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Version finale

37e législature, 2e session
(14 mars 2006 au 21 février 2007)

Le mardi 31 octobre 2006 - Vol. 39 N° 54

Consultations particulières sur le projet de loi n° 30 - Loi modifiant la Loi sur les régimes complémentaires de retraite, notamment en matière de financement et d'administration


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Table des matières

Auditions (suite)

Intervenants

M. Russell Copeman, président

M. Jean-Pierre Paquin, président suppléant

Mme Michelle Courchesne

M. Pierre Reid

Mme Denise Beaudoin

M. Vincent Auclair

Mme Noëlla Champagne

* M. Alain Pélissier, CSQ

* M. Denis Doré, idem

* M. Denis Côté, FPMQ

* M. Pierre Bergeron, idem

* M. Guy Bélanger, idem

* M. André Goulet, AAR

* M. Marcel Rivest, idem

* M. Ghyslain Jobin, idem

* M. Pierre Drolet, Association canadienne des gestionnaires de
caisses de retraite, chapitre québécois

* Mme Louise Charette, idem

* M. Richard Laflamme, idem

* M. Michel Méthot, ACARR

* M. Serge Charbonneau, idem

* Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Neuf heures trente-quatre minutes)

Le Président (M. Copeman): À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare ouverte cette séance de la Commission des affaires sociales. Je vous rappelle que nous sommes réunis afin de poursuivre les consultations particulières et les auditions publiques sur le projet de loi n° 30, Loi modifiant la Loi sur les régimes complémentaires de retraite, notamment en matière de financement et d'administration.

Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. Alors, M. Bouchard (Vachon) va être remplacé par Mme Beaudoin (Mirabel).

Le Président (M. Copeman): Merci. Je vous rappelle, chers collègues ainsi qu'à tous ceux qui sont présents dans la salle, que l'utilisation des téléphones cellulaires et d'autres appareils semblables est défendue pendant les travaux de la commission. Alors, je prierais tous ceux qui en font usage de bien vouloir les mettre hors tension.

Nous allons entendre et échanger avec deux groupes ce matin. Dans quelques instants, nous débuterons avec les représentants de la Centrale des syndicats du Québec, et, autour de 10 h 30, ce sera le tour de la Fédération des policiers et policières municipaux du Québec. Il y a eu un désistement hier, je crois. Alors, nous allons suspendre nos travaux... en fait, ajourner autour de 11 h 30. Il est prévu que nous siégeons cet après-midi, mais c'est l'ordre de la Chambre qui va déterminer la chose.

Auditions (suite)

Alors, sans plus tarder, je souhaite la bienvenue aux représentants et représentantes de la Centrale des syndicats du Québec. M. Pélissier, bonjour.

Centrale des syndicats du Québec (CSQ)

M. Pélissier (Alain): Bonjour.

Le Président (M. Copeman): Je vous avise, comme je le fais pour chaque groupe: vous avez 20 minutes pour votre présentation. Je vais vous aviser, quand il vous reste trois minutes, pour mieux vous aider à conclure tout simplement, le cas échéant, et il y aura par la suite un échange d'une durée maximale de 20 minutes avec les parlementaires de chaque côté de la table. Je présume que c'est M. Doré qui est à côté de vous.

M. Pélissier (Alain): Tout à fait.

Le Président (M. Copeman): Alors, les présentations étant faites, vous pouvez débuter votre présentation, M. Pélissier.

M. Pélissier (Alain): Merci, M. le Président. Mesdames messieurs, bonjour. D'abord, pour compléter la présentation, oui, je suis Alain Pélissier, secrétaire-trésorier de la Centrale des syndicats du Québec, et je suis accompagné de Denis Doré, Denis, qui est conseiller syndical au dossier de la retraite et négociateur aussi pour notre organisation depuis plusieurs années. Denis est également membre du comité de retraite du RREGOP.

Alors, merci de nous donner la possibilité de venir vous présenter notre bref, bref mémoire. Pour ceux qui nous ont déjà vus ici, en commission parlementaire, vous avez sûrement constaté que c'était un changement culturel important quant au nombre de pages qui sous-tendent les positions qu'on vient vous présenter ce matin.

Au-delà de ça, d'entrée de jeu, bien sûr, vous dire que la majorité des membres de la CSQ ne sont pas concernés directement par l'application de cette loi-là, compte tenu que la majorité de nos membres souscrivent au RREGOP ou au RRE. Cependant, nous représentons quelques milliers de personnes qui travaillent dans les centres de la petite enfance, dans le monde des universités, dans le milieu des loisirs, de la communication, Héma-Québec et qui cotisent à un régime de retraite soumis aux dispositions de la Loi sur les régimes complémentaires de retraite. Donc, l'essentiel de notre intervention va porter sur vraiment quelques aspects, compte tenu de notre appréciation de l'ensemble du projet.

Nous nous permettons justement de commencer en vous disant que nous sommes en accord avec l'ensemble des mesures concernant les fonctions et responsabilités des membres du comité de retraite et des fournisseurs de services parce qu'elles encadrent mieux les responsabilités puis les devoirs de toutes et tous et elles offrent une meilleure protection aux personnes qui siègent sur ces comités de retraite là.

Nous voulons vous dire également qu'on a tenu compte du fait que les régimes du domaine municipal et universitaire de même que celui des CPE et des garderies privées conventionnées du Québec ne seraient pas astreints aux exigences de solvabilité, ce à quoi nous souscrivons également entièrement.

Deuxièmement, la très grande majorité des modifications proposées nous apparaît correcte, et ça permettra d'améliorer la santé financière des régimes et, par le fait même, donc de mieux protéger les participantes et les participants, les bénéficiaires ainsi que les personnes retraitées. Par exemple, le fait de ne permettre un congé de cotisation que si le régime est pleinement capitalisé et solvable en tenant compte de la marge pour écarts défavorables sur le moindre des deux excédents nous semble très adéquat dans ce contexte-là, et il faut viser la meilleure santé financière possible des régimes.

Cependant, deux modifications retiennent plus particulièrement notre attention, méritent que nous nous y attardions et devraient à notre avis être enlevées du projet. La première se situe à l'article 11 du projet de loi qui crée un nouvel article 92.2. C'est, comme vous le savez, l'ajout qui permet aux personnes qui prendront leur retraite à compter du 1er janvier 2010 d'exiger l'achat de leur rente auprès d'un assureur, mesure avec laquelle nous sommes en désaccord et dont nous demandons le retrait parce que, pour nous, nous évaluons que l'introduction de cette possibilité générerait des coûts supplémentaires significatifs. On peut parler d'une hausse appréciable pouvant aller jusqu'à 15 % de la cotisation d'exercice. Les actuaires vont devoir tenir compte de cette éventualité lorsqu'ils évalueront le passif des régimes, et donc les assureurs ne prendront sûrement pas la chance de prendre ça à leur charge, et ils voudront se donner des marges bénéficiaires pour d'autres écarts défavorables. Donc, ainsi, comme le projet de loi durcit les obligations concernant la solvabilité et instaure une marge pour écarts défavorables, dont nous reparlerons un peu plus loin, il nous semble que c'est inutile d'ajouter des bretelles à la ceinture.

De plus, nous pensons que cette mesure, si elle devait devenir populaire, pourrait inciter plusieurs employeurs à se tourner vers des régimes à cotisation déterminée bien sûr pour éviter la surcharge que créerait cette option de garantir la rente si plusieurs personnes s'en prévalaient, donc d'établir un taux fixe et de s'en tenir à ce taux fixe là.

n (9 h 40) n

Finalement, on a de la difficulté à comprendre pourquoi un projet qui prône l'équité pourrait créer deux catégories de personnes retraitées: celles d'avant 2010 et celles d'après 2010 qui auraient la possibilité d'exiger l'achat d'une rente chez l'assureur. Donc, nous réitérons notre demande de retrait de cette mesure pour ces raisons-là que nous venons de mentionner et surtout en nous appuyant sur la création de la marge pour écarts défavorables en solvabilité avec laquelle nous sommes totalement en accord. Cette mesure-là, sans coût direct pour les participantes et les participants ou pour les employeurs, comme on le laissait présager à l'origine, constitue pour nous une garantie suffisante quant à la protection des rentes. Selon nous, un régime solvable auquel s'ajoute une marge pour écarts défavorables sera en mesure de faire face à ses obligations. Cette marge défavorable là, créée à partir des gains actuariels et qui se situerait autour de 10 %, serait pour nous un gage tout à fait suffisant de sécurité pour l'avenir, et ça constitue une avenue beaucoup plus intéressante que l'achat de la rente, car elle ne génère pas de coûts nouveaux et elle est tout aussi sécurisante.

Deuxième élément sur lequel nous aimerions que vous réfléchissiez et que cet élément soit retiré du projet, c'est le processus d'attribution du surplus ou de l'excédent d'actif, et nous nous arrêterons plus spécifiquement à l'introduction du principe d'équité et la possibilité au recours à l'arbitrage.

Le projet de loi propose que, pour améliorer un régime qui est en situation de surplus, la ou les modifications doivent s'inscrire dans une perspective d'équité entre actifs, non actifs et bénéficiaires et prévoit que certains éléments doivent être pris en considération, comme l'historique du régime, la source du surplus, les caractéristiques, etc. C'est sûr que, pour une organisation syndicale comme la nôtre, qui s'est investie depuis plusieurs décennies dans la négociation de la retraite, c'est quelque chose d'inacceptable. En matière de régimes de retraite, on tente toujours d'agir en considérant les cotisantes, les cotisants passés, présents et à venir d'un régime de retraite. Ça fait partie de nos responsabilités et de nos objectifs. À cette fin-là, nos documents de consultation, qui sont des documents publics, au moins sur les trois ou quatre dernières rondes de négociations dans le secteur public et parapublic, font état qu'on a toujours trois priorités derrière nos revendications sur la retraite, à savoir la permanence des mesures, l'universalité de ces mesures-là et l'équité intergénérationnelle. Et c'est ce que nous avons tenté d'appliquer même lors de la dernière ronde de négociations, où nous n'avions qu'une seule demande syndicale, à savoir la possibilité pour les retraités... les années 1982 à 2000 soient indexées de la même façon que les années depuis 2000 dans le secteur public et parapublic. C'était donc une demande qui touchait à la fois les personnes au travail comme les personnes retraitées depuis 1982.

Donc, pour nous, la notion d'équité constitue une préoccupation majeure mais qui n'a pas à nous être imposée par une loi. On peut bien sûr comprendre que, dans des milieux qui ne sont pas syndiqués ou qui ne font pas l'objet de négociations entre un employeur et une organisation, il pourrait y avoir des accommodements, mais, dans le cas où il y a des institutions démocratiques, il y a des prises de décision qui sont faites à la lecture d'orientations et de décisions largement élaborées et informées, on pense que c'est à une organisation syndicale qui doit s'assurer de s'entériner une entente, que la majorité des membres y adhèrent et que ce n'est pas à un individu à venir s'objecter ou à tenter de faire prendre une procédure différente. La multiplication de ces gestes-là, on n'a aucune idée des coûts que ça pourrait comporter d'une part, mais ça remet en cause des fonctionnements avec lesquels nous ne travaillons pas, et nous pensons que les règles actuellement en vigueur sont suffisantes pour garantir l'équité lorsque le régime fait l'objet d'une réelle négociation. Donc, on demande que les régimes où les parties négociantes doivent s'entendre pour apporter des modifications soient exemptés de cette mesure. Merci.

Le Président (M. Copeman): Merci, M. Pélissier. Alors, Mme la ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale.

Mme Courchesne: Merci, M. le Président. M. Pélissier, M. Doré, merci d'être devant nous, ce matin. J'ai pris connaissance de votre mémoire bref mais concis, tout à fait en ligne avec les points que vous venez de mentionner. D'abord, je vais vous dire mon appréciation sur votre appréciation du projet de loi. J'apprécie certainement les remarques positives à cet égard-là. Je vais aller d'abord sur le dernier point que vous venez d'aborder. Ça a été une grande question, ça, au cours de la commission parlementaire. Vous savez qu'aujourd'hui et demain sont les deux dernières journées. Donc, on approche du point final, et je pourrais résumer cette commission parlementaire en disant que ce dernier aspect est le coeur des préoccupations, surtout des parties syndicales. Et je comprends, je peux comprendre parce qu'effectivement vous êtes... et vous venez tout juste de l'énoncer de façon très éloquente, vous considérez que, comme syndicat, vous représentez l'ensemble des cotisants passés, présents et futurs, dans un certain sens, et vous considérez que le projet de loi peut interférer avec le processus de négociation. Je comprends ça bien, puis ce qui m'intéresse, c'est que, comme vous, j'ai à coeur de m'assurer qu'on peut avoir une flexibilité pour respecter l'équité intergénérationnelle, mais honnêtement la commission nous a démontré, ce que nous avons entendu, que c'était très difficile de faire consensus sur comment établir cette équité intergénérationnelle.

Donc, les syndicats disent: Faites-nous confiance. On a un mandat, on a un mandat de négocier, on a un mandat, une responsabilité de tenir compte des retraités, et faites-nous confiance, nous le faisons. Et à juste titre probablement, de votre point de vue, vous dites: On réussit bien quand il y a une réelle négociation ? c'est bien le mot que vous avez employé. Or, même dans les secteurs publics... Si on est devant vous, aujourd'hui, c'est parce que, même dans les secteurs publics, il y a des associations de retraités ? puis je ne dis pas que c'est dans votre syndicat, là, je parle de façon générale ? il y a quand même bon nombre d'associations de retraités qui ont manifesté de vives inquiétudes, qui ont vécu des erreurs du passé, qui ont subi certains préjudices par rapport à des décisions prises. Et il y a de vos collègues qui nous disent: Ah, ce n'est pas parce qu'il y a eu quelques erreurs... On n'est pas parfaits, ce n'est pas parce qu'il y a eu quelques erreurs... Ce n'est pas grave, oublions ça, passons l'éponge et poursuivons. Or, j'ai toujours compris notre rôle de législateur comme étant notre capacité de définir ce qu'était cet intérêt public et quel était l'intérêt de l'ensemble des participants à un régime de retraite.

Alors, ma question, c'est: Comment pouvez-vous nous assurer, par les déclarations que vous faites ce matin, les affirmations, comment pouvez-vous nous assurer que les utilisations d'excédents vont vraiment tenir compte de ce qui appartient réellement... Comment pouvons-nous vraiment départager ce qui appartient aux cotisants actifs et ce qui appartient aux retraités? La raison de ça, c'est que chaque régime a son histoire, et c'est une roue qui tourne, hein, ça se répète. Il y a des congés de cotisation, il y a, dans certains cas, des grèves, il y a des revendications, il y a... Tout le monde, au fil de sa carrière, contribue à sa façon. Alors, pourquoi persiste-t-il un malaise au sein des retraités, y compris ceux du secteur public?

M. Doré (Denis): C'est une question de plusieurs millions de dollars, pour ne pas dire de plusieurs milliards, et on pourrait s'étendre longtemps sur ce sujet-là. Notre souci, nous... La première chose, un régime de retraite, bon, ça a une longue pérennité, là ? je fais exprès en disant «longue pérennité» ? c'est quasi éternel, là, et le souci qu'on doit y avoir en premier lieu, c'est de s'assurer que les gens reçoivent effectivement une rente en fonction de ce pour quoi ils ont payé puis c'était quoi, leur contrat face au régime de retraite. Et en même temps c'est de s'assurer que les générations futures ne se retrouveront pas à payer beaucoup plus cher que la génération passée ou présente. Ça, c'est le souci qui nous anime toujours quand on regarde des améliorations qui pourraient éventuellement s'apporter à un ou des régimes.

n (9 h 50) n

Et de là à départager ce qui appartient à un plus qu'à l'autre, c'est très, très, très difficile. Il y a toujours, dans l'histoire de régimes, des moments où il y a eu des départs hâtifs, où il y a eu, à la limite, des congés de cotisation ou d'autres mesures particulières. Sans vouloir dénigrer ce que les personnes retraitées peuvent dire, souvent ces personnes-là oublient, une fois qu'elles sont à la retraite, qu'elles ont bénéficié de mesures particulières au moment de leur départ. Ça arrive. Puis ce n'est pas de la mauvaise foi de leur part, loin de là, là, mais ça arrive qu'on oublie qu'on a profité d'une mesure particulière en partant. Ça fait que de trouver une méthode, une méthode, là, technique, je pense que c'est impossible. On fait affaire à notre bon sens, on regarde aussi le régime, vers où il s'en va puis d'où il vient, ça, c'est bien évident, mais il n'y a pas de recette magique à ça, malheureusement. Parce, s'il y en avait une, c'est sûr qu'on l'appliquerait.

Puis il faut se fier aux prévisions des actuaires qui nous disent: Bien, votre régime, si la tendance se maintient, si, aujourd'hui, il coûte, mettons, 12 % globalement, bien, dans 10 ans, il va en coûter 15 si vous ne changez rien. Bon, bien là, il faut voir c'est quoi qu'on peut faire. Si on bonifie trop vite, bien on risque de se retrouver, cinq ans plus tard, à dire: Bon, bien là, qu'est-ce qu'on fait, on coupe les bénéfices du régime ou on augmente de façon importante la cotisation? C'était une grande question que vous m'avez posée, je vous donne une parcelle de réponse.

Mme Courchesne: On va...

Une voix: ...

Mme Courchesne: Oui?

M. Pélissier (Alain): Si vous me permettez, un autre élément, sur le plan politique, qu'on peut... Comment peut-on s'assurer que, par exemple, les retraités, parce que c'est un peu ça dont il est question, puissent avoir voix au chapitre dans les grandes décisions, dans les prises de décision qui les concernent? Bien, évidemment, on ne prétend pas, comme organisation, avoir le modèle parfait, mais nous avons, dans nos rangs, une association de retraités de 48 000 membres cotisants, au-delà de, qui sont assujettis aux règles de fonctionnement de notre organisation, qui ont voix au chapitre en termes de prises de décision, qui votent dans nos congrès, qui votent dans nos conseils généraux, qui interviennent dans les instances de négociation, qui ont donc voix... partie prenante des décisions qu'on... évidemment pour les dossiers qui les concernent.

Évidemment, on ne peut pas imposer cette règle-là à toutes les autres organisations, à tous les petits syndicats de boutique, mais je pense que c'est un modèle qui fait que... Au même titre que vous, politiciens, politiciennes, quand vous vous engagez dans le cadre de la décision concernant une législation, comment pouvez-vous nous garantir que le gouvernement qui va vous succéder ne passera pas le bulldozer là-dedans puis changer les choses? Vous savez comme moi c'est quoi, des processus démocratiques, des prises de décision. Nous, ces engagements-là, on les fait sur la base de notre vécu des 20 dernières années particulièrement et de notre vécu interne où notre association de retraités n'est pas qu'un club de collectionneurs de bouteilles de vin. C'est correct, là, ça peut être intéressant de collectionner des bouteilles de vin, mais même la municipalité de Paris vient de se départir de la cave de Chirac il y a deux semaines. Mais, bon, au-delà de ça, ce qui est important, c'est de reconnaître le pouvoir et le droit des retraités de participer aux décisions sur les dossiers qui les concernent.

Mme Courchesne: Bien, justement, parlons-en, ça m'intéresse. Ce que vous me dites, c'est que, par exemple, s'il y a un surplus... Est-ce que, s'il y a un surplus une année x, est-ce que vous me dites qu'il y a un processus chez vous par lequel systématiquement vous consultez vos retraités sur l'utilisation de cet excédent-là? Parce que ce que j'entends, c'est que vous jugez que ça les concerne. Donc, est-ce que ça se fait... Comment ça se fait, au moment où l'excédent se produit, ou si vous avez déterminé à l'avance un processus d'utilisation d'excédents, ou... Puis vous me dites qu'il y a un vote, donc ça veut dire que chaque retraité est informé et consulté? Est-ce que c'est ça?

M. Doré (Denis): Bon, il faut faire attention, la majorité de nos membres, comme on le disait, sont au RREGOP, et on sait que... Puis ce n'est pas l'objet ici, aujourd'hui, là, puis au RREGOP, bien, ça n'existe pas, des surplus, en partant. Mais là je pourrais vous l'expliquer longtemps, mais plaçons ça sous cet angle-là.

Mme Courchesne: Mais que le RREGOP?

M. Doré (Denis): Non. Nous sommes quand même... Bien, j'ai eu le bonheur, là, de participer à la création du régime des CPE puis des garderies privées conventionnées du Québec où, là, bien sûr, c'est un régime qui est très jeune et il date d'avril 2003. C'est déjà prévu, dans le texte du régime, comment les surplus pourraient se partager, à savoir une moitié... parce qu'on paie moitié-moitié chacun de notre côté, là, le gouvernement... bien, le ministère ? là, je m'excuse, c'est parce que ça a changé de nom souvent ? de la Famille, des Aînés et de... l'autre petit bout nous manque. Bon, on paie chacun moitié-moitié le régime, et il est prévu qu'en cas de surplus il y a une moitié qui va du côté, on va dire, patronal, puis l'autre moitié vient du côté syndical. Puis, du côté syndical, bien là c'est certain qu'on n'a pas de règles précises encore comment on doit l'utiliser, mais ça doit être utilisé pour améliorer les rentes. C'est l'objectif qu'on a. Bon. Puis ça date de 2003, des retraités, on en a peu ou pas, là. Ça fait qu'on n'a pas eu à vivre ça encore présentement. Notre expérience est jeune, là, en matière de régimes complémentaires de retraite.

Mme Courchesne: En fait, ce que ça me dit, c'est que ? puis vous n'êtes pas les premiers qui signalez ça ? c'est évident dans mon esprit ? puis on ne réglera pas ça cette fois-ci, mais certains en ont fait la demande ? c'est sûr qu'il y a une différence entre les régimes publics et les régimes privés et c'est sûr que le pouvoir de négociation n'est pas le même, et les bases de négociation ne sont pas les mêmes non plus. Donc, je comprends vos demandes, mais ce que ça m'indique aussi, c'est que la loi, on la fait, elle inclut les deux types de régimes.

Par exemple, je ne dis pas que c'est le cas du RREGOP, mais on sait qu'il y a des demandes importantes de la part de retraités de l'État sur l'indexation. Tous les députés reçoivent à leur bureau... Et ce n'est pas récent, là, ça ne date pas de cette année. Donc, une des utilisations de l'excédent pourrait être l'indexation, mais ça se fait dans un contexte... Dans le cas des fonctions publiques et des réseaux ? ce n'est pas nécessairement que le Syndicat de la fonction publique; j'inclus dans ça l'ensemble des réseaux de l'État ? à mon avis les bases de négociation ne sont pas nécessairement les mêmes que dans les régimes privés.

Je ne vous cacherai pas que le projet de loi qui est devant nous s'est attardé beaucoup à la problématique de ce qu'on rencontre dans le secteur privé et... dans notre souci d'avoir une protection pour les retraités du secteur privé tout en maintenant ? et j'insiste ? un équilibre aussi avec les différents participants que sont les employeurs et les travailleurs actifs. Et c'est ça, le défi de cette loi-là, c'est d'être capable d'atteindre ce juste équilibre. Et par contre, que ce soit dans le public ou dans le privé, les syndicats nous disent: Nous sommes les mandataires, nous sommes ceux qui pouvons le mieux répondre à cette notion d'équité.

Je crois qu'on va continuer à réfléchir sur cette... pas difficulté, mais cette particularité, mais, encore une fois, je ne pense pas que cette particularité, qui touche quand même des dizaines et des dizaines de milliers de citoyens, puisse être réglée. Autrement dit, on ne prendra pas la décision maintenant de dire: Les régimes du secteur parapublic vont être extirpés de cette loi-là, mais j'écoute et j'entends ce que vous me dites.

Ce que je comprends aussi, c'est que vous êtes d'accord avec la notion de solvabilité ou vous êtes d'accord avec les mesures de resserrement de solvabilité, mais pas avec le rachat de rentes. Est-ce que je peux conclure que vous êtes d'accord avec une provision pour écarts défavorables plus sévère pour atteindre une meilleure solvabilité plutôt que d'en plus rajouter un rachat de rentes? Est-ce que c'est ça que je comprends? Puis est-ce que vous êtes d'accord à ce que cette provision-là soit liée à la politique de placement?

n (10 heures) n

M. Doré (Denis): Sur la marge pour écarts défavorables, effectivement nous sommes en accord sur le fait qu'elle pourrait être, là, relevée. Il y a quand même une limite, là, puis on a aussi... Parce que, comme gouvernement, vous allez avoir un travail à faire parce que présentement ce serait comme illégal, là. Le fisc canadien ne permet pas ça parce qu'il y a quand même la règle, là, du 110 % qui... puis elle n'est même pas sur... Si ma mémoire est bonne, ce n'est même pas sur la solvabilité, c'est sur la capitalisation. Ça fait qu'on serait en excédent, là; on aurait plus d'argent que ce qu'on a le droit d'avoir selon le fisc canadien.

Le dernier bout de votre question, à savoir de lier ça avec la politique de placement, là je dois vous dire que vous me surprenez, là, c'est la première fois que je l'entends, celle-là, et je ne suis pas certain qu'il faille absolument apparier une politique de placement avec le passif d'un régime si c'est dans ce sens-là que vous le dites. Ça pourrait paraître intéressant, mais, dans le monde d'aujourd'hui, qu'on connaît maintenant, là, avec les taux d'intérêt qu'ils ont, les rendements sur les obligations et des choses comme ça, si on voulait s'apparier, il faut aller vers des obligations à long terme, puis aujourd'hui aller vers des obligations à long terme, c'est comme... Bien, le deux ans est aussi payant que le long terme, là, puis ça n'a comme pas de bon sens. On est dans un drôle de monde économique, là, la courbe est plate puis presque inversée, là. Comme je vous dis, le deux ans est quasiment au même taux que le 30 ans. Ça n'a comme pas de bon sens. Dans le monde d'aujourd'hui, c'est difficile. Puis d'obliger les comités de retraite à vraiment coller leur politique de placement là-dessus, je ne suis pas certain que, dans le contexte présent, là, ce serait la meilleure chose à faire.

Le Président (M. Copeman): M. le député d'Orford, il reste à peu près trois minutes et demie.

M. Reid: Oui. En fait, c'est une question plutôt technique, peut-être. Je vous remercie de votre mémoire, qui est très clair. En tout cas, on a l'impression de comprendre davantage. Mais j'en sais assez sur les régimes de retraite pour savoir que c'est dur à comprendre, et donc je vais être très prudent dans ma question. Vous associez le fait de pouvoir acheter une rente à, disons, la bretelle et la ceinture au-delà de la marge de 10 %, mettons, pour l'écart défavorable. Mais, si on l'associe, est-ce que ? je fais un raisonnement peut-être simpliste ? le fait d'assurer une rente ne libère pas justement une espèce d'obligation par rapport à la prévision des aléas du futur pour le montant? Et est-ce que cette marge-là ne peut pas être diminuée d'autant que le coût de la rente, autrement dit, au-delà... Parce que vous dites que ça coûterait plus cher, il y a une marge bénéficiaire, etc., à prévoir pour les assureurs, est-ce que ce n'est pas le même argent, ça, qui joue en quelque part et est-ce que ce n'est pas complémentaire plutôt que s'additionner? Peut-être, c'est trop simpliste, là, mais...

M. Doré (Denis): Non, ce n'est pas simpliste, c'est même subtil. Au moment où on assure la rente, l'assureur, lui, c'est bien évident, là, il va se protéger et il va se donner une marge, lui aussi, pour écarts défavorables que je vais payer une deuxième fois parce que je vais déjà en avoir une quand même dans mon régime, une marge pour écarts défavorables. Il va nécessairement se donner une marge bénéficiaire aussi parce qu'ils ne font pas ça gratuitement, c'est certain. Donc, c'est quand même un coût qui n'est pas à dédaigner dans le régime. Puis, on le sait, il y a des actuaires qui disent que ça pourrait tourner entre 10 % et 15 % de coûts supplémentaires. Et ça, dans un régime qui coûte 10 %, exemple ? puis ça, c'est un régime pas cher ? bien ça veut dire qu'il monte à 11,5 %. Puis là c'est vrai, on vient garantir la rente, c'est l'assureur qui va prendre le risque, mais c'est protégé, ça, c'est certain.

