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Version finale

36e législature, 2e session
(22 mars 2001 au 12 mars 2003)

Le mardi 20 novembre 2001 - Vol. 37 N° 20

Consultations particulières sur le projet de loi n° 26 - Loi modifiant la Loi sur la Régie du logement et le Code civil


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Table des matières

Journal des débats

(Neuf heures trente-huit minutes)

Le Président (M. Vallières): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission de l'aménagement du territoire entreprend ses travaux. Le mandat de la commission est de tenir des consultations particulières sur le projet de loi n° 26, Loi modifiant la Loi sur la Régie du logement et le Code civil.

M. le secrétaire, est-ce que nous avons des changements à annoncer au niveau des membres de la commission?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Ouimet (Marquette) est remplacé par Mme Houda-Pepin (La Pinière).

Le Président (M. Vallières): Très bien. Ceci étant fait, quand on regarde l'horaire de la journée, ce matin, après les remarques préliminaires de Mme la ministre et de la représentante, porte-parole de l'opposition officielle, nous allons passer aux auditions auprès de la Commission des droits de la personne et de la jeunesse de même que de la Corporation des propriétaires immobiliers du Québec inc., ce qui devrait nous amener à suspendre nos travaux à midi.

Remarques préliminaires

Alors, sans plus tarder, nous allons procéder aux remarques préliminaires de Mme la ministre pour les 15 prochaines minutes ou environ. Mme la ministre.

Mme Louise Harel

Mme Harel: Merci, M. le Président. Alors, mesdames et messieurs, mes chers collègues membres de cette commission parlementaire. Mme, Me Desjardins, présidente de la Régie du logement du Québec.

Mme Desjardins (France): Bonjour.

n (9 h 40) n

Mme Harel: Nous allons débuter ce matin une consultation importante. Nous allons entendre diverses associations et regroupements qui vont souvent nous présenter des points de vue contraires. D'abord, je pense qu'il faut les remercier d'avoir accepté notre invitation et aussi les remercier de la contribution qu'ils feront à nos travaux pour enrichir nos travaux. Nous tenons cette commission au moment même où nous allons avoir à compléter l'adoption en deuxième lecture du projet de loi et au moment où nous pourrons également envisager, lors de l'étude article par article du projet de loi, de l'améliorer à la lumière de ce que nous entendrons durant les trois prochains jours.

C'est bien évident que les personnes qui s'adresseront à cette commission ne présenteront pas la même vision des choses, mais nous sommes ici pour écouter leurs opinions et leurs recommandations dans le respect des uns et des autres. J'insiste sur le fait que nous avons à faire une recherche d'équilibre et à protéger les intérêts de tous, tout en trouvant des solutions adaptées à l'évolution du marché locatif tel que nous le connaissons maintenant.

J'aimerais également rappeler, M. le Président, les modifications qui apparaissent dans le projet de loi n° 26 et qui modifient la législation en matière de louage résidentiel de manière à accroître l'efficacité de la Régie du logement. Cette efficacité qui résulte... ces changements résultent, plutôt, en un encadrement du processus de conciliation avant les audiences qui permet d'octroyer une compétence en matière d'offre de location, qui attribue de nouvelles compétences au greffier spécial et crée la fonction de greffier et qui permet de traiter certaines demandes sur dossier.

Alors, c'est un projet de loi qui propose des modifications au Code civil afin d'encadrer les droits et obligations en précisant les renseignements personnels nécessaires exigibles tant au moment de l'offre que lors de la conclusion du bail, en interdisant au locateur d'exiger une somme d'argent d'un candidat locataire, en réduisant le délai maximum pour donner un avis de modification de bail au locataire et en ouvrant un recours en fixation de loyer au locataire en certaines circonstances. Je pense que cette dernière disposition est particulièrement intéressante dans le contexte où nous allons assister à des baisses de comptes de taxes, notamment dans les grandes villes regroupées.

Alors, cette pièce législative découle de l'évolution de l'environnement du marché locatif au cours des dernières années. Souhaitons qu'elle constitue la première phase d'une réforme plus globale en matière de location résidentielle, notre objectif étant de pouvoir publier un livre blanc concernant la mission de la Régie du logement dans les mois qui viendront, sur toutes les autres problématiques et dimensions de sa mission.

La fonction première de la Régie est celle d'un tribunal qui décide des litiges en matière de bail résidentiel. L'année passée, 67 000 causes ont été introduites devant ce tribunal. La Régie a cependant comme objectif d'accroître son efficacité en adoptant des mesures qui clarifient son champ de compétence et qui permettent de réduire les délais d'attente lors d'une audience.

En vertu de la loi actuelle, la Régie du logement est chargée de favoriser la conciliation entre propriétaire et locataire. Or, ce mandat n'a pas été exercé de façon uniforme depuis sa création et, à ce jour, la Régie du logement ne dispose pas de service de conciliation au sens actuel du terme. Alors, la constitution d'un tel service offrira aux parties l'occasion de se rencontrer en présence d'un conciliateur et possiblement de régler leurs différends tout en conservant leur droit à une audience. Nous jugeons essentiel d'encadrer ce nouveau service de conciliation par des mesures législatives appropriées.

D'autre part, je pense nécessaire d'expliquer, même brièvement, l'importance de la procédure de décision sur dossier. Les demandes produites par les locateurs pour réclamer la résiliation du bail et le recouvrement du loyer qui leur est dû représentent plus de la moitié, soit 53 %, de toutes les audiences devant la Régie du logement. Les statistiques démontrent aussi que 75 % de ces audiences ont lieu en l'absence du locataire. Compte tenu de ce volume important, une nouvelle procédure de décision sur dossier est introduite lorsqu'il n'y a aucune contestation de la part du locataire. Une procédure de contestation simple est également prévue afin de permettre au locataire, le cas échéant, de produire une défense. Les décisions non contestées qui seront rendues par des greffiers permettront aux régisseurs de consacrer plus de temps à l'audition d'autres causes civiles et, par conséquent, de réduire le délai d'attente.

Je crois important de souligner que les objectifs poursuivis par l'encadrement de la conciliation et par l'introduction de la procédure de décision sur dossier sont évidemment... ont comme effet de désengorger la Régie du logement, mais... Quoique les causes reliées au non-paiement de loyer représentent la moitié du volume des demandes, comme je le mentionnais, leur traitement n'exige que 25 % du temps d'audience-régisseur à cause du grand nombre d'entre elles qui ne sont pas contestées. S'il est vrai que la conciliation... D'autre part, il est faux de penser que la conciliation exige moins de temps. La conciliation aurait l'avantage de réduire le temps requis pour une audience éventuelle qui aurait autrement exigé plusieurs jours, mais une séance de conciliation bien faite en vue de rapprocher les parties à long terme dans un conflit aussi émotif que celui des relations propriétaire-locataire nécessite aussi souvent beaucoup de temps, souvent plus de temps que si on avait procédé à l'audience de la cause.

Alors, les renseignements sur la question des greffiers spéciaux... non, sur la question des renseignements personnels plutôt, M. le Président. Alors, c'est une question qui est plutôt sensible, n'est-ce pas? Nous savons les intérêts des un farouchement opposés à ceux des autres et tout tourne autour de cette question de la collecte des renseignements personnels. La distance qui oppose les propriétaire et locataire s'est bien dégagée, là, lorsque les associations de propriétaires ont remis en cause la légitimité même d'une rencontre de consultation que la Commission d'accès à l'information, la Commission des droits de la personne et la Régie du logement avaient tenté de tenir dans le cadre de leur mandat en 1999. On a bien vu à ce moment-là qu'il y avait vraiment des points de vue presque irréconciliables entre associations représentant les locateurs et les locataires. Alors, voilà pourquoi le gouvernement propose en matière de recherche de logement des mesures pour encadrer la collecte des renseignements personnels exigibles par le locateur au candidat locataire.

Il y a une certaine confusion qui persiste autour de cette question de collecte des renseignements personnels, et je voudrais donner les précisions suivantes. La collecte des renseignements personnels, à l'heure actuelle, elle est permise, cette collecte de renseignements personnels nécessaire à l'objet du contrat, là, au louage... est donc permise en vertu de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé. Donc, cette loi permet à l'heure actuelle la collecte des renseignements personnels dits nécessaires et permet aussi une enquête de crédit avec le consentement du locataire. Alors, évidemment, nous n'introduisons pas une collecte de renseignements personnels, elle était déjà en vigueur, et nous n'introduirons pas la nécessité d'un consentement du locataire, c'était déjà requis en vertu de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé.

Ce que nous faisons, c'est que nous circonscrivons les renseignements jugés... considérés nécessaires. Puisque la loi est évasive sur l'interprétation du mot «nécessaires», ce que nous faisons avec le dépôt du projet de loi, c'est que nous voulons mettre fin à certains abus en déterminant quels renseignements personnels il sera permis de demander. Alors, le projet de loi ne vise qu'à circonscrire les renseignements nécessaires qui permettent au propriétaire de réaliser son enquête de crédit et d'obtenir des informations sur le comportement d'un candidat locataire lors de la conclusion du bail. Le projet de loi ne vise pas à mettre fin à un droit ou à créer un nouveau droit mais à encadrer l'exercice d'un droit déjà existant. Je pense que c'est là un élément extrêmement important parce qu'on a entendu les interprétations les plus fantaisistes et des plus contradictoires sur ce qu'est l'intention du gouvernement.

n (9 h 50) n

D'une part, certains se sont imaginé que l'on introduisait une collecte de renseignements qui n'existait pas encore, alors que cette collecte de renseignements nécessaires pour les fins du contrat était déjà prévue dans la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé. Et cependant, nous n'abolissons pas, comme d'autres ont prétendu, nous n'abolissons pas la possibilité de réaliser une enquête de crédit, nous n'abolissons pas la possibilité de le faire avec le consentement du locataire... ou du demandeur plutôt, comme c'est le cas présentement. Ce que nous faisons, c'est que nous circonscrivons les renseignements qui pourront être reçus. Essentiellement, c'est un encadrement d'un droit déjà existant. Et puis, un autre élément auquel le projet de loi s'adresse, c'est de contrer la possibilité d'exiger des frais d'un candidat locataire lors de l'offre de location. On a vu apparaître, M. le Président, ce qu'on considère comme un abus, et le projet de loi va interdire au locateur d'exiger des frais pour ouvrir un dossier de location de la part d'un demandeur de logement.

D'autre part, la compétence de la Régie en matière de prélocation, qui n'était pas clairement attribuée. Alors, le projet de loi propose d'attribuer à la Régie du logement une compétence nouvelle relative à une offre de location. Alors, la Régie pourra entendre les litiges concernant des actes juridiques qui sont préalables à la conclusion du bail. Cette mesure correspond à l'esprit des orientations qui ont présidé à la naissance de la Régie du logement, a fait l'objet de revendications par de nombreux groupes, organismes et parlementaires préoccupés par les droits des locataires. Elle permettra aussi d'unifier les actions des tribunaux puis elle s'ajuste au contexte d'un taux de vacance très faible qui fait que des pratiques qu'on n'avait jamais vues jusqu'à maintenant se sont multipliées en prélocation. Alors, il nous est apparu nécessaire de sanctionner le non-respect des ordonnances et des accords de conciliation par des sanctions civiles telles que des dommages et intérêts plutôt que d'imposer le seul recours à l'outrage au tribunal, recours peu accessible pour le citoyen.

Et puis, M. le Président, je voudrais aussi signaler au passage que le projet de loi accroît la juridiction des greffiers spéciaux de manière à doter la Régie des meilleurs outils pour administrer le tribunal et alléger la mise au rôle des demandes.

Également, le projet de loi propose de réduire la période de reconduction des baux de six à cinq mois avant la fin d'un bail d'un an et plus. Alors, les données sur la fixation du loyer... Vous savez que les données sur la fixation du loyer sont publiées maintenant annuellement, en janvier, et, comme elles le sont en janvier, les parties au bail seront mieux à même de conclure des ententes qui pourront les satisfaire en ayant en main toutes les informations utiles à leur négociation. Alors, ces données sur la fixation des loyers sont publiées par la Régie du logement annuellement et portent à la fois sur le coût de l'énergie, sur... en fait, il s'agit de taux de fixation qui ne sont pas coercitifs, mais qui ont une extrême influence dans les relations, dans les négociations, dans les discussions propriétaire-locataire.

Ensuite, je termine en vous disant ceci. À l'heure actuelle, il n'appartient qu'au locateur de demander à la Régie du logement de fixer le prix du loyer. Le gouvernement juge nécessaire de corriger une forme d'inéquité en introduisant une mesure qui offrira au locataire la possibilité d'exercer un recours en fixation de loyer en cas de diminution de taxes et des coûts de l'énergie utilisée pour le chauffage du logement.

Alors, voilà décrites brièvement les dispositions du projet de loi n° 26 sur lesquelles nous entendrons respectueusement les participants et participantes. J'insiste pour rappeler que les intérêts divergents en matière de relations propriétaire-locataire nous amènent à rechercher un équilibre qui doit guider nos travaux, d'autant plus que nous avons la responsabilité d'assurer l'efficience, l'accessibilité de tous à la Régie du logement et de doter cette Régie des outils les plus adéquats pour faire face aux défis de notre époque. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Vallières): Merci, Mme la ministre. Maintenant, pour les remarques préliminaires de l'opposition officielle, Mme la députée de La Pinière.

Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, tout d'abord, j'aimerais saluer la ministre et mes collègues qui participent, et vous-même, M. le Président, et tout le personnel qui nous accompagne, qui participent à cette consultation particulière sur le projet de loi n° 26, Loi modifiant la Loi sur la Régie du logement et le Code civil.

C'est avec beaucoup de plaisir qu'aujourd'hui je participe au nom de l'opposition officielle à cette consultation qui nous semble bien importante sur un projet de loi largement controversé par certaines de ses dispositions. J'ai eu l'occasion, M. le Président, à l'étude de principe, d'exposer le point de vue de l'opposition sur chacune de ces dispositions et je tiens à souligner que, nous, d'entrée de jeu, à l'analyse, on a réclamé une consultation publique afin de permettre aux organismes et aux groupes qui sont directement concernés, qui représentent à la fois les propriétaires et les locataires ainsi que les experts, les institutions également qui ont des mandats de l'Assemblée nationale, notamment la Commission des droits de la personne, la Commission d'accès à l'information, et bien d'autres, qu'ils puissent se faire entendre. Et dans ce sens, je me réjouis, M. le Président, de voir que finalement cette consultation a lieu. Les acteurs de même que les experts que nous entendrons dans les prochaines minutes, voire dans les prochains jours, pourront éclairer les membres de cette commission sur les conséquences de la proposition que le gouvernement nous fait aujourd'hui par le projet de loi n° 26.

En effet, nous avons devant nous une pièce législative qui a été introduite le 15 juin dernier par un gouvernement qui a de nombreuses difficultés dans ses démarches préalables à bien comprendre les situations complexes qu'il cherche à résoudre et parfois, en voulant les résoudre, il les rend encore plus complexes. Nous partageons l'objectif du gouvernement de vouloir rendre la Régie du logement plus efficace, de la rendre plus accessible, de la rendre plus proche des citoyens, mais je ne suis pas convaincue, M. le Président, que certaines dispositions de ce projet de loi n° 26 vont justement dans le sens de l'atteinte de cet objectif.

Ici, nous sommes dans le domaine du marché du logement locatif, principalement celui du secteur privé. Or, ce secteur d'activité est très important d'un point de vue social, mais aussi et surtout d'un point de vue économique. Le parc de logements locatifs au Québec est constitué de plus de 200 000 propriétaires qui louent leurs logements à plus de 1 million de ménages locataires. Sans ce parc de logements locatifs du secteur privé, les programmes de logements sociaux du gouvernement ne pourront pas fonctionner correctement. Il faut reconnaître et respecter l'apport considérable du secteur privé à la poursuite d'objectifs sociaux légitimes dans le secteur du logement. Ce droit au logement ne pourrait s'exercer sans la participation du secteur privé.

Et je me réjouis, ce matin, d'ailleurs d'entendre la ministre parler de recherche d'équilibre. Je constate chez elle une certaine évolution et j'ose espérer qu'entre le moment où nous avons abordé l'étude du principe et aujourd'hui, et après la consultation surtout, cette recherche d'équilibre ne soit pas qu'un voeu pieux, mais que finalement ce soit réellement un objectif que nous pourrions atteindre à l'issue de nos travaux. Le parc québécois de logements a été construit par des hommes et des femmes qui ont travaillé très fort, M. le Président, qui ont fait des sacrifices pour investir leurs économies dans le logement. Et ce sont bien souvent des travailleurs dans les différentes professions, dans les différents métiers, j'en ai rencontré, moi, quelques-uns qui m'ont expliqué comment ils sont devenus propriétaires, et la plupart d'entre eux sont des petits propriétaires qui finalement ont mis les économies de leur vie dans le logement.

Au cours des dernières années, une crise du logement s'est dessinée, particulièrement durant les cinq dernières années. La ministre refuse même de reconnaître qu'il y a une crise. On fait même de la sémantique en parlant de pénurie de logements. Mais le fait est réel, nous sommes dans une situation où il y a une crise du logement, concentrée, bien entendu, principalement dans les grands centres urbains que sont Montréal, Hull et Québec. Mais, au-delà, il y a... cette crise se manifeste aussi dans différentes régions du Québec. Et il suffit de se donner la peine d'aller à la rencontre des groupes qui oeuvrent au niveau de ces clientèles-là pour réaliser qu'effectivement cette crise est réelle. Elle est d'autant plus réelle que, au 1er juillet dernier, on s'est ramassé avec des familles dans la rue. Il fallait, M. le Président, intervenir et intervenir rapidement.

n (10 heures) n

Donc, les locataires à la recherche d'un logement adéquat pour loger leur famille sont les premières victimes de cette crise, et ce gouvernement ne voit pas venir ce qui se passe sur le terrain, M. le Président, et surtout refuse de reconnaître la crise. Or, si on refuse de reconnaître un problème, c'est évident que les solutions qu'on va y apporter, M. le Président, vont être inadéquates. Les familles à faibles revenus, les femmes chefs de famille monoparentale, les nouveaux arrivants, les gens issus des minorités visibles sont parmi les premières victimes de cette crise, et également les familles qui ont des enfants, parce qu'il y a une rareté de logements pour les familles dites nombreuses, nombreuses dans le sens d'avoir deux ou trois enfants.

