L'utilisation du calendrier requiert que Javascript soit activé dans votre navigateur.
Pour plus de renseignements

Accueil > Travaux parlementaires > Travaux des commissions > Journal des débats de la Commission permanente des affaires sociales

Recherche avancée dans la section Travaux parlementaires

La date de début doit précéder la date de fin.

Liens Ignorer la navigationJournal des débats de la Commission permanente des affaires sociales

Version finale

30e législature, 3e session
(18 mars 1975 au 19 décembre 1975)

Le mardi 15 avril 1975 - Vol. 16 N° 37

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude des crédits du ministère des Affaires sociales


Journal des débats

 

Commission permanente des affaires sociales

Etude des crédits du ministère des Affaires sociales

Séance du mardi 15 avril 1975

(Dix heures quarante et une minutes)

M. Cornelller (président de la commission permanente des affaires sociales): A l'ordre, messieurs!

La commission parlementaire des affaires sociales reprend, ce matin, ses travaux pour l'étude des crédits du ministère des Affaires sociales. Lors de l'ajournement de vendredi, la commission était à étudier le programme no 2.

Le député de Saint-Jacques.

Aide aux ménages privés de moyens de subsistance (suite)

Taxe d'eau

M. Charron: Merci, M. le Président. Bonjour à tous les membres de la commission et à ceux qui les accompagnent.

M. le Président, j'aimerais achever le programme no 2, qui a retenu l'attention de la commission, la semaine dernière, en ajoutant quelques questions particulières sur certains aspects du règlement de l'aide sociale et des modifications qui devront y être apportées au cours de l'année financière qui commence.

Nous avions commencé à discuter des besoins spéciaux qui sont contenus dans le règlement de l'aide sociale. Il y a un de ces besoins spéciaux, ou qui devrait peut-être être calculé dans les besoins spéciaux, qui est la question de la taxe d'eau qui frappe plus particulièrement les assistés sociaux de Montréal. Je n'ai pas besoin de refaire l'historique de ce conflit, parce que conflit il y a.

J'aimerais plutôt profiter de cette occasion pour demander au ministre des Affaires sociales s'il y a du nouveau, s'il y a du développement, suite à la question que posait le député de Sainte-Marie, la semaine dernière, en Chambre. Devant le développement qui s'annonce, quelle sera la position du ministre des Affaires sociales?

M. Forget: M. le Président, il serait peut-être utile, avant de parler de la situation actuelle, de faire un certain retour en arrière relativement à cette question, parce que je crois que, au moins chez certains de ceux qui se sont intéressés à cette question, durant les derniers mois, on peut compter un bon nombre de personnes, à mon expérience, avec qui j'en ai discuté privément, qui ne sont pas conscientes du contexte dans lequel le problème qu'on vient de soulever a été engendré.

Depuis environ un peu plus d'un an, comme on sait, des modifications dans les systèmes administratifs de l'aide sociale ont impliqué une modification considérable dans la façon dont les paiements sont effectués, sont préparés, en termes très matériels ou très concrets, dans la façon dont les chèques sont émis. Des détails pourraient, sans aucun doute, être donnés par M. Houde et ses collaborateurs, quant à la différence ou aux nombreuses différences, parce qu'il y en a plusieurs, entre l'ancien système administratif de l'aide sociale et le nouveau.

A tout événement, une des implications de ce nouveau système administratif consiste dans le fait qu'alors qu'antérieurement les versements, les chèques d'aide sociale, dans le cas des assistés sociaux de la ville de Montréal, étaient préparés par le service des affaires sociales, de la ville de Montréal, l'émission des chèques dans le nouveau système se fait de façon centrale, à Québec, par un processus, d'informatique qui tient compte, par la transmission électronique des données en provenance des bureaux locaux, des plus récentes inscriptions dans les dossiers de chaque ménage bénéficiaire de l'aide sociale.

Lorsque cette modification dans le système administratif a été introduite relativement aux bénéficiaires de l'aide sociale dans la ville de Montréal, nous nous trouvions en face d'une situation où la ville de Montréal avait, depuis aussi longtemps qu'on puisse se souvenir, assumé la préparation des chèques. Dans ce processus, elle avait pris sur elle de prélever à la source les sommes qui lui étaient dues au titre de la taxe d'eau.

Elle était donc à la fois payeur au nom du gouvernement, je parle de la ville de Montréal, et elle était aussi l'un des créanciers de ces familles. Et prenant avantage de ce cumul des rôles en quelque sorte, elle se payait elle-même, à même des prestations sociales qui étaient versées par ses soins aux assistés sociaux de la ville de Montréal, selon des barèmes identiques et uniformes aux barèmes qui s'appliquaient dans d'autres municipalités du Québec.

Donc, on pouvait vraiment parler, à ce moment-là, d'une situation où les bénéficiaires de l'aide sociale de la ville de Montréal étaient l'objet d'une discrimination administrative, si on veut lui donner ce nom.

Cela résultait d'un double rôle de la ville de Montréal, qui était largement unique par rapport aux bénéficiaires de l'aide sociale résidant dans les autres municipalités. L'introduction d'un nouveau régime administratif a tout simplement éliminé la possibilité physique de ce cumul de rôles de la ville de Montréal et donc l'occasion de prélever à la source une taxe locative telle que la taxe d'eau. C'est la situation dans laquelle nous nous trouvons maintenant.

Les mêmes barèmes — et c'est encore plus vrai puisqu'à peu près à la même époque les allocations pour le logement, qui étaient faites en vertu des anciens règlements, en vertu d'une catégorisation en trois zones de toutes les municipalités du Québec, ont été supprimées mais de toute manière, il n'y avait aucune relation directe entre ce zonage des municipalités et la taxe d'eau — dans la situation où nous sommes, s'appliquent indifféremment du lieu de résidence des bénéficiaires de l'aide sociale. Les mêmes taux maximums sont accessibles à tous les

bénéficiaires de l'aide sociale et, effectivement, aucun créancier de l'aide sociale n'est placé dans la position de se prévaloir d'une perception à la source des sommes qui lui sont dues.

Ceci est également vrai pour les comptes d'électricité puisqu'on pourrait, par analogie, supposer que puisqu'il s'agit de l'Hydro-Québe qui est une entreprise d'Etat, dans les mêmes circonstances le gouvernement provincial voudrait prélever à la source les comptes d'électricité ou quelque autre créance que ce soit. Ce n'est cependant pas une situation dont nous prenons avantage puisque, pour la plupart des gens — et c'est vrai pour les employés du gouvernement — nous ne percevons pas à la source de peur qu'ils ne les paient pas leurs comptes d'électricité. Il faut dire qu'on fait différemment pour les comptes, en quelque sorte, pour les taxes sur le revenu mais ceci en vertu d'un système qui donne généralement satisfaction et qui permet d'étaler sur toute l'année des paiements qui seraient autrement déraisonnables.

Toutefois, je crois qu'il est essentiel de comprendre la genèse du problème puisque la question même du député de Saint-Jacques laisse croire que nous avons supprimé un besoin spécial, qu'il y avait, à une certaine époque, dans le passé, une allocation spéciale faite aux bénéficiaires de l'aide sociale parce qu'ils vivaient dans une certaine municipalité et qui leur permettait de payer la taxe d'eau par un système de crédit d'impôt ou autrement.

C'est sans doute un développement qui est souhaitable à long terme, mais prétendre qu'on peut, par l'aide sociale, corriger tous ces problèmes, c'est entrer dans la voie d'une confusion considérable, quand on comprend que certaines municipalités imposent, par exemple, une taxe locative, alors que d'autres municipalités, dans les mêmes situations financières, imposent le même impôt, mais au propriétaire. Le propriétaire — on s'en doute un peu — va répercuter cet impôt, cette taxe d'eau par exemple, sur les loyers qui sont payés, loyers qui, par ailleurs, doivent être défrayés à même l'allocation de base de l'aide sociale.

Ce serait donc privilégier certaines municipalités, non pas en fonction des impôts qu'elles prélèvent, mais en fonction de la façon dont elles prélèvent leurs impôts. Des distorsions et des injustices sans nombre résulteraient immédiatement d'un tel régime. Encore une fois, un régime d'aide sociale n'a pas pour but d'accorder une aide aux municipalités; d'ailleurs, ce serait déséquilibrer complètement à la fois le budget et, encore une fois, l'objectif d'un programme qui vise à aider les familles et les individus.

Il n'est donc pas question, à notre point de vue, d'avoir une allocation spéciale qui ne bénéficierait pas aux individus et aux familles qui ont un revenu insuffisant, mais qui bénéficierait aux municipalités où ils se trouvent à demeurer, puisqu'il faudrait, àce moment-là, envisager à plus ou moins longue échéance une espèce de péréquation des revenus municipaux, basée sur le nombre de bénéficiaires de l'aide sociale à l'intérieur des limites de chaque municipalité. Ce serait la seule façon d'être complètement neutre par rapport aux moyens divers que différentes municipalités adoptent, soit plus de taxes foncières, moins de taxes locatives, des taxes de la nature d'une taxe d'eau qui est imposée au propriétaire plutôt qu'au locataire, mais qui se répercute à ce moment-là dans les loyers. Tout cela, ce sont des questions de détail, de forme et on ne peut certainement pas en privilégier une part rapport à l'autre.

Alors, au point de vue de l'aide sociale, M. le Président, je ne vois pas en quoi il existe un problème. Il existe un problème, bien sûr, au niveau municipal, dans la mesure où une partie des contribuables de n'importe quelle municipalité a des revenus insuffisants pour vraiment s'acquitter de leurs obligations sur le même pied que tous les autres, étant donné que les taxes foncières ou les taxes locatives ne sont pas basées sur la capacité de payer. C'est là un problème qu'on va régler dans un autre secteur, dans un autre service. On peut souligner, là-dessus, les efforts faits depuis quelques années par le gouvernement du Québec pour accroître son aide financière aux municipalités.

De mémoire, je peux citer les chiffres qui étaient donnés dans le discours du budget de l'an dernier. On verra aujourd'hui même, je pense, d'autres chiffres et un autre tableau encore plus éloquent de cela, mais dès l'an dernier, on sait que le gouvernement du Québec, par la taxe de vente, par différentes mesures de subvention, finançait ou fournissait aux municipalités environ, si ma mémoire est juste, 50% de leur revenu total.

Ce n'est donc pas un besoin auquel le gouvernement du Québec est sourd, mais il est beaucoup plus approprié de la faire au titre de l'aide aux municipalités via un besoin spécial qui ne bénéficierait pas du tout aux bénéficiaires de l'aide sociale, mais qui serait versé directement ou bien indirectement mais, de toute façon, sans aucun doute sur la destination finale de ces montants qui seraient versés à des municipalités.

D'ailleurs, d'autres clientèles qui ne sont pas plus favorisées sur le plan économique que les bénéficiaires de l'aide sociale pourraient également prétendre à une aide comme celle-là, s'il nous venait jamais à l'esprit de l'envisager, comme par exemple les personnes âgées. Les personnes âgées de plus 65 ans sont également souvent dans des positions financières précaires et ne bénéficient cependant pas de l'aide sociale mais d'un autre régime de sécurité de revenu . Pour elles également, les problèmes de fiscalité, particulièrement de la fiscalité scolaire qui, à tort ou à raison, semble inapproprié à bien des personnes âgées qui n'ont plus d'enfants, etc.

Alors, c'est également un problème qu'elles pourraient soulever. Comme on le voit, on ne réussirait pas à régler le problème de l'impact sur les gens à faibles revenus de la fiscalité locale par une mesure limitée simplement à l'aide sociale.

M. Charron: M. le Président, j'avais volontairement coupé ma question pour éviter de rouvrir le débat à nouveau. Mais je pense que c'est le choix du

ministre des Affaires sociales qui a préféré reprendre le conflit à son origine, l'expliquer à nouveau, avec les mêmes arguments qu'il avait lorsque nous avons soulevé la question à l'Assemblée. Je me dois donc maintenant, je pense, de lui donner une autre version.

C'est une approche très tatillonne que prend le ministre des Affaires sociales pour nous donner un cours de fiscalité municipale. C'est à croire, avec toutes les excuses qu'il aligne, qu'il y a un vice, qui est évident dans ce cas puisque des gens, des citoyens ont refusé de payer une taxe qui leur était chargée, comme à tous les autres citoyens, je l'admets. C'est une série d'excuses et le vice n'est pas là où le ministre des Affaires sociales le voit.

J'admets qu'il y a beaucoup de difficultés dans le système de fiscalité des municipalités. On n'est pas ici pour en parler, mais puisque le ministre en parle, je n'ai qu'à vous signaler que le maire de Québec, président de l'Union des municipalités du Québec, s'est fait le porte-parole d'un grand nombre de ses collègues, et il revendique une nouvelle forme de fiscalité.

Je n'ai qu'à faire allusion, M. le Président, à la divergence majeure d'opinions entre le président de la Fédération des commissions scolaires du Québec et le président de l'Union des municipalités quant au partage de l'impôt foncier.

Je tomberais exactement dans le panneau que vient d'ouvrir, face à la commission, le ministre des Affaires sociales si j'essayais d'analyser le problème que les assistés sociaux de Montréal ont traversé par un problème de fiscalité. Le vice, parce qu'il y en a un, est dans la Loi de l'aide sociale et dans le règlement de l'aide sociale, point. Que le ministre n'essaie pas de chercher la paille dans l'oeil d'au-trui, il a la poutre dans le sien. Ces gens-là ont essentiellement, à cause d'un système vicié, été responsables d'un geste de désobéissance civile — il faut l'appeler comme cela — auquel ils se sont sentis obligés, auquel je les ai priés d'adhérer, que, je crois, des députés libéraux, si ce n'est ouvertement, du moins privément, les ont également, à l'occasion, invités à faire. Je suis au courant de cette situation sur l'île de Montréal. Que ce matin on vienne nous dire que des gens ont protesté, ont brûlé leur compte de taxe d'eau parce que c'est la preuve que le système fiscal des municipalités est désuet et mérite un raccordement, c'est vraiment prendre des vessies pour des lanternes.

Le problème est où? Le problème est exactement comme je l'ai décrit lorsque nous avons ouvert le débat sur cette aide sociale. C'est le contexte qu'il faut reprendre. Les assistés sociaux font face, chaque année, à la hausse du coût de la vie sans aucune aide. L'aide arrive le 1er janvier de l'année suivante. Elle est un rattrapage pour l'année qui vient de s'écouler. Il y a un rajustement en fonction de la hausse du coût de la vie qui s'est produite pendant les douze mois précédents, mais pendant qu'elle s'est produite, cette hausse du coût de la vie, les bénéficiaires de l'aide sociale ont exactement ce qu'ils avaient le 1er janvier de l'année en cours. Autrement dit, les assistés sociaux de Montréal, puisque c'est d'eux que nous parlons — il s'agit de la taxe d'eau à Montréal — ont traversé la terrible année 1974, sur le plan inflationnaire, avec le même revenu mensuel, le 5 août, le 5 septembre, le 5 octobre que le 5 février ou que le 5 mars, à l'exception du rajustement de juin, qui n'était qu'un rajustement mineur de l'ordre de 3% ou 4% et, qui ne faisait certainement pas état de la crise économique que traversait la ville de Montréal et l'ensemble du Québec, à ce moment-là.

C'est là qu'est le vice. Le revenu pour faire face à l'inflation arrive après que l'inflation a fait sa marque. Aujourd'hui, c'est la même chose. Le rajustement que les assistés sociaux ont reçu le 1er janvier 1975 est calculé en fonction du taux d'inflation de 1974, mais aucunement préparé à faire face à celui de 1975.

Les assistés sociaux feront face, encore cet été, à une hausse du coût de la vie de 1975, que leur revenu sera inapte à conjurer, M. le Président, et qui les obligera, à un moment ou à un autre, parce que les besoins seront plus grands que ce qui aura été prévu, à refuser de payer une dette ici ou de payer une dette là.

Je n'ai pas prétendu que la taxe d'eau était, avant, un besoin spécial. J'aime mieux l'expliquer à nouveau de cette façon. Ce qui était jadis des besoins spéciaux, une allocation spécifique pour un certain nombre de besoins, comme la literie, comme le vêtement, est un jour complètement disparu de l'échelle de l'aide sociale. On a dit: Plutôt que de vous détailler à la pièce le genre de revenu auquel vous avez droit, on augmentera de façon globale votre revenu mensuel, mais ce sera à votre charge, maintenant, de répartir votre budget selon vos propres besoins. Le principe est beau, le principe est bon. C'est lui qui est à la base de la philosophie du revenu minimum garanti que nous attendons encore au Québec après qu'une commission nous l'eut recommandé, il y a maintenant déjà presque sept ou huit ans.

Peu importe, M. le Président, si ce principe est beau, il est beau, il est bon, il est valable pourautant qu'effectivement le montant ajouté au revenu mensuel couvre totalement et, au besoin, avec une majoration leurs dépenses, puisqu'on remet ce budget aux mains des assistés sociaux pour qu'ils l'administrent. Mais ce n'est pas le cas. Dans la pratique actuelle, le montant qui a été ajouté au revenu mensuel ne couvre pas et couvre toujours un an en retard ce qu'il a à couvrir comme hausse des différents besoins à couvrir.

C'est exactement le cas de la taxe d'eau. Lorsque la ville de Montréal a refusé — encore une fois le principe est bon — de percevoir, à même le revenu des assistés sociaux, la taxe qui lui est due, c'était normal, à condition qu'on leur accorde, en conséquence, un montant qui leur permette de faire face à cette nouvelle charge qu'ils ont à assumer d'eux-mêmes maintenant.

Or, M. le Président, au seul chapitre de l'alimentation, en 1974, nous avons connu sur le territoire de Montréal — les statistiques ont été fournies par le ministre de l'Industrie et du Commerce — une hausse de près de 17%. L'alimentation représente, dans le revenu des assistés sociaux — ai-je besoin

de vous le dire, M. le Président, ils ont un estomac, ils ont un foie, ils ont un organisme exactement semblable au vôtre et au mien — une partie de leur budget qui dépasse certainement largement ce que vous, vous y consacrez, M. le Président, ce que moi j'y consacre, ce que tous les membres de la commission consacrent à la nourriture. Ce qui veut dire que, quand nous soutenions à l'Assemblée nationale que l'inflation frappait les gens les plus démunis plus sévèrement, c'était exactement dire, en termes de ce genre, un fait mathématique. La majoration arrivait dans la partie la plus sensible du budget des assistés sociaux.

C'est évident que la première partie du budget se consacre et se donne à la nourriture. Les assistés sociaux ont donc dû faire face à cette augmentation de 17% dans la seule année de 1974, sans autre appui financier que ce qui leur avait été remis le 1er janvier de cette année, mais qui était loin de prévoir ce qui arriverait en 1974.

C'était, au contraire, un rattrapage de ce qui s'était produit en 1973. Ces gens ont donc dû — c'est pourquoi il ne s'agit pas de crime, à mon avis — se rendre à l'évidence. On les abandonnait avec un revenu calculé sur l'échelle de 1973 pour faire face à une hausse du coût de la vie qui n'était pas prévue en 1974. Ils ont fait comme vous et moi, ils ont mangé d'abord. Tout le monde sait qu'avec leur revenu, qui était à l'époque de $183 par mois pour une personne seule, si ma mémoire est fidèle, on ne peut pas dire qu'ils mangeaient d'une façon abondante.

Ils aménageaient leur revenu pour être capables de s'assurer de manger lorsque le boeuf haché atteignait $1.59 la livre, lorsque la pinte de lait atteignait $0.50, lorsque le beurre atteignait $0.90 et maintenant est plus de $1. Ils devaient, non pas qu'ils s'arrangeaient, ils devaient simplement subvenir aux besoins de leur organisme biologique, consacrer une partie de plus en plus importante de leur budget à cette activité humaine qui est celle de manger et ils étaient dans l'obligation de laisser des dettes de côté.

Une de ces dettes fut, certainement, la taxe d'eau, qu'auparavant, ne serait-ce que par habitude, ils n'avaient jamais été appelés à payer eux-mêmes. Mais ils n'ont pas abandonné que la taxe d'eau, il faut bien le dire. Ils ont abandonné aussi probablement beaucoup de loisirs, auxquels les assistés sociaux ont droit comme n'importe qui d'entre nous alentour de cette table. Ils ont abandonné probablement certains caprices quant aux vêtements. Ils ont probablement étiré plus longtemps qu'ils auraient dû le port de certains souliers, le port de certains vêtements parce que la priorité, qu'ils n'avaient pas choisie — on leur laissait l'administration d u budget mais on ne leur laissait aucunement la possibilité de distinguer ce qui devrait aller à tel endroit et d'où allait provenir la plus grande majoration... C'est ainsi qu'alentour des édifices du ministère des Affaires sociales, à Montréal, les 8 ou 9 octobre dernier, ils disaient la vérité en proclamant: Les 8% — ce qui est l'équivalent de la taxe d'eau à Montréal, les 8% du loyer mensuel — on les a mangés.

Ils avaient été laissés seuls, sans revenus majorés, pour faire face à une hausse du coût de la vie qui était étonnante au cours de l'été dernier. Ils ont donc dû y consacrer une bonne partie de leurs revenus et ils ont dû faire attendre, à un moment donné, que la taxe d'eau soit remboursée par le ministère des Affaires sociales. Ils sont encore dans cette impasse, le ministre des Affaires sociales également.

La ville de Montréal poursuivra-t-elle — on dit que c'est 50-50 — les 50% d'assistés sociaux qui n'ont pas payé leur taxe d'eau? Que fera-t-elle des 50% qui, eux, probablement en coupant ici et là, ont réussi à s'acquitter de cette tâche civile de payer leurs taxes au détriment probablement de nourriture, au détriment de vêtements auxquels ils avaient droit? Quel sera leur sort? Est-ce que le ministre entend simplement cautionner ou fermer le dossier sur une situation où il y a nettement injustice entre deux catégories de citoyens?

La situation n'est pas réglée, je le dis non pas pour celle de 1974 mais pour celle de 1975 également. Il est bien possible, si le taux d'inflation continue, comme il est là, à 1% ou 1.1% par mois, que l'on se retrouve, au cours de l'été de 1975, obligés d'affirmer que la majoration ou l'indexation — il n'y avait aucune augmentation là-dedans — qui est venue le 1er janvier 1975 s'avérera encore insuffisante, au cours de l'été prochain, pour faire face à l'inflation parce qu'elle est essentiellement basée sur le calcul de l'année dernière et que les citoyens bénéficiaires de l'aide sociale devront à nouveau faire des choix entre la nourriture et la taxe d'eau.

Entre les deux, M. le Président, je leur dirai encore à ce moment-là, comme je l'ai dit l'année passée et comme je peux le dire encore aujourd'hui, de choisir la nourriture.

Le Président (M. Cornelller): L'honorable ministre des Affaires sociales.

M. Forget: M. le Président, je dois, malgré la longueur du débat, déjà, sur cette question, intervenir à nouveau pour corriger des faussetés évidentes dans les déclarations du député de Saint-Jacques à cet égard, des faussetés qui sont graves parce qu'elles sont de nature non pas à nous approcher d'une solution mais, au contraire, à nous en éloigner.

En effet, il est impossible de concevoir que l'on puisse en arriver à une solution acceptable pour tous les intéressés dans une situation où, délibérément, on fait des affirmations qui sont en conflit avec la réalité.

Le député de Saint-Jacques fait une affirmation, et il l'a faite déjà sans que je soulève ce point, parce que je ne veux pas indûment revenir sur cette question de l'aide sociale en ayant l'air de prétendre que je suis complètement satisfait des niveaux d'aide que nous assurons aux plus défavorisés d'entre nous. Inévitablement, lorsque l'on allègue que les niveaux sont soit insuffisants, soit qu'ils ne s'élèvent pas assez rapidement, on me place dans la position de défendre ces niveaux ou ces taux d'augmentation et de créer peut-être l'impression que j'en suis satisfait.

J'ai indiqué déjà à plusieurs reprises et devant

cette commission, cette année, que je n'étais pas satisfait de ces niveaux et qu'il fallait envisager de les hausser non seulement en harmonie avec les augmentations du coût de la vie mais pour permettre un rattrapage, particulièrement dans le cas des familles. Alors c'est une situation qui prête à confusion que celle dans laquelle je suis forcé de me retrouver mais il mérite, malgré tout, que je fasse ces corrections parce qu'il ne sert à rien d'exagérer, d'un autre côté, la situation que l'on veut corriger. Je reviens donc à l'argument selon lequel les ajustements, l'indexation, pour contrer le coût de la vie dans l'aide sociale se font avec un an de retard.

Cette proposition est strictement fausse. Elle est fausse, non pas, bien sûr, dans le sens naïf avec lequel on peut faire cette affirmation qu'il faut bien connaître quelle a été l'augmentation du coût de la vie avant de faire une indexation, puisque l'un est relié à l'autre. Donc, quant à la façon de calculer l'indexation, il est clair que l'on reflète une situation passée. C'est bien évident, parce qu'on veut mesurer l'action que l'on prend sur une évolution réelle et constatée; donc il faut bien que cette évolution se fasse avant qu'on puisse la voir se refléter dans les niveaux de l'aide sociale.

Mais ce n'est vrai dans aucun autre sens. Ce n'est pas vrai, en particulier, parce que cette affirmation ne tient pas compte du fait que le niveau même que l'on indexe, la base même qui est majorée en fonction de l'élévation du coût de la vie contient elle-même une estimation de la hausse probable du coût de la vie durant l'année qui suit sa mise en vigueur. Ceci est particulièrement vrai, en 1974, alors que tout le monde sait que le niveau général des prestations d'aide sociale s'est vu rajusté de façon très sensible — je citerai tantôt ces chiffres encore une fois — et il ne s'agissait pas, en janvier 1974, d'une indexation mais de la détermination de novo, en quelque sorte, des barèmes de l'aide sociale.

Cette détermination des barèmes de l'aide sociale a pris en compte les objectifs que nous poursuivions quant à la couverture des seuils de pauvreté et de l'indexation de ces seuils eux-mêmes en fonction du coût de la vie pour le point milieu de l'année 1974.

On a donc anticipé, dans la détermination de ces seuils, l'inflation que l'on prévoyait devoir survenir en 1974, si bien même qu'en mai dernier, lorsque j'ai annoncé que le gouvernement majorait de 4% les barèmes de l'aide sociale, j'ai spécifiquement fait allusion à cette estimation, par anticipation, de l'inflation qui est survenue en 1974, anticipation qui était, si on veut, trop optimiste, qui avait fait une part trop peu importante à l'inflation anticipée. L'écard entre l'anticipation de l'inflation, pour l'année 1974, et celle qui se manifestait était de 4%, et c'est ce 4% que nous avons comblé en juin dernier.

Il y a donc, dans le niveau qui est lui-même l'objet d'une indexation, à la base, une anticipation d'une inflation. Et c'est strictement faux de prétendre que l'on réagit en retard, que l'on réagit surtout avec un an de retard, lorsque l'on doit tenir compte, dans les barèmes, de l'inflation, qui est effectivement survenue. Comment autrement faire de l'inde- xation, si ce n'est par rapport à une période passée? Il est évident que l'on se base, dans son calcul, sur les chiffres observés pour l'année antérieure. Mais ce que l'on indexe, à ce moment-là, c'est déjà une base qui contient un élément d'anticipation dans l'inflation qui s'est réalisée mais qui aurait pu également, M. le Président, ne pas se matérialiser.

Dans l'abrogation ou la suppression des besoins spéciaux, et je reviens là sur une argumentation qui est déjà vieille de près de deux ans ou deux ans et demi, il avait été abondamment expliqué, à l'époque, que ces besoins spéciaux d'ameublement avaient été plus que compensés, de façon globale, au niveau du budget de l'aide sociale, de l'ensemble des bénéficiaires de l'aide sociale, par les majorations de barèmes qui sont intervenues à l'époque.

A l'époque où ces besoins spéciaux ont été supprimés, les déboursés annuels de l'aide sociale a ce titre-là étaient d'environ $7 millions. La majoration des barèmes qui est survenue en avril, je crois, 1973, a impliqué des déboursés additionnels pour le régime de $10 millions.

Il n'y avait donc pas une disproportion et certainement pas une diminution dans le total des sommes consacrées par le gouvernement à la lutte contre la pauvreté. Il y avait un réaménagement de ces sommes en fonction d'un objectif de sécurité de revenu avec lequel le député de Saint-Jacques, j'en suis heureux d'ailleurs, s'est déclaré d'accord en principe.

Bien sûr, on peut prétendre que ces montants sont insuffisants mais, encore une fois, c'est peut-être cela qu'il faudrait dire — nous nous joindrions, à ce moment-là, aux reproches qui nous sont adressés — plutôt que de prétendre erronément que nous avons fait quelque économie que ce soit en supprimant les besoins spéciaux.

Sur le plan individuel, puisque les chiffres que j'ai donnés tantôt sont sur le plan collectif, sur le plan individuel, nous nous sommes basés également, quant à la majoration des barèmes, sur le pourcentage du revenu des familles au Canada, des familles à des niveaux de revenu légèrement supérieurs à l'aide sociale, sur le pourcentage qu'elles consacrent effectivement à des besoins analogues.

Donc, toute proportion gardée, nous avons essayé, à l'époque, de situer le bénéficiaire de l'aide sociale dans la même position relative que son voisin qui, lui, n'est pas bénéficiaire de l'aide sociale mais qui jouit d'un revenu quelque peu supérieur à l'aide sociale, résultant d'un emploi.

Globalement, encore une fois, il n'en est résulté aucune économie pour l'Etat, au contraire, une dépense additionnelle.

On nous dit: La taxe d'eau représente un besoin nouveau, une nouvelle charge pour les familles. Je veux bien qu'elle représente une nouvelle charge, mais lorsqu'on nous dit, par ailleurs que cette nouvelle charge doit être satisfaite à même une allocation inchangée, je suis manifestement, pour les raisons que j'ai indiquées tantôt, en désaccord.

Il existe déjà, dans les prestations d'aide sociale, les sommes qui autrefois étaient consacrées au paiement de la taxe d'eau et qui étaient prélevées à la source. Non seulement ces sommes existent

toujours mais elles ont subi, depuis les changements administratifs, des indexations successives.

Il n'y a donc pas eu diminution, ces revenus existent comme ils existaient auparavant.