D'un autre côté, si on a la marge pour écarts défavorables, déjà on est certain de pouvoir payer les sommes, parce que, si on est en solvabilité à une hauteur, exemple, de 110 %, il faudrait que ça aille mal, très mal, pour qu'un régime ne soit pas capable de rencontrer ses obligations. Ça fait que pourquoi, en jumelant les deux... Peut-être qu'ils pourraient être complémentaires, mais, si je les jumelle, là, je viens de taxer le régime doublement. Je l'oblige à capitaliser plus pour se protéger en solvabilité puis, en même temps, je lui dis: Si des gens décident de partir, bien tu vas assumer la marge pour écarts défavorables de l'assureur.

M. Reid: Mais la question, c'est: Pourquoi devrait-on continuer à protéger une somme qui devient protégée par l'assureur? C'est ça, ma question, dans le fond.

M. Doré (Denis): Bien là, ce que vous nous dites... mais c'est parce que, là, on se retrouverait, si on faisait ça... on annulerait la marge pour écarts défavorables puis on se...

M. Reid: Sur ces sommes-là.

M. Doré (Denis): Bien, c'est bien évident, il ne serait plus là, il ne serait plus dans le passif du régime. Mais, si on ne veut pas avoir... Ma marge pour écarts défavorables, là, je la crée dès le premier jour que quelqu'un cotise, là. Je la paie tout au long du régime, Si la personne cotise 35 ans, bien elle a joué tout le long. J'aurai eu des aléas avec, là, puis j'aurai fait des bons coups, des mauvais coups, mais, peu importe, là, mais je vais avoir eu de l'argent. Puis là, après ça, là, l'usufruit de ce montant-là qu'on aura créé au fil des ans, je vais le transférer chez l'assureur.

M. Reid: C'est-à-dire, si vous permettez, M. le Président, c'est que la protection pour cette rente-là qu'on bâtit dans le régime est tout simplement transférée chez un assureur, et donc la marge est transférée sous forme d'une marge que l'assureur se donne pour protéger lui-même son risque. Je ne sais pas, peut-être que ce n'est pas comme ça que ça peut fonctionner, peut-être que le projet de loi ne permet pas de le faire de cette façon-là, mais, puisque l'argent sort du régime, je me dis, moi, il est normal qu'il apporte sa garantie avec lui. Non?

M. Doré (Denis): Au moment où ? je vais essayer de faire ça court; au moment où ? l'argent sort du régime... Prenons aujourd'hui. Si je vais chez l'assureur aujourd'hui, avec les taux d'intérêt qu'on a là, on sait ce que ça va me coûter. Et là j'ai pris tout mon argent, et je l'ai envoyé chez l'assureur. Si je garde ce passif-là avec moi, je la garde, la personne retraitée, demain matin, si les taux d'intérêt montent puis si mes rendements montent, ça va bien, mon affaire, je suis content. Est-ce que les taux d'intérêt peuvent aller plus bas que ce qu'on a là? Oui, mais pas beaucoup. En tout cas, difficilement plus bas que ça, mais quand même un peu plus bas. On est quasiment au creux, là. De créer ça dans le monde d'aujourd'hui, c'est très onéreux pour un régime puis ce n'est vraiment pas le bon moment. Puis je me mets à la place d'une personne qui cotise aujourd'hui, puis que c'est un peu chambranlant, puis on n'a pas de marge pour écarts défavorables, on me dit: Vous avez la possibilité d'aller chez l'assureur, automatique, j'y vais parce que présentement il y a un risque. Dans l'avenir, il n'y en aura peut-être pas, mais ça, ça... En tout cas, à mon avis, ça endetterait encore plus les régimes présentement.

M. Reid: On n'a plus de temps?

Le Président (M. Copeman): À moins qu'il y ait consentement, mais... Oui.

M. Reid: Bien, une dernière petite question: Est-ce qu'à ce moment-là vous êtes en train de dire que ce ne serait pas le même impact... Lorsqu'on aura une marge de sécurité, l'impact n'est plus le même à ce moment-là de permettre un achat de rente?

M. Doré (Denis): Une fois qu'on a une marge pour écarts défavorables entièrement capitalisée puis qu'en solvabilité on est rendu à 110 %, il n'y a pas personne qui a besoin d'aller... Le régime, il est sécuritaire.

M. Reid: Mais, si quelqu'un voulait le faire, ça n'aurait pas le même impact.

M. Doré (Denis): Il n'y aurait pas d'intérêt ? puis là je vais rejoindre Mme Courchesne là-dessus; il n'y aurait pas d'intérêt ? parce que, s'il fait ça, là, la personne se sort du régime. Les bonifications éventuelles futures ne sont plus là pour cette personne-là. Ça fait que l'intérêt, il n'est pas fort. Surtout un régime qui serait en solvabilité à 110 %, il y a des chances qu'il dégage des excédents dans le futur puis là il y a des chances d'avoir une rétribution, peu importe, envers la personne retraitée. L'intérêt ne serait plus là.

M. Reid: C'est parce que ma question était: Est-ce que ça a un impact ou non? Je comprends que vous dites que personne n'aurait intérêt à le faire, mais l'impact ne serait plus le même, l'impact que vous décrivez ne serait plus le même, là, sur le régime, puisqu'il aurait son 110 %, en quelque sorte?

M. Doré (Denis): Mais le coût demeurerait, le coût est toujours là.

M. Reid: Mais ma question initiale était: Le coût est là, mais le 110 %, il y a un 10 %, là, qui servirait aussi... qui sort, qu'il n'est plus nécessaire d'avoir et qui servirait à payer la différence effectivement du coût de la rente. Non?

M. Doré (Denis): Bien, il faut que je demeure quand même à 110 %. Si j'en sors, il faut que j'en remette.

M. Reid: À 110 % de l'argent qui va rester.

Le Président (M. Copeman): Je suis à la veille que vous lunchiez ensemble.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Copeman): Manifestement, il y a beaucoup de sujets, mais il n'y a plus de temps. On a vraiment exagéré un tout petit peu. Mme la députée de Mirabel et porte-parole de l'opposition officielle en matière de régimes de rentes et de retraite.

Mme Beaudoin: Merci, M. le Président. Alors, M. Alain Pélissier, M. Denis Doré, merci pour la présentation de votre mémoire. Il est bref mais précis, et vous dites, dans votre mémoire, que finalement, s'il est bref, c'est parce que la grande majorité de vos membres ne sont pas concernés par l'application de la loi portant sur les régimes complémentaires de retraite, étant des cotisantes et des cotisants ou des personnes retraitées du RREGOP ou du RRE. Par contre, vous parlez d'équité intergénérationnelle, et, moi, j'aimerais savoir: Selon vous, est-ce que le projet de loi actuel, là, tel qu'il est devant vous, c'est un plus ou un moins pour l'équité intergénérationnelle?

M. Doré (Denis): Je ne m'attendais pas à celle-là. Moi, je pense que, sous certains aspects, c'est évidemment un plus. À partir du moment où on s'assure de la meilleure santé financière possible de régimes à prestations déterminées, on garantit aux générations futures d'avoir aussi un régime à prestations déterminées puis de ne pas voir leur régime se transformer en régime à cotisation déterminée. Essentiellement, là, l'âme de ce projet de loi là, c'est de faire en sorte qu'il y ait des sommes nécessaires pour assurer les rentes de toutes et tous, puis en même temps, quant à nous, ça assure la pérennité des régimes une fois que quelqu'un s'est effectivement embarqué dans ce mouvement-là. Et dans ce sens-là, si on le voit pour l'avenir puis si on voit l'équité intergénérationnelle, dans ce sens-là, le projet de loi, effectivement c'est un plus.

n (10 h 10) n

Mme Beaudoin: Vous parlez dans votre mémoire, à la page 7, et c'est très clair: «Pour une organisation syndicale comme la nôtre, cela est presque une insulte.» Alors ça, il n'y a pas d'ambiguïté. «En matière de régime de retraite, nous tentons toujours d'agir en considérant les cotisantes et les cotisants passés, présents et à venir d'un régime de retraite. Cela fait partie de nos responsabilités et de nos objectifs.»

Moi, je me pose la question: Qu'est-ce que l'introduction du principe d'équité et de l'arbitrage, là, va induire, selon vous, sur la dynamique de la négociation de la convention collective? Parce que c'est clair, vous dites: C'est une insulte, là. J'aimerais ça que ce soit plus précis.

M. Pélissier (Alain): Bien, d'abord, vous dire que... oui, vous dire que, si notre mémoire est aussi bref, ce n'est pas nécessairement parce que la majorité de nos membres sont au RREGOP, mais c'est que la majorité des dispositions du projet de loi nous conviennent, qu'il y avait deux éléments sur lesquels on n'était pas d'accord, puis c'est ceux-là qu'on soulève, dont le deuxième, auquel vous vous référez.

J'ai fait mention, dans ma présentation, de notre historique. Je ne peux pas parler au nom de l'ensemble du mouvement syndical québécois, je ne peux pas parler au nom de l'ensemble des organisations syndiquées ou autres, mais je peux parler chez nous. On est effectivement la seule organisation qui regroupe de façon institutionnalisée une association de retraités en bonne et due forme qui représente près de 50 000 personnes ? ce n'est pas rien non plus, là, il n'en existe pas d'autre de même au Québec ? et ces gens-là ont voix au chapitre dans nos décisions, dans notre fonctionnement quotidien au niveau de la centrale, mais particulièrement en négociation sur la question de la retraite.

Ça s'appuie bien sûr sur un historique de prise de décision, de processus démocratique. Et, comme partie négociante, nous, c'est sûr qu'on dit: À partir du moment où n'importe quel individu, sur la base d'une insatisfaction, pourrait s'inscrire dans un processus d'arbitrage, de contestation malgré des décisions qui ont été prises dans... des règles démocratiques ? puis on vit dans une société démocratique ? on pense que ça n'a pas raison d'être. Et c'est dans ce sens-là que, nous, on n'est pas d'accord de discarter les organisations syndicales comme parties prenantes, et on pense que les règles actuelles permettent de protéger ces droits-là, surtout en s'appuyant bien sûr, encore une fois, sur ce que nous sommes à la CSQ.

Mme Beaudoin: M. le Président, vous dites également, à la page 6, que vous avez de la difficulté à comprendre qu'un projet de loi prônant l'équité ne permette pas... bien, au fond, «permette de créer deux catégories de personnes retraitées: celle d'avant 2010 dont la rente est essentiellement dépendante du régime et celle d'après qui pourrait exiger l'achat d'une rente chez un assureur». Qu'est-ce que vous suggérez? Il y a certaines associations qui nous ont dit qu'ils voudraient que ce projet de loi, que ce soit lors de son adoption, là, qu'on puisse avoir tous les bénéfices pour les retraités. Est-ce que vous seriez d'accord avec ça?

M. Pélissier (Alain): Vas-y, Denis.

M. Doré (Denis): Pas vraiment.

Mme Beaudoin: Non, puis je ne suis pas surprise, là, de votre réponse.

M. Doré (Denis): Parce que ce qu'on vous dit, nous, c'est que la notion de pouvoir acheter une rente chez l'assureur au choix de la personne qui prend sa retraite, on est contre ça. Nous ne sommes pas en accord avec ça. Là, on faisait l'analogie par rapport à l'équité, mais, même si on pouvait dire que la rente serait achetable le 1er janvier prochain, on demeurerait contre parce qu'on ne pense pas que c'est rendre service aux régimes de retraite que de permettre ça, et pas plus de rendre service non plus aux personnes qui prendraient leur retraite ultérieurement quand on allie ça ? et ça, c'est très important, là; quand on allie ça ? aux règles de solvabilité puis à la marge pour écarts défavorables. Nous, on fait un lien, là, très direct avec ça, on ne s'en cachera pas.

Mme Beaudoin: Vous soulevez... Et c'est la première fois qu'on entend parler d'une disposition de la loi fédérale qui empêcherait l'adoption du projet de loi. Est-ce que j'ai bien compris? Et, si oui, est-ce que vous pouvez expliquer?

M. Doré (Denis): Ça n'empêche pas l'adoption du projet de loi, mais ça pourrait en empêcher l'applicabilité ? je ne sais pas si c'est français, mais, en tout cas, je le dis quand même, là ? l'application parce que... pour arriver à 110 % en solvabilité. Présentement, ce que la loi fédérale permet, c'est d'être capitalisé à 110 %. Au-delà de ça, il faut apporter des améliorations au régime, prendre des congés de cotisation. En tout cas, un régime ne peut pas être capitalisé à plus que 110 %.

Il est bien entendu que les actuaires, qui sont des personnes très intelligentes, ont trouvé toutes sortes de moyens pour un peu contourner cette règle-là en créant une marge de ci, une marge de ça, mais, même à ça, présentement la notion de solvabilité à 110 %, vous ne pouvez pas trouver son écho, là, du côté fiscal au Canada. Cependant, ce que j'en sais, c'est que, partout à travers le Canada, dans toutes les provinces... J'ai la chance, à tous les étés, d'assister à une rencontre, là, de régimes de retraite d'enseignants, partout les pressions se font pour se sortir de cette règle un peu particulière du 110 %.

Puis, si vous me le permettez, je vais vous donner un petit exemple. Teachers, on en parle souvent, de ce beau régime là, en 2000, 4 milliards d'excédent. Ça dépasse la règle du 110 %, ils sont obligés ? obligés ? de dépenser 4 milliards en 2000. Aujourd'hui, ils sont obligés de hausser leur taux de cotisation; ils n'avaient pas le choix. Et ça, on peut penser que la règle du 110 % ne serait pas un obstacle, là, qui durerait très longtemps parce que, du côté du gouvernement canadien, je pense qu'ils sont très sensibles à ça et je pense qu'ils sont prêts à agir de ce côté-là.

Mme Beaudoin: Alors, si je comprends bien, en fin de compte, vous êtes pour le statu quo, sauf que vous êtes pour l'écart pour provision, vous êtes également pour le 90 %, vous êtes contre l'achat de la rente. J'aimerais ça vous entendre sur la lettre de crédit. Est-ce que vous avez analysé ça ou...

M. Doré (Denis): Non.

Mme Beaudoin: Non. Ça ne s'applique pas à vous de toute façon, c'est ça?

M. Doré (Denis): C'est ça, nous, on n'a pas beaucoup... Comme je vous dis, dans le privé, on n'en a pas. Nos régimes sont plus de l'ordre péripublic, là, ce qui fait qu'ils ont leur pérennité, puis tout ça, puis ça ne nous touche pas. Donc, on ne s'est pas attardés à ça.

Mme Beaudoin: D'accord. Le Conseil du patronat a déposé un mémoire, puis j'aimerais ça avoir vos commentaires sur leur vision de ce projet de loi là. Ils disent finalement que ce sont «des garanties illusoires qui augmentent les coûts et les risques assumés par les entreprises accentuant ainsi l'asymétrie dans les règles de financement [des] régimes». Ils disent: «Un projet de loi qui précipitera la fin des régimes de retraite à prestations déterminées dans le secteur privé.» Est-ce que vous pouvez commenter leur vision?

M. Doré (Denis): Belles phrases. Je m'excuse, mais je vais me limiter à ça: Belles phrases.

Mme Beaudoin: Belles phrases, dans quel sens?

M. Doré (Denis): Bah! c'est... Ils peuvent penser que ça pourrait mener à ça si on regarde le projet de loi dans tout son ensemble, là, comme il existe présentement. Moi, je pense que, modifié comme, nous, on le souhaite et comme d'autres organisations l'ont souhaité, ça ne mènera pas à ça. Au contraire, on devrait être pas mal plus à l'aise dans nos régimes de retraite, et il y aurait pas mal moins de surprises dans nos régimes de retraite. En tout cas, c'est notre vision, à nous. Nous, on pense que ce serait beaucoup plus sécurisant. Puis c'est sûr que ce qu'on ne connaît pas, des fois ça nous fait un peu peur, mais, une fois inscrit dans cette démarche-là, je pense que tout le monde pourrait dire que c'est une bonne chose puis que les régimes ne s'en porteront que mieux, puis leurs cotisantes et cotisants aussi.

Mme Beaudoin: Ils disent aussi que «des nouvelles règles pour les comités de retraite [...] compliqueront les choses». Est-ce que vous êtes d'accord avec ça?

M. Doré (Denis): Bon, nous, on est très habitués à fonctionner en comité de retraite, de façon paritaire en plus. Je comprends que des employeurs puissent s'opposer à ça, parce qu'ils sont habitués à quasiment ne pas avoir de comités de retraite ou en tout cas pas paritaires. C'est de bonne guerre pour eux de s'opposer à ça. Vous comprendrez que, nous, on trouve que les nouvelles règles sont tout à fait correctes.

Mme Beaudoin: Vous savez que toutes les associations de retraités, là, qu'on parle de la FADOQ en particulier, l'AAR, le FARQ, ils sont d'accord à 100 % avec ce projet de loi là et puis ils considèrent que les surplus appartiennent aux retraités également. Qu'est-ce que vous répondez à ces retraités-là?

n(10 h 20)n

M. Doré (Denis): Bon, à qui appartiennent les surplus? Comme je le disais à Mme Courchesne tout à l'heure, c'est une question de plusieurs millions, pour ne pas dire de plusieurs milliards. C'est très, très, très difficile de départager à qui ça appartient. C'est des études, là, assez complexes qui peuvent durer très longtemps, puis, au moment où l'étude va être terminée, peut-être que le surplus, il n'existera plus. C'est très, très, très difficile. Je vais vous dire que le subjectif peut l'emporter sur l'objectif, là, sur cet aspect-là. On ne peut pas nier leur droit de prétendre ce qu'ils prétendent, puis probablement que, sous certains aspects, ces personnes-là ont raison. Mais de là à dire: C'est vrai que ce dollar-là appartient à monsieur X puis que ce 25 sous là appartient à madame Y, c'est très difficile.

Le Président (M. Copeman): ...

Mme Beaudoin: Je n'ai pas d'autre question. Non, ça va.

Le Président (M. Copeman): Alors, M. Pélissier, M. Doré, merci beaucoup pour votre participation à cette commission parlementaire au nom de la Centrale des syndicats du Québec. J'invite immédiatement les représentants de la Fédération des policiers et policières municipaux du Québec à prendre place à la table. Je suspends les travaux de la commission quelques instants.

(Suspension de la séance à 10 h 21)

 

(Reprise à 10 h 24)

Le Président (M. Copeman): Alors, la commission reprend ses travaux, et c'est avec plaisir que nous accueillons les représentants de la Fédération des policiers et policières municipaux du Québec. M. le président Côté, bonjour.

Fédération des policiers et policières
municipaux du Québec (FPMQ)

M. Côté (Denis): Bonjour.

Le Président (M. Copeman): Vous avez 20 minutes pour votre présentation. Le cas échéant, je vais vous aviser quand il vous reste trois minutes pour mieux vous aider à conclure dans le temps. Par la suite, il y aura une période d'échange d'une durée maximale de 20 minutes avec les parlementaires de chaque côté de la table. Je vous prie de présenter vos collaborateurs et d'enchaîner par la suite avec votre présentation.

M. Côté (Denis): Merci, M. le Président. Mme la ministre, mesdames messieurs, membres de la commission, je vais vous présenter, à ma droite, Me Guy Bélanger, avocat chez la firme Trudel Nadeau et, à ma gauche, M. Pierre Bergeron, actuaire à la firme Actuaires-conseils Bergeron & Associés.

Premièrement, je vais vous remercier de l'opportunité que vous nous laissez d'exprimer notre opinion sur le projet de loi n° 30. La fédération dispense à la plupart de ses membres des services professionnels en matière de relations de travail et, à ce titre, elle est impliquée dans la négociation, l'interprétation et l'application de plusieurs régimes de retraite.

Beaucoup de ces régimes sont des régimes à prestations déterminées de type salaire final, mais certains demeurent des régimes de type carrière.

Plusieurs régimes sont à paliers, en ce sens qu'ils ont évolué dans le temps, de telle sorte que les conditions diffèrent selon la date d'embauche, ce qui oblige à procéder à divers rattrapages d'une négociation à l'autre

Plusieurs régimes ne prévoient pas d'indexation des rentes des retraités ou prévoient une formule insuffisante, ce à quoi il faut constamment pallier, quand l'occasion s'y prête, à même les surplus et parfois au moyen de cotisations additionnelles. Bref, la situation n'est pas toujours rose, contrairement à ce qui est généralement véhiculé.

Il est évident que nous sommes particulièrement concernés par les amendements proposés par le projet n° 30, d'autant plus que le régime de retraite constitue l'un des principaux postes de rémunération des travailleurs policiers. Nous n'avons pas l'intention de commenter chaque matière que vise la réforme proposée; nous limiterons notre intervention aux points les plus sensibles et qui nous touchent plus particulièrement.

Dans le but de rentrer dans le 20 minutes, je vais, au niveau du premier point, le premier sujet qui nous concerne, l'achat des rentes des retraités, je vais y aller avec des commentaires assez résumés, je ne veux pas que ça tombe dans la simplicité, mais assez résumés dans le sens où on interprète cette mesure-là comme étant une mesure qui coûte cher, inutile dans le contexte où une ville ne peut pas faire faillite. Et nous craignons également que les retraités pourraient quitter massivement, au risque de compromettre l'objectif retraite des participants actifs, plus particulièrement dans un régime de type carrière. Ça fait qu'en fin de compte cela va affecter la caisse de tous ceux qui restent. Donc, nous recommandons que la mesure permettant aux retraités d'exiger que leur rente soit garantie par un assureur soit tout simplement retirée et que le retraité qui opte pour que sa rente soit garantie par un assureur doive, à tout le moins, en assumer seul le coût par une réduction proportionnelle de sa rente. Au niveau du deuxième sujet qui nous touche, l'évaluation annuelle, encore une fois c'est une mesure qui ne nous paraît utile que si l'employeur est en congé de cotisation. Et, dans les autres cas, bien, évidemment, on voit un inconvénient où est-ce que ça pourrait entraîner des coûts inutiles, là, des coûts élevés. Donc, nous recommandons que l'obligation de produire une évaluation actuarielle complète annuellement soit applicable aux régimes en situation de congé de cotisation et également que les régimes de retraite dont l'employeur est une municipalité soient exclus de la mesure obligeant la production d'une évaluation complète annuellement et que soit maintenue à leur égard la norme de l'évaluation aux trois ans.

Pour ce qui est du troisième sujet qui nous concerne, la provision pour écarts défavorables, l'article 128 du projet de loi prévoit qu'une provision pour écarts défavorables serait requise sur base de solvabilité. Cette mesure ne nous apparaît pas utile en milieu municipal pour les mêmes raisons déjà exposées. Nous serions, malgré cela, favorables à un certain provisionnement dans la mesure où le montant fixé par la réglementation est raisonnable et que la constitution de cette réserve ait pour seul objectif d'empêcher l'employeur de profiter d'un congé de cotisation à la première occasion. Il lui faudrait attendre que la provision soit entièrement financée. Il ne faudrait pas par ailleurs que la réserve empêche l'utilisation d'un surplus pour revaloriser le régime. Bref, si des sommes importantes sont gelées en réserve, la mise à niveau périodique des rentes est compromise. Les participants actifs et les retraités risquent de prendre un retard coûteux. Il semble que la mise à niveau périodique des rentes à même les surplus devrait primer sur le provisionnement, surtout dans le régime garanti par une municipalité. Il n'y a pas non plus de raison d'empêcher les parties d'utiliser les surplus pour revaloriser autrement les rentes passées en les ajoutant, par exemple, aux nouveaux bénéfices courants. Il faut en cela respecter les clauses dites banquier contenues au régime et qui peuvent prévoir l'affectation des surplus, dont l'établissement d'une provision suivant un rang déterminé.

Par ailleurs, il ne nous apparaît pas approprié que la mécanique de calcul de la réserve soit liée à la politique de placement du régime. Dans la quasi-totalité des cas, cette politique relève de l'employeur par le contrôle qu'il exerce sur le comité de retraite et sur les actuaires que le comité embauche. Il ne faudrait pas que la politique de placement devienne tributaire du niveau de réserve requis à l'encontre d'autres priorités, uniquement pour permettre à l'employeur de pouvoir bénéficier plus facilement d'un congé de cotisation.

Donc, nous recommandons qu'il soit établi clairement que la mesure a seul but et a seul effet d'empêcher l'employeur de s'octroyer un congé de cotisation avant que soit constituée une provision pour écarts défavorables; qu'il soit confirmé que les régimes de retraite dont l'employeur est une municipalité soient exclus de la mesure obligeant le maintien d'une provision pour écarts défavorables.

n(10 h 30)n

Quatrième sujet, le financement des améliorations, l'article 132. Suivant cette proposition, les bonifications devraient être payées comptant lorsque le degré de solvabilité du régime est inférieur à 90 %, jusqu'à concurrence de l'actif manquant. Dans le milieu municipal, on ne peut dissocier cette mesure et le contenu du pacte fiscal qui, d'une part, dispense les municipalités de payer les cotisations requises pour amortir un déficit de solvabilité et qui, d'autre part, réduit à cinq ans la période maximale d'amortissement de tout déficit actuariel de modification, incluant donc un déficit de capitalisation. En n'inversant pas les cotisations requises, le degré de solvabilité stagne, et, lorsque vient le temps de bonifier le régime, la totalité ou une partie de la modification pourrait devoir être payée comptant et le reste sur cinq ans. La facture risque d'être inutilement contraignante pour les contribuables et de devenir un frein au maintien d'un historique constant et essentiel de revalorisation.

Ce sont les régimes qui offrent les bénéfices les moins avantageux qui vont écoper, les régimes de type carrière qui doivent obligatoirement être revalorisés de façon périodique pour maintenir un objectif retraite minimal, ceux qui ne prévoient pas d'indexation des rentes des retraités, ceux qui ont accumulé des déficits ponctuels dont ils ne pourront se relever faute de recevoir les cotisations relatives à la solvabilité, ceux qui ont pris des retards importants dans la mise à niveau du salaire de référence et des rentes des retraités. Même si plusieurs régimes sont de type salaire final, ils ne prévoient pas toujours l'indexation des rentes, loin de là, et c'est sur une base ad hoc que les parties y pourvoient. Ces régimes comportent souvent divers paliers de bénéfices établis au fil des ans, donc des conditions moins avantageuses pour des employés ayant plus d'ancienneté et pour lesquels il faut également prévoir des bonifications ad hoc pour leur assurer une retraite acceptable. Ici, on a un commentaire additionnel à formuler, qui n'apparaît pas au mémoire. Je vais céder la parole à l'actuaire, M. Pierre Bergeron.

M. Bergeron (Pierre): Oui. En fait, on voulait attirer votre attention que le projet de loi n° 30, dans toute cette même veine là, abolit les articles 306 et 306.1 de même que les effets de l'article 135.5 pour le régime de retraite de l'ex-ville de Québec. Donc, on pourrait passer beaucoup de temps à essayer de voir un peu d'où ça vient. Mais, longue histoire courte, la ville de Québec, les régimes de retraite bénéficient d'une loi spéciale qui a été passée en 1986, qui permettait d'amortir le déficit jusqu'en 2045. Par la suite, en 1998, des modifications ont été apportées à la loi pour permettre aux participants de bénéficier de l'utilisation des surplus des gains d'expérience malgré le fait que le régime n'était pas solvable. Donc, on a au-dessus de 200 millions de dollars comme ça qui est remboursé par la ville de Québec à la caisse de retraite sur une période qui s'échelonne jusqu'en 2045, ce qui veut dire que notre degré de solvabilité au niveau de Québec est de 65 % environ. Alors, l'introduction de la mesure du 90 % va avoir un effet direct sur le régime de la ville de Québec en faisant que dans le fond on va se retrouver soit à exiger de l'argent neuf de la ville ou soit à reporter l'application des ententes négociées en 1998, et ce, pour une longue période. Donc, à ce moment-là, ce serait à la fois tous les participants du régime, qu'ils soient retraités ou actifs, qui seraient pénalisés par cette mesure.

M. Côté (Denis): C'est donc l'équité intergénérationnelle qui pourrait être compromise par des mesures qui rendraient plus contraignantes les règles de financement des modifications. Les plus jeunes bénéficient de conditions plus avantageuses financées par le service courant, alors que les plus âgés doivent compter sur la revalorisation ponctuelle de leurs services passés pour obtenir la même rente. Ces mesures n'empêcheront pas les employés d'améliorer leurs services courants et en ce sens elles n'affecteront pas les nouveaux employés. La situation pourrait être différente pour les employés embauchés de longue date pour lesquels il pourrait être difficile de corriger les carences du service passé. On comprend difficilement pourquoi les municipalités devraient être soumises aux prescriptions de l'article 132, alors qu'elles ne sont plus soumises aux règles de la solvabilité. Si elles n'ont pas à renflouer un déficit de solvabilité, elles ne devraient pas en tenir compte lorsqu'il s'agit de modifier le régime.

