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Version finale

31e législature, 4e session
(6 mars 1979 au 18 juin 1980)

Le jeudi 3 mai 1979 - Vol. 21 N° 65

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude du projet de loi no 1 - Loi sur le supplément au revenu de travail


Journal des débats

 

Etude du projet de loi no 1

(Dix heures dix-huit minutes)

Le Président (M. Marcoux): A l'ordre, madame, messieurs!

La commission permanente des affaires sociales est réunie pour poursuivre l'étude article par article du projet de loi no 1, Loi sur le supplément au revenu de travail.

Les membres de la commission sont M. Forget (Saint-Laurent), M. Goldbloom (D'Arcy McGee) remplacé par Mme Lavoie-Roux (L'Acadie).

Vous remplacez M. Goldbloom?

Mme Lavoie-Roux: J'ai toujours pensé que j'étais...

Le Président (M. Marcoux): Remplacez-vous M. Goldbloom?

Mme Lavoie-Roux: Non, mais que j'étais...

Le Président (M. Marcoux): Intervenant, point?

Mme Lavoie-Roux:... que j'étais à la commission.

Le Président (M. Marcoux):... alors, M. Goldbloom (D'Arcy McGee), remplacé par Mme Lavoie-Roux (L'Acadie); M. Gosselin (Sherbrooke), M. Gravel (Limoilou), M. Grenier (Mégantic-Compton), M. Lavigne (Beauharnois), M. Lazure (Chambly), M. Martel (Richelieu), M. Paquette (Rosemont), M. Samson (Rouyn-Noranda), M. Shaw (Pointe-Claire).

Les intervenants sont: M. Alfred (Papineau), M. Cordeau (Saint-Hyacinthe), M. Couture (Saint-Henri), M. Lacoste (Sainte-Anne), M. Larivière (Pontiac-Témiscamingue), M. Marcoux (Rimouski), M. Marois (Laporte)... M. Paquette (Rosemont), remplacé par M. Marois (Laporte).

M. Le Moignan: M. le Président, je remplace qui, moi?

Le Président (M. Marcoux): M. Grenier (Mégantic-Compton), remplacé par M. Le Moignan (Gaspé).

Calcul du supplément au revenu de travail (suite)

Vous en étiez, si on m'informe bien, à l'article 6. J'appelle l'article 6.

M. Marois: Je n'ai pas d'amendements à proposer, M. le Président.

M. Forget: Un instant, M. le Président. Je suis un peu déphasé.

Prenons le paragraphe b), M. le Président. Il semble qu'un des aspects les plus, disons-le, surprenants de ce projet, c'est la décision qu'il implique d'aller carrément de l'avant dans la supplémentation des revenus des travailleurs autonomes, c'est-à-dire des propriétaires des petites entreprises, de petits commerces, d'artisans, etc. Etant donné les problèmes de comptabilité — ne serait-ce que ceux-là, ils sont substantiels dans ce secteur — c'est un domaine où on se serait attendu que la réglementation soit abondante, parce que, évidemment, il y a des règles qui sont utilisées pour la détermination des revenus d'un travailleur autonome pour les fins fiscales qui sont, évidemment, substantiellement différentes des règles utilisées pour la détermination des revenus d'un salarié, étant donné qu'il s'agit d'une entreprise. La référence aux articles 119 et 119a, si je comprends bien, c'est la référence à un certain nombre de déductions permises aux chefs d'entreprises.

Est-ce que le ministre pourrait nous tracer, pour le bénéfice du journal des Débats, un tableau de la façon dont on traitera le revenu pour les fins du calcul de la supplémentation du revenu et qui diffère des modes de calcul utilisés pour l'impôt, de manière que ceci soit bien clair?

M. Marois: Pour l'essentiel, M. le Président, je dirais que les distinctions fondamentales sont les suivantes. Dans le cas où il s'agit d'un revenu de travail de salaire, on se base, comme point de départ, sur le salaire brut, en tenant compte d'un certain nombre d'éléments qui interviennent de façon additionnelle, le revenu et le reste additionnel. Dans le cas des travailleurs dont, pour l'essentiel, le revenu provient de commissions, ce sont les règles générales de la Loi de l'impôt qui prévalent. Il y a certaines dépenses qui sont autorisées. On s'en tient strictement à cela.

Dans le cas de ce qu'on appelle les travailleurs autonomes, ceux que vous avez évoqués comme exemple, comme les agriculteurs, on se base sur le revenu net du travailleur autonome, conformément, d'ailleurs, à la Loi de l'impôt. Là-dessus, on suit essentiellement les règles de la Loi de l'impôt et les articles 119 et 119a sont les articles de la Loi de l'impôt qui, précisément, font référence à l'amortissement, lequel n'est pas réduit du revenu brut de l'entreprise. L'article 119a, c'est ce qu'on appelle la perte terminale ou le complément de l'amortissement.

Après examen, il nous semblait que, comme on suit exactement la Loi de l'impôt, c'est exactement la même chose que les règles générales de l'impôt, dans leur cas, il n'y a pas besoin de règlements.

M. Forget: Vous ne tenez aucun compte, dans le cas des agriculteurs, de l'autoconsommation, c'est-à-dire que, dans le cas des agriculteurs, ils produisent ordinairement des biens qu'ils peuvent consommer eux-mêmes. C'est évidemment un élément...

Quand on regarde le problème de la pauvreté, il reste que, du côté des fermiers, même s'il n'y a pas un montant qui est reçu en espèce, en monnaie provenant de la vente d'une certaine partie des biens, il reste que cela contribue au bien-être relatif d'un agriculteur par rapport, par exemple, à une personne qui vit dans une ville, qui est locataire, qui doit payer son loyer, qui doit acheter tous ses radis ou toute sa laitue, tout son lait, etc. Il reste qu'il y a une consommation en nature sur les fermes qui est un phénomène qui est probablement ignoré par l'impôt parce qu'il n'y a pas de transaction financière et c'est une chose qu'il serait trop difficile de mesurer pour l'impôt. Le but de l'impôt dans le fond, c'est de prélever; bien qu'il y ait un concept du revenu idéal, il reste que c'est de prélever une quote-part sur le revenu financier des gens, beaucoup plus que sur le revenu en nature. Mais quand notre préoccupation est une préoccupation d'équité, de lutte à la pauvreté, c'est une dimension qui devient importante et qui pose un certain nombre de problèmes d'équité, justement, entre les gens des villes et les gens des campagnes. On peut se demander si le supplément de revenu qui est donné au même taux à des personnes pour qui l'autoconsorn-mation est un facteur important... Quand on a un petit poulailler, qu'on a une vache, qu'on a un jardin potager, qu'on peut se chauffer à même le bois qu'on prend sur la terre etc., il reste que le problème de la pauvreté n'a pas du tout la même dimension que dans les villes. Si je comprends bien, vous n'en tiendrez aucun compte.

M. Marois: Effectivement, les règles qui s'appliquent concernant l'autoconsommation sont les règles générales de l'impôt. On suit exactement les règles de l'impôt, pour un certain nombre de raisons. D'une part, c'est que — d'ailleurs, même si, théoriquement, en vertu de la loi de l'impôt, il est possible, il serait possible pour le ministère du Revenu d'en tenir compte — la pratique a démontré que c'est extrêmement difficile à évaluer, à cerner comme notion. C'est extrêmement difficile à quantifier, à évaluer financièrement et, en plus, c'est extrêmement variable et changeant. On assiste, par exemple, même en milieu urbain aujourd'hui, au développement de ce qui s'appelle dans certains coins des potagers communautaires. Par ailleurs, semble-t-il, d'après ce qu'on me dit, tout compte fait, c'est relativement marginal dans l'ensemble du budget de fonctionnement de la famille ou du ménage.

Pour ces raisons, par prudence et aussi en tenant compte du fait de l'extrême difficulté dans l'évaluation des choses, pour l'instant, on a préféré s'en tenir strictement aux règles qui s'appliquent présentement à l'impôt et à la pratique.

M. Forget: Je crois que le ministère de l'Agriculture a des méthodes particulières pour évaluer le revenu des agriculteurs qui ne se réfèrent pas à la Loi de l'impôt, pour certaines mesures d'aide aux agriculteurs. L'agriculteur qui est nominalement fermier, bénéficie d'une subven- tion pour le paiement de ses taxes foncières, par exemple. Est-ce que cela sera considéré, indépendamment des revenus de la ferme et indépendamment des revenus de l'agriculteur, comme les versements, les prestations sociales qui sont reçues par d'autres groupes dans la population?

M. Marois: II y a deux volets. Le premier concernant... Il ne faut pas perdre de vue que les gens qui seront touchés dans le cas des agriculteurs, forcément, il s'agit des petits. C'est vrai, c'est exact de dire, je pense bien, que le ministère de l'Agriculture a développé une certaine expertise d'évaluation des revenus de la ferme. Cette expertise s'applique avec beaucoup plus de précision dans le cas des fermes et des exploitations agricoles d'une certaine taille. Dans le cas des petites exploitations agricoles qui rapportent peu, là aussi, l'expertise est, comment dirais-je, très relative, de sorte qu'on en vient sensiblement aux règles générales que j'invoquais.

Dans ce sens, pour la raison que j'ai invoquée, en ajoutant ça aux raisons additionnelles invoquées tantôt, pour l'instant, on préfère s'en tenir aux règles générales.

M. Forget: Pour ce qui est des petits commerçants, c'est seulement la dépréciation, l'amortissement du capital qui n'est pas soustrait du revenu brut, toutes les autres dépenses, toutes les autres déductions...

M. Marois: Du revenu net.

M. Forget: Non, c'est-à-dire que les déductions sont faites du revenu brut pour arriver au revenu net.

M. Marois: Oui.

M. Forget: Toutes les autres déductions permises par l'impôt seront également prises en compte.

M. Marois: En tenant compte cependant du test d'actif qui s'applique.

M. Forget: Le test d'actif non déprécié, j'imagine ou déprécié. (10h30)

M. Marois: J'ai distribué un projet de règlement. Si on regarde le projet de règlement, à l'article 2, il s'agit de la valeur marchande au-delà de laquelle une famille ou une personne seule n'est pas admissible à un supplément pour une année fixée à $50 000. Et, ensuite, il y a la résidence principale, l'automobile et le reste. Donc, c'est la valeur marchande.

M. Forget: Mais la valeur marchande, par exemple, pour un petit dépanneur qui a probablement en inventaire une somme malgré tout appréciable, il a le commerce lui-même, le local dont il peut être propriétaire, dans certains cas...

M. Marois: Ou locataire.

M. Forget: ...ou locataire. S'il est locataire, cela ne pose pas de problème sur la valeur de l'actif. Mais s'il en est propriétaire, est-ce que cela n'exclut pas effectivement une très grande proportion des artisans ou des petits commerçants? Ce n'est pas un gros commerce qui a un actif de $50 000. Il s'agit d'un actif net, j'imagine?

M. Marois: D'après les relevés qu'on a faits, la réponse serait non.

M. Forget: C'est l'actif brut.

M. Marois: Non, j'allais dire que cela n'exclut pas, comme vous sembliez le suggérer ou comme vous le formuliez sous forme de question, un nombre important de commerçants, dans la mesure où on va perdre de vue... vous avez plusieurs situations, au niveau des petits commerçants. Très souvent, ils sont locataires. Deuxièmement, très souvent, leur commerce est accroché à leur résidence. Bien sûr, le test d'actif non seulement établit une valeur marchande de biens à $50 000, mais on ne tient pas compte, en plus, de la résidence principale, le terrain sur lequel elle est érigée, les meubles et effets d'usage domestique de la résidence principale et l'automobile qui est habituellement utilisée à certaines conditions, établies par le règlement que vous avez devant vous.

M. Forget: Est-ce qu'il ne serait pas plus juste de considérer la valeur nette des biens des conjoints? Dans le cas d'un petit commerçant, il va y avoir un inventaire. Il va y avoir des sommes qui sont probablement dues à la banque ou à la caisse populaire — étant donné que c'est un prêt commercial, à ce moment-là, je pense bien que c'est à la banque — et cela ne prend pas un gros commerce ou une grosse entreprise, dans le fond, pour avoir des biens qui peuvent à l'occasion, dépasser $50 000 de nos jours et, malgré tout, être un commerce extrêmement modeste.

M. Marois: On tient compte cependant, M. le Président — je pense qu'il faut peut-être distinguer les deux, les voir l'un par rapport à l'autre — dans l'établissement des revenus, lorsqu'il s'agit d'un travailleur autonome, du revenu net. Forcément, toute la partie des dépenses qui est de la nature d'une dette, par exemple, des versements annuels sur cette dette-là, se trouve déduite, puisqu'on tient compte du revenu net. S'ajoute à cela le test d'actif qui est évoqué.

M. Forget: Si vous tenez compte du revenu net, il me semble qu'il serait logique de tenir compte de la valeur nette de l'actif, parce que justement quelqu'un qui pourrait être pauvre, selon la définition du revenu que vous avez, qui aurait un revenu net extrêmement faible, parce qu'il a des paiements à la banque, etc., finalement, il a presque rien, c'est le profit qui lui reste comme revenu et son profit peut être pratiquement insignifiant.

Il peut, malgré tout, être exclu, si la valeur totale des biens qu'il a sur ses tablettes, par exemple, ou qu'il a en entrepôt, si c'est un artisan, même s'il doit tout cela à la banque, dans le fond, etc., ce n'est pas à lui, il n'a pas l'argent pour les acheter, mais il faut bien qu'il les ait pour travailler. Supposons que c'est un artisan, il a de l'équipement, il a des matières premières. Il va pouvoir être exclu du programme, même s'il est pauvre et même si tout cela, dans le fond, appartient à la banque, cela ne lui appartient pas, mais cela a une valeur marchande de $50 000.

M. Marois: Peut-être que certains chiffres permettraient de mieux voir et mieux cerner la réalité dont on parle. D'après nos évaluations, il y aurait, quand le programme sera complètement en vigueur, sur les 96 000 ménages qu'on évalue, qui tomberaient sous la coupe du programme, 10 000 agriculteurs et 5000 autres travailleurs autonomes, c'est-à-dire des commerçants, des artisans, etc. C'est donc de cela qu'on parle.

