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Version finale

30e législature, 3e session
(18 mars 1975 au 19 décembre 1975)

Le jeudi 27 février 1975 - Vol. 16 N° 20

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude du projet de loi 88 - Loi modifiant la Loi de la protection de la santé publique


Journal des débats

 

Commission permanente des affaires sociales

Projet de loi no 88

Loi modifiant la loi de la protection

de la santé publique

Séance du jeudi 27 février 1975

(Dix heures quinze minutes)

M. Lafrance (président de la commission permanente des affaires sociales): A l'ordre, messieurs!

Avant de commencer les audiences de ce matin, je voudrais faire part à la commission parlementaire des changements des membres de la commission. Mme Bacon (Bourassa) est remplacée par M. Chagnon (Lévis); M. Fortier (Gaspé) est remplacé par M. Leduc (Taillon); M. Lecours (Frontenac) est remplacé par M. Saint-Germain (Jacques-Cartier); M. Massicotte (Lotbinière) est remplacé par M. Marchand (Laurier).

Ce matin, le premier groupe à se faire entendre devant la commission parlementaire des affaires sociales est le Front commun contre la fluoration, représenté par ses porte-parole, MM. Brunet et Bohémier, c'est exact?

M. Bohémier: Exact, M. le Président.

Le Président (M. Lafrance): Si vous avez quelqu'un d'autre, vous pourriez nous le présenter, si vous permettez.

Front commun contre la fluoration

M. Bohémier: D'accord. M. le Président, MM. les membres de la commission, mon nom est Guy Bohémier, je suis le vice-président du Front commun contre la fluoration. Je vous présente à ma gauche, la secrétaire du Front commun, Mme Micheline Quézel, à ma droite, M. Aimé Bastien, professeur de biochimie et de physiologie humaine, et à mon extrême-droite, le maire de la ville de Tracy, M. Aurèle Racine.

MM. les membres de la commission parlementaire, la question de la fluoration artificiel le des eaux potables soulève partout dans le monde de vifs débats. Les uns prétendent qu'il s'agit d'une mesure favorable à la santé de la population, alors que les autres y voient une combine financière possible, une source grave de pollution, une atteinte à la liberté individuelle et une tragique erreur sur le plan scientifique. Nous n'avons pas l'intention dans ce court mémoire, de soulever tous les arguments qui militent contre la fluoration artificielle; ces arguments ont été largement exposés dans de nombreux ouvrages, celui qui désire connaître ces points de vue est donc prié de s'y référer. Il nous era d'ailleurs plaisir d'en fournir la bibliographie.

Néanmoins, nous désirons attirer l'attention sur certains aspects de la question. Nous pensons que les remarques qui suivent suffisent largement pour que soit définitivement abandonnée l'idée de la fluoration artificielle des eaux de consommation au Québec.

Lorsque nous parlons de l'abandon de l'idée de la fluoration artificielle, nous le faisons parce que nous croyons vraiment que cette mesure n'est pas valable. Cependant, nous respectons les règles de la démocratie et nous ne nous opposons pas évidemment à ce que ceux qui croient en la valeur de la fluoration soient en mesure de consommer tout fluor ou les fluorures qu'ils désirent. A cet effet, nous avons été agréablement surpris hier d'entendre la position soutenue par l'Opposition officielle; il ne fait pas de doute que, sur le plan des libertés démocratiques, nous ne pouvons qu'appuyer le Parti québécois, nous estimons qu'il est tout à fait normal et nécessaire de permettre à la population d'exprimer clairement son opinion sur la fluoration par référendum.

Les propagandistes de la fluoration artificielle soutiennent que le fluor, à raison d'une partie par million ou, selon les endroits 1.2 partie par million comme on le recommande ici au Québec, peut prévenir la carie dentaire et renforcer les os du squelette humain. Acceptons pour l'instant cette affirmation, même si plusieurs travaux sérieux permettent de la mettre en doute; attardons-nous plutôt sur la question du dosage et demandons-nous comment il est possible de contrôler avec exactitude, donc scientifiquement, la quantité totale de fluor absorbée chaque jour par un individu.

Evidemment, les gens ne boivent pas tous les mêmes quantités d'eau. D'un individu à l'autre, les quantités de liquide ingérées varient considérablement. Certains boivent beaucoup, d'autres très peu. Les premiers absorberont nécessairement plus de fluor que la dose dite requise alors que les seconds en seront privés. Comme les enfants consomment le plus souvent du lait et des jus de fruits, il est bien possible que la fluoration artificielle de l'eau leur soit peu profitable. Cette mesure devient alors inutile. On nous dira que certains enfants consomment aussi des boissons douces et que si l'eau était fluorée, bien sûr, elles en contiendraient.

On a entendu hier les représentants de l'Ordre des dentistes et des facultés d'art dentaire. Ils ont dit, à un moment donné, qu'il y avait d'autres moyens de prévenir la carie dentaire que la fluoration et, parmi ces moyens, ils ont mentionné une bonne alimentation. Je suis certains que tout le monde est d'accord pour reconnaître que la consommation de liqueurs douces ne constitue pas nécessairement une bonne alimentation.

Alors, même si les enfants trouvaient des quantités de fluorure dans les liqueurs douces, je pense que ce serait quand même condamnable. Si l'on voulait vraiment procéder scientifiquement, il faudrait plutôt proposer un système de distribution de comprimés de fluor qu'on ajouterait aux breuvages des enfants. De cette façon, on pourrait contrôler avec exactitude les quantités de fluor absorbées et la mesure prendrait un caractère plus scientifique.

Alors, lorsqu'on parle de dosage, on ne met pas en doute que les usines de traitement des eaux soient en mesure de doser effectivement à 1.2 ppm le fluor qu'elles laissent évidemment sortir vers la distribution, vers les foyers. Mais ce dosage-là ne peut jamais être exact au moment où il est consommé, parce qu'on n'a pas de contrôle sur les

doses consommées. On a posé la question hier aux dentistes, leur demandant s'ils avaient des chiffres sur la consommation d'eau que font les enfants. Alors ils nous ont dit qu'ils n'avaient pas de chiffres là-dessus.

On comprend tous évidemment que, d'un individu à l'autre, les doses d'eau consommées dans une journée varient évidemment considérablement. Alors, cela devient strictement impossible de faire consommer par ce moyen, aux gens, le dosage que l'on veut et que l'on estime requis. Si donc on procédait d'une façon plus scientifique en utilisant des comprimés de fluor, du même coup le respect des libertés individuelles serait sauvegardé. Personne ne serait forcé de consommer de l'eau fluorée, les individus qui croient au bien-fondé de la fluoration artificielle pourraient jouir de cette mesure à leur guise, ceux qui n'y croient pas seraient libres de la refuser. Ainsi tous seraient satisfaits.

Dans Dossierfluor, publié aux Editionsdu Jour, on trouve un chapitre intitulé: "L'histoire cachée de la fluoration". On y apprend comment est née l'idée de la fluoration artificielle. C'est un fait bien connu que certaines industries ont du fluor à vendre.

Voici ce que disent à ce sujet les docteurs Morin, Roy et Boutet, professeurs de médecine à l'université Laval, dans un texte publié dans le Devoir du 27 janvier 1975: "Dans l'éventualité où la fluoration de l'eau deviendrait obligatoire, les grandes alumineries et les grandes aciéries seraient les principaux fournisseurs de sels de fluor, puisque cette substance est présente comme contaminant dans les métaux qu'ils produisent".

Hier, lorsqu'on a soulevé la position qu'avaient prise ces professeurs de médecine de l'université Laval, je pense qu'on a mentionné qu'ils soulevaient surtout des interrogations dans leur article. Je ferais remarquer qu'ici il n'est pas question d'interrogation, c'est véritablement une affirmation. On verra d'ailleurs tantôt — nous avons une deuxième référence à cet article — que c'est effectivement aussi une affirmation.

En d'autres termes, ces grandes industries nous feraient boire leurs déchets. Par contre, si la fluoration artificielle devait être systématiquement bannie, ce sont ces industries qui seraient les grandes perdantes. Encore de nos jours, des gens bien intentionnés, que l'on voudrait lucides et intelligents, servent naïvement les intérêts économiques de ces industries au détriment de la santé publique.

Je sais que la compagnie Alcan a manifesté l'intention de présenter un mémoire devant cette commission. Vous savez qu'on a soutenu et qu'on soutient souvent — et d'ailleurs on ne manque jamais de mentionner — que les antifluorationnistes soulèvent souvent que les compagnies d'aluminium ont du fluor à vendre. Je pense que la position actuellement peut avoir un peu changé sur cet aspect. Effectivement, il semble bien que les compagnies d'aluminium vendent moins de fluor qu'elles en vendaient.

Je voudrais quand même ajouter ceci: elles en ont certainement déjà vendu. Dans un ouvrage qui s'appelle "Fluoridation in truth decay", remarquez, on ne parle pas de "tooth decay", mais bien de "truth decay", si on traduit, cela veut dire la fluoration et la carie de la vérité, ouvrage qui est signé par Gladys Caldwell et par un médecin, le Dr Philip-E. Zanfagna m.d.

Or on trouve dans cet ouvrage à la page 224, la mention suivante: On dit, l'Alcoa, l'Aluminium Company of America commença à annoncer son fluorure de sodium en janvier 1950, dans le Journal of the American Water Works Association et l'annonce se lisait comme suit: Fluorez votre eau, en toute confiance, utilisez le fluorure de sodium de l'Alcoa reconnu pour sa grande pureté. Le fluorure de sodium convient particulièrement à la fluoration des eaux potables. Si votre ville fluore son eau, ou voudrait le faire, laissez-nous vous montrer comment le fluorure de sodium de l'Alcoa peut s'acquitter de cette tâche.

Alors je pense que ça démontre au moins, que s'ils ne le font pas actuellement, je pense, qu'ils ont au moins déjà vendu du fluorure de sodium.

Les composés de fluor qu'on ajoute à l'eau au cours de la fluoration artificielle présentent une rare toxicité. Pour nous en rendre compte, il suffit de lire ce qui est écrit sous la rubrique "Manipulation du fluor" dans le dossier technique sur la fluoration de la Ligue d'hygiène dentaire de la province de Québec. En fait, le fluor est un des éléments les plus toxiques et les plus réactifs connu en chimie. Il est corrosif pour la majorité des métaux et peut même dépolir le verre. A l'état pur, il explose très violemment au contact de l'air et de l'eau.

Le fluor que l'on ajoute à l'eau au cours de la fluoration artificielle se présente sous forme de fIuorure de sodium, de fluosilicate de sodium et d'acide fluosilicique. Ces composés ne se trouvent pas tels quels dans la nautre. Ils sont les résultats de processus chimiques réalisés au cours de la fabrication de certains produits. L'industrie de l'aluminium, de l'acier, des fertilisants chimiques, entre autres, produisent de tels composés. Ce sont en réalité des déchets qui servaient surtout avant la sinistre fluoration artificielle à la fabrication de poisons à rats et insecticides divers. Lorsqu'on parle de poison à rats, on nous accuse de jouer sur l'émotivité, de chercher à fai re peur aux gens, en mentionnant justement ce fait. Je tiens à souligner ici, que c'est un fait très connu, que le fluorure de sodium a longtemps été utilisé comme poison à rats. On l'a utilisé aussi comme insecticide, pour tuer les co-querelles et autres bestioles du genre. Même les tenants de la fluoration sont d'accord là-dessus. L'un deux, le Dr F.-A. Bull, décédé aujourd'hui, disait ceci à la 4e conférence annuelle des directeurs dentaires des Etats américains, conférence tenue à Washington, du 6 au 8 juin 1951.

Le Dr Bull s'adressait aux congressistes, des gens qui prônent la fluoration.

En relevant les remarquesd'un des participants à la conférence, le Dr Bain, le Dr Bull disait ceci: "J'ai remarqué que le Dr Bain a utilisé, ajoutez du fluorure de sodium, ne dites jamais cela. C'est du poison à rats. Ce que l'on ajoute, ce sont des fluorures.

Si on nous accuse de faire de l'émotivité avec

ces questions, on peut au moins ne pas nous accuser de dire des mensonges. On ne peut peut-être pas en dire autant d'un texte qui a été publié dans la revue 65 à l'heure d u ministère des Affaires sociales, le numéro d'octobre 1974, volume 4, no 5, dans un article intitulé: "La fluoration, avons-nous les moyens de nous en passer" et signé par M. Maurice Arguin. On peut lire en page 12 ceci: "Ce qu'on ajoute à l'eau, ce n'est pas du fluor à l'état pur, mais des sels de fluor, fluorure en très petites quantités, pas plus nocif que le sel de table. Alors on mentionne que les fluorures ne sont pas plus nocifs que le sel de table.

Ecoutez, moi je suis prêt à consommer dans un verre d'eau, au moins une cuillerée à thé de sel de table.

Je ne sais pas si un membre de cette commission serait prêt à consommer la même quantité de fluorure de sodium dans un verre d'eau. Si on s'en tient à ce qu'on nous dit dans cet article-ci, à savoir le fluorure ne serait pas plus nocif que le sel de table.

On a parlé hier, devant cette commission, que le fluor qu'on ajoute à l'eau est le même que celui qui est contenu naturellement dans les eaux naturellement fluorées. Ce n'est pas exact. Bien sûr, l'ion-fluor, quel qu'il soit, demeure toujours l'ionfluor. Dans la nature, on ne trouve pas le fluor à l'état pur. J'ai dit tantôt qu'il s'agissait d'une substance extrêmement dangereuse, qu'elle explosait violemment au contact de l'air et de l'eau. Je n'ai jamais rencontré, dans les endroits où l'eau est fluorée, ce genre d'explosion. C'est tout simplement qu'on ne trouve pas le fluor à l'état pur dans la nature et tout le monde est d'accord là-dessus.

Ce que l'on trouve dans la nature — là encore, tout le monde est d'accord là-dessus et on le mentionne dans le dossier technique sur la fluoration — ce sont des fluorures. Les fluorures n'ont pas tous la même toxicité, contrairement à ce qu'on nous a dit hier. Les fluorures naturels, ceux que l'on trouve naturellement, à savoir le fluorure de calcium, entre autres — c'est celui-là que l'on trouve particulièrement dans les eaux fluorées naturellement — est loin d'avoir la même toxicité que les fluorures artificiels qu'on utilise au cours de la fluoration artificielle.

J'ai dit tantôt que les fluorures utilisés dans la fluoration n'étaient pas les produits que l'on trouve tels quels dans la nature. Ce sont les produits qui résultent de la transformation de certains éléments au cours, donc, de processus chimiques. Dans un livre qui porte essentiellement sur cette question, et qui s'appelle Toxic Properties of Inorganic Fluorine Compounds, écrit par M. Eggers, on peut lire ceci au tout début, dans l'introduction. Il explique, dans ce livre-ci, les différences de toxicité entre les divers composés inorganiques de fluor. Quand je parle de "inorganiques", on veut dire le fluor qui se trouve à l'extérieur de la matière vivante; pas celui qu'on trouve dans les plantes, ni dans les animaux, mais celui qu'on trouve en dehors de la matière vivante.

Il explique, au début, que, dans la nature, on trouve surtout le fluorure de calcium, sel simple, un atome de calcium uni à deux atomes de fluor; on trouve aussi de la cryolithe où on a affaire, cette fois-ci, à un sel qui contient du sodium et de l'aluminium, trois atomes de sodium et un atome d'aluminium unis à six atomes de fluor. Parlant de ces sels que l'on trouve dans la nature, ces fluorures naturels, il dit ceci: "Heureusement, oes minéraux ne sont pas aisément solubles dans l'eau. Ainsi, ce sont les moins toxiq ues, car la toxicité des composés de fluor inorganiques dépend largement de leur solubilité dans l'eau et de leur degré de dissociation en ionfluor." Cela veut dire que tous les fluorures n'ont pas les mêmes propriétés physicochimiques. Certains ont la propriété de se dissoudre très facilement dans l'eau, alors que d'autres ne sont pas facilement dissouts dans l'eau. Le fluorure de calcium n'a pas cette propriété; il est donc moins toxique.

Ce qui fait qu'un fluorure quelconque est toxique ou non, ce sont ces deux propriétés dont on parle dans le livre dont j'ai fait mention, à savoir: 1 ) la solubilité du sel dans l'eau; 2) son degré de dissociation en ionfluor. Si l'on veut exprimer plus facilement d'une façon plus imagée cette question, on trouve, dans Fluoridation and Truth Decay, une excellente image qui, je pense, fait mieux comprendre.

On dit ceci: "Les fluorures naturels peuvent être comparés à de dangereux criminels enfermés dans leur prison. Les fluorures artificiels qu'on ajoute à l'eau potable ressemblent eux aussi à des criminels, mais à des criminels en liberté, libres de commettre des crimes". Cela a rapport évidemment directement à l'idée que les fluorures artificiels ont, premièrement, une très grande solubilité et ont un degré élevé de dissociation en ion fluor, ce qui n'est pas le cas pour la plupart des fluorures naturels et principalement le fluorure de calcium que l'on trouve là où l'eau est fluorée naturellement.

Je pense que les chimistes sont d'accord là-dessus. J'ai eu l'occasion de jeter un coup d'oeil sur le mémoire que les membres de cette profession ont soumis à cette commission et, sans vouloir anticiper, en page 4 de ce mémoire, on peut lire ceci: II est important de faire un choix éclairé, nous disent les chimistes, lors de l'achat du produit — on parle du produit pour fluorer — car il y a de nombreux facteurs à considérer, comme par exemple les propriétés physico-chimiques du composé.

Ils n'ont donc pas tous les mêmes propriétés, contrairement à ce qu'on nous a dit hier. Deuxièmement, les réactions et la solubilité — ce qui rejoint l'idée que j'ai exprimée — du composé dans l'eau. Tout ceci dans le but de connaître la quantité qu'on doit ajouter à l'eau pour obtenir la concentration optimale de fluor. Si donc il s'agit d'un composé dont la solubilité...

Le Président (M. Lafrance): Je m'excuse, les règlements de l'Assemblée nationale prévoientque, lors des auditions en commission parlementaire, il y ait un exposé d'environ 20 minutes, plus une période de questions de 40 minutes...

M. Bédard (Chicoutimi): M. le Président...

Le Président (M. Lafrance): Un instant, un instant, je n'ai pas fini. C'est moi qui ai la parole, ce n'est pas le député de Rouyn-Noranda. Je m'excuse. C'est moi qui parle.

M. Samson: M. le Président, j'invoque le règlement.

Le Président (M. Lafrance): Alors on vous demande...

M. Samson: M. le Président, j'invoque le règlement.

Le Président (M. Lafrance): On vous demande... C'est moi qui parle. C'est moi qui parle. On vous demande...

M. Samson: M. le Président, j'invoque le règlement. On est au service de la commission.

Le Président (M. Lafrance): ...de vous en tenir à votre document, quitte à vous laisser une latitude, comme on l'a fait hier pour d'autres groupes. Si vous voulez prendre quelques minutes pour finir votre exposé et par la suite répondre aux questions, vous pourrez nous arriver avec les arguments que vous nous amenez là. On n'aura pas d'objection à cela. Vous en profiterez durant la période des questions pour répondre à ces choses.

M. Samson: M. le Président, j'invoque le règlement.

Le Président (M. Lafrance): Le député de Chicoutimi avant le député de Rouyn-Noranda.

M. Bédard (Chicoutimi): M. le Président, votre intervention se situe peut-être à l'intérieur des règlements...

M. Samson: ...président partisan comme cela que cela va aller.

M. Bédard (Chicoutimi): ...cela peut être justifié, mais je voudrais bien qu'on soit clair au niveau de la commission, qu'on donne les mêmes droits à ceux qu'on entend présentement que ceux qu'on a donnés en fait aux autres groupes qui étaient pour la fluoration...

Le Président (M. Lafrance): C'est d'ailleurs ce que j'ai dit, qu'on arrive avec un exposé au début puis il y a une période de questions. On a donné de la latitude à d'autres également et on va en donner aussi à ceux-là. C'est tout.

M. Bédard (Chicoutimi): M. le Président, il faudrait quand même nous laisser finir notre intervention, c'est que vous semblez vouloir imposer un certain cadre dans la manière dont...

Le Président (M. Lafrance): Cela prouve, excusez, le député de Chicoutimi...

M. Bédard (Chicoutimi): Non, mais laissez-nous donc finir, M. le Président...

Le Président (M. Lafrance): Très bien. Allez-y.

M. Bédard (Chicoutimi): ...si on a tort, vous nous le direz.

M. Samson: C'est un président partisan, son idée est faite. Comment voulez-vous qu'il puisse présider la commission?

M. Bédard (Chicoutimi): Ceux qui ont à présenter un mémoire ici, il n'y a rien qui dise dans les règlements qu'ils doivent s'en tenir à un texte, qu'ils doivent en sortir ou ne pas en sortir. Alors je pense qu'on ne doit pas presser M. Bohémier de finir son exposé, puis je crois qu'il a toute la latitude de s'en tenir à son texte ou d'en sortir s'il le veut. Nous aurons la latitude de poser des questions après. Mais n'essayez pas de presser. Jusqu'à maintenant on n'a pressé personne qui ait fait des exposés.

Le Président (M. Lafrance): II ne faudrait pas oublier qu'il y a sept mémoires à entendre aujourd'hui.

M. Bédard (Chicoutimi): Je comprends, maison a adopté une ligne de conduite au niveau de la commission, on est prisonnier de la latitude qu'on a décidée au début aux autres groupes qui ont été entendus. Cela a été une attitude ouverte, qui leur permettait en fait de dépasser le temps et puis de n'être pas à cheval sur les règlements. Alors je pense que, dans le cas présent, il faut suivre la même ligne de conduite.

M. Samson: M. le Président...

M. Bédard (Chicoutimi): Souvent, quand I exposé est plus long, cela nous épargne de poser plus de questions.

Le Président (M. Lafrance): Le député de Rouyn-Noranda.

M. Samson: M. le Président, nous avons accepté de bonne grâce, hier, que les gens qui sont venus témoigner devant la commission nous lisent les textes et qu'ils les commentent au fur et à mesure qu'ils sortaient du texte. On aaccepté cela de bonne grâce hier. On l'a fait pour l'Ordre des dentistes, on l'a fait pour les représentants des trois universités. On a même accepté de sortir des règles de procédure de la commission parlementaire, en revenant à deux heures, pour entendre un témoin qui devait retourner aux Etats-Unis.

On nous a demandé notre collaboration, nous l'avons donnée. Par la suite, les représentants des universités ont présenté leur mémoire en le commentant largement et en sortant du mémoire, en sortant même des textes; ils sont allés plus loin que les expertises en nous obligeant à discuter de points de vue qui n'étaient même pas dans leur texte.

M. le Président, je pense que nous n'avons pas le droit de bousculer les autres; il y en a sept aujourd'hui, vous n'aviez qu'à faire comme hier, en mettre deux. Il y en avait deux hier parce que vous

aviez considéré que c'étaient peut-être des témoins valables en faveur de la fluoration. Parce qu'aujourd'hui on a un témoin qui est contre la fluoration, on voudrait le bousculer. Et je souligne ceci, parce que je veux que ce soit entré au journal des Débats. Vous avez vous-même, hier, en tant que membre de la commission, participé aux débats favorables à la fluoration et je pense qu'aujourd'hui, en occupant le poste de président, c'est un manque de délicatesse. Vous devriez vous faire remplacer parquelqu'un qui a été neutre jusqu'à présent, qui ne s'est pas prononcé. Moi, quand vous voulez bousculer des gens qui sont contre la fluoration, je n'ai pas d'autre chose à conclure que c'est parce que vous êtes vous-même impliqué. Vous avez votre droit d'implication, c'est votre droit d'être favorable à la fluoration, M. le Président, mais je pense qu'il serait plus délicat, à ce moment-ci, que nous ayons un autre président qui préside à nos délibérations, quelqu'un qui n'a pas encore été engagé. Je fais appel aux autres membres de la commission pour que ce soit compris de tout le monde. Mon point de vue n'est pas de m'attaquer à la présidence, mais c'est que le président actuel —ce n'est pas la présidence — c'est une personne qui s'est prononcée; donc, s'étant prononcé, c'est bien dommage, si vous continuez à bousculer les gens comme ça, je ne pourrai plus avoir confiance en la présidence et je ne voudrais pas manquer de confiance envers la présidence.

Le Président (M. Lafrance): II n'a été aucunement question de bousculer. C'est qu'on a demandé, j'ai demandé à M. Bohémier... S'il veut sortir de...

M. Samson: M. le Président, je m'excuse... Le Président (M. Lafrance): Je m'excuse...

M. Samson: ...vous m'avez bousculé en plus d'avoir bousculé ces gens.

Le Président (M. Lafrance): ...j'ai laissé toute la latitude voulue, c'est à mon tour.

M. Samson: Quand je vous ai demandé, parce que, quand on invoque le règlement...

Le Président (M. Lafrance): J'ai demandé à M. Bohémier de s'en tenir à son texte, s'il voulait s'en tenir.

M. Samson: M. le Président, j'invoque le règlement encore une fois.

Le Président (M. Lafrance): Je m'excuse...

M. Samson: Quand on invoque le règlement, le président est obligé de nous donner la parole; vous me l'avez refusée tantôt. Vous m'avez bousculé moi-même. Je dis que vous devriez quitter le fauteuil de la présidence et qu'on aille chercher un autre président; je n'ai plus confiance en vous comme président.

Le Président (M. Lafrance): J'espère que vous allez, cette fois-ci, parce que je vous ai laissé parler, me laisser la chance de m'expliquer moi aussi. J'espère que j'ai au moins ce droit comme président. J'ai demandé à M. Bohémier s'il avait l'intention de sortir de son texte; on n'a aucune objection. Mais il y aura une période de questions dont on pourra profiter, tout le monde, à la fois, les membres de la commission ainsi que nos invités.

Deuxième chose, si on veut absolument que je sois remplacé comme président, cela me fera énormément plaisir, et je suis même prêt à suggérer aux membres de la commission d'en nommer un autre. Il y a ici un autre président qui fait partie de la banque des présidents. Je vais vous suggérer de me remplacer par le député de Chicoutimi.

M. Bédard (Chicoutimi): Je dois vous dire, M. le Président...

M. Samson: M. le Président, vous allez enlever quelqu'un de l'Opposition pour vous remplacer, une minute!

M. Bédard (Chicoutimi): Question de règlement. M. le Président, je dois vous dire...

M. Samson: Des pièges libéraux, on en aassez.

M. Bédard (Chicoutimi): ...qu'avant que cette commission ne siège...

M. Bellemare (Rosemont): II y a toujours des limites à se faire invectiver par le député de Rouyn-Noranda. On n'a pas bousculé du tout, on est tous d'accord avec le monsieur qui est là...

M. Samson: M. le Président, je reconnais la haute teneur des connaissances en règlement du député de Rosemont.

Le Président (M. Lafrance): Le député de Rouyn-Noranda a une question de règlement...

M. Bellemare (Rosemont): II y a toujours des limites à se faire invectiver.

Le Président (M. Lafrance): ...qui prime sur vos interventions. Question de règlement, le député de Chicoutimi.

M. Bédard (Chicoutimi): M. le Président, pour faire suite à votre suggestion, je dois porter à votre attention et à l'attention de la commission qu'avant la tenue de cette commission, j'ai été appelé par Mlle Langlois, qui s'occupe de répartir les présidents de commission au niveau des différentes commissions, afin de présider et je lui ai exprimé mon incapacité de présider la commission, d'une part, parce que j'étais le porte-parole de l'Opposition officielle au niveau des affaires sociales et que, deuxièmement, nous avions une position qui était très explicite concernant le sujet que que nous discutons et que je serais dans une position quand même assez difficile.

Le Président (M. Lafrance): Pour continuer dans la même veine, c'est qu'après...

M. Bédard (Chicoutimi): II ne faut pas oublier que je ne refuse pas, mais que, dans les conditions, c'est difficile.

Le Président (M. Lafrance): Après vous avoir appelé, étant donné qu'il n'y en avait pas d'autres disponibles, elle m'a appelé. Parce qu'il n'y a pas d'autres présidents disponibles, on m'a demandé de présider aujourd'hui. C'est avec plaisir.

M. Bédard (Chicoutimi): Je pense que, si on mettait fin à l'incident...

Le Président (M. Lafrance): Pas de problème, c'est ça. On demande à M. Bohémier d'accélérer; s'il veut sortir de son texte, aucune objection.

M. Bédard (Chicoutimi): Peut-être que vous y pensiez...

Le Président (M. Lafrance): Non, mais j'ai l'intention d'en faire.

NI. Samson: M. le Président, je tiens à souligner que c'est...

Le Président (M. Lafrance): Avez-vous encore l'intention de demander de changer de président?

M. Samson: Oui, j'ai l'intention de demander de changer de président, ça n'a pas changé le problème de place.

M. Bellemare (Rosemont): M. le Président, j'invoque le règlement.

M. Samson: M. le Président...

Le Président (M. Lafrance): Question de règlement, question de règlement.

M. Samson: M. le Président...

Le Président (M. Lafrance): Le député de Rosemont.

M. Samson: On peut suspendre la séance et demander au président d'en nommer un autre.

Le Président (M. Lafrance): Vous avez soulevé une question de règlement tout à l'heure, je vous l'ai accordée. C'est une question de règlement du député de Rosemont.

M. Samson: J'avais la parole, pourquoi me lavez-vous enlevée?

M. Bellemare (Rosemont): M. le Président, pour prouver encore une fois notre bonne foi au député de Rouyn-Noranda, je suggérerais qu'on suspende l'Assemblée pour quelques minutes et qu'on essaie de trouver un autre président. Là, on ne sera pas accusé encore de partisanerie pour rien et se faire invectiver.

Le Président (M. Lafrance): D'accord, on suspend la séance pour dix minutes.

(Suspension de la séance à 10 h 46)

Reprise de la séance à 10 h 57

Le Président (M. Pilote): Est-ce qu'on pourrait dire que le président déchu devient membre de la commission en remplacement de M. Verreault?

Une Voix: C'est cela, M. le Président. M. Lafrance: Merci, M. le Président.

M. Samson: M. le Président, j'invoque le règlement. Je n'accepterais pas qu'on dise qu'il est déchu. Quand même, le député de Rivière-du-Loup ne mérite pas qu'on dise qu'on l'a déchu. On lui a tout simplement demandé de se faire remplacer, étant donné qu'il avait participé aux débats. C'est son droit de le faire. Cela va lui permettre de continuer à participer aux débats.

M. Lafrance: M. le Président, je remercie infiniment le député de Rouyn-Noranda d'avoir demandé le remplacement du président. J'espère, je suis assuré que les lumières que je pourrai apporter réussiront à convaincre le député de Rouyn-Noranda que de fluorer les eaux de consommation au Québec, c'est une bonne mesure.

M. Samson: C'est...

Une Voix: Cela ne ramollit pas trop les cerveaux.

M. Samson: II a besoin d'être sur... M. Lafrance: M. le Président...

Le Président (M. Pilote): A l'ordre, messieurs! Je pense que c'est terminé, la patente. On reviendra tantôt.

M. Lafrance: On reviendra tantôt. On parleradu ramollissement de cerveaux tantôt.

Le Président (M. Pilote): Je vous inviterais à continuer, messieurs.

M. Bohemier: M. le Président, merci. Au moment où cette interruption est survenue, j'étais en train d'expliquer que les chimistes soulignent, d'une part, que tous les sels de fluor n'ont pas les mêmes propriétés physiques et chimiques, que leurs réactions peuvent être différentes et que leur solubilité dans l'eau est également différente. A partir de ces différences, lorsqu'on veut ajouter du fluorure dans l'eau, il faut en tenir compte pour pouvoir doser convenablement le fluor. Ceci veut dire que les fluorures naturels n'ayant pas la même toxicité, c'est-à-dire la même solubilité, ni le même degré de dissociation ionique, pour avoir les mêmes effets, il faut nécessairement en mettre davantage. On parlait hier des villes qui sont naturellement fluorées, et là où on n'avait pas remarqué de fluorose dentaire. Les faits s'expliquent maintenant, c'est que les fluorures naturels, étant moins toxiques, provoquent moins évidemment ce genre de dommages au système de la dentition.

Je reprends mon texte en page 5, au centre. De très nombreuses recherches ont démontré les effets toxiques du fluor sur la cellule vivante. Je vous ai présenté M. Aimé Bastien comme professeur de physiologie et de biochimie. Si vous avez des questions tantôt à lui poser, vous pourrez le faire. On a soulevé beaucoup de questions à ce sujet. On a dit que le fluor était un poison des enzymes. On pourra répondre à cette question. On a parlé du rôle que jouait le fluor au niveau de l'émail des dents. Vous pourrez également, je pense, lui poser des questions sur cet aspect.

Voici ce que disent à ce sujet, au sujet donc de la toxicité du fluor, les docteurs Morin, Roy et Boutet, de l'université Laval, dans le texte mentionné plus haut, donc le texte du Devoir. Une absorption régulière d'un léger excès de fluor dans l'organisme peut provoquer l'ostéosclérose, maladie où la densité et la calcification des os sont augmentées de façon excessive avec calcification possible des tendons et des ligaments et l'apparition de marbrures sur les dents. Les signes d'intoxication bénigne au fluor peuvent apparaître à la suite d'une absorption prolongée d'eau contenant aussi peu qu'une partie de fluor par million de parties d'eau. Remarquez que c'est différent de ce qu'on a dit hier. Lorsqu'on a posé à ces messieurs les dentistes la question à savoir si la fluorose dentaire pouvait apparaître alors que l'eau n'est fluorée qu'à 1 ppm ou 1.2 ppm, on nous a dit: Absolument pas. Or, ce n'est pas l'opinion de ces médecins de l'université Laval, professeurs de la faculté, et ce n'est pas l'opinion non plus de ceux qui rédigent les textes de biochimie des manuels que nous utilisons dans les facultés universitaires. A ce sujet, je voudrais vous mentionner ce que l'on dit sur cette question dans le précis de biochimie de Harper. Harper est un biochimiste américain dont l'ouvrage a été traduit ici au Québec par des gens du département de biochimie de la faculté de médecine, dont le directeur actuel ainsi que deux autres professeurs de ce département. C'est un ouvrage utilisé largement en faculté, le précis de biochimie, et voici ce qu'on trouve dans ce précis concernant la fluorose dentaire pouvant apparaître à des doses aussi faibles que 1.2 ppm. Je m'excuse, je cite au texte Harper. "Dans les régions où le taux du fluor dans l'eau se situe entre 0,6 et 1,2 partie par million, moins de 2% des enfants subissent des dommages aux dents". Evidemment, pas 50%, moins de 2%. Sur une population de 6 millions, si on veut parler uniquement des enfants, bien sûr ce n'est pas 6 millions. Supposons que nous ayons un million d'enfants, moins de 2%, soyons conservateurs, disons 1%, cela fait quand même un bon nombre d'enfants qui devraient, en principe, si on se fie à ce que nous dit Harper, être atteints de fluorose dentaire, possiblement pas à un degré avancé, mais quand même atteints de fluorose dentaire. Je pense que c'est un peu différent de ce qu'on nous a dit hier. On a mentionné aussi hier que le fluor était un nutriment. Or, un nutriment, c'est une subsistance n utritive essentiel le à la santé. Là encore, ce n'est pas l'opinion des savants bio-

chimistes ou physiologistes qui rédigent des manuels que l'on utilise dans nos facultés. Harper, à ce sujet, le même Harper qu'on a traduit ici à l'université Laval, que des membres du département de biochimie de la faculté de médecine ont traduit — dont le directeur actuel — voici ce qu'il dit à savoir que le fluor pourrait être un nutriment. "Les études faites avec des animaux recevant des rations alimentaires faibles en fluor n'ont jamais pu dé montrer si cet élément est essentiel. En quantité élevée, il est difinitivement toxique. Pour savoir si un élément est véritablement un nutriment, c'est-à-dire s'il est nécessaire à la cellule vivante, il faut carencer les animaux sur lesquels on fait des expériences. Dans le cas du fluor, il faut leur donner une alimentation où il y a pratiquement pas de fluor et voir si, à partir de cette alimentation carencée en fluor, ils ne développeraient pas des troubles quelconques.

Harper nous dit que ces expériences ont été faites sur des animaux et qu'on n'a jamais pu démontrer si cet élément est essentiel, c'est-à-dire qu'on n'a jamais pu prouver que leur métabolisme était faussé à cause de l'absence du fluor.

Guyton, dans "Medical physiology", un autre ouvrage qu'on utilise dans les facultés universitaires médicales, dit ceci: Le fluor ne semble pas être un élément nécessaire à l'organisme. C'est un ouvrage qu'on utilise et qui fait autorité dans ce domaine. Smith, un autre auteur du genre dans "Principles of biochemistry" dit ceci: II n'y a aucun indice qui me permette de croire que l'élément fluor est nécessaire au métabolisme. C'est encore un peu différent de ce qu'on nous a dit hier.

Finalement, pour n'en citer que quelques-uns, Harrow, un autre auteur utilisé, dans "Biochemistry" dit ceci: "Actuellement, la fonction du fluor est inconnue". Ce qu'on nous a dit hier, c'est que le Département des aliments et drogues des Etats-Unis...

Le Président (M. Pilote): Je vous inviterais à ne pas mentionner ce qui a été dit hier, mais à bien présenter votre rapport. Les questions viendront ensuite, parce que, si on permet de revenir à hier ou à avant-hier, on n'en finira plus sur le sujet. Des questions vous seront posées en relation avec les rapports d'hier.

M. Bohemier: D'accord.

M. Samson: M. le Président, je pense que, hier, nous avons permis au deuxième groupe de faire référence à des questions posées au premier groupe.

Le Président (M. Pilote): A la période des questions.

M.Samson: Non, même dans leur présentation, parce que le deuxième groupe...

M. Forget: Seulement dans les questions.

M. Samson: ...qui a passé hier, nous avait demandé la permission de prendre son mémoire par bloc et de le commenter au fur et à mesure.

Le Président (M. Pilote): Exactement. On a commenté...

M. Samson: A ce moment, M. le Président, on réclame la même chose pour le groupe de ce matin.

Le Président (M. Pilote): Voici ce qui est arrivé, hier.

M. Forget: On ne leur a pas demandé la même chose, ce matin.

Le Président (M. Pilote): Hier, on a commenté, article par article, le rapport qui a été présenté — le deuxième rapport — par le Dr Lussier et les doyens des trois facultés. C'était article par article.

M. Lafrance: Les trois doyens.

Le Président (M. Pilote): J'inviterais, actuellement, celui qui présente le rapport, à lire son rapport. Les questions viendront ensuite. On pourra, à ce moment, faire rapport sur ce qui s'est dit hier ou vous pourrez, faire rapport sur ce qui s'est dit hier.

M. Bohemier: Je vais éviterde faire rapport sur ce qui s'est dit hier. Je souligne donc tout simplement que les auteurs de manuels utilisés dans les facultés de médecine affirment que le fluor n est pas un élément essentiel à l'organisme. Donc, par conséquent, il n'est pas un nutriment.

Les propagandistes de la fluoration artificielle ne semblent pas vouloir tenir compte du fait que les aliments que nous consommons renferment du fluor en quantité significative. Nos aliments nous fournissent donc abondamment tout le fluor dont notre organisme peut avoir besoin. Ce fluor se présente sous une forme beaucoup moins toxique que les composés de fluor artificiel. En effet, dans les aliments, on trouve du fluorophosphate de calcium, substance organique naturelle, digérée par les végétaux. Ce sel de fluorest 85 fois moins toxique que le fluorure de sodium. C'est ce qu'affirmait M. Armand Marchand, L.Ph dans un rapport intitulé "Notre océan d'eau douce, une richesse à préserver.'

Si l'on ajoute à cela que le fluor contient certains additifs alimentaires — je m'excuse — ... le fluor que contiennent certains additifs alimentaires, les poussières de l'air, les insecticides, les pesticides et plusieurs médicaments, la carence en fluor devient pratiquement inexistante. Au contraire, on peut déjà parler d'une véritable pollution par le fluor.

Les recherches de MM. Marier et Rose, du Conseil national de recherche à Ottawa, ont démontré que des citoyens demeurant dans des villes où l'eau est fluorée artificiellement, à raison d'une partie par million, absorbaient entre deux et cinq milligrammes de fluorure par jour. Ces chiffres furent d'ailleurs confirmés par une autre recherche publiée dans l'American Journal of Clinical Nutrition (avril 1969). Cette recherche fut faite par le Dr Herta Spencer, m.d., et ses collaborateurs au Stritch School of Medecine de l'université Loyola. Ces chercheurs évaluèrent entre 3.57 et 5.37 milligram-

mes par jour l'absorption de fluorure chez un groupe d'individus en parfaite santé.

Une autre recherche faite au Japon, pays de plus en plus industrialisé, où l'agriculture, d'ailleurs, est de plus en plus industrialisée et où on utilise de plus en plus d'engrais chimiques qui renferment du fluor, a démontré ceci: Plus un pays est industrialisé et plus il compte sur les méthodes modernes d'agriculture utilisant de fortes doses d'engrais chimiques, riches en phosphate, plus grand est le contenu en fluor des aliments qui y sont produits.

Ainsi, en 1958, à l'Ecole d'agriculture de l'université Meijo au Japon, on découvrait qu'un individu moyen absorbait 4.38 milligrammes de fluor par jour. En 1965, la même recherche a montré que la dose quotidienne absorbée était maintenant rend ue à 11.13, parce que la consommation, l'utilisation de phosphate avait largement augmentée pour la culture des aliments.

Dans le dossier technique sur la fluoration, en page 52, on mentionne cette question-là. On dit bien que le fluor, on ne le trouve pas que dans l'eau. Il existe à d'autres niveaux: On en trouve dans les aliments, on en trouve dans l'atmosphère, dans les dentifrices, etc.

Cependant, c'est assez curieux de constater qu'on ne mentionne pas à quels endroits on a prélevé ces doses que l'on mentionne. Vous comprendrez que, dans une ville où sont situées des industries, des alumineries, parexemple, où s'échappent, des hauts fournaux de ces industries, des émanations de fluor, dans l'atmoshpère, on va en trouver évidemment beaucoup plus que dans une ville qui est située loin de ces industries.

On sait aussi que dans la fabrication de l'essence, plusieurs compagnies utilisent le fluor; or, les moteurs à combustion interne et le gaz d'échappement qui en sort renferment des fluorures. Par conséquent, le fait, dans une grande ville, où il y a beaucoup de circulation automobile, on va respirer davantage de fluor dans l'air qu'on peut en trouver loin des centres de pollution surtout causée par les moteurs à combustion interne.

Le dossier technique ne nous dit pas à quel endroit on a prélevé ces échantillons de façon à ce qu'on sache où sont situées les concentrations de fluor. C'est comme si elles n'existaient pas, ces concentrations.

Une telle absorption quotidienne de fluorure est considérable. Elle dépasse largement la dose que même les propagandistes de la fluoration artificielle reconnaissent comme dangereuse. En effet, ceux-ci admettent que 2 milligrammes de fluorure par jour constituent une dose toxique. C'est mentionné en page 51 du dossier technique sur la fluoration. On peut lire au bas de la page: "La quantité de fluor ingéré quotidiennement par un enfant ne doit pas dépasser 2 milligrammes, si on veut éviter tout risque d'apparition de l'émail tacheté".

Alors, les doses que j'ai mentionnées, celles que MM. Marier et Rose, de même que les travaux du Dr Herta Spencer démontrent que ces doses sont déjà largement dépassées. C'est la raison pour laquelle on dit qu'on peut déjà parler de pollution par le fluor.

On le voit clairement maintenant, notre organisme absorbe déjà trop de fluor. Seuls les gens ignorants et irresponsables peuvent proposerqu'on en ajoute davantage, en procédant à la fluoration artificielle des eaux de consommation.

Puisque les sels chimiques artificiels de fluor sont extrêmement toxiques, la question de la pollution de l'environnement a maintes fois été soulevée. Le fluor qu'on ajoute dans les eaux de consommation se retrouve finalement dans les cours d'eau. Ici au Québec, c'est dans le Saint-Laurent que le fluor s'accumulera.

Voici ce que disent à ce sujet, les docteurs Morin, Roy et Boutet dans le texte mentionné plus haut, toujours celui du Devoir: "Du point de vue écologique, les effets d'une augmentation de la teneur en fluor de l'eau du Saint-Laurent ne sauraient être pris à la légère. La chaîne nutritionnelle qui va de la plante marine au poisson de consommation courante permet l'accumulation excessive de certaines substances toxiques dans l'organisme de certaines espèces animales. Les effets désastreux d'une intoxication de la faune marine dans l'estuaire du Saint-Laurent ne sauraient être pris à la légère et devraient inciter à une extrême prudence".

Je vous ferai remarquer que, contrai rement à ce qu'on a souligné hier, il ne s'agit pas d'interrogations, mais bel et bien d'affirmations. Que pouvons-nous ajouter de plus à ces paroles de sagesse? Le gouvernement québécois va-t-il lui-même financer une grave forme de pollution de notre environnement?

Les propagandistes de la fluoration artificielle basent leur argumentation sur l'hypothèse que le fluor réduit la carie dentaire. Ils prétendent que des études sérieuses justifient leur position, mais lorsqu'on analyse judicieusement ces études, comme l'a fait le professeur Albert Schatz, Ph. D., on s'aperçoit que la fluoration artificielle ne réduit en rien la carie dentaire. Le professeur Schatz a démontré clairement ce fait dans un article intitulé: "The Failure of Fluoridation in England", publié dans le numéro d'octobre 1972 de la revue "Prevention". En 1966, il publiait également dans une revue dentaire du Chili un rapport intitulé "The Failure of Fluoridation in Chile, a Critical Analysis After Eleven Years ".

Lorsqu'ils sont contredits par des hommes de science, les propagandistes de la fluoration artificielle essaient généralement de discréditer ces derniers. Dans le cas du professeur Albert Schatz, ce n'est pas possible. Le professeur Schatz est un savant de réputation internationale, détenteur d'un Ph. D. en microbiologie de la Rutgers University et co-découvreur de la streptomycine, médicament utilisé avec succès dans le monde médical pour enrayer la tuberculose. Premier médicament, d'ailleurs, reconnu comme ayant des effets au niveau de cette maladie.

Le professeur Schatz a fait partie du corps professoral de nombreuses universités. M enseigne actuellement à laTemple University. Ses travaux et ses affiliations à des sociétés scientifiques sont évidemment trop nombreux pour que nous puissions les mentionner ici. Pour le bénéfice des membres de la commission qui voudraient se documenter sur cette question, je pourrais fournir la liste des travaux

concernant les dents — la question dentaire — réalisés par le Dr Schatz de même que ses nombreuses affiliations. Nous avons d'ailleurs à son sujet un dossier où quelques-uns de ses travaux sont présentés. Nous en avons quatre ou cinq copies. Les membres de la commission qui voudraient consulter ces travaux pour se documenter davantage pourraient le faire avec intérêt. Comme on l'a mentionné hier — je pense que c'est le député de Rouyn-Noranda — si la commission désirait faire comparaître le Dr Schatz devant elle, elle pourrait l'inviter. Je pense qu'actuellement c'est l'homme le plus qualifié pour exposer le point de vue des "anti-fluorationnistes" sur cette question.

Le professeur Shatz s'est également penché sur d'autres implications de la fluoration artificielle. Ses recherches au Chili ont montré que la fluoration artificielle était responsable d'une très forte augmentation de la mortalité infantile. Une étude statistique a en effet prouvé qu'après dix ans de fluoration artificielle, la ville de Curicô, première ville au Chili à adopter la fluoration, présentait 233% fois plus de mortalités infantiles dues à des malformations congénitales que la ville témoin de San Fernando. L'incidence de la carie dentaire n'a d'ailleurs pas été réduite à Curicô, selon les recherches du Dr Schatz.

De tels travaux ne sont jamais mentionnés par les propagandistes de la fluoration artificielle. On a dit hier, je pense, que 98.8 des gens de science étaient opposés à la fluoration. Je ne sais pas d'où vient cette statistique. Je pense que c'est largement exagéré.

Les propagantistes de la fluoration ne parlent pas non plus des autres hommes de science qui ont rejeté l'idée de la fluoration artificielle après l'avoir étudiée objectivement. Ils préfèrent continuer de soutenir trompeusement que la fluoration réduit l'incidence de la carie dentaire et est absolument inoffensive.

Tôt ou tard la vérité doit être reconnue et les imposteurs démasqués. Comme le dit si bien le professeur Schatz: "II ne fait aucun doute que le mouvement anti-fluoration triomphera éventuellement. Il ne peut échouer car la fluoration est dommageable et ne prévient pas la carie dentaire".

La prévention de la carie dentaire réside essentiellement dans une meilleure alimentation. C'est de ce côté que le gouvernement doit s'orienter s'il désire vraiment améliorer la santé des Québécois. Merci.

Le Président (M. Pilote): Le ministre des Affaires sociales.

