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Etude du projet de loi no 9
(Dix heures dix-sept minutes)
Le Président (M. Marcoux): A l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission des affaires sociales s'est de nouveau réunie pour
poursuivre l'audition des mémoires sur le projet de loi 9, Loi assurant
l'exercice des droits des personnes handicapées.
Les membres de la commission sont les suivants: M. Boucher
(Rivière-du-Loup), M. Charron (Saint-Jacques), M. Clair (Drummond), M.
Forget (Saint-Laurent), M. Gosselin (Sherbrooke), M. Gravel (Limoilou), M.
Grenier (Mégantic-Compton), M. Lavigne (Beauharnois), Mme Lavoie-Roux
(L'Acadie), M. Lazure (Chambly), M. Marois (Laporte) remplacé par M.
Gagnon (Champlain), M. Martel (Richelieu), Mme Ouellette (Hull), M. Paquette
(Rosemont), M. Saindon (Argenteuil), M. Saint-Germain (Jacques-Cartier), M.
Shaw (Pointe-Claire).
Aujourd'hui, nous entendrons les mémoires de l'Association des
hôpitaux de la province de Québec, l'Association des centres
d'accueil du Québec, la Maison Lucie-Bruneau, la
Fédération régionale des associations SERVCOM
Côte-Nord, M. Gaston Spooner et le Conseil régional de la
santé et des services sociaux du Bas-du-Fleuve et de la
Gaspésie.
J'inviterais d'abord l'Association des hôpitaux de la province de
Québec à venir nous présenter son mémoire. Je vous
inviterais à vous présenter et à présenter vos
collègues. Vous aurez ensuite une vingtaine de minutes pour soit
présenter, soit lire, soit résumer, votre mémoire et
ensuite ce sera le dialogue avec les membres de la commission.
M. Robitaille (Paul): M. le Président...
Le Président (M. Marcoux): Oui. Un instant, Mme le
député de L'Acadie a...
Mme Lavoie-Roux: Comme j'aime bien voir les
invitésj'ai un compagnon devant moi, je ne le lui reproche pas
est-ce que vous avez objection à vous déplacer...
Le Président (M. Marcoux):... vers la gauche.
Mme Lavoie-Roux: ... vers le centre, s'il vous plaît?
Merci, messieurs.
Le Président (M. Marcoux): C'est pour mieux voir nos
invités. Allez-y.
Association des hôpitaux de la province de
Québec
M. Robitaille (Paul): Merci, M. le Président. Mon nom est
Paul Robitaille; je suis le représentant du président de
l'Association des hôpitaux, M. Maurice Cardinal, qui, malheureusement,
n'a pu être avec nous aujourd'hui. Je suis accompagné, à ma
droite, de Me Ghislaine Gosselin, qui est responsable des services juridiques
à l'Association des hôpitaux, et, à ma gauche, de M.
Louis-de-G. Page, membre du conseil d'administration de l'association.
L'Association des hôpitaux de la province de Québec est
heureuse de présenter un mémoire sur le projet de loi 9, Loi
assurant l'exercice des droits des personnes handicapées. Nous vous
remercions d'avoir accepté de nous entendre.
L'Association des hôpitaux de la province de Québec, corps
professionnel intermédiaire fondé au mois de janvier 1966, et
constitué en vertu de la troisième partie de la Loi des
compagnies de la province de Québec, suite à une fusion de
l'Association des hôpitaux catholiques de la province de Québec
(fondée en 1962) et de l'Association des hôpitaux du Québec
(fondée en 1956), est le porte-parole de 199 hôpitaux qui
emploient plus de 80 000 salariés et elle représente donc la
quasi-totalité des hôpitaux généraux, chroniques et
psychiatriques du Québec.
Une des raisons d'être de notre association est de favoriser la
collaboration entre le milieu hospitalier et le gouvernement. C'est à ce
titre qu'elle présente aujourd'hui ses commentaires et ses
recommandations au sujet du projet de loi no 9, Loi assurant l'exercice des
droits des personnes handicapées.
L'AHPQ a été heureuse de prendre connaissance du livre
blanc traitant d'une "proposition de politique à l'égard des
personnes handicapées", de même que du projet de loi no 9, Loi
assurant l'exercice des droits des personnes handicapées. L'AHQP a
été à même de constater que le législateur
avait pris en considération plusieurs des recommandations qu'elle avait
formulées dans son mémoire présenté en commission
parlementaire à l'automne 1976, à l'occasion du
dépôt du projet de loi 55, Loi sur la protection des personnes
handicapées.
A regret, cependant, l'AHPQ se doit d'exprimer au législateur un
commentaire défavorable à l'égard du chapitre II du projet
de loi. Une loi très importante à caractère
général, la Charte des droits et libertés de la personne,
sanctionnée le 27 juin 1975, expose les droits fondamentaux que
possède au Québec chaque personne humaine. Il nous est apparu
déplacé de voir reprises dans le chapitre II du projet de loi no
9 certaines dispositions déclaratoires des droits fondamentaux contenues
dans la charte précitée, principalement les articles 2, 3, 7, 8,
9 et 10.
Ayant le souci d'assurer une meilleure cohésion des dispositions
législatives traitant de l'existence des droits fondamentaux reconnus
aux personnes humaines, notre association est d'avis, plutôt que
d'introduire à l'intérieur de lois particulières, qu'il
s'agisse comme ici d'une loi sur les personnes handicapées ou d'une loi
sur la jeunesse ou autres, des éléments pour compléter une
loi à caractère général, que des amendements
soient apportés à la Charte des droits et libertés
de la personne. Si le législateur veut spécifiquement
prévoir comme motif de discrimination le fait d'être, à
certains égards considéré comme handicapé, il peut
l'inclure à l'article 10 de la charte précitée. Enfin, si
le législateur veut ajouter aux droits fondamentaux, d'une
catégorie de personnes humaines d'autres éléments, qu'il
le fasse via cette loi générale.
Nous sommes heureux de constater que le Dr Lazure, lors de son
exposé à l'ouverture de la commission parlementaire sur le projet
de loi no 9, a déjà tenu compte du présent commentaire
lorsqu'il cite: "Nous pensons, suite à des consultations avec le
ministre de la Justice, pouvoir inclure le contenu de ce chapitre dans les lois
existantes". L'AHPQ soumet respectueusement au législateur le
présent mémoire qui, elle l'espère, sera
considéré avec la meilleure attention. Sur ce, M. le
Président, je passe la parole à Me Ghislaine Gosselin qui va
exposer les recommandations de l'association.
Mme Gosselin (Ghislaine): M. le ministre des Affaires sociales,
madame et messieurs les députés, il me fait plaisir de vous
donner, en premier lieu, lecture des commentaires et recommandations
formulés par l'association, portant sur certains articles bien
spécifiques. En premier lieu, l'article 4 du projet de loi qui stipule
que: "Le propriétaire de tout logement dont l'un des occupants utilise,
de façon permanente, un fauteuil roulant, doit, aux fins de
sécurité, identifier ce logement à l'aide d'un symbole
prescrit par règlement. Le propriétaire n'est tenu de cette
obligation qu'en autant qu'il est informé par écrit de la
présence de cette personne."
Les commentaires de l'association, relatifs à l'article 4, se
lisent comme suit: Reconnaissant le bien-fondé du principe
véhiculé par cette disposition, l'AHPQ, par contre, critique son
contenu "obligationnel" vis-à-vis de la personne handicapée
elle-même.
Cette disposition se voulant déclaratoire de droits
possédés par une personne handicapée, elle se trouve en
effet au sein du chapitre II qui traite des droits des personnes
handicapées, son exercice devrait relever de la seule volonté de
la personne handicapée.
En conséquence, nous recommandons de modifier l'article 4 comme
suit: "Le propriétaire de tout logement dont l'un des occupants utilise,
de façon permanente, un fauteuil roulant, doit, aux fins de
sécurité, identifier ce logement à l'aide d'un symbole
prescrit par règlement. Le propriétaire n'est tenu de cette
obligation qu'en autant qu'il est informé par écrit de la
présence de cette personne et que cette dernière consent
expressément à cette identification".
L'article 12 de la loi stipule que l'office a son siège social
dans une municipalité de la communauté urbaine de Québec.
Les commentaires relatifs au siège social se lisent comme suit: Afin de
décentraliser les activités des divers organismes
créés par le gouvernement l'AHPQ croit que le siège social
de l'Office des personnes handicapées devrait pouvoir être
situé hors de la communauté urbaine de Québec ou de
Montréal. De plus, il s'avère nécessaire de
décentraliser les activités de l'office par la création de
bureaux régionaux, en plus de la nomination de représentants
régionaux prévue à l'article 31, paragraphe c, afin de
permettre une meilleure accessibilité aux services offerts par l'office
à l'intention des personnes handicapées. Nous avons noté,
dans le discours d'ouverture du ministre, que des bureaux régionaux
seraient créés. Nous vous en remercions.
Quant à l'article 13 portant sur la composition de l'office, nous
désirons souligner que la composition de l'office prévoit la
désignation de quatre de ses membres parmi les fonctionnaires de divers
ministères. L'office devrait notamment exercer des fonctions de
représentation auprès des ministres et organismes publics
à la demande d'une personne handicapée.
Nous appréhendons l'existence virtuelle de conflit
d'intérêts pour ces quatre membres fonctionnaires. En
conséquence l'AHPQ est d'avis d'éliminer l'alinéa a) de
l'article 13 et de répartir également les quatre nominations
entre les alinéas c) et d). Effectivement, à l'article 19 du
projet de loi, il est dit: "Sous peine de déchéance de sa charge,
aucun membre ne peut participer à une décision mettant en conflit
son intérêt personnel et celui de l'office." Compte tenu que les
pouvoirs mêmes de l'office sont de représenter les personnes
handicapées auprès des ministères, nous voulons souligner
cette possibilité de conflits entre les représentants de ces
ministères comme membres de l'office.
A l'article 26, lequel porte sur la confidentialité des dossiers,
nous désirons souligner que le second alinéa fait
référence au respect de l'anonymat de la personne
handicapée. Il nous apparaît que le fait de garder secret le nom
d'une personne ne soit pas nécessairement le gage que son
identité n'est pas révélée. De plus, au même
alinéa, le législateur devrait spécifier quel membre de
l'office est habilité à autoriser une tierce personne à
prendre connaissance du dossier d'un handicapé et non seulement laisser
l'office le déterminer lui-même, tel que mentionné à
l'article 33 au paragraphe d).
Cette exigence requise dans l'intérêt même du
bénéficiaire pour assurer un contrôle très strict de
la confidentialité du dossier existe à l'heure actuelle en ce qui
concerne les dossiers tenus par les établissements soumis à
l'article 7 de la Loi sur les services de santé et les services
sociaux.
Seul un DSP ou, à défaut, un DG est habilité, de
par la loi, à communiquer tel dossier à une tierce personne. Dans
le cas de l'office, son président ou, à défaut, son
vice-président devrait assumer cette responsabilité.
En conséquence, nous demandons de modifier l'article 26,
deuxième paragraphe, de la façon suivante: "Toutefois, toute
personne peut prendre connaissance d'un tel dossier pour fins d'étude,
d'enseignement ou de recherche avec l'autorisation du président de
l'office ou, à défaut, du vice-
président à condition de ne pas révéler
l'identité de cette personne handicapée."
A l'article 27 du projet de loi, il est stipulé: "Nonobstant
toute autre loi, l'office peut obtenir tout renseignement d'un ministère
ou d'un organisme du gouvernement chaque fois que la chose est
nécessaire pour l'application de la présente loi". "Nonobstant
toute autre loi" signifie que cette disposition s'applique
indépendamment de toutes restrictions ou dispositions inconciliables
d'une loi antérieure ou postérieure au projet de loi no 9.
Cette préséance accordée à l'office sur
toutes les autres lois nous apparaît nettement exorbitante et doit
être modifiée. En conséquence, l'AHPQ recommande de
reprendre la reformulation de la disposition 81 du projet de loi 55 qui se
lisait comme suit: "Tout ministère, organisme public ou autre
administration publique relevant de l'autorité du Québec est
tenu, sous réserve des dispositions inconciliables d'une autre loi, de
fournir à l'office tous les renseignements qu'il requiert en vue de
l'application de la présente loi."
Nous désirerions également porter à l'attention du
ministre qu'aucune définition spécifique de ce qui peut
constituer un organisme du gouvernement n'est spécifiée à
l'intérieur de la loi. Par analogie, la seule comparaison que nous
pourrions faire c'est que l'"organisme de l'administration" prévu
à la loi 101, auquel cas les centres hospitaliers seraient couverts. Il
serait peut-être important, à l'intérieur du projet de loi
9, de spécifier qui sont les organismes du gouvernement.
Quant à l'article 29 du projet de loi, "le ministre peut
émettre des directives portant sur les objectifs, les priorités
et les orientations de l'office dans l'exercice des fonctions et pouvoirs qui
lui sont conférés par la loi. "Ces directives, une fois
approuvées par le gouvernement, lient l'office qui est tenu de s'y
conformer".
Les commentaires relatifs à cet article se lisent comme suit: "Le
pouvoir réglementaire exercé par le gouvernement sur un organisme
administratif peut revêtir plusieurs formes, dont celle indiquée
dans le présent article. "Cependant, autant l'organisme administratif,
en l'occurrence l'Office des personnes handicapées, ne doit pas
être totalement exempt des contrôles hiérarchiques, autant
l'étendue de tels contrôles ne doit pas lui enlever son autonomie
administrative. "Dans le cas présent, il nous semble que le ministre, en
conservant le pouvoir d'émettre des directives "obligatoires" portant
sur les objectifs, les priorités et les orientations de l'office,
s'assure un pouvoir de tutelle sur l'organisme, ce qui nous paraît
inadmissible. "De plus, le procédé utilisé, soit
l'approbation gouvernementale, puis le dépôt des directives
à l'Assemblée nationale, ne permet aucunement aux principaux
intéressés, l'office, les personnes handicapées, les
ateliers protégés et d'autres, d'exprimer leur point de vue comme
ils en ont la possibilité lorsque l'adoption d'un règlement est
sou- mise à la publication dans la Gazette officielle d'un projet de
règlement avec préavis de 30, 60 ou 90 jours. Effectivement, les
règlements prévus au projet de loi ne sont que les
règlements de l'office. Il n'y a aucun règlement
spécifique quant à la loi elle-même et il semble que ce
règlement ait été modifié par des directives, sujet
à l'approbation du gouvernement. Pour raison d'uniformité et
encore une fois, pour permettre aux organismes impliqués de faire part
de leurs recommandations ou de leurs commentaires avant l'approbation d'un tel
règlement, nous soumettons respectueusement d'abroger l'article 29,
quitte à prévoir que des règlements peuvent exister en
vertu de cette loi.
L'article 32 spécifie que "l'office peut, moyennant l'approbation
préalable du ministre, former des comités consultatifs
spéciaux". Sans lire tout cet article, je voudrais porter à votre
attention que la formation de comités consultatifs spéciaux par
l'office nous apparaît se situer à l'intérieur des pouvoirs
de régie interne confiés à cet organisme. C'est pourquoi
nous n'acceptons pas que l'office soit tenu d'obtenir l'approbation
préalable du ministre à cette fin. En conséquence, nous
demandons, l'abrogation de l'article 32, lequel doit se lire en comparaison
avec nos commentaires et recommandations formulés à l'article 34
dont je donne lecture immédiatement.
L'article 34 spécifie au paragraphe c) que "l'office peut, par
règlement de régie interne, constituer des comités
techniques et en déterminer la constitution et les pouvoirs". Afin
d'être conséquents avec notre recommandation formulée
à l'article 32, l'office doit pouvoir, par règlement de
régie interne, constituer tous les comités qu'il juge
nécessaires et non seulement des comités dits techniques. En
conséquence, nous demandons la modification du paragraphe c) de
l'article 34 afin qu'il se lise comme suit: constituer des comités et en
déterminer la constitution et les pouvoirs.
L'AHPQ, lorsqu'elle a étudié le projet de loi n'a
remarqué la pertinence de l'article 32 du projet de loi que pour fins de
budget. C'est une hypothèse, mais effectivement, si c'était le
pourquoi de cet article, on pourrait tout simplement souligner que l'office
devra agir à l'intérieur de son budget lorsqu'il forme des
comités. A l'article 33, il est dit que "l'office peut, par
règlement, pourvoir à la reconnaissance des personnes
handicapées par la délivrance de cartes d'identité.".
Les commentaires relatifs à cet article stipulent: "Pour
bénéficier de services offerts par l'office, une personne devrait
être reconnue comme étant handicapée selon les
critères formulés par l'office". Article 1m du projet. Une fois
reconnue, l'office pourra lui délivrer une carte d'identité.
Quel usage sera fait de cette carte d'identité et par le
handicapé lui-même et par l'office? La loi ne le précise
pas.
Bien qu'exprimant certaines réserves sur l'utilité
réelle d'une telle carte, l'AHPQ est d'avis que l'office peut, par
règlement, pourvoir à la délivrance d'une carte
d'identité officielle aux personnes handicapées qui en
manifestent le désir. Une
telle carte dolt tendre à favoriser l'exercice des droits des
handicapés et non à être une condition sine qua non de leur
accessibilité aux services offerts par l'office.
Sans reprendre la recommandation, je souligne toutefois avoir pris
connaissance des propos de M. le ministre disant que cet article serait
modifié en conséquence de nos commentaires.
A l'article 42: "L'office peut accorder un permis d'atelier
protégé à une association coopérative ou à
un organisme sans but lucratif qui, en particulier, par son article c) s'engage
à embaucher des personnes handicapées placées par l'office
pour la durée que celui-ci indique".
Dans son discours d'ouverture, le ministre des Affaires sociales a
spécifié qu'un comité d'admission pourrait être
formé dans chaque atelier protégé. C'est effectivement la
teneur de notre recommandation et nous vous en remercions.
A l'article 43: "L'office peut accorder à tout atelier
protégé détenteur d'un permis les subventions selon des
modifications fixées par règlement ainsi qu'une assistance
technique ou professionnelle ".
Afin, d'une part, de limiter l'ingérance de l'office dans le
fonctionnement de l'atelier protégé et, d'autre part, de
permettre à l'atelier protégé de développer ses
propres ressources techniques et professionnelles, l'AHPQ croit que l'office
devrait se limiter à accorder des subventions à l'atelier
protégé.
De plus, par souci de concordance avec l'article 45b du projet de loi,
l'article 43 devrait prévoir que l'office détermine par
règlement, en plus des modalités, les fins pour lesquelles sont
accordées les subventions à un atelier protégé. En
effet, le législateur permet à l'office d'assurer
l'administration provisoire d'un atelier qui, en particulier, utilise les
subventions à des fins autres que celles pour lesquelles elles ont
été accordées. Si l'office ne précise pas telles
fins lorsqu'elles donnent des subventions, nous doutons fortement de
l'application de l'article 45b.
Alors, nous recommandons de modifier l'article 43 comme suit: "L'office
peut accorder à tout atelier détenteur d'un permis les
subventions selon les modalités et pour les fins fixées par
règlement". A l'article 68 du projet de loi, l'office peut, dans le
cadre d'un plan de services, conclure avec tout employeur et un
bénéficiaire un contrat en vue de l'intégration de ce
bénéficiaire au marché du travail. Un tel contrat a une
durée d'au plus six mois et n'est renouvelable que deux fois. La
durée d'un contrat d'intégration professionnelle, six mois,
renouvelable deux fois, nous apparaît trop restrictive. Tout en
étant justifié de vouloir éviter d'éventuels abus,
le législateur doit avoir comme préoccupation majeure le
mieux-être de la personne handicapée. En conséquence,
l'office devrait avoir toute discrétion pour renouveler un tel contrat
lorsque les besoins d'un handicapé le requièrent. En
conséquence, nous demandons de modifier le premier alinéa de
l'article 68 comme suit: "L'office peut, dans le cadre d'un plan de services,
conclure avec tout employeur et un bé- néficiaire un contrat en
vue de l'intégration de ce bénéficiaire au marché
du travail. Un tel contrat a une durée de six mois et est renouvelable
au besoin".
A l'article 69 du projet de loi, portant sur les clauses d'un contrat
d'intégration professionnelle, nous désirons souligner qu'une
personne handicapée est limitée de façon significative et
persistante dans l'accomplissement d'activités normales à cause
d'une déficience physique ou mentale tel que spécifié
à l'article 1m du projet de loi. Lorsque cette personne est
déclarée apte à bénéficier d'un service en
plus de son intégration professionnelle ou sociale et je vous
réfère, en particulier, à l'article 52 l'office est
chargé de préparer ce plan, qui peut comprendre, selon les
besoins et aspirations du bénéficiaire, l'accomplissement d'un
travail rémunérateur. A cet effet, l'AHPQ doute du
bien-fondé d'appliquer à la personne handicapée les
dispositions complètes du Code du travail ainsi que de la Loi du salaire
minimum. Qu'elle se trouve en atelier protégé ou chez un
employeur en vertu d'un contrat d'intégration, la personne
handicapée est susceptible de ne pouvoir exercer des activités
dites "normales", ou à un rythme qui soit "normal". Comme il
apparaît très justifiable de prévoir l'existence de
conditions de travail "spéciales" qui soient inconciliables d'une
convention collective ou d'un décret applicable, il apparaît tout
autant justifiable de prévoir des conditions de
rémunération et d'association inconciliables du Code du travail
ou de la Loi du salaire minimum. Enfin, la personne handicapée ayant le
droit, comme tout autre citoyen, à des conditions de travail et de
rémunération adéquates, il nous semble que l'office est en
mesure de lui garantir l'exercice de ce droit, même sans l'application
des deux lois précitées puisque, d'une part, il est l'organisme
qui contrôle chaque atelier protégé et, d'autre part, il
est partie au contrat d'intégration professionnelle. En
conséquence, nous demandons de modifier l'article 69 comme suit: "Les
clauses d'un contrat d'intégration professionnelle relatives aux
conditions de travail et de rémunération d'un
bénéficiaire ainsi que les conditions de travail et de
rémunération d'une personne handicapée placée en
atelier protégé prévalent sur toute disposition
inconciliable d'une convention collective, d'un décret du Code du
travail ou de la Loi du salaire minimum".
A l'article 73, il est dit: "II est interdit à une entreprise de
50 salariés ou plus de congédier un salarié pour la seule
raison qu'il devient une personne handicapée. "Toute contravention au
présent article, en plus de constituer une infraction à la
présente loi, autorise le salarié à faire valoir ses
droits auprès du commissaire-enquêteur nommé en vertu du
Code du travail au même titre que s'il s'agissait d'un
congédiement pour activités syndicales; les articles 14 à
19 du Code du travail s'appliquent alors, mutatis mutandis."
Tout en souscrivant aux principes formulés par cet article,
l'AHPQ croit que sa rédaction actuelle est déficiente. C'est
pourquoi nous propo-
sons au législateur de reformuler l'article 73, afin de ne plus
subordonner l'exercice du droit accordé par le second alinéa
à la commission d'une contravention du premier article, mais
plutôt au congédiement présumé illégal. De
plus l'office doit intervenir dans le processus, aux fins d'établir si
le salarié est devenu une personne handicapée au sens de
l'article 1m). Enfin, un droit d'appel de la décision rendue par le
commissaire du travail doit être stipulé expressément,
puisqu'il n'est pas inclus aux articles 14 à 19 du Code du travail.
A cet effet, l'AHPQ demande de modifier l'article 73 comme suit: "Une
entreprise de 50 salariés ou plus ne doit pas congédier un
salarié pour la seule raison qu'il devient une personne
handicapée. Un tel congédiement constitue une infraction à
la présente loi. "Lorsqu'un salarié, reconnu par l'office comme
étant une personne handicapée, croit avoir été
congédié pour le seul motif qu'il est devenu une personne
handicapée, il peut soumettre une plainte par écrit auprès
du commissaire du travail nommé en vertu du Code du travail comme s'il
s'agissait d'un congédiement pour activités syndicales; les
articles 14 à 19 du Code du travail s'appliquent alors, mutatis
mutandis. "La décision du commissaire du travail peut être
portée en appel devant le Tribunal du travail constitué en vertu
du Code du travail; les articles 103a, 104b à 114 du Code du travail
s'appliquent alors, mutatis mutandis."
Nous sommes d'ailleurs heureux de constater, même si nous n'avons
pas fait de recommandations spécifiques, que le ministre désire
modifier l'article 74 de la loi quant à l'embauche de certaines
personnes handicapées.
Comme dernière recommandation, l'AHPQ n'a fait que retenir une
erreur qui s'est glissée à l'intérieur de l'article 98; il
s'agit de modifier le chiffre 65 pour le chiffre 66. Je vous remercie pour
votre attention. Les personnes représentant ici l'association sont
prêtes à répondre à toute question.
Le Président (M. Marcoux): M. le ministre.
M. Lazure: M. le Président, je remercie et félicite
l'Association des hôpitaux du Québec pour le travail bien
consciencieux, bien détaillé et éclairant qu'elle nous
présente ce matin. Je passe très rapidement sur les propositions
que vous nous présentez et auxquelles l'allocution d'ouverture a
répondu en bonne partie. Je vais m'arrêter plus longuement sur des
suggestions peut-être plus nouvelles et que je n'avais pas
abordées au cours de l'allocution de la semaine passée.
En ce qui concerne les modes d'identification, que ce soit pour
l'habitation ou pour d'autres fins. Le principe général de rendre
ces cartes facultatives est bien établi et nous allons réviser
chacun des articles où il y aurait une pertinence.
Quant au siège social, vous vous rappellerez peut-être que
le premier ministre avait, au moment où le projet de loi était
à l'impression, exprimé le souhait que le futur Office des
personnes handicapées soit situé en dehors de Montréal ou
en de- hors de Québec. C'est l'orientation que nous avons
conservée. Le site n'est pas encore choisi; il y a cinq ou six
possibilités à l'étude, avec une série de
critères, et il serait prématuré d'en parler d'une
façon plus précise. Quant à la décentralisation de
l'office qui, de toute façon, sera une structure légère
je le répète encore une fois nous envisageons
l'embauche de 15 à 20 personnes, quitte à réviser cela au
bout d'un an et demi ou deux ans. Les structures décentralisées
émanant de cet office ne seront pas nécessairement des
employés de l'office. Nous allons, partout où c'est possible,
utiliser du personnel qui existe déjà dans le réseau des
affaires sociales ou même dans le réseau d'un autre
ministère.
Votre proposition de faire disparaître les représentants
des ministères au conseil d'administration de l'office me laisse un peu
perplexe. Je comprends votre argumentation de conflits d'intérêts
possibles. D'autre part, un des rôles importants que peuvent jouer ces
représentants de divers ministères, c'est
précisément d'améliorer la coordination entre cette
dizaine de ministères qui peuvent avoir une vocation partielle
auprès des personnes handicapées. Nous jugeons, au contraire,
qu'il est essentiel que les ministères soient représentés.
Notre objectif n'est pas d'avoir ces dix ministères
représentés par un délégué, mais, par un
mode de rotation, de voir les dix ministères se réunir et
désigner quatre représentants pour le moment pour
l'ensemble de ces ministères.
Votre suggestion de définir "organisme", nous la retenons, c'est
très pertinent. Aussi, pour la formation des comités
consultatifs, je ne pense pas qu'il soit nécessaire que l'approbation du
ministre intervienne chaque fois. On est sur la même longueur d'onde
quant à cela.
Votre suggestion afin qu'on indique que les comités doivent
fonctionner à l'intérieur du budget me fait sourire un petit peu,
venant de l'Association des hôpitaux du Québec où une telle
directive existe depuis bien longtemps, mais, malheureusement, n'est pas suivie
dans un bon nombre de cas. Je reconnais les efforts que les hôpitaux font
en ce moment.
Ateliers protégés. Je pense avoir indiqué, la
semaine dernière, également, que nous voulons introduire le
concept de comités d'admission, de critères d'admission.
Quant à la durée du contrat d'intégration de 6
mois, nous allons aussi rendre cette clause plus souple. Nous allons enlever
toute limite dans le nombre de fois où le contrat peut être
renouvelé.
Finalement, M. le Président, parmi vos dernières
recommandations, l'article 69 concernant les conditions de
rémunération, nous pensons qu'il est prudent de garder la clause
à peu près comme elle est rédigée. Si on suivait
votre recommandation, cela pourrait vouloir dire, qu'en principe, un contrat
d'intégration au travail pourrait comporter des
rémunérations inférieures au salaire minimum. Si tel
était le cas, cela irait à rencontre de l'esprit de la loi.
L'esprit véhiculé par ce projet de loi veut
précisément que les personnes handicapées qui
seront engagées sur le marché régulier du travail,
compte tenu de l'adaptation des postes de travail qui pourront être faits
dans les entreprises et même avec subventions, nous pensons, de
façon très ferme, que les personnes handicapées doivent
jouir de toutes les dispositions de la Loi du salaire minimum et des autres
lois en vigueur sur le marché régulier du travail.
Je souligne, encore une fois, qu'il s'agit bien de postes
adaptés. A partir du moment où un poste, dans une usine ou dans
une entreprise, est adapté au handicap de la personne handicapée,
il n'y a pas de raison de présumer que son rendement pourrait être
inférieur au rendement moyen.
Finalement, quant à l'article 73, nous prenons bonne note de
votre recommandation. Je ne suis pas prêt à la rejeter ni à
l'accepter. C'est tout, M. le Président.
Le Président (M. Marcoux): Avez-vous des questions ou des
commentaires suite aux propos du ministre?
M. Robitaille: M. le Président, j'aimerais peut-être
revenir sur l'article 13 à propos des inquiétudes du Dr Lazure.
Je me demande dans quelle mesure il n'y aurait pas lieu d'envisager d'autres
genres de formules que de nommer officiellement des gens des autres
ministères. Il peut y avoir, par exemple, un comité permanent
composé de représentants d'autres ministères pour assurer
la coordination dont le ministre faisait état. Ce n'est peut-être
pas la seule façon.
Il y a peut-être aussi un autre élément dans notre
recommandation concernant l'article 13. Lors de la nomination des membres par
le lieutenant-gouverneur en conseil, il y aurait peut-être lieu
d'envisager une bonne représentation qui, à mes yeux, n'exclurait
pas nécessairement les centres de réadaptation comme on l'a
prévu dans la loi no 10.
M. Lazure: M. le Président, la suggestion de former une
espèce de comité parallèle de fonctionnaires qui
pourraient s'assurer la coordination est intéressante, mais encore une
fois, peut-être que les craintes de l'AHPQ peuvent être
atténuées si les gens gardent à l'esprit la
probabilité que nous avons exprimée, il y a quelques jours, soit
d'augmenter de onze à quinze le nombre total des personnes au conseil
d'administration de l'office. Cette augmentation serait en faveur des personnes
handicapées ou des gens représentant des handicapés et non
pas en faveur des fonctionnaires.
Mme Gosselin: Si vous me le permettez M. le Président,
pour répondre à la question portant sur l'article 69, les
commentaires que nous avons formulés ont été faits dans
l'optique où la personne handicapée était une personne
acceptée par l'office. Elle avait quand même un handicap majeur.
Toute personne handicapée n'est pas pour autant inscrite auprès
de l'office. C'est pourquoi nous disions qu'elle devrait
bénéficier de certaines conditions de travail compte tenu de la
gravité ou de son état particulier. Comme l'office est toujours
partie au contrat d'intégration professionnelle, il pouvait justement
voir à ce que la personne reçoive, compte tenu de son
état, la meilleure rémunération et les meilleurs
conditions d'engagement.
