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Commission permanente des affaires sociales
Etude des crédits du ministère des
Affaires sociales
Séance du mardi 15 avril 1975
(Dix heures quarante et une minutes)
M. Cornelller (président de la commission permanente des
affaires sociales): A l'ordre, messieurs!
La commission parlementaire des affaires sociales reprend, ce matin, ses
travaux pour l'étude des crédits du ministère des Affaires
sociales. Lors de l'ajournement de vendredi, la commission était
à étudier le programme no 2.
Le député de Saint-Jacques.
Aide aux ménages privés de moyens de
subsistance (suite)
Taxe d'eau
M. Charron: Merci, M. le Président. Bonjour à tous
les membres de la commission et à ceux qui les accompagnent.
M. le Président, j'aimerais achever le programme no 2, qui a
retenu l'attention de la commission, la semaine dernière, en ajoutant
quelques questions particulières sur certains aspects du
règlement de l'aide sociale et des modifications qui devront y
être apportées au cours de l'année financière qui
commence.
Nous avions commencé à discuter des besoins
spéciaux qui sont contenus dans le règlement de l'aide sociale.
Il y a un de ces besoins spéciaux, ou qui devrait peut-être
être calculé dans les besoins spéciaux, qui est la question
de la taxe d'eau qui frappe plus particulièrement les assistés
sociaux de Montréal. Je n'ai pas besoin de refaire l'historique de ce
conflit, parce que conflit il y a.
J'aimerais plutôt profiter de cette occasion pour demander au
ministre des Affaires sociales s'il y a du nouveau, s'il y a du
développement, suite à la question que posait le
député de Sainte-Marie, la semaine dernière, en Chambre.
Devant le développement qui s'annonce, quelle sera la position du
ministre des Affaires sociales?
M. Forget: M. le Président, il serait peut-être
utile, avant de parler de la situation actuelle, de faire un certain retour en
arrière relativement à cette question, parce que je crois que, au
moins chez certains de ceux qui se sont intéressés à cette
question, durant les derniers mois, on peut compter un bon nombre de personnes,
à mon expérience, avec qui j'en ai discuté
privément, qui ne sont pas conscientes du contexte dans lequel le
problème qu'on vient de soulever a été
engendré.
Depuis environ un peu plus d'un an, comme on sait, des modifications
dans les systèmes administratifs de l'aide sociale ont impliqué
une modification considérable dans la façon dont les paiements
sont effectués, sont préparés, en termes très
matériels ou très concrets, dans la façon dont les
chèques sont émis. Des détails pourraient, sans aucun
doute, être donnés par M. Houde et ses collaborateurs, quant
à la différence ou aux nombreuses différences, parce qu'il
y en a plusieurs, entre l'ancien système administratif de l'aide sociale
et le nouveau.
A tout événement, une des implications de ce nouveau
système administratif consiste dans le fait qu'alors
qu'antérieurement les versements, les chèques d'aide sociale,
dans le cas des assistés sociaux de la ville de Montréal,
étaient préparés par le service des affaires sociales, de
la ville de Montréal, l'émission des chèques dans le
nouveau système se fait de façon centrale, à
Québec, par un processus, d'informatique qui tient compte, par la
transmission électronique des données en provenance des bureaux
locaux, des plus récentes inscriptions dans les dossiers de chaque
ménage bénéficiaire de l'aide sociale.
Lorsque cette modification dans le système administratif a
été introduite relativement aux bénéficiaires de
l'aide sociale dans la ville de Montréal, nous nous trouvions en face
d'une situation où la ville de Montréal avait, depuis aussi
longtemps qu'on puisse se souvenir, assumé la préparation des
chèques. Dans ce processus, elle avait pris sur elle de prélever
à la source les sommes qui lui étaient dues au titre de la taxe
d'eau.
Elle était donc à la fois payeur au nom du gouvernement,
je parle de la ville de Montréal, et elle était aussi l'un des
créanciers de ces familles. Et prenant avantage de ce cumul des
rôles en quelque sorte, elle se payait elle-même, à
même des prestations sociales qui étaient versées par ses
soins aux assistés sociaux de la ville de Montréal, selon des
barèmes identiques et uniformes aux barèmes qui s'appliquaient
dans d'autres municipalités du Québec.
Donc, on pouvait vraiment parler, à ce moment-là, d'une
situation où les bénéficiaires de l'aide sociale de la
ville de Montréal étaient l'objet d'une discrimination
administrative, si on veut lui donner ce nom.
Cela résultait d'un double rôle de la ville de
Montréal, qui était largement unique par rapport aux
bénéficiaires de l'aide sociale résidant dans les autres
municipalités. L'introduction d'un nouveau régime administratif a
tout simplement éliminé la possibilité physique de ce
cumul de rôles de la ville de Montréal et donc l'occasion de
prélever à la source une taxe locative telle que la taxe d'eau.
C'est la situation dans laquelle nous nous trouvons maintenant.
Les mêmes barèmes et c'est encore plus vrai
puisqu'à peu près à la même époque les
allocations pour le logement, qui étaient faites en vertu des anciens
règlements, en vertu d'une catégorisation en trois zones de
toutes les municipalités du Québec, ont été
supprimées mais de toute manière, il n'y avait aucune relation
directe entre ce zonage des municipalités et la taxe d'eau dans
la situation où nous sommes, s'appliquent indifféremment du lieu
de résidence des bénéficiaires de l'aide sociale. Les
mêmes taux maximums sont accessibles à tous les
bénéficiaires de l'aide sociale et, effectivement, aucun
créancier de l'aide sociale n'est placé dans la position de se
prévaloir d'une perception à la source des sommes qui lui sont
dues.
Ceci est également vrai pour les comptes
d'électricité puisqu'on pourrait, par analogie, supposer que
puisqu'il s'agit de l'Hydro-Québe qui est une entreprise d'Etat, dans
les mêmes circonstances le gouvernement provincial voudrait
prélever à la source les comptes d'électricité ou
quelque autre créance que ce soit. Ce n'est cependant pas une situation
dont nous prenons avantage puisque, pour la plupart des gens et c'est
vrai pour les employés du gouvernement nous ne percevons pas
à la source de peur qu'ils ne les paient pas leurs comptes
d'électricité. Il faut dire qu'on fait différemment pour
les comptes, en quelque sorte, pour les taxes sur le revenu mais ceci en vertu
d'un système qui donne généralement satisfaction et qui
permet d'étaler sur toute l'année des paiements qui seraient
autrement déraisonnables.
Toutefois, je crois qu'il est essentiel de comprendre la genèse
du problème puisque la question même du député de
Saint-Jacques laisse croire que nous avons supprimé un besoin
spécial, qu'il y avait, à une certaine époque, dans le
passé, une allocation spéciale faite aux
bénéficiaires de l'aide sociale parce qu'ils vivaient dans une
certaine municipalité et qui leur permettait de payer la taxe d'eau par
un système de crédit d'impôt ou autrement.
C'est sans doute un développement qui est souhaitable à
long terme, mais prétendre qu'on peut, par l'aide sociale, corriger tous
ces problèmes, c'est entrer dans la voie d'une confusion
considérable, quand on comprend que certaines municipalités
imposent, par exemple, une taxe locative, alors que d'autres
municipalités, dans les mêmes situations financières,
imposent le même impôt, mais au propriétaire. Le
propriétaire on s'en doute un peu va répercuter cet
impôt, cette taxe d'eau par exemple, sur les loyers qui sont
payés, loyers qui, par ailleurs, doivent être
défrayés à même l'allocation de base de l'aide
sociale.
Ce serait donc privilégier certaines municipalités, non
pas en fonction des impôts qu'elles prélèvent, mais en
fonction de la façon dont elles prélèvent leurs
impôts. Des distorsions et des injustices sans nombre
résulteraient immédiatement d'un tel régime. Encore une
fois, un régime d'aide sociale n'a pas pour but d'accorder une aide aux
municipalités; d'ailleurs, ce serait déséquilibrer
complètement à la fois le budget et, encore une fois, l'objectif
d'un programme qui vise à aider les familles et les individus.
Il n'est donc pas question, à notre point de vue, d'avoir une
allocation spéciale qui ne bénéficierait pas aux individus
et aux familles qui ont un revenu insuffisant, mais qui
bénéficierait aux municipalités où ils se trouvent
à demeurer, puisqu'il faudrait, àce moment-là, envisager
à plus ou moins longue échéance une espèce de
péréquation des revenus municipaux, basée sur le nombre de
bénéficiaires de l'aide sociale à l'intérieur des
limites de chaque municipalité. Ce serait la seule façon
d'être complètement neutre par rapport aux moyens divers que
différentes municipalités adoptent, soit plus de taxes
foncières, moins de taxes locatives, des taxes de la nature d'une taxe
d'eau qui est imposée au propriétaire plutôt qu'au
locataire, mais qui se répercute à ce moment-là dans les
loyers. Tout cela, ce sont des questions de détail, de forme et on ne
peut certainement pas en privilégier une part rapport à
l'autre.
Alors, au point de vue de l'aide sociale, M. le Président, je ne
vois pas en quoi il existe un problème. Il existe un problème,
bien sûr, au niveau municipal, dans la mesure où une partie des
contribuables de n'importe quelle municipalité a des revenus
insuffisants pour vraiment s'acquitter de leurs obligations sur le même
pied que tous les autres, étant donné que les taxes
foncières ou les taxes locatives ne sont pas basées sur la
capacité de payer. C'est là un problème qu'on va
régler dans un autre secteur, dans un autre service. On peut souligner,
là-dessus, les efforts faits depuis quelques années par le
gouvernement du Québec pour accroître son aide financière
aux municipalités.
De mémoire, je peux citer les chiffres qui étaient
donnés dans le discours du budget de l'an dernier. On verra aujourd'hui
même, je pense, d'autres chiffres et un autre tableau encore plus
éloquent de cela, mais dès l'an dernier, on sait que le
gouvernement du Québec, par la taxe de vente, par différentes
mesures de subvention, finançait ou fournissait aux municipalités
environ, si ma mémoire est juste, 50% de leur revenu total.
Ce n'est donc pas un besoin auquel le gouvernement du Québec est
sourd, mais il est beaucoup plus approprié de la faire au titre de
l'aide aux municipalités via un besoin spécial qui ne
bénéficierait pas du tout aux bénéficiaires de
l'aide sociale, mais qui serait versé directement ou bien indirectement
mais, de toute façon, sans aucun doute sur la destination finale de ces
montants qui seraient versés à des municipalités.
D'ailleurs, d'autres clientèles qui ne sont pas plus
favorisées sur le plan économique que les
bénéficiaires de l'aide sociale pourraient également
prétendre à une aide comme celle-là, s'il nous venait
jamais à l'esprit de l'envisager, comme par exemple les personnes
âgées. Les personnes âgées de plus 65 ans sont
également souvent dans des positions financières précaires
et ne bénéficient cependant pas de l'aide sociale mais d'un autre
régime de sécurité de revenu . Pour elles
également, les problèmes de fiscalité,
particulièrement de la fiscalité scolaire qui, à tort ou
à raison, semble inapproprié à bien des personnes
âgées qui n'ont plus d'enfants, etc.
Alors, c'est également un problème qu'elles pourraient
soulever. Comme on le voit, on ne réussirait pas à régler
le problème de l'impact sur les gens à faibles revenus de la
fiscalité locale par une mesure limitée simplement à
l'aide sociale.
M. Charron: M. le Président, j'avais volontairement
coupé ma question pour éviter de rouvrir le débat à
nouveau. Mais je pense que c'est le choix du
ministre des Affaires sociales qui a préféré
reprendre le conflit à son origine, l'expliquer à nouveau, avec
les mêmes arguments qu'il avait lorsque nous avons soulevé la
question à l'Assemblée. Je me dois donc maintenant, je pense, de
lui donner une autre version.
C'est une approche très tatillonne que prend le ministre des
Affaires sociales pour nous donner un cours de fiscalité municipale.
C'est à croire, avec toutes les excuses qu'il aligne, qu'il y a un vice,
qui est évident dans ce cas puisque des gens, des citoyens ont
refusé de payer une taxe qui leur était chargée, comme
à tous les autres citoyens, je l'admets. C'est une série
d'excuses et le vice n'est pas là où le ministre des Affaires
sociales le voit.
J'admets qu'il y a beaucoup de difficultés dans le système
de fiscalité des municipalités. On n'est pas ici pour en parler,
mais puisque le ministre en parle, je n'ai qu'à vous signaler que le
maire de Québec, président de l'Union des municipalités du
Québec, s'est fait le porte-parole d'un grand nombre de ses
collègues, et il revendique une nouvelle forme de fiscalité.
Je n'ai qu'à faire allusion, M. le Président, à la
divergence majeure d'opinions entre le président de la
Fédération des commissions scolaires du Québec et le
président de l'Union des municipalités quant au partage de
l'impôt foncier.
Je tomberais exactement dans le panneau que vient d'ouvrir, face
à la commission, le ministre des Affaires sociales si j'essayais
d'analyser le problème que les assistés sociaux de
Montréal ont traversé par un problème de fiscalité.
Le vice, parce qu'il y en a un, est dans la Loi de l'aide sociale et dans le
règlement de l'aide sociale, point. Que le ministre n'essaie pas de
chercher la paille dans l'oeil d'au-trui, il a la poutre dans le sien. Ces
gens-là ont essentiellement, à cause d'un système
vicié, été responsables d'un geste de
désobéissance civile il faut l'appeler comme cela
auquel ils se sont sentis obligés, auquel je les ai priés
d'adhérer, que, je crois, des députés libéraux, si
ce n'est ouvertement, du moins privément, les ont également,
à l'occasion, invités à faire. Je suis au courant de cette
situation sur l'île de Montréal. Que ce matin on vienne nous dire
que des gens ont protesté, ont brûlé leur compte de taxe
d'eau parce que c'est la preuve que le système fiscal des
municipalités est désuet et mérite un raccordement, c'est
vraiment prendre des vessies pour des lanternes.
Le problème est où? Le problème est exactement
comme je l'ai décrit lorsque nous avons ouvert le débat sur cette
aide sociale. C'est le contexte qu'il faut reprendre. Les assistés
sociaux font face, chaque année, à la hausse du coût de la
vie sans aucune aide. L'aide arrive le 1er janvier de l'année suivante.
Elle est un rattrapage pour l'année qui vient de s'écouler. Il y
a un rajustement en fonction de la hausse du coût de la vie qui s'est
produite pendant les douze mois précédents, mais pendant qu'elle
s'est produite, cette hausse du coût de la vie, les
bénéficiaires de l'aide sociale ont exactement ce qu'ils avaient
le 1er janvier de l'année en cours. Autrement dit, les assistés
sociaux de Montréal, puisque c'est d'eux que nous parlons il
s'agit de la taxe d'eau à Montréal ont traversé la
terrible année 1974, sur le plan inflationnaire, avec le même
revenu mensuel, le 5 août, le 5 septembre, le 5 octobre que le 5
février ou que le 5 mars, à l'exception du rajustement de juin,
qui n'était qu'un rajustement mineur de l'ordre de 3% ou 4% et, qui ne
faisait certainement pas état de la crise économique que
traversait la ville de Montréal et l'ensemble du Québec, à
ce moment-là.
C'est là qu'est le vice. Le revenu pour faire face à
l'inflation arrive après que l'inflation a fait sa marque. Aujourd'hui,
c'est la même chose. Le rajustement que les assistés sociaux ont
reçu le 1er janvier 1975 est calculé en fonction du taux
d'inflation de 1974, mais aucunement préparé à faire face
à celui de 1975.
Les assistés sociaux feront face, encore cet été,
à une hausse du coût de la vie de 1975, que leur revenu sera
inapte à conjurer, M. le Président, et qui les obligera, à
un moment ou à un autre, parce que les besoins seront plus grands que ce
qui aura été prévu, à refuser de payer une dette
ici ou de payer une dette là.
Je n'ai pas prétendu que la taxe d'eau était, avant, un
besoin spécial. J'aime mieux l'expliquer à nouveau de cette
façon. Ce qui était jadis des besoins spéciaux, une
allocation spécifique pour un certain nombre de besoins, comme la
literie, comme le vêtement, est un jour complètement disparu de
l'échelle de l'aide sociale. On a dit: Plutôt que de vous
détailler à la pièce le genre de revenu auquel vous avez
droit, on augmentera de façon globale votre revenu mensuel, mais ce sera
à votre charge, maintenant, de répartir votre budget selon vos
propres besoins. Le principe est beau, le principe est bon. C'est lui qui est
à la base de la philosophie du revenu minimum garanti que nous attendons
encore au Québec après qu'une commission nous l'eut
recommandé, il y a maintenant déjà presque sept ou huit
ans.
Peu importe, M. le Président, si ce principe est beau, il est
beau, il est bon, il est valable pourautant qu'effectivement le montant
ajouté au revenu mensuel couvre totalement et, au besoin, avec une
majoration leurs dépenses, puisqu'on remet ce budget aux mains des
assistés sociaux pour qu'ils l'administrent. Mais ce n'est pas le cas.
Dans la pratique actuelle, le montant qui a été ajouté au
revenu mensuel ne couvre pas et couvre toujours un an en retard ce qu'il a
à couvrir comme hausse des différents besoins à
couvrir.
C'est exactement le cas de la taxe d'eau. Lorsque la ville de
Montréal a refusé encore une fois le principe est bon
de percevoir, à même le revenu des assistés sociaux,
la taxe qui lui est due, c'était normal, à condition qu'on leur
accorde, en conséquence, un montant qui leur permette de faire face
à cette nouvelle charge qu'ils ont à assumer d'eux-mêmes
maintenant.
Or, M. le Président, au seul chapitre de l'alimentation, en 1974,
nous avons connu sur le territoire de Montréal les statistiques
ont été fournies par le ministre de l'Industrie et du Commerce
une hausse de près de 17%. L'alimentation représente, dans
le revenu des assistés sociaux ai-je besoin
de vous le dire, M. le Président, ils ont un estomac, ils ont un
foie, ils ont un organisme exactement semblable au vôtre et au mien
une partie de leur budget qui dépasse certainement largement ce
que vous, vous y consacrez, M. le Président, ce que moi j'y consacre, ce
que tous les membres de la commission consacrent à la nourriture. Ce qui
veut dire que, quand nous soutenions à l'Assemblée nationale que
l'inflation frappait les gens les plus démunis plus
sévèrement, c'était exactement dire, en termes de ce
genre, un fait mathématique. La majoration arrivait dans la partie la
plus sensible du budget des assistés sociaux.
C'est évident que la première partie du budget se consacre
et se donne à la nourriture. Les assistés sociaux ont donc
dû faire face à cette augmentation de 17% dans la seule
année de 1974, sans autre appui financier que ce qui leur avait
été remis le 1er janvier de cette année, mais qui
était loin de prévoir ce qui arriverait en 1974.
C'était, au contraire, un rattrapage de ce qui s'était
produit en 1973. Ces gens ont donc dû c'est pourquoi il ne s'agit
pas de crime, à mon avis se rendre à l'évidence. On
les abandonnait avec un revenu calculé sur l'échelle de 1973 pour
faire face à une hausse du coût de la vie qui n'était pas
prévue en 1974. Ils ont fait comme vous et moi, ils ont mangé
d'abord. Tout le monde sait qu'avec leur revenu, qui était à
l'époque de $183 par mois pour une personne seule, si ma mémoire
est fidèle, on ne peut pas dire qu'ils mangeaient d'une façon
abondante.
Ils aménageaient leur revenu pour être capables de
s'assurer de manger lorsque le boeuf haché atteignait $1.59 la livre,
lorsque la pinte de lait atteignait $0.50, lorsque le beurre atteignait $0.90
et maintenant est plus de $1. Ils devaient, non pas qu'ils s'arrangeaient, ils
devaient simplement subvenir aux besoins de leur organisme biologique,
consacrer une partie de plus en plus importante de leur budget à cette
activité humaine qui est celle de manger et ils étaient dans
l'obligation de laisser des dettes de côté.
Une de ces dettes fut, certainement, la taxe d'eau, qu'auparavant, ne
serait-ce que par habitude, ils n'avaient jamais été
appelés à payer eux-mêmes. Mais ils n'ont pas
abandonné que la taxe d'eau, il faut bien le dire. Ils ont
abandonné aussi probablement beaucoup de loisirs, auxquels les
assistés sociaux ont droit comme n'importe qui d'entre nous alentour de
cette table. Ils ont abandonné probablement certains caprices quant aux
vêtements. Ils ont probablement étiré plus longtemps qu'ils
auraient dû le port de certains souliers, le port de certains
vêtements parce que la priorité, qu'ils n'avaient pas choisie
on leur laissait l'administration d u budget mais on ne leur laissait
aucunement la possibilité de distinguer ce qui devrait aller à
tel endroit et d'où allait provenir la plus grande majoration... C'est
ainsi qu'alentour des édifices du ministère des Affaires
sociales, à Montréal, les 8 ou 9 octobre dernier, ils disaient la
vérité en proclamant: Les 8% ce qui est
l'équivalent de la taxe d'eau à Montréal, les 8% du loyer
mensuel on les a mangés.
Ils avaient été laissés seuls, sans revenus
majorés, pour faire face à une hausse du coût de la vie qui
était étonnante au cours de l'été dernier. Ils ont
donc dû y consacrer une bonne partie de leurs revenus et ils ont dû
faire attendre, à un moment donné, que la taxe d'eau soit
remboursée par le ministère des Affaires sociales. Ils sont
encore dans cette impasse, le ministre des Affaires sociales
également.
La ville de Montréal poursuivra-t-elle on dit que c'est
50-50 les 50% d'assistés sociaux qui n'ont pas payé leur
taxe d'eau? Que fera-t-elle des 50% qui, eux, probablement en coupant ici et
là, ont réussi à s'acquitter de cette tâche civile
de payer leurs taxes au détriment probablement de nourriture, au
détriment de vêtements auxquels ils avaient droit? Quel sera leur
sort? Est-ce que le ministre entend simplement cautionner ou fermer le dossier
sur une situation où il y a nettement injustice entre deux
catégories de citoyens?
La situation n'est pas réglée, je le dis non pas pour
celle de 1974 mais pour celle de 1975 également. Il est bien possible,
si le taux d'inflation continue, comme il est là, à 1% ou 1.1%
par mois, que l'on se retrouve, au cours de l'été de 1975,
obligés d'affirmer que la majoration ou l'indexation il n'y avait
aucune augmentation là-dedans qui est venue le 1er janvier 1975
s'avérera encore insuffisante, au cours de l'été prochain,
pour faire face à l'inflation parce qu'elle est essentiellement
basée sur le calcul de l'année dernière et que les
citoyens bénéficiaires de l'aide sociale devront à nouveau
faire des choix entre la nourriture et la taxe d'eau.
Entre les deux, M. le Président, je leur dirai encore à ce
moment-là, comme je l'ai dit l'année passée et comme je
peux le dire encore aujourd'hui, de choisir la nourriture.
Le Président (M. Cornelller): L'honorable ministre des
Affaires sociales.
M. Forget: M. le Président, je dois, malgré la
longueur du débat, déjà, sur cette question, intervenir
à nouveau pour corriger des faussetés évidentes dans les
déclarations du député de Saint-Jacques à cet
égard, des faussetés qui sont graves parce qu'elles sont de
nature non pas à nous approcher d'une solution mais, au contraire,
à nous en éloigner.
En effet, il est impossible de concevoir que l'on puisse en arriver
à une solution acceptable pour tous les intéressés dans
une situation où, délibérément, on fait des
affirmations qui sont en conflit avec la réalité.
Le député de Saint-Jacques fait une affirmation, et il l'a
faite déjà sans que je soulève ce point, parce que je ne
veux pas indûment revenir sur cette question de l'aide sociale en ayant
l'air de prétendre que je suis complètement satisfait des niveaux
d'aide que nous assurons aux plus défavorisés d'entre nous.
Inévitablement, lorsque l'on allègue que les niveaux sont soit
insuffisants, soit qu'ils ne s'élèvent pas assez rapidement, on
me place dans la position de défendre ces niveaux ou ces taux
d'augmentation et de créer peut-être l'impression que j'en suis
satisfait.
J'ai indiqué déjà à plusieurs reprises et
devant
cette commission, cette année, que je n'étais pas
satisfait de ces niveaux et qu'il fallait envisager de les hausser non
seulement en harmonie avec les augmentations du coût de la vie mais pour
permettre un rattrapage, particulièrement dans le cas des familles.
Alors c'est une situation qui prête à confusion que celle dans
laquelle je suis forcé de me retrouver mais il mérite,
malgré tout, que je fasse ces corrections parce qu'il ne sert à
rien d'exagérer, d'un autre côté, la situation que l'on
veut corriger. Je reviens donc à l'argument selon lequel les
ajustements, l'indexation, pour contrer le coût de la vie dans l'aide
sociale se font avec un an de retard.
Cette proposition est strictement fausse. Elle est fausse, non pas, bien
sûr, dans le sens naïf avec lequel on peut faire cette affirmation
qu'il faut bien connaître quelle a été l'augmentation du
coût de la vie avant de faire une indexation, puisque l'un est
relié à l'autre. Donc, quant à la façon de calculer
l'indexation, il est clair que l'on reflète une situation passée.
C'est bien évident, parce qu'on veut mesurer l'action que l'on prend sur
une évolution réelle et constatée; donc il faut bien que
cette évolution se fasse avant qu'on puisse la voir se refléter
dans les niveaux de l'aide sociale.
Mais ce n'est vrai dans aucun autre sens. Ce n'est pas vrai, en
particulier, parce que cette affirmation ne tient pas compte du fait que le
niveau même que l'on indexe, la base même qui est majorée en
fonction de l'élévation du coût de la vie contient
elle-même une estimation de la hausse probable du coût de la vie
durant l'année qui suit sa mise en vigueur. Ceci est
particulièrement vrai, en 1974, alors que tout le monde sait que le
niveau général des prestations d'aide sociale s'est vu
rajusté de façon très sensible je citerai
tantôt ces chiffres encore une fois et il ne s'agissait pas, en
janvier 1974, d'une indexation mais de la détermination de novo, en
quelque sorte, des barèmes de l'aide sociale.
Cette détermination des barèmes de l'aide sociale a pris
en compte les objectifs que nous poursuivions quant à la couverture des
seuils de pauvreté et de l'indexation de ces seuils eux-mêmes en
fonction du coût de la vie pour le point milieu de l'année
1974.
On a donc anticipé, dans la détermination de ces seuils,
l'inflation que l'on prévoyait devoir survenir en 1974, si bien
même qu'en mai dernier, lorsque j'ai annoncé que le gouvernement
majorait de 4% les barèmes de l'aide sociale, j'ai spécifiquement
fait allusion à cette estimation, par anticipation, de l'inflation qui
est survenue en 1974, anticipation qui était, si on veut, trop
optimiste, qui avait fait une part trop peu importante à l'inflation
anticipée. L'écard entre l'anticipation de l'inflation, pour
l'année 1974, et celle qui se manifestait était de 4%, et c'est
ce 4% que nous avons comblé en juin dernier.
Il y a donc, dans le niveau qui est lui-même l'objet d'une
indexation, à la base, une anticipation d'une inflation. Et c'est
strictement faux de prétendre que l'on réagit en retard, que l'on
réagit surtout avec un an de retard, lorsque l'on doit tenir compte,
dans les barèmes, de l'inflation, qui est effectivement survenue.
Comment autrement faire de l'inde- xation, si ce n'est par rapport à une
période passée? Il est évident que l'on se base, dans son
calcul, sur les chiffres observés pour l'année antérieure.
Mais ce que l'on indexe, à ce moment-là, c'est déjà
une base qui contient un élément d'anticipation dans l'inflation
qui s'est réalisée mais qui aurait pu également, M. le
Président, ne pas se matérialiser.
Dans l'abrogation ou la suppression des besoins spéciaux, et je
reviens là sur une argumentation qui est déjà vieille de
près de deux ans ou deux ans et demi, il avait été
abondamment expliqué, à l'époque, que ces besoins
spéciaux d'ameublement avaient été plus que
compensés, de façon globale, au niveau du budget de l'aide
sociale, de l'ensemble des bénéficiaires de l'aide sociale, par
les majorations de barèmes qui sont intervenues à
l'époque.
A l'époque où ces besoins spéciaux ont
été supprimés, les déboursés annuels de
l'aide sociale a ce titre-là étaient d'environ $7 millions. La
majoration des barèmes qui est survenue en avril, je crois, 1973, a
impliqué des déboursés additionnels pour le régime
de $10 millions.
Il n'y avait donc pas une disproportion et certainement pas une
diminution dans le total des sommes consacrées par le gouvernement
à la lutte contre la pauvreté. Il y avait un
réaménagement de ces sommes en fonction d'un objectif de
sécurité de revenu avec lequel le député de
Saint-Jacques, j'en suis heureux d'ailleurs, s'est déclaré
d'accord en principe.
Bien sûr, on peut prétendre que ces montants sont
insuffisants mais, encore une fois, c'est peut-être cela qu'il faudrait
dire nous nous joindrions, à ce moment-là, aux reproches
qui nous sont adressés plutôt que de prétendre
erronément que nous avons fait quelque économie que ce soit en
supprimant les besoins spéciaux.
Sur le plan individuel, puisque les chiffres que j'ai donnés
tantôt sont sur le plan collectif, sur le plan individuel, nous nous
sommes basés également, quant à la majoration des
barèmes, sur le pourcentage du revenu des familles au Canada, des
familles à des niveaux de revenu légèrement
supérieurs à l'aide sociale, sur le pourcentage qu'elles
consacrent effectivement à des besoins analogues.
Donc, toute proportion gardée, nous avons essayé, à
l'époque, de situer le bénéficiaire de l'aide sociale dans
la même position relative que son voisin qui, lui, n'est pas
bénéficiaire de l'aide sociale mais qui jouit d'un revenu quelque
peu supérieur à l'aide sociale, résultant d'un emploi.
Globalement, encore une fois, il n'en est résulté aucune
économie pour l'Etat, au contraire, une dépense
additionnelle.
On nous dit: La taxe d'eau représente un besoin nouveau, une
nouvelle charge pour les familles. Je veux bien qu'elle représente une
nouvelle charge, mais lorsqu'on nous dit, par ailleurs que cette nouvelle
charge doit être satisfaite à même une allocation
inchangée, je suis manifestement, pour les raisons que j'ai
indiquées tantôt, en désaccord.
Il existe déjà, dans les prestations d'aide sociale, les
sommes qui autrefois étaient consacrées au paiement de la taxe
d'eau et qui étaient prélevées à la source. Non
seulement ces sommes existent
toujours mais elles ont subi, depuis les changements administratifs, des
indexations successives.
Il n'y a donc pas eu diminution, ces revenus existent comme ils
existaient auparavant.
La seule différence à être intervenue, c'est qu'ils
sont désormais versés directement aux familles et, bien
sûr, que les familles se trouvent en face d'un compte à payer,
plutôt que d'un compte déjà acquitté. Mais les
revenus équivalents se retrouvent dans leurs allocations, si faibles
qu'on les trouve, par ailleurs. Encore une fois, M. le Président, je ne
veux pas, en alléguant que ces sommes se trouvent présentes dans
le montant forfaitaire qui leur est attribué, prétendre que je
suis totalement satisfait du niveau absolu de ces sommes. Il demeure que l'on
ne peut pas représenter faussement la réalité en
prétendant qu'on les a privés d'une source de revenus ou qu'on
leur a imposé une charge nouvelle qui ne leur était pas
imposée dans le passé. Cette charge leur était
imposée, les revenus leur étaient donnés; c'est le
mécanisme par lequel ils seraient censés trouver leur chemin dans
les trésors des municipalités qui a été
modifié, rien d'autre.