M. Bellemare (Rosemont): En dessous des noms, Jean-Marc Brunet, n.d. et Guy Bohémier, n.d.

M. Bohémier: Diplômés en naturopathie.

M. Forget: M. le Président, j'aimerais demander en premier lieu au porte-parole du Front commun contre la fluoration à quel titre ils apparaissent devant nous. J'aimerais savoir s'ils apparaissent ici comme un groupe de citoyens préoccupés par la question de la fluoration ou s'ils prétendent représenter ici un point de vue scientifique. Est-ce qu'ils ont eux-mêmes fait des recherches sur ces questions, comme groupe ou individuellement? J'aimerais qu'ils nous expliquent un peu au nom de quoi ils viennent nous parler, au nom de qui ils viennent nous parler.

M. Bohémier: Le front commun représente, entre autres, l'opinion de divers indididus ou divers organismes qui, à partir du fait que nos positions étaient connues depuis longtemps, j'ai parlé tantôt de la publication de Dossier fluor, les naturistes se sont opposés, je pense, ici, en premier lieu à la fluoration. A partir de cette opposition, des groupes ont demandé à joindre notre position et c'est ainsi que le front commun contre la fluoration a été fondé. Nous représentons donc actuellement un certain nombre d'organismes, de même que tous les individus qui nous ont fait parvenir des lettres demandant à être entendus au nom du front commun contre la fluoration.

M. Forget: M. le Président, si je comprends bien, on nous dit qu'il n'y a aucune prétention scientifique du groupe en question. On vient comme un groupe de citoyens présenter des opinions sur la question de la fluoration, et non pas à titre de groupe scientifique ayant fait des recherches sur le sujet ou ayant des responsabilités professionnelles dans le secteur de la santé. C'est bien cela?

M. Bohémier: Exactement. Les seules préoccupations scientifiques sont celles que nous avons soulevées et qui ont été rapportées par d'autres individus.

M. Forget: Donc, vous vous faites les porte-parole d'un groupe d'individus, mais vous ne prenez pas à votre compte nécessairement les affirmations scientifiques que vous avez faites.

M. Bohémier: Nous les prenons à notre compte. M. Forget: A quel titre?

M. Bohémier: A titre de membres d'un front commun de gens qui sont opposés à la fluoration. Cela veut dire, en termes simples, que les gens qui sont opposés à la fluoration croient aux travaux des savants — les gens dont j'ai fait mention dans mon texte — qui se sont prononcés contre la fluoration. Ils y croient sincèrement.

M. Forget: Remarquez que je ne mets pas en doute votre sincérité, mais je veux simplement établir, pour le bénéfice de la commission, si votre groupe se compare, par exemple, à ceux que nous avons entendus hier, qui, à titre de professionnels de la santé ou à titre de scientifiques, doyens de faculté enseignant l'art dentaire, la médecine dentaire, se sont prononcés sur une base professionnelle et scientifique sur le dossier de la fluoration. Ce que vous me dites, c'est que vous représentez un groupe d'individus qui n'a aucune prétention de cette nature.

M. Bohémien Un groupe d'individus et un groupe d'organismes qui ont expressément manifesté l'intention d'appuyer le front commun contre la fluoration.

M. Forget: Quels sont ces organismes?

M. Bohémier: La secrétaire pourra vous faire lecture. Je vais le faire, si vous voulez. Il y a d'abord le Mouvement naturiste social, Offensive pour la vie, la Ligue démocratie Québec, le Comité Québec-Etats-Unis, l'Institut de formation sociale, l'Association naturiste du Québec, la Ligue des droits de la nature, la Section enfants-famille de la clinique naturiste Brunet, le Mouvement pour les libertés démocratiques, le Mouvement occidental, l'Association des femmes démocrates, l'Institut naturopathi-que, la Ligue sociale chrétienne, l'Association des marchands détaillants d'aliments naturels, la Société des iridologues du Québec, le Collège des naturopathes du Québec, le Mouvement action-santé, l'Alliance chrétienne démocrate, la Ligue pour l'agriculture naturiste, ainsi qu'un bon nombre d'autres individus à titre personnel que je ne nommerai pas ici, incluant M. le maire Aurèle Racine, de la ville de Tracy, ici même.

M. Forget: Vous parlez du Collège des naturopathes. J'aimerais que vous nous précisiez quel est ce collège, quel est son rôle et son organisation. Vous vous rendez compte que la nature de ma question n'est pas de vous embarrasser. Mais vous utilisez une expression qui est aussi utilisée ou qui était utilisée par des ordres professionnels. C'est dans le même sens que ma première question. Je veux bien clarifier le statut professionnel ou scientifique du groupe que vous représentez.

M. Bohémier: II s'agit d'une corporation professionnelle qui détient une charte du gouvernement. Le nom donc est protégé.

M. Forget: En vertu de quelle loi?

M. Bohémier: En vertu, je pense, de la deuxième partie de la Loi des compagnies.

M. Forget: Ah! la Loi des compagnies. M. Bohémier: Oui.

M. Forget: Je vois. Ce n'est pas un organisme professionnel au sens du code des professions.

M. Bohémier: Exactement.

M. Forget: C'est un groupe de citoyens qui peut être formé pour des buts quelconques. Il peut s'agir d'un club de tennis, il peut s'agir d'un groupe de naturopathes. C'est la même chose.

M. Bohémier: Exactement.

M. Forget: Très bien. Je reviendrai plus loin là-dessus.

Je suis personnellement — c'est le premier point que j'aimerais élucider — fasciné par votre argumentation qui est contenue aux pages 3 et 4 de votre mémoire où vous faites allusion — sans vraiment préciser votre pensée, j'aimerais que vous le fassiez — à l'histoire cachée de la fluoration, les grands perdants. Vous mentionnez que le fluor est évidemment quelque chose qui est produit par quelqu'un et que, si on veut l'utiliser, il va falloir l'acheter quelque part.

Au-delà de ce que vous dites dans votre texte, vous semblez porter une accusation assez importante, qui me vise d'ailleurs, je crois, personnellement à titre de ministre des Affaires sociales, comme parrain de ce projet de loi. Vous semblez créer ou voir une implication en termes de conflits d'intérêts. Je crois que le public est assez sensibilisé à ces questions que si vous avez vraiment des indications à cet effet, je vous serais reconnaissant, et je suis sûr que toute la commission le serait aussi, de bien vouloir préciser exactement ce que vous voulez dire.

M. Bohémier: Tout ce que je veux dire ici, c'est que les fluorures utilisés pour la fluoration de l'eau, puisqu'ils ne sont pas des produits qu'on retrouve dans la nature, proviennent donc de quelque industrie. Il faut acheter le fluor quelque part. Ce n'est pas mon intention de prétendre que le ministre des Affaires sociales peut avoir des intérêts quelconques dans une maison semblable, mais il faut bien, je pense, l'acheter quelque part. Je ne pense pas que les villes qui actuellement fluorent leur eau reçoivent gratuitement le fluor qu'elles utilisent dans la fluoration. Je pense qu'on s'entend là-dessus. Il y a donc des industries qui peuvent en profiter.

D'ailleurs, à l'idée des professeurs Morin, Roy et Boutet, les grands perdants seraient justement les compagnies qui produisent ces substances si, effectivement, on décidait de ne pas fluorer à l'échelle du Québec les eaux de consommation des diverses municipalités.

M. Forget: Vous savez...

M. Bohémier: II y a donc un intérêt commercial là-dedans. C'est tout simplement ce que je veux faire remarquer à la commission.

M. Forget: J'aimerais que vous précisiez votre pensée davantage, parce que vous me dites qu'il est évident qu'un produit doit être acheté quelque part. C'est aussi ce que je crois, c'est évident; comme c'est évident que, si on donne des prothèses gratuitement en vertu du régime d'assurance-maladie, il faudra également les acheter quelque part. Donc, les fabricants vont nécessairement être payés pour cela. C'est tellement évident que je cherche la raison pour laquelle vous l'avez indu dans votre mémoire, puisque, normalement, on ne voit pas des évidences dans un mémoire qui porte, paraît-il, sur une question controversée. J'aimerais que vous le précisiez davantage. Est-ce que vous croyez vraiment que le gouvernement va bénéficier de redevances à partir des compagnies qui produisent le fluor? Est-ce que vous croyez que je vais en bénéficier personnelle-

ment? Vous n'avez aucun de ces doutes dans votre esprit?

M. Bohémien C'est certain que vous ne bénéficierez pas personnellement des ventes que peuvent réaliser ces compagnies au niveau du fluor. Quand on a parlé de la compagnie américaine Alcoa, pourquoi pensez-vous qu'à un moment donné de son histoire, elle a vendu du fluor? Parce qu'elle réalisait un profit. Elle était intéressée à en vendre et c'est normal qu'une compagnie soit intéressée à en vendre.

M. Forget: Encore une fois, si c'est normal et si c'est évident, à quelles fins précises se rapporte ce paragraphe de votre mémoire? Vous voulez exprimer une évidence. Vous me dites: II n'y a aucun doute dans votre esprit, qu'il ne s'agit pas d'un conflit d'intérêts, qu'il n'y a aucun bénéfice personnel , à votre avis, qui va en être tiré par qui que ce soit.

Alors pourquoi l'avoir mentionné? Je ne saisis toujours pas la raison de ce paragraphe.

M. Bohémier: Tout simplement pour dire que, si les compagnies peuvent en vendre, elles sont intéressées à mousser la publicité de leur produit. On donne des renseignements un peu partout, comme le cas de l'annonce publicitaire que je vous ai lue de la compagnie Alcoa tantôt, où ils vantaient les mérites de leur fluorde sodium; ils ne le faisaient certainement pas dans l'intérêt de la santé publique, mais pour leurs intérêts purement commerciaux.

M. Forget: Avez-vous des indications précises à savoir que ces compagnies ont été actives au Québec et ont promu d'une façon ou d'une autre, par de la publicité, par de la propagande, par une action de "lobbying" auprès de groupes professionnels ou auprès du gouvernement, la question de la fluora-tion?

M. Bohémier: Non, je ne pense pas que cela ait pu jouer au Québec. Je sais que cela a joué aux Etats-Unis puisque cette annonce publicitaire a paru dans un journal spécialisé. C'est à partir de cela ensuite que la question de la fluoration a été élaborée. Je pense qu'aujourd'hui la plupart des gens qui prônent la fluoration sont très sincères mais je pense qu'à l'origine il y a peut-être quelques doutes qui peuvent planer sur la validité de ceux qui l'ont endossée. Vous savez qu'une fois que la fluoration est endossée ça fait boule de neige. Une fois qu'une association professionnelle se prononce, ça devient extrêmement gênant de retirer son approbation à la fluoration, parce qu'à ce moment-là ce serait avouer qu'elle s'est trompée et elle perdrait toute espèce de crédibilité face à l'opinion publique.

A l'origine, je pense qu'il y a eu des intérêts commerciaux et l'annonce publicitaire que je vous ai lue, qui a paru dans un journal, dans une revue spécialisée, en témoigne, c'est tout ce qu'on veut dire. Actuellement, je suis certain que tous les gens qui prônent la fluoration ici au Québec sont des gens parfaitement honnêtes et sincères.

M. Forget: Je suis tout à fait d'accord avec vous là-dessus. Par ailleurs, cet argument ne s'applique-t-il pas à d'autres points de vue également? Par exemple, vous avez déclaré tout à l'heure que des positions, une fois exprimées, ont tendance à être répétées. Est-ce que cela ne vaut pas également pour les arguments qui sont avancés contre la fluoration?

M. Bohémier: Sauf que ces arguments reposent sur des textes publiés par des hommes de science; j'ai mentionné le professeur Albert Schatz, qui a fait des recherches.

M. Forget: C'est vrai des deux côtés égale ment. M. Bohémier: Ah oui!

M. Forget: Donc, cet argument, que ça fait boule de neige, est également vrai des deux côtés.

M. Bohémier: Oui.

M. Forget: Vous auriez tout aussi bien pu le mentionner dans votre mémoire.

M. Bohémier: Si vous voulez me faire dire par là qu'il y a eu des exagérations à certains moments sur certains aspects de la question de la fluoration, je vais vous dire que je suis d'accord avec vous.

M. Forget: Vous avez mentionné des écrits, un livre publié aux Editions du Jour. Ce livre, qui a été vendu, j'imagine, en un certain nombre d'exemplaires, est-ce que les membres ou le Mouvement naturiste social ont bénéficié financièrement de la vente de ce livre?

M. Bohémier: Je ne pense pas. Les contrats qui sont passés avec les éditeurs sont des contrats qui sont passés entre l'auteur et l'éditeur. C'est l'auteur du volume qui a pu réaliser des profits, si son livre s'est vendu.

M. Forget: Donc, il y a eu des profits et les auteurs sont des membres également. Ils peuvent très bien être des membres du Mouvement naturiste social?

M. Bohémier: Les auteurs ne sont pas les membres. Il n'y a pas cinquante auteurs, il y a un auteur.

M. Forget: Et il est membre?

M. Bohémier: II est membre du Mouvement naturiste social, bien sûr.

M. Forget: Donc, la vertu n'est pas uniformément d'un seul côté dans tout ça?

M. Bohémier: Non, disons que sous cet aspect on pourrait envisager la question comme vous le faites, sauf que je ne me place pas à ce niveau, je me place au niveau des idées qui sont exprimées dans ces ouvrages.

M. Forget: Je vous encourage à rester à ce niveau d'ailleurs.

M. Bohémien D'accord.

M. Forget: Vous faites allusion, dans votre texte écrit, à une abondante bibliographie; je remarque qu'elle n'est pas jointe à votre mémoire. Cependant, vous avez cru bon, durant votre exposé, d'en citer certains extraits. J'aimerais cependant être un peu plus spécifique. Vous dites, par exemple, en page 2 de votre mémoire, que l'on affirme dans certains milieux que la fluoration peut prévenir la carie dentaire et renforcer les os du squelette humain. Vous dites: "Acceptons pour l'instant cette affirmation, même si plusieurs travaux sérieux permettent de la mettre en doute." Est-ce que vous faites exclusivement allusion aux travaux que vous citez plus tard, aux publications du Dr Schatz, par exemple?

M. Bohémier: Non. Il y a beaucoup d'autres sources qui peuvent justifier cette position.

M. Forget: Est-ce qu'il vous est possible de communiquer à la commission la liste des références spécifiques que vous faites dans ces cas?

M. Bohémier: Oui, entre autres, par exemple, je pourrais citer certains auteurs de manuels en biochimie q ui soutiennent effectivement que le fluor ne renforce pas l'émail des dents.

M. Forget: Citez-les donc.

M. Bohémier: Oui, si vous me donnez quelques instants pour les retrouver, je vais vous en citer. D'ailleurs, le professeur de biochimie qui est à mes côtés serait plus qualifié pour vous répondre là-dessus, peut-être qu'il pourrait le faire.

M. Bastien: Si vous me permettez, M. le ministre, j'ai fait une dizaine d'années d'études à l'Université de Montréal en physiologie humaine, et la question du fluor me préoccupe depuis plusieurs années parce que j'enseigne la biologie, l'écologie également. Je suis à préparer un volume sur la survie de l'humanité actuellement.

M. Forget: Voulez-vous parler un peu plus fort, s'il vous plaît?

M. Bastien: Oui. Pour toutes ces bonnes raisons, parce que je prépare un volume actuellement sur la survie de l'humanité, je me suis appliqué et ai fait un petit travail de recherches sur le fluor, la fluoration des eaux potables, un travail de recherche. Une copie a été envoyée, dans le temps, au ministre Goldbloom, médecin, ainsi qu'au ministre Castonguay, ainsi qu'à Jean Drapeau, etc., plusieurs grandes autorités en la matière. Le Dr Goldbloom a répondu assez favorablement, sans accepter tous mes points. Toutefois, pour faire courte une longue histoire, j'ai essayé, depuis ces dix années d'études, de trouver quelque chose de bon dans le fluor, au point de vue physiologique et biochimique et je n'ai jamais rien vu de scientifiquement exposé et favorable à l'utilisation du fluor.

Je crois que cette idée se propage que le fluor est bon pour les dents et dans tous mes volumes que j'ai lus à l'université, conjointement avec les étudiants en médecine et en art dentaire, je ne vois absolument rien et c'est ce qui m'a poussé à faire ce petit travail.

Vous demandiez des références tout à l'heure. Tout le monde sait, par exemple, que, dans les universités américaines, à McGill, à Montréal, nous avons en physiologie médicale, Guyton; nous avons dans les principes de biochimie, Smith, nous avons également en biochimie, Harrow, et nous avons en physiologie médicale, Fabre et Rougier, qui sont des livres classiques d'université. Je n'ai jamais de ma vie trouvé une fonction bénéfique au fluor. Je pourrais peut-être vous mentionner comme ça quelques petites déclarations du dictionnaire de médecine, à la page 223, "Le fluor est le plus réactif de tous les éléments, il est toxique, corrosif et dangereux pour tout tissu vivant. Il s'associe rapidement à la plupart des substances organiques, le fluor peut se combiner au calcium, au sodium, au magnésium, au potassium, à l'aluminium, etc.", affirme le dictionnaire de médecine.

D'autre part, on lit dans Fabre et Rougier, Physiologie médicale, page 269, livre de classe, "Les substances minérales essentielles à l'homme proviennent des aliments d'origine végétale. Elles ne sont jamais ingérées à l'état d'élément car, à l'état pur, ces éléments ne sont pas utilisables et sont extrêmement dangereux. On ne peut pas les utiliser sous forme de sels minéraux mais seulement sous forme de sels organiques, c'est-à-dire combinés à des substances organiques élaborées par les végétaux". Fabre et Rougier, Physiologie médicale, page 269.

Smith, Principle of biochemistry, page 199, "Le fluor s'associe à l'ion hydroxile de l'hémoglobine et il se forme de la métémoglobine, laquelle ne peut plus capter l'oxygène ou l'oxyde de carbone". Si l'hémoglobine qui transporte l'oxygène des poumons par le sang vers toutes les cent quatrillons cellules du corps pouvait rapporter leur quota d'oxygène, si le fluor vient déranger son travail, nous souffrirons de carence d'oxygène.

M. Forget: Permettez que je vous pose une question. Vous citez un texte d'un M. Smith...

M. Bastien: Oui.

M. Forget: Est-ce qu'il s'agit du "Metabolism of Inorganic Fluoride"?

M. Bastien: Non. Smith, c'est "Principle of Biochemistry". C'est un livre de classe à l'université.

M. Forget: Quelle est sa date de publication?

M. Bastien: Pardon, monsieur?

M. Forget: Quelle est sa date de publication?

M. Bastien: Ecoutez! Malheureusement, je n'ai pas apporté ma bibliographie avec moi.

M. Forget: Mais vous savez sans doute, puisque

vous avez fait des études, vousdites, en physiologie, que l'état de la science est en développement continuel. Il y a toujours un certain risque à citer des manuels, puisque les manuels reflètent souvent l'état des connaissances dix ans avant la date de publication ou cinq ans avant la date de publication. Ne serait-il pas beaucoup plus sûr de parler des publications scientifiques qui rapportent non pas l'état des connaissances qui est un peu figé dans les manuels, mais l'état le plus récent des connaissances et, en particulier, de discuter spécifiquement des travaux qui portent spécifiquement, également, sur l'effet du fluor sur l'émail des dents ou sur le développement du squelette, soit chez les animaux, soit chez l'être humain, plutôt que de citer des déclarations qui sont sans doute vraies dans le contexte où elles sont formulées, c'est-à-dire dans le contexte très général d'un manuel qui traite de certains éléments naturels ou de certains composés chimiques, bien sûr, mais non dans un contexte spécifique, et avec une date de publication probable des années soixante. Ceci ne permet pas à l'auteur, en toute justice, de tenir compte des recherches qui se sont effectuées depuis la date de publication et, en particulier, des recherches qui ont démontré, selon les informations que nous avons obtenues hier, lors de la présentation du mémoire par les doyens des facultés de médecine dentaire, par exemple, des recherches du Dr Schatz sur le développement squelettique des rats dans le cas d'une diète absolument libre de fluor et de l'effet assez spectaculaire de l'absence complète de fluor sur le développement du squelette. Cette recherche a été faite en 1971. Relativement, par exemple, à cette recherche, êtes-vous en mesure, sur la base de vos propres travaux ou sur la base de connaissance d'autres travaux que vous avez consultés, de mettre en doute ces résultats?

M. Bastien: Pour répondre à votre question de tout à l'heure, M. le ministre, on a ici Harner, "Précis de biochimie", édition de 1973. Maintenant, probablement, parce que j'ai un certain âge, avez-vous pensé que mes études allaient très loin dans le passé. Cela fait cinq ans que j'ai terminé mes études à l'Université de Montréal. Je me suis recyclé au cas où cela pourrait vous influencer, voyez les cheveux gris sur mes tempes.

M. Forget: Je vous loue dans vos efforts pour vous recycler, mais je vous dis que ce travail n'est jamais terminé. Etant donné qu'il s'agit d'une question controversée, je crois que les plus récents travaux doivent être discutés. S'ils apportent des affirmations contraires aux vôtres, je crois que vous avez le devoir de nous informer soit que vous n'admettez pas la méthodologie scientifique de ces travaux, soit qu'ils contredisent d'autres travaux également valables. Donc, il faut se poser des questions sur l'échantillonnage ou quoi que ce soit.

Mais il reste qu'on ne peut tout simplement pas se borner à une affirmation basée sur un manuel qui ne traite pas spécifiquement de la santé dentaire ou de la fluoration des eaux de consommation, et qui, évidemment, va parler de l'effet toxiq ue du fluor, q ui ne se retrouve pas dans la nature de toute manière à l'état pur, et qu'il n'est pas question comme tel d'administrer aux gens.

Aucune objection à ce que vous débattiez du mérite scientifique des études qui ont été proposées à l'attention de la commission, encore faut-il le faire spécifiquement.

M. Bastien: Quand j'ai nommé tout à l'heure Guyton, c'est un livre que nous avons à l'Université de Montréal, aussi bien en médecine qu'en art dentaire et en biologie. Je croyais que c'était tellement évident que ces choses... Parce qu'il y a des médecins et des dentistes aussi, je ne sais pas, qui peuvent corroborer et confirmer le fait. Je croyais que ces livres étant classiques, étant des livres de classe, que c'était...

M. Forget: Oui, mais nous ne parlons pas de la Bible, n'est-ce pas? Nous parlons de livres scientifiques qui sont datés, donc qui sont susceptibles de devenir désuets lorsque de nouvelles connaissances sont acquises, et qui doivent toujours être faits non pas par rapport à un rappel à l'autorité, mais par rapport à leur valeur intrinsèque.

Or, hier — j'aimerais que vous nous fassiez vos commentaires là-dessus — l'Ordre des dentistes qui, je pense bien, ne peut pas être soupçonné d'avoir des intérêts à encourager la fluoration, et les doyens des facultés de médecine dentaire qui doivent connaître, eux aussi, les livres dont vous parlez et qui doivent aussi les lire, qui doivent aussi s'intéresser à ces questions, je pense nous ont parlé très spécifiquement, non pas de l'effet du fluor en général, dans l'ensemble de la nature, mais très spécifiquement de l'effet sur différents systèmes, y compris, évidemment, le système osseux, les dents, l'émail dentaire. J'aimerais, si vous êtes en mesure de le faire, que vous puissiez nous dire qu'ils se sont trompés, qu'ils ne sont pas à la page, qu'ils ont mal lu ce qu'ils ont cru lire, de manière à faire progresser le débat, puisque, autrement, nous en serons réduits à confronter des affirmations qui, dans le fond, ne portent pas véritablement sur le même point.

M. Bohémier: M. le ministre, pour vous éclairer peut-être sur cette question, vous avez mentionné, je pense, tantôt, un travail qui date de 1971, qui prouverait que, sans fluor, le métabolisme humain ne peut pas s'accomplir...

M. Forget: II ne prouve pas cela, non. M. Bohémier: Non?

M. Forget: On a éliminé — je vous réfère d'ailleurs au mémoire présenté hier — de façon absolument rigoureuse le fluor de la diète de rats. On ne peut pas le faire pour les humains, c'est évidemment un processus assez difficile, comme vous le savez vous-même, que d'éliminer tout le fluor de tous les aliments.

On l'a fait et on a constaté chez ces rats, sur lesquels on faisait l'expérience, une croissance très anormale du squelette.

M. Bohémier: Je vous ferai remarquer, à ce moment-là, que les traducteurs du précis de biochimie de Harper, à savoir le directeur actuel du département de biochimie de la faculté de médecine et de deux autres professeurs de ce département, ne semblent pas être au courant de ces recherches, puisque la publication est datée de 1973, elle provient des presses de l'université Laval, et le travail dont vous me parlez date de 1971.

Or, eux continuent à affirmer que le fluor...

M. Forget: Les traducteurs ne sont pas là pour écrire de nouveau le manuel.

M. Bohémier: Les traducteurs sont des gens qui dirigent le département de biochimie de la faculté de médecine. Peut-être pourraient-ils ajouter, si vraiment Harper était déclassé sur cette question, au moins, une note en marge qui préciserait un peu, je pense, la pensée scientifique actuellement. Alors, ils ne l'ont pas fait.

M. Forget: Oui, mais cela ne prouve rien contre le fluor. Cela prouve peut-être qu'ils auraient pu faire un travail plus complet, mais encore, les traducteurs, normalement, n'écrivent pas de nouveau les livres qu'ils ont à écrire. Cela nous place, vous l'admettrez sans peine, je pense, assez loin d'une contestation scientifique de l'étude en question. C'est sur ce point, je pense, comme sur ces points analogues, que nous aimerions avoir une opinion scientifique; non pas une opinion de circonstance, à savoir: Est-ce que le traducteur a fait son travail consciencieusement? Là n'est pas la question et ce n'est pas sur ce sujet qu'on doit décider — je pense que vous êtes aussi d'accord avec moi sur cela — du mérite de la fluoration. Ce n'est pas sur les qualifications des traducteurs de manuels américains.

Vous faites allusion à des travaux qui ont été faits et publiés par le Dr Schatz, relativement à un taux de mortalité dans une ville du Chili, un taux de mortalité de 233% plus élevé que celui d'une ville témoin du Chili, présumément, également, San Fernando.

Si ces résultats sont exacts, comment pouvez-vous expliquer que les études semblables faites au Canada et aux Etats-Unis depuis 30 ans n'ont pas fait ressortir un taux de morbidité ou de mortalité dans les villes où l'eau était fluorée?

M. Bohémier: Bon. Je vous ferai remarquer d'abord...

M. Forget: Avez-vous eu connaissance vous-même d'études qui auraient pour résultat de prouver le contraire?

M. Bohémier: J'ai devant moi la monographie de ce rapport. Je ferai d'abord remarquer qu'il date du 4 décembre 1973, ce qui est relativement récent; ce n'est pas une recherche qui remonte à 30 ans en arrière. Si ces gens-là n'en ont pas fait mention, ce n'est pas ma faute; cela a été publié dans les journaux, au département de Pediatric Dentistry de l'Université de Buenos Aires. Cela fait partie de la documentation scientifique disponible à tous les chercheurs. C'est compilé dans...

M. Forget: Ce sont toujours les travaux du docteur Schatz?

M. Bohémier: Oui, parce que vous me parlez de celui-là, celui qui soulève la question des 233%...

M. Forget: Oui. Je ne nie pas que ce travail existe.

M. Bohémier: Ah bon!

M. Forget: Comment expliquez-vous que des études analogues, comparatives, de villes où l'eau est fluorée et de villes où l'eau n'est pas fluorée, qui se sont faites à des centaines d'exemplaires, pendant une période de presque trente ans, puisqu'il y aura trente ans cette année que la fluoration a été introduite dans certaines villes du continent nord-américain, comment se fait-il que toutes ces études — j'en ai vu plusieurs moi-même — ne montrent aucune différence, pour ce qui est des taux de morbidité ou de mortalité?

M. Bohémier: Peut-être que M. Bastien pourrait vous répondre sur la validité des statistiques qu'on soulève à ce niveau.

M. Bastien: Jusqu'à maintenant, les scientifiques n'ont pas pu prouver que le fluor était bénéfique aux dents des enfants. Ils disent déjà que ce n'est pas pour les adultes, mais pour les enfants. Ils se servent de statistiques. Les statistiques sont une bonne chose en soi pourvu que l'on respecte les règles du jeu. Les "fluorationnistes" ne respectent pas les règles du jeu. Donc, leurs statistiques perdent toute signification.

En effet, s'il n'y avait, pour protéger les dents de la carie, qu'un seul facteur impliqué, soit le fluor, leurs statistiques seraient valables. Malheureusement, pour les "fluorationnistes", les facteurs impliqués dans la prévention à la carie dentaire sont tellement nombreux qu'un statisticien qui ne considère que le fluor perd son temps et celui de tout le monde.

En effet, pour qu'une dent soit saine, donc résistante aux acides et aux enzimes bactériennes, il faut, d'après tous les bons auteurs étudiés en physiologie médicale, premièrement, des matériaux de construction fournis à l'organisme en quantité suffisante à un rythme satisfaisant, entre autres, le calcium, les phosphates, etc. C'est avec cela que se formera l'hydroxy-apatite qui est l'élément par excellence de l'émail et qui fait que l'émail est résistant. Tous ces matériaux sont fournis par de bons aliments. Mais le calcium est aussi utilisé dans des processus vitaux. Le sang à lui seul requiert six centigrammes de calcium par litre de sang et ce, de façon constante. En cas de déficience de calcium sanguin, le sang ira chercher le calcium dans les os et dans les dents, appauvrissant ainsi ces derniers dans leur structure, mais sauvant l'organisme de la destruction.

Ces matériaux de construction, le calcium et les tres, ne peuvent se structurer ni s'entretenir par eux-mêmes. Ce sont les enzymes phosphatases qui font l'association des molécules entre elles et structurent ainsi les tissus, l'émail, la dentine, le cément, l'os, etc.

Pour se structurer les enzymes ont besoin de magnésium; pas de magnésium, pas d'enzyme, pas d'enzyme, pas d'émail sain. Une déficience alimentaire en magnésium est cause de déficiences enzymatiques. Incidemment, la chlorophylle de feuillages verts, laitue, etc. regorge de magnésium. Quand on pense que le fluor enlève aux enzymes leur magnésium, on l'a déjà prouvé précédemment. Ce sont des cellules qui sécrètent toutes les substances en-zymatiques et plastiques nécessaires à la bonne structuration des os et des dents.

On pourrait continuer longtemps, mais un autre facteur essentiel aussi à la bonne structuration des dents, c'est la vitamine C qui est nécessaire à la formation du collagène, un matériau essentiel à la structuration des dents.

M. Forget: Excusez-moi, je ne veux pas vous interrompre, mais est-ce qu'on n'est pas un peu loin de la question que je vous ai posée? Je vous ai demandé comment il se fait... Vous m'avez dit, si je comprends bien, que les statistiques qu'on alléguait pour démontrer les effets positifs du fluor pour enrayer la carie dentaire ne vous impressionnent pas. Cependant, je crois que vous avez beaucoup fait état du taux de mortalité de 233% dans deux villes du Chili. Le Chili, c'est assez loin.

Je veux bien croire que c'est peut-être un taux de mortalité élevé. Vous dites qu'on ne peut pas en connaître les causes de prévention de la carie dentaire. Cependant, vous êtes assez formel pour dire que vous connaissez les causes du taux de mortalité plus élevé dans une ville du Chili. J'aimerais essayer de comprendre la logique de votre argumentation. Est-ce que vous croyez au moins un peu aux statistiques ou pas du tout?

M. Bohémier: M. le ministre, avant de permettre à mon confrère de terminer, c'est moi qui ai mentionné le travail du Dr Schatz. Si vous le lisez, vous allez voir qu'il tient compte des facteurs qui, justement, sont impliqués dans la carie dentaire et que son travail est beaucoup plus fouillé que le simple fait d'énoncer le chiffre de 233%. Ceci dit, je vais permettre à M. Bastien de terminer.

M. Forget: Toujours sur ce point, je veux bien croire qu'il est plus fouillé, mais, dans votre affirmation, ce n'est pas très fouillé.

Vous dites essentiellement qu'il y a une relation de cause à effet, ou vous laissez soupçonner qu'il y a une relation de cause à effet, entre le taux de mortalité plus élevé dans une ville et la f luoration de l'eau. Ce point-là a une importance capitale. Si, effectivement, la fluoration de l'eau dans une ville a fait doubler ou plus que doubler le taux de mortalité, je crois que vous avez le devoir de nous instruire et de nous dire si c'est bien le seul facteur causal, ou peut-être que vous me dites, par vos remarques, qu'il y a un tas d'autres facteurs qui sont également mentionnés dans cette étude et qui sont peut-être responsables, eux, de la différence dans les taux de mortalité.

M. Bohémier: II y a d'autres facteurs qui sont impliqués. Il y a des facteurs qui justifient la mortalité infantile par une malformation congénitale qui sont étudiés par le professeur Schatz et cela lui a permis, en les étudiant, de dire que ce n'étaient pas eux qui étaient en cause.

M. Forget: Donc, c'est la fluoration qui tue les gens au Chili?

M. Bohémier: On suppose que c'est la fluoration. Maintenant, le docteur Schatz...

M. Forget: Vous le supposez ou vous l'affirmez?

M. Bohémier: Un instant. Le docteur Schatz suppose que c'est la fluoration. Il dit bien que d'autres travaux pourront venir confirmer ou infirmer sa thèse. Il se place vraiment sur un terrain scientifique. Il faudrait le lire, écoutez.

M. Forget: Sur les autres travaux, ses travaux infirment des travaux précédents, et en très grand nombre. Ma question, je la reformule; si je n'ai pas été clair, je m'en excuse. S'il a pu déceler un cas, une ville où la fluoration fait doubler le taux de mortalité, comment se fait-il que des études qui ont porté sur le même phénomène au Canada et aux Etats-Unis, là où on sait que les statistiques de santé sont peut-être un peu plus fiables — sans discrimination envers les pays sud-américains — qu'au Chili, ne sont pas apparues à tous les chercheurs? Ou est-ce que vous appliquez à tous les chercheurs la même épithète assez dédaigneuse que vous appliquez à un tas d'autres personnes, apparemment, à la page 7 de votre mémoire, où vous dites que seuls les gens ignorants et irresponsables peuvent proposer qu'on ajoute du fluor? Je vous comprends de le dire si, vraiment, cela double le taux de mortalité, mais il y a un point spécifique sur lequel il faudrait s'entendre.

M. Bohémier: L'objection que vous soulevez est particulièrement valable. D'ailleurs, le professeur Schatz y a lui-même répondu, dans son travail. Il a dit ceci: Dans les pays où la sous-nutrition existe, il est tout à fait normal que les dangers inhérents au fluor soient accentués parce que des éléments manquent à ces enfants-là. Ils ont plus de chance que les dangers du fluor les atteignent directement. Il s'exprime bien là-dessus. Il dit très bien que si on reprenait la même étude aux Etats-Unis, on n'arriverait pas sensiblement au même taux aussi élevé. C'est expliqué.

M. Forget: Cela ne vous inquiète pas, une affirmation comme celle-là?

M. Bohémier: Cela ne m'inquiète pas. Cela prouve une chose, c'est que si on veut voir si le fluor

est vraiment nocif, comme le dit le professeur Schatz, il faut vraiment qu'on l'utilise, qu'on l'applique là où il y a le plus de chance que ces dangers apparaissent. C'est sur des populations sous-nourries, effectivement, que cela peut apparaître.

Si cela apparaît sur ces populations, cela prouve évidemment que le fluor est nocif. S'il était un nutriment, un élément absolument essentiel, non seulement il ne ferait pas apparaître chez les sous-nourris ces phénomènes-là, mais il améliorerait la santé de ces gens-là.

Ce sont ces villes témoins ou ces groupes d'individus témoins, sous-nourris, qui sont les meilleurs sujets sur lesquels on peut expérimenter. Cela aussi, le professeur Schatz le souligne dans son travail.

M. Forget: Dans une oertaine mesure, donc, c'est une étude qui n'a pas une signification particulière pour le Québec, parce que je pense bien qu'on peut reconnaître, malgré tous nos malheurs, que nous ne sommes pas une population sous-alimentée.

M. Bohémier: Mais l'enquête Nutrition Canada n'a pas montré qu'on était particulièrement bien nourri non plus.

M. Forget: Les témoignages que nous avons entendus hier, j'aimerais que vous les commentiez. Nous avons entendu plusieurs explications sur les mécanismes qui font que l'organisme, le métabolisme humain assure un certain équilibre dans le sang, vu le fluor qui est ingéré, premièrement, en éliminant par l'urine, dans les déchets, une proportion élevée du fluor absorbé et, deuxièmement — c'estd'ailleurscequi fait son avantage pour les fins de la prévention — en emmagasinant dans le système osseux et dans les dents l'ion-fluor qui est absorbé par l'organisme, donc, en maintenant dans le flux sanguin une proportion assez constante de fluor.

Par ailleurs, on nous a montré également que le fluor qui est consommé sous des formes autres que dans l'eau n'est pas sous une forme qui est facile à assimiler pour l'organisme et que ce fluor est éliminé très largement dans les déchets. Donc, nous avons de deux façons des espèces de garanties ou des espèces de mécanismes régulateurs qui font qu'une ingestion normale, dans une marge de sécurité assez large d'ailleurs, est elle-même, en quelque sorte, contrebalancée par le métabolisme. A ce moment, des dangers réels vous paraissent-ils demeurer, puisque vous faites certaines affirmations qui me laissent un peu songeur, étant donné ce que nous avons entendu hier?

Vous parlez, par exemple, de la dose requise de fluor. Or, hier, on nous a clairement démontré qu'il n'était pas question d'une dose requise de fluor. Il est surtout question d'une dose minimale de fluor. La dose minimale de fluor peut être dépassée sans danger. Evidemment, on peut se situer à un niveau inférieur également sans danger, pourvu — ce qui est impossible effectivement — qu'il n'y ait pas une absence totale de fluor. Donc, il n'est pas question d'unedose requise. Il n'y a rien de critique, selon les témoignages entendus hier, dans le dosage du fluor, mais il est requis en quantité minimale pour avoir un effet préventif. Etant donné cette situation, je m'explique mal les références nombreuses que vous faites à une dose requise.

M. Bohémier: Ecoutez! Quant à la dose requise, avant que je permette à M. Bastien de répondre à la première partie de votre question, Harper souligne qu'entre 0.6 et 1.2 ppm, la fluorose dentaire peut apparaître chez moins de 2% de la population.

M. Forget: La fluorose dentaire, on nous a également dit qu'elle avait des inconvénients esthétiques. On nous a cependant affirmé que la fluorose dentaire n'a aucun autre inconvénient qu'esthétique, que les dents affectées par cette tacheture même conservent toute leur qualité au point de vue de la prévention de la carie dentaire, encore accrue dans une certaine mesure, et qu'il faut dépasser de plusieurs fois les niveaux nécessaires pour faire apparaître la fluorose avant que des problèmes de santé n'apparaissent. Etes-vous d'accord avec cela?

M. Bohémier: Non, nous ne sommes pas d'accord avec cela. Nous croyons que la fluorose dentaire est une désintégration de la dent. D'ailleurs, M. Bastien, je pense, est en mesure de vous expliquer pourquoi.

M. Bastien: J'aurais tant aimé, M. le ministre, finir mon point de tout à l'heure. Si vous me le permettiez, cela prendrait 30 secondes.

Le Président (M. Pilote): Allez!

M. Bastien: Je veux seulement souligner que structurer une dent, ce n'est pas une question de fluor. C'est une question d'aliments sains, de calcium, vitamine A, vitamine C, vitamine D et glandes parathyroïdes, qui exercent le contrôle du calcium dans la voie sanguine. Un dernier facteur est la mastication. On reviendra là-dessus.

Etant donné qu'il y a tellement de facteurs qui sont responsables d'une bonne structuration dentaire, je rejette d'une façon scientifique, si vous me permettez le terme, toute statistiq ue. On ne peut pas se baser sur les statistiques parce qu'on ne considère qu'un facteur, le fluor, alors qu'il y en a peut-être une centaine.

Si vous prenez tous les facteurs et faites des statistiques, je serai d'accord. Cela, c'est pour la première partie de tout à l'heure.

Pour ce qui est de la deuxième partie, il est vrai que le fluor s'en vient au niveau de la dentine et de l'émail. C'est vrai que le fluoro-apatite est dur. C'est vrai que c'est résistant. Mais je crois qu'on s'est fourvoyé en croyant que c'était là un produit de synthèse normal et sain. En réalité, le fluoro-apatite sur l'émail décolle, défait, désintègre l'hydroxyapatite, qui est le véritable agent de résistance de l'émail. Je crois qu'il n'y a pas un médecin ici qui peut rejeter ce fait; c'est même pris dans mes notes de médecine physiologique. Mais l'hydroxy-apatite est dur dans l'émail, pour un émail sain, chez un

enfant sain au point de vue de la santé, mais le fluor, avant de désintégrer l'émail avec son fluoro-apatite et causer des taches jaunes, blanches et noires, a auparavant, au préalable, défait la dentine et défait l'ivoire en prenant le calcium, parce qu'il y a beaucoup de phosphate de calcium là-dedans. Il a défait le calcium et amoindri la base même de l'émail, parce que l'émail repose quand même sur le reste de la dent, et c'est une base. Le fluordéfait, désintègre la base de la dent et l'émail, par conséquent, deviendra... voilà.

M. Forget: Voulez-vous m'indiquer quel est l'élément qui est substitué par le fluor dans l'émail des dents?

M. Bastien: L'émail des dents est l'élément le plus dur dans le corps, c'est le tissu le plus dur qui soit, minéralisé à 97%. Vous avez des phosphates de calcium, des phosphates de potassium en quantité variée et vous avez aussi des enzymes, parce que toutes ces molécules, que ce soit du fluorure ou autre chose, sont agencées par des enzymes, qui sont les ouvriers qui structurent la dent, surtout du calcium et du potassium, des phosphates.

M. Forget: Mais ma question était: Quel élément est remplacé, dans la dent, par le fluor?

M. Bastien: Le fluoro-apatite remplace l'hydroxy-apatite, qui est un composé normal et sain de la dent. Quand on a une dent qui dure jusqu'à l'âge de 100 ans, c'est que son hydroxy-apatite est bon et solide. Tandis que le fluoro-apatite, le pauvre petit gars n'ira pas très loin avec son fluoro-apatite, même si, apparemment c'est dur. Je vous ferai remarquer que le fluor n'est pas absorbé par l'émail, il est adsorbé, c'est différent. L'émail va aussi adso -ber le strontium mais tout le monde sait que c'est un produit radioactif très nocif mais c'est un moyen d'autodéfense. Ce n'est pas une constitution normale, c'est un moyen d'autodéfense. C'est là qu'on confond, il y a confusion.

M. Forget: Je pense que vous avez clarifié un point, j'avais cru comprendre que vous affirmiez que le fluor remplaçait le calcium. Il n'en est pas question.

M. Bastien: Non, il fait un complexe avec le calcium. Parce qu'il a beaucoup d'affinités avec le calcium, le magnésium et le potassium.

M. Forget: Est-ce que je pourrais vous demander, à la suite de cet exposé fort savant, si malgré tout vous mettez en doute les propriétés du métabolisme d'établir un équilibre dans l'organisme et de tolérer des variations quand même assez sensibles de part et d'autre du taux proposé dans le projet de loi de fluoration dans les eaux de consommation?

M. Bastien: Si on fait l'analyse du sang, un sang sain et normal, il y a beaucoup de déchets dedans, parce qu'on sait que le sang apporte non seulement l'aliment à la cellule mais en rapporte aussi les dé- chets, dont le CO2, etc. Parmi ces déchets, tout le monde sait qu'il y a de l'urée, de l'acide urique, parfois, du plomb. Personne ne va dire que le plomb est bon pour la santé mais il en existe dans le sang et ce plomb est éliminé par les reins. Il y a une espèce de constante qui permet aux reins d'éliminer facilement les déchets du sang et parmi ces déchets, d u moins ce que l'on considère comme déchet, c'est le fluor qui sera dans le sang une quantité maximale de 1 ppm. Le plomb sera là à 0.5 ppm. Il semble que, plus le déchet est toxique, moins le sang en prendra une grande quantité. En d'autres termes, plus c'est toxique, plus la quantité que le sang transportera sera petite. C'est le cas pour le plomb à 0.5 ppm et le fluor à 1 ppm. Cela ne veut pas dire que c'est un produit normal mais c'est un produit de déchet et le sang l'apporte aux reins pour le faire excréter.

Même là où l'eau n'est pas fluorée, nous avons déjà dans le sang pour excrétion des quantités de 0.5 ppm de fluor qui viennent de l'alimentation. Si vous ajoutez tout de suite 1 ppm dans votre fluoration, ça va faire 1.5 grosso modo et tout le monde, même les fluorationnistes, ad net qu'au-dessus de 1 ppm le fluor est nocif à la santé et au métabolisme.

M. Forget: J'aimerais que vous laissiez aux gens qui sont en faveur de la mesure le soin de défendre leur propre cause. Il reste que vous n'avez toujours pas répondu à ma question. Bien sûr qu'il y a élimination d'excès de fluor par la voie rénale. Encore une fois, je repose ma question, est-ce que vous niez la capacité de l'organisme à s'ajuster en quelque sorte à des variations dans l'absortion de fluor de manière à s'assurer que le taux qui demeure dans le sang soit acceptable pour l'organisme par le double mécanisme de l'élimination rénale et de l'adsor-ption par le squelette.

M. Bastien: Mais, au départ, vous acceptez comme préacquis que le fluor est bon pour l'organisme mais moi je le rejette. Je dis que c'est un produit de déchet. Maintenant, tous les organismes des vivants, quels qu'ils soient, sont capables d'excréter ce qui n'est pas bon, de choisir ce qui est bon, parce que je crois foncièrement à la perméabilité sélective de la cellule intestinale qui choisit ce qui est bon et rejette ce qui n'est pas bon. Mais, malheureusement, c'est là que les statistiques ne sont pas très bonnes, c'est que, dans l'intestin grêle, lorsque les cellules intestinales absorbent ce qu'il y a dans le chyle, elles absorbent ce qui est bon et rejettent ce qui n'est pas bon pour autant qu'elles soient saines. Mais si elles sont droguées, par n'importe quelle drogue, les médicaments, l'alcool, la nicotine, la caféine, etc., la cellule intestinale, tout comme un homme drogué ou un homme ivre, ne pourra pas remplir ses fonctions spécifiques, à savoir choisir d'une façon consciencieuse ce qu'il faut, ce qui est bon et ce qui n'est pas bon. Mais elle a des moyens de défense partout dans le corps, tout le monde sait cela et il y a une première barrière, si la cellule est droguée, ça entrera dans le sang, mais il y a d'autres lignes de défense, comme le foie; ensuite, tout le monde connaît la question des globules blancs qui sont là pour épurer, combattre, mais le sang, c'est

définitif, ne prendra pas plus que 1 ppm pour transporter cela aux reins, le reste sera assimilé quelque part, et c'est là qu'on souffrira de fluorose dentaire ou autre, parce que la fluorose ne se limite pas seulement aux dents. Il y a fluorose quand ça dépasse une certaine limite, quand ça dépasse la limite de résistance de l'organisme, du système.

M. Forget: J'ai l'impression que vous sautez des étapes, si le sang ne peut pas absorber plus qu'un certain maximum, il ne peut pas y avoir d'empoisonnement par cette voie, il le rejette automatiquement par la voie rénale, et je ne peux que noter, après avoir posé la question trois fois, que vous n'avez pas vraiment répondu, du moins à ma satisfaction, à la question que je vous ai posée là-dessus. Mais je vais poser une autre question, si vous permettez. Vous avez fait beaucoup état, dans votre mémoire, de la différence dans la toxicité et la solvabilité dans l'eau de différents fluorures. Vous avez cru vous opposer à ceux qui recommandent la fluoration en soulignant l'importance de ces différences. Si j'ai bien compris, aux exposés que nous avons eus hier, personne n'a nié qu'il y avait des différences dans les différents sels de fluor, et effectivement des différences existent au niveau de la solubilité dans l'eau et de la toxicité sans aucun doute. Ce qu'on a cependant affirmé, c'est que les ions fluors, une fois absorbés par un moyen ou par un autre et avec les concentrations ou la dilution nécessaire étant donné le médium ou le véhicule utilisé, que tous ces ions fluors étaient indifféren-ciables les uns des autres et qu'ils avaient les effets qu'on leur attribue sur la dentition. C'est véritablement ce point qui est important.

Est-ce que vous affirmez, indépendamment de ce que vous pouvez dire sur la solvabilité ou la solubilité dans l'eau et la toxicité de certains fluorures dans une concentration que vous ne mentionnez d'ailleurs pas, qu'une fois que c'est absorbé par l'organisme, une fois que c'est dissous dans l'eau, de toute façon, on ne peut différencier une source naturelle, une source artificielle et que tous ces ions fluors auront l'effet décrit sur l'émail des dents?