L'autre élément additionnel, on a préféré tenir compte de l'actif brut, parce que, quand... Evidemment, c'est un élément nouveau que de tenir compte de la réalité des travailleurs autonomes. Le travailleur autonome qui peut emprunter $50 000 et plus, d'une part, n'est plus au niveau de l'état de revenu ou, à tout le moins, n'est pas un pauvre comme un travailleur salarié au salaire minimum. On ne parle plus du tout de la même chose. Pensez que, passé le cap de $50 000 comme ouverture de possibilité, il s'agit de quelque chose de quand même relativement différent. C'est une raison additionnelle. Je ne vous cacherai pas qu'on a examiné en toute honnêteté la possibilité d'un actif de $100 000. Après réexamen, on en est venu à la conclusion que, dans une première étape, il était préférable de partir à $100 000 pour une autre raison; après avoir regardé le cas, je donnais des chiffres, je parlais d'environ 5000 petits commerçants, petits artisans, et 10 000 agriculteurs. Passé le cap de $50 000, quand on regarde par ailleurs les programmes auxquels sont admissibles les agriculteurs, vous savez qu'ils tombent sous la coupe de toute une série de programmes auxquels ils sont admissibles, les programmes de stabilisation de revenus et le reste, qui sont des éléments qui viennent s'ajouter. Donc, il y a là aussi une question d'harmonisation, pour l'instant, jusqu'à nouvel ordre, avec ces programmes dont il fallait tenir compte dans un premier temps. Par ailleurs, quand on regarde l'autre volet, l'autre extrême, du côté de l'aide sociale, on en tient compte, et je pense que cela a toujours été ainsi, cela a toujours été la valeur brute, sauf pour la maison qui sert de résidence, dans le cas de l'aide sociale.

M. Forget: II faut dire que, dans ce cas, c'étaient des gens qui étaient présumés ne pas détenir un emploi. Alors, la notion de valeur nette ou de valeur brute, dans le cas des gens de l'aide sociale, n'a pas tellement d'importance.

M. Marois: Non. L'argumentation de ce côté, je la faisais simplement à titre de rappel.

M. Forget: Dans le cas de l'hypotèque, par exemple, elle était déduite du montant de la valeur de la maison.

M. Marois: Pour la résidence.

M. Forget: La valeur des maisons à l'aide sociale, c'est la valeur nette, c'est l'équité.

M. Marois: C'est exact, pour la résidence.

M. Forget: J'ai l'impression, M. le ministre, qu'il y a une certaine discrimination que semblent confirmer les chiffres que vous nous donnez. S'il y a 10 000 agriculteurs, c'est quand même un nombre impressionnant d'agriculteurs, parce qu'il n'y a pas 200 000 agriculteurs au Québec. Il y a quelque chose comme 50 000 ou 60 000.

Mme Lavoie-Roux: 40 000, je pense.

M. Forget: Peut-être même 40 000 agriculteurs. Un agriculteur sur quatre va bénéficier de la sécurité du revenu. Il y a des centaines de milliers de petits commerçants, de petits boutiquiers qui vivent tout juste au seuil de la pauvreté avec des heures... Evidemment, si on calculait leur salaire horaire, ces gens n'ont probablement pas $2 l'heure, dans bien des cas. Qu'on en ait seulement 5000 pour tout le Québec qui vont se qualifier, cela indique que, par rapport aux agriculteurs, on les traite plus sévèrement. Je comprends qu'il y a des problèmes d'évaluation des revenus; mais peut-être moins grands dans le cas des petits commerçants, parce qu'après tout, il y a la taxe de vente. Donc, on connaît le chiffre de leurs ventes brutes.

Ils doivent quand même comptabiliser leurs achats, parce qu'il y a quand même, là aussi, des exigences comptables plus connues et plus courantes du côté des petits commerçants et que, de tous les artisans, de tous les petits commerçants au Québec, il n'y en a que 5000 qui sont admissibles au programme. Moi, je me dis: C'est, sans aucun doute, une confirmation de l'impression que j'ai, savoir qu'on est très sévère à leur égard, beaucoup plus sévère, en tout cas, qu'on le sera vis-à-vis des agriculteurs. Je n'ai rien contre les agriculteurs, remarquez, il n'y a pas de sot métier et, si on veut leur donner une certaine sécurité de revenu, tant mieux pour eux. Mais je pense que le petit commerçant, le dépanneur, le cordonnier...

Mme Lavoie-Roux: Le tabagiste.

M. Forget: ...le tabagiste, le vendeur de journaux et d'autres sont des gens qui vivent au seuil de la pauvreté dans un très grand nombre de cas, selon nos définitions courantes, de toute façon. L'autoconsommation et, la subvention sur la taxe foncière, ils n'ont rien de tout ça. Je pense qu'on est peut-être un peu sévère à leur égard.

Mme Lavoie-Roux: L'essence pour leur voiture.

M. Forget: Oui.

M. Marois: Quand, en particulier, on regarde des dimensions ou des aspects de la réalité, comme le phénomène de l'autoconsommation, il ne faut pas perdre de vue... Evidemment, c'est extrêmement difficile, tout le monde en convient, de l'évaluer. On sait fort bien, en particulier dans certains types de petits commerces, que l'autoconsommation joue là aussi. Quelle en est l'ampleur, comment l'évaluer en toute équité? C'est extrêmement difficile de l'établir. Evidemment, on est parti de la réalité, des données dont on pouvait disposer au point de départ. Il n'y a pas de précédent. On franchit une première étape donc, il fallait le faire avec une relative prudence.

Maintenant, d'après les données, je pense qu'il faut faire attention aux chiffres aussi, par ailleurs, faire attention aux extrapolations ou aux généralisations qu'on peut faire à partir d'extrapolations sur la base des chiffres, quand vous compariez, par exemple, le nombre d'agriculteurs qui tomberaient sous la coupe du programme par rapport au nombre global d'agriculteurs avec le nombre d'autres travailleurs autonomes par rapport au nombre global de travailleurs autonomes. D'après les données dont on dispose présentement, il semble — je dis bien "il semble"— cela correspond aux chiffres d'ailleurs, y avoir plus de travailleurs agricoles qui se trouvent en situation économique de pauvreté, toutes choses étant égales, parce que c'est une notion relative et tout dépend aussi des seuils qu'on établit, tout dépend aussi des taux de supplément qu'on peut se permettre de donner, quitte à les rajuster éventuellement, ce qui est loin d'être exclu, que, toute proportion gardée, ce qu'on trouve d'équivalent chez les petits commerçants et artisans ou les travailleurs à commission. Alors, on est parti des données qu'on avait. On ouvre cette porte. Dans ce sens-là, c'est quelque chose de nouveau et, comme cela se fait pour l'essentiel par règlement, le test d'actif est établi par règlement, je ne sais pas, sur la base d'une expérience concrète, de pratique d'application du programme, sur une période de six mois à un an où, la première année du programme, on sera beaucoup mieux à même de cerner la réalité et là, de voir les étapes additionnelles qu'on pourra franchir, le réajustement, le cas échéant, soit du test d'actif, que ce soit du pourcentage du taux du supplément et le reste, il y a un certain nombre d'éléments sur lesquels il y a une marge de manoeuvre possible, mais de s'assurer que ce soit fait avec une certaine prudence, en disposant du maximum de données possible qui collent le plus possible aussi à la réalité.

Mme Lavoie-Roux: Est-ce que vous avez examiné la situation des personnes en service domestique?

M. Marois: Oui.

Mme Lavoie-Roux: Est-ce que vous avez évalué ce que cela pouvait représenter avec la...

M. Marois: Vous voulez dire en nombre possible...

Mme Lavoie-Roux: Oui, en nombre.

M. Marois: ... parmi la clientèle des 96 000 ménages? On a regardé le problème des travailleurs domestiques, évidemment, sur la base du programme, dans la mesure où, dans la première étape, en 1979, il s'agit de personnes ayant charge de famille, qui se qualifieraient selon les bases normales du programme, elles ne sont donc pas exclues. En nombre, je prends note de votre question, je vais demander aux fonctionnaires de vérifier si on a des chiffres précis dans les 96 000 ménages, si on peut l'évaluer.

Mme Lavoie-Roux: J'aimerais, si vous me permettez, M. le Président, le relier au problème qui est soulevé à leur endroit par la loi 126 sur les conditions minimales de travail où, d'une part, il sera facile d'évaluer le cas des travailleurs domestiques employés en résidence, mais leur exclusion de la loi 126, pour ceux qui n'habitent pas en résidence et qui travailleraient moins de 30 heures, va peut-être rendre difficile l'évaluation de cette partie de travailleurs qui, probablement, seraient admissibles au supplément de revenu avec moins de 30 heures de travail, et dont l'employeur serait soumis au salaire minimum. (10 h 45)

M. Marois: En ce qui concerne le programme de supplément au revenu de travail, la base est toujours la même, qu'on soit travailleur domestique ou travailleur d'un autre type, c'est la base du revenu de travail avec les données qui sont incluses dans la loi ou proposées par règlement qui vont servir de base. Ces gens ne sont pas exclus dans la mesure où ils tombent sous la coupe des conditions de base d'admissibilité, qu'il s'agisse de travailleurs domestiques qui travaillent plus de 30 heures, mais qui ne résident pas, ou l'inverse, qui résident et le reste.

Mme Lavoie-Roux: Ce serait assez facile pour ceux qui sont en résidence, mais pour ceux qui ne le sont pas?

M. Marois: Quant à l'évaluation du nombre, les données dont on dispose présentement ne sont pas suffisamment raffinées — je pense que tout le monde le comprend facilement — pour pouvoir donner un chiffre.

Mme Lavoie-Roux: Je suis d'accord avec...

M. Marois: Maintenant, par ailleurs, je vous signale une chose. Je pense que le ministre du Travail l'a évoqué, le ministre est en train de regarder cette question dans l'examen du projet de loi en question.

Mme Lavoie-Roux: Parce qu'il n'a pas donné d'indication dans sa réplique en deuxième lecture, à savoir que la partie des travailleurs domestiques qui avait été laissée de côté soit incluse, et c'est un point qui avait été souligné à plusieurs reprises.

M. Marois: C'est exact. Je sais que le ministre est en train de regarder cette question. Indépendamment de cela, de toute manière, selon que telle ou telle décision est prise, cela peut faciliter ou rendre plus difficile l'accumulation d'un certain nombre de données plus raffinées, quant au nombre possible de cas admissibles éventuellement. Mais la pratique aussi de l'application du programme de supplément aussi va nous permettre d'accumuler un certain nombre de données beaucoup plus précises. Mais, de toute façon, ces gens ne seraient — sur la base des conditions d'admissibilité du projet de loi actuel — pas exclus de la loi, pas du tout.

Mme Lavoie-Roux: Je le réalise, mais...

M. Marois: Mais cela ne me permet pas de vous donner, pour autant, des données raffinées sur le nombre de personnes concernées.

Mme Lavoie-Roux: Parce qu'autant j'ai tenté de plaider qu'ils soient tous inclus, personnellement, je pense qu'il y a des besoins de ce côté, il reste que, quand vous arrivez dans l'évaluation du revenu net des familles, c'est l'envers de la médaille pour ces gens, si vous les excluez, cela devient... Il y a des femmes et il y en a plusieurs, surtout dans la région de Montréal, je ne sais pas ce qu'on paie dans les autres régions, à qui vous allez payer $5 de l'heure et des femmes qui font cinq jours par semaine à $30 ou $35 par jour. Ce sera très facile aussi de les exclure de l'évaluation du revenu net d'une famille. C'est aussi compliqué de vouloir évaluer cela que cela peut l'être quand on parlait tout à l'heure des revenus un peu en marge mais qui sont peut-être moindres, d'une autre façon, chez les agriculteurs. Je pense que cela peut être un élément de plus pour considérer le problème que les travailleurs domestiques ont fait valoir, les associations de travailleurs domestiques. Je ne vois vraiment pas comment vous allez pouvoir le calculer. C'est déjà sans impôt, cet argent que des femmes peuvent gagner en allant travailler à domicile. Il va être fort probablement exclu du revenu et...

M. Marois: Remarquez une chose, le projet de loi no 1 n'a pas pour objet de faire en sorte que les citoyens, quels qu'ils soient d'ailleurs, contournent quelque loi que ce soit. Je pense bien que personne ne peut accepter cela. En d'autres termes...

Mme Lavoie-Roux: Oui, mais cela reste quand même une difficulté.

M. Marois: Oui, mais, très concrètement, ce que je veux dire, c'est qu'il y a deux éléments. Bien malin qui pourrait le chiffrer d'ailleurs. Les uns disent que Beaucoup, les autres disent qu'Un

peu d'assistés sociaux ont des revenus non déclarés, payés comptant.

On sait que ce n'est pas facile de cerner ce phénomène. Ils ont des revenus d'un travail quelconque; analogiquement, ça peut se comparer, des travailleurs domestiques qui touchent des revenus de travail. Ce qu'on dit simplement, c'est que le projet de loi 1 est là; une fois adopté, il devient un programme qui s'applique; des gens qui ont un revenu de travail, qui seraient admissibles au programme ont le choix, c'est leur choix à eux. D'ailleurs, qu'ils soient inclus ou exclus de la loi 126, c'est leur choix de faire la demande pour tomber sous la coupe du programme en question.

Mais s'ils font la demande, ils font une déclaration en conséquence, accrochée à une déclaration d'impôt. Pour certains, ça peut être avantageux et vous savez comme moi que, comme députés, on reçoit des gens à nos bureaux et il y a nombre de choses qu'on constate dans le concret. On sait fort bien que, pour bon nombre de ces gens, ça pourrait être intéressant de faire la déclaration en question et d'aller chercher le supplément au revenu de travail auquel ils ont droit.

Mais c'est le choix, c'est la liberté de choix des citoyens de tomber sous la coupe du programme avec ce que cela implique de déclarations, en conséquence, ou alors de continuer sur les bases selon lesquelles ils fonctionnent présentement.

M. Forget: L'intérêt sera d'autant plus grand que le travail sera partiel, disons, permettant au revenu de se situer à l'intérieur de l'exemption personnelle.