Par ailleurs, dans un contexte où les municipalités sont soumises à des règles particulières de financement, tant sur le plan de la Loi sur les régimes complémentaires de retraite que sur celui des affaires municipales, il y aurait lieu de leur permettre de financer les améliorations à un régime de retraite au moyen d'obligations, de la même façon que le projet de loi n° 54 l'a permis sur une base ponctuelle.

À cet effet, nous recommandons: que les municipalités soient dispensées de la règle de financement des modifications prévue à l'article 132 au même titre qu'elles le sont de cotiser pour amortir un déficit de solvabilité; que les municipalités soient autorisées sur une base permanente à financer les améliorations à un régime de retraite au moyen d'obligations municipales; que la période d'amortissement des déficits de capitalisation demeure à 15 ans; et qu'aucune modification ne soit apportée aux règles particulières appliquées à la ville de Québec sans consultation préalable avec les parties intéressées.

Concernant le cinquième sujet, les règles de gouvernance, nous sommes d'accord avec les propositions énoncées au chapitre de l'administration d'un régime de retraite. Deux éléments cependant suscitent notre inquiétude. D'abord, le premier alinéa de l'article 151.2 qui prévoit ce qui suit: «En cas de divergence entre le texte du régime de retraite et le règlement intérieur en ce qui concerne le fonctionnement et la gouvernance du comité, le règlement intérieur prévaut.» Cette proposition nous apparaît inacceptable. Si les parties au régime ont pris la peine de stipuler des règles de gouvernance à l'intérieur du régime, nous ne voyons pas comment le comité de retraite pourrait les éluder. Le texte du régime, c'est comme une constitution, l'autorité suprême qui ne doit pas être transgressée. De plus, comme la plupart des comités de retraite sont contrôlés par l'employeur, la mesure a pour effet de lui donner la mainmise sur les règles de gouvernance au détriment des ententes qui peuvent survenir en négociation.

L'autre élément sur lequel nous nous interrogeons est la règle énoncée par l'article 154.1 qui prévoit ce qui suit: «Seul le comité de retraite choisit, engage et rémunère les délégataires, les représentants et les prestataires de services.» En d'autres termes, on voudrait que les professionnels ne soient pas choisis exclusivement par l'employeur, par souci de transparence et de régularité. Mais qu'est-ce que cela change lorsque l'employeur contrôle le comité de retraite par la majorité qu'il y détient? Il arrive que les parties prévoient des règles particulières ou s'entendent de façon ponctuelle quant à l'embauche des professionnels, plus particulièrement en ce qui a trait à l'actuaire du régime et des gestionnaires de fonds. On ne voudrait pas que la règle empêche les parties de convenir en ces matières.

Par ailleurs, ayant eu l'opportunité de prendre connaissance du mémoire présenté à cette commission par l'UMQ, nous ne saurions passer sous silence sa proposition que soit créé un comité de gestion où le promoteur désigne les personnes qui siégeront à ce comité. Un comité qui assumerait seul la gestion financière du régime et choisirait les consultants externes. L'UMQ justifie cette proposition par le fait que le promoteur assumerait seul les risques. Elle oublie que l'argent du régime appartient aux participants et fait partie de leur rémunération. Les décisions relatives à la gestion financière ont une incidence déterminante sur le rendement de leur actif, sur la possibilité de dégager des surplus pouvant servir à maintenir leur pouvoir d'achat ou à bonifier autrement leur rente de manière à atteindre des objectifs de retraite adéquats.

Oui, le promoteur a un intérêt dans le rendement parce qu'il peut être appelé à financer un déficit, mais les participants ont également un intérêt à faire fructifier l'argent qui leur appartient. En ce sens, il doit y avoir un équilibre des forces en présence. Les comités de retraite, contrôlés qu'ils sont par le promoteur dans la plupart des cas, répondent à peine à cette idée d'équilibre. Il ne faudrait pas empirer la situation en donnant carte blanche au promoteur. Si l'on devait revoir la formule, il serait beaucoup plus opportun de prévoir que la gestion financière du régime doit faire l'objet d'un accord entre le promoteur et les associations représentatives des participants. Par ailleurs, avec l'émergence des clauses banquier, il est de moins en moins vrai que le promoteur assume seul les déficits.

Enfin, nous ne nous entendons pas sur cette proposition, car elle nous apparaît hors d'ordre. Si elle devait être envisagée le moindrement, elle devra faire l'objet d'un débat en soi, et cette commission devrait reprendre ses auditions de façon à permettre à tous les intéressés de se faire entendre. Nous osons penser que nous ne serions pas les seuls à monter aux barricades. À cet effet, nous recommandons que le texte du régime prime sur toute règle de gouvernance édictée par le comité de retraite et que le choix des professionnels relève du comité de retraite.

Sixième sujet, les droits des retraités dans une perspective d'équité. Nous sommes de nouveau plongés dans la polémique de l'affectation des excédents d'actif par rapport aux droits revendiqués par les retraités. En présence d'un régime qui ne prévoit pas expressément le droit d'utiliser des surplus pour l'acquittement d'engagements supplémentaires, il faudra obtenir l'assentiment des retraités, compte tenu du droit de veto que leur reconnaît le projet de loi, un droit de veto dont même un seul salarié pourrait se prévaloir. En fait, l'employeur aurait l'obligation de satisfaire chaque retraité, sans quoi l'un d'eux pourrait soumettre ses revendications à l'arbitrage. C'est ainsi que l'employeur se voit confier la responsabilité d'assurer aux retraités un partage que l'on voudrait équitable des excédents d'actif en tenant compte d'une série de facteurs qui, s'ils étaient tous respectés, devrait faire en sorte que les retraités ne recevraient ni plus ni moins que les excédents que les parties signataires du régime convenaient de leur attribuer dans le passé, puisque c'est sur cette base que les rentes des retraités étaient indexées de façon ad hoc.

La responsabilité de répartir les excédents d'actif entre les groupes de participants actifs ou retraités ne relève pas uniquement de l'employeur, mais des parties signataires du régime, c'est-à-dire l'employeur et l'association accréditée. En ce qui nous concerne, nos associations assument cette responsabilité et elles le font selon les critères avancés dans le texte proposé et selon les enjeux alors en cause, parfois en priorisant les besoins d'un groupe par rapport à l'autre et, la fois suivante, en priorisant les besoins du groupe qui a été négligé la fois précédente. Mais, de là à en faire une obligation systématique, il y a une marge que le bon sens commande à ne pas franchir.

n(10 h 40)n

Il n'est définitivement pas opportun de permettre à des tiers d'intervenir dans le processus déjà complexe d'une négociation, car c'est exactement l'effet qu'aura cette disposition. Le régime de retraite est un élément important de la négociation, et l'on ne peut convenir d'un règlement global d'une convention collective avec pareille épée de Damoclès sur la tête. De fait, un retraité pourrait faire avorter un règlement de convention collective en soulevant un litige quant à l'affectation des surplus convenue entre les parties signataires. Les policiers que nous représentons seraient même potentiellement sujets à deux arbitrages: l'un suivant le Code du travail, où l'arbitre leur accorderait les bonifications qu'il jugerait équitables; l'autre initié par un retraité insatisfait de l'utilisation des surplus en faveur des actifs, où l'arbitre pourrait contredire le premier dans une même perspective d'équité.

Au-delà des débats de principe que soulève cette question, la mécanique suggérée ne nous apparaît pas réaliste, en ce qu'elle interfère inopinément dans le processus de négociation et qu'elle va créer des embûches majeures qui ne sont pas souhaitables en relations de travail.

Quant au principe, on ne peut être contre. Personne d'ailleurs ne peut être contre l'équité. Même si elle est très bien circonscrite par les critères qui doivent être pris en considération pour y parvenir, selon le deuxième alinéa de l'article 146.3.1 que propose le projet de loi. Là n'est pas la question.

Le problème, c'est d'institutionnaliser l'équité au-delà des textes du régime. Le régime est un contrat, et ce contrat est convenu entre les parties contractantes, soit l'employeur et le syndicat accrédité. Il faut s'en remettre aux parties contractantes pour appliquer l'équité, et, en ce qui nous concerne, elles le font généralement. Si certaines ne le font pas, c'est malheureux et déplorable, mais cela n'enlève rien au retraité par rapport aux bénéfices qui ont été convenus pour lui. Quant aux surplus, il recevra sûrement le même traitement qu'il aurait lui-même consenti aux retraités du temps où il était actif.

Si les retraités ont établi un historique d'indexation des rentes du temps où ils étaient actifs, il y a de fortes chances qu'ils en bénéficieront à leur tour. S'ils ne l'ont pas fait, c'est que la structure du régime ne le permettait pas, souvent parce que les surplus suffisaient à peine à revaloriser les crédits de rente de type carrière.

Quoi qu'il en soit, ce n'est pas en imposant aux parties contractantes un troisième joueur à la table de négociation que l'on fera triompher l'équité. On risque au contraire d'imposer aux actifs un boulet dont ils seront les seuls à subir les contrecoups dans leurs rapports collectifs de travail.

Nous ne croyons donc pas qu'il soit opportun de réglementer cette matière, mais, s'il doit y avoir une intervention législative, tout au plus serions-nous prêts à ce que la loi reconnaisse le principe de prioriser l'utilisation des surplus pour maintenir un historique d'indexation des rentes des retraités suivant les mêmes paramètres et dans une proportion qui ne peut excéder la proportion moyenne du surplus qui a été attribuée à cette indexation dans le passé. L'historique serait établi par l'actuaire du régime, de même que la part du surplus attribuable à la mesure. Tout litige serait tranché par la Régie des rentes.

À cet effet, nous recommandons que soient retirées les mesures proposées par le projet de loi quant au veto des retraités et l'arbitrage sur l'affectation des excédents d'actif d'un régime de retraite.

En conclusion, l'un des points les plus sensibles de la réforme proposée concerne la question de l'affectation des excédents d'actif en regard des retraités.

Compte tenu de la nature de leur travail, la loi reconnaît aux policiers la possibilité de prendre leur retraite plus tôt que les autres travailleurs. Les policiers sont plus longtemps à la retraite. Ils doivent provisionner en conséquence et sont plus particulièrement concernés par l'indexation de leurs rentes.

À cet égard, les policiers actifs sont très solidaires des policiers retraités qui, même à la retraite, demeurent des confrères. On fait partie de la famille policière jusqu'à la mort. Il est évident que les policiers actifs sont préoccupés par le sort des retraités, et, si ceux-ci ne disposent pas d'une formule d'indexation satisfaisante dans le régime, l'association syndicale s'occupe de négocier des indexations ad hoc.

C'est ainsi que plusieurs régimes ont un historique d'indexation ad hoc qui a d'ailleurs été reconnu par les tribunaux d'arbitrage dans le contexte du transfert de certains policiers municipaux à la Sûreté du Québec, en 2002. Ce n'est pas l'employeur qui a défendu l'historique d'indexation de ces dossiers, mais le syndicat policier. Il ne faudrait pas dès lors interpréter nos propos en opposition aux droits légitimes des retraités. Nous croyons cependant qu'il revient aux associations syndicales de corriger les iniquités, le cas échéant, au même titre que les retraités y ont pourvu lorsqu'ils étaient actifs.

Quant aux autres amendements que propose la réforme, il ne faudrait pas qu'ils constituent un obstacle à l'amélioration des régimes, et, en ce qui concerne les municipalités, ils devraient être agencés aux mesures qui découlent du pacte fiscal.

En terminant, nous remercions la commission pour son attention dans le sprint de la lecture du mémoire. Merci.

Le Président (M. Copeman): Et je vous félicite de l'avoir fait à l'intérieur du temps imparti. Alors, Mme la ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale.

Mme Courchesne: Merci, M. le Président. M. Côté, M. Bélanger, M. Bergeron, merci d'être présents devant nous. J'ai trouvé ça... J'avais lu votre mémoire, mais j'ai trouvé intéressant quand même de le réécouter, et ça me soulève beaucoup de questions parce que je veux juste m'assurer qu'on a la même compréhension des gestes qui ont été posés dans le cas des municipalités.

Vous savez que le gouvernement a déposé, il y a quelque temps, un projet de règlement justement qui est devant la Gazette officielle et pour lequel il me semblait qu'on répondait à nombre des questions qui sont soulevées dans votre mémoire. Notamment, en ce qui a égard à la provision pour écarts défavorables, il me semble que le projet de règlement est assez clair à cet effet-là et que donc il n'y aurait pas cette obligation, et qu'on ne traitait pas la façon de nous assurer de la solvabilité de la même façon que les autres secteurs d'activité, notamment le privé. Est-ce que vous avez pris connaissance de ce projet de règlement là?

Une voix: M. Côté.

M. Côté (Denis): Je vais céder la parole à M. Bergeron.

Une voix: M. Bergeron.

M. Bergeron (Pierre): Oui, bien sûr. Et évidemment le projet qui a été publié dans la Gazette, le 30 août dernier, est donc évidemment pour consultation, alors quel sera-t-il dans sa version finale? C'est sûr qu'ici on est dans le cadre de la loi n° 30, on a un projet en parallèle, on a tenté, dans certaines places, de faire le lien ou le joint entre les deux. La provision pour écarts défavorables, je vous avouerais candidement qu'on n'a pas trouvé ça si clair que ça que les municipalités étaient exclues, par contre on s'en doutait, de là la demande de la fédération de confirmer l'exclusion des municipalités par rapport à la provision pour écarts défavorables, de là le libellé comme tel. Par contre, par rapport au reste, il n'y a pas vraiment de différence. Quand on parle de la règle du 90 %, elle est présente.

Et, quant aux autres commentaires, que ce soit au niveau des comités de retraite, tout ça, il y a tout l'ensemble des autres règles qui sont là, là.

Mme Courchesne: Mais je pense que la commission, ce matin, va nous donner une bonne occasion d'éclaircir tout ça. Je vous confirme que, dans le projet de règlement, vous avez raison qu'il est pour consultation, il n'est pas dans sa forme finale. Mais je vous confirme, ce matin, que l'intention du gouvernement, c'est d'effectivement... de ne pas imposer cette provision pour écarts défavorables pour les municipalités, les universités et les CPE, étant donné la pérennité de vos institutions.

Maintenant, ce qui m'étonne un petit peu aussi, c'est que vous me parlez de la règle du 90 %, vous souhaitez que nous harmonisions avec le pacte fiscal. Or, la règle du 90 % de solvabilité fait partie de l'entente du dernier pacte fiscal. Donc, cette règle-là, elle a été acceptée par le monde municipal. Parce que c'est bien évident que, même si on exclut les municipalités, il n'en demeure pas moins qu'il y a quand même une responsabilité et une volonté qu'on puisse atteindre cette solvabilité sous des règles beaucoup moins contraignantes. Mais par ailleurs les municipalités ne peuvent pas être exemptées complètement et totalement de leur obligation de financer cette solvabilité-là. Donc, c'est pour ça que la règle du 90 % a été négociée avec le monde municipal, et elle fait partie intégrante de ce pacte fiscal.

M. Bergeron (Pierre): Si vous permettez. Bien, en fait, si on regarde évidemment les informations transmises, le pacte fiscal, la fédération n'était pas partie à cet exercice-là. Et, en ce qui nous concerne, l'application de la règle du 90 % nous pose un problème d'application. On met une borne pour effectuer certains... qui sert quand on pose certains gestes dans le régime de retraite ou quand on fait certaines améliorations, alors qu'on n'a plus de cotisations qui sont versées par les municipalités, à compter de 2007, pour combler la solvabilité. Donc, dans ce cadre-là, on comprend qu'il y a une règle de 90 % dans le secteur privé, mais il y a également des cotisations qui rentrent ou le test de solvabilité engendre des cotisations pour l'employeur. Dans le milieu municipal, l'employeur, à compter de 2007, ne verse plus aucune somme relative à la solvabilité donc dans le projet de règlement, évidemment. Donc, si on part, par exemple, dans mon exemple de Québec, à 65 %, on va rester à 65 % assez longtemps, et ça a comme impact d'impacter sur d'autres clauses et l'utilisation potentielle des gains d'expérience ou des surplus.

Mme Courchesne: Est-ce que je me trompe si je dis que votre inquiétude, c'est que cette règle du 90 % empêche des améliorations aux régimes? Est-ce que c'est ça essentiellement, votre inquiétude? Parce que cette règle du 90 % n'empêche pas les améliorations. Ce qu'on dit, c'est: S'il y a amélioration, bien le régime devra le payer, c'est-à-dire qu'on devra compenser le coût de cette amélioration-là. Donc, soit qu'on paie l'amélioration, soit qu'on a une somme requise pour compenser l'écart entre l'amélioration et le 90 %, mais, tu sais, théoriquement, ça n'empêche pas... on n'interdit pas les améliorations. Le projet de loi... le règlement n'interdit pas les améliorations.

n(10 h 50)n

M. Bergeron (Pierre): On en est parfaitement conscients, et c'est comme ça que nos choses sont présentées. Évidemment, une amélioration peut toujours se faire, c'est les contraintes relatives qui changent et c'est l'environnement de l'amélioration qui change. Donc, vous le dites, si on est en bas de 90 %, ça prend un paiement comptant pour financer la totalité de l'amélioration. Le projet de règlement prévoit également de limiter à cinq ans la période d'amortissement d'une amélioration, contrairement à la règle actuelle qui nous permet d'améliorer ou de planifier, sur une période de 15 ans, les entrées de fonds dans la caisse de retraite. Donc ça, c'est deux choses que vous allez peut-être nous dire que ça fait partie du pacte fiscal, mais c'est des choses sur lesquelles on apporte des commentaires aujourd'hui, ce matin.

Le Président (M. Copeman): Me Bélanger.

M. Bélanger (Guy): Oui. En fait, ça va empêcher des améliorations, en ce sens que le coût des améliorations va être réparti, va être établi sur un moindre nombre d'années, et puis, en ce sens-là, ça fait un effort de contribution qui est plus élevé, et puis ça limite l'enveloppe budgétaire qui est disponible pour négocier. Alors, en ce sens-là, ça va limiter les améliorations.

Mme Courchesne: Mais on s'entend que ça limite jusqu'à temps qu'on arrive à 90 %.

M. Bélanger (Guy): Exactement.

Mme Courchesne: On s'entend là-dessus, hein? Parce que, tu sais, les municipalités, c'est comme les autres secteurs d'activité, il y a quand même une responsabilité, même s'il y a une pérennité. Vous savez, puis vous le savez encore mieux que moi, que, dans le monde municipal, l'ampleur des déficits des régimes était considérable. Et on a, dans bien des cas... Vous parliez de Québec, mais, tu sais, on a renfloué Québec, on a renfloué Montréal, je veux dire... À un certain moment donné, malgré la pérennité, il faut qu'on se protège mutuellement, et je pense qu'on a cette responsabilité-là. Donc, ce qu'on dit: C'est la règle du 90 % qui s'applique. C'est déjà un pas immense comparativement à ce qu'on exige des secteurs public et même parapublic, ça, je pense que vous pouvez en convenir. Mais est-ce qu'avec moi vous convenez que la nécessité de la solvabilité des régimes dans le monde municipal demeure un critère important?

M. Bergeron (Pierre): On pourrait en parler longuement, du critère de solvabilité. Si on regarde ce que reflète une évaluation actuarielle de solvabilité, c'est mer et monde avec les engagements réels du régime. Un régime de retraite, ce qui préoccupe les cotisants et les retraités, c'est de se bâtir une pension, un niveau de remplacement de revenus adéquat, de prendre une retraite à un âge déterminé et de recevoir une pension tout au long de la retraite, d'être indexés, le cas échéant. Et ça, c'est une évaluation de capitalisation que les actuaires font en fonction de normes édictées par l'institut et dans les rapports envoyés à la Régie des rentes.

Le test de solvabilité est une simulation purement théorique d'une terminaison de régime dans lequel, par exemple, si on aurait une rente basée sur les trois meilleurs salaires, on calcule la rente sur le salaire au moment de la terminaison. Quelqu'un qui aurait droit à des rentes de raccordement, on les enlève. L'évaluation de solvabilité ne reflète pas du tout les engagements que l'on veut éventuellement donner ou accorder aux gens. Donc ça, c'est un débat en soi, à savoir: Le test de solvabilité, est-il approprié ou pas? Et, quand on parle qu'il y a un point important par rapport au secteur privé, il ne faut pas oublier qu'il n'y a pas de cotisation qui rentre dans le municipal. Donc, si on a nos régimes qui sont solvables à 82 % en moyenne, avec les taux d'intérêt actuels ? puis, quand je dis 82 %, je prends un exemple ? si on est... avec les taux d'intérêt actuels, il n'y a pas d'argent qui rentre pour combler cette solvabilité-là. Donc, ça va prendre des rendements et des ci et des ça pour monter le degré de solvabilité à un niveau plus élevé. Mais, le test de solvabilité, si vous me demandez une opinion à savoir si ça a une grande pertinence dans le secteur municipal, on est loin d'être convaincus de cette pertinence-là, là.

Mme Courchesne: Est-ce que vous ne pensez pas que ça permet, à tout le moins, à tout le moins, une discipline même dans la prise de conscience aussi des comités de retraite et des municipalités? Parce que vous avez entendu comme moi les représentants de l'UMQ. Ça me fait plaisir d'ailleurs d'avoir vos commentaires sur leurs remarques. Mais, dans les municipalités, les employés vieillissent aussi, les régimes vont devenir matures aussi, je veux dire, il y a une réalité démographique qui s'applique autant au niveau des employés municipaux que dans le reste de la société. Alors, est-ce qu'à tout le moins ce n'est pas sage et responsable de se donner une certaine discipline autant dans le monde municipal qu'ailleurs? Et encore une fois est-ce que... Par exemple, quand on entend l'UMQ nous dire qu'un comité de retraite n'est pas utile et que ça ne devrait pas exister, est-ce que j'ai compris que ça vous inquiétait autant que moi? Donc, est-ce qu'on ne doit pas prévoir dans une loi? Moi, ça m'inquiète beaucoup quand j'entends ça parce que, regarde, dans le monde municipal, c'est comme nous, hein, c'est comme les députés de ce côté-là, les députés de ce côté-ci, on est soumis aux urnes à tous les quatre ans, là. Ça fait que, moi, il me semble que le législateur est sage de prévoir un minimum d'aléas dans ce sens-là.

M. Bergeron (Pierre): Bien, en fait, vous adressez plusieurs questions. Évidemment, il est sage d'avoir une bonne politique de capitalisation et de provisionnement, d'assurer la sécurité financière, c'est fort louable, et il doit y avoir des prises de conscience à cet égard.

Ceci étant dit, il n'y a pas nécessairement de lien avec le test de solvabilité, et ce serait plutôt le test de capitalisation et d'une meilleure planification des objectifs retraite. Au niveau des diverses ententes que la fédération a mises en place, ça a été abordé d'ailleurs, on parle de surplus ou d'utilisation, il y a des utilisations graduelles, il y a des argents qui sont gardés en coussin de sécurité justement pour répondre à ça, il y a des parties d'argent qui sont laissées en caisse ou qui sont provisionnées sous forme de fonds d'indexation, des choses comme ça. Donc, oui, c'est fort louable, mais je pense que ça touche peut-être plus le volet capitalisation du régime et non le volet solvabilité.

Mme Courchesne: Avant, M. le Président, de laisser la parole à un collègue, je veux juste aussi vous rassurer sur les cas de Québec. C'est évident qu'il y a une loi, qu'il y a une loi qui sera respectée et que, comme la loi n° 30 n'entre pas en vigueur immédiatement, il y aura des négociations. Mais, dans notre esprit, un règlement d'exclusion est tout à fait pensable et devra faire l'objet de négociations avec la ville de Québec de la même façon qu'il y aura négociations avec la ville de Montréal.

Le Président (M. Copeman): M. le député de Vimont.

M. Côté (Denis): Mme la ministre, doit-on comprendre...

Le Président (M. Copeman): Oui, allez-y, M. Côté.

M. Côté (Denis): Oui, merci. Doit-on comprendre à votre engagement que la partie syndicale doit être consultée?

Mme Courchesne: Écoutez, je ne prendrai pas ce genre d'engagement là ce matin. C'est-à-dire que, pour moi, il y a une loi qui existe dans le cas de Québec. Il y a des discussions qui doivent avoir lieu avec la ville comme telle. On va partir de là. Je ne l'exclus pas. Mais vous comprenez que, moi... Le gouvernement n'est pas votre employeur. Vous avez un employeur qui est la ville de Québec. Alors, je ne pense pas qu'on veuille aller jusque-là. Moi, personnellement, si vous me demandez mon avis de ministre, je suis toujours favorable à de la consultation. Mais je veux juste vous dire que je n'ai pas... le gouvernement, ou moi, ou la régie, on n'a pas à s'immiscer dans les liens entre vous et votre employeur. Maintenant, nos débats, aujourd'hui, sont publics, et c'est évident qu'il doit y avoir possiblement un règlement d'exclusion où il faut négocier les paramètres avec ville de Québec. Voilà.

M. Bergeron (Pierre): Si vous permettez. Peut-être simplement porter à votre attention que, lors des modifications législatives de 1998, les discussions dans le cadre de la modification de la loi, les parties syndicales étaient représentées.

Mme Courchesne: Ça, je n'ai pas d'objection avec ça.

M. Bergeron (Pierre): Ça s'est fait conjointement. Je fais juste le porter à votre attention.

Mme Courchesne: Mais je n'ai pas d'objection de principe. On verra avec les intervenants concernés.

Le Président (M. Copeman): M. le député de Vimont.

M. Auclair: Merci beaucoup, M. le Président. Messieurs, bonjour. Écoutez, moi, j'ai trouvé intéressants vos commentaires et surtout l'approche que vous avez. En tout cas, tout le long, ce que j'ai senti, c'était quand même... vous vouliez bien faire saisir aux gens que votre rôle en tant que syndicat était également de défendre les retraités. On le sent, et je pense que vos collègues aussi, il y a des collègues au niveau des pompiers qui sont venus nous faire les mêmes représentations, puis on sent qu'il y a une certaine chimie, disons, des liens très solides qui vous lient, autant après la retraite. Mais le projet de loi, on se comprend aussi que ce projet de loi là n'est pas limité à vos groupes à vous. Donc, malheureusement, cette solidarité-là n'est peut-être pas toujours... ne continue pas malheureusement après la retraite. Et, quand je sens un refus de votre part, vous dites: Bien, les retraités, dans le fond, ils ont leurs syndicats qui sont là, les groupes des retraités, nous autres, n'ont pas ce sentiment-là. En tout cas ? je ne peux pas parler pour tous les retraités ? ceux qui sont venus nous voir, ceux qui nous ont sensibilisés ont ce désir-là d'être retraités... d'avoir un droit de parole au chapitre parce que certains d'entre eux nous disent: Bien, écoutez, nous, on ne paie plus de cotisation, et certains syndicats nous font bien sentir qu'ils ne sont plus des membres intéressants ou des membres intéressés pour eux. Donc, à ce moment-là, on va défendre ceux qui cotisent, ceux qui paient. Et, dans tous vos propos, moi, je veux quand même bien saisir que ce projet de loi là, quand on vise l'intérêt, on vise vraiment l'intérêt de tous les retraités et on ne peut pas, demain matin, mettre de côté certains groupes par rapport à d'autres, hein? Tant mieux pour vos retraités, je pense qu'ils sont très fiers, puis vous faites un bon travail à cet égard-là, mais la réalité des autres groupes de retraités, ce n'est pas ça. Donc, c'est là que, moi, j'ai un petit peu de misère.

n(11 heures)n

Je pense que c'est important de donner un droit au chapitre aux retraités, qu'ils se fassent entendre sans donner peut-être... Bon, le droit de veto, ça fait partie des réalités dans le projet. La ministre a émis certaines opinions à cet égard-là, comment elle allait traiter ça. Mais c'est important quand même que les retraités aient au moins le droit de représenter leurs points de vue et leur réalité. Je ne sais pas si j'ai bien saisi votre commentaire au niveau des vetos. Qu'est-ce que vous poseriez comme geste pour protéger concrètement les retraités? Parce que, là, vous, vous êtes là, vous êtes de bonne foi. Demain matin, un nouveau représentant arrive, il y a une nouvelle réalité au niveau des fonds de pension. On a connu des très mauvaises années qui ont amené à mener ces débats-là. Parce que, s'il y avait toujours eu des surplus, on ne serait pas en train de travailler peut-être sur un projet de loi de la sorte pour protéger puis récupérer les déficits, et tout ça. Là, il y a eu de grands surplus, puis là tout d'un coup ça a chuté. C'est de là que vient tout le débat. Qu'est-ce que vous feriez, vous, concrètement, dans un projet de loi de la sorte, pour protéger les retraités aussi? M. Côté (Denis): Peut-être, d'un premier point de vue, c'est évident que le régime de retraite, ça constitue une condition de travail. Donc, c'est une condition qui... les deux parties, autant la partie syndicale que la partie patronale, sont appelées à négocier, et c'est des conditions de travail qui vont s'appliquer aux participants actifs. Les retraités ont toujours... ils peuvent toujours se fier sur l'obligation morale qui découle de l'appartenance au groupe de syndiqués. Vous savez, les syndiqués, on comprend très bien que, si on est rendu, aujourd'hui, à des conditions de travail qu'on a aujourd'hui, c'est parce qu'il y a des gens qui sont passés avant nous et nous ont amenés à avoir ces conditions de travail là. Et là d'intervenir, de faire intervenir, à toutes fins pratiques, un autre groupe, qui est le groupe des retraités, à une table de négociation, même s'ils ne sont pas activement à la table de négociation, ça pose un problème parce que, demain matin, ça veut dire qu'il n'y aura plus jamais d'entente de principe. Toutes nos ententes de principe vont être conditionnelles à ce qu'un retraité ou un groupe de retraités n'exerce pas le droit de veto. Et ça, ça nous place dans une drôle de situation. Je dirais, à toutes fins pratiques, que ça va être difficile de négocier sur cette base-là.

