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Version finale

31e législature, 4e session
(6 mars 1979 au 18 juin 1980)

Le mardi 2 octobre 1979 - Vol. 21 N° 187

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Présentation de mémoires sur l'avant-projet de loi sur les services de garde à l'enfance


Journal des débats

 

Présentation de mémoires sur l'avant-projet de loi sur

les services de garde à l'enfance

(Dix heures dix-sept minutes)

Le Président (M. Boucher): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission élue permanente des affaires sociales est réunie ce matin pour entendre les mémoires des organismes, groupes et personnes sur l'avant-projet de loi sur les services de garde à l'enfance.

Les organismes convoqués pour aujourd'hui sont les Organismes familiaux associés du Québec Inc., représentés par Mme Denise Laporte-Dubuc; le Regroupement des garderies sans but lucratif du Québec, représenté par Mme Louise-Andrée Boisvert; la Fédération de la famille de Québec, représentée par M. Pierre-Yves Boily; l'Association des propriétaires de garderies du Québec Inc., représentée par M. Jean Carol Boucher; les Cercles de fermières du Québec, représentés par Mme Diane R. Roy; l'Association féminine d'éducation et d'action sociale (AFEAS), représentée par Mme Lucille Bellemare; l'Association des centres de services sociaux du Québec, représentée par Mme Pauline Marois.

Les membres de la commission: Mme Lavoie-Roux (L'Acadie), qui remplace M. Forget (Saint-Laurent); M. Goldbloom (D'Arcy McGee), M. Gosselin (Sherbrooke), M. Lévesque (Kamouraska-Témiscouata) remplace M. Gravel (Limoilou); M. Grenier (Mégantic-Compton), M. Lavigne (Beauharnois), M. Lazure (Chambly), M. Martel (Richelieu), M. Paquette (Rosemont), M. Samson (Rouyn-Noranda), M. Shaw (Pointe-Claire).

Les intervenants sont: M. Alfred (Papineau), M. Cordeau (Saint-Hyacinthe), M. Couture (Saint-Henri), M. Lacoste (Sainte-Anne), M. Larivière (Pontiac-Témiscamingue), M. Marcoux (Rimouski), M. Marois (Laporte).

Y a-t-il un rapporteur? M. Lavigne (Beauharnois).

M. O'Gallagher (Robert Baldwin) remplace M. Goldbloom (D'Arcy McGee).

Mme Lavoie-Roux: D'accord.

Le Président (M. Boucher): Avant de commencer, il y aurait lieu de demander le consentement des membres de la commission pour que le Conseil du Québec de l'enfance exceptionnelle, représenté par M. Daniel Bouffard — étant donné que le mémoire a été reçu le 28 septembre et que le 27 septembre, il était au bureau du ministre, alors que le délai était au 26 septembre — puisse présenter quand même son mémoire.-

M. Lazure: D'accord, M. le Président.

Mme Lavoie-Roux: Nous sommes certainement d'accord, d'autant plus que l'avant-projet de loi a été rendu public au cours de l'été alors qu'il était difficile de réunir les intéressés. Je ferais même la suggestion que s'il y en avait d'autres qui arrivaient au bureau du ministre durant les journées d'audition aujourd'hui, demain ou après-demain, on puisse les entendre, même si on devait tenir une journée d'audition supplémentaire la semaine prochaine.

Le Président (M. Boucher): Est-ce que les membres de la commission sont d'accord sur cette proposition?

M. Lazure: Nous les accueillerons certainement avec beaucoup de sympathie.

M. Grenier: Combien de personnes doivent se présenter, non seulement aujourd'hui mais aussi au cours des jours subséquents? Est-ce que je peux savoir le total des mémoires?

Le Président (M. Boucher): On m'informe qu'il y a actuellement 26 mémoires inscrits. Avec celui de l'enfance exceptionnelle, il y en aurait 27.

Sans plus tarder, j'invite les Organismes familiaux associés du Québec, représentés par Mme Denise Laporte-Dubuc. On va vous demander de parler immédiatement après, M. le ministre... Je cède immédiatement la parole à M. le ministre.

Remarques préliminaires M. Denis Lazure

M. Lazure: M. le Président, collègues de la commission, chers amis du réseau des services de garde, en octobre 1978, à la suite du dépôt du rapport du comité interministériel sur les services à la petite enfance, le gouvernement annonçait son intention de préparer une loi spécifique sur les services de garde d'enfants et de confier à un organisme la responsabilité de planifier les coordonnées de développement de ces services. À peine un an plus tard, il me fait plaisir de vous soumettre un avant-projet de loi sur les services de garde à l'enfance qui s'inspire des multiples consultations auprès des principaux groupes concernés. Je rappelle qu'au moment où le comité interministériel a étudié l'ensemble des problèmes qui touchent la garde de la petite enfance, ce comité a rencontré en consultation une quarantaine d'organismes.

Avant même d'en exposer les différents éléments, il convient de situer cet avant-projet dans un contexte historique. Fruit de l'initiative particulière de certains groupes de parents, l'instauration d'un réseau de garderies au Québec s'est faite sans planification et sans effort de répartition régionale de la part des autorités gouvernementales. Qu'on se rappelle seulement que c'est le gouvernement fédéral, notamment par ses programmes d'initiative locale, qui, le premier, a offert une aide financière directe aux parents désireux d'implanter une garderie dans leur quartier.

Cependant, par égard pour l'histoire, je dois ajouter qu'un peu plus de 100 ans auparavant — je dis bien un peu plus de 100 ans auparavant, j'en reparlerai à la fin de mes remarques — il y a eu un début d'allocation directe de l'État à cinq garderies, les cinq premières garderies du Québec mises sur pied en 1858 par les Soeurs grises du Québec. Le gouvernement de l'époque allouait une somme de $0.25 par année par place d'enfant. Il y a donc eu un début en 1858, mais de 1858 à 1960 — autour de 100 ans — l'intervention de l'État a été à peu près nulle, certainement négligeable, sauf quand on arrive à cette période des années soixante, la période des PIL et autres subventions fédérales du genre. Donc, aide financière directe aux parents désireux d'implanter une garderie de quartier. Ces subventions fédérales ayant été coupées de la même façon qu'elles avaient été octroyées, c'est-à-dire sans consultation préalable auprès du gouvernement québécois, le Québec dut, en 1974, sous la pression des familles, prendre la relève du gouvernement fédéral et improviser un programme d'aide au développement de services de garde.

Tout en témoignant d'une certaine volonté gouvernementale d'intervention dans ce secteur, la situation dont nous avons hérité en 1976 avec l'arrivée de notre parti au pouvoir était bien loin de répondre aux besoins grandissants de la population. De plus, ce système ne reconnaissait pas les besoins spécifiques de certaines familles et de certains enfants qui ne peuvent se plier aux exigences d'une garderie habituelle. De fait, en 1976, le budget consacré au service des garderies atteignait $3 500 000. De plus, ce budget était limité à l'aide financière aux parents et ne visait que la garde en garderies de quartiers. À ce moment, on comptait 245 garderies offrant au total 10 400 places. Quant à l'aide financière aux parents, elle ne bénéficiait qu'à 2700 personnes, soit environ 25% des enfants en service de garde. Pourtant, la demande potentielle de garde était à peu près dix fois plus importante pour les enfants de moins de six ans que ce que le service offrait à ce moment.

Aussi, après son accession au pouvoir, en 1976, notre gouvernement a-t-il confié à un comité interministériel le mandat d'évaluer les besoins en services de garde et de formuler des recommandations au Conseil des ministres sur ces modèles de distribution des services d'accueil aux moins de six ans. Avant même de recevoir le rapport de ce comité, le ministère des Affaires sociales avait apporté des améliorations aux services offerts. Ainsi, dès juin 1977 et afin de favoriser l'intégration des enfants handicapés, une subvention spéciale était accordée aux garderies sans but lucratif qui accueillaient ce type d'enfants. Au même moment, un budget a été consacré à des subventions de démarrage pour la création de garderies en milieu défavorisé. L'aide financière aux familles et les subventions d'équipement et d'aménagement ont également été majorées sensiblement.

Peu après, les établissements de santé et de services sociaux étaient invités à mettre gratuitement des locaux à la disposition de garderies s'adressant principalement aux enfants de leurs employés. Je dois dire, entre parenthèses, que cette politique d'incitation des organismes, en particulier du réseau des affaires sociales, hôpitaux, centres d'accueil, a eu des effets heureux, puisqu'au moment où on se parle il y a dans le réseau des affaires sociales tout près de 30 garderies qui sont ouvertes pour les enfants des employés, mais aussi, dans certains cas, pour les enfants du quartier.

La même chose est vraie du réseau d'éducation où on a entre 25 et 30 garderies qui sont ouvertes aux enfants des enseignants en particulier. Donc, environ une cinquantaine de garderies en milieu de travail alors qu'il y a trois ans on en comptait à peine une demi-douzaine. Cette mesure a également été reprise par le ministère des Travaux publics, qui accepte maintenant de louer à des prix très raisonnables des espaces excédentaires à des garderies. Lorsqu'un ministère occupant des locaux qui sont la propriété ou qui sont loués par le ministère des Travaux publics a des locaux excédentaires, ce ministère peut aménager une garderie et être admissible à tout le système de subventions tel qu'on le connaît, une garderie pour les enfants des employés de ce ministère et aussi, s'il reste de la place, pour les enfants du voisinage. Grâce à cette initiative du gouvernement du Parti québécois, les fonctionnaires du ministère des Affaires sociales profitent des services de garderie en milieu de travail. En effet, c'est hier que la garderie qui s'appelle Feu vert, logée dans l'édifice Joffre sur le chemin Sainte-Foy, édifice du ministère des Affaires sociales, a accueilli ses premiers enfants. Et on espère bien que ce feu vert sera vu et entendu, écouté, si je peux m'exprimer ainsi, par l'ensemble des ministères et que d'autres ministères imiteront l'exemple du ministère des Affaires sociales le plus rapidement possible. (10 h 30)

Sans entrer dans le détail de tout ce qui a été fait en moins de trois ans, il m'apparaît important de souligner que le budget consacré aux garderies, aux services de garde, a été multiplié par sept, passant de $3 500 000, en 1976/77, à $22 500 000 pour l'année courante, l'année 1979/80. $22 500 000.

Ce budget permet aux parents de choisir leur mode de garde, puisqu'il couvre le financement des services offerts tant en garderie qu'en milieu familial et en milieu scolaire.

Nous recensons actuellement 364 garderies, offrant au total 16 000 places. Au-delà de 7000 d'entre elles, soit un peu plus de 45%, sont subventionnées, alors qu'il y a trois ans, à peine 25% des places des enfants en garderie étaient subventionnées.

Ainsi donc, depuis quelques années, le gouvernement a reconnu la responsabilité accrue qui lui incombe dans ce secteur important des services aux enfants et à leur famille. Il importait, en cette année internationale de l'enfant, de privilégier celui-ci par des gestes bien concrets, susceptibles d'avoir des répercussions bien au-delà de cette seule année 1979.

II importait également de donner suite aux recommandations formulées dans le rapport du Conseil du statut de la femme, intitulé: Egalité et indépendance, concernant les garderies.

L'avant-projet de loi marque donc notre ferme intention de répondre à la première des revendications de la majorité des associations féminines du Québec, soit de satisfaire les besoins de la famille québécoise en services de garde d'enfants.

Ces fondements sont la reconnaissance du droit des enfants et des parents à des services de garde de qualité, accessibles et adaptés à leur besoin et à leur choix.

Notre gouvernement reconnaît également sa responsabilité en matière de développement et de financement des services qu'il veut partager avec les parents, auxquels il reconnaît la responsabilité première de l'éducation des enfants. De plus, étant donné qu'un projet de loi de cette envergure ne peut manquer d'aller de pair avec une refonte en profondeur du mode de financement, j'ai rendu publique, vendredi dernier, la décision du Conseil des ministres à cet effet.

Bien que la question du financement ne doive pas faire l'objet d'un débat ici, à cette commission, il m'apparaît important de fournir, dès à présent, ces informations, aux groupes concernés, et j'y reviendrai tout à l'heure.

L'Office des services de garde. L'avant-projet prévoit la création d'un office des services de garde chargé de la planification et du développement des services de garde aux enfants, principalement d'âge pré-scolaire, mais non exclusivement.

Il propose également la mise en place de services diversifiés comprenant la garderie de quartier, la garderie en milieu de travail, la halte-garderie et les services de garde en milieu familial.

Il confie aux commissions scolaires la responsabilité de développer des services de garde pour les enfants du niveau primaire.

Il précise enfin le rôle de l'État et des parents en matière de financement des services.

La création de l'office apparaît à plusieurs titres pertinente. Elle permet d'impliquer, au plan des décisions, les divers intervenants: les parents, les praticiens et responsables de services, les commissions scolaires, les corporations municipales, les travailleurs et leurs employeurs, de même que les ministères impliqués qui sont aussi représentés au conseil d'administration de l'office.

Je remarque tout de suite, puisque plusieurs groupements en parlent dans leur mémoire, qu'il faut distinguer, à l'intérieur du Conseil d'administration qui est proposé, la présence de membres avec droit de vote et la présence de membres qui ne sont là qu'à titre de ressources, c'est-à-dire les représentants de six ministères. Ces personnes ne sont pas des membres à part entière, si je puis dire, puisqu'elles n'ont pas le droit de vote.

Les membres à part entière du conseil d'administration de l'office sont au nombre de onze et l'objet principal de la présence des six représentants des divers ministères est précisément de permettre à l'office de mieux remplir un de ses rôles importants, soit le rôle de coordination de l'action de plusieurs ministères.

L'office assumera des fonctions exclusives de planification, de promotion, d'information, de coordination, d'agrément, d'accréditation et de surveillance des services de garde aux enfants d'âge préscolaire et suivra de près le développement des services de garde aux enfants du niveau primaire. L'office se voit confier un pouvoir de délégation qui lui permettra de confier aux niveaux local et régional des responsabilités précises pour permettre aux milieux de s'ajuster aux responsabilités qui leur seront confiées. Nous n'avons pas cru bon dans un premier temps de rendre cette délégation obligatoire. Peut-être faudra-t-il à l'essai, après un certain temps d'application de cette future loi, recourir à une délégation obligatoire.

Pour faciliter l'accès à des services de garde adaptés aux besoins des enfants et des familles, l'avant-projet prévoit une diversité de services et en précise certaines modalités de reconnaissance et d'organisation. L'office se voit accorder en plus un pouvoir de réglementation sur différents aspects de l'organisation et du fonctionnement des services. L'avant-projet définit la garderie sans égard au milieu où elle se situe et c'est ce qui explique que dans le texte actuel vous ne voyez pas apparaître le terme "garderie en milieu de travail". Mais il est bien clair que le terme "garderie" qui est utilisé comprend autant la garderie en milieu de travail — celles qui existent et celles qui existeront plus tard — que les garderies en quartier. On reconnaît ainsi que toute garderie qui regroupe dix enfants ou plus doit assurer des services de garde qui favorisent le développement physique, intellectuel et social des enfants et respecter les conditions prévues par la loi ou les règlements au chapitre des garderies. Cette définition qui pourrai être élargie — j'en conviens — recouvre également les services qui offrent un programme de développement aux enfants d'âge préscolaire à l'exception des classes maternelles reconnues par le ministère de l'Éducation. La réglementation découlant de la loi verra à préciser les catégories de services et les modalités applicables à chacun. Je souligne dès à présent une modification qui devra être apportée à l'article 30 de l'avant-projet pour permettre à une garderie et à une agence de garde dans le milieu familial de recevoir des enfants du niveau primaire durant les périodes de vacances et les congés pédagogiques.

L'office pourra octroyer un permis de garderie à une association coopérative, à une corporation sans but lucratif dont le conseil d'administration est composé majoritairement de parents d'enfants qui sont inscrits dans la garderie lors de l'ouverture ou, enfin, à une corporation municipale. Je pense qu'il faut noter ce critère fondamental qui illustre peut-être mieux que n'importe quel discours ou n'importe quel texte que la garderie doit être à but non lucratif et contrôlée majoritairement par les parents des enfants qui fréquentent la garderie. Si ce n'est pas là reconnaître le rôle fondamental que doivent jouer les parents, je ne

sais pas ce que c'est. C'est vraiment une illustration, un symptôme de la philosophie qui préside à toute l'élaboration des services de garde. Le gouvernement veut, par cette mesure, consacrer le rôle premier des parents et de la communauté dans l'organisation des services. En outre, l'avant projet assure aux corporations à but lucratif existantes le maintien de leurs droits acquis.

Les services de garde en milieu familial couvrent les services dans une résidence privée, qu'il s'agisse de la résidence des enfants ou celle de la personne responsable. Un maximum de neuf enfants peuvent y être admis. Mais il est évident que ceci sera précisé dans les règlements. Il est évident qu'avec un maximum de neuf enfants il y aura obligation d'une présence de deux adultes et qu'une adulte seule ne pourra avoir plus de quatre enfants, incluant son ou ses enfants d'âge préscolaire, si elle en a.

Les parents qui, jusqu'à présent, confiaient la garde de leurs enfants à un voisin ou à une voisine se trouvaient privés du support financier de l'État. Pourtant, la majorité des parents optent encore pour un tel mode de garde. Aussi, la nouvelle politique de financement des services de garde que j'ai fait connaître la semaine dernière rétablit-elle cet équilibre. Elle prévoit, en effet, que dorénavant les parents seront admissible à l'aide financière gouvernementale. Leurs enfants seront gardés par une personne reconnue par une agence de garde en milieu familial.

Cependant, une personne responsable n'est pas tenue à cette reconnaissance si la famille assume la totalité des coûts. Il est bien évident que ce que nous faisons actuellement, ce n'est que reconnaître un mode de garde qui existe de tout temps. La garde en milieu familial, qu'il s'agisse d'une voisine ou d'une belle-soeur, a toujours existé. Ce qu'il y a de particulier dans notre action gouvernementale, c'est de reconnaître pour la première fois que les parents qui recourent à ce mode de garde sont tout aussi admissibles à des subventions d'appui de l'État que les parents qui recourent aux services de garde dans une garderie de quartier ou dans une garderie en milieu de travail. D'autre part, il est bien sûr que personne, aucune dame qui fait de la garde volontaire d'enfants ne sera obligée de s'inscrire à l'agence de garde. C'est bien évident qu'il s'agit là d'un système volontaire et facultatif.

Je me permets de donner des précisions parce que c'est peut-être un des aspects de l'avant projet de loi qui a été le plus mal perçu par certains groupements qui se sont manifestés de façon assez fracassante dans les médias récemment. Nous n'inventons pas la garde en milieu familial. Nous ne faisons que l'ajouter comme un des modes de garde pour lesquels une aide financière aux parents est possible. La mise sur pied d'une telle ressource s'avère donc nécessaire pour les besoins de certains enfants, peut-être plus particulièrement pour les très jeunes enfants, de zéro à deux ans, de certaines familles aussi, celles qui ont des enfants de plusieurs groupes d'âges, qui peuvent avoir, par exemple, deux enfants ou même trois enfants d'âge préscolaire et qui voudraient les faire garder tous les trois ensemble dans un milieu familial, ou de certains milieux, tels que les milieux ruraux ou semi-urbains où les distances et les densités de population empêchent le regroupement des enfants dans une garderie.

C'est l'agence de garde en milieu familial qui facilitera le développement, la coordination et l'accessibilité des ressources de garde en milieu familial. Ces agences seront également impliquées dans la gestion du programme d'aide financière. Cette formule de regroupement est en vigueur dans plusieurs États américains, en Ontario et en France. Une association coopérative, une corporation sans but lucratif incluant même une garderie, un établissement public au sens de la Loi sur les services de santé et les services sociaux, une corporation municipale ou une commission scolaire pourront être reconnus au titre d'agences de garde en milieu familial afin d'assurer la flexibilité que requièrent de tels services.

L'avant-projet prévoit également que, pour exploiter un service de halte-garderie, une autorisation de l'office sera nécessaire. Sont considérés comme tels les services fournis de façon régulière et pour une partie de la journée. Donc, les services très occasionnels de haltes-garderies n'auront pas à recevoir les autorisations de l'office. (10 h 45)

Finalement, les commissions scolaires se voient confier la responsabilité de fournir des services de garde en milieu scolaire aux enfants à qui elles dispensent des programmes d'enseignement de niveau primaire. De concert avec le ministère de l'Éducation, notre ministère a distribué cette année $700 000 aux commissions scolaires qui étaient prêtes à offrir de tels services. L'expérience qui est en train d'être menée s'avère suffisamment concluante et nous avons décidé de confier aux commissions scolaires la responsabilité de ce type de garde. Après avoir consulté les milieux concernés, nous avons apporté des précisions à l'article 58 de l'avant-projet de loi. Cet article se lira comme suit: Un organisme scolaire doit développer et fournir, conformément aux règlements, des services de garde en milieu scolaire et doit en aviser l'office en conséquence.

Quant à moi, je demeure persuadé que la garde en milieu scolaire est encore celle qui peut rejoindre le plus grand nombre de parents et d'enfants. Elle leur permettra de trouver sur place un service de garde de qualité tout en évitant de déplacer inutilement les enfants. Pour être valables, ces services devront être dispensés à l'heure du repas le midi de même qu'avant et après les heures de classe mais il appartiendra aux commissions scolaires d'établir elles-mêmes leur programme de garde.

Quelques mots du financement. L'avant-projet de loi énonce les composantes principales du financement des services de garde, contribution des parents, contribution de l'État sous forme de subvention aux services et d'aide aux familles. Le Conseil des ministres s'est prononcé récemment sur certains éléments du programme de finance-

ment. Il me fait plaisir de les présenter ici sommairement. Rompant avec le plan Bacon, divorçant du plan Bacon, si vous voulez, le gouvernement du Parti québécois reconnaît pour la première fois le principe du financement direct de la garderie. C'est une demande, évidemment, qui avait été exprimée de façon très claire depuis plusieurs années par les groupements qui sont représentés ici et il y a sûrement des personnes dans la salle qui se sont battues depuis quelques années, comme certains d'entre nous l'ont fait aussi, pour obtenir que le gouvernement reconnaisse la nécessité de subventionner directement la garderie, en plus des subventions de démarrage évidemment. En effet, le ministère des Affaires sociales versera, à partir du 1er avril 1980, une subvention de $2 par jour par place occupée directement aux garderies, leur assurant ainsi un fonds de roulement stable. Il est évident que ces $2 versés directement à la garderie s'ajoutent aux $10 actuels que représente le coût d'une place en garderie. Donc, à partir du 1er avril 1980, le coût quotidien d'une place en garderie sera reconnu comme étant $12.

D'autre part, le budget total affecté aux services de garde sera porté en avril 1980 à $32 500 000, ce qui constitue une augmentation de $10 millions pour la deuxième année consécutive. La subvention de démarrage accordée aux nouvelles garderies qui était en moyenne de $7500 pour l'année courante passera à $14 600 en avril, $14 600 en moyenne. À cela s'ajoute la subvention accordée pour l'aménagement et l'acquisition de l'équipement qui sera indexée l'an prochain. Cette subvention dont le maximum était de $12 000 en 1978/79 a été portée, comme vous le savez, à $20 800 pour l'année courante. Elle passera donc en avril à $22 600.

Donc, au total, dès leur entrée en fonctionnement, les garderies pourront bénéficier au 1er avril 1980 d'une aide gouvernementale maximale de $37 200. Les crédits affectés à la garde — j'ajoute évidemment qu'on est bien loin des $8000 qui étaient la subvention maximale pour une nouvelle garderie il y a à peine trois ans — dans le milieu familial seront portés l'an prochain à $1 200 000 comparativement à $135 000 cette année. Quant à la garde en milieu scolaire, qui démarre cette année avec un budget de $700 000, elle verra ses crédits haussés à un peu plus de $1 million qui seront versés par notre ministère au ministère de l'Éducation qui les versera aux commissions scolaires. La subvention accordée aux garderies accueillant des enfants handicapés ou ayant des besoins spéciaux demeure celle qui est entrée en vigueur le 1er septembre dernier, soit $2500 par enfant par année, sans minimum de nombre d'enfants, mais avec un maximum de 15% des places dans chaque garderie. Finalement, nous avons également prévu la création d'un fonds spécial qui servira à dépanner les garderies en cas de force majeure comme, par exemple, un incendie.

En terminant, j'aimerais rendre hommage à toutes ces femmes, à tous ces hommes — il y a quand même eu quelques hommes qui ont cru aux garderies; j'en vois quelques-uns dans la salle qui illustrent un peu ce rôle très minoritaire des hommes dans le mouvement des garderies au Québec et je pense que c'est un peu normal — mais surtout aux femmes du Québec qui ont oeuvré avec acharnement et ténacité à la mise sur pied des services de garde.

C'est en 1858 que la Communauté des Soeurs grises ouvrit les cinq premières garderies au Québec — je cite un extrait des Femmes dans la société québécoise de Marie Lavigne et M. Pinard ou Mme Pinard, je n'en suis pas sûr, Lavigne et Pinard, en tout cas: — "en vue de permettre aux parents d'être disponibles pour effectuer un travail fructueux". Cette première initiative, en 1858, se traduisait par l'allocation de $0.25 par année par place, dont je vous parlais tantôt. En terminant, je veux assurer toutes celles et tous ceux qui oeuvrent, souvent dans des conditions fort difficiles, que le gouvernement du Québec reconnaît leur contribution unique au bien-être de nos jeunes concitoyens et que l'amélioration et l'accessibilité des services de garde à la petite enfance constituent quelques grandes priorités de notre gouvernement. Merci.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. le ministre. Mme le député de L'Acadie.

Mme Thérèse Lavoie-Roux

Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Nous nous trouvons réunis ce matin pour discuter d'un avant-projet de loi qui tient à coeur à la population du Québec. C'est un sujet fort délicat à maints égards. Il faut se rappeler que même si les gens que nous allons rencontrer durant les jours qui vont suivre se débattent et ont mis énormément d'efforts, d'énergie et d'imagination pour mettre sur pied un réseau, disons, partiel de garderies, il ne faut pas oublier d'autre part que nombre de personnes qui justement ne seront pas ici sont très partagées quant à la mise en place d'un réseau soi-disant — l'avenir le dira — universel et diversifié de garderies. C'est intéressant là-dessus de regarder ou de lire ce que le rapport sur la petite enfance du comité interministériel dit, par exemple en page 12: Des facteurs culturels tels que les opinions sur le rôle de la mère de jeunes bébés ou les préférences quant au mode de garde. Les résultats d'un sondage sur les besoins de garde d'enfants indiquent que plus des trois quarts des femmes qui ont répondu à une enquête, en 1978, croient que le rôle d'une femme qui a au moins un jeune enfant est de rester à la maison et de s'occuper de son foyer. Cette opinion varie selon l'âge: 74% chez les 18 à 24 ans; 92% chez les 45 à 54 ans et selon la scolarité: 86% pour les gradués du primaire; 66% pour les gradués du collège ou de l'université.

Cette opinion se lie aussi à celle ne trouvant pas bon de faire garder régulièrement un bébé d'un an. Je ne poursuis pas la lecture de cette partie du rapport, mais je veux simplement indiquer qu'il s'agit d'un sujet qui, chez une partie de la po-

pulation, trouve énormément d'adhésions, répond à des désirs et est amplement justifié depuis fort longtemps. Une autre partie de la population, d'après ces statistiques, du moins à l'égard des zéro à deux ans ou zéro à trois ans, serait peut-être même opposée à ce qu'un réseau de garderies soit généralisé.

Cela dit pour simplement rappeler le contexte dans lequel on se trouve quand il s'agit de prendre des décisions qui touchent l'ensemble de la population. Les faits demeurent que l'entrée sur le marché du travail, et la croissance sur le marché du travail des femmes, soit pour aller chercher des salaires d'appoint, soit pour une question de choix personnel quant à leur orientation, quant à ce qu'elles considèrent selon leur propre choix, un désir soit de travailler ou de se réaliser au plan professionnel, nous obligent — je pense que là-dessus on doit y aller avec la vigueur qui est nécessaire — à ne pas faire l'autruche et dire: Ceci va diviser la famille, ceci va détruire la famille. Je pense qu'il faut tenir compte des besoins de l'évolution de la société. Ne pas vouloir faire un pas en avant, sous prétexte qu'une partie de la population s'y oppose ne serait pas prendre ses responsabilités.

Il reste que, quand même, on peut se poser des questions. Quand on regarde les statistiques des femmes qui entrent sur le marché du travail, on réalise que la majorité d'entre elles vont y chercher un salaire d'appoint, particulièrement dans les familles des milieux défavorisés. À ce moment, on peut se demander si l'État — et je ne vise pas ce gouvernement-ci en particulier — d'une façon générale prend vraiment toutes ses responsabilités à l'égard de la famille ou si, au contraire, on ne tente pas davantage de colmater les brèches ou de répondre à des besoins selon les pressions qui s'exercent.

À tout événement, je pense qu'au cours des auditions que nous aurons, nous aurons l'occasion d'entendre les deux sons de cloche. D'une part, ceux qui, je pense, croient qu'il faut d'abord et avant tout aider la famille, lui donner les moyens financiers pour que, lorsqu'une femme décide d'aller travailler, elle le fasse par choix et non pas par obligation, pour combler un budget familial qui est trop restreint. Je pense aussi qu'un autre facteur qui entre dans le choix des femmes qui se dirigent vers le marché du travail est le fait que, avec l'évolution des choses, elles se sentent, à maints égards, dans une situation de totale dépendance. Ce point a d'ailleurs été souligné dans le rapport du Conseil du statut de la femme. Est-ce que l'entrée sur le marché du travail, au détriment peut-être d'autres valeurs qu'elles considèrent très importantes, est la vraie réponse, alors que peut-être, tel que le recommandait le Conseil du statut de la femme, un réaménagement de la fiscalité pourrait répondre à ce besoin, du moins pour une partie des femmes qui vont sur le marché du travail? (11 heures)

Ce sont là toutes des questions très complexes auxquelles je ne prétends pas apporter de réponse ce matin. Je voulais simplement faire valoir ces aspects pour indiquer que c'est un sujet délicat et qu'il faudrait probablement l'envisager non seulement en fonction des garderies, mais en fonction d'une politique générale sur la famille.

Si on se reporte à l'avant-projet de loi qui est devant nous, je voudrais d'abord, d'une part, souligner — on me le dit — que c'est un précédent, qu'un avant-projet de loi ne soit pas déposé à l'Assemblée nationale, mais soit déposé en pleine saison d'été et qu'on convoque des auditions sur cet avant-projet de loi avant même qu'il n'ai été déposé à l'Assemblée nationale. C'est une version qu'on m'a donnée. Pour ma part, j'aurais souhaité que ceci se fasse peut-être plus ouvertement, plus officiellement. Je voudrais dire quelques mots quant à l'objectif de cet avant-projet de loi qui est quand même assez étonnant à maints égards. Je ne mets pas ici en question la nécessité d'examiner tout le problème des soins de garde au Québec, mais l'objectif même de l'avant-projet de loi qui, somme toute, a pour effet de créer un office des services de garde. "Cet avant-projet de loi — et je lis — institue un office des services de garde de l'enfance et établit le cadre d'organisation de ces services. Il soumet à la compétence de l'office l'ensemble des services de garde et lui assigne comme fonction, notamment, de concevoir et d'élaborer une politique générale de services de garde et de coordonner et de promouvoir l'organisation de ces services". Ceci me semble un aveu assez étonnant de la part d'un gouvernement qui crée un office pour déterminer une politique. Comme si cela ne devait pas être le rôle du gouvernement d'établir d'abord une politique et ensuite de créer, s'il le désire, un office ou un autre organisme gouvernemental consultatif ou ce qu'on voudra pour l'exécution et la mise en place de cet objectif. Mais ceci, je pense, confirme le fait que cet avant-projet de loi, même s'il répond à des besoins précis qui ont été maintes fois exprimés par la population ou une partie de la population, ne s'insère pas dans une politique générale qui aurait tenté de déterminer une politique familiale, une politique à l'égard de la condition féminine. On sait bien qu'il y a eu un livre de déposé là-dessus, mais le gouvernement en est encore à ses débuts quant à la réalisation de ce qu'il y a à l'intérieur de ce livre qui a été préparé par le Conseil du statut de la femme. On a l'impression que, dans un domaine aussi important, on fonctionne à la pièce. C'est peut-être là aussi la raison des représentations ou des points de vue que l'on retrouve dans les mémoires qui sont devant nous, à savoir quel sera le rôle exactement de l'office. Est-ce une autre superstructure? Viendra-t-elle dans le fond couper l'herbe sous le pied des gens ou des organismes qui déjà prenaient des initiatives dans ce domaine? Une chose est certaine. L'Opposition officielle, pour sa part, s'interroge très sérieusement quant à la mise en place de cet office avant même qu'une politique officielle intégrée soit adoptée par le gouvernement, et qu'on demande à l'office de le faire. Ensuite, si vous continuez de lire les notes explicatives, évidemment, on établit

une catégorie de services de garde, etc. On oblige les commissions scolaires. Il y a le versement des subventions, etc.

Mais j'ai fortement l'impression que le gouvernement, ne sachant pas au juste que faire, d'une part voulant répondre à des pressions, d'autre part, n'étant pas capable de définir sa propre politique familiale, dit: On va répondre là où on crie le plus fort, mais il y a vraiment une absence de politique générale.

On pourrait également poser des questions quant au coût de cet office. Le ministre des Affaires sociales me rétorquera: Vous ne vous êtes pas opposée à la création de l'Office pour les handicapés. C'est exact, mais il faut quand même penser qu'il s'agissait là d'une catégorie de citoyens dont l'âge s'étend de la naissance à la mort, pour ainsi dire, ce qui touchait une foule de ministères et demandait une coordination considérable là où la population est beaucoup plus éparpillée et beaucoup plus dispersée dans l'ensemble de la province que lorsqu'on parle de soins de garde pour les enfants.

À tout événement, selon les explications que le gouvernement voudra nous donner quant au rôle précis de l'office, quant aux balises qu'il voudra lui donner, quant à certaines modifications qu'il voudra apporter... je n'en cite qu'une. Par exemple, le ministre a passé quelques minutes à nous dire qu'enfin s'affirmait la volonté du gouvernement de laisser aux parents le domaine des garderies. Or, quand on regarde la constitution de l'office on n'y trouve que quatre parents, sur un total de quinze, et ces parents sont choisis sans consultation, ce qui n'est pas les cas quand même des autres membres. Ils sont choisis dans un milieu très vaste et on précise qu'ils ont des enfants qui reçoivent des services de garde en garderie en milieu familial et en milieu scolaire. C'est presque la totalité des parents. C'est le gouvernement qui les nomme et on ne prévoit pas, en tout cas à l'article 6, au moins des modalités de consultation.

Viennent s'y ajouter cinq autres membres de l'office qui, selon le projet de loi, n'ont pas le droit de vote. Mais, quand on voit qu'il s'agit là de fonctionnaires fort chevronnés, même s'ils n'ont pas le droit de vote, on peut s'imaginer facilement que leur influence au sein du comité, à l'égard des quatre parents qui s'y trouvent, et leur poids pèseront très fort dans les décisions qui seront prises.

À tout événement, je voulais seulement signaler ici, quant à la constitution de l'office, en mettant de côté pour le moment sa justification ou son bien-fondé, qu'il y aura certainement, si elle est retenue, des modifications importantes à y apporter.

Le ministre a fait grand état du fait qu'on était passé de budgets de $3 500 000, en 1976, à $22 500 000. Je lui chuchotais que, selon ma mémoire de l'étude des crédits, c'étaient $21 500 000, mais je ne me chicanerai pas pour un million, M. le ministre. À tout événement, il est exact qu'il y a eu une augmentation considérable, mais on peut quand même se poser des questions. Alors qu'il y avait, en 1975-1976, 13 600 places de garderie, au Québec, le ministre nous dit qu'avec ce budget de $22 500 000, présentement, à l'heure où il nous parle, il y en a 16 000. Alors, on peut se demander si, entre-temps, il n'y a pas des garderies...

M. Lazure: Si vous le permettez, juste une petite correction. Ce chiffre de 13 000, qui a paru quelque part, incluait les places en maternelle. Alors, le chiffre réel des places en garderie était au contraire de dix mille et quelques centaines, le chiffre que j'ai cité tantôt.

Mme Lavoie-Roux: De toute façon, ce sont des chiffres que j'ai pris dans l'étude des budgets des Affaires sociales depuis que le gouvernement du Parti québécois est au pouvoir. Je pourrai même les apporter cet après-midi. De toute façon, cela n'a peut-être pas tellement d'importance, mais, à ce moment-là, on nous avait dit, à l'étude des crédits, qu'il y avait 13 500 ou 13 600 places. À l'heure actuelle, on en a 16 000. Alors, on peut se demander, à partir de ces $10 millions supplémentaires qui ont été votés cette année, quelle est la partie qui est présentement engagée près de six mois après l'adoption du budget. C'est assez étonnant. Ceci a été signalé par un groupe. J'avais d'ailleurs moi-même réagi, à savoir que le gouvernement, à plusieurs reprises, donne des conférences de presse sur à peu près le même sujet. Sur le même sujet, cela ne serait pas grave, mais il le fait avec les mêmes données, créant l'impression qu'il s'agit de données nouvelles. Ainsi, je pense que plusieurs se rappelleront qu'à l'été 1978 on annonçait ce développement des garderies avec un ajout de $12 millions qui portait à $22 millions les dépenses qui seraient encourues en garderie. Mais il semble que ce soit tout récemment, un an plus tard, cet été, qu'on vienne dire de quelle façon cet argent supplémentaire sera dépensé, à l'occasion d'une nouvelle conférence de presse, alors qu'il s'agit toujours du même contenu que ce qui avait été annoncé à l'été 1978 et qui avait été repris à la conférence conjointe du ministre des Affaires sociales et du ministre d'État au développement social en octobre.

Je voudrais poser quelques questions. Évidemment, je pense que cela sera peut-être davantage l'objet de l'étude du projet de loi — car il ne s'agit présentement que d'un avant-projet de loi — article par article. Il s'agit du phénomène de la garderie en milieu familial. Il est exact, comme dit le ministre, qu'il y a eu une tradition — qui existe encore d'ailleurs — à savoir que devant l'absence de garderie, le parent requérait les services de son voisin, de son parent ou de son milieu proche pour assumer ces fonctions. On semble vouloir là institutionnaliser la garde en milieu familial. Je suis d'accord que dans des endroits, disons, plus éloignés, où les populations sont plus restreintes — on pense particulièrement à des petites municipalités; je pense que le député de Mégantic-Compton peut savoir à qui je fais référence, lui qui

vient d'un comté qui a de nombreuses petites municipalités où la population est très restreinte... Il y a aussi le danger — tout dépendra de l'accent que l'on mettra sur la garde en milieu familial par rapport au développement des garderies — qu'on en vienne, en milieu urbain, à restreindre ou à ralentir le développement de garderies ou d'un réseau de garderies adéquat pour servir les milieux urbains ou semi-urbains.

On peut se demander aussi — des personnes qui viendront devant nous poseront probablement la question — si le financement de ces garderies en milieu familial va vraiment donner aux femmes qui assumeront ces fonctions — n'oublions pas que ce sont surtout des femmes, sinon en totalité — l'assurance du salaire minimum. Quand on pense qu'on va accorder $5 par enfant, plus $1 que les parents devront débourser, et ceci pour quatre enfants, cinq jours par semaine, et des services de garde devant probablement être ouverts de 7 heures ou 7 h 30 le matin à 18 heures le soir, je pense que cet aspect devrait être examiné très sérieusement. Qu'on ne fasse pas un pas en arrière alors qu'on vient d'adopter une Loi sur les conditions minimales de travail qui avait surtout pour effet et qui visait surtout — en tout cas, je l'ai vu dans cet esprit — à corriger des injustices qui étaient commises à l'endroit des femmes. (11 h 15)

Si, d'une part, il peut y avoir nécessité pour de la garde en milieu familial, compte tenu du milieu géographique et de certains autres facteurs, il faut aussi faire attention qu'elle ne se substitue pas à une autre et qu'elle ne devienne pas un moyen plus économique pour l'État de répondre aux besoins de la population.

Je me réjouis évidemment du développement des haltes-garderies. Je pense que c'est là une mesure qui va répondre à des besoins temporaires de certaines familles et leur faciliter la tâche. Là, encore une fois, je ne sais pas — peut-être que le ministre l'a dit — quelles sont les sommes qui seront utilisées à cette fin, mais c'est un aspect important dans la diversification des types de garderies.

Quant à la garderie en milieu scolaire, je trouve assez dérisoire la somme qu'on doit y consacrer — même pas en 1979-1980, mais en 1980-1981 — alors qu'on parle de $1 million. Je me demande quelle est la part que l'État va assumer pour les parents dans ce service de garderie en milieu scolaire. Je sais que cette année, par exemple, là où on a fait des expériences avec les $200 000 ou $250 000 qui avaient été mis à la disposition des commissions scolaires, ces sommes ne devaient être utilisées que pour l'équipement, les activités, la collation, etc., et qu'aucune aide n'a été fournie aux parents. Quand on pense aux parents qui viennent de milieux défavorisés et que ce sont eux qui, comme pour les parents d'autres milieux, doivent assumer le salaire des personnes responsables de soins de garde, on peut se demander si vraiment on ne fait pas un pas en arrière plutôt qu'un pas en avant à l'égard de ces parents. Quand on pense à $1 million pour l'ensemble de la province en 1980-1981, je pose la question au ministre: Est-ce que cette somme ne suffira encore qu'à couvrir les frais d'équipement et ne servira d'aucune façon à assumer les frais de garde proprement dits, ces derniers devant être assumés en totalité par les parents?

Encore dans le domaine de la garderie en milieu scolaire, on me disait, par exemple, qu'il y a une directive du ministère de l'Éducation cette année à savoir que la collation ne doit plus être assumée par la garderie, mais doit être apportée par les enfants. On peut s'imaginer facilement les problèmes que cela crée — je pense que le ministre va être sensible à cela — alors que cette occasion de collation pour les soins de garderie après les heures scolaires pourrait être utilisée pour une éducation à la nutrition dans la ligne de la politique alimentaire que le ministère des Affaires sociales veut développer. On dit: Non, à l'avenir, c'est la famille qui va en assumer les frais et les coûts, alors qu'on sait fort bien, quand on connaît les jeunes de six à onze ans, que si les parents leur donnent déjà un lunch, fort probablement la collation sera avalée en même temps que le lunch. Je pense qu'il ne faut quand même pas demander aux enfants de six, sept, huit ou neuf ans de faire la différence. Ce qui arrivera, c'est que, fort probablement, les enfants seront partis du foyer et, à 16 heures, ils n'auront plus rien à se mettre sous la dent, ce que tous les enfants font d'une façon bien régulière quand ils reviennent à la maison. C'est peut-être une chose que le ministère des Affaires sociales et le ministère de l'Éducation devraient examiner conjointement. Tout ceci pour dire que le $1 million qui sera mis à la disposition du monde scolaire en 1980-1981 m'apparaît totalement insuffisant pour répondre aux besoins et que ce seront les parents qui devront encore, si cela demeure tel quel, assumer la majorité des coûts.

Je disais au départ qu'on créait une structure, que la politique n'était pas définie. Ceci semble être confirmé par le fait qu'on retrouve à l'intérieur de l'avant-projet de loi une réglementation à une foule d'articles. Ceci n'est pas nouveau, mais, encore une fois, nous laissera, à moins qu'au moment où le projet de loi sera déposé... Il ne pourra pas y avoir de projet de réglementation très précis puisque ce sera à l'office de le déterminer. Il faudrait quand même que le gouvernement tente de faire un effort pour préciser un peu plus les choses. Dans sa grande générosité, le gouvernement a dit: Quant au secteur privé de garderies, on leur conserve ou on leur maintient leurs droits acquis. Évidemment, ceci se situe dans la philosophie du gouvernement actuel qui a recouvré sa ferveur pour l'entreprise privée uniquement au moment du dépôt de sa politique économique intitulée, Bâtir le Québec, mais qui, dans tous les autres domaines, fait tout ce qu'il peut pour l'empêcher de se développer. N'eût été, je pense, les initiatives du secteur privé, que ce soit dans le

cas des garderies à but lucratif ou à but non lucratif, on serait encore probablement devant une absence à peu près totale de garderies au Québec.

Je sais que le ministre des Affaires sociales a déjà tenté ceci à l'égard des foyers d'accueil au mois de décembre, à l'occasion de la loi 103. Il l'essaie de nouveau ici avec l'avant-projet de loi sur les garderies. On sait fort bien que le gouvernement voudrait bien tenter la même opération à l'égard des écoles privées, mais il n'est pas sûr que la population soit encore prête à avaler le poisson. À tout événement, je pense que le ministre, si on le lui demandait privément, reconnaîtrait que même s'il y a certainement eu des lacunes à déplorer dans le passé et qu'il y en a peut-être encore présentement, quand même, le secteur privé a rempli un rôle important dans les services de garderies et a rempli un rôle utile et de qualité à maints égards. D'ailleurs, ce témoignage leur est rendu par un grand nombre de parents qui les fréquentent.

M. le Président, je pense que je me suis assez étendue sur tout cet avant-projet de loi. Nous aurons l'occasion de revenir sur le projet de loi à l'occasion de l'audition des mémoires. Je voudrais simplement dire en conclusion que je me pose de très sérieuses questions quant à l'existence de l'office, du moins tel qu'il est conçu, que je me pose également des questions quant à la garde en milieu familial qu'on veut institutionnaliser de façon générale. Cela est-il basé uniquement sur des préoccupations de services aux familles et aux enfants ou n'y entre-t-il pas trop des préoccupations d'ordre économique?

Finalement, je veux dire sur la question de la réglementation, évidemment, que cela découle du vague du projet qui est une création de structure plutôt que la mise en place ou l'exécution d'une politique définie par le gouvernement.

Je voudrais remercier tous les organismes qui se présenteront devant nous et qui, en dépit des vacances, en dépit de l'absence de personnel, d'un fonctionnement peut-être beaucoup plus ralenti des garderies durant la période d'été, ont pris le temps, ont fait l'effort de venir faire valoir leur point de vue devant cette commission parlementaire. Nous examinerons leurs mémoires avec beaucoup d'attention.

Je suis sûre que l'expérience qu'ils vivent depuis plusieurs années et toutes les difficultés qu'ils ont rencontrées, quels qu'en soient les responsables, nous permettront d'obtenir beaucoup plus de lumière et peut-être, finalement, en dernière analyse d'adopter un projet de loi à l'Assemblée nationale qui, d'abord, assurera un réseau de garderies de qualité, mais qui répondra également aux besoins véritables de la population sans, d'une part, faire taire ceux qui ont des points de vue différents et, d'autre part, il permettra que la population soit le mieux servie. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Boucher): Merci, Mme le député de L'Acadie. M. le député de Mégantic-Compton.

M. Fernand Grenier

M. Grenier: M. le Président, je voudrais d'abord remercier les 26 groupes qui ont accepté de venir présenter des mémoires devant cette commission et les assurer que nous ferons tout en notre possible — je pense que c'est là l'intention du gouvernement et du parti de l'Opposition officielle et c'est également notre intention — pour prendre le temps requis pour entendre chacun des groupes et vous questionner pour mieux former notre opinion relativement à cet avant-projet de loi qui nous est présenté aujourd'hui. Il est extrêmement important puisqu'il bâtit un système, continue d'élaborer un système au Québec avec lequel nous vivons depuis déjà plusieurs décades et qui sera passablement transformé d'ici quelques années à la faveur de cet avant-projet de loi. Je voudrais vous dire que nous serons tous pendus à vos lèvres pour mieux vous entendre dès que nous aurons terminé cette première étape qui est la position du gouvernement, de même que celle des partis d'Opposition.

Depuis le début des années soixante-dix, les besoins en garderies n'ont cessé de croître dans toute la province. Déjà en 1974, en instaurant le plan Bacon, le gouvernement libéral de l'époque s'engageait à soumettre une loi-cadre pour les garderies. En 1976, c'était au tour du Parti québécois, dans un enthousiasme préélectoral, de promettre un réseau de garderies universel et gratuit. Trois ans plus tard, le gouvernement péquiste accouche d'un avant-projet de loi sur les garderies aucunement universel et surtout pas gratuit.

Au Québec, on ne peut nier le problème que pose la pénurie de garderies et ce, à la grandeur du Québec. Tout le monde reconnaît cela. Cependant, avant d'aller plus loin, vous allez me permettre de rappeler au gouvernement la philosophie qui prévaut au Tribunal de la jeunesse. Cette philosophie consiste à assurer à l'enfant un milieu sain et stable, c'est-à-dire un milieu qui ne dépersonnalise ni ne désoriente l'enfant, bref, un milieu qui s'apparente le plus au milieu familial. Ainsi, toute loi sur les garderies devrait tenir compte le plus possible de l'élément naturel dans lequel est baigné l'enfant. Tenant compte de ce principe, l'Union Nationale perçoit les priorités en matières de garderies de la façon suivante.

Premièrement, la garderie en milieu familial. Ce genre de garderie devrait être le premier à favoriser, compte tenu des exigences fondamentales de l'enfant. Il est temps que le gouvernement prenne des dispositions en vue d'apporter des correctifs à la situation du gardiennage dans les familles. Qu'en l'occurrence la promesse électorale du Parti québécois en prenne un dur coup, cela ne tient sans doute qu'aux exigences du pouvoir. Deuxièmement, la garderie privée. Au nom de l'Union Nationale, je veux souligner à ce moment-ci l'importance historique des garderies privées dites à but lucratif. Ce genre de garderies québécoises a plus de 100 ans et est le fruit d'efforts et d'acharnement. Il est même le précurseur des nouvelles garderies populaires. Si je rappelle cela aux

membres de la commission, c'est que, depuis que j'étudie ce dossier, il m'a été donné de visiter certaines garderies à but lucratif et certaines garderies dites populaires. Il m'a semblé se dégager autour de l'expression "à but lucratif" une connotation péjorative. Parce qu'un réseau de garderies perçoit directement des parents les sommes requises à son expansion, parce qu'il ne requiert presque pas ou pas du tout de subventions pour son fonctionnement, on le perçoit comme faisant de l'argent sur le dos du peuple. Enfin, le Parti québécois règle la question des garderies privées. Avec cet avant-projet de loi, du revers de la main il voue à une mort certaine toute garderie privée en ne précisant pas leur statut et en bloquant toute possibilité d'en ouvrir de nouvelles. Il faut lire l'article 88 pour s'en convaincre. (11 h 30)

Troisièmement, la garderie privée sans but lucratif et la garderie populaire.

Il est possible que, pour certains quartiers, le système de garderies en milieu familial ne fonctionne pas et qu'il n'y ait que la garderie populaire qui convienne au quartier. Alors, pourquoi ne pas procéder à la création d'une garderie populaire? L'important, pour le législateur, réside dans le fait qu'il faut être ouvert à tous les types de garderie, tout en ayant en tête l'ordre de priorités que je viens de mentionner.

Enfin, l'avant-projet de loi fait état d'un autre type de garderie qui pourrait être utilisé par la grande majorité des femmes. Il s'agit de la halte-garderie, à laquelle le ministre concède peu d'importance. Au Québec, 75% des femmes ne sont pas sur le marché du travail. Une grande partie de ce pourcentage élèvent leurs enfants. Je considère que cet avant-projet de loi sur les garderies est injuste pour ces 75% de femmes. En effet, les mères de famille auraient pu voir dans la halte-garderie une solution à leur problème d'accaparement. Hélas! l'avant-projet ne trouve pas du tout prioritaire ce type de garderie.

J'en profite pour parler de la majorité silencieuse des Québécoises, c'est-à-dire de ces 75% de femmes qui sont classées ironiquement comme inactives parce qu'elles ne sont pas sur le marché du travail. Sous prétexte que la femme au foyer est docile et moins revendicatrice que les 25% de ses concitoyennes qui travaillent hors du foyer, le gouvernement péquiste a complètement oublié cette couche de la population féminine dans ses mesures sociales.

Permettez-moi une brève parenthèse pour illustrer cette lacune du gouvernement et prenons ces $240 d'allocation pour les travailleuses qui doivent s'absenter pour un congé de maternité. Par cette allocation, à mon sens, discriminatoire, le ministre du Travail dévalorise la mère de famille qui élève ses enfants. Ainsi, une mère au foyer qui redevient enceinte n'a pas droit à cette prime de $240. Donc, le gouvernement dit implicitement aux femmes au foyer qu'elles ne sont pas des femmes à part entière, parce qu'il ne reconnaît pas leur travail de mère de famille.

Je ne puis que me réjouir des mesures sociales qui améliorent le sort de 25% des femmes du Qué- bec. Cependant, il est inadmissible que le gouvernement fasse la sourde oreille aux revendications répétées des femmes qui ne sont pas sur le marché du travail, c'est-à-dire de 75% des Québécoises. Pourquoi le gouvernement ne reconnaît-il pas le travail qu'accomplit une femme qui élève ses enfants? Sur le plan économique, voici l'absurde de la situation: Avec cette politique de gardiennage, on va subventionner une dame qui gardera trois enfants étrangers, alors qu'il n'y aura aucun pécule de versé à la femme qui gardera, elle, trois enfants qui lui appartiennent. C'est une attitude qui frise presque le ridicule ou le mépris de la femme au foyer.

Peut-être la situation changera-t-elle avec la nomination du nouveau ministre à la Condition féminine, mais je pense que vous allez me permettre d'en douter. Cette nomination arrive justement en période préréférendaire, alors qu'on se plaint que 75% des femmes, c'est-à-dire des femmes au foyer, sont réticentes à la souveraineté-association. Sans équivoque, le gouvernement a mandaté le nouveau ministre à la Condition féminine d'aller chercher les "oui" chez cette clientèle plus conservatrice.