M. Bastien: Je pense avoir dit, M. le ministre, que l'ion fluor, quel qu'il soit, qu'on le trouve dans n'importe quel sel de fluor, demeurait toujours l'ion fluor. Ce que j'ai dit, ce n'est pas l'ion fluor que l'on avale lorsqu'on boit de l'eau fluorée, c'est un fluorure dissous dans l'eau. Or, les fluorures n'ont pas tous la même toxicité. Si on me donnait l'ion fluor, il n'y aurait pas de problème. Malheureusement, on me donne les fluorures qui eux, ne sont pas tous aussi toxiques les uns que les autres, Les fluorures naturels sont beaucoup moins toxiques que les fluorures artificiels parce que, justement, ils sont moins solubles dans l'eau et leur degré de dissociation de l'ion fluor est beaucoup moins grand. Donc, le criminel que constitue l'ion fluor est emprisonné dans les fluorures qu'on pourrait appeler naturels, ceux qu'on trouve dans la nature, alors que, dans les fluorures artificiels, il est en liberté. C'est là que vient le danger des fluorures.

Est-ce que je me fais bien comprendre sur cette question?

M. Forget: Vous vous faites bien comprendre, mais j'aimerais attirer votre attention sur le fait qu'hier on a mentionné l'émotivité dont s'entoure ce débat.

Ne croyez-vous pas qu'il serait plus susceptible d'éclairer vraiment l'opinion en n'employant pas des expressions comme "le criminel en prison" et "le criminel en liberté"? N'est-ce pas un peu colorer votre argumentation de manière à influencer les gens par les mots que vous utilisez plutôt que par les arguments que vous avez?

M. Bohémier: Si cela donne cette impression, ce n'est certainement pas mon intention. C'est une image que j'ai utilisée parce que je comprends que des considérations aussi techniques puissent être difficiles, parfois, à saisir pour des gens qui en entendent parler peut-être pour la première fois.

M. Forget: Faites-nous confiance, on peut vous suivre. On va essayer de vous suivre.

M. Bohémier: Je veux bien vous faire confiance, personnellement.

M. Bédard (Chicoutimi): M. le Président, je crois que le ministre des Affaires sociales n'a pas à faire de procès d'intention. Il ne faudrait pas aller jusqu'à faire des procès d'intention à ceux qui comparaissent devant la commission.

M. Forget: M. le Président, je n'en ferais pas si je ne trouvais pas, un peu partout dans ce texte, des accusations qui en font, des procès d'intention. On parle des gens qui sont irresponsables et ignorants. C'est, je crois, le seul mémoire soumis à cette commission qui emploie de pareilles épithètes. Je crois que c'est malheureux.

M. Bédard (Chicoutimi): Laissez les gens le juger.

M. Forget: Je pense que la modestie, dans le choix des mots, pourrait servir davantage la cause du Front commun contre la fluoration.

M. Bohémier: L'optique est différente, M. le ministre. Si vous étiez convaincu, comme nous le sommes, que le fluor dans l'organisme, quelle que soit sa provenance, n'est pas un nutriment — là-dessus, je me suis basé sur des manuels, sur des auteurs qui, quand même, font autorité — je pense que vous auriez une conception différente. Nous pensons que le fluor n'est pas un nutriment et moins on en a, mieux on s'en trouve. A partir de là, cela explique peut-être pourquoi on utilise à l'occasion, pour qualifier le fluor, des termes qui l'associent à un intrus ou à une substance qui n'est pas désirable. A partir de là, cela peut justifier une certaine terminologie.

M. Forget: Je respecte vos opinions.

M. Bohémier: D'accord.

M. Forget: Je vous signale, pour vous donner

quand même l'occasion de me détromper si je fais erreur, que sur la question du fluor comme nutriment vous n'avez pas nié la validité de l'étude de 1971, que je vous ai citée, autrement que dans des termes généraux qui ne sont pas de nature à ébranler les conclusions de cette étude. Lorsque je vous ai posé la question à savoir si la fluorose dentaire était une maladie sérieuse, à part ses inconvénients esthétiques, étant donné les marges possibles de variations alentour du taux de 1.2%, je n'ai pas, non plus, eu d'indication positive et spécifique de votre part.

M. Bohémier: Je peux ajouter, M. le ministre, que ceux qui soutiennent que le fluor est un nutriment s'appuient sur le fait que le "Food and Drug " américain l'a classifié dans cette catégorie d'aliment. Or, les "Food and Drug", si vous me permettez la remarque, je pense que l'on peut parfois un peu douter de leur valeur. Je vous ferai remarquer, en passant, que le "Food and Drug " canadien a permis que soit mis sur le marché la thalidomide. Vous savez quels ont été les ravages causés par ce médicament. Or, il l'avait permis.

M. Forget: J'aimerais vous poser une question sur une recommandation qui est contenue à la page 3 de votre mémoire. C'est une recommandation, évidemment, un peu hypothétique de votre part. Vous dites: S'il était vraiment nécessaire de procéder à la fluoration, nous vous suggérons un système de distribution de comprimés de fluor. Quelles sont vos conclusions, à la suite de l'expérience qu'a tentée, par exemple, la Saskatchewan à cet égard, où il s'est avéré impossible de distribuer efficacement le fluor? N'est-il pas plus dangereux de le faire sous cette forme, dans une certaine mesure, si vous croyez vraiment qu'il s'agit d'un poison, puisqu'à ce moment-là sa dilution ou son taux de consommation est encore moins contrôlable?

M. Bohémier: Vous avez raison mais nous sommes essentiellement des démocrates. J'ai bien dit que les gens qui voulaient des fluorures, nous ne serions jamais parmi les organismes qui s'opposeraient à ce qu'ils en aient. Si le gouvernement voulait voter une loi bannissant toute espèce de fluoration, y compris la fluoration volontaire, nous serions parmi les premiers à nous y opposer parce que nous croyons essentiellement aux libertés individuelles fondamentales. Ce n'est pas au gouvernement de décider ce qu'on doit prendre et ce qu'on ne doit pas prendre. C'est sur cet argument q ue je me base pour expliquer le contenu de ce paragraphe.

Je n'ai pas d'autres questions, M. le Président.

Le Président (M. Pilote): L'honorable député de Chicoutimi.

M. Bédard (Chicoutimi): M. le Président, comme il fallait s'y attendre, nous avons profité, si je peux employer l'expression, d'une longue conversation entre le ministre des Affaires sociales et notre invité. Je tiens quand même à vous féliciter, indépendamment des différends que l'on peut avoir sur les effets bénéfiques du fluor, sur votre exposé. Je crois qu'on peut, comme l'a fait le ministre des Affaires sociales, difficilement mettre en doute votre bonne foi. Vous ne vous êtes pas présentés comme des scientifiques. D'ailleurs, même des gens qui sont dans la profession, comme l'Ordre des médecins, hier, qui est venu devant la commission, ont avoué qu'ils n'avaient pas fait d'étude particulière mais qu'ils se référaient à des scientifiques en lesquels ils avaient confiance, ce qui les amenait à exprimer leurs convictions devant la commission.

Egalement, votre conviction, votre bonne foi viennent de la crédibilité que vous accordez — c'est votre droit — à des ouvrages que vous avez cités, à des auteurs quand même sérieux que vous avez cités, ce qui vous amène à soutenir et à exprimer les inquiétudes que vous avez exprimées tout à l'heure devant la commission. De votre passage à la commission, je crois qu'il ressort — puisqu'il y aura une sensibilisation de la population à faire, à moins qu'on l'impose sans coupférir — au moins un point, la nécessité qu'aurait cette commission de faire venir, de faire comparaître des scientifiques — et de s'assurer qu'ils viendront — qui pourraient être contre la fluoration, de manière à informer équita-blement cette commission. A ce que je sache, il n'y a pas tellement de scientifiques ou d'experts scientifiques au sein de la commission; il faut se prendre pour ce qu'on est.

Comme l'information vient, à mon sens, si elle veut être objective, de la possibilité des parties opposées de pouvoir s'exprimer, je pense que cela fait ressortir la nécessité pour le ministère et la commission de faire venir ces experts qui ne partagent pas les vues exprimées par les "profluor ". Je pense que cela permettrait d'informer correctement la commission; cela permettrait aussi de commencer une certaine information objective au niveau de la population. Votre conviction, comme je l'ai dit, vient de ces ouvrages que vous nous avez cités, de ces experts que, j'avoue très sincèrement ne pas connaître plus qu'il ne faut. Il reste que, comme n'importe qui, que ce soit en faveur du fluor, ceux qui citent des experts qui sont pour la fluoration ou contre la fluoration, quand on cite des ouvrages ou des auteurs, il y a toujours le danger de ne pas faire les nuances que pourraient peut-être faire ces experts s'ils étaient entendus devant la commission. Tout cela se fait de bonne foi.

Si on pouvait, d u point de vue scientifique, avoir la possibilité d'entendre des experts comme Schatz — vous en avez cité quelques-uns — peut-être que ces derniers pourraient faire des nuances qu'on ne fait pas. Ce serait à l'avantage, je crois, de l'information non seulement de la commission mais aussi de l'ensemble de la population.

Vous êtes un mouvement, tel que vous l'avez explicité tout à l'heure, qui est actif, il semble, et qui. je crois — puisque la loi no 88 est déposée — semble vouloir travailler à une information de la population dans le sens des idées que vous venez d'émettre, n'est-ce pas, pour essayer de faire partager à la population les doutes que vous venez de nous ex-prfmer ici en commission.

Dans ce sens, l'Ordre des dentistes, de même

que, j'en suis convaincu, toutes les autres corporations professionnelles sérieuses vont nous dire, nous ont dit déjà, pour celles qui ont été entendues, qu'ils avaient fait des efforts de sensibilisation au niveau de la population dans le sens de leurs idées, à savoir la nécessité de la fluoration, mais que leurs efforts s'avéraient extrêmement difficiles, que cette information s'avérait extrêmement difficile. Leur pessimisme était tel que cela les amenait presque, pour certains, d'une façon très claire, à être d'accord sur le principe du projet de loi, qui est d'imposer la fluoration, parce qu'ils se disent: On a travaillé très fort pour informer la population et on en arrive à la conclusion qu'on n'est pas capable, c'est-à-dire qu'on doute de la capacité de cette population de comprendre notre message et d'accepter.

Je pense que cela va être important; dans les deux prochains mois on va parler de fluoration de plus en plus. Dans les efforts que vous faites, même si on ne partage pas les mêmes idées sur les effets du fluor, les mêmes doutes, est-ce que au même titre que l'Ordre des dentistes, qui a été entendu hier, vous obtenez d'aussi piètres résultats que ceux qui nous ont été exprimés hier par des groupes...

Le Président (M. Pilote): A l'ordre, s'il vous plaît! On va permettre aux représentants de réfléchir sur la réponse. Le ministre est pris à un dîner, à une rencontre très importante à midi trente et on suspendrait les travaux jusqu'à deux heures trente. Alors la commission ajourne ses travaux à deux heures trente. Préparez votre réponse.

(Suspension de la séance à 12 h 28)

Reprise de la séance à 14 h 45

M. Pilote (président de la commission permanente des affaires sociales): A l'ordre, messieurs!

Je crois que le député de Chicoutimi avait posé des questions aux représentants du groupement qu'on entend actuellement. Je céderai la parole au député de Rouyn-Noranda en attendant que le député de Chicoutimi soit ici. Il aura, lui aussi, des questions à poser.

M. Samson: D'accord, M. le Président, peut-être à la condition cependant qu'on s'entende, au cas où j'aurais terminé mes questions avant que le député de Chicoutimi arrive, pour qu'on lui donne une chance.

Le Président (M. Pilote): On va vous laisser le temps, je pense, de poser toutes vos questions.

M. Samson: Je n'ai pas parlé seulement pour moi, mais pour le député de Chicoutimi. Au cas où j'aurais fini avant qu'il arrive qu'on lui donne une chance de poser ses questions.

Le Président (M. Pilote): Oui, d'accord.

M. Samson: Vous êtes d'accord?

Le Président (M. Pilote): Je suis bien d'accord.

M. Samson: M. le Président, d'abord, je dois m'excuser. J'ai manqué un bout, ce matin, de la présentation du Dr Bohémien Cependant, j'avais déjà la présentation du mémoire. Elle m'avait suggéré certaines questions. Je réalise la présence, dans la délégation du Front commun contre la fluoration, de M. Racine, qui est maire de la ville de Tracy et qui est également membre du comité du Front commun contre la fluoration. Cela m'incite à poser une question, parce que j'ai pris connaissance d'une résolution qui a été publiée par la ville de Tracy et que j'ai en main. J'ai également une liste de villes qui ont appuyé cette résolution, ce qui veut dire que cela intéresse énormément de gouvernements municipaux. Je voudrais demander à M. Racine s'il lui serait possible, étant donné qu'il fait partie de la délégation contre la fluoration, de nous expliciter les raisons qui l'ont amené à faire partie de ce groupe et, également de nous dire quels sont les points de vue, puisqu'il est maire d'une ville importante quand même, des officiers municipaux quant à la fluoration. Est-ce qu'il serait permis à M. Racine de répondre à mes questions?

M. Racine (Aurèle): D'accord. M. le Président, M. le ministre, MM. les membres de la commission, je dois d'abord me présenter. Je suis le maire de la ville de Tracy, mais mon occupation, mon gagne-pain est le dessin industriel, je suis "designer" comme on dit. Il n'y a pas de terme français pour cela.

Pour moi, la question de la fluoration des eaux n'est pas une question politique, mais une question médicale. Comment ai-je été amené à me prononcer

contre la fluoration? J'ai d'abord été élu comme conseiller dans le domaine municipal. J'ai ensuite été nommé par les autorités de ma ville commissaire à la Commission de l'aqueduc de Saint-Joseph-de-Sorel et Tracy. Evidemment, comme il y était question de traitement des eaux et de fluor—je voulais me faire une opinion, parce que nous avions à prendre une décision — j'ai eu d'abord à rencontrer le maire Jean Drapeau dont les vues sont très connues sur le sujet.

J'ai eu avec lui une discussion d'à peu près une heure lors d'un congrès de l'Union des municipalités. Evidemment, je n'avais vu qu'un côté de la médaille. Comme j'avais la documentation favorable, signée entre autres par le dentiste Jean Lambert, nous avons — les deux conseils de ville, parce que l'usine de filtration de Tracy dessert aussi Saint-Joseph-de-Sorel — invité le dentiste Lambert à venir nous rencontrer et à fournir des explications.

J'avais eu le temps d'avoir la documentation contre la fluoration des eaux, toujours du côté médical. Après une discussion — au début, j'étais le seul, parce que j'étais commissaire à la Commission de l'aqueduc — d'à peu près deux heures, en présence des deux conseils municipaux de Tracy et de Saint-Joseph-de-Sorel, la décision des deux conseils municipaux fut de rejeter la fluoration des eaux.

Je voudrais tout de suite, M. le ministre, souligner une chose que vous avez mentionnée ce matin. Pour moi, j'ai dit que ce n'était pas une question politique, Ce n'est pas une question pécuniaire non plus, parce que nous n'avons pas de chiffres sur ce que coûteraient l'installation, l'entretien pour l'avenir, le personnel qualifié pouvant manipuler ce poison qui, en définitive, est un peu comme d'autres médicaments qui sont poisons. Du côté pécuniaire, cela peut peut-être s'évaluer.

Je n'ai pas de chiffre à donner, mais du côté pécuniaire, cela implique de l'argent des deux côtés, d'autant plus que l'achat et la provenance du fluor ne me préoccupent pas plus que l'achat de l'alun pour la précipitation des matières dans l'eau et le chlore pour tuer les bactéries dans l'eau. On l'achète parce qu'on en a besoin. La provenance ne m'occupe pas plus, que ce soit un résidu ou que ce soit autre chose, s'il peut servir à quelque chose de bien, de ce côté, je n'ai pas à voir à cela.

Comme administrateur municipal, il faut se tourner du côté scientifique. Si vous permettez, d'abord une première résolution fut votée alors que j'étais commissaire, résolution très courte, et qui fut adressée à votre prédécesseur, M. le ministre, M. Castonguay. Si vous le permettez, je vais lire cette première résolution qui est très courte d'ailleurs.

Extrait du procès-verbal de la séance de la commission de l'aqueduc de Saint-Joseph-de-Tracy le 14 octobre 1969: Fluoration.

Motion: Attendu que la fonction d'un système public d'aqueduc est de fournir à la population de l'eau pure et saine et non de servir de véhicule pour l'administration de drogues;

Attendu que le rôle et l'efficacité du fluorure dans la diminution de la carie dentaire fait l'objet d'une vive controverse et qu'il y a des moyens moins hasardeux et plus efficaces pour obtenir les bénéfices attribués au fluorure que de déverser ce fluorure dans l'approvisionnement public d'eau potable;

Attendu que la fluoration soumet à un risque extraordinaire certains individus, qui, pour des raisons d'occupation, circonstances environnantes, état de santé, habitudes diététiques, etc., sont déjà exposés à une absorption relativement forte de fluorure;

Considérant que l'addition de fluorure aux eaux potables ne poursuit pas le but de maintenir ou améliorer la qualité de l'eau ou de l'assainir;

Considérant que personne n'a suggéré que la carie dentaire est transmise par l'eau ou que l'eau soit cause de carie dentaire;

Considérant qu'aucune raison satisfaisante n'a jamais été avancée pour démontrer pourquoi chaque membre d'une communauté doit être forcé de subir pendant sa vie entière le risque d'une soumission extraordinaire à l'action toxique des fluorures, surtout lorsque des moyens plus sûrs, plus efficaces et plus économiques d'administrer les fluorures en vue de réduire la carie dentaire chez les enfants ont été démontrés et sont disponibles...

C'est une première résolution au ministre Castonguay. Maintenant, si vous me permettez, je vais lire la résolution que nous avons adressée à M. le ministre et que nous avons fait parvenir aussi à toutes les villes qui ont des usines de filtration dans la province de Québec.

Considérant que la fonction d'un système d'aqueduc est de fournir à la population de l'eau pure et saine et non de servir de véhicule pour l'administration de drogues — je le répète, c'est la même chose...

La raison pour laquelle cette nouvelle résolution est plus explicite, c'est qu'on se posait la question, après la première: II y a controverse, mais la controverse qu'est-ce que c'est? La controverse vient du fait que des scientifiques, parmi les plus grands du monde... C'est que nous avons voulu, dans notre deuxième résolution, apporter le point de vue, la réponse à la question: Quelle est la controverse?

Article 2: Considérant que six gagnants du prix Nobel de la santé s'opposent à la fluoration, un d'entre eux, le Dr William P. Murphy, de l'école médicale de Harvard, déclare entre autres: "Je suis opposé d'une manière très ferme à la fluoration obligatoire de l'eau du robinet pour différentes raisons. Je crois que cette médication ne doit pas être incluse dans un programme obligatoire ". Un autre, le Dr Theorel I, a réussi à persuader la diète impériale de Suède qu'elle devait déclarer la fluoration illégale. Il s'est contenté de décrire la détérioration des enzymes causée par les fluorures. Je cite toujours le domaine médical parce que, comme vous le savez, je suis technicien.

Article 3: Considérant que plusieurs faits nouveaux prouvent que la fluoration est dangereuse pour la santé, le Dr Simonson, de Hastings, Nebraska, déclare: "Autrefois, on pensait que l'ingestion de 1 milligramme de fluor dans l'eau, par jour, pouvait rendre les dents plus résistantes à la carie avec un minimum de danger; maintenant, nous sa-

vons que les gens prennent de 3 à 5 milligrammes de fluor chaque jour dans la nourriture et l'air pollué seulement.

Si vous me permettez, dans la ville de Tracy, où le gouvernement actuel fait, depuis plusieurs années, des recherches sur la pollution de l'air, il y a des stations d'échantillonnage d'installées à Sorel, à Tracy et à Saint-Joseph-de-Sorel. Le dernier rapport qu'on a eu, était daté de 1971, donne seulement les retombées, à part les gaz, évidemment, qu'on doit respirer — les retombées, c'est disponible; le Dr Goldbloom peut vous les fournir — 42 tonnes par mille carré par mois, dans tout notre territoire, la pollution atmosphérique.

Quatrièmement: Considérant qu'autrefois, on croyait que le fluor était retenu seulement dans les dents et les os, maintenant nous savons que le fluor s'accumule dans les vaisseaux sanguins où il a été prouvé qu'il interfère dans leurs fonctions.

En 1971, un rapport du Public Health Service dit qu'on a enregistré 8,400 ppm de fluor dans l'artère principale du coeur de jeunes personnes — normalement, il est de 1 ppm, une partie par million — ces dernières résidaient à Grand Rapids, Michigan, dont l'eau est fluorée artificiellement depuis 1945. Pourtant, les propagateurs du fluor continuent de dire que le fluor est emmagasiné exclusivement dans les os et les dents. Là-dessus, si vous le permettez, encore une fois, il serait bon, je crois, pour les membres de la commission, de demander à la clinique Mayo, qui est universellement connue, et surtout aux Etats-Unis, en Amérique, et qui a fait des rapports prouvant la mort de jeunes de 17 ans et de 18 ans par les fluorures, même à 1.2 partie par million. J'ai des rapports ici qui paraissent dans le "National Fluoridation News", mais je crois que, devant un tel état de fait, les membres de la commission, avant de prendre une décision, devraient s'adresser à la clinique Mayo pour avoir, justement, ces déclarations qui ont été faites par elle, qui, en fin de compte, est reconnue, je pense, partout le monde.

Cinquièmement: Considérant une observation du professeur Arvid Carlson, du département de pharmacologie de l'Université de Goteborg, en Suède, selon laquelle la fluoration est un moyen de fournir une drogue à une population entière dans le but d'induire un effet systématique. Le terme de médication de masse est adéquat. En ajoutant une drogue à l'eau du robinet, le risque d'un trop grand dosage devient plus grand à cause de la grande différence qu'il y a entre chacun de boire de cette eau. Je parle, ici, d'une drogue. Il en a été question hier. On a dit que ce n'était pas une drogue, que c'était plutôt une prévention. Si vous me permettez un exemple personnel. Je suis cardiaque, j'ai fait une thrombose, etc.; évidemment, la thrombose ne se guérit pas. Alors, les médicaments, les drogues que mon spécialiste m'a prescrits, je les prends non pas pour me guérir, mais pour prévenir une autre thrombose. C'est une drogue que je ne dois pas mettre dans les mains des enfants. Je parle en tant... J'aimerais comme scientifique, comme je vous l'ai fait remarquer au début.

Sixièmement: Considérant quel'article 7 du pacte international relatif aux droits civils et politi- ques adopté à l'unanimité, le 16 décembre 1966, stipule qu'il est interdit de soumettre une personne, sans son libre consentement, à une expérience médicale ou scientifique.

Septièmement: Considérant que d'autres voix autorisées se sont fait entendre il y a deux ans; il s'agit d'un groupe de quinze professeurs de l'université Laval, spécialisés en biologie, en sciences de l'alimentation, en nutrition, en chimie du fluor, en bionique, en physique et en pollution, qui ont adressé une lettre à M. Castonguay, alors ministre de la Santé, le suppliant — c'est textuel — solennellement de retirer son projet de loi obligeant les municipalités à fluorer leur eau potable. Les quinze professeurs de Laval soulignent une autre vérité scientifique indiscutée, même par les partisans du fluor, selon laquelle la carie n'est pas causée par une carence de fluor dans la diète. Il est curieux qu'on nous parle souvent de telle ou telle municipalité américaine qui a adopté la fluoration, mais jamais des quelque 180 municipalités de ce même paysqui l'ont essayée et, ensuite, l'ont abandonnée.

Si vous me permettez, là-dessus. C'était en 1972, 180 municipalités américaines, dans la déclaration qui a été faite, et qui apparaît dans d'autres documents que j'ai ici, l'ont rejetée après l'avoir essayé pendant dix ans.

Partout dans le monde, c'est une complète régression au sujet de la fluoration des eaux. Je pourrais vous nommer huit pays en Europe. On a cité, hier, la France et la Suède. Il y a aussi la Norvège, le Danemark, la Hollande, l'Espagne, enfin, je pourrais continuer, à nommer des pays où c'est illégal, où une loi du gouvernement la défend.

Alors, le Québec deviendrait à ce moment-là, le seul endroit au monde, je crois, sauf peut-être quelques Etats américains où, obligatoirement, on mettrait du fluor dans l'eau de l'alimentation.

Pour ces motifs, il est proposé et secondé que la ville de Tracy condamne l'addition de fluorure dans l'approvisionnement des eaux potables. Que copie de cette résolution soit transmise à l'honorable Claude Forget, ministre des Affaires sociales, ainsi qu'à toutes les municipalités du Québec qui possèdent un réseau d'aqueduc, comme cela a été fait récemment. Déjà, on a eu des réponses.

Je vais vous citer ici les villes qui appuient la résolution, telle que je viens de la lire: D'abord la ville de Montréal, les vues sont très connues là-dessus; la ville de Québec; la ville de La Tuque; la ville de Port-Alfred; la ville de Mascouche; la cité de Loretteville; la ville de Longueuil; la ville de Varen-nes ; la cité de Verd un ; la cité de Salaberry de Valley-field; la ville de Bienville; la ville de Hauterive; la cité de Sherbrooke; la ville de Courville; la ville de Baie-Comeau; la ville de Saint-Joseph-de-Sorel; la ville de Matane; la Commission scolaire régionale Carignan, qui comprend tout le secteur de Sorel, Tracy et des environnements; la Corporation municipale de la paroisse de Contrecoeur; la ville de Drummondville-Sud.

C'est à la date où je suis parti ; il en rentre continuellement à tous les jours. Donc, on ne peut pas taxer d'incompétents, je pense bien, ou d'irresponsables des gens comme M. Drapeau, maire de Mon-

tréal, M. Gilles Lamontagne, maire de Québec, M. Robidas, maire de Longueuil; je parle des maires, mais je devrais parler des conseils, puisque cela a été approuvé.

Les villes qui n'ont pas appuyé cette résolution, mais de qui nous avons reçu une réponse jusqu'ici, ce sont des villes dont l'eau est déjà fluorée. Ils nous disent: Dans notre cas, c'est déjà fait, on a accepté une subvention.

Les autres répondent ainsi: La cité de Montmagny: sujet trop controversé; la municipalité de Rock Forest: sujet trop controversé; la ville de Mont-Laurier: sujet trop controversé; la ville de Candiac: sujet trop controversé. Enfin, elles ne se prononcent pas parce que le sujet est trop controversé.

Si vous me permettez, je vais essayer de faire rapidement pour apporter des points qui n'ont pas été portés à votre attention. J'ai eu l'occasion de parler de la drogue. On a parlé de l'expérience de la thalidomide tout à l'heure, expérience qui fut néfaste. Il y a aussi celle du DDT qui était, évidemment, une découverte formidable, mais aujourd'hui, on cherche des moyens pour se défaire du DDT qui est en train de tout polluer; on en retrouve même dans les poissons qu'on prend dans le Nord.

Il y a une autre chose aussi, la pénicilline. On n'a pas parlé des gens qui sont allergiques au fluor. Il y en a sûrement. Cela a d'ailleurs été admis dans la rencontre avec le docteur Lambert qui a écrit la documentation. La pénicilline est un remède merveilleux, mais, par contre, vous pouveztuer celui qui est allergique à la pénicilline. Qu'est-ce qu'on fera des gens qui sont allergiques au fluor?

Dans le domaine scientifique, on dit — ce sont des chiffres que j'avais cités au dentiste Lambert — que 1% de la population est allergique. Il n'a pas confirmé ou infirmé ce 1%, parce que ce n'était pas défini. Il a donc signé pour 1%.

J'ai entendu une réflexion d'un des membres de la commission hier, qui m'a infiniment surpris. Il disait, en réponse à une question du député de Rouyn-Noranda: Les gens, qu'ils s'en achètent de l'eau. Evidemment, tous les gens qui s'achètent de l'eau, ils la paient, l'eau.

A la ville de Tracy, par exemple, suite à un rapport de mon ingénieur, je peux vous dire que nous produisons, par jour, par personne, 150 gallons d'eau traitée. La moyenne provinciale — j'ai les chiffres qui ont paru dans la revue Municipalité — est de 138 gallons d'eau traitée par jour, par personne.

Quelle quantité de cette eau va servir à l'amélioration de la carie dentaire? Il y a aussi un point bien important. Il y a un dentiste, ici, qui est venu, qui a parlé du fluorure. Avec ces tablettes de fluorure qu'il donnait à ses enfants, il a obtenu de très bon résultats. Mais, ce qu'il aurait fallu ajouter, c'est que ces tablettes de fluorure sont des tablettes de fluorure de potassium, non pas des tablettes de fluorure de sodium ou de silicate de sodium ou d'acide chloro-silique.

Le fluorure de potassium est 85 fois moins toxique que le fluorure de sodium. Ici, j'ai justement un rapport de Mead Johnson, fabriquant les tablettes de Poly-Vi-Flor. Dans la posologie, précautions: La posologie suggérée ne devrait pas être dépassée, car l'ingestion continue de grandes quantités de fluorure peut provoquer la fluorose dentaire et, éventuellement, marbrer l'émail des dents. La bouteille doit être gardée hors d'atteinte des enfants. Si ce n'est pas une drogue, je me demande ce que c'est.

Avant de prescrire Poly-Vi-Flor, il faudrait s'assurer que l'eau absorbée par le patient ne contient pas plus de 0.7 partie par million de fluorure. Il ne doit pas être administré aux enfants prenant déjà des médicaments contenant du fluorure et/ou des patients montrant des signes évidents de fluorose dentaire. C'est le fabricant qui dit cela, mais, croyez-le ou non, quand j'ai commencé à étudier cela, je ne connaissais pas les villes qui pouvaient avoir le fluor. On m'a cité Sorel et Contrecoeur, qui sont nos voisins de chaque côté. Je me suis rendu dans une pharmacie à Sorel. J'ai demandé au pharmacien s'il y avait de l'eau... J'ai d'autres documents ici. L'Association des pharmaciens demande aux pharmaciens de ne jamais donner de médicaments avec du fluor dans une ville où l'eau est fluorée. Cinq ans après l'existence du fluor dans la ville de Sorel, le pharmacien ne le savait même pas.

Je lui ai dit: Téléphonez à votre aqueduc municipal. C'est ce qu'il a fait. Il a été le plus surpris du monde. Cela faisait déjà cinq ans. Récemment, la semaine dernière ou il y a quinze jours, à la fin de notre carnaval d'hiver de Tracy, il y avait le maire de Contrecoeur, M. Fernand Tétreault, qui est un de mes bons amis. Il me signalait justement qu'à Contrecoeur, le ministère, par une analyse des eaux, avait découvert que le taux en fluor avait dépassé la limite dangereuse. On voit ici, dans la liste que je vous ai donnée tout à l'heure, que la corporation municipale de paroisse de Contrecoeur est absolument contre le fluor. Elle a été avisée par le gouvernement de prendre les procédures nécessaires.

On a fait allusion que là où l'eau est fluorée, cela a été adopté sans que les gens le sachent. Je le crois, on y a fait allusion hier.

Parmi mes compagnons de travail, parmi ceux qui travaillent avec moi, il y a des gens de Contrecoeur et des gens de Sorel. Un jour, on m'a posé la question: Est-ce que vous avez du fluor dans votre eau à Sorel ou est-ce que vous avez du fluor dans l'usine de Contrecoeur? Non, on n'a pas cela. J'invitais les gens à téléphoner en disant: Téléphonez donc. Ils téléphonaient pour apprendre, à leur grande stupéfaction, qu'il y avait de l'eau fluorée. Je n'ai pas de difficulté à les croire, parce que je vous ai parlé tout à l'heure de la rencontre avec le dentiste Jean Lambert. A cette rencontre, je lui ai posé une question. Je lui ai demandé: Etes-vous prêt à venir discuter en assemblée publique? Apportez vos arguments et j'apporterai les miens. Remarquez bien que je ne veux aucunement attaquer l'Association dentaire. Au contraire, je veux la féliciter, parce que je vois son souci, étant donné qu'elle doit prévoir la carie dentaire, c'est un souci qu'elle a de prévenir la carie dentaire par le soin des dents. Je ne la blâme pas, elle est même à féliciter. Mais il faut voir le côté de l'ingestion dans notre système de ce fluor qui, par contre, est contesté par d'autres scientifiques.

On a parlé de dosage. Je lis, dans la propagande

pour la fluoration, le dosage. Cela peut être un dosage automatique ou semi-automatique.

M. Lafrance: Question de règlement, M. le Président. Est-ce qu'on présente un deuxième mémoire ou si on est à la période des questions? Quand on pose une question, je pense qu'on devrait répondre sur une question.

M. Samson: Pour répondre à la question, M. le Président, je pense qu'on a intérêt à écouter ce qui se dit présentement.

M. Lafrance: D'accord, merci.

M. Forget: M. le Président, j'aimerais qu'on me pose la question à nouveau, parce que j'ai perdu le fil entre la question et la réponse. Pourrait-on nous rafraîchir la mémoire?

M. Samson: Mon doux, M. le Président! J'avais l'impression que le ministreécouteraitceux qui sont contre la fluoration. Qu'arrive-t-il au ministre? Il écoute seulement ceux qui sont en faveur?

Le Président (M. Pilote): A l'ordre!

M. Samson: M. le Président, que fait-on ici, à cette commission, si le ministre n'écoute pas?

Le Président (M. Pilote): J'inviterais quand même...

M. Racine: Je vais essayer d'être bref.

Le Président (M. Pilote): II reste que c'est un deuxième mémoire.

M. Samson: Laissez-le parler. Il a quelque chose d'intéressant à nous dire.

M. Racine: On a parlé des dosages mécaniques et de procédés automatiques ou semi-automatiques. Dans ce domaine, cela tombe... Je suis "designer" et c'est là-dedans que je travaille. Quelle que soit la mécanique automatique ou semi-automatique, cela peut manquer. On a beau faire les études avec des ingénieurs qui dirigent notre département et tout cela, il y a des... Prenez le système IBM — dans l'industrie où je travaille présentement — qui est reconnu, on a des problèmes. Evidemment, il faut donner à la machine les bonnes données pour avoir les bonnes réponses, mais, malgré tout cela, malgré ces experts, il arrive qu'il y a des différences et on est obligé de faire venir les spécialistes de la compagnie pour réparer tout cela.

En ce qui concerne le dosage, il est mécanique; donc, cela peut manquer. On peut se faire jouer des tours de ce côté. Tout ce qui est mécanique, tout ce qui est dirigé par des humains n'est jamais parfait.

J'ai visité une usine de filtration, pas pour voir le fluor, mais, à ce moment, c'était pour voir les grilles mécaniques, parce qu'on avait des obstacles pour l'entrée de l'eau. A cette usine de filtration, comme j'ai su qu'il y avait du fluor, j'ai demandé l'autorisa- tion de voir. Après mon insistance —j 'étais justement avec M. Girouard, de la firme Girouard, Lalonde et Letendre — j'ai réussi... On m 'a demandé... On a ouvert la porte, mais on m'a prévenu, avant d'entrer: II ne faut toucher à rien. Ne faites pas de mouvements rapides pour soulever les poussières qui pourraient être en suspension. Vous pourriez les respirer et c'est extrêmement dangereux; surtout, n'allez toucher à rien avec votre doigt humide, parce que vous allez vous brûler au troisième degré. Cela donne une idée des conditions de l'opérateur qui devra travailler avec ce matériel.

On a parlé de milieux défavorisés, et, justement, c'est au point de vue de l'alimentation que ceux-ci ont des problèmes, parce que, si on considère les données dans les carottes... Enfin, il y a des légumes qui ont jusqu'à 17.7 parties par million, 40 et 70 pour le thé... Enfin, je ne les nommerai pas tous. Les spécialistes pourront le faire. Il y a l'alimentation dans le monde. Je pourrais en citer encore d'autres pendant... Je pourrais vous en parler pendant des heures, parce q ue cela fait six ans que je travaille sur le problème. J'ai même passé des nuits blanches, et je laissais mes livres sur le fluor pour m'en aller travailler à huit heures à l'usine. J'ai fait une thrombose, et c'est peut-être à cause de cela, parce que j'ai passé beaucoup de nuits à travailler sur le problème. C'est pour cela que je pourrais vous en parler un peu trop longtemps. Mais je voulais vous faire valoir le point de vue municipal, le point de vue des villes qui nous appuient, les plus grandes villes de la province. Elles ne l'ont sûrement pas fait à la légère, avec les hommes responsables qui les dirigent. Ces conseils ne nous ont pas appuyés sans au moins avoir pris connaissance des faits que je lis dans notre résolution.

Excusez-moi. J'ai peut-être été un peu long, mais je vous remercie, M. le ministre, M. le Président, d'avoir bien toléré quelques minutes de plus. Merci, M. Samson, pour avoir suggéré d'avoir l'opinion municipale. Encore une fois, en toute démocratie, cela mérite des félicitations.

M. Forget: Vous me permettez une question incidente à votre présentation, s'il vous plaît?

M. Samson: ...M. le Président, c'est parce que j'aurais une autre question à poser, mais on m'a informé que le député de Rivière-du-Loup devait partir bientôt, et qu'il aurait des questions à poser. Je n'ai aucune objection à ce qu'on lui permette de poser ses questions pour lui permettre de quitter la séance. Après cela, on pourrait continuer.

M. Forget: J'aurais une question découlant de la présentation qu'on vient d'entendre, mais je veux bien céder ma place au député.

M. Lafrance: Merci bien aux membres de la commission, M. le ministre et les membres de l'Opposition, qui me permettent de poser quelques questions. Ce sera très court, je vous en avertis d'avance, parce que j'ai un rendez-vous chez le médecin. Je ne voudrais pas faire perdre le temps du médecin non plus. Il y en a d'autres d'ailleurs... Il y a trop de gens déjà qui perdent leur temps.

Je voudrais poser une question à M. Bohémier, qui est vice-président du Front commun contre la fluoration.

Vous avez un front commun et on a déjà entendu parler d'un front commun qui avait un nombre défini de membres. Vous avez combien de membres dans votre front commun?

M. Bohémier: Cela dépend des organismes qui le composent et de par les noms que nous avons en dossiers d'individus, nous estimons approximativement à 150,000 le nombre de personnes qui pourraient en faire partie.

M. Lafrance: Vous considérez toutes les associations qui vous ont appuyés, y compris les municipalités.

M. Bohémier: Non. M. Lafrance: D'accord.

M. Bohémier: Non, parce que là on dépasserait...

M. Lafrance: D'accord, je ne vous en demande pas plus. Je vous demanderais d'être bref dans les réponses comme j'ai été bref dans les questions.

Est-ce que vous accepteriez ou est-ce que vous êtes d'accord sur le fait que fluorer les eaux de consommation peut causer le ramollissement du cerveau?

M. Bohémier: Je n'ai pas de données scientifiques qui me permettraient de me prononcer dans ce sens.

M. Lafrance: Alors, vous êtes neutre dans ce domaine.

M. Bohémier: Exactement.

M. Lafrance: Vous êtes neutre, d'accord. Etes-vous capable de me définir la Temple University que vous avez mentionnée ce matin? Qu'est-ce que c'est?

M. Bohémier: L'université Temple? M. Lafrance: Oui.

M. Bohémier: C'est une université américaine, à Philadelphie. C'est une université, ce qu'il y a de plus reconnu je pense, dans le monde entier. Qu'on demande aux gens qui sont dans le domaine scientifique de vous parler de l'université Temple et je pense que sa réputation n'est plus à faire.

M. Lafrance: C'est dirigé par qui cette université?

M. Bohémier: C'est dirigé par qui? M. Lafrance: Oui.

M. Bohémier: Vous voulez dire quel est le doyen de l'université Temple?

M. Lafrance: II y a un conseil d'administration?

M. Bohémier: Comme toutes les autres universités, je présume.

M. Lafrance: Vous n'osez pas dire que c'est dirigé par des Mormons.

M. Bohémier: Je n'en sais rien.

M. Lafrance:Très bien. Mettez-vous en doute la lucidité et l'intelligence des organismes, comme l'American Dental Association, le Canadian Dental Association, et mettez-vous en doute aussi la lucidité et l'intelligence des législateurs aux Etats-Unis, dans les dix Etats où on a voté une loi pour obliger la fluoration des eaux de consommation?

M. Bohémier: Non, je ne pense pas. Vous parlez de l'Association dentaire canadienne, entre autres?

M. Lafrance: Toutes. Si vous voulez. Vous avez d'ailleurs le dossier sur la fluoration.

M. Bohémier: D'accord. A ce sujet...

M. Lafrance: Vous les avez toutes énumérées dedans. Je vais m'en dispenser.

M. Bohémier: A ce sujet, j'aimerais peut-être souligner que le professeur Schatz, dont j'ai parlé tantôt, est effectivement membre de l'Association dentaire canadienne. Ses travaux sur les problèmes de dentition l'ont amené à pouvoir devenir membre de cette association. Alors, si on veut l'interroger davantage sur cette question, on pourra le faire.

M. Lafrance: Alors, vous ne mettez pas en doute la lucidité et l'intelligence des gens qui préconisent la fluoration?

M. Bohémier: Non.

M. Lafrance: Alors, qu'est-ce que vous dites dans votre mémoire en page 4: Encore de nos jours, des gens bien intentionnés que l'on voudrait lucides et intelligents servent naïvement les intérêts économiques de ces industries au détriment de la santé publique. Alors, vous incluez là-dedans à la fois les associations et à la fois les législatures.

M. Bohémier: Ecoutez...

M. Lafrance: Alors, il faudrait peut-être enlever ce paragraphe.

M. Bohémier: Non.

M. Lafrance: Vous ne l'enlevez pas.

M. Bohémier: Non, je ne l'enlève pas.

M. Lafrance: Alors, vous vous contredisez et vous ne l'enlevez pas.

M. Bohémien Est-ce que vous voulez que je vous dise pourquoi?

M. Lafrance: Très bien, je n'ai plus besoin d'autre réponse.

M. Bohémier: D'accord, je ne vous le dirai pas.

M. Lafrance: Je voudrais vous demander... Non, j'ai la réponse, je l'ai eue.

M. Samson: C'est un dialogue de sourds. M. Lafrance: Je voudrais demander... Le Président (M. Pilote): A l'ordre! M. Samson: Un dialogue libéral.

Le Président (M. Pilote): A l'ordre!! La parole est au député de Rivière-du-Loup.

M. Lafrance: Si vous me permettez, je vais vous dire autre chose. Vous voulez entendre des spécialistes. Nous en avons un dans la salle. Il se nomme Dr Kleinberg, et doit partir à 3 h 45 et cela fait depuis dix heures ce matin qu'on entend ces gens. On a voulu les entendre, maison va se priver d'un spécialiste qui va être obligé de nous quitter et qu'on ne pourra pas entendre tout à l'heure. C'est pour cela que mes questions sont courtes. D'accord?

M. Samson: Oh! Cela les fatigue!

M. Bédard (Chicoutimi): Pourquoi ne pas avoir le Dr Garcia?

M. Lafrance: Je voudrais poser à votre collègue, monsieur...

M. Bohémier: M. Bastien.

M. Lafrance: M. Bastien, oui. Pourriez-vous nous donner votre curriculum vitae, s'il vous plaît?

M. Bastien: Je ne sais pas ce que cela peut faire sur le poids d'un argument. Quand on est objectif...

M. Lafrance: Vous avez dit tout à l'heure que vous étiez un scientifique, alors je voudrais savoir...

M. Bastien: Très bien, je vais vous le donner, monsieur. Je suis bachelier ès arts deux fois, pour commencer, à vingt ans et à 45 ans. J'ai fait mon B.S.C. deux fois.

M. Lafrance: Vous avez bien dit bachelier ès arts deux fois?

M. Bastien: Bachelier ès arts deux fois, oui monsieur. A l'âge de 20 ans et à l'âge de 45 ans. Je suis retourné aux études à 45 ans. Je me suis recyclé pour toutes sortes de bonnes raisons.

M. Lafrance: En quoi?

M. Bastien: Ensuite j'ai mon B.S.C. en biologie, ensuite j'ai ma maîtrise en biologie, j'ai une licence en pédagogie avec option de biologie et j'ai un baccalauréat en pédagogie également.

M. Lafrance: Vous enseignez à l'heure actuelle?

M. Bastien: J'enseigne à l'heure actuelle. M. Lafrance: Où?

M. Bastien: Au collège Marie-Victorin, à Montréal-Nord, monsieur.

M. Lafrance: Très bien. Est-ce que, M. Bohémier, vous êtes — parce que vous le dites — contre la fluoration des eaux, vous êtes contre le fluor? C'est exact?

M. Bohémier: Je suis contre le fluor? M. Lafrance: Oui.

M. Bohémier: Je ne suis pas plus contre le fluor que contre le strontium 90 ou n'importe quelle substance qu'on trouve dans la nature. Je soutiens que le fluor ne devrait pas être ajouté à l'eau, tout simplement.

M. Lafrance: C'est ce que vous essayez de nous prouver depuis ce matin. Mais pourquoi, par exemple, acceptez-vous qu'on donne des pilules ou des comprimés à des enfants? C'est du fluor quand même.

M. Bohémier: Pour la bonne et simple raison qu'une personne qui croit en la fluoration, c'est son droit le plus démocratique de pouvoir en prendre. Je ne m'opposerai jamais à ce qu'une personne, qui croit à quelque chose puisse, en toute liberté, pouvoir le faire.

M. Lafrance: Alors, vous n'êtes pas contre le fluor en lui-même? Vous êtes tout simplement contre le mode d'application de la loi. Je vais vous poser la question d'une autre façon. Si, par exemple, le ministre disait dans sa loi: Par référendum, on demande aux municipalités d'imposer les eaux de fluoration, est-ce que vous seriez encore contre?

M. Bohémier: Par référendum, voici ce qui se passerait. Le front commun, avant le référendum, expliquerait à la population les raisons pour lesquelles il s'oppose à la fluoration et, ensuite, nous nous plierions à la décision populaire.

M. Lafrance: Alors, vous n'êtes pas contre le principe en lui-même?

M. Bohémier: Je ne suis certainement pas contre le principe de la démocratie.

M. Lafrance: Je vous demande si vous êtes contre le principe de la fluoration, oui ou non?

M. Bohémier: Je pense que la fluoration est une mesure qui n'est pas valable et cela, je pense l'avoir expliqué.

M. Lafrance: Vous êtes contre, mais vous admettez quand même qu'on puisse donner des pilules.

M. Bohémier: Je suis contre la fluoration, mais je suis un démocrate.

M. Lafrance: D'accord. Je poserais une autre question à M. Bastien. Vous nous avez parlé de fluoro-apatite et d'hydroxy-apatite ce matin. Lequel des deux est le plus soluble?

M. Bastien: Question de solubilité. La question est de savoir si la fluoro-apatite est une synthèse normale et saine de l'organisme. Mon point était que la fluoro-apatite... D'abord le fluor est un antigène, je l'ai toujours considéré comme un antigène et lorsque tout antigène entre dans le corps, on forme des anticorps. La fluoro-apatite devient un composé, un complexe, pour excrétion; l'hydroxy-apatite étant, au contraire, la formule normale de cet élément de résistance de l'émail dentaire. C'est cela que j'ai voulu dire.

M. Lafrance: Alors, l'hydroxy-apatite est beaucoup plus soluble que la fluoro-apatite?

M. Bastien: C'est cela, d'accord.

M. Lafrance: Alors, c'est prouvé et cela le sera encore à nouveau.

M. Bastien: Oui, mais excusez-moi. Ce n'est pas un critère de valeur.

M. Lafrance: M. Bohémier, vous avez dit cet après-midi que ce n'est pas du fluor qu'on nous donne dans l'eau, ce sont des fluorures; est-ce exact?

M. Bohémier: Oui, monsieur.

M. Lafrance: Vous disiez que c'était toxique, la fluorure?

M. Bohémier: Oui, monsieur.

M. Lafrance: Savez-vous que le fluor est poison?

M. Bohémier: Oui, monsieur.

M. Lafrance: Vous disiez que le fluor était moins dangereux que le fluorure?

M. Bohémier: Je pense que vous m'avez très mal compris.

M. Lafrance: J'ai très bien compris, parce que je me suis fait traiter de...

M. Bohémier: Est-ce que les membres de la commission me permettent de réexpliquer ce que j'ai dit à ce sujet-là, en détail?

M. Lafrance: Allez-y, j'aimerais vous entendre, pour voir si vous allez dire la même chose.

M. Bohémier: Je vais vous résumer cela. J'ai dit que l'ion fluor, quel qu'il soit, est toujours le même, qu'on le trouve dans quelque sel de fluor que ce soit. J'ai mentionné qu'en soi le gaz qu'on appelle fluor est une substance dangereuse, tous les chimistes sont d'accord là-dessus.

J'ai dit ensuite que, lorsqu'on comparaît les différents fluorures, les différents sels de fluor, ils n'avaient pas tous la même toxicité. J'ai dit que les fluorures naturels, entre autres, le fluorure de calcium que l'on trouve naturellement dans l'eau, n'a pas la même toxicité que les fluorures artificiels qu'on veut ajouter ou qu'on ajoute effectivement dans la fluoration, dont le fluorure de sodium et le fluo-silicate de sodium.