M. Marois: Exact. Le seul problème, en toute honnêteté, qui peut se poser... On a essayé de ne pas compliquer la vie des gens. Dans le cas de travailleurs domestiques, vous en avez un certain nombre, je ne sais pas quel pourcentage parmi le groupe, qui, par exemple, travaille chez plusieurs personnes, dans une même semaine ou durant l'année; ils doivent s'assurer, s'ils veulent tomber sous la coupe du programme de supplément au revenu de travail, d'obtenir les attestations requises de chacun d'eux, en cours de route, pour être capables de faire leur déclaration de revenu.

Le Président (M. Marcoux): Est-ce que l'article 6 sera adopté?

Une Voix: Adopté.

Le Président (M. Marcoux): Adopté. Article 7.

M. Forget: Là, on a l'article vengeur, en quelque sorte, qui permet au programme et au gouvernement de déduire de ce qu'il aurait normalement à verser toute une série de revenu, non seulement de revenu de travail, mais le revenu provenant de biens; ça va. Evidemment, il n'y a pas de pauvreté si quelqu'un reçoit des loyers, des intérêts, des dividendes, ou des revenus provenant de pensions, etc., auxquels il a contribué. Là où on se trouve dans des situations un peu plus difficiles, c'est quand on inclut tout autre montant qui est exclu du calcul du revenu aux fins de la loi sur les impôts.

Cela veut dire que deux personnes qui, sur le plan de leur revenu de travail, le revenu provenant de leurs biens, sont sur un pied d'égalité, donc qui auraient toutes deux droit à un supplément de revenu, mais dont l'une d'elles a reçu une prestation sociale, une prestation d'assurance-chômage, celle-ci va se voir placée en face d'une fin de non-recevoir de la part du programme. Cela apparaît assez paradoxal. Quelqu'un qui, à la suite d'un chômage, durant l'année, perd le revenu de son emploi, retire une compensation de l'assurance-chômage de 60% de ce qu'il a perdu, sans même tenir compte des trois semaines de carence, reçoit beaucoup moins de 60%. S'il avait gardé son emploi, il aurait eu le droit d'avoir le supplément au revenu de son emploi, par hypothèse, il s'agit d'un revenu "supplémentable", mais parce qu'il a perdu son emploi et qu'il a été payé par l'assurance-chômage, il perd aussi le droit au supplément.

C'est sans aucun doute probablement la caractéristique majeure du programme qui va faire l'objet de critiques. Et je ne vois pas comment on peut justifier une pareille attitude. C'est vrai également bien sûr d'une compensation versée par la Commission des accidents du travail. Quelqu'un subit un accident, c'est un travailleur à faible revenu, il a charge de famille, il est payé au salaire minimum. S'il conserve son emploi pendant douze mois, il a droit au supplément. S'il a un accident en octobre, ou en novembre, il reçoit une compensation de la Commission des accidents du travail pour les deux derniers mois de l'année, parce que le montant qu'il va recevoir à ce moment-là à 60% ou à 90% du revenu net, parce qu'il y a deux méthodes de calcul, dans le cas des accidents du travail, c'est 90% du revenu net, cela va se chiffrer par quelques centaines de dollars et, ces quelques centaines de dollars vont être soustraits du montant de supplément auquel il aurait droit normalement, s'il avait gardé son emploi. Autrement dit, il est pénalisé pour avoir été accidenté, ou il est pénalisé pour avoir été en chômage, par le programme de supplément du revenu. Ce sont deux programmes qu'il paie à même ses revenus, en temps ordinaire, par des cotisations auxquelles il peut prétendre avoir un droit strict.

Je ne m'explique pas cela. La seule signification que je peux trouver, la seule justification — ce n'est même pas une justification, c'est une explication — c'est que le programme va coûter beaucoup moins cher avec cela que si on ne tenait pas compte du chômage ou de l'accident du travail, et qu'on continuait à supplémenter le revenu de travail manquant. De toute façon, ce n'est pas un chiffre fictif, on sait ce qu'il est, puisqu'il y a une période d'emploi avant le chômage, qu'il y a eu une période d'emploi avant l'accident. C'est un chiffre très connu, très certain. Il ne s'agit pas de faire d'hypothèse. On sait ce

qu'est ce chiffre. On pourrait continuer à supplémenter douze mois par année et ignorer les périodes de chômage ou les périodes d'absence du travail, pour raison de maladie ou d'accident du travail.

J'aimerais bien connaître ce qui a poussé le gouvernement à prendre une attitude comme celle-là. Je ne suis pas convaincu — je peux vous le dire tout de suite — par le raisonnement qu'on retrouve dans le cahier bleu, en disant qu'on veut encourager la participation au marché du travail, donc, on n'est pas pour supplémenter les moments où une personne est en chômage, où une personne reçoit des prestations d'accident du travail. Là n'est pas la question. Il s'agit véritablement d'une personne qui est sur le marché du travail, qui fait partie de la main-d'oeuvre, et qui est temporairement absente de la main-d'oeuvre, pour des raisons qui sont indépendantes de sa volonté.

Appliquer là les raisonnements d'incitation, c'est l'appliquer au mauvais endroit, là où cela ne peut pas avoir d'application. Cela résulte en une injustice qui va devenir assez frappante.

Je serais curieux de connaître les raisons, malgré tout, au-delà de cette explication superficielle qui n'est pas satisfaisante, qu'on voit dans le cahier bleu, et aussi, quel serait le coût au fait d'ignorer ces exclusions. Combien cela coûterait-il de plus? Et est-ce que cela en vaut vraiment la peine? (11 heures)

M. Marois: II faut bien voir, je pense bien, de quoi on parle quand on parle de ces exclusions. Vous avez mentionné les indemnités versées par la Commission des accidents du travail, l'assurance-chômage, il y a beaucoup plus que cela, quand on tient compte de l'ensemble. Il y a les dividendes. Il y a les gains de capital. Il y a les intérêts. Il y a les prestations d'aide sociale et les indemnités de divers types qui sont versées. Il y a les suppléments de revenu garanti, les allocations de conjoints. Il y a les pensions de vieillesse, enfin, il y en a, il y en a.

Fondamentalement, le problème qui se posait au point de départ, c'était de savoir comment en arriver à une justice et à une équité horizontale. On peut prendre divers exemples très concrets. Prenons le cas d'une personne qui travaille au salaire minimum, qui touche $6000 de revenu uniquement en revenu de travail, $6000. Prenons l'autre cas, le revenu de travail $6000, mais $6000 de gains de capital, à côté. Si on ne tenait pas compte des gains de capital, on voit tout de suite qu'on arriverait à une situation qui serait carrément inéquitable ou injuste, parce que si on ne tenait pas compte du gain de capital, dans l'exemple que je donne, les deux recevraient exactement le même montant de supplément au revenu.

Prenons l'autre exemple. Dans le cas de l'indemnité versée par la Commission des accidents du travail, il y a là une prestation qui est reçue et qui n'est pas taxée; il faut en tenir compte. Si on ne tenait pas compte de cette prestation-là, je ne vois pas pourquoi on ne ferait pas la même chose, par exemple, avec l'aide sociale. Quelle serait la logique et à quelle situation cela nous mènerait-il, toujours dans une perspective d'introduction d'un programme comme celui-là, d'essayer d'en arriver au point de départ à un minimum de justice et d'équité horizontale, si on ne déduisait pas et si on ne tenait pas compte de l'indemnité versée par la Commission des accidents du travail. Prenons le cas d'une personne qui toucherait $25 000 de revenu mais qui travaillerait trois mois. Cela lui donnerait $6000. Mais la personne en question, son indemnité, en vertu de la prestation maximale à laquelle elle a droit, est de l'ordre de $12 000. Là, cela nous mène à des situations qui m'ap-paraissent inéquitables et injustes sur le plan horizontal.

M. Forget: II y a d'abord plusieurs choses. Le ministre a parlé des gains de capital. Ce n'est pas un plaidoyer que je fais, je suis tout à fait d'accord que l'on ignore ou plutôt qu'on tienne compte des revenus provenant de biens, gains en capital, loyer, etc. C'est tout à fait légitime de les déduire. On veut mesurer la pauvreté.

Pour ce qui est du reste, je ne crois pas que l'argument tienne vraiment. Cela ne me gêne pas du tout que l'on déduise les paiements d'aide sociale que reçoit un prestataire potentiel d'un régime de supplément de revenu, parce qu'il s'agit là d'une personne qui, d'une façon très officielle, ne fait plus partie de la main-d'oeuvre. Elle a épuisé ses bénéfices d'assurance-chômage, etc. Tant qu'une personne reçoit des bénéfices d'assurance-chômage qui correspondent, au moins dans l'esprit des gens et, d'une certaine façon, dans la réalité aussi, à une prestation d'assurance sociale, c'est-à-dire celle qu'elle a elle-même payée à laquelle elle a droit et qui remplace un revenu manquant, sans qu'il y soit de sa faute, je crois qu'on a là un problème majeur si le revenu qui est remplacé par l'assurance-chômage donne ouverture à un supplément au revenu, à plus forte raison, le revenu inférieur qui le remplace, sans qu'il en soit de la faute de l'individu en question.

C'est vrai dans les cas des accidents du travail. C'est vrai dans le cas du chômage. Maintenant, on cite le fait que, si quelqu'un travaille trois mois seulement à un taux très élevé et a droit à une compensation, une indemnité de chômage à un taux très élevé, cela ne fait pas de problème, parce que, justement, si on tient compte de l'ensemble de l'année, il n'aura pas droit au supplément. Alors, on n'a même pas besoin de se préoccuper de savoir si c'est déductible ou non, si sa prestation d'assurance-chômage doit être déduite ou non. Sur la base de son revenu pendant les trois mois, projeté pour l'ensemble de l'année, c'est bien clair qu'il est au-dessus même du point de prestation nulle.

M. Marois: Si vous me permettez, seulement une parenthèse. Le député sait fort bien comme moi que l'indemnité versée par la Commission des accidents du travail n'est pas taxable. Donc,

forcément, cela ne fait pas partie d'une déclaration d'impôt. Cette personne n'est même pas obligée de la déclarer. Alors si on n'en tenait pas compte...

M. Forget: Non, mais il y a plusieurs solutions à cela. Il y a des solutions plus élégantes que celles qui sont retenues. Il y a même une solution extrême qui permettrait d'en tenir compte pour les fins de l'impôt. Comme vous le savez, il y a des problèmes d'équité qui se posent, en vertu du régime des accidents du travail, qui fait que les gens qui ont des charges familiales très différentes sont traités différemment par le régime de compensation des accidents du travail. Il n'y a rien qu'on puisse faire par rapport à des gens qui travaillent. Il n'y a rien qu'on puisse faire à moins de rendre imposable, peut-être augmenter le montant des prestations d'accident du travail et de les rendre imposables. Il va toujours subsister des problèmes d'équité, en vertu de ce régime. Si vous voulez, on ne débordera pas ce terrain, parce que cela nous entraînerait très loin. Il reste qu'un régime de supplément de revenu peut administra-tivement tenir compte qu'il y a une prestation versée par la Commission des accidents du travail. De toute manière, comme il s'agit d'un revenu de trois mois, ce sur quoi il s'agit de baser le supplément au revenu, c'est le revenu que cette personne aurait gagné si l'accident en question n'avait pas eu lieu ou si la période de chômage ne s'était pas produite. Il s'agit de savoir si le revenu de travail, s'il avait continué, aurait été un titre suffisant pour donner ouverture à un supplément au revenu. Dans le cas d'un revenu projeté sur douze mois, qui s'élèverait à $25 000, la question ne se pose pas, il n'y a pas de supplément. Le revenu annuel de $6000 qui a été gagné pendant neuf mois, c'est donc un revenu de $4500, et il devrait être suppléments comme si c'était un revenu de $6000 pendant douze mois. Ce que vous faites au contraire, vous considérez $4500, vous accordez un supplément pour $4500, et après, vous soustrayez, dollar pour dollar, ce qui est versé par l'assurance-chômage ou par la Commission des accidents du travail. Le résultat net, c'est que cette personne ne reçoit rien en supplément de revenu dans la plupart des cas, alors que, si vous traitez le revenu à supplémenter comme étant le revenu de $6000, correspondant à douze mois, vous ne déduisez pas la prestation d'assurance-chômage ou la prestation d'accident du travail, la personne en question va recevoir ce qu'elle aurait reçu de toute façon si elle n'avait pas eu de chômage ou si elle n'avait pas eu d'accident. C'est de cela qu'il est question. Il s'agit de tenir compte de l'élément temps dans le fond. L'objection que nous a apportée le ministre, de la personne qui gagne $25 000 par année, mais qui ne travaille que trois mois, nous fait justement toucher du doigt un des problèmes de tout programme de supplément au revenu. C'est qu'on ne peut pas considérer sur le même pied deux personnes qui gagnent le même revenu, la même somme totale de dollars dans une période d'un an, l'une qui gagne ce montant sur douze mois avec douze mois de travail, et l'autre moyennant seulement trois mois ou six mois de travail. Le problème de la pauvreté n'est pas le même dans les deux cas.

M. Marois: C'est pour cela qu'on tient compte de la notion de revenu de ménage, d'une part. Il y a plus que cela. Le député fait, au fond, dans les exemples qu'il prend, l'hypothèse d'une projection possible du revenu de la personne. Je serais prêt à dire que cela peut aller relativement bien pour établir une telle projection dans le cas d'un salarié à temps plein qui a une relative sécurité d'emploi.

Mais le problème est tout autre et extrêmement différent dans le cas de gens qui travaillent à temps partiel, du travailleur saisonnier. Comment faites-vous la projection de revenu? Et là, on retombe précisément dans le problème très réel auquel a eu à faire face la Saskatchewan. Ce programme était basé sur des prévisions de revenu ou sur des projections de revenu, avec les énormes problèmes administratifs que cela a posés de sous-évaluation des gens qui faisaient la demande pour être admis au programme de la projection de leur revenu, avec les conséquences qu'on sait; les prestations versées étant, en conséquence, plus élevées, ça donnait comme résultat des coûts administratifs énormes du programme. Il fallait tenter de récupérer des sommes versées en trop, tenter de rééquilibrer et les derniers contacts qu'on a eus avec ces gens nous indiquent qu'ils s'en vont vers des réajustements fondamentaux de leur programme.

