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Version finale

31e législature, 4e session
(6 mars 1979 au 18 juin 1980)

Le vendredi 19 octobre 1979 - Vol. 21 N° 195

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Question avec débat relative au maintien des services essentiels au cours des arrêts de travail dans le secteur des affaires sociales


Journal des débats

 

Question avec débat

(Dix heures huit minutes)

La Présidente (Mme Cuerrier): À l'ordre, madame et messieurs!

La commission permanente des affaires sociales se réunit ce matin pour discuter de la question avec débat de Mme la députée de L'Acadie concernant le maintien des services essentiels au cours des arrêts de travail dans le secteur des affaires sociales.

Il est bien entendu que nous sommes assujettis à l'article 162A du règlement.

J'aimerais rappeler, avant que nous ne débutions, que le droit de parole de Mme la députée de L'Acadie et de M. le ministre des Affaires sociales sont des droits de parole privilégiés, mais qu'ils ne sont pas exclusifs.

Mme la députée de L'Acadie, vous avez droit à 20 minutes pour la première intervention.

Mme Lavoie-Roux: Excusez-moi, Mme la Présidente. Est-ce que c'est vraiment 20 minutes?

La Présidente (Mme Cuerrier): Non, ce n'est pas statique...

Mme Lavoie-Roux: Vous n'êtes pas assez souple. Des fois, 25 minutes...

La Présidente (Mme Cuerrier): Oui, sûrement. Mme Lavoie-Roux: Oui, d'accord.

La Présidente (Mme Cuerrier): Voulez-vous dire que vous voulez dépasser les 20 minutes?

Mme Lavoie-Roux: Oui, peut-être.

La Présidente (Mme Cuerrier): Là, il faudra le consentement de la commission.

Mme Lavoie-Roux: D'accord.

La Présidente (Mme Cuerrier): M. le ministre a droit aux premiers 20 minutes d'intervention aussi, quant à la première intervention. Mme la députée de L'Acadie.

Exposé du sujet Mme Thérèse Lavoie-Roux

Mme Lavoie-Roux: Merci, Mme la Présidente. Je suis heureuse que les règlements de l'Assemblée nationale nous donnent cette occasion de discuter de ce problème crucial qui est le maintien des services essentiels lors de conflits dans les centres hospitaliers.

Nous avions convoqué le ministre du Travail et, après entente avec le leader du gouvernement, j'ai fort bien accepté... D'ailleurs, ce fut par oubli, et je m'en excuse, que le nom du ministre des Affaires sociales n'a pas été ajouté. Mais, par contre, j'ai dit au leader du gouvernement que je tenais vraiment, si le ministre du Travail ne pouvait assister à cette réunion, que ceci ne serve pas de prétexte pour ne pas répondre à des questions qui seraient peut-être plus du ressort du ministre du Travail. Mais, à tout événement, l'objet de ce débat ou de cette question avec débat ne veut pas porter sur les négociations ou l'état des négociations. Je pense que ceci pourra faire l'objet d'un autre débat. Je pense même que l'Union Nationale l'a peut-être prévu pour la semaine prochaine.

Nous voulons vraiment nous en tenir plus strictement à l'examen du maintien des services de santé lors des conflits qui ont eu lieu au printemps, particulièrement dans les hôpitaux de la région de Québec. Notre objectif est vraiment de savoir si, à cette occasion ou à ces occasions, la protection et la sécurité de la population ont été assurées comme elles doivent l'être dans une société civilisée.

Nous avons entendu, pas plus tard qu'hier ou avant-hier peut-être, le premier ministre s'insurger, et à bon droit, du fait que certains bénéficiaires de la Commission des accidents du travail ne pourraient percevoir leur chèque ou leur indemnité. Je pense que la question se pose d'une façon encore plus cruciale quand il s'agit de problèmes qui peuvent mettre en question la vie même des citoyens.

Je voudrais immédiatement attaquer le fonds du sujet lui-même. Comme on le sait, l'article 99i du Code du travail, qui avait été adopté par la loi 59 apportant ces modifications au Code du travail, prévoyait la création d'un conseil sur le maintien des services de santé et des services sociaux dans les établissements du réseau des affaires sociales. Le mandat principal confié par le législateur à ce conseil était d'informer le public en ce qui concerne le maintien des services essentiels à l'occasion des conflits de travail. La nature de son mandat de même que les moyens dont il dispose pour s'acquitter de ce défi font du conseil ou devraient faire du conseil qu'il constitue la meilleure garantie qui soit que les services essentiels seront assurés à la population. Le conseil, il faut le dire, ne dispose d'aucun pouvoir pour obliger les parties à dispenser des services de santé et des services sociaux. Toutefois, l'appréciation qu'il fait des situations de conflit et le rapport public qu'il doit produire à leur sujet ne peuvent qu'être déterminants en ce qui concerne les décisions gouvernementales, à savoir de suspendre ou non l'exercice du droit de grève qui est prévu au Code du travail et qui a été adopté au moment de l'adoption de la loi 59 qui venait modifier le Code du travail. Il s'agit de la suspension du droit de grève pour une durée de trente jours. D'ailleurs, un télégramme que le ministre des Affaires sociales adressait au président du conseil pour le maintien des services essentiels le 31 mai dernier disait: "Votre information peut déterminer les prochains actes à poser pour le gouvernement". J'imagine qu'il pouvait à ce mo-

ment faire allusion à cette possibilité d'exercer ce pouvoir de suspendre le droit de grève pour une période de trente jours.

Malheureusement, depuis sa création, le Conseil sur le maintien des services de santé et des services sociaux, à notre point de vue, ne s'est pas acquitté de son mandat. Le gouvernement ne semble rien faire, et, à notre connaissance, n'a posé aucun geste concret pour redresser la situation.

Le conseil ne satisfait pas à son mandat pour trois raisons principales:

I Les rapports publics du conseil sont faits avec trop de retard pour qu'ils soient de quelque utilité.

II Les rapports faits par le conseil sont incomplets.

III Les rapports faits par le conseil ne reflètent pas fidèlement la teneur des observations faites à l'occasion des conflits de travail, observations qui sont faites par des experts qui doivent aller sur les lieux et rendre compte de la situation.

Que les rapports du conseil soient produits trop tardivement, rappelons-nous que c'est autour du 28 mars 1979 que débutèrent les débrayages des infirmières membres du Cartel des organismes professionnels de la santé, dont fait partie la Fédération des syndicats professionnels des infirmiers et infirmières du Québec et que la population nous a sans doute entendus appeler le SPIIQ. Au mois de juin 1979, les 13 000 membres de la Fédération des syndicats professionnels des infirmiers et infirmières du Québec, répartis dans quelque 144 établissements, avaient déjà effectué environ 160 000 jours de grève. (10 h 15)

II est pour le moins surprenant de constater que c'est après plus de deux mois et demi de conflit de travail que le Conseil sur le maintien des services de santé s'est décidé à procéder à la nomination d'experts afin d'évaluer l'impact des arrêts de travail, eu égard au maintien des services essentiels en particulier. C'est en effet autour des 12 et 14 juin 1979, alors que le premier débrayage avait eu lieu le 28 mars, que le conseil a procédé à la nomination de sept experts chargés de lui faire rapport sur la situation prévalant dans autant d'hôpitaux.

À noter ici que, contrairement au conseil, les experts désignés par ce dernier se sont acquittés de leur mandat avec beaucoup de célérité. En effet, les experts ont, en moyenne, réussi à produire leur rapport au Conseil pour le maintien des services essentiels dans les quatre jours qui ont suivi leur nomination. Enfin, on constate qu'il s'est par la suite écoulé en moyenne 26 jours supplémentaires entre la date de remise des rapports des experts au conseil et l'information publique qu'a diffusée ce dernier à la suite de ces rapports.

Ainsi, et malgré le fait que les expertises elles-mêmes n'aient pris que quatre jours pour être complétées, il aura fallu attendre environ trois mois pour que le conseil informe la population de la situation qui avait prévalu dans sept établissements du réseau des affaires sociales.

Il est bien évident qu'une information publique aussi tardive est pratiquement inutile. En fait, les travaux du conseil dans un tel contexte ne sont plus d'aucun secours pour le gouvernement qui, dès le début d'un conflit de travail, doit décider s'il doit suspendre ou non l'exercice du droit de grève. De plus, ces travaux ne peuvent pas servir au public pour apprécier la qualité des interventions gouvernementales en ce qui concerne la protection de la santé et de la sécurité de la population.

Deuxièmement, les rapports publiés par le conseil sont incomplets. Il importe de préciser que c'est par rapport aux besoins de la population. C'est pour deux raisons que ces rapports nous apparaissent incomplets. La première, c'est que c'est par rapport aux besoins de la population en général et non pas par rapport aux gens qui, à un moment donné, séjournent dans un établissement de santé ou de services sociaux que l'on doit apprécier la notion de services essentiels. En fait, lorsque l'on parle de services essentiels, il faut à la fois considérer le cas de gens qui sont dans un établissement, qu'on appelle les bénéficiaires, et le cas de personnes qui ne peuvent pas avoir accès à des services de santé ou à des services sociaux à cause d'une diminution des activités dans les établissements.

Fort de ce qui précède, il est troublant de constater, à la lecture des communiqués du Conseil sur le maintien des services de santé, que l'on ne se soucie que des bénéficiaires, c'est-à-dire des gens qui sont en établissement lorsque l'on informe la population sur les situations qui existent à l'occasion de ces conflits.

À notre connaissance, aucun communiqué de quelque nature que ce soit émanant du Conseil sur le maintien des services de santé et des services sociaux ne fait la moindre allusion au sort réservé aux gens qui se sont vu refuser l'accès à un établissement de santé ou de services sociaux. Et on sait, Mme la Présidente, qu'ils sont fort nombreux. Un tel comportement de la part du Conseil sur le maintien des services de santé et des services sociaux a comme conséquence qu'aujourd'hui, comme auparavant, la population se retrouve sans information concernant la situation qui prévaut réellement en matière de maintien des services essentiels dans la population en général, les rapports du conseil ne se limitant qu'aux gens qui séjournent dans un établissement.

Deuxièmement, les rapports du conseil sont, d'autre part, incomplets, en ce sens que, depuis le début des débrayages au mois de mars 1979, le conseil n'a pas cru opportun de faire plus de treize expertises dont le résultat de sept seulement a fait l'objet d'un communiqué de la part du conseil à ce jour. Il est bien évident qu'on ne saurait exiger que des expertises soient faites dans tous les conflits de travail au cours des présentes négociations. Toutefois, il semble que le conseil aurait pu se donner la peine de faire des évaluations complètes des différentes situations vécues au cours des conflits de travail dans un plus grand nombre de cas. La

rapidité avec laquelle les experts se sont acquittés de leur mandat là où on a fait appel à leurs services aurait dû inciter le conseil à multiplier les expériences.

Certes, on pourra toujours nous dire que l'information du public par le conseil peut être faite sans que ce dernier ne recoure systématiquement à des expertises. Nous sommes d'accord en théorie avec cette affirmation. Toutefois, jusqu'à ce jour, lorsque le conseil a informé le public sans avoir recours à des expertises, il s'est contenté de rapporter la version patronale, de même que la version syndicale sans lui-même porter de jugement sur la situation de fait. On admettra que, dans une telle perspective, le public ne puisse être satisfait de la qualité de l'information qu'on lui fournit.

Troisièmement, les rapports faits par le conseil ne reflètent pas fidèlement la teneur des observations faites à l'occasion des expertises. De la lecture des communiqués émis par le conseil suite aux différentes expertises qu'il a fait faire se dégage une impression générale, à savoir que les services essentiels ont été assurés au cours des conflits de travail que nous avons connus entre le mois de mars et le mois de juin 1979.

Pourtant, lorsque l'on fait la lecture intégrale des expertises qui ont été remises au conseil, nous croyons qu'il en fut autrement. Nous reproduisons, en annexe du présent document, le texte intégral des sept communiqués émis par le Conseil sur le maintien des services de santé et des services sociaux, au début d'octobre de même que les différentes expertises qu'avait faites le conseil.

Je me contenterai, dans les minutes qui suivent, d'exposer brièvement la teneur du communiqué émis par le conseil et de mettre en relief certaines constatations de faits relevées par les experts et produites dans le rapport au conseil.