M. Lazure: Je comprends l'esprit dans lequel cela était
proposé. Par ailleurs, les personnes handicapées de façon
majeure dont vous parlez, il est probable que l'on retrouverait ces personnes
plutôt dans ce qu'on appelle des ateliers protégés, ou
qu'on pourrait peut-être appeler bientôt des centres de travail
adaptés. Mais, enfin, on note l'esprit positif dans lequel
c'était présenté.
Le Président (M. Marcoux): Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je veux remercier
l'Association des hôpitaux de la province de Québec de son
mémoire. Ce qui m'a surtout frappé, je pense, c'est qu'elle tente
que l'autonomie de chacune des instances concernées soit
respectée et cela, c'est une préoccupation que, je pense, le
ministre je ne sais pas s'il l'avait semble développer;
j'espère qu'il va être persistant jusqu'à la fin, et on la
retrouve dans les articles 29 et 42. A l'article 29, vous tentez de limiter les
pouvoirs d'intervention du ministre quant à la formation des
comités et quant à ses pouvoirs de directives, etc. A l'article
42, vous essayez de soustraire d'une trop grande subordination les ateliers,
les endroits de travail ou les différents organismes du contrôle
de l'office; c'est ce que je voulais dire.
Par contre, je m'étonne un peu compte tenu de cet esprit
que je retrouve à quelques articles que vous ayez
suggéré, à l'article 12, qu'en dehors de l'office soient
créés aussi d'autres bureaux régionaux. Ceci
m'apparaît comme peut-être un dédoublement de services et on
peut établir la tentation, pour ces offices, de se substituer, dans le
fond, aux organismes régionaux ou aux ressources locales.
Là-dessus, je suis d'accord avec le ministre quand il dit et
j'espère qu'il va persister dans cette idée s'il y a des
personnes localement ou régionalement qui doivent représenter
l'office, qu'elles soient même puisées à l'intérieur
des ressources existantes. Je voudrais essayer de comprendre pourquoi vous avez
mis cette recommandation, votre justification.
Mme Gosselin: Dans un premier temps, si vous me le permettez, je
voudrais souligner que, lorsque nous faisons des commentaires et
recommandations à l'article 29, nous ne contestons d'aucune façon
le pouvoir de faire des directives; c'est un pouvoir qui existe. Ce que nous
avons demandé surtout, c'est une possibilité pour les personnes
impliquées de se faire entendre. L'autonomie de gestion, il est bien
entendu que nous la défendons depuis fort longtemps, pour nous et, nous
l'espérons aussi, pour les autres.
Le motif de cette décentralisation que nous demandons plus
particulièrement à l'article 12, c'est pour fins
d'accessibilité des personnes han-
dicapées auprès de l'office. S'il n'y avait qu'un
siège social, cela pourrait être très loin, ou difficile
pour une personne handicapée de bénéficier des services
offerts par l'office. S'il y a des points s'il y a la
décentralisation où la personne handicapée peut se
rendre, nous sommes assurés que la loi pourra donner vraiment tous les
avantages qu'on attend.
Mme Lavoie-Roux: Croyez-vous, par exemple, que la suggestion du
ministre de nommer localement ou régionalement des personnes à
l'intérieur des organismes existants pourrait répondre à
votre inquiétude?
Mme Gosselin: Notre appréhension serait sûrement
mise de côté, parce que ce que nous voulons défendre par
notre recommandation, c'est l'accessibilité de la personne
handicapée auprès de l'office afin de bénéficier de
la loi.
Mme Lavoie-Roux: Ma deuxième question touche l'article 69.
J'aimerais que vous explicitiez un petit peu davantage votre position relative
à la Loi sur le salaire minimum. Il arrive que j'ai une
appréhension absolument contraire à la vôtre, compte tenu
de la rédaction de l'article 69. Je ne suis pas du tout convaincue que,
tel qu'il est rédigé, on ne soustrait pas les entreprises ou les
ateliers à l'obligation de payer le salaire minimum aux personnes
handicapées. En tout cas, l'Opposition officielle va l'examiner de
près. Mais vous, vous sernblez aller dans une direction même
contraire. J'aimerais connaître votre justification là-dessus.
Mme Gosselin: L'association s'était déjà
prononcée dans son mémoire lors de la présentation du
projet de loi 55. Effectivement, il n'y a pas ici, dans le présent
projet de loi, de définition de la personne handicapée. Nous ne
pouvons nous opposer à cela, étant donné que l'an
passé nous étions les premiers à crier haro sur la
définition qu'on y avait donnée. Toutefois, il est bien dit que
l'intégration professionnelle, le plan d'intégration
professionnelle n'est offert qu'à une certaine catégorie de
personnes handicapées. Une personne handicapée peut facilement
aller sur le marché du travail, avoir au-delà du salaire minimum
et n'avoir pas besoin de l'intervention de l'office.
Lorsque l'office intervient, c'est dans un premier temps parce qu'on a
dit qu'on la considérait comme une personne handicapée au sens de
la reconnaître pour fins de lui donner des services particuliers. Selon
nous, l'intégration professionnelle faisait que cette personne ne
pouvait donner un rendement semblable aux autres personnes. Je comprends que le
ministre Lazure partage une opinion contraire et j'en suis fort heureuse.
Malheureusement, n'ayant pas les projets de règlements, on peut
difficilement décider justement quelles catégories de personnes
handicapées pourront bénéficier de ce contrat
d'intégration professionnelle.
Nous disons: Si cela couvre quand même beaucoup de personnes,
même celles qui ont de forts handicaps, c'est peut-être l'office et
sa présence à l'intérieur du contrat professionnel qui
pourra aider ces personnes. Ces personnes pourraient justement avoir toutes les
possibilités d'intégration sur le marché du travail
même si elles ont un gros handicap. Pour elles, ce n'est peut-être
pas nécessaire de recevoir le salaire minimum. Ce qui est
nécessaire, c'est de s'intégrer à la société
via le travail. Il faudrait que le salaire, que la rémunération
qui a sa raison d'être soit donnée compte tenu de leur
capacité de travailler.
Mme Lavoie-Roux: Je veux bien comprendre. Vous dites que
l'intégration au travail est une condition de la réalisation de
la personne handicapée. Vous admettez cela au point de départ.
Mais une fois qu'elle est sur le marché du travail ou
intégrée selon un programme qui aura été
déterminé pour elle, et avec elle, j'espère, vous ne
semblez pas croire que son employeur devrait lui payer le salaire minimum, mais
que s'il y avait une différence entre le salaire qui lui est payé
et le salaire minimum prenons le cas de personnes handicapées
plus sérieusement la différence devrait être
comblée, selon vous, par l'office ou le gouvernement. C'est cela que
vous voulez dire?
Mme Gosselin: Non, madame. La personne qui est
intégrée au marché du travail, dont l'intégration a
été parfaite n'a plus à bénéficier du plan
d'intégration. Elle a le salaire minimum, tout au moins, comme toute
autre personne. L'exclusion que nous faisons, c'est lorsqu'une personne a
besoin d'un plan de reclassement professionnel. C'est une phase pour fins
d'intégration. Mais dès qu'elle est intégrée, elle
n'est plus sujette à l'application de l'article 68.
Mme Lavoie-Roux: Merci, madame; merci, monsieur.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Pointe-Claire.
M. Shaw: Merci, M. le Président. Je voudrais remercier
l'Association des hôpitaux de la province de Québec. J'ai quelques
questions au sujet des handicapés qui sont de votre
responsabilité, les handicapés mentaux. On ne parle pas beaucoup
de ces gens dans votre mémoire. On ne voit pas ce que vous
prévoyez pour avantager les handicapés mentaux dans votre
programme de suggestions sur le projet de loi no 9. Premièrement, pour
l'hébergement des handicapés mentaux, est-ce que vous avez des
recommandations, parce qu'une partie des droits des handicapés mentaux
est l'hébergement lui-même? Est-ce que vous êtes satisfaits
de la situation actuelle?
Nous avons vécu une situation dans l'est de Montréal avec
un incendie, la situation des conditions d'hébergement dans les
hôpitaux. Est-ce que vous avez des remarques sur le sujet?
Mme Gosselin: Nous voudrions porter à votre attention, si
vous me le permettez, que l'associa-
tion, présentement, est en train de réévaluer la
Loi sur les services de santé et les services sociaux et a. promis au
ministre Lazure de lui faire parvenir un document au plus tard en mars 1978. Le
problème des malades mentaux est un souci continuel pour nous, en ce
sens que nous désirons justement en tenir compte. Nous avons
déjà produit un document de travail au ministre des Affaires
sociales cet été, portant sur la Loi de la protection du malade
mental. Nous allons sûrement tenir compte de ces personnes à
l'intérieur de nos centres hospitaliers, lorsque nous allons faire la
réévaluation de la Loi sur les services de santé et les
services sociaux qui est notre loi-cadre. Lorsque nous avons
étudié le projet de loi no 9, nous l'avons fait compte tenu de
tous les centres hospitaliers que nous représentions.
M. Page (Louis-de-G.): Non, mais je crois que la Loi assurant
l'exercice des droits des personnes handicapées inclut autant le
handicapé physique que le handicapé mental. La loi ne
prévoit pas l'hébergement des handicapés mentaux, mais
plutôt leur intégration sociale et professionnelle. C'est
peut-être pour cela que l'AHPQ ne s'est pas penchée sur
l'hébergement des malades mentaux, simplement.
M. Shaw: Mais est-ce que vous avez beaucoup d'ateliers
protégés pour les handicapés mentaux dans vos
hôpitaux?
Mme Gosselin: Nous ne croyons pas que les services pouvant
être assimilés à des ateliers protégés soient
vraiment des ateliers protégés, au sens du projet de loi ici. Ce
sont vraiment des services à l'intérieur d'un centre hospitalier
ou d'un centre de réadaptation fonctionnel qui ne serait pas, selon
nous, un atelier protégé, parce que cela ne répond pas
à la définition qu'on en donne ici.
M. Lazure: En réponse à la question du
député de Pointe-Claire, il existe un certain nombre d'ataliers
protégés, même au sens du projet de loi ici, dans certains
hôpitaux où ils ont été développés par
voie de suppléance, si vous voulez. Ce n'est pas la solution
idéale, loin de là. On espère que graduellement ces
ateliers protégés, qui sont dans certains hôpitaux
psychiatriques, pourront être développés plus à
l'extérieur des hôpitaux que dans les hôpitaux. A cause d'un
phénomène historique, ils se sont développés par
suppléance, parce que c'était plus rapide, plus facile, par les
voies budgétaires, de créer ces services à
l'intérieur de l'hôpital. Mais, en tout, il y a environ 45
ateliers protégés au Québec. Je dirais que les trois
quarts contiennent un certain nombre de handicapés mentaux, sur ces 45.
Sur les 45, il y en a peut-être une demi-douzaine qui sont dans des
hôpitaux.
M. Shaw: Parfois, on dit de ceux qui sont des malades mentaux au
Québec et dans n'importe quel pays qu'ils sont des humains perdus.
Beaucoup de recommandations sur le projet de loi et même les
représentations des témoins que nous avons entendus, vont vers
ceux qui ont des handicaps physiques. Il me paraît qu'on n'a pas
donné assez de temps pour étudier les besoins des
handicapés mentaux. La situation au Québec et même au
Canada, dans ce domaine, est grave, spécifiquement dans le domaine de la
réinsertion sociale ou de la motivation personnelle pour leur donner un
but dans la vie. On ne voit aucune remarque sur cela dans vos recommandations
et cela m'a surpris un peu que vous ne soyez pas conscients d'une demande qui
vient de votre association.
M. Robitaille: M. le Président, j'aimerais peut-être
revenir sur les propos du Dr Lazure, ce qui va compléter peut-être
l'autre question. Est-ce que dans l'esprit du ministre les ateliers
protégés, qui sont actuellement sous la responsabilité des
centres hospitaliers, seraient ou seront éventuellement
détachés de cette responsabilité pour devenir
autonomes?
M. Lazure: C'est l'objectif.
M. Robitaille: Pour nous, pour répondre à la
question du député maintenant, les ateliers, nous les avions
considérés comme étant des ressources appartenant aux
hôpitaux. C'est peut-être une des raisons pour lesquelles nous
n'avons pas incorporé au projet de loi des choses particulières
pour les handicapés mentaux.
M. Shaw: J'ai une dernière question, M. le
Président, sur l'article 27.
Pouvez-vous me donner plus de renseignements m'indiquant pourquoi vous
voulez faire changer le ton de l'article 27?
Mme Gosselin: Dans le respect des lois, tout simplement.
M. Shaw: Est-ce que cela implique les lois
fédérales?
Mme Gosselin: Ne restons qu'au provincial, M. le
député. Lorsqu'on dit "nonobstant toute autre loi", cela veut
dire qu'on ne tient pas compte des restrictions dans les autres lois si elles
sont inconciliables avec celle-ci.
Chaque loi a son importance et l'association croit que chacune doit
être respectée. Pour ne citer qu'un exemple qui est
peut-être bien hypothétique, à l'heure actuelle, si les
centres hospitaliers sont considérés comme des organismes du
gouvernement, jusqu'à quel point l'office peut-il obtenir des
renseignements dans nos centres hospitaliers, indépendamment des
dispositions de notre article 7 de la Loi sur les services de santé et
services sociaux ou autres dispositions à l'intérieur de cette
loi? Nous nous disons que si l'article 7, dans la Loi sur les services de
santé et services sociaux, existe, c'est qu'il a sa raison d'exister et
il mérite d'être respecté. Nous demandons tout simplement
de retourner à l'ancien projet de loi qui dit: "Nonobstant toute
disposition inconciliable d'une autre loi".
M. Shaw: Oui, est-ce prévu de faire changer cet...
M. Lazure: Oui.
M. Shaw:... dans le même sens?
M. Lazure: M. le Président, c'est prévu, oui.
L'article 27 va être révisé, très certainement. On
va réviser ces articles pour se conformer, justement, à l'esprit
du chapitre 48.
M. Shaw: Merci, c'est tout, M. le Président.
Le Président (M. Marcoux): Je remercie les
représentants de l'Association des hôpitaux de la province de
Québec pour la présentation de leur mémoire.
J'inviterais maintenant l'Association des centres d'accueil du
Québec à venir nous présenter son mémoire. M.
Pierre Cloutier, voulez-vous présenter vos collègues, puis votre
mémoire.
Association des centres d'accueil du
Québec
M. Cloutier (Pierre): A ma droite, Mme Michèle Bouchard,
directeur des affaires professionnelles à l'Association des centres
d'accueil et, à ma gauche, M. Rhéal Dumont, directeur des
services professionnels du Centre d'accueil Villa Du-fresne dans la
région de l'Estrie, ce centre d'accueil décentralisé; on
parlera de ce mot-là plus tard.
Le Président (M. Marcoux): Oui, pour préciser.
M. Cloutier: Tout d'abord, je dois vous dire que l'Association
des centres d'accueil regroupe 330 établissements. Environ 20 000
travailleurs se préoccupent du bien-être des usagers qui nous sont
confiés, usagers qui sont au nombre d'à peu près 32
000.
Cela étant dit, il y a plus spécifiquement 42 centres
d'accueil directement concernés par le projet de loi, dont c'est l'objet
de notre rencontre aujourd'hui. Dans ces 42 centres d'accueil, 5000 usagers
sont desservis; un quart environ sont des handicapés physiques et les
trois quarts sont des handicapés mentaux. C'est donc vous dire qu'au
plus haut point, ce projet de loi intéresse l'Association des centres
d'accueil.
Toutefois, je dois vous dire qu'entre le dépôt de notre
mémoire et aujourd'hui, il s'est passé un certain nombre
d'événements qui font que la discussion qu'on vous aurait tenue,
sans avoir entendu et lu le texte de M. Lazure, lors de l'ouverture de la
présente commission, aurait été fort différente. On
va essayer de tenir compte des énoncés du ministre, tout en
souhaitant qu'ils se traduiront dans une deuxième lecture. On va surtout
s'attarder à certains points qu'il nous reste encore à
éclaircir, à partir de sa présentation lors de l'ouverture
de la commission.
Je voudrais d'abord dire qu'on souscrit entièrement au fait que
les droits des handicapés, comme ils étaient décrits dans
le projet de loi au départ, nous apparaissent beaucoup mieux
traités maintenant par le fait qu'ils seront intégrés
à l'ensemble des loi qui existent au Québec. Je voudrais que ces
droits soient exactement ceux des personnes ordinaires, comme tout le monde, et
à peu près rien de particulier nous apparaissait
nécessaire dans un projet de loi assurant la protection des personnes
handicapées.
Je vais passer alors immédiatement à l'office. On aimerait
souscrire aussi au fait qu'on est entièrement d'accord sur le point que
les handicapés eux-mêmes devraient être
représentés davantage.
Toutefois, on s'interroge sur deux points, particulièrement sur
la rotation des ministères dont faisait état M. Lazure. Alors
deux hypothèses nous viennent à l'esprit sans trop de recherche.
Est-ce qu'ils seront représentés selon les dossiers qui
existeront à l'office ou si, par délégation, l'ensemble
des ministères aura trois ou quatre représentants? Un certain
nombre de ministères seront donc éliminés. Ce qu'on peut
vous dire, c'est qu'il nous apparaît essentiel qu'une coordination
interministérielle existe et nos établissements sont
à même de savoir qu'il y a là une lacune majeure
qu'elle prenne la forme de comités ou autrement. Je redis ce que je
viens d'entendre ce matin, il nous apparaît essentiel que le
législateur s'attarde sur le point de cette relation
ministérielle, pour des services mieux coordonnés. Dans ce sens
on dit: L'office a un rôle majeur.
La composition régionale, et je fais allusion au texte de M.
Lazure lors de l'ouverture de la commission, nous pose un certain nombre
d'interrogations aussi. Je résume deux interrogations. La rotation des
ministères. Notre mémoire faisait état qu'une meilleure
représentation devait être faite, c'est-à-dire d'autres
ministères ajoutés pour la coordination. Le deuxième
aspect, la représentation régionale au conseil d'administration
de l'office, cela ne nous est pas clair du tout. Sur ce point peut-être
que M. le ministre pourrait nous répondre tantôt, afin qu'on
puisse vous préciser un peu notre point de vue dans ce cadre.
Quant aux fonctions de l'office, entre le dépôt du projet
de loi et aujourd'hui, encore là je pense que des modifications majeures
qu'on souhaitait sont apparues, soit les rôles d'information, de
promotion, de coordination et de conception de nouveaux services. On s'attarde
principalement au dernier point, conception de nouveaux services. On vous
souligne nos intérêts pour certains aspects qui sont
peut-être manquants en ce moment dans nos données, soit les
notions de transport, foyers de groupes, d'aides personnelles, d'aides à
domicile. Notre mémoire fait état de ces services sur lesquels il
faudrait réfléchir. Dans les fonctions de l'office, la conception
de nouveaux services pourrait s'attarder aussi à ces points.
On veut insister sur un point qui nous implique davantage, la
décentralisation des services de l'office. On est d'accord que l'office
ne doit pas avoir de services directs avec les handicapés, mais
passer par une structure décentralisée. On le dit dans
notre mémoire, on prend le terme points de services de l'office. A ce
chapitre, on vous dit que les services sociaux, entre autres sont dans les
différentes régions du Québec et les 40 centres d'accueil
sont tous répartis dans l'ensemble des régions du Québec
aussi. On a des points de services partout, on devrait utiliser ces ressources
déjà existantes. Il y a là une connaissance des besoins
des handicapés et une méthode de travail, je pense, qui a
donné certains services jusqu'à maintenant et qu'on souhaite voir
utiliser grandement. Les centres d'accueil, en ce sens, vous sont
entièrement disponibles, avec leur équipe multidisci-plinaire
pour, entre autres, faire l'évaluation, les plans de traitements,
etc.
Ancien rôle de l'office. On est tout à fait d'accord avec
votre approche en disant: Ces points de services pourraient être
assurés par nos établissements. Quant à l'identification,
on passe rapidement en disant qu'on est fort heureux d'apprendre qu'il n'y aura
pas la carte d'identité officielle et que le bottin, parce qu'on en
avait parlé lors de la loi 55, des handicapés au Québec
n'existera pas.
On vous souligne, et on y reviendra un petit peu plus loin, que le
projet de loi 9 et le livre blanc ne constituent quand même pas une
politique globale de services aux handicapés au Québec. A ce
titre, un des premiers rôles de l'office devrait être cette
préoccupation: une étude systématique des besoins, des
ressources, faire une adéquation dans tout cela et enligner pour les
prochaines années une politique globale. C'est vraiment, je pense, la
trame de fond de notre mémoire et on insiste beaucoup sur ce point.
La confidentialité des dossiers. On croit la loi 48 suffisamment
équipée à ce point de vue pour continuer les règles
du jeu qu'on connaît.
Quant aux ateliers, on souscrit et je fais encore
référence au texte de M. Lazure lors de l'ouverture de la
commission au fait que les ateliers ne devraient pas embaucher seulement
des handicapés venant et inscrits à l'office. C'est un peu
discriminatoire vis-à-vis des handicapés d'être
obligés de s'inscrire et, en ce sens, on pense à la suggestion
qui est faite à l'intérieur de notre mémoire, à
savoir les comités d'admission dont fait aussi état M. Lazure,
particulièrement les comités d'admission régionaux. On a
vécu le problème de l'installation de la Loi 48 sur les
admissions. On est en train d'installer dans notre réseau des
comités d'admission régionaux et on pense que cette application
pourrait être déjà prévue à la loi 9, ce qui
ferait que la complémentarité des services serait à peu
près acquise dès le départ.
Sur ce point, dans notre mémoire, on vous décrit une
possibilité de comités d'admission régionaux. A titre
indicatif: un représentant par atelier protégé, un
représentant des centres d'accueil, un représentant des services
sociaux, au besoin un représentant de l'office, etc. Par
conséquent, on dit que les ateliers protégés
subventionnés devraient obligatoirement recevoir les handicapés
référés par les comités d'admission
régionaux et non plus par l'office.
L'intégration sociale et professionnelle. Dans la mesure
où l'office joue un rôle de plaque tournante, joue le rôle
de s'assurer de l'orientation et d'un plan de travail pour les
handicapés, considérant aussi que ce plan de travail sera
élaboré par les ressources du réseau des affaires
sociales, globalement... Je reprends. Dans la mesure où l'office assure
qu'il y ait un plan de traitement, le réseau des affaires sociales,
encore là, peut élaborer toutes les modalités de ce plan
de traitement et prescrire, entre autres, les modalités d'application,
avoir un dossier complet permettant la préparation d'un programme de
travail du handicapé. Dans ce sens, le réseau des affaires
sociales vous est encore disponible.
A l'article 68, sur les contrats d'intégration, on souscrit
à ce qui vient d'être dit par l'Association des hôpitaux du
Québec et à la réponse de M. Lazure, en disant que la
notion des six mois nous apparaît un peu embêtante, d'autant plus
qu'on s'interrogeait à savoir si ces six mois étaient
renouvelables dans la même entreprise ou dans d'autres entreprises. Je
pense qu'il faut élargir ce cadre et permettre à l'office une
assez grande liberté d'action par un règlement interne qui
pourrait être établi en fonction de ces contrats
d'intégration professionnelle.
Quant à l'emploi de la personne handicapée, à la
page 31 de notre mémoire, on dit que la notion de 50 employés ou
plus ne nous apparaît pas une dimension nécessaire. Je pense qu'il
faut traiter les handicapés de façon normalisante. La question de
fond à se poser, c'est: Est-ce que la personne est capable de remplir
l'emploi ou pas? Dans ces conditions, les règles du jeu des autres lois
qui existent déjà au Québec doivent s'appliquer: le Code
du travail, la Loi du salaire minimum, etc. Il nous apparaît important,
par contre, de dire que parce qu'une personne devient handicapée, le
fait qu'elle puisse être congédiée à cause du
handicap ne tient pas. L'important, c'est le rendement au travail et sa
performance dans ce cadre.
Toutefois, une réserve très importante, c'est l'obligation
des employeurs de prendre un certain nombre de handicapés. Même
dans l'allocution de M. Lazure, lors de l'ouverture, on disait que ce serait le
dernier moyen employé. Là-dessus, l'Association des centres
d'accueil, pour avoir aussi regardé les expériences vécues
dans d'autres pays, refuse cette hypothèse en disant que ce n'est pas
par des moyens coercitifs qu'il faut développer cela, mais plutôt
par des moyens incitatifs.
En relisant nos notes, je pense qu'on doute un peu de notre imagination,
celle de l'entreprise privée, dans ce cadre, et aussi celle de
l'entreprise publique et péripublique. On pourrait s'attarder longuement
sur les moyens incitatifs. L'office des handicapés pourrait, entre
autres, s'attarder sur des points semblables.
On termine en vous disant que ce n'est pas une politique globale. Cela
demeure une nécessité. Cela devrait être, entre autres, la
première tâche de l'office, soit penser à une politique
globale. Là-dessus, je vous dis que dans le secteur des centres
d'accueil, on a vécu une commission d'enquête qui s'appelait la
commission Batshaw.
Je crois qu'elle nous a permis, en 1975, de faire le point dans ce sens.
Un travail similaire nous permettrait d'évoluer grandement dans le
secteur des handicapés. Merci. Nous sommes à votre entière
disposition.
Le Président (M. Marcoux): M. le ministre.
M. Lazure: M. le Président, je félicite
chaleureusement l'Association des centres d'accueil du Québec. Je veux
remercier ses représentants aussi. Comme d'habitude l'ACAQ a pris
très au sérieux ce rôle de consultant. Plusieurs des
suggestions contenues dans son mémoire ont déjà
été retenues. Plusieurs autres qui nous apparaissent de plus en
plus pertinentes seront retenues également.
J'ai trois ou quatre commentaires, M. le Président.
Premièrement, la présence des fonctionnaires, des
représentants de divers ministères à l'office. Dans notre
esprit, ces personnes feraient la rotation selon les termes du mandat,
admettons que ce soit deux ans, et non pas changer de représentants de
tel ou tel ministère à chaque réunion. Cela ne se ferait
pas selon l'ordre du jour de la réunion. Toujours dans
l'hypothèse de quatre représentants pour huit ministères,
les quatre représentants feraient leur terme de deux ans. Cependant,
comme tous les autres membres du conseil d'administration de l'office, ils ne
seraient pas là pour représenter seulement leur ministère.
Ces quatre personnes auraient comme rôle, peut-être
privilégié, d'assurer la coordination de tous les
ministères concernés et non pas seulement des quatre qui seraient
représentés au conseil d'administration.
Concernant la représentation régionale, je voudrais
expliquer davantage les commentaires que j'ai faits tantôt aux
représentants des hôpitaux. Nous envisageons le fait, par un
pouvoir de délégation de l'office, que du personnel du
réseau des Affaires sociales, autant que d'autres réseaux, ainsi
que leurs services, même j'inclurais des organismes
bénévoles, puissent être considérés comme des
délégués de l'officeévidemment, cela inclut
les établissementspour des tâches aussi précises que
l'élaboration des plans de services, mais pas exclusivement pour cela.
En d'autres termes, notre orientation actuelle, qu'on va essayer de traduire
dans les amendements, n'est pas de créer des succursales de l'office un
peu partout dans le territoire, mais que l'office reconnaisse, comme
étant des délégués de l'office, une multitude de
points de service qui peuvent appartenir soit à des centres
hospitaliers, à des centres d'accueil ou à des CLSC, peu importe,
à l'ensemble du réseau.
J'apprécie beaucoup l'offre que fait l'Association des centres
d'accueil de jouer un rôle actif dans ce domaine. Les centres d'accueil
ont une expérience pertinente. Vous en avez fait état en regard
des comités en particulier. Nous allons retenir la suggestion de
comités régionaux d'admission. Je ne pense pas qu'il faille
être absolu là-dessus et dire qu'on aurait seulement des centres
régionaux. Il y a certaines régions où il faudrait avoir
aussi des centres locaux. Notre préférence irait aussi vers les
centres régionaux d'admission.
Quant à la question des 50 employés ou plus, cela aussi,
on le remet en question de plus en plus. On va essayer de trouver une formule
où le chiffre magique de 50 disparaîtrait. Remarquez qu'on est
toujours un peu porté à tomber dans le panneau des autres lois.
La plupart des autres lois ont un chiffre magique qui, habituellement, se situe
plus bas cependant: 16, 20 et 30 sont des chiffres qui reviennent dans les lois
européennes. Entre parenthèses je l'ai dit l'autre jour,
mais je le répète l'argumentation qui dit qu'introduire
une clause obligatoire pour les entreprises ne serait pas normalisant est
discutable. Si on prend pour acquis que, chaque fois que le législateur
impose une obligation de faire telle chose, cela devient anormalisant, cela
peut nous mener très loin. Je pense qu'il y a des arguments fort
positifs ou fort impressionnants qu'on pourrait développer pour la
clause que vous appelez coercitive. A tout événement, je
répète qu'à ce stade-ci je suis prêt à ce
qu'on la laisse tomber entièrement, quitte à faire
l'expérience, pendant quelques années, des clauses strictement
incitatives et à faire le bilan dans une couple d'années.
Finalement, quant à l'étude systématique dont vous
parlez, c'est précisément, dans notre esprit, un des premiers
mandats de l'office de faire ce bilan en deux colonnes des besoins par rapport
aux services existants. C'est un plan de développement beaucoup plus
qu'une politique globale. Je pense qu'une politique globale, on n'aura jamais
fini de la définir et de l'énoncer. Il y a une amorce de
politique globale dans le livre blanc. Le projet de loi complétera, dans
une certaine mesure et ajoutera au livre blanc. Une politique globale, c'est un
travail de tous les jours, pour ainsi dire, et qui est constamment à
renouveler. Mais, de façon plus concrète, le mandat qu'on donnera
à l'office, ce sera de mettre en marche un plan de développement.
Merci.
Le Président (M. Marcoux): Avez-vous des commentaires
à ajouter aux propos du ministre?
M. Cloutier: Trois petits commentaires, s'il vous plaît!
Tout d'abord, sur la représentation des ministères au conseil
d'administration de l'office, qu'on utilise une modalité ou de l'autre,
encore là, quatre délégués, par exemple, de huit
ministères, l'important, c'est de bien s'assurer qu'il n'y a pas de
morceaux échappés en cours de route, parce qu'un ministère
n'est par représenté pendant une période de deux ans.
Là-dessus, nous tenons à insister beaucoup pour que vous trouviez
des modalités précises pour les ministères non
représentés au conseil d'administration, afin que cela ne
provoque pas un désintéressement, par exemple, du
ministère des Transports qui ne sera pas là pendant deux ans et,
après cela, ce sera le ministère des Affaires sociales, etc. Il
faut qu'il y ait une continuité dans ce sens.
Quant aux moyens incitatifs, tant mieux; je pense que c'est en faisant
l'expérience pendant peut-être deux, trois ou cinq ans et,
ensuite, en
faisant un bilan qu'on pourra voir si l'hypothèse qu'on
émet est justifiée. Là, vous aurez la preuve, tout comme
nous, de la formule qu'il faut choisir pour ce qui est de l'emploi.
Quant à la politique globale, il est vrai que cela comporte un
élément dynamique, mais la chose que je veux signaler au
ministre, c'est qu'on est toujours surpris de tout ce qui existe au
Québec dans le domaine des handicapés. Je le sais
personnellement, pour y avoir travailler pendant un certain nombre
d'années; on n'a jamais pu constituer un bilan actualisé de ce
qu'on possède.
