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Etude des crédits du ministère des
Affaires sociales
(Dix heures quatorze minutes)
Le Président (M. Marcoux): A l'ordre, messieurs!
La commission des affaires sociales est réunie pour entreprendre
l'étude des crédits du ministère des Affaires
sociales.
Les membres de la commission sont: M. Forget (Saint-Laurent), M.
Goldbloom (D'Arcy Mc-Gee), M. Gosselin (Sherbrooke), M. Gravel (Limoilou), M.
Grenier (Mégantic-Compton), M. Lavigne (Beauharnois), M. Lazure
(Chambly), M. Martel (Richelieu), M. Paquette (Rosemont), M. Samson
(Rouyn-Noranda)...
M. Laplante: Excusez-moi, M. le Président, M. Paquette
(Rosemont) est remplacé par M. Laplante (Bourassa).
Le Président (M. Marcoux): M. Paquette (Rosemont)
remplacé par M. Laplante (Bourassa); M. Samson (Rouyn-Noranda), M. Shaw
(Pointe-Claire).
Les intervenants sont: M. Alfred (Papineau), M. Cordeau
(Saint-Hyacinthe), M. Couture (Saint-Henri), M. Lacoste (Sainte-Anne), M.
Larivière (Pontiac-Témiscamingue), Mme Lavoie-Roux (L'Acadie), M.
Marcoux (Rimouski), M. Marois (Laporte).
Je proposerais que le député de Limoilou soit le
rapporteur des travaux de la commission. Est-ce que vous acceptez?
M. Gravel: II n'y a pas de problème.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Limoilou sera le rapporteur des travaux de cette commission.
M. le ministre, la séance est ouverte.
Remarques préliminaires
M. Denis
Lazure
M. Lazure: M. le Président, MM. les membres de la
commission, au cours du dernier exercice financier, le ministère des
Affaires sociales a modifié son plan d'organisation supérieure
afin de l'adapter aux besoins des établissements du réseau des
affaires sociales, de faciliter les communications et de réduire les
délais d'intervention.
Cette nouvelle structure se distingue de la précédente en
ce qu'elle compte six directions générales au lieu de huit et que
deux d'entre elles recoupent deux grands champs d'activités des affaires
sociales, soit les services de santé et les services sociaux.
Dans le nouveau plan d'organisation du ministère, les six
directions générales comptent 35 directions au lieu de 37. Tel
qu'il vous est présenté aujourd'hui, le budget 1979/80 colle
à cette réorganisation administrative. Le budget du
ministère s'élèvera à $4 692 316 000, soit une
augmentation de 2,6% par rapport à 1978/79, mais un gros mais
si l'on tient compte des modifications apportées au mode de
financement de la Régie de l'assurance-rnaladie, deuxièmement, si
l'on tient compte des honoraires des médecins spécialistes
oeuvrant en centres hospitaliers ainsi que des allocations de maternité,
finalement, sur une base comparative, tout cela s'élevait à $258
millions, au budget 1978/79; si on revient à la base comparative
réelle, le taux d'augmentation des crédits de cette année
s'élève à 8,6%.
L'aide sociale coûtera $939 millions. L'assistance maladie
c'est-à-dire principalement les médicaments aux
bénéficiaires de l'aide sociale, les programmes
d'orthèses, de prothèses coûtera $48 millions, et la
contribution à l'impôt foncier scolaire pour les personnes
âgées, $19 millions. Le secteur prévention et
amélioration accroîtra ses crédits de 16%, pour un total de
$169 600 000. Les crédits alloués au secteur réadaptation
sociale augmentent de $77 300 000 pour s'élever à un peu plus de
$900 millions. Quant aux centres hospitaliers publics et privés, ils
disposeront de quelque $2 260 000 000, ce qui représente 48% des
crédits totaux du ministère. $97 200 000 serviront aux
équipements des services de santé et $50 300 000, aux
équipements des services sociaux. Enfin, $88 millions vont à
l'administration et aux services dont $14 200 000 à l'aide à la
recherche et $19 200 000 à la coordination régionale,
coordination régionale voulant dire principalement les dix conseils
régionaux, services de santé et services sociaux. De ce dernier
montant, des $19 200 000, $7 400 000 sont alloués pour les services
sociaux et de santé du Nouveau-Québec.
Près de $55 millions seront consacrés aux priorités
du ministère ainsi qu'au développement et à
l'amélioration de programmes. C'est effectivement l'aspect particulier,
si vous voulez, de cet ensemble de crédits pour 1979/80,
c'est-à-dire les nouveaux programmes, ou l'expansion de programmes
actuels que nous pourrons enclencher avec cette somme de $55 millions de
nouveaux crédits, pour ainsi dire. Une grande partie de ce budget de
développement sera encore cette année consacrée aux
enfants, aux personnes âgées et aux personnes handicapées.
Même si, depuis deux ans, le nombre de places en garderie a
augmenté de plus de 5000 et que l'aide financière annuelle est
passée de $4 200 000 à $12 400 000, nous avons l'intention
d'intensifier encore nos efforts en ce sens. Une hausse d'un peu plus de 50%,
soit $7 500 000, portera cette année le budget des garderies à
$19 900 000, permettant ainsi la création de 4000 nouvelles places en
garderie, pour porter le total à tout près de 20 000 places. De
plus, j'espère être en mesure de déposer, avant la fin de
cette session, un projet de loi-cadre sur les services de garde à la
petite enfance, qui devrait permettre aux enfants de profiter d'un
service mieux adapté à leurs besoins et aux familles
d'acquérir un peu plus d'autonomie.
L'implantation de nouveaux services de garde permise par ce projet de
loi se fera par étapes, en tenant compte des besoins communautaires et
de la disponibilité des ressources.
Dans le cadre du programme d'allocations familiales, $3 millions ont
été prévus pour des allocations spéciales aux
parents d'enfants handicapés qui gardent ceux-ci à domicile
annualisés à $6 millions et $11 700 000 seront également
affectés à l'application de la Loi de la protection de la
jeunesse principalement pour l'embauche de personnel dans les directions de
protection de la jeunesse des quatorze centres de services sociaux.
De plus, à compter du 1er juillet 1979, la Régie de
l'assurance-maladie défraiera le coût d'achat, d'ajustement, de
remplacement et de réparation des appareils auditifs pour les personnes
de moins de 35 ans. Cette gratuité constitue l'un des
éléments marquants du programme que le ministère a mis en
oeuvre afin de venir en aide aux handicapés auditifs. Mentionnons en
outre la gratuité des soins dentaires étendue aux enfants de
quatorze ans depuis le 1er mai, contrairement à ce qu'un bulletin
à la télévision disait hier soir, à savoir quinze
ans. Je le rappelle, je fais la mise au point plusieurs autour de la
table le savent l'augmentation de l'accessibilité aux soins
dentaires gratuits pour les enfants va jusqu'à quinze ans exclusivement
et non pas inclusivement.
En ce qui concerne les personnes âgées, des sommes
importantes continueront d'être allouées pour
l'hébergement. Un investissement de $6 500 000 permettra la mise en
place de 882 lits en centres d'accueil publics. Nous avançons dans la
réalisation du programme de construction annoncé
l'été dernier et qui prévoyait l'ajout de 5111 nouvelles
places en centres d'accueil pour personnes âgées. Bon nombre de
ces centres sont en construction ou sur le point de l'être. L'ensemble de
ce programme permettra d'atteindre, dans chaque région du Québec,
un taux minimal de quatre places d'hébergement pour 100 personnes
âgées de 65 ans et plus.
Parallèlement à ces investissements, $3 400 000 ont
été distribués l'an dernier aux centres d'accueil pour
leur permettre d'augmenter leur personnel. Ce budget additionnel avait
été rendu nécessaire à cause des nouveaux
critères d'admission dans les centres d'accueil pour personnes
âgées qui entendent donner la priorité, la
préséance aux personnes âgées qui ont perdu leur
autonomie, dans une large mesure, et qui ont davantage besoin de soins.
Sur la base du présent exercice financier complet, ce programme
implique des déboursés de $5 400 000. Je rappelle que c'est la
deuxième année que nous ajoutons une somme à peu
près équivalente pour permettre d'augmenter le personnel dans les
centres d'accueil et nous avons l'intention de continuer encore l'an prochain.
C'est un programme au moins triennal
L'objectif de maintien à domicile constitue encore cette
année une priorité dans les crédits de
développement du ministère des Affaires sociales. En effet, avec
l'injection d'une somme additionnelle de $3 millions à ce programme, le
gouvernement du Québec consacrera, en 1979/80, à l'aide à
domicile près de $46 millions. Ce budget additionnel de $3 millions sera
divisé en deux tranches. D'une part, un montant de $1 million sera
spécifiquement destiné à des organismes
bénévoles dont l'intervention s'inscrit ou peut s'inscrire dans
le cadre d'un programme de maintien à domicile, organismes hors du
réseau. D'autre part, une somme de $1 500 000, à raison de $2 100
000 d'annualités, sera consacrée au développement des
services à domicile à l'intérieur du réseau des
établissements publics de santé et des services sociaux,
principalement les centres locaux de services communautaires.
Quant aux personnes handicapées, la mise en vigueur de la loi
assurant l'exercice des droits des personnes handicapées se poursuit
selon l'échéancier prévu, la loi 9. Presque toutes les
dispositions législatives de cette loi ont été
promulguées. En conséquence, l'Office des personnes
handicapées du Québec pourra accorder $250 000 en subventions
dès cette année aux organismes de promotion des
intérêts des personnes handicapées. Il pourra aussi
délivrer des certificats de centre de travail adapté à une
association ou à un organisme sans but lucratif qui emploie en
majorité des personnes handicapées afin de leur permettre
d'utiliser et de développer leurs possibilités professionnelles.
Je rappelle aussi qu'à partir du 1er juillet 1979, les entreprises
embauchant plus de 50 employés devront soumettre à l'Office des
personnes handicapées leur plan d'embauche des personnes
handicapées.
La loi prévoit également diverses mesures visant à
assurer l'intégration scolaire, professionnelle et sociale de la
personne handicapée, notamment par la mise en oeuvre d'un plan de
services qui tiendra compte du libre choix du bénéficiaire. Cela
aussi entrera en vigueur le 1er juillet, le plan de service individuel.
L'office établira son siège social à Drummondville et une
somme de $493 000 est consacrée aux dépenses de fonctionnement de
l'office, qui s'est vu attribuer un total de 28 postes pour son personnel au
siège social de Drummondville.
Dans un autre ordre d'idée, le gouvernement consacrera $4,2
millions au développement des centres locaux de services communautaires.
En accord avec les objectifs de décentralisation du ministère,
les conseils régionaux de la santé et des services sociaux
répartiront entre les CLSC les enveloppes budgétaires
régionales qui leur seront respectivement allouées. Il est
à noter que, depuis deux ans, les CLSC avaient
bénéficié de crédits de développement, mais
strictement identifiés aux services d'aide à domicile, au
maintien à domicile. Cette année, en plus de crédits de
développement que les CLSC pourront toucher pour l'aide à
domicile, il y aura aussi cette somme de $4,2 millions
qui pourra être affectée au développement de
programmes nouveaux dans les CLSC ou de l'expansion de programmes existants
mais autres que l'aide à domicile.
De plus, $11 millions seront consacrés au développement
des soins hospitaliers dans le cadre des projets d'immobilisation du plan
quinquennal. Enfin, des crédits additionnels de $939 200 seront
consacrés à la santé des travailleurs. Cette somme de
près de $1 million nouvelle dans nos crédits sera
consacrée à l'embauche de personnel dans les départements
de santé communautaire, embauche de personnel qui sera
spécialement chargé de surveiller la santé des gens en
milieu de travail.
Voilà, M. le Président, rapidement esquissée, d'une
part une ébauche comparative de nos crédits cette année
par rapport à l'an dernier, avec une augmentation de 8,6%, et, d'autre
part, quelques exemples de l'utilisation de ces sommes de développement
qui totalisent $55 millions de crédits nouveaux pour nous permettre de
mettre en marche certains programmes. Merci.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Claude Forget
M. Forget: M. le Président, selon nos règles, il
est prévu que ces crédits commencent par une discussion d'ordre
général. J'aimerais, dans cet esprit, avant qu'on aborde
l'étude des crédits, souligner un certain nombre d'aspects du
fonctionnement et des politiques du ministère des Affaires sociales qui
posent un certain nombre de problèmes et qui devraient faire l'objet
d'une discussion de caractère général.
Je vais commencer par tous ces problèmes reliés à
la sécurité du revenu et aux problèmes connexes. Je
parlerai ensuite des autres aspects du fonctionnement du ministère. Du
côté de l'aide sociale et des programmes de sécurité
du revenu, je crois que l'on peut dire que le bilan que l'on peut faire de
l'activité récente du ministère des Affaires sociales est
loin d'être rassurant pour ceux qui se préoccupent d'accorder une
priorité adéquate au problème de la pauvreté au
Québec. (10 h 30)
II semble que ces préoccupations de combattre les injustices, les
inégalités sociales et de consacrer les sommes suffisantes pour
diminuer l'incidence de la pauvreté soient devenues le parent pauvre,
non seulement du gouvernement, c'est déjà évident, mais
également du ministère des Affaires sociales. Ainsi, on remarque
que jamais, dans l'histoire du ministère des Affaires sociales, l'aide
sociale, c'est-à-dire les sommes que le gouvernement consacre
directement à aider les plus démunis dans la
société, jamais la part que l'Etat fait dans ses dépenses
à cette catégorie de la population n'a été aussi
faible.
Une démonstration de ceci est facile à faire lorsqu'on
considère qu'en 1971/72, la part du budget du gouvernement du
Québec à l'aide sociale s'élevait à 9,15% et qu'en
1978/79, le pourcentage est à moins de 6%, exactement 5,92% du budget.
C'est donc près de la moitié de l'effort budgétaire
consenti il y a sept ou huit ans qui est actuellement consentie au
bénéfice des assistés sociaux.
D'ailleurs, cette situation n'est pas le résultat du hasard, elle
reflète des décisions prises par le gouvernement, au cours des
deux dernières années, de se limiter strictement, dans le cas des
deux premières années, à l'indexation des prestations
d'aide sociale, et même pas autant que ça au cours de
l'année en cours. Ainsi, si on compare, je comprends qu'il s'agit de
périodes un peu différentes, mais si on compare l'accroissement
des prestations moyennes de l'aide sociale au cours de la période de
janvier 1971 à décembre 1976, c'est-à-dire la
période qui correspond exactement à l'administration
libérale précédente, on a vu la prestation moyenne pour
les personnes seules passer de $73.43 en janvier 1971 à $164.50 en
décembre 1976, c'est-à-dire une augmentation de $91.07 durant
cette période, par rapport au niveau original de $73.
Dans le cas des familles, la prestation moyenne est passée de
$151.88 en janvier 1971, à $308.22, soit une augmentation de $156.34,
par rapport, encore une fois, à la prestation moyenne initiale de
$151.
Donc, dans les deux cas, qu'il s'agisse de personnes seules ou de
familles, on a observé, pendant cette période, une multiplication
par un facteur de plus de deux de la prestation moyenne. Au cours d'un peu plus
des deux années qui se sont écoulées depuis que le
gouvernement actuel est en place, on a vu les prestations d'aide sociale
afficher un taux d'accroissement beaucoup plus modeste. De janvier 1977, les
personnes seules ont vu leurs prestations passer de $177.10 à $207.93,
en février 1979, une augmentation de $30 par rapport à un taux
initial de $177. Donc, un très faible pourcentage, sensiblement
inférieur à 20%, pendant une période où
l'inflation, comme on le sait, ne s'est pas fait attendre.
Du côté des familles, on a eu un phénomène
analogue, soit une prestation moyenne qui est passée de $336.59 en
janvier 1977 à $380.56 en février 1979, c'est-à-dire une
augmentation de $43.97 par rapport à une prestation de $336, donc un peu
plus de 10% d'augmentation sur plus de deux ans.
Cette évolution est d'autant plus troublante que l'on se trouve
devant un phénomène inquiétant au Québec, une
augmentation rapide, au cours des deux dernières années, du
nombre des bénéficiaires de l'aide sociale, une augmentation qui
a fait croître le nombre de quelque 48 000 bénéficiaires
qui demeurent seuls; donc, environ 48 000 personnes seules de plus
bénéficient de l'aide sociale, et environ 8000 familles de plus,
si l'on compare les chiffres de février 1979 à décembre
1976.
Quand on met ensemble ces données, l'on constate que les
prestations moyennes ont été maintenues à leur niveau le
plus bas possible, on n'a fait aucune amélioration pour augmenter la
générosité de ces prestations, même si
déjà dans la période initiale, dans le cas des familles
avec enfants, on se trouvait devant une situation où des
bénéficiaires étaient environ 10% à 15%
au-dessous du seuil de pauvreté. Malgré tout, durant toute cette
période de près de deux ans et demi, il n'y a eu aucune
amélioration des niveaux, même dans ces cas-là, et on a vu,
au contraire, malgré l'augmentation de la charge, malgré
l'augmentation du nombre des personnes visées, une augmentation
très sensible de près de 60 000 personnes ou ménages
bénéficiaires de l'aide sociale, on a vu une diminution du budget
du gouvernement accordé à l'aide sociale qui place maintenant le
niveau de ces dépenses dans l'ensemble du budget à près de
la moitié seulement de ce qu'il était au début de la
présente décennie.
Il y a eu bien sûr des diminutions de l'importance relative de
l'aide sociale dans le budget du gouvernement antérieures au 15 novembre
1976, mais il s'agissait là d'une diminution attribuable à la
diminution du nombre de personnes. Nous sommes maintenant dans une situation
différente où, malgré l'augmentation du nombre des
personnes, la part du budget consacrée à ces fins diminue
malgré tout et ceci est attribuable, de façon évidente, au
désir du gouvernement, encore une fois, d'être le plus dur
possible quant aux augmentations, de les refuser dans le plus grand nombre de
cas possible et même de refuser une indexation totale dans le cas des
familles avec enfants, comme cela s'est fait cette année, puisque
certaines familles avec enfants n'ont bénéficié que d'une
indexation de l'ordre de 3% par rapport à un taux d'inflation de 9% pour
l'année en cours.
Ces problèmes-là n'ont pas été sans
créer, du côté des associations qui se préoccupent
du sort des pauvres, des assistés sociaux et d'autres catégories
de la population qui sont tout à fait au bas de l'échelle des
revenus, n'ont pas été sans provoquer un certain nombre
d'inquiétudes et des tentatives pour non seulement alerter l'opinion
publique, mais au moins alerter l'attention du ministre. Les groupes que nous
avons rencontrés ont dû nous dire qu'ils avaient eu toutes les
peines du monde à se faire entendre par le ministère et le
ministre, en particulier, que les relations suivies qu'ils avaient dans le
passé avec des fonctionnaires supérieurs du ministère des
Affaires sociales ont été beaucoup plus difficiles à
maintenir et qu'il s'est greffé à tout cela des
difficultés d'ordre administratif qui ont compliqué encore plus
leur tâche. Parmi ces difficultés, on nous a cité, en
particulier, le fait que cette année, contrairement à ce qui a
été fait dans les années passées, les
chèques du 1er janvier n'ont pas été
prédatés de manière que les familles qui les
reçoivent puissent les encaisser avant le Jour de l'An pour obtenir des
fonds pour cette période-là de l'année et que les banques
n'ont pas reçu non plus, contrairement à l'habitude du
ministère des Affaires sociales, une invitation à les honorer par
anticipation.
Ce début d'année a été
particulièrement difficile, et non seulement, il n'y a pas eu une
autorisation d'honorer d'avance les chèques d'aide sociale, mais ils ont
été expédiés en retard cette année, ce qui
fait que, ceci joint à la diminution des allocations familiales
les crédits d'impôt, comme on sait, étant payés
seulement avec une périodicité différente, et ce n'est
plus un versement mensuel les familles d'assistés sociaux ont
été carrément placées devant des difficultés
additionnelles et non nécessaires, à la suite de tous ces
ajustements.
Les ajustements qui devaient découler de l'introduction de
crédits d'impôt par le gouvernement fédéral,
à la place d'une partie des allocations familiales
fédérales, n'ont pas été l'objet, avant le
début de l'année, de règlements nouveaux permettant aux
bénéficiaires de l'aide sociale d'apprécier
véritablement l'impact sur leur budget de ces différences dans le
régime des allocations familiales. On n'a pas su, jusqu'à une
date récente, comment les limites sur les avoirs liquides seraient
modifiées dans les règlements de l'aide sociale, de
manière à refléter le nouveau versement global des
chèques de crédit d'impôt. Les allocations scolaires, qui
sont fixées à $25 depuis plusieurs années, n'ont pas fait
l'objet de changements. Ou côté de la taxe d'eau qui, dans la
région de Montréal, est un problème qui revient
périodiquement, de façon annuelle, c'est non pas le ministre,
mais trois députés ministériels qui représentent
des comtés qui sont particulièrement affectés par ce
problème, qui, en mars dernier, ont cru bon de faire une
conférence de presse, le ministre ayant gardé le silence le plus
complet là-dessus. Non seulement il a gardé le silence, mais il
n'a pas encore répondu, même à l'appel que ses
collègues du parti ministériel lui faisaient à cette
époque.
Il y a eu, devant cette attitude du ministère, toute une
série de réactions. Il est intéressant de voir
jusqu'à quel point les associations qui se vouent, encore une fois,
à la défense des assistés sociaux ont été
unanimes dans leurs protestations face à l'attitude gouvernementale.
Nous avons ici toute une liasse de pétitions, de lettres, de
télégrammes qui ont été adressés au
ministre. En particulier, il y en a un bon nombre qui viennent de la
région et du comté même du député de
Sherbrooke. Je pense que la population de cette région est fort
déçue de son député qui, pourtant, avait
donné toutes sortes d'assurances qu'il se préoccuperait de ces
questions. Pas moins de six ou sept organismes de la région de
Sherbrooke ont écrit à tout le monde au Québec pour se
plaindre de l'impossibilité d'obtenir de sa part des engagements, et
même des représentations, des engagements qu'il fasse des
représentations auprès du ministre du gouvernement, relativement
à ces problèmes.
Lorsque le ministre a jugé bon de répondre à ces
plaintes, à ces protestations de la part soit des assistés
sociaux eux-mêmes, soit des avocats du bureau de l'aide juridique, soit
des associations de locataires, soit de l'ADDS, de différentes
régions, il l'a fait, comme il l'a fait d'ailleurs à de
nombreuses reprises à l'Assemblée nationale, en se rabattant sur
les querelles fédérales-provinciales, ce dont il a l'habitude et
ce qui est la marque de commerce du gouvernement actuel. Il a essentiellement
renvoyé les assistés sociaux à leurs problèmes en
leur disant que toute cette question n'était pas, dans le
fond, d'une importance suffisante pour qu'on laisse de côté
les querelles de juridiction, les ressentiments, appropriés ou non,
vis-à-vis de l'autre palier de gouvernement et qu'on apporte des
réponses qui ne coûteraient quand même pas des centaines de
millions au problème qui était soulevé et qui était
le problème de l'indexation incomplète des prestations
d'assistance sociale pour les familles.
Les gens qui ont reçu de pareilles lettres, évidemment, ne
se sont pas fait faute, à l'occasion, de répondre au ministre et
c'est dans cet esprit, d'ailleurs, que l'on peut lire la réponse que
faisait en particulier Mme Liette Côté, pour le Regroupement des
assistés sociaux de Sherbrooke, au ministre qui lui avait écrit
dans le sens que je viens d'indiquer, à savoir qu'il s'agissait
là de la faute du fédéral si le gouvernement du
Québec n'avait pas indexé ses propres prestations d'aide
sociale.
Cette lettre est asez remarquable, M. le Président. Je pense
qu'elle mériterait d'être lue au long, parce qu'elle
démontre assez clairement le désenchantement qu'éprouve un
certain nombre de citoyens, particulièrement de citoyens
défavorisés, face aux promesses parfois
inconsidérées, mais parfois seulement légitimes que ce
parti avait pu faire, face à des groupes de personnes
défavorisées, mais qui, une fois au gouvernement, se ravise, en
quelque sorte.
Je vais donc lire cette lettre, M. le Président. Je pense qu'elle
témoigne, encore une fois, de cette déception. Elle est
adressée au ministre. Elle est datée du 5 mars de cette
année. On dit: (10 h 45) "M. le ministre, "Par la présente, M. le
ministre, nous désirons donner suite à votre réponse du 19
février 1979. "Suite à la victoire du Parti
québécois le 15 novembre 1976, beaucoup d'espoir naquit au coeur
de la population la plus démunie, en l'occurrence les petits
travailleurs et les assistés sociaux; un parti au pouvoir qui se voulait
être le plus près possible de leurs attentes et de leurs besoins
en les consultant par l'intermédiaire des comités
régionaux du Parti québécois. Mais leur rêve fut de
courte durée. "Citons un exemple de ce gouvernement si humanitaire: Un
porte-parole des assistés sociaux de la région de Sherbrooke
envoie un télégramme à un député
ministériel" ça doit être le député
qui est à cette table, d'ailleurs "qui ne daigne pas lui
répondre personnellement, mais confie cette besogne à sa
secrétaire. "M. le ministre, concernant vos politiques de changement au
niveau des bénéficiaires d'aide sociale, nous sommes au regret de
constater qu'il y en a eu très peu. Il y a bien eu ce changement de date
du 5 au 1er pour la réception des prestations d'aide sociale. Il y a eu
aussi les frais dentaires gratuits à partir du 1er avril 1979, mais
cette directive aurait dû entrer en vigueur le 1er janvier 1976, selon
que cette politique venait du parti au pouvoir à cette époque.
"Il va sans dire que nous sommes énormément déçus
de ce gouvernement que nous nous sommes choisi en toute confiance et qui se
montre aujourd'hui incapable de résoudre les problèmes
d'ingérence fédérale, sauf en punissant les prestataires
d'aide sociale de leur droit le plus strict, une augmentation juste et
équitable, 9%, sans considérer le crédit d'impôt.
"Nous, les prestataires d'aide sociale, demandons à être entendus
sur les 9% d'augmentation. C'est un droit. Nous le voulons au même titre
que le travailleur qui, lui, n'est pas pénalisé par son
crédit d'impôt, cadeau de notre cousin du fédéral.
"Pourquoi ce seraient toujours les plus démunis qui sont
pénalisés suite à cette vieille querelle
fédérale-provinciale? C'est la question que nous nous posons
ainsi que la majeure partie de la population des électeurs. "Nous vous
redisons avec véhémence, M. le ministre, que les familles
d'assistés sociaux avec enfants n'ont pas été
respectées au sujet de ces 9% d'indexation. Pourquoi tant parler de
l'année de l'enfant quand justement le gouvernement si humain
prêche de si belles philosophies, mais s'en fiche si royalement dans le
concret? Nous sommes en droit, M. le ministre, d'exiger que vous
révisiez vos décisions et positions concernant vos politiques
face aux prestataires d'aide sociale. Nous voudrions vous interroger gentiment,
M. le ministre, ainsi que le Conseil des ministres sur le montant exorbitant de
$5 millions pour un aréna aux Nordiques de Québec de
l'Association mondiale de hockey. Combien de millions pour un centre sportif
à l'Université de Sherbrooke? Nous continuons à nous
interroger suite à votre décision et position concernant les 9%
d'indexation pour les prestataires d'aide sociale qui coûteraient $17
millions au budget du trésor. Où sont les vraies valeurs de votre
gouvernement si humanitaire? Nous attendons une réponse positive
à cette demande."
C'est signé Liette Côté, pour le Regroupement des
assistés sociaux de Sherbrooke.
Cette lettre, je l'ai citée au long parce qu'elle résume
assez bien l'attitude de désenchantement et de déception des
personnes que préoccupent ces problèmes et qui sont en
très grand nombre; il y a ici une liasse complète, et ce n'est
pas tout ce que nous avons reçu à nos propres bureaux. Je suis
sûr que plusieurs de ces protestataires n'ont pas pensé à
nous envoyer copie des lettres qu'ils adressaient au ministre.
Cela démontre clairement, par ces chiffres que j'ai cités
tout à l'heure, une diminution du budget de l'aide sociale, de la part
que représente l'aide sociale dans le budget du Québec,
diminution qui se fait en dépit d'une augmentation rapide du nombre des
bénéficiaires. Ce n'est pas un hasard, c'est une volonté
stricte du gouvernement de ne pas donner à l'aide sociale plus que ce
qu'il est absolument impossible de lui refuser, c'est-à-dire ce qu'elle
avait dans le passé, plus ou moins, avec le minimum d'ajustement.
Tout en étant conscient, par ailleurs, que le problème de
la pauvreté, même selon la diminution très modeste du
Montreal Diet Dispensary qui fixe les seuils de pauvreté au niveau le
plus bas de tous les organismes qui se préoccupent de ces
questions, même en fonction de ces seuils de pauvreté, les
barèmes actuels de l'aide sociale ne sont pas adéquats pour
correspondre aux besoins des ménages avec enfants.
Pourtant, le ministre a eu un certain nombre d'occasions
d'améliorer la situation de ces familles. Par exemple, à chaque
année il a introduit une loi d'aide sociale, une loi pour modifier les
allocations familiales du Québec et, à chacune de ces occasions,
il aurait pu aménager différemment la distribution des sommes
versées aux familles selon le rang des enfants. D'ailleurs, nous lui
avions fait la suggestion de le faire lorsqu'il a augmenté les
allocations familiales pour tenir compte du fait que, selon la formule
inhérente à l'entente avec Ottawa, des sommes supérieures
pouvaient être versées aux familles du Québec à
même le montant forfaitaire qui est attribué par le gouvernement
fédéral. Nous avions suggéré au ministre, à
ce moment-là, d'accorder davantage d'importance aux allocations
familiales, d'augmenter le montant des allocations familiales pour les enfants
de troisième et quatrième rangs, étant donné que
l'incidence des familles nombreuses est un facteur important de pauvreté
au Québec. Nous lui avions suggéré, en concordance avec
une telle modification, d'augmenter également le montant qui est inclus
à l'aide sociale pour tenir compte de la présence des enfants
dans les familles, de manière que tous les enfants de premier et
deuxième rang reçoivent autant que les enfants de
troisième et quatrième rang en vertu des allocations
familiales.
C'est là une concordance qui existait antérieurement,
c'est une concordance que le ministre a choisi d'ignorer et on découvre
malgré tout qu'il tient beaucoup à cette question de concordance
lorsqu'il parle de ses querelles avec Ottawa. Il fait reposer là-dessus
l'essentiel de son argumentation pour refuser l'indexation à 9%, en
disant qu'il s'agit d'un programme intégré, que l'aide sociale et
les allocations familiales fédérales et provinciales constituent
un programme intégré, qu'il est donc justifié de tenir
compte des $200 pour ne pas verser 9% d'indexation aux familles avec enfants.
Cela lui apparaît extrêmement important d'intégrer les deux
régimes. Pourtant, quand il a modifié le régime
québécois des allocations familiales, il s'est moqué
complètement de cette intégration-là. Il l'a
ignorée, il a prétendu ne pas comprendre de quoi on parlait au
moment du débat sur les allocations familiales, alors qu'il aurait
été facile et peu coûteux pour le Québec de mettre
toute cette augmentation-là au bénéfice des enfants de
troisième et quatrième rang et d'augmenter les allocations
sociales des familles avec enfants pour les enfants de premier et
deuxième rang, comme ça existait il y a quatre ou cinq ans, il y
a même jusqu'à deux ans et demi, de manière que le montant
que les familles bénéficiaires de l'aide sociale reçoivent
à cause de la présence d'un enfant soit égal à
celui que toutes les familles reçoivent pour un enfant du
quatrième rang par le jeu des allocations familiales
fédérales et provinciales.
Cette intégration a été abandonnée
volontairement par le ministre et, malgré tout, c'est un problème
de concordance qu'il utilise comme excuse pour ne pas indexer. On voit bien que
dans les deux cas, il s'agissait d'économiser de l'argent. Lorsqu'il
s'est agi d'aménager les allocations familiales du Québec, on a
mis de côté l'intégration parce qu'il s'agissait
d'économiser surtout de l'argent, c'était ça la
préoccupation. Quand il s'est agi d'économiser de l'argent sur
l'indexation cette année, on a argumenté à 180
degrés dans l'autre direction, disant que l'intégration
était très importante pour refuser l'indexation.
On se rend bien compte que le ministre utilise n'importe quel argument
et même le même argument, mais dans des sens différents. Le
seul effet de cette incohérence, c'est, dans tous les cas, de prendre
toujours la décision qui est la moins coûteuse pour le ministre
des Finances. Il y a quand même des choses qui doivent être dites
et cette incohérence est trop flagrante pour qu'on ne la souligne pas
aujourd'hui.
Il y a d'autres sujets, bien sûr, qui feront partie de notre
examen détaillé des crédits. Je les mentionne ici pour
mémoire, de manière que le ministre, si jamais les renseignements
lui font défaut, puisse en faire état le moment venu. Il y a
toute cette question qui traîne depuis trois ans et demi ou quatre ans,
relative à la question de la perception des pensions alimentaires. C'est
un sujet qui a fait l'objet d'une étude conjointe par le
ministère de la Justice et le ministère des Affaires sociales.
L'étude a été mise en train vers 1975. On est rendu en
1979 et, quand il en est question, le ministre des Affaires sociales, comme le
ministre de la Justice, se dissimule derrière des délais et des
études additionnels qu'il serait prétendument nécessaire
de faire, alors qu'il s'agit là de pratiques qui existent ailleurs et
dont on a pu s'inspirer et qu'on a pu étudier à
l'expérience. Nous allons certainement demander au ministre de nous
donner des précisions dans ce cas-là.
Il y a également certaines modifications au règlement de
l'aide sociale. Nous avons été mis au courant en particulier
d'une règle qui détermine maintenant une limite financière
pour le remboursement des coûts de déplacement des assistés
sociaux lorsqu'ils doivent se rendre soit à l'hôpital, soit
même au bureau d'aide sociale lui-même, ce qui constituerait une
injustice, puisqu'on rembourse le coût de développement aux
bénéficiaires de l'aide sociale à un taux qui ferait rire,
qui ferait se tordre de rire le Syndicat des fonctionnaires provinciaux du
gouvernement, entre autres. Il s'agit d'une somme de $0.10 le mille, ce qui est
largement insuffisant et qui ne tient pas compte des circonstances diverses,
puisque c'est une minorité d'assistés sociaux qui peut
bénéficier de sa propre voiture pour se déplacer.
Il est bien clair que, pour les autres, cette somme de $0.10 le mille
est une limite qui, dans bien des cas, est complètement
irréaliste. Il sera intéressant de savoir plus largement aussi
quels sont les projets d'avenir du ministre, s'il en a, relativement à
un certain nombre de questions qui
dorment sur son bureau depuis trop longtemps, depuis un an et demi,
depuis deux ans. Chaque année, quand nous avons étudié les
crédits des Affaires sociales, nous avons eu l'occasion de lui demander
il s'agit là de questions plus larges de programmes de
sécurité de revenu ce qu'il va faire, s'il va faire
quelque chose un jour du rapport du comité Boutin sur la discrimination
des avantages sociaux. Il s'agit là d'une application de la Charte des
droits et libertés de la personne, qui demandait une
réglementation, qui demandait des spécifications.
Il y a eu une abondante consultation par le comité Boutin,
puisqu'il y a eu en 1975 un prérapport qui a fait l'objet de
consultations à travers le Québec avec les syndicats, les
organisations d'employeurs, les gestionnaires de régimes sociaux,
d'assurance et de fonds de retraite.
Il y a eu un rapport final qui a été
présenté au ministre en décembre 1976. Depuis c'est un
silence de mort sur cette question. Il y a pourtant un problème de
discrimination, il y a des suggestions concrètes qui sont faites dans le
rapport. Il y a un problème d'inégalité dans
l'accès aux avantages sociaux qui est intolérable, qu'il s'agisse
des régimes d'assurance ou des régimes de retraite entre hommes
et femmes qui sont sur le marché du travail. Ceci est contraire à
la Charte des droits et libertés de la personne qui a été
proclamée depuis déjà quatre ans.
Je ne m'explique pas les retards annuels successifs que le ministre ne
peut pas expliquer, sauf en disant qu'il s'agit d'une question complexe. C'est
justement pour ça que le comité Boutin a été
formé, ce n'était pas un comité composé de
fonctionnaires du ministère seulement, mais dont faisaient partie Me
Jacoby, par exemple, du ministère de la Justice, la présidente,
à l'époque, du Conseil du statut de la femme, et des
administrateurs du régime de retraite, donc un comité qui pouvait
tenir compte de l'ensemble des points de vue.
Ces études ont été faites il y a longtemps, il y a
deux ans que ce rapport traîne; qu'est-ce que l'on fait pour le mettre en
application? Il y a aussi le rapport COFIRENTES qui a été
déposé après des réticences absolument ridicules de
la part du gouvernement, qui avait presque l'impression de commettre un geste
impudique que de révéler quelles étaient les projets
d'avenir relativement au financement du régime de rentes. Il y a des
options qui ont été décrites dans le corps de ce rapport
COFIRENTES, sur lesquelles le gouvernement, d'une part, s'est refusé
à se prononcer dans un sens ou dans l'autre et sur lesquelles il n'a
fait aucune tentative de consultation auprès de qui que ce soit. Il y a
pourtant des échéances qui s'en viennent. Quelles que soient les
solutions qui seront retenues, des études actuarielles seront
nécessaires avant la présentation d'un projet de loi pour amender
le régime de rentes; un débat très large des amendements
au régime de rentes sera nécessaire, des modifications aux
cotisations seront nécessaires également ou au régime des
bénéfices.
Il demeure que c'est là un problème important puisque des
millions de travailleurs cotisent à ce régime et sont en droit de
s'attendre, de la part du gouvernement, maintenant que l'étude
COFIRENTES a été terminée, il y a déjà un an
et demi ou deux ans, maintenant que le ministère des Affaires sociales
comme le ministère des Finances ont eu le temps de se pencher sur ces
recommandations, ils étaient d'ailleurs représentés
à ce comité d'étude... Il serait temps que s'amorce un
processus de décision qui nous amènerait vers des solutions. (11
heures)
Hier, même le Conseil de développement social du Canada a
fait une observation et une suggestion. C'est une suggestion, une observation
qui acquiert, je pense, une importance grandissante dans le contexte actuel
où tous les gouvernements se trouvent à surveiller de très
près leurs dépenses à tous égards, mais où
également on constate que le problème de la pauvreté, que
plusieurs programmes sociaux voulaient résoudre, est presque aussi
entier qu'il l'était il y a une quinzaine d'années, ou même
une vingtaine d'années, que la redistribution que l'on souhaitait faire
sans douleur, sans difficulté, ne s'est pas faite, effectivement, et
qu'on se retrouve devant des inégalités sociales presque aussi
aiguës que celles que l'on connaissait il y a quinze ou vingt ans.
Devant cette situation de besoins encore insatisfaits et de
difficultés financières pour la plupart des gouvernements, le
plus grand nombre des analystes, des observateurs, concluent à la
nécessité de s'éloigner de l'universalité comme
principe, comme élément fondamental de la conception de plusieurs
programmes, y compris, par exemple, les allocations familiales. On parle
également, dans le rapport du Conseil de développement social, de
la pension de la sécurité de la vieillesse, mais il ne s'agit pas
d'un problème qui est de notre compétence ici. Limitons-nous donc
aux allocations familiales. Est-ce que le régime actuel d'allocations
familiales non imposables c'est là aussi une chose qui est
critiquée par le Conseil de développement social et
universel, est-ce que c'est une donnée permanente des politiques
sociales du Québec, ou est-ce que c'est une chose qui va être
modifiée? Le ministre va probablement me dire: Nous allons
étudier le rapport du Conseil de développement social, nous
allons réfléchir là-dessus, mais nous n'avons pas,
à ce moment-ci, de décision à prendre.
Il faudra bien cependant que, de la part du ministre des Affaires
sociales, dans le domaine de la sécurité du revenu, on sache un
peu où on s'en va parce qu'à part la gestion courante que l'on
fait vaille que vaille, il demeure qu'il devient de plus en plus difficile de
comprendre l'orientation que prend le ministère des Affaires sociales et
le gouvernement dans son ensemble.
Bien sûr, son collègue du développement social a
introduit une mesure pour le supplément au revenu de travail. Il reste
que tous ceux qui se sont exprimés en dehors du gouvernement sur ce
sujet se sont interrogés, à savoir si, avant de
supplémenter le revenu de personnes et de ménages qui vont se
trouver dans des catégories de revenus, même, dans
certains cas, dépassant $10 000 par année, c'est bien
assuré que ceux qui ont le plus besoin de l'aide, c'est-à-dire
les bénéficiaires actuels de l'aide sociale, ont malgré
tout des niveaux de prestations suffisants pour les sortir de la
pauvreté la plus abjecte.