Je peux tout à fait comprendre également les
difficultés budgétaires qu'un tel paiement, qui se fait une fois
par année, peut provoquer dans le budget d'une famille qui n'est pas
habituée à en prévoir l'incidence. D'ailleurs, dans le
souci de faciliter la période de transition, nous avons assumé,
l'automne dernier je l'ai annoncé à l'époque
que, pour la première année, le quart des comptes de taxe d'eau
qui serait effectivement payé par les bénéficiaires de
l'aide sociale serait assumé par le gouvernement pour faciliter
l'ajustement dans l'administration du budget, un budget dont l'administration
est peut-être rendue plus difficile à cause d'un paiement
irrégulier de cette nature, quoique je ferais remarquer que ce n'est pas
le seul paiement irrégulier auquel ont à faire face même
les bénéficiaires de l'aide sociale.
Donc, il y a eu une reconnaissance que nous avons donnée de cette
difficulté d'ajustement dans les budgets des familles, en assumant 25%
du coût de la taxe d'eau de ceux qui la payaient effectivement. Nous
avons également pris des dispositions avec le service des finances de la
ville de Montréal pour que des modalités d'étalement des
paiements dans le temps soient prévues et soient rendues accessibles aux
bénéficiaires de l'aide sociale, justement à cause des
difficultés budgétaires que leur cause un paiement qu'ils doivent
maintenant administrer eux-mêmes. Ce n'est pas un paiement qu'ils doivent
assumer, puisqu'ils l'ont toujours assumé, mais ils doivent maintenant
administrer ce paiement, administration qui était faite pour eux
auparavant. Ceci est difficile, je le reconnais, et nous avons pris les mesures
que je viens de décrire pour y faire face.
M. le Président, je m'en veux un peu de prendre autant de temps,
mais ce sont des points qui sont manifestement faux, encore une fois, qui ont
été affirmés et il est important de les éclaircir.
En dernier lieu, je veux revenir sur ce que j'ai donné comme indication,
déjà la semaine dernière, relativement à l'effet de
l'inflation sur les budgets des bénéficiaires de l'aide sociale.
On vient d'alléguer l'importance exceptionnelle de l'inflation des
produits alimentaires. Nous ne nions pas, évidemment, l'importance de ce
phénomène en 1974 et l'importance particulièrement grande
des dépenses alimentaires pour les bénéficiaires de l'aide
sociale.
Encore une fois, tenant compte de ce calcul, tenant compte du
pourcentagedu budget des familles bénéficiaires de l'aide sociale
relativement plus élevé, encore une fois, que pour les autres
familles, tenant compte de l'évolution des autres éléments
de dépenses pour les bénéficiaires de l'aide sociale, nous
en venons à un indice corrigé pour ces
bénéficiaires de 11.1% pour l'année 1974, alors que j'ai
déjà indiqué que la hausse des barèmes de l'aide
sociale, au 1 er janvier 1975 par rapport à l'année
antérieure, s'est située respectivement à 10.2% et 12%
dans le cas'des personnes seules et des familles, donc, dans un ordre de
grandeur tout à fait comparable, particulièrement pour les
familles légèrement supérieur à l'inflation, durant
l'année qui vient de s'écouler.
Donc, il n'y a certainement pas eu de perte, au moins par rapport
à janvier 1974 à comparer à janvier 1975. Encore une fois,
M. le Président, il ne s'agit pas d'un rattrapage en retard, sauf de la
façon absolument arithmétique dont on pourrait faire ce
règlement. Bien sûr, l'indexation est basée sur le
passé, il n'y a pas moyen de faire autrement, mais la base qui est
l'objet d'une indexation, elle, n'est pas le fruit simplement de l'indexation;
elle est le fruit d'une anticipation non seulement partielle, mais
corrigée en cours de route durant 1974, justement à cause de
l'erreur de cette anticipation, pour refléter le niveau des prix au
point milieu de l'année, c'est-à-dire vers le 1er juillet d'une
année donnée. C'est donc, au plus, un retard de six mois sur une
augmentation qui est déjà anticipée en partie dans la
hausse des barèmes.
Le Président (M. Cornellier): Le député de
Sainte-Marie.
M. Malépart: M. le Président, je me pose des
questions. Pour quelles raisons l'aide sociale, les allocations ne sont-elles
pas indexées, comme les pensions de vieillesse, à tous les trois
mois? Une autre question. Vous avez parlé des mesures que le
ministère a prises, avec les autorités de la ville de
Montréal, pour échelonner les paiements. Je dois vous dire
j'ai vérifié personnellement que ces mesures n'ont pas
été tellement efficaces, parce que les fonctionnaires demandaient
aux gens de rembourser un montant de $15 par mois.
Compte tenu de leur faible revenu, c'était impossible. Je dois
vous dire que des menaces ont même été faites. Les
bénéficiaires de l'aide sociale ont vécu un traumatisme
durant cette période. C'est impensable. Disons qu'il y avait la campagne
qui les incitait à brûler les chèques, puisque les gens ne
savaient pas s'ils devaient les brûler. Ils appelaient à un autre
département qui, pour eux, est un département gouvernemental,
soit le CLSC, soit le bureau des officiers de bien-être social puis on
disait aux gens que la meilleure façon était de les brûler.
Alors,
ils se demandaient qui faisait la loi. C'est que vous avez deux
structures puis les gens ne savaient plus où aller. Ils appelaient au
niveau de la ville pour prendre des arrangements pour payer $3 par mois puis on
leur refusait en leur disant: C'est $15 où il va y avoir des
poursuites.
Il y a aussi un facteur qui est presque incroyable, c'est que du fait
que les bénéficiaires de l'aide sociale ont retourné le
chèque au ministère des Affaires sociales pour payer le quart,
ils ont reçu un compte avec intérêt. Alors les gens, je
pense bien, se posent des questions pour savoir de quelle façon s'en
sortir.
M. Forget: M. le Président, j'ai eu le plaisir de discuter
assez souvent avec le député de Sainte-Marie de ces
problèmes de taxes d'eau et il m'a alerté à
l'évolution de la situation au fur et à mesure de son
développement. Il est clair que si, dans une certaine mesure et dans une
mesure assez complète d'ailleurs, la ville de Montréal a
administré l'aide sociale, y compris la préparation des
paiements, la préparation des chèques pendant de nombreuses
années, le ministère des Affaires sociales, pour sa part, ne peut
certainement pas et n'a certainement pas l'intention de se substituer au
service des finances de la ville de Montréal pour la perception des
comptes de taxe d'eau.
Les indications que je viens de donner sur le paiement d'un quart et
l'étalement des paiements sont des recommandations, ce sont des
indications que nous avonsdonnées, des voeux que nous avons
exprimés, si l'on veut, à la ville de Montréal, de
façon à faciliter une transition qui nous paraissait
inévitable. De ceci je n'ai pas parlé puisque je ne crois pas
qu'il s'agisse là d'une question sur laquelle il y a
véritablement de controverse. Le principe même selon
l'administration de l'aide sociale était déléguée
à un autre organisme qui était à la fois un
créancier des bénéficiaires est une situation qui appelait
évidemment une correction. Là-dessus nous n'avons certainement
aucun remords des changements qui sont intervenus.
C'était une situation anormale qui résultait de toute une
histoire, bien sûr, et je ne cherche certainement pas à
blâmer qui que ce soit, certainement pas ceux qui assumaient cette
administration au meilleur de leurs connaissances. Mais, quant au principe
lui-même, c'était une chose qui devait se faire tôt ou tard
et nous sommes tout à fait contents d'avoir pu le faire.
Maintenant, sur le plan de l'impact sur les familles et les individus,
tenant compte des remarques de tantôt à l'effet que personne n'a
été financièrement pénalisé, mais que bien
sûr l'administration de leur budget a été rendue plus
compliquée, nous avons exprimé des voeux, nous avons fait des
recommandations qui ont pu être ou ne pas être suivies dans tous
les détails. Il est bien sûr qu'on peut souligner des
difficultés de coordination au niveau des différentes agences,
des différents organismes, gouvernementaux ou non, qui interviennent et
qui sont en relation avec les populations défavorisées.
C'est, d'ailleurs, la raison pour laquelle, je pense, il est tellement
important que l'on se borne à donner des informations, au moins, qui ne
soient pas faussées. Les informations que j'ai données ce matin,
je pense, sont absolument nécessaires. Encore une fois, on peut
déplorer autant qu'on le voudra nous nous joignons à cette
action, d'ailleurs que le niveau des prestations d'aide sociale, dans le
cas des familles en particulier, ne soit pas encore égal aux seuils de
pauvreté tel que nous les calculons nous-mêmes.
J'ai noté les proès qui avaient été
réalisés depuis quelques années dans la couverture de plus
en plus considérable des seuils de pauvreté. Il était
inévitable qu'il y ait une certaine confusion. Pourtant, et ceci
pourrait aussi faire l'objet d'un développement, mes collaborateurs ont
rencontré des groupes qui s'intéressent à défendre
les droits des assistés sociaux, des bénéficiaires de
l'aide sociale. Ils leur ont expliqué toutes les mesures qui avaient
été mises en place, les moyens d'aide qui étaient mis
à leur disposition, les mesures qui avaient été
recommandées à la ville de Montréal. Je note, cependant
qu'en effet il y a eu beaucoup de déclarations fausses qui ont pu se
glisser dans tout cela. C'est la responsabilité, je pense, de tous ceux
qui connaissent les faits de les communiquer à ceux qui viennent leur
faire part des problèmes particuliers qu'ils ont rencontrés.
Le Président (M. Cornellier): L'honorable
député de Saint-Jacques.
M. Charron: M. le Président, sur le certain nombre de
faussetés que j'avais affirmées, au dire du ministre, tout
à l'heure, il n'y en a pas beaucoup qui ont été
démolies ou prouvées comme telles dans la réponse qu'il
adonnée. Il s'est dit d'accord avec moi pour admettre que la plus grande
partie de l'inflation, sur le plan alimentaire, affectait plus les
bénéficiaires de l'aide sociale que quiconque des citoyens.
C'était une première affirmation que j'avais faite.
Il a prétendu que j'avais affirmé que l'augmentation de
janvier 1974 n'était qu'une indexation. Je n'avais jamais affirmé
cela; elle contenait, en soi, en plus de l'indexation, un rajustement du
barème. Mais il a dû admettre, ce qui était loin
d'être une fausseté de ma part, que l'augmentation avait
été à ce point calculée de façon
insuffisante qu'un rattrapage a dû survenir sur cette base même le
8 mai 1974. Le rattrapage en question, puis-je vous le décrire? Parce
que le ministre a eu la pudeur de ne pas le présenter comme tel à
l'Assemblée ni à la commission encore ce matin.
Je vous signale simplement le cas de deux adultes avec deux enfants
quant au rattrapage en question, suite à la mauvaise évaluation
qui n'avait été que de l'ordre de 3% à 4% alors que tout
le monde s'attendait à une inflation beaucoup plus élevée.
Donc, ce n'était qu'un dû aux assistés sociaux et cela
était d'autant plus dû qu'en janvier 1974 on n'avait pas que
rajusté les barèmes, on avait aussi fait des assistés
sociaux la seule catégorie de citoyens qui n'avait pas le droit de
bénéficier de la hausse des allocations familiales comme
n'importe quel autre citoyen du Québec. Si cela leur était
dû, cela leur était dû largement. Non seulement le
ministère ne s'était contenté de rajuster ses
barèmes de 3% ou 4% quand l'inflation était déjà
bien évidente, mais en plus de cela on avait supprimé la
jouissance des allocations familiales à ces citoyens au même
titre, en tout cas, que les autres de n'importe quelle autre classe
sociale.
Pour vous donner mon exemple, deux parents, deux enfants ont
passé, au mois de juin dernier, de $309 à $320, une augmentation
de $11 par mois pour quatre personnes. On m'a reproché, le ministre m'a
reproché, à un moment donné j'étais à
cette même table de la commission l'année dernière lorsque
l'annonce avait été faite à l'Assemblée, sans que
nous en ayons été le moindrement prévenus, d'ailleurs
d'avoir décortiqué à la cent. Il dit: Pourquoi pas
à la seconde et à la minute? Il m'a évité sur ce
terrain, sur ce que cela signifiait. Moi, je n'ai aucune fausse pudeur à
présenter cette augmentation sur la portée réelle du
pouvoir d'achat que cela signifie pour ces personnes, qui, encore une fois,
faisaient face à une inflation qui avait été prévue
à peine du quart ou du tiers en janvier, même pas du tiers, mais
du quart de ce qu'elle a été réellement en 1974, qu'on a
représentée à grands renforts de publicité et de
tambours, Charles Denis et compagnie en tête, pour nous présenter
cette augmentation de $16 millions.
Le gouvernement donne $16 millions de plus aux assistés sociaux;
déclaration ministérielle en Chambre, caméra, tout ce que
vous voulez. Cela voulait dire quoi dans le revenu réel des citoyens,
une fois que cela se rendait à la table des familles, dont les revenus,
on s'entend tous, dit le ministre, sont nettement insuffisants? Cela voulait
dire $2.75 par semaine, pour quatre personnes, de revenu d'achat
supplémentaire. C'était cela qu'on leur donnait, en juin dernier,
au moment où tout le monde voyait que l'inflation atteignait des
proportions invraisemblables, qui engraissait, d'ailleurs, les coffres du
gouvernement par le fait même, et qui permettait à ce gouvernement
de se trouver une générosité soudaine. C'est beaucoup
mieux de faire miroiter $16 millions à l'ensemble des assistés
sociaux, comme image de générosité, que de dire: Le
gouvernement ajoute, à chaque famille de deux adultes et deux enfants,
$2.75 par semaine pour faire face à la hausse du coût de la vie.
Cela a signifié quoi? Cette augmentation, survenue le 8 mai 1974,
était déjà envolée au taux d'inflation quand, au
mois de juin ou au mois de juillet suivant, à 1.2%, 1.3% d'inflation par
mois, tout avait déjà été mangé. Non
seulement déjà tout avait été mangé, mais je
soutiens encore qu'il a fallu manger la taxe d'eau, à un moment
donné.
M. le Président, je voudrais conclure avec cette intervention.
Nous sommes tous d'accord, le ministre aussi, pour dire que le plancher, le
revenu mensuel que l'on indexe, c'est toujours du rattrapage. Ce n'était
pas une fausseté non plus que j'avais affirmée, cela ne peut pas
être autrement, dit le ministre lui-même, mais c'est le plancher
qui fait défaut. Et même si on indexe, on fait juste flotter la
pauvreté, d'année en année, pour lui permettre de ne pas
descendre plus bas, mais elle demeure la pauvreté, celle qui flotte. Une
insuffisance indexée d'année en année, ça demeure
une insuffisance, M. le Président. On est tous d'accord
là-dessus, nous dit le ministre des Affaires sociales, mais c'est quand
même le cas réel.
J'ai ouvert ce débat sur l'aide sociale en disant
immédiatement qu'avant de nous pencher sur les détails, faut-il
calculer un barème de façon différente? Là
où l'injustice est la plus flagrante, c'est dans l'échelle
même. Qu'on l'indexe ou qu'on ne l'indexe pas, qu'on la rajuste, comme
dit le député de Sainte-Marie et j'endosserais sa position,
à tous les trois mois plutôt qu'à toutes les années,
peut importe, on indexera toujours une mesure qui est insuffisante.
L'indexation ne lui permettra que de se maintenir insuffisante, mais ne lui
permettra jamais de faire disparaître son caractère
d'insuffisance. On se retrouve avec la même situation que maintenant. M.
le Président, au fond, la philosophie qui est en train de s'installer,
sur laquelle je suis d'accord en principe, c'est la disparition des
critères de barèmes spécifiques pour en arriver, Dieu sait
quand, depuis que cela nous est promis, à un revenu minimum garanti, que
l'on répète, d'année en année, dans le discours du
trône. Si c'est vraiment par étapes que nous y allons, en faisant
disparaître les besoins spécifiques pour laissera la personne
bénéficiaire le soin d'administrer elle-même son budget,
c'est à se demander si cette philosophie est encore souhaitable et
devrait même être endossée par quiconque, si elle constitue,
si elle n'intervient pas sur un barème de base rajusté.
Car, à mon avis, M. le Président, tant que l'on
maintiendra l'aide au taux de 1975 $195 pour une personne seule, c'est
le cas de la majorité des bénéficiaires de l'aide sociale
plus on remettra de besoins spécifiques qui, jadis,
étaient pris en charge par les Affaires sociales ou par la ville de
Montréal qui se payait elle-même, pour reprendre notre exemple de
ce débat, plus on fera sentir l'insuffisance de ce montant à la
personne, plus on ajoutera, à la personne qui a maintenant la charge
d'administrer son budget, la complexité d'administrer une si petite
somme et de se débrouiller par elle-même, face à
l'inflation. Le député de Sainte-Marie peut peut-être
témoigner avec moi, nous sommes représentants de populations
extrêmement semblables. Ce phénomène, s'il est bon en
principe, lorsqu'il intervient sur des revenus insuffisants, qu'ils soient
indexés ou non, mais nettement insuffisants, à la base, se trouve
à créer encore plus de traumatisme et plus de difficulté,
car il fait découvrir encore plus aux assistés sociaux les
limites extrême des ressources qu'ils ont.
Au fond, même si le montant était moindre à une
certaine époque, lorsque ses besoins de literie, ses besoins de
chauffage, ses besoins de vêtements, ses besoins de nourriture
étaient calculés à part et qu'il avait cette assurance que
quelqu'un les prévoyait quelque part ailleurs, en fin de compte
l'assisté social n'avait, comme difficulté fondamentale,
qu'à administrer un budget réduit pour ses propres besoins, tels
qu'il les déterminait.
C'est une philosophie saine de considérer l'assisté social
comme n'importe quel autre humain et
de lui faire administrer son budget comme n'importe qui, sans mesure
tatillonne, mais à la condition qu'on lui donne le montant pour le
faire, à condition que les revenus y soient; sinon, on lui ajoute des
problèmes. On le met dans la même position qu'une petite famille
de salarié qui est prise avec HFC sur un côté, un paiement
sur ceci et un paiement sur l'autre. Très souvent, cela brise les
ménages, brise les couples et rend la vie impossible. C'est les remettre
dans la même situation. Que nous vaut de les pousser vers cette
situation?
On a calculé à $8 par mois, à un moment
donné, le remplacement de tous les besoins spécifiques qui
étaient précédemment calculés. Les gens ont donc
dû découvrir, à ce moment-là, que tous ces besoins
spécifiques, dont ils n'avaient auparavant pas ou à peine
à se préoccuper, ils devaient les couvrir à
l'intérieur des $8 supplémentaires qu'on leur ajoutait.
Le menu de cette augmentation leur est apparu le premier mois où
ils ont eu à l'administrer. On ne payait plus le
téléphone. Ils devaient l'assumer eux-mêmes. Plus on leur
remettait de besoins à administrer, plus ils découvraient que les
moyens qu'ils avaient pour remplir cette tâche étaient petits et
plus leurs difficultés étaient grandes d'arriver au bout. Plus
ils ont dû faire des choix à certaines occasions pour
éliminer des dettes et, en particulier, la taxe d'eau, car c'est elle
qui y a goûté, à Montréal, en 1974.
Puisque le ministre m'a dit qu'il n'avait pas l'intention, au tout
début de l'ouverture de l'étude de ce programme, de rajuster le
barème de base; il se contente de l'indexation survenue le 1er janvier
et de celle annoncée pour le 1er janvier 1976, ce n'est pas être
un grand prophète, ni un grand devin de dire que le même
phénomène se produira au cours de l'été prochain.
Plus on ajoute de besoins à couvrir par les assistés sociaux et
plus le montant demeure le même et se contente d'être une
insuffisance indexée, plus sa limite réelle paraît aux yeux
de tous. Là, c'est la ville de Montréal qui en a le choix.
Il y a une question que j'ai posée et je pense que le
député de Sainte-Marie l'a reprise tantôt. Qu'est-ce qui va
arriver aux 50% de gens qui l'ont payée, la taxe d'eau? Ceux qui se sont
rendus aux mesures tatillonnes de la ville de Montréal et aux mesures
difficiles de $15 de paiement par mois, puisque le député
de Sainte-Marie a bien fait de le signaler c'était
l'étalement maximum que la ville de Montréal avait permis de
faire. Est-ce qu'ils vont être remboursés parce qu'ils ont suivi
la loi? Est-ce que ceux qui ne l'ont pas payée, par contre, seront
poursuivis?
Est-ce que le ministre a l'intention de maintenir cette
inégalité, cette injustice, de couvrir le dossier et d'attendre
que cela se répète en 1975? C'est la question que je lui ai
posée, que mon collègue a reprise et nous espérons une
réponse maintenant.
M. Forget: M. le Président, on m'invite à faire un
commentaire qui dépasse manifestement le cadre de l'étude des
crédits en commission et même le cadre des déclarations
qu'il m'appartient de faire, puisque l'on parle d'un problème qui
concerne la ville de Montréal, dans la perception d'une taxe. Une
m'appartient pas de dire, pour la ville de Montréal, quelles sont ses
intentions et comment elle entend procéder.
Je peux simplement référer le député de
Saint-Jacques et, enfin, tous les membres de la commission aux
déclarations, autorisées ou non, qui ont paru depuis quelques
semaines dans les journaux et ailleurs, à l'effet que la ville de
Montréal, si ma mémoire est bonne, ne se montrerait pas
indûment dure dans la façon de percevoir ces comptes. Ceci est
peut-être, d'ailleurs, une représentation même plus forte
que celle que l'on a faite dans certains cas. Maintenant, encore une fois, il
ne m'appartient pas de parler au nom de la ville de Montréal. C'est un
problème administratif et fiscal de la ville de Montréal. Ce
n'est pas le problème du ministère des Affaires sociales pour les
raisons que j'ai abondamment expliquées au début de cette
séance.
La question doit s'adresser à la ville de Montréal et non
pas au ministère des Affaires sociales, compte tenu de tout ce que j'ai
dit sur le sujet, compte tenu des suggestions, des propositions que nous avons
faites à la ville pour la perception de ses comptes, et compte tenu de
mes remarques générales sur les problèmes de la
fiscalité municipale et des relations entre les municipalités et
le gouvernement provincial dans la solution de ces problèmes de
fiscalité municipale.
M. Charron: M. le Président, j'aimerais savoir s'il est
possible que des mesures spéciales je vais faire un
pléonasme, M. le Président pour les besoins
spéciaux interviennent pour que le coût du téléphone
soit compris au chapitre des besoins spéciaux pour certaines
catégories de bénéficiaires. Je n'ai que deux exemples
à donner. L'un tient au propre sens humanitaire. C'est celui d'une
personne malade, cardiaque ou en danger d'attaque soudaine ou aggravation
soudaine d'une maladie ou d'une condition de santé. Ai-je besoin de
reprendre l'argument que je tenais avec Mme Chevalier quant au traumatisme
psychologique des médicaments pour dire que ce traumatisme est grand
également, cette sensation d'insécurité pour des
personnes, encore une fois, spécifiquement malades, en danger d'avoir
une attaque quelconque de maladie qui les obligerait à être
transportées d'urgence à l'hôpital ou à rejoindre
d'urgence un médecin, ce qui peut être une question de minutes
pour leur survie ou pour leur santé? A-t-on l'intention, par exemple,
également, d'étendre cette mesure à ce que les citoyens du
Regroupement à faible revenu du Bas-Saint-Laurent me signalaient lors de
mon passage dans cette région, il y a quelques semaines,
c'est-à-dire certaines catégories de bénéficiaires
éloignés des centres urbains, éloignés du bureau
régional des affaires sociales, dans des villages en
périphérie de Rimouski, par exemple, qui n'ont pas encore
été fermés, ou sur la Côte-Nord, pour qui le
téléphone constitue l'unique moyen de rejoindre le centre urbain
le plus rapproché et le ministère des Affaires sociales, quand un
besoin s'impose?
Autrement dit, est-ce qu'on entend encore se
montrer aussi intraitable sur la question du téléphone,
quelle que soit la cause spéciale de la personne qui milite en sa
faveur? M. le Président, j'ai vu des cas, qui ont certainement
été rapportés à l'oreille du ministre. Cela ne se
peut pas qu'aucun officier des Affaires sociales n'ait, à un moment
donné, décidé de faire suivre un mémo
jusqu'à sa table pour dire que dans certaines catégories de
population malade ou certaines catégories de population
éloignée des centres urbains Bas-Saint-Laurent,
Gaspésie, Côte-Nord cela constitue une véritable
injustice.
Je ne parle pas de la réinstallation gratuite pour tous les
bénéficiaires. Je sais très bien que je m'opposerais
à un veto qui a déjà été maintes fois
exprimé. Je demande seulement si, dans ce qui est prévu comme
étant des besoins spéciaux, on peut inclure le
téléphone pour cette catégorie de personnes et si c'est un
espoir qu'on peut avoir, dans les modifications à la
réglementation qui nous ont été annoncés, de voir
cette modification apportée.
M. Forget: M. le Président, je me pose vraiment des
questions quand j'entends, d'une part, le député de Saint-Jacques
nous direqu'il est d'accord avec le principe de traiter les assistés
sociaux comme tous les autres citoyens et quand, sur chaque quest ion en
particulier, il se comporte exactement comme s'il n'y croyait pas.
Si ce principe n'a aucune application, à son point de vue, je me
demande s'il devrait continuer à ledéfendre. Quant à nous,
nous allons continuer à le défendre.
Il y a quelques années je pense qu'il y a maintenant plus
de quatre ans on abrogeait, en effet, un besoin spécial pour les
téléphones, me dit-on, et on le remplaçait par une
majoration mensuelle de $6 de l'aide sociale, ceci ayant été fait
dans l'esprit du principe auquel, au moins dans les mots, le
député de Saint-Jacques souscrit. Maintenant, on revient à
la charge en disant que cette allocation de base ne comprend pas les
allocations de téléphone et, donc, qu'il faut réinstaller
un besoin spécial pour le téléphone dans certains cas.
Est-ce qu'on va demander à nos agents de sécurité
sociale, dans chaque bureau, de déterminer qui a besoin d'un
téléphone et qui n'en a pas besoin?
Je trouve cette perspective assez peu agréable à
contempler. J'imagine d'avance les lettres et les plaintes que nous allons
recevoir, basées sur le fait que tel ou tel agent, ayant agi au meilleur
de sa connaissance, a déterminé que madame X ou monsieur Y
n'avait pas besoin de téléphone, puisque nous n'entendrons pas
parler des cas où on accorderait une allocation de
téléphone qui ne serait pas nécessaire, bien
sûr.
Mais, de toute manière, dans un cas, le problème que l'on
cause c'est au contribuable et, dans l'autre, c'est évidemment beaucoup
plus personnel, c'est au bénéficiaire lui-même.
Je ne peux pas envisager que nous allons demander à nos bureaux
d'aide sociale de contrôler la vie des gens de cette
façon-là, en ayant un droit que bien peu d'individus ont sur la
vie des autres, en déterminant quels sont les besoins qu'ils ont et les
besoins qu'ils n'ont pas.
Si on descend jusqu'au téléphone, je me demande où
on va s'arrêter, très clairement, le mouvement amorcé par
le gouvernement depuis quelques années, comme on le sait très
bien, et comme on prétend y souscrire, en principe, va tout à
fait dans l'autre sens. La réponse à cette question ne peut pas
être autrement que négative. Il n'est pas question de
réintroduire l'administration publique dans le budget des familles.
Il n'est pas question de faire intervenir des décisions
arbitraires, forcément arbitraires, malgré tous les efforts qu'on
pourrait faire pour édicter des normes qu'on nous reprocherait
immédiatement après, pour diminuer l'arbitraire des
décisions qui seraient prises dans tous les cas. Il n'est pas question
de réintroduire l'arbitraire dans l'attribution des besoins au point
où on envisagerait des allocations spéciales pour le
téléphone.
Il y a déjà l'allocation de base. Encore une fois, on
revient toujours au même argument. On veut faire ressortir, par des cas
particuliers, un argument qu'on répète sans cesse et qui a sans
doute du mérite mais qu'il faudrait peut-être présenter
exclusivement, au risque de répétition, comme un argument
général et non pas comme un argument spécifique sur le
niveau général des barèmes.
Mais, quel que soit le nombre des cas particuliers qu'on allègue,
on ne prouvera jamais rien d'autre que ce que l'on peut prouver au
départ, que bien sûr il existe encore de la pauvreté et que
l'aide sociale, à elle seule, malgré ses $550 millions pour
l'année à venir, ne sera pas en mesure de supprimer la
pauvreté au Québec, en effet, et nous le déplorons tout
autant que l'Opposition.
M. Charron: M. le Président, le principe auquel le
ministre vient se référer, qu'il m'accuse de ne maintenir que du
bout des lèvres mais de ne jamais le soutenir, ce n'est pas de moi de le
défendre et de le réaliser. Je n'ai pas encore été
élu, je n'appartiens pas à un parti qui a été
élu et qui l'a inscrit à son programme en disant qu'il allait le
faire, moi.
Je suis obligé de revenir à ces besoins spécifiques
parce que le principe auquel je crois c'est celui du revenu minimum garanti que
ce gouvernement s'est engagé à établir en I970, il y a
maintenant cinq ans. Ce n'est pas parce que lui met du temps à le faire,
parce que lui refuse de mettre les ressources financières à la
disposition des citoyens pour le réaliser que moi je vais aller
retrouver des gens que je découvre dans un traumatisme psychologique
parce qu'on a retiré le calcul de besoins spécifiques et leur
dire, moi, à la place du ministre des Affaires sociales: Ecoutez, le
revenu minimum garanti s'en vient. Un jour, vous aurez un revenu qui vous
permettra de subvenir à tous ces besoins normaux d'une personne humaine,
comme disait le député de Taschereau, vous serez à un
seuil de vie décente un jour et vous n'aurez plus besoin de calculer de
façon aussi tâtillonne, si vous avez besoin d'un
téléphone ou non. Mais ce principe auquel je crois et que dit
défendre le ministre des Affaires sociales, il n'a pas qu'à le
défendre, il est élu depuis cinq ans pour le
réaliser. Et de plus il ne le réalise pas plus, il accepte
de participer à un gouvernement qui ne lui met pas entre les mains des
ressources financières pour le réaliser plus il va avoi rdes cas
où les besoins spécifiques supprimés sans que le revenu
minimum garanti soit installé, constituent une injustice. Et plus aussi,
je le signalerai, même si ça lui paraît à lui, un
manque au principe que je dis défendre.
Moi, un principe je le défends à condition qu'on le
réalise. Autant la semaine dernière j'ai dit à madame le
ministre d'Etat que ses affirmations ne pouvaient êtreque des
affirmations lorsqu'elles viennent de la bouche d'un ministre, à moins
qu'il y ait engagement politique à les réaliser on s'est
entendu là-dessus autant je le dis aujourd'hui au ministre des
Affaires sociales en face.
