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(Douze heures huit minutes)
Le Président (M. Bordeleau): La commission des affaires
sociales reprend ses travaux aux fins d'entendre les mémoires sur le
projet de loi no 27. Les membres de la commission pour la séance de ce
matin sont: M. Boucher (Rivière-du-Loup) remplacé par M.
Brouillet (Chauveau); Mme Dougherty (Jacques-Cartier), M. Houde (Berthier), M.
Johnson (Anjou), Mme Juneau (Johnson), Mme Lavoie-Roux (L'Acadie), M. Leduc
(Fabre), M. Rochefort (Gouin), M. Sirros (Laurier).
Les intervenants sont: M. Beauséjour (Iberville), M.
Bélanger (Mégantic-Compton), Mme Harel (Maisonneuve), M. Kehoe
(Chapleau), M. Lafrenière (Ungava), M. Laplante (Bourassa), M. Mathieu
(Beauce-Sud), M. O'Gallagher (Robert Baldwin).
Est-ce qu'il y a des remplacements, Mme la députée de
L'Acadie?
Mme Lavoie-Roux: Écoutez, s'il y en a qui viennent, on
fera ce qu'on a fait hier soir. Je ne pense pas qu'il y ait foule ce matin.
Le Président (M. Bordeleau): D'accord. Non? Cela me
surprendrait également.
Je pense qu'on peut commencer immédiatement, étant
donné...
Mme Lavoie-Roux: Ce n'est pas à cause du manque
d'intérêt des mémoires...
Le Président (M. Bordeleau): ... l'heure
déjà tardive.
Mme Lavoie-Roux: ... c'est à cause de l'heure tardive.
Le Président (M. Bordeleau): Pour remplir le mandat de la
commission, il nous reste trois mémoires à entendre qui sont ceux
de l'Association des pharmaciens des établissements de santé du
Québec, en premier lieu, de l'Association de santé publique, et
finalement, de l'Association québécoise des pharmaciens
propriétaires.
Nous sommes prêts à entendre immédiatement
l'Association des pharmaciens des établissements de santé.
J'imagine que ce sont les représentants qui sont ici? M. Donald Laberge,
président et porte-parole.
M. Laberge (Donald): Oui, M. le Président.
Le Président (M. Bordeleau): M. Laberge, si vous voulez
nous présenter les personnes qui vous accompagnent.
Association des pharmaciens des établissements
de santé du Québec
M. Laberge: Oui, M. le Président. M. le ministre des
Affaires sociales, distingués membres de la commission parlementaire,
permettez-moi, avant de commencer, de vous présenter les gens qui
m'accompagnent: à ma gauche, Me Yvan Brodeur, conseiller juridique de
l'association, M. Robert Létourneau, premier vice-président;
à ma droite, M. Gaétan Dubois, secrétaire de
l'association, et Mme Hélène Lambert, deuxième
vice-présidente.
Je voudrais noter que nous avons déposé ce matin une
annexe à notre mémoire.
Il nous est agréable de vous présenter les commentaires de
l'Assocation des pharmaciens des établissements de santé du
Québec relativement au projet de loi 27. Constituée en vertu de
la Loi sur les syndicats professionnels du Québec, notre association
regroupe 446 pharmaciens et représente l'ensemble des pharmaciens
oeuvrant dans les établissements de santé du Québec.
Au-delà de la mission traditionnelle de défense des
intérêts professionnels et économiques des pharmaciens
d'établissements, l'APESQ s'est employée à favoriser
l'organisation et le développement de la pharmacie dans le réseau
des affaires sociales, en étroite collaboration avec le ministère
des Affaires sociales. À titre d'exemple, signalons notre contribution
aux normes sur les services de pharmacie dans les centres hospitaliers, aux
normes sur les services de pharmacie en centres d'accueil, aux stages de
formation professionnelle, à la résidence en pharmacie
d'hôpital, aux cliniques externes, dans les centres hospitaliers,
etc.
De fait, notre présence devant cette commission illustre notre
souci de contribuer positivement à la détermination d'une loi qui
assure des services de santé de haute qualité à nos
concitoyens. Lorsque notre association a été fondée il y a
vingt ans, on dénombrait
25 pharmaciens dans les hôpitaux du Québec. En même
temps que la pharmacie hospitalière s'est développée, le
réseau des centres de services de santé s'est ramifié au
point que le terme hôpital est devenu trop étroit pour
désigner adéquatement cette diversité de centres de
services de santé. Ainsi sont apparus les centres hospitaliers, les
centres d'accueil et les CLSC. Conséquemment, notre groupe de
pharmaciens, désigné alors sous le nom de Société
professionnelle des pharmaciens d'hôpitaux, a modifié son
appellation pour devenir en juillet 1973 l'Association des pharmaciens des
établissements de santé du Québec, Évidemment, la
majorité de nos membres exercent dans les centres hospitaliers.
Cependant, plusieurs d'entre eux oeuvrent en centre d'accueil, parfois à
temps plein, souvent à temps partiel, partageant leurs activités
entre un centre hospitalier et un ou plusieurs centres d'accueil. Quant aux
CLSC, quelques-uns de nos membres y fournissent des services pharmaceutiques
adaptés à la vocation de ce type d'établissement.
Permettez-moi d'ouvrir une parenthèse pour mentionner aussi que
la grande majorité de nos membres détient un diplôme ou un
certificat en pharmacie d'hôpital. Cette formation de deuxième
cycle existe depuis une quinzaine d'années. Le stage de résidence
qui s'y applique est d'ailleurs subventionné par le ministère des
Affaires sociales. Ces changements dans la pratique de la pharmacie en
établissement devraient se refléter dans la loi et la
réglementation en vigueur. Tel n'est pas le cas. C'est ainsi qu'il y a
lieu, croyons-nous, d'apporter des modifications à la Loi sur
l'assurance-maladie et à la Loi sur les services de santé et les
services sociaux.
Premier point, la Loi sur l'assurance-maladie et notre reconnaissance
syndicale. Nous demandons que l'article 3 de la Loi sur l'assurance-maladie
soit amendé pour que le ministre des Affaires sociales ait le pouvoir,
avec l'approbation du gouvernement, de conclure avec l'Association des
pharmaciens des établissements de santé du Québec une
entente qui puisse s'appliquer à tous les pharmaciens en
établissement et lier tous les établissements de
santé.
La situation actuelle. Les pharmaciens en établissement de
santé sont des professionnels au sens de la Loi sur l'assurance-maladie.
En effet, l'article 1b de cette loi définit les professionnels de la
santé comme tout médecin, dentiste, optométriste ou
pharmacien légalement autorisé à fournir les services
assurés.
Toutefois, les services professionnels rendus par les pharmaciens en
établissement de santé ne sont pas présentement des
services assurés au sens de la Loi sur l'assurance-maladie, cette loi se
limitant à assurer le coût des services et médicaments
fournis à certaines catégories de personnes, personnes
âgées, bénéficiaires de l'aide sociale, par les
pharmaciens propriétaires rémunérés à
l'acte.
D'autre part, les services fournis par les pharmaciens dans les centres
hospitaliers sont des services assurés au terme de la Loi sur
l'assurance-hospitalisation. C'est ainsi que, dans le cas des services
pharmaceutiques fournis en centre hospitalier, l'article 3 de la Loi sur
l'assurance-hospitalisation reçoit application.
Article 3. "Le ministre peut aussi, avec l'approbation du gouvernement,
conclure avec tout organisme représentatif d'une catégorie de
professionnels de la santé au sens de la Loi sur l'assurance-maladie,
toute entente aux fins de l'application de la présente loi. "Toute
entente ou partie d'entente peut, s'il y est pourvu expressément, lier
tout établissement. Toutefois, le ministre doit consulter les
établissements ou groupes d'établissements susceptibles
d'être liés par une entente ou partie d'entente et ceux-ci peuvent
transmettre au ministre des recommandations quant aux modalités de leur
participation à la conclusion de cette entente ou partie d'entente."
Le ministre des Affaires sociales a déjà exercé
vis-à-vis de l'Association des pharmaciens des établissements de
santé les pouvoirs que lui reconnaît l'article 3. Ainsi, le 30
juillet 1976 notre association concluait avec le ministre des Affaires sociales
une entente relative aux services pharmaceutiques dispensés en centre
hospitalier. (12 h 15)
Cette entente comportait la reconnaissance formelle de notre association
comme organisme représentatif des pharmaciens exerçant leur
profession en centre hospitalier. Sur le plan légal, le ministre des
Affaires sociales reconnaissait ainsi notre association au même titre, de
la même façon que les autres organismes représentatifs
régis par l'article 19 de la Loi sur l'assurance-maladie et l'article 3
de la Loi sur l'assurance-hospitalisation. Ces organismes représentent
respectivement les médecins, les médecins spécialistes,
les dentistes, les chirurgiens buccaux, les optométristes, les
pharmaciens propriétaires et les pharmaciens d'établissements de
santé.
L'amendement requis. Pour autant, le ministre des Affaires sociales n'a
pas présentement le pouvoir de conclure avec l'Association des
pharmaciens des établissements de santé une entente concernant
les services pharmaceutiques rendus dans les centres d'accueil et les CLSC.
L'Association des pharmaciens des établissements de santé du
Québec représentant la très grande majorité des
pharmaciens oeuvrant dans ces établissements est justifiée de
demander que la loi soit amendée pour que ses membres y
bénéficient
du droit fondamental de voir leurs conditions de travail
négociées par l'organisme représentatif de leur choix.
Cet amendement implique essentiellement que l'article 3 de la Loi sur
l'assurance-maladie soit amendée, en sorte que tous les services que
rendent les pharmaciens dans un établissement, qu'il s'agisse d'un
centre hospitalier, d'un centre d'accueil ou d'un CLSC, deviennent des services
assurés, au sens de la Loi sur l'assurance-maladie, pour toutes
catégories d'établissements que le gouvernement pourra
déterminer. En d'autres termes, nous désirons que la loi soit
amendée pour que le gouvernement puisse, par règlement,
décréter que les services pharmaceutiques rendus dans une ou
plusieurs catégories d'établissements deviennent des services
assurés. Ainsi, le ministre des Affaires sociales détiendrait le
pouvoir d'entreprendre avec l'Association des pharmaciens des
établissements de santé des négociations pour conclure une
entente pouvant s'appliquer à toutes catégories
d'établissements déterminées par le gouvernement.
L'amendement requis pourrait se matérialiser, notamment, en
ajoutant un paragraphe d au premier alinéa de l'article 3. Article 3. Le
coût des services suivants qui sont rendus par un professionnel de la
santé est assumé par la régie pour le compte de tout
bénéficiaire conformément aux dispositions de la
présente loi et des règlements, paragraphes a, b, c et d que nous
voulons introduire: Tous les services que rendent les pharmaciens dans un
établissement visé par règlement.
C'est de haute lutte que nous avons pu obtenir, lors de notre
première négociation, notre reconnaissance syndicale et ce,
malgré une représentativité incontestable. De plus, en
dépit de cette reconnaissance syndicale, notre association n'a pu
obtenir un contrat collectif analogue aux ententes déjà conclues
avec les autres organismes représentatifs des professionnels de la
santé, l'entente de ceux-ci liant automatiquement tous les
établissements.
Il demeure étrange que les pharmaciens d'établissements,
premier groupe de professionnels de la santé à privilégier
le mode du salariat, à accepter un mode de rémunération
qui permet de dissocier le service pharmaceutique du bien que constitue le
médicament, soient victimes de leur bonne foi et soient pratiquement
privés du droit de négocier reconnu à leurs
confrères qui pratiquent en officine.
Notre association demande un redressement de la situation. Elle
désire conclure avec le ministre des Affaires sociales une entente
collective qui régisse tout pharmacien en établissement de
santé, selon des conditions d'exercice et de rémunération
uniformes. Il ne saurait s'agir d'une exigence excessive. Nous demandons
simplement que l'on amende la loi pour faire cesser l'état actuel de
discrimination envers les pharmaciens des établissements de
santé.
Partie II: Loi sur les services de santé et les services
sociaux.
Avant d'exposer nos commentaires sur les modifications
législatives concernant la Loi sur les services de santé et les
services sociaux, permettez-nous de préciser le rôle du pharmacien
en établissement de santé. Ces précisions vous permettront
de mieux situer l'objet de nos représentations.
En établissement de santé, le pharmacien a pour rôle
d'assurer une utilisation rationnelle du médicament. À cet
égard, le législateur confiait au pharmacien d'importantes
responsabilités reliées à la sélection ainsi qu'au
contrôle de la distribution et de l'utilisation des
médicaments.
Ces responsabilités sont décrites dans la Loi sur la
pharmacie et dans le règlement d'application de la Loi sur les services
de santé et services sociaux. Elles sont précisées par des
directives ministérielles telles les normes du service de pharmacie dans
les centres hospitaliers et les normes du service de pharmacie dans les centres
d'accueil.
L'évolution constante de la pratique de la pharmacie depuis 1972
a fait que le rôle du pharmacien en établissement de santé
est maintenant surtout axé sur des activités de contrôle
clinique de la médication.
Ces activités sont principalement la validation des ordonnances,
l'opinion pharmaceutique, le service auprès du malade et
l'information.
Permettez-nous d'apporter brièvement quelques précisions
sur chacune des ces activités.
Validation des ordonnances. L'ensemble des tâches reliées
à la validation des ordonnances a pour but d'apprécier
l'opportunité clinique de la prescription du médecin ou du
dentiste. Cette responsabilité spécifique est confiée par
la Loi sur la pharmacie qui régit l'exercice de notre profession. En
effet, cette loi définit l'expression "ordonnance" comme étant
une autorisation de fournir des médicaments ou des poisons,
donnée par des personnes autorisées à prescrire des
médicaments ou des poisons par une loi du Québec essentiellement
des médecins et des dentistes.
Contrairement à d'autres groupes professionnels, le pharmacien
n'est donc pas un simple exécutant; la loi a créé une
exception pour le pharmacien. Le pharmacien est le seul professionnel
autorisé à déroger au traitement prescrit par un
médecin. Le pharmacien peut donc refuser d'exécuter une
ordonnance, ce qui dépasse le simple droit de recommandation. Les
rapports médecin-
pharmacien demeurent donc de consultant à consultant.
L'opinion pharmaceutique. L'opinion pharmaceutique s'inscrit dans une
perspective de collaboration interdisciplinaire et se manifeste selon les deux
hypothèses suivantes:
Première hypothèse: L'analyse de l'ordonnance
révèle que la médication est inopportune sur le plan
clinique. En pareil cas, le pharmacien en informe le prescripteur et discute
avec lui des correctifs appropriés.
La deuxième hypothèse: Le prescripteur recherche l'opinion
du pharmacien auquel il entend adresser une ordonnance. Cette situation
représente la méthode de travail la plus efficace et devient une
pratique de plus en plus fréquente.
Cette activité clinique-conseil du pharmacien auprès du
médecin et dentiste représente l'aspect le plus important de son
rôle en établissement de santé. Le succès des
politiques de consommation rationnelle du médicament comme agent
thérapeutique dépend de cette collaboration entre le
médecin ou le dentiste et le pharmacien.
Le service auprès du malade. La pharmacie clinique met le
pharmacien en communication croissante avec le malade. Les programmes de
formation universitaire ont d'ailleurs été repensés pour
tenir compte de cette collaboration plus active que le pharmacien apporte aux
médecins traitants.
Ces rapports du pharmacien avec le malade empruntent principalement deux
modes, soit l'histoire médicamenteuse à l'arrivée du
malade et le conseil pharmaceutique au départ du patient.
Ces interventions cliniques du pharmacien auprès du malade
demeurent certes limitées aux situations spéciales, eu
égard aux effectifs disponibles.
Cette contribution s'inscrit dans le cadre des programmes
préventifs de santé; elle n'a pas encore l'ampleur que
justifierait la nécessité de contrer la consommation abusive des
médicaments.
L'utilité du pharmacien dans les programmes de prévention
des départements de santé communautaire nous apparaît
évidente. Il y aurait donc lieu de favoriser cette participation.
L'information. Le pharmacien joue de plus en plus, en
établissement de santé, une fonction d'information auprès
des médecins, des dentistes et du personnel infirmier concernant la
médication. Cette fonction, il l'assume par la tenue de
conférences, de séminaires ainsi que par la publication de
bulletins pharmaceutiques.
L'avalanche du matériel publicitaire publié par les
compagnies pharmaceutiques rend de plus en plus vitale une information critique
sur les médicaments.
En conclusion, on observe que le rôle professionnel du pharmacien
en établissement de santé se transforme et évolue de plus
en plus vers une collaboration clinique au soin du malade favorisant ainsi un
rapprochement médecin-pharmacien. Ce phénomène
engagé depuis des années est irréversible.
La spécificité de l'apport du pharmacien au soin du malade
dans le contexte de la pharmacie clinique devrait se refléter dans la
structure organisationnelle de l'établissement de santé. Telle
n'est pas actuellement la situation.
En effet, les médecins et dentistes en centres hospitaliers font
partie d'un département clinique qui relève d'un chef de
département sous l'autorité du directeur des services
professionnels.
Les médecins et dentistes sont également membres du
Conseil des médecins et dentistes, organisme responsable essentiellement
d'assurer la qualité de l'acte médical.
D'autre part, les pharmaciens en centres hospitaliers font partie du
service de pharmacie sous l'autorité du directeur des services
hospitaliers.
Les pharmaciens étant rattachés aux services hospitaliers
sont exclus du Conseil des médecins et dentistes, dont relève
pourtant l'important comité de pharmacologie, le chef du service de
pharmacie étant toutefois membre à part entière de ce
comité. Il s'agit d'un comité du Conseil des médecins et
dentistes.
Il s'agit là d'une solution boiteuse, qui ne tient pas compte de
l'ensemble de l'apport du pharmacien au soin du malade et du rapprochement qui
s'est dessiné entre le médecin et le pharmacien au cours des dix
dernières années. Il est utile de rappeler qu'au début des
années soixante-dix, les pharmaciens d'établissement de
santé étaient généralement intégrés
aux bureaux médicaux prévus par la loi des hôpitaux, au
même titre que les chirurgiens-dentistes.
C'est avec l'adoption de la Loi sur les services de santé et les
services sociaux et de son règlement d'application que la situation
change; le pharmacien est rattaché aux services hospitaliers et exclu du
Conseil des médecins et dentistes.
L'implication du pharmacien dans le processus de validation des
ordonnances et en particulier le rôle de consultant et de collaborateur
qu'il y joue par rapport au médecin, la participation du pharmacien
à l'élaboration de l'opinion pharmaceutique, la contribution
croissante du pharmacien aux services auprès du malade de même que
le rôle joué auprès des médecins et dentistes dans
l'information critique concernant la médication, tous ces facteurs
impliquent, par nécessité, que les pharmaciens soient
groupés dans un département clinique, sous l'autorité du
directeur des services professionnels et qu'ils soient membres à part
entière du Conseil des médecins et dentistes.
Un bref rappel historique vous permettra d'ailleurs de constater la
constance des positions prises par notre association dans les
représentations qu'elle a eu l'occasion de faire auprès du
ministre des Affaires sociales depuis une dizaine d'années.
En février 1971, lors de la commission parlementaire traitant du
projet de loi no 69, la Société professionnelle des pharmaciens
d'hôpitaux, devenue depuis l'APES, traitait des rôles respectifs du
médecin et du pharmacien.
On signalait entre autres, et je cite: "La suite logique de l'acte
médical est très souvent l'acte pharmaceutique. Ce n'est qu'en de
rares occasions qu'il est possible de prévoir un traitement qui
n'implique pas de médication. C'est en travaillant de concert que les
médecins et pharmaciens peuvent assurer à leurs patients une
thérapie adéquate et une qualité supérieure de
soins. L'établissement, dans nos institutions, d'un formulaire par le
comité de pharmacologie et thérapeutique auquel participe
activement le pharmacien, a contribué à accroître la
sécurité des patients et à diminuer les coûts".
En juillet 1972, lors de la commission parlementaire sur le projet de
règlement en vertu de la Loi sur les services de santé et les
services sociaux, la Société professionnelle des pharmaciens
d'hôpitaux, devenue aujourd'hui l'APES, soulignait que le service de
pharmacie devrait relever de la direction des services professionnels et non de
la direction des services hospitaliers, à cause de la nature du travail
du pharmacien qui est relié très souvent à
l'activité médicale.
En août 1976, l'APES présentait au ministre Claude Forget
ses commentaires sur le projet de règlement en vertu de la Loi sur les
services de santé et les services sociaux.
Ces commentaires rappelaient que, forts de l'expérience
vécue depuis 1972, donc quatre ans d'expérience sous le DSH, nous
étions persuadés que les pharmaciens des établissements de
santé devaient se regrouper sous la direction des services
professionnels.
En mars 1979, dans un mémoire présenté au ministre
Denis Lazure, notre association proposait une réforme de la
réglementation édictée en vertu de la Loi sur les services
de santé et les services sociaux, en recommandant au ministre des
Affaires sociales les modifications suivantes, et je cite: "Que le service de
pharmacie soit placé sous la direction des services professionnels. Que
le service de pharmacie soit régi par les règles d'organisation
et de fonctionnement relatives aux départements et aux services
cliniques. Que les pharmaciens fassent partie du Conseil des médecins et
dentistes. Ces modifications adapteraient les structures aux
réalités et permettraient au pharmacien d'assumer plus
efficacement son rôle au sein de l'équipe clinique."