Premièrement, l'hôpital Laval de Québec. Le communiqué du conseil sur le maintien des services essentiels se lit comme suit: II y a eu une certaine exagération en sonnant l'alarme dès le 28 mai à l'hôpital Laval de Québec, l'allongement de la liste d'attente, surtout en cardiologie, étant "principalement" due à une contamination du bloc opératoire. Déjà, quand on regarde le rapport des experts, il ne s'agit pas du terme "principalement", mais du terme "partiellement". Enfin, c'est peut-être un détail, mais là où je pense ça devient important, c'est lorsque le conseil dit: "Depuis le début du conflit, aucun bénéficiaire nécessitant une intervention cardiaque d'urgence n'a été privé de soins adéquats". Il s'agit là de la seule mention directe et précise du maintien des services essentiels.

Pourtant, lorsque l'on regarde le rapport de l'expert, on peut lire — Mme la Présidente, j'ai ici un texte beaucoup plus développé, l'information y est au complet, mais, compte tenu du temps, je dois quand même me limiter à sortir certains extraits: "D'autre part, en date du 14 juin, il reste encore quinze malades atteints d'une pathologie cardiaque très grave et qui devraient normalement être opérés rapidement. Tous ces malades étaient inscrits sur les listes d'attente depuis déjà quelque temps lors de la première intervention des médecins, en date du 22 mai. On peut donc dire qu'à peu près tous ont attendu maintenant un mois pour une intervention qu'ils auraient normalement dû avoir en dedans de deux semaines. Parmi ces malades, on compte trois cas de maladies — je passe les détails qui sont peut-être d'ordre plus médical — II faut réaliser que les malades atteints d'une sténose aortique sévère symptomatique pour lesquels une intervention chirurgicale a été décidée après étude du cas sont des malades sujets à la mort subite. Par ailleurs, les malades souffrant d'angine sévère et nécessitant un triple pontage sont des candidats à un infarctus aigu du myocarde qui peut être fatal ou compromettre la chirurgie. "Pour ces 14 malades cardiaques bénéficiaires et ayant droit à des soins de qualité dans des délais raisonnables, on peut affirmer de façon catégorique que le délai d'un mois et plus dans certains cas leur est préjudiciable et qu'ils sont inutilement exposés à un risque de mort subite ou de détérioration grave de leur état. Un des malades décédé en attente d'opération et auquel les médecins se sont référés dans leur lettre du 22 mai, témoigne de la gravité des délais. "Il s'agit d'un patient de 71 ans qui avait reçu son congé de l'hôpital Laval, souffrant d'une angine sévère et chez qui il y avait obstruction complète du tronc commun comme des artères coronaires. Comme le malade présentait également une pathologie des artères carotidiennes, on a décidé de le transférer à l'hôpital de l'Enfant-Jésus afin qu'il puisse subir une angiographie, un test technique spécial qui ne se faisait pas à l'hôpital Laval. Comme il y a eu grève à la fin de mars à l'Hôpital de L'Enfant-Jésus, on a réduit le pourcentage d'occupation à 60% dans cette institution et on n'a pas trouvé de place pour hospitaliser ce monsieur de 71 ans et procéder à son angiographie, procédure jugée sans doute sélective — Remarquez bien que c'est toujours l'expert qui parle — Quelques jours plus tard, soit au début d'avril, le patient décédait subitement d'une crise cardiaque. Ce malade serait peut-être décédé de toute façon de l'une ou l'autre de ses multiples pathologies. Il n'en reste pas moins que si les diverses interventions médicochirurgicales avaient pu être faites dans les délais normaux, il aurait alors très probablement pu survivre puisque le résultat de la chirurgie pour l'occlusion complète du tronc commun est, en général, assez bon."

Un peu plus loin, l'expert parle de problèmes particuliers en pneumologie. "Les problèmes de pneumologie sont assez semblables à ceux de cardiologie. Les pneumologues et chirurgiens thoraciques ont en attente 33 malades porteurs d'un cancer du poumon prouvé ou fortement soupçonné. Par ailleurs, il y a dans l'hôpital neuf malades qui sont prêts à être opérés pour cette même affection, mais qui sont constamment remis de jour en jour et n'ont pu être traités adéqua-

tement. Le degré d'urgence dans l'intervention médicochirurgicale pour les malades atteints d'un cancer du poumon est tout à fait relatif. Le médecin doit déterminer si un malade est un candidat à la chirurgie ou non. Pour ceux qui malheureusement ne peuvent pas être opérés, le délai à recevoir un traitement quelconque, soit de radiothérapie ou chimiothérapie, leur cause un certain préjudice, mais il ne met pas leur vie en danger. Ces malades peuvent attendre de quatre à six semaines sans que raisonnablement on puisse affirmer que leur vie sera abrégée de façon significative. Bien entendu, s'ils sont souffrants ou très symptomatiques, ce délai devient alors inacceptable. Par ailleurs, les malades qui sont prêts à être opérés ou qui sont en attente à l'extérieur et qui seraient opérables voient leurs chances de survie diminuées — il s'agit de nos malades à l'extérieur — s'ils ne sont pas traités rapidement. "Comme en chirurgie cardiaque, on peut donc dire que, pour une chirurgie thoracique, un malade qui est privé de soins chirurgicaux pour quatre semaines ou plus après le diagnostic de son cancer du poumon subit un préjudice grave, qui met sa vie en danger, s'il se fait un essaimage à distance pendant ce laps de temps. Il s'agit donc, encore ici, des bénéficiaires qui ont le droit de recevoir des soins de qualité et qui en sont privés depuis une période de temps telle que leur survie est en danger". C'est l'expert qui parle. "Tout comme en cardiologie on craint l'arrivée des vacances qui ne permettrait pas alors de traiter rapidement tous ces malades qui s'accumulent sur les listes d'attente".

Les conclusions de ce rapport d'experts. "Par ailleurs, 25 jours plus tard, soit le 15 juin, on constate que la situation a pu évoluer et qu'il reste encore 14 malades cardiaques graves et une dizaine de patients pulmonaires graves qui n'ont pas reçu les soins auxquels ils avaient droit. Il ne fait pas de doute que ces délais sont beaucoup trop longs et qu'ils risquent d'être préjudiciables aux malades. Certains d'entre eux pourraient décéder faute de soins, tandis que d'autres pourraient voir leur état se détériorer de façon grave et permanente".

Dans le cas du centre hospitalier de l'Université Laval, on peut lire, dans le communiqué émis par le conseil, et je cite: "Les bénéficiaires hospitaliers ont reçu les soins et traitements requis pour leur état".

J'ai les détails ici, mais, pour raccourcir, on parle des services à l'unité néonatale, services essentiels qui sont rendus à l'unité néonatale de l'hôpital universitaire de l'Université Laval." Ils sont donnés pour douze lits sur une capacité de seize lits. Depuis le début du conflit, quinze malades ont dû être transférés, soit à l'hôpital Sainte-Justice ou au CHUS avec, dans certains cas, des inconvénients importants pour ces malades. "Un certain nombre de cas très urgents ont dû être transférés dans d'autres hôpitaux, à savoir trois cas d'infarctus et un cas d'appendicite aiguë. Cette donnée nous vient du directeur des services professionnels. Nous avons fortement souligné aux autorités de l'hôpital et à la partie syndicale qu'il s'agissait là d'une violation flagrante des services essentiels, tels que prévus au Code du travail. "Une appréciation rapide des faits nous permet de conclure que le fonctionnement de l'unité néonatale est insuffisant. La réduction de seize à douze lits est injustifiable au regard du maintien des services essentiels. Même en temps normal, ce nombre de lits ouverts apparaîtrait tout à fait insuffisant puisqu'il y a une demande de porter ce chiffre à trente lits depuis plusieurs mois".

Un peu plus loin, on parle du retard dans l'admission des patients. "Seulement en chirurgie adulte et pédiatrique, on estime que les cas dits sélectifs sont d'environ 245. Quant aux cas urgents, ils seraient d'environ 44. De ces 44 cas urgents en chirurgie, neuf patients pourraient mourir ou avoir une complication mortelle à brève échéance". Je cite toujours cette fois l'expert du centre hospitalier de l'Université Laval.

Un troisième hôpital, l'hôpital Christ-Roi. Je lis le communiqué du conseil sur les services essentiels: "Les services essentiels ont été assurés et aucun bénéficiaire n'a manqué de soins à l'hôpital". Je voudrais simplement citer que l'expert qui est allé là a bien indiqué: "Quant à la suffisance de l'entente en matière de services essentiels, bien que celle-ci soit déterminante selon le Code du travail, elle semble de nature à permettre à l'hôpital d'en arriver à faire face actuellement aux situations urgentes qui s'y présentent. Toutefois, cet aspect ne saurait s'envisager isolément sans tenir compte de l'évolution de la situation sur un plan régional plus vaste." Comme on vient de le voir, l'expertise se limite à ce qui s'est passé le 13 juin et l'expert soulève des questions sérieuses, à savoir si on peut vraiment dire que les services sont assurés si on n'a pas tenu compte de l'évolution de la situation sur un plan régional. (10 h 30)

Si je passe à l'hôpital Jean-Talon de Montréal, le conseil dit: "En aucun moment les bénéficiaires hospitalisés à l'hôpital Jean-Talon à Montréal n'ont été en danger immédiat durant la grève. Pourtant, en conclusion de son expertise, l'expert nous dit: "Pour ce qui est de l'application réaliste de la partie de la loi qui touche au maintien des services essentiels, la vision d'un seul cas ne me permet pas de me prononcer. Il appartient, cependant, au conseil de se poser de sérieuses questions." C'est deux jours plus tard — cette fois-là, le conseil a agi avec beaucoup de célérité — qu'il nous donne ce communiqué où il dit que personne n'est en danger. Mais on pourrait se demander si, après deux jours, on a pu vraiment répondre d'une façon sérieuse aux questions que se posait l'expert lui-même.

L'Hôtel-Dieu de Québec. Le conseil nous dit: "La qualité des soins aux patients hospitalisés n'a pas été affectée, de l'avis même de la direction de l'hôpital." Pourtant, l'expert rapporte ceci: "Malgré certaines affirmations contradictoires sur le sujet, il semble assez correct d'affirmer qu'avec un

taux d'occupation de 50% l'Hôtel-Dieu de Québec a été en mesure de dispenser des soins adéquats à ses patients hospitalisés pendant la grève en autant que les conditions suivantes étaient remplies: 1 - les débrayages ne dépassaient pas trois jours et demi; 2- ces débrayages n'étaient pas trop rapprochés; 3- les cadres étaient en mesure de travailler au moins douze heures; 4- les infirmières syndiquées étaient disponibles pour ajouter du personnel additionnel sur demande dans les cas urgents. "Il est évident que, lorsque l'une ou l'autre de ces conditions n'était pas observée ou encore lorsque le taux d'occupation était trop élevé, la qualité des soins pouvait affecter la sécurité des patients hospitalisés. Heureusement, exception faite de la mi-mai alors que le taux d'occupation était de l'ordre de 90%, l'ensemble des conditions étaient généralement remplies. '

II semble bien qu'il fut une période où elles n'étaient pas remplies. Le rapport de l'expert dit "étaient généralement remplies". "En fait, la direction hospitalière se trouve dans un cercle vicieux. D'une part, si elle maintient un taux d'occupation normal et que les infirmières débrayent, elle n'est pas en mesure d'assurer des soins adéquats aux malades hospitalisés. D'autre part, si elle s'ajuste en prévision de grèves en maintenant un taux d'occupation minimal, elle doit interdire l'admission à des patients qui auraient besoin d'être hospitalisés. C'est ce chemin qu'a suivi l'Hôtel-Dieu de Québec et c'est pourquoi le principal problème n'est pas surtout du côté des patients hospitalisés — c'est l'expert qui parle et je pense que cela correspond à une question antérieure que j'ai posée — le problème se pose surtout du côté de ceux qui attendent pour être hospitalisés et dans la mesure où cet hôpital en est un très spécialisé, particulièrement dans les cas de cancers, la situation est particulièrement délicate".

Dernier cas, Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Cuerrier): Vous avez déjà dépassé largement, Mme la députée. À moins que nous n'ayons le consentement unanime, je vais devoir vous demander de conclure.

M. Bellemare: Consentement.

Mme Lavoie-Roux: II me reste un cas.