Or, ce n'est pas le cas. On peut donc se questionner sur les
priorités que le gouvernement utilise dans la conception de ses
programmes sociaux. Encore une fois, nous applaudissons à la
décision de supplémenter le revenu des travailleurs pauvres.
C'est là un développement qui est souhaitable, qui est attendu
par un tas de gens depuis longtemps. Il demeure qu'il est illogique de poser ce
geste avant de s'assurer que tout a été fait, que tout a pu
raisonnablement être fait pour sortir de la pauvreté ceux qui
n'ont même pas la ressource de pouvoir travailler.
Or, ce n'était pas le cas il y a deux ans, c'est encore moins le
cas aujourd'hui, puisque non seulement n'a-t-on pas augmenté les
barèmes de l'aide sociale, en termes réels, mais on a même
fait défaut de les indexer complètement cette année,
encore une fois, pour les familles avec enfants.
Donc, au lieu d'avancer dans le domaine de l'élimination de la
pauvreté pour les plus démunis, on recule. Et, au même
moment, on choisit de supplémenter le revenu des gens qui, malgré
tout, sont dans une position relativement plus avantageuse, puisqu'ils ont,
eux, la possibilité de travailler.
Il y a également des problèmes fort importants qui se
posent dans le secteur des services de santé. Ces problèmes, M.
le Président, sont un peu du même ordre et découlent d'une
préoccupation excessive de la gestion quotidienne du ministère,
d'une absence de perspective d'ensemble sur l'objectif et la direction dans
laquelle on veut aller.
Par exemple, il est de plus en plus évident que la question des
coûts de santé et de la croissance des coûts de santé
est désormais un faux problème au Québec et au Canada.
C'est un faux problème, parce qu'on a pu constater au cours des trois ou
quatre dernières années une stabilisation du revenu national qui
est consacré aux dépenses de santé. Pendant la
période qui est allée de 1958 à 1972,1973, 1974, il y a eu
effectivement un accroissement rapide de la part des budgets gouvernementaux
consacrés à la santé, un accroissement rapide des
dépenses per capita en termes réels, compte tenu de l'inflation
pour les services de santé et ceci est attribuable largement et
on le perçoit plus clairement maintenant qu'on pouvait le faire à
l'époque à l'introduction successive de
l'assurance-hospitalisation et de l'assurance-maladie pendant une
période d'environ douze ans. Il y a eu un effet de hausse rapide des
budgets, une augmentation des coûts et une augmentation des
dépenses per capita. C'était d'ailleurs le but de ces programmes
de dépenser davantage pour les services de santé, puisqu'on avait
jugé avant que les gens ne dépensaient pas suffisamment pour leur
santé, soit que les services n'étaient pas accessibles, soit sur
le plan géographique, soit plus fréquemment sur un plan
financier. C'est donc normal que ces coûts-là augmentent. C'est ce
qui s'est produit, mais, malgré tout, avec une gestion raisonnablement
rigoureuse des budgets gouvernementaux, avec une "profession-nalisation" accrue
des administrateurs dans les institutions de santé et les
établissements sociaux, le problème d'un débordement des
coûts, le problème d'une escalade des coûts sans fin qui
avait été l'objet de craintes largement exprimées au
milieu des années soixante; cette crainte apparaît
désormais comme non fondée. Elle a pu être fondée
dans le passé, mais justement elle a inspiré des mesures
administratives, des mesures budgétaires qui ont fait que le
problème a été réglé.
A l'heure actuelle, on se trouve à plafonner, on se trouve sur un
plateau. Les dépenses de santé ne sont pas excessives au Canada
ou au Québec par rapport à toutes les comparaisons
internationales que l'on peut faire. Au contraire, elles sont notablement plus
basses au Canada et au Québec également qu'elles ne le sont par
exemple aux Etats-Unis sur une base per capita. On dépense moins pour
les services de santé au Québec et au Canada que dans un certain
nombre d'autres pays. Cela est attribuable, je pense, à une conception
de notre système de santé, à une bonne gestion qui a
demandé des efforts, des coups de barre, des ajustements
pénibles, difficiles, mais c'est un défi qui a été
relevé à la fois par le gouvernement du Québec, les
gouvernements des autres provinces et par les administrateurs des
établissements de santé.
Maintenant que ce défi est relevé, maintenant que nous
pouvons considérer avec plus de dégagement et avec plus de
sécurité quant à l'avenir le problème des
coûts de santé, il devient un peu déplacé et
même dangereux de continuer à mettre une insistance aussi
exclusive que le fait le ministre sur la question des coûts de
santé. Il est normal que, dans une société qui
connaît malgré tout une croissance économique
réelle, une certaine partie de cette richesse nouvelle soit
consacrée à améliorer la qualité de vie pour la
population et rien n'est plus susceptible à améliorer la
qualité de vie de la population qu'une accessibilité qui
s'accroît graduellement à des services de meilleure
qualité, plus spécialisés ou des services plus
accessibles, des services de différentes sortes mais qui appartiennent
à la grande famille des services de santé et des services
sociaux. C'est une façon intelligente et rationnelle d'utiliser la
richesse croissante de nos économies.
Or, à entendre le ministre des Affaires sociales depuis quelque
temps, il s'agit encore d'une croisade sans rémission contre un taux
galopant d'inflation et d'augmentation des coûts dans le secteur de la
santé. Un régime d'amaigrissement, M. le ministre, comme on le
sait très bien, ne doit pas se poursuivre au-delà du moment
où on atteint le poids voulu, et, le poids voulu est actuellement
atteint dans le domaine de la santé.
Le grand danger pour l'avenir, c'est qu'en créant une
espèce de psychose des coûts excessifs dans le secteur de la
santé, on en vienne à dépenser moins pour les services de
santé que les citoyens ne voudraient le faire. Ce n'est pas une peur,
une affir-
mation sans fondement que je fais, il y a des précédents
historiques pour une affirmation comme celle-là. C'est ce qui s'est
produit en Grande-Bretagne pendant les années d'après-guerre
alors que les gouvernements successifs, ayant le contrôle complet sur
l'accroissement des coûts dans le secteur de la santé, ont choisi
d'appauvrir ce secteur pour financer la reconstruction industrielle et
différentes aventures dans différents domaines et ont choisi
délibérément de freiner, par exemple, le renouvellement du
stock hospitalier, de l'équipement hospitalier, de sorte qu'ils se sont
trouvés, après une trentaine d'années, avec un
équipement d'une vétusté absolument alarmante et avec des
services dont la qualité laissait à désirer pas sur le
plan de la compétence professionnelle, mais sur le plan des
possibilités physiques de donner des soins adéquats et conformes
aux standards de l'époque.
C'est un peu le danger qui guette le Québec et même
l'ensemble du Canada, mais on dirait que c'est avec une persistance encore plus
considérable qu'on se voue à cet objectif de contrôle des
coûts à tout prix au Québec. Il y a là un danger
réel de faire moins qu'il ne serait souhaitable de faire objectivement
et de faire moins que, subjectivement, les contribuables ne veulent qu'il soit
fait dans ce secteur. Tout est question de mesure. Je n'invite pas le ministre
à abandonner sa vigilance quant à la performance des centres
hospitaliers et des autres établissements d'affaires sociales, il est
clair qu'il faut s'assurer que les citoyens en aient pour leur argent. C'est
une argumentation bien différente de celle qui est basée sur la
notion que si on ne fait pas quelque chose, on s'en va tout droit à la
banqueroute. On ne s'en va pas du tout à la banqueroute. Les services de
santé sont sous contrôle et ceux qui présentent le
contraire auraient fort à faire pour le prouver. Il y a effectivement un
plafonnement remarquable des dépenses de santé.
Le ministre va dire: Le député de Saint-Laurent tient
maintenant un langage bien différent de celui qu'il tenait dans le
passé.
M. Lazure: Que oui! Que oui, Monsieur le Président!
M. Forget: Je l'inviterais à consulter, pour son
édification, une déclaration que j'ai faite en 1974, à
l'Assemblée nationale. Je l'ai reprise lors d'une conférence
fédérale-provinciale où j'ai tenu exactement le même
langage qu'aujourd'hui, parce qu'il était déjà sensible,
en 1974, qu'un plafonnement commençait à être perceptible.
C'est d'ailleurs sur la base de ce raisonnement que je me suis opposé au
plafonnement des coûts que le gouvernement fédéral voulait
nous imposer à l'époque dans sa participation financière.
C'est le même raisonnement qui est encore valable cinq ans après,
c'est-à-dire en 1979. Aujourd'hui, il ne s'agit pas d'analyser une
situation qui était à peine perceptible, sauf pour ceux qui
étaient le plus près du tableau, qui avaient la vue d'ensemble du
tableau, comme je l'avais à titre de ministre à l'époque.
C'est devenu un fait que les statistiques gouvernementales démontrent
abondamment ce plafonnement des dépenses de santé. Il serait
temps que cela devienne plus que simplement une exhortation d'un individu, que
cela devienne un des principes de base qui guident la planification
financière du gouvernement.
Il ne s'agit pas de faire une guerre contre des moulins à vent.
Le problème de l'accroissement indéfini des coûts de
santé, c'est devenu un moulin à vent, rien d'autre. Il y a des
problèmes réels de rendement. Je suis loin d'affirmer que tous
les centres hospitaliers au Québec donnent le rendement qu'ils
devraient, mais c'est un problème de gestion, ce n'est pas un
problème de préserver la santé financière de l'Etat
ou de prévenir la banqueroute possible. C'est un problème de
beaucoup plus faible envergure, c'est un problème de gestion qui doit
être réglé à ce niveau, et qui ne peut pas se
régler par des coupures générales et arbitraires dans les
budgets comme celles auxquelles on assiste, alors que, depuis deux ans, le
ministre refuse toute l'indexation des coûts autres que les salaires et
ne prévoit aucune somme pour l'accroissement des dépenses non
salariales.
C'est une politique qui n'est pas propre au ministre des Affaires
sociales. Le ministère de l'Education fait exactement la même
chose face à son réseau. On présume, contre le bon sens,
que le prix du chauffage, de l'alimentation et des autres fournitures
matérielles dont ont besoin les immenses réseaux des Affaires
sociales et de l'Education n'a subi aucune augmentation depuis trois ans. C'est
une affirmation qui choque le sens commun tout simplement (11 h 15)
Quand on applique la même règle à des centres
hospitaliers que l'on juge performants et que l'on juge en économie de
ressources, comme c'est le cas dans le moment, où il y a des
hôpitaux qui, d'après les calculs du ministère, sont
performants, sont en économie de ressources, et pourtant on leur dit:
Quant à vous, c'est la même règle qui vaut comme pour les
autres. On présume, sans avoir aucune justification, bien sûr,
pour le faire, que vos fournitures, votre huile à chauffage, etc.,
ça ne vous coûte pas plus cher cette année que l'an
dernier.
Des règles comme celle-là ne sont pas de nature à
encourager les bons gestionnaires et, pour ce qui est des mauvais, elles ne
leur donnent qu'un argument de plus pour combattre les efforts légitimes
du ministère des Affaires sociales pour les induire à mieux
administrer les sommes qui leur sont confiées. Quand on a des
règles budgétaires de cette nature, on ne peut faire autrement
que de se heurter à l'incrédulité et à l'absence de
collaboration.
Il y a des demi-vérités, en plus des faux
problèmes, dans la façon dont le ministre s'y prend pour
améliorer la performance d'un certain nombre de centres hospitaliers. Il
a été jusqu'à commettre cet incroyable comment
dire? faux semblant qu'est de préfacer un communiqué sur
les mises à pied, du titre "Création de 4850 emplois". Il faut le
faire, vous savez, M. le Président. Quand on annonce qu'il y a 2000
postes en trop dans le secteur hospitalier, quand on dit: On
souhaite que ça se fasse par attrition, c'est-à-dire par
les départs, on ne fait que le souhaiter. On n'en fait pas une
règle absolue. D'ailleurs, il y a de nombreux exemples. Il y a des gens
qui viennent nous voir dans nos bureaux pour nous dire: J'ai été
mis à pied dans tel hôpital. Cela ne doit pas être des cas
simplement de raison raisonnante, ce sont des gens en chair et en os qui sont
mis à pied. On dit: On souhaite que ce soit par attrition. Il y a 2000
postes en trop, mais comment s'intitule le communiqué qui parle de tout
ça? "Création de 4850 emplois".
Il ne faut quand même pas aller trop fort. Il ne faut quand
même pas prendre les gens pour de complets imbéciles. D'ailleurs,
les syndicats eux-mêmes, devant un pareil genre de manque de candeur, de
manque d'honnêteté intellectuelle, ... dire: D'accord, il faut
couper des postes. On va les couper et on va appeler un chat un chat, comme le
disait Boileau. Cela fait plusieurs siècles que cela a été
découvert, qu'il faut appeler les choses par leur nom. Quand on coupe
des postes, on dit: On coupe des postes. On ne dit pas: On crée des
emplois. D'ailleurs, il faudrait bien voir s'ils ont été
créés ou non.
Alors, quand on a de telles affirmations, il ne faut pas
s'étonner si la Fédération des affaires sociales part en
guerre. Elle a déjà une certaine propension à partir en
guerre, surtout à cette époque-ci, mais quand on alimente, dans
le fond, sa mauvaise humeur par des affirmations qui sont notoirement fausses
et qui cherchent à créer une fausse impression, il est bien
sûr qu'on va avoir affaire à un renchérissement de l'autre
côté. On va monter les enchères de l'autre
côté. Si le ministre veut s'en tirer en faisant croire qu'il
crée des emplois alors qu'il fait des licenciements, la
Fédération des affaires sociales et les autres syndicats
visés vont vouloir contredire et détruire dans l'opinion publique
cette fausse impression. C'est presque de la provocation.
Il y a un problème réel. Il y a un problème
réel dans un certain nombre de nos hôpitaux, celui d'une
utilisation déraisonnable de personnel, encore que la source des
responsabilités dans ce secteur n'a pas été
départagée de façon très claire, à la
satisfaction de personne, d'ailleurs. S'agit-il d'une exigence stricte des
conventions collectives? S'agit-il d'une mauvaise administration des
conventions collectives par les gestionnaires hospitaliers? C'est un sujet sur
lequel il y a une multiplicité d'opinions.
Mais il est un fait que les administrateurs hospitaliers ont souvent
souligné, que les conventions collectives qu'ils avaient à
administrer rendaient impossible d'administrer nos hôpitaux de la
même façon qu'ils le sont dans d'autres pays. Or, le gouvernement,
les gouvernements qui se sont succédé doivent supporter une large
part de la responsabilité de cette situation. Ils l'ont
également, pour une large part, résolue par la garantie de
sécurité d'emploi, mais la sécurité d'emploi n'est
pas donnée à tout le monde de la même façon, et il
faudrait s'interroger à savoir qui frappent surtout les licenciements
qui s'effectuent dans le domaine des affaires sociales.
Tous les travailleurs sont égaux, bien sûr, mais il y en a
qui sont plus égaux que d'autres. Il y en a qui sont mieux
protégés que d'autres, il y en a qui sont protégés
par leur ancienneté, dans le sens que, s'ils ont fait douze mois dans le
secteur des affaires sociales, ils ont au moins une sécurité de
revenu qui leur est assurée et la probabilité d'obtenir un emploi
dans un autre établissement. Ils ne sont pas tous dans cette situation
et certains qui ont été engagés, qui ont parfois
été incités à se déplacer
d'établissement se retrouvent assis entre deux chaises, n'ayant pas
acquis, ni dans un cas, ni dans l'autre, la protection de la convention
collective.
Il y a, dans nos établissements, un nombre surprenant de
professionnels et de techniciens de haut niveau qui tombent en dehors de la
protection syndicale et qui sont essentiels pour le fonctionnement des centres
hospitaliers, particulièrement de services spécialisés de
haute qualité. Pourquoi ne sont-ils pas syndiqués? Parce que
s'ils se trouvent ordinairement dans des unités trop petites, en trop
petit nombre. Par exemple, on peut trouver certains techniciens; un cas qui m'a
été soumis tout récemment, un illustrateur médical
qui est utilisé, bien sûr, en relation avec des activités
de recherche et d'enseignement dans certains milieux; il est un professionnel,
ce n'est pas un cadre, mais il n'est pas syndiqué; théoriquement,
il est syndicable, mais personne ne s'est préoccupé d'aller
chercher sa cotisation parce qu'il y a un illustrateur médical dans cet
établissement. S'il disparaît, qu'est-ce qui arrive de
l'enseignement clinique et de la recherche? Est-ce qu'il y a des solutions de
rechange? Bien sûr, les administrateurs ne sont pas idiots, ils vont
d'abord congédier ceux qui n'ont pas de protection. Dans les centres
hospitaliers d'enseignement, cela peut viser très probablement des gens
qui n'ont pas de protection syndicale, pour lesquels personne ne viendra
protester auprès d'eux. On va ainsi menacer directement la
qualité des services; on ne congédiera pas des gens
préposés à l'entretien ménager qui sont
protégés par la CSN, on va congédier un illustrateur
médical ou un technicien en radiologie nucléaire dont on a un
seul exemplaire et qui s'adonne à ne pas être syndiqué,
justement, parce qu'il y en a seulement un dans l'hôpital.
Cette situation crée des difficultés et nous sommes loin
d'être dans la situation d'avoir suffisamment de lumière sur
l'impact, sur la qualité des services de ces compressions
budgétaires.
Ce n'est pas la seule difficulté qui est créée. La
pression généralement exercée par le ministère pour
accroître le rendement des centres hospitaliers, diminuer leur
utilisation de personnel, fait que les zones de moindre résistance
peuvent très bien se retrouver, comme je l'ai indiqué tout
à l'heure, mais de façon plus générale, dans la
dimension qualitative des services. Il peut être facile de diminuer la
qualité des services sans encourir la condamnation de qui que ce soit.
Or, on remarque une chose curieuse. Dans la réorganisation
administrative dont le ministre vient de faire état et qui est toute
récente au ministère des
Affaires sociales elle date, je pense, de décembre ou de
janvier dernier on a fait sauter la direction de l'agrément pour
l'intégrer à la direction de la programmation. Or, il y a
là un problème assez délicat. Il est clair que le ministre
peut dire: Dans le passé, il y a eu des problèmes de
communication, on n'était jamais certain de ce qui relevait de
l'agrément, de ce qui relevait de la programmation, il y avait des
directives contradictoires ou des recommandations contradictoires
vis-à-vis du même établissement qui pouvaient émaner
de deux sources.
C'est probablement le cas, il y a eu de telles contradictions, mais ce
n'est pas nécessairement un défaut dans une grosse organisation
administrative que d'avoir des centres de responsabilité qui, à
l'occasion, peuvent se contredire et se vérifier l'un et l'autre. Cela
n'exprime qu'un fait bien connu dans la vie, c'est qu'il y a plus d'une
façon de considérer n'importe quel problème. Il y a, bien
sûr, la considération financière, la considération
de programme, celle de s'assurer que les sommes disponibles au ministère
des Affaires sociales sont consacrées à des activités
jugées prioritaires, que certains réajustements administratifs
sont effectués, etc. Mais il y a aussi la considération de
qualité. Plus les pressions budgétaires sont fortes, plus les
contraintes sont exigeantes sur les administrateurs des établissements
de santé, plus le risque existe que les considérations de
qualité de services soient omises, soient laissées de
côté.
Quand on fond dand un même service administratif au sein du
ministère ces deux préoccupation son prend le risque que l'une ou
l'autre sera ignorée. Comme il est très difficile pour ceux qui
travaillent à l'intérieur du ministère d'ignorer les
contraintes financières et administratives, comme c'est leur pain
quotidien, le parent pauvre dans tout cela, ce sont les activités
d'agrément, de contrôle de la qualité.
Pourtant s'il y a un rôle que le ministère des Affaires
sociales, ou de la santé, dans n'importe quelle juridiction, dans
n'importe quel pays doit jouer, c'est celui de s'assurer d'un contrôle de
la qualité. C'est d'ailleurs une des préoccupations les plus
importantes que le ministre doit avoir à l'esprit, de s'assurer
constamment que ceux qui font ce travail-là peuvent le faite en toute
liberté et sans être indûment empêchés
d'exercer leur rôle par des considérations administratives et
budgétaires. Autrement, comment le ministre peut-il donner à la
population l'assurance qu'il vérifie la qualité des services? Il
est, en quelque sorte, dans un conflit d'intérêts administratifs.
Il est à la fois celui qui donne les fonds et celui qui porte jugement
à savoir si les services que ces fonds-là aident à
financer sont adéquats sur un plan qualitatif. Comment le même
individu, à travers le même service administratif, peut-il donner
des assurances adéquates?
Au cours des dernières années, des progrès avaient
été faits pour que cette activité d'agrément soit
la plus compréhensive possible, qu'elle ne se borne pas à des
vérifications sur la sécurité incendie et sur le
degré de propreté des cuisines, mais cherche à
dépasser ce rôle-là pour intégrer l'activité
de contrôle professionnel par des mécanismes de collaboration avec
la Corporation professionnelle des médecins, la Corporation
professionnelle des infirmières et les autres corporations
professionnelles impliquées.
Déjà la coordination entre les corporations
professionnelles et la direction générale du ministère
posait un certain nombre de problèmes parce que, assez logiquement, les
corporations professionnelles ne veulent pas perdre leur autonomie, leur
indépendance, dans l'appréciation de la qualité
professionnelle des activités de leurs membres au sein des
établissements. Mais combien plus difficile sera cette coordination si
on leur demande de collaborer non pas avec une direction de l'agrément,
mais avec une direction de la programmation, parce qu'eux, de
l'extérieur, voient très bien l'incompatibilité de
travailler avec des gens qui sont à la fois juges et parties, qui sont
juges de la qualité, mais qui sont parties également aux
décisions qui sous-tendent un certain niveau de qualité.
Le Président (M. Marcoux): Je m'excuse de vous
interrompre, M. le député de Saint-Laurent. Le
député de l'Union Nationale voudrait pouvoir faire son
intervention générale avant 12 h 30. Est-ce que vous en avez
encore pour longtemps?
M. Forget: Je n'en ai pas pour une heure, M. le
Président.
Le Président (M. Marcoux): Vous n'en avez pas pour une
heure encore? Est-ce qu'il y a moyen de faire en sorte que l'Union Nationale
puisse faire son intervention générale ce matin?
M. Forget: Je peux lui donner cette assurance-là, M. le
Président.
Le Président (M. Marcoux): Bon, on s'entend pour onze
heures 45?
M. Forget: Environ.
Le Président (M. Marcoux): A onze heures 40 je vous ferai
signe.
M. Forget: Du côté du contrôle de la
qualité, la décision sur les structures qu'a prise le ministre,
est une décision néfaste. Elle me rappelle d'ailleurs la
décision complètement destructrice qu'il avait prise relativement
à un effort de contrôle de la qualité dans les centres
d'accueil pour enfants, effort qui était sur le point d'aboutir par des
mesures concrètes de contrôle de la qualité professionnelle
et administrative des activités à l'intérieur des centres
d'accueil pour enfants. Cet effort a été complètement
rayé, renvoyé aux calendes grecques il y a deux ans par le
ministre, en nous disant: On va s'en occuper nous-mêmes. Notre service
d'agrément va se développer et va pouvoir véritablement
assumer ce rôle-là. Voici que deux ans plus tard, loin de
développer ce rôle-là, il abolit tout simplement la
direction de l'agrément.
C'est bien sûr que pendant ces deux ans on n'a pas entendu parler
d'activité de contrôle de la qualité
dans les centres d'accueil pour les enfants. C'est une carence encore
remarquée et remarquable de ce réseau malgré les efforts
Individuels qui sont faits au sein des établissements. Il y a un besoin
certain de stimuler et d'épauler les efforts de ceux qui veulent
augmenter la qualité des services par une intervention d'un organisme
externe et impartial et qui ne soit pas l'organisme, si possible, qui distribue
les fonds. Cet effort a été réduit à néant
par le ministre et il procède dans les secteurs ou ça existait
déjà, de façon plus ou moins satisfaisante, au lieu
d'améliorer la situation, à l'abolir à toutes fins utiles.
(11 h 30)
Qu'il ne s'étonne pas si les hôpitaux du Québec font
renaître en quelque sorte presque de leurs cendres les efforts de groupes
extérieurs au ministère, de groupes comme le Conseil canadien
d'accréditation des hôpitaux et autres qui vont vouloir reprendre
cette fonction et l'élargir à des domaines où ils
n'avaient pas été actifs dans le passé. Je pense que c'est
là un débat que nous devrions avoir tôt ou tard, qui est
très important, mais qui démontre une carence considérable
des politiques actuellement poursuivies par le ministère des Affaires
sociales.
Dans le secteur de la psychiatrie, M. le Président, il y a
beaucoup de choses qui devraient être dites également. Le
comité sur la psychiatrie au Québec a déposé un
rapport qui lance un cri d'alarme et qui fait un certain nombre de
recommandations pour des modifications dans la gestion et l'organisation des
services psychiatriques. C'est peut-être malheureusement un domaine
où on a un ministre qui, étant psychiatre, a ses propres
préoccupations et sa propre conception professionnelle qui peuvent
très bien dominer dans l'évaluation qu'il fera de ces
recommandations des considérations plus larges.
Ce que je veux dire par cela, c'est que le comité sur la
psychiatrie au Québec revient encore avec cette idée d'un
réseau particulier à la psychiatrie, d'une psychiatrie avec son
propre régime administratif, distinct du régime administratif de
l'ensemble des établissements, une espèce de ghetto psychiatrique
comme on l'a reconnu longtemps au ministère de la santé. On
revient avec la notion de "sectorisation" qui est une notion absolument
condamnable et qui est contraire à la loi, comme le ministre le sait
très bien, et qu'il a maintenue en dépit de son échec
jusqu'à maintenant, au Québec, à donner des soins
psychiatriques valables, qui est remise en question là où elle
avait été appliquée dans d'autres pays comme étant
inopérante et inefficace.
Le comité de psychiatrie revient avec cela et nous mettons en
garde le ministre de ne pas sauter à pieds joints sur une recommandation
qui fait probablement son affaire parce qu'elle coïncide si nettement avec
sa propre conception dans ce domaine, mais dont la population ne veut pas et
dont elle n'a pas besoin.
Il reste également, dans le domaine de la psychiatrie toujours,
les recommandations et l'analyse fort remarquable de la Commission des droits
de la personne qui demande une révision dans les plus brefs
délais de la Loi de la protection du malade mental. C'est un rapport
remarquable qui fait une très belle analyse des difficultés
d'application de cette loi sur le plan de la protection des droits et
libertés de la personne et, quant à nous, nous serions des plus
intéressés à voir mettre en application ces
recommandations et à voir déposer à l'Assemblée
nationale, le plus tôt possible, une loi modifiant la Loi de protection
du malade mental de manière que les anomalies qui existent dans cette
loi soient corrigées au plus tôt.
Cette loi qui fut adoptée en 1971 représentait
elle-même, la Commission des droits de la personne le souligne, un
immense progrès par rapport à la loi de détention, dans le
fond, la loi des hôpitaux psychiatriques qui l'avait
précédé. Il demeure que l'expérience étant
maintenant faite depuis les quelques années de son fonctionnement, des
améliorations sensibles s'imposent, sont nécessaires et nous
invitons le ministre à ne pas différer de deux ou trois ans,
selon son habitude, la mise en application des recommandations de ce
rapport.
Dans le domaine plus large de l'ensemble des services sociaux, et je
rentrerais dans cette catégorie presque même les malades
chroniques, je note qu'il y a un certain nombre de questions qui se posent,
questions fort importantes qui devront être réglées si nous
sommes un jour pour donner des services adéquats et convenables, ne
serait-ce que convenables, aux personnes âgées et aux malades
chroniques.
Il y a d'abord une activité d'autodéfense des droits de
ces personnes qu'il faut encourager. Je remarque que le comité des
bénéficiaires, qui devrait être présent et actif
dans l'ensemble des centres d'accueil et des hôpitaux de soins
prolongés, n'est pas encore exigé dans tous les
établissements. Un projet de règlement publié en juin 1976
et qui portait création obligatoire, dans chacun de ces
établissements, de comités de bénéficiaires dont
l'efficacité a été démontrée, n'a pas encore
été adopté par le gouvernement après trois ans
trois ans dans un mois qu'il a ce projet devant lui. Il n'a pas
encore adopté un règlement très simple de quelques
articles qui fait une obligation, pour les centres d'accueil, d'avoir un
comité de bénéficiaires.
Je remarque que le comité des malades, qui a joué un
rôle exceptionnel dans la promotion des droits des malades chroniques,
n'a pas reçu, me semble-t-il, et, d'après les gens qui sont
très près de ce comité, une attention suffisante et
appropriée, de la part du ministère des Affaires sociales. Je ne
sais pas jusqu'à quel point les subventions prévues cette
année permettront au ministère des Affaires sociales d'appuyer
financièrement cet organisme, mais il est temps, après plusieurs
années de travail bénévole et de travail soutenu par la
communauté, que le gouvernement apporte un appui financier important
à cet organisme.
Du côté des centres d'accueil, M. le Président, il y
aurait beaucoup de choses à dire, parce que le ministre, qui y a fait
allusion brièvement tout à l'heure, a omis de préciser que
son objectif, qui est de quatre places pour 100 personnes âgées
de
centre d'accueil, représente une diminution de 33 1/3% dans
l'objectif qui était précédemment celui du
ministère des Affaires sociales vis-à-vis des personnes
âgées.
Or, l'objectif de six places pour personnes âgées par 100
personnes de plus de 65 ans dans la population est un objectif qui,
premièrement, est déjà atteint et même
dépassé, dans certaines régions du Québec. C'est
donc condamner certaines régions du Québec, en particulier la
grande région métropolitaine de Montréal, à
être défavorisées d'une façon permanente par une
telle planification, et c'est aussi un chiffre, ces 6%, qui correspond à
l'expérience d'un certain nombre de pays, dont le Danemark, qui a un
réseau très développé de services à
domicile.
L'excuse facile de dire que, par le développement des services
à domicile, on peut empêcher le placement des personnes
âgées et que quatre places sont suffisantes, à comparer
à six, c'est une constatation, c'est une expérience, qui
mériterait d'être vérifiée par d'autres que les
principaux intéressés aux décisions budgétaires,
dans ce domaine, c'est-à-dire qui mériterait d'être
discutée par la population en général, d'être
évaluée de façon indépendante, plutôt
qu'être l'objet d'une affirmation ex cathedra du ministre des Affaires
sociales, qui n'a probablement pas l'argent pour réaliser un objectif
plus ambitieux. C'est probablement là aussi, comme dans l'aide sociale,
que l'on trouve la raison profonde des décisions prises. Les 4%, ce
n'est pas parce que c'est 4% qui devraient être la norme, c'est parce que
4%, c'est tout ce qu'on pense pouvoir réaliser.
Encore là, M. le Président, on s'est permis de faire des
annonces de centres d'accueil à plus d'une reprise, au lieu de les
réaliser. C'est un sujet que l'on verra de façon
détaillée, lorsque nous en viendrons à cet
élément du crédit, mais il demeure que, dans le domaine
des services aux personnes âgées, il n'est pas suffisant de
prétendre que l'on fait beaucoup par les services à domicile. Il
est bon que les services à domicile soient développés
ils le sont d'ailleurs depuis plusieurs années on en est
venu à un niveau où le problème principal qui se pose, ce
n'est peut-être pas la disponibilité de services à
domicile, c'est leur accessibilité dans un sens plus réel,
à savoir que plusieurs personnes qui auraient besoin de services
à domicile ne sont pas au courant de leur existence et ne sont pas au
courant des moyens qui sont mis à leur disposition pour s'en
prévaloir.
Autrement dit, dans tout le domaine des services pour malades chroniques
et pour personnes âgées, il y a une approche qui est trop
morcelée. Il y a une approche qui, dans le fond, s'est
caractérisée par une absence d'orientation claire, une absence de
désir de prendre une orientation bien définie qui puisse, au bout
d'un certain nombre d'années, nous faire déboucher sur un
système d'organisation et de distribution des services qui soit
compréhensible, qui soit intelligible pour l'utilisateur.
Actuellement, on distribue des subventions à peu près
à tout le monde, pour les services à domicile, avec le
résultat que personne n'est véritablement responsable, sur un
territoire donné, de donner ces services à domicile, de
coordonner leur action et de coordonner leur action avec l'action d'admission
dans les hôpitaux chroniques ou les centres d'accueil.
On traite différents bouts du problème, on jette l'argent
à gauche et à droite, en espérant qu'on va régler
le problème de cette façon. Il est clair que des ressources
doivent être développées. Nous ne condamnons pas le
développement des ressources comme telles.
Mais, à moins d'aller au-delà simplement du
développement quantitatif des ressources et de les organiser de
façon plus intelligible, de façon à les rendre plus
accessibles, on n'atteindra pas le but recherché de maintenir à
domicile les gens le plus longtemps possible. Il faut aussi s'assurer qu'il y a
une continuité dans la prise en charge des malades chroniques et des
personnes âgées; si on s'en occupe à domicile, si leur
état s'aggrave, si leurs besoins l'exigent, il faut s'assurer que des
services existent, que des organisations existent pour assurer une transition
normale d'un état à l'autre, d'un type de service à
l'autre. C'est un rôle qui devait être joué soit par les
centres de services sociaux, soit par les CLSC, mais l'on se trouve, dans ce
secteur-là, dans une absence d'orientation presque totale. Même au
niveau de l'intégration du personnel, on ne sait plus exactement
où on en est. On intègre tantôt aux centres de services
sociaux, tantôt aux CLSC; tantôt, on donne les fonds à des
organismes bénévoles sans plan d'ensemble, sans orientation.
Encore une fois, on n'obtiendra pas la réponse aux problèmes qui
sont les plus criants dans le moment dans le domaine social, les
problèmes des personnes âgées qui ont besoin
d'hébergement, qui ont besoin de services et les malades chroniques par
une approche aussi fragmentée, une approche qui manque totalement de
coordination.
M. le Président, ce n'est pas...
Le Président (M. Marcoux): Vous aurez l'occasion de
revenir...
M. Forget: Ce n'est pas l'absence d'autres sujets, mais je pense
qu'au cours des...
Le Président (M. Marcoux): ... des semaines qui vont
venir.
M. Forget: ... minutes qui ont précédé, nous
avons pu faire le point sur un certain nombre de questions. Je pense que ce qui
caractérise tout cela, c'est l'absence d'une pensée
cohérente et claire sur les objectifs à atteindre. On ne sait pas
vraiment où on en est, on ne sait pas vraiment où on veut
arriver, on fait de la gestion et on se préoccupe d'objectifs de
gestion, mais on n'a pas une vue d'ensemble et, encore une fois, à moins
d'avoir une vue d'ensemble, tant dans le domaine de la sécurité
du revenu que dans le domaine des services de santé et des services
sociaux, aucun véritable progrès n'est possible.
J'aurais pu et je pense que je vais le faire très
brièvement en terminant souligner que, sur le plan d'un
indicateur de rendement dans le domaine, par exemple, des services de
santé, on n'est pas plus avancé qu'avant pour connaître
l'état de morbidité de la population, pour savoir si ces
services-là ont véritablement un impact sur l'état de
santé de la population, s'il est possible de raffiner les instruments
qui nous permettraient d'évaluer justement la réponse à la
question: Est-ce que le public québécois, est-ce que le
contribuable québécois, l'utilisateur de services en a pour son
argent? La question des indicateurs de santé, des indicateurs sociaux
semble être un prérequis à toute évaluation du
système dans son ensemble. Or, de ce côté-là, on n'a
pas eu grand-chose depuis deux ans. Il y avait des études en marche
à la planification au ministère, il y avait un avis qui avait
été sollicité au Conseil des affaires sociales et de la
famille sur ce sujet-là. Il serait intéressant de savoir si,
justement pour avoir une orientation plus précise et mieux
adaptée aux besoins, le ministère est sur le point de prendre des
décisions et de développer des instruments qui nous permettraient
à l'avenir de porter des jugements sur l'efficacité
générale de ces orientations et de ces politiques.
Le Président (M. Marcoux): Je vous remercie, M. le
député de Saint-Laurent. M. le député de
Mégantic-Compton.
M. Fernand Grenier
M. Grenier: Merci, M. le Président. Bien
brièvement, je pense bien, j'ai voulu résumer dans un texte ici,
que je vais livrer à l'attention du ministre et de cette commission, un
point qui m'est cher et qui est cher à notre parti. J'aurais pu aussi
faire une analyse, comme on vient de le faire, sur l'ensemble des
crédits. Il nous sera donné, au cours de ces quelques jours de
l'étude des crédits, de revenir sur chacun des points et
d'analyser à fond le pourquoi de chacun de ces seize programmes, de
cette nomenclature de seize programmes. S'il y en a trop ou pas assez à
chacun des programmes, nous pourrons y revenir et du même coup aussi
faire une approche sur la philosophie de ce gouvernement face à ces
différents programmes.
Le ministère des Affaires sociales renferme le budget de loin le
plus élevé de tout le gouvernement. Nous sommes ici aujourd'hui
non seulement pour discuter du capital économique de ce
ministère, mais aussi du capital humain auquel ces quelque $4 milliards,
$4 200 000 000, sont affectés. (11 h 45)
Avant d'entrer dans mes remarques préliminaires, laissez-moi
rappeler la motion que j'ai présentée à l'Assemblée
nationale le 7 mars dernier et qui se lisait comme suit, et je cite: "Que cette
Assemblée est d'avis que le gouvernement prenne toutes les mesures
nécessaires en vue de protéger et de valoriser la cellule
familiale au Québec."
C'est dans cette perspective que se situera mon intervention. En
novembre 1976, le Parti québécois prenait le pouvoir avec une
équipe de femmes et d'hommes qui, pour la plupart, avaient trouvé
leur place au soleil pendant les années grasses du début de la l'
évolution tranquille. Leurs conditions financières et même
intellectuelles les plaçaient au-dessus de la masse
québécoise. J'ai eu l'occasion de le signaler à plusieurs
reprises en Chambre.
Je n'apprends rien à personne ici en affirmant que depuis
quelques années, la famille est tiraillée dans tous les sens et
que la notion même de famille est remise en cause. Le Québec, en
tant que nation, n'a donc pas su échapper aux grands bouleversements des
valeurs que connaît tout notre monde occidental. Depuis novembre 1976,
notre équipe d'administrateurs du Parti québécois s'est
affairée à combler les carences de notre système social en
offrant aux Québécois des services: services de garderie,
services de protection de la jeunesse, amélioration des services de
santé communautaire, services de planification familiale, et j'en passe.
J'en laisse, bien sûr, car je ne suis pas ici pour dresser le bilan des
réalisations de ce gouvernement, il y a d'autres plates-formes pour le
faire.
Si je fais ressortir la notion de services, c'est pour bien
caractériser la politique du gouvernement péquiste en ce qui
concerne la famille. Elle se résume en termes de services. Certes, le
Québec avait besoin de toutes ces améliorations dans son
système social. Cependant, l'esprit dans lequel ce parti au pouvoir a
distribué certains de ces services nous a laissé voir une
démission du gouvernement de son poste de réformateur.
Pierre Drouilly, dans le Devoir du 5 mai dernier, affirmait, et je cite:
"Jusqu'à présent, les gouvernements se sont contentés
d'administrer le Québec; ce qu'il faut maintenant, c'est le transformer.
" Qu'a fait le ministre des Affaires sociales pour encourager
financièrement les familles? On a tout simplement profité d'une
querelle avec Ottawa pour diminuer les allocations familiales. Qu'a fait le
ministre pour enrayer les problèmes d'enfants rejetés par leur
famille? Il a tout simplement élargi le réseau des foyers
d'accueil. Qu'a fait le ministre pour enrayer le phénomène des
grossesses non désirées? Il a tout simplement mis sur pied le
réseau de cliniques de planification familiale, offrant des services
d'avortement thérapeutique.
Nous conviendrons qu'à court terme, ces solutions peuvent trouver
une raison d'être; mais à long terme, ces modifications au
système ne sauraient être reconnues comme des réformes.
Je voudrais insister d'une façon particulière sur les
cliniques de planification des naissances. Ce sujet a déjà
déchaîné bien des passions tout autour du Québec
à cause de la présence de services d'avortement
thérapeutique à l'intérieur du programme. Force est de
constater que le premier ministre lui-même remet sur le dos du
fédéral l'initiative d'un tel projet quand il s'adresse à
un auditoire plus conservateur. On se rappelle la lettre qui
a été envoyée au cardinal Maurice Roy, et qui a
été reprise dans le Journal de Montréal le 25 juillet
1978, et qui faisait dire au premier ministre, je cite: "Le fait capital est
que le cadre juridique qui régit au Québec l'avortement a
été fixé par le Parlement fédéral."
