votre regroupement, il y a aussi des groupes d'hommes, là. Alors, moi...

Mme Lévesque (Sylvie): De pères, plutôt.

Mme Hamel: De pères. Alors, c'est dans le rôle parental surtout. Mais j'aimerais vous entendre là-dessus, là. Parce qu'on faisait la promotion, si on veut, là, d'une approche sociétale. Qu'est-ce que vous pensez de ça, là, de sensibiliser plus les hommes en général à ce que vivent les femmes, et tout ça? Est-ce qu'on en est à ce point-là, là, en 2005?

Mme Lévesque (Sylvie): Bien, ce que j'aurais le goût de dire, c'est que je pense qu'on a toujours travaillé dans ce sens-là, l'ensemble des groupes, que ce soient les groupes communautaires, les groupes de femmes, même les groupes familles. Je pense qu'on vise toujours à ce qu'effectivement l'ensemble des pères et des hommes s'impliquent au niveau parental. Donc, c'est dans cet esprit-là. Quand on a parlé de politique familiale globale, bien c'est une approche sociétale aussi parce que c'est l'ensemble des gens de la société qui doivent évoluer et qui doivent faire avancer les mentalités. Je pense que ça, c'est, je dirais, la finalité ou la trame de fond sur laquelle on travaille tout le temps, qu'on soit dans le communautaire ou dans le mouvement des femmes, donc. Sauf que, pour nous, ce qu'on dit, c'est que, pour vraiment y arriver, bien il faut avoir une réelle égalité entre les hommes et les femmes, puis, à notre point de vue, il y a du travail encore à faire, et c'est comme ça qu'on l'a fait ressortir. Mais c'est évident qu'il faut travailler avec l'ensemble de la société, là.

Le Président (M. Copeman): Merci beaucoup. Mme la députée de Terrebonne et porte-parole de l'opposition officielle en matière de condition féminine.

Mme Caron: Merci, M. le Président. Alors, bienvenue, Mme Lévesque, Mme Desjardins. Vous saluerez pour nous Mme Desnoyers qui malheureusement ne peut être avec nous. La Fédération des associations de familles monoparentales et recomposées du Québec fait effectivement un travail extraordinaire, un travail terrain, un travail de représentation. Vous avez bien, je pense, situé que finalement, au niveau des solutions, quand on se parle des familles monoparentales, ou qu'on se parle d'une politique familiale, ou d'une conciliation famille-travail-études, oui, il y a des principes à la base, mais une des clés, c'est sûr, c'est la concertation entre les différents ministères pour s'assurer qu'il n'y a pas d'incohérence ? quand on fait un gain puis on le perd de l'autre côté ? et la question financière, c'est évident, parce qu'à la base de l'ensemble des politiques les budgets font en sorte que c'est ce qui fait qu'on va plus ou moins loin dans nos différentes politiques.

n (10 h 20) n

Comme tous les groupes, vous venez nous rappeler l'importance de la discrimination systémique. Et c'est une double discrimination. Je suis d'accord avec la ministre, dans le cas des chefs de famille monoparentale, la discrimination est double. D'ailleurs, la Confédération des organismes de personnes handicapées du Québec est venue nous dire que, dans la très grande majorité des cas, lorsque naît un enfant avec des limitations fonctionnelles, ce n'est pas très, très long que les mères se retrouvent chefs de famille monoparentale, donc avec des besoins encore plus grands, compte tenu des limitations fonctionnelles de l'enfant, puis avec aussi, à ce moment-là, automatiquement moins de disponibilité au niveau du marché du travail, moins de soutien. Peu importe la limitation fonctionnelle, le montant est le même au niveau de la reconnaissance des limitations fonctionnelles. Donc, ça s'ajoute.

Je voudrais revenir sur toute la question aussi des préjugés, parce qu'ils s'appliquent régulièrement, mais ils s'appliquent particulièrement... Pour, au bureau de comté, rencontrer, là, très, très, très souvent des mères chefs de famille monoparentale, où le problème numéro un revient constamment, c'est la question du logement. Un père qui va pour louer un logement, on lui demande s'il a des enfants, c'est sûr, parce qu'il y a des préjugés par rapport aux enfants, on le voit sur le terrain, mais on ne vérifiera pas s'il est chef de famille monoparentale. Mais la mère chef de famille monoparentale qui arrive, elle a des enfants, elle est souvent au niveau de l'aide sociale, donc c'est un problème criant. C'est le problème le plus difficile, à mon avis.

Et j'aimerais que vous... Plus particulièrement là-dessus, outre le soutien économique, parce qu'effectivement ça part du soutien économique, mais il reste quand même le préjugé qu'elle ne sera pas capable de payer le loyer, que, même quand on leur démontre qu'avec les montants qu'elle reçoit, elle est capable de le payer, le loyer, le préjugé, lui, il reste. Comment on peut lutter contre cette discrimination-là?

Mme Desjardins (Lorraine): C'est une grande question, c'est une très, très grande question. Effectivement, ce que vous soulevez, Mme Caron, est très réel. À tous les ans, autour de cette date-ci, particulièrement au mois de mars, en tout cas au moment où les personnes commencent à chercher des logements, on reçoit des tonnes d'appels, à la fédération, qu'on réfère à nos associations, et tout ça, de femmes qui sont, à la dernière minute, prises à la gorge puis qui doivent se trouver un logement.

Il y a notre présidente, la présidente du conseil d'administration de la fédération, qui est monoparentale et qui a vécu sur l'aide sociale pendant des années, quelques années. Maintenant, elle a un emploi, elle travaille dans un hôpital, et tout ça. Puis elle nous disait que, dans son milieu de travail, les préjugés sont là. Elle travaille dans un hôpital, bon, la plupart des personnes sont... pas la plupart, elle est la seule chef de famille monoparentale dans son milieu de travail. Et elle disait: J'entends des choses, des horreurs qui sont véhiculées sur les familles monoparentales, au travail, entre autres, puis, moi, je leur dis, de temps en temps, pour essayer de les éduquer, je dis: Regardez, moi, je le suis monoparentale puis, moi, je l'ai vécue cette situation-là sur l'aide sociale. Et là elle se fait répondre: Oui, mais, toi, ce n'est pas pareil, tu t'en es sortie. Et puis, là, elle leur dit: Bien, écoutez, je m'en suis peut-être sortie, sauf que, quand vous faites vos 5 à 7, là, moi, je ne peux pas y aller parce que je n'ai pas un conjoint à la maison. Puis elle dit: Quand le dîner de Noël coûte 65 $, là, le souper de Noël coûte 65 $, moi, je ne peux pas y aller parce que j'ai juste un salaire.

Donc, c'est très, très, très... les préjugés sont très tenaces. Et je pense que les... C'est sûr que c'est renforcé en plus, comme je le disais tout à l'heure, par les médias, par la recherche même qui est faite dans certains domaines, là, dans le domaine justement de la délinquance, de la toxicomanie, et tout ça. Effectivement, je pense qu'il y a un gros travail d'éducation à faire à ce niveau-là. Bon, puis je n'ai pas le moyen miracle, là, d'enrayer ces préjugés-là demain matin. Effectivement, ils sont très tenaces. Il devrait y avoir... il y aurait peut-être lieu d'y avoir des mesures incitatives auprès des logeurs ou des logements... Je pense ça existe déjà d'ailleurs, des parties... C'est sûr qu'une de nos demandes est de développer davantage de logements sociaux, là, c'est bien évident. Et, parmi les logements prioritaires, parmi les personnes prioritaires, c'est sûr que ça devrait être des familles monoparentales, là.

Mme Caron: Merci, Mme Desjardins. Avant de laisser la parole à mon collègue, je vais aborder un autre élément. Moi aussi, je veux revenir au niveau de la violence conjugale. Vous savez, vous faites des recommandations, et je suis parfaitement en accord avec les recommandations que vous faites. Je pense que... je suis convaincue que, dès qu'il y a violence conjugale, on ne peut pas faire de médiation familiale parce que d'abord il faut une expertise certaine, on ne s'improvise pas là-dedans, c'est tellement insinueux. C'est insinueux aussi pour ceux qui travaillent avec les personnes. Et j'avoue qu'il faut une expertise. Donc, je suis en accord avec vos recommandations.

Et beaucoup de groupes d'hommes qui sont venus nous parler de la rupture... Et ça revient très, très, très souvent, cette demande d'un droit automatique: dès qu'il y a rupture, garde partagée. Et j'ai même questionné à savoir: Oui, mais, dans les cas où il y a violence, dans les cas où il y a eu violence aussi avec les enfants, dans les cas d'inceste, ça n'a pas de bon sens de donner un droit automatique de garde partagée, et de ne pas se retrouver devant les tribunaux, puis de ne pas pouvoir agir, là. Ce n'est pas pour le bien des enfants, là, à ce moment-là. Et, non, on continue à réclamer un droit automatique. J'aimerais vous entendre là-dessus.

Mme Lévesque (Sylvie): Ça fait longtemps qu'on dit que, nous... Au même titre que je disais tantôt que la médiation familiale pour nous est un processus de relation entre des gens pour réussir à s'entendre sur différents conflits, ou mésententes, ou etc., c'est le même principe pour la garde partagée. Je disais tantôt, sans l'avoir obligée ici, au Québec, il y a quand même une évolution qui se fait au niveau de la garde partagée. Et il y a quand même des couples aussi qui s'entendent bien et que, lors de la rupture, ils sont capables de le faire parce que, comme je disais tantôt, il n'y a pas rupture parentale, mais il y a rupture conjugale. Ça, ça se passe bien en général.

Donc, à notre point de vue... Puis on le voit en France, puis même ils sont supposés... je pense qu'actuellement même ils discutent de peut-être revenir dessus, il y a effectivement une obligation, il y a une présomption de garde partagée. On sait qu'il y a beaucoup de groupes d'hommes, depuis des années, qui demandent ça effectivement, et, à notre point de vue, c'est faire fausse route parce que la garde partagée ne peut pas s'imposer. Ce qu'on veut dire, c'est qu'il y a différentes formules aussi de garde partagée, et pour nous c'est du cas par cas. Parce que des fois ça peut être du 50-50, des fois c'est du 60-40, des fois ça peut être du 30... Je pense qu'il faut aller aussi en fonction de la culture de cette famille-là. On ne peut pas chambarder tout ça puis dire: Bon, O.K., c'est 50... Est-ce qu'avant la rupture c'était 50-50 aussi?

Non, mais en quelque part je pense qu'il faut... On parle des enfants, mais, dans la garde, d'ailleurs le mot qui est éventuellement supposé de changer pour «responsabilité parentale», qui nous apparaît peut-être mieux d'ailleurs, parce que «garde» ça fait comme s'ils étaient en prison, là... Donc, à notre point de vue donc, si on a une responsabilité parentale avant la rupture, bien on devrait être capable de la partager par la suite. Donc, nous autres, on est plus ferventes pour dire: Allons par cas par cas et n'imposons pas ces méthodes-là, puisque je pense que ça va bien se passer pareil.

Mme Caron: Merci beaucoup, Mme Lévesque.

Le Président (M. Copeman): M. le député de Vachon.

M. Bouchard (Vachon): Merci, M. le Président. Bonjour. Deux, trois petits items rapidement. Concernant la garde des enfants et le rôle des tribunaux vis-à-vis de l'octroi de la garde des enfants, vous avez souligné avec raison, là, premièrement, cet élément important à l'effet que les tribunaux règlent... enfin interviennent sur à peu près entre 15 % à 20 % des dossiers lorsqu'il y a conflit. On m'informait, hier ? une chercheure de l'Université du Québec à Montréal maintenant à la retraite, Mme Renée Joyal, qui fait beaucoup de recherche là-dessus et dont une recherche très importante qui a été déposée au ministère de l'Emploi, de la Solidarité sociale et Famille il y a maintenant deux ans ? que de fait les décisions allaient la plupart du temps dans les environs de 50-50: 50 % des fois, c'est la mère qui obtient la garde, 50 % des fois, c'est le père. Ce qui n'était pas le cas il y a plusieurs années, alors que, si, par exemple, la mère s'opposait à une garde partagée, le juge allait presque directement du côté de la mère, disant qu'une garde partagée ça prenait le consentement des deux parents.

n (10 h 30) n

Ça a beaucoup changé, apparemment, au fil des ans. Et ce sera sans doute une recommandation dont nous débattrons ici, autour de la table, à la fin de cette commission, à l'effet de mettre au jour ces données de telle sorte à ce que la population soit mise au fait très clairement de l'évolution dans ce type de dossier là. Parce qu'il y a beaucoup d'hommes très engagés dans la cause des hommes, qui ont une voix extrêmement forte, qui se trouvent avoir été, selon eux, bafoués dans le traitement qu'ils ont eu devant les tribunaux et qui généralisent peut-être leur situation à l'ensemble des cas. Et donc ce serait peut-être intéressant qu'on ait une image beaucoup plus claire, plus rigoureuse ou plus objective de la situation.

Maintenant, parmi les 80 % de cas qui sont réglés à l'amiable, il y en a plusieurs qui le sont par consentement. Et là il pourrait y avoir aussi des questions importantes à se poser avec une analyse différenciée selon les sexes, par exemple: Qui consent à la garde des enfants? Dans quelles circonstances? Dans quel contexte financier ou budgétaire? Selon quels avis des avocats? Il y a plusieurs questions à se poser là-dessus et peut-être que, là, les hommes pourraient quelque part obtenir quelques gains, là, étant donné des situations qui se présentent de façon répétée, et peut-être les femmes aussi. Mais il faudrait qu'on puisse avoir cette ouverture d'esprit vis-à-vis ce problème-là, je pense, parce que c'est un problème qui est très moteur dans l'alimentation des acrimonies entre hommes et femmes et entre pères et mères.

Deuxième observation, sur la question de la pauvreté des familles monoparentales, est-ce que vous avez une petite idée comment il se fait qu'après impôts, au Québec, la pauvreté des familles monoparentales va être diminuée d'à peu près 6 % à 7 %, alors que, dans les Pays-Bas, elle va être diminuée d'à peu près 56 %? Est-ce que vous avez une idée de ce qu'ils font et qu'on ne fait pas?

Mme Lévesque (Sylvie): Bien, j'imagine qu'il doit y avoir des mesures sociales qui sont plus avantageuses pour... Je ne connais pas tout ce qui se passe dans les Pays-Bas, là, mais j'imagine que les mesures sociales sont beaucoup plus avantageuses, j'imagine que les salaires doivent être plus décents, il doit y avoir un meilleur accès au marché du travail, bon, et je pense qu'il y a tout ça qui doit en tenir compte.

C'est sûr que, depuis les dernières années, ce qu'on voit dans les statistiques, il y a quand même, malgré une pauvreté importante des familles monoparentales, il y a une certaine amélioration, malgré tout. Évidemment, je pense qu'on a assez décrié. Il y a quand même une amélioration au niveau du revenu des familles monoparentales, ça, c'est un fait, là. Mais évidemment ça prend du temps. Ils sont toujours en dessous par rapport aux autres, mais il y a quand même une évolution. Alors, je ne le sais pas, peut-être...

Je ne sais pas si je réponds à la question, mais c'est peut-être à ce niveau-là justement que les mesures sont plus avantageuses. Et peut-être qu'il y a une pension... Je sais qu'en Suède par exemple, au niveau des pensions alimentaires, quand on parlait, tantôt, nous, qu'il y a discrimination, bien, si, par exemple, les femmes monoparentales qui n'ont pas de pension alimentaire, pour toutes sortes de raisons, bien ce qui serait intéressant... Je sais que, là-bas, c'est le gouvernement qui compense pour le manque à gagner. Alors, peut-être, s'il y avait des mesures de ce type-là, par exemple, pour éviter justement qu'il y en a qui en ont puis il y en a qui n'en ont pas, bien pour améliorer la situation, je pense, c'est dans... Surtout que c'est pour enfants, là, la pension alimentaire. Donc, après rupture, il ne devrait pas y avoir trop d'impact, à notre point de vue, au niveau du niveau de vie des enfants, alors que ce n'est pas le cas présentement.

M. Bouchard (Vachon): Très bien, merci. M. le Président, une autre petite question, si vous permettez.

Le Président (M. Copeman): Allez-y.

M. Bouchard (Vachon): En page 10 de votre mémoire, vous soulevez quelque chose qui m'apparaît très important, qui m'intéresse, en tous les cas, beaucoup. Alors, dans le paragraphe intitulé La fin des stéréotypes et des préjugés, sur l'intervention précoce, alors «trop souvent, les facteurs retenus par [les] études pour expliquer les comportements déviants se résument à faire porter la responsabilité des problèmes sur les jeunes et leur famille et prévoient rarement des actions pour améliorer leurs conditions de vie», dites-vous. Ensuite, vous poursuivez en disant: «Il semble bien que la tendance de plusieurs programmes d'intervention précoce et de [...] recherche sur laquelle ils s'appuient réside davantage dans une approche qui consiste à compartimenter ou à isoler les sujets d'étude et à cibler les interventions de façon trop pointue.»

Généralement, vous êtes, depuis quelques années d'ailleurs, très sévères vis-à-vis ces types d'intervention. Je pense, entre autres, au programme Naître égaux ? Grandir en santé, programme...

Mme Lévesque (Sylvie): PSJP aussi.

M. Bouchard (Vachon): PSJP, etc. J'aimerais que vous en disiez davantage là-dessus parce qu'il y a quelque chose là-dedans qui me semble... il y a une opiniâtreté dans votre opinion, dans vos positions sur ce type de programmes qui sans doute est appuyée sur un rationnel très solide. J'aimerais vous l'entendre exprimer devant la commission.

Mme Desjardins (Lorraine): Bon, écoutez, la fédération travaille sur ces questions-là avec un groupe d'étude critique sur l'intervention précoce qui est en partie formé par des universitaires que vous connaissez sans doute, des chercheurs. Eux autres auraient une argumentation plus savante que la mienne. Mais le bout que, nous autres, on prend, c'est que, dans les faits, effectivement, sur le terrain, là, avec les familles avec lesquelles on travaille, on fait face à des programmes qui vont, plutôt que d'aider ces personnes-là à augmenter leur sentiment de compétence, vont avoir l'effet contraire.

Par exemple, on pense au fameux programme OLO, dont j'ai déjà parlé devant une commission ici, où on donnait des oranges, du lait et des oeufs aux mères et on faisait... Il y avait deux groupes. Il y avait un groupe qui était suivi par une batterie de professionnels puis il y avait un groupe qui avait simplement les oranges, le lait puis les oeufs, pour vérifier si les bébés allaient être en meilleure santé. Et à la fin c'est le groupe qui n'avait pas été suivi par des professionnels qui avait le mieux performé. Alors, c'est dans ce sens-là. Bon, évidemment, toutes ces jeunes mères là, la grande majorité de ces jeunes mères là étaient des jeunes mères monoparentales ou issues de familles monoparentales. C'est dans ce sens-là.

La leçon qu'on retient de ce genre d'intervention là, c'est que, premièrement, il y a une idéologie qui est en arrière de ces programmes-là, qui existe en arrière de ces programmes-là, il y a une théorie, il y a des études. Et, nous, ce qu'on dit, c'est: Peut-être que le problème, c'est davantage... la façon de régler le problème, c'est de régler le problème de pauvreté plutôt que d'essayer d'avoir des petits bouts ciblés comme ça, là. Si on leur donne les moyens d'acheter une commande qui a du bon sens puis qu'ils puissent acheter d'autres choses que des oranges, du lait puis des oeufs, peut-être qu'on va les aider davantage puis on va les faire sentir moins incompétentes que s'il y a trois travailleurs sociaux, deux psychologues puis un médecin qui travaillent dessus puis qui leur disent à tous les jours: Bien là as-tu mangé? As-tu fait ci? As-tu fait ça? C'est dans ce sens-là, là.

C'est sûr, bon, comme je vous dis, je n'ai pas une argumentation savante ici, je vous dis juste qu'effectivement, nous, ce qu'on retient, en tout cas ce qu'on voit à travers ces programmes-là qui sont utilisés, pas par nos associations mais dont les personnes qui fréquentent nos associations n'ont pas été victimes, là, mais auxquels elles ont participé, bien, c'est ça, c'est dans ces... dans ce sens-là, là.

Mme Lévesque (Sylvie): Ce que j'aurais le goût de dire en réaction, c'est: Comment se fait-il qu'il n'existe pas des programmes comme ça pour des gens qui sont des familles supérieures ou riches? Comment ça se fait qu'on s'acharne ? parce que, nous, des fois on trouve c'est quasiment de l'acharnement ? auprès des intervenants, par rapport à ces familles-là? C'est comme si d'emblée, même quand on sort de l'hôpital, qu'on est monoparentale ou qu'on est... encore là, si on est pauvre puis on est sur l'aide sociale, c'est encore pire, l'infirmière va chez vous, puis là on commence ce que, nous autres, on appelle la prévention féroce, dans le sens que, là, on y va, là. Bon. Donc, il faut davantage.

Moi aussi, j'ai eu des enfants. Il y avait l'infirmière qui me demandait effectivement si j'avais besoin d'aide. J'ai dit non, puis, comme elle sentait qu'on était pas si pire comme parents, elle nous a lâchés. Mais, quand tu es une monoparentale, tu es jeune, puis etc., et tout ce qui vient avec, bien là on s'acharne, on y va. Puis c'est sûr que, pour des intervenants... Puis souvent c'est de la bonne volonté, là. On n'est pas en train de dire que c'est tous des méchants puis qu'il y a un plan machiavélique derrière ça. Mais en même temps c'est moins angoissant pour un intervenant parce qu'on a des solutions à proposer à ces familles-là. Puis, comme intervenant, bien ça peut être sécurisant de dire: Bien, je vais vous aider, je vais vous aider, je vais vous aider. Mais, en même temps, est-ce que, en quelque part, plutôt que d'accompagner ces familles-là... On pourrait peut-être les accompagner plutôt que s'acharner sur eux autres.

Le Président (M. Copeman): Malheureusement, c'est tout le temps qui nous est imparti. Merci beaucoup, Mme Lévesque, Mme Desjardins, d'avoir participé à cette commission parlementaire au nom de la Fédération des associations de familles monoparentales et recomposées du Québec.

J'invite maintenant les représentants de l'Institut de recherches et d'études féministes de l'Université du Québec à Montréal à prendre place à la table. Et je suspends les travaux de la commission quelques instants.

(Suspension de la séance à 10 h 39)

 

(Reprise à 10 h 42)

Le Président (M. Copeman): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, la Commission des affaires sociales reprend ses travaux. Et c'est avec plaisir que nous accueillons les représentantes de l'Institut de recherches et d'études féministes de l'Université du Québec à Montréal. Mme la directrice, Mme Corbeil, bonjour.

Comme je le fais avec tous les groupes, je vous indique nos règles de fonctionnement. Vous avez 20 minutes pour faire votre présentation qui sera suivie par un échange d'une durée maximale de 20 minutes avec les parlementaires de chaque côté de la table. Je vous prierais de nous présenter les personnes qui vous accompagnent et ensuite enchaîner avec votre présentation.

Institut de recherches et d'études féministes
de l'Université du Québec
à Montréal (IREF)

Mme Corbeil (Christine): M. le Président, Mme la ministre, Mmes et MM. les députés, membres de cette commission, bonjour. Contrairement aux deux représentantes qui ont fait une présentation avant moi, c'est une première pour moi, la participation à une commission parlementaire. J'ai donc suivi les travaux, au cours des dernières semaines, avec passion et intérêt.

Le Président (M. Copeman): Soyons bien à l'aise, Mme Corbeil, nous ne mordons pas.

Mme Corbeil (Christine): Merci. Donc, merci de nous recevoir pour échanger avec vous sur l'avis du Conseil du statut de la femme déposé à l'automne 2004, nous invitant à réfléchir sur les modalités d'un nouveau contrat social pour l'égalité entre les hommes et les femmes. Nous sommes reconnaissantes aux membres de la commission de se prêter à cet exercice de consultation publique indispensable dans une société démocratique qui veut donner la parole aux citoyennes et aux citoyens ainsi qu'à leurs organisations.

Mon nom est Christine Corbeil. Je suis directrice de l'Institut de recherches et d'études féministes, professeure à l'École de travail social de l'UQAM et, depuis plus de 20 ans, responsable d'un cours obligatoire dans la formation des étudiantes et étudiants en travail social, qui s'intitule Vie privée, rapports de sexe et intervention sociale. Mes travaux de recherche portent sur l'articulation famille-travail et sur l'intervention féministe. Je suis accompagnée par deux de mes collègues que je vais laisser se présenter.

Mme Roy (Marie-Andrée): Alors, moi, je suis Marie-Andrée Roy. Je suis professeure au Département de sciences religieuses de l'UQAM. Je coordonne l'enseignement à l'IREF, ce qui signifie qu'au quotidien je travaille avec des étudiantes et étudiants au premier et deuxième cycle qui sont inscrits dans nos programmes en études féministes. De plus, je mène des travaux de recherche notamment avec ma collègue Lyne Kurtzman sur la question du trafic sexuel des femmes et j'ai d'autres travaux qui portent sur le rôle de la religion dans la vie des femmes immigrantes au Québec. Et je tiendrais à souligner que j'ai eu le plaisir et l'honneur, entre 1994 et 1999, d'être membre du Conseil du statut de la femme, et ça a été une période extraordinaire pour mieux connaître le rôle extrêmement important de ce conseil.

Mme Kurtzman (Lyne): Bonjour. Je suis Lyne Kurtzman. Je suis coordonnatrice de l'Alliance de recherche IREF/Relais-femmes, qui est rattachée à l'IREF pour ce qui est de sa partie universitaire, qui est rattachée à Relais-femmes pour ce qui est de sa partie communautaire, c'est donc une alliance de recherche avec la communauté, que je coordonne depuis cinq ans. Je suis aussi cochercheure avec Marie-Andrée Roy et Aurélie Lebrun d'une recherche sur le trafic sexuel des femmes au Québec.

Mme Corbeil (Christine): Dès 1976, le Groupe interdisciplinaire de recherches et d'études sur les femmes veillait à favoriser le développement, l'animation et la diffusion de la recherche sur les femmes, les féministes et les rapports sociaux de sexe, ainsi qu'à mettre en place des programmes de formation destinés aux étudiantes et étudiants intéressés par ce champ d'études. Ce groupe est devenu, en 1990, l'Institut de recherches et d'études féministes, désigné plus souvent par l'acronyme l'IREF.

L'IREF regroupe des professeurs-chercheurs de tous les horizons disciplinaires, qui ont pour particularité de travailler sur des problématiques au coeur des débats sociopolitiques contemporains. Pensons à l'homoparentalité, la prostitution, la reconnaissance du travail de soins, l'équité salariale et les travailleuses non syndiquées, les femmes aînées et leur engagement social, la pauvreté des femmes, la participation citoyenne, les discours et pratiques du mouvement des femmes, pour n'en nommer que quelques-unes. Depuis sa fondation, l'IREF soutient l'implication de ses membres professeurs au sein d'un protocole d'entente signé entre l'organisme Relais-femmes et l'UQAM afin de répondre aux demandes de recherche et de formation ou de diffusion en provenance des groupes de femmes du Québec.

Par ailleurs, plus d'un millier d'étudiants et d'étudiantes s'y inscrivent à chaque année, à une trentaine de cours différents en études féministes offerts par l'IREF en collaboration avec plusieurs départements de l'Université du Québec à Montréal. Nombre de ces étudiantes et étudiants participent aux activités de recherche de l'IREF ou encore s'impliquent dans la réalisation de la revue étudiante FéminÉtudes, dont le choix des thématiques reflète leurs préoccupations et leur engagement social et féministe.

En cette dernière journée d'audiences, du moins pour la première période, donc en cette dernière journée d'audiences devant la Commission des affaires sociales, nous aimerions, dans un premier temps, évoquer rapidement ce qui semble être des points de convergence se dégageant des différentes présentations et analyses faites par les représentantes du mouvement des femmes et leurs alliés. Dans un deuxième temps, nous nous attarderons à des dimensions qui visent les études et la recherche féministes de manière plus spécifique et nous conclurons en réitérant certaines recommandations en vue de l'élaboration d'une nouvelle politique en matière de condition féminine.

Les points de convergence sur la question de l'égalité entre les femmes et les hommes. Depuis les 30 dernières années, de grands pas ont été franchis au plan des lois, des droits et des programmes reconnaissant l'égalité entre les femmes et les hommes. Cependant, même si le rattrapage des femmes québécoises en matière de droits politiques, sociaux et économiques semble s'être fait rapidement et peut donner l'impression que tout est réglé, il demeure que les inégalités et les discriminations sont loin d'être disparues. Il suffit d'évoquer les multiples discriminations vécues par les femmes en raison de leur origine ethnique, de leur condition physique ou mentale, de leur orientation sexuelle ou de leur condition sociale.

Il suffit de se rappeler que, si les hommes ont accru leur participation aux soins aux enfants depuis l'entrée massive des femmes sur le marché du travail, la charge mentale et l'exécution des tâches domestiques routinières sont encore largement le lot des mères, puisqu'elles accomplissent au moins une fois et demie plus d'heures de travail domestique par jour que les pères. Les exigences de la double tâche continuent donc d'influencer davantage les trajectoires professionnelles des femmes que celles des hommes: plus de postes à temps partiel, des interruptions plus fréquentes, des revenus d'emploi inférieurs, des carrières qui avancent à petits pas.

Depuis plus de 30 ans, les femmes se sont battues pour accéder à des secteurs d'emplois qui autrefois étaient des chasses gardées masculines. Les programmes d'accès à l'égalité mis en place pour redresser la situation en leur faveur n'ont pas réussi à rétablir un total équilibre entre les sexes. Dans les universités québécoises, par exemple, les femmes représentaient, en 2001-2002, à peine 26 % du personnel enseignant, proportion qui est légèrement supérieure à l'UQAM, puisqu'elles représentent 31 % du personnel enseignant. La sous-représentation des femmes professeurs dans les universités est pourtant difficilement justifiable, car celles-ci sont de plus en plus nombreuses à détenir un doctorat. En 1998, 44 % des diplômes de doctorat étaient accordés à des femmes. Quels sont donc les autres critères qui éliminent les candidates intéressées à postuler à ces emplois?

n(10 h 50)n

Que dire maintenant du Programme de chaires de recherche du Canada lancé en l'an 2000 pour soutenir les chercheurs dont la carrière est jugée exceptionnelle? Les résultats de ce concours ont été à ce jour assez désastreux pour les femmes. Entre décembre 2000 et juin 2003, à peine 16 % des 926 chaires disponibles leur ont été octroyées.

Autrement dit, sans minimiser les avancées importantes des femmes en général, très bien documentées par le CSF, il reste beaucoup à faire pour que toutes les femmes atteignent l'égalité avec les hommes dans tous les domaines et que soient éliminées toutes les discriminations basées sur le sexe. À l'instar du CSF, nous croyons que le principe d'égalité de droit et de traitement pour les femmes et les hommes, bien que socialement reconnu, est insuffisant et qu'il est indispensable de revendiquer une égalité de fait. Nous sommes convaincues, et d'autres le sont aussi, que l'égalité concrète sera possible dans la mesure où elle sera l'expression d'une volonté sociale et politique ferme pour mettre un terme à la hiérarchisation des rapports sociaux entre hommes et femmes.

Par ailleurs, nous croyons que la complexité des enjeux liés à l'objectif d'égalité des sexes de même que la résistance au changement, tant dans la sphère publique que privée, sont autant d'éléments qui appellent à une transformation profonde des structures, normes et institutions patriarcales, transformations qui vont bien au-delà du changement des mentalités et d'attitudes évoqué à plusieurs reprises dans l'avis du conseil.

Sur la volonté de repenser la stratégie gouvernementale, de l'élargir pour inclure davantage les hommes, le CSF suggère d'accentuer le travail visant à faire de l'égalité entre les hommes et les femmes un enjeu socialement partagé en associant davantage les hommes aux revendications et aux organisations des femmes. Dans un même ordre d'idées, la semaine dernière, Mme la ministre Courchesne reprenait à son compte les propos d'une féministe anglophone, Judy Rebick, à l'effet qu'il est dans l'intérêt des femmes de faire cause commune avec les hommes, au même titre que l'on doit faciliter des collusions entre luttes antisexistes, antiracistes et anticapitalistes. Un tel argument ne manque pas d'intérêt, car nous croyons, nous aussi, qu'il est à l'avantage des femmes de susciter des alliances avec les hommes, de lutter à leurs côtés pour exiger des changements de société en profondeur. Mais nous sommes d'avis que cette solidarité, cette complicité ne doit pas se faire au détriment des luttes entamées par les femmes sur leur propre terrain.

Nous avons de sérieuses réserves quant à l'idée de retenir l'approche sociétale comme nouvelle, pour ne pas dire principale stratégie gouvernementale pour atteindre l'égalité entre les sexes. Mme la ministre Courchesne s'est voulue rassurante tout au long de la commission, en affirmant qu'il n'était pas question d'abandonner l'approche spécifique, mais cela ne suffit pas à calmer nos appréhensions face à ces velléités de remplacer la politique de condition féminine par une politique de l'égalité qui inclurait les hommes comme sujets et acteurs. Nous y voyons là un danger de mettre sur un pied d'égalité les situations de discrimination systémique vécues par les femmes et les problèmes de socialisation vécus par les hommes. Nous y voyons là aussi un risque d'invisibiliser ou de minimiser les difficultés des femmes sous prétexte que les hommes vivent, eux aussi, leur lot de souffrance et de détresse.

Par ailleurs, nous aimerions préciser que cette volonté d'interpeller les hommes, de collaborer avec eux en les invitant à faire partie de la solution a été maintes fois réitérée par le Mouvement des femmes, que ce soit dans leur lutte contre la violence conjugale, contre le harcèlement sexuel, contre les coupures dans les programmes sociaux, que ce soit dans le dossier de l'articulation famille-travail, alors que les chercheurs féministes ont toujours dit qu'il fallait impliquer les pères, les patrons, les politiciens, les syndicalistes dans la recherche de solutions et surtout ne pas réduire cette problématique à un simple problème de femmes. Pour instaurer une société égalitaire, nous pensons qu'il faudra miser non seulement sur la modification des comportements individuels, mais encore plus fondamentalement sur la remise en cause des structures et des institutions responsables du maintien d'un ensemble de privilèges accordés à un groupe social au détriment d'un autre.

À titre d'exemple, on peut douter que les hommes soient intéressés à intégrer les métiers féminins tant et aussi longtemps que ceux-ci demeureront sous-payés et dévalorisés socialement. On peut douter également que les femmes investissent massivement les sphères du pouvoir politique et économique tant que les règles du jeu demeureront axées sur la compétition, l'ambition, la disponibilité totale au détriment de la vie personnelle et familiale ou encore l'appartenance à des réseaux d'influence. Or, dans le discours des hommes, on entend surtout évoquer leur vulnérabilité, leurs problèmes identitaires, leur socialisation aliénante, arguments auxquels nous sommes sensibles mais qui nous semblent différents des problèmes de discrimination systémique vécus par les femmes, dont on sait qu'ils seront résolus principalement par une mise en oeuvre de programmes et de mesures fondés sur une analyse féministe des rapports sociaux de sexe.

Nous avons le goût de profiter de cette commission pour réagir aux critiques mille fois adressées aux féministes et aux études féministes à propos de leur aspect doctrinaire et de leur manque d'ouverture aux hommes. Mentionnons tout d'abord que les cours en études féministes ont de tout temps été ouverts aux femmes et aux hommes, que la formation et la recherche féministes, tout en privilégiant l'analyse de la situation des femmes, n'ont jamais exclu ou ignoré la situation des hommes.

De plus, on ne peut passer sous silence le fait que la recherche sur les femmes et les études sur les femmes ont constitué et constituent toujours «une étape de rattrapage indispensable ? et là je cite Huguette Dagenais ? pour combler les vides creusés au cours des siècles passés par l'androcentrisme et la domination masculine dans tous les champs du savoir». En d'autres mots, comme le précise ma collègue Francine Descarries, les études féministes ont avant tout fait la critique épistémologique des biais sexistes à l'oeuvre dans la production des savoirs scientifiques et sociaux. Les études féministes sont un champ d'études centré sur les femmes certes mais surtout sur l'analyse de l'ensemble des processus sociaux sexués qui président à l'organisation de la vie en société.

Dans cette même perspective, nous ajoutons que les féministes n'ont pas délaissé pour autant les instances mixtes de leurs organisations. Elles sont présentes et actives aux assemblées départementales, aux assemblées syndicales et dans les divers comités de travail. Elles y côtoient leurs collègues masculins avec qui elles discutent d'embauche, de réforme de programmes, de renouvellement de la convention collective. Elles mettent donc en pratique l'approche sociétale. Il semble toutefois que cette implication aux divers paliers universitaires ne doit pas se faire au détriment de lieux spécifiques pour penser, développer et diffuser les études féministes. Et, même si nos collègues masculins sont davantage ouverts à intégrer des femmes dans les hauts lieux du savoir, ils détiennent encore le haut du pavé dans bien des disciplines, ils sont encore quelque peu aveugles quant à l'apport intellectuel des femmes et, faut-il ajouter, leurs bibliographies contiennent peu de références féministes.

C'est pourquoi nous pensons que les femmes doivent continuer d'assurer un leadership dans ce domaine, qu'il est de leur responsabilité de définir les termes de la lutte pour l'égalité et de décider des circonstances et des moments pour se solidariser avec les hommes. Le leadership de l'identification et de l'analyse des différentes manifestations d'inégalité entre les femmes et les hommes dans la société québécoise ainsi que les correctifs qui doivent y être apportés reviennent aux premières concernées, les femmes.

Ici, comme le souligne l'avis du conseil, l'étude des rapports sociaux de sexe et des réalités spécifiques aux femmes a donné lieu, dans le monde en général mais au Québec en particulier, à une riche production de recherches scientifiques multidisciplinaires. Nous déplorons que ce constat ne s'accompagne d'une recommandation ferme pour que le gouvernement augmente les ressources financières dont les instituts, les chaires et les groupes de recherche en études féministes ont le plus grand besoin pour poursuivre leurs travaux. De plus, à aucun moment, le conseil ne parle de l'importance de promouvoir ou de soutenir la relève en études féministes, que ce soit par des programmes de bourses destinés à des étudiantes et des étudiants ou par des subventions de recherche pour nouveaux et nouvelles chercheurs.

Le diagnostic est clair et réitéré sur plusieurs tribunes, «la situation des études féministes et de la recherche est encore précaire sinon menacée au sein d'un champ scientifique toujours enraciné dans son objectivité androcentriste et pressé de passer à d'autres choses, à d'autres problématiques», décrivait ma collègue Francine Descarries.

n(11 heures)n

Sur la question du remaniement des ressources vouées à l'égalité, la ministre Courchesne a laissé sous-entendre qu'au terme de la commission parlementaire le gouvernement prendra des décisions sur l'organisation administrative la plus appropriée pour assurer l'égalité entre les sexes. Cette réorganisation, qui pourrait prendre la forme d'une fusion des statuts et des missions du Secrétariat de la condition féminine et du Conseil du statut de la femme pour mettre en place un conseil de l'égalité mixte, nous inquiète à plusieurs égards, tout d'abord parce qu'elle s'inscrit dans une tendance de plus en plus lourde, depuis l'arrivée au pouvoir du Parti libéral, à vouloir rationaliser, alléger, voire réduire les dépenses gouvernementales en procédant à des coupures et à des fusions dans l'appareil gouvernemental. La disparition du poste de ministre à la Condition féminine en est la preuve. Par ailleurs, on ne peut ignorer les pressions qu'exercent les groupes masculinistes qui réclament plus de services et plus d'argent pour réduire les problèmes des hommes et des garçons victimes des changements sociaux.

Nous sommes convaincues du rôle essentiel et complémentaire joué par le secrétariat et par le conseil. Le secrétariat, faut-il le rappeler, travaille en étroite collaboration avec la ministre responsable de la politique en matière de condition féminine et s'assure de l'application des programmes d'action qui en découlent. Le conseil pour sa part est là pour conseiller le gouvernement, faire des recherches, rédiger des avis sur les grands dossiers politiques concernant les femmes et les rapports sociaux de sexe. Le conseil est présent sur la scène politique à travers les consultations qu'il organise auprès de la population et les avis qu'il diffuse largement. Il est le seul à assurer une présence importante dans les diverses régions du Québec afin de pouvoir traduire l'ensemble des besoins et des réalités des femmes. Le conseil dispose d'une plus grande marge d'autonomie et une plus grande liberté de parole que le secrétariat et peut donc jouer un rôle critique, le cas échéant.

Nous croyons que la complexité et la multiplicité des situations critiques vécues par les femmes... Donc, devant cette complexité, le gouvernement ne doit pas réduire les ressources à leur service, mais plutôt en soutenir le développement et en accroître l'accessibilité. À ce jour, les collaborations entre le secrétariat, le conseil et les professeurs de l'IREF ont été nombreuses et ont porté fruit à bien des égards. Elles ont permis d'influencer les politiques sur les questions de garde, d'assurance parentale, de sécurité du revenu, d'équité salariale, de perception des pensions alimentaires. Les études et les analyses réalisées et diffusées par le secrétariat sont largement utilisées dans les cours offerts pour les femmes par l'IREF. Elles sont des sources d'information et de sensibilisation inestimables dans les dossiers aussi fondamentaux que la violence faite aux femmes, la lutte contre le sexisme dans les manuels scolaires ou la diversité religieuse.

C'est pourquoi nous affirmons avec d'autres que la création d'un éventuel conseil de l'égalité ne pourrait véritablement combler les aspirations et les besoins des femmes, qui vivent dans une proportion plus grande que les hommes des situations de discrimination, de violence, de pauvreté et qui sont confinées au statut de citoyennes de seconde zone.

Le Président (M. Copeman): Mme Corbeil, on approche très rapidement de la fin, alors je vous invite à conclure.

Mme Corbeil (Christine): Alors, bien, pour conclure, je dirais rapidement que nous réitérons l'importance que les différentes luttes pour l'égalité des femmes continuent de recevoir l'appui du gouvernement et de la société dans son ensemble, car il est bien évident que l'égalité ne se réalisera pas en dehors de l'expression d'une volonté sociale et d'un ordre politique qui la déclarent et la rendent possible. Et, si la tenue de cette commission parlementaire a été l'occasion d'entendre, de confronter, de discuter, de s'ouvrir à de nouvelles analyses et stratégies d'action en matière d'égalité, nous appuyons cette idée défendue, la semaine dernière, par Marie-Josée Legault, du CIAFT, à l'effet qu'avant de forger de nouveaux outils ou de désigner les choses avec de nouveaux concepts il faudrait davantage donner des dents aux instruments qu'on a déjà.

Je résumerai les principales recommandations que nous soumettons à l'attention de la commission: premièrement, que l'État joue son rôle de leader dans la lutte pour l'égalité entre les hommes et les femmes, une preuve de cet engagement serait de nommer une ministre en titre de la Condition féminine; deuxièmement, que l'État mette en place une politique globale en matière de condition féminine et un plan d'action qui reconnaissent l'existence d'une asymétrie des rapports sociaux de sexe aux dépens des femmes; que l'État maintienne le Conseil du statut de la femme et le Secrétariat à la condition féminine en tant qu'organismes distincts et non mixtes; que l'État appuie par l'octroi de nouvelles subventions l'action des groupes de femmes qui interviennent auprès des populations féminines les plus discriminées et marginalisées dans notre société.