Alors, d'un côté, on pourrait connaître les besoins
et, cela, je pense que c'est un travail que l'office devra faire, mais,
actuellement, il y a très peu de personnes sinon aucune qui peuvent nous
dire: Au Québec, sur les handicapés, l'Etat dispose de tel
potentiel de services et de telles disponibilités. Il y a eu une
tentative d'enquête, à un moment donné, au ministère
des Affaires sociales sur les ateliers protégés. Ce rapport a
été remis un peu sur la tablette, parce qu'on s'est aperçu
que le bilan n'était pas complet, n'était pas satisfaisant. Je me
dis, dans ce sens, que la politique globale, tout en ayant un
élément dynamique, c'est vrai, devrait aussi comporter une
évaluation de ce qu'on possède comme potentiel. Cette action ne
m'apparaît pas, en tout cas, surgir dans la démarche qui s'en
vient. On insiste peut-être pour avoir un bilan, à un moment
donné, de notre portrait là-dessus. Merci.
Le Président (M. Boucher): Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Je veux
féliciter et remercier l'Association des centres d'accueil pour la
qualité de son mémoire. Une chose qui me frappe, c'est que vous
ajoutez plusieurs responsabilités à l'office. Vous parlez du
développement de maisons de groupes, etc. Dans votre esprit, quelle est
votre conception de l'office? Pour ma part, il me semble que l'office doit
avoir un rôle d'animateur, d'éducateur, de coor-donnateur; il est
le chien de garde des personnes handicapées, etc. Est-ce que vous ne
craignez pas que finalement le rôle de l'office devienne très
large? Il y a toujours ce danger de démobiliser les personnes
localement.
Vous y ajoutez, quand même, des responsabilités assez
précises qui, je comprends, sont des inquiétudes qu'on doit avoir
au sujet des personnes handicapées. Là-dessus, je suis tout
à fait d'accord. Mais j'aimerais voir quelle est pour vous votre
conception du rôle de l'office vraiment. Quel est vraiment le rôle
de l'office?
M. Cloutier: Je pense qu'on s'attarde sur les quatre points
principaux qu'on a cités tantôt, à savoir l'information, la
promotion, la coordination et la conception de nouveaux services. L'office fait
la conception dans ce sens.
Mme Lavoie-Roux: Dans le sens de conception.
M. Cloutier: Tout simplement. On ne croit pas que c'est à
lui d'actualiser; exemple: des foyers de groupes, du soutien à domicile.
C'est notre boulot. Je pense qu'il doit le donner à quelqu'un et cela
doit être exécuté par un réseau qui est
déjà existant. Mais, la conception, l'incitation, par exemple, au
ministère des Affaires sociales, elle sera enli-gnée de telle
façon plutôt que de telle autre; je pense que c'est de la
responsabilité de l'office. Et cela doit s'y limiter. Il est dit aussi,
dans notre mémoire, qu'ils ne doivent pas donner ni offrir des services.
Ce doit être fait par d'autres personnes. Leur rôle est dans cette
conception; c'en est un d'entraînement, d'animateur en fait. On vous dit:
II y a des dimensions d'échappées qui sont entre autres celles
qui nous concernent, foyers de groupes, soutien à domicile, etc.
Mme Lavoie-Roux: Conception. M. Cloutier: C'est cela.
Mme Lavoie-Roux: Un autre article où vous proposez un
amendement, c'est l'article 64, dans lequel vous suggérez de remplacer
le mot office par le mot établissement; si je ne m'abuse, c'est ce que
j'ai cru comprendre. A ce moment, dans votre esprit à vous, le plan
d'intégration doit être finalement conçu par
l'établissement et non pas par l'office. Est-ce que c'est dans ce sens
votre modification?
M. Cloutier: Exactement. On ne croit pas que l'office soit
habilité et possède l'expertise pour faire des plans de
réadaptation, par exemple. Dans ce sens, on vous dit: Les 42 centres
d'accueil dont je vous faisais état, eux ont le potentiel, ont les
équipes pour faire cela, ont les spécialistes, ont le "know how".
On dit que c'est le travail du réseau, entre autres. L'office doit
s'assurer que cela existe et qu'on puisse, sur Albert Untel inscrit à
l'office, sortir un dossier dans lequel ces instruments de travail, ce plan
existeront.
Mme Lavoie-Roux: Encore au sujet de l'article 64. J'aimerais
demander votre opinion, compte tenu de votre expérience. Dans la
formulation actuelle, aucune aide matérielle n'est accordée
à moins que le bénéficiaire ne prenne, aux conditions
prescrites par règlement, l'engagement écrit de collaborer
à l'exécution de plans de services, etc. Est-ce que, dans
l'expérience que vous avez vécue, ceci ne peut pas
présenter certaines difficultés pour certains types de personnes
handicapées, particulièrement celles qui éprouvent des
problèmes d'adaptation mentale ou psychologique plus profonds?
Pourrait-il arriver que soit l'office ou un organisme social qui en a la
responsabilité puisse abuser finalement de cette situation où il
est ordonné et prescrit que cette personne s'engage à collaborer
alors que très souvent, dans des cas particulièrement de
déséquilibre temporaire ou plus chronique au plan psychologique,
cela peut être très difficile pour la personne de le faire, cela
devient un point de résistance, etc.? Est-ce que vous avez pensé
à cela et quelle est votre expérience dans ce domaine?
M. Cloutier: Je vais demander à M. Durnont, c'est un
spécialiste de la question.
M. Dumont (Rhéal): En ce qui concerne, par exemple, le
plan de services d'une personne au niveau d'un atelier ou au niveau de
l'intégration professionnelle, si on veut quand même faire
participer à fond la personne dans la décision de ce plan de
services, il faut aussi lui donner la permission de décider si elle veut
l'avoir et la laisser faire le choix du plan de services.
Maintenant, ici on parle de personnes qui ont quand même le
potentiel intellectuel voulu pour prendre ce genre de décision. En ce
qui concerne les personnes qui, à un moment donné, seraient
limitées assez sévèrement au niveau du potentiel
intellectuel, je crois que le ministre l'a mentionné aussi, on pourrait
parler d'un représentant de cette personne ou d'un tuteur qui pourrait
permettre parce qu'ils sont quand même très familiers dans
leurs rapports quotidiens d'aider cette personne à faire un choix
judicieux. A ce moment, le rôle décisionnel serait pris en
collaboration par le bénéficiaire et son représentant ou
son tuteur.
Mme Lavoie-Roux: Je n'avais pas tellement à l'esprit les
personnes qui au plan intellectuel peuvent avoir certaines limitations. Je
pense qu'il y a des cas où c'est clair; elles sont toujours sous la
responsabilité d'un tuteur, d'un parent. Je pense davantage aux
personnes qui souffrent d'instabilité émotive d'une façon
chronique et qui je pense, ne sont pas nécessairement sous la garde d'un
tuteur. Par contre, elles sont très instables dans certains milieux de
travail et auraient besoin d'un plan d'intégration. Est-ce qu'à
ce moment, ceci ne peut pas provoquer certaines difficultés, même
à leur collaboration ou être utilisé parfois d'une
façon un peu intransigeante à leur égard?
M. Cloutier: L'équipe multidisciplinaire qu'on vous
propose dans le plan de traitement ou dans le plan d'intervention pourrait vous
assurer, en tout cas, un minimum d'équilibre dans la question que vous
posez. Je pense, par exemple, que le psychologue thérapeute qui est avec
son "client" pourrait avoir une relation dans le sens d'assurer à la
personne momentanément incapable de prendre la décision que ce
sera une question qui sera vraiment discutée. Cela se rapporte à
l'équipe multidisciplinaire en termes de plan global. Je pense que par
cette méthode on pourrait assurer une solution relativement potable qui
serait probablement la plus... Il n'y en a pas de solution idéale,
probablement, à la question que vous posez, c'est-à-dire
étanche. Qu'on ait toutes les garanties, je ne crois pas que ce soit
possible. Sauf qu'on dit: L'équipe multidisciplinaire dans ce sens peut
faire un bon bout de chemin.
Mme Lavoie-Roux: Dans les ressources existantes à
l'extérieur des grands centres, est-ce que vous retrouvez, à
votre connaissance, cette équipe multidisciplinaire partout, qui puisse
assumer justement cette fonction dont vous parlez?
M. Cloutier: Pour ce qui est des handicapés mentaux, pour
ce qui est des centres d'accueil plus précisément, je pense qu'on
a à peu près dans toutes les régions du Québec au
moins un centre suffisamment équipé pour assurer ce dont vous
parlez. Il y en a dans toutes les régions du Québec.
Pour ce qui est des handicapés physiques, qui sont une
clientèle quand même plus limitée, c'est moins
développé dans les régions périphériques.
Toutefois, la problématique est la même actuellement. Les
handicapés partent de la région de la Côte-Nord, par
exemple, pour s'en venir à Québec ou à
Montréal.
Dans ce sens-là, je pense que l'équipe multidisciplinaire
pourrait encore avoir sa place. On pourrait explorer des moyens tels que ceux
qu'on vous propose, le réseau des services sociaux comme tel. Il y en a
dans toutes les régions du Québec et ils ont le problème
de cette clientèle-là dans leur région, sur la
Côte-Nord aussi.
Mme Lavoie-Roux: Ma dernière question. Vous proposez une
commission d'enquête comme étant un moyen approprié de
mieux identifier, cerner les besoins, évaluer les ressources, etc. Par
contre, j'ai cru vous entendre dire que l'établissement de cette
politique globale je pense que cela est peut-être même
à l'intérieur de votre mémoire devrait être
un premier mandat de l'office. Pourquoi avez-vous les deux
possibilités?
M. Cloutier: Parce qu'il faut que cela se fasse, que ce soit par
l'office ou que ce soit par une commission d'enquête.
Mme Lavoie-Roux: Vous n'avez pas de référence pour
l'un à l'égard de l'autre.
M. Cloutier: Non, c'est le résultat, dans ce
sens-là, qui compte. Un centre d'accueil chez nous dit: Peu importent
les racines si l'arbre pousse. C'est l'important.
Mme Lavoie-Roux: Je vous remercie.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Pointe-Claire.
M. Shaw: Merci, M. le Président. Je voudrais remercier
l'Association des centres d'accueil du Québec pour leur mémoire.
Je conviens avec vous que la représentation des ministères
à l'office des handicapés est un sujet valable, parce que la
lacune que vous pouvez apercevoir maintenant, c'est que vous n'avez pas de
contacts avec tous les ministères dans le réseau actuel. Comme
cela, l'office ne peut pas donner un avantage aux handicapés parce que
chaque ministère a un représentant qui est responsable des
handicapés. Est-ce votre pensée en ce qui concerne l'office?
M. Cloutier: D'abord, le réseau et les centres d'accueil
s'aperçoivent et souffrent du fait que les ministères ne se
parlent pas suffisamment. Fré-
quemment, c'est le réseau qui fait le lien entre
différents ministères. Que cela prenne la formule de
représentation à l'office ou que cela prenne une autre formule,
je pense que c'est un problème qui revient aux légistes en termes
de rédaction d'un texte là-dessus. Ce qu'on vous dit, c'est qu'il
faut que vous vous assuriez qu'il y ait des moyens prévus pour cela;
c'est l'idée fondamentale. Maintenant, dans notre mémoire, on
vous dit: Les ministères devraient être représentés
au conseil d'administration de l'office. C'est une formule. L'important, c'est
que cela se fasse aussi.
M. Shaw: Peut-être puis-je demander au ministre ceci: Dans
votre concept d'un conseil d'administration de l'office, est-ce que vous pensez
qu'il doit y avoir quelqu'un dans chaque ministère qui va être
responsable de l'application du projet de loi ou de la base fondamentale du
projet de loi?
M. Lazure: C'est une possibilité qu'on envisage. Dans un
sens, cela rejoint des suggestions qui nous sont venues de divers groupes,
qu'en plus des quatre sièges représentant des ministères,
il y ait aussi un autre mécanisme dans chaque ministère qui peut
être concerné. Alors, cela peut être par une espèce
de comité de tous les ministères concernés qui serait
conseiller auprès du conseil d'administration. C'est une
possibilité. L'autre possibilité rappelle un peu la loi 101; dans
chaque ministère, il y a une personne désignée pour voir
à l'application de la loi 101. C'est une formule qui me paraît
intéressante; on peut, par hypothèse, imaginer que chaque
ministère identifierait un fonctionnaire qui serait chargé de
surveiller l'application de la future loi 9. C'est une possibilité
M. Shaw: Ma deuxième question porte sur le principe de
l'article 73. Je partage votre position que c'est impossible de dire seulement:
Nulle personne ne peut être congédiée à cause d'un
handicap qui résulte d'un accident parce que ce handicap peut être
assez grave pour qu'elle ne puisse pas continuer de travailler. Même
cette compagnie peut être forcée de payer le salarié le
reste de sa vie.
C'est une forme d'assurance contre les handicaps, cela peut arriver.
Supposons que je travaille dans une compagnie et je suis victime d'une crise
cardiaque. Le lendemain, je peux dire que je ne peux pas travailler plus d'une
heure par jour, parce que mes médecins me considèrent comme une
personne handicapée, mais vous avez besoin de me payer mon salaire au
complet. Voilà le danger du projet de loi, comme l'article 73 est
rédigé maintenant. Je crois que personne ne peut être
congédié s'il peut continuer de fonctionner, même si c'est
à un certain pourcentage. Dire seulement qu'une personne peut être
congédiée à cause d'un handicap, c'est peut-être une
forme de surtaxe sur les compagnies. Vous avez jugé que cet article
pouvait être abrogé, dans le projet de loi, quel est votre point
de vue?
Mme Bouchard (Michèle): M. le député, voici
ce qu'on a voulu dire. A l'article 73 de la loi il est inscrit: "II est
interdit à une entreprise de cinquante salariés ou plus de
congédier un salarié pour la seule raison qu'il devient une
personne handicapée".
C'est très vrai, on y souscrit. Là où on est en
désaccord, c'est lorsqu'on mentionne le nombre de salariés. Dans
notre esprit, que ce soient cinquante salariés, que ce soient trois ou
dix, si le handicap est la seule raison, et qu'il n'affecte pas le rendement du
salarié, ce n'est pas parce qu'il y à trois, huit, dix ou quinze
salariés, l'employé fonctionne quand même à
l'intérieur de ses fonctions. S'il devient handicapé et que le
handicap n'affecte pas son rendement, on ne voit pas pourquoi le nombre
"cinquante salariés" a une incidence.
C'est pourquoi, dans notre recommandation, nous disons tout simplement
qu'il est interdit à une entreprise de congédier un
salarié pour la seule raison qu'il devient une personne
handicapée sans tenir compte du nombre de salariés dans
l'entreprise. Je ne sais pas, est-ce que vous saisissez?
M. Shaw: Oui, oui, je saisis très bien votre point de vue
et je le partage aussi. Le nombre de personnes ne compte pas, mais le type de
handicap peut compter fortement.
Mme Bouchard: Si le handicap affecte le rendement de
l'employé, c'est différent, dans notre esprit; mais si le
handicap n'affecte pas, si la seule raison, c'est parce qu'il devient
handicapé... à titre d'exemple, une secrétaire normalement
dactylographie, elle a besoin de ses deux mains pour dactylographier; or, elle
devient handicapée, elle perd une jambe, je ne pense pas que ce handicap
affecte son travail. C'est un exemple. On croit que l'employeur serait mal vu
de la congédier, parce qu'elle a perdu une jambe.
M. Jolivet: Si elle perd une main?
Mme Bouchard: Cela affecte son rendement, c'est peut-être
une raison de la...
M. Lazure: M. le Président, pour clarifier, si M. le
député le permet, dans notre esprit, si le rendement n'est pas
affecté, et que l'employeur voudrait congédier la personne,
l'employé pourrait avoir recours évidemment à la
Commission des droits de la personne, parce que ce serait nettement une
discrimination. Nous, ce qui nous concernait, c'est l'employé où
le rendement serait affecté par le nouvel handicap; c'est pour cette
raison qu'on introduisait un chiffre qui peut être révisé,
le 50, c'est discutable. Parce qu'à la limite, comme vous dites, si le
rendement est affecté dans une petite entreprise de cinq
employés, les possibilités de relocalisation de cet
employé handicapé dans l'entreprise sont très
limitées s'il n'y a que cinq ou six employés, donc cinq, six
postes de travail. Alors, c'est pourquoi il nous semblait presque
inévitable de préciser un chiffre, mais comme je l'ai dit
tantôt, le 50, on va le regarder de nouveau.
Mais il faut distinguer si le rendement est affecté ou non, ce
sont deux mécanismes différents.
M. Shaw: Même la compagnie de cinquante employés,
disons que vous avez une compagnie d'hélicoptères et ce sont des
pilotes qui sont impliqués, puis un pilote devient aveugle à un
moment donné, c'est impossible de lui... le rendement, c'est très
important. J'appuie totalement la position voulant que si la personne peut
encore continuer à donner le service qu'elle rendait avant, j'appuie. Ce
n'est pas juste qu'elle soit congédiée à cause de ce
handicap.
Mais si vous avez un handicap qui coupe même la moitié du
rendement, est-ce que c'est juste que la compagnie le congédie si elle
ne peut pas relocaliser l'employé? On voit dans les autres pays ce qui
se passe, ils ont de tels articles. Si vraiment ils sont mis à pied, il
y a une forme de surtaxe pour cela et il y a même des assurances. Si on
veut garder les gens aptes au travail c'est le principe que l'on
veutles employeurs ont des responsabilités aussi, autrement les
compagnies vont dire: Oui, c'est encore un travail, c'est la compagnie
d'assurance qui paie les dépenses pour le garder à la maison.
C'est dans ce sens que nous avons besoin de faire une appréciation, je
crois.
M. Lazure: II va falloir nuancer cet article pour, à la
fois, essayer de sauvegarder les droits de la personne handicapée et
aussi les droits de l'employeur. C'est une question fort complexe. Il va
falloir le nuancer autant sur le nombre de 50 que sur une certaine protection
des droits de l'employeur.
M. Shaw: Merci. C'est tout, M. le Président.
Le Président (M. Marcoux): Je remercie l'Association des
centres d'accueil du Québec de bien avoir accepté de venir
présenter son mémoire. J'inviterais maintenant la Maison
Lucie-Bruneau à venir nous présenter son mémoire.
Alors, M. de Grandpré?
Maison Lucie-Bruneau
M. Laberge (Jacques-Gilles): Je regrette, M. de Grandpré
ne pouvait venir ce matin.
Le Président (M. Marcoux): Alors, M. Laberge, voulez-vous
présenter vos collègues?
M. Laberge: Je suis Jacques-Gilles Laberge, directeur
général à la Maison Lucie-Bruneau. Je suis
accompagné, ce matin, de Luc Filiatreault, qui est conseiller en
réadaptation et chef du service de maintien à domicile, et de
Jacques Corbeil, qui est sociologue et chef du service des résidences de
groupe.
Evidemment, tout comme l'Association des centres d'accueil du
Québec, notre langage est tout à fait différent, ce matin,
du discours du ministre des Affaires sociales à l'ouverture de cette
commission parlementaire. Il reste qu'il y a des points sur lesquels nous avons
certaines recommandations à faire ou certaines incertitudes face au
rôle que l'office aura à jouer. Afin d'éliminer des
conversations qui seraient fastidieuses, serait-il possible, M. le
Président, que soient déposées au procès-verbal de
cette commission les pages 1 à 17 de notre mémoire afin
d'éviter une lecture? C'est assez important pour nous puisque nous
sommes entièrement d'accord avec le livre blanc; par contre, nous avons
voulu prouver, dans la première partie de ce mémoire, une
certaine contradiction qu'il y avait entre le livre blanc et le projet de loi
no 9.
Le Président (M. Marcoux): Est-ce que les membres de la
commission acceptent de verser au procès-verbal ces pages? Alors, les 17
premières pages de votre mémoire seront versées au
procès-verbal du journal des Débats.
M. Laberge: Merci. Dans la conclusion, nous voulons absolument
une politique globale en réadaptation. Une politique globale, pour nous,
ce n'est pas le livre blanc. Le livre blanc, pour nous, est tout simplement un
énoncé de principe. Nous voulons avoir une politique globale qui,
en plus d'un énoncé de principe, nous apporterait un plan de
développement de services aux personnes handicapées.
Nous souhaitons, au niveau du reclassement professionnel, la
régionalisation des comités d'admission. Soyez assurés de
notre empressement de participer au reclassement professionnel puisque nous
avons déjà pris de l'avance. Nous avons formé un
comité l'été dernier. Nous avons déjà un
rapport expliquant comment nous collaborerons, en termes de reclassement
professionnel, avec l'organisme qui sera créé qui, d'après
nous, devrait surtout jouer un rôle de coordination plutôt que
d'implication directe dans des services.
Il y a une autre chose qui a attiré notre attention. C'est que la
loi 9 est confiée au ministre des Affaires sociales. Considérant
que cette loi est tellement importante, nous souhaiterions qu'elle puisse
dépendre du ministre d'Etat au développement social, tout comme
la loi 101 dépend du ministre d'Etat au développement culturel.
Nous croyons que cette loi, qui touche différents ministères,
devrait avoir plus de poids dans son application.
Nous souhaitons aussi que l'organisme qui sera créé puisse
tenir une commission d'enquête sur les ressources et les services qui
sont actuellement organisés, surtout, pour nous, en ce qui concerne les
personnes physiquement handicapées. Actuellement, un tas de
handicapés sont malheureusement dans des centres hospitaliers pour soins
prolongés, ce qu'on appelle les centres hospitaliers pour chroniques.
Nous recevons à peu près une trentaine de ces clients qui
étaient dans ces centres, qui n'avaient absolument rien à faire
là. Il est temps qu'on crée des centres d'hébergement avec
des programmes vraiment organisés. Malheureusement, je n'ai pas cette
assurance,
dans la loi qui est actuellement déposée, qu'on va
améliorer les services de ces personnes handicapées qui sont
actuellement dans des centres hospitaliers. Cela m'amène à dire
qu'il serait grandement temps de "médicaliser" les services aux
personnes physiquement handicapées. Je passerai la parole à M.
Filiatreault qui voudrait nous entretenir sur quelques sujets.
M. Filiatreault (Luc): M. le ministre, MM. les
députés, j'aimerais vous parler de trois points bien
précis.
Le Président (M. Marcoux): Vous oubliez Mme le
député.
M. Filiatreault: Madame, excusez-moi.
Le Président (M. Marcoux): II faut faire respecter tous
les droits des membres de la commission.
Mme Lavoie-Roux: Je n'ai pas l'intention d'aller devant la
Commission des droits de la personne.
M. Filiatreault: Je m'excuse. De toute façon, on va parler
des droits des handicapés. Le premier point sur lequel je voudrais vous
entretenir c'est la discrimination face aux handicapés physiques,
or-thèses et/ou prothèses.
Dans le projet de loi, surtout au chapitre II, article 2, on retrouve
que personne n'a le droit de faire de discrimination contre une personne
handicapée. On ne spécifie pas si c'est physique ou pas. Ce que
j'aimerais préciser à la commission ce matin, c'est que la
discrimination ne se fait pas nécessairement contre la personne.
Habituellement, la discrimination se fait contre l'orthèse ou la
prothèse. Je m'explique. En ce sens je vais vous donner un exemple bien
concret. Je vais dans une salle de cinéma. On n'a rien contre Luc
Filiatreault comme tel, sauf que le fait que je me présente en fauteuil
roulant provoque tout le brouhaha. J'aimerais vraiment qu'on spécifie
dans le texte de loi, comme vous le disiez, M. le ministre, dans votre rapport,
relativement à la Charte des droits et libertés de la personne,
que c'est au niveau de l'orthèse ou de la prothèse qu'on ne doit
pas faire de discrimination et non pas au niveau de la personne
handicapée. Comprenez-vous le sens inverse de la situation à
l'intérieur de cela?
M. Lazure: Je le comprends très bien. On en a
discuté la semaine dernière. Je pourrai y revenir tantôt ou
tout de suite si vous le voulez.
L'interprétation que les légistes font de la Charte des
droits et libertés de la personne avec l'addition d'un article
concernant les personnes handicapées sur lequel on s'est entendu avec le
ministère de la Justice. L'interprétation qu'ils font, c'est que
la prothèse ou l'orthèse fait partie de la définition de
personne handicapée. Même si les juristes nous disent que cela en
fait partie, que c'est implicite, il n'y a pas d'inconvénients, à
mon avis, à ce qu'on le spécifie pour que les gens comprennent
bien parce que je saisis très bien ce que vous voulez dire.
M. Filiatreault: J'aimerais vraiment être assuré, M.
le ministre, que ce soit vraiment spécifié; parce qu'on va
invoquer, par la suite, toutes sortes de raisons qui vont passer à
côté de la discrimination, comme le feu ou ainsi de suite,
à l'intérieur des établissements publics et, à ce
moment-là, il y aura discrimination mais la loi ne l'aura pas
prévue. C'est sur ce point que j'aimerais vraiment que ce soit
très clair et très explicite.
Le deuxième point comme tel, c'est le rôle de l'office.
Quant à moi, l'office doit être un organisme qui ne fait pas de
services directs, qui ne donne pas de services directs, mais qui fait faire. Il
peut devenir un organisme de dépistage des personnes handicapées
et des besoins, il fait l'inventaire des ressources existantes en
matière de réadaptation et d'intégration au travail, il
joue, par la suite, un rôle d'information et auprès des personnes
handicapées et auprès des organismes qui oeuvrent dans ce domaine
et, par la suite, il a un rôle de promotion à l'intérieur
de cela et, finalement, un rôle de coordination des ressources. Ce serait
le mandat de l'office ou, enfin, comme on l'appelle dans notre mémoire,
à l'article 11, on dit: "II est institué un Bureau de
développement social des personnes handicapées" plutôt
qu'un office parce qu'office se référait à une
superstructure qui nous apparaissait, en tout cas, de la façon que
c'était décrit, assez excusez l'expression
"monstrueuse" dans ce sens.
Je vais vous expliquer: Nous considérons que l'office n'offre pas
de services directs aux personnes handicapées sous aucune
considération. Ceci, afin d'éviter de créer une
superstructure bureaucratique et centralisée, ce qui va, de toute
façon, à l'encontre des politiques émises par le
ministère, ce qui aurait inévitablement pour conséquence,
à notre avis, de diluer la qualité et la quantité des
services requis par les personnes handicapées; alors, ne pas tomber dans
ce panneau, car cela nous apparaît assez dangereux.
Le troisième point qui m'apparaît le plus important, c'est
que, dans le projet de loi, on retrouve des mesures coercitives au niveau du
travail et on ne retrouve pas, par contre, des mesures coercitives au niveau de
l'habitation et des barrières architecturales comme telles. Notre point
de vue là-dessus serait que, par cette loi ou par le biais d'une autre
loi ou au niveau du ministère des Affaires municipales il y ait une
modification de la conceptualisation architecturale existant actuellement au
Québec, dans le Code du bâtiment, afin que les personnes
handicapées physiquement puissent accéder facilement aux
édifices publics et aux logements aussi. Quand je parle de la
modification de la conceptualisation architecturale, déjà,
certaines personnes, à la Société d'habitation du
Québec, connaissent cette nouvelle conceptualisation. A ce
moment-là, les nouvelles maisons d'appartements ou maisons de rapport et
ainsi de suite qu'on construirait... Premièrement,
les bâtiments publics, c'est-à-dire des offices municipaux
d'habitation chapeautés par la Société d'habitation du
Québec seraient bâtis avec une conceptualisation architecturale
qui permettrait à n'importe quelle personne, qu'elle soit
handicapée physique ou pas, de pouvoir y habiter sans qu'on crée
des logements spécifiques, spéciaux et spécialisés
pour les personnes handicapées physiquement. A l'heure actuelle, sans
aller plus loin, je crois que les études prouvent que cela ne
coûte pas plus cher. Je vais vous donner un exemple bien concret: Si on
bâtit une maison de rapport où il y a 100 logements et qu'à
l'intérieur de cette maison, on dit: II y a dix logements
réservés aux personnes handicapées physiquement, et que
dans cette maison de rapport on commande 90 portes de chambre de bain de 24
pouces et on en commande 10 de 30 pouces; vos 10 portes de 30 pouces vont vous
coûter beaucoup plus cher. Par contre, si on commande cela en portes de
30 pouces, à ce moment, on arrive au même coût que si on en
avait commandé 100 de 24 pouces.
C'est toute cette modification, cette conceptualisation architecturale.
Je demande ici à la commission de pouvoir avoir des mesures beaucoup
plus coercitives face à l'abolition des barrières architecturales
dans tout ce qui est bâtiment, autant édifices publics que maisons
de rapport, habitations, ainsi de suite, pour permettre aux personnes
handicapées physiques, effectivement, de pouvoir s'intégrer
facilement dans la société sur ce plan qui m'apparaît un
des plans les plus primordiaux au point de vue d'avoir un toit sur la
tête et une place où on peut demeurer, où on peut se
mouvoir sans préjudice.
Je vais aller plus loin que cela parce que les barrières
architecturales, à l'heure actuelle, face aux personnes
handicapées physiques, sont déjà discriminatoires si on ne
modifie pas cette conceptualisation qui existe présentement. C'est tout,
M. le ministre.
M. Corbeil (Jacques): M. le ministre, MM. les
députés, Mme le député, j'aimerais vous faire deux
suggestions de modification aux articles. Le premier, c'est au sujet du nom de
la loi et le deuxième, au sujet de la carte d'identité. Nous
suggérons une modification du nom de la loi. Le nom devrait, à
notre avis, se lire comme suit: Loi favorisant le développement social
de la personne handicapée plutôt que Loi assurant l'exercice des
droits des personnes handicapées. Le nom ainsi modifié perdrait
son caractère surprotecteur puisque assurer l'exercice des droits d'un
groupe de personnes implique que l'on protège ces personnes contre tout
intervenant qui léserait les droits de ce groupe de personnes.
Le nom suggéré, Loi favorisant le développement
social de la personne handicapée, met l'accent sur la promotion, la
stimulation du développement social des personnes handicapées, ce
qui nous apparaît plus compatible avec l'idée que les personnes
handicapées puissent se prendre en charge elles-mêmes. A notre
avis, les personnes handicapées ont déjà subi trop de
surprotection et le nom de la loi pourrait véhiculer toute une approche
dont on essaie de se débarrasser; même si, comparativement au nom
de la loi 55, il y a beaucoup d'amélioration dans le changement de nom,
on suggérerait quand même qu'il y ait une modification à ce
niveau.
Deuxièmement, la carte d'identité. Même si la carte
d'identité n'est pas obligatoire, même si elle n'est que
facultative, c'est-à-dire que la personne handicapée a le libre
choix de se la procurer, il n'en reste pas moins qu'à notre avis, ce
genre de carte ne devrait pas exister. Nous croyons que cette carte ne rend
aucun service aux personnes handicapées et qu'au fond, elle ne servirait
qu'à protéger la société contre certaines
impostures, c'est-à-dire que des personnes non handicapées
pourraient se prétendre handicapées pour bénéficier
de certains avantages. Comme nous sommes certains que ce genre d'imposture
demeure des faits vraiment rares, nous doutons de la pertinence de cet
article.