Bien sûr, on se sert, à l'occasion de lois
fédérales ou de discussions fédérales, pour les
faire nôtres quand cela fait notre affaire, et, autrement, on les
dénonce.
Je tiens à attirer l'attention du ministre sur le
phénomène des grossesses non désirées. Evidemment,
on me répondra que c'est un problème mondial, mais cela ne
règle pas la question pour nous, Québécois. Comment
peut-on affronter ce problème? En 1971 et en 1977, l'avortement
thérapeutique a augmenté de 600% au Québec, et le besoin
est de plus en plus grandissant, nous dit-on. Que fait le ministre dans tout
cela? L'an dernier, le ministre des Affaires sociales a décidé,
en accord avec le premier ministre, qu'il fallait passer à l'action et
cesser le "placotage", comme dirait le ministre d'Etat au développement
social. Il fallait mettre au plus tôt sur pied les cliniques de
planification familiale. Les ministres et les fonctionnaires disaient
pieusement que l'avortement thérapeutique n'était qu'une mesure
de dernier recours, qu'une mesure d'exception ou qu'une mesure d'urgence. Cela
a été cité dans le Devoir du 4 avril 1979.
Comment expliquer que les représentants du MAS aient, le 9 mai
1978, incité publiquement le futur comité à accorder
Iibéralement des avortements aux femmes qui en feraient la demande. Il
s'agit d'un cas d'abus de vos deux représentants, dénoncé
par le Dr René Jutras de l'hôpital Sainte-Croix de Drummondville.
J'ai ici la lettre qu'il m'a fait parvenir et que je cite: "Le 9 mai 1978, au
cours d'une réunion convoquée par le directeur
général de l'hôpital Sainte-Croix de Drummondville, en
présence de membres du personnel de l'hôpital et de plusieurs
médecins, les représentants du ministère des Affaires
sociales, MM. Gilles Gourgues et Horace Lamarche, ont insisté pour que
des médecins favorables à l'avortement soient nommés sur
le comité d'avortement et aussi qu'une représentante des
mouvements féministes siège à ce comité. "Ils ont
incité publiquement le futur comité à accorder des
avortements à celles qui en feraient la demande."
Cette réunion se tenait vers 11 heures de la matinée le 9
mai 1978.
Il me semble, M. ie Président, que c'est tirer la notion
d'urgence par les cheveux que d'inciter les comités d'avortement
thérapeutique à agir de la sorte. De plus, la lettre du Dr Jutras
signale que vos émissaires ont insisté pour que ce soient des
médecins et des femmes favorables à l'avortement qui
siègent au comité.
Est-ce que le ministre pense que c'est une façon de régler
le problème des grossesses non désirées? Votre
gouvernement et vous pensez qu'en agissant de la sorte, vous rendez un service
à la population?,
L'Union Nationale vous répond que votre action dans ce dossier
est une démission, au lieu de réformer, vous rapiécez.
Où sont les mécanismes pour encourager les familles à
croître en harmonie? Où sont les services essentiels au
développement de la famille?
Vous conviendrez avec moi que vous êtes loin des recommandations
sur la famille des cinq membres de votre parti qui, en 1976, nous proposaient,
et je cite: Création de centres intégrés de services
communautaires multidisciplinaires pour répondre à toute la gamme
des besoins d'information, de conseils et d'assistance concernant la
planification et la fécondité, la grossesse, l'adoption,
l'alimentation et l'éducation des enfants, les soins
pédiatriques. Quel que soit le nom donné à ces centres,
centres de l'enfant, centres d'aide aux parents ou centres d'aide à la
famille, il nous apparaît important qu'ils regroupent les services
offerts aussi bien à ceux qui ont besoin d'être assistés en
matière de contraception qu'à ceux qui désirent des
enfants, traitement de la stérilité ou adoption, par exemple, et
à ceux qui ont besoin de conseils ou d'aide pour les bien élever.
"En fait, les mêmes personnes, à des moments différents de
leur vie, auront des besoins différents. Les gens devraient prendre
l'habitude de s'adresser à cet endroit. Ils auraient plus de chances de
comprendre l'esprit dans lequel les divers services sont offerts. En venant
chercher une réponse à un besoin très
délimité, le bénéficiaire apprendrait que d'autres
services peuvent lui être offerts. Ces centres ne seraient pas uniquement
médicaux, mais multidisciplinaires et feraient appel, par exemple,
à des psychologues, à des travailleurs sociaux et des
diététiciens.
Ces personnes sont, bien sûr, Renée Cloutier-Cournoyer,
Fernand Dumont, Stella Guy, Monique Verdi-Jones et Henri Laberge.
On peut le constater, cela s'est détérioré avec le
temps. On se retrouve avec des disciplines de limitation des naissances qui
n'offrent, en substance, que des services de contraception, d'avortement de
façon libérale, et, enfin, une aide psychosociale aux
avortées. Je souligne que c'est une erreur de sémantique que de
restreindre le mot "planification" au sens de "limitation".
Au moment où le ministre des Affaires sociales annonce son plan
de redressement budgétaire des hôpitaux, celui-ci offre $50 000 et
plus à tout centre hospitalier qui voudra bien se munir d'une clinique
de planification. On le sait, comme l'avortement thérapeutique est la
pièce maîtresse des cliniques Lazure, il ne saurait être
question d'accorder aux hôpitaux le pouvoir de se munir d'une telle
clinique sans cette pièce maîtresse.
Le ministre s'est servi de cet appât économique pour
faciliter l'implantation de ces cliniques. A mon sens, ce n'est pas une
politique de transparence et c'est grave, parce qu'elle s'attaque à la
racine de notre société qu'est la famille.
Dans le journal The Gazette, du 5 mai 1979, on dit ceci, du ministre des
Affaires sociales, et je cite: "Denis Lazure has always had a dream, that he
knows
what is good for everyone and that, now, he can realize it".
Si vraiment le ministre sait ce qui est bon pour nos familles
québécoises, comment se fait-il qu'il n'offre pas de solution
intermédiaire avant le recours à l'avortement? Je mets au
défi n'importe quelle femme de téléphoner à un CLSC
montréalais, de dire qu'elle est enceinte, qu'elle désire plus ou
moins l'enfant à naître. On lui conseillera inévitablement
de se faire avorter. Où est la solution intermédiaire? Dans tout
le Québec, nous n'avons trouvé qu'un seul répertoire des
endroits où on incite et où on aide les femmes à porter
leur enfant. Il s'agit du dernier numéro d'Offensive pour la vie,
organisme qui racle ses fonds de tiroirs pour arriver financièrement et
qu'on qualifie d'être à l'eau de rose, quand on ne s'en moque pas
publiquement.
Est-il normal qu'il y ait des professionnels bien payés dans ces
cliniques de planification et que ce soient des bénévoles qui
assurent le service d'un organisme tel que Grossesse-secours à
Montréal et où on est débordé de travail et sans le
sou? Est-ce là la notion de pluralisme?
Dans votre allocution lors du colloque du Conseil des affaires sociales
et de la famille, le 17 février dernier, vous avez abordé la
question du vieillissement de notre population. Pour remédier à
la situation, vous proposiez des mesures afin de modifier le processus
même de l'évolution démographique. Or, vers la fin de votre
discours, vous admettez que nul ne sait avec certitude comment une population
peut être motivée à élever son taux de naissance.
Comment pouvez-vous affirmer mettre sur pied une politique visant à
modifier l'évolution démographique si vous dites que nul ne sait
avec certitude comment y parvenir? Si j'ai bien compris, vous voulez
régler le problème du vieillissement de la population en
améliorant le sort des personnes âgées. Pas besoin de vous
dire que, de cette façon, on ne fera pas des enfants très forts
dans la société.
Si vous ne savez pas comment une population peut être
motivée à élever son taux de naissance, au moins, il ne
faudrait pas décourager les initiatives, soit par une baisse des
allocations familiales ou en pénalisant la femme au foyer. Au sujet de
la femme au foyer, dans votre même allocution, vous avez fait mention des
$240 d'allocation pour les travailleuses qui doivent cesser leurs
activités à cause d'une grossesse. Par cette allocation, à
mon sens, discriminatoire, le ministre du Travail dévalorise la
mère de famille qui élève ses enfants. Ainsi, si elle
redevient enceinte, elle n'aura pas droit à l'allocation de $240 parce
qu'elle n'est pas considérée comme travailleuse. On fait de cette
femme au foyer une femme qui est sans travail, comme dit souvent Yvon
Deschamps.
Pour cette allocation discriminatoire, vous dites implicitement aux
femmes au foyer qu'elles ne sont pas des femmes à part entière,
parce que vous ne les considérez pas comme des travailleuses, du moins
ce secteur de femmes au foyer. Quand va-t-on reconnaître un statut aux
femmes qui élèvent leurs enfants?
Vous terminez votre discours en soutenant que les
Québécois auront peut-être le goût des enfants si on
offre à ceux-ci une société où ils pourront
s'épanouir. Cette affirmation du ministre me laisse quelque peu songeur,
si on pense aux millions que le ministère des Affaires sociales
dépense pour les arrêts de grossesse. Le ministère des
Affaires sociales pourrait peut-être songer à investir une partie
de ces sommes à améliorer le niveau de vie de la mère et
de l'enfant à venir en investissant ainsi non dans le capital perdu,
mais dans le capital qui se renouvelle, le capital humain.
En terminant, je tiens à signaler que la politique de
planification des naissances du ministre des Affaires sociales est une
politique à sens unique. Elle n'est orientée que vers un seul
but, la dénatalité. Si, dans notre société
québécoise, on veut assurer la juste circulation des valeurs, une
politique démographique devrait favoriser au moins autant la
natalité que la contre-natalité. Je répète que
l'Union Nationale est consciente des problèmes sociaux avec lesquels il
faut vivre; elle est consciente, aussi, que ce n'est pas en pratiquant la
politique de l'autruche qu'on va régler ces problèmes. À
l'instar de M. Alfred Rouleau, que le Soleil rapportait en date du 30 avril
1979, j'invite le gouvernement à amorcer une action plus
préventive que curative au niveau de la fonction familiale.
D'autre part, l'Union Nationale appuie le président du Mouvement
des caisses populaires Desjardins quand celui-ci suggère de mettre en
place des structures ou nommer un ministre d'Etat afin d'épauler les
familles dans leurs tâches de parents et d'éducateurs. De cette
façon, les politiciens du Parti québécois ne seront plus
désormais uniquement des administrateurs, mais ils commenceront à
être des réformateurs. Merci.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Rouyn-Noranda. (12 heures)
M. Camil Samson
M. Samson: M. le Président, les membres de l'Opposition
qui m'ont précédé ont fait état de plusieurs
problèmes assez en détail. Le député de
Saint-Laurent a fait passablement le tour du sujet. Il reste que nous
retrouvons encore une fois, et c'est à l'étude des crédits
du ministère des Affaires sociales, que le grand problème parmi
tant d'autres, bien sûr, est encore celui de la sécurité du
revenu des citoyens.
J'ai presque envie de dire que plus les gouvernements se
succèdent, plus les griefs demeurent, parce qu'en matière de
sécurité du revenu, c'est la neuvième année que
j'ai l'occasion d'assister à l'étude de certains crédits,
je pense que je n'ai pas tellement manqué de crédits des Affaires
sociales au cours de ces neuf années, je suis revenu sur le sujet
presque chaque fois. Chaque fois, on arrive à avoir les mêmes
griefs, à recommander, à demander, à réclamer
encore la même chose.
Bien sûr, les chiffres ont changé avec les années,
certaines modalités ont changé, mais le
principe demeure, celui que beaucoup trop de personnes, dans notre
société présentement, manquent du nécessaire pour
affronter les besoins de la vie.
On me dira peut-être qu'il y a beaucoup de mesures sociales qui
ont été prises, qu'on tente d'améliorer le sort des
citoyens à faible revenu, mais plus on tente de l'améliorer, plus
j'ai l'impression qu'on n'y réussit pas. Quand on dit, d'après
les derniers rapports, encore une fois, qu'un cinquième de notre
population est au-dessous du seuil de la pauvreté, sans dire combien il
y en a qui se situent autour du seuil de la pauvreté, dans une
société comme la nôtre, c'est encore inadmissible.
Les griefs que nous font nos électeurs au cours de l'année
sont encore les mêmes. Parmi les députés membres de
l'Assemblée nationale qui reçoivent leurs électeurs
régulièrement, je pense que plusieurs seront d'accord pour
soutenir que les problèmes de la sécurité du revenu,
c'est-à-dire l'aide sociale, sont encore les problèmes qui nous
reviennent le plus souvent à nos bureaux de comté, parce que les
familles qui n'ont pas d'autre alternative que de vivre de cette aide sociale
n'en ont pas suffisamment. Ce n'est pas suffisant pour permettre à une
famille de vivre convenablement. Rien ne sert, je pense, de jongler avec des
chiffres, avec des statistiques. La réalité est très
cruelle dans ce domaine. La réalité nous fait voir qu'un membre
d'une famille qui se retrouve dans la misère ne mange malheureusement
pas des statistiques. Cela prend autre chose que ça pour tenir du monde
en vie. Ce n'est pas avec des statistiques et ce n'est pas avec des plans qu'on
va réussir à donner le strict minimum décent à
cette population qui en a besoin.
Bien sûr, on nous dira peut-être qu'il y a une
ébauche de revenu garanti qui est déposée devant
l'Assemblée nationale. Je voudrais souligner le fait que ce qui est
déposé devant l'Assemblée nationale n'a rien à voir
avec ce qui peut s'appeler un revenu garanti. C'est un supplément du
revenu au travail et encore faut-il avoir beaucoup d'imagination pour trouver
que le programme qui nous est présenté est satisfaisant.
Au contraire, il ne l'est pas, c'est un programme, et un autre programme
qui part de la sélection, de la sélectivité, où on
obligera encore des gens à faire des rapports et à faire la
preuve de leur pauvreté pour leur venir en aide. C'est là, je
pense, la grande lacune de nos politiques sociales. On oblige les gens à
faire la preuve de leur pauvreté, on les oblige à s'humilier, on
les oblige, dans plusieurs cas, à se mettre à genoux ou presque,
pour leur donner ce que la loi, normalement, leur donnerait sans qu'on les
oblige à s'humilier comme c'est le cas présentement.
En 1976, vers les mois de mai ou juin, je n'ai pas la date exacte, je me
rappelle que la commission parlementaire des affaires sociales avait
siégé. Pour la première fois de l'histoire, je pense, on
avait invité les groupes de citoyens à faible revenu, à
venir devant cette commission présenter leurs griefs. Cette
journée parce que ça n'avait pas duré qu'une
journée avait été très intéressante
et avait ouvert les yeux à plusieurs personnes présentes à
cette commission. Le ministre qui, au nom du gouvernement, assistait à
la commission, était le ministre d'Etat aux affaires sociales, M.
Giasson, aujourd'hui député de Montmagny-L'Islet.
Nous avions eu, à cette occasion, des représentants de
groupes d'assistés sociaux de comités de citoyens à faible
revenu de la région du Nord-Ouest, de Rouyn-Noranda en particulier, des
groupes de la Beauce et de Montréal, des gens étaient venus nous
expliquer quels sont les problèmes moins connus, mais qui existent quand
même, qu'ont à subir les assistés sociaux de notre
société. Nous avions cru qu'avec ces témoignages, les
politiques du ministère des Affaires sociales auraient pu en être
influencées aux fins d'apporter des correctifs, des adoucissements
à l'application de la Loi de l'aide sociale.
Ce n'est malheureusement pas le cas. Le gouvernement a changé,
dans les mois qui ont suivi et, l'actuel gouvernement, dont les
députés, alors qu'ils siégeaient dans l'Opposition,
faisaient exactement le même genre de revendications que je fais
présentement et qu'a fait tantôt le député de
Saint-Laurent. Et Dieu sait s'ils faisaient ces revendications à grands
cris, M. le Président, et Dieu sait s'ils encourageaient les
comités, quels qu'ils soient, quelle que soit leur forme de
contestation, à venir contester le gouvernement.
Maintenant que le gouvernement est changé de main, que c'est le
Parti québécois qui mène, ces mêmes
députés qui revendiquaient à grands cris ne crient pas
aussi fort que dans ce temps-là. On ne les voit plus tellement aux
commissions parlementaires, il semble qu'ils ont oublié assez rapidement
ces revendications qu'ils voulaient si justes il y a moins de trois ans.
Je pense que ce qui leur semblait valable dans ce temps-là
devrait leur sembler valable encore aujourd'hui, car leur gouvernement n'a rien
changé à cette situation, les pauvres sont demeurés
pauvres et il semble qu'ils soient en plus grand nombre que d'habitude. C'est
peut-être là l'élément de croissance, le seul qu'on
puisse considérer, la pauvreté va en s'accroissant.
La sécurité du revenu, dans sa forme actuelle, n'est pas
suffisante, mais encore je pense qu'il y aurait lieu d'étudier
sérieusement de la part du gouvernement, la possibilité d'en
arriver à une formule de revenu garanti véritable et non pas la
formule qu'ils nous ont suggérée, qui est actuellement à
l'étude, qui est encore un autre cataplasme sur une jambe de bois. Quand
on pose des cataplasmes sur une jambe de bois, ça no la fait pas
pousser, la jambe demeure en bois encore.
M. le Président, une formule de revenu garanti, de type
universel, est la seule solution possible. Même si je le
répète depuis longtemps, même si je réclame
ça depuis longtemps, il reste qu'aussi longtemps que ça
n'arrivera pas, aussi longtemps que ça ne s'appliquera pas, on
connaîtra les problèmes qu'on connaît présentement et
on n'aura pas de solution réelle. Je ne suis pas le seul
à penser de cette façon. J'ai devant moi un article
publié le 3 mai 1978, dans le journal La Frontière, de Rouyn,
alors qu'un officier régional du ministère des Affaires sociales,
au bureau de l'aide sociale, accordait une entrevue. Faisant état de
plusieurs problèmes et de ce qui est connu présentement dans la
région, en matière de dossiers d'aide sociale, il ajoutait ceci,
et je cite la Frontière du mercredi, 3 mai 1978: "M. Lessyk croit que le
régime sélectif que nous connaissons actuellement
catégorise les gens et les met dans une classe à part. Il
soutient donc que la solution réside dans le régime universel.
Les gens ne sont pas gênés de se servir de leur carte
d'assurance-maladie et les personnes âgées n'éprouvent pas
de honte à recevoir des pensions, puisque c'est la même chose pour
tout le monde, indique-t-il. Il demeure convaincu que la formule de revenu
garanti aiderait à faire tomber la honte que subissent aujourd'hui les
bénéficiaires d'aide sociale."
On pourrait ajouter beaucoup de choses à cela, mais je me
contente de citer ce qui est rapporté dans le journal et ce que je
considère comme une approche très positive du problème, ce
que je considère comme une approche réaliste de ce
problème. Et je ne peux qu'abonder dans le même sens. Bien
sûr, cet article de journal ne va peut-être pas aussi loin que je
le voudrais et que j'irais moi-même, mais c'est un témoignage de
quelqu'un qui a vécu, pendant de nombreuses années, dans le
système et qui en connaît les rouages.
Si nous avions un système plus logique sur cette base
universelle, il y aurait beaucoup moins d'inquiétude chez notre
population qui serait assurée d'avoir ce minimum vital, moins
d'inquiétude, bien sûr, moins de maladies nerveuses, ce qui
intéresse particulièrement le ministre des Affaires sociales. Je
pense que nous aurions raison d'appliquer des sommes d'argent à
prévenir les maladies nerveuses. Je pense qu'il vaut mieux
prévenir les dépressions que de payer pour les soigner. Cela ne
coûterait peut-être pas plus cher. Par les temps qui courent, on
sait que c'est encore là une chose qui a tendance à
croître.
Un budget familial mieux équilibré, à partir des
nécessités. Les biens doivent rencontrer les besoins, dans le cas
qui nous occupe. Il y a beaucoup trop de gens qui viennent se plaindre, et avec
raison, qu'ils ne peuvent pas boucler les deux bouts, qu'ils sont
obligés de se priver, comme parents, et, en plus, de priver les enfants
des besoins de la vie.
Je pense qu'on n'aurait pas besoin, si on en arrivait à une
formule logique et universelle comme celle que je recommande, de chercher des
trucs de midi à quatorze heures, comme c'est le cas présentement
au ministère, semble-t-il, pour favoriser l'avortement. Si on avait une
possibilité d'assurer à la famille sa survie, il y aurait
beaucoup moins de gens qui penseraient à cette formule et le
ministère ne serait pas obligé d'utiliser des sommes d'argent
pour la destruction de la vie si seulement il voulait utiliser les mêmes
sommes d'argent pour la promotion de la vie. On n'aurait pas besoin de
s'attaquer à ce droit de naître. Là-dessus, je peux vous
assurer que j'endosse entièrement ce que vient de dire, à ce
propos, le député de Mégantic-Compton. Je pense qu'il vaut
mieux utiliser nos ressources à faire la promotion de la cellule
familiale, qui est la base de notre société, plutôt que
d'utiliser ces mêmes ressources à la destruction par l'avortement
de la cellule familiale.
Bien sûr, M. le Président, il y a d'autres sujets qui ne
sont pas moins importants: les besoins qu'ont nos personnes âgées
de recevoir les traitements, de recevoir l'hébergement, également
celui des handicapés physiques et mentaux. Je vais faire
référence à la situation qui prévaut dans la
région du Nord-Ouest québécois, en espérant que le
ministre pourra m'accorder quelques minutes pour écouter ce que j'ai
à dire. Je sais qu'il y a sûrement des conversations très
importantes, mais la situation des handicapés physiques et mentaux dans
la région du Nord-Ouest québécois est une question qui
revêt actuellement un caractère d'importance et aussi d'urgence.
(12 h 15)
Je sais que le ministre a fait des efforts sérieux pour trouver
une solution à ce problème, mais je sais également que la
solution n'est pas encore arrivée. J'ai dans mes notes des
revendications qui viennent de plusieurs associations et notamment d'une
association de la région d'Amos qui écrivait au ministre
dernièrement, il y a une couple de mois, je pense, pour revendiquer, au
nom des personnes handicapées, physiques et mentales; ce sont des cas
précis, justement, et c'est pénible d'avoir à être
témoin de ce genre de cas.
Dernièrement encore, une personne âgée me soulignait
que son fils, qui avait dû être placé, par un jugement de la
cour, à l'hôpital de Malartic, avait été
transféré finalement après quelque temps dans des foyers
d'hébergement et, sans que personne n'ait été averti
à l'avance. Finalement, ce handicapé s'est retrouvé
à l'hôpital d'Amos et, de là, on l'a
transféré, on l'a retourné sans avertissement chez ses
parents qui n'avaient pas la possibilité de le garder, il y a trois ou
quatre ans passés et pas plus maintenant. C'est comme cela qu'on
retourne les handicapés dans les foyers de leurs parents. Le linge
arrive par autobus, une semaine après. C'est le genre de choses qu'on
vit dans notre région, ce qui me fait dire que c'est un secteur qui,
actuellement, aurait besoin d'une approche très humaine qui n'existe pas
tellement. Bien sûr, il y a un problème. Il y a un problème
que je connais. Je sais que le ministre a des difficultés, je pense,
d'ordre juridique, à la suite d'une décision qu'il a dû
prendre dans ce domaine. Je ne veux pas entrer dans le domaine des
difficultés juridiques, je ne veux pas entrer dans cette question de
cette façon, mais je veux réclamer, au nom des handicapés
de cette région comme d'autres régions du Québec, qu'on
puisse leur donner les soins qui sont conformes à leurs besoins, les
soins qu'ils sont en droit d'attendre.
Quant à un autre domaine, celui des aides ménagers, le
même problème que celui que j'ai soulevé l'an passé
revient encore. Je ne sais pas
trop à qui il va falloir s'adresser pour trouver une solution
à cela. Les services sociaux de la région n'en finissent plus de
renvoyer la balle à d'autres, en nous soulignant qu'ils n'ont pas les
budgets. Quand on s'adresse au ministère, on renvoie la balle aux
services sociaux. Dans mes dossiers, j'ai plusieurs communications à cet
effet, à la suite de demandes de la population. Je pense que personne ne
nous fera grief de nous occuper des demandes de la population, c'est notre
devoir de le faire. A la suite des demandes de la population, on s'adresse ou
bien aux services sociaux, ou bien au ministère. Quel que soit l'endroit
où on s'adresse en premier, on se fait renvoyer au deuxième
endroit à tout coup, cela ne manque pas. Le citoyen qui a besoin de
soins, pendant ce temps, ne reçoit pas de soins. Bien sûr, on me
dira que les centres de services sociaux ont une certaine autonomie, mais
l'autonomie est limitée par les budgets qui leur sont alloués.
Comme ils ne peuvent pas donner les services qui sont requis, ils nous disent:
Le gouvernement ne nous a pas donné de budget. Quand on s'adresse au
gouvernement, il nous dit: Adressez-vous aux services sociaux, ce sont eux. Ils
sont autonomes, c'est à eux à décider. C'est le genre de
cercle vicieux et il me semble qu'on devrait pouvoir s'attendre à y
mettre fin.
Du côté des soins de chiropractie pour les
accidentés du travail, on sait qu'il y avait une entente qui existait
entre la Commission des accidents du travail et les chiropraticiens, laquelle a
été abolie en octobre 1977, selon laquelle des soins de
chiropractie pouvaient être donnés aux accidentés du
travail. Cette entente est terminée. Un comité spécial aux
Affaires sociales devait faire rapport. On s'attendait à une solution.
Il n'y a pas encore eu de solution. Ce n'est pas encore réglé. Du
côté des Affaires sociales, le ministre a déclaré
à l'Assemblée, si ma mémoire est fidèle, qu'une
solution pourrait peut-être finir par être envisagée, mais
intégrée avec d'autre chose, soit les accidentés de la
route, soit encore d'autres formes d'accidentés, mais, en attendant il
reste que les soins qui pouvaient être donnés jusqu'en octobre
1977 aux accidentés du travail par les chiropraticiens et
remboursés ne le sont pas. Je pense que, tout en voulant donner la
chance au coureur, tout en voulant laisser le temps à ceux qui font les
études de les compléter, il me semble qu'en attendant, au moins,
on aurait pu renouveler cette entente sur une base temporaire, en attendant de
trouver une solution plus permanente. Je réclame qu'on en arrive
à quelque chose qui ressemble au moins à un renouvellement
d'entente, même aussi temporaire qu'elle pourrait être, en
attendant qu'on en arrive à quelque chose de concret et de
permanent.
Je reviens à l'aide sociale, un sujet qui est revenu souvent.
J'aimerais que le ministre en traite dans sa réplique, si possible. Ce
fameux test du loyer de $85 par mois qu'on retrouve pour une famille. Bien
sûr, il y a des aspects techniques qui peuvent apporter une
réponse. Mais, il demeure que pour le commun des mortels, pour les
familles assistées, c'est incompréhensible. Ces personnes ne
peuvent comprendre que dans un barème d'aide sociale, une somme de $85
par mois qui va pour leur logement, c'est suffisant. Je regardais encore hier,
en circulant, un endroit de la ville de Québec où on
annonçait des logements, je pense qu'on les appelait à "bas
prix", une coopérative, la Société centrale
d'hypothèques et de logement. On appelait ça des loyers à
bas prix, $240 par mois. Si on est à bas prix à $240 par mois,
comment voulez-vous faire comprendre à des assistés sociaux que,
dans leur barème de bien-être social du mois, on leur alloue une
somme de $85 pour payer le logement? Cela, c'est la première source de
grief.
Comme je le disais tantôt, il y a sûrement des raisons
techniques qui peuvent nous apporter des explications, mais ça, ce n'est
pas le genre de choses que vous allez faire comprendre facilement à la
population. Il fallait trouver un moyen de faire comprendre... Là, je
pense que c'est le gouvernement fédéral qui doit comprendre de ce
côté. Moi, je n'ai jamais eu d'objection à ce qu'on
revendique des choses normales du gouvernement fédéral. Je n'ai
jamais eu d'objection à ce qu'on revendique, du côté du
gouvernement fédéral, des choses qu'on considère comme
logiques. Je me suis opposé à des genres de revendications pour
revendiquer, des "criages" pour crier. Je m'oppose à ce genre de choses.
Mais, quand on a raison, réellement, et que ça se défend
très bien, je pense qu'il ne faut pas se gêner de le faire avec
tous les moyens que nous avons.
M. le Président...
Le Président (M. Marcoux): C'est parce que l'horloge s'est
arrêtée au moment où vous avez commencé à
parler, ou à peu près.
M. Samson: Oui. C'est quand on a parlé d'avortement
tantôt que l'horloge s'est arrêtée.
Oui, je remarque, M. le Président, que vous avez raison de me
faire signe, parce que nous arrivons à 12 h 30.
Je termine là-dessus en demandant au ministre, autant que ce sera
possible, au cours de sa réplique, à la reprise après la
période des questions en Chambre, de traiter des sujets que nous avons
soumis à son attention.
Le Président (M. Marcoux): Tout le monde est d'accord pour
qu'on ajourne immédiatement?
La commission des affaires sociales ajourne ses travaux sine die.
Fin de la séance à 12 h 25
Reprise de la séance à 15 h 40
Le Président (M. Marcoux): La commission des Affaires
sociales est réunie pour poursuivre
l'étude des crédits du ministère des Affaires
sociales. Les membres de la commission sont: M. Forget (Saint-Laurent), M.
Goldbloom (D'Arcy McGee), M. Gosselin (Sherbrooke)...
M. Goldbloom: M. le Président, s'il vous plaît,
pourriez-vous remplacer mon nom par celui du...
Le Président (M. Marcoux): Je crois deviner.
M. Goldbloom: ... député de L'Acadie, Mme
Lavoie-Roux.
Le Président (M. Marcoux): M. Goldbloom (D'Arcy McGee) est
remplacé par Mme Lavoie-Roux (L'Acadie); M. Gosselin (Sherbrooke), M.
Gravel (Limoilou), M. Grenier (Mégantic-Compton), M. Lavigne
(Beauharnois), M. Lazure (Chambly), M. Martel (Richelieu), M. Paquette
(Rosemont) est remplacé par M. Laplante (Bourassa); M. Samson
(Rouyn-Noranda), M. Shaw (Pointe-Claire). Les intervenants sont M. Alfred
(Papineau), M. Cordeau (Saint-Hyacinthe), M. Couture (Saint-Henri), M. Lacoste
(Sainte-Anne), M. Larivière (Pontiac-Témiscamingue), Mme
Lavoie-Roux (L'Acadie) remplacée par M. Goldbloom (D'Arcy McGee), M.
Marcoux (Rimouski), M. Marois (Laporte).
M. le député de Bourassa.
M. Patrice Laplante
M. Laplante: M. le Président, après la longue
intervention du député de Saint-Laurent ce matin, il me fait
plaisir de rétablir les faits alors que le député de
Saint-Laurent a voulu donner l'impression que le gouvernement n'avait pas
grand-chose jusqu'à maintenant pour les personnes
âgées.
Ce qu'on pourrait dire, c'est qu'on n'a pas attendu une élection,
comme cela s'est produit en 1976, pour essayer de faire préparer un
rapport d'urgence pour s'en servir en période électorale, sur la
condition des personnes âgées du Québec. Actuellement,
seulement au point de vue des centres d'accueil, on a doublé le nombre
de lits, de 1970 à 1976; en deux ans, on a réussi à
doubler le nombre de lits.
M. Forget: Vous n'avez pas pu... M. Laplante: Non
monsieur.
M. Forget: Vous n'avez pas pu le freiner. On le fera un par un,
tantôt.
M. Laplante: On les prendra un par un. M. Forget: Unpar un.
M. Laplante: Seulement dans les HLM, près de 6000
logements ont été faits en deux ans, plus une entente encore qui
vient de se produire avec les Affaires municipales pour 15 000 autres logis,
grâce à des ententes municipales avec l'entreprise
privée.
M. Forget: C'est publicitaire, M. le Président. M.
Laplante: Ce n'est pas du tout publicitaire.
M. Forget: Ce n'est pas le ministère des Affaires
municipales et la Société d'habitation du Québec.
M. Laplante: Lorsqu'on parle...
Le Président (M. Marcoux): A l'ordre!
M. Laplante: Cela fait mal un peu.
Le Président (M. Marcoux): La parole est au
député de Bourassa.
M. Forget: Cela ne figure nulle part dans les crédits du
ministère des Affaires sociales.
M. Laplante: Lorsqu'on parle d'avoir soin des personnes
âgées.
M. Lazure: M. le Président, personne n'a interrompu le
député de Saint-Laurent dans sa longue harangue ce matin. Il a
pris une heure et demie, personne ne l'a interrompu.
M. Forget: Non, je parlais des crédits du ministère
des Affaires sociales, pas de la Société d'habitation du
Québec.
M. Lazure: On pourra en reparler tantôt.
Le Président (M. Marcoux): Le député de
Bourassa.
M. Forget: Des faits, s'il vous plaît.
M. Laplante: Je répète, aux 6000 logements qu'on a
construits pour les personnes âgées, 15 000 autres
s'additionneront dans les années qui s'en viennent avec des ententes
entre les offices municipaux et l'entreprise privée.
Vous avez eu en plus, pour les personnes âgées, l'aide
à domicile qui est passée de $12 millions à $46 millions,
pour le budget 1979.
Vous avez ensuite le remboursement de l'impôt scolaire qui entre
encore dans les réalisations du gouvernement. C'est, en deux ans et
demi, les projets qu'on vous donne là. Vous avez la diminution des
tables d'impôt. Cela a l'air à faire mal à l'Opposition,
tous ces projets...
Mme Lavoie-Roux: Dites au moins la vérité.
M. Forget: C'est comme la création d'emplois quand on fait
des licenciements. C'est le même degré de
vérité.
M. Laplante:... où un gouvernement a fini par faire des
réalisations pour les personnes âgées. Vous, de
l'Opposition, vous vous êtes toujours servis des personnes
âgées, comme vous vous êtes servis des cultivateurs. Vous
avez toujours fait
des politiques, à chaque élection, sur le dos des
cultivateurs, pour essayer de les grimper. Nous nous sommes aperçus,
à notre arrivée au pouvoir, qu'il n'y avait rien de fait dans
cette politique. Vous avez fait des politiques en 1976, à peu
près partout, pour essayer d'acheter le vote des personnes
âgées, par la peur ou par des réalisations que vous n'avez
jamais faites.
Nous autres, en deux ans et demi, on a réussi à
réaliser, par des actions, des programmes spécifiques pour les
personnes âgées. Si vous prenez la table d'impôt, par
exemple, un couple de personnes âgées qui gagne $13 500 a une
diminution d'impôt nette de $500 dans son rapport d'impôt. Vous
avez, en plus, l'impôt foncier. On peut mettre une partie de
l'impôt foncier sur le rapport d'impôt, en retour.
Vous avez aussi les médicaments gratuits. Dernièrement,
vous avez eu la gratuité des ambulances.
M. Forget: On en reparlera.
M. Laplante: On en reparlera. C'est sûr, on est là
pour en parler. Les budgets sont faits pour cela, pour être
étudiés, dans ce contexte. Vous avez ceux qui habitaient les
centres d'accueil. (15 h 45)
Vous parliez tout à l'heure des indexations. En somme, on
conserve des gens qui voulaient faire mourir... les assistés sociaux...
On a pris $48, qui pouvait rester à une personne âgée en
hébergement, ou à un handicapé, ou à une personne
aux soins chroniques, et on a porté le taux à $68.
Vous avez ensuite...
M. Forget: Parlez donc du profit net dans cette
opération.
M. Laplante: Ensuite, on a donné une fierté aux
gens qui ont atteint 65 ans. Sous votre régime, quand une personne
gagnait un peu d'argent après 65 ans, tout de suite, vous coupiez les
rentes du Québec qu'elle avait. Vous enleviez à ces gens la
fierté de pouvoir gagner quelques sous en dehors. Nous autres, on a dit:
Ces gens-là n'ont pas à être pénalisés pour
un supplément de pension qu'ils ont déjà payé, les
rentes du Québec. On leur donne le droit de travailler et de gagner de
l'argent, d'être fiers de ce qu'ils sont aujourd'hui; on ne veut pas les
faire vieillir avant le temps.
Nos politiques, nous allons les accentuer de concert avec le ministre
suivant les objectifs qu'on s'est fixés sur les soins à domicile.
$48 millions pour nous autres, on prévoit, on essaie de faire des
pressions à l'intérieur des politiques du ministère pour
donner encore plus dans les services à domicile. On croit que pour un
couple qui a toujours vécu dans un quartier, nous devons essayer de le
faire résider dans ce quartier le plus longtemps possible que ce soit
dans les centres d'accueil et, comme dernière solution, l'amener
à aménager de lui-même ces centres d'accueil.
C'est un peu la réplique, M. le Président, que je voulais
donner au député de Saint-Laurent, ce matin, après l'heure
et demie durant laquelle il a dit qu'il n'y avait rien de bon, qu'il n'y avait
rien de palpable dans les politiques du gouvernement actuel pour les personnes
âgées. On continuera de s'en occuper même si cela
déplaît actuellement aux membres de l'Opposition, qu'on soit un
vrai gouvernement qui s'occupe des personnes âgées. Je suis
certain qu'on est appuyé par nos membres, par nos députés
pour accentuer les politiques que nous avons déjà mises en marche
et dans les nouvelles politiques que nous entreprendrons. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Marcoux): Dans l'ordre que j'avais, le
député de Limoilou, celui de Beauharnois et...
M. Gosselin: ... ce matin, à la commission, je voudrais
intervenir. Je n'ai pas objection à ce que ce soit plus tard, tout
à l'heure. J'aimerais reprendre quand même...
Le Président (M. Marcoux): Je vais vous enregistrer. Le
député de Limoilou, celui de Beauharnois et ensuite le
député de Shefford.
M. Raymond Gravel
M. Gravel: M. le Président, je serai très bref. Je
veux simplement souligner le fait que le ministre n'a pas oublié le
soutien aux organismes bénévoles. Dans mon comté, un
comté qui est très pauvre, le comté de Limoilou, on a
beaucoup de groupements bénévoles qui n'étaient pas
supportés dans le passé. Je suis heureux d'apprendre que depuis
qu'on est arrivé au pouvoir, l'aide au soutien des organismes
bénévoles est passée de $2 millions à $5 millions.
Ce qui me fait dire qu'on avait un gouvernement qui était à
Ottawa qu'on appelle le gouvernement canadien avec des politiques du Canada au
travail, ce qui m'amène à vous dire de quelle façon on
procédait surtout dans un organisme bénévole qui
maintenant n'existe plus parce qu'on avait fait une demande pour des soins
à domicile de $110 000 et qu'en fin de compte, par un programme de
Canada au travail, on leur a accordé $63 000, mais à la condition
qu'on ait nécessairement un bureau, le téléphone et
tout.
De ces $63 000, seulement $11 000 sont retournés aux soins
à domicile, prce qu'il en coûtait $52 000 pour l'administration. A
ce moment, on peut dire que de ces $63 000, seulement $11 000 ont servi aux
soins à domicile. J'espère que le ministre va pouvoir me donner
plus d'explications à savoir: De quelle façon ces groupes qui
maintenant n'existent plus pourraient-ils reprendre vie et donner des vrais
soins à domicile et que la totalité des montants donnés
à ces groupes servent exactement à des soins à
domicile?
M. le Président, je poserai des questions sur d'autres points
tout à l'heure, lors de l'étude des crédits. Merci.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Beauharnois.
M. Laurent Lavigne
M. Lavigne: M. le Président, je m'en voudrais de ne pas
intervenir lors de l'étude des crédits du ministère des
Affaires sociales, parce que j'étudie particulièrement un
dossier, il s'agit du dossier des garderies. Quand on entend l'argumentation
des députés de l'Opposition ce matin, je ne comprends pas qu'ils
ne soient pas capables d'admettre objectivement l'effort que le
ministère des Affaires sociales a fait dans ces différents champs
d'activités. Je suis bien conscient de l'effort qui a été
fait au niveau des Affaires sociales, face au réseau des garderies du
Québec. Quand on pense que quand on est arrivé là en 1976,
il n'y avait au budget des garderies que $4 200 000 d'investis, depuis ce
temps, nous avons augmenté le budget à $12 400 000, en augmentant
par le fait même le nombre de places de 5000. C'est dans un premier
temps.
Dans le budget qu'on vous présente maintenant, que nous avons
sous les yeux, nous augmentons encore de $7 500 000 le montant aux garderies,
ce qui va porter le budget global des garderies à $19 900 000 cette
année, alors que deux ans et demi auparavant, il n'était que de
$4 200 000. Par le fait même, nous allons augmenter encore une fois de
4000 le nombre de places pour enfants dans les garderies.