Pour les raisons que j'ai soulignées, premièrement, à cause du fait que ces fluorures n'ont pas la même solubilité et ensuite, parce que leur degré de facilité de libérer l'ion fluor n'est pas le même; c'est cela que j'ai dit.

M. Lafrance: M. le Président, je regrette infiniment d'être obligé de vous quitter, parce que la discussion est assez belle et assez intéressante. J'aurais souhaité entendre le docteur Kleinberg, mais malheureusement, j'ai l'impression qu'on ne pourra pas, parce qu'il doit nous quitter à 3 h 45 et c'est un des grands spécialistes dans le domaine de la fluoration. Si vous vous donnez la peine de regarder le curriculum vitae du docteur Kleinberg dans le document 8M qui nous est présenté, vous avez son curriculum vitae et vous avez également ses interventions, ses articles ainsi que les cours qu'il a pu donner un peu partout. Cela aurait été très intéressant au point de vue information. J'aurais souhaité que les membres qui font partie du Front commun contre la fluoration puissent l'entendre, mais c'est malheureux, on ne pourra pas l'entendre.

M. Bédard (Chicoutimi): Est-ce que le député de Rivière-du-Loup ne croit pas que, si des membres de cette commission, comme lui et tous ceux du côté ministériel, étaient au courant que ce spécialiste d'envergure, que nous avons aussi intérêt à entendre, que nous avons hâte d'entendre, devait nous quitter à quatre heures, il me semble qu'ils auraient dû le faire intervenir et tout simplement intervertir l'ordre des comparants devant la commission et non pas essayer, comme il l'a fait tout à l'heure, de laisser entendre qu'on en a peut-être assez d'entendre ces gens-là et qu'il serait peut-être mieux d'en entendre un autre.

M. Bellemare (Rosemont): On n'était pas au courant, M. le Président.

M. Bédard (Chicoutimi): Si on n'entend pas le spécialiste dont vous parlez, cela dépendra de la commission et non pas de ceux qui nous sommes en train d'entendre.

M. Bellemare (Rosemont): Je m'excuse, M. le Président, j'invoque le règlement. On n'était pas au courant et, là, le député dit que cela dépendra de la commission. Je ne voudrais pas que le député de Chicoutimi généralise parce que, personnellement, je n'étais pas au courant.

M. Bédard (Chicoutimi): Bon, je m'en réfère aux propos du député de Rivière-du-Loup.

M. Samson: Cela nous fait plaisir de savoir que même vous autres n'étiez pas au courant.

M. Bellemare (Rosemont): Je savais que le docteur passait, mais je ne savais pas...

M. Lafrance: M. le Président, je reviens aussitôt que possible pour reprendre la discussion. Merci.

Le Président (M. Pilote): L'honorable député de Verdun.

M. Caron: M. le Président, on a parlé de la ville de Verdun, tout à l'heure, en mon absence. Je dois travailler à la commission des engagements financiers, ce soir, et je voudrais faire remarquer à M. Racine que les membres du conseil ont appuyé la résolution de votre ville, la ville de Tracy; par contre, ils ne se sont pas donné la peine de demander un rapport du directeur médical. Le directeur médical est favorable. Je pense que les membres du conseil auraient dû se donner la peine de demander un rapport à des personnes compétentes en la matière et je suis convaincu qu'après avoir reçu le rapport du directeur médical, vous n'auriez paseu la résolution que vous avez eue.

M. Racine: A ceci, je pourrais répondre...

M. Caron: Je tenais à faire cette mise au point. Je présidais l'assemblée, je n'avais pas à voter mais, si j'avais eu à voter, je n'aurais pas voté pour cette résolution.

Le Président (M. Pilote): L'honorable ministre des Affaires sociales.

M. Forget: M. le Président, comme on nous a informés d'une difficulté d'horaire, je demanderais la permission de nos collègues de la commission pour suspendre nos travaux sur cette question et entendre tout de suite le Dr Kleinberg avant son départ, de manière à pouvoir bénéficier de ses lumières avant que l'on poursuive avec le même groupe ultérieurement, si c'est nécessaire.

M. Bédard (Chicoutimi): Nos invités semblent d'accord, j'imagine.

Le Président (M. Pilote): Etes-vous d'accord?

M. Bohémier: Je n'ai aucune espèce d'objection. Je pense qu'il serait intéressant pour tout le monde de l'entendre. Est-ce qu'il a un mémoire?

Le Président (M. Pilote): J'inviterais le Dr Kleinberg à prendre place, s'il vous plaît, avec son groupe à la barre. C'est le mémoire no 8, présenté par l'Ecole de médecine dentaire de l'université Laval, et on a invité le Dr Kleinberg à accompagner les intervenants. J'inviterais M. Paul Simard, le directeur, à identifier les personnes qui l'accompagnent.

Ecole de médecine dentaire de l'université Laval

M. Simard (Paul): M. le Président, M. le ministre, madame, messieurs, vous avez eu l'amabilité, hier, d'entendre les représentants des trois facultés dentaires du Québec qui ont présenté un mémoire conjoint. Vous acceptez, aujourd'hui, de recevoir l'Ecole de médecine dentaire de Laval et surtout son invité; je tiens donc à vous remercier.

Vous le voyez sans doute de plus en plus, la question de la fluoration est très vaste. Le mémoire des trois facultés dentaires abordait plusieurs aspects de cette mesure de santé publique. Celui que nous présentons aujourd'hui est circonscrit aux propriétés inhibitrices du fluor sur la carie dentaire et a pour but de vous fournir un bref résumé de nos connaissances actuelles sur ce sujet, sur ce point précis. C'est donc notre intention de nous en tenir à ce point particulier qui a fait l'objet d'une multitude de travaux et de recherche et de répond re aux q ues-tions qui s'y rapportent.

Le mémoire, de moins de cinq pages, sera lu et commenté par le Dr Trahan, professeur de l'Ecole de médecine dentaire. Le DrTrahan est responsable de la recherche à l'Ecole de médecine dentaire de l'université Laval. Il est D. PH. en biochimie, il a fait des études spécialisées en biologie dentaire, en biologie orale surtout, et, en dépit de son jeune âge, le DrTrahan compte déjà de très nombreuses publications et est très bien préparé pour traiter le sujet qui nous intéresse aujourd'hui.

Auparavant, toutefois, avec votre consentement, et en raison des difficultés de transport et le rendez-vous pris antérieurement, je demanderais au Dr Israël Kleinberg de vous adresser la parole en premier. Le Dr Kleinberg est dentiste. Il est détenteur d'un D. Ph. en biochimie orale. Il a consacré sa vie à l'enseignement et surtout à la recherche. Le député, tout à l'heure, indiquait jusqu'à quel point le Dr Kleinberg avait fait de la recherche. Je pense que, dans le petit mémoire que vous avez là, il y a au moins douze pages qui font état de toute la recherche qu'il a faite, de tous ses travaux, de ses publications. Il est actuellement directeur du département de biologie orale et de pathologie à l'Ecole de médecine dentaire à la State University of New York, à Stoney Brook. C'est un autre Canadien qu'on a malheureusement perdu, que les Américains sont venus nous chercher.

Le Dr Kleinberg est un chercheur mondialement reconnu dans le domaine de la plaque dentaire. Nous avons joint à notre mémoire la liste imposante des conférences et surtout des publica-

tions scientifiques présentées par le Dr Kleinberg. L'Ecole de médecine dentaire de Laval est donc très heureuse de vous présenter le Dr Kleinberg, qui vous parlera du mécanisme inhibiteur du fluor sur certaines affections dentaires. J'attire votre attention non seulement sur la carie dentaire, mais sur d'autres affections dentaires. Je me permets aussi d'attirer votre attention sur la partie de l'exposé du Dr Kleinberg qui met en évidence les effets bénéfiques du fluor non seulement pour les enfants, mais aussi pour les adultes. Il y a deux points qu'on oublie souvent: Le fluor peut être utile non seulement pour combattre la carie dentaire, peut être utile non seulement aux enfants, mais aussi aux adultes. Je pense que ce sont deux points qu'il vaut la peine de souligner.

Le Dr Kleinberg.

M. Kleinberg (Israël): I am sorry I have to give my presentation in English. I am afraid I cannot communicate effectively in French. My apologies.

I am going to take just a few minutes, basically to try to put fluoridation in perspective, relative to a total health care problem, and that is one dealing with dental disease. The reason why I would like to do this is that, as a result of the substantial amount of research that has taken place during the last two decades in the area of what is called dental plaque — these are the bacterial films that collect on the teeth — we now know that when you are dealing with tooth decay, you are only dealing with one part of what one refers to as plaque disease.

Another aspect of plaque disease is your gum problems, and, actually, the two go together in one overall package.

M. Samson: Pourrais-je invoquer le règlement pour demander s'il n'y aurait pas possibilité d'avoir une copie du mémoire qui nous est présenté présentement?

M. Leduc: Vous l'avez devant vous, je crois, 8M. M. Samson: C'est celui-là? Une Voix: C'est cela.

M. Simard (Paul): Non. Ce que présente le Dr Kleinberg, c'est autre chose...

M. Samson: Autre chose...

M. Simard (Paul): ...que je n'ai pas moi-même.

M. Samson: Vous ne l'avez pas non plus? D'accord!

M. Simard (Paul): On pourra peut-être demander le texte, mais je ne l'ai pas.

M. Kleinberg:The reason forthis is because this will preface some of the remarks I wish to make relative to why fluoridation, as compared to other methods of fluoride, etc. I do not know well that cannot be seen... O.K., that may be adequate...

Would you mind if I could go up there? Perhaps it might be a little easier. I do not think I can get anything...

What we have here is a mouth that has been neglected and what we see are accumulations — these whitish materials that we see here — and unsoft tissues around the teeth, those accumulations are bacterial masses, which is called dental plaque.

What the dental plaque does in the mouth is, not only does it cause tooth decay, but it also causes gum problems. It also causes mouth odor and it is also responsible for many of the stains that you get in your mouth. It is responsible also for the accumulation of these large deposits of scale on your teeth.

Can I have the next slide?

This shows you more dramatically the scale deposits and these masses are all bacteria. I am going to show you some pictures of these in a moment.

Can I have the next one?

Here again you can see the masses, on the tongue, it is on the soft tissues. It is not something that just deals with the teeth.

Can I have the next one?

Here is a younger patient and you can see: Look at the masses. Again, soft tissues. Look at the destruction that it causes in the mouth. So, it is not just teeth. It is the whole mouth that is affected.

Can I have the next one, please?

Now, with the development of instruments that permit us to look in three dimensions, a very high magnification of this plaque, we can look at the different kinds of bacteria. Here, for example, is one type that looks like a puff ball, a coccus. There are other types, you can see, that have long, string-like or filament forms.

Can I have the next one, please?

This again shows what the plaque looks like. It is really just a jungle of bacteria.

Can I have the next slide?

On the soft tissues, we see that it attaches to the epithelial cells. These are the cells that cover your soft tissues. There are masses of bacteria.

Can we have the next one, please?

This shows, in the very high magnification that we get with the electromicroscope, you can see, the remains of the soft tissue, and then you can see the bacteria.

Can we have the next one?

This shows you at a very high magnification; this is one single cell, just a piece of it. Here you can see the bacteria that are attached.

There is not a person in this room who does not have quite a bit of this in their mouth. It is extremely difficult to keep the mouth in away whereby you can keep the numbers down so that it is healthy.

Can we have the next one?

I have to use this diagram to tell you what happens in the plaque and how fluoride comes into the picture. This is a graph that shows you time in minutes here and shows acidity, acidity on this scale is going down. In other words, the more acid we have in the mouth, the more this number will drop. What this shows is what happens when you introduce some carbohydrates in your mouth, like sugar. Here

you have a fairly safe level of acidity. It is neutral. At this point, if you introduce some sugar into the mouth, immediately the bacteria make acid and this causes a drop in this acidity scale, which is called pH. That happens in minutes, and then what happens is that it levels off only when the carbohydrate is used up, then only when this is used up either by... I am sorry. Let me backtrack. What will happen is that when you introduce the carbohydrate, you get this immediate formation of acid and this drop in pH. This is an acidity level. It will stay down here as long as there is carbohydrate in the mouth. Just as soon as that is gone, either because the saliva moves it or if it used up by the bacteria, then it gradually returns to a safe level. All right.

Can I have the next slide?

Now, what this slide shows is what I have shown you before, except what happens during the normal course of events during the day when the person eats breakfast, has a snack, lunch, has another snack. What happens is, everytime they eat and introduce carbohydrate into the mouth, we get acid and this index falls. Again, adid; acid again. This keeps up like so. Every time a person eats carbohydrate, we get these amounts of acid on the tooth. There is a protection due to the saliva. There is also a protection due to the tooth itself, and that protection gives you something that is called a critical cage. In other words, a certain level up to which or down to which you can have acid but it will not cause any damage. But if you cause more acid than that, then you cause damage. These are the periods during which the tooth will dissolve.

Now, what fIuoride does is, fIuoride reduces the size of this zone. Fluoride will move this down and it it moves it down far enough, you will get no cavities. If you move it down a little bit, you get caries, but less of it, so that whether or not you have some fluoride or a lot of fluoride, you will have some effect on this process.

Can I have the next slide?

Th is is the last slide. Th is is a looking at the tooth surface under the scanning electromicroscope. The way the tooth is dissolved is not simply in a parallel fashion. There is a tunneling that takes place, and we can see the tunneling here. This is simply the lower magnification.

In other words, the acid does not go flat, uniformly into the tooth, it penetrates. The important thing about fluoridation of the water supply is that when the tooth is being built in the body, fluoride gets incorporated, so that you do not have fluoride just in the outer layer, you have it through further into the tooth. That is something you cannot get easily or, in fact, you cannot get to the same extent with any kind of topical proced ure or what you have. They still get fluoride on the tooth, but you cannot get that depth penetration. You can only get this with fluoride in the water supply. That is why it is an extremely important way of putting fluoride in, in order to give us the protection.

With that as a background, the comments I wish to make are as follows: I think one has to look at the fluoridation process and this building-in of the fluoride into the tooth, somewhat analogous as to put- ting in insulation into a house while it is being built. If one does it at that time, one can do an effective job and one can do it cheaply. On the other hand, if you try to do it afterwards, if you do not have the insulation in there, as the house is built, and you try to do something about insulating the house afterwards, not only is it more costly, but it is not as effective.

The thing about fluoride, as far as to how it works: It works in two ways. One is its effect on the enamel itself, and the second is an effect on the ability of the bacteria to produce acid. As far as the tooth itself, what it does is it builds a better crystal. It builds a better calcium-phosphate crystal in the tooth. Not only does it make a more defined crystal, one that does not dissolve so readily, but it is a better crystal. As far as the protection with acid is concerned, because the plaque, at the same time that is forming, lays down a certain amount of a certain kind of calcium phosphate in the saliva. It can trap some of the fluoride. If that dissolves as it will during the time that acid is being formed, then, fluoride is available. But there is one thing that is unique here, as compared as to elsewhere in the body, as far as to how fluoride works. Fluoride is more effective when we have an acid condition. If we were to compare the levels you need at a neutral pH to have an effect on the cell as compared to an acidic pH, it is a factor of ten to a hundred times. So what happens is that for the same level that will cause an effect on the tooth because of the acid condition, you get no effect elsewhere in the body. Nature seems to have taken care of this. Because of the fact that only in the teeth you get the kind of pH. I have described, the kind of acidity levels described, consequently the low levels of fluoride, the levels that are recommended to be placed in water supplies, these levels are effective here and safe elsewhere in the body.

Much attention is always paid on the benefits to the young, and that is understandably, because of the fact that I think most people are concerned. If they have children, I am sure they are always concerned that they will not suffer some of the problems associated with plaque disease and particularly that related with caries. But there are things that are starting to happen relative to the older patient. Because today, what we are finding is that the individuals are living longer. There is more effective means of making them still effective. In other words, what we are finding is that many patients who ordinarily would have to be in hospital are now ambulatory, and what one finds is that because individuals are living longer, one sees what we call root caries, because the gums recede with age, then this exposes the roots of the teeth and the roots of the teeth are more soluble than the enamels. What happens is that, if you do not have enough fluoride in that portion of the tooth, that will be now be more vulnerable to acid and what we are now seeing is a problem with older patients is that we are seeing cervical caries.

What is happening, is that any therapy that is used that results in reduction in saliva flow, results in a very sharp rise in caries incidence.

Two places where this occurs is the increasing use of tranquilizers that are being used today and

what is happening as a result of this is that the adults who previously were not getting caries or were susceptible to caries have now become more susceptible to caries. Another place that has become a problem is that because of the greater effectiveness of cancer therapy, patients living longer, what is now happening is that where there is a therapy in the region of the head, then what happens is, a radiation will cause what they call atrophy of the salivary glands, so one ends up with very little saliva flow. These individuals end up having a very sharp increase in caries. If they had fluoride in their teeth and at effective levels, this would be an easier problem to manage.

Another thing that is being identified is the fact that in the post-menopausal period of females, there is a greater tendency for osteoporosis, and if the fluoride has been built into the bone, then this becomes less of a problem.

Basically, what I am saying is that there has tended to be considerable attention focused on the young patient ans essentially with caries, and what is happening as a result of the increased number of individuals who are reaching the older ages, caries will also be a problem of the adult.

These are the base of my remarks.

Le Président (M. Pilote): L'honorable ministre des Affaires sociales.

M. Forget: M. le Président, je pourrais peut-être suggérer de demander au Dr Simard de continuer la présentation qu'il avait l'intention de faire et de laisser après...

M. Simard (Paul): Pardon, M. le ministre, M. le Président. Le Dr Kleinberg doit aller prendre un avion dans quelques minutes. Alors, on a quand même un peu de temps. Est-ce qu'il y aurait possibilité de lui poser des questions tout de suite, parce qu'après cela il partira. Le Dr Trahan pourra continuer, enchaîner avec la présentation du court mémoire de l'Ecole de médecine dentaire.

Si on a des questions à poser au Dr Kleinberg.

M. Forget: J'accepte volontiers la suggestion, M. le Président. Je vais poser une question au Dr Kleinberg, si vous le permettez, de manière à laisser à mon collègue de l'Opposition et à ceux du côté ministériel le temps peut-être d'en poser une ou deux.

Doctor, I found your presentation very interesting. I would like to take this opportunity to ask whether, in your own experience over several years, you have come across any deleterious effect or a questionable effect of fluoridation on the teeth of patients or people you have seen.

M. Kleinberg: At the levels that we are talking about in the water supply, no. At higher levels, you can see mottling, and essentially when we are talking about fluoridation of water supply, basically what we are talking about is adjustment to a level which is not too low and not too high. In other words, there is no water supply that does not have fluoride present. They all have fluoride. If you get to levels that are below this figure of approximately one and above approximately two, then the benefits and the least adverse effects follow a curve upwards. Basically, what I am saying is that we find many places where you have natural fluoride, which are at eight and ten parts per million, and so forth, and these should be adjusted downwards. Essentially, fluoridation of water supply really is a fluoride adjustment to a level which the scientific evidence, taken as a whole, says, should be around 1.2, somewhere at this sort of level.

M. Forget: Thank you.

M. Bédard (Chicoutimi): Simplement une question. Je voudrais savoir si le Dr Kleinberg connaît un des spécialistes auxquels on s'est référé beaucoup dans le groupe qu'on a entendu précédemment, le professeur Albert Schatz, qui serait professeur à...

M. Kleinberg: Yes, I know Professor Schatz, yes.

M. Bédard (Chicoutimi): Est-ce qu'il connaît les études qu'il a faites concernant la fluoration et ses effets?

M. Kleinberg: The biggest problem with much of Professor Schatz's work and the reason why he has not received acceptance in the scientific community is not because of the persecution that he claims, but simply because he is continually asked to present data and he never presents data. Professor Schatz always talks in philosophy, and that is the biggest problem.

That is why, in the scientific community, Schatz enjoys no reputation. He claims that he has been persecuted, but there are several very highly regarded individuals like Professor Jenkins, in Newcastle, who has continually asked him to present some data, some actual experimental data. That is the reason why he enjoys no reputation.

M. Bédard (Chicoutimi): Est-ce que le docteur a lu un article ou un ouvrage de cet homme dont je viens de parler, qui était intitulé — je m'excuse de mon anglais et de ma prononciation — The failure of fluoridation in England"?

Une Voix: Voulez-vous répéter, s'il vous plaît? Le titre...

M. Bédard (Chicoutimi): Peut-être... Je peux le dire en français: "La faillite de la fluoration en Angleterre ", qui a été publié dans le numéro d'octobre 1972 de la revue "Prévention..."...

M. Kleinberg: O.K. What you are saying is about the failure of fluoridation. On that question, one could go on and on debating as to why. But it has not been a failure. The biggest problem, as I pointed it out on the diagram here, is this: If you have a very severe acid drop, as I showed you, if the curve goes down very low, and if the fluoride, that you have built

in, has not moved that appreciably or has moved it, but there is still a very large gap, then it is very difficult to see in clinical trials, because the problem with clinical trials is that there is a very large error associated with scoring of caries. As a consequence, you can have errors that can be as much as plus or minus 20%, 30%, something of this sort of order with some of the... techniques. Consequently, what happens is that if you have a very severe caries attack, then you will not see the benefits of fluoride as readily as you will where the caries attack is less. Fluoride is one approach that we have to have in order, ultimately, to control caries. It is essentially one means of making the tooth more resistent. The area of research that is actively going on now is, of course, to see whether or not we can do something about the plaque bacteria so they will not make as much acid. Once we get that, then we may have the whole picture.

So, fluoride is not a complete answer. It is only a complete answer for those people who have, say, a moderate to modest, and those that have severe, you are still going to see the caries. Of course in Britain, the caries attack is extremely high.

M. Bédard (Chicoutimi): Je vous remercie.

Le Président (M. Pilote): Y a-t-il d'autres membres qui seraient intéressés à poser des questions?

M. Forget: I would like, perhaps, to thank Dr Kleinberg on behalf of the members of this commission, and thank him for his presentation and wish him good luck in going back wherever he is going.

M. Kleinberg: Thank you very much.

Le Président (M. Pilote): J'inviterais à présent le Dr Simard à présenter son mémoire.

M. Samson: M. le Président...

Le Président (M. Pilote): Le député de Rouyn-Noranda.

M. Samson: Non, j'avais compris qu'on suspendait l'audition des membres du front commun pour permettre au Dr Kleinberg de présenter son témoignage.

M. Forget: ...revenir...

M. Samson: Je n'ai pas d'objection à ce qu'on revienne par la suite au groupe du Dr Simard. C'est parce que c'est l'entente que nous avions acceptée pour permettre au Dr Kleinberg de présenter son témoignage.

Le Président (M. Pilote): J'inviterais l'autre groupe à reprendre place. On vous remercie, messieurs.

L'honorable ministre des Affaires sociales.

M. Forget: M. le Président, je vous remercie. On se souviendra que j'avais indiqué le désir de poser, à la suite de la réponse de M. Racine à une question du député de Rouyn-Noranda sur la position des autorités municipales de Tracy et de certaines autres villes sur la fluoration, une question visant à éclaircir un point qui est contenu dans cette résolution dont il nous a fait lecture et qui consiste dans le témoignage qu'il invoque de six gagnants du prix Nobel comme s'opposant à la fluoration.

J'aimerais qu'il puisse nous donner un peu plus de détails sur ces déclarations en particulier une énumération complète des personnes impliquées et aussi des citations précises des publications ou des déclarations qu'ils auraient faites et des dates en particulier relativement à trois personnes dont les noms sont parfois indiqués. J'ai ici des déclarations faites par trois de ces titulaires du prix Nobel où ils indiquent clairement qu'ils sont, contrairement aux indications fournies par le front commun, dans certaines de leurs publications ou certains groupes qui sont associés avec eux, où ils disent clairement qu'ils sont en faveur de la fluoration des eaux de consommation et qui indiquent d'ailleurs les circonstances dans lesquelles leur nom aurait pu être associé à un mouvement contre la fluoration. Enfin, ils allèguent que le Dr Murphy se déclare opposé à la fluoration. J'aimerais savoir s'ils pourraient nous dire quand cette déclaration a été faite ou même s'ils savent si le Dr Murphy est toujours du même avis qu'à l'époque où il a fait cette déclaration.

M. Racine: D'abord, sur ce billet du National Fluoration News assez réoent, si le Dr Murphy a fait d'autres déclarations, je ne suis pas au courant, mais comme tout à l'heure, on le dit bien dans la résolution — textuellement: Je suis opposé d'une manière très ferme à la fluoration obligatoire de l'eau du robinet pour différentes raisons. Je crois que cette médication ne doit pas être incluse dans un programme obligatoire.

M. Forget: M. Racine, j'ai bien compris la déclaration. Ce que je voudrais savoir c'est où et quand cette déclaration a été faite de manière, je pense que c'est normal quand on cite quelqu'un, qu'on dise où et quand on peut retrouver cette déclaration.

M. Racine: C'est une chose pour laquelle je pourrais faire la recherche nécessaire pour vous le dire, mais, actuellement, fouiller dans tout cela, je pense que cela prendrait beaucoup de temps, mais quand la résolution a été faite, on avait les documents en main qui déclaraient exactement ce q ui est marqué dans la résolution. Maintenant, en ce qui concerne d'autres personnes, je ne suis pas au courant.

M. Forget: Vous êtes conscient, je suppose, que le Dr Murphy... On doute d'abord s'il est encore en vie, mais il est né il y a fort longtemps et il se peut que cette déclaration remonte à 30 ou 40 ans, donc, ce n'est pas une vaine question de ma part, mais c'est un peu dans le même esprit que les questions que j'ai posées tantôt pour s'assurer que oette déclaration est faite à la lumière des informations qui sont maintenant disponibles.

Pour ce qui est des autres déclarations et des autres noms, est-ce que vous pouvez nous donner d'autres détails puisque, encore une fois, sur trois autres prix Nobel, j'ai devant moi des déclarations fort complètes qui nient cette position.

M. Racine: Vous donner des dates exactes, j'aurais probablement dû les marquer à ce moment-là, quand on a fait la résolution, mais je ne peux pas, actuellement, vous donner ces dates exactes. Il y a une chose, en passant, si vous me permettez, un exemple. Il y a deux ans environ, paraissait dans le Reader's Digest la déclaration du Dr J.H. Johnson, rédacteur en chef du journal de l'Association dentaire de l'Ontario. Il y a environ deux ans. "Peut-être le fluorure retarde-t-il l'apparition de la carie chez les jeunes sans défense, mais il n'en reste pas moins un poison et je pense qu'il faudra attendre encore 25 ans pour en mesurer vraiment la nocivité." C'est le Dr J.H. Johnson, rédacteur en chef.

M. Forget: On pourrait passer l'après-midi, je pense bien, à lire des déclarations de tous vos membres. Vous dites que vous en avez 150,000, mais il reste que, sur un point précis, sur l'autorité des détenteurs ou des titulaires des prix Nobel, si je comprends bien, vous pouvez peut-être nous faire parvenir, dans les prochains jours, la liste des références précises qui nous permettront de vérifier ces choses et si ce sont des déclarations qu'ils ont faites, je crois qu'il serait prudent de s'assurer qu'ils les ont effectivement faites et à quelle époque.

M. Bédard (Chicoutimi): Vous pourriez également en faire parvenir à l'Opposition, parce que ce sont quand même des témoignages de poids.

M. Forget: Moi, je peux vous donner tout de suite, de toute façon, une copie des déclarations qu'ils font et qui sont à l'opposé de ce que vous alléguez. C'est pour cela, je crois que cela a une certaine importance d'être bien sûrs qu'ils les ont faites, ces déclarations.

M. Racine: Alors, je pense que le président du front commun...

M. Forget: Je peux vous donner les dates également.

M. Racine: ... pourra le faire, étant donné que moi, je suis maire; donc je suis à temps partiel, je dois également gagner ma vie. Il y a toute l'administration municipale à voir, je n'aurai probablement pas le temps de m'attarder sur ce sujet-là, mais le président du front commun essaiera de le faire, de vous donner des dates.

M. Forget: Je sympathise avec vos problèmes. On est prêt à attendre quelques jours, sans difficulté.

Le Président (M. Leduc): Le député de Rouyn-Noranda.

M. Samson: M. le Président, j'ai remarqué, dans la présentation du mémoire du front commun, qu'on fait référence au Dr Albert Schatz. J'ai également remarqué tantôt, à l'occasion d'une question posée par le député de Rivière-du-Loup, cette tentative de discréditer le Dr Schatz, avec cette référence aux mormons, à l'université. Je vous avoue que cela m'a un peu déçu cette espèce de tentative. Cela frisait la tentative de discrimination religieuse; c'était passablement disgracieux.

Puisque la question est venue, je voudrais demander au Dr Bohémier de me dire si ceci est véridique. Tantôt, on m'a informé — j'ai dû sortir quelques minutes — que le Dr Kleinberg aurait mentionné, à propos du Dr Schatz — et c'était le député de Chicoutimi qui avait posé la question — qu'il était plutôt de tendance philosophique et un travailleur isolé.

J'ai un document qui nous donne une liste des activités du Dr Schatz. Je voudrais vous les lire afin que vous me disiez si, selon vous, c'est véridique ce que j'ai en mains. 1968-1972: Member of USA-USSR Academic Council.

Citizen Exchange Corps Field Institute for Russian Studies. New York City. 1970-1973: Temple University representative to International Research and Exchanges Board. New York City. 1961: Member. American Advisory Committee. Medicina Universalis. 1970: Chairman of Session on Chemotherapy. Xth International Congress of Microbiology. Mexico City. 1970: Member of the Presidency of the Scientific Sessions. Symposium on Microbiological Transformation of Organic Matter in the Soil. Budapest. 1962: Kearney Foundation of Soil Science Lecturer. University of California. College of Agriculture. 1960 to date: Member. Editorial Board. Compost Science. 1960-1964: Abstractor. New York State Dental Journal and New York Journal of Dentistry. 1964: President of Opening Session. International Stomatological Conference. Budapest. 1964 to date: Member. Board of Associate Editors. The Pakistan Dental Review. 1967: Member of the Presidency for Sessions on Civilization Diseases and Dental Health. 13th Annual Meeting. International Society for Research on Nutrition and Vital Substances. Luxembourg and Trier. 1968-1970: Member of the Scientific Council International Society for Research on Civilization Diseases and Vital Substances. 1969: Member of the Presidency for Session on Dental Health. 15th Annual Meeting. International Society for Research on Civilization Diseases and Vital Substances. Hanover, Germany. 1969 do date: Member of the Editorial Board of Fluoride Quarterly Reports, Journal of the International Society for Fluoride Research. 1973 to date: Member of the Editorial Board of National Fluoridation News.

Il détient les "patents" suivants:

1948: Streptomycin and Process of Preparation. United States. No 2,449,866. 1949:Un procedimiento para la produccion de estreptomicina. Argentina. No 71,416. 1945: Improvement and Chemical Compounds and Processes for Preparing the Same (Streptomycin). New Zeland, No. 92,780. 1952: Chemical Compounds and processes for Preparing the Same (Streptomycin). Canada. No. 481-108.

J'achève, M. le Président. Si le député veut me donner quinze secondes, il pourra soulever sa question.

M. Bonnier: II me semble que c'est moi...

M. Samson: M. le Président, tantôt, on a tenté de mettre en doute la crédibilité du Dr Schatz.

M. Bonnier: J'invoque le règlement, M. le Président.

Le Président (M. Pilote): A l'ordre! Sans cela, je fais tout fermer.

M. Samson: Faites-les fermer, M. le Président. On ne se laissera pas "bulldozer" par les libéraux. Cela n'est pas vrai.

Le Président (M. Pilote): On va vous donner cinq minutes pour vous engueuler et puis...

Une Voix: ... par les créditistes.

M. Bonnier: Est-ce que je peux soulever ma question de règlement?

M. Samson: Ce n'est pas parce que vous êtes 101 que vous allez nous "bulldozer". Ne vous cassez pas la tête.

Le Président (M. Pilote): A l'ordre! A l'ordre! Il n'est pas question de "bulldozage". La parole est au député de Rouyn-Noranda.

M. Samson: Je vous remercie, M. le Président. Vous êtes un bon président. 1954...

M. Bonnier: Je ne crois pas, M. le Président, parce que je n'ai pas pu dire ce que j'avais à dire.

M. Samson:... A Process... Ai-je la parole, M. le Président?

Le Président (M. Pilote): Oui. M. Samson: Merci.

M. Boudreault: M. le Président, M. Samson, ce matin... m'a rappelé, sur une question de règlement, qu'il avait droit...

M. Bonnier: II me semble que j'ai le droit de soulever ma question de règlement.

M. Boudreault:... vous deviez lui donner la parole. Je pense que le député...

Le Président (M. Pilote): Je n'ai pas compris que quelqu'un...

M. Bonnier: Si vous n'avez pas compris, il me semble que j'ai soulevé une question de règlement.

Le Président (M. Pilote): Allez.

M. Bonnier: On ne m'a même pas laissé la liberté de dire ce que j'avais à dire.

Le Président (M. Pilote): Allez, sur la question de règlement.

M. Bonnier: Sur la question de règlement, je voudrais savoir si l'objet de notre commission est de décliner les titres ou les ouvrages faits par telle et telle personne ou si c'est d'essayer de voir exactement et de comprendre davantage les effets du fluor sur la maladie en général et sur l'état de santé des dents en particulier. Parce que là, je pense qu'on a perdu cinq ou dix minutes de bon temps.

M. Samson: M. le Président, est-ce que je peux continuer?

Le Président (M. Pilote): Allez!

M. Samson: M. le Président, j'ai vu tantôt le député de Rivière-du-Loup demander sa biographie à un de nos invités. C'est ce qui m'a incité à vouloir faire part de celle de la personne qu'on a voulu discréditer. Et je terminais en disant: 1954: A Process for the Production of Streptomycin, Japan. No. 207,508.

Je voudrais demander au Dr Bohémier si, à son avis et selon ses connaissances, cette biographie est véridique.

M. Bohémier: Le document que vous avez lu est celui que nous a fait parvenir le professeur Albert Schatz lui-même et s'intitule: Miscellaneous activities. Vous en avez lu un peu plus d'une page. Il y a en réalité dix pages.

M. Samson: C'est ce que je voulais savoir, M. le Président. C'est parce que je n'accepterai pas que, par des moyens détournés, on discrédite le Dr Schatz.

M. Bédard (Chicoutimi): M. le Président, je pense qu'il faut essayer, en tant que membre de la commission, de savoir ce qui en est. C'est moi qui ai posé, comme c'est mon droit, la question à celui que nous avons entendu tout à l'heure, le Dr KIeinberg.

M. Bonnier: C'est une question du député de Chicoutimi.

M. Bédard (Chicoutimi): II me semble... Personnellement, je ne suis pas intéressé à me faire charrier ni d'un côté, ni de l'autre.

M. Bonnier: Oui, je suis d'accord.

M. Bédard (Chicoutimi): De tout ça, de toute notre petite discussion, de notre patente...

M. Bonnier: M. le Président, je n'avais rien contre la question du député de Chicoutimi...

M. Bédard (Chicoutimi): Si vous permettez, j'en tirerais juste une conclusion. C'est que je verrais très difficilement que le ministre des Affaires sociales refuse d'inviter le Dr Schatz dont on a tant parlé et qui me semble être une des références, en termes d'expert, les plus valables auxquelles on s'est référé jusqu'à maintenant au cours des travaux de cette commission. Qu'il y ait au moins une invitation officielle de la part du gouvernement, du ministère des Affaires sociales, à son endroit et qu'on trouve les moyens de le faire entendre ici. Ceci, à l'avantage des membres de la commission et aussi à l'avantage de l'information de l'ensemble du public.

Je ne sais pas si cette suggestion, si vous seriez heureux...

M. Bohémier: Oui, elle répond très certainement...

M. Bédard (Chicoutimi):... de le voir paraître à la commission.

M. Bohémier: Elle répond très certainement à la fois à nos intérêts et à notre plaisir. Si nous avons mentionné les travaux du professeur Albert Schatz, c'est parce que nous, du Front commun contre la fluoration, y attachons une valeur certaine. S'il pouvait, à l'invitation de la commission, venir ici s'expliquer lui-même, parce que je soutiens que c'est certainement, parmi les opposants à la fluoration, la personne la plus qualifiée pour exposer l'aspect "antifluorationniste."

M. Bédard (Chicoutimi): II me semble que le public québécois aurait droit à cela, de cette source de renseignements, et cela ne doit pas être si difficile que cela de lui faire parvenir une invitation et d'assurer sa présence.

Le Président (M. Pilote): Le ministre des Affaires sociales.

M. Forget: M. le Président, dans tous ces travaux de la commission parlementaire, je n'ai adressé d'invitation à personne en particulier, mais à tous les groupes et tous les individus qui s'intéressaient au problème, qui voulaient éclairer la commission par leurs opinions ou leurs connaissances. Certains groupes que nous avons déjà entendus ont jugé bon de se faire accompagner par des experts qu'ils ont eux-mêmes invités et je n'ai pas eu à participer à ces invitations. Je ne vois pas, dans le cas du Dr Schatz, pourquoi le gouvernement participerait à ces invitations ou ferait une invitation à qui que ce soit. Maintenant, il est clair que les groupes qui sont venus devant nous et ceux qui vont se succéder devant nous durant le restant de la journée, durant au moins une autre séance, ont toute liberté pour faire les invitations qu'ils veulent faire et j'imagine que, s'ils ont décidé de ne pas le faire, nous ne devons pas nous substituer à eux dans ce jugement, étant donné que la possibilité existait et que ce choix a déjà été fait. Maintenant, du côté des oppositions, l'Opposition officielle comme les autres, il y a des fonds de recherche qu'elles peuvent consacrer aux fins qu'elles désirent et elles n'ont pas besoin pour cela de ma permission, Dieu merci, et elles peuvent voir là à compléter leur dossier si elles jugement que le dossier technique que nous leur avons remis il y a plusieurs mois n'est pas suffisant pour les éclairer.

M. Bédard (Chicoutimi): Je suis surpris des remarques du ministre, d'autant plus que notre position jusqu'à maintenant, nous fiant sur le rapport d'experts, est de ne pas douter des effets bénéfiques du fluor, comme vous, en toute bonne foi, vous fiant à d'autres experts, vous en venez à la conclusion contraire. On sait fort bien, et c'est facile de le constater par la liste que nous avons devant nous, d'abord ceux qu'on a entendus et ceux qu'on entendra, que les organismes qui sont pour la fluoration semblent, prima facie, ont définitivement les fonds pour pouvoir s'inviter des experts afin d'apporter... Je me permets de continuer. Prenez, par exemple, on vient d'entendre...

M. Forget: ... Il me semble que le député de Chicoutimi fait des insinuations qui sont déplacées dans le cadre du débat actuel, qui est de savoir: Est-ce que nous devons...

M. Bédard (Chicoutimi): Quand j'aurai fini, on verra ce qui est déplacé.

M. Forget:... ou non, à même les fonds de l'Assemblée nationale, faire des invitations et il semble suggérer qu'il y a des nantis et des non-nantis. On nous dit qu'il y a 150,000 membres dans une association, un front commun, qui croit qu'il y va de la santé publique de s'opposer à une telle mesure. Je crois que, devant un tel appui populaire, avec une cotisation de $0.10 par membre, il serait possible de faire venir tous les experts imaginables sur le sujet sans que cela constitue un fardeau excessif et je pense que ce sont des considérations qui ne devraient pas entrer en ligne de compte ici.

M. Bédard (Chicoutimi): Cela ne m'empêche pas de continuer à m'étonner du raisonnement du ministre des Affaires sociales.

Le Président (M. Pilote): Je vous inviterais à conclure là-dessus.

M. Bédard (Chicoutimi): M. le Président, je vais présenter l'idée que je veux développer. Il reste quand même qu'il est facile de voir... On a eu l'invité, l'expert, M. Kleinberg. qui a été invité par... — je ne sais pas si c'est à même nos fonds — mais qui a quand même été invité par la faculté de médecine. C'est facile de voir que, prima facie, ils ont plus d'argent que nous pour pouvoir amener des invités pour soutenir leurs allégations. Mais indépendam-

ment de cela, que ce soient des fonds de recherche ou quoi que ce soit, il reste que, pour le point important que nous discutons, la fluoration des eaux, nous nous apercevons, au cours de la discussion, qu'il y a, d'une part, les experts qui sont d'accord et qu'il y a, d'autre part, un expert, tout particulièrement équipé pour pouvoir amener une version qui soit différente. Je me demande, alors qu'on est en train de discuter d'une mesure qui sera peut-être susceptible d'affecter ou d'améliorer la santé de l'ensemble des Québécois, tel qu'on l'a exprimé de notre côté, de la clôture, je vois très mal qu'on mette même complètement de côté la possibilité de l'inviter à venir se faire entendre au niveau de cette commission. Je ne vois pas...

M. Forget: La possibilité a toujours existé et elle continue d'exister.

M. Bédard (Chicoutimi): Oui, mais je pense qu'il y a toute la différence du monde, je le soumets respectueusement, entre une invitation officielle, qui viendrait de la part du gouvernement, à un spécialiste tel que M. Schatz, et une invitation faite par des groupes à l'intérieur de la population. Je ne vois pas comment on peut priver la commission de cette source de renseignements qui, à mon sens, est nécessaire et s'impose.

Parce que même si, jusqu'à maintenant, j'ai carrément exprimé mon opinion de profane sur les effets bénéfiques du fluor, il reste une chose, je crois de mon devoir et du devoir de l'ensemble des membres de la commission de ne pas rejeter la possibilité d'entendre l'autre partie, l'autre côté de la situation, d'entendre la voix d'experts autorisés en la matière.

M. Samson: M. le Président...

Le Président (M. Pilote): Je ne vois pas, pour le moment, que la commission puisse décider de faire venir quelqu'un ici et d'en défrayer le coût. Je pense qu'il faudrait référer cette question àqui de droit, on va y réfléchir. Avant de s'engager...

M. Bédard (Chicoutimi): Je voudrais faire une proposition, M. le Président...

Le Président (M. Pilote): Avant que la commission s'engage...

M. Bédard (Chicoutimi): pour que la commission prenne l'initiative d'envoyer... Je vais faire ma proposition, vous la battrez, ce n'est pas compliqué, cela. Je fais la proposition que cette commission fasse une invitation formelle au Dr Schatz de venir se faire entendre devant la commission.

M. Forget: II n'y a aucune raison, M. le Président, de privilégier une personne parmi d'autres, ce serait le seul "expert" que nous inviterions pour témoigner devant la commission, il n'y a aucune raison de faire un statut privilégié à un expert parmi d'autres. Les groupes qui viennent ici sont assez adultes et responsables, je l'espère, pour décider eux-mêmes de qui ils veulent se faire accompagner et avec qui ils veulent venir discuter cette question devant l'Assemblée nationale. Nous n'avons pas besoin de leur imposer ou de leur dicter ou de les aider à accomplir leur rôle si l'on croit vraiment que ces groupes sont représentatifs d'une partie de l'opinion. Ils ont comme les autres groupes, s'exprimant de l'autre côté, les mêmes moyens de faire venir des experts, pour donner des témoignages divers, et s'ils ne l'ont pas choisi, je ne vois pas que cette commission doive se substituer à leur jugement.

M. Bédard (Chicoutimi): M. le Président, je laisse de côté la responsabilité des groupes de se faire accompagner ou non d'experts. Simplement, cette commission a des droits et des pouvoirs, et ma proposition est très claire: C'est que la commission juge bon d'inviter le Dr Schatz à venir témoigner devant cette commission. Vous pouvez ne pas être d'accord, mais je suis convaincu qu'il y a bien des Québécois qui pourraient être intéressés à l'entendre et voir quels sont les arguments de valeur qu'il peut apporter au soutien du fait qu'il semble carrément être contre et ne pas reconnaître les effets bénéfiques du fluor.

Le Président (M. Pilote): Le député de Rouyn-Noranda.

M. Samson: M. le Président, je serai évidemment en faveur de la motion qui nous est présentée par le député de Chicoutimi. J'ai mentionné dès le début des auditions, hier, que notre commission devrait inviter, parmi les opposants à la fluoration, les experts qui seraient jugés utiles. C'est une possibilité, M. le Président. Depuis hier, on entend parler du Dr Schatz comme de quelqu'un qui est une autorité en la matière. C'est évidemment également, comme l'a d'ailleurs si bien souligné le député de Chicoutimi, que parmi ceux qui appuient cette mesure, se retrouvent des organismes qui sont beaucoup plus en position financière de se payer des experts, de défrayer les coûts de voyage de ces experts que parmi ceux qui se retrouvent contre la fluoration. M. le ministre a dit tantôt $0.10 par tête dans ceux que représentent le Front commun contre la fluoration, ça pourrait régler le cas. Mais je me dis: Pourquoi obliger la population à se cotiser pour faire venir un expert qui est contre la fluoration alors qu'on n'oblige pas la population à se cotiser pour en faire venir qui sont en faveur de la fluoration? Que ce soient des universités qui nous ont présenté le Dr Schatz hier ou le Dr Kleinberg aujourd'hui, que ce soient eux qui aient défrayé ou qui aient pris des arrangements pour les amener devant la commission, je n'ai rien contre cela.

D'ailleurs, nous les avons bien reçus et c'était notre devoir de bien les recevoir. Mais il demeure que les universités, c'est évident, ont des budgets leur permettant beaucoup plus de se payer ces choses qu'un simple comité formé dans la population. Egalement, bien entendu, ces budgets proviennent indirectement du gouvernement, sinon directement, indirectement du gouvernement.

A l'appui de mes prétentions, je vois que le mi-

nistère lui-même s'est appuyé sur un dossier qui a nécessité beaucoup de recherches, qui a nécessité sûrement des paiements à des experts. Je ne sache pas, c'est là l'importance de le dire... parce que le ministre a fait référence tantôt à la possibilité des budgets de recherche des partis de l'Opposition pour défrayer les coûts d'experts qu'on pourrait faire venir devant la commission, parce que si on parle du professeur Schatz, on pourrait parler d'autres aussi qui sont spécifiés dans les mémoires qui sont présentés par les opposants. Quand on fait référence au budget de recherche des groupes de l'Opposition, à ce moment, c'est injuste de faire référence à cela, parce que je suis pas mal persuadé que ce n'est pas le budget de recherche du Parti libéral qui a défrayé le coût de ce dossier qui est publié, qui a coûté de l'argent. Cela provient du budget du ministère. Or, on ne peut pas comparer un budget de ministère avec un budget de recherche d'un parti politique. Si cela provenait entièrement du budget de recherche du Parti libéral, parce qu'il y a eu d'autres dossiers que les ministres nous ont présentés à l'occasion d'autres commissions, il n'y aurait sûrement pas assez d'argent dans leur budget de recherche pour faire cela. Donc, cela doit provenir du budget du ministère.

A l'encontre de cela, on doit permettre, si l'on veut être bien informé, si le ministre qui a convoqué cette commission parlementaire a en tête d'écouter tous les sons de cloche... Si, au contraire, il a en tête de convoquer la commission parlementaire seulement pour sauver les apparences, seulement pour la frime, à ce moment, bien sûr, il ne nous donnera pas de possibilité d'entendre les opposants parce que son idée, au ministre, est faite depuis longtemps. Elle est tellement faite depuis longtemps, qu'il a manqué son coup en 1973 alors qu'il était sous-ministre des Affaires sociales. Son ministre, M. Claude Castonguay, à ce moment, avait dû retirer le projet de loi devant l'opposition du peuple, devant l'opposition des municipalités. Drôle de coïncidence, ce projet de loi... je le dis à l'attention des nouveaux députés, de ceux qui n'étaient pas avec nous avant 1973, il serait peut-être bon de leur faire un peu l'historique à ceux-là...

M. Bonnier: On a suivi les débats, on est au courant.

M. Dufour: On est au courant.

M. Samson: A l'attention des nouveaux députés, nous savons tous...

M. Dufour: Tu veux prolonger... Il parle bien.

M. Samson: ... que le ministre Claude Castonguay avait dû retirer ce projet de loi à la toute veille...

M. Dufour: Lâche pas. Continue.

M. Samson:... d'un déclenchement d'élections. Car cette mesure préconisée par le gouvernement était tellement impopulaire que si le premier ministre avait déclenché des élections à ce moment, il y aurait eu un grand risque de rentabilité électorale pour le Parti libéral. Donc, on a joué au chat et à la souris avec la population. On a retiré le projet de loi à la toute dernière minute. On a évité le débat...

Le Président (M. Pilote): A l'ordre! J'aimerais à ce que le député de Rouyn-Noranda s'en tienne au fait d'inviter ou de ne pas inviter le Dr Schatz.