La seule différence à être intervenue, c'est qu'ils sont désormais versés directement aux familles et, bien sûr, que les familles se trouvent en face d'un compte à payer, plutôt que d'un compte déjà acquitté. Mais les revenus équivalents se retrouvent dans leurs allocations, si faibles qu'on les trouve, par ailleurs. Encore une fois, M. le Président, je ne veux pas, en alléguant que ces sommes se trouvent présentes dans le montant forfaitaire qui leur est attribué, prétendre que je suis totalement satisfait du niveau absolu de ces sommes. Il demeure que l'on ne peut pas représenter faussement la réalité en prétendant qu'on les a privés d'une source de revenus ou qu'on leur a imposé une charge nouvelle qui ne leur était pas imposée dans le passé. Cette charge leur était imposée, les revenus leur étaient donnés; c'est le mécanisme par lequel ils seraient censés trouver leur chemin dans les trésors des municipalités qui a été modifié, rien d'autre.

Je peux tout à fait comprendre également les difficultés budgétaires qu'un tel paiement, qui se fait une fois par année, peut provoquer dans le budget d'une famille qui n'est pas habituée à en prévoir l'incidence. D'ailleurs, dans le souci de faciliter la période de transition, nous avons assumé, l'automne dernier — je l'ai annoncé à l'époque — que, pour la première année, le quart des comptes de taxe d'eau qui serait effectivement payé par les bénéficiaires de l'aide sociale serait assumé par le gouvernement pour faciliter l'ajustement dans l'administration du budget, un budget dont l'administration est peut-être rendue plus difficile à cause d'un paiement irrégulier de cette nature, quoique je ferais remarquer que ce n'est pas le seul paiement irrégulier auquel ont à faire face même les bénéficiaires de l'aide sociale.

Donc, il y a eu une reconnaissance que nous avons donnée de cette difficulté d'ajustement dans les budgets des familles, en assumant 25% du coût de la taxe d'eau de ceux qui la payaient effectivement. Nous avons également pris des dispositions avec le service des finances de la ville de Montréal pour que des modalités d'étalement des paiements dans le temps soient prévues et soient rendues accessibles aux bénéficiaires de l'aide sociale, justement à cause des difficultés budgétaires que leur cause un paiement qu'ils doivent maintenant administrer eux-mêmes. Ce n'est pas un paiement qu'ils doivent assumer, puisqu'ils l'ont toujours assumé, mais ils doivent maintenant administrer ce paiement, administration qui était faite pour eux auparavant. Ceci est difficile, je le reconnais, et nous avons pris les mesures que je viens de décrire pour y faire face.

M. le Président, je m'en veux un peu de prendre autant de temps, mais ce sont des points qui sont manifestement faux, encore une fois, qui ont été affirmés et il est important de les éclaircir. En dernier lieu, je veux revenir sur ce que j'ai donné comme indication, déjà la semaine dernière, relativement à l'effet de l'inflation sur les budgets des bénéficiaires de l'aide sociale. On vient d'alléguer l'importance exceptionnelle de l'inflation des produits alimentaires. Nous ne nions pas, évidemment, l'importance de ce phénomène en 1974 et l'importance particulièrement grande des dépenses alimentaires pour les bénéficiaires de l'aide sociale.

Encore une fois, tenant compte de ce calcul, tenant compte du pourcentagedu budget des familles bénéficiaires de l'aide sociale relativement plus élevé, encore une fois, que pour les autres familles, tenant compte de l'évolution des autres éléments de dépenses pour les bénéficiaires de l'aide sociale, nous en venons à un indice corrigé pour ces bénéficiaires de 11.1% pour l'année 1974, alors que j'ai déjà indiqué que la hausse des barèmes de l'aide sociale, au 1 er janvier 1975 par rapport à l'année antérieure, s'est située respectivement à 10.2% et 12% dans le cas'des personnes seules et des familles, donc, dans un ordre de grandeur tout à fait comparable, particulièrement pour les familles légèrement supérieur à l'inflation, durant l'année qui vient de s'écouler.

Donc, il n'y a certainement pas eu de perte, au moins par rapport à janvier 1974 à comparer à janvier 1975. Encore une fois, M. le Président, il ne s'agit pas d'un rattrapage en retard, sauf de la façon absolument arithmétique dont on pourrait faire ce règlement. Bien sûr, l'indexation est basée sur le passé, il n'y a pas moyen de faire autrement, mais la base qui est l'objet d'une indexation, elle, n'est pas le fruit simplement de l'indexation; elle est le fruit d'une anticipation non seulement partielle, mais corrigée en cours de route durant 1974, justement à cause de l'erreur de cette anticipation, pour refléter le niveau des prix au point milieu de l'année, c'est-à-dire vers le 1er juillet d'une année donnée. C'est donc, au plus, un retard de six mois sur une augmentation qui est déjà anticipée en partie dans la hausse des barèmes.

Le Président (M. Cornellier): Le député de Sainte-Marie.

M. Malépart: M. le Président, je me pose des questions. Pour quelles raisons l'aide sociale, les allocations ne sont-elles pas indexées, comme les pensions de vieillesse, à tous les trois mois? Une autre question. Vous avez parlé des mesures que le ministère a prises, avec les autorités de la ville de Montréal, pour échelonner les paiements. Je dois vous dire — j'ai vérifié personnellement — que ces mesures n'ont pas été tellement efficaces, parce que les fonctionnaires demandaient aux gens de rembourser un montant de $15 par mois.

Compte tenu de leur faible revenu, c'était impossible. Je dois vous dire que des menaces ont même été faites. Les bénéficiaires de l'aide sociale ont vécu un traumatisme durant cette période. C'est impensable. Disons qu'il y avait la campagne qui les incitait à brûler les chèques, puisque les gens ne savaient pas s'ils devaient les brûler. Ils appelaient à un autre département qui, pour eux, est un département gouvernemental, soit le CLSC, soit le bureau des officiers de bien-être social puis on disait aux gens que la meilleure façon était de les brûler. Alors,

ils se demandaient qui faisait la loi. C'est que vous avez deux structures puis les gens ne savaient plus où aller. Ils appelaient au niveau de la ville pour prendre des arrangements pour payer $3 par mois puis on leur refusait en leur disant: C'est $15 où il va y avoir des poursuites.

Il y a aussi un facteur qui est presque incroyable, c'est que du fait que les bénéficiaires de l'aide sociale ont retourné le chèque au ministère des Affaires sociales pour payer le quart, ils ont reçu un compte avec intérêt. Alors les gens, je pense bien, se posent des questions pour savoir de quelle façon s'en sortir.

M. Forget: M. le Président, j'ai eu le plaisir de discuter assez souvent avec le député de Sainte-Marie de ces problèmes de taxes d'eau et il m'a alerté à l'évolution de la situation au fur et à mesure de son développement. Il est clair que si, dans une certaine mesure et dans une mesure assez complète d'ailleurs, la ville de Montréal a administré l'aide sociale, y compris la préparation des paiements, la préparation des chèques pendant de nombreuses années, le ministère des Affaires sociales, pour sa part, ne peut certainement pas et n'a certainement pas l'intention de se substituer au service des finances de la ville de Montréal pour la perception des comptes de taxe d'eau.

Les indications que je viens de donner sur le paiement d'un quart et l'étalement des paiements sont des recommandations, ce sont des indications que nous avonsdonnées, des voeux que nous avons exprimés, si l'on veut, à la ville de Montréal, de façon à faciliter une transition qui nous paraissait inévitable. De ceci je n'ai pas parlé puisque je ne crois pas qu'il s'agisse là d'une question sur laquelle il y a véritablement de controverse. Le principe même selon l'administration de l'aide sociale était déléguée à un autre organisme qui était à la fois un créancier des bénéficiaires est une situation qui appelait évidemment une correction. Là-dessus nous n'avons certainement aucun remords des changements qui sont intervenus.

C'était une situation anormale qui résultait de toute une histoire, bien sûr, et je ne cherche certainement pas à blâmer qui que ce soit, certainement pas ceux qui assumaient cette administration au meilleur de leurs connaissances. Mais, quant au principe lui-même, c'était une chose qui devait se faire tôt ou tard et nous sommes tout à fait contents d'avoir pu le faire.

Maintenant, sur le plan de l'impact sur les familles et les individus, tenant compte des remarques de tantôt à l'effet que personne n'a été financièrement pénalisé, mais que bien sûr l'administration de leur budget a été rendue plus compliquée, nous avons exprimé des voeux, nous avons fait des recommandations qui ont pu être ou ne pas être suivies dans tous les détails. Il est bien sûr qu'on peut souligner des difficultés de coordination au niveau des différentes agences, des différents organismes, gouvernementaux ou non, qui interviennent et qui sont en relation avec les populations défavorisées.

C'est, d'ailleurs, la raison pour laquelle, je pense, il est tellement important que l'on se borne à donner des informations, au moins, qui ne soient pas faussées. Les informations que j'ai données ce matin, je pense, sont absolument nécessaires. Encore une fois, on peut déplorer autant qu'on le voudra — nous nous joignons à cette action, d'ailleurs — que le niveau des prestations d'aide sociale, dans le cas des familles en particulier, ne soit pas encore égal aux seuils de pauvreté tel que nous les calculons nous-mêmes.

J'ai noté les proès qui avaient été réalisés depuis quelques années dans la couverture de plus en plus considérable des seuils de pauvreté. Il était inévitable qu'il y ait une certaine confusion. Pourtant, et ceci pourrait aussi faire l'objet d'un développement, mes collaborateurs ont rencontré des groupes qui s'intéressent à défendre les droits des assistés sociaux, des bénéficiaires de l'aide sociale. Ils leur ont expliqué toutes les mesures qui avaient été mises en place, les moyens d'aide qui étaient mis à leur disposition, les mesures qui avaient été recommandées à la ville de Montréal. Je note, cependant qu'en effet il y a eu beaucoup de déclarations fausses qui ont pu se glisser dans tout cela. C'est la responsabilité, je pense, de tous ceux qui connaissent les faits de les communiquer à ceux qui viennent leur faire part des problèmes particuliers qu'ils ont rencontrés.

Le Président (M. Cornellier): L'honorable député de Saint-Jacques.

M. Charron: M. le Président, sur le certain nombre de faussetés que j'avais affirmées, au dire du ministre, tout à l'heure, il n'y en a pas beaucoup qui ont été démolies ou prouvées comme telles dans la réponse qu'il adonnée. Il s'est dit d'accord avec moi pour admettre que la plus grande partie de l'inflation, sur le plan alimentaire, affectait plus les bénéficiaires de l'aide sociale que quiconque des citoyens. C'était une première affirmation que j'avais faite.

Il a prétendu que j'avais affirmé que l'augmentation de janvier 1974 n'était qu'une indexation. Je n'avais jamais affirmé cela; elle contenait, en soi, en plus de l'indexation, un rajustement du barème. Mais il a dû admettre, ce qui était loin d'être une fausseté de ma part, que l'augmentation avait été à ce point calculée de façon insuffisante qu'un rattrapage a dû survenir sur cette base même le 8 mai 1974. Le rattrapage en question, puis-je vous le décrire? Parce que le ministre a eu la pudeur de ne pas le présenter comme tel à l'Assemblée ni à la commission encore ce matin.

Je vous signale simplement le cas de deux adultes avec deux enfants quant au rattrapage en question, suite à la mauvaise évaluation qui n'avait été que de l'ordre de 3% à 4% alors que tout le monde s'attendait à une inflation beaucoup plus élevée. Donc, ce n'était qu'un dû aux assistés sociaux et cela était d'autant plus dû qu'en janvier 1974 on n'avait pas que rajusté les barèmes, on avait aussi fait des assistés sociaux la seule catégorie de citoyens qui n'avait pas le droit de bénéficier de la hausse des allocations familiales comme n'importe quel autre citoyen du Québec. Si cela leur était

dû, cela leur était dû largement. Non seulement le ministère ne s'était contenté de rajuster ses barèmes de 3% ou 4% quand l'inflation était déjà bien évidente, mais en plus de cela on avait supprimé la jouissance des allocations familiales à ces citoyens au même titre, en tout cas, que les autres de n'importe quelle autre classe sociale.

Pour vous donner mon exemple, deux parents, deux enfants ont passé, au mois de juin dernier, de $309 à $320, une augmentation de $11 par mois pour quatre personnes. On m'a reproché, le ministre m'a reproché, à un moment donné — j'étais à cette même table de la commission l'année dernière lorsque l'annonce avait été faite à l'Assemblée, sans que nous en ayons été le moindrement prévenus, d'ailleurs — d'avoir décortiqué à la cent. Il dit: Pourquoi pas à la seconde et à la minute? Il m'a évité sur ce terrain, sur ce que cela signifiait. Moi, je n'ai aucune fausse pudeur à présenter cette augmentation sur la portée réelle du pouvoir d'achat que cela signifie pour ces personnes, qui, encore une fois, faisaient face à une inflation qui avait été prévue à peine du quart ou du tiers en janvier, même pas du tiers, mais du quart de ce qu'elle a été réellement en 1974, qu'on a représentée à grands renforts de publicité et de tambours, Charles Denis et compagnie en tête, pour nous présenter cette augmentation de $16 millions.

Le gouvernement donne $16 millions de plus aux assistés sociaux; déclaration ministérielle en Chambre, caméra, tout ce que vous voulez. Cela voulait dire quoi dans le revenu réel des citoyens, une fois que cela se rendait à la table des familles, dont les revenus, on s'entend tous, dit le ministre, sont nettement insuffisants? Cela voulait dire $2.75 par semaine, pour quatre personnes, de revenu d'achat supplémentaire. C'était cela qu'on leur donnait, en juin dernier, au moment où tout le monde voyait que l'inflation atteignait des proportions invraisemblables, qui engraissait, d'ailleurs, les coffres du gouvernement par le fait même, et qui permettait à ce gouvernement de se trouver une générosité soudaine. C'est beaucoup mieux de faire miroiter $16 millions à l'ensemble des assistés sociaux, comme image de générosité, que de dire: Le gouvernement ajoute, à chaque famille de deux adultes et deux enfants, $2.75 par semaine pour faire face à la hausse du coût de la vie. Cela a signifié quoi? Cette augmentation, survenue le 8 mai 1974, était déjà envolée au taux d'inflation quand, au mois de juin ou au mois de juillet suivant, à 1.2%, 1.3% d'inflation par mois, tout avait déjà été mangé. Non seulement déjà tout avait été mangé, mais je soutiens encore qu'il a fallu manger la taxe d'eau, à un moment donné.

M. le Président, je voudrais conclure avec cette intervention. Nous sommes tous d'accord, le ministre aussi, pour dire que le plancher, le revenu mensuel que l'on indexe, c'est toujours du rattrapage. Ce n'était pas une fausseté non plus que j'avais affirmée, cela ne peut pas être autrement, dit le ministre lui-même, mais c'est le plancher qui fait défaut. Et même si on indexe, on fait juste flotter la pauvreté, d'année en année, pour lui permettre de ne pas descendre plus bas, mais elle demeure la pauvreté, celle qui flotte. Une insuffisance indexée d'année en année, ça demeure une insuffisance, M. le Président. On est tous d'accord là-dessus, nous dit le ministre des Affaires sociales, mais c'est quand même le cas réel.

J'ai ouvert ce débat sur l'aide sociale en disant immédiatement qu'avant de nous pencher sur les détails, faut-il calculer un barème de façon différente? Là où l'injustice est la plus flagrante, c'est dans l'échelle même. Qu'on l'indexe ou qu'on ne l'indexe pas, qu'on la rajuste, comme dit le député de Sainte-Marie et j'endosserais sa position, à tous les trois mois plutôt qu'à toutes les années, peut importe, on indexera toujours une mesure qui est insuffisante. L'indexation ne lui permettra que de se maintenir insuffisante, mais ne lui permettra jamais de faire disparaître son caractère d'insuffisance. On se retrouve avec la même situation que maintenant. M. le Président, au fond, la philosophie qui est en train de s'installer, sur laquelle je suis d'accord en principe, c'est la disparition des critères de barèmes spécifiques pour en arriver, Dieu sait quand, depuis que cela nous est promis, à un revenu minimum garanti, que l'on répète, d'année en année, dans le discours du trône. Si c'est vraiment par étapes que nous y allons, en faisant disparaître les besoins spécifiques pour laissera la personne bénéficiaire le soin d'administrer elle-même son budget, c'est à se demander si cette philosophie est encore souhaitable et devrait même être endossée par quiconque, si elle constitue, si elle n'intervient pas sur un barème de base rajusté.

Car, à mon avis, M. le Président, tant que l'on maintiendra l'aide au taux de 1975 — $195 pour une personne seule, c'est le cas de la majorité des bénéficiaires de l'aide sociale — plus on remettra de besoins spécifiques qui, jadis, étaient pris en charge par les Affaires sociales ou par la ville de Montréal qui se payait elle-même, pour reprendre notre exemple de ce débat, plus on fera sentir l'insuffisance de ce montant à la personne, plus on ajoutera, à la personne qui a maintenant la charge d'administrer son budget, la complexité d'administrer une si petite somme et de se débrouiller par elle-même, face à l'inflation. Le député de Sainte-Marie peut peut-être témoigner avec moi, nous sommes représentants de populations extrêmement semblables. Ce phénomène, s'il est bon en principe, lorsqu'il intervient sur des revenus insuffisants, qu'ils soient indexés ou non, mais nettement insuffisants, à la base, se trouve à créer encore plus de traumatisme et plus de difficulté, car il fait découvrir encore plus aux assistés sociaux les limites extrême des ressources qu'ils ont.

Au fond, même si le montant était moindre à une certaine époque, lorsque ses besoins de literie, ses besoins de chauffage, ses besoins de vêtements, ses besoins de nourriture étaient calculés à part et qu'il avait cette assurance que quelqu'un les prévoyait quelque part ailleurs, en fin de compte l'assisté social n'avait, comme difficulté fondamentale, qu'à administrer un budget réduit pour ses propres besoins, tels qu'il les déterminait.

C'est une philosophie saine de considérer l'assisté social comme n'importe quel autre humain et

de lui faire administrer son budget comme n'importe qui, sans mesure tatillonne, mais à la condition qu'on lui donne le montant pour le faire, à condition que les revenus y soient; sinon, on lui ajoute des problèmes. On le met dans la même position qu'une petite famille de salarié qui est prise avec HFC sur un côté, un paiement sur ceci et un paiement sur l'autre. Très souvent, cela brise les ménages, brise les couples et rend la vie impossible. C'est les remettre dans la même situation. Que nous vaut de les pousser vers cette situation?

On a calculé à $8 par mois, à un moment donné, le remplacement de tous les besoins spécifiques qui étaient précédemment calculés. Les gens ont donc dû découvrir, à ce moment-là, que tous ces besoins spécifiques, dont ils n'avaient auparavant pas ou à peine à se préoccuper, ils devaient les couvrir à l'intérieur des $8 supplémentaires qu'on leur ajoutait.

Le menu de cette augmentation leur est apparu le premier mois où ils ont eu à l'administrer. On ne payait plus le téléphone. Ils devaient l'assumer eux-mêmes. Plus on leur remettait de besoins à administrer, plus ils découvraient que les moyens qu'ils avaient pour remplir cette tâche étaient petits et plus leurs difficultés étaient grandes d'arriver au bout. Plus ils ont dû faire des choix à certaines occasions pour éliminer des dettes et, en particulier, la taxe d'eau, car c'est elle qui y a goûté, à Montréal, en 1974.

Puisque le ministre m'a dit qu'il n'avait pas l'intention, au tout début de l'ouverture de l'étude de ce programme, de rajuster le barème de base; il se contente de l'indexation survenue le 1er janvier et de celle annoncée pour le 1er janvier 1976, ce n'est pas être un grand prophète, ni un grand devin de dire que le même phénomène se produira au cours de l'été prochain. Plus on ajoute de besoins à couvrir par les assistés sociaux et plus le montant demeure le même et se contente d'être une insuffisance indexée, plus sa limite réelle paraît aux yeux de tous. Là, c'est la ville de Montréal qui en a le choix.

Il y a une question que j'ai posée et je pense que le député de Sainte-Marie l'a reprise tantôt. Qu'est-ce qui va arriver aux 50% de gens qui l'ont payée, la taxe d'eau? Ceux qui se sont rendus aux mesures tatillonnes de la ville de Montréal et aux mesures difficiles de $15 de paiement par mois, puisque — le député de Sainte-Marie a bien fait de le signaler — c'était l'étalement maximum que la ville de Montréal avait permis de faire. Est-ce qu'ils vont être remboursés parce qu'ils ont suivi la loi? Est-ce que ceux qui ne l'ont pas payée, par contre, seront poursuivis?

Est-ce que le ministre a l'intention de maintenir cette inégalité, cette injustice, de couvrir le dossier et d'attendre que cela se répète en 1975? C'est la question que je lui ai posée, que mon collègue a reprise et nous espérons une réponse maintenant.

M. Forget: M. le Président, on m'invite à faire un commentaire qui dépasse manifestement le cadre de l'étude des crédits en commission et même le cadre des déclarations qu'il m'appartient de faire, puisque l'on parle d'un problème qui concerne la ville de Montréal, dans la perception d'une taxe. Une m'appartient pas de dire, pour la ville de Montréal, quelles sont ses intentions et comment elle entend procéder.

Je peux simplement référer le député de Saint-Jacques et, enfin, tous les membres de la commission aux déclarations, autorisées ou non, qui ont paru depuis quelques semaines dans les journaux et ailleurs, à l'effet que la ville de Montréal, si ma mémoire est bonne, ne se montrerait pas indûment dure dans la façon de percevoir ces comptes. Ceci est peut-être, d'ailleurs, une représentation même plus forte que celle que l'on a faite dans certains cas. Maintenant, encore une fois, il ne m'appartient pas de parler au nom de la ville de Montréal. C'est un problème administratif et fiscal de la ville de Montréal. Ce n'est pas le problème du ministère des Affaires sociales pour les raisons que j'ai abondamment expliquées au début de cette séance.

La question doit s'adresser à la ville de Montréal et non pas au ministère des Affaires sociales, compte tenu de tout ce que j'ai dit sur le sujet, compte tenu des suggestions, des propositions que nous avons faites à la ville pour la perception de ses comptes, et compte tenu de mes remarques générales sur les problèmes de la fiscalité municipale et des relations entre les municipalités et le gouvernement provincial dans la solution de ces problèmes de fiscalité municipale.

M. Charron: M. le Président, j'aimerais savoir s'il est possible que des mesures spéciales — je vais faire un pléonasme, M. le Président — pour les besoins spéciaux interviennent pour que le coût du téléphone soit compris au chapitre des besoins spéciaux pour certaines catégories de bénéficiaires. Je n'ai que deux exemples à donner. L'un tient au propre sens humanitaire. C'est celui d'une personne malade, cardiaque ou en danger d'attaque soudaine ou aggravation soudaine d'une maladie ou d'une condition de santé. Ai-je besoin de reprendre l'argument que je tenais avec Mme Chevalier quant au traumatisme psychologique des médicaments pour dire que ce traumatisme est grand également, cette sensation d'insécurité pour des personnes, encore une fois, spécifiquement malades, en danger d'avoir une attaque quelconque de maladie qui les obligerait à être transportées d'urgence à l'hôpital ou à rejoindre d'urgence un médecin, ce qui peut être une question de minutes pour leur survie ou pour leur santé? A-t-on l'intention, par exemple, également, d'étendre cette mesure à ce que les citoyens du Regroupement à faible revenu du Bas-Saint-Laurent me signalaient lors de mon passage dans cette région, il y a quelques semaines, c'est-à-dire certaines catégories de bénéficiaires éloignés des centres urbains, éloignés du bureau régional des affaires sociales, dans des villages en périphérie de Rimouski, par exemple, qui n'ont pas encore été fermés, ou sur la Côte-Nord, pour qui le téléphone constitue l'unique moyen de rejoindre le centre urbain le plus rapproché et le ministère des Affaires sociales, quand un besoin s'impose?

Autrement dit, est-ce qu'on entend encore se

montrer aussi intraitable sur la question du téléphone, quelle que soit la cause spéciale de la personne qui milite en sa faveur? M. le Président, j'ai vu des cas, qui ont certainement été rapportés à l'oreille du ministre. Cela ne se peut pas qu'aucun officier des Affaires sociales n'ait, à un moment donné, décidé de faire suivre un mémo jusqu'à sa table pour dire que dans certaines catégories de population malade ou certaines catégories de population éloignée des centres urbains — Bas-Saint-Laurent, Gaspésie, Côte-Nord — cela constitue une véritable injustice.

Je ne parle pas de la réinstallation gratuite pour tous les bénéficiaires. Je sais très bien que je m'opposerais à un veto qui a déjà été maintes fois exprimé. Je demande seulement si, dans ce qui est prévu comme étant des besoins spéciaux, on peut inclure le téléphone pour cette catégorie de personnes et si c'est un espoir qu'on peut avoir, dans les modifications à la réglementation qui nous ont été annoncés, de voir cette modification apportée.

M. Forget: M. le Président, je me pose vraiment des questions quand j'entends, d'une part, le député de Saint-Jacques nous direqu'il est d'accord avec le principe de traiter les assistés sociaux comme tous les autres citoyens et quand, sur chaque quest ion en particulier, il se comporte exactement comme s'il n'y croyait pas.

Si ce principe n'a aucune application, à son point de vue, je me demande s'il devrait continuer à ledéfendre. Quant à nous, nous allons continuer à le défendre.

Il y a quelques années — je pense qu'il y a maintenant plus de quatre ans — on abrogeait, en effet, un besoin spécial pour les téléphones, me dit-on, et on le remplaçait par une majoration mensuelle de $6 de l'aide sociale, ceci ayant été fait dans l'esprit du principe auquel, au moins dans les mots, le député de Saint-Jacques souscrit. Maintenant, on revient à la charge en disant que cette allocation de base ne comprend pas les allocations de téléphone et, donc, qu'il faut réinstaller un besoin spécial pour le téléphone dans certains cas.

Est-ce qu'on va demander à nos agents de sécurité sociale, dans chaque bureau, de déterminer qui a besoin d'un téléphone et qui n'en a pas besoin?

Je trouve cette perspective assez peu agréable à contempler. J'imagine d'avance les lettres et les plaintes que nous allons recevoir, basées sur le fait que tel ou tel agent, ayant agi au meilleur de sa connaissance, a déterminé que madame X ou monsieur Y n'avait pas besoin de téléphone, puisque nous n'entendrons pas parler des cas où on accorderait une allocation de téléphone qui ne serait pas nécessaire, bien sûr.

Mais, de toute manière, dans un cas, le problème que l'on cause c'est au contribuable et, dans l'autre, c'est évidemment beaucoup plus personnel, c'est au bénéficiaire lui-même.

Je ne peux pas envisager que nous allons demander à nos bureaux d'aide sociale de contrôler la vie des gens de cette façon-là, en ayant un droit que bien peu d'individus ont sur la vie des autres, en déterminant quels sont les besoins qu'ils ont et les besoins qu'ils n'ont pas.

Si on descend jusqu'au téléphone, je me demande où on va s'arrêter, très clairement, le mouvement amorcé par le gouvernement depuis quelques années, comme on le sait très bien, et comme on prétend y souscrire, en principe, va tout à fait dans l'autre sens. La réponse à cette question ne peut pas être autrement que négative. Il n'est pas question de réintroduire l'administration publique dans le budget des familles.

Il n'est pas question de faire intervenir des décisions arbitraires, forcément arbitraires, malgré tous les efforts qu'on pourrait faire pour édicter des normes qu'on nous reprocherait immédiatement après, pour diminuer l'arbitraire des décisions qui seraient prises dans tous les cas. Il n'est pas question de réintroduire l'arbitraire dans l'attribution des besoins au point où on envisagerait des allocations spéciales pour le téléphone.

Il y a déjà l'allocation de base. Encore une fois, on revient toujours au même argument. On veut faire ressortir, par des cas particuliers, un argument qu'on répète sans cesse et qui a sans doute du mérite mais qu'il faudrait peut-être présenter exclusivement, au risque de répétition, comme un argument général et non pas comme un argument spécifique sur le niveau général des barèmes.

Mais, quel que soit le nombre des cas particuliers qu'on allègue, on ne prouvera jamais rien d'autre que ce que l'on peut prouver au départ, que bien sûr il existe encore de la pauvreté et que l'aide sociale, à elle seule, malgré ses $550 millions pour l'année à venir, ne sera pas en mesure de supprimer la pauvreté au Québec, en effet, et nous le déplorons tout autant que l'Opposition.

M. Charron: M. le Président, le principe auquel le ministre vient se référer, qu'il m'accuse de ne maintenir que du bout des lèvres mais de ne jamais le soutenir, ce n'est pas de moi de le défendre et de le réaliser. Je n'ai pas encore été élu, je n'appartiens pas à un parti qui a été élu et qui l'a inscrit à son programme en disant qu'il allait le faire, moi.

Je suis obligé de revenir à ces besoins spécifiques parce que le principe auquel je crois c'est celui du revenu minimum garanti que ce gouvernement s'est engagé à établir en I970, il y a maintenant cinq ans. Ce n'est pas parce que lui met du temps à le faire, parce que lui refuse de mettre les ressources financières à la disposition des citoyens pour le réaliser que moi je vais aller retrouver des gens que je découvre dans un traumatisme psychologique parce qu'on a retiré le calcul de besoins spécifiques et leur dire, moi, à la place du ministre des Affaires sociales: Ecoutez, le revenu minimum garanti s'en vient. Un jour, vous aurez un revenu qui vous permettra de subvenir à tous ces besoins normaux d'une personne humaine, comme disait le député de Taschereau, vous serez à un seuil de vie décente un jour et vous n'aurez plus besoin de calculer de façon aussi tâtillonne, si vous avez besoin d'un téléphone ou non. Mais ce principe auquel je crois et que dit défendre le ministre des Affaires sociales, il n'a pas qu'à le défendre, il est élu depuis cinq ans pour le

réaliser. Et de plus il ne le réalise pas plus, il accepte de participer à un gouvernement qui ne lui met pas entre les mains des ressources financières pour le réaliser plus il va avoi rdes cas où les besoins spécifiques supprimés sans que le revenu minimum garanti soit installé, constituent une injustice. Et plus aussi, je le signalerai, même si ça lui paraît à lui, un manque au principe que je dis défendre.

Moi, un principe je le défends à condition qu'on le réalise. Autant la semaine dernière j'ai dit à madame le ministre d'Etat que ses affirmations ne pouvaient êtreque des affirmations lorsqu'elles viennent de la bouche d'un ministre, à moins qu'il y ait engagement politique à les réaliser — on s'est entendu là-dessus — autant je le dis aujourd'hui au ministre des Affaires sociales en face.