Dans ce contexte de crise, M. le Président, la situation entre les propriétaires et les locataires devient de plus en plus tendue. Plusieurs groupes de défense des droits des locataires dénoncent des abus de la part de certains propriétaires qui sont de plus en plus exigeants dans leur recherche de locataires. Quels sont ces abus? Qui sont les victimes de ces abus, M. le Président? Il faut mettre un visage humain sur cette réalité. Qu'est-ce qu'on peut considérer comme une pratique abusive ou discriminatoire? Je me réjouis de voir que la Commission des droits de la personne va se faire entendre, et cette institution a beaucoup d'expérience dans le domaine de la discrimination en matière de logement. Quel est l'avis des propriétaires sur cette question? C'est très important. Il ne suffit pas juste de les pointer du doigt, il ne suffit pas juste de dire que les grands méchants loups sont les propriétaires, mais il est important de savoir comment, eux, ils vivent cette crise-là qui déborde et qui fait que les relations deviennent de plus en plus tendues les locataires et les propriétaires.

Quel est l'avis des associations qui représentent les locataires sur cette question de discrimination et de crise de logement? Quel est l'avis des experts également qui se préoccupent de l'équité et de la justice sociale? Est-ce que le projet de loi n° 26 consacre des droits nouveaux ou limite certains droits pour les locataires ou les candidats locataires? J'écoutais l'intervention de la ministre tantôt qui dit: Ça ne crée pas de droits nouveaux, nous voulons juste circonscrire un droit existant. Mais, si on relit le discours qu'elle a fait à l'étude de principe, à l'étape du principe, ce n'est pas du tout ce qui a été dit à ce moment-là. Alors, est-ce qu'on doit comprendre qu'il y a une évolution dans le discours de la ministre ou est-ce qu'il y a des contradictions? J'ose espérer que ces points-là seraient clarifiés. Est-ce que la Régie du logement, qui est victime actuellement d'une remontée spectaculaire du volume de demandes, aura les moyens nécessaires pour agir dans un champ de compétence élargi parce que le projet de loi n° 26 vient élargir le champ de compétence de la Régie? Est-ce que le projet de loi enlève des droits aux propriétaires? Est-ce que le projet de loi empêchera les propriétaires d'exercer leurs responsabilités correctement non seulement pour eux-mêmes, mais également pour et au nom des locataires qui habitent déjà dans leurs immeubles? C'est une question qui me semble très pertinente.

Là encore, il n'y a pas... Il y a différentes interprétations, parce que, si on écoute les premiers intéressés, ils disent: Oui, ce projet de loi limite nos droits, nous limite notre capacité de faire des enquêtes. Et la ministre dit: Non, pas du tout, ce n'est pas le cas. On sait qu'il y a une cause qui est actuellement devant les tribunaux et qui porte précisément sur cette question-là, à savoir: Quelles sont les informations qu'un propriétaire peut exiger d'un candidat locataire avant même la conclusion du bail pour fins d'enquête de solvabilité? Alors, la ministre introduit un projet de loi alors qu'il y a une cause qui est devant les tribunaux et dont on attend incessamment la décision.

Est-ce que ce projet de loi n° 26, tel que libellé, va vraiment permettre d'éviter les abus qui sont dénoncés par les locataires? Est-ce que le projet de loi n° 26 va améliorer la situation et permettre des relations plus harmonieuses et plus consensuelles entre les principaux acteurs, et principalement les propriétaires et les locataires? Et, pour nous, dans l'opposition officielle, c'est extrêmement important de trouver le point d'équilibre et améliorer les relations entre les propriétaires et les locataires. Or, à cause de la crise et à cause des conséquences de cette crise, de ce qu'elle a généré comme conflits, les relations entre les propriétaires et les locataires sont devenues de plus en plus tendues.

Donc, nous sommes, de notre côté, à la recherche d'un juste équilibre entre les principaux acteurs de ce secteur d'activité, parce que nous croyons qu'il faut travailler sur les convergences et bâtir sur ce qui nous apparaît clairement comme une communauté d'intérêts. Parce qu'il ne faut pas l'oublier, un propriétaire a tout intérêt à avoir des bons locataires et les locataires ont tout intérêt à faire affaire avant avec des bons propriétaires.

Si ce gouvernement veut réellement combattre la crise du logement et agir de façon responsable, il doit combattre également l'image négative qui circule dans la société à l'égard de ce secteur d'activité et favoriser l'investissement responsable dans ce domaine. Si la ministre fait fausse route avec le projet de loi n° 26, elle va empirer la crise du logement et nuire aux milliers de familles qui cherchent à se loger convenablement. Si la ministre fait fausse route, au lieu de rapprocher les parties, elle risque d'élargir encore davantage le fossé qui sépare actuellement les locataires et les propriétaires. Elle risque également de décourager encore davantage les Québécois et les Québécoises d'investir dans ce secteur-clé de l'économie en aggravant et en multipliant les conflits entre les locataires et les candidats locateurs et les propriétaires.

La mesure de conciliation qu'elle veut consacrer dans le projet de loi n° 26 ne réussira pas à déjudiciariser les rapports entre propriétaires et les locataires et les conflits risquent de se multiplier, M. le Président. L'opposition ne la suivra pas nécessairement dans cette voie parce que les mises en chantier dans ce secteur ne suffisent plus à répondre à la demande, parce que la pénurie de logements locatifs fait des victimes, notamment dans la région de Montréal, comme je l'ai dit, dans la région de Québec et dans l'Outaouais.

Et on l'a vu, M. le Président, en juillet dernier, cette consultation nous permettra d'échanger et de tenter de faire la lumière sur ces questions en écoutant les points de vue des principaux acteurs de l'industrie du logement locatif. Qu'est-ce qu'un candidat locataire peut donner comme information à un futur propriétaire? Est-ce que le projet de loi n° 26 empêchera, dans la période précédant la conclusion d'un bail et au moment de la signature d'un bail, l'échange de consentements quant à l'accès à l'information et la protection de renseignements personnels? Est-ce que c'est une bonne idée d'encadrer par loi, de façon stricte, l'échange d'information entre aspirant locataire et futur propriétaire? Qu'est-ce qu'un propriétaire peut demander comme information à un futur locataire pour assurer non seulement le paiement de son loyer, mais également la présence dans son immeuble d'un locataire qui agira correctement, de façon responsable?

Le Président (M. Vallières): Il faudrait conclure, Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: Alors, je terminerai, M. le Président, en vous disant que nous abordons l'étude de ce projet de loi avec beaucoup d'espoir, l'espoir effectivement que la ministre puisse être à l'écoute de ce que les groupes vont nous dire, et qu'à l'issue de nos travaux on puisse bonifier le projet de loi de façon à le rendre acceptable aux différentes parties et surtout qu'il puisse être dans l'intérêt public. Merci, M. le Président.

Auditions

Le Président (M. Vallières): Merci beaucoup, Mme la députée de La Pinière. Alors, ceci nous amène maintenant à procéder à la première audition, en vous rappelant que les gens qui viennent nous rencontrer disposent de 20 minutes de présentation et d'environ 40 minutes d'échange avec les parlementaires de cette commission.

Alors, je prierais donc maintenant les représentants de la Commission des droits de la personne et de la jeunesse de bien vouloir prendre siège, s'approcher.

Bien. Alors, tout le monde aura reconnu quelqu'un qui n'a presque pas besoin de présentation dans nos locaux, en cette assemblée, M. Roger Lefebvre, qui est vice-président de la Commission des droits de la personne et de la jeunesse. Alors, M. Lefebvre, on vous prierait de présenter les gens qui vous accompagnent et de procéder avec votre mémoire.

Commission des droits de la personne
et des droits de la jeunesse (CDPDJ)

M. Lefebvre (Roger): Alors, M. le Président, je veux vous saluer et saluer Mme la ministre, les ex-collègues. Et, à ma gauche et à ma droite, M. le Président, je voudrais vous présenter Me Claire Bernard, qui est la responsable de la rédaction du document qu'on a déposé à l'attention de vos collègues, et, à ma droite, Me Hélène Tessier. Alors, Me Bernard est à la division de la recherche à la Commission des droits de la personne et, à ma gauche, Me Hélène Tessier qui est directrice du contentieux à la Commission des droits de la personne.

n (10 h 10) n

M. le Président, la Commission des droits de la personne a la responsabilité et la mission de s'assurer que chaque projet de loi déposé à l'Assemblée nationale respecte les règles, les principes que l'on retrouve dans la Charte des droits et libertés. La Commission des droits de la personne s'acquitte de cette tâche de sa propre initiative ou encore sur invitation du législateur. L'Assemblée nationale et la commission de l'aménagement du territoire a demandé à la Commission des droits de la personne son avis sur le projet de loi n° 26. Or, je voudrais, M. le Président, vous remercier et remercier vos collègues de cette invitation.

M. le Président, la Charte des droits garantit à chaque personne le droit à l'égalité en matière de logement, garantit également la protection contre la discrimination et le harcèlement. Je ferai, M. le Président, des commentaires d'ordre général et Mme Bernard, Me Bernard précisera certains éléments de ma présentation. Et Me Tessier également est à la disposition de vos collègues pour répondre à toute question suite à notre présentation.

M. le Président, à la page 1 et 2 de notre document... On retrouve aux pages 1 et 2 des remarques générales sur l'expertise de la Commission en matière de logement et également sur l'expertise du Tribunal des droits de la personne. À la page 3, M. le Président, il y a une analyse... commence l'analyse spécifique des dispositions du projet de loi n° 26. Je n'ai pas à insister, c'est connu des parlementaires que l'expertise en matière de discrimination, c'est au Tribunal des droits de la personne qu'on la retrouve et à la Commission des droits de la personne, particulièrement en matière de logement. Le projet de loi n° 26, qui est soumis à l'attention et à l'étude des parlementaires, est un projet de loi important, M. le Président. Je voudrais, à partir de maintenant, vous faire connaître nos réflexions, nos suggestions sur certains éléments très précis du projet de loi.

Dans un premier temps, la Commission indique à l'ensemble des parlementaires qu'elle est d'accord avec l'encadrement législatif de la cueillette des renseignements personnels. Et la position de la Commission, dans ce sens-là, elle est connue depuis longtemps, on l'a déjà suggérée dans d'autres circonstances, M. le Président. Le projet de loi, et c'est ce qu'on retrouve à l'article 21, introduit l'encadrement de la cueillette des renseignements personnels; on est d'accord, sauf sur le renseignement «date de naissance», avant ou lors de la signature du bail. Alors, la Commission inscrit sa réserve sur la cueillette de ce renseignement, soit la date de naissance du postulant locataire. Me Bernard vous précisera tout à l'heure, M. le Président, les raisons pour lesquelles la Commission a des réserves sur cette disposition. Le projet de loi n° 26 ne règle pas le problème de la promesse de location. On aurait suggéré... On aurait souhaité et on suggère, M. le Président, au législateur de se pencher sur cette question-là. L'article 21, dans son dernier paragraphe, indique que le locateur ne peut exiger d'un candidat locataire le versement d'une somme d'argent à quelque titre que ce soit. La Commission est d'accord avec cette suggestion, M. le Président.

À la page 6 du mémoire de la Commission, on traite des demandes de recouvrement de loyer et de résiliation de bail. La Commission des droits, M. le Président, a des inquiétudes sur l'ensemble de cette disposition-là et considère de façon très claire que le délai de 10 jours dont on parle est beaucoup trop court, pourrait placer le locataire contre qui on aurait dirigé une procédure dans une situation telle qu'il serait incapable de faire les démarches lui permettant de se défendre de façon adéquate et correctement.

On sait que le droit de se faire entendre, c'est un principe fondamental, et il faut permettre au locataire en toute circonstance, entre autres en lui donnant le délai raisonnable, nécessaire pour pouvoir faire les démarches nécessaires, M. le Président, pour qu'il puisse soumettre une défense pleine et entière.

Le projet de loi ? à la page 8 du mémoire, on en parle, M. le Président ? le projet de loi, à l'article 6 ? et on traite de l'article 6 à la page 8 de notre mémoire ? propose d'élargir le champ de compétence de la Régie. Je l'ai dit tout à l'heure en introduction, l'expertise en matière de discrimination dans le logement, c'est au Tribunal des droits de la personne qu'on la retrouve et à la Commission des droits de la personne. Le projet de loi, s'il était adopté tel que rédigé ? je parle de l'article 6, M. le Président ? donnerait une compétence exclusive à la Régie du logement pour tout acte préalable à la signature du bail.

La Commission est en désaccord avec cette proposition qui apparaît dans le projet de loi. Cette proposition, M. le Président, survient alors que la compétence du Tribunal des droits de la personne et de la Commission des droits de la personne, à tort, est attaquée devant les tribunaux. Je dis «à tort» parce que, à plusieurs reprises, la compétence en toute matière du Tribunal des droits de la personne, en toute matière évidemment qui relève de sa responsabilité telle que décrite dans la Charte des droits, autant la compétence du Tribunal des droits de la personne que de la Commission elle-même, ont été maintenues par les tribunaux au cours des dernières années. La Commission demande donc que l'élargissement de la compétence de la Régie n'empiète d'aucune façon sur la compétence du Tribunal des droits de la personne et sur la compétence de la Commission des droits de la personne.

M. le Président, en conclusion, très rapidement, la Commission considère que le projet de loi propose des dispositions qui sont souhaitables, avec lesquelles la Commission est en accord. Toutefois, très rapidement, on a des réserves très sérieuses sur, quant à la cueillette des renseignements personnels, la date de naissance du locataire ou du locataire postulant. Les promesses de location doivent faire l'objet d'une interdiction ou d'une réglementation limitant la possibilité de s'engager dans une seule promesse de location à la fois, et ce, tant pour l'aspirant locataire que pour le locateur. Et, M. le Président, la contestation des demandes de recouvrement de loyer quant aux délais sont insuffisamment longs pour permettre... trop courts, pour permettre aux locataires, comme je l'ai indiqué tout à l'heure, d'offrir une défense, s'il y a lieu, pleine et entière.

n (10 h 20) n

Et je souhaiterais... La Commission souhaite, on l'a indiqué tout à l'heure, que toute ambiguïté, toute confusion possible quant à des compétences données, des compétences additionnelles que l'on donnerait à la Régie au détriment du Tribunal des droits de la personne et de la Commission des droits de la personne, M. le Président, que cette ambiguïté soit corrigée. Et Me Bernard et Me Tessier et d'autres experts à la Commission... C'est ce que laisse entendre le projet de loi n° 26, il y a de l'ambiguïté, il y a de l'inquiétude quant à des compétences qui seraient enlevées au Tribunal des droits de la personne et à la Commission au profit de la Régie. Et nous sommes convaincus que, si c'était le cas, ça ne servirait pas la cause qui est essentiellement la suivante à la Commission: de protéger le locateur sans nécessairement, évidemment, attaquer le propriétaire ou l'association des propriétaires. La responsabilité de la Commission, c'est de faire en sorte que les principes que l'on retrouve dans la Charte soient respectés de façon correcte et objective. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Vallières): Merci, M. Lefebvre.

M. Lefebvre (Roger): Je vous demanderais, M. le Président, si vous permettez... Me Bernard préciserait certains éléments que j'ai soulevés.

Le Président (M. Vallières): Très bien. Alors, Me Bernard.

Mme Bernard (Claire): Sur le premier point, en ce qui concerne l'encadrement de la collecte de renseignements personnels, globalement, la Commission accueille favorablement cette modification parce qu'elle a observé au cours des années que la multitude de questions qui ont trait à des demandes de renseignements personnels favorise des actes discriminatoires de la part des locateurs, principalement des refus discriminatoires. Et, en dehors de ça, parce que ces demandes représentent des atteintes au droit au respect de la vie privée des locataires éventuels et des locataires une fois qu'ils concluent le bail. Donc, elle accueille le fait que ça soit encadré parce qu'elle a constaté que c'est effectivement par voie législative qu'on pouvait régler cette question des renseignements qu'on peut ou non donner. Elle avait tenté d'établir d'autres types de consensus, et ça n'a pas marché.

D'autre part, elle a effectivement observé que les recours que prévoit la Loi sur la protection des renseignements dans le domaine privé, les recours actuels ne sont pas efficaces, prennent beaucoup trop temps, et, dans la période de temps, quand on recherche un appartement, on a besoin d'un recours, et ce que fait la loi, c'est qu'elle donne, entre autres, un recours pour... Donc, d'une part, elle cristallise les renseignements qui peuvent être demandés; d'autre part, elle donne un recours additionnel en dommages et intérêts punitifs. Par contre, elle s'oppose effectivement à la question de la date de naissance parce que c'est un renseignement qu'elle considère qui n'est pas nécessaire pour choisir un locataire ou pour la conclusion du bail, alors que tous les autres renseignements: le nom du locateur, le nom et l'adresse du locataire, sont des renseignements nécessaires et à la sélection, et à la conclusion du bail, et parce que ces informations sont généralement utilisées pour donner accès au dossier de crédit.

Et la Commission a pu observer, à travers les demandes, les plaintes en discrimination, que l'information qu'il y a dans le dossier de crédit fournit toutes sortes d'informations sur l'état de crédit de la personne, mais qui ne sont pas nécessairement reliées à son statut de crédit, par rapport à son crédit envers ses anciens locateurs. Et ce qui est important pour un locateur, ce qui est nécessaire pour un locateur, c'est de connaître son comportement de payeur, c'est de connaître comment il a respecté les baux antérieurs qu'il a conclus. Dans ce sens-là, c'est pour ça qu'on reconnaît que c'est nécessaire d'avoir le nom du locateur antérieur, mais les autres informations qui sont dans le dossier de crédit favorisent des refus discriminatoires. Le fait que la personne ne paye pas sa carte de crédit n'est pas un élément nécessaire pour un locateur. Ce que lui doit établir, c'est: Est-ce que le locataire va payer son loyer?

Bon. Sur les promesses de location, je pense que c'était assez clair que... On voit qu'avec ces engagements préalables les locataires, surtout dans la situation actuelle, se retrouvent avec plusieurs engagements potentiels et... Donc, c'est évidemment à leur détriment de s'engager, alors on demande soit de l'interdire, soit d'encadrer, en disant: Il faut aussi que le locateur s'engage, lui, de la même façon que ça se fait par exemple dans les achats de... d'immeubles. Excusez-moi.

Troisièmement, pourquoi on salue l'interdiction d'exiger des sommes d'argent? C'est que, là aussi, on voyait les effets discriminatoires pour les locataires éventuels qui ont une condition sociale qui est plus défavorisée. En demandant des sommes d'argent pour étudier le dossier de crédit ou quand on demande un dépôt préalable, évidemment on exclut les gens qui ont moins d'argent et ça a un effet dissuasif sur certaines personnes dans leur recherche de logement.