Donc, je pense qu'il n'y a pas lieu d'extrapoler plus longtemps sur
cette question, sur ce point. Je pense que les chiffres que nous avons devant
nous démontrent d'une façon claire la volonté du
gouvernement du Parti québécois de faire du réseau des
garderies un réseau amélioré, par rapport à celui
qui existait au moment où nous sommes arrivés au pouvoir.
Il y a un autre élément, bien sûr, qui
n'apparaît pas dans l'étude des crédits, mais je voudrais
profiter de l'occasion pour souligner ou mentionner encore une fois à
quel point le gouvernement actuel est intéressé à
améliorer le sort des femmes au travail en particulier qui ont besoin de
place pour garder leurs enfants. Nous allons réglementer tout le
réseau des garderies par un projet de loi-cadre qui va être
déposé dans le courant de l'année et, à
l'intérieur du projet de loi-cadre, nous trouverons, bien sûr, les
grands principes de la loi et toute une réglementation qui viendra
faciliter l'administration des garderies et j'espère que ce projet de
loi-cadre sera déposé je pense bien que le ministre pourra
me le confirmer dans le courant de la présente session.
Je ne voudrais pas discuter sur les autres points que nous avons dans
l'étude des crédits, parce que le député de
Bourassa, entre autres, a parlé en particulier des personnes
âgées. Le ministre va commenter aussi les autres points, mais je
voulais quand même me faire le porte-parole de cette commission
parlementaire pour mentionner et indiquer à quel point le gouvernement
actuel est soucieux et a une ferme volonté de vouloir améliorer
notre réseau de garderies.
C'étaient donc les quelques propos que je voulais tenir sur le
budget des Affaires sociales, M. le Président, en ce qui a trait
particulièrement au réseau de garderies au Québec. Je vous
remercie.
M. Gérard Gosselin M. Gosselin: M. le
Président...
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Sherbrooke.
M. Gosselin:... il n'était pas de mon intention de faire
un exposé général ou global au début de la
commission des affaires sociales pour l'étude des crédits. Mais
comme le député de Saint-Laurent a abondamment parlé dans
son exposé des groupes sherbrookois en signalant leur dynamisme et les
représentations qu'ils ont dû faire à la suite du
déséquilibre financier qu'on connaît par suite des coupures
aux allocations familiales et à l'indexation de l'aide sociale, je me
vois en devoir quand même de faire certaines rectifications.
Le député de Saint-Laurent a fait allusion à mon
rôle là-dedans et a commenté, à sa manière
évidemment, ces représentations. Je dois dire que je suis heureux
de constater que le milieu a été le plus expressif dans ses
représentations, qui a été le plus dynamique aussi dans
ses représentations autour des mois de janvier, février, mars
derniers, à l'occasion de la situation relativement dramatique,
disons-le, qui a été imposée aux familles par suite d'un
déséquilibre financier provoqué par la perte subite,
sèche, de 22,1% des allocations familiales régulières
qu'elles recevaient du fédéral et qui ont été
transformées, par la suite, en crédits d'impôt et
lié aussi à la décision que nous avons prise, dans le
même intervalle, d'indexer l'aide sociale d'une manière relative
en tenant compte évidemment des autres sources de revenu qui
s'ajoutaient pour ces familles.
Le député de Saint-Laurent a parlé de six ou sept
groupes qui se sont exprimés là-dessus et qui ont eu de la
difficulté à se faire entendre du gouvernement. Je dois dire
qu'il y en a eu plus que cela, il y en a eu une bonne douzaine. J'ai
reçu la visite de ce groupe à mon bureau, j'ai également
reçu le groupe de représentants qui se sont exprimés sur
la question de l'aide sociale à Québec, Ie 21 mars dernier; j'ai
eu au moins deux autres rencontres formelles avec eux et il y a
également eu un échange suivi de correspondance avec les
représentants de tous les groupes qui ont fait ces
représentations; une douzaine, peut-être même davantage.
Les groupes avaient même demandé à rencontrer le
ministre des Affaires sociales pour se faire mieux expliquer les
décisions du gouvernement québécois dans cette affaire et
le ministre s'est effectivement rendu disponible dans une rencontre qui a eu
lieu le 4 mai dernier à Sherbrooke même où, à
l'occasion d'une bonne heure et demie d'échanges, les groupes ont pu se
faire entendre abondamment et le ministre a pu expliquer la position du
gouvernement.
Je voulais corriger l'impression qu'a pu laisser ce matin l'intervention
du député de Saint-Laurent sur cette question et je dois dire
qu'à ce moment-ci, le point de vue du gouvernement
québécois a été abondamment connu, les
représentants des organismes sherbrookois vont faire la même
démarche vis-à-vis du ministre fédéral de la
Santé et du Bien-Etre, Mme Monique Bégin, et auprès du
député fédéral.
Je termine ici pour ce qui est de cette question, c'était
seulement une mise au point que je voulais faire. Je m'attends de reprendre
d'une manière beaucoup plus substantielle les questions relatives
à l'aide sociale, mais à l'intérieur de la discussion
spécifique que nous aurons en commission sur cette question. Merci.
Le Président (M. Marcoux): M. le ministre. M. Lazure:
M. le Président...
Le Président (M. Marcoux): Vous voulez intervenir avant
que...
Mme Lavoie-Roux: Les remarques générales.
Le Président (M. Marcoux): Pour des remarques...
Mme Lavoie-Roux: Si le ministre a quelque chose à dire
immédiatement...
M. Lazure: Non.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
D'Arcy McGee et Mme le député de L'Acadie.
M. Victor C. Goldbloom
M. Goldbloom: M. le Président, je serai bref, mais je
voudrais profiter du débat sur les crédits du ministère
des Affaires sociales pour m'adres-ser, par votre intermédiaire, au
ministre. C'est un sujet que vous connaissez bien, M. le Président, et
que le ministre connaît bien; il n'est pas le seul à être
impliqué, ses collègues de l'Education et de l'Agriculture sont
également intéressés par ce sujet. Je voudrais solliciter
la collaboration active du ministre par rapport à ce dont je vais
parler.
On sait que depuis l'an dernier, il y a un programme de distribution de
lait dans les écoles. J'ai soulevé ce problème
parce que problème il y a aux crédits du ministère
de l'Education et, même si le ministre de l'Education a fait preuve d'une
certaine compréhension, il n'a pas été en mesure de
m'assurer que le programme se déroulera avec les contrôles qui,
à mes yeux, s'imposent.
Je voudrais souligner un fait que le ministre reconnaîtra sans
difficulté, à cause de sa formation scientifique. Si
l'Université Laval, l'Université de Sherbrooke, le Montreal
Children's, l'Hôpital Sainte-Justine, l'Hôtel-Dieu de Québec
s'adressaient au ministre des Affaires sociales en proposant un projet de
recherche qui porterait sur des régimes alimentaires, sur la comparaison
entre divers régimes alimentaires par rapport à leur contenu en
calories, par rapport à leur contenu en matières grasses, plus
précisément en cholestérol, le ministre exigerait un
protocole de recherche, un protocole d'analyse convenable. Si l'institution en
question ne proposait pas des méthodes valables de contrôle, le
ministre, avec l'avis de ses conseillers en ce genre de matières,
refuserait sûrement d'accorder une subvention pour une telle entreprise,
pour un tel projet de recherche. (16 heures)
J'irai plus loin, et j'aurais dû le mentionner quand j'avais
à m'adresser au ministre de l'Education. Si, dans une commission
scolaire, on voulait entreprendre, faire l'expérience d'une nouvelle
méthode pédagogique, le ministère de l'Education ne
l'accepterait pas, ne permettrait pas que l'expérience se fasse sans
avoir des balises, sans savoir qu'à la fin, il y aurait un rapport
valable soumis au ministère permettant d'évaluer le programme en
question, d'évaluer ses effets sur les enfants.
Or, M. le Président mon intervention est presque
terminée je voudrais tout simplement demander au ministre des
Affaires sociales de bien vouloir se pencher sur le programme Lait-école
avec l'oeil scientifique que sa formation lui a donné, pour que ce ne
soit pas une aventure empirique où l'on dirait tout simplement: Le lait
doit être bon, donc on en donnera.
Il y a plus que cela, M. le Président, dans l'analyse de
l'alimentation qui convient à la population et, particulièrement,
aux enfants. Il y a à se demander: Est-ce que c'est nécessaire,
est-ce que c'est une contribution valable à la santé des enfants,
y a-t-il des dangers dans ce programme?
J'ai fourni au ministre, il s'en rappellera, une certaine correspondance
avec des gens qui ont une certaine expertise et qui ont fourni un point de vue.
Le ministre, avec l'avis de ses conseillers, pourra arriver à la
conclusion qu'il n'est pas d'accord avec ces opinions. Il a parfaitement le
droit de le faire. S'il le fait, je suis convaincu que cet avis contraire qu'il
exprimera sera fondé sur une base scientifique; il aura
étudié la chose et il sera venu à la conclusion que
d'autres facteurs doivent être pris en considération et que
l'équilibre entre le pour et le contre l'amène à dire: Oui
pas sur une base empirique, mais sur une base scientifique c'est
un bon programme, c'est un programme nécessaire, c'est un programme
qu'il faudra poursuivre.
Je soutiens respectueusement que si nous n'avons pas l'assurance que le
contrôle scientifique ou l'évaluation scientifique du programme se
poursuit et que nous aurons donc, d'ici relativement peu de temps, une
évaluation qui nous indiquera que le lait aura fait du bien aux enfants,
que le lait aura modifié les habitudes alimentaires des enfants et que
les enfants en question n'auront pas acquis une tendance vers
l'obésité, une tendance vers la cholestérolémie,
à cause de cette addition de lait, nous nagerons dans des eaux inconnues
et nous ne serons pas en mesure de répondre convenablement aux parents
intéressés,
aux médecins intéressés, aux
diététistes intéressés.
Ma demande au ministre, je l'ai faite en toute
sérénité, je l'ai faite par votre intermédiaire, M.
le Président, entre deux personnes qui jouissent d'une formation
scientifique, c'est simplement qu'il se penche sur le programme et qu'il
puisse, d'ici peu de temps et je dirais au plus loin, lors du
débat de l'an prochain sur ses crédits nous donner une
évaluation de ce programme dans les termes que j'ai exposés, pour
que nous puissions être assurés que le programme a
été bien inspiré et que sa poursuite vers un avenir
indéfini serait également justifiée. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Marcoux): Merci, M. le
député de D'Arcy McGee. Mme le député de
L'Acadie.
Mme Thérèse Lavoie-Roux
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je voudrais faire
quelques remarques. Je trouve intéressant de voir qu'il y a ici un plus
grand nombre de députés du côté ministériel
qui viennent vanter les mérites des actions du gouvernement en
matière d'affaires sociales qu'il n'y en avait du côté de
l'éducation. Evidemment, du côté de l'éducation,
c'était moins zéro. On peut voir qu'ils auraient
été moins à l'aise pour venir vanter les
réalisations du gouvernement à ce ministère.
Qu'il y en ait ici un peu plus, vis-à-vis des personnes
âgées, je pense que c'est le fait aussi d'une population qui est
vieillissante et qu'on ne peut pas ignorer, que le gouvernement le veuille ou
pas, il doit poser des actions dans le domaine des personnes
âgées. En pose-t-il suffisamment? En pose-t-il suffisamment
à l'égard des familles en général? Cela devrait
aussi être le souci des Affaires sociales. En pose-t-il suffisamment
à l'égard des organismes bénévoles dont on a
parlé tout à l'heure, à l'égard des garderies,
à l'égard des personnes handicapées? Je pense qu'au fur et
à mesure qu'on examinera les crédits, le bilan du gouvernement
n'apparaîtra pas aussi reluisant que certains députés du
côté ministériel ont voulu le laisser croire.
Si on prend, par exemple, les organismes bénévoles, il y
avait une question que je voulais poser ultérieurement, mais, compte
tenu des remarques faites tout à l'heure, je voudrais simplement
référer les collègues du côté
ministériel aux problèmes soulevés dans la Presse du
samedi 21 avril et du Devoir du 14 mai, touchant les centres d'accueil pour les
femmes clochardes, comme on les a intitulés dans la Presse. Nous nous
trouvons en face de quatre ou cinq maisons d'accueil, qu'on appelle refuges,
où, finalement, on se bat presque contre l'impossible. Les seules
subventions que ces maisons ont reçues dans le passé, selon les
articles que j'ai entre les mains, venaient du fédéral. Depuis ce
temps, ces différentes maisons ont essayé de constituer un fonds
commun, pour tenter d'avoir une oreille un peu plus sensible de la part du
gouvernement. Et même si les situations sont extrêmement
aiguës, dramatiques, il semble bien que, toujours, c'est une fin de
non-recevoir de la part du ministère des Affaires sociales.
Voilà un bon exemple du grand support... Il ne s'agit pas
uniquement de femmes seules. Il s'agit aussi, dans bien des cas, de femmes avec
enfants qui, dans des circonstances dans lesquelles je ne veux pas entrer, sont
obligées de laisser la maison jusque là appelée familiale
pour trouver refuge ailleurs.
On peut aussi se demander quels sont les critères que le
ministère des Affaires sociales utilise dans sa distribution d'appui ou
d'allocations aux organismes bénévoles. Je ne crois pas me
tromper en disant, par exemple, que l'association pour la défense des
droits sociaux, les différentes associations ont vu leurs allocations
diminuer; on est à les affamer. Est-ce que, par hasard, ces
personnes-là, qui sont celles qui protestent présentement, par
exemple, contre le fait que, dans une décision politique, même si
c'est une chicane fédérale-provinciale, le gouvernement, à
la suite d'une décision politique qu'il peut penser rentable ou
peut-être parce qu'il veut récupérer de l'argent, coupe les
fonds ou les revenus aux familles les plus pauvres qui sont les familles avec
enfants qui sont bénéficiaires d'aide sociale, de même que
l'argent a été enlevé aux personnes en centres
d'accueil... Même l'explication du ministre des Affaires sociales,
à ce moment-là, à l'Assemblée nationale, disant
qu'il leur laissait 75%... Il ne leur a même pas laissé 75% de ce
qui leur avait été remis en janvier, contrairement à toute
l'argumentation qu'il avait développée à ce
moment-là. On sait fort bien que les familles monoparentales,
particulièrement les familles monoparentales dont les femmes sont des
chefs de famille, vivent bien en deçà du seuil de la
pauvreté. Encore une fois, qu'arrive-t-il des personnes dont l'âge
se situe, d'une façon un peu grossière, entre 55 et 65 ans, qui
attendent d'avoir 65 ans pour retirer certains autres avantages que les
personnes âgées ont mais qu'elles n'ont pas, bien qu'elles vivent
dans la pauvreté? Je l'ai souligné à l'Assemblée
nationale et je tiens à le souligner à nouveau tout de suite. Une
question que je poserais au ministre des Affaires sociales: Où en
est-il, où son gouvernement en est-il dans les réflexions
touchant l'allocation de logement pour ces catégories de personnes qui
étaient peut-être dans les... En tout cas, selon un
communiqué qu'on a eu des Affaires sociales, c'était une
réflexion que le gouvernement faisait présentement, cette
possibilité de subventionner le logement des personnes qui sont
bénéficiaires de l'aide sociale ou qui n'ont pas les ressources
suffisantes pour vivre d'une façon décente.
On a parlé tout à l'heure des garderies. Evidemment, on
fait grand état du développement ou des montants d'argent qui
sont alloués pour les garderies. Il ne faudrait quand même pas
rire. Il faudrait peut-être demander au regroupement des garderies ce
qu'il pense de la générosité du gouvernement. Il est vrai
que, l'an dernier, il y a eu une indexation, mais, en ce qui touche les
gar-
deries elles-mêmes, cela correspondait à l'indexation des
dépenses courantes. On est encore avec du personnel de garderie qui est
payé au salaire minimum et, de tous les techniciens qui sortent des
CEGEP, ce sont les employés ou enfin les techniciens qui sortent et qui
doivent faire face à un marché dont les conditions de travail
sont les plus difficiles et les moins bien rémunérées.
Evidemment, il y a eu une augmentation du nombre de places avec les
années. Grand Dieu, si on ne voulait pas reculer, je pense que c'est une
chose qui était inévitable, mais il faudrait avoir des calculs
précis pour savoir si on tient compte de l'augmentation des places, si
on tient compte de l'indexation des dépenses courantes, quelle a
été l'amélioration qu'on a apportée à la
qualité des garderies. On peut bien ouvrir des garderies, mais qui
s'assure de la qualité des services qui y sont donnés? C'est
extrêmement important, parce qu'on a affaire à la population la
plus jeune qui est en période de formation et je pense qu'il ne s'agit
pas simplement de se glorifier: On a X nombre de places de plus. D'ailleurs, il
faut entendre les femmes et les associations féminines continuer de
récriminer et de protester contre le fait qu'il y a une pénurie
flagrante de garderies au niveau de la province et je pense que le nombre de
places là-dessus, j'accepterai bien une correction du ministre
en garderie au Québec se situe encore bien en deçà
de celui qui existe en Ontario. Je pense qu'elles sont... En tout cas, c'est
une vérification qui est à faire, mais je suis à peu
près convaincue de cela. (16 h 15)
On peut se glorifier, mais je pense qu'il y a encore
énormément de points du côté des garderies qui ne
sont pas couverts. Je voudrais simplement... Je pense uniquement à la
somme qui a été mise à la disposition des écoles
pour assurer la garderie après la classe. On a mis à la
disposition du ministère de l'Education l'énorme somme de $400
000. Je dois dire, par exemple, que c'était pour quatre mois, et non pas
pour une année totale, justement pour expérimenter des formules
de garderie après les heures de classe. C'est à peine une goutte
d'eau quand on considère l'ensemble des besoins de la province. Le
ministre pourra-t-il faire le point sur l'expérimentation de garderies
ou formules de garderie diversifiées?
Il serait extrêmement intéressant aussi maintenant qu'il y
aura bientôt un an que la loi 9 sur les handicapés a
été adoptée, que le ministre nous fasse le point sur les
réalisations. J'admets, au départ, d'ailleurs, on en avait
convenu au moment de l'étude en commission parlementaire, qu'on pouvait
prévoir une période de neuf mois pour mettre les choses en place.
Qu'en est-il exactement et quels en sont les résultats?
Ce ne sont que quelques points que je voulais soulever dans ces
remarques préliminaires. Si on peut faire grand état du fait
qu'on a donné les médicaments gratuits à toutes les
personnes âgées, on peut peut-être se poser des questions
très sérieuses. Est-ce qu'on répond là vraiment aux
besoins prioritaires sur le plan social dans notre so- ciété? Je
lisais, peut-être qu'on va le renier parce qu'il venait du Conseil du
bien-être, peut-être que ce n'est pas bon parce que cela ne vient
pas du même gouvernement, lequel faisait remarquer hier ou avant-hier
dans le rapport d'une étude que je n'ai pas lue en détail, dont
j'ai pris connaissance uniquement par des communiqués de journaux,
à savoir que c'est peut-être le temps qu'on repense à une
distribution qui vraiment va apporter des correctifs aux plus démunis de
notre société, mais non pas se glorifier du fait que quelqu'un
avec un revenu de $40 000 ou $50 000 ou même de $30 000 peut avoir
je comprends que c'est une minorité ses médicaments
gratuits. A mon point de vue, ce n'est pas là une distribution
équitable des ressources en fonction des besoins. C'est dans ce sens que
quand je vois qu'on est allé chercher les $15 supplémentaires des
$20 qui ont été accordés aux personnes en centre d'accueil
pour les redonner en soins ambulanciers ce contre quoi je n'ai rien
mais encore une fois, à la condition qu'on les donne aux
personnes qui en ont besoin. On est à financer les plus pauvres à
partir des revenus des plus pauvres. Je pense que c'est sérieux. Dans le
même sens, j'aimerais que le ministre des Affaires sociales puisse au
moment opportun nous dire...
M. Laplante: Est-ce que Mme le député de L'Acadie
me permettrait une question?
Mme Lavoie-Roux: Je vais finir, il me reste une phrase.
M. Laplante: D'accord.
Mme Lavoie-Roux: De la même façon, je serais fort
intéressée de connaître du ministre des Affaires sociales
à quoi il utilisera dans son budget l'argent qu'il aura
récupéré par la non-indexation des prestations des
bénéficiaires de l'aide sociale; on l'estime à $20
millions. Je pense que là-dessus, il n'en faut calculer que $10
millions. Il reste que quand même, vous auriez eu à
dépenser $20 millions, mais vous ne le dépenserez pas. A quoi
seront utilisées ces sommes qui normalement auraient dû revenir,
encore une fois, aux plus pauvres de notre société? Merci, M. le
Président.
M. Laplante: Si vous permettez, madame, par quels critères
voyez-vous qui est plus pauvre, qui est plus riche parmi les personnes
âgées, sachant que le gouvernement fédéral
actuellement n'a pas été capable de l'établir, il a
été obligé de mettre les pensions universelles pour tout
le monde à 65 ans? Il est parti de 70 ans, à un moment
donné, et il déterminait qui était le plus riche et le
plus pauvre pour le donner à 65 ans. Selon un rapport de ce temps, il
trouvait qu'au point de vue de l'application, cela coûtait aussi cher de
le donner à tout le monde. C'est qu'il y avait un retour par
l'impôt après cela. Les critères, au point de vue des
médicaments, lesquels donneriez-vous pour déterminer qui est plus
pauvre, qui est plus riche?
Mme Lavoie-Roux: Ce n'est pas à moi à
établir les critères, mais quand je vous dis...
M. Laplante: Vous l'exigez.
Mme Lavoie-Roux: Non! De plus, c'est évident que quand les
ressources sont limitées parce qu'on se fait entretenir par le
gouvernement de l'austérité budgétaire, etc.
l'argent qu'on a à mettre à la disposition de la population pour
des mesures sociales, il faut s'assurer qu'il aille à ceux qui en ont le
plus besoin. C'est aussi simple que ça. Est-ce que le revenu est de $10
000, $15 000, $30 000 ou $40 000? Il y a certainement une différence
entre une personne âgée qui a un revenu de $5000 et une qui a un
revenu de $40 000, M. le Président.
M. Laplante: Mais, qu'est-ce que vous faites des gens, par
exemple, qui se sont donnés à leurs enfants, qui sont
déjà riches?
Mme Lavoie-Roux: Vous entrez dans des cas particuliers, je
pense.
M. Laplante: Non, ce ne sont pas des cas particuliers. C'est 10%
d'une certaine population que je connais.
Mme Lavoie-Roux: 10% des personnes âgées qui se sont
données à leurs enfants?
M. Laplante: Qui ont de l'argent. Mme Lavoie-Roux:
Prouvez-moi ça!
M. Laplante: Qui ont eu de l'argent et qui l'ont remis à
leur famille, à leurs enfants...
M. Forget: Allons donc!
M. Laplante:... pour avoir des suppléments de pension.
Mme Lavoie-Roux: Oui, allons donc! M. Forget: Allons donc!
M. Laplante: Oui...
Mme Lavoie-Roux: Vous nous dites que les personnes
âgées sont malhonnêtes.
M. Laplante: Oui, et j'en connais comme ça.
Mme Lavoie-Roux: C'est ça que vous nous dites. Les
personnes âgées sont malhonnêtes, pour recevoir un
supplément...
M. Laplante: Ce n'est pas ça. Ne déviez pas de ce
que j'ai dit.
Mme Lavoie-Roux: C'est ça que vous venez de me dire.
M. Forget: C'est ça.
M. Laplante: Ne faites pas démagogie...
Mme Lavoie-Roux: Pour avoir un supplément de revenu, elles
se sont données à leurs enfants. Aie!
M. Laplante: Ne faites pas de démagogie. Je vous dis que
c'est une coutume très répandue.
M. Forget: Jamais de la vie! Vous êtes incapable...
M. Laplante: Très répandue!
Mme Lavoie-Roux: C'est une accusation; prouvez-là!
M. Laplante: Très répandue.
Mme Lavoie-Roux: Vous qui défendez les personnes
âgées, ne les accusez pas!
M. Laplante: Je ne les accuse pas, non plus... M. Forget:
Ah oui!
Mme Lavoie-Roux: C'est ce que vous venez de faire.
M. Forget: C'est ce que vous venez de faire.
M. Laplante: ... je vous demande: Qu'est-ce que vous
suggérez encore dans ces moyens-là?
M. Forget: Quand vous êtes arrivés en 1977, vous
aviez un régime de gratuité des médicaments pour ceux qui
étaient justement en bas de l'échelle des revenus. Vous avez
décidé de le donner à tout le monde, y compris les gens
qui ont des revenus élevés et les gens qui ont des revenus
élevés, c'est très simple, ce sont ceux qui ne
reçoivent pas du tout le supplément au revenu garanti. C'est le
dernier tiers, le moins pauvre ou le plus riche des personnes
âgées et c'est de ce côté-là que vous avez mis
vos priorités.
Alors, qu'est-ce que vous faites des familles qui ont la charge
d'enfants et qui ont des revenus au niveau minimal? Justement, ces travailleurs
dont on veut supplémenter le revenu, ils ont un titre égal
à demander les médicaments gratuits, d'autant plus qu'il y a des
enfants dans ces familles.
Mme Lavoie-Roux: C'est ça.
M. Forget: C'est un choix que vous avez fait de favoriser les
personnes âgées, non pas parce qu'elles étaient pauvres,
mais parce qu'elles avaient plus de 65 ans et, après, monsieur se permet
de nous faire la morale au sujet de l'exploitation des personnes
âgées.
Le Président (M. Marcoux): M. le député, une
question de règlement? Non?
M. Gosselin: Non, c'est simplement pour signaler...
J'espère qu'on aura abondamment de
temps, à chaque élément de l'étude des
crédits, pour aborder point par point ces sujets. J'aurais beaucoup de
choses à relever de ce que disait et avec lesquelles je suis
d'accord le député de L'Acadie tout à l'heure, mais
je voudrais simplement vous rappeler, M. le Président, que nous sommes
en discussion générale sur les crédits et j'espère
qu'on pourra engager tout à l'heure l'étude de chacun des
points.
Le Président (M. Marcoux): Sur ça, je pense qu'il
vaut mieux interpréter de façon très large la teneur des
propos, parce que le temps qu'on prend pour une discussion
générale, même si elle va dans des sujets
spécifiques, on l'économise lorsqu'on arrive à
l'étude des programmes élément par élément.
De toute façon, il y a un temps déterminé pour les travaux
de la commission et c'est donnant-donnant. Ce sont des vases communiquants.
M. le ministre.
Réponse du ministre
M. Lazure: Merci, M. le Président. Je voudrais d'abord
dire quelques mots sur les dernières interventions, quitte à
garder pour le dessert ma réplique à l'intervention du
député de Saint-Laurent.
Le député de D'Arcy McGee, en somme, fait la proposition,
à savoir qu'avant de procéder trop loin dans la distribution du
lait dans les écoles, on fasse une recherche sur la valeur nutritive du
lait. C'est une proposition qui est raisonnable et je m'empresse tout de suite
de l'informer, M. le Président, que notre comité
interministériel, qui s'occupe d'implanter la politique du gouvernement
en matière de nutrition, dans un rapport de mars 1979 nous informe que,
justement, c'est une des décisions, "... qu'en collaboration" je
cite textuellement "avec le ministère de l'Education,
d'évaluer les résultats du programme de nutrition initié
par la Fédération des producteurs de lait du Québec et le
ministère de l'Agriculture du Québec, en vue d'approuver ces
instruments utilisés à haute échelle dans les
écoles s'il y a lieu "...
M. Forget: En vue de l'approuver?
M. Lazure: Ecoutez, on ne s'attardera pas aux mots, M. le
Président, si vous permettez...
M. Forget: Non, enfin, c'est amusant.
M. Lazure: Vous allez me dire encore que c'est mal
rédigé, mais je répéterai au député
de Saint-Laurent, M. le Président, que c'est rédigé,
à 80% du temps, par des gens qu'il a embauchés à son
service et qui ne sont pas parfaits. Il y a seulement lui qui est parfait.
Cela, on le sait, tout le monde le sait autour de la table.
L'esprit de la recommandation, pour être sérieux, c'est que
nous aussi sommes conscients qu'il y a une espèce de dispute
scientifique, actuellement, sur la valeur nutritive du lait. On a l'in- tention
de surveiller cela de très près et, avec l'aide de
nutritionnistes, de médecins, d'essayer d'en évaluer cette valeur
nutritive le plus adéquatement possible, mais ce n'est pas facile.
D'autre part, je pense qu'il y a une espèce de consensus dans
notre société qui veut que, à tort ou à raison, le
lait ait une bonne valeur nutritive surtout chez l'être en croissance. Il
me semble que ce n'est pas tout à fait comme une nouvelle technique
pédagogique qui serait introduite comme cela, un peu à
l'aveuglette. Il faut faire attention et ne pas alerter la population, parce
que le député de D'Arcy McGee a employé l'expression
"aventure", j'ai noté cette expression. Je ne pense pas qu'on puisse
qualifier la distribution gratuite de lait aux écoliers d'une aventure
qui a de gros risques. Il reste malgré tout que les parents peuvent
certainement intervenir. Si des parents croient fermement que le lait en
question peut être nuisible à la santé de l'enfant, je suis
sûr que le parent en question peut faire une entente pour que l'enfant
soit exempté de son lait gratuit, à la limite.
Je veux simplement dire, en réponse à la question du
député: Oui, nous allons d'une part l'étudier, nous
serions intéressés à recevoir un projet de recherche bien
bâti. D'autre part, je pense qu'il n'y a pas lieu d'inquiéter la
population et, sur demande, certains enfants pourraient sûrement
être exemptés. Ce qui peut nous inquiéter aussi, c'est
l'inverse, à savoir que, dans certains quartiers, surtout, à
cause de la montée des prix, il y a de jeunes enfants, des enfants
d'âge élémentaire, qui ne boivent pas suffisamment de lait
et qui en sont privés à leur domicile. C'est vraiment une
question discutable, la proposition m'apparaît raisonnable et nous
l'acceptons.
M. Goldbloom: M. le Président, me permet-triez-vous de
remercier le ministre de cette réponse? C'est la première fois
qu'un ministre nous dit: II y aura une évaluation scientifique du
programme. Je souligne à son attention il en est peut-être
déjà au courant le fait qu'il y a, depuis deux ou trois
ans, une tendance à limiter l'alimentation des jeunes
bébés, par exemple, à ne donner à manger des
aliments solides qu'à partir de l'âge de six mois, contrairement
à l'habitude des récentes années, où l'on
commençait à un mois ou même à trois semaines, cela
pour éviter une tendance progressive vers l'obésité.
Ce n'est pas mon désir de condamner le programme, c'est
simplement de demander que l'on en fasse une évaluation
scientifique.
Mon dernier commentaire: le ministre a fait lecture d'un petit extrait
d'un rapport. A ma mémoire, c'est la première fois que j'entends
dire que la Fédération des producteurs de lait avait joué
un rôle dans l'instauration du programme.
M. Lazure: De concert avec le ministère de l'Agriculture,
évidemment.
M. Goldbloom: Je ne me rappelle pas en avoir entendu parler
auparavant; je trouve cela intéressant.
M. Lazure: Cela a déjà été rendu
public.
Quant au député de L'Acadie, M. le Président, et
à ses remarques sur les $20 octroyés par le gouvernement
fédéral à certaines personnes âgées et sur
lesquels le ministère, avec les établissements, a
décidé d'en remettre $5, c'est-à-dire 25%, j'ai eu,
à plusieurs reprises, l'occasion d'expliquer qu'en faisant cela on ne
faisait que suivre une politique établie depuis longtemps au
ministère des Affaires sociales, sous votre collègue, en
particulier, le député de Saint-Laurent...
Mme Lavoie-Roux: M. le Président...
M. Lazure: Si vous me permettez, je n'ai interrompu
personne...
Mme Lavoie-Roux: Oui, mais est-ce que...
M. Lazure: Je vous ai écouté patiemment, votre
collègue, surtout...
Mme Lavoie-Roux: Sur l'indexation... Le Président (M.
Marcoux): A l'ordre! M. Lazure: M. le Président...
Mme Lavoie-Roux:... vous n'avez pas remis la partie de
l'indexation du mois de janvier.
Le Président (M. Marcoux): A l'ordre! M. le ministre.
M. Lazure: Quand même! J'ai été très
patient, ce matin, j'ai écouté votre collègue on
voit bien que vous n'étiez pas ici pendant une heure et demie, je
ne vous ai pas interrompue tantôt. M. le Président, j'aimerais
bien qu'on...
Mme Lavoie-Roux: Donnez les faits tels qu'ils sont, je ne vous
interromprai pas.
Le Président (M. Marcoux): Mme le député de
L'Acadie, vous aurez tout le loisir d'intervenir à nouveau et de vous
exprimer.
Mme Lavoie-Roux: D'accord.
Le Président (M. Marcoux): M. le ministre. (16 h 30)
M. Lazure: J'essaie d'être bien serein parce qu'on va
devoir passer plusieurs heures ensemble et on ne fait que commencer. Ces fameux
$20 distribués de façon électoraliste par le gouvernement
fédéral... Oui, on recommence; puisque vous avez
recommencé à poser la question, je recommence à donner ma
réponse. Nous n'avons fait que maintenir une politique, une pratique du
ministère des Affaires sociales en remettant au
bénéficiaire 25% de ce revenu additionnel et en gardant le reste
on ne s'en est jamais caché pour défrayer une
partie du coût de l'hébergement de ces personnes
âgées qui sont en centres d'accueil.
Il faut bien dire à la population que ces personnes
âgées voient toutes leurs dépenses d'hébergement
payées entièrement par l'Etat, à un taux entre $700 et
$800 par mois. Donc, quand on garde $15 sur les $20 pour assumer une petite
partie du coût d'hébergement, je pense qu'on fait une chose
raisonnable. Même la personne âgée qui est à la
maison, qui a reçu les $20 en question du gouvernement
fédéral, que je sache, elle n'a pas utilisé les $20 en
entier pour ses petites dépenses, parce que les $5 qu'on a
ajoutés aux $63 pour un total de $68 par mois, c'est une allocation de
poche que la personne âgée reçoit en centre d'accueil et en
famille d'accueil. La personne âgée qui vit en domicile, de
façon autonome, en appartement ou dans sa maison, n'utilise pas tout le
nouveau revenu dans une proportion de 100% pour son argent de poche,
évidemment. Elle en utilise environ les trois quarts pour des
dépenses essentielles de la vie, le logement, l'hébergement et
tout ce qui s'ensuit.
Aux garderies, bien sûr qu'il y a un contrôle, pour
répondre à votre question, Mme le député de
L'Acadie, qui s'effectue par le biais du service de l'agrément dans la
direction générale des services sociaux. On aura l'occasion d'en
reparler plus longuement quand on arrivera au programme en question. Les
maisons d'accueil pour femmes... Votre service de recherche est un peu en
retard parce que vous lisez une coupure du mois d'avril, mais vous auriez
pu...
Mme Lavoie-Roux: Quatorze mai 1979, M. le ministre. C'est le
journaliste qui est en retard.
M. Lazure: C'est le journaliste qui est en retard parce que j'ai
devant moi un communiqué qu'on a émis le 3 mai et qui porte comme
titre: "$831 000 en subventions à des organismes bénévoles
féminins". Là aussi, on pourra les passer un par un tantôt
dans le programme 6 des...
Mme Lavoie-Roux: Aux centres d'accueil?
M. Lazure: Oui, je puis vous dire qu'à notre
arrivée au pouvoir, aucun centre d'accueil pour femmes
maltraitées ou femmes en détresse n'était
subventionné par le ministère des Affaires sociales. Cette
année, nous subventionnerons exactement quatorze de ces maisons, dans
à peu près toutes les régions du Québec.
M. Laplante: Combien dites-vous en 1976?
M. Lazure: En 1976, aucune maison de la sorte n'était
subventionnée.
M. Laplante: Ah bon!
M. Lazure: En 1979/80, puisqu'on étudie nos nouveaux
crédits, il y a exactement quatorze maisons du genre qui sont
situées à peu près dans toutes les régions: les
régions 02, 03, 04, 05, 6A, 6C et 7. M. le Président, je
continue. J'arrive aux remarques du député de
Mégantic-Compton... Je
voulais en parler quand je ferais la réplique aux critiques
officielles de l'Opposition...
Mme Lavoie-Roux: D'accord.
M. Lazure: Le député de Mégantic-Compton a
mis l'accent dans son intervention sur le respect des coutumes familiales, a
fait quelques critiques sur nos cliniques de planification familiale. Je
voudrais faire remarquer au député de Mégantic-Compton...
Je le renvoie à un article dans la revue Express d'il y a un mois et
demi environ, une longue entrevue où le ministre de la Santé
publique de France, Mme Veil, discutait en particulier du taux de naissance qui
dégringole un peu partout dans le monde occidental et elle a à
essuyer des critiques de parlementaires, de groupes de pression semblables au
groupe Pro-Vie qu'on connaît ici, puisque, d'une part, leur
législation en France est beaucoup plus ouverte, beaucoup plus
permissive si on veut utiliser le langage que vous utilisiez tantôt, une
législation qui incite plus à l'avortement thérapeutique
que celle du Canada, beaucoup plus ouverte, comme en Italie, d'ailleurs.
Devant les critiques de ses adversaires, le ministre de la Santé
de France disait: Écoutez, il a été démontré
à maintes reprises que la baisse, la chute du taux de naissance dans un
pays n'est aucunement reliée à la législation sur
l'avortement thérapeutique, absolument pas. Il a même cité
quelques pays, dont le Québec, comme exemple de pays où il y
avait eu chute spectaculaire du taux de naissance depuis une dizaine
d'années, dans une société qui, justement, n'avait pas,
à toutes fins utiles, recours à l'avortement
thérapeutique. Notre société québécoise de
langue française surtout, n'a presque pas eu recours à
l'avortement thérapeutique.
Je pense que les démographes l'on démontré maintes
et maintes fois, c'est trop simple d'essayer de faire peur aux gens, de mettre
ensemble ces deux phénomènes, d'y mettre une relation de cause
à effet, de dire: le gouvernement du PQ veut créer des cliniques
de planning familial, c'est pour cette raison que le taux de naissance baisse
tellement. Je vous ferais remarquer que le taux de naissance est baissé
au Québec depuis une dizaine d'années, mais il s'est
stabilisé depuis trois ans. Les derniers chiffres qu'on a vus pour 1978,
1977, 1976, nous démontrent que le nombre des naissances se maintient
entre 95 000 et 100 000 par année.
Donc, il n'y a vraiment pas de relation de cause à effet.
Maintenant, les cliniques de planification familiale, qu'on finance, il y en a
18 ouvertes au moment où on se parle; notre programme, il y a un peu
plus d'un an, voulait en mettre sur pied une vingtaine, on y arrive. On est
conscient qu'il y a des oppositions, de la part de certains médecins, de
la part de certains membres de conseils d'administration. Je
répète encore une fois qu'il s'agit là d'une
activité clinique tout à fait légitime, tout à fait
dans le cadre des lois existantes, et qui, socialement, répond à
un besoin.
Ce n'est pas parce qu'on se mettrait la tête dans le sable, qu'on
jouerait le jeu de l'autruche, qu'un certain nombre de femmes au Québec
voudraient, pour des raisons de santé mentale ou physique, mettre un
terme à leur grossesse. Ce n'est pas l'absence de clinique de planning
qui va faire que ce phénomène va arrêter. Le
phénomène existe et, aussi longtemps qu'on n'a pas eu, dans le
réseau hospitalier en particulier, des cliniques donnant des services de
façon ouverte, officielle et sérieuse, les femmes ont recours
à des charlatans, à des expédients qui les exploitent,
d'abord au point de vue pécuniaire et qui mettent souvent leur
santé en péril.
Alors, il me semble que le gouvernement, au contraire, devrait
être félicité d'avoir eu le courage de faire face à
ce problème épineux qui suscite toujours des passions chez les
gens, même à l'intérieur d'un même parti, Dieu sait
que ça peut en susciter.
Je pense qu'on n'a pas le droit de refuser un service normal permis par
la loi. Quant aux organismes familiaux, le député de
Mégantic-Compton avait l'air de dire qu'on ne s'en occupait pas. Je lui
rappelle que dans notre liste d'organismes qui reçoivent des subventions
au programme 06, on se rend compte que les organismes familiaux
reçoivent $350 000 par année de subvention. On pourra donner la
liste au moment où on arrivera à ce programme.