Cette perspective n'est guère réjouissante pour les 75% de Québécoises sur lesquelles l'intérêt du ministre sera porté. Nous sommes au début de la saison de la distribution des "candies" préréférendaires à ces pauvres femmes indécises. Cela relève de l'exploitation politique, dont les femmes ne seront certainement pas dupes.

Je voudrais, M. le Président, vous dire que nous aurons au cours de l'étude de ce projet de loi à préciser beaucoup plus le rôle que doit tenir le secteur privé dans le système de garderies. Nous avons eu à discuter, autour de cette table, les mêmes personnes, soit vous, M. le ministre, Mme le député de L'Acadie et moi-même, d'autres lois et des crédits, autour de cette table, qui m'ont parfois éberlué. Dans le programme du Parti québécois — Mme le député de L'Acadie en faisait mention tout à l'heure — en éducation, on s'était engagé à diminuer à rien le système de subventions aux institutions privées. On a retardé, puisque cela ne faisait pas trop politique de couper cela en moins de cinq ans. On a adopté un autre projet de loi, autour de cette table, aussi, qui a fait qu'on a aboli complètement le service d'adoption du secteur privé, qui est devenu, maintenant, une appartenance du conseil de services de santé.

On n'a, également, pas trop élaboré les politiques des foyers privés pour personnes âgées alors qu'on met un accent fort important dans le domaine du secteur public. Vous allez me permettre de douter de la volonté du gouvernement de vouloir développer... le ministre dit bien à l'article 88 de son avant-projet de loi — bien sûr, je ne veux pas entrer dans le détail de l'article — "... les services de santé et les services sociaux, peut conserver son statut — de garderie privée — corporatif et les règles de formation..." On peut conserver; bien sûr, on ne parle pas d'étendre et de rayonner davantage dans le secteur privé, mais de conserver. C'est probablement une mesure

temporaire en attendant d'arriver avec quelque chose de plus radical.

Pas besoin de vous dire, M. le Président, que dans le secteur privé on s'inquiète, et avec raison. On s'inquiète de ces maisons qu'on a bâties, qu'on a érigées, de ces services qu'on a rendus à la population, depuis plusieurs années, services qu'on peut qualifier de tout à fait corrects; dans le moment, on s'inquiète à savoir s'il y aura continuité pour le secteur privé. Je ne suis pas au secteur public et je sais que nous avons besoin, dans plusieurs parties du Québec, de développer davantage le secteur public des garderies. Je veux vous faire savoir immédiatement que je m'opposerai à un tel projet de loi s'il ne garde pas le secteur privé comme il est et si on ne lui permet pas de se développer. Je m'opposerai avec la dernière énergie. Je voudrais que ce système, qui a fait ses preuves au Québec, on ne le rejette pas du revers de la main comme on tente de le faire dans le domaine de l'éducation, comme on l'a fait dans le service d'adoption et comme on s'efforce de le faire, depuis quelques années, dans le système des foyers d'accueil. Inutile de vous dire, M. le Président, que mes interventions au cours de l'étude de l'avant-projet de loi, au nom de mon parti, porteront sur l'aspect du secteur privé de garderie, spécialement là-dessus. Nous nous acharnerons et nous ferons une lutte pour conserver ce secteur au Québec.

Personnellement, je viens du milieu de l'enseignement et j'ai également travaillé pendant six années dans le milieu des affaires sociales. Je suis en mesure de savoir de quoi je parle. J'aime mieux vous dire immédiatement qu'avec un rouleau compresseur, on peut réussir à abolir le système de l'enseignement privé. On peut également réussir à abolir le système des garderies privées. Mais cela coûte cher à un gouvernement de faire cela. Je vous avise immédiatement qu'on devra élaborer davantage les politiques du gouvernement lors de l'étude de cet avant-projet de loi relativement aux garderies privées, ou on montrera les dents, de ce côté-ci de la table.

Il y a une autre chose que j'aimerais faire remarquer au gouvernement. Je trouve étrange que le ministre d'État à la Condition féminine ne soit pas présente ce matin. Vous avez signalé au tout début que cela intéresse, bien sûr, les hommes — je ne vois peut-être pas très bien, mais j'ai l'impression qu'ils sont en minorité ici — mais cela intéresse surtout les dames. Il me semble que ce serait la responsabilité du ministre, avant de commencer sa croisade à travers le Québec sur la condition féminine, de venir entendre ici les organismes provinciaux. Il y a des organismes qui représentent bon nombre de dames du Québec. Il y a un organisme, qui va se présenter au cours de la journée, qui représente 75 000 femmes du Québec. Cela vaudrait peut-être la peine qu'elle soit présente avec nous. Je sais qu'elle a d'autres obligations. Elle a principalement l'obligation du référendum, mais cet avant-projet de loi qu'on étudie aujourd'hui, c'est le projet de loi sur les garderies.

Motion pour convoquer

le ministre d'État à la Condition féminine

J'ai une motion ici qui dit que cette commission est d'avis d'inviter Mme le ministre d'État à la Condition féminine à venir siéger autour de cette table pendant l'audition des mémoires relatifs à l'avant-projet de la loi sur les services de garde à l'enfance. Je vous remercie, M. le Président.

Une voix: Cela va passer à l'histoire.

Le Président (M. Boucher): Est-ce que cette motion sera adoptée?

Une voix: Non.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Beauharnois.

M. Lavigne: M. le Président, il me fait plaisir d'intervenir dans un bref commentaire sur la présentation des mémoires, ce matin...

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, il y a une motion sur la table.

M. Lavigne: Je m'excuse.

Le Président (M. Boucher): Sur la motion.

Mme Lavoie-Roux: Le ministre s'est exprimé. Une voix: D'accord.

Le Président (M. Boucher): Est-ce que... M. Lavigne: On va vider cette question.

Le Président (M. Boucher): ... il y a des intervenants sur la motion?

M. Lazure: Oui, M. le Président, je peux bien intervenir sur la motion pour dire qu'elle n'est pas la meilleure du député de Mégantic-Compton. Je dois dire que le ministre d'État à la Condition féminine est actuellement en Colombie-Britannique, ou canadienne, comme vous voudrez. En tout cas, elle est assez loin d'ici. Je dois ajouter qu'elle a suivi de très près toute l'évolution de cette question des services de garde depuis trois ans et encore tout récemment. Je pense qu'il est un peu facile de faire croire au monde que le ministre d'État à la Condition féminine ne s'intéresse pas aux services de garde parce qu'elle est absente. Elle a évidemment d'autres obligations, mais elle suit de très près toute l'évolution de ce dossier.

Le Président (M. Boucher): Merci. Mme le député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Sur la motion du député de Mégantic-Compton, je dois dire que j'abonde dans le sens du député. En fait, cette idée m'avait traversé l'esprit quand je suis arrivée à la commission parlementaire ce matin. Pas que je veuille

minimiser le rôle du ministre des Affaires sociales, mais il y a aussi l'absence du ministre d'État au Développement social. Je ne ferai pas de motion pour le convoquer. Il est sûr qu'il est étonnant, d'abord, qu'il y ait l'absence du ministre d'État à la Condition féminine, le superministre, et peut-être même qu'aucune femme du Parti québécois ne soit ici, quand elles sont en plus grand nombre que dans l'Opposition...

M. Lazure: II y en a beaucoup dans la salle.

Mme Lavoie-Roux: À tout événement, cela ne m'étonne pas. Évidemment, je réalise que Mme le ministre est en Colombie-Britannique. Si le ministre me le permet, y est-elle retenue pour toute la semaine?

M. Lazure: Je l'ignore, M. le Président, mais je vais vérifier. Sur cette question capitale, fondamentale, je vous donnerai une réponse cet après-midi.

Mme Lavoie-Roux: Cela aurait été fort instructif pour un ministre qui va vouer ses efforts uniquement à la condition féminine, M. le député de Mégantic-Compton, de voir ici comment ce projet de loi est tellement parcellaire par rapport à tout le problème de la condition féminine. Je ne veux pas revenir sur les choses que j'ai dites tout à l'heure, à savoir qu'il s'agit vraiment d'un projet de loi dont on ne sent pas l'intégration dans le problème général de l'évolution et des besoins des femmes au Québec. Je pense qu'à cet égard le ministre aurait peut-être assisté à des auditions fort instructives pour elle.

Évidemment, on sait qu'elle préfère faire la tournée de la province, comme elle l'a fait dans le cas de l'assurance automobile, quand on peut préparer ceux qui viendront se faire entendre, que les auditoires sont choisis, alors qu'ici — je rends témoignage au ministre, cela n'a pas été fait sur invitation, comme certains ministres ont l'habitude de le faire; ce fut une invitation ouverte — le ministre aurait peut-être eu un son plus exact de ce que la population pense que lorsqu'elle part en tournée organisée, bien arrangée par ses fonctionnaires.

Je pourrais parler vingt minutes, M. le ministre, pour vous dire toutes les bonnes raisons pour lesquelles il faudrait que le député de Dorion soit ici, mais, dans les circonstances, je peux simplement exprimer mon regret. Peut-être peut-on souhaiter qu'au moins elle lise les mémoires. Je doute fort qu'elle en ait pris connaissance, parce que, si elle en avait pris connaissance, elle serait peut-être ici aujourd'hui et non en Colombie-Britannique. J'ai terminé, M. le Président, sur la motion.

Le Président (M. Boucher): Merci, Mme le député de L'Acadie. M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: Oui, deux minutes seulement pour signaler au ministre que j'ai trouvé un peu bizarre son attitude quand j'ai demandé la présence du ministre d'État à la Condition féminine — parce que le journal des Débats ne le dit pas — et qu'il a ricané. C'est sans doute qu'il attache peu d'importance à la crédibilité qu'il accorde au nouveau ministre à la Condition féminine. Il ne faudrait pas oublier que c'est quand même un superministre. Elle s'est rangée dans le rang des gros ministres dans le moment. Ils sont maintenant cinq au lieu de quatre. Je pense, qu'à ce moment, l'assistance aurait aimé entendre le ministre d'État à la Condition féminine s'exprimer sur cet avant-projet de loi. J'ai presque l'assurance que si le ministre d'État à la Condition féminine avait été ici, elle aurait peut-être abondé dans notre sens à plusieurs reprises, pour permettre à ces 75% de femmes du Québec dont elle parle sur les ondes ce matin... C'est très fragmentaire, c'est peut-être une déclaration faite de la Colombie-Britannique, mais elle semble soudainement s'intéresser, comme on l'a signalé tout à l'heure de part et d'autre, tant le député de L'Acadie que moi-même, au pourcentage de femmes qui ne sont pas sur le marché du travail. C'est ce qui est arrivé ce matin. J'ai entendu cela avant de descendre de ma voiture.

Je pense que cela aurait été intéressant qu'elle vienne nous dire ce qu'elle pense de cet avant-projet de loi, pour que n'arrive pas ce qu'on a connu, par exemple, à l'Industrie et au Commerce, c'est-à-dire que le superministre ne soit pas d'accord avec le ministre en titre et qu'on arrive, dans une quinzaine de jours, avec ce bris qui fait mal parfois à un gouvernement et qu'on ne vous souhaite pas. On ne vous souhaite pas autant de mal que cela. (11 h 45)

On voudrait bien qu'il y ait une entente possible entre votre superministre, le ministre d'État à la Condition féminine, et vous. On sait que le ministre d'État à la Condition féminine est mal à l'aise à l'Assemblée nationale. Ce sont ses propos. Elle dit qu'elle n'est pas comme un poisson dans l'eau à l'Assemblée nationale, qu'elle n'aime pas cela. C'est sûr qu'elle aime mieux se promener dans la province et ailleurs aussi; j'accepte cela. Ce sont ses paroles, c'est elle qui nous l'a dit. Mais il y a ici des gens qui ont quelque chose à dire et ils aimeraient le dire devant les personnes responsables, non pas le dire seulement devant l'Opposition mais devant les personnes qui auront à prendre une décision.

Honnêtement, avec le projet de loi que nous avons là, si le ministre d'État à la Condition féminine juge que ce n'est pas important qu'elle soit ici, pour moi, c'est le monde à l'envers. On étudie une loi qui, pour moi, est capitale; on entend les gens, c'est plus important que la loi que nous allons étudier. Les gens viennent se faire entendre à Québec et ils veulent dire au gouvernement ce qu'ils pensent, et le ministre qui devrait être fortement intéressé n'est pas là. J'étais assuré — comme on le signalait tout à l'heure — que les deux ministres seraient ici puisque vous avez un rôle important à jouer dans cette loi. Il est bien sûr que vous êtes le titulaire de la loi mais son application aura des répercussions fort importan-

tes sur les femmes au Québec. S'il y a une personne qui a bien décidé de défendre la condition féminine au Québec, c'est bien elle et c'est le gouvernement qui lui en a donné le mandat il y a quelques jours ou, du moins, c'est ce qu'on a entendu.

M. le Président, on va voter, on a des chances de se faire battre puisque le gouvernement est toujours majoritaire mais c'est dur d'expliquer un vote de gens qui pourraient voter contre. On va voter contre la présence de Mme le ministre à cette table ce matin. C'est assez étrange.

M. Lazure: M. le Président, le député de Mégantic-Compton me permettra d'expliquer mon ricanement de tantôt pour le journal des Débats. Si j'ai ricané, c'est tout simplement avec, en même temps, un peu de tristesse/de voir qu'on perd du temps précieux sur une motion qui est aussi loufoque. S'il y a une personne dans le cabinet actuel des ministres qui a démontré l'intérêt qu'elle porte à l'amélioration des conditions de travail des femmes en garderie et aussi pour augmenter les services de garderie, c'est bien le ministre d'État à la Condition féminine. Je pense qu'il est absolument irresponsable de vouloir profiter d'un concours de circonstances où le ministre est physiquement incapable d'assister à la réunion pour laisser entendre aux gens qui sont ici ou à d'autres qui liront le journal des Débats que le ministre d'État à la Condition féminine n'est pas intéressé à ce projet de loi. Il n'y a pas de qualificatif pour un tel procédé, M. le Président, et je n'oserai pas le qualifier mais le moins qu'on puisse dire, c'est que c'est une perte de temps et un peu une insulte à l'intelligence des gens qui suivent la scène politique au Québec et qui connaissent bien les intérêts du ministre d'État à la Condition féminine.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, il me reste encore du temps de parole.

Le Président (M. Boucher): Mme le député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Je voudrais quand même... Malheureusement, je n'ai pas la transcription de cette émission de ligne ouverte — ou de radio, ce n'était peut-être pas une ligne ouverte — où moi-même et Mme la ministre d'État, à la Condition féminine étions présentes. Ceci remonte à la Journée des femmes du 8 mars 1977 — je pense que ce serait facile de vérifier — où cette question de garderie avait été abordée de part et d'autres d'une façon incidente au cours d'un échange d'une dizaine de minutes. À ce moment-là, Mme la ministre des Consommateurs et responsable du Conseil du statut de la femme s'était demandé si, aujourd'hui, c'était aussi important de penser à un réseau universel de garderies parce que, selon les rencontres qu'elle faisait avec des jeunes filles, il y avait maintenant une propension à rester avec les enfants, à en prendre soin, etc. Je me souviens très bien de lui avoir rétorqué: Ceci peut être le cas de jeunes filles qui complètent des études universitaires et pour qui, tout à coup, il peut y avoir un changement de valeurs ou un déplacement temporaire de valeurs mais que tel n'était pas le cas quand on pensait à la majorité des femmes qui, elles, étaient forcément sur le marché du travail pour aller chercher un salaire d'appoint. C'est encore de cette majorité de femmes qu'il s'agit quand on discute d'un réseau de garderies. Je ne veux pas minimiser les bons sentiments de Mme le ministre à l'égard des garderies ou de la condition féminine, et je pense que je suis prête à appuyer le ministre sur le fait qu'elle tente dans la mesure du possible, avec les interlocuteurs qu'elle a comme collègues dans son parti, de faire avancer la condition féminine. Mais, quant à la question des garderies, il aurait été fort intéressant de connaître le fond de la pensée du ministre sur le sujet. Il se peut fort bien qu'elle ait évolué depuis le 8 mars 1977, mais elle était quand même à ce moment ministre et elle était pour le moins, disons, je n'exagère rien, ambivalente quant à la nécessité de l'établissement d'un réseau de garderies. Je pense qu'il serait facile, M. le ministre, de relever, c'était à Radio-Canada, cette transcription. Je pense que mes paroles, quoi qu'elles ne sont pas répétées textuellement, situent bien le contexte de l'échange que nous avions eu à ce moment.

Le Président (M. Boucher): Est-ce que les membres de la commission sont prêts à voter? M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: M. le Président, je veux signaler ce qu'on a donné comme arguments ici. Je pense que le ministre est conscient lui aussi, et c'est son rôle d'excuser son collègue qui est absent. Je pense bien qu'il est conscient aussi que ce serait la place du ministre d'État à la Condition féminine d'être ici. On n'exagère pas en demandant cela et je pense bien que le ministre ne peut pas nous accuser de faire perdre le temps de la commission si l'on prend dix minutes pour discuter de la présence du ministre d'État à la Condition féminine.

D'autre part, j'aimerais que le ministre puisse nous donner une assurance. Il est difficile de monopoliser deux personnes du cabinet pendant quatre jours de temps, mais si on pouvait, d'ici la fin des auditions, faire que la ministre d'État à la Condition féminine puisse être présente au moins à une de nos séances pour donner son point de vue! J'aurais aimé lui poser certaines questions sur les ajustements qui seraient faits, par exemple, aux subventions de garde en milieu familial; j'aimerais connaître sa position là-dessus. Je pense qu'il y aurait peut-être un éclairage intéressant à connaître du ministre d'État à la Condition féminine.

Mise aux voix de la motion

Le Président (M. Boucher): Merci. Est-ce qu'on est prêt à prendre le vote sur la motion du député de Mégantic-Compton à savoir que cette commission est d'avis d'inviter Mme le ministre

d'État à la Condition féminine à venir siéger à cette table pendant l'audition des mémoires relatifs à l'avant-projet de loi, Loi sur les services de garde à l'enfance? Mme le député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Pour.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Robert Baldwin.

M. O'Gallagher: Pour.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Sherbrooke.

M. Gosselin: Contre.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: Pour.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Beauharnois.

M. Lavigne: Contre.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Chambly.

M. Lazure: Contre.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Rosemont.

M. Paquette: Contre.

Le Président (M. Boucher): La motion est rejetée 4 contre 3.

Mme Lavoie-Roux: Ce n'est quand même pas si mal.

M. Lazure: Je peux vous essayer.

Le Président (M. Boucher): M. le ministre.

Modifications à l'avant-projet de loi

M. Lazure: M. le Président, si vous permettez, très rapidement, avant qu'on ne commence à écouter les représentants des groupes, j'aimerais faire part à cette commission et aux groupes de quelques changements très précis qui seront apportés à l'avant-projet. L'article 30 sera modifié de manière que la garde dans le milieu familial soit accessible aux enfants n'ayant pas atteint l'âge scolaire obligatoire et aux enfants fréquentant l'école primaire, donc, accessible aux deux groupes d'enfants. L'article 30.

Deuxième changement, l'article 58 — je l'ai dit au cours de mes remarques préliminaires ce matin — sera aussi modifié pour prévoir que l'obligation de fournir les services de garde en milieu scolaire sera énoncée, explicitée, expliquée par voie de règlement.

L'article 65 est modifié afin de permettre à l'office de pouvoir déterminer par règlement le montant de la contribution qui peut être exigée pour les enfants recevant des services de garde en milieu scolaire. L'article 67 sera modifié afin de permettre à l'office de subventionner les enfants de familles à faible revenu et qui reçoivent des services de garde en milieu scolaire. Et enfin, à l'article 72, le dernier paragraphe sera modifié de manière qu'il soit clairement établi que le ministre responsable de l'office a le pouvoir de créer la réglementation en ce qui concerne les services de garde et de suggérer des modifications à la réglementation suggérée au gouvernement par l'office. Voilà, M. le Président... et peut-être deux...

Mme Lavoie-Roux: C'est difficile de...

M. Lazure: Oui, d'accord. On va en faire photocopier des exemplaires qu'on va distribuer.

M. Grenier: M. le Président...

Le Président (M. Boucher): M. le député de Mégantic-Compton.

Mme Lavoie-Roux: J'ai demandé copie des amendements.

M. Grenier: Oui, mais on discutait tout à l'heure d'une question. On est prêt à étudier l'avant-projet de loi que vous nous avez présenté et qu'on a en main depuis quelques jours, mais n'y aurait-il pas eu lieu de faire ces modifications à la parution du projet de loi? J'ai la conviction que les mémoires vont également porter sur l'avant-projet de loi tel qu'on l'a en main, alors que vous nous proposez des modifications fort importantes.

M. Lazure: M. le Président, justement, c'est pour cette raison. Sur presque la centaine d'articles qu'il y a dans le projet de loi, ce que je vous communique ce matin à la commission et aux groupements, ce sont des modifications à cinq articles, et je pense qu'ils sont suffisamment importants pour que tout le monde le sache au départ et qu'on en tienne compte dans la discussion. Je répète encore une fois que l'esprit et l'objectif d'un avant-projet de loi, c'est de permettre une consultation encore plus large qu'avec un projet de loi proprement dit, c'est-à-dire de favoriser deux temps de consultation, un pour l'avant-projet et un deuxième pour le projet lui-même. Ceci s'explique assez bien puisqu'on a à créer de toutes pièces une loi sur les services de garde. C'est par un souci de consultation, par un souci démocratique qu'on a déposé cet avant-projet de loi. Nous l'avons déposé au cours de l'été tout simplement parce que nous travaillons à longueur d'année, été compris. Les groupements des garderies savaient fort bien que nous allions le déposer au cours de l'été. Nous aurions préféré le déposer juste avant l'ajournement, mais cela n'a pas été techniquement possible.

M. le Président, une dernière remarque quant au programme du Parti québécois. Nos adversai-

res vont souvent nous reprocher de ne pas appliquer le programme. Ils nous donnent quelques extraits du programme, mais sans jamais se rendre jusqu'au bout de l'article en question qui est l'article 4 du programme, la dernière version, à la page 30 qui se termine en disant: "Cette implantation pourra se faire par étapes, mais devra cependant être prioritaire." C'est précisément ce que nous faisons. Nous voulons implanter le réseau le plus complet possible de garderies et un éventail de services de garde le plus large possible, mais nous le faisons par étapes et je pense que tout le monde sait que financièrement ce n'est pas possible de faire autrement.

Mme Lavoie-Roux: Une chance que vous avez entrepris la première étape avant la fin de votre mandat.

M. Lazure: La première étape est entreprise depuis le 16 novembre 1976, M. le Président.

Une voix: L'accouchement a été douloureux.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. le ministre. Sans plus tarder, j'inviterais les représentants des Organismes familiaux associés du Québec Inc. qui sont ici dans la salle à bien vouloir prendre place à la table centrale.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président...

Le Président (M. Boucher): Mme le député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: ... j'aimerais que nous nous entendions quant à l'allocation du temps. Je ne sais pas si le ministre veut procéder d'une façon rigide, 20, 20, 20, c'est-à-dire 20 minutes de présentation, 20 minutes pour le parti ministériel et 20 minutes pour les partis d'Opposition ou 15 minutes pour le parti ministériel, soit 20 et 15 ou 20 et 20, ou si encore on est prêt, selon le nombre de points soulevés par un mémoire, à prolonger peut-être le débat tout en étant bien certain qu'aucun des intervenants, c'est-à-dire de nos invités, ne se sente bousculé. (12 heures)

M. Lazure: M. le Président, je suis partisan d'une méthode souple, flexible. On peut garder, comme guide, les quinze minutes, si vous voulez, mais cela peut certainement varier, d'un groupe à l'autre, selon la quantité des questions ou des commentaires qu'il y aura à faire.

Mme Lavoie-Roux: Je pense que leur donner vingt minutes... Évidemment, si le mémoire n'a pas vingt minutes, cela en prendra dix, mais d'une façon générale, je pense que la règle, c'est vingt, vingt, vingt, généralement.

Le Président (M. Boucher): C'est cela, la règle...

M. Lazure: Bon, allons-y pour un maximum de vingt minutes.

Mme Lavoie-Roux: Bien, pour la présentation...

M. Lazure: Comme règle, comme guide.

Mme Lavoie-Roux: Oui, comme guide, d'accord.

Le Président (M. Boucher): Alors, on appréciera chaque mémoire. Je le mentionnerai aux membres de la commission, si on dépasse le temps alloué. Alors, messieurs, si vous voulez bien vous identifier, identifier les gens qui sont avec vous et procéder à la lecture de votre mémoire. Madame.

Mémoires OFAQ

Mme Laporte-Dubuc (Denise): Je m'appelle Denise Laporte-Dubuc. Je suis secrétaire générale des OFAQ, les Organismes familiaux associés du Québec. Je suis accompagnée de deux membres du conseil d'administration: à ma droite, Jean-Guy Brochu, vice-président des OFAQ, et, à ma gauche, le trésorier, Maurice Archambeault. Je suis aussi accompagnée d'une autre permanente qui a travaillé sur le mémoire, Katoune Témisjian. M. Brochu va vous lire notre court mémoire et après on sera disposé à répondre à vos questions.

Le Président (M. Boucher): M. Jean-Guy Brochu.

M. Brochu (Jean-Guy): L'OFAQ est la confédération qui représente, à travers treize fédérations d'associations familiales, environ 125 000 familles québécoises. Depuis sa création, en 1970, le regroupement OFAQ s'est fixé des objectifs: c'est de travailler à l'épanouissement de la famille; de promouvoir le regroupement des familles en associations; de favoriser la connaissance mutuelle, l'échange et la collaboration entre les membres et autres organismes s'intéressant à la famille; de faire de la prévention sociale en aidant la famille dans ses diverses fonctions et d'assurer la représentation de la famille.

Les fédérations familiales provinciales et régionales membres, composées majoritairement de bénévoles et faisant la promotion de la famille, sont les suivantes:

Christian Family Movement Inc., Conseil de la famille de Hull Inc.; Conseil de la famille Richelieu-Yamaska Inc.; Couple et Famille Inc.; Dames Hélène de Champlain Inc.; Fédération nationale des services de préparation au mariage Inc.; Fédération de la famille de Québec Inc.; Fédération des organismes familiaux Saguenay-Lac-Saint-Jean Inc.; Fédération des organismes familiaux Lanaudière Inc.; Institut de la famille de Montréal Inc.; Inter-Montréal du Mouvement des femmes chrétiennes Inc.; Office diocésain de la famille de Trois-Rivières Inc. et Vacances-Familles Inc.

Les services de garde à l'enfance ne sont pas un sujet tout à fait nouveau. En tant que porte-parole de 125 000 familles québécoises, les Organismes familiaux associés du Québec se sont penchés sérieusement sur le problème, à savoir quels sont les choix ou encore les besoins de ces familles. Nécessitent-elles davantage une garderie ou une garde en milieu familial?

Maintes recherches et études ont déjà été effectuées pour identifier les besoins réels de la population en ce qui concerne les services de garde à l'enfance. Entre autres, nous pouvons noter que le rapport du Comité interministériel sur les services d'accueil à la petite enfance, appelé en résumé CISAPE — nous le verrons plus loin — a excellé par son sérieux.

L'avant-projet de loi sur les services de garde à l'enfance prévoit l'institution d'un Office des services de garde à l'enfance et lui définit certaines fonctions. Mais est-ce là un choix pertinent quant à l'utilisation des fonds publics que cette institution entraînerait, son organisation, ses fonctions et enfin sa réglementation?

Nous allons voir, dans une première partie, en quoi la création de cet office serait inutile; dans une seconde partie, nous donnons les conditions qui nous amèneraient à accepter un office des garderies et, ensuite, nous exposerons notre position à l'égard des services de garde à l'enfance.

En termes d'utilisation des fonds publics, nous croyons que l'institution de l'office, telle que proposée, ne constitue qu'un gaspillage de fonds publics: en effet, elle ne représentera qu'une répétition d'études déjà entreprises à divers niveaux. C'est ainsi que l'étude réalisée par les CISAPE a donné lieu à des recommandations vouées à l'oubli par le législateur. Pourtant, la valeur de ce document est considérable. Ce comité avait pour mandat d'examiner les besoins des familles par rapport aux services de garde et aux réseaux de services existants, et d'explorer de nouveaux modèles de services et leur financement. Ce mandat nous rappelle étrangement certaines fonctions de l'office.

Donc, où se trouve le besoin de créer un office gouvernemental des services de garde surtout dans une période où l'État semble encourager fortement l'initiative privée, d'autant plus que cette intervention ne garantit pas l'efficacité par rapport au but fixé.

L'office est constitué de seize membres nommés par le gouvernement. Seuls quatre d'entre eux sont choisis parmi les parents d'enfants recevant des services de garde en garderie, en milieu familial ou scolaire. Ainsi, le pourcentage des personnes capables d'exprimer une partie des besoins réels vécus, elles-mêmes étant chargées d'enfants, n'est que de 25%. Ceci ne permet de connaître qu'une infime proportion des besoins de garde vécus par M. et Mme Tout-le-Monde, la partie la plus importante numériquement n'étant même pas représentée ici.

Doit-on croire que le seul souci du gouvernement en services de garde porte uniquement sur les mères qui sont au travail? L'injustice est flagrante ici. Les mères ayant choisi d'élever elles- mêmes leurs enfants doivent-elles être pénalisées pour autant?

Les fonctions assignées à l'office ne constituent qu'un dédoublement de recherches déjà effectuées par des organismes compétents; notamment, les Organismes familiaux associés du Québec, en qualité de porte-parole de 125 000 familles, sont capables de garantir l'expression des besoins réels des familles. Or, dans les OFAQ, étant donné que ce n'est pas une structure gouvernementale, les frais encourus sont automatiquement moindres. L'institution d'un office, de par sa constitution même, sera obligatoirement loin du monde. Par ailleurs, la garde dans le milieu de travail de même que la garde occasionnelle au domicile de l'enfant n'ont pas été mentionnées dans les fonctions de l'office.

L'office détient tous les pouvoirs sur les différents modes de garde. On n'a que faire des règles et normes qui régissent chacun de nos gestes. Ce ne sont pas les institutions qui manquent, au contraire. Jacques Dumais, dans un article publié récemment dans le Soleil, défend exactement nos positions: "Une bureaucratisation infecte résulterait de l'immixtion trop grande de l'État dans la garde à l'enfance. On n'a que faire des normes, règles, rapports froids dans des lieux où l'enfant a surtout besoin d'humanisme, d'affection, de détente sécurisante, de sentir la vie et la créativité autour de lui. Dans ce contexte, la lourdeur déconcentrée des Affaires sociales s'apparente assez mal merci, comme on l'a suggéré, à la question d'un réseau de garde en milieu familial".

L'humanisation des services de garde à l'enfance ne pourra être garantie qu'en tenant compte des besoins des parents puisque ce sont eux les agents affectifs. Nous voyons dans la création de l'office, tel que défini, une perte de la responsabilité d'éducateurs des parents et le glissement de cette responsabilité vers l'État. Alors que cette responsabilité de l'État se situe uniquement et seulement au niveau économique, le législateur aura-t-il oublié de garantir dans cet office tous les droits de l'enfant?

Dans un autre ordre d'idées, l'orientation actuellement en cours pour les services de garde démontre un déséquilibre en ce qui concerne le nombre de places accordées en garderie et celles accordées en milieu familial. En effet, le nombre de places prévu en garderie est sept fois plus élevé que celui réservé en milieu familial: 3500 en garderie contre 500 en milieu familial. Et pourtant, la recherche effectuée par le Comité interministériel sur les services d'accueil à la petite enfance nous démontre que les besoins sont inverses: "La garde à domicile est sans aucun doute la formule la plus utilisée au Québec, mais elle n'est pas réglementée et financée. Il s'agit de la garde des enfants dans leur domicile. La Colombie — appelée britannique ici — de même que quelques États américains (Ohio, Arizona, Wisconsin), ont réglementé la garde à domicile pour les programmes d'assistance financière. Dans ce cas, seule la garde des enfants d'une seule famille dans leur domicile par une personne non apparentée contre

compensation financière est reconnue et les programmes d'assistance financière se limitent aux familles nombreuses et aux familles dont les parents travaillent sur horaires variables. Donc, dans les cas où l'utilisation des autres formules s'avère impossible ou très onéreuse."

La responsabilité de l'État en matière d'aide aux familles ne doit pas se traduire par la création de nouvelles institutions ni par une politique d'ingérence dans la vie des familles à travers celles-ci, mais bien plutôt par la satisfaction des besoins réels des familles en ce qui a trait aux services de garde. En d'autres termes, il faut sauvegarder la liberté des familles de choisir leur mode de garde, indépendamment des motifs de la garde. Le rôle de support de l'État pourra alors se définir par des allocations de garde mensuelles, versées directement aux parents qui, eux, les utiliseront en toute liberté.

La seule conjoncture dans laquelle nous serions favorables à la création de cet office serait qu'il obéisse aux conditions suivantes: promouvoir l'existence d'un éventail de services de garde dont la qualité serait contrôlée par les parents eux-mêmes; garantir la liberté de choix des parents du mode de garde qui leur convient; établir les ajustements nécessaires entre le modèle que nous proposons, allocations de garde mensuelles versées directement aux parents, et le rôle de coresponsabilité de l'État.

La participation des parents à l'office devrait être garantie à plus de 50% puisque la qualité de l'éducation offerte doit être contrôlée par eux-mêmes.

En ce qui concerne les servies de garde à l'enfance, nous considérons que les familles doivent avoir le droit de choisir le mode de garde qui leur convient. L'État doit leur garantir ce droit et cette responsabilité d'éducateurs. L'État a une responsabilité partagée avec la famille vis-à-vis des enfants. C'est la responsabilité économique. Or, nos principes ne sont pas garantis avec la création d'un office puisqu'il n'y a pas une reconnaissance réelle d'un éventail de besoins de garde. Le contrôle de l'éducation des enfants par leurs parents et de la qualité de celle-ci, peu importe les intervenants, n'est pas assuré. La participation de M. et Mme Tout-le-Monde est inexistante. Les services de garde accordés par l'État doivent être réalisés avec la participation directe des familles puisque ce sont elles seules qui sont en mesure de connaître leurs besoins.

Nous, organismes familiaux associés, après consultation de nos membres, estimons que la coresponsabilité de l'État doit se traduire par une reconnaissance économique des frais de garde, quels que soient le mode et le motif choisis, sous forme d'allocations de garde mensuelles.

En conclusion, nous sommes d'avis que l'avant-projet de loi sur les services de garde à l'enfance est absolument inefficace pour protéger un certain nombre de droits des parents. Une fois de plus, l'institution d'un office des services de garde à l'enfance ne pourra être utile que pour inspecter les familles et non pour subvenir à leurs besoins. Toute action concernant les chargés d'enfants doit être pensée et réalisée par eux-mêmes car ce sont eux qui ont posé le geste social de mettre au monde des enfants.

Donc, au nom de 125 000 familles du Québec, nous recommandons que l'Office des services de garde à l'enfance ne soit pas créé tel que proposé dans l'avant-projet de loi; que, s'il existe une nécessité d'identifier les besoins de la population en matière de services de garde, ce rôle revienne aux organismes familiaux déjà établis, et que le rapport du CISAPE soit mis en application, à savoir que l'État traduise sa coresponsabilité par des allocations de garde mensuelles aux familles. Voilà, M. le Président.

Le Président (M. Boucher): M. le ministre.

M. Lazure: M. le Président, je veux remercier les représentants de l'OFAQ pour leur mémoire. Nous sommes d'accord sur l'essentiel de leurs représentations quand ils parlent de responsabilité parentale, de coresponsabilité de l'État. On est d'accord avec le libre choix des parents. C'est pour cette raison qu'on introduit justement, pour la première fois, le concept de la garde en milieu familial aussi bien que la garde en milieu scolaire et qu'on a développé aussi depuis trois ans la garde en milieu de travail. Il faut que les parents aient vraiment l'éventail le plus complet. Je le répète encore une fois parce que je sais que l'OFAQ y tient beaucoup et a raison d'y tenir: c'est aux parents de déterminer à quel mode de garde, à quel genre, à quelle sorte de garde, à quel service de garde on va confier leur enfant. Ce n'est pas à l'État de décider cela. On est aussi d'accord pour étudier cette possibilité d'une allocation. Votre groupement y tient. D'autres groupements nous font cette suggestion dans leur mémoire.

Nous avons déjà envisagé une allocation de garde qui aurait un caractère encore plus universel et qui pourrait prendre des voies fiscales, qui pourrait être faite par le biais de l'impôt. Nous n'abandonnons pas l'espoir d'en arriver à une formule équivalente à celle que vous proposez aujourd'hui. Malheureusement, il s'avère que dans l'immédiat une telle formule est tellement complexe qu'elle n'est pas applicable à court terme. (12 h 15)

Seulement une dernière remarque. Je pense que vous illustrez l'ambivalence, les sentiments partagés de beaucoup de groupes vis-à-vis du rôle de l'État. D'une part, vous répétez à plusieurs reprises qu'il ne faut pas que l'État s'ingère, et d'autres groupes aussi ont cette même attitude un peu ambiguë. D'une part, l'État ne doit pas s'ingérer et, d'autre part, vous demandez qu'on intervienne de plus en plus. Vous dites: La garde occasionnelle en milieu familial, on n'en parle pas. Si on n'en parle pas, c'est justement parce qu'on ne veut pas que l'État ou l'office qui va représenter l'État soit une machine tellement tatillonne qu'elle paralyse les initiatives qui se prennent tous les jours depuis toujours. La garde occasionnelle se fait de tout temps aussi. Je ne pense pas que l'État

doive intervenir dans un domaine comme celui-là. Je voulais faire ressortir cette espèce d'ambivalence de sentiments un peu mélangés; d'une part, on en veut plus de l'État et, d'autre part, on ne veut pas non plus qu'il vienne demander trop de comptes.

Il y a finalement la pertinence de votre suggestion de consulter les groupes familiaux pour la composition de l'office; possiblement aussi que certains sièges au conseil d'administration pourraient être identifiés pour certains groupements très représentatifs d'organismes familiaux. On le retient pour l'étudier plus à fond. Je poserais une seule question: Qu'est-ce qui manque dans le projet actuel pour que l'éventail de ces choix que les parents pourront faire soit plus complet à votre avis?

Mme Laporte-Dubuc: Selon nous, votre projet ne répond pas aux besoins réels des parents à cause des raisons qu'on vous donne dans le mémoire et simplement parce qu'il fait d'abord dédoublement avec des choses qui sont déjà faites comme le rapport du comité interministériel sur les services d'accueil. Ce qu'on dit n'est pas ambigu du tout. Il y a quelque chose qui n'a pas été compris à un moment donné, peut-être qu'on s'est mal exprimé, mais ce n'est pas ambigu du tout le rôle de l'État et le rôle de la famille; c'est très clair. Les parents veulent garder leur rôle, leurs responsabilités d'éducateurs, de premiers éducateurs des enfants. Les parents reflètent la société. On n'a pas fait le choix comme société que l'État devienne responsable de cette fonction des parents. Il reste que la figure la plus déterminante dans la vie d'un enfant, ce sont les parents et les parents y tiennent; ils veulent de l'aide pour bien remplir cette fonction. La responsabilité de l'État est strictement au niveau économique tout en sauvegardant la liberté. Cela nous apparaît très clair. Vous avez dit que c'était ambigu. Ce sont là les réponses. Pourquoi? Parce que ces principes ne sont pas sauvegardés actuellement.

M. Lazure: M. le Président, je ne vois pas en quoi l'avant-projet de loi ou une future loi sur les services de garde fait double emploi avec un rapport de comité interministériel. Le rapport du comité interministériel est un instrument qui a servi à élaborer un avant-projet de loi qui va être modifié suite aux discussions qu'on va avoir avec votre groupe et d'autres groupes, qui va devenir un projet de loi et qui, encore une fois, va être discuté et modifié. Mais une loi sur les services de garde, cela m'étonnerait... Est-ce que c'est là le sens de votre question? Est-ce que vous êtes contre le principe d'une loi sur les services de garde? Si c'est cela, c'est une autre affaire mais cela ne fait certainement pas double emploi avec un rapport d'un comité interministériel qui a préparé le chemin à une loi.

Mme Laporte-Dubuc: On n'est pas contre le principe d'une loi sauf qu'on se rend très bien compte que l'arrivée de cette loi est beaucoup plus pour répondre à des voix, à des groupes bien organisés qui ont la possibilité de faire un lobbying extrêmement puissant et que cela ne s'inscrit pas dans une politique familiale. On est très conscient de cela. C'est un aspect de la politique familiale: Vous prenez le bébé par le bras et le bébé va peut-être venir après. Mais nous disons: II faudrait le prendre par la tête. On voudrait qu'on le prenne globalement. Vous sortez un aspect parcellaire d'une politique familiale sans qu'il y ait des principes définis par la société, sans qu'il y ait eu une réflexion préalable faite par l'ensemble de la société sur ce qu'est la politique familiale et quels sont les principes qui la sous-tendent.

Là, vous élaborez, mais il y a un problème de garde. Peut-être qu'une partie des problèmes des familles seront satisfaits à travers le projet que vous proposez. Nous, on essaie d'arracher un petit morceau. C'est certain, par exemple, que l'approche qu'on aurait souhaitée, cela aurait été un choix clair de la part du gouvernement qu'on élabore ensemble avec tous les groupes de la société ce dont on a besoin vraiment, qui est une politique familiale.

M. Lazure: Une dernière question, M. le Président. Mme Dubuc, est-ce que vous reconnaissez que ce gouvernement-ci, par le biais du projet de loi, pour la première fois, va subventionner la garde en milieu familial et est-ce que vous croyez, oui ou non, que ceci répond à un besoin?

Mme Laporte-Dubuc: Aujourd'hui, vous nous avez annoncé des changements. Il m'a semblé — c'était difficile de faire la jonction avec le peu de temps qu'on avait — que ce que vous proposez, cela ne correspond pas. Ce n'est pas cela les besoins des gens. Le comité interministériel sur les services d'accueil a fait une étude qui nous apparaît juste et qui correspond vraiment aux besoins de la population. J'ai le rapport de M. Henri-pin, en 1974, qui n'est pas tellement vieux et qui confirme la recherche du comité interministériel dans ce sens, le choix majoritaire des familles, c'est faire garder chez eux ou autour de la maison par une personne qui a la confiance. Dans votre projet de loi, il n'est pas question de cela. Il est question du milieu familial, mais par un organisme. D'abord il n'y avait que 500 familles sur 3500 et je me suis dit cela va être les 500 premiers arrivés, et c'est une famille qui serait reconnue par un organisme mais accréditée en somme. Cela ne correspond pas du tout au vécu des familles. Vous avez des changements qui semblent corriger un peu cette lacune. Tant mieux, à ce moment. Le morceau qu'on réussira à arracher va être un peu plus gros. Mais c'est dans ce sens que cela ne correspond pas aux besoins.

Vous savez, même pour les femmes qui travaillent, puisque cela semble être votre premier souci — et j'admets que vous introduisez d'autres soucis dans cela — quand vous avez un bébé qui fait 102° ou 103° de fièvre, ou un enfant de deux ans ou trois ans qui a 102° ou 103° de fièvre pendant l'hiver — et on peut dire raisonnablement que

cela arrive trois, quatre ou cinq fois dans une année — cela vous arrache le coeur comme mère de le sortir pour aller le conduire à la garderie. Cette journée, il y aura le meilleur réseau universel de garderies d'État, ce n'est pas cela qui répond à votre besoin en tant que mère. Ce n'est pas cela. La même chose aussi, même pour ces mêmes femmes, quand elles veulent sortir le soir avec leur mari, parce qu'il y a un aspect loisir. C'est pour cela qu'on ne veut pas que vous teniez compte du motif de la garde. Mais si un couple ou une famille ou même une mère seule ou un père seul — parce qu'il y en a aujourd'hui qui les gardent leurs enfants — veut un soir sortir pour son loisir, si c'est le temps du dodo, il va avoir naturellement et viscéralement envie de respecter cela. Il ne va pas avoir envie d'aller le conduire à la garderie. Vous avez dit: Je voudrais répondre à une chose. Vous avez dit: En quoi ce que nous proposons dédouble-t-il l'action qui est déjà faite? C'est dans la fonction étude. Vous donnez une fonction étude à votre office; les études, pour moi, il y en a de faites et elles peuvent se poursuivre avec les organismes existants. Si vous lui donnez la fonction de connaître les besoins de la population, c'est dans ce sens qu'il y a un dédoublement.

M. Lazure: Juste pour répondre, M. le Président. C'est une des nombreuses fonctions de l'office et ce n'est pas la principale, surtout à court terme. Ses principales fonctions, à court terme, sont beaucoup plus de faire la promotion pour développer des services de garde, quel que soit le type de services de garde, encore une fois. La promotion et la coordination. Maintenant, vous semblez tenir pour acquis que nous voulons satisfaire seulement les besoins de la femme qui travaille. Ce n'est pas le cas puisque, encore une fois, pour la première fois, nous introduisons dans le cadre des services financés par l'État — pour la première fois — ce service qui n'est pas seulement pour la femme qui travaille. Le service en garde familiale aussi bien que le service en garderie populaire, ce n'est pas seulement pour la femme qui travaille. Je ne sais pas où est-ce que vous lisez cela dans le texte de loi. Vous faites un procès d'intention.

Mme Laporte-Dubuc: Non, mais j'ai admis tantôt qu'on sentait qu'il y avait une évolution. Je vous l'ai dit. C'est tant mieux. J'ai dit que le morceau sera un peu plus gros. Mais, à travers les mass media, ce qu'on entend dans les interventions et même dans les revendications, il est évident que c'est lié aux besoins de garde des femmes au travail. C'est évident que c'est la priorité. C'est par le biais de ce besoin qu'on introduit une préoccupation gouvernementale dans la question des garderies ou des besoins de garde des familles. Personne ne va nier cela. Que vous intégriez la nouvelle dimension, les autres besoins de garde, tant mieux. C'est parce qu'on a réussi un petit peu à se faire entendre. C'est dans ce sens-là que je le discute.

M. Lazure: Merci.

Le Président (M. Boucher): Merci. Mme le député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Je désire remercier les représentants des organismes familiaux pour la présentation de leur mémoire. Je pense que vous êtes venus nous rappeler la responsabilité des parents. D'ailleurs, vous avez raison de vous référer au Comité interministériel sur les services d'accueil à la petite enfance. J'en ai cité une partie tout à l'heure dans mes remarques du début. À plusieurs endroits, on indique justement le fait que, même dans le développement des services d'éducation ou des services spéciaux pour des enfants handicapés, on semble toujours rechercher les solutions à l'extérieur de la famille plutôt que dans la famille.

Mme Laporte-Dubuc: C'est cela.

Mme Lavoie-Roux: Les objectifs de votre association sont vraiment la promotion de la famille. Vous venez ici comme porte-parole des problèmes que vivent les familles et les femmes au foyer. Je pense qu'il faut le situer dans ce contexte-là. Je comprends qu'un office qui soit si distant ou qui soit si loin et auprès duquel les parents sont peu représentés — ceci peut aussi s'appliquer aux parents dont les enfants fréquentent des garderies ou dont les enfants sont confiés à un service de garde — vous inquiète; je l'ai signalé aussi dans mes remarques du début. Que vous soyez inquiets aussi devant toute la multiplicité de règlements qui vont venir de l'office... On retrouve au moins à une dizaine d'articles des règlements de l'office. De quelle façon ceci va-t-il venir vraiment en contradiction avec certaines valeurs ou certains objectifs que votre association poursuit? Je pense que vos questions sont très sages.

Je me demande s'il n'y a pas une confusion, cependant, entre ce que vous entendez par soins de garde en milieu familial et ce que l'avant-projet de loi indique par soins de garde en milieu familial. Pour vous autres, je pense que c'était vraiment un service non organisé, non structuré chez la voisine, chez la grand-maman ou chez un membre de la famille alors qu'ici il est structuré de telle sorte qu'on donnera une allocation pour autant qu'on sera regroupé, soit en nombre de quatre ou neuf, incluant ou excluant les enfants des parents. Enfin, les modalités, je ne les connais pas par coeur. Pour vous, ce n'est pas cela que vous recherchez. Vous autres vous vous dites: Nous, on est prêts à assumer la garde nous-mêmes dans la majorité des situations, mais on a besoin aussi d'un service de garde qui nous dépanne, qui réponde aux besoins sociaux de la famille, besoins sociaux dans le sens de loisirs, dans le sens d'équilibre de la famille. Vous ne trouvez pas réponse à ceci dans l'avant-projet de loi puisque, de toute façon, même la garderie en milieu familial — j'imagine — sera de 7 heures à 18 heures ou de 7 heures à 17 heures, peu importe. Il faudra qu'il y ait regroupement d'en-

fants. C'est là où vous dites que, dans le fond, on n'apporte pas un soutien de plus à la famille, du moins à la famille traditionnelle - je ne le dis pas dans un sens péjoratif — qu'on connaît. Vous avez raison de souligner un fait. Je l'avais dit dans mes remarques du début et je le redis. (12 h 30)

Étant de l'Opposition, c'est évident que les gens peuvent interpréter en disant: C'est vrai d'une part mais, d'autre part, dans la réalité des choses, ce qui me frappe c'est que vraiment cet avant-projet de loi, à maints égards, est improvisé. On vient d'en avoir une démonstration sur place. Dans un avant-projet de loi, on vient de nous donner cinq amendements parce qu'on a admis qu'on n'avait pas pu, pour des raisons techniques, le déposer à l'Assemblée nationale avant la fin de la session, qu'il y avait certains engagements de pris et on le dépose au mois d'août. On a l'impression que ce n'est pas suffisamment pensé et, je le répète, pas suffisamment intégré à une politique familiale et sociale globale. On veut vraiment répondre à des besoins qui sont là et auxquels il faut répondre mais on aurait cru... Le ministre me rétorquera que je suis peut-être mal placée, étant membre d'un parti qui n'avait pas pris de mesures...

M. Lazure: Qui a si peu fait pour les garderies.

Mme Lavoie-Roux: On pourra toujours voir cela. Il y en a d'autres qui auront peut-être d'autres sons de cloches. En tout cas, je suis prête à le prendre. C'est pour cela que je ne me place pas sur une ligne partisane, je me place devant la réalité des choses. Je me dis... Le député de Beauharnois peut bien sourire, son intérêt pour les garderies est probablement un intérêt d'occasion, de toute façon, de circonstances.

M. Lavigne: M. le Président, je pense que Mme le député de L'Acadie... Question de privilège, M. le Président.

Mme Lavoie-Roux: Je retire mes paroles, M. le Président.

M. Lavigne: Je voudrais indiquer, M. le Président, au député de L'Acadie que j'ai fait partie, depuis le début, du comité interministériel qui a eu à travailler, à se pencher sur le problème des garderies au Québec. Ne le sachant pas, Mme le député de L'Acadie s'est aventurée sur un terrain qu'elle ne connaît pas.

Une voix: Elle connaît mal son dossier.

Le Président (M. Boucher): Je m'excuse. Tel que convenu, nous devions suspendre à 12 h 30. Il est 12 h 30 passé.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, est-ce qu'on ne pourrait pas faire une proposition pour compléter ce mémoire...

Mme Laporte-Dubuc: J'ai encore des choses à vous dire.

Mme Lavoie-Roux: ... quitte à ce qu'on reprenne, si on finit à 12 h 45... Voulez-vous?

Le Président (M. Boucher): Est-ce que vous désirez prolonger jusqu'à 13 heures?

Mme Lavoie-Roux: Pour compléter ce mémoire.

Le Président (M. Boucher): Si on peut compléter d'ici quinze minutes, je suis bien d'accord pour prendre un autre quart d'heure, si le groupe est d'accord.

Mme Lavoie-Roux: On commencera un quart d'heure plus tard. Il n'y a personne qui...

Mme Laporte-Dubuc: Cela devrait aller.

Le Président (M. Boucher): Alors, on complète ce groupe-ci. Est-ce qu'on s'entend bien? Pour compléter le présent mémoire, on continue encore quinze minutes.

M. Lazure: Cela veut dire qu'après la suspension, on revient avec un deuxième groupe. C'est cela que ça veut dire?

Mme Lavoie-Roux: Oui.

M. Lazure: D'accord.

Le Président (M. Boucher): D'accord.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, encore une fois, je m'excuse auprès du député de Beauharnois. Évidemment, je ne connais pas les secrets des officines du gouvernement pour savoir qu'il a travaillé à ce projet de loi. Je ne sais pas si je peux lui faire des remarques vu qu'il siège comme président.

Le Président (M. Lavigne): Oui, il est sur la liste des dépenses.

M. Lazure: II faut surtout être gentille et polie.

Mme Lavoie-Roux: Je parle toujours à la place vacante du député de Beauharnois. Une chose est certaine, il aurait peut-être dû travailler un peu plus longtemps à l'avant-projet de loi et on aurait peut-être quelque chose de mieux articulé et de mieux intégré.

Le Président (M. Lavigne): Je répondrai quand j'aurai repris mon siège de député, madame.

Mme Lavoie-Roux: D'accord. J'ai deux questions. J'en aurai d'autres après. La première: Est-ce que je me trompe en pensant qu'il y a confusion dans la notion que vous avez de garderie en

milieu familial et celle qui est présentée par le projet de loi? Deuxièmement, dans vos contacts avec les familles, est-ce que vous avez vu quand même, au cours des cinq ou dix dernières années — je ne sais pas depuis combien de temps vous êtes impliquée dans votre association — une évolution des besoins et aussi la nécessité qu'on réponde aux besoins des femmes qui sont au travail, quels que soient les motifs pour lesquels elles sont au travail, que ce nombre va en augmentant et que l'État ne peut quand même pas se désintéresser de la mise en place de garderies pour répondre aux besoins? On peut commencer par ces deux-là, j'en aurai une troisième.