Pour en revenir plus précisément au projet de loi no 27,
nous nous permettons deux remarques: les responsabilités additionnelles
que le projet de loi no 27 veut confier aux chefs de départements
médicaux s'apparentent de plus en plus aux responsabilités
actuelles du chef du service de pharmacie. Deuxième remarque: Nous ne
pouvons qu'être d'accord d'ailleurs avec la rémunération
prévue pour les chefs de départements médicaux, les chefs
de service de pharmacie bénéficiant déjà d'une
rémunération supplémentaire pour leurs activités
administratives.
En conséquence, nous demandons à cette commission
parlementaire que l'article 3 de la Loi sur l'assurance-maladie soit
amendé pour que le ministre des Affaires sociales ait le pouvoir, avec
l'approbation du gouvernement, de conclure avec l'Association des pharmaciens
des établissements de santé du Québec, une entente qui
puisse s'appliquer à tous les pharmaciens en établissements et
lier tous les établissements de santé. Deuxième
recommandation: Nous réitérons à cette commission
parlementaire nos demandes antérieures, à l'effet que la Loi sur
les services de santé et les services sociaux soit modifiée pour
que le service de pharmacie devienne un département clinique, que le
chef du département de pharmacie soit placé sous la surveillance
du directeur des services professionnels et que les pharmaciens soient membres
du Conseil des médecins et dentistes.
Permettez-moi, M. le Président, de passer maintenant à
l'annexe que nous avons déposée ce matin. Cette annexe traite de
deux sujets. Première partie: Aspect économique du rôle du
pharmacien au sein du Conseil des médecins et dentistes. Deuxième
partie, circulaire 1981-071 émise le 7 juillet 1981 et ayant pour objet
les services de pharmacie en centre d'accueil d'hébergement. (12 h
30)
Aspect économique du rôle du pharmacien au sein du conseil
des médecins et dentistes. Dans le plan actuel d'organisation des
établissements, le pharmacien se retrouve sous la direction des services
hospitaliers. En conséquence, le pharmacien est appelé à
participer régulièrement à des rencontres
réunissant les chefs de services hospitaliers, par exemple, le chef du
service d'accueil, le chef du service des archives, le chef technicien du
service de radiologie ou celui du service des laboratoires. Ces rencontres
portent essentiellement sur des discussions d'ordre administratif. Dans ce
contexte, il n'y a aucune relation entre l'impact financier de la consommation
des médicaments et les dépenses engendrées dans les autres
services hospitaliers puisque aucune de leurs dépenses
n'implique des médicaments.
Le pharmacien ne peut donc échanger avec les chefs de ces
services, il ne peut vraiment y avoir de langage commun ni de relation de cause
à effet qui puissent s'établir. Par contre, telle n'est pas la
situation avec les chefs de département clinique, lesquels sont
essentiellement des médecins, lesquels sont aussi les principaux
intervenants au chapitre de la consommation des médicaments en
établissement. Car, rappelons-le, ce n'est qu'en de rares occasions
qu'il est possible de prévoir un traitement qui n'implique pas de
médication. Comme la suite logique de l'acte médical est
très souvent l'acte pharmaceutique, c'est donc en travaillant de concert
que les médecins et les pharmaciens peuvent assurer à leurs
patients une thérapie adéquate, une qualité
supérieure de soins.
C'est aussi en travaillant de concert avec les médecins que les
pharmaciens peuvent matérialiser, par le biais de l'élaboration
d'une liste de médicaments à partir de la liste de
médicaments de la régie, par le biais de programmes de revue de
l'utilisation des médicaments, leur souci de la plus stricte
économie compatible avec l'efficacité du traitement. Pour se
faire, M. le ministre, il nous faut une structure organisationnelle
adéquate. C'est vraiment au niveau du conseil des médecins et
dentistes que le pharmacien peut discuter avec tous les chefs de
département clinique de problèmes reliés à
l'utilisation des médicaments et intervenir de façon valable et
significative. C'est à ce niveau que le pharmacien peut réaliser,
entre autres, l'équilibre coût/qualité tant
recherché. Comme le mentionnait l'Ordre des pharmaciens dans son
mémoire présenté mercredi soir, si le chef du
département de pharmacie doit contrôler l'utilisation non
seulement des médicaments, mais aussi de budgets très importants
reliés à la consommation de ces médicaments, il devrait
pouvoir compter sur des moyens accrus prévus dans la structure
organisationnelle d'un département clinique.
D'ailleurs, le législateur a reconnu partiellement cette
réalité en prévoyant la création d'un comité
de pharmacologie, lequel est un des comités obligatoirement
formés par le conseil des médecins et dentistes. Et le
législateur a pris soin de préciser que le pharmacien fait partie
ex officio de ce comité. Il a aussi pris soin, M. le ministre, de
préciser que ce comité de pharmacologie a pour fonction, entre
autres, de conseiller le pharmacien sur la préparation d'un formulaire
ou liste de médicaments en usage dans l'hôpital, à partir
de la liste de médicaments visés à l'article 4 de la Loi
sur l'assurance-maladie. Il nous apparaît intéressant de souligner
que les formulaires internes et propres à chaque établissement
contiennent environ de 400 à 600 médicaments extraits de la liste
de la régie, laquelle, comme vous le savez, en contient quelques
milliers. En fait, ce sont de 400 à 600 médicaments en centre
hospitalier et moins de 100 médicaments en centre d'accueil, alors qu'il
y a environ 2000 médicaments.
Il y a là une première source d'économie
substantielle résultant de l'exercice des pouvoirs de sélection
des médicaments dévolus aux pharmaciens par la
réglementation afférente au chapitre 48. Une deuxième
source d'économie apparaît lorsqu'à partir de cette liste
restreinte, le pharmacien applique le principe de l'équilibre coût
par rapport à l'efficacité du traitement, par son pouvoir de
sélection.
Deuxième partie de l'annexe. La circulaire 1981-071 émise
le 7 juillet 1981 et ayant pour objet les services de pharmacie en centre
d'accueil d'hébergement. Cette circulaire du 7 juillet 1981 contient,
entre autres, les éléments suivants. Elle définit les
services pharmaceutiques et attribue aux pharmaciens le rôle clinique que
nous venons d'évoquer dans notre mémoire. Elle précise que
l'établissement doit retenir les services d'un pharmacien oeuvrant sur
place qui doit être rémunéré selon le mode du
salariat ou de la vacation. Elle précise aussi que les centres d'accueil
doivent s'approvisionner en médicaments selon les mécanismes
d'achat de groupe. Cette circulaire fait ainsi la distinction, comme nous le
faisons dans notre mémoire, entre le bien, le médicament, et le
service pharmaceutique lui-même. Cette circulaire ajoute ensuite que ces
modes de distribution et de financement des médicaments pour les
bénéficiaires hébergés constituent le meilleur
mécanisme pour éviter la surconsommation de médicaments,
et nous sommes totalement d'accord avec cet énoncé du
ministère.
L'orientation politique du ministère des Affaires sociales
étant maintenant connue, nous demandons au ministre des Affaires
sociales de fournir un cadre légal à cette politique par le biais
de l'amendement que nous avons proposé à l'article 3 de la Loi
sur l'assurance-maladie. Merci.
Le Président (M. Bordeleau): Alors, merci, M. Laberge. M.
le ministre.
M. Johnson (Anjou): M. Laberge, merci à vous et à
vos collègues de cette présentation avec encore une fois nos
excuses des retards dans l'horaire qui ont pu causer quelques changements dans
vos activités cette semaine.
Il y a essentiellement dans votre mémoire deux sections: la
question de la reconnaissance collective qu'on pourrait appeler la
reconnaissance syndicale ou la
clarification du rôle de l'interlocuteur au niveau des conditions
de travail et deuxièmement ce que j'appellerais l'intégration du
pharmacien dans l'établissement, et dans votre cas et dans le cas de
ceux que vous représentez, c'est déjà fait. Ce que vous
évoquez, c'est le type de relation et la dynamique de cette relation qui
existe entre les professionnels que vous représentez et les autres,
compte tenu de l'interdépendance relative, du moins de l'interrelation
qui existe notamment au niveau des gestes thérapeutiques entre les
différents professionnels dont vous faites partie.
Sur la première partie, vous n'êtes pas sans savoir, vous
l'évoquez vous-même, que le problème est d'autant plus
complexe qu'il y a chez vous des gens qui sont salariés, d'autres qui
occupent des postes de cadre, qu'il y a la Loi sur l'assurance-maladie et qu'il
y a celle sur l'assurance-hospitalisation, qu'il y a la relation avec
l'établissement et qu'il y a également la relation avec le
ministère à certains égards. Considérez-vous que ce
que vous proposez résoudrait, notamment, cette question du statut de
ceux qui sont cadres et de ceux qui ne le sont pas?
M. Laberge: Ce qu'on désire, c'est que vous vous donniez
le pouvoir de négocier. Je pense que la question des cadres et des
non-cadres ferait l'objet à ce moment des négociations. On
pourrait voir lors des négociations...
M. Johnson (Anjou): Vous voulez dire que cette reconnaissance que
vous recherchez, disons, au sens de la Loi sur l'assurance-maladie...
M. Laberge: C'est au niveau des centres d'accueil surtout qu'on
la recherche; il n'est pas question de cadre, je pense bien, dans les centres
d'accueil, quand même.
M. Johnson (Anjou): Actuellement, il y en a seulement un de toute
façon.
M. Laberge: Les gens sont là à la vacation quelques
heures par semaine. Vous connaissez le ratio actuel, le .05 heure par lit, et
je ne pense pas qu'il soit question de cadre en centre d'accueil. Donc,
l'amendement de la première partie, c'est surtout pour les centres
d'accueil et les CLSC. J'espère bien qu'il n'est pas question de cadre
au niveau de ces établissements pour un pharmacien qui va là
à la vacation.
M. Johnson (Anjou): Je pense qu'il y en a assez de façon
générale.
M. Laberge: C'est ce qu'on entend dire souvent et on est d'accord
avec cela, nous, de toute façon, on l'a dit longtemps dans nos
négociations qu'il y avait trop de cadres.
M. Johnson (Anjou): D'accord. Alors, pour vous, dans le fond,
cela vient... Ce que vous voudriez finalement, c'est que votre association en
tant qu'association ait comme domaine d'interventions tout ce qui touche aux
conditions de rémunération et/ou d'exercice, parce qu'il y a eu
de longs débats là-dessus avec d'autres, de tous les pharmaciens
pratiquant en établissement, que ce soit encore une fois sur la base de
ceux qui sont à la vacation, notamment dans les centres d'accueil, ou de
ceux qui sont à toutes fins utiles à temps plein. Je me demande
d'ailleurs si vous n'en avez pas quelques-uns qui sont des temps pleins
géographiques sur un plan universitaire aussi. Est-ce que je me
trompe?
M. Laberge: Ils ne font pas partie de notre association, mais
nous avons des temps pleins en centre d'accueil. Dans certains centres
d'accueil, effectivement, il y a des pharmaciens à temps plein.
D'ailleurs, je me permets une remarque sur cela, M. le ministre. Le ratio de
.050 est évidemment aussi objet de négociation, si vous voulez..
Lorsque notre association a négocié avec le ministère sur
cela, c'était dans le but de régler un problème, qui
était le problème des petits centres hospitaliers. Or, quand vous
avez repris votre directive, vous parliez du ratio de .05, ce n'est pas un
ratio qui a été négocié après discussion,
disons que ce n'était pas dans le cadre des négociations, et cela
a été interprété de façon
mathématique, malheureusement, et je pense qu'en fait la directive
disait ça, par les gros centres d'accueil. Cela cause réellement
un problème, parce que, dans un centre d'accueil de 250 lits, il y a
actuellement des pharmaciens à temps plein, et je pense qu'il faut
nécessairement un pharmacien à temps plein, lorsqu'il y a 250
lits dans un centre accueil.
Si vous appliquez le ratio de .050 vous allez voir que c'est loin
d'être un temps plein. Et ça ne laisse vraiment pas la place au
pharmacien de jouer toutes ses activités cliniques qui permettent
toujours de contrôler le coût finalement du médicament. Cela
ne lui permet que de faire l'essentiel, et non pas les interventions dans les
dossiers, ce qui est important. Vous pourrez vérifier d'ailleurs avec
les fonctionnaires, je suis assuré que, lors de ces
discussions-là, le problème qu'on voulait résoudre,
c'était celui des petits centres d'accueil. Parce que c'était
vraiment un problème. On a dit: On va trouver un ratio pour commencer.
On s'est dit: C'est un départ, on est d'accord, on est un groupe qui
veut collaborer. Finalement cela pose un problème pour les gros
centres.
M. Johnson (Anjou): Sur la deuxième partie de votre
intervention qui est tout le mécanisme de l'interrelation avec les
professionnels, notamment, pensons essentiellement aux centres hospitaliers,
parce que c'est là qu'en pratique le volume et le nombre de personnes
impliquées justifient qu'on s'en préoccupe à ce point. Si
je comprends bien, vous faites partie ex officio, en vertu du règlement,
d'un comité statutaire, qui a un rôle de conseil du responsable de
la pharmacie mais vous ne faites pas partie du CMD en vertu de la loi.
M. Laberge: Exactement. Le comité de pharmacologie est
formé, est c'est un des comités obligatoires d'ailleurs. Il y a
quatre comités obligatoires que le CMD doit former actuellement. Le
comité de pharmacologie en est un. Donc il est formé par le
conseil des médecins et dentistes, c'est obligatoire qu'ils le forment.
Et, ce qui est obligatoire dans la composition, c'est que le chef du service de
pharmacie en fausse partie. C'est par règlement ça. Et cela
dépend du CMD.
M. Johnson (Anjou): D'accord. Deuxièmement, et si vous le
permettez, il y a peut-être deux ou trois choses que je voudrais faire
ressortir pour ensuite qu'on discute un peu sur les conclusions qu'on en tire,
ou que vous en tirez. Deuxièmement, en plus de cette participation
à un comité conseil obligatoire du CMD et votre non-participation
au CMD, il y a le fait que vous avez le droit, en vertu de la loi, d'intervenir
contrairement, je pense, aux autres professionnels de la santé, ou vous
avez le droit d'intervenir et de changer une prescription médicale.
M. Laberge: Et de refuser aussi une prescription
médicale.
M. Johnson (Anjou): Ou de refuser une prescription
médicale. Et c'est une caractéristique, si je comprends bien, de
votre profession par rapport aux autres dans l'établissement.
M. Laberge: On a essayé de voir s'il y avait d'autres
groupes, et on a l'impression que non, qu'il n'y a aucun groupe qui a le
pouvoir de modifier une prescription médicale.
M. Johnson (Anjou): Troisièmement, le statut, prenons les
centres hospitaliers encore une fois. Dans un centre hospitalier, on va en
prendre trois catégories. Dans un centre hospitalier de la dimension de
l'Hôtel-Dieu à Québec, ou de Notre-Dame à
Montréal, il y a combien de pharmaciens dans l'établissement?
M. Laberge: Je peux vous donner des statistiques.
M. Johnson (Anjou): À peu près, des ordres de
grandeur disons, pour les fins des membres de la commission.
M. Laberge: Disons que, vous m'avez donné les exemples, je
ne peux pas vous donner les nombres précis pour les exemples que vous
m'avez donnés. En général, lorsqu'il y a quatre
pharmaciens dans un centre hospitalier, en haut de quatre, cela devient des
exceptions.
M. Johnson (Anjou): Mais quatre là...
M. Laberge: Alors, on dit qu'il y en aurait sept à
l'Hôtel-Dieu de Québec donc cela devient déjà une
exception.
M. Johnson (Anjou): Ah bon! D'accord.
M. Laberge: Lorsqu'il y a quatre, cinq pharmaciens... je vais
vous répondre autrement. Il y a trop de centres hospitaliers qui ont
seulement un pharmacien. Cela n'a absolument pas de sens. Il n'y a pas de
continuité de service. Il n'y a absolument aucune continuité de
service. Alors quatre, cinq, lorsque ça dépasse cela, ce sont des
exceptions disons.
M. Johnson (Anjou): Bon, d'accord. C'est parce que j'essaie de
mettre en évidence un inconvénient de cela, dans ce que vous
revendiquez au niveau de la reconnaissance du chef de département, par
exemple, ou du fait que vous releviez du directeur des services professionnels,
évidemment, c'est le petit nombre. (12 h 45)
M. Laberge: Vous permettez que je commente?
M. Johnson (Anjou): Oui, M. Laberge.
M. Laberge: Je regarde chez moi, je suis au centre hospitalier de
Valleyfield. Prenons le département d'anesthésie. Jusqu'à
il y a quelques mois, il comprenait deux membres; maintenant, ils sont trois.
Le département de chirurgie à Valleyfield s'est modifié;
il y a peut-être une dizaine de membres et au département de
pharmacie à Valleyfield, il y aurait trois membres, comme au
département d'anesthésie.
M. Johnson (Anjou): C'est une réponse.
M. Laberge: Je pense que cela se défend bien.
M. Johnson (Anjou): Je vous soumets maintenant ceci, pour avoir
votre réaction et je terminerai là-dessus. De toute
évidence, une meilleure intégration au niveau structurel
semblerait a priori s'imposer par cette raison. Je vous poserais cette
question: Pourquoi pensez-vous que cela n'a pas été fait? C'est
avec un peu de candeur là...
M. Laberge: Quand on a étudié la
réglementation, effectivement, des services de santé, services
sociaux, où on a commencé à... Ce qui est arrivé,
en fait... Je pense que, quand on a fait cela, on était pris avec un
certain nombre de services; on ne savait pas trop où les rattacher parce
que là, je vous rappelle qu'antérieurement à cela le
service de pharmacie, de radiologie et de laboratoire, pour prendre ces trois
exemples-là, relevaient du directeur médical, l'ancien titre pour
DSP.
Quand est arrivée la réglementation, on a
été poigné avec un nombre de services; on ne savait pas
où les placer et, comme on fait souvent, on a dit: On va former un autre
cadre. On l'a appelé "Directeur des services hospitaliers" et là,
on a mis ce qui restait comme service, qu'on ne pouvait pas mettre sous
l'auxiliaire, qu'on ne pouvait pas mettre sous le DSP parce qu'à ce
moment on a dit DSP... On a dû régler la question en disant: Cela,
ce sont les médecins et les dentistes; on les met dans ce
cadre-là et cela finit là. On a dit concernant les auxiliaires:
Les services de buanderie et de lingerie, on les met sous une direction
d'auxiliaires, cela va relativement bien. Quand on était pris avec ce
qui restait, les laboratoires, l'accueil, les archives et la pharmacie, on a
formé un autre directorat, le DSH. Je pense que c'est à peu
près ce qui s'est passé en fait; on était pris, on a
formé un directorat. On démontre, surtout dans notre aspect
économique, que finalement nous, la pharmacie, avec l'accueil et les
archives, ce n'est pas que... Ce sont des bonnes personnes, c'est
intéressant; quand on dit que nos réunions sont d'ordre
administratif, on a des discussions, cela est intéressant, mais cela ne
me rapporte rien sur mon budget à moi, parce que là, je parlais
de l'aspect financier. Cela ne me rapporte rien; à l'accueil - qu'est-ce
que vous voulez? - les gens qui travaillent là, le chef inclus, ne
coûtent pas un sou de médicament. Cela fait 11 ans que je
travaille à Valleyfield, l'accueil ne m'a pas coûté un sou,
j'ai peut-être donné deux aspirines au chef de service une fois.
Je n'en ai pas le droit, vous me direz, j'ai pris cela sur le budget de
l'hôpital, vous me direz peut-être...
M. Johnson (Anjou): Tant que ce sont uniquement des
aspirines.
M. Laberge: ... continuez ensuite, avec les archives, vous voyez
ce que je veux dire. On discute de budget entre nous, les chefs de service, et
on ne peut pas s'influencer vis-à-vis de nos propres budgets; je ne peux
pas dire à l'accueil qu'il dépense trop de médicaments, il
n'en utilise pas. Il faut que je sois à la table où, à
côté de moi, j'ai des chefs de départements médicaux
qui, eux, représentent les membres qui utilisent des médicaments.
Il faut que je me retrouve ensuite au Conseil des médecins et dentistes
pour que, quand on traite de médicaments, je sois là aussi. Je
pense que cela se tient bien, autant sur le plan professionnel que vous
retrouvez dans notre mémoire, que sur le plan économique - et
cela aussi, c'est important - que vous retrouvez dans notre annexe.
M. Johnson (Anjou): D'accord.
Je prends bonne note de vos remarques. Je n'entrerai pas ici dans le
détail technique des amendements que vous suggérez; on a des
équipes qui fignolent ces choses et qui ont eu d'ailleurs,
antérieurement, l'occasion de discuter et de ressasser le dossier
récemment là-dessus. Vous aurez notre position, lors de la
deuxième lecture, sur ces différentes choses.
Le Président (M. Bordeleau): Merci. Mme la
députée de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président.
Je veux aussi remercier l'Association des pharmaciens des
établissements de santé. Je pense que même si le
mémoire porte sur un point très très précis et que
vous ne vous êtes pas prononcés sur son ensemble, c'est quand
même fort instructif.