La Présidente (Mme Cuerrier): Consentement, Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: On ne perdra pas de temps, je vais y aller tout de suite. Il s'agit du dernier cas, l'hôpital du Saint-Sacrement de Québec. Le conseil pour le maintien des services essentiels, dans son communiqué, dit, et je cite: "Les services ont toujours été maintenus aux bénéficiaires de l'établissement." L'expert dit: 1 — "Selon une liste remise par le comité des normes d'admission et de séjour, plusieurs malades devraient être admis dans les plus brefs délais, compte tenu de pathologies graves qui mettent leur vie en danger. Ainsi, en date du 11 juin 1979, plus de 26 cas graves et d'une grande urgence étaient en attente selon les prétentions du comité des admissions. 2 — "Le président du Conseil des médecins et dentistes note également que, depuis le 11 juin 1979, les services essentiels ne sont pas fournis au niveau de deux unités de soins, soit le 4 et le 7 d'Youville. "Plusieurs cas de cancers diagnostiqués attendent depuis environ un mois pour être admis à l'hôpital pour intervention chirurgicale. "Certains membres du corps médical prétendent que la situation peut être qualifiée de dramatique. On estime déjà que les soins adéquats ne peuvent plus toujours être donnés aux patients hospitalisés et que des compromis médicalement dangereux font maintenant partie de la routine quotidienne. On estime que la grève qui perdure a des conséquences directes sur le taux de morbidité ou de mortalité pour la population de la région, et elle en aura à brève échéance sur le taux de mortalité. "Malgré les demandes répétées de réduire le taux effectif d'occupation à 201 lits, les autorités médicales estiment que cela est irréaliste et quasi irresponsable. Déjà, avec une occupation de 244 lits, on n'est plus en mesure d'assurer les services essentiels au sens prévu par la loi."

Mme la Présidente, comme je l'avais fait remarquer, le texte était beaucoup plus long. Je n'ai pas voulu prendre des phrases au hasard. D'ailleurs, ce sont les interprétations des experts. Je me suis tenue loin des comptes rendus des syndicats ou de la partie patronale pour vraiment donner l'opinion de l'expert.

Mes questions au ministre sont les suivantes. Je lui en ai déjà posé trois originalement, à savoir si les rapports sont complets, s'ils arrivent à temps, si les communiqués du conseil pour le maintien des services essentiels correspondent aux rapports des experts. J'y ajouterais les suivantes: Le ministre considère-t-il que les services essentiels ont toujours été assurés à la population au cours des arrêts de travail qui ont eu lieu jusqu'à ce jour dans les centres hospitaliers du Québec en général et, en particulier, dans le cas des hôpitaux que je viens de mentionner, l'hôpital Laval de Québec, Centre hospitalier de l'Université Laval, hôpital Christ-Roi de Vanier, hôpital Jean-Talon, Hôtel-Dieu de Québec, hôpital Saint-Sacrement de Québec.

La Présidente (Mme Cuerrier): Ne pourriez-vous pas réserver vos autres questions? Vous pourrez intervenir immédiatement après M. le ministre, Mme la députée. Est-ce que vous n'entendez pas plutôt réserver une partie de vos questions pour une intervention immédiatement après lui?

Mme Lavoie-Roux: Si vous voulez, je pourrai revenir.

La Présidente (Mme Cuerrier): Parce qu'il faut quand même s'en tenir à l'article 162A du règlement.

Mme Lavoie-Roux: D'accord, parfait.

M. Bellemare: Je pense bien qu'à ce moment Mme la députée voudra bien nous donner une petite chance...

Mme Lavoie-Roux: Oui, Mme la Présidente devrait faire remarquer au député de Johnson que j'en avais beaucoup plus. J'ai vraiment coupé.

La Présidente (Mme Cuerrier): Oui, d'accord. Je pense quand même que nous pourrons, à certains moments au cours de cette période, donner la parole à M. le député de Johnson, c'est bien sûr. M. le ministre.

Réponse du ministre M. Denis Lazure

M. Lazure: Mme la Présidente, la députée de L'Acadie, dans son intervention, a tenté de démontrer que les grèves que la région de Québec a connues en mai et juin ont causé des préjudices. Je voudrais tout de suite rassurer la députée de L'Acadie et tout le monde, c'est bien évident qu'on est d'accord avec ce diagnostic. C'est bien évident que tout arrêt de travail dans un hôpital comporte quelque chose d'un peu odieux, comporte des inconvénients considérables pour la population.

Là-dessus, on n'aura pas de dispute, la députée de l'Acadie et moi. Je pourrais en parler en connaissance de cause pour avoir vécu les deux grèves générales de 1972 et de 1976 à titre de directeur général d'un hôpital.

Je peux comprendre les inconvénients majeurs qu'une grève cause à la population, aux malades qui sont hospitalisés, mais aussi à leur famille et aux malades qui ne sont pas hospitalisés mais qui devraient l'être.

Quand on aborde des périodes comme celles-là, Mme la Présidente, je pense qu'il faut garder un certain calme. Le calme, ce n'est pas synonyme d'indifférence. Le calme, ce n'est pas synonyme de négligence, parce que le contraire du calme, la panique, dans des circonstances comme celles-là, devient mauvaise conseillère. Une panique du genre de celle qu'on a connue en 1970, par exemple, serait mauvaise conseillère dans une période où il y a des problèmes sérieux de relations de travail au Québec.

Le Québec a connu, depuis 1965, des grèves dans les secteurs public et parapublic. En 1966, le gouvernement de l'Union Nationale a dû mettre en tutelle tous les hôpitaux, toutes les administrations hospitalières du Québec pour pouvoir arriver à un règlement du conflit. En 1972, le gouvernement Bourassa a dû recourir à une loi spéciale pour régler le conflit.

M. Bellemare: On avait annoncé une session spéciale à ce moment-là.

M. Lazure: Le même gouvernement Bourassa, en 1972, a dû emprisonner les chefs syndicaux. Il y a eu toute une pluie d'amendes et il y a eu évidemment des décrets qui ont ramené des syndiqués au travail, notamment les enseignants et les infirmières de la FIIQ. Finalement, en 1976, le gouvernement Bourassa toujours, avait adopté une loi, la loi 253, qui a très mal fonctionné, qui a résulté en 7000 à 8000 plaintes et qui a amené aussi toute une série de procédures judiciaires.

Mme la Présidente, le gouvernement du Parti québécois, quand il est arrivé au pouvoir, a voulu adopter une nouvelle loi, faire un peu de prévention. Contrairement à ce qui se faisait souvent dans le passé, soit improviser des lois comme la loi 253, improviser en cours de conflit des lois pour encadrer les relations de travail, nous avons prévenu cette situation et nous avons fait adopter par l'Assemblée nationale, notamment, le projet de loi 59 qui amende le Code du travail. J'y reviendrai tantôt.

Mme la Présidente, je voudrais quand même ajouter que le Québec est assez unique en son genre en ce qui touche l'utilisation du droit de grève dans le secteur hospitalier. Je ne connais aucun pays dans le monde occidental, en tout cas, et encore moins dans le monde socialiste, j'imagine, qui a recours si souvent au droit de grève dans le secteur hospitalier.

Je pense que nos chefs syndicalistes ne font pas suffisamment preuve d'imagination par l'utilisation de leurs moyens de pression. Comme dans le passé, il n'y a pas si longtemps, notamment en 1976, les dirigeants des hôpitaux n'ont pas suffisamment fait preuve d'imagination en se contentant de recourir à des procédures judiciaires.

Donc, une fois arrivés au pouvoir, nous avons vécu, par la loi 59, un cadre bien serré de négociations, un calendrier de négociations qui donnait les étapes de négociations et, entre autres choses, nous avons mis sur pied un conseil qui est responsable du maintien de services de santé et services sociaux. Dans la même loi, nous avons prévu un mécanisme pour assurer le mieux possible les services essentiels en cas de débrayage, et ce mécanisme, nous l'avons fondé sur la bonne foi des deux parties. Nous avons la conviction, et je pense que l'expérience nous a donné raison jusqu'à ce jour, que, dans un hôpital, si les deux parties s'entendent sur le nombre d'employés syndiqués qui doivent entrer au moment d'un conflit de travail, nous sommes persuadés que, dans cet hôpital-là, il y aura beaucoup moins d'inconvénients, il y aura toujours des inconvénients, mais il y aura moins d'inconvénients que dans un hôpital où il n'y a pas eu entente locale.

Alors, la loi prévoit que, s'il n'y a pas entente, le fardeau de la responsabilité repose sur le dos du syndicat et elle prévoit que le syndicat dépose une liste, s'engage à respecter cette liste et à assurer les services essentiels.

L'article 99 de la même loi prévoit que le gouvernement, en cas de grève appréhendée ou de grève déjà en cours, peut suspendre le droit de grève pour 30 jours. Je vous ferai remarquer en passant, Mme la députée de L'Acadie, que, pour

ce faire, le gouvernement n'a pas à recevoir un avis favorable du Conseil sur le maintien des services de santé. Par conséquent, le ministre des Affaires sociales, pour recommander une ligne de conduite au lieutenant-gouverneur en conseil, n'a pas à attendre les rapports du comité sur les services essentiels.

Dans les grèves du printemps dernier, surtout dans la région de Québec, et c'est là-dessus que Mme la députée de L'Acadie s'est attardée, nous avons eu l'assurance de ce Conseil sur le maintien des services de santé et services sociaux que, dans tous les cas où il y a eu plainte de l'hôpital, et je réponds de façon très spécifique à l'une des questions de la députée de L'Acadie, il y a eu enquête. Je pense donc que ce n'est pas équitable vis-à-vis du Conseil sur le maintien des services de santé, de laisser entendre que ce conseil a été négligent et n'a pas enquêté dans tous les cas où il y avait lieu de le faire. Nous avons la certitude que le conseil y est allé et a envoyé un expert dans tous les cas où il y a eu une plainte.

J'ajouterai que, de l'aveu unanime des parties syndicales autant que des parties patronales, de tous les experts, dans tous les cas, les ententes ont été respectées et les listes respectées. Aussi, tout le monde a convenu que, durant ces deux mois, mai et juin, les services essentiels aux malades hospitalisés ont été satisfaisants. (10 h 45)

Cela nous amène à parler des malades qui sont en dehors de l'hôpital. Bien sûr, durant toute l'année, il y a un certain nombre de malades, qu'ils souffrent de cancer ou de troubles cardiaques, qui attendent pour être hospitalisés. Il est évident que des débrayages vont occasionner des augmentations du délai. Par contre, on entre sur un terrain très glissant quand on essaie de démontrer que c'est à cause de la grève dans tel ou tel hôpital que M. X, souffrant d'un cancer, est décédé. C'est un terrain très glissant; il s'agit d'une preuve qu'il est à peu près impossible de faire. Je pense qu'il faut faire preuve de grande prudence, qu'il faut être beaucoup plus prudent que ne l'a été, par exemple, le Dr Lambert, au mois de juin dernier, le président de l'Association des conseils des médecins, qui a tout à coup lancé dans le public une accusation très grave, à savoir que trois enfants, à Québec, étaient décédés à cause de la grève. Ces affirmations gratuites ont ensuite été réfutées par les hôpitaux en question.

Je pense que, si on veut que les services essentiels soient maintenus dans la meilleure mesure possible, il faut non seulement la collaboration des deux parties en cause, patronale et syndicale, mais aussi il faut que les tierces parties, autant les hommes politiques que les groupements, médecins ou autres, qui peuvent avoir des intérêts particuliers fassent preuve de responsabilité et ne deviennent pas des semeurs de panique. Il est très grave qu'un parti de l'Opposition accepte trop facilement les hypothèses du Dr X ou du Dr Y et en fasse ensuite une argumentation.

Il est bien évident que les services qui sont prévus dans une entente locale ou dans une liste doivent être réévalués au jour le jour. Nous avons aussi l'assurance des deux parties que cette clause de réouverture au jour le jour des négociations est contenue dans toutes les ententes et dans toutes les listes déposées.

Je pense qu'il faut aussi la collaboration de la population. En temps de débrayage, il y a quand même d'autres services médicaux qui sont disponibles. À part les cabinets privés, les polycliniques privées, il ne faut pas oublier qu'il y a dans plusieurs CLSC, centres locaux de services communautaires, plusieurs salles d'urgence. Si on veut vraiment garder en tête l'unique bien de la population et minimiser le plus possible les inconvénients, il faut constamment rappeler à la population de ne pas abuser des salles d'urgence, surtout en temps de grève. On sait qu'en temps normal un bon nombre de patients — environ 50% — se rendent à l'urgence alors qu'ils n'ont pas un problème urgent. Ce phénomène continue même en temps de débrayage. Mme la Présidente, je pense qu'il est de notre devoir de rappeler à la population qu'elle doit hésiter beaucoup avant de se rendre à une salle d'urgence; elle doit être sûre que son cas est urgent et aussi elle doit recourir aux autres services qui existent.