Mme Laporte-Dubuc: Au sujet de la confusion, vous avez raison. C'est peut-être ce que M. Lazure a appelé l'ambiguïté tout à l'heure. Nous, ce n'est pas du tout organisé. Quand on exprime les besoins de garde, ce sont des besoins absolument non structurés, spontanés, où on n'a pas besoin de faire tout un processus de réhumanisation des services. L'humanisation est là tout le temps; c'est la voisine. Cela n'a rien à voir avec une structure.

C'est pour cela que, dans notre réflexion, si on voulait tenir compte de ce besoin, qui est le besoin majoritaire, on n'avait pas d'autre ressource que de demander une allocation de garde et on est allé discuter avec les membres du cabinet de M. Parizeau dernièrement, il y a quinze jours, et on a discuté de cette question. Contrairement à ce que M. le ministre des Affaires sociales semble dire, ce n'était pas un problème, une difficulté, c'était même ce qui était le plus simple de donner une allocation de garde aux familles, quand on a discuté avec les membres de M. Parizeau, on l'a rencontré deux fois dans l'année et on a discuté ce problème avec lui. C'est de la simplicité la plus grande. Le moyen le plus simple serait de donner une allocation de garde pour les zéro à six ans aux familles.

M. Lazure: M. le Président, à titre d'information, si vous me permettez, puisque Mme Dubuc donne des renseignements si précis, je suis obligé d'en donner un peu pour ne pas induire les gens en erreur. Je ne sais pas quel membre de M. Parizeau, comme elle le dit, elle a vu, je ne veux pas le savoir. J'espère encore une fois que c'est conforme à l'éthique de certain parti qui n'est pas le nôtre.

Mme Laporte-Dubuc: Je n'étais pas seule avec lui.

M. Lazure: Vous n'étiez pas seule avec ses membres, tant mieux, seule ou avec d'autres. Sérieusement, je ne peux pas laisser passer cette remarque. Mme Dubuc laisse entendre que des gens dans l'entourage de M. Parizeau seraient d'accord avec l'allocation de garde. C'est cela qu'on comprend quand on vous écoute.

Mme Laporte-Dubuc: Comme j'ai dit...

M. Lazure: Si vous permettez, moi, j'ai dit tantôt que nous avions étudié ce système. Nous l'avons étudié et il a été mis de côté pour le moment par un comité interministériel qui comprenait justement le sous-ministre des Finances et qui comprenait le ministre des Finances évidemment, le ministre des Affaires sociales et quelques autres ministères. Je vous dis de façon bien officielle, pour le journal des Débats, que la position officielle du ministre des Finances et du sous-ministre des Finances, encore une fois j'ignore à quel membre de l'entourage Mme Dubuc a parlé, c'est que ce n'était pas réalisable dans l'immédiat.

Mme Laporte-Dubuc: D'abord, on est allé, un groupe, rencontrer un groupe, c'est évident.

M. Brochu (Jean-Guy): À notre avis, la recommandation centrale de notre rapport permet ceci, c'est que nous recommandons une allocation de base aux familles pour les besoins de garde, ce qui évite, ce qui permet à l'État d'assurer sa responsabilité que nous croyons être une responsabilité économique. À ce moment, l'État n'a pas besoin d'une foule de règlements pour tous les cas de garde qui peuvent exister, que ce soit le soir, dans la matinée, l'après-midi ou la nuit. Lorsque vous parlez d'ambiguïté au niveau de la garde en milieu familial, je reconnais avec vous que c'est difficile de faire une liste de toutes les méthodes de garde en milieu familial. C'est celle organisée qui est subventionnée et je pense qu'elle doit entrer dans le projet de loi, que le projet de loi doit l'encadrer. Mais il y a une foule d'autres besoins de garde, soit pour aller jouer aux quilles le lundi soir, soit parce que la femme reste au foyer et qu'on n'a pas besoin d'encadrer, mais l'allocation de base aux familles permet aux familles de mieux satisfaire leurs besoins de garde. L'État reconnaît ce besoin de garde, mais il n'est pas obligé de légiférer sur chacun des détails, sur la façon de faire cette garde.

Mme Laporte-Dubuc: J'ai ri avec vous autres, j'ai écouté, j'avais perdu ma réaction à donner, je vais laisser faire, pour ne pas intervenir, ne pas discuter ce que vous avez dit, M. Lazure, mais je vais répondre à votre question, Mme Lavoie-Roux. Vous avez parlé de l'évolution des besoins des femmes au travail. Je pense, par ce que je constate, par ce que je vois, par ce que j'entends avec les groupes avec lesquels on travaille, que ce sont des femmes un peu plus vieilles qui vont sur le marché du travail. Les femmes qui ont des enfants, qui sont mères d'enfants de zéro à un an, de zéro à deux ans, de zéro à trois ans, tiennent à les élever encore, en majorité. Il y a même une étude récente qui a été faite dans les milieux scolaires et qui a montré combien — on peut appeler cela traditionnel, si on veut, sans même que ce soit péjoratif — elles y tiennent.

Il reste que c'est une fonction importante dans la vie d'une femme, et dans la vie d'un homme aussi, avoir un enfant. Je connais des jeunes qui

planifient et qui veulent vivre la naissance de l'enfant dans tout ce que cela a de beau et de grand. Ce n'est pas obligatoirement une chose qui aliène les femmes. Cela a aliéné certaines femmes, mais cela a épanoui d'autres femmes. C'est ce que je veux surtout dire. Il y a peut-être une évolution du point de vue nombre. Je ne fais pas les recherches sur le nombre, mais on ne fait pas intervenir souvent l'âge des femmes au travail. On dit: II y a 52% des femmes qui sont sur le marché du travail qui sont des femmes mariées, mais ce ne sont pas obligatoirement des mères de jeunes enfants.

Il y a des nuances qui ne sont pas toujours données dans les recherches. Ensuite, il y a autre chose, et cette position est la nôtre. Il y a eu dans les interventions un accent vers une certaine professionnalisation des parents. On a dit: Dans le milieu familial, cela va-t-il garantir la qualité de l'éducation? Quand on prend un enfant de sa famille parce que cela va bien mal, les parents se sont séparés ou qu'un enfant délinquant a des problèmes et qu'on veut le placer dans une famille d'accueil, là, on ne se soucie pas de la professionnalisation. C'est un substitut heureux, le plus adéquat possible. Je conviens que c'est un substitut valable, mais on ne se soucie pas de la qualité et, pour toutes les femmes ordinaires qui n'ont pas d'aide et qui se lancent dans l'éducation des enfants, et les hommes aussi — je ne veux pas les exclure — il n'y a pas d'aide pour eux. On ne se soucie pas de la qualité de l'éducation qu'ils vont donner à leurs enfants.

Là aussi, il y a un rôle pour l'État. Ce serait à intégrer dans une politique familiale, mais, tout à coup, on en discute. Ce n'est pas dans l'avant-projet de loi, mais c'est dans les discussions — on l'a lu dans la Presse — et la nécessité d'assurer une qualité de l'éducation. Pourquoi, dans le secteur des garderies tout à coup, alors qu'on ne s'en soucie pas pour les familles d'accueil et pour les parents ordinaires qui élèvent tout le temps leurs enfants? Il n'y a jamais eu d'intervention par rapport à la qualité de l'éducation. Peut-être en faudrait-il une! S'il y en avait une, il y aurait peut-être moins de familles qui soient obligées de faire appel à des substituts comme cela?

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je voudrais seulement ajouter un mot. Je pense que ce à quoi Mme Laporte-Dubuc fait allusion, c'est à la nécessité de l'éducation, appelons-la familiale, si vous le voulez bien, à l'intérieur des programmes d'éducation. Je pense que les gens deviennent de plus en plus conscients, en sentent de plus en plus la nécessité, et peut-être le système scolaire n'a-t-il pas été très vigilant là-dessus. Cela éviterait peut-être un certain nombre de problèmes qui s'ensuivent. Il reste, Mme Laporte-Dubuc — je peux avoir mon point de vue personnel sur les garderies ou pas — que, quand je regarde la situation sociale en face, quand je regarde les faits, je suis d'accord qu'il y a des femmes qui veulent prendre soin de leurs enfants et on doit leur donner tout l'appui nécessaire. Je pense que je l'ai dit au départ. Il y a aussi des femmes qui travaillent, même si on mettait de côté celles qui travaillent parce qu'elles ont fait des études supérieures et elles veulent poursuivre une carrière, mettons-les de côté et prenons seulement les femmes qui travaillent pour aller chercher un salaire d'appoint. Elles aimeraient peut-être garder leurs enfants et je ne pense pas qu'une subvention de garde uniquement suffirait à compléter le salaire d'appoint. Elles n'ont pas le choix d'y aller ou de ne pas y aller. Dans le fond, une politique générale de soins de garde ou une politique familiale devrait être de permettre aux femmes de faire les choix qu'elles veulent. Je pense qu'on n'en est pas encore rendu là parce que, justement, on n'a pas pensé le problème dans sa globalité ou dans sa totalité. Mais je dis qu'il reste des femmes qui, non pas par choix — d'autres, c'est par choix — sont obligées d'aller travailler et il faut prévoir pour ces personnes ou pour ces familles des soins de garde bien organisés au moins durant le jour. C'est peut-être une priorité, parmi tous les soins de garde. C'est tout ce que j'avais à dire. Je ne sais pas si vous voulez ajouter quelque chose.

M. Brochu (Jean-Guy): C'est bien sûr que nous reconnaissons que la garderie répond à un besoin. Ce que nous déplorons, c'est que la garderie soit venue d'un besoin pour les femmes qui vont au travail et c'est ce réseau qui s'est d'abord développé pour répondre à un besoin immédiat. Nous voudrions aussi que tous les besoins de garde soient reconnus et non pas celui seulement naissant des milieux de travail.

Mme Lavoie-Roux: Merci bien.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. Brochu. M. le député de Mégantic-Compton. (12 h 45)

M. Grenier: Très brièvement, puisque le temps fuit on a d'autres groupes à rencontrer, on pourra certainement revenir sur cette question à plusieurs reprises, alors que les groupes présenteront d'autres mémoires; mais ce que vous signalez aux pages 5, 6 et 7 de votre mémoire, sur ces principes sur lesquels vous revenez, rejoint la position que je défendais tout à l'heure et que je pense qu'on défend de ce côté-ci de la table, quand vous dites que l'injustice est flagrante, parce que les mères qui ont choisi d'élever elles-mêmes leurs enfants doivent être pénalisées pour autant. C'est à la page 5.

À la page 6, vous dites: Création d'office, tel que défini. Une perte de responsabilité de l'éducateur, des parents, et le glissement de cette responsabilité vers l'État.

Vous complétez, à la page 7, en disant: "Le rôle du support de l'État pourra alors se définir par des allocations de garde mensuelles, versées directement aux parents qui, eux, les utiliseront en toute liberté".

En fait, ce que vous reprochez au projet de loi, c'est de trop vouloir encadrer, alors que vous

voulez une plus grande liberté. C'est peut-être l'envers du projet de loi que vous voudriez, à savoir qu'on devrait d'abord compenser les familles pour qu'elles s'occupent elles-mêmes de leur gardiennage, et ensuite suppléer avec l'État dans d'autres formes de garderies, alors que c'est l'envers qu'on a dans le moment. On commence par donner l'importance à la formation de garderies et très peu au fonds pour la garderie familiale. Je pense que c'est votre désir dans votre mémoire.

J'ai l'impression, depuis tout à l'heure, que vous notez comme nous le manque total de politique familiale. On aimerait voir dans le gouvernement une toile de fond, qui est une politique familiale et on ne l'accroche pas, on ne la sent pas. C'est une loi de "patchage" qu'on a dans le moment, qui comble certains vides, à certains endroits, qui peut aider à régler certains problèmes, mais on ne dégage pas cette toile de fond d'une politique familiale que vous voulez, qu'on voudrait voir établir par le gouvernement du Québec.

Il n'est pas question de reproches à d'anciens gouvernements; on fait face à une loi dans le moment et on se dit: C'est du "patching". On aurait préféré sentir davantage cette toile de fond d'une politique familiale au Québec qu'on n'a pas. On l'a senti par des mesures qui sont venues préalablement à celle-là; on en a parlé tout à l'heure au sujet de l'avortement, par exemple, on peut parler de services de placement d'enfants; dans l'enseignement, ce ne sont pas toutes les responsabilités de l'actuel ministre, mais on le sent dans plusieurs projets de loi. Ce que vous dites ce matin, c'est dire tout fort ce que pas mal de gens pensent plus bas.

S'il y avait une question à vous poser, je pense que ce serait peut-être sur le fonds dont parlait le ministre pour les garderies en milieu familial: on parlait d'un montant de $135 000 qui était donné et on donne $1 200 000. Il serait peut-être intéressant de savoir du ministre — il ne peut pas nous le dire à ce moment-ci — ce que ce projet de loi va coûter pour être mis en oeuvre dans le Québec et cette part qui est donnée en garderies familiales, ce que coûtera proportionnellement aux Québécois l'application d'un tel projet de loi. Il serait fort surprenant de constater que le but que vous poursuivez et que nous poursuivons dans notre parti est loin d'être comblé, puisque c'est une minime part qu'on donne aux garderies familiales. Je pense que vous avez raison de dire que l'État s'ingère beaucoup trop dans la vie des citoyens et que ce serait peut-être une occasion toute donnée de le retirer de certains secteurs.

Aimeriez-vous émettre quelques opinions?

Le Président (M. Boucher): Merci, M. le député. Mme Laporte-Dubuc.

Mme Laporte-Dubuc: Je suis contente de voir que, quand on parle à l'Opposition, elle est toujours d'accord. Cela me rappelle que, quand M. Marcel Léger était à l'Opposition, il avait puisé largement dans un de nos documents où on demandait une politique familiale; il avait, comme membre de l'Opposition, accusé le gouvernement d'alors de ne pas se préoccuper d'une politique familiale. C'est facile pour moi d'utiliser ça évidemment, mais là, la situation se répète, mais ça ne nous donne toujours pas la politique familiale, c'est malheureux, mais ça ne nous la donne toujours pas.

Il me semble que je ne peux pas partir avant de peut-être rectifier une chose. L'OFAQ ne représente pas juste des familles qu'on peut appeler traditionnelles ou, si vous voulez, biparentales; ce n'est pas là la perception qu'il faut avoir de l'OFAQ, on a des familles monoparentales en nombre important, il y a des femmes qui utilisent les garderies au sein de l'OFAQ et il y a des gens qui ont encore presque la malchance - il faut ridiculiser la situation — d'être des biparentaux aussi au sein de l'OFAQ. Alors, c'est la famille, ce sont les chargés d'enfants pour lesquels on travaille, mais pas la famille traditionnelle obligatoirement; la position n'est pas traditionnelle, mais, quand on associe le mot "famille", c'est toujours le mot "traditionnelle" qu'on met avec. Je veux le dire parce que c'est une tribune parfaite pour dire ce genre de chose.

Le Président (M. Boucher): Merci, Mme Laporte-Dubuc. M. le député de Rosemont.

M. Paquette: M. le Président, je pense que je comprends une des préoccupations du groupe qui est devant nous. On voudrait qu'on accorde plus d'importance aux services de garde en famille par rapport aux garderies. Je vous avoue que je suis en train de me faire une idée sur la question. Je n'ai pas d'idée préconçue là-dessus.

Cela étant dit, je reviens sur cette question de la responsabilité strictement économique de l'État. Que l'État ait une responsabilité économique, je pense que tout le monde est d'accord, et le projet de loi l'assume, en tout cas de façon plus grande que précédemment. Les parents et les services de garde seront subventionnés de façon supérieure à ce qu'ils étaient précédemment. Quand vous dites "strictement économique", est-ce que cela veut dire que vous voudriez que l'État puisse distribuer des fonds sans qu'il puisse, jusqu'à un certain point, s'assurer de la qualité des services de garde? Autrement dit, vous n'êtes pas contre l'existence de permis d'opération pour les garderies, par exemple?

Mme Laporte-Dubuc: Non. Quand on dit "strictement économique", on dit, par exemple, que la fonction de l'État, c'est de redistribuer des fonds pour des services dont le milieu a vraiment besoin. Je ne l'applique pas aux garderies, mais c'est non. On ne serait pas contre. On n'est pas contre l'existence des garderies. C'est vrai qu'il y en a un besoin. Sauf qu'on dit que les parents reçoivent l'argent et qu'ils installent les garderies. En somme, cela équivaut — en écoutant tantôt les interventions qui précédaient, je me dis que notre position équivaut — à demander un réseau — pas

à demander, mais à proposer qu'il y ait au Québec un réseau — de garderies privées. On ne s'y est pas opposé. En tout cas, il n'y a pas eu d'écho, à savoir qu'il ne pourrait pas y avoir d'aide directe aux garderies. On n'a pas fait une opposition systématique. Je veux préciser ce qu'est la responsabilité économique. Par exemple, il y a un besoin d'aider les familles au niveau de leur fonctionnement, au niveau de la qualité de la fonction que les parents remplissent. On est dépourvu quand on élève des enfants. Ce n'est pas d'aller s'ingérer dans la façon dont les parents devraient élever leurs enfants — cela sera une ingérence — mais de permettre l'organisation des services que les familles se donneraient elles-mêmes pour se munir du support dont elles ont besoin. Ce sont deux choses différentes. La fonction est strictement économique, mais la définition du service peut être réservée aux familles et aux associations familiales.

M. Paquette: Puisque vous êtes d'accord pour que l'État émette des permis, donc s'assure d'un seuil de qualité minimale — je pense toujours aux garderies — à ce moment-là, préférez-vous que ces permis soient émis, parce qu'une des fonctions de l'office, c'est justement d'émettre les permis d'après l'avant-projet de loi? Est-ce que vous préférez que cela soit fait par une direction générale du ministère des Affaires sociales ou n'est-il pas préférable qu'on ait un office représentatif où siègent des parents, des représentants d'autres organismes qui le fassent plutôt que le ministère, en s'assurant toujours que, dans les garderies elles-mêmes, ce soient les parents qui contrôlent la garderie?

Mme Laporte-Dubuc: Pourquoi cela ne serait-il pas dans un organisme régional? On est dans une vogue de déconcentration, de décentralisation.

M. Lazure: M. le Président, c'est prévu dans le projet de loi...

Mme Laporte-Dubuc: Pourquoi ne seraient-ce pas les CRSSS?

M. Lazure: ... que cela peut être décentralisé et régionalisé. La régionalisation n'est pas obligatoire dans un premier temps. Mais c'est certainement possible et on va l'encourager.

Mme Laporte-Dubuc: Alors, vous n'aurez pas besoin d'office à ce moment-là.

M. Paquette: Ce sont des offices régionaux. C'est un office décentralisé régionalement. Est-ce que c'est cela que vous me dites?

Mme Laporte-Dubuc: Les CRSSS ou les CSS, pourquoi n'y aurait-il pas une intégration au niveau régional?

M. Paquette: Là, vous allez augmenter la bureaucratie.

Mme Laporte-Dubuc: Les gens ne savent presque pas que ce réseau-là existe.

M. Paquette: Je regrette. Je m'excuse, mais je suis obligé de ne pas être d'accord avec vous parce que là vous allez augmenter la bureaucratie. Vous voudriez qu'on insère tout cela dans le réseau des Affaires sociales. Il me semble que le projet de loi, tel qu'il est, garantit beaucoup plus l'autonomie des garderies qu'actuellement.

Mme Laporte-Dubuc: Nous n'avons pas étudié les modalités d'un office.

M. Paquette: Oui, mais vous dites...

Mme Laporte-Dubuc: On a réagi comme des parents qui ne sont pas des spécialistes.

M. Paquette: Oui, mais vous dites qu'on augmente la bureaucratisation. C'est cela que je ne comprends pas.

Mme Laporte-Dubuc: C'est évident pour nous.

M. Paquette: À quel point de vue?

Mme Lavoie-Roux: Voyons donc!

Mme Laporte-Dubuc: C'est évident pour nous.

M. Grenier: M. le Président, si vous me le permettez. Avant de partir, j'aurais une requête à faire à Mme Laporte-Dubuc. On a discuté il n'y a pas si longtemps d'un projet de loi sur le placement de l'enfant, et j'aurais aimé vous entendre.

Mme Laporte-Dubuc: Est-ce qu'il y a eu une commission parlementaire?

M. Grenier: La famille était concernée. Je ne sais pas si vous avez été invitée. Il n'y a peut-être pas eu de mémoire, je n'ai pas lu votre réaction dans les journaux. Mais je vous ai écoutée ce matin et j'ai été joliment emballé par votre proposition. J'aurais aimé vous entendre lors de l'adoption de la loi.

Nous étions seuls de l'Opposition. On disait, tout à l'heure: C'est drôle que l'Opposition, quand on est le gouvernement, cela n'a plus l'air d'être pareil, mais quand on est seul pour se défendre, dans l'Opposition, on aime entendre les groupes. Vous en représentez un fort important. J'aimerais connaître votre réaction à l'adoption de cette loi sur l'adoption de l'enfant, qui est faite maintenant par l'État. Ce n'est plus le secteur privé.

Mme Laporte-Dubuc: Mais, monsieur, nous envoyons régulièrement des communiqués aux journaux. Nous avons un mal énorme à passer dans les mass media. On se demande pourquoi. Peut-être que nous ne savons pas faire du lobbying.

M. Grenier: Vous pourriez venir à moi, que j'en fasse état, à un moment donné, à la commission parlementaire au moins.

M. Brochu (Jean-Guy): Vous avez sûrement déjà reçu des lettres venant de l'OFAQ.

Mme Laporte-Dubuc: Je vous ai répondu.

Le Président (M. Boucher): La commission doit suspendre ses travaux jusqu'à 15 heures

Suspension de la séance à 12 h 56

Reprise de la séance à 15 h 11

Le Président (M. Boucher): À l'ordre, s'il vous plaît!

À la suspension de 13 heures, nous avions entendu le mémoire des Organismes familiaux associés du Québec. Maintenant, j'inviterais les représentants du Regroupement des garderies sans but lucratif du Québec à bien vouloir s'approcher de la table centrale.

Regroupement des garderies sans but lucratif du Québec

Pour l'instant, on m'a demandé de faire part à la commission des télégrammes reçus concernant le prochain mémoire. Je vais lire les télégrammes succinctement. D'abord, il y a un télégramme reçu au secrétariat des commissions le 20 septembre, adressé à la commission parlementaire sur les services de garde à l'enfance, au soin de M. Marc Cantin, secrétaire des commissions parlementaires, Hôtel du gouvernement, bureau 2, édifice A, Québec: "Par la présente, la Fédération des ACEF tient à exprimer son appui et sa solidarité aux revendications mises de l'avant par le Regroupement des garderies du Québec."

C'est signé: Daniel Fournier, pour la Fédération des ACEF.

En date du 1er octobre, un autre télégramme adressé également à la commission parlementaire sur les services de garde à l'enfance: "Nous, de l'AJTM, endossons le mémoire présenté à la commission parlementaire à Québec les 2, 3 et 4 octobre 1979 par le Groupement des garderies sans but lucratif du Québec Inc. concernant l'avant-projet de loi des services de garde à l'enfance."

C'est signé: L'Association des jeunes travailleurs de Montréal.

Également, une lettre reçue le 1er octobre, adressée à M. Marc Cantin, secrétaire des commissions parlementaires, Hôtel du gouvernement, bureau 2, édifice A, Québec. Re: Commission parlementaire sur les services de garde à l'enfance: "Monsieur, auriez-vous l'obligeance de prendre note que Feux Verts, journal d'action communautaire, appuie en tous points le mémoire que le Regroupement des garderies sans but lucratif du Québec Inc. présentera à la commission parlemen- taire sur les services de garde à l'enfance. Dans l'espoir que vous trouverez le tout à votre satisfaction, je vous prie de croire en mes sentiments distingués.

C'est signé: Richard Théoret, coordonnateur, journal Feux Verts.

En date du 2 octobre...

M. Grenier: Ils sont tous pour.

Le Président (M. Boucher): C'est un télégramme...

M. Grenier: C'est un geste spontané, ils ont envoyé cela, eux autres.

Mme Lavoie-Roux: Non, non, mais ils sont pour.

M. Grenier: Ils sont pour la loi.

Mme Lavoie-Roux: Bien non, bien non, écoutez donc! Ils sont pour un appui au regroupement.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Mégantic-Compton, c'est un appui au prochain mémoire qui...

M. Grenier: Ah! bon.

Le Président (M. Boucher): ... est présenté par...

M. Grenier: Je pensais que vous disiez que c'étaient des gens qui étaient favorables au projet de loi.

M. Lazure: Ils n'ont pas le problème que l'OFAQ avait ce matin avec les media.

Le Président (M. Boucher): Également le 2 octobre, un autre télégramme: "Nous appuyons fortement le mémoire du Regroupement des garderies du Québec et faisons nôtres ses recommandations auprès du MAS, concernant les services de garde. Les enfants, d'une responsabilité collective".

Le Centre de santé des femmes du quartier.

Également le 2 octobre, un télégramme de l'exécutif du Carrefour des associations de familles monoparentales du Québec: CAFMQ appuie le mémoire, une critique de l'avant-projet de loi de services de garde à l'enfance, présenté par le Regroupement des garderies sans but lucratif du Québec à la commission parlementaire et dénonce l'avant-projet sur les services de garde à l'enfance déposé dernièrement par le ministre Lazure. Ce projet va à l'encontre des revendications du CAFMQ dans son mémoire sur la situation des femmes chefs de famille vivant sur l'assistance sociale, novembre 1977, et notre organisme réclame un réseau universel de garderies. C'est signé Claire Leblanc pour le bureau exécutif du CAFMQ.

Enfin, un dernier télégramme en date du 2 octobre: "Le Syndicat des professeurs du Québec

métropolitain appuie le Regroupement des garderies sans but lucratif du Québec dans la présentation de leur mémoire en commission parlementaire. Nous demandons d'y donner suite dans les plus brefs délais." Jacques Couture, président. (15 h 15)

Madame, si vous voulez bien vous identifier, identifier les gens qui sont avec vous et procéder à la lecture de votre mémoire. J'ignore actuellement si vous avez un résumé de votre mémoire ou si vous allez le lire au complet.

Mme Boisvert (Louise-Andrée): On comptait le lire au complet parce que tous les éléments sont très importants pour en arriver à l'argumentation.

Le Président (M. Boucher): Croyez-vous y arriver dans une vingtaine de minutes?

Mme Boisvert: Dans une demi-heure.

Le Président (M. Boucher): On avait convenu quand même d'une vingtaine de minutes pour la présentation des mémoires.

Mme Boisvert: Alors, cela peut être 20 ou 25 minutes.

Le Président (M. Boucher): Les membres de la commission sont-ils d'accord pour...

Mme Boisvert: Je pense qu'il y a quand même eu du temps perdu ce matin.

Le Président (M. Boucher): Oui.

Mme Boisvert: On a accepté que se perde du temps. À notre sens, c'était du temps perdu.

M. Lazure: Merci.

Le Président (M. Boucher): Même si cela dépasse 20 minutes, les membres sont-ils d'accord pour que la présentation du mémoire soit faite au complet?

Mme La voie-Roux: Moi, je suis d'accord, mais je pense que c'est un des mémoires les plus volumineux qu'on ait.

M. Lazure: Oui.

Mme Boisvert: Je suis Louise-Andrée Boisvert, présidente du Regroupement des garderies du Québec Inc.

Mme Lavoie-Roux: Pardon?

Mme Boisvert: Louise-Andrée Boisvert. Il y a Camille Gariépy qui est membre de l'exécutif, Hélène Allaire, membre de l'exécutif, Louise Bourgon-Paré, permanente au RGQ à Montréal et Pierre Simard, conseiller.

Il y a peut-être certains éléments qui ont été utilisés ce matin soit dans l'argumentation de

Mme Thérèse Lavoie-Roux ou l'argumentation utilisée par le ministre. On reconnaissait quand même des bouts de notre propre argumentation. On ne voudrait pas que cela ait l'air qu'on prend vos termes, mais nous, on ne savait pas ce que vous alliez dire à ce moment-là. Je pense que l'argumentation est d'autant plus justifiée à ce moment-là.

Mme Lavoie-Roux: ... ce matin et je ne vous en impute pas le...

Mme Boisvert: Alors, c'est que c'est d'une évidence...

Mme Lavoie-Roux: Ce doit être cela.

Mme Boisvert: ... incontestable. Alors, on commence.

Le Regroupement des garderies sans but lucratif du Québec est un organisme jeune, créé il y a quinze mois, en mai 1978. Cet organisme se retrouve, par contre, au milieu d'une problématique qui, elle, date de plusieurs années, celle des garderies.

Si ce jeune organisme se retrouve aujourd'hui devant une commission parlementaire gouvernementale, c'est, entre autres, grâce à sa détermination à presser l'intervention des gouvernements en matière de garderie. Il est d'ailleurs largement responsable de la tenue même de cette commission parlementaire.

Si le RGQ n'existe officiellement que depuis quinze mois, ses membres, eux, sont sur le terrain depuis une dizaine d'années déjà. En 1970-1971, les projets d'initiatives locales permettaient la mise en marche de dizaines de garderies au Québec. L'évolution normale et prévisible des garderies a subi un choc lorsque le gouvernement fédéral procéda à la coupure des subventions attendues, laissant une soixantaine de garderies sans autre ressource financière que la contribution des parents. C'est alors que des groupes de citoyens ont décidé d'entreprendre la lutte pour la reconnaissance du droit aux garderies. Cette lutte fut menée de façon convaincante par le Comité de liaison des garderies populaires d'abord, puis par SOS garderies.

Les pressions exercées alors obligèrent le gouvernement libéral de M. Robert Bourassa à mettre sur pied un programme de subventions destinées à soutenir le développement des garderies. Inutile de vous rappeler l'insuffisance honteuse du plan Bacon, présenté en 1974. Dénoncé de toutes parts et surtout par l'Opposition officielle à l'Assemblée nationale d'alors, mais devenue gouvernement aujourd'hui, le plan Bacon a entraîné une longue série de luttes et de revendications axées sur l'implantation d'un réseau complet de garderies et sur le financement direct de ces garderies.

Une autre lutte se dévoilait parallèlement, une lutte politique, électorale plus précisément. L'enjeu, le pouvoir. Le gagnant, le Parti québécois. La date, le 15 novembre 1976.

Le changement de gouvernement entraîna de facto le retrait du projet Forget de juin 1976 touchant les garderies. Ce retrait laissait aux garderies le temps de se regrouper et de manifester leur attentes.

En mars 1977, le ministre des Affaires sociales, M. Lazure, et le ministre des Consommateurs, Coopératives et Institutions financières, Mme Lise Payette, convoquent les gens oeuvrant dans les garderies à une rencontre où l'on veut connaître leur opinion sur les politiques en matière de garderies, les problèmes qu'elles soulèvent et les solutions suggérées.

À la suite de cette rencontre, une conclusion s'impose pour ceux qui oeuvrent en garderie. Il faut procéder à un regroupement de nos forces et il faut préparer nos revendications, car si le mot "garderie" doit être écrit sur une page de notre histoire, il sera écrit par les citoyens eux-mêmes.

Pendant six mois, nous allions alors procéder à un travail de déblayage, à l'identification des principaux problèmes et des objectifs à atteindre. Constamment, les discussions se feront sur une base démocratique avec la participation d'intervenants issus des quatre coins du Québec. Le temps du rassemblement pointe alors à l'horizon. Il aura lieu en octobre 1979 alors que sera créé un bureau provincial provisoire composé d'un délégué par région.

À partir de là, le regroupement provisoire des garderies se met en marche et multiplie les rencontres avec ses garderies membres, met sur pied différents comités sur les statuts et règlements. D'autres comités préparent l'action et la stratégie. Un vaste processus de consultation s'enclenche dans les garderies membres afin de connaître les besoins de tous et chacun, afin de préparer une politique des garderies qui sera intimement liée au vécu quotidien de nos intervenants. Le travail de préparation est alors terminé.

Mai 1978. C'est une nouvelle page de l'histoire des garderies qui s'ouvre avec la tenue du congrès de fondation du RGQ. Un organisme provincial, représentatif de toutes les régions du Québec en matière de garderie naît de la seule volonté et de la participation de ses militants membres. Cet organisme est aujourd'hui en mesure de revendiquer auprès du gouvernement une politique en matière de garderies façonnée par les parents et les travailleurs du milieu.

Octobre 1978. Les ministre Lazure et Marois publiaient alors le rapport du comité interministériel sur les services d'accueil à la petite enfance et annonçaient leur nouvelle politique de financement en matière de garderies. Le RGQ tient alors son congrès à Montréal. À cette occasion, les délégués dénoncent entre autres les principes qui sous-tendent la reconnaissance et le financement de la garde en milieu familial. De plus, ils réclament un financement direct, équitable et adéquat pour les garderies sans but lucratif. Ces positions sont publicisées lors d'une conférence de presse. Dès lors, nous savions qu'il faudrait compter sur nos propres forces militantes et sur notre mobilisation à assurer le développement des garderies. Le regroupement s'attaque donc à des dossiers majeurs: étude précise du coût réel d'un enfant en garderie, ce qui mènera à la présentation du document "Budget global" en mai 1979; définition du profil socio-économique des membres; définition des ententes et conditions de travail types pour les travailleurs en garderie.

Déjà en octobre 1978, le RGQ entreprend une étude sur les différents statuts possibles pour les garderies, statuts qui seront définis dans une loi-cadre qu'on nous promet pour juin 1979. En moins de six mois, le RGQ est donc sur la première ligne, parfaitement informé de tous les dossiers concernant les garderies, démocratiquement structuré et promoteur de revendications issues des besoins concrets des garderies membres. Cette stabilité du regroupement, cette force interne, cette capacité de travail qui lui ont apporté une indéniable compétence en matière de garderies, nous les devons aux membres du RGQ.

Impliqués depuis des années dans les garderies, c'est de là qu'ils ont tiré, à la lumière de la réalité quotidienne, petit à petit les objectifs essentiels d'une politique de garderies. Leur détermination au travail était d'autant plus grande qu'elle était fouettée par l'inaction des gouvernements au pouvoir et les longs retards apportés à la mise en place et à la réalisation de leurs propres objectifs.

C'est à travers cette force militante qu'est apparue la nécessité de promouvoir le regroupement de toutes les garderies sans but lucratif du Québec. C'est l'expérience quotidienne de nos membres qui commande au RGQ de promouvoir la qualité de vie des enfants en milieu de garderie et de promouvoir également des conditions de travail équitables pour tous les travailleurs en garderie. C'est le résultat de toutes nos consultations auprès de la population qui engage le RGQ à agir comme groupe de pression ayant pour but la promotion et la défense des intérêts des garderies. L'organisation de ces rencontres, de conférences et d'assemblées devient nécessaire afin de diffuser l'information que les gouvernements oublient de transmettre.

C'est donc en s'appuyant sur des objectifs clairement définis et nettement identifiés à une situation où prédomine, sur le terrain politique, des rapports de force précis que le RGQ ne cessera d'exiger l'établissement d'un réseau universel de garderies, financé directement par l'État, accessible à tous et contrôlé par les usagers et les travailleurs.

Concernant nos revendications, confrontés tous, tant que nous sommes, à l'évidence et au caractère irréversible des besoins de la population québécoise en matière de services de garde, nous avons vu émerger au Québec, depuis quelques années, à la faveur d'initiatives individuelles ou de petits groupes, différentes formules de services de garde dont la mise sur pied et le maintien relèvent davantage de l'urgence du contexte et du moment que du souci d'assurer un éventail complet et articulé de services de garde de qualité.

Il est devenu impérieux de donner un cadre, une infrastructure qui permette le développement sain et l'articulation harmonieuse d'un réseau de

services de garde qui, pour le moment, se limite à des initiatives isolées, en butte, et de façon assidue, à des difficultés de fonctionnement multiples dues à un financement pour le moins déficient.

En réclamant depuis des années une loi-cadre, le Regroupement des garderies sans but lucratif du Québec reconnaît la nécessité fondamentale d'assurer la mise sur pied d'un réseau de services de garde universel, partout et sous toutes les formes, qui réponde de façon assurée à des normes de qualité uniformes, et qui soit intégré et accessible à tous. À l'heure où le gouvernement s'apprête à mettre en place une loi-cadre sur les services de garde à l'enfance, et à titre de population expérimentée en la matière, nous intervenons aujourd'hui.

En première partie de ce mémoire, nous tenterons de vous exposer la réalité de la famille atomique et les besoins qu'elle engendre chez ses différentes composantes, soit les parents, les mères en tant que femmes et les mères en tant que travailleuses, de même que les enfants.

Devant cette situation de fait, nous vous expliquerons ensuite en quoi nous croyons que l'État a une responsabilité sociale et financière, face à ce phénomène, et pourquoi nous considérons que nos revendications sont justifiées. En dernière partie, nous vous démontrerons les lacunes de l'actuel avant-projet de loi et les modifications préalables à y être apportées avant toute considération.

René Lévesque écrivait, à l'automne 1975 dans le journal Le Jour: "Pour la famille "atomique" d'aujourd'hui, il faut qu'on organise au plus tôt, aussi universellement présente que la petite école traditionnelle, une institution qui, de la pouponnière à la maternelle, puisse accueillir les marmots du voisinage avec autant de chaleur et de compétences".

En 1979, quatre ans plus tard, le RGQ constate que la carence de service de garde énoncée alors est d'une actualité navrante. La réalité de la famille atomique existe; nous nous devons de la reconnaître et il nous revient de l'assumer collectivement. Ce nouveau type de famille, née de l'industrialisation et de l'urbanisation grandissante de la société québécoise se caractérise par l'isolement de ce noyau social et son nombre réduit d'enfants. Contrairement à ce qui existait autrefois, les enfants vivent anormalement dans un univers d'adultes jusqu'à ce qu'ils soient d'âge scolaire. Cette transformation sociale importante n'est pas propre au Québec. Elle va dans le sens normal de l'évolution de la société occidentale.

Selon le profil socio-économique des Québécoises, établi par le Conseil du statut de la femme, dans son document "Egalité et indépendance", il ressort que deux Québécoises sur cinq sont sur le marché du travail et que l'une des deux a un enfant de moins de six ans. Nous n'avons pas trouvé de statistiques qui indiquent précisément combien d'entre elles travaillent pour des raisons économiques, mais quand on sait qu'en 1978, on dénombrait 130 000 femmes chefs de famille et que, par ailleurs, sept Québécoises sur dix avaient un revenu inférieur au seuil de la pauvreté, on peut conclure que ces travailleuses le font avant tout par nécessité et non par choix.

À ces phénomènes, s'ajoute de façon positive celui de la scolarisation et de la professionnalisation accrues des femmes en général, incluant les mères de famille. Selon une étude faite par le ministère de l'Éducation, Service de l'informatique, en 1975-1976, la représentation féminine relative dans la répartition de la clientèle scolaire au niveau collégial était de 48,6%. Par ailleurs, en 1974, au niveau universitaire, cette représentation était de 38,4% au premier cycle, de 30% au second cycle et 14,4% au troisième cycle. En outre, les statistiques indiquent clairement que l'accroissement du taux de fréquentation universitaire des femmes est inversement proportionnel à leur âge, ce qui nous permet de croire qu'indéniablement, le phénomène amorcé ira en progressant d'année en année. Ce mouvement irréversible doit nous inciter à mettre en place des conditions de réalisation optimales pour les 52% de la population que constituent les femmes.

Dans un document produit par Richard Cloutier, de l'École de psychologie de l'Université Laval, celui-ci constate avec justesse que la femme se retrouve au coeur du problème des services de garde autant que ces derniers se retrouvent au centre du problème des droits sociaux des femmes. Dans la famille, la femme cumule les fonctions de gardienne, de ménagère et d'éducatrice. Cette situation relève d'une tradition voulant que les services de garde soient confiés à la mère. "La distinction entre la responsabilité familiale et celle de la mère en matière de garde apparaît comme une étape préalable au droit des femmes d'accéder librement au marché du travail." (15 h 30)

En 1980, 40% des femmes ayant de jeunes enfants auront des activités de travail qui les obligeront à recourir à un mode de garde. Les autres 60%, bien que plus disponibles à l'éducation des enfants, n'ont souvent pas les conditions favorables pour assurer un développement optimal des enfants. Pensons seulement aux nombreux enfants uniques élevés dans des logements exigus qui n'ont à peu près pas de relations avec des enfants de leur âge avant leur entrée en classe maternelle. Les activités sociales organisées pour les enfants de moins de cinq ans n'existent pour ainsi dire pas et les équipements sociaux pour ce groupe d'âge sont tout aussi rares. La mère de famille d'aujourd'hui n'est que très rarement secondée par les membres de sa propre famille ou de son entourage. Avec ses seules ressources, elle doit fournir à ses enfants des conditions lui assurant un développement sain comme s'il s'agissait d'une sentence prononcée par la société pour payer sa procréation. Si la fonction de garde et d'éducation des enfants n'est plus automatiquement attribuée à la mère, c'est à la famille que s'adresse la garderie. Les responsabilités de la famille et de la mère ne doivent pas être confondues en matière de garde des enfants. Une première différenciation à ce niveau pourrait sans

doute contribuer à l'élaboration d'une conception plus contemporaine du rôle social de la garderie. Dans le cas de familles monoparentales où un seul parent doit cumuler les fonctions généralement attribuées aux deux parents, il devient évident que le rôle social de service de garde prend une ampleur plus qu'importante.

L'établissement de services de garde à contenu éducatif s'avère être une solution pour répondre au besoin de garde de la famille, mais encore plus au besoin de socialisation des enfants. Nous ne pouvons faire abstraction de cette dimension qui aura une influence sur toute la vie future de l'enfant. Il revient à nous, adultes, d'instaurer les mécanismes pour leur permettre d'y accéder.

Loin de vouloir sous-entendre que tous les enfants doivent être placés en service de garde dès leur plus jeune âge, nous considérons toutefois que tous y tireraient avantage à des niveaux différents de développement. L'avantage suprême d'avoir accès à un service de garde est de se retrouver dans un milieu privilégié, animé par une équipe d'adultes dont la préoccupation première réside dans le bien-être et le développement harmonieux des petits et ceci dans un environnement aménagé et équipé en fonction de leurs besoins spécifiques.

Dans de telles conditions, le service de garde favorise la socialisation des jeunes enfants en permettant des interactions fréquentes des enfants entre eux et avec une équipe d'adultes dont les compétences et les personnalités se conjuguent pour offrir à l'enfant un répertoire élargi de ressources et de modèles humains. De plus, la vie en groupe favorise auprès de l'enfant l'apprentissage du respect des autres, du respect du bien collectif, de l'autodiscipline, de l'autonomie, de l'acquisition de la confiance en soi par des activités de vie à leur mesure.

Outre un régime de vie équilibré face à l'alimentation, au sommeil, à l'hygiène, au plein air, la garde organisée offre l'avantage d'un milieu stimulant permettant aux enfants des expériences multiples et où une certaine prévention peut être réalisée par le biais d'un dépistage précoce des difficultés d'apprentissage.

L'enfant d'un milieu familial peu stimulant peut dans un tel contexte développer son potentiel d'apprentissage au même titre qu'un enfant bénéficiant de meilleures conditions familiales. S'il est vrai que tout se joue avant six ans, tous les enfants, peu importe leur milieu social, économique ou géographique, ont droit à des conditions optimales de développement. N'oublions pas qu'ils sont des citoyens à part entière, malgré leur bas âge, et qu'ils sont en plus les adultes de demain. En 1976, les 98 781 enfants qui fréquentaient la maternelle coûtaient à l'État $100 millions, soit 0,9% du budget total de la province. Comment accepter qu'en 1979, les 600 000 enfants de moins de six ans ne reçoivent qu'un budget de $22 500 000 avec les limites d'accessibilité et de qualité que ce budget impose. Le RGQ s'explique très mal cette différence énorme des coûts so- ciaux assumés par l'État entre un enfant de plus de cinq ans et un de moins de cinq ans.

S'il est maintenant évident que les familles, les femmes et les enfants ont besoin de services de garde pour des raisons propres à chacun des groupes et pour d'autres raisons indissociables d'un groupe à un autre, il est aussi dans la société une autre population qui a besoin d'un tel service: les travailleuses. D'ailleurs, des études américaines viennent confirmer ces besoins des femmes au travail, lesquelles les employeurs québécois n'ont pas encore daigné considérer. "Bien que ceux-ci, les employeurs, ne se sentent pas encore concernés par les problèmes de garde éprouvés par leurs employés au Québec, certaines études américaines révèlent que les services de garde en milieu de travail peuvent constituer un atout permettant d'attirer et de retenir le personnel. De façon générale, des services de bonne qualité, fournis en milieu de travail, en quartier, en milieu scolaire ou en milieu familial, semblent limiter l'absentéisme, réduire le taux de roulement, accroître la productivité et favoriser un meilleur climat de travail." Puisque nous avons établi que les femmes doivent avoir un libre accès au marché du travail, il devient incontestable que nous nous devons de leur fournir les dispositions matérielles et financières pour y accéder. Sinon, il devient carrément prétentieux et malhonnête de parler de liberté de choix pour elles.

Nous reconnaissons que plus un changement social menace l'ordre établi, plus l'acceptation de ce changement est tortueuse et pénible. Il ne faudrait pas toutefois être réactionnaire au changement au point de mettre en péril la qualité d'être d'une ou deux générations de Québécois. Un gouvernement peut être un frein ou un stimulus à un changement de valeurs culturelles et sociales. Le gouvernement du Québec, qui s'apprête à adopter une politique d'avant-garde en matière d'énergie, au nom d'une responsabilité à l'égard de nos richesses naturelles ou collectives, ne peut nier sa responsabilité à l'égard de la richesse humaine collective que constituent les enfants.

Présentement au Québec, l'éventail des formules possibles se limite, à peu de choses près, à la garderie de jour, ouverte en moyenne de 6 h 30 à 18 heures et accueillant au moins 30 enfants. La responsabilité de mettre en place un réseau complet de mode de garde ne peut être assumée, malgré toute la bonne volonté, l'énergie et les ressources personnelles qu'ils y consacrent, par des groupes de parents isolés et les garderies qu'ils ont réussi à mettre sur pied.

Le Regroupement des garderies sans but lucratif du Québec, une voix collective dans le domaine s'il en est une, reconnaît depuis longtemps la multiplicité des besoins et la nécessité de différencier les formes de services de garde: des garderies de jour, des mini-garderies, des garderies 24 heures, des garderies parascolaires, des garderies pour les moins de deux ans et des haltes-garderies.

De plus, nous croyons qu'il ne suffit pas de mettre en place un éventail de formules de services de garde, encore faut-il que cet éventail soit articulé en un réseau où prévalent les mêmes normes de qualité, les mêmes conditions qui permettent d'assurer ces normes.

Tous ces types de services de garde sont possibles et nécessaires. Nos seules exigences à l'endroit des services de garde autres que les garderies sous la formule où nous les connaissons aujourd'hui prennent racine dans la raison d'être même qui caractérise les garderies sans but lucratif, c'est-à-dire le souci d'assurer une qualité optimale au milieu de vie des jeunes enfants québécois et au service qu'elle assure à une proportion grandissante de parents usagers.

C'est pourquoi nous exigeons que les normes de qualité que nous voulons voir assurées par une législation et les réglementations adjacentes, en ce qui concerne les garderies soient les mêmes pour toutes les formes de services de garde; outre des ratios raisonnables, des locaux adéquats, des conditions de travail décentes pour les travailleurs, ainsi qu'un financement direct et suffisant qui permette l'actualisation de ces normes, la loi devra miser sur l'implication des parents et leur reconnaître la responsabilité du contrôle des services de garde dont ils sont les usagers.

Pour avoir vécu sous ce régime de contrôle direct des usagers, les garderies souhaitent voir reconnaître cette formule administrative à l'échelle de tous les types de services de garde au Québec. En effet, malgré des conditions d'exploitation souvent misérables, les garderies ont réussi à se donner un niveau de qualité plus que suffisant pour obtenir l'accréditation du MAS. À l'expérience vécue des garderies et aux convictions profondes acquises au RGQ quant à la garantie que constitue le contrôle des usagers, se greffent les conclusions d'études spécialisées sur le sujet, dont celles de Richard Cloutier qui affirme dans son document "La garderie, c'est pour les enfants ou leurs parents?": "La considération de l'enfant comme citoyen à part entière pose le problème de la démocratisation des "opportunités" sociales déjà à l'âge préscolaire. Le constat des effets négatifs d'un environnement socioculturel appauvri sur l'avenir de l'enfant a justifié les importants mouvements d'éducation compensatoires amorcés dans divers pays depuis les années soixante. Ces efforts de discrimination positive se sont constamment heurtés aux problèmes de maintien des gains chez l'enfant. Replongé dans son environnement socioculturel de provenance, une fois les années d'éducation compensatoire terminées, ce dernier perd les gains obtenus au niveau du rendement intellectuel, tel qu'évalué par les instruments traditionnels de mesure, et reprend un déclin par rapport à la ligne moyenne de scolarisation".

L'implication familiale dans un effort éducatif plus précoce semble constituer une stratégie plus prometteuse pour la démocratisation des "opportunités" sociales des enfants. "Aux États-Unis, la tendance s'oriente vers une participation accrue des parents à l'éducation de la petite enfance.

Cette tendance se fonde sur six facteurs. En premier lieu, tous les secteurs de la société revendiquent de plus en plus le droit de participation à toutes les décisions; les parents, notamment, réclament un contrôle accru sur l'éducation de leurs enfants. Deuxièmement, c'est une vérité première que les résultats scolaires dépendent moins des écoles telles qu'elles sont actuellement constituées que des parents qui sont de ce fait considérés comme l'élément central du processus éducatif. Troisièmement, on constate un intérêt accru porté aux cinq premières années de la vie de l'enfant au cours desquelles les parents étaient traditionnellement responsables de l'éducation. En quatrième lieu vient l'échec des systèmes fondés sur l'école à réaliser l'égalité des résultats de l'éducation. Cinquièmement, on apprécie davantage ce que les écoles peuvent apprendre des parents et, enfin, l'on prend de plus en plus conscience de la nécessité éventuelle d'une éducation des parents dans tous les secteurs de la société.

Puisque le hasard de la naissance demeure un facteur de développement social de premier ordre, une véritable démocratisation des chances dans la vie implique une politique éducative cohérente qui doit non seulement encadrer la garderie comme milieu de développement, mais aussi impliquer l'unité familiale en tant qu'agent significatif d'éducation. Si l'enfant est un citoyen à part entière, il a droit à un accès démocratique aux "opportunités" sociales.

En conséquence, nous ne pouvons être d'accord avec un mode de garde en milieu familial dont le contrôle relèverait, de façon limitée, d'agences, d'autant plus qu'on n'exige nullement que ces dites agences soient elles-mêmes contrôlées par les usagers du service de garde qu'elles administrent. Si nous privilégions la formule de mini-garderies en regard de la garde en milieu familial, ce n'est pas pour une question de termes, mais bien pour s'assurer que le droit au contrôle soit reconnu aux usagers de ces services comme à ceux des garderies ou de tout autre mode de service de garde. C'est aussi, rappelons-le, la meilleure façon de doter ce type de service de garde du même degré de qualité que nous voulons voir garantir au niveau d'une loi pour les garderies sans but lucratif. En effet le Comité interministériel sur les services d'accueil à la petite enfance reconnaît lui-même, dans son rapport, à la page 51, quand il établit un tableau comparatif des familles de garde, qu'en ce qui concerne la famille de garde le milieu qui appartient à un autre — la personne qui offre le service chez elle — peut vraisemblablement créer chez l'enfant gardé des conflits de propriété s'il y a d'autres enfants dans la maison — il n'y a pas de sentiment d'appartenance — et que les stimulations apportées aux enfants sont strictement reliées aux capacités des gardiennes.

Comment le parent peut-il exiger d'une personne qui garde des enfants chez elle, jusqu'à dix heures par jour, cinq jours par semaine, sans autres ressources humaines que les siennes, une

recherche d'harmonisation du milieu de vie offert à chaque enfant avec les valeurs familiales et une démarche de perfectionnement en matière de pédagogie s'il n'est pas légitimé de le faire à la faveur d'une formule administrative instituée au niveau de la loi? Il reste toujours, pourrait-on argumenter, le jeu de l'offre et de la demande qui se manifesterait dans le domaine par le principe suivant: Si le service ne satisfait pas aux exigences du consommateur, ce dernier peut toujours choisir. Or, il ne faut pas oublier que la marchandise dont il s'agit s'avère être des enfants de zéro à six ans.

De plus, nous contestons vivement les conditions de travail que subiraient les personnes assumant ce mode de service de garde: travailleur isolé et, de ce fait, défavorisé comparativement aux travailleurs en garderies, au niveau des ressources humaines et matérielles, sans avantages sociaux, dû à son statut de travailleur autonome, telles sont les conditions que laissent entrevoir les mesures financières et administratives mises en place en 1979-1980 par le présent gouvernement pour lancer cette nouvelle formule. Nous pouvons, à juste titre, nous demander ce qu'il y a de nouveau dans cette formule qui consacre, entre autres, l'exploitation des femmes. Comme le souligne fort opportunément Richard Cloutier dans son étude, le développement et le fonctionnement même des services de garde d'enfants au Québec sont à plus de 95% assumés par les femmes — garderies publiques et familiales, prématernelles — elles-mêmes aux prises avec des difficultés reliées au travail féminin: salaires inférieurs, conditions de travail défavorables, insécurité d'emploi, etc. Ainsi, en tant que milieu de travail, la garderie se retrouve directement impliquée dans la problématique de l'accès des femmes à des conditions équitables d'emploi.