Une question précise: Sur ce point technique que vous venez de
discuter avec le ministre, je dois vous dire qu'au premier abord, j'ai une
attitude positive à votre requête mais je pense qu'il y a un tas
d'autres considérations d'organisation de l'hôpital qui peuvent
m'échapper à ce moment parce que dans le fond, vous demandez
quelque chose de nouveau. Je pense qu'on aura l'occasion d'en discuter, article
par article, mais je veux simplement vous signaler que votre demande, à
première vue, ne semble pas sans fondement logique en tout cas.
Voulez-vous me préciser combien de vos 446 membres travaillent à
temps plein dans les établissements et combien sont à temps
partiel, à vacation?
M. Laberge: Je vais vous expliquer ça d'une certaine
façon. En centre hospitalier, disons que la très grande
majorité travaille à temps complet. On a quelques personnes qui
vont travailler à temps partiel, régulier si on veut. En centre
d'accueil, la majorité de nos gens travaille à temps partiel, et
souvent, ce qu'on retrouve, ce sont des pharmaciens qui travaillent
déjà dans un centre hospitalier, qui travaillent également
dans un ou deux
centres d'accueil. Je ne sais pas si vous comprenez. Et ils peuvent
travailler trois jours dans un centre hospitalier, engagés par le centre
hospitalier, et peuvent, par un centre d'accueil, être engagés
à vacation, ce qui complète ainsi leur horaire d'une semaine.
C'est la raison pour laquelle cela m'est difficile de vous dire combien
exactement, c'est sûr que je pourrais vous fournir...
Mme Lavoie-Roux: Est-ce qu'il y a parmi vos membres des gens qui
exploitent aussi des pharmacies?
M. Laberge: Non. C'est totalement défendu qu'ils fassent
partie de notre association. Non. Maintenant, puisque vous soulevez une
question, actuellement, et je pense que c'est relié un peu à la
circulaire du ministère des Affaires sociales, qui dit un certain nombre
de choses. Voici pour répondre un peu à votre question. Je pense
que vous faites référence au fait que des pharmaciens autres que
des membres de notre association puissent offrir des services actuellement dans
les centres d'accueil. C'est probablement peut-être...
Mme Lavoie-Roux: Non.
M. Laberge: Qu'il y aurait des pharmaciens non-membres dans notre
association en centre d'accueil. Est-ce que c'est ça votre question?
Mme Lavoie-Roux: Non. Est-ce que, pour être membre de votre
association, vous devez travailler exclusivement dans un centre hospitalier ou
dans un centre d'accueil? Compte tenu du fait que vous en avez quand même
un certain nombre qui ne sont pas à temps plein, est-ce qu'il y en a qui
peuvent travailler dans des pharmacies? Je ne sais pas si, par rapport aux
établissements, vous les appeliez des pharmacies privées. Je
pense que ce serait ça.
M. Laberge: D'accord, d'accord. Là je comprends bien votre
question. Autant, effectivement, un pharmacien peut travailler - c'est le
même exemple que tantôt - trois jours dans un centre hospitalier et
le reste de son temps dans d'autres établissements autant il peut c'est
évident, travailler trois jours au centre hospitalier et partager le
reste de son temps dans des officines privées.
M. Johnson (Anjou): Pas propriétaire, c'est ça.
M. Laberge: II n'est pas propriétaire effectivement, mais
il pourrait...
M. Johnson (Anjou): Théoriquement l'être.
M. Laberge: ... théoriquement être
propriétaire tout en étant engagé dans un centre
hospitalier...
M. Brodeur (Yvan): Mais en tant que pharmacien
propriétaire, il n'est pas représenté par l'APESQ, il est
représenté par l'association des pharmaciens
propriétaires.
Mme Lavoie-Roux: Alors il pourrait être membre des deux
associations.
M. Brodeur: Oui madame.
Mme Lavoie-Roux: Bon. Vous n'avez pas de statistiques sur
cela.
M. Laberge: II n'y en a pas beaucoup là. Vous voulez dire
des membres de l'APESQ et en même de L'OQPP. Ah mon Dieu! c'est moins de
cinq, je pense. Je dirais moins de cinq personnes.
Mme Lavoie-Roux: Bon.
M. Laberge: Ce que l'on a voulu dire lorsque le pharmacien
d'établissement s'en va travailler en pharmacie communautaire pour
compléter son horaire de travail, moi je ne parlais pas de ce
pharmacien-là qui était propriétaire de la pharmacie. Le
pharmacien qui fait ses trois jours à l'hôpital, qui s'en va
à l'officine, s'en va travailler pour un propriétaire.
Mme Lavoie-Roux: Là, ce que je déduis, c'est qu'il
y en a trois catégories, la dernière étant très
mince, peut-être de quatre ou cinq. Il y a la catégorie de ceux
qui travaillent exclusivement en établissement, il n'y a pas de
problème à temps plein...
M. Laberge: Oui, oui. C'est la majorité de nos membres,
ça.
Mme Lavoie-Roux: Là, j'aurais aimé ça avoir
des chiffres. Il y a la catégorie de ceux qui travaillent d'une
façon mixte, si je peux m'exprimer ainsi. On s'est couché assez
tard hier soir, j'ai les idées moins claires ce matin. Et la
troisième catégorie, qui est très minime, vous dites que
cela pourrait être quatre ou cinq, qui seraient membres des deux parce
qu'ils sont aussi propriétaires d'une pharmacie. Est-ce que j'ai bien
compris?
M. Laberge: Ce que je dis, c'est que dans notre association, nous
avons au plus... Moi, j'enlèverais même le nombre de cinq. Disons
que nous avons peut-être cinq personnes, membres de notre association,
qui
sont également propriétaires d'une pharmacie.
M. Johnson (Anjou): Est-ce que ces membres... parce que, dans le
fond, les catégories, c'est assez important pour cerner notamment votre
revendication de reconnaissance pour être sûr qu'on ne tranche pas
dans des débats dans lesquels on ne veut pas trancher dans certains cas.
Essentiellement, vos membres, ce sont des salariés
d'établissement.
Deuxièmement, vous avez d'autres membres qui sont des gens qui
sont à la vacation dans de petits établissements qui ne sont pas
à temps plein et qui, sur le plan de leur pratique, complètent
leur revenu par un travail dans des officines mais encore une fois non pas
à titre de propriétaires mais à titre de salariés,
à contrat ou autrement. C'est la deuxième catégorie, vous
devez en avoir plusieurs comme cela. Vous avez, à l'occasion, parmi vos
membres des gens qui travaillent en établissement mais qui sont d'abord
et avant tout propriétaires. Je présume que cela doit être
des choses comme les centres d'accueil aux Îles-de-la-Madeleine; je
présume que là c'est un pharmacien-propriétaire qui va
desservir.
M. Laberge: C'est cela. Quand je dis que c'est cinq personnes, ce
sont des cas marginaux comme ceux-là.
Mme Lavoie-Roux: Oublions les cinq, les autres se divisent...
Donnez-moi une estimation de la proportion.
M. Laberge: Écoutez, je ne sais pas vraiment ce que vous
voulez avoir comme statistiques.
Mme Lavoie-Roux: C'est très clair, il y a ceux qui
travaillent à temps plein dans les établissements, qui ne vont
pas travailler dans les pharmacies privées à salaire. Ce sont les
deux premières catégories; je laisse de côté la
troisième.
M. Laberge: On me dit qu'on aurait 400 pharmaciens qui
travailleraient à temps plein - est-ce que c'est cela que dit M. le
ministre - dans les centres hospitaliers et 46 pharmaciens en centre d'accueil
exclusivement... Une autre chose, il y aurait 46 pharmaciens qui
travailleraient exclusivement dans des établissements autres que les
centres hospitaliers, alors que vous aviez tantôt des pharmaciens qui
travaillaient en centre hospitalier et en plus dans des centres d'accueil.
Là, on aurait 46 pharmaciens qui travailleraient uniquement en centre
d'accueil, mais on en a beaucoup plus que cela dans les centres d'accueil parce
que des gens sont dans les centres hospitaliers et travaillent également
dans un certain nombre de centres d'accueil.
Mme Lavoie-Roux: Pour moi, c'est l'ensemble du secteur public. Je
pourrais poser ma question différemment.
M. Laberge: Peut-être, oui.
Mme Lavoie-Roux: II y a ceux qui exercent leur profession
totalement dans les centres publics, que ce soient les centres d'accueil pour
soins prolongés ou de courte durée, peu importe, et qui partagent
leur temps entre les deux; ils sont totalement dans les institutions publiques.
Alors, de vos 446, combien combinent l'ensemble de leur travail dans les
centres publics et combien ont une activité - c'est le mot que je
cherchais tout à l'heure - mixte entre le centre public et l'institution
privée, non pas l'institution mais la pharmacie privée?
M. Laberge: Écoutez, je vous ai dit qu'on avait 400
pharmaciens qui travaillaient à temps plein, donc 35 heures par semaine;
sur 446, c'est clair. Mais il faut que je vous dise quand même que ces
gens à temps plein pourraient travailler en officine privée le
soir, un soir ou deux par semaine, remplacer un collègue d'officine le
soir. C'est pour cela qu'il...
Mme Lavoie-Roux: Là, je comprends.
M. Laberge: ... faut que vous voyiez ce qui arrive.
Mme Lavoie-Roux: C'est la troisième dimension.
M. Laberge: On vous dit 400 à temps plein mais ces
gens-là... Vous me dites exclusivement, je ne peux pas vous
répondre que oui, exclusivement, parce qu'on ne dit pas à nos
membres: Ne va jamais travailler en officine.
Mme Lavoie-Roux: C'est cela, non, non, c'est cela.
Alors, globalement...
M. Laberge: II y a d'autres statistiques, Mme Lavoie-Roux, si
vous me le permettez. L'ordre des pharmaciens rapportait, selon ses
statistiques, 487 pharmaciens en établissements de santé. Nous,
on dit qu'on en représente 446; vous pouvez voir la différence.
Je ne sais pas si cela peut vous aider...
Mme Lavoie-Roux: J'essayais de démêler cela parce
que je pense que cela a des implications également sur les
recommandations que vous faites.
Ma deuxième question n'a pas trait à l'ensemble de votre
mémoire, mais puisque vous êtes devant nous. Cet aspect de conseil
clinique que vous remplissez dans les
institutions, je le trouve fort intéressant et à un moment
donné vous parlez justement d'un travail que vous faites pour
éviter la surconsommation de médicaments là où ce
n'est pas indiqué. Tout le monde, tous les pharmaciens, j'espère,
ont ce même souci. Mais on observe et on nous dit et je pense que je l'ai
observé aussi, quoique je ne puisse pas le prouver scientifiquement
parce que je n'ai pas les qualifications pour cela -que dans les centres
d'accueil pour personnes âgées, il y a, je vais être
prudente, mais au moins une certaine surconsommation de tranquillisants, de
médicaments de toutes sortes. Est-ce que c'est votre opinion et dans
quelle mesure pouvez-vous contrer cette tendance qui ne provient pas de vous
mais qui peut provenir de ceux qui oeuvrent auprès de ces
bénéficiaires-là? (13 heures)
M. Laberge: Je pense que nous partageons entièrement vos
commentaires sur la forte consommation des patients qui sont en centre
d'accueil d'hébergement. Je pense qu'on ne peut quand même pas
s'empêcher de noter que les services pharmaceutiques, dans ces
établissements-là, ne sont pas vraiment couverts. On a là
des gens qui travaillent en centre d'accueil, mais les centres d'accueil ne
sont pas tous couverts, loin de là. De ce côté, il y a
déjà eu des ouvertures du ministère en 1977, 1978, disons
1979 ou dans ce coin-là, où on a débloqué des
centres, on a ouvert des postes. On commence maintenant à couvrir les
centres d'accueil mais il y a encore énormément de centres
d'accueil où il n'y a aucun service pharmaceutique. Et il est
intéressant de noter - et on a des études qui, quand même,
ont démontré ça - que l'arrivée d'un pharmacien, au
début, dans un centre d'accueil où il n'y en a jamais eu,
s'autofinance. Simplement d'une part, en commençant par faire le
ménage dans les médicaments que le centre d'accueil a à sa
disposition. On mentionne que la liste de la régie contient 2000
médicaments. Moi, je vous affirme que, dans les centres d'accueil
où les pharmaciens exercent, selon la directive du ministère, il
y a moins de 100 médicaments. Entre 2000 et 100, vous comprendrez que
c'est quand même relativement important.
Si vous avez à votre disposition 2000 médicaments,
déjà il y a de fortes possibilités que les patients qui
ont cet arsenal devant eux, qui ne peuvent pas les prendre eux-mêmes,
peuvent en consommer beaucoup.
Si vous en avez moins de 100, déjà les possibilités
sont diminuées. Et je voudrais reprendre l'autofinancement du service
pharmaceutique. On a constaté, dans ces cas-là - je parle au
début, quand on arrive - que quand vous en êtes rendu à
bien contrôler votre distribution et votre utilisation, on ne peut pas
continuellement autofinancer les services. Mais au début, certainement.
Les services pharmaceutiques s'autofinancent par la diminution de la
consommation du médicament. Cela s'autofinance. Cela ne coûte pas
plus cher pour l'établissement.
Mme Lavoie-Roux: Une dernière question, c'est en bas de la
page, je pense que c'est la page 11. Non, ce n'est peut-être pas cela. Il
me semblait que c'était dans le bas d'une page, excusez-moi. Vous faites
allusion au fait que vous n'avez qu'une liste je le dis de mémoire
là - de 600 médicaments, et là oublions les centres
d'accueil, je pense que vous vous adressez à une catégorie de
clientèle particulière. Que le nombre de médicaments soit
limité etc. c'est fort possible. Mais dans le centre hospitalier, vous
avez 600 médicaments, de mémoire. Est-ce que ceci vous permet de
couvrir toutes les ordonnances des médecins? En fait, la question que je
vous pose, comment expliquez-vous la différence entre les 600 et les
2000 de la liste générale?
M. Laberge: Bon. Je pense que c'est assez facile à
expliquer. Pratiquer la pharmacie, que ce soit en officine privée ou en
établissement de santé, c'est essentiellement la même
chose. C'est de contrôler l'utilisation rationnelle. Pour ça, il
n'y a pas de problèmes. Sauf que la façon de pratiquer est
différente: entre travailler en officine et travailler en
établissement.
Il y a d'abord, d'une part, le mode de rémunération - le
salariat dans notre cas -donc pour l'ensemble des activités. Donc une
dissociation du bien, qui est le médicament par rapport au service
lui-même. À l'officine, c'est à l'acte; donc, il y a deux
sources de rémunération. II y a l'honoraire et il y a la notion
de profit sur le bien. Ce n'est pas moi qui l'ai dit, c'est le rapport Hould,
c'est à peu près textuellement ce que le rapport Hould dit. Mais
ce n'est pas simplement sur ce phénomène là que je veux
embarquer, je ne veux pas rentrer dans la question du salariat, ce n'est pas
pour moi une idéologie, pour le ministre non plus. Mais, je vais
continuer à donner d'autres éléments qui vont vous montrer
que les pouvoirs donnés au pharmacien en établissement sont
différents. On lui en donne des supplémentaires, on lui donne un
cadre qui lui permet de faire davantage.
On peut parler du comité de pharmacologie. Le pharmacien, par le
règlement de la Loi sur les services de santé et les services
sociaux, a la responsabilité supplémentaire de la
sélection des médicaments dans son centre. C'est lui qui a
l'autorité de dire: On va avoir ce médicament-là ou on ne
l'aura pas. Lorsque le pharmacien propriétaire reçoit une
ordonnance, il ne peut pas dire. Bien,
écoutez, ce n'est pas sur mon formulaire. Parce que lui, son
formulaire c'est la liste de la Régie de l'assurance-maladie, les 2000.
Alors que nous, via ce que la réglementation nous donne comme
responsabilité, à savoir la sélection, c'est nous qui
déterminons quels médicaments vont être utilisés
dans notre centre hospitalier. Pour nous aider dans ça, il y a le
comité de pharmacologie que nous pouvons aller consulter avant de
prendre notre décision.
Donc, je pense que c'est là que se produit le
phénomène que nous choisissons de 400 à 600
médicaments et que nous en avons suffisamment pour travailler dans nos
établissements. J'ajouterais même, si vous me permettez, que
l'ordre des pharmaciens a mentionné qu'il voulait en laisser tomber une
partie, toutefois, parce que dans l'article 108, anciennement, on disait que
tout établissement devrait utiliser des médicaments dans la liste
et là, il y a une "mautadite" porte qui est ouverte où on parle
de toute nécessité médicale particulière. L'ordre
en fait mention. On dit: Laissez tomber la première partie, gardez la
question de la recherche fondamentale. Bon, je n'ai pas le texte, je m'en
excuse. Je pense qu'effectivement, M. le ministre, là-dessus, il y a de
l'économie à faire.
Si vous dites au directeur des finances des centres hospitaliers que
dorénavant les médicaments hors liste, dans leur centre
hospitalier, ne sont plus des dépenses admissibles, vous allez nous
donner un bon coup de main. Et pour la raison suivante. J'ai mentionné -
cela est un autre phénomène important relié au nombre de
pharmaciens - qu'il y a une relation entre le nombre de pharmaciens et le
nombre de médicaments hors liste.
Vous comprenez que le pharmacien, seul dans son établissement, a
bien des choses à faire. Alors, quand il y a une nécessité
médicale particulière, préparer son dossier pour
l'envoyer, c'est bien difficile. Moi, ce que je suggérerais d'ajouter,
en plus que ce que l'ordre dit, c'est: À moins que le pharmacien du
centre hospitalier ait reçu du conseil consultatif de pharmacologie
l'autorisation d'ajouter ce médicament à son formulaire pour des
indications précises. Je pense qu'il y a vraiment quelque chose à
faire de ce côté-là aussi. Je m'excuse, Mme Lavoie-Roux,
j'ai fait...
Mme Lavoie-Roux: Non, non, non, cela va. Je suis habituée,
on a fait ça de temps à autre. Bon, vous dites: C'est la liste
qu'on a choisie de 600 médicaments, on fonctionne avec ça et on
pense que nos patients sont bien servis. Mais est-ce que vous êtes
capable, quand même, de dire qu'il y a des médicaments qui sont
prescrits par le médecin, par exemple au moment du congé du
patient, que vous n'auriez pas dans vos bureaux, enfin, dans vos laboratoires,
et qui doivent être achetés dans une pharmacie? En fait, le sens
de ma question, c'est que c'est vrai que probablement, avec vos 600
médicaments, vous pouvez répondre aux besoins certainement
fondamentaux.
M. Laberge: C'est sûr.
Mme Lavoie-Roux: Mais il reste quand même, je pense
qu'à peu près tout le monde a vécu cette
expérience-là, que quand on sort de l'hôpital, à un
moment donné, on va vous dire: Bien, vous ne pourrez pas trouver
ça ici. Je ne pense pas que c'est parce que le médecin s'amuse
à vouloir nous envoyer à l'autre pharmacie, mais ce sont des
médicaments que vous trouvez ailleurs. Et il nous le prescrit comme
étant possiblement un médicament plus satisfaisant. Dans ce
sens-là, même si votre liste ne laissera mourir personne, vous
restreignez peut-être là, sans tomber dans les extravagances, le
choix et la "thérapeutique", si on peut dire.
M. Laberge: On limitait le choix du médecin à son
traitement. Je pense que ce que le comité de pharmacologie a comme objet
là, c'est de conseiller le pharmacien. Le pharmacien, c'est lui qui
décide. Bon, le médecin dit: Moi, j'ai absolument besoin du
dernier anxiolytique qui est sorti, s'il réussit à me convaincre
qu'effectivement son patient en a besoin, je pense que c'est là une
relation de consultant à consultant. Moi, je suis préparé
avec mon équipe de pharmaciens, on regarde le dossier de la demande que
le médecin a faite, et on lui dit: Écoutez, à notre avis,
à ce jour en tout cas, je n'accepte pas votre demande, on a comme
alternative tel autre médicament. Il y a toujours des incidences de
coût, pratiquement, dans ces affaires-là. Si le médecin,
par contre, réussit scientifiquement à me prouver avec d'autres
études qu'il a raison de demander cela, que des malades en ont besoin
dans le centre hospitalier et qu'il est meilleur que l'autre, il est
évident qu'on va l'accepter. Ce qui arrive à ce moment, c'est
que, quand on en trouve un meilleur, s'il n'y a pas trop d'incidence
économique, on essaie de sortir celui qui serait remplacé par le
meilleur. Il faut faire attention, Mme Lavoie-Roux, aux nouveaux
médicaments. C'est un peu comme une Renault 1981...
Mme Lavoie-Roux: Je ne parlais pas dans le sens du nouveau
médicament. Il peut être nouveau, mais il peut aussi ne pas
être nouveau et être utilisé. Juste une petite
rectification. Ce n'était pas dans le sens de priver l'individu de son
choix au médicament parce que l'individu, s'il est comme moi, il ne sait
pas lequel est le meilleur de toute façon. C'était plutôt
dans le sens de la thérapie prescrite par le médecin pour un
individu.
M. Laberge: Cela serait assez étonnant. Je me dis: II me
semble que les gens à l'hôpital devraient être normalement
plus malades que les gens qui sont chez eux. Je ne sais pas. Il semble que
c'est une évidence. Peut-être que je me trompe. Je n'ai pas
pensé longtemps à ça, mais cela me vient
spontanément. Je pense à ça tout à coup. Je me dis:
Mon Dieu, si on les soigne, alors qu'ils sont vraiment malades, avec 400
à 600 médicaments, comment n'est-il pas possible de le faire en
externe? Je ne comprends pas.