Maintenant, quand on regarde l'historique au niveau de la Fédération des policiers, au niveau des syndicats policiers, il n'y en a pas, d'histoire d'horreur. Nous, on est prêts à reconnaître que, s'il y a eu un historique de revalorisation qui a été fait, bien, à ce moment-là, dans la proportion qui leur a été attribuée au niveau des surplus, on peut continuer cette perspective-là, cet historique-là, mais de le faire d'une façon systématique, de l'instaurer et de l'institutionnaliser, c'est évident que ça nous pose un problème parce que ce n'est pas des membres actifs.

M. Auclair: Et, au niveau de votre position très claire comme quoi vous n'êtes pas en accord au fait que l'on puisse permettre à un retraité de retirer dans le fond sa mise et justement d'aller faire affaire avec une compagnie d'assurance, est-ce que je saisis bien votre problème ou votre désaccord à cet égard-là? Parce que pour vous ça va... Dans le fond, c'est sûr que ça va retirer des fonds importants au sein des fonds, ce qui va amener, au niveau... une négociation pour changer la donne au complet parce que, vous l'avez même mentionné, ça fait partie d'un actif et des objets de négociation collective courante. Si on se retrouve avec un fonds qui est beaucoup moins garni parce que des retraités se sont retirés, à ce moment-là, ça vous donne moins de marge de manoeuvre pour négocier. Ça aussi, ça devient... On comprend que ça fait partie aussi de cette réalité-là.

M. Côté (Denis): Oui, quand on parle de négociation, on peut parler en termes de flexibilité de placements, on peut parler en termes aussi... Ça peut amener une augmentation des coûts de gestion. Le fait qu'il y ait une portion de la caisse qui est retirée du régime, évidemment ça a des conséquences pour les membres actifs qui vont demeurer.

M. Auclair: Mais aussi, si vous défendez bien l'intérêt... Parce que je sais que, chez vous... Parce que le problème que, moi, j'ai, c'est que vous avez des... Vous, chez vous, vos fonds de pension, autant comme les policiers, pompiers, vous êtes dans une réalité un peu distincte ou différente de la grande majorité des retraités du Québec, malheureusement. On souhaiterait tous avoir... Dans le fond, les gens, quand on parle de fonds de pension, les gens comparent avec vos fonds de pension ou certaines autres entreprises, mais vous faites partie de ceux qui avez travaillé très fort dans vos négociations pour aller chercher le maximum dans ce volet-là. Sauf que, pour les... Si dans le fond cet intérêt-là... Et vous faites un bon travail, continuez un bon travail de même. Moi, je ne vois pas pourquoi vos membres décideraient de se retirer. Si on a tant de possibilités que ça, ça n'aura pas un grand impact chez vous.

M. Côté (Denis): Je vais céder la parole à Pierre, mais ils pourraient être mal conseillé aussi. Ça fait que je vais vous laisser... je vais laisser M. Bergeron vous expliquer.

Le Président (M. Copeman): Le plus succinctement possible, M. Bergeron, s'il vous plaît.

M. Bergeron (Pierre): Oui, d'accord. Bien, en fait, vous avez entendu largement parler de l'impact sur les coûts, alors évidemment les marges de profit des assureurs, etc. Donc, à un moment donné, ça a beau... Est-ce que ça va se produire ou pas? Peut-être qu'il va y avoir en proportion moins de retraités, dans le municipal, qui vont opter pour ça. Ça ne veut pas dire qu'il va y en avoir... qu'il n'y en aura pas. Qui les conseille, ces gens-là? Et donc ça va coûter plus cher au régime, donc au détriment de l'ensemble de la caisse, et ça ne sera pas dans l'intérêt du retraité. Il y a moins de chances que l'assureur... Un assureur peut faire faillite, en passant. Une ville, est-ce que ça peut vraiment faire faillite? Bon, on peut se poser la question. Donc, le retraité n'est pas nécessairement mal protégé dans une ville. Et, en faisant ça, il perdrait toutes les pratiques d'indexation qu'on a mises en place.

Mais ça n'empêche pas, comme le président dit, que quelqu'un pourrait être mal conseillé, et tout ça, puis, une fois que le principe est parti... On a vu beaucoup de gens, dans les dernières années, sortir leurs fonds, leurs caisses de retraite pour gérer, parce que supposément que c'est beaucoup plus payant de gérer de l'argent... Et, chez Hydro-Québec, c'est une politique, les gens ont perdu des centaines de milliers de dollars et ont hypothéqué leurs retraites. Ils n'avaient pas de raison de le faire, mais il y a eu un mouvement massif qui l'a fait. On a des craintes.

Le Président (M. Copeman): Mme la députée de Mirabel et porte-parole de l'opposition officielle en matière des régimes de rentes et de retraite.

Mme Beaudoin: Merci, M. le Président. Alors, M. Côté, Me Bélanger, M. Bergeron, merci pour la présentation de votre mémoire. Et vous dites aussi que faire partie de la famille policière, on fait partie de la famille policière jusqu'à la mort, alors on voit une grande solidarité, et je vous en félicite, toute l'équipe.

Quand vous avez parlé, dans votre mémoire, au préambule, là, de différents régimes, là, on parle de régimes... sous des régimes à prestations déterminées de type salaire final; après ça, vous parlez de type carrière;, vous parlez de régimes qui sont à paliers. En tout cas, pour les fins de l'enregistrement, là, j'aimerais ça que vous puissiez expliquer exactement la différence entre chacun.

M. Bergeron (Pierre): Donc, premièrement, c'est que le régime de retraite, l'objectif visé, publié par la Régie des rentes puis les actuaires, c'est qu'on essaie de bâtir une rente de l'ordre de 70 % après une carrière complète, mais en fonction des salaires précédant la retraite. Donc, quand la rente est basée en fonction des salaires précédant la retraite, on parle d'un régime salaire final dans notre jargon. Donc, le pouvoir d'achat préretraite finalement a été protégé. La personne a un salaire. Elle part à la pension l'année d'après. Sa pension est basée sur ses salaires précédant immédiatement la retraite. Beaucoup de régimes, la majorité, la très grande majorité des régimes ne prévoit pas ça automatiquement. Ils prévoient plutôt des salaires soit carrière ou salaires finals avec des plafonds.

Donc, par exemple, on va dire: On met de l'argent de côté, on va vous payer... Un policier gagne un montant de x dollars aujourd'hui, on va vous provisionner dans le temps. Dans 15 ans, on va gagner 100 000 $. Donc, on met de l'argent de côté sur un plafond, mais peut-être que quelqu'un va gagner plus que ça dans 15 ans, ou dans 20 ans, ou dans 30 ans. Donc ça, c'est un régime où il y a un plafond dans le calcul de la rente.

Un régime carrière, c'est un régime simplement où la rente est calculée sur le salaire gagné au cours de chacune des années de cotisation. Donc, je commence dans un régime en 1975, je finis en 2005, ma rente est basée une fois sur 1975, une fois sur 1976, 1977, donc en moyenne la rente est peut-être basée sur l'année 1990.

Alors, la priorité absolue, dans un régime de retraite pour tout le monde, c'est de bâtir un objectif de retraite adéquat, donc dans un premier temps, pour assurer une équité entre les générations de retraités. Avant même de parler d'équité, à savoir comment on est traité après la retraite, est-ce qu'on a une équité, à savoir: Est-ce que tous les gens ont eu accès à un remplacement de revenu adéquat pour pouvoir prendre la décision de prendre leur retraite?

Donc, dans la pratique du municipal, tous les retraités ou la très grande majorité des retraités ont eu une rente basée sur leurs salaires des années précédant la retraite. Maintenant, dans nos régimes tels qu'ils se font, il faut continuer à mettre de l'effort et à mettre des réserves pour assurer cet objectif-là pour les futurs retraités au cours des prochaines années. Donc, c'est ce qu'on appelle... C'est la problématique qu'on voulait faire ressortir par les types de régimes.

Mme Beaudoin: Alors, vous dites que vous vous opposez également à l'achat de rentes, là. Est-ce que vous croyez que l'achat de rentes va être populaire chez vos membres? On en a parlé tantôt, là, mais j'aimerais ça vous entendre quant au degré de popularité, vous connaissez vos membres évidemment.

M. Côté (Denis): Écoutez, on n'a pas sondé nos membres, à savoir si ce serait une formule populaire. Par contre, on a des réserves pour les motifs qu'on a exposés. Si les gens... Tout d'un coup que cette formule-là deviendrait populaire, ça risque de compromettre l'actif de la caisse, ça risque de compromettre notre flexibilité de placement, nos choix de gestion, les taux, les taux de gestion, les taux de placement. Donc, à toutes fins pratiques, c'est évident qu'on aimerait mieux que les membres demeurent à l'intérieur du régime, qu'ils laissent leur argent à l'intérieur du régime de façon à pouvoir bénéficier des indexations futures, ce qui ne serait pas le cas dans le cas où ils décideraient de retirer leurs sommes et d'acheter une rente au niveau d'un assureur. Mais on n'a pas sondé nos membres en espérant que ce ne serait pas une formule populaire. Mais le fait de le permettre, on court un risque, et c'est pour ça qu'on demande de ne pas le permettre.

M. Bergeron (Pierre): Si vous me permettez, si vous posez la question à un actuaire, l'actuaire vous dirait: Ça ne sera sûrement pas populaire, on regarde la composition. Mais je voudrais sûrement donner la même réponse dans le cas de l'application 98 de la loi qui permet aux gens de sortir la totalité de leurs fonds dans un régime à prestations déterminées, et donc les gens se mettaient à risque, payaient même de l'impôt à cause des montants maximums permis par la loi fédérale. Et il y a eu des mouvements ? j'ai nommé un dossier tantôt ? il y a eu des mouvements dans plusieurs dossiers où les gens, malgré... On disait: Ils ne sortiront pas leur argent, mais ils l'ont fait quand même. On n'est pas à l'abri de ça.

n(11 h 10)n

Mme Beaudoin: M. le président, vous estimez également que l'évaluation actuarielle annuelle, ça va coûter cher. Vous savez que les retraités sont d'accord avec ce principe-là puis vous proposez également d'en dispenser les municipalités. Est-ce que vous avez fait des études? Et puis j'aimerais vous entendre également sur les coûts, étant donné que les retraités sont d'accord avec l'évaluation actuarielle annuelle.

M. Bergeron (Pierre): Bien, en fait, une évaluation actuarielle annuelle va définitivement coûter plus cher qu'une évaluation aux trois ans. Pour changer de chapeau, parce que j'agis aussi comme membre de comité dans certains dossiers sur lesquels... où on a fait faire des études actuarielles à des dates plus fréquentes, on n'a pas eu vraiment d'économie d'échelle du fait de tout faire le travail sur une base annuelle plutôt qu'aux trois ans, donc... Mais le coût de l'étude actuarielle va dépendre d'un dossier à l'autre, là. Ça peut varier de 5 000 $ à 10 000 $ pour un petit dossier à 75 000 $ pour un autre dossier ou peut-être même plus, là. Alors donc, il faudrait faire la somme de tout ça, là, pour tous les régimes concernés, puis essayer de voir où ils se situent.

Mme Beaudoin: Mais vous ne pensez pas que c'est quand même une sécurité, là, avec tout ce qu'on a vu par le passé, que ce soit la mine Jeffrey ou les employés Acier Atlas, parce qu'eux ils ont subi vraiment des pertes, et puis, s'il y avait vraiment eu cette évaluation-là, peut-être qu'on ne serait pas rendu là.

M. Bergeron (Pierre): Bien, honnêtement, la mine Jeffrey, c'est un cas de terminaison de régime d'un employeur insolvable. Je ne suis pas sûr que l'évaluation actuarielle annuelle produite avec neuf mois de délai ? parce que ça prend quand même neuf mois, donc on n'est jamais à jour dans nos chiffres ? ajoute quelque chose de plus. Normalement, avec les chiffres qu'un actuaire fournit dans son rapport, on a l'ensemble des informations requises pour faire des projections de façon très... relativement précise sans nécessairement se taper l'ensemble du travail d'une étude actuarielle complète devant être soumise à la régie. On prend nos résultats, on a les rendements de caisse, on est capables de faire des projections pour voir le bilan actuariel. Donc, je pense que quelqu'un qui veut bien suivre ce bilan-là, et un comité qui veut bien suivre... Ça existe fréquemment aussi que les comités posent ce genre de question là, demandent des calculs approximatifs. Mais pourquoi faire ça dans un document qui est beaucoup plus gros et beaucoup plus coûteux, là?

M. Côté (Denis): Si vous me permettez, madame.

Mme Beaudoin: Oui.

M. Côté (Denis): Je sais que vous cherchez l'élément de la sécurité. Dans notre recommandation, à la page 8, notre première recommandation: «Que l'obligation de produire une évaluation actuarielle complète annuellement soit applicable aux régimes en situation de congé de cotisations», ça fait qu'il y aurait peut-être un élément, là, qui vous rejoindrait. Dans les cas où est-ce qu'il y aurait un congé de cotisation, il pourrait y avoir, à ce moment-là, une obligation de se soumettre à une évaluation actuarielle annuelle.

Mme Beaudoin: Alors, je vais vous poser la question autrement: Qu'est-ce qu'il aurait fallu faire pour éviter ces deux cas-là qui sont vraiment désastreux, là, puisque les retraités se retrouvent presque en état de pauvreté, si on peut dire? Selon vous, qu'est-ce qu'il aurait fallu faire? Vous dites que, si on avait fait une évaluation actuarielle annuelle, ça n'aurait pas changé de quoi. Sauf que, dans ce cas-là, peut-être qu'il aurait fallu en faire. Mais est-ce qu'il aurait fallu faire autre chose pour éviter ces deux cas-là?

M. Bergeron (Pierre): Bien, écoutez, Mine Jeffrey, premièrement, c'est un dossier qui est devant les tribunaux, à ma connaissance. Évidemment, il y a diverses revendications ou affirmations à savoir qui a raison dans la séquence des événements. Mais ce qu'on comprend de ce qui est publié publiquement, c'est qu'il y a eu... c'est plutôt au niveau de la gestion des actifs qu'il y a eu des grands manques à certains niveaux où les gestionnaires et les politiques de placement n'étaient pas encadrés, et on s'est lancé à âme perdue, à 70 % de la caisse à la Bourse canadienne qui a planté en 2001-2002, et, ça termine en même temps, l'employeur était insolvable. Est-ce que des débats... Il y a peut-être des congés de cotisation là-dedans aussi, là, on ne connaît pas tout le détail du dossier. Mais l'évaluation annuelle n'aurait pas... surtout produite neuf mois plus tard. Comme je vous dis, un comité qui veut avoir son chiffre... Parce que, dans la mesure où il n'y a pas de congé de cotisation, ça ne donne pas plus de sécurité, là.

Le Président (M. Copeman): Je veux juste vous rappeler, Mme la députée, la cause est sub judice, il faut faire bien attention quand on embarque sur ce terrain-là comme parlementaires, hein?

Mme Beaudoin: Alors, dans votre mémoire, à la page 15, dans le chapitre Les droits des retraités dans une perspective d'équité, vous passez vos commentaires. Mais, à la page 16, ce qui m'a surprise un peu, à la fin de cette page-là, vous dites: «Quoi qu'il en soit, ce n'est pas en imposant aux parties contractantes un troisième joueur à la table de négociation que l'on fera triompher l'équité. On risque, au contraire, d'imposer aux actifs un boulet dont ils seront les seuls à subir les contrecoups dans leurs rapports collectifs de travail.» Est-ce que vous voulez dire que la tierce partie, qui se trouve à être les retraités, en fin de compte, ça se trouve à être un boulet, selon vous?

M. Côté (Denis): C'est parce qu'en matière de négociation collective il y a plusieurs sujets qui rentrent dans un règlement. Vous savez, on peut arriver dans une année où est-ce que l'employeur va nous dire: J'ai une masse salariale, j'ai une enveloppe budgétaire de 9 %. De quelle façon vous voulez le répartir sur ces trois années-là? Si vous en mettez 2 % sur le régime de retraite, à ce moment-là, il vous en reste juste 7 % à étaler sur les trois autres années. Il peut y avoir des modifications de faites dans une convention collective, ça fait partie d'un règlement global. Ça fait que, si ce règlement global là, qui s'adresse aux actifs, ce règlement-là, cette entente de principe là est assujettie, elle est conditionnelle à un droit de veto exercé par un retraité pour la seule façon... pour la seule raison qu'il n'apprécierait pas la façon dont a été bonifié le régime de retraite, à ce moment-là, ça vient... C'est de là que vient l'expression où est-ce qu'on a un boulet. On a un boulet parce que les membres actifs vivent la situation présente et, pour la durée de la convention collective, c'est à cet effet-là que ça vient instaurer un boulet. Je veux dire, il faut le qualifier, je veux dire, sans être trop péjoratif, ça représente une embûche, puis dans le fond ce n'est pas les retraités comme tels qui constituent... c'est bien plus toute la mécanique, là. À partir du moment... C'est parce que dans le fond on l'a, le lien de confiance. Je comprends qu'il y a peut-être des histoires d'horreur dans d'autres secteurs, mais, au niveau policier, on l'applique toujours, je veux dire. On l'a, l'historique, on peut vous en faire la démonstration. Mais c'est d'instaurer cette mécanique-là qui risque de poser un problème.

Le Président (M. Copeman): Mme la députée de Champlain.

Mme Champagne: Merci. Bonjour, messieurs. Écoutez, vous relevez de municipalités en tant que policiers. Donc, c'est fort différent de d'autres groupes qu'on a rencontrés, qui relèvent d'entreprises. Alors, c'est pour ça que faire un projet de loi qui va rallier tout le monde, ce n'est pas toujours évident, là, et je m'en rends compte. Et, là-dessus, on a beaucoup de groupes, plusieurs groupes qui nous ont parlé d'inquiétude, suite à ce projet de loi là ou face à ce projet de loi là, avec des exigences qui sont là, que des employeurs... Et là je vous pose la question si votre employeur pourrait avoir cette tendance-là de passer d'un régime à prestations déterminées à un régime à cotisation déterminée. Ce n'est pas la même garantie, on s'en doute un peu. Est-ce qu'au niveau municipal cette inquiétude-là est là ou a été soulevée par votre monde, ou si ce n'est pas le cas du tout? Parce que je me rends compte qu'au niveau municipal, quand on a une entreprise qui est solvable ou à peu près à aucun risque de faillite ? je ne croirais pas que, demain matin, Québec ou Montréal vont faire faillite, là, en tout cas, je ne pense pas ? mais il y a quand même des inquiétudes sur la solvabilité, là, des régimes de retraite quand même. Alors, cette inquiétude-là, face au passage d'un régime à prestations déterminées à un régime à cotisation déterminée, est-ce que c'est soulevé chez vous?

M. Bélanger (Guy): Ce n'est pas vraiment une inquiétude chez nous. Je veux dire, c'est quand même irréversible, les régimes à prestations. Là, ce que je peux vous dire, par contre, c'est qu'il peut arriver qu'à certains endroits où ils ont des REER ? il reste peu de cas parce qu'il y a moins de corps de police ? où on cherche à ramener ça dans un régime à prestations, on ait plus de réticences qu'on en avait auparavant, parce que c'est bien plus facile pour une municipalité de gérer un REER évidemment qu'un régime à prestations. Mais c'est sûr que je ne pense pas qu'il y ait une incidence par rapport au projet de loi, mais par rapport bien plus au principe même du régime à prestations, mais il en reste très peu, hein, des REER. On pourrait les compter sur les doigts de la main puis même qu'on en aurait trop.

Mme Champagne: Une autre toute petite question. Si vous aviez à faire le projet de loi ? des fois, c'est plaisant de se mettre dans la peau de l'autre, ça nous aide à décider, hein? ? quel serait le plus grand irritant que vous auriez face au projet de loi? On s'entend bien, là, en lien avec votre... le groupe que vous représentez, là, parce que je me rends compte à quel point les groupes ont des attentes différentes. Tu es un retraité, tu as telles attentes; tu es un syndiqué, tu as une autre attente, là. Puis il faut composer avec tout ça, puis on va avoir à juger, là, du projet de loi, article par article, à un moment donné, et très bientôt. Alors, le plus gros irritant, celui qui ferait que, vous autres, ça pourrait vous satisfaire ou du moins vous rendre plus confortables, ce serait lequel?

n(11 h 20)n

M. Bélanger (Guy): En fait, c'est le fameux droit de veto, mais c'est le même irritant que pour l'ensemble du monde syndical, c'est le fameux droit de veto qui constitue une ingérence dans les négociations. Puis en plus, nous, on a un arbitrage obligatoire suivant le Code du travail. On serait pris avec un arbitrage en vertu du Code du travail, un arbitrage demandé par un retraité. Alors, le gros irritant, là, c'est à ce niveau-là.

C'est une mécanique qui à notre avis est irréaliste en négociation, pas juste pour les policiers, pour l'ensemble du milieu du travail. Je pense que, s'il y a une solution qui doit être trouvée, on n'a pas de mécanique miracle, on n'a pas de proposition miracle à faire valoir, on suggérerait de plutôt mettre des critères automatiques qui feraient en sorte qu'il y aurait un certain droit reconnu aux retraités, aux surplus, suivant un critère bien précis qui serait contrôlé par l'actuaire du régime et de la Régie des rentes, mais on avance ça de même, on n'a pas vraiment approfondi la matière. On n'a pas de solution miracle, mais on sait une chose, c'est que la mécanique suggérée, elle, elle est tout à fait inappropriée.

Le Président (M. Copeman): Ça va. Alors, M. le président Côté, Me Bélanger, M. Bergeron, merci pour votre participation à cette commission parlementaire au nom de la Fédération des policiers et policières municipaux du Québec, et, malgré le fait qu'il est prévu que nous siégeons cet après-midi, j'ajourne les travaux de la commission sine die.

(Suspension de la séance à 11 h 21)

 

(Reprise à 16 h 31)

Le Président (M. Paquin): Bonjour. Donc, je constate que nous avons quorum. La Commission des affaires sociales reprend ses débats. Je vais rappeler rapidement le mandat. La Commission des affaires sociales est réunie afin de poursuivre ses consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 30, Loi modifiant la Loi sur les régimes complémentaires de retraite, notamment en matière de finance et d'administration. Je rappelle aux personnes présentes de bien vouloir éteindre leur cellulaire, le mettre hors fonction pour éviter de déranger les travaux de la commission.

Donc, nous allons recevoir trois groupes cet après-midi, mais, dans un premier temps, on s'excuse auprès des groupes, le retard que nous avons. Malheureusement, c'est des choses qu'on ne peut, des fois, pas éviter d'aucune façon, et c'est vraiment le cas. Excusez-nous. Et je crois qu'on s'est entendus pour, au lieu de 60 minutes par présentation, 40 minutes pour être capables de finir dans des délais acceptables.

Donc, trois groupes que nous allons entendre cet après-midi: dans un premier lieu, l'Alliance des associations des retraités; par la suite, Association canadienne des gestionnaires de caisses de retraite, chapitre Québec; et nous allons terminer le tout avec l'Association canadienne des administrateurs de régimes de retraite.

Donc, on débute sans plus tarder avec les représentants de l'Alliance des associations de retraités. Vous avez 40 minutes, on a 40 minutes en tout. Vous pouvez prendre 20 minutes pour présenter votre mémoire ou prendre moins de temps et il y a aura plus d'échanges de chaque côté. C'est à votre choix. Si vous prenez le 20 minutes au complet, ça va être 10 minutes de chaque côté pour la période de questions. Donc, je vous invite à vous présenter ? je pense, c'est M. Goulet ? et à présenter les personnes qui vous accompagnent, et nous faire part de votre mémoire. Nous vous écoutons.

Alliance des associations de retraités (AAR)

M. Goulet (André): Merci, M. le Président. Comme représentants de l'alliance, nous tenons d'abord à vous dire notre satisfaction de pouvoir présenter notre point de vue. Et comme vous, depuis le 19 septembre où nous devions, une première fois, passer, nous avons dû nous adapter à plusieurs changements, et ça démontre... Mais n'allez pas croire cependant, parce qu'on était retraités, que ça a été facile pour nous autres aussi de trouver du temps, ce n'est pas vrai.

L'alliance est un jeune organisme, né en 1998, qui regroupe des retraités des secteurs public et parapublic et des secteurs municipal et privé. Nous regroupons environ 70 000 personnes et nous travaillons beaucoup sur le dossier de la retraite. Nous avions, pour cet après-midi, préparé un résumé de mémoire que le vice-président, Ghislain Jobin, devait vous livrer, mais, devant la contrainte de temps et pour en conserver le plus possible pour la période de questions aussi, M. Jobin, notre vice-président, on a décidé, avec Me Marcel Rivest, qui est notre conseiller juridique, que M. Rivest vous présenterait... feuilletterait le mémoire avec vous pour aller le plus rapidement possible, pour donner l'essentiel.

Je me contenterai, pour moi, de vous rappeler que l'alliance appuie le projet de loi n° 30 sans réserve, en souhaitant une réflexion sur la méthode alternative à l'arbitrage qui est suggérée, et demande son adoption dès cet automne. L'alliance aussi souhaite que le projet de loi soit adopté avec l'appui de tous les partis politiques. Et l'alliance tient à remercier chaleureusement Mme la ministre Michelle Courchesne pour sa vision et son dévouement à défendre des principes juridiques, des valeurs fondamentales et l'équité et tient à remercier son gouvernement pour l'avoir entendue. Alors, je laisse la parole à Me Rivest, à qui vous pourrez adresser vos questions.

Le Président (M. Paquin): ...beaucoup d'attention.

M. Rivest (Marcel): Merci. Donc, comme vient de le dire le président, nous allons simplement comme faire un survol de notre mémoire. Je comprends que vous l'avez. Compte tenu du temps, on n'entrera pas dans le détail. Donc, je vais aller avec les grandes têtes de chapitre pour rappeler ce qu'il y a à l'intérieur de ce mémoire-là.

Donc, au début, on parle de la situation des retraités. On rappelle la situation un peu pénible qu'ont vécue un certain nombre de retraités récemment. On pense, là, au cas de Mine Jeffrey, on pense à Aciers Slater et d'autres où des gens ont perdu... je pense à Mine Jeffrey en particulier, 36 % de leur pension, puis c'est vrai pour d'autres aussi, suite à la déconfiture, là, de leur employeur.

On rappelle également qu'au cours des 25 dernières années où les surplus se sont plutôt dégagés, les retraités, particulièrement ceux du secteur privé, ont eu très peu d'accès aux surplus. En fait, les surplus ont surtout servi, d'une part, à des congés de contribution des employeurs et, d'autre part, à des améliorations aux régimes de retraite, mais particulièrement l'amélioration pour les participants actifs, la baisse de l'âge de retraite et l'introduction de rentes de raccordement. En fait, il y a eu très peu d'indexation des rentes dans les régimes de retraite.

La revendication principale des retraités, c'était de pouvoir participer dans l'utilisation des surplus si jamais il s'en dégage dans les régimes, et l'alliance est satisfaite de voir que le projet de loi n° 30 répond à cette demande-là.