Vous ne me ferez pas souscrire à un principe que vous continuez à faire miroiter depuis cinq ans au-dessus de la tête de la population sans le réaliser. Si vous le réalisez, je vais l'appuyer, l'Opposition va l'appuyer amplement. Si vous êtes capable de convaincre votre gouvernement de le réaliser, d'aller chercher chez le ministre des Finances les crédits supplémentaires pour le faire, on va le réaliser. Vous ne me verrez pas intervenir à la table de la commission pour vous demander des besoins spécifiques de téléphone pour les personnes qui sont cardiaques, qui ont peur de mourir seules, abandonnées, parce qu'elles n'ont pas de moyens de rejoindre leur médecin ou quiconque pour leur venir en aide lorsque, soudain, la maladie les frappe. Je n'interviendrai plus de cette façon, parce que j'aurai la conviction qu'au Québec on aura donné aux citoyens un seuil de vie décent où ce sera leur responsabilité de s'installer un téléphone s'ils trouvent qu'ils en ont besoin. Ce principe, j'y souscris pour autant qu'on le réalise. Mais quand on le maintient au-dessus de la tête des gens, qu'on le répète de discours inaugural en discours inaugural, mais que, dans le fond, on se trouve devant une situation où on maintient des gens à $195 par mois et qu'on ne leur donne même pas de téléphone, j'ai le droit d'intervenir comme je le fais, tout en soutenant le même principe.

Je ne soutiens pas un principe que pour la forme. Si vous ne le réalisez pas, vous allez poser des téléphones chez les gens qui en ont besoin, chez les gens qui ont ce besoin psychologique aussi bien que physique à certaines occasions, car leur santé en dépend. On va réaliser le revenu minimum garanti, vous allez vous entendre avec le gouvernement d'en face qui est votre allié, que vous avez soutenu sur les "hustings" électoraux, dont vous avez dit qu'il n'était pas un obstacle à la réalisation d'une politique sociale cohérente pour les Québécois; vous allez allerchercher à Ottawa l'argent qu'il nous faut pour le réaliser ou bien vous n'en parlerez plus, de ce principe.

Mais vous ne me ferez pas accrocher sur le principe pendant qu'il y a des gens qui vont attendre en arrière. On fait cette politique, on a les moyens — les Québécois — de la faire à part cela. Sinon vous avez menti aux gens en 1970 et vous avez menti en 1973 quand vous l'avez inscrite au programme de votre parti politique. Et vous avez menti encore à la Chambre lorsque vous l'avez fait dire par le lieutenant-gouverneur dans le discours inaugural.

Au bout de cinq ans d'un gouvernement, on doit s'attendre à des réalisations, à un moment donné, ou bien pas du tout. Vous le faites ou vous ne le faites pas. Si vous ne le faites pas, moi je vais vous parler des cas de téléphone; moi je vais vous parler des cas de médicaments; moi je vais vous parler des cas d'injustice qui arrivent. C'est bien ma détermination. Quand vous présenterez une loi à l'Assemblée, qui instituera, ici, un revenu minimum garanti pour les citoyens et qui leur permettra un seuil de vie décente, vous allez avoir l'appui entier de l'Opposition, vous le savez. Mais tant que vous ne le ferez pas, on va être obligés de subvenir à ces cas.

On enlève $2 par mois durant les mois d'été, M. le Président, aux assistés sociaux qui ont un jardin. C'est de la mesquinerie comme celle qui existe là. Et on ne soulèverait pas cela à un moment donné, qu'un assisté social dans le bas Saint-Laurent se fait punir pour des actes aussi inoffensifs que ceux-là? Tant que vous maintiendrez des mesures tâtillonnes et que vous refuserez de réaliser les promesses de votre gouvernement, je soulèverai le même genre de questions à la table de la commission. Je n'ai aucun remords d'avoir manqué à un principe auquel je souscris, celui du revenu minimum garanti des citoyens, parce que ce matin j'ai soulevé à la table de la commission parlementaire qu'il y a des citoyens pour qui l'absence de téléphone peut être dramatique à une certaine occasion, et que vous refusez de le voir.

Je connais tout le côté discrétionnaire que cela voudrait dire. J'admets très bien que cela signifierait qu'on aurait, à un moment donné, à évaluer si une telle personne a besoin d'un téléphone. Je sais très bien dans quel chemin je m'en vais. Ce n'est pas un chemin que je choisis, mais vous le maintenez pour un tellement grand nombre de besoins autres, ailleurs, que je peux me permettre de rajouter celui-là lorsqu'il est aussi dramatique dans la vie de certains citoyens. Faites disparaître tous ces besoins, assurez aux citoyens... Les Québécois ont les moyens. Qu'on rapatrie simplement une partie des taxes et des impôts qu'on laisse administrer par un autre gouvernement; qu'on ait simplement ici un gouvernement qui a la volonté d'aller chercher cette somme et on est capable de réalisercette mesure. Et vous le savez. Sinon, vous avez menti aux députés quand vous l'avez inscrite dans votre programme de parti politique. Bien, qu'on le fasse! Si on ne le fait pas, on va continuer à avoir le genre de discussions qu'on a ce matin et on va en avoir souvent.

Je voudrais soulever un autre cas, la hausse de l'évaluation foncière. On me dira que c'est encore un cas spécifique qui m'éloigne de la philosophie à laquelle je dis souscrire. La hausse de l'évaluation foncière à travers tout le Québec, vous le savez, M. le Président, cette hausse de taxes déguisés a rendu caduque — je vous réfère au paragraphe f) du règlement 402: "La maison qui sert de résidence et le terrain sur lequel elle est bâtie, dont l'équité nette sur la base de la valeur marchande et déduction faite des hypo-

thèques et autres charges qui les grèvent n'excèdent pas $15,000. "Cette maison n'entre pas dans le calcul prévu à l'article précédent qui est le critère d'évaluation des ressources que possède une personne."

Qu'est-ce qui est arrivé, M. le Président? Avec la nouvelle loi de l'évaluation foncière, que cette Assemblée a votée, plusieurs domiciles précédemment sous-évalués à $15,000 se sont trouvés à être réévalués plus haut que cela. C'est la même maison qui, auparavant, ne constituait aucunement une charge trop lourde pour un assisté social. Je parle des assistés sociaux du Bas-du-Fleuve et de la Gaspésie.

Il y a des députés au tour de cette table qui pourraient donner le même exemple que celui que je m'apprête à donner. Il y a des assistés sociaux qui ont vu leur maison, dont ils avaient hérité ou qu'ils ont construite à une autre époque, peu importe, soudainement, par une mesure adoptée par l'Assemblée nationale, évaluée d'une façon supérieure à $15,000. Mais cette évaluation signifie une coupure dans le revenu de ces gens, parce que là on les dit propriétaires d'une maison qui vaut plus. La maison qui sert de résidence et le terrain sur lequel elle est bâtie, dont l'équité nette sur la base de la valeur marchande, déduction faite des hypothèques et autres charges qui les grèvent, se trouvent à excéder $15,000. C'est la même maison qui, en fin de compte, a même perdu de la valeur, au sens physique du mot, parce qu'elle est plus vieil le d'année en année. Mais par une nouvelle table d'évaluation issue du gouvernement du Québec, le même que celui auquel appartient le ministre qui est en face de moi ce matin, elle se trouve à avoir pris de la valeur, ce qui constitue, pour ces gens, une injustice.

Cette question, d'ailleurs, je peux le souligner sans partisanerie, a été soulevée à l'Assemblée nationale par le député de Rimouski lui-même, et il avait parfaitement raison là-dessus. L'Union des assistés sociaux du Bas-du-Fleuve l'a maintes fois signalée. Une lettre a été envoyée au ministre des Affaires sociales, ils attendent encore une réponse. Moi j'espère en avoir une ce matin.

M. Forget: M. le Président, je vous réfère, pour fins de brièveté, à la réponse que j'ai donnée la semaine dernière à l'Assemblée nationale, à une question sur exactement le même sujet du député de Rimouski, qui non seulement à titre de député, mais à titre de maire avait été confronté par ce problème. J'ai indiqué à ce moment-là que nous étions à faire — et non seulement dans les étapes initiales — et pratiquement à terminer la révision de l'ensemble des règlements de l'aide sociale et que, dans le cadre de cette révision, nous envisagions de modifier certains de ces barèmes actuellement utilisés pour la détermination des revenus et des actifs.

M. Charron: Celui-là en particulier? M. Forget: Celui-là en particulier.

M. Lessard: Est-ce que le ministre a l'intention de tenir compte des régions? Moi, M. le Président, je voudrais quand même souligner que dans des ré- gions comme la Côte-Nord, le montant de $15,000 était absolument insuffisant, et actuellement, il est extrêmement difficile d'avoir des maisons à des coûts inférieurs à $21,000.

Tout à l'heure je parlerai d'entretien puis je parlerai du logement aussi. Il y a une chose qui nous paraît essentielle et normale, je le constate tout simplement, c'est qu'il y a certaines régions où le coût de la vie est supérieur à d'autres régions d u Québec. Depuis très longtemps, d'ailleurs, chez nous, le montant de $15,000 était absolument insuffisant, de telle façon qu'on limitait pratiquement les bénéficiaires de l'aide sociale à rester dans des taudis. Il me semble qu'on devrait, en tout cas, tenir compte de cela.

Bien souvent, quelqu'un devient bénéficiaire de l'aide sociale à cause du hasard de la vie. Il n'a pas choisi, dans une grande partie des cas il n'a pas choisi, lui, à un moment donné, au moment où il travaillait pour une compagnie, au moment où il pouvait se faire un salaire décent, il n'a pas choisi tout à coup, comme j'ai des cas actuellement, sur lesquels j'ai eu l'occasion de travailler, il n'a pas choisi, tout à coup, de devenir bénéficiaire de l'aide sociale. Il n'est pas capable de remettre du jour au lendemain sa maison qui est évaluée à $21,000 ou $22,000 par l'évaluation municipale.

Actuellement, tel que c'est fait, qu'on lui prête ou bien la personne en question est obligée tout à coup de vendre sa maison.

On lui dit: Vendez votre maison et, après cela, on pourra vous donner de l'aide sociale. Quand on dit cela à une personne, c'est bien regrettable, mais la vente d'une maison ne se fait pas aussi facilement que le ministère des Affaires sociales semble le croire ou que certains agents du ministère des Affaires sociales semblent le croire. Il me semble que dans cette modification des barèmes, comme en ce qui concerne aussi le logement... Je suis d'accord avec le député de Saint-Jacques qu'il faut accepter le principe d'un revenu minimum garanti, mais tant et aussi longtemps que cela ne sera pas concrétisé dans les faits, tant et aussi longtemps que le ministre, comme ce gouvernement, ne se décidera pas, on sera toujours aux prises avec des problèmes tatillons, mais des problèmes sérieux pour les bénéficiaires de l'aide sociale.

Le gars de chez nous qui doit payer, par exemple, un logement... Je voudrais bien que le ministre vienne se chercher un logement à un montant inférieur à $125, $130 ou $135 par mois chez nous, à Hauterive ou à Sept-lles. Auparavant, dans l'ex-loi ou les ex-règlements du ministère des Affaires sociales, on prévoyait un montant de $143.50 au point de vue du logement. Maintenant, le maximum prévu est de $85 ou le minimum, si vous voulez de telle façon que, chez nous, le bénéficiaire de l'aide sociale est obligé d'hypothéquer sa nourriture, il est obligé d'hypotéquer ses biens essentiels pour compenser le montant supérieur aux normes ou aux critères du ministère des Affaires sociales pour se payer un logement qui soit décent. Il n'a pas le choix parce que, jusqu'ici, on n'a pas encore de politique de logement au Québec et les HLM sont encore plus ou moins développés.

La même chose en ce qui concernel es $10 d'en-

tretien par mois. Cela, on ne l'a pas indexé et on ne l'a pas modifié et cela fait encore plusieurs années qu'on est aux prises avec ce problème. $10 par mois pour l'entretien d'une maison, $120 par année! Figurez-vous ce que cela peut donner à la fin de l'année! Encore là, on est aux prises avec des problèmes tatillons, mais on dirait que le ministre des Affaires sociales se ferme les yeux sur ces problèmes. Tant et aussi longtemps qu'on n'aura pas une véritable politique, on sera obligé, nous autres les députés, d'expliquer la loi et de dire: C'est bien regrettable, mais le ministre, jusqu'ici, n'a pas pris conscience du fait que ça coûte plus que $10 par mois pour entretenir une maison.

Nous avons chez nous, comme probablement dans d'autres régions du Québec, le problème de l'évaluation. Le ministre nous dit qu'il va le modifier. J'espère qu'il va le modifier en tenant compte que, dans certaines régions du Québec, une maison évaluée à $18,000 ou à $20,000, ce n'est pas exorbitant. Bien souvent, le bénéficiaire de l'aide sociale était déjà installé dans cette maison et, parce qu'il n'a pas choisi de devenir bénéficiaire de l'aide sociale, on le pénalise. On forcerait ces gens à vendre leur maison ou à demeurer dans des taudis, si vous voulez, consacrant le principe que le bénéficiaire de l'aide sociale doit rester dans une maison dont l'intérieur ne serait pas décent.

Il y a le problème du logement, du montant de la norme, de ces $85 tels que décidés le 23 octobre 1974. Je suis d'accord que cela a pu favoriser bien peu, comme le dit le ministre, peut-être 28,000 familles bénéficiaires de l'aide sociale. Cependant, cela a pénalisé aussi d'autres familles de régions où le coût de la vie est différent — que voulez-vous, on n'a pas le choix — de ce qu'il est dans certaines régions du Québec.

Il y a la questionde l'entretien. Les $10 par mois, j'espère, en tout cas, que le ministre va modifier cela dans le plus bref délai. En même temps, on pénalise les propriétaires parce que ça leur coûte plus cher que $10 par mois pour l'entretien de leur maison. On a fait disparaître certains besoins spéciaux qu'on avait auparavant dans ce secteur, tels que les réparations urgentes. Là, on a compris le système de chauffage parce que c'était absolument essentiel, mais, auparavant, on pouvait avoir des montants, quand c'était la santé qui était en cause, pour la réparation des maisons, qui pouvaient aller, au régional, jusqu'à $300.

Maintenant, on dit: C'est bien regrettable mais les $10 sont compris, comme entretien, dans votre aide sociale.

J'espère que, tant et aussi longtemps qu'on n'aura pas reconnu le principe du revenu minimum garanti, ces différentes normes vont être modifiées dans le plus bref délai. J'aimerais bien avoir sur ces trois choses une réponse de la part du ministre. Va-t-il tenir compte, un moment donné, dans l'évaluation, des régions, tenir compte de la modification, de l'entretien dans ses barèmes de logements?

Je suis bien d'accord qu'on s'en va de plus en plus vers une non-répartition comme telle des besoins spécifiques, puis on veut donner un montant global. Mais tant qu'on n'arrivera pas, par exemple, à un montant suffisant à la base, comme le disait le député de Saint-Jacques, on indexera toujours l'insuffisance. Dans des régions comme chez nous, puis probablement des régions comme l'Abitibi, puis d'autres régions du Québec, le logement est bien supérieur au montant prévu par le ministère des Affaires sociales; en particulier, par exemple, le chauffage, l'électricité sont compris à l'intérieur des barèmes. Les bénéficiaires de l'aide sociale demeurent bien souvent dans des maisons qui sont plus ou moins organisées, plus ou moins équipées, qui sont plus ou moins protégées contre le froid et cela leur coûte des prix exorbitants pour payer l'huile, à la fin du mois. Cela leur fait des logements dont le prix est considérable.

J'aimerais avoir les commentaires, à ce sujet, du ministre, parce que je pense qu'il y a une certaine urgence, de ce temps-ci. Chez nous, on l'est déjà assez pénalisé, on en parlera en ce qui concerne tous les services de santé que le ministre nous refuse, que ce soit les agents de probation ou autre chose. Au moins, qu'on ne pénalise pas ceux qui sont les plus poignés dans la société, un moment donné, soit les bénéficiaires de l'aide sociale.

M. Forget: M. le Président, je vais essayer d'être bref dans mes réponses, puisqu'on recouvre déjà une partie du terrain couvert la semaine dernière.

Pour ce qui est des régions ou des zones, la désignation de zones pour des besoins, qu'ils soient des besoins ordinaires ou des besoins spéciaux, je rappellerai au député de Saguenay, dont je salue la présence en commission parlementaire des affaires sociales...

M. Lessard: C'est parce que j'avais des problèmes à venir discuter avec vous.

M. Forget: II me fait plaisir de le voir ici. C'est une expérience que nous avons déjà vécue. Jusqu'à janvier 1974, il y avait, comme annexe aux règlements de l'aide sociale, trois listes de municipalités. Ces listes étaient utilisées pour les fins du paiement des desoins de logements qui étaient des besoins payés distinctement du NVPD de l'époque et qui essayait, mais essayait seulement, de se coller à la réalité de différences dans les coûts de logements.

L'expérience, donc, a été faite. L'expérience faite n'a pas été particulièrement heureuse. Des plaintes ont été reçues, relativement à l'inclusion ou à l'exclusion d'une municipalité donnée de ces trois zones, ou de l'une de ces trois zones. Il y avait l'absence de données qui, effectivement, n'existent pas au Québec, sur le niveau relatif de certains besoins ou de certaines dépenses, qu'il s'agisse de logement, qu'il s'agisse d'alimentation. On sait très bien que les coûts de la satisfaction de tous ces besoins ne sont pas identiques, quel que soit l'endroit où l'on réside. Malheureusement, il n'existe pas de point de référence pour déterminer, selon la municipalité où une personne réside, quel est le niveau relatif de chacun de ces articles, dans son budget. On est forcé à des solutions arbitraires qui ne sont jamais défendables, parce qu'à la limite elles sont arbitraires et qu'elles ne reposent que sur un

jugement qui est contestable. La décision aété prise donc, profitant d'un réaménagement général de l'aide sociale, en 1974, d'éliminer cette notion de zones.

D'ailleurs, les lois, les règlements, les politiques gouvernementales, et ceci à la demande d'un très grand nombre de groupes, depuis de nombreuses années — que l'on pense à toute la politique salariale du gouvernement, qu'on pense à l'application de la Loi du salaire minimum, qu'on pense à toutes ces mesures — ont consisté à rendre uniformes les taux qui, au début, étaient plus avantageux, largement très souvent, pour la région de Montréal, par exemple.

Donc, étendre à l'ensemble de la province des niveaux de rémunération, des niveaux de prestations, des politiques générales, de façon uniforme à travers tout le territoire.

Cette orientation, jointe encore une fois à l'absence de point de référence pour déterminer le coût relatif de certaines dépenses, nous amène à une situation où il est presque impossible de justifierdes distinctions. On peut, bien sûr, imaginer toutes sortes de règlements, avec toutes sortes de distinctions. Mais je suis sûr que si on le faisait le 1er mai de cette année, on se retrouverait, l'an prochain, en commission parlementaire, à défendre, sans vraiment pouvoir le faire, les catégories qu'on aurait établies.

On ne pourrait pas le faire puisqu'elles ne seraient basées que sur des impressions. Il n'y a rien de systématique à ce niveau. Ce qui a été fait, c'est une évaluation sommaire des différences dans différents points des budgets familiaux. Nous avons constate que les différences à la hausse, pour certains points du budget, étaient, très souvent, pas toujours compensées par des différences à la baisse dans le niveau relatif de certaines dépenses, pour d'autres points du budget d'une famille.

Donc, il y a, dans un certain nombre de cas, une certaine compensation a l'intérieur d'un montant total accordé à un budget familial. Mais au-delà de cela, il n'est malheureusement pas possible de procéder pour le moment. Même si c'était possible, je le rappelle, tout ceci s'inscrit dans un ensemble de politiques qu'on a toujours voulu d'application générale à travers tout le territoire.

Pour ce qui est des besoins d'entretien des maisons, je ne ferai pas de réponse spécifique puisque j'ai déjà indiqué, à la fois à l'Assemblée et ici, que nous sommes à travailler à une nouvelle version des règlements de l'aide sociale qui tiendront conpte, évidemment, de l'évolution dans le niveau des prix, dans le niveau des valeurs, qu'elles soient les valeurs dont on parle dans la détermination des règles pour le calcul des revenus et le calcul des besoins.

Pour ce qui est des barèmes de logement, je serai encore plus bref puisque j'ai déjà débattu ici même, la semaine dernière, avec le député de Rouyn-Noranda, la signification de ces barèmes. Je renvoie tous ceux qui s'y intéressent à la discussion qui a été assez complète à cette occasion, sauf pour mentionner qu'on le soulève probablement dans le contexte dans lequel on vient de le soulever. On vient de soulever d'autres exemples encore pour mettre en lumière une carence dans le niveau absolu des prestations, qui inclut un montant pour les besoins de logement, qui n'est pas, évidemment, identique mais supérieur à ceux qui apparaissent dans les barèmes de logements qui, comme on le sait, sont des mesures de besoins en deça desquels la pleine allocation n'est pas reçue mais qui ne mesure pas l'importance des dépenses de logement dans le budaet familial.

Enfin, je n'avais pas l'intention de le faire mais je pense qu'il est peut-être préférable de le faire, on nous indique, de façon très enflammée, j'en félicite le député de Saguenay et tout particulièrement le député de Saint-Jacques, avec quel enthousiasme on accueillerait le développement d'un régime complet de revenu garanti. C'est certainement un appui aux politiques gouvernementales auxquelles je suis très sensible.

Je félicite les deux députés pour leur acceptation des principes que nous poursuivons. On nous fait le reproche de ne pas l'avoir réalisé. Je ne sais pas si on sait qu'un régime complet de sécurité d'un revenu garanti n'existe, de façon aussi complète qu'on l'envisage pour l'avenir, dans pratiquement aucun pays, même des plus développés. Il y a, un peu partout, des mesures partielles à l'intégration desquelles on travaille. Mais il s'agit d'un objectif très ambitieux et qui est d'autant plus difficile qu'il est ambitieux. Même lorsqu'il sera réalisé, les problèmes que nous discutons ce matin se retrouveront à peu près intacts puisqu'il ne faut pas jouer sur les mots. Un régime de revenu garanti ne vise pas nécessairement à donner à tout le monde, à toutes les familles, à toutes les personnes seules un revenu égal au revenu moyen ou à un revenu nécessairement plus élevé. Il consiste en un régime qui non seulement vient en aide, sur le plan de la sécurité du revenu, à ceux qui n'ont aucun revenu d'emploi ou un revenu presque négligeable provenant d'un emploi mais également à une nouvelle classe qui n'est pas actuellement l'objet d'une protection sur le plan de la sécurité du revenu.

Mais, pour ceux qui sont actuellement couverts par le régime de l'aide sociale, même dans un régime complet de sécurité du revenu, même avec un régime de revenu garanti, nous nous retrouverions fondamentalement avec les mêmes problèmes. Donc, cette opposition que l'on cherche à faire entre un objectif auquel on souscrit, mais qui n'est pas du tout réalisé et une réalité qui serait toute différente, à l'heure actuelle, c'est une opposition qui est, en partie, factice, au moins pour les bénéficiaires actuels de l'aide sociale qui sont, dans une très large mesure, des gens qui n'ont aucun revenu d'emploi et qui se retrouveraient, dans un régime de revenu garanti, essentiellement dans la même position, pour ce qui est de l'application des règlements, pour ce qui est des mécanismes administratifs, que celle qui est la leur dans le moment.

Les grands bénéficiaires d'un régime de revenu garanti, au-delà de ceux qui bénéficient actuellement des régimes de sécurité du revenu, seraient les travailleurs à faible revenu. Nous avons déjà eu abondamment l'occasion de discuter de leur situation relativement défavorisée dans l'ensemble des mesures gouvernementales, dans l'ensemble des mesures fiscales du gouvernement. C'est sans aucun doute un domaine qui mérite notre attention, mais, encore une fois, cette opposition que l'on cherche à faire est factice. Je n'en accepte pas la validité comme base pour les critiques que l'on nous dirige relativement à des besoins spéciaux que l'on cherche à faire réintroduire dans un régime qui, pour la clientèle qu'il couvre actuellement, est essentiellement un régime de revenu garanti.

Le Président (M. Cornellier): L'honorable député de Sainte-Marie.

M. Malépart: M. le Président, dans les crédits, est-ce qu'on tient compte, dans l'augmentation des besoins spéciaux, des $25 qui étaient versés pour les effets scolaires? Je pense que je n'ai pas besoin de vous dire que ce montant est augmenté de 40%.

Cela fait deux ou trois ans qu'il est au même montant. Il y a aussi les allocations pour pertes en cas d'incendie ou d'autres sinistres et il y a le transport pour le déménagement. C'est une autre chose, disons, qui a augmenté. Alors, aussi bien dire que les gens n'y ont presque pas droit. Il y a aussi le montant alloué pour des gardiennes, en cas de maladie. Je pense que c'est impensable — le montant qui est versé présentement, c'est plus bas que le salaire minimum — que les gens puissent trouver des gardiennes. Dans le fond, on l'a seulement en principe, parce qu'en pratique les gens ne peuvent pas l'utiliser.

M. Forget: L'ensemble de ces mesures fait l'objet, en effet, de la révision qui est actuellement en cours.

Une Voix: Quand cela va-t-il s'appliquer?

M. Forget: Je ne suis pas en mesure d'annoncer une date, puisque nous sommes à faire cette révision. Lorsque nous tombons sur un problème, il faut prendre le temps de le résoudre avant de pouvoir en arriver à des conclusions, mais le plus tôt possible.

Le Président (M. Cornellier): L'honorable député de Saint-Jacques.

M. Charron: M. le Président, avant l'adoption de ce programme, j'ai deux autres courtes questions de détails, qui s'ad ressent peut-être plus à M. Houde qu'au ministre lui-même. Qu'est-il arrivé avec le bureau d'aide sociale d'Acton Vale, qu'on devait fermer le 1er avril? Est-ce que ce bureau, qui, me dit-on, dessert une partie importante de la population de cette région, a effectivement été fermé?

M. Forget: L'attitude que nous prenons, M. le Président, maintenant, vis-a-vis de la fermeture des bureaux est de ne pas les fermer totalement, mais de conserver ce qu'on appelle des points de services qui sont, en quelque sorte, satellites d'un bureau principal, de sorte que, pour les besoins d'attribution, c'est-à-dire les besoins financiers, il y ait de nos gens qui se déplacent sur place, demeurent sur les lieux pour recevoir les demandes des bénéficiaires, mais que, d'autre part, pour les fins des services de référence, de soutien et de la politique que nous voulons développer à cet égard, nous ayons des bureaux d'une ampleur suffisante pour jouer un rôle réel.

Alors ce bureau, comme bon nombre d'autres, demeurera sous forme de bureau qu'on appelle satellite, mais j'aimerais mieux, en fait, une autre expression.

M. Charron: Est-ce à dire que... M. Forget: Un point de services.

M. Charron: Bon. Ce point de services fonctionne-t-il de façon relative, une journée par semaine, ou à temps limité par rapport au bureau central?

M. Forget: Dans ce cas précis, je vous avoue que je n'ai pas la réponse à l'esprit. Je ne sais pas si quelqu'un l'a. Mais nous essayons de faire en sorte que la présence soit directement proportionnelle aux besoins. Il y a au moins une présence une ou deux fois la semaine, en règle générale, et, si c'est nécessaire, une présence tous les jours et, si c'est nécessaire, la présence complète pendant les heures normales de bureau,

En ce qui concerne le cas plus précis d'Acton Vale, je crois que c'est deux jours par semaines, mais je le dis sous réserve.

M. Charron: Est-ce que, pendant ces deux jours, le bénéficiaire qui se présente à ce point de services peut obtenir sur place la même chose que s'il se présentait au bureau central?

M. Forget: Oui.

M. Charron: Une autre question, qui s'adresse au ministre, mais qui, à mon avis, terminerait bien l'étude de ce programme.

Depuis quelques années, et au cours de la dernière année fiscale en particulier, on a vu naître de façon considérable des regroupements de bénéficiaires d'aide sociale sur une base régionale ou locale, à certaines occasions. J'aimerais savoir du ministre, en plus de son opinion, bien sûr, que j'espère deviner à l'avance, s'il a l'intention, un tant soit peu, d'établir un mécanisme de consultation permanent ou officiel qui concrétiserait, j'imagine, la satisfaction qu'il éprouve de voir les bénéficiaires se regrouper, comme n'importe quel autre citoyen, pour défendre ou promouvoir leurs intérêts propres.

Je pense que sous ces organismes, la preuve en est faite dans plusieurs régions, celle de la capitale nationale des Québécois vient de connaître la création du sien il y a à peine quelques jours... Est-ce que tous ces organismes seront intégrés d'une façon officielle dans l'élaboration, par exemple, du nouveau règlement d'aide sociale qui sera échafaudé au cours de l'été?

M. Boudreault: ... du Parti québécois qui sont les principaux organisateurs de ces manifestations ou de ces regroupements.

M. Charron: Veuillez inclure la remarque de monsieur.

M. Lessard: Ils n'avaient pas le droit de le faire? C'est-à-dire que ces gens-là n'auraient pas le droit de se regrouper?

M. Boudreault: On ne les blâme pas de se regrouper, c'est que le Parti québécois est l'instigateur de ça, de faire regrouper les gens. Les manifestations et ainsi de suite, ce n'est pas vous autres qui êtes à la base de ça?

M. Charron: Je pense que votre voisin de droite pourrait vous prouver le contraire.

M. Boudreault: Oui. Je lui poserai la question en temps et lieu.

M. Forget: M. le Président, il y a eu régulièrement, au cours des années passées et à tous les niveaux, non seulement au niveau du ministre mais au niveau des responsables de l'administration de l'aide sociale, puisqu'un certain nombre des problèmes sont à ce niveau-là, comme on le sait, des rencontres avec différents groupes pour la défense des droits sociaux des différents groupes de bénéficiaires, qu'ils soient sous une étiquette ou sous une autre. Très souvent les groupes étaient, en quelque sorte, des groupes transitoires qui n'avaient pas de permanence. Cela n'a pas, malgré tout, empêché des contacts et des rencontres. S'ils choisissent de se donner des points d'ancrage en quelque sorte et d'assumer le fardeau d'animer, de faire fonctionner des structures permanentes, il n'y a certainement aucune difficulté, du côté du ministère, qui sera placé dans leur chemin. Au contraire, nous continuerons avec eux les contacts qui ont déjà été établis dans le passé.