Vous ne me ferez pas souscrire à un principe que vous continuez
à faire miroiter depuis cinq ans au-dessus de la tête de la
population sans le réaliser. Si vous le réalisez, je vais
l'appuyer, l'Opposition va l'appuyer amplement. Si vous êtes capable de
convaincre votre gouvernement de le réaliser, d'aller chercher chez le
ministre des Finances les crédits supplémentaires pour le faire,
on va le réaliser. Vous ne me verrez pas intervenir à la table de
la commission pour vous demander des besoins spécifiques de
téléphone pour les personnes qui sont cardiaques, qui ont peur de
mourir seules, abandonnées, parce qu'elles n'ont pas de moyens de
rejoindre leur médecin ou quiconque pour leur venir en aide lorsque,
soudain, la maladie les frappe. Je n'interviendrai plus de cette façon,
parce que j'aurai la conviction qu'au Québec on aura donné aux
citoyens un seuil de vie décent où ce sera leur
responsabilité de s'installer un téléphone s'ils trouvent
qu'ils en ont besoin. Ce principe, j'y souscris pour autant qu'on le
réalise. Mais quand on le maintient au-dessus de la tête des gens,
qu'on le répète de discours inaugural en discours inaugural, mais
que, dans le fond, on se trouve devant une situation où on maintient des
gens à $195 par mois et qu'on ne leur donne même pas de
téléphone, j'ai le droit d'intervenir comme je le fais, tout en
soutenant le même principe.
Je ne soutiens pas un principe que pour la forme. Si vous ne le
réalisez pas, vous allez poser des téléphones chez les
gens qui en ont besoin, chez les gens qui ont ce besoin psychologique aussi
bien que physique à certaines occasions, car leur santé en
dépend. On va réaliser le revenu minimum garanti, vous allez vous
entendre avec le gouvernement d'en face qui est votre allié, que vous
avez soutenu sur les "hustings" électoraux, dont vous avez dit qu'il
n'était pas un obstacle à la réalisation d'une politique
sociale cohérente pour les Québécois; vous allez
allerchercher à Ottawa l'argent qu'il nous faut pour le réaliser
ou bien vous n'en parlerez plus, de ce principe.
Mais vous ne me ferez pas accrocher sur le principe pendant qu'il y a
des gens qui vont attendre en arrière. On fait cette politique, on a les
moyens les Québécois de la faire à part
cela. Sinon vous avez menti aux gens en 1970 et vous avez menti en 1973 quand
vous l'avez inscrite au programme de votre parti politique. Et vous avez menti
encore à la Chambre lorsque vous l'avez fait dire par le
lieutenant-gouverneur dans le discours inaugural.
Au bout de cinq ans d'un gouvernement, on doit s'attendre à des
réalisations, à un moment donné, ou bien pas du tout. Vous
le faites ou vous ne le faites pas. Si vous ne le faites pas, moi je vais vous
parler des cas de téléphone; moi je vais vous parler des cas de
médicaments; moi je vais vous parler des cas d'injustice qui arrivent.
C'est bien ma détermination. Quand vous présenterez une loi
à l'Assemblée, qui instituera, ici, un revenu minimum garanti
pour les citoyens et qui leur permettra un seuil de vie décente, vous
allez avoir l'appui entier de l'Opposition, vous le savez. Mais tant que vous
ne le ferez pas, on va être obligés de subvenir à ces
cas.
On enlève $2 par mois durant les mois d'été, M. le
Président, aux assistés sociaux qui ont un jardin. C'est de la
mesquinerie comme celle qui existe là. Et on ne soulèverait pas
cela à un moment donné, qu'un assisté social dans le bas
Saint-Laurent se fait punir pour des actes aussi inoffensifs que
ceux-là? Tant que vous maintiendrez des mesures tâtillonnes et que
vous refuserez de réaliser les promesses de votre gouvernement, je
soulèverai le même genre de questions à la table de la
commission. Je n'ai aucun remords d'avoir manqué à un principe
auquel je souscris, celui du revenu minimum garanti des citoyens, parce que ce
matin j'ai soulevé à la table de la commission parlementaire
qu'il y a des citoyens pour qui l'absence de téléphone peut
être dramatique à une certaine occasion, et que vous refusez de le
voir.
Je connais tout le côté discrétionnaire que cela
voudrait dire. J'admets très bien que cela signifierait qu'on aurait,
à un moment donné, à évaluer si une telle personne
a besoin d'un téléphone. Je sais très bien dans quel
chemin je m'en vais. Ce n'est pas un chemin que je choisis, mais vous le
maintenez pour un tellement grand nombre de besoins autres, ailleurs, que je
peux me permettre de rajouter celui-là lorsqu'il est aussi dramatique
dans la vie de certains citoyens. Faites disparaître tous ces besoins,
assurez aux citoyens... Les Québécois ont les moyens. Qu'on
rapatrie simplement une partie des taxes et des impôts qu'on laisse
administrer par un autre gouvernement; qu'on ait simplement ici un gouvernement
qui a la volonté d'aller chercher cette somme et on est capable de
réalisercette mesure. Et vous le savez. Sinon, vous avez menti aux
députés quand vous l'avez inscrite dans votre programme de parti
politique. Bien, qu'on le fasse! Si on ne le fait pas, on va continuer à
avoir le genre de discussions qu'on a ce matin et on va en avoir souvent.
Je voudrais soulever un autre cas, la hausse de l'évaluation
foncière. On me dira que c'est encore un cas spécifique qui
m'éloigne de la philosophie à laquelle je dis souscrire. La
hausse de l'évaluation foncière à travers tout le
Québec, vous le savez, M. le Président, cette hausse de taxes
déguisés a rendu caduque je vous réfère au
paragraphe f) du règlement 402: "La maison qui sert de résidence
et le terrain sur lequel elle est bâtie, dont l'équité
nette sur la base de la valeur marchande et déduction faite des
hypo-
thèques et autres charges qui les grèvent
n'excèdent pas $15,000. "Cette maison n'entre pas dans le calcul
prévu à l'article précédent qui est le
critère d'évaluation des ressources que possède une
personne."
Qu'est-ce qui est arrivé, M. le Président? Avec la
nouvelle loi de l'évaluation foncière, que cette Assemblée
a votée, plusieurs domiciles précédemment
sous-évalués à $15,000 se sont trouvés à
être réévalués plus haut que cela. C'est la
même maison qui, auparavant, ne constituait aucunement une charge trop
lourde pour un assisté social. Je parle des assistés sociaux du
Bas-du-Fleuve et de la Gaspésie.
Il y a des députés au tour de cette table qui pourraient
donner le même exemple que celui que je m'apprête à donner.
Il y a des assistés sociaux qui ont vu leur maison, dont ils avaient
hérité ou qu'ils ont construite à une autre époque,
peu importe, soudainement, par une mesure adoptée par l'Assemblée
nationale, évaluée d'une façon supérieure à
$15,000. Mais cette évaluation signifie une coupure dans le revenu de
ces gens, parce que là on les dit propriétaires d'une maison qui
vaut plus. La maison qui sert de résidence et le terrain sur lequel elle
est bâtie, dont l'équité nette sur la base de la valeur
marchande, déduction faite des hypothèques et autres charges qui
les grèvent, se trouvent à excéder $15,000. C'est la
même maison qui, en fin de compte, a même perdu de la valeur, au
sens physique du mot, parce qu'elle est plus vieil le d'année en
année. Mais par une nouvelle table d'évaluation issue du
gouvernement du Québec, le même que celui auquel appartient le
ministre qui est en face de moi ce matin, elle se trouve à avoir pris de
la valeur, ce qui constitue, pour ces gens, une injustice.
Cette question, d'ailleurs, je peux le souligner sans partisanerie, a
été soulevée à l'Assemblée nationale par le
député de Rimouski lui-même, et il avait parfaitement
raison là-dessus. L'Union des assistés sociaux du Bas-du-Fleuve
l'a maintes fois signalée. Une lettre a été envoyée
au ministre des Affaires sociales, ils attendent encore une réponse. Moi
j'espère en avoir une ce matin.
M. Forget: M. le Président, je vous réfère,
pour fins de brièveté, à la réponse que j'ai
donnée la semaine dernière à l'Assemblée nationale,
à une question sur exactement le même sujet du
député de Rimouski, qui non seulement à titre de
député, mais à titre de maire avait été
confronté par ce problème. J'ai indiqué à ce
moment-là que nous étions à faire et non seulement
dans les étapes initiales et pratiquement à terminer la
révision de l'ensemble des règlements de l'aide sociale et que,
dans le cadre de cette révision, nous envisagions de modifier certains
de ces barèmes actuellement utilisés pour la détermination
des revenus et des actifs.
M. Charron: Celui-là en particulier? M. Forget:
Celui-là en particulier.
M. Lessard: Est-ce que le ministre a l'intention de tenir compte
des régions? Moi, M. le Président, je voudrais quand même
souligner que dans des ré- gions comme la Côte-Nord, le montant de
$15,000 était absolument insuffisant, et actuellement, il est
extrêmement difficile d'avoir des maisons à des coûts
inférieurs à $21,000.
Tout à l'heure je parlerai d'entretien puis je parlerai du
logement aussi. Il y a une chose qui nous paraît essentielle et normale,
je le constate tout simplement, c'est qu'il y a certaines régions
où le coût de la vie est supérieur à d'autres
régions d u Québec. Depuis très longtemps, d'ailleurs,
chez nous, le montant de $15,000 était absolument insuffisant, de telle
façon qu'on limitait pratiquement les bénéficiaires de
l'aide sociale à rester dans des taudis. Il me semble qu'on devrait, en
tout cas, tenir compte de cela.
Bien souvent, quelqu'un devient bénéficiaire de l'aide
sociale à cause du hasard de la vie. Il n'a pas choisi, dans une grande
partie des cas il n'a pas choisi, lui, à un moment donné, au
moment où il travaillait pour une compagnie, au moment où il
pouvait se faire un salaire décent, il n'a pas choisi tout à
coup, comme j'ai des cas actuellement, sur lesquels j'ai eu l'occasion de
travailler, il n'a pas choisi, tout à coup, de devenir
bénéficiaire de l'aide sociale. Il n'est pas capable de remettre
du jour au lendemain sa maison qui est évaluée à $21,000
ou $22,000 par l'évaluation municipale.
Actuellement, tel que c'est fait, qu'on lui prête ou bien la
personne en question est obligée tout à coup de vendre sa
maison.
On lui dit: Vendez votre maison et, après cela, on pourra vous
donner de l'aide sociale. Quand on dit cela à une personne, c'est bien
regrettable, mais la vente d'une maison ne se fait pas aussi facilement que le
ministère des Affaires sociales semble le croire ou que certains agents
du ministère des Affaires sociales semblent le croire. Il me semble que
dans cette modification des barèmes, comme en ce qui concerne aussi le
logement... Je suis d'accord avec le député de Saint-Jacques
qu'il faut accepter le principe d'un revenu minimum garanti, mais tant et aussi
longtemps que cela ne sera pas concrétisé dans les faits, tant et
aussi longtemps que le ministre, comme ce gouvernement, ne se décidera
pas, on sera toujours aux prises avec des problèmes tatillons, mais des
problèmes sérieux pour les bénéficiaires de l'aide
sociale.
Le gars de chez nous qui doit payer, par exemple, un logement... Je
voudrais bien que le ministre vienne se chercher un logement à un
montant inférieur à $125, $130 ou $135 par mois chez nous,
à Hauterive ou à Sept-lles. Auparavant, dans l'ex-loi ou les
ex-règlements du ministère des Affaires sociales, on
prévoyait un montant de $143.50 au point de vue du logement. Maintenant,
le maximum prévu est de $85 ou le minimum, si vous voulez de telle
façon que, chez nous, le bénéficiaire de l'aide sociale
est obligé d'hypothéquer sa nourriture, il est obligé
d'hypotéquer ses biens essentiels pour compenser le montant
supérieur aux normes ou aux critères du ministère des
Affaires sociales pour se payer un logement qui soit décent. Il n'a pas
le choix parce que, jusqu'ici, on n'a pas encore de politique de logement au
Québec et les HLM sont encore plus ou moins
développés.
La même chose en ce qui concernel es $10 d'en-
tretien par mois. Cela, on ne l'a pas indexé et on ne l'a pas
modifié et cela fait encore plusieurs années qu'on est aux prises
avec ce problème. $10 par mois pour l'entretien d'une maison, $120 par
année! Figurez-vous ce que cela peut donner à la fin de
l'année! Encore là, on est aux prises avec des problèmes
tatillons, mais on dirait que le ministre des Affaires sociales se ferme les
yeux sur ces problèmes. Tant et aussi longtemps qu'on n'aura pas une
véritable politique, on sera obligé, nous autres les
députés, d'expliquer la loi et de dire: C'est bien regrettable,
mais le ministre, jusqu'ici, n'a pas pris conscience du fait que ça
coûte plus que $10 par mois pour entretenir une maison.
Nous avons chez nous, comme probablement dans d'autres régions du
Québec, le problème de l'évaluation. Le ministre nous dit
qu'il va le modifier. J'espère qu'il va le modifier en tenant compte
que, dans certaines régions du Québec, une maison
évaluée à $18,000 ou à $20,000, ce n'est pas
exorbitant. Bien souvent, le bénéficiaire de l'aide sociale
était déjà installé dans cette maison et, parce
qu'il n'a pas choisi de devenir bénéficiaire de l'aide sociale,
on le pénalise. On forcerait ces gens à vendre leur maison ou
à demeurer dans des taudis, si vous voulez, consacrant le principe que
le bénéficiaire de l'aide sociale doit rester dans une maison
dont l'intérieur ne serait pas décent.
Il y a le problème du logement, du montant de la norme, de ces
$85 tels que décidés le 23 octobre 1974. Je suis d'accord que
cela a pu favoriser bien peu, comme le dit le ministre, peut-être 28,000
familles bénéficiaires de l'aide sociale. Cependant, cela a
pénalisé aussi d'autres familles de régions où le
coût de la vie est différent que voulez-vous, on n'a pas le
choix de ce qu'il est dans certaines régions du
Québec.
Il y a la questionde l'entretien. Les $10 par mois, j'espère, en
tout cas, que le ministre va modifier cela dans le plus bref délai. En
même temps, on pénalise les propriétaires parce que
ça leur coûte plus cher que $10 par mois pour l'entretien de leur
maison. On a fait disparaître certains besoins spéciaux qu'on
avait auparavant dans ce secteur, tels que les réparations urgentes.
Là, on a compris le système de chauffage parce que c'était
absolument essentiel, mais, auparavant, on pouvait avoir des montants, quand
c'était la santé qui était en cause, pour la
réparation des maisons, qui pouvaient aller, au régional,
jusqu'à $300.
Maintenant, on dit: C'est bien regrettable mais les $10 sont compris,
comme entretien, dans votre aide sociale.
J'espère que, tant et aussi longtemps qu'on n'aura pas reconnu le
principe du revenu minimum garanti, ces différentes normes vont
être modifiées dans le plus bref délai. J'aimerais bien
avoir sur ces trois choses une réponse de la part du ministre. Va-t-il
tenir compte, un moment donné, dans l'évaluation, des
régions, tenir compte de la modification, de l'entretien dans ses
barèmes de logements?
Je suis bien d'accord qu'on s'en va de plus en plus vers une
non-répartition comme telle des besoins spécifiques, puis on veut
donner un montant global. Mais tant qu'on n'arrivera pas, par exemple, à
un montant suffisant à la base, comme le disait le député
de Saint-Jacques, on indexera toujours l'insuffisance. Dans des régions
comme chez nous, puis probablement des régions comme l'Abitibi, puis
d'autres régions du Québec, le logement est bien supérieur
au montant prévu par le ministère des Affaires sociales; en
particulier, par exemple, le chauffage, l'électricité sont
compris à l'intérieur des barèmes. Les
bénéficiaires de l'aide sociale demeurent bien souvent dans des
maisons qui sont plus ou moins organisées, plus ou moins
équipées, qui sont plus ou moins protégées contre
le froid et cela leur coûte des prix exorbitants pour payer l'huile,
à la fin du mois. Cela leur fait des logements dont le prix est
considérable.
J'aimerais avoir les commentaires, à ce sujet, du ministre, parce
que je pense qu'il y a une certaine urgence, de ce temps-ci. Chez nous, on
l'est déjà assez pénalisé, on en parlera en ce qui
concerne tous les services de santé que le ministre nous refuse, que ce
soit les agents de probation ou autre chose. Au moins, qu'on ne pénalise
pas ceux qui sont les plus poignés dans la société, un
moment donné, soit les bénéficiaires de l'aide
sociale.
M. Forget: M. le Président, je vais essayer d'être
bref dans mes réponses, puisqu'on recouvre déjà une partie
du terrain couvert la semaine dernière.
Pour ce qui est des régions ou des zones, la désignation
de zones pour des besoins, qu'ils soient des besoins ordinaires ou des besoins
spéciaux, je rappellerai au député de Saguenay, dont je
salue la présence en commission parlementaire des affaires
sociales...
M. Lessard: C'est parce que j'avais des problèmes à
venir discuter avec vous.
M. Forget: II me fait plaisir de le voir ici. C'est une
expérience que nous avons déjà vécue.
Jusqu'à janvier 1974, il y avait, comme annexe aux règlements de
l'aide sociale, trois listes de municipalités. Ces listes étaient
utilisées pour les fins du paiement des desoins de logements qui
étaient des besoins payés distinctement du NVPD de
l'époque et qui essayait, mais essayait seulement, de se coller à
la réalité de différences dans les coûts de
logements.
L'expérience, donc, a été faite.
L'expérience faite n'a pas été particulièrement
heureuse. Des plaintes ont été reçues, relativement
à l'inclusion ou à l'exclusion d'une municipalité
donnée de ces trois zones, ou de l'une de ces trois zones. Il y avait
l'absence de données qui, effectivement, n'existent pas au
Québec, sur le niveau relatif de certains besoins ou de certaines
dépenses, qu'il s'agisse de logement, qu'il s'agisse d'alimentation. On
sait très bien que les coûts de la satisfaction de tous ces
besoins ne sont pas identiques, quel que soit l'endroit où l'on
réside. Malheureusement, il n'existe pas de point de
référence pour déterminer, selon la municipalité
où une personne réside, quel est le niveau relatif de chacun de
ces articles, dans son budget. On est forcé à des solutions
arbitraires qui ne sont jamais défendables, parce qu'à la limite
elles sont arbitraires et qu'elles ne reposent que sur un
jugement qui est contestable. La décision aété
prise donc, profitant d'un réaménagement général de
l'aide sociale, en 1974, d'éliminer cette notion de zones.
D'ailleurs, les lois, les règlements, les politiques
gouvernementales, et ceci à la demande d'un très grand nombre de
groupes, depuis de nombreuses années que l'on pense à
toute la politique salariale du gouvernement, qu'on pense à
l'application de la Loi du salaire minimum, qu'on pense à toutes ces
mesures ont consisté à rendre uniformes les taux qui, au
début, étaient plus avantageux, largement très souvent,
pour la région de Montréal, par exemple.
Donc, étendre à l'ensemble de la province des niveaux de
rémunération, des niveaux de prestations, des politiques
générales, de façon uniforme à travers tout le
territoire.
Cette orientation, jointe encore une fois à l'absence de point de
référence pour déterminer le coût relatif de
certaines dépenses, nous amène à une situation où
il est presque impossible de justifierdes distinctions. On peut, bien
sûr, imaginer toutes sortes de règlements, avec toutes sortes de
distinctions. Mais je suis sûr que si on le faisait le 1er mai de cette
année, on se retrouverait, l'an prochain, en commission parlementaire,
à défendre, sans vraiment pouvoir le faire, les catégories
qu'on aurait établies.
On ne pourrait pas le faire puisqu'elles ne seraient basées que
sur des impressions. Il n'y a rien de systématique à ce niveau.
Ce qui a été fait, c'est une évaluation sommaire des
différences dans différents points des budgets familiaux. Nous
avons constate que les différences à la hausse, pour certains
points du budget, étaient, très souvent, pas toujours
compensées par des différences à la baisse dans le niveau
relatif de certaines dépenses, pour d'autres points du budget d'une
famille.
Donc, il y a, dans un certain nombre de cas, une certaine compensation a
l'intérieur d'un montant total accordé à un budget
familial. Mais au-delà de cela, il n'est malheureusement pas possible de
procéder pour le moment. Même si c'était possible, je le
rappelle, tout ceci s'inscrit dans un ensemble de politiques qu'on a toujours
voulu d'application générale à travers tout le
territoire.
Pour ce qui est des besoins d'entretien des maisons, je ne ferai pas de
réponse spécifique puisque j'ai déjà
indiqué, à la fois à l'Assemblée et ici, que nous
sommes à travailler à une nouvelle version des règlements
de l'aide sociale qui tiendront conpte, évidemment, de
l'évolution dans le niveau des prix, dans le niveau des valeurs,
qu'elles soient les valeurs dont on parle dans la détermination des
règles pour le calcul des revenus et le calcul des besoins.
Pour ce qui est des barèmes de logement, je serai encore plus
bref puisque j'ai déjà débattu ici même, la semaine
dernière, avec le député de Rouyn-Noranda, la
signification de ces barèmes. Je renvoie tous ceux qui s'y
intéressent à la discussion qui a été assez
complète à cette occasion, sauf pour mentionner qu'on le
soulève probablement dans le contexte dans lequel on vient de le
soulever. On vient de soulever d'autres exemples encore pour mettre en
lumière une carence dans le niveau absolu des prestations, qui inclut un
montant pour les besoins de logement, qui n'est pas, évidemment,
identique mais supérieur à ceux qui apparaissent dans les
barèmes de logements qui, comme on le sait, sont des mesures de besoins
en deça desquels la pleine allocation n'est pas reçue mais qui ne
mesure pas l'importance des dépenses de logement dans le budaet
familial.
Enfin, je n'avais pas l'intention de le faire mais je pense qu'il est
peut-être préférable de le faire, on nous indique, de
façon très enflammée, j'en félicite le
député de Saguenay et tout particulièrement le
député de Saint-Jacques, avec quel enthousiasme on accueillerait
le développement d'un régime complet de revenu garanti. C'est
certainement un appui aux politiques gouvernementales auxquelles je suis
très sensible.
Je félicite les deux députés pour leur acceptation
des principes que nous poursuivons. On nous fait le reproche de ne pas l'avoir
réalisé. Je ne sais pas si on sait qu'un régime complet de
sécurité d'un revenu garanti n'existe, de façon aussi
complète qu'on l'envisage pour l'avenir, dans pratiquement aucun pays,
même des plus développés. Il y a, un peu partout, des
mesures partielles à l'intégration desquelles on travaille. Mais
il s'agit d'un objectif très ambitieux et qui est d'autant plus
difficile qu'il est ambitieux. Même lorsqu'il sera réalisé,
les problèmes que nous discutons ce matin se retrouveront à peu
près intacts puisqu'il ne faut pas jouer sur les mots. Un régime
de revenu garanti ne vise pas nécessairement à donner à
tout le monde, à toutes les familles, à toutes les personnes
seules un revenu égal au revenu moyen ou à un revenu
nécessairement plus élevé. Il consiste en un régime
qui non seulement vient en aide, sur le plan de la sécurité du
revenu, à ceux qui n'ont aucun revenu d'emploi ou un revenu presque
négligeable provenant d'un emploi mais également à une
nouvelle classe qui n'est pas actuellement l'objet d'une protection sur le plan
de la sécurité du revenu.
Mais, pour ceux qui sont actuellement couverts par le régime de
l'aide sociale, même dans un régime complet de
sécurité du revenu, même avec un régime de revenu
garanti, nous nous retrouverions fondamentalement avec les mêmes
problèmes. Donc, cette opposition que l'on cherche à faire entre
un objectif auquel on souscrit, mais qui n'est pas du tout
réalisé et une réalité qui serait toute
différente, à l'heure actuelle, c'est une opposition qui est, en
partie, factice, au moins pour les bénéficiaires actuels de
l'aide sociale qui sont, dans une très large mesure, des gens qui n'ont
aucun revenu d'emploi et qui se retrouveraient, dans un régime de revenu
garanti, essentiellement dans la même position, pour ce qui est de
l'application des règlements, pour ce qui est des mécanismes
administratifs, que celle qui est la leur dans le moment.
Les grands bénéficiaires d'un régime de revenu
garanti, au-delà de ceux qui bénéficient actuellement des
régimes de sécurité du revenu, seraient les travailleurs
à faible revenu. Nous avons déjà eu abondamment l'occasion
de discuter de leur situation relativement défavorisée dans
l'ensemble des mesures gouvernementales, dans l'ensemble des mesures fiscales
du gouvernement. C'est sans aucun doute un domaine qui mérite notre
attention, mais, encore une fois, cette opposition que l'on cherche à
faire est factice. Je n'en accepte pas la validité comme base pour les
critiques que l'on nous dirige relativement à des besoins
spéciaux que l'on cherche à faire réintroduire dans un
régime qui, pour la clientèle qu'il couvre actuellement, est
essentiellement un régime de revenu garanti.
Le Président (M. Cornellier): L'honorable
député de Sainte-Marie.
M. Malépart: M. le Président, dans les
crédits, est-ce qu'on tient compte, dans l'augmentation des besoins
spéciaux, des $25 qui étaient versés pour les effets
scolaires? Je pense que je n'ai pas besoin de vous dire que ce montant est
augmenté de 40%.
Cela fait deux ou trois ans qu'il est au même montant. Il y a
aussi les allocations pour pertes en cas d'incendie ou d'autres sinistres et il
y a le transport pour le déménagement. C'est une autre chose,
disons, qui a augmenté. Alors, aussi bien dire que les gens n'y ont
presque pas droit. Il y a aussi le montant alloué pour des gardiennes,
en cas de maladie. Je pense que c'est impensable le montant qui est
versé présentement, c'est plus bas que le salaire minimum
que les gens puissent trouver des gardiennes. Dans le fond, on l'a seulement en
principe, parce qu'en pratique les gens ne peuvent pas l'utiliser.
M. Forget: L'ensemble de ces mesures fait l'objet, en effet, de
la révision qui est actuellement en cours.
Une Voix: Quand cela va-t-il s'appliquer?
M. Forget: Je ne suis pas en mesure d'annoncer une date, puisque
nous sommes à faire cette révision. Lorsque nous tombons sur un
problème, il faut prendre le temps de le résoudre avant de
pouvoir en arriver à des conclusions, mais le plus tôt
possible.
Le Président (M. Cornellier): L'honorable
député de Saint-Jacques.
M. Charron: M. le Président, avant l'adoption de ce
programme, j'ai deux autres courtes questions de détails, qui s'ad
ressent peut-être plus à M. Houde qu'au ministre lui-même.
Qu'est-il arrivé avec le bureau d'aide sociale d'Acton Vale, qu'on
devait fermer le 1er avril? Est-ce que ce bureau, qui, me dit-on, dessert une
partie importante de la population de cette région, a effectivement
été fermé?
M. Forget: L'attitude que nous prenons, M. le Président,
maintenant, vis-a-vis de la fermeture des bureaux est de ne pas les fermer
totalement, mais de conserver ce qu'on appelle des points de services qui sont,
en quelque sorte, satellites d'un bureau principal, de sorte que, pour les
besoins d'attribution, c'est-à-dire les besoins financiers, il y ait de
nos gens qui se déplacent sur place, demeurent sur les lieux pour
recevoir les demandes des bénéficiaires, mais que, d'autre part,
pour les fins des services de référence, de soutien et de la
politique que nous voulons développer à cet égard, nous
ayons des bureaux d'une ampleur suffisante pour jouer un rôle
réel.
Alors ce bureau, comme bon nombre d'autres, demeurera sous forme de
bureau qu'on appelle satellite, mais j'aimerais mieux, en fait, une autre
expression.
M. Charron: Est-ce à dire que... M. Forget: Un
point de services.
M. Charron: Bon. Ce point de services fonctionne-t-il de
façon relative, une journée par semaine, ou à temps
limité par rapport au bureau central?
M. Forget: Dans ce cas précis, je vous avoue que je n'ai
pas la réponse à l'esprit. Je ne sais pas si quelqu'un l'a. Mais
nous essayons de faire en sorte que la présence soit directement
proportionnelle aux besoins. Il y a au moins une présence une ou deux
fois la semaine, en règle générale, et, si c'est
nécessaire, une présence tous les jours et, si c'est
nécessaire, la présence complète pendant les heures
normales de bureau,
En ce qui concerne le cas plus précis d'Acton Vale, je crois que
c'est deux jours par semaines, mais je le dis sous réserve.
M. Charron: Est-ce que, pendant ces deux jours, le
bénéficiaire qui se présente à ce point de services
peut obtenir sur place la même chose que s'il se présentait au
bureau central?
M. Forget: Oui.
M. Charron: Une autre question, qui s'adresse au ministre, mais
qui, à mon avis, terminerait bien l'étude de ce programme.
Depuis quelques années, et au cours de la dernière
année fiscale en particulier, on a vu naître de façon
considérable des regroupements de bénéficiaires d'aide
sociale sur une base régionale ou locale, à certaines occasions.
J'aimerais savoir du ministre, en plus de son opinion, bien sûr, que
j'espère deviner à l'avance, s'il a l'intention, un tant soit
peu, d'établir un mécanisme de consultation permanent ou officiel
qui concrétiserait, j'imagine, la satisfaction qu'il éprouve de
voir les bénéficiaires se regrouper, comme n'importe quel autre
citoyen, pour défendre ou promouvoir leurs intérêts
propres.
Je pense que sous ces organismes, la preuve en est faite dans plusieurs
régions, celle de la capitale nationale des Québécois
vient de connaître la création du sien il y a à peine
quelques jours... Est-ce que tous ces organismes seront intégrés
d'une façon officielle dans l'élaboration, par exemple, du
nouveau règlement d'aide sociale qui sera échafaudé au
cours de l'été?
M. Boudreault: ... du Parti québécois qui sont les
principaux organisateurs de ces manifestations ou de ces regroupements.
M. Charron: Veuillez inclure la remarque de monsieur.
M. Lessard: Ils n'avaient pas le droit de le faire?
C'est-à-dire que ces gens-là n'auraient pas le droit de se
regrouper?
M. Boudreault: On ne les blâme pas de se regrouper, c'est
que le Parti québécois est l'instigateur de ça, de faire
regrouper les gens. Les manifestations et ainsi de suite, ce n'est pas vous
autres qui êtes à la base de ça?
M. Charron: Je pense que votre voisin de droite pourrait vous
prouver le contraire.
M. Boudreault: Oui. Je lui poserai la question en temps et
lieu.
M. Forget: M. le Président, il y a eu
régulièrement, au cours des années passées et
à tous les niveaux, non seulement au niveau du ministre mais au niveau
des responsables de l'administration de l'aide sociale, puisqu'un certain
nombre des problèmes sont à ce niveau-là, comme on le
sait, des rencontres avec différents groupes pour la défense des
droits sociaux des différents groupes de bénéficiaires,
qu'ils soient sous une étiquette ou sous une autre. Très souvent
les groupes étaient, en quelque sorte, des groupes transitoires qui
n'avaient pas de permanence. Cela n'a pas, malgré tout,
empêché des contacts et des rencontres. S'ils choisissent de se
donner des points d'ancrage en quelque sorte et d'assumer le fardeau d'animer,
de faire fonctionner des structures permanentes, il n'y a certainement aucune
difficulté, du côté du ministère, qui sera
placé dans leur chemin. Au contraire, nous continuerons avec eux les
contacts qui ont déjà été établis dans le
passé.
Nous avons d'ailleurs aussi en voie d'élaboration un service de
liaison qui sera reconnu comme tel enfin, du moins nous
l'espérons dans l'organigramme du ministère, qui est de
nature à nous permettre justement d'entretenir des liens au niveau de
l'administration et du fonctionnement du régime. Par ailleurs, comme on
le sait peut-être, puisque cela remonte à plusieurs années,
le Conseil des affaires sociales et de la famille est à mettre la
dernière main à un rapport sur les relations entre le
ministère et les groupes populaires. Nous voudrons, sans aucun doute,
prendre connaissance du rapport avant d'adopter des politiques dans ce
secteur-là.