Mme Lavoie-Roux: Une dernière question, c'est vraiment la
dernière. Vous êtes des salariés. Pourriez-vous très
brièvement dire comment vous négociez vos conditions de travail?
Je ne sais pas au juste. Tantôt on a mentionné que c'était
peut-être à l'intérieur des cadres ou je ne sais trop.
Est-ce que vous avez la sécurité d'emploi pour ceux qui sont
à temps plein et quels sont les avantages sociaux que vous avez,
sécurité d'emploi, assurance-salaire? Est-ce que c'est
comparable, par exemple, à la fonction publique? Vous êtes en fait
sur les échelles de la fonction publique à l'intérieur de
l'échelle des cadres. Parfait, merci.
Le Président (M. Bordeleau): Je vous remercie. M. Brodeur,
dernier petit mot de la fin.
M. Brodeur: Oui. Si vous me permettez, Mme Lavoie-Roux, vous avez
parlé justement des négociations et j'aimerais ajouter quelque
chose concernant l'amendement qu'on demande à l'article 3. Très
brièvement. Effectivement, le problème se pose essentiellement en
centres d'accueil parce que déjà le ministre a le pouvoir de
négocier avec nous aux termes de la Loi sur l'assurance-maladie. Ce
qu'on dit, cela n'est pas: Reconnaissez-nous comme association en amendant la
loi. Effectivement, on est conscient des difficultés pratiques
auxquelles le ministre a fait référence tantôt. Ce qu'on
dit au ministre, c'est: Donnez-vous le pouvoir de négocier une entente
qui pourra lier les établissements et les centres d'accueil. Notre
expérience à cet égard nous a démontré qu'il
était impossible d'arriver à des résultats pratiques sans
une clause de cette nature. On a eu dans le passé des échanges
avec le ministère. On est arrivé même à un projet
d'entente. Finalement, il aurait fallu que les centres d'accueil y souscrivent
individuellement et ça a tourné en queue de poisson.
On se rend compte qu'il y a des avantages en termes de normalisation. Il
y aurait énormément d'avantages pratiques à une formule
comme celle-là. Mais, pour autant, tout ce qu'on demande, c'est une
disposition qui dirait que le ministre ou le Conseil des ministres peut, par
règlement, déterminer que les services pharmaceutiques rendus
dans tel ou tel type d'établissement deviennent des services
assurés. À partir de ce moment, aux termes de l'article 19 de la
Loi sur l'assurance-maladie, le ministre aurait le pouvoir, lorsqu'il aurait
décrété, par exemple, que pour les centres d'accueil cela
deviendra, à partir de telle date, un service assuré, le
ministre, dis-je, aurait le pouvoir nécessairement de négocier
avec nous aux termes de l'article 19 ou de négocier avec une autre
association si c'est une autre qui est représentative. Mais ce qui se
présente dans les faits, c'est qu'on représente la très
grande majorité des pharmaciens en établissements de santé
et en centres d'accueil en particulier, mais on ne peut pas, finalement,
négocier leurs conditions de travail.
Le Président (M. Bordeleau): Merci beaucoup, madame,
messieurs. Le prochain groupe que nous recevrons est l'Association de la
santé publique. Je demande à leurs représentants de
s'approcher... Tout le monde s'approche. (13 h 15)
Le groupe est représenté, j'imagine, par M.
André-Pierre Contandriopoulos. C'est bien cela? Je vous demanderai de
présenter les personnes qui sont avec vous. Je ne dirais pas que votre
mémoire est volumineux, mais il contient plusieurs pages, est-ce que ce
serait possible, sans vouloir vous contraindre d'aucune façon, de
résumer certains points?
Association de la santé publique
M. Contandriopoulos (André-Pierre):
Vous allez dans le sens de ce qu'on avait préparé. On ne
comptait pas lire notre mémoire, mais bien le présenter pour en
faire ressortir les principaux points.
Le Président (M. Bordeleau): Ah bon! Je
l'apprécierais beaucoup, et, je pense, les membres de la commission
également.
M. Contandriopoulos: Parfait.
Le Président (M. Bordeleau): Vous pouvez y aller
maintenant.
M. Contandriopoulos: Nous sommes membres du bureau de direction
de l'Association pour la santé publique du Québec. Le
mémoire sera présenté par le Dr Maguire, par M. Marc
Renaud et par moi-même. Comme vous nous le demandez et c'est ce que nous
avions prévu, nous ne comptons pas faire lecture de notre
mémoire, mais bien faire ressortir certains
points qui nous sont apparus essentiels.
Le Président (M. Bordeleau): Est-ce que vous pourriez
rapprocher votre micro?
M. Contandriopoulos: Je vais rapprocher mon micro. Bon! Je ne
peux plus lire en même temps.
Le Président (M. Bordeleau): Voulez-vous
répéter les noms des personnes qui vous accompagnent? On n'a pas
compris.
M. Contandriopoulos: Je reprends. Les personnes présentes
sont le Dr Robert Maguire, M. Marc Renaud et moi-même,
André-Pierre Contandriopoulos. Nous ne lirons pas notre mémoire,
mais nous présenterons les principaux points sur lesquels nous avons
fait porter nos réflexions et nos recommandations.
En tout premier lieu, nous tenons à dire que nous sommes d'accord
avec l'esprit de ce projet de loi, mais nous pensons que plusieurs points
pourraient et devraient vraisemblablement être modifiés et
améliorés. Nos commentaires ne porteront pas sur l'ensemble des
points touchés par la loi, mais nous allons tenter de faire ressortir
certains éléments et principalement ceux qui touchent
l'organisation des services de santé et, par voie de conséquence,
ceux qui ont un impact sur la santé de la population.
Le cadre dans lequel nous allons essayer d'articuler nos commentaires
s'est développé en reprenant les principaux points qui
sous-tendent les réformes qu'a connues notre système de
santé québécois, c'est-à-dire principalement
l'accessibilité, l'efficacité et l'humanisation des services. Nos
commentaires porteront sur ces points. Nous traiterons d'abord
brièvement de l'accessibilité aux services, ensuite de
l'efficacité économique et de l'efficacité qu'on a
appelée administrative et, finalement, nous parlerons de l'humanisation
et de la participation.
À la fin de notre mémoire - ce que nous ne lirons pas -
nous retrouvons l'ensemble des modifications que nous proposons, qui sont
soulignées, les textes du projet de loi sont repris et les modifications
que nous proposons sont soulignées.
En termes d'accessibilité, nous tenons à mentionner que
nous sommes d'accord avec la nécessité d'une intervention.
Jusqu'à présent, au Québec, le problème de
l'accessibilité, aux services médicaux entre autres, n'est pas
entièrement réglé. Depuis 1970, dans le cadre des
négociations, nous ne sommes pas arrivés, malgré la
vigueur de la démographie médicale, malgré le fait que le
Québec soit une des régions du monde dans lesquelles il y a le
plus de médecins, à avoir une répartition adéquate,
acceptable des médecins sur le territoire.
On pourrait développer ce point en détail, mais j'aimerais
seulement faire ressortir un exemple, et on a des chiffres beaucoup plus
détaillés pour appuyer ces dires. Dans certaines régions,
on a des ratios du nombre de personnes par médecin spécialiste
qui sont beaucoup plus grands qu'ailleurs. En Abitibi, par exemple, il y a
trois fois plus de personnes par pédiatre, par
gynéco-obstétricien, par interniste, c'est-à-dire les
médecines de spécialité de base,
élémentaires, que dans la moyenne du Québec. En même
temps - ce qui est paradoxal - il y a 50% de personnes de plus par
omnipraticien. Autrement dit, ce sont des régions dans lesquelles il n'y
a pas suffisamment de spécialistes, mais, en plus, il n'y a pas un
nombre suffisant d'omnipraticiens pour compenser le manque de
spécialistes.
Je sais bien qu'il y a de longues argumentations sur le fait que
l'ensemble des spécialités ne doivent pas être
réparties également à l'ensemble du Québec, mais si
l'ensemble des spécialistes naturellement devaient être
concentrés dans certaines régions où il y a des
hôpitaux, on devrait voir un nombre plus grand d'omnipraticiens dans les
régions dans lesquelles il y a moins de spécialistes et c'est
absolument l'inverse que l'on observe au Québec. Pour être bref,
la question de l'accessibilité au Québec se pose et on peut dire
aujourd'hui que les négociations avec les professionnels de la
santé, dont le mandat clair est la défense des
intérêts de leurs membres, ces négociations n'ont pas
apporté de résultats complètement satisfaisants. Il nous
semble important de sortir de l'enjeu des négociations ce point de
l'accessibilité et d'essayer de trouver un autre moyen de le
régler.
Dans le projet de loi, on propose un décret ministériel.
Nous pensons - et c'est là l'objet d'une résolution - que si la
négociation n'a pas pu résoudre ce problème, le
décret ministériel peut poser aussi un certain nombre de
questions et nous suggérons d'ajouter à la proposition
l'obligation, pour la structure gouvernementale, de consulter les personnes
compétentes en santé publique et représentatives des
régions concernées avant de faire passer un délai,
autrement dit, d'assortir le décret d'un minimum de consultations
auprès de la population qui est concernée par les manques
d'effectifs.
Cette nécessité de consultation, nous y reviendrons dans
le troisième point de notre présentation, à propos de la
création de comités de bénéficiaires qu'on pourrait
appeler aux fonctions élargies. Nous y reviendrons plus tard.
En termes d'accessibilité, il y avait là un
élément de la loi qui était en faveur de trouver des
moyens qui permettraient
d'améliorer l'accessibilité aux services. On trouve
malencontreusement aussi dans le projet de loi deux éléments qui
iraient en sens inverse et qui pourraient, dans la suite du temps, amener une
restriction de l'accessibilité aux services.
Nous en faisons mention à l'article 5 du projet de loi, qui porte
sur la médiane. C'est une manière détournée de
faire introduire la médiane et nous avons l'impression que cet article
ouvre la porte à la possibilité d'un ticket modérateur,
fait en sorte que le patient pourrait être amené à
débourser une certaine somme pour obtenir le médicament de son
choix.
D'une part, sur le plan des principes, ça va à l'encontre
des grands principes qui ont sous-tendu notre système de soins et,
d'autre part, sur le plan de l'efficacité économique, nous sommes
convaincus que cet élément est peu utile. Autrement dit, les
sommes qu'à court terme on pourrait récupérer par le
principe de la médiane sont relativement faibles. À moyen terme,
il est vraisemblable que l'industrie pharmaceutique et les médecins
prendront une habitude systématique d'indiquer de ne pas substituer sur
les ordonnances de médicaments, ce qui réduira à
zéro le principe de la médiane, et, à encore plus long
terme, le lobbying des compagnies pharmaceutiques jouera sur le prix des
médicaments pour rendre les compagnies qui produisent actuellement en
dessous de la médiane inopérantes ou hors du marché et ces
gens contrôleront les prix.
Nous suggérons le retrait pur et simple de cet article de loi
sous le fait qu'il est une atteinte à l'accessibilité de toute la
population à des services et que sur le plan économique il est
plus dangereux qu'autre chose.
Dans le même ordre d'idées, il serait vraisemblablement, et
cela n'est pas explicitement inclus dans notre mémoire,
intéressant de reconsidérer l'article 23 alinéa b1 dans
lequel on prévoit qu'on pourrait enlever certains services actuellement
assurés. Il faudrait éventuellement discuter sous quelles
conditions et avec quelle méthode de consultation on reviendrait sur des
services déjà assurés.
Voilà pour ce qui a trait, rapidement, à
l'accessibilité ou à des éléments qui touchent
à l'accessibilité dans le cadre de cette loi. L'efficacité
financière, nous touchons là un point qui nous semble
important... Et nous parlons de l'article 1, c'est-à-dire de l'article
dans lequel on prévoit que les résidents, durant leur stage de
formation, n'auraient pas le droit d'être payés à l'acte en
dehors des établissements. Ce point nous semble parfaitement
souhaitable, c'est une mesure de rationalisation normale de ce qui se passe
actuellement, en termes de rémunération des résidents.
Il nous semblerait par ailleurs qu'il serait possible et probablement
souhaitable d'étendre cet article à certains services qui
seraient offerts par des médecins et, entre autres, les "temps pleins
géographiques". Seulement à titre d'exemple, les "temps pleins
géographiques" sont payés par l'université, des salaires
qui vont à l'Université de Montréal de 34 000 $ à
56 000 $ et qui sont actuellement en voie de renégociation. Donc, ce
sont déjà des salaires anciens. Des salaires de cet ordre
correspondent effectivement à du quasi temps plein. On peut se demander
ou s'interroger fortement sur la duplication de rémunération dont
font état ou dont bénéficient ces professionnels de la
santé. Donc, on pourrait peut-être penser à élargir
à d'autres types de médecins les conditions que l'on
prévoit pour les résidents.
Encore dans le cas de l'efficacité financière, mais un peu
en marge, bien que ce soit extrêmement important, l'article 30 du projet
de loi no 27 prévoit accorder des bourses de recherche aux
établissements ou organismes universitaires pour des travaux portant sur
les sciences traditionnelles de la santé. Il nous semble que là
encore il serait opportun de considérer que la recherche dans le domaine
de la santé, compte tenu de l'évolution de ce que devient la
maladie, compte tenu du vieillissement de la population, déborde assez
largement des domaines classiques de la recherche fondamentale dans les
sciences cliniques et qu'il serait important de permettre que ces bourses de
recherche puissent couvrir des domaines ou des apports tels que la sociologie,
l'anthropologie, l'économie c'est-à-dire les sciences sociales
dans leur contribution à une meilleure compréhension du
système de santé. Donc, élargissement de cet article 30
prévu dans le projet de loi no 27.
Je vais céder la parole à mon collègue, Marc
Renaud, qui va continuer la suite de la représentation.
M. Renaud (Marc): Je voulais vous parler...
Le Président (M. Bordeleau): Allez-y.
M. Renaud: M. le Président, je dois vous parler de deux
aspects de notre mémoire, celui qui concerne l'efficacité
administrative et celui qui concerne la participation des usagers.
Commençons, si vous le voulez bien, par la question de
l'efficacité administrative, de la restructuration d'ensemble et des
pouvoirs à l'intérieur de l'hôpital. Depuis longtemps, on
se plaint de l'existence de deux lignes d'autorité à
l'intérieur des hôpitaux. On a même inventé le terme,
si je ne me trompe pas, c'est M. Deschênes lui-même il y a quelques
années qui a inventé ce terme, on a même parlé de
deux solitudes, les médecins
ayant souvent de la difficulté à parler aux
administrateurs parce qu'ils ne connaissent pas la médecine et,
inversement, les administrateurs ayant de la difficulté à parler
aux médecins. Le projet de loi essaie de mettre un peu d'ordre dans tout
cela et de clarifier les rôles de chacun, et cela nous semble
extrêmement louable. Cependant, on trouve un peu curieux les principes
que le projet de loi met de l'avant. On a le sentiment, en lisant l'ensemble du
projet de loi, qu'on va renforcer le pouvoir du Conseil des médecins et
dentistes et diminuer les pouvoirs des directeurs généraux des
conseils d'administration d'établissements. Il nous semble qu'au
contraire on devrait essayer de renforcer les conseils d'administration et les
pouvoirs des directeurs généraux plutôt que de renforcer
les CMD.
À cet égard, nous avons trois suggestions précises:
la première traite de l'article 20 et des canaux d'information. Le
projet de loi limite l'accès au profil individuel de pratique des
médecins aux chefs de département clinique. Nous sommes
entièrement d'accord avec cette limite, mais nous croyons que le chef de
département clinique, comme lui-même n'est pas salarié,
devrait voir son profil individuel de pratique examiné par le DSP de
l'établissement. C'est un point mineur, si vous voulez, mais cela nous
semble malgré tout un point important.
Deuxième aspect de cette question de distribution de
l'information, le projet de loi limite l'accès au profil collectif de
pratique au ministre et au Conseil des médecins et dentistes. Quant
à nous, il nous semblerait souhaitable, encore une fois, pour
éliminer ces deux lignes d'autorité, que ces profils collectifs
de pratique soient également accessibles au DSP et aux conseils
d'administration des établissements qui ainsi pourront un peu mieux
analyser les rôles respectifs des divers départements.
Notre deuxième suggestion traite des pouvoirs qui sont impartis
aux CMD. L'ensemble des pouvoirs et de l'établissement des normes et
sanctions à l'intérieur du projet de loi est donné au
Conseil des médecins et dentistes. Il me semble tout à fait
normal qu'effectivement les médecins élaborent ces normes, mais
il nous semblerait également souhaitable que les médecins ne
soient pas totalement juges et parties dans cette question et qu'en
conséquence le conseil d'administration soit le lieu où ces
normes sont entérinées. Je m'excuse, on perd un peu le fil de nos
idées.
Mme Lavoie-Roux: On vous écoute, on a deux oreilles, comme
le dit le ministre.
M. Johnson (Anjou): On réagit en même temps.
M. Renaud: Vous êtes bons! Finalement, je vais être
bref. Troisième suggestion, qui est au fond notre suggestion la plus
importante eu égard à l'efficacité administrative qui
serait un changement dans les fonctions de gestion. Le projet de loi
suggère que ce soient les chefs de département et les CMD qui
aient une fonction de gestion des ressources disponibles; c'est ce que dit le
texte de loi. Or, il nous semble qu'il y a un glissement sémantique
important. Les chefs de département clinique sont responsables des
services médicaux et non des ressources disponibles. Ces ressources
sont, elles, de la responsabilité administrative de
l'établissement, les directeurs de soins infirmiers, les directeurs de
soins hospitaliers et du BSP. Il nous semblerait extrêmement important
que ce mot "ressources" soit enlevé et remplacé par la notion de
services, de manière, encore une fois, que ce soit le conseil
d'administration de l'hôpital qui ait la responsabilité la plus
importante à l'intérieur de l'établissement.
(13 h 30)
Finalement, le dernier aspect de notre mémoire concerne la
participation des usagers. Nous sommes totalement d'accord avec l'esprit du
projet de loi suivant lequel il est nécessaire de changer la composition
des conseils d'administration des hôpitaux et des centres d'accueil.
L'expérience des membres de notre association de même que
plusieurs études qui ont été faites sur ces
différents mécanismes de participation ont toutes montré
que, si dans certains cas il y a eu un changement de climat en raison de la
participation des usagers, grosso modo, cette participation est restée
embryonnaire et n'a pas eu les effets qu'on escomptait au départ. Bref,
la participation des usagers n'a pas atteint les objectifs qui étaient
poursuivis. La loi propose de restructurer cette participation des
différents agents à l'intérieur de l'hôpital en
éliminant les usagers pour les conseils d'administration des centres
d'accueil et des hôpitaux et de les remplacer par des
bénévoles et des bénéficiaires. Dans le cas des
bénéficiaires, cela nous semble tout à fait valable, tout
à fait souhaitable qu'effectivement les gens qui sont parties prenantes
d'une organisation et qui passent toute leur vie dans cette organisation
puissent effectivement participer à la gestion de cette organisation. De
la même manière, il nous semble tout à fait souhaitable que
des bénévoles puissent participer à la gestion de leur
organisation puisqu'ils donnent généreusement de leur temps
à ces organisations.
Cependant, ce qui nous préoccupe en fin de compte, c'est que
l'idée même de la participation des usagers dont on parle au
Québec depuis dix ans est largement abandonnée dans le projet de
loi eu égard
aux hôpitaux et aux centres d'accueil et, quant à nous,
l'association a le sentiment que cette idée est peut-être
éliminée un peu trop rapidement. Il faut quand même se
rappeler l'esprit dans lequel cette législation avait été
introduite. C'était l'esprit suivant lequel les services de santé
sont de tous les secteurs de notre vie collective, un des secteurs les plus
bureaucratisés et professionnalisés qui soit, de telle
manière que les usagers sont inévitablement un peu perdus dans
ces structures. Bien sûr, tout le monde a de la bonne volonté. Les
professionnels cherchent à faire comprendre aux patients comment
dénicher des services à l'intérieur du système. De
la même manière, la bureaucratie fait de même, mais il reste
que les usagers sont globalement perdus très souvent. Il nous semblerait
qu'il ne faille pas éliminer le principe de la participation des
usagers, mais au contraire, essayer de la restructurer d'une manière
nouvelle.
L'Association pour la santé publique du Québec a eu au
cours de l'année dernière une expérience assez grande de
visite des différentes régions du Québec pour organiser
des colloques régionaux sur l'accouchement. Au fur et à mesure
qu'on se promenait d'une région à l'autre, on était
extrêmement frappé du fait qu'il y ait au Québec un
ensemble de groupes mobilisés sur les questions de santé. Il y a
des gens qui étaient extrêmement préoccupés de faire
en sorte que les services de santé changent dans des directions qui
soient meilleures pour la population. On a surtout eu affaire aux
comités d'humanisation de l'accouchement puisque ce sont des
comités qui existent un peu partout au Québec, mais on a
également rencontré dans l'ensemble d'autres groupes, par
exemple, l'Association de promotion de la santé, les comités
d'accidentés du travail, les associations de consommateurs qui sont
préoccupés de questions de santé, les associations
d'ex-psychiatrisés et les associations de retraités et
préretraités. Bref, on a rencontré tout un ensemble de
groupes qui nous semblent être des groupes porteurs d'un rôle des
usagers dans le contexte de la gestion des services de santé à
l'heure actuelle.