Le député de Rouyn-Noranda nous a dit au début de
ses remarques, plus ça change, plus c'est pareil. En écoutant les
critiques de l'Opposition officielle, ça lui rappelait les critiques de
l'Opposition officielle du Parti québécois à
l'époque, il y a quelques années, alors que les rôles
étaient inversés, alors que le député de
Saint-Laurent était probablement dans une position moins confortable
qu'aujourd'hui, quoiqu'il est toujours confortable. J'admire son confort
apparent. Je l'admire. Je lui en rends hommage. Mais il était
probablement quand même moins loquace qu'aujourd'hui. Aujourd'hui, il a
été très loquace. J'en reparlerai tantôt.
Il est certain que c'est facile, dans l'Opposition, de critiquer et de
dire: Ce gouvernement n'a aucune politique de sécurité du revenu.
M. le Président, on en a une, une politique de la sécurité
du revenu. Elle est contenue dans le programme du Parti
québécois. Nous voulons réaliser ce que d'autres,
même parmi les critiques des partis d'Opposition tantôt,
réclament depuis longtemps, nous voulons le réaliser, à
savoir que nous voulons consacrer suffisamment d'argent pour que chaque
personne au Québec ait un revenu annuel garanti. C'est cela qui est
notre politique, c'est cela qui est notre objectif.
On a décidé d'y aller par étape. Quand le
député de Saint-Laurent a fait de longues envolées sur
cette espèce de régression du gouvernement actuel par rapport
à la sécurité sociale, il est vraiment hors d'ordre, en ce
sens que nous consacrons non seulement plus d'argent au chapitre de l'aide
sociale qu'on n'en a jamais consacré, mais nous initions cette
année et il le sait fort
bien avec le projet de loi de mon collègue, le ministre
d'Etat au développement social, a parrainé, une première
étape vers le revenu annuel garanti, en consacrant environ $40 millions
par année pour supplémenter le revenu des bas
salariés.
Pour revenir au député de Rouyn-Noranda, nous voulons
aller vers cette formule d'un revenu annuel garanti. Il est bien sûr que
les moyens à notre disposition ne nous permettent pas de le faire aussi
rapidement qu'on voudrait le faire. Je suis sensible à l'appel que le
député de Rouyn-Noranda m'a lancé vis-à-vis des
personnes handicapées de la région du Nord-Ouest. Je suis
conscient des problèmes dans cette région. Avec le concours de
l'Office des personnes handicapées, nous, au ministère, nous
allons, surtout en ce qui a trait à la réadaptation par le
travail, surtout en ce qui a trait aux ateliers protégés, en
particulier à l'atelier Témabec dans la région du
Nord-Ouest qui fait un excellent travail, nous allons, au cours de
l'année, faire l'impossible pour octroyer des sommes d'argent
additionnelles.
Pour ce qui concerne les soins chiropratiques, j'ai déjà
eu l'occasion en Chambre de répondre que nous étions en
négociation avec l'Association des chiropraticiens. Notre intention
initiale est de rendre gratuits, rendre assurés les services
chiropratiques vis-à-vis de deux clientèles: les
accidentés du travail et les accidentés de la route. Nous avons
pris en considération la suggestion du député de
Rouyn-Noranda d'inclure possiblement les personnes âgées et nous
sommes en train de faire une étude d'estimation des coûts. La
suggestion n'est pas rejetée, mais je ne suis pas en mesure de dire
qu'on pourra la retenir tout de suite.
Finalement, le test du loyer. Vous avez absolument raison, M. le
député de Rouyn-Noranda, il s'agit d'un test qui est
incompréhensible pour 99% de la population. C'est une exigence du
gouvernement fédéral. Je pourrai déposer, à une
prochaine séance, la correspondance encore récente que j'ai eue
avec le ministre de la Santé nationale, Mme Bégin, où elle
réitère, encore une fois, le refus du gouvernement
fédéral de faire disparaître cette exigence d'un test du
logement, qui est fixé à $85.
Mais pour la compréhension de ceux qui lisent le journal des
Débats, je voudrais quand même que les gens comprennent que la
seule façon dont ce test s'applique, c'est la suivante: Si un
bénéficiaire de l'aide sociale paie moins de $85 par mois pour
son loyer ce qui extrêmement rare, il y en a encore un certain
nombre, mais c'est très rare si, par exemple, il paie $70 de
loyer par mois, à ce moment-là, il y a une diminution de $15, la
différence entre le coût réel de son loyer et les fameux
$85. On diminue de $15 l'allocation mensuelle qu'il touche comme
bénéficiaire de l'aide sociale. C'est dans ce sens-là.
Mais cela ne veut pas dire qu'un bénéficiaire de l'aide sociale
est obligé de se loger dans un logement qui coûte moins de $85 par
mois. Cela ne veut pas dire ça. (16 h 45)
Ceci étant dit, nous allons continuer le combat pour faire
disparaître cette clause. C'est un bel exemple d'ailleurs,
là-dessus, je pense qu'on n'a pas de querelle, le député
de Saint-Laurent et moi d'ingérence fédérale qui
impose un critère vraiment pénalisant, ne serait-ce que parce
qu'il est difficile à comprendre, aux gens qui sont
bénéficiaires de l'aide sociale. C'est justement la marque d'une
méfiance excessive de la part du gouvernement central vis-à-vis
des provinces, qui peuvent fort bien administrer un programme d'aide sociale
sans se voir imposer un tel critère par un gouvernement
fédéral.
J'arrive au plat de résistance, M. le Président. Le
député de Saint-Laurent...
Mme Lavoie-Roux: Est-ce que vous me permettez de poser... Cela va
vous permettre de voir. Tout à l'heure, vous avez parlé des
quatorze organismes ou maisons d'accueil pour les femmes et familles que vous
allez subventionner cette année. Est-ce que vous accepteriez de
déposer la liste et également la date de leur
création?
M. Lazure: Oui, j'accepterais j'ai une toute petite
hésitation parce que cela a été rendu public dans
un communiqué de presse. Il n'y a pas de problème, et les gens
ont été avertis verbalement. Je m'en suis assuré
tantôt. La lettre vis-à-vis de tous les organismes est en route.
Il n'y a pas de problème à déposer la liste. Quant
à la date d'implantation, elle n'apparaît pas sur cette liste,
mais je suis sûr qu'on peut, peut-être à la séance de
la semaine prochaine, mercredi prochain...
Mme Lavoie-Roux: Je pense qu'on pourrait l'avoir avant la semaine
prochaine, parce que vous avez laissé entendre qu'il n'y en avait pas de
subventionnés avant 1976, mais je me demande s'il en existait avant
1976.
M. Lazure: Oui, il en existait. Je peux vous... Mme
Lavoie-Roux: Combien? Un?
M. Lazure: Non, il en existait une demi-douzaine à peu
près avant 1976. Elles n'étaient pas subventionnées par
le...
Mme Lavoie-Roux: En tout cas, vous nous donnerez les dates...
Cela ne prend pas une semaine pour trouver cela, M. le ministre.
M. Lazure: Non.
M. Laplante: Dans le même ordre d'idées, M. le
ministre, en sortant ces documents, pourriez-vous regarder, dans les six qui
existaient auparavant, s'il y a déjà eu des demandes de
subventions pour ces organismes et les causes de refus, s'il y a eu des
demandes et des refus?
M. Forget: C'est une excellente idée. J'aurais dû
penser à cela moi-même.
M. Lazure: Le député de Saint-Laurent est en train
de nous dire maintenant qu'il n'est pas parfait. Je commence à ne plus
rien comprendre. Voltaire disait, M. le Président: Mentez, mentez,
il
en restera toujours quelque chose. On a l'impression parfois, quand on a
des commissions, que le député de Saint-Laurent, lui, son dicton,
c'est: Parlez, parlez, il en restera toujours quelque chose. Il l'a fait, il
parle d'une façon qui a l'air tellement plausible. Je veux dire: II
énonce toute une série d'affirmations qui, souvent, ont un grain
de vérité mais qui, la plupart du temps, sont des
vérités partielles. Le plus bel exemple que je peux donner tout
de suite en commençant... D'ailleurs, il a commencé son
intervention dans cette veine, quand il a dit je n'ai pas pris les
citations, on pourrait les retrouver au journal des Débats
essentiellement: C'est épouvantable, depuis 1971, il y a une
dégringolade du pourcentage des dépenses gouvernementales qui
sont affectées à l'aide sociale. Je pense avoir entendu le
chiffre 15% à 6%...
M. Forget: Non.
M. Lazure: ... ou 9% à 6%.
M. Forget: C'est cela.
M. Lazure: Les chiffres que j'ai, c'est 9% à 6%. On a les
mêmes chiffres.
M. Forget: Oui, cela vient de votre document, M. le ministre.
M. Lazure: Ce sera encore plus facile pour... M. Forget:
Page 18.
M. Lazure: Oui, c'est exactement cela. Si le député
de Saint-Laurent.
M. Forget: 9,15% à 6%.
M. Lazure: Effectivement, le député de
Saint-Laurent a établi, comme il l'a fait souvent, toute une longue
harangue sur cette affirmation un peu courte en disant: On est passé, de
9,15% à 1971 à environ 6% cette année. Il en accuse
évidemment, dans le reste de son discours qui était très
long, le Parti québécois, il en accuse le gouvernement
actuel.
M. le Président, je vais simplement relever...
M. Forget: ... je constate.
M. Lazure: Le député de Saint-Laurent va se tenir
tranquille, M. le Président, si vous voulez le rappeler à
l'ordre. Je vais constater une chose, c'est que le député de
Saint-Laurent a été ministre des Affaires sociales
plusieurs s'en souviennent de 1973 à 1976. Dans cette variation
du taux des dépenses gouvernementales affectées à l'aide
sociale qui varie de 9%, grosso modo, à environ 6% cette année,
il a oublié de dire que le taux le plus bas dans l'histoire, jusqu'ici,
c'est justement alors qu'il était ministre des Affaires sociales, en
1974/75, un taux de 5,59%.
M. Forget: En parlant de demi-vérité...
M. Lazure: M. le Président...
M. Laplante: Vous vous trompez...
Le Président (M. Marcoux): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Forget: Je pense que le ministre est expert en
demi-vérités. C'est également l'année...
M. Laplante: ... grossière erreur.
M. Lazure: M. le Président, j'ai été
très patient. Je n'ai aucunement interrompu le député de
Saint-Laurent ce matin.
Le Président (M. Marcoux): A l'ordre!
M. Forget: M. le Président, je pense que vous intervenez
de façon intempestive. Avant même que je n'aie parlé, vous
me rappeliez à l'ordre. Je comprends que vous vouliez protéger le
ministre, mais je pense qu'il peut se défendre lui-même.
M. Lazure: Non, je n'ai pas besoin de la protection du
président, mais j'aurais besoin d'un peu d'étiquette, de
savoir-vivre de la part du député de Saint-Laurent. Ce matin, il
a parlé une heure et demie et je n'ai pas dit un seul mot, même si
la tentation était forte souvent. J'aimerais qu'il me laisse parler sans
dire un mot.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Saint-Laurent, libre à vous de prêter l'intention que vous voulez
au président de la commission. Simplement, je souhaite que la
règle du respect de la parole de chacun soit la même pour tous
chez les membres de la commission parlementaire et que, lorsqu'un membre de la
commission désire intervenir, il demande le droit de parole.
Actuellement, c'est le ministre qui a le droit de parole. Peut-être que
le ministre accepterait d'être interrompu; sinon, il faut attendre que
vous ayez ie droit de parole vous aussi.
M. Lazure: Je donne avis que je n'accepterai pas d'être
interrompu par le député de Saint-Laurent. C'était un peu
perdu dans le brouhaha. Je répète que le député de
Saint-Laurent ce matin a passé plusieurs longues minutes on
pourra le vérifier en regardant le journal des Débats
à faire une sortie contre le gouvernement actuel, parce qu'il
était trop mesquin vis-à-vis des bénéficiaires de
l'aide sociale, parce qu'il avait baissé ce pourcentage des
dépenses gouvernementales affectées à l'aide sociale. Je
constate, en regardant le tableau de 1971 à 1978/79, que l'année
où le taux a été le plus bas, c'était en 1974/75,
à une époque où le député de Saint-Laurent
était ministre des Affaires sociales, 5,55%.
Ceci étant dit, si on aborde ce fameux taux de 6,5%, qui est le
pourcentage actuel cette année
pour les crédits dont on discute, le pourcentage des
crédits alloués à l'aide sociale par rapport à
l'ensemble des dépenses gouvernementales, bien sûr que c'est plus
bas que 9%, mais c'est plus haut que 5%. Il y a quelque chose d'un peu à
courte vue dans cela quand on ne fait que critiquer les 6,5%. Le
député de Saint-Laurent ne parle pas de tous les montants que ce
gouvernement dépense depuis deux ans, en particulier pour le programme
"Opération solidarité économique", le programme OSE...
M. Forget: ... cela aide...
M. Lazure: ... qui crée des emplois et qui fait de la
prévention. Cela fait partie d'une philosophie sociale. Je ne pense pas
que le Parti libéral, même s'il se fourvoie souvent,
préconise qu'une politique sociale soit fondée simplement sur
l'addition d'année en année de montants aux
bénéficiaires de l'aide sociale. Je pense que, heureusement,
l'ensemble du Parti libéral, comme la plupart des partis, fait entrer en
ligne de cause les aspects économiques d'une politique sociale. Je pense
qu'on ne peut plus dissocier, dans la gestion d'un gouvernement, le social de
l'économique. C'est un des objectifs particuliers de notre gouvernement
de faire cette jonction nécessaire entre le social et
l'économique. J'en donne comme un autre exemple le montant de $20
millions que les crédits de 1979/80 allouent pour la création
d'emplois chez les jeunes. Ce montant de $20 millions est une entreprise
socio-économique, en ce sens que nous voulons enlever un certain nombre
de jeunes, surtout de moins de trente ans, ceux qui sont sur les listes des
bénéficiaires de l'aide sociale, en leur créant des
emplois. Je suis un peu déçu de ce genre de raisonnement un peu
démagogique de la part du député de Saint-Laurent qui se
fie à un seul pourcentage pris isolément comme cela et qui n'a
pas, si vous voulez, l'honnêteté de donner toute la
séquence de l'évolution depuis 1971 et qui aussi ne fait pas
mention d'un tas d'autres mesures que ce gouvernement prend et qui
indirectement aident aux bénéficiaires de l'aide sociale.
J'ajouterais une dernière remarque à ce chapitre. Si le
pourcentage était plus élevé en 1971 le pourcentage
des montants gouvernementaux qui allaient à l'aide sociale une
des principales raisons, c'est qu'il y a un bon nombre des besoins
spéciaux, qui totalisaient environ $50 millions par année
à cette époque. Un bon nombre de ces besoins spéciaux sont
maintenant satisfaits par des programmes réguliers, qu'il s'agisse de
médicaments, qu'il s'agisse de prothèses et d'orthèses,
peu importe. On pourra, quand on arrivera aux divers programmes, en donner
d'autres exemples.
Il y a eu un réajustement de cet argent. Ces montants
n'apparaissent plus pour constituer un pourcentage de 9%, mais ils apparaissent
pour augmenter les crédits d'un certain nombre d'autres programmes. Je
ferai remarquer aussi que si on regarde l'ensemble du budget du
ministère des Affaires sociales, les crédits de 1979/80, il reste
que ce montant de tout près de $1 milliard, qui est consacré
à l'aide sociale, représente quand même 20% du budget, et
qu'il y a, par rapport à l'an passé, une augmentation de 11%,
simplement au chapitre de l'aide sociale.
Mme Lavoie-Roux: Par rapport à l'augmentation du nombre,
qu'est-ce que ça représente?
M. Lazure: Du nombre de ménages? Il y a une
légère augmentation. On a des chiffres là-dessus...
Mme Lavoie-Roux: Non, mais je veux dire, si vous tenez compte de
l'augmentation du nombre de personnes seules et de ménages...
M. Lazure: Mais je parle du montant total... Quand le
député de Saint-Laurent...
Mme Lavoie-Roux: Ah, d'accord.
M. Lazure: ... c'était toujours sur le montant global des
dépenses...
M. Forget: Non...
M. Lazure: ... consacrées...
Mme Lavoie-Roux: II faut tenir compte du nombre de
bénéficiaires aussi.
M. Lazure: ... à l'aide sociale en millions de dollars,
par rapport à l'aide sociale en proportion du budget du
gouvernement.
M. Forget: J'ai parlé du nombre...
M. Lazure: C'est le titre.
S'il faut reparler encore une fois de cette fameuse politique
improvisée par le gouvernement fédéral qui, à
l'automne de 1978, a subitement informé les provinces, par le truchement
des media, que les allocations familiales fédérales
étaient coupées de 22% et aussi que le gouvernement
fédéral imposait d'autres restrictions sur les prestations
d'assurance-chômage, s'il faut revenir là-dessus, on va le faire,
et on va le faire en rappelant un certain nombre de choses.
D'abord, que le gouvernement fédéral, en posant ces gestes
improvisés l'automne dernier, alors qu'il devait y avoir une campagne
électorale, a trahi au moins deux engagements qu'il avait
contractés envers les provinces. Le premier, c'était de toujours
indexer les allocation familiales fédérales et le
deuxième, c'était de garder un caractère universel aux
allocations familiales fédérales. Alors, par le geste qu'il a
posé l'automne dernier, le gouvernement fédéral a
violé ces deux engagements. Quand le gouvernement fédéral
nous dit qu'il a fait preuve d'une grande générosité en
distribuant les $200 par année de crédit d'impôt aux
familles avec enfants $200 par enfant laquelle distribution
représente $34 millions pour 174 000 enfants, il faut lui rappeler, pour
ce qui est du Québec, que la non-indexation, en 1976, des allocations
fédérales, additionnée à la coupure de
22% en janvier 1979, nous donne une épargne de $23 200 000 de la
part du gouvernement fédéral, et si on y ajoute une somme de $14
800 000, dont les bénéficiaires de l'aide sociale au
Québec ont été privés lorsqu'il y a eu distribution
du cadeau de $85 de M. Chrétien, on se rappellera que les fameux $85 de
M. Chrétien étaient distribués seulement aux gens qui
avaient fait des rapports d'impôt. Comment se fait-il qu'on ait
oublié à ce moment-là je n'ai pas entendu le
député de L'Acadie ou le député de Saint-Laurent
dénoncer leurs amis d'Ottawa les vrais pauvres, les
bénéficiaires de l'aide sociale, qui n'ont pas touché
à ces $85, parce qu'ils n'avaient pas rempli de rapport
d'impôt?
Si vous mettez ça ensemble, ça vous donne des coupures de
$38 millions, que le gouvernement fédéral a effectuées et,
en échange, il a remis $34 800 000 millions. Ce n'est pas loin des
quatre $0.25 pour $1, et je pense que la population du Québec ne peut
pas être bernée indéfiniment, ne peut pas être
induite en erreur indéfiniment par les politiciens du gouvernement
fédéral. Je pense que c'est dommage que les porte-parole du Parti
libéral du Québec, du parti de l'Opposition, soient un peu
victimes de cette espèce de propagande venant du gouvernement central et
contribuent, de cette façon, peut-être involontairement, à
induire la population en erreur. (17 heures)
Les coûts de santé. Le député de
Saint-Laurent a dit, à toutes fins utiles: Le ministre des Affaires
sociales inquiète indûment la population quand il parle des
coûts excessifs en santé. Je lui ferai remarquer, d'abord, que
l'essentiel du message, autant du message parlé que du message
écrit depuis quelques années aux administrateurs hospitaliers en
particulier, ne porte pas sur cette soi-disant augmentation alarmante des
coûts des programmes de santé pris de façon globale, pas du
tout. Là aussi, le député de Saint-Laurent établit
cela comme base et, ensuite, il échafaude toute une critique, mais la
base n'est pas bonne, elle est fausse parce que notre approche vis-à-vis
des hôpitaux qui ont accumulé des déficits a
été, au contraire, de dire: II faut qu'il y ait de
l'équité, d'une part, et il faut qu'il y ait de
l'efficacité. Il faut qu'il y ait de l'équité dans la
distribution des fonds que le gouvernement affecte au réseau
hospitalier. Ce sont des fonds considérables, on en convient, mais je
n'ai jamais prétendu que la proportion qui va aux programmes de
santé par rapport à l'ensemble des dépenses
gouvernementales était excessive; au contraire, je me suis fait l'avocat
de la thèse inverse et j'ai démontré maintes et maintes
fois à des collègues et à des personnes dans le
réseau que, effectivement, l'augmentation des coûts en
santé depuis une dizaine d'années, est légèrement
inférieure à l'augmentation de l'ensemble des dépenses
gouvernementales.
Ce à quoi nous nous attachons depuis deux ans, c'est justement de
rendre la gestion des hôpitaux plus efficace et, deuxièmement, de
rendre plus équitable la distribution de ces sommes d'argent; plus
équitable, on l'a fait en révisant la base budgétaire des
hôpitaux. Les hôpitaux bénéficiaient d'augmentations
qui variaient d'année en année, mais sans révision de leur
base budgétaire, si bien qu'on a pu traîner pendant sept ou huit
ans des injustices qui avaient été commises à l'origine,
volontairement ou pas, à l'époque de l'assurance-hospitalisation.
Là, on remonte loin et ces injustices se sont perpétuées.
Nous avons procédé à une opération d'envergure, on
a examiné à la loupe la base budgétaire et pour cela il
fallait étudier les performances, le rendement d'hôpitaux, selon
des centres d'activités, en les groupant selon des critères
où les fonctions d'un certain nombre d'hôpitaux, quinze ou vingt
hôpitaux regroupés ensemble, étaient similaires. On en
arrivait à déterminer que certains hôpitaux pouvaient
dispenser un service équivalent et surtout dans le cas des
services physiques, des services matériels, c'est plus facile à
mesurer à des coûts parfois de 25% ou 30% moins
élevés, ou l'inverse.
Dans le cas des hôpitaux qui avaient eu un rendement efficace,
nous avons augmenté la base budgétaire, tout en reconnaissant
qu'ils avaient eu une insuffisance de ressources. D'autres hôpitaux,
inversement, pouvaient avoir eu des ressources abondantes, toute proportion
gardée, et avoir eu un mauvais rendement. Avec ces hôpitaux, nous
avons révisé la base à la baisse. Cependant, nous avons
dit aux hôpitaux en question c'est là qu'intervient ce
qu'on appelle le plan de redressement: Nous allons, ensemble, baisser votre
base budgétaire, mais on va y mettre le temps, un an, deux ans, trois
ans. Pour la grande majorité des hôpitaux, c'est une
opération qui se fait en moins de deux ans.
Je rappelle encore une fois que dans toute cette opération, notre
guide aux hôpitaux a été de diminuer, là où
c'était nécessaire, le personnel sans faire de mise à
pied. Malgré, encore une fois, les demi-vérités du
député de Saint-Laurent, on peut vous certifier qu'il y a eu
très peu de mises à pied, très peu, très peu.
D'une part, le député de Saint-Laurent nous reproche
parfois d'être autoritaires et centralisateurs, de ne pas respecter
l'autonomie des conseils d'administration des hôpitaux, d'autre part, il
semble nous reprocher d'interdire une mise à pied. On ne peut pas
interdire à un hôpital de faire une mise à pied. Mais nous
incitons les hôpitaux qui ont besoin de le faire, qui ont besoin de
diminuer leurs dépenses, à réduire leur budget, par
l'attrition, par le roulement naturel, à l'occasion des départs
naturels.
Je dois vous dire que, déjà, depuis huit mois, on a
assisté à des changements d'orientation spectaculaires et
c'était commencé d'ailleurs depuis deux ans. En gros, j'ai
déjà publiquement donné comme exemple l'hôpital
Sainte-Justine à Montréal ou le Centre hospitalier universitaire,
ici à Laval, qui, tous deux, dans l'espace d'un an, un an et demi, ont
réduit leurs dépenses d'une somme entre $1 million et $1 500 000,
sans faire aucune mise à pied. Ce peut être de bonne guerre de
jeter de l'huile sur le feu, encore une fois
d'inquiéter les employés d'hôpitaux, mais, M. le
Président, je vous répète que notre politique concernant
le redressement financier dans la gestion des hôpitaux est
acceptée dans l'ensemble de la population, elle est acceptée
même dans l'ensemble des hôpitaux, par l'Association des
hôpitaux, et je pense que l'opération se déroule avec un
minimum de friction. Au moment où l'on se parle, il y a à peine
30% des hôpitaux qui devront prolonger leur plan de redressement durant
une autre année fiscale, c'est-à-dire 1980/81.
En ce qui concerne l'agrément, le député de
Saint-Laurent a essayé de démontrer qu'on abandonnait nos
responsabilités vis-à-vis de l'agrément,
l'accréditation ou l'inspection des établissements du
réseau des affaires sociales, parce que ça n'apparaissait plus
comme une des huit directions générales dans l'organigramme du
ministère. Cela aussi est un peu court comme raisonnement et je peux
vous assurer que non seulement nous avons maintenu tout le personnel à
l'agrément, mais nous pensons que son travail va être encore plus
efficace puisqu'il va être articulé au travail d'une équipe
à l'intérieur des deux grandes directions
générales, celle qui s'appelle Direction générale
des programmes de santé et celle qui s'appelle Direction
générale des programmes de services sociaux. A l'intérieur
de ces deux directions, les responsables de l'agrément, qu'ils soient
infirmières, médecins ou diététistes, peu importe,
ou ingénieurs, ces responsables vont travailler au jour le jour en
équipe, avec les responsables du financement des hôpitaux ou des
établissements du réseau des affaires sociales, les responsables
des programme. Je pense qu'il faut essayer d'être d'une pureté qui
est un peu ridicule que de dire qu'un service de l'agrément ne tiendra
pas compte du tout des possibilités financières d'un Etat, d'un
gouvernement, et il doit faire son travail seul en isolement.
Je pense que ça c'est de la vertu poussée au ridicule. Il
y a, bien sûr, des choses à améliorer dans les
établissements et nous pensons que cette jonction qui s'opère
entre les responsables de l'agrément et ceux des programmes et du
financement, quand ils vont ensemble dans un établissement, ils y vont
aussi séparément évidemment, mais je pense que ce travail
d'équipe est bénéfique aux établissements et permet
des recommandations qui sont plus réalistes, qui sont plus rapidement
implantées, mises en application ensuite par les collègues de la
même direction générale.
Quant à la psychiatrie, le député de Saint-Laurent
n'a rien à son épreuve. Malgré les 600 psychiatres qui
sont à peu près unanimes à dire que ce qu'on appelle la
psychiatrie communautaire, la psychiatrie de secteur, c'est à peu
près la forme non seulement la plus efficace, mais la plus humaine et la
plus intéressante d'une pratique de psychiatrie, malgré tout
ça, un peu comme le soldat qui est seul à avoir le pas dans
l'armée, le député de Saint-Laurent continue la critique
qu'il avait commencée en 1976 lors des derniers moments de son
règne, à dénoncer la psychiatrie de secteur, comme il
l'avait fait dans un discours à l'emporte-pièce à
l'Association des psychiatres du Québec, ou M. le ministre des Affaires
sociales, à ce moment-là, s'était érigé en
un expert dans le domaine.
Je pense que, là aussi, ça souligne très bien cette
tendance qu'a le député de Saint-Laurent, non seulement de penser
tout connaître, mais de penser tout connaître mieux que quiconque.
Cette psychiatrie de secteur, ce qu'elle a d'intéressant, c'est
d'assurer la population qu'il y a, dans un secteur donné, rural ou
urbain, une équipe de professionnels, de travailleurs sociaux, de
psychologues, d'infirmières, d ergothérapeutes, de
médecins, qui sont à la disposition. Le député de
Saint-Laurent n'a jamais compris ce qu'était la psychiatrie de secteur,
il s'est basé sur quelques critiques, d'un ou deux refus par ci par
là, pour dire que la psychiatrie de secteur exclut des gens du
système, alors que la psychiatrie de secteur a précisément
l'inverse comme objectif et a réalisé, non seulement au
Québec, en dépit du ministre des Affaires sociales de 1973
à 1976, je devrais le dire, a réalisé une
amélioration, dans plusieurs pays, a contribué à une
amélioration très notable des soins de psychiatrie.
J'en profite pour l'informer qu'il va y avoir, qu'on va remettre sur
pied un service de psychiatrie au ministère des Affaires sociales. Cela
a été un des hauts faits du règne libéral, de 1970
à 1976, d'abolir une division qui marchait très bien et qui
s'appelait la division des services psychiatriques. On a aboli beaucoup de
choses, de 1970 à 1976, durant la période technocratique par
exemple. On voulait tout normaliser et on voulait, du jour au lendemain, faire
disparaître toute expertise un peu spécifique, que ce soit pour
les personnes âgées ou pour les malades psychiatriques.
Le résultat, c'est qu'au point de vue de l'organisation des
services psychiatriques, cela a été la période sombre de
la psychiatrie, de 1970 à 1976, période pendant laquelle le
député de Saint-Laurent a été sous-ministre
adjoint, d'une part, et ensuite ministre des Affaires sociales.
Mme Lavoie-Roux: ...
M. Lazure: Tout ne va pas bien en psychiatrie et, justement, on
veut réparer les dégâts qui ont été commis
par six ans d'ineptie, 1970 à 1976.
M. Forget: Vous voulez recommencer les mêmes erreurs, vous
voulez dire.
M. Lazure: Nous voulons mettre sur pied cette division des
services psychiatriques. J'ai pensé que le député de
Saint-Laurent serait très heureux d'entendre cette nouvelle.
M. Forget: Pas surpris surtout.
M. Lazure: On veut aussi mettre à jour la Loi de la
protection du malade mental. Là-dessus, on se rejoint. Le
député de Saint-Laurent a parlé du mémoire de la
Commission des droits de la
personne qui est un bon mémoire; il y a aussi d'autres rapports
qui nous sont parvenus de l'Association des psychiatres du Québec, parce
qu'il peut sortir de bonnes choses de cette association, et aussi du groupe sur
la santé mentale. On a actuellement un coordonnateur au ministère
qui fait rencontrer ces groupements et on espère pouvoir
présenter cet automne des amendements à la Loi de la protection
du malade mental.
L'aide à domicile. Je vais être obligé de couper
court parce qu'il y en aurait encore beaucoup à dire sur l'intervention
du député de Saint-Laurent, M. le Président, mais l'aide
à domicile est une des perles. Le député de Saint-Laurent,
dans une envolée, nous dit: C'est épouvantable, il y a tellement
d'aide à domicile à gauche et à droite, tout le monde en
fait, qu'il n'y a plus de coordination, il n'y a plus personne qui est
responsable. C'est un bel exemple de demi-vérité ou de
fausseté, carrément, parce qu'il sait très bien que,
depuis deux ans, tous nos crédits de développement en soins
à domicile et services à domicile ont été
distribués par les conseils régionaux de services de santé
et de services sociaux, par les CRSSS. Il connaît très bien la
politique du ministère. Il sait très bien qu'on a renforcé
le rôle de coordonnateur régional du CRSSS dans ce domaine comme
dans bien d'autres depuis deux ans.
Je ne comprends pas, sauf simplement pour épater la galerie ou
pour jouer à la personne qui connaît tout, pourquoi le
député de Saint-Laurent ne se donne pas la peine de lire des
circulaires qui sont accessibles à tout le monde, les circulaires qu'on
envoie depuis deux ans aux conseils régionaux, lorsqu'il s'agit de
distribuer des crédits pour l'aide à domicile.
Pour nous, pour le public, pour le réseau, c'est très
clair, le conseil régional est l'organisme responsable, région
par région, non seulement de la coordination, de l'aide à
domicile, mais aussi de faire en sorte que les nouvelles sommes d'argent soient
distribuées de façon équitable.
M. Laplante: ...
M. Lazure: Probablement. Mais j'en profite aussi pour vous dire
qu'il y a quelque chose de nouveau dans notre façon d'allouer des fonds
cette année, pour l'aide à domicile. Nous avons
décidé d'allouer 50% des fonds à des organismes qui sont
hors du réseau, ce qu'on appelle habituellement des organismes
bénévoles. Cette distribution de fonds va quand même
être faite par les conseils régionaux. Nous pensons qu'il est
important que des organismes bénévoles soient aidés
financièrement, ne serait-ce que pour engager une personne qui va
coordonner le travail d'aide à domicile, qui se fait dans beaucoup de
régions, sur une base bénévole.
Je pense que c'est une innovation importante dans ce programme. Quand on
dit qu'on confie le mandat au conseil régional, c'est aussi pour que le
conseil régional s'assure qu'il n'y ait pas une compétition aux
dépens de la population, compé- tition entre
établissements, entre types d'établissements, mais qu'au
contraire, il y ait une complémentarité, que les rôles des
uns soient complémentaires aux rôles des autres, qu'il s'agisse du
CLSC, du centre de services sociaux, du centre hospitalier, ou de l'organisme
bénévole.
Je vais répéter encore une fois que dans notre esprit,
dans celui du CRSSS, l'organe principal qui dispense l'aide à domicile
doit demeurer le CLSC, ce qui n'exclut pas que dans certaines régions,
dans certains cas, l'aide à domicile peut être dispensée
par un autre type d'établissement du réseau des affaires
sociales.
M. le Président, je m'excuse d'avoir été un peu
long, mais je pense qu'on n'a pas le choix, quand le député de
Saint-Laurent, lui, se croit obligé, dans chaque intervention ou
à peu près et ceux qui suivent les activités
parlementaires, comme le député de Mégantic-Compton, le
savent très bien à chaque occasion, de prendre beaucoup de
temps, je pense que cela devient absolument nécessaire que le ministre
réplique, de façon un peu plus détaillée. C'est ce
que j'ai fait aujourd'hui, contrairement à mon habitude.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Saint-Laurent.
Discussion générale
M. Forget: M. le Président, comme le ministre a fait
allusion à des demi-vérités, je crois qu'il est important
de préciser le débat alentour de certaines questions que j'ai
soulevées ce matin. Je vais revenir parce que le ministre feint
d'avoir ignoré ou de n'avoir pas entendu les propos que j'ai tenus
sur cette question de pourcentage que représentent les budgets de
l'aide sociale dans les budgets gouvernementaux. J'ai mentionné, bien
sûr, ce pourcentage de la page 18. Il écoutait d'ailleurs d'une
oreille assez distraite parce que lorsque j'ai dit 9,15%, il a cru entendre
15%. Mais je ne m'arrêterai pas là-dessus.
Il reste que j'ai aussi mentionné l'évolution dans le
nombre des bénéficiaires. C'est une évolution qui rend
encore plus frappante le déclin progressif dans le pourcentage que
représente l'aide sociale dans les budgets gouvernementaux. Il a tout
à fait raison de souligner qu'il y a eu une année, en 1974/75,
où l'aide sociale représentait une proportion encore plus faible
qu'aujourd'hui dans les budgets gouvernementaux. Il a tout à fait raison
de le souligner. Ce qu'il n'a pas remarqué, cependant, c'est que c'est
précisément à ce moment-là qu'on a eu le point le
plus bas, dans le nombre des bénéficiaires. Les
bénéficiaires, au début des années soixante-dix,
dans le cas des familles, par exemple, se tenaient aux environs de 90 000
familles En 1974 et début 1975, le nombre des familles était
à quelque 85 000, 87 000. Il est même descendu, tout à fait
à la fin de 1973, à 82 000. Donc, il y a eu une baisse
très marquée dans les nombres. Ces baisses très
marquées dans les nombres ont pu faire que le budget a diminué,
en proportion du total, même si les prestations
augmentaient. Ce qui est remarquable depuis 1976, c'est que loin de
diminuer en nombre, les bénéficiaires de l'aide sociale se sont
accrus de façon très visible, très sensible. J'ai
d'ailleurs indiqué qu'il y avait environ quelque 50 000 ou 60 000
bénéficiaires de plus depuis décembre 1976.
Or, quand les nombres augmentent, c'est bien différent de la
situation où le nombre de bénéficiaires diminue. Quand le
nombre de bénéficiaires diminue, on peut s'attendre que le
pourcentage du budget consacré à l'aide sociale diminue, mais que
ce pourcentage continue à diminuer quand le nombre augmente, c'est
véritablement un exploit. C'est l'exploit du gouvernement actuel qui
maintient la ligne la plus rigide possible quant aux niveaux des barèmes
de l'aide sociale, des niveaux qui n'ont pas progressé en termes
réels pendant les deux dernières années, contrairement
à ce qu'ils ont fait durant les années antérieures. Qu'il
prenne n'importe quelle période de 1971 à 1976, qu'il prenne la
période qui me concerne plus particulièrement, il verra que de
décembre 1973, au moment où je suis arrivé, jusqu'en
décembre 1976, il y a eu une augmentation très sensible,
très très sensible de la prestation moyenne. C'est cela qui a
permis d'augmenter le pourcentage, même quand le nombre des
bénéficiaires continuait à décliner. Il y a eu, par
exemple, de décembre 1973 à décembre 1976, une majoration
de quelque 60% dans le niveau des prestations. Dans le cas des personnes
seules, c'est passé de $109.94, disons $110 en moyenne, à
$164.50, dans la période où j'ai occupé les fonctions,
donc à peu près la même période de temps dont on
parle aujourd'hui. Il y a donc en une majoration très substantielle des
barèmes qui dépassait de loin l'indexation, parce que
l'indexation n'aurait pas produit 60% d'augmentation en l'espace de trois ans.
Il y a eu une augmentation en termes réels des barèmes.
Depuis 1976, on assiste tout au plus, en 1977 et en 1978, au maintien de
la valeur réelle par l'indexation et, en 1979, même pas à
cela. On a une diminution de la valeur réelle des prestations. C'est
donc là un changement de politique. On jouera comme on voudra avec les
chiffres, il reste que, quand on joint deux éléments,
l'augmentation de la clientèle et la diminution de la part de l'aide
sociale dans les budgets de l'Etat, cela peut se produire seulement que par une
autre dimension, cela peut se produire seulement en tenant la ligne et en
diminuant même la valeur réelle des prestations d'aide sociale et
c'est ce qui s'est passé.
Quand il veut justifier sa décision, le ministre s'engage, selon
son habitude, dans un débat au sujet des modifications qui se sont
produites du côté du gouvernement fédéral. Je veux
bien qu'il ne s'agisse pas là de la découverte du siècle.
La non-indexation des allocations familiales en 1976, c'est une chose qui
était inacceptable dans le contexte d'un engagement ferme de les
indexer. Très bien! La substitution de crédits d'impôt de
$200 pour une certaine partie des allocations familiales, ce n'était pas
non plus la trouvaille du siècle, c'était un déni des
engagements pris par le gouvernement fédéral dans le
passé. Tout ceci étant dit et après même avoir
affirmé qu'en faisant tout cela, le gouvernement fédéral
n'a fait que donner quatre $0.25 pour $1 ou vice versa, donc de ne rien donner
de plus, c'est malgré tout à l'aide de ce raisonnement-là
que le ministre a pris l'occasion d'économiser $20 millions sur l'aide
sociale. Si, véritablement, le gouvernement fédéral n'a
rien donné de plus aux assistés sociaux en substituant $200 aux
allocations familiales fédérales, pourquoi alors avoir
déduit ce montant-là dans le calcul de l'indexation de l'aide
sociale?
C'est là que le raisonnement ne tient pas. Même si on est
d'accord pour dire que le gouvernement fédéral avait tort d'agir
comme il l'a fait, pourquoi en avez-vous profité financièrement
à un rythme de $20 millions par année? S'il avait tort, corrigez
son erreur dans la mesure du possible, ne l'aggravez pas. C'est en l'aggravant
que vous avez réagi. C'est là l'illogisme d'un raisonnement comme
celui-là. Même si vous avez raison sur toute la ligne, même
si le gouvernement fédéral a tort sur toute la ligne dans tout
cela, vous avez pris avantage d'une situation où vous avouez
vous-mêmes qu'il n'a rien donné de plus en termes d'argent aux
assistés sociaux pour dire: Maintenant, puisqu'il a fait cela, on va
payer moins cher quant à nous. Cela ne tient pas debout. Il n'y a
personne pouvant lire un texte le moindrement simple qui va pouvoir
adhérer à une version des événements comme celle
que vous nous présentez et qui va pouvoir juger que vous avez raison de
pénaliser les plus pauvres dans la société à cause
de votre désaccord avec une décision fédérale, si
erronée soit-elle, parce que le travailleur à faible revenu,
celui qui gagne $6000 ou $7000 va avoir droit aux $200 de crédit
d'impôt en totalité, mais dans le cas des assistés sociaux,
vous allez leur prendre une partie de cela pour payer leur indexation à
leur barème d'aide sociale.