La politique actuelle tend donc à confiner la femme dans son rôle traditionnel et à perpétuer l'exploitation éhontée de celle-ci. Pourtant, c'est le même gouvernement qui, dernièrement, prétendait instaurer des conditions de travail minimales pour les travailleurs non syndiqués.

Or, la femme qui gardera des enfants chez elle ne touchera même pas le salaire minimum. De plus, elle travaillera de dix à douze heures par jour, isolée, sans bénéfices marginaux. Le gouvernement est très conscient de cette situation puisqu'il a trouvé un moyen pour contourner la Loi du salaire minimum en déclarant que ces femmes sont des travailleuses autonomes et non des employées des agences. Le Regroupement des garderies sans but lucratif du Québec dénonce cette exploitation de la femme et exige des conditions de travail décentes, comparables à celles des travailleurs du secteur public, pour tous les travailleurs du secteur des services de garde.

Toutes ces raisons nous justifient grandement d'exiger une loi qui assure une mise en place et le développement d'un réseau universel régi par des normes uniformes qui garantissent une qualité optimale des services. (15 h 45)

Or un réseau universel, c'est aussi un réseau équitablement implanté qui garantit aux citoyens du Québec, parents et enfants, quelle que soit la région où ils vivent, l'accès à un service de garde qui réponde à leurs besoins. C'est présentement loin d'être le cas au Québec. En effet: "Par rapport à l'ensemble du Québec, la région 03 — qui est la région de Québec — regroupe environ 10% des places en garderie pour 15% de la population. De son côté, la région de Montréal compte 79% des places pour 56% de la population alors que le reste du Québec possède 15% des places pour 35% de la population."

Outre l'universalité du réseau que devrait instituer une loi-cadre sur les services de garde à l'enfance, dans les conditions que nous venons d'exposer, la même loi devra assurer l'intégration du réseau. Présentement, il n'y a pas de réseau, nous en convenons tous. Or, quant à en implanter les assises dans une loi, autant prévoir lui garantir un développement harmonieux en lui conférant dès le départ une intégration rien de moins que rationnelle. Ainsi, ladite loi devra-t-elle avoir une juridiction d'égale valeur sur tous les types de service de garde en laissant le moins possible à d'autres la responsabilité de mettre en place un secteur ou l'autre du réseau.

Qui dit réseau dit aussi qu'il ne doit pas y avoir discrimination dans l'accessibilité aux services. Si nous mettons de l'avant une telle revendication, c'est que la situation n'a guère changé depuis trois ans. Le choix réel d'envoyer son enfant en garderie au Québec reste toujours le privilège des familles les plus démunies, admissibles de façon substantielle aux subventions, et des familles les plus riches qui peuvent se payer le luxe d'assurer en entier les frais de garderie. La classe moyenne laborieuse, travaillant au seuil du salaire minimum, n'a pas plus droit qu'il y a trois ans aux garderies, les indexations de l'échelle d'aide n'ayant jamais dépassé de façon raisonnable les maigres augmentations dont ont pu bénéficier leurs revenus.

Pour établir ces services de garde qui apporteraient de façon évidente la solution aux problèmes, il nous faut maintenant parler de financement. Nous ne détaillerons pas ici notre étude économique sur les coûts de fonctionnement d'une garderie puisque nous la déposons en annexe à ce mémoire mais nous en rassortirons les grandes lignes.

La création de nouvelles garderies et de nouveaux services ainsi que la survie des garderies existantes exigent une politique de financement adéquate. Afin d'établir cette politique sur une évaluation sérieuse et réaliste, le Regroupement des garderies a entrepris l'an dernier une étude du coût de fonctionnement des garderies. Nos calculs sont basés non pas sur une situation idéale mais bien en fonction d'une situation normale. Tous nos chiffres ont été basés sur des montants minimaux afin de permettre aux garderies de fonctionner normalement et non pas de façon luxueuse.

Selon notre étude, pour garder un enfant de moins de deux ans, il en coûte $23.85 par jour au minimum si le ratio personnel-enfants est de 1-7. Pour les enfants de deux à six ans, il en coûte $17.88 au minimum avec un ratio de 1-10. Ces ratios sont ceux préconisés par le ministère des Affaires sociales du Québec et ils sont inférieurs aux normes qui prévalent dans la plupart des autres provinces canadiennes. Pour sa part, le regroupement prône des ratios de 1-4 pour les enfants de moins de deux ans et 1-7 pour les plus de deux ans, ce qui porte le coût de garde à $35.71 et à $23.38 par jour selon l'âge.

Il est évident que les parents ne peuvent pas assumer seuls ces frais. C'est pourquoi le regroupement exige que le gouvernement fournisse aux garderies un financement direct pour assurer leur stabilité financière.

Si l'on compare les coûts qui ressortent de notre étude aux barèmes du présent gouvernement, ils peuvent sembler exorbitants à première vue. En réalité, ce sont les conditions actuelles de fonctionnement des garderies qui sont anormales. Pour assurer la survie des garderies, les moniteurs sont sous-payés, les parents doivent fournir une large part de bénévolat, les ratios sont excessifs et le matériel insuffisant. Enfin, le système en vigueur d'aide indirecte accordée aux parents plutôt qu'aux garderies ne permet pas à celles-ci d'être assurées d'un revenu stable. Bien plus, il ne rejoint qu'une minorité de la population. Les salariés moyens ne recevant aucune aide, ou bien doivent payer une somme excessive pour la garderie, ou bien n'y ont pas accès. Les coûts qui ressortent de notre étude ne sont point exorbitants. Au contraire, ils démontrent à quel point le gouvernement est en retard en matière de politique de garde d'enfants.

Ceci ressort encore plus clairement lorsqu'on compare le Québec à d'autres pays ou encore à d'autres provinces canadiennes. En 1977, par exemple, le coût des crèches en France était estimé à 80 francs, soit $18 par enfant de moins de trois ans par jour en moyenne. Par contre, l'Ontario versait l'an dernier $15.34 par jour par enfant en subvention directe aux garderies. Ce montant est présentement en révision. Nos demandes sont alors très comparables aux montants accordés ailleurs. En outre, le principe même de financement direct des garderies est accepté dans bon nombre de pays. En effet, d'après une étude sur les services de garde effectuée dans sept pays et deux provinces canadiennes pour le compte du Comité interministériel sur les services d'accueil, dans tous les cas, l'État apporte une contribution financière directe et, dans plusieurs endroits, le gouvernement local également. Par exemple, en Suède, en France, au Danemark, en Allemagne, en Ontario, en Alberta et en Yougoslavie.

Cette contribution directe de l'État représente en moyenne 60% à 80% des coûts de fonctionnement de la garderie sauf aux États-Unis et dans les provinces canadiennes. Partout, le tarif maximum exigé des parents est inférieur au coût économique des services car il représente de 20% à 40% de ces coûts. Cette contribution des parents varie selon une échelle qui tient compte du revenu des parents, du nombre d'enfants en garde et du temps de garde. En Suède, par exemple, la cotisation maximum était de 20 couronnes en 1976 soit $5.34.

Nos estimations ne semblent point exagérées non plus lorsqu'on les compare aux coûts de fonctionnement de la maternelle à l'heure actuelle. À la garderie, les enfants passent en moyenne 10 heures par jour et reçoivent au moins un repas et deux collations. Les coûts horaires à la garderie qui varient de $1.79 à $3.57 selon l'âge et le ratio, se comparent d'autant plus favorablement à celui de la maternelle, si l'on considère qu'un enfant à la maternelle ne reçoit aucun repas et ne nécessite plus les soins particuliers que requièrent les bébés, par exemple. En effet, d'après les chiffres avancés par le rapport du Comité interministériel en 1977, un enfant en maternelle coûtait à l'État $905 par année, soit $2.50 l'heure avec un ratio de 1-20.

Le coût d'un enfant à la maternelle ne cesse d'augmenter depuis 1978, puisqu'en 1978 il avait déjà grimpé à $1300 par année contre $905 en 1977. Il en est tout autrement de l'argent que perçoit la garderie. Celle-ci ne touche actuellement aucune subvention directe statutaire proportionnelle au nombre d'enfants qu'elle reçoit. Une étude de l'Université Laval démontre qu'en 1978-1979, le ministère des Affaires sociales du Québec subventionnait 465 des 1155 places en garderie de la région de la ville de Québec avec une moyenne d'environ $7.10 par jour, par place, selon le revenu familial. Reportées sur l'ensemble des places, ces subventions donnent une moyenne de $3 par jour par place. Pour les 185 demi-journées de maternelle, le ministère de l'Éducation du Québec, en incluant la subvention à l'immobilisation avec celle du fonctionnement, verse environ $1300 par enfant par année, ce qui revient à environ $14 par jour.

Soulignons cependant que dans les faits, les garderies ne reçoivent même pas $3 par jour-place en moyenne, puisque le système d'allocations actuel est discriminatoire et fluctuant d'une région à l'autre, d'une garderie à l'autre et d'une année à l'autre.

Le Regroupement des garderies sans but lucratif entend donc critiquer cette loi sur la base de ses revendications fondamentales, soit: Un réseau de garderies universelles et accessibles à tous, le contrôle des garderies par les parents usagers et les travailleurs du service de garde, (II y a un erratum dans le texte, un oubli), un financement direct des garderies par le gouvernement sur la base d'un budget global évalué de manière à assurer des normes de qualité pour les enfants et des conditions de travail décentes pour les travailleurs en garderies, le droit de tous les enfants et de tous les parents d'avoir accès à un service de garde d'égale qualité.

Mme Allaire (Hélène): On en est maintenant à la critique de l'avant-projet comme tel. Il est de

notoriété publique que toute loi est sujette à des interprétations différentes selon le point de vue ou les intérêts de ceux qui la manipulent. Or, dans le cas de l'avant-projet de loi sur les services de garde à l'enfance que nous discutons aujourd'hui, la marge de manoeuvre et l'arbitraire prend d'autant plus d'envergure que le projet de loi n'est pas accompagné d'une spécification des principes généraux qui la sous-tendent. Nous croyons essentiel d'inclure de façon non équivoque le droit des enfants à un service de qualité, le droit des parents à un service de garde et au contrôle réel de ce service et le droit des travailleurs du milieu à une qualité de vie décente afin que ces droits soient assurés et défendus par cette loi.

De plus, pour élucider tout problème de compréhension de la loi et pour la rendre plus accessible aux parents québécois, une définition des termes utilisés est plus que souhaitable. Par exemple, le service de garde en milieu familial n'étant pas clairement défini dans cet avant-projet de loi, on peut se demander quelle distinction existerait entre cette famille de garde et la famille d'accueil au sens de la Loi sur les services de santé et les services sociaux. En effet, l'article 34 ne délimite d'aucune façon que par le nombre d'enfants reçus le sens de ce mode de garde. Les enfants pourront-ils y être reçus 24 heures par jour, sept jours par semaine? Ces deux conditions sont un prérequis essentiel avant même de pouvoir discuter du contenu de l'avant-projet. Ce dernier, très vague sur plusieurs points, laisse la porte ouverte à des reculs importants.

Le Regroupement des garderies sans but lucratif du Québec réclame donc que les principes généraux que devrait sous-tendre cette loi soient clairement identifiés et fassent partie intégrante de la loi.

Les garderies demandent depuis fort longtemps que les services de garde soient dissociés de la Loi sur les services de santé et les services sociaux. En effet, cette loi place les garderies actuelles dans le même cadre que les services d'accueil pour enfants requérant des soins spéciaux, subventionne les parents selon des critères d'assistance sociale, ne régit aucune politique ou normes émises par le service des garderies, bref est inadéquate. Donc, en principe, le Regroupement des garderies sans but lucratif du Québec n'est pas en défaveur d'une loi permettant aux services de garde d'être régis de façon autonome. Par contre, l'avant-projet de loi soumis à notre attention ne répond pas à nos attentes.

En effet, cet avant-projet de loi crée un Office des services de garde à l'enfance. À première vue, cet office semble avoir des pouvoirs très étendus. Or, l'article 23, qui confère au ministre des Affaires sociales le pouvoir de déterminer les orientations et les objectifs de cet office, limite de façon radicale la capacité d'agir de ce dernier. Si l'on considère en plus que cinq fonctionnaires, bien que sans droit de vote, siégeront de facto au conseil d'administration de l'office, on peut s'interroger sur le pouvoir réel des membres de ce conseil. Nous considérons que c'est là donner un droit de vote déguisé aux cinq fonctionnaires, puisque c'est sûrement à partir de leurs recommandations que le ministre concerné émettra ses directives.

De plus, le Regroupement des garderies sans but lucratif du Québec s'interroge fortement sur la pertinence de la composition stéréotypée de l'office proposée par l'avant-projet de loi à l'article 6. En effet, l'office qu'on nous présente est conçu selon les mêmes critères de représentation que les conseils d'administration des hôpitaux, des CLSC et autres services sociaux actuels. Or, la participation des ressources du milieu que le projet de loi 65 prétendait favoriser s'est avérée sinon nulle, du moins non efficace à l'usage et les critiques à cet égard fusent de toute part. Pourquoi alors répéter l'expérience dans le domaine des services de garde?

De notre point de vue, l'organisme régissant d'une façon autonome les services de garde se doit d'être un organisme représentatif du milieu de garde, avec des pouvoirs réels de planification et de consultation, lui permettant de préciser ses objectifs et ses orientations.

Le Regroupement des garderies sans but lucratif du Québec ne prétend pas avoir de solutions miracles à proposer à ce sujet au niveau national, mais il tient dès lors à attirer l'attention de cette commission sur la nécessité flagrante d'assises régionales pour l'office. À l'article 25 de l'avant-projet, il est fait mention de possibilité pour l'office de "désigner des représentants régionaux". Le Regroupement des garderies sans but lucratif du Québec considère que, plus qu'une possibilité, la représentation régionale de l'office est un devoir. De plus, nous tenons à souligner que nous ne concevons pas comme valable la représentation régionale qui serait exercée par "un organisme ou un établissement public au sens de la Loi sur les services de santé et les services sociaux", tel que mentionné au deuxième alinéa du même article.

En effet, l'implication des ressources des services de garde dans les CRSSS, les CSS, les CLSC et autres établissements sociaux est loin d'être acquise et la pratique actuelle démontre clairement que les services de garde sont définitivement traités en parents pauvres à ces niveaux. Aucun mécanisme dans cette loi n'assure que ces établissements répondront aux demandes de l'office; tout comme les hôpitaux qui n'ont pas répondu aux exigences du MAS pour la mise sur pied de comités d'avortement thérapeutique, ces organismes gouvernementaux auront libre choix de remiser sur des tablettes les demandes de l'Office des services de garde.

Cette loi doit donc prévoir des mécanismes de consultation directe qui permettent à l'office d'avoir des assises régionales solides, en contact permanent avec les usagers des services de garde locaux. Afin d'identifier les besoins de la population, la qualité des personnes et organismes à être consultés par l'office devrait être clairement identifiée à l'article 24 du projet de loi. Ce n'est que dans un tel contexte qu'il pourrait être concevable

qu'un tel office remplisse les fonctions qui lui sont attribuées dans l'avant-projet de loi.

Comme nous l'avons exposé plus haut, le Regroupement des garderies sans but lucratif du Québec revendique un réseau de services de garde où tous les services répondraient aux mêmes critères tant au niveau du statut corporatif qu'au niveau des normes de qualité ou des contrôles à être assurés. Aussi est-il inacceptable pour notre organisation que les services de garde soient classifiés de façon différente selon l'âge des enfants (préscolaire ou scolaire) auxquels ils s'adressent, le nombre d'enfants qui les recevront — plus ou moins dix enfants — ou encore le temps pendant lequel ils sont offerts — halte-garderie. (16 heures)

À notre avis, la section I du chapitre II de l'avant-projet doit donc uniformiser l'organisation de tous les services de garde à la fois, soit garderie, mini-garderie, garderie parascolaire, halte-garderie et l'office doit régir directement tous les types de services de garde.

La nécessité de détenir un permis pour un service de garde est l'objet de l'article 29 du projet qui nous est soumis. Conformément à ce que nous avons déjà annoncé, nous insistons sur la nécessité de délivrer sur la même base des permis pour tous les modes de garde. Les dispositions de l'avant-projet de loi sur l'organisation des services de garde en milieu scolaire ou en halte-garderie, telles que trop brièvement déterminées aux articles 58, 59 et 60, nous apparaissent donc définitivement inacceptables puisqu'elles ne sont aucunement du même ordre que celles prévues pour les garderies.

De plus, nous croyons des plus urgents que l'office puisse sévir contre toute forme de garde clandestine. Nous savons tous que des lieux de garde inadéquats, voire même scandalisants, existent et pour qu'ils disparaissent définitivement, il faut absolument que des places de garde de qualité indéniable soient créées. En effet, dans la situation actuelle, plusieurs parents n'ont pas d'autre choix que de confier leurs enfants à des services inadéquats puisque les services organisés, tels garderies ou mini-garderies, sont inexistants ou minoritaires par rapport aux places requises. À ce propos, nous considérons que l'article 29 de l'avant-projet ne garantit pas les mesures qui s'imposent puisque quiconque n'utilise pas dans son nom ou sa raison sociale le mot "garderie" ou les expressions "services de garde en garderie", "services de garde en milieu familial" peut légalement garder des enfants sur une base régulière sans que l'office puisse intervenir pour contrôler les abus.

Pour assurer le contrôle de la vie quotidienne des enfants par les parents, nous tenons à ce que ces derniers puissent jouer un rôle actif et bénéficier d'un pouvoir décisionnel à la garderie. La corporation sans but lucratif, dont le conseil d'administration est formé majoritairement de parents usagers de la garderie, répond à nos attentes sur ce point. Le regroupement des garderies sans but lucratif du Québec exige que toutes les ressources de garde soient bâties selon ce modèle. Seul le contrôle réel des activités tant administratives que pédagogiques d'un service de garde par les parents et les travailleurs de ce service assure une continuité entre les objectifs familiaux et les objectifs de garde. Le pouvoir collectif d'intervention des parents sur le milieu de garde est une garantie de qualité du service. Ce pouvoir décisionnel est et doit demeurer entre les mains des parents usagers de tous les services de garde.

Nous ne pouvions accepter qu'une garderie soit du ressort d'un organisme aussi peu représentatif des parents qu'une corporation municipale, tel que le permettrait l'article 31, ou encore qu'une coopérative à but lucratif puisse administrer une telle ressource et en tirer des profits au détriment de la qualité des services offerts aux enfants.

La structure proposée à l'article 33 pour la formation d'agences de service de garde en milieu familial entraîne indéniablement la non-participation des parents aux décisions impliquant le service de garde.

Comment un parent pourra-t-il avoir droit de regard sur ce qui se passe dans une famille de garde considérée comme une structure autonome, si en plus cette famille est elle-même recrutée par un organisme aussi lointain qu'une corporation municipale, une commission scolaire ou un établissement public au sens de la Loi sur les services de santé et les services sociaux, par un organisme dont la préoccupation première est tout autre que le service de garde qui préoccupe l'usager?

Tout comme pour la garderie de plus de dix enfants, le service de garde de moins de dix enfants devrait être géré par une corporation sans but lucratif dont le conseil d'administration est composé majoritairement de parents usagers. Nous le répétons, c'est le seul statut corporatif acceptable pour quelque mode de garde que ce soit, quels que soient la taille du groupe d'enfants (garderie, mini-garderie) et l'âge de ces enfants.

Nous ne voyons donc pas la nécessité de créer des agences pour administrer des places surtout si ces mêmes agences n'y voient qu'une façon d'aller chercher des subventions et, par le fait même, de boucler leur budget comme certains organismes pourraient être tentés de le faire.

Par exemple, les changements récents du pouvoir municipal de taxation pourraient inciter les municipalités à aller chercher des subventions sans effort en mettant sur pied un service d'agences. Les corporations municipales n'y verront qu'un moyen supplémentaire de se faire des revenus additionnels.

Nous entrevoyons d'un oeil sceptique les discussions à venir entre maires et conseillers au sujet de l'application pratique des normes de gestion concernant nos enfants. Leurs intérêts en seront "de gestionnaires" qui n'ont aucun sens des réalités quotidiennes d'un monde de marmots de trois mois à douze ans.

II en est de même pour les commissions scolaires et les autres établissements où les pouvoirs décisionnels n'appartiennent pas aux parents usagers.

De ce fait, le Regroupement des garderies sans but lucratif du Québec demande qu'un permis de service de garde ne puisse être accordé sans que le contrôle effectif des usagers y soit assuré et que le projet de loi soit modifié en ce sens, en particulier les articles 31, 33, 58 et 60.

En plus de revendiquer une qualité au moins égale à celle des garderies des enfants d'âge préscolaire, le Regroupement des garderies sans but lucratif du Québec estime que les services de garde s'adressant aux enfants de six à douze ans doivent être disponibles en toute période de l'année. En effet, les services de garde pour ces enfants sont nécessaires non seulement les jours de classe, comme le propose l'article 58, mais aussi les jours de congé pédagogique et pendant les vacances d'été. De quelle utilité serait un service de garde aussi incomplet pour des parents travailleurs qui sont loin de bénéficier d'autant de jours de congé que leurs enfants?

Certains articles de cette même section I du chapitre II étalent avec acuité les différences d'exigences gouvernementales entre les garderies d'une part, et les autres modes de garde, d'autre part. Soulignons plus précisément que nous trouvons pour le moins bizarre que seuls les services de garde en garderie doivent obtenir une autorisation de l'office pour aménager un local ou le modifier, à l'article 41, alors que tous les autres services de garde n'ont pas à se prêter à de telles exigences. Qu'on ne se méprenne pas ici sur la teneur de nos propos. Ce n'est pas parce que nous voulons soustraire les garderies à de telles formalités, mais bien plutôt que nous jugeons des plus importants que l'environnement physique de l'enfant soit adéquat dans tous les types de services de garderies.

Cette notion de deux poids deux mesures réapparaît encore clairement à l'article 43, troisièmement, alors que les mesures de suspension, annulation ou refus de renouvellement de permis pour cause de menace à la santé, à la sécurité ou au bien-être des enfants ne s'appliquent qu'aux services de garde en garderie et non aux autres modes de garde prévus dans l'avant-projet de loi, car ce ne sont pas les parents usagers d'un service de garde où ils n'exercent pas collectivement un pouvoir décisionnel qui pourront faire suspendre ou annuler le permis d'un service inadéquat; ils pourront retirer leurs enfants d'un lieu menaçant la santé, le bien-être et la sécurité, mais la place pourra être comblée dès le lendemain par un autre enfant.

L'article 43,3e paragraphe, apparemment anodin, confirme que les familles de garde ne seraient contrôlées que par les agences qui risquent fort de devenir à l'image des agences de services sociaux qui sélectionnent les familles d'accueil pour placement d'enfants et qui n'ont d'autres contacts avec ces familles que lors du placement et du déplacement des enfants.

Nous percevons à travers cette politique l'intention du gouvernement de mettre de l'avant un mode de garde bon marché et de qualité douteuse. Mais le gouvernement s'en lave les mains, puisqu'il ne se portera pas responsable de la supervision et du contrôle. On comprend bien qu'il ne veuille pas en assumer la paternité complète.

Enfin, toujours dans la même veine discriminatoire, seules les garderies doivent tenir un dossier individuel pour chaque enfant qu'elles reçoivent. Cette fois, le RGQ s'insurge contre le principe même des dossiers des enfants. Si ces dossiers sont si anodins que certains veulent nous le laisser croire, pourquoi alors y tient-on autant? Pourquoi alors la nécessité de la confidentialité de tels rapports, de quelle utilité alors seraient-ils pour des fins d'enquête, d'étude ou de recherche? Le Regroupement des garderies sans but lucratif du Québec trouve indécent de commencer à classifier les enfants et à les codifier dès la naissance ou presque et les garderies qui en sont membres refusent irrémédiablement de devoir tenir de tels dossiers et encore plus de les mettre à la disposition de qui que ce soit.

Dans la troisième partie de la section I du 2e chapitre, l'avant-projet donne à l'office le pouvoir d'accorder des subventions directes au service de garde. Le Regroupement des garderies sans but lucratif du Québec est fermement convaincu que l'octroi de subventions directes est un devoir essentiel de tout office créé par un gouvernement qui désire vraiment promouvoir l'essor des services de garde au Québec. Par contre, nous dénonçons la possibilité de financer des paliers intermédiaires tels que les agences qui favorisent une bureaucratisation du réseau beaucoup plus que son extension tant quantitative que qualitative.

La section IV du même chapitre traite aussi des dispositions d'aide financière et du montant de contributions qu'un service de garde peut exiger. Suite aux résultats de son étude économique sur l'établissement du coût jour-enfant en garderie, le RGQ est des plus sceptiques face à la détermination du montant de contribution des parents par l'office. En effet, l'étude économique "Pour la reconnaissance du droit aux garderies: un financement direct et adéquat", conduite par Mme Ruth Rose-Lizée, professeur en science économique à l'Université du Québec à Montréal, établit à $23.85 le coût jour-enfant minimum pour les 0 à 2 ans et à $17.88 celui des 2 à 6 ans. Or, le gouvernement l'estime actuellement à $10 par jour, peut-être $12, sans différenciation des catégories d'âge où les ratios sont différents et ce, bien que des études gouvernementales arrivent elles-mêmes à établir des coûts supérieurs.

Comment alors les services de garde pourront-ils offrir un service de qualité s'ils ne reçoivent que peu ou pas de subventions directes et qu'en plus leurs coûts sont sous-estimés d'une part, mais qu'on leur impose des normes et des contrôles stricts d'autre part? Le Regroupement des garderies dénonce l'objet de cette loi qui, sous le couvert de statuer sur la contribution qui peut être exigée pour les enfants, détermine une

enveloppe budgétaire stricte. La capacité de payer des parents a déjà atteint sa limite indépendamment de l'échelle d'aide qui peut être versée à ces derniers. Aussi, le RGQ conteste fermement la possibilité illimitée d'augmenter la contribution des parents, selon les circonstances et les besoins identifiés par règlement inscrits à l'article 65.

Toute augmentation des coûts doit être absorbée par l'État par voie de subvention directe. Les dispositions financières stipulées à l'article 65 briment de façon inacceptable le contrôle effectif des parents sur les services de garde; ceux-ci se voient confinés à un rôle de commis, sans aucune latitude pour augmenter la qualité du service au-delà des normes prescrites par règlements sans risquer de se voir accusés de malversation de fonds ou de mauvaise administration.

À l'heure actuelle, les ratios personnel-enfants mis de l'avant par le service des garderies sont de un adulte pour sept enfants de zéro à deux ans et de un adulte pour dix enfants de deux à six ans. Ces ratios entraînent des coûts estimés à $23.85 pour les plus jeunes et à $17.88 pour les plus vieux. Par contre, les garderies membres de notre organisme prônent des ratios de un-quatre pour les zéro à deux ans et de un-sept pour les deux à six ans; les coûts quotidiens s'élèvent alors respectivement à $35.71 et $23.38. Comment des parents pourraient-ils décider de s'offrir un service de plus grande qualité sans enfreindre cette loi qui détermine à la fois l'enveloppe budgétaire et les normes?

Par ailleurs, le Regroupement des garderies sans but lucratif du Québec s'est toujours opposé à la formule du plan Bacon qui subventionne les parents de façon inadéquate. Or, l'article 67 de l'avant-projet laisse présumer que cette formule inéquitable sera perpétuée, d'autant plus que le principe de financement direct des ressources n'est pas garanti dans la loi.

Le Regroupement des garderies sans but lucratif du Québec ne peut que constater que le chapitre III de l'avant-projet de loi réaffirme les inégalités entre les divers modes de garde proposés. Les thèmes sur lesquels l'office aura à établir une réglementation sont différents selon qu'il s'agit de services de garde en milieu familial ou en garderie, en halte-garderie ou en milieu scolaire.

De plus, le RGQ s'interroge sur la pertinence de laisser le champ libre à ce point au niveau de la réglementation. Ce faisant, le projet de loi laisse ouverte la possibilité de reculs considérables dans le domaine des services de garde selon que le gouvernement sera plus ou moins sensibilisé à sa responsabilité sociale d'offrir des services de garde universels de qualité.

L'étendue du pouvoir de réglementation est d'autant plus large que la loi ne fixe que très peu de limites. On ne peut que constater l'inaptitude de cette loi en elle-même; elle est tellement peu précise que toute réglementation sera possible sans qu'on puisse la contester ou la déclarer ultra vires. C'est pourquoi le Regroupement des garderies sans but lucratif du Québec insiste pour que certains principes fondamentaux apparaissent clairement dans l'énoncé de la loi pour qu'ils dirigent le sens de la réglementation à venir.

Mme Boisvert: En conclusion, le Regroupement des garderies sans but lucratif du Québec revendique une loi qui régisse les services de garde depuis sa fondation. Pourtant, il conteste fermement le contenu de la loi qui lui est présentée aujourd'hui et constate avec amertume que, loin de promouvoir l'essor et la qualité des services de garde, ce projet de loi ne fait que consacrer la médiocrité des services offerts à la population.

En effet, le Regroupement des garderies sans but lucratif du Québec s'insurge contre le concept restrictif de la garderie qui transpire dans cet avant-projet, contre la démission du gouvernement face à sa responsabilité en matière de services de garde, contre la bureaucratisation et la dépersonnalisation de ces dits services, contre l'éparpillement des ressources, contre l'incertitude causée par le trou béant creusé par la trop grande place laissée à la réglementation et enfin et surtout contre la perte d'un droit acquis, le contrôle des usagers des services de garde.

Le Regroupement des garderies sans but lucratif du Québec exige donc que le principe du contrôle des usagers des services de garde soit préservé intégralement par cette loi; que tous les types de service de garde répondent aux mêmes critères tant au niveau du statut corporatif qu'au niveau des normes de qualité et des contrôles à être assurés; qu'un énoncé de principes définissant les droits des enfants, des parents et des éducateurs en garderies fasse partie intégrante de la loi; que l'office fixe lui-même ses orientations et ses objectifs après les résultats des consultations, recherches ou expériences pilotes qu'il aura menées; que les cinq fonctionnaires prévus dans la composition du conseil d'administration de l'office soient retranchés; que l'office repose sur des assises régionales solides en lien avec les services locaux; que le principe de subventions octroyées directement aux services de garde soit assuré sans équivoque; que soit mis sur pied un réseau de garderies universelles intégrées et accessibles à tous; que ce réseau de garderies soit de type multiforme, soit des garderies de jour, des garderies de 24 heures, des garderies parascolaires, des garderies pour moins de deux ans, des haltes-garderies, des mini-garderies. De là, nous nions toute autre forme parallèle de système de garde tel que le propose l'avant-projet de loi au niveau de la garde en milieu familial, la halte-garderie et la garde parascolaire, qui serait sous la juridiction du ministère de l'Éducation. (16 h 15)

Le Président (M. Boucher): Merci. Je dois vous faire part d'un autre télégramme qui vient d'arriver au secrétariat des commissions: "Monsieur, nous, du Syndicat des professeurs du cégep de Limoilou, appuyons le Regroupement des garderies sans but lucratif dans la présentation d'un mémoire au sujet des services de garde."

C'est signé: Line Boyer, secrétaire du Syndicat des professeurs de Limoilou. M. le ministre.

M. Lazure: M. le Président, il est difficile évidemment de ne pas être d'accord sur tous les objectifs qui sont énoncés dans le mémoire du Regroupement. Pour ma part, je voudrais surtout essayer de ne pas engager la discussion sur un ton de polémique et je suis prêt à passer pardessus des excès de langage qui sont nombreux dans ce mémoire. Cela fait peut-être partie d'un vocabulaire contestataire universel et je le reconnais, c'est une réalité de la vie. J'en prends note et j'essaie de rester serein.

Nous nous étions rencontrés en mars 1977; madame la porte-parole a évoqué cette rencontre. Ce qu'elle n'a pas dit, c'est que le gouvernement, à ce moment-là, a spontanément offert aux représentantes que nous avions convoquées de toutes les régions du Québec de mettre sur pied un secrétariat. Dans l'ensemble des services relevant du ministère des Affaires sociales, à ma connaissance, c'était le seul service qui ne recevait pas une aide financière du gouvernement pour avoir un secrétariat, une permanence. Nous l'avons offert. Il y a eu une première subvention, il y en a eu une deuxième et il y en a une troisième qui s'en vient. Je pense que vous avez été avisés que la troisième s'en vient incessamment.

Notre objectif — autant pour vous que nous autres — à ce moment-là, c'était d'avoir un véritable regroupement de toutes les garderies du Québec sans but lucratif. Il existe actuellement tout près de 300 garderies sans but lucratif au Québec. Pour autant qu'on puisse obtenir des renseignements, votre regroupement n'inclut qu'à peu près 70 ou 75 garderies sans but lucratif au Québec. Je pense qu'au départ il faut établir cela. Je ne vous cache pas que je suis un peu déçu, si on remonte à mars 1977, que plusieurs régions se soient dissociées de votre regroupement: la région 6C, la rive sud de Montréal, la région 6A, la région de Montréal, la région 04, la région de Trois-Rivières. Ces groupements se sont dissociés par écrit, ils nous ont envoyé des lettres nous disant qu'ils ne faisaient pas partie du regroupement.

Je pense qu'on a un problème sérieux et notre intérêt, au gouvernement, c'est de subventionner une association, un regroupement qui va vraiment être représentatif de la majorité des garderies sans but lucratif.

Cela dit, je comprends que c'est difficile. Et si on peut vous être utile à réaliser un tel regroupement au moins majoritaire, sinon unanime, vous pouvez être certaines que, quant à moi, j'offre mes bons services.

Je vais d'abord reprendre les conclusions de votre mémoire. À la page 50, votre conclusion est un bel exemple d'excès de langage quand vous dites que le gouvernement démissionne face à ses responsabilités en matière de garde. Je vous rappelle tout simplement les commentaires que je faisais ce matin, à savoir que ce gouvernement actuel consacre, cette année, $22 500 000 par rapport à $3 500 000 il y a à peine trois ans. Nous nous engageons publiquement, depuis ce matin, à dépenser $32 500 000 l'an prochain, c'est-à-dire dix fois plus qu'il y a quatre ans. Qu'on vienne nous dire dans un mémoire officiel, de façon très éclatante et percutante, que le gouvernement démissionne devant ses responsabilités, vous comprendrez que je ne peux pas accepter un tel verdict de la part de nos amis des garderies.

Quand vous dites aussi, au bas de la page 50, "... et enfin et surtout contre la perte d'un droit acquis, c'est-à-dire le contrôle des usagers des services de garde...", M. le Président, justement, dans notre projet de loi, nous consacrons de façon bien officielle le principe fondamental. J'ai dit, ce matin, qu'une garderie doit être administrée par un conseil où on retrouve majoritairement des parents des enfants qui fréquentent la garderie. Si ce n'est pas cela le contrôle des usagers, je ne sais pas ce que vous entendez par contrôle des usagers. Nous en faisons une pierre angulaire du projet de loi. Il y a vraiment un dialogue de sourds, ou bien, on ne veut pas lire le projet comme il est présenté et on nous prête des intentions. Parce qu'on le dit textuellement dans le projet de loi: Un conseil d'administration contrôlé majoritairement par les parents des enfants. Ensuite, à la page 51 : 2. que tous les types de service de garde répondent aux mêmes critères tant au niveau du statut corporatif qu'au niveau des normes de qualité et des contrôles à être assurés.

Votre principale critique touche la garde en milieu familial. Vous prétendez que par la garde en milieu familial, nous voulons avoir une main-d'oeuvre à bon marché et qu'en même temps nous allons diminuer la qualité des services de garde. C'est une opinion et cela demeure strictement au niveau de l'opinion. Nous avons l'opinion contraire, non seulement nous, mais d'autres, beaucoup d'autres. Je ne veux pas refaire l'historique encore une fois de la garde en milieu familial qui est une institution qui date depuis des générations. Il n'y a personne qui a démontré que pour avoir une bonne garde éducative, pédagogique ou psychosociale adéquate, il fallait avoir un diplôme de cégep ou d'université. Il n'y a personne qui a démontré cela.

Quand vous dites: On demande le même niveau de qualité de garde en milieu familial qu'en garderie, nous sommes d'accord sur le principe, mais une qualité peut être interprétable selon les circonstances. Il est bien entendu qu'il y a des qualités humaines, que ce soit des qualités d'une personne qui garde quatre enfants, belle-soeur ou voisine, qui sont difficilement mesurables, qui ne sont pas mesurables par un diplôme ou par des normes d'un ministère, mais nous prétendons que c'est un mode de garde qui est conforme aux us et coutumes de notre société québécoise. Nous prétendons que l'ingérence de l'État que vous dénoncez si facilement quand cela fait votre affaire serait réelle si on disait: Nous allons choisir Mme Une-telle comme responsable de quatre enfants en garde familiale selon toute une série de critères. Nous pensons que ce n'est pas opportun de faire cela. Cela étant dit, il y aura certainement, par le

biais de l'agence des services de garde en milieu familial, un processus de sélection pour celles qui voudront volontairement s'inscrire comme des gardiennes en milieu familial. Je répète que ce mode de garde en milieu familial sera strictement facultatif. Nous n'allons pas obliger les femmes — puisqu'il s'agit de femmes en général — qui font de la garde actuellement d'un, deux, trois ou quatre enfants à s'inscrire.

Je continue votre série de recommandations. Je ne m'oppose pas à l'énoncé de principe définissant les droits des enfants. Peut-être y aurait-il lieu de l'inclure dans le projet de loi. Je répète que c'est un avant-projet qui va avoir beaucoup de modifications et, il y aura ensuite le projet proprement dit qui, même lui, sera modifié comme tous les projets de loi. Mais, je retiens cette suggestion d'inclure un énoncé de principe. "Que l'office fixe lui-même ses orientations et ses objectifs d'après les résultats des consultations, recherches..." Je suis d'accord. "Que les cinq fonctionnaires prévus dans la composition du conseil d'administration de l'office soient retranchés;". Il faut comprendre le but de cette présence des cinq fonctionnaires. Un des rôles principaux de l'office — on l'a dit ce matin — est de coordonner l'action de plusieurs ministères. Il n'y a pas seulement le ministère des Affaires sociales qui doit intervenir dans le domaine des services de garde; il y a aussi le ministère de l'Éducation, il y a le ministère des Loisirs, l'ex-Haut-commissariat, il y a le ministère du Travail aussi, puisqu'on parle de normes. Bref, il y a cinq ministères que nous avons identifiés pour lesquels il y aurait intérêt, comme on le fait pour l'Office des personnes handicapées où il y a des représentants des ministères qui siègent au conseil de l'office sans avoir droit de vote et qui sont là comme des personnes ressources pour éclairer les membres du conseil au besoin, mais aussi ensuite pour se faire des propagandistes des services de garde, dans notre cas, une" fois retournés dans leurs ministères. Nous pensons honnêtement que c'est utile d'avoir ce mécanisme, parce que c'est un reproche qu'on fait souvent au gouvernement d'être mal coordonné, d'être mal articulé entre les ministères. On pense que cette formule est utile.

Que l'office repose sur des assises régionales solides en lien direct avec les services locaux, nous sommes d'accord avec cela. Nous n'avons pas jugé nécessaire de rendre obligatoire la délégation de pouvoirs de l'office vers les régions. Je ne suis pas fermé au principe de la rendre obligatoire si on nous convainc que c'est nécessaire. À ce moment, peut-être faudra-t-il se donner un délai raisonnable pour ne pas rendre obligatoire quelque chose qui ne peut pas être appliqué ensuite une fois la loi promulguée.

Enfin, il y a le principe des subventions octroyées directement aux services de garde. Je pense que j'ai répondu ce matin en annonçant la décision toute récente du Conseil des ministres de dorénavant, à partir d'avril 1980, financer directement, au rythme de $2 par place occupée par jour.

Vous parlez de bureaucratisation quand vous faites allusion aux agences de services de garde dans le milieu familial. Si vous regardez l'article comme il faut, vous vous rendrez compte que nous avons pris une attitude souple. Plusieurs organismes sans but lucratif peuvent agir comme agences de services de garde en milieu familial. Il y a les établissements du réseau des affaires sociales. Vous vous êtes concentrés sur ceux-là surtout, mais il n'y a pas seulement ceux-là. Cela peut être aussi une garderie populaire. Cela peut être tout organisme, et c'est bien dit dans l'article, tout organisme à but non lucratif. Cela peut être un organisme comme un cercle de fermières, un cercle d'AFEAS. Cela peut être un organisme du genre de ceux qui militent dans les rangs pour maintenir ou sauvegarder les droits féminins. Enfin, quant à nous, cela n'a pas besoin d'être un organisme du réseau des affaires sociales. Nous avons mis cette formule comme une des formules possibles. Il y a déjà des projets qui nous ont été présentés par certains CLSC, des Centres locaux de services communautaires, qui sont assez proches de leur population et qui s'offrent d'agir comme agence.

Je ne vois pas pourquoi on se couperait, on s'empêcherait d'utiliser ces organismes. Justement, c'est dans le but de ne pas créer une autre structure inutilement. Sur qualification des définitions, je suis aussi d'accord. C'est un peu comme pour l'énoncé de principe. Je pense que c'est une suggestion pertinente qu'on va retenir. Quant à la garde des enfants d'âge scolaire lors des jours pédagogiques et des vacances, à cela j'ai répondu à midi aussi en vous donnant la liste des cinq amendements que nous allons apporter à l'avant-projet de loi.

Là, je vous pose une question: Sur quoi vous basez-vous pour affirmer que l'avant-projet consacre la médiocrité des services offerts, ou est-ce que cela fait partie des excès de langage qu'on doit accepter sans trop trop sourciller? Vous avez parlé des coûts tantôt. Vous avez parlé de l'Ontario. Je pense qu'en toute justice, il faut parler des autres provinces aussi. Colombie-Britannique: $8 par jour en garderie, $6 par jour, garde en milieu familial. Saskatchewan, $8.60 par jour, garderie; $6.50, garde en milieu familial. Nouvelle-Écosse, $7.50 en garderie. Nouveau-Brunswick, $6, etc. Vous avez évidemment sorti la province qui était la seule à avoir un per diem plus élevé que celui de $12 que nous aurons au 1er avril, et cela est de bonne guerre, je suppose. Je pense qu'en toute justice, il faut donner un tableau plus complet. (16 h 30)

Votre suggestion d'avoir dans les agences de services de garde en milieu familial, une participation accrue des parents, je trouve cette suggestion intéressante. Et elle est possible, actuellement, comme le texte est libellé. Je répète encore une fois: Tout groupement, y compris un conseil actuel d'administration d'une garderie populaire pourrait, selon les termes de ce projet, agir comme agence de service de garde en milieu familial.

Il ne faut pas faire peur au monde inutilement; le dossier dont il est question dans le projet de loi, c'est celui qui est utilisé actuellement dans les

garderies. Vous l'utilisez. Que veut dire le dossier? Cela ne veut pas dire grand-chose. Cela veut dire la fiche d'inscription — j'ai les textes devant moi, pour ceux ou celles qui y sont intéressés — comme on a n'importe où, quand on a recours à un service. Ensuite, cela veut dire la fiche d'autorisation pour les sorties des enfants et, finalement, l'autorisation des parents, en cas d'urgence. Et tout cela, on le dit très bien en haut, ce sont des guides de fiche. Or, ce n'est pas envoyé au ministère, c'est pour la bonne marche de vos garderies. Ce qu'on demande dans le projet de loi, c'est tout simplement ce qui existe actuellement. Alors, il ne faut pas semer la panique et alerter la Commission des droits de la personne. En définitive, il n'y a rien qui brise le secret de la vie privée des gens là-dedans et on n'a pas l'intention de ficher les citoyens ou citoyennes du Québec, à partir de l'âge d'un an ou de six mois. Pas du tout.

Alors, M. le Président, une dernière remarque. À la page 26 du mémoire, vous dites aussi qu'il n'y a rien d'amélioré, par rapport à il y a quelques années, quant aux classes moyennes. C'est faux, M. le Président, c'est absolument faux. Vous le savez que c'est faux. Ce n'est pas correct de dire des choses aussi fausses. Dans l'échelle des revenus, un couple, deux adultes avec deux enfants, dont l'un est en garderie, alors qu'il y a à peine quelques années, un tel couple, avec deux enfants, s'il gagnait plus de $10 000, n'était pas admissible aux subventions du tout. Aujourd'hui, depuis le 1er septembre, vous le savez, cette échelle s'étend à $16 400. Et je trouve cela dommage que vous charriiez, un peu, l'opinion publique, de cette façon-là. Vous vous enlevez une crédibilité qui, autrement, est fort utile. Alors, on y touche, de plus en plus, à la classe moyenne. À cet égard, je pense qu'il faut faire les clarifications qui s'imposent. Non seulement on touche de plus en plus à la classe moyenne, mais aussi, par rapport à il y a trois ans, alors qu'à peine 25% des 10 000 enfants qui étaient en garderie étaient admissibles à des subventions, aujourd'hui, c'est 46% des 16 000 enfants qui sont admissibles aux subventions, qui touchent des subventions.

Alors, ne venez pas me dire qu'il n'y a rien de changé et que le gouvernement du PQ démissionne devant ses responsabilités. Ce n'est pas vrai. Alors cela étant dit, on a quand même noté plusieurs choses intéressantes, pertinentes et utiles dans votre mémoire et on va en tenir compte. Merci.

Le Président (M. Boucher): Mme Boisvert, est-ce que vous voulez...

Mme Boisvert: Oui. Le ministre vient de nous entretenir de beaucoup de choses.

M. Lazure: Vous aussi, pendant une heure. Quant à moi, je n'ai pris que quinze minutes.

Mme Boisvert: Ce n'est pas un reproche. Si, effectivement, il y a beaucoup de choses sur lesquelles vous êtes d'accord, pourquoi ces cho- ses ne figurent-elles pas comme volonté dans la loi? C'est s'amuser à légiférer sur les dossiers, alors que les dossiers pourraient être quelque chose qui figure dans la réglementation. Il y a des choses tellement plus importantes qui pourraient figurer dans la réglementation, comme le droit aux garderies. Parce que là, il faut bien penser que si ce n'est pas mis dans la loi et que c'est laissé à une réglementation, à partir du moment où il y aura un autre gouvernement ou que ceux qui vous remplaceront auront une autre volonté, ce sera tout à refaire, il faudra recommencer à tous les quatre ou six ans, tout cela, parce qu'il n'y aura rien d'assis dans la loi. C'est un reproche qu'on fait à la loi.

M. Lazure: À cet égard, M. le Président, je vous l'ai dit tantôt, on va envisager le fait d'inclure l'énoncé de principe.

Mais, pour revenir à votre question fondamentale, vous me dites: Si vous êtes ouvert à ça, pourquoi ne l'avez-vous pas mis dans votre loi? Parce qu'on n'a pas la science infuse; on ne l'a pas et c'est pour ça qu'on fait une commission parlementaire où on va entendre 25 ou 26 groupements; ensuite, on va avoir un projet de loi qui va être amélioré, qui va être débattu à trois étapes, qui va encore être amélioré. Je n'ai aucun problème de culpabilité ou je ne me sens pas sur la défensive de dire qu'on va changer telle ou telle chose. Cela fait des mois qu'on travaille là-dessus, mais c'est loin d'être parfait et c'est améliorable.

Mme Boisvert: Si c'est une politique voulue, les choses qui touchent la politique, qui ne sont pas sujettes à être changées avant qu'il y ait un changement de mentalité dans la population devraient être incluses dans la loi et non pas laissées à une réglementation. Je ne sais pas si je peux intervenir sur tout ce que vous avez dit ou si c'est à Mme...

Le Président (M. Boucher): Vous pouvez y aller.

Mme Boisvert: Quand on parle de la perte de contrôle des usagers, c'est que dans les garderies à but lucratif, vous conservez le pouvoir des conseils d'administration qui sont déjà effectifs dans ces garderies. Alors, le contrôle aux usagers n'est pas assuré là. Il n'est pas assuré dans les coopératives qui peuvent très bien être des coopératives à but lucratif. Il n'est pas assuré, non plus dans les municipalités. Quel parent va pouvoir aller siéger à la municipalité pour finalement faire valoir le contrôle de la garderie, dans tout ce qui touche les agences, dans les familles de garde? À notre sens, ce n'est pas le contrôle aux usagers; ça va être la loi de l'offre et de la demande.

M. Lazure: Voulez-vous qu'on les prenne une par une? Il est vrai qu'il existe encore à peu près 80 garderies à but lucratif sur les 360. On l'a dit ce matin. Il n'y a pas de nouveau permis d'émis pour les garderies à but lucratif, vous le savez.

Mme Boisvert: Non, mais celles-là peuvent subsister longtemps.

M. Lazure: Cela est un choix, mais vous n'êtes pas obligée d'envoyer vos enfants là.

Deuxièmement, l'association coopérative généralement, c'est toute la philosophie du mouvement coopératif, ça comprend des gens qui sont des usagers du service; des coopérants, par définition, ce sont des gens qui utilisent un service. Je pense que, à l'exception des 80 à but lucratif, si c'est ce que vous voulez dire, on est d'accord, on s'entend, mais pour nous c'est une espèce de droit acquis qu'on laisse aller. Mais, pour tout le reste, on pense que la loi, comme elle est faite, consacre le contrôle des usagers.

Mme Allaire: Elle le consacre peut-être, mais ne l'assure pas. Si on revient à l'exemple des coopératives, si on étudie la Loi des coopératives où il doit y avoir douze membres actifs, il se peut très bien qu'une coopérative à but lucratif vous fasse une demande de permis. Qu'est-ce qui va vous permettre de le leur refuser?

M. Lazure: On va ajouter dans le texte: "coopératives à but non lucratif", si c'est ce que vous voulez, d'accord.

Mme Allaire: Merci. Pour ce qui est des garderies à but lucratif, la discussion vient de ceci: s'il y a vente ou autre en termes d'achalandage, de bâtisse, d'équipement, le nouveau propriétaire devra modifier son statut, mais, si on ne vend que les actions, si on conserve le statut de départ, une garderie qui s'appellerait Louise et André, qui serait vendue à Mme X et qui continuerait à s'appeler la garderie Louise et André pourrait exister encore pendant 300 ans. La vente des actions n'indique pas une possibilité à court terme de modifier le statut de cette garderie pour devenir une garderie sans but lucratif.

M. Lazure: Si je veux bien comprendre, vous préconisez qu'on demande aux 80 garderies à but lucratif qui existent d'avoir des conseils d'administration où il y aurait majoritairement des parents. Est-ce ce que vous demandez?

Mme Allaire: En fait, ce n'est pas la demande précise que l'on vous fait. La demande que l'on vous fait, c'est que, à court terme, ces garderies soient contrôlées par les parents usagers et qu'elles perdent leur statut de but lucratif. Parce que la marchandise, dans ce cas-ci, ce sont des enfants de zéro à six ans, entre autres.

Le Président (M. Boucher): Avez-vous terminé?

Mme Boisvert: Pour poursuivre sur l'indexation de l'échelle dont vous nous parlez, je trouve que vous pouvez peut-être le dire avec un soupçon de fierté que maintenant deux parents ensemble peuvent gagner jusqu'à $16 400 et toucher encore $0.50 de subvention. Mais quand on pense que les salaires ont augmenté, là comme ailleurs, pour ces gens-là comme pour vous ou moi, à $16 400, ça ne leur donne toujours que $8 200 de revenu. Il ne faut pas s'imaginer que ça s'adresse à la classe moyenne, les garderies. On est dans le domaine des garderies, on le voit à qui cela s'adresse.

Aussitôt que le parent a une position, ce qui pourrait s'appeler autre chose que... même un ouvrier spécialisé, il n'a plus droit à la subvention. Je comprends vos chiffres de 40% et 50%, mais c'est parce qu'il s'est créé d'autres garderies aussi, et les gens qui retirent des subventions, ce sont justement ceux qui sont encore sous l'assistance sociale ou les familles monoparentales, qui ont peut-être un peu plus de facilité à avoir des subventions et à gagner des salaires qui leur permettent de vivre. Mais ce sont des salaires...

M. Lazure: Si vous voulez nous dire qu'il faut l'élargir encore, je suis d'accord avec vous. Mais quand vous dites qu'on n'a rien fait, je ne suis pas d'accord avec vous.

Mme Boisvert: Bien, cela n'a pas modifié de beaucoup les choses. Cela n'a pas modifié de beaucoup les choses. Le budget est passé de $12 millions à $22 millions mais, dans les faits, cela n'a pas... moi, je n'étais pas subventionnée il y a trois ans et je ne le suis pas plus aujourd'hui. Les gens ont eu des augmentations de salaire aussi qui ont annihilé finalement leur possibilité d'être subventionnés. Quand on parle aussi des $2 par jour, cela m'a fait un peu sourire, lorsque je l'ai entendu la semaine dernière en conférence de presse et, ce matin, avec l'exemple que vous nous ameniez par rapport aux $0.25 par année qui se payaient il y a 100 ans, je me dis que, pour une garderie qui existe présentement — je ne parle pas des nouvelles garderies à être créées, parce qu'effectivement il y a de bons montants. Dieu merci, cela va aider à élargir le réseau de garderies — mais pour une garderie qui existe présentement, qui a trois ans, cinq ans d'existence, elle va toucher $2 par jour par enfant, plus $13.33 par année par enfant pour la subvention de renouvellement de l'équipement. Bien, si on reporte cela à 100 ans après, finalement, les $0.25...

M. Lazure: Plus les $10 par jour... Mme Boisvert: $2.

M. Lazure: ... quand même, n'oubliez pas. Mme Boisvert: La garderie...

M. Lazure: $2 venant directement de l'État, plus les $10.

Mme Boisvert: Oui, mais directement, nous demandons que le financement direct soit proportionnel à ce que cela coûte vraiment dans les garderies, non pas à l'évaluation que vous en

faites. À $10 par jour, on n'arrive pas! C'est fou, cela. On peut bien arriver avec des déficits de $40 000 et, après cela, on sera mis en tutelle parce qu'on sera accusé de mauvaise administration. Je ne sais pas si vos comptables ont pu comptabiliser cela mais on ne peut pas arriver, dans une garderie; même à $12 par jour, on ne peut pas arriver.