Quant au mécanisme de contestation, ce qu'il faut souligner, c'est que, la contestation écrite, c'est une nouvelle procédure qu'on introduit, puisque actuellement, devant la Régie, toutes les demandes, qu'elles soient de la part du locateur ou du locataire, peuvent être contestées verbalement et que le locataire, par exemple, dans la situation... la résiliation du bail, reçoit un avis d'audition et peut toujours venir contester la demande. En imposant une contestation écrite avec un délai très court, parce que c'est un délai de signification à partir du moment où la demande est envoyée, en demandant donc qu'il y ait contestation, c'est-à-dire comparution aussi par un avocat, donc recherche entre autres d'un mandat d'aide juridique et compréhension de la situation, on donne très peu de temps au locataire qui, s'il ne conteste pas, va être pratiquement forclos de pouvoir contester la demande. Pourquoi on dit «pratiquement»? C'est vrai que le projet de loi dit qu'il peut toujours contester même verbalement avant le jugement, mais, puisqu'il ne recevra pas d'avis d'audition, il va pratiquement ne pas être au courant de quand est-ce qu'il va y avoir audition, quand est-ce qu'il va y avoir décision, parce que, ce qu'on est en train d'introduire, c'est une procédure ex parte et une procédure sur dossier, et ce serait le seul cas où on introduirait cette procédure, et les conséquences de cette procédure, c'est l'éviction de la personne et de sa famille du logement

Donc, non seulement on demande que le délai soit rallongé pour qu'il puisse adéquatement permettre à la personne de se défendre et d'être représentée par avocat si elle le choisit, on demande aussi que le mécanisme soit plus simple, comme on voit des mécanismes dans d'autres types de procédures. Par exemple, que ce soit simplement un formulaire à cocher à partir du moment où elle désire contester. Et on veut aussi s'assurer que la personne effectivement comprenne l'importance de la signification et qu'il n'y ait pas des problèmes dans la signification, et donc que l'avis soit envoyé par la Régie plutôt que par le propriétaire. De même qu'on introduit qu'une fois que la personne conteste par écrit, le locataire conteste, le locataire renvoie cette contestation à la Régie et c'est la Régie qui avise le locateur ? donc, on demande... ? puisqu'on vient formaliser la même formalité pour le début de la procédure.

Finalement, on a aussi accueilli favorablement deux mesures qui affectent le régime de contrôle des loyers: c'est la réduction du six mois à cinq mois dans le délai maximal et le fait que le locataire puisse. lui aussi, maintenant demander une réduction du loyer, parce que ce sont aussi des mesures qui peuvent favoriser les familles qui sont à revenus plus faibles. Et finalement aussi, ce que la Commission tenait à dire, c'est que ce projet de loi n'est pas suffisant et qu'il faut revenir... il faut lier ces modifications à une politique plus large et du logement et à une politique qui soit liée aussi au dossier de la pauvreté. Parce que, si on se retrouve dans des situations de crise aussi, ces situations de crise, elles affectent ? on le sait très bien ? majoritairement des gens qui ont une condition sociale défavorisée, et donc il faut regarder globalement cette situation, effectivement pas à penser que c'est juste devant la Régie du logement que cette situation va se régler. Alors, on est prêts à répondre à vos questions. Je vous remercie.

Le Président (M. Vallières): Très bien. Merci. Alors, nous allons maintenant passer aux interventions des membres de la commission. Mme la ministre.

Mme Harel: Alors, merci, M. le Président. Je souhaite bienvenue à M. Lefebvre ? je pense que c'est la première fois que je l'appelle par son nom de famille; auparavant, c'était par sa fonction de député ? et à Mes Bernard et Tessier. Bon. Peut-être la première chose, Me Bernard, je crois. Vous avez, à la Commission des droits de la personne, certainement dû vous réjouir de l'annonce que l'on retrouve dans le budget de la ministre des Finances, de 13 500 nouveaux logements et d'un investissement de 500 millions de dollars au cours des prochaines années, dont un peu plus de 355 millions pour les programmes de rénovation et de construction de logements pour familles en difficulté ou personnes plus démunies, et aussi ce nouveau programme conjoint que nous discutons avec le gouvernement fédéral pour offrir du logement abordable aux familles à revenus modestes. Alors, c'est là un effort extraordinaire.

Il faut comprendre que le Québec a été la seule de toutes les provinces canadiennes à poursuivre son action énergique en matière de logement social dans le cadre du programme AccèsLogis et du programme Revitalisation des vieux quartiers, alors que, depuis le retrait unilatéral du gouvernement fédéral, en 1994, toutes les autres provinces ont cessé d'investir, y compris le fédéral, dans le logement social, coopératif, communautaire. Alors, nous allons continuer, mais avec des moyens accrus, et c'est, vous le comprenez bien, la ministre responsable de l'Habitation qui s'en réjouit aussi, et certainement tous les collègues, membres de cette commission, y compris la porte-parole de l'opposition.

n (10 h 30) n

Alors, revenons à votre mémoire. Évidemment, il a fallu, pour nous, faire la réconciliation entre l'avis que nous avions reçu de la Commission, le 15 mai dernier, et celui que vous nous avez présenté la semaine passée. Vous êtes conscients qu'il y a deux points de vue, ce qui m'amène à penser que les choses ne sont pas si évidentes, parce que c'est la Commission des droits de la personne, elle-même, comme l'écrivait son président, M. Claude Filion, en date du 15 mai, au Secrétaire général associé à la coordination des comités ministériels, à qui on avait demandé un avis, et qui disait: «La Commission a par ailleurs signalé le caractère très serré des délais de contestation des demandes de recouvrement de loyer ou de résiliation de bail. Elle constate avec satisfaction que la période a été effectivement étendue à 10 jours, ainsi qu'elle l'avait proposé.»

Alors, je comprends que, le 15 mai, la Commission propose une période de 10 jours dans le contexte des demandes de recouvrement de loyer ou de résiliation, mais que, aujourd'hui, devant nous, vous nous dites: Ce délai maintenant est insuffisant. Donc, il y a un point de vue. Je veux juste noter que, si la Commission peut changer d'idée, vous vous rendez compte à quel point il n'y a pas d'évidence, si vous voulez, dans ces matières. Donc, on peut évoluer. Alors, je constate que vous avez évolué sur cette question et j'aimerais savoir quel est le délai que vous jugeriez raisonnable? Vous nous disiez que cinq jours étaient insuffisants, 10 jours vous apparaissaient satisfaisants. Quel est le délai maintenant que vous jugez raisonnable? Ça, c'est ma première question.

La seconde ? je vais en poser juste deux puis je reviendrai parce que j'en ai d'autres ? êtes-vous pour ou contre le fait qu'un propriétaire puisse réaliser une enquête de crédit avec consentement du locataire? Ça, c'est la première chose. Parce que vous nous parlez de date de naissance. Dans l'avis que nous avions reçu en mai, au moment de l'élaboration du projet de loi, la Commission dit ceci, elle s'est montrée très favorable à l'encadrement de la collecte des renseignements lors de la sollicitation du logement. Bon. Là, je comprends que tout tourne autour de ça. La date de naissance, c'est une façon d'obtenir une enquête de crédit avec le consentement du locataire. Actuellement, il y a des choses sur lesquelles on s'entend bien. Vous nous avez dit dans votre mémoire ? et ça, je l'apprécie; c'est à la page 4; je pense qu'on peut partir de là, on a un point de départ intéressant, en tout cas ? vous nous avez dit que «la Commission est parvenue à la conclusion que c'est par voie législative que des solutions devraient être apportées à la problématique de la cueillette de renseignements personnels.» On s'entend là-dessus.

Donc, la Loi adoptée en 1993 sur la protection des renseignements personnels... Étiez-vous le ministre responsable à ce moment-là, M. Lefebvre? Étiez-vous le ministre responsable de l'adoption de cette Loi sur les renseignements personnels dans le secteur privé?

M. Lefebvre (Roger): Non.

Mme Harel: Bien, en tout cas, cette loi-là est insuffisante. Alors, vous nous dites: Il faut donc qu'il y ait des mesures législatives qui soient introduites. Vous nous dites ça à la page 4 de votre actuel mémoire. Donc, des mesures législatives, «des solutions devraient être apportées à la problématique de la cueillette des renseignements personnels». D'accord. Bon. Précisons lesquelles, circonscrivons, encadrons. Mais, la première question, ça ne peut pas... On ne peut pas tourner autour du pot. Est-ce que vous êtes d'accord ou pas d'accord à ce qu'il y ait possibilité pour un propriétaire de faire une enquête, de réaliser une enquête de crédit avec le consentement du locataire, comme c'est possible actuellement en vertu de la Loi sur les renseignements personnels dans le secteur privé?

Le Président (M. Vallières): Très bien. M. le président.

M. Lefebvre (Roger): Dans un premier temps, la Commission veut rappeler à l'attention de Mme la ministre et de ses collègues que la responsabilité de la Commission des droits, sa mission, c'est de s'assurer que les locataires ne subissent pas de discrimination. On pense, entre autres, aux locataires bénéficiaires d'aide sociale. On pense, entre autres, aux locataires monoparentaux, les plus faibles de notre société, M. le Président. La responsabilité de la Commission, c'est de protéger ses citoyens du Québec sans, comme je l'ai dit tout à l'heure, causer d'injustices à l'encontre du propriétaire qui a le droit légitime de vouloir faire commerce. C'est ça essentiellement le rôle de la Commission des droits. Et la Commission des droits trouve sa réponse dans ses analyses, ses décisions et les suggestions qu'elle fait dans la Charte des droits. C'est ça essentiellement.

M. le Président, si, par hypothèse... En fait, ce n'est pas comme ça que je devrais répondre à Mme la ministre. La question de Mme la ministre, elle est hypothétique. Vous nous demandez si la Commission serait d'accord si, par hypothèse, dans le projet de loi, on retrouvait la mention: avec le consentement du locataire ou du présumé... ou du locataire qui... du locataire à qui on demanderait le renseignement personnel et il donnerait son consentement. C'est une question hypothétique, et, moi, je vous dis tout de suite que la discrimination, M. le Président, c'est une notion objective. La réserve et l'inquiétude de la Commission, c'est qu'avec la date de naissance on pourrait éventuellement déborder sur l'enquête de crédit. C'est ça qui est l'inquiétude de la Commission des droits. Le délai auquel Mme la ministre fait référence....

Mme Harel: Juste sur cette question-là, parce qu'on va revenir...

M. Lefebvre (Roger): Oui.

Mme Harel: ...sur cette question-là.

Le Président (M. Vallières): Mme la ministre.

Mme Harel: Je repose la question, là. Vous êtes vice-président de la Commission des droits de la personne. L'article 6 de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé, l'article 6, là, d'une loi adoptée et mise en vigueur depuis 1993, stipule que le locateur doit collecter les renseignements auprès du candidat locataire, le locateur peut aussi collecter des renseignements personnels auprès d'un tiers, si le locataire consent à la cueillette. Je répète ma question, elle est simple, elle est concrète: Dans la mesure ou le locataire consent à la cueillette, est-ce que vous êtes d'accord avec une collecte de renseignements personnels auprès d'un tiers?

M. Lefebvre (Roger): M. le Président, je voudrais compléter également sur le délai de 10 jours. En mai dernier ? je vérifiais avec Mme Bernard ? la Commission a eu deux jours à peine pour réagir sur cette question-là. On a dit tout à l'heure qu'on avait des inquiétudes sur l'ensemble de cette disposition et particulièrement sur le délai qui nous apparaît beaucoup trop court.

Quant à votre question, Mme la ministre, la Commission, dans son mémoire et dans ses commentaires ce matin, commente une disposition très précise du projet de loi dans lequel on ne retrouve pas ce à quoi vous faites référence: s'il y avait consentement du locataire.

Mme Harel: Alors, prenez pour acquis que ça existe déjà dans l'article 6 de la loi et que notre intention ? et je le dis clairement et je l'ai dit d'ailleurs dans mes notes d'introduction ? notre intention est de faire en sorte qu'il y ait consentement du locataire pour qu'il y ait collecte auprès d'un tiers. Dans ce contexte-là, ce que je veux savoir, là... Il faut être clair dans la vie, là. Quand on est contre la date de naissance, c'est parce qu'on est contre l'enquête de crédit. Dites-nous le clairement. Est-ce que vous êtes contre l'enquête de crédit dans tous les cas? Parce que, si on ne le met pas dans la loi, ça veut dire que l'enquête de crédit ne sera pas possible. Ça veut dire... Elle ne sera pas possible auprès d'un tiers. Même avec le consentement, elle ne sera pas possible auprès d'un tiers parce que c'est la date de naissance qui permet finalement l'enquête de crédit auprès d'un tiers. Et on a l'intention d'ajouter à la loi qui existe déjà ? pour que tout le monde soit convaincu, là ? que le consentement du locataire est nécessaire pour ça. C'était déjà dans une loi, on ne pensait pas le répéter, mais on va le répéter pour que ce soit bien évident que c'est le consentement qui est nécessaire. Mais, avec le consentement déjà nécessaire mais qui sera encore plus nécessaire, est-ce que vous êtes pour ou contre une enquête de crédit auprès d'un tiers?

M. Lefebvre (Roger): M. le Président, je vais, si vous permettez, permettre, suggérer à Mme Tessier de compléter les commentaires qu'on a faits, Me Bernard et moi.

Le Président (M. Vallières): Très bien. Alors, Me Tessier.

Mme Tessier (Hélène): Oui. Mme la ministre, votre question est très directe, je vais simplement revenir sur ce que disait M. Lefebvre. D'abord, nos commentaires portent sur le fait que, dans le projet de loi actuel, le propriétaire pourrait requérir la date de naissance, ce qui évidemment est un contexte différent. Vous nous posez la question: Est-ce qu'on serait d'accord avec le consentement? Je ferais d'abord une réserve pratique.

La Commission des droits de la personne a plaidé plusieurs causes de discrimination fondée sur la condition sociale dans le logement, des refus de location pour des gens qui consacraient plus que 30 %... Moi, j'ai déjà personnellement représenté des gens qui dépensaient 55 % de leur loyer pour les frais de location. Et, pour répondre à Mme la ministre, notre préoccupation dans la notion de consentement, c'est: Est-ce qu'on peut réellement parler d'un consentement dans cette situation-là? Est-ce qu'une personne qui doit avoir un logement et à qui on dit: Vous avez le logement moyennant votre... Bien, on ne peut pas vous répondre si vous ne consentez pas à une enquête de crédit. Jusqu'à quel point est-ce qu'on parle véritablement d'un consentement? Et ce que la Commission doit se poser comme question, c'est: Quel pourrait être l'effet discriminatoire sur évidemment une certaine clientèle de locataires?

n(10 h 40)n

Notre préoccupation est principalement sur les locataires assistés sociaux pour qui l'enquête de crédit ne représente pas nécessairement les habitudes de paiement. Si vous n'avez pas d'argent, mais du tout, il est possible que vous retardiez de payer certains frais, certaines dettes, mais vous pouvez payer votre logement en priorité parce que vous avez besoin d'un toit. Je ne veux pas faire non plus du sentimentalisme, mais c'est la réalité des gens qui vivent sous le seuil de la pauvreté et qui est la réalité d'à peu près toutes les personnes que la Commission a représentées dans ses causes de logements, qui ont été très nombreuses depuis 1993.

Alors, la préoccupation de la Commission, Mme la ministre, serait: Premièrement, ce consentement est-il vraiment un consentement? Et, deuxièmement: Est-ce que, parce que donné dans des conditions de très grande inégalité sur le plan de la liberté contractuelle... On ne se contera pas d'histoire non plus, un propriétaire, dans une situation de pénurie de logements, n'est pas du tout dans la même situation qu'un locataire quand il s'agit de négocier un bail. Et l'autre aspect de la question, c'est: Est-ce que les conclusions qu'on peut tirer d'une enquête de crédit, qui serait, par exemple, faite avec le consentement, est-ce que les conclusions pourraient, elles, devenir ? passez-moi l'expression ? perverses? C'est-à-dire, est-ce qu'on pourrait utiliser un renseignement pris dans l'enquête de crédit, renseignement véridique, pour lui faire dire ce qu'il ne veut pas dire quant aux habitudes de paiement?

Je ne sais pas si je réponds à votre question aussi clairement que vous le vouliez, mais je vous réponds en fonction de la façon dont la Commission analyse le problème qui lui est posé.

Mme Harel: En fait, ce qui m'a étonnée, c'est que ce n'est pas une réponse que vous m'avez apportée, mais une question. Alors, moi, c'est une réponse que j'attends de vous, en fait. Mais je vais la poser à tout le monde, hein, la même question. Ce que je comprends, c'est qu'en fait, avec la réponse que vous me faites, qui renvoie à une question, je comprends que vous n'êtes pas favorables à des enquêtes de crédit. Alors, quelle que soit la formule, qu'elle soit directement à un tiers ? la collecte de renseignements au sens d'une enquête auprès d'un tiers avec consentement ? vous réinterrogez le consentement. Là, je veux juste savoir où vous vous logez. Puis là je comprends... Je ne sais pas si j'ai à déduire cela, si vous êtes d'accord avec la conclusion que je tire de vos propos, c'est que vous n'êtes pas favorables à une enquête de crédit auprès d'un tiers dans les cas de signature d'un bail.

M. Lefebvre (Roger): Où la Commission loge ce matin, la Commission vous donne, Mme la ministre et à vos collègues également, une opinion basée sur l'analyse du texte tel qu'il est présenté, le projet de loi n° 26. Et, si, Mme la ministre, il y a 15 jours...

Mme Harel: Ça ne change rien. Je m'excuse, parce que le texte tel que présenté, vous le savez bien...

M. Lefebvre (Roger): Il n'y a pas de consentement.

Mme Harel: ...doit se lire aussi à la lumière de tout le contexte juridique, et, le contexte juridique, c'est aussi l'article 6 de la Loi sur les renseignements personnels dans le secteur privé. Alors, vous avez à le lire dans ce contexte-là. En plus, vous avez ma parole que nous n'avons pas l'intention d'aller à l'encontre de cet article 6 qui existe déjà et que nous allons même le reproduire, s'il le faut. Donc, c'est dans ce contexte-là que je vous interroge.

M. Lefebvre (Roger): Mais, M. le Président, je pense que Mme la ministre va reconnaître avec nous que si, par hypothèse, c'était écrit textuellement à l'article 21 ? textuellement ? alors, que le propriétaire pourrait requérir la date de naissance du postulant locataire et celui-ci pourrait le faire s'il le veut bien, s'il y a consentement de la part du locataire, ça serait plus clair quant à la Commission des droits et on aurait pu, M. le Président, si ça avait été... si cette modification-là, possible, apparaissait au texte ce matin, bien, l'opinion de la Commission aurait été plus nuancée.

Mme Harel: Plus nuancée dans quel sens? Alors, admettons que ce serait une des modifications que vous nous suggéreriez, c'est qu'il y ait consentement pour la date de naissance. Est-ce que ça vous agrée, à ce moment-là?