On a choisi la voie, comme je l'ai évoqué l'autre jour, ou plutôt l'approche de se baser sur le revenu de travail de l'année antérieure et, partant de là aussi, de tenir compte, encore une fois, d'une perspective de justice et d'équité horizontale. Sinon, si on ne tient pas compte de ça, on risque d'en arriver à des choses qui soient carrément injustes ou inéquitables et, par ailleurs, en tenant compte aussi du fait que c'est exact que des problèmes d'équité, je dirais, se posent quant au régime actuel d'indemnisation des victimes d'accident du travail.

J'ai déjà eu l'occasion d'indiquer qu'on travaillait là-dessus. On ne sera certainement pas prêt à y aboutir dans la loi-cadre sur la santé et la sécurité qui, elle, vise la prévention, mais on poursuit les travaux pour essayer de voir dans quelle mesure il est possible de réaménager ou de modifier, d'une façon relative ou substantielle, le régime d'indemnisation pour en arriver à quelque chose qui soit plus correct, plus juste. Effectivement, le député a parfaitement raison de mentionner le fait qu'est examinée actuellement cette possibilité; c'est une des hypothèses, et le Québec n'est pas le seul à l'envisager d'ailleurs. Au moment où une chose comme celle-là pourrait peut-être venir, il va de soi aussi que ça doit être fait en concertation avec des voisins. Je sais que, dans d'autres provinces aussi, on examine cette possibilité, quitte à réajuster à la hausse les prestations, mais de les rendre imposables. Evi-

détriment, au moment où un changement comme celui-là interviendrait, dans l'hypothèse où il interviendra, le problème va se poser en des termes différents, forcément. Cela supposera des ajustements ailleurs. Je n'exclurais pas, dans cette hypothèse, que, dans cette perspective, on soit obligé, à ce moment-là, de regarder à nouveau le problème qu'on évoque.

M. Forget: J'aimerais, si c'est possible, seulement terminer sur ce point-là, parce que le ministre a souligné une chose; je ne voudrais pas être mal compris. Il a dit: On ne veut pas s'engager dans les projections de revenu. Je suis tout à fait d'accord s'il indique qu'il y a des problèmes administratifs considérables, d'un ordre tout à fait différent de ceux qu'on discute dans le moment, si on veut appliquer sur l'année courante, dans le fond, le calcul du revenu et de l'admissibilité. Le programme que le gouvernement nous propose, c'est de baser ça sur les revenus de l'année antérieure. Mais, quand je parlais de projection sur une année, ce n'est pas une projection dans l'avenir, c'est, dans le fond, une projection dans le passé, si on peut dire; c'est qu'on sait... Si une personne, par exemple, l'an dernier, a travaillé huit mois et a reçu quatre mois de l'assurance-chômage, on peut dire que, si elle avait travaillé douze mois au salaire qu'elle avait pendant les huit mois où elle a travaillé, on saurait combien de revenu elle a. On peut le lui imputer pour l'année en entier. Ce sont tous des faits connus. On sait pendant combien de mois ou de semaines a été versée l'assurance-chômage, ou on peut le savoir. C'est un geste administratif. On sait pendant combien de mois ou de semaines sont versées les prestations d'accident du travail et on sait également pendant combien de mois ou de semaines sont versées les prestations d'aide sociale. (11 h 15)

Donc, il est possible, pour les administrateurs du régime, de déterminer pendant combien de mois l'individu en question a été sur le marché du travail dans le sens administratif suivant, il n'était ni bénéficiaire de l'aide sociale, ni bénéficiaire d'une prestation d'assurance-chômage, ni bénéficiaire d'une prestation d'accident du travail. Il y a donc un résidu, en termes de mois ou de semaines, pendant lesquels on doit présumer que le revenu qu'il déclare, pour les fins de son admissibilité au programme, a été gagné. On peut, par une simple règle de trois, dire: S'il avait travaillé pendant toute l'année à ce revenu, il aurait gagné un montant X et c'est ce montant X qu'on va supplémenter. Une fois qu'on l'aura supplémenté, on ne se préoccupera pas de savoir, ni à plus forte raison de déduire les montants qu'il a reçus, soit de l'assurance-chômage, soit de l'aide sociale, soit de la Commission des accidents du travail.

Ce qu'on ferait, à ce moment-là, ce serait donc de supplémenter le revenu pendant le temps où il l'a gagné au taux où il serait supplémenté s'il avait eu la chance de le gagner pendant douze mois. C'est plus incitatif que la procédure que vous suggérez et je pense qu'il n'y a pas de difficulté administrative à faire cela: II y a, bien sûr, des échanges de données qui doivent se faire entre les administrateurs du programme, la Commission des accidents du travail, la Commission d'assurance-chômage et l'administration de l'aide sociale. De toute manière, je pense que ces fichiers vont être en communication les uns avec les autres, par nécessité, pour s'assurer que les programmes sont administrés convenablement. Ce sont donc des données qui sont disponibles, déjà, d'une certaine manière et qui pourraient être utilisées pour augmenter l'équité, la justice horizontale du programme, c'est-à-dire traiter de la même façon des gens qui sont sur le marché du travail et qui gagnent fondamentalement le même revenu, mais qui en sont temporairement absents pour des raisons qui ne sont pas de leur faute et qu'on va pénaliser en vertu du programme tel qu'il est conçu justement parce qu'ils sont absents du marché du travail pour une raison indépendante de leur volonté.

Je pense que c'est une donnée fondamentale de ce programme d'avoir cet effet discriminatoire. On va pénaliser des gens parce qu'ils ont été malades, qu'ils ont eu un accident, qu'ils ont fait face à une période de chômage ou n'ont commencé à travailler que le 1er février plutôt que le 2 janvier. Pourtant, pendant les mois où ils vont travailler, ils vont se situer exactement au même revenu mensuel, hebdomadaire ou quotidien que d'autres qui, eux, vont avoir droit à un supplément.

Il me semble que ce défaut de conception du programme est corrigible.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Beauharnois.

M. Lavigne: M. le Président, je suis sensible aux remarques apportées par le député de Saint-Laurent. Dans tout le calcul qu'il nous démontre, je pense qu'il y a quand même un aspect qu'il ne faut pas oublier. La personne qui est en chômage ou qui reçoit l'aide sociale ou une prestation d'accident du travail n'a quand même pas autant de dépenses que la personne qui est sur le marché du travail, qui va travailler tous les jours, si on pense aux repas, aux déplacements, peut-être même à une gardienne. Je pense que c'est à considérer.

Il y a aussi une chose très importante, et je pense que c'est le but de cette loi; c'est essentiellement d'inciter les gens au travail et non pas d'inciter les gens à ne pas travailler. Je comprends lorsque vous dites que, souvent, ces personnes ne travaillent pas pour des raisons indépendantes de leur volonté, mais il n'en reste pas moins que si la personne qui reçoit des prestations d'assurance-chômage, d'aide sociale ou d'accident du travail, finalement, à la fin de l'année, gagne autant que la personne qui travaille... quand vous parlez d'inéquité, je me demande si, là aussi, ce ne serait pas inéquitable que d'arriver à la fin de l'année — comparons deux personnes — une qui a été sur le marché du travail pendant douze mois, moins les vacances norma-

les, et l'autre, qui aurait été sur le marché du travail pendant six mois et le reste du temps qu'elle soit bénéficiaire de l'aide sociale ou de l'assurance-chômage et, avec l'aide gouvernementale au revenu, ces deux personnes se retrouveraient avec le résultat final qu'elles auraient gagné autant l'une que l'autre.

Bien sûr, les hommes étant ce qu'ils sont, on pourrait faire le calcul — je ne veux pas prêter de mauvaises intentions aux travailleurs — et dire: Pourquoi irais-je me faire geler à la construction au mois de janvier ou au mois de février, je vais travailler six, sept ou huit mois par année — je donne l'exemple du secteur de la construction où on sait que c'est beaucoup plus pénible d'y travailler l'hiver — et, sciemment, volontairement, se mettraient sur le chômage pendant les deux, trois mois difficiles de l'hiver et seraient compensés pour cette perte par le projet de loi 1. Je comprends que j'ai l'air de prêter de mauvaises intentions à des chômeurs. Mais, vous savez comme moi, M. le député de Saint-Laurent, qu'il y a aussi de ces cas et on n'est quand même pour organiser un état policier pour savoir si vraiment, dans la conscience de chacune de ces personnes, on est de bonne foi ou de mauvaise foi quand on se met sur le chômage ou sur l'assistance sociale, et même, parfois, quand on prolonge des périodes de chômage à cause d'un accident du travail. Il y a certaines personnes qui pourraient, je pense, retourner au travail une semaine, quinze jours trois semaines ou un mois plus tôt, mais vont être tentées de prolonger cette période parce qu'effectivement, une convalescence à la maison, en ayant des prestations, c'est plus intéressant que de retourner un mois plus vite ou un mois et demi plus vite sur le marché du travail.

Pour toutes ces raisons, je me dis qu'on n'inciterait pas la personne à aller sur le marché du travail. On l'inciterait plutôt, parce qu'elle ne perdrait pas de revenu par rapport à l'autre qui travaille, soit à prolonger le chômage, soit à prolonger la période de convalescence à la suite d'accident du travail ou on l'inciterait peut-être à être davantage sur l'aide sociale.

Ce sont les quelques réflexions que j'ai à faire suite à l'argumentation du député de Saint-Laurent et je m'inquiéterais de voir deux personnes, une qui a travaillé, comme je vous disais tout à l'heure, pendant toute l'année, et l'autre qui a travaillé une partie de l'année, gagner autant l'une que l'autre. Je me demande ce que cela provoquerait dans le monde du travail.

M. Forget: La social-démocratie ne se porte pas très bien de l'autre côté.

Le Président (M. Marcoux): Mme le député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Je m'excuse, mais je l'avais demandé depuis un bout de temps, surtout que notre président a été occupé à faire autre chose. J'ai dû sonner la cloche souvent avant qu'il ne me voie. Ce n'est pas un reproche, M. le Président.

Je ne vais que répliquer un petit peu. Je ne suis pas d'accord... Oui, succomber à la tentation, mais cela n'est pas le point que je veux soulever, à la suite de l'argumentation du député de Beauharnois. Je pense que quelqu'un qui veut travailler, qui est en chômage et qui a une offre d'emploi ou qui veut vraiment travailler quand l'emploi se présente, il ne dit pas: Je pourrais retirer encore un mois et demi de chômage, restons à la maison, d'une façon très générale, surtout quand on est dans une situation de rareté d'emploi. Là-dessus, je suis loin de... cela n'est pas le point que je voulais soulever. C'est une question au ministre, M. le Président.

Je voudrais savoir si, dans son évaluation du revenu total servant au calcul du supplément de revenu au travail, il va inclure ou exclure les crédits d'impôt qui seront versés aux familles avec des revenus de moins de $18 000, évidemment, ce seront peut-être des familles avec des revenus de moins de $12 000 ou moins de $10 000...

M. Marois: M. le Président, c'est exactement comme les allocations familiales, on n'en tient pas compte.

Mme Lavoie-Roux: Bon, parfait.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Sherbrooke.

M. Gosselin: Simplement pour resituer un peu l'objectif même de la loi, qui a été décrite comme une étape vers un revenu minimum garanti plus complet et aussi une intégration définitive des divers programmes qui, actuellement, sont éparpillés aux divers niveaux de gouvernement; je pense qu'il faut comprendre que le projet de loi no 1 vise et est inscrit dans la finalité suivante: permettre aux travailleurs au travail de maintenir leur emploi et à ceux qui ne le sont pas actuellement d'y retourner dans la mesure où ils ont toutes les chances de le faire, moyennant quoi il y a des intérêts réels de le faire. C'est la finalité de la loi et, à cet égard, la loi n'a pas la prétention de réparer toutes les injustices sociales qui sont causées par les problèmes de maladie et tout cela. Dans ce sens, elle se concentre sur la situation des travailleurs à l'emploi.

Alors, ceci dit, je voudrais ajouter ceci, à propos de l'assurance-chômage. Je ne pense pas qu'il nous appartienne de réparer les inéquités mêmes du régime d'assurance-chômage, qui a été décrit par le Conseil économique du Canada, il y a un an et demi, et par l'imposante étude qu'a réalisée le Conseil du bien-être social, comme le régime le plus inéquitable au Canada, dans le sens où... d'ailleurs, il y avait des propositions formulées par le Conseil économique du Canada, l'étude spécialisée qui avait été produite, dans le sens de corriger le système d'assurance-chômage en vue de l'ajuster aux besoins familiaux et de permettre effectivement de corriger le tout au niveau des travailleurs à revenu secondaire, qui jouissent actuellement des mêmes bénéfices de l'assurance-chômage, que les gens à unique revenu peuvent donc

faire, par le régime d'assurance-chômage, sous forme de revenu garanti, ce qui n'est pas le cas.

Il y a eu près de $2 milliards dépensés ces dernières années en assurance-chômage, au Québec seulement, et je pense qu'il ne serait pas correct de vouloir, par ce projet de loi, corriger ces inéquités et que l'ultime solution, évidemment, il nous reste encore beaucoup de chemin à faire au niveau d'une véritable intégration des politiques de revenu garanti, sera la réunion des politiques de sécurité sociale qui sont actuellement éparpillées aux deux niveaux de gouvernement.

Je ne veux pas dire ça en tentant de faire de la basse politique, parce que c'est un facteur de réalité qu'une véritable politique de revenu garanti, pleinement intégrée, suppose la récupération de ces diverses politiques en un seul gouvernement pour en assurer une coordination efficace. La démonstration des dernières années, au niveau des possibilités d'entente et de concertation qui peuvent exister entre les deux niveaux de régime, n'a pas été suffisamment probante pour qu'on se hasarde à l'intérieur de ce projet de loi sur le supplément au revenu de travail, à prétendre établir des protocoles fermes avec la Commission d'assurance-chômage, d'une manière qui serait satisfaisante.