Le Conseil sur le maintien des services de santé et des services sociaux a eu un départ difficile. Le gouvernement en a convenu et je pense qu'il est normal que toute nouvelle loi, surtout quand elle fait appel à une nouvelle philosophie, doit prendre un certain temps. Nous sommes les premiers à reconnaître qu'il y a eu des retards, mais au moment où on se parle, ce conseil est en mesure de fonctionner très bien au jour le jour.

Il est faux de prétendre que les rapports du Conseil sur le maintien des services de santé sont trop en retard. Nous recevons quotidiennement — la députée de L'Acadie le sait, puisqu'elle a accès à cette information — des rapports détaillés du conseil, nous donnant l'état de la situation dans chaque hôpital où il y a un débrayage. Quant aux rapports qui suivent une expertise dans un hôpital, il est bien évident qu'il y a eu des retards au début, mais nous avons l'assurance que dorénavant, puisque tous les experts nécessaires ont été embauchés par le conseil, ces rapports n'accuseront pas de retard.

Mme la Présidente, on ne peut pas parler des services essentiels sans déboucher quelque peu sur les négociations. Les débrayages que nous avons eus jusqu'à maintenant qui ont affecté des hôpitaux dans la région de Québec et de la région de Montréal étaient dus principalement aux infirmières et autres professionnels, c'est-à-dire les groupes dont la convention est expirée depuis 1978, avec lesquels nous négocions depuis plusieurs mois. Je dois le répéter ici encore aujourd'hui, autant le Cartel des organismes professionnels de la santé, le COPS, que la Fédération des infirmiers et infirmières du Québec, à mon avis et à l'avis du gouvernement, ne sont pas justifiés de recourir à des moyens de pression hors de proportion. Ils sont trop exagérés dans les circonstances, compte tenu que les négociations ont pro-

gressé de façon très sensible, surtout avec la Fédération des infirmiers et infirmières du Québec, depuis deux mois, et compte tenu aussi que ces deux groupements ne montrent pas, à notre avis, tout l'enthousiasme qu'ils devraient montrer aux tables de négociation.

On peut comprendre que ces deux groupements veuillent être prudents par rapport aux offres que le gouvernement fait actuellement aux groupes de 1979; on peut comprendre que ces deux groupements de syndicats veuillent attendre un peu pour voir, d'où un rythme — qui n'est pas dû à nous — de négociation, surtout dans le cas du COPS, qui n'est pas satisfaisant.

Mme la Présidente, dans les deux cas, ou bien la négociation avance beaucoup, c'est le cas de la FIIQ, ou bien les négociations avancent peu, et c'est, à notre avis, parce que le syndicat n'est pas assez pressé. Dans les deux cas, nous ne pensons pas qu'il soit justifié de recourir à des débrayages aussi graves, aussi importants.

Finalement, si on veut faire de la prévention, si on veut que la population ne soit pas pénalisée, ou le moins possible, quand des syndiqués exercent un droit, c'est-à-dire le droit de grève, il faut que les négociations progressent rapidement. Je ferai remarquer à la députée de L'Acadie, surtout en ce qui concerne le front commun, dont la convention a expiré en juin 1979, il y a à peine quelques mois, que jamais dans le passé les négociations n'ont progressé aussi rapidement avec un front commun. Jamais dans le passé le gouvernement et ses partenaires n'ont montré autant d'empressement à négocier et, jamais dans le passé le gouvernement n'a déposé des offres aussi claires, aussi importantes que celles que nous avons déposées il y a quelques jours concernant les plans de pension, offres qui donnent satisfaction aux syndiqués à 100%, qui répondent à leurs demandes à 100%. Et la dernière offre que nous avons déposée il y a à peine quelques jours touche les congés de maternité et donne à toutes les syndiquées 20 semaines de congé de maternité payées, plus deux ans de congé sans solde; elle donne même au père deux jours de congé payés et la possibilité de prendre deux ans sans solde, pour ceux qui veulent assumer très pleinement leur rôle de père.

En terminant, Mme la Présidente, nous avons, comme gouvernement, vis-à-vis des services essentiels, largement assuré nos responsabilités, nous avons tenté de faire montre d'imagination, nous avons fait de la prévention. Nous pensons qu'il va continuer d'y avoir des problèmes chaque fois qu'il y aura débrayage. Mais nous pouvons assurer ceci à la population, grâce au conseil des services essentiels et à la vigilance de notre ministère et de nos fonctionnaires qui recueillent au jour le jour tous les renseignements. Grâce à ces deux piliers qui surveillent la situation, nous pouvons assurer — je réponds directement à la dernière question de la députée de L'Acadie — à la population que jusqu'ici, dans tous les cas, l'entente a été respectée.

Nous avons bien l'intention d'assumer nos responsabilités. Le Code du travail permet au gouvernement de suspendre le droit de grève pour trente jours, si la santé ou la sécurité du public est en jeu. Et si jamais cette situation survenait, nous prendrons les mesures nécessaires. Merci.

La Présidente (Mme Cuerrier): Mme la députée de L'Acadie.

Discussion générale

Mme Lavoie-Roux: Mme la Présidente, je voudrais simplement revenir sur quelques affirmations du ministre. Je vous avais fait remarquer au début que l'objet de notre question avec débat n'était pas la négociation. Notre préoccupation — et elle est profonde — c'est que la population sache — et que le gouvernement l'informe également — ce qu'il en est exactement des services essentiels assurés à la population en temps de conflit dans les milieux hospitaliers.

Il y avait trois questions préalables. Le ministre n'a peut-être pas utilisé le terme "injuste ", mais il ne m'a pas offusquée, de toute façon, en répondant à mon affirmation que le conseil procédait avec trop de retard. Tant mieux, Mme la Présidente, si les choses se sont améliorées. Mais il reste qu'il n'a pas réfuté. Nous n'avons pas les données sur la situation actuelle, je n'ai pas les rapports des experts sur la situation actuelle. Mais je vous ai parlé de la situation qui prévalait à Québec aux mois d'avril, de mai et de juin, alors que le ministre répondait à mes questions à l'Assemblée nationale et disait à tout le monde: Cela cause des inconvénients, mais tout va bien. Et j'arrive ici avec ces témoignages. À ce moment-là, le retard était évident. Si cela s'est amélioré, bravo! mais je pense que vous n'avez pas vraiment répondu à cette question.

Quant à la deuxième, que les rapports faits par le conseil sont incomplets, je pense que vous n'y avez pas répondu non plus, si on tient compte du contenu du rapport des experts.

Mais c'est la troisième question qui, à mon point de vue, était la plus importante. Les rapports faits par le conseil ne reflètent pas fidèlement la teneur des observations faites à l'occasion des conflits de travail. Je pense que j'ai démontré qu'il était fort évident que les communiqués du conseil, les six communiqués qui disent que personne n'a été privé de soins adéquats, que les services essentiels sont assurés, ne parlent pas de la teneur, des mises en garde et des jugements sévères qui sont posés par les experts.

Le ministre n'a pas répondu à cette question.

M. Lazure: Est-ce que vous me permettez de répondre tout de suite à celle-ci?

Mme Lavoie-Roux: Oui.

M. Lazure: II faut bien comprendre que le conseil sur le maintien des services de santé est formé d'une espèce de comité paritaire, comme un conseil d'administration, qui est responsable des décisions du conseil et de l'information émanant du conseil. L'information qui sort du conseil est basée en bonne partie, sur le rapport d'un

expert qui est allé étudier la situation dans un hôpital.

La députée de L'Acadie se scandalise parce que l'information publique diffusée ne correspond pas entièrement au rapport écrit de l'expert, mais il n'y a pas lieu de se scandaliser.

Mme Lavoie-Roux: C'est aux conclusions du conseil que je m'oppose, Mme la Présidente.

M. Lazure: Le conseil, en plus du rapport écrit de son expert, a aussi un rapport verbal du même expert. Le conseil discute lui-même de ce rapport. C'est lui qui est responsable de l'émission finale d'un communiqué. Il ne faut pas se scandaliser si, parfois, il y a des divergences entre les deux.

Mme Lavoie-Roux: II reste, Mme la Présidente, qu'entre les faits que j'ai signalés et les communiqués du conseil disant que personne n'est privé de soins adéquats, que les services essentiels sont rendus, il y a une différence. À moins que vous me disiez que les experts ne sont pas sérieux quand ils font leurs rapports, ce que vous n'avez pas dit et que je ne veux pas vous faire dire.

M. Lazure: Et que je ne dirai pas non plus parce que, la plupart du temps, les deux coïncident, les rapports du conseil et ceux de l'expert.

Mme Lavoie-Roux: Pas dans les conclusions auxquelles arrivent les communiqués du conseil. Le ministre dit: On ne peut jamais établir de lien de cause à effet, à savoir qu'un délai dans l'hospitalisation ou que le transport d'un patient dans un autre milieu peut être dangereux pour un patient ou causer sa mort. Et il a fait référence au cas du monsieur de 71 ans dont l'expert avait fait état.

Je vous ferai remarquer que les conclusions auxquelles l'expert arrive, ce ne sont pas les miennes. C'est l'expert qui dit: "Ce malade serait peut-être décédé, de toute façon." Évidemment, à moins d'une mort violente, vous ne pourrez jamais établir de lien de cause à effet à savoir si un délai a causé la mort ou a causé un préjudice grave. (11 heures)

C'est cette démonstration-là que le ministre veut et on n'arrivera peut-être jamais à l'établir. "Ce malade serait peut-être décédé d'une façon ou de l'autre de ses multiples pathologies. Il n'en reste pas moins que, si les diverses interventions médico-chirurgicales avaient pu être faites dans les délais normaux, il aurait alors très probablement pu survivre, puisque le résultat de la chirurgie pour l'occlusion complète du tronc commun est en général assez bon".

Un peu plus loin, dans le cas de l'Université Laval, on parle des besoins, de l'appréciation: "Une appréciation d'effets me permet de conclure que le fonctionnement de l'unité néonatale est tout à fait insuffisant. La réduction de seize à douze lits est injustifiable, en regard du maintien des services essentiels. Même en temps normal, ce nombre de lits ouverts apparaît tout à fait insuffisant, puisqu'il y a une demande de porter ce chiffre à trente lits, etc."

Je ne suis pas pour recommencer la lecture, mais le ministre n'a répondu à aucune de ces affirmations. Je le répète, Mme la Présidente — d'ailleurs, je sais que vous en êtes fort consciente — ce ne sont pas mes affirmations, ce sont les affirmations des experts.

M. Lazure: Mme la Présidente...

Mme Lavoie-Roux: Je vous écouterai après. Quand le ministre nous dit également que les gens peuvent aller dans les CLSC, le ministre sait fort bien que, dans la plupart des cas, quand les gens arrivent à un hôpital, souvent ils sont passés par le CLSC et ils ont été référés à l'hôpital, parce qu'il s'agissait d'un cas qui nécessitait une aide à l'hôpital. Je pense qu'il ne faut quand même pas exagérer là-dessus.

Le ministre a également parlé des cas du Dr Lambert, que les médecins avaient ou qu'un médecin avait exagérés. Je ne pense pas, Mme la Présidente, que j'aie fait allusion de quelque façon que ce soit à ce cas du Dr Lambert. Je pense que tous les faits que j'ai ici sont des faits qui ne relèvent pas de ma confection ou de mon imagination, ce sont des faits exacts qui sont rapportés là.

Cela a pris bien du temps au ministre avant d'arriver aux réponses plus ou moins précises à la suite des questions que je lui avais posées. Il a fait l'historique des conflits de travail dans les milieux hospitaliers au Québec, en partant de l'Union Nationale, en passant par les gouvernements libéraux pour finalement arriver à ce beau, bon gouvernement qui n'a pas de conflits.

Mme la Présidente, je vous ferai remarquer que toutes ces observations qui sont faites ont été faites à l'occasion de conflits qui ont été causés dans les hôpitaux par un syndicat qu'on appelle le COPS et qui jamais auparavant n'avait fait de grève. Il s'était toujours entendu avec tous les gouvernements et, pourtant, on se souviendra qu'aux mois de mai, de juin, tout était pour se régler, il n'y avait que les infirmières dans ce syndicat qui regroupe plusieurs groupes professionnels qui n'étaient pas satisfaites et que cela allait se régler. Elles sont encore en grève. Je ne voulais pas aborder la question des négociations, mais, puisque le ministre a voulu l'aborder sous cet angle-là, je pense qu'il faut préciser que ces gens qui ont fait 160 000 jours de grève n'en avaient jamais fait avant sous aucun gouvernement et que, même si leur convention est terminée depuis juin 1978, ils sont encore sans convention collective.