Nous avons d'ailleurs aussi en voie d'élaboration un service de liaison qui sera reconnu comme tel — enfin, du moins nous l'espérons — dans l'organigramme du ministère, qui est de nature à nous permettre justement d'entretenir des liens au niveau de l'administration et du fonctionnement du régime. Par ailleurs, comme on le sait peut-être, puisque cela remonte à plusieurs années, le Conseil des affaires sociales et de la famille est à mettre la dernière main à un rapport sur les relations entre le ministère et les groupes populaires. Nous voudrons, sans aucun doute, prendre connaissance du rapport avant d'adopter des politiques dans ce secteur-là.

Et, finalement...

M. Charron: Est-ce que ce rapport doit venir bientôt?

M. Forget: Oui, enfin, il est en préparation, je crois, depuis 1971. Il devrait donc venir bientôt...

M. Charron: Laissez tomber, laissez tomber.

M. Forget: Je crois que c'est une chose qui est prévue pour les prochaines semaines ou les prochains mois. L'information que je tiens du président du conseil est que c'est prévu pour le mois de mai, mais je ne veux pas l'engager outre mesure en précisant une date. Par ailleurs, quels que soient les voeux ou l'ouverture d'esprit relativement aux relations avec ces groupes-là, je pense que la première initiative leur revient peut-être de spécifier quel genre de relations ils veulent entretenir avec le ministère. Ce qu'ils n'ont pas fait formellement, du moins à ce jour.

M. Charron: Connaissez-vous des bureaux régionaux du ministère qui ont déjà été, j'emploie l'expression entre guillemets "institutionnalisés" leurs rapports avec des citoyens bénéficiaires regroupés.

M. Forget: J'aimerais que M. Houde réponde à la question.

En fait, la première expérience du genre l'a été à l'instigation du prédécesseur de M. Forget, M. Cas-tonguay lui-même, qui, à la suite de discussions que nous avions eues avec les comités de citoyens de Montréal, avait autorisé — il l'avait dit publiquement — que ces comités de citoyens soient présents sur place au niveau de l'accueil dans six ou sept des bureaux du ministère à Montréal. Il y avait aussi eu à l'époque des discussions avec la ville de Montréal pour poursuivre l'expérience dans certains bureaux de la ville et nous avons tenté de l'élargir dans la région de Québec, dans le bureau de Lévis, si je me souviens bien, et dans un ou deux des bureaux importants de la ville de Québec.

A Rouyn-Noranda, ou dans la région de Rouyn — et là, la mémoire me fait un peu défaut parce que cela remonte déjà à deux ou trois ans — avait été entreprise aussi une démarche qui tenait lieu du même type d'initiatives et qui, cette fois-là, était attribuable au palier régional, de même que dans une ou deux autres régions. Encore une fois, comme vient de le dire le ministre, ces initiatives, dont on a quand même pu tirer une certaine expérience, n'ont pas eu de suites plus formelles ou plus formalisées parce qu'il y a eu, au niveau des groupes de citoyens eux-mêmes, un certain flottement quant à la représentativité, non pas en ce sens qu'ils ne sont pas représentatifs mais en ce sens que divers groupes se sont constitués, se sont modifiés. Nous croyons que présentement l'atmosphère est à une certaine forme de regroupement qui devrait nous permettre, d'abord à eux comme l'a dit le ministre mais ensuite à nous, de répondre de façon plus favorable à un contexte en voie d'évolution.

Jusqu'ici, toutes les expériences qui se sont faites, sur une base plus formelle comme sur une base informelle, ont de façon générale été très fructueuses dans le dialogue. Nous n'avons pas retrouvé, par exemple, dans la présence des groupes de citoyens dans les bureaux, des pierres d'achoppement comme certains l'ont craint. Au contraire, je pense qu'on peut tirer de l'enseignement une leçon positive. Mais eux-mêmes, je pense, ont hésité et hésitent encore entre revendiquer de l'extérieur en quelque sorte et revendiquer de l'intérieur, ce qui est une question bien normale pour un mouvement qui se veut de l'extérieur; c'est ce genre de solution, au fond, à laquelle ils doivent eux-mêmes arriver avant que nous-mêmes puissions réagir de façon précise à leurs demandes.

Mais il y a eu, dans le passé effectivement, des expériences presque reconnues comme des expériences moins formelles.

M. Charron: M. le Président, je suis disposé à adopter le programme 2.

Le Président (M. Cornellier): Le programme 2 est composé de quatre éléments; adopté? Adopté. Programme 3: Assistance maladie.

M. Charron: Voulez-vous finir l'assurance-maladie tout de suite?

M. Forget: Tout de suite?

M. Charron: Voyez comme je suis dans de bonnes dispositions.

M. le Président, je crois que nous avons suffisamment de temps avant la suspension pour terminer l'étude de ce programme, à moins que M. Martin ne soulève un débat houleux, selon son habitude.

Assistance maladie

Ma première question, puisque nous reprenons ce programme que nous avons entamé la semaine dernière, fait suite à l'annonce faite la semaine dernière de modifications au programme de l'assurance-maladie même par le ministre, l'extension aux enfants de neuf ans du programme de gratuité de soins dentaires. J'avais presque envie — je le ferai si le ministre le fait — de soulever le débat de fond qu'il y a à l'arrière de cela; s'il le fait dans sa réponse, M. le Président, je vous prie de me remettre le crachoir immédiatement après. Je soutiens encore que les moyens financiers du Québec permettraient d'étendre immédiatement jusqu'aux enfants de 0 à 14 ans inclusivement ce service. Je me contente, puisque ce débat a longuement eu lieu lorsque le programme a d'abord été instauré, lorsque l'année dernière il a été modifié, de m'assurer si je dois voir dans — c'est peut-être la question la plus importante que j'ai sur cet élément de l'assurance-maladie.

Est-ce que nous devons voir, dans l'annonce faite la semaine dernière, l'affirmation d'un principe qui veut que désormais, d'année en année, le programme soit étendu, de sorte qu'un enfant précédemment couvert par le régime ne sera pas abandonné en cours de route?

Autrement dit, devons-nous voir, dans l'annonce de la semaine dernière, une annonce semblable pour l'année prochaine, devant étendre les services aux enfants de dix ans, et cela indéfiniment, quitte à brûler des étapes aussi à certaines occasions?

M. Forget: M. le Président, la réponse que je vais faire à cette question est une réponse que, je suis sûr, le député de Saint-Jacques va qualifier de prudente, et je pense qu'elle doit être une réponse prudente. Il tombe sous le sens commun qu'un régime qui, au moins a priori, doit être destiné à assurer la couverture des soins dentaires pour les enfants d'âge scolaire — et c'était, on s'en souvient, l'intention originale — soit effectivement l'objet d'une extension d'année en année, de manière à pouvoir couvrir effectivement toute la clientèle à laquelle il est destiné.

La réserve qui pourrait être faite est une réserve pas seulement de forme mais, malgré tout, qui indique que l'on ne peut pas aller trop loin dans l'affirmation du principe pour toutes les années à venir, c'est l'expérience qui sera accumulée dans le fonctionnement de ce programme sur le plan des coûts et la capacité de trouver le financement additionnel requis à la lumière de toutes les autres priorités entre lesquelles, à chaque année, un gouvernement doit choisir.

Donc c'est un principe qui est une déduction normale de l'objectif initial du régime. Mais ce n'est pas la seule réserve que l'on peut faire non plus, comme il sera évident lorsque l'expérience des six premiers mois de fonctionnement du régime de la couverture des soins dentaires sera rendue publique. Et j'ai l'intention de le rendre public, de déposer un document à ce sujet à l'Assemblée nationale dès aujourd'hui.

On se rendra compte que la couverture est nominalement complète, mais pas effectivement complète, même avec une extension à chaque année, dans le sens où les habitudes de consommation, si l'on peut employer cette expression, des soins dentaires sont telles qu'une proportion supérieure à la moitié des enfants qui sont effectivement déjà couverts ne s'est pas prévalue du régime.

On peut supposer, bien sûr, que ces enfants jouissent d'une santé dentaire parfaite, donc ils n'ont pas eu l'occasion de s'en prévaloir. Mais l'hypothèse la plus réaliste est qu'encore une fois les habitudes, le manque d'intérêt pour la santé dentaire, qui est peut-être une des caractéristiques du problème de la santé dentaire au Québec, caractéristiques importantes, fait qu'effectivement on ne se prévaut pas des services.

Il y a également des problèmes de distribution géographique, mais sans les nier, sans les minimiser, on peut se demander s'ils sont assez importants pour produire un taux de couverture aussi faible que celui qui, effective ment, est observé pour la première année. Devant un phénomène comme celui-là, sans négliger les possibilités de contribuer à l'éducation sanitaire, à l'information des parents sur l'accessibilité des services, sur l'importance d'une bonne dentition, etc., sans minimiser ces possibilités, on doit également tenir compte du fait que l'efficacité de mesures d'information et de propagande en faveur de la santé dentaire, n'est peut-être pas une efficacité escomptée de 100%. Il sera peut-être nécessaire d'adopter une attitude moins passive que simplement rendre accessibles des services, sans frais, une politique plus active ou qui consisterait à aller vers les enfants, si les enfants ne veulent pas aller vers le dentiste.

D'ailleurs, j'en avais fait part au public, à la population, lorsque le programme de santé dentaire a été annoncé en mai ou en avril, c'est-à-dire de l'an dernier, nous envisageons de mettre sur pied un programme de santé dentaire en milieu scolaire dont les dimensions ne sont pas complètement définies même à ce moment-ci.

C'est, d'ailleurs, la raison pour laquelle nous y travaillons encore et nous n'avons pas pu faire état d'un programme très spécifique et d'une date d'entrée en vigueur très précise. Mais il est clair que simplement l'approche passive, si vous voulez, n'est pas suffisante dans le domaine de la santé dentaire; il faut une approche plus active qui va au devant des problèmes. C'est donc une deuxième réserve à ce qu'on vient d'indiquer. Les extensions successives du régime devront tenir compte également de cette préoccupation qui est, à mon avis, extrêmement importante. Donc, à la lumière des possibilités qui se révéleront en temps et lieu de ce côté-là, des disponibilités financières, de l'expérience qui va

s'accumuler du régime, c'est une décision de principe que cette extension d'année en année, qui peut éventuellement être remise en question. D'un autre côté, ces réserves étant faites, je ne crois pas que ce soit là une très forte probabilité, mais, encore que je ne puisse exprimer qu'une opinion personnelle, c'est une décision qui, chaque année, devra être prise par le gouvernement.

M. Charron: M. le Président, pour ce qui est de l'information et de l'éducation, l'année dernière, si je me rappelle bien, nous avions reçu des assurances, de la part du ministre des Affaires sociales, que ces programmes, qui sont d'une efficacité peut-être inférieure à celle qui était escomptée, auraient des modifications au cours de l'année qui vient de s'écouler. Qu'a-t-on fait de plus que l'année précédente, au cours de la dernière année, dans cette politique non seulement de propagande — j'admets le mot pour la cause — mais aussi d'information, de prévention en milieu scolaire? Je sais qu'on en discutera tout à l'heure, à un autre programme, les services en milieu scolaire, mais pour ce point en particulier.

M. Forget: Sur ce point-là, je dois me fier largement à ma mémoire. Il y a eu un programme d'information et, d'ailleurs, M. Martin pourrait le développer. En collaboration avec l'Ordre des dentistes, il y a eu d'abord — je pense que tout le monde s'en souvient — une campagne d'information télévisée ou de propagande télévisée en faveur, en général, de la santé dentaire et attirant l'attention, plus spécifiquement, sur certains aspects, il y a eu également, par l'intermédiaire des services gouvernementaux, qu'il s'agisse de la régie ou du ministère, un effort fait auprès des élèves dans le milieu scolaire. Peut-être que je demanderai à M. Martin de vous décrire les principaux éléments de ce programme.

Les principaux éléments sont de deux ordres. Le premier élément est que le ministère des Affaires sociales, par ses services, rencontre les élèves en milieu scolaire, déjà cette année, pour les initier aux problèmes de santé dentaire. La régie a préparé, à cette fin, un jeu de prévention, destiné aux enfants, de façon à attirer leur attention sur les problèmes de carie dentaire et autres problèmes de santé dentaire et pour les inciter à se préoccuper de visiter le dentiste, à se prévaloir des avantages du programme.

Les deux efforts combinés ont duré pendant toute l'année, parce que c'est assez long. Je ne pourrais pas dire le nombre d'écoles visitées, mais le but visé était de couvrir l'ensemble des écoles élémentaires.

M. Charron: Est-ce que cela a été fait?

M. Forget: Pour le jeu de la prévention, oui, il a été distribué dans toutes les écoles. En même temps que le ministère des Affaires sociales rencontrait les élèves, le jeu était distribué de façon que les enfants voient pourquoi c'était distribué et soient sensibilisés, en même temps, aux problèmes de santé dentaire.

M. Charron: M. le Président, je ne crois pas que la deuxième réserve qu'a faite le ministre — les obligations ont peut-être été moins prévues qu'elles auraient dû l'être — l'obligation, pour employer son expression, d'aller vers les enfants si les enfants ne viennent pas, que cette nouvelle obligation, dis-je, qui va avec le sens du programme et certainement avec le voeu que l'Assemblée avait voté derrière la loi, soit, à un moment donné, un obstacle qui justifierait l'abandon de l'extension annuelle du programme. J'admets que cela peut signifier, si on s'en va vers un programme qui se déplace vers les écoles, comme vient de le signaler M. Martin, sur le plan financier, une charge différente de celle d'assumer uniquement les soins en cabinet de dentiste. Mais le principe fondamental, qui est celui de ne pas abandonner un enfant qui a commencé des soins, me semble encore plus important et justifierait le ministre des Affaires sociales d'insister encore plus auprès de son collègue des Finances pour que le programme, même s'il devient plus coûteux, à cause de cet aspect de promotion obligatoire, soit quand même maintenu, et étendu d'année en année. J'ai compris que les réserves n'étaient pas présentées comme des obstacles qui, éventuellement, seraient utilisées; que l'attachement existe au sein de la régie et du gouvernement pour l'étendre d'année en année; que ce n'est qu'une difficulté majeure qui pourrait peut-être interrompre cette extension annuelle. Est-ce que j'ai bien compris le sens de votre intervention, tout à l'heure?

M. Forget: Oui, vous avez bien compris. Ce ne sont effectivement pas des obstacles auxquels j'ai fait allusion, mais des réserves ou, si vous voulez, des considérations qui doivent être prises en compte lorsque la décision est prise, année après année. Il est un fait, malgré tout, qu'il ne faut pas dissimuler, c'est que nous parlons, même comme objectif prévisible, d'un régime partiel, c'est-à-dire que nous n'envisageons pas une extension à l'ensemble de la population et que cet abandon, comme vous le dites, interviendra à un âge ou à un autre. Qu'il intervienne à 18 ans ou à 16 ans, il est prévu qu'il interviendra à un moment donné.

La question qu'il faut se poser, à la lumière justement du taux de participation, inférieur à 50%, et peut-être même inférieur à 40%, encore qu'il soit peut-être délicat de projeter sur une année les données d'un semestre... Ces résultats nous permettent de dire que la question qui est posée à tous les ans devra être non pas seulement: Est-ce que nous continuons pour ceux qui sont déjà dans le régime? mais: Est-ce que cette continuation elle-même devient un obstacle ou une difficulté pour donner, à ceux qui n'ont eu aucun accès au régime, un minimum de services.

Et, il est évident que c'est également une considération très importante puisque certains enfants viennent peut-être d'un milieu défavorisé, que peut-être les habitudes de fréquentation du dentiste, étant donné les coûts élevés avant l'introduction du régime, ont découragé des habitudes de santé dentaire essentielles. Est-ce qu'il est raison-

nable qu'on favorise ceux qui ont déjà accès si une telle décision implique un développement moins rapide d'un programme qui irait au devant des besoins dans les cas où ces besoins ne sont pas spontanément exprimés?

C'est, essentiellement, comme je l'ai indiqué, une décision qui doit être prise à tous les ans, à la lumière de l'expérience du régime, à la lumière des disponibilités financières du gouvernement, évidemment en tenant compte des objectifs de l'un et de l'autre.

M. Charron: Sur un autre sujet, M. le Président, mais qui concerne toujours la régie, le 17 décembre dernier, un rapport du comité d'étude sur les problèmes des handicapés visuels a été rendu public. Il s'est appelé le rapport Girard.

Il recommande, entre autres choses, que la régie assume le coût, les aides mécaniques et électroniques ainsi que leur remplacement et leur entretien. Je ne me leurre pas, je serais très surpris que depuis le 17 décembre une décision ait déjà été prise. Mais cette recommandation, que j'ai retenue parmi toutes celles qu'il y avait, parce qu'elle me semblait la plus fondamentale en ce qui concerne le bien-être des handicapés visuels, est-ce qu'elle fait déjà, actuellement, l'objet d'études quant aux implications financières et autres que cela signifierait si le gouvernement devait la suivre ou la retenir?

M. Forget: Vous parlez — je m'excuse, j'ai été consulté — de l'ensemble des recommandations ou d'une recommandation particulière?

M. Charron: De la recommandation qui vise à faire assumer, par la régie, le coût des aides mécaniques et électroniques pour les handicapés visuels.

M. Forget: Enfin, comme on le sait, cette recommandation se situe dans un contexte. D'ailleurs, le rapport Girard comporte lui-même une évaluation du coût probable de...

M. Charron: $4.5 millions.

M. Forget: ... l'extension du régime aux aides visuels. Maintenant, il y a aussi une recommandation qui a paru aux membres du comité Girard comme extrêmement importante, c'est-à-dire que ceci ne soit pas une simple extension de couverture qui laisse l'handicapé visuel sans appui en quelque sorte dans l'utilisation de ces appareils, dans l'apprentissage nécessaire pour leur utilisation efficace. C'est dans ce contexte que nous voulons situer l'extension du régime. C'est la raison pour laquelle dès le mois de janvier, nous avons communiqué avec les organismes qui s'occupent d'eux, les établissements, les centresd'accueil qui s'occupent des handicapés visuels, à Montréal et à Québec. Nous leur avons demandé de prendre connaissance du rapport et de nous faire des suggestions et des recommandations quant à la manière dont eux, comme établissements spécialisés dans la réadaptation et les services de soutien à donner aux handicapés visuels, se voyaient jouer un rôle d'appui et le rôle que le comité Girard a décrit dans ses lignes générales mais qui, évidemment, a besoin d'être précisé et d'être rendu concret par l'identification de structures bien déterminées.

Des réponses ont été reçues des établissements auxquels nous avons écrit. Des rencontres sont prévues. Je pense bien qu'il y va de soi.

Mais, malgré tout, rassurant de constater que nous avons reçu de ces établissements une réponse enthousiaste. Des rencontres auront lieu ces jours-ci, ces semaines-ci, pour en déterminer les modalités précises, de manière que, sur la base de ce contexte institutionnel, en quelque sorte, où on fera plus que donner des appareils, ou indiquera aux gens comment s'en servir, on assurera les réparations, etc., qui s'imposent. Alors on aura un régime plus complet que simplement un régime de gratuité des prothèses de des prothèses visuelles.

Ceci devait se faire durant le printemps 1975 et on peut envisager, peut-être — mais ceci est tout à fait hypothétique, au point de vue date — qu'à l'automne, il y ait l'entrée en vigueur d'un tel régime. Encore une fois, il faut franchir plusieurs étapes: préparation de règlements, ententes avec les établissements, établissement d'une liste définitive, détermination des prix. Alors le travail avance, sur plusieurs fronts à la fois, mais le principal, c'est de s'assurer qu'il ne s'agit pas simplement d'une extension du régime mais qu'il y a les éléments de contexte qui ont été précisés par le comité Girard comme étant essentiels au succès de cette extension.

M. Charron: Une question de détails. Est-ce que, si vous deviez suivre cette recommandation, cela voudrait dire qu'il faudrait amender la Loi de l'assurance-maladie, ou si on peut considérer ces aides mécaniques et électroniques comme des prothèses?

M. Forget: On peut les considérer comme des prothèses. Il s'agit d'une introduction qui peut se faire par voie réglementaire. C'est l'avis des conseillers juridiques, à ce moment-ci, sous réserve d'un changement d'opinion.

M. Charron: C'est la sienne aussi.

M. Forget: Sous réserve d'un changement d'opinion là-dessus.

M. Charron: II y a aussi, sur ces handicapés visuels, M. le Président, qui n'occupent pas souvent les sujets de cette Assemblée, une dernière question. Une des recommandations, aussi, peut-être pas formulée aussi formellement que cela, s'intéressait au sort des chiens-guides, dont les handicapés visuels ont nécessairement besoin. Est-ce que, dans les considérations auxquelles se livre le ministère des Affaires sociales, suite au rapport Girard, on inclura également cette considération comme une prothèse mobile qui accompagne l'handicapé visuel?

M. Forget: Je ne vois pas, a priori, pourquoi ce

serait exclu, au contraire. D'ailleurs, le ministère, de façon non officielle, si vous voulez, donne déjà une certaine aide, un certain secours financier à des handicapés visuels qui ont un chien-guide.

Ceci se fait actuellement de façon un peu plus spécifique, un peu plus ad hoc, en dehors d'un cadre formel, mais il y a déjà un certain appui, une certaine assistance qui est donnée. Il n'y a aucune raison, à l'avenir, dans le cadre d'un ensemble de mesures qui visent à aider les handicapés visuels, d'exclure les chiens-guides. Je ne crois pas que, dans l'immédiat — d'ailleurs, le comité ne l'a pas retenu comme une recommandation immédiate — l'idée de l'établissement d'une école de chiens-guides francophones, si l'on peut dire, soit une priorité, étant donné, quand même, le petit nombre et le caractère très spécialisé de ce genre d'entraînement.

M. Charron: M. le Président, on vient de parler du rapport Girard; il y en a un autre qui est célèbre aussi, c'est celui du comité Gingras. Vous me permettrez simplement de vous faire le nomenclature de certains événements qui ont entouré ce rapport.

Ce comité, qui devait étudier toute la situation des prothèses et appareils orthopédiques, a été formé en février 1973, ça fait déjà longtemps. Avant même, je pense que le comité ait même eu à l'esprit la moindre recommandation, la publicité gouvernementale battait son plein et, le 7 juin de la même année, on annonçait l'extension de la couverture pour les prothèses et appareils orthopédiques. En juillet de la même année, nous adoptions la loi. Le 19 septembre 1973, le comité Jobin, sur la nomenclature et le prix des prothèses et des appareils orthopédiques, se mettait en branle. Le 19 décembre de 1973, un tout jeune politicien, le ministre des Affaires sociales, nous disait espérer mettre le programme en vigueur durant la première moitié de l'année 1974. Le 14 mai 1974, à celui qui vous parle, M. le Président, le ministre disait, je le cite, qu'il avait reçu le rapport du comité Jobin, il y avait deux ou trois semaines. Il disait qu'un certain nombre de questions administratives restaient à régler. Il me promettait de faire diligence et il me disait que la date se situerait certainement — je le souligne, M. le Président — à l'intérieur de l'exercice financierpour lequel nous étudions les crédits.

Or, le 18 mars, le lieutenant-gouverneur nous apprenait que "vous aurez également à vous pencher sur les services aux handicapés par l'extension du régime d'assurance-maladie aux prothèses orthopédiques."

Ça fait juste cinq ou six mois qu'on l'annonce, cette affaire-là, M. le Président. Evidemment, ça fait toujours de la publicité au gouvernement. Il fait semblant d'intervenir souvent, mais on est aujourd'hui en avril 1975. Malgré toute la diligence qu'on a mise, j'imagine, de l'autre côté, il y a toujours le programme pour lequel nous avons voté, M. le Président, vous comme moi probablement, si vous avez suivi la ligne de votre parti.

A l'adoption de la loi, en juillet 1973, nous avons voté une loi qui est encore lettre morte, qui n'a pas encore donné les résultats pour lesquels l'Assemblée s'était, je pense, unaniment prononcée. Ma question est simple: Qu'est-ce qui arrive avec votre diligence?

M. Forget: La question du député de Saint-Jacques est bienvenue, M. le Président. Je pense qu'il a une occasion en or de souligner des retards successifs qui sont tout à fait réels et qui me désolent certainement autant que lui. Je peux l'assurer cependant que si nous n'avons pas fourni de prothèses à personne en vertu du programme, nous avons cependant fourni pas mal de travail à bien du monde à cause d'un programme qui n'est pas encore effectivement en vigueur, que j'ai annoncé pour la dernière fois comme devant entrer en vigueur au début de juin. J'espère que les circonstances me donneront raison cette fois-là.

Pour répondre spécifiquement à sa question, ce qui est intervenu c'est un travail long qui portait sur plusieurs éléments et sur un régime nouveau dans le fond dont on devait faire l'expérience. Il faut peut-être faire le rappel que l'an dernier, en parallèle mais non pas sans effet sur ce régime de prothèses, était publié également un projet de règlement en vertu de la Loi de protection de la santé publique portant sur les laboratoires d'orthèses et de prothèses et d'autres laboratoires auxquels des permis doivent désormais être délivrés.

Or, il est important qu'avant que le régime ne puisse entrer en vigueur ces règlements soient terminés, que des permis puissent être délivrés afin que la distribution des prothèses en vertu du programme se fasse par des laboratoires dûment accrédités. Ceci est une première série de difficultés, puisque la rédaction d'un projet final de règlements relatifs aux laboratoires s'est avérée extrêmement complexe, extrêmement difficile. Encore tout récemment, quelqu'un qui est particulièrement ingénieux, probablement, a découvert toute une autre série de difficultés qui n'avaient jamais été considérées par qui que ce soit.

C'est un problème difficile, donc, que l'introduction des prothèses parce qu'il est lié à un très grand nombre d'autres mesures. La détermination d'une liste et de prix pour la liste a également fait l'objet de travaux, de discussions assez nombreuses; la préparation d'un règlement par la Régie de l'assurance-maladie et son approbation éventuelle.

Enfin ceci n'excuse pas, M. le Président, des délais qui sans doute devraient être plus courts. Mais, si elle ne les excuse pas, ces délais, je pense que cette explication au moins fournit des éléments d'explication.

C'est une déception que nous partageons de n'avoir pas pu jusqu'à maintenant mettre en vigueur ce régime, mais il ne faut pas oublier qu'une fois mis en vigueur il sera en vigueur pour longtemps et que la façon dont il sera mis en vigueur déterminera toute une série d'habitudes, une série de façons de procéder avec lesquelles nous devrons vivre pendant des années et des années. Au moment de jeter les bases de quelque chose de nouveau, nous envisageons des extensions du côté des prothèses visuelles, du côté des prothèses auditives pour les enfants, quoiqu'une décision absolument finale n'a

pas encore été prise de ce côté. Cela nous permet de voir qu'il s'agit là d'assises extrêmement importantes, pour toute une nouvelle dimension du régime d'assurance-maladie, si vous voulez, assez généralement au Québec. Cela mérite un soin tout particulier de manière à ce que nous n'ayons pas à refaire plus tard ce qui aura été mal fait une première fois. Encore une fois ce ne sont pas des excuses, mais ce sont peut-être des explications qui sont à notre avis suffisamment importantes pour expliquer, pour justifier le délai intervenu jusqu'à maintenant.

Le Président (M. Cornellier): La commission suspend ses travaux jusqu'à cet après-midi après la période des questions.

(Suspension de la séance à 13 h 3)

Reprise de la séance à 17 h 2

M. Cornellier (président de la commission permanente des affaires sociales): A l'ordre, messieurs!

La commission des affaires sociales reprend ses travaux avec le programme 3 des crédits du ministère des Affaires sociales, qui s'intitule Assistance-maladie. Vous me permettrez de mentionner que M. Marchand (Laurier) remplace M. Bellemare (Rosemont).

L'honorable député de Saint-Jacques.

M. Charron: M. le Président, on avait terminé, tout à l'heure, en parlant de l'implantation du prolongement du régime d'assurance-maladie aux prohèses et appareils orthopédiques. Je suis obligé de prendre la parole du ministre, évidemment, comme quoi ce long retard n'est pas dû à la volonté du ministre, mais bien à des circonstances étrangères à sa volonté. Je prends sa parole, mais je terminerai cette acceptation en disant quand même que les paroles prononcées le 14 mai 1974 au sujet de la diligence devraient être intégralement maintenues au journal des Débats de cette année, de sorte que l'année prochaine j'aurai l'occasion de lui répéter les deux déclarations si on n'est pas encore arrivé au résultat que l'on attend. Je dis que l'on attend, mais que des personnes, effectivement, attendent et, en ce sens-là, cela peut contrecarrer leur santé de ne pouvoir bénéficier de ce droit que l'Assemblée leur a reconnu.

Je toucherai évidemment, puisque le député de Vanier nous y a invité à l'Assemblée tout à l'heure, parce que j'attends un dossier sur ce sujet, la question de la négociation en cours avec les fédérations médicales. Je m'en tiend rai donc à des questions de détails, pour le moment, qui peuvent avoir des réponses rapides.

Pour les comités de révision dont on a parlé l'année passée, c'est la régie qui fait des enquêtes, selon un échantillon, d'après les plaintes pour compresser l'aspect économique, pratique jugée abusive ou injustifiée. Ces comités, d'après la loi ou d'après les règlements, doivent faire rapport au ministre le 31 décembre de chaque année. Est-ce que cela a été fait pour chacun des comités? L'année dernière, le comité des optométristes n'était pas encore formé; est-ce qu'il l'a été au cours de l'année qui s'est achevée?

M. Forget: II est possible de répondre à cette question. Il faut préciser que ces comités ne sont pas des comités de la régie.

Ce sont des comités établis en vertu de la loi qui ont leur existence autonome, qui font rapport au ministre, le 31 décembre de chaque année.

M. Charron: C'est quand même la régie qui détermine s'il y,a abus ou irrégularité.

M. Forget: Nous, à la régie, on a comme mandat, d'après la loi, de soumettre un dossier quand on est d'avis qu'une pratique ou un profil de pratique révèle, selon des critères internes, ce qui pourrait

être une fréquence abusive ou injustifiée de dispensation de services assurés.

Si on est d'avis que c'est le cas, on doit soumettre le dossier au comité de révision qui, lui, l'étudie et fait ses recommandations que, maintenant, d'après le nouveau texte de la loi, la régie peut accepter ou mettre en cause, auquel cas il faut soumettre l'appel à la commission des affaires sociales, selon la nouvelle...