Mme Allaire: II y a deux ans, quand on parlait d'un financement direct, on avait une petite demande de $2 par jour, il y a même trois ans, même quatre ans. Aujourd'hui, vous nous l'accordez, on le reconnaît; le principe du financement direct, comme tel, dans vos politiques, par réglementation, vous nous l'accordez. Dans la loi, vous parlez de "possibilités à l'office de réglementer en vertu d'un financement direct" mais ce n'est pas acquis. Si un autre gouvernement vient, s'il y a des coupures de budget, on va être comme tous les autres organismes qui sont subventionnés par le gouvernement; d'une certaine façon, on va être les premiers à se faire couper un budget de financement direct si ce principe n'est pas reconnu clairement en termes de devoir à l'intérieur de la loi comme telle. Il y a cela.

Les fameux $2, vous dites que cela fait $12, plus le restant des sous qui peuvent nous parvenir. Mais les garderies les plus mal prises sont celles qui existent à l'heure actuelle. C'est la consolidation du réseau, par une augmentation de la qualité des services, qu'il faut voir maintenant. Vous avez fait des efforts louables pour ce qui est des garderies qui vont être créées, mais, pour les garderies à l'heure actuelle, ce que vous donnez comme choix aux garderies qui existent depuis quelques années pour essayer de renouveler leur équipement selon des critères de qualité, pour essayer d'aller chercher des sous, vous leur demandez quasiment de déménager, d'agrandir pour aller chercher les fameuses subventions que vous avez annoncées, car elles n'y auront pas droit et ce sont elles qui en ont surtout besoin.

Les $2 qu'on demandait il y a quatre ans arrivent aujourd'hui, mais, avec l'indexation du coût de la vie, avec toutes les autres dépenses inhérentes, avec l'augmentation des salaires des employés parce qu'eux aussi ont voulu avoir des augmentations de salaire, ils en étaient au salaire minimum et là ils en sont peut-être à $0.20 ou $0.40 de plus, alors ils viennent d'y passer, à l'heure actuelle, aujourd'hui, cela ne nous aide pas à prévoir, par exemple, un budget d'organisation qui ne serait pas déficitaire. (16 h 45)

M. Lazure: Ma dernière remarque, M. le Président. Je vous concède que les efforts qu'on a faits depuis quelques années portent des fruits surtout pour les nouvelles garderies. Je vous concède cela et on a essayé quand même d'ajouter quelque chose pour les garderies existantes. Je suis conscient que ce n'est pas assez. Vous avez raison, et je pense qu'il va falloir travailler là-dessus dans les mois qui viennent du côté du financement. Je pense maintenant qu'au moins là, on a un point d'accord ensemble que pour les nouvelles garderies, il y a des subventions intéressantes qui permettent de démarrer de nouvelles garderies, très intéressantes. Il reste, en plus des $2 par jour par personne, à trouver d'autres façons de consolider les garderies existantes, et on va y travailler.

Le Président (M. Boucher): Mme le député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Je voudrais remercier les représentantes du Regroupement des garderies de leur mémoire.

Je voudrais quand même, en premier lieu, reconnaître les efforts que vous avez faits pour faire évoluer les garderies au Québec, quel que soit le moment où vous l'avez fait. Que vous continuiez de le faire, je pense que c'est extrêmement important. Que vous soyez peut-être un peu plus agressives que le ministre le souhaiterait, ce n'est peut-être pas aussi grave que cela. Il reste que vous avez réussi, non seulement vous, mais tous les autres qui ont assumé des tâches à l'intérieur des garderies depuis plusieurs années — on a parlé d'il y a 100 ans, mettons depuis dix ans — c'est quand même vous qui avez rendu possible cette évolution. Que vous vous battiez pour des services de qualité, je ne pourrais pas vous le reprocher, non plus que vous vous posiez des questions quant à la garde en milieu familial, pour bien vous assurer que ce seront là des services de qualité. Ce matin, il y avait confusion. Je ne parle pas de la garde en milieu familial traditionnel qu'on a connue, le service de la voisine qu'on rémunérait, etc. Je parle de l'institutionnalisation du service de garde en milieu familial pouvant aller de quatre à neuf ans. Je n'ai pas encore de démonstration et peut-être que cela reviendra. Le ministre, le parti ministériel et l'Opposition auront d'autres occasions pour avoir des faits plus précis là-dessus, mais il y a une chose certaine: qui va s'occuper d'assurer la qualité de ces garderies? Sans aucun doute, on parle des agences qui pourront être des agences... Le ministre était ouvert à toutes sortes de possibilités d'organismes existants dans le milieu, mais encore faudra-t-il que ces agences, en prenant l'hypothèse, par exemple, que dans un milieu, ce soit un conseil de service social qui le fasse, aient la disponibilité pour le faire vraiment. Je ne sais pas si c'est vous qui avez dit cela. Je l'ai peut-être lu ailleurs. On demande, par exemple, au Conseil de services sociaux d'assumer de nouvelles responsabilités vis-à-vis des handicapés, d'assumer l'application de la Loi de la protection de la jeunesse, d'assumer maintenant l'évaluation des garderies en milieu familial et je ne sais quoi. Il ne s'agit pas de déléguer une responsabilité pour être sûrs qu'elle sera exercée; encore faut-il que les gens à qui on demande de l'exercer aient les moyens de l'exercer. Que vous vous inquiétiez des services de qualité dans tous les types de garderies, je suis avec vous et je pense que c'est là votre rôle, comme d'ailleurs tous les autres qui vont se

présenter derrière vous, j'imagine, vont le faire de la même façon. Des services de qualité en garderie, on ne saurait trop insister là-dessus.

Évidemment, vous avez cité l'Ontario. Je dois vous dire que le parti ministériel aime beaucoup se comparer à l'Ontario. Je pense qu'il ne peut pas trop en vouloir d'avoir pris l'Ontario comme point de comparaison. Mais il y a une autre chose que je voudrais faire. Quand je regarde le coût des soins de services en garderie, en admettant que ce soit de la même façon à la grandeur du pays etc., je me demande si ce n'est pas rattaché à l'histoire du développement des garderies. Vous avez là une profession. Vous avez là d'abord un réseau de services ou une partie de réseau de services qui a fait la préoccupation des femmes presque exclusivement depuis toujours. Vous avez également dans ce secteur-là presque exclusivement... Je m'excuse, monsieur; êtes-vous un conseiller? Vous êtes un moniteur, n'est-ce pas?

M. Simard (Pierre): Non, non.

Mme Lavoie-Roux: Un conseiller juridique. Voyez-vous, j'espérais qu'il y aurait un moniteur dans la salle, mais vous êtes un conseiller juridique.

M. Simard: Ce n'est pas tout à fait la même chose.

M. Grenier: On est poigné avec un avocat encore.

Mme Lavoie-Roux: Je dis "presque exclusivement" parce que je sais qu'il y a maintenant certaines expériences qui sont faites où on a des moniteurs masculins dans des garderies. Je pense que vous êtes d'accord que c'est vraiment très minoritaire. Vous avez là une occupation qui est remplie principalement par des femmes. Il ne faut pas s'étonner, non plus, que c'est peut-être à peu près de tous — c'est peut-être absolu, vous me corrigerez — les groupes qui terminent des études professionnelles dans les cégeps ceux qui sont le moins rémunérés quand ils entrent sur le marché du travail. Qu'ils soient moins rémunérés au point de départ, disons qu'ils commencent. Mais c'est presque un état statique dans le développement des rémunérations des moniteurs. On pourrait ajouter d'autres points, mais je pense que tout ceci indique que cela a vraiment été le problème des femmes. On ne peut pas le dissocier de l'ensemble du problème de la condition féminine. C'est pour cela qu'on peut être heureux de penser qu'il en coûte $8 en Saskatchewan et $6 au Nouveau-Brunswick; ce n'est pas souvent qu'on se compare au Nouveau-Brunswick. Plus horizontalement, ce serait $7 partout. Le fait reste que c'est encore là un domaine...

Une voix: Terre-Neuve.

Mme Lavoie-Roux: Terre-Neuve... qui est une démonstration des conditions de travail et de la façon dont la société en général a traité les problèmes qui touchaient plus exclusivement ou quasi exclusivement les femmes. Qu'il s'en trouve quelques-unes pour le contester et essayer de le faire avancer, je les suis. Maintenant, j'ai des réticences sur d'autres points et j'y reviendrai.

Une première question que je voudrais vous poser même si je suis dans l'Opposition, si jamais ma formation politique ou une autre prenait le pouvoir, vous...

M. Grenier: Vos déclarations vous suivent. M. Paquette: Ne parlez pas de malheurs!

Mme Lavoie-Roux: C'est pour cela que j'y mets toutes les précautions oratoires. Même si je suis dans l'Opposition et que je pourrais me lancer dans des promesses irresponsables comme on en a entendu alors que le gouvernement qui est là siégeait de ce côté et qu'on puisse...

Une voix: Voyons!

Mme Lavoie-Roux: ...être en faveur d'une accessibilité universelle avec tous les services diversifiés possibles, services de 24 heures. Vous en avez énuméré plusieurs. En pratique, c'est souhaitable que toutes ces choses soient là, mais aujourd'hui, au moment où on se parle, je pense que pour quelque gouvernement que ce soit me voilà à la défense du gouvernement; eux en ont fait des promesses, par exemple!

M. Paquette: Comment cela?

Mme Lavoie-Roux: En tout cas. M. le Président, il me distrait, le député de Rosemont.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Rosemont, s'il vous plaît!

M. Paquette: Vous tendez des perches.

Le Président (M. Boucher): Mme le député de L'Acadie, vous avez la parole.

Mme Lavoie-Roux: Quelles seraient vos priorités? Il y a quand même la considération économique. Vous dites: On regrette que la classe moyenne ne soit pas plus aidée par les dispositions actuelles des subventions qui sont accordées en fonction des revenus, etc. Mais, quand on parle d'une accessibilité universelle, la meilleure possible, de qualité, etc., il reste que c'est peut-être la classe moyenne qui va le plus la payer, cette accessibilité universelle à un réseau de garderies. C'est quand même une considération qu'on ne peut pas taire complètement.

Personnellement, je me dis: Est-ce que ce n'est pas mieux, là où on est capable de donner des services de meilleure qualité, de payer le personnel d'une façon décente? Quelles seraient vos priorités aujourd'hui, compte tenu des facteurs économiques dans ce souhait que vous faites de

l'accessibilité universelle et générale? Vous savez fort bien qu'au plan concret on ne peut pas procéder demain et l'établir ou est-ce que vous pensez que c'est vraiment une négligence de l'État parce que cela ne l'intéresse pas suffisamment? Quelles seraient vos priorités dans les services de garde aujourd'hui, compte tenu des disponibilités économiques de l'État?

Mme Boisvert: Ce n'est pas à nous de trouver des mécanismes pour permettre à plus de gens d'accéder aux services de garde. Si cela doit se faire par des crédits d'impôt ou d'autres façons, ce n'est pas à nous de le faire. Il y a des gens au gouvernement; s'ils ont le mandat de le faire dans cette optique, ils vont trouver des solutions. Ils trouvent des solutions pour d'autres choses qui ne font pas toujours notre affaire. Ce n'est pas de notre ressort. Par ailleurs, si on accepte que les enfants sont une responsabilité collective et constituent la relève de demain, ce n'est pas aux parents, parce qu'ils ont mis des enfants au monde, d'assumer tous les frais qu'encourt un enfant. Déjà, la femme est pénalisée pour avoir des enfants parce qu'elle doit se retirer ou retarder son entrée sur le marché du travail. En termes de coûts économiques, c'est beaucoup parce que l'année ou les trois ans d'expérience qu'elle n'acquiert pas, qu'elle n'accumule pas à son travail, il faut les comptabiliser. La difficulté d'entrer sur le marché du travail, si elle attend que les enfants aient douze ans et qu'ils ne requièrent plus de services de garde, cela va lui coûter cher aussi non seulement pour l'aspect pécuniaire mais aussi pour le droit qu'on est censé lui accorder. C'est un droit qui est nié à ce moment-là si on dit: Restez à la maison jusqu'à ce que vos petits aient douze ans, cela coûtera moins cher à l'État et vous irez travailler après. Je trouve qu'on aborde le problème de façon bien détournée.

Mme Lavoie-Roux: D'après vous, cela devrait être une priorité du gouvernement de procéder dans les plus brefs délais à l'établissement d'un réseau universel.

Mme Boisvert: II me semble que cela fait déjà assez longtemps que la situation poireaute et qu'il n'y a rien de vraiment... Cela se fait tellement à petits pas. Le budget a été multiplié par sept mais ce sont sept petits pas alors qu'on en a tellement à reprendre qu'on ne peut pas attendre de faire cela à petits pas comme ça indéfiniment. On n'arrivera jamais à un niveau comparable à l'égalité et l'indépendance qui a été soulevé dans un rapport gouvernemental.

M. Lazure: Vous permettez une information? Mme Lavoie-Roux: Oui.

M. Lazure: Puisqu'on a parlé d'impôt, vous savez qu'il existe actuellement une déduction d'impôt qui va jusqu'à $2000 par année par enfant, qui peut aller jusqu'à $5000 pour la même femme adulte. Cela existe déjà et cela aussi a été augmenté; c'était $1000 et cela a été monté à $2000 par notre gouvernement.

Mme Boisvert: Les études démontrent que la classe moyenne, justement la classe à laquelle Mme Roux faisait allusion, est pénalisée par un système semblable. Cela coûte plus cher aux gens de classe moyenne, les déductions rapportent moins que si tu fais $30 000 alors que tes $2000 de déduction vont te rapporter pleinement à ce moment-là. Plus tu as de l'argent, plus tu vas pouvoir retirer toutes les déductions qui sont allouées par ce système-là. C'est pour cela qu'on ne préconise pas du tout le système de déduction. Il faudrait avoir un autre système qui serait peut-être un système de crédits.

Mme Lavoie-Roux: Ce que Mme Boisvert dit est démontré, je pense, dans le rapport du comité interministériel.

Mme Boisvert: Oui.

M. Lazure: C'est juste mais, d'autre part, si on continue le raisonnement, votre ménage à $30 000 et plus paie évidemment un pourcentage d'impôt pas mal plus élevé sur l'ensemble de ses impôts que le ménage à $16 000.

Mme Boisvert: Les frais encourus par le service de garde sont plus élevés aussi.

M. Lazure: Oui.

Mme Boisvert: Je pense que nous n'avons pas à démontrer cela; votre gouvernement l'a même analysé. (17 heures)

Mme Lavoie-Roux: II y a ce qui m'apparaît dans votre mémoire peut-être pas une contradiction absolue mais j'ai de la difficulté à concilier les deux. D'une part, vous mettez beaucoup l'accent sur le contrôle par les usagers des garderies quelles qu'elles soient, quelle qu'en soit la forme. Là-dessus, je suis d'accord avec vous et je dois vous dire que vos luttes, sur ce point, ont peut-être empêché — je veux bien admettre que c'est une hypothèse que je fais — que l'on rende, que l'on crée un système de garderies qui soit absolument public dans le même sens qu'on a créé un système d'éducation et que maintenant, on essaie de corriger, c'est-à-dire, une espèce de bureaucratie scolaire, et vos luttes font peut-être que le gouvernement est plus hésitant à procéder immédiatement avec un système de garderies complètement contrôlé par l'État. Vous dites à la page 12, vous insistez beaucoup sur ce contrôle par les usagers, vous dites comme c'est important la place des parents qui sont les mieux... Vous développez toute une argumentation là-dessus, comment ils sont les mieux placés pour faire ceci, faire cela, ainsi de suite. À la page 12, vous dites: Loin de vouloir sous-entendre que tous les enfants doivent être placés en service de garde dès leur plus jeune

âge, nous considérons toutefois que tous y tireraient avantage à des niveaux différents de développement.

Là, vous développez également toute une argumentation pour dire, finalement, moi, ce qui m'apparaît comme une préférence pour que tous les enfants passent par la garderie en faisant valoir, par exemple, que la mère est laissée dans un état d'isolement, enfin, peut-être que je ne cite pas d'après le texte. On se demande, à un moment donné... Je reste convaincue personnellement en tout cas, que si parfois des mères décident de rester avec leurs enfants à la maison, de jouer ce rôle d'éducatrices, je n'ai pas l'impression, en tout cas, jusqu'à l'âge de 4 ou 5 ans, je dirais même jusqu'à la première année scolaire dans bien des cas, que l'enfant s'en trouvera pénalisé. D'ailleurs, on a fait des études pour trouver des comparaisons entre le développement d'enfants qui étaient allés à la maternelle et ceux qui n'avaient pas eu l'année préscolaire, l'année avant la première année, et on n'a pas pu conclure dans un sens ou dans l'autre que les enfants avaient été nécessairement plus favorisés parce qu'ils étaient passés par une maternelle ou qu'ils n'y étaient pas passés. Je veux bien faire des nuances. Cela peut dépendre du milieu de provenance de l'enfant. Cela peut dépendre du stimulus, des stimulations qu'un enfant reçoit. J'ai l'impression qu'en page 12, vous ne l'avez peut-être pas voulu, mais indirectement vous diminuez un peu en tout cas ce qui m'apparaît encore un rôle qu'une mère qui est heureuse d'être éducatrice, qui peut le faire, qui est dans des circonstances où elle peut le faire, qui choisit de le faire, je ne suis pas sûre que son enfant y perde en ne s'en allant pas à la garderie même si là il rencontrera plus d'enfants que dans son milieu familial.

Mme Boisvert: II y a peut-être une erreur de compréhension dans le texte. On n'a jamais voulu dire que tous les enfants doivent être placés. On ne veut pas enrégimenter les enfants à compter de l'âge de six mois pour en faire tous des petits modèles semblables. Ce qu'on dit, c'est que les enfants... que la famille atomique qui est le modèle de la famille présentement, n'a souvent pas les moyens et les ressources de subvenir à tous les besoins de développement de l'enfant. On ne dit pas que tous les enfants doivent être là cinq jours par semaine, de 8 heures à 18 heures, mais la mère qui est seule à la maison avec son enfant vient peut-être à bout de ressources en ce qui concerne le développement de l'enfant, peut-être qu'à un moment donné elle aimerait cela deux journées par semaine ou une journée ou trois jours, ou cinq jours si elle a besoin de cinq jours, de le placer en garderie ou dans d'autres types de garde où elle serait assurée de la qualité du service. Elle aurait son mot à dire sur les valeurs à être transmises dans ce mode de garde pour le développement de son enfant. Jamais on a voulu dire que les enfants appartenaient à l'État et que c'était l'État qui devait les enrégimenter de la façon dont ils voulaient les voir plus tard.

Mme Lavoie-Roux: Ce n'est pas ce que j'ai dit que vous aviez dit, mais c'est parce que je trouvais qu'il y avait une espèce de contradiction entre, d'une part, votre argumentation pour l'utilisation des parents comme conseil d'administration et, d'autre part, la nécessité des enfants d'être en garderie comme condition presque sine qua non de leur développement.

Mme Boisvert: C'est de laisser l'accessibilité à tous ceux qui en font la demande. On se plaint que le taux de natalité va en décroissant. Peut-être que s'il y avait un peu plus de facilités, le taux de natalité irait en s'accroissant, plutôt qu'en décroissant. On y pense drôlement, avant de mettre des enfants au monde, quand on sait qu'on va ou bien payer $2500 par année ou $3000 par année pour le faire garder; il faut avoir les moyens; ou bien ne pas avoir d'enfant, parce qu'on n'a pas les moyens de s'en payer. On y pense, avant de mettre des enfants au monde. Il y a aussi les enfants qui sont placés dans des familles d'accueil. Si la garderie était universelle, peut-être ces parents-là pourraient-ils garder ces enfants avec eux, sachant qu'il y a une ressource sociale, dans le milieu, qui pourrait prendre les enfants, pour compenser un peu leur incapacité temporaire, si on veut, à prendre complètement les enfants à leur charge émotive et financière.

Mme Lavoie-Roux: II n'y a pas de questions précises que je voudrais vous demander. Ce sont des problèmes auxquels vous avez fait allusion, pas nécessairement, dans votre mémoire d'aujourd'hui, mais dans...

Mme Boisvert: Le budget global.

Mme Lavoie-Roux: Oui, dans votre étude budgétaire de toute façon et, au cours des différentes conférences de presse que vous avez faites. D'abord, est-ce que les deux dollars qui ont été annoncés, en conférence de presse, il y a quelques jours et dont le ministre a parlé en disant: "Voilà une rupture avec le plan Bacon". Dans les faits, c'est une rupture avec le plan Bacon, puisque c'est la première fois que vous recevrez directement ces deux dollars. Mais, est-ce que ceci répond vraiment aux attentes quant à la liberté de fonctionnement, à la planification et à l'organisation de vos garderies?

Mme Boisvert: Cela comble seulement l'argent qu'on doit aller chercher par différents moyens, soit par des bazars, soit par du temps où les travailleurs se mettent en chômage et viennent travailler à la garderie en retirant du gouvernement fédéral leur salaire et en faisant, parfois, combler leur salaire par la garderie. Cela comble les projets pilotes qu'on va continuer à aller chercher, et ce sera moins vital pour boucler le budget. Cela comble à peu près seulement cela. Il n'y aura pas d'amélioration dans la qualité du service. Les appareils qui se détériorent ne pourront pas plus être remplacés, le personnel ne

pourra pas être mieux payé pour autant, parce qu'il y aura deux dollars. Les garderies budgétisent toujours de façon assez serrée, de sorte que les prévisions amènent toujours des déficits. Il y a toujours des déficits prévus. Alors, là, les deux dollars par jour vont donner, pour une garderie de trente enfants, $15 000. C'est limitatif.

Mme Allaire: Puisqu'on parle de budget, j'aimerais faire un commentaire, à savoir que les garderies sans but lucratif ont toujours l'air de ne pas arriver, tandis que les garderies à but lucratif disent toujours: "Nous, nous arrivons avec l'argent qu'on nous donne". Et c'est très peu, apparemment. À ce moment-là, j'aimerais faire le commentaire suivant: pour répondre au nom du gouvernement, on doit avoir un ratio moniteur-enfants, qui corresponde en termes de valeur, à l'heure actuelle, avec ce qui est préconisé par les services de garderie, ce qui est préconisé, je dis bien, parce que cela n'a pas force de loi, là, un sept chez les petits et un dix, chez les plus vieux. Cela, c'est un ratio en fonctionnement. Ce n'est pas un ratio en comparaison avec la comparaison suivante: dans nos garderies, sans but lucratif, quand on compare notre ratio, on assure un temps, en présence, auprès des enfants, qui va en concordance avec le ratio demandé par le Service des garderies. On ne fait pas, comme dans plusieurs garderies à but lucratif, le calcul suivant: on ne prend pas le nombre d'enfants, divisé par dix, pour obtenir le nombre de moniteurs. On le calcule, nous, selon les heures de présence des enfants, selon les heures de présence des moniteurs, c'est très différent. Les garderies à but lucratif peuvent bien dire qu'elles arrivent et qu'elles ne demandent pas tant d'argent que cela au gouvernement et qu'elles peuvent s'en tirer avec les budgets qu'on leur donne.

Nous, si nous assurons une qualité minimale, en termes de présence d'adultes-enfants, il faut pouvoir les payer ces gens-là. De là, toute la différence. En proportion, en pourcentage, il y a au moins 80% de notre budget qui va en salaire à nos employés qui sont payés à peu près $4.20 l'heure, en moyenne. Calculez le pourcentage dans les garderies à but lucratif qui va au salaire et vous allez tout de suite voir la différence.

Mme Lavoie-Roux: Le ministre a beaucoup parlé de l'augmentation des budgets. Si on le laisse faire, cela va devenir du triomphalisme, parce que je l'entendais tout à l'heure dire que c'était dix fois ce qui était versé avant. Je vous ferai remarquer, M. le ministre, qu'en 1976/77 le budget n'était pas de $3 500 000, mais il était de $4 200 000. Vous avez six mois d'exercice de cette année budgétaire et vous n'avez dépensé que $3 500 000, — j'ai le journal des Débats ici, je peux vous le lire au complet — c'est pour ça qu'on se réfère toujours à $3 500 000, mais c'était $4 200 000. Il reste que ce n'est pas juste... pas que le ministre en mette de plus en plus.

Il est indéniable qu'il y a eu augmentation des budgets. Mais compte tenu du nombre de places qu'il y a maintenant en garderie, de l'augmentation, et compte tenu de l'inflation annuelle, est-ce que vraiment il y a plus d'argent qui arrive aux garderies pour s'occuper d'un enfant?

Mme Boisvert: Non, je pense qu'on y a répondu tout à l'heure en disant que les subventions d'aménagement annoncées pour démarrer une garderie sont louables, mais, pour les garderies existantes, il n'y a absolument rien. Le même petit régime de misère continue, la petite misère noire.

Mme Lavoie-Roux: D'une année à l'autre, on est passé de $6 à $8 à $9 et à $10, mais...

Mme Boisvert: Oui, mais les coûts ont augmenté aussi.

Mme Lavoie-Roux: Cela n'a pas couvert autre chose que la hausse des coûts.

Mme Boisvert: Absolument pas, on est toujours en deçà de ce que ça coûte; il faut toujours continuer à aller chercher de l'argent ailleurs.

M. Lazure: C'est absorbé en bonne partie par l'augmentation du nombre de places en garderie, il ne faut pas l'oublier.

Mme Lavoie-Roux: Oui, c'est ce que je dis, mais ce qui m'intéressait du point de vue de la qualité, c'est de savoir si pour un enfant X dans une garderie on reçoit davantage. C'est probablement pour ça qu'une grande partie a été absorbée par l'augmentation du nombre d'enfants et par l'augmentation du coût de la vie. Mais ce qui m'intéresse de savoir, c'est qu'on peut bien dire: On donne beaucoup plus, etc., mais du point de vue de la qualité du service qu'on peut donner et de l'argent qu'on met vraiment en disponibilité pour un enfant en garderie, est-ce qu'il y a augmentation? On me dit que non, on pourra y revenir au moment de l'étude article par article. Mais, étant donné que ces personnes sont ici, je croyais opportun de le leur demander.

Une autre question, c'est sur la fameuse mesure touchant les enfants handicapés. J'ai ouï-dire, vous pourrez me corriger, que ça n'avait pas vraiment répondu aux attentes que même le ministre avait. Je pense que la mesure en soi était louable, mais, dans la pratique, est-ce que ça permet vraiment une intégration significative de l'enfant handicapé ou est-ce qu'on ne peut pas parfois être porté à s'en servir pour boucler son budget, puisque ça paie un peu plus?

Mme Boisvert: C'est tentant de le faire parce qu'effectivement il y a des crédits qui ont été votés et qui peuvent améliorer un tant soit peu les conditions des garderies, mais il ne faudrait pas acheter les places pour les enfants handicapés, ce serait vraiment disgracieux et honteux de procéder ainsi pour financer une garderie en déficit.

M. Lazure: Je ne vois pas comment — ça fait partie des excès de langage encore une fois — on peut prétendre que c'est un encouragement à acheter des places avec des enfants handicapés. Ce n'est vraiment pas correct de dire ça. C'est un effort qui est honnête de notre part... plusieurs garderies le font et j'espère que vous allez intégrer de plus en plus un nombre raisonnable... 15%, ça veut dire sur 30 enfants dans une garderie quatre ou cinq enfants handicapés. Cela n'est pas acheter la survie des garderies.

Si on revient aux chiffres de tantôt, en 1976/1977 l'allocation maximale pour les parents était de $6 par jour; aujourd'hui elle est de $9 par jour. Donc, c'est une augmentation de 50% en trois ans, et ça c'est plus que l'augmentation du coût de la vie. Je m'excuse, mais on n'a plus les mêmes calculs si on parle d'augmentation du coût de la vie. 50% en trois ans, c'est beaucoup plus que le coût...

Mme Lavoie-Roux: De $6 à $9, ça ne fait pas 50%.

M. Lazure: Oui, $3 par rapport à $6, ça fait 50%.

Mme Lavoie-Roux: Oui, d'accord.

M. Lazure: Donc, au moment où on se parle, il y a eu 50% d'augmentation et, en avril 1980, il faudra ajouter à cela les $2 de plus. Alors, je n'accepte pas du tout l'opinion que les représentantes du regroupement expriment, à savoir qu'il n'y a rien de changé dans les revenus réels, ce n'est pas vrai!

Mme Boisvert: On pourrait vous montrer à tous nos états financiers. Ce n'est pas plus facile d'administrer une garderie en 1979-1980 que ça l'était en 1974.

M. Lazure: Que ce soit difficile, j'en suis, mais ne venez pas dire qu'il n'y a pas eu de progrès. (17 h 15)

Mme Boisvert: Le progrès a été mangé, je veux dire que les subventions additionnelles ont couvert seulement le fonctionnement. Que voulez-vous que je vous dise? C'est cela.

Mme Lavoie-Roux: Une dernière question sur la formation des moniteurs. Évidemment, il n'en est pas question nulle part dans le projet de loi. Je ne pense même pas que ce soit la responsabilité de l'office de s'en préoccuper, mais il faudrait que je le vérifie.

Mme Boisvert: C'est dans les devoirs.

Mme Lavoie-Roux: À tout événement, est-ce que, dans le moment, le ministère de l'Éducation prévoit suffisamment de ressources pour la formation des moniteurs de garderies ou s'il y a encore des besoins? Qu'en est-il de ce problème?

Mme Allaire: À l'heure actuelle, en termes de facilités, on forme les étudiantes en technique de garderie d'enfants. Pour ce qui est des moniteurs déjà en place dans les garderies, le service des garderies a tenté une certaine formation en cours d'emploi, mais qui n'est pas accessible à la grandeur du réseau actuel. Au niveau de la formation en cours d'emploi, je pense qu'il y aurait des efforts à entreprendre dans ce sens.

C'était une troisième question. J'ai trois commentaires que j'aimerais faire sur l'ensemble de ce qui a été dit ou reprendre simplement. J'aimerais parler des municipalités, des corporations municipales qui pourront s'octroyer un permis d'agence, faire une demande pour un permis d'agence. Quand on parlait des discussions qu'on pourrait prévoir entre un maire et ses conseillers sur la question du service à offrir en garderie, je pense qu'on a tous en tête un certain conseil municipal et à voir le fonctionnement pour trouver une raison à en redire là-dessus. Mais il y a aussi tout le patronage municipal qui pourra se faire auprès des électeurs. "Si tu es fine, je vais te donner ton permis d'agence. Tu pourras garder des petits chez toi." Je pense qu'il faut être conscient de cela, du patronage municipal qui pourra être fait avec l'octroi au niveau des agences.

Une autre chose, c'est quand on parle de la représentation de l'office.

Mme Lavoie-Roux: Vous devriez avoir honte, vous autres!

Mme Allaire: Si on parle de la représentation de l'office et si on demande des assises régionales, il faudrait peut-être penser à un système de représentation à l'office qui soit relié directement à la représentation régionale des gens du milieu. Autre chose, on parle de commission parlementaire sur un avant-projet. On nous a annoncé qu'il y aura peut-être une commission parlementaire à venir sur le projet de loi comme tel. On aimerait bien que ce ne soit pas nécessairement une commission parlementaire de courtoisie, mais qu'on ait vraiment le temps d'analyser de nouveau le projet de loi qui sera retravaillé, qu'on ne soit pas pris de court pour présenter un mémoire sur ce projet de loi, si commission parlementaire il y a.

M. Lazure: Bon, d'accord.

Mme Allaire: Je pose la question...

M. Lazure: Votre commentaire sur le rôle des municipalités est à propos. Pour ma part, je pense que c'est une formule qui serait utile et intéressante dans des petites municipalités. D'ailleurs, il y en a dans la région de Québec qui se sont déjà prévalu de leur possibilité d'intervenir, à Saint-Nicolas de Lévis, tout près d'ici. Dans une grande municipalité comme Montréal, je suis d'accord avec vous; c'est peut-être une chose qu'il faut éviter pour le moment, en tout cas.

Mme Allaire: Même dans les petites municipalités, encore plus!

M. Lazure: Bien, écoutez. Encore une fois, le conseil municipal, surtout dans une petite municipalité où les gens participent à l'élection, ne venez pas me dire que ce n'est pas démocratique. Ce sont quand même des gens qui sont élus, bon. Mais ce n'est qu'une des nombreuses formules possibles. Ce sera au milieu à décider, aux parents qui ont de jeunes enfants à faire garder, quelle sorte d'agence ils veulent avoir.

Mme Allaire: Personnellement, j'aurais un dernier commentaire qui porte peut-être sur votre première intervention, M. le ministre Lazure, en regard du Regroupement des garderies sans but lucratif du Québec. Vous avez très bien précisé que c'est lors d'une rencontre où vous nous aviez convoqués, l'ensemble des représentants des régions, que la décision de former un regroupement qui aurait une conjoncture provinciale a été prise. C'est vrai que vous avez aussi accordé des subventions mais ce qui est vrai aussi, c'est que les 70 garderies que nous représentons viennent de partout dans la province. Ce qui est aussi vrai, c'est que la région qui est la plus difficile, où on a le plus de travail à faire en termes de "membership", c'est la région de Montréal et pourquoi? C'est que les garderies ont toujours été tenues dans un état de pauvreté tellement apparente, on a tellement eu toujours à se débattre, il y a si peu de moyens d'assurer une permanence chez les employés, chez le personnel, que c'est un monde où les radicaux ont appris à s'infiltrer et à venir travailler fort pour faire passer la majorité de leurs revendications. Il est clair qu'un organisme comme le nôtre a de la difficulté à rallier les garderies, même les garderies sans but lucratif, parce que la plupart de ces garderies, au fil des années — si on regarde l'histoire des garderies — ont eu à se débattre dans des débats politiques avant même de penser à la qualité de vie des enfants en garderie.

Je pense qu'en quinze mois, le Regroupement des garderies sans but lucratif du Québec a fait ses preuves. Il a su rallier 70 garderies qui, autrefois, avaient des intérêts très divergents, des garderies qui n'avaient pas réussi, autrefois, à se rallier autour d'une chose. Je pense qu'au niveau des revendications et de la qualité des revendications que le regroupement avance, on ne doit pas parler et essayer de nous discriminer sur la base qu'on n'a pas rejoint les 300 garderies sans but lucratif du Québec. Il n'y a aucun organisme qui a essayé de rallier des garderies dans la province au niveau de l'histoire qui a réussi en si peu de temps à rallier 70 membres, membres-garderies en plus.

M. Lazure: Mais vous en aviez plus que cela au début. Il y en avait plus que cela au début.

Mme Allaire: On n'en avait pas plus que cela au début. On a commencé avec 25 garderies de la région 04 et de la région 6C. Pour des raisons très personnelles qui sont facilement identifiables, elles se sont dissociées. Elles ont le libre choix de le faire. Il reste que toutes les autres régions du Québec sont représentées à notre organisme et que dans l'ensemble, en termes de proportions, toutes les garderies de la Gaspésie sont membres. Les garderies du Saguenay-Lac Saint-Jean sont membres. Il y a des garderies dans l'Outaouais qui sont membres. La majorité des garderies de la région de Québec sont membres. Il y a une grosse proportion maintenant des garderies de Montréal qui sont membres. Je pense qu'on n'a plus à se justifier à ce point de vue.

M. Lazure: Je veux seulement exprimer le souhait que vous représentiez le plus tôt possible la majorité des 270 garderies à but non lucratif.

Mme Allaire: Laissez-leur le temps de nous reconnaître comme un organisme qui veut prôner la qualité des services.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: Merci, M. le Président. Comme vous n'avez pas été tendre pour l'Opposition tout à l'heure, au début, je pense qu'on peut se permettre aussi de vous rendre la semblable à l'occasion. À l'égard de vos prédécesseurs, vous avez manifesté qu'on vous avait fait perdre votre temps à attendre. Il faut bien conclure maintenant que cela fait deux heures et 20 minutes qu'on est avec vous et on a pris une heure quinze avec le premier groupe qui représentait quand même un organisme très valable, qui était Organismes familiaux associés du Québec. Je veux vous le dire parce que je dois avoir l'honnêteté de le faire.

Je ne suis pas ici pour ramasser des votes pour notre parti seulement et flatter tout le monde. Il y a des choses qui doivent se dire en commission parlementaire. Je n'accepte pas, comme membre de cette commission, de me faire faire des reproches parce qu'on veut questionner un organisme plus qu'un autre, de se faire dire qu'on a perdu notre temps. Je pense que les gens qui vont vous suivre maintenant auront la décence de dire qu'ils n'ont pas perdu leur temps parce que j'ai appris des choses de vous cet après-midi que je ne connaissais pas, honnêtement. Vous m'avez appris des choses et je pense que ce matin, je n'ai pas perdu mon temps et je n'ai pas l'impression non plus d'avoir fait perdre le temps de la commission en écoutant le premier organisme qui s'est présenté devant nous et qui avait d'excellents arguments.

Mme le député de L'Acadie a soulevé un argument à la page 12 et j'en avais soulignés; quand on parle le troisième, on ramasse ce qui reste à dire, mais j'ai l'habitude de cela — elle a signalé un quelque chose à la page 12, et je dois dire que cela se répète aux pages 11, 12, 13, 15 et 19 et je suis arrêté là. Cet argument-là, alors que vous dites que l'enfant qui est placé en famille de garde, placé en garde, c'est une priorité, c'est là

qu'il apprendra sa vraie socialisation. Moi, j'ai oeuvré. J'ai une famille. Je suis un père de famille et je considère que ce n'est pas la première priorité. Je pense que le père de famille, la mère de famille et les enfants, les frères et les soeurs sont la première cellule qu'on doit défendre et moi, comme député ici, c'est la première cellule que je vais défendre. Mme le député de L'Acadie vous a posé quelques questions. Je vous affirme que c'est la première cellule que je vais défendre et non pas la garde pour les enfants, d'abord la famille, et je vais faire en sorte que mes interventions contribuent à ce que le ministre donne davantage à la mère qui veut rester au foyer avec ses enfants. Il y a beaucoup de mères, vous savez, qui veulent rester au foyer avec leurs enfants. Il y en a un très grand nombre. Il ne faut pas les négliger, celles-là non plus.

À partir de là, je suis prêt, bien sûr, à accepter qu'on ait un plan de garderies sans but lucratif, mais je suis prêt aussi à ce qu'on continue de subventionner les garderies à but lucratif parce que pour moi, ce n'est pas onéreux. Il n'y a pas de connotation onéreuse à avoir des garderies à but lucratif et quand j'entends le ministre dire: II reste encore — j'espère que c'est un mot qui lui a échappé — 80 garderies, j'espère que son intention va changer et que ce sera autre chose que cela qu'il nous dira un peu plus tard et que ce sera dans d'autres secteurs aussi, pas seulement dans les garderies. Il y a quand même une limite aussi à vouloir tout donner à l'État, tout faire faire par l'État. En tout cas, pour un point bien précis, une mère de famille qui décide d'élever ses enfants — bien sûr, on l'a signalé tout à l'heure — n'a peut-être pas la formation de trois années de cégep dans tous les cas, mais elle a quand même cette psychologie qu'on ne peut pas enlever à une mère de famille. Je les défendrai tout le temps ici et je dirai toujours que c'est la première chose qu'on doit défendre ici comme député. Je pense bien qu'il n'y a pas beaucoup de députés qui vont dire le contraire de moi ici à cette table. Il n'y en aura pas un, même. Je peux vous le dire. Pas un seul ne viendra contredire cette assertion.

Que ce soient des personnes dans des garderies à but lucratif, que ce soient des médecins qui font adopter des "castonguettes" ou des "lazurettes", que ce soient des dentistes qui le fassent ou que ce soient des personnes d'autres secteurs de la société, que ce soient vous autres, par exemple, des groupes sans but lucratif qui retirez des salaires de garderies subventionnées, rien de cela ne me scandalise. Je ne suis pas scandalisé par cela. Je trouve que notre société ne doit pas être copiée sur une autre société qui n'est peut-être pas plus heureuse. J'en ai vu des pays, j'en ai visité des pays où c'était l'État qui se chargeait uniquement des garderies, bien sûr, sans but lucratif. C'était à Berlin-Est. Cela allait très bien, cela avait l'air d'aller très bien. Il y avait certains mécontentements qu'on n'a pas pu découvrir parce qu'on n'avait pas le droit de parler à tout le monde. Je peux vous dire que ce n'était pas l'idéal non plus; je peux vous dire cela.

Je défendrai un système qui est différent d'ailleurs. Je défendrai le système au Québec qui doit être différent d'ailleurs. Des deux côtés de la table, si on veut que le Québec soit différent d'un autre pays ou d'une autre province, si vous voulez — je veux qu'il soit absolument différent et vous aussi êtes de cet avis, à savoir qu'il soit différent — il faut garder nos différences. Il y a là une différence qui s'appelle le secteur privé des garderies. Il faut le défendre. Il faut que vous nous aidiez à le défendre aussi si vous voulez qu'on soit différent des autres, si vous ne voulez pas qu'on s'assimile à d'autres communautés. Alors, il faut avoir l'appui de tout le monde, de l'Opposition, du gouvernement et de vous autres aussi. Dans un communiqué comme le vôtre - je lisais celui-là — cela revient à chacune des pages. Évidemment, si on se rend compte que l'atmosphère n'est pas trop propice, on dit: Non, ce n'est pas exactement cela, etc. Mais à chacune des pages, les pages 11, 12, 13, 15 et 19 — je me suis arrêté là — il est dit que l'enfant doit passer par une garderie si on veut qu'il soit vraiment un enfant qui ait toutes les connaissances de socialisation et d'adaptation à la société. On peut en être, mais on peut aussi ne pas partager...

Remarquez que je respecte votre opinion. Je ne la partage pas, par exemple, mais je la respecte. J'ai appris cela en commission et j'ai appris beaucoup de choses cet après-midi. Il est bon que des groupes comme le vôtre viennent se faire entendre. Ce n'est pas la première fois qu'on entend des gens qui viennent contredire une loi et qui viennent essayer de l'améliorer. Il y a de la place pour beaucoup d'améliorations. Je ne voudrais pas que la loi ressemble uniquement à ce que vous proposez parce que je me sentirais beaucoup moins Québécois si c'était le cas. Je m'assimilerais à d'autres pays pour lesquels je n'ai rien envisagé et dont je n'ai rien à emprunter non plus.

Cela dit, vous avez fait une comparaison avec des chiffres de l'Ontario. Vous avez de bons renseignements, je pense. Cela me semblait tout à fait correct ce que vous aviez. En comparant avec l'Ontario, et vous le savez sans aucun doute, est-ce que le nombre d'enfants en garderies sans but lucratif ou en garderies privées est aussi important que le nôtre ou moins important? Honnêtement, je ne le sais pas.

Mme Boisvert: Malheureusement, je ne peux pas répondre.

M. Grenier: On se compare avec l'Ontario. On a signalé tout à l'heure les autres provinces. Ici, autour de la table, des comparaisons, ne vous vous en faites pas, vous savez que vous êtes dans le ton. C'est toujours avec l'Ontario qu'on se compare et votre dossier est tout à fait à point, à ce moment-là.

Mme Bourgon-Paré (Louise): Non, malheureusement. Je pense qu'il faudrait peut-être commencer par préciser qu'actuellement toutes les

garderies sont des garderies privées, qu'elles soient à but lucratif ou non. Quand on propose des garderies sans but lucratif, ce ne sont pas des garderies publiques. Ce sont encore des garderies privées...

M. Grenier: Oui, d'accord.

Mme Bourgon-Paré: ... contrôlées par une corporation qui est une corporation autonome privée et qui est contrôlée par des parents, majoritairement usagers de la garderie. Il peut y avoir aussi d'autres membres à l'intérieur du conseil d'administration.

M. Grenier: D'accord.

Mme Bourgon-Paré: Mais ce ne sont pas des garderies publiques.

M. Grenier: Non.

Mme Bourgon-Paré: La seule chose, c'est que ces garderies, même si elles sont privées, ne le font pas dans un intérêt d'amasser des profits, mais le font dans un intérêt autre qui est celui d'offrir des services de qualité aux enfants que l'on dessert.

M. Grenier: Oui, d'accord. J'ai compris ce que vous dites depuis ce matin.

Mme Bourgon-Paré: C'est parce que...

M. Grenier: J'ai compris cela et je comprends aussi qu'il y a des garderies privées qui font cela aussi pour rendre service. Ce n'est pas uniquement... Elles gagnent leur vie tout simplement là-dedans. Ce ne sont pas des gens qui entassent des magots. J'en ai visité et je vais en visiter d'autres. Elles le font et c'est ce qui fait la couleur du Québec. Je voudrais qu'on considère mes... Mais ma question portait sur l'Ontario principalement. Si vous aviez des détails à nous donner là-dessus, sur le nombre d'enfants en garderies...

Mme Boisvert: Non, on n'a pas...

M. Grenier: ... subventionnées ou pas.

Mme Boisvert: ... de proportion...

M. Grenier: Vous n'en avez pas.

Mme Boisvert: ... de chiffres qui démontreraient la proportion des enfants en Ontario qui fréquentent des garderies privées ou des garderies à but lucratif ou sans but lucratif.

M. Grenier: Vous n'avez pas de chiffres.

Mme Boisvert: C'est sûrement trouvable. Peut-être qu'on les a au centre de documentation.

M. Grenier: D'accord. On pourra le demander au ministre. Il devrait nous le donner. J'ai également une question à vous poser. Alors que vous dites que dans les garderies à but lucratif, que vous appelez et qui s'appellent de cette façon, on parle d'incorporer des personnes, des parents, par exemple, dans l'administration. C'est une suggestion que vous avez faite, je pense. Si ce n'est pas dans votre dossier, je pense que vous l'avez signalé tout à l'heure en discutant avec le ministre. C'est une espèce de cogestion, je pense. C'est à peu près cela que vous proposez. (17 h 30)

Mme Boisvert: C'est ce qui existe présentement.

M. Grenier: Ne trouvez-vous pas que les formules coopératives qui sont introduites ici par la loi répondent un peu à cette question? Est-ce qu'on ne devrait pas avoir ce champ d'activités privé d'un côté, des formules coopératives qui sont préconisées, qui sont cette cogestion que vous retrouvez pas mal dans ce que vous proposez et, ensuite, ces garderies à but non lucratif?

Mme Boisvert: Je pense que quand on parle de garderies, le premier thème à retenir est la qualité des services offerts aux enfants. Dans une garderie sans but lucratif, il y a juste cela qui peut subsister comme intérêt parce qu'il n'y a pas de redivision de profits ou il n'y a pas de grossissement de salaires des propriétaires, cela n'existe pas.

M. Grenier: II y a grossissement quand même du salaire des personnes qui sont là. Cela se fait. J'étais dans les affaires sociales aussi; j'étais dans ceci et...

Mme Boisvert: Cela se fait pour l'ensemble des travailleurs mais, présentement, quand on considère le salaire qui est offert, on ne peut pas déplorer cette situation. Au contraire, il faudrait se réjouir que les corporations...

M. Grenier: Est-ce que vous me diriez, par exemple, qu'il pourrait y avoir, en plus du secteur privé que nous connaissons, le secteur sans but lucratif et le secteur coopératif, une autre formule de cogestion et si vous voulez que cette cogestion soit incorporée au niveau du secteur privé?

Mme Boisvert: Elle se fait présentement au niveau du secteur privé sans but lucratif, la cogestion.

M. Grenier: D'accord mais — je m'excuse — dans le secteur privé à but lucratif?

Mme Boisvert: On ne trouve pas que le thème principal de fonctionnement d'une garderie à but lucratif nous permette même de viser cette cogestion. Les intérêts sont peut-être trop différents pour essayer même de viser la cogestion dans les entreprises à but lucratif.

M. Grenier: Le ministre parlait de 270. Dans les 70 — parce que vous êtes quand même une association qui est importante — si vous avez 70 garderies, c'est quand même un chiffre important cela représente combien d'enfants comme moyenne?

Mme Boisvert: On peut mettre une moyenne de 45 enfants par garderie parce qu'il y en a des plus grosses et des plus petites.

M. Grenier: Elles sont implantées, vous dites, à la grandeur du Québec. Je viens de l'Estrie; est-ce que vous y avez des garderies? Vous ne l'avez pas mentionné tout à l'heure quand vous avez mentionné les régions.

Mme Boisvert: Dans l'Estrie, toutes les garderies sont membres du regroupement.

M. Grenier: Vous en avez combien dans l'Estrie?

Mme Boisvert: II y a quinze garderies et il y a quelques projets qui sont en voie de réalisation.

M. Grenier: Principalement dans la région de Sherbrooke, dans la région de la ville?

Mme Boisvert: Oui, il y en a à La Patrie, à Coaticook.

M. Grenier: À La Patrie, c'est une garderie dans votre association?

Mme Boisvert: Oui.

Une voix: C'est la patrie du député.

M. Grenier: Oui, c'est une belle patrie. Vous la visiterez.

M. Lazure: Le temps avance. Une voix: Sauf le député.

M. Grenier: Ah non, il va bien lui aussi et il est bien apprécié; je peux vous dire cela. Il y aurait certainement d'autres sujets... Si c'était possible qu'on ait l'occasion de se rencontrer pour jaser d'autres sujets qui m'intéresseraient parce qu'il y a d'autres secteurs ici que j'aurais voulu aborder. On n'a pas le temps à cette commission mais si c'était possible qu'on puisse rencontrer votre groupe parce qu'il m'a été donné de le faire avec d'autres groupes et je peux vous dire qu'il y a des choses à apprendre considérablement et cela me fera plaisir.

Mme Boisvert: Avant de terminer, je voudrais juste faire une rectification. Ce n'est pas dans le but de le faire inscrire au journal des Débats, c'est juste par honnêteté pour le groupe qui nous a précédé. Quand on a fait allusion à la perte de temps qui a été encourue ce matin, ce n'était pas du tout — jamais cela nous a passé par la tête — par rapport au groupe qui s'était présenté. C'était plutôt par rapport aux lenteurs de procédure. C'est une rectification qui s'imposait.

M. Grenier: Vous êtes chanceuse, c'est une des premières fois qu'il y en a si peu.

Mme Lavoie-Roux: II n'y en a pas eu, en fait.

Le Président (M. Boucher): Le député de Portneuf, vous désirez intervenir? Il faudra que je demande la permission de la commission.

M. Pagé: Je voulais tout simplement savoir quelles procédures il y a eu aujourd'hui.

M. Lazure: M. le Président, le député de Mégantic-Compton demandait un renseignement sur ce qui se passait en Ontario. Il y a exactement 50% des places qui sont à but lucratif et 50% à but non lucratif.

Mme Lavoie-Roux: Combien d'enfants sont inscrits?

M. Grenier: Combien d'enfants?

M. Lazure: Tout près de 50 000 enfants inscrits. Nous sommes loin en arrière. C'est ce qu'on dit ensemble, vous et moi, depuis trois ans.

Mme Lavoie-Roux: Ils ont 2 millions de population de plus, par contre.

M. Lazure: II faut tenir compte de presque 2 500 000 de plus qu'ici mais, même proportion gardée de la population, on est en arrière d'eux. Il n'y a pas de doute là-dessus. On est en arrière de I'Alberta aussi en nombre de places en garderie. Je vous remercie du travail que vous faites et continuez, vous nous aidez.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Sherbrooke, sur cette question.

M. Gosselin: Seulement une note en terminant. Je suis impressionné par l'expérience riche du Regroupement des garderies, une expérience qui sera signée dans plusieurs années de combats et dans des rôles de représentation publique qui les ont mis souvent en évidence et par lesquels ils ont pu étoffer leur philosophie des choses. En même temps, à travers les deux mémoires consécutifs qu'on vient d'entendre, je ne puis que constater la rupture quant aux options fondamentales sur l'installation des services de garde entre deux traditions qui existent au Québec. Vous en amenez une qui est importante et qui aurait mérité d'être développée bien avant ça au Québec, qui est née tardivement et qui, par l'intensité de l'expérience qu'elle vous apporte, vous amène peut-être une forme d'exclusivité quant aux vues d'avenir. Moi, je pense qu'on ne peut pas actuellement penser ouvrir et élargir une accessibilité

universelle uniquement à travers le modèle qu'est le vôtre. Vous semblez, actuellement, en tout cas, dans votre discours et je le mets sur le compte de l'expérience que vous vivez dans ce type de garderie... Ce que je peux dire, c'est que je n'accepte pas certains vocabulaires non plus que vous employez quand vous parlez des garderies privées et cela peut sembler un peu étonnant qu'un député du parti ministériel défende les garderies privées — oui, à but lucratif, d'accord — simplement pour dire qu'il y a aussi de ces garderies privées à but lucratif qui sont proprement tenues et pour lesquelles les gens qui y travaillent font du bon travail.

D'accord? Cela me semble important aussi et je n'accepterais pas qu'on endosse trop simplement la disparition pure et simple des garderies privées y compris quant au fait qu'on permette à de nouvelles de naître. Cela me semble important. C'est un parti ouvert justement. Ce sont mes convictions personnelles.

Mme Lavoie-Roux: On verra le vote à la fin.

M. Grenier: Arrêtez, vous allez en perdre d'autres.

M. Gosselin: Quant aux services de garde, là je n'endosse vraiment pas votre point de vue là-dessus, au type de réglementation auquel vous voulez nous amener par vos propositions comme si le choix des Québécois à ce moment-ci qui font garder leurs enfants par la belle-mère, par la voisine, par les gens du voisinage, n'étaient pas déjà sains et ne faisaient pas déjà une large discrimination quant à la qualité des ressources qui existent. J'avoue que de ce côté, je comprends mal votre philosophie. Je pense qu'on risquerait d'embarquer dans un système qui tuerait bientôt toute forme de dynamisme et d'originalité si on s'appliquait trop à uniformiser absolument, à régulariser absolument, à normaliser à tout prix toutes les formes de garde existantes.