Et, finalement...
M. Charron: Est-ce que ce rapport doit venir bientôt?
M. Forget: Oui, enfin, il est en préparation, je crois,
depuis 1971. Il devrait donc venir bientôt...
M. Charron: Laissez tomber, laissez tomber.
M. Forget: Je crois que c'est une chose qui est prévue
pour les prochaines semaines ou les prochains mois. L'information que je tiens
du président du conseil est que c'est prévu pour le mois de mai,
mais je ne veux pas l'engager outre mesure en précisant une date. Par
ailleurs, quels que soient les voeux ou l'ouverture d'esprit relativement aux
relations avec ces groupes-là, je pense que la première
initiative leur revient peut-être de spécifier quel genre de
relations ils veulent entretenir avec le ministère. Ce qu'ils n'ont pas
fait formellement, du moins à ce jour.
M. Charron: Connaissez-vous des bureaux régionaux du
ministère qui ont déjà été, j'emploie
l'expression entre guillemets "institutionnalisés" leurs rapports avec
des citoyens bénéficiaires regroupés.
M. Forget: J'aimerais que M. Houde réponde à la
question.
En fait, la première expérience du genre l'a
été à l'instigation du prédécesseur de M.
Forget, M. Cas-tonguay lui-même, qui, à la suite de discussions
que nous avions eues avec les comités de citoyens de Montréal,
avait autorisé il l'avait dit publiquement que ces
comités de citoyens soient présents sur place au niveau de
l'accueil dans six ou sept des bureaux du ministère à
Montréal. Il y avait aussi eu à l'époque des discussions
avec la ville de Montréal pour poursuivre l'expérience dans
certains bureaux de la ville et nous avons tenté de l'élargir
dans la région de Québec, dans le bureau de Lévis, si je
me souviens bien, et dans un ou deux des bureaux importants de la ville de
Québec.
A Rouyn-Noranda, ou dans la région de Rouyn et là,
la mémoire me fait un peu défaut parce que cela remonte
déjà à deux ou trois ans avait été
entreprise aussi une démarche qui tenait lieu du même type
d'initiatives et qui, cette fois-là, était attribuable au palier
régional, de même que dans une ou deux autres régions.
Encore une fois, comme vient de le dire le ministre, ces initiatives, dont on a
quand même pu tirer une certaine expérience, n'ont pas eu de
suites plus formelles ou plus formalisées parce qu'il y a eu, au niveau
des groupes de citoyens eux-mêmes, un certain flottement quant à
la représentativité, non pas en ce sens qu'ils ne sont pas
représentatifs mais en ce sens que divers groupes se sont
constitués, se sont modifiés. Nous croyons que
présentement l'atmosphère est à une certaine forme de
regroupement qui devrait nous permettre, d'abord à eux comme l'a dit le
ministre mais ensuite à nous, de répondre de façon plus
favorable à un contexte en voie d'évolution.
Jusqu'ici, toutes les expériences qui se sont faites, sur une
base plus formelle comme sur une base informelle, ont de façon
générale été très fructueuses dans le
dialogue. Nous n'avons pas retrouvé, par exemple, dans la
présence des groupes de citoyens dans les bureaux, des pierres
d'achoppement comme certains l'ont craint. Au contraire, je pense qu'on peut
tirer de l'enseignement une leçon positive. Mais eux-mêmes, je
pense, ont hésité et hésitent encore entre revendiquer de
l'extérieur en quelque sorte et revendiquer de l'intérieur, ce
qui est une question bien normale pour un mouvement qui se veut de
l'extérieur; c'est ce genre de solution, au fond, à laquelle ils
doivent eux-mêmes arriver avant que nous-mêmes puissions
réagir de façon précise à leurs demandes.
Mais il y a eu, dans le passé effectivement, des
expériences presque reconnues comme des expériences moins
formelles.
M. Charron: M. le Président, je suis disposé
à adopter le programme 2.
Le Président (M. Cornellier): Le programme 2 est
composé de quatre éléments; adopté? Adopté.
Programme 3: Assistance maladie.
M. Charron: Voulez-vous finir l'assurance-maladie tout de
suite?
M. Forget: Tout de suite?
M. Charron: Voyez comme je suis dans de bonnes dispositions.
M. le Président, je crois que nous avons suffisamment de temps
avant la suspension pour terminer l'étude de ce programme, à
moins que M. Martin ne soulève un débat houleux, selon son
habitude.
Assistance maladie
Ma première question, puisque nous reprenons ce programme que
nous avons entamé la semaine dernière, fait suite à
l'annonce faite la semaine dernière de modifications au programme de
l'assurance-maladie même par le ministre, l'extension aux enfants de neuf
ans du programme de gratuité de soins dentaires. J'avais presque envie
je le ferai si le ministre le fait de soulever le débat de
fond qu'il y a à l'arrière de cela; s'il le fait dans sa
réponse, M. le Président, je vous prie de me remettre le crachoir
immédiatement après. Je soutiens encore que les moyens financiers
du Québec permettraient d'étendre immédiatement jusqu'aux
enfants de 0 à 14 ans inclusivement ce service. Je me contente, puisque
ce débat a longuement eu lieu lorsque le programme a d'abord
été instauré, lorsque l'année dernière il a
été modifié, de m'assurer si je dois voir dans
c'est peut-être la question la plus importante que j'ai sur cet
élément de l'assurance-maladie.
Est-ce que nous devons voir, dans l'annonce faite la semaine
dernière, l'affirmation d'un principe qui veut que désormais,
d'année en année, le programme soit étendu, de sorte qu'un
enfant précédemment couvert par le régime ne sera pas
abandonné en cours de route?
Autrement dit, devons-nous voir, dans l'annonce de la semaine
dernière, une annonce semblable pour l'année prochaine, devant
étendre les services aux enfants de dix ans, et cela
indéfiniment, quitte à brûler des étapes aussi
à certaines occasions?
M. Forget: M. le Président, la réponse que je vais
faire à cette question est une réponse que, je suis sûr, le
député de Saint-Jacques va qualifier de prudente, et je pense
qu'elle doit être une réponse prudente. Il tombe sous le sens
commun qu'un régime qui, au moins a priori, doit être
destiné à assurer la couverture des soins dentaires pour les
enfants d'âge scolaire et c'était, on s'en souvient,
l'intention originale soit effectivement l'objet d'une extension
d'année en année, de manière à pouvoir couvrir
effectivement toute la clientèle à laquelle il est
destiné.
La réserve qui pourrait être faite est une réserve
pas seulement de forme mais, malgré tout, qui indique que l'on ne peut
pas aller trop loin dans l'affirmation du principe pour toutes les
années à venir, c'est l'expérience qui sera
accumulée dans le fonctionnement de ce programme sur le plan des
coûts et la capacité de trouver le financement additionnel requis
à la lumière de toutes les autres priorités entre
lesquelles, à chaque année, un gouvernement doit choisir.
Donc c'est un principe qui est une déduction normale de
l'objectif initial du régime. Mais ce n'est pas la seule réserve
que l'on peut faire non plus, comme il sera évident lorsque
l'expérience des six premiers mois de fonctionnement du régime de
la couverture des soins dentaires sera rendue publique. Et j'ai l'intention de
le rendre public, de déposer un document à ce sujet à
l'Assemblée nationale dès aujourd'hui.
On se rendra compte que la couverture est nominalement complète,
mais pas effectivement complète, même avec une extension à
chaque année, dans le sens où les habitudes de consommation, si
l'on peut employer cette expression, des soins dentaires sont telles qu'une
proportion supérieure à la moitié des enfants qui sont
effectivement déjà couverts ne s'est pas prévalue du
régime.
On peut supposer, bien sûr, que ces enfants jouissent d'une
santé dentaire parfaite, donc ils n'ont pas eu l'occasion de s'en
prévaloir. Mais l'hypothèse la plus réaliste est qu'encore
une fois les habitudes, le manque d'intérêt pour la santé
dentaire, qui est peut-être une des caractéristiques du
problème de la santé dentaire au Québec,
caractéristiques importantes, fait qu'effectivement on ne se
prévaut pas des services.
Il y a également des problèmes de distribution
géographique, mais sans les nier, sans les minimiser, on peut se
demander s'ils sont assez importants pour produire un taux de couverture aussi
faible que celui qui, effective ment, est observé pour la
première année. Devant un phénomène comme
celui-là, sans négliger les possibilités de contribuer
à l'éducation sanitaire, à l'information des parents sur
l'accessibilité des services, sur l'importance d'une bonne dentition,
etc., sans minimiser ces possibilités, on doit également tenir
compte du fait que l'efficacité de mesures d'information et de
propagande en faveur de la santé dentaire, n'est peut-être pas une
efficacité escomptée de 100%. Il sera peut-être
nécessaire d'adopter une attitude moins passive que simplement rendre
accessibles des services, sans frais, une politique plus active ou qui
consisterait à aller vers les enfants, si les enfants ne veulent pas
aller vers le dentiste.
D'ailleurs, j'en avais fait part au public, à la population,
lorsque le programme de santé dentaire a été
annoncé en mai ou en avril, c'est-à-dire de l'an dernier, nous
envisageons de mettre sur pied un programme de santé dentaire en milieu
scolaire dont les dimensions ne sont pas complètement définies
même à ce moment-ci.
C'est, d'ailleurs, la raison pour laquelle nous y travaillons encore et
nous n'avons pas pu faire état d'un programme très
spécifique et d'une date d'entrée en vigueur très
précise. Mais il est clair que simplement l'approche passive, si vous
voulez, n'est pas suffisante dans le domaine de la santé dentaire; il
faut une approche plus active qui va au devant des problèmes. C'est donc
une deuxième réserve à ce qu'on vient d'indiquer. Les
extensions successives du régime devront tenir compte également
de cette préoccupation qui est, à mon avis, extrêmement
importante. Donc, à la lumière des possibilités qui se
révéleront en temps et lieu de ce côté-là,
des disponibilités financières, de l'expérience qui va
s'accumuler du régime, c'est une décision de principe que
cette extension d'année en année, qui peut éventuellement
être remise en question. D'un autre côté, ces
réserves étant faites, je ne crois pas que ce soit là une
très forte probabilité, mais, encore que je ne puisse exprimer
qu'une opinion personnelle, c'est une décision qui, chaque année,
devra être prise par le gouvernement.
M. Charron: M. le Président, pour ce qui est de
l'information et de l'éducation, l'année dernière, si je
me rappelle bien, nous avions reçu des assurances, de la part du
ministre des Affaires sociales, que ces programmes, qui sont d'une
efficacité peut-être inférieure à celle qui
était escomptée, auraient des modifications au cours de
l'année qui vient de s'écouler. Qu'a-t-on fait de plus que
l'année précédente, au cours de la dernière
année, dans cette politique non seulement de propagande j'admets
le mot pour la cause mais aussi d'information, de prévention en
milieu scolaire? Je sais qu'on en discutera tout à l'heure, à un
autre programme, les services en milieu scolaire, mais pour ce point en
particulier.
M. Forget: Sur ce point-là, je dois me fier largement
à ma mémoire. Il y a eu un programme d'information et,
d'ailleurs, M. Martin pourrait le développer. En collaboration avec
l'Ordre des dentistes, il y a eu d'abord je pense que tout le monde s'en
souvient une campagne d'information télévisée ou de
propagande télévisée en faveur, en général,
de la santé dentaire et attirant l'attention, plus
spécifiquement, sur certains aspects, il y a eu également, par
l'intermédiaire des services gouvernementaux, qu'il s'agisse de la
régie ou du ministère, un effort fait auprès des
élèves dans le milieu scolaire. Peut-être que je demanderai
à M. Martin de vous décrire les principaux éléments
de ce programme.
Les principaux éléments sont de deux ordres. Le premier
élément est que le ministère des Affaires sociales, par
ses services, rencontre les élèves en milieu scolaire,
déjà cette année, pour les initier aux problèmes de
santé dentaire. La régie a préparé, à cette
fin, un jeu de prévention, destiné aux enfants, de façon
à attirer leur attention sur les problèmes de carie dentaire et
autres problèmes de santé dentaire et pour les inciter à
se préoccuper de visiter le dentiste, à se prévaloir des
avantages du programme.
Les deux efforts combinés ont duré pendant toute
l'année, parce que c'est assez long. Je ne pourrais pas dire le nombre
d'écoles visitées, mais le but visé était de
couvrir l'ensemble des écoles élémentaires.
M. Charron: Est-ce que cela a été fait?
M. Forget: Pour le jeu de la prévention, oui, il a
été distribué dans toutes les écoles. En même
temps que le ministère des Affaires sociales rencontrait les
élèves, le jeu était distribué de façon que
les enfants voient pourquoi c'était distribué et soient
sensibilisés, en même temps, aux problèmes de santé
dentaire.
M. Charron: M. le Président, je ne crois pas que la
deuxième réserve qu'a faite le ministre les obligations
ont peut-être été moins prévues qu'elles auraient
dû l'être l'obligation, pour employer son expression,
d'aller vers les enfants si les enfants ne viennent pas, que cette nouvelle
obligation, dis-je, qui va avec le sens du programme et certainement avec le
voeu que l'Assemblée avait voté derrière la loi, soit,
à un moment donné, un obstacle qui justifierait l'abandon de
l'extension annuelle du programme. J'admets que cela peut signifier, si on s'en
va vers un programme qui se déplace vers les écoles, comme vient
de le signaler M. Martin, sur le plan financier, une charge différente
de celle d'assumer uniquement les soins en cabinet de dentiste. Mais le
principe fondamental, qui est celui de ne pas abandonner un enfant qui a
commencé des soins, me semble encore plus important et justifierait le
ministre des Affaires sociales d'insister encore plus auprès de son
collègue des Finances pour que le programme, même s'il devient
plus coûteux, à cause de cet aspect de promotion obligatoire, soit
quand même maintenu, et étendu d'année en année.
J'ai compris que les réserves n'étaient pas
présentées comme des obstacles qui, éventuellement,
seraient utilisées; que l'attachement existe au sein de la régie
et du gouvernement pour l'étendre d'année en année; que ce
n'est qu'une difficulté majeure qui pourrait peut-être interrompre
cette extension annuelle. Est-ce que j'ai bien compris le sens de votre
intervention, tout à l'heure?
M. Forget: Oui, vous avez bien compris. Ce ne sont effectivement
pas des obstacles auxquels j'ai fait allusion, mais des réserves ou, si
vous voulez, des considérations qui doivent être prises en compte
lorsque la décision est prise, année après année.
Il est un fait, malgré tout, qu'il ne faut pas dissimuler, c'est que
nous parlons, même comme objectif prévisible, d'un régime
partiel, c'est-à-dire que nous n'envisageons pas une extension à
l'ensemble de la population et que cet abandon, comme vous le dites,
interviendra à un âge ou à un autre. Qu'il intervienne
à 18 ans ou à 16 ans, il est prévu qu'il interviendra
à un moment donné.
La question qu'il faut se poser, à la lumière justement du
taux de participation, inférieur à 50%, et peut-être
même inférieur à 40%, encore qu'il soit peut-être
délicat de projeter sur une année les données d'un
semestre... Ces résultats nous permettent de dire que la question qui
est posée à tous les ans devra être non pas seulement:
Est-ce que nous continuons pour ceux qui sont déjà dans le
régime? mais: Est-ce que cette continuation elle-même devient un
obstacle ou une difficulté pour donner, à ceux qui n'ont eu aucun
accès au régime, un minimum de services.
Et, il est évident que c'est également une
considération très importante puisque certains enfants viennent
peut-être d'un milieu défavorisé, que peut-être les
habitudes de fréquentation du dentiste, étant donné les
coûts élevés avant l'introduction du régime, ont
découragé des habitudes de santé dentaire essentielles.
Est-ce qu'il est raison-
nable qu'on favorise ceux qui ont déjà accès si une
telle décision implique un développement moins rapide d'un
programme qui irait au devant des besoins dans les cas où ces besoins ne
sont pas spontanément exprimés?
C'est, essentiellement, comme je l'ai indiqué, une
décision qui doit être prise à tous les ans, à la
lumière de l'expérience du régime, à la
lumière des disponibilités financières du gouvernement,
évidemment en tenant compte des objectifs de l'un et de l'autre.
M. Charron: Sur un autre sujet, M. le Président, mais qui
concerne toujours la régie, le 17 décembre dernier, un rapport du
comité d'étude sur les problèmes des handicapés
visuels a été rendu public. Il s'est appelé le rapport
Girard.
Il recommande, entre autres choses, que la régie assume le
coût, les aides mécaniques et électroniques ainsi que leur
remplacement et leur entretien. Je ne me leurre pas, je serais très
surpris que depuis le 17 décembre une décision ait
déjà été prise. Mais cette recommandation, que j'ai
retenue parmi toutes celles qu'il y avait, parce qu'elle me semblait la plus
fondamentale en ce qui concerne le bien-être des handicapés
visuels, est-ce qu'elle fait déjà, actuellement, l'objet
d'études quant aux implications financières et autres que cela
signifierait si le gouvernement devait la suivre ou la retenir?
M. Forget: Vous parlez je m'excuse, j'ai été
consulté de l'ensemble des recommandations ou d'une
recommandation particulière?
M. Charron: De la recommandation qui vise à faire assumer,
par la régie, le coût des aides mécaniques et
électroniques pour les handicapés visuels.
M. Forget: Enfin, comme on le sait, cette recommandation se situe
dans un contexte. D'ailleurs, le rapport Girard comporte lui-même une
évaluation du coût probable de...
M. Charron: $4.5 millions.
M. Forget: ... l'extension du régime aux aides visuels.
Maintenant, il y a aussi une recommandation qui a paru aux membres du
comité Girard comme extrêmement importante, c'est-à-dire
que ceci ne soit pas une simple extension de couverture qui laisse
l'handicapé visuel sans appui en quelque sorte dans l'utilisation de ces
appareils, dans l'apprentissage nécessaire pour leur utilisation
efficace. C'est dans ce contexte que nous voulons situer l'extension du
régime. C'est la raison pour laquelle dès le mois de janvier,
nous avons communiqué avec les organismes qui s'occupent d'eux, les
établissements, les centresd'accueil qui s'occupent des
handicapés visuels, à Montréal et à Québec.
Nous leur avons demandé de prendre connaissance du rapport et de nous
faire des suggestions et des recommandations quant à la manière
dont eux, comme établissements spécialisés dans la
réadaptation et les services de soutien à donner aux
handicapés visuels, se voyaient jouer un rôle d'appui et le
rôle que le comité Girard a décrit dans ses lignes
générales mais qui, évidemment, a besoin d'être
précisé et d'être rendu concret par l'identification de
structures bien déterminées.
Des réponses ont été reçues des
établissements auxquels nous avons écrit. Des rencontres sont
prévues. Je pense bien qu'il y va de soi.
Mais, malgré tout, rassurant de constater que nous avons
reçu de ces établissements une réponse enthousiaste. Des
rencontres auront lieu ces jours-ci, ces semaines-ci, pour en déterminer
les modalités précises, de manière que, sur la base de ce
contexte institutionnel, en quelque sorte, où on fera plus que donner
des appareils, ou indiquera aux gens comment s'en servir, on assurera les
réparations, etc., qui s'imposent. Alors on aura un régime plus
complet que simplement un régime de gratuité des prothèses
de des prothèses visuelles.
Ceci devait se faire durant le printemps 1975 et on peut envisager,
peut-être mais ceci est tout à fait hypothétique, au
point de vue date qu'à l'automne, il y ait l'entrée en
vigueur d'un tel régime. Encore une fois, il faut franchir plusieurs
étapes: préparation de règlements, ententes avec les
établissements, établissement d'une liste définitive,
détermination des prix. Alors le travail avance, sur plusieurs fronts
à la fois, mais le principal, c'est de s'assurer qu'il ne s'agit pas
simplement d'une extension du régime mais qu'il y a les
éléments de contexte qui ont été
précisés par le comité Girard comme étant
essentiels au succès de cette extension.
M. Charron: Une question de détails. Est-ce que, si vous
deviez suivre cette recommandation, cela voudrait dire qu'il faudrait amender
la Loi de l'assurance-maladie, ou si on peut considérer ces aides
mécaniques et électroniques comme des prothèses?
M. Forget: On peut les considérer comme des
prothèses. Il s'agit d'une introduction qui peut se faire par voie
réglementaire. C'est l'avis des conseillers juridiques, à ce
moment-ci, sous réserve d'un changement d'opinion.
M. Charron: C'est la sienne aussi.
M. Forget: Sous réserve d'un changement d'opinion
là-dessus.
M. Charron: II y a aussi, sur ces handicapés visuels, M.
le Président, qui n'occupent pas souvent les sujets de cette
Assemblée, une dernière question. Une des recommandations, aussi,
peut-être pas formulée aussi formellement que cela,
s'intéressait au sort des chiens-guides, dont les handicapés
visuels ont nécessairement besoin. Est-ce que, dans les
considérations auxquelles se livre le ministère des Affaires
sociales, suite au rapport Girard, on inclura également cette
considération comme une prothèse mobile qui accompagne
l'handicapé visuel?
M. Forget: Je ne vois pas, a priori, pourquoi ce
serait exclu, au contraire. D'ailleurs, le ministère, de
façon non officielle, si vous voulez, donne déjà une
certaine aide, un certain secours financier à des handicapés
visuels qui ont un chien-guide.
Ceci se fait actuellement de façon un peu plus spécifique,
un peu plus ad hoc, en dehors d'un cadre formel, mais il y a déjà
un certain appui, une certaine assistance qui est donnée. Il n'y a
aucune raison, à l'avenir, dans le cadre d'un ensemble de mesures qui
visent à aider les handicapés visuels, d'exclure les
chiens-guides. Je ne crois pas que, dans l'immédiat d'ailleurs,
le comité ne l'a pas retenu comme une recommandation immédiate
l'idée de l'établissement d'une école de
chiens-guides francophones, si l'on peut dire, soit une priorité,
étant donné, quand même, le petit nombre et le
caractère très spécialisé de ce genre
d'entraînement.
M. Charron: M. le Président, on vient de parler du rapport
Girard; il y en a un autre qui est célèbre aussi, c'est celui du
comité Gingras. Vous me permettrez simplement de vous faire le
nomenclature de certains événements qui ont entouré ce
rapport.
Ce comité, qui devait étudier toute la situation des
prothèses et appareils orthopédiques, a été
formé en février 1973, ça fait déjà
longtemps. Avant même, je pense que le comité ait même eu
à l'esprit la moindre recommandation, la publicité
gouvernementale battait son plein et, le 7 juin de la même année,
on annonçait l'extension de la couverture pour les prothèses et
appareils orthopédiques. En juillet de la même année, nous
adoptions la loi. Le 19 septembre 1973, le comité Jobin, sur la
nomenclature et le prix des prothèses et des appareils
orthopédiques, se mettait en branle. Le 19 décembre de 1973, un
tout jeune politicien, le ministre des Affaires sociales, nous disait
espérer mettre le programme en vigueur durant la première
moitié de l'année 1974. Le 14 mai 1974, à celui qui vous
parle, M. le Président, le ministre disait, je le cite, qu'il avait
reçu le rapport du comité Jobin, il y avait deux ou trois
semaines. Il disait qu'un certain nombre de questions administratives restaient
à régler. Il me promettait de faire diligence et il me disait que
la date se situerait certainement je le souligne, M. le Président
à l'intérieur de l'exercice financierpour lequel nous
étudions les crédits.
Or, le 18 mars, le lieutenant-gouverneur nous apprenait que "vous aurez
également à vous pencher sur les services aux handicapés
par l'extension du régime d'assurance-maladie aux prothèses
orthopédiques."
Ça fait juste cinq ou six mois qu'on l'annonce, cette
affaire-là, M. le Président. Evidemment, ça fait toujours
de la publicité au gouvernement. Il fait semblant d'intervenir souvent,
mais on est aujourd'hui en avril 1975. Malgré toute la diligence qu'on a
mise, j'imagine, de l'autre côté, il y a toujours le programme
pour lequel nous avons voté, M. le Président, vous comme moi
probablement, si vous avez suivi la ligne de votre parti.
A l'adoption de la loi, en juillet 1973, nous avons voté une loi
qui est encore lettre morte, qui n'a pas encore donné les
résultats pour lesquels l'Assemblée s'était, je pense,
unaniment prononcée. Ma question est simple: Qu'est-ce qui arrive avec
votre diligence?
M. Forget: La question du député de Saint-Jacques
est bienvenue, M. le Président. Je pense qu'il a une occasion en or de
souligner des retards successifs qui sont tout à fait réels et
qui me désolent certainement autant que lui. Je peux l'assurer cependant
que si nous n'avons pas fourni de prothèses à personne en vertu
du programme, nous avons cependant fourni pas mal de travail à bien du
monde à cause d'un programme qui n'est pas encore effectivement en
vigueur, que j'ai annoncé pour la dernière fois comme devant
entrer en vigueur au début de juin. J'espère que les
circonstances me donneront raison cette fois-là.
Pour répondre spécifiquement à sa question, ce qui
est intervenu c'est un travail long qui portait sur plusieurs
éléments et sur un régime nouveau dans le fond dont on
devait faire l'expérience. Il faut peut-être faire le rappel que
l'an dernier, en parallèle mais non pas sans effet sur ce régime
de prothèses, était publié également un projet de
règlement en vertu de la Loi de protection de la santé publique
portant sur les laboratoires d'orthèses et de prothèses et
d'autres laboratoires auxquels des permis doivent désormais être
délivrés.
Or, il est important qu'avant que le régime ne puisse entrer en
vigueur ces règlements soient terminés, que des permis puissent
être délivrés afin que la distribution des prothèses
en vertu du programme se fasse par des laboratoires dûment
accrédités. Ceci est une première série de
difficultés, puisque la rédaction d'un projet final de
règlements relatifs aux laboratoires s'est avérée
extrêmement complexe, extrêmement difficile. Encore tout
récemment, quelqu'un qui est particulièrement ingénieux,
probablement, a découvert toute une autre série de
difficultés qui n'avaient jamais été
considérées par qui que ce soit.
C'est un problème difficile, donc, que l'introduction des
prothèses parce qu'il est lié à un très grand
nombre d'autres mesures. La détermination d'une liste et de prix pour la
liste a également fait l'objet de travaux, de discussions assez
nombreuses; la préparation d'un règlement par la Régie de
l'assurance-maladie et son approbation éventuelle.
Enfin ceci n'excuse pas, M. le Président, des délais qui
sans doute devraient être plus courts. Mais, si elle ne les excuse pas,
ces délais, je pense que cette explication au moins fournit des
éléments d'explication.
C'est une déception que nous partageons de n'avoir pas pu
jusqu'à maintenant mettre en vigueur ce régime, mais il ne faut
pas oublier qu'une fois mis en vigueur il sera en vigueur pour longtemps et que
la façon dont il sera mis en vigueur déterminera toute une
série d'habitudes, une série de façons de procéder
avec lesquelles nous devrons vivre pendant des années et des
années. Au moment de jeter les bases de quelque chose de nouveau, nous
envisageons des extensions du côté des prothèses visuelles,
du côté des prothèses auditives pour les enfants,
quoiqu'une décision absolument finale n'a
pas encore été prise de ce côté. Cela nous
permet de voir qu'il s'agit là d'assises extrêmement importantes,
pour toute une nouvelle dimension du régime d'assurance-maladie, si vous
voulez, assez généralement au Québec. Cela mérite
un soin tout particulier de manière à ce que nous n'ayons pas
à refaire plus tard ce qui aura été mal fait une
première fois. Encore une fois ce ne sont pas des excuses, mais ce sont
peut-être des explications qui sont à notre avis suffisamment
importantes pour expliquer, pour justifier le délai intervenu
jusqu'à maintenant.
Le Président (M. Cornellier): La commission suspend ses
travaux jusqu'à cet après-midi après la période des
questions.
(Suspension de la séance à 13 h 3)
Reprise de la séance à 17 h 2
M. Cornellier (président de la commission permanente des
affaires sociales): A l'ordre, messieurs!
La commission des affaires sociales reprend ses travaux avec le
programme 3 des crédits du ministère des Affaires sociales, qui
s'intitule Assistance-maladie. Vous me permettrez de mentionner que M. Marchand
(Laurier) remplace M. Bellemare (Rosemont).
L'honorable député de Saint-Jacques.
M. Charron: M. le Président, on avait terminé, tout
à l'heure, en parlant de l'implantation du prolongement du régime
d'assurance-maladie aux prohèses et appareils orthopédiques. Je
suis obligé de prendre la parole du ministre, évidemment, comme
quoi ce long retard n'est pas dû à la volonté du ministre,
mais bien à des circonstances étrangères à sa
volonté. Je prends sa parole, mais je terminerai cette acceptation en
disant quand même que les paroles prononcées le 14 mai 1974 au
sujet de la diligence devraient être intégralement maintenues au
journal des Débats de cette année, de sorte que l'année
prochaine j'aurai l'occasion de lui répéter les deux
déclarations si on n'est pas encore arrivé au résultat que
l'on attend. Je dis que l'on attend, mais que des personnes, effectivement,
attendent et, en ce sens-là, cela peut contrecarrer leur santé de
ne pouvoir bénéficier de ce droit que l'Assemblée leur a
reconnu.
Je toucherai évidemment, puisque le député de
Vanier nous y a invité à l'Assemblée tout à
l'heure, parce que j'attends un dossier sur ce sujet, la question de la
négociation en cours avec les fédérations
médicales. Je m'en tiend rai donc à des questions de
détails, pour le moment, qui peuvent avoir des réponses
rapides.
Pour les comités de révision dont on a parlé
l'année passée, c'est la régie qui fait des
enquêtes, selon un échantillon, d'après les plaintes pour
compresser l'aspect économique, pratique jugée abusive ou
injustifiée. Ces comités, d'après la loi ou d'après
les règlements, doivent faire rapport au ministre le 31 décembre
de chaque année. Est-ce que cela a été fait pour chacun
des comités? L'année dernière, le comité des
optométristes n'était pas encore formé; est-ce qu'il l'a
été au cours de l'année qui s'est achevée?
M. Forget: II est possible de répondre à cette
question. Il faut préciser que ces comités ne sont pas des
comités de la régie.
Ce sont des comités établis en vertu de la loi qui ont
leur existence autonome, qui font rapport au ministre, le 31 décembre de
chaque année.
M. Charron: C'est quand même la régie qui
détermine s'il y,a abus ou irrégularité.
M. Forget: Nous, à la régie, on a comme mandat,
d'après la loi, de soumettre un dossier quand on est d'avis qu'une
pratique ou un profil de pratique révèle, selon des
critères internes, ce qui pourrait
être une fréquence abusive ou injustifiée de
dispensation de services assurés.
Si on est d'avis que c'est le cas, on doit soumettre le dossier au
comité de révision qui, lui, l'étudie et fait ses
recommandations que, maintenant, d'après le nouveau texte de la loi, la
régie peut accepter ou mettre en cause, auquel cas il faut soumettre
l'appel à la commission des affaires sociales, selon la nouvelle...
M. Charron: ... loi.
M. Forget: C'est ça. Et de même le professionnel en
cause peut faire la même chose, accepter ou non la recommandation, et il
adroit à l'appel auprès de la commission d'appel des affaires
sociales. Quant à savoir si les comités ont fait rapport le 31
décembre, le ministre le sait peut-être, moi, je n'ai pas
reçu les rapports.