Et, pour terminer, nous ajoutons une demande expresse auprès du gouvernement pour que soit améliorée la situation institutionnelle des études féministes par l'octroi de meilleurs financements et l'engagement d'une relève professorale dans les universités, ceci afin que nous puissions continuer d'interpeller les différents univers disciplinaires sur la question des rapports sociaux de sexe, d'améliorer nos outils conceptuels pour mieux interpréter les nouvelles réalités touchant les femmes et travailler en partenariat avec les groupes de femmes. Merci.

Le Président (M. Copeman): Mme Corbeil, merci, merci beaucoup. Mme la ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration.

Mme Courchesne: Merci, M. le Président. Mme Corbeil, Mme Kurtzman, Mme Roy, bienvenue. Mme Corbeil, félicitations pour votre première participation à une commission parlementaire. Et je voudrais souligner aussi très certainement le travail de votre institut de recherches. Il est évident que, dans tout ce dossier que nous débattons depuis plus de deux semaines maintenant, il est évident que, lorsque des groupes de chercheuses se présentent devant nous, non seulement il y a de l'intérêt, mais je considère que c'est important que vous preniez la peine de venir jusqu'ici, que vous rédigiez ce mémoire et que vous nous fassiez valoir ces points de vue, puisque, vous le dites vous-mêmes, il y a plus de 15 ans maintenant que votre institut effectue ces recherches.

Donc, pour moi, les chercheuses sont au coeur de cette loupe qu'on utilise pour examiner les phénomènes sociaux, pour essayer de les analyser, de les comprendre, mais certainement pour nous apporter des solutions, des recommandations. Et, à cet égard-là, il m'apparaît que vous êtes donc des femmes qui avez eu l'occasion de creuser tout ça bien en profondeur. Et je voudrais faire le lien avec le milieu universitaire, parce que vous nous dites qu'au fil des ans vous constatez que les programmes d'accès à l'égalité n'ont peut-être pas donné tous les résultats escomptés. Vous nous dites très simplement: On s'aperçoit que... Et rappelons-nous, hein, quand nous les avons créés, nous étions des pionniers en la matière et on a mis beaucoup, beaucoup d'espoirs à l'intérieur de ces programmes.

Vous nous dites aussi, et vous n'êtes pas les premières à nous le dire, peu importe l'université, pas plus la vôtre que d'autres universités, les chercheuses nous disent aussi, en tant que professeures, que, bien, la situation n'est pas si égalitaire que ça dans les hauts lieux de savoir. Il y a encore beaucoup de résistance, que ce soit au niveau de l'accession à des postes plus importants, ou l'accession à des niveaux de recherche, ou l'obtention de chaires, dans quelque secteur d'activité que ce soit. Et, moi, je vous dirais que c'est là que ça m'inquiète un peu parce que les universités, donc qui sont au coeur de bien comprendre les phénomènes sociaux, qui sont extraordinairement sensibilisées, qui savent ce qui se passe à travers le monde, qui ont toutes les facilités pour avoir ces niveaux de renseignements, et d'information, et de savoir pour être en mesure de bien comparer et de bien apporter les bons indicateurs, si dans les universités on a de la difficulté à donner toute cette place aux femmes parce qu'il y a, vous nous dites, des résistances au changement, des résistances d'attitudes, de comportements, je me dis: Oups!

Et là vous dites: Dans l'avis du Conseil du statut de la femme, les stratégies, on est plus ou moins à l'aise parce que ça ramène beaucoup, beaucoup aux attitudes et aux comportements. Alors, vous dites: Il faudrait plutôt s'attaquer aux structures, il faudrait plutôt s'attaquer aux normes, aux institutions patriarcales. Mais, pour changer des institutions, est-ce qu'il ne faut pas aussi changer des mentalités et des attitudes? Est-ce qu'on peut changer des institutions, des normes liées au patriarcat sans changer ces attitudes-là? Et, même dans une institution comme la vôtre, il y a des difficultés énormes. Alors, moi, là... Vous qui faites, toutes les trois, des recherches depuis 15 ans, là, quels vont être finalement, quels seront finalement les meilleurs moyens pour que ça bouge, pour créer cette nouvelle dynamique des rapports sociaux entre les sexes? Parce que c'est ça, le coeur de la commission parlementaire. Pouvez-vous nous éclairer là-dessus?

Mme Roy (Marie-Andrée): En fait, on peut considérer que le changement des mentalités est effectivement très important et on ne peut pas s'en passer. Mais le seul changement des mentalités, ce qu'on dit, n'est pas suffisant. On a besoin de politiques, de pratiques qui vont changer nos institutions sur la question, par exemple, des embauches, pour faire en sorte qu'il y ait autant d'hommes que de femmes dans nos départements, sur la question quand il est temps d'attribuer une chaire. Ce n'est pas uniquement une question de mentalité. La mentalité joue, l'opinion, mais on pense qu'il faut aussi qu'au niveau de nos institutions il y ait des politiques claires qui font en sorte... qui encouragent véritablement l'accès à l'égalité des femmes avec les hommes. En fait, nos institutions doivent aussi être changées dans leur mode de fonctionnement. Alors... Oui?

n(11 h 10)n

Mme Courchesne: Mais pourquoi, à ce moment-là, que les programmes d'accès à l'égalité, qui sont soutenus par les chartes en plus, là, ce n'est pas rien, donc pourquoi nos programmes d'accès à l'égalité ? je parle des institutions, je ne vise pas la vôtre particulièrement, ça peut être aussi le gouvernement, hein, on est une institution ? pourquoi ça n'a pas donné les résultats auxquels on avait droit d'espérer?

Mme Kurtzman (Lyne): Je pourrais répondre à cette question, moi, Mme la ministre... M. le Président. Je prends la parole sans qu'on me l'accorde...

Le Président (M. Bouchard, Vachon): Allez-y, allez-y.

Mme Kurtzman (Lyne): D'abord, vous parliez des champs du savoir. Vous nous dites: Vous êtes dans une université où vous travaillez de la recherche, vous produisez des études, vous êtes entre personnalités savantes et vous avez fait depuis 15 ans des recherches, comment se fait-il qu'on plafonne? Il me semble que vous avez posé cette question-là un peu...

Mme Courchesne: Un peu ça, là. Je ne veux pas être trop réductrice, là. C'est parce que je fais rapidement parce qu'on n'a pas beaucoup de temps, mais...

Mme Kurtzman (Lyne): Enfin, sur les programmes d'accès à l'égalité, pour prendre cet exemple-là, on plafonne, c'est clair. Moi, je vous dirais, les champs de savoir sont traversés par les subjectivités des personnes, qu'il y a longtemps que les universités... enfin, il y a au moins une dizaine d'années, de façon très, très affirmée, les universités ont reconnu que le savoir objectif et positiviste n'existe pas vraiment. Donc, dans les universités, tous les champs du savoir sont traversés par des points de vue, par des intérêts différents, ça, je pense qu'il faut le poser au départ, et l'IREF s'inscrit dans cette dynamique globale là. Et, on le voit bien souvent quand on arrive face à des décisions, c'est un jeu d'intérêts, un jeu de manoeuvre, un jeu d'influences pour faire passer un certain nombre de décisions concernant l'embauche en particulier, concernant les programmes d'accès à l'égalité.

Aussi, pourquoi on plafonne concernant les programmes d'accès à l'égalité? Moi, je pense qu'il y a, dans l'université plus fortement qu'ailleurs, cette peur, je dirais, cette inquiétude d'être embauché sur la base d'un privilège sexuel, enfin de sexe, et que plus fort qu'ailleurs existe cette perception-là que c'est sur la compétence et c'est sur la compétence qu'une personne doit être absolument et uniquement... devrait être le seul critère qui prévale à l'embauche d'une personne. Et, d'ajouter, à compétences égales, le critère de la préférence des femmes, c'est toujours compliqué, c'est compliqué pour les femmes elles-mêmes d'accepter qu'elles soient embauchées sur la base de cette clause-là qu'on appelle la clause des programmes d'accès à l'égalité.

Donc, il y a, dans les mentalités, comme vous dites, c'est sûr, il y a encore beaucoup d'obstacles, mais, bien avant, bien avec, je dirais, bien parallèlement à ce jeu des mentalités-là, il y a le jeu des intérêts portés par les uns et les autres qui font que c'est toujours à l'intérieur de son propre champ d'études qu'il y a une urgence plus grande d'embaucher des candidats et des candidates qui sont à l'intérieur des réseaux, qui sont souvent encore des réseaux masculins.

Mme Courchesne: C'est parce qu'effectivement ce que vous dites, on parle d'universités parce que vous êtes des universitaires, mais à mon avis ? corrigez-moi si je me trompe ? ce reflet-là se retrouve aussi dans d'autres secteurs d'activité, que ce soient les milieux d'affaires, que ce soient les milieux d'autres services, soit santé, services sociaux. Je veux dire, on entend ça régulièrement. Ce que vous me dites confirme que, malgré les lois, malgré les programmes, malgré les politiques, vous nous confirmez... je veux bien, l'intérêt, le jeu du pouvoir, mais vous nous confirmez aussi qu'il y a des problèmes de mentalités, d'attitudes et de comportements. Et ma question, c'est ça, c'est...

Et je pense que c'est un peu ça. Moi, c'est ma compréhension de l'avis du Conseil du statut de la femme, c'est ma compréhension de certaines personnes qui sont venues devant nous, c'est qu'il faut donc aussi travailler sur les mentalités, les attitudes et les comportements. Ce que je veux dire, c'est que l'obligation de travailler sur les lois, les programmes et les politiques demeure fondamentale, particulièrement pour un gouvernement, ça, j'en conviens tout à fait, et ça peut aller dans le sens de l'approche spécifique, tout à fait, on ne doit pas se dérober de cette responsabilité-là. Mais vous nous confirmez aussi par vos propos qu'il y a donc ce changement.

Et ma question, c'est: Comment faisons-nous ? et là je ramène ça à plus large, je sors du contexte uniquement universitaire parce que je pense que ça existe dans d'autres secteurs d'activité ? comment faisons-nous et avec qui? Et comment pouvons-nous réellement, après tant d'années, malgré les progrès réalisés, mais comment pouvons-nous ? parce qu'on nous signale les dangers, là, vous les signalez, les dangers, je suis très consciente des dangers, soyez convaincues de ça ? comment pouvons-nous donc les changer, ces mentalités, ces attitudes et ces comportements? Est-ce que c'est par l'exercice du pouvoir? Est-ce que c'est... Parce que, vous en faites mention, il faudrait plus de femmes dans l'exercice du pouvoir. Si c'est ça, la réponse, comment on va faire pour intéresser davantage les femmes à prendre leur place dans ce pouvoir-là?

Mme Corbeil (Christine): Écoutez, je reviendrais sur la question des programmes d'accès à l'égalité. Je pense que ces programmes-là, dans leur conception, sont justes, ils ont permis de rétablir une situation un peu criante d'inégalité. Mais là la question est davantage de dire: Dans quelle mesure les individus qui appliquent ces programmes-là, qui vivent avec ces programmes-là les acceptent, sont prêts à les appliquer? On a bien sûr des femmes qui sont visibles beaucoup plus qu'autrefois, à toutes les instances des universités, mais il y a encore des lieux où elles sont éminemment absentes.

Et je crois qu'il faut aussi revoir les critères qui nous amènent à définir les embauches. Ces critères-là sont-ils encore des critères qui éliminent les femmes parce que d'emblée elles n'ont pas le nombre de publications qu'on a exigées, qu'on exige pour ces postes-là? Donc, sans dire qu'il faut des critères à rabais, loin de là, je crois qu'il faut réfléchir sur qu'est-ce que ça implique, des programmes d'accès à l'égalité, quel soutien on veut leur donner. Est-ce qu'il faut que, par exemple, sur les comités d'embauche, il y ait à la fois des hommes et des femmes qui sont présents? Est-ce que, dans le recrutement des candidates, il doit y avoir des efforts particuliers de faits?

Alors, en quelque part, oui, les programmes sont là, mais il faut une volonté politique pour que ces programmes-là deviennent réalité. Et c'est là que tout est à innover, c'est là qu'il faut avoir une vigilance extrême. Et bien sûr cette vigilance, c'est les femmes qui en prennent la responsabilité parce qu'elles sont les premières à réaliser que la mixité, elle est encore au niveau d'un principe plutôt que d'une réalité.

Le Président (M. Copeman): Oui, allez-y, Mme Kurtzman.

Mme Kurtzman (Lyne): Moi, toujours sur la question des mentalités et des stéréotypes, je trouve que c'est majeur d'accorder de l'importance à cette dimension-là. Je ne dis pas ça... Je pense qu'il ne faut pas secondariser l'importance pour les femmes d'accéder aux postes de pouvoir, aux postes décisionnels, à quelque niveau que ce soit. Je mettrais l'accent aussi là-dessus. Mais je trouve que c'est important, les mentalités et...

Prenons un exemple. On parle des universités. Les sciences de l'éducation qui sont enseignées à l'UQAM, vous me corrigerez si je me trompe, Mme Roy, mais il me semble que les cours sur les stéréotypes sont absents. Il y en a eu un pendant un certain temps; maintenant, il n'y en a plus. Il n'y a plus personne, en sciences de l'éducation, à l'UQAM, qui forme nos enseignantes et nos enseignants, et, il faut bien le dire, encore une majorité d'enseignantes. Donc, les hommes ne se présentent pas en nombre suffisant pour prendre des postes, pour des carrières de professeur ou d'enseignant au primaire. Donc, à ce moment-là de la formation de la conscience de nos enfants, il n'y a pas de cours sur les stéréotypes, il n'y a pas de cours sur les rapports sociaux de sexe. Donc, moi, je pense qu'il y a là une piste, là. C'est des moments de la vie fondamentaux, c'est là que se structure la conscience de nos enfants. Et ce sont les femmes qui poussent, l'IREF pousse pour que ce genre de cours se donne en sciences de l'éducation. Et pourtant, là, je ne sais pas comment ça va, les pressions, mais ce n'est toujours pas un acquis, ce n'est toujours pas un cours obligatoire en sciences de l'éducation.

Le Président (M. Copeman): Merci. Mme la députée de Nelligan.

n(11 h 20)n

Mme James: Merci, M. le Président. Bonjour, mesdames, merci beaucoup pour votre présentation ce matin et pour la qualité de votre mémoire. J'aurais une question pour vous. Lorsque je faisais le parcours de votre mémoire, j'ai remarqué que vous avez présenté ou vous avez évoqué un doute par rapport à une proposition du gouvernement d'encourager la diversification professionnelle en cherchant, en attirant notamment les garçons dans les secteurs à prédominance féminine. Alors, je me demandais ? il me semble que ce serait un bon moyen en fait à contrer des stéréotypes puis justement avancer le débat: Pourquoi vous avez évoqué ce doute-là?

Mme Roy (Marie-Andrée): En fait, tout ce qu'on a signalé, c'est qu'on pense qu'il est souhaitable que l'ensemble des professions, hommes et femmes y aient accès et qu'il y ait une plus grande circulation des deux côtés. Mais ce dont on s'aperçoit, c'est que les professions traditionnellement féminines, compte tenu du niveau de rémunération qui est rattaché à ces fonctions, il est peu probable qu'il y ait un attrait très fort chez les hommes pour suivre ces formations, par exemple, que ce soit comme enseignant au niveau du primaire, que ce soit travailler, par exemple, dans les garderies, etc., des lieux qui sont très majoritairement féminins. Et ce sont des lieux importants et où on pourrait souhaiter effectivement qu'il y ait une participation masculine plus forte, mais ces professions sont tellement dévalorisées qu'à l'heure actuelle ce dont on s'aperçoit, c'est que ce sont principalement les femmes qui les assument. Alors, au fond, il y a aussi peut-être un travail à faire pour que ces professions traditionnellement féminines soient mieux rémunérées, et peut-être qu'à ce moment-là effectivement elles auront plus d'attrait pour les hommes. Et en ce sens on ne s'opposera pas à un partage...

Mme James: Merci, Mme Roy. J'ai compris que la rémunération, ce serait un facteur important, mais je me dis: Est-ce qu'il y a d'autres moyens, je dois dire, qu'on peut ou que le gouvernement pourrait utiliser pour justement soutenir ou encourager la participation, l'insertion des hommes dans ces domaines qui sont prédominants féminins, selon vous?

Mme Roy (Marie-Andrée): Ah, il peut y avoir des incitatifs, mais, vous savez, tant que ça rapportera davantage, aller visser des boulons chez Bombardier, par exemple, pour construire des avions, si ça rapporte davantage que, par exemple, aller s'occuper de très jeunes enfants dans une garderie, alors, tant qu'il va y avoir des écarts comme ça dans les types de... je pense que ça va être très difficile d'inciter effectivement les hommes à accéder à un certain nombre de responsabilités, un certain nombre de fonctions.

Mme James: J'aurais une autre question. J'ai le temps?

Le Président (M. Copeman): Oui, oui.

Mme James: C'est une question qui a été posée à... Aussi, moi, j'ai remarqué, dans votre mémoire, vous parlez de politique en matière de condition féminine et non de politique en matière d'égalité entre les femmes, les hommes. Moi, j'aimerais entendre votre point de vue par rapport à pourquoi vous avez choisi... vous faites ce choix-là.

Mme Corbeil (Christine): Peut-être parce qu'on sait qu'on est à une étape cruciale justement de renouvellement de la politique en matière de condition féminine, qu'il y a une réflexion à l'effet d'intégrer davantage les hommes dans les organisations qui ont été traditionnellement féminines, des hommes qui sont porteurs de préoccupations qui sont les leurs. Et, nous, en voulant réitérer une politique de condition féminine, c'est qu'on a l'impression que la façon dont on pose les problèmes des femmes, la façon dont on a mis de l'avant des solutions est fondamentalement différente de la façon dont les hommes posent les problèmes.

On ne nie pas qu'ils aient des problèmes, mais on a l'impression qu'ils ne les posent pas nécessairement en termes de rapports sociaux de sexe et que les perspectives... les stratégies d'action qu'ils mettent de l'avant sont moins des stratégies qui visent à remettre en cause de manière fondamentale ? et là je me répète les programmes, les normes et les structures de la société. Alors, nous, on pense que les problèmes sont suffisamment importants pour que les solutions dépassent les questions de socialisation, de stéréotypes, pour qu'on s'adresse directement à la racine même des situations qui ont mené à des discriminations criantes dont les femmes portent les préjudices encore aujourd'hui.

Le Président (M. Copeman): Malheureusement, c'est tout le temps qui vous est imparti. Alors, Mme la députée de Terrebonne et porte-parole de l'opposition officielle en matière de condition féminine.

Mme Caron: Merci, M. le Président. Alors, merci beaucoup: votre mémoire, votre présence, votre participation, Mme Corbeil, Mme Roy, Mme Kurtzman. L'Institut de recherches et d'études féministes de l'Université du Québec à Montréal puis qui est en lien avec Relais-femmes, pour moi, c'était essentiel que vous soyez ici, aussi essentiel à cause de votre expertise, mais essentiel aussi pour le rappeler, je pense ? puis c'est important, je l'ai dit souvent au cours de la commission, mais je veux continuer à le répéter, et votre présence nous permet de le répéter ? dans un domaine comme celui-là, ce n'est pas seulement une question de perception, une perception d'opinions, il y a des recherches sérieuses. Et, vous, votre présence vient nous le rappeler, tout comme celle de la Chaire d'étude Claire-Bonenfant sur la condition des femmes, qui est venue nous rencontrer, comme les chercheurs proféministes, comme, du côté de la relève, le Centre des femmes de l'UQAM, qui sont venues nous rencontrer, qui nous ont présenté un mémoire extrêmement intéressant, le Groupe Salvya aussi, des jeunes féministes convaincues qui sont venues nous présenter un mémoire avec des pistes de solution.

Vous savez, c'est important de dire ça. Puis c'est aussi important de rappeler, comme vous le faites, qu'il y a une différence et qu'il y a une discrimination systémique puis qu'on ne peut pas ne pas la reconnaître. D'ailleurs, on se l'est fait rappeler à quelques reprises, on se l'est fait rappeler par les membres du Barreau du Québec et on se l'est fait rappeler par l'honorable Claire L'Heureux-Dubé et Me Belleau, qui sont venues dire: C'est une obligation de l'État, autant dans les chartes, autant dans la constitution, dans les traités internationaux, l'État québécois a le devoir de mettre en place des politiques pour lutter contre la discrimination systémique faite aux femmes. Donc, non seulement il y a des expertises, mais il y a aussi une obligation tout à fait légale de le faire.

Vous rappelez aussi que la complexité des enjeux doit amener des transformations qui vont bien au-delà des mentalités. Moi, je vais seulement rappeler quelques exemples. Au niveau des mentalités, si on avait attendu un changement des mentalités pour adopter une loi sur l'équité salariale, on aurait attendu bien longtemps, parce que, même pour pouvoir l'adopter, il a fallu que les deux caucus de femmes travaillent très fort dans leur formation politique respective. Même chose ? pour ne pas être partisane ? pour la loi pour le patrimoine familial, même chose, je dirais, du côté de la perception automatique des pensions alimentaires, on ne pouvait pas attendre les mentalités. Il faut qu'on pose des actions concrètes, qui ne donnent pas tous les résultats qu'on souhaite, mais au moins elles nous font faire une avancée, un progrès.

Ma question va être au niveau de votre mémoire, quand vous nous parlez de l'importance que l'État mette en place une politique globale en matière de condition féminine, un plan d'action qui reconnaissent l'existence d'une asymétrie des rapports sociaux de sexe aux dépens des femmes, je veux que vous puissiez l'expliquer à nouveau. Je l'ai demandé régulièrement aux différents groupes parce que, j'avoue, pour ceux et celles qui vont lire, par exemple, l'avis du Conseil du statut de la femme ou qui vont entendre notre commission, ce n'est pas toujours évident de faire la nuance, la différence. Puis c'est normal parce que c'est un champ d'expertise spécialisé, alors ce n'est pas facile de le faire comprendre. Et je sens qu'à chaque fois qu'on ne s'entend pas au niveau des différents groupes ou au niveau des propos qu'on tient de part et d'autre, c'est toujours lié à cet aspect-là des choses. Alors, est-ce que vous pouvez, en termes clairs, nous répéter cette différence majeure, capitale, importante pour la suite des choses?

n(11 h 30)n

Mme Roy (Marie-Andrée): On a besoin d'une politique de la condition des femmes parce qu'à notre avis le diagnostic qui a été posé par le conseil est extrêmement éloquent. Le diagnostic le dit fort bien, les écarts sont encore extrêmement nombreux en ce qui concerne les problèmes économiques, politiques, les problèmes de relations hommes-femmes, les problèmes de violence. À tous les niveaux il existe encore des pas importants à franchir en ce qui concerne spécifiquement l'avancée des femmes pour arriver à une véritable égalité des sexes dans notre société, et, en ce sens-là, on pense qu'on ne peut pas se passer d'une politique.

Quand on regarde les différentes orientations qui étaient proposées, on pense que, parmi les orientations qui devraient être privilégiées ? on va en citer deux une première, c'est toute la question de l'accès au pouvoir, et, en ce sens-là, je pense que le gouvernement doit donner l'exemple. Et une des façons de donner l'exemple pour dire que tous les dossiers de condition des femmes sont prioritaires, c'est de reconnaître qu'il faut une ministre de la condition des femmes qui porte ce dossier-là. Il y a comme un exemple à donner pour avoir un effet d'entraînement ailleurs. Alors, c'est la première priorité, c'est toute la question de l'accès au pouvoir, mais le pouvoir à tous les niveaux.

Au niveau gouvernemental, vous, mesdames, qui avez été élues comme députées, vous savez parfaitement ce que ça voulait dire, hein. Ce n'est pas tant compliqué de se faire élire par des concitoyens, mais c'est tout un défi que de passer à l'intérieur de son parti pour devenir une candidate dans un comté où on a des chances de l'emporter. C'est un défi que vous avez rencontré. Et on sait qu'il reste encore, au niveau des partis, des deux côtés, quelques croûtes à manger de ce côté. Mais l'idée de l'accès au pouvoir, l'accès au pouvoir au niveau gouvernemental mais aussi au niveau régional et local, et les données sont encore éloquentes de ce côté-là.

Alors, au niveau de la politique, cette politique devrait mettre de l'avant, en fait... Et là je reprends les orientations 6 et 7 qui sont mises de l'avant dans l'avis du conseil. Alors, c'est l'idée de permettre aux personnes d'accéder, à tous les niveaux, à des postes de responsabilité. Et, en ce sens, il faut des études, il faut des recherches qui vont soutenir cela de manière systématique, il faut une politique qui dit dans quel sens aller. Et, par exemple, toute la question de la régionalisation nous inquiète profondément en ce qui concerne les impacts sur les femmes, et de la participation active des femmes dans ces instances.

Alors, si je reprends encore une fois le document du conseil, en ce qui concerne le pouvoir des femmes dans les instances économiques, c'est extrêmement éloquent quand on voit que les femmes sont absentes dans la moitié des conseils d'administration des plus grandes entreprises au Québec. C'est, à proprement parler, un scandale. Alors, on a des problèmes dans nos universités, mais, au niveau de la haute finance, dans les grandes entreprises, il y a des problèmes importants. Et, justement, quand on parle de changements de mentalités, oui, il y a des changements de mentalités, mais ces changements vont peut-être advenir s'il y a des femmes qui sont présentes, là, dans ce face à face dans les différentes institutions. On a besoin de cette présence active. Alors, cette politique devrait mettre de l'avant la question du pouvoir.

Et l'autre élément, et je pense que ce serait extrêmement important, l'autre élément à mettre de l'avant, c'est toute la question au niveau des familles et de la répartition, de la conciliation travail-famille. Il y a, il me semble, une avancée qui serait à faire, et je pense qu'il y aurait un support tant de la part des femmes que des hommes pour mettre ça de l'avant. Mais il y a un travail majeur à faire sur la conciliation travail-famille et éventuellement développer une politique familiale, ou compléter celle qui existe déjà pour aller de l'avant, pour faire un pas supplémentaire.

Mais, vous savez, à l'heure actuelle, le Conseil du statut de la femme, le Secrétariat à la condition féminine, ces deux instances, ces deux instruments majeurs pour veiller à l'accès à l'égalité des femmes avec les hommes, ces deux instruments donc qui sont cruciaux au niveau de l'État québécois, combien coûtent-ils? Autour, au total, secrétariat et conseil, autour de 7 millions de dollars. 7 millions de dollars par année pour assurer l'égalité entre les sexes, ça, ça veut dire 2 $ par femme, au Québec, et ça, nous, on considère que c'est insuffisant pour supporter cette idée. Et, si vous souhaitez une recommandation, on dirait que 3 $ par femme, au Québec, ce ne serait pas de trop pour supporter et le conseil et le secrétariat.

Mme Caron: Bien, merci beaucoup, Mme Roy.

Le Président (M. Copeman): Ou 1 $, 1,50 $ par habitant. Allez-y.

Mme Caron: Merci, M. le Président. Effectivement, je suis contente que vous ayez d'abord donné des précisions, mais aussi apporté l'élément, parce que je voulais y revenir tantôt. Quand on se parlait des mentalités, là, j'aimerais bien qu'on se le rappelle ? vous avez rappelé à juste titre toute la question des instances régionales ? à partir de 1997, avec la cinquième orientation, au niveau de la place des femmes dans le développement régional, nous avions travaillé, avec les groupes de femmes et avec les différentes instances régionales et locales, sur les mentalités, hein. Puis on se donnait des outils puis des moyens, puis il y avait un programme. Mais une loi, comme la loi n° 34 ? on a beau avoir travaillé sur les mentalités ? est venue défaire tout ce travail-là. Donc, on a beau travailler sur les mentalités, il ne faut pas que les politiques qu'on adopte, ou les programmes qu'on adopte, ou les lois viennent défaire ce qu'on avait gagné.

Je m'en voudrais, vu que vous nous avez dit tantôt que vous aviez travaillé, au niveau des recherches, d'une manière importante au niveau du trafic sexuel des femmes au Québec et que peu de groupes... Les groupes le mentionnent, mais peu de groupes avaient une expertise pour nous en parler davantage. Je pense au niveau des moyens d'action, parce que je pense que, dans une politique en matière de condition féminine, une politique globale, il va falloir travailler à ce niveau-là. J'aimerais vous entendre, je sais que vous n'avez pas beaucoup de temps, mais vous entendre un peu sur cet aspect-là précis, profiter de votre expertise.

Mme Kurtzman (Lyne): Bon, il est clair que, sur les questions de prostitution et trafic sexuel des femmes et des enfants ? ce sont surtout des femmes et des enfants qui sont trafiqués sexuellement, qui font de la prostitution ? les lois relèvent du gouvernement fédéral. Bon, cela dit, ces lois-là, la façon dont ces lois sont formulées traduit notre compréhension, enfin une perception, nos représentations de la prostitution dans la société en général, qui conçoit des Canadiens, des Québécois, des Montréalais, les citoyens, quoi. Et là, actuellement, l'ensemble des lois sur la prostitution ne statuent pas sur la prostitution. Les lois statuent sur la nuisance publique, les lois statuent sur les bonnes moeurs, sur ce qui est acceptable par la société canadienne ou la société québécoise, ce qu'il est acceptable de montrer. Et, en ce sens, actuellement, tout... Bon.

Et des études, notre étude en tout cas, pour parler de celle-ci, elle vient tout juste de commencer et vise à documenter la réalité du trafic sexuel au Québec. Et on a tendance à penser que ça n'existe pas au Québec. Il y a quelques études canadiennes qui sont sorties, mais, même à l'échelle canadienne, on a tendance à penser que le trafic sexuel n'existe pas. Or, nous, actuellement, on est en train de documenter que ça existe et que, comme ça se déploie à l'intérieur des zones cachées de la prostitution, celles qui n'intéressent pas la société parce que ce n'est pas visible, ça crée une situation où on occulte des réalités aussi dramatiques que celle du trafic sexuel.

n(11 h 40)n

Donc, ce que notre étude vise à faire, c'est d'abord de sortir vraiment, là, de rendre visible, de faire connaître l'existence de cette réalité-là, mais plus encore de démontrer cette espèce de cul-de-sac qu'il y a à considérer la prostitution comme uniquement en termes de nuisance publique. Nous pensons qu'il y a là fondamentalement un rapport inégalitaire entre les hommes et les femmes, que, s'il est un lieu qui devrait être analysé, compris et appréhendé selon une analyse différenciée selon les sexes, c'est bien la prostitution. Et pourtant personne ne le fait, ni au fédéral, qui sur... enfin qui tergiverse à l'idée de décriminaliser complètement le monde prostitutionnel. C'est une tendance qui tend à se développer au sein du gouvernement fédéral actuellement, alors qu'il y a des analyses comparatives entre les sexes et des engagements gouvernementaux à l'endroit des analyses, personne n'en parle, tout le monde se tait.

Et donc, moi, je pense que là-dessus, ce qu'il faut faire, c'est encourager la recherche sur ces dimensions-là. Notre recherche est toute récente. On vient de commencer un terrain très, très complexe. Parce que vous savez que c'est un monde clandestin. Donc, pour pouvoir amasser des données, il faut aller dans les bars la nuit, il faut s'insérer dans des milieux clandestins. Donc, il faut vraiment sortir la prostitution du silence, du silence de la société en général, et qui rejoint jusque les communautés de chercheurs, hein? Très peu de chercheurs osent se prononcer sur la prostitution. Donc, ce que je peux dire, c'est que c'est un phénomène en expansion, le trafic sexuel, et c'est en lien direct avec cette espèce d'hypocrisie de la société dans laquelle on vit, à l'effet que tout ce qui ne se voit pas, bien, ma foi, on va faire avec.

Le Président (M. Copeman): M. le député de Vachon, en vous signalant qu'il reste à peu près quatre minutes.

M. Bouchard (Vachon): Oui, M. le Président, vous me permettrez de prendre quelques secondes quand même pour saluer de façon bien particulière des collègues de l'institution, avec laquelle j'ai toujours des liens, sans solde mais affectifs. Et ça aura bien pris cette occasion de faire le saut en politique pour vous rencontrer plus que 10 minutes dans les corridors. Et je salue en même temps votre participation à l'Institut de recherches féministes, qui est un institut important, 241 personnes ? ce n'est pas rien, là ? qui se centrent, qui centrent leur énergie de chercheurs là-dessus.

Maintenant, vous avez affirmé, tout à l'heure, Mme Corbeil, quelque chose de très intriguant et vous avez dit: Nos recherches sont très peu lues par la communauté scientifique autre que féministe. Ça veut dire, ça, que les recherches que vous faites ? et là je fais référence au phénomène que vous venez d'évoquer à propos de la prostitution ? ça veut dire qu'elles seraient très peu lues par les criminologues, les géographes, les urbanistes, les personnes qui sont spécialistes en développement régional, en développement économique. Pourquoi?

Mme Corbeil (Christine): Elles sont très peu lues parce qu'on sait qu'on n'est plus cités. Il y a un comité, une veille étudiante qui s'est mise sur pied, il y a quelques années de ça, justement pour faire l'analyse des bibliographies dans les plans de cours, et, à leur grand désespoir, les professeurs mentionnent rarement des ouvrages faits par des femmes dans une perspective féministe. Donc, il y a aussi un aveuglement par rapport à la contribution des femmes.

Donc, à la fois il faut avoir plus de... il faut obtenir plus de visibilité, publier sans doute dans des créneaux qui sont reconnus sur le plan scientifique, publier en anglais. Donc, effectivement, les femmes souvent vont choisir des lieux de publication qui sont plus près de la communauté, vont viser, bien sûr, ultimement, des revues américaines ou des revues scientifiques qui ont la cote. Mais, bon, au-delà du fait qu'elles ne publient pas toutes dans les revues les plus reconnues sur le plan international, il y a quand même, facilement, je dirais, entre collègues, des réseaux qui sont mis en place, et ces réseaux sont un peu imperméables à intégrer de nouveaux apports, alors ce qui fait qu'effectivement il faut constamment répéter, réitérer qu'il y a des publications pertinentes, les mettre sur les sites disponibles, faire acheter nos ouvrages dans les bibliothèques. Il faut exercer une vigilance constante. Et on n'a pas toujours le temps de le faire et on n'a pas toujours les énergies, les ressources pour le faire. Mais je pense que, bon, ça tend à changer. Mais en même temps on peut trouver dommage qu'on se cite entre nous, alors que les femmes, elles, vont faire référence... Je pense juste dans le domaine de la famille, il y a énormément d'hommes qui écrivent sur les questions familiales, et on les intègre tout autant qu'on intègre les recherches féministes. Alors, je pense que l'ouverture doit se faire des deux côtés.

M. Bouchard (Vachon): Merci, M. le Président. Merci, madame.

Le Président (M. Copeman): Merci. Alors, Mme Corbeil, Mme Kurtzman, Mme Roy, merci beaucoup d'avoir participé à cette commission parlementaire au nom de l'Institut de recherches et d'études féministes de l'Université du Québec à Montréal.

Et j'invite les représentantes du prochain groupe, la Promotion des Estriennes pour initier une nouvelle équité sociale, à prendre place à la table. Je suspends les travaux de la commission quelques instants.

(Suspension de la séance à 11 h 46)

 

(Reprise à 11 h 49)

Le Président (M. Copeman): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, c'est avec plaisir que nous accueillons les représentantes de la Promotion des Estriennes pour initier une nouvelle équité sociale. Mme Martel, bonjour.

Je répète, comme je le fais avec tous les groupes, vous avez 20 minutes pour faire votre présentation qui sera suivie par un échange avec les parlementaires des deux côtés de la table. En vous souhaitant la bienvenue à cette commission, je vous invite à présenter les personnes qui vous accompagnent et de débuter votre présentation.

Promotion des Estriennes pour initier
une nouvelle équité sociale (PEPINES)

Mme Martel (Céline): Alors, bonjour, M. le Président. Mme la ministre, bonjour, et Mmes et MM. les députés, bonjour et merci de nous recevoir.

n(11 h 50)n

Alors, nous représentons toutes les trois notre organisme, Promotion des Estriennes pour initier une nouvelle équité sociale. Je suis ici comme représentante de l'organisme, en tant que présidente, Céline Martel. J'ai, à ma droite, une autre administratrice, Mme Nicole Dorin, qui siège au conseil d'administration. Et nous avons aussi Colette Bernier, qui est une personne-ressource, qui est la coordonnatrice de l'organisme. Alors, merci de nous recevoir.

Je vais introduire le mémoire un petit peu en présentant les PEPINES, et ensuite je donnerai la parole à Nicole Dorin pour le corps un petit peu de notre communication, et je reviendrai pour les recommandations. Colette participera aux échanges avec nous.

Alors, l'organisme Promotion des Estriennes pour initier une nouvelle équité sociale, qu'on appelle communément PEPINES, veut, comme tant d'autres groupes, partager ses réflexions et ses convictions quant au nouveau contrat social au Québec pour l'égalité entre les hommes et les femmes. Dans un premier temps, le mémoire présentera les PEPINES et leur rôle dans la société estrienne. En annexe I, vous l'avez sûrement vu, nos actions et nos interventions sont listées à cette annexe et elles témoignent un petit peu de notre présence précisément à l'instance régionale de développement, et c'est plutôt en lien avec nos interventions dans ce cadre-là, qui sont en lien directement ou indirectement. Alors, à l'annexe I est présenté un bref descriptif de leurs réalisations depuis sa fondation. Par la suite, il parlera des buts du mémoire, des fondements sur lesquels devrait se baser la politique à venir. Puis, il fera brièvement l'état de la situation de la condition féminine à partir des avancées des femmes et des problèmes graves qui subsistent. Avant de conclure, il soumettra quelques propositions.

Alors, l'organisme Promotion des Estriennes pour initier une nouvelle équité sociale a été mis sur pied en 1992, dans la foulée de la politique de régionalisation. Il voulait ainsi répondre à un besoin d'une meilleure présence des femmes dans le développement régional, particulièrement dans les sphères de pouvoir.

Incorporé depuis 1995, les principaux objectifs des PEPINES sont: mettre en place les moyens pour permettre l'accès des femmes aux sphères de décision; promouvoir l'engagement et la participation des femmes au développement socioéconomique de leur région; voir à mettre en évidence les réalisations des femmes, tant sur le plan du travail gagne-pain que sur le plan de leur engagement bénévole à l'amélioration des conditions de vie de la population; susciter de la part des femmes de l'Estrie une réflexion sur les perspectives contemporaines du marché du travail de façon à en augmenter les lieux d'insertion et à provoquer une nouvelle approche. On vise ainsi à améliorer les conditions de vie socioéconomiques et politiques des femmes de l'Estrie.

Alors, au cours des ces années, les PEPINES ont particulièrement investi leurs énergies sur la scène du développement régional. Notre organisme est considéré comme le comité aviseur en condition des femmes par le CRD de l'Estrie, de 1993 à sa fermeture, en 2004. Probablement le doyen, sinon un des plus anciens organismes au Québec à avoir mis au centre de ses préoccupations la participation des femmes dans les instances décisionnelles du développement régional, les PEPINES ont développé une expertise reconnue en Estrie et ailleurs au Québec. Nous avons choisi la voie des alliances avec les principaux leaders socioéconomiques en Estrie, alliances qui ont permis des avancées pour les femmes dont la région peut s'enorgueillir.

Comme vous pouvez le constater en consultant l'annexe, nos actions ont été modelées à la lumière du contexte estrien, le plus rigoureusement en cohérence avec notre objectif de départ, tout en utilisant la stratégie des petits pas. Ainsi, nous avons tenté de poser un à un les jalons nécessaires à une plus grande équité de représentation des femmes, notamment au CRD-Estrie, parce que nous sommes convaincues que la présence des femmes en nombre suffisant dans les lieux décisionnels est un des moyens les plus efficaces pour éliminer les inégalités sociales et économiques encore présentes en 2004. S'il y a une chose que le cours des événements nous a malheureusement démontré, c'est que les acquis demeurent fragiles en matière d'égalité et qu'un simple changement de structure peut freiner, voire provoquer un recul considérable à un élan pourtant bien amorcé.

L'expertise de notre organisme est forgée de la riche expérience de concertation avec les divers acteurs et actrices du développement de l'Estrie tout autant que des batailles que nous avons dû parfois mener pour convaincre de la nécessité d'agir si on veut changer le cours des choses. C'est à la lumière de cette expérience terrain particulièrement que nous vous présentons notre réflexion et les recommandations qui en découlent. À toi, Nicole.

Mme Dorin (Nicole): Oui. Alors, avant de débuter, je voulais simplement vous dire que je suis particulièrement touchée de venir ici, aujourd'hui, parce que, si, pendant plusieurs années de ma vie, j'ai été une féministe intuitive, 17 années de travail au conseil m'ont permis de devenir une féministe engagée pour toujours dans la condition féminine.

Ce mémoire ne se veut pas une critique en règle et systématique de l'avis du Conseil du statut de la femme Vers un nouveau contrat social pour l'égalité entre les femmes et les hommes. Le peu de temps et les moyens dont nous disposons ne nous permettent pas de produire un tel document. Nous nous contenterons de signaler les paramètres que nous considérons comme essentiels pour mettre fin à la discrimination systémique envers les femmes et nous assurer ainsi que le gouvernement mette tout en oeuvre pour favoriser l'égalité de fait entre les Québécois et Québécoises et ainsi réaliser une réelle démocratie.

Les fondements du mémoire. Alors, constatant que la discrimination systémique ? parce que c'est vraiment le point crucial ? est toujours le fait des femmes en tant que groupe social et considérant que, «dans toute société démocratique, l'État est le premier responsable de la promotion de l'égalité entre les sexes, qui représente un des ses missions fondamentales», nous sommes donc d'accord avec l'avis du CSF, qui poursuit ainsi: «Il ? l'État ? doit s'assurer de promouvoir cette valeur reconnue comme un fondement substantiel de la démocratie, au même titre que la justice, la liberté [et l'égalité]. C'est avant tout aux personnes élues que revient la mission d'inscrire l'égalité parmi les premiers objectifs à atteindre et de réunir les moyens et les conditions nécessaires à sa réalisation. Leur volonté politique et leur engagement s'avèrent des conditions essentielles. La réalisation de l'égalité devient ainsi un enjeu qui touche l'ensemble de la société.»

Tenant compte des constats précédents, nous croyons que seule une loi-cadre sur l'égalité peut sérieusement contribuer à régler cette question de discrimination systémique à l'endroit des femmes. Tout comme le Comité de condition féminine en développement régional de la Montérégie, le CCFPRMR, nous estimons, nous aussi, qu'il faut avant tout concentrer les actions sur les inégalités forgées par un système politique et économique dominé par un sexe au détriment de l'autre. Pour ce faire, des mesures spécifiques pour les femmes dans des secteurs d'activité cruciaux, tels ceux de la politique et de l'économie, et ce, dans un contexte de compressions budgétaires, doivent être conservées, voire ajoutées.