Le ministre a également fait état que son gouvernement a adopté une loi où on assure les services essentiels. On a créé un conseil pour le maintien des services essentiels. Exact, mais dans le fond, je me demande, Mme la Présidente, si on n'a pas simplement rendu légal ce qui avant était illégal, parce qu'auparavant, il y avait des services essentiels, une liste de services essentiels. On pouvait venir à une entente sur des services

essentiels, même sous les anciens gouvernements, sauf que, quand on ne s'entendait pas, c'était un commissaire qui était chargé de dresser la liste des services essentiels et cette liste-là était toujours ou enfin était très généralement — très généralement, je ne voudrais pas dire cela — a été contestée par les syndicats, qui disaient: C'est nous qui connaissons quels doivent être les services essentiels. Je voudrais bien que le ministre me fasse la différence entre cette chose que les syndicats, à ce moment-là, n'acceptant pas la liste des services essentiels de la part du commissaire, décidaient de la dresser eux-mêmes et c'est ce qui existe aujourd'hui, parce qu'aujourd'hui, quand il n'y a pas une entente dans les centres hospitaliers entre la partie patronale et le syndicat, c'est encore le syndicat qui dresse lui-même sa liste syndicale. Ce qu'on a fait, par contre, on a rendu légal ce qui était illégal, mais, dans les faits, a-t-on vraiment changé quelque chose, est-ce que c'est à partir d'une liste tout simplement, qui est dressée souvent sans entente, qu'on peut décider que les services essentiels sont assurés?

Je voudrais faire remarquer au ministre également que la négociation du front commun n'est même pas commencée et que, depuis avril et juin dernier, on connaît des débrayages dans les hôpitaux. Il y a maintenant deux syndicats d'infirmières qui ont fait des débrayages. Au lieu de faire dévier la question sur la négociation, que le ministre attende pour savoir si la CSN va débrayer deux jours la semaine prochaine et voie ce que cela va causer dans les hôpitaux avant d'affirmer hors de tout doute qu'ils ont tout sous contrôle.

J'arrête ici mes propos, parce que ce n'est vraiment pas là-dessus que je veux faire porter le débat. Notre préoccupation, c'est de savoir si, avec les modifications qui ont été faites au Code du travail, compte tenu des rapports des experts, compte tenu des observations qui nous sont rapportées à nos bureaux quotidiennement, vraiment le ministre peut tenter de me rassurer. Il n'a pas besoin de me rassurer, le ministre, qu'il rassure la population. On a dit dans des éditoriaux cette semaine qu'il ne suffisait plus de dire à la population: Tout va bien. On essaie de lui apporter des faits montrant que tout ne va pas bien et les experts ont souligné des carences extrêmement sérieuses. Je ne veux pas en faire la lecture, mais c'est sur ce point. Le ministre m'affirme d'abord que les services essentiels ont été assurés, d'accord, si on se réfère à une liste ou à une entente, mais, même à cela, j'ai souligné des points où les experts soulèvent des questions à cet égard.

Deuxièmement, je pense que la loi ne fait pas uniquement obligation de dresser des listes syndicales, mais dit aussi que le conseil est chargé d'informer le public de la situation qui prévaut en matière d'ententes, de listes syndicales et de maintien de services essentiels lors d'un conflit de travail. De cette troisième préoccupation qui m'apparaît quand même la plus importante, on n'a guère de nouvelles de la part du ministre. Le ministre considère-t-il toujours qu'ils sont maintenus? Deuxièmement, le ministre a-t-il pris connaissance des expertises effectuées par les mandataires du Conseil sur le maintien des services de santé et des services sociaux? Est-ce que le ministre peut affirmer ici que ces expertises reflètent bien la situation vécue dans les différents centres hospitaliers? Ce sont les trois questions que je lui pose.

Le Président (M. Boucher): M. le ministre.

M. Lazure: M. le Président, ou bien la députée de L'Acadie manque de connaissances, pour utiliser une expression gentille...

Mme Lavoie-Roux: Dites donc que je suis ignorante! Cela m'est égal!

M. Lazure: ... ou elle est de mauvaise foi quand elle dit que, dans le front commun, les négociations ne sont même pas commencées. C'est ce que vous avez dit textuellement. Je vous mets au défi de vérifier le journal des Débats.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, question de...

M. Lazure: M. le Président, j'ai la parole. Je vous ai laissé parler tantôt. Vous avez dit textuellement: Les négociations ne sont même pas commencées.

Mme Lavoie-Roux: Non, je veux faire une rétractation. Si je l'ai dit — et j'accorde foi aux propos du ministre — je me suis mal exprimée et j'aimerais immédiatement me corriger. Ce que j'ai voulu dire, c'est qu'elles ne sont pas assez avancées pour savoir quels seront les problèmes à venir. C'est pour cela que nos propos de ce matin ont porté sur les conflits qui ont eu lieu au printemps, de telle sorte que, si d'autres conflits surgissent, la population soit certaine que de vrais services essentiels lui seront assurés.

M. Lazure: Je suis content de voir que la députée de L'Acadie retire ses paroles qui n'étaient pas exactes. Ma principale intervention, si vous le permettez...

Mme Lavoie-Roux: On ne va pas en faire tout un plat.

M. Lazure:... c'est la suivante: C'est un procédé trop facile de piger dans un rapport détaillé, assez long, quelques extraits pour essayer de monter en épingle un aspect particulier du rapport qui va dramatiser la situation. Le rapport que la députée de L'Acadie a cité, concernant la personne de 71 ans, dit textuellement: "II serait peut-être mort quand même s'il n'y avait pas eu de débrayage."

Mme Lavoie-Roux: Je l'ai lu.

M. Lazure: Malgré cela, la députée de L'Acadie y revient pour développer un climat de panique, un climat d'anxiété et d'inquiétude. En plus, elle a recours à son procédé habituel d'essayer de

faire croire à la population que le gouvernement ne fait rien, que le gouvernement n'est pas intéressé par la situation et que le gouvernement dit que tout va bien.

M. le Président, je pense que c'est un procédé qui est un peu grossier. Le gouvernement et le ministre des Affaires sociales ne disent pas: Tout va bien. J'ai bien pris garde, dans mes remarques préliminaires, justement, de dire que ça va mal dans les secteurs public et parapublic lorsque les syndicats recourent, de façon abusive, à leur droit de grève, et j'ai bien dit qu'au Québec nous avions une situation particulière. Aucun État aux États-Unis, aucune province au Canada, aucun pays en Europe n'a recours aussi souvent à ce droit de grève.

Mais je dirais aussi ceci, M. le Président, à la députée de L'Acadie, parce que derrière tout ça il y a une espèce de soupçon que la conclusion libérale, ce serait: Enlevons le droit de grève. On fait quoi après avoir enlevé le droit de grève, M. le Président? Elle n'ose pas aller jusqu'au bout de la pensée.

M. Pagé: Question de règlement! M. Lazure: Elle laisse entrevoir...

M. Pagé: Question de règlement, M. le Président!

M. Lazure: ... comme son chef, M. Ryan, l'a laissé entrevoir...

M. Pagé: M. le Président, question de règlement! Question de règlement!

Le Président (M. Boucher): S'il vous plaît! M. le ministre! Question de règlement, M. le député de Portneuf?

M. Pagé: Très brièvement, M. le Président. La question avec débat doit porter... D'ailleurs, vous en avez l'expérience vous, M. le Président, probablement beaucoup plus que le ministre à cet égard. La question avec débat doit porter sur un sujet qui est amené par l'Opposition. La question de ce matin, je pense qu'elle a été clairement indiquée, clairement évoquée par la députée de L'Acadie. La députée de L'Acadie a posé plusieurs questions. Depuis tantôt, M. le Président, et vous en conviendrez avec moi, le ministre des Affaires sociales veut ramener le débat sur un projet qui est tout autre que celui qu'on a inscrit ce matin. Le droit de grève dans le secteur public, on va en parler mercredi. J'espère que vous en parlerez vous-même, parce que vous serez personnellement visé.

M. Chevrette: M. le Président...

M. Pagé: M. le Président, c'étaient là mes commentaires...

M. Lazure: Des menaces! Des menaces, M. le député de Portneuf! Le style habituel, des menaces!

M. Pagé: Non, ce ne sont pas des menaces. Mais on parlera des choses dont il faut parler au moment où on doit en parler et ça, c'est mercredi. Ce matin, on vous invite à répondre à nos questions, tout simplement.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Joliette-Montcalm, question de règlement.

M. Chevrette: Tout ce que j'allais dire, c'est que, quand on ne veut pas avoir de réponse, on ne pose pas de question.

M. Pagé: On va en poser tantôt.

M. Chevrette: II répond aux allusions et aux questions de la députée de L'Acadie. Il doit avoir le droit.

M. Lazure: M. le Président, je continue.

Le Président (M. Boucher): Je pense que le ministre était en train de répondre aux questions qu'a posées Mme la députée de L'Acadie. Alors, on va le laisser poursuivre.

M. le ministre.

M. Lazure: Vous savez, M. le Président, en faisant des allusions, on peut toucher des choses encore plus importantes que les choses qu'on vise par des questions. Je pense qu'il est correct de reprendre ces allusions.

Je reviens encore sur la remarque que je faisais tantôt. On extrait d'un long rapport une phrase qui émet l'hypothèse que "peut-être la mort était reliée", mais l'expert ajoute, en toute honnêteté: Peut-être aussi que l'individu serait mort s'il n'y avait pas eu de débrayage. Mais de sortir ces extraits...

Mme Lavoie-Roux: ... après.

M. Lazure: ... et de les monter en épingle, M. le Président, ce n'est pas responsable. C'est aussi irresponsable que lorsque le Dr Lambert déclarait que trois enfants étaient morts à Québec à cause de la grève. Le Dr Lambert a dû ravaler ses paroles puisque les trois hôpitaux en question ont nié ces soi-disant morts à cause des débrayages.

Les urgences — là, je reviens à une des questions de la députée de L'Acadie — ont été ouvertes constamment, sauf deux exceptions, durant tous ces mois où il y a eu des débrayages. Quand la députée de L'Acadie prétend que notre loi 59 ne fait que consacrer une situation de fait qui existait depuis 1976, elle est dans l'erreur, parce que la loi 253 avait comme base un mécanisme strictement judiciaire. Les ententes ou, à défaut d'ententes, les listes étaient soumises à un arbitre, et un arbitre qui ne faisait qu'entendre les deux parties dans une pièce fermée, alors que la loi actuelle et le fonctionnement du conseil sur les

services essentiels sont basés sur une expertise sur place, à la suite de plaintes. Je pense qu'il est important, M. le Président, pour dégonfler un peu les ballons lancés par la députée de L'Acadie, de répéter encore une fois que, dans tous les cas où les hôpitaux ont porté plainte au conseil, le conseil a envoyé un expert. Entre parenthèses, je peux assurer la députée de L'Acadie que j'ai lu tous les rapports des experts. Dans tous les cas, donc, il y a eu expertise. (11 h 15)

Une autre différence fondamentale entre notre loi et la loi du gouvernement Bourassa en 1976, c'est que la loi du gouvernement Bourassa, à cause d'une philosophie qui était strictement judiciaire et qui n'était pas basée sur la bonne foi des deux parties, a amené comme conséquence une avalanche de poursuites judiciaires et de plaintes. Il y a eu entre 7000 et 8000 plaintes en rapport avec cette loi 253.

M. le Président, je veux bien croire que la députée de L'Acadie est plus à l'aise dans des questions scolaires, dans des questions d'éducation que dans des questions d'affaires sociales...

Mme Lavoie-Roux: C'est trop facile.

M. Lazure: ... mais je pense qu'elle devrait prendre du recul, mieux se renseigner sur ce qui s'est passé en 1972 et en 1976 avant de faire des comparaisons et avant d'affirmer que c'est du pareil au même.

Je conclus, M. le Président, en disant encore une fois que dans la mesure où tout débrayage d'un secteur hospitalier cause des préjudices graves à la population, nous faisons, comme gouvernement, l'impossible pour réduire ces inconvénients. Nous pouvons affirmer que jusqu'ici, durant tous les débrayages, les services essentiels ont été assurés. Le seul recours que l'Opposition a, M. le Président, maintenant, c'est de poser des questions sur des malades qui sont à domicile.