On a connu depuis trop longtemps le malaise qui pouvait exister pour les gens qui sont en attente de chèques d'assurance-chômage et que l'aide sociale venait supplémenter, parce que la Commission d'assurance-chômage n'avait jamais le souci de délivrer les chèques très vite, parce qu'elle ne tenait pas compte des besoins des familles, et on a vu comment cela a été laborieux de pouvoir établir un minimum de protocole d'entente entre l'assurance-chômage et l'aide sociale. Je ne pense pas qu'il faille s'embarquer dans l'application du projet de loi no 1, d'une manière qui nous conduirait à répéter des expériences aussi laborieuses.

Je répète ce que je disais tout à l'heure, il ne nous appartient pas de corriger les inéquités de l'assurance-chômage et les objectifs que citait le député de Saint-Laurent, d'une politique plus globale de revenu garanti, ne peuvent pas être atteints pour toutes les catégories de citoyens par ce projet de loi, mais la clientèle spécifique du projet de loi, je le répète, est celle des petits travailleurs à l'emploi ou susceptibles de retourner à l'emploi et elle veut avoir un effet incitatif là-dessus directement. Je vous remercie.

M. Marois: M. le Président, je voudrais simplement ajouter quelques mots. Le député de Sherbrooke vient de toucher l'essentiel de ce que je voulais mentionner. Comme j'ai eu l'occasion de l'évoquer déjà, le présent projet de loi n'a pas la prétention d'être une politique complète intégrée de revenu minimum garanti. Les morceaux sont éparpillés dans divers coins et relèvent de diverses juridictions. On poursuit les travaux, par exemple, dans cette perspective. Cependant, il s'agit d'une étape et cette étape, comme cela a souvent été évoqué, chercher à rejoindre ceux qui ont été, en quelque sorte, les oubliés des divers régimes de soutien ou de supplément au revenu, c'est-à-dire les petits travailleurs, les travailleurs à faible revenu, qu'ils soient salariés ou autonomes. (11 h 30)

Et en ce sens-là, l'objectif du présent projet n'est pas de viser à supplémenter en quelque sorte d'autres programmes de soutien ou de supplément au revenu, que ce soit celui qui vient des indemnités versées par la Commission des accidents du travail, que ce soit l'assurance-chômage, que ce soit l'aide sociale. On n'a pas non plus, je pense bien... C'est un côté que j'ai toujours trouvé — je vais le dire comme je le pense — très odieux, parce qu'il n'y a personne qui peut se permettre d'essayer de fouiller la conscience des gens. On n'a pas à évaluer si les gens vont volontairement, consciemment, en chômage volontaire ou involontaire, ou à l'aide sociale volontairement ou involontairement. Je ne crois pas que les citoyens soient spontanément des gens qui fraudent.

Mais je crois cependant que les citoyens québécois ne sont pas des fous et qu'ils savent compter et calculer, ce qui a toujours été, au fond, un des dilemmes clés du problème du fameux ratio entre l'aide sociale et le salaire minimum; la seule façon de casser cela était d'introduire une première étape de revenu minimum garanti, visant à supplémenter le revenu de travail. Les gens savent tout simplement compter. Et, quand on vit en situation économique de pauvreté, qui pourrait se permettre, quels que soient les motifs, de blâmer un ménage et un citoyen de dire: J'ai fait tous mes calculs et je pense que c'est plus intéressant, financièrement, avec la sécurité du revenu que cela peut donner, une fois passées les étapes, d'être à l'aide sociale que de travailler au salaire minimum.

C'est pour cela que c'est vrai, comme l'évoquait le député de Saint-Laurent, que des problèmes sur le plan administratif peuvent être facilement réglés par une simple règle de trois. Cela se pourrait probablement, je pense qu'il a raison; sur la base d'une approche comme celle-là, mathématiquement, on peut faire des règles de trois, faire une projection de revenu. Une personne a travaillé quatre mois, elle est en chômage par la suite; alors, on pourrait faire une projection, multiplié par trois ce qu'aurait été son revenu, sur une période d'une année.

Mais cela peut mener à différentes situations; il y en a une très concrète que je voudrais évoquer, sans juger quoi que ce soit, faire un simple constat de la réalité. La pratique quotidienne des citoyens n'est pas basée sur de simples règles de trois. Elle est basée sur des situations sociales et économiques qui sont terriblement changeantes, qui évoluent, qui sont la dure réalité de tous les jours, avec les taux de chômage que l'on connaît en plus.

Voici la première question qu'il faut se poser, sur une règle de trois: Est-ce que, vraiment, dans le contexte socio-économique qu'on connaît, compte tenu de l'ensemble des divers autres programmes qui existent, est-ce que cette person-

ne aurait vraiment travaillé douze mois? Et comment allez-vous, partant de là, dans le cas de l'un, dire: On applique la règle de trois; dans le cas de l'autre, qui est un travailleur à temps partiel ou travailleur saisonnier, qui, peut-être, comme bon nombre d'assistés sociaux, a la volonté de travailler... Malgré certains de nos préjugés collectifs qui traînent beaucoup dans le paysage, ces gens voudraient, bien plus souvent qu'on le pense, aller travailler, à la condition d'être capables de gagner honorablement leur vie.

Mme Lavoie-Roux: Je suis contente d'entendre le ministre le dire, parce qu'il y a d'autres ministres qui pensent différemment.

M. Marois: Je le pense très profondément. Je pense que c'est exact. Peu importe l'opinion des autres, je vous donne la mienne.

Mme Lavoie-Roux: C'est cela. Bravo!

M. Marois: En tout cas, je le pense très profondément. Les gens ne sont pas fous et ils savent compter. Je crois cela. Les fraudeurs, oui, il y en a dans n'importe quelle société. Je crois que c'est à la marge. Je crois que les gens veulent essayer de vivre décemment et d'avoir le minimum pour être capables de se payer des choses qui sont du domaine des besoins essentiels. Je crois à cela aussi.

Mais comment va-t-on appliquer une règle de trois dans le cas de celui qui, possiblement, aurait pu être là à temps plein? Mais qui va nous dire que oui, il aurait travaillé effectivement douze mois? Peut-être que oui, peut-être que non. Dans la situation actuelle...

M. Forget: Le bénéfice du doute.

M. Marois: D'accord. On accorderait le bénéfice du doute dans un cas, mais on ne l'appliquerait pas dans le cas du travailleur saisonnier, par exemple, on ne l'appliquerait pas dans le cas de celui qui est à l'aide sociale présentement.

M. Forget: Pourquoi pas?

M. Marois: On change complètement le pattern et là, vous ouvrez la porte vers une perspective complète de revenu minimum garanti. Je suis loin d'être réfractaire à cette perspective. J'ai constamment dit que, pour nous, ce n'était qu'une première étape qui vise à réexaminer, dans une seconde phase ou un certain nombre d'étapes, l'ensemble des programmes actuels de sécurité du revenu. C'est donc loin d'être exclu, bien au contraire dans mon esprit, il faut franchir une première étape en se donnant un certain nombre d'objectifs qui m'apparaissaient assez clairs. Il faut faire attention, parce qu'il y a certains programmes sur lesquels, dans l'état actuel des choses, on n'a pas de contrôle. C'est le cas notamment de l'assurance-chômage. Vous savez que quant à l'assurance-chômage, il s'agit précisément d'un de ces programmes qui a eu une tendance à changer relativement vite, en particulier au cours des derniers temps.

Il faut faire attention aussi de ne pas créer à nouveau des situations desquelles un bon nombre de citoyens veulent sortir, en d'autres termes, de se mettre dans des situations qui favorisent une incitation au chômage volontaire, non pas parce que les gens veulent chômer, mais parce que les gens savent compter, ce qui est bien différent. Une personne qui travaillerait six mois, par exemple, qui recevrait de l'assurance-chômage pendant six mois, 60%, plus une prestation de supplément au revenu de travail, qu'est-ce que cela donnerait concrètement? On comblerait le manque à gagner à cause du chômage. Il y aurait là la prestation jusqu'à 25% de plus qu'on ajouterait. A ce moment-là, on se trouverait dans la situation qu'il serait presque aussi payant de travailler durant six mois que de travailler durant douze mois et cela nous ramène où? Cela nous ramène exactement dans le dilemme ou l'on se trouve quand on regarde le problème très conflictuel, je crois, pour les citoyens qui sont pris pour le vivre entre le salaire minimum et l'aide sociale. On franchit une première étape. Je crois comprendre qu'il y a un consensus sur la perspective, on verra sur les modalités vers un programme réel, une politique de revenu minimum garanti qui suppose que l'on réajuste des morceaux, mais les morceaux qui sont éparpillés.

La première étape vise essentiellement ceux qui ont été les oubliés, pour l'essentiel de l'ensemble de ces politiques.

M. Forget: Je dois conclure que c'est là une approche fondamentalement inacceptable. Le gouvernement hésite, dans le fond, entre deux principes ou deux objectifs dans ce programme, soit celui de l'incitation au travail et celui de l'équité.

Du côté de l'incitation, il me semble qu'étant donné les caractéristiques administratives du programme, le fait qu'on va recevoir quelque quinze mois plus tard des prestations de supplément au revenu, ce n'est pas un effet qui va se faire sentir très fortement, si même il se fait sentir. Personnellement, j'exprimais l'opinion qu'il ne se fera pas sentir du tout. Il y a trop loin entre le moment où la décision se prend de participer à la main-d'oeuvre et le moment où on supplémente le revenu pour que cela ait un effet. De plus, celui qui va accepter un emploi, celui qui va décider de s'inscrire comme participant à la main-d'oeuvre, il va se dire que c'est mieux d'être un emploi de douze mois, parce que si c'est un emploi de huit mois ou si jamais il a un accident du travail, de toute façon, le supplément du revenu va disparaître. Il n'y en aura plus du tout. Je suis bien sûr que, de ce côté-là, l'incitation devient non seulement éloignée dans le temps, mais elle est très aléatoire. Quant à l'incitation, n'en parlons plus.

Pour ce qui est de l'équité, il reste que les travailleurs à faible revenu qui seront frappés d'un accident du travail ou d'une période de chômage,

non seulement seront-ils pénalisés, parce que ce régime ne comble pas à 100% leur perte de revenu, mais de plus, ils vont perdre même le supplément de revenu auquel ils auraient droit s'ils n'avaient pas eu ces malchances.

Les plus mal pris parmi les travailleurs à faible revenu vont continuer de l'être, parce que ce régime ne s'adressera pas à eux. Il s'adresse à ceux qui ont des emplois permanents, réguliers, qu'ils occupent douze mois par année, mais à un taux de revenu inférieur à ce qui est nécessaire selon les barèmes approuvés par le programme.

Je pense que c'est là une situation ni équitable, ni incitative. Je suis étonné d'entendre, du côté gouvernemental, après qu'il nous ait... Je voyais ici tout à l'heure, le député de Saint-Jacques, comme critique dans l'Opposition, nous faisait anticiper, du côté d'un gouvernement du Parti québécois, toutes sortes de choses absolument merveilleuses concernant les programmes sociaux. Je vois une obsession dans toutes les contributions à ce débat des membres du parti ministériel, une véritable obsession avec le fait que les gens peuvent abuser, par exemple, du régime d'assurance-chômage, qu'ils peuvent chômer plus longtemps ou même prolonger des périodes à la suite d'un accident pour recevoir des prestations d'accident du travail plus longtemps.

Tous ceux qui en ont parlé, ont dit: On emploie des euphémismes, les gens ne feront pas cela, bien sûr. Ils ne veulent pas frauder, mais ils savent compter. Ecoutez, peut-être que les gens savent compter, mais, nous autres, on sait comprendre aussi. On comprend très bien que ce qui préoccupe les gens, du côté ministériel, c'est la possibilité qu'ils paient des prestations à des gens qui ne sont peut-être pas les premiers rendus sur un chantier, parce qu'on a des doutes là-dessus, du côté ministériel.

Ce n'est pas quelque chose qui leur fait honneur dans le contexte d'un programme qui est censé combattre la pauvreté chez les travailleurs à faible revenu. Ils peuvent le faire en donnant, plus qu'ils ne le font effectivement, un avantage aux familles. D'ailleurs, c'est le député de Sherbrooke qui l'a mentionné. On le sait très bien et c'est normal que ce soit ainsi, qu'un programme d'assurance-chômage vise à remplacer des revenus perdus. Il ne vise pas à combler le problème de la pauvreté, c'est un programme d'assurance. Ce n'est pas un programme de soutien de revenu et de supplément au revenu. C'est un peu comme un régime de rentes. C'est une pension reliée au revenu que la personne gagnait, pas aux situations familiales. C'est la nature de l'animal d'être comme cela.

C'est créer un faux problème que de supposer qu'il faille d'abord réformer l'assurance-chômage avant d'avoir un programme de supplément au revenu. Vous aurez toujours les deux situations dans n'importe quel régime social, indépendamment d'ailleurs des problèmes constitutionnels. N'importe quel pays va vouloir remplacer un revenu perdu à la suite d'une période de chômage ou de maladie. Il ne remplacera pas ce revenu en fonction des circonstances particulières à l'individu au moment où il a perdu son revenu, mais en fonction du revenu lui-même. C'est un régime d'assurance. Les cotisations sont basées sur le revenu, elles ne sont pas basées sur la situation familiale. Ce n'est pas un régime de redistribution de revenu, c'est un régime de remplacement d'un revenu. C'est là une notion complètement différente, ce qui ne veut pas dire qu'il ne doive pas y avoir un supplément au revenu qui s'ajoute à cela, surtout quand le revenu qu'on remplace était lui-même, à l'origine, insuffisant. C'est ce qu'on ne fera pas précisément. On ne supplémentera pas les revenus insuffisants et, en particulier, non seulement on ne les supplémentera pas pendant la période où ils ne sont pas gagnés à la suite du chômage ou de la maladie, mais le supplément auquel un travailleur aurait droit pendant la période où, effectivement, il travaille — je pense bien que vous n'avez rien contre cela — on va la lui enlever, parce qu'on va dire qu'il a déjà reçu de l'argent du gouvernement pour une autre période où il ne travaillait pas. Au moins, qu'on fasse un divorce complet, qu'on considère isolément les périodes où il travaille, qu'on supplémen-te ce revenu quand il travaille, mais qu'on ne vienne pas lui enlever le supplément au revenu pendant les mois où il travaille, sous prétexte qu'à d'autres périodes, dans des périodes où il ne travaille pas, il reçoit d'autres prestations sociales qui représentent d'ailleurs les prestations d'un régime d'assurance.