M. Samson: M. le Président, vous n'avez pas à me tracer un corridor. Je parle sur une motion de fond. A ce moment, j'ai droit à 20 minutes sur cette motion de fond. Je dois prendre toutes les comparaisons que je trouve valables. C'est à moi de décider ce que je dirai ou non à la présidence.

M. Dufour: Même les conneries.

M. Samson: Je regrette, mais c'est moi qui vais décider ce que j'ai à dire.

M. Dufour: Lâche pas.

M. Samson: Je continue. En 1973...

M. Dufour: On va te subir.

M. Samson: ... parce qu'il était important à ce moment, devant l'opinion publique de retirer le projet de loi pour des raisons uniquement électorales.

Pourquoi l'a-t-on fait à ce moment? Pour éviter le débat. De plus, M. le Président, je dois dire que si vous vous rappelez — j'espère que vous vous le rappelez — et que si les autres membres de cette commission se le rappellent et, s'ils ne se le rappellent pas, je leur demande de faire référence au programme électoral du Parti libéral d'octobre 1973, ils verront à ce moment que ce gouvernement n'a aucun mandat pour imposer la fluoration. En aucun moment, dans le programme du Parti libéral, on n'a mentionné ce fait. Au contraire. Plutôt que de mentionner ce fait, on est allé jusqu'à promettre que ce gouvernement protégerait l'environnement, verrait à l'assainissement des eaux, etc.

J'ai quelque part, dans mes documents, la référence que je ne retrouve pas pour le moment, mais je la retrouverai, s'il le faut. Maisil reste que je défie qui que ce soit de me dire le contraire, je défie qui que ce soit de me dire que le gouvernement libéral a un mandat pour imposer la fluoration à la population, ce gouvernement n'a pas de mandat pour le faire. Cela renforce d'autant plus la prétention que nous avons dans l'Opposition qu'il n'a pas le droit de l'imposer sans un référendum sur cette question, d'autant plus qu'il y a actuellement des villes où il y a fluoration. Tantôt, par le témoignage du maire de Tracy, nous avons été à même de constater que même chez eux, à Sorel, les pharmaciens ne savaient pas que l'eau était fluorée depuis cinq ans.

C'est donc dire que, dans différents endroits, cela s'est fait sans que la population en ait connaissance. Cela s'est fait ainsi chez nous, cela s'est fait ainsi ailleurs. Donc, le référendum devrait s'appli-

quer partout. Que l'on consulte la population. A-t-on tellement peur de consulter la population? Le gouvernement considère-t-il que le peuple du Québec n'est pas assez intelligent pour se faire une idée sur cette question? Le gouvernement considère-t-il que le peuple du Québec ne mérite pas d'être consulté sur cette question?

M. Boudreault: On a eu notre mandat le 29 octobre.

M. Samson: Non, M. le Président. On s'est contenté d'aller chercher, par toutes sortes de moyens, de l'appui populaire en 1973, mais en évitant d'amener cette question sur la place publique.

Je dis qu'au moins le gouvernement, à ce moment-ci, devrait accepter de payer les frais de spécialistes que nous pourrions faire comparaître devant cette commission parlementaire pour parler contre la fluoration et nous dire quelles sont les raisons d'ordre scientifique.

Quant à moi, je n'ai pas à invoquer des raisons d'ordre scientifique. Je vous l'ai dit au début: Ce qui nous préoccupe, ce sont les libertés individuelles. Mais puisque le débat semble vouloir s'orienter de façon scientifique, à des témoignages scientifiques, il nous faudra opposer d'autres témoignages scientifiques en ce qui concerne cette partie du débat. On va s'occuper de l'autre partie du débat, mais en ce qui concerne cette partie, on a le droit de le demander, et il n'est pas exclu dans les possibilités d'une commission parlementaire de faire comparaître des spécialistes et de défrayer le coût de ces spécialistes, ce n'est pas exclu. Je vous réfère, M. le Président, aux nombreux débats de l'Assemblée nationale où, à différentes reprises, nous avons adopté des motions de fond, des motions de députés qui ont ordonné la tenue d'une commission parlementaire sur différents sujets. Je cite notamment la commission parlementaire, par exemple, du travail, de la main-d'oeuvre et de l'immigration concernant les fameux permis de construction et l'autre commission parlementaire du travail, de la main-d'oeuvre et de l'immigration concernant ce qui se passe à la Commission des accidents du travail. A chacune de ces motions, et je vous réfère aux débats de l'Assemblée nationale, il est dit que la commission aura le pouvoir d'entendre et de convoquer toute personne jugée utile.

Nous l'avons fait également à l'occasion d'une motion que nous avions présentée en juin 1973, quand nous voulions la convocation de la commission des richesses naturelles aux fins de faire entendre les représentants de la Société de la baie James — toute personne jugée utile — des entrepreneurs, des représentants des travailleurs et, évidemment, en payant les frais de ceux que la commission déciderait de faire entendre. Cette motion avait été adoptée à l'unanimité parce que nous avions retiré la date dans notre motion. Dans notre motion, nous avions mis "sans délai", et comme nous avions accepté de retirer le "sans délai", le gouvernement lui-même avait accepté cette motion.

C'est donc dire qu'il n'est pas exclu, dans les règles de pratique que nous avons, de faire venir, devant la commission, des gens qui viendraient comparaître. D'autant plus, M. le Président, que, même avec le nouveau règlement de l'Assemblée nationale, il est dit, dans les tout premiers articles de ce règlement, que la procédure de l'Assemblée nationale du Québec, article 3, est réglée, premièrement, par des lois; deuxièmement, par des règlements; troisièmement, par des règlements adoptés pour la durée d'une seule session; quatrièmement, par des ordres spéciaux adoptés par l'Assemblée dont l'effet est limité aux matières pour lesquelles ils sont votés et, cinquièmement — c'est cela que je voudrais souligner, M. le Président — par des précédents établis par suite de l'interprétation des lois et du règlement.

Donc, les précédents établis nous réfèrent à l'ancien règlement beaucoup plus volumineux, qui contenait, je pense, 848 ou 850 articles et, par cet ancien règlement qui découle, évidemment, des traditions du parlementarisme britannique, il est déjà arrivé, dans le passé, qu'un comité ait convoqué devant lui des personnes de l'extérieur du pays et en a payé les frais. Je fais référence au major Douglas en 1935 devant le comité fédéral des banques où le gouvernement fédéral avait accepté, à ce moment, de le faire venir d'Ecosse et de payer les frais.

Je vous dis qu'il n'est pas exclu que c'est possible et que le ministre ne doit pas se défiler devant cette exisgence de l'Opposition qui, je pense, a raison de demander qu'on fasse comparaître devant nous les gens qui pourraient nous apporter certaines lumières et, en tout cas, un son de cloche peut-être différent. Cela ne veut pas dire qu'après avoir entendu ces témoignages, la commission n'est pas maître de ses travaux. Cela ne veut pas dire, après avoir entendu ces témoignages, que les représentants des différents partis politiques, alentour de la table, ne sont pas maîtres de leurs décisions, mais cela veut dire que nous pourrions le faire en meilleure connaissance de cause.

Merci, M. le Président.

Le Président (M. Pilote): Le député de Taillon.

M. Leduc: M. le Président, je crois que la motion — le député de Chicoutimi a parlé de proposition mais, en fait, c'est une motion qui est devant nous — est recevable et l'argumentation qu'a amenée tantôt le député de Chicoutimi était excellente à entendre, mais, en fait, le fait demeure que cette motion est recevable. Le député de Chicoutimi n'avait pas besoin de convaincre les membres de la commission qu'elle est recevable.

Cependant, la seule chose qui m'inquiète et la raison pour laquelle, si nous en venons à un vote, je voterai contre, c'est premièrement, qu'à ce stade-ci de nos travaux, nous nous permettons de privilégier un groupe, les opposants, sans nécessairement s'engager à faire venir d'autres gens.

Deuxièmement, lorsqu'on vient au stade de convoquer des "experts", on commence au point A et on s'arrête où? C'est cela qui m'inquiète. Je crois qu'à chaque fois que nous avons eu une commission parlementaire où nous avons eu à assigner des

gens, de mémoire — je peux me tromper — il était quasi implicite, dans la motion, quels seraient les gens que nous convoquerions, tandis qu'ici on s'embarque un peu dans ce que je pourrais appeler un labyrinthe. C'est là qu'est le danger.

Je crois que, déjà, des organismes ont décidé de se faire accompagner par des experts. Ils sont les bienvenus. Si d'autres gens manifestent — j'ai bien l'impression que, probablement, le ministre serait consentant — d'ici quelque temps et qu'ils veulent se faire entendre ou rencontrer les membres de la commission, de leur propre chef, je pense bien qu'on serait bien mal placé pour refuser de les entendre, mais de là à faire des invitations spécifiques, on s'arrête où? C'est la question que je me pose et je doute d'avoir une réponse qui me satisfera. En conséquence, je voterai contre cette motion.

M. Bédard (Chicoutimi): M. le Président, pour répondre au député, on n'aura pas à se poser la question de savoiroù on s'arrête si on ne commence pas. Il faut quand même poser un geste avant de se poser des questions. Si on invite quelqu'un, quand est-ce qu'on va s'arrêter pour ne pas en inviter d'autres? Il faut quand même commencer par en inviter un. Après cela, on se posera la question à savoir jusqu'à quel point c'est nécessaire d'arrêter. Je prends chaque problème au moment opportun. Je crois que la proposition que nous faisons, nous la faisons en étant convaincus que le gouvernement ne peut pas refuser cela, d'autant plus — je n'ai pas élaboré là-dessus, mais mon collègue en a touché un mot tout à l'heure — que le principe de ce projet de loi est d'imposer obligatoirement la fluoration, ce qui veut dire que le seul débat qu'il y aura sur cette question est celui que nous avons à compter d'hier jusqu'à l'adoption de la loi.

Si le principe de la loi consacrait ce que je pense qu'il serait nécessaire du point de vue démocratique, la possibilité pour des populations d'être consultées et d'accepter ou de refuser, à ce moment-là, peut-être que l'urgence serait moins grande de recourir dès maintenant à des experts qui ne soutiennent pas seulement un côté de la médaille, mais qui également viennent nous montrer l'autre côté de la médaille. Mais comme il n'y aura qu'une période très restreinte qui va s'écouler entre le moment présent et l'adoption de la loi, et comme l'idée du gouvernement est de l'imposer, nous sommes d'autant plus responsables, comme membres de cette commission, de devoir, au nom de cette population à qui on veut imposer une mesure, prendre tous les moyens pour nous renseigner afin de prendre la décision adéquate et, par le fait même, renseigner également cette population.

Il est clair, et je le redis, que ce que ce projet de loi n'a pas, c'est qu'il n'a aucune couleur démocratique. C'est clair. On l'impose. C'est ce que fait ce gouvernement. A plusieurs reprises depuis un certain temps — cela ne fait quand même pas longtemps que je siège ici en cette Chambre, mais les exemples ne manquent pas pour le prouver — il semble donner pour habitude d'imposer, de consulter le moins possible, d'avoir toujours peur de la population.

M. Leduc: M. le Président, j'invoque le règlement.

M. Bédard (Chicoutimi): Si vous permettez, je vais vous donner...

M. Leduc: J'invoque le règlement. Le député de Chicoutimi n'a pas droit, j'imagine que c'est de bonne foi, de dire que ce gouvernement ne consulte pas. Il n'y a pas un gouvernement qui a eu autant de commissions parlementaires pendant des mois et des mois. C'est exactement ce que vous avez dit.

M. Bédard (Chicoutimi): Non.

M. Leduc: Non, c'est faux ce que vous avez dit, je vous dis que c'est quelque chose qui est faux. On n'a jamais eu autant...

M. Bédard (Chicoutimi): Une question de privilège.

M. Samson: Une question de privilège.

M. Leduc: II n'y a pas de question de privilège en commission parlementaire.

M. Samson: Une question de privilège, M. le Président.

M. Leduc: II n'y a pas de question de privilège.

M. Samson: J'invoque mon privilège en vous posant une question de règlement, parce que le député n'a pas le droit, M. le Président, vous le savez très bien d'ailleurs, d'interrompre un opinant à moins que ce soit pour lui poser une question à ce moment-ci ou à moins que l'opinant viole le règlement lui-même. Ce que fait le député, il a le droit...

M. Leduc: L'opinant viole le règlement parce qu'il a fait une affirmation qui est fausse.

M. Samson: M. le Président, ce que fait le député, il a le droit de le faire en vertu de l'article 96, rectifier des propos, lorsque le député aura fini son intervention, mais non pas avant. Vous connaissez tellement bien le règlement, M. le député de Taillon, que vous devriez savoir cela.

M. Leduc: D'accord.

Le Président (M. Pilote): Le député de Chicoutimi.

M. Bédard (Chicoutimi): Si le député de Taillon n'est pas d'accord, ce n'était pas une question de règlement qu'il a soulevée et il aura l'occasion de répondre.

Des Voix: Passons.

M. Bédard (Chicoutimi): Mais je tiens à lui rappeler, en le disant, je plaide simplement sur le fond de la motion que j'ai présentée, M. le Président. Je

tiens à dire que ce n'est pas une fausseté dans mon esprit quand je dis que ce gouvernement consulte de moins en moins la population, qu'il a une attitude de gouvernement qui a peur de la population, que ses projets de loi font en sorte que lorsqu'il y a le moindrement la possibilité de consulter la population, il ne le fait pas. Les exemples en sont nombreux, même si cela ne fait pas longtemps que je suis dans cette Chambre.

Une Voix: Prouvez-le!

M. Bédard (Chicoutimi): Je vais vous en donner. Juste avant les Fêtes, qu'est-ce que vous avez eu? Des fusions forcées. On n'a pas consulté la population, dans toute la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean où on a forcé les fusions. Aucune consultation. Vous en avez eu quand cela a été le temps d'imposer le bill 22. C'est évident. Vous avez également procédé de la même manière quand cela a été le temps de publier des règlements pour les handicapés sociaux. Lorsque le gouvernement s'est aperçu qu'on venait contester devant la commission parlementaire, on a arrêté les travaux de la commission. Ensuite, les handicapés se sont vus collés avec des règlements qu'ils n'avaient pas le choix d'accepter ou de ne pas accepter. Vous avez en quantité des exemples de ce gouvernement qui, à mon humble opinon, bâtit le Québec beaucoup plus à coups de hache qu'à coups de démocratie ou de gestes démocratiques. Concernant ce projet de loi, l'attitude du Parti québécois et de l'Opposition officielle en est une d'opposition sur le principe. La meilleure preuve en est que, lorsque le projet de loi 31 a été présenté qui prévoyait une consultation de la population, l'Opposition, le Parti québécois, qui n'était pas l'Opposition officielle à ce moment-là, était pleinement d'accord sur le projet de loi. Devant ce même projet de loi, quant au contenu qui est présenté, mais où on ne prévoit pas de référendum ou de possibilité pour la population d'en sortir, de ne pas accepter cette mesure, si elle ne le veut pas, ceci explique notre opposition qui en est une au niveau du principe démocratique de la démarche du gouvernement.

M. le Président, d'autant plus que le gouvernement, par la loi 88, veut faire l'imposition obligatoire, également parce qu'il y aura un temps très court qui va s'écouler entre maintenant jusqu'à l'adoption de la loi et q ue la population n'aura pas la possibilité de s'exprimer, je crois qu'à ce moment-là nous ne serions, à mon sens, pas sérieux. Nous serions également irresponsable si nous nous privions du moyen que nous avons d'avoir — au moins d'essayer — devant nous un expert qui me semble valable — les avis sont partagés, on l'a vu cet après-midi — qui est l'expert auquel se réfèrent presque tous les groupes qui sont contre la fluoration.

Je ne vois pas comment, étant sérieux et responsables, on pourrait se priver et priver la population d'entendre ce que cet homme de science pourrait avoir à nous dire.

Le Président (M. Pilote): L'honorable ministre des Affaires sociales.

M. Forget: M. le Président, après avoir entendu les derniers exposés de nos collègues de l'Opposition, je ne puis que déplorer le ton qu'ils apportent dans ces discussions et je désire les assurer que ce n'est pas à coups de déclarations démagogiques qu'ils vont me persuader du bien-fondé de leur position.

S'ils croient que dans cette démarche que nous entreprenons par profonde conviction — il y va de l'intérêt de la population québécoise, de sa santé — nous allons nous prêter à ce jeu et favoriser, par une action tout à fait exceptionnelle, un spectacle auquel va se prêter un soi-disant scientifique, alors que le groupe qui s'en réclame a jugé bon, pour des raisons qui sont les siennes, de ne pas le faire venir, de ne pas le faire témoigner en sa faveur, je pense qu'ils se trompent grandement.

Je n'ai aucune intention de céder à ces chantages, parce que c'en sont, qui veulent faire paraître notre attitude comme une attitude d'autoritarisme injustifié, qui veulent accréditer, sous le couvert d'une lutte pour les droits fondamentaux relativement à la fluoration, des conceptions politiques auxquelles ils sont attachés pour d'autres raisons. Ils veulent accréditer l'idée d'un attachement viscéral du Parti québécois à un référendum, pas pour l'intérêt qu'il a sur le sujet dont nous discutons ici, mais pour un tout autre objet, pour un tout autre motif. Alors, je ne me prêterai pas du tout à ces manoeuvres, et je les condamne, parce que ce à quoi on assiste aujourd'hui, c'est un petit groupe de nos collègues de l'Assemblée nationale qui sont prêts à faire passer leurs intérêts partisans au-dessus de la santé de tous les Québécois.

A mon avis, il s'agit là d'une manoeuvre tout à fait déplorable qui n'est pas digne d'un membre de l'Assemblée nationale.

M. Samson: Est-ce qu'on doit considérer...

M. Bédard (Chicoutimi): J'imagine que le ministre sait, lorsqu'un député pose un geste qui n'est pas digne de l'Assemblée nationale, qu'il doit avoir des recours pour le remaner à la raison.

M. Samson: Est-ce qu'on doit considérer, M. le Président... Est-ce que je peux poser une question au ministre?

Le Président (M. Pilote): Dans votre optique...

M. Samson: Je peux poser une question au ministre? Est-ce qu'on doit considérer la dernière déclaration du ministre comme étant une accusation de sa part, du fait que les membres de l'Opposition sont indignes de siéger à l'Assemblée nationale?

M. Forget: J'ai parlé d'un comportement. M. Samson: Alors, vous...

M. Bédard (Chicoutimi): Autrement dit, démagogiquement.

M. Samson: Vous l'avez fait, comme le dit le député de Chicoutimi, démagogiquement, mais vous n'oserez pas porter d'accusation.

Est-ce que le ministre porte l'accusation que les membres de l'Opposition sont indignes de siéger à l'Assemblée nationale?

M. Forget: M. le Président, le piège est vraiment trop gros. Je rappellerais le député de Rouyn-Noranda au calme, à la sérénité qui lui convient normalement très bien et dont il pourrait faire bénéficier nos travaux. Je sais qu'il peut faire la distinction entre un comportement responsable et un comportement irresponsable et qu'il en donne parfois des échantillons. Alors je l'invite à faire la même chose dans ce cas-ci.

M. Samson: M. le Président, j'invoque le règlement. Il s'agit ici d'une question de privilège des membres de l'Assemblée nationale. Le ministre a laissé planer un doute et je réfère le ministre aux règlements de l'Assemblée nationale. Il a parfaitement le droit, s'il croit en ces propos — j'en doute — de nous accuser directement d'être indignes de siéger à l'Assemblée nationale. Et en faisant référence au livre de règlements, à ce moment-là, il devra mettre son propre siège en jeu. Nous devrons alors convoquer la commission de l'Assemblée nationale pour vider cette question. Si le ministre veut jouer à ce jeu, j'espère avoir perçu suffisamment de teinte dans ses propos pour en conclure que ses paroles ont peut-être un peu dépassé sa pensée.

Mais je trouverais extrêmement regrettable que le ministre veuille nous amener sur ce terrain. On n'a pas à se gêner, nous avons des mandats et, quelle que soit la façon dont nous déciderons de débattre les sujets à l'Assemblée nationale, ce n'est sûrement pas le ministre des Affaires sociales qu'on va aller consulter pour décider de notre stratégie.

Le Président (M. Pilote): Sur le droit de réplique, l'honorable député de Chicoutimi.

M. Bédard (Chicoutimi): Je serai très bref, M. le Président. Cela ne fait pas longtemps que je suis en politique, mais j'ai déjà entendu pas mal d'exposé démagogiques. Mais un comme celui que vient de faire le ministre des Affaires sociales, en si peu de temps, c'est vraiment un chef-d'oeuvre. Parce que, franchement, c'est mon humble opinion, il faut être malade ou démagogue pour voir un piège dans la proposition que je viens de faire.

Le ministre a déploré le ton que j'avais employé pour le faire. Remarquez que le ton s'est haussé au niveau de la discussion, bien plus à la suite des interventions qu'autrement. Je déplore les arguments qui nous ont été amenés par le ministre des Affaires sociales, qui sont indignes de lui. Je nedirai pas qu'il est indigne de siéger à l'Assemblée nationale, mais je crois que les arguments qu'il nous a apportés sont indignes de lui, pour ce que je le connais.

Des arguments comme le suivant: Si vous voulez avoir des experts, les groupes, cotisez-vous. Un petit $0.10 par chacun de vos membres et emmenez-le, l'expert, alors qu'on parle d'un sujet que je crois important. Et, s'il yen a un dans ce débat qui ne fait aucune démagogie, à mon sens, je ne me pose pas en exemple, mais je vous dis mon état d'esprit... Je pense bien que, en aucune façon au cours de ce débat, je n'ai fait preuve de démagogie ou encore de manque de sérieux ou je n'ai posé des gestes ou dit des paroles qui peuvent laisser croire, comme l'a affirmé le ministre tout à l'heure, que le Parti québécois n'est pas intéressé par le fond même de la question que nous discutons.

Il a affirmé que c'était simplement par démagogie que nous faisons cette proposition qui, à mon sens, est tout à fait normale dans le cadre de la discussion que nous avons. Peut-être que le ministre aurait pu employer cet argument si nous avions fait cette demande dès le début des travaux de la commission, si cela avait paru comme une sorte de tactique de notre part de vouloir accumuler les invitations. C'est arrivé tout simplement, on le sait, suite à certains mémoires qu'on a eu à écouter, parce que les tenants qui sont contre la fluoration — je m'en aperçois, on est tous à même de s'en apercevoir — se réfèrent surtout à cet expert qu'est le Dr Schatz. D'autre part, nous avons entendu le Dr Kleinberg, un invité de l'université, qui a exprimé son opinion sur ce docteur en question et c'est ce qui fait qu'à un moment donné, quelqu'un qui est sérieux se dit: J'ai affaires à des experts. Et même, les experts, entre eux, ont leur opinion sur leur propre compétence mutuelle et respective. Eh bien, je pense que c'est un comportement sérieux que de dire: II est normal que cet expert, qui semble plus valable, soit entendu par la commission ou soit, tout au moins, invité à la commission.

C'est le sens de ma motion: Simplement de l'inviter. Je ne peux même pas concevoir que vous soyez contre le fait de l'inviter. S'il ne vient pas, on s'arrangera autrement. Mais que vous soyez même contre le fait de faire la démarche de l'inviter, je trouve que, justement, vous jouez un jeu qui n'est pas sérieux. Quand l'Opposition officielle fait cette demande, elle le fait sérieusement, elle ne joue pas un jeu.

Il n'est pas question d'un commencement de stratégie, d'inviter qui que ce soit, n'importe qui à cette commission, mais pour ce qui est du Dr Schatz, l'Opposition officielle y tient.

Motion pour entendre le Dr Schatz

Le Président (M. Pilote): Est-ce que les membres sont prêts à se prononcer sur cette motion? Nous allons passer au vote. La motion se lit comme suit: Que cette commission décide d'inviter officiellement le Dr Schatz à venir témoigner devant elle, concernant la fluoration des eaux de consommation. C'est bien cela?

Le Président (M. Pilote): M. Chagnon (Lévis)?

M. Chagnon: Contre.

Le Président (M. Pilote): M. Bellemare (Rosemont)? M. Bellemare (Johnson)? M. Bédard (Chicoutimi)?

M. Bédard (Chicoutimi): Pour.

Le Président (M. Pilote): M. Bonnier (Taschereau)? M. Boudreault (Bourget)?

M. Boudreault: Contre.

Le Président (M. Pilote): M. Charron (Saint-Jacques)? M. Dufour (Vanier)? M. Forget (Saint-Laurent)?

M. Forget: Contre.

Le Président (M. Pilote): M. Leduc (Taillon)?

M. Leduc: Contre.

Le Président (M. Pilote): M. Saint-Germain? M. Marchand (Laurier)? M. Samson (Rouyn-Noranda)?

M. Samson: Pour.

Le Président (M. Pilote): M. Verreault (Shefford)?

M. Verreault: Contre.

Le Président (M. Pilote): Est-ce que vous permettez à M. Dufour, qui était retenu... Alors, M. Dufour (Vanier)?

M. Dufour: Je suis contre.

Le Président (M. Pilote): La motion est rejetée. M. Bonnier est contre. La motion est rejetée par sept contre deux.

Est-ce que les membres veulent continuer de poser des questions?

M. Bédard (Chicoutimi): On va lire le dossier technique, seulement sur un côté.

M. Samson: M. le Président...

Le Président (M. Pilote): L'honorable député de Rouyn-Noranda.

M. Samson: J'aimerais poser une question au Dr Bohémier. Est-ce que votre mouvement aurait les moyens d'inviter le Dr Schatz et de défrayer le coût de ses déplacements?

M. Bohémier: Notre mouvement est un mouvement essentiellement bénévole. Les organisations qui en font partie ne feraient absolument rien, n'ont rien à payer comme cotisation. C'est un mouvement qui s'est organisé essentiellement sur le plan idéologique. Je pense qu'en affirmant cela, cela répond à votre question.

M. Samson: Est-ce que vous auriez évalué le coût de ce genre d'invitation?

M. Bohémier: Non, nous n'y avons pas pensé. Le professeur Schatz demeure à Philadelphie. Je ne sais pas si cela peut vous indiquer quelques orientations.

M. Bédard (Chicoutimi): Est-ce qu'il enseigne toujours à l'endroit que vous mentionnez dans votre mémoire?

M. Bohémier: II est professeur àTemple University.

M. Samson: Est-ce que vous avez eu des communications avec le Dr Schatz? Est-ce que vous sauriez nous dire si ce dernier accepterait l'invitation qui pourrait lui être faite?

M. Bohémier: II est venu à Montréal l'été dernier. J'ai eu l'occasion de le rencontrer. Nous n'avons pas discuté, évidemment, de la possibilité pour lui de venir devant une commission, puisque celle-ci n'existait pas, sur cette question précise. Personnellement, je pense qu'il accepterait avec plaisir l'invitation. Je connais ses vues et l'intérêt qu'il porte à la question de la fluoration. J'ai souligné qu'il avait publié de nombreux travaux et sur la question des dents en général et de la fluoration en particulier. Je pense qu'il serait particulièrement intéressé à présenter son point de vue.

M. Samson: Est-ce que vous auriez, en tant que front commun antifluoration, d'autres personnes, d'autres experts qu'il vous semblerait utile d'entendre devant cette commission?

M. Bohémier: Personnellement, je pense que le professeur Schatz serait la personne la plus qualifiée pour présenter — et je I ai dit tantôt — le point de vue des "antifluorationnistes".

M. Samson: Selon vous, il ne serait pas absolument nécessaire de faire appel à d'autres personnes pour venir nous donner un témoignage d'experts, dans le même sens que votre mémoire?

M. Bohémier: Non, je pense qu'il connaît parfaitement bien la question et qu'il pourrait la vider quant au point de vue des "antifluorationnistes".

M. Bédard (Chicoutimi): S'il était entendu, vous auriez la conviction que ce que vous défendez a eu l'occasion d'être défendu par quelqu'un qui est capable de le faire.

M. Bohémier: Oui, je suis d'accord avec vous qu'un front commun serait parfaitement... Je trouverais parfaitement justifiable, acceptable et exhaustive, si vous voulez, quant à lui, l'intervention du professeur Schatz.

Le Président (M. Pilote): D'autres questions? On vous remercie, messieurs, ainsi que...

M. Bédard (Chicoutimi): C'est-à-dire que j'avais posé une question lors de...

M. Bohémier: Vous m'aviez posé une question au tout début, avant que nous levions l'assemblée. Est-ce que vous pourriez la résumer?

M. Bédard (Chicoutimi): C'est parce que, lorsqu'on a entendu l'Ordre des dentistes du Québec, hier, plusieurs se sont exprimés dans le sens que cela faisait bien longtemps qu'ils travaillaient à sensibiliser la population sur les effets bénéfiques de la fluoration. Mais ils devaient constater que les efforts qu'ils avaient faits pour informer la population se soldaient par une sensibilisation très peu avancée de cette population. A un point tel qu'ils abondaient dans le sens d'une attitude pessimiste qui va jusqu'à dire: Si on ne l'impose pas obligatoirement, ça ne se fera pas. Il y aura des débats sur la place publique et, encore une fois, ça ne pourra pas s'appliquer. Vous avez dit au début de votre exposé que vous aviez l'intention, comme front commun, de continuer votre sensibilisation de la population sur cette question, avec les idées que vous avez, et que vous l'aviez fait aussi dans le passé, depuis un certain temps. Je voulais savoir quels sont les résultats que vous pouvez percevoir, s'ils sont perceptibles et si vous êtes aussi pessimistes que les dentistes sur la capacité d'une population de comprendre là où se trouve son mieux-être si on lui donne de l'information valable qui lui fait voir les deux côtés de la médaille.

M. Bohémier: Je pense avoir établi à plusieurs reprises au cours des réponses que j'ai pu donner aux membres de la commission que, fondamentalement, nous étions essentiellement orientés vers les libertés démocratiques. Personnellement, je suis absolument convaincu que tout individu intelligent peut comprendre, si on lui expose convenablement une situation, le bien-fondé de cette situation. Nous n'avons pas trouvé, nous, particulièrement difficile d'expliquer aux gens ce que nous croyons être les méfaits de la fluoration.

M. Bohémier: Bien sûr, notre attitude serait de respecter la décision populaire. Ceux parmi nos membres, les gens qui sont groupés autour du Front commun contre la fluoration, ceux qui ne voudraient pas vraiment consommer de l'eau fluorée devraient trouver d'autres moyens pour ne pas en consommer. Ce que je ferais personnellement. Maintenant, nous serions pénalisés; nous payons des taxes, comme l'a souligné tantôt le maire de Tracy, pour que nos aqueducs nous fournissent de l'eau qui soit pure. Ces gens, je pense, seraient pénalisés.

M. Boudreault: M. le Président...

Le Président (M. Pilote): Le député de Taschereau a demandé la parole.

M. Bonnier: Je ne voudrais pas couper la parole au député de Bourget. J'ai une seule question à poser. Lors des différentes études ou des présentations que nous avons, il y a beaucoup d'insistance sur la q uestion de la carie mais très peu sur les effets secondaires au niveau de l'environnement; or, dans votre mémoire, vous soulevez cette question. Est-ce qu'à votre avis, à part l'opinion qui a été émise par les trois spécialistes de Laval à savoir qu'il ne fallait pas prendre à la légère les effets que cela pourrait avoir sur la faune aquatique, il y a eu des études ou est-ce que vous en avez faites? Parce que vous mentionnez qu'un de vos membres disait qu'il prépare une étude sur la survie...

M. Bohémier: Survie de l'humanité.

M. Bonnier: C'est un sujet fort important. Est-ce que dans votre étude vous avez un chapitre là-dessus? Est-ce que vous avez fait quelques études là-dessus ou est-ce que vous connaissez des études dans ce domaine des relations entre fluor et faune aquatique?

M. Bastien: J'ai déjà commencé cela il y a plusieurs années et cela va entrer dans mon livre, la Survie de l'humanité. C'est consacré au fluor exclusivement, c'est une recherche sérieuse de plusieurs années. Ce n'est pas...

M. Bonnier: Vous-même avez fait des recherches?

M. Bastien: Oui, c'est ma recherche; même s'il y a des citations d'auteurs classiques, le travail est personnel et le tout est un contexte, c'est le mien.

M. Bohémier: M. le député, si je peux maintenant vous répondre au nom du Front commun contre la fluoration, j'aimerais souligner, quant à votre question, que le professeur Albert Schatz a fait de nombreux travaux quant à l'écologie face au problème de la fluoration. Il a fait des travaux, non pas uniquement sur la question de la carie dentaire ou l'hygiène dentaire, mais aussi sur des aspects très précis de la pollution par le fluor dans l'environnement.

M. Boudreault: M. le Président, je voud rais vous faire part qu'on a apporté à mon attention tout à l'heure qu'il y avait d'autres personnes dans cette salle qui devaient nous présenter des mémoires. Je crois qu'on va se réveiller dans le même cas que M. Kleinberg, on va être pris à les entendre à la dernière minute parce qu'ils ont des heures d'échéance pour s'en retourner. Je ne sais pas s'il n'y aurait pas moyen de demander à ces messieurs de passer ces gens? Est-ce que vous avez objection?

Le Président (M. Pilote): Est-ce qu'il y a d'autres questions?

Une Voix: J'ai fini, moi.

M. Boudreault: Si c'est terminé...

M. Bédard (Chicoutimi): Je n'ai pas d'autres questions.

Le Président (M. Pilote): On vous remercie, messieurs, de votre mémoire.

M. Bohémier: C'est nous qui vous remercions.

Le Président (M. Pilote): La commission va le prendre en considération. J'inviterais le Dr Paul Simard, directeur de l'Ecole de médecine dentaire de l'université Laval, à venir continuer la présentation de son mémoire.

M. Simard: Le groupe des médecins me demande s'il pourrait passer avant nous. Je ne sais pas si les membres de la commission seraient d'accord. Nous serions prêts à accéder à cette demande puisqu'il y a déjà longtemps qu'ils attendent. Ils demeurent à l'extérieur. Je suis prêt à laisser la place et à revenir un peu plus tard si les membres de la commission sont d'accord.

Le Président (M. Pilote): Pas d'objection? J'inviterais le Dr Augustin Roy, président de la Corporation professionnelle des médecins du Québec, à venir présenter son mémoire.

M. Boudreault: M. le Président, est-ce qu'on a des gens de l'extérieur du Québec dans cette salle?

Le Président (M. Pilote): Je l'ignore. J'inviterais le Dr Roy à identifier les personnes qui l'accompagnent.

Corporation professionnelle des médecins du Québec

M. Roy (Augustin): M. le Président, M. le ministre, MM. les membres de la commission parlementaire. Je suis le Dr Augustin Roy, président de la Corporation professionnelle des médecins du Québec. Je suis accompagné par le Dr Reynald Mo-rency, spécialiste en anatomie-pathologie à l'Hôpital de l'Enfant-Jésus et professeur à l'université Laval; le Dr Yves Warren, spécialiste en néphrologie, chef de service en néphrologie à l'Hôtel-Dieu de Québec et professeur à la faculté de médecine de Laval; le Dr Marc Bouchard, spécialiste en biochimie, médecin, chef du département des laboratoires de l'Enfant-Jésus; du Dr Paul-Emile Roy, anatomo-pathologiste, professeur à l'université Laval; du Dr Laurent Dufour, pédodontiste en charge de la dentisterie pédiatrique à l'Ecole de médecine dentaire de l'université Laval et au CHUL, et du Dr Luc Tra-han, professeur de biochimie orale à l'Ecole de médecine dentaire de l'université Laval.

Messieurs, avant de parler du bill 88, je serais tenté de philosopher un peu sur la nature de notre système parlementaire, parce que j'ai trouvé la journée — non seulement moi mais plusieurs de mes confrères — extrêmement frustrante et désapoin-tante, mais je vais m'en tenir au bill 88.

Consciente de ses responsabilités vis-à-vis de la population du Québec en matière de santé, la Corporation professionnelle des médecins du Québec se présente devant vous pour appuyer, sans réserve, le projet de loi no 88 en ce qui concerne plus spécifiquement la section traitant de la fluoration des eaux de consommation. Les doyens des quatre facultés de médecine du Québec appuient également notre prise de position qui est semblable à celle de toutes les organisations dentaires et médicales importantes de l'Amérique du Nord.

Ce n'est pas pour protéger leurs intérêts personnels que les dentistes — que je tiens à féliciter personnellement de toute la prime qu'ils se sont donnée pour préparer un dossier sur la fluoration des eaux de consommation — et les médecins s'entendent pour recommander au gouvernement du Québec l'instauration, la plus rapide possible, d'une telle mesure; c'est uniquement parce que la démonstration scientifique de l'efficacité de la fluoration des eaux de consommation nous satisfait et que la santé publique nous tient à coeur. Nous sommes heureux que le ministre des Affaires sociales ait le courage de rendre obligatoire la fluoration de l'eau potable, sachant fort bien que cette mesure essentielle de santé publique a ses détracteurs dans le monde entier.

Nous avons eu, aujourd'hui, le Front commun contre la fluoration qui en a parlé toute la journée. Je ne dirai pas que ces gens sont ignorants, irresponsables ou criminels, parce que je suis persuadé qu'ils sont sincères avec eux-mêmes, mais j'espère qu'ils rectifieront leur tir devant le flot d'arguments scientifiques apportés devant cette commission, qu'ils cesseront cette bataille d'arrière-garde et qu'ils se rallieront à notre opinion.

Ces détracteurs dans le monde entier sont ceux-là qui ont combattu également les moyens de prévention aussi reconnus que la vaccination et l'immunisation. Où en serions-nous sans ces mesures importantes? Il y a longtemps qu'on ne parle plus de variole au Québec; pourtant, des épidémies ont fait des milliers de morts au cours du siècle dernier. Une épidémie, à Montréal, en 1885, a fait 5,000 morts. On n'en parle plus, c'est disparu, à cause de la vaccination.

Qu'on se rappelle la poliomyélite, communément appelé paralysie infantile. Plusieurs de nos concitoyens en portent encore les marques et les séquelles. Pourtant, elle est aujourd'hui pratiquement disparue depuis l'utilisation de vaccins très efficaces. Que nous arriverait-il si nous cessions la pasteurisation du lait? L'incidence de la tuberculose et de là fièvre typhoïde, pour ne nommer que deux maladies, remonterait en flèche. Pourtant, cette mesure a été violemment combattue lors de son instauration.

Ce n'est pas notre intention de démontrer en détail la valeur scientifique de la fluoration des eaux de consommation. D'autres organismes l'ont fait abondamment avant nous et d'autres le feront également.

Un nombre impressionnant d'articles et de volumes ont été publiés sur ce sujet. Nous notons en particulier la monographie de l'Organisation mon-

diale de la santé parue en 1972 ; j'engagerais tous les membres de cette commission à lire ce document avec beaucoup d'attention. 93 spécialistes de divers pays ont participé à la préparation de cette étude impressionnante. Il est abondamment prouvé que l'ingestion régulière d'une eau contenant 1.2 partie par million de fluor réduirait la carie dentaire dans une proportion de 60% à 65% des cas, sans causer d'effets secondaires. Quand on compare le coût minime d'une telle mesure préventive (environ douze à quinze cents par personne par année, en tenant compte de l'inflation) au coût moyen annuel des frais dentaires de chaque individu (trente dollars et plus et même quarante dollars), on doit conclure qu'une province comme le Québec n'a pas les moyens de ne pas se payer la f luoration de ses eaux de consommation, surtout lorsqu'on tient compte du mauvais état de la dentition d'une bonne partie de la population du Québec, condition mauvaise qui a été démontrée hier, et surtout dans les milieux défavorisés pour qui nous nous battons ici aujourd'hui.

Il est important, par ailleurs, qu'un bon contrôle, une bonne vérification du fonctionnement de l'équipement servant à la fluoration puisse être assurée et, également, que la compétence de ceux qui font fonctionner ces instruments soit vérifiée.

Nous voulons terminer sur ce sujet en répondant rapidement à ceux qui s'opposent à cette mesure en prétendant qu'il s'agit d'une atteinte à leur liberté. C'est vrai, mais ne faut-il pas payer un certain prix pour vivre en société?

Connaissent-ils, eux, un meilleur moyen de diminuer grandement la carie dentaire chez notre population ? Les experts sont unanimes à affirmer que la meilleure méthode de fluoration est celle qui consiste à ajouter une certaine quantité de fluorures à l'eau potable. Encore là, cela a été abondamment prouvé, au cours de la journée d'hier, cela le sera sûrement encore dans les jours à venir.

M. le ministre, la Corporation professionnelle des médecins du Québec vous incite à voir à ce que soit mise en application la fluoration obligatoire des eaux de consommation. L'immense majorité des gens du Québec vous en sera reconnaissante. Pensons aux 100 millions d'Américains, aux 7,500,000 Canadiens et millions d'autres personnes dans le monde entier qui boivent de l'eau fluorée qui n'est absolument pas dommageable dans des conditions normales. Ainsi, le Centre d'intoxication de l'hôpital Sainte-Justine pour les enfants, à Montréal, n 'a relevé aucun cas d'intoxication au fluor, secondaire à l'ingestion d'eau fluorée dans les municipalités où la fluoration est existante. De même, le département de pathologie de l'Université de Montréal, par l'entremise de son chef, m'a fait parvenir un rapport après une étude, démontrant que jamais aucun cas de mortalité par l'utilisation exagérée de fluorure n'a été décelé dans la région de Montréal, de même qu'à l'Institut de médecine légale.

Peut-être le ministre pourrait-il, en même temps, voir s'il est possible d'étendre la couverture des soins dentaires jusqu'à l'âge de douze ans, couverture qui est actuellement donnée jusqu'à l'âge de huit ans. Ce serait là, évidemment, une autre mesure qui aiderait notre population de jeunes à maintenir une bonne santé dentaire.

Finalement, sur un autre sujet de ce projet de loi, nous désirons attirer l'attention du ministre des Affaires sociales sur le Daragraphe "L" de l'article 1 qui définit un studio d'esthétique. Ce projet de loi no 88 est un projet de loi qui amende la loi 30 sur la santé publique. Le ministre n'a sûrement pas voulu inclure dans cette définition un cabinet de médecin. Par exemple, le "peeling" et la greffe des cheveux, dont il est fait mention dans cet article, sont des actes chirurgicaux qui ne peuvent être faits que par un médecin. Quant à I'électrolyse, il s'agit également d'un acte médical qui pourrait être confié à une personne qualifiée sous la responsabilité et la surveillance d'un médecin. Nous croyons donc que lorsqu'il définit "studio d'esthétique", le ministre a à l'esprit un endroit où sont fournis des soins de beauté et où l'on vend diverses crèmes de valeur variable. Nous demandons donc au ministre de bien vouloir réviser cette définition pour qu'elle n'entre pas en conflit avec les dispositions d'autres lois et que, en même temps, elle assure la protection du public dans le domaine de l'esthétique, domaine important où il est presque impossible pour un profane et même un expert de faire la distinction entre une personne compétente et une autre qui ne l'est pas. Il est grandement temps que le législateur fasse des règlements sur les studios d'esthétique. Cette initiative du ministre mettra de l'ordre dans un domaine où règne le désordre. Nous le félicitons de cette initiative et espérons que le gouvernement actuel du Québec instaurera la fluoration obligatoire des eaux de consommation dans le plus bref délai possible. Merci.

Le Président (M. Pilote): L'honorable ministre des Affaires sociales.

M. Forget: Je vous remercie, Dr Roy, pour cette présentation qui nous réconforte, sans aucun doute, dans notre projet d'instaurer la fluoration. J'aimerais, puisque vous êtes accompagné de spécialistes en néphrologie et en pathologie, que vous commentiez peut-être avec l'aide des personnes qui vous accompagnent, d'une part, les allégations qui sont contenues dans le dossier technique du ministère des Affaires sociales relativement aux effets, par exemple, sur les personnes qui sont affligées d'une affection rénale ou qui subissent un traitement de dialyse rénale, des affirmations assez catégoriques sont faites dans ce dossier, selon lesquelles ces procédures et ces pathologies ne sont pas affectées de façon adverse par la présence de fluorure dans l'eau de consommation; et, d'autre part, que vous commentiez aussi, si cela vous est possible, des déclarations qui ont été souvent citées, peut-être hors contexte, et qui sont attribuées à des pathologistes, relativement à la fluoration, encore une fois, de façon générale, relativement à la détérioration possible du milieu ambiant.

M. Roy (Augustin): Mais c'est que le Dr Warren a commencé!

M. Morency (Reynald): Oui. Tout d'abord, pour

ce qui est des pathologistes, disons que le point de vue qui est généralement accepté actuellement, c'est qu'à la concentration de 1.2 partie par million, véritablement, il n'y a pas d'effet toxique véritable décelable chez les patients. En fait, plusieurs patients ont subi des autopsies. De toute façon, on n'a pas trouvé d'effet toxique à cette concentration et la majorité des auteurs dans la littérature s'entendent là-dessus.

Cependant, ce sur quoi nous voulons insister, c'est quand même que cette concentration doit être bien contrôlée de telle façon qu'on ait véritablement que 1.2 partie par million dans l'eau potable. C'est le point de vue, actuellement, des pathologistes. Là-dessus, je peux peut-être donner la parole au Dr Paul-Emile Roy, qui est à ma droite, c'est-à-dire à la droite du Dr Roy, et auquel vous faites peut-être allusion en parlant des rapports de certains pathologistes.

Le Président (M. Pilote): Le Dr Roy.

M. Roy (Paul-Emile): Les commentaires que nous avons faits dant les journaux étaient surtout éclairés par un souci de contribuer, comme scientifiques, à un raisonnement qui pourrait, selon nous, être peut-être positif. C'est pourquoi nous avons pensé soulever certaines choses qui nous paraissaient de base, pour éclairer la population. Bien sûr que le fait de ma présence ici, aujourd'hui, montre que ce n'est pas équivoque et q ue je suis favorable à l'application de la fluoration.

C'est pour une raison qui sort, d'une façon assez patente, de la littérature à ce sujet, et cela peut se résumer en très court, c'est le fait que la fluoration semble retarder les caries dentaires dans 60% des cas, d'une part, et, d'autre part, qu'il y a au moins 100 millions de personnes en Amérique du Nord dont l'eau est fluorée. Les rapports relatant des maladies sont très peu nombreux. Alors, on est en face ici d'une disproportion sûrement assez importante en faveur de la fluoration, si on considère que là on semble corriger un défaut très grand sans créer de défaut de quelque gravité que ce soit.

Ceci pour ce résumé-là, qui, de toute évidence, nous paraît trop simple; de toute évidence, la situation n'est peut-être pas aussi simple que cela. La première observation a trait au fait qu'il ne semble pas y avoir de maladies qui sont relatés dans les différents centres d'Amérique. Bien sûr, il n'y a pas eu de fléau important, d'épidémie de cancer ou de crise tragique de mortalité, aucune maladie de cet ordre. S'il y a une pathologie là des maladies autrement dit, je pense que personne n'est capable de dire qu'il n'y en a pas. Mais, s'il y en a, il faudrait que ce soit dans le genre d'une action plus subtile sur, par exemple, le processus de vieillissement ou de la sénilité un peu plus précoce ou l'aggravation peut-être de certains processus pathologiques qui sont normalement attribués à d'autres causes.

Dans ce secteur, on ne sera jamais capable d'avoir le fond de la vérité là-dessus parce que je pense que les scientifiques, quels qu'ils soient, prix Nobel ou pas prix Nobel, ne sont pas capables de mettre la main dans le feu pour dire qu'il n'y a abso- lument pas de danger pour la santé, en aucune façon, avec les taux de fluor préconisés.

La deuxième question a trait à l'efficacité de contrôler la carie, qu'on dit être de 60%. Il y a des rapports là-dessus. Je pense qu'on est obligé d'en tenir compte. Mais je pense que ce serait naïf de croire que c'est cela qui va se produire ici. La réponse, c'est qu'on ne le sait pas probablement — je ne sais pas si le ministre a une réponse précise là-dessus à donner dans le moment — mais, si on peut risquer une prédiction, le résultat va tomber autour de 30% ou 40% ou quelque chose de ce genre, si on veut être réaliste.

Je pense que 60% à 65% sont des chiffres optimistes. J'en viendrais tout de suite à la recommandation qui découlerait de cela: Si le ministère s'occupe de bien voir et de bien contrôler s'il y a vraiment 25% et plus de protection contre la carie dentaire dans la province, dans les cinq prochaines années, grâce à cela, je pense que le programme aura été justifié. Si on arrive à des améliorations qui sont n'importe où en bas de 25%, dans les cinq prochaines années, je pense que cela n'en vaudrait pas le coût. Je pense qu'il faudrait, à ce moment-là, arrêter le programme immédiatement parce que là les équivalences entre les avantages et les risques ne seraient plus en faveur de la fluoration mais probablement en faveur de l'autre côté à cause de beaucoup de grands inconnus qui semblent planer autour de ce sujet.