À ce moment-là on est dans de pures hypothèses. Humainement, tout ce qu'il est possible de faire, c'est de bien vérifier si les services aux malades hospitalisés sont adéquats, et ils le sont.

M. Bellemare: M. le Président.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Johnson.

M. Bellemare: D'abord je voudrais signaler que la menace de grève dans les secteurs hospitaliers en 1966 venait juste au début du mandat de M. Johnson et qu'il avait nommé M. Pratte — vous vous souvenez de ça — après avoir édicté un arrêté en conseil pour enlever le droit aux administrateurs de gérer les hôpitaux. Même après ces interventions qui étaient un peu draconiennes, dans le temps, M. Johnson a été poussé au pied du mur et a annoncé une session spéciale. Le jour où la session devait ouvrir, à 3 heures, on a réglé. Donc, il n'y a pas eu de session. 1970, 1972, 1974, je me souviens aussi de ces années où on a voulu aller jusqu'à l'outrance dans certains débrayages. J'étais moi-même hospitalisé dans un hôpital de Montréal pour une opération très grave. Dans la nuit on faisait le vide des hôpitaux, on venait voir si les malades étaient réellement des cas très graves. J'avais été opéré le matin, j'étais donc un des grands malades. On a foncé dans ma chambre et c'est ma femme qui est allée les mettre à la porte. Ceci pour en venir à l'argument suivant que je veux développer ce matin, à savoir qu'il y a des droits pour les syndicats, mais qu'il y a aussi des devoirs impérieux. Je me trouve dans une position intenable ce matin. Ce n'est pas ma place d'être ici ce matin pour revendiquer, au nom des civilisés, des justes limites.

Dans le programme du parti "PQuiou" on a été jusqu'à dire: On va trouver des formules nouvelles pour empêcher ces débrayages sporadiques et particulièrement pour respecter les malades dans les hôpitaux. On a adopté le projet de loi 59 pour établir les services essentiels, mais c'est impensable que, dans un pays civilisé comme le nôtre, on n'ait pas avancé d'un pas dans le domaine syndical pour respecter au moins les droits acquis d'un malade dans un hôpital. Il y a une maudite limite pour les syndicats de se penser rois et maîtres de la population et d'exercer un pouvoir, un droit qui ne leur a jamais été donné. Il y a une limite dans la province de Québec de faire chanter tout le monde et d'être obligé d'aller jusqu'à l'adoption de la loi 59 pour empêcher les syndicalistes d'outrepasser le bon sens.

Dans un pays civilisé comme le nôtre, on a évolué, on a réellement fait du progrès au point de vue de la civilisation, mais quelle civilisation ont-ils, eux, maintenant, vis-à-vis des otages? C'est réellement de la barbarie.

Je m'élève avec violence, c'est indigne d'un peuple civilisé que d'agir de la sorte et, malgré les lois, on trouve encore le moyen de passer outre à la loi. Je comprends que la grande bénédiction que leur a donnée le "P-Quiou" en effaçant pour $50 millions de poursuites les a rendus plus braves. Cela a été une erreur monumentale au point de vue administratif. C'est bon d'être bon, mais jusqu'à faire ça, parce que la situation vous prouve aujourd'hui que vous avez craché en l'air et que ça revient sur le nez du gouvernement.

En voulez-vous une preuve? Au Centre Miriam, à Laval, où on avait 65 employés syndiqués, on a laissé 90 enfants, handicapés mentalement et physiquement, absolument à leur sort. On a, je le comprends, recruté d'urgence les cadres pour pallier cela; mais c'en est une preuve où l'on dépasse le bon sens, le droit de se faire respecter. On prend les malades en otage, on les fait chanter et on fait chanter le gouvernement avec ça; il y a toujours une maudite limite; — excusez-moi, M. le Président, je retire le mot "maudite" — c'est une abomination que de voir, aux premiers jours de juin, dans les hôpitaux de Québec, qu'on a entrepris de réduire, de façon importante, le taux d'occupation, réduire le taux d'occupation pour rendre service à qui? Est-ce que l'intérêt public

commandait véritablement de réduire les services d'admission? C'est abominable!

Voici une lettre dont vous avez peut-être pris connaissance dans le dossier qui a été déposé par le président des services essentiels, au mois de juin. Elle est adressée à M. Henri Larouche, directeur général de l'hôpital Laval. "Cher monsieur,

L'Institut de cardiologie est le seul centre desservant l'est de la province pour les soins surspécialisés de cardiologie et de chirurgie cardiaque. Les services essentiels, tels que fournis, se sont avérés inadéquats et compromettent la sécurité des malades. La liste d'attente des malades pour chirurgie cardiaque dépasse la centaine, depuis le début du conflit, de ces malades qui sont jugés prioritaires: 33 pontages orthocoronaires, onze cardiopathies congénitales, et sept remplacements valvulaires aortiques. Déjà deux malades sont décédés en attendant le transfert."

Je ne veux pas, comme le disait le ministre, crier au scandale et essayer d'attirer la sympathie du ministre, non, mais voici une lettre qui est écrite et dans laquelle on dit qu'il y a deux malades qui sont décédés en attendant le transfert. "Les médecins et chirurgiens de l'Institut de cardiologie jugent qu'ils ne peuvent, dans les circonstances, fournir les soins surspécialisés de cardiologie et de chirurgie cardiaque; en conséquence, les médecins et les chirurgiens de l'Institut de cardiologie vous prient instamment de prendre tous les moyens pour corriger cette situation et rétablir des conditions décentes pour les malades."

Cela, M. le Président, je l'ai pris dans les dossiers qui ont été déposés en Chambre par le président des services essentiels. Cela en est une preuve; on ne court pas dans les cimetières pour aller compter le nombre de morts depuis ce temps, c'est probablement la meilleure réponse qu'on pourrait donner aux médecins: Les cimetières sont remplis de morts. Ce n'est pas votre faute, on a eu recours à vous, mais vous avez manqué votre coup bien des fois; il n'y a pas de clients qui sont capables de revendiquer un droit d'appel, ils sont morts, les cimetières sont remplis. Y a-t-il une municipalité qui n'ait pas de cimetière?

On a jeté hors de l'hôpital des patients qui devraient normalement continuer d'y recevoir des soins, à cause justement des services essentiels; on a refusé d'admettre des patients qui auraient dû normalement suivre l'itinéraire de leur maladie.

Dans un cas comme dans l'autre, le citoyen contribuable subit actuellement de la part des syndicats — je ne blâme pas le gouvernement, ce n'est pas de sa faute, il est devant un état de fait — une agression bureaucratique. Vous avez été trop bon, M. le ministre, vous leur avez pardonné bien des défauts pendant l'autre grève et surtout bien des offenses qui avaient été légalement constituées et judiciairement adoptées. $50 millions qui ont été remis.

Voulez-vous un exemple? Ce n'est pas pour soulever des cas typiques, mais Mme Louise MacKay, de Cap Rouge, consulte son médecin au sujet de son bébé — je voudrais bien que le nom puisse être signalé, Mme Louise MacKay — et son médecin lui dit: Conduisez immédiatement votre enfant à l'hôpital. Elle arrive et il se passe 22 heures avant qu'on lui dise qu'on ne l'admet pas, d'aller à Sainte-Justice à Montréal. L'enfant a été transporté d'urgence à Sainte-Justine à moitié mort; on l'a quasiment ressuscité pour l'opérer. C'est un cas et cela a été public; c'était dans les journaux, dans la Presse du 5 juin. Pas besoin de vous dire qu'on a trouvé ça comme un diplôme de non-compétence des services essentiels.

Si on ferme l'urgence, cela veut dire qu'on refuse une personne qui fait une crise cardiaque ou du cancer avancé. Qui peut juger ça, sinon un pathologiste? Dans la composition du conseil des services essentiels, il y a un seul médecin, le Dr Harvey Barkun, il y a trois gardes-malades, Paulette Côté, Ginette Lestage et Andrée Serre, services auxiliaires de Notre-Dame, et J.-Y. Légaré.

Mme la Présidente, pour vous démontrer que, malgré notre état de pays civilisé, on est en retard, je me souviens qu'en 1964, quand M. Lesage a donné le droit de grève aux services publics, M. Pépin avait dit avec M. Marchand qui était ministre à Ottawa et qui est aujourd'hui sénateur: M. Lesage, on vous demande bien humblement de nous laisser essayer le droit de grève dans les services publics. On a vu ce que cela a donné. On a été obligé d'adopter la loi 59 pour assurer un conseil des services essentiels qui ne produit pas véritablement ce pourquoi il a été nommé, pas plus que le conseil d'information qui est aussi dans la loi 59.

L'article 99j de la loi dit qu'une entente ou une liste doit notamment prévoir le libre accès d'un bénéficiaire, tel que défini au paragraphe p) de l'article 1 de la loi des services de santé et services sociaux. Mme la Présidente, c'est épouvantable de vivre dans un pays, dans une province, dans un monde civilisé comme on dit l'être et d'avoir à subir ça, d'être inquiets pour nos familles, inquiets pour les êtres qui nous sont les plus chers, parce qu'ils n'auront pas la facilité d'aller sur des listes d'attente parce que les services essentiels contrôlent mal leur affaire.

Je félicite, ce matin, Mme la député de L'Acadie d'avoir bien voulu porter ce sujet à notre attention commune par sa question avec débat. Je pense que c'était réellement un sujet d'appoint qu'elle a magnifiquement exposé, qui nous invite, particulièrement nous les législateurs, à dire aux syndicats: Vous avez des droits, c'est vrai, on vous les a reconnus, mais aussi vous avez le devoir de respecter la population civilisée et de ne pas prendre en otage comme moyen d'action des malades ou des enfants dans les écoles. Il faut leur indiquer un point d'arrêt. Il y a toujours une limite à vouloir aller au-delà du bon sens et c'est ce qu'on fait présentement. Le ministre, qu'est-ce que tu veux qu'il fasse? Il fait ce que les autres ont fait dans le temps, le Dr Leclerc et les autres. On n'est pas capable d'aller plus loin.

Mais les services essentiels dont on avait parlé dans le programme du "PQuiou" cela aurait été,

en vertu de la loi 59, un remède absolu à tous les maux.

(11 h 30)

Mme la Présidente, on dirait qu'il n'y a pas de pires sourds que ceux qui ne veulent pas entendre. Ce matin, mon intervention est justement pour dire aux syndicats: Vous allez trop loin. Le premier ministre est rendu à l'admettre en pleine Chambre. Il dit: II y a une limite. C'est une question de jours ou de semaines, mais probablement que ce sera très prochainement que nous allons imposer des nouvelles directives, nous allons prendre des moyens d'action.

C'est le premier ministre d'une province qui a été appuyé par les syndicalistes. Vous savez, ces gens représentent 92 500 personnes dans les services de santé; il y en a 50 000 qui appartiennent à la CSN, il y en a 12 000 qui appartiennent à la FTQ, il y en a 7000 à la Fédération des infirmières et infirmiers du Québec, il y en a 23 000 dans le Cartel des organismes professionnels de la santé.

Mais ce petit groupe de 92 000 n'a pas le droit d'imposer sa loi de barbarie vis-à-vis les malades. Est-ce qu'on choisit le temps où on est malade? Est-ce qu'on choisit la période à laquelle on va subir des traitements spécialisés? Non, madame. Mais eux autres prennent cela comme moyen d'action pour faire chanter le gouvernement, pour faire de la pression et dire, comme ils font dans les services publics actuellement. Vous ne passerez pas.

Vous savez que l'honorable premier ministre avait dit à ces gens-là: Ne lâchez pas. Et, aujourd'hui, il l'a, sa réponse. Ils ne lâchent pas. Pauvre premier ministre, je le plains. Vous savez que nous sommes aussi responsables des actes qu'on a posés. Les paroles s'envolent, mais les écrits restent. Et je pense que vous, Mme la Présidente, qui avez assez d'expérience, parce que vous avez vécu dans un domaine qui vous a donné l'avantage de connaître ce qu'est l'enseignement, vous savez quels préjudices cela peut causer aux enfants par le retard. Ce n'est pas la question ce matin.

Mais on a dit: Les services essentiels, ce seront des chiens de garde. Il y a un gars qui a écrit dans un journal que les chiens de garde étaient des chiens de garde édentés. C'est écrit le 20 juin, dans le journal La Presse.

Les services essentiels, le ministre répond avec beaucoup d'assurance. C'est un bon ministre qu'on a, c'est sûr. Je le dis parce que j'ai été témoin de certains actes où il a véritablement agi dans l'intérêt public, particulièrement dans le comté que je représente. Il fait son possible.