C'est comme si vous disiez aux salariés: Comme vous avez
reçu $200, ce qui est un peu plus que les allocations familiales vous
auraient donné sous l'ancien régime, si vous avez un revenu
inférieur à $18 000, comme vous avez reçu cela, vous
n'aurez pas droit à votre indexation de salaire prévue dans votre
convention collective. Il n'y a pas un syndicat au monde qui tolérerait
un raisonnement pareil. Malheureusement, les assistés sociaux ne sont
pas syndiqués dans ce cas, et ils sont bien obligés de se laisser
faire, d'autant plus que lorsqu'ils ont demandé des rendez-vous avec le
ministre, aussi tôt qu'au début d'octobre de l'an dernier, ils
n'ont pas réussi à avoir de rendez-vous. On nous a dit, un des
députés s'est vanté en disant: Au début de mai, le
ministre s'est rendu disponible. Cela faisait six mois que les gens se posaient
des problèmes dans ce secteur. Du côté des associations
pour la défense des droits sociaux, les ADDS, que le gouvernement
fédéral a affamés depuis 1976, ils n'existent
virtuellement plus. Tous les organismes...
M. Lazure: Le gouvernement fédéral?
M. Forget: Oui, que le gouvernement fédéral a
affamés. Avez-vous pris la relève de ces gens? Non. Vous vous
êtes bien gardés de leur aider, de peur qu'ils contestent un peu
trop vos politiques.
M. Lazure: On vous montrera qu'on les subventionne, au programme
6.
M. Forget: Cela vient de commencer, mais ils n'avaient pas de
fonds depuis trois ans.
Mme Lavoie-Roux: ... cela aussi.
M. Forget: Cette carence de trois ans les a
désorganisés complètement, comme ils en témoignent
eux-mêmes, si vous les rencontrez. Ils vont vous dire: On avait un
certain rythme de croisière. On avait engagé des gens. On a en
quelque sorte habitué la clientèle que l'on dessert à
avoir des services rémunérés et payés. Maintenant,
il a fallu refonctionner avec des bénévoles. Il a fallu
refonctionner sur une base complètement différente, ce qui nous a
coupés de tous nos moyens d'action. Depuis deux ans, évidemment,
il n'y a pas eu le degré de participation et de questions posées
au ministre en provenance de ces milieux parce que, tout bonnement, les deux
gouvernements semblent s'être donné la main pour faire taire les
assistés sociaux. Ils ont réussi de façon admirable.
Convoquez-les en commission parlementaire, comme nous l'avons fait en juin
1976, ils vont vous dire de quel bois ils se chauffent dans le moment. Osez les
convoquer, si vous en avez l'audace, et ils vont venir vous dire ce qu'ils
pensent de votre politique relativement à l'aide sociale.
Pour ce qui est des coûts à la santé, je ne
reviendrai pas sur l'argument. Le ministre s'est fait fort d'être
d'accord avec moi et d'avoir dit que jamais il n'a jeté de hauts cris,
tant mieux! J'espère qu'il convaincra le ministre des Finances et ses
autres collègues qu'effectivement, il n'y a pas là un
problème majeur et qu'on lui donnera finalement les budgets suffisants,
non seulement pour tenir le fort temporairement, mais pour voir à ce que
les besoins qui existent dans le réseau des institutions de
santé, des établissements de santé, soient satisfaits plus
qu'à la graine.
Il y a actuellement dans le réseau des établissements de
santé des équipements qui souffrent de désuétude et
qui ne sont pas près d'être remplacés ou
rénovés convenablement. C'est une hypothèque qui
grève l'avenir du Québec, parce qu'éventuellement, ces
dépenses devront être faites. Je suis persuadé que les
fonds que le ministère des Affaires sociales depuis plusieurs
années a consacrés au renouvellement et au remplacement des
équipements désuets sont insuffisants. Les sommes actuellement
disponibles sont de loin inférieures à ce qu'elles devraient
être quand on tient compte de l'augmentation rapide des coûts dans
le secteur de la construction.
Pour ce qui est des mises à pied, le ministre a dit qu'il y en a
eu très peu. La CSN, la Fédération des affaires sociales,
prétend qu'avant même la mise en application du plan de
redressement budgétaire que le ministre a annoncé au début
de mars dernier, il y avait déjà eu quelque 2000 mises à
pied dans le réseau. Il y a certainement autre chose que de pures
affirmations de principe qui doivent être faites. Je pense qu'il ne
s'agit ni d'un côté ni de l'autre, soit d'endormir la population,
soit de l'ameuter. Il s'agirait, cependant, de lui donner les chiffres tels
qu'ils sont. Il y en a eu des mises à pied, contrairement à
l'impression qu'a voulu créer le ministre qu'il avait des lignes
directrices qui interdisaient en quelque sorte ces mises à pied. J'ai
cité son fameux communiqué de presse où il annonce des
mises à pied sous le titre de création d'emplois.
Indépendamment de cela, je pense qu'il devrait contribuer à cette
discussion par un relevé des mises à pied dont il a eu
connaissance. Après tout, en décembre 1977, dès son
arrivée au ministère des Affaires sociales, il a exigé de
l'ensemble des établissements du réseau que, lorsqu'ils feraient
des mises à pied, il devait être informé personnellement et
qu'il devait autoriser les mises à pied. J'imagine que la directive a
été suivie. Je n'ai pas entendu dire qu'elle ait
été retirée. Donc, j'imagine que le ministre pourra
documenter son affirmation selon laquelle il y a eu très peu de mises
à pied. (17 h 30)
M. Lazure: C'est ça, de la même façon que
vous pourrez documenter l'affirmation inverse.
M. Forget: II sera intéressant de vérifier, M. le
Président, si les chiffres que produira le ministre
éventuellement concordent avec les informations qu'on a par ailleurs et
je suis sûr qu'un tas de groupes seront intéressés de le
savoir, parce qu'il est question de bonne foi dans tout ceci.
Au moment où des négociations s'engagent, il est important
de savoir de quoi on parle exactement. Il y a des allégations
contradictoires. Les syndicats prétendent qu'il y a des centaines et des
milliers de mises à pied. Le ministère dit: II n'y en a pas. Je
pense bien que la vérité doit se situer quelque part entre les
deux. Mais il serait important de faire la lumière là-dessus,
parce que ça peut-être un sujet qui complique sérieusement
les négociations l'automne prochain.
Entre parenthèses, lorsque le ministre nous dit que son
redressement budgétaire est accepté, il est un peu optimiste.
M. Lazure: Par les hôpitaux.
M. Forget: Par les hôpitaux, mais cette...
M. Lazure: Oui, c'est ce que j'ai dit.
M. Forget: ... qualification était... Vous avez
donné comme exemple les hôpitaux, mais je pourrais vous donner
l'exemple d'autres groupes, évidemment, qui l'acceptent moins.
M. Lazure: Ecoutez, je n'ai... M. Forget: Dans ce
contexte...
M. Lazure: ... pas la naïveté de prétendre que
les syndicats...
M. Forget: Ah bon! C'est ça.
M. Lazure: ... acceptent mon plan... Quand même...
M. Forget: Dans ce contexte, je pense que la transparence la plus
complète sur la localisation des mises à pied est importante.
Pour ce qui est de la question de l'agrément, le ministre a dit:
C'est vouloir prétendre qu'il faut nécessairement une
organisation administrative distincte pour s'occuper de l'agrément;
c'est de la vertu poussée au ridicule.
Je prétends que c'est autant de la vertu raisonnable et non pas
poussée au ridicule que de prétendre qu'il faut un
Vérificateur général pour les comptes publics et qu'il
n'est jamais venu à l'idée de qui que ce soit de dire que,
puisque, de toute façon, les fonds sont administrés par les
ministères, ils pourraient faire leur propre vérification et on
pourrait se dispenser du Vérificateur général. C'est un
peu le même genre de situation. Il faut bien que quelqu'un, dans un
organisme comme le ministère des Affaires sociales, fasse de la question
de la qualité et du maintien de la qualité son unique
préoccupation. Autrement, il est nécessairement amené
à faire des compromis, qui sont dictés par les
nécessités de la vie, les contraintes budgétaires, les
priorités gouvernementales qui font que, même si on sait qu'il y a
des problèmes aigus dans un secteur, on veut, malgré tout, avoir
assez d'argent de reste pour pouvoir favoriser tel ou tel développement
que le ministre a annoncé, etc., et qui constitue une priorité
gouvernementale. Cette question du contrôle de la qualité, on ne
peut pas la balayer sous le tapis si facilement que ça en disant: II
faut des gens qui soient prêts à un travail d'équipe.
Dans une équipe, il y a nécessairement des partenaires
majeurs et des partenaires mineurs et il est très probable que, puisque
la préoccupation principale du ministère, c'est de voir à
exécuter ses programmes et à administrer son budget, le
partenaire majeur de l'équipe soit celui qui s'occupe
précisément de ces fonctions plutôt que de protéger
l'intérêt du public à une qualité et à une
accessibilité sans reproche.
Le problème, d'ailleurs, n'est pas simplement de faire des
condamnations. L'utilisation principale des rapports de l'agrément,
c'est justement d'alerter le ministère à des carences, à
des difficultés et non pas de semer la panique dans le public. Mais,
encore une fois, si personne ne fait son affaire de cette question, elle va
nécessairement être négligée et, d'ici un nombre de
mois ou d'années variable, selon les problèmes qui pourront
surgir, on verra des demandes se révéler, venir à la
surface pour qu'un organisme distinct du ministère des Affaires sociales
se préoccupe de cette question. On ne pourra pas la balayer, encore une
fois, sous le tapis. Le problème demeure avec nous, comme il
était encore présent avec nous, même avec une
administration distincte, étant donné les
nécessités de faire une jonction avec les activités de
contrôle professionnelles des corporations professionnelles. Le
problème, comme je l'ai indiqué ce matin, est plus
compliqué qu'avant, à cause de la nouvelle structure du
ministère.
Pour ce qui est des arguments du ministre, M. le Président,
relativement à l'organisation de la psychiatrie, le ministre a voulu se
faire très percutant, faire des accusations de caractère
personnel. Je n'ai jamais prétendu à l'expertise dans le domaine
de la psychiatrie, contrairement à lui. Mais ce que je peux juger,
cependant, dans ce domaine-là comme dans un autre, c'est que, lorsque
l'on donne le pouvoir à des gens qui sont professionnellement
impliqués, à des techniciens d'un domaine, ils sont
nécessairement portés à faire dominer leurs
intérêts professionnels légitimes, leurs
préoccupations professionnelles sur les intérêts du
public.
Ce qu'il y a de particulier dans l'organisation de la psychiatrie de
secteur, c'est qu'elle donne le pouvoir sur la distribution des services
à certains psychiatres qui ont certaines théories sur la
façon de jouer leur rôle. Contrairement à d'autres
théories dans le domaine scientifique, celle-là réclame un
monopole dans l'organisation des services; elle se dit: Notre façon de
voir est la seule façon de voir et tout le monde doit s'y conformer. Les
citoyens, une fois entrés dans ce moule, n'ont plus le choix,
véritablement, de s'adresser ailleurs qu'à leur centre
hospitalier responsable des soins du secteur dans la mesure où il ne
s'agit pas de consultation au bureau du psychiatre, mais de procédure
purement directive. Dans la mesure où il y a des problèmes
d'urgence, des problèmes de consultation et de suivi en clinique
externe, à plus forte raison des problèmes d'hospitalisation pour
des raisons psychiatriques, on se trouve dans un moule où on donne le
pouvoir à certains théoriciens de la distribution des soins
psychiatriques.
En 1979, on n'est plus, fort heureusement, dans la situation où
on pouvait être en 1969. La psychiatrie communautaire, la psychiatrie de
secteur a subi sa part de critique et d'évaluation parce que le
Québec n'est pas le seul endroit au monde où on s'en est fait
l'apôtre. Dans la plupart des endroits où elle a été
essayée, on adopte vis-à-vis de cette théorie une position
beaucoup plus critique que ne semble le soupçonner, pour les besoins de
la cause, le ministre des Affaires sociales. Je ne me surprends pas de sa
réaction, il s'agit là d'un professionnel de la psychiatrie, il a
fait son idée là-dessus, son idée est faite depuis
longtemps et maintenant il utilise normalement ou anormalement les
privilèges que lui confie sa fonction actuelle pour faire
prédominer un point de vue professionnel parmi d'autres qui, encore une
fois, est criticable sur le plan de l'intérêt public, parce qu'il
introduit un système rigide, un système qui est en
désaccord avec l'esprit de l'ensemble des services de santé ou
des services sociaux où le principe de libre choix du
bénéficiaire face aux établissements et face aux
profession-
nels, est affirmé formellement dans un des articles initiaux de
la Loi sur les services de santé et les services sociaux. Ce mode
d'organisation exclusif et fermé que représente la psychiatrie de
secteur est donc en contradiction flagrante avec l'esprit de la Loi sur les
services de santé et les services sociaux et c'est une
réalité que rejette la population qui a eu à faire avec
ces services, parce qu'elle a été en butte à des
frustrations sans nombre à cause de cette organisation arbitraire dans
l'organisation des soins.
M. le Président, c'est, pour l'instant du moins, les seules
remarques que j'ai à faire sur ces sujets.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Mégantic-Compton.
M. Grenier: M. le Président, je voulais intervenir avant
d'aller dîner; je serai très bref parce qu'on vient de me
prévenir que le mini-débat aurait lieu avant 18 heures et comme
je dois me rendre en Chambre, je vais intervenir rapidement quitte à
revenir un peu plus tard.
J'aurais voulu vous mettre au courant, comment, parfois, il ne faut pas
se fier aux déclarations qui sont faites; il faut plutôt se fier
aux articles qui sont écrits de la main d'une personne. Lors de votre
visite dans la région de Sherbrooke et de Lac-Mégantic la semaine
dernière, le journal de Sherbrooke, où est situé le CRSSS,
dit que vous avez endossé le plan du CRSSS et le journal de
Lac-Mégantic dit que vous avez endossé la position du
comité de citoyens. Il faut avoir assisté aux rencontres pour
savoir ce qui s'est passé.
Tout à l'heure, le ministre a repris les arguments que j'ai
soulevés face aux cliniques de planning familial qui sont
implantées dans nos différents hôpitaux. J'aimerais que le
ministre me précise certaines choses qui ne me laissent pas
indifférent quant au pourcentage élevé d'avortements qui
ont été pratiqués depuis 1971, savoir l'augmentation de
600%. Il a donné une partie de réponse à l'argumentation
que j'ai soulevée ce matin; cette partie de réponse ne me
satisfait pas; j'aurais aimé en savoir davantage. Quand le ministre me
donne comme exemple le rapport qu'a préparé le ministre de la
Santé de France, je n'ai pas besoin de vous dire que ce n'est pas
seulement en France qu'il faut prendre nos exemples sur la planification
familiale; il peut y avoir d'autres pays qui pourraient être cités
en exemple plus largement que la France.
J'aimerais avoir des précisions de la part du ministre concernant
ces deux personnes que j'ai mentionnées ce matin MM. Gourgues et
Lamar-che, qui ont l'air à véhiculer des messages qui sont
contraires à ceux du ministre ce matin. J'aurais aimé savoir si
ces deux personnes qui véhiculent des messages, selon le Or René
Jutras, qui n'est pas un inconnu dans le Parti Québécois, je
pense, et qui nous a dit, comme je l'ai cité ce matin: "Les
représentants du ministère des Affaires sociales, MM. Gourgues et
Lamarche ont insisté pour que des médecins favorables à
l'avortement soient nommés sur le comité d'avortement et aussi
qu'une représentante du mouvement féministe siège à
ce comité. Ils ont incité publiquement le futur comité
à accorder libéralement des avortements à celles qui en
feraient la demande".
Je ne veux pas jouer au Bonhomme Sept Heures, j'ai vécu ça
pendant un mois il n'y a pas si longtemps, mais je ne voudrais pas qu'on laisse
passer inaperçu cet événement qui nous est signalé.
J'ai une copie pour le ministre de cette assertion qui est faite par le Dr
Jutras de Drummondville et qui peut inquiéter pas mal de parents au
Québec; cela ne doit pas nous laisser indifférents. Cette
proposition qu'on lui faisait dans son parti, j'aimerais qu'il nous fasse
état de ce qui se passe actuellement dans ces cliniques, quand on
parlait de fécondité, de grossesse, d'adoption, d'alimentation,
d'éducation des enfants, de soins pédiatriques.
Je pense que ça doit inquiéter le ministre. C'est lui le
responsable et il devrait être capable de nous dire s'il y a des choses
qui avancent ou si on n'en est pas rendu, avec ces cliniques de planning
familial, à développer des cliniques d'avortement sur demande.
C'est la partie qui est inquiétante au Québec actuellement, c'est
celle sur laquelle j'ai fortement insisté ce matin, parce que ça
inquiète pas mal de monde. Cela inquiète aussi du monde
sérieux et du monde consciencieux qui aimerait que l'argent du
ministère serve à d'autres fins qu'à répondre
à cet avortement très libéral. J'attends votre
réponse là-dessus et j'aurai l'occasion certainement d'y revenir
prochainement.
M. Lazure: On proteste contre le libéral pour au moins
deux raisons.
M. Grenier: On est plusieurs.
Mme Lavoie-Roux: C'est un avortement unioniste.
M. Grenier: Ce serait plus simple. Ce serait moins apeurant.
Une Voix: De ce temps-ci, ce sont plutôt des avortements
péquistes, si on regarde les élections partielles.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Limoilou.
M. Gravel: Pour faire suite à ce que le
député de Saint-Laurent a dit tout à l'heure à
propos de la fermeture de postes dans les hôpitaux, je sais que la
décision que le ministre a prise en 1976 a été une bonne
décision, pour avoir été un travailleur dans les
hôpitaux pendant 24 ans. Je crois que c'est une bonne décision qui
a été prise, parce que réellement il y avait un surplus de
personnel dans les hôpitaux et j'ai toujours dit que ce n'était
pas la quantité de personnes travaillant auprès du malade qui
faisait la qualité des soins.
En fin de compte, il y a une chose qui se produit, M. le ministre, je ne
sais pas si vous avez
un genre de contrôle sur ça et on se fait souvent dire par
les syndicats qu'on ferme des postes de syndiqués et que beaucoup de
conseils d'administration des hôpitaux ouvrent des postes de cadre. Le
syndicat accepte jusqu'à un certain point la fermeture de postes de
syndiqués, mais il n'accepte pas l'ouverture de postes de cadre.
Exemple: Dans les hôpitaux de soins psychiatriques, on ouvre maintenant
des postes d'éducateurs. Cela demande beaucoup plus d'argent pour payer
le salaire d'un éducateur que pour payer le salaire d'un
préposé aux malades. Je ne sais pas si le ministre a le
contrôle sur ça, s'il a des chiffres à nous donner,
à savoir que si on ferme des postes de syndiqués, on ouvre
à la place des postes de cadre et le syndicat ne l'accepte pas. Et je
pense qu'en fin de compte, comme syndiqué et comme travailleur
d'hôpital, je ne l'accepterais pas.
M. Lazure: M. le Président, en réponse à la
question du député de Limoilou, je suis content qu'il
soulève ça, parce que, justement, l'information n'a pas encore
été assez diffusée, quoique je l'aie dit chaque fois que
j'ai eu l'occasion de le faire en public. Nos hôpitaux, encore une fois,
c'est moins que la moitié, 40% de nos hôpitaux, ont à faire
une plan de redressement. La grande majorité vont le réaliser en
l'espace d'un an, mais les hôpitaux qui ont à faire un plan de
redressement, donc à diminuer les dépenses et à fermer un
certain nombre de postes, se sont fait dire par écrit que ces
diminutions devaient toucher les cadres et les professionnels autant que le
personnel syndiqué. (17 h 45)
Dans les formules de rapport trimestriel que chaque hôpital qui a
un plan de redressement doit nous envoyer, il y a une colonne qui va indiquer
le nombre de postes de cadres qui auraient été fermés. On
sera en mesure, pour la première fois, d'avoir un tableau vraiment
complet et vous pouvez être certain que, quant à moi, il n'est pas
question de faire payer aux syndiqués, pour ainsi dire, ce redressement
des budgets hospitaliers.
Le député de Mégantic-Compton a parlé de la
question de l'avortement thérapeutique. Encore une fois, je pense que
c'est vraiment induire la population en erreur que de laisser entendre que ces
cliniques de planification familiale sont en train de devenir des cliniques
d'avortement sur demande. Ce n'est absolument pas le cas. Le comité de
trois médecins qui est formé dans chaque hôpital qui
accepte d'avoir une telle clinique a des comptes à rendre au conseil
d'administration. Si le conseil d'administration d'un hôpital ou si la
population d'une région donnée a des doutes, le conseil
d'administration doit poser des questions au comité médical, qui
décide si la personne enceinte doit, pour des raisons de santé,
avoir un avortement thérapeutique.
Je vous garantis que, quant à nous, il n'est pas question
d'instaurer l'avortement sur demande et qu'il n'y a aucune indication dans le
réseau hospitalier actuel qu'on s'en irait vers ça, absolument
aucune. Cela prend beaucoup d'imagination pour laisser supposer qu'on s'en va
vers ça.
Maintenant, la fameuse réunion de Drummondville dont vous parlez,
j'en ai le procès-verbal devant moi. C'est une réunion à
laquelle nos deux fonctionnaires ont participé. Je ne vois pas le nom du
Dr Jutras, votre informateur, et je voudrais être certain que le Dr
Jutras vous affirme, sur ce que nos représentants ont dit, que c'est
authentique, mais je ne suis pas certain.
Je ne mets pas la parole du Dr Jutras en doute, s'il n'était pas
là lui-même, il y a toujours un danger que les informations soient
déformées quand ça se transmet d'une personne à une
autre. Je n'ai aucune raison de douter du travail de qualité que font M.
Lamarche et M. Gourgues et je peux vous assurer qu'il n'y a pas de pression
indue qui est faite auprès du personnel de ces hôpitaux.
Encore une fois...
M. Grenier: Vous n'avez pas eu de plainte au sujet de ces deux
personnes?
M. Lazure: Non. M. Grenier: Jamais?
M. Lazure: Honnêtement, je n'ai pas eu de plainte.
M. Grenier: De Jonquière non plus?
M. Lazure: Non. Au contraire, Jonquière a accepté
de mettre sur pied...
Ecoutez, il y a toujours des discussions viriles, quand il s'agit de
déterminer le budget. On dit: Entre $50 000 et $100 000, selon les
besoins de l'institution en question. Là-dessus, c'est évident
qu'il y a toujours des plaintes. Mais, sur la qualité du travail de ces
deux personnes, je n'en ai jamais eu.
Pour les statistiques, il n'y a pas une augmentation effarante du nombre
d'avortements théra-peuthiques au Québec, pas du tout. Je n'ai
pas les chiffres des autres provinces, malheureusement, mais cela mettrait cela
dans une perspective où vous verriez que c'est très
modéré.
C'est évident qu'il y a eu une augmentation. En 1972, 2919; donc
3000. On augmente graduellement, en 1973, 3200; ensuite 4400, 5600, 6600, 7700
en 1977. Sur six années, passer de 3000 à 7700, cela ne me
paraît pas exorbitant. Il y a eu un changement de législation,
à ce moment-là.
M. Forget: Est-ce que le ministre me permettrait une question?
Dans le cas des cliniques qui fonctionnent, est-ce qu'il serait possible, pour
les derniers six mois de l'année 1978 par exemple, d'avoir une
idée du nombre d'avortements thérapeutiques qui ont
été exécutés?
M. Lazure: C'est demandé, nous attendons la compilation.
J'ai bien hâte de le voir aussi. Je l'ai demandé.
Mme Lavoie-Roux: Sur une question de statistiques, cela rejoint
la question du député de Saint-Laurent. Je pense que le
député de Mégan-
tic-Compton l'avait posée. La clinique a quatre fonctions...
M. Lazure: Oui, éducation sexuelle, méthodes de
contraception...
Mme Lavoie-Roux: Est-ce qu'on serait capable de nous donner des
statistiques pour chacune des fonctions que la clinique est appelée
à remplir? Ce serait peut-être intéressant de savoir de
quelle façon les cliniques s'orientent.
M. Lazure: Peut-être. J'hésite. On va essayer
d'avoir le plus de données possible, mais il faut dire que c'est 18 qui
ont accepté jusqu'à maintenant. Les dernières datent
seulement de quelques mois. La plupart, c'est de date récente. Je ne
pense pas que le recul soit assez grand pour que les statistiques soient
significatives. Mais, en tout cas, on va essayer d'avoir le plus de
données possible, quand on arrivera au programme, peut-être.
Je voudrais profiter des dernières minutes pour dire quelques
mots au sujet des remarques du député de Saint-Laurent. Par
économie de temps, je me bornerai à la chose principale. On
revient au plaidoyer sur l'augmentation, ou plutôt l'augmentation
insatisfaisante des sommes déboursées pour les ménages,
les individus ou les familles à l'aide sociale, ces dernières
années.
Si on regarde toujours la même page 18, qu'on s'arrête
à décembre 1973, pour les fins de la cause, et qu'on va
jusqu'à décembre 1976, pour une période de 36 mois, on
s'aperçoit que, pour la colonne personne seule, les prestations sont
passées de $109 environ à $164.50. Donc, grosso modo, $55 pour 36
mois, cela donne à peu près $1.60 par mois d'augmentation.
Toujours pour la personne seule, on descend la colonne et, depuis
l'arrivée du Parti québécois au pouvoir, décembre
1976, jusqu'à février 1979, donc une période de 26 mois,
et non plus 36, on passe de $164.50 à $207, pour une augmentation de
$43.65. Si on fait la division de $43.65 par 26 mois, c'est bien curieux, on
arrive exactement à $1.60 d'augmentation par mois.
M. Forget: C'est une façon de calculer.
M. Lazure: II y a plusieurs façons de calculer, justement.
C'en est une.
M. Forget: Oui, il y en a plusieurs.
Mme Lavoie-Roux: Oui, mais l'inflation.
M. Lazure: M. le Président, je vous ai
laissé...
M. Forget: Sur ce, nous sommes d'accord, il y a plusieurs
façons de calculer.
M. Lazure: Oui, il y a plusieurs façons de calculer.
Mme Lavoie-Roux: Mais l'inflation et la dévaluation de
l'argent.
M. Lazure: Bien sûr, il y a toutes sortes d'autres
facteurs.
Mme Lavoie-Roux: Bien oui, mais c'est important en grand.
M. Lazure: C'est pour cela que cela démontre une chose,
cette espèce de discussion, c'est que, lorsqu'on prend un chiffre
isolément, comme le député de Saint-Laurent l'a fait ce
matin, et qu'on veut vraiment avoir les deux versions, à ce
moment-là, c'est un débat presque interminable.
Mme Lavoie-Roux: ... voyons donc.
M. Lazure: Et le même calcul, on l'a fait pour les couples
et cela donne exactement la même chose.
Mme Lavoie-Roux: Mais votre dollar, en 1979, ne vaut pas ce qu'il
valait en 1976.
M. Lazure: Cela donne exactement la même chose.
M. Laplante: Le dollar à Trudeau, combien valait-il?
Mme Lavoie-Roux: C'est trop facile!
M. Lazure: Je répète que la réponse
principale qui, justement ne touche pas les colonnes de chiffres, la
réponse principale à tout cela, c'est que les montants sont
indexés, d'année en année, les prestations d'aide sociale
sont indexées d'année en année. C'est pour cela qu'ils
montent à peu près également, si on prend deux tranches
d'une tranche de 30 mois...
M. Forget: C'est une fausseté complète! Vous savez
très bien, M. le ministre, qu'entre décembre 1973 et
décembre 1976, il y a eu beaucoup plus que l'indexation.
M. Lazure: Assoyez-vous donc à votre place et restez
tranquille pendant que je termine mon intervention. Vous avez parlé
à votre tour. Vous me permettrez de terminer mon intervention. Je vous
ai laissé parler tantôt.
En définitive, l'autre aspect qu'il faut faire valoir dans toute
cette querelle, c'est que, comme je l'ai dit tantôt, il y a plusieurs
programmes qui sont accessibles maintenant, qui sont accessibles en dehors de
l'aide sociale. Je ne vois pas pourquoi on peut critiquer un gouvernement de ne
pas investir un plus haut pourcentage de ses dépenses gouvernementales
pour les prestations directes d'aide sociale, si on peut rendre les services
aux mêmes individus par le biais de programmes établis pour
l'ensemble de la population.
En ce qui concerne les mises à pied dans les hôpitaux, je
pense qu'il faut distinguer les mises à pied effectives des mises
à pied théoriques. Souvent, les syndicats nous disent: Dans
l'hôpital, il y a eu des mises à pied. Quand on regarde ce qui
s'est passé, c'est ce qu'on appelle une mise à pied
technique, à savoir qu'un poste a été fermé dans un
service, mais que l'individu a le loisir de faire une demande dans un autre.
Cela, c'est une mise à pied technique qui suit les contraintes d'une
convention collective.
Quand je dis qu'il n'y a pas de mise à pied ou à peu
près, je parle de congédiement, je parle de perte d'emploi et non
pas de transfert à l'intérieur d'un même hôpital.
Finalement, la psychiatrie, encore une fois, cela aussi, c'est un
débat qui peut devenir tellement technique. D'abord, la psychiatrie de
secteur, avec la grande majorité des psychiatres du Québec
à lesquels j'ai travaillé, j'ai essayé de la promouvoir au
Québec comme un mode d'organisation des services psychiatriques, ce
n'est pas du tout un mode d'organisation de distribution des soins
psychiatriques qui pénalise la population et qui enlève le droit
au citoyen de choisir son médecin; ce n'est pas du tout le cas.
Là aussi, il y a vraiment un excès de langage de la part du
député de Saint-Laurent qui s'acharne à vouloir
discréditer ce mode de distribution des soins. Je lui rappelle son
discours de 1975/76. Il me dit qu'il ne pose pas en expert, mais c'est quand
même lui qui a fait ce discours-là. C'est vous qui l'avez
prononcé devant l'Association des psychiatres du Québec et,
à toutes fins utiles, on présume que vous avez endossé ce
discours-là. En tout cas, quand je fais un discours...
M. Forget: Je l'ai même écrit.
M. Lazure: On dit, c'est la rumeur qui circulait dans le
ministère, que le ministre avait même écrit de
lui-même ce discours sans les avis... il n'avait pas besoin des avis de
ses hauts fonctionnaires, il n'en avait pas besoin, lui, il connaît cela
la psychiatrie.
M. le Président, je termine là-dessus, mais c'est vraiment
le genre de discussion interminable sur lequel on peut être
entraîné, parce que le député de Saint-Laurent
prétend à une expertise à peu près dans tous les
domaines.
Le Président (M. Marcoux): A 20 heures, Mme le
député de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Oui, à 20 heures.
Le Président (M. Marcoux): La commission suspend ses
travaux jusqu'à 20 heures.
Suspension de la séance à 17 h 56
Reprise de la séance à 20 h 3
Le- Président (M. Marcoux): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La parole était à Mme le député de
L'Acadie.
Une Voix: Est-ce qu'on dit Mme "le" député ou "la"
députée?
Mme Lavoie-Roux: "La" députée.
Le Président (M. Marcoux): Mme "la" député
de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. La question que
je voudrais poser rejoint le problème qui avait été
soulevé cet après-midi par le député de
Mégantic-Compton et peut-être par le député de
Rouyn-Noranda, touchant l'avortement, mais d'une façon assez
différente.
J'aimerais que le ministre des Affaires sociales nous dise où il
en est dans son travail de collaboration avec le ministère de
l'Éducation pour mettre sur pied dans les écoles "un cours", si
on veut, d'éducation sexuelle. Le problème de l'avortement,
à mon point de vue, deviendra beaucoup moins aigu quand on commencera
à faire de la prévention. Là-dessus, c'est à
regret, je pense, que les écoles ou les ministères de
l'Éducation ou des Affaires sociales, soit l'un, soit l'autre,
n'assument pas totalement leurs responsabilités à cet
égard.
M. Lazure: Je m'excuse, M. le Président. J'ai eu
l'occasion d'en parler récemment, il y a une semaine ou deux, au
congrès de l'Association des centres de services sociaux à
Montréal. Il y a environ 80% des commissions scolaires qui ont
accepté en principe le programme d'éducation sexuelle qui peut
être dispensé à travers tout le Québec par le
personnel relevant des Affaires sociales. En général, c'est du
personnel qui relève des départements de santé
communautaire. Cependant, comme vous le savez, étant donné que ce
cours est facultatif au secondaire, il demeure que trop peu de jeunes sont
touchés par le cours. Grosso modo, il y a un peu moins de 100 000 jeunes
ou 90 000, de mémoire c'est le chiffre qu'on m'a rapporté
il y a quelques semaines au ministère et que j'ai transmis dans cette
allocution environ 90 000 jeunes qui sont touchés par ce cours
d'éducation sexuelle.
Nous pensons, nous, que c'est un cours qui devrait être essentiel.
Malheureusement, le ministère de l'Education se fait dire la même
chose pour un tas de cours, et il y a seulement un certain nombre d'heures
d'enseignement par semaine. Le ministère de l'Education laisse aux
commissions scolaires et aux élèves le choix, le loisir de
décider si ce cours sera obligatoire ou facultatif. Donc, en
résumé, le cours a été porté à la
connaissance de l'ensemble des commissions scolaires. Je pense que la
collaboration est bonne au niveau des deux ministères dans le sens que
l'Education reconnaît aussi que c'est un cours valable, mais leur
décision, c'est de permettre à la fois aux jeunes de le suivre ou
de ne pas le suivre selon leur choix, et de permettre aussi aux commissions
scolaires de le présenter, de l'offrir ou de ne pas l'offrir.
En définitive, moi, je suis un peu déçu que si peu
de jeunes... Il y a une certaine augmentation d'année en année,
mais ce n'est certainement pas suffisant.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je suis un petit peu
étonnée de la réponse du ministre.
Comment se fait-il qu'on laisse cette grande latitude au sujet de ce
cours, alors qu'on ne la laisse pas au sujet d'un grand nombre d'autres cours?
Je pense, par exemple, qu'on est à élaborer... Il y avait
déjà des notions d'écologie qui se donnaient en biologie
au primaire, au secondaire, etc., mais on est en train d'élaborer un
cours d'écologie qui sera donné au niveau
élémentaire et, évidemment, au niveau du secondaire. C'est
bien, l'écologie. Je suis pour l'écologie aussi. Mais je me
demande si, à un moment donné, il n'y a pas une question de
priorité et cette attitude un peu, enfin, je vais le mettre entre
guillemets "débonnaire" du ministre des Affaires sociales
m'étonne, parce que cela a une foule de répercussions à
plus ou moins long terme.
Je comprends qu'il y a une approche vis-à-vis de ce cours qui
doit faire appel à la collaboration des enseignants, cela va
peut-être être un cours "plaqué", mais il reste qu'on
connaît... Et il ne faut pas s'en scandaliser, je pense que c'est une
résistance qui est assez normale, compte tenu de l'évolution des
mentalités. Quand on parle d'un cours d'éducation sexuelle, il y
a des résistances qui s'expriment, mais les résistances
n'évolueront jamais si l'attitude des différents
ministères reste une attitude qui m'apparaît, à vous
entendre, M. le ministre je ne le dis pas pour vous blâmer
être une attitude un peu de laisser-faire à l'égard de ce
problème qui, je suis bien prête à l'admettre, est complexe
et demande une approche pédagogique, une interprétation plus
particulière.
Quand on regarde les statistiques là-dessus, vous serez
certainement à même de me corriger parce que je ne les ai pas en
main le grand nombre d'avortements se fait, si je ne m'abuse, chez les
plus jeunes, disons entre 14 et 21 ou 22 ans et ensuite à l'autre
extrémité, mais ceux-ci doivent être en moins grand nombre
pour des raisons d'ordre thérapeutique, à cause de l'âge
avancé des femmes enceintes, ces choses-là. Je pense que je ne me
trompe pas trop, du moins dans l'évaluation de ces statistiques.
Si le grand nombre des avortements se fait chez les jeunes entre 14 et
20 ou 21 ans, je pense que cela peut être relié en partie à
une mauvaise préparation, à une mauvaise information et
peut-être simplement à l'absence d'information. C'est pour cela
que j'aimerais... Le ministère des Affaires sociales peut dire que c'est
l'Education, et l'Education peut dire que c'est les Affaires sociales. Quelle
est la conception du ministre dans ce domaine? Quelle est sa perception des
choses et de l'action qui devrait être entreprise?
M. Lazure: M. le Président, je suis content que le
député de L'Acadie ait soulevé cette question parce que
c'est une préoccupation que j'ai de ce temps-ci en priorité, pour
toutes sortes de raisons. Je conviens qu'aux Affaires sociales, on n'a
peut-être pas fait toutes les pressions qu'on aurait dû faire
auprès de l'Education; le ministère et les commissions scolaires
y accordent plus d'importance. J'en prends bonne note et je m'engage à
redoubler d'efforts.
J'ai eu, depuis la réponse de tantôt, des chiffres un peu
plus précis. Effectivement, c'est 84% des commissions scolaires, en
1977-1978 ce sont les derniers chiffres qu'on a qui avaient
accepté le programme. Le programme était implanté dans 84%
des commissions scolaires régionales et intégrées du
Québec. Cependant, comme je le disais tantôt, le nombre
d'étudiants qui ont suivi le cours en 1977-1978 était de 65 000,
mais il est monté à 85 000 en 1978-1979; ça
représente encore très peu.
Mme Lavoie-Roux: On a 1 300 000 élèves dans les
écoles du Québec...
M. Lazure: ... non non, je parle du secondaire seulement. Cela
représente peut-être 15% des élèves du secondaire,
alors c'est vraiment trop peu.
Mme Lavoie-Roux: Oui, il y a à peu près 400 000 au
secondaire.
Je pensais que c'était en bas du million.
M. Lazure: Environ 15% des élèves du secondaire,
et...
Mme Lavoie-Roux: II y a l'élémentaire, il
m'apparaît encore plus important à l'élémentaire, on
aurait moins de résistance à le donner au secondaire s'il y avait
à l'élémentaire quelque chose...
M. Lazure: D'accord. Ecoutez, M. le Président, je suis
concient que c'est peut-être une des meilleures façons, si non la
meilleure, de prévenir des grossesses indésirables au point de
vue de la santé mentale et physique, en faisant l'éducation des
plus jeunes et, aussi, de susciter des grossesses désirables si on se
place d'un autre point de vue, du point de vue de la fertilité. Je peux
tout simplement répéter que je vais faire un effort particulier
avec les collaborateurs au ministère pour qu'on puisse obtenir une
meilleure diffusion de ce cours-là.
M. Laplante: Dans le même ordre d'idées, connaissant
moi-même la réticence des parents... Du temps où
j'étais commissaire et Mme le député de L'Acadie aussi,
dans beaucoup de cas un professeur voulait commencer à donner un de ces
cours-là, c'était des plaintes continuelles au niveau des
commissaires et au niveau de votre bureau, vous deviez en recevoir à ce
moment-là énormément...
Mme Lavoie-Roux: Je n'en ai jamais reçu,
honnêtement.
M. Laplante: Nous en avons reçu beaucoup. Ce que j'aurais
comme conviction au départ là-dedans, je suis complètement
d'accord avec vous quand on dit qu'il faudrait avoir un cours qui soit reconnu
par le ministère de l'Education et accepté aussi par les
commissions scolaires aux deux niveaux, élémentaire et
secondaire. Je pense que la première éducation, ce qu'on pourrait
reprocher
au ministère des Affaires sociales depuis longtemps, c'est de ne
pas faire l'éducation des parents, soit par des feuillets continuels ou
leur entrer dans la tête qu'il faut qu'ils acceptent cette
éducation donnée par l'école pour que ça puisse
devenir une demande globale des parents afin que ces cours entrent dans
l'école. Actuellement on a toujours fait l'inverse. Je me souviens de
longues discussions à la Fédération des commissions
scolaires avec d'autres collègues, alors qu'il y avait chicane avec le
ministère des Affaires sociales, quand le premier film qu'on donnait au
niveau secondaire, on forçait un peu les écoles. (20 h 15)
J'ai moi-même été un de ceux qui ont appuyé
certaines commissions scolaires sur un certain film qu'on ne voulait pas
laisser entrer à la CECM sans approbation. Tout ça pour dire que
le parent n'a jamais eu un mot à dire au point de vue éducation,
pour qu'il puisse faire pression et dire: On en veut de ces cours, un cours
qu'on pourrait présenter sous une forme ou l'autre, pour qu'il soit
donné aux enfants.
Il me semble que ce serait le départ, au lieu d'essayer de le
vendre à l'enfant. On est tenté de le vendre aux directions
d'écoles, aux commissions scolaires, aux professeurs, chacun l'analyse
à sa façon et, ensuite, on arrive à l'enfant; le parent
est inquiet, toujours inquiet, parce qu'il y a vu la pilule
anticonceptionnelle. On disait qu'on encourageait beaucoup plus le vice parce
qu'on montrait justement ces pilules anticonceptionnelles, comment s'en servir,
ainsi que d'autres méthodes.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Mégantic-Compton.