Nous aimerions changer l'article 33b de la façon suivante: On
pourrait simplement faire disparaître l'article parce qu'on pense que le
fardeau de la preuve devrait incomber à celui qui fait la discrimination
et en aucun cas à la personne handicapée.
C'est tout, je vous remercie.
M. Laberge (Jacques-Gilles): C'est à peu près tout
ce qu'on avait à dire, sauf qu'on souhaite que l'organisme qui sera
créé par le projet de loi va pouvoir élaborer une
commission d'enquête afin qu'on puisse avoir l'image claire des
réalités vécues au Québec par les personnes
handicapées et qu'une politique globale de normalisation sociale et de
réadaptation soit implantée. Ainsi le Québec pourrait se
doter des lois utiles qui font appel au meilleur de nos énergies et, de
toute évidence, le texte actuel et les idées qu'on
véhicule au sujet de lois concernant les handicapés,
d'après nous, n'auraient pas subi la maturation suffisante. Merci.
Le Président (M. Marcoux): M. le ministre.
M. Lazure: M. le Président, je veux remercier les
représentants de la maison Lucie-Bruneau, les féliciter pour leur
ardeur au travail, la vigilance avec laquelle ils ont suivi les actions du
ministère, depuis quelques années, sur cette question des droits
des personnes handicapées.
Je vais commencer par commenter les dernières remarques des
intervenants. La proposition d'éliminer toute carte, même
facultative, je dois dire qu'il y a un ou deux autres groupements qui nous
l'ont exprimé, mais que, par contre, la grande majorité des
groupements voient une utilité à ce qu'elle demeure facultative,
cette carte. Quand on dit carte, il s'agit d'un moyen d'identification qui peut
aller jusqu'au simple symbole sur le pare-brise d'une automobile afin de
bénéficier d'une place de stationnement rapprochée d'un
bâtiment, comme ça se voit dans certaines municipalités. Je
pense qu'après avoir entendu plusieurs groupements, avoir lu plusieurs
mémoires, si on
veut jouer le jeu de la démocratie, il me paraît
évident que l'ensemble des groupements préfère qu'on
conserve cette clause tout en la rendant facultative.
Quant au nom que vous suggérez pour le projet de loi, Loi
favorisant le développement social des personnes handicapées, je
n'ai rien contre, mais il me paraît un peu restrictif. A ce moment,
pourquoi ne pas dire: le droit au développement culturel, au
développement économique de la personne handicapée. Je
comprends qu'on pourrait interpréter "social" comme englobant tout cela,
mais dans l'acceptation habituelle du terme "social" cela diffère quand
même, cela n'inclut pas habituellement le côté culturel ou
le côté économique. Je n'accepte pas tout à fait le
diagnostic sociologique que vous faites, M. l'intervenant, le dernier, j'oublie
votre nom, à savoir que c'est trop protecteur ce nom, le nom tel qu'il
existe actuellement. A ce compte, même la Charte des droits et
libertés de la personne, cela devient trop protecteur comme titre. Je
pense qu'il y a vraiment une sensibilité à fleur de peau,
vis-à-vis de ce phénomène de la protection.
Je comprends cette sensibilité, surtout pour les personnes
handicapées elles-mêmes qui vivent constamment soit un rejet assez
cruel parfois ou soit la surprotection, à l'autre extrême. Je
connais assez ce mécanisme-là. Je ne pense pas que le titre
actuel soit surprotecteur.
Les remarques concernant l'habitation sont fort intéressantes.
Effectivement, et M. Garcia m'en informait tantôt, notre sous-ministre
adjoint au ministère, qui a été chargé des contacts
avec les autres ministères, incluant la Société
d'habitation du Québec, la SHQ a modifié ses pratiques, surtout
depuis quatre à cinq mois, depuis l'arrivée d'une nouvelle
direction à la SHQ vous êtes au courant qu'il y a un
nouveau directeur de la SHQ et il y a pas mal de pratiques et de
philosophies qui sont en train d'être changées à la SHQ,
pour le mieux; on s'en réjouit nous autres aussi. Quand vous dites qu'il
n'y a pas assez d'obligations, il y en a quand même un certain nombre. Le
Code du bâtiment de 1976, pour toute nouvelle construction, dit
clairement qu'il doit y avoir adaptation. Vous voulez m'interrompre?
Allez-y.
M. Filiatreault: Si vous me le permettez, M. le ministre. Oui,
effectivement. Mais on parle d'adaptation à l'extérieur.
J'aimerais faire la distinction entre l'intérieur d'un logement et
l'extérieur d'un édifice. On parle de l'extérieur, d'une
rampe d'accès, et on parle d'un ascenseur et ainsi de suite. Mais on ne
parle pas de l'intérieur du logement. Comprenez-vous? On ne parle pas de
l'intérieur du logement dans cette loi.
M. Lazure: Ecoutez, je ne le connais pas par coeur. Si tel est le
cas, si vraiment il laisse de côté tout l'intérieur, il
faudra qu'il y ait des modifications au Code du bâtiment.
M. Filiatreault: C'est dans ce sens-là que mon
intervention...
M. Lazure: D'accord, on en prend note. Pour ce qui est de
l'obligation générale, si vous voulez, que ce soit une
construction publique ou privée, peu importe, là aussi, on va se
référer à la charte. A partir du moment où la
protection des droits des personnes handicapées est incluse dans la
charte des droits de la personne, je pense que cela couvre, là aussi,
les bâtiments de toutes sortes. Il faudra quand même qu'il y ait
des provisions, des clauses pour des périodes de transition. Je ne pense
pas qu'on puisse espérer que, du jour au lendemain, au moment de la
sanction de la loi, les bâtiments seront tous modifiés de
façon qu'il n'y ait plus de discrimination. Il faudra qu'il y ait une
période de transition.
Quant à votre suggestion de changer l'"Office des personnes
handicapées" pour un "Bureau de développement social", je trouve
que l'appellation est intéressante, mais les remarques que je faisais
tantôt, pour le changement au titre du projet de loi, s'appliquent ici
aussi et "Office pour les personnes handicapées" me paraît plus
général. Il est assez cocasse quand même de remarquer, et
les vérifications ont été faites, que le mot "bureau",
dans ce sens, n'est pas français; c'est un anglicisme. C'est le mot
"office" qui est français dans ce sens. D'ailleurs, vous avez des
"bureaux" de toutes sortes aux Etats-Unis, dans la structure
fédérale surtout; alors, "bureau" est anglais et "office" est
français, dans le contexte présent.
La dernière remarque, toujours en reculant, qui rejoint une des
premières de nos amis de la maison Lucie-Bruneau, c'est de rattacher ou
de confier au ministère du développement social l'application de
la loi.
D'autres groupements ont fait cette suggestion la semaine
dernière, je pense qu'il y a deux ou trois groupements, deux ou trois
mémoires sur les 60 qui ont fait cette suggestion. Je n'ai pas
d'objection de principe, j'en ai discuté avec le ministre d'Etat au
développement social qui, lui non plus, n'a pas d'objection de principe,
il a une objection pratique à cause évidemment du fardeau
énorme que ça implique. Je pense qu'il n'y a pas de commune
mesure entre les responsabilités administratives qui
découleraient de l'application de cette loi-ci et les
responsabilités administratives de l'application de la loi 101. Je pense
qu'il n'y a pas de commune mesure.
Je pense que cette loi va comporter beaucoup plus de charges
administratives. C'est la crainte que M. Marois exprimait. Moi encore une fois,
je suis bien mal placé pour essayer de défendre ce point; je ne
tiens pas à ajouter aux charges administratives du ministère des
Affaires sociales qui sont déjà trop monstrueuses, alors on doit
en rediscuter. Donc, c'est une proposition qui a du sens, qui a du sens dans la
mesure où il faut énormément de coordination avec un
ensemble de ministères. C'est la logique.
Par contre, il y a aussi une logique au fait que, jusqu'ici le
gouvernement n'ait pas jugé opportun de confier des tâches
administratives trop accaparantes à ses ministres d'Etat. La seule
exception, c'est la loi 101 sur la langue; cela a été la seule
exception, justement parce que ces ministres, par
définition, doivent surtout s'appliquer à faire de la
planification et de la coordination entre un certain nombre de
ministères.
Le Président (M. Marcoux): Est-ce que vous avez des
commentaires à ajouter aux propos du ministre?
M. Corbeil: Oui, au sujet de la carte d'identité, je suis
prêt à respecter les principes de la démocratie, par contre
j'insiste sur le fait que nous préférons, pour les personnes
handicapées, qu'elles s'efforcent de répondre aux attentes
générales habituellement reconnues à la
société québécoise, plutôt que d'utiliser un
passe-partout pour avoir un traitement spécial qui risquerait
d'être non normalisant. Alors, je me permettrais seulement d'insister
à ce niveau. Pour ce qui est du changement du nom de la loi, je ne
prétendrais pas faire un diagnostic sociologique, loin de moi cette
prétention. Par contre je tenais compte des réactions des
personnes handicapées elles-mêmes qui, vous l'avez
déjà mentionné, sont très soucieuses de ce
côté de ne pas avoir d'éléments qui pourraient
être interprétés, qui pourraient véhiculer toute une
approche qui ne leur plaît pas. Merci.
Le Président (M. Marcoux): Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, merci aux
représentants de la maison Lucie-Bruneau. Evidemment, la partie la plus
importante de votre mémoire m'a beaucoup intéressée parce
que vous remettez vraiment en question, jusque dans les détails, les
responsabilités de l'office. C'est une préoccupation,
peut-être à un degré moindre, qui a été
signalée par un grand nombre d'organismes qui sont venus devant cette
commission pour se faire entendre.
Je reviens peut-être sur des remarques que j'ai déjà
faites mais il me semble important de les refaire en présence du
ministre. Je pense que le gouvernement, qui, comme d'autres d'ailleurs, se veut
décentralisateur, au moment où il s'implique dans un nouveau
domaine, a vraiment une occasion rêvée de faire la preuve
concrète de son désir de décentralisation et de respect
des organismes locaux, de la prise en charge le plus possible par les gens qui
oeuvrent quotidiennement. Je pense qu'on aura la réponse seulement au
moment où le ministre nous apportera son projet de loi
révisé, au cours de la semaine prochaine ou à la fin de la
semaine prochaine.
M. Lazure: On va essayer de l'avoir la semaine prochaine.
Mme Lavoie-Roux: Je pense que cela peut vraiment être un
test véritable des intentions du ministère. Quand il y a des
choses d'établies, c'est toujours difficile je le sais de
défaire, de réorganiser, etc. Mais là, on parle de quelque
chose qu'on établit à partir de zéro et je pense que cela
va être extrêmement intéressant de voir dans le concret
l'orientation que prendra le gouvernement à l'égard de la
création de cet office.
J'aurais juste une question; à la page 5, alors que vous demandez
le retrait provisoire, du projet de loi no 9, pour qu'on puisse, au
préalable, faire une révision en profondeur de tous les
problèmes des personnes handicapées. C'est d'ailleurs un peu dans
le même sens que le groupe qui vous a précédé s'est
prononcé, quoiqu'il ne demandait pas le retrait du projet de loi no 9.
Mais il avait cette même préoccupation au sujet de
l'élaboration d'une politique globale. Croyez-vous vraiment qu'il serait
sage, à ce moment-ci non pas que je trouve le projet de loi no 9
parfait, loin de là de retarder davantage l'adoption du projet de
loi si on apporte des amendements?
Il faut bien que j'admette qu'il y a déjà eu des
amendements intéressants qui ont été signalés. Je
m'en suis réjouie. C'est quand même un projet de loi qu'on attend
depuis longtemps. Il a pour objectif premier que la société en
général et non seulement les gens qui oeuvrent à
l'intérieur des organismes qui sont aux services des personnes
handicapées devienne beaucoup plus consciente de ces
problèmes. Déjà, tout le monde l'a exprimé ici, on
sent, d'une façon urgente, des besoins d'animation, d'éducation
du public, de la population pour favoriser l'évolution des
mentalités.
Même si je souscris à votre deuxième
inquiétude, il me semble que ce serait retarder indûment la mise
en place au moins de principes de base et d'éléments de solution
qui m'apparaissent tout aussi importants c'est mon point de vue
que cette deuxième préoccupation que vous avez de cette politique
globale de l'évaluation des besoins, l'évaluation des services,
etc. Vous savez, quand on met quelque chose sur la tablette, cela prend parfois
du temps avant de le descendre. Je serais inquiète qu'on retarde
l'adoption de ce projet.
M. Laberge (Jacques-Gilles): Evidemment, nous demandons le
retrait provisoire du projet de loi 9 tel que présenté. A notre
avis, le projet de loi 9, amendé en seconde lecture, est tout à
fait différent. Il reste qu'une législation est tout à
fait urgente, entre autres, dans le domaine du transport, dans le domaine de
l'habitation, dans le domaine de l'amendement de la Charte des droits et
libertés de la personne et ainsi de suite. Evidemment, une loi est
urgente à l'intérieur de tout cela. Cela aurait dû
être fait depuis nombre d'années. Malheureusement, nous avons
été très surpris de ne pas retrouver, dans la loi 9 et
dans la loi 10, entre autres, au niveau des centres de réadaptation
fonctionnelle, le sens des énoncés du livre blanc. Cela nous a
vraiment surpris et on s'inquiète beaucoup de ce que deviendra, par
exemple, le centre de réadaptation fonctionnelle.
M. Lazure: M. le Président, le concept d'un centre de
réadaptation fonctionnelle se situe dans le cadre du chapitre 48 de la
Loi sur les services de santé et les services sociaux et non pas dans le
cadre particulier d'une loi comme le projet de loi
no 9. Ce n'est pas qu'on veuille l'ignorer ou qu'on veuille garder la
notion de centre de réadaptation fonctionnelle vague. Ce n'est pas cela
du tout. C'est établi à l'intérieur de la série
d'établissements qui relève du chapitre 48. Cela nous paraissait
normal. Le gouvernement antérieur avait cru normal aussi de le faire
dans ce contexte, et nous étions d'accord.
M. Laberge (Jacques-Gilles): Nous sommes d'accord avec la
création de centres de réadaptation fonctionnelle, c'est
évident, sauf que la définition du centre de réadaptation
fonctionnelle ne permet pas de réaliser exactement ce qui est inscrit
dans le livre blanc. Elle a peut-être la prétention de le
faire.
M. Lazure: Je ne suis pas d'accord avec ce diagnostic. Je pense
que cela permet de réaliser ce qu'il y a dans le livre blanc.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, j'aurais une autre
question peut-être que je l'adresserai au ministre qui
rejoint, je pense, la préoccupation qui est à l'intérieur
de vos recommandations touchant l'office et les responsabilités de
l'office, et il se peut que le ministre y ait déjà
répondu, mais j'aimerais qu'il y revienne. Il est vrai que
différents ministères seront représentés à
l'intérieur de l'office; vous parliez même, tout à l'heure,
qu'on pourrait peut-être, à l'intérieur de chacun des
ministères, rendre une personne responsable de servir de lien ou
d'établir la coordination. Est-ce que le gouvernement envisage et
ceci, je pense, rejoint vos préoccupations qu'à
l'intérieur des règlements, des lois qui régissent chacun
des ministères, il y ait une révision de ce qui existe et
I'intégration de nouvelles dispositions pour éviter ce danger
que, je pense, des représentants de la Maison Lucie-Bruneau craignent
que, finalement, l'office puisse je suis sûre que ce n'est pas
l'intention du législateur devenir la soupape vers laquelle on
envoie tout le monde et qu'à l'intérieur des ministères on
ne prenne pas vraiment en main les responsabilités qui leur
appartiennent, respectivement.
M. Lazure: C'est une préoccupation et les fonctionnaires
de notre ministère, qui ont travaillé depuis quelques
années à l'élaboration d'un projet de loi, ont eu de
nombreux contacts et cela a été une des retombées
positives de cet exercice qui dure quand même depuis environ trois ans au
ministère, que ce soient le ministère des Transports, le
ministère de l'Education ou le ministère des Affaires
municipales, la SHQ. Au fur et à mesure, il s'est fait aussi des
améliorations on parlait tantôt de la SHQ qui ont
découlé, en grande partie, des contacts. La réponse, c'est
oui, on est très sensible à cela et il y a déjà des
ministères je l'ai dit la semaine dernière le
ministère des Transports, en particulier, a soumis, conjointement avec
les commissions de transport, les six grandes commissions de transport urbain,
un plan de développement pour les deux prochaines années, et
c'est à leurs prévisions budgétaires de 1978/79 et de
1979/80.
Nous allons nous assurer que justement, cet office ne soit pas, aux yeux
des autres ministères, un prétexte pour ne pas agir dans leur
domaine de compétence.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Pointe-Claire, brièvement.
M. Shaw: M. le Président, parce que nous avons
dépassé notre temps... Il a été dit par les
représentants de l'Association des centres d'accueil que nous avons
besoin de faire un bilan des services maintenant disponibles pour les
handicapés au Québec; on accepte même qu'il y a des
lacunes... On a besoin d'accepter que le réseau actuel est très
bien organisé. Est-ce que vous craignez, dans votre
établissement, que la présence d'un office de surveillance qu'on
prévoit, puisse enlever peut-être l'autonomie et même le
support communautaire que vous avez maintenant? Est-ce que vous avez ces
craintes?
M. Laberge (Jacques-Gilles): Au niveau de l'office, nous sommes
entièrement d'accord, si l'office a un rôle de coordination. Nous
sommes prêts à collaborer avec l'office. Il n'y a aucune crainte
à savoir ce que l'office va venir faire à la maison
Lucie-Bruneau. Pas de problème à ce niveau. Sauf que si l'office
intervient et donne des services directs, à ce moment, j'ai une crainte.
Je me dis: Quel sera le rôle d'un établissement, d'un centre de
réadaptation fonctionnelle? Qui va déterminer les programmes,
ainsi de suite? Je pense qu'il y a déjà des ressources humaines
et matérielles fonctionnelles installées dans le réseau.
Le seul problème, c'est le manque de coordination et une absence de
connaissances de toutes les possibilités avec lesquelles on pourrait
améliorer les services déjà existants. C'est cela qui est
le problème.
M. Shaw: Pour faire une comparaison, disons, avec la Loi des
services sociaux. Nous avons vu l'expérience de tous les centres
d'accueil, même ceux qui étaient privés avant, et
l'imposition d'une régie des services sociaux. Croyez-vous que dans ce
domaine, il y aurait une certaine perte d'autonomie dans le réseau
actuel?
M. Laberge: Au niveau de notre centre d'accueil, je pense que la
Loi sur les services sociaux a tout simplement amélioré les
services que les établissements donnent. On n'a pas enlevé... Pas
de problème, à ce niveau. Evidemment qu'il y a des politiques de
décentralisation sur le plan des décisions, soit au niveau du
ministère, qui vont au niveau régional avec la loi 10. On en
parle énormément. Je pense que la décentralisation des
décisions est importante, mais comme telle, il n'y a pas de crainte
à ce qu'un office vienne jouer le rôle de coordination. Au
contraire, cela va améliorer les services.
M. Shaw: D'accord.
Le Président (M. Marcoux): Je remercie les
représentants de la maison Lucie-Bruneau pour la
présentation de leur mémoire. La commission des affaires
sociales ajourne ses travaux sine die mais les reprendra, fort probablement,
vers le milieu de l'après-midi à la suite de l'avis du leader
parlementaire du gouvernement. Merci.
(Suspension de la séance à 12 h 37)
Reprise de la séance à 16 h 4
Le Président (M. Marcoux): A l'ordre, messieurs!
La Commission des affaires sociales est réunie pour poursuivre
l'audition des mémoires sur le projet de loi no 9, Loi assurant
l'exercice des droits des personnes handicapées. Les membres de la
commission sont: M. Boucher (Rivière-du-Loup), M. Charron
(Saint-Jacques) remplacé par M. Gagnon (Champlain); M. Clair (Drummond),
M. Forget (Saint-Laurent), M. Gosselin (Sherbrooke), M. Gravel (Limoilou), M.
Grenier (Mégantic-Compton), M. Lavigne (Beauharnois), Mme Lavoie-Roux
(L'Acadie), M. Lazure (Chambly), M. Marois (Laporte), M. Martel (Richelieu),
Mme Ouellette (Hull), M. Paquette (Rosemont), M. Saindon (Argenteuil), M.
Saint-Germain (Jacques-Cartier), M. Shaw (Pointe-Claire).
J'inviterais la Fédération régionale des
associations SERVCOM Côte-Nord à s'approcher pour nous
présenter son mémoire. Est-ce que M. Vi-gneault est
là?
Fédération régionale des
associations SERVCOM Côte-Nord
M. Vigneault (Yvan): Oui.
Le Président (M. Marcoux): Bonjour, M. Vigneault. Je vous
inviterais à présenter votre collègue. Vous avez une
vingtaine de minutes, soit pour nous lire votre mémoire, soit pour le
résumer, ou insister sur certaines parties, pour qu'ensuite s'engage le
dialogue avec les membres de la commission.
M. Vigneault: Merci, M. le Président. Je vais vous
présenter mon collègue, en effet. C'est à la fois un
parent je le respecte beaucoup pour cela et aussi, parce qu'il
est mon patron. Il s'agit de M. Paul Otis, de Baie-Comeau Hauterive.
M. Otis m'a demandé de présenter le mémoire pour la
simple raison que, étant à la présidence depuis peu,
depuis novembre seulement, et puisque le dépôt du mémoire
comme tel a été fait à la fin du mois d'août, au
début de septembre, il se sentait plus à l'aise de me demander de
le faire.
Par contre, j'ai insisté pour qu'il puisse vous donner sa
réaction spontanée, suite à son vécu comme parent,
sur la Côte-Nord, sur le dossier SERVCOM et sur la loi no 9.
Ceci dit, je me dois de remercier le ministère des Affaires
sociales pour ce que j'appellerais sa grande ouverture d'esprit face au projet
de loi no 9. On a apprécié beaucoup, sur la Côte-Nord, la
tournée qui a eu lieu chez nous, en présence des hauts
fonctionnaires, dont M. Garcia, le sous-ministre adjoint. Je pense que cette
tournée a quand même permis d'éclaircir plusieurs points
sur la loi no 9, et nous l'avons appréciée grandement.
Merci également de nous avoir permis de venir jusqu'ici. C'est un
voyage que l'on souhaitait et cela nous permet de pouvoir dialoguer
quelques
instants avec les élus du peuple, comme on dit. Pour moi, c'est
une première expérience. J'espère qu'elle ne sera pas trop
traumatisante.
Ceci étant dit, je pense que le message que j'aimerais venir
livrer ici, au nom des gens que je représente sur la Côte-Nord,
c'est où se situe la loi no 9 par rapport au dossier SERVCOM. Le dossier
SERVCOM Côte-Nord est un projet-pilote, un projet
d'expérimentation et de démonstration, pour des services
communautaires intégrés.
Ce projet, qui est officiellement en place depuis le 1er avril 1977, est
quand même un dossier qui nous apparaît extrêmement
important. C'est un dossier sur lequel les personnes bénévoles
travaillent depuis des années déjà. On aimerait se situer
face au projet de loi 9 sur ce dossier.
Qu'est-ce que c'est SERVCOM? C'est le développement d'un
réseau de services communautaires intégrés. C'est parti
c'est cela qui est extraordinaire de gens bénévoles
et de parents qui se sont dit, à un moment donné: Nous, sur la
Côte-Nord, on aimerait avoir le projet SERVCOM pour démontrer
qu'il est possible d'intégrer les personnes qui vivent avec une
déficience physique ou mentale dans le milieu, dans la
communauté. C'est possible également de
désinstitutionnaliser, autant que possible, toute la question de la
déficience. Permettre à des personnes qui vivent avec une
déficience de vivre dans leur milieu, au lieu de vivre en institution,
c'est là un objectif fondamental du projet SERVCOM, un projet de
normalisation avec comme principal corollaire l'intégration sociale.
Comme j'ai dit, ce sont des gens bénévoles qui ont
demandé le projet SERVCOM, ce sont eux qui l'ont défendu avec
l'aide technique de professionnels, mais c'est, d'abord et avant tout, un
dossier des gens bénévoles, des comités de parents.
Où est-ce qu'on se situe à la fédération? Sur la
Côte-Nord, dans le dossier SERVCOM, il y a deux structures, la structure
que j'appellerais gouvernementale et la structure bénévole. La
structure gouvernementale est une commission administrative. On dit de SERVCOM:
Créature du CRSSS sur un mandat du ministre Lazure lui-même. Cette
structure dite gouvernementale a comme partenaire et comme chien de garde la
Fédération régionale SERVCOM que nous représentons
ici. Cette fédération regroupe toutes les personnes
bénévoles, tous les parents de la Côte-Nord, de Tadoussac
à Blanc-Sablon, jusqu'à la ville minière de Schefferville.
Vous comprendrez que c'est une grande étendue de territoire et qu'il y a
beaucoup de milles à parcourir pour consulter tout le monde. On se situe
comme structure bénévole par rapport à la structure
gouvernementale.
C'est un dossier quand même assez unique au Québec en tant
que projet, parce que c'est la seule région dans la province où
on a un tel dossier. On s'est dit, sur la Côte-Nord, face au projet de
loi no 9: Qu'est-ce que SERVCOM va devenir? Pour que SERVCOM puisse continuer,
il fallait que certaines choses soient garanties dans le projet de loi. La
première chose qui nous apparaît fondamentale, c'est la
normalisation.
On souhaiterait ardemment que le principe de normalisation comme tel
soit consacré dans la loi et son principal corollaire,
l'intégration. On pense que le ministère, par ses politiques, se
compromet de plus en plus face à la normalisation et à
l'intégration c'est dit même dans le livre blanc
mais d'une façon que l'on calcule un peu timide. On aimerait vraiment
que, dans le projet de loi, le principe de la normalisation et son corollaire
principal, l'intégration, soient inclus. On va dans ce sens, de toute
façon, avec le mémoire qu'a présenté l'AQDM,
notamment la recommandation no 3.
Comme conséquence immédiate, cela veut dire la
désinstitutionnalisation, et, pour vraiment arriver à la
désinstitutionnalisation, nous croyons fermement qu'il faut que les
mesures législatives s'adressent également à la petite
enfance, enfin aux enfants, dès qu'ils viennent au monde, de zéro
à dix-huit ans, et non pas seulement aux adultes. Pour que vraiment il y
ait désinstitutionnalisation, nous croyons fermement qu'il faut que le
ministère impliqué par la loi soit vraiment
préoccupé par les gens de zéro à dix-huit ans,
également.
Au niveau de l'office, on parle, à ce moment, de centralisation
et de décentralisation, vous avez entendu beaucoup de choses sur ce
sujet sans doute, depuis l'ouverture de la commission parlementaire et
également lors de la tournée des fonctionnaires, ce à quoi
on croit actuellement, compte tenu de l'expérience que nous avons sur la
Côte-Nord, c'est à une formule qui est actuellement tentée,
celle où, au niveau régional, vous avez une commission
administrative, créature du CRSSS. Cette structure fonctionne depuis
quelques mois déjà. Elle est formée de façon
paritaire entre six bénévoles et six professionnels du
ministère du réseau des Affaires sociales. Au niveau
régional, cette structure fonctionne très bien actuellement. Les
bénévoles eux-mêmes en sont satisfaits. Je pense qu'elle
est dans sa troisième vitesse actuellement. Elle fonctionne à la
satisfaction des bénévoles. La commission administrative SERVCOM
sur la Côte-Nord a juridiction complète sur tous les programmes de
santé et de services sociaux touchant à la déficience
mentale, également à la déficience physique et aux
réaménagements de services qui vont se faire dans la
région de la Côte-Nord. C'est bien important pour nous que ce soit
considéré dans toute loi, ce projet de démonstration au
niveau de la structure régionale. Cela ne veut pas dire, par contre, que
la structure au niveau provincial n'est pas nécessaire. L'office, pour
nous, doit, au niveau provincial, coordonner les politiques des divers
ministères concernés. Il y a plusieurs ministères qui sont
concernés, vous le savez, les Transports, les loisirs, l'Education,
ainsi de suite.
Nous pensons qu'au niveau provincial, l'office doit coordonner les
efforts des différents ministères, mais que l'action se fasse au
niveau régional par le biais des commissions administratives qui,
elles-mêmes, devraient être formées des divers
représentants des différents bureaux régionaux ou des
organismes publics ou privés, incluant même les patrons et les
syndicats, les universités, etc.
Une structure provinciale, l'office, qui coordonne les politiques du
ministère et une décentralisation de pouvoirs au niveau
régional par le biais d'une commission administrative, SERVCOM, telle
qu'on le vit actuellement sur la Côte-Nord; sauf au niveau de la
composition qui, à notre avis, devrait être plus
représentative des différentes facettes de la vie même
d'une personne déficiente, c'est-à-dire que la personne
déficiente a à faire non seulement avec le réseau des
Affaires sociales, mais également avec l'Education, avec les Transports,
avec les loisirs, avec les Affaires municipales et ainsi de suite. Alors, tout
ça en résumé, pour dire que nous souhaiterions cette
structure, tant au niveau provincial, au niveau national qu'au niveau
régional.
Il y a une question qui préoccupe également les gens de la
Côte-Nord au niveau du transport, dans la loi, à l'article 69, de
mémoire, on parle du transport qu'on demande aux compagnies qui
désirent... On demande aux compagnies un plan d'aménagement pour
permettre aux personnes, qui ont une déficience, de voyager à
même leurs services. Nous, sur la Côte-Nord, étant
donné que les services de transport urbain sont presque inexistants,
seulement peut-être dans deux ou trois principales villes, on se demande
si le ministère est conscient que l'importance, au niveau subventions,
du transport dit spécialisé... On sait qu'il y a une
expérience actuellement qui se vit dans les régions de
Québec, Montréal et Sherbrooke. Dans les régions
périphériques, dans les régions excentriques, je dirais
même, qu'est-ce que le ministère entend faire pour permettre le
transport, par exemple, des personnes qui ont une déficience en ateliers
protégés ou à l'école, alors qu'il n'y a pas de
transport urbain comme tel? Est-ce qu'il sera possible facilement pour des
organismes sans but lucratif de demander des subventions au transport, soit par
le biais du ministère des Affaires sociales ou par le biais des
Transports, tel que M. le ministre le signale dans son exposé
d'ouverture?
Egalement, une chose qu'il nous a été demandé de
vous dire, c'est au niveau de l'aide financière, il y a beaucoup de
familles... Là, on parle d'intégration. A ce moment-là, on
parle d'intégration dans la communauté. On se dit: Les gens
devraient rester chez eux, avec les services de qualité leur permettant
effectivement de rester chez eux et non en centres d'accueil. On se dit: Bon! A
ce moment-là, le centre d'accueil, lui, est aménagé
spécifiquement pour les personnes qui ont une déficience, mais
les foyers, les domiciles, eux, ne sont pas nécessairement
adaptés à recevoir des personnes qui ont une déficience ou
des personnes déficientes ne peuvent pas nécessairement vivre
à l'intérieur d'un domicile parce qu'elles ne peuvent pas entrer
ou se servir des facilités.
On nous a demandé, au niveau de l'aide financière, de
financer non pas seulement au niveau des édifices publics
également les familles qui désirent garder chez eux leur enfant
qui a une déficience, parce qu'on sait que, règle
générale, ces gens-là demeurent chez eux au moins
jusqu'à vingt ans; on nous a demandé de leur permettre de
demander des subventions, de l'aide financière pour aménager leur
domicile pour pouvoir garder leurs enfants.