M. Charron: ... loi.

M. Forget: C'est ça. Et de même le professionnel en cause peut faire la même chose, accepter ou non la recommandation, et il adroit à l'appel auprès de la commission d'appel des affaires sociales. Quant à savoir si les comités ont fait rapport le 31 décembre, le ministre le sait peut-être, moi, je n'ai pas reçu les rapports.

Effectivement, M. le Président, nous avons reçu des rapports des comités de révision créés en vertu de la loi qui, comme on vient de l'indiquer, sont légalement tenus de le faire. C'était leur deuxième rapport annuel. Il faut cependant dire que le rapport qu'ils avaient fait à la fin de 1973 était un rapport extrêmement sommaire, puisque la loi qui les avait créés avait été adoptée en juillet 1973, qu'ils étaient tout juste formés au moment du 31 décembre et qu'ils n'avaient eu, pour la plupart d'entre eux, qu'une première réunion à la fin de 1973. Durant 1974, leurs activités ont consisté largement à prendre connaissance de leur mandat, à explorer les points de procédure, à éclaircir la procédure selon laquelle ils devaient procéder à clarifier, par des discussions entre eux et la régie, la nature des données qui pourraient leur être fournies, à explorer également certaines dimensions juridiques de leur rôle, étant donné qu'ils s'inscrivent dans l'application d'une loi, mais également dans l'application d'ententes qui elles-mêmes prévoient des mécanismes de recours, de nature conventionnelle, et dans le cas d'un certain nombre de ces comités, à examiner effectivement un certain nombre de profils ou de dossiers qui leur ont été soumis par la régie de manière à en venir, dans un nombre de cas fort peu nombreux, à des conclusions ou des recommandations dont l'une a été attaquée devant les tribunaux.

Cette contestation devant les tribunaux d'une recommandation d'un comité de révision a posé le problème juridique de leur rôle, de leur compétence, de leur juridiction, du type de procédures qui pouvaient être utilisées pour argumenter un cas devant eux et les aider à arriver à des conclusions. C'est un type de problème juridique qui est extrêmement épineux, extrêmement difficile et nouveau au Québec, dans le droit québécois.

Un avis juridique a été reçu sur la question, qui montre effectivement toute la complexité de la situation. Alors, nous nous trouvons essentiellement dans cette situation où il y a eu une clarification des mandats, des rôles et procédures. Quelques gestes ont été posés, gestes qui sont déjà attaqués, qui soulèvent tout un problème juridique quant au rôle de ces organismes et à leur efficacité.

Mais, évidemment, je ne peux pas présumer par là du sort qui sera éventuellement fait par les tribunaux de droit commun au recours qui est actuellement présenté. Il est de nature, par la conclusion qui lui sera donnée, à préjuger en quelque sorte de l'ensemble du travail, à déterminer de façon définitive non seulement le cas particulier qui a été soumis, mais l'ensemble de la situation des comités de révision dans le contrôle du régime.

M. Charron: Est-ce la première fois depuis l'implantation du régime qu'un cas aboutissait devant les tribunaux?

M. Forget: Non. C'est-à-dire qu'il faut faire des distinctions. Les comités de révision n'ont pas été créés pour exercer le rôle de contrôle administratif de la régularité des réclamations, qui est exercé par la régie elle-même, si vous voulez, des cas de fraudes ou de mauvaises représentations.

M. Martin, le président de la régie, pourra, si vous le désirez, vous décrire un peu les procédures de contrôle utilisées, les recours, l'issue de ces recours devant les tribunaux qui, soit dit en passant, ont, dans presque tous les cas, été adjugés en faveur de la régie, mais il s'agit de contrôlede type administratif. Les comités de révision sont largement des comités de pairs, c'est-à-dire des membres de la même profession et de la même spécialité, le cas échéant, qui évaluent, sur un plan professionnel, le caractère raisonnable ou déraisonnable de l'ensemble de la pratique d'un professionnel.

Il n'est donc pas question, dans leur cas, de fraude.

Il est question d'un "abus" qui permet ou permettrait, par hypothèse, à certains professionnels, de tirer du régime pi us qu'il n'est destiné à produire, sur le plan du revenu d'un professionnel en particulier, mais sans impliquer pour ce professionnel de fausses déclarations, de fraudes ou quoi que ce soit.

M. Charron: C'était, je pense, un cas qui a été soulevé par la régie, cette année, à un comité de révision, celui des injections contre les varices, où on avait identifié une exagération dans l'acte qui a amené la régie à prendre une position différente. Est-ce que c'est exact? Quelle est la nature exacte de cette situation?

M. Forget: II y a une situation, à laquelle vous vous référez, qui est sans doute le changement qui a été apporté, l'amendement qui a été apporté à l'entente existante, aux deux ententes, omnipraticiens et spécialistes, en ce qui concerne les injections sclérosantes. Basé sur l'observation, depuis le début du régime, de l'évolution des coûts et du nombre d'injections sclérosantes, cet amendement a été accepté par les parties à la suggestion du ministre. Les fédérations ont accepté de réviser le tarif et d'exclure aussi, comme service assuré, certains types d'injections qui sont de nature purement esthétique, qui sont faites pour des fins purement estéti-ques. Cela a été à partir d'observations statistiques. On s'est rendu compte que de 500,000, la première année, on était à près de 2 millions, en 1973, d'injec-

tions sclérosantes. C'est ce qui a amené le ministre à poser le problème aux fédérations.

M. Charron: On ne les a pas exclues mais on a diminué le tarif.

M. Forget: On a diminué le tarif d'une part, et, d'autre part, on a, par règlement, déterminé que certains types d'injections ne sont pas des services assurés parce qu'ils sont de nature esthétique et donc non médicalement requises.

M. Charron: Cette année, la régie a porté combien de plaintes devant les tribunaux?

M. Forget: En cette année 1973/74, on en a porté très peu, surtout dans la dernière partie de l'année, parce qu'on aeu un jugement, à un moment donné, qui a indiqué que, selon le juge en question, la régie n'avait pas le pouvoir. Lui jugeait que la loi ne permettait pas d'appliquer la sanction pénale parce qu'il n'y avait pas ouverture, dans la loi, à une sanction.

L'article 18, sur lequel on se basait traditionnellement pour porter des plaintes, donne un droit aux médecins d'être payés mais il n'établissait pas la sanction s'ils remplissaient faussement une déclaration ou une demande de paiement. C'est la raison pour laquelle le ministre a proposé un amendement à la loi, pour que ce soit précisé et puisse donner ouverture à une sanction.

M. Charron: Est-ce à dire qu'à cause de cette faille dans la loi plusieurs pratiques irrégulières se sont trouvées absoutes?

M. Forget: Non. Voici ce que nous avons fait. Il y avait un certain nombre de plaintes devant les tribunaux.

Nous avons, dans chacun des cas, continué la procédure, mais en soumettant au juge le jugement du juge Sirois auquel je faisais allusion et le juge décidait lui-même s'il poursuivait ou non. Dans tous les cas le juge décidait lui-même s'il poursuivait ou non. Dans tous les cas le juge a décidé de ne pas poursuivre. C'est la position que la régie a prise à ce moment-là, et maintenant, il faut attendre qu'on puisse appliquer la nouvelle loi.

Par contre on a quelques autres cas qui se sont poursuivis au criminel et on a eu un jugement, il y a quinze jours, au criminel qui nous a donné raison.

C'est la première fois que la régie portait une cause, avec l'assistance du ministère de la Justice, en matière criminelle, contre un médecin de Montréal, je crois.

M. Charron: M. le Président, la distinction que le ministre a faite tout à l'heure, à bon droit, entre la tâche réservée par la loi à la régie quant aux poursuites, criminelles au besoin, et la tâche réservée au comité de révision ne devrait-elle pas être amplifiée ou mise à jour par le fait qu'on rendrait les rapports publics, les rapports que reçoit le ministre le 31 décembre de chaque année des comités de révision, pour avoir un autre aperçu de la pratique telle que jugée par ces comités de révision-là?

M. Forget: Je n'ai pas d'objection de principe à rendre publics les rapports que j'ai reçus à ce jour, d'un certain nombre de comités de révision, mais ce qu'il faut tout de suite dire c'est que ces rapports sont des rapports d'activités des comités et non pas des rapports sur la pratique médicale. Ce sont donc des rapports au contenu relativement sec et qui relatent le nombre de réunions tenues, le type de travaux effectués, le nombre de cas étudiés, et ça se limite essentiellement à ce genre de problèmes.

D'ailleurs, je crois qu'on peut assurer la distribution aux membres de cette commission des rapports qui ont été reçus au 31 décembre. Si ce n'est pas possible immédiatement, on pourra le faire au début de la séance de ce soir. Mais, encore une fois, c'est un tableau qui n'est pas un tableau de la pratique médicale mais un tableau des activités de ces comités où l'on souligne, cependant, les problèmes qui ont été abordés. C'est en m'inspirant de ces rapports, d'ailleurs, que j'ai brossé tout à l'heure un tableau sommaire des activités de l'ensemble de ces comités, en insistant particulièrement sur les problèmes légaux qui existent. M. Martin vient de souligner qu'il y a eu des problèmes légaux quant à l'application de sanctions pénales. Ce problème-là est maintenant surmonté mais son effet ne sera sensible qu'un peu plus tard durant l'année, quand les actes qui ont été posés depuis l'adoption de la nouvelle loi auront fait l'objet d'un examen et d'une évaluation et d'une sanction possible, ce qui nous reporte dans quelques mois, j'imagine.

Pour ce qui est du recours non pénal, mais de type plutôt professionnel, il y a aussi des problèmes juridiques. Nous avons reçu tout récemment, enfin, même la semaine dernière un avis juridique que nous sommes à évaluer dans le moment et sur laquelle je préfère ne pas en dire davantage, puisque c'est un problème qui est devant un tribunal, devant la cour Supérieure. Je pense qu'il vaut mieux attendre le jugement dans cette cause avant de tirer des conclusions définitives de l'avis juridique que nous avons reçu.

Tous ces contrôles, de quelque sorte que ce soit, qu'il s'agisse de contrôles de type administratif avec des conclusions pénales ou des contrôles de type professionnel avec des conclusions purement économiques, c'est-à-dire un refus de paiement partiel ou total, se sont avérés dans la pratique extrêmement difficiles à utiliser et à mettre en place, sujets à toutes sortes de difficultés à la fois techniques et juridiques. Donc, nous ne sommes pas au bout de l'édification d'un régime dont on puisse dire avec une satisfaction raisonnable qu'il fait effectivement l'objet de tous les contrôles normaux, je pense, pour un régime d'assurance de soins médicaux. On peut probablement trouver, à l'extérieur du Québec et dans des régimes d'assurance soit publics ou privés, des mécanismes de contrôle que nous aurions intérêt à instaurer progressivement. Encore une fois, il s'agit là du jeu combiné de lois, d'ententes, d'un régime un peu d'exception, puisque c'est un régime qui fait exception au droit commun et à la juridiction des tribunaux de droit commun. Cela pose des problèmes très considérables. C'est un domaine nouveau pour le Québec sur

le plan juridique et aussi sur le plan des informations nécessaires pour faire fonctionner de tels organismes.

Il est clair qu'il y a des millions d'actes qui sont posés par des milliers de professionnels. Leur contrôle pose un problème mécanique, si on veut, d'importance, indépendamment de toutes les difficultés juridiques que je viens d'exposer.

M. Charron: M. le Président, à partir de quand les bénéficiai res du régime recevront-ils copie de ce que la régie paie à leur médecin?

M. Forget: J'aimerais peut-être que le président de la régie réponse à cette question.

Nous avons fait engager des études dès que la loi a été sanctionnée, même un peu avant, dès qu'on a su l'intention du ministre à cet égard. Les premières indications nous faisaient constater qu'on ne pourrait pas envisager les envois aux bénéficiaires avant la fin de 1976 et à des conditions extrêmement onéreuses en termes de personnel et de ressources financières.

Il y a tout le système d'inscription, la validation du fichier des bénéficiaires qu'il faut assurer, avant de pouvoir s'assurer qu'on a les bénéficiaires bien identifiés avec la bonne adresse et qu'on puisse avoirtout le système mis en marche pour inscrire les actes à mesure sur leur dossier, avec tous les contrôles que cela suppose au point de vue informations et manuel dans certains cas.

C'est une procédure extrêmement complexe. Pour le moment, je préférerais ne pas mentionner de date. La première constatation me démontrant que ce serait très considérable comme dépense, j'ai demandé qu'on fasse de nouvelles études pour considérer d'autres hypothèses qui étaleraient peut-être davantage dans le temps, ou qu'on trouve par une imagination quelconque des moyens plus efficaces d'arriver aux résultats dans le meilleur délai, et le délai minimum est fatalement au moins vers la fin de 1976. C'est le délai minimum.

Encore une fois, c'est sans engagement de ma part que je le dis.

M. Charron: Est-ce que le jeu en vaut la chandelle, si c'est aussi onéreux et aussi compliqué, que cela représente une charge supplémentaire pour la régie? Est-ce que l'objectif que visait le ministre en apportant cette modification mérite ou vaut toute cette dépense?

M. Forget: Je ne voudrais pas revenir sur le principe d'une loi qui est déjà adoptée, mais il me paraît personnellement évident que ce coût en vaut la chandelle, comme vous dites, parce que non seulement un tel système permettra-t-il de produire des relevés — c'est l'aspect le plus évident, peut-être le plus terre à terre d'un tel développement — mais il permettra également de développer et de tenir à jour un dossier des bénéficiaires qui permettra d'éviter un phénomène qui existe probablement, quoique dans un point indéterminé à l'heure actuelle, de services qui sont probablement fournis à des per- sonnes qui ne sont pas qualifiées comme résidents du Québec. Ce système permettra également, et ceci est peut-être plus important, de cumuler un profil historique, faire une validation historique des actes posés et donner une base beaucoup plus certaine et beaucoup plus intéressante pour, justement, le travail d'évaluation et de contrôle sur le plan, parexemple, requis pour les comités d'évaluation ou les comités de...

M. Charron: De révision.

M. Forget: ... de révision.

Il est clair que seule cette validation historique des actes, évidemment, et des paiements faits aux professionnels peut permettre de déceler, par exemple, que l'on fait un acte d'obstétrique au bénéfice d'une personne du sexe masculin ou que l'on enlève un troisième poumon à une personne ou même le deuxième, c'est déjà assez grave, ou qu'on enlève, pour la deuxième fois, une autre partiede l'anatomie. Je cite des exemples qui font rire mais il y en a d'autres qui sont moins évidents et qui permettraient d'établir un contrôle meilleur.

Il est clair que, sur le plan de la révision des profils, le profil du bénéficiaire est beaucoup plus significatif que le profil global du professionnel.

M. Charron: M. le Président, je neveux pas, non plus, reprendre ledébat sur le principede la loi, mais en posant une question bien précise on va rejoindre cette discussion qu'on a eue sur le principe de cette innovation. Est-ce qu'on est fixé maintenant, à l'intérieur de la régie, sur les détails qu'il y aura sur le document qui sera communiqué aux bénéficiaires? Est-ce le chef de famille qui recevra la copie ou s'il y aura une copie pour chaque membre individuellement, quel que soit son rang et sa place dans la famille?

M. Forget: Ceci est déterminé par le projet de loi. C'est ie bénéficiaire lui-même qui va recevoir ce relevé et il y a une certaine flexibilité possible pour préciser, par voie réglementaire, le format et la périodicité. Il reste que les règles de confidentialité sont respectées et, en particulier, parmi les choses qu'il sera permis d'exclure, par règlement, il y a certaines catégories de problèmes de santé dont la nature est plus délicate et dont la divulgation pourrait engendrer dans une famille, etc., des problèmes. C'est déjà pratique courante d'omettre, parexemple, au niveau de la vérification qu'effectue la régie auprès des bénéficiaires, certains types de services pour certai-nes affections. Certains types de problèmes de santé ne font jamais l'objet de vérifications à cause, justement, de leur caractère, disons, personnel, plus personnel que d'autres.

M. Charron: Cette assurance, contenue dans la loi, sera renforcée par le règlement qui permettra que la confidentialité desdossiers demeure même quand il y aura envoi aux bénéficiaires, vers la fin de 1976. C'est ce que vous m'avez dit tout à l'heure.

M. Forget: J'ai répondu à votre question dans le

sens bien précis: Quand pourrait-on commencer à envoyer... J'ai dit: La période la plus rapprochée — et, encore là, ce n'est pas un engagement — ce serait vers la fin de l'année 1976 et peut-être pi us tard. Tout dépend des hypothèses qu'on va considérer pour l'étalement ou le choix de moyens qui nous amèneraient à raccourcir cette période-là puisque, l'objectif étant fixé par la loi, on veut bien l'atteindre le plus rapidement possible, mais à des conditions financières et matérielles, des conditions de ressources humaines tolérables.

On réalise, je pense, et c'est peut-être bon de le mentionner, que la mise en place de ce système suppose une opération qui aurait probablement — et même je crois qu'on peut dire certainement — été nécessaire, à tout événement, qui est l'opération de désignation des bénéficiaires qui a été faite sur la base du numéro d'assurance sociale, au débutdu régime, puisquec'étaitunsystèmed'identi-fication qui existait déjà, qui était connu, mais qui pose un certain nombre de problèmes et même des problèmes certains. C'est un numéro qui est susceptible de changer durant la vie d'une personne, lors des changements d'état civil — une femme qui se marie, par exemple — et qui ne prévoit aucune date d'expiration de validité.

C'est-à-dire qu'une carte émise une fois est émise pour l'éternité, et qui, aussi, ne permet pas, par exemple, l'inscription de l'adresse, donc tout ce genre de mise à jour, de considérations, nous amenait, indépendamment des considérations précédentes sur la validation historique, à un nouveau système d'identification qui empêche toutes les difficultés, celles que j'ai mentionnées et d'autres qu'on pourrait mentionner sur le plan technique, parce qu'il y en aet qui amène une amélioration de ce côté.

Donc, je pense qu'il faut faire ladistinction, dans les coûts du système d'information envisagé entre ce qui était nécessaire, de toute manière, et ce qui permettra d'améliorer justement le fonctionnement d'un certain nombre de comités qui doivent dépendre de données validées historiquement pour un fonctionnement efficace. Ce n'est pas le système d'information comme tel qui va contribuer à un coût considérable.

On ne peut pas faire tout cela, d'un autre côté, en quelques mois. Déjà, quand on se met à la décrire, on se rend compte que c'est une opération de très grande envergure.

M. Charron: Question de détail, combien de citoyens qui auraient droit à leur carte ne l'ont pas encore?

M. Forget: D'après les estimations qu'on peut faire, il nous semble que ce serait autour de 5%.

M. Charron: 5%.

M. Forget: Particulièrement les personnes âgées, dans certaines régions particulières. D'après les observations qu'on a pu faire, c'est une estimation et ce sont surtout des personnes âgés.

M. Dufour: M. le Président, ceux qui n'ont pas leur carte, présentement, quelle en est le cause?

Est-ce que vous avez une raison valable à nous donner?

M. Forget: Je pense que la principale cause, il y en a peut-être d'autres, mais la cause essentielle, c'est qu'ils n'ont pas fait de demande, ils ne se sont pas inscrits.

M. Dufour: Je m'excuse, parce que j'ai dû remettre, à mon bureau, à de nombreux patients, des formules pour s'inscrire. Ils en ont rempli trois, quatre, cinq, ils n'ont jamais reçu de réponse.

M. Forget: C'est possible, il y a eu des problèmes, pendant une certaine période. Ces problèmes, depuis quelques mois sont...

M. Dufour: Cela se continue, parce qu'ils remplissent encore des formules et ils ne reçoivent pas leur carte.

M, Charron: II faut combien de temps, M.Martin, à peu près, entre la demande et le retour de la carte?

M. Forget: Quand les renseignements sont bien décrits, quand la demande est bien formulée, actuellement, Ie délai est d'à peu près 30 jours. Mais il y a des problèmes. Là-dessus, je vais être d'accord avec vous, il reste des problèmes, il faut les signaler puis on s'en occupe.

M. Dufour: Mais qui est pénalisé au moment où l'identification du malade qui n'a pas sa carte est mal faite? Quand l'identification du malade est mal faite, parce que le patient donne une mauvaise adresse, un mauvais nom, vous autres vous cherchez, sur quelle base nous payez-vous? Qui est responsable?

M. Forget: Du point de vue des médecins, vous posez la question de la bonne foi, de la clause de bonne foi qui est inscrite dans les ententes?

M. Dufour: Oui.

M. Forget: La clause de bonne foi indique que, quand le médecin a toutes raisons de penser que la personne est un résident québécois, sur déclaration de la personne, il a droit de recevoir les honoraires prévus. Il n'est pas pénalisé.

M. Dufour: C'est pour cela qu'on embarque souvent dans le code 20, puis les études se font assez lentement.

M. Forget: II y a des cas de vérification et d'identification du bénéficiaire qui peuvent retarder des paiements. Le code 20 n'est pas la principale raisons. Ce sont surtout des demandes de renseignements, des erreurs de complètement ou des analyses particulières qui doivent être faites et qui dépendent du professionnel lui-même, qui se rattachent à la façon dont un professionnel a rempli sa demande ou qui concernent des demandes qui supposent des analyses particulières.

M. Charron: M. le Président, le surplus de la régie était de quel ordre, à la fin de l'année financière?

M. Forget: Au 31 mars 1975... M. Charron: Oui.

M. Forget: ...sous réserve de vérifications comptables de dernière heure par le vérificateur général, donc aux états financiers, sous cette réserve, le chiffre que je peux mentionner est de $97.3 millions.

M. Charron: II était de $65 millions à la fin du précédent exercice financier.

M. Forget: II était, à la fin du précédent exercice financier, de $79,406,000.

M. Charron: Qu'est-ce que le ministre a l'intention de faire avec tout cet argent?

M. Forget: Je vous rappelle que...

M. Charron: Oui, je savais que vous étiez pour me le rappeler de toute façon.

M. Forget: II a été convenu — je pense que c'est admis par tout le monde — qu'il y a au moins une partie de ce surplus qui doit correspondre en gros à un mois de revenus, qui doit être conservée comme réserve pourtoute éventualité grave, ce qui équivaudrait, avec ces ordres de grandeur, à quelque $48 millions, si on tient compte d'un mois de revenus, à ce moment-ci.

M. Saint-Germain: Lorsque vous parlez du coût très dispendieux de la mise en application de ce mode d'information, quelle est l'échelle, à peu près, du coût?

M. Forget: Pour la mise en place du système d'inscription on est en train d'étudier justement ces questions. Je ne peux pas mentionner de chiffres. Le ministre avait raison d'indiquer que, de toute manière, il y a des coûts qu'il aurait fallu encourir pour faire la mise à jour de notre fichier des bénéficiai res. Ce coût, on l'avait estimé, même avant l'adoption de la loi 93, à une dépense d'environ $1 million par année, pendant trois ans, mais d'où il faudrait défalquer un chiffre correspondant au remplacement des cartes, ce qu'il aurait fallu faire de toute manière. L'opération en gros, l'opération nette, on l'estimait, pour la révision du fichier, la nouvelle inscription avec le nouveau numéro, à $1.8 million.

Quant à l'addition pour l'information au bénéficiaire, le chiffre exact, je ne pourrais pas le formuler à ce stade-ci. Ce sont précisément les hypothèses, considère-t-on, qui vont nous le dire parce que c'est le personnel qui est en cause, c'est l'équipement qui est en cause aussi, ainsi que le traitement des données. Si on traite l'adresse, cela coûte plus cher. Mais, de combien?Tout dépend des moyens technologiques qu'on utilise, et c'est là-dessus qu'on travaille actuellement pour arriver avec des hypothèses qu'on aimerait discuterensuite avec le ministre pour s'entendre sur le délai nécessaire, raisonnable pour commencer à envoyer des relevés aux bénéficiaires.

M. Saint-Germain: Vous avez mentionné, tout à l'heure, que certains jugements vous ont un peu paralysés pour, du moins, arrêter ou punir les abus. Est-ce que vous avez ressenti que certains professionnels qui connaissent bien cette situation judiciaire, abusent de la situation?

M. Forget: Bien, ils n'ont pas eu le temps d'en abuser longtemps parce que la loi aété modifiée... Le jugement est du mois de septembre, sauf erreur, août ou septembre, et la loi, du mois de décembre. On n'a pas fait une très grande publicité au jugement du juge Sirois...

M. Saint-Germain: Est-ce que vous avez la pleine coopération maintenant, pas des corporations professionnelles car ce n'est plus leur nom...

M. Forget: C'est encore le nom, pour les médecins ce n'est pas pareil.

M. Saint-Germain: Oui, pour les médecins, est-ce que vous avez le pleine coopération du conseil?

M. Forget: En ce qui nous concerne, c'est parfait comme collaboration avec les collèges, ou corporations professionnelles ou ordres.

La collaboration est parfaite.

M. Charron: M. le Président, si, comme le dit M. Martin, il faut bien analyser le chiffre de $97.3 millions, qui est le surplus, en date du 31 mars 1975 et le prendre avec toutes les réserves qui s'imposent sur le fonctionnement habituel de la régie, il reste que, d'année en année, ce surplus est plus considérable. Vous vous rappellerez certains points de notre discussion. Nous avons vu que certaines extensions possibles au régime ne seraient finalement pas si coûteuses qu'elles peuvent le sembler à première vue et que cette "réserve" peut, à l'occasion, servir pour étendre la couverture du régime.

Il est bien possible, d'ailleurs, que ce surplus accumulé soit encore plus considérable. Non seulement cela est bien possible, mais il est tout à fait probable que le surplus accumulé soit encore plus considérable que l'année dernière, profitant lui-même, comme n'importe quel autre revenu du gouvernement, de l'inflation. Les revenus de l'assurance-maladie provenant essentiellement d'une perception sur les salaires, la hausse des salaires qui accompagne la période inflationniste permet des revenus supplémentaires qui, que ce soit pour l'extension des soins dentaires ou d'autres exemples qu'on a touchés, donnent une liberté de manoeuvre au ministre, qu'il aura le loisir, au cours de l'année 1975/76, d'analyser pour inviter la Chambre, à l'occasion, à étendre à nouveau le régime d'assurance-maladie à la suite des revenus supplémentaires qui lui seront donnés.

Je ne prétends pasqu'il s'agit là de $97.3 mil lions qui dorment, qui ne servent à rien, qui sont dans les bas de laine du ministre des Affaires sociales. Je n'ai

pas cette conception du surplus accumulé. Mais je crois qu'il y a là une possibilité financière d'action dans le but d'élargir le régime d'assurance-maladie, toutes ces considérations faites avec les réserves que M. Martin a bien légitimement apportées. Je me demande si ce surplus, qui frise maintenant les $100 millions, qui les aura probablement atteints au cours des prochains mois avec les revenus supplémentaires qui s'y grefferont, ne permettra pas au ministre de déclencher à l'intérieur du ministère des Affaires sociales ou d'encourager ses hauts fonctionnaires la recherche de possibilités d'extension du régime d'assurance-maladie, pour la prochaine année.

M. Forget: M. le Président, je crois qu'il ne faudra pas chercher très longtemps. ll y a un phénomène sur lequel il faut attirerl'attention dans l'évaluation de ce surplus accumulé. C'est le retard, qu'on a d'ailleurs mentionné ce matin, dans l'introduction d'un régime en particulier, le régime des prothèses. Il faut également attirer l'attention sur le retard qui avait précédé l'entrée en vigueur du régime de soins dentaires pour les enfants. On se rappelle que les négociations à ce sujet s'étaient poursuivies pendant près de deux ans. Il y a donc eu des retards qui ont contribué à gonfler le surplus accumulé par rapport à ce qui se serait normalement passé si ces retards ne s'étaient pas produits.

Par ailleurs, il y a eu deux décisions successives d'extension du régime pour les médicaments aux personnes âgées, une première étape en janvier 1974, une deuxième en janvier 1975, qui ont contribué à ajouter environ $15 millions, $16 millions ou $17 millions, je crois, au coût du régime sur une année complète.

On sait que l'on se trouve devant aussi des perspectives telles que celles mentionnées dans le rapport Girard et ailleurs qui, certainement, épuisent passablement la liste des possibilités qu'il faille considérer à l'heure actuelle.

J'aimerais d'ailleurs que M. Martin nous donne un aperçu des perspectives pour l'année qui vient de commencer pour ce qui est du surplus de l'année et non pas du surplus accumulé, qui nous permettra de voir s'il est raisonnable d'anticiper, de voir s'accroître ce surplus ou si, au contraire, il ne va pas se stabiliser.

M. le Président, je vais, d'abord, si vous me permettez, enlever une inquiétude au député de Saint-Jacques à propos du bas de laine. Les millions servent aux fins du régime d'assurance-maladie. Ce sont des revenus de placement. Les intérêts sur le placement, pour vous donner une idée de l'ordre de grandeur, pour 1974/75, nous estimons qu'ils auront été de $10,125,000.

Alors, c'est de l'argent qui s'ajoute et qui va servir pour les fins du régime.

M. Charron: Cela me rappelle les $9 millions dont vous parliez pour les troisièmes tranches des personnes âgées qui ne reçoivent pas d'assistance-médicaments. Je veux dire que c'est le seul intérêt...

M. Forget: Je vous laisse les rapports à faire entre les chiffres.

M. Charron: Vous ne pouvez pas m'empêcher de le faire, quand même.

M. Forget: La perspective pour 1975/76, avant l'annonce de l'extension aux enfants de huit ans du programme de service dentaire, nous prévoyons un surplus de $875,000 pour l'exercice 1975/76, par rapport à un surplus prévu et réalisé, sous réserve encore une fois des dernières vérifications, de $17,896,000 pour 1974/75. Alors 1975/76, le surplus prévu était $875,000 avant l'annonce de cette extension. Mais maintenant, nous devons prévoir un déficit pour l'exercice, si on considère seulement l'exercice, de $2,425,000.

M. Charron: Lesurplus accumulé, autrement dit, n'aura pas de croissance au cours de l'année à cause des extensions qui ont été apportées.

M. Forget: II sera restreint selon les prévisions actuelles à $95 millions, environ, après l'annonce de l'extension aux enfants de huit ans du programme de service dentaire.

M. Charron: Pour l'année en cours le déficit au total est de $2 millions.

M. Forget: On commence à gruger le surplus. Et des prévisions ont été faites, compte tenu des programmes dont a parlé le ministre, y compris orthèses et prothèses, mais pas pour les handicapés visuels, orthèses et prothèses telles que définies dans le premier temps, et les prévisions ont été faites aussi en tenant compte du maintien du tarif actuel. Il n'y a pas d'indication quant à ce qui se passera en matière de négociations. Pour nous à la régie, on a fait nos prévisions à partir des tarifs inscrits dans les cahiers de prestations qui sont en vigueur actuellement.