C'est cela, l'injustice du régime. Vous pourrez bien dire tout ce que vous voudrez, à savoir que l'assurance-chômage est incitative au chômage et tout cela. Enfin, ce n'est pas prouvé et ce n'est pas prouvé non plus pour tous les travailleurs, surtout les travailleurs qui ont une charge familiale. C'est cela que le régime veut avantager. On peut avoir toutes sortes de discussions sur l'assurance-chômage pour les étudiants et les conjoints, etc. Là, il y a des problèmes parce que ce sont des gens qui ont une forte élasticité de participation au marché du travail. Pour les travailleurs qui ont une charge familiale, ceux qui sont visés par ce programme, l'allégation est rarement faite qu'il y a un problème d'incitation au chômage. De toute façon, il y a des périodes pendant lesquelles ils travaillent, pendant lesquelles ils auraient droit au supplément et voici qu'on veut le leur enlever, parce qu'il y a d'autres périodes où ils n'ont pas de revenu du travail. C'est doublement injuste.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Sherbrooke.

M. Gosselin: M. le Président, très honnêtement et au-delà des discussions qu'entretient le député de Saint-Laurent sur les principes d'équité, avec lesquels nous sommes fondamentalement d'accord, et sur l'objectif de réaliser d'une manière intégrée un véritable régime de revenu garanti, nous partageons essentiellement ces objectifs. Quant à l'allusion qui a été faite à une critique dans les débats sur le projet de loi no 1, je pense que, ni dans les

discours des députés ministériels, ni dans ceux, d'ailleurs, de l'Opposition, au cours du débat en deuxième lecture, ni en commission, les propos qui ont été tenus à cette table ou à l'Assemblée ne laissent penser le type de jugement que le député de Saint-Laurent voudrait nous imputer sur les chômeurs. Au contraire... (11 h 45)

Mme Lavoie-Roux: J'invoque le règlement 96. Il se peut que le député de Sherbrooke n'ait pas été en Chambre, mais quand le député de Saint-Jacques — vous n'avez qu'à relever le journal des Débats — se félicitait, par exemple, de ce que la personne qui faisait l'effort d'aller travailler, de ce que la femme qui avait un enfant, qui avait le coeur d'aller travailler... il y a eu trois exemples, l'un après l'autre, voulant que, pour vendre le projet du gouvernement, on faisait une condamnation des assistés sociaux. Relisez le journal des Débats...

M. Gosselin: Non, écoutez...

Mme Lavoie-Roux: Relisez! Relisez! Relisez! C'est très clair.

M. Gosselin: C'est une question...

Mme Lavoie-Roux: Moi, je lui ai donné le bénéfice du doute que c'était...

M. Gosselin: C'est une question... Mme Lavoie-Roux: ... dans son éloquence. M. Gosselin: ... d'interprétation. Mme Lavoie-Roux: Bien...

M. Gosselin:... probablement des propos que vous avez entendus du député de Saint-Jacques.

Mme Lavoie-Roux: Ecoutez donc!

M. Gosselin: Personnellement, je suis très fier de ce projet, pour les assistés sociaux qui, actuellement, veulent travailler, notamment les femmes chefs de famille qui espèrent avoir un accès au marché du travail et qui voudraient notamment aller travailler à temps partiel. Je me sens tout à fait fondé et je pense qu'il est tout à fait honnête de dire que ce projet est intéressant, parce qu'il favorise le retour au travail et que, ceci dit, ça ne veut pas dire qu'on condamne les gens qui, pour toutes sortes de raisons, ne peuvent pas avoir accès à ce marché du travail. Bon! Cela, je pense que c'est important que ce soit clarifié et je pense que, dans notre discours, on n'a pas voulu ou on n'a pas vraiment, comme on veut nous l'imputer, tenté d'accabler les assistés sociaux.

D'autre part, au-delà de l'accord de principe que nous avons sur l'équité qu'il faut atteindre dans nos régimes de sécurité sociale, je tiens seulement à rappeler au député de Saint-Laurent que si le Québec est embarqué comme il l'est actuelle- ment dans tout le champ de la sécurité sociale, au point où nous nous sentons justifiés d'amener un projet de loi comme celui-ci, c'est un peu historiquement d'une manière accidentelle que, comme province, dans le système canadien, nous avons été amenés à bâtir nos propres lois, et que, encore aujourd'hui, les trois quarts, sinon davantage, je ne sais pas la proportion exacte, des ressources qui arrivent aux citoyens en termes de sécurité sociale sont versés par le gouvernement canadien.

En tout cas, une grande partie des déboursés vient du gouvernement canadien qui, lui, évidemment, a des ressources beaucoup plus importantes pour pouvoir l'effectuer. Quand on parlait de l'assurance-chômage tout à l'heure, je ne voulais pas indiquer que le régime d'assurance-chômage avait à être autre chose que ce qu'il est, sauf que ces critiques que j'ai formulées sur le régime d'assurance-chômage et qui sont très largement partagées par les citoyens, ont été également formulées par des organismes aussi accrédités que le Conseil économique du Canada et le Conseil de bien-être social, à savoir que le régime était très inéquitable.

Quand on compare un programme très modeste de $50 millions et qui, pourtant, atteint 96 000 familles, aux déboursés fantastiques, par exemple, de l'assurance-chômage, je pense qu'il y aurait lieu de s'interroger sur l'équité aussi du régime d'assurance-chômage. Si le député de Saint-Laurent, au-delà d'un grand accord de principe et d'une volonté qui, je pense, est sincère de sa part, de voir le Québec se doter d'une véritable politique de revenu garanti, voulait aller au bout de sa pensée, je pense, dis-je, qu'il conviendrait avec nous qu'une intégration, comme il le suggère, de nos politiques, qu'un élargissement des clientèles, comme il le suggère, par le projet de loi no 1, veulent nécessairement dire, à moins d'être totalement inconséquent, la récupération de tous les pouvoirs et une harmonisation plus définitive de toutes les politiques de sécurité sociale.

Le Président (M. Marcoux): Est-ce que l'article 7 sera adopté?

M. Forget: Adopté.

Le Président (M. Marcoux): Adopté. L'article 8.

M. Marois: M. le Président, je m'excuse, il y a un amendement...

Le Président (M. Marcoux): Vous avez un amendement?

M. Marois: C'est-à-dire un article qui s'introduirait entre les articles 7 et 8, c'est-à-dire l'article 7a. Je crois qu'il a été distribué déjà.

Le Président (M. Marcoux): J'appelle un projet d'amendement qui vise à insérer un nouvel article, l'article 7a.

M. Forget: Adopté.

M. Marois: M. le Président, on me permettra simplement... Je pense que c'est important. L'article vise, pour l'essentiel, à permettre qu'il soit possible d'utiliser, pour faciliter les choses, une table divisée en tranches de revenu pour permettre aux gens de s'y retrouver le plus facilement et le plus rapidement possible.

Le Président (M. Marcoux): L'article 7a est adopté. L'article 8.

M. Marois: II n'y a pas d'amendement, M. le Président.

Demande, détermination et paiement du supplément au revenu de travail

Le Président (M. Marcoux): Est-ce que l'article 8 est adopté?

M. Forget: Dans la demande qui est faite à l'article 8, si je comprends bien les références que le ministre a faites plus ou moins en passant précédemment... Par exemple, un étudiant qui termine en juin et qui a un travail de juillet à décembre, il s'agit de 1979, il termine au cours des prochaines semaines, a un emploi immédiatement et occupe cet emploi jusqu'à la fin de décembre. Le 30 avril 1980, il produit une demande. Est-ce que la demande sera acceptée, même si son revenu pendant l'année n'était pas un revenu de douze mois? Il suffit qu'il ait un travail le 31 décembre.

M. Marois: Oui.

M. Forget: A ce moment-là, on va faire effectivement la règle de trois. On va dire: Ce revenu est "supplémentable", même si c'est un revenu qui est un revenu de six mois, on va le supplémenter, quel que soit son montant.

M. Marois: On va supplémenter son revenu de travail de l'année antérieure. On ne fait pas de règle, ni de deux, ni de trois.

M. Forget: A supposer qu'il gagne $12 000 par année, comme il a travaillé seulement à partir du 1er juillet, il a gagné $6000.

M. Marois: On va supplémenter $6000. M. Forget: On va supplémenter $6000.

M. Marois: Pour la première année, c'est exact.

M. Forget: Vous voyez le genre de situation aberrante dans laquelle on se place? Pourquoi supplémenter $6000? A ce moment-là, selon l'argumentation que vous avez développée tantôt, il n'a pas d'intérêt à commencer à travailler en juillet; il est aussi bien d'attendre au mois de novembre parce que vous allez supplémenter beaucoup plus un revenu de deux mois qu'un revenu de six mois, même s'il est au même taux.

M. Marois: Je ne vois pas comment le député peut faire une affirmation comme celle-là. On supplémente à 25% le revenu de travail.

M. Forget: C'est vrai dans tous les cas. M. Marois: Oui, bien sûr.

M. Forget: Tantôt, c'était l'argument selon lequel les gens cesseraient de travailler ou seraient en chômage plus longtemps. Il ne fallait pas utiliser une règle de trois et, étant donné les comportements des gens qui savent compter, il ne fallait pas les encourager à travailler moins de douze mois, en supplémentant les périodes pendant lesquelles ils ne travaillent pas.

Dans ce calcul, comme pendant les premiers six mois, l'étudiant n'a rien reçu, il n'a pas reçu de prestations de chômage, il n'était pas dans la main-d'oeuvre; il n'a pas reçu de prestations d'accident du travail; il n'a pas reçu d'aide sociale, il était étudiant...

M. Marois: Pendant un certain temps, il a peut-être eu des bourses.

M. Forget: II devient admissible au programme. S'il n'a pas reçu de bourse, c'est probablement que le revenu de sa famille était supérieur. A ce moment-là, on va supplémenter le revenu de travail des trois, des quatre ou des six derniers mois de l'année comme si c'était son seul revenu pour l'ensemble de l'année et on va aussi supplémenter, dans le fond, le revenu des deux derniers mois s'il ne travaillait que les deux derniers mois. C'est assez curieux comme approche, compte tenu du raisonnement que vous avez développé tout à l'heure.

M. Marois: Je ne suis pas certain que je suis très bien le raisonnement du député de Saint-Laurent, M. le Président.

M. Forget: On va supplémenter quelqu'un qui gagne un revenu à un taux annuel de $12 000 par année pour la simple raison qu'il a commencé le 1er juillet ou le 1er octobre; pas parce que c'est un travailleur pauvre, c'est un étudiant qui peut gagner $12 000 ou $15 000. Mais il a travaillé si peu longtemps qu'on va supplémenter son revenu comme s'il était pauvre. Au moment où il va recevoir son chèque, vers l'automne 1980, ça fera un an et demi qu'il travaillera à un revenu fort supérieur à celui du seuil de la pauvreté et, parce qu'il n'a pas reçu de bourse, pendant les premiers six mois de 1979, on ne fera aucune soustraction de la somme qu'on lui doit. Si cependant sa famille était pauvre et qu'il a reçu une bourse, là on va diminuer le montant auquel il a droit; extraordinaire équité.

M. Marois: Je pense qu'il faut faire extrêmement attention. J'ai dit qu'on aura l'occasion de revenir à l'automne. On parle de l'étudiant, voici les premières questions qu'on a à se poser: La personne est-elle mariée, est-ce qu'il s'agit d'un ménage ou s'agit-il d'une personne seule?

Une Voix: ...

M. Marois: Non, non, faisons attention, il y a plus que cela. Si c'est une personne qui constitue un ménage au sens de la loi, c'est bien différent du fait que si c'est une personne seule. Si c'est une personne seule, on verra. Je dis là-dessus que le député a invoqué, lors de la dernière rencontre, l'idée que peut-être la base dans le cas des personnes seules aurait comme règle l'âge de 30 ans. J'ai dit que cela n'était pas exclu dans l'étude qu'on mène présentement pour aboutir, à l'automne, à la deuxième étape. Donc, il faudra voir quelle sera la règle dans ce cas. Si c'est 30 ans, vous voyez tout de suite qu'il peut y avoir toute une série de cas hypothétiques dont on parle présentement. Mais si c'est 30 ans, cela exclut bon nombre de cas auxquels on pourrait faire allusion, présentement. Je pense qu'il y a des distinctions à faire à l'affirmation du député.

M. Forget: Plusieurs étudiants vivent dans des unions de fait. Si c'est un étudiant qui a moins de 30 ans, si vous mettez une limite d'âge de moins de 30 ans ou de 30 ans pour les personnes seules, le problème ne se pose pas. Mais s'il s'agit d'un conjoint de fait, on trouve un certain nombre de ces cas de nos jours chez les étudiants, chez les jeunes, ces derniers sont traités comme une famille, comme un ménage, le problème va se poser immédiatement et, encore une fois, ne tenant pas compte de la période pendant laquelle une personne travaille, vous allez supplémenter un an et demi après qu'un étudiant a quitté ses études, a peut-être pris un emploi à $15 000 par année. Supposons qu'il a travaillé quatre mois en 1979, il aura gagné $5000, il s'agit d'un ménage, donc ce sera sujet au supplément au revenu, il vient d'une famille à l'aise, etc. Il n'a pas demandé de bourse, il n'en a pas reçu, donc on ne réduit en rien sa prestation de sécurité du revenu. On va donner à quelqu'un qui fait un revenu de près de $20 000 un supplément de sécurité de revenu, parce qu'il n'a travaillé que quatre mois, la première année où il a travaillé, et qu'il ne recevait pas de bourse précédemment, et qui vit dans une union de fait. C'est paradoxal, avouez-le. Alors qu'on va refuser à un chômeur, qui a travaillé huit mois pendant l'année, le supplément au revenu de $6000 par année, parce qu'il n'a gagné que durant huit mois. Il a donc seulement gagné $4000 parce qu'il a reçu de l'assurance-chômage pendant les quatre derniers mois de l'année. On peut bien appeler cela de l'équité si on veut, mais encore une fois je vous dis en toute honnêteté et sans esprit partisan, à mon avis, que le programme tel quel va susciter une levée de boucliers. Ces cas vont devenir évidents. Repensez-y.