Voilà en gros l'essentiel du mémoire, l'essentiel du
message, comme je le disais au début. Notre préoccupation se
situe au niveau du dossier SERVCOM par rapport à la loi 9, et on
aimerait que le ministère en tienne compte. M. Lazure lui-même, en
donnant le mandat officiellement à la région de la
Côte-Nord dans le dossier SERVCOM, une lettre que vous avez au
mémoire, situe très bien sa pensée au niveau de la
normalisation, en page première, si vous permettez, M. le ministre?
"Nous souscrivons au principe de normalisation et d'intégration de la
personne handicapée qui sous-tend l'action de l'Association du
Québec pour les déficients mentaux". Egalement à
l'idée que la commission administrative se forme sur la Côte-Nord,
en page 2, et au niveau de la composition, point sur lequel nous sommes
également très chatouilleux. M. le ministre tiendra compte de
l'avis des bénévoles concernant la composition comme telle pour
permettre à un éventail plus large de citoyens, dont les
syndicats en fait c'est l'interprétation que j'en ai; pour moi,
citoyens veut dire, éducation, travail, loisir, ainsi de suite
pour permettre à tous ces gens, autour d'une même table de
faciliter l'intégration des personnes qui ont une déficience.
Là-dessus, je vais laisser à M. Otis le soin de donner,
comme parent, son vécu de l'intégration de l'action face au
mémoire, et peut-être poser quelques questions s'il en a
envie.
M. Otis (Paul): Je remercie Yvan, M. le ministre et tous les
députés ici présents. Je les remercie d'abord de leur
invitation et de nous laisser dire notre mot. Comme représentant de
toutes les associations locales de la Côte-Nord, comme
représentant des parents étant un parent moi-même
j'aurais quelques points à signaler.
Comme le mentionnait Yvan, je n'étais pas au courant de tout le
dossier, de tout le document qui a été présenté,
parce que je suis président depuis le mois de novembre seulement. Mais
il y a quand même quelques points que je devais signaler parce que le
projet SERVCOM en lui-même vise l'intégration, la sensibilisation
et la normalisation de tous les déficients mentaux et physiques.
J'aimerais souligner au ministère des Affaires sociales, qui
normalement travaille en collaboration avec tous les autres ministères
concernés par ce même projet, qu'il y aurait peut-être
avantage, au niveau du ministère de l'Education, d'insérer, au
sein de son programme, des cours, peut-être, en sensibilisation si on
veut vraiment sensibiliser les citoyens et les intégrer. Je pense qu'il
n'y a pas seulement les handicapés physiques et mentaux qu'il faut
intégrer, il faut aussi intégrer toute la population et faire
accepter ces personnes dans la société. Je pense que ce serait
peut-être très valable d'avoir des cours, au niveau du
ministère de l'Education, qui pourraient faire partie du programme pour
sensibiliser les gens, tous les gens, et accepter d'abord les personnes qui
vivent avec
des déficients mentaux et physiques. Ce sont nous, les parents,
qui connaissons vraiment les problèmes d'intégration parce qu'on
les a vécus avec notre enfant; faire accepter aux parents leurs enfants,
c'est déjà un problème de taille, mais il reste ensuite
à les faire accepter par les voisins et par toute la communauté.
Si le ministère de l'Education incluait à son programme des cours
qui se donneraient en conséquence, je pense que cela, c'est la base.
D'abord on commencerait par les jeunes, à les sensibiliser et ensuite je
pense que l'intégration viendrait automatiquement. C'est un premier
point que je signale, auquel je tiens. J'espère que mon affaire se
tient. En tout cas, je l'élabore du mieux que je peux.
Le deuxième point que j'ai signalé: dans la loi no 9, on
fait mention d'ateliers protégés. Je vais avoir à
travailler, justement, avec les comités locaux sur des projets
d'ateliers protégés. Cela peut porter un autre nom aussi, les
ateliers occupa-tionnels, ou autre nom qu'on devra donner à ce
moment-là. M. le ministre l'a mentionné lui-même qu'il
était assez large dans les structures de toutes ces choses-là,
alors à un moment donné il faudra intégrer,
peut-être, les noms, approprier les noms aux besoins des personnes. A ce
moment-là, je pense que la question des ateliers
protégés... On parle, à l'article 42 du projet no 9, des
ateliers protégés. On mentionne que cela devrait être une
corporation à but non lucratif et qui devrait être
subventionnée par le ministère. A la suite de cela, je pense
qu'on en vient à peu près à l'idée que je voudrais
amener, qu'anciennement, les ateliers protégés devaient
s'autofinancer et je crois que dans notre région, c'est impensable parce
qu'il faut quand même un débouché, un marché pour
les choses qu'il faut fabriquer.
Dans notre région, étant donné que la population
est étendue sur à peu près 800 milles de côte et que
la demande n'est pas tellement forte de ce côté, je pense que ce
serait impossible de procéder de cette façon. Je vois qu'avec la
corporation telle qu'elle est formée et toute la largesse du
ministère qui s'en vient avec la nouvelle loi, il y aura certainement
moyen de s'entendre sur de nouvelles structures, de façon qu'on puisse
donner à nos enfants et à tous nos handicapés,
déficients mentaux et physiques, parce que ça ne comprend pas
seulement un groupe, mais tout le monde, à tous les niveaux...
A ce moment-là, il y aura possibilité, je crois,
d'organiser des services qui seront vraiment appropriés à la
population qu'on doit desservir.
Je vous remercie. Ce sont les points principaux que j'avais à
signaler. J'aimerais entendre vos commentaires à ce sujet.
Le Président (M. Marcoux): M. le ministre.
M. Lazure: M. le Président, je désire remercier
vivement les représentants de la Fédération
régionale des associations SERVCOM de la Côte-Nord. Pour ceux qui
ne seraient pas tout à fait au courant, cette mise sur pied de services
communautaires intégrés, sur une base régionales, est en
train de se faire au Québec pour la première fois.
La région de la Côte-Nord a été choisie comme
projet pilote. C'est un genre d'intégration de services communautaires
qui a été imaginé, à l'origine, aux Etats-Unis,
surtout dans la région du Nebraska, et par des protagonistes, des
promoteurs de ce concept de normalisation, en particulier un psychologue du nom
de Wolfensberger.
L'Association des déficients mentaux du Québec, aussi bien
que celle du Canada, a voulu depuis quelques années, promouvoir le
même genre de services communautaires intégrés sur une base
régionale. C'est avec plaisir qu'on a reconnu les efforts des personnes
bénévoles de la Côte-Nord et qu'on leur a donné une
subvention qui leur permet, de concert avec le Conseil régional des
services sociaux et des services de santé, de jouer vraiment un
rôle d'agent coordonnateur et, en même temps, d'agent stimulateur
de nouveaux services.
Je veux remercier toutes les personnes bénévoles qui
oeuvrent dans ce secteur et je sais que c'est difficile, surtout dans une
région où les communications sont déjà, au
départ, un problème, dans une région telle que la
Côte-Nord.
Rapidement, les principales demandes qui sont inscrites dans votre
mémoire apparaissent dans le résumé aux toutes
premières pages. Je partage votre souci de voir traduit, dans le texte
de loi, sous forme de préambule, une espèce de déclaration
de principe qui apparaît déjà dans le livre blanc,
évidemment, mais qui devrait peut-être apparaître, à
titre de préambule, dans le texte de la future loi; principalement ces
deux principes de normalisation et d'intégration, aussi bien que
d'autres mises au point de principe, par exemple, que cette loi devrait
s'appliquer aux personnes handicapées de tous les âges; même
si c'est implicite dans l'expression "personne handicapée", je pense
qu'on aurait intérêt à le reconnaître de façon
plus explicite.
Vous parlez, à juste titre, dans le cas des déficients
mentaux, de barrières psychologiques qui sont peut-être encore
plus importantes que les barrières architecturales, bien que les
barrières psychologiques s'appliquent aussi aux handicapés
physiques. Mais je pense qu'elles sont encore plus fortes quand il s'agit de
handicapés mentaux, de déficients mentaux. C'est le défi
que votre groupe, comme notre ministère puisque votre groupe
s'adresse aux deux types de personnes handicapées le défi
que nous avons de vraiment avoir autant d'attention pour les barrières
psychologiques que pour les barrières architecturales, les
barrières physiques.
On s'entend sur la fonction principale de l'office qui doit être
de coordonner les politiques et l'action des différents organismes. Je
ne serais pas prêt à accepter d'emblée de mettre cela dans
un texte de loi, à savoir que le conseil régional soit
nécessairement le représentant régional de l'office. Dans
plusieurs régions, cela peut être le mécanisme le plus
approprié. Dans d'autres régions, pas nécessairement.
Je sais que dans votre région, cela fonctionne bien. Mais pour
nous, en tout cas, cela sera un des mécanismes
privilégiés. Dans certaines régions,
cela pourrait être, au contraire, une association
bénévole, qui agirait comme coordonnateur.
Deux remarques sur des problèmes qui sont particuliers à
votre région: Le transport. Vous faites bien de le souligner. Je pense
qu'il faudra, dans la réglementation de la loi, avoir des clauses
particulières pour le transport, dans des régions comme la
vôtre. Dans les villes, c'est relativement simple, le ministère
des Transports est impliqué, comme je l'expliquais la semaine
dernière, depuis un an, et va s'impliquer de plus en plus, avec les
commissions de transport urbain. Il va falloir faire preuve d'imagination dans
des régions comme la vôtre, soit d'utiliser en partie les
véhicules du transport scolaire ou du transport privé, dans
certains cas.
L'aide à domicile aussi est importante dans une région
comme la vôtre. Je parle d'aide financière à domicile, pour
les parents d'un enfant déficient mental ou d'un enfant handicapé
physique.
Plus le transport constitue un problème, plus il est
nécessaire d'avoir un système d'aide financière à
domicile, pour les parents d'un enfant handicapé qui seraient
prêts à garder l'enfant à domicile, moyennant une certaine
compensation; parce que, dans beaucoup de cas, la présence d'un enfant
handicapé ne présente pas un gros montant additionnel. Mais il y
a quand même un bon nombre de cas où cela présente
nettement une charge pécuniaire additionnelle.
Dernière remarque. Sur les ateliers, je vois que votre groupe,
comme quelques autres groupes, a encore certaines interrogations sur le mode de
rémunération en atelier protégé. Pour que ce soit
bien clair, pour nous, c'est le salaire minimum qui va s'appliquer en atelier
protégé. On va le rendre plus clair que ce ne l'est actuellement
dans le texte. Il faudra faire des distinctions avec le centre de
réadaptation où la partie production ne compte pas, où
c'est plutôt la réhabilitation et le réapprentissage des
mouvements, le réapprentissage de la fonction du travail. C'est une
chose. Il est évident que, dans ce contexte, il n'est pas question du
salaire minimum, mais il faudra quand même avoir des allocations plus
généreuses que celles qu'on a dans le moment. C'est tout.
Le Président (M. Marcoux): Avez-vous des commentaires ou
des questions à poser au ministre à la suite de son
intervention?
M. Otis: Quant à moi, je pense que le ministre est
lui-même plein de bonne volonté. Je lui fais confiance.
Le Président (M. Marcoux): Mme le député de
L'Acadie.
M. Vigneault: M. le Président...
Le Président (M. Marcoux): M. Vigneault.
M. Vigneault: J'aimerais simplement demander une précision
au ministre au niveau du rapport COPEX par rapport à
l'intégration et à la normali- sation. Le ministre aurait-il
quelques commentaires à faire là-dessus? J'aimerais bien les
entendre, s'il y a lieu.
M. Lazure: J'ai lu ce rapport COPEX qui, pour les gens du
ministère de l'Education constitue un peu un complément,
même s'il est sorti avant, au livre vert sur l'enseignement
élémentaire et secondaire.
Mme Lavoie-Roux: C'est indiqué, M. le ministre, il est
sorti avant et c'est devenu un complément.
M. Lazure: C'est cela. On en a parlé l'autre jour, ici, en
commission. C'est dommage que le ministère de l'Education n'ait pas
intégré à son livre vert sur l'enseignement
élémentaire et secondaire tout ce qui concerne les enfants, les
adolescents handicapés. C'est dommage. Par contre, ce qui est dans le
rapport COPEX me paraît valable. Je dois dire que toute cette
période au cours de laquelle on a travaillé à la
rédaction du projet de loi a permis à nos collègues du
ministère d'avoir beaucoup de contacts avec leurs collègues des
autres ministères, y compris ceux de l'Education.
De ce point de vue, on va pousser je pense que ce sera un des
rôles de l'office, au plan national, si vous voulez sur divers
ministères, y compris l'Education, pour que les orientations
décrites dans cette loi soient vraiment appliquées dans le
domaine de l'éducation.
Déjà, j'ai eu de la correspondance officielle avec le
ministre de l'Education. Son attitude est très ouverte. Je pense qu'il a
déjà manifesté son intention de modifier certains articles
de la Loi de l'instruction publique. Il y en a qui vont être
modifiés par le biais de notre loi et il y en a qui vont être
modifiés carrément, de sa propre initiative et à notre
demande.
Le Président (M. Marcoux): Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Je veux vous remercier pour votre
mémoire. Je voudrais vous poser une question.
Je sais que vous avez certaines inquiétudes à savoir
comment vont s'agencer les responsabilités de l'office, telles que
décrites dans le projet de loi, et votre propre projet de SERVCOM de la
Côte-Nord qui, quand même, prend beaucoup d'initiatives et qui se
sent vraiment pilote dans l'organisation des services pour les personnes
handicapées dans cette région. Est-ce que la réponse que
le ministre vous a donnée vous satisfait, par exemple, quand vous lui
avez demandé si votre fédération pourrait servir au plan
régional, remplir jusqu'à un certain point une partie du
rôle de l'office?
M. Vigneault: Ce que j'ai compris de l'intervention de M. le
ministre, c'est qu'au niveau provincial, au niveau national, il était
certain que l'objectif promis de l'office serait de coordonner les
efforts des différents ministères, et que par contre, au
niveau régional, il n'était pas dit qu'il n'était pas
certain que toutes les régions pouvaient avoir la même structure,
compte tenu de la conjoncture des CRSSS eux-mêmes . Quant à
nous, sur la Côte-Nord, cela fonctionne bien. M. le ministre l'admet
lui-même. On s'en dit satisfait également pour l'instant.
Personnellement, cela me satisfait.
M. Lazure: Pour être plus précis, c'est justement un
bel exemple d'organismes existants. Il pourrait voir l'office lui
déléguer la responsabilité de coordonner, pour la
région 9, tous les services dont il est question dans la loi.
Mme Lavoie-Roux: J'aimerais vous poser une question. Dans votre
mémoire, à la page 9, centralisation et décentralisation,
vous citez une recommandation du rapport COPEX touchant la
décentralisation. Est-ce que vous avez réfléchi, dans
l'élaboration de vos services communautaires, à cette
façon dont l'éducation pourrait être
décentralisée? Est-ce que vous avez fait certaines projections
sur le rôle que votre organisme ou votre fédération
pourrait jouer dans cette décentralisation de l'éducation, non
seulement pour les enfants handicapés ou les personnes
handicapées, mais pour l'éducation en général?
M. Vigneault: Je ne suis pas sûr de bien comprendre, mais
je vais essayer de refléter. Vous demandez si on s'est
préoccupé également de la décentralisation en
matière d'éducation pour l'intégration ou les services aux
personnes vivant avec une déficience?
Mme Lavoie-Roux: Oui. Je pense que quand vous citez le rapport
COPEX...
M. Vigneault: Oui.
Mme Lavoie-Roux: ... il y a évidemment la
décentralisation des services sociaux et des services de
réhabilitation, etc.
M. Vigneault: Oui.
Mme Lavoie-Roux: Je pense que vous y joignez la
préoccupation de l'éducation.
M. Vigneault: Oui, bien sûr.
Mme Lavoie-Roux: Vous vous demandez, dans le fond, si la
recommandation du rapport COPEX sera mise en application en ce qui touche la
décentralisation de l'éducation. Ce que je vous demande
précisément, c'est de quelle façon, si vous y avez
réfléchi, la voyez-vous s'intégrer à l'ensemble des
services communautaires que vous tentez de développer dans votre
région?
M. Vigneault: Actuellement, cela se traduit comme ceci. Sur la
Côte-Nord, lors d'une récente réunion de la commission
administrative SERVCOM, une proposition a été apportée et
vo- tée en ce sens qu'il y aurait un représentant du bureau
régional de l'éducation sur la Côte-Nord au sein même
de la commission administrative.
Ceci traduit un souci constant de la fédération de mettre,
à une même table, tous les intervenants possibles, afin qu'on
puisse discuter sur toutes les facettes qui touchent la vie d'une personne
déficiente, comme n'importe quel autre individu dit normal.
L'éducation, les loisirs et le travail font... Le ministère du
Travail du Québec, par exemple, pourrait s'intégrer. D'ailleurs,
il y a une proposition dans ce sens-là.
L'éducation nous apparaît quand même fondamentale,
comme disait M. Otis tout à l'heure, une question d'éducation et
de sensibilisation. On dit dans le résumé que les parents voient
surtout une barrière psychologique, et je pense que l'éducation,
la sensibilisation, l'information sont extrêmement importantes pour
permettre aux personnes déficientes de pouvoir circuler comme tout le
monde, dans la rue, dans les centres commerciaux, s'intégrer à
l'école, ainsi de suite. Le ministère de l'Education a un
énorme travail à faire à ce niveau. C'est pour ça
qu'on le voit très bien au niveau de la commission administrative.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce que vous avez tenté de faire des
efforts pour inclure, à votre table de discussion ou à votre
conseil d'administration, des représentants élus de votre
commission scolaire ou... C'est la Commission scolaire de la Côte-Nord,
je pense, qu'on l'appelle, ou la régionale?
M. Vigneault: La Régionale de Manicouagan et du Golfe.
Mme Lavoie-Roux: Oui, du Golfe. Est-ce que vous avez
tenté, par exemple, que certains des commissaires qui sont élus
à ces commissions scolaires ou certaines personnes de ces commissions
scolaires fassent partie de votre table de discussion?
M. Vigneault: Dans un premier temps, ce qui a été
demandé à la commission administrative, c'est d'inclure un
représentant du bureau régional d'éducation. Le
problème pratique qui se pose, c'est qu'il y aurait peut-être de
30 à 50 intervenants possibles à la même table. Ce qui a
été demandé dans un premier temps...
Mme Lavoie-Roux: ... un, non?
M. Vigneault: Un représentant du ministère...
Mme Lavoie-Roux: Oui.
M. Vigneault: ... de l'Education par le biais du bureau
régional, parce qu'il ne faut pas oublier qu'actuellement, étant
donné que c'est une politique du ministère des Affaires sociales,
nous avons principalement les intervenants du réseau des affaires
sociales. Ce qui serait, à notre avis, beaucoup plus intéressant
et ce qu'on dit dans le mémoire, c'est qu'il y ait un
représentant des affaires
sociales, mais qu'il y ait aussi divers représentants des autres
intervenants intéressés et impliqués dans la vie de la
personne déficiente. L'éducation en est un, les
municipalités en sont d'autres, enfin, plusieurs personnes comme
ça pourraient se joindre à l'équipe que j'appellerais
peut-être multidis-ciplinaire à ce moment-là.
Mme Lavoie-Roux: Si je comprends bien, dans la table de
concertation que vous avez présentement, ce sont davantage des personnes
bénévoles, des parents et des représentants du
réseau des affaires sociales.
M. Vigneault: C'est ça. Actuellement... Mme
Lavoie-Roux: Et jusqu'à maintenant...
M. Vigneault: ... c'est une commission que je dirais paritaire
entre les bénévoles 6 et les professionnels des affaires sociales
6. C'est ça actuellement. On a un représentant de chacun des
établissements qui existent sur la Côte-Nord et...
Mme Lavoie-Roux: Mais, jusqu'à maintenant, ou vous n'avez
pas tenté, ou vous n'avez pas réussi à inclure des
représentants des autres ministères ou d'autres fonctionnaires
qui peuvent, pas nécessairement dépendre directement du
ministère, mais peuvent être intéressés aux
questions d'éducation municipale, etc.
M. Vigneault: Ce que nous avons gagné actuellement, c'est
un représentant du ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre du
Québec et un représentant du bureau régional de
l'éducation sans droit de vote, parce qu'il y a toute la question de
juridiction ici, qui entre en ligne de compte, alors qu'on travaille sur le
réseau des affaires sociales principalement, les budgets des affaires
sociales, alors, les gens du réseau voient d'un mauvais oeil
évidemment que les gens des autres ministères viennent à
la table avec droit de vote. C'est une question qui n'est pas tranchée
encore.
Mme Lavoie-Roux: Oui, mais est-ce que, comme personne-ressource,
si vous voulez parler d'un développement communautaire
intégré, ça ne peut pas se limiter aux affaires
sociales?
Je suis tout à fait d'accord avec vous. Sans penser à des
représentants des ministères, pouvez-vous penser à un
conseiller municipal, à un commissaire d'école, à des
personnes qui ne sont pas rattachées à des ministères,
mais qui sont tout de même des représentants de la population dans
leur coin?
M. Vigneault: Ce que vous dites est très juste et je pense
que le modèle idéal est d'incorporer tous ces gens autour de la
même table. Quand on parle d'un modèle idéal, cela revient
toujours, comme juridiction, cela revient à dire qu'on a un
contrôle sur tous les budgets des différents ministères qui
touchent la personne déficiente. Cela touche les affaires municipales,
cela pourrait être un conseiller municipal, comme vous le dites si bien,
cela pourrait être un syndicaliste d'une compagnie. Pourquoi, par
exemple, les Métallurgistes unis d'Amérique n'auraient-ils pas un
représentant à la commission administrative? Ce sont eux qui
règlent les conventions collectives dans les compagnies minières
et ainsi de suite. On aurait, à ce moment-là, un éventail
de possibilités pour intégrer les personnes qui vivent avec une
déficience, et dans le milieu du travail ce serait fort
intéressant d'avoir un patron, la partie patronale et la partie
syndicale. Question de sensibilisation, question de faciliter
l'intégration des personnes adultes au marché du travail.
Mme Lavoie-Roux: Avez-vous fait des approches dans ce sens?
M. Vigneault: Oui, mais, comme je vous le disais, la
difficulté c'est qu'au niveau de la juridiction et au niveau du nombre
des intervenants, cela pose des problèmes techniques. Au niveau
juridiction, cela pose un problème majeur, celui d'avoir droit de vote
sur des budgets d'organismes qui ne sont pas concernés.
Mme Lavoie-Roux: Mais comme personne-ressource, sans droit de
vote, il serait possible qu'elles se joignent à vous?
M. Vigneault: Oui, certainement. Excellent. C'est d'ailleurs dans
ce sens que nous travaillons actuellement du côté
bénévole.
Mme Lavoie-Roux: Juste une dernière question. Vous
recommandez qu'à l'article 68, le deuxième paragraphe soit
enlevé, et je comprends fort bien votre préoccupation. A votre
avis, peut-il rester des cas où, même si on développait la
quantité et la qualité des services à l'intérieur
des ressources déjà existantes, peut-il rester des cas qui
pourraient ne pas être servis ou si, au contraire, on devrait même
en créer, mais à l'extérieur de l'office. Etes-vous
absolument si j'utilise le terme intransigeant ce n'est pas dans un sens
péjoratif est-ce une position ferme que l'office, en aucun
moment, ne devrait mettre elle-même sur pied des services de
main-d'oeuvre?
M. Vigneault: Cette position fait suite à celle qui est
première et essentielle, celle de l'intégration. Dans la mesure
où on accepte ce principe, on doit inciter le plus possible les
personnes avec une déficience à se servir des services dits
génériques, comme les hôpitaux par exemple, les services
que M. Tout-le-Monde a actuellement. Pourquoi une personne qui a un handicap,
une personne qui a une déficience mentale devrait aller à la
porte voisine du centre de main-d'oeuvre du Québec par exemple, une
porte à côté, juste pour déficients mentaux, alors
que M. Tout-le-Monde prend la porte de droite pour le centre de main-d'oeuvre
du Québec? Nous nous disons qu'il ne faut pas faire deux portes, deux
bureaux. On se dit: Augmentons, là où c'est nécessaire, la
qualité
des centres de main-d'oeuvre du Québec avec une personne qui aura
pour principal dossier l'intégration des personnes avec une
déficience, mais pas créer à côté un autre
centre de main-d'oeuvre ou un autre bureau à la porte voisine, à
la porte de gauche, simplement pour les personnes déficientes parce que
l'intégration et la normalisation exigent qu'on se serve des services
génériques.
Mme Lavoie-Roux: J'aimerais demander à M. le ministre si
c'est le sens qu'il faut donner à ce deuxième paragraphe. Je ne
l'avais pas interprété...
M. Lazure: L'article...
Mme Lavoie-Roux: L'article 58.
M. Lazure: Vous disiez 68 tantôt, c'est 58.
Mme Lavoie-Roux: Article 58, excusez-moi.
M. Lazure: Dans sa rédaction actuelle, cela veut dire que,
dans certaines régions, l'office pourrait, dans un rôle de
suppléance, si vous voulez, mettre sur pied des services de
main-d'oeuvre; évidemment, avec la rétrospective qu'on a
maintenant et sous les groupements qu'on a entendus, je me demande si on doit
maintenir cette possibilité-là. Cela peut être un raccourci
dans le temps pour certaines régions, parce que, comme on l'a dit au
début de la commission la semaine dernière, tout le monde sait
que nos bureaux de la main-d'oeuvre du Québec, malheureusement, ne sont
pas tellement équipés en termes d'expertise dans la plupart des
régions du Québec et cela va prendre un certain temps avant qu'on
puisse former du personnel et peut-être ouvrir des esprits à ce
que les bureaux de la main-d'oeuvre du Québec reçoivent mieux nos
personnes handicapées mentalement ou physiquement.
Mme Lavoie-Roux: Mais si vous deviez mettre ces ressources en
place, à côté, il va quand même falloir trouver ces
personnes-ressources. Il y a peut-être autant intérêt
à les y introduire immédiatement.
M. Lazure: C'est cela; alors, aussi bien les mettre dans les
bureaux de main-d'oeuvre carrément. C'est pour cela que je mets un gros
point d'interrogation à côté du deuxième
paragraphe.
Mme Lavoie-Roux: Alors, je vous remercie. Merci, M. le
ministre.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Pointe-Claire.
M. Shaw: Merci, M. le Président. Je peux constater que
vous êtes dans une institution qui est à l'avant-garde,
peut-être, pour les services aux handicapés. Je crois que la
plupart de vos recommandations ont déjà été
acceptées par le ministre dans ses remarques avant l'étude de ces
mémoi- res. J'ai deux petites questions à vous poser. Vous
demandez 23 personnes au conseil d'administration de l'office. Il y a eu quatre
ou cinq groupes qui ont même dit que chaque ministère doit
être représenté au conseil de l'office. Le ministère
suggère que cela pourrait être fait par un conseil dans chaque
ministère pour prendre en main les responsabilités des affaires
des handicapés dans chaque ministère; peut-être a-t-on
besoin d'un conseil de 23 personnes. Est-ce qu'il y a assez de
flexibilité dans le fonctionnement d'un conseil de 23 personnes? La
position du ministère d'avoir, dans chaque ministère quelqu'un
responsable de l'application du projet de loi, répondrait-elle à
vos besoins, d'après la recommandation que vous avez faite?
M. Vigneault: Je dois dire que j'ai entendu la version de M. le
ministre pour la première fois ce matin. Il est évident que cela
pose un problème pratique, la quantité de personnes à une
telle commission, quoique le nombre de 23 ou 24 ne soit pas, à notre
avis, amplement exagéré. Il y a toujours des absents ou il y a
toujours des gens qui... Je pense que l'idée fondamentale
derrière cela, c'est de permettre à tous les intervenants
d'être sensibilisés, les intervenants des différents
ministères qui ont à prendre des décisions qui entrent
dans la vie quotidienne des personnes qui vivent avec une déficience.
L'idée fondamentale, c'est justement de faire en sorte que tous ces
intervenants soient bien informés et impliqués dans le processus.
Cela pourrait se traduire autrement, par des fonctionnaires des
différents ministères qui assisteraient aux réunions ou
par la présence de ces gens-là autour d'une table, mais ce qu'il
faut comprendre très bien ici, c'est l'importance que nous accordons
à ce que des représentants de tous les ministères
loisir, Education, Travail, les syndicats, les patrons qui touchent ou
qui peuvent toucher la personne déficiente dans sa vie quotidienne, son
intégration au travail, son intégration à l'école
etc., puissent discuter et influencer, rendus au niveau de leur
ministère, les décisions, les grandes politiques, dans le sens de
la normalisation, de l'intégration. Si, autour d'une même table,
vous avez quatre de ces principaux intervenants, on risque d'allonger le temps
nécessaire pour sensibiliser les différents organismes, alors
que, si on les regroupe autour d'une même table, de quelque façon
que ce soit, cela m'apparaît extrêmement important et plus vite
dans la réalisation de l'objectif.
Je ne sais pas si vous saisissez ma pensée.
M. Shaw: Oui, mais c'est toujours la question de la façon
de le mettre en pratique. Si vous avez le même résultat avec les
communications, comme vous venez de le dire, avec des fonctionnaires qui
assistent aux réunions, on arrive à la même situation sans
alourdir le comité lui-même.
Deuxièmement, vous avez parlé un peu des cartes
d'identité. Le ministre vient de dire que ça devient maintenant
facultatif. Vous n'avez pas de cartes d'identité dans votre
région, et tout le
monde est servi. Est-ce que vous croyez que ça va changer quelque
chose, d'avoir une carte d'identité?
M. Vigneault: Ce qu'on recommande, c'est que cette carte soit
facultative, comme M. le ministre le propose lui-même. Mais nous
considérons qu'il faut laisser le choix à la personne qui vit
avec une déficience de la demander ou pas, cette carte.
M. Shaw: Même si c'est facultatif, s'il y a une carte
d'identité, croyez-vous que des gens qui sont responsables d'une
personne handicapée mentalement, vont laisser la carte de
côté, pour son avantage ou pour être protégés?
Ce n'est même pas facultatif à ce moment-là, c'est un
mélange. C'est pour ça que je suis totalement d'accord; il y a
certaines formes d'identité que vous avez besoin de démontrer.
Mais je parle de la carte d'identité elle-même, facultative ou non
facultative, est-ce que ça va être un besoin pour chaque
handicapé, si on garde le concept de carte d'identité?
M. Vigneault: J'ai un peu de difficulté à saisir le
fond de votre pensée réelle. Quant à nous, c'est clair
qu'on veut la laisser facultative. On est d'accord avec le ministre qu'il le
fasse ainsi, parce qu'elle n'est pas nécessaire à toutes les
personnes qui ont une déficience physique ou mentale...
M. Shaw: Mais si on dit qu'on veut créer un climat pour
les handicapés, soit avec une carte d'identité ou non, cela
enlève le besoin d'une carte d'identité pour tout le monde. Au
lieu d'être sévères, nous avons d'autres moyens
d'identifier tous les gens qui ont besoin d'être
bénéficiaires d'un projet de loi de cette sorte. Je suis craintif
d'une carte d'identité de n'importe quelle sorte. C'est pour ça
que je dis, facultative ou non, est-ce que c'est rendu un besoin
réel?