M. Charron: Alors, cela je vais vous en parler aussi tout à l'heure mais, comme profane encore dans ce milieu-là, j'ai de la misère à m'expliquer comment il se fait que la seule extension, en fait c'est la seule nouvelle, aux enfants de neuf ans...

M. Forget: II y a autre chose, il y a d'abord la croissance de la rémunération à payer et tous les facteurs dont on doit tenir compte, le coût des programmes qui augmente, les médicaments, orthèses et prothèses. Ce ne sera pas un surplus cette année si le programme est mis en place, et vous le souhaitez. Tous ces faits-là, une augmentation de la rémunération, nos prévisions pour l'ensemble de la rémunération des professionnels de la santé...

M. Charron: Ce seul article-là, par exemple?

M. Forget: Cela comprend des boursesd'études et de recherche, qui est aussi un nouvel article...

M. Charron: Oui.

M. Forget: ...qui passerait de $472,484,000 à $537,685,000 selon les prévisions actuelles.

M. Charron: Si les médecins devaient demeurer au même tarif?

M. Forget: Exactement, oui, médecins, pharmaciens. Il y a de 400 à 500 nouveaux médecins.

M. Charron: Nouveaux médecins, donc autant de fois d'actes médicaux multipliés.

M. Forget: C'est cela et le coût des services augmente. La consommation per capita augmente.

M. Charron: Au total, il y a combien d'actes médicaux, de quelque nature que ce soit, qui sont donnés? 40 millions?

M. Forget: 48 millions, tout près de 49 millions prévus.

M. Charron: Les médecins, M. le Président, dont nous avons parlé, sont la pierre angulaire du régime d'assurance-maladie, il va sans di re, des services de santé. Le député de Vanier a soulevé pertinemment la question à l'Assemblée tout à l'heure, durement touché lui-même par le communiqué qu'il avait reçu de la fédération dont il est membre. J'avais l'intention, de toute façon, de le soulever ici, non pas — j'évite immédiatement l'excuse — pour que nous procédions à cette table à une négociation ou à l'explication de la stratégie de l'employeur dans ses négociations, je sais très bien qu'à chacune des questions que je peux poser le ministre peut me répondre la formule classique qui dit: Je ne répondrai pas à cette question car je crois qu'elle interviendrait indûment dans les négociations en cours. Donc, d'avance j'assure que je pose les questions avec la conviction qu'une réponse ou une discussion alentour de ces questions ne nuira pas à la négociation, mais qu'à l'occasion un petit peu plus de lumière sur les propositions gouvernementales ou une philosophie jusqu'ici mal expliquée ou mal entendue peut même être un facteur — en tous cas, modestement je l'espère — de rapprochement des parties à la table des négociations.

M. le Président, j'ai souligné cette information que le ministre a confirmée à la Chambre vendredi dernier. Le régime dont nous venons de parler connaîtra des difficultés semblables, j'espère pas semblables en gravité, à celles qu'il a déjà traversées en 1970, quelques semaines à peine après son adoption par l'Assemblée et son implantation. Je ne souhaite certainement pas traverser une crise semblable à celle-là. Mais cela ne prend pas un cours classique, comme on dit, pour deviner qu'on s'en va vers une période où les longues négociations entreprises d'une entente expirée depuis décembre 1972 semblent devoir prendre un tournant un peu plus difficile.

Selon les informations qu'a communiquées le ministre des Affaires sociales à l'Assemblée, lors d'une question du député de Johnson, je crois, il y a quelques semaines, avant l'ajournement de Pâques, le ministre disait avec raison qu'on n'avait pas abordé encore la question salariale, la question de la rémunération à l'acte, le tarif de la rémunération avec les médecins.

Cette information, M. le Président, effectivement, a été confirmée par les médecins eux-mêmes, par le porte-parole qu'ils se sont donné. Le document auquel référait ledéputédeVanierdansson intervention en Chambre cet après-midi le dit noir sur blanc. C'est vrai qu'on n'a pas encore abordé cette question avec la fédération.

Je me permets une opinion immédiatement, M. le Président. Cette allure des négociations ou, si vous voulez, cette priorité que l'on a donnée à l'acte professionnel, à la liberté de pratique, tous les synonymes qui se recoupent, le secret professionnel, la pratique indépendante des administrations, etc., etc., est actuellement, contrairement à ce qu'on peut penser dans certains milieux, favorable à la classe médicale, je pense.

La stratégie des médecins qui jouissent toujours, faut-il le rappeler, M. le Président, d'un revenu sensiblement supérieur à l'ensemble de nos concitoyens... J'ai ici des statistiques selon lesquelles, enfin, 62,650 spécialistes feraient plus de $20,000; 52,000 omnipraticiens, enfin peu importe ces revenus...

M. Forget: La liste des omnipraticiens.

M. Charron: D'accord, c'est la moyenne de salaire; ce n'est pas le nombre. C'est $62,650 pour les spécialistes et, pour les omnipraticiens, $52,463. Toutes ces statistiques, que le ministre a lui-même déposées à l'ouverture des travaux de la commission, font qu'évidemment les deux fédérations seraient bien mal vues d'entamer les négociations par la clause salariale.

Leur stratégie évidente, c'est de s'assurer un certain respect de la profession, d'emmurer, je dirais, la profession médicale dans un respect que toute la société, disent-ils, leur doit et, une fois que, dans des ententes normatives la place du médecin dans le centre hospitalier ou n'importe où ailleurs sera effectivement reconnue, justifier, par la suite, le salaire qui va avec le statut qu'on vient de lui accorder.

Si les médecins devaient avoir gain de cause sur les demandes qu'ils ont formulées à la table de négociations quant au statut qu'ils exigent d'avoir non seulement dans l'exercice de leur profession dans un centre hospitalier, mais je dirais dans l'ensemble de la société québécoise et si le ministre devait parapher chacun des paragraphes présentés par la fédération, il est bien évident qu'il serait très mal vu par la suite, après avoir accordé un tel statut professionnel, de ne pas accorder le revenu qui vient.

Donc, que cette discussion achoppe sur les clauses normatives pour les fins de la discussion, c'est-à-dire la situation du médecin dans les services de santé, n'est pas au désavantage de la classe médicale. Il n'y a pas grand monde qui va réussir à me faire accroire cela, même si on me faisait beaucoup de démonstration de malheurs.

Par contre, comment dirais-je il est évident, qu'on l'accepte ou qu'on ne l'accepte pas, que la priorité que les médecins se sont donnée dans les négociations quant à leur statut professionnel, personne — je dis personne alentour de cette table — ne réussira à les faire démordre de cela.

Ils se refuseront et ils commettront les actes auxquels ils se préparent, qui ont déjà été annoncés à la régie depuis le 7 avril pour une région donnée au

Québec tant et aussi longtemps qu'ils n'auront pas obten u, je ne dis pas gain de cause nécessairement à tout ce qu'ils ont demandé, mais règlement de cette partie-là avant d'aborder d'autres questions. Le point qui achoppe particulièrement, le député de Vanier l'a signalé, c'est celui de ce contrôle de l'acte médical à la minute. J'ai vu des porte-parole de ces fédérations s'insurger contre une telle définition. Je n'ai pas de commentaire à faire quant à cette proposition même du gouvernement quant à sa nature, c'est ses objectifs que j'aimerais voir clarifier.

Pourquoi a-t-on choisi cette formule du "minutage" minimum de l'acte médical? Pourquoi en sommes-nous venus à étendre ce que le ministre a affirmé être déjà considéré pour les soins psychiatriques, pourquoi l'étendre à l'ensemble des actes médicaux? Si je prends la proposition du 21 mars 1975, on en sera rendu à minuter au minimum — encore une fois j'admets la distinction — l'examen ordinaire, l'examen de contrôle, l'examen complet, l'examen spécifique, l'examen prénatal. Pas besoin de vous dire que quand on entre dans les examens spécifiques, chacund e ceux là sont définis à 15, 30 et 40 minutes.

Le ministre a soutenu, tout le monde sait ce qu'il a soutenu à l'Assemblée il y a à peine quelques minutes. J'ai soutenu le contraire. Je ne veux pas me faire l'avocat du diable, mais je suis sincère dans cette opinion, que je maintiens, que l'inscription d'un temps minimum pour la pratique d'un acte médical n'est évidemment pas une invitation au médecin, en bonne et due forme, à s'y maintenir. Le ministre peut bien dire qu'il pense améliorer la pratique de la médecine et des soins de santé aux citoyens par cette méthode, car il peut s'assurer que les actes médicaux ne seront pas bâclés. Il fixe un minimum à chacun des actes. Donc, chaque citoyen peut être au moins certain que lorsqu'un examen de contrôle, par exemple, dans un centre hospitalier se fera, il aura droit au temps qui est prévu, c'est-à-direau minimum de cinq minutes; sinon, l'acte de son médecin ne sera pas rémunéré, s'il faut en croire l'entente.

Moi, je dis que dans la pratique, je soutiens, je crains, disons le mot, que dans la pratique, ce soit une invitation às e maintenir. Le médecin très tatillon, avec exagération parfois, sur la liberté professionnelle quant à son acte, quant à sa profession de contrôle, se voyant dire qu'il est possible, puisque le minimum a été fixé à cinq, de faire un examen de contrôle à cinq, peut très bien se dire: Pourquoi je le ferais à six ou à dix? A ce moment-là, cela ne reposera que sur sa conscience professionnelle en quelque sorte, que d'espérer qu'un médecin qui, visiblement, ayant dépassé les cinq minutes et s'apercevant qu'il n'a pas terminé auprès d'un patient un examen de contrôle, passe cinq minutes de plus qui ne lui sont pas, plus rémunérées, car il sera rémunéré à partirde la base minimum. C'est une invitation à demeurer au minimum.

Tout le monde sait combien plusieurs citoyens — chacun dans son comté, on ces échos — ont l'impression que la médecine est désormais bâclée.

C'est le député de Rouyn-Noranda qui l'a soutenu dès l'ouverture des travaux de la commission.

Que ce soit réel ou non, le simple fait que cette impression existe et qu'elle puisse être augmentée par la suite de ce genre de proposition, si elles devaient être retenues, mérite l'attention de la commission. Or, avant même d'entrer dans d'autres détails, d'ailleurs où je n'ai pas l'intention d'aller, je voudrais simplement obtenir ce qui n'a pas été clair à l'Assemblée, ce qui méritede l'être, à mon avis, surtout quand on sait les circonstances qui nous attendent, au début du mois de mai, savoir quel est l'objectif poursuivi par le ministère dans ce genre de proposition. Et est-ce à la suite d'abus, finalement, peut-être pas du genre frauduleux, dont la régie a la responsabilité, mais d'abus généralisés dans la pratique de la médecine qu'on en est venu à vouloir minuter chacun des actes au minimum? C'est donc là la seule question que j'ai à poser qui mérite réponse, je pense?

M. Forget: M. le Président, je vais essayer de le faire le plus rapidement possible, puisqu'on approche l'heure de la suspension de nos travaux.

En premier lieu, et avant d'aborder ce point spécifique, j'aimerais revenir aux remarques du début, du député de Saint-Jacques et, contrairement à lui, dire que ce qui fait objet des négociations avec les fédérations, ce n'est pas un vague objectif sociologique de statut ou quoi que ce soit du genre.

Nous ne faisons pas, aux médecins, de guerre d'intention. Nous n'en faisons pas maintenant et nous n'avons pas l'intention d'en faire non plus. Nous préférons croire que de part et d'autre de la table de négociations, ce que l'on veut et l'objectif que l'on poursuit, c'est effectivement de trouver des modalités de participation du médecin au fonctionnement des établissements, en particulier des centres hospitaliers, qui soient les plus propices à assurer des soins de qualité, des soins personnalisés, des soins qui correspondent à tout ce qu'on considère généralement comme étant ce qui est souhaitable dans le domaine de la pratique de la médecine et du fonctionnement des établissements.

Les différences, qui s'observent de part et d'autre de la table des négociations, n 'ont pas pour objets des différences dans les buts poursuivis mais dans les moyens qui semblent propices à l'une ou l'autre des parties pour rejoindre cet objectif, il est probablement naturel de voir que, du côté médical, on est peut-être moins optimistes que du côté gouvernemental, qu'on ne veut pas prendre de chance et qu'on cherche des garanties dans des textes alors que, de notre côté, nous sommes disposés à croire qu'au contraire les établissements, avec un minimum peut-être de formalités, peuvent assurer un fonctionnement convenable, des soins convenables et un milieu de pratique acceptable.

Mais ce sont des divergences quant aux moyens et il nous semble futile de vouloir voir là des guerres de religion, comme je l'ai déjà indiqué. Il ne s'agit pas, ni pour l'une ni pour l'autre des parties, de remettre en question un régime qui fonctionne de façon généralement satisfaisante mais qui, bien évidemment, après quatre ans de fonctionnement, peut subir certaines modifications de façon à l'améliorer pour l'une et pour l'autre des parties impliquées.

Le contrôle à la minute, dont on veut faire une

cause célèbre cesjours-ci, est, évidemment — je dis évidemment à cause de ce que j'ai déjà déclaré mais c'est une information additionnelle que je suis bien prêt à donner à cette commission — un sujet très secondaire et qui a été, effectivement, très secondaire dans les négociations, telles qu'elles se sont déroulées jusqu'à maintenant. Ce n'est pas ce sur quoi les négociateurs, de part et d'autre, ont achoppé mais sur d'autres questions, bien que nous ne soyons pas encore dans un constat d'échec. Au contraire, il y a encore des perspectives d'ententes.

Il est prévu que, jeudi et vendredi de cette semaine, nos négociateurs se rencontreront, comme à l'accoutumée, pour poursuivre le dialogue entrepris.

Cette question des minutes, au sujet de laquelle on nous demande de préciser nos objectifs, a précisément pour but — peut-être n'est-ce pas là le bon moyen — d'éviter que, par un paiement qui soit uniforme et uniformément accessible à tout médecin, quel quesoit le temps qu'il passe avec un patient, par un paiement unique qui n'est pas différencié selon l'importance, la durée de l'examen, on ne pénalise effectivement ceux des médecins qui passent un temps relativement plus long pour poser essentiellement le même acte, si vous voulez, mais un acte qui peut prendre plus ou moins de temps et qui peut, évidemment, être plus ou moins complet, selon le temps qu'on prend pour le poser.

L'observation de la pratique et du profil de pratique d'un grand nombre de médecins montre que certains voient un très grand nombre de patients en un laps de temps très bref, d'autres en voient relativement peu. Il nous semble que, dans la limite de ce qu'il est possible de préciser quant à la nature, l'étendue, la complexité, mais aussi la durée — c'est un des critères, peut-être, à retenir — il est désirable que l'on encourage un contact qui ne soit pas trop rapide, pas excessivement rapide, entre le malade et son médecin.

Autrement, on pourrait peut-être nous accuser, par un paiement unique qui ne tient pas compte de ces différences, d'encourager les durées minimales dans tous les cas. Il faut comprendre que, dans bien des cas, c'est essentiellement le même type d'acte, le même type d'intervention, mais qui peut nécessiter plus ou moins de temps. C'est le médecin lui-même qui doit choisir, en fonction de sa disponibilité, en fonction des besoins du patient, entre plusieurs durées possibles pour un examen. Il nous semble raisonnable que, s'il choisit de passer plus de temps, il soit plus rémunéré.

Encore une fois, nous sommes prêts à discuter du principe lui-même, puisque ce n'estqu'un moyen pour atteindre une fin, des durées ou de l'idée, même, de retenir des durées dans la description d'actes différents, mais qui ne sont pas différents de la même façon que des objets sont différents. Ce sont des rencontres entre un médecin et un malade qu'il faut bien caractériser d'une certaine façon, si on veut les payer à des taux différents.

Autrement, on n'aurait qu'un acte qui tiendrait compte de tous les besoins, et si l'on a des actes différents, c'est pour tenir compte des différences. Est-ce que la durée plus longue est souvent une source de satisfaction plus grande chez le patient, et le but était de ne pas la décourager dans le cas où le médecin lui-même juge qu'elle est appropriée.

Parce que si on ne compte que le nombre de patients plutôt que le temps qu'on prend pour leur donner des services on encourage essentiellement un type de médecine, disons peut-être plus industrielle et ce n'est pas nécessairement un objectif souhaitable.

Les moyens utilisés sont peut-être déficients. La table de négociation est là pour nous permettre, avec la partie d'en face, d'en arriver à de meilleures définitions. Des définitions qui doivent, autant que possible, être comprises de la même façon par tout le monde pour ne pas résulter dans des situations où ceux qui interprètent largement des choses qui sont sujettes à des interprétations très larges bénéficient d'un régime de faveur par rapport à d'autres qui interprètent moins largement les mêmes dispositions.

Encore une fois, ce n'est pas nouveau dans le régime. Il y a des spécialités qui sont rémunérées de façon importante en tenant compte de la durée. L'anesthésiste que l'on rémunérerait selon le type d'opérations, sans tenir compte de la durée de ces opérations se plaindrait à juste titre. Effectivement, les spécialistes ne se plaignent pas d'être rémunérés en fonction de la durée des interventions chirurgicales.

Le psychothérapeute qui fait une intervention d'une heure plutôt qu'une intervention de trente minutes s'attend également à une rémunération supérieure. Autrement, il pourrait plaider qu'on l'empêche de pratiquer la médecine comme il l'entend puisque, quant à lui, une bonne intervention, c'est une intervention d'une heure.

Nous voulons le laisser choisir la durée de l'intervention en fonction de son évaluation des besoins des malades et de sa façon de pratiquer la médecine sans pénaliser qui que ce soit. C'est ça l'objectif. Les moyens utilisés, on peut en discuter peut-être éternellement. On ne pourra pas évidemment discuter éternellement si on veut en venir à une entente, mais ils sont essentiellement discutables et c'est ce qui est important.

Le Président (M. Cornellier): Messieurs, suspension des travaux de la commission jusqu'à vingt heures quinze, ce soir.

(Suspension de la séance à 18 h 6)

Reprise de la séance à 20 h 24

M. Cornell!er (président de la commission permanente des affaires sociales): A l'ordre, messieurs! Si le député de Louis-Hébert veut bien prendre son siège, nous aurons quorum, et la commission pourra reprendre ses travaux sur le programme 3 des crédits du ministère des Affaires sociales qui traite de l'assistance-maladie.

L'honorable député de Saint-Jacques.

M. Charron: Nous avions abordé la question du minutage de l'acte médical qui est contenu dans les propositions gouvernementales à la table de négociations avec la Fédération des médecins omnipraticiens actuellement.

J'ai besoin d'une information encore plus spécifique de la part du ministre pour éviter que des malentendus se glissent dans l'interprétation de cette proposition. Quand le gouvernement dit qu'un examen ordinaire devrait prendre, pour être remboursé par la régie, au minimum dix minutes, est-ce que cela veut dire que, si un médecin prend 20 minutes à cause de la situation particulière du patient ou de la patiente, il est rémunéré en conséquence ou s'il est rémunéré toujours comme s'il n'avait pris que dix minutes et qu'en fin de compte les dix minutes qu'il a pris davantage auprès du patient est à son désavantage financier?

M. Forget: J'aimerais peut-être qu'on vous donne ces explications de manière à ce qu'on soit totalement clair sur la signification à être attribuée. Je préciserais, comme je l'ai fait déjà, qu'il s'agitd'un critère parmi un certain nombre de critères.

M. Charron: D'accord.

M. Forget: Si vous prenez — je vois que vous les avez devant vous — les textes, il y a par exemple un certain nombre d'examens qui sont décrits et un examen va être rémunéré au tarif d'un examen ordinaire ou d'un examen complet s'il répond à un ensemble de critères qui sont décrits là.

On pourrait, comme c'est le cas dans l'entente actuelle, enlever toute référence à un nombre de minutes et tel examen serait par exemple un examen ordinaire selon son contenu et indépendamment du temps qu'il prend et un autre examen serait complet selon son contenu et indépendamment du temps qu'il prend.

Dans le texte du 21 mars, il y a un critère additionnel, qui est celui du nombre de minutes et qui peut aider à distinguer deux types d'examens entre lesquels on pourrait hésiter, à savoir si c'est un examen ordinaire ou complet. La durée pourrait être un critère de distinction mais la rémunération n'est pas fonction de la durée, elle est fonction de l'acte qui est posé, s'il se qualifie comme examen ordinaire ou complet.

M. Charron: Je vous pose une question très précise: En ce qui concerne l'examen ordinaire d'un patient, les six étapes sont définies dans la proposition gouvernementale.

C'est ce qui existe déjà dans l'entente actuelle qui est expirée depuis 1972 je pense.

M. Forget: Ce n'est pas exactement ce qui existe dans l'entente. Ce sont des critères analogues, la phraséologie a été, à notre point de vue, améliorée, mais ça ressemble à ce qui est dans l'entente actuelle.

M. Charron: Si le ministère décide d'ajouter à cette description, phase par phase, l'acte à être rémunéré, un critère de durée minimale parce que c'est le cas, dans ces propositions de 1975, est-ce parce que le ministère croit que, pour remplir de façon adéquate, efficace, intègre et honnête chacune des phases de cet acte, il est impossible de le faire en deça de ce qui est fixé comme durée minimum? Autrement dit, un acte médical, par exemple, comme un examen ordinaire qui comprend l'anomnèse portant sur le ou les symptômes qui motivent l'examen jusqu'à la rédaction d'un certificat, lorsque requis, ne peut se faire en deça de dix minutes.

M. Forget: Le temps qui est précisé est un temps en présence du patient. Il peut y avoir un certain temps qui est consacré à la completion de l'acte comme par exemple la conciliation de normes de notre côté...

M. Charron: La phase 5 et la phase 6.

M. Forget: ... et la conciliation des résultats d'examen qui ne sont pas nécessairement effectués en présence du patient. Je pense que les temps ont été fixés en prenant en considération le temps raisonnable que cela peut prendre pour poser un tel acte. Maintenant là-dessus, je dois dire que nous sommes présentement en négociation. Je pense que les minutes qui sont là sont des critères qui s'ajoutent aux autres pour aider à discriminer entre un examen et un autre. Ce ne sont pas des minimums qui doivent interférer avec une pratique normale de la médecine. Je pense qu'un des buts de la négociation, c'est peut-être justement d'examiner quel est le temps minimum qui est le critère raisonnable correspondant à l'énumération de ces actes.

M. Charron:Tout cela dit, si par hasard, l'entente devait arriver à, plutôt que dix minutes pour un examen ordinaire, si l'entente, dis-je, suite aux représentations que vous fait — j'allais dire la partie syndicale, cela leur ferait plaisir — la partie médicale de l'autre côté de la table, treize minutes ou quinze minutes, admettons-le, reste le problème que j'ai soulevé à l'Assemblée, cet après-midi, au ministre des Affaires sociales.

Est-ce qu'il n'y a pas danger que, dans la pratique quotidienne, même si le texte de l'entente spécifie à plusieurs endroits qu'il s'agit d'un temps minimum passé, dans son comportement pratique, le médecin, sachant qu'il ne sera guère plus rémunéré s'il consacre 25 minutes que les 10 minutes convenues, en vienne à raisonner comme bien des travailleurs le font en bien d'autres endroits et à se dire que c'est à son désavantage, finalement, de mettre plus

de temps, puisque le gouvernement a dit — il pourrait dire cela — que toutes ces phases, de une jusqu'à six, peuvent se faire à l'intérieur de quinze minutes. C'est donc une question de zèle ou de dévouement qui n'a pas à être rémunéré si cela va plus loin que cela?

Je sais que j'extrapole un entendement, mais, si vous êtes à la table de négociations, vous savez qu'elle est extrapolable, cette façon de voir la chose et qu'elle peut avoir des conséquences néfastes à certaines occasions. Ce n'est pas à vous, probablement, que je devrais poser la question, mais plus au ministre. Je peux résumer ma pensée en disant: Est-ce que le ministre est conscient du danger à rebours que comporte ce genre de rémunération basée sur un acte pratiqué dans un temps minimum?

M. Forget: Peut-être que je peux répondre étant donné que je suis assez familier avec la question.

M. Charron: Allez-y, je ne veux pas vous interdire de parler.

M. Forget: Je ne voudrais pas, par ailleurs, qu'on se transforme en table de négociations. J'imagine que vous ne représentez pas...

M. Charron: Je ne représente pas les médecins, non.

M. Forget:... la Fédération des omnipraticiens. Si on compare cela à la situation actuelle, on peut, par analogie, considérer que le temps minimum spé-cifié dans l'entente, c'est zéro, parce qu'il n'y a pas de temps minimum requis, de sorte que le médecin qui, pour faire un examen ordinaire, prend trois minutes, sept minutes, douze minutes ou vingt-cinq minutes est rémunéré toujours au même montant, quelle que soit la quantité de temps qu'il prend pour poser l'acte. L'introduction d'un minimum ne fait qu'ajouter un seuil ou un plancher en bas duquel le temps consacré à l'exécution de l'examen ne peut pas descendre, alors que, présentement, il n'y a aucun seuil, il n'y a aucun plancher minimum. A savoir si c'est un progrès ou non, je vous laisse le soin d'en juger. Il est évident que, si on fait la proposition, c'est qu'on pense que cela représente un certain progrès, mais vous pouvez comparer cela à la situation actuelle où le minimum est, en quelque sorte, zéro.

M. Charron: En fin de compte, c'est ce que disait le ministre cet après-midi à l'Assemblée. Cela représente, dit-il, dans son entendement, pour les patients une garantie supérieure à l'entente, échue depuis décembre 1972, quant à la qualité des soins qu'ils vont recevoir, le fait qu'on fixe un minimum de temps. Vous me disiez : On n'est pas à une table de négociations. Je ne représente pas les médecins et j'essaie un tant soit peu ce soir de représenter les patients éventuels.

Si je vais chez un médecin qui, je sais, est rémunéré presque à la minute quant au temps minimum qu'il y a, j'ai l'impression que, si mon examen de contrôle n'est pas terminé au bout de cinq minutes, il y a bien des chances qu'il l'abandonne en cours de route. L'entente est une espèce de sécurité, en tout cas, de la part du patient, quant à l'acte médical qui est opéré sur lui.

Encore une fois, nous ne sommes pas à la table de négociations, tout cela sera réglé, j'espère, dans les plus brefs délais, avant qu'aucune rupture, aucun dommage à la qualité des services présentement en cours, à la suite du régime d'assurance-maladie que nous avons adopté, ne soit occasionné dans aucune région du Québec et chez aucun citoyen. Il reste que, je pense, l'opinion publique sera particulièrement attentive au cours des prochaines semaines au développement que nous aurons de ce côté.

J'ai une seule autre question à apporter quant aux propositions gouvernementales comme telles. Nous en aurons d'autres à l'occasion, si besoin il y a. Est-ce qu'il est entendu très clairement qu'une entente signée entre la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec et le ministère des Affaires sociales exclurait toute entente particulière ultérieure entre médecins, participants ou non participants, ou quoi que ce soit, du régime? Autrement dit, est-ce que la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec, aux yeux du gouvernement, représente tous les omnipraticiens du Québec?

M. Forget: Si vous permettez, les deux questions que vous venez de poser, ou les deux formulations de ce que vous voyez comme une même question sont effectivement deux questions distinctes.

J'ai affirmé, et cela continue d'être vrai, que nous considérons, dans nos négociations que la fédération parle au nom de tous les médecins qui ne sont pas des médecins spécialistes et qui pratiquent au Québec. Ceci nous l'avons affirmé à plusieurs reprises, par nos gestes, par les négociations et la manière de les conduire vis-à-vis de certains groupes particuliers qui auraient pu, basés sur certains arguments, ne pas être considérés comme étant représentés par la FMOQ. Ils sont effectivement considérés comme étant représentés par la FMOQ par nous. Donc, cela ne pose aucun doute dans notre esprit que la fédération parle au nom de tous les médecins omnipraticiens, au moins ceux qui ont l'intention de pratiquer à l'intérieurdu régime.

Il ne s'ensuit pas cependant que, dans la conclusion d'une entente avec un groupe dont on ne nie pas la représentativité, l'on veuille nécessairement rejeter a priori la possibilité d'ententes qui se greffent et qui s'inscrivent dans ce cadre et qui vont plus loin que l'entente générale sur certains aspects ou qui spécifient des détails que l'entente générale laisse dans l'ombre en quelque sorte ou laisse sans les préciser. Ce sont des ententes complémentaires, à ce moment, qui seraient envisagées, qui découlent du fait que même si une personne est représentée par un organisme, elle ne perd pas sa capacité de contracter qui lui est donnée par le code civil et, même davantage, qui est un droit fondamental de pouvoir contracter pourvu qu'elle le fasse librement et qu'en le faisant elle ne se trouve pas à aller à l'encontre des ententes auxquelles elle est implicitement partie par sa participation à un organisme représentatif. La même proposition vaut pour la partie gouvernementale.

Cette question fait l'objet de discussion, mais c'est une question sur la possibilité d'ententes complémentaires et non pas sur la représentativité d'un groupe qu'on accepte a priori sans réserve et sans restriction.

La représentativité, pour être complète, pour être totale, pourêtre réelle, n'implique pas nécessairement une idée d'exclusivité ou de limitation de la liberté de contracter, à notre point de vue, pour les membres de cet organisme.

M. Charron: Non, j'admets bien cela aussi que l'appartenance à un groupe qui négocie en son nom n'est pas la disparition complète des droits individuels parce qu'on appartient à ce groupe. Mais sur le plan syndical, dans la pratique habituelle des négociations collectives, les syndicats, je veux parler des syndicats ouvriers, des syndicats de travailleurs, ont été très réservés quant à cette question de possibilité pour leurs membres. Autrement dit, chaque ouverture qui permettrait à leurs membres de se détacher un tant soit peu de l'entente collective leur paraît, à raison, l'expérience l'a prouvé, un danger quant au sens de la négociation collective.

Si je regarde la proposition gouvernementale, clause 4-0-1 du 21 février 1975, qui dit: "L'entente lie tout médecin quel que soit le lieu où il exerce sa profession, quel que soit son mode de rémunération. — mais voilà cette phrase — A moins de stipulation expresse l'autorisant, aucuneentente particulière portant sur l'un des objets mentionnés à la présente entente ne peut intervenir."