Mme La voie-Roux: Cela va probablement être les plus alertes qui vont aller chercher leur supplément au revenu.

M. Marois: Evidemment, il faut faire attention aux exemples qu'on prend. J'essaie de le regarder le plus honnêtement possible et je me demande si parfois on n'extrapole pas, on ne généralise pas à partir de cas extrêmes, à la marge, qui peuvent peut-être se présenter. Quand on introduit un programme — je pense que le député de Saint-Laurent le sait fort bien, il a eu à administrer déjà des programmes hérités d'autres personnes antérieurement — il y a des ajustements qui peuvent s'imposer en cours de route. J'essaie de le regarder en toute honnêteté et de faire en sorte que dans la pratique on atteigne quand même le mieux possible les clientèles visées au point de départ. (12 heures)

Je me méfie toujours des exemples pris à la marge, à partir desquels on extrapole pour généraliser des règles. Le cas de l'étudiant qu'on évoque, il y a diverses hypothèses, j'exclus le cas de la personne seule, sauf un cas exceptionnel qui pourrait se présenter, ça pourrait arriver. Si cette personne a des enfants, qu'elle gagne $6000 pendant six mois et qu'elle n'a pas d'autre revenu, je ne vois pas pourquoi, au point de départ, pour cette période, elle n'aurait pas droit au supplément, s'il n'y a pas autre chose que ça. Sinon... ou alors, il y a autre chose. Elle a eu des bourses ou l'autre conjoint a des revenus et, forcément, on en tient compte.

A ce moment-là, vraisemblablement, la personne va être exclue du programme. Ecoutez, est-ce qu'on va trouver ça à tous les coins de rue, un étudiant ou une étudiante, peu importe, l'un ou l'autre ayant charge d'enfants, qui va prendre charge d'enfants, avec la période de temps qu'il faut pour se qualifier, parce qu'il faut au moins que les conjoints de fait soient ensemble depuis un an. On va en trouver beaucoup à divers coins de rue du Québec, une personne qui se mettra dans une situation comme celle-là, simplement pour tomber sous la coupe du supplément au revenu de travail, je pense qu'on est en train de discuter de cas vraiment marginaux.

Par ailleurs, d'autre part, à l'autre pôle, la personne qui serait dans cette situation, dont le niveau de revenu du ménage serait d'un ordre tel qu'elle serait admissible au programme, je ne vois pas pourquoi, même si ce n'est que pour une période d'un an, on l'exclurait.

M. Forget: Le problème, M. le ministre, c'est que la période des calculs est trop longue. Quand on parle d'un montant comme $2000 ou $1000, c'est beaucoup ou trop peu, selon la période de temps à laquelle ça s'applique. $1000 par jour, c'est beaucoup. $1000 par année, c'est très peu. Alors, la notion de temps est centrale dans la définition d'un revenu à supplémenter. Quand vous me dites: Quelqu'un qui reçoit $6000 pendant six mois et qui a une charge familiale, ce n'est pas déraisonnable de supplémenter, je suis d'accord

avec vous. Mais, si vous me dites que quelqu'un qui reçoit $12 000 pour douze mois, avec les mêmes charges, on doit supplémenter... Or, vous ne prévoyez pas supplémenter, donc, vous avez la réponse à votre question. $6000 sur six mois, c'est effectivement trop, vous le dites vous-même dans votre loi.

M. Marois: C'est plus que $6000 sur six mois, c'est $6000 sur l'année antérieure, au complet. Ce n'est pas $6000 sur six mois. La personne a effectivement travaillé pendant six mois, mais le revenu du travail du ménage en question a été de $6000 sur l'année, sinon, il y a autre chose. Il y a eu des bourses ou le conjoint a d'autres revenus, alors ils ne sont pas admissibles au programme.

Ou alors $6000 sur un an ou alors les parents ont aidé, d'une façon ou d'une autre, il y a eu des contributions financières additionnelles, et le reste.

Il faut, je pense, l'appliquer sur la période de l'année antérieure, parce que s'ils n'ont eu que $6000 sur une période d'un an avec la charge de famille, je ne vois pas pourquoi on ne supplé-menterait pas, même si ce n'est que pour une période d'un an. Tant mieux si leur situation s'améliore par la suite et que ce ménage n'est plus admissible au programme, parce que sa situation s'est améliorée.

M. Gosselin: Je conviendrais avec le député de Saint-Laurent que pour des cas limites, mais vraiment des cas limites, selon la discussion qu'on a, il peut se produire un problème. Par ailleurs, il nous reste à évaluer si la limite du genre de cas qui peut se produire nous justifie d'amener un amendement spécifique là-dessus, auquel cas, je pense que dans la discussion, d'ici à la troisième lecture, il pourrait être possible de le faire, de notre côté. Peut-être que le député de Saint-Laurent a aussi un amendement à formuler nous permettant d'éviter ces cas-là.

M. Forget: Je remercie le député de Sherbrooke de son ouverture d'esprit. Malheureusement, il s'agit d'une loi très technique. Nous avons eu très peu de préavis pour l'étude de l'ensemble du projet. Cela n'a pas été déposé il y a des mois et cela s'est passé dans une période où on a peut-être pas eu la disponibilité qu'on a normalement, je n'insisterai pas pour dire pourquoi, à moins qu'on me le demande, M. le Président.

Il reste qu'étant donné que c'est une loi quasiment avec des implications fiscales, en termes de dépenses, au moins, notre rôle ici se borne à soulever des questions. Nous n'avons pas d'amendement formel. Je pense que, dans une loi comme celle-là, j'hésiterais beaucoup avant de formuler des amendements. Il faut que ce soit fait après mûre réflexion. Je tente simplement d'illustrer d'avance des problèmes qui m'apparais-sent évidents, à mes yeux. Ils ne le sont peut-être pas à tous. Ce sont des problèmes réels. Et, là-dessus, je dirais, en terminant, que même si les exemples — on peut toujours dire que les exem- ples, ce sont des cas extrêmes — mais dans ces cas-là, qu'il s'agisse d'une loi fiscale ou d'une loi visant des prestations sociales, les cas individuels, même s'il n'y en a qu'un, sont parfois suffisants pour faire modifier une loi. Les cas individuels acquièrent une telle importance pour les individus en cause que, forcément, il s'agit de centaines ou de milliers de dollars de bénéfice, surtout si on les étale sur quelques années, parce que si la loi n'est pas changée, les gens peuvent, de façon permanente, être privés d'un appui ou d'un recours. De la même façon, s'il y a une fraude fiscale ou une évasion fiscale qui se révèle, il s'agit qu'il y ait un contribuable qui le fasse et que ce soit assez visible pour qu'on modifie la loi. On n'attend pas qu'il y en ait 200. On dit: II y a vraiment un "loophole", il y a vraiment quelque chose. Les gens contournent la loi, il faut boucher ce trou-là. On n'attend pas, encore une fois, qu'on ait fait la preuve qu'il y en a 200 qui le font ou 10 000. Dès qu'on l'identifie, on essaie de le boucher.

Dans la question des prestations, quand il s'agit de donner de l'argent plutôt que d'en recevoir, l'intérêt se trouve du côté du citoyen et, pour le citoyen, c'est énorme. Les comparaisons que les gens font les uns avec les autres, finalement, deviennent de notoriété publique, très souvent en peu de temps. Il y a d'ailleurs des journalistes qui se spécialisent dans ce travail et c'est légitime, parce que cela fait ressortir des difficultés.

Je pense que l'argument qui veut que ce ne soit pas un cas statistiquement important, ce dont on ne sait rien d'ailleurs, ce l'est peut-être et cela ne l'est peut-être pas, n'est pas en soi suffisant pour éviter de considérer des problèmes comme ceux-là. Il y a plusieurs solutions possibles, je pense, qui me viennent à l'esprit. Mais, encore une fois, j'hésiterais à aller dans les détails, à moins qu'on nous donne des délais additionnels.

On n'a pas eu le bénéfice d'une commission parlementaire ouverte à tous ceux qui pourraient avoir des choses à dire sur le sujet. Je pense qu'il y a déjà des groupes — cela m'est arrivé ce matin — qui ont fait connaître leur déception de ne pas avoir eu l'occasion de débattre avant la deuxième lecture, présenter des mémoires, etc., pour faire ressortir un sujet qui est extrêmement complexe. Je ne blâme pas le ministre d'être parfois devant des situations qui n'ont pas été, comme telles, spécifiquement envisagées. C'est très difficile de faire une loi là-dessus. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle, croyant qu'une grande partie de ces règles seraient dans le règlement, je vois qu'il n'en est rien, qu'on se fie au texte de loi comme tel. Je me disais: Vous en avez pour des mois à rédiger des règlements qui donnent vraiment satisfaction. Chaque fois qu'on pense avoir fini, il y a quelqu'un qui les lit et qui dit: Avez-vous pensé à telle situation? On recommence au point zéro. C'est la nature de l'animal qui est comme cela. Je pense qu'on n'y peut rien.

Encore une fois, j'ai fait mes points, je pense qu'ils sont intelligibles. Enfin, je les ai rendus les plus intelligibles possible. Je n'ai pas d'amende-

ment à proposer, on n'a pas l'intention de faire un "filibuster" là-dessus, comme je l'ai dit en deuxième lecture. On ne voudrait pas retarder le projet de loi. On essaie simplement d'avoir la discussion la plus explicite possible, sur les difficultés que peut présenter son application, quitte au ministrel à tirer de cela ce que bon lui semble.

M. Marois: M. le Président, si on me permet simplement une remarque très brève, dans le sens de ce qu'a évoqué le député de Sherbrooke. J'ai noté en cours de route, depuis le début de nos travaux, les diverses questions qui ont été formulées, les remarques, les commentaires. Je crois quand même qu'on peut procéder. J'ai pris bonne note des commentaires sur cette question. Je ne sais pas si d'ici midi et demi — j'ai des doutes — on va passer à travers l'examen article par article, mais, même dans cette hypothèse, rien n'exclut, notre procédure n'empêche pas, le cas échéant, si j'en venais à la conclusion après examen... Je vais demander quand même aux fonctionnaires de regarder cela à nouveau, sur la base des diverses argumentations qui ont été soulevées et, le cas échéant, si j'en venais à la conclusion que c'est fondé d'apporter un amendement, je n'hésiterai pas du tout à le faire.

Mme Lavoie-Roux: Mais, M. le Président, il y a d'autres cas. Quand on se met à examiner les cas qui pourraient survenir, ce sont des cas auxquels je serais sympathique de prime abord, mais il pourrait y avoir d'autres situations. Par exemple, quelqu'un qui sortirait d'une communauté religieuse, quelqu'un qui sortirait de prison, quoiqu'on s'imagine que, même si on lui accorde un peu plus... Mais il a quand même reçu les soins de l'Etat. Enfin, je ne sais pas si ce sont toujours des soins, mais il a été à la charge de l'Etat pendant, disons, huit à dix mois de l'année. Enfin, il y a tous ces... Même quelqu'un qui sortirait d'un hôpital pour des raisons psychiatriques, mais qui a requis une longue hospitalisation. Là, je comprends que je tombe peut-être dans les...

Une Voix: Les forces armées.

Mme Lavoie-Roux: ... cas d'exagération dont parle le ministre, mais il y a plusieurs autres situations, je pense, qui pourraient survenir.

M. Forget: Est-ce que c'est sujet au supplément? Les salaires des forces armées, est-ce que c'est sujet au supplément?

Une Voix: C'est trop élevé. M. Forget: C'est trop élevé.

M. Marois: Je vais vérifier, je ne le sais pas du tout. Je ne sais pas quel est le salaire. Je peux vérifier cela et vous donner une réponse là-dessus.

Le Président (M. Marcoux): L'article 8 sera-t-il adopté?

M. Forget: Oui, adopté.

Le Président (M. Marcoux): Article 9.

M. Marois: II n'y a pas d'amendement, M. le Président.

M. Forget: Est-ce que cela veut dire que... Qu'est-ce qui arrive si deux personnes vivent maritalement et ne sont pas mariées, que l'une d'elle fait une demande de supplément au revenu et déclare qu'elle a un conjoint, mais qu'elle est incapable d'obtenir une attestation de l'autre conjoint, parce que les deux travaillent? Disons que c'est l'homme qui fait la demande de supplément. Sa conjointe travaille. Elle dit: Non, je ne veux pas être considérée comme conjointe et je ne fais pas de déclaration. A ce moment-là, il n'a pas droit au supplément de revenu. D'un autre côté, la loi dit qu'ils doivent être considérés comme des conjoints. Comment est-ce qu'on tranche le noeud?

M. Marois: En formulant votre question, est-ce que vous ne venez pas d'apporter la réponse en même temps?

M. Forget: Oui et non, parce que la loi ne dit pas... Quand on a défini les conjoints, on a dit: Deux personnes qui vivent ensemble et qui sont mariées l'une à l'autre — parfait, là, on ne parle pas de cela — ou qui vivent ensemble maritalement depuis au moins un an. On n'ajoute pas: Et qui acceptent de faire une déclaration, en fonction de cela. Une personne qui a droit au supplément au revenu qui en fait la demande doit joindre la déclaration de l'autre. Si elle ne la joint pas, elle ne peut pas se qualifier pour le programme, elle perd son droit simplement par le refus du conjoint.

M. Marois: Oui, ce qui indique que le ménage ne désire pas obtenir le supplément au revenu de travail, puisque, forcément, dans un texte de loi, les termes s'interprètent les uns par rapport aux autres, en tenant compte aussi des définitions, la personne désignée comme conjoint, au sens de la loi... Les conjoints, au sens de la loi, ce sont deux personnes qui vivent ensemble, etc. Si tel était le cas, il y aurait là une indication.

Le Président (M. Marcoux): Adopté?

M. Forget: Dans le contexte actuel, je peux envisager un très grand nombre de cas où le conjoint va s'opposer à déclarer officiellement à l'Etat quel est le conjoint de fait. Il doit être considéré un peu comme la dépendance de celui qui gagne un revenu. Cela va causer des frictions, je vous le souligne, parce que c'est un point très délicat, très sensible.