M. Lefebvre (Roger): Dans le sens de l'argumentation qui vous a été soumise par Me Tessier sur les inquiétudes de la Commission quant à l'utilisation du renseignement «date de naissance».

Mme Harel: Donc, même avec un consentement du locataire...

M. Lefebvre (Roger): Et également sur la question fondamentale, à savoir: Est-ce que c'est un consentement vraiment volontaire ou si on place le locataire ou le postulant locataire dans une situation telle qu'il consent malgré lui?

Mme Harel: Bon. Alors, je veux bien vous comprendre.

M. Lefebvre (Roger): Ce n'est pas une question simple, M. le Président.

Mme Harel: Regardez, je veux vous comprendre. D'abord, excusez-moi, mais vous avez tenté d'éluder ma question en disant: Ce n'est pas dans le projet de loi. Je vous dis que c'était déjà dans une autre loi. On le reprend et, dans l'hypothèse où la date de naissance serait de la nature à demander, à exiger un consentement, là, à cette question-là, vous répondez que même cela ne vous agréerais pas. C'est ce que je conclus.

M. Lefebvre (Roger): Même avec cet encadrement-là, M. le Président, la Commission des droits serait encore inquiète.

Mme Harel: Merci.

M. Lefebvre (Roger): Et Mme Tessier l'a bien exposé tout à l'heure.

Le Président (M. Vallières): Alors, une autre demande d'intervention, Mme la députée La Pinière.

Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, à mon tour, je voudrais vous souhaiter la bienvenue, mon ancien collègue député avec nous dans la formation du Parti libéral et aujourd'hui à la tête de la Commission des droits de la personne. Alors, je vous souhaite un fructueux mandat là où vous êtes.

Je voudrais auparavant demander à la ministre de déposer l'avis de la Commission des droits de la personne auquel elle a fait référence, celui du mois de mai, si c'est possible, ainsi que le mémoire au Conseil des ministres, la partie publique. Si on peut l'avoir, ça nous aiderait beaucoup à comprendre ce qui se passe dans ce projet de loi.

Moi, je comprends parfaitement les inquiétudes que vous exprimez, que la Commission des droits de la personne exprime, et les nuances qu'elle apporte, entre autres, à la notion de consentement dans le cadre d'un rapport de force. Mais, auparavant, je voudrais savoir combien de plaintes la Commission reçoit-elle, traite-t-elle, au niveau de la discrimination dans le logement? Est-ce que c'est un volume important par rapport aux autres motifs de discrimination ou est-ce que c'est quelque chose qui est relativement moins important? Je vous pose cette question parce que, lorsqu'on parle aux représentants des propriétaires, ils nous disent qu'en règle générale les relations avec les locataires sont bonnes, en règle générale; que, même avec les clientèles dites défavorisées, notamment les gens qui vivent sur la sécurité du revenu, la plupart des gens sont des bons locataires qui paient leur loyer, qui s'acquittent fort bien de leurs responsabilités, mais qu'il y a une infime minorité de gens avec lesquels il y a des problèmes.

Je voudrais savoir: Pour vous, à la Commission des droits de la personne, qu'est-ce que ça représente, pour vous, les demandes ou les requêtes pour motif de discrimination au logement?

M. Lefebvre (Roger): Alors, Mme la députée...

Le Président (M. Vallières): Oui, M. Lefebvre.

M. Lefebvre (Roger): Oui, M. le Président. Pour répondre à la question de Mme la députée de La Pinière, en 1999, 111 plaintes ont été soumises à l'attention de la Commission; en 2000, l'année 2000, 121 plaintes; en 2001, jusqu'au 8 novembre, alors du 1er janvier 2001 au 8 novembre 2001, 160 plaintes. Alors, on peut constater qu'il y a un accroissement des plaintes. Et, sur ces 160 plaintes, M. le Président, il y a 40 plaintes dont le fondement est la discrimination fondée sur l'âge, c'est-à-dire refus de location à un postulant locataire qui aurait des enfants, des jeunes enfants; 61 plaintes ont été portées à l'attention de la Commission, fondées sur la discrimination... fondées sur la condition sociale. Alors, M. le Président, en résumé, il y a un accroissement des plaintes qui sont portées à l'attention de la Commission des droits.

Le Président (M. Vallières): Mme la députée La Pinière.

Mme Houda-Pepin: Oui. Ça, ce sont des plaintes en rapport avec la discrimination dans le logement exclusivement. Combien de ces plaintes ont été réglées par médiation et combien ont été... sont rendues, par exemple, au Tribunal des droits de la personne?

M. Lefebvre (Roger): M. le Président, pour compléter, je vous suggère de permettre à Me Tessier de donner les détails additionnels.

Le Président (M. Vallières): Très bien. Me Tessier.

Mme Tessier (Hélène): Oui. Mme la députée, je regrette, on n'a pas apporté des statistiques de règlement, donc je ne peux pas vous répondre avec le chiffre exact, mais beaucoup de règlements en matière de logement ont lieu après le dépôt de l'action au Tribunal ou après que la Commission ait terminé son enquête. Alors, je vous dirais que majoritairement, il y a un gros taux de règlement à la Commission après enquête de la Commission.

n(10 h 50)n

Je voudrais simplement compléter la réponse de M. Lefebvre sur votre question du nombre de plaintes parce que ça me paraît important, compte tenu du contexte aujourd'hui, de souligner que nos plaintes sont presque toujours ? et je pourrais dire «toujours», mais j'ajoute un «presque» ? en matière de refus de location. Alors, ce que vous disiez sur le fait que les relations peuvent être cordiales entre locataires et propriétaires n'est pas contredit par le nombre de plaintes, parce que, nous, notre champ d'action, c'est ce qui précède le bail, les gens refusés parce qu'ils ont soit des enfants, condition sociale, ou origine ethnique ou nationale. Ce sont les trois gros secteurs d'intervention de la Commission, mais c'est toujours préalable au bail. Alors, je ne peux pas être tellement plus précise, mais le taux de règlement, compte tenu de la jurisprudence qui est assez établie en matière de discrimination dans le logement, est un taux assez important.

Mme Houda-Pepin: Donc, c'est à partir de là aussi que vous exprimez des préoccupations par rapport à l'élargissement de la compétence de la Régie du logement, sachant que, dans le projet de loi n° 26, on lui donne des pouvoirs qui sont actuellement du ressort de la Commission des droits de la personne et également du Tribunal des droits de la personne. Est-ce que c'est sur la base de cette expertise que vous avez développée que vous vous préoccupez ou est-ce qu'il y aura, selon vous, une cohabitation entre les pouvoirs de la Régie, tels que conférés par le projet de loi n° 26, et les pouvoirs de la Commission et du Tribunal des droits de la personne?

Mme Tessier (Hélène): Oui, Mme la députée. Comme c'est assez clairement dit dans le mémoire, pages 8 et 9, l'inquiétude de la Commission ? parce que là il s'agit vraiment d'une inquiétude ? tient à l'ambiguïté de la situation juridique. On rapporte dans le mémoire qu'il y a un débat judiciaire actuellement en cours, qui porte sur tous les secteurs où il existe des compétences exclusives, par exemple l'arbitrage de griefs, la CSST, quand il y a un organisme administratif qui détient une compétence exclusive. Un débat judiciaire qui est assez important s'est développé autour de la question: Est-ce que cette exclusivité de recours n'était pas une exclusivité qui chasse du champ tous les autres organismes, y compris ? et c'est là-dessus que, la Commission, elle a toujours contesté cette position ? y compris la compétence tout à fait particulière du Tribunal des droits de la personne et de la Commission en matière de discrimination?

Alors, on souhaite d'une certaine façon la cohabitation, mais on la craint, vu l'ambiguïté de la situation juridique. Mais, comme disait M. Lefebvre, jusqu'à maintenant, la jurisprudence de la Cour supérieure a été favorable à la position de la Commission qui disait qu'il s'agissait de compétences concurrentes et que, quand l'essence du litige reposait sur la discrimination, toute autre exclusivité de recours n'atteignait pas la compétence tout à fait particulière de la Commission et du Tribunal dans le champ de la discrimination. Mais on attend là-dessus un jugement de la Cour d'appel ? on n'est pas sûr de rien dans la vie ? et, si cet élargissement de la compétence a pour effet de chasser la Commission et le Tribunal du secteur logements en matière de refus de location, je pense qu'il n'est pas exagéré de dire que c'est une grande perte. Je m'excuse, je prêche pour notre paroisse, mais la Commission a en effet développé une énorme expertise en matière de discrimination dans le logement.

Mme Houda-Pepin: Mais, dans la pratique, pour lever toute ambiguïté, selon vous, le citoyen, lui, il va s'adresser où? Il va aller à la Régie du logement ou il va aller à la Commission des droits de la personne?

Mme Tessier (Hélène): Notre expérience, c'est que, en matière de bail déjà conclu, en fait, la Commission a eu très peu de cas de plaintes en matière de bail parce que peut-être qu'à ce moment-là le litige ne se présente pas, à première vue, comme un litige de discrimination. On a eu en tout et partout, à ma connaissance, deux causes de harcèlement sexuel dans le logement après... dans des baux conclus. Mais mon expérience ? et j'ai beaucoup travaillé en matière de logement ? c'est que nos plaintes portent entièrement sur des refus de location. Et, au stade du refus, je suis loin d'être... Je ne peux pas parler pour la Régie, mais je n'ai pas l'impression que la personne victime de refus de location, quand il s'agit de race, couleur ou de condition sociale, le perçoit comme un problème locateur-locataire mais le perçoit plutôt essentiellement et fondamentalement comme un problème de discrimination, de sorte qu'elle s'adresse ? à bon droit, selon nous ? à la Commission qui dispose de l'expertise de traiter sa plainte.

Mme Houda-Pepin: Alors, en quoi est-ce que le projet de loi tel que libellé actuellement menace-t-il les compétences de la Commission des droits de la personne et du Tribunal des droits de la personne?

Mme Tessier (Hélène): Vous avez dû remarquer, ou vous le remarquerez à la lecture du mémoire, que nous sommes réservés. C'est une préoccupation à cause justement des interprétations qui peuvent venir des tribunaux. Si vous créez un champ exclusif, est-ce que ça sort le Tribunal et la Commission? C'est vraiment la question qui est devant la Cour d'appel en matière d'arbitrage de griefs. Alors, on ne connaît pas la réponse. On souhaite évidemment qu'elle soit, comme elle l'a été à la Cour supérieure, favorable à la position de la Commission qui maintient toujours sa compétence d'enquête fondée sur l'essence du litige et la discrimination, mais on ne peut pas présumer du jugement de la Cour d'appel, et on se dit: Est-ce que, advenant un jugement qui pourrait être différent, est-ce que la compétence de la Commission et du Tribunal ne serait pas mise en danger par...

Mme Houda-Pepin: À la page 1 et page 2, vous énumérez les différentes formes de discrimination dans le logement. Alors, vous dites: «Mentionnons, à titre d'exemples: le refus de louer un logement, d'effectuer une réparation ou de procurer un avantage fondé sur un motif de distinction illicite», etc. Et vous énumérez, parmi les formes de discrimination, les enquêtes de crédit. Sur quoi est-ce que vous vous basez pour dire qu'une enquête de crédit est en soi une forme de discrimination?

Mme Tessier (Hélène): On ne peut pas parler... Il s'agit de la question des effets discriminatoires. On ne peut pas dire a priori: Une enquête de crédit est une forme de discrimination. La question qu'on doit se poser, c'est: Est-ce qu'une enquête de crédit peut avoir un effet d'exclusion sur des groupes protégés par la Charte? Et c'est dans ce sens-là. Je ne voudrais pas répéter ce que j'ai dit tout à l'heure, mais, si une personne a des dettes, mais de très bonnes habitudes de paiement de loyer, est-ce qu'on ne pourrait pas en tirer des conclusions défavorables à la personne sur la base d'une généralisation hâtive de certains de ses comportements comme payeur? C'est évident que ce type de situation est susceptible de se poser beaucoup plus avec les locataires très pauvres, notamment les assistés sociaux.

Mme Houda-Pepin: Donc, vos préoccupations concernant l'encadrement de la collecte des renseignements personnels, c'est surtout au niveau des effets que ça peut produire et non pas en soi sur l'enquête comme telle. Donc, a priori l'enquête pour fin de solvabilité vous semble acceptable, sauf qu'en bout de ligne elle peut provoquer une discrimination dans la mesure où le propriétaire a le loisir d'exclure quelqu'un dont la solvabilité n'est pas établie où les habitudes de crédit sont très discutables. C'est bien ça que je comprends.

Mme Tessier (Hélène): Votre question a deux volets. Oui, pour la deuxième partie, pour les effets d'exclusion, mais il y a toujours deux niveaux de préoccupation à la Commission. Moi, j'ai parlé plus, compte tenu de mes fonctions professionnelles, de la discrimination et des effets discriminatoires. Je vais laisser Me Bernard compléter, s'il y a une préoccupation en matière de vie privée qui toucherait plus les droits fondamentaux. Elle existe aussi, mais là-dessus, j'aimerais mieux lui laisser la parole, parce que c'est vrai que, moi...

Le Président (M. Vallières): Me Bernard.

Mme Bernard (Claire): Donc, effectivement, c'est qu'il faut voir que la date de naissance, c'est une information personnelle et que a priori tout le monde n'est pas en mesure de nous demander, et dans le sens de la loi, cette information, sauf si elle est nécessaire à la conclusion d'un dossier. C'est ce que dit la loi. Et, là, ce qu'on dit: Est-ce que la date de naissance est nécessaire comme information pour qu'un locateur choisisse parmi l'ensemble des aspirants locataires tel ou tel locataire? Est-ce que c'est une information nécessaire?

Mme Houda-Pepin: Bien, moi, je ne connais pas...

Mme Bernard (Claire): Et c'est une atteinte à la vie privée a priori.

Mme Houda-Pepin: D'accord. Moi, je ne connais pas du tout les enquêtes de crédit, mais je me suis renseignée auprès de quelqu'un qui en fait et on m'a dit que la date de naissance était un élément essentiel. Par exemple, vous êtes Me Claire Bernard. Il y a certainement d'autres Claire Bernard qui existent dans la région de Montréal. Si on veut avoir une information fiable, sans risque de commettre des erreurs, ça prend un élément qui va vous distinguer des autres Claire Bernard qui pourraient exister. Et la seule donnée fiable en termes d'enquête de crédit, c'est la date de naissance. Alors, qu'est-ce que vous répondez à ça? Parce que vous risquez aussi d'avoir l'effet pervers, c'est-à-dire que, si on n'a pas cette information qui nous permet d'identifier avec certitude la personne concernée, on risque aussi d'exclure des gens, parce que, bon, bien, on n'a pas la bonne information puis on commis des erreurs.

Mme Bernard (Claire): Bien, c'est qu'on répond, nous, que le dossier crédit n'est pas représentatif du comportement d'un locataire par rapport non seulement à sa capacité mais à son passé, à sa conduite antérieure comme locataire, et que, cette conduite-là, le locateur peut l'obtenir en contactant le locateur antérieur. Le locateur n'a pas besoin de savoir si la personne a fraudé, si elle n'a pas payé d'autres types d'engagement. Parce qu'à partir de cette information-là évidemment il va pouvoir éviter... Et contre qui est-ce que cette information-là se retourne? C'est contre ces populations plus vulnérables.

n(11 heures)n

Mme Houda-Pepin: Mais vous êtes consciente aussi que dans d'autres secteurs de relations contractuelles, de secteur commercial, ces enquêtes de crédit existent et donc on se base sur ces enquêtes de crédit là pour établir le profil de la personne avec laquelle on va contracter.

Donc, si on le fait pour le logement et que... Vous soulevez ici une question de droit fondamental. Est-ce que ça veut dire qu'il faudrait que le législateur revoie les autres dispositions de sa législation, de sa réglementation pour empêcher les études de crédit pour justement cause de discrimination?

Mme Bernard (Claire): C'est tout. On se situe dans un contexte, le contexte du logement, donc dans une relation contractuelle qui n'est pas la même que celle de quelqu'un qui veut s'acheter par exemple un immeuble ou une fourgonnette à 32 000 $. Ce n'est pas la même situation.

Et, deuxièmement, ça dépendrait aussi de l'utilisation qui serait faite aussi de ce dossier, c'est-à-dire si on voyait d'autres effets discriminatoires, oui. En tant que tel, ce n'est pas le dossier de crédit, comme on disait. Objectivement, ce n'est pas avec une intention discriminatoire qu'on demande le crédit, mais c'est l'utilisation qui en est faite, et dans un contexte de logement avec, comme on venait de le dire, des situations où les gens étant vulnérables n'ont pas la capacité de donner nécessairement un consentement aussi libre que dans d'autres types de relations contractuelles.

Mme Houda-Pepin: Oui, je peux comprendre ça, sauf que, vous, vous posez la question...

M. Lefebvre (Roger): M. le Président, si vous permettez...

Mme Houda-Pepin: Vous permettez, M. le...

M. Lefebvre (Roger): Oui, oui. C'était pour compléter.

Mme Houda-Pepin: Je veux juste...

M. Lefebvre (Roger): Oui, oui, oui, allez-y.

Le Président (M. Vallières): Mme la députée de La Pinière.

M. Lefebvre (Roger): Allez-y. Je m'excuse.

Mme Houda-Pepin: Oui. Si vous permettez, je voudrais juste comprendre. Parce que, quand j'ai posé ma question, on m'a répondu qu'il y a deux volets. Il y a le volet contextuel sur lequel on m'a répondu; je suis satisfaite. Et on m'a dit qu'il y a un volet de droits fondamentaux sur lequel... de vie privée. Donc, ça, c'est fondamental. Et vous me donnez une réponse sur la question de la date de naissance et l'enquête de crédit qui n'est pas justifiée nécessairement parce qu'elle viole les droits fondamentaux. Et puis là vous me ramenez à une situation, donc vous me ramenez au contexte. Je ne suis pas plus avancée.

Je veux juste comprendre. Est-ce que, quand on parle des droits fondamentaux, il y a une ligne qu'on ne doit pas franchir? Et, dans ce cas-là, on ne la franchira jamais quel que soit le contexte ou alors, c'est des droits fondamentaux, mais on va les négocier selon les contextes? C'est ça que je veux comprendre.

Mme Bernard (Claire): Le droit fondamental dont on parle ici, c'est le droit au respect de la vie privée.

Mme Houda-Pepin: D'accord.