État de la situation: avancées et problèmes. La Québécoise d'aujourd'hui est plus instruite et est sur le marché du travail pour y rester. Elle veut vivre en couple, hétéro ou homosexuel, plusieurs choisissent aussi le célibat. La majorité des Québécoises veulent des enfants, mais elles veulent combiner carrière et famille. C'est ainsi qu'elles maîtrisent leur maternité. De plus en plus, les Québécoises aspirent à des postes de direction sur le marché du travail ou à des postes en politique municipale, provinciale ou fédérale, tout comme elles se voient à la présidence des grandes institutions en éducation, en santé, en affaires, en développement régional. La Québécoise actuelle est très informée et politisée, car elle lit les journaux, les revues d'information, elle participe aux débats. Depuis longtemps, la femme québécoise est cultivée, puisqu'on la retrouve partout et en plus grand nombre que ses compatriotes hommes au théâtre, au concert, dans les musées et les bibliothèques. Plus âgée, elle est de mieux en mieux préparée pour la retraite, moment où elle suit des cours à l'université ou au collège, voyage et fait du sport. Depuis toujours, elle veille à sa santé et à celle des siens.

Si la condition de vie des femmes québécoises s'est améliorée, cela ne s'est pas fait tout seul. Il n'y a jamais eu de ministres, de députés qui se sont levés un bon matin en disant: Aujourd'hui, qu'est-ce que c'est que je pourrais bien faire pour améliorer la condition de vie des Québécoises? Tout ce qui s'est fait s'est accompli parce que des femmes courageuses, sensibles à leurs besoins et à ceux des autres femmes, intelligentes, capables d'articuler leur pensée, de décrire les situations impossibles dans lesquelles elles vivaient, capables aussi de réclamer des conditions meilleures en les identifiant et en les spécifiant se sont donné comme mission de travailler à l'avancement des Québécoises. Ces femmes, ce sont les féministes du Québec. Elles n'ont jamais travaillé à détruire les hommes, à leur enlever leur bien-être, leur confort et leurs postes, elles n'ont travaillé qu'à obtenir une juste part de la richesse collective et du pouvoir pour la gérer.

n(12 heures)n

Cette situation des Québécoises, grandement améliorée par rapport à celle des femmes âgées d'aujourd'hui, n'est pas nécessairement le lot de toutes les Québécoises. De plus, les acquis sont fragiles et rien n'est obtenu spontanément. En dépit du fait que les Québécoises représentent 51 % de la population, il faut constamment rappeler qu'elles existent, il faut toujours concevoir des projets pour protéger leurs droits, il faut que ces projets à budget limité soient conçus avec beaucoup de raffinement et d'exemplarité, il faut que celles qui les conçoivent acceptent avec beaucoup d'humilité de les peaufiner à l'infini et d'être évaluées par des personnes qui souvent ne connaissent rien à la situation des femmes et doutent constamment de la véracité des avancées, quand ce n'est pas de la capacité des femmes de dépenser de façon appropriée les petits budgets qu'on finit par leur accorder.

Nous sommes tout à fait d'accord avec l'analyse que fait le CSF dans la première partie de son avis, au chapitre des inégalités et des obstacles. Les problèmes les plus persistants sont ceux sur le plan économique, pour différentes raisons qui sont toutes, d'une manière ou d'une autre, liées à une discrimination systémique. Au chapitre des responsabilités familiales, par exemple, il est prouvé que les femmes y consacrent plus de temps que l'homme, même si le Québécois actuel y accorde de plus en plus de temps. Ce sont majoritairement les femmes qui ont aidé le système de santé à réaliser son virage ambulatoire et à maintenir les vieux parents, les enfants malades et les personnes handicapées à domicile, la plupart du temps avec pour résultat un travail à temps partiel qui fragilise grandement leur autonomie financière.

Les femmes disposaient, en 2000, d'un revenu moyen correspondant à 64,3 % de celui des hommes, selon les données du recensement de 2001. En dépit d'études sérieuses et des succès scolaires qui en résultent, que d'aucuns reprochent presque aux filles, les rendant quasi responsables des échecs des garçons et de leur décrochage scolaire, malgré tout, sur le marché du travail, les garçons obtiennent encore les meilleurs postes et à de meilleurs salaires. Pour accroître le problème, les travailleuses sont encore majoritairement concentrées dans des secteurs moins bien payés.

D'autre part, si les femmes ont fait des progrès importants dans les sphères du pouvoir, il n'en demeure pas moins qu'elles sont encore loin de l'égalité dans ce domaine. Même si elles sont 32 % des députés et 32 % des ministres à l'Assemblée nationale, à la Chambre des communes, elles ne représentent que 25,3 %. Quant au palier municipal, celui qui est le plus près des gens, elles sont loin de l'égalité, puisqu'elles ne représentent que 10,9 % des maires et 24,1 % de tous les postes de conseillers municipaux. À ce niveau, d'ailleurs, on remarque qu'après un bond au cours des années quatre-vingt, la progression a nettement ralenti à compter de 1992, pour presque stagner depuis cinq ans: 1980, 1,5 % de mairesses et 3,8 % de conseillères municipales; 1991, 7,9 % de mairesses et 19,3 % de conseillères municipales; 1998, 10,1 % de mairesses et 22,4 % de conseillères; 2003, 11,6 % de mairesses et 24,5 % de conseillères.

Le même phénomène se produit dans d'autres sphères décisionnelles, et en Estrie les femmes ne représentent qu'en moyenne 25 % des décideurs, tous secteurs d'activité confondus. Nous voyons qu'ici encore la discrimination systémique imprègne les comportements des gens bien en place et, de façon plus insidieuse, l'ensemble de la population. C'est d'ailleurs le propre d'une discrimination systémique, ce n'est pas l'individu comme tel qui est discriminé, c'est son groupe.

Or, toute politique qui ne tient pas compte de cette discrimination, qui n'instaure pas des mesures précises, concrètes et mesurables pour la contrer ne fait que maintenir le problème ou, pire, aggraver la situation, car une politique en apparence neutre peut parfois être dommageable. À preuve, la mise en place des conférences régionales des élus, les CRE, dans toutes les régions du Québec, qui, accordant le pouvoir aux élus municipaux, a du même coup éradiqué des efforts de plusieurs années en matière d'équité, au plan régional. En effet, on l'a vu, les femmes étant peu présentes au palier municipal, encore moins au poste de mairesse, la loi n° 34, qui octroie les deux tiers des sièges de la CRE à des élus ? la plupart du temps les maires ? a eu pour résultat net une diminution dramatique du nombre des femmes dans une instance qui a pour mandat d'orienter le développement des régions.

Concrètement, en Estrie, l'avènement de cette nouvelle structure a aussi eu pour impact la mise au rancart de toute une politique d'équité qui avait été pas à pas instaurée au CRD-Estrie. Il faut donc reprendre les discussions avec les élus, expliquer, convaincre, en espérant au moins revenir au même point.

Donc, pour les Estriennes comme pour toutes les Québécoises, des avancées, certes, mais, pour chaque gain, il a fallu des années de lutte, des tonnes de rapports de toutes sortes, des marches, des occupations pacifiques. Combien de femmes ont dû passer pour des folles féministes, pour ne pas dire des maudites féministes, en tentant d'obtenir les droits qui améliorent présentement la vie des Québécoises. Bref, l'égalité des droits, sans doute; l'égalité de fait, encore beaucoup de chemin à parcourir. Alors, Mme Martel continue pour la...

Mme Martel (Céline): O.K. Des propositions en vue d'une égalité de fait entre les hommes et les femmes au Québec. Une loi-cadre sur l'égalité en termes d'objectif à atteindre. À l'instar du projet gouvernemental de doter le Québec d'une loi et de principes directeurs en matière de développement durable, il faut se doter d'une loi-cadre sur l'égalité. Cette loi-cadre devra bénéficier des moyens financiers nécessaires à sa réalisation et à son application dans tous les ministères et organismes paragouvernementaux, ceci selon une approche transversale. S'il est louable de soutenir les jeunes par de nombreuses mesures spécifiques, comme les gouvernements l'ont fait depuis quelques années, et aujourd'hui le développement durable, qu'est-ce qui justifierait que les femmes à la recherche de l'égalité n'obtiennent pas aussi ce soutien, d'autant que les principes d'équité et d'égalité des chances font partie intégrante d'un réel développement durable et sont le fondement même d'une réelle démocratie.

Nomination d'une ministre en titre à la condition féminine comme moyen pour atteindre l'égalité. En plus d'une loi-cadre, il est indispensable que le gouvernement nomme une ministre et crée un ministère doté des ressources nécessaires pour voir à son application, même si cette loi-cadre devra être appuyée par l'ensemble du Conseil des ministres.

Instaurer une politique en matière de condition féminine. Il est clair que les avancées en matière de condition féminine, au cours des dernières années, ont été fortement liées à la politique de la condition féminine. Cette politique, il va sans dire, doit être accompagnée d'un plan d'action, d'indicateurs de résultat et de bilans annuels si on veut sérieusement apprécier les résultats ou apporter des modifications s'il y a lieu.

Notre champ d'expertise nous fait insister sur l'aspect d'obligation de résultat à l'endroit des nouvelles structures locales et régionales. En effet, bien que la décentralisation soit sur toutes les lèvres en ce moment, nous maintenons que l'État est le premier responsable du respect du principe d'égalité, à l'instar des principes de liberté et de justice, et qu'à ce titre il doit signifier clairement ses attentes en matière d'égalité et instaurer des mécanismes de reddition de comptes.

Finalement, la politique de condition féminine devra reconnaître l'expertise développée par de nombreux groupes de femmes au Québec et voir à les intégrer dans le processus de mise en oeuvre de cette politique en région.

Les ressources financières nécessaires. Autant dans le cas de la loi-cadre sur l'égalité que pour la mise en oeuvre de la politique en matière de condition féminine, il faut prévoir les moyens financiers pour leur réalisation. En effet, les principes seuls ne suffisent pas. En matière d'égalité politique notamment, il faut bonifier le budget octroyé au programme À égalité pour décider, qui a été une mesure des plus efficaces, depuis 1999, pour améliorer la représentation des femmes dans les instances régionales et locales. Il faudra par ailleurs que ce programme reconnaisse plus formellement les groupes dont c'est la mission principale, de façon à assurer un suivi et la consolidation des actions et à bénéficier d'une expertise solide. Il faut de plus dédier des fonds à l'équité, en appui aux attentes signifiées aux structures régionales, qui résistent à se voir imposer des responsabilités sans transfert de budget. Ici encore, la politique jeunesse devrait guider minimalement le gouvernement, d'autant que les femmes ne sont pas un secteur, mais la moitié de la population.

Des structures à maintenir. Aussi longtemps que les objectifs sur l'égalité ne seront pas atteints, nous pensons que le Conseil du statut de la femme et le Secrétariat à la condition féminine doivent être maintenus. De plus, il nous apparaît essentiel que le gouvernement voie à pourvoir chaque ministère d'une répondante à la condition féminine, de façon à ce que la fonction transversale de la loi-cadre sur l'égalité se matérialise.

Enfin, l'analyse différenciée selon les sexes. Avec l'analyse différenciée, il nous apparaît clair que tant les ministères que le gouvernement ou encore les instances régionales de développement pourront mieux comprendre les disparités entre les hommes et les femmes dont nous avons parlé dans ce mémoire. Il faut accentuer les efforts en ce sens et implanter les mécanismes nécessaires dans tout l'appareil gouvernemental et paragouvernemental.

n(12 h 10)n

En conclusion, la préparation de ce mémoire nous a démontré encore plus clairement que, depuis l'arrivée de ce gouvernement, la situation est en perte de vitesse. Pas de ministre en titre à la condition féminine, une politique de condition féminine qui a pris fin ou du moins qui est dans un certain flou, pour ce qui concerne notamment la cinquième orientation, des représentantes à la condition féminine, dans certains cas, dans les ministères, qui n'ont pas été remplacées, autant de facteurs qui démontrent un désintéressement vis-à-vis des femmes et de leur situation sans que cette attitude soit expliquée par une amélioration réelle de la situation des Québécoises. La montée des groupes masculinistes, qui attribuent aux femmes leurs problèmes et condamnent presque celles-ci pour leurs succès, a amené le gouvernement à se questionner en matière de condition féminine. Nous reconnaissons que les hommes ont des problèmes, mais ils ne relèvent pas d'une discrimination systémique comme groupe social. Le projet possible d'un conseil de l'égalité au lieu du Conseil du statut de la femme n'aidera ni les uns ni les autres.

Nous saluons par ailleurs la vision du gouvernement énoncée dans le document Briller parmi les meilleurs, où il est dit que l'égalité entre les hommes et les femmes sera exemplaire. Mais, pour y arriver, le gouvernement doit reconnaître explicitement que l'égalité n'est pas encore atteinte pour les femmes, s'attaquer à la discrimination systémique des femmes, tant sur le plan économique que politique, et proposer une loi-cadre dans les meilleurs délais. Je vous remercie.

Le Président (M. Copeman): Merci, mesdames. Alors, Mme la ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration.

Mme Courchesne: Merci beaucoup, M. le Président. Mesdames, bienvenue. Bienvenue à la région de l'Estrie, mais bienvenue d'abord à vous trois. Et vous dire que je me suis arrêtée longuement sur vos principales réalisations. D'abord, merci de nous les avoir communiquées de façon à la fois détaillée mais précise et succincte, ça nous donne une bonne idée de ce que vous avez fait au fil des ans, dans votre région. Et je trouve ça intéressant parce que ça résume bien aussi la teneur de vos propos dans votre mémoire. On sent bien que votre action est très certainement en ligne avec vos propos. Donc, il y a une bonne cohérence à cet égard-là. Vous démontrez, par ces actions-là, justement ? et vous l'avez dit en présentation ? que vous croyez beaucoup à la formation d'alliances et que vous avez vous-mêmes, dans votre région, créé énormément d'alliances au fil des ans et avec différents partenaires, avec des partenaires de toutes sortes.

On a beaucoup parlé de l'importance de ce travail-là dans toutes les régions, et j'aurai donc des questions qui ont un lien avec l'aspect terrain de votre travail. Moi, je voudrais savoir, indépendamment des difficultés que vous venez tout juste de signaler, là, que vous avez bien énumérées, moi, je voudrais savoir de quelle façon on pourrait officialiser davantage ces alliances-là dans les régions pour justement atteindre cette égalité, pour faire ce pas de plus, pour être mobilisateur... ou mobilisatrice, plutôt, dans votre région. Vous parlez bien sûr d'une loi-cadre à l'ensemble national pour démontrer les volontés, mais comment on pourrait traduire ça plus officiellement dans les régions? Est-ce que c'est une politique d'égalité dans les régions? Comment on peut officialiser ces partenariats ou ces alliances que vous avez et... Je vais commencer par cette question-là.

Mme Martel (Céline): Bon. Moi, je répondrai comme ceci. Je me dis que, par rapport à notre expérience, ce qu'on peut dire, c'est que nous avons créé des alliances, c'est vrai, nous avons travaillé avec les hommes donc, puisqu'ils sont à 80 %, 70 %, 75 % sur le conseil d'administration, à l'instance régionale, mais j'ai l'impression que ça dépend toujours des hommes qui sont en présence. Alors, dès que ça change de structure, dès qu'on quitte la scène, tout est à recommencer. Alors, je me dis, on a réussi ça, il faut recommencer à zéro.

Alors, s'il y avait une volonté politique, un mandat clair auprès de ces instances-là, il me semble qu'on ne partirait pas à zéro, il me semble qu'on partirait d'une base établie sur laquelle on sait qu'on doit travailler en alliance. C'est pour ça qu'on pense à une loi-cadre, c'est pour ça qu'on pense à des mesures concrètes qui font qu'ils se sentent responsables, qu'ils se sentent investis d'une responsabilité vis-à-vis l'égalité, vis-à-vis la participation des femmes dans le développement régional.

Quand on pense actuellement, là, qu'on avait un siège femme, un principe liminaire, on avait une politique d'équité, la parité dans les commissions, une grille d'analyse, tout ça entre les mains de l'instance régionale et, maintenant, qu'il n'y en a plus du tout, là, on n'a même pas un siège femme, pas un principe, pas une parité, pas une politique, tout est à refaire. Il me semble qu'il y a là quelque chose de clair, là, qu'on pourrait aménager plus facilement d'une instance à l'autre, je veux dire, d'un changement de structure à l'autre, même si on change les hommes et les femmes. Moi, je répondrais comme ça. Je ne sais pas si mes collègues aimeraient ajouter quelque chose.

Le Président (M. Copeman): Mme Dorin.

Mme Dorin (Nicole): Bien, en tout cas, au tout début, quand les CRD... au moment du ministre Picotte, quand il a fait ses remaniements, la réorganisation du CRD, à ce moment-là, on avait demandé, nous autres, la moitié des sièges. En réalité, là, on n'a jamais voulu un siège femme au CRD, on voulait la moitié des sièges. Bon. À un moment donné, on s'est bien rendu compte que, tu sais, là... on le savait qu'il n'y a personne qui nous céderait son siège pour dire: Ça vous conviendrait mieux qu'à moi, là.

Alors, ce qui est arrivé, c'est qu'on a demandé un siège femme. Et on a réalisé aussi qu'on ne peut pas non plus constamment demander aux femmes qui sont là... puis je pense qu'en politique vous devez bien le sentir, là, tu sais, que souvent on est portées, les femmes, à faire reposer sur les femmes qui sont là tout l'avenir des femmes de la terre, tu sais. Bon, ça, c'est dur, tu sais, puis c'est comme impossible. Mais c'est parce qu'il faudrait qu'il y ait des hommes qui aillent dans le même sens, tu sais, puis qui... Bon. Mais pour ça il faut qu'elles soient assez nombreuses.

Il faut aussi qu'il y ait au moins une femme dont c'est la préoccupation constante, quotidienne de réfléchir aux questions des femmes. Toutes les femmes sont sensibilisées à la question des femmes. Elles ne veulent pas toutes le dire, mais elles le sont, en réalité, sensibilisées, sauf qu'à mon avis il faut qu'il y en ait qui osent être la féministe d'office ou quelques féministes d'office en attendant que le nombre augmente.

Puis, moi, je peux vous dire une chose, c'est qu'en général les élus, puis en particulier dans nos régions, les élus, à moins que ce soit inscrit qu'il faut telle chose, là, je peux vous le dire, ils ne le font pas. Dans le domaine de la culture ? moi, je suis présidente du Conseil de la culture de l'Estrie aussi, là ? dans le domaine de la culture, il a fallu remonter les mailles constamment parce qu'il n'y avait pas eu de poste culture dans les CLD. Bien, tu sais, c'est forçant de faire ça comme ce n'est pas possible. Et c'est la même chose... Tandis que, quand c'est inscrit dans la loi, bien ils ne peuvent pas passer à côté. En attendant que...

Il faut se souvenir que l'éducation, on le sait, «it's a lifetime job». Puis je pense que, tu sais, on le dit, les parents, c'est comme ça, ils éduquent les enfants quasiment jusqu'à leur mort, tu sais. Bon, bien, c'est la même chose par rapport à ça, qu'est-ce que vous voulez que je vous dise?

En réalité, le Conseil du statut de la femme, c'est un organisme qui devrait en arriver à l'autodestruction. C'est ça. Le monde idéal, c'est l'autodestruction de ces histoires-là. On est d'accord, mais on n'est pas rendus là. C'est le problème.

Le Président (M. Copeman): Mme la députée de Jean-Talon.

Mme Delisle: Bonjour, mesdames, merci d'être présentes ce matin pour nous éclairer. Vous allez me permettre de réagir un petit peu à vos propos. Je partage plusieurs des affirmations que vous avez faites et, sans vouloir revenir sur un dossier qui a monopolisé, je dirais, depuis plusieurs... depuis quelques années, mettons deux, trois ans, nos régions et autant la mienne que la vôtre, je partage effectivement votre opinion sur le fait que les grandes perdantes des fusions municipales, ça a été les femmes. Je l'avais dit à l'époque. Ça ne change rien, là, je veux dire, ça ne change rien au dossier, là, mais ça a changé, entre autres, l'important capital d'intervention des femmes sur l'ensemble des dossiers, puis pas juste le dossier du brigadier scolaire puis le dossier des loisirs, là. Parce que, moi, j'ai été conseillère municipale, dans une autre vie, et mairesse, puis les premiers dossiers qu'on m'a offerts, c'était d'aller gérer la madame au coin de la rue, là, qui faisait traverser les enfants. Ça, je voulais le faire, mais je voulais faire d'autres choses aussi, j'étais capable de faire d'autres choses.

Moi, je voudrais vous dire que, contrairement à ce que vous dites, même si on peut être de guerre lasse des fois, moi, je pense profondément qu'il faut continuer à battre puis défoncer la porte. Puis je vais vous donner l'exemple de la CRE de Québec. C'est vrai que ce n'était pas inscrit dans la loi que ça prenait une représentante pour les femmes, puis un représentant pour les étudiants, puis un représentant pour ci ? en tout cas je ne me souviens plus exactement, là, de la liste. Mais, moi, je peux vous dire qu'on a, à la CRE de Québec ? bien Québec, la grande région de Québec ? quelqu'un qui représente les groupes de femmes. Puis les groupes de femmes se sont entendues entre elles pour que ce soit Élaine Hémond qui soit là. Et fort heureusement elle est là. Elle parle de démocratie, de démocratie et de démocratie.

n(12 h 20)n

Et c'est important, vous avez eu raison de dire qu'il faut qu'il y ait quelqu'un qui l'ait, cette préoccupation-là. Même nous, on est plusieurs femmes autour de la table, nous sommes des élues, on sait que ce n'est pas toujours facile et, même nous, là, des fois on a besoin d'être rappelées à la réalité parce qu'on vit dans un milieu où il y a... Ça va vite. On a des politiques... Je n'allais pas dire: Il y a des gars. J'allais dire... Il m'a regardée. Non, mais c'est vrai, on vit dans un lieu où ça va assez rondement, puis il faut prendre le temps de réfléchir, mais ça nous prend aussi des moments où on va se rappeler, là, que les luttes ne sont... je n'aime pas ce mot «lutte» là, mais c'est ça, ce n'est pas terminé. Puis ce n'est pas plus terminé pour ma génération que ça l'est pour celle de mes filles puis de mes belles-filles. Parce que, moi, je peux vous dire que je connais des gens près de moi, quelqu'un qui avait un emploi et qui a réalisé, en quittant son emploi, que le gars d'à côté gagnait plus cher qu'elle pour exactement le même emploi. Puis on ne parle pas de quelqu'un qui a 63 ans, là, on parle de quelqu'un qui a à peine le début de la trentaine. Ça fait que ces iniquités-là existent encore aujourd'hui, puis il faut trouver les moyens de les enrayer.

Alors, moi, je pense que vous devez ? c'est un commentaire plus que d'autre chose ? moi, je pense que vous devez, si vous jugez opportun d'avoir quelqu'un dans votre CRE qui représente les femmes... bien, je ne sais pas comment ça fonctionne chez vous, mais organisez-vous, là, ayez des alliés. Mais il faut le faire parce que c'est vrai que, notre place, il faut la prendre.

Je vous écoutais puis je trouve ça très intéressant, ce que vous disiez, là, mais concrètement, là, il y a quand même une structure. Bon. On a beau dire qu'il n'y a pas un ministère attitré, on a une ministre responsable, on a des fonds qui sont dévolus à la condition féminine. Les femmes qui vous précédaient tout à l'heure disaient qu'il y avait comme un maigre 7 millions qui était investi uniquement... tu sais, ce n'était pas beaucoup. Mais il ne faut pas oublier aussi qu'il y a des mesures qui ont été prises pour aider les femmes. Parce que c'est les femmes à mon avis qui gagnent le plus, là, avec la question des garderies. Il y a beaucoup de femmes chefs de famille monoparentale. Donc, ces femmes-là, avec les garderies, les centres de petite enfance... On ne reviendra jamais en arrière, là, c'est rendu dans nos moeurs puis c'est important d'avoir ce bon réseau là. Il y a aussi combien d'organismes finalement qui sont subventionnés par le gouvernement et qui aident finalement les groupes de femmes, et tout ça.

J'ai cru comprendre, de la part des intervenantes tout à l'heure, que ce n'était comme probablement pas assez. Elles n'ont pas dit que c'était trop peu, mais en tout cas. Puis je ne veux pas mettre les groupes les uns contre les autres, mais vous voyez ça comment, vous? Je veux dire, dans un monde idéal, c'est sûr que, si on pouvait dépenser bien de l'argent, là, on le ferait. Puis je pense qu'il ne faut pas toujours se lancer la pierre d'un parti politique à l'autre. On a quand même des difficultés budgétaires que le précédent gouvernement a connues puis qu'on connaît aujourd'hui. Mais jusqu'où ça peut aller, ça, ces interventions-là? Vous parliez d'une loi-cadre. Je veux bien, mais ce n'est pas comme si on revenait en arrière puis qu'il ne s'était rien fait, là, on continue d'avancer. Peut-être que les méthodes ont changé. Mais où est-ce que ça va s'arrêter, tout ça, puis quels sont les moyens... Je vais rephraser, là, je vais le dire autrement. Pas que je veux que ça s'arrête, mais de quelle manière on va... Comment on peut mieux et plus investir pour que ce soit plus efficace, autant pour ma génération, mais pour celle de mes filles, puis de mes belles-filles, puis de vos petites-filles, puis de mes petites-filles aussi, là?

Mme Martel (Céline): Moi, en tout cas, ce que je répondrais, dans un premier temps, notre champ d'expertise est plus en fonction de l'équité de représentation dans les sphères décisionnelles. Et, moi, c'est là que je verrais d'abord les premières interventions les plus urgentes à faire. C'est vrai que l'argent, c'est nécessaire, mais, pour moi, ce n'est pas vraiment l'argent qui est la priorité actuellement. Pour moi, je vois ça... On est face à un déficit démocratique. Pour moi, c'est grave, c'est plus grave qu'un déficit financier. Et, à ce titre-là, je me dis, qu'est-ce qu'on fait?

On peut comparer quand même avec le déficit financier. Qu'est-ce qu'on fait quand on efface un déficit financier? On prend des mesures spéciales, on choisit un plan de redressement dans un temps déterminé, puis après ça on regarde où est-ce qu'on en est rendu, qu'est-ce qu'on pourrait faire de plus, et on a mis des mesures particulières. Moi, c'est dans ce cadre-là que notre organisme intervient pour penser d'abord à une justice au niveau de la représentation.

C'est sûr que ça prend des... il faut soutenir financièrement les instances qui vont avoir à se responsabiliser par rapport à ça, sinon ils ne le feront pas. Moi, c'est à peu près à ce niveau-là d'abord que je trouve que, nous, le champ d'expertise qu'on a, l'expérience qu'on a, les réponses qu'on a eues, c'est toujours de cette manière-là qu'on nous répond: Si le gouvernement ne nous donne pas des sous pour soutenir ce que vous proposez, ce que vous revendiquez, que voulez-vous qu'on fasse, il n'y tient pas plus que nous autres. J'aimerais ça, moi, que, dans les instances régionales, on nous dise: Nous autres, on va faire nôtres vos avancées, vos revendications puis on va choisir de mettre ça en priorité dans notre région. À date, là, en tout cas, ça n'a pas été comme ça chez nous. Puis c'est pour ça qu'on revendique toujours un mandat clair auprès d'eux. Est-ce qu'il y en a qui veulent continuer? Colette?

Le Président (M. Copeman): Mme Dorin, oui.

Mme Dorin (Nicole): Oui. Bien, en tout cas, moi, effectivement, je suis d'accord avec tout ce que Céline dit, mais il faut aussi remarquer que, bon, au cours de l'évolution de la condition féminine, il y a eu différents groupes de femmes qui ont été mis en place pour répondre à des besoins précis et cruciaux, mais il y a toujours des besoins qui sont différents. Et, quand je regarde cette question-là de l'accession des femmes dans les sphères de pouvoir, c'est relativement récent que des groupes se sont mobilisés pour travailler à cette tâche-là, c'est-à-dire de faire en sorte que les femmes aient accès aux sphères de pouvoir. Et le programme À égalité pour décider est venu, dans le cadre de projets, supporter ces groupes-là. Et ce qui nous apparaît important, c'est que ces groupes-là, qui sont nouveaux ? parce que la situation est une préoccupation nouvelle pour les femmes ou relativement nouvelle ? bien ça m'apparaîtrait important que ces groupes-là puissent recevoir une forme de subvention de base pour les... Parce que, là, pour le moment, chaque année, on doit présenter un nouveau projet et on ne sait pas si on va sortir gagnantes du concours ou pas, tu sais. Bon, alors, c'est ça, les PEPINES, c'est comme ça qu'elles vivent, là, présentement. Mais ça ne nous apparaît pas suffisant. En tout cas, Colette pourrait vous en parler plus abondamment encore que moi, là, mais...

Mme Bernier (Colette): Je donnerais peut-être aussi un exemple. Vous disiez: De quelle façon... On regardait, on a travaillé... il y a d'autres régions qui ont travaillé des ententes... ou qui ont tenté de travailler, de négocier des ententes spécifiques en condition des femmes.

Une voix: Oui, bon exemple.

Mme Bernier (Colette): On peut vous donner notre expérience. Tout à l'heure, vous nous disiez que vous nous encouragiez à continuer nos luttes. N'ayez crainte, nous ne sommes pas des lâcheuses.

Une voix: Oui, je te dis qu'on frappe fort à la porte, hein?

Mme Bernier (Colette): Je voulais juste faire cette petite parenthèse. Mais l'exemple de la négociation de l'entente spécifique est probant. On a travaillé pendant cinq ans et presque six ans à essayer... pas parce que les partenaires... Tous les partenaires étaient d'accord sur les objectifs. On a réuni tout ce monde-là, tous les ministères, on a reçu des avis positifs de tout le monde, mais il n'y avait aucun programme qui fittait ? excusez-moi l'anglicisme ? et à nulle part on ne pouvait trouver l'argent. Donc, pendant...

Et on avait quand même... Ces alliances-là qu'on a créées au sein de l'instance régionale, le conseil régional de développement appuyait cette entente-là dès le départ. Mais le propre d'une entente spécifique, c'est de rallier plusieurs partenaires, et on a réussi, là, de peine et de misère, l'an dernier. Puis, l'apport des partenaires gouvernementaux est 10 000 $, et nous avons toutes les misères à renégocier la deuxième année de l'entente. Nous attendons encore.

C'est des choses qui peut-être ne sont... Ce n'est pas toujours beaucoup d'argent, mais le fait qu'il y ait un soutien, que, quand il y a une politique ou qu'il y a des objectifs, ils soient soutenus par un programme, par... ? je ne sais pas, moi, c'est vous autres, les experts et expertes de ces choses-là, là ? mais c'est ça qui fait toute la différence. Pendant des années, on n'a pas pu avoir ça.

Le Président (M. Copeman): Merci, Mme Bernier. Avant de céder la parole à Mme la députée de Terrebonne, je présume qu'il y a consentement pour dépasser 12 h 30? Consentement. Mme la députée de Terrebonne et porte-parole de l'opposition officielle en matière de condition féminine.

n(12 h 30)n

Mme Caron: Merci, M. le Président. Alors, merci beaucoup, Mme Martel, Mme Dorin, Mme Bernier, les PEPINES ? alors, on va peut-être dire le titre au complet aussi pour celles et ceux qui nous écoutent ? Promotion des Estriennes pour initier une nouvelle équité sociale, cette équité sociale là basée évidemment sur une équité de représentation et aussi une équité au niveau économique, je pense, les différents groupes sont venus aussi nous le rappeler.

D'abord, félicitations pour votre travail. Vos réalisations sont extrêmement intéressantes. Vous n'avez pas chômé depuis votre fondation, vous avez fait un travail extraordinaire dans votre région. Et vous rappelez à juste titre que les acquis sont toujours fragiles. Il n'y a jamais rien d'assuré au niveau de l'égalité de fait. Le moindre programme, la moindre politique, la moindre décision peut venir renverser ça. D'où l'importance d'une analyse différenciée selon les sexes, je pense, qui ne doit pas être seulement des données ventilées, parce que, si on a juste des données ventilées, on passe carrément à côté, on fait fausse route. C'est une base, les données ventilées, mais après ça il faut faire l'analyse différenciée pour vrai parce que sinon on se trompe. Mais, même une fois qu'on a fait ça, même une fois qu'on l'a faite, l'analyse différenciée selon les sexes, il faut qu'il y ait une volonté politique de répondre à cette analyse-là, parce que, même si, par exemple...

On va prendre l'exemple de la loi n° 34. On le savait, là, c'était clair, moi, c'est la première chose que j'avais dite à mon caucus au moment du dépôt du projet, c'est évident qu'on va arriver à une diminution au niveau de la présence. C'était clair. Mais il faut aussi qu'il y ait une volonté politique de dire: Bien, on va s'assurer d'apporter des modifications pour ne pas amener des reculs. Donc, ça, ça n'empêche pas cette nécessité-là. Et c'est vrai qu'au niveau des régions, comme au niveau des ministères aussi, s'il n'y a pas une obligation réelle et des budgets financiers qui vont avec, ça ne se fait pas.

Les ententes spécifiques, je peux vous en parler, moi aussi, dans Lanaudière. Les ministères, pour les ententes spécifiques, ils travaillaient avec leurs programmes, puis leurs programmes, ils étaient normés. Puis une entente spécifique, ça vient défaire les normes, ça fait que, si tu n'as pas un budget à part pour des ententes spécifiques, tu ne peux pas les réaliser parce que, là, tu as tes normes, tu peux essayer de jouer avec tes normes, mais tu ne viens pas donner la vraie réponse d'une entente spécifique. Puis il faut aussi une croyance qu'une entente spécifique c'est important. Mais, s'ils n'ont pas le budget qui va avec, ils ont beau trouver ça important, ça ne se réalise pas.

L'importance aussi, au niveau des régions, vous l'avez dit, d'une équité au niveau de la représentation. Mais ce que la cinquième orientation venait dire aussi, c'est la prise en compte de leurs besoins, des besoins des femmes. Et c'est vrai que, s'il n'y a pas une personne qui le porte, là, puis ce n'est pas facile à porter, on va toutes s'entendre là-dessus, hein, vous le savez, nous le savons, mais, s'il n'y en a pas une personne qui l'a tout le temps, tout le temps, pour le ramener, vérifier... Parce que c'est très lourd. Il y a combien de programmes, de mesures qui sortent, là, autant au niveau régional que national? Bien, il faut que quelqu'un le porte, sinon ça ne se fait pas. Si c'est tout le monde qui le porte, bien il n'y a comme personne. Donc, oui, il faut que tout le monde soit convaincu de l'importance, mais il faut qu'il y ait une personne qui le porte, sinon ça ne se fait pas.

Ma question va être directement sur le programme À égalité pour décider. Vous l'avez vécu, c'était un nouveau programme qui a permis d'offrir finalement à des groupes de femmes, au niveau régional, de travailler sur un aspect bien particulier, celui de la représentation. Puis il est à la base, vous le dites. Et on était supposés être rendus, là, après cinq ans, on était à... On avait confirmé, là, au Rendez-vous des régions, qu'on continuait le programme un autre trois ans. Mais je sais qu'on souhaitait réexaminer les critères, apporter des transformations, puis utiliser la pratique, l'expérience terrain dans les programmes qui n'étaient pas connus, puis de voir maintenant comment il fallait le réenligner. Alors, je pense que, dans une nouvelle politique en condition féminine, on ne pourra pas passer à côté.

Le programme À égalité pour décider, il est important, la ministre l'a dit. Alors, il est important. Puis, moi, je voudrais profiter de votre expérience pour nous dire les modifications que vous souhaiteriez apporter au niveau de ce programme-là. Et j'insiste sur une petite phrase que vous nous faites: «Il [faudrait] par ailleurs que ce programme reconnaisse plus formellement les groupes dont c'est la mission principale de façon à assurer un suivi des actions et à bénéficier d'une expertise solide.» Parce que c'est évident que, les groupes de base qui n'ont pas un plein financement pour leur fonctionnement, c'est intéressant de s'inscrire pour aller chercher un volet puis de le faire. Puis je ne dis pas que les groupes ne le font pas bien, là, mais c'est sûr que ça fait partie des budgets qui sont là, puis les gens les utilisent. Comment vous voyez ça, si on avait à établir, là, les nouveaux critères, vous les voyez comment, par votre expérience qui est vraiment, là, très, très terrain?

Mme Bernier (Colette): Oui. En ce moment, c'est un concours, en fait c'est ouvert à tous les groupes, effectivement. Puis, nous, on ne nie pas que, dans beaucoup de régions... Puis des groupes, une année donnée, peuvent se donner cet objectif-là et faire des actions très intéressantes, mais il nous semble qu'il pourrait y avoir au moins un volet pour des actions sur le plus long terme, peut-être sur un trois ans ou... pour faire en sorte que les groupes qui travaillent vraiment cet objectif-là puissent travailler en continuité, consolider. Quand on est toujours à devoir repenser des projets de plus en plus innovateurs, de plus en plus originaux...

Parfois, on a fait un projet, tu sais, la plupart du temps, un projet intéressant dont on commence à voir les impacts et on est obligées presque de laisser tomber ça pour faire autre chose. Puis, à un moment donné, on peut bien continuer un petit peu, mais on ne peut jamais accumuler, accumuler les actions si on reste avec un financement qui est presque de six mois en six mois, là, il faut bien être clair. Alors, on pense qu'au moins on reconnaisse une base ou un plan sur plusieurs années, quelques années, ce serait déjà aidant.

Mme Caron: Aviez-vous quelque chose à ajouter, Mme Martel?

Mme Martel (Céline): Non, je trouve que, en fait, la principale chose, c'est la consolidation et la continuité. Parce que c'est vrai qu'on devient passablement essoufflées de toujours être sur le point de chercher autre chose, chercher autre chose. Puis je me dis qu'un concours ça reste un concours, c'est quand même... Pour moi, le concours, là, ça devrait être, je dirais, l'intervention, l'accès ultime, mais il devrait y avoir bien d'autres choses, bien d'autres mesures, bien d'autres encadrements, paramètres avant ça. Alors, là, on est là à se diviser un petit million, je ne sais trop, là, comment, mais enfin c'est ce qui reste dans les régions, c'est des pinottes, en fait, là.

Puis, c'est certain, nous, on a commencé à travailler, les PEPINES, bénévolement sur cette dimension-là. On a été, je ne sais pas, moi, cinq, six ans à travailler d'une manière militante finalement parce qu'on y croyait, puis parce que c'était le moment de s'investir à ce niveau-là, puis qu'il fallait travailler, là, dans une autre dimension. Et, quand est arrivé ce programme, ce concours, bien, là, c'est sûr qu'on a dit: Coudon, allons-y. Mais ce n'est pas parce que je ne trouve pas que c'est une mesure si... Bon, elle est là, profitons-en, mais je trouve que c'est vraiment la dernière des mesures qu'on devrait avoir.

Le Président (M. Copeman): Mme Dorin, oui?

Mme Dorin (Nicole): Bien, en tout cas, d'ailleurs, quand je regarde tous les outils qu'on a mis en place, là, tu sais, le répertoire, la Cartographie du pouvoir, l'outil sur Les chemins du pouvoir, pour un peu aider les femmes par rapport aux différents problèmes qu'on rencontre, les formations qu'on a mises à partir de cet outil-là, à un moment donné, tu sais, un répertoire, il faut que ce soit révisé, tu sais. Bon. Ensuite de ça, on utilise un outil, bon, on en perçoit l'utilisation, les limites, les réajustements qu'on doit faire, bon, et ainsi de suite, tu sais. Alors, chaque outil a toujours besoin d'une mise au point à un moment ou l'autre, là, tu sais. Puis ensuite de ça les pratiques qu'on développe font qu'on voit des nouveaux outils ou des nouvelles façons de travailler, mais ça demande de l'ajustement, et c'est une chose...

On a une personne, c'est Colette. Elle, elle travaille avec des comités. Bon, bien, c'est elle qui finit par être obligée d'écrire les choses puis de concevoir les choses, de représenter puis d'être très multiple, en réalité. Et ça, en même temps de chercher les sources de financement, en même temps de remplir les conditions, puis des conditions, vous le savez qu'il y en a de multiples conditions quand on fait une demande de projet, si on veut gagner le gros lot, là, il faut que ce soit l'excellence, hein, qu'on fasse, là, puis il faut dire qu'elle est bonne, là, mais ça demande du temps quand même pour le faire, tu sais.

n(12 h 40)n

Ça fait que c'est ça, là, c'est tout ça. C'est qu'à un moment donné il faut avoir une espèce de convention où on dit: Bon, bien, là, elle, on l'a, là, on la garde, puis quitte à aller ponctuellement chercher d'autres personnes pour compléter. C'est ça qu'il faut qui existe, tu sais. Ça, c'est un aspect. Naturellement, là, on a fait état des autres aspects, mais, si vous me questionnez sur le financement, là, tu sais...

Puis, je regarde, tu sais, quand on parle des ententes spécifiques, là, à un moment donné, il y avait trois ententes spécifiques qui devaient être renouvelées cette année, bon: une dans le tourisme, une pour les psychotropes dans les écoles puis, l'autre, la nôtre. Les deux autres, ça a passé. La nôtre, ils n'avaient même pas reçu le rapport encore qu'ils commençaient à nous dire: Bien, vous savez, les fonds diminuent, patati, patata. Aïe, ils ne l'avaient pas regardée, ils n'avaient pas regardé notre chose puis ils nous disaient ça comme ça. Bon. On a fait ce qu'il fallait faire, ce que vous pensez. Toutes les actions, on les a toutes faites puis on l'a eue. Mais, tu sais, il a fallu encore monter des scénarios pour les posséder un peu parce que c'était la seule manière qu'on allait avoir ce qu'on voulait. Puis encore il reste des petites affaires à régler, hein, Colette?

Mme Martel (Céline): Encore, ils voulaient nous diminuer, une diminution.

Mme Dorin (Nicole): Oui, ils voulaient nous diminuer. Bon, là, on est allées, tout le monde, la salle a été très bien remplie. Ils ont rajouté des chaises, et puis on est devenues très visibles. Ça fait que... Bon. Gentiment visibles mais visibles.

Mme Caron: Oui. Merci, mesdames. Effectivement, même dans les ententes spécifiques, il n'y a pas fureur pour faire des ententes spécifiques, mais, quand c'est une entente spécifique en condition féminine, la discrimination systémique, elle vit là pareil, ça, c'est clair.

Je reviens sur le programme À égalité pour décider. Effectivement, au départ, vous, vous étiez dans une région où, vous, vous aviez commencé à travailler, mais il y avait des régions qui n'avaient pas travaillé beaucoup ce volet-là. Donc, on ne savait pas beaucoup quels groupes pouvaient prendre le volet. Donc, il y a eu... ça a été sous forme de concours. Je pense, tout comme vous, que nous sommes rendus à une étape de consolidation, parce que, si on veut aller plus loin, il faut effectivement consolider puis que, là où il y a une expertise plus forte, on puisse travailler davantage à partir des outils qu'on a. Donc, vous parlez d'un volet qui pourrait être du long terme.