M. Lazure: M. le Président, si vous permettez, encore une
fois, peut-être que pour la Côte-Nord, ça ne répond
pas à un besoin, mais au grand centre commercial de Pointe-Claire, si
une personne en chaise roulante veut aller faire ses emplettes le samedi et
qu'on réussit à convaincre les centres commerciaux, d'ici
quelques temps, à avoir des places réservées pour les
handicapés physiques, je pense que c'est un service à rendre
à la personne handicapée qu'elle porte un petit symbole sur le
pare-brise de son auto, une identification...
M. Shaw: Cela, c'est une identification.
M. Lazure: Oui, j'ai dit à plusieurs reprises à
cette commission que...
M. Shaw: Mais ce n'est pas une carte d'identité.
M. Lazure: ... quand on parle de carte dans le projet de loi,
c'est une façon d'identifier. Cela peut être pour le cas d'un
handicapé physique qui désirerait en faire la demande, ça
peut être seulement un collant, un symbole international dans son
pare-brise d'auto.
M. Shaw: Pas de carte avec son nom et toutes...
M. Lazure: Non, non, pas ça.
M. Shaw: D'accord, merci.
Le Président (M. Marcoux): Je vous remercie, au nom de
tous les membres de la commission, d'avoir bien voulu présenter votre
mémoire et d'être venus de la Côte-Nord.
J'inviterais maintenant M. Gaston Spooner à s'approcher...
M. Gaston Spooner
M. Spooner (Gaston): Je n'ai pas l'intention de résumer
tout le mémoire. Je pourrais peut-être expliquer, en
commençant, que j'ai déjà participé à
l'élaboration d'un mémoire, qu'on avait étudié
article par article. C'était pour le projet de loi 55. Dans ce
mémoire-ci, ce sont plus des options fondamentales. Ce n'est pas article
par article que je l'ai fait, mais chapitre par chapitre. Cela explique un peu
l'affaire.
Pour le comprendre, je pense que les recommandations elles-mêmes
il y en a peu se retrouvent à la fin des chapitres. Je
vais être plutôt bref sur la description. J'aimerais mieux qu'on
procède avec des questions.
Dans l'introduction, il n'y a rien de spécial. Au chapitre 1,
j'avais souligné la difficulté d'identification. En fait,
à qui est-ce que le projet de loi s'adresse exactement? Cela a pris
beaucoup de temps avant d'avoir un peu de précision. Ce n'est pas encore
tellement clair. Mais disons que cela a été une
préoccupation, tout le temps que nous avons étudié le
projet de loi, de savoir dans quelle proportion et à quel genre de
handicap on s'adressait. J'avoue que je ne sais pas encore si ce sont des
handicapés à 10%, 20%, 30% ou 50%; en gros, ce ne sont pas des
chiffres absolus que j'aurais aimé avoir, mais une idée, pour
voir si, dans le cas de certaines personnes, cela s'adressait à elles.
Je pense qu'on en a une meilleure idée après plusieurs mois. Je
pense que ça s'adresse plutôt aux handicapés très
touchés, mais c'est encore assez vague. Je ne sais pas s'il y a moyen de
préciser...
Je pense qu'il y a une nette amélioration à enlever le
chapitre 2, comme cela semble acquis. Cela vient clarifier ce
côté-là, parce que la définition ne cadrait pas
très bien avec tout le chapitre 2. C'était un problème
supplémentaire. J'espère que la définition telle quelle va
poser moins de problèmes. Mais cela me semble encore un peu vague,
à savoir à qui exactement cela s'adresse. Ce n'est
peut-être pas dans le projet de loi qu'on va trouver cela, mais on va
peut-être le trouver dans des déclarations et autres choses comme
cela. Mais cela a été une difficulté pour étudier
le projet de loi.
Au chapitre 2, dans tout le chapitre, il y a une nette
amélioration sur l'ancien projet de loi du fait qu'on procède
beaucoup plus en modifiant d'autres lois, qu'en faisant une grosse loi, tout un
bloc qui se serait soutenu. C'est nettement une amélioration et je pense
qu'on aurait pu aller encore plus loin dans ce sens-là.
Le chapitre 2, je pense que je vais le passer rapidement. Il semble
acquis qu'il va aller dans la Charte des droits et libertés de la
personne. S'il y a d'autres questions pour le justifier, je suis bien
prêt à y répondre, parce qu'il ne semblait nettement pas
à l'endroit approprié.
Au chapitre 3, sur l'office lui-même, on se pose encore plusieurs
questions. C'est peut-être la chose... Je serais d'accord pour les
rôles de planification, de coordination et d'enquêtes. Je suis bien
d'accord. Mai cela m'inquiète encore de voir l'office dans j'ai
appelé cela la cuisine quotidienne des plans de service et autres
choses du genre. Je ne vois pas quel rôle il peut jouer en donnant en
même temps des services et en coordonnant l'ensemble des services. On va
se retrouver avec des intervenants externes, comme le ministère de
l'Education et d'autres ministères et il va se trouver à
coordonner des services qu'il va donner lui-même. Cela me semble une
difficulté. Mais la difficulté majeure, c'est que l'office... si
on croit qu'il est là temporairement, le temps de chanaer la
mentalité de la société...
Idéalement, il n'y aurait pas d'office. Je pense que, si cela
donne des services, c'est bien sûr qu'on ne s'en débarrassera pas
avant l'an 2000. Les cas vont revenir à mesure. Les enfants vont
vieillir, d'autres vont venir au monde. C'est évident que l'office va
être là pour rester. Il ne disparaîtra pas de la carte. En
tout cas, je ne m'attends pas à le voir disparaître. Je pense que
c'est le deuxième point majeur concernant l'office.
J'ai une inquiétude qui n'est peut-être pas directement
dans le mémoire. J'aurais beaucoup aimé avoir un office nettement
prévu pour les handicapés, avec le point de vue des
handicapés. En tout cas, on a vécu des situations où il y
a eu souvent plusieurs points de vue, plusieurs façons de voir les
choses, des points de vue qui étaient justifiés. On le retrouve
dans l'administration. Cela pourrait être des handicapés qui
demeurent dans des hôpitaux de malades chroniques et qui sont soumis
à toutes sortes de règlements. On peut appeler cela des
règlements de fous. On va attendre que l'office fonctionne. Il me semble
que l'office est beaucoup impliqué avec des personnes officielles du
ministère. Je n'ai pas de solution miracle. Je ne sais pas s'il serait
préférable d'avoir un comité interministériel qui
aurait fait le travail technique de coordination et de donner à l'office
une espèce de rôle de groupe de pression, si on veut. Cela aurait
pu être une possibilité. Je n'ai pas d'idée précise,
mais je vois mal un ensemble de fonctionnaires faire une critique des services
qui manqueraient et qui, dans le fond, seront des services que chaque
ministère n'aura pas créés. C'est une faiblesse que je
vois dans l'office.
C'est dans ce sens que je dis qu'il y a beau- coup de choses qui
viennent embrouiller son mandat. Je ne sais pas comment il va s'en sortir. J'ai
l'impression que ce sera un peu à mi-chemin, qu'il va ménager un
peu la chèvre et le chou. Ce seront des représentants de
fonctionnaires. On va attendre de voir comment cela se passe dans le concret.
C'est un point de notre inquiétude qui demeure.
Je suis très réticent à ce que l'office s'embarque
dans les services. C'est peut-être le point le plus négatif que je
verrais à l'office comme c'est là, parce qu'on ne saura jamais
qui doit intervenir. On nous donne comme prétexte qu'il faudra combler
les lacunes. Je pense que c'est un peu une solution de facilité, parce
que si on veut vraiment combler les lacunes, il faudrait établir des
politiques dans différents ministères. Je ne vois pas une raison
suffisante pour embarquer l'office dans des choses, seulement parce que cela
n'existe pas présentement, que des services n'existent pas
présentement.
J'avais suggéré la création d'une régie. Je
l'aurais appelée la régie de réadaptation sociale
professionnelle pour toute la question des plans de services. Cela me fait un
peu peur, l'optique dans laquelle on va donner les services. En lisant le
projet de loi, j'ai un peu l'impression c'est peut-être moi qui ne
suis pas correct, je ne sais pas si c'est parce que cela vient du MAS
qu'on va faire de la réadaptation un peu à rabais. C'est une
impression. Elle n'est peut-être pas fondée. C'est une des raisons
pour lesquelles j'aurais préféré, pour le secteur des
handicapés physiques je ne m'embarquerai pas dans une chose que
je connais moins que ce ne soit pas seulement des ententes avec la
Commission des accidents du travail, mais qu'il y ait seulement un
réseau qui s'occuperait de toute la réadaptation des
handicapés physiques. Je crains très fortement que le fait
suivant continue: ceux qui auront eu la "chance" d'avoir un accident du
travail, qui ont quand même un certain régime universel et une
espèce d'assurance sociale, si on veut je ne sais pas si c'est le
fait de rattacher les nouveaux plans de services au MAS j'ai
l'impression que cela va encore être considéré, que cela va
friser l'aide sociale, c'est une impression.
Il y a une chose qui est aussi un peu inquiétante, c'est le fait
de compartimenter les handicapés. Là, on s'adresse seulement aux
handicapés mentaux, aux handicapés physiques. Peut-être que
ce serait trop compliqué d'ajouter tous les handicapés, mais, en
tout cas, il y a beaucoup de handicapés, des mésadaptés
sociaux qui sont en dehors. Je ne sais pas si c'est parce qu'il y a d'autre
chose de prévu ou si c'est parce qu'il y a déjà des
réseaux qui existent. Ce n'est peut-être pas un problème
majeur. Peut-être que, s'il y a une bonne coordination, cela ne posera
pas de problème. Il y a le danger d'avoir des handicapés qui ne
se retrouvent ni à une place ni à l'autre. J'espère que
cela ne se produira pas, mais il y a un danger de ce côté.
Il y a peut-être un dernier point majeur dans les recommandations
spécifiques. Il me semble
que, si on veut avoir une véritable réadaptation
professionnelle et sociale sérieuse, il faudrait commencer à
mettre sur pied un service universel, dans le sens... En tout cas, je verrais
que cela partirait du principe que c'est la société dans son
ensemble qui assume les coûts supplémentaires du handicap. On
l'effleure dans le livre blanc, mais très superficiellement, très
rapidement. Si on veut vraiment avoir la normalisation et
l'intégration... Présentement, il y a des handicapés
physiques qui ne peuvent presque pas sortir du réseau de l'aide sociale.
Pour les handicapés physiques les plus affectés, ce n'est
peut-être pas un problème général. Les
handicapés physiques, présentement, sont presque enfermés
dans le système de l'aide sociale. S'ils veulent en sortir, ils vont
payer une série de choses, automatiquement, qu'ils n'auront pas à
payer s'ils restent dans le système de l'aide sociale.
C'est un petit peu moins pire avec le développement des services
de la Régie de l'assurance-maladie qui est un régime universel,
mais ce n'est pas encore suffisamment développé comme services,
comme régime universel. C'est un point important. C'est surtout pour
cela que j'avais proposé à la régie de la
réadaptation sociale professionnelle, c'était surtout
l'idée de faire passer la notion d'assurance sociale. Je trouve que
c'est une aide qu'on accorde.
Présentement, j'ai l'impression qu'il y a beaucoup de
handicapés physiques ou peut-être mentaux, je ne sais pas, je le
sais moins, qui vont se retrouver en dehors du cadre de cette loi et qui vont
se retrouver avec les mêmes problèmes que ceux qu'ils ont
présentement, comme des coûts supplémentaires d'habitation,
des coûts supplémentaires... En tout cas, il y en a toute une
série qu'on pourrait énumérer, par exemple, les
handicapés physiques qui demeurent chez eux et qui ont moins parce
qu'ils demeurent chez eux, qu'ils demeurent avec leur famille. C'est une
série de problèmes comme cela qu'on ne pouvait pas s'attendre de
retrouver dans la loi, mais auxquels il serait bon de penser.
Comme recommandation spécifique, c'était toujours dans le
but de soulager l'office de beaucoup de rôles qu'on lui donne
présentement. Il me semblait plus normal que toute l'affaire des
ateliers protégés relève d'un ministère en
particulier, par exemple du Travail et de la Main-d'Oeuvre, peu importe le
ministère. J'avais aussi proposé la création d'un
organisme qui prendrait en charge les plans de réadaptation sociale et
professionnelle. En fait, il prendrait en charge tous les services. J'ai
parlé des plans de réadaptation sociale et professionnelle, de
tout l'aspect des services, pour que l'office n'ait pas à s'en occuper.
Cela pourrait être remis à des groupes locaux, comme on l'a dit.
On a parlé du CRSSS, il y en a qui ont parlé de CLSC. On pourrait
leur "refiler" l'affaire, comme la Régie de l'assurance-maladie peut
prendre des ententes avec d'autres dans ce sens, mais ce ne serait pas l'office
qui serait responsable des services.
Enfin, troisièmement, que cet organisme fonctionne selon le
principe d'un régime universel d'assurance sociale, pour la raison que
j'ai donnée tout à l'heure.
C'est pour sortir la réadaptation sociale professionnelle de
l'idée d'aide sociale ou qui prisait l'aide sociale; disons, c'est la
raison.
Le chapitre 5; il y a peu à dire sauf pour l'article 79, qui
devrait se retrouver dans les dispositions finales. Il n'y a pas grand-chose...
Disons que l'idée est là. Il s'agirait simplement de la situer
avec les autres dispositions modifiant d'autres lois.
Pour le chapitre 7, je trouve que c'est la partie qui a peut-être
été la plus améliorée dans le projet de loi. C'est
vraiment dans une optique plus normalisante que les mesures qui sont
proposées pour les handicapés se retrouvent dans les lois; elles
auraient dû s'y trouver depuis le début. Je pense que c'est
peut-être la partie que j'ai préférée, que j'ai
trouvée la plus intéressante, si je compare les deux projets de
loi.
J'ai ajouté trois articles à inclure dans la Charte des
droits et libertés de la personne. Ils sont peut-être
théoriques comme tout article de charte. En tout cas, il y en a un en
particulier que j'aimerais voir inclure immédiatement, et ce serait, je
lis: "Toute personne a droit à un logement normal, l'institution
n'étant qu'une ressource de dernier ressort." Je pense qu'il y a encore
des situations qui sont presque scandaleuses, à savoir le nombre de
personnes qui restent dans des institutions complètement
inadaptées. Je pense que ce serait le temps qu'on les sorte et qu'il y
ait des mesures... Je sais que ce n'est pas une mesure, pas un exercice de
droit concret pour le lendemain matin, mais, au moins, que le principe soit
retenu, principe selon lequel les personnes handicapées vivent dans un
milieu normal et selon lequel des institutions, ce n'est pas un milieu normal
où on peut vivre à l'année. Je tiendrais beaucoup à
voir ça dans la Charte des droits et libertés de la personne. Ce
serait une des choses que je tiendrais à voir...
Il y a aussi une deuxième mesure qui pourrait se retrouver dans
la Charte des droits et libertés de la personne; c'est plus en rapport
avec l'idée que la société, dans son ensemble, assume les
coûts supplémentaires amenés par un handicap. Ce serait:
"Toute personne handicapée a droit aux aides techniques et aux services
spécialisés qui favorisent au maximum son autonomie."
Je sais que, pour demain matin, ça ne donne pas de services
supplémentaires automatiquement, mais, au moins, ceux qui se battent
pour avoir des services auraient quelque chose sur quoi s'appuyer.
Il y aurait aussi une troisième recommandation qui pourrait aller
dans la Charte, se lisant comme suit: "Toute personne handicapée a droit
à ce que ses besoins spéciaux soient pris en considération
à toutes les étapes des programmes de planification
économique et sociale."
Cela, je pense que ce serait une bonne façon de s'assurer que les
mesures sont prises d'avance et non après coup, comme pour
l'accessibilité aux édifices. Il y en a toute une série
qu'on pourrait
nommer. Je pense qu'il faut y penser d'avance si on veut assurer
l'égalité des chances. Ce n'est pas après que la
bâtisse ait été faite... Cela, c'est à plus long
terme. C'est peut-être moins urgent, et quant à inclure les autres
dispositions...
J'ai explicité un peu l'importance d'une charte. Je pense qu'il
suffit de lire la disposition.
Je pense que, pour terminer, je pourrais peut-être lire le dernier
paragraphe. Je pense que ça résume l'idée
générale.
En terminant, j'espère qu'on ira loin pour faire du projet de loi
no 9 une loi omnibus, modifiant plusieurs autres lois. En procédant
ainsi, peut-être que la loi assurant l'exercice des droits des personnes
handicapées aura moins de panache et sera moins "monumentale" qu'une
"belle loi" contenant tout dans son corps principal. Mais les personnes
handicapées n'ont surtout pas besoin de beaux monuments, elles ont
surtout besoin, avant tout, d'instruments de vie normalisante.
Je pense que cela résume l'idée du mémoire. Il y a
une annexe au mémoire. Je pense que ce ne serait peut-être pas
l'endroit pour le commenter. Cela se rapporte surtout au livre blanc. Je ne
sais pas, mais peut-être qu'on pourrait verser l'annexe aux
procès-verbaux de la commission.
Le Président (M. Marcoux): Selon votre désir et
selon le consentement mutuel des membres de la commission, nous pourrons le
verser en annexe aux procès-verbaux du journal des Débats. (Voir
annexe).
Je vous remercie beaucoup du résumé que vous avez fait de
votre mémoire.
M. le ministre.
M. Lazure: Je veux rendre hommage à l'acharnement de M.
Spooner de Sherbrooke qui, non seulement présente son propre
mémoire, mais a travaillé aussi à la rédaction
d'autres mémoires. M. Spooner est aussi très actif dans
l'Es-trie, en particulier dans le transport des personnes handicapées
qui a été finalement subventionné, depuis quelque temps,
par le ministère des Transports et le ministère des Affaires
sociales, en attendant que ce soit assumé par la voie normale. Je veux
aussi le remercier pour son mémoire.
Trois ou quatre remarques seulement. Vous souhaitez que l'office ait
nettement un préjugé favorable à la personne
handicapée. Non seulement cela répond à notre souhait,
mais on va probablement, à la suite de plusieurs recommandations,
augmenter le nombre et la proportion des personnes handicapées dans
l'office. Je serais porté, à ce stade-ci, à aller
jusqu'à dire qu'elles doivent détenir la majorité des
sièges à l'office. On n'est jamais mieux servi que par
soi-même, cela assurerait que l'office a un préjugé
nettement favorable.
Le rôle des fonctionnaires dans l'office vous laisse un peu
inquiet, un peu perplexe. Je pense tout à coup au Comité de la
protection des enfants battus qui avait été créé il
y a un an et demi ou deux ans par une loi spéciale, qui est toujours
resté un comité restreint quant au nombre de fonctionnaires,
à peine une douzaine, qui a juste- ment utilisé des services
existant dans le réseau des affaires sociales principalement, les
centres de services sociaux en particulier et aussi le personnel des
hôpitaux, et ce comité a joué un rôle
extrêmement utile. Il y a d'ailleurs de bonnes chances pour que le futur
Comité de la protection de la jeunesse, qui va découler du projet
de loi 24, soit pas mal constitué en partant du noyau actuel du
Comité de la protection des enfants battus. Mais je le donne comme
exemple d'une structure légère de fonctionnaires, dix ou douze
employés permanents, qui ont quand même pu agir comme des
"ombudsman" et des surveillants par rapport aux jeunes, plus
particulièrement les jeunes qui étaient victimes de
sévices physiques.
De la même façon, je pense qu'un groupe de fonctionnaires
on envisage de quinze à vingt personnes qui aurait comme
principal mandat, comme on l'a dit à plusieurs reprises, de coordonner
des services existants, peut jouer un rôle utile. Je vois très
bien quel rôle ce groupe-là pourrait jouer, surtout en regard des
autres ministères, pour les inciter à modifier graduellement leur
réglementation.
Handicapé social. C'est un gros morceau que vous soulevez. Faire
une définition de ce que serait une personne handicapée sociale,
c'est tout un défi. Je pense qu'il y a un certain nombre de personnes
qu'on a en tête quand vous parlez de handicap social, qui peuvent
être identifiées et reconnues comme telles, non pas par l'office,
mais par les professionnels du milieu, le personnel dans le milieu qui est
habilité à reconnaître des handicaps comme ceux-là,
qui ont en même temps des handicaps mentaux, un certain nombre. En tout
cas, ce nombre-là peut être identifié plus facilement. Mais
si vous voulez dire par là toute personne qui est le moindrement rebelle
par rapport aux normes sociales, c'est tout un contrat.
Finalement, vous proposez que les ateliers protégés
relèvent du ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre. Un autre
groupe a proposé que les ateliers relèvent du ministère de
l'Industrie et du Commerce. Ce sont deux propositions qui ont du sens.
Je craindrais qu'à ce stade-ci, les deux ministères en
question remarquez qu'on va l'étudier et qu'on va leur en parler
les deux ministères en question voient cela comme étant
tellement peu dans leur vocation qu'il y aurait une assez longue période
d'apprentissage de leur part avant qu'ils ne soient vraiment
préoccupés par ces problèmes. Idéalement aussi, je
pense que cela ne devrait pas être au ministère des Affaires
sociales à le faire, cela devrait être à un des autres
ministères. Finalement, concernant les édifices gouvernementaux
dans votre conclusion, vous en parlez nous savons que le
ministère des Travaux publics est en train de finaliser un plan de cinq
ans, justement, de conversion, et non pas de dix ans; il n'est pas encore
approuvé par les autorités, mais il doit être soumis
très bientôt et on espère bien, nous aussi, comme vous, que
cette période de conversion des édifices gouvernementaux ne
devrait pas dépasser de beaucoup cinq ans. Merci.
Le Président (M. Marcoux): Est-ce que vous avez des
commentaires ou des questions suite aux propos du ministre?
M. Spooner: II y a peut-être juste une chose que j'avais
oublié dans la présentation, c'est que je me demandais si, au
ministère, on serait prêt à prendre le risque d'encourager
des groupes de base, des groupes de pression, à définir
eux-mêmes leurs besoins. C'est pour cela que l'idée de l'office,
qui n'est peut-être pas formé en majorité, mais presque, de
fonctionnaires... C'est parce qu'on a eu une expérience de
représentants et quand des représentants sont nommés par
des organismes officiels, ils sont souvent plus ou moins
intéressés par la question et à un moment donné, on
s'est impliqué carrément et on a travaillé pendant un
temps en groupe, avec des représentants officiels et, à un moment
donné, il y en a la moitié qui étaient plus ou moins
intéressés. Ils sont nommés là par une
résolution de l'ACA, parce qu'il faut en nommer. Cela dépend
beaucoup de la motivation du fonctionnaire. Je me demande jusqu'à quel
point, si on prend le moindre petit organisme qui doit nommer un
représentant ici, un représentant là, celui-ci a des
difficultés à trouver des personnes toujours
intéressées. C'est souvent, parce qu'il faut en nommer une qu'on
en nomme une. C'est ce qui m'inquiétait dans l'idée des
représentants officiels. Peut-être y aurait-il une façon de
contrer cela: ce serait de prendre le risque je ne sais pas si le
ministère serait prêt d'encourager des groupes de base,
pour ne pas dire des groupes de pression, à presque "achaler" le
ministère pour des besoins qu'ils auraient identifiés
eux-mêmes. Je ne sais pas, je sais que c'est peut-être demander
l'impossible.
M. Lazure: Non, je ne trouve pas que c'est un gros risque. Ce
n'est pas demander l'impossible. Est-ce que vous n'êtes pas un peu en
charge du système de transport des personnes handicapées de
Sherbrooke?
M. Spooner: Oui.
M. Lazure: Alors, on a assez facilement pris ce que vous appelez
un risque et cela fonctionne bien. Je crois que dans la mesure où
l'office va déléguer ses pouvoirs régionalement, pas
seulement à des établissements publics je l'ai dit ce
matin encore mais aussi à des groupes de personnes
bénévoles ou des groupes de handicapés eux-mêmes,
qui se constituent en groupement, dans la même mesure il est certain que
l'office va être bien informé des besoins des handicapés
à ce moment-là, si c'est un groupe de handicapés, prenez
le vôtre, dans la région de l'Estrie, qui est reconnu comme
l'agent coordonnateur régional au nom de l'office, à ce
moment-là, l'office va être alimenté des vrais besoins des
handicapés.
En résumé, pour répondre clairement à votre
question, on serait prêt à reconnaître, par le biais de
l'office, les groupements, que ce soit des groupements des handicapés
eux-mêmes, ou des groupements qui représentent les
handicapés; je pense qu'il ne faut pas éliminer d'emblée
des groupements qui représentent les handicapés.
M. Spooner: C'est plus que les reconnaître que je voulais
dire, justement, c'est leur donner les moyens. Cela peut-être un
organisme de personnes bénévoles, d'accord, mais qui a absolument
besoin d'un permanent, peut-être à un certain stade de
développement. C'est plus que seulement les reconnaître. C'est
cela que...
M. Lazure: D'accord. Quand je parle d'une reconnaissance, d'une
délégation de pouvoirs de la part de l'office à un groupe
régional, cela implique, si c'est un groupe de personnes
bénévoles, qu'il faudra donner un budget de fonctionnement, de
secrétariat et un minimum de personnel.
M. Spooner: D'accord.
Le Président (M. Marcoux): Mme le député de
l'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Je veux remercier M. Spooner de son
mémoire. Je l'ai trouvé extrêmement intéressant,
parce que je pense qu'à maints égards, il dépasse, au
niveau de la réflexion, strictement les correctifs à apporter ou
certains amendements proposés aux différents articles du projet
de loi. J'aimerais peut-être que vous développiez davantage cette
idée que vous avez apportée, je ne me souviens pas exactement de
vos termes, mais je pense qu'on va se comprendre, l'idée de sortir
particulièrement la personne handicapée du cercle vicieux de
l'aide sociale.
Je me demande si vous pourriez commenter là-dessus et essayer de
dire comment vous envisageriez ceci. Je pense que c'est vrai qu'en dépit
de toutes les ressources qu'on développe ou qu'on peut mettre en place,
il y en a qui se retrouvent toujours, même si on se défend de
marginaliser les gens, dans cette enveloppe de l'aide sociale dont, finalement,
ils ne peuvent pas sortir.
M. Spooner: D'accord, je pourrais préciser cela. Cela
existe encore et on partait de loin. Bien concrètement, si un
handicapé reçoit des prestations d'aide sociale, automatiquement,
il a droit à certains services l'assurance-maladie est rendue pas
mal universelle mais il y a encore des services, comme par exemple un
handicapé qui a besoin d'un auxiliaire pour l'aider à faire les
repas ou le ménage, des choses comme ça; s'il
bénéficie de l'aide sociale, il a droit à un auxiliaire.
Automatiquement, s'il commence à gagner de l'argent, il n'y a pas droit.
Il y avait une série de choses qui faisaient que le gars qui travaillait
seulement parce qu'il aimait travailler, puisqu'il n'en restait pas plus
à la fin, il fallait qu'il assume des coûts
supplémentaires; c'est ça que je voulais dire quand je parlais
des coûts supplémentaires amenés par le handicap.
C'est comme moi, présentement, je travaille, et il y a un
auxiliaire du CLSC qui vient faire les
repas, une demi-journée on est deux par semaine. Ce
n'est pas encore établi, mais même un organisme comme le CLSC, en
théorie, il est presque à un régime universel, il
s'adresse à tout le monde; en pratique, il y a des restrictions
budgétaires, il faut qu'il limite, alors il va prendre ceux qui en ont
le plus besoin. Si une personne travaille, et ce n'est pas seulement pour le
handicapé, c'est pour le mari qui travaille, qui gagne un salaire moyen;
si sa femme tombe malade et qu'il veut la garder chez lui, il va falloir qu'il
prenne son salaire pour se payer une auxiliaire ou une aide
ménagère. Je pense que ce n'est pas particulier aux
handicapés.
C'est peut-être parce qu'ils ont souvent plus de besoins quand ce
sont des handicaps graves. En tout cas, je connais des handicapés qui
ont essayé de travailler et à la fin du compte, il ne leur en
restait pas plus que s'ils bénéficiaient de l'aide sociale. Le
travail pour le travail, il ne faut pas s'en cacher, il n'y en a pas beaucoup
qui font ça; seulement pour dire que c'est valorisant de travailler.
C'est normal de travailler. Souvent, c'est pour se payer autre chose ou le mois
de vacances. Mais le travail pour le travail, il n'y en a pas beaucoup qui
choisissent ça.
Mme Lavoie-Roux: Je me demande si, dans le fond, le
problème que vous soulevez ne rejoint pas le revenu minimum garanti.
Présentement, tout est calculé à un bout, soustrait
à l'autre et il ne reste plus de motivation ou peu d'incitation au
travail. Je pense que c'est ça. Si je prends comme exemple le
réseau des garderies, si les garderies étaient à la
disposition de tout le monde comme l'école, et non pas avec des normes
qui viennent finalement pénaliser au bout. Il y a aussi une question de
ressource budgétaire dans tout ça.
M. Spooner: Oui, parce que le revenu minimum garanti peut
régler l'affaire, comme il ne peut rien changer. C'est-à-dire que
s'ils ne reconnaissent pas les besoins spéciaux, c'est-à-dire que
tout le monde ne peut pas se payer une aide ménagère une
demi-journée par jour... Il y a certains besoins qui, s'ils ne sont pas
reconnus comme un minimum, ça ne changera rien, ça va être
le minimum, mais il va y avoir des frais supplémentaires à payer,
et la personne n'arrivera pas plus.
M. Lazure: M. le Président, le genre de revenu annuel
garanti qu'on aimerait mettre sur pied, j'espère d'ici quelques
années, va nécessairement changer quelque chose, contrairement
à ce que vous dites, en ce sens que celui que nous envisageons aurait
des incitations au travail d'inclus, des mécanismes pour inciter les
gens au travail et les gens garderaient une portion intéressante du
fruit de leur travail, sans perdre la subsistance fondamentale qui
équivaut à l'aide sociale, si vous voulez.
Mme Lavoie-Roux: Mais je ne sais pas si, dans le cas que M.
Spooner apporte à l'égard des personnes handicapées, qui,
quand même, constituent un certain pourcentage de la population, si dans
la situation qu'il décrit, l'aide sociale est aussi productive que
l'effort au travail, au moins dans un domaine particulier. Cela devrait
être examiné.
Si on veut vraiment parler d'intégrer les gens et qu'on fait des
efforts dans ce sens je pense que la loi 9 est un effort dans ce sens
je me demande si on ne va pas à l'encontre des objectifs.
N'est-ce pas un peu paradoxal, dans le fond?
M. Lazure: Oui. Premièrement, il n'y a aucune personne ou
aucune famille recevant de l'aide sociale qui touche des prestations qui
seraient plus élevées que le salaire minimum, contrairement
à ce que les gens pensent. On entend toutes sortes d'histoires. Les gens
disent: C'est plus payant de recevoir l'aide sociale que de travailler. C'est
charrier un peu quand on dit cela.
Mais je comprends qu'actuellement le système n'incite pas
à travailler à temps partiel tout en recevant des prestations
pour des besoins spéciaux. Mais, si on revient aux personnes
handicapées, pour rejoindre vos commentaires sur l'aide à
domicile, nous sommes bien conscients que les personnes handicapées
constituent un groupe prioritaire. C'est la directive que nous avons
donnée aux CLSC ou aux CSS depuis un an. On a donné des budgets
additionnels cette année pour l'aide à domicile, comme vous le
savez; ils ont été distribués par les CRSSS et les trois
groupes prioritaires sont les malades chroniques, les personnes
handicapées et les personnes âgées. Remarquez que, souvent,
ces trois groupes se rejoignent aussi.