Alors, je crois bien que le ministère devrait absolument, au départ, établir des contrôles sur l'efficacité du programme sur la carie dentaire et arriver avec des résultats au bout de cinq ans, de façon à pouvoir juger par la suite. Je pense aussi que le ministère devrait probablement profiter de l'occasion pour commencer des recherches dans le milieu scientifique québécois touchant la fluoration. Je pense que ce serait un moment tout à fait bien choisi. On a une faculté d'art dentaire qui ouvre ses portes à Laval. Je pense que les gens de l'art dentaire de l'université Laval, en association avec d'autres centres, pourraient peut-être accomplir des travaux qui seraient complémentaires à une étude épidémiologique, comme je viens de le mentionner.

Comme conclusion à tout cela, je vais réitérer la recommandation du Dr Roy, à ma gauche, qui parle au nom du Collège des médecins, voulant que la dose, la teneur dans l'eau soient extrêmement bien contrôlées et vérifiées avec la plus grande sévérité.

M. Forget: Je vous remercie, Dr Roy. J'aimerais peut-être vous poser quelques questions en rapport avec ce que vous venez de dire, de manière à bien préciser le sens de vos remarques. Je crois que nous les avons écoutées avec beaucoup d'intérêt.

Tout d'abord, j'aimerais peut-être préciser, pour que ce soit bien clair, que vous êtes un des auteurs qui ont été abondamment cités par le groupe qui vous a précédé, je crois, et qui a publié, il y a quelque un mois ou deux mois, ou quelques semaines disons, un article dans le Devoir. C'est bien celai

Je comprends que vous avez exprimé, relativement aux effets du fluor, une réserve qui est basée

sur un fait, évidemment, qui est vrai universellement, à l'effet qu'il n'est pas possible, je crois, scientifiquement ou autrement, de prouver un négatif, c'est-à-dire de faire la preuve qu'une chose n'existe pas. Par exemple, il y a un vieux proverbe qui dit qu'on n'a jamais prouvé que Jupiter n'existait pas. Alors, on a cessé d'y croire tout simplement. Et, de la même façon, par une démonstration scientifique, c'est assez difficile de démontrer qu'une chose n'existe pas, qu'une conséquence n'existe pas parce que, pour faire une démonstration, il faut, au contraire, démontrer, par une chaîne de causalités, qu'une certaine cause produit un certain effet.

Or, si on ne peut pas avoir d'effet parce que, notre hypothèse, c'est qu'il n'y en a pas. Alors, cela ne se prouve pas parce qu'il n'y a rien qu'on puisse vérifier. Dans cette mesure, ne croyez-vous pas que c'est peut-être très exigeant, dans le fond, de supposer une preuve négative? Si je vous ai bien compris, parce que je pense bien qu'on est d'accord là-dessus, vous avez formulé un certain nombre d'hypothèses qui ont fait l'objet d'une extrapolation par ceux qui ont pris vos propos littéralement mais ce n'était, en tout état de cause, que des hypothèses que vous avez formulées, des hypothèses qui, à cause de leur nature négative, ne peuvent pas être vérifiées.

M. Roy (Paul-Emile): M. le ministre interprète bien mes paroles par ce qu'il vient de dire; je les répéterais à peine autrement.

M. Forget: D'accord. Alors, pour ce qui est de l'efficacité, ce qui est l'autre aspect de vos remarques, vous dites: II ne serait peut-être pas réaliste d'anticiper une efficacité des deux tiers au Québec. Je pense qu'il est vrai qu'il ne faut pas s'attendre à une efficacité des deux tiers immédiatement. Tout le monde admet que l'effet principal de la fluoration, en plus de son effet topique, qui, évidemment, est valable dès le départ et pour tout le monde, c'est un effet dans la formation de l'émail dentaire et c'est particulièrement important à la période de formation des dents. Donc, il va falloir attendre un certain nombre d'années pour que des enfants soient nés dans ces conditions pour pouvoir vérifier l'effet sur la prévention de la carie dentaire.

Il reste qu'au Québec même il y a des villes qui ont l'eau fluorée depuis longtemps. Il y en a une en particulier qui afait l'objet d'une étude comparative, la ville de Berthier, je crois, où on a montré un effet très comparable à l'effet observé aux Etats-Unis quant à la réduction de la carie dentaire chez les enfants de cette ville. Donc, est-ce que votre réserve est basée sur une prudence disons de scientifique ou si elle est basée sur l'observation d'autres villes au Québec où ces taux ne se seraient pas vérifiés après une application d'une longueur comparable?

M. Roy (Paul-Emile): Disons que c'est une prudence qui est basée sur les deux, sûrement sur une prudence de scientifique. 60% de résultat, cela me paraît tellement trop beau que dans les meilleures expériences, où les résultats sont flagrants, on n'obtient souvent pas des résultats aussi clairs que ceux-là.

Maintenant, pour ce qui est des travaux qui ont été faits ici, dans la province de Québec, sans vouloir trop discuter là-dessus, j'aimerais bien qu'on commence les études d'une façon un peu plus provinciale.

M. Forget: Cela ne sera possible qu'avec la fluoration de tout le monde.

M. Roy (Paul-Emile): C'est cela.

M. Forget: Je vous remercie, Dr Roy. Sur l'autre aspect — enfin, là je parle à l'autre Dr Roy, au président de l'ordre — croyez-vous qu'il soit opportun de faire un commentaire puisque vous avez avec vous, un néphrologue? Il serait peut-être important que nous ayons le bénéfice de cela.

M. Roy (Augustin): D'accord. Est-ce que le Dr Warren...?

M. Warren (Yves): Au point de vue de la néphrologie, c'est-à-dire au point de vue de maladie du rein, il semble assez évident que la fluoration, aux taux qui sont utilisés dans l'eau potable, n'augmente pas l'incidence de maladies rénales, d'une part.

Par contre, il y a beaucoup de controverse qui ont eu lieu quant à l'effet des fluorures chez des patients souffrant d'insuffisance rénale, c'est-à-dire ayant le principal organe démonctoire atteint. Je pense que le mieux qu'on puisse dire est que les études à ce niveau ne sont pas concluantes. Il semble, en effet, que les taux varient peu, peuvent parfois augmenter, sont parfois diminués dans le sang. Une chose est claire: II semble y avoir augmentation légère et, dans certains cas, assez marquée, de fluor dans les eaux.

Quelles sont les conséquences à long terme de ceci? Je pense qu'il est encore trop tôt pour se prononcer. De toute façon, je pense qu'il faut dire qu'il n'existe, jusqu'à maintenant, même dans l'insuffisance rénale, aucune évidence d'une diminution de vitalité ou d'une augmentation de morbidité ou de pathologie osseuse secondaire à cette accumulation.

Je dois signaler d'ailleurs qu'il ne s'agit pas seulement de la seule substance qui est storée dans les os, dans l'insuffisance rénale, et que la composition des os chez les patients souffrant d'insuffisance rénale ressemble beaucoup à la teneur de l'eau potable qu'ils emploient, qu'elle soit naturelle, fluorée ou autre.

Un autre point qui a été très discuté, qui a d'ailleurs fait l'objet d'études au Canada est l'utilisation des fluorures au moment de la dialyse par rein artificiel. En effet, il faut se rendre compte qu'il s'agit de patients qui n'ont aucune fonction rénale, donc aucune capacité de se débarrasser d'un fluor qu'ils peuvent recevoir au moment du traitement de dialyse. Une étude venant d'Ottawa, entre autres, a cru démontrer que le fluor était responsable de maladies osseuses. Or, je suis heureux de dire que depuis une étude qui a été faite à Toronto — où on a ajouté ou enlevé du fluor à des patients dialyses — a

montré que l'incidence, jusqu'à maintenant, des maladies rénales était exactement la même.

Je dois dire aussi qu'on a eu aussi à Québec une expérience assez particulière, celle d'avoir exactement avec nos malades le même problème qui avait été imputé à Ottawa à la présence de fIuor dans l'eau sans qu'il y ait ou qu'il y ait à peine de fluor dans l'eau utilisée par la ville de Québec.

En conséquence, il nous semble que ce rôle est probablement secondaire, d'autant plus que l'attitude actuelle de tous les néphrologues qui font de la dialyse, c'est-à-dire du rein artificiel, est d'utiliser un traitement préalable de l'eau, soit par déonisation, soit par d'autres techniques, afin d 'utiliser une eau absolument pure et, à ce titre, ceci ne causerait aucun problème pour les patients qui pourraient se dialyser, mais possiblement, cependant, une augmentation modérée des coûts de la dialyse.

M. Forget: Je n'ai pas d'autres questions, M. le Président.

Le Président (M. Pilote): Le député de Chicoutimi.

M. Bédard (Chicoutimi): M. le Président, j'ai écouté, avec un sourire le Dr Roy louer le courage du ministre des Affaires sociales. Je me disais que la vie change parce que je me remémorais certaines interventions du Dr Augustin Roy, il n'y a pas si longtemps, concernant les projets de loi 42, 93, etc. Mais cela me prouve que c'est sûrement par conviction qu'il est venu nous expliciter son appui à la mesure gouvernementale.

Comme il le sait, au sujet des propriétés bénéfiques du fluor, la discussion n'est pas longue pour autant que je suis concerné, mais je voyais qu'il précisait bien dans son mémoire, au tout début, qu'il appuyait sans réserve le projet de loi qui, comme principe, préconise l'imposition obligatoire de l'eau fluorée.

Je me demandais si le Dr Roy verrait peut-être d'un mauvais oeil le fait que ce projet de loi pourrait prévoir — peut-être, appliquer le programme dans tout le Québec — la possibilité pour une population d'une municipalité concernée de se retirer du programme, si à ce moment, il aurait comme attitude de croire que le projet de loi serait moins bon dans cet esprit.

M. Roy (Augustin): Comme je crois en l'honnêteté du député de Chicoutimi, je suis sûr qu'il va bien me comprendre. A titre de citoyens responsables, il nous fait plaisir, et même nous nous en faisons un devoir, d'appuyer la législation gouvernementale lorsqu'elle est dans l'intérêt public. Si nous nous prononçons en faveur du projet de loi 88, c'est parce que nous y croyons. Je dois préciser immédiatement que, lorsque M. Castonguay avait déposé le projet de loi 31, il y a un certain nombre d'années, nous nous sommes prononcées pour le principe de la fluoration des eaux de consommation avant le dépôt du projet de loi. Nous n'avons fait aucune remarque par la suite, pour la bonne et simple raison que le projet de loi est mort à la première lecture et qu'il n'y a pas eu de commission parlementaire, ni de seconde lecture, et que nous n'avons pas eu à faire de représentations. Si nous avions eu à en faire, nous nous serions justement opposés au projet de loi à cause des mesures qui étaient préconisées dans ce projet de loi, soit le référendum qui le rendait, à toutes fins pratiques, inapplicable. C'est pour cela que je trouve que le ministre actuel des Affaires sociales a un projet de loi énormément amélioré. Vous avez eu la démonstration devant vous aujourd'hui de ce que serait un référendum dans les 1,200 à 1,500 municipalités du Québec sur un tel projet.

M. Bédard (Chicoutimi): Je veux préciser le sens de ma question, Dr Roy. Un référendum ou une consultation de la population pour se retirer du programme, si cette population le désire.

M. Roy (Augustin): Un référendum négatif en ce sens.

M. Bédard (Chicoutimi): Pas pour l'appliquer, pour s'en retirer.

M. Roy (Augustin): Oui, je comprends très bien. C'est déjà une amélioration sur votre pensée d'hier, parce qu'à ce moment on demandait un référendum pour se joindre au plan, mais là je pense que c'est déjà une grosse amélioration. Encore là, je voudrais...

M. Bédard (Chicoutimi): Vous me permettrez, je m'excuse de vous interrompre, peut-être que vous avez perçu cela, mais ce n'est pas une amélioration sur son idée d'hier, parce que...

M. Roy (Augustin): C'était cela votre idée d'hier? J'ai peut-être mal interprété votre pensée à la commission parlementaire.

M. Bédard (Chicoutimi): Je me suis peut-être mal exprimé, remarquez.

M. Roy (Augustin): Je suis très heureux que vous soyez d'accord sur la fluoration obligatoire des eaux de consommation. Ce matin, j'ai passé à une émission de radio, où on m'a posé toutes sortes de questions sur la fluoration. Les mêmes arguments qui ont été invoqués aujourd'hui l'ont été à ce poste de radio, des arguments très démagogiques qu'il est très difficile de réfuter. Tenons compte, en particulier, de l'apathie de la population, pensons au pourcentage du vote aux élections municipales, combien d'énergie il faut dépenser pour organiser une élection provinciale ou fédérale, pensons aux énergies que l'on dépense et au temps que l'on prend seulement pour venir défendre un projet de loi ici dans l'intérêt du public, un projet de loi qui a une dimension sociale tellement grande qu'on pense qu'il est de l'intérêt public, qu'il y va du bien commun que le gouvernement prenne une mesure énergique.

Après tout, un gouvernement n'est-il pas élu pour gouverner? Je pense qu'il doit prendre les mesures pour le faire. Même si un référendum négatif serait moins pire que ce qui était préconisé dans le bill 31, encore là je me dis que, si on est d'accord sur le principe que la fluoration de l'eau, c'est bon, alors pourquoi ne pas la rendre obligatoire sans possibilité d'en sortir, surtout si on veut aider toute notre population du Québec, si on veut la mettre à l'abri de certains démagogues, si on veut surtout aider les pauvres, les défavorisés, ceux qui ont la plus mauvaise dentition. En fait, c'est dans cet intérêt que, je pense, le législateur a le droit, et non seulement le droit, mais le devoir d'imposer une loi parce que le bien commun l'exige. Il y a d'autres exemples de lois où on impose des restrictions aux libertés individuelles des gens, parce que c'est le prix, comme je le disais, qu'il faut payer pour vivre en société. Des débats semblables ont eu lieu lorsque d'autres mesures ont été introduites, mesures qui sont d'ordre très émotif et qu'il est très difficile de discuter sur la place publique lorsqu'on a affaire à un petit groupe d'individus qui amènent des arguments démagogiques, surtout lorsque toute la preuve n'a pas encore été faite que, sur un recul d'une trentaine d'années, c'est à 100% efficace.

On est raisonnable, on dit 60%. Le Dr Paul-Emile Roy est encore plus restrictif, mais, quand même, je me fie à toutes les données ailleurs, au Québec, au Canada, aux Etats-Unis, où, après des études scientifiques, on en arrive à une réduction de la carie dentaire de 60%. Je dis sur cela, en tant qu'ancien hygiéniste dentaire, ancien hygiéniste médical, médecin d'unité sanitaire, qu'il faut évidemment ajouter des mesures d'hygiène de la bouche, enseigner, éduquer notre population à bien se brosser les dents, à manger des aliments sains, à éviter les sucreries. Il faudrait peut-être sortir les machines à coke des écoles et ces choses, j'en suis parfaitement d'accord. Mais commençons par instaurer la fluoration à un coût minime pour la population du Québec, pour que nos enfants n'aient pas la même bouche que nous et nos parents avons, pour que nous ne soyons plus des édentés perpétuels et pour que nous ayons une dentition convenable, surtout en tenant compte de la santé dentaire, mais aussi en tenant compte de l'aspect esthétique, qui prend de plus en plus de valeur dans notre société.

M. Bédard (Chicoutimi): Vous pensez que, malgré un plaidoyer aussi éloquent que celui que vous venez de nous faire, que vous feriez à la population, celle-ci ne serait pas capable de voir que peut-être son mieux-être est dans la voie que vous indiquez.

M. Roy (Augustin): Oui, mais, M. le député de Chicoutimi, je suis sûr que, si j'allais dans votre comté avec vous, je serais capable de gagner la population de votre comté, mais, malheureusement, j'ai moi aussi des contraintes. J'ai du travail à faire. Je ne peux pas travailler à temps plein à une campagne de fluoration à l'échelle provinciale. Lorsque la preuve est faite, c'est établi que c'est une bonne mesure, je pense que le gouvernement a le devoir de légiférer le plus rapidement possible. Après tout, cela fait 20 ans qu'on parle de cela. A Pointe-Claire, à Montréal, l'eau est fluorée depuis 1955; à Laval, depuis 17 ans. Les gens qui sont là se portent bien. Des gens d'autres provinces, d'autres pays se portent bien. Je ne vois pas pourquoi les gens des autres municipalités du Québec ne pourraient par jouir de la même protection.

Je suis un citoyen de Montréal. Je paie des taxes à Montréal. Le service de santé de Montréal s'est prononcé en faveur de cette mesure et, par une action dictatoriale, le maire de Montréal s'est opposé à cette mesure. Je pense qu'il doit y avoir une autorité supérieure qui doit, à un moment donné, agir et décider, parce que c'est elle qui a eu le mandat de la population de gouverner.

M. Bédard (Chicoutimi): Remarquez que cela fait des milliers d'années qu'on parle des libertés personnelles, qu'on considère comme des libertés fondamentales. Ce n'est pas une raison pour arrêter d'en parler et de ne pas faire des efforts pour en promouvoir le respect. Je voudrais poser une autre question au Dr Roy.

M. Roy (Augustin): Paul-Emile.

M. Bédard (Chicoutimi): Dans votre exposé, vous avez dit très clairement qu'il y avait des dangers, si je vous ai bien compris, qu'il ne fallait pas minimiser concernant la possibilité de sénilité précoce, également, je crois, de vieillissement des os et peut-être d'autres éléments dont vous avez parlé mais, entre autres, ces deux-là. Vous avez également dit que c'était clair dans votre esprit que c'était être beaucoup trop optimiste que de penser à une amélioration de 60%, n'est-ce pas? C'était clair. Vous avez dit que, s'il y avait, pour employer vos termes, une amélioration de 25%, ce serait déjà probablement suffisant pour justifier l'application de ce projet de loi et l'action gouvernementale et que, si cela devait être en bas de cela, cela ne vaudrait vraiment pas la peine d'appliquer ce projet de loi. Jusqu'où va votre conviction que c'est dans l'ordre des possibilités que cela puisse être une amélioration de moins de 25%?

M. Roy (Paul-Emile): Le peu de travaux que j'ai vus... Remarquez que mes études là-dessus n'ont pas été exhaustives, loin de là. J'ai regardé par-ci, par-là les rapports. Certains disent 60%, ce sont les plus optimistes. Il y en a d'autres qui sont en bas de cela. Il yen a un certain nombre qui disent qu'il n'y a rien. En gros, il semble clair qu'il y a une amélioration. Dans le moment, on est en train de parler des chiffres les plus optimistes qui circulent dans la documentation. C'est presque trop beau pour être vrai. C'est à peu près cela qui...

M. Bédard (Chicoutimi): Je note vos réticences.

Le Président (M. Pilote): D'autres questions? Le député de Rouyn-Noranda.

M. Samson: Je voudrais m'adresser au Dr Augustin Roy. J'ai écouté avec beaucoup d'attention le

mémoire qu'il nous a présenté. En page 1 du mémoire, à la fin de la page, on écrit et je cite: "Sachant fort bien que cette mesure essentielle de santé publique a ses détracteurs dans le monde entier." Je voudrais poser la question suivante au Dr Roy. Est-ce que vous voulez dire par là, je ne suis pas absolument convaincu de ce que vous voulez dire, que le fait de ne pas préconiser les mêmes idées que vous préconisez présentement ferait que ces gens qui s'y opposent sont automatiquement des détracteurs? Est-ce que le fait de s'opposer pour des raisons peut-être aussi scientifiques que les vôtres, cela devient des détracteurs?

M. Roy (Augustin): C'est la question du député de Rouyn-Noranda, à lequel je vais répondre avec beaucoup de plaisir. Le sens de détracteur, c'est le sens de dissident. Je crois aux libertés, je crois à la dissidence. Je sais qu'il y a des personnes qui n'ont pas la même opinion, mais c'est la minorité des personnes. Ce que nous disons dans notre mémoire, c'est que dans le monde entier, sur cette question de la fluoration, comme sur les questions de la vaccination, de l'immunisation, de la pasteurisation du lait, des grandes mesures de santé publique, il y a toujours eu des gens qui se sont opposés. Généralement, cela a toujours été les mêmes groupes qui se sont opposés aux mêmes mesures. Je les appelle des détracteurs, ce sont des dissidents, je respecte leur opinion, je ne la partage pas. Je dis que c'est une minorité de personnes. Je pense qu'un gouvernement légifère pour la vaste majorité des invididus et légifère dans leur intérêt public. Je respecte la dissidence, mais je ne peux en aucun point partager le fait que des gens nient encore les effets bénéfiques d'une mesure aussi valable que la fluoration des eaux de consommation.

M. Samson: Est-ce que cela voudrait dire, Dr Roy, que vous vous associez à l'idée qu'étant donné qu'il n'y a qu'une minorité dans votre monde qui s'y oppose cela justifie de l'imposer? Est-ce que c'est cela que j'ai bien compris?

M. Roy (Augustin): En fait, si nous acceptons le système de la démocratie, il faut que nous le vivions. A ce moment, c'est la majorité qui doit mener. Evidemment, la majorité a le devoir de prouver qu'une mesure est bonne. Je pense que c'est ce qu'elle fait aujourd'hui. Nous avons entendu déjà un bon nombre de mémoires. La preuve en est qu'il y a, je pense, 18 groupes qui se présentent ici devant cette commission parlementaire, je ne sais pas combien s'opposent à la fluoration. Par le nombre de mémoires, le nombre de personnes, vous allez voir en général qui est minoritaire et qui est majoritaire. Je pense qu'il faut respecter l'opinion du monde scientifique, médical et dentaire, qui a mis beaucoup d'énergie, beaucoup de temps à étudier cette question, non pas pour protéger ses intérêts, mais encore une fois pour protéger les intérêts de la collectivité, du monde entier. Lorsque je vois cette étude où 93 personnes de différents pays se prononcent de façon très scientifique, je pense que je dois m'incliner et dire: Voici des gens qui sont sérieux, qui ne sont pas des chevaliers d'industrie, mais qui sont des scientistes, qui admettent que cette mesure a des effets bénéfiques. Ils sont honnêtes, ils ne disent pas que c'est à 100% valable. Ils sont conservateurs, je pense, 60%. Je suis un peu plus libéral dans le sens, sur le mot "fluor"...

M. Samson: On espère que c'est seulement dans ce sens.

M. Roy (Augustin): Parce que je suis apolitique pour le moment. Mais, dans ce sens, je vais jusqu'à 65% et peut-être, si nous avions l'énergie et la conviction de bien éduquer notre population, nous pourrions aller à des chiffres encore plus élevés en ajoutant avec le fluor des mesures de prévention, d'hygiène dentaire.

J'en profite pour dire juste un mot sur les pilules, les pastilles de fluor. Quelqu'un a justement parlé de fluorure de potassium, alors que le fluorure de sodium était très dangereux. Je répète une expérience dont a fait mention hier le Dr Gosselin, le président de l'Ordre des dentistes. J'ai trois enfants au lieu de quatre et mes trois enfants ont pris — un en prend encore — des pastilles de fluor. En l'occurrence, c'est du caridium et du caridium, si ma mémoire est bonne, c'est du fluorure de sodium, ce que certaines personnes appellent vulgairement du poison à rats ou du poison. J'en donne à mes enfants et je n'ai pas l'intention de les empoisonner. Mes deux filles les plus vieilles ont de très bonnes dents et mon fils de huit ans également, ils prennent leurs pastilles de caridium tous les soirs, mais je dois dire que cette mesure que je prends pour la protection de mes enfants, c'est une mesure très assidue et c'est très difficile de s'assurer chaque soir qu'ils prennent leur pilule jusqu'à un certain âge. Même rendu à dix ou douze ans, il faut encore vérifier si les dents sont bien brossées.

Je dis et je pense que la majorité de la population n'aurait peut-être pas le temps et la patience de faire ce que certaines personnes et moi-même faisons. Mais si je le fais, c'est parce que j'y crois et je crois que cela n'empoisonne pas mes enfants. Au contraire, cela leur est bénéfique. J'aurais aimé, dans mon enfance, pouvoir jouir d'une même mesure.

M. Samson: Dr Roy, si je m'associe à votre déclaration, étant donné qu'il semble y avoir une majorité parmi vos gens qui est d'accord sur la fluoration et qui trouve que c'est convenable qu'en toute démocratie il faut respecter cette majorité, est-ce que, à ce moment, il ne serait pas valable, pour ma part, de vous demander de vous associer également à la même pensée en ce qui concerne d'autres sortes de gens, c'est-à-dire l'ensemble de la population? Vous avez défendu avec beaucoup d'ardeur le fait qu'il fallait respecter la majorité en démocratie. Vous l'avez défendu en ce qui concerne le monde médical, mais est-ce que vous ne trouvez pas que envers ceux qui prétendent qu'il vaut mieux demander l'avis de la population, à ce moment, il faudrait aussi respecter les mêmes règles démocratiques? Autrement dit, ce que je veux dire par là, est-ce que vous

acceptez le fait que si on vit en démocratie, il faut en accepter les règles d'un bout à l'autre de la ligne? Est-ce que vous acceptez cela?

M. Roy (Augustin): J'ai répondu tout à l'heure. M. Samson: Non, je m'excuse.

M. Roy (Augustin): La démocratie est le système que nous vivons.

M. Samson: Peut-être que je ne me suis pas fait bien comprendre.

M. Roy (Augustin): J'ai bien compris.

M. Samson: Vous avez longuement répondu sur un aspect autre que celui-là, mais sur cet aspect de ma question, si vous semblez exiger d'autres gens qu'ils respectent les règles démocratiques quand cela fait votre affaire, il faudrait peut-être aussi penser à les respecter même si cela ne fait pas votre affaire dans d'autres domaines.

M. Roy (Augustin): Je suis bien d'accord, j'ai dit que je respecte la démocratie, donc le jeu de la majorité d'un gouvernement dûment élu. Si jamais un gouvernement adopte cette loi — j'espère fortement qu'elle sera adoptée — et qu'un autre gouvernement voulait la modifier, un gouvernement démocratiquement élu pourrait le faire. Ce serait à lui de prouverque la mesure n'est pas bonne, alors que nous disons qu'elle est bonne. A l'heure actuelle, nous avons assez tergiversé, c'est le temps d'agir. Il y en a assez d'énergie de dépensée sur ce sujet.

En fait, aujourd'hui, vous me parlez de la question des libertés, je suis d'accord sur cela, mais, sur la question des référendums, si on allait à l'absurde, un gouvernement ne pourrait pas gouverner, adopter des lois sans recourir à des référendums.

M. Samson: C'est à...

M. Roy (Augustin): Je suis de Montréal. Quand le maire Drapeau a décidé d'avoir les Jeux olympiques, il n'a pas passé de référendum, et quand il a décidé d'avoir Expo 67, il n'a pas passé de référendum. Il a été élu, il gouverne...

Une Voix: Comment l'appelle-t-on?

M. Roy (Augustin):...et il prend ses responsabilités. Quand le gouvernement veut adopter des projets de loi, c'est à lui de les adopter. S'il adopte de mauvaises lois, évidemment il en fera rapport à la population. C'est tout.

M. Samson: M. le Président...

M. Bédard (Chicoutimi): Comment appelle-ton...

M. Samson: ... oela m'oblige à tenir compte intégralement de la déclaration que vient de faire le Dr Roy. Il cite en exemple la ville de Montréal, qui n'a pas fait de référendum, alors que quelques minutes plus tôt il a pratiquement et presque directement accusé le maire de Montréal d'être un dictateur. Alors, à ce moment-là, à quel moment doit-on prendre votre déclaration? Vous sembliez tantôt ne pas être d'accord et là vous semblez être d'accord en ce qui concerne la mesure qu'il a prise pour les Jeux olympiques. Cela revient peut-être à ce que je disais tantôt. Quand cela fait votre affaire, la démocratie, vous y al lez et, quand cela ne le fait pas, vous n'y allez pas.

Est-ce que vous acceptez ceci? Je vais vous poser une autre question. Est-ce que vous acceptez qu'un gouvernement, sur une mesure aussi importante que celle-là, se doit d'imposer la mesure même s'il n'a pas un mandat pour le faire? C'est-à-dire que, vous le savez, le jeu de la démocratie veut que les partis politiques présentent un programme. Quand c'est à l'extérieur du programme, on ne peut pasdire que le gouvernement a eu un mandat. Est-ce que je dois comprendre que vous, vous considérez que même sans mandat le gouvernement doit y aller?

M. Roy (Augustin): S'il fallait que tous les gouvernements élus soient obligés de remplir leurs programmes électoraux, évidemment je pense que peu de gouvernements seraient réélus. Ecoutez, un programme, c'est un programme. Et la société change, la société évolue. Ce n est pas une promesse formel le de dire: Si je suis élu, je m'engage à... Alors, un gouvernement est élu pour gouverner, prendre des mesures dans l'intérêt de la population. Alors, la question de la fluoration a été discutée. Elle a été recommandée antérieurement. Le gouvernement n'a jamais dit qu'il ne présenterait pas de mesures contre la fluoration. Il n'a jamais dit qu'il ne fluorerait pas les eaux de consommation. Au contraire, M. Castonguay a dit que c'était une de ses priorités. Alors, il n'y avait rien qui laissait croire que le gouvernement avait changé d'opinion.

Je pense qu'un gouvernement, c'est fait pour gouverner. Si cela gouverne mal, la population n'a qu'à le changer.

M. Samson: Si on prend pour principe, Dr Roy, que ce qui n'est pas partie d'un programme d'un gouvernement ou de son mandat, si on prend comme exemple...

M. Bonnier: Je soulève une question de règlement. On est encore engagé dans le même débat qu'hier. Je pense qu'il est convenable pour les membres de la commission de savoir le point de vue des experts sur cette question mais pas d'argumenter trop longtemps parce que là c'est en dehors de leurs compétences spécifiques. Ils ont été invités ici en tant que médecins et non pas en tant que politico-logues.

NI. Samson: M. le Président, je continue avec votre permission.

Le Président (M. Pilote): II est six heures et nous aurons à revenir siéger ce soir, à huit heures. Il nous reste encore quatre ou cinq mémoires à en-

tendre. Est-ce qu'on ne pourrait pas conclure avec ce groupe?

M. Roy (Augustin): Est-ce que ce serait possible, s'il y a des questions d'ordre scientifique et médical, de nous les poser? C'est le temps. Nous pouvons répondre à tous vos arguments.

M. Samson: M. le Président, malheureusement, vous avez déclaré qu'il est six heures. On est prisonnier du règlement. On reviendra à huit heures.

M. Boudreault: ...de les faire revenir.

Le Président (M. Pilote): On pourrait aller jusqu'à six heures et cinq minutes ou six heures et dix minutes.

M. Forget: ...avons été assez généreux avec le premier groupe...

M. Samson: Ecoutez, M. le Président, si vous me demandez d'aller jusqu'à six heures et cinq minutes ou six heures et dix minutes, je n'ai pas d'objection. J'ai quelques questions à poser et cela va durer cinq à dix minutes.

Le Président (M. Pilote): Est-ce qu'il y en a d'autres?

M. Samson: Je vais essayer de les faire durer moins longtemps. D'accord?

Des Voix: D'accord.

M. Roy (Augustin): Posez des questions moins longues et les réponses vont être plus courtes.

M. Samson: Ah bien là, je m'excuse, mais je poserai les questions que je devrai poser et prendrai le temps qu'il faut. Si c'est un marathon que vous voulez...

M. Roy (Augustin): D'accord.

M. Samson: Partons du principe qu'un gouvernement qui n'a pas un mandat spécifique, lorsqu'il arrive quelque chose d'urgent, il doit, évidemment, légiférer. Cela est un principe. Mais, dans le cas présent, est-ce que vous étiez — je m'imagine que oui mais en tout cas je vous pose la question pour les fins du journal des Débats — au Québec en 1973?

M. Roy (Augustin): Si j'étais au Québec en 1973?

M. Samson: Oui.

M. Roy (Augustin): Certainement.

M. Samson: Bon, je le savais mais c'est pour les fins du journal des Débats.

M. Roy (Augustin): Oui, oui, d'accord. Vous aussi... pour la deuxième lecture.

M. Samson: A ce moment-là, vous n'êtes pas sans savoir que le même gouvernement — on n'a pas changé de gouvernement cette année — venait de retirer son projet de loi et il n'a pas parlé du tout de cette mesure durant les élections. Il est revenu sans mandat spécifique. A ce moment-là, on tente de nous l'imposer.

Est-ce que vous êtes quand même d'accord avec cette procédure?

M. Roy (Augustin): Ecoutez, je ne me suis pas présenté pour un parti politique. Vous posez une question d'ordre politique. Je pense y avoir répondu tout à l'heure.

M. Samson: Je m'excuse, là.

M. Roy (Augustin): Mais si j'étais...

M. Samson: Dr Roy, vous avez mentionné tantôt le jeu de la démocratie. C'est ça dont je vous parle.

M. Roy (Augustin): Oui. Je vous ai dit que nous étions, en 1973...

M. Bonnier: M. le Président, il me semble qu'encore une fois...

M. Samson: Non, cela va durer plus longtemps. Continuez.

M. Bonnier: ...le député de Rouyn-Noranda...

M. Samson: Continuez, cela va durer plus longtemps.

M. Bonnier: Un instant.

Le Président (M. Pilote): A l'ordre!

M. Samson: Vous ne m'arrêterez pas.

M. Bonnier: M. le Président, à un moment donné, vous allez être obligé de statuer...

M. Samson: Non, non, il n'y a pas de...

M. Bonnier: ... parce que l'on perd royalement son temps. Il faut quand même être franc une fois pour toutes. On l'a perdu hier avec des questions. Moi, je pense que c'est le privilège des membres de la commission de sonder les experts peut-être sur cette question-là, en passant, d'accord, mais pas d'engager une argumentation. A ce moment-là, on perd son temps et on ne se réfère pas à l'objet pour lequel ces gens ont été invités ici.

C'est en vue de leur mandat scientifique et non pas en vue de leurs connaissances politiques...

M. Samson: Bien, M. le Président...

M. Bonnier:... même s'ils ont le droit d'avoir des opinions politiques.

M. Bédard (Chicoutimi): Sur la question de règlement.

Le Président (M. Pilote): Oui, allez-y.

M. Bédard (Chicoutimi): Je suis d'accord — et on l'avait statué hier — que, lorsqu'on a des experts, on s'en tient aux questions scientifiques avec les connaissances que l'on a. Mais, quand ces mêmes experts se permettent d'entrer dans un domaine où ils sont peut-être plus vulnérables, je ne vois pas en quoi on n'a pas le droit de leur poser des questions.

M. Bonnier: Oui, mais pas argumenter.

M. Bédard (Chicoutimi): Si on était simplement...

M. Bonnier: C'est ça que je veux dire.

M. Bédard (Chicoutimi): ... aux témoignages scientifiques qui nous ont été donnés tout à l'heure par pi usieurs des invités q ue nous avons, il n'y aurait pas de problème. Mais, quand on lit le mémoire, on s'aperçoit que le mémoire est entré dans d'autres choses que des questions scientifiques. L'appuyer sans réserve...

M. Bonnier: Notre rôle, à ce moment-là...

M. Bédard (Chicoutimi):... cela veut tout dire. Il y a un principe à une loi et le principe de cette loi...

M. Bonnier: Oui, mais notre rôle, c'estd'essayer de nous informer.

M. Bédard (Chicoutimi): ... il ne faut quand même pas le mettre de côté.

Le Président (M. Pilote): Le rôle de la commission est de se renseigner sur le sujet, sur le fluor, d'abord et avant tout.

M. Dufour: C'est ça.

Le Président (M. Pilote): Ce n'est pas de poser des questions politiques à ceux qui viennent nous rencontrer. J'inviterais les membres de la commission à s'en tenir à se renseigner sur le fluor. Il est vrai que M. Roy a amené un élément de démocratie. J'inviterais les membres à fermer, disons, cette discussion et à poser des questions d'aspect scientifique.

M. Samson: M. le Président, j'invoque le règlement. Le but de la convocation de cette commission n'est pas uniquement de nous renseigner sur le fluor parce que le projet de loi no 88, ce n'est pas le fluor, c'est la Loi modifiant la loi de la protection de la santé publique. C'est ça le projet de loi.

M. Dufour: Pas la santé du gouvernement.

M. Samson: Cela englobe un paquet de choses. Dans ce projet de loi, il y a une imposition. Alors, cela veut dire qu'on a le droit de poser les questions que l'on veut en temps voulu.

Le Président (M. Pilote): A l'ordre! M. Samson: M. le Président,...

Le Président (M. Pilote): A l'ordre! A l'ordre! Je voudrais relever ce qui vient d'être dit. A l'article 9 de nos règlements, c'est bel et bien marqué: "Lors des auditions, le président, en plus de l'exposé, n'autorise que des questions permettant à la commission de se renseigner." Ici, nous avons affaire à des hommes de science. J'inviterais les membres à poser des questions scientifiques.

M. Samson: Je regrette, M. le Président, mais on ne s'en tiendra pas aux questions scientifiques. Ce n'est pas vrai. Personne ne s'en est tenu aux questions scientifiques. On va s'en tenir à ce qu'il y a dans le bill, aux questions que nous avons à poser pour ce qu'il y a dans ce projet de loi...

M. Dufour: Non, mais vous avez la chance de vous renseigner, de vous ouvrir des horizons.

M. Samson: ...no 88.

M. Dufour: Vous avez des spécialistes.

M. Samson: Mais, M. le Président,...

M. Dufour: Profitez-en parce que...

M. Samson: ...si vous voulez éterniser le débat, continuez.

M. Bonnier: Non mais, M. le Président,...

M. Samson: J'en avais pour cinq ou six minutes.

M. Dufour: ...des déclarations antérieures...

Le Président (M. Pilote): A l'ordre! A l'ordre!

M. Samson: J'en avais pour cinq ou six minutes...

M. Dufour: Cela va vous faire du bien de consulter les spécialistes.

M. Bonnier: ...cela fera. M. Dufour: ...psychiatre.

M. Samson: M. le Président, on reviendra à huit heures d'abord.

Le Président (M. Pilote): La commission suspend ses travaux jusqu'à vingt heures.

(Suspension de la séance à 18 h 4)

Reprise de la séance à 20 h 7

Le Président (M. Pilote):A l'ordre!

M. Samson: II n'y a pas de représentant de l'Opposition officielle encore.

Le Président (M. Pilote): L'Opposition officielle, vous allez poser vos questions, j'imagine.

M. Samson: L'opposition naturelle est là! M. Dufour: II manque le PQ, je crois.

Le Président (M. Pilote): Je considère que nous avons quorum. On peut y aller. Je voudrais mentionner que M. Faucher (Nicolet-Yamaska) remplace M. Bellemare (Rosemont).

Est-ce que les membres ont des questions à poser aux représentants des médecins?

L'honorable député de Rouyn-Noranda.

M. Samson: M. le Président, nous étions, lorsque nous sommes partis à six heures et dix minutes environ, dans une discussion des plus intéressantes. Au risque de décevoir peut-être le Dr Augustin Roy, je ne continuerai pas dans le même sens.

Cependant, j'ai noté avec beaucoup d'intérêt les réponses qu'il m'a données. Je voudrais m'adresser, M. le Président, au Dr Roy; à la page 2 du mémoire, vous parlez de vaccination et de maladies contagieuses.

Est-ce que vous estimez que des individus qui ne consommeraient pas d'eau fluorée représenteraient un danger pour la société?

M. Roy (Augustin): Je pense que, honnêtement, je dois dire que non. Il n'y a pas de danger à ne pas consommer d'eau fluorée. Il y a des bénéfices à en consommer, par ailleurs.

M. Samson: D'accord. C'est parce que...

M. Roy (Augustin): Evidemment, il y a des dangers pour...

M. Samson: ...j'ai remarqué...

M. Roy (Augustin): ...le porte-monnaie parce que cela peut coûter plus cher en soins dentaires.

M. Samson: ...que dans votre mémoire vous faisiez référence surtout au cas du vaccin comme mesure pour prévenir des maladies contagieuses, par comparaison, si vous le voulez, pour établir le besoin de l'imposer. C'est surtout dans ce sens que je pose ma question.

Alors, si on part de votre mémoire, si vous nous dites qu'il était justifiable d'imposer un vaccin parce que cela pouvait empêcher des maladies contagieuses de se propager, est-ce que, à ce moment-là, on ne peut pas honnêtement utiliser le même raisonnement quant au fluor? Suivant la réponse que vous me donnez vous-même, cela ne constitue pas un danger au même sens qu'une maladie conta- gieuse, par exemple, par rapport au vaccin qui est nécessaire.

M. Roy (Augustin): Oui.

M. Samson: Je vous dis que c'est nécessaire aussi dans le cas des vaccins.

M. Roy (Augustin): D'accord. Je comprends bien la question du député de Rouyn-Noranda. Les comparaisons sont toujours dangereuses. Lorsqu'on fait ces comparaisons, évidemment c'est pour montrer que certaines mesures d'ordre obligatoire ont été instituées. Il y en a d'autres.

Je pourrais dire l'obligation qu'il y a pour un médecin, par exemple, d'avertir le Bureau des véhicules automobiles du fait qu'une personne est inapte à conduire. Cela ne présente pas de danger pour l'individu. C'est une question de bien commun. Alors, tout ça est une question de dosage de la part d'un gouvernement responsable qui décide si une mesure q ui est bonne, doit être imposée ou non dans l'intérêt de la communauté.

M. Samson: Mais là, Dr Roy, vous m'amenez une autre comparaison.

M. Roy (Augustin): Je le sais, toutes les comparaisons sont boiteuses.

M. Samson: Oui, je l'admets avec vous, surtout lorsque je vous entends! En fait, le genre de comparaison que vous m'apportez n'est pas tellement différent de l'autre. Lorsque vous dites qu'un médecin est obligé de faire rapport, il y va, à ce moment-là d'un danger public, si une personne est inapte à conduire. Alors, ce n'est pas dans le même sens.

Maintenant, vous dites: Si l'on impose la fluoration, c'est un bienfait, ce n'est pas pour empêcher un danger. Est-ce que je vous ai bien compris?

M. Roy (Augustin): Je comprends très bien. On n'empêche pas un danger public, mais on empêche un fléau, une catastrophe au point de vue de la santé de la population. Au Québec, on possède presque le championnat. Alors, on a des études sur la nutrition, des rapports de commissions d'enquête qui ont établi qu'on avait des indices de morbidité très élevés. On est obligés d'admettre que ces statistiques sont véridiq ues. On essaie de les corriger. Imaginez le rôle d'un médecin. Evidemment, c'est principalement un rôle curatif, de soigner. Mais ce serait beaucoup mieux pour la population de prévenir. On a quand même un rôle préventif.

Je crois en la médecine préventive. J'en ai fait dans ma carrière. J'en ai fait, en pratique général, dans votre comté de Témiscamingue, où j'ai débuté dans ma carrière médicale.

M. Samson: Cela est une bonne référence.

M. Roy (Augustin): Cela est une bonne référence. Cela me donne des notes, je suppose!

M. Samson: Cela ne vous nuit pas.

M. Roy (Augustin): Je crois en la médecine préventive. Et en croyant en la médecine préventive, je pense que l'on va éviter une foule de maladies. On peut diminuer l'incidence des maladies cardio-vasculaires, par exemple, avec des mesures de médecine préventive: exercice physique, bonne alimentation, bonnes habitudes de vie. Je pense que tout le monde est d'accord sur ça. C'est de l'éducation. Alors, c'est dans le même sens qu'on dit: Si une mesure qui est prouvée scientifiquement bonne, non dangereuse quand elle est bien appliquée va réduire la carie dentaire de 60% environ et peut-être plus si on ajoute d'autres mesures d'éducation, je me dis pourquoi refuser...

M. Samson: Juste pour ouvrir une parenthèse. C'est parce que je ne veux pas oublier ce que vous venez de dire. Vous parlez de 60%. Est-ce que vous pouvez affirmer cela, hors de tout doute?

M. Roy (Augustin): Hors de tout doute, d'après l'avis de tous les experts compétents qui ont fait des études scientifiques dans le domaine et même des études ici, au Québec...

M. Samson: Je m'excuse...

M. Bédard (Chicoutimi): Voulez-vous dire que M. Roy n'est pas compétent?

M. Roy (Augustin): Oui, je veux dire...

M. Samson: Parce qu'on a entendu l'autre M. Roy nous dire...

M. Roy (Augustin): Oui, M. Roys'estexpriméetil est avec nous. Il est un peu plus conservateur.

M. Samson: Vous l'obligez à respecter la majorité.

M. Roy (Augustin): Ce n'est pas un défaut d'être conservateur. Ce sont ses opinions, que je respecte. L'opinion que j'exprime n'est pas la mienne, c'est celle des experts. Je vous suggère de lire les rapports des experts qui ont fait des études scientifiques sur le sujet et qui en sont tous arrivés à peu près aux mêmes conclusions.

Alors, une mesure semblable, qui va réduire énormément les coûts de santé dentaire, je pense qu'on ne peut pas s'en priver dans le contexte actuel du Québec. Je pense qu'on n'est pas une province assez riche pour se payer le luxe de ne pas avoir une bonne politique de prévention dentaire.

M. Samson: Vous avez sûrement, comme nous, entendu parler... Parce que, si je me rappelle bien, vous nous avez parlé du dossier, préparé par le ministère comme étant valable, excellent, d'ailleurs. Vous avez sûrement entendu parler de l'autre publication du ministère des Affaires sociales: La fluoration, avons-nous les moyens de nous en passer? C'est un passage de cela que je veux relever pour vous demander votre avis. "Ce que l'on ajoute à l'eau, ce n'est pas du fluor à l'état pur mais des sels de des fluorures, en très petite quantité, mais pas plus nocifs que le sel de table". Est-ce que vous êtes d'accord sur ce qui est déclaré dans la revue du ministère des Affaires sociales?

M. Roy (Augustin): Je suis d'accord. Je pourrais peut-être demander à quelqu'un d'expliciter davantage, au point de vue chimique, en ce qui concerne les réactions qui se font dans l'organisme.

Qui est-ce qui veut en dire un mot?

M. Trahan: Voulez-vous répéter votre quest ion?

M. Samson: Oui. Je vais vous citer ce que je lis dans la circulaire du ministère des Affaires sociales, qui s'intitule "La fluoration, avons-nous les moyens de nous en passer?" Je cite un passage: "Ce que l'on ajoute à l'eau, ce n'est pas du fluor à l'état pur, mais des sels de fluor (fluorures), en très petites quantités. mais les plus nocifs que le sel de table." Et le Dr Roy me dit que c'est vrai.

M. Roy (Augustin): C'est vrai. Le sel de table...

M. Samson: Ce n'est pas plus nocif que le sel de table?

M. Roy (Augustin): Je veux juste embrayer la discussion. Le sel de table, c'est du chlorure de sodium, NaCI, si ma mémoire est bonne. Et vous ajoutez du fluorure de sodium, NaS. Alors, de toute façon, c'est une réaction. Ce sont les ions fluor qui comptent. Le sel de table, en fait, il ne faut pas en abuser non plus. Le sel de table, c'est peut-être une des choses que les médecins disent le plus à leurs patients:...

M. Samson: Je sais que lorsqu'on est malade vous nous l'enlevez.

M. Roy (Augustin): Soyez prudents dans l'utilisation du sel de table parce que le sel de table peut causer une rétention d'eau, et le Dr Warren est beaucoup plus compétent que moi pour en parler. Mais, alors, on dit que c'est une question de dosage. Trop de sel, c'est peut-être bien plus nocif que trop de fluor. Cela, peut-être que le Dr Warren...

M. Samson: Vous êtes d'accord sur ce qui est écrit là, que les fluorures utilisés pour la fluoration de l'eau, ce n'est pas plus nocif que le sel de table. Vous êtes d'accord sur ça.

M. Trahan: Aux concentrations qu'on propose de mettre dans l'eau de consommation, ce n'est pas plus nocif...

M. Roy (Augustin): 1.2 partie par million d'eau. M. Trahan: A 1.2 ppm.

M. Samson: Ah bon! à une concentration différente. Est-ce ça que vous voulez dire?

M. Trahan: Oui.

M. Samson: C'est parce que je ne suis pas un médecin, je suis comme le commun des mortels et je lis ça. Je veux bien faire confiance au ministère des Affaires sociales, qui a fait écrire ça. Quand je lis ça: "Ce que l'on ajoute à l'eau, ce n'est pas du fluor à l'état pur, mais des sels de fluor (fluorures), en très petites quantités, mais pas plus nocifs que le sel de table. " Alors, si je me base sur ce qui est écrit, si je ne prenais pas la précaution de vous poser la question, textuellement, si je prenais une cuillère de sel de table et que je mettais ça dans un verre d'eau et que je prenais une cuillère de fluorure de sodium et que je mettais ça dans un autre verre d'eau pour vérifier la véracité des faits de ce q ui est écrit, là je me ramasserais dans le tombeau tout de suite.

Alors, vous voyez que ce que je voulais vous faire dire dans le fond, au sujet de ce qu'il y a dans le dossier du ministère des Affaires sociales, sur lequel tout le monde qui est favorable à fluoration vient s'appuyer. Dans les publications du ministère des Affaires sociales il y a des choses, si on les suivait à la lettre, qui seraient dangereuses pour notre santé. C'est cela que je voulais faire comprendre...