Il y a un nouveau volet national qui est ajouté, même si c'est le même budget, là. Donc, plusieurs groupes sont venus nous dire: Il faut augmenter le budget parce qu'il y a un nouveau volet national. Si on met le volet long terme, je pense que c'est quelque chose d'important. Au niveau régional, est-ce que vous iriez jusqu'à... Parce que présentement il peut y avoir plusieurs groupes par région. Vu que c'était sous forme de concours, il pouvait y avoir plusieurs groupes par région. Puis il y avait même des régions, des années, qui n'en avaient pas. Est-ce que vous iriez jusqu'à mettre une enveloppe régionale au niveau du programme À égalité, où, dans chacune des régions du Québec, les groupes s'entendraient pour décider qui va faire... ou partager, là ? ça peut être deux groupes aussi ? mais, si, au niveau régional, les groupes s'entendaient pour ce travail-là, À égalité pour décider? Et est-ce que, au niveau du gouvernement, on devrait réserver une enveloppe par région, même montant, pour s'assurer que le travail puisse se faire? Comment vous la voyez, la partie régionale?

Le Président (M. Copeman): Et comment vous le voyez de la façon la plus concise possible.

Mme Martel (Céline): Bien, moi, dans un premier temps, je suis un peu... j'ai des réserves par rapport à ça parce que j'ai peur que... J'ai une inquiétude par rapport à ça parce que ça risque d'être: Bon, il y a un programme, il y a un accès. Moi, je suis plus intéressée par une intervention qui mobilise l'ensemble des acteurs du développement régional. Alors, je ne suis pas capable de trancher en faveur de ça. J'ai trop d'inquiétude que: Ah, vous avez votre enveloppe, allez-y par là!

Mme Caron: Vous ne voulez pas de concours. Alors, concrètement, là, concrètement, on fait quoi? Vous ne voulez pas de concours qui mobilise les groupes à déposer des projets...

Mme Martel (Céline): Bien, je dirai... Une enveloppe régionale, je vous ai répondu par rapport à une enveloppe régionale. Si le concours demeure, s'il est encore provincial, s'il y a encore une continuité, s'il respecte un peu les groupes qui ont déjà amorcé une...

Mme Caron: Mais vous le voulez comment? Pas si. Vous, vous le voulez comment?

Mme Martel (Céline): Comme ça, comme ce que je dis là, moi. Mais sauf que l'enveloppe régionale, non.

Le Président (M. Copeman): Bon. On va la laisser là. Alors, Mme Martel, Mme Dorin et Mme Bernier, merci beaucoup d'avoir participé à cette commission parlementaire au nom de la Promotion des Estriennes pour initier une nouvelle équité sociale.

Et je suspends les travaux de la commission jusqu'à 14 heures, cet après-midi. Merci.

(Suspension de la séance à 12 h 46)

 

(Reprise à 14 h 4)

Le Président (M. Copeman): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, la Commission des affaires sociales reprend ses travaux.

Je vous fais lecture rapidement de l'ordre du jour de cet après-midi, compte tenu que je ne l'ai pas fait ce matin. Nous débutons dans quelques instants avec l'échange... présentation et échange avec le Réseau québécois d'action pour la santé des femmes; qui sera suivi par, à 15 heures, le groupe Femmes autochtones du Québec inc.; 16 heures, Regroupement des groupes de femmes de la région 03, Portneuf-Québec-Charlevoix; et nous allons terminer l'après-midi autour de 17 heures avec la ville de Québec.

Sans plus tarder, je souhaite la bienvenue à cette commission aux représentantes du Réseau québécois d'action pour la santé des femmes. Mme la présidente Vaillancourt, bonjour. Je vous rappelle, comme je le fais avec tous les groupes, nos règles de fonctionnement. Vous avez 20 minutes pour faire votre présentation qui sera suivie par un échange de plus ou moins 20 minutes avec les parlementaires de chaque côté de la table. Pour les fins d'enregistrement et pour nos fins à nous autres, je vous prierais de présenter les personnes qui vous accompagnent et d'enchaîner avec votre présentation.

Réseau québécois d'action
pour la santé des femmes (RQASF)

Mme Vaillancourt (Lina): Merci, M. le Président. Mme la ministre, nous vous remercions de nous permettre de présenter notre mémoire, cet après-midi. Mon nom est Lina Vaillancourt, présidente du Réseau d'action pour la santé des femmes. À ma droite, j'ai Mme Isabelle Mimeault, responsable de la recherche, et, à ma gauche, Mme Lise Lamontagne, directrice générale.

Je vais faire une brève présentation du Réseau québécois d'action pour la santé des femmes, et nous allons passer assez rapidement au travers de notre mémoire étant donné le temps dont nous disposons.

Le Réseau québécois d'action pour la santé des femmes, c'est un organisme multidisciplinaire qui travaille solidairement et dans une perspective féministe à l'amélioration de la santé et des conditions de vie des femmes. Situé à Montréal, le RQASF regroupe 108 groupes membres associatifs et 52 membres individuels dans toutes les régions du Québec.

Le Réseau québécois d'action pour la santé des femmes poursuit les objectifs de promouvoir et de défendre, par l'action collective et l'action politique, les droits et les intérêts des femmes en matière de santé sur le plan sociétal, politique, législatif et gouvernemental; d'adopter et de faire valoir une approche globale de la santé des femmes; de regrouper et de mobiliser les femmes et les organisations préoccupées par la santé des femmes; d'agir pour et avec les femmes dans la reconnaissance de leur savoir et la prise en charge de leur santé.

Les principaux dossiers au RQASF portent sur la ménopause, le cancer du sein, la santé des lesbiennes, la santé mentale et la prise de médicaments, l'image corporelle et bien d'autres. Les grands secteurs d'activité du RQASF comprennent la recherche, l'éducation et l'information, considérées dans une perspective féministe. Bien qu'il s'intéresse à la santé et aux conditions de vie de toutes les femmes, le RQASF tient toujours compte des situations particulières vécues par les femmes marginalisées, soit en raison de leur statut socioéconomique, de leur orientation sexuelle, de leur langue, de leur couleur ou de leur origine ethnique. Je passe maintenant la parole à Mme Mimeault.

Le Président (M. Copeman): Mme Mimeault.

Mme Mimeault (Isabelle): Merci. Notre mémoire discute les deux parties de l'avis, c'est-à-dire les stratégies proposées, de même que deux des sept orientations, soit la quatrième orientation, sur la santé, ainsi que la septième, sur les institutions de l'État.

Quant à la définition de l'égalité qui est proposée dans l'avis, nous sommes d'accord. L'égalité est une revendication qui suppose l'existence d'inégalités. Ces inégalités sont l'effet de la discrimination historique et actuelle, ce qu'on appelle la discrimination systémique. On s'entend.

Toutefois, il nous est apparu, à l'analyse de cette définition de l'égalité, que cette définition d'«égalité» en fait, ce n'était pas soutenu tout au long du document, dans l'avis. Il y a comme une tension, voire une contradiction qui ressort entre cette définition d'«égalité entre les sexes» et une approche fonctionnaliste. C'est très manifeste, particulièrement dans la quatrième orientation, qu'on va discuter.

J'explique juste brièvement le concept. Le fonctionnalisme est une approche selon laquelle tout va fonctionner pour le mieux puis on laisse aller les choses, comme ça, sans intervenir. Par exemple, le néolibéralisme correspond à une approche fonctionnaliste de l'économie. Le fonctionnalisme ne tient pas compte des rapports sociaux, il conduit à la négation des inégalités sociales, ce qui contredit l'existence de discriminations systémiques, qui est proclamée dans l'avis, pourtant.

Au premier chapitre de l'avis, le conseil dresse un portrait de la situation actuelle quant aux inégalités et aux obstacles réels qui persistent toujours pour les femmes. Ce portrait est assez juste. Nous y avons identifié trois principales lacunes toutefois qui se répercutent dans les orientations, des lacunes qui proviennent de cette perspective fonctionnaliste.

Bon. La discrimination, c'est un phénomène qui s'amplifie par l'ajout d'autres motifs de discrimination, bon, l'âge, la religion, l'orientation sexuelle, etc., l'origine ethnique et tout autre motif, là, qui est énuméré dans l'article 10 de la charte québécoise des droits et libertés. Cette amplification, elle a été reconnue d'entrée de jeu page 24, une fois, mais ça n'a pas été repris, ça n'a pas été repris en compte de façon systématique dans les autres chapitres du document.

n(14 h 10)n

La deuxième lacune qu'on a vue dès le départ, c'est que, discutant de la persistance des inégalités entre les femmes et les hommes, le conseil est muet au sujet de la persistance d'inégalités de santé entre les sexes.

La troisième lacune, c'est que la libéralisation des échanges économiques ? bon, le néolibéralisme, si on veut ? est présentée comme une force que ni l'État ni la société civile ne peuvent contrer en aucune manière, ce qui est loin d'être certain. En fait, c'est un autre volet du fonctionnalisme. Comme le souligne à juste titre le conseil, ce sont surtout les femmes qui sont affectées par ces changements, que ce soit comme travailleuses, comme aidantes bénévoles ou comme usagères. C'était pour les trois lacunes identifiées dès le départ.

Dans le second chapitre, le conseil propose trois approches ou leviers pour atteindre l'égalité: approche spécifique, transversale, sociétale. Nous sommes d'accord quant à leur pertinence. Concernant l'approche spécifique, elle demeure vraiment essentielle en raison de la persistance des inégalités. Pour le deuxième levier proposé, c'est l'approche transversale, qu'on dit aussi approche intégrée de l'égalité, ou AIE. En fait, c'est une approche systémique de l'égalité.

En examinant la quatrième orientation, sur la santé, et les deux axes d'intervention qui lui sont associés, on a constaté que les deux axes d'intervention répètent les deux approches, transversale et spécifique. Encore, ces deux axes, ce sont des éléments qui ne relèvent pas exclusivement de la santé. Ce n'est pas seulement en santé, ça devrait être partout. C'est pourquoi nous préconisons leur inclusion dans l'approche transversale.

Nous recommandons premièrement d'instaurer l'approche intégrée de l'égalité dans tout l'appareil gouvernemental, pas seulement en santé, et deuxièmement que la plus grande vulnérabilité de certaines femmes, en raison de l'ajout de motifs de discrimination qui sont énumérés dans l'article 10 de la charte québécoise, soit prise en compte dans l'approche transversale.

Enfin, en ce qui concerne l'approche sociétale, qui est le troisième levier, nous sommes en accord avec l'analyse selon laquelle la réalisation de l'égalité entre les hommes et les femmes représente un projet de société auquel les hommes doivent être partie prenante. Soulignons que cette approche n'est pas si nouvelle, en passant, puisque des organismes communautaires adoptent déjà une telle perspective inclusive dans leurs actions. Finalement, c'est ça, c'est que l'approche sociétale selon nous est un complément aux approches spécifique et transversale. Alors, voilà pour la première partie de l'avis.

En ce qui concerne la deuxième partie, c'est dans la quatrième orientation, sur la santé, que la perspective fonctionnaliste ? que j'ai évoquée ? est la plus évidente. Les inégalités de santé ne sont pas nommées comme des inégalités en tant que telles. On voit ici l'influence du rapport Rondeau, qui insistait abondamment... pas abondamment, mais enfin qui est très présent et qui est d'ailleurs cité, oui, dans la quatrième orientation. En passant, le rapport Rondeau, comme on l'appelle, ce n'est basé sur rien. C'est une méthodologie assez bidon ? on pourrait le dire comme ça ? et il n'a pas de source fiable. C'est un rapport qui est centré sur l'adaptation des services, d'où la formulation sans doute de la quatrième orientation.

Dans cette quatrième orientation, on analyse plutôt les réalités différenciées des femmes et des hommes en matière de santé physique, de santé sexuelle et reproductive et de santé mentale, à partir de leurs différences physiques et psychosociales. Bien sûr, la prise en compte des réalités différenciées est nécessaire. Cette perspective, elle ouvre la voie à une approche d'équité qui est d'ailleurs requise pour atteindre l'égalité. Mais l'équité seule ne mène pas nécessairement à l'égalité. En d'autres mots, adapter les services aux réalités différentes des femmes et des hommes n'équivaut pas à combattre les inégalités.

Nous posons l'existence d'inégalités de santé entre les femmes et les hommes, et, pour ça, il a fallu faire pas mal de recherches parce que ce n'était pas dans l'avis. On ne trouvait pas les sources. Rien de ça dans l'avis.

La pauvreté est reconnue, tant par le milieu communautaire, par la recherche que par les gouvernements, comme un déterminant fondamental de la santé. Les inégalités de santé entre les femmes et les hommes se saisissent en lien avec la pauvreté, avec les rapports sociaux inégalitaires et avec les conditions de vie des femmes. Ces rapports inégalitaires conditionnent non seulement leur état de santé, mais également leur accès aux services ? ce qu'on appelle accessibilité, adéquation des services ? ils ont aussi un impact sur la prestation rémunérée ou bénévole des soins qu'assument de très nombreuses femmes. Ces trois domaines, si on veut, entre guillemets, c'est-à-dire état de santé, accès aux services, prestations des soins, constituent en fait un vaste champ de recherche en santé des femmes. Ils seront... ici. On reviendra pour des questions, si vous voulez. Bon.

Alors, l'état de santé des femmes. On se fie, nous, sur des sources fiables d'information, sur des sources statistiques comme l'enquête sociale et de santé 1998. Par exemple, la prévalence des problèmes de santé est supérieure chez les femmes dans 24 des 30 catégories de problèmes de santé qui sont répertoriés dans l'enquête. Elle est égale, la prévalence de problèmes de santé, elle est égale à celle des hommes dans deux catégories; elle est inférieure dans quatre catégories. Alors, il y a plusieurs inégalités de santé entre les sexes qui s'expliquent par la plus grande pauvreté des femmes.

Concernant l'accessibilité et l'adéquation des services ? j'irai rapidement ? on sait que les femmes réclament de rendre les services accessibles aux femmes plus vulnérables en raison de leurs couleur ou leur origine ethnique, leur orientation sexuelle, leur condition sociale, etc. Et, pour être accessibles, en fait, selon nous, les services doivent répondre aux besoins des femmes et respecter leurs droits.

Finalement, la prestation des soins, un autre domaine, entre guillemets, où il y a des inégalités de santé. Les réformes du système de santé ont des impacts négatifs sur les femmes en tant que requérantes, travailleuses et aidantes bénévoles. Les femmes représentent les trois quarts du personnel du réseau public de la santé. Et l'une des conséquences du virage ambulatoire a été d'alourdir considérablement les tâches de ces travailleuses.

Alors, ça fait un petit peu le tour de certaines inégalités de santé. Ça a été très rapide, mais on s'est fondé sur des sources statistiques fiables, sur les recherches sociales empiriques, théoriques et sur des documents internationaux également.

Mme Lamontagne (Lise): Je vais poursuivre. Comme Isabelle le disait, pour nous, la quatrième orientation de cet avis-là est peut-être la plus faible et au niveau de l'analyse et au niveau des recommandations proposées. Et c'est un peu dommage qu'on soit peut-être le seul groupe à vous amener des pistes de solution. J'ai suivi les travaux de la commission et, bien que ça ait été mentionné à quelques reprises que c'était une partie faible, il n'y a personne qui vous a apporté des pistes de solution. Alors, écoutez-nous attentivement, on a travaillé pour essayer de réécrire, vous proposer des nouveaux axes.

Donc, on vous propose de reformuler la quatrième orientation et on vous propose sept nouveaux axes d'intervention. On se rappelle que les deux axes qui sont actuellement sous le chapeau santé et bien-être, on les trouve bons, mais on pense qu'ils doivent s'appliquer à l'ensemble des dossiers et non seulement à la santé des femmes. C'est pour ça, on les a référés à la partie 1 dans les approches. On pense que c'est des bons axes mais qui doivent être pour tout le monde.

Pour la quatrième orientation, si on veut tenir compte qu'il y a des inégalités qui existent, alors on doit rédiger la quatrième orientation en disant: Promouvoir la santé des femmes et des hommes et corriger les inégalités qui existent. Là, je pense qu'on serait beaucoup plus précis.

Et, ensuite, en termes des sept axes, je vais vous les présenter rapidement. Certainement que la pauvreté est une trame commune des enjeux qui touchent la condition féminine. D'ailleurs, le Secrétariat à la condition féminine et le conseil en font état dans plusieurs de leurs documents. Et puis on sait que la pauvreté, c'est un déterminant majeur de la santé pour les femmes de tous âges, mais aussi pour les sous-groupes minoritaires. Alors, c'est impératif d'en tenir compte dans les actions gouvernementales si on veut réduire les inégalités de santé. Alors, nous recommandons de poursuivre les efforts pour réduire les écarts de santé entre les femmes et les hommes en luttant activement contre la pauvreté. Ça va être la meilleure façon d'améliorer la santé des femmes.

n(14 h 20)n

Notre deuxième axe concerne principalement les différentes réformes qui ont lieu dans le domaine de la santé. On vous a dit que les femmes avaient payé le prix des différentes réformes, que ce soit comme usagères, comme travailleuses, comme bénévoles. Alors, on sait aussi que, la privatisation, parce que les femmes sont des plus grandes utilisatrices du système de santé, elles vont être plus affectées par la privatisation des services. Donc, on propose comme deuxième axe d'assurer l'universalité, l'accessibilité et la gratuité des services sociaux et des services de santé.

Comme troisième axe, on a voulu prendre un pas sur le fait que les femmes ne sont pas égales entre elles et qu'il y a de la discrimination qui est subie par certaines femmes en vertu de l'article 10 de la charte. Donc, nous recommandons d'assurer des services de santé et des services sociaux qui répondent adéquatement aux besoins des femmes et tenir compte des situations particulières que vivent les femmes marginalisées.

Comme quatrième axe, on a abordé un peu la question du discours dominant par rapport à la santé des femmes, un discours qui médicalise systématiquement toutes les étapes naturelles de la vie des femmes. Que ce soit la puberté, la grossesse, la ménopause, vous savez qu'il y a toujours quelque chose qu'on peut faire pour rétablir notre équilibre, que ce soit en termes de médicaments ou d'interventions. Ça représente beaucoup d'expérimentations sur le corps des femmes pour des processus normaux de la vie qu'on pourrait accompagner. Alors, notre quatrième axe est de contrer la médicalisation des cycles normaux de la vie des femmes.

En cinquième axe, on a trouvé important de parler de la consommation de médicaments parce que l'enquête Santé Québec 1998 révèle une augmentation importante de la consommation de médicaments et que ça fait partie des frais importants de notre système de santé. C'est une situation qui touche plus les femmes que les hommes: 63 % contre 43 %. Et ce n'est pas parce qu'on prend des médicaments de femmes, c'est dans toutes les catégories de médicaments où les femmes vont prendre plus de médicaments que les hommes. Donc, il faut travailler à contrer le recours excessif à la médication prescrite pour les femmes.

En sixième axe, on a observé que la pratique médicale des dernières années favorisait vraiment une approche curative. Le développement des technologies et des médicaments de pointe fait les premières pages, mais la prévention, la promotion de la santé, l'éducation à la santé sont souvent les parents pauvres. Et on voulait se donner les moyens d'intervenir en amont des problèmes de santé. C'est pourquoi on recommande d'adopter une approche de prévention et de promotion de la santé.

Et, finalement, en septième axe, on a apporté la question des médecines alternatives et complémentaires. Les femmes sont les plus grandes utilisatrices de médecines alternatives. Elles sont aussi les travailleuses, les praticiennes de médecines alternatives. Et il n'y a pas d'encadrement législatif pour ces médecines-là. Il n'y a donc pas de protection du public. C'est important que le gouvernement légifère en matière de médecines alternatives et complémentaires.

Alors, ça, c'est notre nouveau plan de match qu'on vous propose pour la quatrième orientation.

Pour la septième orientation, qui est celle des structures, l'ancrage de l'égalité au sein du gouvernement, on pense que les propositions du Conseil du statut de la femme sont intéressantes. C'est sûr que pour nous on a renforcé peut-être certains aspects ou précisé certains aspects, dont les éléments de la formule gagnante pour l'atteinte de l'égalité entre les femmes et les hommes que le Conseil du statut de la femme avait tirés d'une récente recherche dans différents pays où on parlait d'un noyau de femmes convaincues ? qui sont peut-être les femmes que vous recevez ici en audition depuis quelques jours; une volonté politique réelle ? et ça, c'est un élément très important; une infrastructure gouvernementale porteuse et des ressources humaines et budgétaires suffisantes ? parce que, si on a des institutions mais qui n'ont pas les budgets adéquats, bien ils ne pourront avoir les moyens de porter leurs projets; une politique globale en matière d'égalité entre les femmes et les hommes; et un processus ouvert et une obligation de résultat.

On trouvait important de vous rappeler ces cinq éléments d'une formule gagnante. Et, nous, ce qu'on pense, c'est qu'il faut que l'égalité devienne un principe directeur de l'action gouvernementale au Québec, et il faut mettre en place des mécanismes qui vont assurer ça.

Plusieurs groupes vous ont probablement fait les mêmes recommandations de reconduire une ministre en titre responsable. Nous, on l'a appelée «responsable des droits des femmes et de l'égalité». Alors, vous pourrez voir si cette formule vous plaît. Et la ministre est responsable donc de coordonner la politique.

On recommande de maintenir distincts le Secrétariat à la condition féminine et le conseil, de maintenir leurs mandats respectifs tels qu'ils sont présentement et de maintenir l'indépendance du conseil avec des représentantes des milieux sociaux, économiques, universitaires, des groupes de femmes, etc. De façon plus dans notre domaine, on pense qu'il est important d'assurer dans chaque ministère une direction des droits des femmes et de l'égalité, et particulièrement au ministère de la Santé, où on a vu cette direction-là fondre comme neige au printemps.

Alors, je pense qu'au ministère de la Santé on a besoin d'une direction en condition féminine, mais aussi dans les instances régionales ? j'ai presque fini ? et d'assurer, à la fois aux niveaux régional et national, les ressources dans ces directions.

Mme Vaillancourt (Lina): Est-ce que je pourrais conclure en disant que nous comptons sur une volonté gouvernementale...

Le Président (M. Copeman): Vous avez continué avant que je réponde. La réponse est oui, mais allez-y brièvement, s'il vous plaît.

Mme Vaillancourt (Lina): C'est ce que je comptais faire. Bon. Il est bien entendu que nous comptons sur une volonté gouvernementale comme condition de réussite. Et puis, étant donné l'incertitude qui plane autour du maintien d'organismes essentiels à la réalisation de l'égalité, le RQASF demande d'être consulté au sujet de toute modification des structures ainsi qu'au sujet d'une politique gouvernementale en condition féminine. Merci.

Le Président (M. Copeman): Merci. Alors, afin de débuter notre échange, Mme la ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration.

Mme Courchesne: Merci, M. le Président. Mme Vaillancourt, Mme Lamontagne, Mme Mimeault, bienvenue à toutes les trois. Merci d'avoir pris la peine non seulement de vous rendre jusqu'ici, mais de rédiger un mémoire quand même assez volumineux, que nous avons lu avec attention, que vous avons parcouru, qui couvre plusieurs aspects. J'espère que nous pourrons couvrir en peu de temps les principaux, mais je veux m'assurer que j'ai bien compris.

Bien sûr que vous faites un lien, par exemple, entre la santé des femmes et notamment la pauvreté. Vous élaborez énormément puis vous donnez de bons exemples. Vous faites les bonnes relations entre ce que peuvent vivre des femmes et comment la pauvreté peut rendre vulnérables bon nombre de femmes.

Mais, pour une bonne compréhension non seulement des parlementaires, mais aussi des gens qui nous écoutent, moi, j'aimerais que vous commenciez par nous dire exactement ce que vous entendez par les inégalités de santé entre les sexes. Vous en parlez beaucoup dans votre document. Je pense que j'ai saisi, mais j'aimerais mieux que vous nous disiez, là, plus précisément à quoi vous faites référence quand vous parlez de ces inégalités de santé. Est-ce que c'est dans l'approche? Est-ce que c'est dans la façon dont on diagnostique, dans la façon dont on soigne, dans la façon dont on accorde de l'importance? Expliquez-moi.

Mme Lamontagne (Lise): Je pense que vous avez bien compris.

Mme Courchesne: Vous me rassurez moi-même.

Mme Lamontagne (Lise): Quand on parle d'inégalité de santé, c'est basé sur le fait que la santé a été développée, la santé et la maladie, sur un modèle masculin. Donc, on a défini les modèles, les maladies à partir d'un modèle masculin, on a défini les traitements et les interventions à partir d'un modèle masculin. Quand on était... Il y a plusieurs années, quand on a dit: Va te faire soigner, tu es malade, on expliquait qu'en santé mentale être une vraie femme, c'était être une femme hystérique et une femme malade; être un vrai gars, ça prenait d'être un gars agressif. Alors, ça montrait comment les standards, qui étaient basés sur un modèle masculin, appliqués aux femmes, apportaient une distorsion par rapport à leur condition.

On a plus récemment entendu parler beaucoup des maladies cardiovasculaires. Alors, les maladies cardiovasculaires, c'est la première cause de mortalité chez les femmes. Par contre, ça ne fait pas longtemps qu'on sait que les symptômes chez les femmes sont différents des symptômes chez les hommes. Et, dans plusieurs cas, les femmes se sont rendues à l'urgence, et on n'a pas diagnostiqué le fait qu'elles avaient un malaise cardiaque parce qu'elles ne décrivaient pas les bons symptômes. Elles décrivaient les symptômes qui maintenant sont reconnus comme étant des symptômes par rapport aux femmes.

n(14 h 30)n

Si on parle de la recherche de médicaments, jusqu'à il n'y a pas longtemps les groupes chez qui on testait les médicaments, c'étaient des hommes parce que c'était plus facile, il n'y avait pas de problème d'hormones, avec les hommes. Alors, les hommes ont un taux d'hormones stable, alors on pouvait connaître vraiment les effets des médicaments sur les personnes. Et on excluait les femmes des essais cliniques parce que les femmes, à cause de leurs hormones, ça intervenait sur le médicament et on n'était pas en mesure d'apprécier l'efficacité des médicaments.

Alors, c'est des exemples que je vous donne pour vous dire que, et dans la définition des maladies et dans le développement des traitements mais aussi dans les interventions qu'on fait au niveau de la santé, on les a faits, jusqu'à présent et encore dans plusieurs domaines, sur un modèle masculin.

Ce qu'on sait aussi, c'est qu'il y a des maladies qui touchent plus les femmes, qui n'ont pas reçu d'attention autant que des maladies qui touchent les hommes. Et je vais vous dire que, si on demande aux femmes quels sont leurs principaux problèmes de santé, la migraine, les maux de tête vont ressortir souvent comme étant dans les «top ten», comme on dit, mais ce n'est pas des maladies qui sont beaucoup étudiées, ce n'est pas des maladies qui reçoivent beaucoup d'attention, ni au niveau de la recherche ni au niveau des traitements.

Ça fait que, quand on parle d'inégalités de santé, c'est vraiment... on a défini par rapport à un modèle masculin. Mais il y a des percées qui se font, je ne veux pas dire qu'on est complètement, là... il y a des percées qui se font pour introduire maintenant les femmes. Mais on a vraiment défini par rapport au modèle masculin et au niveau de la définition et au niveau de l'intervention.

Mme Courchesne: Alors, la seconde question. Je comprends. C'est gros, là, c'est très, très gros, dans le sens où... Je comprends tout à fait l'espèce d'évolution historique par rapport à la capacité de diagnostiquer, de faire de la recherche, d'accorder de l'importance, de choisir qu'on fait de la recherche davantage dans un type de maladie que dans d'autres. On fait appel effectivement à des enjeux qui sont énormes par rapport à ça. Je comprends bien ce que vous me dites et je ne dis pas que je suis contre ce que vous dites, bien au contraire, ça fait du sens. Mais vous dites aussi qu'il y a eu des progrès, sûrement trop timides.

Donc, quelle est la solution? Par où on prend le problème? Comment on fait pour essayer de contrer cette tendance-là, de faire le virage requis pour s'assurer qu'effectivement, tant au niveau du dépistage, du diagnostic, du traitement que de la recherche, on tient compte à la fois de la morphologie... pas la morphologie, la capacité de réagir mais aussi la capacité sociale d'y répondre? Parce qu'on rajoute à tout ce que vous venez de dire le fait qu'il y a aussi des femmes qui sont plus vulnérables parce qu'elles ont des conditions de vie qui les fragilisent et les rendent plus vulnérables. Alors, par où on prend le problème?

Mme Lamontagne (Lise): Bien, je pense qu'une des solutions qu'on n'a pas indiquées, c'est certainement le financement et de la recherche et des groupes de femmes qui travaillent en santé des femmes et qui sont là pour porter un certain nombre de solutions. Ce qu'on vous apporté comme axes d'intervention, c'en est, ça, des solutions. C'est comme ça que les femmes nous disent que ce serait la meilleure façon de répondre à leurs besoins: d'investir dans la prévention, dans la promotion. C'est souvent les femmes, dans les familles, qui prennent soin des leurs, qui enseignent l'hygiène de vie; il faut que ce soit appuyé.

Quand on vous parle de contrer la médicalisation croissante des étapes de vie des femmes, bien ce n'est pas normal qu'au Québec le taux de césariennes soit celui qu'il est ici, on bat des records. Il faut vraiment suivre ça et être des chiennes de garde de ces pratiques-là, quand on voit qu'il y a des abus, de pouvoir intervenir. C'est sûr qu'on intervient avec des gros joueurs. Si on parle de... Ça peut être des corporations professionnelles, ça peut être l'industrie pharmaceutique. Ce n'est pas un groupe comme le nôtre qui va réussir à faire un contrepoids efficace à ces institutions-là. Mais je pense qu'il faut avoir cette vigilance-là et intervenir souvent.

Quand l'enquête Santé Québec, en 1998, nous montre l'augmentation de la prise de médicaments chez les femmes, bien il faut adresser ça, il faut s'y pencher puis il faut proposer des alternatives. Quand on voit que les femmes se tournent vers les médecines alternatives et qu'il n'y a aucun encadrement législatif, on peut mettre sa santé en danger dans des médecines alternatives autant que dans les traitements conventionnels, donc il faut faire un encadrement.

Moi, je vous dirais, soyons vigilantes sur les sept axes qu'on vous propose, assurons-nous de ne pas les oublier parce que ces sept axes sont là où les femmes nous disent le plus d'être actives pour améliorer la santé.

Mme Courchesne: Je veux laisser mes collègues, M. le Président, poser des questions, mais... Je vais donc sauter un peu. Parce qu'encore une fois je peux être d'accord avec ce que vous dites, sauf que, là, on fait appel aussi à... Si j'exclus ? puis pas que je veux l'exclure, là ? tout le lien entre la pauvreté et les femmes, mais j'essaie de pousser un peu ce que vous nous dites un peu plus loin, mais il reste quand même qu'on tombe, là aussi, dans des questions individuelles, d'une certaine façon.

Parce que, dans votre mémoire, tu sais, vous nous dites, par exemple, que... Si on vient au groupe de lesbiennes qu'on a eu devant nous, qui vont pour un test, par exemple, si le médecin ne connaît pas l'orientation sexuelle, comment pouvez-vous affirmer que le médecin refuse un test, ou prend plus de temps, ou ne donne pas l'approche adéquate s'il ne connaît pas l'orientation sexuelle? De la même façon, si un homme est en détresse psychologique, mais on sait que les hommes vont moins souvent chez le médecin, ou on pense, d'après les enquêtes ou je ne sais pas quoi, qu'ils ont... Tu sais, comment peut-on conclure qu'on ne s'en occupe pas s'ils n'y vont pas? J'essaie de faire le lien.

C'est parce que je comprends qu'on dit beaucoup, beaucoup de choses, vous dites vous-même qu'il n'y a pas beaucoup, beaucoup de recherches, il y a quelques enquêtes, il y en a plus qu'il y en avait. Mais est-ce qu'il n'y a pas un danger de glissement, là, par rapport à la réalité ou au diagnostic social que nous posons? Encore une fois, j'exclus la pauvreté parce que je crois que la pauvreté fragilise la santé des femmes, je suis convaincue de ça. Mais, si on le met dans un autre contexte... J'essaie juste de bien saisir vers où on va en essayant d'aborder puis, je vais vous dire, comme gouvernement, là, parce que, là, je me sens interpellée comme membre du gouvernement puis... Alors, comment on fait pour s'assurer qu'on n'est pas dans des glissements, là, par rapport aux uns et aux autres, là?

Mme Mimeault (Isabelle): Je peux répondre à la question. Concernant l'orientation sexuelle, on a, tout récemment, assez récemment, fait une recherche assez étendue sur la question de l'accessibilité des lesbiennes aux services sociaux et aux services de santé puis on a découvert que la présomption d'hétérosexualité était en soi une barrière pour les lesbiennes. La présomption d'hétérosexualité en fait est une discrimination. Un médecin, un professionnel de la santé ou une professionnelle n'a pas à présumer que toutes les femmes sont hétérosexuelles. Alors, c'est un peu ça, là, l'idée. Concernant la pauvreté, je ne saisis pas bien de quel glissement vous pouvez parler.

Mme Courchesne: Je ne parle pas de pauvreté, là.

Mme Mimeault (Isabelle): Oui, mais vous dites que, oui, il y a la pauvreté, mais là c'est... à part la pauvreté. Mais je ne vois pas comment on peut dire «à part la pauvreté». Parce que le glissement vers quoi? C'est que la pauvreté est en amont, la pauvreté cause, est en amont de bien des problèmes de santé, d'inégalités sociales et de santé.

Mme Courchesne: Non, peut-être qu'on ne comprend pas. Puis je veux y aller très délicatement, là, parce que je ne veux pas avoir l'air réductrice dans ce que je dis, là, puis je voudrais que mes collègues posent des questions, il n'y a pas beaucoup de temps.

Ce que j'essayais de comprendre par rapport à votre approche... Je ne conteste pas qu'il y ait des inégalités de santé, au sens où vous le dites, et certainement lorsqu'il y a un lien de pauvreté, certainement, je suis d'accord avec ça. Mais, quand je lis votre mémoire, à moins que je me trompe, vous ne vous adressez pas qu'aux femmes pauvres. Moi, je ne comprends pas votre mémoire comme ça. Alors, c'est pour ça que j'essayais de vous questionner en disant... Puis je laisserai mes collègues ou la députée de Terrebonne peut-être de vous poser cet aspect-là de la question, mais, moi, j'essayais d'examiner votre approche dans un sens plus global.

n(14 h 40)n

Et ce que je dis ? et là vous me donnez une bonne réponse ? par rapport à l'orientation sexuelle, ce que je comprends, c'est que les médecins devraient systématiquement nous poser la question: De quelle orientation sexuelle êtes-vous?, si on ne doit pas présumer de l'hétérosexualité. Je veux dire, le médecin, il a besoin de ces informations-là. C'est comme ça que je comprends que... vers ça que vous voulez nous amener pour signifier que, dans la façon d'aborder la médecine, bien ça peut... c'est le modèle masculin dont vous parlez. C'est ce que je comprends. M. le Président, je ne veux juste pas monopoliser le micro, alors je laisserai mes collègues poursuivre.

Le Président (M. Copeman): Mme la députée de Soulanges.

Mme Charlebois: Merci, M. le Président. Bonjour, mesdames, merci beaucoup pour la présentation de votre mémoire. Je vais vous amener... Je voulais vous parler de médecines alternatives. Vous avez commencé à en parler avec Mme la ministre. Je voulais voir avec vous comment légiférer les médecines alternatives. Vous avez commencé à exposer un peu comment ça pouvait régler des inégalités. Parce que vous nous dites que régler... bon, légiférer en matière de médecines alternatives pour le bénéfice de la population mais plus particulièrement pour les femmes. Alors, j'aimerais ça vous entendre là-dessus, mais aussi et principalement sur la prévention. C'est quelque chose qui me tient à coeur beaucoup.

Et je me questionnais à l'effet que... Parce que je travaille à un comité justement qui établit des priorités en matière de prévention et je me questionnais à savoir: Est-ce que vous ne croyez pas que la population, du moins les groupes de femmes... Comment vous voyez... Est-ce qu'on doit faire la promotion de la prévention en matière de santé plus particulièrement vers les femmes ou en général? Parce que vous disiez que les femmes, ce sont celles qui transmettent les connaissances, bien souvent, etc. Est-ce qu'il y a un danger que ce soit perçu comme une responsabilité de plus qu'on leur remette?

Mme Lamontagne (Lise): Par rapport aux médecines alternatives, on l'a admis comme axe d'intervention parce que les femmes sont les premières utilisatrices et sont principalement les praticiennes aussi. Donc, c'est deux façons qui nous permettent de dire: Là-dedans, si on ne s'occupe pas de la place des femmes, on est en train de les pénaliser et le public en général aussi parce que les femmes y vont pour elles-mêmes et pour leurs enfants.

Pour ce qui est de la prévention et de la promotion de la santé, c'est sûr qu'il y a toujours un danger de culpabiliser, un danger de dire... Et, en santé, c'est facile. On sait que, si on mange bien, on fait de l'exercice, puis qu'on dort bien, puis on a une bonne vie, on va être en meilleure santé. Mais, dire ça à une femme monoparentale qui travaille, qui a ses enfants à la maison qu'il faut qu'elle fasse les boîtes à lunch avec un budget réduit, rajouter ça par-dessus, ce n'est pas bien, bien gagnant. Alors, c'est sûr qu'il faut trouver le mot juste.

La même chose pour toutes les campagnes antitabac, les campagnes pour l'activité physique, les campagnes pour l'alimentation, il faut faire attention de parler des conditions qu'il y a dans la vie des femmes, pour que ces programmes-là aient de l'écoute pour les femmes. Si on ne fait qu'interpeller le comportement individuel, on tombe dans la culpabilité, et les femmes n'en ont plus de place pour en rajouter. Alors, il faut qu'on adresse ça dans un contexte de leur vie plus large, qu'on adresse les conditions de vie qui font que ce soit comme ça, et, à ce moment-là, oui, il y aura de l'écoute.

Par ailleurs, j'aimerais vous dire qu'il y a quelques années, quand le ministère de la Santé a voulu faire des campagnes de prévention du sida, j'avais rencontré un représentant qui voulait faire une campagne qui s'adressait aux femmes pour encourager le port du condom. Et il me disait: Écoutez, les campagnes qu'on fait vis-à-vis des hommes hétérosexuels ne marchent pas. On sait que les femmes sont responsables puis on ne pourrait pas faire quelque chose pour convaincre les femmes du port du condom? Bien, j'ai dit non. Il y a des limites à ce qu'on peut mettre sur le dos des femmes. Les condoms, on ne les mettra jamais. Alors, même si actuellement c'est la seule barrière efficace qu'on a contre le sida, bien c'est aux gars de prendre leurs responsabilités, et on ne doit pas remettre la responsabilité ni les campagnes de prévention sur le dos des femmes. Alors, c'était pour vous donner un exemple d'un glissement qui peut se passer.

Puis j'aimerais juste revenir sur la question de... Mme la ministre, quand vous parlez de cas individuels versus la discrimination systémique. Ce qu'on vous apporte aujourd'hui en termes d'inégalités, pour nous, c'est de la discrimination systémique, ce n'est pas une addition de cas individuels. Et il ne faut pas penser que ce sont des cas isolés qui en font... qu'il y a assez de cas isolés pour qu'on en parle. C'est vraiment basé sur un modèle masculin de base.

Mme Courchesne: Si vous me permettez. Non, je ne pense pas ça. Non, non, je ne pense pas ça du tout. Sauf qu'en médecine ou en santé... Comment je vous dirais? Je ne pense pas que la majorité des femmes qui se présentent dans un cabinet de médecin se disent... puis même quand elles vont voir un médecin femme. Parce qu'il y a des pratiques, on enseigne la médecine. Bon, oui, les femmes peuvent pratiquer un peu différemment des hommes. Mais je ne pense pas que, quand une femme est dans un cabinet de médecin, elle se dise: Ah, je suis dans un modèle masculin de diagnostic de ma santé ou de l'intervention que j'ai à faire. Ce n'est pas aussi évident que, par exemple, quand tu vas dans une entreprise, et que tu te fais embaucher, et que tu n'as pas le même salaire. C'est comme très clair que, là, tu as une discrimination où tu te fais répondre... Bon.

En santé, honnêtement, je ne pense pas qu'on ait cette sensibilisation, ou cette conscientisation, ou que la majorité des femmes l'aient et que ça puisse effectivement changer notre façon à nous, le gouvernement, de prendre des décisions ou d'influencer les multinationales dont vous parlez pour avoir des programmes de recherche plus adéquats et plus adaptés. Je trouve que, de tous les sujets qu'on a parlés ici, c'est un de ceux où on en parle le moins sur la place publique. Oui, il y en a eu un peu dans les recherches pharmaceutiques ? il y a la politique du médicament qui va commencer en commission parlementaire, bientôt ? oui, il y en a un peu, mais c'est un peu, ce n'est pas énorme.

Si vous me permettez, parce qu'il ne reste pas beaucoup de temps, M. le Président, je veux juste... Vous parlez de l'origine ethnique, de la couleur. Il y a des problèmes de santé chez les femmes immigrantes, beaucoup. Comment fait-on pour rejoindre ces femmes? Très souvent, elles sont encore plus craintives, surtout les nouvelles arrivantes doivent être plus craintives face à notre système de santé, face à notre façon de faire. Est-ce que c'est des dimensions que vous avez étudiées? Est-ce que vous travaillez avec ces femmes? Est-ce qu'il y a des choses que vous souhaiteriez mettre en évidence rapidement en ce qui les concerne?

Le Président (M. Copeman): Très rapidement, parce que votre affirmation, Mme la ministre, comme quoi qu'il reste très peu de temps est tout à fait inexacte, il ne reste plus de temps du tout. Mais je vais brièvement permettre une réponse. S'il vous plaît.

Mme Lamontagne (Lise): Bien, en fait, on travaille déjà, nous, avec des groupes qui représentent les communautés culturelles. Je pense que, si on parle de prévention de la santé, ou d'adopter des... changer des comportements, ou d'utiliser le service de santé, il faut s'associer aux groupes des communautés culturelles.

Nous, on travaille, entre autres, en lien avec le Programme québécois de dépistage du cancer du sein, et les actions qu'on a faites étaient en lien avec un groupe des communautés. On a aussi travaillé sur les mutilations génitales féminines, et, à ce moment-là, notre rôle était de mobiliser les communautés et, une fois la mobilisation faite, de s'enlever de là et de les laisser travailler.

Le Président (M. Copeman): Merci. Mme la députée de Terrebonne et porte-parole de l'opposition officielle en matière de condition féminine.

Mme Caron: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, Mme Vaillancourt, Mme Lamontagne, Mme Mimeault, merci beaucoup de votre présentation. Puis soyez assurées que votre mémoire touche effectivement un secteur de discrimination bien particulier qui a été abordé... je dirais nommé dans des mémoires. Mais vous avez raison de dire qu'on n'a pas poussé le travail jusqu'à des propositions très concrètes dans tous les axes et même d'ajouter carrément des axes et des orientations.