Effectivement, M. le Président, nous avons reçu des
rapports des comités de révision créés en vertu de
la loi qui, comme on vient de l'indiquer, sont légalement tenus de le
faire. C'était leur deuxième rapport annuel. Il faut cependant
dire que le rapport qu'ils avaient fait à la fin de 1973 était un
rapport extrêmement sommaire, puisque la loi qui les avait
créés avait été adoptée en juillet 1973,
qu'ils étaient tout juste formés au moment du 31 décembre
et qu'ils n'avaient eu, pour la plupart d'entre eux, qu'une première
réunion à la fin de 1973. Durant 1974, leurs activités ont
consisté largement à prendre connaissance de leur mandat,
à explorer les points de procédure, à éclaircir la
procédure selon laquelle ils devaient procéder à
clarifier, par des discussions entre eux et la régie, la nature des
données qui pourraient leur être fournies, à explorer
également certaines dimensions juridiques de leur rôle,
étant donné qu'ils s'inscrivent dans l'application d'une loi,
mais également dans l'application d'ententes qui elles-mêmes
prévoient des mécanismes de recours, de nature conventionnelle,
et dans le cas d'un certain nombre de ces comités, à examiner
effectivement un certain nombre de profils ou de dossiers qui leur ont
été soumis par la régie de manière à en
venir, dans un nombre de cas fort peu nombreux, à des conclusions ou des
recommandations dont l'une a été attaquée devant les
tribunaux.
Cette contestation devant les tribunaux d'une recommandation d'un
comité de révision a posé le problème juridique de
leur rôle, de leur compétence, de leur juridiction, du type de
procédures qui pouvaient être utilisées pour argumenter un
cas devant eux et les aider à arriver à des conclusions. C'est un
type de problème juridique qui est extrêmement épineux,
extrêmement difficile et nouveau au Québec, dans le droit
québécois.
Un avis juridique a été reçu sur la question, qui
montre effectivement toute la complexité de la situation. Alors, nous
nous trouvons essentiellement dans cette situation où il y a eu une
clarification des mandats, des rôles et procédures. Quelques
gestes ont été posés, gestes qui sont déjà
attaqués, qui soulèvent tout un problème juridique quant
au rôle de ces organismes et à leur efficacité.
Mais, évidemment, je ne peux pas présumer par là du
sort qui sera éventuellement fait par les tribunaux de droit commun au
recours qui est actuellement présenté. Il est de nature, par la
conclusion qui lui sera donnée, à préjuger en quelque
sorte de l'ensemble du travail, à déterminer de façon
définitive non seulement le cas particulier qui a été
soumis, mais l'ensemble de la situation des comités de révision
dans le contrôle du régime.
M. Charron: Est-ce la première fois depuis l'implantation
du régime qu'un cas aboutissait devant les tribunaux?
M. Forget: Non. C'est-à-dire qu'il faut faire des
distinctions. Les comités de révision n'ont pas été
créés pour exercer le rôle de contrôle administratif
de la régularité des réclamations, qui est exercé
par la régie elle-même, si vous voulez, des cas de fraudes ou de
mauvaises représentations.
M. Martin, le président de la régie, pourra, si vous le
désirez, vous décrire un peu les procédures de
contrôle utilisées, les recours, l'issue de ces recours devant les
tribunaux qui, soit dit en passant, ont, dans presque tous les cas,
été adjugés en faveur de la régie, mais il s'agit
de contrôlede type administratif. Les comités de révision
sont largement des comités de pairs, c'est-à-dire des membres de
la même profession et de la même spécialité, le cas
échéant, qui évaluent, sur un plan professionnel, le
caractère raisonnable ou déraisonnable de l'ensemble de la
pratique d'un professionnel.
Il n'est donc pas question, dans leur cas, de fraude.
Il est question d'un "abus" qui permet ou permettrait, par
hypothèse, à certains professionnels, de tirer du régime
pi us qu'il n'est destiné à produire, sur le plan du revenu d'un
professionnel en particulier, mais sans impliquer pour ce professionnel de
fausses déclarations, de fraudes ou quoi que ce soit.
M. Charron: C'était, je pense, un cas qui a
été soulevé par la régie, cette année,
à un comité de révision, celui des injections contre les
varices, où on avait identifié une exagération dans l'acte
qui a amené la régie à prendre une position
différente. Est-ce que c'est exact? Quelle est la nature exacte de cette
situation?
M. Forget: II y a une situation, à laquelle vous vous
référez, qui est sans doute le changement qui a été
apporté, l'amendement qui a été apporté à
l'entente existante, aux deux ententes, omnipraticiens et spécialistes,
en ce qui concerne les injections sclérosantes. Basé sur
l'observation, depuis le début du régime, de l'évolution
des coûts et du nombre d'injections sclérosantes, cet amendement a
été accepté par les parties à la suggestion du
ministre. Les fédérations ont accepté de réviser le
tarif et d'exclure aussi, comme service assuré, certains types
d'injections qui sont de nature purement esthétique, qui sont faites
pour des fins purement estéti-ques. Cela a été à
partir d'observations statistiques. On s'est rendu compte que de 500,000, la
première année, on était à près de 2
millions, en 1973, d'injec-
tions sclérosantes. C'est ce qui a amené le ministre
à poser le problème aux fédérations.
M. Charron: On ne les a pas exclues mais on a diminué le
tarif.
M. Forget: On a diminué le tarif d'une part, et, d'autre
part, on a, par règlement, déterminé que certains types
d'injections ne sont pas des services assurés parce qu'ils sont de
nature esthétique et donc non médicalement requises.
M. Charron: Cette année, la régie a porté
combien de plaintes devant les tribunaux?
M. Forget: En cette année 1973/74, on en a porté
très peu, surtout dans la dernière partie de l'année,
parce qu'on aeu un jugement, à un moment donné, qui a
indiqué que, selon le juge en question, la régie n'avait pas le
pouvoir. Lui jugeait que la loi ne permettait pas d'appliquer la sanction
pénale parce qu'il n'y avait pas ouverture, dans la loi, à une
sanction.
L'article 18, sur lequel on se basait traditionnellement pour porter des
plaintes, donne un droit aux médecins d'être payés mais il
n'établissait pas la sanction s'ils remplissaient faussement une
déclaration ou une demande de paiement. C'est la raison pour laquelle le
ministre a proposé un amendement à la loi, pour que ce soit
précisé et puisse donner ouverture à une sanction.
M. Charron: Est-ce à dire qu'à cause de cette
faille dans la loi plusieurs pratiques irrégulières se sont
trouvées absoutes?
M. Forget: Non. Voici ce que nous avons fait. Il y avait un
certain nombre de plaintes devant les tribunaux.
Nous avons, dans chacun des cas, continué la procédure,
mais en soumettant au juge le jugement du juge Sirois auquel je faisais
allusion et le juge décidait lui-même s'il poursuivait ou non.
Dans tous les cas le juge décidait lui-même s'il poursuivait ou
non. Dans tous les cas le juge a décidé de ne pas poursuivre.
C'est la position que la régie a prise à ce moment-là, et
maintenant, il faut attendre qu'on puisse appliquer la nouvelle loi.
Par contre on a quelques autres cas qui se sont poursuivis au criminel
et on a eu un jugement, il y a quinze jours, au criminel qui nous a
donné raison.
C'est la première fois que la régie portait une cause,
avec l'assistance du ministère de la Justice, en matière
criminelle, contre un médecin de Montréal, je crois.
M. Charron: M. le Président, la distinction que le
ministre a faite tout à l'heure, à bon droit, entre la
tâche réservée par la loi à la régie quant
aux poursuites, criminelles au besoin, et la tâche réservée
au comité de révision ne devrait-elle pas être
amplifiée ou mise à jour par le fait qu'on rendrait les rapports
publics, les rapports que reçoit le ministre le 31 décembre de
chaque année des comités de révision, pour avoir un autre
aperçu de la pratique telle que jugée par ces comités de
révision-là?
M. Forget: Je n'ai pas d'objection de principe à rendre
publics les rapports que j'ai reçus à ce jour, d'un certain
nombre de comités de révision, mais ce qu'il faut tout de suite
dire c'est que ces rapports sont des rapports d'activités des
comités et non pas des rapports sur la pratique médicale. Ce sont
donc des rapports au contenu relativement sec et qui relatent le nombre de
réunions tenues, le type de travaux effectués, le nombre de cas
étudiés, et ça se limite essentiellement à ce genre
de problèmes.
D'ailleurs, je crois qu'on peut assurer la distribution aux membres de
cette commission des rapports qui ont été reçus au 31
décembre. Si ce n'est pas possible immédiatement, on pourra le
faire au début de la séance de ce soir. Mais, encore une fois,
c'est un tableau qui n'est pas un tableau de la pratique médicale mais
un tableau des activités de ces comités où l'on souligne,
cependant, les problèmes qui ont été abordés. C'est
en m'inspirant de ces rapports, d'ailleurs, que j'ai brossé tout
à l'heure un tableau sommaire des activités de l'ensemble de ces
comités, en insistant particulièrement sur les problèmes
légaux qui existent. M. Martin vient de souligner qu'il y a eu des
problèmes légaux quant à l'application de sanctions
pénales. Ce problème-là est maintenant surmonté
mais son effet ne sera sensible qu'un peu plus tard durant l'année,
quand les actes qui ont été posés depuis l'adoption de la
nouvelle loi auront fait l'objet d'un examen et d'une évaluation et
d'une sanction possible, ce qui nous reporte dans quelques mois, j'imagine.
Pour ce qui est du recours non pénal, mais de type plutôt
professionnel, il y a aussi des problèmes juridiques. Nous avons
reçu tout récemment, enfin, même la semaine dernière
un avis juridique que nous sommes à évaluer dans le moment et sur
laquelle je préfère ne pas en dire davantage, puisque c'est un
problème qui est devant un tribunal, devant la cour Supérieure.
Je pense qu'il vaut mieux attendre le jugement dans cette cause avant de tirer
des conclusions définitives de l'avis juridique que nous avons
reçu.
Tous ces contrôles, de quelque sorte que ce soit, qu'il s'agisse
de contrôles de type administratif avec des conclusions pénales ou
des contrôles de type professionnel avec des conclusions purement
économiques, c'est-à-dire un refus de paiement partiel ou total,
se sont avérés dans la pratique extrêmement difficiles
à utiliser et à mettre en place, sujets à toutes sortes de
difficultés à la fois techniques et juridiques. Donc, nous ne
sommes pas au bout de l'édification d'un régime dont on puisse
dire avec une satisfaction raisonnable qu'il fait effectivement l'objet de tous
les contrôles normaux, je pense, pour un régime d'assurance de
soins médicaux. On peut probablement trouver, à
l'extérieur du Québec et dans des régimes d'assurance soit
publics ou privés, des mécanismes de contrôle que nous
aurions intérêt à instaurer progressivement. Encore une
fois, il s'agit là du jeu combiné de lois, d'ententes, d'un
régime un peu d'exception, puisque c'est un régime qui fait
exception au droit commun et à la juridiction des tribunaux de droit
commun. Cela pose des problèmes très considérables. C'est
un domaine nouveau pour le Québec sur
le plan juridique et aussi sur le plan des informations
nécessaires pour faire fonctionner de tels organismes.
Il est clair qu'il y a des millions d'actes qui sont posés par
des milliers de professionnels. Leur contrôle pose un problème
mécanique, si on veut, d'importance, indépendamment de toutes les
difficultés juridiques que je viens d'exposer.
M. Charron: M. le Président, à partir de quand les
bénéficiai res du régime recevront-ils copie de ce que la
régie paie à leur médecin?
M. Forget: J'aimerais peut-être que le président de
la régie réponse à cette question.
Nous avons fait engager des études dès que la loi a
été sanctionnée, même un peu avant, dès qu'on
a su l'intention du ministre à cet égard. Les premières
indications nous faisaient constater qu'on ne pourrait pas envisager les envois
aux bénéficiaires avant la fin de 1976 et à des conditions
extrêmement onéreuses en termes de personnel et de ressources
financières.
Il y a tout le système d'inscription, la validation du fichier
des bénéficiaires qu'il faut assurer, avant de pouvoir s'assurer
qu'on a les bénéficiaires bien identifiés avec la bonne
adresse et qu'on puisse avoirtout le système mis en marche pour inscrire
les actes à mesure sur leur dossier, avec tous les contrôles que
cela suppose au point de vue informations et manuel dans certains cas.
C'est une procédure extrêmement complexe. Pour le moment,
je préférerais ne pas mentionner de date. La première
constatation me démontrant que ce serait très considérable
comme dépense, j'ai demandé qu'on fasse de nouvelles
études pour considérer d'autres hypothèses qui
étaleraient peut-être davantage dans le temps, ou qu'on trouve par
une imagination quelconque des moyens plus efficaces d'arriver aux
résultats dans le meilleur délai, et le délai minimum est
fatalement au moins vers la fin de 1976. C'est le délai minimum.
Encore une fois, c'est sans engagement de ma part que je le dis.
M. Charron: Est-ce que le jeu en vaut la chandelle, si c'est
aussi onéreux et aussi compliqué, que cela représente une
charge supplémentaire pour la régie? Est-ce que l'objectif que
visait le ministre en apportant cette modification mérite ou vaut toute
cette dépense?
M. Forget: Je ne voudrais pas revenir sur le principe d'une loi
qui est déjà adoptée, mais il me paraît
personnellement évident que ce coût en vaut la chandelle, comme
vous dites, parce que non seulement un tel système permettra-t-il de
produire des relevés c'est l'aspect le plus évident,
peut-être le plus terre à terre d'un tel développement
mais il permettra également de développer et de tenir
à jour un dossier des bénéficiaires qui permettra
d'éviter un phénomène qui existe probablement, quoique
dans un point indéterminé à l'heure actuelle, de services
qui sont probablement fournis à des per- sonnes qui ne sont pas
qualifiées comme résidents du Québec. Ce système
permettra également, et ceci est peut-être plus important, de
cumuler un profil historique, faire une validation historique des actes
posés et donner une base beaucoup plus certaine et beaucoup plus
intéressante pour, justement, le travail d'évaluation et de
contrôle sur le plan, parexemple, requis pour les comités
d'évaluation ou les comités de...
M. Charron: De révision.
M. Forget: ... de révision.
Il est clair que seule cette validation historique des actes,
évidemment, et des paiements faits aux professionnels peut permettre de
déceler, par exemple, que l'on fait un acte d'obstétrique au
bénéfice d'une personne du sexe masculin ou que l'on
enlève un troisième poumon à une personne ou même le
deuxième, c'est déjà assez grave, ou qu'on enlève,
pour la deuxième fois, une autre partiede l'anatomie. Je cite des
exemples qui font rire mais il y en a d'autres qui sont moins évidents
et qui permettraient d'établir un contrôle meilleur.
Il est clair que, sur le plan de la révision des profils, le
profil du bénéficiaire est beaucoup plus significatif que le
profil global du professionnel.
M. Charron: M. le Président, je neveux pas, non plus,
reprendre ledébat sur le principede la loi, mais en posant une question
bien précise on va rejoindre cette discussion qu'on a eue sur le
principe de cette innovation. Est-ce qu'on est fixé maintenant, à
l'intérieur de la régie, sur les détails qu'il y aura sur
le document qui sera communiqué aux bénéficiaires? Est-ce
le chef de famille qui recevra la copie ou s'il y aura une copie pour chaque
membre individuellement, quel que soit son rang et sa place dans la
famille?
M. Forget: Ceci est déterminé par le projet de loi.
C'est ie bénéficiaire lui-même qui va recevoir ce
relevé et il y a une certaine flexibilité possible pour
préciser, par voie réglementaire, le format et la
périodicité. Il reste que les règles de
confidentialité sont respectées et, en particulier, parmi les
choses qu'il sera permis d'exclure, par règlement, il y a certaines
catégories de problèmes de santé dont la nature est plus
délicate et dont la divulgation pourrait engendrer dans une famille,
etc., des problèmes. C'est déjà pratique courante
d'omettre, parexemple, au niveau de la vérification qu'effectue la
régie auprès des bénéficiaires, certains types de
services pour certai-nes affections. Certains types de problèmes de
santé ne font jamais l'objet de vérifications à cause,
justement, de leur caractère, disons, personnel, plus personnel que
d'autres.
M. Charron: Cette assurance, contenue dans la loi, sera
renforcée par le règlement qui permettra que la
confidentialité desdossiers demeure même quand il y aura envoi aux
bénéficiaires, vers la fin de 1976. C'est ce que vous m'avez dit
tout à l'heure.
M. Forget: J'ai répondu à votre question dans
le
sens bien précis: Quand pourrait-on commencer à envoyer...
J'ai dit: La période la plus rapprochée et, encore
là, ce n'est pas un engagement ce serait vers la fin de
l'année 1976 et peut-être pi us tard. Tout dépend des
hypothèses qu'on va considérer pour l'étalement ou le
choix de moyens qui nous amèneraient à raccourcir cette
période-là puisque, l'objectif étant fixé par la
loi, on veut bien l'atteindre le plus rapidement possible, mais à des
conditions financières et matérielles, des conditions de
ressources humaines tolérables.
On réalise, je pense, et c'est peut-être bon de le
mentionner, que la mise en place de ce système suppose une
opération qui aurait probablement et même je crois qu'on
peut dire certainement été nécessaire, à
tout événement, qui est l'opération de désignation
des bénéficiaires qui a été faite sur la base du
numéro d'assurance sociale, au débutdu régime,
puisquec'étaitunsystèmed'identi-fication qui existait
déjà, qui était connu, mais qui pose un certain nombre de
problèmes et même des problèmes certains. C'est un
numéro qui est susceptible de changer durant la vie d'une personne, lors
des changements d'état civil une femme qui se marie, par exemple
et qui ne prévoit aucune date d'expiration de
validité.
C'est-à-dire qu'une carte émise une fois est émise
pour l'éternité, et qui, aussi, ne permet pas, par exemple,
l'inscription de l'adresse, donc tout ce genre de mise à jour, de
considérations, nous amenait, indépendamment des
considérations précédentes sur la validation historique,
à un nouveau système d'identification qui empêche toutes
les difficultés, celles que j'ai mentionnées et d'autres qu'on
pourrait mentionner sur le plan technique, parce qu'il y en aet qui
amène une amélioration de ce côté.
Donc, je pense qu'il faut faire ladistinction, dans les coûts du
système d'information envisagé entre ce qui était
nécessaire, de toute manière, et ce qui permettra
d'améliorer justement le fonctionnement d'un certain nombre de
comités qui doivent dépendre de données validées
historiquement pour un fonctionnement efficace. Ce n'est pas le système
d'information comme tel qui va contribuer à un coût
considérable.
On ne peut pas faire tout cela, d'un autre côté, en
quelques mois. Déjà, quand on se met à la décrire,
on se rend compte que c'est une opération de très grande
envergure.
M. Charron: Question de détail, combien de citoyens qui
auraient droit à leur carte ne l'ont pas encore?
M. Forget: D'après les estimations qu'on peut faire, il
nous semble que ce serait autour de 5%.
M. Charron: 5%.
M. Forget: Particulièrement les personnes
âgées, dans certaines régions particulières.
D'après les observations qu'on a pu faire, c'est une estimation et ce
sont surtout des personnes âgés.
M. Dufour: M. le Président, ceux qui n'ont pas leur carte,
présentement, quelle en est le cause?
Est-ce que vous avez une raison valable à nous donner?
M. Forget: Je pense que la principale cause, il y en a
peut-être d'autres, mais la cause essentielle, c'est qu'ils n'ont pas
fait de demande, ils ne se sont pas inscrits.
M. Dufour: Je m'excuse, parce que j'ai dû remettre,
à mon bureau, à de nombreux patients, des formules pour
s'inscrire. Ils en ont rempli trois, quatre, cinq, ils n'ont jamais reçu
de réponse.
M. Forget: C'est possible, il y a eu des problèmes,
pendant une certaine période. Ces problèmes, depuis quelques mois
sont...
M. Dufour: Cela se continue, parce qu'ils remplissent encore des
formules et ils ne reçoivent pas leur carte.
M, Charron: II faut combien de temps, M.Martin, à peu
près, entre la demande et le retour de la carte?
M. Forget: Quand les renseignements sont bien décrits,
quand la demande est bien formulée, actuellement, Ie délai est
d'à peu près 30 jours. Mais il y a des problèmes.
Là-dessus, je vais être d'accord avec vous, il reste des
problèmes, il faut les signaler puis on s'en occupe.
M. Dufour: Mais qui est pénalisé au moment
où l'identification du malade qui n'a pas sa carte est mal faite? Quand
l'identification du malade est mal faite, parce que le patient donne une
mauvaise adresse, un mauvais nom, vous autres vous cherchez, sur quelle base
nous payez-vous? Qui est responsable?
M. Forget: Du point de vue des médecins, vous posez la
question de la bonne foi, de la clause de bonne foi qui est inscrite dans les
ententes?
M. Dufour: Oui.
M. Forget: La clause de bonne foi indique que, quand le
médecin a toutes raisons de penser que la personne est un
résident québécois, sur déclaration de la personne,
il a droit de recevoir les honoraires prévus. Il n'est pas
pénalisé.
M. Dufour: C'est pour cela qu'on embarque souvent dans le code
20, puis les études se font assez lentement.
M. Forget: II y a des cas de vérification et
d'identification du bénéficiaire qui peuvent retarder des
paiements. Le code 20 n'est pas la principale raisons. Ce sont surtout des
demandes de renseignements, des erreurs de complètement ou des analyses
particulières qui doivent être faites et qui dépendent du
professionnel lui-même, qui se rattachent à la façon dont
un professionnel a rempli sa demande ou qui concernent des demandes qui
supposent des analyses particulières.
M. Charron: M. le Président, le surplus de la régie
était de quel ordre, à la fin de l'année
financière?
M. Forget: Au 31 mars 1975... M. Charron: Oui.
M. Forget: ...sous réserve de vérifications
comptables de dernière heure par le vérificateur
général, donc aux états financiers, sous cette
réserve, le chiffre que je peux mentionner est de $97.3 millions.
M. Charron: II était de $65 millions à la fin du
précédent exercice financier.
M. Forget: II était, à la fin du
précédent exercice financier, de $79,406,000.
M. Charron: Qu'est-ce que le ministre a l'intention de faire avec
tout cet argent?
M. Forget: Je vous rappelle que...
M. Charron: Oui, je savais que vous étiez pour me le
rappeler de toute façon.
M. Forget: II a été convenu je pense que
c'est admis par tout le monde qu'il y a au moins une partie de ce
surplus qui doit correspondre en gros à un mois de revenus, qui doit
être conservée comme réserve pourtoute
éventualité grave, ce qui équivaudrait, avec ces ordres de
grandeur, à quelque $48 millions, si on tient compte d'un mois de
revenus, à ce moment-ci.
M. Saint-Germain: Lorsque vous parlez du coût très
dispendieux de la mise en application de ce mode d'information, quelle est
l'échelle, à peu près, du coût?
M. Forget: Pour la mise en place du système d'inscription
on est en train d'étudier justement ces questions. Je ne peux pas
mentionner de chiffres. Le ministre avait raison d'indiquer que, de toute
manière, il y a des coûts qu'il aurait fallu encourir pour faire
la mise à jour de notre fichier des bénéficiai res. Ce
coût, on l'avait estimé, même avant l'adoption de la loi 93,
à une dépense d'environ $1 million par année, pendant
trois ans, mais d'où il faudrait défalquer un chiffre
correspondant au remplacement des cartes, ce qu'il aurait fallu faire de toute
manière. L'opération en gros, l'opération nette, on
l'estimait, pour la révision du fichier, la nouvelle inscription avec le
nouveau numéro, à $1.8 million.
Quant à l'addition pour l'information au
bénéficiaire, le chiffre exact, je ne pourrais pas le formuler
à ce stade-ci. Ce sont précisément les hypothèses,
considère-t-on, qui vont nous le dire parce que c'est le personnel qui
est en cause, c'est l'équipement qui est en cause aussi, ainsi que le
traitement des données. Si on traite l'adresse, cela coûte plus
cher. Mais, de combien?Tout dépend des moyens technologiques qu'on
utilise, et c'est là-dessus qu'on travaille actuellement pour arriver
avec des hypothèses qu'on aimerait discuterensuite avec le ministre pour
s'entendre sur le délai nécessaire, raisonnable pour commencer
à envoyer des relevés aux bénéficiaires.
M. Saint-Germain: Vous avez mentionné, tout à
l'heure, que certains jugements vous ont un peu paralysés pour, du
moins, arrêter ou punir les abus. Est-ce que vous avez ressenti que
certains professionnels qui connaissent bien cette situation judiciaire,
abusent de la situation?
M. Forget: Bien, ils n'ont pas eu le temps d'en abuser longtemps
parce que la loi aété modifiée... Le jugement est du mois
de septembre, sauf erreur, août ou septembre, et la loi, du mois de
décembre. On n'a pas fait une très grande publicité au
jugement du juge Sirois...
M. Saint-Germain: Est-ce que vous avez la pleine
coopération maintenant, pas des corporations professionnelles car ce
n'est plus leur nom...
M. Forget: C'est encore le nom, pour les médecins ce n'est
pas pareil.
M. Saint-Germain: Oui, pour les médecins, est-ce que vous
avez le pleine coopération du conseil?
M. Forget: En ce qui nous concerne, c'est parfait comme
collaboration avec les collèges, ou corporations professionnelles ou
ordres.
La collaboration est parfaite.
M. Charron: M. le Président, si, comme le dit M. Martin,
il faut bien analyser le chiffre de $97.3 millions, qui est le surplus, en date
du 31 mars 1975 et le prendre avec toutes les réserves qui s'imposent
sur le fonctionnement habituel de la régie, il reste que, d'année
en année, ce surplus est plus considérable. Vous vous rappellerez
certains points de notre discussion. Nous avons vu que certaines extensions
possibles au régime ne seraient finalement pas si coûteuses
qu'elles peuvent le sembler à première vue et que cette
"réserve" peut, à l'occasion, servir pour étendre la
couverture du régime.
Il est bien possible, d'ailleurs, que ce surplus accumulé soit
encore plus considérable. Non seulement cela est bien possible, mais il
est tout à fait probable que le surplus accumulé soit encore plus
considérable que l'année dernière, profitant
lui-même, comme n'importe quel autre revenu du gouvernement, de
l'inflation. Les revenus de l'assurance-maladie provenant essentiellement d'une
perception sur les salaires, la hausse des salaires qui accompagne la
période inflationniste permet des revenus supplémentaires qui,
que ce soit pour l'extension des soins dentaires ou d'autres exemples qu'on a
touchés, donnent une liberté de manoeuvre au ministre, qu'il aura
le loisir, au cours de l'année 1975/76, d'analyser pour inviter la
Chambre, à l'occasion, à étendre à nouveau le
régime d'assurance-maladie à la suite des revenus
supplémentaires qui lui seront donnés.
Je ne prétends pasqu'il s'agit là de $97.3 mil lions qui
dorment, qui ne servent à rien, qui sont dans les bas de laine du
ministre des Affaires sociales. Je n'ai
pas cette conception du surplus accumulé. Mais je crois qu'il y a
là une possibilité financière d'action dans le but
d'élargir le régime d'assurance-maladie, toutes ces
considérations faites avec les réserves que M. Martin a bien
légitimement apportées. Je me demande si ce surplus, qui frise
maintenant les $100 millions, qui les aura probablement atteints au cours des
prochains mois avec les revenus supplémentaires qui s'y grefferont, ne
permettra pas au ministre de déclencher à l'intérieur du
ministère des Affaires sociales ou d'encourager ses hauts fonctionnaires
la recherche de possibilités d'extension du régime
d'assurance-maladie, pour la prochaine année.
M. Forget: M. le Président, je crois qu'il ne faudra pas
chercher très longtemps. ll y a un phénomène sur lequel il
faut attirerl'attention dans l'évaluation de ce surplus accumulé.
C'est le retard, qu'on a d'ailleurs mentionné ce matin, dans
l'introduction d'un régime en particulier, le régime des
prothèses. Il faut également attirer l'attention sur le retard
qui avait précédé l'entrée en vigueur du
régime de soins dentaires pour les enfants. On se rappelle que les
négociations à ce sujet s'étaient poursuivies pendant
près de deux ans. Il y a donc eu des retards qui ont contribué
à gonfler le surplus accumulé par rapport à ce qui se
serait normalement passé si ces retards ne s'étaient pas
produits.
Par ailleurs, il y a eu deux décisions successives d'extension du
régime pour les médicaments aux personnes âgées, une
première étape en janvier 1974, une deuxième en janvier
1975, qui ont contribué à ajouter environ $15 millions, $16
millions ou $17 millions, je crois, au coût du régime sur une
année complète.
On sait que l'on se trouve devant aussi des perspectives telles que
celles mentionnées dans le rapport Girard et ailleurs qui, certainement,
épuisent passablement la liste des possibilités qu'il faille
considérer à l'heure actuelle.
J'aimerais d'ailleurs que M. Martin nous donne un aperçu des
perspectives pour l'année qui vient de commencer pour ce qui est du
surplus de l'année et non pas du surplus accumulé, qui nous
permettra de voir s'il est raisonnable d'anticiper, de voir s'accroître
ce surplus ou si, au contraire, il ne va pas se stabiliser.
M. le Président, je vais, d'abord, si vous me permettez, enlever
une inquiétude au député de Saint-Jacques à propos
du bas de laine. Les millions servent aux fins du régime
d'assurance-maladie. Ce sont des revenus de placement. Les
intérêts sur le placement, pour vous donner une idée de
l'ordre de grandeur, pour 1974/75, nous estimons qu'ils auront
été de $10,125,000.
Alors, c'est de l'argent qui s'ajoute et qui va servir pour les fins du
régime.
M. Charron: Cela me rappelle les $9 millions dont vous parliez
pour les troisièmes tranches des personnes âgées qui ne
reçoivent pas d'assistance-médicaments. Je veux dire que c'est le
seul intérêt...
M. Forget: Je vous laisse les rapports à faire entre les
chiffres.
M. Charron: Vous ne pouvez pas m'empêcher de le faire,
quand même.
M. Forget: La perspective pour 1975/76, avant l'annonce de
l'extension aux enfants de huit ans du programme de service dentaire, nous
prévoyons un surplus de $875,000 pour l'exercice 1975/76, par rapport
à un surplus prévu et réalisé, sous réserve
encore une fois des dernières vérifications, de $17,896,000 pour
1974/75. Alors 1975/76, le surplus prévu était $875,000 avant
l'annonce de cette extension. Mais maintenant, nous devons prévoir un
déficit pour l'exercice, si on considère seulement l'exercice, de
$2,425,000.
M. Charron: Lesurplus accumulé, autrement dit, n'aura pas
de croissance au cours de l'année à cause des extensions qui ont
été apportées.
M. Forget: II sera restreint selon les prévisions
actuelles à $95 millions, environ, après l'annonce de l'extension
aux enfants de huit ans du programme de service dentaire.
M. Charron: Pour l'année en cours le déficit au
total est de $2 millions.
M. Forget: On commence à gruger le surplus. Et des
prévisions ont été faites, compte tenu des programmes dont
a parlé le ministre, y compris orthèses et prothèses, mais
pas pour les handicapés visuels, orthèses et prothèses
telles que définies dans le premier temps, et les prévisions ont
été faites aussi en tenant compte du maintien du tarif actuel. Il
n'y a pas d'indication quant à ce qui se passera en matière de
négociations. Pour nous à la régie, on a fait nos
prévisions à partir des tarifs inscrits dans les cahiers de
prestations qui sont en vigueur actuellement.
M. Charron: Alors, cela je vais vous en parler aussi tout
à l'heure mais, comme profane encore dans ce milieu-là, j'ai de
la misère à m'expliquer comment il se fait que la seule
extension, en fait c'est la seule nouvelle, aux enfants de neuf ans...