En conséquence, on a deux suggestions globales. La
première est de changer la définition du terme même
d'"usagers" qui est donné dans la loi et la seconde est de créer
des comités d'usagers sur une base régionale. Le projet de loi
nous dit que, pour être défini comme usagers - maintenant, c'est
restreint, évidemment, parce qu'on les a enlevés des
hôpitaux - il faut avoir été malades, à toutes fins
utiles, dans les deux dernières années et détenir une
carte quelconque de participation au service. Concrètement, cela veut
dire qu'un homme comme moi - et les hommes consultent moins que les femmes -
dans la trentaine, qui ne va pas voir le médecin souvent, n'a pas le
droit de participer à la gestion de ces services de santé. En
d'autres termes, quelqu'un qui est en santé n'a pas le droit de
s'occuper de ce qui va se passer quand il va être malade. Il y a quelque
chose d'un peu paradoxal dans tout cela. Ce qui est encore pire, dans le
contexte actuel, c'est qu'on parle énormément de
prévention où on dit: II est important d'arriver à
développer des services qui sont préventifs; on empêche les
gens qui sont souvent en santé et qui cherchent à faire de la
prévention de participer à la gestion des services de
santé. Il y a quelque chose qui n'a pas d'allure dans tout cela. Il nous
semblerait vraiment souhaitable de changer la définition des usagers
pour la remplacer par une définition qui serait à peu près
comme suit: "Toute personne qui réside sur le territoire d'un conseil
régional et qui a reçu ou qui est susceptible de recevoir des
services d'un établissement sur ce territoire." En d'autres mots, que
l'usager soit l'usager potentiel de même que l'usager des deux
dernières années. Donc, c'est notre première suggestion.
La seconde suggestion, c'est qu'on essaie de reconceptualiser la participation
des usagers, pas dans l'abstrait, mais en créant concrètement
dans chaque région du Québec, des comités d'usagers.
Autant les bénéficiaires sont un peu pris en otage, si
vous voulez, à l'intérieur des établissements où
ils travaillent, autant les usagers sont pris en otage des services qu'on leur
offre. Il nous semble éminemment souhaitable que ces usagers aient une
fonction à l'intérieur du système et puissent
réagir. On a fait une erreur importante dans la notion de participation
telle qu'elle a été avancée par la commission Castonguay
et reprise dans le chapitre XLVIII par la suite. On a tenu pour acquis qu'il
était possible à des citoyens de se mobiliser sur une base
d'établissement, qu'il était possible à des citoyens de
s'asseoir aux conseils d'administration et de pouvoir parler de dossiers de
relations du travail, de donner des avis au ministre, de gérer les
ressources d'un établissement. À toutes fins utiles, ce sont
vraiment des tâches extrêmement dures. Je participe moi-même
parfois à des conseils d'administration à l'intérieur de
l'université sur des sujets que je ne connais pas, et je vous avoue que
je m'absente souvent. C'est quasiment inévitable.
On se dit que, s'il y avait moyen de créer sur une base
régionale des comités d'usagers à l'intérieur
desquels on permettrait à tout le monde de se présenter, les
groupes qui, actuellement, sont mobilisés sur les questions de
santé y participeraient et auraient intérêt à voir
de leurs membres se présenter et prendre position sur des questions de
santé. À l'avant-dernier
colloque, où Jean-Yves Rivard faisait un bilan de la
réforme Castonguay, une idée essentielle a ressorti, c'est que la
participation individuelle, en général, ne marche pas. Ce qui
fonctionne dans notre société hautement organisée, c'est
une participation organisée, sur la base des groupes qui existent. Ce
qu'on suggère, c'est de créer un comité d'usagers en
espérant que les groupes qui sont déjà mobilisés
sur les questions de santé puissent y participer.
On donne essentiellement deux fonctions à ce comité
d'usagers, autour des mêmes fonctions attribuées au comité
des bénéficiaires. L'une est une fonction de transmission de
l'information du haut vers le bas, et l'autre est une transmission de
l'information du bas vers le haut. Encore une fois, l'usager est perdu dans les
services de santé. Très souvent, on n'a pas d'information eu
égard à la qualité des pratiques qui se produisent dans un
hôpital ou dans un autre ou dans la variation des normes dans un
hôpital par rapport à un autre. Il nous semble extrêmement
important que ces comités aient comme principale fonction, d'abord, de
transmettre l'information, de questionner les directeurs généraux
des établissements, de questionner le CRSSS, de questionner le ministre
et d'être en mesure de transmettre au public, par le mécanisme des
médias, une certaine information sur la valeur respective des services
ou sur différents points de vue qui peuvent être discutés,
différents modes qui peuvent exister relativement aux différentes
thérapies.
Il y a également une fonction d'information du bas vers le haut.
Vous en avez probablement déjà entendu parler, bien des gens se
plaignent des mécanismes de plaintes. Les gens sont mal à l'aise;
on sent souvent que leurs plaintes sont mal suivies. Il nous semble qu'un
comité d'usagers pourrait avoir comme fonction d'aider les usagers
à transmettre leurs plaintes aux groupes concernés.
Ce qui nous semble important pardessus tout - je termine
là-dessus - c'est que le comité d'usagers ne devrait d'aucune
manière avoir de fonctions bureaucratiques. Ce sont les fonctions
bureaucratiques qu'on a imposées aux fameux citoyens qui participaient
aux organisations qui, jusqu'à un certain point, ont tué la
participation populaire, de telle manière qu'il nous semble important,
pour établir un certain contrôle de ces organisations, d'avoir des
organismes assez distincts, au fond. On a pensé, dans notre
mémoire, de demander aux CRSSS de superviser les élections
à l'intérieur de ces fameux comités d'usagers si jamais
ils étaient créés. En y repensant par la suite, on s'est
dit qu'il serait peut-être encore préférable, compte tenu
du fait que les CRSSS vont inévitablement avoir tendance à
vouloir voir leur politique défendue par les comités d'usagers,
que ce soit, en fait, l'Office de la protection du consommateur qui organise
ces élections.
En résumé, il semble y avoir deux conditions sine qua non
au bon fonctionnement du comité. C'est premièrement, que le
comité n'ait pas de fonction de gestion directe, mais une fonction
d'orientation générale des services de santé, donc, pas de
rôle fonctionnel, bureaucratiquement parlant, mais un rôle
d'information et d'aide aux usagers, d'une part, et, d'autre part, que ce
comité d'usagers ait un pouvoir réel. Le pouvoir réel,
c'est qu'il faudrait forcer d'une manière quelconque les directeurs des
différents établissements ou des différentes fonctions
ministérielles de répondre aux questions des usagers et de donner
les statistiques, quand besoin il y a.
Par exemple, quand on visitait le Québec sur la question des
accouchements, on a été frappé de constater que, dans
certaines régions, certains comités d'humanisation de
l'accouchement avaient été créés depuis un an ou
deux et que ces comités n'avaient jamais réussi à parler
au directeur général de l'établissement de la
région et à obtenir de lui un certain nombre d'informations. Il a
fallu que le colloque régional se produise pour qu'enfin ces gens se
parlent. Donc, si un comité d'usagers était créé,
il faudrait effectivement que les directeurs d'établissement aient le
devoir de leur donner de l'information.
Tout cela peut sembler dangereux au ministre des Affaires sociales, le
responsable de l'ordre public dans ce secteur. Cela peut sembler assez curieux
de dire: On va, au fond, financer la contestation ou financer des
contre-pouvoirs. Mais je ne suis pas sûr que ce soit si dangereux, d'une
part, et, d'autre part, je me demande si on n'aurait pas avantage à
tolérer une certaine incertitude, une certaine ambiguïté
dans le secteur de la santé au Québec, et probablement dans
d'autres secteurs.
Il semble que, depuis une quinzaine d'années, ce qu'on
amène comme conception de la démocratie, c'est une conception
d'organigramme. On a une conception très linéaire de la
démocratie, ça part d'en haut avec le ministre et on a toutes
sortes de boites en bas et le débat se déroule dans les officines
de ces différentes boites d'organigramme. Or, la véritable
démocratie, à mon sens, et au sens de la plupart des membres de
l'association, ce n'est pas ça. La véritable démocratie
c'est l'affrontement de points de vue dans l'arène publique. C'est le
rapport entre des pouvoirs et des contre-pouvoirs et ce comité d'usagers
aurait un peu ce genre de fonction-là. Je termine là-dessus.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M.
Renaud.
M. le ministre, vous avez des questions?
M. Johnson (Anjou): Messieurs, je vous remercie du mémoire
que vous avez déposé et des remarques que vous y avez
ajoutées, dans certains cas sous forme de synthèse et dans
certains cas sous forme d'ajouts et d'explications de contexte.
Les jours qui ont précédé fournissent des
réponses satisfaisantes ou pas ou une partie des réponses
à certaines des préoccupations que vous avez, notamment en ce qui
a trait à médiane, 23b 1), la question des résidents.
C'est pour cela que je vais plutôt concentrer mes remarques sur deux
choses. La question de l'information et cette question qui est centrale
à vos yeux, je pense, qui est la participation des citoyens.
La question de l'information, il faut bien se comprendre. Il y a
peut-être une méprise dans la façon de l'expliquer de notre
côté ou peut-être une ambiguïté dans le texte,
je ne sais pas. Mais il faut bien se rappeler que le directeur des services
professionnels fait partie de l'exécutif du CMD et comme il en fait
partie il a donc cette notion d'une transmission de l'information des profils
individuels aux DSP également.
On ne prétend pas résoudre le problème de la
bicéphalie hospitalière. Je pense d'ailleurs que ce serait bien
prétentieux que de tenter de le faire. C'est un long long cheminement,
je pense, dans une collectivité. Ce que l'on tente de faire, c'est au
moins de mieux l'harmoniser. Vous nous dites peut-être un peu
malhabilement à l'égard des pouvoirs des CMD, peut-être
irions-nous dans le sens contraire de l'objectif visé. Je ne crois pas,
dans la mesure où le directeur des services professionnels reste une
cheville et une charnière extrêmement importantes, très
concrètement, si on regarde le développement du réseau
depuis un certain nombre d'années. Il y a aussi des précisions
qui devront être apportées en cours de route.
Sur la question des bénéficiaires, et je sais l'action que
font certains des membres chez vous à travers le territoire pour pousser
cette plus grande conscience des citoyens d'une réflexion autour de leur
propre santé et des instruments que la collectivité s'est
donnée. Vous me permettrez de vous dire que je pense que nous visons le
même objectif qui est celui d'une participation accrue. Je ne le dis pas
juste théoriquement. Vous évoquiez toute cette ébullition
qui est peut-être nécessaire, cette espèce de contrepoids
à la bureaucratie par la participation des citoyens, à laquelle
je crois beaucoup, mais le pari qu'on fait, c'est qu'à partir des
expériences des dix dernières années, notamment dans le
cas des hôpitaux où les assemblées d'usagers avaient
quelque chose et restent encore quelque chose d'un peu caricatural dans la
majorité des cas, il s'agit de faire confiance au fait que
l'évolution de notre société a permis depuis dix ans
l'éclosion d'une série d'organismes dont ceux auxquels vous avez
référé. Notre approche a peut-être quelque chose
d'analogiquement un peu corporatif dans un autre milieu, c'est de
reconnaître que ces citoyens se sont formés et ont agi à
travers des organismes bénévoles et c'est de permettre, par ces
personnes qui ont agi à travers des organismes bénévoles,
de devenir des intrants dans le système, au niveau de leur participation
au conseil d'administration. En présumant que cette démarche
d'ébullition ne doive pas passer par une structuration des usagers, mais
qu'elle existe dans la société. Le pari qu'on fait c'est que la
structure gouvernementale ou le CRSSS, où on essaie encore une fois,
d'augmenter l'intrant des citoyens et de créer un contrepoids au
réflexe bureaucratique au niveau du conseil d'administration, se fera
dans ce sens-là.
Encore une fois, je pense qu'en termes d'objectifs, peut-être
qu'ils sont plus près que n'en donne l'impression le texte, vous aurez
sûrement l'occasion dans les jours qui viennent de nous entendre nous
référer à ces notions et à ces principes à
l'occasion de la deuxième lecture. (13 h 45)
Je m'excuse d'être si bref dans mes commentaires, mais je pense
que vos commentaires sont très précis et je n'ai pas de question
additionnelle. Le texte parle par lui-même, même s'il peut y avoir
des divergences de vues.
M. Contandriopoulos: M. le Président...
Le Président (M. Bordeleau): Oui, monsieur.
M. Contandriopoulos: ... un point d'éclaircissement. Quand
vous dites que le DSP reçoit le profil individuel des chefs de service,
je ne vois pas, dans l'article 20, où c'est marqué. Il est
effectivement marqué que le profil de pratique collectif des
professionnels va au CMD et que les profils individuels vont uniquement au chef
de département. Donc, le profil de pratique du chef de
département n'est pas soumis à un examen individuel.
M. Johnson (Anjou): Ah! je comprends ce que vous voulez dire. Je
m'excuse. D'abord, j'ai fait un lapsus quand j'ai dit "individuel" au lieu de
"collectif". Je comprends ce que vous voulez dire: Le profil du chef de
département, lui, personne ne le voit.
M. Contandriopoulos: Et on dit que le DSP devrait pouvoir le
voir.
M. Johnson (Anjou): D'accord, je comprends.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. le ministre. Mme la
députée de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Je veux remercier
les membres de l'Association pour la santé publique du Québec de
leur mémoire. Je pense que cela apporte une autre dimension. Je crois
comprendre que vous êtes un groupe "bénévole". Je pense que
c'est vraiment bénévole, c'est-à-dire que c'est une
organisation volontaire, etc. Cela nous éloigne peut-être d'autres
préoccupations. Sans faire de reproche à qui que ce soit, c'est
normal que les gens viennent faire valoir leur point de vue, mais vous semblez
peut-être un peu plus éloignés d'autres
préoccupations que les gens ont.
Je sens chez vous, à moins que je ne me trompe, une
préoccupation, d'abord, de mettre l'accent sur la participation et
j'apprécie les commentaires que M. Renaud a faits pour expliciter ce qui
est dans le mémoire. Je trouve cela intéressant. Vous avez dit:
II faut que le réseau - ce n'est pas l'expression que vous avez
utilisée, c'est la mienne - devienne un peu moins hermétique. Je
pense que c'est le message que vous avez voulu transmettre. C'est vrai qu'il
est hermétique. Par expérience, je peux vous dire que ce sont des
réflexions que les députés nous font quand ils se voient
pris dans cette grande structure. Ils disent: Franchement, c'est un monde
à part, le réseau des affaires sociales.
Il y a un point sur lequel je m'entends peut-être un peu moins
avec vous. Votre idée de la création de comités de
citoyens est intéressante, par contre, je pense aussi que la
participation des bénéficiaires est importante. Est-ce qu'il y a
un meilleur équilibre à établir entre les deux? C'est
à voir et cela me semble extrêmement important, surtout quand on
parle des soins prolongés et des centres d'accueil, de ce genre
d'établissement.
Vous avez établi votre mémoire encore une fois, je
m'excuse si j'ai un peu de difficulté à m'exprimer - à
partir de la philosophie de la Loi sur les services de santé et les
services sociaux. Vous reprenez, par exemple, la notion d'accessibilité,
la notion d'universalité reliée à l'accessibilité,
la notion de participation. Je suis heureuse que vous ayez soulevé
l'article 5, mais cela m'a étonnée que vous n'ayez pas
soulevé l'article 23 qui, à mon point de vue, pourrait être
encore plus important au point de vue de l'introduction, par la bande, pour
utiliser une expression particulière, d'un ticket modérateur.
Je m'étonne, par contre - c'est peut-être une question de
temps - que vous ne vous soyez pas arrêtés à des notions de
confidentialité et de choix pour les bénéficiaires ou les
citoyens, par certains pouvoirs accordés en vertu de l'article 31a,
à moins que je ne me trompe d'article: 18.1, 18.2 ou 18.3. Par exemple,
dans l'organisation de la centrale, on va assez loin pour la rendre efficace
dans le type de renseignements qui peuvent être transmis. Non pas
à ce moment-ci, ce seront peut-être seulement des nombres, etc.,
mais on va aussi loin qu'on le peut; ce peuvent être des noms et,
à un moment donné, quand la machine ne produit pas
l'efficacité demandée, on étend. Ce sont quand même
des choses sur lesquelles - je ne sais pas si vous vous êtes posé
des questions - il faut peut-être se poser des questions.
Il y a évidemment la question de la restriction du libre choix du
citoyen. Il y a des contraintes physiques, géographiques, etc. qui
existent. C'est peut-être un autre point, au niveau du principe, qu'il
faudrait relever. Il y a des points, comme la question de la répartition
géographique par le gouvernement, sur lesquels je suis tout à
fait d'accord. Je voudrais vous poser une question précise: Pensez-vous
que le mécanisme actuel sera efficace, celui qui est
suggéré par la loi, la rémunération à la
baisse ou à la hausse, comme on le voudra?
Je suis d'accord avec vous aussi quant à la question du salariat
du résident qui se trouve modifié. Je pense que vous avez raison
là-dessus. Vous avez raison aussi sur la nécessité de
mieux coordonner les dépenses du secteur public pour les gens qui ont
à la fois un salariat et d'autres types d'honoraires, mais je ne sais
pas où vous oeuvrez, si vous êtes dans le secteur public,
parapublic ou si vous êtes dans les universités, je n'en ai aucune
idée... c'est-à-dire, je n'en ai aucune idée, je peux en
avoir mais je voudrais aussi que ce même souci, vous l'exerciez à
l'égard d'autres professions. Ici, je ne me place pas à la
défense des médecins plus qu'à une autre profession, mais
vous savez fort bien que dans d'autres professions il y a ce même genre
de duplication de paiements par l'État de revenus. Vous examinerez les
comptes publics, ils parlent d'eux-mêmes. C'est ce genre de
choses-là, mais, précisément, je pense qu'il y a un
objectif que tout le monde veut atteindre et c'est à l'égard des
régions éloignées. C'est sur le mécanisme
lui-même.
Sur l'autre question de la bicéphalie dont on a parlé au
sujet de l'administration, la bicéphalie des médecins et de
l'administration hospitalière, il y a une question qui
m'inquiète. Je ne sais pas si vous y avez réfléchi. On a
introduit la notion de chef de département à qui on donne
maintenant - il y avait toujours eu des chefs de département - une
fonction particulière
qui, d'après ce que je comprends, va être
rémunérée. N'y a-t-il pas danger à long terme ou
à moyen terme qu'on évolue à cet égard vers une
autre forme de bureaucratisation ou de fonctionnarisme à
l'intérieur même des services? Je vous ai posé un tas de
questions, je ne vous en poserai pas d'autres. Je voudrais seulement avoir vos
réactions. Je vous remercie.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, Mme la
députée. M. Renaud.
M. Renaud: Est-ce qu'on peut réagir deux secondes? Je
voudrais d'abord réagir à la question de la bicéphalite,
comme le disait M. Johnson. Jusqu'à un certain point, il me semble que
c'est bon qu'il y ait ces deux lignes de pouvoir dans un hôpital, parce
que l'autogestion est probablement la méthode de travail la plus
intéressante pour tout le monde. Si j'étais médecin dans
un hôpital, j'imagine bien que j'aimerais, moi, contrôler mes
collègues. Cependant, ce qu'il faut éviter, c'est que cette
formule en vienne à prendre une place telle que la ligne administrative,
elle, perde du poids. C'est un peu cette inquiétude qu'on manifestait
dans le mémoire tout simplement.
Je voudrais également parler brièvement des usagers. Je
suis entièrement d'accord avec vous, Mme Lavoie-Roux, que la
participation des bénéficiaires est quelque chose de fondamental
et qu'elle fait un progrès énorme dans cette loi, parce
qu'effectivement ce sont ces gens, au fond, qui ont le plus de choses à
dire puisqu'ils vivent dans l'établissement; c'est la même chose
pour les bénévoles. Il me semble que c'est un pas en avant
considérable et, comme le disait M. Johnson tantôt, en ce sens la
loi ne va pas contre la participation des usagers. Par ailleurs, je suis quand
même un peu troublé quand j'entends le ministre Johnson nous dire
que le CRSSS a une fonction de maintien de l'ébullition, du
questionnement par rapport aux questions de santé. Cela ne me saute pas
aux yeux. Si j'étais dans la position inverse, je vous poserais la
question: Comment maintient-on une ébullition? Pardon?
Mme Lavoie-Roux: ...quelquefois, je dois vous dire.
M. Renaud: Parce que les CRSSS - j'ai énormément
d'estime pour les gens des CRSSS - sont malgré tout pris dans une
logique de gestion bureaucratique. Ils sont pris à régler les
problèmes d'allocation des ressources dans les établissements,
à régler un ensemble de problèmes de rapports entre
groupes professionnels et groupes d'établissements sur le territoire. Il
y a souvent la fonction des usagers à l'intérieur des CRSSS ou la
fonction d'information, dans quel hôpital on fait tel genre
d'accouchement, quels sont les taux d'hystérectomie et d'amygdalectomie,
etc., de chirurgie élective dans les différents hôpitaux
d'une région donnée. Les CRSSS ont très rarement rempli
cette fonction. Il nous semblerait, nous, que ce serait souhaitable que ce ne
soient pas les CRSSS qui remplissent ce rôle, mais bien un comité
d'usagers qui, lui, n'aurait pas les mains liées et qu'on ne paierait
pas pour faire cela, auquel on ne ferait que fournir des ressources
matérielles.