Et la disposition du projet de loi n° 30 sur l'équité, elle est appropriée, elle est juste, elle est équitable pour les raisons que nous avons mentionnées dans notre mémoire, qu'on va regarder brièvement. À la page 4, on parle de la notion de patrimoine d'affectation. En fait, on reconnaît ? c'est la loi qui le dit ? qu'un régime de retraite, c'est un patrimoine d'affectation fiduciaire, et en conséquence la nature même d'un régime de retraite impose aux parties d'appliquer les règles applicables au patrimoine d'affectation, aux règles d'administration d'autrui, et en pratique ça veut dire l'équité.

On a parlé aussi du concept de la rémunération globale. En fait, c'est un principe qui est bien reconnu, qui veut que, lors d'une négociation, la rémunération globale est négociée. Et dans cette rémunération-là fait partie la contribution de l'employeur au régime de retraite, de sorte que les contributions des employeurs sont en définitive des contributions des employés, de sorte que, s'il se dégage des surplus dans les régimes de retraite, ceux-ci devraient être attribués aux participants, qu'ils soient actifs ou qu'ils soient retraités, parce que ça signifie en réalité qu'il y a eu trop de cotisations à la caisse de retraite pour les rentes qui sont versées ou que les rentes versées sont insuffisantes par rapport aux cotisations.

Comment se créent les surplus dans une caisse de retraite? Sans rentrer dans les détails, les actuaires estiment, à l'aide d'hypothèses actuarielles, la solvabilité de la caisse. Entre autres, ils utilisent des hypothèses de rendement ? c'est l'hypothèse la plus importante ? de sorte que, quand la réalité fait en sorte que les rendements sur les marchés sont plus élevés que l'hypothèse de rendement, il se crée alors des surplus ou, à l'inverse, des déficits si la réalité est plus basse. Il est à noter que les surplus se créent autant sur le capital réservé pour payer les rentes des retraités que sur celui réservé pour payer les rentes de ceux qui sont des participants actifs, de sorte que, si l'actuaire avait pu connaître l'avenir, les participants auraient eu à contribuer moins à la caisse de retraite. Dans les cas où il y a des surplus, ils auraient donc plus d'argent dans leurs poches.

n(16 h 40)n

La prise des risques. On entend les employeurs dire qu'ils prennent tous les risques dans un régime de retraite, mais en réalité ce n'est pas tout à fait exact. Et, comme l'a reconnu la Cour d'appel dans l'affaire Singer, les participants aussi partagent certains risques, entre autres le risque de l'inflation. Dans un régime de retraite qui n'est pas indexé ou qui est partiellement indexé, la valeur de la rente diminue à chaque année du montant ou du pourcentage de l'inflation. Il y a également le risque de perte d'emploi. Lorsque vous perdez votre emploi avant d'arriver à la retraite, de la façon qu'on calcule la valeur de votre rente, vous perdez les subsides de retraite anticipée et vous perdez généralement la rente de raccordement. Il y a également le risque qu'après plusieurs années de promesses l'employeur décide de modifier le régime à prestations déterminées en régime à cotisation déterminée, comme ça se fait un petit peu actuellement. Il y a également le risque relié à l'insolvabilité de l'employeur. Autrement dit, les rentes sont garanties mais ne sont garanties que par la solvabilité de l'employeur, avec comme résultat que, si l'employeur n'est pas capable d'assumer un déficit, à ce moment-là on doit baisser la rente des participants.

L'utilisation des surplus à la terminaison d'un régime. Simplement rappeler que la loi actuelle prévoit que le consentement ou l'objection, parce que ça fonctionne sur une base d'objection, des retraités actuellement est aussi considéré que le consentement des participants actifs, que le principe général dans la loi, c'est que les surplus vont être partagés entre les participants actifs et retraités au prorata des crédits de rente. Et, comme dans beaucoup de régimes les retraités ont un passif équivalent, des fois, plus que celui des participants actifs, ils auraient, en vertu de la loi, une part de surplus plus grande que celle des participants actifs. De plus, un arbitre peut décider d'attribuer les surplus sur une base d'équité en fonction des différents critères que vous connaissez. En conséquence, quand on parle d'utilisation de surplus en cours de régime, à ce moment-là il est indéfendable de prétendre que les retraités, qui auraient leur juste part des surplus si le régime se terminait demain, n'auraient pas, en cours de régime, droit à une part équitable des surplus.

Le bien-fondé de l'indexation des rentes. J'attire simplement votre attention sur... Il y a différentes études qui ont été faites, au cours des années soixante-dix, au cours des années quatre-vingt, qui ont recommandé la nécessité d'indexer les rentes de retraite pour protéger le revenu des retraités. Tous ces rapports-là sont tombés un peu dans l'oubli au fil du temps, mais au moins le projet de loi n° 30, par sa clause d'équité, pourra tendre à ramener un peu cette idée que les rentes des retraités, si jamais il y a des surplus qui se dégagent dans une caisse de retraite, il y a une certaine partie qui pourrait aller à l'indexation des rentes.

Le recours à l'arbitrage prévu au projet de loi n° 30, bon, l'alliance préférerait qu'il y ait une méthode alternative à l'arbitrage. On n'est pas vraiment en accord qu'une seule personne pourrait bousiller le principe, de sorte qu'on a comme une méthode alternative à proposer. Et la méthode alternative, c'est celle qui serait relativement copiée sur ce qui existe actuellement à l'article 146.5 dans les cas où l'employeur veut faire reconnaître son droit à des congés de contribution, où il y aurait une proposition de l'employeur qui doit recevoir l'assentiment des différentes parties, incluant les syndicats, les retraités, les participants non syndiqués. Cette méthode-là serait plus rapide, moins coûteuse, moins judiciaire, si vous voulez, que l'arbitrage. Donc, en conséquence de tout ça, la disposition du projet de loi relative à l'équité est appuyée par l'alliance des retraités.

Pour la sécurité des prestations, le projet de loi prévoit la possibilité d'un achat de rente pour les participants actifs actuels. En fait, les retraités vont exercer leur choix en fonction de différents critères, mais ils vont prendre en considération le fait qu'ils pourraient ou pas participer dans les utilisations de surplus, et de sorte que, si la clause actuelle sur l'équité va de l'avant, les retraités auront un intérêt de demeurer dans le régime de retraite.

Sur les règles de gouvernance, l'alliance accueille favorablement les dispositions qui y sont contenues. Que les fournisseurs de services aient l'obligation d'agir dans l'intérêt des participants va diminuer l'ambiguïté qui existe actuellement, sinon le conflit d'intérêts, au niveau des comités de retraite qui sont majoritairement composés de représentants d'employeurs. L'alliance apprécie aussi et reconnaît que le projet de loi facilite la formation, assure une meilleure protection des membres des comités de retraite, est d'accord avec la clause sur la franchise.

Bon, sur la survie des régimes à prestations déterminées, on indique dans le mémoire pourquoi, nous, on ne croit pas que c'est la loi n° 30 ou que c'était la loi n° 102. C'est une tendance lourde, si vous voulez, qui existe depuis un certain temps, qui a commencé au États-Unis. Dieu sait qu'aux États-Unis les législations ne sont pas tellement favorables aux participants, et pourtant cette tendance lourde là est commencée, si je peux dire, et la raison principale ? sans rentrer dans le détail, mais je pourrais si vous voulez ? c'est qu'aujourd'hui les régimes coûtent plus cher et les employeurs ne sont pas intéressés à assumer les coûts, qui pourtant ils avaient promis qu'ils le feraient au fil des années, de sorte que, là, on arrive à la conclusion que M. Genest a déjà expliquée.

J'aimerais également peut-être prendre quelques minutes pour faire certains commentaires sur les mémoires de la FTQ et de la CSN, deux commentaires sur le mémoire de la FTQ et puis quelques-uns sur le mémoire de la CSN.

Le premier commentaire, c'est que les syndicats n'ont pas d'obligation légale de représenter les retraités. Les décisions qui ont été citées ne prétendent pas ou ne décident pas à cet effet-là. L'article 47.2 du Code du travail est assez clair que l'obligation légale de représentation des syndicats est à l'égard des salariés membres de l'unité de négociation. Or, les retraités ne font pas partie de l'unité de négociation. Le deuxième point, c'est que la FTQ est d'accord pour que les retraités soient traités avec équité. Ils parlent qu'il devrait y avoir comme une part équivalente des surplus pour indexer les rentes d'une façon ou d'une autre; on prend bonne note de ce point-là.

Sur la question de l'obligation légale de représenter, dans le fond que... je pense que les syndicats n'ont pas cette obligation-là. D'ailleurs, les syndicats ne votent pas à leurs assemblées, les syndicats ne demandent pas l'avis des retraités. Mais, de toute façon, qu'ils l'aient ou qu'ils ne l'aient pas, ça ne change rien au bien-fondé d'un principe qui serait que les retraités, s'il y a des améliorations qui doivent être apportées avec les surplus, que les retraités soient traités avec équité, une perspective d'équité comme l'explique la loi, de sorte que, s'ils l'ont, le devoir de représentation, bien ils appliqueront le principe d'équité. Et je comprends que la FTQ est d'accord avec ça parce qu'elle l'a dit. Et, s'ils ne l'ont pas, à ce moment-là le principe d'équité s'appliquera. Que ce soit d'une façon ou d'une autre, le principe de la loi est bon.

Maintenant, quant au mémoire de la CSN, quelques remarques. La CSN semble indiquer... Il reste cinq minutes en tout, tout, tout?

Le Président (M. Paquin): Il resterait cinq minutes pour atteindre votre 20 minutes, là.

M. Rivest (Marcel): Ah, O.K.

Le Président (M. Paquin): On a 15 minutes de faites.

M. Rivest (Marcel): Ah, O.K. La CSN semble dire que seuls l'employeur et le syndicat seraient les parties à un régime de retraite. Si tel est le cas, à ce moment-là, on demande que les rentes soient achetées pour tous les retraités dans les régimes de retraite. Et, lorsque les rentes seront achetées, à ce moment-là, les syndicats et les employeurs seront les deux seules parties et feront ce qu'ils veulent avec les caisses de retraite. Mais, tant et aussi longtemps que le 50 % de la caisse, c'est de l'argent réservé pour les retraités, je pense qu'il y a trois parties dans un régime de retraite: les participants actifs, généralement ou parfois représentés par les syndicats, les retraités et les employeurs. Parce que le principe de la rémunération globale s'applique autant aux retraités, parce que c'était leur argent au moment où ils étaient à l'emploi de l'employeur.

Le deuxième point, bon, la CSN s'oppose aussi à l'achat des rentes. Disons, il est bien fait, le mémoire de la CSN, je comprends ce qui est indiqué dans leur mémoire. Par ailleurs, ils disent: Bon, les retraités ne sont pas des parties, par ailleurs, on s'oppose aussi à l'achat de rentes pour eux, de sorte que les retraités n'auraient que les désavantages du système, c'est-à-dire pas de participation dans les surplus ou garder les risques d'insolvabilité de l'employeur. Il me semble que c'est une situation qui ne fonctionne pas.

Autre élément. La CSN dit: Bon, bien qu'est-ce que c'est, l'équité? C'est difficile à définir. Effectivement, c'est difficile à définir d'une certaine façon, mais, par ailleurs, ça a la beauté d'être flexible, et de pouvoir s'adapter aux différentes situations, et de permettre aux parties de développer, au fil du temps, des pratiques dans les différents milieux de travail. La question en fait, c'est de savoir d'où viennent de façon générale les surplus. Et, si les surplus, comme c'est le cas généralement, viennent de rendements excédentaires sur les actifs de la caisse, à ce moment-là, les rendements excédentaires se créent autant sur le capital des participants actifs que sur celui des retraités, et il serait juste que les deux groupes puissent participer dans les surplus.

n(16 h 50)n

Autre élément. La CSN parle de la réduction des coûts de main-d'oeuvre. Bon, avec respect pour eux, je ne pense pas que la caisse de retraite est un bassin d'argent à la disposition de l'employeur et des syndicats pour négocier les réductions ou les coûts de main-d'oeuvre sans considérer les retraités, puisque le capital ou l'argent des retraités est aussi dans la caisse de retraite. Autrement dit, il peut être possible pour l'employeur et les syndicats de négocier des clauses de préretraite avec les surplus, mais encore là dans une perspective d'équité et que les retraités qui ne bénéficieront pas de ces avantages-là puissent aussi avoir une part raisonnable.

Ensuite, on parle de conflit de générations. Je ne pense pas qu'il y ait aucun conflit de générations dans un régime de retraite privé parce que les régimes de retraite sont capitalisés. Autrement dit, cette année, on met dans la caisse ce qui est nécessaire pour que ce qui est gagné aujourd'hui soit éventuellement payé, de sorte que, quand les gens arrivent à la retraite, de façon générale le montant nécessaire pour payer la rente est déjà dans la caisse de retraite. Autrement dit, ce n'est pas un régime «pay-as-you-go», comme on dit, où est-ce que les jeunes paient pour les vieux.

Le Président (M. Paquin): Me Rivest, c'est très intéressant, mais je dois vous inviter à conclure dans 50 secondes, s'il vous plaît.

M. Rivest (Marcel): O.K. Disons, le dernier point à ce moment-là, c'est que la CSN se dit aussi d'accord avec l'équité. Par ailleurs, elle ne suggère aucune méthode pour traiter les retraités avec équité. Ça fait que, disons, je vais arrêter là pour l'instant et je pourrai répondre aux questions pour expliquer la solution, mettons, pratique, là, qu'on voit.

Le Président (M. Paquin): Très bien. Merci. Mme la ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale, nous vous écoutons.

Mme Courchesne: Merci, M. le Président. D'abord, messieurs, merci de votre patience et de votre compréhension, on l'apprécie énormément. J'irai droit au but parce que le temps est plus court que prévu. Vous savez qu'on est à la veille de terminer cette commission. Demain, il ne restera que deux groupes à se présenter, plus les deux autres ce soir qui seront devant nous, et il y a eu... Vous semblez avoir bien suivi les débats, vous savez que la question de l'arbitrage pose beaucoup de problèmes. Il en pose bien sûr aux parties syndicales, mais il en pose aussi à d'autres, d'autres qui croient effectivement qu'il y a une ingérence dans un processus de négociation. Donc, ça m'invite à réfléchir davantage.

Je voudrais savoir, vous faites une proposition, que vous dites plus simple, qui est de faire cette assemblée majoritaire et de régler la question par un vote majoritaire de ceux qui sont présents. Mais ça, ceux qui sont présents, tu sais, s'il y a 10 personnes, c'est le vote majoritaire de 10 personnes. Puis, s'il y a, je ne sais pas, moi, des centaines ou des milliers de membres, j'exagère peut-être avec mon 10 personnes, là, mais comment on fait pour s'assurer que ce vote demeure un vote représentatif? Parce que je ne suis pas certaine que c'est strictement sur les personnes présentes. Ça demeure un droit, ça demeure une revendication des personnes retraitées, là, qui est sérieuse. Alors, est-ce qu'on peut véritablement se baser uniquement sur un vote des personnes présentes?

Le Président (M. Paquin): Me Rivest.

M. Rivest (Marcel): Je ne dis pas qu'il n'y a pas d'autre méthode, mais je pense que la réponse, c'est oui. C'est un petit peu comme, mettons, les réunions syndicales. Généralement, une réunion syndicale va avoir un certain pourcentage de membres relativement minime, mais, lorsque la convention collective arrive pour résolution, si je peux dire, là la salle est pleine parce que les gens y voient leur intérêt. Et le vote, c'est seulement quand même les votes présents, sauf qu'il y a beaucoup de monde dans la salle parce qu'il y a de l'argent qui est en jeu. De sorte que, dans notre cas, ça va être un petit peu la même chose: à partir du moment où un document va être envoyé aux retraités pour leur dire: Écoutez, il y a une proposition qui est faite par laquelle, mettons, votre rente pourrait être indexée de telle façon, et les participants actifs auraient peut-être... Je ne sais pas trop comment ce serait indiqué, mais là les gens vont voir leur intérêt et vont participer à l'assemblée où le vote va être pris.

Mme Courchesne: Bien, si vous permettez, parce que, M. le Président, je voudrais quand même laisser mes collègues poser des questions, si je vous disais, messieurs ? puis ne présumez d'aucune façon de mes intentions, c'est vraiment une question tout à fait objective que je pose sans arrière-pensée, je vous l'assure; mais, si je vous disais ? que, pour cette question-là, on conserverait, pour l'utilisation de l'excédent, là, le principe de la loi n° 195, est-ce que ça, ça peut vous satisfaire? Vous comprenez ce que je veux dire?

M. Rivest (Marcel): Non, je...

Mme Courchesne: C'est que, si, par exemple, on n'a pas d'arbitrage, si on ne retient pas l'idée de cette assemblée avec un vote majoritaire, vous savez que, dans la loi n° 195, il y a quand même des mécanismes qui permettent aux retraités de se prononcer, par exemple, sur les congés de cotisation. Si on appliquait un mécanisme semblable pour l'utilisation... Parce que l'équité demeure, là. L'équité, on s'entend là-dessus. Mais, si on prend un procédé semblable à la loi n° 195 dans les cas de confirmation, est-ce que ça, ça peut vous satisfaire?

M. Rivest (Marcel): O.K. Moi, je croyais qu'avec la loi n° 195 puis l'application de l'article 146.5 il y a un mécanisme de consultation des syndicats, des retraités puis des non-syndiqués, puis que ça se fait, je pense, à l'assemblée annuelle ou quelque chose du genre, puis c'est...

Mme Courchesne: ...comme ça, là, je ne pense pas, il y a des difficultés, là. Mais, en tout cas, allez-y.

M. Rivest (Marcel): O.K. Mais, moi, je pensais que c'était comme ça, que c'était soit l'assemblée annuelle ou une assemblée spéciale où les gens étaient consultés. Ça fait que c'est sûr que, si c'est ça, ça, on serait d'accord avec ça. Autrement dit, ce qu'on veut pour les retraités, c'est un mécanisme de consultation, et un mécanisme de consultation où eux seuls, juste leur petit groupe ou leur grand groupe, dépendant des circonstances, voteraient séparément, si vous voulez, du groupe des participants actifs.

Mme Courchesne: Mais on se comprend bien ? puis je conclus là-dessus, là ? que ce vote-là ? je comprends que, vous, vous dites: Il y aura probablement beaucoup de monde dans la salle, là, mais peu importe; et ce vote-là ? s'il est négatif, ça équivaut à une sorte de droit de veto au fond, là, c'est-à-dire que ce vote-là, il est prépondérant, et ce vote-là va empêcher le comité de retraite d'agir de la façon dont il le souhaitait. On s'entend là-dessus?

M. Rivest (Marcel): Oui, on s'entend sur ça, mais j'ajoute quand même que par rapport... Si vous voulez, il n'y a pas d'arbitrage, là. Ça fait qu'autrement dit l'employeur fait une proposition, mais, en pratique, la vraie pratique de la vie, ce qui va se passer, c'est que, lorsque l'employeur va vouloir faire sa proposition, bon, ou il y a un syndicat ou il n'y en a pas dans sa place, mais, si, mettons, il n'y en a pas, là il va penser par lui-même qu'est-ce qui serait équitable pour les deux groupes et il va faire une proposition. S'il y a un syndicat dans la place, à ce moment-là, il va probablement discuter avec le syndicat: Si on faisait ca, est-ce que ce serait équitable? Le syndicat va dire oui. À ce moment-là, la proposition va être faite aux retraités, et là les retraités vont être pris dans la position où, voilà, j'ai une possibilité d'avoir une certaine part de surplus. Si je refuse, là il n'y en a pas, de proposition, et ça ne veut pas dire que, demain, il va en revenir. Donc, j'ai une pression, moi, comme retraité, d'accepter, à moins que ce soit vraiment inéquitable. Et, si c'est vraiment inéquitable, ce sera non, la réponse, et là effectivement l'employeur refera ses devoirs puis il en fera une autre, proposition, s'il veut que ce soit accepté.

Le Président (M. Paquin): Merci. M. le député de Vimont.

M. Auclair: Merci beaucoup. Messieurs, bonjour. Écoutez, votre point de vue est très intéressant, parce qu'on a entendu beaucoup de groupes, entre autres les syndicats, qui sont venus nous présenter leur point de vue direct à l'égard du fait que ce sont eux qui sont là pour défendre les intérêts, incluant l'intérêt des ex-membres.

Un élément qui a été soulevé, c'est au niveau du type de régime. Lorsqu'on parle d'un régime à prestations déterminées, on s'entend que c'est le montant qui va être reçu à la fin, à la retraite, qui est déterminé d'avance. Donc, l'employeur a l'obligation de mettre les fonds en conséquence pour assurer aux retraités un revenu x, tel que convenu, là, dans les ententes négociées antérieures.

On parle beaucoup des surplus. Il n'y a personne qui m'a encore soulevé ou qui m'a amené la réalité au niveau des déficits. Parce que je comprends très bien tout le débat des surplus. Les employeurs nous disent: Bien, écoutez, nous, on doit assurer un montant x, on doit assurer un fonds x dans la caisse pour assurer les revenus; dès qu'on a atteint ça, notre rôle est respecté. Qu'est-ce qui arrive au niveau des déficits? Votre point de vue. Parce que je comprends l'intérêt d'aller chercher les surplus, mais qu'est-ce qu'on fait avec le volet des déficits? Parce que, là, ça vient en contradiction par rapport à ma réalité de régime à prestations déterminées, parce que, moi, comme employeur, je dois vous assurer quand même le même revenu. Comment on le gère, ça?

n(17 heures)n

M. Rivest (Marcel): J'ajoute une petite remarque préliminaire. Quand vous dites que vous avez entendu les syndicats qui disent qu'eux représentent les retraités, on peut quand même se poser des questions. Et certains syndicats le font, beaucoup ne le font pas. Et, si les syndicats le faisaient, les régimes de retraite dans le secteur privé seraient indexés. Or, ils ne sont pas indexés, ce qui est la preuve qu'il n'y a pas grand-chose qui se fait pour les retraités.

Sur le deuxième point, sur la question du déficit, en fait le législateur a déjà décidé cette question-là. Il a décidé en disant: L'employeur doit, un, assumer premièrement le solde du coût et également il doit assumer le déficit s'il y en a un. Donc, en fait, la cotisation de l'employeur est en deux volets: premier volet, le solde du coût annuel; deuxième volet, le cas échéant, une cotisation additionnelle pour payer le déficit. Donc, c'est tout à fait normal que l'employeur, à ce moment-là, paie le déficit.

M. Auclair: Merci. Parfait.

Le Président (M. Paquin): Ça va? D'accord. Donc, on va poursuivre du côté de l'opposition officielle avec Mme la députée de Mirabel et porte-parole de l'opposition officielle en matière de régimes de rentes et de retraite.

Mme Beaudoin: Merci, M. le Président. Alors, M. Goulet, M. Jobin, Me Rivest, merci pour la présentation de votre mémoire. Et je vous félicite également d'avoir soumis une méthode alternative à l'arbitrage. Alors, vous vous démarquez, parce qu'il semblerait que la question de l'arbitrage soulève beaucoup de questions, et je trouve ça très innovateur de présenter une méthode du moins qui constitue une alternative à l'arbitrage.

Moi, j'aimerais vous poser une question concernant le principe d'équité. Alors, certains craignent que le principe d'équité, le mécanisme d'arbitrage engendrera à terme une comptabilité distincte entre les caisses des actifs et des retraités. J'aimerais vous entendre à ce sujet-là.

M. Rivest (Marcel): Bon, l'équité, dans un régime de retraite, peut être complexe et peut être simple, mais essentiellement c'est d'essayer de retrouver les sources des surplus ? les actuaires font ça dans leurs évaluations actuarielles; on peut savoir d'où ils viennent, les surplus ? et, après ça, au fil du temps, de les attribuer aux groupes qui les ont générés ou créés.

Sur la question de la comptabilité distincte, je vais vous donner l'exemple de l'Université Laval, qui est, pour moi, un modèle d'application, si vous voulez, d'utilisation de surplus. Effectivement, on en fait une comptabilité distincte. On trouve d'où viennent les surplus à chaque année avec une série d'hypothèses actuarielles. Et, lorsque les surplus sont utilisés, à ce moment-là on trouve pour quel groupe ils ont été utilisés, et, au fil du temps, on applique comme ça l'équité. Ils n'ont pas de chicanes, et ça fonctionne très bien, et je pense que ce serait d'ailleurs la façon de faire qui serait la plus juste et équitable dans les circonstances.

M. Jobin (Ghyslain): Si vous permettez que...

Le Président (M. Paquin): Allez-y, M. Jobin.

M. Jobin (Ghyslain): ...je rajoute un petit mot par rapport à ça. Il faut bien prendre en compte qu'à chaque année, au moment des évaluations actuarielles, c'est que l'actuaire fait état effectivement du passif des deux groupes. D'où viennent, d'où proviennent les surplus? Bien, c'est en fonction du passif des deux groupes. Si, par exemple, vous avez un fonds de pension où il y a 100 millions, il y a 50 millions qui est inscrit au passif des retraités et 50 millions au passif des actifs, et le rendement a été égal pour les deux groupes, bien ça va être un rendement qui va être égal en termes d'argent pour les deux groupes. On connaît ça. Et, à chaque année, il nous fournit l'information, le cumul de ça. On peut avoir le cumul de ça. Par exemple, chez nous, on sait, par exemple, que, depuis 10 ans, on sait combien il a été versé aux actifs, combien il a été versé aux retraités, et ça, en fonction vraiment, là, des rendements des deux groupes. Donc, ça ne m'apparaît pas quelque chose de très, très compliqué que de faire ça.

Le Président (M. Paquin): Mme la députée de Mirabel.

Mme Beaudoin: Merci, M. le Président. Vous avez dit tantôt ? et reprenez-moi si j'ai mal compris ? que les associations syndicales ne représentent pas bien les retraités. Est-ce que vous avez des exemples?

M. Rivest (Marcel): Bien, je pense que le meilleur exemple, ça va être Hydro-Québec où il y a eu une utilisation de 1,2 milliard de surplus sur une période de cinq ans ? 2 milliards après ça, mais parlons juste 1,2 milliard sur une période de cinq ans ? et les retraités, sur le 1,2 milliard, ont eu 25 millions. Donc, autrement dit, il y a eu 1 175 000 $ pour les participants actifs et l'employeur. Ça fait que je pense que ça, c'est l'exemple le plus patent qui existe. Mais je pense que de façon générale... de façon générale, tout ce que je dis, c'est que certains syndicats vont représenter les retraités, d'autres syndicats ne représentent pas les retraités. Si on regarde le mémoire de la CSN, ils ne sont pas très, très chauds à l'égard des retraités, comme vous avez pu le constater. Et mon explication, c'est que, dans le secteur privé, il y a peu de régimes indexés. Ça fait que, s'il n'y a pas d'indexation, à ce moment-là, comment les syndicats les ont représentés, ces gens-là, alors que la seule amélioration qu'on peut donner aux retraités, c'est de l'indexation? C'est ça vraiment que je dis.

Le Président (M. Paquin): Mme la députée.

Mme Beaudoin: Merci. Vous avez parlé tantôt, là, du mémoire présenté par le FTQ. J'aimerais ça avoir vos commentaires sur ce qu'ils disent, là, concernant la rente garantie et rente des retraités. Ils disent: «Nous pensons que la proposition de permettre aux participantes et participants d'un régime de se prévaloir d'une rente garantie aux frais du régime, bien que louable sur le plan des intentions, ouvre une boîte de Pandore et alourdira le coût des régimes. Cela est dû au fait que les hypothèses actuarielles utilisées par les compagnies d'assurances sont plus restrictives, ce qui fait que la rente coûte considérablement plus cher qu'elle ne coûterait au régime lui-même.»

M. Rivest (Marcel): Ça, c'est vrai.

Mme Beaudoin: Vous êtes d'accord avec ça?