M. Forget: II y a autre chose, il y a d'abord la croissance de la
rémunération à payer et tous les facteurs dont on doit
tenir compte, le coût des programmes qui augmente, les
médicaments, orthèses et prothèses. Ce ne sera pas un
surplus cette année si le programme est mis en place, et vous le
souhaitez. Tous ces faits-là, une augmentation de la
rémunération, nos prévisions pour l'ensemble de la
rémunération des professionnels de la santé...
M. Charron: Ce seul article-là, par exemple?
M. Forget: Cela comprend des boursesd'études et de
recherche, qui est aussi un nouvel article...
M. Charron: Oui.
M. Forget: ...qui passerait de $472,484,000 à $537,685,000
selon les prévisions actuelles.
M. Charron: Si les médecins devaient demeurer au
même tarif?
M. Forget: Exactement, oui, médecins, pharmaciens. Il y a
de 400 à 500 nouveaux médecins.
M. Charron: Nouveaux médecins, donc autant de fois d'actes
médicaux multipliés.
M. Forget: C'est cela et le coût des services augmente. La
consommation per capita augmente.
M. Charron: Au total, il y a combien d'actes médicaux, de
quelque nature que ce soit, qui sont donnés? 40 millions?
M. Forget: 48 millions, tout près de 49 millions
prévus.
M. Charron: Les médecins, M. le Président, dont
nous avons parlé, sont la pierre angulaire du régime
d'assurance-maladie, il va sans di re, des services de santé. Le
député de Vanier a soulevé pertinemment la question
à l'Assemblée tout à l'heure, durement touché
lui-même par le communiqué qu'il avait reçu de la
fédération dont il est membre. J'avais l'intention, de toute
façon, de le soulever ici, non pas j'évite
immédiatement l'excuse pour que nous procédions à
cette table à une négociation ou à l'explication de la
stratégie de l'employeur dans ses négociations, je sais
très bien qu'à chacune des questions que je peux poser le
ministre peut me répondre la formule classique qui dit: Je ne
répondrai pas à cette question car je crois qu'elle
interviendrait indûment dans les négociations en cours. Donc,
d'avance j'assure que je pose les questions avec la conviction qu'une
réponse ou une discussion alentour de ces questions ne nuira pas
à la négociation, mais qu'à l'occasion un petit peu plus
de lumière sur les propositions gouvernementales ou une philosophie
jusqu'ici mal expliquée ou mal entendue peut même être un
facteur en tous cas, modestement je l'espère de
rapprochement des parties à la table des négociations.
M. le Président, j'ai souligné cette information que le
ministre a confirmée à la Chambre vendredi dernier. Le
régime dont nous venons de parler connaîtra des difficultés
semblables, j'espère pas semblables en gravité, à celles
qu'il a déjà traversées en 1970, quelques semaines
à peine après son adoption par l'Assemblée et son
implantation. Je ne souhaite certainement pas traverser une crise semblable
à celle-là. Mais cela ne prend pas un cours classique, comme on
dit, pour deviner qu'on s'en va vers une période où les longues
négociations entreprises d'une entente expirée depuis
décembre 1972 semblent devoir prendre un tournant un peu plus
difficile.
Selon les informations qu'a communiquées le ministre des Affaires
sociales à l'Assemblée, lors d'une question du
député de Johnson, je crois, il y a quelques semaines, avant
l'ajournement de Pâques, le ministre disait avec raison qu'on n'avait pas
abordé encore la question salariale, la question de la
rémunération à l'acte, le tarif de la
rémunération avec les médecins.
Cette information, M. le Président, effectivement, a
été confirmée par les médecins eux-mêmes, par
le porte-parole qu'ils se sont donné. Le document auquel
référait ledéputédeVanierdansson intervention en
Chambre cet après-midi le dit noir sur blanc. C'est vrai qu'on n'a pas
encore abordé cette question avec la fédération.
Je me permets une opinion immédiatement, M. le Président.
Cette allure des négociations ou, si vous voulez, cette priorité
que l'on a donnée à l'acte professionnel, à la
liberté de pratique, tous les synonymes qui se recoupent, le secret
professionnel, la pratique indépendante des administrations, etc., etc.,
est actuellement, contrairement à ce qu'on peut penser dans certains
milieux, favorable à la classe médicale, je pense.
La stratégie des médecins qui jouissent toujours, faut-il
le rappeler, M. le Président, d'un revenu sensiblement supérieur
à l'ensemble de nos concitoyens... J'ai ici des statistiques selon
lesquelles, enfin, 62,650 spécialistes feraient plus de $20,000; 52,000
omnipraticiens, enfin peu importe ces revenus...
M. Forget: La liste des omnipraticiens.
M. Charron: D'accord, c'est la moyenne de salaire; ce n'est pas
le nombre. C'est $62,650 pour les spécialistes et, pour les
omnipraticiens, $52,463. Toutes ces statistiques, que le ministre a
lui-même déposées à l'ouverture des travaux de la
commission, font qu'évidemment les deux fédérations
seraient bien mal vues d'entamer les négociations par la clause
salariale.
Leur stratégie évidente, c'est de s'assurer un certain
respect de la profession, d'emmurer, je dirais, la profession médicale
dans un respect que toute la société, disent-ils, leur doit et,
une fois que, dans des ententes normatives la place du médecin dans le
centre hospitalier ou n'importe où ailleurs sera effectivement reconnue,
justifier, par la suite, le salaire qui va avec le statut qu'on vient de lui
accorder.
Si les médecins devaient avoir gain de cause sur les demandes
qu'ils ont formulées à la table de négociations quant au
statut qu'ils exigent d'avoir non seulement dans l'exercice de leur profession
dans un centre hospitalier, mais je dirais dans l'ensemble de la
société québécoise et si le ministre devait
parapher chacun des paragraphes présentés par la
fédération, il est bien évident qu'il serait très
mal vu par la suite, après avoir accordé un tel statut
professionnel, de ne pas accorder le revenu qui vient.
Donc, que cette discussion achoppe sur les clauses normatives pour les
fins de la discussion, c'est-à-dire la situation du médecin dans
les services de santé, n'est pas au désavantage de la classe
médicale. Il n'y a pas grand monde qui va réussir à me
faire accroire cela, même si on me faisait beaucoup de
démonstration de malheurs.
Par contre, comment dirais-je il est évident, qu'on l'accepte ou
qu'on ne l'accepte pas, que la priorité que les médecins se sont
donnée dans les négociations quant à leur statut
professionnel, personne je dis personne alentour de cette table
ne réussira à les faire démordre de cela.
Ils se refuseront et ils commettront les actes auxquels ils se
préparent, qui ont déjà été annoncés
à la régie depuis le 7 avril pour une région donnée
au
Québec tant et aussi longtemps qu'ils n'auront pas obten u, je ne
dis pas gain de cause nécessairement à tout ce qu'ils ont
demandé, mais règlement de cette partie-là avant d'aborder
d'autres questions. Le point qui achoppe particulièrement, le
député de Vanier l'a signalé, c'est celui de ce
contrôle de l'acte médical à la minute. J'ai vu des
porte-parole de ces fédérations s'insurger contre une telle
définition. Je n'ai pas de commentaire à faire quant à
cette proposition même du gouvernement quant à sa nature, c'est
ses objectifs que j'aimerais voir clarifier.
Pourquoi a-t-on choisi cette formule du "minutage" minimum de l'acte
médical? Pourquoi en sommes-nous venus à étendre ce que le
ministre a affirmé être déjà considéré
pour les soins psychiatriques, pourquoi l'étendre à l'ensemble
des actes médicaux? Si je prends la proposition du 21 mars 1975, on en
sera rendu à minuter au minimum encore une fois j'admets la
distinction l'examen ordinaire, l'examen de contrôle, l'examen
complet, l'examen spécifique, l'examen prénatal. Pas besoin de
vous dire que quand on entre dans les examens spécifiques, chacund e
ceux là sont définis à 15, 30 et 40 minutes.
Le ministre a soutenu, tout le monde sait ce qu'il a soutenu à
l'Assemblée il y a à peine quelques minutes. J'ai soutenu le
contraire. Je ne veux pas me faire l'avocat du diable, mais je suis
sincère dans cette opinion, que je maintiens, que l'inscription d'un
temps minimum pour la pratique d'un acte médical n'est évidemment
pas une invitation au médecin, en bonne et due forme, à s'y
maintenir. Le ministre peut bien dire qu'il pense améliorer la pratique
de la médecine et des soins de santé aux citoyens par cette
méthode, car il peut s'assurer que les actes médicaux ne seront
pas bâclés. Il fixe un minimum à chacun des actes. Donc,
chaque citoyen peut être au moins certain que lorsqu'un examen de
contrôle, par exemple, dans un centre hospitalier se fera, il aura droit
au temps qui est prévu, c'est-à-direau minimum de cinq minutes;
sinon, l'acte de son médecin ne sera pas rémunéré,
s'il faut en croire l'entente.
Moi, je dis que dans la pratique, je soutiens, je crains, disons le mot,
que dans la pratique, ce soit une invitation às e maintenir. Le
médecin très tatillon, avec exagération parfois, sur la
liberté professionnelle quant à son acte, quant à sa
profession de contrôle, se voyant dire qu'il est possible, puisque le
minimum a été fixé à cinq, de faire un examen de
contrôle à cinq, peut très bien se dire: Pourquoi je le
ferais à six ou à dix? A ce moment-là, cela ne reposera
que sur sa conscience professionnelle en quelque sorte, que d'espérer
qu'un médecin qui, visiblement, ayant dépassé les cinq
minutes et s'apercevant qu'il n'a pas terminé auprès d'un patient
un examen de contrôle, passe cinq minutes de plus qui ne lui sont pas,
plus rémunérées, car il sera rémunéré
à partirde la base minimum. C'est une invitation à demeurer au
minimum.
Tout le monde sait combien plusieurs citoyens chacun dans son
comté, on ces échos ont l'impression que la
médecine est désormais bâclée.
C'est le député de Rouyn-Noranda qui l'a soutenu
dès l'ouverture des travaux de la commission.
Que ce soit réel ou non, le simple fait que cette impression
existe et qu'elle puisse être augmentée par la suite de ce genre
de proposition, si elles devaient être retenues, mérite
l'attention de la commission. Or, avant même d'entrer dans d'autres
détails, d'ailleurs où je n'ai pas l'intention d'aller, je
voudrais simplement obtenir ce qui n'a pas été clair à
l'Assemblée, ce qui méritede l'être, à mon avis,
surtout quand on sait les circonstances qui nous attendent, au début du
mois de mai, savoir quel est l'objectif poursuivi par le ministère dans
ce genre de proposition. Et est-ce à la suite d'abus, finalement,
peut-être pas du genre frauduleux, dont la régie a la
responsabilité, mais d'abus généralisés dans la
pratique de la médecine qu'on en est venu à vouloir minuter
chacun des actes au minimum? C'est donc là la seule question que j'ai
à poser qui mérite réponse, je pense?
M. Forget: M. le Président, je vais essayer de le faire le
plus rapidement possible, puisqu'on approche l'heure de la suspension de nos
travaux.
En premier lieu, et avant d'aborder ce point spécifique,
j'aimerais revenir aux remarques du début, du député de
Saint-Jacques et, contrairement à lui, dire que ce qui fait objet des
négociations avec les fédérations, ce n'est pas un vague
objectif sociologique de statut ou quoi que ce soit du genre.
Nous ne faisons pas, aux médecins, de guerre d'intention. Nous
n'en faisons pas maintenant et nous n'avons pas l'intention d'en faire non
plus. Nous préférons croire que de part et d'autre de la table de
négociations, ce que l'on veut et l'objectif que l'on poursuit, c'est
effectivement de trouver des modalités de participation du
médecin au fonctionnement des établissements, en particulier des
centres hospitaliers, qui soient les plus propices à assurer des soins
de qualité, des soins personnalisés, des soins qui correspondent
à tout ce qu'on considère généralement comme
étant ce qui est souhaitable dans le domaine de la pratique de la
médecine et du fonctionnement des établissements.
Les différences, qui s'observent de part et d'autre de la table
des négociations, n 'ont pas pour objets des différences dans les
buts poursuivis mais dans les moyens qui semblent propices à l'une ou
l'autre des parties pour rejoindre cet objectif, il est probablement naturel de
voir que, du côté médical, on est peut-être moins
optimistes que du côté gouvernemental, qu'on ne veut pas prendre
de chance et qu'on cherche des garanties dans des textes alors que, de notre
côté, nous sommes disposés à croire qu'au contraire
les établissements, avec un minimum peut-être de
formalités, peuvent assurer un fonctionnement convenable, des soins
convenables et un milieu de pratique acceptable.
Mais ce sont des divergences quant aux moyens et il nous semble futile
de vouloir voir là des guerres de religion, comme je l'ai
déjà indiqué. Il ne s'agit pas, ni pour l'une ni pour
l'autre des parties, de remettre en question un régime qui fonctionne de
façon généralement satisfaisante mais qui, bien
évidemment, après quatre ans de fonctionnement, peut subir
certaines modifications de façon à l'améliorer pour l'une
et pour l'autre des parties impliquées.
Le contrôle à la minute, dont on veut faire une
cause célèbre cesjours-ci, est, évidemment
je dis évidemment à cause de ce que j'ai déjà
déclaré mais c'est une information additionnelle que je suis bien
prêt à donner à cette commission un sujet
très secondaire et qui a été, effectivement, très
secondaire dans les négociations, telles qu'elles se sont
déroulées jusqu'à maintenant. Ce n'est pas ce sur quoi les
négociateurs, de part et d'autre, ont achoppé mais sur d'autres
questions, bien que nous ne soyons pas encore dans un constat d'échec.
Au contraire, il y a encore des perspectives d'ententes.
Il est prévu que, jeudi et vendredi de cette semaine, nos
négociateurs se rencontreront, comme à l'accoutumée, pour
poursuivre le dialogue entrepris.
Cette question des minutes, au sujet de laquelle on nous demande de
préciser nos objectifs, a précisément pour but
peut-être n'est-ce pas là le bon moyen d'éviter que,
par un paiement qui soit uniforme et uniformément accessible à
tout médecin, quel quesoit le temps qu'il passe avec un patient, par un
paiement unique qui n'est pas différencié selon l'importance, la
durée de l'examen, on ne pénalise effectivement ceux des
médecins qui passent un temps relativement plus long pour poser
essentiellement le même acte, si vous voulez, mais un acte qui peut
prendre plus ou moins de temps et qui peut, évidemment, être plus
ou moins complet, selon le temps qu'on prend pour le poser.
L'observation de la pratique et du profil de pratique d'un grand nombre
de médecins montre que certains voient un très grand nombre de
patients en un laps de temps très bref, d'autres en voient relativement
peu. Il nous semble que, dans la limite de ce qu'il est possible de
préciser quant à la nature, l'étendue, la
complexité, mais aussi la durée c'est un des
critères, peut-être, à retenir il est
désirable que l'on encourage un contact qui ne soit pas trop rapide, pas
excessivement rapide, entre le malade et son médecin.
Autrement, on pourrait peut-être nous accuser, par un paiement
unique qui ne tient pas compte de ces différences, d'encourager les
durées minimales dans tous les cas. Il faut comprendre que, dans bien
des cas, c'est essentiellement le même type d'acte, le même type
d'intervention, mais qui peut nécessiter plus ou moins de temps. C'est
le médecin lui-même qui doit choisir, en fonction de sa
disponibilité, en fonction des besoins du patient, entre plusieurs
durées possibles pour un examen. Il nous semble raisonnable que, s'il
choisit de passer plus de temps, il soit plus
rémunéré.
Encore une fois, nous sommes prêts à discuter du principe
lui-même, puisque ce n'estqu'un moyen pour atteindre une fin, des
durées ou de l'idée, même, de retenir des durées
dans la description d'actes différents, mais qui ne sont pas
différents de la même façon que des objets sont
différents. Ce sont des rencontres entre un médecin et un malade
qu'il faut bien caractériser d'une certaine façon, si on veut les
payer à des taux différents.
Autrement, on n'aurait qu'un acte qui tiendrait compte de tous les
besoins, et si l'on a des actes différents, c'est pour tenir compte des
différences. Est-ce que la durée plus longue est souvent une
source de satisfaction plus grande chez le patient, et le but était de
ne pas la décourager dans le cas où le médecin
lui-même juge qu'elle est appropriée.
Parce que si on ne compte que le nombre de patients plutôt que le
temps qu'on prend pour leur donner des services on encourage essentiellement un
type de médecine, disons peut-être plus industrielle et ce n'est
pas nécessairement un objectif souhaitable.
Les moyens utilisés sont peut-être déficients. La
table de négociation est là pour nous permettre, avec la partie
d'en face, d'en arriver à de meilleures définitions. Des
définitions qui doivent, autant que possible, être comprises de la
même façon par tout le monde pour ne pas résulter dans des
situations où ceux qui interprètent largement des choses qui sont
sujettes à des interprétations très larges
bénéficient d'un régime de faveur par rapport à
d'autres qui interprètent moins largement les mêmes
dispositions.
Encore une fois, ce n'est pas nouveau dans le régime. Il y a des
spécialités qui sont rémunérées de
façon importante en tenant compte de la durée.
L'anesthésiste que l'on rémunérerait selon le type
d'opérations, sans tenir compte de la durée de ces
opérations se plaindrait à juste titre. Effectivement, les
spécialistes ne se plaignent pas d'être
rémunérés en fonction de la durée des interventions
chirurgicales.
Le psychothérapeute qui fait une intervention d'une heure
plutôt qu'une intervention de trente minutes s'attend également
à une rémunération supérieure. Autrement, il
pourrait plaider qu'on l'empêche de pratiquer la médecine comme il
l'entend puisque, quant à lui, une bonne intervention, c'est une
intervention d'une heure.
Nous voulons le laisser choisir la durée de l'intervention en
fonction de son évaluation des besoins des malades et de sa façon
de pratiquer la médecine sans pénaliser qui que ce soit. C'est
ça l'objectif. Les moyens utilisés, on peut en discuter
peut-être éternellement. On ne pourra pas évidemment
discuter éternellement si on veut en venir à une entente, mais
ils sont essentiellement discutables et c'est ce qui est important.
Le Président (M. Cornellier): Messieurs, suspension des
travaux de la commission jusqu'à vingt heures quinze, ce soir.
(Suspension de la séance à 18 h 6)
Reprise de la séance à 20 h 24
M. Cornell!er (président de la commission permanente des
affaires sociales): A l'ordre, messieurs! Si le député de
Louis-Hébert veut bien prendre son siège, nous aurons quorum, et
la commission pourra reprendre ses travaux sur le programme 3 des
crédits du ministère des Affaires sociales qui traite de
l'assistance-maladie.
L'honorable député de Saint-Jacques.
M. Charron: Nous avions abordé la question du minutage de
l'acte médical qui est contenu dans les propositions gouvernementales
à la table de négociations avec la Fédération des
médecins omnipraticiens actuellement.
J'ai besoin d'une information encore plus spécifique de la part
du ministre pour éviter que des malentendus se glissent dans
l'interprétation de cette proposition. Quand le gouvernement dit qu'un
examen ordinaire devrait prendre, pour être remboursé par la
régie, au minimum dix minutes, est-ce que cela veut dire que, si un
médecin prend 20 minutes à cause de la situation
particulière du patient ou de la patiente, il est
rémunéré en conséquence ou s'il est
rémunéré toujours comme s'il n'avait pris que dix minutes
et qu'en fin de compte les dix minutes qu'il a pris davantage auprès du
patient est à son désavantage financier?
M. Forget: J'aimerais peut-être qu'on vous donne ces
explications de manière à ce qu'on soit totalement clair sur la
signification à être attribuée. Je préciserais,
comme je l'ai fait déjà, qu'il s'agitd'un critère parmi un
certain nombre de critères.
M. Charron: D'accord.
M. Forget: Si vous prenez je vois que vous les avez devant
vous les textes, il y a par exemple un certain nombre d'examens qui sont
décrits et un examen va être rémunéré au
tarif d'un examen ordinaire ou d'un examen complet s'il répond à
un ensemble de critères qui sont décrits là.
On pourrait, comme c'est le cas dans l'entente actuelle, enlever toute
référence à un nombre de minutes et tel examen serait par
exemple un examen ordinaire selon son contenu et indépendamment du temps
qu'il prend et un autre examen serait complet selon son contenu et
indépendamment du temps qu'il prend.
Dans le texte du 21 mars, il y a un critère additionnel, qui est
celui du nombre de minutes et qui peut aider à distinguer deux types
d'examens entre lesquels on pourrait hésiter, à savoir si c'est
un examen ordinaire ou complet. La durée pourrait être un
critère de distinction mais la rémunération n'est pas
fonction de la durée, elle est fonction de l'acte qui est posé,
s'il se qualifie comme examen ordinaire ou complet.
M. Charron: Je vous pose une question très précise:
En ce qui concerne l'examen ordinaire d'un patient, les six étapes sont
définies dans la proposition gouvernementale.
C'est ce qui existe déjà dans l'entente actuelle qui est
expirée depuis 1972 je pense.
M. Forget: Ce n'est pas exactement ce qui existe dans l'entente.
Ce sont des critères analogues, la phraséologie a
été, à notre point de vue, améliorée, mais
ça ressemble à ce qui est dans l'entente actuelle.
M. Charron: Si le ministère décide d'ajouter
à cette description, phase par phase, l'acte à être
rémunéré, un critère de durée minimale parce
que c'est le cas, dans ces propositions de 1975, est-ce parce que le
ministère croit que, pour remplir de façon adéquate,
efficace, intègre et honnête chacune des phases de cet acte, il
est impossible de le faire en deça de ce qui est fixé comme
durée minimum? Autrement dit, un acte médical, par exemple, comme
un examen ordinaire qui comprend l'anomnèse portant sur le ou les
symptômes qui motivent l'examen jusqu'à la rédaction d'un
certificat, lorsque requis, ne peut se faire en deça de dix minutes.
M. Forget: Le temps qui est précisé est un temps en
présence du patient. Il peut y avoir un certain temps qui est
consacré à la completion de l'acte comme par exemple la
conciliation de normes de notre côté...
M. Charron: La phase 5 et la phase 6.
M. Forget: ... et la conciliation des résultats d'examen
qui ne sont pas nécessairement effectués en présence du
patient. Je pense que les temps ont été fixés en prenant
en considération le temps raisonnable que cela peut prendre pour poser
un tel acte. Maintenant là-dessus, je dois dire que nous sommes
présentement en négociation. Je pense que les minutes qui sont
là sont des critères qui s'ajoutent aux autres pour aider
à discriminer entre un examen et un autre. Ce ne sont pas des minimums
qui doivent interférer avec une pratique normale de la médecine.
Je pense qu'un des buts de la négociation, c'est peut-être
justement d'examiner quel est le temps minimum qui est le critère
raisonnable correspondant à l'énumération de ces
actes.
M. Charron:Tout cela dit, si par hasard, l'entente devait arriver
à, plutôt que dix minutes pour un examen ordinaire, si l'entente,
dis-je, suite aux représentations que vous fait j'allais dire la
partie syndicale, cela leur ferait plaisir la partie médicale de
l'autre côté de la table, treize minutes ou quinze minutes,
admettons-le, reste le problème que j'ai soulevé à
l'Assemblée, cet après-midi, au ministre des Affaires
sociales.
Est-ce qu'il n'y a pas danger que, dans la pratique quotidienne,
même si le texte de l'entente spécifie à plusieurs endroits
qu'il s'agit d'un temps minimum passé, dans son comportement pratique,
le médecin, sachant qu'il ne sera guère plus
rémunéré s'il consacre 25 minutes que les 10 minutes
convenues, en vienne à raisonner comme bien des travailleurs le font en
bien d'autres endroits et à se dire que c'est à son
désavantage, finalement, de mettre plus
de temps, puisque le gouvernement a dit il pourrait dire cela
que toutes ces phases, de une jusqu'à six, peuvent se faire
à l'intérieur de quinze minutes. C'est donc une question de
zèle ou de dévouement qui n'a pas à être
rémunéré si cela va plus loin que cela?
Je sais que j'extrapole un entendement, mais, si vous êtes
à la table de négociations, vous savez qu'elle est extrapolable,
cette façon de voir la chose et qu'elle peut avoir des
conséquences néfastes à certaines occasions. Ce n'est pas
à vous, probablement, que je devrais poser la question, mais plus au
ministre. Je peux résumer ma pensée en disant: Est-ce que le
ministre est conscient du danger à rebours que comporte ce genre de
rémunération basée sur un acte pratiqué dans un
temps minimum?
M. Forget: Peut-être que je peux répondre
étant donné que je suis assez familier avec la question.
M. Charron: Allez-y, je ne veux pas vous interdire de parler.
M. Forget: Je ne voudrais pas, par ailleurs, qu'on se transforme
en table de négociations. J'imagine que vous ne représentez
pas...
M. Charron: Je ne représente pas les médecins,
non.
M. Forget:... la Fédération des omnipraticiens. Si
on compare cela à la situation actuelle, on peut, par analogie,
considérer que le temps minimum spé-cifié dans l'entente,
c'est zéro, parce qu'il n'y a pas de temps minimum requis, de sorte que
le médecin qui, pour faire un examen ordinaire, prend trois minutes,
sept minutes, douze minutes ou vingt-cinq minutes est
rémunéré toujours au même montant, quelle que soit
la quantité de temps qu'il prend pour poser l'acte. L'introduction d'un
minimum ne fait qu'ajouter un seuil ou un plancher en bas duquel le temps
consacré à l'exécution de l'examen ne peut pas descendre,
alors que, présentement, il n'y a aucun seuil, il n'y a aucun plancher
minimum. A savoir si c'est un progrès ou non, je vous laisse le soin
d'en juger. Il est évident que, si on fait la proposition, c'est qu'on
pense que cela représente un certain progrès, mais vous pouvez
comparer cela à la situation actuelle où le minimum est, en
quelque sorte, zéro.
M. Charron: En fin de compte, c'est ce que disait le ministre cet
après-midi à l'Assemblée. Cela représente, dit-il,
dans son entendement, pour les patients une garantie supérieure à
l'entente, échue depuis décembre 1972, quant à la
qualité des soins qu'ils vont recevoir, le fait qu'on fixe un minimum de
temps. Vous me disiez : On n'est pas à une table de négociations.
Je ne représente pas les médecins et j'essaie un tant soit peu ce
soir de représenter les patients éventuels.
Si je vais chez un médecin qui, je sais, est
rémunéré presque à la minute quant au temps minimum
qu'il y a, j'ai l'impression que, si mon examen de contrôle n'est pas
terminé au bout de cinq minutes, il y a bien des chances qu'il
l'abandonne en cours de route. L'entente est une espèce de
sécurité, en tout cas, de la part du patient, quant à
l'acte médical qui est opéré sur lui.
Encore une fois, nous ne sommes pas à la table de
négociations, tout cela sera réglé, j'espère, dans
les plus brefs délais, avant qu'aucune rupture, aucun dommage à
la qualité des services présentement en cours, à la suite
du régime d'assurance-maladie que nous avons adopté, ne soit
occasionné dans aucune région du Québec et chez aucun
citoyen. Il reste que, je pense, l'opinion publique sera
particulièrement attentive au cours des prochaines semaines au
développement que nous aurons de ce côté.
J'ai une seule autre question à apporter quant aux propositions
gouvernementales comme telles. Nous en aurons d'autres à l'occasion, si
besoin il y a. Est-ce qu'il est entendu très clairement qu'une entente
signée entre la Fédération des médecins
omnipraticiens du Québec et le ministère des Affaires sociales
exclurait toute entente particulière ultérieure entre
médecins, participants ou non participants, ou quoi que ce soit, du
régime? Autrement dit, est-ce que la Fédération des
médecins omnipraticiens du Québec, aux yeux du gouvernement,
représente tous les omnipraticiens du Québec?
M. Forget: Si vous permettez, les deux questions que vous venez
de poser, ou les deux formulations de ce que vous voyez comme une même
question sont effectivement deux questions distinctes.
J'ai affirmé, et cela continue d'être vrai, que nous
considérons, dans nos négociations que la
fédération parle au nom de tous les médecins qui ne sont
pas des médecins spécialistes et qui pratiquent au Québec.
Ceci nous l'avons affirmé à plusieurs reprises, par nos gestes,
par les négociations et la manière de les conduire
vis-à-vis de certains groupes particuliers qui auraient pu, basés
sur certains arguments, ne pas être considérés comme
étant représentés par la FMOQ. Ils sont effectivement
considérés comme étant représentés par la
FMOQ par nous. Donc, cela ne pose aucun doute dans notre esprit que la
fédération parle au nom de tous les médecins
omnipraticiens, au moins ceux qui ont l'intention de pratiquer à
l'intérieurdu régime.
Il ne s'ensuit pas cependant que, dans la conclusion d'une entente avec
un groupe dont on ne nie pas la représentativité, l'on veuille
nécessairement rejeter a priori la possibilité d'ententes qui se
greffent et qui s'inscrivent dans ce cadre et qui vont plus loin que l'entente
générale sur certains aspects ou qui spécifient des
détails que l'entente générale laisse dans l'ombre en
quelque sorte ou laisse sans les préciser. Ce sont des ententes
complémentaires, à ce moment, qui seraient envisagées, qui
découlent du fait que même si une personne est
représentée par un organisme, elle ne perd pas sa capacité
de contracter qui lui est donnée par le code civil et, même
davantage, qui est un droit fondamental de pouvoir contracter pourvu qu'elle le
fasse librement et qu'en le faisant elle ne se trouve pas à aller
à l'encontre des ententes auxquelles elle est implicitement partie par
sa participation à un organisme représentatif. La même
proposition vaut pour la partie gouvernementale.
Cette question fait l'objet de discussion, mais c'est une question sur
la possibilité d'ententes complémentaires et non pas sur la
représentativité d'un groupe qu'on accepte a priori sans
réserve et sans restriction.
La représentativité, pour être complète, pour
être totale, pourêtre réelle, n'implique pas
nécessairement une idée d'exclusivité ou de limitation de
la liberté de contracter, à notre point de vue, pour les membres
de cet organisme.
M. Charron: Non, j'admets bien cela aussi que l'appartenance
à un groupe qui négocie en son nom n'est pas la disparition
complète des droits individuels parce qu'on appartient à ce
groupe. Mais sur le plan syndical, dans la pratique habituelle des
négociations collectives, les syndicats, je veux parler des syndicats
ouvriers, des syndicats de travailleurs, ont été très
réservés quant à cette question de possibilité pour
leurs membres. Autrement dit, chaque ouverture qui permettrait à leurs
membres de se détacher un tant soit peu de l'entente collective leur
paraît, à raison, l'expérience l'a prouvé, un danger
quant au sens de la négociation collective.
Si je regarde la proposition gouvernementale, clause 4-0-1 du 21
février 1975, qui dit: "L'entente lie tout médecin quel que soit
le lieu où il exerce sa profession, quel que soit son mode de
rémunération. mais voilà cette phrase A
moins de stipulation expresse l'autorisant, aucuneentente particulière
portant sur l'un des objets mentionnés à la présente
entente ne peut intervenir."
Le principe est là qu'aucune entente particulière portant
sur l'un des objets mentionnés à la présente entente ne
peut intervenir. Mais lorsqu'on voit cette réserve de stipulation
expresse l'autorisant et que, par la suite, on parcourt la liste de
propositions gouvernementales, par exemple, quant au plan d'organisation des
centres hospitaliers, etc., on s'aperçoit que les stipulations
expresses, à l'occasion, l'autorisant peuvent se trouver plus nombreuses
que pour un groupe qui essaie de parler au nom d'un autre, au nom de plusieurs
individus réunis sur une base professionnelle, que cela paraisse un
phénomène important.