D'ailleurs, même le mémoire du Parti québécois avait fait référence à cette discrimination systémique au niveau de la santé. Et, quand on en parle, il faut toujours effectivement expliquer beaucoup. Alors, je suis très contente des questions de la ministre, qui ont permis de pouvoir expliquer aussi à l'ensemble de ceux et celles qui nous écoutent parce qu'il y a facilement possibilité de glissement là aussi ? dans ce domaine-là, je dirais encore plus ? entre la discrimination systémique et certaines problématiques.

Vous, je veux vous remercier de vos axes, de vos propositions. Je pense qu'effectivement pour arriver à faire des propositions dans ce domaine-là, il faut que ce soit fait par des groupes qui ont fait de la recherche, qui ont travaillé exclusivement dans ce domaine-là. Alors, je pense que cette contribution-là pourrait facilement être intégrée dans la prochaine proposition de politique que le gouvernement va déposer.

n(14 h 50)n

Je veux revenir sur ce qui est peut-être le plus connu au niveau des discriminations systémiques, je dirais, toute la question de la médicalisation des cycles normaux de la vie des femmes et la surprescription. On a des données là-dessus, c'est très clair et c'est assez frappant. Et c'est une réalité, là, les cycles normaux de la vie des femmes. Et les solutions, même en santé mentale, les solutions sont souvent de prescrire. Dans à peu près tous les domaines on y va. Et, comme effectivement les femmes vont consulter davantage à cause aussi de ces cycles normaux de la vie des femmes... C'est évident que lorsqu'elles sont enceintes aussi, elles consultent davantage, c'est tout à fait normal. Donc, ça, puis je reviendrai sur deux autres aspects par la suite.

Mme Lamontagne (Lise): Bien, sur les cycles normaux de la vie, c'est quelque chose que les groupes de femmes ont dénoncé depuis le début... le milieu des années soixante-dix, en fait. Le mouvement en santé des femmes a beaucoup porté à l'attention ces pratiques-là. Et ce qu'on voit, aujourd'hui, c'est que ça ne s'améliore pas. Les petites filles commencent à prendre les hormones, la pilule contraceptive, très jeunes, puis ça commence comme ça. Puis ensuite de ça on va avoir beaucoup de services par rapport à l'infertilité, hein. Très tôt, on va juger que quelqu'un est infertile et on va le mettre aussi sur des hormones. Et, rendu à la ménopause, aussi on va maintenir les femmes sur des hormones.

Les récentes recherches, entre autres sur l'hormonothérapie, ont beaucoup inquiété les femmes, parce qu'on leur avait aussi fait valoir que l'hormonothérapie allait prévenir les maladies cardiaques, allait prévenir de l'ostéoporose, et finalement ce qu'on arrive comme conclusion d'une recherche sur plusieurs femmes, c'est ce que ce n'est pas ça. Donc, à chaque fois qu'on intervient sur une personne en santé, on prend un risque. Et ça, c'est quelque chose qu'il va falloir qu'on comprenne, chacun, comme individu mais aussi comme société: les gens en santé, on n'a pas besoin de faire de la prévention chimique, là, sur ces gens-là pour prévenir la maladie. On prend des risques à chaque fois. Comme on prend des risques quand on est en santé puis qu'on va se faire faire une chirurgie esthétique, c'est la même chose. Quand on est en santé, il ne faut pas intervenir sur notre corps.

Par rapport à la surprescription. Nous, on préfère parler de surprescription que de surconsommation, parce que, dans la majorité des cas, on parle de médicaments prescrits, donc il y a eu un prescripteur qui aurait pu ne pas prescrire, qui aurait pu souvent présenter d'autres alternatives. Alors, il n'y a pas... Si on va dans le cabinet de médecin, le médecin ne parle des médecines alternatives, ne parle pas non plus de ressources qui pourraient aider les femmes. Je pense, dans toutes sortes de domaine, que ce soit la santé reproductive ou la santé mentale, il n'y a pas d'autres ressources que les médicaments. Et les médecins sont informés des nouveaux traitements par les compagnies pharmaceutiques; il n'y a pas d'autres façons pour eux de se mettre à jour sur l'information que de recevoir l'information des compagnies pharmaceutiques. Alors, oui, ils connaissent les nouveaux médicaments et dans certains cas sont encouragés à les prescrire aussi, et les femmes vont en cabinet, donc ça fait un mariage dangereux.

Il existe des alternatives, il existe différentes options qui sont offertes aux femmes. On a fait, par exemple, une trousse sur la ménopause où on explique qu'il y a différents symptômes associés à la ménopause qui ne sont pas tous aussi graves les uns que les autres. La même chose pour le syndrome prémenstruel. Il n'y a plus une femme qui n'a plus de syndrome prémenstruel. Là, je ne suis plus... Avant ça, les femmes avaient des menstruations puis c'était la vie normale, mais maintenant on devient toutes un petit peu folles à la veille de nos menstruations, et il faut soigner ça par des hormones ou on soigne ça par des antidépresseurs.

Il y a des jeunes femmes qui nous ont témoigné avoir été chez le médecin parce qu'elles se sentaient mal, elles étaient en questionnement par rapport à leur orientation sexuelle, et on leur a prescrit des antidépresseurs des femmes mineures. Alors, cette réponse-là, là, il faut la questionner, il faut la talonner, il faut informer autant les praticiens que les usagères. Et plus on sera informé, plus il y aura d'alternatives offertes, mais moins on prendra de médicaments, moins on en prescrira aussi.

Mme Caron: Merci beaucoup. Je voudrais vous... brève question sur les répondantes en condition féminine. Alors, vous en avez parlé dans votre mémoire. À votre connaissance, au niveau des agences, les nouvelles agences dans les régions, est-ce qu'il y a des répondantes en condition féminine?

Mme Lamontagne (Lise): On n'a pas les derniers chiffres là-dessus. Peut-être que le réseau des tables régionales aurait le portrait le plus précis. Mais ce qu'on sait, c'est que les répondantes qu'il y avait au niveau des régies régionales ? d'abord, il n'y en avait pas dans chaque régie ? en fait, n'étaient pas exclusivement au dossier des femmes, hein. Souvent, elles cumulaient plusieurs dossiers. Ça pouvait être aussi les services de langue anglaise, et les femmes, et autre chose. Et, quand elles avaient le dossier de la santé des femmes, souvent c'était exclusivement le volet violence dont elles s'occupaient. Alors, ça, c'était un des problèmes qu'on a soulevés. Et on avait d'ailleurs documenté ça dans l'ensemble des régions.

L'autre problème ? et ça, je peux témoigner ? c'est que, dans certaines régions, on avait réussi à mettre sur pied des comités aviseurs en conditions de vie des femmes, qui étaient en lien avec la régie régionale. Ces comités fonctionnaient sous différents mandats, là. Vraiment, on avait les réalités régionales qui s'exprimaient. Par contre, depuis que les agences sont en place, les comités existants sont en majorité sur la glace. Il y a plusieurs comités qui ne sont pas dissous mais n'ont pas travaillé. Et, nous, on s'inquiète de la place, par exemple, que va prendre le Programme québécois de dépistage du cancer du sein dans toute la réorganisation du système de santé. C'est un programme en santé publique, on réorganise le réseau, quels seront les ponts entre les deux? C'est un des aspects qui nous inquiètent de la réforme.

Mme Caron: Voulez-vous préciser pourquoi il vous inquiète?

Mme Lamontagne (Lise): Bien, c'est parce que, nous, on vient de terminer une recherche sur l'attente des femmes... les femmes en attente de diagnostic donc après une première mammographie anormale, les étapes subséquentes jusqu'à avoir un diagnostic, et il y a plusieurs améliorations à apporter au programme pour un meilleur suivi des femmes, pour qu'elles aient un suivi psychosocial, elles aient une ressource en tout cas si elles ont besoin d'être accompagnées, qu'on reconnaisse que ça puisse être une période anxiogène, qu'on réponde à leurs questions sur les étapes qui s'en viennent. Et, ça, c'est un élément à développer parce que ça n'a pas beaucoup été fait dans les premières années d'implantation du programme.

Mais là, en même temps qu'on doit améliorer le programme, toute l'énergie est mise sur la restructuration du réseau de la santé actuel et un peu comme en vase clos par rapport aux améliorations à apporter au programme. Donc, c'est possible que le programme reste un peu en statu quo pour quelques années, le temps que le réseau soit réorganisé dans sa nouvelle structure, et, là, après, qu'on améliore le programme. Mais, si on ne répond pas aux besoins des femmes, les femmes ne vont pas embarquer dans le programme. C'est un programme qui marche en autant que les femmes participent. Alors, c'est important vraiment d'être à l'écoute des femmes puis d'améliorer le programme le plus possible, et justement, en améliorant les aspects psychosociaux, ça peut être une bonne façon.

Mme Caron: Merci beaucoup. L'autre élément, vous l'avez abordé un peu tantôt, au niveau de toute la question des différentes chirurgies, qui sont faites de plus en plus jeunes d'ailleurs au niveau des jeunes filles. C'est très lié aussi à toute la question de la sexualisation de nos jeunes filles.

n(15 heures)n

Et il y a un autre élément. Lorsqu'il n'y a pas chirurgie, il y a toute la question, qu'on n'a pas beaucoup abordée encore au niveau de la commission, mais je pense que tous les membres en sont bien conscients et conscientes, l'anorexie, la boulimie, où on retrouve 45 %, là, ce sont des jeunes filles, ce sont des jeunes femmes ou des femmes. Donc, c'est vraiment très, très spécifique. Et là aussi les études sont moins connues, il y a moins de prévention, il y a moins d'information. Et ça m'apparaît un des éléments qui est extrêmement, extrêmement important parce que... d'abord pour toutes les conséquences aussi qu'elles vivent, autant physiques que psychologiques. Alors, j'aimerais ça vous entendre un petit peu sur cet aspect-là.

Mme Lamontagne (Lise): Nous, on appelle ça l'image corporelle, ce dossier-là, parce que c'est à la fois la question des régimes, des régimes alimentaires, des chirurgies esthétiques, des produits et traitements qu'on fait pour changer notre corps, et c'est un dossier, c'est un enjeu extrêmement important actuellement pour les femmes. On n'a jamais vu autant de pression chez des femmes de tout âge pour modifier son apparence. Dans l'histoire du monde, ça ne s'est jamais vu. Il y a toujours eu des modes. Selon les cultures, selon les époques, il y a toujours eu... Bon, ceci est plus à la mode, il y a des profils. Bon, ça, ça... Mais, que ça touche tout le monde avec une importance aussi grande, c'est la première fois dans l'histoire du monde qu'on voit ça. Et on est confrontées avec le fait que la technologie nous permet ces changements-là. Donc, pourquoi est-ce que maintenant c'est si populaire? C'est qu'aussi on a les moyens. Il y a quelques années, là, on ne pouvait pas se faire refaire... la chirurgie esthétique était tellement chère que c'était réservé à une classe de la société. Maintenant, ça s'est démocratisé, d'une certaine façon.

Cette pression-là est importante. Les jeunes filles commencent à se mettre au régime au primaire, donc avant même d'avoir commencé leur puberté. Et les femmes qui ont un poids santé, la majorité veulent maigrir. Donc, ce n'est pas juste la question des femmes, des filles anorexiques, c'est chacune d'entre nous, on n'est pas fières de nous quand on se regarde dans le miroir, puis on aimerait mieux être un peu plus minces ou avoir des formes à des endroits, qu'on n'a pas, ou ne pas avoir de petit ventre parce que ce serait mieux que ça... ce serait plus joli dans notre robe du soir. Alors, c'est rester mince et rester jeune.

Donc, toute la question du vieillissement est complètement attaquée. Et, si on regarde les représentations médiatiques, c'est très, très clair, il n'y a pas de cheveux blancs dans les médias. Il y en a dans Le Bel âge. D'ailleurs, nous, on a étudié les magazines féminins, et les mannequins qui sont dans les magazines sont toujours plus jeunes que le public cible du magazine. Donc, ça nous place toujours en état d'inadéquation et il faut corriger. Il va falloir être vigilantes de comment ça se développe. Nous, on travaille sur ce dossier-là avec des jeunes, avec des femmes de tout âge et on intervient dans les médias aussi. Bon, quand il y a eu l'affaire Charest, c'est dommage, il y a eu un décès, mais en même temps ça a permis de discuter de ces questions de chirurgie et jusqu'à quel point on est prêtes à mettre notre santé en danger pour répondre à des critères qui sont établis pour une minorité de femmes.

Mme Caron: Merci beaucoup, parce que, ce sujet-là, on l'avait vraiment peu abordé, puis il fait partie de notre réalité, autant dans tous les médias, là, dans toutes les formes de média. Et les pressions sont effectivement très nombreuses. Merci beaucoup. J'ai le temps pour une autre question, M. le Président?

Je veux aborder toute la question de la médecine alternative parce qu'effectivement ? puis j'en fais partie ? les thérapies alternatives, c'est, bien, tout ce qui touche ce qu'on appelle médecine alternative, médecine douce, complémentaire. Les femmes ont effectivement une tendance plus naturelle à s'y intéresser. Bien, on a le goût d'aller vers ce genre de thérapie là, ce genre de médecine là. Plutôt que de prendre parfois des médicaments, on préfère aller du côté de ce qui est vitamines ou produits, et parfois produits miracles, mais naturels. Mais il y a aussi effectivement des conséquences, parce qu'on peut cumuler différents produits et se donner autant de problèmes de santé physique.

Mais il n'y a pas de... ce n'est pas légiféré. Je sais qu'il y avait un travail de fait, pour y avoir participé durant quelques années, et la tendance s'enlignait sur la réforme de la Loi pour la protection du consommateur, qui devait apporter ce volet-là. C'est là que c'était supposé atterrir, et ce n'était pas atterri. Et, au niveau des... En attendant qu'il y ait cette législation-là, il faut aussi s'assurer que les femmes sont bien informées, vu qu'elles sont plus portées à les utiliser. Et elles conseillent aussi les autres, hein, pour les utiliser. On se raconte nos expériences, hein, puis nos résultats, puis ce qu'on pense que ça donne comme résultats. Alors, en attendant la législation, qu'est-ce qu'on peut ajouter de plus pour apporter une protection?

Mme Lamontagne (Lise): Je pense que l'information est un bon point, faire un peu le ménage de l'information qu'on a par rapport aux médecines alternatives et, je vous dirais, autant que pour les médicaments ou la médecine conventionnelle, permettre qu'il y ait une source indépendante qui, par les médecines alternatives, permette qu'il y ait une source critique qui donne de l'information sur les médecines alternatives. Parce que, si on laisse les médecines alternatives nous informer sur leur démarche, c'est une facette. Et souvent on va avoir les naturopathes qui vont parler pour la naturopathie, les acupuncteurs qui vont parler pour l'acupuncture, mais on n'aura pas le portrait global de ces disciplines-là. Alors, si on a quelque chose qu'on peut faire en attendant de légiférer, c'est de pouvoir donner au public une information indépendante et critique sur l'ensemble des médecines alternatives.

Mme Caron: À votre connaissance justement, pour avoir une information critique puis indépendante, est-ce qu'il y a vraiment beaucoup de recherche de ce côté-là? Parce que très souvent les critiques arrivent du côté de la médecine traditionnelle, et donc il y a comme un peu un conflit d'intérêts. Alors, sur quoi les femmes peuvent-elles s'appuyer?

Mme Mimeault (Isabelle): Justement, au Réseau québécois d'action pour la santé des femmes, on en a fait une recherche concernant les médecines alternatives et complémentaires. C'était à l'intérieur de la trousse, là, dans le projet concernant la trousse sur la santé des femmes au mitan. Alors, on a exploré les différentes alternatives possibles concernant la ménopause plus en particulier, mais en fait ça concernait toute la santé des femmes. Quand on a exploré l'homéopathie, la naturopathie, évidemment ce n'était pas seulement concernant la ménopause, alors que c'était quand même une bonne source d'information pour toutes les femmes.

Le Président (M. Copeman): Il faut atterrir.

Mme Caron: Oui, une dernière, peut-être?

Le Président (M. Copeman): Bien, la piste est courte. Allez-y.

Mme Caron: O.K. Je vais poser la question que je pose pour les groupes spécialisés comme vous qui avez fait une recherche très exhaustive: Si vous avez un dernier message à nous donner, aux membres de cette commission, qu'est-ce que ce serait?

Mme Lamontagne (Lise): Bien, je pense, de retravailler votre orientation sur la santé, d'y associer des groupes comme nous, ça peut être une bonne ressource. J'ai vu qu'on n'était pas citées en référence, aucunement, dans l'avis, alors qu'on a plusieurs productions et recherches qui pourraient être utiles. Ça, ce serait vraiment notre dernier mot par rapport à la quatrième orientation.

Et, par rapport à l'ensemble de l'avis et de l'engagement du gouvernement, il faut que ça devienne... il faut qu'on sente que le gouvernement en fait une priorité, il faut que ça se voie et que ce soit clair. Et, peut-être, de rétablir le Secrétariat à la condition féminine et la ministre en titre directement au ministère du Conseil exécutif, ce serait un message clair qu'on pourrait envoyer à la société.

Le Président (M. Copeman): Mme Vaillancourt, Mme Lamontagne, Mme Mimeault, merci beaucoup d'avoir participé à cette commission parlementaire au nom du Réseau québécois d'action pour la santé des femmes.

J'invite les représentantes de Femmes autochtones du Québec à prendre place à la table. Et je suspends les travaux de la commission quelques instants.

(Suspension de la séance à 15 h 10)

 

(Reprise à 15 h 16)

Le Président (M. Copeman): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, c'est avec plaisir que nous accueillons les représentantes des Femmes autochtones du Québec. It's with pleasure that we welcome the representatives of Femmes autochtones du Québec. Mme la présidente Gabriel, welcome to the commission. I give the same information that I do to all groups, that is to say you have 20 minutes to do your presentation, which will be followed by an exchange for a maximum of 20 minutes with the Members on each side of the table.

Alors, présentation d'un maximum de 20 minutes, qui sera suivie par un échange de 20 minutes avec les parlementaires de chaque côté de la table.

I would ask that you introduce your colleagues who are with you today and begin your presentation whenever you're ready.

Femmes autochtones
du Québec inc. (FAQ)

Mme Gabriel (Ellen): Thank you very much. To my right, is the vice-president of our Association, Mérilda St-Onge; and, to her right, is our coordinator for native women shelters and the promotion of non-violence, France Robertson.

If I may follow part of our customs before we begin an audience like this is to have a prayer to acknowledge Creation.

Mme St-Onge (Mérilda): (S'exprime dans sa langue).

Le Président (M. Copeman): Thank you. And we are at your disposal.

Mme Gabriel (Ellen): (S'exprime dans sa langue).

I thank you. (S'exprime dans sa langue). Bonjour to the honored Members of the National Assembly in the Province of Québec. Thank you for allowing Québec Native Women's Association the opportunity to present to you the aboriginal women's perspective on equality.

Like many other aboriginal women before me, my presence here is thanks to the many ancestors to keep our identity, language, culture, spirituality and governments alive. Aboriginal people have had to fight to preserve many aspects of our identity from the effects of colonialism and oppression. We are a proud strong people, with a rich history that still maintains its ties to the land and the environment of the earth, that we call Mother.

n(15 h 20)n

The Québec Native Women's Association has been in existence since 1974 and has advocated on behalf of aboriginal women for their rights, safety and well-being. We have been a voice to aboriginal women through some turbulent times during our 30-year history, due to the sexist discrimination of the Indian Act, an act of Canadian Parliament that continues to practice discrimination against aboriginal women in spite of the passing of Bill C-31, in 1995, that allowed reinstatement of the inherent rights of aboriginal women who lost their status when they married a non-aboriginal man.

In spite of this amendment to the Indian Act, aboriginal women continue to fight the sexist discrimination which is currently being perpetuated by male dominated band councils under the Indian Act. With soft government negotiations between the federal and provincial governments and band councils, the fear of aboriginal women is that our fundamental human rights are in peril due to the integrated discrimination of the band council system. The patriarchal system that is inherent in Western society has infiltrated the very social fabric of aboriginal people's lives and culture and has resulted in the traditional roles and voice of women being tossed to the side, becoming insignificant and oftentimes a token for appearances sake. The creation of the Indian Act, in 1876, places all aboriginal people under the guardianship of the federal Government, a role that continues to be played out even today.

Aboriginal people are a diverse group of people with their own unique traditions, customs, language and governments. However, there are commonalities that we all share when it comes to the traditional roles that women possess within our own respective nations. Aboriginal women's roles are to nurture, to pass on our languages, be part of the decision-making processes, but as well our roles extend to knowledge of medicines, history, participants in economic development, custodians of land and the passing of holistic knowledge to future generations. Colonialism has upset the very nature of the role of aboriginal women within our societies. Acts of legislation that come under the guise of assimilation into Canadian society have attacked not only the importance of our roles in our society but have attacked our very identity as aboriginal people.

Residential schools, that were created to assimilate aboriginal people into Canadian society, were actually designed to create cheap labor to work in factories. However, what it created are people who are still trying to overcome the effects of oppression and attacks against their very identity. Punishment for speaking one's language, in residential schools, ranged from piercing a child's tongue with needles, forcing the child to hold their hand over hot flame till the skin peeled off, shaving their heads, to physical and sexual beatings. So how are we, as a people who were taught to hate the very skin that we live in, expected to walk unscathed from these various acts designed to eliminate our very identity as a people? I'm only touching on some of the examples which have contributed to the root causes for ailments found in contemporary aboriginal society.

What is troubling to many aboriginal women's groups is that all levels of government seem to insist on the signing of self-agreements that will do little or nothing to promote a healthy, prosperous society, when we are dealing with the effects of residential school, oppressive legislation like the Indian Act. Self-government has little to insure the fundamental human rights of aboriginal women and their families or protect it. How can it be reassuring when aboriginal women who fall under Bill C-31 are not even allowed to live in their communities where they grew up and were born in?

As well, Canada, in spite of being a signatory to the International Covenant on Civil and Political Rights and Universal Declaration of Human Rights, continues to enact legislation that does not defend the rights of aboriginal women and their children, for example on the issue of matrimonial property, an issue that places aboriginal women at risk of losing their home in cases of divorce, even though she may own the family home. The Government of Canada, by its own admission, admits that Bill C-31 and the Indian Act continue to discriminate against aboriginal women and their children. Yet there has been very little movement by the Government to rectify the situation.

On policy four: Improve health and welfare by adapting services to the differences between women and men. We have seen through statistics that indicate that aboriginal people have the highest incidences of such diseases as diabetes, heart disease, ever increasing cases of HIV-AIDS, and the highest rates of suicide amongst our youth, and as well highest rates of conjugal violence. It would seem therefore that aboriginal people's future is questionable, to say the least. However, aboriginal women's groups like Québec Native Women have been working on these very issues that affect aboriginal women and their communities' health. Although we do not receive the same kind of funding than our male counterparts receive, we continue to forge ahead to advocate for the rights, health and well-being of our members.

In area one: Commitment to gender-based approach to planning, organizing and assisting health and social services with a view to adapting them to the differences between men and women. The attack on our identity has long lasting effects on the self-esteem of aboriginal women and their children. Issues as the reinstatement of status and the plight of single mothers continue to plague the safety and well-being of aboriginal women.

Archaic attitude learned from the policies of the Indian Act has caused aboriginal women to become isolated, ostracized and placed in vulnerable situations that lend itself to potential violence. In order to properly address and work on the empowerment of aboriginal women and their families, we need to develop programs and services that are culturally adapted to the needs of aboriginal people. We need to address the problems of access to programs and services for aboriginal women and must place an emphasis on prevention, education and the promotion of health as well as the level of problems of rights and jurisdictions. We would like to see a holistic and multidisciplinary approach to health programs and services to value culture and traditional practices while encouraging cultural sensitivity amongst health care professionals.

And since many aboriginal people still maintain a lifestyle of hunting and fishing, they are more at risk in developing mercury poisoning and organ chlorides, all of which attack the central nervous system. Traditional philosophies teach the preservation of the environment for future generations. Therefore, companies who pollute the fauna, aquatic and botanical resources used by aboriginal people must be made responsible. We must be part of consultations that include the environment. However, since aboriginal people are considered wards of the State, we do not have much impact in directing these companies to be accountable for the destruction of the environment.

A special emphasis also needs to be placed on the family, but in particular single mothers, because, in order for an healthy child development to take place, aboriginal mothers need help. Socioeconomic factors, which play a large role in the health, and safety, and well-being of aboriginal women and their children, have never been properly addressed by mainstream studies, programs and services. Aboriginal women, who make up the majority of frontline workers in their communities, complain that they do not have the resources and personnel to adequately deal with the problems they face in their communities.

We therefore require financial and moral support from Government agencies to help us network, coordinate and develop research files and training for frontline workers who work on the issues of aboriginal health. We require the help of government organizations to support the creation of reference documents that allow us a better understanding of the global situation of aboriginal women's health. We need to sensitize and peak the interest of governments, who have the authority over funding in these areas, so that we make profound strides in the area of the health of aboriginal women and their communities. It is organizations like Québec Native Women who provide the advocacy and services for aboriginal women who are all too often refused services from their bands for such reasons as they have not yet been reinstated or that they are living off reserve.

I could speak of the statistics that concern aboriginal women and the higher rates of gender-based violence, which we have more than any other group in this country, but statistics do very little to help those affected by violence. While the Government of Québec issued a very practical and comprehensive action plan to deal with the conjugal violence issue, the reality is that an increase in financial support for the implementation of the action plan is needed in order to truly make an impact on this very serious issue. We applaud the Government of Québec for its initiative in regards to this action plan. The Government of Québec is miles ahead of the federal Government in its concern regarding this issue.

n(15 h 30)n

However, in order to truly understand the roots of conjugal violence in aboriginal communities, one also has to remember that aboriginal people's identity, livelihood, culture and sovereignty have been under constant attacks since contact with the Europeans and their descendants. Violence is also attributed to the high rates of poverty, deplorable social conditions, and to the political frustration stemming from the battle for self-government and self-determination.

Violence is not a tradition in aboriginal society, contrary to some popular Canadian society beliefs. But we do not profess to have had a perfect society before Europeans came here. Indigenous people nevertheless had and have inherited customs and traditions that allow for societies to deal with those enacting violent behavior. We need to provide concrete programs of sensitization and education in aboriginal communities as well as developing emergency services such as telephone hotlines and programs for aggressors, such as the Attikamek Program Arawtin, that utilizes traditional healing methods and has been very effective in dealing with aggressors.

We also need to provide some additional training in conjugal violence for police, not just aboriginal police but police in general. More funding for aboriginal women shelters needs to be provided. Aboriginal women shelters receive $150,000 a year, as opposed to the non-aboriginal women shelters, who receive $350,000 a year, in spite of the fact that their clientele includes aboriginal women. In Indian shelters, we would like to see more hiring of aboriginal staff to help those aboriginal women who come to these shelters.

The issue, as far as we are concerned, is not just conjugal violence, but systemic and racist acts of violence against aboriginal women and their families. Amnesty International report, Stolen Sisters: A human rights response to discrimination and violence against indigenous women in Canada, last year, October ? I quote: «The social and economic marginalization of indigenous women, along with a history of government policies that have torn apart indigenous families and communities, have pushed a disproportionate number of indigenous women into dangerous situations that include extreme poverty, homelessness and prostitution. [...] These acts of violence may be motivated by racism, or may be carried out in the expectation that societal indifference to the welfare and safety of indigenous women will allow the perpetrators to escape justice.» End quote.

This is the violation of our human rights that has a direct link to the Indian Act legislation that has caused some indigenous women to become alienated from their families and communities and has placed them in situations that are sometimes dangerous and unhealthy. It is in this consistent disregard of an indigenous women's rights that law enforcement agencies fail to provide the protection or respect to acts of violence against aboriginal women. Case in point: Helen Betty Osborne and many other aboriginal women whose murders, kidnapping and rapes seem to go unheard of or are not dealt with properly by authorities because of their race, a fact that is evident in its occurrences, but is denied by police authorities. And that is why we insist that police training and as well cultural sensitivity to the lawyers and judges who see aboriginal women and their families be given so that they can understand our realities.

Racist stereotypes invariably make aboriginal women vulnerable to society at large, as the attitude is that all aboriginal women are available to all men. This fact, according to frontline workers, is this aspect that continues to place aboriginal women, no matter who they are, at risk.

In 2003, Québec Native Women collaborated with the Québec Government and other agencies, including police, to issue a tripartite report on justice. Recommendations addressed the problems of racism, sexism, and insensitivity to cultural values and beliefs. It is a report that was used by the Québec Government in its action plan against conjugal violence, and it is the report that should be referenced by all policing agencies in Canada.

In adopting special measures for groups facing double discrimination. The difficulties that aboriginal women face in receiving adequate care and services are linked to many factors, some of which include linguistic factors, dealing with multilevel of governments and all their jurisdictional and administrative problems, cultural and traditional practices that are not acknowledged, isolation and proximity to urban centers, the degree of sensitivity of the workers from various professions, and systemic racism.

For some aboriginal women, it goes further. Discriminatory provisions of the Indian Act that include: restrictions on Indian status and entitlement; the discriminatory policy of the Indian Registrar, which requires identification of a child's father, which does not occur for aboriginal men and their mates in spite of the fact that the mother may be a non-aboriginal; the difficulty in transferring to another band, such as birth band, because of the requirement of consent of the other band; the denial of band membership by some band councils in spite of the passage of Bill C-31; and difficulties in obtaining orders for the temporary use of the matrimonial house in situations of family violence, or to have that orders enforced on reserve. All the facts and elements mentioned in this supplement only touch the surface of the multifaceted group of problems and contributors to the realities faced by aboriginal women.

Québec Native Women would like to recommend the following: that initiative aim at making known the needs, concerns, and priorities of aboriginal women in a holistic manner be reflected in government and community policies and programs, such as policy analysis, research, training, workshops, consultations, etc.; that governments encourage interdepartmental cooperation in consulting with aboriginal people's organizations and groups; that governments resolve the problems of the administrative and jurisdictional factors that prevent aboriginal people, and in particular women, accessibility to quality services ? for example, in women shelters where there are no aboriginal workers; that support be given to the development of training programs that provide capacity building in communities in a holistic manner; that funds be available on a recurring basis for the creation of programs, tools and methods that empower and promote aboriginal people society, language, education, and culture; that governments put into place policies, programs, and action plans that target poverty amongst aboriginal women by encouraging education, employment, suitable living and working conditions, equitable wages, income security, and access to decent housing.

We also recommend that the Minister of the Status of Women brings the issue of the inequalities of aboriginal women in regards to Bill C-31 to the table at the Federal-Provincial Territorial Table of the Status of Women. And we know that you do have some influence on this issue. For example, the late René Lévesque, at the FPT First Ministers' meeting, in the late 1970s, gave his seat to one of our founders, Mary Two-Ax Early, and Evelyn O'Bomsawin to put forward the voice of aboriginal women at this table. It is therefore imperative that the Québec Government maintain the existing Department of «Condition féminine» and the status «statut des femmes», as each individual department strengths can positively contribute to the recommendations that Québec Native Women has made here today.

It has been said by many human rights groups that war is archaic. Many aboriginal indigenous people have stated that we continue to fight a war with the Western governments in their acts of legislation that commodifies aboriginal people.

In a so-called postcolonial age, the effects of colonialism on aboriginal people must be undone. The discriminatory policies must be eliminated, along with the acknowledgement and recognition of indigenous people's right to self-determination, but as well to ensure that aboriginal women's voice be included in the dialog, discussions, consultations, and negotiations on self-determination. Indigenous people are a nation of people who are in the process of rebuilding to make a brighter future for the generations yet to come. The recommendations of today are a small step in undoing the injustices of the past. Aboriginal people welcome dialog with their Québécois brothers and sisters. We hope that this is reciprocated, on a equal footing that requires the knowledge and consent of aboriginal people as an equal partner for a better future. (S'exprime dans sa langue).

Le Président (M. Copeman): Merci. Thank you, Mrs. Gabriel. Mme la ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration.

Mme Courchesne: Merci beaucoup, M. le Président. Mrs. Gabriel et Mme St-Onge, Mme Robertson, sincerely, thank you for being here, thank you for the presentation. I'll say a few words in English and then I'll ask some questions in French. But, because you did the presentation, I will just express my deep concern and preoccupation regarding the aboriginal woman, remembering that, more than a year ago, when I was nominated, a few months later, we had our first federal-provincial meeting with all Status of Women Ministers. And I remember looking at the «ordre du jour», agenda, and there was nothing, no items, no discussions, no issues regarding aboriginal women.

n(15 h 40)n

So I've asked my Deputy Minister to take the phone, and then I've spoken with the Minister and I said: It's unbelievable that, you know, we meet at a federal-provincial meeting knowing, knowing the very, very serious situation of all these women in each province everywhere in Canada, and, us, ministers of all provinces, are not talking about the issues regarding aboriginal woman. So I asked to put that on the agenda, and the next meeting it came back. I can assure you, as long as I'll be Minister of Status of Women and we'll have those meetings, there will be an issue and an item on the agenda. We have to go and move on. It is a very, very serious situation, and we have the responsibility to address it. That's what I wanted to say.

Depuis 1987, Femmes autochtones du Québec, vous faites un travail remarquable dans une situation où effectivement ? et Mme Gabriel l'a bien énoncé ? il y a une juridiction fédérale et il y a un territoire québécois. Et vous avez bien énoncé le fait qu'à chaque fois qu'on veut amorcer certaines actions on est souvent, très, très souvent confrontés à cette situation légale, administrative, hors réserve, sur réserve, qui intervient, quand et à quel moment. Et, depuis 1987, vous essayez beaucoup de travailler en partenariat, en concertation, dans un monde, en tout cas dans votre cas, où le pouvoir est franchement exclusivement, ou presque, masculin. Ellen, correct me if I'm wrong, but I think you're the only woman who has a sort of responsibility or, you know, who is president of an association and has a seat as a woman. C'est un monde d'hommes qui est très, très, très, très étanche.

Est-ce que, depuis 1987, où vous faites cette promotion de tous ces dossiers, que ce soit la violence, la santé, l'éducation, la place des femmes au sein des communautés, est-ce que vous... Quel est le progrès et comment on peut agir pour que les femmes puissent avoir toute cette place, tout ce pouvoir pour véritablement apporter des mesures et des correctifs, et que ce soit plus facile de pouvoir oeuvrer sur des sujets, là, qui sont infiniment majeurs, là, importants et fondamentaux, quand on parle de la santé, mais qu'on parle de l'agression, de la violence, de vie et de mort dans bien des cas? Comment réagissez-vous à ça?

Mme Gabriel (Ellen): I'll answer this and then I'll ask France Robertson to answer as well. I think we've made great strives, at least in the public. There are certain communities who have done great work in regards to conjugal violence and issues that concern the family. However, you know, in spite of having a seat at the AFNQL, we're the only women's organization there for sure... There is another woman with me who represents the Centre d'amitié des autochtones, Édith Cloutier, but we have, well amongst our own people, I think, the greatest work to do because the way the Indian Act is designed to promote the power of the Manawan seems like power towards men.

As I've mentioned in my supplement, every woman's voice, in our role, has really been disrupted by the Indian Act and by colonialism, but, I think, what we would like to see... And I think it's because I'm Mohawk, I know it's a little bit different than other communities because Mohawk women have always had a great voice within their community, but I know that we still need to do a lot of sensitization for the men within our communities in area of conjugal violence, which, as I mentioned, relates to poverty, relates to social injustices, and other things ? that's not to excuse them, I'm not, by any means, excusing the men ? but as well the areas where people go to find help. The aboriginal women who seek help outside their communities never seem to have the kind of services that could really meet their needs. And so that's why the centers or organizations like CAVAC really need to hire an aboriginal person. It's not enough to say that they tried to find an aboriginal person ? because I've never seen any of their job postings in my community ? we really have to insist that CAVAC hire aboriginal people for these organizations. We'd like to see more work with police officers, be the aboriginal SQ, RCMP, to really understand our realities and to sensitize them.

But, you know, if I look back from what happened 30 years ago, we weren't speaking about violence then. It was Femmes autochtones du Québec that began a campaign, in the nineties and before that, to talk about, to break the silence of sexual abuse, of conjugal violence, of the things that are going wrong in our community, so that we can fix them. But again we have less funding, we receive less funding for those areas and we really need help to do those issues. Projects funding is good, but we need something that continues way beyond that, so the good work that's been done can continue and won't be put on the side. So allow my colleague France Robertson to answer the next.

Mme Robertson (France): Je vais rajouter ce qu'Ellen mentionnait, depuis 1987 aussi, Femmes autochtones du Québec a brisé des tabous, comme elle disait, a brisé des silences. Il y a eu des colloques sur la non-violence qui ont permis à prendre conscience, autant les femmes, autant les hommes, ce qu'est la violence dans nos communautés puis quel impact, aujourd'hui, ça a dans nos communautés. Tout dernièrement le colloque sur les abus sexuels, Apitendemowin, en 2001, qui a eu lieu.

L'abus sexuel, ça ne fait pas longtemps qu'on en parle dans nos communautés, ça fait tout dernièrement. On a brisé ce silence-là puis on dit: Qu'est-ce qu'on fait? Puis, avec le peu de moyens qu'on avait, Femmes autochtones du Québec, bien on a réussi à aller chercher des partenaires pour dire: Bien, il y a des graves problèmes dans notre communauté, tout le monde en est conscient, tout le monde, que ce soit autochtones, non-autochtones, on en parle, on en fait mention. Pauvres autochtones, on fait donc pitié, mais, lorsque ça en vient pour en parler, bien qu'est-ce qu'on peut faire? On est tout démunis, que ce soit auprès des gouvernements ou chez nous aussi.

Femmes autochtones du Québec a fait aussi différentes campagnes, comme elle dit, entre autres, aussi, des capsules d'information juridique, qui étaient entre autres de sensibiliser, à travers les radios communautaires, dans les communautés autochtones, soit sur les pensions alimentaires, sur la violence conjugale, sur les abus, sur différents thèmes spécifiques. Puis ces capsules-là ont été traduites en différentes langues afin de rejoindre les personnes dans leur langue maternelle.

Il y a aussi des tables qu'on appelle des tables de concertation pour le mieux-être de nos nations. Cette table-là a été fondée à peu près en 1987, suite à un des colloques sur la non-violence. Cette table-là regroupe différents partenaires, dont l'Assemblée des premières nations du Québec et du Labrador, dont le Regroupement des toxicomanies, le Regroupement des centres de métiers, le Conseil en éducation des premières nations, l'Association des chefs de police, Femmes autochtones du Québec. Puis l'objectif de cette table-là est vraiment d'aller chercher des partenaires.

Pour nous, notre priorité, c'est de promouvoir la non-violence dans nos communautés. Puis qu'est-ce qu'on peut faire avec le partenaire? Cette année, qu'est-ce qu'on a fait, on a diffusé un poster et un agenda. Là, présentement on veut s'asseoir avec eux autres puis dire vraiment: On veut accroître encore notre mandat puis faire des actions vraiment concrètes avec eux, là, exemple des bottins de ressources. On n'a pas, dans notre... Le gros problème dans les communautés, c'est des communautés isolées, le manque de financement, le manque de ressources. Ce qu'on veut faire, c'est d'aller chercher vraiment ces personnes-là dans les communautés, c'est de créer des bottins de ressources vraiment à niveau, autant pour les femmes victimes, autant pour les jeunes et les enfants. Est-ce que tu veux ajouter quelque chose, Mérilda?

n(15 h 50)n

Mme St-Onge (Mérilda): Oui, j'aimerais aussi peut-être dire qu'on a quand même des bons rapports avec certains de nos chefs de bandes, parce qu'on a aussi des conseillères en condition féminine dans certaines communautés qui sont très ouvertes à entendre les besoins des femmes. Puis on a aussi des processus de guérison, tel que le Regroupement des femmes innues. Ça dure depuis 10 ans. On parle beaucoup de violence, de tous les maux dont les femmes souffrent. Et, depuis trois ans, les hommes aussi ont leur rassemblement d'hommes, donc ce qui est très... ils parlent beaucoup de violence familiale, des gardes d'enfants, des gardes partagées, des pensions alimentaires. On peut aussi ajouter l'identité, la responsabilité paternelle, la reconnaissance paternelle pour les jeunes filles et les jeunes hommes puis l'orientation sexuelle.

Donc, il y a beaucoup de choses qui se font dans nos communautés aussi. Les communautés essaient de s'entraider du mieux qu'elles peuvent. Et puis, comme on disait aussi, les représentantes des nations ? parce qu'on a, dans l'association des Femmes autochtones du Québec, on a des membres du C.A. cri qui sont des représentantes des nations ? donc ces femmes-là vont beaucoup dans leurs communautés. J'ai été représentante de la nation innue quelques années. Donc, aussi j'ai travaillé beaucoup avec le Regroupement des femmes de la Côte-Nord. On était membres de leur association aussi, de leur organisme. Donc, ça nous faisait plaisir de travailler avec les femmes non autochtones. Donc, on participe beaucoup à ces organismes.

Le Président (M. Copeman): Merci. Mme la députée de Jean-Talon.

Mme Delisle: Welcome. I was very interested in hearing ? not really reading, because I was listening to you ? reading your brief and I was sort of brought back 13 or 14 years ago, when I was... Actually, I was president of the Federation of Canadian Municipalities, and we were... I think we were working very closely with the aboriginal women groups. And I'm totally amazed, then saddened to see that we're still talking about the same issues, the same difficulties. All I have to do is close my eyes and imagine somebody else's voice and I'm still hearing the same thing. And I'm really saddened by that because it seems to me that, with all the means that we have today, whether... You know, we don't always have the financial means that we would like to have, but it seems to me that the effort should be there to help women, mostly aboriginal women, succeed in their quest for not only good services, but healthy services also, because that's the basis for everything.

There were so many issues that you raised. I would like to maybe focus mostly on the health issue. And you mentioned in you brief that women have difficulties even trying to have access to regular health services. I understand, from what I read and what I heard you say, that we're talking about our own services, we are not talking about your specific services within your different aboriginal communities. And I'd be interested in hearing you on the reasons for these difficulties. Maybe I'm naive, but I read the newspapers, I know that there is a lot of racism out there, but still, I mean, when you're sick, you're sick and, if you need the services, actually, you should be... you're entitled to have these services.

And you were also mentionning about the holistic approach, how we should maybe look into that as far as receiving social services, health and social services for aboriginal women within the different communities. So maybe you could just elaborate it a bit so that we can understand here, in the commission, exactly what type of an approach would be in the best interest not only of the aboriginal women requiring these services, and... by «aboriginal women», I also mean, you know, the children and those who really require those services.

Mme Gabriel (Ellen): Some of the problems women have encountered are the ones I've referred to as jurisdictional. Sometimes, it's federal jurisdiction, for a certain treatment that they need and so they don't have the proper paperwork, so that people will say: Well... There are certain services that are provided for, that the band receives money and gets paid to... the different medical services. But, if they don't have that piece of paper, the person has to pay for it. And, since the majority of people live at the lower... at poverty level, it's difficult for them to pay for those services, so they don't end at getting the services that they need. And, you know, being status or non status, you get the service or you don't.