Mme Boisvert: Quand on parle de garderies, peut-être que le député M. Gosselin a compris qu'on parlait uniquement des garderies du regroupement. Quand on parle de garderies dans notre langage, il faut comprendre mini-garderies, haltes-garderies, garderies postscolaires, parascolaires, garderies pour les moins de deux ans, en fait, tout cela, on voudrait que ce soit régi par une même loi, qu'il n'y en ait pas un petit brin qui dépende du ministère de l'Éducation, un autre petit brin qui dépende d'une agence. Depuis cinq ans, on demande qu'il y ait une régie autonome, qu'il y ait un office, qu'il y ait une tête à cela et dans la loi, on ne voit pas une seule tête. Il y a trois petites têtes qui se dessinent. On voudrait une seule tête et dans ce sens, quand on demande qu'il y ait un même statut pour tout le monde, c'est pour que justement cela relève d'une seule tête, tout le temps, et que celui qui sera à l'office, que l'office pourra voir à réglementer tout cela sinon les garderies... On veut abolir les garderies clandes- tines, le ministre lui-même veut le faire. Toutefois, il va se créer toutes sortes de petits réseaux parallèles. Le petit réseau parallèle parascolaire, le petit réseau garde en milieu familial. On en a contre la garde en milieu familial telle qu'elle est présentée. Tout ce qu'on demande, qu'on l'appelle mini-garderie nous autres, cela va possiblement se passer dans les mêmes locaux de la dame rurale ou semi-rurale, c'est avec le même monde, avec la même dame. On ne demande pas d'aller suivre un cours de trois ans au cégep, mais on demande que les parents aient le contrôle sur ce qui se passe dans cette mini-garderie s'il y a moins de dix enfants, ou moins de cinq enfants que les parents aient un droit de décision sur ce qui va se passer là-dedans. À ce même titre, que ce ne soit pas sa propriété privée, sa petite mini-garderie ou sa petite garde en milieu familial. Qu'elle soit l'employée d'une succursale régionale de l'office, qui serait la tête qu'on demande, finalement.

M. Gosselin: Je ne suis pas nécessairement d'accord avec votre conception des choses.

Le Président (M. Boucher): Merci. M. le député de Beauharnois.

M. Lavigne: Je serai bref. Cela me fait plaisir d'avoir pris connaissance de votre mémoire. Comme mon prédécesseur, M. Gosselin, le député de Sherbrooke, le disait, je pense que c'est le fait que vous ayez travaillé dans le milieu et que vous vous soyez battues depuis déjà longtemps que vous êtes parvenues à pondre un mémoire aussi étoffé. J'endosse aussi les propos du ministre, lorsque tout à l'heure il disait que vous le faites avec un verbe assez radical, mais chacun peut avoir ses écarts de langage et ses façons de dire les choses. L'important, c'est d'être capable de lire à travers vos revendications ce qui est nécessaire ou ce qui est essentiel pour le mieux-être des jeunes Québécois ou Québécoises qui vont être en garderie.

Je me dis que ce que vous préconisez... ce n'est pas facile quand on est au gouvernement d'entendre des groupes comme le vôtre et d'autres dans le sens suivant, c'est que nous regardons la situation au moment où on arrive. On sait que le réseau des garderies au moment où on est arrivé faisait vraiment pitié, c'était pitoyable...

Mme Lavoie-Roux: Et vous...

M. Lavigne: Peu importe, en attendant on est là et on fait notre gros possible. Je pense qu'on va laisser notre trace, même si on vient à partir. On aura une trace intéressante à laisser, en plus, Mme la députée.

Ce que je veux dire, c'est que, quand on examine le mémoire qui a été présenté juste avant le vôtre, le mémoire des Organismes familiaux et associés du Québec, qui, essentiellement — Mme Laporte le disait ce matin — préconise avant tout... l'essence même de ce mémoire porte sur la garde de l'enfant chez la voisine, la belle-mère, la soeur ou l'amie. C'est cela, l'essentiel de ce qu'il

est venu nous dire. Nous sommes ici, nous écoutons, nous sommes attentifs. Vous venez nous dire à peu près presque l'inverse. Vous n'êtes pas carrément contre cela, mais vous voulez beaucoup plus institutionnaliser le réseau des garderies. Nous sommes réceptifs aux deux groupes et il va venir d'autres groupes tout à l'heure. Ce qu'il est important de comprendre pour tous les groupes qui passeront devant nous, c'est de voir la situation passée, la situation présente même, avec l'augmentation des fonds qu'on a mis, même si ce n'est pas encore idéal. J'entendais discuter de la question des $22 millions plutôt que des $3,5 millions ou des $4 millions qu'il y avait au moment où on est arrivé. Maintenant, entre ce qui serait l'idéal, entre ce qu'il y avait et ce qu'il y a aujourd'hui, je pense qu'il y a quand même eu un effort de fait. On présente un avant-projet de loi sur le réseau des garderies, et je pense que ce qu'il faut retenir là-dedans, c'est la volonté du gouvernement de ne pas maintenir le statu quo. On veut faire un pas en avant. On a besoin de tous les groupes qui s'occupent des garderies pour venir nous donner des conseils, venir nous faire part de leur expérience et je pense qu'on est bien ouvert là-dessus. Je suis sûr que parmi les mémoires qui vont nous être présentés, on retiendra des choses. Il y a des choses qui sont intéressantes dans le vôtre. Maintenant, de là à dire que tous les gens qui vont avoir à oeuvrer dans le domaine... quand vous parlez de la qualité qu'on doit avoir dans un réseau de garderies, j'en suis. Je pense qu'il n'est pas question d'envoyer des enfants n'importe où, n'importe comment et à n'importe qui. Mais de là à institutionnaliser cela de façon que tous les gens qui vont avoir à garder un enfant aient suivi un cours extraordinaire, de là à ce que cela coûte encore des fortunes, je pense qu'il y a une distinction à faire. C'est important.

Je suis aussi sceptique quant à l'approche de l'avant-projet de loi face aux conseils municipaux. Nous, comme gouvernement, nous essayons d'avoir une unité de pensée. Quand on regarde ce qu'on voudrait donner, dans l'avant-projet de loi, comme pouvoirs aux municipalités en ce qui a trait au réseau de garderies, on essaie de décentraliser les services et de donner aux hommes et aux femmes du Québec des responsabilités sur leur terrain. Il est bien sûr que quand on regarde dans le passé tout ce qui a pu se passer au niveau du patronage, que vous mentionniez tout à l'heure, vous êtes sceptiques et on peut peut-être être sceptique aussi. Mais dans d'autres projets de loi que le gouvernement du Québec actuel a adoptés sur le plan de la décentralisation et les pouvoirs accrus qu'on a donnés aux municipalités, en essayant de faire comprendre aux citoyens du Québec qu'un gouvernement municipal, c'est un gouvernement important qui va avoir, d'année en année, de plus en plus de responsabilités, je pense que ça fait essentiellement partie de la responsabilité des Québécois de se donner des gouvernements municipaux et provinciaux à la hauteur de leurs besoins. (17 h 45)

Si vous avez des gouvernements municipaux qui s'adonnent encore à du petit patronage, il va falloir que les gens se réveillent et qu'ils élisent des gouvernements municipaux plus honnêtes, plus sérieux qui vont répondre à leurs aspirations.

Vous allez peut-être me dire que c'est utopique, mais si on met des balises assez sévères et qu'on tient tout le monde dans le statu quo de peur d'avancer sur le plan démocratique, je me dis: Que fait on? On a seulement à se mettre des barrières, des balises et à ne pas bouger.

Je dis que le conseil municipal aurait un rôle à jouer dans le service de garderie en autant bien sûr qu'il va bien jouer son rôle.

C'étaient les quelques remarques que j'avais à faire. Je trouve que ce n'est quand même pas facile de faire le point et de trancher entre tous les gens qui vont venir nous porter des mémoires. On n'en a vu que deux depuis ce matin et il y a des distinctions majeures entre les deux. Nous, on est au centre et on va devoir dire, à la fin: On va prendre telle ou telle orientation. L'avant-projet de loi, c'est un avant-projet de loi; il sera sûrement modifié et amélioré et c'est grâce à des gens comme vous s'il y a des améliorations qui y sont apportées. Je vous remercie, c'étaient les quelques commentaires que je voulais apporter.

Mme Allaire: Puis-je répondre aux commentaires, mais de façon très brève?

Le Président (M. Boucher): S'il vous plaît!

Mme Allaire: Si on fait la distinction entre le groupe qui est passé ce matin et nous, vous y voyez une très grande distinction du fait que le groupe de ce matin rappelle que toute femme, toute famille doit pouvoir avoir accès à des subventions en termes de pouvoir s'assurer des services de garde à tout moment de la journée. Je pense que ce n'est pas vrai de dire qu'on ne se rejoint pas à un certain moment.

Quand on parle de garderies de 24 heures, ou de mini-garderies, ou de tout autre service de garde en assurant une universalité et une accessibilité, on peut parfois se rejoindre. Je ne crois pas qu'on soient si éloignés l'un de l'autre comme groupes.

Premièrement, on n'a jamais, mais jamais nié la qualité de la femme, de la grand-mère, de la tente, de l'oncle ou de l'ami pour garder des enfants. Tout ce qu'on demande c'est que la structure qui sera imposée par cette loi prévoie des modalités de contrôle et de supervision ainsi que l'assurance d'une qualité minimale dans tous ces types de services; ce qu'elle ne nous donne pas, à l'heure actuelle, comme garantie.

M. Lazure: M. le Président, là-dessus, s'il vous plaît? Dans l'article 72, l'office peut faire des règlements pour toute une série d'activités en particulier l'article 72, paragraphe 6, "établir les normes d'hygiène, de salubrité et de sécurité qui doivent être respectées dans les locaux où sont fournis des services de garde en garderie, en milieu familial ou en halte-garderie."

Si vous continuez, au paragraphe 7, "déterminer les éléments du programme d'activités qu'un service de garde en garderie ou en milieu familial doit fournir aux enfants afin de favoriser leur développement physique, intellectuel et social."

Dans notre esprit — et si ce n'est pas assez clair, on va le rendre plus clair — ce que vous demandez, nous partageons votre avis là-dessus. Nous pensons que l'office des services de garde à l'enfance devrait avoir non seulement pouvoir de réglementation sur l'ensemble de tout ce qui sera service de garde mais aussi une juridiction très réelle. Là-dessus, on n'a pas de chicane.

Mme Bourgon-Paré: Je pense qu'on paraît peut-être un peu comme l'avocat du diable mais c'est un peu notre rôle en temps que chien de garde, dans le sens que vous avez peut-être de bonnes intentions à l'intérieur des réglementations que vous voulez mettre sur pied mais il n'y a rien qui nous assure, dans la loi, que cette réglementation ne pourra pas être changée à l'inverse des intentions du gouvernement actuel. On ne peut que présumer de vos intentions parce qu'elles ne sont pas clairement définies et clairement inscrites dans la loi.

M. Lazure: Lisez l'article 72 comme il faut, c'est clair.

Mme Bourgon-Paré: C'est clair que vous avez des pouvoirs pour le faire, que vous allez en faire. Mais jusqu'à quel point cela va-t-il aller et jusqu'à quel point le contrôle sera-t-il exercé pour aller voir ce qui se passe effectivement dans les familles de garde? Ce ne sera pas à l'office de le faire; ce sera à l'agence de vérifier si les normes prescrites par règlement seront effectivement mises de l'avant par les familles de garde.

Mme Allaire: À l'heure actuelle, l'agence n'a pas ces ressources, en termes de disponibilité. Si on compte seulement le fameux $1 que vous leur accordez dans le projet que vous avez mis de l'avant, est-ce qu'on peut compter pour une agence, par exemple, qui va placer 50 enfants, à $50 par jour, après avoir payé une secrétaire pour administrer tout cela, s'être payé une dactylo et un téléphone, qu'est-ce qu'il va lui rester?

M. Lazure: Justement, on veut prendre des organismes qui existent déjà de préférence, au moins pour la partie cléricale, pour faire en sorte qu'on ne soit pas obligé d'engager du nouveau personnel clérical.

Mme Bourgon-Paré: À ce moment-là, on se demande, entre autres, comment une municipalité va libérer du personnel pour aller vérifier la qualité des services offerts dans les familles, comment une commission scolaire va aller vérifier la qualité du service offert dans les familles, comment un CSS va le faire.

M. Lazure: Encore une fois, la seule réponse que j'ai à cela, c'est que les parents, dans une région donnée, une ville donnée, un quartier donné, un village donné, qui ont des enfants à faire garder, ce sont eux et elles qui décideront quelle sorte d'agence ils vont utiliser. Le texte de loi prévoit une grande ouverture à ce chapitre et vous avez tout un choix soit sur le conseil municipal ou un organisme à but non lucratif, ou même une garderie qui est déjà en place.

Mme Bourgon-Paré: À cela, M. le ministre, on ne peut que vous répondre que les parents insatisfaits n'auront le choix que de s'en aller ailleurs mais la place sera toujours vacante et étant donné le grand besoin de places en service de garde, cette place sera comblée peut-être pour une période très courte par un autre enfant qui aura à subir les mêmes affres que le précédent.

Mme Allaire: Si vous ne trouvez pas d'objection, pourquoi est-ce que... vous devriez mettre dans la loi, dans la volonté, dans les paragraphes du début, pourquoi cette loi est conçue. Si c'est pour assurer une qualité, pourquoi n'est-ce pas là? Si c'est laissé à un pouvoir de réglementation, cela ne nous assure pas que ce ne sera pas interprété, parce que cela peut facilement être interprété.

M. Lazure: Non. L'énoncé des principes et des objectifs, j'ai dit tantôt que je le retenais. On peut envisager de l'inclure dans la loi. Il n'est pas coutumier d'inclure cela dans une loi, mais cela peut se faire.

Mme Allaire: On parle d'énoncé, mais encore là, ce n'est pas une garantie pour nous de 100%. La seule garantie qui serait de 100%, ce serait de voir les articles de la loi où les principes qui sous-tendent la politique sont clairement définis. On ne veut pas envisager que du jour au lendemain votre gouvernement partira ou même des intentions présumées d'un autre gouvernement. Cela fait 100 ans qu'on se bat. Vous avez parlé vous autres mêmes des $0.25. On est peut-être tanné de se battre. On veut peut-être que la seule possibilité qu'on a aujourd'hui avec une loi qui va enfin réglementer les garderies réponde définitivement à nos attentes. On ne peut pas espérer que dans dix ans, on révisera la loi. Vous savez comme moiqu'une loi se révise aux 100 ans, et encore. La place à la réglementation est trop grande dans cette loi et vous devez nous indiquer clairement les politiques qui sous-tendent par voie d'articles dans la loi. J'aimerais ramener une chose au niveau des politiques municipales, la fameuse question des municipalités...

M. Lazure: Vous pourrez nous faire des suggestions concrètes là-dessus!

Mme Allaire: Vous parlez de quoi, là? De l'ensemble de tout cela? Je pense que le mémoire en parle comme tel.

M. Lazure: Non, non. D'articles. Vous parlez d'articles qui expliciteraient la philosophie de la loi.

Mme Allaire: Mais il y a beaucoup de choses où on parle de pouvoirs et où on pourrait parler de devoirs, entre autres. Il y a une très grande différence.

M. Lazure: Oui, d'accord.

Mme Allaire: En tout cas, on pourrait en parler longtemps, mais si on revient aux municipalités, le contrôle aux usagers qui est, à notre sens, la seule garantie qui fait que le parent en ayant le pouvoir décisionnel pourra s'assurer de la qualité de services. C'est là la solution à vos problèmes. Trouvez une structure où le contrôle aux usagers sera garanti et peut-être pourra-t-on parler le même langage.

Mme Boisvert: On s'entendra peut-être sur le projet de loi, si on ne s'entend pas sur l'avant-projet de loi, si vous ajoutez tout cela.

Mme Lavoie-Roux: Le projet de loi dans les notes explicatives, c'est simplement une structure qu'on met en place. Il n'y a aucune politique de définie. Là-dessus, je comprends leur inquiétude.

M. Lazure: La politique a été définie en bonne partie par le rapport du comité interministériel que le gouvernement s'est engagé à réaliser dans la mesure du possible.

Mme Allaire: II n'y a pas de référence officielle à cela dans la loi. Ce n'est pas écrit.

M. Lazure: On commence le début d'une longue série de discussions et j'espère que cette longue série de discussions va nous permettre d'adopter vers le 15 ou le 20 décembre 1979, avant l'ajournement des Fêtes, un projet de loi avec lequel vous serez d'accord. J'ai confiance qu'on va y arriver, ici.

Mme Lavoie-Roux: Si je peux exprimer un voeu, j'espère qu'on le débattra avant le 16 décembre.

Mme Boisvert: Votre expérience dans la lutte des garderies...

Le Président (M. Boucher): M. le député de Rosemont, il ne reste que cinq minutes.

M. Grenier: Exprimez-vous le voeu qu'on entende le député de Rosemont avant la fin? On a cinq minutes...

Mme Boisvert: ... les garderies.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Rosemont, il ne reste que cinq minutes.

M. Grenier: II ne faudrait pas être privés de son intervention puisque je sais que cela sera collé à la réalité. Il a l'habitude.

M. Paquette: Je ne répondrai pas à celle du député de Mégantic-Compton; cela prendrait une demi-heure. Il y avait tellement de substance là-dedans et tellement d'affirmations qui mériteraient d'être commentées, mais...

M. Grenier: On se verra.

M. Paquette: J'aimerais simplement dire aux gens qui sont devant nous à quel point on a apprécié la qualité de leur mémoire qui vient d'une expérience vécue de combats dans des circonstances qui étaient assez adverses. J'en ai été témoin à plusieurs reprises. Je pense qu'on a là un point de vue qui va nous éclairer. Le ministre nous a mentionné un certain nombre d'amendements qu'il était prêt à faire. Règle générale, je me place un peu dans la même perspective que vous défendez, à deux exceptions près. Je ne vous parlerai pas des points avec lesquels je suis d'accord parce qu'on n'est pas ici pour se congratuler ou s'appuyer mutuellement. On est ici pour essayer de voir où sont les points de différence et ce qui ne marche pas.

Le premier point, c'est la question des garderies à but lucratif. Je suis tout à fait d'accord pour qu'on privilégie et qu'on mette l'accent, à l'avenir, sur le développement des garderies à but non lucratif parce qu'elles assurent mieux, me semble-t-il, un contrôle des parents. Cependant, vous semblez souhaiter qu'on transforme les garderies à but lucratif existantes en garderies à but non lucratif. Vous nous demandez, en quelque sorte, d'établir un principe, jusqu'à un certain point, de rétroactivité dans la loi. Est-ce que vous admettez que, dans les garderies à but lucratif existantes — elles ont été soumises à des inspections, de multiples inspections, elles ont été vérifiées quant à la qualité, etc. — il ne vaudrait pas mieux — on est dans un contexte de ressources rares aussi, il n'y a pas trop de garderies au Québec; je pense que tout le monde en est conscient... Dans certains cas, vous avez là aussi des gens dont les efforts sont parfois — même je dirais la plupart du temps — tout aussi respectables que ceux des garderies à but non lucratif. Il y a des gens qui se sont battus pour créer des garderies à but lucratif et pas toujours pour faire la piastre parce qu'il n'y avait pas d'autre moyen et que cela apparaissait plus commode, plus facile pour une, deux ou trois personnes de mettre sur pied une garderie. Ces gens-là ont investi là-dedans. Ils ont investi du temps, pas seulement de l'argent, mais du temps et ils arrivent à un point où il y a une ressource. Ne pensez-vous pas qu'on devrait respecter cela dans un contexte de ressources rares? C'est le premier point.

Le deuxième point, c'est l'uniformité. Vous dites par exemple à la page 17: Nous exigeons que les normes de qualité que nous voulons voir

assurées par une loi et les réglementations adjacentes en ce qui concerne les garderies soient les mêmes pour toutes les formes de services de garde. Je comprends qu'il faut assurer une qualité minimale à tous les services de garde. Je suis d'accord avec cela mais cela pourrait aller très loin. Est-ce qu'il n'est pas exact que pour certains enfants — je connais des cas — le fait de les mettre dans une garderie a entraîné certaines régressions de leur développement? Cela dépend de l'enfant. Pour certains enfants, il peut être préférable de les mettre dans un milieu familial voisin, de les confier à la voisine, même si elle n'a pas tout l'appareillage psychopédagogique, tous les diplômes et toutes les ressources nécessaires qu'on peut souhaiter trouver dans une garderie. Cela dépend beaucoup des enfants. Est-ce qu'on devrait demander à l'office de réglementer de façon uniforme ou si on ne devrait pas dire: On va essayer de développer des ressources de garderie diversifiées pour tenir compte de la diversité des enfants?

Mme Boisvert: Je suis bien d'accord avec cela, c'est pour cela qu'on amène le principe de la mini-garderie. Un enfant qui ne fonctionne pas dans un grand groupe peut très bien, effectivement, tirer profit dans un plus petit groupe. Mais pourquoi ce ne serait pas des mini-garderies avec un statut juridique qui seraient contrôlées par les parents de ces enfants? C'est à peu de choses près, au niveau de l'organisation, ce que vous voyez quand vous parlez de familles de garde sauf qu'au niveau du statut et au niveau du conseil d'administration, du pouvoir de décision, ce n'est plus la dame qui décide, c'est le parent qui, avec les autres parents utilisant le service, définit avec la dame ce qui va se faire, quel sera le programme pédagogique et le fonctionnement interne de la journée. (18 heures)

II faut quand même tenir compte que ce sont des petits enfants qu'on confie à une voisine et les parents sont en droit et en devoir de se prononcer sur ce qui se passe. Il y a une autre chose qui est revenue plusieurs fois et on n'a peut-être pas été assez clair. On ne veut pas que toutes les dames aillent au cégep pour faire un cours de technique de garderie. Ce n'est absolument pas cela qu'on vise. Tout le monde le reprend un peu à son compte mais on n'a jamais laissé entendre cela. À l'intérieur des garderies, il y a des gens de formations diverses et on trouve que c'est plus enrichissant finalement. On ne préconise même pas le cours de technique de garderie pour l'ensemble des travailleurs de garderie. Cela fait plus enrichissant d'avoir des formations diversifiées pour les enfants.

M. Paquette: Quant aux services de garde dans le milieu familial, est-ce que vous ne trouvez pas suffisant, dans le cas où les agences sont des corporations à but non lucratif, donc où il y a une majorité d'usagers au conseil, est-ce que les agences ne pourraient pas jouer ce rôle que vous souhaitez, de faire en sorte qu'il y ait un contrôle des usagers même dans le cas des garderies en milieu familial?

Mme Boisvert: S'il y a 50 familles, 50 ou 100 parents qui utilisent la garde en milieu familial ou les mini-garderies pour utiliser notre terme, chaque parent ne saura pas pour autant qu'est-ce qui se passe dans la mini-garderie où il fait affaire. C'est très éloigné finalement, l'agence.

M. Lazure: Voulez-vous dire que vous iriez jusqu'à préconiser un conseil d'administration formé majoritairement de parents pour chacune de ces mini-garderies?

Mme Boisvert: Une structure qui permette aux parents de se prononcer à l'intérieur des minigarderies de moins de dix enfants.

M. Lazure: Cela ressemble à de la bureaucratisation.

Mme Allaire: II ne faut pas rêver en couleur non plus. Quand on parle d'une structure pour chacune de ces mini-garderies, mais il faut vraiment tenir compte d'une réalité que l'agence ne nous garantira pas... Quand on parle d'usagers, il faut penser aux parents usagers fonctionnant dans ces mini-garderies. Il faut que la structure permette à ces parents de bien s'interroger et de bien faire valoir leur point de vue.

Le Président (M. Boucher): Je regrette, il est 18 heures et la commission doit suspendre ses travaux jusqu'à 20 heures. Est-ce qu'on considère que pour le groupe actuel, le mémoire est terminé?

M. Lazure: Je pense que le groupe actuel a passé plusieurs messages très importants. On les note et on les remercie beaucoup.

Le Président (M. Boucher): Au nom de tous les membres de la commission, je remercie le Regroupement des garderies sans but lucratif du Québec et la commission suspend ses travaux jusqu'à 20 heures.

Suspension de la séance à 18 h 3

Reprise de la séance à 20 h 11

Le Président (M. Boucher): À l'ordre, s'il vous plaît!

À la suspension, nous avions terminé avec le Regroupement des garderies sans but lucratif du Québec. J'inviterais maintenant la Fédération de la famille de Québec à bien vouloir prendre place à la table centrale.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président...

Le Président (M. Boucher): Oui, Mme le député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: ... ce matin, quand vous me faisiez faire la révision de qui était membre ou non de la commission pour l'Opposition officielle, j'ai omis de vous dire que le député de Portneuf... En fait, on peut peut-être le mettre comme intervenant, si la commission est d'accord, vu qu'on a mis M. O'Gallagher à la place de M. Goldbloom, mais on a eu deux réaménagements de fonctions et on sait bien que santé et salubrité au travail...

M. Lazure: Consentement. Consentement.

Mme Lavoie-Roux: C'est le seul genre de remaniement qu'on puisse faire, nous autres.

M. Lazure: Consentement.

Le Président (M. Boucher): Vous demandez que M. le député de Portneuf...

Mme Lavoie-Roux: Oui.

Le Président (M. Boucher): ... remplace M. O'Gallagher?

Mme Lavoie-Roux: Non. M. Larivière pour le moment et demain, on le mettra comme...

M. Grenier: C'est un bon père de famille d'abord, le député de Portneuf.

Mme Lavoie-Roux: Oui et lui, il a de l'expérience...

M. Pagé: ... dans les garderies.

M. Lazure: II ne fait pas cela en double, mais en triple.

Mme Lavoie-Roux: En triple? M. Lazure: En triple.

Mme Lavoie-Roux: II n'y a pas un gars du PQ qui a été capable de faire cela.

M. Grenier: C'est un monsieur qui a des triplés. Il connaît cela, les enfants. Cela n'a pas l'air de ça, n'est-ce pas?

M. Pagé: Sept à la table en cinq ans.

M. Grenier: Sept à la table.

M. Pagé: Ce n'est pas pire, cela.

M. Grenier: Je ne sais pas si c'est à lui.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Portneuf remplace M. Larivière (Pontiac-Témiscamingue) comme intervenant.

Voulez-vous vous identifier, identifier les gens qui sont avec vous et procéder à la lecture de votre mémoire, s'il vous plaît?

Fédération de la famille de Québec

M. Boily (Pierre-Yves): Pierre-Yves Boily. À ma droite, Madeleine Dontigny. À ma gauche, Lucie Brien. Nous sommes trois délégués à la Fédération de la famille de Québec représentant les différents organismes qu'on va vous mentionner dans notre mémoire. Je laisse le soin à Mme Brien de vous faire lecture de notre mémoire.

Mme Brien (Lucie): La Fédération de la famille de Québec est un organisme ayant pour but de représenter et revendiquer les droits des familles auprès des autorités, de sensibiliser l'individu, le couple et la société aux besoins des familles, de favoriser la collaboration entre les différents organismes familiaux. Pour ce faire, nous regroupons différents mouvements et services familiaux. Chaque organisme membre a un délégué permanent qui assiste à une rencontre mensuelle. Nos interventions ou actions sont faites à partir des besoins démontrés par nos organismes membres et en fonction de l'actualité politique. Nous représentons environ 10 000 membres. Les organismes membres qui en font partie sont inscrits dans le rapport.

Création de l'office des services de garde à l'enfance. Nous sommes heureux de voir que le législateur veuille s'arrêter sur cette dimension de la vie familiale qu'est la garde des enfants. La société québécoise est prête, selon nous, à partager avec les familles la responsabilité de l'éducation des enfants, et un projet de loi sur les services de garde doit être pour le législateur une occasion de réfléchir sur le problème plus large de la nécessité d'une politique familiale québécoise. Ce bref mémoire s'inscrit dans cet effort de réflexion en s'attachant, bien sûr, sur la dimension particulière de la garde des enfants. (20 h 15)

Nous sommes d'accord sur la création d'un office des services de garde à l'enfance et nous souhaitons que cet office ait les ressources humaines et financières suffisantes pour qu'il puisse s'attaquer à l'ensemble des problèmes de garde et non qu'il se limite à être un administrateur de garderies.

Par ailleurs, nous sommes étonnés et déçus du peu d'orientations politiques générales, quant au contexte et à l'objectif social, en fonction desquelles le mandat de l'office devrait être exécuté. Cette lacune relève pour nous de l'absence d'une véritable politique familiale québécoise.

Le contexte social doit orienter cet office des services de garde à l'enfance vers la coresponsabilité "famille-État" quant à l'éducation des enfants en accordant la primauté à la famille. Les services de garde devraient éviter l'écueil de la prise en charge totale par l'État, écueil sur lequel s'est échouée l'éducation scolaire par une infime participation des parents.

L'objectif social que nous proposons pour orienter l'office est le suivant: l'amélioration de la qualité de vie des enfants et de ceux qui prennent charge de leur éducation. Cet objectif oriente clairement l'office vers la prévention et le support aux parents comme éducateurs plutôt que vers la suppléance et la régie de la vie familiale. Cet objectif reconnaît aussi les services de garde comme instrument d'assistance à la fonction parentale, celle-ci étant d'abord assurée dans les familles.

En regard de ce contexte social et de cet objectif, l'article 24 du projet de loi (les fonctions de l'office) devrait indiquer, et cela nous apparaît une préoccupation majeure, un éventail de services de garde qui puissent répondre adéquatement aux différentes exigences des familles. Si les parents pouvaient choisir parmi cet éventail de services, ils accueilleraient et éduqueraient les enfants comme ils le désirent, ce qui est leur droit le plus strict.

Une liberté de choix des services de garde commande non seulement une diversité d'équipements sociaux, mais aussi une reconnaissance économique des frais de garde, ce que les articles 66 et 67 ne font qu'effleurer. Le versement aux parents d'allocations de garde par le seul fait qu'ils sont responsables d'un enfant et que celui-ci et ceux-là ont droit à une qualité de vie, voilà ce qui permettrait vraiment, selon nous, une éducation responsable.

Grâce à la diversité des services et grâce au support économique, le mode de garde sera choisi en tenant compte de la situation psychologique et sociale propre au vécu de chaque famille.

Nous ne sommes pas d'accord avec la formulation plusieurs fois répétée dans l'avant-projet de loi, où "les services de garde en garderie, en milieu familial ou en milieu scolaire" (article 6.10) sont présentés comme étant sur la même échelle.

Pour nous, une garderie est un des moyens utilisables pour fournir un service de garde dans un milieu donné, et non un milieu de vie en soi. De plus, le milieu de travail est complètement oublié, comme si les services de garde ne doivent rejoindre que le milieu familial et le milieu scolaire. Toute cette formulation est contraire à l'ouverture que nous souhaitons dans le mandat de l'office.

L'avant-projet de loi mentionne aussi à quelques reprises "le développement physique, intellectuel et social de l'enfant" (article 32.20). Deux graves oublis ici: le développement affectif et/ou psychologique et le développement spirituel de l'enfant. Ces deux dimensions sont pourtant inscrites dans la Charte internationale des droits de l'enfant aux numéros 2 et 6 et un projet de loi présenté durant l'Année internationale de l'enfant ne les mentionne pas. Nous tenons à ces deux dimensions.

À l'article 6, aucun des membres de l'office désignés par le gouvernement ne provient des organismes familiaux. Bien sûr, le paragraphe 1 indique des parents, mais cela ne nous apparaît pas suffisant pour assurer une réflexion, une recherche et une action de l'office qui soient en lien avec l'ensemble d'une politique familiale. Nous souhaitons donc qu'un membre de l'office soit nommé sur recommandation de l'ensemble des organismes familiaux par le biais des OFAQ. De plus, il y aurait intérêt à ce que l'article 8 précise quelles sont les catégories de membres énumérés à l'article 6 qui sont nommés pour un, deux ou trois ans.

Nous proposons que les membres choisis parmi les employeurs, parmi les conseils de corporation municipale et parmi les commissaires d'écoles soient les trois membres nommés pour un an. Ceci permettra, selon nous, de donner plus de force aux premiers intéressés, les parents.

En conclusion, nous voulons que les services de garde soient perçus comme un moyen d'améliorer la qualité de la vie des enfants et des parents et comme une occasion pour l'État de reconnaître dans les faits aux parents leur responsabilité première dans l'éducation des enfants et leur droit de choisir les moyens qui conviennent à leur famille. Un élément de politique familiale n'est ni de nature rétrograde, ni dans une perspective nataliste, mais bien simplement une façon concrète de reconnaître la coresponsabilité de l'État et de la famille dans l'éducation des enfants.

Le Président (M. Boucher): M. le ministre.

M. Lazure: M. le Président, je veux remercier les porte-parole de la Fédération de la famille de Québec. En peu de pages, je pense que ce groupe a très bien résumé l'orientation que ce groupement et d'autres comme les OFAQ ce matin et d'autres aussi qu'on entendra plus tard cette semaine nous expriment dans les mémoires. Votre dernière remarque, quand vous parlez d'une façon concrète de reconnaître la coresponsabilité de l'État et de la famille dans l'éducation des enfants, est, je pense, une excellente formule pour bien illustrer ce que nous, en tout cas, au gouvernement, nous croyons être l'objectif de la plupart des parents et de l'ensemble de la population au Québec. Je pense que l'ensemble de la population au Québec considère que les services de garde doivent être assumés conjointement et par les parents et par l'État.

Quelques réactions à vos recommandations spécifiques. Je me réjouis que vous soyez en accord avec la création de l'office. Votre proposition qui recoupe celle des OFAQ, soit d'avoir un représentant des organismes familiaux au conseil d'administration de l'office, j'en prends bonne note et je pense que cela mérite considération. Vous parlez du peu d'orientation politique. Si vous étiez ici cet après-midi — je pense que vous y étiez — vous avez compris que j'étais tout à fait ouvert à cette possibilité d'avoir un certain nombre d'articles au début de la loi qui énonceraient les principes et les objectifs de ce projet de loi et qui, en même temps, résumeraient, si vous voulez, cette espèce de philosophie sociale qui est à la base de tous nos efforts et des efforts que des groupes comme le vôtre font depuis un bon nombre d'années.

Quant à votre définition de l'objectif de l'office, à la page 3 de votre mémoire, qui est l'amélioration de la qualité de vie des enfants et de ceux qui prennent charge de leur éducation, je pense que sur cela aussi on ne peut qu'être d'accord.

L'éventail des services. Je suis un peu surpris de voir que vous ne voyiez pas cet éventail. Pourtant, on a bien essayé de l'étaler au grand jour, de le préciser. Il reste que pour la garderie en milieu de travail, il y aurait probablement avantage à ce que ce soit spécifié dans notre esprit. Quand on parlait de soins de garde en garderie, cela couvrait autant la garderie en milieu de travail que la garderie dans un quartier, mais je pense qu'il vaudra la peine de spécifier dans le projet "la garderie en milieu de travail".

Enfin, vous proposez le versement aux parents d'allocations de garde un peu comme les OFAQ l'ont fait ce matin. C'est une formule qui est, à prime abord, séduisante parce qu'elle donnerait aux parents tout le loisir de décider de l'utilisation de cette allocation. Cela pourrait être parfois utilisé pour la garde en milieu familial, parfois pour la garde en milieu d'emploi ou en quartier. Mais comme je le disais ce matin, en dépit de l'apparente simplicité de cette formule, il nous paraît impossible de l'implanter pour le moment parce que de deux choses l'une, ou bien on accorde cette allocation de garde de façon universelle à tous les enfants en bas âge, et alors, comme les OFAQ l'ont déjà proposé, cela représenterait pour chaque enfant d'âge préscolaire $80 par mois. Si vous étendez une telle allocation aux services de garde à tous les enfants d'âge préscolaire au Québec, vous atteignez facilement une somme d'environ $300 millions. C'est la première possibilité, une espèce d'allocation universelle pour tous les enfants. C'est facile d'application. Il s'agirait d'ajouter au chèque d'allocation familiale la somme de $80 par mois pour les enfants de moins de cinq ans. Malheureusement, je ne pense pas que les contribuables du Québec soient prêts à faire face à cette nouvelle dépense qui, nécessairement, amènerait une augmentation des impôts.

L'autre possibilité est d'avoir cette même allocation de garde réservée seulement pour les ménages à revenus modestes. C'est là que la formule apparemment simple d'application devient très difficile d'application. C'est pour cette raison, encore une fois, que, sans rejeter le principe d'une allocation de garde — au contraire, nous pensons qu'il faut en arriver à une telle allocation de garde, un jour — pour le moment, cela ne nous paraît pas d'application pratique.

Enfin, dans le projet de loi, nous parlons du développement physique, intellectuel et social de l'enfant. Je pense qu'avec raison vous relevez quelques lacunes dans les qualificatifs et vous voulez qu'on ajoute "développement affectif ou psychologique et développement spirituel de l'enfant". Pour certains, quand on parle de développement social, cela peut inclure tout cela dans le sens très large de "social". Je peux vous dire qu'on en prend note. Personnellement, je ne suis pas du tout opposé à ce qu'on ajoute les qualificatifs que vous nous proposez.

Finalement, M. le Président, je veux manifester mon appréciation pour cette espèce d'accord au moins partiel que les représentants de la Fédération de la famille de Québec manifestent vis-à-vis de I'avant-projet de loi et leur dire que leurs remarques vont être prises en sérieuse considération. Merci.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. le ministre.

M. Boily: Vous me permettrez quelques commentaires là-dessus?

Le Président (M. Boucher): M. Boily. (20 h 30)

M. Boily: D'abord, je voudrais indiquer que notre mémoire a été élaboré de façon tout à fait indépendante de celui des OFAQ, même si on en arrive à des positions fort similaires.

J'ai aussi entendu cet après-midi, par exemple, le député de Sherbrooke, dire combien c'étaient des positions différentes de celles des regroupements des garderies. Or, il ne nous semble pas qu'on soit en opposition avec le Regroupement des garderies, mais bien qu'on regarde deux aspects très différents d'une même problématique et on ne se voit pas comme étant en opposition. Quand on mentionne l'éventail des services, M. le ministre, vous déplorez qu'on n'aie pas élaboré notre pensée là-dessus. Je sais qu'il y a beaucoup de mémoires qui, comme celui du Regroupement des garderies, élaborent un certain nombre de services disponibles, plus ce qui est déjà indiqué dans l'avant-projet de loi et il nous semblait que c'était une des fonctions de l'office de découvrir d'autres modes de services de garde.

Quant à la coresponsabilité État-famille, j'entends que vous êtes d'accord avec cette coresponsabilité et je voudrais simplement mentionner que, dans notre mémoire, à la page 2, on indique fort bien qu'on tient à accorder une primauté à la famille, dans cette coresponsabilité.

Une autre remarque. En fonction de l'allocation de garde, ce à quoi nous tenons, derrière cette allocation de garde, c'est la reconnaissance d'un droit de toutes les familles à avoir des services de garde, selon leur choix.

Comment cela sera-t-il appliqué? Selon des modes financiers? On a pensé à ce mode-là. Est-ce que cela coûte plus cher qu'un réseau de garderies universelles? Je n'en suis pas aussi sûr que cela. Vous mentionnez le chiffre de $300 millions. On pourrait peut-être comparer nos chiffres en un autre moment, mais si on regarde les enquêtes faites et par le comité interministériel et par le réseau des garderies, on pourrait estimer entre 150 000 et 200 000 le nombre d'enfants qui pourraient bénéficier de ces allocations et je doute — moi, personnellement, je suis prêt à chercher au niveau des chiffres — que cela s'élève à un montant aussi gros. Voilà.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. Boily. Mme le député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Je voudrais d'abord remercier les représentants de la Fédération de la famille de Québec de s'être déplacés. Nous entendons, ici, d'une certaine façon, de la même façon que ce matin, avec les OFAQ, les personnes qui sont impliquées au premier chef dans les garderies et qui, d'une certaine façon, n'ont pas d'intérêt pécuniaire dans toute la question, du moins d'une façon directe. Je pense que cela permet de présenter les choses d'une façon détachée et objective, non que je veuille mettre en question l'objectivité des groupes qui sont venus ou qui viendront, mais je pense que c'est vraiment la voix des personnes les plus autorisées et les plus intéressées.

Je dois vous dire que je viens juste de prendre connaissance de votre mémoire, parce que — et de cela, je ne tiens personne responsable — tous les mémoires nous sont arrivés au dernier mille — c'est d'ailleurs la coutume, ici — mais je relève, par exemple, en page 2, le paragraphe 3, si vous étiez ici, ce matin, vous avez dû remarquer que j'ai souligné cette lacune, en disant que, finalement, le projet de loi m'apparaissait comme une mise en place de structures sans qu'on ait vraiment une politique de définie, qu'on l'appelle familiale ou autrement, même une politique générale ou une philosophie des garderies, et que ceci se reflétait même dans les notes d'introduction de la loi qui dit: "l'office définira une politique", ce qui m'apparaît un peu surprenant.

Je suis heureuse que vous ayez signalé, au paragraphe 3a, qu'il n'y avait pas vraiment de divergence fondamentale entre votre position et celle du Regroupement des garderies. Je pense que le paragraphe 3a indique bien que, dans ce sens-là, vous allez dans la même direction, du moins que "les services de garde devraient éviter l'écueil de la prise en charge totale par l'État, écueil sur lequel s'est échouée l'éducation scolaire, par une infime participation des parents."

En cela, je pense qu'il faut rendre quand même témoignage aux garderies, au Regroupement des garderies qui se sont continuellement opposés à une prise en charge totale du système de garderies par l'État, comme on l'a fait pour l'éducation avec, maintenant, les correctifs à y apporter, la marche arrière, etc. C'est pourquoi cela m'apparaît extrêmement important qu'au niveau de l'office il y ait un représentant des OFAQ, tant mieux, mais je pense qu'il devrait également y avoir plus de représentants des parents. L'équilibre est mal établi, tel qu'il nous est présenté. Je crois comprendre que le ministre est prêt à envisager des correctifs là-dessus. Si on veut vraiment être capable de poursuivre, compte tenu de l'implication financière de l'État qui ira en grandissant forcément dans le domaine des garderies et de tous les autres changements qui en résultent, il faudra que les associations de parents, les fédérations de parents ou ceux qui regroupent les familles soient extrêmement vigilants pour que ce qu'on ne fait pas aujourd'hui on ne le fasse pas dans cinq ou dix ans, parce qu'à ce moment-là la machine nous aura un peu échappé, elle suivra son cours et on ne pourra plus faire marche arrière.

Le ministre s'est montré sensible à votre suggestion du point 7, c'est-à-dire les deux dimensions que vous voulez ajouter. J'en suis fort aise, parce que le terme social — le ministre sera probablement d'accord avec moi — même si pour certains il recouvre ces dimensions, quand on le prend dans son sens précis, quand on parle de développement social, c'est plus ou moins certain que ces dimensions soient vraiment incluses mais, de toute façon, le ministre s'est montré sympathique à cela.

Il y a un point sur lequel j'aimerais que vous précisiez un peu votre pensée; c'est le point 6: Nous ne sommes pas d'accord avec la formulation plusieurs fois répétée dans l'avant-projet de loi où les services de garde en garderie, en milieu familial ou en milieu scolaire sont présentés comme étant sur la même échelle. Une garderie est un des moyens utilisables pour fournir un service de garde dans un milieu donné et non un milieu de vie en soi.

Je comprends mal l'association que vous faites entre votre premier et deuxième paragraphes. Peut-être pouvez-vous expliciter cela?

M. Boily: Si on considère un office des services de garde, on peut voir que la garderie est un des moyens pour offrir des services de garde dans différents milieux dont le milieu familial, dont le milieu scolaire. Mais, si on met sur le même pied l'instrument qu'est la garderie avec des milieux de vie ou le milieu de travail, par exemple, à ce moment-là, on a confusion de vocabulaire comme on en a eu toute la journée à savoir, par exemple, si des services de garde en milieu familial devraient avoir une garderie comme instrument ou si des services de garde en milieu familial peuvent avoir d'autres modes d'intervention qu'une garderie très bien structurée. De sorte que, pour nous, mettre sur le même plan garderie, qui est un mode d'intervention dans un milieu donné, fausse la perception de l'ensemble du projet de loi où la garderie peut-être considérée comme un des instruments d'intervention pour offrir des services de garde dans différents milieux.

M. Lazure: Me permettez-vous une petite correction?

Mme Lavoie-Roux: Oui.

M. Lazure: Nous pensions que c'était clair; peut-être peut-on le réviser, mais dans tout l'avant-projet, on parle de services de garde qui peuvent être donnés soit en garderie — ceci inclut, comme je le disais tantôt, garderie en milieu de travail et garderie en quartier — et deuxièmement, service de garde du type garde en milieu familial et non pas garderie familiale. Pour nous, c'est clair que

quand on parle de garde en milieu familial, il ne s'agit pas d'essayer de recréer le même schéma, la même organisation qu'on retrouve dans une garderie de quartier ou de milieu de travail.

M. Boily: Je suis content de vous entendre dire que pour vous c'était clair, mais maintenant qu'on a déjà entendu trois mémoires où cela ne semble pas clair, il serait intéressant de clarifier cela en disant que la garderie est un des instruments d'intervention et qu'il y a des milieux donnés dans lesquels elle peut être un instrument, mais pas nécessairement celui-là.

M. Lazure: Exactement.

M. Boily: Un autre commentaire. Mme Lavoie-Roux, vous parliez aussi de la carence signalée d'une politique familiale d'ensemble. J'aimerais seulement mettre l'accent là-dessus pour un instant. Tant qu'on n'aura pas une réflexion plus large au niveau d'une politique appelons-la familiale aussi, on va faire des interventions à coups de pinceau, à la pièce. C'est ce qui est arrivé au niveau de la loi 24. C'est ce qui est arrivé quand on a discuté des projets de loi touchant les personnes âgées. C'est ce qui est en train de se passer au niveau du Code civil quand on revoit le nom des enfants, etc. parce qu'on n'a pas de pensée ou de politique globale touchant le couple, la famille et les enfants. Alors, à chaque fois, on est obligé de remettre ou de confronter et d'ajouter dans un projet de loi des intentions au point de départ qui devraient être comprises, dans le fond, dans une loi-cadre ou une politique générale de la famille au Québec.

Mme Lavoie-Roux: Je suis tout à fait d'accord avec vous. À la décharge du gouvernement, je dois dire quand même que ce n'est pas une tâche facile, mais — je l'ai signalé ce matin — cela vient recouper quand même une politique plus globale à l'égard de la condition féminine. Ce n'est pas non plus totalement intégré et c'est soulevé dans le comité interministériel sur la garde de l'enfance où on fait ce recoupement, mais ici, cela revient plus comme un mécanisme ou un moyen de pallier à des problèmes ou des besoins plus urgents ou plus immédiats qui ont été identifiés.

Vous faites allusion à la révision du Code civil. Je pense que c'est aussi un autre exemple. J'allais justement vous poser une question sur la politique familiale. Vous êtes un organisme familial. Je ne vous demande pas de la définir pour le gouvernement, mais vous y avez quand même réfléchi. Par exemple, où en êtes-vous dans votre réflexion sur l'évolution de la famille comme organisme? C'est peut-être un des points, par exemple, qui accrochent. Il y aura peut-être certaines corrections à y apporter à partir de la révision du Code civil. Le problème est assez complexe, mais je pense que cela ne justifiait pas que ce projet de loi soit tout à fait muet sur aucune espèce de politique. Le gouvernement semble avoir l'air de s'en décharger totalement sur l'office, alors que je disais ce matin que l'office est vraiment plus un lieu d'exécution, un lieu de... Mais avez-vous réfléchi à ce problème et quelle est, à ce moment-ci, votre définition non pas d'une politique familiale, mais de la famille? Comment la considérez-vous dans vos discussions entre les membres de votre groupe?

M. Boily: Je sais que les OFAQ, à plusieurs reprises en commission parlementaire, entre autres en 1976, ont présenté des éléments de politique familiale d'ensemble globale. Il y a toute une réflexion d'entreprise au niveau des OFAQ, donc au niveau de la province dans chacune des régions aussi sur ce que pourrait être une politique de la famille au Québec. D'ailleurs, il y a un document des OFAQ qui a été distribué à tous les membres régionaux, sur lequel nous avons travaillé dans la région de Québec et qui sera publié d'ici deux ou trois semaines. Cela présente notre réflexion sur une politique familiale d'ensemble. Nous avons beaucoup travaillé aussi en fonction de la définition que le comité des affaires sociales et de la famille avait établie de ce qu'était une famille; on définissait surtout la famille en fonction de la fonction parentale, donc, autour des enfants, qu'on l'appelle atomique ou nucléaire et...

M. Lazure: Cela ne se peut pas, la famille atomique.

M. Pagé: C'est votre premier ministre... M. Lazure: Non, non. Cela ne vient pas de lui. Mme Lavoie-Roux: Cela ne vient pas de lui. M. Lazure: II répondait... M. Grenier: Ils l'ont cité...

Mme Lavoie-Roux: Non, non. Il l'avait emprunté quand même.

M. Lazure: C'est cela. Il répondait à un groupe de représentants de familles atomiques.

Mme Lavoie-Roux: Non. Ce n'est pas le style du premier ministre...

M. Boily: À partir de cette définition du CASF, plusieurs réflexions ont été faites là-dessus, plusieurs colloques ont été faits là-dessus. Je suis sûr qu'on vous communiquera le résultat de cette pensée dans les semaines à venir.

Mme Lavoie-Roux: Je vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Boucher): Merci, Mme la députée de L'Acadie. M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: Merci, M. le Président. Je veux vous féliciter et vous remercier d'être venus à cette commission. C'est la première occasion que

j'ai de vous rencontrer. J'ai pris connaissance, à la page 2, des groupes que vous représentez. Ce sont des groupes avec lesquels nous sommes plus familiers quand on représente le milieu rural. J'imagine que c'est la même chose en ville aussi, mais comme je représente le milieu rural, ce sont des groupes que nous coudoyons de façon régulière, de façon permanente et je pense bien que vous représentez, ici, devant nous, nos valeurs traditionnelles auxquelles je crois profondément. (20 h 45)

Je pense qu'il fait bon de vous entendre de temps en temps et ce serait peut-être une bonne habitude à développer chez vous que de venir nous rencontrer plus souvent. Vous représentez une dizaine de milliers de personnes, d'après ce qu'on a dit, tout à l'heure, au début. Alors, à partir de là, je pense qu'on doit vous entendre plus souvent, puisque l'occasion nous en est donnée. On a développé comme système, depuis trois ou quatre ans, d'écouter les groupes avec plus de temps. Alors, il faudrait développer comme bonne habitude d'être présent lorsqu'on fait l'appel. Et, même lorsqu'on ne fait pas appel à vous, il serait bon de vous imposer de temps en temps. Ce serait important qu'on vous sente proche.

Vous dites, à la page 2, que le service de garde devrait éviter l'écueil de la prise en charge totale par l'État, écueil sur lequel s'est échouée l'éducation scolaire, par une infime participation des parents. Vous avez vécu je pense bien, ce milieu et vous voyez que, si on laisse cela à des gens qui ne sont pas des représentants des familles, à un moment donné, on prend des embardées, qu'on regrette quelques années après. Vous le mentionnez ici, avec pas mal d'à-propos, je pense bien. Je reviendrai sur la page 4, pour vous en parler.

Vous avez également souligné les deux thèmes dont vous ont parlé le ministre et Mme Lavoie-Roux, les deux appellations que vous aimeriez voir mieux définies au projet de loi. Encore une fois, je pense que le développement affectif ou psychologique et le développement spirituel devraient davantage faire partie d'un projet de loi, en reconnaissant bien que ce ne sont pas des choses faciles. Mais l'insistance que vous avez mise, à la fin de votre paragraphe, en disant: Nous tenons à ces deux dimensions indique que vous témoignez d'une vérité que vous aimeriez voir transpirer dans le projet de loi.

Ce n'est pas l'habitude d'un projet de loi de faire des exposés au début, des exposés philosophiques du projet de loi. Mais, ici, on se rend compte plus que dans tout autre projet de loi — on l'a mentionné cet après-midi, vous avez été témoins, vous étiez dans la salle — qu'on manque de plus en plus de cette toile de fond d'une politique familiale. Vous êtes sur le point de nous livrer un document, à ce que nous a répondu un monsieur, tout à l'heure, et ce sera fort intéressant, je pense, d'en prendre connaissance pour savoir ce que vous entendez. Le gouvernement, bien sûr, s'en inspirera et les partis d'Opposition, aussi. On a besoin de cela. Si vous ne pouvez pas nous le donner et si vous ne deviez pas nous fournir un document comme celui-là, on se demanderait sur qui se rabattre pour se faire donner un tel document. Ce serait préparé par des personnes moins compétentes que vous, c'est évident, et cela correspondrait moins à ce que vous demandez. Je pense que vous avez dû donner pas mal de temps bénévole à la société et vous allez en donner encore beaucoup, j'imagine. Mais vous êtes justement les personnes dont on a besoin, la sorte de personnes qu'on doit rencontrer plus souvent, la sorte de personnes qui doivent nous produire des documents, de temps en temps, qui doivent nous inspirer. N'oubliez pas de vous servir aussi des partis d'Opposition, ils sont là pour quelque chose, pour vous soutenir dans vos efforts.

Mme Lavoie-Roux:... pour les députés, aussi.