Mme Bernard (Claire): Et ce que prévoit la loi, ce que permet la Charte, c'est que ce n'est plus une atteinte à partir du moment où la personne donne un consentement libre et éclairé. Ça, c'est le principe général. Donc, il n'y a plus d'atteinte. Et ce que la loi, à partir des articles 1 à 9, prévoit, c'est que, s'il y a un consentement soit quand la personne donne elle-même les renseignements personnels soit quand elle permet que des tiers donnent ces renseignements, elle permet que le champ de la vie privée soit empiété. Elle donne sa permission. Mais ce qu'on dit ici, c'est que, quand on force... Dans un contexte de recherche de logement, quand il n'y a pas de logement et qu'on dit à la personne: Écoutez, c'est très bien si...

D'ailleurs, c'est ce que fait le projet de loi en disant: Si vous demandez... Parce que ce qu'on voit ici, c'est qu'on exclut d'autres types d'information, hein? On exclut maintenant le numéro d'assurance sociale, le numéro d'assurance maladie, et on dit: Maintenant, si vous demandez cette information qui n'est pas nécessaire au sens de la loi, vous vous exposez à une demande de dommages-intérêts punitive.

Mme Houda-Pepin: D'accord. Mais la loi, le projet de loi qui est devant nous stipule clairement que c'est par consentement. Donc, on a le consentement du candidat locataire à ce que le propriétaire obtienne un certain nombre d'informations.

Mme Bernard (Claire): Mais c'est ce qu'il fait actuellement.

Mme Houda-Pepin: Oui.

Mme Bernard (Claire): Mais ce qu'on voit, c'est qu'à cause du déséquilibre de ces relations...

Mme Houda-Pepin: Voilà!

Mme Bernard (Claire): ...ce sont des demandes abusives...

Mme Houda-Pepin: D'accord.

Mme Bernard (Claire): ...parce que les gens ne sont pas en mesure de dire: Non. Très bien, merci. C'est comme vous quand vous cherchez une maison, si votre vendeur vous posait des questions, vous demandait par exemple votre numéro d'assurance maladie, vous diriez: Écoutez, moi, comme acheteur d'une maison, vous n'avez pas besoin de mon numéro d'assurance maladie. Merci beaucoup, je vais chercher une maison ailleurs ou je vais chercher ma fourgonnette auprès d'une autre compagnie. Vous n'avez pas besoin d'avoir mon numéro d'assurance sociale. Vous n'avez pas besoin d'avoir le nom de mon employeur quand, moi, je suis en train de vous acheter tel ou tel bien. Sauf que, là, on parle d'un bien qui est essentiel et qui n'est pas disponible actuellement. On se situerait dans un autre contexte où il n'y aurait pas de pénurie de logements et tout le monde aurait le choix, ce serait tout à fait différent.

Mme Houda-Pepin: Est-ce que vous seriez d'accord pour...

Le Président (M. Vallières): Mme la députée de La Pinière, ce sera la dernière question et dernière réponse.

Mme Houda-Pepin: Ah! merci, M. le Président, le temps coule vite. Est-ce que vous seriez d'accord pour que le propriétaire demande le nom des locateurs précédents et non seulement du seul dernier locateur?

M. Lefebvre (Roger): Oui. Oui, M. le Président, on n'aurait pas d'objection à cette question posée par le propriétaire aux locataires postulants.

M. le Président, si vous permettez, en conclusion, ce n'est pas le projet de loi n° 26...

Le Président (M. Vallières): Alors, M. Lefebvre, je veux vous indiquer qu'il reste quelque trois minutes à ma droite, alors peut-être conclure à la toute fin de nos travaux rapidement.

M. Lefebvre (Roger): D'accord.

Le Président (M. Vallières): Alors, j'ai trois demandes d'intervention. La première, Mme la députée de Rimouski.

Mme Charest: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Vallières): En vous rappelant que vous disposez de trois minutes, incluant la réponse.

Mme Charest: Bon. Alors, M. le Président... Bonjour, monsieur et mesdames. Dans votre mémoire, à la page 5, vous parlez des promesses de location et vous dites qu'on exige de la part de l'aspirant locataire, dans bien des cas, une promesse de location, et vous voulez que cette promesse de location soit réglementée soit pour qu'on cesse la pratique, ou qu'on la réglemente pour que, si on la maintient, qu'il y ait des règles très claires là-dessus. Alors, j'aimerais vous entendre. Est-ce que vous préférez qu'il n'y en ait pas, que ce soit interdit, ou si vous voulez qu'il y en ait une avec encadrement? Parce qu'on ne peut pas...

Le Président (M. Vallières): Me Bernard.

Mme Bernard (Claire): Là, encore, je pense que la réponse dépend du contexte dans lequel on se situe. Actuellement, étant donné qu'on est dans un cas de pénurie, il y a peu de logements. Évidemment, même les engagements sont au détriment des locataires. Et je pense qu'avant qu'on ne s'engage plus à fond, il faudrait voit quels sont les effets d'interdire. Mais, a priori, comme actuellement c'est les locataires encore là, qui sont... bon, ceux qui sont démunis et qui ont moins accès à moins de logements que ça vise, je pense qu'on... je ne sais pas si... parce que, évidemment, je n'ai pas l'approbation de toute ma haute direction, mais, si on se place du point de vue des effets, c'est des effets pour les locataires.

Mme Charest: Je suis désolée, mais ça ne m'éclaire pas beaucoup, moi, comme membre de cette commission. Je veux dire, si on vous entend aujourd'hui, c'est pour que vous nous éclairiez à savoir qu'est-ce que nous devrions faire dans ce projet de loi là pour s'assurer de protéger à la fois les locataires et les locateurs également. Et là vous ne donnez pas de réponse, en réalité. Est-ce que vous êtes pour ou contre cette promesse de location? C'est ça que j'aimerais savoir, parce que, moi, à partir de votre réflexion, de votre position, ça va... et de celle des autres intervenants qui vont venir devant cette commission, j'aurai à me faire une tête. Mais, avec la réponse que vous venez de me donner, je ne peux pas me faire une tête.

Mme Bernard (Claire): Je vous dis que... Ce que je vous ai répondu, c'est qu'en 2001, actuellement, c'est une pratique qui est au détriment des locataires. Mais...

Le Président (M. Vallières): Bien, alors...

M. Lefebvre (Roger): M. le Président.

Le Président (M. Vallières): Oui. Alors, M. Lefebvre, et ça va terminer nos travaux, rapidement, s'il vous plaît.

M. Lefebvre (Roger): Oui. La question de Mme la députée trouve sa réponse précisément à la page 6: «La Commission croit qu'il serait opportun de réglementer cette pratique, soit en l'interdisant, soit en limitant la possibilité de s'engager...»

M. le Président, je voudrais rappeler aux parlementaires autant à ma gauche qu'à ma droite que la responsabilité de la Commission n'est pas d'écrire les textes de loi. La responsabilité de la Commission, c'est de surveiller le législateur et de s'assurer qu'il n'y a pas, dans un texte de loi, des dispositions qui vont à l'encontre de la Charte. Et, dans ce sens-là, l'analyse que nous avons faite du projet de loi n° 26 n'est pas facile. Il n'y a pas, dans la position de la Commission et particulièrement en regard du long débat qu'on a eu autour de la cueillette des renseignements personnels au niveau de la compétence de la Commission qui se verrait amputée d'une partie de cette compétence-là au profit de la Régie... Ce n'est pas des questions simples, M. le Président, de sorte que la position de la Commission, elle est, sur plusieurs points, nuancée. Mais la responsabilité que l'on a, et c'est ce qu'on a établi en début d'intervention, c'est de s'assurer que tous les citoyens sont égaux, s'assurer qu'aucun citoyen ne subisse de discrimination, M. le Président. C'est ça, la responsabilité de la Commission des droits. Et on se retrouve souvent dans des débats où trancher est impossible.

n(11 h 10)n

Alors, il y a dans le projet de loi n° 26 ? et je conclus là-dessus ? des dispositions avec lesquelles la Commission est d'accord. L'encadrement, à titre d'exemple, des renseignements personnels, on est d'accord. Mme la ministre prétend qu'au sens de la Loi sur la protection des renseignements... permettrait de conclure qu'on pourrait requérir le consentement du locataire peut-être, mais, ultimement, on resterait quand même inquiet. C'est ça, M. le Président, qui est la position de la Commission sur ce point-là précisément.

Le Président (M. Vallières): Alors, M. Lefebvre, il faut...

M. Lefebvre (Roger): Quant au reste, le document est bien fait et il y a là-dedans des nuances, puis ça ne peut pas être autrement, M. le Président.

Le Président (M. Vallières): C'est bien. Nous vous remercions de votre contribution à nos travaux.

Alors, je demanderais maintenant au prochain organisme, soit la Corporation des propriétaires immobiliers du Québec, de bien vouloir prendre place. Nous suspendrons, le temps de saluer nos invités.

(Suspension de la séance à 11 h 11)

 

(Reprise à 11 h 12)

Le Président (M. Vallières): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. Alors, je demanderais maintenant à... je pense que c'est Me Doray, de bien vouloir présenter les gens qui l'accompagnent. Et vous disposez de 20 minutes pour présenter votre mémoire.

Corporation des propriétaires immobiliers
du Québec inc. (CORPIQ)

M. Courtemanche (Luc): Bonjour. Je m'excuse, mon nom est Luc Courtemanche et non Me Doray.

Le Président (M. Vallières): Bon, première correction. On va la faire immédiatement. Me Courtemanche.

M. Courtemanche (Luc): Donc, bonjour, M. le Président, Mme la ministre, Mmes et MM. membres de la commission de l'aménagement du territoire. Comme je vous le mentionnais précédemment, mon nom est Luc Courtemanche, je suis président de la Corporation des propriétaires immobiliers du Québec, communément appelée CORPIQ.

Étant propriétaire moi-même d'immeubles à logements dans la région du Saguenay, je suis à même de comprendre les vives inquiétudes des milliers de propriétaires qui, suite à la campagne de sensibilisation initiée par CORPIQ, ont pris la peine de signer et de nous faire parvenir leurs appuis contre l'adoption du projet de loi dans sa forme actuelle et intensive.

Pour l'occasion, je suis accompagné de Me Chantal Gosselin à ma droite ainsi que de Me Raymond Doray à ma gauche. Ces deux experts traiteront et répondront à toutes vos questions concernant les aspects plus spécifiques et légaux contenus dans ce projet de loi.

Pour ma part, je souhaiterais vous résumer les grandes lignes du mémoire qui a été déposé devant cette commission et dont vous avez sûrement eu l'occasion de prendre connaissance. Il est important de rappeler qu'au Québec environ 1,2 million de logements sur les 1,3 million existants appartiennent à des propriétaires privés qui ne reçoivent aucune forme de subvention pour mener à bien leur entreprise, sauf dans des cas bien spécifiques comme l'adaptation de logements pour les personnes handicapées ou la revitalisation des centres-villes.

Point très important à retenir, tous les propriétaires de logements résidentiels au Québec, peu importe le nombre d'unités qu'ils possèdent, sont considérés comme des entreprises au sens de l'article 1525 du Code civil du Québec. Ces derniers possèdent pour la plupart des petits immeubles à logements dans lesquels ils ont investi une grande partie de leurs économies, sinon la totalité de celles-ci. Leurs immeubles représentent donc, pour la majorité de ces propriétaires, leur seul et unique fonds de pension au même titre qu'un épicier ou un garagiste ayant investi toutes ses économies dans l'acquisition d'un immeuble pour la bonne marche de son entreprise.

Jamais ces propriétaires d'immeubles à logements n'accepteront d'être contrôlés de façon abusive par un projet de loi qui leur enlèverait le droit légitime d'assurer la saine gestion de leur entreprise au même titre que tout autre entrepreneur au Québec. Une grande majorité de ces propriétaires géographiquement répartis dans l'ensemble de la province font confiance à CORPIQ depuis maintenant plus de 21 ans afin de défendre leurs intérêts auprès de tous les intervenants reliés au milieu de l'habitation au Québec. CORPIQ, le plus important organisme national sans but lucratif, est administré bénévolement par 16 membres élus en assemblée générale, dont la presque totalité sont propriétaires d'immeubles à logements. L'ensemble des membres de notre organisation est composé majoritairement de petits propriétaires immobiliers, ce qui est à l'image même du parc de logements au Québec.

CORPIQ, principal porte-parole des propriétaires, est une organisation représentative du type d'entreprises que possèdent ses membres, lesquels ont à coeur la saine gestion de leurs immeubles afin d'offrir des logements de qualité correspondant aux besoins de leur clientèle. Saviez-vous que notre secteur d'activité injecte bon an, mal an plus d'un demi-milliard de dollars, soit environ 600 millions, dans l'économie de la province simplement en dépenses d'entretien et de réparations d'immeubles à logements? En termes clairs, à tous les deux ans d'activité, les propriétaires injectent pratiquement l'équivalent de ce qu'il en coûte pour construire une aluminerie moderne. Toutes ces sommes injectées dans notre économie contribuent en plus à créer ou maintenir plus de 20 000 emplois directs ou indirects reliés à notre secteur d'activité, ce qui, par les temps qui courent, est non négligeable.

Autre fait important, le logement est considéré comme un bien essentiel pour tout citoyen au même titre que l'alimentation, et il nous apparaît tout à fait inacceptable que le gouvernement impose des lois qui ne correspondent aucunement à la réalité du marché et qui n'apportent aucun effet positif autant pour les locataires que les propriétaires. Malgré le fait qu'au Québec le coût des loyers moyens soit de 25 % inférieur à ceux du reste du pays, les propriétaires doivent quand même consacrer à la gestion de leur entreprise les mêmes sommes d'argent que leurs voisins des autres provinces, de là une rentabilité presque inexistante.

De cet état de fait résulte le désintéressement des investisseurs à construire des unités de logement. Plus alarmant encore, malgré les sommes phénoménales injectées par les propriétaires dans l'entretien et la réparation de leurs logements, le parc immobilier au Québec se détériore de façon alarmante. Des restrictions de toutes sortes combinées à des pertes de revenus considérables en termes de non-paiement de loyers amènent les propriétaires à ne faire que l'entretien nécessaire et non pas de veiller à l'amélioration de leur immeuble comme ils le devraient.

n(11 h 20)n

Rappelons qu'au Québec où le logement locatif est assujetti à un tribunal administratif, soit la Régie du logement, 70 % des 70 330 dossiers traités annuellement sont des dossiers reliés au seul non-paiement de loyers, et ce chiffre ne tient pas compte de tous les propriétaires qui ne s'adressent pas à ce tribunal, estimant leurs chances de récupérer leurs loyers dus pratiquement nulles.

Même en s'adressant au tribunal de la Régie du logement pour un dossier relié au non-paiement de loyer, nos propriétaires doivent composer actuellement avec des délais de plus de 60 jours avant l'obtention d'un jugement. Ces délais pourraient facilement être réduits avec une gestion efficace des dossiers traités.

Imaginez maintenant ce qu'il adviendra de cet important secteur d'activité économique qu'est le logement au Québec si le propriétaire de ce type d'entreprise n'a plus le droit fondamental et essentiel de qualifier adéquatement et avec certitude le proposant locataire qui se présente à lui. Pouvons-nous imaginer un concessionnaire automobiles qui procéderait à la location d'un véhicule avec, comme seuls renseignements, le nom, l'adresse et le numéro de téléphone de son client? La réponse est non, bien entendu. Un propriétaire immobilier qui loue un bien dont la valeur moyenne avoisine 45 000 $ et qui, de plus, en plus de fournir un logement de qualité, doit assurer la jouissance paisible des lieux non seulement au locataire en place, mais à tous les locataires de l'immeuble a l'obligation contractuelle de s'assurer que le proposant locataire qui se présente à lui puisse rencontrer toutes les obligations découlant du bail qu'il s'apprête à signer.

Il est plus que temps et urgent aujourd'hui que ce gouvernement admette qu'il serait profitable pour tous les intervenants reliés de près ou de loin à ce milieu de convoquer des états généraux sur l'habitation afin de construire et de mettre en place une véritable politique du logement au Québec, politique qui serait assurément plus profitable à tous que le fouillis actuel dont les renseignements personnels et les délais d'obtention de décision ne sont que la pointe de l'iceberg. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Vallières): Bien. Merci, M. Courtemanche. Ça met fin à votre présentation. Nous allons maintenant passer aux échanges avec les membres de la commission. La première question sera attribuée à Mme la ministre.

Mme Harel: Merci, M. le Président. Alors, M. Courtemanche, vous êtes nouvellement élu président, je crois?

M. Courtemanche (Luc): Oui. C'est bien ça.

Mme Harel: C'est depuis quand?

M. Courtemanche (Luc): Depuis le mois septembre 2001.

Mme Harel: Depuis septembre. C'est vous qui avez signé la lettre à George Bush alors?

M. Courtemanche (Luc): C'est bien ça.

Mme Harel: Alors, vous êtes accompagné de Me Doray, conseiller juridique pour l'ensemble de toutes les associations. Vous êtes conseiller juridique, je crois, pour quatre associations de propriétaires, hein?

M. Doray (Raymond): C'est exact, Mme la ministre.

Mme Harel: C'est ça. Et Me Gosselin, conseillère juridique. Bon. Alors, qu'est-ce que vous nous proposez? Vous êtes au courant que le gouvernement, dans le budget déposé par Mme Marois, va investir massivement dans le logement pour y construire 13 500 logements au cours des prochaines années, dont 4 400 au cours de la seule année 2002. Évidemment, je ne sais pas si, pour vous, ce type de logement que nous allons construire pour les personnes les plus démunies est du logement qui devrait faire partie de la politique de l'habitation que vous réclamez.

Est-ce que vous êtes au courant, M. Courtemanche ? vous n'étiez pas président à ce moment-là ? que votre Corporation avait mis en demeure la Régie du logement, la Commission d'accès à l'information et la Commission des droits de la personne, il y a déjà deux ans, de cesser toute consultation auprès de vos associations et d'autres associations sur cette question de collecte de renseignements personnels? Votre association à ce moment-là ne voulait en rien qu'il y ait une consultation ou une conciliation sur ces questions-là. Vous aviez invoqué à ce moment-là que, étant donné que c'étaient des tribunaux quasi judiciaires, ils n'avaient pas à faire ce genre de démarches. Et c'est la raison pour laquelle nous nous retrouvons ici, aujourd'hui, en démarche législative, puisque la démarche consultative a été, sous les instances de la CORPIQ, abandonnée suite à une mise en demeure. Alors, vous nous proposez quoi? Vous nous proposez de retirer le projet de loi?

M. Courtemanche (Luc): Ce que nous vous proposons, Mme Harel... Dans le projet de loi en tant que tel, il y a deux volets très importants, un volet concernant la Régie du logement et un volet concernant la cueillette de renseignements personnels. Évidemment, ce qu'on vous proposait, en conclusion de mon allocution, c'étaient des états généraux sur l'habitation au Québec. Il y a un malaise très profond dans ce secteur d'activité ici au Québec dont il faudrait remanier tout ce qui a un lien direct avec l'immobilier. Mais pour...