There's the issue of language. Sometimes, the people speak neither French nor English, they speak their own language or they speak very little of the dominant, English or French, languages. There's the issue that, I think... just a misconception. You know, you're talking about health, but what it brings me to mind is that, within very isolated communities... If I could go to justice, just to give an example, there's an itinerant court which travels, you know, seeing the issues of conjugal violence. Well, sometimes the person who is responsible to help them will drive out the aggressor and the victim in the same car and... So these kinds of services that aboriginal women need, and the protection, and safety that they need is oftentimes not given to them. So the quality of services is not there.

It's like an attitude that, in some ways... It's not that I really understand, but in some ways it's been explained to me ? I just don't agree with it ? that: We give you so much money, as aboriginal people, you know, what more do you want? If you consider what I've talked about this historical step, we have problems that seem to be larger obstacles than the average person in Canadian society, and we need to really specialize and bring that aspect of the services, health services that they receive.

That's why we're talking about research, we're talking about references that need to be done to improve where can we improve those services for these women, but as well a holistic approach. In my culture, cancer is considered a spiritual disease. It's something that is wrong with you, something happened to you ? and, if you look at osteopathy as well ? I'll say, a chock to your system, it did something to your liver, it did something to this part of your body. Well, holistic approach deals with everything. It's not just: Oh, I cut myself here ? to take a very minor example ? I cut myself here, so I'm just going to deal with this part of my body. Well, this part of your body may be hurt, but the rest of you will feel it. And the kind of things that we have dealt with as people, just as ordinary people of this world, the oppression made to feel that we are not worthy. We need that holistic approach, the mental, spiritual, and physical approach ? that's what the holistic approach is ? and done in a traditional way that is in keeping with our culture and our tradition.

Mme Delisle: Thank you.

Le Président (M. Copeman): I don't want to cut you off, Mrs. Gabriel. One of our colleagues is very anxious to ask a question, and there's only a little bit of time left. So, Mme la députée de Nelligan, allez-y.

Mme James: Merci beaucoup, M. le Président. Good afternoon, ladies, merci beaucoup pour votre présentation. The term was right that I was very anxious, because I did want to have at least an opportunity to tell you how moved I was by your presentation because... specifically by the fact that you raise a unique tradition that you've experienced. And why I think that that's particularly important and I would like to be able to discuss it at length ? and maybe we will have another time to be able to do that ? is because our mission here, we're doing a consultation on trying to find a way to achieve equality between men and women. But the reality is that you brought forward, in your presentation, aboriginal women just as women from ? such as black women ? different cultural communities or different... that have different experiences, don't have the same needs.

And so my question is ? and it's really more than a question as we reflect on what the right strategy, what the right approach is: How do you take that all into consideration in a global policy that we would eventually adopt? Because, you know, a number of people or groups before have made presentations or have made comments about, saying, well, you know... Discrimination against women is wrong just like it is against blacks, for example. But I would always crank when I would hear that in a way because it's not necessarily the same thing. The principle is the same. But I would not pretend to understand the experience of an aboriginal woman anymore than a white woman could understand my experience. But still don't we have that commonality as women? So how do we bring that all together? How do we make sure that all of us are taken into account in order to exact in general our objective, which is to get toward equality? I know I made that really quick, but I leave that to you.

Mme Gabriel (Ellen): I'll try an answer very quickly.

Le Président (M. Copeman): I don't know how you are going to, but go ahead, Mrs. Gabriel.

n(16 heures)n

Mme Gabriel (Ellen): O.K. If you just look at some of the recommendations and the fact that Canada is a signatory to a lot of charters, at the Canadian Charter of Human Rights, the Québec Charter of Human Rights is not applied on reserves, that's why there is so much things that aboriginal women lose. As a global policy, it would be to try to rectify that situation and to provide support for the recommendations, because I think we really need to work on ourselves, we really need help and support, as I mentioned. A global policy to include the rights of aboriginal women specifically perhaps is needed, but, as I mentioned to the Minister of the Status of Women, aboriginal women's voices need to be put on the table in order for you to actually sit down and create a global policy. You need to hear more of our voices. Thank you.

Le Président (M. Copeman): I think we'll have to leave it there, we're already over time quite a bit to my right. Mme la députée de Terrebonne et porte-parole de l'opposition officielle en matière de condition féminine.

Mme Caron: Merci beaucoup, M. le Président. Mme Gabriel, Mme St-Onge, Mme Robertson, je vous parlerai en français, je vous questionnerai en français. Ma connaissance de l'anglais est beaucoup trop limitée pour que je m'attarde à exprimer mon opinion en anglais. Mais soyez assurées que j'ai vraiment pris le temps de lire votre premier mémoire, que vous nous aviez fait parvenir en décembre et qui était écrit en français, et votre complément de mémoire que vous nous avez ajouté aujourd'hui, aussi écrit en français.

Vous amenez une réalité, réalité qui démontre une discrimination, discrimination multiple, un peu comme nous avons dit au cours des dernières semaines, et aussi une discrimination qui est intersectionnelle parce qu'il y a des liens entre beaucoup d'instances et que chacune de ces discriminations, non seulement s'ajoute l'une à l'autre, mais l'ensemble des discriminations elles-mêmes est plus grand que chacune des parties, finalement.

Vous ramenez aussi toute la discrimination et la double application du système fédéral et du Québec qui fait en sorte qu'autant le projet de loi C-31 et la Loi sur les Indiens perpétuent la discrimination envers les femmes autochtones et leurs enfants, et ces discriminations-là sont à la base de l'ensemble des discriminations qui s'ajoutent de toutes les façons possibles.

Vous avez fait des recommandations très précises, autant dans le premier mémoire, au niveau des axes, des orientations, des recommandations précises aussi à nouveau dans le complément de mémoire aujourd'hui. Parmi ces recommandations, il y a presque unanimité avec les autres groupes de femmes à l'effet de demander le maintien du Conseil du statut de la femme et du Secrétariat à la condition féminine, avec une ministre en titre qui vient soutenir toute l'action, toutes les recommandations.

Ma question serait... Parce que mon collègue qui est responsable du dossier autochtone est avec nous, donc c'est lui qui posera la majorité des questions, mais j'aimerais vous entendre sur les projets pilotes qui ont été commencés avec les CALACS. Les CALACS sont venus, la semaine dernière, nous parler, ils ont déposé un mémoire extrêmement... j'ai même dit exceptionnel, sur toute la question, au niveau des différentes régions, au niveau de la violence faite aux femmes et au niveau des agressions. Et elles nous ont dit travailler en collaboration avec plusieurs de vos nations sur des projets pilotes. Je sais qu'ils ne sont pas terminés et qu'elles souhaitent une poursuite de ces projets-là. Mais, à ce jour, dans le travail que vous avez fait en collaboration, est-ce qu'on a déjà des éléments qui nous permettraient de mieux définir, des éléments pour faciliter, là, une application concrète de la politique, là, en matière de violence conjugale ou d'agression?

Mme Robertson (France): Si vous me permettez de répondre, le projet pilote avec les CALACS, ça s'est fait avec les femmes cries. C'est ça qui est plate, on fait des projets pilotes pour mettre à l'essai. Présentement, c'est ça, ce projet-là a été mis aux mains d'un groupe de femmes cries qui... Présentement, on n'en sait pas plus de l'information. On sait seulement que ce qu'ils ont mis en place, à partir du groupe de femmes, des femmes cries, c'est de mettre en place un service d'aide pour les agressions sexuelles. C'est seulement ça à date où est-ce que c'est rendu, là, le projet.

Ce qu'on trouve dommage, c'est que ? c'est ce qu'on avait dit au Regroupement des CALACS ? c'est qu'ils donnaient un financement, mais, nous autres, ce qu'on voulait, c'est qu'ils en donnent aussi dans des communautés. Sauf que, comme on sait, la juridiction fédérale-provinciale, les femmes cries, bon, c'est parce que c'étaient des municipalités, bon, ça fait qu'on s'est dit, O.K...

Parce que, nous, on faisait beaucoup référence avec le CAVAC. C'était une bonne innovation. Tout à l'heure, Mme Gabriel vous parlait de l'intervenante autochtone au CAVAC. On a fait un projet pilote, mais ça a porté fruit. Ils veulent une deuxième intervenante à la Côte-Nord, ils en veulent une en Mauricie, ils veulent en avoir une en Abitibi. Ça fait que ça crée des petits. Mais un projet pilote comme CALACS, il ne faut pas se limiter parce que c'est... Il faut voir au-delà, là, des...

Mme Caron: Mais est-ce que vous avez participé à l'élaboration du projet pilote comme Femmes autochtones du Québec, comme... Votre regroupement a été consulté? Vous avez participé?

Mme Robertson (France): Oui. On a été consultées au début du projet pilote. Mais, nous, ce qu'on trouve important, c'est de faire impliquer les femmes des communautés, les femmes de la base, les femmes membres, les femmes autochtones. Eux, ce qu'ils voulaient, c'est que... Comme je disais, le projet CALACS s'adressait à des femmes cries. Ça fait qu'on est allées chercher notre directrice. Parce que, comme elle disait, les membres de C.A., ça regroupe les femmes de différentes nations. Donc, la femme crie est allée, c'est elle qui a pris la relève de ce projet pilote là.

Mme Caron: Je vous remercie.

Le Président (M. Copeman): M. le député d'Ungava.

M. Létourneau: Merci, M. le Président. Alors, Mme Gabriel, Mme Robertson, Mme St-Onge, merci de participer aux travaux de cette commission. Thanks for being here.

J'ai quelques questions à vous poser évidemment, comme porte-parole en matière d'affaires autochtones, et je connais assez la situation parce que je vis dans une région où cohabitent des Québécois, des Cris et des Inuits, notamment dans le Nord-du-Québec, site d'ailleurs de la «Paix des Braves» et de l'entente Sanarrutik avec les Inuits, probablement les deux ententes les plus progressistes actuellement en matière de relations entre un État et des nations autochtones.

Alors, votre mémoire est clair à l'égard de la vulnérabilité des femmes autochtones, notamment sur les questions de violence et d'exploitation sexuelle. Au-delà de l'engagement du gouvernement du Québec pour enrayer le phénomène, vous conviendrez que ça requiert aussi l'engagement des chefs et des membres des conseils de bande. J'imagine facilement aussi que vous comprenez que, d'une nation à l'autre, d'une communauté à l'autre, le degré de mobilisation est différent, considérant que les problématiques sociales varient aussi de façon importante ? et vous en avez parlé un petit peu ? en fonction d'une foule de facteurs.

Alors, ma question est en trois volets. Comment qualifieriez-vous la mobilisation des chefs autochtones à l'égard des problèmes spécifiques vécus par les femmes de vos communautés? Et avez-vous des statistiques ou une idée plus ou moins précise sur le taux de présence des femmes sur les conseils de bande et dans les structures nationales de représentation autochtone? Et, en troisième lieu, ne croyez-vous pas qu'une présence accrue des femmes dans les postes décisionnels serait un début de solution aux problèmes vécus par les femmes autochtones? Vous pouvez prendre tout le temps que vous voulez.

n(16 h 10)n

Mme Gabriel (Ellen): I'm not so sure I understood your third question, but I'll try and answer one of them and give the two... to my colleagues. To mobilize the chiefs, one of the best ways is during our seats, our meetings with the chiefs at the AFNQL, to sensitize them to the realities, because I think they need to hear some of these things that are going on for aboriginal women. Maybe they don't realize the vulnerability that women feel when they're outside of their community or what they're faced with in poverty. So I dialogue with the chiefs in there. There are people within the AFNQL who have responded positively to supporting aboriginal women and our realities. We don't have statistics, per say. I know of a few chiefs, women chiefs, within this province, but not more than that. It's still very much a male dominated profession. So I'll allow my colleagues to answer the rest, because I know we're short of time.

Mme St-Onge (Mérilda): Tout à l'heure, je vous ai dit qu'on avait quand même des bons rapports avec certains chefs dans certaines communautés. Je suis fière de le dire aussi que c'est dans ma communauté innue qu'on a le plus de bons rapports puis qu'on a aussi des conseillères femmes ? il y en a certainement une de chaque conseil qui est conseillère en condition féminine ? qui sont très ouvertes à nos ententes, ces femmes-là, et les chefs aussi. Il y a aussi qu'en 1987, lors de la table de concertation sur la violence familiale, il y avait la participation des femmes, des hommes, des chefs et des hommes politiques. Donc, je pense qu'on a des bonnes relations puis qu'on peut s'enligner dans une entente, s'asseoir puis essayer de travailler sur ce qui nous blesse selon nos besoins en tant que femmes. Et il y a aussi les enfants qu'il faut inclure dans ces relations d'entente là avec nos hommes.

Pour ce qui est des femmes représentantes en politique, ça fait... Moi, je me rappelle, étant jeune, aussi on avait déjà des femmes en politique. Je ne suis pas très, très vieille, non, mais il y a quand même quelques années, il y a 50 ans, il y avait déjà des femmes en politique, du moins dans ma communauté. Et ça continue aujourd'hui. Il y en a un petit peu plus qu'avant, ça gradue, c'est encourageant. C'est sûr, on a déjà eu une femme chef aussi dans la communauté de Betsiamites. Maintenant, on n'en a pas de... elles sont rares. Je pense qu'on a une femme chef dans la province de Québec. Est-ce que c'est dû parce que les femmes, elles n'ont pas... Ce n'est pas qu'elles n'ont pas accès à la politique, je pense que c'est le manque de confiance aussi que les femmes ont.

On a dit tout à l'heure qu'on avait subi plusieurs choses de violence physique, morale. Lorsque tu veux parler... tu n'avais pas le droit de parler parce que tu étais femme. Donc, on a beaucoup de choses à surmonter en tant que femmes. Les processus de guérison spirituelle, c'est ce qu'on fait dans nos communautés avec nos jeunes femmes, à leur faire prendre conscience de ce qu'elles sont, de ce qu'elles sont capables de faire. Je pense que c'est des approches souvent qu'on prend dans la spiritualité. C'est ça que je voulais partager avec vous.

C'est sûr, il ne faut pas demander à ce qu'il y en ait beaucoup, beaucoup tout de suite, mais graduellement j'ai confiance que les femmes... Parce que déjà les jeunes femmes nous parlent, déjà les jeunes femmes assistent à nos réunions. On a un conseil de jeunes femmes à l'association, on a des représentantes de jeunes femmes à l'association. Donc, elles sont déjà politisées, il y a déjà eu des formations données aux jeunes femmes au niveau politique pour... C'est ça, c'était du côté politique.

Donc, il y a des choses qui se font. De plus en plus, les jeunes femmes sont intéressées à la politique. C'est sûr qu'elles ne s'en vont pas se lancer comme ça, parce que ces femmes-là s'interrogent beaucoup, s'informent beaucoup. C'est très intéressant de les voir agir. Moi, je sais, lorsque j'étais représentante des femmes de la nation innue, j'ai vu plusieurs jeunes femmes qui se lançaient, qui étaient intéressées à la politique, qui écoutaient, qui voulaient venir, qui s'inscrivent aussi à l'association comme membres de l'association. Donc, je trouve que, oui, il y a certainement des choses qui s'en viennent.

M. Létourneau: M. le Président? Ça va. Je trouve ça intéressant, là. Mais je ne sais pas si je comprends mal, mais vous laissez sous-entendre que c'est peut-être différent aussi dans le reste du Canada. Par rapport aux autres provinces canadiennes et le Québec, diriez-vous que la situation de la représentativité politique des femmes est la même, différente ou...

Mme St-Onge (Mérilda): Non. Moi, je n'ai parlé que de la province de Québec. J'ai dit: Dans certains cas...

M. Létourneau: O.K. Oui. Mais par rapport au reste du Canada?

Mme St-Onge (Mérilda): Par rapport au reste, je peux peut-être laisser Ellen...

Mme Gabriel (Ellen): In the rest of Canada, there seems to be a higher number, I guess, than Québec, of women chiefs. But again it's not a profession that women gravitate towards. It seems to be because... I don't want to sound sexist myself, but women are concerned with different issues. And I think as well there's the attitude from certain people within the Department of Indian Affairs who do not take women's voices seriously, and so it's not somewhere that women want to sit at. Women prefer to be in situations that take care of the family, that take care of their communities. The political vie for power is really much a male preoccupation more than a female preoccupation. But, as my colleague has said, it is starting to change. Women want to take a more political... act a political role in our communities. But again it's because the role of a chief is considered power, whereas the role of the women is not. Like, in my culture, a clan mother is equivalent to a chief, she can tell him what to do, you know. And, in a band council system, that's not the case. It's a hierarchical system and patriarchal system, and it's very foreign to us, which is probably why a lot of women prefer to have alternatives to becoming a band council chief.

M. Létourneau: Oui. Et ça va aider beaucoup aussi d'une nation à l'autre aussi. Vous citez, dans votre mémoire, l'Association des femmes autochtones du Canada, qui fait une démonstration de la désuétude et de l'irréalisme, je dirais presque du surréalisme de la loi fédérale sur les Indiens. Alors, on connaît toutes les difficultés que rencontre la réforme de cette loi, que ce soit à cause du manque de connaissance des réalités autochtones ou de la mobilisation insuffisante de certains acteurs. Alors, j'aimerais savoir quel travail votre organisme accomplit pour la réforme de cette loi-là, autant auprès des décideurs autochtones qu'auprès des gouvernements. Et je voudrais aussi savoir à votre avis quel rôle le gouvernement du Québec devrait jouer à l'égard de la démonstration de la nécessité de cette réforme-là.

Mme Gabriel (Ellen): It's a big question. It's going to take time. And I think it's a lot of open dialogue with our own people, amongst our own people, because, I think, a lot of times, the reinstatement of women has all been economical. They're afraid money is going to go elsewhere, when it would be to their advantage to increase the membership. But as well the role of the Government of Québec, I think, is maybe to perhaps, through the Status of Women seat, begin discussions and consultations to aboriginal women and to aboriginal people on how they would see this issue being resolved.

It is sad to see, in a country like Canada, that there is such inequalities for aboriginal women and that nothing has been done about it in spite of the 20-year anniversary of Bill C-31. I think we have to really look at what it's done, to evaluate what Bill C-31 has done, to evaluate the actions and behaviors of the Government in regards to this issue, because, even though they've given jurisdiction to the band councils, or a so-called jurisdiction, they still maintain the ultimate jurisdiction and authority over membership. So they have to decide. What do they want to do? Do they want to pass this role on to the band councils or to the people, or do they want to keep it? It's very much again the word of the State and the Government telling aboriginal people what to do. So they have to decide for themselves. And the Québec Government, I think, can help in support of the things that you hear today and in educating yourselves on the realities and issues that we face as a people.

M. Létourneau: Ça va? O.K.

Mme St-Onge (Mérilda): On pourrait peut-être ajouter quelque chose.

M. Létourneau: Oui.

Mme St-Onge (Mérilda): Lorsqu'on parle des décisions prises par le gouvernement, comme Ellen disait, c'est le gouvernement qui décide pour nous. On parlait de la loi C-31, le cas des mères célibataires, par exemple, auxquelles on demande au père de signer un affidavit pour reconnaître sa paternité pour que l'enfant soit reconnu autochtone de la catégorie 6.(1). Parce qu'on est catégorisés aussi, vous le savez tous. C'est 6.(1), 6.(2). Donc, ça, c'est des décisions du gouvernement.

n(16 h 20)n

Il me semble qu'en tant qu'autochtones, avant la Loi sur les Indiens, les Indiens étaient autochtones à part entière, peu importe d'où venait la paternité. On n'a jamais demandé à personne, de dire qui est le père de ton enfant. D'ailleurs, ce n'est pas demandé à nulle part, dans aucune nationalité, que ce soit à travers le monde, à une femme de nommer le nom du père, à part que les femmes autochtones. Ça, c'est quelque chose qui nous revient, qu'on doit décider nous autres mêmes, qui est le père, aussi discrètement que l'on veut. Il y a beaucoup de... C'est ça qu'on dit. On ne demande pas...

Même que ça a été imposé, le gouvernement l'a imposé aussi aux hommes. Parce que ces hommes-là, il faut que, s'ils veulent reconnaître leur enfant, s'ils veulent prendre leurs responsabilités, en ayant un enfant avec une mère célibataire, il faut qu'ils signent un affidavit, il faut qu'ils reconnaissent... Sauf que, s'ils ne veulent pas prendre leurs responsabilités, bien c'est la femme puis c'est l'enfant qui est diminué du statut. Je pense que les gouvernements devraient nous consulter ou du moins faire des actes qui sont moins visibles dans la discrimination.

Tu sais, on le sait que le gouvernement a toujours cherché d'éliminer les autochtones. J'ai toujours... je dis tout le temps: Le génocide existe chez nous. Le génocide ethnique, on dit. On fait attention de ne pas dire «génocide», parce qu'on m'a déjà dit qu'il n'y a personne qui a été tué, sauf que le génocide ethnique est là. On sait que, dans 30 quelques années, il n'y aura plus d'autochtones à cause des catégories d'autochtones. Donc, il y a certainement quelque chose à faire. Puis on doit agir, en tant qu'autochtones, à se défendre puis à parler de ce que l'on subit par rapport aux lois.

Des lois aussi, on n'est pas... en tout cas, moi, je ne suis pas habituée avec vos lois, je ne suis pas habituée avec vos manières d'Occidentaux. C'est très difficile pour nous autres. Quand la chose est faite, quand les lois sont faites, elles sont faites, on dirait qu'on n'a pas eu connaissance que ça a été fait à nos dépens. Tu sais, on s'aperçoit quand la loi est appliquée. Parce que souvent les langues ne sont pas pareilles. Moi, j'ai de la misère à vous comprendre... Non, mais j'ai de la misère à m'exprimer en français, puis pourtant, je me dis, je ne suis pas si pire que ça. Oui. Mais il y en a, imaginez-vous, des gens, des aînés, qui ne font que parler la langue innue ou d'autres dialectes, à qui on leur parle des lois. Moi, je suis déjà perdue dans ces lois-là. Puis pourtant on est là à tous les jours.

Le Président (M. Copeman): Nous aussi, parfois, Mme St-Onge. Alors, malheureusement, on doit arrêter à ce moment-ci. C'est tout le temps qui est imparti.

Une voix: Déjà?

Le Président (M. Copeman): Déjà. Mrs. Gabriel, Mme St-Onge, Mme Robertson, merci beaucoup d'avoir participé au nom des Femmes autochtones du Québec, thank you very much for having participated in this parliamentary committee...

Mme St-Onge (Mérilda): On vous remercie. Puis ce qu'on n'a pas été capables de vous dire, on vous l'enverra par courrier.

Le Président (M. Copeman): ...on behalf of Québec Native Women.

J'invite les représentants du prochain groupe, le Regroupement des groupes de femmes de la région 03. Vous pouvez prendre place à la table. Et je suspends les travaux de la commission quelques instants.

(Suspension de la séance à 16 h 24)

 

(Reprise à 16 h 27)

La Présidente (Mme Charlebois): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, maintenant, nous accueillons le Regroupement des groupes de femmes de la région de Portneuf, Québec et Charlevoix. Je crois que c'est Mme Laliberté qui effectue la présentation. Oui?

Regroupement des groupes
de femmes de la région 03,
Portneuf-Québec-Charlevoix (RGF-03)

Mme Bergevin (Ginette): Je vais débuter.

Une voix: C'est Mme Bergevin.

La Présidente (Mme Charlebois): Vous allez débuter? Alors, je vous demande de vous identifier et d'identifier celles qui vous accompagnent. Vous avez 20 minutes pour faire la présentation de votre mémoire. Ça va être suivi d'une période d'échange avec les parlementaires.

Mme Bergevin (Ginette): Parfait. Merci, Mme la Présidente. Mme la ministre, Mme la députée de Terrebonne et membres de la commission, merci de nous recevoir aujourd'hui. Mon nom est Ginette Bergevin. Je suis la coordinatrice du Regroupement des groupes de femmes de la région 03, comme on le disait, qui comprend Portneuf, Québec et Charlevoix. Je suis accompagnée de Mme Élizabeth Laliberté, qui est directrice de Viol-secours et présidente du Regroupement des groupes de femmes; à ma droite, Mme Solange Gobeil, qui est membre du comité des femmes du Conseil central de Québec?Chaudière-Appalaches de la CSN et membre du conseil d'administration du Regroupement des groupes de femmes.

Alors, nous débutons notre présentation. Vous venez de recevoir de notre part un petit cadeau, en espérant qu'il vous fera plaisir. Alors, nous vous remettons une épinglette de la Journée internationale des femmes qui a lieu, comme vous le savez, le 8 mars 2005 et qui a lieu le 8 mars à chaque année. Cette année, le thème: Femmes d'ici et d'ailleurs ? Changeons le monde! Nous vous invitons donc à porter cette épinglette et à changer le monde avec nous, pour une société québécoise et un monde où les valeurs d'égalité, de liberté, de solidarité, de justice et de paix sont primordiales.

Nous vous remettons également l'étude Jeunes femmes d'avenir: une vie à bâtir, une expertise à découvrir, dont vous avez entendu parler par le groupe Salvya et également par la Chaire d'étude Claire-Bonenfant sur la condition des femmes. Il y a peu de recherches sur les jeunes femmes. Donc, cette recherche a été réalisée en collaboration avec la Chaire d'étude Claire-Bonenfant sur la condition des femmes. Cette recherche exploratoire reflète les préoccupations des jeunes femmes de notre région ? il y en a quelques-unes dans la salle aujourd'hui ? elle reflète également l'engagement de la chaire et de sa titulaire, Mme Pierrette Bouchard, à l'amélioration des connaissances en matière de condition féminine et de son implication auprès du milieu. La rigueur intellectuelle avec laquelle la Chaire d'étude et Mme Bouchard mènent les travaux de la chaire sont exemplaires. Nous vous invitons à vous en inspirer. Pour nous, elle est un exemple à suivre. Je cède maintenant la parole à ma collègue Mme Laliberté.

La Présidente (Mme Charlebois): Allez-y, Mme Laliberté.

n(16 h 30)n

Mme Laliberté (Élizabeth): C'est moi, Mme Laliberté. Alors, le Regroupement des groupes de femmes de la région 03, Portneuf, Québec et Charlevoix est composé de 39 groupes de femmes qui interviennent dans les champs de la santé et des services sociaux, de l'emploi, de la place des femmes en politique, en éducation, en défense des droits, en pauvreté, de la place des femmes dans l'Église, etc. Ils sont situés tant dans Québec que dans Portneuf et Charlevoix. Ils sont réunis au regroupement pour défendre les droits et intérêts des femmes de notre région et travailler à l'amélioration de leurs conditions de vie. Nous rappelons à cette commission que, dans la capitale nationale comme au Québec, des disparités importantes subsistent pour les femmes, notons particulièrement en matière d'accès au revenu, d'accès aux postes décisionnels, d'accès à des services de santé et de services sociaux adaptés à leurs besoins.

Le 12 mai 2004, réunies en assemblée, 50 représentantes des groupes de femmes ont réaffirmé les demandes inscrites à notre mémoire. Nous vous les rappelons succinctement. Alors, nous parlons du maintien du Conseil du statut de la femme et du Secrétariat à la condition féminine avec des ressources financières et humaines adéquates, la nomination d'une ministre responsable de la Condition féminine, l'adoption et la mise en oeuvre d'une politique en matière de condition féminine majeure et mobilisatrice réalisée en collaboration avec les ministères sectoriels, l'attribution de ressources financières adéquates aux groupes de femmes pour leur mission. Je cède la parole à ma collègue Ginette Bergevin.

Mme Bergevin (Ginette): Au cours des travaux de cette commission, nous avons été heureuses d'entendre la ministre affirmer son engagement de maintenir l'approche spécifique comme axe majeur pour l'amélioration des conditions de vie des femmes, de reconnaître la discrimination systémique vécue par les femmes, d'affirmer également la non-mixité des structures en condition féminine ? nous en déduisons qu'elles seront maintenues, selon ce qu'on en a compris ? et également d'être à plusieurs reprises désignées par les présidents de cette commission responsable de la condition féminine. Donc, nous aussi, nous appelons la ministre la responsable de la condition féminine.

Par contre, puisqu'un des problèmes des femmes dans l'histoire est l'invisibilité, nous souhaitons maintenant que le premier ministre ajoute officiellement ce titre de responsable de la Condition féminine au titre de la ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration. Nous souhaitons également entendre ? peut-être d'ici la fin de cette commission ? que des ressources adéquates seront consacrées aux institutions en condition féminine, et à une politique en matière de condition féminine, et également aux groupes de femmes.

Comme vous le savez, Mme la ministre, notre région, parce qu'elle a le siège social du gouvernement du Québec sur son territoire, vit des problèmes pour mener des dossiers régionaux au niveau de la visibilité. Dans ce contexte, la condition féminine ne fait pas exception. Notre région est également composée de deux territoires, Portneuf et Charlevoix, dont on oublie bien souvent l'existence, car ils sont dans la même région que Québec et Québec prend beaucoup de place. Pourtant, les groupes de femmes et les regroupements des groupes de femmes disposent des mêmes moyens financiers que dans les autres régions, et ces régions ont une agente régionale du Conseil du statut de la femme. Nous réaffirmons donc aujourd'hui le besoin d'une agente régionale du Conseil du statut de la femme pour la région de la Capitale-Nationale, et ce, à temps plein.

Nous sommes également impliquées, dans notre région, dans deux dossiers majeurs, celui de la santé des femmes et celui de la place des femmes dans le développement régional et local. Le Regroupement des groupes de femmes de la région 03 et l'Agence de développement des réseaux locaux de services de santé et de services sociaux de la Capitale-Nationale ont innové, en 2004, en dotant notre région du premier plan d'action régional en santé des femmes au Québec. Il va sans dire que nous avons besoin de votre appui, Mme la ministre, et d'un message clair de votre part à votre collègue M. Couillard pour que des ressources financières soient disponibles au cours des prochaines années pour la mise en oeuvre de ce plan d'action. Évidemment, vous vous souvenez que le Réseau des tables régionales des groupes de femmes a également demandé des plans d'action dans toutes les régions du Québec, mais chaque table de groupes de femmes vous fait part aussi de ces demandes à ce niveau.

Nous avons également besoin de votre appui pour développer, avec la Conférence régionale des élus de la Capitale-Nationale, une entente spécifique en condition féminine qui permettra la réalisation d'une politique d'égalité et de parité pour les femmes dans notre région. Ce n'est pas un dossier nouveau, on travaille déjà sur cette question-là. Alors, je cède la parole à ma collègue Mme Gobeil.

La Présidente (Mme Charlebois): Allez-y.

Mme Gobeil (Solange): Alors, en conclusion, il est déterminant que la ministre maintienne son engagement en faveur de la condition féminine et exerce un leadership au sein du gouvernement du Québec pour la mise en oeuvre d'actions concrètes et de mesures spécifiques. Il est important que la ministre interpelle ses collègues ministres pour que le travail se poursuive dans les ministères tout au long des travaux de cette commission. Le budget du gouvernement du Québec est pour bientôt, il est important que la ministre positionne les besoins de condition féminine en matière de ressources financières et humaines de façon à renforcer nos outils collectifs ? institutionnel, gouvernemental et communautaire ? qui font notre fierté. Merci, Mme la Présidente. Merci, Mme la ministre, mesdames.

La Présidente (Mme Charlebois): Ça va?

Mme Bergevin (Ginette): Nous avons été plus rapides que nous pensions. On est... nerveuses et on parle, vite, vite, vite, mais en tout cas il y aura plus de temps pour la période des questions.

La Présidente (Mme Charlebois): Alors, nous allons débuter la période d'échange avec Mme la ministre.

Mme Courchesne: Merci, Mme la Présidente. Alors, Mme Bergevin, Mme Laliberté, Mme Gobeil, merci d'être présentes parmi nous et bienvenue à cette commission. Effectivement, vous avez été concises et précises. Et je vais aborder la question d'emblée parce qu'on s'est rencontrées quand même à quelques reprises depuis que le gouvernement est en place, on a beaucoup discuté effectivement de la région, de la grande région de Québec. Tout à l'heure, nous recevrons les intervenantes de la ville de Québec. Mais je voudrais, puisque vous êtes là, que nous parlions davantage de cette grande région de Québec.

Aussi, parce que j'ai lu votre mémoire et très amicalement je vous dirai que cette commission ne parle pas de ma politique, pas plus que de la politique du gouvernement, on s'entend. Cette commission a pour objectif de se prononcer sur un avis du Conseil du statut de la femme. Et vous connaissez suffisamment bien et le conseil et son équipe pour savoir que le conseil a fait cet avis tout à fait librement, en dehors de toute interférence ou de toute attache donc et que, dans cet avis, très sincèrement, on parle de la place des femmes dans le pouvoir politique, le pouvoir économique bien sûr aussi.

Mais, là où je veux venir, parce qu'on a beaucoup parlé des régions et tout en sachant que vous favorisez... Puis je suis d'accord avec ça, j'ai abondamment discuté, la semaine dernière, de ça, de l'approche spécifique. Mais, dans cette perspective par ailleurs régionale, certaines nous ont parlé d'une loi-cadre nationale pour bien démontrer la volonté du gouvernement pour atteindre cette égalité de fait. Mais, si on avait cette loi-cadre, ou peu importe, quand on ramène ça dans les préoccupations des régions ? et vous faites bien de mentionner qu'ici on ne doit pas oublier ni Portneuf ni Charlevoix, c'est une région qui est particulière, qui a des spécificités ? comment, au-delà des réalisations que vous nous donnez en annexe... Puis félicitations parce que vous avez fait du bon travail aussi sur les représentativités, très, très bon travail au niveau des représentativités. Mais comment on peut voir à cette évolution vers l'égalité en région? Est-ce que c'est par une politique régionale de l'égalité ou une politique régionale de condition féminine? Moi, je n'ai rien exclu, hein? Et donc comment voyez-vous, par rapport à cette région-là, la façon la plus structurante, la plus... plus qu'utile mais plus efficace, celle qui pourrait être plus déterminante pour s'assurer qu'on poursuit vers cet objectif?

La Présidente (Mme Charlebois): Mme Bergevin.

Mme Bergevin (Ginette): Oui. C'est très clair pour nous qu'il faut maintenir une politique nationale en condition féminine, qui pourrait effectivement avoir des antennes régionales, parce que la politique en matière de condition féminine doit toucher l'ensemble des ministères, hein, elle doit... C'est toujours la question de l'approche spécifique versus transversale et versus sociétale, hein, dans le fond, ça s'imbrique les unes dans les autres, ces approches-là. Donc, pour nous, la politique nationale en matière de condition féminine est importante pour ne pas qu'il se crée de disparités.

n(16 h 40)n

Après ça, il pourrait y avoir des adaptations régionales. La question de la politique d'égalité et de parité est principalement rattachée à la Conférence régionale des élus, et c'est le moyen que l'on privilégie parce que c'est là où on a un noyau dur. On s'adresse à un secteur qui est particulièrement masculin et beaucoup plus difficile à pénétrer, là, donc le développement économique, le développement touristique, il y a des secteurs plus féminins, comme culturels, etc. Mais, comme c'est un milieu... Les CRE ont été créées récemment, elles découlent quand même des travaux qui se menaient avant dans les conseils régionaux de développement. Ça a traditionnellement été beaucoup occupé par les hommes, ça l'est encore beaucoup, ça a une couleur masculine aussi en termes de mode de fonctionnement. Donc, c'est une politique spécifiquement rattachée aux CRE.

Donc, pour moi, ce serait comme une mesure qui serait intégrée à une politique en condition féminine globale, qui pourrait, au niveau régional, s'adresser à différents ministères. Et cette mesure-là est principalement reliée au rôle des CRE, qui ne sont pas des ministères non plus, qui ont plus le même... je ne voulais pas dire le même style, mais le même fonctionnement ou mission que les agences, un peu. C'est une organisation régionale qui a quand même des conseils d'administration, ce n'est pas des directions régionales de ministères, donc qui ont une spécificité, et on pense que ce serait le meilleur moyen pour ces organisations-là de mener à bien des politiques d'égalité et de parité pour les femmes à l'intérieur de ces structures.

Mme Courchesne: Et ce que je comprends de ce que vous dites, c'est que, à ce moment-là, on pourrait préserver, et non seulement préserver, mais accentuer et mettre en valeur les enjeux propres à chacune des régions. C'est un peu ça que vous dites.

Mme Bergevin (Ginette): Oui, c'est sûr.

Mme Courchesne: Vous, par exemple, je suis certaine que vous l'avez demandée, une politique santé pour toutes les régions, une santé des femmes, c'est certain. Donc, j'imagine que, pour la région de Québec, c'est aussi ce que vous prioriseriez ou un des éléments que vous pourriez prioriser dans une telle politique. Est-ce que vous en verriez... Quels seraient les autres éléments de priorisation que vous souhaiteriez pour cette grande région de Québec à l'intérieur d'une politique comme ça, d'égalité et parité?

Mme Bergevin (Ginette): O.K. Bien, comme c'est un moyen qui est spécifiquement en lien avec la Conférence régionale des élus, ça va être une politique que nous ciblons plus particulièrement pour aller vers les secteurs où on a moins d'emprise. On va essayer d'influencer le secteur de l'emploi. Évidemment, la représentation des femmes doit être au coeur de cette politique-là.

Et l'objectif, ce n'est pas juste que la CRE... Minimalement, il faudrait que la CRE se donne des règles dans ses statuts et règlements ou dans sa régie interne pour s'assurer qu'il y ait une parité sur l'ensemble des comités, sur sa structure elle-même. Mais notre objectif, c'est aussi que les organisations qui sont membres de cette CRE là, que ce soient les élus municipaux, que ce soient les organisations du milieu socioéconomique, s'approprient cette politique-là. On voudrait que la CRE soit un fer de lance finalement et porteur de cette politique-là dans l'ensemble des milieux qui sont représentés à la CRE pour qu'on contamine notre milieu avec cette politique-là, que ce soit un des objectifs.

Donc, la représentation est majeure, mais également c'est à plein de niveaux où on veut contaminer les organisations. Particulièrement au niveau économique, on souhaiterait que les entreprises se dotent de politiques pour qu'il y ait autant de femmes-cadres, autant de femmes dans les postes de direction, que l'équité salariale soit appliquée dans l'ensemble des entreprises de notre région. Donc, ça, c'est un véhicule finalement, la Conférence régionale des élus, réunissant divers acteurs, c'est une occasion...

Moi, je ne siège pas à la Chambre de commerce, par exemple, mais ça se peut que, dans le cadre de la CRE, je vais rencontrer des représentants de la Chambre de commerce et j'ai l'occasion justement d'échanger avec eux ou avec elles sur ces questions-là, et ça, c'est extrêmement important. Et le fait de faire une politique dans le cadre de cette organisation-là nous permet d'avoir un rayonnement qu'on n'aurait pas nécessairement de d'autres façons, tandis qu'un plan d'action régional en santé des femmes s'inscrivait tout à fait de façon majeure à l'intérieur de l'agence.

D'ailleurs, on a utilisé aussi, là, deux stratégies, que ce soit en termes de représentation, que ce soit en termes de travail directement avec l'organisation elle-même, puisque je siège sur le conseil d'administration de l'agence aussi, sur le volet communautaire. Donc, à ce moment-là, on a pu, en étant dans l'interne justement, ouvrir des portes pour les femmes. C'est ça dans le fond qu'on a toujours souhaité, c'est envoyer des femmes de façon à ouvrir des portes et permettre que plus de femmes viennent en arrière de nous et qu'on puisse adapter...

Donc, le plan d'action régional en santé des femmes s'inscrit bien dans le rôle de l'agence. Évidemment, le système est en transformation. Il va falloir travailler à localiser les actions du plan d'action. Donc, on est en train de réfléchir à cette question-là, puisque les projets cliniques sont en construction, et ce n'est pas fini, la transformation, là.

La Présidente (Mme Charlebois): Mme la députée de Jean-Talon.

Mme Delisle: Merci. Alors, bonjour, mesdames.

Mme Bergevin (Ginette): Bonjour.

Mme Delisle: Bienvenue. Un petit commentaire éditorial puis ensuite... Je suis d'accord avec vous quand vous dites qu'il faut... Je ne vous mets pas de mots dans la bouche, là, mais il y a quelques groupes avant vous qui en ont parlé du recul finalement au niveau de la représentation. Bon, vous utilisez l'exemple de la CRE. On pourrait tout aussi bien utiliser évidemment la perte de plusieurs femmes élues municipales lorsqu'il y a eu la fusion des municipalités. Je ne veux pas faire de partisanerie politique avec ça, mais je pense que ça aussi, il faut aussi comprendre ça.

Mme Bergevin (Ginette): On l'avait...

Mme Delisle: Je ne l'ai pas vu. J'ai trouvé juste le projet... J'ai juste trouvé notre loi n° 34. Je n'ai pas trouvé le manque à gagner, entre guillemets. Mais ce n'est pas un reproche que je vous fais.

Mme Bergevin (Ginette): Non, mais je veux revenir là-dessus.

Mme Delisle: Je pense que c'est important d'en parler.

Mme Bergevin (Ginette): Oui, oui.

Mme Delisle: Je vous dirais que, quand on parle d'investir, entre guillemets, là, les instances régionales et locales, je pense que le plus beau rôle que vous avez à jouer, c'est celui justement d'ouvrir ces portes-là, de permettre aux femmes de quelque milieu qu'elles soient, puis peut-être encore plus de milieux où c'est plus difficile ? je le sais, là ? en termes de temps, on a beaucoup de familles, de femmes monoparentales... Mais on a des élections municipales qui s'en viennent, et j'ose espérer que les groupes de femmes vont encourager les femmes. On n'est pas souvent, j'espère que je ne suis pas la seule à penser ça, mais on n'est pas souvent des bons alliés de nos femmes, là, qui se présentent, que ce soit au municipal ou au... quel que soit le niveau de gouvernement. Et je pense qu'il faut profiter des occasions comme celle-là pour les encourager, les soutenir, quitte à ce que vous nous les envoyiez, puis on les encouragera. De quelque formation politique qu'on soit, on a besoin de femmes dans ces instances-là.

Maintenant, je reviens à votre mémoire. J'étais un petit peu étonnée, à la page 7 ? maintenant, on est capable d'en prendre, là ? troisième paragraphe, là, si on oublie les deux premières lignes de cette page-là, vous dites que, «depuis son ascension au pouvoir, le gouvernement du Québec envoie un message ambigu quant à son adhésion à l'amélioration des conditions de vie des femmes en laissant sous-entendre la fin du Conseil du statut de la femme et du Secrétariat à la condition féminine et en ne proposant pas de politique en matière de condition féminine. Ce message a commencé à faire des dégâts ? je vous cite toujours. Les différents ministères se sentent de moins en moins concernés par la condition féminine. De plus en plus d'hommes se sentent le droit de minimiser les propos de femmes siégeant sur des organisations mixtes. Cette ambiguïté affecte également des institutions, tels les églises, les syndicats, le secteur économique. Nous sommes extrêmement inquiètes de la situation.» Puis vous dites: «La ministre doit sans délai donner un message clair à ses collègues ministres pour qu'ils poursuivent le travail entrepris.» Fin de la citation.