M. Rivest (Marcel): Ça, c'est vrai. La position des retraités, c'est celle-ci: c'est que, quand on regarde la situation, mettons, pénible de quelques groupes où ils se sont vu, là, baisser leur rente à cause de la déconfiture de leur employeur et quand on regarde que, depuis les 25 dernières années, les régimes privés sont peu ou pas indexés, à ce moment-là, on s'aperçoit que les surplus n'ont pas servi dans le passé de façon équitable aux retraités. Donc, on se dit: Ou bien les retraités doivent rester dans les régimes de retraite, mais, à ce moment-là, il faudra qu'ils participent sur une base équitable dans les surplus... À défaut, bien, qu'on achète une rente auprès des compagnies d'assurance parce que, là, il y a la garantie de la rente, il y a ce qu'on appelait la SIAP, qui s'appelle Assuris, je pense, maintenant, qui garantit les rentes. Ça fait qu'à ce moment-là c'est vrai que ça coûterait plus cher, mais là il y a peut-être un choix pour les régimes. Si vous ne voulez pas les acheter, les rentes pour les retraités, à ce moment-là, traitez les retraités de façon équitable, et les retraités vont rester dans les régimes, et puis il n'y en aura pas, de problème.

Le Président (M. Paquin): Mme la députée.

Mme Beaudoin: Merci. Mais est-ce que vous êtes d'accord que ce serait le comité de retraite qui devrait payer s'il y a le rachat des rentes? Qui doit assumer les frais?

M. Rivest (Marcel): Bien, généralement, quand... Actuellement, c'est possible, pour un comité de retraite, d'acheter les rentes des retraités. Donc, qui paie? C'est la caisse de retraite. On demande à une compagnie d'assurance, bien, combien que ça coûterait pour acheter telle rente, la compagnie d'assurance fait une soumission à plusieurs, puis on vous dit: Bien, ça coûte tant, et là... Mais la raison pour laquelle ça coûte plus cher, c'est simplement ceci techniquement, c'est que les compagnies d'assurance vendent les rentes aux taux du marché, donc aux taux généralement des obligations à long terme, grosso modo, qui sont les taux qui sont plus bas que le taux utilisé dans l'évaluation par les actuaires, de sorte qu'effectivement ça coûte un petit peu plus cher à cause de ça.

Le Président (M. Paquin): Mme la députée de Mirabel.

Mme Beaudoin: Une dernière question. Vous savez que le Conseil du patronat est vraiment en contradiction avec ce que vous dites, évidemment.

Une voix: Je suis surpris.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Beaudoin: J'aimerais quand même avoir vos commentaires, parce qu'ils sont catégoriques, ils disent: «Des garanties illusoires qui augmentent les coûts et les risques assumés par les entreprises accentuant ainsi l'asymétrie dans les règles de [finance] de ces régimes.» Ils disent: «Un projet de loi qui précipitera la fin des régimes de retraite à prestations déterminées dans le secteur privé.» Ils sont catégoriques. J'aimerais quand même avoir vos commentaires.

Le Président (M. Paquin): Me Rivest.

n(17 h 10)n

M. Rivest (Marcel): Bien, regardez, même la question de l'asymétrie, les statistiques de la Régie des rentes démontrent qu'au cours des 25 dernières années 50 % des employeurs ont pris des milliards de dollars en congés de contribution. Donc, déjà sur la question de l'asymétrie, ce n'est pas nécessairement vrai, ce qu'ils disent, qu'il y a asymétrie, puisqu'ils ont pris tant de congés de contribution. Ça, c'est le premier point.

Le deuxième point, sur la question des régimes à prestations déterminées qui sont convertis en régimes à contribution déterminée, c'est une tendance qui existe, qui existe depuis quelques années déjà. Et la raison principale, on l'indique dans notre mémoire, mais, juste pour vous le rappeler, c'est qu'un régime de retraite, lorsqu'il commence avec des employés qui sont jeunes, la contribution de l'employé est quasiment suffisante pour payer ce qu'il accumule durant l'année, de sorte que, quand le régime a des employés jeunes, la part de l'employeur est relativement modeste.

Au fil du temps, lorsque les employés vieillissent, la technique veut que, là, la contribution de l'employeur devient plus élevée. On est aujourd'hui en l'an 2006, ça fait plusieurs années, les régimes sont de plus en plus matures, et normalement c'est le temps de l'employeur de payer sa part, et il ne veut pas la payer. Il y a eu aussi malheureusement la baisse des taux d'intérêt qui, de façon conjoncturelle, depuis quelques années, fait en sorte qu'il y a des déficits. Les employeurs, lorsqu'ils prenaient les congés de contribution, depuis 25 ans, disaient: On a le droit de prendre des congés de contribution parce qu'on assume les déficits. Aujourd'hui, les déficits sont là, ils ne veulent pas assumer les déficits, ils veulent modifier les régimes en des régimes à contribution déterminée, ce qui fait que dans le fond ce n'est pas la loi n° 30, pas plus que c'était la loi n° 102, parce qu'il y avait le même argument avec la loi n° 102, qui va faire un changement aux régimes. Et, s'il y a certains régimes qui sont transformés en contribution déterminée, ce ne sera pas à cause de ça. Et de toute façon ceux qui vont rester régimes à prestations déterminées vont rester et vont être administrés de façon équitable.

Le Président (M. Paquin): Merci. Et le temps, c'est complété, malheureusement. Donc, M. Goulet, M. Jobin, Me Rivest, des représentants de l'alliance de l'association des retraités, merci de votre présence à l'Assemblée nationale, cet après-midi.

J'invite maintenant les membres de l'association canadienne de gestion des caisses de retraite, chapitre québécois, à prendre place, s'il vous plaît.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Paquin): Donc, madame, messieurs, de l'Association canadienne des gestionnaires de caisses de retraite, chapitre québécois, bienvenue. Nous avons 40 minutes. Nous avons dû malheureusement raccourcir tout ça de 20 minutes. On s'en excuse, mais on n'a pu faire autrement dû à des travaux qui ont persisté à l'Assemblée nationale, un peu plus tôt, en après-midi. Vous pouvez prendre 20 minutes pour faire part de vos commentaires sur votre mémoire ou vous pouvez prendre un peu moins de temps, ça donnera plus de temps à la période de questions. C'est à votre choix. Donc, c'est M. Drolet, je crois, qui est le président. Je vous invite, M. Drolet, à présenter les personnes qui vous accompagnent et à nous faire part de votre mémoire.

Association canadienne des gestionnaires
de caisses de retraite, chapitre québécois

M. Drolet (Pierre): Merci beaucoup. Alors, M. le Président, Mme la ministre, MM., Mmes les députés, merci beaucoup de nous recevoir cet après-midi. Je suis accompagné de deux personnes aujourd'hui. Il y a Louise Charette ici et Richard Laflamme, qui est à ma gauche, qui sont, comme moi, responsables de la gestion des placements des caisses de retraite.

Alors, l'Association canadienne des gestionnaires des caisses de retraite, communément appelée PIAC, est une association représentant exclusivement les responsables des gestions de portefeuille des principales caisses de retraite au Canada. Ses membres gèrent collectivement plus de 790 milliards de dollars pour le bénéfice évidemment de millions de participants. La mission de PIAC, communément appelée, consiste à favoriser la sécurité financière des bénéficiaires de caisses de retraite par le biais de politiques et de pratiques saines en matière de placement. Le chapitre québécois de PIAC, communément appelé PIAC-Québec, regroupe les membres québécois de cette association.

Évidemment, on vous remercie de nous donner la chance, l'opportunité de commenter. Évidemment, on est conscients que la commission a entendu beaucoup de représentants qui soulignent l'intérêt de la plupart des gens. On a eu le privilège d'y prendre part, on est vraiment contents. On remercie aussi la Régie des rentes pour son ouverture et sa transparence face à cette approche-là. Je vous dirais que nos collègues des autres provinces nous envient d'avoir des relations aussi intéressantes et constructives avec la Régie des rentes et aussi les gens dans ce processus-là. C'est vraiment apprécié.

Évidemment, notre rôle de gestionnaire de placement des caisses de retraite nous met aux premières loges dans ce domaine-là, et c'est pourquoi nous sommes heureux de pouvoir participer aux travaux de la commission. Les commentaires que nous vous apportons aujourd'hui sur le projet de loi n° 30 portent essentiellement sur l'aspect de la gestion financière des régimes, un peu notre expertise en gestion de portefeuille.

Comme vous le savez, les caisses de retraite jouent un rôle important dans l'économie. Ce rôle, on le voit en deux gros volets. Le premier a trait aux investissements effectués par les caisses de retraite, qui permettent en fait un recyclage efficace de l'épargne collective dans des investissements qui sont rentables évidemment à long terme. À cet égard-là, nous vous référons au discours de novembre 2005 de M. David Dodge, qui est le gouverneur de la Banque du Canada, qui mentionne que ces régimes favorisent l'efficience économique et permettent une meilleure affectation de l'épargne. Le texte est de toute façon annexé à notre présentation. Et le second volet des caisses de retraite est un peu plus social et relié finalement aux prestations que nous payons régulièrement à partir de nos caisses de retraite pour permettre finalement aux retraités d'avoir une source de revenus plus stable et un peu plus importante lors de leur retraite.

Nous comprenons que le gouvernement désire résoudre des problèmes reliés au manque de sécurité des prestations et éviter les conflits de partage... des partages éventuels des excédents d'actif avec les retraités, et peut-être mieux baliser aussi le fonctionnement des divers comités de retraite. C'est dans ce contexte que nous vous présentons nos commentaires. Ils portent spécifiquement sur l'utilisation des lettres de crédit, l'option d'achat de rente offerte aux participants ? on en a entendu parler tout à l'heure ? la création de réserve, le partage équitable des surplus et certaines règles de gouvernance. Alors que ? en fait, je vous résume ici; alors que ? nous sommes favorables à l'utilisation des lettres de crédit, nous sommes un petit peu opposés aux mesures qui augmentent le coût de maintien des régimes à prestations déterminées et qui pourraient finalement amener un exode vers d'autres formes d'épargne ? on le voit, principalement les régimes à contribution déterminée ? pour la retraite où les participants, dans ce cas-là, assument des risques financiers beaucoup plus élevés.

Donc, commençons tout d'abord avec l'utilisation des lettres de crédit. D'abord, nous désirons féliciter le gouvernement d'avoir accepté d'intégrer de façon permanente, dans le projet de loi n° 30, la possibilité d'utiliser les lettres de crédit pour financer un déficit de solvabilité. PIAC-Québec a été un des instigateurs de ce dit concept là il y a plusieurs années, et on en a discuté à maintes reprises avec la Régie des rentes. On croit que cette approche-là permet de distinguer entre le financement à long terme des caisses de retraite, qui est important, en fonction du coût du régime et la protection aussi à plus court terme pour tous les participants, qu'ils sont en droit d'obtenir pour leurs caisses de retraite. Nous sommes conscients que, pour la plupart des participants, les régimes de retraite constituent une source de revenus très importante.

L'utilisation des lettres de crédit, qui deviennent rétractables lorsque la caisse de retraite a atteint un niveau de solvabilité adéquat, ajoute de la flexibilité au promoteur tout en maintenant une excellente protection pour les participants. Ce type de mesure est réellement gagnant-gagnant pour tous et va dans le sens de maintenir la pérennité des régimes de retraite à prestations déterminées. L'utilisation des lettres de crédit sera vue par les employeurs qui y ont accès comme un palliatif à l'asymétrie systémique qui existe entre le partage des surplus, que je mets entre guillemets, et le financement des déficits, que je mets aussi entre guillemets.

D'ailleurs, dans un souci de clarification, il est important de rappeler à tous les concepts de surplus et de déficit. Ils doivent être traités, selon nous, avec beaucoup de circonspection ? bon sang! c'est dur, ça ? car les évaluations actuarielles effectuées pour évaluer la santé financière des régimes de retraite sont basées, comme vous le savez, sur une série d'hypothèses tout à fait nécessaires mais faisant en sorte que le surplus ou le déficit qu'on mesure en cours de régime n'est seulement qu'une opinion. Le vrai surplus ou le déficit est connu seulement lors de la terminaison du régime. Donc, dans cette optique-là, il faut faire attention quand on parle de surplus, qui n'est pas vraiment garanti. Par conséquent, il doit toujours être considéré comme une situation en évolution, et c'est comme ça qu'il faut le voir. C'est dans cette optique que l'utilisation des lettres de crédit pour le financement d'un déficit de solvabilité nous apparaît appropriée.

n(17 h 20)n

Le deuxième aspect dont on veut couvrir, c'est l'option d'achat de rente offerte aux participants. La première mesure qui, selon nous, est un petit peu plus dommageable pour la gestion des caisses de retraite ? on s'entend bien que, nous, on essaie de vous donner le point de vue de qu'est-ce que... l'impact sur la gestion des caisses de retraite ? est celle où le participant peut demander un transfert de sa rente à une institution financière. En offrant une telle mesure, on comprend que le but est d'augmenter la protection des participants. Toutefois, cela ne fait que transférer le risque associé à une caisse de retraite à une autre institution financière. Le participant continue d'assumer le risque de défaut, car l'histoire nous rappelle que certaines compagnies d'assurance ont fait faillite évidemment au début des années quatre-vingt-dix. On comprend aussi qu'il y a des mesures d'assurance et de protection, mais, avec les rentes, qui sont quand même plus importantes que 1 000 $ ou 2 000 $ par année, qui vont commencer à être payées, il y a peut-être un risque là. Donc, il faut quand même regarder cet aspect-là.

Nous croyons que les règles de financement actuelles, qui forcent le promoteur à financer les déficits de solvabilité sur cinq ans, offrent déjà une certaine protection aux participants. Évidemment, nous sommes conscients que cette protection n'est pas parfaite, ça, c'est certain, mais nous sommes d'avis qu'un resserrement de la protection par l'achat d'une rente assurée peut avoir un effet pervers sur la gestion de l'actif qui sera dommageable pour nous tous, et je vais y aller un peu plus en détail là-dessus.

En effet, en donnant la possibilité à un retraité de demander à sa caisse de retraite d'acheter une rente, on amène une incertitude supplémentaire dans la gestion des fonds, la gestion des actifs des caisses de retraite, soit le moment et l'ampleur des sorties de fonds. Actuellement, les prévisions de sorties de fonds pour les caisses de retraite sont relativement faciles à faire à court terme, puis, nous, quand on parle de court terme, on parle, je dirais, cinq ans et moins. Par conséquent, il est facile pour les gestionnaires des caisses de retraite comme nous d'implanter des stratégies de placement qui sont à long terme, par exemple des placements privés, des portefeuilles d'actions canadiennes, américaines, internationales, grande capitalisation, petite capitalisation. On peut tout passer la panoplie de placements qu'on peut faire qui permettent dans le fond une saine diversification des placements et l'obtention d'un rendement maximal par unité de risque.

Toutefois, ces stratégies-là sont basées sur un horizon à long terme. Une demande soudaine de liquidités pourrait forcer les caisses de retraite à se défaire de stratégies de placement à long terme, qui sont rentables à long terme, à des moments qui pourraient être inopportuns, ce qui pourrait générer ou augmenter des pertes et augmenter les coûts du régime. C'est une contrainte. Par conséquent, cette mesure offerte aux participants entraîne une incertitude qui amènera les caisses de retraite à réduire la prise de risque à long terme. Ceci amènera une construction d'un portefeuille de placement qui va être moins optimal, qui générera probablement un rendement un peu inférieur et ultimement entraîne des coûts supérieurs pour le promoteur et aussi pour les participants finalement, parce que tout revient ultimement aux participants. Nous désirons aussi rappeler que le gouverneur de la Banque du Canada a bien justement indiqué que les caisses de retraite ont un rôle majeur à jouer dans l'économie en réinvestissant efficacement l'épargne des participants par des investissements à long terme.

De plus, l'achat d'une telle rente auprès d'un assureur a un coût. On en a parlé tout à l'heure d'ailleurs, c'était clair. En transférant le risque de paiement d'une rente à un assureur, la caisse devra payer ce dernier, cet assureur-là, pour sa prise de risque, le risque investissement, oui, mais le risque de longévité qui est important aussi, et aussi rémunérer l'assureur pour sa marge de profit. Cela signifie que le coût d'achat de la rente est plus élevé que son paiement à même la caisse de retraite, c'est évident. Cela s'ajoute donc au coût d'une telle mesure. En outre, en laissant à l'administrateur de la caisse de retraite le choix de l'institution financière, si on fait ça, bien la caisse devient implicitement garante possiblement de cette institution financière là. Alors, advenant un problème de l'institution financière, on peut peut-être imaginer qu'est-ce qui peut arriver; il peut y avoir une autre situation problématique qui se présente.

Un argument amené par certains est la limite actuelle du marché des rentes et la difficulté d'acheter des rentes importantes sur le marché. On est conscients, PIAC, nous, de cette limite actuelle là, mais, connaissant bien les rouages du marché et, en tant que gestionnaires de portefeuille, on est dans les marchés régulièrement, il nous semble évident que ce marché-là, selon nous, va évoluer pour les offrir, ces produits-là. La question fondamentale, c'est: à quel prix?, étant donné que cette hausse de demande là, évidemment le coût va encore plus augmenter, et là ça va faire en sorte qu'on va avoir un coût encore supplémentaire à supporter par la caisse de retraite. Cela affectera encore une fois négativement la situation financière des régimes de retraite et en augmentera le coût. Par exemple, l'achat d'une rente indexée peut être structuré à l'aide d'obligations gouvernementales à rendement réel. Un manque d'offre de ce type de produit là, d'obligation là augmente une hausse de la prime exigée par les compagnies d'assurance pour garantir cette rente-là. La conséquence directe est une augmentation du coût d'achat de la rente.

Bref, le concept d'achat de rente représente pour PIAC un transfert de richesse entre les caisses de retraite, le patrimoine qui est dans les fiducies et caisses de retraite, vers des institutions financières qui vont offrir ces rentes-là. Il entraîne du même fait la disparition du principe de mutuelle qui existe dans les caisses de retraite, aussi de solidarité entre les membres actifs, et le partage de risques qui est derrière le concept des caisses de retraite à prestations déterminées. Une telle mesure rendra la gestion des actifs pour nous un peu plus complexe, incertaine et coûteuse et réduira évidemment l'attrait pour le promoteur de maintenir un régime à prestations déterminées. Ainsi, cette mesure va à l'encontre de l'objectif de maintenir la pérennité, selon nous, des caisses de retraite à prestations déterminées.

L'autre point, on veut traiter de la création d'une réserve, provision pour écarts défavorables. Donc, la création d'une réserve pour écarts défavorables a plusieurs antécédents, car les institutions financières traditionnelles sont tenues de tenir de telles réserves dans leur passif; c'est même réglementé. Comprenons que la création d'une réserve a pour but de renforcer la protection pour les participants au régime. L'intention est tout à fait louable. Ça, c'est clair. Toutefois, avant de procéder en ce sens-là, il faut tenir compte de quelques facteurs qu'on veut vous énumérer ici.

Tout d'abord, une telle modification de la réglementation entraîne une immobilisation d'actifs et, implicitement, une hausse du coût du régime. Ça, c'est clair. Cette augmentation-là s'ajoute aux coûts supplémentaires que subissent actuellement les promoteurs de régimes, accentue les pressions sur ces derniers pour fermer les régimes de retraite, bon, à prestations déterminées aux nouveaux employés. Encore une fois, ça va à l'encontre, on croit, de l'objectif de pérennité des régimes de retraite à prestations déterminées.

De même, en exigeant une telle réserve, on augmente aussi la probabilité de générer des surplus dans le futur, accentuant ainsi les conflits potentiels quant à son partage en cours d'existence ? encore là, je reviens sur le concept que le surplus, pour nous, c'est seulement à la terminaison, mais bon ? ou advenant une terminaison du régime. Par conséquent, la création d'une réserve pour protéger les participants augmente le problème d'asymétrie, entraîne une incertitude supplémentaire pour les gestionnaires, comme nous, de caisses de retraite et rend la gestion des placements un peu plus difficile.

À notre avis, la protection des participants est adéquate, compte tenu des circonstances économiques dans lesquelles sont les promoteurs des caisses de retraite à prestations déterminées. La question qu'il faut se poser est la suivante: Est-il préférable pour un participant qui assume un risque relativement minime de voir sa rente réduite, advenant évidemment la faillite du promoteur ? et ça, c'est clair qu'il y a un risque, on le comprend, mais il faut comprendre que les règles sont actuellement encadrées par la Régie des rentes ? ou qu'il assume une volatilité dans les marchés financiers et un risque de longévité s'il a un régime à cotisation déterminée? Avec un régime à cotisation déterminée, il est fort probable que l'État ultimement, on croit, soit obligé, directement ou indirectement, de subvenir aux besoins des participants s'il y a un manque de fonds. Il s'agit donc d'un coût social indirect à long terme mais qu'il est important, selon nous, de considérer. Nous sommes convaincus qu'un régime à prestations déterminées est préférable et économiquement plus optimal pour la grande majorité des participants à un régime de retraite. Selon nous, la création d'une réserve pour écarts défavorables est un exemple probant de: Le mieux est peut-être l'ennemi du bien. On croit qu'elle pourrait même nuire peut-être à la compétitivité des employeurs québécois, compte tenu que ces protections-là, ces surplus ne seront peut-être pas équivalents partout.

Plus concrètement, la migration vers un régime à cotisation déterminée ? ça, c'est important aussi ? entraîne aussi une augmentation des frais de gestion des actifs pour les participants, car, sauf de rares exceptions, comme vous le savez, la gestion des actifs à cotisation déterminée est beaucoup plus onéreuse que celle à prestations déterminées. De plus, les stratégies de placement disponibles pour les caisses de retraite à cotisation déterminée sont moins élaborées, offrent un rendement potentiellement moins attrayant. Donc, indirectement, si on déplace l'épargne d'une caisse de retraite à prestations déterminées vers une caisse à cotisation déterminée, bien on va entraîner un transfert, encore là, de richesse entre les participants envers les intermédiaires financiers. Une caisse de retraite à prestations déterminées, qui est fondée sur le principe en fait de mutuelle et de solidarité, comme on l'a mentionné tout à l'heure, permet le maintien de cette richesse-là chez les participants et le recyclage interne des gains et des différents risques qu'on subit tous.

Donc, nous avons présenté nos arguments un peu contre la création d'une réserve pour écarts défavorables. Toutefois, on comprend que, si cette provision-là doit être maintenue, bon, il est impératif pour nous que cette réserve-là appartienne exclusivement à celui ou celle qui l'a provisionnée, dans l'optique où c'est l'employeur, les employés, un partage selon ce qui est établi, mais c'est important pour nous. Il faut comprendre que, même si cette réserve-là est créée à l'aide de gains d'expérience, il y a quand même un coût d'opportunité pour le promoteur de laisser des sous là évidemment qui ne peuvent pas être investis du côté de l'entreprise. Ainsi, en enlevant tout doute quant à l'appartenance de cette réserve, on évite d'accentuer le problème d'asymétrie des surplus et des déficits.

n(17 h 30)n

Quant au partage équitable des surplus, tout en se rappelant que les surplus sont des estimations, PIAC croit que certaines mesures présentées dans le projet de loi n° 30 concernant le partage des surplus accentuent le problème d'asymétrie. En effet, en lançant une requête pour un partage équitable des surplus, un participant peut entraîner la gestion des actifs dans une incertitude à plus ou moins long terme. Nous le répétons, une gestion des actifs plus incertaine, ça signifie une gestion plus difficile pour les caisses de retraite, plus difficile d'implanter des stratégies de placement à long terme qui sont en général... qui nous permettent de maximiser le rendement par chaque unité de risque. Il faut comprendre que ce dilemme de partage des surplus est très difficile. Ça, on en est conscients. En fait, on croit même que c'est même impossible à régler, car il touche divers intervenants: l'employeur, les retraités, les gens actifs, qui ont tous des intérêts un peu divergents. En fait, tout le monde veut évidemment s'approprier une partie, ça, c'est clair.

Ouvrir ce débat, selon nous, entraîne une incertitude qui rend la gestion des actifs plus difficile. En offrant à tous et chacun d'ajouter une incertitude dans la gestion des caisses de retraite, bien on met un frein supplémentaire à un investissement à long terme et aussi à la promotion des caisses de retraite à prestations déterminées. Dans cette optique-là, on préfère le statu quo avec ses bons et ses mauvais côté, c'est clair, qu'à toute mesure qui entraînerait une incertitude supplémentaire et qui, bon, pourrait durer plusieurs années, évidemment au gré des ententes et des jugements qui peuvent être rendus.

Je veux terminer avec un petit bout sur les règles de gouvernance. Le projet de loi n° 30 précise de façon exhaustive des règles de gouvernance pour les comités de retraite. Ces règles s'inspirent, bon, de celles prescrites l'an dernier par l'ACOR. Les règles précisent les mesures à prendre pour la protection des membres des comités de retraite dans l'exercice de leurs devoirs fiduciaires et tentent d'établir un certain équilibre entre le comité et les experts qu'il s'adjoint, et éclaircissent aussi les cadres et délégations, et définissent les responsabilités et les devoirs des intervenants. Dans cette optique, ces règles sont les bienvenues et protègent les membres des caisses de retraite, car elles clarifient le rôle de chacun dans l'administration des caisses de retraite, ce qui est correct.

Toutefois, le projet de loi introduit le concept d'expert et de règle refuge, le «safe harbor rule». En effet, si le comité de retraite agit de bonne foi en se fondant sur l'avis d'un expert, il sera présumé avoir agi avec prudence. Toutefois, le projet de loi ne définit pas ce que peut être un expert auprès du comité, et ça, pour nous, je dirais que c'est important. Nous nous réjouissons du fait que la définition, qui était plutôt restrictive, de la notion d'expert qui a été présentée, en mai dernier, par le comité n'a pas été retenue. Nous, en tant que gestionnaires de fonds institutionnels, la majorité d'entre nous sommes réputés être des investisseurs sophistiqués aux fins des gestions de placement. Il serait important que les gestionnaires de caisses de retraite comme nous, responsables des investissements, soient rémunérés par l'employeur, par les comités de retraite, ne perdent pas ce statut auprès du comité de retraite à cause d'une définition trop étroite du mot «expert» qui viendrait, dans le règlement, rattaché à la loi.

Par ailleurs, nous comprenons que le comité de retraite devra établir des règles internes qui incluent les règles de sélection, rémunération, surveillance, évaluation des délégataires, des représentants et des fournisseurs de services. À cet égard, la majorité de ces responsabilités sont souvent déléguées à l'employeur et, dans certains cas, à un sous-comité du comité de retraite. Nous croyons que le comité de retraite devrait avoir le droit de déléguer ces nouvelles responsabilités, à condition de le faire évidemment avec soin, et ainsi être présumé avoir agi avec prudence. Ainsi, il demeurera plus facile pour le délégataire de combiner, comme il le fait actuellement, la gestion des actifs dans une fiducie globale, facilitant la gestion des placements en simplifiant aussi les structures. Tel que rédigé actuellement, il n'est pas clair, de ce qu'on en a lu, qu'une telle délégation soit possible.

Le Président (M. Copeman): Il reste à peine une minute, M. Drolet. Vous avez terminé?

M. Drolet (Pierre): Bien, écoutez, j'avais ma conclusion mais qui reprend essentiellement mes points, alors, moi, je serais prêt à arrêter là et ouvrir aux questions.

Le Président (M. Copeman): C'est gentil de votre part.

M. Drolet (Pierre): Ça me fait plaisir.

Le Président (M. Copeman): Alors, pour débuter l'échange, Mme la ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale.

Mme Courchesne: Merci, messieurs, madame. Merci beaucoup d'être là. Vous savez qu'on a lu attentivement votre mémoire. On vous a écouté aussi, vous êtes volubile puis vous connaissez votre matière, mais j'ai quand même quelques questions à vous poser. Comme on n'a pas beaucoup de temps, je vais aller droit au but. Ce qui m'intéresse de vous parler, c'est la provision pour écarts défavorables. Vous demandez qu'elle appartienne à celui qui l'a constituée, mais vous savez que cette provision-là devra être constituée normalement avec ? là, je parle en haut du 100 %; avec ? les excédents, hein, de rendement, on s'entend. Donc, est-ce que vous ne trouvez pas que, malgré tout, tout ça fait partie, comme le régime au fond, ceux qui participent, ça fait partie de leur rémunération globale? C'est difficile... Moi, j'ai de la difficulté à penser que, surtout quand on constitue à même les excédents, que cette provision-là appartient exclusivement à l'employeur. Je voudrais vous entendre là-dessus. Je n'ai pas le temps d'élaborer, là, je ne veux pas avoir l'air d'avoir un raisonnement court, parce que, croyez-moi que j'ai poussé ces raisonnements-là à fond, mais il me semble que, vous-même, vous réduisez ça à quelque chose qui m'apparaît... puis surtout après avoir écouté, là, l'ensemble des intervenants, tant du côté patronal, gestionnaire que syndical. Comment pouvez-vous faire une telle affirmation?