Mme Harel: Excusez-moi, je n'ai pas compris. Avec?

M. Courtemanche (Luc): Avec tout ce qui a un lien avec le secteur immobilier au Québec. Mais j'aimerais, par contre, laisser la parole à Me Gosselin, à ma droite, concernant strictement les dispositions de la Régie du logement et les délais d'obtention d'un jugement.

Le Président (M. Vallières): Très bien. Me Gosselin.

Mme Harel: Mais, je répète, ma question est la suivante: Est-ce que vous nous recommandez de retirer le projet de loi ou de l'adopter d'ici Noël, comme on nous le propose dans l'opposition?

Le Président (M. Vallières): Me Gosselin.

Mme Gosselin (Chantal): Avec permission, M. le Président, vous avez, si vous prenez connaissance du mémoire que CORPIQ a produit, si vous regardez le mémoire comme tel, vous verrez que la position de CORPIQ n'est pas du tout...

Mme Harel: On vient juste de l'avoir, le mémoire, hein, vous savez?

Mme Gosselin (Chantal): Oui, on comprend, il a été transmis vendredi.

Mme Harel: C'est la raison pour laquelle il faut que vous nous l'expliquiez, mais on l'a eu ce matin.

Mme Gosselin (Chantal): Effectivement. Alors, ce que je veux simplement vous donner comme information: CORPIQ ne souhaite pas le retrait en son intégralité des articles du projet de loi n° 26.

De mon côté, je couvre l'aspect Régie du logement, donc procédures devant la Régie du logement. Je couvre l'aspect modification de certaines modalités au Code civil du Québec. Vous constaterez qu'à certains niveaux CORPIQ est d'accord avec certains amendements qui sont présentés.

Particulièrement, si vous regardez la partie B du mémoire à compter de la page 24, vous verrez la position CORPIQ concernant l'adaptation des différentes procédures qui pourraient être mises en place afin d'assurer l'efficacité du traitement des dossiers devant la Régie du logement. Vous verrez, par exemple, au premier point, quand on parle de la signification de «nouveau», nous abordons un point très spécifique dans l'ensemble du projet pour faire part de nos positions, mais nous ne demandons pas le retrait, je tiens à le préciser. Alors, nous apportons des commentaires sur certains articles de loi qui méritent, selon nous, soit le retrait ou une modification pour, encore une fois, assurer la meilleure efficacité.

Lorsqu'on regarde au point 1, par exemple, à la page 24, lorsqu'on parle de la possibilité pour un greffier et greffier spécial de demander une signification à nouveau d'une procédure qui aurait été validement signifiée, à ce niveau-là, on ne peut pas être d'accord. Si une signification valide s'est faite, dans un objectif d'efficacité il ne faut pas retarder l'audition d'un dossier en demandant qu'une signification additionnelle soit faite.

Si on regarde au niveau du point 2, la contestation écrite, CORPIQ est tout à fait d'accord à ce qu'on trouve une méthode pour responsabiliser le locataire et lui demander de se prononcer officiellement par une contestation écrite dans un délai de 10 jours. C'est un voeu qui avait été manifesté par CORPIQ depuis maintenant 1994, et nous sommes très heureux de voir que soit inclue cette modalité dans le projet de loi n° 26.

J'aimerais, à ce niveau-là, apporter certaines précisions par rapport à ce qui a été discuté depuis ce matin, depuis l'ouverture de la commission, quant au délai de 10 jours: est-ce que le délai est raisonnable ou non, le délai de 10 jours? Au départ, il faut savoir que c'est un délai de 10 jours qui compte non pas à compter de l'envoi d'une demande, mais à compter de la réception de la signification d'une demande.

Et ça m'amène à aborder deux aspects concernant les demandes. Il y a deux types de demandes qui seraient traitées, concernées par ce délai de 10 jours. Il y a, au départ, les demandes de recouvrement de loyers. Alors, on ne parle pas de résiliation de bail; c'est simplement un locateur qui s'adresse à la Régie du logement pour que le loyer qui n'est pas payé soit effectivement payé. Si les montants réclamés sont de la compétence de la Cour des petites créances, donc actuellement si les montants réclamés sont en bas de 3 000 $, le locataire ne peut pas être représenté par avocat ni le locateur non plus. C'est de la compétence des Petites créances, en principe, mais, spécifiquement, la Loi sur la Régie du logement attribue une compétence exclusive à la Régie de traiter de ces dossiers lorsqu'ils concernent le logement.

n(11 h 30)n

Alors, tout à l'heure, on laissait sous-entendre qu'il fallait laisser un délai au locataire pour se trouver un avocat et pouvoir contester et faire valoir sa défense. Je peux vous dire, à ce niveau-là, que ce n'est pas applicable, lorsqu'on parle de recouvrement de loyer, lorsque la somme en jeu est moins de 3 000 $. Au-delà de ça, ce délai de 10 jours qui est indiqué dans le projet de loi est un délai qui s'applique déjà en matière de petites créances. Pour tous les dossiers civils de la compétence des Petites créances, ce délai de 10 jours pour une partie défenderesse de produire sa défense est le délai qui s'applique déjà actuellement depuis de nombreuses années. C'est un délai qui est déjà considéré raisonnable par le législateur.

Si on regarde l'autre aspect, concernant la résiliation du bail, dans ce cas-ci, les parties, si elles le désirent, peuvent être représentées par avocat ou non. Le délai de 10 jours suggéré s'ajoute à un délai de trois semaines qui est laissé au locataire, de répit, si on peut dire, avant effectivement qu'une procédure soit entreprise par le locateur. Alors, déjà, le... doit avoir un délai de trois semaines; s'il est... une procédure doit être entreprise et signifiée, et un délai de 10 jours additionnel est accordé au locataire pour pouvoir manifester son intention ou non de contester la procédure. Alors, à ce niveau-là, c'est un objectif d'efficacité qui est recherché, mais dans le respect des règles fondamentales de justice naturelle, donc de permettre à une partie qui est en défense de faire valoir son point de vue et d'être éventuellement entendue devant le tribunal compétent, dans ce cas-ci la Régie du logement.

Le Président (M. Vallières): Merci, Me Gosselin. Mme la ministre.

Mme Harel: Oui. Cependant, Me Gosselin, dans les cas de résiliation de bail, la présence d'un avocat est permise.

Mme Gosselin (Chantal): Oui, tout à fait.

Mme Harel: Et comme, très souvent, ce que vous nous décrivez, dans les cas de recouvrement, ne nécessite pas, même ne permet pas, à un certain seuil, présence d'avocat... mais, la plupart du temps, les demandes de recouvrement sont associées à celles de résiliation de bail, où là il peut y avoir présence d'un avocat.

Mme Gosselin (Chantal): Et je vous dirais, Mme la ministre, qu'à ce niveau-là, par expérience, si on se rend sur le champ, c'est très, très rare que le locateur ou même le locataire fasse le choix d'être représenté par avocat pour ce type de dossier, parce que la question en litige est simplement: Est-ce qu'il y a, oui ou non, un retard dans le paiement de plus de trois semaines, si on parle de résiliation? Alors, le débat est tellement limité, la question qui doit être tranchée par la Régie est tellement limitée que les parties n'ont pas nécessairement besoin d'être représentées par avocat, et, de fait, ce n'est pas une option qui est privilégiée par l'une ou l'autre des parties à ce niveau.

Mme Harel: Cependant, le locataire peut lui-même faire... je ne sais pas si on peut appeler ça une demande reconventionnelle, là, mais peut, lui aussi, invoquer que le locateur a négligé de respecter ses obligations.

Mme Gosselin (Chantal): À ce moment-là, Mme la ministre, il s'agit d'un recours qui est tout à fait distinct...

Mme Harel: C'est ça, mais qui est concurrent.

Mme Gosselin (Chantal): ...c'est-à-dire qu'il peut faire l'objet d'une réunion, hein, d'actions...

Mme Harel: Oui.

Mme Gosselin (Chantal): ...effectivement, mais on parle d'autres points en litige que ceux dont on parle dans les procédures. Mais, effectivement, c'est quelque chose qui est possible.

Mme Harel: Oui, parce qu'il peut y avoir une contestation qui est à l'usage du locataire, à ce moment-là, qui est distincte mais qui peut être réunie justement, parce que ça se fait en même temps, parallèlement et concurremment. D'ailleurs, on travaille sur cette question, puisqu'il faut s'assurer que les règles de justice naturelle permettent aussi au locataire qui est l'objet d'une demande de recouvrement ou de résiliation avec une procédure sur dossier de savoir qu'il peut aussi avoir accès à une procédure de contestation si tant est qu'il considère que le locateur a négligé de respecter ses obligations.

Écoutez, je sais que j'ai d'autres collègues qui veulent échanger avec vous. Je voudrais peut-être m'adresser à Me Courtemanche d'abord pour m'excuser d'avoir adressé à son prédécesseur, à tort, la lettre du 22 octobre dernier, il était déjà en fonction. Croyez bien que ce sera corrigé. Mais cette lettre venait, à mon point de vue, éclaircir ce que j'ai appelé, moi, pas une campagne de sensibilisation, mais une campagne de désinformation, et je pense que cette campagne de désinformation a pris prétexte des renseignements qui sont requis pour que l'État alloue un logement subventionné à un ménage qui ne consacrera pas plus de 25 % de ses revenus pour se loger. Et bien évidemment, comme je l'ai dit, si le secteur privé veut offrir ce genre de logements subventionnés avec participants, si vous voulez, à une sélection, parce qu'il est évident qu'il y a des listes d'attente, alors, en toute équité, l'État doit s'assurer que les revenus du ménage concerné donnent accès, selon les règlements adoptés et publics... Dans la Gazette officielle, il y a un règlement, le Règlement de location des logements à loyer modique, et on applique ce règlement de location. Dans le règlement, il est prévu qu'il y ait une sélection qui se fasse, et cette sélection doit être faite d'autant plus qu'il doit y avoir un test de revenus, puisque la personne va obtenir le logement... disons, en étant sélectionnée par rapport à d'autres, en fonction justement, notamment, de ses revenus. Ce qui n'est pas le cas, je pense que vous fixez... C'est encore un marché privé, le loyer, et vous fixez le coût de votre loyer. Et la personne qui habite dans un des loyers des membres appartenant à la CORPIQ ne se voit pas subventionnée pour y habiter et n'a pas à prouver son... elle n'a pas à faire un test de revenus pour s'assurer qu'elle ne consacrera pas plus que 25 % de son revenu pour se loger. En tout cas, j'ai écrit à M. Côté, votre prédécesseur, j'imagine que la lettre vous a aussi été transmise.

Mais il y avait quelque chose d'outrecuidant, là. J'ai lu la lettre ? je croyais au départ que... je ne croyais pas que c'était sérieux, là ? la lettre à George Bush pour lui dire que, avec le projet de loi, vous pourriez aussi devoir héberger des terroristes si vous n'aviez pas la possibilité de faire une enquête de crédit. En fait, c'est l'essentiel de ce que vous avez écrit à M. Bush. Vous ne trouvez pas que, mettons, là, c'est exagéré, tout ça?

M. Courtemanche (Luc): Mme la ministre...

Le Président (M. Vallières): Oui, M. Courtemanche.

M. Courtemanche (Luc): ...concernant les renseignements que vous mentionniez tantôt à l'effet que vous devez, vous, en tant que propriétaire de logement social, qualifier vos locataires à l'effet qu'ils rencontrent les dispositions ou les critères que vous avez fixés afin de leur permettre d'habiter un de vos logements, au même titre, un propriétaire privé doit qualifier son locataire afin de l'assurer que son futur locataire rencontre les obligations du bail. Le gouvernement qualifie ses locataires versus des revenus. On doit, en tant que propriétaires privés, exercer la même vigilance dans la qualification de nos locataires afin de s'assurer que ceux-ci sont aptes à rembourser les coûts de loyer auxquels ils vont contracter un bail avec le propriétaire. De là l'importance de qualifier et de prendre des renseignements nécessaires afin de s'assurer que la personne qui est devant nous réponde à ces critères.

Et, concernant les renseignements personnels, j'aimerais donner la parole à Me Doray, ici, qui pourra vous en dire un petit peu plus en détail à ce sujet-là.

Mme Harel: Si vous permettez, M. le Président.

Le Président (M. Vallières): Oui, Mme la ministre.

Mme Harel: Oui, je voudrais faire valoir à M. Courtemanche que c'est exactement pour des raisons inverses. Alors, vaut mieux les exprimer, ces raisons inverses. L'État vérifie non pas si le ménage peut payer son loyer, l'État vérifie si le ménage est admissible à une subvention qui est l'équivalent, si vous voulez ? qui est assez importante ? qui est l'équivalent de sommes considérables, pour lui permettre de ne pas débourser plus que 25 %. Donc, on ne vérifie pas s'il peut payer, on vérifie s'il est admissible et s'il doit être sélectionné par rapport à d'autres pour ne payer que 25 % de son revenu pour se loger. Et, vous, vous faites le contraire. Vous venez de nous le dire, vous voulez vérifier s'il peut payer son loyer. Nous, on veut vérifier s'il peut être subventionné pour payer moins de loyer.

Alors, mettre ça sur le même pied d'égalité comme vous l'avez fait, là, c'était, comment vous dire? c'était, si vous voulez, aussi inacceptable que le projet de loi que vous avez envoyé à M. Bush, là, le projet de loi n° 26, qui n'était pas le projet de loi initial ni intégral, qui était un projet de loi remanié, dans lequel vous avez recomposé des aspects du projet de loi. C'est bien ça, là, hein? Vous n'avez pas... Vous n'avez même pas été assez conséquent, à mon point de vue, là, pour prendre le projet de loi puis le transmettre, mais vous avez, dans le fond, rejoué dans le projet de loi et vous l'avez fait accompagner dans votre lettre de transmission.

Le Président (M. Vallières): M. Courtemanche.

M. Courtemanche (Luc): J'aimerais encore une fois, Mme la ministre, vous rappeler que le gouvernement qualifie ses locataires à l'effet qu'ils n'ont pas trop de revenus afin d'obtenir une subvention. Nous, on doit qualifier nos locataires afin de s'assurer qu'ils ont les revenus adéquats pour payer leur loyer. On exerce la même activité et le même processus de sélection tous les deux, le gouvernement et le propriétaire privé.

n(11 h 40)n

Encore une fois, j'aimerais insister sur le fait des renseignements personnels que nous devons avoir afin de qualifier ce proposant locataire. Et j'aimerais que vous écoutiez Me Doray à ce sujet-là, s'il vous plaît.

Le Président (M. Vallières): Très bien. Me Doray.

M. Doray (Raymond): Merci, M. le Président. Mme la ministre, MM. et Mmes les députés, peut-être faudrait-il essayer d'établir nos points de consensus tout d'abord sur la problématique des renseignements personnels pour ensuite voir là où le bât blesse, là où il y a des difficultés.

Il y a des points de consensus, et vous serez, je pense, Mme la ministre, contente de les entendre. Premièrement, l'idée de faire une liste des renseignements qu'un propriétaire peut recueillir auprès d'un proposant locataire nous semble être une excellente idée. Je dois vous avouer que ça fait plus de 20 ans que je travaille dans le domaine de la protection des renseignements personnels et ça fait plus de 20 ans que je viens en commission parlementaire demander à vos collègues ministre des Relations avec les citoyens ou ministre des Communications d'apporter des précisions dans le champ de la protection des renseignements personnels parce que nos lois sont vagues, sont extrêmement difficiles à comprendre. Elles m'aident à gagner ma vie honorablement, mais, d'un point de vue purement pratique, il n'y a pas grand-chose à comprendre en lisant ces lois-là. Donc, l'idée de faire une liste est excellente, et je dirais que l'ensemble des organisations qui se sont regroupées pour déposer un mémoire sur l'aspect protection des renseignements personnels appuient cette démarche.

Autre point de consensus, et vous serez heureuse de l'entendre, le fait que la juridiction soit conférée à la Régie est une excellente chose parce que ça n'a pas de sens que propriétaire et locataire soient obligés de se promener d'un tribunal à un autre qui vont donner des interprétations différentes et qui, en plus, se disent tous des spécialistes. C'est assez curieux d'ailleurs, ils ont tous une expertise extraordinaire, mais, dans le fond, ça ressemble un petit peu à du corporatisme et chacun veut défendre son petit morceau de territoire sans se poser la question: Dans le fond, pour le citoyen, est-ce que le guichet unique n'est pas un principe qu'on a accepté au Québec il y a déjà 15 ou 20 ans? Est-ce qu'on ne devrait pas l'appliquer autant dans le domaine du logement que dans tout autre domaine où il est possible de donner aux administrés une seule porte avec une seule adresse et une seule sonnette? Et là-dessus je pense que vos objectifs sont plus que louables. Et d'ailleurs je note, l'article 122 de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé ne confère pas une juridiction exclusive à la Commission d'accès à l'information dans le domaine de la protection des renseignements personnels dans le secteur privé. La Commission d'accès a une compétence exclusive dans le secteur public mais pas dans le secteur privé et, de fait, au moment où on se parle, la Régie et la Cour du Québec, en matière de logement, ont interprété à quelques reprises les dispositions de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé.

Donc, en termes d'efficacité... J'entendais tout à l'heure certains participants faire valoir que ça prenait 60 jours à obtenir une décision de la Régie. Ces gens-là devraient se réjouir parce que, moi, j'attends des décisions depuis deux ans et demi de la Commission d'accès à l'information. Alors, délai pour délai, la Régie semble nettement plus efficace. Et là-dessus je pense que, si la loi balise bien les renseignements qui peuvent être recueillis, on réglera énormément de litiges. Je gagnerai moins bien ma vie, mais ce sera certainement un très bon avantage pour l'efficacité administrative.

Là où le bât blesse, Mme la ministre, c'est dans la rédaction. Et je suis obligé de vous dire avec le plus grand respect: La personne qui a rédigé cet article-là ignore les principes et la jurisprudence en matière de protection des renseignements personnels, et ça tient de l'évidence. Ce n'est pas grave, mais il faut que ce soit corrigé. La Commission d'accès vous dit elle-même ce que d'autres avocats vous ont dit et ce que je vous ai écrit et que j'ai répété dans le mémoire: Quand on écrit dans une loi «sont les seuls renseignements nécessaires», ça vient de dire très clairement, dans l'état actuel de la jurisprudence: Il n'y a pas moyen d'aller recueillir, même avec le consentement, d'autres renseignements. C'est ça, l'état de la jurisprudence. Si vous...