Moi, je dois vous dire que je suis un petit peu étonnée. Bon, on peut discuter ou pas de la pertinence ou pas d'avoir une ministre responsable de la Condition féminine. Ça appartient au premier ministre du Québec de déterminer ça. Par contre, je sais, pour avoir fait l'exercice puis en avoir parlé avec des collègues, on sait qu'il y a plus de 30 ministères et organismes du gouvernement du Québec qui ont une responsable du dossier de la condition féminine et que c'est coordonné par le Secrétariat à la condition féminine.

Je ne veux pas vous mettre au batte, comme on dit en bon français, je voudrais juste que vous m'expliquiez c'est quoi, les ravages, les dégâts qu'a connus la condition féminine depuis 19 mois. Très honnêtement, ça m'a interpellée, ça, ce paragraphe-là. Parce que je connais le travail que vous faites, puis je le sais que vous faites du bon travail sur le terrain. On travaille ensemble, je connais plusieurs de vos organismes. Puis, bon, je voudrais que vous m'expliquiez. Puis qu'est-ce qui peut être amélioré?

La Présidente (Mme Charlebois): Mme Bergevin.

Mme Bergevin (Ginette): Nous sommes actuellement dans un contexte où il est très clair... C'est sûr que, là, ça s'est calmé un petit peu, mais on est... Le débat va reprendre ce soir, avec une émission d'Enjeux sur la situation des pères. On est dans une période où il y a un discours fort, très antiféministe. Ce n'est pas de la faute du gouvernement du Québec, et on ne vous en accusera pas, ce n'est pas de votre faute.

n(16 h 50)n

Ceci dit, dans un contexte, dans une conjoncture difficile ou plus complexe à gérer, ça prend un positionnement fort du gouvernement du Québec. Parce que, même si, comme groupes de femmes, on continue notre travail sur le terrain ? hein, on n'est pas dans les médias tous les jours, mais on continue, on fait un travail de fond, on est présentes, on est tenaces ? ça prend une position forte du gouvernement ou en tout cas un maintien.

C'est sûr que, nous, on a été très déçues quand le premier ministre n'a pas nommé officiellement dans son titre Mme la ministre responsable de la condition féminine parce que ça crée une invisibilité de la situation. Et c'est un des problèmes dans l'histoire des femmes, c'est qu'elles ont fait beaucoup de choses, mais elles sont souvent peu visibles. C'est dans les dernières années que... Ça ne fait pas si longtemps qu'il y a eu des initiatives qui ont commencé pour tenter de mettre l'histoire des femmes sur la place publique, avec le Collectif Clio et d'autres historiennes et écrivaines. Donc, dans ce contexte-là, il y a eu cette nomination-là qui n'a pas été faite, mais Mme Courchesne joue ce rôle et fait ce travail-là, mais elle ne l'a pas dans son titre.

Ensuite, il y a eu évidemment la loi n° 34, qui nous a un peu... On est en train de corriger la situation par la représentation des organismes socioéconomiques. Par contre, notre crainte, et on le dit dans le mémoire, c'est qu'on craint que ce soit une situation temporaire. Ce n'est pas une règle du jeu adoptée à l'intérieur des CRE. Donc, on a une crainte là-dessus. Donc, ça, ça a provoqué aussi une situation de recul. Il y a en plus dans notre société le discours antiféministe. Et on a constaté des flottements à plusieurs niveaux. Et moi-même ou de mes collègues se sont vu parfois minimiser leurs propos.

Alors, on s'est retrouvé vite, vite, vite dans un contexte d'ambiance où on s'est dit: Ouf! Aïe, on en mange toute une, là, il n'y a pas de ministre de la Condition féminine, ils sortent des choses dans les médias qui questionnent l'avenir du Conseil du statut de la femme et du Secrétariat à la condition féminine. Il y avait aussi... on était dû pour une nouvelle politique. Évidemment, il y a le processus de commission, qui va nous mener, nous le souhaitons bien, à une nouvelle politique. Mais tous ces éléments-là mis ensemble font que, dans les milieux où on est, il y a des hommes qu'on a convaincus qui ne nous passeront pas de commentaires, mais il y a ceux qui au moins se taisaient avant qui maintenant se sentent le droit de passer des commentaires sur comment on ne devrait pas s'occuper de ces questions-là parce que le développement économique est plus intéressant, ou autres. Donc, dans un contexte comme ça, on a besoin du gouvernement du Québec et du maintien de son engagement dans les dossiers pour sentir qu'on peut continuer notre travail là-dedans. Donc, c'est dans cet esprit-là.

Je voulais juste... rapide, rapide, hein, parce que le temps passe vite. Au niveau des fusions municipales, effectivement, avec la Chaire d'étude Claire-Bonenfant sur la condition des femmes, à l'époque de la commission parlementaire sur les fusions municipales, nous avons été le seul groupe de femmes à déposer un mémoire, et nous avions souligné le danger de la réduction du nombre de postes disponibles qui provoquerait une réduction du nombre de femmes, qui risquait de provoquer cette situation-là. Donc, oui, effectivement, on avait abordé cette question-là. Je n'y suis pas revenue dans notre mémoire, mais, oui, c'est un facteur.

Et nous intervenons également parce que nous avons un projet, À égalité pour décider, qui nous permet actuellement de travailler sur la question des femmes en politique municipale. Récemment, une publicité est sortie dans les petits hebdos de la région, Candidates recherchées. Vous avez peut-être vu ça dans votre hebdo de la région. Il y a des femmes qui ont commencé à appeler au Regroupement des groupes de femmes. Nous venions également de publier un petit guide qui est une adaptation du guide de l'Abitibi sur la place des femmes en politique. Alors, il y a une femme au regroupement qui travaille sur cette question-là.

Mme Delisle: Il reste à peine trois minutes. J'aurais une autre question. En fait, l'avis du Conseil du statut de la femme, je le rappelle, c'est Vers un nouveau contrat social pour l'égalité entre les femmes et les hommes. On a parlé beaucoup de condition féminine. J'aimerais vous rappeler que, dans votre mémoire, vous faites référence à une politique en matière de condition féminine plutôt qu'à une politique en matière d'égalité entre les hommes et les femmes. Bon. Pour le bénéfice des membres de la commission, quelle distinction faites-vous entre les deux dénominations, étant donné que vous dites, dans votre mémoire, adhérer au principe de l'égalité entre les femmes et les hommes?

La Présidente (Mme Charlebois): Mme Bergevin, tout ça en dedans de deux minutes.

Mme Bergevin (Ginette): Oui. O.K. Rapidement, je vous dirais que, nous, de la façon dont on voit ça, c'est que la condition féminine, c'est plus large que le principe uniquement de l'égalité. Il faut que j'explique ça rapidement, mais... L'égalité, c'est une partie du dossier de la condition féminine. Je donne un exemple rapide, qui va être très raccourci. Dans notre région, 26 % des femmes sont victimes de détresse psychologique; en comparaison, 19,5 % des hommes le sont aussi dans notre région. Donc, en travaillant à corriger une discrimination pour réduire le taux de détresse psychologique des femmes, donc aller chercher les causes, notre objectif, ce ne sera pas d'égaliser les hommes à 19. Notre objectif, comme groupes en condition féminine, ça va être de détruire la détresse psychologique, qu'il n'y en ait plus. L'objectif d'égalité, ce serait qu'on soit tous les deux à 19,5 %, mais ce ne serait pas satisfaisant pour nous. Donc, nous, on corrige... on veut corriger l'inégalité, mais on veut dépasser ça pour aller aux racines et aux causes des problèmes et l'éradiquer. Donc, à ce moment-là, il faut dépasser cet objectif-là. C'est rapide comme explication, mais c'est un exemple.

Mme Delisle: Merci.

La Présidente (Mme Charlebois): Ça va?

Mme Delisle: Oui.

La Présidente (Mme Charlebois): Mme la députée de Terrebonne et porte-parole en matière de condition féminine.

Mme Caron: Merci, Mme la Présidente. Alors, Mme Bergevin, Mme Laliberté, Mme Gobeil, merci beaucoup. Merci de votre mémoire. Merci de votre action constante et de votre action très, très dynamique au niveau du terrain. Merci de nous avoir apporté cette recherche au niveau de Jeunes femmes d'avenir. L'autre document que nous avions, c'était Des nouvelles d'elles, qui avait été publié il y a quelques années par le Conseil du statut de la femme. Donc, d'avoir un portrait plus spécifique au niveau de la région de la Capitale-Nationale, et donc le portrait Portneuf-Québec-Charlevoix, c'est extrêmement intéressant. Vous avez rappelé aussi à juste titre que c'est fait en partenariat avec la Chaire d'étude Claire-Bonenfant, donc Mme Pierrette Bouchard, dont vous avez reconnu l'expertise, le professionnalisme. Donc, nous allons lire avec beaucoup d'attention cette recherche-là. Merci infiniment.

Oui, il y a une différence, c'est évident. Et, pour moi, la différence principale, je dirais, lorsqu'on se parle d'un concept d'égalité ou lorsqu'on se parle de condition féminine, c'est toute la question de la discrimination systémique. Et il faut aussi que ce soit très clair, très, très clair que, quand on se parle d'une égalité de fait, c'est qu'on veut contrer les discriminations systémiques. Et d'ailleurs on est venu nous rappeler, autant le Barreau, la juge L'Heureux-Dubé, l'avocate Belleau, que c'était un... on avait ce droit-là, là. Comme État, là, ça fait partie de nos obligations. Ce n'est pas juste: Est-ce qu'on veut ou on ne veut pas, là? On a l'obligation, par les chartes, par les traités, par les engagements internationaux, de lutter contre la discrimination systémique. Donc, c'est très clair.

Quand on se parle des reculs, bien, pour moi, le fait de... Vous l'avez bien expliqué, donc je ne reviendrai pas sur la question de l'invisibilité parce que les problèmes de discrimination systémique faite aux femmes relèvent d'abord et avant tout de cette invisibilité-là qu'on continue à essayer de perpétuer. Le fait de ne pas nommer une ministre en titre, c'est un signal, c'est évident que c'est un signal. C'est un oubli... C'était le premier recul parce que, dans cette longue lutte vers l'égalité de fait, jamais c'est arrivé qu'il n'y ait pas eu aucune nomination d'une responsable en titre. Les noms ont varié, le nombre de personnes affectées à la fonction a varié, mais il y a toujours eu une personne responsable et dans le titre. Donc, c'est un signal.

Puis je veux leur laisser du temps, donc je vais raccourcir, mais, dans les neuf premières lois qui ont été adoptées sous le bâillon, il y en avait huit qui étaient des reculs directs, bien identifiés au niveau des droits des femmes, alors je pense que... Et même, dans la loi sur la pauvreté, la loi n° 112, il y avait une obligation d'analyse différenciée selon les sexes. Et, quand on a vu arriver la loi n° 57 au niveau de la sécurité du revenu, l'analyse différenciée n'était pas faite. Quand on a vu une proposition sur une réforme du Régime de rentes du Québec, l'analyse différenciée n'était pas faite. Donc, je pense que, oui, c'est là, c'est une réalité, puis ça fait partie du contexte général qui est là.

Il y a des choses que vous demandez qui pourraient être faites tout de suite. Parce qu'il ne faut pas oublier qu'on a un an de retard au niveau de la politique en condition féminine. Et cette consultation-ci nous permet évidemment d'étudier l'avis du Conseil du statut de la femme, mais il devra y avoir par la suite le dépôt d'une politique, donc ça devrait nous conduire à l'automne, et, avant qu'elle soit adoptée, donc ça voudra dire deux ans sans adoption de politique en condition féminine, donc un retard de deux ans.

n(17 heures)n

Mais je pense qu'il y a des mesures qui pourraient être apportées tout de suite pour essayer de donner le signal, pour essayer de corriger un peu la tendance qui a été prise, c'est-à-dire de nommer tout de suite... dans le titre officiel, ministre responsable de la Condition féminine, de tout de suite passer le message au niveau des différents ministères, au niveau de l'analyse différenciée selon les sexes, c'est là, donc de passer à l'action, de s'assurer qu'il y a des répondantes en condition féminine dans tous les ministères et qu'elles sont en opération, et de le refaire aussi au niveau régional. Je pense que ça, ça se fait sans attendre les deux ans de la nouvelle politique, parce qu'on prend un retard. Et il pourrait y avoir un signal aussi au niveau du budget qui s'en vient et, dans le programme À égalité pour décider, là aussi, il pourrait y avoir un signal tout de suite. Même si on n'a pas toute la structure de la politique en condition féminine, tout le plan d'action, on pourrait au moins avoir des éléments, là, qui pourraient nous arriver rapidement, au printemps.

Mes questions, mesdames, vont être évidemment sur votre expertise régionale, moi aussi. Au niveau du programme À égalité pour décider, que vous connaissez bien, que vous avez utilisé, vous recommandez de rehausser le financement. On sait que le programme a un nouveau volet, un volet national, donc il y a davantage de demandes. Et vous demandez la consolidation sur trois ans des initiatives et la poursuite des projets sur plusieurs années. Voulez-vous préciser davantage, si, disons, vous aviez à redéfinir, donner une permanence, là, à ce programme-là pour une période, un laps de temps, mettons, de cinq ans, les critères précis qu'on devrait utiliser pour que le programme soit le plus porteur possible?

La Présidente (Mme Charlebois): Allez-y, Mme Bergevin.

Mme Bergevin (Ginette): Je n'ai pas dans ma tête des critères précis, mais c'est clair qu'au niveau de ce programme les travaux que nous avions entrepris étaient de, premièrement, le rendre possible pour des projets sur la représentation des femmes mais également sur la représentation des besoins des femmes ? parce que ça, c'est un volet que nous travaillons ? qui étaient les deux axes de la cinquième orientation de la politique en matière de condition féminine, d'ailleurs, et sur la possibilité donc de...

Parce qu'il y a tout ce travail-là aussi qu'on fait. On veut plus de femmes dans les structures, mais on fait aussi tout un travail sur les besoins des femmes en matière d'emploi, en matière de santé, etc., auprès des CRE, auprès des agences, auprès des diverses structures régionales. Et cette représentation-là des besoins, elle prend du temps. Comme par exemple, dans les CRE, bientôt, il va y avoir... À la CRE de la Capitale-Nationale, démarre le processus pour doter la région d'un plan quinquennal de développement. Le Regroupement des groupes de femmes va participer au comité de suivi. Donc, ça, ça va prendre du temps. Et ce dont on dispose le peu au niveau du Regroupement des groupes de femmes, c'est des moyens financiers pour soutenir ces démarches-là. Donc, le programme À égalité pour décider, si déjà il y avait du financement pour les deux axes, ce serait favorisant.

Et, également, pour inscrire des changements à long terme, nous devons avoir des projets au moins sur trois ans parce que le fait de devoir innover annuellement fait que soit qu'on maintient à bout de bras ce qu'on faisait les années précédentes, et il faut faire des nouvelles choses, alors qu'il y a des projets qui prennent plusieurs années d'implantation pour donner ces résultats. Changer le monde, ça prend du temps, ça prend de la présence, ça prend de la ténacité, il faut pouvoir être présent auprès des acteurs de la région. Et ça, transformer les modes de fonctionnement et les structures, c'est long. Donc, ça, ces deux axes-là, déjà, si on pouvait mieux les doter au niveau de ressources financières et pouvoir le faire sur plusieurs années, ce serait significatif.

Et également rehausser les sommes disponibles, parce qu'évidemment on a ouvert le programme à d'autres groupes, ce qui est positif. Que ce soit ouvert à d'autres groupes, c'est intéressant. On a appuyé des initiatives dans ce sens-là. Par contre, ce que ça fait, c'est que ça réduit les montants disponibles par projet et, à ce moment-là, c'est beaucoup plus difficile, là, d'avoir une action structurante dans nos milieux. Donc, il y a cette question-là. C'est bon.

Mme Caron: Merci beaucoup. Je vais profiter de la présence de ma collègue de la région de Québec.

La Présidente (Mme Charlebois): Alors, Mme la députée de Taschereau.

Mme Maltais: Merci, Mme la Présidente. Bonjour, Mme la ministre, chers collègues, mesdames du Regroupement des groupes de femmes, que je salue, Mme Laliberté, Mme Gobeil. Je sais, d'abord comme groupe, à quel point vous avez travaillé ? votre document en fait foi, les annexes aussi ? à quel point vous êtes, je dirais, un groupe précieux pour la région. Vous êtes intervenues régulièrement, souvent, vous êtes sur toutes les tables, et votre impact a été extrêmement positif pour les femmes de la région. Je sais aussi comment personnellement vous êtes des femmes engagées, et c'est à ce titre aussi que je veux vous saluer.

J'ai lu votre mémoire avec attention, j'ai écouté ce que vous avez dit. Je sais que vous avez dit être les seules à avoir soulevé, à l'époque de la loi n° 70, effectivement le fait qu'en faisant la fusion peut-être qu'on perdrait un peu au niveau des postes d'élues. J'en parlais avec... Il y a des élues de la ville de Québec qui sont ici, qui me disaient tout à l'heure: Oui, effectivement, à l'époque, on était tellement embarquées dans la fusion, et les élues du centre-ville aussi, femmes, sont plus nombreuses, donc on n'avait pas vu venir cet impact. Maintenant, par rapport aux conférences régionales des élus, c'est toutes les femmes du Québec qui ont repris votre cri et qui ont dit effectivement: Bon, là, il y a un véritable danger.

Tout ça dit, ceci tout simplement pour dire: Quand arrivent de nouvelles lois ou de nouvelles... quand un gouvernement s'inscrit dans de nouvelles tendances, il est extrêmement important que des organismes comme le Conseil du statut de la femme existent et soient le chien de garde de nos positions, de nos revendications, de notre situation. Je l'ai déjà dit d'ailleurs, la ministre m'a déjà entendue sur une scène récemment, quand j'ai repris mon habit d'artiste, je crois profondément à l'importance du Conseil du statut de la femme.

Vous êtes le groupe féminin et féministe de la région, non pas de la région de Québec, je le rappelle, mais de la région de la Capitale-Nationale, vous êtes le seul groupe qui nous représente. Je viens de parler des directions de gouvernements. Le gouvernement nous a annoncé maintes et maintes fois qu'il voulait réduire la taille de l'État, qu'il voulait favoriser la sous-traitance, qu'il voulait aller en partenariat public-privé, ce sont des tendances lourdes du gouvernement. En même temps, vous nous avez proposé Jeunes femmes d'avenir, qui est un cri, et j'ai assisté au lancement du document, c'est un cri d'alarme des jeunes qui disaient: Il faut qu'on réussisse à trouver notre place. Est-ce que vous avez commencé à examiner ou à étudier ce qui pourrait se produire dans la région? Est-ce que vous avez des signaux? Est-ce que vous avez des craintes, des inquiétudes? Ou peut-être que pour vous il n'y a pas de problème.

L'autre chose, c'est ? et j'en profite pendant que la ministre est là: Est-ce qu'il n'y aurait pas lieu de voir dans cette course à l'égalité si, dans la région, étant donné que nous ne partons pas du même point de départ, femmes et hommes, les jeunes femmes... Je pense beaucoup aux jeunes, là. Il y a une inégalité qu'on connaît, mais il y a évidemment le facteur temps et le facteur âge, ce qui fait que cette inégalité est plus prononcée chez les femmes plus âgées. Mais est-ce qu'il ne serait pas temps d'inscrire dans cette course à l'égalité, avant que le gouvernement fasse des mouvements trop brusques soit du côté de ses politiques, de ses institutions, soit du côté de ses grandes indications, qu'on aille... qu'on ait des études sur la région: Qu'est-ce que ça signifiera comme impact dans l'avenir pour les jeunes ? pas pour l'ensemble mais pour les jeunes ? ces mouvements? Est-ce que vous embarqueriez dans une étude comme ça? Est-ce que vous trouvez qu'elle pourrait avoir de l'importance? Je sais qu'il y a des élues de la ville de Québec qui sont ici, peut-être qu'elles aussi seraient intéressées par ce type de projet.

La Présidente (Mme Charlebois): Mme Bergevin.

Mme Bergevin (Ginette): Peut-être deux choses. Premièrement, c'est sûr qu'on est préoccupées que le gouvernement du Québec, avant d'adopter une loi, un règlement, etc., fasse l'impact que ces lois et règlements ont sur les femmes parce que sinon, si cette situation... si ce n'est pas fait... Donc, de l'analyse différenciée selon les sexes, des éléments d'impact, c'est majeur parce que sinon on ne pourra pas... on va toujours revenir en arrière par rapport à ce qui a été fait.

Au niveau de la situation des jeunes femmes, c'est sûr qu'on a décidé de démarrer notre projet et la réalisation de cette recherche-là... On a travaillé pour obtenir le projet pendant presque un an et demi parce qu'il y avait très peu de publications sur le sujet, parce que les jeunes femmes ont beaucoup de choses à dire et qu'un des constats qui ressort de la recherche... Je ne vous en parlerai pas en détail, là. Il y a des femmes... Hélène Charron a passé ici, en commission, avec le Groupe Salvya, et c'est elle qui a réalisé l'étude, qui est encore plus calée que moi dans la recherche, là. Mais ça a été... On a eu quelques surprises à l'intérieur de cette recherche-là: découvrir la violence qu'elles vivent, ces jeunes femmes là, découvrir aussi combien elles ont apprécié les focus groupes que nous avons réalisés parce qu'elles avaient enfin l'occasion d'être juste entre jeunes femmes pour dire ce qu'elles avaient envie de dire. Alors, ça nous a beaucoup surpris parce que souvent le discours ambiant, c'est que les jeunes femmes veulent être toujours dans la mixité. Puis peut-être qu'elles-mêmes, elles l'ont découvert en le faisant comment ça pouvait être intéressant d'être là ensemble.

n(17 h 10)n

C'est sûr que nous souhaiterions continuer à approfondir la question des jeunes femmes, leur réalité dans la région de la Capitale-Nationale. Il y a plusieurs éléments, d'ailleurs toute leur inquiétude et leurs craintes face à ce qu'elles ne sont pas du tout sûres qu'elles vont pouvoir mener une carrière, hein, et donc être disponibles, faire beaucoup de carrières ? si tu veux occuper justement des postes de cadres, des postes de direction, tu dois être disponible 60, 70 heures, 80 heures par semaine qu'elles ne sont pas sûres que, dans ce contexte-là... Elles vont devoir être productives, elles ont envie de relever ce défi-là, mais elles sont loin d'être sûres que, dans ce contexte-là, elles vont pouvoir avoir des enfants, et ça, c'est une grande inquiétude que vivaient plusieurs des jeunes femmes qu'on a rencontrées.

Donc, oui, nous pourrions être intéressées de s'associer à une étude plus approfondie sur la situation des jeunes femmes de notre région, qui pourrait approfondir plusieurs éléments de cette recherche exploratoire. Puisque c'était une recherche exploratoire, on a essayé d'aller voir c'était quoi qu'elles voulaient, les jeunes femmes, plus spécifiquement.

La Présidente (Mme Charlebois): Allez-y, Mme la députée.

Mme Maltais: Merci. Merci beaucoup. Je pense que, si je vous ai posé cette question, c'est parce que j'ai été impressionnée par la qualité du travail de Jeunes femmes d'avenir et vous avez une expertise que, je pense, on doit utiliser au maximum.

Autre chose. Vous nous avez parlé du besoin dans les sous-régions, les sous-régions de la Capitale-Nationale. On pense souvent... On dit «sous-régions» parce qu'il y a une grosse disparité dans les régions, on le sait, comme parlementaires. Il y a la grande ville de Québec, mais il y a les alentours, et particulièrement Portneuf et Charlevoix. Pourriez-vous nous plaider un peu plus sur le fait d'avoir une agente régionale et son impact sur ces sous-régions?

Mme Bergevin (Ginette): Bien, c'est très clair, on le dit dans le mémoire et on l'a répété dans notre présentation, il nous semble essentiel d'avoir une agente régionale du Conseil du statut de la femme à temps plein ? un poste ? pour permettre une présence dans les milieux. Particulièrement, effectivement, Québec, on est à proximité de l'adresse et de l'édifice du conseil, mais par contre Portneuf et Charlevoix ont besoin d'avoir une présence aussi du conseil. Ils sont en secteur plus éloigné, alors nous essayons, dans les moyens dont nous disposons, d'être présentes auprès d'elles, qu'elles soient présentes dans le regroupement et qu'elles puissent représenter leurs préoccupations à l'intérieur de notre regroupement. Mais c'est très clair que nous ne pouvons pas jouer le rôle d'une agente régionale qui se promène dans Portneuf et Charlevoix, qui va voir les besoins, qui voit comment les politiques gouvernementales sont appliquées aussi dans Portneuf et Charlevoix et pas seulement dans la Capitale-Nationale.

C'est très clair également, et ça, je ne veux pas nous comparer à la Gaspésie, là, qui a son agente régionale, mais c'est sûr que nous vivons une réalité particulière. Oui, c'est vrai que le siège social du gouvernement est ici, mais justement ça complexifie les dossiers régionaux souvent parce qu'il y a beaucoup de gens pour regarder qu'est-ce qui se passe dans la Capitale-Nationale, parce qu'il y a des... On est heureuses de l'intérêt que les gens portent à la Capitale-Nationale, mais parfois ça complexifie nos dossiers parce qu'il y a beaucoup de gens qui peuvent s'en mêler. Et je dis ça du point de vue de la condition féminine et je l'ai entendu du point de vue de d'autres secteurs d'activité.

Donc, je ne veux pas nous... Je ne veux pas qu'on soit à plaindre, on n'est pas nécessairement à plaindre, mais il y a des besoins pour une agente régionale à temps plein, c'est important. C'est important qu'elle soit présente dans l'ensemble de la région et qu'on puisse avoir quelqu'une qui suit l'ensemble des applications régionales, des politiques et des stratégies du gouvernement et de s'assurer que ça va donner des résultats dans notre région, sinon il y a des choses qui se perdent. Malgré le travail que nous faisons, malgré notre présence, malgré notre désir de suivre tout, c'est impossible, avec les moyens dont nous disposons.

La Présidente (Mme Charlebois): Oui, il vous reste un petit peu de temps si vous avez une question. Allez-y, Mme la députée de Terrebonne.

Mme Caron: Merci, Mme la Présidente. Oui, pour avoir un chalet dans Charlevoix, et, lorsque j'avais fait la tournée de toutes les régions du Québec, j'avais effectivement décidé d'aller rencontrer les groupes de femmes dans Charlevoix parce qu'il m'apparaissait que la réalité était très, très, très différente. Et je pense, moi aussi, qu'effectivement, même au niveau de l'ancrage au niveau des politiques, c'était très, très, très différent. Et même le travail des maisons d'hébergement, ça ne se faisait pas du tout de la même façon. Donc, je pense que c'est très différent.

Je vais vous poser une question que j'ai posée souvent quand il restait peu de temps. Vous avez un dernier message à nous livrer, quel serait ce message?

La Présidente (Mme Charlebois): Mme Bergevin, en moins de une minute.

Mme Bergevin (Ginette): On va faire un cercle, on va revenir au début. On aimerait vous partager notre passion de changer le monde avec nous et de porter cette condition féminine au Québec. On est fières d'avoir ces institutions gouvernementales et communautaires, les groupes de femmes. Alors, on aimerait le porter ensemble, tout le monde ensemble, et continuer le travail qui a été... a débuté par nos prédécesseures qui ont permis que nous soyons d'ailleurs là, aujourd'hui, et sinon ce serait toute une gang de gars peut-être qui seraient là, alors que, là, on est là. Merci.

La Présidente (Mme Charlebois): Merci, Mme Bergevin, Mme Gobeil et Mme Laliberté, pour la présentation de votre mémoire, ce qui fut fort intéressant. Alors, je demanderais aux gens de la ville de Québec, aux représentantes, de bien vouloir prendre place. Et je vais suspendre quelques instants.

(Suspension de la séance à 17 h 16)

 

(Reprise à 17 h 18)

La Présidente (Mme Charlebois): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, nous accueillons maintenant les représentantes de la ville de Québec. Et je présume que madame... Attendez un peu. Qui fera la présentation? Vous êtes...

Mme Cloutier (Lynda): C'est moi.

La Présidente (Mme Charlebois): Mme Cloutier? Alors, je vous invite à présenter les gens qui sont avec vous et à nous faire la présentation de votre mémoire. Vous savez les règles: 20 minutes pour la présentation du mémoire, qui est suivie d'une période d'échange avec les parlementaires.

Ville de Québec

Mme Cloutier (Lynda): Parfait, merci beaucoup. Bonjour, Mme la ministre, Mme Caron, Mme la Présidente et les collègues de ces dames. Je veux vous présenter d'abord, à ma droite, Lisette Lepage, conseillère municipale et aussi membre de la Commission Femmes et Ville de la ville de Québec, et Mme Nathalie Martin, de l'arrondissement de Beauport, qui est aussi une citoyenne membre de la Commission Femmes et Ville.

Je voudrais d'entrée de jeu apporter une précision pour ne pas qu'il y ait de quiproquo. Je le disais à la commission, je le répète ici, je suis conseillère municipale depuis 1993, mais je suis aussi en congé sans solde du gouvernement du Québec, et mon dernier employeur était le Secrétariat à la condition féminine. Mais, comme vous ? j'espère ? pourrez en juger, je suis passée de la théorie à la pratique et je tenais à ce que tout le monde en soit informé.

Alors, sur ces mots, je ne lirai pas entièrement le mémoire, vous le comprendrez, je vais essayer d'attirer l'attention sur les points les plus importants ou qu'on a considérés les plus importants. Je rappelle également que le mémoire de la Commission Femmes et Ville a été entériné par le comité exécutif de la ville, et il a été déposé au Conseil municipal, hier soir, de façon à ce que chacun et chacune en prennent connaissance et, nous espérons, s'approprient un peu les objectifs qu'il poursuit.

n(17 h 20)n

Alors, la ville de Québec a entrepris, il y a maintenant 15 ans, un travail de modernisation de l'appareil politique municipal en faisant de sa politique de consultation publique la pierre angulaire de cet exercice. Il s'agissait d'ouvrir l'hôtel de ville à la population, à ses citoyens et ses citoyennes. L'augmentation de la participation des femmes à la vie politique municipale et une meilleure prise en compte des conditions de vie propres aux femmes faisaient partie intégrante du projet. Ces dernières préoccupations, doit-on le rappeler, étaient portées par les femmes militantes au sein du parti politique porté alors au pouvoir, lesquelles ont été bien relayées par les élues et les élus municipaux.

Plusieurs de ces mesures adoptées au cours des années quatre-vingt-dix ont été reconduites après les regroupements municipaux. Cependant, force est d'admettre que ces acquis demeurent fragiles et que des reculs ont été accusés à certains égards. Le travail de sensibilisation, et même plus, demeure donc nécessaire, d'autant plus qu'il se heurte, aujourd'hui, à différents discours qui tentent de minimiser, voire de nier, les inégalités structurelles persistantes entre les femmes et les hommes, discréditant ainsi les mesures d'action positive perçues comme étant dépassées et inutiles.

La Commission consultative Femmes et Ville de la ville de Québec, créée en 1993 pour permettre aux citoyennes d'être des actrices du développement de leur ville, trouve donc essentiel de se prononcer sur l'avis du Conseil du statut de la femme soumis à la consultation publique. Après des considérations générales, la commission concentre ses commentaires sur les secteurs qui bien sûr interpellent plus particulièrement le milieu municipal, soit les questions d'articulation des temps sociaux, la participation politique et enfin le rôle de l'État.

Je rappellerai, dans ce qui suit, rapidement les actions qui avaient été prises et qui ont été continuées dans la ville de Québec. J'ai parlé, tout à l'heure, de l'adoption de la politique de consultation publique en 1993 et, dans le cadre de la nouvelle ville, en 2003.

La création de la Commission consultative Femmes et Ville, qui a été reconduite au lendemain des regroupements municipaux; elle est rendue à sa 12e année. La commission poursuit un objectif général d'améliorer les conditions de vie des citoyennes et d'encourager leur participation à la vie municipale. Et on a encore la prétention de croire qu'elle fait figure de référence dans le monde municipal. Notre fil conducteur est toujours: ce qui est bon pour les femmes est généralement bon aussi pour l'ensemble de la société.

Le règlement régissant les conseils de quartier ? et ça, je tiens à insister là-dessus ? réserve un nombre égal de postes aux femmes et aux hommes, c'est-à-dire quatre femmes et quatre hommes composent obligatoirement les conseils de quartier de la ville de Québec.

De plus, le principe de parité hommes-femmes, sans être inscrit de manière formelle, est respecté dans la formation du comité exécutif par le maire de Québec, et ce, depuis 1989. Par exemple, actuellement, nous sommes quatre femmes, quatre hommes au comité exécutif, plus le maire.

Une politique de remboursement des frais de garde et de déplacement pour les personnes participant à des instances de consultation a été adoptée et maintenue après les regroupements municipaux. Bien que modeste, cet effort va dans le sens de reconnaître des obstacles et de lever ces obstacles à la participation citoyenne.

Finalement, notons enfin que le règlement constitutif du Bureau de l'ombudsman, créé en 2004, a prévu une composition paritaire, c'est donc inscrit dans un règlement, et des changements ne pourraient être apportés dans ce cas-là qu'en modifiant le règlement de la composition du Bureau de l'ombudsman.

On constate donc que les mesures adoptées dans les années quatre-vingt-dix ont été reconduites sans trop de changement, avec les regroupements municipaux. Toutefois, on doit admettre que l'objectif d'une parité femmes-hommes au sein de l'ensemble des instances politiques, à l'exception des conseils de quartier où celle-ci est obligatoire, relève davantage de la volonté politique et de ce fait reste soumise aux changements d'orientation ou d'administration à l'hôtel de ville. De plus, il semble que cet objectif ne soit pas également partagé parmi les élus ainsi que les fonctionnaires lorsque vient le temps de statuer sur la composition et de recruter des citoyennes et des citoyens pour siéger au sein de ces différentes instances. Or, cet objectif demande des efforts particuliers et constants.

Par ailleurs, lors des premières élections après les regroupements de 2001 ? on en a fait état ici largement, j'en suis convaincue ? la proportion des conseillères municipales à la ville de Québec a subi un net recul. Alors que les femmes occupaient le tiers des postes à la ville de Québec avant 2001, elles n'en occupent plus que 17 %. De sept conseillères sur 20, elles sont sept conseillères sur 40 élus. Une seule conseillère occupe le poste de présidente d'arrondissement.

Enfin, du côté de l'administration municipale, il faut constater que les femmes sont très peu nombreuses à occuper des postes de cadres, l'ensemble des nominations ayant été faites à partir du bassin immédiatement disponible dans l'ensemble des 13 villes.

En résumé, il ressort de ce court exposé que l'adoption de mesures concrètes pour augmenter la présence des femmes s'explique en partie par le long travail de sensibilisation et la persistance de militantes actives. On souhaite qu'elles reçoivent maintenant de l'aide. Ces mesures ont pu voir le jour parce qu'elles ont été relayées, notamment par des femmes élues et bien sûr avec l'appui du maire de Québec. Certaines de ces mesures demeurent fragiles. Si elles ont été reconduites après les regroupements municipaux, c'est en partie grâce à la vigilance des femmes militantes et les pressions des groupes de femmes, qui parfois peuvent être considérés comme des empêcheurs de tourner en rond. Mais, plus souvent qu'autrement, elles nous appuient dans ce travail de sensibilisation et de conviction qu'on a toujours à faire. Tant que ces mesures ne sont pas formalisées, elles sont sujettes à changement lors de changements politiques ou de toute autre nature.

La capacité d'influence des femmes en milieu municipal dépend également de leur présence au sein de l'administration municipale. À cet égard, on a aussi besoin de renforcement.

Je passe rapidement sur les considérations générales. Elles rejoignent celles qui ont été exposées ici par d'autres groupes, organismes ou autres. Ce contexte qui repose... Trois éléments.

L'exercice en cours a été confié au Conseil du statut de la femme, ce qui est surprenant considérant le mandat de celui-ci. En effet, le mandat du conseil est de jouer un rôle critique à l'égard de l'administration provinciale. Il a un rôle fondamental de recherche et d'alimenter, de nous alimenter sur la meilleure connaissance de la situation des femmes, et il a à cet égard un rôle critique important à jouer.

Deuxièmement, on l'a mentionné aussi, la volonté du gouvernement de réduire la taille de l'État et, pour ce faire, de diminuer le nombre d'instances, bref de procéder à une rationalisation de la fonction publique, est le deuxième élément du contexte dont il faut tenir compte et qui en inquiète plus d'une.

Enfin, la montée d'un discours antiféministe qui tend à considérer l'égalité de fait comme étant atteinte et à faire une analyse symétrique des conditions masculine et féminine a pour effet de nier les inégalités structurelles ou la discrimination systémique dont les femmes, comme classe sociale et comme groupe, font encore les frais dans plusieurs domaines.

Dans ce contexte général et... compte tenu de ce contexte général, il apparaît très important que le gouvernement du Québec réaffirme de manière plus vigoureuse et apparente qu'il ne l'est fait dans le document la persistance de la discrimination systémique à l'endroit des femmes et sa volonté de travailler à l'élimination des inégalités structurelles qui persistent. Il lui revient encore d'assurer un rôle de leadership et de multiplier ses efforts pour préserver ces importants acquis et se donner les mécanismes nécessaires pour garantir l'atteinte d'une égalité de fait.

De la réaffirmation donc des inégalités persistantes découle, selon la Commission Femmes et Ville, le maintien des mesures spécifiques à l'endroit des femmes et d'instances entièrement dévolues à cette fin. Le 30e anniversaire du Conseil du statut de la femme a mis au jour la grande appréciation des travaux du conseil, et leur pertinence ne fait pas de doute dans le contexte mentionné plus haut, d'où l'étonnement tout à l'heure de voir qu'il sortait de son rôle critique pour devenir plutôt un rôle conseil. La commission est d'avis que le conseil et le Secrétariat à la condition féminine, par leur rôle complémentaire, doivent être maintenus et que leur existence demeurera justifiée tant et aussi longtemps que l'égalité de fait ne sera pas atteinte. L'État a donc encore un rôle central à jouer, encore plus central s'il entend convier l'ensemble des acteurs à son nouveau contrat social.

Nonobstant ces réserves, la Commission consultative Femmes et Ville apprécie la qualité et la richesse de l'avis produit par le Conseil du statut de la femme et salue l'initiative de la ministre responsable de la condition féminine d'ouvrir un large débat social sur la question de l'égalité.

En résumé, il apparaît nécessaire que le gouvernement, par l'adoption d'une politique: reconnaisse de manière très affirmée la discrimination systémique à l'endroit des femmes; affirme de manière vigoureuse sa volonté de travailler à éliminer les causes de ces discriminations; maintienne les mesures actuelles en condition féminine ? structures et mesures spécifiques ? assorties de ressources suffisantes; travaille en collaboration avec les acteurs sociaux ? groupes de femmes, groupes d'hommes, instances locales et régionales, syndicats ? qui reconnaissent ces inégalités persistantes à l'endroit des femmes et sont prêts à collaborer pour les éliminer.

n(17 h 30)n

Quant aux préoccupations de la commission, sur l'articulation des temps sociaux, j'attirerai votre attention sur un aspect particulier où ça met en lumière, je pense, l'importance de l'analyse différenciée et le fait de tenir compte des différences entre les hommes et les femmes quand on veut implanter de nouvelles mesures. Ainsi, concernant l'articulation des temps sociaux dans une perspective d'égalité, dont il a été fait mention dans la politique et dans le mémoire de la ville sur la politique familiale du gouvernement, il faut rappeler que les initiatives italiennes dont on s'inspire ont vu le jour sous l'impulsion des mouvements féministe et syndical en Italie. Les mères italiennes ont fait le constat que leurs villes n'étaient pas organisées pour les soutenir dans la coordination de leurs différents rôles. Ces actions sont-elles nécessairement porteuses d'égalité? S'il s'agit d'ajuster le milieu de vie pour permettre aux femmes d'assumer plus facilement les multiples tâches qui continuent de leur incomber, le risque est de renforcer l'actuelle inégale répartition entre les femmes et les hommes. L'action sur les temps, bien qu'elle soit prometteuse, ne constitue donc pas une panacée si elle n'est pas accompagnée par des actions vigoureuses en d'autres secteurs, mais surtout si elle n'est pas précédée d'une analyse qui tient compte des différences.

La participation des femmes au pouvoir. Soutenir la participation sociale des femmes et faciliter leur accès à l'exercice du pouvoir constituent des préoccupations constantes de la Commission consultative Femmes et Ville. La sixième orientation proposée dans le document de consultation nous interpelle donc vivement. La commission est entièrement d'accord avec le constat formulé dès le départ, selon lequel «le déficit persistant de la présence féminine dans les institutions démocratiques finit par jeter un discrédit sur les institutions elles-mêmes».

Faut-il rappeler que le monde est composé encore pour la moitié de femmes et que nos institutions politiques sont loin de reproduire cette représentation? Il est donc à notre avis extrêmement important que l'État continue d'assumer ce rôle de leader dans la mise en place de mesures concrètes et à long terme afin d'assurer la réalisation de ces objectifs.

Un petit mot sur les statistiques récentes sur la présence des femmes au sein des différents paliers de gouvernement. Le portrait des grandes avancées des Québécoises présente une vision assez idyllique de l'évolution de la participation des femmes aux différents lieux de pouvoir. Présentées sur une période de 30 ans, effectivement ces avancées semblent évidemment réelles, mais la tendance est loin d'être constante. Au contraire, depuis une dizaine d'années, le milieu politique connaît une certaine stagnation, notamment aux niveaux régional et local, de 20 % pour la représentation des femmes aux conseils municipaux et seulement 10 % aux postes de mairesse.

Il nous est difficile de ne pas rappeler ici que le gouvernement doit, en ce domaine peut-être encore plus que dans les autres, prêcher d'abord par l'exemple. À ce titre, la transformation des conseils régionaux de développement, les CRD, en conférences régionales des élus s'est faite sans tenir compte des impacts sur la représentation des femmes au sein de ces instances. En faisant des élus les principaux partenaires de ces conférences sans tenir compte du fait que les femmes ne représentent qu'un maire sur 10 ? et, dans la ville de Québec, sept femmes sur 30 au conseil et un maire ? le gouvernement a contribué à réduire significativement la présence des femmes au sein de ces nouvelles structures. La commission ose espérer que ces erreurs ne se répéteront pas et que le gouvernement saisira l'occasion que présente la réforme du mode de scrutin pour faire de la parité un objectif central de cette réforme.

Enfin, l'expérience de la ville de Québec décrite dans la première partie démontre bien que ce sont les femmes qui ont été les principales artisanes des mesures mises en place pour augmenter la participation des citoyennes à la gestion de leur ville. Certes, elles l'ont fait avec la collaboration de collègues alliés, mais on peut avancer sans trop de risque que, sans l'impulsion de ces femmes, ces mesures n'auraient pas vu le jour. Et elles souhaitent, ces femmes, être soutenues pour ne pas avoir à sans cesse recommencer les mêmes débats et discussions.