M. Grenier: Ah! oui, il faudrait que le gouvernement se penche davantage sur ce que vous lui proposez, pas seulement dire: C'est bien bon ce que vous nous donnez, mais aussi s'en inspirer et que vous vous reconnaissiez dans les lois.

J'aimerais que vous nous disiez, quand vous dites qu'il devrait y avoir une participation plus grande de la famille, ce que vous entendez. Bien sûr, on peut toucher du doigt le manque de participation des parents ou des familles dans la politique scolaire, par exemple, que vous avez regretté, à la page 2. Mais, dans ce projet de loi, pourriez-vous nous donner deux ou trois indications ou balises ou une couple de jalons qui pourraient nous permettre de comprendre ce que vous entendez par une meilleure participation des parents?

M. Boily: D'abord, je voudrais vous remercier de votre invitation à collaborer. On le fera certainement. Une petite introduction; vous mentionniez qu'on représentait des valeurs traditionnelles. Peut-être, sûrement. Maintenant, quand on représente des valeurs traditionnelles, certaines fois on peut avoir un langage qui pourrait déranger, même un langage qui pourrait être qualifié d'écarts de langage. Si je prenais, par exemple, le message des évêques québécois, sur la famille, en 1974, qui est aussi un document dont on pourrait se servir pour élaborer une politique familiale, il y a beaucoup de vocabulaire là-dedans qui pourrait être qualifié d'écarts de langage, dans une commission parlementaire.

Quant à une meilleure participation de la famille, des parents, ce qu'on considérait c'était, au niveau de l'office, un plus grand nombre de parents qui puissent participer comme membres délégués à cet office et qu'il soit nommé là pour un terme de trois ans pour qu'il puisse prendre le roulement parce que des volontaires ne travaillent pas aussi rapidement que des professionnels fonctionnaires engagés pour cela. Au niveau des services de garde, si on prend les services de garde déjà structurés, on estime qu'au niveau des garderies il y a déjà — comme on l'a souligné à

plusieurs reprises — une participation très grande des parents. Ce n'est pas là qu'on voudrait des changements, on estime cela excellent. Mais s'il y a création de nouveaux instruments d'intervention au niveau des services de garde, encore là l'office devrait voir à ce que les parents soient les premiers à collaborer et qu'ils soient majoritaires au niveau de ces organisations.

M. Grenier: Vous avez une autre recommandation que je qualifie de timide, celle de la page 5, quand vous dites que vous devriez avoir une personne de nommée — vous en faites la recommandation comme les OFAQ l'ont faite ce matin — parmi les cinq représentants qu'il pourrait y avoir. Je me demande pourquoi vous n'avez pas parlé de deux, par exemple, même de trois. Il est bien sûr que le gouvernement nommera cinq personnes et bien sûr que, parmi celles-là, il y aura possiblement des pères de famille ou des mères de famille qui pourront être d'excellents représentants au comité.

Mme Lavoie-Roux: Des péquistes.

M. Grenier: Oui, peut-être qu'on exigera d'abord qu'ils aient leur carte de PQ avant d'être nommés là mais, en dehors de cela — farce à part — je pense qu'il serait peut-être intéressant qu'on ait plutôt, au lieu de gens nommés par le gouvernement, des personnes de votre milieu qui ont l'habitude de travailler avec vous, qui sont vraiment sensibilisés aux problèmes que vous voulez voir discuter. Je pense que des personnes compétentes, il y en a un peu partout. Je ne veux pas discréditer les personnes qui pourraient éventuellement être nommées par le gouvernement, mais j'aurais confiance en des personnes nommées par votre groupe. J'aimerais qu'il y en ait au moins une couple qui soient des représentants. Je pense que le ministre ne fait pas la sourde oreille à des recommandations de ce genre. On pourrait en avoir une couple au moins capables de représenter, comme on l'a dit tout à l'heure, nos valeurs traditionnelles qui sont vraiment adaptées — à vous entendre et à lire votre mémoire — aux besoins du temps.

M. Boily: Si vous le qualifiez de modeste, tant mieux. Si nous avions déjà une personne au niveau de l'office, ce serait énorme.

M. Grenier: Merci.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. le député de Mégantic-Compton, M. le député de Sherbrooke.

M. Gosselin: Un bref commentaire sur votre mémoire très dense, qui contient beaucoup de choses tout en n'allant pas au bout de la réflexion qui est à pleine entamée là-dedans. Un peu pour manifester la même chose que le député de Mégantic-Compton, vous êtes timide dans ce sens que la large représentativité qu'est celle des organismes familiaux — ma remarque s'adresse également aux OFAQ — devrait vous autoriser à aller plus loin dans l'expression de vos recommandations. C'est une simple remarque. J'aimerais vous demander d'expliciter ce que vous dites ici. Je trouve cela très intéressant. C'est une ébauche, mais je sens qu'il y a vraiment quelque chose là qui est important et j'aimerais vous demander de l'expliciter. Quand vous dites que le rôle de l'office devrait être un rôle de support et de prévention aux parents comme éducateurs, c'est tout une approche qui peut vouloir dire beaucoup plus que seulement des services de garde; elle peut amener un type d'intervention de l'office des services de garde tout autre auprès des parents dans des modèles d'éducation, etc. Est-ce que vous avez une idée un peu plus précise sur un rôle de support et de prévention auprès des parents?

M. Boily: D'abord, quand vous dites que nous ne sommes pas allés au bout de notre réflexion, c'est très vrai. Je ne veux pas nous excuser ici mais nous sommes un regroupement de volontaires qui avons reçu ce document il y a un mois et demi. Nous l'avons reçu avant mais nous étions tous en vacances et les organismes familiaux ne fonctionnent pas l'été.

Mme Lavoie-Roux: Vous avez compris, M. le ministre?

M. Boily: Qu'on soit modeste dans nos revendications, je suis heureux de l'entendre dire de l'autre côté aussi. J'espère que vous répéterez la même chose au comité des budgets quand vous étudierez, entre autres, le budget des OFAQ.

Une voix: C'est une autre affaire.

M. Grenier: Répétez la même chose au comité des budgets.

M. Gosselin: Je l'ai déjà dit lors d'une question en Chambre.

M. Pagé: C'est un engagement que vous prenez?

M. Boily: Quant à la dimension support et prévention, il y a deux choses là-dessus qui pourraient retenir l'attention d'un office. On le voit au niveau de l'éducation à la fonction parentale par le biais des organismes familiaux. On connaît, par exemple, pour ne vous donner qu'un exemple, la grande mode ces temps-ci de la formation à parents efficaces qui nous vient des États-Unis. Là, c'est soit le secteur privé à but lucratif, soit les bénévoles qui le prennent en charge. Ce pourrait être, s'il y avait accompagnement de l'État, une des actions éducatives qui pourraient être très payantes à ce niveau. Une deuxième, c'est au niveau de l'information, si je prends, par exemple, tout l'aspect de la sécurité familiale. On se préoccupe beaucoup de la sécurité des travailleurs dans les industries. Il y a aussi tout un dossier sur la

sécurité familiale qu'entre autres les OFAQ ont bâti et qui pourrait vous être disponible n'importe quand et qui devrait être, selon nous, un des dossiers sur lesquels on devrait informer les familles. Quand on parle de support et de prévention, c'est bien plus dans la ligne d'éducation et d'information et aussi dans la ligne — je reviens à cela — d'une politique familiale. Plutôt que de penser en termes de catégories d'âge — je mets tout cela entre guillemets — plutôt que de "parquer" nos vieux dans des bâtisses et nos petits dans des garderies, si on pensait à structurer les services qu'on offre à une famille, qu'elle soit atomique ou qu'elle soit plus large, de telle sorte qu'elle soit un milieu de vie acceptable pour des groupes d'âge différents, on pourrait à ce moment-là avoir une intervention de l'État auprès des familles en fonction d'une prévention et d'un support. Plutôt que de penser à cela en termes de catégories d'âge ou de personnes, de le penser dans une optique globale d'une famille avec toutes les catégories d'âge. Je ne veux pas dire, pour autant, de revenir à la famille traditionnelle où dans la même maison il y avait mon oncle, ma tante, plus grand-papa et grand-maman, mais qu'on ait des organisations familiales et des services de l'État qui permettent à des familles de vivre mieux ce qu'elles veulent vivre. Plutôt que d'investir, par exemple, dans des programmes pour les enfants ou les personnes âgées, si on investissait plus, par exemple, au niveau des services pour les couples, alors qu'on est en train de fermer tous les services de consultation conjugale dans toute la province, si on s'occupait que les couples tiennent debout et qu'il y ait un service pour qu'ils soient de meilleurs parents, on aurait à long terme une ligne préventive, car c'est bien sûr qu'on joue aux pompiers parce qu'on essaie d'éteindre des feux et je ne suis pas contre, non plus.

M. Gosselin: Ne devrait-il pas y avoir, plus qu'un office de garde, une sorte de grand office de la famille duquel relèveraient les services de garde et ces efforts de prévention auprès des parents? Finalement, ce que vous nous proposez, c'est toute une action auprès des couples. Vous avez raison. Vous avez drôlement raison là-dessus. Je me réjouis de voir que les associations diocésaines prennent actuellement en charge des rôles thérapeutiques, des rôles de soutien, de support et de prévention auprès des couples, alors que les centres de services sociaux abandonnent leur rôle et que ces groupes n'ont presque pas de ressources. Je le dis publiquement: Le gouvernement n'accorde pas...

Mme Lavoie-Roux: Sans leur donner de ressources.

M. Gosselin: ... assez de ressources à ces organismes. Les rôles qui sont joués sont...

M. Grenier: Le ministère de la famille qu'on a connu serait peut-être le grand organisme dont parle le député. Il serait peut-être temps qu'on remette au monde le ministère de la famille.

M. Gosselin: Je veux seulement terminer là-dessus pour espérer...

Le Président (M. Boucher): S'il vous plaît, un à la fois. Un à la fois, s'il vous plaît!

M. Gosselin: ... que cette réflexion de la part de la Fédération de la famille de Québec se continue avec les OFAQ. Je pense que les appuis parmi les parlementaires de tous les partis seront de plus en plus soutenus pour entendre et accompagner les requêtes ou les recommandations que vous avez à nous formuler.

M. Boily: Une dernière remarque.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. le député de Sherbrooke.

M. Boily: Nous ne tenons pas du tout à avoir un office de la famille, un ministre d'État à la famille ou un ministère de la famille. Ce à quoi nous tenons, c'est à avoir une politique familiale qui sera applicable dans les différents projets de loi qui touchent, entre autres, à la famille.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. Boily. Au nom de tous les membres de la commission, je remercie la Fédération de la famille de Québec pour la présentation de son mémoire.

Mme Lavoie-Roux: Merci.

Le Président (M. Boucher): J'inviterais maintenant l'Association des propriétaires de garderies du Québec Inc., à prendre place à la table centrale, s'il vous plaît. (21 heures)

Si vous voulez vous identifier et identifier les gens qui sont avec vous.

Association des propriétaires de garderies du Québec Inc.

M. Boucher (Jean-Carol): À mon extrême gauche, vous avez M. Georges Coneim, vice-président de l'association; à ma gauche immédiate, Mme Huguette Bacon, présidente de l'association, laquelle n'a aucun lien avec le plan Bacon; à mon extrême droite, Mme Erika D'Isep, Mme Ceppi et, à ma droite immédiate, Mme Chambefort qui est secrétaire de l'association.

Le Président (M. Boucher): Est-ce que vous avez l'intention de lire votre mémoire au complet? Étant donné le peu de temps dont nous disposons, est-ce qu'il y aurait possibilité de le résumer? De toute façon, je peux vous assurer que le mémoire au complet pourrait être versé en annexe au journal des Débats.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je m'excuse, mais s'ils jugent qu'il n'est pas à propos de

lire leur mémoire au complet, ils peuvent exercer leur propre jugement. Je pense que dans les circonstances, nous avons entendu cet après-midi assez longuement un groupe et je pense que la même règle doit s'exercer à leur endroit, compte tenu que, peut-être, sur certains points de vue, il s'agit de deux groupes qui ont des positions opposées, du moins du point de vue administratif sinon du point de vue de l'approche des enfants ou de la philosophie de la garderie.

M. Grenier: Pour compléter, M. le Président, j'aimerais que même si on a un résumé... C'est un mémoire que j'ai entièrement lu parce qu'il m'intéressait. Je n'ai pas besoin de vous raconter des peurs et vous dire que j'ai lu tous les mémoires — je n'ai pas eu le temps de tous les lire — mais c'en est un que j'ai lu complètement et j'aimerais mieux qu'on l'entende au complet, qu'on prenne le temps qu'il faut pour l'entendre au complet. Cela ne peut pas nous prendre bien du temps. Il est à peu près le tiers de celui qu'on a vu cet après-midi. Cela nous rafraîchirait les idées d'abord et cela nous permettrait d'en discuter un peu plus longuement. On a au moins une bonne heure devant nous.

M. Lazure: M. le Président, je vous ai entendu proposer au groupe ou bien de lire ou de résumer. L'intérêt de résumer le mémoire est que cela nous laisse plus de temps pour la discussion.

M. Boucher (Jean-Carol): En fait, on s'était déjà posé la question avant de se présenter à la table. Je pense que la formule qui va être employée va être une formule mixte, c'est-à-dire qu'à certains moments il y aura une partie de lecture peut-être, mais ce ne sera pas une lecture servile; je veux dire par là qu'en fait je vais essayer de reprendre le tout dans la présentation du mémoire de façon relativement vivante dans un concept général de discussions et d'échanges avec les membres de la commission, tout en ajoutant, d'autre part, certaines remarques sur certains arguments qui ont été apportés par des groupes qui nous ont précédé cet après-midi et ce soir.

Le Président (M. Boucher): Alors, allez-y Me Boucher.

M. Boucher (Jean-Carol): M. le Président, M. le ministre, Mme et MM. les députés. Comme vous avez pu le remarquer, le mémoire de l'Association des propriétaires de garderies du Québec concernant l'avant-projet de loi sur les services de garde à l'enfance est un mémoire qui se rapproche de façon très proche du texte lui-même de l'avant-projet de loi et des différents chapitres qui composent cet avant-projet de loi.

Au premier abord, évidemment, l'association ne peut que se réjouir de voir que le gouvernement a procédé à l'élaboration d'un projet de loi sur les services de garde à l'enfance et que, suivant les mécanismes qui sont actuellement en marche, il appert que le projet de loi pourra être adopté dans un avenir prochain.

En fait, comme nous le rappelons dans le mémoire lui-même, le contexte socio-économique québécois s'est largement développé au cours des dernières années et le concept ou la réalité que l'on a connu sous le nom de garderie est devenu de plus en plus évident pour la majorité de la population. Devant cette évidence, il est certain que le gouvernement se devait de prendre en main ce champ d'activité et de légiférer principalement afin d'éviter que tout groupe d'aventuriers ou d'inexpérimentés se mette à implanter des garderies au Québec et offre des services qui soient de qualité plus ou moins douteuse.

C'est à ce niveau que l'association se permet d'être d'accord avec le principe d'un avant-projet de loi tout en y apportant les tempéraments qu'on y retrouve aux pages suivantes du mémoire.

Par ailleurs, avant d'aborder les différents points de l'avant-projet de loi et principalement la question de l'Office des services de garde à l'enfance, j'aimerais plutôt sauter immédiatement — et je pense que les membres de la commission me permettront cet égarement — à la page 5 du mémoire, envisager de façon plus concrète avec vous et attirer votre attention sur ce que constituent les garderies à but lucratif. En fait, si l'on se reporte à l'ensemble des discussions qui ont eu lieu ce matin et cet après-midi sur le sujet, on remarque, en regard de l'avant-projet de loi, que les garderies à but lucratif constituent une sorte de fantôme et que, d'autre part, elles n'ont aucun droit de cité dans l'ensemble du projet de loi, exception faite, évidemment, d'un article qui regroupe toute la question des droits acquis. Pourtant, nous croyons que les garderies à but lucratif devraient certainement avoir droit de cité dans le contexte socio-économique du Québec des années quatre-vingt, d'une part, parce que, depuis plus de 80 ans, des garderies à but lucratif oeuvrent sur le territoire québécois et, d'autre part, parce que si l'on s'en reporte à l'énoncé de politique économique du ministre Landry dans son document intitulé "Bâtir le Québec", on y remarque que le secteur privé y est traité de façon privilégiée. À la page 5 du rapport, nous citons un extrait de la page 168 du document intitulé "Bâtir le Québec" et nous croyons que si l'on met en regard le texte du document même et la philosophie générale et des principes qui ressortent de l'avant-projet de loi, nous y retrouvons à tout le moins une situation assez paradoxale et contrastante, c'est-à-dire que, d'une part, le ministre veut privilégier le secteur privé et fonder une part de l'avenir du Québec sur le dynamisme des agents du secteur privé et que, d'autre part, ce qui traite du secteur privé et plus particulièrement des garderies à but lucratif est absolument inexistant dans l'avant-projet de loi. Il s'agit en fait du premier paradoxe que l'on retrouve dans l'avant-projet de loi et que nous voulons souligner aux membres de la commission.

J'aimerais, avant de continuer cette question de la nécessité des garderies à but lucratif, exposer peut-être aux membres de la commission ce qu'est exactement le concept de garderies à but lucratif dans son aspect légal, mais surtout

dans son aspect d'application quotidienne. Je pense qu'il existe une différence essentielle entre la notion du but lucratif en général et de profit, telle qu'on la retrouve dans de grosses compagnies ou des multinationales, et les garderies à but lucratif qui constituent, en fait, des petites et moyennes entreprises ou des entreprises gouvernées par un ou deux individus seulement.

Concernant le concept de garderies à but lucratif lui-même — comme je le soulignais précédemment — c'est depuis les toutes premières garderies, exception faite des bonnes soeurs auxquelles faisait allusion le ministre ce matin, que les garderies à but lucratif existent.

Si elles se sont implantées, c'est d'abord en vertu d'un sens "d'entrepreneurship" des gens qui les ont implantées, lesquelles personnes voulaient, en implantant un tel type de garderie, promouvoir et mettre de l'avant une volonté personnelle d'oeuvrer dans le secteur de l'aide à l'enfance. En fait, tous les gens qui oeuvrent dans le secteur des garderies à but lucratif ont des connaissances, des spécialités et sont à même de pouvoir répondre aux besoins de la population. Alors, eu égard à ce premier élément de connaissance, joint au sens "d'entrepreneurship" auquel je faisais allusion précédemment, c'est ce qui donne naissance aux garderies à but lucratif, telles qu'on les a connues par le passé et telles qu'on les connaît actuellement.

On répliquera, évidemment, que la notion de profit se rattache à un tel type de garderies. Il est très vrai que le profit, en tant que tel, fait partie du but d'une corporation à but lucratif. D'autre part — et je pense que le gouvernement a en main tous les documents pour démontrer ce que je vais avancer — si l'on se place au niveau des propriétaires de garderies à but lucratif, on a simplement un échange de notions, c'est-à-dire qu'au lieu de parler de salaire proprement dit, on parle de profit ou de dividendes. Mais, dans l'ensemble des garderies qui composent l'Association des propriétaires de garderies privées du Québec et qui en sont membres — et il y a 60 établissements qui reçoivent approximativement 5000 enfants — pour la très large majorité, le mot profit n'a pas de sens comme tel et correspond plutôt à un salaire. Il est évident que le salaire correspond plus ou moins aux heures mises, mais on ne retrouve pas, dans les garderies à but lucratif, comme elles existent actuellement, et dans le cadre de celles qui font partie de l'association, des garderies où le profit est traité en tant qu'élément directeur de l'opération de la garderie. Comme je le disais précédemment, c'est plutôt le sens "d'entrepreneurship" et la volonté d'être relativement indépendant dans un secteur d'activité qui font que les gens qui sont propriétaires de garderies, soit en société, soit seuls ou à titre de corporation à but lucratif, procèdent aux soins des enfants, tels qu'ils les donnent actuellement.

Si, d'autre part, on prend en considération que dans les cégeps ou dans les différentes autres institutions du Québec, plusieurs finissants en techniques de garderie vont arriver sur le marché du travail, on doit se rendre compte et admettre qu'une partie de ces mêmes finissants vont aller, évidemment, à l'emploi de divers types de garderies, mais que certains de ces finissants auront, comme beaucoup de Québécois, le sens de "l'entrepreneurship", la volonté d'avoir une entreprise qui soit la leur et la volonté de servir la population du Québec, à leur compte ou avec certaines personnes, sans pour autant ériger la notion de profit en système. Si l'on veut faire un peu d'étymologie, on doit quand même voir qu'avec le mot profit, on peut tirer le mot profitable et que si cela peut être profitable pour les gens qui exercent l'activité, cela peut également et cela doit également être profitable pour l'ensemble de la population à laquelle on rend les services.

Je pense que c'est un point très important qu'il faut prendre en considération, si l'on considère que les finissants de cégep ou des institutions où l'on donne le cours de techniques de garderie devront trouver des débouchés et nous soumettons à cette commission que l'un de ces débouchés pourrait être et devra être l'ouverture de nouvelles garderies qui pourront être à but lucratif.

Alors, sous cet aspect, je pense que le fantôme ou le spectre que plusieurs ont laissé poindre à l'horizon n'est pas du tout ce que l'on a bien voulu présenter, mais qu'il faut y apporter de larges nuances.

Concernant toujours le spectre des garderies à but lucratif, on a également parlé des parents. Je me dois de rappeler aux membres de cette commission que, si, d'une part, on prévoit que les garderies à but non lucratif devront être formées majoritairement, à leur conseil d'administration, de parents, dans le cadre du fonctionnement des garderies à but lucratif les parents sont également présents. Certes, les parents ne sont pas présents nécessairement comme membres du conseil d'administration, mais ils sont présents dans divers comités. Ils sont présents aux assemblées de parents et ils sont présents quotidiennement dans les commentaires qu'ils émettent au propriétaire ou directeur de la garderie. Sous cet aspect, nous croyons que le rôle du parent n'est aucunement négligé ou mis à l'écart dans la garderie à but lucratif. Certes, les parents sont à un niveau différent, mais ils sont là. Nous croyons que la place des parents est importante puisque, si les parents avaient certains mécontentements en regard des services offerts par la garderie à but lucratif, le premier geste du parent serait évidemment de retirer son enfant de ce type de garderie. Et, comme le salaire du propriétaire est, en fait, le profit qu'il retire à la fin de l'année, vous comprendrez très certainement qu'il n'est aucunement de l'intérêt du propriétaire ou d'un actionnaire de garderie à but lucratif de laisser le profit s'envoler ou de laisser le parent partir. D'où le fait que, dans le cadre même des principes généraux de concurrence et d'application d'une garderie à but lucratif, on peut, à toute le moins, être assuré que le service sera de qualité plus que minimale et sera même de qualité supérieure puisque la survie

même de la garderie à but lucratif, en tant que commerce, y est en jeu en regard du service qu'elle rend. Je pense qu'il s'agit là d'un élément très important à considérer et qui fait en sorte que la garderie à but lucratif n'est pas seulement et n'est même aucunement cette organisation qui vise un profit sur le dos des parents et des enfants et en minimisant le service qui est offert aux enfants. Vous pourrez le demander tout à l'heure aux divers membres qui sont ici à la table avec moi. Les services offerts par les garderies à but lucratif, les équipements mis sur pied par ces mêmes garderies à but lucratif sont d'une qualité égale ou même supérieure aux autres types de garderies que l'on retrouve.

Globalement, dans ses concepts généraux, l'Association des propriétaires de garderies du Québec fonde les principes de son mémoire et fonde la nécessité de son existence même sur le respect de deux points fondamentaux, lesquels ont d'ailleurs été soulignés par le ministre au début et à l'ouverture de la présente commission parlementaire, à savoir tout d'abord le respect des besoins spécifiques de certaines familles et de certains enfants et également le respect de la volonté individuelle des parents. Car il ne faut pas l'oublier, si certains parents veulent que leurs enfants aillent dans des garderies à but non lucratif, certains parents, d'autre part, et même certains membres de la Législature ou du cabinet veulent que leurs enfants soient placés dans des garderies à but lucratif ou dans d'autres types de garderies. Somme toute, ce que l'Association des propriétaires de garderies privées du Québec veut dire au gouvernement et à cette commission, c'est que, si, d'une part, l'ensemble des types de garderies qui sont envisagés dans le projet de loi est acceptable, souhaitable, valable et nécessaire, il est, d'autre part, nécessaire d'y voir également inclus les corporations à but lucratif, de même que les sociétés. En fait, si le gouvernement veut respecter la volonté individuelle des parents et respecter les besoins spécifiques des familles et des enfants, il faut offrir à la population du Québec un éventail complet de services de garde et, parmi cet éventail complet, il existe indéniablement les garderies à but lucratif. Ceci donc pour le premier aparté que je voulais mettre au point avec la commission. Maintenant, je vais me reporter à une critique plus systématique du projet de loi lui-même.

Cette critique ou ces commentaires sont toujours faits dans l'optique que les garderies à but lucratif constitueront l'une des catégories mentionnées à l'article 31 du projet de loi. L'un des points importants dont traite le projet de loi et auquel l'association donne son appui, sous certaines réserves évidemment, c'est l'institution d'un Office des services de garde à l'enfance. Il pourra peut-être apparaître curieux aux membres du gouvernement et du parti ministériel que notre association soit d'accord avec ce principe. En fait, ce que l'association considère, c'est que le secteur des services de garde à l'enfance constitue une sorte de microcosme dans son fonctionne- ment général et qu'il est important qu'un office soit créé à cette fin. Il a été longuement discuté avec les membres de l'association et principalement avec l'exécutif de la nécessité ou de la non-nécessité d'un office. Nous croyons que globalement, pour mieux servir la population et surtout pour donner un service à la fois plus direct et plus rapide, un office pourrait s'avérer très efficace.

Toutefois, nous aimerions apporter quant aux pouvoirs généraux de l'office et à ses caractéristiques les tempéraments suivants. Le premier tempérament est à caractère strictement juridique. On note, en effet, à l'article 3 de l'avant-projet de loi, que l'office jouit des droits et privilèges d'un mandataire du gouvernement. À cet égard, si l'on se replace dans le désir général du gouvernement au pouvoir d'avoir une transparence quant à l'accomplissement de ses devoirs gouvernementaux, nous comprenons assez mal comment ce gouvernement peut vouloir, d'autre part, se réfugier derrière un principe de droit aussi général. En fait, si ce principe demeure dans le texte de loi tel qu'adopté, à toutes fins utiles, il s'avère que toutes les décisions de l'office quelles qu'elles soient, exception faite d'un excès de juridiction flagrant ou d'un abus grave de pouvoir, ne sauraient être corrigées par aucun tribunal, même s'il y avait une erreur de droit.

Nous soumettons qu'en regard du fait que l'office, suivant les prévisions gouvernementales, doit énoncer les diverses politiques en matière de services de garde, il ne saurait y avoir pour lui un paravent semblable, puisque ce serait rendre l'office inattaquable à quelque critique que ce soit ou à quelque recours judiciaire que ce soit. Par le fait même, advenant une erreur de droit ou une erreur d'application technique dudit office, il n'y aurait aucun recours d'un justiciable, sauf si l'office excédait formellement sa juridiction. C'est pourquoi nous croyons que l'office ne devrait point jouir d'un privilège aussi grand.

Concernant, évidemment, les nominations et désignations prévues à l'article 6 assumant que les garderies à but lucratif seront incluses dans l'avant-projet de loi, nous croyons évidemment que, parmi les représentants choisis, un de ces représentants devrait venir du secteur des garderies à but lucratif. D'autre part— et c'est peut-être le point le plus important quant à l'office lui-même — nous nous interrogeons sérieusement sur la marge de manoeuvre réelle qui est accordée à l'office dans le libellé de l'avant-projet de loi. On y voit, en effet, au premier alinéa de l'article 23 que l'office doit se conformer aux directives émises par le ministre concernant les orientations et les objectifs de l'office.

Nous croyons déceler là un sérieux danger que l'office ne devienne, à toutes fins utiles, un instrument manoeuvré par les directives ministérielles. En fait, si l'office doit jouer le rôle que théoriquement le gouvernement veut lui voir jouer, nous voyons mal comment le ministre pourrait avoir un tel pouvoir d'intervenir et d'imposer ses vues. Si le ministre veut imposer ses vues, point n'est besoin de créer un office. Que le ministre

crée un service à l'intérieur de son ministère et il sera servi à souhait.

Si le ministre veut créer un office qui soit indépendant, qui ait des pouvoirs et qui puisse réellement agir en dehors des contraintes politiques globales, nous croyons que cet office se doit d'être indépendant. Le ministre, certes, peut faire des suggestions à l'office, mais les suggestions ministérielles ne devraient, en aucune façon, lier l'office lui-même.

D'autre part, concernant les pouvoirs de l'office, l'association souhaite que dans le processus de consultation des personnes et organismes intéressés, le secteur des garderies privées, évidemment, à savoir le secteur des garderies à but lucratif, soit considéré à sa juste valeur et ne soit aucunement écarté comme il semble l'être actuellement dans l'avant-projet de loi. Nous croyons, en effet, que si l'office se veut réellement pleinement représentatif et consultatif, il se doit de considérer les garderies à but lucratif comme partie intégrante du système des services de garde de l'enfance et que, par voie de conséquences, il pourrait, dans une certaine mesure, s'inspirer du parallèle qu'on peut faire entre l'école privée et l'école publique tel qu'il existe actuellement.

Concernant maintenant la section de l'organisation des services de garde en garderie, j'ai parlé précédemment de la nécessité de l'existence des garderies à but lucratif et de la nécessité de sa reconnaissance à l'article 31 du projet de loi. Je ne voulais point revenir sur ce principal fait.

Quant à la clientèle des services de garde en garderie, j'aimerais attirer l'attention de la commission sur l'une des dispositions de l'article 30 concernant les enfants d'âge scolaire en tant que clients potentiels des services de garde en garderie. Tel que libellé actuellement, ce même article 30 exclut les enfants d'âge scolaire en tant que clients potentiels des services de garde en garderie. Toutefois, l'association, tout en étant d'accord sur le principe général, croit que cet article devrait être amendé pour permettre l'admission des enfants d'âge scolaire dans les garderies pour les jours non scolarisés, entre autres pour les périodes de vacances. En fait, l'association croit que le fait de vouloir avoir des services de garde en garderie en milieu scolaire est une excellente chose, évitant une duplication à une époque donnée, à savoir l'époque scolaire, entre autres, mais si on se replace dans le contexte de la période estivale, je pense que les membres de la commission reconnaîtront que la garderie en milieu scolaire ne saurait fonctionner à cette étape. Pour certaines mères de famille qui sont au travail à ce moment, il est nécessaire de prévoir que certains enfants d'âge scolaire pourront être admissibles dans les services de garde tels qu'ils sont définis à l'avant-projet de loi.

Toujours concernant le fonctionnement des services de garde en garderie, l'association désire apporter certains principes concernant le fait de savoir qui est titulaire d'un permis de services de garde. Si on lit l'avant-projet de loi, il nous semble à tout le moins remarquer une forme de contradic- tion à cet effet. À certains articles, il nous semble reconnaître que c'est l'organisme qui sera titulaire du permis alors que dans d'autres articles on croit déceler qu'un requérant ou représentant de l'organisme sera titulaire d'un permis. À tout le moins, nous croyons que le projet de loi doit clarifier clairement qui demande le permis et au nom de qui. Sur une base pratique, l'association suggère et propose au gouvernement d'indiquer clairement que le permis soit délivré à l'entité juridique, et ceci pour un motif très pratique. (21 h 30)

Si, même dans le cadre d'une garderie à but non lucratif, le permis est émis au nom d'un parent et que ce parent et son enfant quittent les services de garderie, cela présuppose immédiatement qu'à chaque fois que le parent quittera, il y aura une nouvelle application, une nouvelle demande et nouvelle formule présentée à l'office pour réduire la paperasserie gouvernementale qui est déjà trop considérable, nous proposons et suggérons au gouvernement que le permis soit émis au nom de l'entité juridique qui exploite le service de garde, de sorte que quel que soit le changement de parent à l'intérieur de la structure, ou quel que soit le changement des individus qui seront au conseil d'administration, le permis sera toujours valide et toujours en vigueur et qu'il n'y aura pas de période d'inactivité ou de période de non-permis pour l'exploitation d'une garderie.

Quant au renouvellement du permis, l'association désire apporter certains commentaires. Si l'on s'en rapporte à l'article 36 de l'avant-projet de loi, on y voit que le permis de service de garde pourra être renouvelé à des conditions qui seront prescrites dans la loi ou dans les règlements. Actuellement, aucune condition n'est prescrite dans l'avant-projet de loi et il y a tout lieu de présumer, comme c'est normal, que les conditions de renouvellement seront prévues dans la réglementation à venir.

Par ailleurs, si on recherche l'esprit de l'article 36 suivant son libellé même, il ressort clairement de l'avis de l'association que le fardeau de la preuve pour le renouvellement d'un permis soit et est assumé par le titulaire du permis, de sorte qu'on n'y retrouve aucune garantie implicite au renouvellement du permis. Aussi, dans le but d'assurer une continuité valable pour les parents et l'enfant dans le fonctionnement de la garderie, nous croyons que le titulaire du permis devrait posséder en principe le droit au renouvellement du permis. C'est pourquoi, considérant cette présomption du droit au renouvellement du permis, l'association suggère que l'article 36 soit modifié et qu'il soit expressément prévu que le permis ne serait point renouvelé au cas où le titulaire du permis se soit rendu coupable d'infraction à la loi ou à l'un de ses règlements ou que la conduite générale des affaires du service de garde soit telle qu'elle ne réponde plus aux normes prescrites par la loi ou les règlements.

En fait, par un semblable changement, il s'agit simplement de modifier le fardeau de la preuve pour l'obtention d'un permis et de donner le

bénéfice du doute et une présomption que le permis sera accordé au titulaire, et que ce titulaire soit une corporation à but lucratif, une corporation à but non lucratif, une municipalité, une association coopérative ou un individu ou société.

Concernant maintenant la cession et le transport des permis, nous croyons qu'il y a lieu également d'apporter certains correctifs. Par esprit d'équité envers les titulaires actuels de permis, nous croyons qu'il devrait être ajouté à l'article 39, une disposition prévoyant que l'office ne peut refuser une cession ou un transport de permis, sauf au cas de décision motivée, lesdits motifs pouvant être donnés en regard des critères généraux de la loi ou de l'un des règlements et, après audition, de toutes les personnes concernées. Nous croyons en effet que l'office, malgré ses nombreux pouvoirs, ne saurait être dispensé de normes aussi élémentaires de justice naturelle.

Concernant enfin la modification des locaux occupés par un service de garde en garderie, plus particulièrement en regard des principes énoncés à l'article 41 de l'avant-projet de loi, l'association est d'avis que la restriction prévue et que la demande d'autorisation ne devraient pas s'appliquer dans les cas de modification locative tel qu'il est prévu généralement au Code civil du Québec. En d'autres termes, si une demande de modification est requise de la part de l'office, elle devrait l'être lorsque la modification est sérieuse et non pas simplement pour une modification mineure qui ne requerrait que l'approbation d'un service municipal d'incendie ou de sécurité. Si ces normes sont respectées et si elles n'affectent pas les heures générales d'occupation, nous ne croyons point qu'une demande devrait être faite en surplus auprès de l'office.

Concernant la cessation des activités d'un titulaire de permis, le principe général, à notre avis, est très applicable dans le cadre de tous les types d'exploitants de services de garde de l'enfance, sauf dans le cas des garderies à but lucratif.

En effet, vouloir interdire à un titulaire de permis de fermer son établissement, sauf permission de l'office, constitue, à notre avis, un certain arbitraire. Dans le cadre des corporations à but lucratif, on comprendra qu'une corporation pourrait s'éteindre par suite du désir de ses administrateurs de ne point continuer ou de certains événements d'ordre financier qui empêcheraient la continuation de ses activités.

Par ailleurs, dans le cadre de certains types d'exploitants de garderies qui recevraient des subventions, nous croyons qu'à ce moment l'office peut demander d'être consulté avant d'autoriser la cessation des activités.

Quant aux garderies à but lucratif, nous croyons qu'il devrait simplement être indiqué au projet de loi que les garderies devraient donner un avis raisonnable à l'office avant de cesser toute activité.

Concernant, enfin, la suspension, l'annulation ou le refus de délivrer et de renouveler un permis, l'association reconnaît le bien-fondé du principe que l'on retrouve à l'article 44 de l'avant-projet de loi. Toutefois, nous croyons que tout titulaire de permis, quel que soit le type de garderie qu'il exploite, et tout requérant en vue de l'obtention d'un permis ont droit à ce que la décision de l'office soit prise dans le plus grand respect des règles de justice naturelle.

À cet égard, nous croyons, entre autres, qu'on devrait indiquer clairement au projet de loi la possibilité pour le requérant ou le titulaire de se faire entendre par l'office avant que la décision soit prise. À cet égard, l'association propose qu'il soit spécifiquement indiqué à l'article 44 que, sur demande du requérant ou du titulaire, aux fins de se faire entendre par l'office, le secrétariat de l'office soit obligé d'expédier au titulaire ou au requérant un résumé des faits et des témoignages sur lesquels s'est basé l'office pour refuser la délivrance ou pour suspendre, annuler, ou refuser le renouvellement du permis.

Le Président (M. Boucher): Me Boucher, je m'excuse, est-ce que vous pourriez accélérer ou abréger, étant donné l'heure? Il y a au-delà de 20 minutes de passées pour le mémoire, actuellement, et on s'est entendu au début pour que les mémoires ne dépassent pas cela.

M. Boucher (Jean-Carol): J'y arrive. Il reste à peine quelques pages et le reste va être assez abrégé. Mais dans ce contexte-ci, nous devions donner les énoncés principaux parce que, quand même, cela touche des éléments qu'on pourrait qualifier de cuisine, et ce sont pourtant ces mêmes éléments de cuisine avec lesquels sont pris quotidiennement ceux qui exploitent des services de garde, quels qu'ils soient, et ils se posent souvent de nombreuses questions. Pour une fois que nous sommes au stade d'un avant-projet, je crois que pour la partie que je viens d'énumérer, il était important de le faire longuement.

Pour le reste, je suis d'accord avec vous, M. le Président, d'abréger et de résumer les autres points pour permettre ensuite à la commission de s'exprimer.

Le Président (M. Boucher): Je vous fais confiance et je vous remercie.

M. Boucher (Jean-Carol): Concernant la confidentialité des dossiers, on en a déjà parlé cet après-midi. En fait, sans être contre le principe de fournir à l'office des renseignements contenus dans les dossiers individuels, l'association croit que les renseignements à être fournis devraient être d'ordre objectif et ne point contenir de noms ou de signes qui permettraient d'identifier à qui on fait référence formellement.

En résumé, nous croyons qu'il devrait s'agir de renseignements d'ordre général et d'ordre statistique. D'autre part, nous nous permettons de suggérer à la commission la création, pour le ministère des Affaires sociales, d'un fichier central contenant les différents renseignements recueillis dans divers types d'enquêtes, de sorte que les garderies ne soient pas prises à répondre à cinq ou à

six reprises à un même questionnaire, relevant de cinq ou six directions du même ministère.

Malheureusement, nous retrouvons parfois un semblable état de fait. Alors, nous croyons que la création d'un registre central pourrait éliminer de semblables problèmes.

Concernant l'administration provisoire d'un service de garde par l'Office des services de garde à l'enfance, nous référant ici aux articles 47 à 54, nous croyons que les dispositions prévues dans ces articles sont exagérées et qu'elles vont au-delà des pouvoirs normaux qui pourraient être accordés à l'office. En effet, suivant ce libellé, nous soumettons que l'office devient à la fois juge et partie, et autant pour la fermeture que pour l'administration provisoire, pour résumer ici les commentaires de notre association, nous croyons qu'avant de fermer, de bloquer ou de refuser quoi que ce soit, il est important que le projet de loi prévoie que, pour fermer ou prendre en main un service de garde déjà existant, l'office, ou quelle que soit la structure établie par le projet de loi, ne le fasse que sur permission d'un juge de la Cour supérieure. Nous croyons en effet qu'il doit exister une présomption de bonne foi, de bon fonctionnement et de validité des opérations de la part des divers groupes qui y opèrent et que, de la seule décision du directeur de l'office ou des membres de l'office, aucune garderie, de quelque type qu'elle soit, ne saurait être fermée ou que son administration, dis-je, ne saurait être prise en main avant qu'un juge de la Cour supérieure ne se prononce, de sorte qu'un témoin indépendant puisse prendre une décision à cet effet. Nous suggérons simplement le modèle de l'injonction interlocutoire pour ce type d'action, ce qui permettrait à chacune des parties de se faire entendre et éviterait — comme je l'ai déjà dit — que l'office devienne à la fois juge et partie. Il me semble que c'est là un principe de justice naturelle qui se doit d'être respecté.

Concernant les octrois de subventions, les remarques de l'association ont été brèves pour une seule raison. Toute la question des subventions relève des projets de règlement, que nous ne connaissons pas, et nous serions malvenus de vouloir faire quelque commentaire que ce soit. D'autre part, nous nous permettons simplement de suggérer et de requérir du gouvernement au pouvoir que le régime de subventions, quel qu'il soit, soit clairement établi, clairement déterminé, et qu'il ne laisse aucune place à l'arbitraire, de quelque sorte que ce soit.

Concernant l'inspection des livres et comptes d'un titulaire de permis, l'association croit que l'office pourrait avoir le droit de réviser les livres et comptes d'un titulaire de permis, pour autant que le même titulaire ait déjà bénéficié d'une subvention ou d'une aide gouvernementale, de quelque sorte que ce soit. Si le titulaire d'un permis n'a reçu aucune aide gouvernementale, nous croyons que seul le ministère du Revenu ou le ministère des Finances pourrait avoir un droit de regard sur les livres comptables du titulaire du permis.

Concernant d'autre part les infractions et peines, nos remarques sont les mêmes que celles mentionnées précédemment. Nous croyons qu'aucune fermeture ou aucune destitution d'aucune sorte ou aucun arrêt de fonctionnement ne devrait être permis sans l'autorisation d'un juge de la Cour supérieure, car nous croyons qu'il y aurait là un arbitraire de premier ordre.

Enfin, sur la question des droits acquis, nous constatons que l'article 88 considère les garderies à but lucratif existant au 22 août 1979 comme n'étant point soumises à l'avant-projet de loi. Dans un premier temps, nous aimerions souligner à cette commission que le projet de loi oublie de façon complète les sociétés et les individus qui exploitaient déjà des services de garde avant cette même date et qu'à tout le moins, les individus et les sociétés doivent être inclus dans le même article 88 et non point seulement les corporations à but lucratif. Par ailleurs, en regard des principes premiers que j'explicitais précédemment, nous croyons davantage que l'article 88 ne saurait avoir aucune utilité si le gouvernement en place, dans le respect des besoins spécifiques de certaines familles et de certains enfants et dans le respect de la volonté individuelle des parents, inscrit les garderies à but lucratif, les sociétés et les individus opérant des services de garde dans le contexte de son article 31.

Nous vous remercions.

Le Président (M. Boucher): Merci, Me Boucher. M. le ministre.

M. Lazure: M. le Président, je n'ai pas l'intention de reprendre les points un par un; il y en a trop. Je vais surtout m'attarder aux points fondamentaux de la présentation de l'Association des propriétaires de garderies. (21 h 45)

Je pense bien que le premier point fondamental, c'est la proposition qui nous est faite par ce groupe d'étendre l'émission de permis nouveaux aux garderies à but lucratif. Tout le reste, nous en prenons note et il y a des choses avec lesquelles nous sommes d'accord et d'autres qu'on va étudier, mais je vais m'attarder à ce point fondamental. L'association est habile. Elle part en compagnie de mon collègue, M. Landry. C'est de bonne guerre, mais quand on cite M. Landry, le ministre d'État au développement économique, on fait un tout petit peu d'adaptation puisque, quand il parle de l'"entrepreneurship" — un terme que vous avez employé souvent — la citation que vous nous présentez du ministre, de mon collègue, elle parle bien du secteur privé et non pas nécessairement du secteur à but lucratif. Je répète encore une fois que les garderies qu'on est porté à considérer comme publiques sont effectivement des garderies privées à but non lucratif. Les garderies privées, justement, dans notre esprit, étant donné qu'elles sont axées, qu'elles sont à la disposition de l'initiative des groupes de parents et qu'elles sont conditionnées par l'esprit d'initiative des groupes de parents, pour nous, c'est un instrument, un médium qui se prête tout à fait aux

objectifs d"'entrepreneurship" dont vous parliez tantôt. Je pense que les principes qui nous guident en voulant favoriser les garderies à but non lucratif — entre parenthèses, je vous fais remarquer, ainsi qu'aux membres de la commission, que c'est la politique du ministère des Affaires sociales depuis 1974 et non pas depuis l'élection du 15 novembre 1976 et vous le savez fort bien; donc, il faut que cela soit clair dans l'esprit de tout le monde — c'est une politique que nous n'avons pas initiée, mais avec laquelle nous sommes d'accord. Cela arrive de temps à autre que nous soyons d'accord avec des politiques qui ont été initiées par le gouvernement antérieur, le gouvernement du Parti libéral. Cela en est un exemple. Cela arrive parfois et...

M. Grenier: Je vous signale qu'ils se sont fait battre avec cette politique-là.

M. Lazure: Cela reste à voir.

M. Pagé: On en sait quelque chose, vous savez.

M. Lazure: Nous pensons que les parents doivent avoir le rôle — on en a parlé toute la journée — majeur dans la mise sur pied d'une garderie, dans l'administration, la direction, l'orientation d'une garderie. Nous avons une conviction profonde à cet effet et pour nous, la garantie importante pour que ceci puisse se faire, c'est justement que ce soit une garderie à but non lucratif. On conçoit mal une garderie à but lucratif, comme vous le disiez tantôt; vous avez dit "profit", c'est un beau mot, cela peut profiter à tout le monde mais le "lucre", c'est un mot aussi, "lucratif" cela veut dire "lucre", cela veut dire avantage, cela veut dire intérêt, cela veut dire un profit, mais aussi une espèce de préoccupation de gagner son pain avec cela. Remarquez qu'il n'y a rien de mal à cela, mais je pense que de plus, dans le contexte du Québec 1979, cela répond aux désirs de la société québécoise, à tort ou à raison. On a vu la même chose dans le secteur hospitalier. Il y avait des hôpitaux à but lucratif. Graduellement, la société a trouvé que c'était une chose qui n'était pas tout à fait correcte. Il y avait aussi beaucoup de foyers pour personnes âgées à but lucratif. La société a trouvé graduellement que ce n'était pas tout à fait correct. On peut constater certains changements dans l'opinion de la société. L'opinion de la société sera peut-être différente dans cinq ou dix ans, mais nous, comme hommes politiques, comme gouvernement, c'est un peu notre devoir de sentir le pouls de la société.

Nous avons la conviction que l'ensemble de la société est d'accord avec ce principe général que, quand il s'agit du bien-être des enfants, des personnes âgées ou des malades, l'État doit assumer, par le biais d'organismes bénévoles ou à but non lucratif, un rôle entier. L'État ne doit pas abdiquer, le gouvernement ne doit pas abdiquer sa responsabilité en confiant à un entrepreneur ou un individu, un groupe d'individus cette responsa- bilité extrêmement importante de veiller au bien-être d'une catégorie de la population. M. le Président, c'est à la fois pour nous une question de principe, mais en même temps c'est une question de continuité avec une politique qui a été établie il y a quelques années. Que je sache, cette politique établie depuis cinq ans n'a pas suscité tellement de protestations et d'opposition dans la société québécoise, sauf pour l'association des propriétaires, évidemment, et c'est normal. J'ajouterais aussi que, si M. le porte-parole nous disait tantôt que les parents sont représentés dans la gestion d'une garderie à but lucratif, on pourrait s'interroger à savoir si ces garderies seraient prêtes à ce que les conseils d'administration soient majoritairement composés de parents qui utilisent la garderie. Je serais curieux d'entendre votre réponse à cette question.

Enfin, juste un ou deux points spécifiques. Vous semblez inquiets des pouvoirs de directive du ministre. C'est une disposition qu'on retrouve dans un certain nombre de projets de loi, encore là, autant sous l'ancien gouvernement. Par exemple, dans la Loi de la Régie de l'assurance-maladie, il y a un pouvoir de directive du ministre. Je pense qu'il faudrait jouer le jeu de l'autruche pour prétendre que l'office doit être un organisme complètement indépendant et non influençable par le pouvoir élu, le pouvoir politique. Je pense que c'est une grande illusion. Il est bien évident que l'office est une émanation du gouvernement, mais, au lieu d'en faire simplement une direction du ministère, nous pensons, un peu comme la garderie, où il y a présence majoritaire des parents-usagers, que l'office a l'avantage d'avoir comme gestionnaires des gens qui sont beaucoup plus proches du milieu, qui sont beaucoup plus proches du service que si nous avons une structure émanant du ministère comme une direction générale. Je ne pense pas qu'il faille se scandaliser du fait que ce projet prévoie le pouvoir de directive ministériel. J'ajouterai, cependant, que ce pouvoir de directive est quand même tempéré par deux choses; par le Conseil des ministres et par le dépôt nécessaire à l'Assemblée nationale. Il faut bien comprendre qu'il n'y a aucun ministre qui va s'amuser à émettre des directives ministérielles à un tel office puisqu'il a à en rendre compte autant au Conseil des ministres qu'à l'Assemblée nationale.

Les renouvellements de permis, dans notre esprit et dans le texte de la loi, il n'y a pas de régime particulier pour les garderies à but lucratif par rapport aux garderies à but non lucratif. On dit simplement que c'est objet de réglementation et, là aussi, je pense que c'est tout à fait normal pour ce genre de projet de loi. Enfin, la même remarque pour l'administration provisoire, la tutelle. Dans la plupart des ministères qui ont des réseaux à administrer, l'Éducation, les Affaires municipales ou les Affaires sociales, il y a un pouvoir d'administration provisoire qui est utilisé peut-être quelques fois par année, dans certains cas. Je pense que c'est une prudence que l'État doit exercer de maintenir ce recours dans certains cas. M. le

Président, en résumé, si le projet de loi ne parle des garderies à but lucratif que pour maintenir les droits acquis, c'est parce que nous pensons que la formule idéale pour le développement des garderies à l'avenir — c'est ce qui s'est fait depuis quatre ou cinq ans — c'est par le biais des groupes de parents, par la biais des garderies à but non lucratif contrôlées par des parents-usagers. C'est aussi parce que nous pensons que, socialement, la population trouve normal qu'autant l'ensemble des services scolaires que l'ensemble des services hospitaliers soient administrés, gérés, si vous voulez, dispensés par des corporations à but non lucratif.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. le ministre. Me Boucher.

M. Boucher (Jean-Carol): Si vous me permettez simplement quelques points sur ce que M. le ministre a avancé, M. le Président, le ministre a parlé de continuité. À cet égard, j'aimerais souligner au ministre que, dès qu'un parent change de secteur, de coin ou dès que son enfant cesse de fréquenter la garderie, ce même parent n'est plus nécessairement au conseil, de sorte que, dans l'optique d'une garderie à but non lucratif, gérée au conseil d'administration majoritairement par des parents, la continuité va être quelque chose d'assez difficile à réaliser. Il y aura une certaine forme de chaos ou de difficultés de fonctionnement due à cette rotation qui est normale. Les enfants évoluent et grandissent. À moins qu'on n'ait affaire à une mère de famille qui a quatre ou cinq enfants qui partent de zéro à cinq ans à la suite, vous êtes certain que votre conseil d'administration va être modifié.

Alors, je pense que, sous l'aspect de la continuité, la garderie à but lucratif sert beaucoup mieux la population que la garderie à but non lucratif ne peut la servir. D'autre part, si l'on se replace dans la question de l'abdication des responsabilités, je ne crois pas qu'en considérant les garderies à but lucratif à part entière dans le projet de loi le gouvernement abdique d'aucune façon sa responsabilité.

La responsabilité gouvernementale, comme nous la retrouvons dans l'avant-projet de loi, repose essentiellement sur l'office et c'est le motif pour lequel notre association est d'accord avec l'établissement de l'office. Dans les faits, ce que l'association reconnaît, c'est que l'office va effectuer un certain tamisage du grand nombre de garderies existant actuellement, de quelque sorte qu'elles soient. L'office va mettre de l'ordre dans les garderies et va s'assurer que les garderies qui continueront à fonctionner seront de qualité et seront valables, quelle que soit la structure à l'intérieur de laquelle la garderie fonctionne.

Sous cet aspect, nous ne croyons pas que le fait que les garderies à but lucratif existent soit un handicap à cette responsabilité gouvernementale, bien au contraire. Concernant, d'autre part, le désir de favoriser les garderies à but non lucratif, nous croyons que le fait de favoriser lés garderies à but non lucratif n'est absolument pas incompatible avec l'existence des garderies à but lucratif dans le cadre du projet de loi général.

Je ne crois aucunement, M. le Président — je pense que le ministre sera d'accord avec moi — que le fait de favoriser un type de garderies puisse inclure le fait d'exclure un autre type de garderies. On peut favoriser un type, tout en ayant un autre type à l'intérieur du projet de loi. Je ne pense pas que l'on doive fermer la porte formellement aux garderies à but lucratif pour favoriser les garderies à but non lucratif. Il n'y a aucun synonyme, à mon sens, entre les deux.

On parlait des parents également. M. le Président et M. le ministre me permettront de leur apporter le point suivant et beaucoup de propriétaires de garderies vous le diront aussi. Lorsque le parent a fait sa journée et reprend son enfant le soir, je ne pense pas que le premier désir du parent soit de s'occuper d'administrer une garderie.