M. Drolet (Pierre): O.K. Je vais y aller. Écoutez, c'est certain que le but n'est pas de réduire ça au minimum. Quand on parle de provision pour écarts défavorables, en fait l'important, c'est de clarifier encore là l'excédent, ledit surplus en haut du 100 % basé sur... solvabilité versus le déficit, de quelle façon ce partage-là se fait. Nous, ce qu'on voit... Parce qu'en tant que responsables de placements évidemment sous... nous, on paie des retraités, donc on a à coeur autant les retraités que les actifs, et tout ça, mais ce qu'on en comprend d'un point de vue économique, c'est qu'au départ il y a une promesse de montant à payer, une rente à payer, et dans le fond c'est ce qui fait, selon nous, là, office du contrat. On dit à une personne: On te promet tant de dollars par mois ou... enfin, quelle que soit la formule, ce n'est pas vraiment important, là. Alors donc, on promet ça, et c'est cette promesse-là qui tient finalement, selon nous, de contrat. La réserve qui est là, les fonds qui sont là évidemment pour payer le retraité, on pourrait pousser à l'extrême puis dire: Bien, l'employeur pourrait tout garder l'argent dans son entreprise et le payer dans 30, 40, 50 ans, ce qui ne fait aucun sens parce que, là, le participant subit un risque énorme. C'est dans cette optique-là qu'on contribue régulièrement dans une fiducie pour qu'il y ait une réserve, pour qu'à la fin on soit bien protégés. Donc...

Mme Courchesne: Oui, mais vous ne pensez pas qu'à partir du moment où c'est un contrat justement... Puis ça, là-dessus, je suis bien d'accord avec vous, c'est une obligation, c'est un contrat. À partir de ce moment-là, est-ce que vous ne pensez pas qu'effectivement il est sage, quand on a une entreprise, quand on a un contrat, quand on doit gérer un contrat, qu'il est sage, pour parer aux éventualités et être en mesure de respecter ce contrat, d'avoir cette réserve, un peu comme les banques sont obligées... Vous l'avez dit vous-même, les institutions financières sont obligées d'avoir...

M. Drolet (Pierre): Effectivement, oui.

Mme Courchesne: Mais, tu sais, à mon avis, on parle là de l'épargne des participants. Donc, est-ce que ça ne devrait pas être sage... Parce que, quand je lis votre mémoire, à la page 4, vous allez loin, vous dites: «La question qu'il faut se poser est la suivante: Est-il préférable qu'un participant assume un risque relativement minime de voir sa rente légèrement réduite advenant une faillite d'un promoteur...» Je vais vous dire, là, vous n'avez pas reçu souvent, vous, les retraités de Mine Jeffrey, ou d'Aciers Atlas, ou de la Gaspésia, ou de Port-Alfred pour dire ça, là, parce que, regarde, eux autres, là, ce n'est pas des petites diminutions minimes quand on est un salarié bien moyen qui n'avait pas la capacité d'avoir d'autres façons d'économiser pour avoir une retraite décente. Alors, éclairez-moi, là.

M. Drolet (Pierre): Veux-tu y aller, Louise? Vas-y.

Mme Charette (Louise): Oui. Si vous permettez, je vais essayer de répondre à votre question, Mme la ministre. La provision pour écarts défavorables, quand on dit que les banques en ont, les institutions financières sont dotées de mesures semblables, il n'y a quand même aucun doute sur à qui appartient cette provision si elle est faite pour rien: elle appartient au profit de la banque. Et, dans ce sens-là, toute provision qui est peut-être prudente appartient, selon nous, à celui qui l'a provisionnée. Et, dans ce sens-là, il m'apparaît... En tout cas, l'exemple des institutions financières, il n'y a personne qui s'inquiète à qui appartient le profit quand on a pris une provision et qu'on n'en a pas eu de besoin.

Pour ce qui est de l'argumentation sur les risques inhérents, c'est que, dans la mesure où on rend moins attrayants les régimes à prestations déterminées, on pousse effectivement, donc, les employeurs à fournir des régimes à cotisation déterminée. Et, dans ce cas-là, notre analyse montre qu'avec un argent semblable la rente accumulée sera inférieure à celle des rentes qui sont promises dans les régimes actuels. Et donc, effectivement, c'est sûr que personne ne souhaite qu'un retraité voie sa rente diminuer, mais il est certes évident que la rente qu'il pourra s'accumuler tout seul dans son régime à cotisation déterminée, elle-même sera déjà moins importante que celle qu'il aurait dans un régime à prestations déterminées. C'était l'argumentaire qu'il y avait dans ce paragraphe-là.

Le Président (M. Copeman): M. le député de Vimont.

M. Auclair: Merci beaucoup. Mesdames messieurs, bonjour. Écoutez, moi, je vous ai vu sourciller à quelques reprises, quand le groupe avant vous, l'association des retraités, s'est présenté, sur certains arguments. Puis, à relire votre mémoire, j'ai compris pourquoi, parce qu'il y a vraiment... vous êtes, à certains niveaux, diamétralement opposés.

Mais ce n'est pas là-dessus, moi, que je veux revenir, c'est un point que... au niveau des options d'achat des rentes offertes aux participants. Vous dites clairement dans votre mémoire ? et vous l'avez affirmé également ? que le fait que plus de personnes, par exemple, s'en iraient dans cette direction-là, ça coûterait plus cher. Moi, j'étais sous le principe ou sous l'idée que, un peu comme la saucisse, hein, plus de gens en mangent, bien, c'est la même chose, plus de gens vont chercher ce produit-là, plus les coûts relativement devraient diminuer. La compétition du marché fait en sorte que techniquement ça devrait être comme ça.

Et également le deuxième volet de ma question: vous êtes des gens qui avez donc un rayonnement canadien, pouvez-vous me dire qu'est-ce qui se passe dans le reste du Canada par rapport justement à l'achat des rentes? Est-ce que ça existe? Parce que ça existe au Québec, on sait que ça se fait. Est-ce que ça existe dans le reste du Canada? Et à quelle ampleur ça se fait aussi dans le reste du Canada?

n(17 h 40)n

M. Drolet (Pierre): Au niveau de l'achat de rentes, la première partie de votre question, à savoir... Là, il ne faut pas oublier que, lorsqu'on se retrouve... c'est qu'on va se retrouver avec une demande d'achat de rentes, là. Donc, si on pousse, si on augmente la demande, au point de vue économique c'est clair que le prix va augmenter, donc le coût de la rente va augmenter. Il faut voir que beaucoup de gens vont se présenter avec soit un montant de dollars... En fait, la caisse de retraite va dire: Bon, on demande une soumission pour un, deux, trois, 10, 20, 30 millions, et ça continue à augmenter. Les compagnies d'assurance qui sont derrière, qui ont un certain capital de côté pour offrir ces produits-là, bien soit qu'il va être limité à un moment donné... Et c'est ce capital-là qui sert de garantie, parce qu'ultimement rien ne se perd, rien ne se crée, là, c'est ce capital-là qui est limité. Et, en étant limité, ce capital-là, bien, fait en sorte que les compagnies d'assurance vont dire: Oui, mais là j'ai beaucoup de demandes pour ce produit-là, alors je vais augmenter mon prix ou... je vais augmenter le prix. Ça, c'est clair. Et, à un moment donné, s'il manque de réserves en fait, bien là les réserves supplémentaires à aller chercher, ça va être sous forme d'émission d'actions, etc. Donc, ils peuvent ultimement avoir un coût de capital plus élevé qui fait en sorte que le prix va augmenter. Donc, c'est dans ce sens-là qu'il faut le voir.

Il faut comprendre la façon justement de réduire peut-être l'achat de ces rentes-là. Bien en laissant les fonds dans la caisse de retraite, qui est essentiellement une formule d'achat de rentes quand on s'y arrête deux secondes, là, l'argent demeure dans la caisse de retraite, et le retraité est payé à même la caisse de retraite, donc, c'est comme si la caisse de retraite lui achète une rente, lui garantit cette rente-là, elle est déjà achetée là. Et le partage de risques est fait parmi tous ces participants-là sans avoir à rémunérer une institution financière qui, elle, va faire un profit. Alors donc, c'est ce gain-là qu'on a quand on garde les fonds à l'intérieur de la caisse de retraite.

Évidemment, j'ai parlé aussi de l'aspect gestion d'investissements à long terme qui va être plus difficile si quelqu'un nous demande des fonds parce que ce n'est, des fois, jamais le bon temps de vendre des actions ou vendre des placements privés, on ne peut pas s'en défaire. Ça, c'est clair.

M. Auclair: Dans le reste du Canada? Comment ça se vit dans le reste du Canada?

M. Drolet (Pierre): Et, dans le reste du Canada, cette mesure-là... Évidemment, moi, j'ai focussé un peu plus sur ce qui se passe au Québec, je ne suis pas un grand spécialiste des réglementations à l'extérieur, mais, pour avoir rebondi l'idée avec d'autres personnes à l'extérieur, cette demande-là d'achat de rentes ou de forcer, si vous voulez, pas le comité de retraite, mais l'employeur, à ce moment-là, à acheter la rente, je ne l'ai pas vu nulle part, je n'ai pas remarqué ça.

Le Président (M. Copeman): Merci, messieurs. Malheureusement, c'est tout le temps. Alors, Mme la députée de Mirabel et porte-parole de l'opposition officielle en matière de régimes de rentes et de retraite.

Mme Beaudoin: Merci, M. le Président. Alors, M. Drolet, Mme Charette, M. Laflamme, merci pour la présentation de votre mémoire. Vous avez fait une bonne démonstration du coût supplémentaire introduit par la possibilité de transférer sa rente chez un assureur, mais avez-vous une bonne idée de l'ampleur de ce coût?

M. Drolet (Pierre): Non, parce qu'évidemment on ne sait pas comment les participants vont réagir, ça, c'est certain. Ça, je ne peux pas vous le dire. On n'a pas fait de sondage à cet effet-là, ça, non, malheureusement.

M. Laflamme (Richard): Mais, à partir du moment, vous permettez, où c'est inclus dans la loi, on va devoir avoir l'obligation de créer une réserve pour ça dans le passif du régime, et c'est là que ça devient un coût important.

Le Président (M. Copeman): Mme la députée de Champlain?

Mme Champagne: ...elle est sur sa lancée.

Le Président (M. Copeman): Ah, allez-y, Mme la députée de... Bien sûr, oui, allez-y.

Mme Beaudoin: Vous avez entendu auparavant les gens qui sont venus présenter leur mémoire, l'Alliance des associations de retraités, et ils ont mentionné que les retraités souhaitent évidemment la survie des régimes à prestations déterminées, mais ils sont bien conscients qu'il y a une tendance lourde qui s'est manifestée depuis plusieurs années et qu'elle va continuer. J'aimerais ça avoir vos commentaires à ce sujet-là. Est-ce que vous pensez vraiment que c'est une tendance de fond et que ce projet de loi, s'il est adopté tel quel, n'y changera rien?

M. Drolet (Pierre): Écoutez, c'est sûr que la tendance est déjà commencée, vous avez tout à fait raison. Nous, ce qu'on voit, c'est que peut-être ce projet de loi là finalement ne changera rien, ça va continuer, mais il y a un message en quelque part qui sort, et on dit: Les régimes à prestations déterminées, c'est important parce que, un, c'est peut-être ce qui coûte le moins cher, ce qui offre le plus de garanties à M. et Mme Tout-le-monde qui n'ont pas cette expertise-là pour gérer des placements. Vous savez, quelqu'un qui quitte, qui part avec un demi-million de dollars, ce n'est pas si facile que ça à gérer, et même plus des fois. Alors donc, s'il y a un message qui sort d'ici, qui dit que, oui, on veut vraiment... on favorise les régimes à prestations déterminées, bien, d'après nous, à l'intérieur de cette loi-là, le message, c'est clair que ce n'est pas ça qui ressort. Alors donc, ça n'aidera pas.

Est-ce que ça va l'accentuer ou non? C'est difficile à dire. Nous, on gère, on s'occupe plus de la gestion des actifs. Il faudrait parler directement aux promoteurs, et ces promoteurs-là, bon, vous en avez eu, j'imagine, via les chambres de commerce, etc., qui vous ont déjà dit qu'est-ce qu'il en était. Mais c'est clair que ça ne peut pas aider en rendant le processus un peu plus complexe. Ça, c'est certain.

Mme Beaudoin: Qu'est-ce que vous suggérez pour que ça continue, pour les rendre plus populaires au fond, là?

Mme Charette (Louise): Bien, ce qui est certain, c'est que la flexibilité dans le financement des régimes à prestations déterminées, dont l'utilisation des lettres de crédit pour combler un déficit de solvabilité, est un pas dans la bonne direction, et nous tenons à réitérer notre appui à cette mesure comme étant une mesure efficace pour faciliter les transitions à court terme ou les fluctuations à court terme qui surviennent à cause d'événements de marché. Et ça, c'est donc une très, très bonne mesure.

Pour ce qui est de la pérennité des régimes, je pense qu'il faut continuer de montrer tant aux employés qu'aux employeurs qu'un régime à prestations déterminées est un très bon moyen pour accumuler de l'épargne à long terme pour les retraites, pour faciliter la solidarité entre les membres des régimes et de fournir à meilleur coût une retraite pour la plus grande part des travailleurs qui y participent.

M. Drolet (Pierre): Je peux peut-être même rajouter quelque chose là-dessus, peut-être que finalement ça va être l'expérience des prochaines années où les gens, dans 10, 15 ans, vont avoir accumulé leur fabuleux magot dans leur régime à cotisation déterminée, ils vont se tourner et vont dire: Ah, bien, je ne peux pas acheter ma rente ou ça ne me garantit pas tant de sous que ça, là. Alors, peut-être que finalement on va revenir finalement... Vous savez, ça prend... Les gens voient des sommes s'accumuler dans leur régime de retraite, dans leur REER ou dans leur cotisation déterminée et ils se croient riches, là, on va beaucoup... On voit des six chiffres facilement, des fois des sept chiffres, sauf que, même avec 1 million, à 4 %, ça fait 40 000 $ par année. C'est correct, 40 000 $ par année, c'est parfait, mais ça prend 1 million juste pour avoir 40 000 $, alors... Et puis c'est à peu près où sont les taux d'intérêt à long terme actuellement, alors ça...

M. Laflamme (Richard): J'ajouterais que les règles de gouvernance que vous mettez en place, que vous mettez de l'avant, vont sûrement aider aussi aux comités à mieux s'approprier le suivi de gestion de régimes à prestations déterminées. Et l'organisme de réglementation qu'est la Régie des rentes fait un très bon travail à cet égard-là, et ils vont continuer à le faire. Donc, une bonne surveillance et un accent qui ne met pas nécessairement les coûts sur un fardeau encore plus grand pour maintenir ces régimes-là, je pense que c'est la clé qui va permettre la survie des régimes.

Le Président (M. Copeman): Mme la députée de Champlain.

Mme Champagne: Une minute?

Le Président (M. Copeman): Deux, peut-être.

Mme Champagne: Deux petites minutes? Madame, messieurs, bonjour. Le précédent groupe nous disait tout à l'heure... il nous mettait d'ailleurs en garde carrément contre le fait qu'on nous chanterait peut-être la même chanson sur le danger d'aller vers les régimes de retraite à cotisation déterminée, comme ça avait été fait avec la loi n° 102 autant que maintenant. Moi, je comprends qu'il y a risque, que le risque est déjà commencé. Donc, il ne faut pas se fier uniquement à cette loi-là pour corriger le tout. C'est ce que j'en retiens, là.

M. Drolet (Pierre): Oui, ça, c'est clair.

n(17 h 50)n

Mme Champagne: C'est ce que j'en retiens. Par contre, il y a une autre question qui a été soulevée par le précédent groupe, puis on n'a pas pu élaborer. Donc, je vais vous poser la question, à vous, qui êtes gestionnaires: Est-ce qu'il est normal et courant qu'une décision de s'exempter de cotisation, de la part d'un employeur, se fasse unilatéralement, c'est-à-dire qu'on ne questionne pas les participants actifs? On décide, un bon matin ou une bonne journée: Cotisation, parfait, on n'a pas besoin parce qu'on est en bon surplus. Est-ce que c'est commun? Puis est-ce que c'est légal, premièrement?

M. Drolet (Pierre): L'aspect légal, écoutez, je ne suis pas un avocat, là, je ne pourrais pas vous commenter là-dessus. Ça s'est fait, j'imagine que c'est légal. Mais je ne suis pas un expert, je ne peux pas rien vous dire là-dessus, là.

Quant à savoir si on prend... Les montants de cotisation qui ont été faits, après coup c'est facile à dire que, oui, finalement, là, avec le recul, c'était peut-être un peu trop, ce qui a été fait. Toutefois, ça a été basé sur des évaluations actuarielles d'un expert qui connaît vraiment ça, qui a dit: Écoutez, compte tenu de votre promesse, bien vous avez en masse de sous et finalement vous n'avez pas besoin de contribuer pour ne pas augmenter encore plus l'excédent, tout en sachant que l'actuaire, de ce que je comprends, ce qu'il regarde, lui, c'est la promesse qui a été faite. On lui promet une rente, à monsieur et madame. C'est ça qu'il évalue, la promesse. Et c'est basé sur cette promesse-là qu'on fait des calculs relativement complexes, on l'avoue. Ça, c'est certain. Et puis, bon, s'il y a un surplus, bien là il semble que celui qui prend le risque, bon, semble en prendre des gains, mais évidemment il faut qu'il comble les déficits rapidement s'il y a de quoi, et le cinq ans de la Régie des rentes est là justement pour protéger, pour ne pas que personne ne vide la caisse. Ceci étant dit, on ne vide pas la caisse, mais on fait juste ne pas contribuer. Évidemment, sous un point de vue économique, on peut presque dire que c'est la même chose.

Mme Champagne: ...congé de cotisation.

M. Drolet (Pierre): Oui, congé de cotisation, c'est ça, là. Tu sais, on ne retire pas de l'argent de la caisse, évidemment, là, c'est clair. Mais un congé, c'est comme si on ne l'avait pas mis. Bon, c'est... on ne l'a pas mis, là.

Mme Champagne: Non, c'est ça. Mais l'actuaire prend cette décision-là, et la propose à l'employeur, et le participant actif n'a pas un mot à dire, c'est ça?

Mme Charette (Louise): Oui, c'est ça.

M. Drolet (Pierre): Vas-y, Louise.

Mme Charette (Louise): Oui, c'est ça. Oui, parce que le régime de retraite, c'est basé sur une promesse, hein? C'est vraiment une formule, hein, une prestation déterminée. Donc, il y a un calcul, et on promet de payer selon ce calcul. L'employeur est tenu par la loi de mettre dans la fiducie en commun, hein, dans le fonds fiduciaire et solidaire, les montants nécessaires pour payer cette promesse. Il n'est pas tenu de mettre un montant rigide par année; il met le montant nécessaire pour payer la promesse dans la meilleure évaluation de son actuaire-conseil. Alors, effectivement, si les formules et l'évaluation montrent qu'il y a suffisamment d'argent pour payer cette promesse-là à tous les participants dans le régime, le promoteur n'est pas tenu de mettre de l'argent dans le régime. C'est comme ça que c'est écrit, et parce que le contrat, c'est cette promesse d'une formule qui garantit une rente au moment de la retraite.

Mme Champagne: Merci.

Le Président (M. Copeman): Alors, Mme Charette, merci. M. Drolet, M. Laflamme, merci pour votre participation. Je vous demanderais, chers collègues, de rester ici, peut-être quelques instants. C'est un peu tard, mais... Bon, je peux bien demander à des collègues de rester, mais manifestement mon autorité morale est quelque peu effritée depuis un certain temps. Chers collègues, je n'ai pas suspendu les travaux encore. Je comprends, chers collègues, qu'il y a consentement pour dépasser 18 heures, afin de terminer notre journée parlementaire, pour un bloc qui ne dépasse pas 40 minutes. Il y a consentement?

Des voix: Consentement.

Le Président (M. Copeman): Consentement. Je comprends également que nous allons changer de salle. Compte tenu de la réunion statutaire du caucus de l'opposition officielle ici, en cette salle, nous allons immédiatement, en courant, se diriger vers la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine où nous allons reprendre nos travaux pour terminer avec l'Association canadienne des administrateurs de régimes de retraite. Alors, je remercie les gens de l'Association canadienne des gestionnaires de caisses de retraite, chapitre québécois, pour leur présentation. Merci beaucoup, messieurs dames. Je suspends les travaux de la commission quelques instants, et on reprend à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine. Merci.

(Suspension de la séance à 17 h 55)

 

(Reprise à 17 h 59)

Le Président (M. Copeman): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, après un déménagement qui fut exemplaire dans son efficacité, la commission reprend ses travaux, et c'est avec plaisir que nous accueillons les représentants de l'Association canadienne des administrateurs de régimes de retraite. M. Méthot, bonjour.

Association canadienne des administrateurs
de régimes de retraite (ACARR)

M. Méthot (Michel): Bonjour.

Le Président (M. Copeman): Dans un premier temps, on s'excuse pour le prolongement de notre journée parlementaire, le déménagement de salle...

Une voix: La tempête de neige.

Le Président (M. Copeman): Je ne sais pas s'il neige dehors, mais c'est les aléas de travail parlementaire qui nous amènent, à ce stade-ci, de vous souhaiter la bienvenue. Je vous avise également que, compte tenu de l'heure, nous sommes obligés d'écourter un tout petit peu la période d'échange. On va évidemment vous permettre de faire votre présentation de 20 minutes, mais par la suite il y aura un échange d'une durée maximale de 10 minutes avec les parlementaires de chaque côté de la table. On jugeait ça mieux que de vous demander de revenir demain avec... Ce n'est pas évident, ni pour vous ni pour nous. Alors, je pense que, dans les circonstances, on fait ce qu'on peut pour terminer cette journée un peu mouvementée de façon correcte. Alors, je vous prie de présenter vos collaborateurs puis par la suite d'enchaîner avec votre présentation.

M. Méthot (Michel): Bien, merci beaucoup, M. le Président. Mmes, MM. les membres de la commission, merci de votre invitation, et je vous félicite de votre assiduité à cette commission, compte tenu de l'heure tardive. J'ai, à ma droite, M. Serge Charbonneau et, à ma gauche, M. Jean Lagacé, qui sont tous deux membres du conseil québécois de l'Association canadienne des administrateurs de régimes de retraite. Le nom peut... Succédant à l'Association des gestionnaires, l'association peut porter à confusion, mais, dans notre cas, il s'agit d'une association qui a une trentaine d'années, qui est une association ouverte d'experts en matière de régimes de retraite et qui s'est donnée pour mission la santé et la croissance du système de revenus de retraite au Canada en défendant certains principes: clarté de la législation et de la réglementation ainsi que des dispositions du régime; une bonne et saine administration des régimes de retraite; et également, ce qui est important à nos yeux, une prise en compte équilibrée des intervenants.

Nous ne sommes pas ici pour vous faire part du point de vue de nos employeurs respectifs. Si c'était le cas, notre discours serait probablement différent. Les consensus qui se dégagent des discussions au sein de l'association sont ceux d'experts qui oeuvrent dans ce domaine et qui ont à coeur la croissance du système de revenus de retraite au Canada. Pour ça, nos consensus tiennent compte des points de vue équilibrés de tout le monde, là, de tous les intervenants. Et j'ajouterai, à titre de mon expérience personnelle au sein du comité d'experts qui a récemment soumis un rapport à la régie, que, lorsque des groupes d'experts mettent de côté l'intérêt de leurs groupes respectifs pour rechercher des consensus, on peut en obtenir.

Alors, pour les fins de notre présentation aujourd'hui, nous allons regrouper nos interventions en deux pôles: d'abord, le sujet de l'amélioration de la sécurité des prestations de retraite, la sécurité des prestations, sous lequel on peut parler du resserrement des règles de solvabilité, de provisionnement; l'option pour le retraité de s'acheter une rente à la retraite; et une amélioration de la régie interne. Alors, ce sont trois thèmes qui visent essentiellement à améliorer la sécurité des prestations. D'un autre côté, il y a le thème de ce que j'appellerais un sain équilibre dans le partage de la richesse entre les générations de retraités. Alors, c'est un peu dans cet ordre que nous allons aborder les différents thèmes que nous souhaitons soulever aujourd'hui.

n(18 heures)n

Alors, parlons d'abord de l'amélioration de la sécurité des prestations. Tous les intervenants ont applaudi les mesures temporaires qui ont été mises en place pour permettre aux parrains de régimes de traverser la période difficile de 2002 jusqu'à 2010 avec des mesures temporaires qui visent à étaler l'amortissement des déficits.

Nous croyons que l'introduction d'une provision pour écarts défavorables offre une occasion unique de rééquilibrer les responsabilités des différentes parties au régime, ce qu'il est convenu d'appeler, aujourd'hui, l'asymétrie. Une telle provision pour écarts défavorables représente un coût de capital additionnel pour les employeurs québécois qui parrainent des régimes à prestations déterminées. L'asymétrie actuelle des régimes à prestations déterminées porte ombrage et décourage les employeurs, ce qui est particulièrement dommageable dans un contexte, admettons-le, de désengagement mondial des employeurs à l'égard de ces régimes. L'introduction d'une telle provision, sans adresser ce problème, portera un autre coup dur. À notre avis, c'est une occasion unique, au moment où on introduit une provision pour écarts défavorables, de corriger le tir et d'envoyer un message clair aux employeurs québécois que le Québec est encore un terreau fertile pour de tels régimes.

Pour ce, nous réitérons notre proposition de permettre aux promoteurs de régimes d'établir un compte de solvabilité. C'est un compte notionnel, distinct et qui tiendrait compte de toutes les cotisations de solvabilité et des cotisations supérieures au montant minimum exigé en l'absence de la règle pour provision d'écarts défavorables, et il est comptabilisé. Ces cotisations comptabilisées seraient remboursables dans la mesure où la provision a été pleinement constituée et le régime est pleinement provisionné. Le remboursement pourrait même être effectué aussi bien en cours d'existence qu'en cas de terminaison de régime. Ce compte pourrait également recevoir toute cotisation patronale volontaire visant la constitution d'une provision pour écarts défavorables. À notre avis, c'est une approche qui favoriserait un meilleur provisionnement des régimes, constituerait une option avantageuse pour toutes les parties et augmenterait la flexibilité par rapport à la seule utilisation des lettres de crédit, lesquelles, malgré tous leurs avantages, n'apportent aucun argent neuf dans la caisse. Tout ce que fait une lettre de crédit, c'est d'acheter du temps.

La deuxième mesure visant l'amélioration de la sécurité des pensions est l'obligation d'offrir l'achat d'une rente assurée aux futurs retraités. Admettons-le, elle a été critiquée par la majorité des intervenants, surtout du côté des employeurs, à cause de son coût, la prime demandée par un assureur étant presque toujours supérieure aux engagements du régime à l'égard du participant évalués sur une base de provisionnement, de permanence de régime. Outre le problème de coût, cette mesure crée une responsabilité fiduciaire additionnelle pour le comité de retraite particulièrement lorsque l'employeur est en difficulté et que le comité a à décider du moment approprié pour procéder à l'achat de rente. En fait, l'option d'achat de rente assurée aggrave la situation plutôt que la solutionne. Tout ce qu'on réussit à faire, c'est de transférer, au profit d'un groupe de nouveaux retraités, une partie de la richesse collective au détriment des autres participants. On ne peut pas avoir le beurre et l'argent du beurre, soit qu'on réduise le degré de capitalisation du régime pour financer l'achat des rentes assurées, soit qu'on détourne les cotisations de l'employeur qui pourraient autrement augmenter la capitalisation du régime, tout ça pour financer des rentes assurées.

Enfin, cette option n'offre aucune sécurité additionnelle aux retraités actuels ni aux retraités futurs qui auront mal apprécié, au moment de leur retraite, la situation de la caisse ou de la santé financière de leur employeur. Enfin aussi, elle désolarilise ? excusez-moi...

Des voix: ...

M. Méthot (Michel): ...on se comprend ? l'ensemble des participants ? alors, heureusement, ce n'est pas télévisé ce soir ? en favorisant le chacun-pour-soi de ceux qui sont admissibles à une retraite anticipée ou qui atteignent l'âge normal de retraite juste au moment où le répondant traverse une période difficile, au détriment des autres participants qui exigeront un droit similaire. Si ce droit était accordé, c'est-à-dire accordé à tous les retraités, l'option d'une rente assurée, évidemment la situation serait catastrophique.