M. Roy (Augustin): C'est une question d'interprétation.

M. Forget: M. le Président, il serait important de ne pas induire en erreur le groupe qui est devant nous; c'est bien indiqué "en petites quantités".II faut lire toute la citation.

M. Samson: Non. M. le Président, j'ai demandé aux experts — parce qu'on m'a demandé tantôt de m'en tenir aux questions scientifiques, cela va me brûler les tripes un peu, mais en tout cas — de nous expliquer ça. Si on n'avait eu cette explication, à la lecture de ça, n'importe lequel des citoyens du Québec, de bonnefoi, pourrait dire: Je fais confiance au ministre des Affaires sociales — en tout cas là, à partir de ce moment, il lui fera peut-être moins confiance. Il nous dit que ce n'est pas dangereux, je l'essaie pour voir si c'est bien vrai. Il ne sera pas là le lendemain matin pour nous dire si c'était vrai! C'est ça que je veux faire ressortir devant la commission.

C'est le même ministère qui prépare les documents, le dossier technique. C'est pour vous démontrer que, moi, je peux mettre cela en doute, une fois qu'on vient de m'expliquer. Il aurait dû être inclus, dans ce que le ministère a publié: A des quantités différentes. Cela aurait dû être marqué. Cela ne l'a pas été. Cela veut dire que, pour le reste du dossier technique, on peut, parce que c'est le même ministère qui l'a préparé, mettre aussi certaines autres pages en doute. Evidemment, je n'ai pas l'intention de tout relire ça avec vous autres et le recommenter. Je pourrais probablement vous poser un tas d'autres questions. Mais je vous remercie, Dr Roy, parce que là vous m'avez drôlement apporté un témoignage qui me fait de plus en plus mettre en doute ce que le ministère des Affaires sociales publie.

M. Roy (Augustin): Je vous ai empêché de vous empoisonner, alors c'est un bon coup que je fais!

M. Samson: Pardon?

M. Roy (Augustin): J'espère que j'ai fait un bon coup en empêchant de vous empoisonner!

M. Samson: Comme vous avez déjà pratiqué dans mon comté, je vous faisais confiance au point de vous consulter.

J'ai maintenant une question que j'aimerais poser au Dr Roy, mais à l'autre Dr Roy, celui qui, tantôt, dans son témoignage, nous a soulevé plusieurs points d'interrogation. Dr Roy, vous êtes bien le docteur Roy qui a écrit dans le journal Le Devoir avec MM. Boutet et Morin? C'est bien cela. Ce n'est pas un article d'un journaliste. C'est vous autres qui l'avez écrit.

M. Roy (Paul-Emile): Disons que j'en prends la responsabilité. Oui.

M. Samson: Bon. D'accord. Dans l'un des paragraphes, vous dites: "Dans la nature, le fluor se retrouve sous forme de fluorospath, un sel de calcium sous forme de cryolithe, un sel composé formé de sodium et d'aluminium ou sous forme d'apatite, un sel composé de calcium et de phosphate. Dans l'éventualité où la fluoration de l'eau deviendrait obligatoire, les grandes alumineries et les grandes aciéries seraient les principaux fournisseurs de ces sels de fluor. Cette substance est présente comme contaminant dans les métaux qu'ils produisent". Puis-je considérer que vous soutenez encore cela?

M. Roy (Paul-Emile): Oui.

M. Samson: D'accord. Un peu plus loin... "Les connaissances actuelles sur les produitsorganiques démontrent cependant que ceux-ci peuvent être chlorés lors du traitement des eaux pour la consommation et que, de façon générale, les produits organiques chlorés sont plus aptes à provoquer le cancer que le produit organique original. Il est plus que probable que le fluor aurait des propriétés semblables, ce qui est inquiétant dans cette perspective. C'est qu'il est maintenant reconnu que, lorsque plusieurs substances aptes à provoquer le cancer se retrouvent dans un milieu donné, leurs effets s'additionnent et produisent les mêmes effets que si une quantité plus grande d'une seule substance était présente. Les études récentes effectuées à la Nouvelle-Orléans semblent démontrer la véracité des observations citées précédemment et devraient inciter à une très grande réserve vis-à-vis de la fluoration des eaux de consommation". Vous soutenez encore la même chose? D'accord.

Un peu plus loin: "Le point de vue écologique ". Je vais en passer parce que... "Les effets désastreux d'une intoxication de la faune marine dans l'estuaire du Saint-Laurent ne sauraient être pris à la légère et devraient inciter à une extrême prudence".

C'est là dessus que j'aimerais avoir plus de précisions. De quelle façon estimez-vous qu'il y aurait ce danger dans le Saint-Laurent? Comment cela pourrait-il provenir?

M. Roy (Paul-Emile): Je n'ai pas de réponse à cela. Evidemment, la question est entièrement ouverte. Il s'agit ici, bien sûr, d'injecter dans le fleuve Saint-Laurent des quantités assez appréciables d'un élément et il y a lieu de se demander ce qui va se passer dans la faune et la végétation aquatiques dans ce milieu.

Je suis sûr que les réponses existent, mais la raison pour laquelle nous avons écrit cela, c'est parce que nous ne les avions pas.

M. Samson: C'est une mise en garde. Etes-vous d'accord avec ceux qui disentque la consommation d'eau potable par les humains est d'environ 1% de l'eau distribuée parles robinets, parexemple, parles systèmes d'aqueduc?

M. Roy (Paul-Emile): Je ne suis pas spécialiste dans cela.

M. Samson: Quelqu'un saurait-il me dire cela?

M. Warren (Yves): C'est aux environs de ce pourcentage. Je n'ai pas le pourcentage exact.

M. Samson: Aux alentours de cela. On peut dire à 1% près ou à 2% près, cela peut-être cela.

M. Warren: C'est dit qu'un faible pourcentage de l'eau sert à l'ingestion. Le reste, évidemment, vous vous en servez pour prendre votre bain, votre douche. Il faut faire la cuisine, etc., mais, même en calculant la perte, c'est quand même économique.

M. Samson: Ce n'est pas tellement de ce point de vue que je veux amener le débat. En demandant au Dr Paul Roy: Puisque vous avez émis certaines inquiétudes dans ce que vous avez écrit concernant la contamination, la pollution possible, peut-être... Je ne sais pas si j'ai bien interprété.

Puisque vous avez émis certaines de ces inquiétudes, seriez-vous d'avis que, s'il y avait dans les égouts, dans l'eau qui retourne dans la nature après utilisation, 1%ou2%d'eau qui aurait été fluorée, cela serait moins dangereux que si 100% de l'eau avait été fluorée?

M. Roy (Paul-Emile): En admettant qu'il y aurait des conséquences néfastes, bien sûr que c'est mathématique.

M. Samson:Toujours en admettant les possibilités et les inquiétudes que vous avez manifestées, cela m'amène à me poser une question. Pourquoi fluorer toute l'eau de façon obligatoire si cela n'est pas nécessaire pour autre chose que la prévention de la carie dentaire? Je verrais mal la ménagère laver ses couches à l'eau fluorée plutôt qu'à l'eau ordinaire et dire: Mon bébé va être mieux traité dans cette eau que dans l'autre. C'est un peu charrier, je l'avoue, je vois le Dr Augustin Roy qui semble sourire. C'est peut-être un peu charrier, mais c'est peut-être aussi pour dire finalement: Pourquoi exiger, de façon obligatoire, 100%, alors qu'il y en aura 1 % qui sera utile? N'y a-t-il pas d'autres moyens? Je pose laq uestion au Dr Augustin Roy.

M. Roy (Augustin): Oui, il y en a d'autres.

M. Samson: Si on tient pour acquis, scientifiquement — je ne suis pas prêt à le tenir pour acquis parce qu'il y a de la contestation et, évidemment, on n'est pas des hommes de science; on ne peut se fai re une idée en partant seulement de ce que vous nous apportez comme témoignage parce que d'autres témoignages contraires nous arrivent. Je pense que vous comprendrez qu'il faut considérer tout le monde. Mais en tenant pour acquis que cela serait valable, à ce moment, n'est-il pas mieux d'utiliser un autre moyen plutôtquede risquer de la pollution par le moyen du retour de l'eau qu'on contamine, si le fluor est considéré, possiblement, comme pollution?

M. Roy (Augustin): II y a plusieurs moyens qui ont été envisagés. En faisant une boutade, si le Québec était le Koweït ou l'Iran ou la Lybie, je dirais: Ayons deux réseaux d'aqueduc, un avec l'eau fluorée...

M. Samson: ... le pétrole...

M. Roy (Augustin): ...et un avec l'eau non fluorée, mais je pense que nous n'avons pas les possibilités de vous payer un tel luxe. On a parlé des autres moyens comme les pastilles de fluor que les parents peuvent faire prendre à leurs enfants. J'ai mentionné les inconvénients que cela comportait. Il a grandement été question hier du lait fluoré, que le député de Chicoutimi a mentionné, qui présente également des inconvénients. C'est une possibilité. Cela présente plusieurs inconvénients: la quantité que cela prend, à peu près quatre pintes de lait par enfant, le fait qu'un certain nombre d'enfants ne boivent pas de lait, le fait qu'un certain nombre d'enfants soient allergiques au lait alors qu'on n'est pas allergique au fluor, contrairement à ce qui a été avancé cet après-midi; il n'y a pas d'allergie au fluor. C'est prouvé scientifiquement. Il y a aussi le fait que la réaction chimique n'est pas la même et l'effet topique n'est pas le même. Je ne sais si quelqu'un veut mettre un peu plus l'accent sur cela. Cela peut être important parce qu'il y a un problème chimique qui est le plus important, à part aussi l'élément... Le Dr Trahan pourrait peut-être mettre l'accent sur ce point.

M. Trahan (Luc): Oui, effectivement. D'ailleurs, c'est mentionné dans le mémoire qu'a déposé l'Ecole de médecine dentaire en introduisant le Dr Kleinberg, qui, en fait, aurait dû être entendu à la commission bien avantqu'on ne parlede cela actuellement. Mais on peut ajouter que l'effet topique du fluor au niveau de la plaque dentaire... Le Dr Kleinberg nous a montré ce qu'était une plaque dentaire. C'est le dépôt de protéines. C'est surtout constitué de bactéries à la surface des dents, qui sont responsables des caries. La plaque dentaire accumule le fluor et l'accumulation de fluor dans la plaque dentaire, selon les études, peut atteindre même jusqu'à 70 ou 80 parties par million dans la plaque dentaire. Cette accumulation de fluor est responsable de l'inhibition des bactéries de la plaque qui sont responsables des caries.

Alors, cette action d'accumulation dans la plaque se produit petit à petit par l'apport constant d'un peu de fluor, de fluorure dans l'eau d'alimentation, dans l'eau de consommation et on n'a pas ces effets quand on prend une pilule de fluorure de sodium une fois par jour. On n'a pas ces effets non plus quand on met du fluorure de sodium dans le lait parce qu'à ce moment le fluorure de sodium forme des complexes avec à la fois et le calcium et les protéines du lait, et le fluor n'est pas libéré au niveau de la bouche. Il est libéré uniquement au niveau du tube digestif et on a une action systématique. On perd l'action topique au niveau de la plaque dentaire.

M. Samson : Dr Roy, vous avez mentionné en me donnant une réponse tantôt que, si on était au Koweït ou dans des pays semblables, on pourrait se payer deux systèmes d'aqueduc et on pourrait avoir de l'eau fluorée et de l'eau non fluorée. Cela veut-il dire que je dois comprendre que vous admettez qu'il y a des gens qui ne voudront pas boire de l'eau fluorée?

M. Roy (Augustin): Qui ne veulent pas quoi?

M. Samson: Qui ne voudront pas boire de l'eau fluorée, une fois qu'elle sera fluorée.

M. Roy (Augustin): Je pense bien que tout le monde doit boire de l'eau. Evidemment, s'ils ne veulent absolument pas en boire, en fait ils n'auront qu'à boire de l'eau embouteillée ou du scotch, d'une certaine façon! Il reste qu'ils boiront l'eau qui est à leur disposition. C'est une question très générale. Je pense qu'il n'y a pas de danger. Nous, on dit qu'il n'y a pas de danger à ce que cette eau soit fluorée et que tout le monde en boive. Il n'y a aucun inconvénient.

M. Samson: Actuellement, l'eau n'étant pas fluorée partout, ceux qui veulent bénéficierdu fluor doivent l'acheter. On est d'accord là-dessus? lls doivent l'acheter eux-mêmes, se le procurer. Une fois l'eau fluorée, ceux qui ne voudront pas boire de l'eau fluorée devront acheter de l'eau.

M. Roy (Augustin): Cette hypothèse que vous posez, malheureusement, ne s'applique pasdans les faits, parce qu'il y a beaucoup de villes où l'eau est fluorée et personne ne refuse de boire de l'eau. C'est une hypothèse qui ne se réalise pas dans la réalité des faits.

M. Samson: Un instant. Ce n'est pas dit qu'il n'y a pas de monde qui achète de l'eau. Il y a un bon marché là-dessus présentement. Ce q ue je veux vous faire comprendre, c'est que présentement ceux qui veulent utiliser le fluor peuvent se le payer, ils sont libres de le faire. Une fois toute l'eau fluorée partout, ceux qui ne voudront pas en boire devront payer pour acheter de l'eau. A ce moment, ce sont encore les riches qui pourront se la procurer et les pauvres ne pourront pas le faire. Est-ce que ce n'est pas là une mesure...

M. Roy (Augustin): Je pense que c'est de l'interprétation, pas mal de charriage.

M. Samson: Ecoutez, on le sait. Vous ne connaissez pas les barèmes de bien-être social pour dire cela. Un instant. Le ministre devrait vous les dire, les barèmes de bien-être social. Vous verrez que ces gens n'ont pas les moyens de s'acheter de l'eau ailleurs...

M. Roy (Augustin): Non, c'est justement pour ces gens que la mesure est essentielle. Ce sont eux qui ont la pire condition dentaire. C'est pour ces gens, je l'ai dit, qu'on est ici à se battre pour tenter de vous faire comprendre que c'est une bonne mesure dans l'intérêt du public. Vous, qui êtes si près du peuple, évidemment, vous devriez le comprendre, vous qui avez le petit peuple qui vous écoute et qui vous comprend parfois.

Je pense que vous devriez être plus en mesure de saisir...

M. Samson: Vous êtes en train de mêler les cartes pas mal.

M. Roy (Augustin): ...les bénéfices que peut retirer la population d'une telle mesure, surtout le pauvre monde. Je suis en contact fréquent avec les gens. Je peux vous dire que les gens n'auront pas d'objection à cette mesure. Evidemment, tantôt vous m'avez dit que si on était riche comme...

M. Samson: J'admets ce que vous venez dire, mais vous venez de dire quelque chose de très intéressant. Vous dites que les gens n'auront pas d'objection. Cela m'intéresse, parce que, lorsque vous affirmez que les gens n'auront pas d'objection, je prétends que vous ne devriez pas non plus avoir d'objection à aller l'expliquer aux gens, si vous êtes sûr qu'ils n'auront pas d'objection.

M. Roy (Augustin): Je l'ai expliqué.

M. Samson: Pourquoi refusez-vous de l'expliquer à la population? Tentez-vous de le lui imposer dans ce cas?

M. Roy (Augustin): Vous êtes le représentant du peuple. Je ne suis pas élu député, heureusement peut-être, parce que je comprends votre tâche. Je viens souvent ici à l'Assemblée nationale. Je sais que c'est un rôle très ingrat, le rôle de député. J'ai suivi avec intensité les débatssurvos salaires. J'ai étudié les réactions du peuple. Je dis que le député qui travaille doit être bien payé, c'est un peu un à-côté. Je dis que ceux qui travaillent méritent un bon salaire, parce que c'est une tâche ingrate.

M. Samson: ...par les libéraux.

M. Roy (Augustin): Vous êtes les représentants du peuple. C'est votre devoir de vendre à la population une bonne mesure. C'est un devoir que vous avez vis-à-vis de la population de vendre une bonne mesure. Evidemment, nous tentons de vous en convaincre, de vous convaincre que c'est bon. D'ailleurs, vous l'avez chez vous à Rouyn-Noranda, l'eau fluorée. Vous n'en êtes pas morts personne. Vous

avez l'air en santé. Vousêtes resplendissant de santé. Ou vous n'allez pas dans votre comté du tout, cela me surprendrait, parce que vos électeurs seraient mal servis, ils se plaindraient de ne pas avoir un bon député avec eux...

M. Samson: Ce n'est pas vous, docteur, qui avez dit aujourd'hui qu'on devrait avoir plus d'expérience sur le territoire du Québec, qu'on n'a pas d'expérience encore? Comment pouvez-vous dire que je suis plus en santé parce que je bois de l'eau fluorée? Voyons donc! Ecoutez, soyez conséquent, Dr Roy, avec ce que vous avez dit aujourd'hui. Vous nous avez dit qu'il n'y a pas d'expérience encore sur le territoire du Québec. Il devrait y en avoir.

M. Roy (Augustin): II y en a des expériences. C'est le contraire. Cela a été dit qu'il y a des expériences.

M. Samson: Vous avez dit: Faisons-en plus. Par contre, j'ai remarqué que le ministre a dit: Oui, on va fluorer et ils feront les expériences après.

M. Roy (Augustin): Non, il y a des expériences. Ecoutez, il y a des expériences au Québec. Il y en a, évidemment, plus en Ontario.

Il y en a plus dans d'autres pays qui ont une plus longue expérience que nous, mais au Québec, pour donner deux exemples, il y a Lakeshore, Dorva!, Pointe-Claire. Les Anglais de Montréal, eux l'ont l'eau fluorée.

M. Samson: Ce n'est pas le Parti québécois qui les a fait fluorer.

M. Roy (Augustin): Peut-être qu'ils sont plus intelligents que nous. Par ailleurs, les gens de Laval ont l'eau fluorée depuis 17 ans, et ils en sont parfaitement heureux. Ils n'en sont pas morts personne.

M. Samson: Je vais vous poser une dernière question.

M. Roy (Augustin): Pas de problème.

M. Samson: Puisque vous semblez dire que tout le monde acceptera cela — ça saute aux yeux...

M. Roy (Augustin): Avec votre collaboration!

M.Samson: ...êtes-vous prêt à aller jusqu'à permettre que la population puisse juger directement en bonne connaissance de cause ou, sinon, du moins par l'entremise de ses députés, et puisse écouter les pour et les contre du point de vue scientifique? Seriez-vous d'accord sur cela, au moins?

M. Roy (Augustin): Je pense que c'est le but de la commission parlementaire: De faire entendre...

M. Samson: Je parle de spécialistes.

M. Roy (Augustin): II y en a eu des spécialistes hier.

M. Samson: Bon.

M. Roy (Augustin): II y en a eu aujourd'hui.

M. Samson: Vous êtes d'accord sur cela?

M. Roy (Augustin): II peut y en avoir la prochaine fois. Vous en avez ici aujourd'hui.

M. Samson: Etes-vous d'accord sur cela que la commission puisse entendre les spécialistes des deux catégories, des opposants, si vous voulez?

M. Roy (Augustin): Oui, mais écoutez... M. Samson: Si je vous pose la question...

M. Roy (Augustin): Si vous m'embarquez dans un débat, et je peux embarquer, vous savez...

M.Samson: Dr Roy, si je vous pose la quest ion...

M. Roy (Augustin): ...je suis capable de vous suivre sur votre terrain. Je vous dis ceci: Ceux qui voulaient emmener des spécialistes n'avaient quà faire comme moi, c'est-à-dire en emmener.

M.Samson:Si je vous pose la question, Dr Roy...

M. Roy (Augustin): Ils n'en n'ont pas emmené et je peux vous dire qu'ils avaient raison de ne pas en emmener parce que leurs spécialistes se seraient peut-être faits déculotter. C'est ce qui serait arrivé.

M. Samson: Dr Roy, si vous êtes sûr que les spécialistes se feront déculotter, vous n'aurez pas d'objection à ce qu'ils viennent dans ce cas parce que vous aurez avantage à les laisser déculotter.

M. Roy (Augustin): Ils n'avaient qu'à venir et ils ne voudront pas l'emmener de toute façon.

M. Samson: Bon. Très bien.

M. Roy (Augustin): Ce n'est pas mon problème.

M. Samson: Je vous ai entendu dire que ce que vous voulez, c'est le bien du peuple. Je sais que votre association a de l'argent. Je veux vous demander ceci: Etes-vous prêt...

M. Roy (Augustin): Non. On n'a pas...

M. Samson: ...à nous aider à défrayer le coût pour faire venir le Dr Schatz ici? Etes-vous prêt à faire cela pour le bien de la population?

M. Roy (Augustin): Savez-vous qui est le Dr Schatz?

M. Samson: Non. Je ne veux pas savoir...

M. Roy (Augustin): Savez-vous qui est le Dr Schatz?

M. Samson: Faites-le venir.

M. Roy (Augustin): Je peux vous informer sur le Dr Schatz.

M. Samson: Faites-le venir.

M. Roy (Augustin): D'abord, il n'est ni médecin, ni dentiste.

M. Samson: Je m'excuse. J'ai dit: Docteur. C'est professeur que je voulais dire. Ne trouveriez-vous pas valable qu'on le fasse venir ici? S'il n'est pas correct, vous serez vainqueur.

M. Roy (Augustin): S'il avait voulu venir, il n'avait qu'à se faire inviter par un groupe qui voulait...

M. Samson: Le Parti québécois, le Ralliement créditiste, l'Union Nationale l'invitent mais nous n'avons pas d'argent pour le faire venir.

M. Roy (Augustin): Vous avez eu deux mois pour présenter des mémoires et inviter des groupes, susciter de l'opposition. J'ai l'en-tête du papier à lettre du Dr Schatz et j'ai appris dans le métier à me méfier d'une chose. Plus les en-têtes du papier à lettre d'un individu sont larges, plus il faut se méfier. Parce que plus on a besoin de se vanter qu'on a des titres, et qu'on est professeur de telle ou telle chose et qu'on a un doctorat en...

M. Samson: Pourrais-je avoir une copie de vos en-têtes de lettre?

M. Bédard (Chicoutimi): ...des lettres des Affaires sociales.

M. Roy (Augustin): ...plus il faut être prudent. Pardon?

M. Samson: Etes-vous prêt à déposer une copie de vos en-têtes de lettre?

M. Roy (Augustin): Les en-têtes de cette lettre?

M. Samson: Non. De vos en-têtes de lettre à vous.

M. Roy (Augustin): Mes en-têtes de lettre sont très simples, mon cher!

M. Samson: Oui?

M. Roy (Augustin): Elles sont très simples.

M. Samson: Et ceux de...?

M. Roy (Augustin): Mon nom n'apparaît même pas.

M. Samson: Etes-vous prêt à faire l'affirmation pour tout le corps médical?

M. Roy (Augustin): Je n'ai rien à prouver.

Le Président (M. Pilote): A l'ordre, messieurs! M. Samson: M. le Président, je m'excuse...

M. Roy (Augustin): Je voulais tout simplement dire que ce monsieur, qui n'est ni médecin, ni dentiste, a fait très peu de publications dans le domaine de la dentisterie. Le reste est dans le domaine de la chimie et il est parti dans une croisade antifluoration. C'est son droit. Il fait une croisade aux Etats-Unis, mais je dois vous dire qu'il n'est pas accepté dans les milieux scientifiques. Il est très controversé dans les endroits qu'il fréquente. Ses théories ne sont pas admises. C'est son droit. Je connais, moi ici au Québec, des médecins avec lesquels je ne suis pas d'accord et ils ont droit à la dissidence. Cela ne veut pas dire qu'ils ont raison.

Lorsque 99.9% des gens vous disent que telle chose est bonne et qu'il y en a un sur 100 qui vient vous dire que cela n'est pas bon, je dis:Très bien. Tu peux dire que cela n'est pas bon, mais tu n'as pas raison. C'est dans ce sens qu'il faut prendre le témoignage de ce M. Schatz qui n'a aucune valeur. Est-ce assez clair?

M.Samson: II y a le député de Chicoutimi qui me dit que le Christ s'est fait crucifier comme cela.

M. Roy (Augustin): Je termine là-dessus, M. le Président.

M. Bedard (Chicoutimi): Evidemment, c'est parce qu'il semblait avoir raison tout seul.

M. Roy (Augustin): Je ne suis pas Juif, heureusement!

Le Président(M. Pilote): Leministre des Affaires sociales.

Si c'est possible, il nous reste encore quelques organismes à entendre. Je sais qu'il y en a qui sont obligés de monter à Montréal, ce soir. Je veux m'en aller au lac Saint-Jean. Lui, veut s'en aller à Chicoutimi. J'inviterais quand même les gens, les organismes et les membres de la commission à tenter de nous donner une chance pour pouvoir surtout entendre les gens des autres organismes. Il nous en reste cinq.

M. Forget: M. le Président, j'aimerais poser une dernière question si possible au Dr Roy et aux personnes qui l'accompagnent. Je crois quand même que le sujet est suffisamment important pour que nous l'épuisions, d'autant plus que certains aspects ont peut-être été traités au détriment d'autres. Je ne crois pas que ce soient les principaux et les plus importants qui aient eu nécessairement la première place. Mais à tout événement, j'aimerais donner l'occasion aux personnes qui accompagnent le Dr Roy, ou au Dr Roy lui-même peut-être, de nous aidera faire le point sur les arguments d'ordre biologique, puisque nous avons devant nous, il ne faut pas l'oublier, la Corporation professionnelle des médecins. D'autres viendront témoigner sur les aspects d'ingénierie et certains autres aspects. Il demeure que sur le plan

des effets biologiques d'ensemble, d'une mesure comme celle-là, je pense qu'il serait peut-être utile que les membres de la commission aient l'occasion de faire un peu le tour en écoutant un des membres de la délégation nous faire le point sur cet aspect, l'effet du fluor sur l'organisme humain dans son ensemble.

M. Roy (Augustin): Le Dr Bouchard va répliquer.

M. Bouchard: N'ayez crainte, je ne décrirai pas toutes les équations du métabolisme intermédiaire. Je vais être extrêmement concret. En étudiant le dossier du fluor, je ne me suis posé que des questions scientifiques, et je vais essayer de répondre dans ce sens.

La première question que je me suis posée: Le fluor est-il un élément essentiel à la nutrition? Est-ce que c'est nécessaire à l'organisme d'avoir du fluor? Je pense qu'on peut à ce moment-ci diviser cela en deux, à savoir, au point de vue dentaire et au point de vue général. Je pense que les données de la littérature scientifique décrites dans les documents qui m'ont été fournis d'une part, et ceux que j'ai pu examiner, par une revue de la littérature récente, c'est-à-dire de l'année 1974, prouvent hors de tout doute scientifique raisonnable que le fluor est béné-fiq ue pour la santé des dents. Je pense que cela a été largement prouvé dans le courant de la journée et que cela l'a été hier; je n'étais pas ici, mais d'après oe qu'on m'a dit.

Au point de vue général, c'est un domaine qui est en pleine évolution. Je peux citer un auteur qui s'appelle — c'est très mauvais les arguments d'autorité, il faudrait faire les expériences nous-mêmes — M. Neilson, publié dans une excel lente revue, un journal américain de nutrition, où il fait une revue sur un certain nombre de composés qu'on trouve dans l'organisme, dont le fluor. Les données les plus récentes datent de 1972. Elles tendent à prouver d'une façon relativement certaine — bien que cela n'ait pas été confirmé, comme vous le savez, dans le domaine scientifique, un auteur publie quelque chose, cela peut prendre des années avant que cela soit répété et confirmé absolument — que le fluor serait nécessaire pour maintenir chez l'individu un hématocrite normal, un niveau de fertilité satisfaisant. Il serait nécessaire à la croissance.

Si on l'infère à l'homme, évidemment, le problème est un peu différent, parce qu'il n'y a pas encore d'expérience qui a été faite sur l'homme. C'est extrêmement difficile de donner à l'homme un régime carence absolument en fluor pour regarder sur l'homme si le fluor est un élément essentiel à sa croissance. D'ailleurs, je pense qu'au point de vue de l'éthique, ce ne serait pas acceptable. Alors, on doit se contenter des données biologiques qui ont été prouvées chez l'animal ou qui, actuellement, tentent à être prouvées. C'est le problème général.

La deuxième question que je me suis posée: Le fluor, à la dose où il est recommandé, est-ce que c'est dangereux?

Si on examine ici encore la littérature scientifique qu'on trouve dans de bonnes revues, je pense bien qu'il n'y a aucune preuve que cela pourrait être dangereux. Que le fluor recommandé, soit un milligramme par litre ou 1,2 milligramme par litre, je pense que c'est à peu près semblable au point de vue pratique, ce n'est pas dangereux.

Si on augmente la dose jusqu'à 2,5 milligrammes par litre, ce n'est pas dangereux non plus. On n'a pas trouvé d'effet nocif, et même j'irais plus loin, la concentration sérique du fluor reste au même niveau.

Le troisième point, maintenant. Vous savez, on traite certaines pathologies maintenant avec le fluor, certaines maladies de l'oreille et ainsi de suite. Même si on augmente la dose de cinquante fois, c'est-à-dire que, si on monte à cinquante milligrammes par litre de sang, étant donné la clairance rénale, c'est un terme un peu technique, c'est-à-dire la facilité qu'a le rein d'éliminer le fluor, il y a un "peak" à un moment donné, mais ce n'est pas nocif. Cela aussi, c'est un point que... A la concentration où on le donne, je pense bien qu'il ne peut pas y avoir de danger. Même s'il y a un accident dans le dosage, je vais en parler maintenant, je pense que cela ne peut pas l'être beaucoup.

Il y a un troisième point qui m'a préoccupé, celui-là, non pas parce que je suis médecin, mais parce que je suis biochimiste et que je m'occupe de laboratoire. Je ne connais pas d'équipement infaillible. La question que je vais poser est la suivante: Je me suis dit: S'il arrive un accident dans les mécanismes qui libèrent, incorporent le fluor, le fluorure de sodium ou tout autre composé dans l'eau, qu'est-ce qui va arriver? Sommes-nous devant la possibilité d'une catastrophe?

J'ai l'impression que c'est extrêmement improbable, particulièrement si on emploie le fluorure de sodium. Je vais vous expliquer pourquoi. La dose dangereuse, d'une façon chronique, du fluor — je pourrais en discuter avec mes collègues — c'est à peu près 4,000 milligrammes par jour environ. Cela voudrait dire 4,000 milligrammes par litre de sang. J'ai l'impression qu'avant qu'on parvienne à ce niveau, étant donné que le fluor est un sel, comme vous le savez, et qu'au Ph de l'eau, qui est d'environ de 6, 5 à 7, d'une façon normale, tout dépendant des impuretés... Quand on purifie l'eau d'une façon parfaite, on obtient un Ph de 7. La dissociation du fluorure de sodium à titre d'exemple est presque à 100%.

A ce moment, je pense que l'eau sentirait d'une façon importante. Tout ce que cela pourrait provoquer, ce serait ce qu'on appelle une fluorose chronique. J'ai l'impression que, si les mécanismes de contrôle sont adéquats pour l'incorporation du fluor dans l'eau, il n'y aurait pas de problème pour cela, parce qu'on s'en apercevrait avant.

Dernière possibilité. Encore là, on peut discuter sur le chiffre et je ne veux pas ouvrir un débat sur cela. La dose létale du fluor, c'est d'environ quatre grammes de fluorure de sodium, ce qui est une quantité considérable. Je me suis trompé, je m'excuse. J'ai passé une étape. C'est 1,000 que j'aurais dû dire avant et ensuite 4,000. Donc, c'est environ 4,000 milligrammes de fluorure de sodium dans un litre d'eau.

Or, pour que ce soit extrêmement dangereux

pour la santé, il faudrait qu'un individu, d'une seule dose, le bouffe dans un verre comme cela. Cela fait qu'il faut multiplier ces valeurs à peu près par dix, ce qui nous ferait environ 40,000 milligrammes de fluor dans un verre d'eau. Il faudrait que les machines qui distribuent le fluor se soient trompées d'une façon extraordinaire et qu'il n'y ait pas de contrôle.

Si on résume, je pense qu'on tend à prouver que c'est un élément essentiel, mais je ne pense pas que ce soit dangereux avec les doses qu'on veut utiliser.

Finalement, je crois que, même dans le cas d'un accident, on s'en apercevrait avant que ce soit dangereux pour la santé des individus. Il y a un ou deux ans, il est arrivé, à Montréal, un accident dans une piscine à cause du niveau de dosage du chlore dans ce cas.

Il y a des enfants qui ont été incommodés, mais cela n'a pas eu de conséquence grave. J'ai bien l'impression qu'il arriverait la même chose s'il y avait une erreur dans les appareils, quelle que soit leur perfection, qui incorporent le fluor dans l'eau. Je n'ai pas d'autres commentaires.

M. Roy (Augustin): Maintenant, pour ajouter, je l'ai dit dans mon mémoire. J'ai vérifié avec le Centre des poisons de Montréal, et on n'a rapporté aucun cas d'intoxication au fluor. Je n'en ai vu aucun dans la littérature. Evidemment, à ce dosage, l'odeur et la couleur seraient tellement évidentes que cela paraîtrait à la face même. Il reste quand même que comme on l'a mentionné, il faut exercer un contrôle important, comme pour la chloration de l'eau, sur ce mécanisme, d'addition ou d'ajustement du fluor dans les eaux de consommation.

M. Bonnier: Seulement une petite question. On a beaucoup souligné l'importance du fluor pour la dentition chez les enfants de couche économiquement faible. On note, en fait, peut-être une dentition défectueuse, due à l'alimentation, au manque de soins ou peut-être d'alimentation. A ce moment, peut-être que le fluor viendrait aider. Cependant.au cours de la journée, on nous a dit que, justement, dans cette catégorie de population, le danger d'absorption de fluor est encore plus grand parce qu'à cause d'une alimentation défectueuse, la réaction au fluor serait beaucoup plus dommageable. Est-ce que c'est exact? Est-ce qu'on peut penser cela? Peut-être que le Dr Bouchard peut nous dire cela.

M. Roy (Augustin): C'est l'étude de Chili qu'on met en doute, parce que ce ne sont pas les mêmes cond itions de vie. Effectivement, je pense q ue le fait que la mortalité soit plus élevée, n'est pas du tout du au fluor, elle est due à la malnutrition. On sait, évidemment, que la malnutrition entraîne beaucoup de maladies, particulièrement les maladies infectueu-ses, une moins grande résistance de l'organisme. C'est une des raisons. Le Dr Bouchard veut peut-être ajouter d'autres choses.

M. Bouchard: Je peux peut-être répondre à cela. La toxicité du fluor est plus grande lorsque l'alimentation est moins bonne. C'est pour cela, d'ailleurs, que la fluorose même sur les dents, la fluorose générale et la fluorose ankylosante diffè- rent en fonction de la concentration du fluor que l'individu ingère, d'accord, mais aussi en fonction de son alimentation. S'ils s'alimentent moins bien, la concentration toxique est plus basse. Je ne sais pas si cela répond à votre question.

M. Bonnier: Oui, mais est-ce que cela peut être dangereusement plus...

M. Bouchard: Je n'ai pas l'impression que dans... Qu'est-ce que vous voulez, si j'étais aux Indes...

M. Bonnier: Notre type de climat et prenez nos habitudes alimentaires...

M. Bouchard: Je ne pense pas qu'ici ce soit dangereux.

M. Roy (Augustin): Je ne pense pas que nos enfants se comparent à ceux du Bangla Desh comme on a vu l'autre soir à la télévision, ni à ceux de l'Ethiopie. On n'est pas dans cet état de malnutrition, même s'il y aurait encore de la place pour l'amélioration des bonnes habitudes alimentaires. Les habitudes ne sont quand même pas si mauvaises. Evidemment, manger du chocolat et boire du Coke, comme le député de Rouyn-Noranda, c'est très mauvais pour la santé.

M.Samson: L'eau est fluorée au Bangla Desh, je suppose?

M. Roy (Augustin): Pardon?

M. Samson: Avez-vous dit que l'eau était fluorée au Bangla Desh?

M. Roy (Augustin): Non, mais j'ai ditqu'il yavait des enfants qui étaient sous-nourris. Ils n'avaient pas des riz, pas de chocolat, ni de Coke.

M. Samson: Vous devriez ajouter que c'est parce que je n'ai pas soupé. Cela vous ferait mieux comprendre.

M. Roy (Augustin): Oui, je comprends. Cela augmente un peu le sucre dans le sang.

M. Samson: Cela donne de l'énergie. Je peux continuer si vous voulez.

M. Roy (Augustin): Moi aussi.

M. Forget: M. le Président, j'aimerais, si les membres n'ont pas d'autre question, remercier le Dr Roy et les personnes qui l'accompagnent, non seulement pour l'excellence de leur présentation, mais également pour la patience dont ils ont fait preuve en attendant leur tour aussi tard et en étant encore avec nous même ce soir. Je leur souhaite un bon retour, étant donné que l'heure est déjà avancée. Je crois que tout le monde va se joindre à moi pour les remercier.

M. Roy (Augustin): Merci beaucoup.

Le Président (M. Pilote): On vous remercie, messieurs.

M. Roy (Augustin): Merci et sans rancune. Pas besoin de passeport encore?

M. Samson: On ne vous l'imposera pas.

Le Président (M. Pilote): J'inviterais à présent le Dr Paul Simard qui a bien voulu céder sa place le numéro 8.

M. Simard (Paul): On a presque l'impression de faire partie de l'équipe du Parlement. Je pense bien que c'est la dernière fois qu'on comparaît.

M. le Président, est-ce que je peux vous demanderceci? Si le mémoire est tout simplement déposé, est-ce qu'il va paraître aux dossiers ou s'il faut absolument en faire la lecture? Maintenant, s'il y a des membres de l'Opposition... Je dois dire que ce mémoire...

M. Bédard (Chicoutimi): En ce qui regarde l'Opposition officielle, on n'aurait pas d'objection.

Le Président (M. Pilote): Le mémoire a cinq pages.

M. Simard (Paul): Le mémoire est une entrée en matière, en fait, au travail ou à la conférence qu'a présentée le Dr Kleinberg. Il va absolument dans le même sens. Ce serait pour épargner du temps à to ut le monde. J'aimerais, cependant, qu'il soit porté au dossier.

Le Président (M. Pilote): Avec le consentement de la commission, il est permis de l'intégrer au journal des Débats. (Voir annexe 1)

M. Simard (Paul): Je pense bien, M. Samson, qu'on ne parlera pas de libertés individuelles ce soir?

M. Samson: Cela va me priver d'une bonne période de questions.

M. Bédard (Chicoutimi): On en a assez parlé.

M. Simard (Paul): Alors, je remercie la commission parlementaire de nouveau.

Le Président (M. Pilote): Est-ce que les membres ont des questions?

NI. Forget: Cela n'empêche pas que nous posions des questions. Il y a peut-être des questions.

M. Samson: M. le Président, je n'en ai pas à poser. On s'est questionné, je pense, hier. On remercie le Dr Simard d'avoir eu le courage de revenir deux jours.

M. Simard (Paul): Cela a été très agréable.

M. Samson: C'est pas mal.

M. Simard (Paul): Je vais passer près d'être candidat, pas député.

M. Samson: Si vous revenez une autre journée, on vous fait élire.

M. Simard (Paul): II s'agirait de déterminer q uel parti, je ne le sais pas.

Le Président (M. Pilote): Si je comprends bien, le mémoire, qui comprend cinq pages — on veut éviter les publications à l'intérieur du journal des Débats — fera quand même partie intégrante du journal des Débats.

M. Simard (Paul): C'est très bien.

Le Président (M. Pilote): On vous remercie, M. Simard, ainsi que celui qui vous accompagne. J'inviterais à présent le Dr Jean-Guy Bonnier. Est-ce qu'il est présent? L'Association dentaire canadienne, représentée par le Dr Sidney Silver et le Dr Ralph Burgess; est-ce qu'ils sont ici?

Association dentaire canadienne

M. Silver (Sidney): M. le Président, MM. les membres de la commission parlementaire des affaires sociales, permettez-moi de présenter mes titres et qualités. Je suis administrateur et membre du comité administratif de l'Ordre des dentistes du Québec. Je fais également partie du comité exécutif et du Bureau des gouverneurs de l'Association dentaire oanadienne. Je désire vous soumettre, à titre de représentant de l'Association dentaire canadienne, un mémoire recommandant la fluoration des eaux de consommation au Québec. Vous avez tous reçu copie du mémoire. Je tiens surtout à énumérer ici ses points saillants, plutôt que de vous relire encore le texte entier. En voici donc le résumé.

La fluoration de l'approvisionnement d'eau fait l'objet d'études scientifiques documentées depuis au moins 30 ans. Aucune autre disposition dans le domaine de la santé publique n'a fait l'objet d'une investigation aussi approfondie. L'amélioration obtenue en ce qui concerne la santé dentaire par suite de la fluoration a comme résultat non seulement l'amélioration de l'état de santé général, mais encore la réduction du nombre d'absents à l'école ou au travail, ainsi qu'une diminution de 50% du coût des soins dentaires pour les enfants. La fluoration a l'appui des autorités médicales, dentaires et du domaine de la santé publique. Elle est également sanctionnée par la Fédération dentaire internationale et l'Organisation mondiale de la santé.

Un nombre total de 120 millions de personnes du monde entier bénéficient aujourd'hui de la fluoration dirigée deseaux de consommation. Les résultats de la fluoration sur une période de dix ans sont impressionnants: une réduction de la carie dentaire de l'ordre de 50% pour les enfants et de 35% pour les adolescents.

La fluoration, l'hygiène buccale adéquate et le

régime alimentaire approprié sont les procédés les plus efficaces pour réduire la carie dentaire. Je me permets ici, M. le Président, une observation personnelle. Chez les enfants qui ont bénéficié de la fluoration, on voit non seulement la réduction de la carie dentaire déjà mentionnée, mais surtout les caries que l'on trouve ne sont ni très profondes ni très grandes.

Le docteur Ralph Burgess se présente avec moi en tant que témoin expert. Ses qualifications et son expérience sont imposantes. Né à Montréal, le Dr Burgess obtient son baccalauréat dans le domaine de la biochimie animale en 1949, à l'université McGill. Il y reçoit également sa maîtrise en nutrition animale en 1952. Vous voyez qu'il était bien qualifié pour entrer dans l'étude de l'art dentaire. Il obtient son DDS àToronto en 1957. Il est actuellement professeur et directeur du département de dentisterie préventive de l'Université de Toronto.

Depuis ce temps, le Dr Burgess a fait de considérables recherches. Ses investigations scientifiques comprennent l'examen biochimique de la formation du tissu dentaire dur, y compris l'incorporation d'éléments mineurs, tels que, par exemple, le fluorure dans l'émail dentaire, l'étude de l'efficacité clinique et l'emploi de procédés alternatifs à la fluoration de l'eau, l'enquête approfondie de la concentration et de la nature du fluorure naturel existant dans l'eau, de plus, une évaluation dentaire clinique de l'ingestion de fluorure de sodium par des enfants qui résident à proximité d'usines d'engrais chimiques.

Le Dr Burgess sera heureux de répondre à vos questions et de vous exposer les données les plus récentes. L'Association dentaire canadienne, consciente et de la compétence et de la courtoisie traditionnelle des Québécois, a préparé son exposé en langue anglaise, puisque le Dr Burgess ne se sent à l'aise que dans cette langue. Il demande respectueusement que les questions lui soient posées autant que possible en anglais et qu'il lui soit permis d'y répondre en anglais.

M. le Président et MM. les membres de la commission, je vous remercie de votre attention soutenue et je vous passe le Dr Burgess.

Le Président (M. Boudreault): M. le ministre.

M. Forget: Dr Burgess, as a biochmist with considerable experience in fluoride chemistry, are you in a position to comment on the research done by previously mentioned Dr Schatz, who allegedly is a member of the association you represent here?

M. Burgess: Mr President, members of the Council, I should first make a comment in reference to the statement that Mr Schatz is a member of the Canadian Dental Association and clarify this point. He is an associate member of the Canadian Dental Association; it is the policy of the Canadian Dental Association that anaybody who claims an interest in dentistry can be an associate member.

This neither implies any approval of their views by the association, nor does this association de- mand that any associated member agree to the general policies of this association, a housewife or anyone else could have this status and therefore we do not recognize Dr Schatz as an expert in this area. In fact, the association defers very strongly in views expressed by Dr Schatz.

Dr Schatz, on research, as indicated earlier, is mainly in the field of chemistry and he is done virtually no research that I am aware of, himself, relative to water fIuoridation or either the ideal effects or the beneficial effects on dental caries. So, I do not feel that he is an expert in this field.

M. Forget: Thank you. In your capacity as a dentist, with a particular knowledge of the subject of fluorides, can you tell me about the incidence of mottled enamel in fluoridated and nonfluoridated regions of this country or abroad?

M. Burgess: In considering this subject, I think it is important to realize that there are a variety of causes for blemishes of enamel — I think, in French, it is "tacheté", I have gotfixed thatword up — these blemishes in enamel arise from many causes. One of which is the ingestion of a very high level of fluoride in water supplies. If the level of fluoride is approximately two parts per million, then, roughly 15% of children living in such an area will show minor blemishes in the enamel. At the level suggested for water fluoridation here, one point two parts per million, there are no blemishes apparent.

I referred, earlier, to other causes of blemishes because this is interesting that, in communities, they have a very low level of fluoride. There is the high frequency of blemishes for a variety of reasons. The incidence of this type of blemishes actually lower in areas which have water fluoridation so, in other words, these teeth, far from being disfigured orharmed in anyway, are actually improved and this has been proven by at least three studies that I know of.

M. Forget: Although, I realize that it maybe somewhat out of your proper field of competence because it has nothing to do, strictly speaking, about chemistry. Allegations were made today that fluoridation, as a preventive help measure, is on the decline throughout the world, that many communities, that had it, or countries or states or provinces that had it have desisted from this measure and have abandoned it. Is that a true statement of fact? Can you confirm it?

M. Burgess: No, I do not believe that this is a true statement of fact. I think it is better to say that the rate of increase in fluoridation is not as rapid as it was saying in the early sixties. This is simply because many areas have al ready adopted fIuoridation and you just cannot continue at the same rate inde-finately. For instance, in Ontario, where I come from, all of the large cities have adopted fluoridation. So, we cannot continue to go on an upward graph at the same rate. Ever the less, we are progressing and each year more people are drinking fluoridated water than ever before. I think there are several coun-

tries recently that have adopted legislation, widening the use of fluoridated water. Greece has introduced mandatory fluoridation, Brazil has introduced fluoridation and I believe that the Soviet Union is now greatly extending the use of fluoridated water.

M. Forget: Thank you. I have no other question, M. le Président.

Le Président (M. Boudreault): Vous n'avez pas de questions?

M. Leduc: Oui, M. le Président. Dr Silver, dans le mémoire que vous avez présenté, à la page deux, dernier paragraphe, vous mentionnez: "Naturally, at first, acceptance was slow", en vous référant à la fluoration.

M. Silver: Un instant, s'il vous plaît.

M. Leduc: A la page 2 au sujet de la "fluoridation"...

M. Silver: Oui.

M. Leduc: You mentioned naturally, at first, acceptance was slow. Questions were asked, is it effective, is it safe? By 1953, the Canadian Dental Association became satisfied on both points. Now we heard today that very little research has been made in Canada or may be elsewhere, from my understanding of the "témoignage" that we heard today, that is 20 years ago.

How did the association become satisfied that it was effective and safe by 1953, I do not know whether it is clear or not with the question.

M. Silver: If I remember rightly, Brantford was one of the Canadian cities that started experimentation in fluoridation in 1945, so that by 1953, there was scientific documented evidence. However, the evidence was respected' the fluoridation goes back much farther than 30 years ago. It goes back now, something between 50 to 70 years from empirical observation by a dentist that people living in areas with naturally fluoridated waters, observably had much less dental cary than those living in areas where there was no fluoridation, natural fluoridation of the water supply, so that by 1953, when the Canadian Dental Association took this position, there was a wealth of cumulative evidence of which 8 years of it was absolutely scientifically documented and therefore it was able to take this position and...

M. Leduc: Over and above that, 8 years from 1955 to 1963, you mentioned that that there had been some experience elsewhere that were documented to a degree that this might have helped you come to the conclusion that it was helpful.

M. Silver: What were the other two? That was Chicago and there is another...

M. Burgess: Newburg.

M. Silver: Newburg in... M. Burgess: That is right.

M. Silver: In New York. There were three pioneer cities in Canada and in the United States which started this program.

M. Leduc: ...survie, affirmation — I do not know what word, what it is in English — that was made this afternoon that there was not very much research on the effects of fluoridation, your judgment is false.

M. Silver: I certainly agree that that was an improper interpretation of the evidence.

M. Leduc: Thank you.

Le Président (M. Pilote): Est-ce qu'il y a d'autres questions? Le député...