M. Marois: Oui, bien sûr. Par ailleurs, il s'agit de déclarations traitées exactement comme des déclarations en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu, avec toute la confidentialité qui entoure de telles déclarations. Je pense que le député sait fort

bien que même un membre du gouvernement ne peut pas obtenir du ministre du Revenu des détails concernant les noms des personnes qui font des déclarations en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu. (12 h 15)

Donc, c'est quelque chose qui est traité avec la plus stricte confidentialité, et s'il n'y en a pas là, il n'y en a nulle part. En ce sens...

M. Forget: D'un autre côté, c'est comme faire signer un contrat de mariage par des gens qui ont choisi de ne pas en signer. C'est un peu par des voies administratives demander à quelqu'un une reconnaissance d'une situation sur papier, en apposant sa signature.

M. Gosselin: Le même exemple peut s'appliquer par rapport à l'aide sociale.

M. Forget: Oui. On sait combien cela pose des problèmes.

M. Gosselin: Est-ce qu'en contrepartie, on justifierait le fait qu'à l'aide sociale, notamment, des gens qui vivent ensemble pour une assez longue durée, ne soient pas tenus de déclarer des revenus de l'un et de l'autre pour se rendre admissibles au programme?

M. Forget: Oui, mais ici, on supplémente un revenu du travail. Dans le cas des enfants, par exemple, on ne leur demande pas de signer une déclaration indiquant qu'ils sont effectivement à la charge de la famille. Pourtant, on en tient compte. On tient compte de la déclaration du réclamant. On ne lui demande pas de faire corroborer par les enfants ou par un tiers la présence des enfants.

M. Gosselin: Je me dis qu'à la limite, c'est un choix qui reste aux individus de se prévaloir ou non du régime, et, dans ce cas, personne ne leur tiendrait rigueur de ne pas vouloir s'en prévaloir. Par ailleurs, si l'avantage réel les concerne de se prévaloir du régime, je pense que cela ne fera pas de difficulté.

M. Forget: C'est certainement une entorse à la liberté des individus. Enfin, tout ce qu'on veut faire, c'est de le souligner. Je pense que cela va alimenter des controverses, mais tout ce qu'on veut faire, c'est le souligner à ce moment. Cela découle probablement de la notion de l'unité familiale, telle que vous l'avez adoptée, comme base d'attribution de ce supplément.

M. Marois: Sûrement.

M. Forget: Avec tous les problèmes de non-incitation du travail des conjoints que cela pose.

M. Marois: J'ai entendu cet argument l'autre jour, mais je ne veux pas prendre énormément de temps. Je ne crois pas que cela soit exact, sur la base des données qu'on a.

M. Forget: Les études que vous avez démontrent que c'est à peu près le seul effet...

M. Marois: C'est parce que vous faites référence, M. le député, constamment... la seule fois que je vous ai entendu intervenir là-dessus, c'était dans le débat en deuxième lecture, alors que le député de Saint-Laurent faisait référence à l'expérience américaine, mais la situation américaine est très différente de la situation au Québec. Le régime d'assurance-chômage, aux Etats-Unis, ce n'est pas du tout la même chose que ce qui existe ici. Le problème se présente en des termes extrêmement différents et, selon notre évaluation à nous, dans le cas des femmes en particulier, s'il devait y avoir des incitations — nous croyons qu'il n'y en a pas — ce n'est qu'à la marge, vraiment, et dans des cas exceptionnels. Le vrai problème est beaucoup plus relié à l'état actuel de fonctionnement du régime d'assurance-chômage. Là, il y a un problème qui est beaucoup plus réel.

Le Président (M. Marcoux): Est-ce que l'article 9 sera adopté?

M. Forget: Adopté.

Le Président (M. Marcoux): Article 10. M. Marois: II n'y a pas d'amendement. M. Forget: Adopté.

Le Président (M. Marcoux): Adopté. Article 11.

M. Marois: II n'y a pas d'amendement. M. Forget: Adopté.

Le Président (M. Marcoux): Adopté. Article 12.

M. Forget: Cet article détermine effectivement comment se fera le paiement. Il n'est pas question, si je comprends bien, contrairement à certaines allusions qu'on découvre dans le document de travail sur les différentes hypothèses, de versement par anticipation.

M. Marois: Non.

M. Forget: Ce sera strictement dans l'année qui suit. Comme, pour une année donnée, on fait la déclaration avant le 30 avril et présumément que ça va se situer à peu près vers le mois de mars, avril, au moment où les gens vont faire la déclaration, puisqu'ils vont devoir attendre d'avoir tous leurs documents, les TP-4 et TP-5 et tout le reste, il y a des délais. On va faire le "processing" de ça, l'analyse de ces données avec un certain délai aussi, bien sûr, de quelques semaines, ce qui veut dire que le premier versement, normalement, serait fait probablement vers le mois de... au plus tôt au mois de mai, plus vraisemblablement au

mois de juin et peut-être même juillet de l'année subséquente. Donc, les versements de supplément au revenu pour 1979, par exemple, seraient payés à compter de juin 1980, s'étalant jusqu'en avril 1981.

M. Marois: Prenons — quoique là, on va essayer d'y arriver le mieux possible — la première année; l'idée est, au fond, s'il y a lieu, d'effectuer quatre versements, évidemment, selon le montant de la prestation, correspondant à des périodes clés de l'année: les vacances, la période des Fêtes, la période du printemps, la période de la rentrée scolaire. Bon! Sur la base du revenu de travail de l'année antérieure, donc, pour 1979, sur la base du revenu de travail de 1978, les déclarations sont faites et les premiers versements arrivent à l'été. Ensuite, ça s'enchaîne. Pour la première année, ce sera extrêmement difficile d'y arriver au mois d'août. Ce qu'on prévoit, c'est septembre, pour l'année de démarrage, il faut s'entendre. Par la suite, c'est comme je viens de l'expliquer.

Le Président (M. Marcoux): L'article 12 est-il adopté?

M. Forget: Dans le fond, pour une année de calendrier donnée, ça s'étale jusqu'au mois de juin non pas de l'année suivante, mais de l'année subséquente.

M. Marois: C'est-à-dire que, très concrètement, le supplément versé en 1980 est payable en 1980 et non pas en 1979, mais en se basant sur le revenu de travail de l'année 1979.

M. Forget: II se peut très bien que si les circonstances ont changé, il ne soit pas dû sur la base du revenu de 1980. A ce moment-là, une personne qui se voit devant des fluctuations, comme il y a un certain cycle d'activité économique — c'est connu dans la construction ou dans d'autres secteurs — on peut fort bien voir se produire que les personnes qui sont soumises à ces cycles vont recevoir leur prestation dans les années où le revenu de travail est relativement bon et ne recevront pas de prestation dans les années où leur revenu de travail est particulièrement bas, étant donné ce décalage de quinze mois.

M. Marois: Si le supplément pour 1980 était versé en 1980, le problème dans lequel on retomberait, c'est toujours celui que j'ai évoqué à plusieurs reprises, celui de le faire par anticipation sur la base de prévisions.

M. Forget: Tout ceci découle de la longueur de la période de calcul. Si on calcule l'insuffisance ou la suffisance du revenu sur un mois, comme à l'aide sociale, on peut faire le paiement le mois suivant. Si on le calcule sur la base d'une année, il faut faire le paiement l'année suivante. Si on prenait, par hypothèse, une période de cinq ans, évidemment, durant cinq ans, par définition, il faudrait payer dans les cinq ans subséquents. Ce n'est pas simplement une nécessité administrative absolue, c'est un choix — et c'est important de le souligner — qui découle du choix de la période de calcul. Une période de calcul longue entraîne de longs délais. Vous avez choisi une période de calcul d'un an, contrairement à l'aide sociale, qui est basée sur une période de calcul d'un mois; vous avez donc nécessairement choisi un délai long dans les paiements. Il serait possible d'imaginer, pour les fins du revenu supplémentaire, des périodes de calcul de trois mois ou d'un mois. Cela supposerait, bien sûr, de la part de l'administration fiscale, un changement de procédure. Cela rendrait peut-être même impossible pour le ministère du Revenu, à moins de créer un autre ministère à côté ou un autre département complètement différent à côté, d'administrer lui-même un tel programme.

Quoique, dans le cas des professionnels, ils reçoivent des versements sur une base de trois mois, par anticipation, la base de calcul n'est pas modifiée pour autant, c'est toujours la base de calcul pour un an. La base de calcul du revenu, c'est un an; la base de calcul de l'aide sociale, c'est un mois. Le choix est là et toutes les autres conséquences en découlent nécessairement, comme vous dites.

M. Marois: Ce ne sont pas les raffinements possibles et les ajustements éventuels, je n'exclus rien. D'autant plus qu'il est prévu une évaluation extrêmement serrée de la pratique du programme. En Saskatchewan, par exemple, je crois que c'est aux trois mois. Ce que cela suppose, chez eux, c'est quatre déclarations par année, avec tout ce que cela implique de papiers additionnels, de traitements, de problèmes administratifs et le reste. Donc, on a regardé les diverses formules pour démarrer; c'est celle qu'on a retenue, qui n'exclut pas les ajustements qui pourraient être requis, le cas échéant, à l'évaluation de l'expérience.

Le Président (M. Marcoux): Est-ce que l'article 12 serait adopté?

M. Forget: Oui, adopté.

Le Président (M. Marcoux): L'article 13?

M. Forget: Adopté.

Le Président (M. Marcoux): L'article 14?

M. Forget: Ici, c'est l'information d'office du ministère qui peut se baser non seulement sur la déclaration, mais sur tout autre renseignement. Cela va relativement bien si on pense aux déclarations fiscales provenant des employeurs, l'original des TP-4, etc., par exemple, permettant de découvrir que les revenus d'emploi sont supérieurs à ceux déclarés, les prestations sociales qu'on veut déduire, etc., qui pourraient être sous-déclarées et que l'on peut restituer à leur valeur réelle en obtenant simplement copie du fichier de la Régie des rentes. Est-ce que l'on vise d'autres

renseignements? On va faire des enquêtes, il va y avoir des enquêteurs sur la route pour découvrir s'il y a des inexactitudes dans les déclarations qui sont faites.

M. Marois: Le principe de base, c'est exactement ce que !e député de Saint-Laurent a évoqué, c'est l'article 743 de la Loi de l'impôt sur le revenu qui prévoit — cela s'applique aussi bien au fédéral qu'au provincial — que le ministère du Revenu n'est jamais lié, pour les fins de déclarations de ce type, uniquement par les renseignements qui sont fournis. Les autres formes habituelles de renseignements additionnels peuvent intervenir et on en tient compte.

Donc, ce qui est prévu n'est pas autre chose; pas d'enquête additionnelle ou d'enquêteur additionnel à des fins spécifiques ou additionnelles, en d'autres termes, pas autre chose que ce qui se fait normalement au ministère du Revenu, les enquêtes seraient les enquêtes normales du ministère du Revenu.

M. Forget: Le statut des conjoints, par exemple, qui ne fait pas l'objet d'enquête du ministère du Revenu, mais peut-être qu'on peut me corriger là-dessus, on s'intéresse à savoir si le conjoint a un revenu, son existence, mais on ne s'intéresse pas de savoir s'il est marié ou non, s'il déclare un conjoint, on accepte sa déclaration ou si cet aspect fait l'objet d'enquête.

M. Marois: Déjà, les simples éléments donnés, que vous venez d'énoncer, qui sont l'objet d'un suivi normal du ministère du Revenu donnent déjà les premiers éléments clés de renseignements pertinents.

M. Forget: Oui, mais pas tous, parce que quand il s'agit de payer l'impôt, on va payer l'impôt, les deux conjoints, s'ils gagnent un revenu, vont payer l'impôt chacun pour soi et on va devoir vérifier si justement le conjoint a un revenu, on le vérifie par le numéro d'assurance sociale. Ni l'un ni l'autre ne pourra déclarer son conjoint comme dépendant, donc au niveau des exemptions personnelles, il y aura une implication. Mais s'il ne gagne pas de revenu, par définition, il ne fait pas partie du fichier du ministère du Revenu et alors, on va l'admettre comme dépendant sans se poser la question s'il vit maritalement ou non, etc.

Parce qu'il n'a pas d'avantage autre que celui que je viens de mentionner. Dans le cas d'un supplément de revenu, il y a un avantage à déclarer un conjoint avec qui on prétend vivre maritalement. Si on prend soin de déclarer le nom d'une personne qui n'a pas d'emploi, le ministère du Revenu, à moins de faire une enquête, n'a aucun moyen de le contrôler. Le réclamant peut bénéficier financièrement d'une déclaration de cette nature. Ce qui est différent de la situation qui prévaut dans le cas d'une déclaration d'impôt. (12 h 30)

Alors, voici la question qui se pose: Est-ce que le ministère du Revenu va faire des enquêtes pour savoir si des individus vivent maritalement ou non?

M. Marois: Je reviens à ce que je disais, le problème que soulève le député est réel, d'après ce qu'on me dit, donc ce qui suppose que dans les processus normaux de vérification, c'est un élément dont le Revenu devra tenir compte et procéder normalement à ces vérifications, comme il le fait sur d'autres plans.

Cependant, les éléments et les données de base inhérents aux déclarations d'impôt sur le revenu et au processus normal d'enquête permettraient déjà, après analyse, de déceler ce qui serait, ce qui pourrait être un cas réel possible de fraude, dans la mesure où, par exemple, un conjoint aurait obtenu réellement des revenus de travail, de salarié, par exemple. Forcément, il y a des formules de déclaration de l'employeur qui circulent.

Donc, déjà, il semble que sur la base des données qui existent, il y ait là les éléments de renseignements de base pertinents. Va devoir s'ajouter ce que vous avez évoqué, l'aspect spécifique de la relation de fait qui, là, va se faire sur la base des enquêtes normales du ministère du Revenu.

Le Président (M. Marcoux): Est-ce que l'article 14 sera adopté?

M. Forget: Adopté.

Le Président (M. Marcoux): Adopté. Comme il est 12 h 30, la commission parlementaire des affaires sociales ajourne ses travaux sine die.

Fin de la séance à 12 h 33

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