Mais, pour les services essentiels, il dit: Tout y est et tout fonctionne bien. C'est correct pour la quantité, peut-être. Mais la qualité doit exister aussi. La quantité, c'est correct. Vous êtes d'accord avec les chiffres qui nous sont donnés. Mais la qualité des services essentiels, est-ce qu'elle y est? Et la loi dit bien: quantité et qualité. La qualité n'y est pas. Pour la quantité, dans certains hôpitaux, cela fait, mais pas pour la qualité. Pour la qualité, c'est terrible.

Je termine. J'aurais une charge contre le con- seil de l'information, mais il n'est pas question de cela. Pourquoi les malades ne seraient-ils pas appelés à faire partie de la table des négociations? Le ministre pourrait peut-être me donner une bonne réponse sur cela. Est-ce qu'il y a une raison pour que les malades ne soient pas à la table des négociations? Vous n'avez pas pensé qu'à un moment donné, si les malades étaient à la table des négociations, cela changerait peut-être bien des choses, si on avait quelqu'un de dynamique; que les malades soient présents à la table des négociations. Quand vous voyez passer devant le parlement 100 chaises roulantes, est-ce que c'est parce que cela va bien? 100 chaises roulantes, devant le parlement du Québec, sur la Grande-Allée, et, à Montréal, 60 chaises roulantes dans les rues; est-ce qu'on ne peut pas dire qu'il y a un peu de révolte bien naturelle, bien mesurée et bien actualisée?

On dit, dans un article de M. Hardy, dans un journal du 19 juin: "Pour une large part, la grève des hôpitaux a provoqué la chute du gouvernement Bourassa." Je reprends ce texte et je le mets dans le décor des situations qu'on vit. Est-ce que les grèves qu'on a eues ou les grèves qui sont appréhendées ne causeront pas la chute du gouvernement? Je ne fais pas de menace. Je fais simplement lire un article qui a été écrit le 19 juin 1979, par un homme qui connaît un peu le métier. "Sans être antisyndicaliste, dit-il, il faut se rendre à l'évidence que le système de maintien des services essentiels ne fonctionne pas."

L'Association des patients de l'hôpital Saint-Charles-Borromée a déposé il y a quelques semaines, Mme la Présidente, une réclamation de $350 000 contre le syndicat des employés de l'hôpital. Pensez-vous qu'on va s'occuper de cela après le large pardon qu'on leur a donné et la remise des $50 millions de l'amende qui avait été décrétée par les tribunaux, en 1976? L'association des patients de l'hôpital vient d'intenter une action pour $350 000 contre le syndicat. Il a éclaté de rire, n'est-ce pas? Sur les tablettes! Vous avez mal fait de faire cela. Vous avez brimé, mon cher, ce qu'on appelle l'intérêt public. Prendre des fonds qui appartenaient à la province pour acheter une paix relative ou peut-être, je suppose, pour remercier les syndicats d'avoir été "PQuiou"... Je ne l'affirme pas, mais je dis simplement que c'est difficile pour ceux qui sont syndicalistes d'être juge et partie, comme le dit la loi sur les services essentiels. Ils sont juge et partie. Il y a sûrement conflit d'intérêts. Nous autres, Mme la Présidente... Ah oui! j'ai fini. D'ailleurs, j'ai dit tout ce que j'avais à dire du mieux possible. C'était intéressant, n'est-ce pas? Je voudrais...

M. Lazure: Pas de complexe, pas de complexe.

M. Bellemare: Je pense qu'on n'a pas le droit de monnayer un succès syndicaliste sur le dos de la santé ou la sécurité de la population du Québec. C'est pourquoi, la semaine prochaine, lors d'une question avec débat, je parlerai d'enlever le droit de grève dans les services publics. Merci.

La Présidente (Mme Cuerrier): M. le ministre.

M. Lazure: Mme la Présidente, je remercie le député de Johnson des bonnes paroles qu'il a eues à mon endroit.

M. Bellemare: C'est vrai.

M. Lazure: Je le remercie aussi de toute la sollicitude, de l'intérêt qu'il porte à la réélection du Parti québécois.

M. Bellemare: Ah, ah, ah!

M. Lazure: Je lui fais remarquer quand même, pour être sérieux, que, malgré des conflits très graves de 1972, parce que le député de Johnson dit: Faites attention, s'il y a trop de problèmes au cours des négociations avec le front commun, votre élection peut être compromise... C'est une remarque qui est intéressante, mais il faut quand même se souvenir qu'en 1972, malgré les terribles problèmes qu'on a vécus, quelques mois plus tard, en 1973, le gouvernement Bourassa était réélu avec la plus grande majorité jamais vue au Québec. Ainsi vont les caprices de l'électorat.

Le député de Johnson, au fond, fait une argumentation contre le droit de grève ou l'usage du droit de grève dans les secteurs public et parapublic. Il dit, au début de ses remarques, qu'on a laissé les syndicats passer outre aux lois. J'ai pris la citation de façon bien exacte. C'est sérieux comme accusation. Nous ne croyons pas que, pour le moment, depuis que la loi 59 existe, les syndicats aient passé outre aux lois. Ils n'ont pas passé outre aux lois. Mais, comme le député l'a dit tantôt, on va reparler la semaine prochaine du droit de grève, des négociations en général.

Je voudrais revenir rapidement aux malades, aux problèmes qui entourent des situations de débrayage. Vous avez fait allusion aux transferts; les deux partis de l'Opposition ont fait allusion aux transferts. Je voudrais qu'on comprenne bien que, dans le cours normal des choses, qu'il s'agisse d'un nouveau-né, d'un bébé, d'une personne âgée, d'un cardiaque ou d'un malade pulmonaire, des transferts d'un hôpital à un autre, cela se fait couramment, cela se fait tous les jours.

L'admission à l'hôpital pour les cas qui sont à domicile, cela vaut la peine d'y revenir, parce que c'est un peu le thème qu'on a entendu au mois de mai, au mois de juin. Les gens disaient: C'est vrai que les malades qui sont dans l'hôpital sont bien traités, mais il ne faut pas oublier qu'on pénalise les gens qui sont à la maison, et qui devraient être à l'hôpital. Je répète ce que j'ai dit au mois de mai: La responsabilité de voir à l'admission d'un malade qui est à domicile, c'est la responsabilité du médecin traitant, du médecin de famille.

Je continue à croire qu'aux mois de mai et juin, aucun syndiqué n'a refusé l'accès d'un malade dans une urgence, aucun syndiqué. Par conséquent, je pense qu'il est de l'obligation du médecin, chaque fois que, dans sa liste de malades qui attendent pour une opération, chaque fois qu'il pense que ce malade devrait entrer d'urgence, c'est son obligation, sa responsabilité de faire en sorte qu'il s'emmène, que le malade soit emmené à l'urgence. Nous avons jusqu'ici, sur la base d'expériences, l'assurance que ce malade sera admis, mais encore faut-il que quelqu'un l'emmène à l'hôpital. Les urgences ont été très rarement fermées pour les douzaines et les douzaines d'hôpitaux qui ont eu des débrayages d'un jour ou de deux jours depuis cinq ou six mois...

M. Bellemare: ... un hôpital!

M. Lazure: Il y a eu quelques fermetures d'urgence dans Montréal ou Québec. D'habitude, c'était une urgence de fermée à la fois. Là aussi, il faut faire attention pour ne pas dramatiser dans une ville comme Québec où il y a 25 hôpitaux avec des urgences, ou à Montréal, il y a une cinquantaine avec des urgences. Qu'une urgence soit fermée temporairement pour six heures ou douze heures, ce n'est quand même pas une catastrophe.

M. Bellemare: Cela contredit la loi.

M. Lazure: La qualité des services essentiels...

M. Bellemare: Oui.

M. Lazure: ... on entre dans une forêt très touffue, on entre dans un domaine où il est absolument impossible d'avoir des mesures de qualité. Qui va aller mesurer la qualité de soins qu'une infirmière dispense? Ce n'est pas facile.

M. Bellemare: La qualité du malade est plus ou moins...

M. Lazure: Le député de Johnson a raison de proposer que les malades soient plus impliqués. Je ne sais pas si cela doit aller jusqu'à la participation à la table de la négociation, comme il le dit, mais nous en avons tenu compte. Le Conseil sur le maintien des services de santé, par exemple, a recouru au comité provincial des malades. Il y a au moins un des treize experts engagés par le conseil qui est un représentant de ce comité provincial de malades. Le comité provincial de malades, d'ailleurs, a été consulté quand il s'est agi de constituer le Conseil sur les services essentiels.

Mme la Présidente, j'aimerais, pour le temps qu'il me reste, passer la parole au député de Joliette-Montcalm, qui aurait quelques remarques à faire au sujet des interventions du député de Johnson.

La Présidente (Mme Cuerrier): Vous auriez jusqu'à 11 h 56, M. le député de Joliette-Montcalm, si tant est que nous considérions le temps qui aurait pu être alloué au ministre.

M. Chevrette: Je vais me situer à l'intérieur de cela, Mme la Présidente.

M. Pagé: Mme la Présidente, je m'excuse, le député de Joliette-Montcalm me permettra quand même. Ce matin, la question avec débat a été amenée par la députée de L'Acadie. Mme la députée de L'Acadie a fait des représentations, a posé des questions et elle aimerait conclure. Nous avions l'intention de terminer nos travaux vers midi. J'aimerais bien, quant à moi, qu'elle puisse en arriver à sa conclusion d'ici quelques minutes dans les plus brefs délais.

M. Chevrette: D'accord. Dans ce cas, je vais...

La Présidente (Mme Cuerrier): Si vous voulez bien, nous ménagerons...

M. Lazure: Nous sommes d'accord.

M. Chevrette: Je me donne quatre ou cinq minutes, au maximum.

M. Bellemare: Le ministre s'en va!

La Présidente (Mme Cuerrier): Si vous voulez bien, nous ménagerons un temps pour Mme la députée de L'Acadie pour sa conclusion, et ensuite, un temps pour M. le ministre, puisque Mme la députée avait été la première à poser la question.

M. Lazure: Très bref. M. Chevrette: Très bref.

La Présidente (Mme Cuerrier): Rapidement, M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Pagé: Cinq minutes et dix minutes.

M. Chevrette: Je voudrais tout simplement souligner quelques points qui ont été amenés ici. Quant la députée de L'Acadie, en particulier, se servait de rapports d'experts et qu'elle dit qu'ils sont incomplets, je suis un peu d'accord avec elle, dans le sens suivant: un rapport d'expert doit aussi vérifier la situation en temps de grève par rapport à la situation en temps de travail. On aurait probablement pu constater, par exemple, que les cédules d'opérations à l'hôpital Laval n'étaient pas plus grandes en temps de grève qu'en temps de non-grève. C'est important pour porter un jugement de valeur face à la situation dans le cas d'un débrayage. On a malheureusement constaté dans certains hôpitaux qu'il n'y avait pas plus d'opérations que quand il n'y avait pas de grève. Cela m'apparaît un petit peu aberrant et cela permet à certains hommes publics de se poser des questions très sérieuses. On semble vouloir faire porter le blâme complètement sur le dos du syndicaliste. Je pense que non. Il y a du tort des deux côtés. Je m'excuse, j'apporterai les nuances qui s'imposent. Je suis d'accord qu'il faut lancer des appels au monde syndical pour ne pas exagérer dans l'utilisation d'un droit, mais il m'apparaît qu'avec les huit jours d'avis, on peut prévoir certaines situations dans certains hôpitaux, surtout dans le cas de Laval, par exemple.

(11 h 45)

Je donne l'exemple suivant: si un hôpital qui prévoit qu'il y a un débrayage, parce qu'on a huit jours pour aviser, ne s'organise pas pour respecter le taux d'occupation, le syndicat est responsable d'assurer le minimum qu'il a négocié ou le minimum qu'il s'est engagé à faire respecter. Mais la situation est la suivante: II ne contrôle pas, cependant, le taux d'occupation du même hôpital. Je suppose que les services essentiels suggérés par le syndicat représentent un taux d'occupation de 48% ou de 50% et que la direction permet un taux d'occupation de 65%, c'est bien évident que la qualité, dont parlait le député de Johnson, n'est plus assurée, parce que le taux d'occupation devrait être en fonction du pourcentage de services essentiels qu'on s'est engagé à donner.