Le Président (M. Vallières): Me Doray, alors, peut-être en conclusion là-dessus, parce qu'on a déjà dépassé la vingtaine de minutes impartie à ma droite. En conclusion, et ensuite Mme la députée de La Pinière. Ça va? Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup, M. le Président. Compte tenu qu'il nous reste 15 minutes pour midi, est-ce que, par consentement, on peut prendre le temps qui est alloué à l'opposition, M. le Président?

Le Président (M. Vallières): Oui, on devra donc dépasser...

Une voix: On a commencé à et quart, M. le Président.

Le Président (M. Vallières): ...de cinq minutes, là, c'est ça.

Mme Houda-Pepin: C'est bien. D'accord. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Président (M. Vallières): Et on va peut-être demander votre consentement. Je sais que Mme la députée de Matapédia, à quelques reprises, a demandé la parole et ne l'a pas obtenue. Alors, je pense bien qu'on peut convenir qu'on va pouvoir procéder jusqu'à environ et 10.

Mme Houda-Pepin: O.K. Très bien. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Vallières): Mme la députée La Pinière.

Mme Houda-Pepin: Deuxièmement, je voudrais demander à la ministre de déposer les lettres, les échanges auxquels elle faisait référence tantôt, avec le document que j'ai demandé, et j'insiste beaucoup sur le mémoire au Conseil des ministres. M. le Président, vous savez que c'est une mine d'informations, et l'opposition serait vraiment ravie de prendre connaissance de ce document.

Le Président (M. Vallières): Bon, comme les documents doivent transiter par la présidence, je vais demander à Mme la ministre si elle a l'intention de déposer les documents demandés.

Mme Harel: Alors, écoutez, j'ai ici diverses lettres en français, en anglais, et la réponse, c'est que... la lettre également que j'ai transmise, lettre en français à M. Bush, lettre en anglais à M. Bush, la réponse également que j'ai transmise. Alors, je vais me faire un plaisir de faire ce dépôt, M. le Président.

Mme Houda-Pepin: L'avis de la Commission des droits de...

Mme Harel: L'avis de la Commission, je ne sais pas, je veux qu'on fasse une vérification. Est-ce qu'on transmet les avis des commissions? Peut-être pouvez-vous, par le biais de votre dévoué adjoint, vérifier auprès de la Commission, si tant est que la Commission peut vous en transmettre une copie, ou vérifiez peut-être, M. le secrétaire, auprès de la Commission, et, dès que la Commission nous donne son autorisation...

Mme Houda-Pepin: Et le mémoire au Conseil des ministres...

Mme Harel: Et le mémoire, je vais le relire avant.

Mme Houda-Pepin: ...ça dépend de la volonté de la ministre.

Mme Harel: Je vais le relire avant. Ha, ha, ha!

Documents déposés

Le Président (M. Vallières): Bien. Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: Bien. Ceci étant dit, M. le Président, j'invite la ministre à collaborer avec nous parce qu'on est là pour bonifier le projet de loi.

M. Courtemanche, Me Gosselin, Me Doray, soyez les bienvenus. J'ai lu en diagonale votre mémoire, malheureusement, parce qu'il nous a été déposé ce matin, mais j'ai retenu de votre présentation un certain nombre de points qu'il me semble important de relever. Vous avez dressé le portrait du logement locatif privé au Québec, 1,2 million de logements sur 1,3 million, c'est beaucoup. Donc, vous êtes un acteur incontournable dans tout débat, que ce soient des états généraux ou des politiques relatives à l'habitation. Vous êtes un acteur majeur.

Vous avez aussi soulevé une question qui nous préoccupe, nous, de l'opposition officielle, c'est la qualité du parc locatif, à quel point il est détérioré. Et, comme vous êtes finalement les propriétaires, les investisseurs, compte tenu que les loyers sont bas, compte tenu des difficultés que vous vivez, il y a... vous avez dit ça vous-même, vous faites un entretien nécessaire au lieu vraiment d'investir dans le logement, et ça, c'est dommage, parce que c'est vraiment une problématique majeure.

La ministre, à chaque fois, réitère le fait que le gouvernement a bougé dans le dossier du logement, et, nous, de notre côté, on serait ravis que vraiment les résultats concrets soient au rendez-vous. Elle a effectivement annoncé, par le biais de la ministre des Finances, quelque 500 millions de dollars, mais, comme on le sait, ces montants-là ne sont pas encore attachés, parce qu'il y a une partie du fédéral et il y a le partenariat, aussi, avec les différents acteurs, que... ce n'est pas encore fait.

Ceci étant dit, le nerf de la guerre pour vous dans le projet de loi n° 26... et, contrairement à la ministre, je ne serai pas aussi sévère dans le jugement, parce que je pense que vous défendez votre pain, vous êtes là pour nous dire que ce projet de loi vous affecte énormément. Par contre, vous savez très bien que le secteur du logement dans lequel vous investissez, et que vous avez bâti aussi le parc locatif, c'est un secteur qui correspond à un besoin de première nécessité. Donc, ce n'est pas comme lorsqu'on achète une voiture, parce qu'on peut se passer d'une voiture. Mais le logement, c'est un bien de première nécessité et, d'une certaine manière, bien que vous soyez dans le privé, vous avez quelque part une responsabilité sociale.

n(11 h 50)n

Alors, ceci m'amène à vous poser la question concernant l'article 21 dans le projet de loi, l'article 21 qui encadre les renseignements personnels qu'un propriétaire doit aller chercher préalablement à la conclusion d'un bail. L'article 21 stipule qu'on peut demander le nom, la date de naissance, l'adresse, le numéro de téléphone du candidat locataire et, s'il a un bail, le nom, l'adresse, le numéro de téléphone du locateur antérieur, le propriétaire antérieur. Est-ce que les informations auxquelles le projet de loi vous habilite dans l'article 21 sont des informations suffisantes ? je ne dirais pas nécessaires, mais suffisantes ? pour faire ce que vous devez faire, ce que vous voulez faire, à savoir une enquête de solvabilité sur le candidat locataire? Et, si non, quelles sont les autres informations qui sont indispensables pour vous pour faire ce travail-là?

Le Président (M. Vallières): Alors, M. Courtemanche.

M. Courtemanche (Luc): Oui. Je vais répondre à une de vos interrogations avant de passer la parole à Me Doray. Je crois que vous n'avez pas aimé ma comparaison avec le concessionnaire automobile qui loue une voiture. Vous parlez de première nécessité. Mais vous allez sûrement être d'accord avec moi, tous les gens présents ici, qu'un logement est, au même titre que la nourriture, une première nécessité. Est-ce qu'une personne qui se présente dans une épicerie et qui n'a pas l'argent comptant pour payer son sac d'épicerie va sortir avec le sac d'épicerie? La réponse, c'est non. Le logement est la même chose que la nourriture, c'est une première nécessité, et les gens qui ont besoin de se loger doivent évidemment absorber le coût correspondant à ce type de nécessité. Pour continuer sur votre autre interrogation, je passe la parole à Me Doray.

M. Doray (Raymond): Mme la députée, le problème, ce que je disais tout à l'heure lorsque vous avez entrepris votre échange de documents, c'est la façon dont la loi est écrite. Elle fait en sorte qu'il est interdit à un propriétaire d'obtenir d'autres renseignements que ceux qui sont mentionnés là. Donc, il est interdit, tel que l'article 21 est rédigé, à un propriétaire d'obtenir un rapport de crédit. Il a beau avoir la date de naissance, le nom et l'adresse, mais, puisque les seuls renseignements considérés comme nécessaires sont ceux mentionnés dans l'article 21, la jurisprudence constante dans le domaine fait en sorte que le propriétaire ne pourrait pas prendre ce renseignement, même avec le consentement du proposant locataire, et aller chercher un rapport de crédit. Il ne pourrait pas, même avec le consentement du proposeur locataire, appeler l'ancien propriétaire pour vérifier si ce proposant locataire qui a cogné à sa porte se comportait de façon correcte et acceptable. Et ça, j'en suis convaincu. Convaincu. Je travaille dans ce domaine depuis 20 ans, j'écris dans ce domaine depuis 20 ans, je plaide dans ce domaine depuis 20 ans, j'enseigne à l'université dans ce domaine depuis 20 ans, j'en suis persuadé. Dire le contraire, c'est de l'ignorance légistique.

Et c'est ça, le problème. On s'évertue à nous dire, en nous parlant de l'article 6 de la Loi sur la protection des renseignements personnels, qui permet avec le consentement d'aller recueillir des renseignements auprès d'un tiers... L'article 6 de la loi n'est pas l'article pertinent dans les circonstances, c'est l'article 5 de la loi qui est pertinent. Quand la ministre parle de l'article 6, malheureusement elle confirme que ses conseillers juridiques ne connaissent pas ce dont ils parlent. C'est bête, mais c'est comme ça.

Mme Houda-Pepin: D'accord, Me Doray, je comprends. Vous êtes un expert en la matière, je pense que tout le monde le reconnaît. Pourriez-vous nous expliquer, parce que, nous, on n'est pas dans le concret des choses... Je suis une candidate à une location, d'accord? Je viens rencontrer un propriétaire. Il me fait remplir un formulaire de cueillette d'informations, au préalable, dans lequel il y a... je dois donner mon nom, mon adresse, mon compte de banque, n'est-ce pas? Quelles sont les informations que vous demandez actuellement et qui sont litigieuses, qui sont contestées, et qui sont considérées comme une source potentielle à la discrimination?

M. Doray (Raymond): Je pense qu'il y a deux paradigmes qu'il ne faut pas mêler. Premièrement, les propriétaires peuvent demander, et c'est reconnu dans l'état actuel de la jurisprudence et c'est reconnu par la Commission d'accès à l'information, peuvent obtenir le nom, l'adresse, le numéro de téléphone, le nom du propriétaire antérieur, peuvent obtenir un consentement pour aller chercher un rapport de crédit, peuvent s'enquérir du comportement du proposant locataire auprès de l'ex-locataire, peuvent demander une preuve de revenus, parce qu'il y a des gens qui n'ont pas nécessairement... je dirais, qui sont un peu mégalomanes, qui vont louer un appartement qu'ils n'ont pas les moyens de payer. Le rapport de crédit ou la preuve de revenus est un bon indicateur qui permet au propriétaire de dire: Écoutez, là, vous gagnez 1 500 $ par mois et vous voulez louer un appartement qui se loue 1 000 $ par mois non chauffé. Il y a un problème.

Alors, à l'heure actuelle, il y a peu de résistance pour ce qui est de l'obtention d'un rapport de crédit. D'ailleurs, dans le cadre du procès, qui est présentement en délibéré devant la Cour du Québec, j'ai interrogé des gens des regroupements des locataires et je leur ai fait dire: Bien oui, il y a un rapport de crédit. C'est effectivement un renseignement qu'un propriétaire a besoin pour savoir si, effectivement, il s'adresse à une personne qui est en mesure ou qui n'est pas en mesure de payer, parce qu'elle a des dettes jusqu'au oreilles.

Il y a des renseignements plus sensibles qui peuvent poser des difficultés. Le numéro d'assurance sociale, il y a un stigmate autour de ce numéro-là. Il n'y a aucune loi au Québec qui interdit l'utilisation du NAS, aucune loi, pas plus au fédéral qu'au provincial. Mais il y a une dimension sensible qui l'entoure, parce que d'aucuns pensent que c'est la clé qui permet d'entrer dans les banques de données informatisées du gouvernement, ce qui est faux. Mais ça fait partie, comme on dit souvent, de la rumeur publique. Alors, ces renseignements-là, le NAS ou le numéro d'assurance maladie, ne sont pas des renseignements dont on a besoin pour aller chercher un rapport de crédit, sauf dans des cas exceptionnels où la personne a un nom très commun avec un prénom très commun: les Michel Côté et les Michel Tremblay, et, à ce moment-là, la seule façon de s'assurer de l'identité de la personne, c'est avec un numéro d'assurance sociale. Mais il y a des moyens d'éviter les problèmes qu'on pourrait imaginer en disant que le propriétaire utilise les renseignements usuels: nom, adresse antérieure et date de naissance. S'il n'est pas capable d'obtenir un rapport de crédit avec ça, qu'il revienne ensuite à la charge en expliquant au proposant locataire: On n'est pas capable de vous identifier, est-ce que ce serait possible d'avoir votre NAS pour avoir la certitude qu'on ne violera pas la vie privée de quelqu'un d'autre en utilisant un rapport de crédit qui ne vous concerne pas? Le propriétaire n'a pas besoin de conserver ces renseignements-là. La loi pourrait très bien prévoir que les renseignements recueillis pour les fins d'obtenir un rapport de crédit doivent être détruits une fois le rapport de crédit obtenu et même que le rapport de crédit doit être détruit. Pourquoi pas? Improvisons.

Mme Houda-Pepin: Donc, ma question concernant les informations dont vous avez besoin pour faire une enquête de crédit, vous y avez répondu en disant: Ce que le projet de loi, et l'article 21, nous permet de faire ne nous permet pas d'avoir une enquête de crédit du tout. Moi, j'ai déjà entendu la ministre, surtout à la période de l'étude de principe, dire que, oui, qu'avec ces éléments-là vous êtes capables d'aller faire une enquête de crédit. Alors, je veux juste qu'on clarifie...

M. Doray (Raymond): C'est à cause de la formulation. Un nom, une adresse et une date de naissance permettent dans 97 ou 98 % des cas d'obtenir un rapport de crédit avec le consentement de la personne concernée. Mais, si on écrit dans une loi, comme on l'a fait ici, «sont seuls considérés comme étant des renseignements nécessaires les renseignements suivants», il n'est pas possible d'utiliser ces renseignements pour aller en chercher d'autres. Comprenez-vous? Ce qu'on donne ici, en fait, aux propriétaires, ce sont des renseignements avec lesquels ils ne pourront rien faire, même avec le consentement.

n(12 heures)n

Mme Houda-Pepin: D'accord. La Commission des droits de la personne, qui est passée avant vous, nous a dit que l'enquête de crédit n'est pas pertinente pour déterminer les habitudes de paiement de loyer. Parce que la Commission est très préoccupée par le volet de la discrimination. Alors, j'aimerais savoir comment est-ce que vous répondez à ça?

Puis la deuxième question, parce que le temps presse, c'est concernant les versements de sommes que vous exigez dans la phase préalable à un bail. Je sais que, dans certains cas, vous demandez 100 $ et, dans d'autres cas, vous demandez 200 $. À quoi d'abord servent ces sommes-là? Est-ce que c'est pour faire votre... financer votre enquête de crédit ou c'est pour autre chose? Et comment s'établissent ces montants-là? Et pourquoi, finalement, vous avez introduit, parce que ce n'était pas quelque chose qui était là avant, vous avez introduit cette exigence que, avant même de signer un bail, il faut qu'on paye 100 ou 200 $ au propriétaire en remplissant un formulaire, en même temps qu'on remplit un formulaire d'enquête?

Le Président (M. Vallières): Me Doray.

M. Doray (Raymond): Je vais répondre à la première partie de votre question. Si vous permettez, je laisserai M. Courtemanche répondre à la seconde, ou Me Gosselin.

Mais, pour ce qui est de l'inquiétude de la Commission des droits de la personne... Écoutez, la capacité de paiement d'un individu, ça forme un tout. Je pense que c'est dénaturer la réalité ? et je le dis avec respect ? que de dire que le rapport de crédit ne permet pas à un propriétaire d'avoir une évaluation de la capacité de paiement parce qu'on n'y parle pas nécessairement du paiement du loyer au cours des dernières années par le locataire.

Le propriétaire ? et nous le disons dans notre mémoire ? doit pouvoir appeler le propriétaire antérieur pour savoir si, effectivement, le loyer a été payé correctement. Mais il a besoin d'autres choses. Il a besoin de savoir si la personne qui s'adresse à lui n'est pas dans un niveau d'endettement tel que... elle était peut-être capable de payer le loyer de 500 $ à son ex-propriétaire l'année dernière, mais là elle vient de louer un appartement de 1 000 $. Comment le propriétaire qui doit assumer une hypothèque et qui doit compter sur cet argent peut-il savoir si son locataire a les moyens de le payer, comme n'importe quel autre créancier: banques, institutions financières ou assureurs? C'est deux réalités complètement différentes.

La question de la discrimination, il est possible, il est toujours possible que, même sans poser de questions et sans obtenir de rapport de crédit, un propriétaire ait un comportement qui soit discriminatoire. On n'a pas besoin de renseignements pour être discriminatoire, c'est une façon d'être. On dit: Je ne veux pas de Noirs dans mes logements puis je trouve un prétexte pour ne pas les avoir; je ne veux pas de personnes avec des enfants. Ça n'a rien à voir. Et la Commission pourra toujours exercer ? la Commission des droits ? sa juridiction lorsque les faits permettent à quelqu'un de penser que ce n'est pas parce qu'on lui a refusé le logement en raison de son incapacité de payer, mais c'est parce qu'on avait des intentions malveillantes basées sur un critère prohibé par la Charte. C'est comme deux réalités qui peuvent vivre de façon parallèle sans difficultés.

M. Courtemanche (Luc): Concernant votre deuxième question, si vous allez à la page 28 de notre mémoire, vous allez voir... pardon, vous y êtes. Vous allez voir que CORPIQ est complètement en accord avec Mme la ministre à l'effet que d'empêcher un locateur d'exiger un montant d'argent à un proposant locataire... Nous sommes tout à fait en accord. Pourquoi cette pratique-là s'est établie au fil des ans? La question demeure sans réponse. C'est possiblement une minorité de propriétaires qui ont décidé d'appliquer ça. Mais la Corporation est tout à fait en désaccord avec ce genre de versement. Par contre, on veut clarifier la chose, que, dans le bail, un locateur peut exiger le premier versement du loyer à la signature du bail. Ça, ça doit demeurer. Mais un versement d'argent à un proposant locataire, nous sommes tout à fait d'accord à éliminer cette...

Mme Houda-Pepin: Dernière question, je pense, parce qu'il reste très peu de temps. Avec ce projet de loi, nous sommes face à deux positions diamétralement opposées. Vous, vous dites: Donnez-nous les moyens pour assurer une saine gestion de nos entreprises. Et vous considérez que le fait de faire une enquête de solvabilité totale et entière, c'est un outil indispensable pour vous pour assurer cette bonne gestion. Et, de l'autre côté, nous avons les associations représentant les locataires qui, elles, soutiennent que c'est un contrôle abusif. Et vous avez aussi la Commission des droits de la personne qui nous dit qu'elle a des inquiétudes quant à la discrimination, aux effets directs et indirects de tels contrôles. Est-ce que vous avez réfléchi sur le point de rencontre? Jusqu'où est-ce que vous pouvez aller dans votre volonté de vouloir harmoniser les rapports des propriétaires et des locataires? Jusqu'où est-ce que vous pouvez aller pour bonifier le projet de loi n° 26 afin que l'on puisse éventuellement avoir une pièce de législation qui atteigne le niveau d'équilibre que l'on recherche?