Je ne dis pas cela pour donner raison, encore une fois, à la
contrepartie, d'ailleurs, que j'ignore, sur ce point en particulier, de la
Fédération des médecins omnipraticiens du Québec.
Je veux juste dire qu'une phraséologie aussi floue, dans un domaine
aussi important, risque, à mon avis, de faire achopper, encore une fois,
des négociations qui mériteraient d'être plus
sévères plus précises dans leur rédaction.
Ce sont peut-être les dernières remarques que je peux faire
au nom de l'Opposition là-dessus. Il me semble qu'il y a gain possible,
du côté gouvernemental, à préciser sa pensée
là-dessus. Sinon, je crois que si on s'en tient à cette
disposition telle qu'elle est écrite, elle risque de compromettre le
succès des négociations avec les médecins.
M. Forget: Je pense que c'est là un texte qui fait encore
l'objet de négociations et je pense bien qu'il est susceptible de
précisions. Il faut tenir compte du fait que, dans les affaires
sociales, on couvre un réseau d'environ 1,200 établissements, qui
sont de différentes catégories. Ce principe d'avoir des ententes
particulières n'est pas totalement étranger à l'existence,
parexemple, dans tout le secteur public, de paliers de négociation au
niveau provincial et au niveau local ou, dans le cas d'entreprises qui ont
également des succursales multiples, d'avoir une convention
maîtresse, quitte à y apporter certaines précisions au
niveau local.
Je pense qu'on peut ou qu'on a pu exagérer la portée ou
l'importance de ces dispositions et je crois bien qu'il est possible, en
négociation et nous sommes toujours en négociation
d'en préciser la portée.
J'aimerais revenir en arrière deux secondes sur le premier point,
pour ne pas que nos discussions puissent indui re les gens en erreur. Vous
demandiez si, parexemple, les dix minutes étaient
écoulées, si la visite serait interrompue. Il faut garder en
tête que le temps n'est qu'un des éléments. Si chacune des
six phases n'est pas complétée, on n'a pas non plus un examen
ordinaire.
Je pense que le fait de s'interrompre après dix minutes ou de
s'interrompre à la phase quatre, par exemple, c'est quelque chose
d'entièrement parallèle.
A cause de la nouveauté de l'élément, on a
prêté une importance beaucoup plus grande à
l'élément temps, mais je pense que, pour nous, c'est un
élément parmi tant d'autres. L'acte est décrit par un
ensemble d'étapes et de phases qui doivent être accomplies et le
temps n'est qu'un de ces critères.
Je pense que, pour éviter toute confusion, c'était bon
d'apporter la précision.
M. Charron: Je pense que, M. le Président j'ai
terminé, pour ma part, sur ce sujet les échanges que nous
venons d'avoir sur les propositions gouvernementales à la table des
médecins n'auront pas pour effet de nuire aux négociations, mais
d'éclairer le public également sur ce qui va se passer. Parce
qu'il ne me reste qu'une chose à dire sur ce point précis des
négociations en cours avec les différentes
fédérations, c'est de souhaitertrès ardemment qu'elles se
fassent sans entorse aucune au régime d'assurance-maladie. Comme je l'ai
dit tout à l'heure, je souhaite qu'aucun citoyen d'aucune région
du Québec n'ait à souffrir, à un moment ou à un
autre, d'une difficulté qui entraînerait une partie ou une autre
à commettre des gestes répréhensibles, je pense bien,
lorsqu'il s'agit de la santé du citoyen. Cela s'adresse non seulement
aux médecins, mais également au gouvernement qui, s'il devait
faire preuve d'entêtement sur certains points qu'au fond il serait
prêt à concéder advenant une crise, aurait lui-même
créé une crise artificielle où personne, vraiment personne
n'aurait rien à gagner.
Comme Opposition, je peux exprimer le souhait de n'avoir jamais à
me prononcer à nouveau sur une loi d'exception obligeant des
médecins à offrir des services qui sont essentiels à la
population, ceux de la santé.
Puisque nous sommes, en fait, en face d'un avis dûment
déposé à la Régie de l'assurance-maladie depuis le
7 avril par le docteur Bédard, de l'Association des médecins
omnipraticiens de la région de
Yamaska, je ne pense pas être en train de parler à travers
non chapeau.
Il y a danger, effectivement, parce que des actes de toutes natures
Dieu sait que les médecins sont aptes à en poser plusieurs
sont à l'horizon, M. le Président. Je serais bien
prêt à dire, en terminant, au ministre des Affaires sociales que,
s'il doit, au cours de ce mois d'avril je ne dis même pas au cours
de l'année financière, puis que nous devons suspendre
l'étude des crédits ce soir se trouver une
priorité, je crois bien que les événements la lui ont
apportée sans que j'aie à la lui rappeler.
C'est celle de s'intéresser le plus activement possible à
la négociation où des fonctionnaires le représentent, mais
éviter tout arrêt ou tout ralentissement d'un régime
d'assurance-maladie, admirablement bien administré depuis sa
création, qui répond de façon inadéquate à
certains endroits, mais satisfaisant dans son ensemble, je reprends
l'expression du ministre, aux besoins de santé de la population, et
à entrevoir qu'une nouvelle entente pour quelques années
s'installe entre les médecins et le gouvernement du Québec.
Le Président (M. Cornelller): L'honorable
député de Jacques-Cartier.
M. Saint-Germain: M. le Président, j'aimerais demandersi
il y a une raison profonde qui sous-tend cette question de minutage. Est-ce
qu'on aurait constaté à la régie, par exemple, que
tellement d'actes médicaux étaient posés dans un certain
nombre d'heures données qu'il était impossible pour un
médecin de poser autant d'actes valables dans un espace de temps aussi
court?
M. Forget: Le principe de la rémunération à
l'acte est basé sur l'existence présumée d'une certaine
moyenne dans le temps et les efforts nécessaires pour poser certains
actes médicaux, diagnostiques ou thérapeutiques, puisqu'on ne se
fait pas d'illusion de pouvoir décrire, même avec une nomenclature
de quelques milliers d'actes, toutes les ci rconstances et toutes les
variations possibles dans la nature, l'étendue, la complexité des
services qui sont donnés.
Donc, pour chacun de ces actes, on suppose qu'il y a une certaine
variation possible, mais qu'en moyenne, en quelque sorte, un acte tel qu'il est
décrit au tarif, étant donné les principes qui servent
à déterminer le tarif et où évidemment les
indications de la durée ne sont pas étrangères, qu'en
moyenne, donc, cette description jointe au tarif entretient une certaine
équivalence.
Il est clair que ce qui est vrai en moyenne et de façon
générale n'est pas toujours vrai en particulier et dans chaque
cas. Il n'y a personne dans le cabinet du médecin, une fois qu'il
prépare sa réclamation à la Régie de
l'assurance-maladie, personne du ministère, personne de la régie;
il est seul à déterminer et à décrire, à
facturer son acte en se servant de la description qui est contenue au
tarif.
Il est presque inévitableque la moyenne en question ne
corresponde pas nécessairement à sa moyenne propre et
individuelle. Et il est clair que plus la définition est vague, plus
elle est faite en se servant de mots qui sont susceptibles
d'interprétation, plus effectivement l'interprétation va varier
d'un professionnel à l'autre.
Et, indépendamment de tout désir de fraude ou d'abuser du
système, il reste que plus les définitions sont vagues, plus
elles sont susceptibles de faire se révéler, d'un professionnel
à l'autre, des différences systématiques entre eux, dans
l'interprétation qu'ils font de ces descriptions forcément,
jusqu'à un certain point, vagues.
Et on peut observer effectivement que certains médecins ont une
proportion plus grande d'examens complets majeurs par rapport aux examens
complets. C'est inévitable, étant donné que chaque
médecin, individuellement, interprète une définition et
essaie de faire correspondre sa définition à l'acte qu'il vient
de poser.
Devant ces variations, on est frappé, non pas par des abus, etc.
bien sûr on ne peut pas les éliminer complètement
mais tout le système est susceptible de se prêter à
des abus.
L'on ne peut s'empêcher d'être troublé, disons, par
des disparités autrement inexplicables que par des différences
systématiques d'interprétation d'un individu à l'autre.
Cela nous amène à conclure que ces définitions qui sont un
outil de travail quotidien des professionnels dans la facturation qu'ils font
et encore une fois qu'ils seront les seuls à faire, ils en sont
les seuls juges peuvent être peut-être meilleures et leur
permettre de laisser une moindre place aux facteursde subjectivité dans
l'interpré-tationd'unedéfinition. D'où l'effort que l'on
fait pour préciser les définitions, énumérer les
éléments constitutifs de chaque acte tel qu'il aété
conçu et tel qu'il a été tarifé.
Maintenant c'est un effort qui ne peut jamais être parfait,
puisqu'il y a un élément d'interprétation qui doit
demeurer, mais il est clairque les variations sont évidentes. Encore une
fois, ne parlons pas des extrêmes; les extrêmes, de toute
manière, on va les retrouver sous une forme ou sous une autre, quelles
que soient les définitions. Mais je parle simplement des divergences,
des différences d'interprétation d'un professionnel à
l'autre, quels que soient les efforts d'information que fait la régie
pour expliquer la signification du tarif. Et non seulement il y a des
différences d'interprétation, mais il semble qu'il y a
peut-être aussi une certaine iniquité puisque finalement, dans un
système où il y a place à l'interprétation,
forcément il y a des différences dans le niveau de
rémunération qui est basé parfois, et dans une certaine
mesure, essentiellement sur des différences d'interprétation et
non pas sur les différences dans la charge réelle de travail ou
l'efficacité réelle d'un professionnel.
Il n'y a peut-être pas de solution à ce problème.
Cependant, ce n'est pas une raison pour ne pas essayer, à l'occasion
d'une négociation, d'en découvrir. Maintenant, j'aimerais
préciser que le minutage des actes ne s'applique pas à tous les
actes qui sont contenus aux tarifs. Il y a des pages et des pages, et on ne
prévoit pas un accouchement de 90 minutes et un accouchement de 120
minutes. On prévoit un minutage, si on veut persister à utiliser
l'expression,
pour une quinzaine d'actes sur 2,000, 3,000 ou 4,000. Evidemment, ce
sont des actes qui ont une signification très considérable,
étant donné qu'ils sont posés très
fréquemment. Et justement parce qu'ils sont posés très
fréquemment et qu'ils sont moins différenciables que certains
actes très spécialisés qui, par le seul mot qui les
désigne, les caractérisent dans le tarif, il y a un
élément d'appréciation considérable. Ce sont des
actes très courants, des examens. Un examen, cela peut être
n'importe quoi, tout le monde le sait, qui est allé chez un
médecin. On serait bien en peine comme individu de dire: Cela c'est un
examen ordinaire, cela c'est un examen complet.
Cela prend un certain effort d'imagination pour établir une
classification comme celle-là. On pourrait bien n'en avoir qu'un, mais
à ce moment-là on paierait le tarif moyen d'un examen qui
pourrait être de $6.50 ou $6.75. Parfois cela prendrait une heure et
demie pour faire un examen très compliqué, parfois cela prendrait
deux minutes.
Dans un but de coller plus près à la
réalité, on a pensé, comme tous les régimes
d'assurance-maladie, d'établir des définitions de ce que c'est
qu'un examen rapide, puis un examen moins rapide, puis un examen un peu plus
long, puis un examen très long. Et, dans le but de préciser cela,
on arrive à des notions comme le minutage. Ce n'est pas important comme
tel, cela fait partie d'un effort d'ensemble pour coller à une
réalité, pour ne pas pénaliser le médecin qui a la
malchance de tomber sur des gens qui sont plus malades ou qui requièrent
des soins plus longs, ce qui serait le cas s'il n'y avait qu'un type et un
tarif pour tous les examens.
C'est de l'ordre des moyens. Cela ne vise pas l'ensemble du
système, mais une partie où les axes sont, par
leurdéfinition même, beaucoup plusdiffici-les à
différencier. Certains régimes qualifient différemment la
première visite et les visites subséquentes. Enfin, il y a toutes
les variations possibles. Cela demeure essentiellement arbitraire, à la
limite, puisqu'on ne peut jamais faire la preuve que c'est la bonne
définition. C'est à l'usage, dans un milieu donné, avec le
sens que les gens donnent couramment aux mots qui sont utilisés dans la
définition qu'on se rend compte si on a une définition qui est
bonne ou qui n'est pas bonne.
On a le sentiment, à observer la façon dont les
facturations sont faites, la façon dont elle évolue dans le
temps, que si on faisait un effort pour clarifier les choses, ce serait
peut-être mieux plutôt que pire. Maintenant, ce n'est qu'un
jugement d'une des parties en négociation. Il s'agira de conclure, le
moment venu, s'il est possible de se mettre d'accord sur une façon de
faire ces définitions-là. C'est un problème de mots, c'est
un problème de définitions, ce n'est pas un problème de
substance.
On n'a pas l'impression que de cela va découler une modification
du régime. C'est une façon d'appliquer le régime qu'on a
de façon à avoir peut-être plus d'équité
entredifférents professionnels. Maiscela ne change rien au
régime, cela le laisse essentiellement dans l'état actuel. C'est
la raison pour laquelle j'ai dit qu'on accordait beaucoup trop d'importance
à une question très secondaire qui, à mon avis, n'a pas du
tout été la question sur laquelle ont achoppé,
jusqu'à maintenant, les négociations. Les négociations,
j'aimerais le croire, vont achopper sur des problèmes de substance, pas
sur des problèmes de forme. Je pense que nous avons là un peu un
problème de forme, ce qui ne veut pas dire qu'il soit entièrement
à négliger parce que la forme a aussi de l'importance, mais
c'est, malgré tout, un problème de forme et non pas un
problème de fond.
M. Saint-Germain: Vous avez mentionné, M. le ministre,
qu'on était quelquefois troublé par le décalage du temps
qu'un professionnel peut mettre à poser un certain nombre d'actes avec
un autre professionnel, qui oeuvre dans le même genre d'activités,
et qui pose les mêmes actes. Avez-vous été troublé
par une infime minorité de professionnels ou si les autorités ont
été troublées de façon journalière, si je
peux dire?
M. Forget: Je vais réitérer ce que j'ai dit
tantôt. Pour les fins des négociations, ce qui nous
intéresse, ce ne sont pas les cas extrêmes. Je suis
personnellement, convaincu qu'on ne peut pas régler les cas
extrêmes dans le cadre d'une négociation qui s'applique à
l'ensemble des professionnels. Mais dans la masse des professionnels qui ne
sont pas des cas extrêmes on trouve des divergences qui sont assez
substantielles malgré tout pour nous amener à nous poser le genre
de questions que nous nous sommes posées.
Il est clair que ce n'est pas pour réprimer des abus comme tels
que l'on suggère de pareilles modifications dans le libellé des
définitions. Il y a d'autres mesures, nous les avons décrites cet
après-midi, qui, dans ces cas-là, dans des cas extrêmes,
où c'est véritablement évident que c'est un
phénomène autre que la mauvaise interprétation
honnête, peuvent être utilisées et qui le sont
effectivement. Donc, c'est un problème d'utilisation du tarif dans le
cas qui ne sont pas des cas extrêmes.
Bien sûr, ces phénomènes, s'ils se manifestent dans
la masse, si vous voulez, des professionnels, ils se manifestent avec plus de
force dans les cas extrêmes, mais ce n'est pas là le genre de
solution qu'on cherche, ce n'est pas la répression d'abus que l'on
cherche, c'est une amélioration dans l'utilisation de définition
qui sont monnaie courante tous les jours dans un cabinet de médecin et
qui sont interprétées, de fait, qu'on le veuille ou non.de
façon différente. Le même acte, en réalité,
est payé à des taux différents parce que les
médecins qui le posent interprètent la signification du tarif de
façon différente.
M. Saint-Germain: Avant de terminer, lorsqu'on dit, parexemple,
contre cette définition de forme, au point de vue du temps concernant
l'acte médical, qu'elle peut amener des professionnels à vouloir
oeuvrer dans une limite de temps donnée, cela me surprend un peu. Tout
de même, je fais partie, à titre d'optométriste, du
système d'assurance-maladie et je pense bien qu'à ce point de vue
les professionnels sont réellement traités en professionnels, en
ce sens qu'ils sont libres, comme vous l'avez mentionné, seuls dans leur
bureau, d'établir leurs honoraires. J'en suis toujours aux règles
et aux règlements de
l'assurance-maladie, mais, personnellement, je sais qu'ils ont une
très grande liberté d'action et, en plus, la qualité de
leur acte n'est pas à discuter pour recevoir le paiement. A ce point de
vue, on est tous, je pense bien, traités en professionnels. Vous avez
tout de même une minorité de professionnels qui voient dans le
patient futur un signede piastre. Mais ce n'est pas l'assurance-maladie qui a
établi cela, cela existait. C'est une minorité de professionnels
qui existait bien avant l'établissement de l'assurance-maladie et qui va
exister après, de la même façon. Alors, il y a des
professionnels je pense bien que c'est la majorité qui,
lorsqu'une personne fait appel à leurs services, quels que soient les
honoraires ou quelle que soit la situation, vont faire leur possible pour
rendre service. Ils auront une journée de travail satisfaisante, pour
autant qu'ils auront travaillé dans des conditions valables. Ils
sentiront alors qu'ils ont eu une journée positive et ils
n'établiront pas leur satisfaction nécessairement en pensant au
montant d'argent que la journée a rapporté. Il pourra même
arriver des journées qui auront rapporté un faible revenu, mais
qui pourront, par le professionnel qui a rendu les services, être
calculées comme satisfaisantes. A ce point de vue, je suis un peu du
dire du ministre; Ce n'est pas exclusivement par les règlements de
l'assurance-maladie qu'on va amener cette minorité de professionnels
à agir autrement qu'ils ont toujours agi même avant
l'assurance-maladie.
Le Président (M. Cornellier) : Le député de
Frontenac.
M. Lecours: M. le Président, j'aimerais savoir du ministre
s'il y a quelqu'un qui négocie au nom des médecins qui font de la
médecine industrielle, présentement. Avec des problèmes
qu'on connaît dans notre région, je pense que le ministère
des Affaires sociales va avoir à se pencher sur ce problème
très sérieux. C'est un problème qui est devenu très
sérieux dans ma région et, vu que cela relève de la
médecine préventive avant tout, je pense que votre
ministère a quelque chose à faire pour tenter de régler
ces problèmes. Moi, je me demandais s'il y a des médecins qui
font de la médecine industrielle et qui envoient des comptes à la
régie déjà. Est-ce que cela existe?
M. Forget: Je crois que je serai le premier à applaudir la
formation d'une table de négociations spéciale pour discuter des
conditions de travail des médecins spécialisés en
santé publique. En médecine industrielle, malheureusement, ils ne
sont peut-être pas encore assez nombreux pour constituer un groupe
identifiable de cette façon. Ils sont représentés par les
fédérations dans l'ensemble. Dans une large mesure, je crois que
les actes qu'ils posent paraissent déjà aux tarifs. Un examen,
qu'il soit posé dans le contexte d'un examen de contrôle pour les
finsde prévention, peut être payé de la même
façon, dans bien des cas, qu'un examen ordinaire.
Il reste cependant que, dans le cadre de programmes de santé
préventive, il y a des distinctions qu'il faut faire. Mais sur cet
aspect en général, cela déborde largement les
négociations, il est clair que la responsabilité au niveau
gouvernemental, pour la médecine industrielle, est assez largement
partagée, comme on le sait, entre, d'une part, les ministères
sectoriels qui s'occupent de différentes industries on en a eu
des exemples récemment dans la déclaration de mon
collègue, le ministre des Richesses naturelles, relativement au
problème de l'amiante. Et des responsabilités existent aussi dans
ce secteur au ministère du Travail, à la Commission des accidents
du travail, mais tout ceci ne veut pas dire que le ministère des
Affaires sociales est absent de ce secteur. C'est un secteur qui nous
intéresse et que nous avons l'intention de développer en
étroite collaboration avec les ressourcesqui sont de plusen plus mises
à la disposition des départements de santé communautaire
de manière à rapprocher ces ressources des populations qu'elles
doivent desservir. C'est une des vocations essentielles des départements
de santé communautaires que de se préoccuper de la
médecine industrielle et de développer des programmes de
santé préventive dans ces secteurs.
M. Lecours: Mais est-ce que vous entendez par là que vous
n'avez pas l'intention de surveiller les actes posés par ces
médecins d'aucune façon?
M. Forget: J'aimerais qu'on précise la nature de la
question.
M. Lecours: Bien, on vit un problème présentement
à Thetford Mines, avec la clinique des mines, où des
médecins travaillent pour des compagnies; ils travaillent dans
l'intérêt des compagnies au lieu de travailler dans
l'intérêt du patient. Souvent les gens qui vont là, ce
n'est pas pour un examen ordinaire, ils sont des malades qui
mériteraient d'être avertis qu'ils sont sérieusement
malades. Le médecin en chef de la clinique des mines, le 20 mars
dernier, déclarait lui-même qu'il n'a jamais dit aux patients
qu'ils souffraient d'amiantose et ils retournaient travailler dans des
conditions souvent inhumaines, j'oserais dire, vu la condition physique du
patient.
Moi, je me demande quand votre ministère va s'occuper de ces cas
d'une façon plus particulière en imposant des normes aussi
sévères à ces médecins qu'à ceux qui peuvent
pratiquer dans la province de Québec. Je trouve anormal de laisser un
champ aussi important de côté.
M. Forget: II y a deux aspects à la question du
député de Frontenac. Je dois préciser, malgré les
accusations contraires qui sont parfois proférées
vis-à-vis du ministère ou les insinuations qui sont souvent
faites, que le ministère des Affaires sociales ne surveille
l'activité d'aucun professionnel, certainement d'aucun
médecin.
Si on le faisait, d'ailleurs, on entendrait très rapidement des
protestations de toutes parts. Nous avons très souvent fait la
distinction entre la surveillance des activités professionnelles et
l'établissement de programmes impliquant l'utilisation de ressources
humaines et matérielles pour la réalisation de certains objectifs
au sein desquels les professionnels travaillent. Mais, pour ce qui est de
l'aspect
strictement professionnel de leur travail, ils demeurent sous la
surveillance unique de leurs collègues dans leur entourage professionnel
immédiat et, de façon imminente, de leur corporation
professionnelle.
Donc, si on fait l'affirmation que les médecins engagés
par les compagnies minières ou manufacturières surveillent
effectivement la santé de ces travailleurs, mais le font de
manière à en faire bénéfi-cierplutôt
l'intérêt des compagnies qui les emploient plutôt que les
travailleurs, on met en doute l'intégrité professionnelle de ces
médecins. ll y a, pour exercer une surveillance et,
éventuellement, prendre des sanctions vis-à-vis de ces
médecins, des canaux très bien connus que constituent la
corporation professionnelle et les mécanismes de discipline de la
corporation professionnelle. Il n'y a pas d'autre organisme, y inclus le
gouvernement, qui soit habilité à surveiller l'activité de
ces professionnels.
Ce que j'avais à l'esprit lorsque j'ai indiqué que nous
nous soucions des programmes de santé préventive et que nous
placions la première responsabilité pour leur
développement ou leur mise en oeuvre dans les départements de
santé communautaire, c'était au sens du développement des
programmes pour favoriser une coordination, une concertation des ressources
professionnelles et des autres ressources pour une action concertée,
organisée pour la prévention et, évidemment, le
traitement, le cas échéant, des maladies industrielles. Mais,
même dans l'exécution d'un tel programme, nous devrons prendre
pour acquis que tous les professionnels qui y participent font leur travail de
façon complète.
Si nous avons des doutes, si nous avons des plaintes, nous sommes sur le
même pied que tous les citoyens, nous n'avons qu'à faire une
plainte formelle auprès de la corporation professionnelle, et c'est
à el le qu'appartient la responsabilité de sévir, et
à elle seule.
M. Lecours: Mais j'aurais pensé, M. le ministre, que vous
auriez élaboré un projet dans le but d'intégrer ces
médecins à un hôpital en particulier. Ils pourraient
travailler pour le gouvernement, quitte à ce que votre ministère
envoie les comptes aux compagnies par la suite.
M. Forget: II y a une variété de formules qui
peuvent être imaginées pour arriver à ces fins mais, encore
une fois, on doit partir de l'hypothèse qu'un médecin, quel que
soit son employeur, quelle que soit la source de son financement, si vous
voulez, va effectivement faire un travail honnête. Si l'on ne part pas de
cette hypothèse, évidemment, on parle d'un contexte, on se situe
dans un contexte tout à fait différent.
Si l'on accepte cette hypothèse je crois qu'on doit
l'accepter on peut envisager différentes formules pour favoriser
une concertation des ressources. Selon la taille des entreprises, leur
capacité d'assumer leurs responsabilités ou l'absence de
capacité de le faire, on peut envisager que les médecins soient
dans les entreprises et payés par ces entreprises avec et ceci
peut se faire par voie de négociation toutes les
possibilités d'un contrôle, au moins externe, si vous voulez, en
quelque sorte, sur certai- nes dimensions de ces services, de manière
conjointe par le patron, les employés et les syndicats qui les
représentent, mais que, malgré tout, ils soient situés au
sein d'une entreprise, s'intégrant dans des programmes et participant
à des programmes d'application plus générale, et, pour la
petite et moyenne entreprise, des mécanismes différents
où, effectivement, les médecins pourraient s'intégrer aux
hôpitaux désignés qui maintiennent un service de
santé communautaire.
Ce sont différentes formules que nous examinons et,
évidemment, il faudra également, en parallèle avec cela,
développer des programmes pas seulement développerdes
structures et s'assurer que des médecins soient
adéquatement formés pour ce type de pratique qui est
évidemment différent de la médecine curative
traditionnelle. Mais c'est une préoccupation que nous avons. Nous avons
d'ailleurs, comme on le sait probablement, constitué, en 1973, un
service de santé industrielle, de médecine industrielle et nous
travaillons à élaborer un programme dans ce sens, en
collaboration avec les services de santé communautaire.
Le Président (M. Cornellier): L'honorable
député de Vanier.
M.Dufour: M. le Président, je voudrais qu'on me renseigne
un peu plus. Je n'ai pas tout à fait compris quand on a dit, tout
à l'heure, que le minutage allait permettre d'établir une plus
grande équité entre les professionnels. Je ne peux pas voir.
C'est ma première question.
M. Forget: Je peux essayer ou peut-être demander à
M. Guérard d'essayer de reprendre cette explication en utilisant des
mots différents, mais il est clair, je pense, que si vous avez une
règle qui permet la rémunération de certains actes, cette
règle est basée sur la définition de l'acte en question.
Et cette définition, parce qu'elle utilise des mots, est sujette
à une interprétation que l'on peut, en général,
supposer, comme c'est toujours le cas, quand il est question d'utiliser des
mots, que deux individus vont les utiliser de façon
légèrement différente.
Si on admet le raisonnement jusque là, on peut présumer
que si on utilise les mots de façon légèrement
différente, les professionnels qui ont, par ailleurs, des pratiques par
hypothèse identiques, parce qu'ils interprètent la signification
du tarif différemment, vont facturer différemment à la
régie les mêmes actes qu'ils posent l'un et l'autre.
Si c'est le cas, celui qui fait une facturation inférieure
à l'autre, pas parce qu'il a posé des actes différents
mais parce qu'il interprète différemment le tarif, va être
victime d'une certaine injustice. Si, à cela, s'ajoute le
phénomène que c'est celui qui, peut-être, a passé
relativement plus de temps avec ses patients, il nous semble que c'est une
injustice, vis-à-vis du professionnel, qui se double d'une certaine
injustice envers ses patients puisqu'il est, à priori, celui qui a pu,
peut-être, donner les services les plus complets aux malades qui sont
venus le voir.
M. Dufour: Vous parlez, à ce moment-là, d'un
minimum, mais à quel moment va finir le minimum pour tomber dans
le maximum? Parce que celui qui passe plus de temps avec un patient,
normalement, a droit à plus, surtout si on calcule son honoraire en
minutes. Vous semblez vouloir baser cela un peu sur le minutage.
Mais si un médecin voit un malade plus que le minimum, on va
arriver avec quoi, si je suis pris pour le garder trois quarts d'heure dans mon
bureau? Normalement vous me payez quinze minutes. Qui va me payer les trente
minutes?
M. Forget: C'est là une difficulté bien sûr
mais il faut se souvenir de la réponse que nous avons donnée
à cette question tout à l'heure, c'est que l'acte est
décrit par toute une série de caractéristiques. C'est un
acte donné qui correspond à un certain nombre de composantes, si
vous voulez. L'acte ne change pasde nature parce que le temps qu'on prend pour
le poser s'allonge indûment. Mais nous croyons, malgré tout, qu'on
ne peut pas présumer que le temps est égal à zéro,
que le temps est supérieur à zéro ou à une minute
ou à une seconde, qui comporte un certain nombre de composantes ou de
caractéristiques qui le distinguent d'un autre acte et que, pourvu que
ce minimum de temps soit observé, par hypothèse, et pourvu que
toutes les autres caractéristiques soient présentes, on est en
face véritablement d'un acte donné et tarifé de
façon précise.
Si on passe une journée à poser cet acte-là, on ne
change malgré tout pas la nature de l'acte. On l'a tout simplement
posé de façon inefficace, si l'on veut, ou on a conversé
pendant 23 heures et on a posé un acte pendant une heure. Cela ne change
malgré tout pas la nature de l'acte. Là le paiement n'est pas
requis. Mais si l'acte est posé en une minute et si l'on prétend
qu'il a satisfait à toutes les autres caractéristiques, bien par
hypothèse, dans la mesure où on retient ce minutage, on se pose
au moins la question: Est-ce que, véritablement, c'est un acte tel que
décrit, s'il a été posé si rapidement.
M. Dufour: S'il arrivait que vous décidiez, par
négociation, de faire de la médecine à la minute, on
serait le premier pays au monde à faire de la médecine à
la minute.
Mais, pour résumer l'affaire, je voudrais une réponse
très brève: trouvez-vous, de facto, qu'il y a une réaction
de cause à effet entre la d urée d'un acte posé et la
valeur de ce même acte?
M. Forget: A l'intérieur de certaines limites, j'imagine
qu'on peut probablement le prétendre.
Le Président (M. Cornellier): Avant l'adoption du
programme 3, le député de Saint-Jacques a signalé qu'il
avait un autre commentaire à faire.
M. Charron: Je suis disposé à adopter le programme
3, ça ferait deux programmes'd'adoptés dans la même
journée, je vous le ferai remarquer. Mais avant, puisque j'ai devant moi
pour la dernière fois, probablement, le président de la
Régie de l'assurance-maladie qui s'occupera à d'autres fonctions
à partir du 1er juin prochain, je crois, je pourrais employer des
formules bien compliquées mais j'aime autant m'en tenir à une
seule. J'ai l'impression que, depuis cinq ans que je connais monsieur Martin,
d'avoir côtoyé un des piliers de la grande fonction publique
québécoise. Je ne peux que lui exprimer toute l'admiration que
j'ai eue à le voir oeuvrer à l'Education d'abord et, depuis
quelque temps, à la Régiede l'assurance-maladie, et au nom de
l'Opposition comme en mon nom personnel, lui souhaiter la meilleure chance
possible dans les nouvelles fonctions qu'il aura très bientôt.