Le principe est là qu'aucune entente particulière portant sur l'un des objets mentionnés à la présente entente ne peut intervenir. Mais lorsqu'on voit cette réserve de stipulation expresse l'autorisant et que, par la suite, on parcourt la liste de propositions gouvernementales, par exemple, quant au plan d'organisation des centres hospitaliers, etc., on s'aperçoit que les stipulations expresses, à l'occasion, l'autorisant peuvent se trouver plus nombreuses que pour un groupe qui essaie de parler au nom d'un autre, au nom de plusieurs individus réunis sur une base professionnelle, que cela paraisse un phénomène important.

Je ne dis pas cela pour donner raison, encore une fois, à la contrepartie, d'ailleurs, que j'ignore, sur ce point en particulier, de la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec. Je veux juste dire qu'une phraséologie aussi floue, dans un domaine aussi important, risque, à mon avis, de faire achopper, encore une fois, des négociations qui mériteraient d'être plus sévères plus précises dans leur rédaction.

Ce sont peut-être les dernières remarques que je peux faire au nom de l'Opposition là-dessus. Il me semble qu'il y a gain possible, du côté gouvernemental, à préciser sa pensée là-dessus. Sinon, je crois que si on s'en tient à cette disposition telle qu'elle est écrite, elle risque de compromettre le succès des négociations avec les médecins.

M. Forget: Je pense que c'est là un texte qui fait encore l'objet de négociations et je pense bien qu'il est susceptible de précisions. Il faut tenir compte du fait que, dans les affaires sociales, on couvre un réseau d'environ 1,200 établissements, qui sont de différentes catégories. Ce principe d'avoir des ententes particulières n'est pas totalement étranger à l'existence, parexemple, dans tout le secteur public, de paliers de négociation au niveau provincial et au niveau local ou, dans le cas d'entreprises qui ont également des succursales multiples, d'avoir une convention maîtresse, quitte à y apporter certaines précisions au niveau local.

Je pense qu'on peut ou qu'on a pu exagérer la portée ou l'importance de ces dispositions et je crois bien qu'il est possible, en négociation — et nous sommes toujours en négociation — d'en préciser la portée.

J'aimerais revenir en arrière deux secondes sur le premier point, pour ne pas que nos discussions puissent indui re les gens en erreur. Vous demandiez si, parexemple, les dix minutes étaient écoulées, si la visite serait interrompue. Il faut garder en tête que le temps n'est qu'un des éléments. Si chacune des six phases n'est pas complétée, on n'a pas non plus un examen ordinaire.

Je pense que le fait de s'interrompre après dix minutes ou de s'interrompre à la phase quatre, par exemple, c'est quelque chose d'entièrement parallèle.

A cause de la nouveauté de l'élément, on a prêté une importance beaucoup plus grande à l'élément temps, mais je pense que, pour nous, c'est un élément parmi tant d'autres. L'acte est décrit par un ensemble d'étapes et de phases qui doivent être accomplies et le temps n'est qu'un de ces critères.

Je pense que, pour éviter toute confusion, c'était bon d'apporter la précision.

M. Charron: Je pense que, M. le Président — j'ai terminé, pour ma part, sur ce sujet — les échanges que nous venons d'avoir sur les propositions gouvernementales à la table des médecins n'auront pas pour effet de nuire aux négociations, mais d'éclairer le public également sur ce qui va se passer. Parce qu'il ne me reste qu'une chose à dire sur ce point précis des négociations en cours avec les différentes fédérations, c'est de souhaitertrès ardemment qu'elles se fassent sans entorse aucune au régime d'assurance-maladie. Comme je l'ai dit tout à l'heure, je souhaite qu'aucun citoyen d'aucune région du Québec n'ait à souffrir, à un moment ou à un autre, d'une difficulté qui entraînerait une partie ou une autre à commettre des gestes répréhensibles, je pense bien, lorsqu'il s'agit de la santé du citoyen. Cela s'adresse non seulement aux médecins, mais également au gouvernement qui, s'il devait faire preuve d'entêtement sur certains points qu'au fond il serait prêt à concéder advenant une crise, aurait lui-même créé une crise artificielle où personne, vraiment personne n'aurait rien à gagner.

Comme Opposition, je peux exprimer le souhait de n'avoir jamais à me prononcer à nouveau sur une loi d'exception obligeant des médecins à offrir des services qui sont essentiels à la population, ceux de la santé.

Puisque nous sommes, en fait, en face d'un avis dûment déposé à la Régie de l'assurance-maladie depuis le 7 avril par le docteur Bédard, de l'Association des médecins omnipraticiens de la région de

Yamaska, je ne pense pas être en train de parler à travers non chapeau.

Il y a danger, effectivement, parce que des actes de toutes natures — Dieu sait que les médecins sont aptes à en poser plusieurs — sont à l'horizon, M. le Président. Je serais bien prêt à dire, en terminant, au ministre des Affaires sociales que, s'il doit, au cours de ce mois d'avril — je ne dis même pas au cours de l'année financière, puis — que nous devons suspendre l'étude des crédits ce soir — se trouver une priorité, je crois bien que les événements la lui ont apportée sans que j'aie à la lui rappeler.

C'est celle de s'intéresser le plus activement possible à la négociation où des fonctionnaires le représentent, mais éviter tout arrêt ou tout ralentissement d'un régime d'assurance-maladie, admirablement bien administré depuis sa création, qui répond de façon inadéquate à certains endroits, mais satisfaisant dans son ensemble, je reprends l'expression du ministre, aux besoins de santé de la population, et à entrevoir qu'une nouvelle entente pour quelques années s'installe entre les médecins et le gouvernement du Québec.

Le Président (M. Cornelller): L'honorable député de Jacques-Cartier.

M. Saint-Germain: M. le Président, j'aimerais demandersi il y a une raison profonde qui sous-tend cette question de minutage. Est-ce qu'on aurait constaté à la régie, par exemple, que tellement d'actes médicaux étaient posés dans un certain nombre d'heures données qu'il était impossible pour un médecin de poser autant d'actes valables dans un espace de temps aussi court?

M. Forget: Le principe de la rémunération à l'acte est basé sur l'existence présumée d'une certaine moyenne dans le temps et les efforts nécessaires pour poser certains actes médicaux, diagnostiques ou thérapeutiques, puisqu'on ne se fait pas d'illusion de pouvoir décrire, même avec une nomenclature de quelques milliers d'actes, toutes les ci rconstances et toutes les variations possibles dans la nature, l'étendue, la complexité des services qui sont donnés.

Donc, pour chacun de ces actes, on suppose qu'il y a une certaine variation possible, mais qu'en moyenne, en quelque sorte, un acte tel qu'il est décrit au tarif, étant donné les principes qui servent à déterminer le tarif et où évidemment les indications de la durée ne sont pas étrangères, qu'en moyenne, donc, cette description jointe au tarif entretient une certaine équivalence.

Il est clair que ce qui est vrai en moyenne et de façon générale n'est pas toujours vrai en particulier et dans chaque cas. Il n'y a personne dans le cabinet du médecin, une fois qu'il prépare sa réclamation à la Régie de l'assurance-maladie, personne du ministère, personne de la régie; il est seul à déterminer et à décrire, à facturer son acte en se servant de la description qui est contenue au tarif.

Il est presque inévitableque la moyenne en question ne corresponde pas nécessairement à sa moyenne propre et individuelle. Et il est clair que plus la définition est vague, plus elle est faite en se servant de mots qui sont susceptibles d'interprétation, plus effectivement l'interprétation va varier d'un professionnel à l'autre.

Et, indépendamment de tout désir de fraude ou d'abuser du système, il reste que plus les définitions sont vagues, plus elles sont susceptibles de faire se révéler, d'un professionnel à l'autre, des différences systématiques entre eux, dans l'interprétation qu'ils font de ces descriptions forcément, jusqu'à un certain point, vagues.

Et on peut observer effectivement que certains médecins ont une proportion plus grande d'examens complets majeurs par rapport aux examens complets. C'est inévitable, étant donné que chaque médecin, individuellement, interprète une définition et essaie de faire correspondre sa définition à l'acte qu'il vient de poser.

Devant ces variations, on est frappé, non pas par des abus, etc. — bien sûr on ne peut pas les éliminer complètement — mais tout le système est susceptible de se prêter à des abus.

L'on ne peut s'empêcher d'être troublé, disons, par des disparités autrement inexplicables que par des différences systématiques d'interprétation d'un individu à l'autre. Cela nous amène à conclure que ces définitions qui sont un outil de travail quotidien des professionnels dans la facturation qu'ils font — et encore une fois qu'ils seront les seuls à faire, ils en sont les seuls juges — peuvent être peut-être meilleures et leur permettre de laisser une moindre place aux facteursde subjectivité dans l'interpré-tationd'unedéfinition. D'où l'effort que l'on fait pour préciser les définitions, énumérer les éléments constitutifs de chaque acte tel qu'il aété conçu et tel qu'il a été tarifé.

Maintenant c'est un effort qui ne peut jamais être parfait, puisqu'il y a un élément d'interprétation qui doit demeurer, mais il est clairque les variations sont évidentes. Encore une fois, ne parlons pas des extrêmes; les extrêmes, de toute manière, on va les retrouver sous une forme ou sous une autre, quelles que soient les définitions. Mais je parle simplement des divergences, des différences d'interprétation d'un professionnel à l'autre, quels que soient les efforts d'information que fait la régie pour expliquer la signification du tarif. Et non seulement il y a des différences d'interprétation, mais il semble qu'il y a peut-être aussi une certaine iniquité puisque finalement, dans un système où il y a place à l'interprétation, forcément il y a des différences dans le niveau de rémunération qui est basé parfois, et dans une certaine mesure, essentiellement sur des différences d'interprétation et non pas sur les différences dans la charge réelle de travail ou l'efficacité réelle d'un professionnel.

Il n'y a peut-être pas de solution à ce problème. Cependant, ce n'est pas une raison pour ne pas essayer, à l'occasion d'une négociation, d'en découvrir. Maintenant, j'aimerais préciser que le minutage des actes ne s'applique pas à tous les actes qui sont contenus aux tarifs. Il y a des pages et des pages, et on ne prévoit pas un accouchement de 90 minutes et un accouchement de 120 minutes. On prévoit un minutage, si on veut persister à utiliser l'expression,

pour une quinzaine d'actes sur 2,000, 3,000 ou 4,000. Evidemment, ce sont des actes qui ont une signification très considérable, étant donné qu'ils sont posés très fréquemment. Et justement parce qu'ils sont posés très fréquemment et qu'ils sont moins différenciables que certains actes très spécialisés qui, par le seul mot qui les désigne, les caractérisent dans le tarif, il y a un élément d'appréciation considérable. Ce sont des actes très courants, des examens. Un examen, cela peut être n'importe quoi, tout le monde le sait, qui est allé chez un médecin. On serait bien en peine comme individu de dire: Cela c'est un examen ordinaire, cela c'est un examen complet.

Cela prend un certain effort d'imagination pour établir une classification comme celle-là. On pourrait bien n'en avoir qu'un, mais à ce moment-là on paierait le tarif moyen d'un examen qui pourrait être de $6.50 ou $6.75. Parfois cela prendrait une heure et demie pour faire un examen très compliqué, parfois cela prendrait deux minutes.

Dans un but de coller plus près à la réalité, on a pensé, comme tous les régimes d'assurance-maladie, d'établir des définitions de ce que c'est qu'un examen rapide, puis un examen moins rapide, puis un examen un peu plus long, puis un examen très long. Et, dans le but de préciser cela, on arrive à des notions comme le minutage. Ce n'est pas important comme tel, cela fait partie d'un effort d'ensemble pour coller à une réalité, pour ne pas pénaliser le médecin qui a la malchance de tomber sur des gens qui sont plus malades ou qui requièrent des soins plus longs, ce qui serait le cas s'il n'y avait qu'un type et un tarif pour tous les examens.

C'est de l'ordre des moyens. Cela ne vise pas l'ensemble du système, mais une partie où les axes sont, par leurdéfinition même, beaucoup plusdiffici-les à différencier. Certains régimes qualifient différemment la première visite et les visites subséquentes. Enfin, il y a toutes les variations possibles. Cela demeure essentiellement arbitraire, à la limite, puisqu'on ne peut jamais faire la preuve que c'est la bonne définition. C'est à l'usage, dans un milieu donné, avec le sens que les gens donnent couramment aux mots qui sont utilisés dans la définition qu'on se rend compte si on a une définition qui est bonne ou qui n'est pas bonne.

On a le sentiment, à observer la façon dont les facturations sont faites, la façon dont elle évolue dans le temps, que si on faisait un effort pour clarifier les choses, ce serait peut-être mieux plutôt que pire. Maintenant, ce n'est qu'un jugement d'une des parties en négociation. Il s'agira de conclure, le moment venu, s'il est possible de se mettre d'accord sur une façon de faire ces définitions-là. C'est un problème de mots, c'est un problème de définitions, ce n'est pas un problème de substance.

On n'a pas l'impression que de cela va découler une modification du régime. C'est une façon d'appliquer le régime qu'on a de façon à avoir peut-être plus d'équité entredifférents professionnels. Maiscela ne change rien au régime, cela le laisse essentiellement dans l'état actuel. C'est la raison pour laquelle j'ai dit qu'on accordait beaucoup trop d'importance à une question très secondaire qui, à mon avis, n'a pas du tout été la question sur laquelle ont achoppé, jusqu'à maintenant, les négociations. Les négociations, j'aimerais le croire, vont achopper sur des problèmes de substance, pas sur des problèmes de forme. Je pense que nous avons là un peu un problème de forme, ce qui ne veut pas dire qu'il soit entièrement à négliger parce que la forme a aussi de l'importance, mais c'est, malgré tout, un problème de forme et non pas un problème de fond.

M. Saint-Germain: Vous avez mentionné, M. le ministre, qu'on était quelquefois troublé par le décalage du temps qu'un professionnel peut mettre à poser un certain nombre d'actes avec un autre professionnel, qui oeuvre dans le même genre d'activités, et qui pose les mêmes actes. Avez-vous été troublé par une infime minorité de professionnels ou si les autorités ont été troublées de façon journalière, si je peux dire?

M. Forget: Je vais réitérer ce que j'ai dit tantôt. Pour les fins des négociations, ce qui nous intéresse, ce ne sont pas les cas extrêmes. Je suis personnellement, convaincu qu'on ne peut pas régler les cas extrêmes dans le cadre d'une négociation qui s'applique à l'ensemble des professionnels. Mais dans la masse des professionnels qui ne sont pas des cas extrêmes on trouve des divergences qui sont assez substantielles malgré tout pour nous amener à nous poser le genre de questions que nous nous sommes posées.

Il est clair que ce n'est pas pour réprimer des abus comme tels que l'on suggère de pareilles modifications dans le libellé des définitions. Il y a d'autres mesures, nous les avons décrites cet après-midi, qui, dans ces cas-là, dans des cas extrêmes, où c'est véritablement évident que c'est un phénomène autre que la mauvaise interprétation honnête, peuvent être utilisées et qui le sont effectivement. Donc, c'est un problème d'utilisation du tarif dans le cas qui ne sont pas des cas extrêmes.

Bien sûr, ces phénomènes, s'ils se manifestent dans la masse, si vous voulez, des professionnels, ils se manifestent avec plus de force dans les cas extrêmes, mais ce n'est pas là le genre de solution qu'on cherche, ce n'est pas la répression d'abus que l'on cherche, c'est une amélioration dans l'utilisation de définition qui sont monnaie courante tous les jours dans un cabinet de médecin et qui sont interprétées, de fait, qu'on le veuille ou non.de façon différente. Le même acte, en réalité, est payé à des taux différents parce que les médecins qui le posent interprètent la signification du tarif de façon différente.

M. Saint-Germain: Avant de terminer, lorsqu'on dit, parexemple, contre cette définition de forme, au point de vue du temps concernant l'acte médical, qu'elle peut amener des professionnels à vouloir oeuvrer dans une limite de temps donnée, cela me surprend un peu. Tout de même, je fais partie, à titre d'optométriste, du système d'assurance-maladie et je pense bien qu'à ce point de vue les professionnels sont réellement traités en professionnels, en ce sens qu'ils sont libres, comme vous l'avez mentionné, seuls dans leur bureau, d'établir leurs honoraires. J'en suis toujours aux règles et aux règlements de

l'assurance-maladie, mais, personnellement, je sais qu'ils ont une très grande liberté d'action et, en plus, la qualité de leur acte n'est pas à discuter pour recevoir le paiement. A ce point de vue, on est tous, je pense bien, traités en professionnels. Vous avez tout de même une minorité de professionnels qui voient dans le patient futur un signede piastre. Mais ce n'est pas l'assurance-maladie qui a établi cela, cela existait. C'est une minorité de professionnels qui existait bien avant l'établissement de l'assurance-maladie et qui va exister après, de la même façon. Alors, il y a des professionnels — je pense bien que c'est la majorité — qui, lorsqu'une personne fait appel à leurs services, quels que soient les honoraires ou quelle que soit la situation, vont faire leur possible pour rendre service. Ils auront une journée de travail satisfaisante, pour autant qu'ils auront travaillé dans des conditions valables. Ils sentiront alors qu'ils ont eu une journée positive et ils n'établiront pas leur satisfaction nécessairement en pensant au montant d'argent que la journée a rapporté. Il pourra même arriver des journées qui auront rapporté un faible revenu, mais qui pourront, par le professionnel qui a rendu les services, être calculées comme satisfaisantes. A ce point de vue, je suis un peu du dire du ministre; Ce n'est pas exclusivement par les règlements de l'assurance-maladie qu'on va amener cette minorité de professionnels à agir autrement qu'ils ont toujours agi même avant l'assurance-maladie.

Le Président (M. Cornellier) : Le député de Frontenac.

M. Lecours: M. le Président, j'aimerais savoir du ministre s'il y a quelqu'un qui négocie au nom des médecins qui font de la médecine industrielle, présentement. Avec des problèmes qu'on connaît dans notre région, je pense que le ministère des Affaires sociales va avoir à se pencher sur ce problème très sérieux. C'est un problème qui est devenu très sérieux dans ma région et, vu que cela relève de la médecine préventive avant tout, je pense que votre ministère a quelque chose à faire pour tenter de régler ces problèmes. Moi, je me demandais s'il y a des médecins qui font de la médecine industrielle et qui envoient des comptes à la régie déjà. Est-ce que cela existe?

M. Forget: Je crois que je serai le premier à applaudir la formation d'une table de négociations spéciale pour discuter des conditions de travail des médecins spécialisés en santé publique. En médecine industrielle, malheureusement, ils ne sont peut-être pas encore assez nombreux pour constituer un groupe identifiable de cette façon. Ils sont représentés par les fédérations dans l'ensemble. Dans une large mesure, je crois que les actes qu'ils posent paraissent déjà aux tarifs. Un examen, qu'il soit posé dans le contexte d'un examen de contrôle pour les finsde prévention, peut être payé de la même façon, dans bien des cas, qu'un examen ordinaire.

Il reste cependant que, dans le cadre de programmes de santé préventive, il y a des distinctions qu'il faut faire. Mais sur cet aspect en général, cela déborde largement les négociations, il est clair que la responsabilité au niveau gouvernemental, pour la médecine industrielle, est assez largement partagée, comme on le sait, entre, d'une part, les ministères sectoriels qui s'occupent de différentes industries — on en a eu des exemples récemment dans la déclaration de mon collègue, le ministre des Richesses naturelles, relativement au problème de l'amiante. Et des responsabilités existent aussi dans ce secteur au ministère du Travail, à la Commission des accidents du travail, mais tout ceci ne veut pas dire que le ministère des Affaires sociales est absent de ce secteur. C'est un secteur qui nous intéresse et que nous avons l'intention de développer en étroite collaboration avec les ressourcesqui sont de plusen plus mises à la disposition des départements de santé communautaire de manière à rapprocher ces ressources des populations qu'elles doivent desservir. C'est une des vocations essentielles des départements de santé communautaires que de se préoccuper de la médecine industrielle et de développer des programmes de santé préventive dans ces secteurs.

M. Lecours: Mais est-ce que vous entendez par là que vous n'avez pas l'intention de surveiller les actes posés par ces médecins d'aucune façon?

M. Forget: J'aimerais qu'on précise la nature de la question.

M. Lecours: Bien, on vit un problème présentement à Thetford Mines, avec la clinique des mines, où des médecins travaillent pour des compagnies; ils travaillent dans l'intérêt des compagnies au lieu de travailler dans l'intérêt du patient. Souvent les gens qui vont là, ce n'est pas pour un examen ordinaire, ils sont des malades qui mériteraient d'être avertis qu'ils sont sérieusement malades. Le médecin en chef de la clinique des mines, le 20 mars dernier, déclarait lui-même qu'il n'a jamais dit aux patients qu'ils souffraient d'amiantose et ils retournaient travailler dans des conditions souvent inhumaines, j'oserais dire, vu la condition physique du patient.

Moi, je me demande quand votre ministère va s'occuper de ces cas d'une façon plus particulière en imposant des normes aussi sévères à ces médecins qu'à ceux qui peuvent pratiquer dans la province de Québec. Je trouve anormal de laisser un champ aussi important de côté.

M. Forget: II y a deux aspects à la question du député de Frontenac. Je dois préciser, malgré les accusations contraires qui sont parfois proférées vis-à-vis du ministère ou les insinuations qui sont souvent faites, que le ministère des Affaires sociales ne surveille l'activité d'aucun professionnel, certainement d'aucun médecin.

Si on le faisait, d'ailleurs, on entendrait très rapidement des protestations de toutes parts. Nous avons très souvent fait la distinction entre la surveillance des activités professionnelles et l'établissement de programmes impliquant l'utilisation de ressources humaines et matérielles pour la réalisation de certains objectifs au sein desquels les professionnels travaillent. Mais, pour ce qui est de l'aspect

strictement professionnel de leur travail, ils demeurent sous la surveillance unique de leurs collègues dans leur entourage professionnel immédiat et, de façon imminente, de leur corporation professionnelle.

Donc, si on fait l'affirmation que les médecins engagés par les compagnies minières ou manufacturières surveillent effectivement la santé de ces travailleurs, mais le font de manière à en faire bénéfi-cierplutôt l'intérêt des compagnies qui les emploient plutôt que les travailleurs, on met en doute l'intégrité professionnelle de ces médecins. ll y a, pour exercer une surveillance et, éventuellement, prendre des sanctions vis-à-vis de ces médecins, des canaux très bien connus que constituent la corporation professionnelle et les mécanismes de discipline de la corporation professionnelle. Il n'y a pas d'autre organisme, y inclus le gouvernement, qui soit habilité à surveiller l'activité de ces professionnels.

Ce que j'avais à l'esprit lorsque j'ai indiqué que nous nous soucions des programmes de santé préventive et que nous placions la première responsabilité pour leur développement ou leur mise en oeuvre dans les départements de santé communautaire, c'était au sens du développement des programmes pour favoriser une coordination, une concertation des ressources professionnelles et des autres ressources pour une action concertée, organisée pour la prévention et, évidemment, le traitement, le cas échéant, des maladies industrielles. Mais, même dans l'exécution d'un tel programme, nous devrons prendre pour acquis que tous les professionnels qui y participent font leur travail de façon complète.

Si nous avons des doutes, si nous avons des plaintes, nous sommes sur le même pied que tous les citoyens, nous n'avons qu'à faire une plainte formelle auprès de la corporation professionnelle, et c'est à el le qu'appartient la responsabilité de sévir, et à elle seule.

M. Lecours: Mais j'aurais pensé, M. le ministre, que vous auriez élaboré un projet dans le but d'intégrer ces médecins à un hôpital en particulier. Ils pourraient travailler pour le gouvernement, quitte à ce que votre ministère envoie les comptes aux compagnies par la suite.

M. Forget: II y a une variété de formules qui peuvent être imaginées pour arriver à ces fins mais, encore une fois, on doit partir de l'hypothèse qu'un médecin, quel que soit son employeur, quelle que soit la source de son financement, si vous voulez, va effectivement faire un travail honnête. Si l'on ne part pas de cette hypothèse, évidemment, on parle d'un contexte, on se situe dans un contexte tout à fait différent.

Si l'on accepte cette hypothèse — je crois qu'on doit l'accepter — on peut envisager différentes formules pour favoriser une concertation des ressources. Selon la taille des entreprises, leur capacité d'assumer leurs responsabilités ou l'absence de capacité de le faire, on peut envisager que les médecins soient dans les entreprises et payés par ces entreprises avec — et ceci peut se faire par voie de négociation — toutes les possibilités d'un contrôle, au moins externe, si vous voulez, en quelque sorte, sur certai- nes dimensions de ces services, de manière conjointe par le patron, les employés et les syndicats qui les représentent, mais que, malgré tout, ils soient situés au sein d'une entreprise, s'intégrant dans des programmes et participant à des programmes d'application plus générale, et, pour la petite et moyenne entreprise, des mécanismes différents où, effectivement, les médecins pourraient s'intégrer aux hôpitaux désignés qui maintiennent un service de santé communautaire.

Ce sont différentes formules que nous examinons et, évidemment, il faudra également, en parallèle avec cela, développer des programmes — pas seulement développerdes structures — et s'assurer que des médecins soient adéquatement formés pour ce type de pratique qui est évidemment différent de la médecine curative traditionnelle. Mais c'est une préoccupation que nous avons. Nous avons d'ailleurs, comme on le sait probablement, constitué, en 1973, un service de santé industrielle, de médecine industrielle et nous travaillons à élaborer un programme dans ce sens, en collaboration avec les services de santé communautaire.

Le Président (M. Cornellier): L'honorable député de Vanier.

M.Dufour: M. le Président, je voudrais qu'on me renseigne un peu plus. Je n'ai pas tout à fait compris quand on a dit, tout à l'heure, que le minutage allait permettre d'établir une plus grande équité entre les professionnels. Je ne peux pas voir. C'est ma première question.

M. Forget: Je peux essayer ou peut-être demander à M. Guérard d'essayer de reprendre cette explication en utilisant des mots différents, mais il est clair, je pense, que si vous avez une règle qui permet la rémunération de certains actes, cette règle est basée sur la définition de l'acte en question. Et cette définition, parce qu'elle utilise des mots, est sujette à une interprétation que l'on peut, en général, supposer, comme c'est toujours le cas, quand il est question d'utiliser des mots, que deux individus vont les utiliser de façon légèrement différente.

Si on admet le raisonnement jusque là, on peut présumer que si on utilise les mots de façon légèrement différente, les professionnels qui ont, par ailleurs, des pratiques par hypothèse identiques, parce qu'ils interprètent la signification du tarif différemment, vont facturer différemment à la régie les mêmes actes qu'ils posent l'un et l'autre.

Si c'est le cas, celui qui fait une facturation inférieure à l'autre, pas parce qu'il a posé des actes différents mais parce qu'il interprète différemment le tarif, va être victime d'une certaine injustice. Si, à cela, s'ajoute le phénomène que c'est celui qui, peut-être, a passé relativement plus de temps avec ses patients, il nous semble que c'est une injustice, vis-à-vis du professionnel, qui se double d'une certaine injustice envers ses patients puisqu'il est, à priori, celui qui a pu, peut-être, donner les services les plus complets aux malades qui sont venus le voir.

M. Dufour: Vous parlez, à ce moment-là, d'un

minimum, mais à quel moment va finir le minimum pour tomber dans le maximum? Parce que celui qui passe plus de temps avec un patient, normalement, a droit à plus, surtout si on calcule son honoraire en minutes. Vous semblez vouloir baser cela un peu sur le minutage.

Mais si un médecin voit un malade plus que le minimum, on va arriver avec quoi, si je suis pris pour le garder trois quarts d'heure dans mon bureau? Normalement vous me payez quinze minutes. Qui va me payer les trente minutes?

M. Forget: C'est là une difficulté bien sûr mais il faut se souvenir de la réponse que nous avons donnée à cette question tout à l'heure, c'est que l'acte est décrit par toute une série de caractéristiques. C'est un acte donné qui correspond à un certain nombre de composantes, si vous voulez. L'acte ne change pasde nature parce que le temps qu'on prend pour le poser s'allonge indûment. Mais nous croyons, malgré tout, qu'on ne peut pas présumer que le temps est égal à zéro, que le temps est supérieur à zéro ou à une minute ou à une seconde, qui comporte un certain nombre de composantes ou de caractéristiques qui le distinguent d'un autre acte et que, pourvu que ce minimum de temps soit observé, par hypothèse, et pourvu que toutes les autres caractéristiques soient présentes, on est en face véritablement d'un acte donné et tarifé de façon précise.

Si on passe une journée à poser cet acte-là, on ne change malgré tout pas la nature de l'acte. On l'a tout simplement posé de façon inefficace, si l'on veut, ou on a conversé pendant 23 heures et on a posé un acte pendant une heure. Cela ne change malgré tout pas la nature de l'acte. Là le paiement n'est pas requis. Mais si l'acte est posé en une minute et si l'on prétend qu'il a satisfait à toutes les autres caractéristiques, bien par hypothèse, dans la mesure où on retient ce minutage, on se pose au moins la question: Est-ce que, véritablement, c'est un acte tel que décrit, s'il a été posé si rapidement.

M. Dufour: S'il arrivait que vous décidiez, par négociation, de faire de la médecine à la minute, on serait le premier pays au monde à faire de la médecine à la minute.

Mais, pour résumer l'affaire, je voudrais une réponse très brève: trouvez-vous, de facto, qu'il y a une réaction de cause à effet entre la d urée d'un acte posé et la valeur de ce même acte?

M. Forget: A l'intérieur de certaines limites, j'imagine qu'on peut probablement le prétendre.

Le Président (M. Cornellier): Avant l'adoption du programme 3, le député de Saint-Jacques a signalé qu'il avait un autre commentaire à faire.

M. Charron: Je suis disposé à adopter le programme 3, ça ferait deux programmes'd'adoptés dans la même journée, je vous le ferai remarquer. Mais avant, puisque j'ai devant moi pour la dernière fois, probablement, le président de la Régie de l'assurance-maladie qui s'occupera à d'autres fonctions à partir du 1er juin prochain, je crois, je pourrais employer des formules bien compliquées mais j'aime autant m'en tenir à une seule. J'ai l'impression que, depuis cinq ans que je connais monsieur Martin, d'avoir côtoyé un des piliers de la grande fonction publique québécoise. Je ne peux que lui exprimer toute l'admiration que j'ai eue à le voir oeuvrer à l'Education d'abord et, depuis quelque temps, à la Régiede l'assurance-maladie, et au nom de l'Opposition comme en mon nom personnel, lui souhaiter la meilleure chance possible dans les nouvelles fonctions qu'il aura très bientôt.