M. Bonnier: ...a question in relation with your statement that in Ontario, most of the cities and towns already have this kind of system. Was it organized on a voluntary basis or by the government itself, imposed by the government, what was the natural reaction of the people to it?

M. Burgess: I should correct an impression. I believe that I said all of the large cities have now fluoridated their water supply. Our experience has been this:That it was very easy to gain acceptance of fluoridation in the large cities. Dr Roy commented this afternoon on the amount of efforts it takes, experts, personal to go on testified it, town meetings, etc. People like myself, Dr Roy and others would give up days of time, to carry out the public information in the large cities, but when it comes to the hundreds of smaller towns and cities, this is quite impossible. So I think it is fair to say that the utilization of fluoridation in Ontario in the small communities has not progressed as rapidly unfortunately for their children.

M. Bonnier: But it could be increased if you had time to discuss the matter with the civic authorities in different towns, I presume, but the reaction was...

M. Burgess: Well, if we had people paid full time to do this, it might be possibly easy, but people like myself...

M. Bonnier: People were available.

M. Burgess: ...have a full time job apart from that, we do that in the evenings.

M. Bonnier: Thank you.

Le Président (M. Pilote): D'autres questions?

M. Forget: I would like, on behalf of this commission, thank both of you for attending the meeting today and waiting for your turn a considerable number of hours. Thank you very much.

Le Président (M. Pilote): J'inviterais le Or Jean-Guy Bonnier, du Conseil de la santé et des services sociaux du Montréal métropolitain. Le Dr Bonnier représente également, après entente avec Mme Rachel Larivée, le Conseil de la santé et des services sociaux de l'Outaouais.

Conseil de la santé et des services sociaux de Montréal

M. Bonnier (Jean-Guy): M. le Président, M. le ministre, honorables députés, sans malice, je vous remercie de m'avoir convoqué pour comparaître devant la commission parlementaire à dix heures. Ceci m'a donné l'occasion de comparaître à 21 heures. Ainsi, j'ai bénéficié...

Le Président (M. Pilote): ...votre temps.

M. Bonnier (Jean-Guy): ...de mon baptême, de mon initiation aux débats parlementaires. Pour cette raison et à cause aussi de mon nom, qui pourrait m'identifier à un honorable député ici présentée sais que vous serez indulgents à mon égard.

Vous excuserez Mme Larivée. Je ne suis pas le porte-parole du Conseil de la santé et des services sociaux de l'Outaouais mais vous avez un document qui vous a été présenté. J'en ai discuté, lors du souper, avec Mme Larivée. Si je fais une revue globale des représentations de l'Outaouais, du Conseil de la santé et des services sociaux de la région du Saguenay — Lac-Saint-Jean, du Conseil régional de la santé et des services sociaux de la région sud de Montréal, je constate, sans consultation préalable, que c'est unanime comme type de présentation comme conseil régional.

Pour l'Outaouais, je veux simplement mentionner le fait que Mme Larivée insiste pour dire quels sont les problèmes de santé dentaire qui existent dans la région: Manque de dentistes et pénurie au point de vue de la fluoration des eaux dans son coin. Elle m'a demandé de vous le mentionner.

Quant au projet de loi no 88, voici nos commentaires. Il est reconnu que la santé dentaire de la population québécoise est dans un état déplorable. Il était urgent que le ministère des Affaires sociales établisse un programme complet de santé dentaire. A ce jour, les divers volets de la politique de santé buccale du ministère des Affaires sociales sont les suivants.

M. Bedard (Chicoutimi): Peut-être, puisque vous vous êtes référé au mémoire qui est présenté par l'Outaouais, qu'il y aurait lieu de le déposer tenant compte du fait que madame a été dans l'obligation de partir, il y a seulement quelques minutes — elle est restée avec nous toute la journée. Elle m'avait dit de demander à la commission si c'était possible de consigner, comme on l'a fait tout à l'heure avec un autre, son mémoire au journal des Débats.

Le Président (M. Pilote): Surtout qu'elle a attendu toute la journée ici; je pense qu'il serait décent qu'on intègre son mémoire au journal des Débats.

M. Dufour: Excellente idée.

Le Président (M. Pilote): C'est accepté. (Voir annexe 2)

M. Bonnier (Jean-Guy): En son nom, je vous remercie.

Les divers volets de la politique de santé buccale du ministère sont les suivants: 1.Gratuité des soins de chirurgie buccale prodigués en milieu hospitalier; 2. Gratuité des soins dentaires en cabinet privé pour les enfants de moins de huit ans.

Le troisième volet que propose le ministère des Affaires sociales est une loi sur la fluoration des eaux de consommation.

Les deux premières mesures, principalement la première, sont plutôt à caractère curatif et ont une action restreinte à des individus ou à des petits groupes d'individus. La troisième mesure, la fluoration des eaux de consommation, a par ailleurs un caractère nettement préventif dont peut bénéficier l'ensemble de la collectivité.

Par ce projet de loi no 88, les autorités provinciales imposent aux municipalités qui exploitent une usine de filtration l'installation d'un appareil de filtration. De plus, l'achat de l'installation des appareils de fluoration sont aux frais du ministère.

Sur le plan juridique et vu l'aspect sociosani-taire de cette mesure, nous croyons opportun et nécessaire que les autorités provinciales prennent sous leur juridiction, leur autorité et leur compétence la loi qui oblige les propriétaires d'une usine de filtration à installer, selon des normes décrétées, un appareil de fluoration. Il ne faudrait pas favoriser une loi qui permettrait seulement aux propriétaires d'une usine de filtration l'installation d'un appareil de fluoration.

L'achat et l'installation des appareils de fluoration. Le ministre est autorisé à les financer.

Nous croyons aussi que les coûts d'exploitation devraient être aux frais du ministre. En effet, c'est le ministre qui est responsable de la santé de la population — je vous réfère au chapitre 48 — je m'excuse, M. le ministre, et la fluoration est nettement une mesure préventive à effet circonscrit dont les effets bénéfiques sur le plan économique réduiront éventuellement pour la province le coût des soins dentaires. C'est une attitude que nous prenons, d'autant plus que je fais simplement remarquer... Je vois, par exemple, que le conseil régional de Sherbrooke appuie la fluoration, appuie le ministre dans son projet de loi et, préalablement, on a dit que la ville de Sherbrooke avait passé une résolution contre ce projet.

Quant au dossier technique, nous en avons fait une revue. Je pense qu'à la suite des débats qui ont eu lieu aujourd'hui, je peux passer assez vite là-dessus, simplement pour dire, en ce qui nous concerne, que l'appui des organismes reconnus est une garantie suffisante. Si on fait abstraction des personnalités qui approuvent le fluor ou qui sont contre, nous croyons que, pour cette mesure scientifique, l'opinion d'un individu, pour ou contre, importe peu pour le moment.

Quant à l'aspect juridique, nous pourrions nous

étendre longtemps là-dessus, mais nous croyons que le bien public a actuellement priorité.

Nous dépassons ces aspects qui ont été longuement discutés, et nous apportons d'autres considérations au ministre.

Le premier point, c'est la formation des techniciens qui opèrent une usine de filtration. Nous le faisons dans un but très constructif et, surtout, en vue de l'avenir. En collaboration avec le ministèrede l'environnement, je réfère ici la commission à la Loi de la qualité de l'environnement, surtout à l'article 46, qui donne la responsabilité des eaux de consommation à ce ministère.

Décrire les qualifications requises pour les techniciens qui exploitent une usine de filtration avec ou sans appareil de fluoration. Organiser des stages de formation en cours d'emploi. Offrir aux municipalités des subventions pour réaliser les deux éléments précédents. Avoir à son emploi des ingénieurs et des techniciens compétents qui assureraient une surveillance étroite des eaux de consommation et qui apporteraient leur aide technique aux organismes responsables de fournir l'eau potable au public.

Pour les substances chimiques utilisées tant pour le fluorque pour les autres produits chimiques utilisés dans les usines de filtration et les aqueducs, des normes précises sur la composition, le dosage, le mode d'utilisation devraient être définies par règlements ou directives.

Un troisième point: Des études épidémiologiques constantes sur la santé dentaire et les effets de la fluoration devraient être une préoccupation prioritaire constante du ministère des Affaires sociales. A l'intérieur du ministère des Affaires sociales, des structures valables en santé buccale devraient témoigner de cette préoccupation et le ministre devrait peut-être, alors, compter sur un sous-ministre adjoint, dentiste, qui ferait le lien entre le ministère des Affaires sociales, les organismes dentaires et le public, tant celui qui appuie fortement la fluoration que celui qui, d'une façon inconsciente ou apathique, ou celui qui s'oppose pour des raisons d'ordre scientifique ou moral à la fluoration, afin d'assurer une certaine continuité.

Un quatrième point: Nous entrons avec un autre ministère. En collaboration avec le ministère de l'Education, les organismes dentaires, les départements de santé communautaire, les CLSC, les unités sanitaires et les services de santé, le ministère des Affaires sociales doit élaborer immédiatement un programme d'éducation sanitaire de première valeur et continu. Cette préoccupation, alliée aux autres éléments, serait un indice que le ministère des Affaires sociales développe vraiment une politique globale en santé buccale, témoigne de son sérieux et que la fluoration n'est qu'un élément dans l'ensemble du programme. Il ne faudrait pas que la mise en application de la fluoration constitue, pour le ministère des Affaires sociales, la solution miracle aux problèmes de santé buccale et devienne un cran d'arrêt pour les autres activités d'hygiène dentaire.

Conclusion: Le sujet de la fluoration a été et sera l'objet de nombreuses discussions. Il appartient au gouvernement du Québec de prendre la décision finale et d'arrêter ces tergiversations.

Le ministère des Affaires sociales est responsable de la santé de la population. Il impose que les eaux fournies pour une usine de filtration aient une teneur en fluor de 1.2 partie par million.

Après étude, nous appuyons ce projet de loi et nous en profitons pour soumettre au ministre certaines recommandations et suggestions notamment sur les points suivants:

En plus du financement et de l'installation des appareils de fluoration, les coûts d'exploitation devraient être aux frais du gouvernement provincial;

Etablir des liens étroits et fonctionnels avec les ministères de l'environnement et de l'Education;

Etablir des normes sur la formation et le perfectionnement des techniciens qui exploitent une usine de filtration. Le contrôle de la quantité;

Définir des normes sur les produits chimiques utilisés.

Enfin, posséder à l'intérieur du ministère des Affaires sociales des structures valables dans le domaine de la santé buccale;

Etablir des études épidémiologiques appropriées.

Comme vous constatez, ce qui nous préoccupe, c'est d'appuyer ces projets de loi, mais nous voulons que ce projet de loi soit fait dans un but positif. Ce qui nous préoccupe, c'est que ce soit un continuum. C'est la qualité qui devrait être une préoccupation du ministère des Affaires sociales. Je vous remercie.

Le Président (M. Pilote): Le ministre des Affaires sociales.

M. Forget: M. le Président, je ne crois pas avoir de question. C'est un exposé très clair et très constructif. Je n'ai pas de question particulière à poser.

M. Bédard (Chicoutimi): Je n'ai pas de question non plus. Cela rejoint naturellement le contenu de plusieurs des mémoires qui ont été présentés. Je m'associe au ministre pour vous féliciter de votre...

M. Bonnier (Jean-Guy): Vous êtes bien gentils, je vous remercie.

Le Président (M. Pilote): On vous félicite, M. Bonnier, et soyez assuré que les membres de la commission vont prendre en considération votre mémoire. On vous remercie.

M. Bonnier (Jean-Guy): Merci beaucoup.

Le Président (M. Pilote): J'inviterais à présent le

Dr Bertrand Forest, président de l'Ordre des agronomes du Québec. Si vous voulez identifier également ceux qui vous accompagnent.

Ordre des agronomes du Québec

M. Forest (Bertrand): Oui, M. le Président. Cela me fait plaisir d'abord de me présenter moi-même Bertrand Forest, président de l'Ordre des agronomes, directeur général de la recherche et de l'enseignement au ministère de l'Agriculture du Québec.

Cet avant-midi, j'avais avec moi les membres du comité administratifs. Maintenant, ils ont dû s'absenter, ils ont siégé cet après-midi et ce soir. Eux aussi doivent travailler. J'ai à ma droite le Dr Fer-nand Gauthier, directeur général adjoint de la recherche au ministère de l'Agriculture du Québec. A mon extrême gauche, le Dr Gilles Emond, chef de la division de la défense des cultures au ministère de l'Agriculture du Québec. A ma gauche, le Dr Morton Tabi, chef de la division des sols au même ministère de l'Agriculture du Québec.

Le Président (M. Pilote): Si vous voulez faire la lecture du mémoire, vu qu'il est très bref.

M. Forest: M. le Président, à la suite de l'étude du projet de loi 88, intitulé Loi modifiant la Loi de la protection de la santé publique, le bureau de l'Ordre des agronomes réuni en réunion régulière à Drummondville, le 14 février dernier, a fait parvenir de brefs commentaires à la commission parlementaire chargée de l'étude du projet de loi 88. Le court espace de temps entre la réunion du bureau et la date limite qui nous était fixée pour déposer le document ne nous a pas permis de rédiger un texte plus complet, le bureau s'étant prononcé et ayant approuvé les commentaires brefs que nous avons acheminés le plus rapidement possible à la commission parlementaire.

Je voudrais, avec votre bienveillante autorisation, vous donner aujourd'hui des renseignements supplémentaires, après d'autres études faites par les membres de notre ordre et par d'autres spécialistes du ministère et d'ailleurs, sur la présence du fluor dans le sol, dans les plantes et les animaux, sur ses effets, afin de vous permettre, par analogie, de tirer vos propres conclusions et d être mieux en mesure de prendre vos responsabilités.

Les autres spécialistes qui sont passés ont couvert le domaine de la médecine et de l'art dentaire. Ce n'est pas notre intention d'y revenir. On trouve du fluor dans le sol, dans les plantes et les animaux. Dans certaines régions seulement, cette concentration du fluordans l'eau, le sol ou la nourriture serait assez élevée pour causer des troubles alimentaires chez les plantes et les animaux. Dans des sols, la teneur en fluor varie de zéro à .15%, les sols en contiennent normalement de 100 à 300 parties par million de fluor avec une augmentation de ia concentration dans le sous-sol. Les sols dérivés de roches très riches en phosphate peuvent en contenir jusqu'à 8,000 parties par million.

Mais, attention, comme je l'ai dit tout à l'heure, on n'a pas dit s'il était soluble ou insoluble dans ces parties. Il y a une différence entre la quantité totale et la quantité assimilable directement par les plantes.

Dans les sols, l'ion basique prédominant est le calcium et, comme la solubilité de fluorure de calcium est d'environ seize parties par million dans l'eau, il est douteux que la concentration maximale du fluor dans le sol excède huit parties par million, qui est la quantité de fluor dans une solution saturée de ce sel.

Le fluor existe en quantités très variables dans un grand nombre d'espèces végétales. Il est essentiel à certaines espèces. Il exerce même un effet bénéfique dans certaines zones. La teneur des plantes en fluor varie de dix à vingt parties, vingt milligrammes par kilogramme de matières fraîches, jusqu'à 80 milligrammes par kilogramme de matières sèches dans certains cas, ce qui donne environ de deux à vingt parties par million suivant les endroits où ces plantes croissent.

Des analyses de 107 échantillons de foin de luzerne provenant de différentes régions des Etats-Unis, régions qui étaient exemptes de pollution industrielle, assez éloignées d'usines où il pouvait y avoir de l'émanation de fluor, usines d'aluminium ou encore de transformation d'engrais chimiques, ont révélé une teneur en fluor très variable. Elle variait de .8 de 1%à36.5 parties par million avec une moyenne de 3.6 parties par million. Il n'y avait aucune relation entre la teneur en fluor des échantillons et leur provenance géographique. La limite de tolérance fixée par The American Feed Control Office est de 90 parties par million de fluor dans les aliments du bétail.

Dans un milieu de culture, la concentration optimale pour les plantes serait de .002% ou de .0021%. On le rencontre surtout dans les feuilles. Il y en a très peu dans les fruits et les graines. Les feuilles de thé, paraît-il, seraient très riches en fluor, puisqu'elles en contiendraient de 160 à 200 milligrammes par kilogramme.

Plusieurs chercheurs ont étudié les effets du fluor sur les plantes. On a rapporté des augmentations de rendement avec certaines plantes, aucun effet avec d'autres. On a, par ailleurs, trouvé que l'action du fluor sur l'ananas et le maïs devenait apparente, mais seulement en présence d'une très forte concentration d'ions de fluor. On ajoute du fluor au sol lorsqu'on emploie certains engrais chimiques provenant de phosphate de roches de la Floride et du Tennessee, qui contiennent de 3% à 4% de fluor dont les trois quarts seraient retenus dans les engrais fabriqués avec du minerai de ces sources.

La toxicité du fluor peut être corrigée chez les plantes et les animaux par l'addition de chaux et l'emploi de phosphates solubles qui immobilisent les fluorures solubles et produisent l'apatite minérale très insoluble contenant le phosphore.

Dans les sols acides, à la suite d'application d'engrais contenant du fluor, la teneur de certaines plantes en fluor peux s'élever jusqu'à 500 parties par million ou davantage. D'ordinaire, on observe les dommages lorsque la teneur s'élève à 50 parties par million. A une concentration plus élevée, il va sans dire que les plantes meurent.

On a toutefois démontré que la quantité de fluor absorbée par les racines n'est pas proportionnelle à la concentration dans le sol et qu'il y a peu de transport dans les autres parties de la plante, excepté lorsque la concentration du sol est de plusieurs milliers de parties par million.

Les seuls éléments mineurs dont on a démontré les déficiences chez les animaux, mais on pourrait dire chez l'homme, sont le fluor, le cobalt, l'iode et le fer. On n'a pas cependant de preuves du besoin

physiologique des animaux en fluor. On sait qu'il est utile parce qu'il est une partie constituante, comme on l'a répété tout au cours de la journée, des dents et des os.

L'effet d'une teneur élevée en fluor chez les plantes utilisées comme aliments des oiseaux n'est pas connu. Des travaux ont démontré qu'une diète contenant quatorze parties par million de fluor empêchait le développement normal des dents chez les rats.

On affronte surtout des problèmes, en alimentation animale, lorsqu'on donne du phosphate de roc pulvérisé aux animaux, phosphate de roc provenant de minerai qui serait très riche en fluor, au lieu de donner aux animaux de la farine d'os. Mais on peut obvier à cet inconvénient en faisant griller le minerai à une température élevée pour en chasser le fluor, comme on le fait dans la fabrication des engrais chimiques où l'on chasse le fluor.

On a rapporté des troubles chez des animaux qui buvaient de l'eau contenant de dix à vingt parties par million de fluor, mais, lorsque la teneur de l'eau en fluor est trop élevée, on peut encore la réduire en filtrant l'eau avec des filtres fabriqués à l'aide d'os moulus.

Chez les volailles, on dit qu'ils seraient beaucoup moins sensibles et qu'il y aurait danger de fluorose lorsque l'on donne du phosphate de roc au lieu de donner du supplément minéral normal.

M. le Président, les raisons pour lesquelles on devrait refuser l'autorisation d'employer un produit chimique ou celles pour lesquelles on devrait le retirer de la circulation devraient toujours être basées sur des preuves scientifiques reproductives, comme on l'exige pour leur utilisation. Si l'opinion publique doit jouer un rôle important dans le processus politique — et elle doit en jouer un — il faut que cette opinion publique appuie toujours ses assertions sur des analyses critiques des faits plutôt que sur l'émotivité, la sensiblerie ou des craintes du genre croque-mitaine, Bonhomme-Sept-heures de la part de plaisantins de l'Apocalypse. Les décisions doivent être basées sur une évaluation objective de preuves scientifiques irréfutables et non sur les seules opinions publiques ou politiques fussent-elles démocratiques. Les décisions d'obédience scientifique conditionnées par des expédients politiques, avec caution gouvernementale, ne sont pas toujours adéquates ni bénéfiques.

Je vous remercie, messieurs, de nous avoir écoutés.

Le Président (M. Pilote): L'honorable ministre des Affaires sociales.

M. Forget: Je vous remercie, Dr Forest. J'aimerais que nous nous arrêtions un moment sur certaines affirmations qui ont été faites aujourd'hui, selon lesquelles le déversement dans les eaux d'égout des déchets et de l'eau usée, mais fluorée, aurait des effets inconnus et imprévisibles sur la biologie animale et végétale.

Vous attirez, dans vos notes à la page trois, l'attention sur la possibilité que la toxicité du fluor puisse être corrigée par l'addition de chaux et l'em- ploi de phosphates solubles qui immobilisent le fluorure soluble et produisent l'apatite minérale très insoluble contenant le phosphore. Est-ce qu'un processus analogue ou un processus identique à celui-là n'est pas de nature à se produire, justement, dans les eaux d'égout qui contiennent du phosphate — on sait qu'il y a quelques années on parlait de la surabondance de phosphate dans les eaux usées — et de provoquer une réaction de ce genre qui est susceptible de neutraliser, en quelque sorte, les fluorures qui se trouvent dans l'eau, de manière à les rendre totalement inoffensives?

M. Forest: Vous avez raison, M. le ministre. Ceci démontre comment il faut être prudent lorsqu'on projette, dans l'avenir, des possibilités de réactions ou autres. Vous avez mentionné, précisément, une possibilité qu'il y ait déjà neutralisation dans ces groupes. Par ailleurs, on pourrait prétendre qu'il y aurait danger de concentration, comme on le dit malheureusement trop souvent. La fameuse chaîne alimentaire dont on parle si souvent; dans cette chaîne alimentaire, il y a concentration, peut-être, mais on oublie toujours s'il y a aussi dégradation et détoxication d'un organisme à l'autre.

Vous avez certainement vu, messieurs les membres de la commission, de nombreuses publications où il y avait des exagérations, il faut le dire. On vous a montré en graphique une dizaine — je pourrais laisser mon confrère expliquer le graphique — d'insectes empoisonnés, dix grenouilles qui mangeaient chacune dix insectes et la couleuvre qui mangeait dix grenouilles empoisonnées et l'aigle, enfin, qui... C'est une grossière représentation de ce qui se passe dans la nature.

Il y a concentration mais on a oublié qu'il y a dégradation et détoxication tout au cours de la chaîne également. Il y a d'autres processus que l'on ignore. Il faut être très prudent lorsqu'on projette, comme cela, ou qu'on émet des hypothèses sans référence scientifique précise.

M. Forget: Vous faites également allusion, dans votre mémoire — je pose la question pour être bien sûr de comprendre les implications — à l'absorption, par les racines des plantes, du fluor qui se trouve présent dans le sol.

Vous indiquez que l'absorption par les racines n'est pas proportionnelle à la concentration dans le sol et qu'il y a peu de transport dans les autres parties de la plante, excepté lorsque la concentration est de plusieurs milliers de parties par million. Est-ce que, par exemple, l'arrosage des pelouses, des fleurs et des jardins par de l'eau fluorée dans les villes où les gens peuvent avoir des potagers ou simplement des pelouses, est susceptible de causer des difficultés quant à la culture, à rendre stériles les potagers, à tuer le gazon ou quoi que ce soit du genre?

M. Forest: II y a beaucoup plus de danger avec le sel que l'on applique dans les eaux. Encore là. vous voyez les pelouses reverdir. On a dit que les végétaux digéraient, mais les végétaux ne digèrent pas; ils transportent, par tout un mécanisme, des

racines aux différentes parties de la plante, les minéraux qu'ils absorbent. Mais, je l'ai mentionné, il y a un blocage parfois au niveau des racines, le Dr Gauthier se rappelle ici qu'un de nos confrères avait travaillé avec du manganèse, avec différentes variétés d'une même espèce; il a trouvé que chez certaines variétés, il y avait un blocage génétique au niveau des racines. C'est donc que des plantes ne peuvent s'adapter et peuvent avoir certains gènes. Ce que l'on oublie encore dans les considérations scientifiques — un spécialiste qui n'aurait été que dans le domaine de la physiologie pure... on avait l'avantage, à cette station de recherche, d'avoir un généticien qui avait travaillé conjointement avec les spécialistes en fertilité des sols et qui ont fait cette découverte, malgré les fortes concentrations de manganèse — il y avait là blocage au niveau des racines, à cause d'un gène dans la variété qu'on avait réussi à développer et à créer dans la station.

M. Forget: Est-ce qu'on peut dire, donc, Dr Forest, que ce qui se passe dans le corps humain pour équilibrer en quelque sorte, dans le flux sanguin, le dosage de fluorure, soit par l'élimination, la voie rénale, soit par l'emmagasinage dans les tissus osseux, cela se passe un peu, toutes proportions gardées, du côté de la vie végétale aussi, par des mécanismes qui s'assurent qu'au niveau de la tige, des feuilles et des fruits, par exemple, le niveau de concentration de fluorure qui peut se trouver dans le sol, par l'arrosage ou naturellement, par l'irrigation, ou Dieu sait comment, ne se transmet pas et que la chaîne en quelque sorte, est brisée, de cette façon-là? Je n'ai pas d'autres questions, M. le Président.

Le Président (M. Pilote): L'honorable député de Bourget.

M. Boudreault: J'aurais peut-être une petite question à poser à M. Forest, à savoir, dans la page 4 de son mémoire, qui mentionne qu'on a rapporté des troubles chez les animaux qui buvaient de l'eau contenant de 20 à 20 ppm... Quels sont ces troubles qu'on a rencontrés chez les animaux?

M. Forest: Le même genre, à peu près, que vous avez rapporté chez les humains, de déposition dans l'émail, dans les mâchoires, etc. C'était surtout cela. En somme, s'il y a une trop forte concentration de fluor chez les humains, vous allez avoir dans la dentition un dépôt, comme on l'a appelé; chez les animaux, il y aura déposition là encore.

M. Dufour: Dans vos lectures, M. le Président, vous avez certainement dû rencontrer des gens qui sont pour ou contre la fluoration. Qu'est-ce que vous avez à dire, en résumé, là-dessus?

M. Forest: Disons brièvement, M. le Président, que j'ai tâché d'étudier toutes ces références que j'ai pu consulter et le plus objectivement possible, avec un esprit le plus critique possible aussi. Toujours ayant en mémoire combien ma naïveté avait été surprise, ma bonne foi avait été surprise il y a vingt ans, alors qu'on avait publié trois volumes d'un auteur américain:

Malabar Farms, Pleasant Valley, Plowman's Folly, la folie du laboureur, et qui avaient ébranlé tout le monde agronomique à cette période, au point qu'un de mes professeurs avait obtenu l'autorisation, dans le temps, d'aller visiter les fermes de Louis Broomfield, Malabar Farms, dans la Pennsylvanie. Il avait été — on lui avait dit qu'il serait accueilli tel jour — il se rend là, il nous revient fort surpris de ce qu'il avait vu. Louis Broomfield faisait de la culture, qu'il prétendait naturelle, biologique, sans employer aucun engrais chimique, de peur de contaminer ses plantes et les produits que l'on consommerait, de peur aussi d'empoisonner les humains. Aucun engrais chimique, aucun pesticide. Le professeur avait trouvé que les rendements étaient passables, absence de maladie, d'insectes et revint un peu décontenancé l'hiver passé.

Vingt ans après, M. le ministre, il rencontre le gérant de la ferme Malabar Farm qui lui dit: Dr Ca-rew, je vous connais bien. Le Dr Carew ne se rappelait pas M. X qui était en congrès et lui dit qu'il ne le connaissait pas. Il dit: Vous êtes venu visiter Malabar Farm en 1954, alors que j'étais gérant de la ferme de Louis Broomfield, Malabar Farms, qui avait vendu des livres et des livres. Il ajouta: Cela ne vous a pas surpris? Le docteur répondit: J'ai été surpris un peu. Il dit: Savez-vous ce que nous faisions? Nous avions été prévenus de votre visite. Un professeur d'université viendrait visiter les fermes de Louis Broomfield pour constater ses méthodes de culture. Il dit: Louis Broomfield nous avait dit, la veille: Cachez tous les sacs d'engrais chimiq ue, tous les sacs de pesticide, tous les appareils servant à pulvériser dans la vieille grange à l'autre bout de la ferme et n'amenez pas le professeur Carew dans cette grange. Le professeur Carew a publié un article et a dit: Où que tu sois, Louis Broomfield, ta fumisterie de 20 ans a coûté cher et tu as pris ma naïveté de professeur en défaut.

Il faut toujours être critique quand on voit certaines choses semblables. Il demande: Mais pourquoi avez-vous fait ces choses? Celui-ci répondit: II fallait bien employer des engrais chimiques. Il fallait bien employer des pesticides, autrement, nous n'aurions eu aucune récolte. Par ailleurs, Louis Broomfield s'était enrichi en publiant trois volumes contre l'emploi des pesticides et des engrais chimiques. Il faut toujours un peu se méfier des fumisteries, il faut avoir l'esprit assez critique. Le professeur Carew avait été victime, comme je l'avais été moi aussi.

M. Dufour: M. le Président, je voudrais poser une dernière question. Vous dites qu'il n'y avait pas d'insectes dans cette ferme, est-ce que le fluor serait un insecticide?

M. Forest: Je vais passer la parole à mon spécialiste en pesticides, le Dr Gilles Emond, qui connaît les pesticides et les insecticides qu'il faut bien distinguer. Lui va faire la distinction entre chacun des...

M. Emond (Gilles): Je pense qu'il faut faire une

distinction ici. Quand on parle de pesticides, on se réfère aux insecticides contre les insectes, aux fongicides contre les maladies des plantes, et aux herbicides contre les mauvaises herbes. Il y en a, évidemment, toute une gamme. Il y a les acaricides, ainsi de suite, les rodenticides. Mais, tout de même, si on se réfère à ces produits, aux produits qui sont utilisés au Québec, on s'aperçoit qu'aucun des insecticides recommandés ne contient du fluor. Il y a seulement deux herbicides que nous recommandons au Québec qui contiennent du fluor, mais, tout de même, il faut s'assurer, évidemment, que ces produits soient homologués par le ministère de la Santé, des Aliments et Drogues à Ottawa, et soient couverts par une documentation très soutenue. Je ne crois pas qu'il y ait de problème de ce côté, du côté des pesticides proprement dits.

M. Forest: Et, surtout, ces deux herbicides sont utilisés — des produits chimiques — l'un, pour détruire les mauvaises herbes dans le tabac et l'autre, dans les plates-bandes, les fleurs.

M. Dufour: Merci!

Le Président (M. Pilote): D'autres questions?

On vous remercie, Dr Forest, ainsi que ceux qui vous accompagnent, de votre mémoire, et soyez assurés que les membres de la commission voudront prendre bonne note de vos recommandations.

M. Forest: Merci beaucoup!

Le Président (M. Pilote): Avant d'ajourner les travaux, je voudrais mentionner les organismes que nous allons entendre le mardi 4 mars: L'Association dentaire du Québec; l'Association médicale du

Québec; l'Ordre des chimistes; la ville de Laval; l'Association québécoise des techniques de l'eau; l'Alcan et l'Association des esthéticiennes.

La commission ajourne ses travaux au mardi, 4 mars, à 10 heures

M. Samson: Je m'excuse. Est-ce que c est seulement pour mardi ou s'il y en aura mercredi également? Est-ce qu'on peut nous informer?

M. Forget: Non, c'est seulement mardi. M. Samson: Seulement le 4.

M. Forget: Tous ceux qui ont demandé à être entendus dans les délais fixés sont compris dans la liste qui vient d'être donnée.

Le Président (M. Pilote): Le député de Chicoutimi me demande si on ne pourrait pas commencer à 10 h 30; je le comprends, parce que...

M. Boudreault: J'allais poser la même question. M. le Président...

Le Président (M. Pilote): Quand on part du Lac-Saint-Jean ou de Montréal...

M. Boudreault: C'est peut-être préférable... M. Bédard (Chicoutimi): A 10 h 30.

Le Président (M. Pilote): La commission ajourne ses travaux à 10 h 30.

(Fin de la séance à 21 h 50)

ANNEXE 1

MEMOIRE DE L'ECOLE DE MEDECINE DENTAIRE DE L'UNIVERSITE LAVAL INTRODUCTION

Le présent mémoire, soumis en plus du mémoire conjoint des facultés dentaires des universités du Québec, a pour objet de contribuer à élucider un point particulier de la question de la fluoration des eaux de consommation. En fait, il a pour but spécifique d'exposer un bref résumé des connaissances actuelles concernant les propriétés inhibitrices du fluor sur la carie dentaire.

Les recherches relatives à la prévention des caries dentaires ont progressé remarquablement au cours de ces dernières années, particulièrement à l'égard de l'étude du processus même de la carie. Bien que la question soit l'objet d'une abondante documentation, ce mémoire n'ambitionne pas d'en présenter une revue exhaustive. Il se bornera à constituer une simple introduction aux travaux que notre invité, un scientifique de réputation reconnue, aura l'honneur de présenter aux membres de la commission.

EFFETS DES FLUORURES SUR LA CARIE DENTAIRE

En médecine dentaire, les chercheurs s'accordent généralement à déclarer que la carie dentaire résulte de l'interaction de trois facteurs: 1-une dent vulnérable; 2-la présence de la plaque dentaire (*) contenant des bactéries;

(*) La plaque dentaire est constituée par la couche de bactéries en suspension dans une matrice protéique qui se dépose sur la dent.

3- l'effet du sucre contenu dans les aliments.

En conséquence, la prévention de la carie dentaire repose formellement sur toute action répressive touchant l'un ou l'autre de ces facteurs.

L'hygiène buccale vise particulièrement à éliminer la plaque dentaire de la cavité buccale, de même que de saines habitudes alimentaires tendent à minimiser les facteurs cariogènes reliés à l'alimentation. Par ailleurs, la fluoration des eaux de consommation permet de s'attaquer à la fois aux facteurs mentionnés en 1 et 2.

Les principaux stades du processus de la carie dentaire peuvent être décrits succinctement ainsi: les bactéries de la plaque dentaire transforment en acides les sucres alimentaires qui sont au contact de la plaque; les acides ainsi formés entraînent alors la dissolution de l'hydroxy-apatite, principal constituant de la structure des dents. Notons que la solubilité de l'hydroxy-apatite s'accroît, dans la mesure où le degré d'acidité de la plaque dentaire s'élève.

Les fluorures réduisent la vulnérabilité de la dent en diminuant la solubilité de l'émail. Bien que le mécanisme de diminution de la solubilité soit actuellement controversé, il ne subsiste aucun doute concernant la propriété des fluorures de réduire la solubilité de l'émail, par leur présence dans l'émail ou dans le solvant. Plusieurs travaux scientifiques en témoignent. Qu'il suffise d'en mentionner quelques-uns (1-4). Il semble que l'un des mécanismes les plus admissibles soit la transformation, durant la période de développement et de maturation de la dent, d'une partie de l'hydroxy-apatite en fluorapatite de caractère moins soluble. Ce phénomène n'exclut pas, évidemment, l'effet topique des fluorures, produit uniquement par contact direct. Ainsi, les fluorures véhiculés dans les liquides ingérés continuent de s'infiltrer dans l'émail, à une profondeur de 100 à 200 microns, c'est-à-dire dans la couche superficielle des dents (5). Il s'y produit une substitution ionique et l'on y observe une très forte teneur en fluor.

Les fluorures attaquent également la plaque dentaire en inhibant les microorganismes présents. Il est reconnu depuis longtemps que le fluor agit sur les enzymes du métabolisme des sucres. Il est aussi admis que cette inhibition réclame des concentrations de fluorures plusieurs fois supérieures à la concentration maintenue dans le plasma (0.1 à 0.2 ppm) par les mécanismes homéostatiques(6-8). De plus, pratiquement tous les enzymes exercent leur action dans le liquide intracellulaire, un liquide dont la teneur en fluorures est encore moins élevée que celle du plasma. C'est-à-dire que l'on ne peut pas démontrer une inhibition enzymatique in vivo aux concentrations de fluorures existantes dans le plasma, qui sont maintenues de 0.1 à 0.2 ppm, même si l'eau de consommation présente une teneur s'élevant à 5.4 ppm de fluor (9). De plus, des études sur les enzymes du sérum de patients traités pour l'ostéoporose, à l'aide de fortes doses de fluorure de sodium, n'ont présenté aucune modification significative de l'activité enzymatique (10, 11).

Si l'on peut affirmer que la fluoration de l'eau de consommation ne semble pas affecter les systèmes enzymatiques des consommateurs, principalement parce que la teneur en fluor in vivo est maintenue à un bas niveau par un mécanisme de régulation, l'on ne peut heureusement en affirmer autant des bactéries de la plaque dentaire, cause de la carie.

En effet, dès 1959, Jenkins (16,17) démontrait qu'une concent ration de 6 à 10 ppm de fluorures suffisait à interrompre complètement la production d'acide par les microorganismes de la salive, à un pH de 5.0. Notons que l'action inhibitrice des fluorures sur les enzymes s'accroît lorsque les microorganismes sont soumis aux fluorures à un pH acide (15), un étatf réquent de la plaque dentaire. De plus, il est maintenant reconnu que la plaque contient une concentration de fluorure étonnament élevée (12,13). On a également démontré une relation entre les fluorures de la plaque et les fluorures contenues dans l'eau de consommation (13).

Selon les auteurs et les conditions existantes, la teneur moyenne de la plaque en fluorures serait de l'ordre de 26 à 70 ppm (12, 13), dont une grande partie sous forme liée (14). Il semble évident qu'une telle accumulation de fluorures dans la plaque proviendrait principalement d'une infiltration lente de la salive et de lavages beaucoup plus abondants, mais intermittents, par l'eau de consommation. Evidemment, la présence de fluorures dans la plaquedentaire a surtout été considérée du point de vue de ses effets anti-enzymatiques, mais elle peut aussi vraisemblablement exercer une influence sur la carie en diminuant la solubilité de l'émail.

Des chercheurs canadiens de l'Ecole de médecine dentaire de l'Université du Manitoba ont apporté une contribution remarquable à l'étude de l'action des fluorures sur des cultures pures de bactéries buccales (18-21). C'est ainsi que les résultats de leurs travaux (24), confirmés par d'autres chercheurs (25), ont démontré que la synthèse de polyssacharides, à partir des sucres par les bactéries buccales, est inhibée, comme la production d'acide, par des concentrations en fluorures de 2 et de 4 ppm, une teneur qui correspond bien à celles qui s'établissent, vraisemblablement, lorsque la plaque est acide. D'autres travaux (20, 21) démontrent clairement que l'inhibition reconnue de l'énolase par les fluorures interrompt non seulement la production d'acides, mais aussi le transport du glucose exogène à l'intérieur des cellules bactériennes, par l'inhibition de l'un des mécanismes de phosphorylation.

CONCLUSION

Bien que ces quelques considérations n'exposent pas entièrement les phénomènes de l'action répressive des fluorures sur la carie dentaire, elles constituent toutefois un résumé succinct des connaissances actuelles concernant les propriétés protectrices du fluor au bénéfice de la santé dentaire.

Les scientifiques de plusieursdisciplines s'efforcent présentement de définir, avec plus de précision, les mécanismes de l'action inhibitrice du fluor sur les caries dentaires. Toutefois, l'efficacité des fluorures pour

prévenir la carie dentaire est parfaitement reconnue depuis longtemps. De plus, la grande majorité des scientifiques reconnaît que, dans l'état actuel de nos connaissances, la fluoration des eaux de consommation, du strict point de vue de l'effet du fluor, constitue le seul moyen pratique, sûr et économique d'obtenir la protection dentaire maximale des fluorures, au bénéfice de l'ensemble de la population.

L'Ecole de médecine dentaire de l'Université Laval est heureuse de contribuer aux travaux de cette commission parlementaire, en y présentant l'un des chercheurs les plus réputés du domaine de la biochimie de la plaque dentaire, le docteur Israël Kleinberg, DDS. PhD., de l'Université de l'Etat de New York à Stoony Brook, Long Island. Ses nombreux travaux sur la production d'acide par les microorganismes de la salive et de la plaque ont contribué considérablement au progrès de nos connaissances des mécanismes de la carie dentaire. La liste de ses principaux travaux dans ce domaine apparaît dans l'annexe suivante.

ANNEXE 2

MEMOIRE DU CONSEIL DE LA SANTE ET DES SERVICES SOCIAUX DE L'OUTAOUAIS INTRODUCTION

Après avoir pris connaissance de l'article 2, projet de loi no 88 portant sur la fluoration des eaux de consommation, le Conseil de la Santé et des Services sociaux de l'Outaouais désire y apporter un appui inconditionnel. Le Conseil s'appuie sur l'avis d'un certain nombre de spécialistes, pour affirmer que la fluoration des eaux de consommation est une nécessité. Le Conseil souscrit donc à l'idée de rendre obligatoire la fluoration des eaux, au fait que le financement en soit assuré à 100% par le ministère des Affaires sociales et qu'il n'y ait pas de référendum pour en déterminer l'opportunité. Le CSSSO ne peut prétendre posséder toute l'expertise requise pour se prononcer validement sur la question. Cependant l'appui massif déjà apporté par des organismes, associations et personnalités à travers le monde, les Etats-Unis, le Canada et le Québec donne une autorité incontestable au bien-fondé d'une législation rendant la fluoration obligatoire.

Il ne sert donc plus à rien de reprendre toute l'argumentation en faveur de la fluoration puisque celle-ci est fort bien étayée dans le dossier technique sur la fluoration (1974) du ministère des Affaires sociales, ainsi que dans un autre document intitulé "La fluoration des eaux de consommation", le rapport final d'un comité ad hoc de l'Association Québécoise des techniques de l'eau publié en mai 1970. Dans le présent mémoire nous nous bornerons donc à une description de la situation de l'hygiène dentaire dans l'Outaouais à partir de quelques données et nous essaierons de faire ressortir comment la fluoration des eaux est très importante pour notre région.

1. UN PRINCIPE DE BASE

Affirmons au départ qu'un bien public pour lequel tous les citoyens ne peuvent saisir la haute technicité doit être imposé par une loi. Lorsque des études scientifiques approfondies ont démontré la nécessité d'un tel bien public, celui-ci doit être imposé par la force de l'autorité politique même si des minorités s'y opposent. Il est possible que de telles oppositions se fassent jour compte tenu des préjugés, des mystifications et des rumeurs qui alimentent l'opinion publique sur des matières hautement complexes. Nous affirmons donc que le législateur doit prendre ses responsabilités pour assurer la prévention de la carie dentaire chez l'individu et de la détérioration de la santé dentaire de l'ensemble de la population. Au lieu de compter sur la bonne volonté de tous et chacun, particulièrement des spécialistes, des dentistes et des hygiénistes, le législateur doit assurer, par l'exercice massif d'une technique prouvée scientifiquement, une action massive touchant l'ensemble de la population. Même avec les mesures aussi louables que l'assurance-santé dentaire pour les enfants, il est impossible d'atteindre toute la population pour des traitements préventifs et curatifs car la législation sur l'assurance-santé dentaire n'augmente pas le nombre réel des dentistes et même si une telle législation devait porter sur des enfants d'un âge plus avancé, ceci ne ferait que compliquer le problème compte tenu qu'il ne serait pas assuré qu'il y aurait une augmentation suffisante de dentistes pour atteindre l'ensemble de la population.

2. QUELQUES DONNEES SUR LA SITUATION DE LA SANTE DENTAIRE DANS L'OUTAOUAIS 2.1 Ressources humaines

Au niveau des ressources humaines affectées à la santé dentaire, nous pouvons dénombrer environ quarante-deux (42) dentistes dans l'Outaouais dont les 2/3 environ sont situés en milieu urbain couvrant une population d'environ 140,000 personnes, l'autre tiers (1/3) étant dispersé dans l'arrière pays à caractère rural pour une population d'environ 110,000 personnes. Par rapport à l'ensemble du Québec, l'Outaouais est nettement défavorisée. Le taux provincial par 10,000 habitants est de 288 alors que le taux régional est de 1.72 par 10,000 habitants. Des hygiénistes dentaires se retrouvent en nombre très limité, deux hygiénistes

dentaires publics ont pu être recensés; tout au plus cinq ou six sont présumément rattachés à des bureaux de dentistes en milieu urbain. Il en découle qu'il est donc nettement impossible de pouvoir apporter tous les soins préventifs requis à l'ensemble de la population et plus particulièrement de la population des enfants de la région de l'Outaouais par l'exercice des professionnels de la santé dentaire. Or, il n'est pas assuré que l'on puisse trouver à court terme le moyen d'augmenter et de mieux répartir les professionnels de la santé dentaire de manière à ce que l'ensemble de la population puisse avoir satisfaction à ses besoins à ce niveau.

Il s'ensuit donc que si une technique est connue qui puisse réduire la carie dentaire dans la masse de la population, que cette technique est applicable dans de brefs délais et économique dans sa réalisation, on ne peut en priver la population de l'Outaouais. 2.2Taux de carie chez les enfants

L'ensemble des relevés effectués dans l'Outaouais chez les enfants d'âge scolaire entre les années 65 à 70 décèle qu'il y a une moyenne de 6 à 7 caries par enfant. Plus précisément, un relevé effectué dans la région de l'Outaouais de septembre à décembre 1971 donne des résultats assez probants. Deux mille huit cent quatre-vingt-onze (2,891) enfants d'âge de 6, 7 et 8 ansont été examinés. Sur ce nombre, 2,478 possédaient au moins une dent cariée; la moyenne de dents cariées s'élève à 7.4 et dans la plupart des cas, il s'agit de dents temporaires.

S'il est plus plausible de penser que la fluoration pourrait réduire ce taux de carie à environ 2 à 3 dents par personne, nous ne pouvons que souscrire encore une fois à ce principe de prévention massive qu'est la fluoration. 2.3 Facteurs écnomiques

Dans l'Outaouais, d'autres facteurs rendent la prévention en santé dentaire plus difficile que dans d'autres régions. Dans le milieu urbain, la situation est sans doute com parable à d'autres endroits du Québec mais en milieu rural, l'accès aux services est extrêmement difficile et les moyens courants qui pourraient être mis à la disposition de la population pour fins de fluoration sont non disponibles à cause du facteur d'éloignement et de dispersion de la population. Il faut ajouter à ceci que les économiquement faibles ne peuvent aussi facilement que les autres utiliser les services d'un dentiste. La fluoration des eaux de consommation est donc un départ indispensable pour parer au plus grave. 2.4 La fluoration dans l'Outaouais

Actuellement dans l'Outaouais aucune municipalité ne dispose d'un système de fluoration. Seules huit (8) municipalités ont déjà l'eau fluorée naturelle, mais à des niveaux inférieurs ou supérieurs à 1.2 partie par million. La population ainsi atteinte par la fluoration totalise 4,450 habitants sur environ 245,000.

L'usine régionale de fiItration de la Communauté régionale de l'Outaouais est équipée pour la fluoration, mais ne la dispense pas. Cet équipement inutilisé pourrait être rapidement mis en service pour couvrir une partie importante de la population de l'Outaouais.

3. AUTRES MESURES A ENTREPRENDRE:

La fluoration des eaux de consommation n'est cependant pas une panacée universelle. Il ne faudrait pas s'asseoir sur les lauriers de la fluoration pour prétendre que tout a été fait au niveau de la prévention en santé dentaire. Cette technique doit s'associer à l'augmentation et à l'amélioration des autres programmes en hygiènedentaire. Mentionnons en particulier le cas de beaucoup de gens qui demeurent en milieu rural et qui ne pourront pas profiter de la fluoration des eaux de consommation étant donné qu'ils ne sont pas branchés sur des aqueducs municipaux. Dans leur cas, il faudrait envisager la possibilité d'un programme d'eau fluorée dans les écoles qui pourrait contenir de 7 à 9 parties par million compte tenu du fait que l'enfant n'est que 5 jours par semaine à l'école et sur une période de 9 mois par année, ou encore, on pourrait mettre en place des programmes systématiquesderince-bouchefluoréeoude tout autre moyen qu'on peut imaginer rendant aisé l'accès à la fluoration chez les enfants en milieu rural. Sur un autre plan, il ne faudra pas négliger la nécessité d'assurer la distribution adéquate des professionnels de l'hygiène et de la santé dentaire.

De plus, de concert avec le département de santé communautaire et les CLSC, des services additionnels de prévention, des programmes et des actions bien concrètes devront être entreprises de manière à assurer aux québécois de l'Outaouais une meilleure dentition. La fluoration aura sans doute, au départ, le mérite additionnel d'accentuer la préoccupation de l'hygiène buccale et peut-être même de l'hygiène en général.

CONCLUSION

II serait un désastre pour la région de l'Outaouais, particulièrement ses sous-régions les plus sous-développées que l'on retarde encore la mise en application de la fluoration systématique des eaux de consommation. Nous ne pouvons que souhaiter que le législateur ne se laisse pas impressionner outre mesure par ceux qui crient le plus fort leur opposition. Leurs cris n'ont aucun poids à côté des arguments scientifiques et approfondis au niveau des études effectuées dans le domaine et à côté des cris des pauvres édentés ou mal embouchés sur le dos de qui on fait des procès idéologiques.

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