Le Président (M. Bordeleau): Merci.
M. Contandriopoulos: Vous voulez qu'on continue à
répondre?
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. Contandriopoulos.
M. Contandriopoulos: II y a avait deux ou trois questions dans
l'air. Il y avait des sous-questions et des questions sur
l'accessibilité. Vous vous étonniez qu'on n'ait pas réagi
à la confidentialité ou au problème du respect du droit de
l'individu par rapport à l'information. Je pense - et je parle
moitié en mon nom et moitié au nom de l'association - qu'il y a
à certains moments des arbitrages à faire entre un minimum de
circulation de l'information et une volonté de rationalisation. Il faut
qu'on arrive à avoir suffisamment d'information pour pouvoir faire un
certain nombre de choix de façon éclairée.
Trop souvent, le respect de ces règles de la non-transmission de
l'information de la part de l'individu peut amener une impossibilité de
fonctionner pour arriver à rationaliser les services. Quand on lisait la
loi, on avait l'impression qu'à travers ce projet de loi il y avait une
volonté d'améliorer la circulation de l'information, à peu
près à tous les niveaux. Les articles que vous avez
désignés semblent aller dans cette volonté de faire mieux
connaître ce qui préoccupe les gens qui travaillent. Alors, on va
donner des profils individuels aux chefs de département, on va donner
des profils collectifs à ceux qui gèrent un peu plus haut, on va
redonner de l'information à d'autres personnes de façon que les
gens soient informés et puissent avoir du "feedback" sur ce qu'ils font
de toutes les façons.
Mme Lavoie-Roux: Ma question était davantage en fonction
de l'article où on donne des pouvoirs au conseil régional...
M. Contandriopoulos: L'article 31.
Mme Lavoie-Roux: ... de déplacer la distribution...
M. Johnson (Anjou): Le choix de l'établissement.
Mme Lavoie-Roux: Oui, le choix de l'établissement et la
centrale va avoir tel type de renseignements. Je suis certaine, dans un premier
geste, que ce qu'on veut, ce sont uniquement des renseignements statistiques:
le nombre d'admissions, de départs, etc. Si je peux retrouver la loi, je
vais vous le dire plus exactement, excusez-moi. "En regard des inscriptions et
des admissions des bénéficiaires, de leur transfert et transport
en ambulance."
Vous êtes rendus aux inscriptions et aux admissions des
bénéficiaires. À partir de cela, vous pouvez, à un
moment donné, trouver que ces choses ne sont pas suffisantes et vous
pouvez étendre vos recherches à d'autres types. Je pense qu'il
faut toujours être prudent, au point de départ, dans les balises
qu'on met pour ne pas, toujours au nom de l'efficacité, qu'on
dépasse ce qui devrait être une norme régulière.
M. Contandriopoulos: Je peux dire qu'on n'y a pas
réfléchi plus que cela. Notre souci de rationalité l'a
emporté sur notre crainte du bris de la confidentialité. On n'y a
pas réfléchi plus que cela en tant qu'association. Je ne me
prononcerai pas en mon nom personnel.
Vous posiez la question à savoir: Est-ce que les
mécanismes prévus dans le projet de loi seraient suffisants pour
améliorer l'accessibilité? Il semble que le projet de loi
prévoit la possibilité d'instaurer des mécanismes. Il va
permettre à la structure gouvernementale de modifier des règles
du jeu de façon à créer des moyens qui permettraient
d'améliorer l'accessibilité. Le projet de loi, en tant que tel,
ne donne pas ces moyens de façon précise. On dit qu'on pourrait
éventuellement modifier les revenus, qu'on pourrait
éventuellement donner des primes, qu'on pourrait faire telles choses,
mais, à l'heure actuelle, si je lis la loi correctement, c'est sujet
à discussion, c'est sujet à décret, c'est
éventuellement sujet à négociation. Je ne vois pas de
façon précise quelle serait la modalité actuellement
choisie à travers ce projet de loi.
Autrement dit, en regardant cela, je me dis: La loi prévoit la
possibilité, pour le ministère, de prévoir des
mécanismes qui régleraient cette question de
l'accessibilité, mécanismes qui ne seraient pas sujets
automatiquement à un processus de négociation.
Mme Lavoie-Roux: Mais il y en a un mécanisme qui est
clairement identifié dans la loi.
M. Johnson (Anjou): La désignation d'un territoire,
voulez-vous dire?
Mme Lavoie-Roux: Non, non.
M. Johnson (Anjou): Ou le décret dans le cas des nouveaux
arrivants.
Mme Lavoie-Roux: Oui. "...peut prévoir une
rémunération différente pour les médecins durant
les premières années."
M. Contandriopoulos: Oui, "peut".
Mme Lavoie-Roux: Oui, "peut", d'accord. Cela sous-entend qu'on va
le soumettre à la négociation ou à l'entente.
M. Contandriopoulos: C'est ce que j'ai dit.
Mme Lavoie-Roux: Oui, mais il y en a un d'identifié de
façon précise.
M. Contandriopoulos: Oui, c'est cela. On peut faire cela. On
pourrait aussi ouvrir des cabinets gratuits pour les médecins, on
pourrait développer des pratiques de groupe, on pourrait garantir des
revenus pendant un certain temps, on pourrait garantir un emploi dans la ville
après dix ans de service en région éloignée. On
peut inventer un éventail excessivement large de moyens incitatifs, de
stimulants qui feraient en sorte que les médecins iraient en
région éloignée.
Ce que je comprends, c'est que la loi dit: Cela, il faut que ce soit de
notre ressort. Le ministère dit: II faut que ce soit de notre ressort et
nous, on lui suggère de consulter un peu les gens qui sont
concernés, mais ça ne peut pas être uniquement du ressort
des négociations. Il n'est pas évident, a priori, logiquement,
que les associations qui défendent les intérêts
économiques de leurs membres vont aussi être
préoccupées de la même façon de
l'accessibilité aux services par la population.
Mme Lavoie-Roux: Savez-vous - ce sera ma dernière
réflexion - qu'il y avait déjà des mécanismes que
le gouvernement n'a pas utilisés?
M. Contandriopoulos: Je le sais bien, la loi 65 prévoyait
des mécanismes similaires. Un dernier point, si vous me le permettez.
Vous m'avez posé une question. Vous parlez de la crainte que le pouvoir
qu'on donne aux chefs de département pourrait amener des modifications
dans la rémunération des chefs de département. Vous
semblez dire qu'on ouvrait la voie...
Mme Lavoie-Roux: Ils vont ajouter une
rémunération.
M. Contandriopoulos: Ils vont être payés
pour une tâche médico-administrative.
Mme Lavoie-Roux: Oui, c'est cela. (14 heures)
M. Contandriopoulos: ... et vous sembliez me suggérer que
peut-être ça pourrait être l'amorce de modifications dans la
rémunération, c'est ça?
Mme Lavoie-Roux: Non, que ça pourrait être l'amorce,
finalement, d'un chef de département qui deviendrait un
fonctionnaire.
M. Contandriopoulos: Là encore, je pense qu'il faut faire
très attention de distinguer un mode de rémunération d'une
situation d'employés.
Mme Lavoie-Roux: Bien, c'est ça. Cela peut évoluer
vers ça.
M. Contandriopoulos: Dans le projet de loi - là je ne le
défends pas spécialement -le chef de département est sous
l'autorité du CMD. Pour le moment, il n'est pas clair que c'est
différent de ce qui se passe actuellement. Ce que l'on dit, c'est qu'on
va ajouter une rémunération pour les activités
supplémentaires qu'il va avoir. Bon, la suite des négociations
dira ce qu'il va advenir de son statut, mais le projet de loi en tant que tel
ne me semble pas particulièrement dangereux.
Mme Lavoie-Roux: D'accord, merci.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, Mme la
députée de l'Acadie.
M. Johnson (Anjou): Merci.
Le Président (M. Bordeleau): Je vous remercie messieurs de
l'Association de la santé publique. J'invite maintenant notre dernier
groupe pour aujourd'hui, soit l'Association québécoise des
pharmaciens propriétaires.
C'est M. André Lévesque, je présume. Si vous voulez
nous présenter les personnes qui sont avec vous.
Association québécoise des pharmaciens
propriétaires
M. Lévesque (André): Oui. À mon
extrême gauche, M. Normand Simard, deuxième vice-président;
Olivier Vaillancourt, secrétaire; Me Claude Trudel, notre conseiller
juridique; à mon extrême droite, M. Réal Lemire, premier
vice-président, et, à ma droite personnelle, M. Daniel Larouche,
qui est notre économiste.
Le Président (M. Bordeleau): Nous sommes prêts
à vous entendre.
M. Lévesque (André): Comme nous sommes les derniers
à nous présenter devant vous et que les derniers sont toujours
les premiers, j'ai vraiment l'impression que nos recommandations seront celles
auxquelles vous vous arrêterez d'avantage, et je vous en remercie
à l'avance.
Le Président (M. Bordeleau): Voulez-vous rapprocher votre
micro, M. Lévesque, s'il vous plait?
M. Lévesque (André): M. le Président,
mesdames et messieurs les membres de la commission, je tiens d'abord à
remercier la commission d'avoir invité l'Association
québécoise des pharmaciens propriétaires à formuler
ses commentaires sur le projet de loi 27.
L'AQPP représente les quelque 1200 pharmaciens
propriétaires du Québec. Depuis 1972 le réseau
québécois de pharmacie exécute les ordonnances dont le
coût est défrayé par le gouvernement dans le cadre de ses
programmes d'assistance-médicaments. C'est à ce titre que les
pharmaciens sont touchés par la Loi sur l'assurance-maladie.
Comme la majorité des modifications que le gouvernement se
propose d'apporter à la Loi sur l'assurance-maladie vise d'abord et
avant tout les médecins, L'AQPP n'attend pas commenter l'économie
générale du projet de loi. Toutefois, certaines dispositions de
ce projet auront des effets immédiats ou potentiels sur les pharmaciens
et sur les bénéficiaires des programmes gouvernementaux
d'assistance-médicaments. C'est ce dont j'ai l'intention de vous
entretenir brièvement.
Afin de faciliter votre compréhension de l'impact du projet de
loi sur les pharmaciens et les bénéficiaires, qu'il me soit
permis de vous rappeler certaines modalités de fonctionnement des
programmes de médicaments. Le système de
rémunération du pharmacien dans le cadre des programmes en
vigueur depuis 1972 comprend deux composantes. Lorsque le pharmacien
exécute une ordonnance qu'il facture à la Régie de
l'assurance-maladie, il est, d'une part, remboursé pour le
médicament qu'il fournit au patient, et, d'autre part,
rémunéré pour le service qu'il rend en exécutant
l'ordonnance. Le coût du médicament est fixé deux fois l'an
par le ministre des Affaires sociales sur recommandation du Conseil consultatif
de pharmacologie et publié dans la liste des médicaments dont
fait état l'article 4 de la Loi sur l'assurance-maladie.
Le coût inscrit à cette liste correspond au prix
généralement payé par le pharmacien pour se procurer le
médicament. Quant au montant des honoraires professionnels, il est le
fruit d'une négociation entre le gouvernement et l'AQPP. Ces
honoraires
comprennent, outre la rémunération du service
lui-même, un montant qui compense les frais généraux du
pharmacien.
Ainsi, la rémunération du pharmacien dans le cadre des
programmes gouvernementaux est en partie négociée et en partie
fixée unilatéralement par le gouvernement. Ce système, qui
donne déjà de multiples possibilités de contrôle au
gouvernement, a assez bien fonctionné jusqu'à présent.
La signification et la valeur économique des honoraires
étaient assez bien circonscrites. Il était donc possible de
négocier les honoraires en connaissant les grandes lignes des conditions
qui entoureraient l'exercice de la pharmacie au cours d'une entente. Le projet
de loi propose de modifier les règles du jeu. Cette modification
comporte trois volets.
Premièrement, l'article 4 du projet de loi, qui modifie l'article
19 de la loi, réduit le champ des négociations aux seules
conditions de travail des professionnels de la santé. En effet, on
pourrait difficilement contester le privilège du gouvernement de
gérer le système québécois de santé. De
fait, les ententes négociées par les pharmaciens n'ont jamais
débordé le domaine des conditions de travail de ceux-ci.
En deuxième lieu, le projet de loi donne au gouvernement des
pouvoirs de réglementation sur les modalités de couverture et de
remboursement du coût des médicaments dont les effets pourront se
répercuter justement sur les conditions de travail et sur la
rémunération du pharmacien.
Troisièmement, l'article 31 du projet ajoute un nouvel article,
l'article 104.1, qui rend la loi d'ordre public et empêche ainsi les
pharmaciens de se protéger par la négociation contre les effets
néfastes que pourrait avoir les règlements, décrets ou
arrêtés adoptés en vertu des nouveaux pouvoirs que le
gouvernement cherche à se donner.
Je crois utile de m'attarder un peu plus sur les deux derniers
points.
L'article 2 du projet de loi, qui vise à modifier l'article 4 de
la loi, donnerait au ministre le pouvoir non seulement de dresser la liste des
médicaments, mais aussi de déterminer la méthode de
fixation du prix de chaque médicament et le montant maximal, s'il y a
lieu, dont la régie assume le paiement dans les cas, conditions ou
circonstances qu'elle détermine.
Ainsi, le ministre aurait le pouvoir de modifier à tout moment
les prix remboursés au pharmacien pour les médicaments. À
la limite, le ministre aurait le loisir de décider
unilatéralement qu'il ne rembourse plus le coût du
médicament en fixant, par exemple, le prix plafond à zéro.
C'est dire que le ministre aurait le pouvoir de modifier à
volonté, en cours d'entente et de façon unilatérale, les
conditions de travail des pharmaciens.
Certes, le genre de mesures rendues possibles par l'article 2 du projet
de loi concerne ce qu'on pourrait appeler les privilèges d'assureur du
gouvernement, qui sont parfaitement légitimes.
Mais cette disposition prend une tout autre signification lorsqu'on
l'examine à la lumière de l'article 31 du projet de loi qui
propose de rendre la Loi sur l'assurance-maladie d'ordre public. L'adoption de
cet article impliquerait que les pharmaciens seraient complètement
à la merci des mesures prises en vertu de l'article 2 du projet de loi
sans même pouvoir négocier les modalités d'implantation de
ces mesures ni une compensation propre à absorber les coûts
entraînés par ces mesures, le cas échéant.
Le ministre demande donc des pouvoirs qui lui permettraient de modifier
les règles du jeu, au gré des objectifs budgétaires ou
autres du gouvernement. La consommation augmente plus rapidement que
prévu, il ne faut pas s'alarmer. Il n'y a qu'à baisser le prix
maximum remboursé par la régie et tout rentrera dans l'ordre pour
les fonctionnaires et les politiciens. Les pharmaciens et la population
n'auront qu'à s'adapter. Les négociations avec les pharmaciens
sont difficiles? Qu'à cela ne tienne. Donnons-leur aujourd'hui les
honoraires qu'ils réclament; demain, le ministre décrétera
une nouvelle baisse des prix plafonds.
Bref, le projet de loi no 27, s'il était adopté dans sa
version actuelle, donnerait au ministre des Affaires sociales une
capacité quasi illimitée de jouer avec la masse d'argent
impliquée dans les programmes de médicaments. Il s'agit d'un mode
de fonctionnement dont rêve sans doute tout responsable d'un budget
gouvernemental. Mais une telle situation aurait un effet secondaire grave,
celui de donner au pharmacien un cadre de pratique d'une fluidité telle
que toute planification un tant soit peu sérieuse serait impossible pour
eux.
Cette affirmation vaut autant pour chacun des pharmaciens dans
l'administration de son officine que pour l'ensemble des pharmaciens dans leur
négociation avec le gouvernement. On a dit, à raison d'ailleurs,
que le but des programmes d'assistance médicaments n'était pas
d'assurer un niveau de revenu aux pharmaciens. Cet argument a d'autant plus de
vraisemblance que le régime est partiel. Mais nul ne saurait contester
que l'État, par ses extensions successives de programmes au cours des
neuf dernières années, est maintenant à l'origine de 25%
à 30% du chiffre d'affaires total des pharmaciens, ce qui est loin
d'être négligeable.
Comme, en plus, les pharmaciens n'ont déjà pas de
possibilité réelle de choix quant à leur adhésion
au régime, il est clair que
l'État ne peut plus nier sa responsabilité envers cette
catégorie de professionnels de la santé. Or, le projet de loi
donnerait à l'État les moyens d'abdiquer cette
responsabilité. Les membres de la commission comprendront dès
lors notre inquiétude.
Les pharmaciens ne seront pas les seuls à être
touchés par le projet de loi, les bénéficiaires des
programmes le seront aussi. Premièrement, l'article 5 du projet, qui
modifie l'article 22 de la loi, stipule que le pharmacien peut exiger la
différence entre le prix du médicament indiqué à la
liste et le montant dont la régie assume le paiement. Malgré
l'élégance des termes employés, c'est bien un ticket
modérateur qui se glisse ainsi dans le régime des
médicaments. Tous les médicaments dont les prix seront au-dessus
des prix maxima fixés par le ministre, seront susceptibles d'être
frappés d'un ticket modérateur. Plus les prix maxima seront bas,
plus grand sera le nombre de médicaments frappés d'un ticket
modérateur.
Et pourtant, le gouvernement a écarté sans
équivoque il y a quelques mois, cette idée d'un ticket
modérateur. Il faut dire toutefois que le gouvernement a
agrémenté la notion de ticket modérateur d'une
subtilité additionnelle. Car, non content de donner cette
possibilité au ministre, le projet lui permet de rejeter l'odieux de la
décision finale sur chaque pharmacien pris individuellement.
Le règlement sur les frais modérateurs, adopté le
22 juillet 1981 et publié dans la Gazette officielle du 19 août,
nous indique que le gouvernement a bien l'intention d'agir en ce sens. De la
sorte, il sera toujours possible de dire que c'est le pharmacien et non le
gouvernement qui impose un ticket modérateur. Lorsqu'un pharmacien
voudra prendre une telle responsabilité, il devra, selon nous, d'abord
se faire élire à l'Assemblée nationale, mais dans son
officine le pharmacien n'a pas à prendre une responsabilité que
le gouvernement refuse d'endosser.
Deuxièmement, le paragraphe s.5 de l'article 23 du projet
introduit un nouveau pouvoir réglementaire permettant de
déterminer les conditions requises pour que le coût des
médicaments soit assumé par la régie. À nos yeux,
les bénéficiaires ont tout lieu d'être inquiets d'un tel
pouvoir. Cela ouvre la porte à toutes les possibilités de
restriction dans la couverture des programmes. Par exemple, il sera possible
que certains médicaments ne soient remboursés que sur approbation
préalable des fonctionnaires de la régie en fonction du
diagnostic posé par le médecin. Déjà des mesures en
ce sens nous ont été annoncées par le Conseil consultatif
de pharmacologie et la Régie de l'assurance-maladie.
Il n'est question de mettre en doute ni la bonne foi ni la
compétence des fonctionnaires de la régie, mais nous ne croyons
pas qu'il leur appartienne de déterminer la médication requise
par les patients. De plus, cette disposition du projet de loi donne au
gouvernement des pouvoirs de réglementation tels que
l'accessibilité aux médicaments dans le cadre des programmes
gouvernementaux pourra rapidement rétrécir comme une peau de
chagrin au gré, encore une fois, des objectifs financiers à court
terme du gouvernement.
L'accessibilité aux soins de santé, qu'on avait pourtant
érigée en droit fondamental, devient désormais monnayable.
Bien sûr, nous sommes conscients que les coûts de la santé
en général, et en ce qui nous concerne, le coût des
programmes des médicaments, ont augmenté de façon assez
spectaculaire au cours de la dernière décennie. Nous sommes
conscients aussi qu'en cette période de restrictions budgétaires,
il faut bien aller chercher des économies quelque part.
Mais, est-il bien nécessaire de suspendre des épées
de Damoclès au-dessus de la tête des professionnels et des
bénéficiaires, ainsi que le gouvernement se propose de le faire?
(14 h 15)
Que le gouvernement cherche à améliorer la gestion du
système québécois de santé, l'AQPP trouve cela
hautement souhaitable. Que le gouvernement privilégie, pour ce faire, la
voie législative et réglementaire, cela relève d'un choix
politique qui lui appartient et dont il est responsable devant la
population.
Nous ne saurions donc lui contester ce privilège, bien que nous
nous réservions le droit de critiquer, le moment venu, les mesures
spécifiques qui seront décidées en vertu des orientations
choisies.
L'article 4 du projet de loi indique la volonté bien
arrêtée du gouvernement de ramener le champ des ententes
négociées avec les organismes représentatifs de
professionnels de la santé aux seules conditions de travail.
Accepterions-nous cette réduction du champ de négociation que
nous aurions toutes les raisons d'être inquiets puisque par l'article 31
du projet, le gouvernement et le ministre, par leurs règlements,
décrets et arrêtés, à l'avenir d'ordre public,
pourraient unilatéralement modifier même nos conditions de
travail.