Mais nous pensons qu'une bonne partie de ce que vous regrettez, de ce
que vous déplorez, va être réglée par une
augmentation substantielle des crédits pour l'aide à
domicile.
Mme Lavoie-Roux: L'autre point de vue que vous avez
abordé, ou l'autre notion que vous avez abordée, c'est, dans
votre annexe, la question de la normalité ou de la normalisation. Je
dois vous dire que j'éprouve exactement les mêmes sentiments que
vous à l'égard de ce concept. Je sais que la normalité est
un concept cher au gouvernement actuel, au plan politique, mais on va se situer
uniquement en fonction des personnes handicapées. Je trouve que c'est un
concept tellement relatif.
On a fait l'erreur, en éducation, jusqu'à un certain
point, de vouloir que tous les enfants, dans le fond, soient normaux, par
rapport à une norme qui est établie à partir de l'on ne
sait pas exactement quoi, mais à partir de certaines valeurs que
certains groupes ont. On cherche toujours à se référer,
particulièrement dans ce domaine, au concept de normalisation ou de
normalité. Je sais que c'est très en vogue aux Etats-Unis dans la
littérature et tout cela. Mais je me pose de sérieuses questions,
comme d'ailleurs, je me pose aussi des questions sur un autre concept qu'on
utilise fort fréquemment, quand on parle de potentiel
résiduel.
Je trouve cela extrêmement péjoratif comme concept, je ne
sais pas si on peut parler d'un
concept, ou comme formule, parce que le potentiel résiduel veut
dire quoi? Peut-être que le mien est résiduel par rapport à
celui du ministre, ou vice versa. Cela inclut quelque chose de très
limitatif au départ. Je me demande si ce n'est pas le genre d'expression
qui, finalement, est utile au départ c'est utilitaire mais
qui, finalement, à mon point de vue, recouvre des idées un peu
péjoratives ou peut impliquer des notions un peu péjoratives.
J'étais heureuse que vous souleviez ce concept de normalisation
qui, je sais, est fort répandu il est dans la littérature
courante, mais, pour moi, il est extrêmement relatif, dans quelque
domaine que ce soit. Quant à l'utiliser avec autant d'abondance dans le
domaine dont nous discutons aujourd'hui, il faudrait peut-être y
repenser.
A ce propos, je pense que vos réflexions étaient fort
utiles. En tout cas, elles m'apparais-sent fort utiles et pertinentes.
Je vous remercie, M. Spooner.
M. Spooner: Je veux simplement compléter la phase
normalité. Je trouve important de le souligner. Il y a deux semaines
quelqu'un me faisait remarquer qu'un groupe de personnes handicapées
physiques voulait avoir un local pour des réunions et des
activités. Un gars, à une réunion où on en parlait,
a dit: Cela ne va pas faire de vous des marginaux? J'ai apporté comme
exemple: Quand un groupe de médecins loue un édifice pour avoir
leurs bureaux dans la même bâtisse, est-ce que cela en fait un
groupe de marginaux? Il n'a pas répondu.
Le Président (M. Marcoux): Je pense que vous avez le mot
de la fin. M. le ministre?
M. Lazure: Oui, simplement pour remercier M. Spooner.
Le Président (M. Marcoux): Je vous remercie beaucoup, M.
Spooner. J'inviterais maintenant le dernier organisme qui est sur notre liste
d'invités: le Conseil régional de la santé et des services
sociaux du Bas-du-Fleuve et de la Gaspésie. Nous avons commencé
par visionner le film du CEDAP d'Alma. Nous allons terminer par une autre
région, la région de la Gaspésie et du Bas-du-Fleuve. Je
vous inviterais à vous approcher.
Je vous inviterais à vous présenter et à prendre
une vingtaine de minutes pour résumer ou présenter votre
mémoire pour qu'ensuite nous puissions dialoguer.
Organismes, associations et institutions de la
région socio-sanitaire 01
Mme Tremblay (Hélène): Hélène
Tremblay, conseiller en programmation au CRSSS-01.
M. Marcoux (André): André Marcoux, responsable
sectoriel, Baie-des-Chaleurs, Association pour déficients auditifs de
l'Est du Québec.
M. Mongrain (Gilles): Gilles Mongrain, vice-président de
l'Association des assoifés de vivre de Rimouski.
M. Gendron (Marcel): Marcel Gendron, vice-président de
l'Association des handicapés gaspé-siens de Matane.
M. le Président...
Mme Tremblay: Excusez-moi. Vu que le mémoire a
été présenté par le CRSSS-01, j'aimerais apporter
quelques précisions avant de laisser la parole à M. Gendron qui
va vous présenter verbalement la synthèse de notre
mémoire, synthèse que vous devriez avoir devant vous dans le
moment.
Première remarque. Je vous ferai remarquer que, dans notre
mémoire initial, à la dernière page, il y a la liste de
tous les établissements, associations et organismes qui ont
participé à ce mémoire. Ce n'est donc pas du tout le
mémoire du CRSSS. Le CRSSS n'a servi que d'animateur pour les mettre
tous autour d'une table, ce qui apporte une très forte nuance à
la qualité du mémoire en question. Il n'est peut-être pas
très innovateur dans son contenu, mais il a l'avantage de
représenter, je pense, à peu près tous les intervenants et
tous les intéressés à la question de la région
01.
Deuxième remarque, qui est peut-être un reproche.
D'habitude, on fait les reproches à la fin plutôt qu'au
début. Je voudrais signaler la profusion des textes. Pour ne pas
biaiser... J'espère que cela ne nous donnera pas une mauvaise note, je
ne le pense pas, sinon je ne le ferais pas.
M. Lazure: Non.
Mme Tremblay: Je voudrais signaler on n'est pas le seul
mémoire à le faire, j'en suis à peu près certaine
la profusion de textes qu'il y a eu sur ce projet de loi, de même
que les délais qui ont été accordés. Je vous ferai
remarquer que la qualité de notre mémoire va sûrement s'en
ressentir parce que, dans notre volonté de remettre un mémoire
régional, on a eu peu de temps, cet été, pour le faire. On
a fait cela à la dernière minute.
On ne savait plus tellement sur quoi devait porter notre
réflexion: sur le projet de loi, sur le livre blanc, sur le
résultat de la tournée des fonctionnaires ou sur l'allocution que
M. Lazure a présentée la semaine dernière? Je vous ferai
remarquer qu'on en tient compte dans notre synthèse. La fameuse
allocution, on l'a eue hier matin, verbalement. Ce matin, on l'a eue par
écrit. C'est sûr que la qualité s'en ressent. On aurait
aimé faire une analyse beaucoup plus sérieuse. Sur ce, je passe
la parole à M. Gendron.
M. Gendron (Marcel): M. le Président, M. le ministre,
madame et messieurs, nous tenons à vous remercier de nous avoir
donné l'occasion d'être présents aujourd'hui afin
d'expliciter le contenu de notre mémoire sur la Loi assurant l'exercice
des droits des personnes handicapées.
En premier lieu, nous tenons à mentionner que ce mémoire
se veut une représentation fidèle des délibérations
des organismes ou associations des handicapés qui ont participé
à l'étude du projet de loi. Evidemment, tous les
handicapés ne sont pas groupés en association, et, par
conséquent, ils n'ont pas tous travaillé directement à la
critique du projet de loi. Nous osons croire qu'ils approuvent tout de
même le résultat de notre démarche, si l'on tient compte de
l'information qui fut diffusée sur tout le territoire par les CLSC ou
autres établissements du ministère des Affaires sociales et le
caractère régional de certaines associations de personnes
handicapées.
Compte tenu de facteurs imprévisibles et de notre
réalité géographique, il a été impossible de
constituer un mémoire exhaustif. Nous sommes quand même enclins
à croire que nous avons touché les principaux points
spécifiques dans notre contexte socio-économique. Il faut
concevoir que la planification et l'organisation de services adéquats
pour les personnes handicapées ne sont pas une mince tâche en
raison de la faible concentration de cette population sur le territoire.
Il ne faut pas, toutefois, conclure que nous avons formulé nos
commentaires en négligeant l'aspect de l'individu à part
entière chez les handicapés. Ce principe de fond demeure et est
pour nous l'objectif à atteindre. Comme ce but est celui de tous, nous
avons estimé qu'en second lieu, l'important était de situer le
handicapé dans son milieu avec ses ressources actuelles, ses contraintes
et ses besoins. Nous avons tenté de refléter les besoins de
toutes les catégories de personnes handicapées. Cet exposé
demeure fondamentalement conforme aux positions tenues dans notre
mémoire, mais précise certains points obscurs en s'ajustant aux
propos tenus par M. le ministre Iors de son allocution. Ces propos, en effet,
dans la mesure, où ils se traduiront en amendements concrets du texte de
loi, viennent corriger de nombreuses lacunes soulignées soit dans notre
mémoire, soit dans d'autres dont celui très
apprécié de la Ligue des droits de l'homme.
Nous allons donc considérer ici les propos qui sont tenus dans
cette allocution comme prémisses à notre exposé et ne
soulignerons que les points de notre mémoire qui demeurent pertinents,
mais négligés dans cette intervention du ministre. Les principaux
sujets que nous aimerions retenir sont les suivants: La définition du
répondant gouvernemental de l'office, la formation et le rôle de
l'office, les droits des personnes handicapées, les remarques
particulières émises dans notre chapitre "Répondant
gouvernemental". Nous avons suggéré, dans notre mémoire,
que le répondant de l'office devrait, en l'occurrence, être un
ministre délégué, peut-être au même titre que
celui du Haut-Commissariat, à la Jeunesse, aux Loisirs et aux
Sports.
A cette étape de notre réflexion, nous nous permettons de
souligner que le ministre d'Etat au développement social est
probablement le ministre le mieux placé actuellement pour remplir cette
fonction, considérant que la création d'un nou- veau poste
parallèle à ceux existant ne résoudrait pas le
problème. Elle risquerait, tout au plus, de se traduire par une
duplication coûteuse, sans assurer la correction des lacunes qui se
perpétuent au sein des divers ministères impliqués.
Cette suggestion s'avère d'autant plus capitale que la
proposition émise par le projet de loi de faire relever l'office du
ministère des Affaires sociales risque d'entraver directement la
volonté explicite d'impliquer tous les ministères
concernés. Or, nous voyons mal quel pouvoir un ministre aurait
concrètement sur les ministères de ses collègues sans
crainte de conflits de juridiction.
La formation et le rôle de l'office: L'allocution de M. Lazure
nous assure d'une représentation accrue, autant au niveau
régional qu'au niveau des associations de personnes handicapées.
Nous sommes en accord avec cette position, mais nous tenons à
préciser qu'au sein du conseil d'administration, en plus d'augmenter le
nombre de représentants de l'association, le gouvernement devra nommer
des fonctionnaires non seulement des ministères cités, mais
également des Affaires municipales, du Transport et de la Justice. Cette
requête, même si elle alourdit les structures du conseil, assure
une implication directe de ces trois ministères
supplémentaires.
De plus, nous aimerions voir préciser le mode de nomination des
représentants des associations. Notre crainte se justifie du fait que
peu d'entre elles sont d'envergure provinciale et sont donc difficilement
identifiables pour les responsables de ces nominations.
Quant au rôle accordé à l'office, il semble que la
nouvelle orientation donnée par le ministre ôte à celui-ci
toute intervention directe auprès de la clientèle
handicapée. Cette position est conforme à nos recommandations,
puisque nous croyons que les établissements existant déjà
à divers niveaux ont des mandats qui permettent, dans l'ensemble,
d'offrir la gamme des services requis. Cependant, spécifions, pour
éviter toute équivoque, que l'office, dans ses fonctions
régionales, devra recevoir des mandats semblables à ceux
accordés aux nouvelles commissions administratives régionales,
mais avec ceci de particulier qu'il ne relèvera, contrairement à
cesdites commissions, d'aucun ministère particulier, mais bien de
l'office lui-même et donc, du superministère au
développement social.
Les droits des personnes handicapées: M. le ministre
suggérait que le chapitre 2 du projet de loi soit abrogé et que
la Charte des droits de l'homme soit modifiée en conséquence.
Nous appuyons cette suggestion dans la mesure où elle évite de
marginaliser notre clientèle. Mais nous espérons que ce correctif
ne nuira pas à la volonté formelle d'éliminer toute
discrimination à l'égard de la personne handicapée, car il
ne faut pas oublier que ladite charte existait déjà
antérieurement à l'actuel projet de loi et que, pourtant, les
promoteurs de celui-ci sentaient le besoin de réaffirmer ses principes
d'égalité des droits du handicapé.
Ce n'est évidemment pas une nouvelle loi qui corrigera
l'ancienne, mais il faut souhaiter que,
dorénavant, des mesures seront effectivement prises et des moyens
consécutifs accordés pour permettre sa pleine et entière
application.
Les moyens les plus sûrs sont rarement répressifs. Comme le
souligne le livre blanc, c'est plutôt une mentalité qu'il faudra
modifier.
Remarques particulières émises dans notre chapitre 2. Ces
dites remarques demeurent toutes actuelles, mais précisons notre
pensée quant à certaines d'entre elles.
Transport. Le transport constitue peut-être la principale
barrière à laquelle a à faire face le handicapé.
Mais ce problème est vécu différemment dans les
régions périphériques, car généralement
aucun transport public n'y existe. Il ne suffit donc pas de prévoir une
adaptation des transports existants.
La formule la plus réaliste qui pourrait être retenue dans
notre région copierait les services offerts aux handicapés de
certaines villes comme Sherbrooke, c'est-à-dire un mini-bus et son
conducteur que l'office mettrait à la disposition des personnes
handicapées d'une localité et de ses environs. Le service
pourrait être offert sur demande aux clients qui le réclament et
qui défraieraient, pour y avoir droit, le coût d'un billet
d'autobus régulier. Le mini-bus desservirait prioritairement les
handicapés se rendant à leur travail puis ceux désirant se
déplacer pour des raisons médicales ou purement
récréatives.
Ce service se révèle d'autant plus nécessaire
qu'aucun palliatif acceptable n'est à la disposition de ces personnes
dans des régions comme la nôtre où, en plus, les distances
à couvrir sont fréquemment très importantes. Ainsi un
handicapé de Rimouski devra incessamment quitter un emploi
régulier. Il gagne un salaire net de $125 par semaine et doit payer, en
taxis, une moyenne de $75 dans le même laps de temps pour se rendre
à son travail. Cette situation est intolérable dans une
société qui valorise l'insertion professionnelle des
handicapés.
Construction de résidences. Nous ne réclamons pas ici une
subvention inconditionnelle aux handicapés qui désirent se faire
bâtir une maison. Une telle position serait fatalement discriminatoire.
Mais il s'agit en fait d'accorder à tous une chance égale. C'est
ainsi que la subvention réclamée irait aux frais
supplémentaires encourus lorsqu'il s'agit d'adapter une habitation aux
exigences particulières des handicapés à savoir la
construction d'une rampe d'accès, l'adaptation des appareils sanitaires
ou ménagers, l'abaissement des comptoirs de cuisine, des interrupteurs,
etc.
L'aide à domicile. Cette recommandation devrait effectivement se
lire ainsi: Que les budgets pour l'aide à domicile soient
augmentés, mais qu'ils le soient surtout en tenant compte des
coûts supplémentaires que signifient de tels services en zone
rurale. Que cette aide soit adaptée aux véritables besoins de la
clientèle.
Je passe maintenant la parole à Gilles Mon-grain.
M. Mongrain (Gilles): J'aimerais, à titre de
complément, revenir à la page 4, au deuxième paragraphe,
où nous avons mentionné, dans notre synthèse, que nous
aimerions voir préciser le mode de nomination des représentants
de l'association.
Ceci fait suite à un atelier qui a eu lieu au mois de septembre
des conseils d'administration des associations de handicapés de la
région 01 qui, devant ce fait, s'interrogeaient justement sur la
délégation de représentants de personnes
handicapées via l'office et via une certaine
représentativité aux conseils possibles d'administration,
d'exécution régionale. Pour faire suite à cette
constatation, il a été énoncé qu'il serait vraiment
favorable qu'au niveau régional il y ait, au conseil d'administration,
une représentation majoritaire des associations de handicapés ou
de déficients auditifs ou de parents auditifs ainsi que des
représentants des services tels que CLSC, CRSSS, CSS, etc. Ainsi, cela
pourrait prendre une structure au niveau de toutes les autres régions du
Québec, des onze régions. Cette formule pourrait simplifier la
représentativité des personnes d'associations de
handicapés à l'office. Comme tel, étant donné qu'au
niveau régional on serait déjà majoritaire, ce serait
simple de demander que chaque région du Québec ait un
délégué du conseil régional à l'office, ce
qui ferait onze représentants. Sur ces onze représentants, il y
aurait possiblement une grande majorité de ceux-ci qui seraient des
représentants ou des handicapés physiques représentant
leur association. Cela mènerait à un complément à
la représentativité des associations provinciales telles que la
paralysie cérébrale, l'Association des quadraplégiques,
etc, ainsi que des représentants des divers ministères ou des
services publics etc. C'est à titre de complément.
M. Lazure: M. le Président, je veux remercier et
féliciter nos amis de la région 01 pour le travail qu'ils nous
présentent aujourd'hui. Je regrette qu'il y ait eu malentendu quant
à l'appellation au titre du mémoire et je n'en suis pas
personnellement responsable, mais on vous présente nos excuses, et on
souligne le rôle d'animateur du CRSSS dans cette entreprise. Les
remarques de Mlle Tremblay au tout début, cela joue dans les deux sens.
Qu'est-ce que vous voulez? Au fond, vous déplorez le fait que j'aie
réagi, comme ministre responsable de piloter ce projet de loi,
périodiquement au fur et à mesure qu'on avait des
résultats de la tournée des fonctionnaires et au fur et à
mesure qu'on prenait connaissance des mémoires que j'aie fait part de
mes réactions.
Je comprends que ça pouvait créer un terrain un peu plus
mouvant. Les groupements ne savaient pas exactement, comme vous dites, sur quoi
préparer leurs mémoires, mais par contre, c'est
l'évolution inévitable, si on fait des consultations. Si on fait
des consultations, on s'attend que le ministre responsable du projet en tienne
compte et fasse part le plus rapidement possible de ses réactions
à telle ou telle suggestion. C'est ce que j'ai voulu faire de bonne
foi.
Les remarques présentées aujourd'hui sous forme de
synthèses, je vais les reprendre très rapi-
dement. Le répondant gouvernemental, je répète ce
que j'ai déjà dit à quelques autres groupements qui ont
déjè fait une suggestion semblable, que je n'ai pas d'objection
de principe. La seule réserve, c'est que les ministres d'Etat dans la
structure nouvelle de ce gouvernement-ci sont censés s'occuper surtout
de la planification et de la coordination et non pas de l'administration
à administrer directement.
Il y a une exception, le ministre d'Etat au développement
culturel qui est responsable de l'application de la loi 101, c'est la seule
exception, jusqu'ici. J'ai eu l'occasion d'en discuter avec M. le ministre au
développement social et on va regarder cette possibilité. Mais
ça va un peu à l'encontre des objectifs que le gouvernement
s'était tracés en créant ces nouveaux postes de ministre
d'Etat.
Quant au deuxième chapitre, formation et rôle de l'office,
nous avons dit depuis quelques jours qu'on allait sûrement augmenter le
nombre des personnes handicapées elles-mêmes ou leurs
représentants au sein de l'office. Vous proposez qu'il y en ait un pour
chaque région, ce qui veut dire 10. Je ne comprends pas pourquoi le
chiffre 11. Mais on a dix régions socio-sanitaires, à ce que je
sache, et c'est une suggestion intéressante, à première
vue. De toute façon, on parlait de quatre et on était prêt
à monter pas mal, deux, trois, quatre de plus, peut-être se rendre
à dix, ce qui donnerait une structure bien ordonnée de un
représentant par région. On va étudier cette suggestion
que vous nous faites.
Quant au transport, vous évoquez le modèle de ce qu'on a
fait à Sherbrooke il y a six ou huit mois et qui semble bien
fonctionner. Pour nous, c'est certainement quelque chose de valable et qui
pourra nous inspirer, dans les villes moyennes ou petites, ou dans les
régions rurales, quant à cela.
Une dernière question, peut-être. A la page 9 je
retourne à votre mémoire, au texte intégral de votre
mémoire à la page 9, à l'article 58, vous proposez
un changement, comme suit: L'office doit, au besoin, mettre sur pied des
services de main-d'oeuvre pour les bénéficiaires, etc.
Tantôt, et avec d'autres groupements, cela a été
souvent soulevé. Nous, on abordait les travaux de la commission avec
l'idée que cela devait demeurer exceptionnel, les services que l'office
pouvait mettre sur pied lui-même. Cela devait être pour
suppléer à une absence temporaire.
Maintenant, au fur et à mesure que les travaux avançaient,
j'étais de plus en plus porté à dire qu'il n'y a
pratiquement pas de situation où l'office devrait lui-même donner
des services. Vous arrivez et vous faites une recommandation très
catégorique: L'office doit, au besoin, mettre sur pied des services.
Je serais simplement curieux de voir votre réaction, parce que je
sais que vous avez entendu la discussion de tantôt.
M. Gendron (Marcel): II faudrait peut-être souligner "au
besoin" en même temps qu'on a souligné "doit".
M. Lazure: C'était ma position jusqu'ici, au besoin.
Mme Tremblay: C'est embêtant d'être quatre. Je ne
voudrais pas non plus qu'on se contredise. Mais, comme M. le ministre
soulignait tantôt qu'il était de toute bonne foi, en s'ajustant au
fur et à mesure, nous autres aussi, on s'ajuste au fur et à
mesure. La remarque qui était là faisait suite à la
tournée régionale.
A la suite de la tournée régionale, l'office offrait
encore des services directs. A l'article 58, notre remarque venait du fait
qu'on sentait le besoin que les services de main-d'oeuvre soient
améliorés. Selon la suggestion de la loi, c'était
effectivement l'office qui allait s'en occuper si c'était mal
donné.
Mais là, c'est encore bien mieux. On avait une objection au tout
début, c'est que l'office offre lui-même les services directs en
négligeant les établissements et les services existants. On aime
bien mieux que vous teniez compte de cette remarque et que l'office se contente
de susciter et d'améliorer, de s'arranger pour que les services soient
améliorés, tout simplement. Alors, notre article, notre 1.31
saute, en l'occurrence. On veut que les services soient donnés.
M. Lazure: D'accord.
Le Président (M. Marcoux): Mme le député,
est-ce que vous avez d'autres commentaires sur les propos du ministre? Mme le
député de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Je veux d'abord remercier les
représentants des organismes, associations et institutions de la
région socio-sanitaire 01 pour leur mémoire. Les remarques qu'ils
ont faites au début suscitent une question pour moi. Le ministre,
évidemment, semble avoir trouvé une bonne excuse en disant: On a
voulu tenir compte de la consultation. On a proposé les amendements
à l'ouverture de cette commission. Je ne peux pas m'empêcher de me
demander si, dans le fond, les lois sont écrites en même temps que
se fait la consultation, parce que, quand vous regardez des modifications aussi
importantes que celles touchant l'inclusion à l'intérieur de la
Charte des droits de l'homme, les dispositions supplémentaires requises
pour les personnes handicapées, l'obligation d'avoir une carte
d'identité, aussi les mesures coercitives touchant les entreprises,
etc., j'ai l'impression que le ministre a dû les entendre au cours de sa
tournée. Cela demeure une interrogation dans mon esprit. Ecrit-on les
projets de loi en même temps que, supposément, on procède
è une consultation? Je n'ai pas encore la réponse.
Il y a d'autres détails, je comprends, qui arrivent au fur et
à mesure que les mémoires arrivent au Parlement et tout cela;
mais pour des questions aussi fondamentales que celles-là, sans avoir
suivi la tournée du ministre, j'ai l'impression et la conviction que
cela a dû être soulevé au cours de la tournée.
M. Lazure: Une clarification, si vous permettez.
Mme Lavoie-Roux: Oui.
M. Lazure: Ce n'était pas la tournée du ministre,
c'était une tournée d'un certain nombre de fonctionnaires dans
toutes les régions du Québec.
Mme Lavoie-Roux: Oui, mais cela ne change rien.
M. Lazure: Si vous voulez. Là-dessus, seulement deux mots.
C'est une histoire bien ancienne et, chose certaine, cela ne me tenterait pas
du tout, à l'avenir, avec l'expérience que j'ai acquise depuis un
an, d'essayer de faire un projet de loi en partant d'un projet de loi
déjà préparé par un ancien gouvernement, parce que
les orientations sont différentes. Le projet de loi 55 tel que
présenté avait d'ailleurs soulevé un tonnerre de
protestations dans tous les milieux. Il était très restrictif. Il
s'adressait strictement c'était valable mais c'était
très restrictif à la réintégration
professionnelle, le reclassement professionnel. La première chose qu'on
a voulue, en arrivant, c'était de l'ouvrir beaucoup plus; la notion de
plans de services, par exemple, pas seulement pour l'intégration au
travail, mais scolaire, sociale et tout cela, cela n'existait pas dans l'ancien
plan.
La question de la Commission des droits de l'homme qui est quand
même capitale... Dès janvier ou février dernier, quand on a
commencé à travailler là-dessus, on a posé la
question et les experts, à l'époque, au ministère de la
Justice, nous ont répondu: Non, ce n'est pas possible, il faut que vous
le gardiez dans votre loi. Je l'ai expliqué la semaine dernière
je pense que vous n'étiez pas ici au début de la
commission.
Mme Lavoie-Roux: ...
M. Lazure: C'est dommage que ce soit allé comme cela parce
que cela a fait perdre du temps à des gens et cela a suscité des
discussions inutiles. On nous informe, depuis quelque temps, que c'est
possible.
Mme Lavoie-Roux: Je veux bien que le ministre se défende
en mentionnant le projet de loi de l'ancien gouvernement, c'est de bonne
guerre. Il reste qu'il y avait eu des consultations et l'audition d'un certain
nombre de mémoires, même à l'occasion de la loi 55,
mémoires qui avaient déjà été faits. Je
trouve son excuse faible. Justement, il y avait peut-être eu plus de
consultations parce qu'on retrouve, à maints égards, la
même chose dans le projet de loi 9 que dans la loi 55.
M. Lazure: Oui, mais plusieurs groupes nous ont dit que la
version déposée en mai constituait une grande amélioration
par rapport au projet de loi 55.
Mme Lavoie-Roux: Oui, d'accord, mais je vous pose cette question
fondamentale: Ecrit-on des projets de loi au même moment où on
fait des consultations?
M. Lazure: Non.
Mme Lavoie-Roux: C'est la question que je me pose.
M. Lazure: Je réponds clairement à votre question
qui est claire: la réponse est non. Le projet de loi a été
déposé au début de mai. Il n'a pas été
retouché jusqu'au moment où on se parle. Il va être
retouché dans les jours qui viennent.
Mme Lavoie-Roux: Je vais vous poser une autre question claire:
Quand vos ministres ont fait la tournée avec le livre blanc, cette
fois...
M. Lazure: Les fonctionnaires, vous voulez dire?
Mme Lavoie-Roux: Pas les ministres, les fonctionnaires.
M. Lazure: Je n'ai pas de ministres.
Mme Lavoie-Roux: Les fonctionnaires ont fait la tournée
avec le libre blanc. Certaines des principales questions ont dû
être abordées au cours de la tournée. Je comprends votre
explication touchant l'inclusion dans la Charte des droits de l'homme et je
l'accepte. Dans le cas des autres modifications majeures que vous avez
apportées au début ou à l'ouverture des travaux de la
commission, touchant, par exemple, les mesures coercitives, la carte
d'identité obligatoire qui, celle-là, si ma mémoire est
bonne, a été touchée depuis déjà assez
longtemps...
M. Lazure: Oui, la tournée a été faite, et
avec le livre blanc et avec le projet de loi tel que déposé au
mois de mai par les fonctionnaires. Ils avaient les deux instruments en main.
Ils demandaient, dans les dix régions du Québec, les
réactions des groupes à ces deux documents. Quelque temps
après la fin de la tournée, j'ai émis un communiqué
on y a fait allusion tantôt dans lequel, tout de suite,
à première vue, selon les renseignements obtenus durant la
tournée des fonctionnaires, j'ai dit que nous étions prêts
à modifier telle ou telle chose. Ensuite, les mémoires se sont
mis à entrer la tournée était en juillet et
août . Les mémoires sont entrés jusqu'en septembre.
J'ai pris connaissance, cet automne, des mémoires jusqu'à
récemment, jusqu'à il y a quelques semaines. Après avoir
bien réfléchi à tous ces mémoires, il y en avait 60
ou 61, j'ai décidé d'ajouter d'autres modifications que
j'étais disposé à apporter au projet.
Il y a une troisième phase, si vous voulez, à la fin des
audiences de cette commission-ci...
Mme Lavoie-Roux: Ça, je l'accepte tout à fait.
C'est pour ceux qui viennent que j'espère que ça va servir
à quelque chose.
M. Lazure: C'est ça.
Mme Lavoie-Roux: Mais, ce que je comprends, c'est que c'est une
réflexion longuement mûrie de la part du ministre.
M. Lazure: Exactement, Mme le député, oui. Mme
Lavoie-Roux: Oui.
M. Lazure: On ne peut pas me reprocher ça,
j'espère.
Mme Lavoie-Roux: En tout cas, vous avez suscité tout ce
débat, c'est le premier qu'on a dans...
M. Lazure: Oui.
Mme Lavoie-Roux:... qu'on ait eu de cette nature durant
l'audition des mémoires.
Je voudrais simplement vous demander quelques éclaircissements en
me référant à votre mémoire principal.
D'abord, en page 5, no 1.14, c'est un rôle de l'office, dans
lequel vous dites que l'article doit être modifié de la
façon suivante: Effectuer le dépistage des personnes susceptibles
de bénéficier des dispositions de la présente loi selon un
mode de classification universelle qui s'appliquera à tous les
intervenants. J'aimerais que vous me développiez ça un peu. Je ne
suis pas sûre de comprendre ce que vous voulez dire et, comme je ne
comprends pas, j'ai l'impression que cela peut être assez difficile
de...
M. Mongrain: C'est que, déjà, en Belgique, au
niveau du Fonds de reclassement social des handicapés, on utilise un
mode de classification qui vient de l'OMS qui est, je pense, l'Office mondial
de la santé, et on trouve que cette classification est assez bien
établie. Nous, ce qu'on trouverait déplorable, c'est que le
Québec utilise une classification vis-à-vis des déficients
auditifs, des handicapés physiques et des déficients
intellectuels et que, dans une autre province, s'il arrive la même
optique, la classification soit d'une autre forme. A un moment donné,
c'est difficile d'en arriver à une uniformité. En tout cas, c'est
dans l'optique...
M. Lazure: Si vous permettez, étant donné que nous
avons l'intention de laisser tomber, à l'article 1 du projet, paragraphe
m), "personne handicapée", la définition, on a l'intention de
laisser tomber "et reconnue comme telle par l'office", votre proposition
devient un peu superflue. L'office n'aura plus besoin de suivre une
classification.
Mme Lavoie-Roux: Ma deuxième question: A la page 6,no
1.19, article 31f, de mettre à la disposition de tous les organismes
visant à la promotion des intérêts de la personne
handicapée les listes de personnes handicapées qui auront
été établies par l'office, vous ne voyez pas
d'inconvénients à ceci? Oui?