Le premier désir du parent, quand il est 18 heures ou 19 heures, c'est de prendre son enfant, d'avoir un contact avec lui, de le voir un peu et de le coucher avant qu'il soit trop tard. C'est le premier désir du parent. Je pense que, si on veut être logique eu égard à ce constat qui est fondamental pour quelque parent que ce soit et de quelque nature qu'il soit, on reconnaîtra que la garderie à but lucratif vient justement pallier ce point et que, tout en permettant au parent de le faire, ne l'oblige pas à s'intégrer à l'administration de la garderie et respecte le premier désir du parent qui, le soir venu, veut reprendre contact avec son enfant. (22 heures)

Je pense, M. le ministre, que ce principe est très important et que, dans cette optique, le fait de garder à l'intérieur d'un projet de loi les garderies à but lucratif n'est absolument point incompatible avec tous les objectifs du gouvernement, lesquels sont, évidemment, partagés par l'association, exception faite d'exclure les garderies à but lucratif du champ des services de garde à l'enfance.

M. Lazure: Dans l'hypothèse où des parents voudraient s'occuper d'un conseil d'administration d'une telle garderie, est-ce que vous les admettriez majoritairement au conseil d'administration?

M. Boucher (Jean-Carol): M. le ministre, je pense qu'à cet effet, ce serait plutôt aux propriétaires ici à répondre, mais on a discuté de ce point. Vous pourrez le leur demander, je pense quand même que je ne suis pas le seul interlocuteur devant la commission, et ils vous diront tous que l'intérêt majoritaire du parent de confier son enfant à la garderie à but lucratif est d'abord de connaître le propriétaire de la garderie, d'avoir une relation individuelle avec ce propriétaire et de pouvoir faire des récriminations, des demandes ou des reproches s'il y a lieu. Dans le cadre d'une garderie à but non lucratif, vous avez un conseil d'administration. Qui est le conseil d'administra-

tion? Qui est le pouvoir décisionnel? C'est tout le monde, mais c'est personne. Dans le cadre des garderies à but lucratif, vous pouvez identifier l'autorité, vous pouvez identifier l'interlocuteur valable et vous pouvez vous exprimer à lui. Pour le reste, je cède la parole aux gens qui sont avec moi, ils pourront vous dire, en fait, le désir premier du parent. On peut présumer du désir d'administrer, mais je pense que des gens qui, comme mes parents, sont de simples travailleurs, quelqu'un comme mon père, qui était plombier pour une compagnie de chemin de fer, n'est pas intéressé, le soir venu, à s'occuper de l'administration d'une garderie. Il est beaucoup plus intéressé à reprendre le contact avec ses enfants. Je ne pense pas, M. le ministre, que la majorité de la population québécoise soit composée de professionnels comme vous et moi. Je pense que sur ce point, nous devons prendre en considération la nature des gens qui confient leurs enfants à la garderie.

Le Président (M. Boucher): Mme le député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Je veux remercier les porte-parole de l'Association des propriétaires de garderies du Québec pour leur mémoire. De façon générale, je pense qu'il y a plusieurs éléments touchant les pouvoirs éventuels de l'office qui ont été notés par vous et qui, je pense, méritent d'être examinés de plus près. Je pense que c'est également l'intention du ministre quant à cela. Certains pouvoirs pourraient quand même, à certains égards, être excessifs et les remarques que vous avez faites pourront également être utiles à toutes les autres garderies, qu'elles soient à but lucratif ou non. Je vous en remercie. Je ne reviendrai pas sur chacun de ces éléments; vous les avez soulevés d'une façon précise.

Je voudrais quand même revenir sur le problème fondamental de l'existence de garderies privées à but lucratif versus les garderies privées à but non lucratif. Le ministre a souligné qu'en 1974 — je pense que c'est probablement suite à l'adoption de la politique du plan Bacon — on a gelé, dans une certaine mesure, ou on a arrêté le développement des garderies à but lucratif, c'est ce que je crois comprendre. Je n'étais pas membre du gouvernement à ce moment-là ni même simple député; je n'étais simplement pas à l'Assemblée nationale. Il reste qu'aujourd'hui, on le fait d'une façon officielle ou on pourrait le faire de façon officielle si on s'en tient à l'avant-projet de loi et s'il était adopté tel quel. Je pense qu'il faut se poser des questions très sérieuses qui touchent, évidemment dans le cas qui nous occupe, les garderies, mais aussi l'ensemble du problème du secteur privé.

Le ministre se souviendra qu'au mois de décembre, nous avons discuté assez longuement d'un autre projet de loi qui fut finalement adopté, le projet de loi no 103 dans lequel, aussi, on voulait mettre un frein officiel et légaliser, si je peux dire, le développement des centres d'accueil privés pour personnes âgées ou malades en soins prolongés. Le ministre, pour des raisons dans lesquelles je ne voudrais pas entrer ce soir, a finalement été obligé de modifier quelque peu la teneur de ce projet de loi. Il me semble que l'association des propriétaires ici dit: Nous sommes prêts à nous soumettre à l'office, nous voulons même être intégrés à part entière par ce projet de loi en ce sens que les conditions, les règlements, etc., établis par l'office sont ceux auxquels nous devrons nous soumettre. Ils ont peut-être déploré l'absence d'une politique très structurée jusqu'à maintenant, qui a justement empêché de faire d'une façon absolument efficace le tri entre l'ivraie et le bon grain dans le domaine des garderies. Vous vous réjouissez qu'à ce moment-ci ce projet de loi, cet encadrement que l'office viendrait apporter pourrait permettre ceci. Je demeure convaincue que ce n'est pas en éliminant tout ce qui est dans le secteur privé qu'on rend meilleur le secteur public. Le même problème se pose à l'occasion du secteur privé d'enseignement et c'est un problème sur lequel le gouvernement — je l'ai dit brièvement ce matin — pour des raisons politiques fort compréhensibles — peut-être plutôt des raisons électorales — ne le fait pas à ce moment-ci. Le fera-t-il après le référendum? C'est une autre chose. Il faudra attendre le résultat du référendum. C'est une attitude d'attentiste.

M. Pagé: Oui, oui. Vous voulez déplaire au moins grand nombre de gens possible!

M. Lazure: Le projet de loi est très clair.

Mme Lavoie-Roux: Oui, mais c'est parce que cela touche moins de monde.

M. Lazure: Allons donc!

Mme Lavoie-Roux: Écoutez! Voyons donc!

M. Pagé: C'est gros comme la lune.

M. Lazure: On touche au moins 150 000 familles au Québec. C'est beaucoup de monde, ça!

Mme Lavoie-Roux: Non, vous ne touchez pas 150 000 familles en touchant au secteur privé des garderies.

M. Lazure: Non, mais...

Mme Lavoie-Roux: Vous ne touchez pas 150 000 familles en touchant le secteur privé des garderies.

M. Lazure: En touchant aux familles qui ont des besoins de services de garde, on touche à 150 000 familles.

Mme Lavoie-Roux: Je parle de l'élimination à plus ou moins long terme du secteur privé, je ne parle pas des soins de garderie en général. Je ne

pense pas qu'on prétende être capable de répondre à tous les besoins de garderie dans le secteur privé. Voyons donc, M. le ministre!

M. Lavigne: Je n'en suis pas au nombre de familles, j'en suis au référendum.

Mme Lavoie-Roux: Ah!

M. Lavigne: Ce n'est pas ce qui joue du tout.

Mme Lavoie-Roux: C'est vous qui y attachez beaucoup d'importance, je l'avais déjà oublié.

Une voix: C'est très important pour nous.

M. Pagé: Vous ne faites partie que du caucus, vous, pas du Conseil des ministres!

Le Président (M. Boucher): S'il vous plaît! On s'écarte.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, j'essaie bien...

Le Président (M. Boucher): Mme le député de L'Acadie.

M. Pagé: C'est tellement évident.

Mme Lavoie-Roux: Comme, dans le domaine de l'éducation, la priorité doit être, je pense, accordée au développement d'un secteur public, parce que c'est ordinairement là... Quoique, encore là, c'est public dans un sens mitigé, puisqu'il s'agit de garderies privées à but non lucratif, mais, pour autant que les garderies veulent fonctionner à l'intérieur des règlements et de toutes les directives de l'office, je ne vois pas quel est l'intérêt du gouvernement, ou même du précédent. Au moins, le précédent gouvernement ne l'avait quand même pas confirmé par une loi. Voulait-il éventuellement le modifier ou non? Je ne le sais pas.

M. Lazure: ... à faire une loi.

Mme Lavoie-Roux: Même si c'était cela, M. le ministre...

M. Pagé: On s'en reparlera tantôt, vous n'étiez pas là.

M. Lazure: On suivait quand même l'affaire de près.

Mme Lavoie-Roux: En tout cas, le principe fondamental en cause est que le gouvernement actuel, en dépit de certaines protestations officielles, a décidé de faire table rase du secteur privé. Il y va progressivement, comme je le disais tout à l'heure, pour des raisons politiques. Je lui demanderais d'examiner la chose d'une façon prudente. Je trouve même que c'est une certaine forme d'exploitation des gens qui oeuvrent dans ce domaine. Pendant 75 ans ou 80 ans, on leur a demandé d'assumer cette responsabilité; là, on ne peut pas s'accuser réciproquement et dire que c'est votre faute ou la nôtre, on n'y était pas. Pendant 75 ans, on leur a demandé d'assumer cette fonction.

Encore aujourd'hui, on serait peut-être un peu mal pris si, demain matin, tout le secteur privé fermait ou que le secteur qu'on va appeler public —par opposition à lucratif et à non lucratif - devait se porter acquéreur de tous les équipements qui existent présentement dans le secteur privé à but lucratif. Dans le fond, voici ce qu'on dit: Faites les poissons jusqu'au moment où on aura le temps de vous avaler, il y a quand même une question de justice. Autant il faut que, quand l'office aura établi ses règlements — et, à l'heure actuelle, le ministère des Affaires sociales doit être très rigoureux; peut-être n'a-t-il pas à sa disposition le personnel requis — les normes soient respectées, autant c'est agir de façon désinvolte après que de reconnaître qu'on permette encore l'existence ou le maintien, mais tant et aussi longtemps que cela fera notre affaire. C'est un sursis qu'on vous donne, mais après, peu importe ce qui arrivera.

J'aimerais quand même poser aux personnes qui sont ici présentes une question. Vous avez répondu à une question du ministre: Non, nous ne considérerions... Vous n'avez pas dit: Nous ne considérerions pas, vous avez dit: II semble que les parents ne soient pas tellement intéressés à faire partie d'un conseil d'administration. Ce qu'ils veulent, c'est, le soir ou en fin de journée, venir chercher leur enfant. Ils veulent surtout avoir une personne responsable qu'ils puissent reconnaître, comme responsable, à qui ils peuvent faire leurs récriminations, etc. Dans l'école privée du milieu scolaire il existe quand même des comités de parents ou des associations de parents-maîtres — enfin, peu importe le terme qu'on utilise. Mettriez-vous de côté également une formule comme celle-là? J'admets au départ que, souvent, les parents des garderies sont plus mal pris, au point de vue disponibilité de temps, que les parents de l'école privée; encore une fois, d'une façon générale, je ne dis pas cela d'une façon absolue. Mais cette possibilité des parents de se former en association à l'intérieur d'une école, comme on la retrouve à l'intérieur de l'école privée, est-ce que c'est une formule qui vous rebute complètement ou dont vous ne voyez pas le bien-fondé?

M. Boucher (Jean-Carol): Voici, Mme la députée de L'Acadie. Comme je le disais précédemment — et j'en ai rediscuté au repas ce soir avec plusieurs personnes à la table et d'autres qui sont à l'arrière pour être certain avant de m'avancer sur une affirmation dans ce sens-là; on m'a confirmé à nouveau que des comités de parents et des réunions de parents existent dans les garderies à but lucratif actuellement. La seule différence, c'est que les parents ne sont pas formellement membres d'un conseil d'administration et il y a certaines garderies qui ne sont pas des corporations

à but lucratif, qui sont des sociétés simplement administrées par une ou deux personnes, sociétés au sens du Code civil qui, elles aussi, ont leur comité de parents dans leur garderie. La consultation des parents et la participation des parents existent, sauf qu'ils n'ont pas tous les pouvoirs. Cela ne s'exerce pas, dis-je, dans tout le cadre prévu par la troisième partie de la Loi des compagnies du Québec, à savoir que ce sont des parents qui décident de l'achat de telle ou telle chose, de la couleur du mur, de ceci ou de cela, est-ce qu'on va agrandir, rapetisser, faire une demande pour une augmentation du nombre d'enfants. Les suggestions viennent des parents souvent, mais ce ne sont pas les parents qui prennent la décision finale parce que, évidemment, les parents ne siègent pas au conseil d'administration formellement, mais ils sont consultés. Les comités de parents existent et il n'y a aucun problème à ce niveau-là, en fait, sauf que le parent n'a pas, comme dans le cas d'une garderie à but non lucratif, l'obligation, s'il est membre du conseil, de siéger aux assemblées, de prendre les pouvoirs décisionnels, de léguer le tout à un gérant et tout le reste.

En fait, il existe un mécanisme à peu près semblable. Si on veut réellement, dans la pratique, saisir et cerner exactement la différence entre une corporation à but lucratif et une corporation à but non lucratif, on peut dire que dans un cas, le parent vote la décision — je parle là de la corporation à but non lucratif — il siège au conseil d'administration et on engage un gérant. (22 h 15)

Dans le cas de la corporation à but lucratif, le gérant est habituellement le promoteur, l'initiateur, l'entrepreneur premier du projet de garderie qu'il administre, qui a pris son époux, son frère ou son voisin ou quelqu'un pour l'aider à avoir trois personnes pour respecter la Loi sur les compagnies du Québec, première partie, et les parents sont consultés. Ils agissent à titre consultatif et donnent leur avis aussi. En fait, dans le cas des garderies à but non lucratif, le gérant constitue celui qui a la supervision quotidienne durant les heures normales du projet de garderie, d'une certaine continuité, alors que les parents, eux, le soir ou à d'autres moments, se réunissent et administrent, prennent les décisions.

Dans la garderie à but lucratif, c'est l'individu qui est de l'autre bord, un peu comme le gérant, qui prend les décisions, qui administre quotidiennement, qui fonde ses décisions, très souvent, et c'est dans son intérêt, sur les commentaires des parents, parce que si l'individu prend sa décision à l'encontre des commentaires des parents, qu'est-ce qui arrive? Les parents retirent l'enfant et cela se termine là.

Au niveau pratique, à la limite, on obtient le même résultat. Ce que défend l'association, c'est le droit pour quelqu'un qui, par le passé, a implanté un projet de garderie, de continuer à l'implanter, comme il l'était, sous une forme à but lucratif, de société ou par un individu. Ce que les gens qui sont à la table avec moi reconnaissent, c'est que ce même esprit d'"entrepreneurship" va exister.

On ne peut pas nier cela; on forme les étudiants pour vouloir l'avenir de notre province, s'élever un peu et quitter ce qu'on appelait, jadis, les "porteurs d'eau".

Alors, parmi les gens qui étudient dans le secteur des techniques de garderie, il est certain qu'il va s'en trouver qui vont vouloir s'impliquer davantage, qui vont vouloir administrer quelque chose de semblable et le processus va se continuer.

Ce que nous demandons, c'est de reconnaître que le processus existe, qu'il a existé et qu'il peut se continuer, le tout, comme...

Mme Lavoie-Roux: Je m'excuse de vous interrompre, Me Boucher, parce que le temps passe. Si, par exemple, l'office faisait une obligation formelle aux garderies à but lucratif d'avoir une association de parents, pas responsable nécessairement de l'administration, mais une association de parents qui soit consultée régulièrement, est-ce que vous vous y soumettriez?

M. Boucher (Jean-Carol): C'est certain, Mme la députée, je suis convaincu — vous pouvez demander à tout le monde, vous allez avoir un "oui" massif — qu'il n'y a aucun problème à ce niveau. Au contraire...

Mme Lavoie-Roux: J'y vais rapidement, je voudrais juste que vous me répondiez "oui" ou "non". Du point de vue du contrôle de vos finances, etc., de votre tenue de livres, évidemment, tout le monde dit: Bien, ils font des profits. C'est lucratif dans le sens où le ministre... en fait, c'est la signification du terme, que c'est très payant. Seriez-vous opposés à ce que l'office puisse examiner vos livres, par exemple?

M. Boucher (Jean-Carol): Voici. Les remarques que nous avions dans le rapport, constituaient principalement le fait que s'il y avait quelque subvention que ce soit accordée par le gouvernement, de quelque nature qu'elle soit, il est certain qu'à ce moment, le gouvernement, accordant une subvention, a plein droit de regard.

Mme Lavoie-Roux: De la même façon que pour l'école privée?

M. Boucher (Jean-Carol): Exactement. Si le gouvernement accorde une subvention, il est normal, il est même nécessaire que le gouvernement intervienne par la suite, croyons-nous, pour vérifier, examiner et s'assurer que les deniers des contribuables sont utilisés à bon escient; cela tombe sur le sens, je pense. Vouloir le refuser...

M. Lazure: Une mise au point. Dans le cas des garderies, étant donné que l'État subventionne les parents, qui, eux, choisissent d'envoyer l'enfant à la garderie à but lucratif ou non lucratif, il est clair — on n'a pas à faire l'hypothèse — que si l'État subventionne, oui, on ouvrira les livres. Je vous dis que l'État subventionne actuellement les garderies

Dans la garderie à but lucratif, c'est l'individu qui est de l'autre bord, un peu comme le gérant, qui prend les décisions, qui administre quotidiennement, qui fonde ses décisions, très souvent, et c'est dans son intérêt, sur les commentaires des parents, parce que si l'individu prend sa décision à l'encontre des commentaires des parents, qu'est-ce qui arrive? Les parents retirent l'enfant et cela se termine là.

à but lucratif par le biais de subventions aux parents.

M. Boucher (Jean-Carol): Là-dessus, je m'avance peut-être, mais...

Mme Lavoie-Roux: Je m'excuse. Je ne sais pas si quelqu'un d'autre du groupe, qui est impliqué dans la...

M. Boucher (Jean-Carol): Oui, demandez-le leur. Le problème avait été discuté un peu. Je pense qu'ils peuvent très bien répondre là-dessus.

Mme Bacon (Huguette): Je tiendrais à dire à M. le ministre que cela a été fait à l'assemblée de l'Association des propriétaires de garderies privées. On voudrait vous demander, au même titre que ce que vous avez fait avec les médecins, d'établir une courbe des salaires minimaux et maximaux. Vous allez voir que la question de gros sous, on ne la fait pas. Je vous demande de le faire. C'est votre devoir de le faire exactement comme vous l'avez fait pour les médecins ou tout autre groupe professionnel.

M. Lazure: Je ne pense pas avoir parlé de gros sous dans les remarques que j'ai faites.

Mme Bacon: Non, non. Je ne vous parle pas de gros sous, mais je vous dis simplement...

M. Lazure: Je sais très bien que les propriétaires de garderies à but lucratif ne font pas de gros sous. Je sais cela.

Mme Bacon: Je vous demande tout simplement — c'est un voeu de l'association — de demander à votre gouvernement d'établir une courbe d'après les salaires des garderies, ce qu'un propriétaire de garderie privée peut faire au minimum et au maximum. Je vous demande de le souligner.

Mme Lavoie-Roux: Seulement un dernier point.

Mme Bacon: À ce stade-là — je m'excuse — je ne vois pas d'inconvénient à vous montrer mes livres.

Mme Lavoie-Roux: Oui. Il y a seulement un dernier point sur lequel je veux vous dire qu'à première vue, en tout cas, je ne suis pas d'accord avec vous. C'est l'article, peut-être pas 88, mais un article où vous dites que si un groupe ouvre une garderie sans permis et l'exploite — vous pourriez peut-être me référer au bon article, peut-être 61... Enfin — à ce moment-là, l'office ne peut pas d'autorité fermer cette garderie qui a été ouverte d'une façon clandestine, sans qu'il y ait d'abord eu possibilité d'appel devant un tribunal d'une tierce personne qui juge, etc. Là-dessus, j'ai beaucoup de difficulté à vous suivre. D'une part, on dit qu'il faut un office, il faut quand même un cadre pour qu'on permette aux... Cela va être une chose très publique. Tout le monde va la connaître, etc. Je trouve difficile d'accepter que vous disiez que l'office ne peut pas intervenir pour faire évacuer — je pense que c'est le terme utilisé dans l'article 75...

M. Boucher (Jean-Carol): Vous êtes à quel article?

Mme Lavoie-Roux: À l'article 75.

M. Boucher (Jean-Carol): Ce n'est pas compliqué. On parle d'activités exercées sans permis ou sans autorisation, pour lesquelles un permis ou une autorisation peut être exigée. En fait, je pense qu'il y a lieu de voir le fait suivant. Quand j'en ai discuté avec les membres de l'association, on se rapportait à des expériences quotidiennes. Les membres de l'office peuvent, sous certains aspects, considérer que l'on exerce sans permis, mais il arrive parfois — je vous prie de croire en certains dossiers que j'ai déjà examinés, dont je me suis déjà occupé, où on accusait des gens de fonctionner sans permis et où on a fait la preuve que cette accusation était inexacte, compte tenu de tel ou tel point de droit. Si on laisse le tout fonctionner tel qu'écrit, cela veut dire que dès que l'office a décidé que c'est sans permis, le jugement est déjà rendu. Ce que nous voulons, c'est que si l'office croit qu'un individu fonctionne sans permis du même genre — et je crois d'ailleurs qu'on parle exactement dans cet exemple de l'injonction interlocutoire — à moins de 24 heures d'avis, vous avez votre autorisation, mais l'office a dû aller voir une tierce personne indépendante, lui expliquer la question et dans les 24 ou les 48 heures, il obtient la fermeture. Ce que nous refusons, c'est que la seule décision de l'office soit suffisante pour fermer. À ce moment-là, on peut — vous m'excuserez le parallèle — se trouver avec un second Roncarelli, d'une façon ou d'une autre. Nous voulons qu'une tierce personne indépendante intervienne parce qu'il arrive parfois — et je vous prie de me croire — dans le monde judiciaire, qu'on accuse des gens ou qu'on poursuive des gens pour avoir exercé sans permis sous tel ou tel motif et qu'à la fin du procès, on dise: Non, le permis était valide sur une question de droits acquis ou sous d'autres questions semblables. C'est ce principe qu'on a voulu sauvegarder en mettant cette remarque.

Mme Lavoie-Roux: Je vous remercie. Je pourrais continuer, mais on va se limiter.

Le Président (M. Boucher): Merci, Mme le député de L'Acadie. M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: M. le Président, je vais tâcher de faire très brièvement puisqu'on s'était entendu pour terminer à 22 heures. Il est déjà 22 h 25. J'aurais bien voulu prendre une bonne demi-heure pour questionner ce groupe, mais je pense qu'on devra terminer dans quelques minutes seulement.

J'ai aimé bien sûr la présentation de votre mémoire et c'est regrettable que cela arrive à cette heure de la nuit. J'aurais eu besoin de questionner davantage là-dessus. Je peux vous dire qu'avec l'intervention que le ministre a faite tout à l'heure, quand il a comparé à cette volonté de l'opinion de la société qui veut qu'on ait commencé par les hôpitaux privés et qu'on les ait fermés... On est rendu aux centres d'accueil privés qu'il faudrait également fermer, toujours selon l'opinion de la société, et, maintenant, ce serait le tour des garderies privées. Je dois d'abord dire au ministre...

M, Lazure: De fermer des garderies.

M. Grenier: Non, le terme n'est pas encore compris dans la loi, mais, ne vous en faites pas, le glas est sonné, on l'a compris tout à l'heure. Vous ne me ferez pas croire le contraire. Quand je lis la loi, je commence à avoir l'habitude qu'un ministre commence par nous dire: Vous savez, c'est l'opinion de la société, d'abord, ce n'est pas l'opinion de la société. C'est l'opinion de technocrates autour de vous et de quelques personnes qui veulent absolument l'omniprésence de l'État dans tous les secteurs. Ce sont ces personnes, ce n'est pas la société, je m'excuse. Mais vous devriez écouter ce qu'on a entendu cet après-midi.

M. Lazure: À but non lucratif, ce ne sont pas des garderies d'État.

M. Grenier: Pardon?

M. Lazure: Des garderies à but non lucratif, ce ne sont pas des garderies d'État.

M. Grenier: L'État paie, il est patron. C'est cela qui s'en vient. Vous n'avez pas de dessin à nous faire. Les déclarations que vous avez faites tout à l'heure ne m'ont pas pris par surprise. Je le sens depuis le début de la loi et je pense que le groupe qui est devant nous est conscient de ce qui se passe. Le glas des garderies à but lucratif, vous l'avez sonné quand on voit ce que vous disiez cet après-midi, qu'il en reste encore 80, que cela semble lourd à peser, à supporter. Il me semble que j'aurais aimé qu'on entende ce gouvernement qui parle continuellement de pluralisme dans cette société tenter par tous les moyens d'être omniprésent dans chacun des projets de loi. On en a vécu d'autres. Là-dedans, je fais appel au groupe qui est ici devant nous. Je ne reprendrai pas les propos de cet après-midi, mais je fais appel à ce groupe pour être présent au moment de la loi, pour venir faire des suggestions à l'Opposition et nous aider à faire que, dans la loi, on se reconnaisse et que ce ne soit pas un "candy" préréférendaire, qu'on ne fasse pas tout à fait les courbettes qu'il y a à faire devant ce monde pour se faire le moins d'adversaires possible. C'est bien sûr que ce n'est que 60 institutions, ce n'est que 5000 enfants. Ce n'est pas pesant dans la balance référendaire, mais il reste une chose, c'est que je rappelle à ce groupe que c'est important dans la transformation de notre société, ce qui se produit ce soir, ce qui va se produire dans l'adoption de la loi. Je demande à ce groupe d'être présent ici au moment de la loi, pour qu'on conserve le secteur privé, si vous voulez. Qu'il n'arrive pas là-dedans ce qui est arrivé dans d'autres secteurs.

Cette volonté, ce n'est pas la volonté de la société. C'est la volonté d'un groupe très limité, et je fais un devoir à ces groupes qui sont ici ce soir d'être présents à l'adoption de la loi. On a besoin de vous autres. Si le gouvernement n'en a pas besoin, moi, j'en ai besoin comme membre d'un parti d'Opposition. J'ai besoin de votre appui ici au moment de l'adoption de la loi. Il faut que vous veniez nous dire comment vous devez continuer d'exister dans notre société. On veut que cette mosaïque soit complète au Québec. Je l'ai dit après-midi, je ne reprends pas ces termes. Vous l'avez saisi, je pense. Si vous n'êtes pas là au moment de l'adoption de la loi, ne venez pas accuser le gouvernement et ne venez pas accuser l'Opposition. On a besoin de vous. C'est dommage, vous êtes trop tard, il n'y aura pas une ligne d'écrite nulle part sur ce que vous avez dit, parce que vous êtes trop tard. Si vous aviez été ici demain matin, cela aurait été différent. Vous aviez un dossier qui était important ce soir. J'aurais aimé que vous soyez le premier demain matin pour le soumettre. Cela va passer inaperçu, si vous n'êtes pas présents. Si vous n'y êtes pas, ne venez pas me blâmer, si vous n'êtes pas présents à l'adoption de la loi.

C'est votre rôle à vous d'être ici. Je veux que vous nous aidiez à continuer dans cette voie à mettre à la loi des dents pour être sûr qu'on conserve dans cette loi le statut de garderies privées à but lucratif. On a besoin de cela, nous autres aussi, dans la société.

Je vous le dis carrément, à vous autres, et je le dis au ministre, je le dis aux partis qui sont ici: On a besoin de cela dans notre société et on ne refoulera pas du revers de la main ces années qu'on a passées et qui ont fait des preuves. Je pense bien qu'on aurait peut-être avantage à lire l'histoire de la petite poule devant le ministre. Je la lui expédierai, s'il ne l'a pas lue. Maintenant, vous savez, on en a vu d'autres et méfiez-vous des règlements. Ils ne sont pas produits. Ils ne sont pas donnés avec la loi. Méfiez-vous des règlements. On a vu d'autres lois. Vous viendrez voir une loi qui est difficile à comparer, c'est une loi de l'agriculture, j'aimerais vous parler plus longuement des problèmes que j'ai vécus cette semaine. Quand il est question de fermer un établissement ou de transporter un permis à une autre personne, les difficultés qu'on crée par les règlements, vous viendrez voir cela. Il y en a plusieurs qui subiront des fermetures à cause du transfert de permis qui devient absolument inacceptable, absolument pas possible pour les gens. Je vous mets en garde contre cela. Dans les cas de fermeture, dans les contestations d'activités, des transferts de permis aussi; on peut vous dire parfois: À qui voulez-vous

transporter votre permis? À des personnes, alors que c'est absolument impossible de les remettre à ces personnes.

J'ai aussi aimé ce que vous avez dit sur l'avis de consultation — je ne veux pas être plus long — à l'article 42, quand vous avez dit, par exemple, que le gouvernement pourrait fermer... Ce n'est pas de même que cela se fait, c'est bien sûr. Il faut que ce soit corrigé dans la loi. On ne peut pas décider que cela va fermer à tel moment, quand la personne est déficitaire chaque semaine ou chaque mois ou bien que l'on décide, quand pour une personne, cela va bien, de mettre la hache là-dedans et d'implanter une autre garderie sans but lucratif. Cela ne doit pas se faire comme cela. Je pense que, quand on veut avoir une mosaïque complète de gens qui veulent oeuvrer au niveau du Québec, ce n'est pas comme cela qu'on fonctionne. J'ai aimé l'avis que vous avez émis, Me Boucher, à savoir que l'on doit s'entendre sur le nombre de mois ou de semaines pour faire parvenir l'avis de cessation à une personne qui doit fermer sa garderie; j'ai aimé la façon dont vous l'avez présenté. (22 h 30)

Le mémoire que vous avez présenté aujourd'hui, même si vous ne représentez qu'une soixantaine d'institutions. Je pense qu'il est important qu'on en entende parler prochainement quand on aura cette loi devant nous. Si cela vous est possible, faites les efforts nécessaires pour être présents à ce moment-là. Maintenant, encore une fois, j'ai la conviction qu'on se gargarise souvent de mots ici et j'ai la ferme opinion que ce n'est pas la société qui demande ces choses-là; ce sont quelques personnes seulement. Vous êtes convaincus du contraire. Moi, je suis convaincu du contraire aussi. Ne vous en faites pas, il y a aussi d'autres secteurs. Ne partez pas coupables, hein! Vous n'êtes pas coupables, dites-vous bien cela. Il y a aussi d'autres secteurs sans but lucratif. Il y a des gens qui créent des "jobs" dans ces secteurs; il ne faut pas avoir honte de le dire. Ce n'est pas seulement dans le secteur privé que cela arrive; cela arrive dans le secteur public. Dans le secteur public "sans but lucratif", il y a des gens qui vont là pour créer des emplois. Il faut dire cela. Je veux les deux. Chez nous, on a besoin du secteur "sans but lucratif", mais je veux aussi que le secteur privé vive à côté. Ce n'est pas tout de dire à ces gens-là: Vous voulez faire des gros sous et nous autres on est des anges. Cela n'est pas vrai. Il y a des gens qui veulent former des garderies pour se créer une "job". C'est clair cela. Et sans but lucratif. Je vais vous donner des noms si vous en avez besoin ou si vous ne me croyez pas. Je les fournirai au ministre. Il y a une limite à faire rire de nous autres, à un moment donné, seulement pour dire: II faut changer pour changer. Vérifiez autour de vos gens dans votre ministère et vous allez trouver des appuis fort importants. Je vous conseille d'ici le référendum de ne pas faire trop de bouleversement dans ce secteur-là: cela ne sera pas payant.

M. Gosselin: M. le Président...

Le Président (M. Boucher): M. le député de Sherbrooke.

M. Gosselin: ... j'apprécierais de pouvoir formuler encore quelques questions au groupe. Je constate que le député de Mégantic-Compton était très bien parti. Je pense que tous les membres de la commission, de quelque parti que ce soit, ont très bien compris les représentations du groupe ici ce soir. Je l'ai moi-même manifesté tout à l'heure. Je ne parle pas au nom de tout mon groupe, mais ce sont des sujets qui sont discutés chez nous aussi. Il y a aussi des gens chez nous qui sont ouverts à ces réalités et qui plaident pour la pleine reconnaissance des expériences acquises au Québec dans ce secteur comme dans d'autres. Je ne voudrais pas que le député de Mégantic-Compton laisse croire à tout le monde que le monopole de la vérité, l'Union Nationale le détient, ou, en tout cas...

M. Grenier: Ah, non!

M. Gosselin: ... qu'il existe une seule vérité perçue de ce côté-là.

M. Grenier: J'en suis bien convaincu.

M. Gosselin: II y a une question qu'il me plaît de vous formuler parce qu'on vous connaît mal. D'accord? Cela tient peut-être au statut de clandestin. On utilise ce terme pour parler des garderies comme pour parler des foyers. J'aimerais savoir ceci: La tradition de vos membres, quelle est-elle? La moyenne des groupes de votre association en activité ont combien d'années d'administration, par exemple? La moyenne, de combien à combien varie-t-elle?

Mme Bacon: Dix, quinze, vingt ans.

M. Gosselin: Dix, quinze, vingt ans. Alors, c'est une moyenne de sept ou huit ans d'activité, j'imagine.

M. Boucher (Jean-Carol): Au moins. Une voix: Et plus.

M. Boucher (Jean-Carol): Au moins. M. Gosselin: Oui.

M. Boucher (Jean-Carol): Je ne pourrais pas vous donner de chiffres, mais comme procureur de l'association, je peux dire que les garderies que l'on retrouve le plus souvent représentées existent au moins depuis six à sept ans, comme il faut; celles que nous représentons. Votre moyenne de sept ans est valable, je pense.

M. Gosselin: Juste en termes d'information supplémentaire dans la perspective de mieux connaître qui vous êtes, je sais qu'il y a des gens qui, après l'enseignement, se sont lancés dans les garderies. D'autres sont venus à partir de diverses

autres disciplines. Pourriez-vous nous faire un portrait professionnel ou scolaire de vos praticiens?

Mme Chambefort (France): J'étais assistante dentaire en spécialité pour les enfants et j'ai fait une technique de garderie après.

Mme Bacon (Huguette): Je ne crois pas que sur le panel, cela donne une vue, mais je peux vous dire, en gros, qu'il y a des infirmières, des professeurs, des institutrices, des puéricultrices, des professionnels d'autres secteurs qui sont venus se joindre à nous. Je ne suis pas tout à fait certaine, mais il y a aussi des mères de famille.

M. Gosselin: Je vous remercie infiniment.

Le Président (M. Boucher): Merci. M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Très brièvement, M. le Président. Je voudrais tout d'abord remercier nos intervenants de ce soir de leur mémoire. Sans être un spécialiste de la question des affaires sociales et ayant à m'occuper d'autres dossiers, on ne peut demeurer insensible au dossier des garderies. Mes premiers commentaires, M. le Président, seront tout d'abord adressés au ministre relativement à la référence qu'il a faite — je ne vous dérange pas? — à plusieurs reprises aujourd'hui au projet ou à ce qui avait été énoncé par le précédent gouvernement, dont j'étais député à l'époque, en 1974. Je trouve cela un peu cavalier de la part du ministre. Je trouve que c'est une faible défense de se ramener à un projet qui avait déjà été élaboré en 1974. De toute façon, le gouvernement qui était là en 1974 a été jugé. Il a été défait. On en sait quelque chose et je me le rappelle. C'est maintenant votre cru; c'est le cru du gouvernement; c'est vous qui avez maintenant la responsabilité du ministère des Affaires sociales. Le moins que je puisse dire, c'est que je trouve cavalière et un peu grossière votre référence à 1974.

Deuxième commentaire que je voulais formuler; je vous remercie et j'espère que le ministre a pris bonne note de vos commentaires, particulièrement sur ce que vous avez évoqué, Me Boucher, sur l'application de certains articles de la loi qui, à un juriste, doivent nécessairement impliquer des préoccupations, entre autres aux articles 3, 47, 75. J'espère que le ministre pourra, avec l'aide de son contentieux, voir les implications légales qui peuvent survenir avec le projet. Pour avoir fait la lecture de l'avant-projet, il m'apparaît, quant à moi que l'office aura des pouvoirs exorbitants et, de par la définition de l'office prévue à l'article 3, comme Me Boucher l'a signalé, l'article 33 du Code de procédure civile, c'est-à-dire le recours à la Cour supérieure, ne pourra pas s'appliquer. Dans plusieurs des cas, l'office sera juge et partie. Je ne pense pas que ce soit là une façon justifiée pour le législateur de permettre à un organisme d'être à la fois juge et partie.

Troisième commentaire, votre revendication et vos inquiétudes. Je dois tout d'abord, M. le Président, vous exprimer ma surprise du feu tout récent qui semble jaillir du côté des péquistes à l'égard de l'entreprise privée. L'entreprise privée a un handicap, un sérieux handicap, vous avez la méfiance du gouvernement. Il faut dire les choses comme elles sont. On a un gouvernement au Québec qui n'est pas contre l'entreprise privée, d'accord, mais il est particulièrement méfiant à l'égard de ce qui s'appelle entreprise privée, capital, intérêt et production. Aujourd'hui, que le député de Sherbrooke vienne nous faire un serment nouvelle vague à l'égard de sa foi dans l'entreprise privée, je ne veux pas lui imputer de motifs, cela se reproduit d'ailleurs chez plusieurs membres de l'équipe de la majorité ministérielle depuis quelques semaines, c'est pour le moins qu'on puisse dire attentiste, et on peut présumer tout au moins que cela s'inscrit dans le cadre d'une stratégie préréférendaire. D'ailleurs...

M. Gosselin: Je m'excuse, M. le député de Portneuf...

M. Pagé: J'ai bien dit que je ne voulais pas vous imputer de motifs, mais...

M. Gosselin: ... mais un homme a des traditions, des expériences et il peut se permettre à l'occasion de mettre ses convictions sur la table sans qu'on lui impute toutes sortes de motifs.

M. Pagé: J'ai bien dit que je ne voulais pas vous imputer de motifs, sauf qu'on ne le dit pas assez souvent dans votre parti que l'entreprise privée est au Québec et que l'entreprise privée est importante au Québec. Vous rappelez-vous ce qui est arrivé il y a deux semaines à votre ministre de l'Industrie et du Commerce, qui a claqué la porte? On pourrait s'en parler, mais on s'en parlera dans d'autres circonstances.

Pour revenir à l'entreprise privée, je voudrais tout simplement dire au ministre d'être prudent. Le ministre nous dit: Elle ne disparaîtra pas. Ce que le député de L'Acadie, ma collègue, a évoqué tout à l'heure, que le poisson allait nager jusqu'à ce qu'il soit avalé, je pense que c'est une crainte qu'on peut énoncer autour de la table et le ministre devrait profiter des modifications au projet de loi, parce que c'est un avant-projet de loi — on peut présumer qu'il sera modifié, que certains articles seront retouchés — et de l'intervention de cette association ce soir pour répondre à ses inquiétudes d'une part et, d'autre part, s'assurer que, dans le projet de loi, il y aura de la place pour l'entreprise privée à but lucratif. Je me permets un commentaire qui n'est peut-être pas celui de mon parti, mais je l'énonce quand même: je trouve un peu illusoire qu'on veuille donner l'administration aux parents des enfants en garderie.

À moins que je ne me trompe — je ne suis pas un spécialiste, M. le ministre, mais le chef de famille monoparentale ou le couple dont les conjoints travaillent, quand ils reprennent l'enfant

le soir, j'hésite à croire qu'ils aient beaucoup de temps à consacrer à l'administration de la garderie et aux réunions du conseil d'administration. L'expérience qui a été menée jusqu'à maintenant dans toute notre structure, qui a été mise sur pied par nous à compter de 1970 dans les hôpitaux, les CLSC, un peu partout, où, au conseil d'administration, c'est un peu tout le monde qui est là, je ne suis pas convaincu que cela ait toujours été concluant.

J'inviterais le ministre tout au moins à regarder cela et à y penser sérieusement avant de se lancer dans une politique comme celle-là. Il y aura des modifications à ce projet de loi. Il y a des choses auxquelles nous souscrivons dans ce que vous nous avez annoncé ce soir. Il y a des choses avec lesquelles nous ne sommes peut-être pas d'accord. On va le dire et on aura d'autres débats. Ce projet de loi sera déposé en première lecture. On aura un débat en deuxième lecture. On aura ensuite l'étude du projet de loi article par article, où on présentera probablement des amendements si le ministre n'en a pas présenté à notre goût. Mais soyez convaincus que, quant à moi, je suis satisfait de la présentation de votre mémoire. Comme juriste, je verrai entre autres à ce que des amendements soient apportés relativement aux pouvoirs exorbitants de l'office qui s'en vient.

Le Président (M. Boucher): M. le ministre.

M. Lazure: Deux mots, M. le Président. D'abord, avec l'arrivée du député de Portneuf, le débat risquait de changer de niveau et il a changé de niveau. Je pense que le député de Portneuf, qui n'a même pas suivi les débats, est malvenu non seulement pour imputer par la bande des motifs au député de Sherbrooke, mais aussi pour parler de ce qui est arrivé au gouvernement il y a deux semaines avec le ministre de l'Industrie et du Commerce et, surtout, pour venir dire que je me cache derrière l'action du gouvernement antérieur. J'ai simplement voulu...

M. Pagé: À deux reprises aujourd'hui...

M. Lazure: Ayez la décence de ne pas rn'interrompre. Je ne vous ai pas interrompu. J'ai simplement voulu renseigner les gens qui sont ici et dire, pour le journal des Débats, qu'il ne s'agissait pas d'une politique nouvelle. Je n'ai aucunement tenté de me cacher derrière l'ancien gouvernement du Parti libéral.

M. Pagé: Tant mieux.

M. Lazure: J'ai établi les motifs qui nous amenaient à présenter le projet comme nous le présentons, en toute bonne foi, et j'espère que le député de Portneuf va apprendre à maintenir le haut niveau des débats que nous avons eu dans cette commission jusqu'ici. Je remercie le groupe...

M. Pagé: M. le Président, là-dessus, je vou- drais quand même soulever une question de règlement et mon collègue va me le permettre. Je ne laisserai pas mon collègue, le député de Chambly et ministre des Affaires sociales faire...

M. Lazure: M. le Président, quel règlement? Quel numéro? Quel règlement?

M. Pagé: ... de tels commentaires. M. le Président, l'article...

M. Lazure: Quel article?

M. Pagé: ... 98.

M. Lazure: Quel article? Quel article?

M. Pagé: Je vais vous le dire... C'est qu'en commission parlementaire, on n'a pas le droit de soulever une question...

M. Lazure: 03?

M. Pagé: ... de privilège, mais on a le droit de soulever une question de règlement pour rétablir le privilège.

M. Lazure: Je vous demande quel règlement.

M. Pagé: Que le ministre des Affaires sociales me dise ce soir que je ne suis pas un spécialiste de la question et que je suis récemment arrivé, j'en conviens...

M. Lazure: Ce n'est pas cela. Je vous ai dit que vous changiez le niveau de la discussion quand vous arriviez.

M. Pagé: Je m'occupe du ministère du Travail, vous savez, et avec le paquet de grèves qu'on a au Québec, on ne peut pas toujours être ici. Je vous dirai: Le débat, on va le suivre et ce ne sont pas les commentaires du ministre des Affaires sociales qui vont m'empêcher, quant à moi, de donner mon point de vue sur le projet de loi et sur l'attitude tout à fait nouvelle et récente du gouvernement, qui semble avoir un nouveau préjugé à l'égard de l'entreprise privée.

M. Lazure: Vous sortez d'une boîte à surprise, M. le député.

M. Pagé: Voyons donc! On vous a vu venir.

Le Président (M. Boucher): D'accord. Merci. Oui?

M. Coneim (Georges): Je voudrais faire une petite déclaration qui viserait à modifier un tant soit peu les déclarations du ministre au début. Le ministre a dit qu'il faisait état d'une évolution ressentie par la population en ce qui concernait la transformation des établissements dans le Québec, en ce qui concernait les hôpitaux et les écoles. Je pense qu'il fait abstraction des 500 000

signatures de la pétition qui a été déposée au gouvernement et qui l'ont forcé à suspendre les procédures visant à abolir l'école privée.

M. Lazure: M. le Président, il n'a jamais été question d'abolir l'école privée. Je ne sais pas ce que cela vient faire dans la discussion.

M. Coneim: II y avait un moratoire. Vous avez dit qu'il y avait une... Comment dire?

M. Lazure: Cela ne relève pas du tout de la compétence de cette commission.

M. Coneim: Je pense que c'est une déclaration que vous avez faite que la population voyait une évolution et ne réagissait pas à une évolution dans ce sens-là. Or, je pense qu'il a été clairement soulevé avec ce problème des 500 000 pétitions une réaction violente de la part d'une grande partie de la population. D'autre part, il y a, je pense, une précision importante qu'il faut apporter en ce qui concerne le besoin des garderies. On dit que le besoin potentiel est de 150 000 familles. Notre association croit en la liberté des parents de choisir leur propre solution. (22 h 45)

Or, le gouvernement a tendance à préjuger de la volonté des parents. À peu près 20% à 30% des parents venant visiter une garderie, qu'elle soit privée, à but lucratif ou à but non lucratif, viennent nous voir et, contrairement à ce que pourraient penser les membres de cette commission, après interview, des fois, qui peut aller d'une heure à deux heures, nous disons aux parents: D'après ce que vous nous dites, pour le service que vous attendez, vous n'avez pas foi dans la solution de la garderie et ce n'est pas cette solution que vous cherchez. Vous avez un service qui est existant. Vous cherchez à l'utiliser, mais cela ne correspond pas à ce que vous attendez.

D'autre part, bien des parents dans la garderie ne sont pas vendus au problème ou à la solution de garderies ou à la solution de garde en milieu familial. Il y aura toujours une grande partie de la population qui voudra garder les enfants à la maison avec la mère, et je pense que nous abondons dans le sens du député de Mégantic-Compton qui, à cet égard, est d'accord que la population doit avoir le choix.

Dire que le besoin est de 150 000 familles, je pense que c'est exagérer un peu. D'autre part, nous avons eu des expériences très pratiques. Nous prendrons un exemple d'une population d'à peu près 20 000 personnes. Dans cette municipalité — je pense que le ministère a été tenu au courant par le biais du directeur des services de garderies — il y a eu un CLSC qui a voulu mettre sur pied une garderie populaire, malgré l'existence de six à sept garderies, qui avaient le choix de garderies à but non lucratif, dirigées par les parents, ou de garderies à but lucratif. On a pris les fonds publics pour faire de la publicité d'une part, de porte à porte, quatre fois de suite, parmi 20 000 de population. La première fois, il y a eu exactement trois personnes qui se sont présentées. La deuxième fois, il y a eu sept personnes. La troisième fois, quatre personnes.

D'après vous, pensez-vous qu'il y a un besoin réel de garderies dans ces environs? Je pense que si vous aviez 20 000 personnes avec des garderies existantes, on met trop l'accent sur le besoin impératif de garderies.

Le Président (M. Boucher): Merci.

Mme Bacon: Avant de terminer, j'aurais juste une dernière formulation...

Le Président (M. Boucher): Brièvement, s'il vous plaît.

Mme Bacon: ... qui s'adresse à M. Lazure. M. Gosselin, cet après-midi, a demandé au regroupement: Est-ce que vous voulez du secteur privé? Alors, je formule la question à M. Lazure. Est-ce que vous voulez du secteur privé?

M. Lazure: M. le Président, la réponse, c'est oui. Le texte du projet de loi le dit, quand on affirme que nous voulons maintenir les garderies à but lucratif qui existent. Alors, ma réponse, c'est oui, nous voulons du secteur privé. Nous voulons que le développement des garderies à venir se fasse selon une formule que j'ai expliquée à plusieurs reprises aujourd'hui, que j'ai encore expliquée ce soir, une formule qui est axée sur la participation — sans esprit de profit matériel, si vous voulez — majoritaire des parents, des usagers. C'est cela que nous voulons. Nous n'avons pas l'intention, en dépit de ce que les députés de l'Opposition ont pu vous faire croire, de fermer les 80 ou les 90 garderies privées à but lucratif qui existent.

Mme Bacon: Si vous n'avez pas l'intention de les fermer, pourquoi s'est-il créé auprès du ministère un précédent? Les permis se donnaient toutes les années. Vous les avez fixés aux deux ans, c'est-à-dire qu'ils se terminent en 1981. Mais, après 1981, qu'est-ce que vous allez nous demander?

M. Lazure: M. le Président, encore une fois, il y a un malentendu, parce que nous avons effectivement modifié, avec la loi 103, l'hiver passé, la durée des permis, non seulement pour les garderies, mais tout ce qui relève du ministère des Affaires sociales. Alors, cela n'a rien de particulier aux garderies.

Mme Bacon: Oui, mais, après 1981, qu'est-ce qui va arriver?

M. Lazure: Ce sera maintenu. Aussi longtemps — je l'affirme de façon très solennelle — que les garderies actuelles qui, à ma connaissance, ne présentent pas de problèmes et ne présenteront pas de problèmes, elles seront maintenues.

Mme Lavoie-Roux: Est-ce que les garderies actuelles peuvent se développer?

M. Grenier: Oui, pourvu qu'elles se conforment à l'esprit du gouvernement.

M. Lazure: Oui, il s'agit de non-émission de nouveaux permis. Sous toute réserve...

Mme Chambefort: On ne peut pas s'agrandir; on n'a pas le droit de s'agrandir. On les garde mais on n'a pas le droit d'agrandir nos garderies. Ce n'est pas vrai. J'ai eu une lettre de M. Angers. On n'a pas le droit de se transformer.

M. Lazure: On m'informe, pour le moment, que, toujours, depuis quelques années, il n'y a pas possibilité d'augmentation du nombre de places aux permis. Ce qui est dit dans la loi, c'est qu'il n'y aura pas de nouveaux permis. Quant à cette partie, celle qui a pour but d'augmenter le nombre de places aux permis, personnellement, je suis prêt à regarder si, dans certains coins d'une ville ou du Québec, il y a lieu d'augmenter, si l'intérêt public l'exige — vraiment, il serait ridicule de dire non — le permis de 30 à 40 ou quelque chose du genre. On peut regarder cela.

Mme Bacon: Comment se fait-il que lorsqu'on s'est rencontré, au mois d'avril, vous nous avez dit: II y aura peut-être possibilité, pour les garderies privées, d'avoir de nouveaux permis, ce sera laissé à la discrétion du ministre? Maintenant, c'est l'office. Lorsque l'office va prévaloir, la discrétion du ministre...

M. Lazure: On n'est pas rendu au projet de loi encore.

Mme Bacon: Non, mais vous le voulez fortement.

M. Lazure: Mme le député de L'Acadie a fait allusion tantôt au projet de loi no 103. Aussi bien aller au bout de cette piste. Quand on a discuté du projet de loi qui amendait la Loi des services de santé et des services sociaux — la loi 103 — l'hiver dernier, en ce qui concerne les centres d'accueil, nous nous sommes finalement entendus sur une formule. Nous n'avons pas été obligés, comme le député de L'Acadie le disait...

Mme Lavoie-Roux: Hum!

M. Lazure: ... mais nous avons consenti à cette proposition qui dit, en somme, qu'il sera possible, à l'avenir, d'ouvrir des centres d'accueil privés dans telle région du Québec lorsque l'intérêt public l'exige.

M. Grenier: Combien y en a-t-il d'ouverts depuis?

M. Lazure: II n'y a pas de demande jusqu'à présent. Il est bien sûr qu'à un moment ou à un autre, on va regarder très sérieusement la possibilité d'appliquer ou de ne pas appliquer cette formule qui a été utilisée dans la loi 103, pour les centres d'accueil privés. Ce n'est pas du tout un engagement que je prends, le texte qui vous est proposé ne prévoit pas de nouveaux permis, mais on va avoir l'occasion d'en rediscuter lors de cette commission et aussi lors de la présentation du projet de loi proprement dit.

Mme Bacon: Est-ce qu'on sera avisé? On est toujours ignoré.

M. Lazure: Vous n'êtes pas ignorés.

Mme Bacon: On reçoit toujours les documents après. Ce doit être à cause du courrier ou je ne sais trop. On a déjà fait allusion à cela.

M. Lazure: On est assez nombreux ici, il y a assez de témoins, je m'engage à ce que vous soyez avertis en temps, comme les autres, comme tout le monde.

Mme Bacon: Oui? J'espère que cela ne fera pas comme...

M. Lazure: Le courrier, c'est le fédéral!

M. Pagé: Cela lui fait d'ailleurs plaisir de le dire.

Le Président (M. Boucher): Au nom de tous les membres de la commission, je remercie Me Boucher.

M. Grenier: M. le Président...

Le Président (M. Boucher): Un instant, s'il vous plaît. Je vais finir et on pourra continuer. Je remercie Me Boucher ainsi que les gens qui l'accompagnent pour le mémoire présenté. Il avait été entendu ce matin qu'on ajournerait ce soir à 22 heures. Je regrette qu'il reste encore trais associations, trois groupes qui devaient comparaître aujourd'hui. Y a-t-il des groupes qui sont dans l'impossibilité de revenir demain matin? Il y a le Cercle des fermières du Québec, représenté par Mme Diane Roy. Pourrez-vous être ici demain matin? D'accord, vous serez la première sur la liste demain matin.

L'Association féminine d'éducation et d'action sociale, AFEAS. Pourrez-vous revenir demain matin? Oui? Aussi, l'Association des centres de services sociaux du Québec, M. Lacroix, vous pourrez revenir demain matin. Disons que ce seront les trois organismes qu'on entendra demain matin à compter de 10 heures.

La commission ajourne ses travaux à 10 heures demain matin.

Fin de la séance à 22 h 54

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