M. Grenier: Seulement quelques questions, ça va
empêcher d'intervenir là-dessus au moment du budget.
Le Président (M. Marcoux): ...
générales...
M. Grenier: Avant d'intervenir... justement sur la même
question. On a des données qui vont réapparaître, bien
sûr, au budget. Le centre Betty Farhood dit dans ses rapports que, sur
1828 personnes qui se sont présentées pour avortement ou autre
moyen, 117 seulement ont décidé, après consultation, de
mener leur grossesse à terme. Est-ce que le ministère a un
certain contrôle sur une institution comme celle-là?
M. Lazure: M. le Président, je vous...
M. Grenier: Ou si c'est absolument privé?
M. Lazure: ... avoue mon ignorance vis-à-vis du centre
Betty...
M. Grenier: Betty Farhood sur la rue Saint-Hubert à
Montréal.
M. Lazure: C'est un centre privé, je pense. M. Grenier:
C'est un centre privé, c'est ça.
M. Lazure: Je vous avoue que ce n'est pas un centre qui fait
partie du réseau d'établissements des Affaires sociales, je n'en
ai jamais entendu parler. C'est une agence privée qui fait la promotion
de l'avortement thérapeutique?
M. Grenier: C'est ça, qui envoie ses clientes aux
Etats-Unis principalement.
M. Lazure: Justement, en voulant mettre des cliniques de
planification familiale sur pied, on veut éviter la prolifération
de toutes ces cliniques privées qui nous échappent dans une large
mesure, parce que ça prendrait une armée d'inspecteurs.
Très souvent, ça peut être des non-professionnels et
ça peut être des professionnels, aussi, qui mettent une pancarte
ou un nom dans un journal et qui s'appellent des consultants en planning. Je ne
connais pas cette clinique, on en prend note, on va faire une enquête. Si
vous pouvez nous fournir des renseignements plus précis, on va regarder
le cas.
M. Grenier: II y a des données qui sont fort
intéressantes, qu'on pourrait soumettre au ministre, même si c'est
une institution qui n'est pas sous la tutelle du gouvernement et sur laquelle
le gouvernement n'a aucune autorité. On répond aux questions que
se posait tout à l'heure le député de L'Acadie, alors que
les gens entre 18 et 20 ans, ou 21 et 23 ans, c'est 1100 sur 1800, qui sont
entre ces âges. Ce sont généralement des
célibataires.
Il y a une autre donnée. Je prends le centre hospitalier
Saint-Joseph-de-Rimouski. Dans un rapport d'étape au 1er avril 1979, il
y a un budget annoncé pour 1978/79, de $12 200, et pour 1979/80, de $24
000. C'est sur la partie médicale. C'est donc la partie avortement,
j'imagine bien. Quand vous arrivez sur la partie psycho-sociale et quand
je lis psychosociale, cela a l'air du traitement, le ministre pourra
peut-être nous donner des informations supplémentaires cela
me dit que c'est la personne qui tâche de replacer la conscience des
personnes, une fois que l'événement s'est produit.
Le montant de 1978/79 est donc de $12 800, et celui de 1979/80 est de
$25 600. J'aimerais connaître le montant qui est donné, dans un
centre comme cela, pour convaincre les personnes de continuer leur grossesse et
pour donner à ces personnes le soin qui doit leur être
donné, et avoir un montant au moins égal à cela et un peu
plus, j'imagine bien. On n'a pas ces données ici. J'espère que ce
n'est pas seulement là que va l'argent.
M. Lazure: M. le Président, je pense qu'il faut comprendre
qu'essentiellement, dans ces cliniques de planification familiale, que le
budget soit de $50 000 par année ou de $75 000, selon l'envergure de
l'hôpital, il s'agit d'embaucher, à 80% de
ce budget, du personnel autre que des médecins, soit des
psychologues, des travailleurs sociaux, des infirmières. En gros, ce
sont les trois principales catégories. Ce personnel est choisi pour son
expérience, sa compétence, à aider les femmes ou les
couples qui se présentent dans une clinique, les aider non seulement sur
une des quatre principales fonctions de la clinique, mais sur l'ensemble des
quatre fonctions de la clinique.
Il n'est pas correct de dissocier, de dire que la partie psychosociale
du budget va aller pour des avis ou de l'aide psychosociale, en fonction de
l'avortement ou de la fertilité. Cela peut aller dans les deux sens.
Tout dépend du problème de la personne qui se présente ou
du couple qui se présente à la clinique. Il n'y a pas de
divisions étanches dans cette clinique. En d'autres termes, le budget
que nous accordons à ces cliniques de planning est pour constituer une
équipe j'ajouterai également une secrétaire,
évidemment, le personnel de soutien une équipe de quatre
ou cinq personnes qui va recevoir cela peut être
référé par un médecin praticien, un omnipraticien,
par un service social, peu importe, ou des gens qui se présentent
directement à la clinique des gens qui ont des problèmes
d'infertilité aussi bien qu'une personne qui peut avoir un
problème, durant sa grossesse, de santé physique ou mentale, ou
encore un couple qui veut avoir des conseils sur la planification de sa
famille.
Alors, nous essayons d'embaucher des professionnels qui sont
compétents dans chacune des fonctions de ces cliniques.
M. Grenier: Si vous me permettez, quand on arrivera à
cette étape, j'aimerais que les personnes qui vous entourent, votre
personnel de soutien soit capable de répondre à des questions
aussi importantes que celles-là. J'aimerais, sur les $50 000 qui seront
donnés, par exemple, à un hôpital en particulier le
portrait pourrait être celui de bien des hôpitaux qui ont une
clinique comme celle-là qu'on nous détaille bien l'argent
qui va servir, par exemple, pour des avortements et leurs conséquences
et l'argent qui va servir à encourager les personnes dans leur
grossesse, les femmes qui se présentent à la clinique. Il me
semble qu'on devrait avoir ça...
M. Lazure: A une question claire, on donne une réponse
claire. Les $50 000 en question ne vont pas de façon directe au
coût d'un avortement thérapeutique tel qu'accompli, tel que fait
par un médecin, disons un gynécologue. L'avortement
thérapeutique qui découle d'un acte médical, ou d'un acte
chirurgical plutôt, est reconnu dans l'échelle des tarifs
négociés entre le ministère et les
fédérations de médecins. Par conséquent, le
médecin qui procède à un avortement thérapeutique
dans un hôpital, comme s'il procédait à un accouchement,
est payé selon les barèmes de sa convention collective. En
d'autres termes, le gros des $50 000 je le répète encore
une fois d'abord, ne va pas du tout au médecin, à quelque
médecin que ce soit. Il va au personnel professionnel dont j'ai
parlé tantôt.
M. Grenier: La question que je vous ai posée est bien
précise. Je pense qu'on aurait le droit de savoir, durant l'étude
des crédits que nous allons faire du budget de 1978/79 comment ont
été utilisés on ne veut pas connaître les
noms des personnes et on ne veut pas entrer dans les détails ces
$50 000 qui ont été donnés au CHU de Sherbrooke ou
à l'hôpital de Rimouski. A quelles fins ont-ils servi?
J'aimerais... je le fais pour inciter le gouvernement pour que celui-ci
tâche de faire une éducation à ce niveau pour qu'au moins,
les trois quarts de l'argent servent à faire de la prévention ou
servent à faire de l'éducation ou servent à encourager les
personnes à la natalité, au lieu de trouver des moyens, au lieu
de payer pour l'avortement et ses conséquences. On discute depuis le
matin le budget des Affaires sociales, mais au rythme où vont les
choses, l'augmentation du budget qui se donne, prochainement, vous allez
être dépassé par le ministre de l'Immigration. C'est
l'autre qui va avoir un gros budget au train où on va.
M. Lazure: M. le Président, il y a un excès de
langage de la part du député.
M. Grenier: Non, disons que c'est imagé. Je veux
colorer.
M. Lazure: D'accord.
M. Grenier: II reste une chose: Je pense qu'on est mieux de
prévoir ici ce soir que d'attendre trop longtemps.
M. Lazure: M. le Président, je répète encore
une fois que les $50 000, pour répondre de façon bien directe,
vont à l'embauche de gens qui ne procèdent pas à des
avortements thérapeutiques. Ils vont à l'embauche de gens qui
vont rencontrer des couples ou des individus qui ont des problèmes de
fertilité, des problèmes de planification familiale. En
conséquence, nous octroyons les $50 000 pour que l'hôpital engage
une travailleuse sociale, une infirmière, une psychologue et une
secrétaire. En gros, c'est pour cela, les $50 000, c'est pour l'embauche
de quatre personnes. Ces personnes, selon les clients qui vont se
présenter, selon les personnes qui vont se présenter, vont
essayer d'apporter une aide psychosociale à ces gens. En
définitive, si on veut rejoindre votre pensée, le gros de ces
sommes va être affecté beaucoup plus à une planification
des naissances pour un couple, ou encore, à des enseignements ou
à des encouragements à la fertilité ou à la
multiplication des naissances là où c'est indiqué
socialement et psychologiquement pour les personnes qui se présentent.
Il ne faut pas partir en guerre et dire: $50 000, c'est pour les avortements.
Je répète encore une fois: L'avortement thérapeutique,
bien avant qu'on décide de créer ces cliniques, était
prévu dans les conventions collectives des médecins. La
Régie de i'assurance-maladie défraie des avortements
thérapeutiques depuis des années.
M. Grenier: Evidemment, je ne voudrais pas qu'on pense que je
chasse des sorcières, ce n'est
pas cela. C'est sûr que cela se détaille. Ce serait
intéressant de savoir cela. Avec les politiques que le ministère
amorce depuis un certain nombre de mois ou d'années pour des filles
mères, par exemple, ou ce vers quoi on se dirige pour la mère au
foyer ou l'assurance d'une femme sur le marché du travail qui doit
accoucher, il me semble qu'à ce moment, on a tout ce qu'il faut pour
être capable de diminuer le taux d'avortement qui, si on se fie aux
chiffres de 1976, est considérable, est apeu-rant. J'imagine que mes
statistiques sont un peu en retard; 1976, je l'admets. Si j'avais celles de
1979, elles ne sont peut-être pas si différentes non plus. Ce
serait fort intéressant de connaître cela. Le gouvernement a un
rôle et on a raison d'interroger le gouvernement. Cela m'intéresse
de savoir qu'on est capable de sauvegarder notre monde, à nous. Je pense
que cela intéresse le gouvernement encore un peu plus.
Ce sont des moyens, les données que vous avez là, et en
subventionnant les cliniques qu'on subventionne, on a tout ce qu'il faut pour
être capable de connaître ces données. Cela se fait. Je
pense qu'on serait capable d'exiger, pendant l'étude des crédits,
de savoir ce qui a servi proprement à l'avortement et ses
conséquences et ce qui a servi à promouvoir la naissance. On
devrait être capable de savoir ça. Ce seraient des chiffres
joliment intéressants.
M. Lazure: M. le Président, je pense que j'ai
répondu. Je répète pour la troisième fois: II
s'agit d'embaucher un noyau d'équipe de gens qui sont capables...
M. Grenier: Oui, mais vous ne répondez pas en disant
ça.
M. Lazure: Je réponds.
M. Grenier: C'est un personnel "at large" qui est donné
dans un centre de planning familial et vous ne me répondez pas. Ce que
je veux savoir comme réponse, c'est combien d'argent a servi à
l'avortement et ses conséquences et combien a servi à la
natalité?
M. Lazure: Ah, bien ça, M. le Président... M.
Grenier: Cela se voit.
M. Lazure: ... on pourra le fournir volontiers au
député de Mégantic-Compton, au moins pour l'année
1977, le plus tôt possible, en tout cas, au plus tard la semaine
prochaine. Il faudra demander à la régie de relever les
états de comptes de médecins qui ont présenté des
comptes d'honoraires pour avortements thérapeutiques. Ce n'est pas une
chose qui se fait en clandestinité. C'est une chose qui est officielle,
ça. On pourra le présenter.
M. Grenier: C'est ça, d'accord.
M. Lazure: Mais ça, c'est en dehors des budgets
spéciaux des cliniques de planification familiale.
Le Président (M. Marcoux): Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Je reviens sur la question de l'éducation
sexuelle, parce que, sans le vouloir, le député de
Mégantic-Compton a pris la parole et, comme disait le président,
je n'ai pas protesté...
M. Grenier: Je m'excuse. (20 h 30)
Mme Lavoie-Roux: Non, ce n'est pas grave du tout. J'avais
posé une question au ministre: Quelle était sa conception d'un
programme d'éducation et quand vous dites que vous en avez
discuté avec le ministre de l'Education, il y a la question de savoir:
On en donne un ou on n'en donne pas, mais ça doit se situer... Quelle
est l'approche... Quelle est votre conception de l'approche qu'on doit avoir
pour un programme d'éducation sexuelle dans les écoles primaires
et secondaires?
M. Lazure: Ecoutez, là, je ne veux surtout pas poser
à l'expert, mais je pense que tout enfant qui entre à
l'école...
Mme Lavoie-Roux: Parce que vous en avez un... Vous parliez tout
à l'heure d'un audio-visuel que vous aviez ou, enfin, je ne sais
pas...
M. Lazure: Oui.
Mme Lavoie-Roux: Vous semblez avoir du matériel, mais
comment est-ce que vous conciliez ça avec l'approche de
l'éducation...
M. Lazure: Oui, on a du matériel; l'Education a du
matériel. Je ne pense pas que ce soit le matériel qui manque.
Ecoutez, vous me posez une question sur ma philosophie, mon approche. Je pense
que tout enfant à l'élémentaire et au secondaire, selon
son âge, doit recevoir un enseignement lucide, un enseignement
approprié à son degré de développement mental,
intellectuel, psychologique. Cela, c'est clair. Je pense que tout le monde
accepte ça dans la société. Mais, comme le disait le
député de Bourassa tantôt, il ne faut pas sous-estimer la
résistance des parents.
Mme Lavoie-Roux: Oui, j'en ai parlé, d'ailleurs, de
ça.
M. Lazure: On est pris dans un dilemme vraiment. Dans un
système qui est décentralisé, où les commissions
scolaires ont, vous le savez, Mme le député de L'Acadie, quand
même le dernier mot à dire, je pense qu'on ne peut pas faire plus
qu'inciter, par les moyens les plus compétents possible, les plus
attrayants possible, inciter les parents à accepter ces programmes. Moi,
je ne pense pas que ce soit l'expertise qui manque autant aux Affaires sociales
qu'à l'Education. Elle est là, l'expertise, que ce soit sous
forme de documents audio-visuels ou que ce soit sous forme d'enseignement
anatomique pur et simple. Il y a plusieurs méthodes qui sont bien
connues, parce qu'il y a un blocage et il y a un travail de per-
suasion à faire auprès des parents et des commissions
scolaires.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce que vous pouvez m'assurer qu'il y a un
programme cohérent qui existe adapté aux besoins des enfants du
primaire et du secondaire? La seule barrière qui demeure, c'est celle du
consentement des parents, qu'il est nécessaire d'obtenir. De quelle
façon cela doit-il s'intégrer dans le programme de l'enseignement
primaire? Qui doit en avoir la responsabilité?
M. Lazure: C'est nettement le ministère de l'Education qui
doit en avoir la responsabilité. Je pense qu'il doit faire appel aux
ressources qui se trouvent au ministère des Affaires sociales ou
ailleurs, principalement chez nous, mais c'est certainement le ministère
de l'Education et les commissions scolaires qui ont cette
responsabilité, de la même façon qu'ils ont la
responsabilité de faire de l'enseignement civique auprès des
jeunes.
Mme Lavoie-Roux: Si vous avez des outils à mettre à
la disposition du ministère de l'Education, de quelle façon
avez-vous conçu ces outils et quels objectifs particuliers visez-vous
dans le programme que vous pouvez mettre à la disposition du
ministère de l'Education.
M. Lazure: La façon dont on conçoit la
préparation de ces outils, de ces documents, on fait appel à des
professionnels qui sont soit dans la fonction publique, soit dans notre
ministère, ou des professionnels qui sont dans le réseau des
affaires sociales et, de concert avec le ministère de l'Education, on
s'entend sur l'orientation générale d'un document, par exemple,
d'un document audio-visuel. Encore une fois, je répète que
même la télévision commerciale a fait état de
plusieurs de ces documents; je ne pense pas que ce soit l'expertise qui manque.
Il me semble qu'il y a, du côté des commissions scolaires, un
travail considérable à faire pour vraiment faire comprendre la
situation aux commissaires, aux parents et aux comités de parents,
aussi, dans les régions, car les comités de parents sont
très puissants et peuvent parfois exercer une influence importante
auprès des commissions scolaires.
Je ne vois pas du tout à quoi le député de L'Acadie
veut en venir.
Mme Lavoie-Roux: Je vais prendre un autre exemple, la
nutrition.
M. Lazure: Oui.
Mme Lavoie-Roux: J'ai l'impression, à tort ou à
raison, que vous avez lancé un programme qui vise à une meilleure
nutrition des citoyens. Je pense que vous avez même aussi des
préoccupations particulières pour le niveau scolaire dans ce
domaine. Je n'ai jamais ouï-dire que vous travailliez avec la même
intensité dans cet autre domaine de l'éducation sexuelle, par
exemple.
M. Lazure: Ah bon! C'est juste. On ne peut pas utiliser chacune
des 24 heures par jour avec la même intensité, on se fixe des
priorités, à tort ou à raison. On a fait de la correction
des habitudes alimentaires une de nos grandes priorités. Je le
répète encore une fois je l'ai dit tantôt
peut-être avons-nous négligé tout ce domaine de
l'éducation sexuelle au point de vue de la prévention, au point
de vue de la santé publique, de la santé mentale, de la
santé physique et on va s'efforcer d'y mettre plus d'accent dans les
mois qui viennent.
Le Président (M. Marcoux): Est-ce qu'il y a d'autres
députés qui ont des remarques préliminaires à
faire?
M. Forget: Oui, M. le Président.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Forget: Dans l'établissement des cliniques de
fertilité je ne sais plus trop comment les appeler, étant
donné les périphrases qu'a utilisées le ministre
des cliniques d'avortement, de fertilité ou de planning familial, je
pense que c'est la terminologie reconnue, quel est l'élément
déterminant? Si je comprends bien, vous cherchez à obtenir
l'acceptation de la formule de l'établissement d'une clinique.
Est-ce qu'il y a un élément dont l'absence est
suffisamment importante pour rendre impossible l'établissement d'une
clinique? Est-ce que cet élément-là est l'approbation du
conseil d'administration? Est-ce que c'est au contraire l'approbation du
conseil des médecins et dentistes? Est-ce d'autres
éléments, enfin... On a même entendu dire, je crois que
c'est à l'hôpital de Jonquière, que le syndicat des
infirmiers et infirmières s'était opposé à
l'établissement et au fonctionnement de la clinique. Peu importe les
exemples particuliers, quel est l'élément déterminant, ce
sur quoi vous vous reposez pour dire: C'est accepté? Même si
d'autres groupes ne l'acceptent pas à l'intérieur du même
établissement, vous dites: Nous avons, malgré tout, ce qu'il nous
faut pour commencer, il nous reste seulement à persuader tel ou tel
groupe.
M. Lazure: En clair, M. le Président, c'est le conseil
d'administration. L'autorité, dans un hôpital, c'est le conseil
d'administration et il est arrivé malheureusement que certains conseils
d'administration se sont cachés derrière un conseil de
médecins et ont esquivé leurs responsabilités,
abdiqué leurs responsabilités et n'ont même pas voulu se
prononcer, en disant: Les médecins ne veulent pas. Notre position est
claire. Notre interlocuteur, l'autorité dans un établissement,
c'est le conseil d'administration. Nous octroyons cette subvention qui varie
entre $50 000 et $100 000 à partir du moment où nous avons une
autorisation écrite du conseil d'administration.
M. Forget: Est-il compris, dans la discussion préalable
à l'accord et à la signature d'une entente avec le conseil
d'administration, dans quel esprit cette clinique doit fonctionner? Pour
être très clair, à supposer qu'on sache qu'il existe dans
un établissement hospitalier un groupe de médecins, pas
nécessairement majoritaire, qui est fortement opposé à
rétablissement d'une telle clinique, est-ce que l'on va explorer cette
question-là et on va s'assurer d'avance, en quelque sorte, que le
conseil d'administration est prêt à faire des nominations, de
manière à ne pas paralyser l'action du comité
thérapeutique?
M. Lazure: La question est fort pertinente. Dans nos
démarches, nous demandons au conseil d'administration de faire en sorte
que, dans le comité d'avortement thérapeutique de trois
médecins qui est prévu dans la loi fédérale, ce
comité soit composé majoritairement de médecins qui ne
sont pas opposés en conscience à l'avortement
thérapeutique. Nous avons pris cette précaution parce
qu'évidemment, c'est un cul-de-sac, autrement. Si le comité est
formé de médecins qui s'opposent en conscience à
l'avortement thérapeutique et qui disent non à toute demande
normale d'avortement thérapeutique, c'est un pseudo-comité
d'avortement thérapeutique.
M. Forget: Est-ce qu'il y a des établissements qui,
à la suite de cette exigence qui est en effet effectivement normale
autrement, c'est un exercice vide de sens ont opposé un
refus à une demande du ministère d'établir un tel
centre?
M. Lazure: Oui, il y en a. Quand on arrivera au programme en
question, on pourra donner des détails plus précis, mais il y a
quelques hôpitaux qui nous ont dit: Nous, du conseil d'administration,
nous décidons qu'il ne se fera pas d'avortement thérapeutique
dans notre hôpital. C'est une fin de non-recevoir qu'après
discussion, on a acceptée. À ce moment-là, on cherche
d'autres ressources dans la région et c'est le cas de la région
de l'Outaouais actuellement, de la région de la rive sud de
Montréal et des Laurentides. Jusqu'ici, il y a trois régions sur
les dix où on n'a pas eu d'acceptation d'un conseil d'administration
d'hôpital. Mais on est en pourparler avec d'autres institutions, des
hôpitaux peut-être de moins d'envergure, avec lesquels on a des
pourparlers.
M. Forget: Vous exigez, j'imagine, du centre hospitalier, avant
de le considérer comme un candidat possible, qu'il dispose
déjà de certains services spécialisés
appropriés, par exemple, un département d'obstétrique.
M. Lazure: Oui, c'est ça.
M. Forget: J'aimerais, M. le Président, aborder, au
chapitre des remarques générales, deux sujets que je n'ai pas eu
le temps d'aborder ce matin, je vais le faire très brièvement ce
soir. Le premier est relatif à la mise en application de la Loi de
protection de la jeunesse. Il serait un peu inapproprié que durant
l'année de l'enfant, on termine les remarques préliminaires
à l'étude des crédits des Affaires sociales, sans au moins
faire une mention de la mise en application, le 15 janvier dernier, de cette
loi. Je ne demande pas au ministre de brosser un tableau d'ensemble, je pense
qu'il est assez bien connu par les reportages qui ont été
publiés. De toute façon, tout ceci est en rodage. Je vais me
limiter à des aspects précis.
On sait que cette loi a été votée par
l'Assemblée nationale en décembre 1977, soit il y a environ un an
et demi. On apprend, par les différentes directions de protection de la
jeunesse, que les budgets nécessaires à la mise en application de
la loi, pour laquelle le gouvernement a pris un délai substantiel de
treize mois, n'ont été mis à la disposition des directeurs
de protection de la jeunesse que vers le 15 novembre 1978, soit 11 mois
après l'adoption de la loi, et qu'étant donné les
procédures habituelles exigées par les conventions collectives,
l'affichage des postes, etc., ce n'est qu'à la veille même du jour
d'entrée en vigueur de la loi, c'est-à-dire vers la mi-janvier,
de toute façon, après la période des fêtes, que les
centres de services sociaux ont pu mettre la main, si on peut employer
l'expression, sur le personnel nécessaire à la mise en
application de la loi.
Évidemment, c'est une heureuse coïncidence qu'ils aient pu
le faire à ce moment-là plutôt que plus tard; mais on
aurait pu souhaiter qu'étant donné l'inexpérience d'un
certain nombre de ce personnel nouveau, ils puissent engager le personnel
peut-être au début de décembre, au moins, de manière
que pendant quelques semaines, ils puissent les instruire sur les
mécanismes d'application de la loi, faire certaines applications
ce qu'on appelle, je ne connais pas l'expression française, des "dry
run" les entraîner, se faire la main, ne serait-ce que par des
simulations quant à des mécanismes qui sont, malgré tout,
assez complexes dans l'application de la loi.
Il semble qu'on est en face d'un problème considérable
maintenant, puisque les demandes, les signalements sont deux ou trois fois
supérieurs aux prévisions, ce qui taxe lourdement un personnel
inexpérimenté.
Est-ce que le ministre pourrait nous expliquer pourquoi il a dû
attendre si longtemps après l'adoption de la loi, c'est-à-dire
onze mois plus tard, l'attribution de budget. Je ne commente pas le fait que le
budget était singulièrement plus modeste qu'il n'avait
été souhaité. Je crois qu'on avait demandé à
l'origine $20 millions, on a obtenu $9 millions et on a accordé environ
$5 millions. Il reste qu'il y a, bien sûr, une certaine tension de ce
côté.
Mais indépendamment de ce facteur qui est attribuable à
d'autres raisons sur lesquelles nous reviendrons, il demeure qu'il y a un
délai un peu inexplicable qui compromet, peut-être au
départ au moins, la mise en application de la loi durant les premiers
mois. Je pense que c'est une difficulté qu'on va surmonter avec le
temps, mais il reste qu'on risque de décevoir les attentes
créées par
l'adoption de la loi et par la longue période d'attente que le
ministre avait prise avant de décréter son application.
M. Lazure: M. le Président, je ferais d'abord remarquer
que c'est une loi qui est appliquée par deux ministres. En ce qui
concerne la partie qui relève du ministre des Affaires sociales, nous
avons obtenu des crédits en novembre dernier et l'autorisation a
été transmise aux 14 centres de services sociaux. Les $5 millions
dont parle le député de Saint-Laurent, c'était pour le
reste de l'année budgétaire 1978/79. (20 h 45)
La promulgation complète de la loi 24 s'est faite en janvier
1979, si bien qu'à partir de novembre, les centres de services sociaux
ont pu procéder à l'embauche de personnel pour la direction de la
protection de la jeunesse dans chacun des quatorze CSS. Cette somme, sur une
base annuelle, est d'environ $10 millions on va le voir dans les
crédits cette année plus un peu plus de $1 million pour le
transport.
Quand le député de Saint-Laurent parle du retard indu pour
la promulgation et l'application de la loi, je pense que la critique n'est pas
tellement appropriée, n'est pas tellement valable. C'est une loi qui
changeait, de façon assez radicale, les processus ou toutes les
démarches à faire dans le cas de l'arrestation d'un mineur ou
dans les situations où un mineur a besoin de protection. Des changements
fondamentaux comme cela, de philosophie et de pratique, doivent être
précédés d'une certaine éducation. C'est ce qu'on a
fait par l'entremise d'une mission d'implantation. Il y a eu d'abord une
mission pour informer le public réduit, d'abord, ceux qui allaient
devoir implanter cette loi dans le domaine des Affaires sociales, de la Justice
et de l'Education en particulier, et la mission d'information qui s'est mise en
marche très tôt, après l'adoption de la loi, a fait un
excellent travail. Cette mission a été suivie d'une autre
mission, une mission d'implantation. Pour nous, c'était important de
prendre cette période de plusieurs mois pour être bien sûr
qu'autant les corps policiers que les centres de services sociaux, le personnel
scolaire, les parents, le public en général, soient bien au
courant des procédures.
Donc, les centres de services sociaux ont procédé à
l'embauche, en novembre, avec des crédits. Et, au moment, où on
se parle, le personnel est à peu près complet dans les quatorze
centres de services sociaux. Cela représente environ 350 postes dans les
directions de la protection de la jeunesse.
Je suis bien conscient que les centres de services sociaux demandaient
une somme presque double, aux environs de $20 millions. Il est possible qu'on
doive, au cours de l'année 1979/80, recourir à des budgets
supplémentaires. C'est possible. Mais on a finalement eu cette entente
avec l'Association des centres de services sociaux, pour démarrer avec
un budget "annualisé" de $11 millions, ce qui est quand même une
injection importante d'argent pour l'application d'une loi.
Jusqu'ici, j'en prends comme preuve le fait que les media ont
rapporté très peu de complications dans l'application de la loi.
Il y en a des problèmes, c'est sûr, le contraire aurait
été surprenant, dans une loi qui est si différente de la
précédente. Il y a des problèmes, autant du
côté des tribunaux de la jeunesse que du côté d'un
certain embouteillage, un certain encombrement dans certains centres de
services sociaux.
En gros, comme on peut s'y attendre, les centres de services sociaux de
Montréal et de Québec surtout de Montréal
sont particulièrement encombrés. Les signalements sont plus
nombreux qu'on l'avait prévu. Mais, d'autre part, dans les autres, la
grande majorité des CSS, il n'y a pratiquement pas d'encombrement et
tout se déroule de façon normale. Plus on va dans les
régions périphériques, les régions rurales et
semi-rurales1, l'application de la loi présente très
peu de difficultés.
M. Forget: M. le président, je n'ai pas blâmé
le ministre d'avoir pris un an pour faire une mission d'implantation et de
s'assurer qu'à la fois les responsables du ministère de la
Justice, les forces policières, les tribunaux, etc., soient saisis des
nouvelles dispositions légales applicables. Au contraire! Je pense que
c'était tout à fait sage et prudent de bien aménager
l'application de la loi.
Justement, c'est là le point que je veux soulever. Si on voulait
vraiment faire ce travail vis-à-vis de tous ceux qui auraient à
agir dans le cadre de la nouvelle loi, est-ce qu'il n'aurait pas
été plus raisonnable de libérer des'budgets un peu plus
tôt dans l'exercice de manière que la mission d'implantation
s'adresse aussi aux 350 personnes qui, finalement, n'ont été
engagées qu'en janvier, une fois la mission terminée?
Il y a un problème de rodage, non seulement pour ceux qui sont
déjà dans le réseau et déjà impliqués
dans les problèmes de l'enfance, les rnésa-daptés sociaux,
mais aussi pour les nouveaux qui y sont admis. Bien sûr, par hasard, il
peut se faire qu'un certain nombre des postes, des 350 postes, aient
été comblés par des gens qui étaient
déjà familiers avec le système de la Cour de la jeunesse,
etc., et qui avaient pu faire des lectures privément sur la loi. Mais il
demeure que ces gens ont eu bien peu de délai pour se familiariser avec
les rouages d'une loi nouvelle dont ils sont les premiers responsables, parce
que les autres jouent un rôle passif.
Les cours, en particulier, et même les centres d'accueil, sont les
points de chute de ce système, mais l'initiative, la
responsabilité première appartient au directeur de la protection
de la jeunesse et à ses délégués, ce qui en fait
des agents principaux du système. Mais ce sont ces gens qu'on a
engagés à partir de décembre. Dans un certain nombre de
cas, nous a-t-on signalé seulement en janvier quelques
jours à peine avant l'introduction, la mise en vigueur de la loi, comme
le gouvernement avait le préavis de onze mois, il eût
été souhaitable, me semble-t-il, que, dès le mois de
juillet ou août, au plus tard en septembre, le
ministre fasse connaître aux centres de services sociaux, les
autorisations qui seraient les leurs pour engager le personnel nouveau, quitte
à leur donner, à leur en intimer l'ordre, au besoin, que ces
crédits étaient prévus pour les trois derniers mois ou les
deux mois et demi précédant le 15 janvier 1979, de manière
à permettre leur rodage.
Par exemple, dans le cas des centres d'accueil, quand on ouvre un centre
d'accueil ou qu'on ouvre un centre hospitalier, il est bien connu que le
personnel est engagé avant le jour de l'ouverture. On commence par les
cadres et on engage du personnel plusieurs semaines avant le début des
activités comme telles, et c'est le point que je voulais soulever. Le
ministre a glissé rapidement là-dessus. J'imagine qu'il y a eu
des difficultés de coordination interne du gouvernement, mais on ne peut
pas faire autrement que de souligner ici qu'il y a eu un retard. Même si
les autorisations d'engager le personnel parviennent à la mi-novembre,
même au début de novembre, on sait très bien qu'il n'est
pas possible d'engager des gens la même semaine. Il y a toutes sortes de
formalités qui doivent être suivies. Les conventions collectives
en prévoient un bon nombre et les engagements sont étalés
sur plusieurs semaines. Quand c'est en termes de semaines seulement, c'est
heureux. Cela peut également prendre quelques mois. Dans ces
circonstances, je pense que s'imposait un préavis, dont disposait le
ministère, et, fort sagement d'ailleurs, il s'est donné le temps
de l'appliquer. Mais, sur cet aspect, il a un peu court-circuité son
propre processus et c'est dommage.
Pour ce qui est de l'attitude des autres agents, tels que les forces
policières, les tribunaux, on fait état également d'un
certain nombre de problèmes. C'est un problème d'ajustement et
j'imagine que ça va se résorber avec le temps. De toute
façon, on y reviendra l'an prochain, quand on n'aura plus de recul.
Il n'y avait que cet aspect que je voulais souligner, le retard apparent
dans les autorisations d'engagement du nouveau personnel.
M. Lazure: Juste une dernière remarque, M. le
Président. Il faut se rappeler que les directeurs de la protection de la
jeunesse dans chacun des quatorze CSS ont été engagés plus
tôt que novembre, beaucoup plus tôt. Ils ont été
engagés en mai ou juin, si bien que la mission d'implantation s'est
faite avec ces gens, avec les cadres, si on revient à votre exemple de
la construction d'un hôpital où on engage les cadres un an ou six
mois avant que la construction soit terminée. C'est ce qui est
arrivé pour la protection de la jeunesse. Alors, les DPJ, les directeurs
étaient là. Deuxièmement, beaucoup de ces 300 ou 350
personnes, comme vous l'avez dit, M. le député de Saint-Laurent,
étaient déjà en place. Il s'agissait bien souvent d'un
transfert d'une direction à une autre. J'ajouterais que, pour le
personnel des centres de services sociaux, les nouvelles dispositions de la loi
ne tombaient pas comme une surprise. La plupart de ceux qui suivaient les
discussions depuis quatre ou cinq ans au Québec dans ce domaine
étaient bien au courant de l'orientation que la nouvelle loi aurait.
C'est une orientation qui était réclamée, d'ailleurs, par
les centres de services sociaux. Donc, le personnel, en gros, dans les centres
de services sociaux, non seulement était d'accord avec cette nouvelle
philosophie, cette nouvelle approche, mais était déjà et
mentalement et techniquement préparé, dans bien des cas, à
l'appliquer.
Ceci étant dit, il est certain qu'il y a des problèmes de
rodage, les problèmes de la période initiale de toute application
d'une nouvelle loi, mais, dans l'ensemble, je pense que cela va encore mieux
qu'on ne l'aurait prévu. Mais il faut rester vigilant. Effectivement, on
pourra en reparler dans un an.
Le Président (M. Marcoux): Sur le même sujet, il y a
trois députés: M. le député de Sherbrooke, Mme le
député de L'Acadie et M. le député de
Mégantic-Compton.
M. Grenier: Je vais m'absenter pour aller en Chambre et je
reviendrai après le débat. Je ne pense pas que la période
de questions générales sera terminée.
Le Président (M. Marcoux): D'accord. Non, je ne crois pas.
M. le député de Sherbrooke, Mme le député de
L'Acadie.
M. Gosselin: Ce n'est pas tellement long, mais c'est dans le
même sens, puisqu'on parle de l'application de la Loi sur la protection
de la jeunesse. Je pense qu'on conviendra tous que cette loi a eu un impact
inespéré. En tout cas, on en espérait un bon impact, parce
qu'elle était attendue depuis très longtemps, mais l'impact
qu'elle a effectivement eu a débordé les prévisions qu'on
avait pu faire, tellement l'attente était vive et tellement il y a eu
tout un courant de sensibilisation en tout cas, c'est comme cela que
cela s'est produit à Sherbrooke qui a fait qu'il y a un paquet de
cas qui ont été référés, des cas de gens
qui, dans la filière traditionnelle, ne trouvaient d'écoute nulle
part ailleurs. À Sherbrooke comme ailleurs, le centre de service social
a failli être débordé. Je dis bien "a failli", parce que,
les premières semaines, après la publicité qui a
été faite, on a reçu tellement d'appels qu'on ne savait
pas trop comment y répondre. On a dû établir une liste de
priorités. Je pense que l'opération est assurément bien
amorcée et que les collaborations avec les autres secteurs chez nous
fonctionnent particulièrement bien.
Dans l'évolution de la loi, dans l'évolution des services
pour la protection de la jeunesse, j'ai quand même une certaine
inquiétude et je voudrais la manifester ici. Cela tient aux discussions
que j'ai pu avoir avec les travailleurs sociaux. On craint vaguement que le
volume de demandes qui sont adressées impose tôt ou tard un "case
load" tel qu'il y ait une sorte de pratique qui se définisse dans ce
secteur, un peu par la force des choses, à
cause du "case load" accéléré qui, finalement,
empêche de réaliser la véritable intention de la loi,
tôt ou tard. On peut facilement imaginer que, si le "case load" devient
trop important, les agents vont nécessairement être forcés
d'appliquer des décisions plus expéditives de placements en
centres d'accueil, par exemple. La loi suppose une démarche tout autre.
Elle suppose une intervention dans le milieu familial, un suivi, un
accompagnement. Elle suppose la recherche d'un milieu de support auprès
de l'enfant, la recherche de milieux tuteurs, l'association de parents ou
d'amis à une démarche d'accompagnement auprès de l'enfant.
Cette action, très concrètement, qui va donner à la Loi
sur la protection de la jeunesse son véritable impact et sa
véritable chance de réaliser ses véritables objectifs,
cela suppose qu'on établisse toujours ou de plus en plus une
pondération pour l'avenir quant à la mise sur pied de services
d'accompagnement aux professionnels. Ce que je veux dire, c'est
l'identification de bénévoles, l'identification de ressources
dans le milieu, qui s'appellent des prêtres ou des enseignants
d'écoles et des professeurs d'écoles ou des parents tuteurs, pour
être aussi des intervenants avec les professionnels auprès des
enfants. (21 heures)
Je pense qu'on devra vérifier de très près,
après un an d'application de la loi, jusqu'où le "case load" ou
la pratique professionnelle qui s'établit permet ou a permis de
développer ces ressources d'accompagnement en dehors du milieu
professionnel. J'ai l'impression qu'il faudra probablement dégager des
fonds spécifiques pour l'avenir et donner les directives aussi aux CSS,
dans le sens d'engendrer le plus possible ces milieux supports et s'assurer,
donc, d'échapper à un style de pratique professionnelle trop
exclusive qui pourrait se développer avec le temps.
Le Président (M. Marcoux): Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce que le ministre veut répondre?
Non?
M. Lazure: II y a des dispositions dans la loi qui
prévoient justement les rôles des organismes
bénévoles, des accompagnateurs, que ce soient enseignants ou
tuteurs, et les centres de services sociaux ont été
incités à utiliser ce genre de personnel au maximum. Quant
à savoir si, éventuellement, ça pourra occasionner des
dépenses additionnelles, on pourra l'étudier.
Mme Lavoie-Roux: J'ai deux questions très
spécifiques à vous poser. On a dit tout à l'heure que les
quatorze directeurs de la protection de la jeunesse, les DPJ, comme on les
appelle, ont été nommés. Est-ce qu'il y a eu des
démissions et, si oui, combien, et pour quelles raisons?
M. Lazure: On me dit qu'il y en a eu trois. Je savais qu'il y en
avait eu quelques-unes. Un instant, si vous permettez.
Il y a eu effectivement trois démissions.
M. le Président, on m'informe que ce n'est pas trois, c'est deux
démissions; une dans la région de Laurentides-Lanaudière,
démission qui est arrivée juste au moment de l'implantation, fin
janvier, début de février. Il semble qu'il y avait eu. de la part
de la personne qui avait accepté le poste, une compréhension
incomplète du rôle, en tout cas. L'autre démission, dans la
région 02, on me dit que c'était à cause de maladie.
Mme Lavoie-Roux: II n'y a eu que deux démissions.
M. Lazure: C'est ce qu'on me dit.
Mme Lavoie-Roux: Vous en êtes bien sûr?
M. Lazure: II semble. On cherchait le troisième. C'est
avant l'application de la Loi de la protection de la jeunesse. Un directeur de
la protection de la jeunesse à Montréal a abandonné ce
qu'il s'apprêtait à assumer. La loi n'était pas encore en
vigueur.
Comme vous le savez, même avant l'application de la loi, certains
CSS avaient embauché une personne qui occupait le poste de directeur de
la protection de la jeunesse.