Et finalement intégration de l'égalité au sein du gouvernement. Dans cette dernière orientation le document propose différentes mesures afin que l'atteinte de l'égalité devienne un principe directeur de l'action gouvernementale à tous les niveaux. De manière générale, il est difficile de se prononcer en défaveur de l'orientation générale et des mesures proposées qui s'apparentent à ce qui existe déjà: conseil, secrétariat, responsables dans chaque ministère. Cependant, le texte est formulé de manière à ouvrir la porte à une instance mixte où le nouveau paradigme de l'égalité entre les femmes et les hommes remplacerait ou ferait disparaître celui de la condition féminine et il nous laisse perplexes.

L'avis propose, d'un côté, un projet conjuguant trois approches avec lesquelles nous sommes fondamentalement d'accord et, de l'autre, il semble suggérer la disparition de deux instances à caractère spécifique. On ne peut alors que souscrire aux inquiétudes manifestées par plusieurs. La commission réaffirme que, si les stratégies mixtes sont pertinentes, elles ne doivent pas se faire au détriment des approches spécifiques.

Par ailleurs, je veux apporter un exemple sur le rôle que peut jouer le gouvernement dans une façon d'augmenter la représentation des femmes ou de créer des obligations aux municipalités pour que cette augmentation se répercute dans la réalité. Il a fait preuve récemment d'un tel leadership dans le domaine du recyclage et de la protection de l'environnement, un autre domaine essentiel pour l'avenir de notre société. Lorsque l'urgence d'agir se bute à la force d'inertie des mentalités et des comportements, des actions plus vigoureuses sont nécessaires. En établissant des objectifs ambitieux sur un horizon de cinq à 10 ans, avec l'élaboration de plans de gestion des matières résiduelles et en prévoyant également ? ici, il y a une coquille dans le mémoire ? non pas des ressources, mais des obligations pour la mise en oeuvre de ces plans de gestion de matières résiduelles dans les municipalités, le gouvernement oblige ses partenaires à se doter de programmes afin de répondre à des objectifs. Il l'a fait aussi dans le domaine de la sécurité publique. Il a donné des normes aux villes, selon la taille des villes et il a demandé à ces villes de se conformer et de se doter d'un plan d'action qui permettrait de répondre à ces normes. Une telle stratégie devrait s'appliquer pour l'évaluation de la mise en oeuvre d'une politique pour l'égalité entre les femmes et les hommes.

Je vais tout de suite à la conclusion parce que je crois, hein, que ça tire sur la fin.

Alors, l'atteinte d'une réelle égalité entre les femmes et les hommes exige un travail de chaque instant sur tous les fronts, autant dans la sphère publique que dans la sphère privée. En faire un objectif prioritaire exige de prendre des moyens fermes, assortis d'une obligation de résultat et de reddition de comptes. C'est vrai pour le gouvernement, mais ces obligations, elles peuvent aussi être faites aux villes dans le cadre des délégations de pouvoirs et de ressources afférentes. En leur domaine, les municipalités peuvent certes agir, et la ville de Québec n'a pas attendu le présent exercice pour le faire et est prête encore à le faire. L'engagement de la Commission s'inscrit donc dans les visées du mouvement féministe, dont les retombées ont de manière générale bénéficié à la société dans son ensemble. Merci.

Le Président (M. Copeman): Merci beaucoup, Mme la conseillère municipale. Alors, afin de débuter l'échange, Mme la ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration.

Mme Courchesne: Merci, M. le Président. Alors Mme Cloutier, Mme Lepage, Mme Martin, merci beaucoup d'être présentes à cette commission. Soyez rassurées, même si vous êtes le dernier groupe de la journée, nous avons quand même parcouru votre mémoire avec attention et ça ne diminue en rien notre intérêt. Je veux vous le dire parce que je trouve toujours que c'est la pire heure pour un groupe de se présenter devant nous. Alors, soyez rassurées de ça.

Si vous me permettez, juste une petite précision par rapport à ce que vous avez écrit dans votre mémoire. Vous dites dans votre mémoire que vous ne comprenez pas pourquoi le conseil a fait un tel avis. Vous dites: Le conseil se retrouve juge et partie par rapport à une éventuelle politique et l'avis qu'il nous a confié. Je veux juste vous rappeler que la première ministre qui a demandé un tel avis pour des orientations gouvernementales, c'est Lise Payette, en 1977, et Violette Trépanier a fait la même chose en 1990. Et c'était très clair, c'étaient vraiment des avis. Et le Conseil du statut de la femme, pour moi, a d'abord et avant tout, par sa loi, un rôle conseil, un rôle conseil au gouvernement et à la ministre. Donc, un rôle conseil, pour moi, c'est justement de pouvoir émettre un tel avis. Je ne pense pas que ce soit hors norme à cet égard-là.

Comme j'ai deux conseillères municipales et je pense que... une personne qui est aussi conseillère à vous, qui joue un rôle important dans cette Commission consultative Femmes et Ville, j'aborderai donc d'emblée, et c'est à ce titre-là que je voudrais pousser plus loin la réflexion de ce qu'on peut faire... Et vous avez terminé votre mémoire en faisant des recommandations pour les villes aussi. Mais, comme on a affaire à ville de... C'est ville de Québec quand même qui est devant nous, hein, je pense qu'on peut le dire comme ça. Donc, habituellement, dans une ville comme Québec, dans un conseil municipal où normalement on est quand même plus sensibilisé, on a plus d'information, on est plus au fait de cet enjeu de société, donc une ville devrait normalement mettre... une ville comme Québec, comme Montréal, comme Trois-Rivières, Sherbrooke serait en mesure de s'assurer que, par exemple, un programme d'accès à l'égalité en embauche devrait fonctionner, devrait être appliqué, devrait donner des résultats qui sont probants.

n(17 h 40)n

Ma question, c'est: De votre point de vue, pourquoi... Puis vous le dites dans votre mémoire, là, c'est pour ça, c'est que, vous-mêmes, vous dites qu'il y a moins de femmes, la capacité d'influence n'est pas encore tout à fait là et que la capacité d'influence des femmes en milieu municipal dépend également de leur présence au sein de l'administration municipale. Donc, comment se fait-il... Puis là ce n'est pas à la ville de Québec. Moi, je vais parler de toutes les villes. Mais, parce que vous m'avez ouvert cette porte dans votre mémoire, comment se fait-il que nos programmes d'accès à l'égalité en embauche, dans une ville, par exemple, ou au gouvernement, mais dans une ville, parce que c'est une ville qui est devant moi, comment ça se fait qu'on a de la difficulté à avoir des résultats plus significatifs?

Mme Cloutier (Lynda): Je vais peut-être distinguer deux choses: la ville avant, la ville maintenant. La ville avant avait un programme d'accès à l'égalité qui était porteur de résultats. Un comité faisait le suivi de façon régulière, et l'accent avait été mis principalement sur l'intégration des femmes dans les postes de cols bleus, où des mesures très spécifiques devaient être mises de l'avant pour attirer des femmes, les former et donc les faire progresser dans ces métiers. Avec la nouvelle ville, l'obligation de programmes d'accès à l'égalité n'est pas encore formalisée, on doit commencer... En tout cas, à chaque six mois, je posais la question, et c'est toujours remis, remis, remis. Quand on a autre chose à faire, les programmes d'accès à l'égalité pour les femmes, et même pour les communautés culturelles, bon, et l'ensemble dit des minorités sont relégués toujours au second plan. Ça, c'est...

Deuxièmement, je pense que ce qui a pu être fait jusqu'à maintenant... Et on décrit la situation comme insatisfaisante, mais au moins il y avait une volonté politique et une certaine solidarité pour faire des choses qui ont permis de contrer certains reculs ou... Moi, j'ai l'impression de refaire le travail que j'ai fait il y a 10 ans. C'est clair comme ça, parce que le fait de se retrouver avec un ensemble de nouveaux élus, le travail terrain qui avait été gagné... Mme Maltais, la députée de Taschereau, disait tout à l'heure: Au centre-ville, par exemple, l'arrondissement de La Cité, on est trois femmes sur cinq élus. Il y avait donc un petit peu de terrain, là, qui avait été labouré, et on commençait, je dirais, à récolter.

Et, troisièmement, je pense que... Et ce n'est pas pour rien que j'ai pris l'exemple... Ce n'est pas un bon exemple, le PGMR, la gestion des matières résiduelles. Prenons l'exemple de la sécurité publique. La volonté politique a aussi parfois besoin d'être stimulée ou d'avoir à remplir des obligations. Et, souvent, moi, je dis: Aidez-nous à nous aider en nous créant des obligations qui vont nous faciliter le travail de terrain pour qu'on cesse d'être des chialeuses de service qui parlent toujours: Et les femmes, et les femmes, et les femmes, et que ça devienne enfin un acquis. La moitié de la population est une femme, et on a le devoir et l'obligation, comme disait quelqu'un, en citant la juge Claire L'Heureux-Dubé, de remplir ce devoir et d'avoir une représentation des femmes plus près de la réalité, de celle qu'on retrouve dans la population.

Mme Lepage (Lisette): Je voudrais ajouter un commentaire.

Le Président (M. Copeman): Allez-y, madame.

Mme Lepage (Lisette): Excusez ma voix. Hier, je ne parlais pas, aujourd'hui je parle un peu. Il y a eu des phénomènes qui ont fait qu'on a eu un recul, et, bon, le regroupement des municipalités en a été un. Il y avait 117 conseillers municipaux, on s'est ramassés 39, 40 avec le maire. C'est sûr qu'à partir de ça il y a des gens qui ont écopé, et je pense que ce sont surtout les femmes. Moi, je regarde, il y avait des efforts de faits partout. Quand on était à la municipalité de Beauport, quand je suis entrée en poste, en 1996, sur 14 conseillers, on était six femmes et il y avait huit hommes. Ça fait que, je veux dire, ce n'est pas loin de la parité, ce n'est pas loin d'être 50-50.

Je pense que ce qu'on doit faire, c'est revenir au front et se dire que, toutes et chacune, faire en sorte que... On a une élection municipale qui s'en vient, et je pense qu'on doit faire en sorte, toutes et chacune, comme je le disais, d'initier, de parler à des femmes et d'amener les femmes à faire de la politique municipale. Je pense que c'est un rôle qu'on a à jouer, nous-mêmes, comme élues, je pense qu'on doit le faire. Moi, je m'applique à faire ça depuis maintenant quelques années et je suis très fière de ça. Je pense qu'à Beauport ce sera fait, pour les prochaines élections, on aura des femmes dans l'arrondissement. Puis je pense qu'on a tous ce rôle-là à jouer puis qu'on doit aller de l'avant dans ce sens-là.

Mme Courchesne: Juste une autre question ? je veux laisser mes collègues poser des questions. Mais, quand vous nous dites: Aidez-nous à nous aider, donc ce que je comprends... Puis vous faites le parallèle avec le développement des matières résiduelles, excusez-moi, le... En tout cas, vous m'avez comprise. Excusez-moi, je veux arriver à ma question. Donc, quelles normes... Comment voulez-vous qu'on vous aide à vous aider de façon plus précise? Parce que j'entends le mot «parité», hein, ça fait plusieurs fois que vous le dites, là. Est-ce que vous voulez qu'on aille aussi loin que d'imposer la parité par le biais d'une loi? Est-ce que c'est ça que j'entends ou est-ce qu'il y a d'autres façons plus... Parce que j'entends le mot un peu coercitif, là. Vous voulez qu'on impose, d'une certaine façon. Est-ce que c'est vers ça que vous souhaitez que nous allions?

Mme Cloutier (Lynda): On n'a pas réussi encore à faire de consensus là-dessus, n'est-ce pas, au sein des élues. Enfin, devra-t-on arriver à une loi sur la parité, comme en France, un jour? Peut-être, si on n'y arrive pas. Mais je pense qu'il faut d'ores et déjà maintenant développer des mesures qui permettraient au moins de reconnaître les efforts qui sont faits. Ça a déjà été suggéré antérieurement, par exemple par les partis politiques municipaux, en faisant en sorte que le financement est ajusté en fonction de la proportion de candidates qu'on retrouve lors de l'élection et du nombre de femmes élues quand on rembourse les dépenses électorales ? parce qu'il ne faut pas toutes les envoyer n'importe où, n'est-ce pas?

Quant à la loi sur la parité aussi, le mode de scrutin actuel, au Québec, ne permet pas ? en tout cas je n'ai pas pris le temps de réfléchir à ça ? d'avoir des listes où on aurait un nombre égal d'hommes et de femmes. Ça dépend encore de l'initiative des partis politiques municipaux à présenter un nombre de candidates important.

Le Président (M. Copeman): Ça va? Mme la députée de La Peltrie.

Mme Hamel: Bonjour, Mme Lepage, Mme Cloutier, Mme Martin. C'est un domaine, là, que j'ai côtoyé, le municipal, alors je suis heureuse de vous revoir ici. Je suis contente que vous ayez parlé de la parité, tout à l'heure. Il semble y avoir... Il n'y a pas consensus entre vous, là, là-dessus. C'est bien ce que j'ai compris? Il y en a qui sont pour, il y en a qui sont contre?

Mme Lepage (Lisette): Bien, ce n'est pas le fait d'être contre, comme, Mme Cloutier, l'exemple qu'elle venait de vous donner, faire en sorte de donner les moyens, comme elle disait, au niveau du financement, puis tout ça. Être très catégorique, entre 50-50, je pense qu'on peut quand même... Comment je vous dirais bien, là? Moi, je ne pense pas qu'on doive imposer des choses très strictes à tout prix, mais on doit faire en sorte que ça vienne naturellement. Moi, je pense que le juste milieu dans tout, c'est ce qui serait le mieux, là, tu sais.

Mme Cloutier (Lynda): Et c'est là-dessus qu'on se complète ou que je vais plus loin, parce qu'en attendant bien ça n'avance pas, hein, ça recule aussi. Et, tant qu'on concevra la parité comme étant des quotas, on n'y arrivera jamais parce que c'est négatif, des quotas, alors que, quand on parle de parité et que j'utilise et qu'on essaie d'utiliser le plus possible l'exemple de: la moitié du monde est une femme, la moitié du monde dans nos institutions politiques devrait être une femme, avoir une représentation qui se rapproche de la composition de la société... Cependant, quand on enligne toutes les minorités, bien là on devient une minorité comme les autres et non plus 50 % de la population. Mais en même temps je pense qu'on est toutes d'accord sur l'objectif. Mais, quand on appelle ça «quotas», là, on discute sur les moyens, alors que, sur la parité, ça peut, je pense, être un objectif, non seulement un objectif, je rappelle, une obligation qui est inscrite dans nos lois et dans nos chartes.

Mme Hamel: Mais vous le vivez un petit peu, là, dans les conseils de quartier, là, qui seront consultatifs. Est-ce qu'au niveau des conseils de quartier ? je suis curieuse de savoir ? est-ce que les femmes se présentent très spontanément ou si vous devez aller les chercher? Parce que des fois c'est ça qui arrive, là. Les femmes, il faut aller les chercher dans leur milieu, là, puis les attirer vers des postes de pouvoir ou être candidates à des élections. Est-ce que c'est ce qui arrive aussi ou si c'est...

n(17 h 50)n

Mme Cloutier (Lynda): C'est un très bon exemple, et merci de m'amener sur cette piste-là. Moi, je travaille avec un conseil de quartier depuis 10 ans. Depuis 10 ans, quatre femmes et quatre hommes sont élus à ce conseil de quartier à peu près à un rythme de deux ans. Effectivement, on doit parfois... on doit faire des efforts pour aller chercher les femmes pour qu'elles se présentent. Spontanément, je ne sais pas si vous l'avez fait. Moi, je n'ai pas fait ça spontanément de me présenter en politique, là, on est venu me chercher. Il faut sensibiliser, première fois; faire connaître, deuxième fois; troisième fois, l'amener à un conseil de quartier. Mais jusqu'à maintenant on a toujours eu quatre femmes, quatre hommes au conseil de quartier. C'est vrai dans le mien, mais c'est vrai dans les 16 qui existaient dans l'ancienne ville et maintenant dans les 23 qui existent dans la nouvelle ville, et ça marche.

Mme Hamel: Très bien. Est-ce que je peux vous amener dans une autre réalité, là? Vous dites: C'est impossible d'être contre une plus grande participation des hommes à la marche vers l'égalité. Qu'est-ce que vous voulez dire par ça? Avez-vous des exemples ou avez-vous des expériences, comme conseillères municipales ou au niveau municipal, d'associer les hommes aux démarches, là, des femmes, là, pour...

Mme Cloutier (Lynda): Comme conseillère municipale? Comme conseillère municipale, je vous dirais que ce n'est pas de les... en tout cas, ce n'est pas tellement de les associer à l'égalité comme de vivre l'égalité. Faire partie, par exemple, d'un comité exécutif où il y a autant d'hommes que de femmes, ça amène la richesse de la diversité que je pense qu'on peut apprécier. Pour les femmes aussi, le fait d'être un certain nombre, ça a un côté très renforçant. C'est plus facile d'agir, de prendre sa place et non seulement de développer des solidarités, mais d'avoir des points de vue communs.

Associer les hommes à l'égalité, pour moi, c'est plus que ça, là, c'est vraiment de vivre l'égalité. Puis, je vous dirais, associer les hommes à l'égalité, ça commence aussi dans le privé. Et, le jour où les hommes en tout cas assumeront aussi bien le privé que le public, probablement qu'on ne sera plus ici pour en parler.

Mme Lepage (Lisette): Bien, l'exemple que je peux vous donner, c'est que, moi, en tant que conseillère municipale de l'opposition, je suis la seule femme sur... Au début, il y avait 22 hommes. Maintenant, avec ce qui s'est passé, les indépendants, puis tout ça, on est moins. Il y a un grand respect de la part de ces hommes-là envers moi, je dis ce que j'ai à dire. Mais, avoir deux, trois autres femmes avec moi, ou même quatre, cinq, je pense que je vivrais assez bien ça, merci. Et je ne peux rien dire contre ma formation politique. Au contraire, on me laisse toujours prendre ma place ? remarquez que je l'ai toujours prise ? on me laisse toujours prendre ma place et dire ce que j'ai à dire, mais j'apprécierais beaucoup avoir des collègues. Je suis très solidaire aux collègues qui sont de l'autre côté de la chambre, si on peut dire, mais elles ne sont pas avec moi dans mon parti, et j'espère qu'aux prochaines élections j'aurai des collègues avec moi. Je le souhaite de toute façon.

Mme Hamel: Je pourrais peut-être adresser à peu près la même question à Mme Martin, là. Est-ce que vous pensez que, pour l'atteinte de l'égalité des femmes, là, il faut nécessairement associer les hommes, à notre démarche, tu sais, les conscientiser, et tout ça? Moi, personnellement, je vais vous dire mon avis personnel, là, ça ne se fait pas tout seul, ça. Je ne peux pas marcher vers quelque chose et, tu sais, être égale avec les hommes sans associer au moins les hommes de mon entourage à ma démarche puis leur expliquer qu'est-ce que je vis. Mais, en général, là, dans la société, les groupes de femmes, est-ce qu'on devrait s'associer avec les hommes puis leur faire... pas admettre, là, mais les conscientiser à ce qu'on vit puis vers où on s'en va aussi?

Mme Martin (Nathalie): Bien, je vous dirais, Mme la députée, comme l'a si bien dit Mme Cloutier au début, le monde dans lequel nous vivons, nous avons des femmes et nous avons des hommes, nous sommes partie intégrante de ce monde-là. On ne peut pas penser avoir une opinion sans penser au sexe opposé. Donc, évidemment, que ce soit au niveau de développer une politique, qu'importe sur quel sujet, on est des femmes et des hommes et on doit évidemment tenir compte des hommes dans la question ici que nous traitons, c'est... On ne peut pas passer à côté de ça.

Mme Hamel: Merci.

Le Président (M. Copeman): Deux minutes, Mme la députée.

Mme Delisle: Ce sera peut-être juste quelques commentaires. Sur la question de la loi sur la parité, je me rappelle d'avoir vu, suite aux élections, les dernières élections françaises, que ce sont les femmes qui ont payé le prix, hein, de cette loi sur la parité. Évidemment, ils ont un système de liste, et tout ça. Puis, la journée où on arrivera à débattre de ces possibilités-là en termes législatifs, il faudra peut-être qu'on pense aux conséquences.

Sur le plan personnel, c'est difficile de déterminer si on doit aller 50-50 dans les candidats et les candidates. Je suis d'accord que ce n'est pas facile à déterminer. Chose certaine, par contre, les partis politiques, de quelque niveau que ce soit, devraient prévoir, parce que c'est pour les femmes que c'est plus difficile, un système de gardiennage, un fonds qui serait mis à la disposition des femmes pour les aider à aller faire du porte-à-porte, à aller faire la cabale puis la campagne électorale sur le même niveau que les candidats masculins. Ça, je pense que, ça, il faut... Je pense que c'est de l'action concrète et puis... En tout cas, ça, c'est mon point de vue personnel. Mais je pense que, tant qu'on ne fera pas ça dans nos formations politiques, qu'on n'aidera pas à faire ça, ça va être encore difficile juste d'y aller en frappant aux portes puis en disant: Il faut que tu viennes te présenter. Puis c'est vrai qu'il faut tout le temps solliciter les femmes parce qu'elles ne viennent pas d'elles-mêmes. Ça, c'est un commentaire.

L'autre, c'est dans votre conclusion. J'avoue, là... Très rapidement. Vous mentionnez, là, que vous avez comme l'impression d'abord que... Vous dites que l'exercice est pour le moins nébuleux et vous semblez laisser entendre que ce qu'on sous-entend, nous, avec cet exercice-là, c'est qu'on veut répondre à des impératifs de rationalisation de la fonction publique et aux pressions d'un lobby masculiniste virulent à l'endroit du mouvement féministe.

Alors, je trouve le ton un peu raide par rapport à la présentation que vous avez faite. Je vous dirais que, par rapport aux impératifs de rationalisation de la fonction publique, on a toujours dit de toute façon que ça se ferait par attrition puis qu'on ne choisirait pas de demander aux femmes de partir avant de demander aux hommes. Ce n'est pas comme ça que ça marche. Vous êtes en congé sans solde de la fonction publique, vous savez comment ça fonctionne.

Je vous dirais aussi qu'à la dernière page vous parlez que la ville de Québec a l'intention de mettre sur pied une politique familiale pour être mieux adaptée aux besoins des familles en termes de loisirs, etc., et de milieu de vie. Par contre, vous dites: «...celle-ci exige d'être [...] appuyée par une volonté ferme du gouvernement provincial qui, toujours avec un objectif d'égalité entre les sexes, doit viser les meilleurs aménagements temporels en faveur de la vie familiale.» Je ne vois vraiment pas qu'est-ce que ça vient faire dans le débat. Moi, je peux vous dire, là, sincèrement, j'ai été mairesse de la ville de Sillery, de la défunte ville de Sillery, on a créé des espaces temporels, on avait une politique familiale, on avait une politique pour les aînés, on avait une politique de développement durable puis on n'a pas attendu après le gouvernement du Québec pour faire ça ni après l'argent du gouvernement du Québec.

Le Président (M. Copeman): Très rapidement, Mme Cloutier.

Mme Cloutier (Lynda): C'est la notion d'articulation des temps sociaux, qui a été présentée ici même par le gouvernement, dans le cadre de sa politique familiale. Et ce sur quoi les municipalités ont peu de moyens ou de recours, c'est les heures d'ouverture de commerce, par exemple, et l'arrimage des calendriers scolaires des cégeps et des écoles secondaires, qui pose des problèmes souvent pour la garde des enfants qui vont aux écoles et dont les services de garde ne sont pas ouverts pendant deux semaines. Ce sont des exemples...

Mme Delisle: ...l'aménagement des milieux de vie.

Le Président (M. Copeman): Malheureusement, mesdames, c'est tout le temps qu'on a. Mme la députée de Terrebonne et porte-parole de l'opposition officielle en matière de condition féminine.

Mme Caron: Merci, M. le Président. Alors, je tenterai de vous donner un petit peu de temps, là, pour élaborer un petit peu plus. Donc, merci beaucoup, Mme Cloutier, Mme Lepage, Mme Martin, de votre présentation. Dans un premier temps, je voudrais apporter une petite précision. Vous aviez quand même raison de vous interroger, là, sur l'avis. Je veux préciser qu'effectivement la ministre Lise Payette, qui a présenté la première politique en condition féminine, Égalité indépendance, a demandé au Conseil du statut de la femme. Mais elle ne pouvait pas demander au Secrétariat à la condition féminine, il n'était pas créé, il a été créé en 1979, ça fait qu'elle ne pouvait pas demander à une instance qui n'existait pas de lui préparer une politique. Et il a été créé en 1979, puis cette politique-là est arrivée en 1977-1978. Donc, c'est évident qu'elle a demandé au conseil.

Le Président (M. Copeman): Mme la députée, j'ai été négligent, j'ai oublié de demander le consentement des collègues pour dépasser 18 heures. Consentement? Pardonnez-moi, Mme la députée.

n(18 heures)n

Mme Caron: De rien. Merci. Alors, ça a été le choix de la ministre, Mme Trépanier, lors de l'adoption de la nouvelle politique, en 1991, de faire une demande au Conseil du statut de la femme. Par contre, nous avions fait des consultations, nous avions fait un colloque pour préparer la nouvelle politique qui devait être en vigueur à partir de 2004, et c'était le Secrétariat à la condition féminine qui avait préparé les consultations, il avait fait le colloque, le bras gouvernemental. Donc, c'était parfaitement normal de se poser la question.

Du côté de la parité, je pense que vous avez amplement précisé les nuances. Moi, j'ajouterais une simple chose. Au niveau des mesures incitatives, je pense qu'il faut vraiment qu'elles soient, si on veut y aller au niveau du nombre, il faut qu'elles soient au niveau des femmes élues. Parce que, lorsqu'on le limite au niveau des candidates, et on le sait, là, dans le passé, chaque parti se vantait du nombre de candidates mais dans des comtés où on savait que c'était pratiquement impossible de les faire gagner. Donc, je pense qu'il faut y aller sur le nombre de femmes élues pour s'assurer qu'elles sont ? vous l'avez bien dit, Mme Cloutier ? qu'elles sont dans des arrondissements ou des comtés, dans notre cas, où elles peuvent obtenir des résultats.

Bien, ma première question, ça va être pour vous permettre de finaliser un petit peu sur le bureau des temps, où vous aviez des réserves, pour vous permettre, là, d'exprimer le fond de votre pensée là-dessus.

Mme Cloutier (Lynda): Le bureau des temps, ce n'est pas ma... Une des préoccupations de la Commission Femmes et Ville a été, depuis quelques années, la prise en charge des enfants pendant la période estivale. Vous savez toutes et tous que, la première semaine... ou la dernière de juin, la première de juillet et la dernière d'août, les deux dernières d'août, plus souvent qu'autrement, les services de garde ne sont pas disponibles et les camps d'été ou les PVE, comme on appelle ici, à Québec, sont fermés parce que les étudiants ou bien retournent ou bien veulent prendre une semaine de congé. Une ville qui veut intervenir là-dessus devrait soit suppléer, prendre en charge une responsabilité qui n'est pas la sienne ou faire en sorte que se développent, bon, des initiatives.

Toujours est-il que la Commission Femmes et Ville a fait souvent des représentations. Et, lorsque la ville de Québec a commencé, a entrepris la démarche pour se doter d'une politique familiale et que la ville a aussi participé à la consultation ou à la commission parlementaire qu'il y a eu ici sur l'adoption d'une politique familiale ? là je résume ça en ces mots-là, probablement que le titre est plus long ? des représentations ont été faites parce qu'il semblait que le bureau des temps semblait être un moyen privilégié et qu'en soi, si une mesure comme celle-là n'est pas appuyée par une analyse plus, je dirais, plus sophistiquée ou plus fine, un bureau des temps peut amener juste une organisation du temps qui permet de rendre plus disponibles et les femmes et les hommes, alors que l'objectif recherché, je pense, pour tout le monde, c'est une amélioration de la qualité de vie privée, qualité de vie publique.

D'où l'utilité de l'analyse différenciée selon les sexes, qui permet de mettre en lumière les impacts différents que ça peut avoir sur les femmes et sur les hommes et de faire en sorte ? et c'était le rôle entre autres du secrétariat ? de donner un avis au gouvernement: Attention, si vous adoptez une mesure telle que celle-là, elle pourrait avoir un impact différent, il serait peut-être mieux de faire telle ou telle chose. L'intérêt de l'analyse différenciée ou de l'analyse... ? il y a trois appellations différentes dans le document ? c'est d'être capable de nommer les différences, d'en tenir compte pour faire en sorte qu'ou bien on ne les amplifie pas ou bien même on peut, je dirais, les contrer, ces différences, les compenser.

Mme Caron: Merci beaucoup, Mme Cloutier. Je vais vous demander justement... Je vais rester dans la même ligne parce que je trouve que... Dans votre mémoire, en page 13, il y avait deux exemples bien intéressants qui permettent de démontrer... Si on faisait une vraie analyse différenciée selon les sexes, dans ces dossiers-là, on verrait une différence. Et je veux vous entendre parce qu'on ne les entend pas souvent, ces exemples-là. Alors, vous donnez l'exemple du décrochage scolaire et des conséquences, selon une étude en développement social, pour les femmes et pour les hommes. Et aussi toute la question de la différence au niveau des plans de retraite. Alors, je trouve que c'est deux bons exemples et puis, comme ils n'ont pas été apportés jusqu'à maintenant de cette façon-là, je trouverais ça intéressant qu'ils soient entendus à la commission.

Mme Cloutier (Lynda): Je m'étonne que ces exemples-là n'aient pas été apportés et je...

Mme Caron: Précisément, non. Dans d'autres termes.

Mme Cloutier (Lynda): Oui. Et je comprendrai peut-être aussi, on veut souvent éviter d'entrer dans le vif du sujet. On parle souvent du décrochage scolaire. Le décrochage scolaire est réel et effectif, particulièrement pour les garçons. On parle peu des conséquences, des conséquences différentes que peut avoir le décrochage scolaire chez les garçons et chez les filles.

Ainsi ? et c'est ce qu'on retrouve à la page 13 ?«selon une étude du Conseil canadien de développement social, une femme qui a abandonné ses études qui a donc décroché ? sera sans emploi en moyenne 23,2 ans, tandis qu'un décrocheur ne passera que 6,6 ans dans la même situation». Et, pour ce qui est de l'inégalité, bon, économique, c'est tout l'impact sur le retrait du marché du travail ou les congés de maternité à un taux de salaire moindre que le salaire à 100 % qui peut avoir des conséquences, en les cumulant, sur la retraite éventuelle que prendront les femmes et auxquelles peu d'hommes sont encore exposés aujourd'hui. Mais il s'en trouve, c'est sûr, j'en connais.

Mme Caron: Merci, Mme Cloutier. On a effectivement parlé des conséquences différentes du décrochage scolaire au niveau des jeunes filles et des jeunes garçons, et personne n'avait apporté cette donnée précise sur le nombre d'années où elles se retrouvaient sans emploi. Alors ça, je trouvais ça important de le dire.

Au niveau des écarts salariaux, on en parle beaucoup, on parle beaucoup au niveau de la conciliation famille-travail-études, mais l'élément retraite est venu lors de la commission sur la Régie des rentes du Québec mais ne revient pas régulièrement. Mais c'est une réalité et c'est ce qui fait aussi d'ailleurs qu'on retrouve... Quand on a travaillé au niveau de la lutte à la pauvreté, on s'est aperçus qu'effectivement les femmes étaient plus pauvres. Mais les femmes âgées étaient beaucoup plus pauvres, et c'étaient les conséquences, là, du cumul de tous les écarts durant leur vie.

Je voudrais aussi vous entendre... Je l'ai vu dans votre mémoire, je l'avais vu dans l'avis du conseil, et ça m'avait étonnée, puis je ne l'avais pas renoté par la suite, mais c'est en le relisant dans votre mémoire que je me suis dit: Oui, effectivement, comme exemple... Vous rappelez qu'effectivement on a beaucoup de chemin à faire au niveau de l'intégration des femmes au sein des organisations politiques, diminuer la méfiance, et vous rappelez que, dans la synthèse de l'avis, en page 22, on suggère que les hommes parlementaires doivent jouer un rôle de mentor auprès des femmes nouvellement arrivées en politique. Je vous avoue que, moi aussi, j'ai eu un petit sursaut en voyant la suggestion. On est quand même rendues 32 %, hein, 32 %, alors. Et vous nous ajoutez: «Il faut que les femmes soient bien peu nombreuses ? on est 32 %, déjà presque le tiers ? et encore peu crédibles dans cette sphère pour qu'on fasse appel aux hommes pour assurer le mentorat des nouvelles politiciennes! Cette suggestion n'est pas loin de sentir le paternalisme!» Alors, effectivement, mesdames, vous qui êtes... dont deux sont conseillères municipales, vous n'avez sûrement pas suggéré, au niveau de la municipalité, d'avoir du mentorat par les hommes.

n(18 h 10)n

Mme Cloutier (Lynda): Il faut que j'explique, je pense, parce que, lorsque j'ai lu l'avis, principalement la synthèse et rapidement l'avis complet du Conseil du statut de la femme, à un moment donné, ça m'a, comme on dit, sauté en pleine face. Tout le soin ? et ça, on l'a développé ? l'art, non pas de la féminisation ici, mais l'art de dire les choses sans réussir à nommer les hommes et les femmes, O.K., le meilleur étant ? et je ne veux pas que ce soit blessant, là, O.K., c'est le résultat de beaucoup de travail, je le sais: «Susciter la reconnaissance de la parentalité et du soutien aux personnes dépendantes et mettre en place les conditions pour une meilleure articulation des temps sociaux.» Hein, on n'a pas parlé de femmes, on n'a pas parlé d'hommes.

Alors, quand je suis arrivée sur le mentorat puis qu'on ne parlait que des hommes, bien j'ai dit: Aie, ça ne marche pas, là; les mentors, c'est aussi des hommes, mais c'est aussi des femmes. Et c'est pour ça que je tenais à ce qu'on le retrouve un petit peu, parce que je me suis sentie un peu piquée, de dire: Après tous ces efforts qu'on fait pour soigner la formule, quand on parle du mentorat, on l'attribue aux hommes, alors que je pense qu'on a un rôle important. Compte tenu de la difficulté que nous avons à attirer des femmes en politique, c'est bien ce rôle de mentorat qu'on doit jouer. Mais c'était comme une petite... une petite craque, là, tu sais.

Mme Caron: Au niveau de ce langage neutre effectivement, on l'a déjà vu dans des régions, à l'époque des régies régionales, où ils souhaitaient effectivement utiliser un langage très, très neutre, où ils avaient parlé des personnes enceintes. C'était vraiment, là, je vous avoue, là, que c'était vraiment vouloir utiliser un langage très neutre. Mais, à force d'utiliser un langage neutre, je trouve que ça renforce cette invisibilité de la situation réelle des femmes. Et cette invisibilité-là, on la ressent partout. On la ressent au moment où les gens vont vouloir former un comité et vont spontanément plutôt penser à aller chercher des hommes parce qu'elles les ont vus davantage, elles ont été plus en réseau avec eux.

Cette invisibilité-là, elle se traduit aussi par la non-reconnaissance des discriminations réelles qui sont vécues par les femmes, elle se traduit dans les écarts salariaux parce qu'on ne reconnaît pas le travail effectué par les femmes, elle se traduit de toutes sortes de façons. Et, quand on veut une égalité de fait, je pense que là où il faut lutter le plus, c'est contre cette invisibilité-là et ce langage trop neutre qui finalement nous fait oublier la réalité. Est-ce que vous le vivez aussi?

Mme Cloutier (Lynda): Je vous dirais, pas à la ville, parce qu'à la ville ça fait partie des reculs. On avait intégré une certaine féminisation ou une neutralité qui avait pour effet de ne pas exclure. Par exemple, on parlait des relations avec la population; maintenant, c'est devenu relations avec le citoyen. Ça fait trois ans et demi, je n'ai pas encore terminé, il me reste six mois pour arriver à développer en tout cas une autre appellation. Mais la bataille de la féminisation avait cet objectif de rendre visible justement, d'inclure, de nommer. Et ça m'a frappée effectivement, le... C'est pour ça que je dis: On arrive à une maîtrise du vocabulaire telle que, là, c'est... en tout cas, ça devient invisible. Il y a peut-être un danger, là. Dans un contexte dont celui que je parle, je parle, à la ville, le citoyen, c'est l'autre extrémité dans laquelle il ne faut pas tomber, mais je pense qu'il faut réfléchir sur ? ce n'est pas l'invisibilité ? la neutralité à tout prix, là. Quand il y a des choses à nommer et qu'on dit que c'est encore important de tenir compte des différences, il faut donc être capable de les nommer.

Le Président (M. Copeman): ...

Mme Caron: Oui, M. le Président, je... Vous avez indiqué, dans votre mémoire, que plus on approche... Je ne veux pas me tromper de page, là, puis je ne veux pas me tromper au niveau des mots. C'est ça, page 11: «Après les avancées importantes qui ont permis d'atteindre une égalité de droit, grâce au travail des groupes de femmes, [les] programmes, [les] mesures spécifiques mises en oeuvre par l'État, il faut s'attendre, à mesure que les femmes, comme groupe social, se rapprocheront d'une égalité de fait, à de plus grandes résistances, puisque ces avancées ne pourront se faire sans modifier de manière importante les rapports sociaux de sexe.»

Et, effectivement, à partir du moment où il y a peu de femmes sur une instance, il n'y a pas vraiment... on ne sent pas vraiment de menace et l'ouverture est très, très grande. Et, plus on se rapproche d'une égalité de fait, plus les résistances ressortent. Elles ressortent directement, dans certains cas, mais elles ressortent d'une manière plus indirecte, dans d'autres cas, mais tout aussi efficace.

Mme Cloutier (Lynda): Vous voulez que je commente, que je...

Mme Caron: Oui. Vous avez inscrit ça dans votre document, donc vous devez penser que c'est bien vrai.

Mme Cloutier (Lynda): ...que j'illustre?

Le Président (M. Copeman): Bien, pas forcément, Mme la conseillère, si vous ne voulez pas, mais...

Mme Cloutier (Lynda): Non, non.

Mme Caron: Vous devez penser que c'est bien vrai.

Mme Cloutier (Lynda): Mais en fait c'est pour ça que tout à l'heure je remerciais la ministre de nous convier à faire ce débat, parce que, pour préparer ce mémoire-là, il a fallu aussi débattre, discuter. On disait: Mais où est-ce qu'on est rendues? Et où est-ce qu'on est rendues, c'était, d'une part, les éléments du contexte dont je vous parlais tantôt. Bon. Puis c'est vrai ici, puis c'est vrai dans d'autres pays, la rationalisation budgétaire, l'antiféminisme. Bon. Il y a un contexte. Mais en même temps on dit: Pourquoi ce contexte-là? Mais il y a aussi des transformations qui se sont faites, il y a plus de femmes qui sont présentes, et je pense que ça devient... ça peut devenir menaçant. Plus il va y en avoir, plus ça va devenir menaçant.

La synthèse écrit «le partage du pouvoir», pas l'accès des femmes au pouvoir. C'est écrit «le partage du pouvoir». C'est menaçant, ça, parce que, s'il y a un partage du pouvoir, il faut que ceux qui l'avaient en aient moins pour que celles qui n'en avaient pas en aient. Donc, c'est pour ça, il y a sûrement... Il y a une agressivité qui découle de ça.

Et Mme Delisle parlait tout à l'heure de la France. Moi, je suis allée en France avant que la loi sur la parité s'applique; ce n'était pas joyeux, hein? Les commentaires des conseillers, là, municipaux, là, j'en ai entendu de toutes les sortes, parce qu'on disait: Non, je ne serai pas là parce que je ne serai sur la liste. Puis tu sentais, là, une agressivité. Mais en même temps, quand je suis retournée après l'élection, mon Dieu! j'ai rencontré plein d'adjointes au maire, j'avais jamais vu ça en x années. Bon. Je ferme la parenthèse. Mais c'est clair que... En tout cas, il y a des résistances.

Mais en même temps il y a aussi des aspects positifs. Je disais, quand on a travaillé... Écoutez, l'UMQ a enfin un comité sur la place des femmes dans les municipalités pour faire la promotion de la place des femmes dans les municipalités, ce n'est pas rien. Il y a plusieurs villes qui sont en train de se donner des commissions femmes et ville ou conseil, bon, des Montréalaises. Il se passe quelque chose. Et, comme je disais que c'était important qu'il y ait un conseil, qu'il y ait un secrétariat, il faut nous aider parce que les villes n'ont pas... le groupe de... Voyons, le corps d'emploi, les agentes de recherche en planification socioéconomique, là, il n'y en a pas beaucoup dans les villes, même dans une ville comme Québec. De la recherche, il s'en fait à peine dans les domaines municipaux.

Donc, on a besoin, comme villes, aussi d'être alimentées par des analyses qui expliquent la situation des femmes dans la région, dans l'ensemble des villes, on a besoin d'être alimentées par ces recherches-là du conseil et être soutenues par des avis du secrétariat qui diraient: Attention, ne faites pas ça, ça va avoir un impact négatif. Donc, je pense que, face aux résistances, il faut aussi être capables d'associer les hommes à cette démarche pour faire en sorte que ce qui est perdu d'un côté est peut-être gagné de l'autre. Et c'est peut-être du public au privé que les gains pourront se faire...

Mme Caron: Merci beaucoup.

Le Président (M. Copeman): C'est tout le temps qui nous est imparti. Avant de remercier nos invités, je souhaite que mes collègues restent sur place quelques instants. Alors, Mme la conseillère Cloutier, Mme la conseillère Lepage, Mme Martin, merci beaucoup d'avoir participé à cette commission parlementaire au nom de la ville de Québec.

n(18 h 20)n

Et je souhaite au moins faire le point sur les travaux de la commission. Et nous avons terminé aujourd'hui même, à l'instant même, la première phase des consultations, hein. Je tenais à l'expliquer parce que ça paraît pour le public et les autres personnes qui peuvent suivre le débat. Alors, on suspend l'exécution de ce mandat, c'est-à-dire les consultations sur le document Vers un nouveau contrat social pour l'égalité entre les hommes et les femmes.

Nous allons entreprendre, nous, la Commission des affaires sociales, entreprendre dès demain un autre mandat qui sera suivi par la suite d'un deuxième mandat. Tout ça pour dire que nous allons reprendre nos consultations en quelque part en mi-mars, dont la date reste à déterminer selon d'autres facteurs, entre autres le besoin de terminer les deux autres mandats. Alors, je vous remercie beaucoup. Nous sommes à mi-chemin, hein, j'ai vérifié avec la secrétaire, alors à mi-chemin dans la consultation. Ça va bien.

Et, sur ça, j'ajourne les travaux de la commission jusqu'à demain matin, afin d'effectuer le mandat, la consultation générale sur le projet de loi n° 83, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux et d'autres dispositions législatives, qui aura lieu demain matin, à partir de 9 h 30. Merci beaucoup.

(Fin de la séance à 18 h 21)


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