Que le gouvernement bâillonne ainsi les associations de
professionnels et qu'il nous enlève la possibilité de
négocier avec lui lorsque ses actions auront un impact sur nos
conditions de travail, cela est inacceptable.
On ne s'étonnera donc pas que l'Association
québécoise des pharmaciens propriétaires demande le
retrait de l'article 31 du projet de loi qui vise à rendre d'ordre
public la Loi sur l'assurance-maladie. C'est notre seule demande, mais on
comprendra qu'elle ne se prête à aucun compromis.
Mes collègues et moi-même sommes maintenant à la
disposition de la commission.
Le Président (M. Bordeleau): Merci. Des questions, M. le
ministre?
M. Johnson (Anjou): Oui. Merci, messieurs, de votre
mémoire. Je ne veux pas reprendre tout ce qu'on a évoqué
depuis trois jours au niveau des articles sur le pouvoir de décret, etc.
Je pense que les membres de la commission m'ont entendu le dire à peu
près dix fois et je ne pense pas qu'ils le supporteraient une
onzième fois, étant donné qu'on est à la fin de la
commission. J'aurais quelques questions sur le fond de votre
mémoire.
Vous représentez les pharmaciens propriétaires. On se
demanderait pourquoi vous êtes en relation avec l'État. Vous
êtes en relation avec l'État parce que, à un moment
donné, il y a un gouvernement -celui qui nous a
précédés, d'ailleurs - qui a instauré un programme
permettant que des citoyens, assistés sociaux, notamment, puissent
bénéficier de médicaments payés par la
collectivité. Cela a fait, je pense - à moins que vous ne me
fassiez une démonstration contraire, ce qui m'étonnerait un peu -
augmenter essentiellement votre chiffre d'affaires et vos revenus parce que,
s'il n'y avait pas eu ce programme de 150 000 000 $, cela ne se serait pas
traduit par 150 000 000 $ de consommation de médicaments dont à
peu près 50% sont afférents à des honoraires.
Pour regarder où on va et où on est, c'est toujours utile,
je trouve, de regarder d'où on vient. On vient d'une époque, il
n'y a pas si longtemps, où il n'y avait pas ce programme, où il
n'y avait pas 50 000 000 $ ou 75 000 000 $ qui s'en allaient dans vos
pharmacies, chez vos membres. En ce sens, vous comprendrez mes
réactions, à l'occasion, quand je vois certaines affiches, dans
certaines pharmacies ce temps-ci qui, au nom du bien commun et de
l'intérêt des citoyens, visent carrément à faire
oublier que vous avez 75 000 000 $ d'honoraires que vous n'aviez pas avant.
C'est dans cette perspective que je voudrais qu'on mette certains bémols
sur certaines de vos affirmations. Vous n'êtes pas dans un programme
universel et la seule raison pour laquelle vous êtes en relation avec
l'État est que l'État a consenti aux citoyens - c'est le
rôle de l'État de prendre cette décision, des
parlementaires et de l'Exécutif - un programme particulier qui
coûte 150 000 000 $ aux "payeurs de taxes" du Québec dont la
moitié s'en va en honoraires chez vous.
En ce sens-là, je me permettrai de vous dire que - vous pouvez
avoir votre opinion là-dessus, comme tout groupe de citoyens
intéressés - fondamentalement, c'est un ajout sur ce qui est
votre commerce. Je ne dis pas qu'il n'y a pas de contraintes, etc., mais c'est
un ajout en termes absolus. C'est toujours important de redéfinir les
choses, ce dont votre association ne semble pas avoir tenu compte
récemment dans certaines réactions à la médiane et
dans autre chose, mais, moi, je m'en suis rendu compte.
J'aurais une question sur les médicaments et la liste. Nous avons
entendu l'ordre hier nous dire que c'est vrai, 2000 médicaments,
c'était beaucoup, 4000, si on inclut les marques commerciales
différentes mais 2000 substances, c'était beaucoup, alors
qu'à certains endroits on s'en tire fort bien avec 600 ou 700. On a
entendu vos collègues, pharmaciens également, mais qui sont eux
pharmaciens d'établissements, qui travaillent dans un contexte clinique
où leur rapport clinique est plus fréquent, évidemment, un
peu par définition - c'est rare que les médecins vont dans les
pharmacies, ils sont à l'hôpital assez souvent - nous dire que
dans le fond, avec 600 ou 700 médicaments, ils considéraient que
c'est ce qui se fait dans les hôpitaux et que les gens ne sont pas
maltraités. Je voudrais peut-être vous entendre un petit peu sur
l'extension de cette liste et son importance.
Le Président (M. Bordeleau): Alors, M.
Lévesque.
M. Lévesque (André): Voici.
Premièrement, M. le ministre, cela me laisse un peu perplexe,
quand vous laissez entendre que le gouvernement, par ses programmes, fait
presque une faveur aux pharmaciens de leur permettre d'exister. Même si
cela ne fait pas 25 ans que je pratique la pharmacie, avant qu'on ait des
programmes à frais partagés par l'État, les pharmaciens
exerçaient leur profession et vivaient quand même assez
décemment.
C'est bien sûr que, quand le gouvernement est entré dans le
système et qu'il a couvert les médicaments pour les
bénéficiaires de l'aide sociale et les personnes
âgées, dans certaines régions spécialement cela a pu
accroître un certain volume d'ordonnances. Mais je n'aimerais pas qu'on
pose comme principe de départ que c'est une faveur qu'on a fait aux
pharmaciens quand l'État est entré dans le champ, parce que nous
aussi on rend un service. L'État nous paie pour un service qu'on rend
à ses privilégiés, comme une compagnie d'assurance les
paie pour ses assurés.
M. Johnson (Anjou): Cela m'apparaît important, je ne
prétends pas que le gouvernement vous fasse une faveur, je vous dis
juste que, s'il n'y avait pas ce programme, il y aurait moins d'honoraires
qui
vous seraient versés, c'est une addition. Vous me dites que les
pharmaciens avant ce programme vivaient fort bien, je n'en doute pas, tant
mieux, je vous dis juste qu'on a simplement ajouté à ce confort
des pharmaciens, et je pense qu'en termes de climat cela est important qu'on se
comprenne bien. Ce programme n'ayant pas le caractère universel d'autres
programmes dans notre système à l'égard d'autres types de
professionnels, c'est un ajout à vos commerces, c'est aussi simple que
cela. Encore une fois, je ne prétends pas que ce soit une faveur, il y a
un service que vous rendez. S'il n'y avait pas de services que vous rendiez, on
ne vous paierait pas des honoraires pour le faire. Je dis qu'en termes de
volume, on ne niera pas, j'espère, que ce programme a augmenté le
volume et le chiffre d'affaires de toutes les pharmacies du Québec.
C'est simplement une affaire de fait, ce n'est pas un commentaire.
M. Lévesque (André): De toute façon, M. le
ministre, je n'ai pas de chiffres pour prouver de combien l'apparition des
programmes de santé défrayés par le gouvernement a
augmenté le chiffre d'affaires des pharmaciens. C'est sûr que les
personnes âgées avant consommaient quand même des
médicaments même si cela ne leur était pas
remboursé. La preuve, c'est que dans le moment les médicaments
qui ne sont pas dans la liste, beaucoup de personnes âgées
continuent à se les payer elles-mêmes. Donc, on n'est pas capable
d'évaluer jusqu'à quel point la venue du système a
augmenté la masse monétaire des pharmaciens.
Pour ce qui est du point auquel vous avez fait allusion tout à
l'heure, à savoir le retrait de certains médicaments de la liste,
je pense que l'AQPP en tant que personne morale a le droit de s'impliquer
socialement au même titre que les autres syndicats.
Deuxièmement, nous avons mis sur pied un système
d'assistance-médicaments au Québec, dont je pense que non
seulement le gouvernement mais les citoyens eux-mêmes étaient
fiers et je trouve qu'il serait malheureux qu'au cours des années,
strictement pour des besoins budgétaires, on coupe dans la liste; un
jour, on va se réveiller avec une liste de deux pages. Est-ce qu'on
pourra encore défendre qu'on a un système
d'assistance-médicaments? J'en doute fort. Cela va?
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Johnson (Anjou): Sur le fond, j'aimerais vous entendre puisque
vous dites avoir une responsabilité sociale. Je n'en doute pas. Tout le
monde a le droit de s'exprimer. Je pense que votre association fait valoir
certains points de vue et c'est parfaitement votre droit, mais sur le fond, de
fait, il y a 2000 médicaments différents sur cette liste. Il y a
4000 marques différentes, alors que dans la plupart des pays, il y en a
500, 600 ou 700. Dans les établissements où les gens sont fort
bien traités, il y en a 700. Est-ce que pour vous, - après tout,
vous êtes des professionnels -est-ce que vous avez porté un
jugement sur cela ou si vous pensez que c'est...
M. Lévesque (André): Les médicaments que
vous avez retirés de la liste, je pense, vous les avez laissés
disponibles dans les établissements de santé et dans les centres
d'accueil, ce qui laisse entendre quand même que ce ne sont pas là
des médicaments complètement inutiles et que si des personnes
âgées dans des centres d'accueil ont droit à cette
médication, je ne vois pas pourquoi les personnes qui viennent dans nos
pharmacies, elles, n'y auraient pas droit ou celles qui demeurent à
domicile. Au fond, ce sont elles qui coûtent le moins cher à
l'État. Je ne vois pas pourquoi on les prive plus que celles qui
demeurent en centre d'accueil ou ailleurs.
M. Johnson (Anjou): Je pense que cela provient du
mécanisme. En établissement, les médicaments ont toujours
été gratuits. C'est comme cela que fonctionne le système
en vertu du régime instauré d'un bout à l'autre. Permettez
que je termine. Deuxièmement, on n'empêche pas les gens d'acheter
des laxatifs. S'ils veulent en acheter, ils peuvent en acheter, mais vous
n'aurez pas d'honoraires professionnels parce qu'ils vont l'acheter au
comptoir. C'est aussi simple que cela.
M. Lévesque (André): C'est une question de pouvoir
d'achat des bénéficiaires. On n'est pas capable d'évaluer
dans le moment quels sont les bénéficiaires qui auront les moyens
de se les payer, comme vous dites.
M. Johnson (Anjou): Ah bon! Cela me ramène à la
première affirmation que je faisais à ce moment-là quand
je dis que je présume que ce programme a augmenté de façon
considérable, d'une façon sûrement qui est sensible
à notre chiffre d'affaires, parce que vous dites: Si vous retirez ces
médicaments, les gens ne l'achèteront pas. Donc, je dois
présumer qu'avant le programme ils n'en achetaient pas non plus. S'ils
n'en achetaient pas avant le programme, est-ce que oui ou non cela a
augmenté vos chiffres d'affaires?
M. Lévesque (André): Je n'ai pas dit que les gens
ne les achèteront pas. J'ai dit que je ne pouvais pas évaluer
combien d'entre eux ont les moyens de les acheter. Il y a sûrement des
gens qui vont continuer à
se les payer pareil. C'est pour ça que je dis que pour nous cela
n'a pas été une bataille de gros sous parce que, possiblement, on
va continuer à vendre les mêmes médicaments aux gens. Dans
quelle proportion? Il y a ça, mais il y a sûrement des gens de
l'aide sociale dont les revenus sont trop bas et qui ne pourront pas, eux, se
les payer, mais je ne suis pas capable d'évaluer le pourcentage de ces
gens. Il y a sûrement beaucoup de personnes de 65 ans et plus qui, elles,
vont sûrement avoir les moyens de se les payer encore.
Le Président (M. Bordeleau): Merci. Mme la
députée de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Je remercie l'Association
québécoise des pharmaciens...
M. Larouche (Daniel): Un instant!
Le Président (M. Bordeleau): Je m'excuse. Un
complément de réponse ou...
M. Larouche: ... additionnel, si vous voulez, dans le cadre de ce
que le ministre...
Le Président (M. Bordeleau): Si vous voulez bien vous
identifier d'abord.
M. Larouche: Daniel Larouche. Je suis l'économiste.
M. le ministre a parlé d'augmentation de volume tantôt
à plusieurs reprises même et je pense que nul ne saurait contester
effectivement qu'il y a eu augmentation de volume. Après tout,
c'était justement un des objectifs de la mesure en question.
C'était d'accroître l'accessibilité et qui dit
accroissement d'accessibilité dit forcément que s'il y a un
problème de ce côté à l'origine dit forcément
accroissement de volume. Donc, il y a eu accroissement de volume, mais donc,
personne ne peut invoquer la surprise devant ce phénomène.
J'aimerais ajouter une autre remarque à cela. Finalement, il a
été assez peu question - s'il en a été question, si
on a pu voir cela dans le mémoire ici aujourd'hui - il n'a
été aucunement question du pouvoir du gouvernement d'allonger ou
de réduire la liste. En tout cas l'association ne fait aucune demande,
aucune recommandation là-dessus.
M. Johnson (Anjou): Très bien...
M. Larouche: L'association ne conteste pas ici aujourd'hui le
droit du gouvernement d'allonger ou de rétrécir la liste,
absolument pas.
M. Johnson (Anjou): Aujourd'hui? D'accord. Je veux dire, elle l'a
fait récemment à l'occasion de... Mais ça, c'est une autre
affaire. D'accord.
M. Larouche: C'était de l'information.
M. Johnson (Anjou): Ah bon! Très bien. C'est parce que
j'aime ça qu'on établisse bien clairement les rôles et ce
qu'on fait tous là-dedans. Ce que j'essaie de dire, c'est que votre
mémoire qui soulève une couple de questions importantes, je
pense, sur le plan juridique, n'explicite pas une chose; c'est que le programme
gouvernemental touche 14% de la population. Ce n'est pas un programme
universel. C'est absolument partiel et ça, je pense que ça change
la nature même de la relation qui existe entre les gens que vous
représentez comme association et l'État, contrairement à
ce qui se passe chez les médecins, par exemple. (14 h 30)
Cela m'apparaît assez fondamental, mais si cela était
marqué en lettres très claires au début, on pourrait
peut-être moduler beaucoup de choses qu'on retrouve dans votre
mémoire. C'est simplement un commentaire que je voulais qu'on fasse pour
les membres de la commission, qui peuvent être éclairés de
ma part, comme ils le sont pas vous et votre mémoire. C'est tout, c'est
simplement cela, je peux peut-être permettre à ma collègue
d'intervenir.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. le ministre.
M. Larouche: Je voudrais juste poser une petite question.
C'est...
Le Président (M. Bordeleau):
Normalement, ce sont les gens de la table qui posent des questions,
remarquez, je ne veux pas vous empêcher de parler mais...
M. Larouche: Je veux avoir un éclaircissement dans ce
cas-là.
Le Président (M. Bordeleau): Allez-y.
M. Larouche: En quoi est-ce que la nature universelle ou
partielle d'un programme change fondamentalement la relation entre
l'État et le professionnel qui rend les services?
M. Johnson (Anjou): Cela change au sens où votre
revendication est une revendication économique, que je reconnais. Vous
avez le droit d'avoir une revendication économique, c'est pour cela que
vous avez une association. Ce programme, j'en regarde l'évolution depuis
1977; il est passé de 71 000 000 $ à 148 000 000 $, c'est pas mal
plus vite que l'inflation. Je sais qu'il y a à peu près 50% de
cela qui s'en va sous forme d'honoraires aux professionnels que vous
représentez et j'affirme que votre revendication - puisque votre
mémoire est revendicateur à cet égard - doit
s'inscrire
dans la réalité, cette réalité. C'est celle
d'une évolution assez remarquable de ce programme qui touche 14% de la
population et qui émarge au budget de l'État pour tout
près de 150 000 000 $ à un rythme de progression qui l'a fait
doubler en moins de quatre ans. Il m'apparaît normal que ces choses
soient remises en perspective.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. le ministre.
Mme la députée de l'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Je voudrais
remercier l'association et je voudrais nous excuser auprès de ses
représentants pour le fait qu'on les ait fait attendre toute la
journée hier et qu'on les ait remis à aujourd'hui. Ils l'ont
accepté de bonne grâce, pour nous accommoder, parce qu'on aurait
probablement fini à 2 heures et demie au lieu de finir à une
heure et quart.
À tout événement, évidemment, tous les
professionnels qui sont venus ici devant nous et qui oeuvrent dans le secteur
privé, a priori, on se dit toujours, ou les gens semblent insinuer
qu'ils n'ont pas de conscience sociale. Je pense que le ministre - cela ne veut
pas dire que je suis d'accord avec tout ce qu'il y a dans votre mémoire
-est entré sur un terrain glissant. Quand M. Lévesque a fait
valoir la question de l'accessibilité, aux bénéficiaires
démunis, de certains médicaments, ce qu'il ne faut pas oublier,
M. le ministre - ce n'est peut-être pas vous qui en êtes
responsable - c'est qu'à un moment donné votre gouvernement, pour
des raisons qui étaient certainement, en partie, des raisons de
rentabilité électorale, a décidé d'ajouter, au
troisième tiers, des personnes âgées qui n'étaient
pas couvertes, qui ne recevaient pas la gratuité des médicaments,
et de les couvrir. Fort bien. Là-dessus, j'aimerais avoir une opinion,
plus tard, des pharmaciens. Il semble bien, selon les statistiques que l'on
obtient, que ce soit ce troisième tiers qui utilise le plus les
médicaments gratuits. Aujourd'hui, les pharmaciens viennent nous dire
que, dans un contexte économique difficile pour le gouvernement, on
décide de retirer juste à ce moment-ci une série de
médicaments qui ne sont peut-être pas les plus essentiels - il ne
s'agit pas d'antibiotiques, il ne s'agit pas de choses comme cela - mais qui,
quand même, sont retirés non pas uniquement à ceux qui
peuvent se les procurer, mais à la population qui avait accès
à la gratuité. Ils sont retirés à des
bénéficiaires qui, ou ne pourront pas se les payer ou, s'ils se
les paient, le feront au détriment d'autres choses qui leur seraient
tout autant essentielles. Il faut bien se rappeler que pour les
bénéficiaires de l'aide sociale ou les personnes
âgées qui ont des revenus très bas - là-dessus,
personne ne se chicanera - pour eux, qu'on n'ait gardé, par exemple,
aucun produit laxatif - apparemment, il y en avait une série qu'on a
éliminée totalement, alors que l'Ontario les donne encore
gratuitement à ces personnes âgées... Je sais que le
ministre va me rétorquer qu'on a une liste moins longue en Ontario, mais
ce n'est pas la question, car la question de la liste, je l'ai abordée
tout à l'heure avec les autres pharmaciens...
M. Johnson (Anjou): C'est fondamental.
Mme Lavoie-Roux: Oui, mais là, c'est un
dénominateur commun, si je comprends ce qu'un dénominateur commun
veut dire au plan d'une liste de médicaments qui ont été
enlevés. On n'entendra pas le personnel du réseau s'en plaindre
puisqu'il leur est encore accessible, me dit-on ou selon ce que j'ai cru
comprendre, alors que ceux qui n'y ont pas accès par le truchement du
réseau, c'est-à-dire les centres d'accueil, devront se les payer
eux-mêmes. Je pense qu'il y a là un problème réel.
Je ne me prononce pas à savoir si c'est la bonne liste ou si on aurait
dû en enlever moins ou plus, mais je pense qu'il y a une question
fondamentale qui se pose et qu'on n'a jamais posée directement au
gouvernement, parce que l'occasion ne s'est pas présentée.
Évidemment, il ne faut pas toujours nécessairement voir
dans ces questions des intérêts spécifiquement
économiques ou financiers de la part des personnes qui les posent. Moi,
je la pose et je n'ai pas d'intérêt économique, je peux
vous l'assurer, dans cette question. Ceci étant dit, j'aimerais que vous
m'explicitiez un peu l'article 5. Vous dites: On introduit, par le truchement
de l'article 5, un ticket modérateur. Je pense que cela a
été signalé par le groupe qui vous a
précédés, et on ne pouvait certainement pas l'accuser
d'avoir des intérêts économiques.
Mais pour l'article ... saisir, ce qui lui a été
ajouté, et vous reliez cela à l'entente, c'est que dans
l'entente... Écoutez, par le pouvoir, à l'article 31, que le
ministre se donne de réviser une entente, il pourrait modifier en cours
d'entente ce qui aurait été convenu à l'article 4. Est-ce
que vous pouvez expliciter ce sujet? Est-ce que j'ai bien compris cela? C'est
l'argument en général sur 31. Si l'article 31 était
enlevé, disons, ou modifié, est-ce que vous auriez encore cette
même préoccupation par rapport à l'ajout qui a
été fait ou à la modification qui a été
apportée dans l'article 2? Je veux essayer de bien comprendre.
Le Président (M. Bordeleau): M.
Lévesque.
M. Lévesque (André): Disons que pour nous, c'est
vraiment l'article 3 qui est la
pierre d'achoppement. Parce qu'une fois l'article 31 enlevé, il
nous sera loisible de négocier avec le gouvernement.
Mme Lavoie-Roux: Ah bon! Alors, c'est dans le sens du temporaire
que ceci pourrait avoir en fonction de l'article 31. C'est la seule
chose...
M. Lévesque (André): C'est parce que l'article 31
vient éliminer...
Mme Lavoie-Roux: Intervenir en cours d'entente.
M. Lévesque (André): Oui, il vient rendre caduques
toutes nos ententes, en fait.