Moi, je vous avoue — le député de Johnson va tomber d'accord avec moi là-dessus — que la situation actuelle, ce n'est pas le fruit de la spontanéité en relations de travail. Cela s'est bâti, ce climat. Je demeure convaincu, moi, que ce n'est pas en écrivant dans une loi: Demain matin, vous n'avez pas le droit de faire la grève qu'on règle le problème des relations de travail au Québec.

M. Bellemare: C'était dans votre programme.

M. Chevrette: Ce serait vraiment utopique de croire ça. On n'a jamais dit, non plus, qu'on adopterait la loi pour dire qu'on enlève le droit de grève, parce qu'avec les violations légales qui ont eu lieu, en particulier dans la période 1970-1976— et je regardais un des conseillers du Parti libéral qui a vécu toutes ces phases, un certain bout avec moi, à part ça, à certaines tables de négociation — Dieu sait comment on a eu de la difficulté à faire appliquer certaines lois. Pourquoi? Parce qu'elles étaient irréalistes.

Le député de Johnson disait tantôt, par exemple: Vous avez donné la bénédiction pour $50 millions. Mais, pauvre de vous, du jour au lendemain, on allait imposer des amendes de $5000 à des individus qui gagnaient à peine $25 par jour! C'était tout à fait irréaliste. Je conclus là-dessus, Mme la députée, ce ne sera pas long.

M. Bellemare: Ce n'est pas vous autres qui avez décidé ça, c'est la cour.

M. Chevrette: Non, ce que je veux expliquer, c'est que la législation, à l'époque, en particulier sous le régime Bourassa, était complètement farfelue, tellement farfelue que les gens n'y croyaient pas à force que c'était tout à fait exagéré. Quand on veut qu'une loi soit respectée, il faut qu'elle se situe dans le cadre d'une conjoncture politique et d'un climat social qui sont reconnus; sinon, vous courez, comme législateurs, après la violation de la législation.

M. Bellemare: Oui.

M. Chevrette: C'est ça aussi, le piège dans lequel on ne doit pas plonger comme législateurs. On doit plutôt faire appel, comme l'a fait le député de Johnson, à la modération. On se doit de ne pas chercher la provocation et on se doit, cependant, d'être éveillé.

La Présidente (Mme Cuerrier): Alors, votre conclusion, Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Mme la Présidente, je voudrais, d'abord, faire remarquer que le ministre n'a jamais répondu aux faits précis que j'ai apportés. C'est toujours par des allusions. Il m'a également accusé de sortir des extraits. Bon! Je lui ferai remarquer— d'ailleurs, ceci sera remis au public qui pourra juger lui-même — qu'il n'y a pas eu de parties de phrases d'extraites, contrairement à ce que le ministre lui-même a fait au sujet du monsieur de 71 ans. S'il l'avait lu jusqu'au bout, il l'aurait vu. J'ai également dit qu'on était prêt à déposer tous les rapports d'expertises et les communiqués du conseil. D'ailleurs, je ferai remarquer qu'alors que j'ai cité au texte les experts, le conseil, en certaines occasions, ne les cite même pas au texte.

J'ai apporté des faits précis et le ministre n'y a pas répondu. Nous avons vu le député de Joliette soulever des points que je n'ai même pas soulevés et les réfuter lui-même, des questions hypothétiques; il n'a répondu à aucun des points que j'ai soulevés. Je voudrais également faire remarquer qu'en première réponse le ministre a fait état de son bon gouvernement par rapport à ceux qui l'ont précédé, mais qu'en deuxième réplique il m'a accusée personnellement. Je n'ai pas la compétence, etc. Je ne connais rien aux affaires sociales. Mais, Mme la Présidente, je pense qu'il doit rire dans sa longue barbe un peu parce qu'il sait fort bien que j'ai travaillé dans des hôpitaux pendant dix ans. Nous avons même eu des contacts professionnels alors qu'il était en centre hospitalier et d'ailleurs, quand il veut m'amadouer dans d'autres commissions, il y fait facilement allusion.

Je pense qu'il était là sur une mauvaise piste, mais c'est dans le même sens des autres réfutations qu'il a tenté de faire et qui sonnaient vraiment faux. Je voudrais également rectifier un point. Ceci ne se voulait pas une attaque contre les syndicats, au contraire. Les syndicats, la loi leur permet... Enfin, ils fonctionnent avec ce que la loi leur permet et la loi c'est vraiment l'Assemblée nationale qui en a la responsabilité et non les syndicats.

Les questions que je voudrais poser en terminant, la première: Est-ce que la loi, telle qu'elle existe, est suffisante pour assurer à la population la sécurité et les services requis auxquels elle a droit en temps de conflit? C'est une première question.

Est-ce que le gouvernement, conscient de ce qui existe, des rapports des experts — il les a eus bien avant nous, Mme la Présidente — a examiné la possibilité de voir dans quelle mesure il avait utilisé ce que la loi lui permet? Il y avait une possibilité de suspension de grève pour 30 jours.

Également, est-ce que le gouvernement nous dit que, pour autant que les listes sont respectées, cela assure les services essentiels? Je pense que nous avons fait la démonstration ce matin que c'était loin d'être suffisant. Je voudrais terminer, et que le ministre ne me dise pas que je sors encore ces passages du contexte, je les ai lus plus longuement. Je veux simplement dire quelques points où le ministre n'a pas apporté de réponse.

Pour quatorze malades cardiaques bénéficiaires et ayant droit à des soins de qualité dans les délais raisonnables, on peut affirmer de façon catégorique que le délai d'un mois et plus dans certains cas leur est préjudiciable et qu'ils sont inutilement exposés à un risque de mort subite ou à une détérioration grave de leur état.

À l'hôpital Laval, un certain nombre de cas très urgents ont dû être transférés dans d'autres hôpitaux. Nous avons fortement souligné aux autorités de l'hôpital et à la partie syndicale qu'il s'agissait là d'une violation flagrante des services essentiels tels que prévus au Code du travail.

À l'hôpital Laval, on lit qu'en chirurgie thoracique comme en chirurgie cardiaque il s'agit ici de bénéficiaires qui ont droit de recevoir des soins de qualité et qui en sont privés depuis une période de temps telle que leur survie est en danger...

Finalement, Mme la Présidente, en parlant de l'Hôtel-Dieu de Québec, dans la mesure où cet hôpital est un hôpital très spécialisé, principalement dans les cas de cancers, la situation est particulièrement délicate. Il est vrai que j'ai raccourci, mais c'est quand même au texte, j'ai lu toutes les parties qui étaient touchées et les expertises sont là pour qu'on s'y réfère.

Mme la Présidente, je pense qu'il n'y a absolument pas de mauvaise foi de notre part. Le ministre est encore vraiment peu conscient de ses responsabilités quand il tente de dire, devant la population: Non, nous avons fait de bonnes lois, tout va bien, les services essentiels sont assurés. On n'est pas pour se préoccuper de tous ceux qui sont à la maison; évidemment, il y en a toujours qui attendent, mais je pense que ces données font la preuve, hors de tout doute, que le gouvernement ne s'est pas acquitté de ses responsabilités et continue de ne pas vouloir s'en acquitter. Il y a actuellement à Montréal des débrayages dans probablement une dizaine d'hôpitaux, le transport en commun est complètement paralysé. Même les transferts dans les hôpitaux — auxquels le ministre faisait allusion tout à l'heure — ne sont presque plus possible, quand on connaît la situation de la circulation à Montréal. Alors, je pense que c'est encore de la fausse réassurance que le ministre donne au public.

Notre seule préoccupation — je le répète — est que le gouvernement — nous sommes prêts à l'aider; je l'ai fait dans cet esprit ce matin — examine la loi, voie dans quelle mesure on peut mieux assurer les services essentiels et prenne des mesures pour que, dans les faits, ces services essentiels soient assurés à la population. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Cuerrier): Dernière intervention, la conclusion de M. le ministre des Affaires sociales.

M. Lazure: Merci, Mme la Présidente. Je remercie Mme la députée de L'Acadie pour avoir évoqué cette période plus calme où nous travaillions tous les deux dans le secteur hospitalier; ça fait déjà très longtemps!

J'ai simplement voulu dire et j'ai dit que Mme la députée de L'Acadie était plus familière, plus à l'aise dans les questions d'éducation et c'est normal.

Ceci étant dit, je vais prendre les questions qu'elle a posées dans sa conclusion, une par une.

Quant à nous, la loi — pour reprendre l'expression de Mme la députée de L'Acadie — est actuellement suffisante. La loi, à notre avis, fonctionne pour autant qu'une loi peut fonctionner, dans la mesure où les humains qui appliquent la loi sont de bonne foi pour faire appliquer cette loi. On trouve une confirmation du bon fonctionnement de cette loi et du bon fonctionnement du conseil sur les services essentiels dans le fait suivant, où je rejoins directement les questions de Mme la députée de L'Acadie.

Contrairement à ce qu'elle a laissé entendre, le comité sur les services essentiels a répondu à toutes les plaintes des hôpitaux. Treize hôpitaux, depuis le mois de mai, ont porté plainte au comité et, dans chacun des cas, il y a eu enquête, Mme la Présidente, et c'est capital, c'est fondamental, dans chacun de ces cas, il y a eu enquête et le rapport officiel du comité sur les services essentiels a conclu en disant, dans les treize cas sur treize, que les services nécessaires avaient été fournis. Encore une fois, il faut distinguer entre le rapport très détaillé qu'un expert fournit au comité sur les services essentiels, c'est une chose; ensuite, il y a discussion avec les membres du comité sur les services essentiels et ce sont les membres du comité sur les services essentiels qui émettent le communiqué final ou la décision finale.

Dans tous les cas, la conclusion du comité a été très claire, dans tous les cas, les services nécessaires avaient été maintenus. C'est ça, au fond, le concept principal, l'idée fondamentale de la loi et du rôle du comité, de voir à maintenir les services nécessaires pour la santé et la sécurité des gens. J'ajouterai aussi que le ministère des Affaires sociales et le ministre ont des rapports quotidiens, venant de nos propres fonctionnaires; nous assumons pleinement notre responsabilité et, en plus des rapports quotidiens qui viennent depuis quelque temps du comité sur les services essentiels, nous avons aussi nos propres rapports quotidiens.

Je dois dire avec satisfaction que, dans presque tous les cas, les deux rapports concordent. Ce sont des rapports établis par téléphone avec tous les hôpitaux qui sont en débrayage chaque jour, en consultant et la partie patronale et la partie syndicale. Je réponds à sa deuxième question: Oui, nous avons envisagé la possibilité de suspendre le droit de grève, nous l'avons envisagée. Si c'est nécessaire, si la situation le commande, nous l'envisagerons encore. Lorsque nous l'avons envisagée, notre conclusion a été: Étant donné que les services de santé étaient suffisamment maintenus, il n'y avait pas lieu de retirer ce droit de grève.

L'autre question, la dernière de la députée de L'Acadie, où elle parle, encore une fois, en citant des extraits de rapports d'experts, de certains malades dont le risque de décès augmentait à cause de la période d'attente, dans ces cas précis que j'ai bien connus, de par les rapports de tous les jours que j'étudiais, que ce soit à l'hôpital Laval, au CHUL ou dans les hôpitaux de Québec, je peux vous assurer, Mme la Présidente, que les médecins, chaque fois qu'ils ont assumé leurs responsabilités, chaque fois qu'ils ont rempli leurs obligations professionnelles de faire transporter les malades de leur domicile vers l'hôpital, ces malades étaient admis.

Il faut, cependant, que les médecins ne se contentent pas de dire: Nous avons des malades à domicile qui vont peut-être mourir parce qu'il y a un débrayage. Il faut que ces médecins les emmènent ou les fassent venir à l'hôpital et nous avons la certitude, sur la base de l'expérience que nous avons eue en tout cas, que ces malades seront admis aux urgences. (12 heures)

Mme la Présidente, je conclus à mon tour. Je me réjouis que nous ayons eu cette occasion de faire un retour en arrière sur la période de mai et juin. Je pense que nous pouvons toujours apprendre suite à ces discussions et tirer certaines leçons. Je peux vous assurer, Mme la Présidente, que cette loi 59, qui comporte en particulier la création du comité des services essentiels, jusqu'ici, nous a démontré, depuis cinq ou six mois, qu'elle était infiniment supérieure comme loi à la loi 253 et à toutes les autres mesures législatives que les gouvernements antérieurs ont pu prendre.

Mme Lavoie-Roux: C'est le ministre qui le dit, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Cuerrier): C'était la question avec débat de Mme la députée de L'Acadie au ministre des Affaires sociales. La commission des affaires sociales ajourne ses travaux sine die.

Fin de la séance à 12 h 1

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