Mme Tremblay: Disons que c'est justement un des problèmes
de faire des mémoires un peu trop à la dernière minute. On
a travaillé encore dans ce domaine depuis quelques temps. On sait fort
bien maintenant qu'on aurait de gros problèmes de confidentialité
pour obtenir...
Mme Lavoie-Roux: C'est ce que je pense.
Mme Tremblay: ... Donc effectivement, quand on s'est réuni
hier pour mettre au point notre rencontre d'aujourd'hui, on a dit qu'on
laisserait ce point-là sous silence. Nous n'y reviendrons pas parce
qu'on sait de qui la rédaction...
Le Président (M. Marcoux): Cela sera inscrit au journal
des Débats que ce point-là est sous silence.
Mme Lavoie-Roux: Je ne proposerais pas d'amendement dans ce sens.
L'article 31e: préparer et publier au moins bisanuellement des
statistiques sur la population des personnes handicapées du
Québec. Je pense que ce que vous voulez faire, c'est rendre plus
rigoureuse l'obligation de l'office de publier périodiquement des
statistiques, mais par contre il me semble que bisanuellement, c'est
très fréquent. Si...
M. Lazure: S'il y en avait à tous les deux ans, de
façon vraiment sérieuse, ce serait vraiment beaucoup.
Mme Lavoie-Roux: II y aurait peut-être lieu d'indiquer "de
façon plus rigoureuse" dans le projet de loi, mais bisanuellement me
semble un peu trop fréquent.
Mme Tremblay: C'est le principe de la bonne guerre syndicale, en
demander un peu plus pour avoir un peu dans le milieu. Que
périodiquement le rapport aille avec le recensement de la population,
une fois par cinq ans avec les recensements de la population, on trouvait cela
vraiment trop loin. On voulait que le périodique soit
spécifié. Que ce soit assez fréquent, que ce soit
utilisable comme source de données.
M. Marcoux (André): Pour permettre aussi de voir à
l'application de cette loi si jamais il n'y a aucun moyen d'évaluation
et c'est par ces moyens que nous voulions fixer, dans le temps, des
périodes auxquelles on devait sortir des statistiques ou des rapports.
Cela permettait de voir l'évolution des handicapés avec ce projet
de loi en application.
Mme Lavoie-Roux: A l'article 56, 1.28 de la page 8, vous faites
une recommandation qui me semble pertinente et qui a d'ailleurs
été faite par M. Bolduc qui est venu avant-hier, qui a
présenté un mémoire individuel. Je pense que c'est ce qui
devrait normalement se produire étant donné que ce sont les
organismes qui sont chargés finalement de faire ce projet
d'intégration, préparer le plan d'intégration, mais
j'aimerais avoir la réaction
du ministre là-dessus. Il me semble que de l'introduire à
l'article 56 c'est peut-être une prudence.
M. Lazure: Oui, on a dit l'autre fois qu'on reconnaîtrait
l'équivalent de ce qui est appelé mandataire ici, ou
représentant légal, c'est la même chose. Je pense aussi que
ce serait prudent de l'introduire.
Mme Lavoie-Roux: L'autre article que je voudrais souligner, c'est
l'article 72. C'est également une recommandation qui nous a
été faite par un ou deux autres organismes et qui me semble
intéressante, c'est pour cela que je la souligne au ministre et je
voudrais avoir sa réaction. Est-ce une chose qu'ils ont
envisagé?
M. Lazure: Non. Pas que je sache, mais cela me paraît
intéressant. Cela évoque la PME, la petite et moyenne entreprise,
qui est une de nos cordes.
Mme Lavoie-Roux: C'est dommage que le chef de l'Union Nationale
ne soit pas ici.
M. Lazure: Je pense que cela pourrait être
étudié en regard des moyens incitatifs que le gouvernement a
actuellement dans ses politiques pour la petite entreprise. C'est
intéressant comme idée, en tout cas.
Mme Lavoie-Roux: Enfin, ce serait peut-être en
collaboration avec le ministère de l'Industrie et du Commerce.
M. Lazure: Oui, à ce moment-là.
Mme Lavoie-Roux: Peut-être que ceci pourrait être
opérationnalisé. Les autres mémoires parlaient d'un groupe
de personnes handicapées. Je vous remercie. Je pense qu'il y a plusieurs
autres recommandations qui sont intéressantes, vos recommandations
générales, par exemple, qui touchent, par exemple les
barrières architecturales, les téléphones signaux
d'urgence, les trottoirs, et qui nous ont été signalés par
d'autres et qui ne trouvent pas de place précise dans le projet de loi.
Evidemment, ce sont des choses techniques, mais qui, j'espère, pourront
être transmises aux ministères qui ont la responsabilité de
ces problèmes. Alors, je désire vous remercier pour votre
mémoire.
Le Président (M. Marcoux): Oui.
M. Marcoux (André): J'aurais, si vous le permettez,
quelques remarques ou questions. Si on se réfère à
l'allocution de M. Lazure du 29 novembre concernant la possibilité de
voir, suite à l'étude des ministères concernés,
soit les Travaux publics, les Affaires sociales ou autres, installer dans les
édifices publics les signaux lumineux d'urgence et adapter les
téléphones pour l'auditif, par exemple, j'aimerais faire
remarquer qu'en 1977 on peut maintenant dissocier les deux attributs "sourds"
et "muets". Car une personne qui est sourde n'est pas nécessairement
muette. C'est une remarque en passant. D'autre part, si on regarde le service
d'aide à domicile, on le souligne dans notre mémoire et, dans le
fond, c'est ce qu'on veut dire, surtout le mémoire synthèse qu'on
vous présente aujourd'hui et pour faire aussi un peu le lien avec ce que
M. Lazure a dit tout à l'heure lors du mémoire
précédent, les catégories de clientèles qui sont
privilégiées par les services à domicile sont
effectivement les handicapés, les personnes âgées, les
malades chroniques.
Mais si on regarde dans le contexte dans lequel cette politique est
appliquée concrètement, c'est-à-dire qu'on donne des
services de coûts de durée à cette clientèle,
lorsqu'on sait que c'est une clientèle à jour, parce qu'il n'y a
pas d'autre moyen, on n'est pas encore sur le marché du travail ou dans
une insertion sociale, c'est une catégorie de clientèle ou des
catégories de clientèles qui demandent des services à long
terme.
Ces gens sont toujours pris avec le fait que ce sont des politiques
appliquées par des établissements à court terme, on parle
de deux ou trois mois. Cela crée un problème et c'est dans ce
sens qu'on souligne, dans le mémoire synthèse l'idée
d'adapter les services à domicile aux clientèles. Selon nous,
c'est quand même illogique de favoriser cette clientèle et
d'arriver avec des services de deux mois.
M. Lazure: Vous avez absolument raison, je pense que vous
êtes le premier à souligner cette anomalie. Je note, je pense
qu'il va falloir, dans les soins et services à domicile, aller un peu
vers cette même division qu'on a pour soins hospitaliers, soins
hospitaliers prolongés, soins hospitaliers à court terme, si vous
voulez. Alors, on peut imaginer la clientèle des personnes
handicapées dans plusieurs cas, à laquelle s'appliqueraient des
services à domicile presque indéfinis, prolongés en tout
cas dansle temps. Je pense qu'on va apporter cette mise au point aussi aux
CLSC, aux CSS, aux organismes du réseau.
Mme Tremblay: II y a peut-être plus que ça, c'est
malheureusement seulement un oui-dire, je ne peux pas apporter de statistiques,
je ne peux pas vérifier. C'est une plainte formulée parfois par
des individus, à savoir que les services à domicile urbains sont
valorisés par rapport aux services à domicile ruraux.
M. Lazure: Cela, je protesterais avec véhémence si
c'était vrai, mais ce n'est certainement pas une politique du
ministère.
Mme Tremblay: Je n'en doute pas.
M. Lazure: On va vérifier ce que vous dites.
M. Mongrain: Une dernière question, excusez.
M. Marcoux: Je n'ai pas terminé. Cela achève. On
regarde aussi les possibilités d'inciter les entreprises de 50
salariés et plus à déposer des plans
d'embauche pour les handicapés. Je pense que c'est quand
même une porte ouverte qu'on se garde par rapport au projet de loi comme
tel, mais il demeure que, même si on insère ça dans une
loi, pour les handicapés de la région 01, ça
représente peu de possibilités d'aller sur le marché du
travail, parce que les entreprises ayant 50 salariés et plus, c'est
quand même seulement les bureaux gouvernementaux, les hôpitaux et
autres. Les chances, pour le marché du travail, des handicapés de
la région 01 sont très faibles, même si, à mon avis,
c'est strictement une porte ouverte.
M. Lazure: J'ai dit à plusieurs reprises que le chiffre
50, on allait le réviser et peut-être même que cela n'est
plus utile d'avoir un chiffre à partir du moment où cela n'est
qu'incitatif. L'incitation, je pense qu'à la première vue, elle
pourrait s'appliquer à toute entreprise, que ce soit de 5, 10 ou 15
employés.
M. Marcoux (André): C'était d'ailleurs le contenu
de notre mémoire initial, de faire sauter les chiffres.
M. Mongrain: Je voudrais m'adresser au Dr Lazure, à titre
d'information. Ce serait pour savoir comment le Dr Lazure voit le rôle de
l'office dans l'application des plans quinquennaux qui touchent
handicapés auditifs, handicapés moteurs et handicapés
visuels?
M. Lazure: Je m'excuse, je n'ai pas saisi.
Mme Lavoie-Roux: Le rôle de l'office à
l'égard des plans quinquennaux.
M. Lazure: De quels plans quinquennaux parlez-vous?
M. Mongrain: Au niveau des deux plans actuels. Il y a un plan
pour les handicapés auditifs et un plan pour handicapés visuels,
qui sont en étude.
M. Lazure: Oui.
M. Mongrain: II y a possiblement un plan qui va être fait
pour les handicapés moteurs, ainsi que pour les adultes.
M. Lazure: Oui.
M. Mongrain: Comment voyez-vous le rôle de l'office.
M. Lazure: Je vois cela comme des instruments de travail. On
parle, depuis le début de la commission, que l'une des premières
tâches de l'office serait de faire le bilan des besoins, par rapport au
bilan des services existants.
Les plans quinquennaux sont déjà des briques qui vont
servir à l'édifice qui va s'appeler un plan de
développement global. Tant mieux si on a déjà
identifié, pour un type de handicap, autant les be- soins que les
ressources existantes. Cela serait d'autant moins de travail que l'office aura
à faire. Il va sûrement utiliser ces données.
Le Président (M. Marcoux): Je vous remercie au nom de tous
les membres de la commission d'être venus présenter votre
mémoire.
Une Voix: M. le Président.
Le Président (M. Marcoux): Un instant.
M. Lazure: J'aurais une demande spéciale, M. Courcy que je
vois là-bas, qui est un citoyen de la région, a assisté
pratiquement à toutes les séances de la commission. Il voudrait
prendre cinq ou sept minutes de notre temps pour nous faire part de ses
expériences personnelles. Je suggérerais, si les gens voulaient
consentir...
Le Président (M. Marcoux): II y a consentement pour que M.
Courcy puisse nous présenter quelques commentaires.
M. Jacques Courcy
M. Courcy: Je vais être bref. Je m'appelle Jacques Courcy,
je suis handicapé épileptique. Naturellement, à
l'hôpital où j'ai été soigné il n'y a pas
d'organismes ou d'organisation, si vous aimez mieux. Quand j'ai appris cela,
j'en ai créé un moi-même. Cela m'a pris deux mois. Je ne
lirai pas tout mon mémoire. Je n'ai pas besoin de vous le lire.
D'ailleurs, je l'ai donné au ministre des Affaires sociales.
Mais je voudrais tenir compte de quelque chose. J'ai entendu parler de
la carte obligatoire; je crois que le handicapé devrait l'avoir, surtout
le handicapé épileptique. Je parle du handicapé
épileptique parce qu'il m'est arrivé personnellement quelque
chose dans un centre commercial; j'ai perdu conscience, je me suis
retrouvé au centre de police et, en fin de compte, je suis resté
là une fin de semaine. Au point de vue de la société,
n'ayant pas les moyens de me sortir de là, j'ai été mal
jugé, j'ai été rejeté par la société,
puis, en fin de compte, il a fallu que je fasse faire une enquête
moi-même pour, autrement dit, me justifier.
C'est un point que j'amène; je crois que c'est essentiel, la
carte pour un handicapé, surtout pour les handicapés
épileptiques, parce que je représente les handicapés
épileptiques. Vous savez que le projet de loi, pour moi, le
définir avec un esprit ouvert, c'est pas mal difficile.
Mais comme je le disais ici à l'enquête, vous savez, M. le
ministre, que, pour un handicapé, critiquer avec un esprit ouvert
surtout quand il s'agit d'un projet de loi comme la loi no 9, ce n'est pas
toujours facile, puisque c'est rare que nous puissions donner notre version.
C'est vrai. C'est rare que les handicapés puissent donner leur version,
car ce ne sont que des organismes; ce n'est pas parce que je suis contre les
organismes, je suis pour les organismes. Seulement, il y en a, autrement dit,
qui profitent un peu trop des handicapés dans la société.
C'est pourquoi je dis cela.
Autrement dit, c'est entendu que vous ne pouvez pas entendre tous les
handicapés de la ville de Québec, ni de la province, mais cela
serait la version la plus juste, la plus équitable et parfois la plus
honnête. Je fais partie de certaines organisations dans ma paroisse; j'y
entends parler de certaines choses. Je fais partie, autrement dit, un peu de
l'âge d'or, parce que c'est l'âge d'or qui m'a
réadapté un peu à la vie sociale, autrement dit, à
la société. J'arrive à l'âge d'or une
journée, il y avait des cours pour l'âge d'or, j'avais pris des
cours, j'avais payé. Alors, il arrive...
Je peux parler un peu plus fort pour me faire comprendre.
Le Président (M. Marcoux): Alors, vous pouvez y aller,
monsieur.
M. Courcy: Alors, il vient donner une démonstration de ce
qu'étaient les coûts comment appelle-t-on cela? d'une
coopérative funéraire. Il était avec un autre. Il y avait
là des bonnes dames de l'âge d'or, qui reçoivent de
l'assistance sociale, parce qu'elles ne reçoivent pas de pension.
J'étais moi-même assis en avant. Il a dit: II n'y a qu'avec une
sorte de gens qu'on fait un trou; c'est avec le service social, les gens qui
bénéficient du service social. Nous autres, on ne leur donne pas
une tombe de drap, on leur donne une tombe de bois. Et il a
éclaté de rire. Vous comprenez bien que se faire envoyer cela en
pleine figure, c'est pas mal difficile, c'est dur d'accepter cela, même
et surtout quand on a en arrière de nous des personnes d'un certain
âge. Même si on est bien compris, cela nous froisse toujours un
peu. Et moi de répliquer: Le gouvernement ne donne pas $500 pour un
handicapé qui meurt? Il dit: Oui. J'ai dit: Si la famille veut donner
plus, est-ce qu'elle pourrait en donner, comme c'était prévu dans
l'ancienne loi? Il a dit: Non, si tu donnes $25, le gouvernement ne donne rien.
C'est fini pour cela.
On va passer au logement. Prenez le logement. J'ai eu connaissance de
quelque chose l'année passée, parce que j'en ai été
victime; ce n'est pas moi qui étais le propriétaire, mais cela ne
fait rien. Vous avez des personnes qui ont perdu leur chaste époux, ou
qui se sont séparées, si vous aimez mieux. Vous avez des
personnes qui ont un grand logement. Nous, les personnes handicapées, on
s'en va là. Elles aussi vivent du bien-être social. Moi, je n'aime
pas vivre du bien-être social, être tous sur le même pied,
avec ces personnes, les jeunes, j'aimerais que ce soit séparé. Je
ne veux pas rien dicter à personne, remarquez bien. Mais tout retombe
sur le dos du handicapé. Vous savez, les plus riches dans la
société dénoncent facilement le handicapé; ils vont
caler le handicapé, mais ils ne déclarent pas, par exemple, ce
qu'ils cac'hent à l'Etat. Ce sont là deux choses distinctes.
Certains handicapés sont frustrés parfois, comprenez-vous? j'en
viens maintenant au rôle de l'office. Je vais vous dire bien franchement,
après 20 ans d'hospitalisation, on m'a dit que j'étais fini. Je
suis sorti, je suis allé au bureau de placement provincial, au bureau de
placement fédéral; qu'est-ce qu'on m'a répondu? Le
handicapé, le monde du Québec n'est pas habitué à
cela. Je suis même allé voir si vous me donnez votre
protection le maire Gilles Lamontagne; savez-vous ce qu'il m'a
répondu? et je partais à pied de la rue Saint-Vallier pour
monter jusque là il m'a répondu que je ne voulais pas
m'aider moi-même. Alors, que voulez-vous? A 28 ans, j'avais des forces
physiques mais à 41 ans, je n'ai plus les mêmes forces que lorsque
je suis sorti de l'hôpital. Alors, je ne retournerai pas. Je voudrais
faire comprendre cela: Un handicapé, que ce soit un handicapé
physique ou mental, il n'y a pas seulement son handicap qui paraît qui
compte, mais seulement il y a le rôle des médicaments, il y a le
rôle de la société, de sa parenté, il y a toutes
sortes de choses qui peuvent ne pas l'avancer dans la société.
Même la société le rejette et cela, je peux vous l'affirmer
et vous le prouver n'importe quand c'est parce que je veux me
dépêcher parce que la Vierge Marie va m'en vouloir ce soir
ce que vit le handicapé dans la solitude.
Une autre chose que j'aimerais, c'est qu'on protège les
handicapés épileptiques devant les tribunaux parce que,
réellement, on les pense ivres et, parfois, ils ne le sont pas. C'est ce
que je voudrais, autrement dit, que l'office si vous en créez un
les défende adéquatement, si on veut faire une petite
enquête. Aussi, j'aimerais voir réapparaître dans nos
hôpitaux pour les handicapés ce qu'on avait à
Saint-Hilaire et à l'Hôtel-Dieu du Sacré-Coeur, ici
vous appelez cela des ateliers protégés et moi j'appelle cela des
centres de jour. Cela éduquait le handicapé en bas âge, lui
montrait à faire de ses mains quelque chose dans la vie et à se
débrouiller de lui-même. Moi, je ne vois pas un handicapé
épileptique, par exemple, dans un centre d'accueil parce que ce n'est
pas une réhabilitation pour lui.
Je voudrais aussi que les handicapés épileptiques, vous
savez que lorsqu'on sort d'un hôpital, après 20 ans, on est pas
mal je vais vous dire bien franchement moralement fichu; on ne
connaît rien de la vie, on ne sait rien parce qu'on n'est jamais sorti.
La majorité des handicapés neurologiques, qui sont traités
dans des cliniques neurologiques, n'ont pas vu le monde. Alors, quand ils
sortent, c'est entendu qu'ils font un peu de "fun". J'ai été le
premier moi-même et le chef du Parti québécois peut
le dire, il m'a vu souvent ici parce que j'ai appris les lois ici, un peu,
c'est comme cela que je me suis instruit seulement qu'ils ne soient pas
rejetés des loisirs d'une organisation régionale. Quand je vois
une organisation régionale installer, autrement dit, des loisirs pour
handicapés et choisir un à un celui qu'elle veut avoir
d'ailleurs, je l'ai vu dernièrement je ne trouve pas cela
logique, et même je trouve cela dur.
Deuxièmement, on parlait d'hôpitaux tout à l'heure,
vous savez, M. le Président, M. le ministre, que la vie d'une personne
c'est beaucoup. Vous pouvez créer plusieurs handicaps en laissant des
enfants qui viennent d'en dehors d'une ville, manger dans le portique d'un
hôpital depuis la Loi 65, j'ai vu cela l'an dernier lors de mon
examen
annuel des biscuits et des sandwiches. J'ai trouvé cela
bestial. Quand on jette tant de nourriture dans les hôpitaux, au lieu de
les envoyer manger un bon repas chaud. Ils savent, autrement dit, qu'un examen
dure une journée, cela ne dure pas deux ou trois heures, cela dure une
journée. Alors, quand ils viennent d'en dehors de la ville de
Québec, pourquoi ne pas leur servir un repas chaud, à ces
enfants, au lieu de les laisser dans un portique à manger des sandwiches
et des biscuits. J'ai trouvé cela bestial.
Nous, qui vivons dans la société, sommes payés pour
douze mois. Cela fait 48 semaines. Le calendrier, c'est trompeur. Allez vous
louer une chambre et vous allez voir que c'est là que vous vous en
apercevez, car on vit 52 semaines dans un an. Vous allez voir que, quand vous
avez 52 semaines dans un an, vous vivez 13 mois, même si vous êtes
payé pour 12. Comment pouvez-vous arriver avec tout cela?
Il y a une autre chose que j'aimerais noter aussi. Les
bénéficiaires de l'aide sociale, prenez, par exemple, les
handicapés épileptiques... excusez, j'ai eu un blanc de
mémoire, excusez, c'est vrai qu'on vit 48 semaines. Supposons,
aujourd'hui, que je change de logis, on parle de loyer, je parlais de ce sujet;
je vais partir d'où je demeure, en chambre et pension, j'ai droit au
téléphone, j'ai certains privilèges parce que c'est une
dame de l'âge d'or qui m'a logé et elle a 75 ans aujourd'hui. Mais
si je veux aller dans un autre appartement et que je veux avoir le
téléphone à mon nom; combien m'en coûte-t-il? $50 en
dépôt pour avoir le téléphone et pourtant, demandez
à M. Jean-Denis Bouchard, il me l'a toujours dit, il était
autrefois président du bien-être social, le
téléphone, c'est une nécessité, ce n'est pas un
luxe. Je vais donc demeurer dans un autre appartement. J'ai à faire un
dépôt de $50 tout de suite pour avoir le téléphone,
payer un peu ma chambre et ma pension. Mais si je vais dans un "flat", car,
parfois on ne trouve pas de chambre et pension, on vous dit parce que
vous êtes épileptique, et vous êtes obligé de le dire
de repasser le lendemain, qu'un monsieur est venu ce midi. Donc, on vous
dit de repasser le lendemain, et quand vous revenez, c'est encore marqué
"chambre à louer", mais on vous dit que la chambre est louée et
ce n'est pas vrai.
Le Président (M. Marcoux): M. Courcy...
M. Courcy: II y a une autre chose. J'aimerais mentionner le genre
d'appartements que vous pourriez construire, comme pour l'âge d'or.
Prenez les édifices d'appartements qui sont à prix modique, non
pas à $210 par mois, ce qui équivaut à un loyer, mais
seulement à $100, $150, $135, comme pour les gens de l'âge d'or.
Il y a encore une dernière chose que je veux mentionner, c'est le cas de
ceux qui sont en chaise roulante.
Il y en a des handicapés en chaise roulante; c'est facile de
faire des rampes à la place d'escaliers dans une maison à
logements. Ce qui ne coûte pas plus cher.
Le Président (M. Marcoux): M. Courcy, il est 18 h 35 et
les membres de la commission...
M. Courcy: Si vous avez quelque chose...
Le Président (M. Marcoux): Non, non, ce n'est pas
pour...
M. Courcy: Si vous voulez me questionner, questionnez-moi.
Le Président (M. Marcoux): Non, peut-être vous
donner le loisir d'insister sur un autre ou deux autres points que vous jugez
très importants avant que nous terminions nos travaux.
M. Courcy: Bien, il y a un point surtout que j'ai ici dans mon
mémoire. Vous savez que vous avez le droit d'emprunter à la
banque $500. C'est absurde, c'est une chose que je trouve absurde pour le
handicapé. Autrement dit, vous, vous payez de l'intérêt,
d'accord. C'est bon pour le gars qui gagne $4 000 par année ou moins et
qui a beaucoup d'enfants. C'est bon, autrement dit, pour celui qui est à
part de son chaste époux, comme je vous ai dit tout à l'heure.
Maintenant, je dis qu'il serait préférable d'en donner un peu
plus au handicapé et de le séparer de "cette gang", parce qu'on
est mal vu dans la société et cela retombe tout le temps sur ses
épaules, comme je vous le dis.
Maintenant, je parle des agents. On est lésé par un
article de loi parce qu'on n'a pas le droit de mettre plus de $200 à la
banque. C'est une affaire primordiale que j'aimerais vous faire comprendre et
j'espère que vous allez me comprendre. Celui à qui il reste
$0.25, $0.50, $0.75 à la fin du mois, qu'il ne soit pas
lésé d'en mettre plus à la banque. Là, on a le
droit de mettre $200 à la banque, bon, pas plus, sans cela, sous peine
d'une amende de $200 et, en plus, deux mois de prison. Je trouve cela absurde
parce que celui qui voudrait économiser, il pourrait le faire en se
sacrifiant; là, vous lui montreriez à se sacrifier et, en
même temps quitte à payer de l'impôt, je ne suis pas
contre cela cela lui donnerait la permission... C'est là qu'on
jouit de la vie, quand on a quelque chose par sacrifice un petit peu, c'est
là qu'on se sent léger. C'est un point auquel je voulais venir
parce qu'aller emprunter $500 à la banque..., tandis que le gouvernement
fait de la publicité contre les cartes de crédit Chargex
et Master Charge bon. C'est un point.
Un dernier point où je veux en venir. Je voudrais et je vais le
lire: Les agents qui sont dans vos bureaux locaux, pourquoi ne pas les
documenter sur les lois que vous adoptez ou sur les amendements? Et s'ils sont
documentés, vos hommes, pourquoi ne pas les forcer à apprendre
leur travail comme il le faut afin que, lorsqu'on leur pose une question, ils
sachent nous répondre au lieu de parler de barème qu'ils ne
connaissent même pas eux-mêmes ou bien répondre par des
choses qui ne rentrent pas dans la loi ou faire des réponses ridicules?
J'ai fait face à cela. C'est pourquoi j'aime à préciser ce
point. Maintenant, si vous avez
des questions à me poser, je n'ai pas besoin de vous lire le
texte.
M. Lazure: M. le Président, je veux remercier...
M. Courcy: Je vous remercie beaucoup M. Lazure.
M. Lazure: Je vous en prie. J'ai noté aussi en particulier
le fait que, dans certaines municipalités, le service des loisirs qui
est même supposé être à l'adresse des
handicapés, ferait une certaine discrimination, d'après vous,
pour les patients épi-leptiques, pour les handicapés
épileptiques.
M. Courcy: Oui, monsieur, parce que samedi soir, j'y suis
allé et j'ai remarqué quelque chose.
M. Lazure: Alors, il y a encore beaucoup de travail à
faire...
M. Courcy: Puis je vais vous dire plus...
M. Lazure: ... parce que c'est une discrimination à
l'intérieur d'un groupe qui se plaint déjà d'être
discriminé.
M. Courcy: Oui, parce que je vais vous...
M. Lazure: Ecoutez, je pense...
M. Courcy: Est-ce que je pourrais vous apporter quelque chose qui
va être...
M. Lazure: Si vous voulez, après la commission; M. Courcy,
je vais vous voir après la commission, si vous voulez.
Le Président (M. Marcoux): Je vous remercie. Mme le
député de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Je veux vous remercier d'être venu et je
pense que c'était une bonne suggestion du ministre que nous vous
entendions. Ce qui m'étonne, c'est qu'on n'ait pas entendu de groupe ou
de représentants de handicapés qui souffrent d'épilepsie,
et je pense que c'est un groupe qui, justement, peut plus facilement
peut-être que d'autres, parce que leur handicap est moins évident.
A maints égards, il peut être l'objet de discrimination,
peut-être pas nécessairement voulue, mais à cause de
l'ignorance et de certains préjugés. Je pense que votre
témoignage est extrêmement intéressant et je veux vous
remercier, M. Courcy, d'être venu, et surtout de votre
persévérance à nous écouter. Je vous remercie
beaucoup.
M. Lazure: M. le Président, je proposerais que le
mémoire de M. Courcy, comme d'ailleurs le mémoire de chaque
groupe qui en a fait parvenir un à cette commission, soient
versés au journal des Débats.
Le Président (M. Marcoux): Vous voulez dire les
mémoires qui n'ont pas été entendus.
M. Lazure: Je parle de tous les mémoires, même les
groupes qui ont été entendus, ce qu'on va voir au journal des
Débats, c'est simplement les échanges verbaux. Il me semble qu'il
y aurait intérêt à ce que le public et les autres
parlementaires surtout, et les fonctionnaires puissent avoir accès
à tous les mémoires qui nous ont été soumis.
Le Président (M. Marcoux): Est-ce que cette motion est
adoptée?
Mme Lavoie-Roux: Adopté.
Le Président (M. Marcoux): Adopté.
M. Courcy: Je vous remercie beaucoup, M. le ministre, ainsi que
les membres de la commission, d'avoir prolongé votre temps. C'est un
signe de bonne foi que je remarque en vous. Je crois que votre loi va finir par
aboutir à quelque chose. Je l'espère.
Le Président (M. Marcoux): Je vous remercie, M. Courcy. M.
le député de Rivière-du-Loup.
Fin de l'audition de mémoires
M. Boucher: Compte tenu que nous avons entendu, à ce jour,
au-delà de 25 mémoires et que l'ensemble des mémoires,
qu'il reste à entendre, reprend les mêmes questions qui ont
été posées et auxquelles le ministre a répondu, je
pense, à la satisfaction des organismes qui les ont
présentés, je proposerais que la commission mette fin à
ses travaux en se déclarant suffisamment informée, et que le
rapport soit fait à l'Assemblée nationale dans les meilleurs
délais.
Le Président (M. Marcoux): Est-ce qu'il y a des
députés qui voudraient parler sur cette motion?
Mme Lavoie-Roux: Je pense qu'il est toujours
téméraire, M. le député de Rivière-du-Loup,
de dire qu'on est suffisamment informé. Mais compte tenu,
néanmoins, du fait que ce projet de loi sur les handicapés
remonte déjà le premier a plus d'un an à
près de deux ans, ou un an et demi, compte tenu aussi du fait qu'on a
versé les autres mémoires au journal des Débats et qu'on
pourra en prendre connaissance il y en a quelques-uns dont je n'ai pas
pris connaissance et en tenir compte, tant de la part du gouvernement
que de l'Opposition pour faire les amendements nécessaires, je souscris
à la motion.
Le Président (M. Marcoux): Alors, la motion du
député de Rivière-du-Loup est adoptée. J'aimerais
remercier tous les membres de la commission, ainsi que tous nos invités,
de la collaboration qu'ils ont apportée aux travaux de cette commission
qui s'est déroulée avec célérité.
Mme Lavoie-Roux: Avec sérénité, M. le
Président.
Le Président (M. Marcoux): Sérénité
et sévérité.
M. Lazure: M. le Président, je voudrais souligner la
collaboration des deux partis de l'Opposition, en particulier le parti de
l'Opposition officielle. Je veux les remercier et remercier aussi les
collègues du parti ministériel et je vous remercie, M. le
Président, pour votre efficacité.
Le Président (M. Marcoux): Cela me fait plaisir. Le
rapporteur de la commission, le député de Champlain, fera rapport
à l'Assemblée nationale que la commission des affaires sociales a
terminé l'audition des mémoires concernant le projet de loi no 9.
Je me dois, à ce moment-ci, d'ajourner les travaux de notre commission
sine die.
(Fin de la séance à 18 h 46)
Référer à la version PDF page B-9043 à
page B-9259