Nous avons proposé, dans notre mémoire, que la régie entreprenne plutôt une révision de l'ordre de priorité des droits de terminaison en cas de régime déficitaire. Nous estimons qu'il y a place à amélioration. À titre d'exemple, l'ordre des priorités pourrait donner une priorité à la rente normale de retraite par rapport aux bénéfices accessoires, ce qui n'est pas le cas actuellement. C'est donc dire qu'actuellement un employé qui a droit à une retraite anticipée à un âge aussi jeune que 55 ans, on évalue tout ce droit et on l'évalue de la même façon que l'employé ou le retraité qui a 80 ans et qui reçoit sa rente depuis 20 ans. On est en droit de se demander: Est-ce que ces deux avantages doivent être priorisés de la même façon? Est-ce qu'on ne devrait pas davantage donner d'importance à la rente normale de retraite et moins aux avantages accessoires?

Il y a d'autres exemples qu'on pourrait vous donner où la question mérite d'être soulevée pour qu'effectivement, lorsque tout a été dit et qu'il faut partager un patrimoine qui n'est pas suffisant, on ait un ordre de priorité qui, au bout de la ligne, probablement avantagerait les retraités qui sont là depuis plus longtemps et qui reçoivent une rente au-delà de l'âge normal de retraite.

n(18 h 10)n

En fait, là où le bât blesse, avec ce pan du projet de loi, c'est la nature assurée de la rente. L'assurance est un bénéfice qui a une valeur, donc un coût. C'est un bénéfice qui n'a jamais fait partie du deal d'une caisse de retraite en fiducie. Le comité d'experts, mandaté pour faire rapport sur le rôle des comités de retraite et la surveillance des régies, commentait dans ce même sens, et je vous cite un extrait du rapport: «La raison principale pour laquelle les régimes de retraite en fiducie ont succédé aux rentes collectives assurées était la possibilité pour l'employeur d'assumer un risque financier à court terme en retour de rendements plus élevés à long terme, lesquels se sont traduits en coûts moindres pour des prestations supérieures. C'est de cette situation dont ont hérité les comités de retraite en 1990. On ne peut extraire ou vouloir éliminer le risque financier de la gestion des caisses de retraite dont ils ont la charge aujourd'hui sans remettre en cause leurs fondements.» Fin de la citation.

Malgré tout, la quête de sécurité des retraités, particulièrement dans les cas où la solidité financière et la durabilité de l'employeur sont incertaines, est légitime. Comment alors l'aborder? Il y a évidemment les mesures préventives, telle la constitution d'une provision pour écarts défavorables, que nous avons appuyée avec certaines réserves concernant le compte de solvabilité. Dans les situations où cela ne se sera pas avéré suffisant, il faut s'assurer du partage équitable du patrimoine en situation de terminaison de régime. Là encore, nous recommandons une révision de l'ordre des priorités.

Depuis le dépôt de notre mémoire, en discussion en interne, on a développé une autre avenue. Et j'aimerais, à ce stade-ci, passer la parole à Serge, à ma droite, qui va consacrer quelques minutes à élaborer, pour les fins de partage d'idées, une autre solution.

M. Charbonneau (Serge): Merci. Ce qu'on s'est dit, c'est que la proposition de rente assurée, la plupart des gens l'admettent, ça coûte plus cher. Et puis la raison que ça coûte plus cher, c'est que l'argent se fait tout réfugier dans des placements très, très conservateurs parce que l'assureur a une responsabilité de le garantir ad vitam aeternam. Alors, est-ce qu'il n'y aurait pas moyen de créer un autre mécanisme pour que, si le besoin est là... de bouger l'argent dans un autre mécanisme? Il n'y aurait pas moyen de mettre quelque chose en place et plus efficace que les placements des assureurs? Donc, on renvoie la balle au gouvernement ou à la régie: Essayez donc de trouver un mécanisme où il y aura plein de modalités à déterminer, ça va être quoi, la mécanique, puis qui peut faire quoi à quel moment, puis c'est placé comment.

Mais, s'il y a moyen que l'argent n'ait pas à être réfugié dans les placements très, très, très conservateurs, à ce moment-là, les retraités qui sont mis dans ce véhicule-là pourraient profiter des gains de placement à long terme et ils pourraient donc retirer une rente qui est plus élevée, qui pourrait être indexée avec l'inflation. Et, à ce moment-là, quand on demande aux régimes actuels de transférer tout ce bloc-là, si on le fait sur une base qui est comparable à l'évaluation de capitalisation à long terme, à ce moment-là, les régimes ne pourraient pas dire: Ça coûte trop d'argent d'envoyer l'argent ailleurs, non, parce que vous auriez un mécanisme qui est comparable. Donc, on n'a pas mis en place toutes les balises, on vous lance juste la balle, de dire: Essayez donc d'être un peu plus créatifs au profit de tout le monde.

M. Méthot (Michel): En fait, il s'agit d'un véhicule qui mutualiserait le risque d'investissement et de longévité en partageant les gains et les pertes en vertu d'une politique de placement qui ressemble davantage aux politiques qu'on retrouve dans les caisses en fiducie plutôt qu'à celles de compagnies d'assurance.

Alors, je ferme ici la parenthèse et je retourne en fait à certaines de nos recommandations qui touchaient encore une fois la sécurité des pensions et des règles de gouvernance, qui en somme ont pour effet d'améliorer l'administration et donc, par la bande, d'améliorer la sécurité des prestations.

Comme nous l'avons souligné au début, notre association est un défenseur des principes de bonne gestion. Nous appuyons donc généralement les mesures proposées avec toutefois une réserve sur la responsabilité du provisionnement des régimes de retraite. Les hypothèses actuarielles, dans un scénario de provisionnement de caisses de retraite à long terme, doivent être raisonnables, et c'est le mot, le qualificatif qui est utilisé en vertu de normes actuarielles. Le mot «raisonnables» permet un intervalle à l'intérieur duquel les choix doivent être effectués. Nous croyons que ces choix relèvent d'une politique de provisionnement qui devrait être du ressort de l'employeur et qui devrait être publique.

Si cette politique de provisionnement relevait du comité de retraite, nous croyons qu'on déboucherait sur une mauvaise règle de régie interne inacceptable aussi bien pour l'employeur, pour qui cela signifierait plus ou moins l'équivalent de signer un chèque en blanc, que pour l'actuaire aussi désigné, qui devra privilégier, plutôt que des hypothèses raisonnables, des hypothèses qui protègent au mieux les intérêts des participants aux dépens de celles qu'il considère raisonnables. Le résultat, c'est qu'on augmente le coût du régime à long terme.

Comme nous le proposons, nous croyons que, si cette proposition était retenue, à savoir que les règles de provisionnement, la politique de provisionnement est une responsabilité de l'employeur, les rôles et la distribution des rôles seraient très clairs. D'une part, on aurait la Loi des régimes complémentaires de retraite, qui prévoit les minimums; la loi de l'impôt, qui prévoit les maximums; le promoteur, qui a sa propre politique de provisionnement, qui se situe entre les deux; et enfin l'actuaire, qui évalue le régime selon chacune des bases, la base minimum, la base maximum et la base de provisionnement, et fait rapport au comité de retraite et aux autorités gouvernementales.

Enfin, compte tenu des changements touchant le rôle fiduciaire des prestataires de services et des modifications que cela entraînerait, nous soulignons qu'il serait important d'accorder un délai d'un an entre l'adoption de la loi et son application pour permettre à tous les prestataires de réviser leurs contrats avec les comités de retraite.

Le deuxième objectif est d'assurer un sain équilibre dans le partage de la richesse entre les générations de retraités. On prend soin des mots qu'on utilise ici. On aurait tort d'antagoniser les actifs et les retraités, puisque les actifs... les retraités étaient les actifs d'hier; les actifs d'aujourd'hui sont les retraités de demain. Et, lorsqu'on regarde la différence entre un actif de mon âge et un retraité dans la jeune cinquantaine ou jeune soixantaine, il y a très peu de différences ou tout au moins la différence qui existe entre nous deux est bien moindre que la différence entre moi comme employé actif et un employé actif aujourd'hui qui rentre sur le marché du travail.

Donc, on parle plutôt d'équité entre générations de retraités. C'est évidemment un concept hautement suggestif et ouvert à toutes les interprétations. Chose certaine, le répondant sera toujours perdant ou il se verra comme tel, puisqu'il continue à être le seul responsable des déficits et que son droit contractuel de modifier le régime, en utilisant le surplus, devient ouvert à toutes les contestations.

Le Président (M. Paquin): M. Méthot, permettez-moi de vous souligner qu'il reste deux minutes pour votre présentation.

n(18 h 20)n

M. Méthot (Michel): Deux minutes? Parfait. Alors, je saute tout de suite à notre recommandation sur ce sujet. Nous, ce qu'on dit, c'est que plutôt que d'entrer dans ce terrain miné de partage équitable, ce qu'on devrait plutôt dire, c'est que... Cette provision pour écarts défavorables, permettons de l'utiliser pour les retraités aussi. En d'autres mots, s'il y a une provision pour écarts défavorables de 7 %, le surplus, à hauteur du premier surplus de 7 %, pourrait être utilisé aussi pour améliorer les retraités, mais pas pour les congés de cotisation, pas pour les actifs. En haut de la provision, c'est un problème de riche, laissez les contractants se débrouiller avec ça. L'avantage, c'est que, dans un premier temps, vous donnez une priorité, presque une exclusivité, au premier 7 %, pour le bénéfice des retraités. Et mettez-vous à la place d'un retraité: Qu'est-ce que vous préférez: une rente de 100 % sécurisée à 107 % ou une rente de 107 % sécurisée à 100 %? Un tiens vaut mieux que deux tu l'auras. Et ce qu'on dit, c'est que... Mettons de côté cette règle d'équité et privilégions, à l'intérieur de la provision pour écarts défavorables, les retraités.

La deuxième recommandation qu'on fait, c'est: Ayant recommandé que l'employeur ait une politique de provisionnement, il faudrait prévoir que cette politique de provisionnement décrit qu'est-ce que l'employeur entend faire lorsqu'il aura un surplus, comment le gérera-t-il, si ça devra faire... ça devra faire partie intrinsèque de la politique de provisionnement.

N'oubliez pas qu'au Québec, dans le secteur privé, les 100 plus grandes caisses couvrent 90 % de tous les participants du secteur privé au Québec. Ce n'est quand même pas des voyous, c'est quand même des employeurs responsables. Si vous leur dites: Adoptez une politique, elle ne vous lie pas autant qu'une promesse contractuelle, mais rendez-la publique, la pression est forte pour qu'ensuite ces employeurs la suivent. Alors, ça clôt le principal de nos points dans notre mémoire. Merci.

Le Président (M. Paquin): Merci beaucoup. Mme la ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale, nous vous écoutons.

Mme Courchesne: Merci, messieurs. C'était bien intéressant. Je vous avoue qu'on vous a écoutés attentivement, malgré l'heure tardive. D'abord, merci de votre compréhension et de votre patience. Je pense que c'est certainement remarquable de votre part.

J'ai beaucoup de questions puis je sais qu'on a peu de temps. Disons qu'on va faire un peu de millage, un peu de pouce sur votre dernière recommandation. Vous semblez dire que, dans la loi, la politique de provisionnement devrait être obligatoire. Je vais vous dire pourquoi je comprends ça, là. En tout cas, vous la suggérez fortement. Mais là, comme on fait une loi, c'est ou elle est obligatoire ou elle ne l'est pas. C'est «peut» ou «doit», là, hein? Nous, quand on a à discuter de l'article par article, ça fait une grosse différence.

Mais disons que, pour les fins de la discussion, comme vous la suggérez fortement, mettons qu'on décide qu'elle est obligatoire. Puis vous nous dites même: Dans cette politique-là, on devrait prévoir le surplus... comment on va utiliser les surplus de la provision. Mais vous ne pensez pas que... Puis vous dites même... Vous allez très loin, là. Ça, on n'a pas entendu ça, c'est la première fois, là. Corrigez-moi, collègues, si je me trompe, là, mais il me semble que j'ai écouté attentivement, c'est la première fois qu'on nous dit que la provision pourrait servir aux retraités. Mais, si ça sert aux retraités, ce n'est plus une provision.

Nous, le fondement même de la loi, c'est... Une provision a son sens véritable, c'est-à-dire, c'est pour prévenir, c'est pour protéger, c'est pour sécuriser bien sûr, mais ça a son sens véritable de provision. Alors, comment on pourrait dire: On a une provision mais on la donne exclusivement ou en tout cas prioritairement, peut-être pas... prioritairement aux retraités? Pensez-vous vraiment que, dans nos entreprises syndiquées, on aurait un consensus là-dessus? Parce que, quand même, on nous a beaucoup fait valoir, puis même du côté des patrons, que la solidarité entre les actifs est importante. Alors...

M. Méthot (Michel): Laissez-moi reformuler plus précisément la recommandation, ce serait de dire qu'une amélioration qui touche les retraités ne requiert pas une cotisation additionnelle pendant qu'on est en construction de la provision pour écarts défavorables. Évidemment, ça ne veut pas dire qu'il faut l'utiliser, mais, s'il y a utilisation, s'il y a une amélioration aux retraités pendant qu'on est en train de constituer cette provision, ça ne serait pas nécessaire, comme le requiert actuellement le projet de loi, de cotiser tout de suite. C'est tout.

Mme Courchesne: Pensez-vous vraiment, là, que, pendant qu'on est en train de constituer une provision, l'employeur et le syndicat vont accepter qu'il y ait une amélioration uniquement pour les retraités? Il me semble que non. À ce moment-là, il y aurait amélioration du régime. S'il y a amélioration du régime, ça va coûter plus cher, donc ça va prendre plus de temps pour constituer la... Tu sais, ce n'est plus une provision. Je ne sais pas si...

M. Méthot (Michel): Oui, oui. Écoutez, si les syndicats prétendent défendre les intérêts des retraités, je ne vois pas en quoi ils pourraient s'y opposer.

Pour ce qui est de s'il y a une combinaison d'amélioration aux retraités et aux employés actifs, il faudrait effectivement distinguer le coût de chacun, celui pour les employés actifs exigeant une cotisation, comme le prévoit le projet de loi, puisque la provision n'est pas constituée. Pour ce qui est de l'amélioration aux retraités, le choix serait laissé d'utiliser la marge à l'intérieur de la provision ou de ne pas l'utiliser et de cotiser.

Mais, moi, je me place... Ici, j'essaie de... Je porte le chapeau du retraité ici. Et encore une fois, aussi longtemps que la provision n'a pas été constituée, le retraité se fait dire: Écoutez, il n'y a pas assez de surplus dans la caisse pour vous donner une rente. Pendant ce temps-là, le temps passe. Et le temps, ça compte beaucoup pour un retraité. Et encore une fois, de son point de vue... Et ça demande un consentement de l'employeur aussi, là, il faut bien s'entendre, là. Il faut que l'employeur aussi, comme d'ailleurs tout autre amendement, soit bien consentant à l'accorder. Mais le point, ici, c'est qu'on donne une chance au retraité d'aller chercher une augmentation plutôt que d'attendre que la provision soit pleinement constituée.

Mme Courchesne: Je vais essayer d'être brève. Votre collègue, M. Charbonneau, nous a invités à la créativité. M. Charbonneau, j'aurais aimé ça vous inviter aux heures, et aux heures, et aux heures de consultation et de discussion qu'on a eues sur cette question-là. Croyez-moi, on a essayé de couvrir tous les angles, comme on dirait.

Donc, vous faites une proposition qui est un transfert dans un fonds de retraite ou un fonds de retraités. Est-ce que vous ne pensez pas que ce transfert-là, qui a l'air très, très simple quand je vous écoute, mais d'une part il va diminuer les liquidités aussi de la caisse de retraite? Ça va quand même être une diminution, au même titre que le rachat de la rente. Puis est-ce que vous ne pensez pas que vous impliquez un transfert de risques carrément vers les participants, puis qu'au fond, un régime à prestations déterminées, tu es supposé avoir une rente déterminée, mais que... Dans cette proposition que vous nous faites, il me semble plutôt, là, que le retraité va avoir une rente variable, là, elle va être pas mal moins fixe, puis que c'est lui qui va assumer davantage le risque, là, dans la façon dont vous l'avez... parce que ça devient variable. La rente, elle va devenir variable une fois qu'elle va être transférée. C'est ça que je comprends de votre proposition, là.

M. Charbonneau (Serge): Bon. Deux aspects à la question. Premièrement, j'ai essayé de rester très, très bref, donc évidemment je n'ai pas donné plein d'ingrédients pour que la recette marche.

Premièrement, vous avez dit que le fait de transférer l'argent à cet autre mécanisme là va aussi coûter de l'argent. Mais ça coûterait beaucoup moins cher que les rentes assurées. Puis l'objectif, c'est justement ça. L'objectif du provisionnement, c'est de bâtir à long terme une réserve sur base de capitalisation qui sera, mettons, 1 million. Ça, c'est basé sur des taux. On sait à l'avance qu'on va pouvoir profiter des gains de placement. Quand on dit: Au lieu de faire ça, interrompons le provisionnement ordonné puis, disons, achetons une rente assurée, là, soudainement, on passe de 1 million à 1,2 million, mettons.

L'autre mécanisme que, moi, je suggère plutôt, ce serait quelque chose qui n'augmenterait pas les coûts de façon substantielle. On dirait: Il y a 1 million qui est dans la caisse, puis c'est partagé avec tous les actifs puis tous les retraités. Puis les arguments, actuellement, c'est de dire: Bien, mon million, il est mêlé avec tout le monde, puis tout le monde va aller piger dedans, puis, moi, je n'en profiterai pas, M. le retraité. Donc, ce qu'on suggère, c'est de dire: Si votre million est mis dans un nouveau véhicule... Et là les règles sont écrites très clairement que les gains de placement ou les gains d'expérience, ils ne seront pas siphonnés par les employeurs ou par les participants actifs, ils vont être seulement attribués aux participants retraités.

Oui, vous avez raison qu'il y a des risques que ça implique, et la façon d'adresser ça serait de mettre un mécanisme où il y a un partage de risques, donc de déjà considérer dans le calcul qu'il y aurait une certaine marge qui est incluse ou une provision pour de l'indexation future partielle. Et vous pourriez dire: Bien, si on vise à avoir une indexation de 2 %, bien on va avoir un mécanisme que ça pourrait être 2 %, ça pourrait être 4 %. Donc, c'est une redéfinition du partage de risques, mais d'une façon qui sera acceptée par toutes les parties.

Le Président (M. Paquin): M. le député de Vimont, en deux minutes, s'il vous plaît.

M. Auclair: Oui. Merci. Bonjour, messieurs. Bonsoir. Écoutez, moi, je vais vous poser la même question que j'ai posée à l'Association canadienne des gestionnaires de caisses de retraite. Donc, pouvez-vous nous dire qu'est-ce qui se passe, quelle est la réalité au niveau de l'acquisition de rentes à l'extérieur du Québec? Est-ce que c'est quelque chose qui est connu, qui est utilisé de façon assidue, les gens utilisent cette réalité-là, c'est permissible, ou ce n'est vraiment pas quelque chose qui est populaire, qui ne se fait pas?

M. Méthot (Michel): À ma connaissance, le marché est inexistant.

M. Auclair: Donc, il n'y a aucune possibilité.

M. Méthot (Michel): Bien, en fait, il est inexistant.

M. Auclair: Parce qu'ici, quand même, les employeurs peuvent, dans le choix...

M. Méthot (Michel): Il est inexistant. Il est chétif.

M. Auclair: O.K.

n(18 h 30)n

M. Méthot (Michel): O.K.? Les retraités, c'est... Pourquoi? Parce qu'effectivement, en pratique, tous les régimes... Le marché serait... celui des personnes qui accumulent, sous forme de cotisation définie, ou de REER collectif, ou de REER personnel, un magot qu'elles veulent convertir en rente à la retraite. En pratique, ces gens-là ne veulent pas prendre tout leur patrimoine qu'ils ont constitué durant toute leur vie pour acheter une rente qui cesse à leur décès. Alors, ils utilisent des véhicules, tels les fonds de retraite viager... de revenu viager, des véhicules où il n'y a pas d'éléments de risque assumés par l'assureur. Donc, à toutes fins pratiques, et je pense que vous serez d'accord...

M. Auclair: ...qu'ils sortent du régime, comme le régime actuel, disons, si on est dans un régime à prestations, ou c'est à l'intérieur même du régime qu'ils font l'acquisition de cette rente viagère là?

M. Méthot (Michel): Non, c'est...

M. Auclair: À l'extérieur?

M. Méthot (Michel): C'est à l'extérieur.

M. Auclair: Donc, on n'achète pas une rente, on n'achète pas le même principe de rente au niveau d'un assureur, mais on fait l'acquisition d'un CRI, une forme de CRI dans le fond, si on veut.

M. Méthot (Michel): Oui, oui, voilà. En fait, si, demain, une caisse de 1 milliard, pour prendre une grosse caisse, tombait... l'employeur tombait en faillite, il fallait la liquider, je pense que le marché canadien serait totalement incapable d'assumer un tel afflux.

M. Auclair: Merci. Vous confirmez...

Le Président (M. Paquin): Très bien. On va passer du côté de l'opposition officielle, Mme la députée de Mirabel, porte-parole de l'opposition officielle en matière de régime de rentes et de retraite. Mme la députée, on vous écoute.

Mme Beaudoin: Merci, M. le Président. M. Méthot, M. Reny, M. Lagacé, M. Charbonneau, merci pour la présentation de votre mémoire. Vous dites que la possibilité de faire assurer sa rente impose une pression sur le comité de retraite, surtout si l'employeur traverse une situation difficile. Est-ce que vous pouvez expliquer votre point de vue?

M. Méthot (Michel): Oui. Alors, prenez une situation difficile: l'employeur a de la difficulté à cotiser ce qui est requis dans la caisse; ça va mal dans la business; le régime est à 90 % solvable; voici des nouveaux retraités qui disent: Moi, je veux une rente assurée. Alors, moi, je sais... Le comité de retraite a deux ou trois ans pour acheter les rentes, et, pour chaque dollar qu'il va utiliser de la caisse, on sait que ça coûte plus cher auprès d'un assureur que ça le coûte à long terme par la caisse, de sorte que, si 100 $ est suffisant pour payer cette prestation dans la caisse à long terme, ça va lui en coûter 110 $ pour acheter la rente. Alors, voilà que le comité de retraite est appelé à débourser 110 $ de la caisse au moment où il manque déjà de l'argent et au moment où je vais prendre 10 $ de plus pour acheter la rente.

Alors, sa décision... Et il n'est pas certain de pouvoir retourner vers l'employeur et d'obtenir le manque que ça cause dans la caisse. Alors, imaginez la difficulté du comité de retraite, de son rôle de fiduciaire, de dire: Cet employé-là m'a demandé quelque chose auquel il a droit en vertu de la loi, mais, dès que je vais agir, je vais réduire la sécurité de tous ceux qui restent. Qu'est-ce que c'est, son rôle comme fiduciaire? Protéger l'ensemble des bénéficiaires? Se conformer à la loi? Protéger ces employés-là qui demandent une rente assurée? Écoutez, c'est presque écrit dans le ciel qu'il va se faire poursuivre.

Le Président (M. Paquin): Mme la députée de Mirabel.

Mme Beaudoin: Vous dites que l'expérience des autres pays montre que de trop réglementer le régime à prestations déterminées entraîne une fuite vers les régimes à cotisation déterminée. Est-ce que vous avez des exemples?

M. Méthot (Michel): De mon expérience personnelle, le meilleur exemple, pour faire affaire un peu dans d'autres pays, c'est celui de l'Angleterre. En Angleterre, par exemple, l'indexation des rentes est obligatoire. Si vous avez un régime à prestations déterminées, il faut que vous l'indexiez. Évidemment, ça vient d'un souci de protéger le pouvoir d'achat des retraités. Mais, quand vous avez le choix entre soit ne rien faire, un régime à cotisation déterminée ou de prendre des engagements d'indexer les rentes, si vous prenez un régime à prestations déterminées, en fait vous créez une barrière pour les employeurs. Et ça s'est matérialisé. Aujourd'hui, 70 % des employeurs, en Angleterre, ont fermé leurs régimes aux nouveaux employés et ils n'offrent que des régimes à cotisation déterminée.

Et ça s'est déroulé sur un espace de 10 ans. Moi, je me souviens, il y a 10, 15 ans, des régimes à cotisation déterminée, en Angleterre, ça n'existait pas. Aujourd'hui, c'est la norme. Et, parce que ça crée de gros déficits, ils ont créé un organisme d'assurance financé par tous ceux qui sont encore dans des régimes à prestations déterminées... d'assurer les rentes des régimes qui se terminent en déficit, ce qui crée des obligations additionnelles, ce qui encore évidemment est une raison additionnelle pour sortir les employeurs desdits régimes. Alors, en somme, plus on les réglemente, plus on sort les employeurs du système.

Mme Beaudoin: Dans votre mémoire, à la page 4, vous dites: «Nous proposons plutôt que la régie entreprenne une étude conjointe au sein de l'Association canadienne des organismes de contrôle en vue de modifier l'ordre de priorité des droits en cas de terminaison d'un régime déficitaire, en tenant compte des nouvelles règles sur le financement des régimes.»

Est-ce que vous pouvez expliquer d'abord quel genre d'étude conjointe vous suggérez?

M. Méthot (Michel): Oui. Écoutez, tantôt, j'ai donné l'exemple de prestations accessoires qui probablement devraient avoir une priorité moindre que la rente normale, c'en est un.

Ici, ce qu'on souligne, c'est qu'il y a plusieurs régimes qui ont des employés dans plusieurs provinces. S'il faut que chaque province ait ses propres normes en cas de terminaison de régime, quant à savoir quelle est la priorité, c'est absolument ingérable. Alors, à partir du moment où il faut vraiment définir un ordre de priorité en cas de terminaison, il faut s'entendre avec les autres organismes de supervision pour que tout le monde ait le même ordre de priorité, surtout pour les régimes qui ont des employés dans plusieurs provinces. Et il ne faut pas minimiser cette situation. On a quand même beaucoup d'employeurs, au Québec ou à l'extérieur du Québec, qui ont des travailleurs au Québec qui font partie d'un régime pancanadien.

Mme Champagne: Peut-être une petite question. Bonjour, messieurs. Votre définition de l'équité, là, vous dites que c'est un concept hautement subjectif...

Le Président (M. Paquin): Mme la députée de Champlain.

Mme Champagne: ...oui, et par conséquent ouvert aux interprétations et aux litiges. Vous savez que ça fait quelques rencontres qu'on a où la définition de l'équité n'est pas la même, tout dépend d'où elle vient. Et, avec le régime, avec le projet de loi n° 30, avez-vous l'impression qu'on atteint à cette équité, selon vous, ou pas du tout?

Le Président (M. Paquin): M. Méthot.

M. Méthot (Michel): Oui. Du point de vue de l'employeur, il n'y a pas... En fait, on parle d'équité entre participants. L'employeur va vous dire: En essayant de résoudre cette équité entre participants, vous êtes inéquitables envers moi, puisque, quand il y a un surplus, vous donnez aux participants le droit de veto sur la façon dont je peux l'utiliser. Alors, en voulant... dans ce sens-là, vous allez avoir un pan des intervenants qui vont dire: Non, il n'y a pas d'équité.

L'autre problème, c'est évidemment le rôle d'un arbitre. Est-ce qu'un arbitre peut décider du quantum, si un cas lui est soumis, ou peut-il décider seulement de l'équité ou de l'inéquité de ce qui lui est soumis, et de dire «accepté» ou «rejeté»? S'il a le droit de déterminer le quantum, encore une fois tout ça basé sur un surplus qui, comme on l'a déjà souligné à plusieurs reprises, est une opinion. Là aussi l'employeur va dire: Un instant! Vous êtes en train de donner une décision qui a un impact financier sur mes responsabilités à long terme, entre les mains d'un arbitre. À bien des égards, aussi bien... n'importe quel employeur, également incluant le gouvernement à titre d'employeur, va bien hésiter ou en fait manifestera toujours son opposition à confier à un arbitre le rôle de décider du quantum de son contrat de travail.

Mme Champagne: Merci, monsieur.

Le Président (M. Paquin): Ça va? Merci. Donc, M. Méthot, M. Lagacé et M. Charbonneau, de l'Association canadienne des administrateurs de régimes de retraite, merci pour la présentation de votre mémoire et bon retour.

La commission ajourne ses travaux au mercredi 1er novembre 2006, à 10 heures, afin d'effectuer un autre mandat. Merci.

(Fin de la séance à 18 h 40)


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