Mme Lavoie-Roux: Alors, s'il était modifié à
ce moment, cette objection ne résisterait pas...
M. Lévesque (André): On pourrait s'accommoder des
autres dispositions du projet de loi, si l'article 31 n'était pas
là parce qu'au moins, on aurait la possibilité de négocier
des ententes, de se prémunir dans ces ententes contre les effets de
certains articles et d'avoir une certaine survie d'une entente à
l'autre. Tandis qu'avec l'article 31 on est dans une insécurité
totale, parce que le ministre et le gouvernement se gardent le pouvoir
d'intervenir à n'importe quel moment par différentes mesures,
soit au niveau de la liste, soit au niveau de la fixation des prix maximaux,
soit au niveau des frais modérateurs que le pharmacien pourra percevoir,
soit de la catégorie de bénéficiaires qui pourra en
être exonérée, sur les modes de perception de ces frais,
etc. Alors, on se trouve dans une complète insécurité au
cours de nos ententes, avec l'article 31.
Mme Lavoie-Roux: C'est vraiment l'article 2 et l'article 5 que
vous vouliez, le 2 relié à l'article 31, porter à notre
attention.
Il y a une question que j'aimerais vous poser. C'est la seule, je
finirai ensuite par un commentaire. Je me préoccupe quand même -
je pense que tout le monde s'en préoccupe - de la question de la
surconsommation des médicaments. Je voudrais savoir comment, comme
association, volontairement évidemment, vous prenez des mesures pour
l'éducation du public dans ce sens. C'est vrai que des pharmaciens moins
consciencieux pourraient avoir uniquement intérêt à en
vendre le plus possible. Il reste que vous avez aussi une responsabilité
sociale, d'abord, vis-à-vis des coûts et, ensuite - oublions ceux
pour qui l'État paie, parlons de ceux qui paient - vis-à-vis de
l'état général de la santé des citoyens. Je pense
que dans votre formation, il y a certainement cette dimension.
Est-ce que, au niveau de l'éducation, vous prenez des mesures ou
des moyens pour remplir cette dimension sociale de votre profession?
Le Président (M. Bordeleau): M.
Lévesque.
M. Lévesque (André): Disons qu'au cours des
dernières années l'AQPP a endossé à 100% toutes les
actions qui ont été entreprises par l'Ordre des pharmaciens pour
améliorer la qualité de services des pharmaciens.
M. Johnson (Anjou): Pardon?
M. Lévesque (André): J'ai dit que toutes les
actions...
M. Johnson (Anjou): Rapprochez le micro le plus possible.
Merci.
M. Lévesque (André): ... qui ont été
entreprises par l'Ordre des pharmaciens dans les dernières
années, qui a pour mission de protéger la santé publique,
comme vous le savez ont été endossées à 100% par
l'AQPP. Nous avons même, lors de nos congrès, tenu des
journées d'étude, nous avons même envoyé à
nos membres, à nos frais, des cassettes sur différentes
médications, sur des bêta-bloquants, sur toutes sortes de choses;
nous avons même débordé notre champ d'activité,
à un moment donné, pour que les pharmaciens soient mieux
renseignés et pour qu'ils donnent des services pharmaceutiques de
meilleure qualité.
Mme Lavoie-Roux: Oui. Maintenant, est-ce que je me trompe en
disant - je ne sais pas si c'était l'initiative de quelques pharmaciens
ou d'un certain groupe - que dans certaines pharmacies, quand on vous vend un
médicament ou qu'on vous remplit une prescription, attachées
à la prescription - je me demandais de qui venait l'initiative -il y a
des indications précises - non pas les recommandations "deux fois par
jour, le matin ou le soir" - quant aux effets de cette médication, ce
qui est une forme éducative en soi?
M. Lévesque (André): L'Association des pharmaciens
propriétaires met à la disposition de ses membres ce qu'on
appelle des feuillets d'information à remettre aux patients lors de la
délivrance de l'ordonnance. C'est même l'AQPP qui est à
l'origine de ce genre de dépliants. C'est nous qui avons initié
la mesure pour que les pharmaciens informent les patients des
contre-indications de différents médicaments, la façon
optimale de les absorber. C'est nous qui avons été initiateurs de
ces dépliants que
vous retrouvez dans les pharmacies et que les pharmaciens remettent
à leurs patients lors de l'exécution de l'ordonnance. C'est l'une
de nos préoccupations.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce que ceux qui s'en servent sont assez
nombreux?
M. Lévesque (André): Je crois que c'est de plus en
plus répandu. La pharmacie a beaucoup évolué ces
dernières années et dans le bon sens.
Mme Lavoie-Roux: Je vous remercie.
M. Lévesque (André): Je vous remercie, madame.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Johnson (Anjou): J'ai deux questions; d'abord, une assez
générale. Le fond de votre mémoire semble vouloir nous
amener à changer quelque chose. Peut-être que cela explique le
début de nos échanges. Le fond de votre mémoire semble
vouloir rattacher le montant de revenu des professionnels que vous êtes,
dans le cadre de l'application d'un programme qui couvre 14% de la population,
à une négociation sur le prix des médicaments. Vous parlez
beaucoup du prix des médicaments dans votre mémoire et vous
dites: Là, le gouvernement pourrait modifier le prix plafond alors que
cela a toujours été sur les honoraires professionnels qu'on a
fait jouer cela. Est-ce que je dois comprendre que vous voulez... Ce qui est
très différent de ce qui a toujours existé jusqu'à
maintenant.
M. Lévesque (André): Je pourrais l'expliquer, mais
je pense que notre économiste va le faire d'une façon encore plus
savante.
Le Président (M. Bordeleau): M.
Larouche.
M. Larouche: Je ne pense pas qu'il ait été question
de négocier le prix du médicament dans le mémoire. Reste
un fait, le service que rend le pharmacien est attaché à un bien,
ce qui complique un peu la chose. Lorsque l'honoraire est
négocié, il est, bien sûr, négocié en se
basant sur un ensemble de données qui sont censées
refléter les coûts de fonctionnement d'une pharmacie et les frais
généraux d'une pharmacie. Des manipulations à la liste
pourraient, tout comme des changements dans les méthodes de fixation des
prix, avoir un impact sur les pratiques du pharmacien, que ce soit au niveau de
ses méthodes administratives, que ce soit au niveau de ses
approvisionnements et de ses politiques d'inventaire. (14 h 45)
Que voulez-vous? Un pharmacien, tout professionnel qu'il soit, est pris
avec des contraintes de type commercial ou des préoccupations de type
commercial de par sa gestion. Cela change donc les paramètres qui
servent de base à la négociation d'honoraires. Donc, sans changer
la valeur nominale de l'honoraire, les modifications à la liste peuvent
changer tout ce qui a servi de base à la négociation d'honoraires
et, ainsi, modifier l'honoraire réel net perçu par le
pharmacien.
Je vous donne un exemple très concret qui est justement la
médiane qui doit entrer en vigueur le 1er janvier. On a calculé
à l'association que les coûts engendrés par les
modifications à la pratique rendues nécessaires par l'adoption de
la médiane seraient d'environ 0,24 $ par ordonnance
délivrée dans le cadre du programme. Vous allez me dire: C'est
peut-être moins, c'est peut-être plus. Vous allez peut-être
me dire que ce n'est pas vrai. D'ailleurs, on a entrepris des
négociations avec les représentants du ministère
là-dessus, parce que maintenant la loi et l'entente nous le
permettent.
Peut-être que ce n'est pas vrai. Peut-être que c'est 0,15 $.
Peut-être que c'est 0,24 $, mais il reste une chose: il y a
matière à discussion là-dessus. Il y a donc matière
à négociation là-dessus. Or, ce que les amendements
proposés à la loi provoqueraient, c'est que, matière
à discussion ou non, il n'y aurait plus matière à
négociation. Donc, c'est dans ce sens qu'il y a un lien à
établir entre la gestion de la liste des médicaments, la gestion
des modalités qui s'y rattachent et les conditions de travail du
pharmacien, notamment l'honoraire professionnel. C'est dans ce sens-là
et c'est ça, le sujet fondamental des préoccupations du
pharmacien. Il n'est donc pas vraiment question de négocier la liste des
médicaments, quoique, éventuellement, on pourrait explorer
d'autres façons.
M. Johnson (Anjou): Je reviens à votre texte sur deux
choses. Vous dites à la page 4: "Ainsi, la rémunération du
pharmacien dans le cadre des programmes gouvernementaux est en partie
négociée et en partie fixée unilatéralement par le
gouvernement". Le prix des médicaments ne fait pas partie de la
rémunération. Je comprends mal.
M. Larouche: Si l'industrie du médicament et l'industrie
de distribution du médicament étaient structurées de sorte
que chaque pharmacien, quelles que soient ses habitudes d'achat, quel que soit
son volume d'affaires, réussisse à se procurer tel
médicament pour un prix donné et que ce
prix soit identique au prix qu'on trouve dans la liste, on ne pourrait
pas parler de rémunération du pharmacien. C'est le monde
idéal qui ne souffre aucune imperfection. Maintenant, il y a des
imperfections. Autour des prix de la liste, dans la réalité
quotidienne du pharmacien, il existe des variations. Certains pharmaciens sont
avantagés, d'autres moins. D'autres seront désavantagés
dans certains cas. Cela introduit au grand dam de tout le monde, d'ailleurs -
parce que j'entends souvent des commentaires du conseil consultatif de
pharmacologie, à la régie ou au ministère et du
côté des pharmaciens c'est aussi dérangeant, si je peux
m'exprimer ainsi - des possibilités de rémunération
additionnelle sur le médicament comme tel. C'est un fait. Je pense que
cela n'a jamais été nié par les pharmaciens. Cela offre un
élément supplémentaire d'insécurité chez le
pharmacien compte tenu du système.
M. Johnson (Anjou): Je vais revenir là-dessus, parce que
c'est assez fondamental, je pense. Je relève dans votre mémoire
beaucoup de choses qui ont trait à cela. C'est une approche qui nous
surprend quand vous dites notamment: "L'article 2 du projet de loi qui vise
à modifier l'article 4 de la loi donnerait au ministre le pouvoir non
seulement de dresser la liste des médicaments, mais aussi de
déterminer la méthode de fixation des prix." Je vous le dis, il
l'a toujours eu. La loi 27 vient simplement baliser ça. Et il y a toute
une notion derrière ce que vous venez de dire, un peu comme si la
relation qui existe entre le gouvernement et les membres de votre association,
pouvait prendre le caractère d'une subvention à la dimension
commerciale de l'opération. La notion du prix et de l'achat en volume,
etc... J'espère que le gouvernement ne viendra pas expliquer aux
pharmaciens qui font du commerce comment lui pourrait avoir un meilleur "deal"
avec telle compagnie, etc. Cela ne regarde pas le gouvernement. On ne veut pas
subventionner les opérations commerciales. La relation qui existe entre
le gouvernement et vos membres, c'est de payer pour les gestes, au nom du fait
qu'ils sont des professionnels dans le cadre d'un programme d'accès pour
14% de la population, à certains médicaments. C'est tout cela,
l'esprit dont je parle dans votre mémoire, et qui
précédait les remarques préliminaires que j'ai faites tout
à l'heure à la suite de votre exposé.
Il y a un programme qui ne représente qu'une fraction de la
population, qui ne représente, vous nous l'avez dit, qu'une fraction de
votre activité, et dans lequel nous intervenons et nous reconnaissons le
titre de professionnels que vous avez, la nécessité de payer les
actes professionnels posés par vos membres, alors que la philosophie qui
sous-tend cela, c'est que ça devient une politique presque de
rémunération à l'égard d'une "entreprise" ou de
subvention à l'égard d'une entreprise. Je pense que cela devrait
relever de la SDI et non pas de la RAMQ. C'est vraiment au titre que vous
êtes des professionnels qui intervenez, encore une fois, dans un
processus qui n'implique qu'une partie de la population pour une partie de vos
activités. Cela me semble compliquer considérablement la relation
entre l'État et les pharmaciens si on se met à faire entrer en
ligne de compte tout le processus de fixation des prix au niveau des
compagnies. Je vous dirai d'ailleurs que je pense qu'il y a une partie de cela
qui serait peut-être inconstitutionnelle dans la mesure où on
pourrait entrer dans des détails qui nous amènent dans le
commerce interprovincial. On n'a pas l'intention de faire cela. En tout cas, je
trouve que l'approche est complexe; je ne pense pas qu'on règle cela ici
à la table, et j'ai l'impression que nos gens vont être
obligés de se parler un peu dans d'autres forums. Je veux simplement
vous rappeler cela.
Finalement sur une question de fond, qui m'apparaît fondamentale,
il y a un article que vous soulevez, l'application de l'article 31 de l'article
5. On dit à l'article 5, il ne s'agit pas d'introduire au-delà du
ticket modérateur qui était déjà prévu dans
le chapitre 48 des lois de 71, il s'agit simplement d'asseoir, à
l'article 5, ce qui permet de mieux encadrer l'arrêté en conseil
qui touche la médiane. On l'a fait en vertu du ticket modérateur
du chapitre 48 et on précise que ce n'est pas un ticket
modérateur, ce sont des frais additionnels. Je pense qu'il faut
être plus limpide.
Mais ce qu'on dit à l'article 5 c'est, par addition à la
fin du quatrième alinéa qui suit: "Cependant un pharmacien peut
exiger la différence entre le prix du médicament indiqué
à la liste et le montant dont la régie assume le paiement dans
les cas, condition et circonstance prescrits."
Vous voudriez voir là, "doit exiger la différence", si je
comprends bien. Parce que vous parliez tout à l'heure du gouvernement
qui va faire peser l'odieux sur le professionnel dans chaque cas individuel,
d'expliquer... J'aimerais vous entendre clairement sur ça. C'est quoi la
différence entre "peut" et "doit".
Le Président (M. Bordeleau): Un instant. Je veux juste
faire part à tous les membres de la commission qu'il y a une commission
qui va siéger à 15 heures. Donc, je demanderais à tout le
monde d'être le plus concis possible. Mais monsieur...
M. Trudel (Claude): Bien M. le Président. Oui, Claude
Trudel, conseiller
juridique de l'association. Pour répondre à la question
qui est posée, je pense qu'en fait, dans un premier temps, c'est vrai
que l'article 5 du projet de loi était nécessaire à
compter du moment où le gouvernement n'assume, à ce
moment-là, qu'une partie. Par exemple, disons dans le système du
prix médian, pour certains médicaments, la régie n'assume
qu'une partie du coût. C'est bien sûr qu'à ce
moment-là c'était nécessaire qu'on ajoute un alinéa
ou une phrase pour permettre aux pharmaciens de réclamer la
différence, dans les cas évidemment où c'est permis. Parce
que si on ne l'avait pas ajouté, à cause du texte actuel, il est
bien dit qu'un professionnel de la santé ne peut pas réclamer
plus que ce qui est prévu dans une entente. Parfait. Je pense qu'il faut
quand même lire l'article en question, avec également, le pouvoir
de réglementation qui est accordé à l'article 23 du projet
qui remplace le paragraphe f actuel par un nouveau paragraphe f et qui donne
des pouvoirs de réglementation pour non seulement fixer le montant des
frais payables, mais fixer également par règlement les
modalités de perception et les cas, également,
d'exonération. Je pense que c'est un pouvoir quand même assez
large. De toute façon, quand on parle du "peut" ou du "doit", on peut
bien, et ça, je pense que ça peut être...
Évidemment, on pourrait discuter longtemps, mais l'association peut bien
dire pour un certain nombre de raisons que s'il y a un supplément de
prix, le pharmacien, tous les pharmaciens pourraient être tenus ou
devraient être tenus de le réclamer. Cela peut être pour
empêcher, à ce moment-là, une certaine discrimination entre
des pharmacies de différentes tailles et aussi pour empêcher que
le bénéficiaire s'en prenne, à toutes fins utiles,
concernant le ticket modérateur non pas à l'État qui l'a
décidé, mais au pharmacien qui, lui, à ce moment-là
sera dans la situation... Certains pharmaciens diront: Moi, je ne le
réclame pas, à toutes fins utiles, le ticket modérateur et
d'autres devront le réclamer sinon, ils auront des problèmes
financiers.
En négociation, on décide, à ce moment-là,
d'écrire une règle et de dire: Lorsqu'il y aura des frais
modérateurs qui seront fixés par l'État - et l'État
fixera des frais modérateurs ou non, cela ne nous regarde pas - lorsque
l'État décidera à ce moment-là de fixer des frais
modérateurs, tous les pharmaciens devront les réclamer comme
condition de paiement par la régie.
M. Johnson (Anjou): ...
M. Trudel: Seulement pour compléter: On avait une
règle semblable qui avait été négociée en
1972 avec le gouvernement, qui s'est toujours répétée
d'une entente à l'autre et sans qu'on ne nous consulte, sans qu'on nous
dise rien, on sort un règlement qui vient dans le fond, aujourd'hui,
détruire le principe même de cette règle 13 qui avait
été négociée.
Le Président (M. Bordeleau): Merci. M. le ministre, si
vous voulez finir, j'ai une question de Mme la députée de
Johnson.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, j'ai pris bonne note
de cela, je pense que c'est un débat intéressant qui
s'amorçait, mais on en voit les tenants et aboutissants avec
l'exposé de M. Trudel. Nous aurons l'occasion, je pense, en cours de
route, d'en reparler, mais comme cette salle doit servir pour une autre
commission parlementaire dans exactement une minute, je pense que nous allons
malheureusement être obligés de mettre fin à nos
exposés.
Le Président (M. Bordeleau): Mme la députée
de Johnson.
Mme Juneau: J'avais une toute petite question.
Le Président (M. Bordeleau): Allez-y.
Mme Juneau: C'est parce que Mme la députée de
L'Acadie mentionnait tout à l'heure les laxatifs. J'aurais voulu avoir
une petite précision là-dessus, parce que j'ai su qu'ils avaient
été enlevés de la liste. Certains médicaments, par
exemple, le Metamucil ou quelque chose du genre, ne sont pas indispensables
à la vie. À ce que j'ai su, le médicament se vendrait
environ 3,60 $ et les frais professionnels des pharmaciens seraient de 3 $.
Est-ce exact qu'une personne pourrait prendre, peut-être, par
année, au maximum une bouteille par mois, ce qui équivaudrait
à 43,20 $ et qui coûterait à l'État 36 $ pour les
frais professionnels? Et, si c'est un bénéficiaire de l'aide
sociale, en fin de compte, cela coûte 79,20 $. Je trouve que cela
coûte très cher pour dire que ce n'est vraiment pas un
médicament qui est indispensable et qui ne peut pas se le payer... Je ne
sais pas, il me semble toujours. J'aimerais que vous me disiez si cela est
exact.
M. Lévesque (André): Disons, quand vous parlez de
3,60 $, que cela est le prix coûtant du Metamucil facturé à
la Régie de l'assurance-maladie. Est-ce exact?
Mme Juneau: Je n'ai pas compris, je m'excuse.
M. Lévesque (André): J'ai dit: Quand vous parlez de
3,60 $, cela est le prix coûtant du Metamucil facturé à la
Régie de l'assurance-maladie. D'accord? Là-dessus, c'est bien
sûr, il y a des honoraires négociés
de 3 $ qui sont ajoutés. Ceci fait 6,60 $ par mois, si je ne
m'abuse, pour un patient qui en prend une bouteille par mois.
Supposons qu'on dit que le pharmacien vend le Metamucil au comptoir, il
va sûrement se garder une marge de profits qui ne peut pas être en
bas de 30%, parce qu'en bas de cela, il n'y a pas de pharmacies rentables.
Alors, il va sûrement le vendre autour de 5 $, 5,25 $ ou quelque chose du
genre. La différence n'est pas aussi énorme que celle que vous
mentionnez. (15 heures)
De toute façon, nous, les pharmaciens, je peux vous dire qu'avant
le retrait des médicaments de la liste, nous n'avons pas
été consultés. Il est fort possible que, si nous l'avions
été, nous aurions eu des solutions à proposer au
gouvernement. Peut-être des méthodes autres de dispenser ces
médicaments-là, peut-être des façons
différentes de calculer l'honoraire en fonction de ces
médicaments-là, mais nous n'avons pas été
consultés, nous avons été tout simplement placés
devant un état de fait. Et, quand vous parlez d'honoraires, qu'un
honoraire de 3 $ vous paraît élevé pour dispenser un flacon
de Metamucil, je dois vous dire que, lorsqu'on vend cent Tagamet qui nous
coûtent 25,50 $, c'est aussi 3 $. Alors, il faut bien voir l'honoraire du
pharmacien selon une moyenne.
Le Président (M. Bordeleau): Alors, je remercie les
représentants de l'Association québécoise des pharmaciens
propriétaires.
M. Johnson (Anjou): Pas de remarques finales... J'en aurais eu,
mais si vous voulez qu'on s'en dispense...
Le Président (M. Bordeleau): On va reporter cela en
deuxième lecture. Mme la députée de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Les remarques finales que je ferais seraient
malicieuses, alors je vais m'en dispenser. Mais malicieux, ce n'est pas
mauvais.
Le Président (M. Bordeleau): Alors, je voudrais remercier
les membres de la commission parlementaire des affaires sociales et je
demanderais au rapporteur de faire rapport à l'Assemblée que la
commission des affaires sociales ajourne ses travaux sine die.
(Fin de la séance à 15 h 02)