Mme Lavoie-Roux: Parmi ces nominations, combien étaient
des hommes et combien étaient des femmes?
M. Lazure: Malheureusement, à ma courte honte,
malgré que je ne devrais pas m'en sentir coupable c'est vrai
qu'on est responsable de tout, comme ministre mais je dois avouer qu'il
y avait une femme seulement parmi les quatorze et elle a
démissionné; c'est une des deux démissionnaires.
Mme Lavoie-Roux: Cela, je ne le savais pas.
M. Lazure: On se passe de l'information l'un, l'autre.
Mme Lavoie-Roux: II y a quelque chose qui ne marche pas dans le
réseau, parce que ce sont des gens qui relèvent des CSS
où, traditionnellement, sauf durant les dernières années
évidemment, le temps passe et on ne s'en aperçoit pas
il y avait beaucoup de femmes, et voilà qu'on se retrouve avec...
Je vais même vous en concéder une. Le fait de démissionner,
ce n'est peut-être la faute de personne, mais il y a des questions
sérieuses à se poser...
Autre question: Est-il exact que les tribunaux de la jeunesse, à
deux reprises, ont déclaré certains articles de la loi 24 ultra
vires?
M. Lazure: Je peux vous dire oui, tout de suite. Il est exact
qu'un tribunal a émis l'opinion qu'un article... Mais, si vous voulez,
cela commence à être des détails très précis.
J'aimerais consulter les fonctionnaires pour avoir le numéro
précis de l'article.
C'est très complexe. Il y a eu une première opinion, celle
dont je faisais mention tantôt et on me dit qu'un deuxième
tribunal a émis l'opinion contraire. Ce litige, cete divergence
d'opinions est actuellement à l'étude au ministère de la
Justice et cela touche un article qui a trait à la
confidentialité des témoignages du personnel d'une direction de
protection de la jeunesse.
Mme Lavoie-Roux: Ma question spécifique est celle-ci:
Quand vous dites qu'un deuxième tribunal a contredit le premier, est-ce
que c'est parce qu'on est allé en appel? Si ce n'est pas le cas, est-ce
que le ministère de la Justice a l'intention d'aller en appel sur ce qui
a été déclaré par un premier tribunal comme ultra
vires, ou le ministère de la Justice ou le gouvernement entend-il
modifier la loi? Que va-t-il advenir de ce problème?
M. Lazure: Effectivement, il s'agissait de deux avis
parallèles, si on peut dire, au même niveau de tribunal, deux avis
parallèles différents. Le ministère de la Justice va en
appel sur le premier avis.
Mme Lavoie-Roux: II n'y a eu qu'un seul cas où cela a
été déclaré ultra vires.
M. Lazure: C'est l'article 58.
Mme Lavoie-Roux: Un seul cas, à votre connaissance.
M. Lazure: Oui, l'article 58. Mme Lavoie-Roux: Parfait,
merci.
Le Président (M. Marcoux): Est-ce qu'il y a d'autres
remarques générales avant d'entreprendre l'étude des
programmes?
M. Forget: Oui, M. le Président.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Forget: On apprenait, dans le journal d'aujourd'hui, qu'hier,
le ministre des Affaires sociales a déclaré ce qu'il a
d'ailleurs répété ce matin qu'il y aurait un budget
de développement pour la première fois en deux ans du
côté des CLSC. On s'en réjouit et c'est une heureuse
coïncidence que cette affirmation soit faite le matin même où
on commence l'étude des crédits, parce qu'on allait sans aucun
doute demander au ministre quelles étaient ses intentions, à
moyen et à long terme, relativement aux CLSC. Dans les années
antérieures, il a indiqué de façon un peu ambiguë, on
ne savait pas exactement si c'était pour des raisons budgétaires
ou pour des raisons de principe, qu'il n'y avait pas de développement,
qu'on se bornait, si je comprends bien, à "annualiser" un certain nombre
de développements antérieurs à 1977, à
régulariser la situation, sous réserve bien sûr de
l'addition de personnel pour les soins à domicile, comme le ministre l'a
dit ce matin, qui faisait exception à la règle
générale.
Il y aurait donc $4 200 000 au développement des centres locaux
de services communautaires, mais il serait utile de savoir, au-delà de
ces $4 200 000, quelles sont les intentions du ministre relativement à
cette question de développement. On développe jusqu'où?
Dans quel but? Quelle est l'intention finale de ce processus de
développement? La question a été posée, bien
sûr, entre autres par l'Association des centres locaux de services
communautaires dans deux articles qui ont eu une large diffusion, où on
pose justement la question: Quelles sont les orientations du ministre,
où veut-il nous amener? L'association, qui est bien placée pour
le savoir, pour ne pas le savoir ou pour dire qu'elle ne le sait pas, affirme
ne pas saisir les intentions du ministre relativement à cette question.
Ce n'est pas la seule, je pense qu'il n'y a pas grand monde qui sache
clairement où se dirige le gouvernement actuel relativement aux CLSC.
Différents membres du gouvernement ont émis, à
l'égard des CLSC, des opinions fort critiques. Le premier ministre
lui-même, l'automne dernier, a dit qu'il fallait revoir ce programme,
revoir ces établissements, leur conception, leurs orientations. Le
ministre des Finances, dans le discours du budget, a dit qu'il y aurait des
fonds pour le développement, mais il a dit qu'ils seraient
répartis de manière discriminatoire, c'est-à-dire dans le
sens de favoriser ce qu'il considère comme des établissements
performants.
Je ne sais pas si ceci coïncide avec la décision du ministre
des Affaires sociales de confier aux conseils régionaux le soin de
répartir les sommes. Il resterait à savoir comment se
définit la notion de CLSC performant. Est-ce la même
définition qu'ont à l'esprit le ministre des Finances, le
ministre des Affaires sociales et les CRSSS? Ce serait un peu surprenant,
étant donné qu'on ne sait la définition d'aucun de ces
trois centres possibles de décision. Parce que performant s'entend par
rapport à un objectif et c'est justement la question qui est
posée. Qu'est-ce que l'on veut privilégier, qu'est-ce que l'on
veut faire, de quelle façon un CLSC qui voudrait se mériter une
subvention de développement peut-il améliorer sa performance? Il
y a bien des significations qu'on peut donner à tout ça.
Il y a une chose que je remarque cependant, et je ne sais pas si c'est
la définition de performant, quand je fais l'analyse comparative des
effectifs qui étaient dans les CLSC en mars 1976 et ça se
retrouve dans un document qui a été déposé par
moi-même lors de l'étude des crédits en 1976, avec les
effectifs dont disposent les CLSC en mars 1979, exactement trois ans plus tard,
on se rend compte que si ces chiffres sont tous exacts et comparables, et je
pense qu'ils le sont, leur présentation même suggère qu'ils
le sont, nous avions des effectifs totaux de 1750 personnes en mars 1976 et en
mars 1979 on avait des effectifs de 2774. Or, quelle n'est pas ma surprise de
constater que puisqu'il faut bien le dire, il y a trois modules ou trois
regroupements de ressources à l'intérieur de ces CLSC. Il y a le
module administration ou gestion, il y a les ressources de santé et les
res-
sources socio-communautaires. C'est le même groupement, je pense,
qui existait en 1976 et qui existe actuellement en 1979. Or, je remarque que le
module gestion, qui regroupe les activités d'accueil et
d'administration, comptait 550 postes j'arrondis le chiffre il y
a trois ans et maintenant compterait le total n'est pas fourni, mais on
peut le faire rapidement environ 1200 postes aujourd'hui.
M. Lazure: Vous pourriez répéter, s'il vous
plaît! Juste la dernière phrase.
M. Forget: Oui, 1200 postes en 1979 pour l'administration.
M. Lazure: Par rapport à...
M. Forget: Par rapport à 550. Or, la proportion n'est pas
la même quand on regarde la croissance du nombre total des effectifs de
1750 à 2774, c'est un peu plus, environ 1000 postes de plus, par rapport
à 1774 donc, c'est à peu près 60%. On a
ajouté 60% aux effectifs globaux, d'un autre côté, les
effectifs affectés aux tâches de soutien et de gestion sont
passés de 550 à 1200. Donc, on les a plus que doublés. Je
me dis c'est peut-être une question mal informée
qu'on semble s'être écarté dans le mauvais sens du mot
d'une norme ou d'un guide administratif au moins que j'avais
suggéré moi-même en 1976, c'est-à-dire que les
effectifs de soutien ne dépassent pas 25% de tous les effectifs parce
que, quand les frais d'administration c'est essentiellement de ça
qu'il s'agit dépassent 25% d'un programme, je pense que c'est un
programme où l'administration est trop lourde. Or, quand on est rendu
à 1200 postes... non, je m'excuse, j'ai induit le ministre en erreur,
j'ai additionné deux colonnes qui ne doivent pas s'additionner, on est
passé de 550 non pas à 1200, parce qu'il y a des doubles lignes
et des simples lignes, des fois je les fais à vue, on est passé
à 700 plus 247, on est donc passé à 947. (21 h 15)
Bon, on a à peu près ajouté 400 postes par rapport
à 500, on a presque doublé. Cela ne détruit pas l'argument
que je faisais tout à l'heure, parce que je m'étais basé
à l'origine sur le bon total. Il semble qu'on soit, à ce
moment-ci, à 947 postes, 946 postes pour être exact, à
temps plein, sur un total de 2774 postes. Si je ne m'abuse, on est à peu
près à 35% par rapport à un total un peu plus modeste,
mais qui était déjà trop élevé à mon
avis, sur le plan des frais administratifs en 1976.
Ma question est donc double, M. le Président; d'une part,
où le gouvernement s'en va-t-il avec les CLSC, quel est son objectif
final, à moyen ou à long terme, ou existe-t-il actuellement un
tel objectif, ou se borne-t-on à encourager ceux qui vont bien en
freinant ceux qui vont moins bien, en se disant: II y aura une
évaluation qui se fera à une époque ultérieure et
où on prendra véritablement des orientations? C'est un
problème qui mériterait d'être éclairci.
Deuxièmement, quand on essaie de clarifier un peu ce que veulent
dire "performant" et "non performant", est-ce que ce problème du poids
de l'administration dans le budget des CLSC est une des composantes du
critère de performance?
M. Lazure: D'abord, pour les remarques générales.
Quant à la philosophie ou la politique du gouvernement vis-à-vis
du réseau des CLSC, on a établi assez clairement, il me semble,
autant avec la fédération des CLSC qu'avec les différents
organismes parapublics ou publics qui s'y intéressent, que nous allions
nous concentrer sur la consolidation des effectifs des CLSC existants avant de
procéder, le cas échéant, à la multiplication de
nouveaux CLSC, si bien que, depuis deux ans, l'an passé et cette
année, nous n'ouvrons pas de nouveaux CLSC. Cette année, nous
avons pu obtenir des crédits de développement d'un peu plus de $4
millions.
Cela reste un principe fondamental, nous pensons qu'il est sage de bien
établir les 81 CLSC qui existent avant d'ouvrir de nouveaux CLSC.
Deuxièmement, on veut aussi faire en sorte que les services des CLSC
deviennent encore plus complémentaires qu'ils ne l'ont été
par le passé avec les services des autres établissements dans le
réseau des affaires sociales, qu'il s'agisse d'hôpitaux, de
centres d'accueil, de centres de services sociaux. Tout le monde convient qu'il
y a encore de l'amélioration à obtenir du côté de la
complémentarité, pour faire en sorte qu'il n'y ait pas de
dédoublement de services dans un même quartier, dans une
même région.
Une fois cette consolidation assez bien établie, une fois la
complémentarité des services assez bien développée,
nous désirons créer de nouveaux CLSC. On a dit très
clairement aussi que notre priorité ira vers des régions rurales,
semi-rurales, des régions qui ont moins de services actuellement, des
services de santé et des services sociaux, que les régions
urbaines.
Il me semble que ces trois volets résument bien notre approche,
notre politique vis-à-vis de l'ensemble des CLSC. Les CLSC connaissent
cette politique. Par exemple, en termes très clairs, en termes concrets,
pour l'an prochain, ça pourrait vouloir dire obtenir des crédits
de développement, espérons-le, supérieurs à ce
qu'on a obtenu cette année, pour mettre à un niveau de
fonctionnement optimal, pas idéal mais souhaitable, la majorité
des CLSC.
Quant à la performance, nous avons dit dans la circulaire qui
vient d'être expédiée aux conseils régionaux et aux
81 CLSC, circulaire qui établit quelques critères fondamentaux
pour l'attribution des montants d'argent, par les CRSSS, à la fin, qu'il
revenait aux conseils régionaux et aux CLSC d'évaluer ensemble la
performance des CLSC et d'en tenir compte dans l'attribution des nouveaux
montants.
Les quelques critères sont assez simples. D'abord, on a
établi qu'il y a une dizaine de CLSC qui sont jeunes, ceux qui avaient
été créés surtout
il y a deux ans, la dernière série, qui n'ont même
pas $275 000 de budget annuel. On leur accorde priorité et on prend une
partie du $4 200 000, environ $700 000, pour immédiatement les placer
à ce seuil minimal de $275 000.
D'autre part, l'autre extrême de l'éventail, il y a une
quinzaine de CLSC qui ont obtenu, à travers les années, un budget
de fonctionnement qui est assez normal, assez acceptable, qui joue autour de $1
million, selon la population qu'ils ont à desservir.
On a convenu que ces CLSC ne toucheraient pas de crédits de
développement. Donc il en reste, grosso modo, peut-être 55 qui
vont se partager le reste de cet argent. Et quant au dernier critère
qu'on a établi, on a dit que région par région, une fois
la portion du $700 000 qui touche la région enlevée de
l'enveloppe régionale, le solde de l'enveloppe régionale devra
être réparti de la façon suivante: Pour les CLSC en milieu
urbain, dans la région donnée, 5% d'augmentation par rapport au
budget de 1978/79, pour les CLSC ruraux et semi-ruraux, 10% d'augmentation par
rapport à leur budget de l'an passé. Voilà pour les
critères assez généraux qui ont été
présentés aux CLSC et aux CRSSS.
Quant au personnel, j'ai quelques chiffres devant moi. Dans l'ensemble
des 81 CLSC et ces chiffres remontent à quelques mois,
évidemment, mars 1979 on retrouve 3300 employés, dont 650
à temps partiel. La composition de ces 3300 est la suivante: II y a 300
médecins, 900 employés du côté personnel de
santé, 1130 du côté personnel de services sociaux, 800 du
côté du personnel de soutien et 250 du côté du
personnel de cadre.
Si on commence par le personnel de cadre, 250, par rapport aux 3300,
cela nous donne 7,5%, comme proportion de cadres, pour l'ensemble des
employés. Jusque-là, je pense que c'est assez régulier,
c'est assez normal. C'est à peu près la proportion que l'on
retrouve dans le réseau hospitalier, 7,5% de cadre. 800 employés
de soutien, cela veut dire 24%. Le pourcentage peut paraître assez
élevé, surtout si on l'additionne au 7% de cadre. Et l'addition
n'est pas nécessairement appropriée dans les circonstances.
Jusqu'à un certain point, cela s'additionne, mais pas
complètement. Il y a du personnel de soutien, évidemment, qui
peut être fort actif dans la distribution de soins de santé ou de
services sociaux, dans les soins directs. Mais, à tout
événement, ce que le député de Saint-Laurent
soulevait tantôt, la proportion grandissante des cadres, là non
plus... Si on regarde le recul, il y a eu une apparente augmentation du
personnel de soutien, le fameux 24%. C'est rattaché, en bonne partie,
à la création de ces 12 nouveaux CLSC il y a deux ans. Il s'agit
justement de CLSC qui sont en bas du seuil de fonctionnement minimal, de budget
minimal et qui, d'autre part, comme un nouvel hôpital, engagent leurs
cadres pour partir et ensuite, embauchent le reste du personnel.
Il y a un certain nombre de CLSC qui ont un pourcentage de personnel
cadre ou de soutien plus élevé qu'au moment où le CLSC
aura atteint sa vitesse de croisière. Si la remarque
générale du député de Saint-Laurent implique qu'il
faille surveiller l'addition ou la multiplication de personnel cadre ou de
soutien dans les CLSC, ça serait vrai également dans les
hôpitaux et dans les centres de services sociaux. Là-dessus, j'en
conviens; c'est une chose qu'il faut surveiller de très près. Il
faut constamment inciter les gens à dépenser l'argent nouveau
qu'on leur donne pour du personnel; c'est ce que notre circulaire, la
dernière, concernant les CLSC dit très bien concernant l'aide
à domicile aussi, qu'il faut mettre l'accent sur l'embauche de personnel
qui va dispenser des services directs à la population. Alors, si c'est
ça que le député de Saint-Laurent veut comme mise en
garde, elle est tout à fait appropriée.
M. Forget: M. le Président, je suis heureux que le
ministre confirme essentiellement ce que je lui avais dit il y a deux ans,
quand il avait décidé l'implantation de douze CLSC, sans avoir de
crédits de développement suffisants. Il s'exposait justement
à voir s'alourdir l'importance relative des cadres, d'avoir beaucoup de
chefs et peu d'Indiens dans le réseau des CLSC, puisqu'il est clair
qu'on commence par engager les cadres et si on n'a pas d'argent pour faire
autre chose, on reste pris avec une institution où il y a seulement des
cadres qui ne donnent aucun service et qui attendent simplement que les budgets
soient débloqués. Si c'est ça, je doute que ça
suffise à expliquer un haut pourcentage. Je ne veux certainement pas
dire qu'il suffit de s'inquiéter du phénomène et
d'être vigilant. Il y a des...
M. Lazure: Si vous me permettez une question, de quel haut
pourcentage parlez-vous? De 7,5% pour les cadres ou de 24%...
M. Forget: Je ne fais pas de distinction. Je regarde simplement
l'ensemble des tâches administratives, par rapport aux tâches des
prestations de services. Il reste que c'est le meilleur indicateur. Comment le
travail est divisé entre le secrétaire et un directeur
quelconque, dans le fond, m'importe peu. Il s'agit de savoir si, globalement,
les tâches de pousser la paperasse ne prennent pas une importance
disproportionnée, parce qu'essentiellement, l'administration s'occupe de
pousser la paperasse, de pousser les papiers d'un côté du bureau
à un autre côté et, en somme, ça n'aide personne. Il
y a un minimum de ces choses qui est nécessaire, mais si on n'a pas des
limites strictes sur leur prolifération, on sait que c'est un domaine
où l'emploi peut se multiplier à plaisir. Il y a plus que
d'être inquiet et préoccupé. Il faut avoir des orientations
très claires là-dessus.
Parlant d'orientations très claires, je regarde les paroles que
Renée Rowan, journaliste du journal Le Devoir, prête au ministre
relativement à sa déclaration d'hier. Cela doit être
extrait d'un communiqué de presse où on cite le ministre, en
disant que certains CLSC, dans le passé, face à des situations
budgétaires difficiles, ont réalisé des prouesses
administratives qu'il y a lieu de "récompenser", maintenant qu'on a un
peu plus
d'argent. Qu'est-ce que le ministre voulait dire par ça ou
peut-être qu'il va nous dire qu'il ne l'a pas dit, que c'est une
extrapolation de la part du journaliste. Mais je pensais qu'il y avait
là une indication d'un désir d'utiliser des critères qui
soient autres que simplement les 5% pour les urbains et les 10% pour les
ruraux.
M. Lazure: Non, et on pourrait déposer dès demain
la circulaire en question. Cela ne pose pas de problèmes. Je vous assure
que le dernier paragraphe de la circulaire est très clair, quant
à nous, nous nous en remettons aux conseils régionaux et aux
commissions administratives des services communautaires, des conseils
régionaux qui sont formés majoritairement des CLSC. On s'en remet
à eux pour évaluer cette performance. On n'est pas en mesure de
l'évaluer dans le moment. S'il y avait eu un système de
cueillette de données, ne serait-ce que des données statistiques
de mises sur pied, à l'origine, au moment où le
député de Saint-Laurent était ministre des Affaires
sociales, on pourrait le faire plus facilement. Enfin, on va réussir,
à partir du mois de septembre, à avoir des données
informatisées, venant de tous les CLSC. Dieu sait que cela a pris
beaucoup de démarches. On a commencé, on les reçoit en
partie et on les recevra en totalité à partir du 1er septembre.
On devra faire comme on a fait pour les hôpitaux dans les CLSC, comme
n'importe quel type d'établissement. Je pense que c'est de la saine
gestion. (21 h 30)
On pourra, à un moment donné, comparer le rendement des
CLSC dans la mesure où on tient compte de populations à peu
près similaires, de bassins de populations aussi quantitativement
semblables. Il faudra en arriver à établir je pense qu'on
ne se sort pas de cette espèce de guide qui reste toujours
aléatoire, mais c'est encore ce qu'on connaît de mieux comme guide
de rendement moyen. J'ajouterais aussi que, dans le cas de nouveaux CLSC, il
est bien évident que, cette année, puisqu'on n'ouvre pas de
nouveaux CLSC, ce pourcentage qui semble un peu gonflé de personnel de
soutien et de personnel de cadre devrait diminuer, parce que le personnel qui
va être embauché avec les $4 200 000, essentiellement, ce ne sera
pas du personnel de cadre ni du personnel de soutien. Ce sera du personnel de
services directs et on devrait assister à une certaine diminution de ce
pourcentage.
J'ajouterai une dernière chose. Les 7,5% de cadres ne sont pas
exagérés. On les retrouve dans la plupart des autres types
d'établissements, y compris dans l'entreprise privée. Les 24% de
personnel de soutien, j'aimerais qu'on puisse faire le calcul rapidement dans
les hôpitaux, mais, de mémoire, j'ai l'impression qu'on arriverait
à peu près au même pourcentage. Si vous prenez un gros
hôpital où il y a 3000 employés au total, j'ai l'impression
que si on additionne tout le personnel de soutien administratif, entretien,
etc., on arriverait à 20% ou 25% facilement.
M. Forget: M. le Président, le ministre m'intrigue en
disant qu'il n'y a pas de système de collecte des données. Il y a
malgré tout depuis le début du fonctionnement des CLSC un
système qui a été implanté par un groupe de
l'Université Laval, qui avait été transféré
au ministère vers 1976 et qui a été
généralisé à tous les CLSC à ce moment.
Est-ce que ce système a été abandonné
subséquemment par le ministère?
M. Lazure: Non, M. le Président, ce système, je le
connais bien, il couvrait 11 CLSC.
M. Forget: Oui, c'était une expérience au
départ.
M. Lazure: C'est pour cela que je parle de système
partiel.
M. Forget: II a été élargi à tous en
1976.
M. Lazure: C'est cela. Le "dry run" a été fait
à plusieurs reprises. Au 1er septembre, on aura les données
informatisées pour les 81 CLSC.
Mme Lavoie-Roux: Vous ne partez pas de rien.
M. Lazure: On part des données de 11 CLSC. C'était
un effort louable, un effort valable, mais ce n'étaient pas des
données complètes, même sur les 11 CLSC.
M. Forget: Pourquoi cela n'a-t-il pas été
étendu à plus que 11 depuis 1976, parce que la décision
avait été prise en 1976 de l'étendre à tous?
M. Lazure: On me dit que le système était partiel,
et pas seulement partiel parce qu'il touchait seulement 11 des 70 CLSC à
l'époque, mais aussi parce qu'il ne touchait pas toutes les
activités des 11 CLSC. On l'a étendu à toutes les
activités des CLSC. À ce moment, le ministère et la
fédération des CLSC ont convenu qu'il valait mieux brancher ce
système sur l'ordinateur du ministère, sur l'équipement
qui existe au ministère et qui est encore sous-utilisé.
M. Forget: Je reviens à ma question. Pourquoi n'a-t-il pas
été possible avant septembre de cette année, si je
comprends bien, de généraliser à l'ensemble des
établissements ce système d'information?
M. Lazure: Essentiellement, il n'y a pas de mystère. Les
négociations avec la Fédération des CLSC ont
été très longues, encore une fois, parce que notre
objectif était d'inclure toutes les activités des CLSC, et il y
avait une certaine résistance.
M. Forget: Sur le caractère confidentiel de certaines
données peut-être.
M. Lazure: Oui. On a éliminé toute menace d'accroc
au caractère confidentiel. On a un proto-
cole. On s'est entendu avec la Fédération des CLSC, comme
je le disais tantôt. Cela va démarrer pour de bon le 1er
septembre. Donc, cela a été des négociations d'une part,
et d'autre part, une fois l'entente faite sur le genre de questionnaire, de
données informatisées, il fallait faire l'essai un peu partout.
On a fait des expériences dans le réseau.
M. Forget: Une dernière question sur le même sujet.
Lorsque le premier ministre, en novembre dernier, a indiqué qu'une
réévaluation serait nécessaire, qu'est-ce qu'il faut
comprendre par ça? Parce que, si je comprends bien ce que le ministre a
dit, il veut consolider, continuer la consolidation des CLSC existants,
distribuer les sommes, généraliser le système
d'information. Cela prend tout l'air d'un programme stabilisé ou
à stabiliser encore mieux, dans l'esprit du ministre. Il semble
cependant que le premier ministre, quant à lui, considère que le
problème est encore ouvert. Qu'est-ce qu'il faut comprendre par
ça? Quelles sont les démarches qui sont envisagées pour
donner suite à cette opinion du premier ministre?
M. Lazure: Je ne peux pas répondre à la place du
premier ministre, mais autant les remarques du premier ministre que celles du
ministre des Finances au moment du discours du budget portent essentiellement
sur un objectif assez raisonnable du gouvernement, à savoir que, devant
un nouveau type d'établissement, un type d'établissement qui
remonte à peine à six ou sept ans dans notre milieu, il est
prudent de l'évaluer. Quand un premier ministre parle d'évaluer
un type de service, je ne pense pas qu'il ait en tête des outils
d'évaluation. Je ne pense pas que ce soit son rôle.
M. Forget: II a des suggestions à l'esprit,
peut-être.
M. Lazure: Ce qu'il a à l'esprit, pour en avoir
discuté avec lui, vous vous imaginez bien, ce qu'il a à l'esprit
et la même chose peut s'appliquer aux hôpitaux ou aux
centres de services sociaux c'est qu'il y a des CLSC qui donnent
d'excellents services, d'autres qui en donnent de très bons et d'autres
qui devraient beaucoup améliorer leurs services. Cela frappe plus, dans
le quotidien ou dans l'hebdomadaire des tournées d'un premier ministre
ou d'un député, quand il s'agit d'un nouveau type
d'établissement comme le CLSC, surtout un type d'établissement
qui a été controversé à l'origine, pour toutes
sortes de raisons. Les feux sont plus braqués sur les CLSC, si vous
voulez, que sur les hôpitaux ou sur les centres de services sociaux. Je
pense que c'est parfois injuste. Tous, tant qu'on est, on est peut-être
tombés dans ce piège d'être un peu trop critique
vis-à-vis des CLSC. Ceci étant dit, cette évaluation,
encore une fois, dont parlaient le premier ministre et le ministre des
Finances, nous nous occupons de la faire au meilleur de nos connaissances. Ce
n'est jamais facile d'évaluer la qualité des services d'une
institution comme un CLSC.
M. Forget: Mais c'est une évaluation informelle, en somme,
il n'y a rien de précis.
M. Lazure: II n'y a pas d'enquête, si c'est ça que
vous voulez dire. C'est informel et c'est formel. Ce sera formel, comme je le
disais tantôt, à partir du moment où on aura toutes les
données informatisées des services que rend chaque CLSC par
rapport au nombre d'employés qu'il y a dans chaque CLSC, par rapport au
nombre d'heures travaillées dans chaque CLSC. Tout ça sera des
outils qui vont nous permettre d'évaluer un peu mieux le rendement de
chaque CLSC.
On pourrait peut-être ajouter un commentaire, M. Forget. Vous avez
devant vous un cahier qui fait suite à un questionnaire
élaboré auprès de chacun des CLSC. C'est dans le cadre de
la revue de programmes que ce questionnaire a été fait, voulant
justement introduire une évaluation, une espèce d'état de
fait, une certaine analyse des CLSC à l'occasion de la revue de
programmes. Ce n'est donc pas une opération genre opération bilan
qui a déjà été faite, mais, dans le cadre de la
revue de programmes, c'est une plus grande analyse sur l'état de fait
des CLSC. Le cahier bleu que vous avez devant vous est justement un
résultat des discussions faites au moment des revues de programmes
à l'automne.
M. Forget: Je vous remercie. Si je comprends bien le ministre,
cette évaluation, comme elle est faite de façon informelle par le
ministère, par le ministre lui-même peut-être, à
l'aide des statistiques, sans l'aide d'un comité spécial,
ça peut déboucher sur des conclusions, j'imagine. Si on fait une
évaluation, on va un jour conclure un jour, d'ailleurs,
indéfini et on peut se réveiller un matin, les CLSC et
ceux qui y travaillent, devant un jugement que portera sur eux le
ministère selon lequel il faut une réorientation majeure ou on
arrête le développement ou, au contraire, on continue. Donc, il
n'y a pas de cadre très défini. Encore une fois, ils ne peuvent
même pas se défendre. Ils ne savent pas s'ils sont accusés
de quoi que ce soit. Tout ceci demeure un peu mystérieux. Essayons de
nous placer dans la peau de ceux qui travaillent dans ce milieu. C'est un peu
comme une espèce d'épée de Damoclès, parce que,
dans le fond, le ministre pourrait dire la même chose de chacun des
centres hospitaliers du Québec. C'est toujours bon de
réévaluer ce qui se fait et on peut se poser des questions.
Tout n'est pas parfait, dans la tournée des comtés,
à l'occasion, les gens se plaignent de tel ou tel établissement.
Malgré tout, on ne va pas sur la place publique à toutes les
semaines pour dire: Ecoutez, on est en train de réévaluer les
hôpitaux; on présume que les problèmes vont se
régler les uns après les autres. On suggère sans aucun
doute autre chose quand on dit qu'on fait une réévaluation ou
qu'une réévaluation s'impose. Cela suppose que le résultat
de la réévaluation va être une réorientation, pas
simplement la solution à des problèmes ad hoc.
M. Lazure: M. le Président, encore une fois, je veux
certainement rassurer les membres de la commission et les gens dans les CLSC
aussi qu'il ne s'agit pas de faire des études ou des enquêtes en
vase clos et arriver, comme le député de Saint-Laurent le disait
tantôt, et annoncer de façon subite aux CLSC: II y a tel ou tel
changement radical dans l'orientation. Il ne s'agit pas de cela. Nos contacts
avec la Fédération des CLSC sont suivis, très suivis au
niveau des fonctionnaires et à mon niveau aussi, et ce que nous essayons
de faire dans cette espèce d'évaluation c'est un mot qui
porte à ambiguïté on veut inciter, en gros
c'est la meilleure façon dont je peux le décrire
l'ensemble des CLSC à se rendre encore plus disponibles qu'ils ne l'ont
été vis-à-vis des besoins de la population; on parle
d'ouverture le soir, d'ouverture les fins de semaine, de disponibilité
la nuit. On parle d'une plus grande ouverture vers les besoins de la
communauté environnante.
A titre d'exemple là-dessus, je pense qu'on a fait
beaucoup de progrès depuis quelques années il y a
actuellement treize CLSC qui sont accessibles 24 heures par jour par toutes
sortes de mécanismes et la plupart des CLSC sont ouverts au moins deux
ou trois soirs par semaine. Quand on parle d'évaluation, ce qu'on veut
dire, finalement, c'est qu'on souhaite que les CLSC soient plus
sensibilisés à remplir pleinement ce rôle de
première ligne par rapport aux besoins les plus diversifiés de la
population.
Dans tout le secteur de l'aide à domicile qui a été
notre priorité, je dois vous dire que les CLSC ont bien collaboré
et il y a eu on n'en parle pas souvent des crédits de
développement qui sont allés aux CLSC par le biais des
subventions pour l'aide à domicile. A part les $4 200 000, il y aura
aussi environ $1 million venant de l'aide à domicile et dans l'espace
des deux dernières années, il y a eu au-delà de $6
millions affectés aux CLSC pour l'aide à domicile.
Personnellement, je suis satisfait de cette évolution qui est
plus axée sur le service direct, concret à la population qu'il ne
l'était il y a quelques années.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Sherbrooke.
M. Gosselin: Je pense, avec le député de
Saint-Laurent et avec le ministre, qu'il est important de se réjouir de
l' évolution de nos CLSC et de dépasser la critique qu'on a un
peu institutionnalisée autour de la formule des CLSC au cours des
dernières années. Evidemment, la formule des CLSC a donné
lieu à certaines improvisations et, comme le signalait le ministre tout
à l'heure, à plusieurs controverses, parce que, justement, ils
inventaient un nouveau type de services dans des milieux qui se sont
souventefois opposés à des pratiques traditionnelles dans les
hôpitaux où les corporations traditionnelles se sont parfois
senties menacées et où des rapports de force ont joué,
autour de l'implantation de CLSC, entre les institutions et les comités
de citoyens qui voulaient ouvrir un CLSC, pour interdire ou paralyser,
empê- cher ou retarder souvent la mise en place des services. Alors, il y
a des difficultés de démarrage de plusieurs CLSC qui sont
liées à des entraves que le milieu institutionnel a
imposées. (21 h 45)
L'autre chose que je voulais dire, on parle de la performance des CLSC.
Je pense qu'on attend beaucoup des CLSC parce qu'on s'attend à un type
de pratique, à un type de relations avec la clientèle très
nettement différent des institutions. Ce sont des services de
première ligne qui font appel à la participation, qui font appel
à beaucoup d'originalité et à un travail de
prévention plus poussé aussi. Dans ce sens là c'est
presque une suggestion que je voudrais faire si on a à faire
l'évaluation de la performance du CLSC, il faudrait peut-être
amener le critère suivant, à savoir, à mon avis, par
rapport à l'intention de la loi 65, un CLSC est performant d'autant plus
qu'il réussit à associer d'une manière concrète,
dans l'organisation de ses services bénévoles, des volontaires.
Ce pourrait être un critère quant à la performance des
CLSC, jusqu'à quel point on réussit, dans les CLSC, à
associer les populations aux plans d'organisation de services qui se font,
d'une manière concrète, qualitative et quantitative.
Un autre élément que je voulais amener quant aux CLSC
c'est que, du côté des travailleurs, des professionnels de la
santé, il y a une pratique vraiment nouvelle que les CLSC ont
développée avec les DSP d'ailleurs: le salariat des
professionnels de la santé. Il y a aussi un type de pratique
vis-à-vis de la clientèle qui est très différent du
contexte de la salle d'urgence à l'hôpital et de la
"castonguette".
Est-ce qu'on est en mesure, à ce moment-ci, d'évaluer,
d'une manière comparative, la rentabilité du personnel infirmier
et médical des CLSC, en regard de leur type de pratique, et la pratique
institutionnelle? Est-ce qu'il y a un examen de ce cas à ce jour,
l'expérience de salariat de médecins dans les CLSC en termes
d'échelle de comparaison quant au type de services qu'ils rendent et
quant au coût?
M. Lazure: C'est très difficile là aussi
d'évaluer la performance. Peut-être qu'après l'ajournement,
on pourra profiter de la présence du président de la Corporation
des médecins pour lui proposer un projet de recherches dans ce
sens-là. Il y a eu une recherche faite il n'y a pas si longtemps dans la
région de Montréal, entre le genre de pratique médicale
effectué dans les cliniques privées par rapport aux CLSC. Cela a
été publié dans les revues, dans les journaux.
Essentiellement, par exemple, ce sont des indices qui valent ce qu'ils valent,
mais on trouvait que le médecin de CLSC recourait pas mal moins souvent
à la prescription de médicaments que le médecin de
pratique privée. Il y avait toute une série de critères
comme ça et selon qu'on accepte au départ les critères ou
pas comme voulant dire de la bonne médecine par rapport à de la
mauvaise médecine, le résultat de la recherche demeure
très discutable.
Mais le député de Sherbrooke parle des médecins
à salaire dans les CLSC. Il y a certainement eu un progrès
considérable de ce côté. On a augmenté, depuis un
an, le nombre de médecins, qui est passé de 200 à 320 dans
les CLSC, et 90% de ces médecins sont à salaire. Je pense qu'on a
dans les CLSC une génération de jeunes médecins, en
général, qui croient vraiment à cette possibilité
d'allier, dans une pratique, à la fois les aspects: prévention et
cure, et traitement de la personne qui se présente pour des soins
médicaux.
Je pense qu'on est en train de faire la démonstration,
contrairement à ce que les syndicats de médecins ont dit dans le
passé, qu'on pouvait avoir une excellente médecine
salariée, une excellente médecine qui pouvait être
accomplie par un mode de rémunération qui s'appelle le salariat.
S'il y a des cliniques privées de groupe qui, de plus en plus, regardent
la façon de pratiquer des jeunes dans les CLSC, j'ai confiance que cette
espèce de préoccupation qui est particulière aux CLSC,
pour les aspects préventifs de la maladie, ça va se propager et
influencer la pratique médicale de façon
générale.
M. Gosselin: A mon avis, en tout cas, la pratique qui s'est
développée dans les CLSC, pourrait nous donner des leçons
très importantes pour l'orientation future de tout notre système
de santé. Chez nous, à Sherbrooke, au CLSC-SOC, il s'est fait des
expériences très intéressantes du côté de la
médecine industrielle. Le médecin, un des médecins, par la
répétition de verdicts ou grâce aux gens qui venaient le
voir de certains milieux de travail, a pu localiser des problèmes. Il a
pu y avoir des négociations entreprises par la suite avec les syndicats
et avec l'entreprise pour améliorer les conditions de santé dans
ces usines. Il y a eu des efforts de sensibilisation et d'information
auprès des travailleurs qui vivaient certains problèmes de
surdité liés au type d'industrie dans lesquelles ils
travaillaient, et c'est évident que cela n'est possible que dans un
contexte de CLSC, de pratique préventive et de salariat.
Il y a un autre champ où il y aurait énormément de
choses à faire, ce sont les soins à domicile. Il y a très
peu de médecins qui se rendent disponibles, jusqu'à
présent, pour les soins à domicile. Or, une politique
complète de soins à domicile supposerait qu'on puisse vraiment
lancer des médecins, de plus en plus nombreux, sur le terrain. Mais je
ne pense pas qu'on puisse le faire tant qu'on n'aura pas sensiblement
augmenté le nombre de médecins, raccrochés aux CLSC ou aux
départements de santé communautaire, spécifiquement avec
le mandat de travailler auprès des personnes âgées et
formés à ce faire, et à salaire, parce que, et c'est
là une des contradictions, nous sommes dans un milieu relativement bien
pourvu, nous autres à Sherbrooke, du côté des
professionnels de la santé.
Mais les ressources gériatriques, pour les soins à
domicile notamment, sont hypothéquées, sont un peu
paralysées, au niveau de l'expansion qu'elles pourraient prendre, parce
que toute la pratique professionnelle est liée à un type de
traitement à l'acte par les institutions hospitalières. Tant
qu'on forcera les personnes âgées à se déplacer de
chez elles vers l'hôpital pour recevoir le diagnostic du médecin
ou les prescriptions du médecin, on n'aura pas atteint les objectifs
d'une vraie politique de soins à domicile. Et cela voudrait dire qu'on
devrait créer une sorte d'amorce, auprès des médecins de
pratique privée ou de pratique institutionnelle, pour peut-être
leur offrir une option de travail auprès de nouvelles personnes comme
celles-là, comme les personnes âgées, en leur offrant aussi
des conditions d'emploi intéressantes pour ce faire. La seule
manière de le faire, c'est vraiment de créer un type de programme
spécifique pour les médecins en regard des soins à
domicile.
En tout cas, c'est une partie de l'analyse que je dégage. Quand
je regarde le potentiel de médecins dans une ville comme Sherbrooke et
quand je regarde le piétinement de l'organisation des soins à
domicile et la contradiction entre une forme très embryonnaire de mise
sur pied de services de soins à domicile, par rapport au maintien
presque intégral d'une pratique en milieu hospitalier qui n'a pas
bougé, je pense qu'on ne peut pas continuer indéfiniment dans
cette voie. Il va falloir créer vraiment, pour les médecins, une
option de travail dans la perspective des soins à domicile, et selon des
conditions de travail qui seraient totalement différentes.
Le Président (M. Marcoux): Comme il est dix heures moins
deux... Est-ce que c'est un nouveau sujet complètement ou...?
Mme Lavoie-Roux: Oui, c'est un nouveau sujet. C'était pour
vous proposer d'ajourner les travaux à demain.
Le Président (M. Marcoux): C'est la même
proposition. Demain, nous commencerons par Mme le député de
L'Acadie et M. le député de Mégantic-Compton, pour
continuer nos brèves remarques préliminaires d'aujourd'hui. La
commission ajourne ses travaux à dix heures demain matin.
Fin de la séance à 17 h 35