M. Forget: J'allais, M. le Président, poser le même
geste avant le député de Saint-Jacques mais je lui cède
volontiers la priorité pour le faire. J'aimerais joindre l'expression
des mêmes sentiments aux siens et j'imagine ceux de tous les autres
membres de la commission. M. Martin a rendu des services distingués,
comme on vient de le rappeler, au ministère de l'Education et, depuis
près de deux ans, à la Régie de l'assurance-maladie. Je ne
doute pas que la nouvelle carrière, la seconde carrière
universitaire qui l'attend va également lui permettre de se distinguer.
Je désire lui témoigner publiquement de la gratitude pour les
services et l'appui qu'il m'a apportés depuis que je détiens le
poste que j'occupe actuellement et l'assurer de ma sympathie et de mes voeux de
succès pour le poste qu'il va assumer dans quelques semaines.
M. Martin : M. le Président, vous al lez me permettre de
remercier le député de Saint-Jacques et le ministre des Affaires
sociales avec les deux, j'ai eu l'occasion de collaborer de
manière différente de leur témoignage. Je
l'apprécie profondément avec une certaine émotion. Je le
considère comme un témoignage de confiance qui constitue un
appui, pour moi, très significatif dans la tâche que j'ai
accepté d'assumer dans un milieu différent de la fonction
publique, mais qui demeure dans le secteur public auquel, personnellement, je
reste profondément attaché.
Ce témoignage constitue pour moi un appui dans l'exercice des
responsabilités que je vais assumer. Je pressens et je devine que les
uns et les autres comprennent le sens de cette décision que j'ai prise
pour continuer, dans la mesure de mes moyens, à servir la
collectivité québécoise. Grâce à l'appui de
cette collectivité particulière de Sherbrooke, grâce
à l'appui aussi de beaucoup de personnes sur le concours desquelles je
peux compter, j'espère ne pas décevoir cette collectivité
régionale de Sherbrooke, d'abord, la collectivité
québécoise dans son ensemble et, par voie de conséquence,
ceux qui représentent cette collectivité, quel que soit le parti
qu'ils ont pris. Je vous remercie beaucoup.
Le Président (M. Cornellier): Le programme 3 est
adopté. Programme 4 servi ces communautaires.
M.Charron: J'ai presque envie de vous proposer d'aller regarder
la fin de la deuxième période, M. le Président.
Le Président (M. Cornellier): S'il y a consentement
unanime des membres de la commission.
M. Charron: Parce que c'est un long programme. Enfin, c'est le
dernier long programme qui reste. Par la suite, l'étude des
crédits devrait aller assez rapidement. Je ne sais pas quelle est
l'intention du ministre. Est-ce que je serais appuyé par des
députés ministériels si je faisais la proposition que j'ai
en tête?
M. Forget: Je ne veux pas être difficile, mais, d'un autre
côté, les fonctionnaires sont ici et ils sont disposés
à répondre aux questions. Comme nous allons ajourner les travaux
de cette commission avant de pouvoir les reprendre, je pense qu'on pourrait
peut-être, au moins, amorcer l'étude de manière à
voir certaines questions.
M. Charron: M. Dumas est ici?
M. Forget: Oui, il est dans le corridor.
Services communautaires M. Charron: M. le Président...
Le Président (M. Cornellier): L'honorable
député de Saint-Jacques.
M. Charron: ... le programme 4 qui traite des services
communautaires ouvre la discussion sur ce qui a été
différemment qualifié par plusieurs analystes, mais tous dans le
même sens, d'oeuvre majeure de la réforme sociale qui s'est
opérée au Québec depuis cinq ans.
Il s'agit des centres locaux de services communautaires ou piliers de la
loi 65 dans son esprit comme dans sa lettre. Je parcourais certains documents
ramassés un peu partout, même venant du ministère des
Affaires sociales lui-même, et je trouvais, pour qualifier cette
institution, toutes sortes d'expressions comme fer de lance, pointe, coeur de
la réforme.
Je pense qu'aucune de ces qualifications n'est exagérée,
si on se rappelle bien l'esprit avec lequel l'Assemblée a adopté
la loi 65, l'esprit dans lequel le promoteur, le parrain de la loi 65 à
l'époque avait fait l'unanimité de l'Assemblée alentour de
cette notion. C'est donc d'elle, si vous le permettez, M. le Président,
d'abord, que nous allons discuter, avant de vérifier certains autres
services compris dans ce programme 4.
D'abord, les choses pratiques. J'ai en main le document qui provient du
ministère en date du 27 mars, de la direction de M. Dumas, qui fait
référence je ne sais pas si on l'a reçu
à certaines copies en annexe qui, pour les fins de la présente
discussion, me seraient d'une utilité considérable.
J'ai une partie des documents en annexe, c'est-à-dire le budget
annualisé 1974/75, mais certains autres m'apparaissent essentiels et
éviteraient probablement un certain nombre de questions fastidieuses que
je serais obligé de poser ne les ayant pas en main.
Vous les avez toutes?
J'aurais aimé avoir le temps de les parcourir. Très
bien.
L'année dernière, M. le Président, nous avions
soulevé une inquiétude quant à l'avenir de ces embryons de
réforme CLSC. Vous vous rappellerez, même, M. le Président,
que le débat alentour de cette table avait lui-même
été assez houleux. J'avais reçu, sans l'avoir
provoquée, la preuve de ce que j'avais affirmé à l'effet
que ces nouveaux-nés de la réforme sociale, avaient
déjà plus d'un adversaire. Des adversaires que l'on attendait ou
qu'on s'attendait normalement à trouver, par exemple, dans les milieux
professionnels, habituellement ancrés dans une solidité
légendaire et que la réforme, forcément, bousculait. Donc,
de ce côté, peu de surprise, mais une organisation sociale et
politique aussi, disons-le, qui, dans certains coins du Québec,
où l'implantation s'avérait plus difficile qu'ailleurs,
était particulièrement coriace quant à l'arrivée de
ces promoteurs de services sociaux à caractère différent
et dont l'unification avait poureffet c'était le butde la loi,
maison aurait dit qu'on ne l'avait pas calculé au moment où on
l'a adoptée de les renforcer et de leur donner une
cohésion plus grande qu'auparavant.
On est loin des CLS du rapport Castonguay-Nepveu. Le C qu'on a
rajouté a une dimension bien particulière et c'est cette
dimension bien particulière qui avait, l'avons-nous constaté,
pour effet d'énerver ou de déranger bien des gens. La dimension
d'action communautaire, M. le Président, chez nous, vous le savez, a eu
pour longtemps comme synonyme bénévolat, militantisme religieux,
générosité périodique, je dirais, mais n'a jamais
reçu, autant que par cette loi 65 que nous avons votée, une
consécration officielle comme étant un agent reconnu, par l'Etat
québécois, de développement social des
Québécois.
Les adversaires des centres locaux de services communautaires sont, par
définition, ceux que le centre local de services communautaires
dérange. Dans certaines régions, les nantis, les bien-assis
trouvent curieux de voir des adversaires, jadis parsemés, trouver un
moyen de cohésion alentour d'un centre local et qui plus est, pour la
première fois, financé par des deniers publics, en partie du
moins, dans la réalisation de leurs actions.
Il y a, bien sûr, comme je le signalais tantôt, les
professionnels de la santé, particulièrement dans les
régions où les centres hospitaliers étaient
installés. Je ne pense pas que l'installation de centres locaux de
services communautaires, qui se donnaient des vocations dans le domaine de la
santé, se soit opérée facilement nulle part là
où il y avait déjà des centres hospitaliers
installés. Il ne faut pas parcourir longtemps le Québec pour
vérifier, à quelques endroits, comment cela aété
particulièrement difficile. Il y a la vieille idée, difficilement
décrassable, je dirais, de cette espèce de tour d'ivoire que les
professionnels de la santé avaient édifiée,
s'étaient vu édifier alentour d'eux. Forcément, leur
participation dans un centre local de services communautaires, qui fait appel
modestement à la participation populaire, les dérangeait.
Tout cela existait donc l'année dernière. Nous l'avons
signalé. Des députés ministériels et moi-même
avons croisé le fer dans des conceptions différentes sur ce
sujet. J'avais prévenu le ministre des Affaires sociales, sur ce sujet,
si c'était son intention
bien nette d'implanter ce que la loi 65 l'autorisait et l'incitait
à implanter, qu'il avait l'appui de l'Opposition, même si cela,
à l'occasion, pouvait lui être un handicap à
l'intérieur de son propre parti.
Je ne veux pas dire que le ministère des Affaires sociales a
été inactif suite aux représentations que nous lui avions
faites, plus tôt, plus modestement suite à la période de
discussion que nous avions eue l'année dernière. En fait, le
document que j'ai en main, q ui vient de m'être remis avec ses annexes,
fait état de certaines décisions qu'il est, je pense, inutile de
commenter puisque, dans l'ensemble, je crois qu'elles constituent ce qui devait
être fait à ce moment-ci alentour de l'implantation des CLSC.
La Direction des services communautaires est une nouvelle direction, a
un nouveau directeur. Si je me fie aux objectifs qu'elle a pour fonction de
rendre opérationnels, je puis dire que j'endosse chacun des objectifs
que cette direction s'est donnés. Il y a pourtant quelques questions
bien précises que j'ai à poser au ministre ou au directeur sur
l'action de cette direction nouvelle depuis un an. J'aimerais la
féliciter, d'abord, de la formation de l'équipe Bilan et
m'informer, par le fait même, si, au yeux du directeur, le calendrier que
l'équipe Bilan s'est donné, l'échéance au 30 juin
1975, je crois, ce soir lui paraît encore respecté comme
calendrier, si des difficultés nouvelles sont apparues, etc., autrement
dit, faire le bilan de l'équipe Bilan là où elle se trouve
aujourd'hui.
M. Forget: M. le Président, pour répondre à
cette question précise de notre évaluation de l'opération
Bilan, je dois dire que nous avions anticipé lancer cette équipe
au début du mois de janvier dans le sens que ce qu'on anticipait qu'elle
puisse faire à ce moment-là c'était de s'impliquer
davantage dans la visite et dans un processus d'entrevues et de familiarisation
avec un certain nombre de CLSC. On a entrevu, au tout début de la
formation de cette équipe, une certaine difficulté à
trouver des gens ou à identifier des professionnels qui
répondaient à nos critères, c'est-à-dire les
critères fixés conjointement entre nous et les gens qui oeuvrent
dans les CLSC, au niveau de la compétence de ces gens-là, de leur
objectivité et surtout de leur disponibilité.
Je crois que, heureusement, on est arrivé à mettre sur
pied une équipe qui est franchement intéressante.
Donc, depuis un mois, je crois que cette équipe fonctionne, est
en état d'opération, a commencé à visiter un
certain nombre de CLSC, a commencé à s'impliquer dans un
processus de revues, d'entrevues, ainsi de suite. Ce qui me permet de dire,
à ce stade-ci, qu'en ce qui nous concerne, les grands objectifs qu'on
s'était fixés, par rapport à la mise sur pied de cette
opération, seront satisfaits, d'ici la fin de juin, du moins dans ses
objectifs essentiels ou dans les attentes essentielles qu'on avait
attachées à cetteéquipe. Il va peut-être rester
quelques éléments plus secondaires qu'on pourra poursuivre, de
concert avec les gens qui ont vécu l'expérience,
c'est-à-dire soit les directeurs généraux, les
organisateurs communautaires, les professionnels oeu- vrant au sein des CLSC,
mais en somme, pour répondre de façon résumée
à votre question, les objectifs majeurs seront satisfaits pour la fin du
mois de juin.
M. Charron: Quel est le programme par la suite?
L'opération bilan vous soumettra son rapport à vous, au
ministre?
M. Forget: C'est ça.
M. Charron: Est-ce que, déjà, on a prévu la
façon dont on disposera de ce rapport?
M. Forget: Oui. La façon dont fonctionne cette
opération, actuellement, n'aboutira pas, ne nous amènera pas
à un type d'opérations traditionnelles de consultantsoù on
asoudainement un rapport qui contient des recommandations auxquelles on donne
suite. Ce qu'on a voulu introduire dans cette opération c'est de
catégoriser cette opération d'un genre de processus de
recherche-action impliquant, à la fois, tous les partenaires qui sont
impliqués, qui ont été impliqués soit au niveau de
la mise en oeuvre ou soit au niveau du fonctionnement des CLSC.
Donc, ce qu'on prévoit, d'ici la fin du mois de juin, c'est une
série de rencontres où on pourra bénéficier des
observations et des conclusions ou certaines recommandations que pourra nous
fournir l'opération bilan. Donc, on prévoit un certain nombre de
rencontres qui impliqueraient des gens du ministère, des observateurs
plus objectifs, des gens qui oeuvrent actuellement au sein des CLSC, plus
particulièrement par leur médium qui est la nouvelle
Fédération des CLSC.
On prévoit deux ou trois rencontres d'ici la fin des travaux de
ce groupe d'experts. On prévoit, à ce stade-ci, ce qu'on peut
prévoirou ce qu'on anticipe plutôt vers la fin de cette
opération, c'est un genre de prise de conscience assez globale,
peut-être organisée sur des bases régionales, où les
professionnels pourront se grouper et étudier le contenu du rapport en
profondeur et en évaluer la possibilité d'application chez eux ou
en évaluer la compatibilité avec les besoins plus particuliers de
leur milieu, avec la possibilité de peut-être intégrer dans
leur fonctionnement certaines des conclusions, des grandes recommandations
qu'auront pu nous transmettre ces gens.
Maison ne voit pas cela comme un processus qui va se terminer le 30
juin. Un grand rapport volumineux va être soumis, et là on se met
à travailler. C'est un processus évolutif au sein duquel on
prévoit, dès le début du mois de mai, des rencontres avec
les consultants, un genre de processus éducatif qui va se poursuivre
dans le temps.
Au cours de l'été, comme je vous le disais, on
prévoit de façon pi us intensive des rencontres régionales
où les différents groupes de professionnels seront
impliqués et seront sensibilisés aux grandes recommandations du
rapport, de façon que cela les amène à faire un peu ce que
je disais: examiner la correspondance entre ce qu'ils font et ce qu'un groupe
d'experts aurait pu articuler ou développer en termes d'observations et
de recommandations.
M. Charron: Si je prends certains autres sujets de vocation de la
direction que vous assumez, que s'est-il fait de particulier quant à la
formation des gestionnaires dans les CLSC?
M. Forget: De ce côté, et cela s'intègre dans
une opération ou dans une préoccupation qu'on a pressentie, tant
à notre niveau qu'au niveau des gens qui oeuvrent dans les CLSC, c'est
une préoccupation de consolider davantage ou d'améliorer certains
systèmes de support ou certains comportements qui répondent
à des normes élémentaires de bonne gestion dans un
organisme quelconque.
De ce côté, suite à un besoin particulier qu'on a
identifié, qui est un besoin majeur du côté de la gestion,
il y a celui de former des gestionnaires. C'est un besoin qui a fait l'accord
presque unanime chez tous les directeurs généraux qui oeuvrent
dans les CLSC, puis le nôtre.
Suite à la reconnaissance de ce besoin, le ministère a
joué un genre de rôle de facilitateur vis-à-vis de la
réalisation de ce type de programme de formation. Alors, on a
commencé par une certaine forme d'analyse des besoins, encore une fois
impliquant les gens du milieu. Tout cela a abouti à une session de trois
jours dernièrement, où l'ensemble des directeurs
généraux des CLSC ont été impliqués dans la
réalisation du cours et dans l'évaluation de ce cours, ce qui
nous amène à apporter certaines modifications à une
session ultérieure qui est censée avoir lieu vers la mi-mai.
On avait prévu au tout début deux sessions comme
celles-là mais, compte tenu de la demande, de la
réceptivité que ces cours de formation amènent chez les
directeurs généraux, on prévoit les poursuivre. C'est un
programme de formation un peu fait sur mesure pour les directeurs
généraux tel qu'eux le voient et le pressentent.
Seulement pour vous donner une idée...
M. Charron: Je m'excuse de vous interrompre. Est-ce que ces
cours, cette formation des gestionnaires ne s'adresse qu'aux directeurs
généraux ou si, à l'occasion, vous incluez des membres de
conseils d'administration?
M. Forget: Précisément, à ce stade, on a
débuté avec les directeurs généraux, mais on
prévoit, en collaboration avec les conseils régionaux, au cours
des prochains mois, d'amorcer tout un processus de formation ou de
sensibilisation, devrais-je dire, au niveau des conseils d'administration un
peu partout en province.
M. Bonnier: Relativement à l'étude qui est en train
de se faire, vous dites qu'il n'y aura pas nécessairement de rapport
final et vous avez beaucoup parlé d'une certaine continuation de
réflexion avec les professionnels. Est-ce que vous incluez
là-dedans le reproche qu'on fait d'une façon
générale à l'effet que c'est trop professionnel?
C'est que les gens du milieu sont un peu laissés de
côté et même, quand on assiste à des
assemblées générales, on s'aperçoit que ce sont les
professionnels qui mènent tout le bal et peu de place est laissée
aux gens du milieu dans la définition de leurs besoins et l'expression
des services qu'ils devraient peut-être avoir relativement à ces
besoins.
Est-ce que, une fois que le rapport sera fait, ce ne serait pas aussi
l'occasion pour une réflexion avec des gens du milieu concerné
beaucoup plus que les professionnels?
M. Forget: Je dois dire que, dans la conduite même de cette
opération d'évaluation ou d'articulation, il y a plusieurs
groupes de citoyens qui sont visés et qui sont consultés au fur
et à mesure que cette opération a lieu. Quant à une
participation ou une implication plus grande des citoyens, peut-être
à un stade ultérieur y aura-t-il lieu de les impliquer. Mais,
jusqu'à maintenant, on n'a pas prévu de processus
systématique de ce type d'implication. Mais si vous le voulez je vais en
prendre bonne note et voir à ce que cela se fasse, qu'on implique
davantage dans ce processus de réflexion, comme vous le dites, les
citoyens.
A ce stade, je crois que les citoyens ont été
impliqués de façon très intensive dans la mise sur pied de
tous les CLSC.
Cela a été un reproche qu'on a fait aux CLSC de prendre
énormément de temps avant de démarrer et avant de
s'implanter, justement à cause de cet objectif ou cette intention, qui
était implicite dans la loi 65, d'impliquer les citoyens. Donc, il y a,
dans certains cas, une période d'un an ou un an et demi où les
citoyens ont été profondément ou intensément
consultés dans la mise sur pied du CLSC.
Une fois le CLSC mis sur pied, ce processus se poursuit et divers CLSC
ont trouvé des formules plus ou moins originales, impliquant plus ou
moins les citoyens dans, par exemple, un processus continu d'identification des
besoins, ainsi de suite.
Je peux comprendre que, dans certains cas, c'était dû au
manque d'expérience, à la nouveauté de la formule. C'est
peut-être un reproche qui mériterait d'être analysé
davantage, à savoir dans quelle mesure il n'y aurait pas lieu de les
impliquer davantage, particulièrement dans des secteurs plus
particuliers.
M. Bonnier: M. le Président, je pense que si on s'en
reporte à l'esprit initial, disons, des CLSC, ce devaient être des
groupes à dimension communautaire, du moins à
représentation communautaire, dont la première fonction
était de faire une espèce d'évaluation des besoins du
milieu. Or, il y a un certain nombre de CLSC qui n'ont jamais fait
d'études de ce genre, qui ont décidé tout d'un coup de
mettre tel ou tel service sur pied, parce que, selon eux, cela correspondait
à ce qui devait être mis sur pied, alors que ce n'était
peut-être pas essentiel du tout.
A la suite d'études évidemment, je ne sais pas
comment votre processus va se faire j'imaginais qu'on arriverait au
moins à une espèce de consensus de fixation de la vocation
réelle des CLSC et, à partir de ce moment, que les gens du milieu
seraient impliqués dans cette redéfinition de la vocation du CLSC
dans une première étape et dans une deuxième. Mais si cela
devait toujours garder cet aspect
d'organisme communautaire devant répondre à un certain
nombre de besoins, j'imaginais que la première étape serait de
les identifier, ces besoins, une fois pour toutes, de s'asseoir avec les gens
et non pas de mettre sur pied des services qui, dans certains cas, il faut bien
l'avouer, étaient simplement le dédoublement de services qui
existaient ailleurs.
M. Forget: A moins qu'il y ait quelques CLSC déviants,
tout ce que j'ai vu, depuis mon entrée en fonction, c'est justement un
certain nombre d'activités et un certain montant d'engagements de la
part des CLSC. Dans la présentation des programmes fonctionnels qu'on
nous a faite, on nous a clairement indiqué le degré de
participation et d'implication des citoyens, de l'identification des besoins
jusqu'à une formulation d'une certaine gamme de programmes.
Comme je vous le disais tantôt, dans ce processus de remise en
question, les citoyens, les bénéficiaires ou les consommateurs
des services de CLSC ne sont absolument pas oubliés. Si je vous
présentais les questionnaires, particulièrement du professeur
Leithman qui s'occupe de la dimension organisation communautaire, vous verriez
qu'il a fait justement un de ses objectifs de questionner ou de passer un
certain temps à parler avec des citoyens, justement pour connaître
leur point de vue, se sensibiliser à leurs observations à
l'égard de leur participation et savoir ce qu'ils en pensent.
Quant à leur implication progressive et, disons, plus en
profondeur dans ce processus évolutif d'évaluation ou de bilan
qu'on a amorcé, comme je vous le dis, j'en ferai un point personnel de
vérification, et si je vois qu'il y a lieu d'améliorer ou
d'introduire certains correctifs à ce processus, on le fera.
Le Président (M. Cornellier): L'honorable
député de Vanier.
M. Dufour: Ce serait pour continuer, pour appuyer l'idée
de mon ami de Taschereau. Est-ce que, dans votre étude, vous avez une
étape pour visiter le député du comté qui,
jusqu'à nouvel ordre, représente bien les problèmes du
milieu, parce qu'il a à les vivre pendant quatre ans? Est-ce qu'il
serait possible, de temps en temps, de ne pas trop l'oublier, d'aller voir
quelles sont les sortes de plaintes qu'il a, quelles sont ses idées sur
le CLSC? Je ne parle pas pour moi, je n'en ai pas dans mon comté, Dieu
soit loué.
Je n'ai pas de problèmes. Alors, comme M. Bonnier qui vit
intensément ces problèmes-là tous les jours, le
député de Saint-Jacques et vous-même, je pense qu'une
visite chez ces députés apporterait peut-être des
éléments de solution.
M. Forget: M. le Président, si vous me permettez
d'intervenir, dans les relations qui peuvent exister entre les
députés et le ministère, pour ne parler que ce de
problème-là, je crois qu'il y a eu, dans tous les cas où
cela a été fait et quels que soient les partis, une
disponibilité très grande des fonctionnaires du ministère,
dans toute la mesure des possibilités physiques, pour discuter des
problèmes d'un éta- blissement ou d'un autre; c'est parfois un
CLSC, c'est parfois un centre d'accueil, un centre hospitalier. Ces contacts
sont assez fréquents, je pense, puisque heureusement, les
députés s'intéressent aux problèmes de leur
comté et se font les porte-parole de la population qu'ils
représentent, pas seulement à l'Assemblée nationale, mais
auprès du gouvernement. Il n'y a pas tellement de problèmes de ce
côté-là dans tous les cas où ces demandes de
rencontres ont été formulées, je pense qu'elles ont
été satisfaites.
Pour ce qui est des établissements, on se trouve,
évidemment, dans une situation un peu différente, quoique la
position qu'on a toujours tenue, c'est que ces établissements
fonctionnent avec les deniers publics et que c'est une question de simple
courtoisie pour les établissements d'accueillir les membres de
l'Assemblée nationale, de les familiariser avec leur fonctionnement et
de répondre à leurs questions, comme, d'ailleurs, ils sont
censés répondre aux questions du public en général.
Je pense que, sur le plan des principes, il n'y a vraiment pas de
problème; il y a des problèmes, évidemment, comme toujours
quand il est question de relations humaines, entre des individus qui ne
s'entendent pas ou qui ne voient pas les choses de la même façon.
Mais, dans tous les cas où un problème peut nous être
signalé, il est clair qu'il nous fera plaisir d'intervenir, comme
médiateurs, le cas échéant, s'il en est besoin, encore
qu'on ne m'ait pas signalé, à ce jour, de problème
véritablement aigu de ce côté-là.
Je ferai remarquer que, finalement, le ministère lui-même,
parfois, n'est pas entièrement bienvenu dans certains
établissements. A l'occasion, on a certains problèmes. Je pense
que ça nous indique qu'il faut faire la part des personnalités et
des humeurs. Il reste que c'est un principe qu'on a toujours défendu, la
possibilité pour les membres de l'Assemblée nationale de
communiquer le plus librement possible avec les établissements.
Je ne sais pas si j'ai bien saisi la question du député de
Vanier.
M. Dufour: C'est un peu ça, mais actuellement on fait une
étude, on évalue. Alors, dans l'évaluation, je pense qu'il
serait bon, peut être, de cognera la porte du député et de
lui demander lui-même ce qu'il a à dire. Comme il vit les
problèmes de son propre comté, il est au courant de beaucoup de
choses et je pense qu'il pourra apporter des éléments
valables.
M. Forget: II n'y a pas de doute qu'il peut apporter des
éléments valables. Il est, évidemment, un observateur
privilégié de ce qui se passe. D'un autre côté, on
comprend que, lorsqu'il s'agit d'un travail d'évaluation comme
celui-là, on demande à des personnes qui sont, soit des
fonctionnaires, soit qui ont des mandats spécifiques et qui ont des
contrats spécifiques avec le gouvernement, de jouer un rôle qui
peut être très délicat. Je crois que ce genre de
préoccupation là peut, sans aucun doute, être
communiqué par d'autres canaux, à l'occasion, puisqu'il peut
devenir très délicat, pour des person-
nés qui sont engagées pour une tâche
d'évaluation, de s'insérer dans des questions qui ont et
ça, c'est indubitable; on ne peut pas le nier des dimensions
politiques. Elles ne savent pas quoi faire, je pense, dans certains cas, avec
des recommandations qui portent plutôt sur ces implications-là que
sur le contenu des programmes proprement dits. C'est les placer dans une
situation très difficile et je pense que c'est peut-être un peu
injuste aussi de leur demander de jouer ce rôle-là. Evidemment,
peut-être que c'est votre humble serviteur qui est dans la meilleure
position pour prendre connaissance de ces points de vue et s'en faire
l'interprète auprès du ministère.
Le Président (M. Cornellier): Le député de
Sainte-Marie.
M. Malépart:Toujours dans le même sens sur la
question de l'évaluation. Si l'évaluation est faite au niveau des
gens déjà impliqués dans les CLSC, je pense bien qu'il est
très normal que les gens vont dire que ça fonctionne bien, qu'ils
sont représentatifs, parce que je voismal un groupe qui va avouer
lui-même qu'il n'est pas représentatif.
Dans chaque milieu, alentour du CLSC, il existait une
quantitéd'organismes, de comitésde citoyens, à
l'époque on appelait ça des gens bénévoles, les
confrères de la Saint-Vincent-de-Paul, il y a des comités
d'écoles. Serait-il possible de faire un échantillonnage et de
faire une évaluation avec ces gens pour avoir un autre côté
de la médaille?
Il y a des comités dans chaque école, alentour des CLSC,
il y a des comités de parents, des organismes comme les
Conférences de la Saint-Vincent-de-Paul. Il y a les caisses populaires
qui sont normalement censées être impliquées dans le
milieu. Est-ce qu'il n'y aurait pas une rencontre pour savoir si vraiment il y
a une véritable participation de tout le monde alentour du CLSC? Je ne
sais pas si c'est dans vos vues.
M. Forget: Oui, c'est dans nos vues. Il y a le problème de
l'étendue, de délai, dedisponibilité, etc. Et comme ce
n'est pas possible, pour ces gens qui sont impliqués dans ce type
d'opération, de visiter tous les CLSC prévus, de faire un certain
échantillonnage en fonction des milieux ruraux, semi-urbains et urbains,
comme, dans ce cas, on doit se limiter et essayer de procéder sur une
base aussi scientifique que possible, le même type de
préoccupations se transfère dans le nombre de gens qui peuvent
visiter à l'extérieur du CLSC.
Toutefois, c'est implicite, dans le plan de travail de tous ces experts,
que d'impliquer dans leur processus d'évaluation tous les autres
éléments à l'extérieur du CLSC qui pourraient
être dans des états d'interrelation, d'interdépendance par
rapport aux CLSC. Ce n'est pas tout, comme vous le dites très bien, que
d'essayer de définir le CLSC en soi, c'est important aussi que de le
définir par rapport à ses interlocuteurs.
Parmi les interlocuteurs qui sont impliqués dans cet effort de
bilan et d'évaluation, il y a tous les éléments du
réseau. On rencontre des gens dans les CSS, des chefs de
départements de santé commu- nautaires, dans les hôpitaux,
dans la FMOQ, des médecins qui pratiquent dans les cabinets
privés, et des groupes de citoyens également.
Comme dans tout processus de ce genre, on ne peut pas s'étendre
compte tenu des délais et des disponibilités dans
la mesure où on le voudrait, mais c'est impliqué, comme vous
l'avez souligné, dans le processus.
M. Malépart: Comme à Montréal, il y a
l'ADDS; c'est un organisme qui serait, quand même, en mesure de vous
donner sa façon de percevoir les CLSCà l'état actuel.
M. Forget: J'aimerais peut-être ajouter aussi qu'il n'y a
pas seulement l'Opération bilan, qui est en cours actuellement, qui
pourrait impliquer une certaine forme de consultation ou d'implication soit des
autres partenaires dans le réseau ou des consommateurs des services
actuels des CLSC. Nous sommes préoccupés par d'autres
média. Par exemple, au niveau des régions, il y a toutes sortes
de groupes nous appelons ça dans notre langage interne des
groupes de coordination, des tables de concertation au sein desquels se
poursuivent des discussions impliquant tous les partenaires qui sont, comme je
le disais tantôt, en interdépendance avec les CLSC.
Dans ces processus régionaux et peut-être plus locaux
également, je crois que les citoyens, soit par le moyen des conseils
régionaux ou soit directement, sont impliqués. Donc, si on ne
peut pas rejoindre tous ceux auxquels vous faisiez allusion ou que nous
désirerions rencontrerdans le processus bilan, nous le faisons par
d'autres mécanismes. Et ça, c'est un type de
préoccupations que nous n'anticipons pas de terminer le 30 juin ; ce
sont des types de préoccupations qu'il faudrait, pour nous, continuer et
poursuivre. Cela devrait faire partie intégrante de notre processus
d'évolution et de prise de décision.
M. Malépart: D'accord.
M. Charron: M. le Président, j'aimerais...
Le Président (M. Cornellier): Le député de
Saint-Jacques.
M. Charron: ...aborder de façon plus rigoureuse certaines
actionsde la direction qui, elles, me paraissent moins facilement endossables
que la création de l'Opération bilan ou que le fait que la
direction s'occupe de l'image des CLSC dans une promotion conjointe avec la
direction des communications. Mais je me demande si je ne devrais pas garder
ces observations pour un autre moment, étant donné que ça
pourrait être assez long.
M. Forget: Considérant la longueur de la question et la
longueur de la réponse.
M. Charron: Considérant aussi que j'ai de la
difficulté à aligner deux phrases l'une à la suite de
l'autre, M. le Président, je ne sais pas si je peux proposer à
cette commission l'ajournement.
Le Président (M. Cornellier): Est-ce que cette motion
d'ajournement est agréée? Agréé. La commission
ajourne ses travaux sine die.
(Fin de la séance à 21 h 55)