M. Forget: J'allais, M. le Président, poser le même geste avant le député de Saint-Jacques mais je lui cède volontiers la priorité pour le faire. J'aimerais joindre l'expression des mêmes sentiments aux siens et j'imagine ceux de tous les autres membres de la commission. M. Martin a rendu des services distingués, comme on vient de le rappeler, au ministère de l'Education et, depuis près de deux ans, à la Régie de l'assurance-maladie. Je ne doute pas que la nouvelle carrière, la seconde carrière universitaire qui l'attend va également lui permettre de se distinguer. Je désire lui témoigner publiquement de la gratitude pour les services et l'appui qu'il m'a apportés depuis que je détiens le poste que j'occupe actuellement et l'assurer de ma sympathie et de mes voeux de succès pour le poste qu'il va assumer dans quelques semaines.

M. Martin : M. le Président, vous al lez me permettre de remercier le député de Saint-Jacques et le ministre des Affaires sociales — avec les deux, j'ai eu l'occasion de collaborer de manière différente — de leur témoignage. Je l'apprécie profondément avec une certaine émotion. Je le considère comme un témoignage de confiance qui constitue un appui, pour moi, très significatif dans la tâche que j'ai accepté d'assumer dans un milieu différent de la fonction publique, mais qui demeure dans le secteur public auquel, personnellement, je reste profondément attaché.

Ce témoignage constitue pour moi un appui dans l'exercice des responsabilités que je vais assumer. Je pressens et je devine que les uns et les autres comprennent le sens de cette décision que j'ai prise pour continuer, dans la mesure de mes moyens, à servir la collectivité québécoise. Grâce à l'appui de cette collectivité particulière de Sherbrooke, grâce à l'appui aussi de beaucoup de personnes sur le concours desquelles je peux compter, j'espère ne pas décevoir cette collectivité régionale de Sherbrooke, d'abord, la collectivité québécoise dans son ensemble et, par voie de conséquence, ceux qui représentent cette collectivité, quel que soit le parti qu'ils ont pris. Je vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Cornellier): Le programme 3 est adopté. Programme 4 servi ces communautaires.

M.Charron: J'ai presque envie de vous proposer d'aller regarder la fin de la deuxième période, M. le Président.

Le Président (M. Cornellier): S'il y a consentement unanime des membres de la commission.

M. Charron: Parce que c'est un long programme. Enfin, c'est le dernier long programme qui reste. Par la suite, l'étude des crédits devrait aller assez rapidement. Je ne sais pas quelle est l'intention du ministre. Est-ce que je serais appuyé par des députés ministériels si je faisais la proposition que j'ai en tête?

M. Forget: Je ne veux pas être difficile, mais, d'un autre côté, les fonctionnaires sont ici et ils sont disposés à répondre aux questions. Comme nous allons ajourner les travaux de cette commission avant de pouvoir les reprendre, je pense qu'on pourrait peut-être, au moins, amorcer l'étude de manière à voir certaines questions.

M. Charron: M. Dumas est ici?

M. Forget: Oui, il est dans le corridor.

Services communautaires M. Charron: M. le Président...

Le Président (M. Cornellier): L'honorable député de Saint-Jacques.

M. Charron: ... le programme 4 qui traite des services communautaires ouvre la discussion sur ce qui a été différemment qualifié par plusieurs analystes, mais tous dans le même sens, d'oeuvre majeure de la réforme sociale qui s'est opérée au Québec depuis cinq ans.

Il s'agit des centres locaux de services communautaires ou piliers de la loi 65 dans son esprit comme dans sa lettre. Je parcourais certains documents ramassés un peu partout, même venant du ministère des Affaires sociales lui-même, et je trouvais, pour qualifier cette institution, toutes sortes d'expressions comme fer de lance, pointe, coeur de la réforme.

Je pense qu'aucune de ces qualifications n'est exagérée, si on se rappelle bien l'esprit avec lequel l'Assemblée a adopté la loi 65, l'esprit dans lequel le promoteur, le parrain de la loi 65 à l'époque avait fait l'unanimité de l'Assemblée alentour de cette notion. C'est donc d'elle, si vous le permettez, M. le Président, d'abord, que nous allons discuter, avant de vérifier certains autres services compris dans ce programme 4.

D'abord, les choses pratiques. J'ai en main le document qui provient du ministère en date du 27 mars, de la direction de M. Dumas, qui fait référence — je ne sais pas si on l'a reçu — à certaines copies en annexe qui, pour les fins de la présente discussion, me seraient d'une utilité considérable.

J'ai une partie des documents en annexe, c'est-à-dire le budget annualisé 1974/75, mais certains autres m'apparaissent essentiels et éviteraient probablement un certain nombre de questions fastidieuses que je serais obligé de poser ne les ayant pas en main.

Vous les avez toutes?

J'aurais aimé avoir le temps de les parcourir. Très bien.

L'année dernière, M. le Président, nous avions soulevé une inquiétude quant à l'avenir de ces embryons de réforme CLSC. Vous vous rappellerez, même, M. le Président, que le débat alentour de cette table avait lui-même été assez houleux. J'avais reçu, sans l'avoir provoquée, la preuve de ce que j'avais affirmé à l'effet que ces nouveaux-nés de la réforme sociale, avaient déjà plus d'un adversaire. Des adversaires que l'on attendait ou qu'on s'attendait normalement à trouver, par exemple, dans les milieux professionnels, habituellement ancrés dans une solidité légendaire et que la réforme, forcément, bousculait. Donc, de ce côté, peu de surprise, mais une organisation sociale et politique aussi, disons-le, qui, dans certains coins du Québec, où l'implantation s'avérait plus difficile qu'ailleurs, était particulièrement coriace quant à l'arrivée de ces promoteurs de services sociaux à caractère différent et dont l'unification avait poureffet — c'était le butde la loi, maison aurait dit qu'on ne l'avait pas calculé au moment où on l'a adoptée — de les renforcer et de leur donner une cohésion plus grande qu'auparavant.

On est loin des CLS du rapport Castonguay-Nepveu. Le C qu'on a rajouté a une dimension bien particulière et c'est cette dimension bien particulière qui avait, l'avons-nous constaté, pour effet d'énerver ou de déranger bien des gens. La dimension d'action communautaire, M. le Président, chez nous, vous le savez, a eu pour longtemps comme synonyme bénévolat, militantisme religieux, générosité périodique, je dirais, mais n'a jamais reçu, autant que par cette loi 65 que nous avons votée, une consécration officielle comme étant un agent reconnu, par l'Etat québécois, de développement social des Québécois.

Les adversaires des centres locaux de services communautaires sont, par définition, ceux que le centre local de services communautaires dérange. Dans certaines régions, les nantis, les bien-assis trouvent curieux de voir des adversaires, jadis parsemés, trouver un moyen de cohésion alentour d'un centre local et qui plus est, pour la première fois, financé par des deniers publics, en partie du moins, dans la réalisation de leurs actions.

Il y a, bien sûr, comme je le signalais tantôt, les professionnels de la santé, particulièrement dans les régions où les centres hospitaliers étaient installés. Je ne pense pas que l'installation de centres locaux de services communautaires, qui se donnaient des vocations dans le domaine de la santé, se soit opérée facilement nulle part là où il y avait déjà des centres hospitaliers installés. Il ne faut pas parcourir longtemps le Québec pour vérifier, à quelques endroits, comment cela aété particulièrement difficile. Il y a la vieille idée, difficilement décrassable, je dirais, de cette espèce de tour d'ivoire que les professionnels de la santé avaient édifiée, s'étaient vu édifier alentour d'eux. Forcément, leur participation dans un centre local de services communautaires, qui fait appel modestement à la participation populaire, les dérangeait.

Tout cela existait donc l'année dernière. Nous l'avons signalé. Des députés ministériels et moi-même avons croisé le fer dans des conceptions différentes sur ce sujet. J'avais prévenu le ministre des Affaires sociales, sur ce sujet, si c'était son intention

bien nette d'implanter ce que la loi 65 l'autorisait et l'incitait à implanter, qu'il avait l'appui de l'Opposition, même si cela, à l'occasion, pouvait lui être un handicap à l'intérieur de son propre parti.

Je ne veux pas dire que le ministère des Affaires sociales a été inactif suite aux représentations que nous lui avions faites, plus tôt, plus modestement suite à la période de discussion que nous avions eue l'année dernière. En fait, le document que j'ai en main, q ui vient de m'être remis avec ses annexes, fait état de certaines décisions qu'il est, je pense, inutile de commenter puisque, dans l'ensemble, je crois qu'elles constituent ce qui devait être fait à ce moment-ci alentour de l'implantation des CLSC.

La Direction des services communautaires est une nouvelle direction, a un nouveau directeur. Si je me fie aux objectifs qu'elle a pour fonction de rendre opérationnels, je puis dire que j'endosse chacun des objectifs que cette direction s'est donnés. Il y a pourtant quelques questions bien précises que j'ai à poser au ministre ou au directeur sur l'action de cette direction nouvelle depuis un an. J'aimerais la féliciter, d'abord, de la formation de l'équipe Bilan et m'informer, par le fait même, si, au yeux du directeur, le calendrier que l'équipe Bilan s'est donné, l'échéance au 30 juin 1975, je crois, ce soir lui paraît encore respecté comme calendrier, si des difficultés nouvelles sont apparues, etc., autrement dit, faire le bilan de l'équipe Bilan là où elle se trouve aujourd'hui.

M. Forget: M. le Président, pour répondre à cette question précise de notre évaluation de l'opération Bilan, je dois dire que nous avions anticipé lancer cette équipe au début du mois de janvier dans le sens que ce qu'on anticipait qu'elle puisse faire à ce moment-là c'était de s'impliquer davantage dans la visite et dans un processus d'entrevues et de familiarisation avec un certain nombre de CLSC. On a entrevu, au tout début de la formation de cette équipe, une certaine difficulté à trouver des gens ou à identifier des professionnels qui répondaient à nos critères, c'est-à-dire les critères fixés conjointement entre nous et les gens qui oeuvrent dans les CLSC, au niveau de la compétence de ces gens-là, de leur objectivité et surtout de leur disponibilité.

Je crois que, heureusement, on est arrivé à mettre sur pied une équipe qui est franchement intéressante.

Donc, depuis un mois, je crois que cette équipe fonctionne, est en état d'opération, a commencé à visiter un certain nombre de CLSC, a commencé à s'impliquer dans un processus de revues, d'entrevues, ainsi de suite. Ce qui me permet de dire, à ce stade-ci, qu'en ce qui nous concerne, les grands objectifs qu'on s'était fixés, par rapport à la mise sur pied de cette opération, seront satisfaits, d'ici la fin de juin, du moins dans ses objectifs essentiels ou dans les attentes essentielles qu'on avait attachées à cetteéquipe. Il va peut-être rester quelques éléments plus secondaires qu'on pourra poursuivre, de concert avec les gens qui ont vécu l'expérience, c'est-à-dire soit les directeurs généraux, les organisateurs communautaires, les professionnels oeu- vrant au sein des CLSC, mais en somme, pour répondre de façon résumée à votre question, les objectifs majeurs seront satisfaits pour la fin du mois de juin.

M. Charron: Quel est le programme par la suite? L'opération bilan vous soumettra son rapport à vous, au ministre?

M. Forget: C'est ça.

M. Charron: Est-ce que, déjà, on a prévu la façon dont on disposera de ce rapport?

M. Forget: Oui. La façon dont fonctionne cette opération, actuellement, n'aboutira pas, ne nous amènera pas à un type d'opérations traditionnelles de consultantsoù on asoudainement un rapport qui contient des recommandations auxquelles on donne suite. Ce qu'on a voulu introduire dans cette opération c'est de catégoriser cette opération d'un genre de processus de recherche-action impliquant, à la fois, tous les partenaires qui sont impliqués, qui ont été impliqués soit au niveau de la mise en oeuvre ou soit au niveau du fonctionnement des CLSC.

Donc, ce qu'on prévoit, d'ici la fin du mois de juin, c'est une série de rencontres où on pourra bénéficier des observations et des conclusions ou certaines recommandations que pourra nous fournir l'opération bilan. Donc, on prévoit un certain nombre de rencontres qui impliqueraient des gens du ministère, des observateurs plus objectifs, des gens qui oeuvrent actuellement au sein des CLSC, plus particulièrement par leur médium qui est la nouvelle Fédération des CLSC.

On prévoit deux ou trois rencontres d'ici la fin des travaux de ce groupe d'experts. On prévoit, à ce stade-ci, ce qu'on peut prévoirou ce qu'on anticipe plutôt vers la fin de cette opération, c'est un genre de prise de conscience assez globale, peut-être organisée sur des bases régionales, où les professionnels pourront se grouper et étudier le contenu du rapport en profondeur et en évaluer la possibilité d'application chez eux ou en évaluer la compatibilité avec les besoins plus particuliers de leur milieu, avec la possibilité de peut-être intégrer dans leur fonctionnement certaines des conclusions, des grandes recommandations qu'auront pu nous transmettre ces gens.

Maison ne voit pas cela comme un processus qui va se terminer le 30 juin. Un grand rapport volumineux va être soumis, et là on se met à travailler. C'est un processus évolutif au sein duquel on prévoit, dès le début du mois de mai, des rencontres avec les consultants, un genre de processus éducatif qui va se poursuivre dans le temps.

Au cours de l'été, comme je vous le disais, on prévoit de façon pi us intensive des rencontres régionales où les différents groupes de professionnels seront impliqués et seront sensibilisés aux grandes recommandations du rapport, de façon que cela les amène à faire un peu ce que je disais: examiner la correspondance entre ce qu'ils font et ce qu'un groupe d'experts aurait pu articuler ou développer en termes d'observations et de recommandations.

M. Charron: Si je prends certains autres sujets de vocation de la direction que vous assumez, que s'est-il fait de particulier quant à la formation des gestionnaires dans les CLSC?

M. Forget: De ce côté, et cela s'intègre dans une opération ou dans une préoccupation qu'on a pressentie, tant à notre niveau qu'au niveau des gens qui oeuvrent dans les CLSC, c'est une préoccupation de consolider davantage ou d'améliorer certains systèmes de support ou certains comportements qui répondent à des normes élémentaires de bonne gestion dans un organisme quelconque.

De ce côté, suite à un besoin particulier qu'on a identifié, qui est un besoin majeur du côté de la gestion, il y a celui de former des gestionnaires. C'est un besoin qui a fait l'accord presque unanime chez tous les directeurs généraux qui oeuvrent dans les CLSC, puis le nôtre.

Suite à la reconnaissance de ce besoin, le ministère a joué un genre de rôle de facilitateur vis-à-vis de la réalisation de ce type de programme de formation. Alors, on a commencé par une certaine forme d'analyse des besoins, encore une fois impliquant les gens du milieu. Tout cela a abouti à une session de trois jours dernièrement, où l'ensemble des directeurs généraux des CLSC ont été impliqués dans la réalisation du cours et dans l'évaluation de ce cours, ce qui nous amène à apporter certaines modifications à une session ultérieure qui est censée avoir lieu vers la mi-mai.

On avait prévu au tout début deux sessions comme celles-là mais, compte tenu de la demande, de la réceptivité que ces cours de formation amènent chez les directeurs généraux, on prévoit les poursuivre. C'est un programme de formation un peu fait sur mesure pour les directeurs généraux tel qu'eux le voient et le pressentent.

Seulement pour vous donner une idée...

M. Charron: Je m'excuse de vous interrompre. Est-ce que ces cours, cette formation des gestionnaires ne s'adresse qu'aux directeurs généraux ou si, à l'occasion, vous incluez des membres de conseils d'administration?

M. Forget: Précisément, à ce stade, on a débuté avec les directeurs généraux, mais on prévoit, en collaboration avec les conseils régionaux, au cours des prochains mois, d'amorcer tout un processus de formation ou de sensibilisation, devrais-je dire, au niveau des conseils d'administration un peu partout en province.

M. Bonnier: Relativement à l'étude qui est en train de se faire, vous dites qu'il n'y aura pas nécessairement de rapport final et vous avez beaucoup parlé d'une certaine continuation de réflexion avec les professionnels. Est-ce que vous incluez là-dedans le reproche qu'on fait d'une façon générale à l'effet que c'est trop professionnel?

C'est que les gens du milieu sont un peu laissés de côté et même, quand on assiste à des assemblées générales, on s'aperçoit que ce sont les professionnels qui mènent tout le bal et peu de place est laissée aux gens du milieu dans la définition de leurs besoins et l'expression des services qu'ils devraient peut-être avoir relativement à ces besoins.

Est-ce que, une fois que le rapport sera fait, ce ne serait pas aussi l'occasion pour une réflexion avec des gens du milieu concerné beaucoup plus que les professionnels?

M. Forget: Je dois dire que, dans la conduite même de cette opération d'évaluation ou d'articulation, il y a plusieurs groupes de citoyens qui sont visés et qui sont consultés au fur et à mesure que cette opération a lieu. Quant à une participation ou une implication plus grande des citoyens, peut-être à un stade ultérieur y aura-t-il lieu de les impliquer. Mais, jusqu'à maintenant, on n'a pas prévu de processus systématique de ce type d'implication. Mais si vous le voulez je vais en prendre bonne note et voir à ce que cela se fasse, qu'on implique davantage dans ce processus de réflexion, comme vous le dites, les citoyens.

A ce stade, je crois que les citoyens ont été impliqués de façon très intensive dans la mise sur pied de tous les CLSC.

Cela a été un reproche qu'on a fait aux CLSC de prendre énormément de temps avant de démarrer et avant de s'implanter, justement à cause de cet objectif ou cette intention, qui était implicite dans la loi 65, d'impliquer les citoyens. Donc, il y a, dans certains cas, une période d'un an ou un an et demi où les citoyens ont été profondément ou intensément consultés dans la mise sur pied du CLSC.

Une fois le CLSC mis sur pied, ce processus se poursuit et divers CLSC ont trouvé des formules plus ou moins originales, impliquant plus ou moins les citoyens dans, par exemple, un processus continu d'identification des besoins, ainsi de suite.

Je peux comprendre que, dans certains cas, c'était dû au manque d'expérience, à la nouveauté de la formule. C'est peut-être un reproche qui mériterait d'être analysé davantage, à savoir dans quelle mesure il n'y aurait pas lieu de les impliquer davantage, particulièrement dans des secteurs plus particuliers.

M. Bonnier: M. le Président, je pense que si on s'en reporte à l'esprit initial, disons, des CLSC, ce devaient être des groupes à dimension communautaire, du moins à représentation communautaire, dont la première fonction était de faire une espèce d'évaluation des besoins du milieu. Or, il y a un certain nombre de CLSC qui n'ont jamais fait d'études de ce genre, qui ont décidé tout d'un coup de mettre tel ou tel service sur pied, parce que, selon eux, cela correspondait à ce qui devait être mis sur pied, alors que ce n'était peut-être pas essentiel du tout.

A la suite d'études — évidemment, je ne sais pas comment votre processus va se faire — j'imaginais qu'on arriverait au moins à une espèce de consensus de fixation de la vocation réelle des CLSC et, à partir de ce moment, que les gens du milieu seraient impliqués dans cette redéfinition de la vocation du CLSC dans une première étape et dans une deuxième. Mais si cela devait toujours garder cet aspect

d'organisme communautaire devant répondre à un certain nombre de besoins, j'imaginais que la première étape serait de les identifier, ces besoins, une fois pour toutes, de s'asseoir avec les gens et non pas de mettre sur pied des services qui, dans certains cas, il faut bien l'avouer, étaient simplement le dédoublement de services qui existaient ailleurs.

M. Forget: A moins qu'il y ait quelques CLSC déviants, tout ce que j'ai vu, depuis mon entrée en fonction, c'est justement un certain nombre d'activités et un certain montant d'engagements de la part des CLSC. Dans la présentation des programmes fonctionnels qu'on nous a faite, on nous a clairement indiqué le degré de participation et d'implication des citoyens, de l'identification des besoins jusqu'à une formulation d'une certaine gamme de programmes.

Comme je vous le disais tantôt, dans ce processus de remise en question, les citoyens, les bénéficiaires ou les consommateurs des services de CLSC ne sont absolument pas oubliés. Si je vous présentais les questionnaires, particulièrement du professeur Leithman qui s'occupe de la dimension organisation communautaire, vous verriez qu'il a fait justement un de ses objectifs de questionner ou de passer un certain temps à parler avec des citoyens, justement pour connaître leur point de vue, se sensibiliser à leurs observations à l'égard de leur participation et savoir ce qu'ils en pensent.

Quant à leur implication progressive et, disons, plus en profondeur dans ce processus évolutif d'évaluation ou de bilan qu'on a amorcé, comme je vous le dis, j'en ferai un point personnel de vérification, et si je vois qu'il y a lieu d'améliorer ou d'introduire certains correctifs à ce processus, on le fera.

Le Président (M. Cornellier): L'honorable député de Vanier.

M. Dufour: Ce serait pour continuer, pour appuyer l'idée de mon ami de Taschereau. Est-ce que, dans votre étude, vous avez une étape pour visiter le député du comté qui, jusqu'à nouvel ordre, représente bien les problèmes du milieu, parce qu'il a à les vivre pendant quatre ans? Est-ce qu'il serait possible, de temps en temps, de ne pas trop l'oublier, d'aller voir quelles sont les sortes de plaintes qu'il a, quelles sont ses idées sur le CLSC? Je ne parle pas pour moi, je n'en ai pas dans mon comté, Dieu soit loué.

Je n'ai pas de problèmes. Alors, comme M. Bonnier qui vit intensément ces problèmes-là tous les jours, le député de Saint-Jacques et vous-même, je pense qu'une visite chez ces députés apporterait peut-être des éléments de solution.

M. Forget: M. le Président, si vous me permettez d'intervenir, dans les relations qui peuvent exister entre les députés et le ministère, pour ne parler que ce de problème-là, je crois qu'il y a eu, dans tous les cas où cela a été fait et quels que soient les partis, une disponibilité très grande des fonctionnaires du ministère, dans toute la mesure des possibilités physiques, pour discuter des problèmes d'un éta- blissement ou d'un autre; c'est parfois un CLSC, c'est parfois un centre d'accueil, un centre hospitalier. Ces contacts sont assez fréquents, je pense, puisque heureusement, les députés s'intéressent aux problèmes de leur comté et se font les porte-parole de la population qu'ils représentent, pas seulement à l'Assemblée nationale, mais auprès du gouvernement. Il n'y a pas tellement de problèmes de ce côté-là dans tous les cas où ces demandes de rencontres ont été formulées, je pense qu'elles ont été satisfaites.

Pour ce qui est des établissements, on se trouve, évidemment, dans une situation un peu différente, quoique la position qu'on a toujours tenue, c'est que ces établissements fonctionnent avec les deniers publics et que c'est une question de simple courtoisie pour les établissements d'accueillir les membres de l'Assemblée nationale, de les familiariser avec leur fonctionnement et de répondre à leurs questions, comme, d'ailleurs, ils sont censés répondre aux questions du public en général. Je pense que, sur le plan des principes, il n'y a vraiment pas de problème; il y a des problèmes, évidemment, comme toujours quand il est question de relations humaines, entre des individus qui ne s'entendent pas ou qui ne voient pas les choses de la même façon. Mais, dans tous les cas où un problème peut nous être signalé, il est clair qu'il nous fera plaisir d'intervenir, comme médiateurs, le cas échéant, s'il en est besoin, encore qu'on ne m'ait pas signalé, à ce jour, de problème véritablement aigu de ce côté-là.

Je ferai remarquer que, finalement, le ministère lui-même, parfois, n'est pas entièrement bienvenu dans certains établissements. A l'occasion, on a certains problèmes. Je pense que ça nous indique qu'il faut faire la part des personnalités et des humeurs. Il reste que c'est un principe qu'on a toujours défendu, la possibilité pour les membres de l'Assemblée nationale de communiquer le plus librement possible avec les établissements.

Je ne sais pas si j'ai bien saisi la question du député de Vanier.

M. Dufour: C'est un peu ça, mais actuellement on fait une étude, on évalue. Alors, dans l'évaluation, je pense qu'il serait bon, peut être, de cognera la porte du député et de lui demander lui-même ce qu'il a à dire. Comme il vit les problèmes de son propre comté, il est au courant de beaucoup de choses et je pense qu'il pourra apporter des éléments valables.

M. Forget: II n'y a pas de doute qu'il peut apporter des éléments valables. Il est, évidemment, un observateur privilégié de ce qui se passe. D'un autre côté, on comprend que, lorsqu'il s'agit d'un travail d'évaluation comme celui-là, on demande à des personnes qui sont, soit des fonctionnaires, soit qui ont des mandats spécifiques et qui ont des contrats spécifiques avec le gouvernement, de jouer un rôle qui peut être très délicat. Je crois que ce genre de préoccupation là peut, sans aucun doute, être communiqué par d'autres canaux, à l'occasion, puisqu'il peut devenir très délicat, pour des person-

nés qui sont engagées pour une tâche d'évaluation, de s'insérer dans des questions qui ont — et ça, c'est indubitable; on ne peut pas le nier — des dimensions politiques. Elles ne savent pas quoi faire, je pense, dans certains cas, avec des recommandations qui portent plutôt sur ces implications-là que sur le contenu des programmes proprement dits. C'est les placer dans une situation très difficile et je pense que c'est peut-être un peu injuste aussi de leur demander de jouer ce rôle-là. Evidemment, peut-être que c'est votre humble serviteur qui est dans la meilleure position pour prendre connaissance de ces points de vue et s'en faire l'interprète auprès du ministère.

Le Président (M. Cornellier): Le député de Sainte-Marie.

M. Malépart:Toujours dans le même sens sur la question de l'évaluation. Si l'évaluation est faite au niveau des gens déjà impliqués dans les CLSC, je pense bien qu'il est très normal que les gens vont dire que ça fonctionne bien, qu'ils sont représentatifs, parce que je voismal un groupe qui va avouer lui-même qu'il n'est pas représentatif.

Dans chaque milieu, alentour du CLSC, il existait une quantitéd'organismes, de comitésde citoyens, à l'époque on appelait ça des gens bénévoles, les confrères de la Saint-Vincent-de-Paul, il y a des comités d'écoles. Serait-il possible de faire un échantillonnage et de faire une évaluation avec ces gens pour avoir un autre côté de la médaille?

Il y a des comités dans chaque école, alentour des CLSC, il y a des comités de parents, des organismes comme les Conférences de la Saint-Vincent-de-Paul. Il y a les caisses populaires qui sont normalement censées être impliquées dans le milieu. Est-ce qu'il n'y aurait pas une rencontre pour savoir si vraiment il y a une véritable participation de tout le monde alentour du CLSC? Je ne sais pas si c'est dans vos vues.

M. Forget: Oui, c'est dans nos vues. Il y a le problème de l'étendue, de délai, dedisponibilité, etc. Et comme ce n'est pas possible, pour ces gens qui sont impliqués dans ce type d'opération, de visiter tous les CLSC prévus, de faire un certain échantillonnage en fonction des milieux ruraux, semi-urbains et urbains, comme, dans ce cas, on doit se limiter et essayer de procéder sur une base aussi scientifique que possible, le même type de préoccupations se transfère dans le nombre de gens qui peuvent visiter à l'extérieur du CLSC.

Toutefois, c'est implicite, dans le plan de travail de tous ces experts, que d'impliquer dans leur processus d'évaluation tous les autres éléments à l'extérieur du CLSC qui pourraient être dans des états d'interrelation, d'interdépendance par rapport aux CLSC. Ce n'est pas tout, comme vous le dites très bien, que d'essayer de définir le CLSC en soi, c'est important aussi que de le définir par rapport à ses interlocuteurs.

Parmi les interlocuteurs qui sont impliqués dans cet effort de bilan et d'évaluation, il y a tous les éléments du réseau. On rencontre des gens dans les CSS, des chefs de départements de santé commu- nautaires, dans les hôpitaux, dans la FMOQ, des médecins qui pratiquent dans les cabinets privés, et des groupes de citoyens également.

Comme dans tout processus de ce genre, on ne peut pas s'étendre — compte tenu des délais et des disponibilités — dans la mesure où on le voudrait, mais c'est impliqué, comme vous l'avez souligné, dans le processus.

M. Malépart: Comme à Montréal, il y a l'ADDS; c'est un organisme qui serait, quand même, en mesure de vous donner sa façon de percevoir les CLSCà l'état actuel.

M. Forget: J'aimerais peut-être ajouter aussi qu'il n'y a pas seulement l'Opération bilan, qui est en cours actuellement, qui pourrait impliquer une certaine forme de consultation ou d'implication soit des autres partenaires dans le réseau ou des consommateurs des services actuels des CLSC. Nous sommes préoccupés par d'autres média. Par exemple, au niveau des régions, il y a toutes sortes de groupes — nous appelons ça dans notre langage interne des groupes de coordination, des tables de concertation — au sein desquels se poursuivent des discussions impliquant tous les partenaires qui sont, comme je le disais tantôt, en interdépendance avec les CLSC.

Dans ces processus régionaux et peut-être plus locaux également, je crois que les citoyens, soit par le moyen des conseils régionaux ou soit directement, sont impliqués. Donc, si on ne peut pas rejoindre tous ceux auxquels vous faisiez allusion ou que nous désirerions rencontrerdans le processus bilan, nous le faisons par d'autres mécanismes. Et ça, c'est un type de préoccupations que nous n'anticipons pas de terminer le 30 juin ; ce sont des types de préoccupations qu'il faudrait, pour nous, continuer et poursuivre. Cela devrait faire partie intégrante de notre processus d'évolution et de prise de décision.

M. Malépart: D'accord.

M. Charron: M. le Président, j'aimerais...

Le Président (M. Cornellier): Le député de Saint-Jacques.

M. Charron: ...aborder de façon plus rigoureuse certaines actionsde la direction qui, elles, me paraissent moins facilement endossables que la création de l'Opération bilan ou que le fait que la direction s'occupe de l'image des CLSC dans une promotion conjointe avec la direction des communications. Mais je me demande si je ne devrais pas garder ces observations pour un autre moment, étant donné que ça pourrait être assez long.

M. Forget: Considérant la longueur de la question et la longueur de la réponse.

M. Charron: Considérant aussi que j'ai de la difficulté à aligner deux phrases l'une à la suite de l'autre, M. le Président, je ne sais pas si je peux proposer à cette commission l'ajournement.

Le Président (M. Cornellier): Est-ce que cette motion d'ajournement est agréée? Agréé. La commission ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 21 h 55)

Document(s) associé(s) à la séance