M. Courtemanche (Luc): Vous savez, Mme Pepin, fondamentalement, la très grande majorité des locateurs et des locataires au Québec sont en parfait accord et vivent en parfaite harmonie. Ça, j'en suis persuadé. On le vit à tous les jours. On entend parler des propriétaires, des locataires. Ils vivent en harmonie. Le fait qu'il y a certaines restrictions ou problèmes dans différents domaines de notre secteur d'activité provient du fait d'une minorité. Je ne vous cacherai pas qu'autant du côté des locateurs que des locataires il y a des gens qui ne font pas les choses adéquatement. La demande qu'on fait, à la conclusion de notre mémoire, à l'effet de proposer des états généraux sur l'habitation, est justement dans cette optique de mettre tous les intervenants autour d'une table, autant les locataires que les propriétaires et que tous les intervenants du domaine de l'immobilier, afin qu'on puisse, une fois pour toutes, établir des bases solides sur lesquelles on va pouvoir bâtir l'avenir du Québec et ainsi pouvoir loger tous les locataires de façon équitable et adéquatement. C'est la base d'une relation harmonieuse entre les deux parties.

Mme Houda-Pepin: Mais pour le projet de loi n° 26?

M. Courtemanche (Luc): Concrètement, pour le projet de loi n° 26, à la page 22 de ce document-ci, vous avez nos recommandations, O.K.? à l'effet que... Il y a cinq ou six recommandations qu'on aimerait que vous preniez connaissance, qui pourraient améliorer, encore une fois, les relations entre les locataires et les propriétaires, dans le cadre de ce projet de loi là. Donc, vous avez...

Concernant effectivement l'article 21 du projet de loi n° 26, qui doit être réécrit afin de reconnaître explicitement le droit au locateur d'obtenir, notamment du proposant locataire, les renseignements personnels et les consentements tels que... dont vous avez la liste ici:

Le nom, l'adresse, la date de naissance et le numéro de téléphone du proposant locataire;

Le nom de l'employeur, le salaire annuel, le caractère permanent ou occasionnel de l'emploi ainsi qu'un consentement pour vérifier l'exactitude de ces renseignements;

Le nom, l'adresse et le numéro de téléphone du propriétaire actuel du proposant locataire et, si ce dernier a déménagé au cours des deux dernières années, les noms, adresses et numéros de téléphone des locateurs antérieurs, au cours des deux dernières années;

Un consentement permettant au locateur de vérifier auprès du ou des locateurs antérieurs le comportement du proposant locataire relativement à l'entretien du logement, à la jouissance paisible des lieux, au respect des biens du locateur et au paiement assidu du loyer. Parce que n'oubliez pas qu'une de nos contraintes ou lorsqu'on signe un bail avec un proposant locataire, on doit lui fournir la jouissance paisible des lieux, c'est une de nos obligations;

En plus, une autorisation visant à obtenir un rapport de crédit auprès d'un agent de renseignements personnels et exceptionnellement le NAS lorsque les autres renseignements recueillis ne permettent pas d'identifier positivement le proposant locataire aux fins d'obtenir un rapport de crédit. Comme Me Doray vous mentionnait tantôt, des Michel Tremblay ou des Jean Riverin, il peut y en avoir 50 dans la province. On se doit de s'assurer qu'on a la bonne personne devant nous et qu'on a les renseignements relativement à cette personne-là;

Le cas échéant, les nom, date de naissance, adresse, numéro de téléphone de la caution ainsi qu'une autorisation de celle-ci à obtenir un rapport de crédit à son sujet;

Et, au moment de la signature du bail, le locateur devrait être en mesure d'obtenir le modèle et le numéro d'immatriculation du véhicule du locataire, si le bail évidemment inclut un espace de stationnement. Le numéro de téléphone au travail du locataire devrait également être fourni au propriétaire pour des situations d'urgence, s'il y a un bris de... de feu ou d'inondation.

Le Président (M. Vallières): Bien. Alors, ceci nous amène, avec votre consentement, à madame... oui, oui, je n'ai pas oublié Mme la députée de Matapédia. Nous allons terminer nos travaux avec Mme la députée de Matapédia. Alors, questions, Mme la députée.

n(12 h 10)n

Mme Doyer: Merci, M. le Président. Alors, je dois vous faire quelques remarques d'entrée de jeu et, ensuite, j'irai à vous poser deux questions.

Je trouve que le ton que vous utilisez aujourd'hui devant nous est intéressant et plus respectueux en général, et intéressant en termes de discussion et d'avancement par rapport au projet de loi n° 26, que celui que vous avez utilisé dans la lettre envoyée à M. Bush. Et vous avez écrit dans cette lettre-là, puis je vais en lire quelques extraits assez vite pour ne pas indisposer mes collègues.

«Le projet de loi 26, ainsi que toutes les autres lois et règlements de la Régie du logement, du Code civil du Québec, etc., se résume à la confiscation de la propriété privée. Vous comprenez pourquoi nos membres n'ont pas l'intention de respecter cette loi.»

Là, vous continuez plus loin, vous dites: «De plus, certains de nos membres, sans le savoir, hébergent probablement des criminels et des terroristes parce que nos droits actuels d'enquête sur des candidats locataires sont très limités et difficiles à appliquer.»

Alors, vous continuez, vous dites: «De plus, dans le cadre de l'étude de ce projet de loi 26, la majorité des locataires respectables sont contre ce projet parce qu'ils veulent une certitude quant aux références de la personne qui sera leur voisin.»

Alors, dans le ton de cette lettre, vous parlez beaucoup de sécurité intérieure alors que, dans le fond, le projet de loi n° 26, comme vous l'avez dit et que ma collègue l'a dit tantôt, veut arriver à un équilibre entre les besoins et les droits légitimes des propriétaires et des locataires de rencontrer leurs besoins respectifs, celui d'avoir un investissement qui est rentable, qui est très légitime, et celui qu'ont les locataires d'avoir des logements adéquats et d'avoir droit au logement aussi.

Alors, moi, je trouve que vous avez ? et j'ai utilisé un terme... dans mon comté, on utilise souvent le terme «charrier» ? vous avez charrié joyeusement et, un moment donné, comment vous faites pour concilier ça avec... Le chemin est très... la ligne est très mince entre la discrimination quand on ouvre trop par rapport au droit, que vous voulez, d'avoir des renseignements personnels, accès à des renseignements personnels.

Alors, est-ce que vous avez toujours l'intention de ne pas respecter la loi n° 26? Ça, c'est ma première question. Et ma deuxième question c'est: En quoi la façon de faire américaine protège mieux la façon de faire québécoise et même canadienne, je dirais, dans l'existence des rapports propriétaire-locataire? Parce que vous avez vu comme moi, dans un reportage, qu'un propriétaire en Floride disait qu'il avait hébergé un des pilotes et il était un peu catastrophé de ça. Et, moi, je vous dis: la ligne est très mince de ce côté-là. Puis en quoi c'est supérieur, chez nos voisins américains, à nos façons de faire à nous de ce côté-là?

Le Président (M. Vallières): Bien. Alors, M. Courtemanche, vous aurez le mot de la fin.

M. Courtemanche (Luc): Oui. Concernant le respect du projet de loi n° 26, premièrement, vous savez comme moi que ce projet de loi n'est pas encore adopté. Nous verrons, lorsque celui-ci sera adopté, avec, espérons-le, des amendements, les options qui s'offriront à nous afin de faire comprendre, si ça n'a pas été le cas aujourd'hui, nos inquiétudes face à toute cette problématique, au Québec, du logement.

Vous nous comparez ou on se comparait avec les États-Unis. Vous savez, depuis 21 ans que l'immobilier au Québec est régi de façon abusive par toutes sortes de lois, de contraintes qui nous empêchent de mener nos entreprises à terme... Tout ce qu'on veut, tout ce qu'on recherche, avec nos arguments, notre mémoire, c'est qu'il y ait une harmonie entre toutes les parties, et la cueillette de renseignements provient du fait ou va nous permettre de autant assurer la sécurité de nos locataires en place et les qualifier adéquatement pour qu'ils rencontrent leurs obligations découlant du bail. Au risque de me répéter, c'est un domaine fantastique, l'immobilier au Québec, j'ai investi dans celui-ci depuis plusieurs années et je ne changerai pas de domaine aujourd'hui. Par contre, nous avons tellement de contraintes, de toutes sortes. Le propriétaire immobilier au Québec n'est pas reconnu à sa juste valeur. Je vous mentionnais des chiffres tantôt, du nombre de millions de dollars qu'on investit d'année en année, les milliers d'emplois qu'on crée d'année en année. On se doit d'avoir un cadre plus respectueux autant pour les propriétaires que les locataires afin que le Québec se développe de façon harmonieuse et que tous les gens, citoyens, locataires soient logés de façon adéquate. Merci, M. le Président, Mme la ministre, chers membres de la commission.

Le Président (M. Vallières): Très bien. C'est nous qui vous remercions. Alors, cette première partie de nos travaux est complétée. Nous ajournons donc jusqu'aux environs de 15 heures cet après-midi, après les affaires courantes. Merci.

(Suspension de la séance à 12 h 15)

 

(Reprise à 15 h 58)

La Présidente (Mme Doyer): Alors, Mesdames, Messieurs. La commission de l'aménagement du territoire reprend ses travaux. Je vous rappelle que le mandat de la commission est de tenir des consultations particulières sur le projet de loi n° 26, Loi modifiant la Loi sur la Régie du logement et le Code civil.

Je vais demander aux membres de la commission ainsi qu'aux autres personnes présentes dans la salle de bien vouloir fermer leur téléphone cellulaire pendant la séance.

Est-ce qu'il y a des remplacements, M. le secrétaire?

Le Secrétaire: Oui, Mme la Présidente, il y a remplacement. M. Ouimet (Marquette) est remplacé par Mme Houda-Pepin (La Pinière).

La Présidente (Mme Doyer): D'accord. Je vous remercie. Et nous allons continuer les échanges, tel que nous les avons commencés ce matin, sur le projet de loi n° 26. Cet après-midi, à 15 heures... Je regrette le retard, mais nous avions la remise... une motion avec la remise des Prix du Québec, et la motion en Chambre vient juste d'être donnée pour les travaux de cette commission parlementaire.

Nous allons entendre le Regroupement des comités logement et associations de locataires du Québec: M. Denis Cusson, coordonnateur et Mme Anne Thibault, membre du conseil d'administration.

Mme Houda-Pepin: Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Doyer): Oui, Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: Merci, Mme la Présidente. Étant donné que nous sommes en retard, je voudrais vous suggérer que l'on puisse, de consentement avec la ministre, déborder les 18 heures pour aller à 19 heures afin qu'on puisse entendre les groupes qui avaient été à notre programme.

n(16 heures)n

La Présidente (Mme Doyer): Je crois que ce serait peut-être possible d'entendre un groupe qui était supposé se faire entendre aujourd'hui demain matin, de consentement. Je pense que les personnes sont dans la salle et que le personnel de Mme la ministre... Et, de consentement, nous pourrions peut-être entendre le groupe que nous ne pouvons entendre aujourd'hui demain, si c'est possible.

Mme Houda-Pepin: Lesquels? Parce que nous avons trois groupes.

La Présidente (Mme Doyer): La Ligue des propriétaires de Montréal, peut-être?

Mme Houda-Pepin: Bien. Étant donné que les gens se sont déplacés de Montréal...

(Consultation)

Mme Houda-Pepin: Je pense que ce serait mieux, étant donné que les gens se sont déplacés de Montréal, de les entendre, et puis on aura fini. C'est un peu notre responsabilité d'avoir débordé sur l'ordre du jour.

La Présidente (Mme Doyer): Ça va. Alors, nous allons commencer les travaux et nous allons entendre les trois groupes qui étaient prévus au programme. Merci. M. Cusson. Mme Thibault.

Regroupement des comités logement
et associations de locataires
du Québec (RCLALQ)

M. Cusson (Denis): Bonjour. Mme la Présidente, Mme la députée de La Pinière, Mme la ministre, MM., Mmes les députés. Et aussi, je voudrais souhaiter la bienvenue à tous les locataires qui nous ont accompagnés, qui sont présents dans la salle et aussi à l'extérieur de la salle, qui sont venus nous appuyer et assister à cette intervention.

Mon nom est Denis Cusson. Je suis coordonnateur au Regroupement des comités logement et associations de locataires du Québec. Nous remercions la présente commission parlementaire de nous permettre de présenter le point de vue, les doléances des locataires du Québec, lesquels constituent près de la moitié des ménages québécois, à propos de la discrimination qu'ils vivent lorsque vient le temps de chercher un nouveau logement.

Pour représenter le Regroupement, je suis accompagné, à ma droite, de Mme Anne Thibault, qui est membre du conseil d'administration du Regroupement et intervenante au Comité logement de la Petite-Patrie à Montréal.

Donc, sans plus tarder, étant donné que nous avons très peu de temps devant nous et que vous avez sûrement déjà beaucoup de questions à nous poser, je céderai la parole à Mme Thibault.

Mme Thibault (Anne): Alors, bonjour. Avant de commencer comme tel, on aimerait vous déposer, en annexe du mémoire du Regroupement que vous avez reçu vendredi, cinq annexes, dont la publicité qui est faite par un bureau d'avocats qui se spécialise dans l'achat de renseignements personnels, des exemplaires de formulaires d'offre de location, les différentes campagnes mises de l'avant par les associations de propriétaires et, finalement, un jugement de l'Île des Soeurs sur une cause en fixation de loyer où on va avoir l'occasion d'y revenir un peu plus tard lors de notre présentation.

D'entrée de jeu, nous aimerions qu'on soit sur le même pied d'égalité quand on parle des relations locataire-propriétaire. Je m'explique: on aimerait vous faire une distinction entre un propriétaire occupant et un propriétaire investisseur. Pour nous, il est très important que, quand on parle de propriétaires ou de petits propriétaires, on fait référence à des propriétaires occupants, c'est-à-dire un propriétaire qui habite dans l'immeuble qu'il possède, mais qui ne possède pas d'autres immeubles, contrairement à des propriétaires investisseurs où, eux, le nombre de logements qu'ils possèdent déborde leur toit.

Alors, nous avons fait un petit exercice. Alors, nous avons été du côté de la CORPIQ, qui possède 10 000 membres et qui contrôle 145 000 logements locatifs, ce qui fait, en moyenne, 14,5 logements par propriétaire membre de la CORPIQ. L'Association des propriétaires d'appartements du Grand Montréal, eux, comptent 100 membres et possèdent 20 000 logements. Donc, ce que ça veut dire, c'est 200 logements par propriétaire membre de cette association de propriétaires.

Pour ce qui est de La Ligue des propriétaires de Montréal, leur nombre de membres est à 1 200, et il y a l'Association des propriétaires du Québec où le nombre de membres est à 4 800. On n'a pas réussi à obtenir jusqu'à date le nombre de logements possédés par les membres de ces deux associations de propriétaires là.

Pour nous, c'est important de voir la chose en tenant compte que les associations de propriétaires qui vont défiler devant vous lors de cette commission parlementaire sont avant tout des investisseurs immobiliers et, même s'ils agitent à tour de bras les préoccupations des propriétaires occupants, ce n'est pas eux qu'ils représentent.

Alors, j'aimerais ça que, pour le bien et la compréhension de la problématique que nous allons vous soulever, nous laissions de côté la situation de notre oncle, de notre soeur et de notre beau-frère, parce que ceux qui dictent les règles du jeu en matière de logement locatif, ce sont les propriétaires investisseurs.

La discrimination que vivent les ménages locateurs, lors de la recherche d'un logement, n'est pas une situation qui est récente. Au début des années quatre-vingt-dix, les personnes les plus démunies, c'est-à-dire ceux qui sont sans emploi, les personnes qui sont sur l'aide sociale, les personnes qui sont en chômage et les personnes qui sont sur le salaire minimum, ont vu soit leurs revenus diminuer comparativement aux loyers, eux, qui sont en constante progression.

Lors du début des années quatre-vingt-dix, comme on assistait à un grand nombre de ménages qui consacraient un taux d'efforts élevé pour se loger, les associations de propriétaires se sont mis à confectionner des baux maison, c'est-à-dire des baux où on retrouvait des renseignements personnels, l'obligation d'une caution et où on intégrait aussi des règlements qui étaient soit tendancieux ou illégaux, ce qui a fait qu'à partir du début des années quatre-vingt-dix le Regroupement s'est battu pour que les baux maison soient retirés de la circulation pour faire place à un bail obligatoire qui a été finalement adopté par l'Assemblée nationale en 1996.

Et, à l'intérieur du bail obligatoire, pour ceux qui ne l'auraient jamais vu, à l'intérieur du bail obligatoire, nous retrouvons comme information: nom, adresse et numéro de téléphone du locataire et naturellement la contrepartie: nom, adresse et numéro de téléphone du propriétaire.

Pour contrer le bail obligatoire adopté par l'Assemblée nationale en 1996, les associations de propriétaires se sont mises à élaborer des formulaires d'offre de location. À l'intérieur desdits formulaires, on retrouve exactement les informations qui étaient interdites dans le bail obligatoire. Donc, on retrouve les renseignements personnels en abondance, la nécessité d'une caution et, finalement aussi, on y retrouve un engagement du locataire qui signe de tels formulaires à signer éventuellement un bail si jamais on est l'heureux élu du propriétaire.

Alors, face à tous ces abus, c'est pour ça qu'on se retrouve, encore une fois aujourd'hui, ici, pour demander que le gouvernement encadre le processus de recherche de logement et interdise à toutes fins pratiques les formulaires d'offre de location mis sur pied par les différentes associations de propriétaires.

La situation de rareté des logements que l'on vit présentement dans les grands centres urbains, que ce soit à Montréal, à Québec ou à Hull, ne fait qu'accentuer la discrimination envers des ménages qui, de toute façon, depuis les années quatre-vingt-dix, vivent la discrimination. Et, quand je dis «accentuer», ça veut dire que, naturellement, les sans-emploi sont ceux qui ont encore énormément de difficulté à se trouver un logement, mais s'ajoutent à ces personnes-là des jeunes, des personnes des communautés culturelles et les familles avec présence d'enfants.

L'autre aussi aspect de la rareté du logement qu'on connaît à l'heure actuelle dans les grands centres urbains, on voudrait vous faire prendre conscience que ça exerce des pressions à la hausse sur le prix des loyers, c'est-à-dire qu'on organise présentement des visites collectives pour un seul logement, et cette pratique naturellement favorise la surenchère au niveau du coût du loyer. Donc, on est prêt à accepter un loyer anormalement plus élevé que ce que la loi permettrait si on avait la chance de pouvoir aller en révision du coût du loyer en tant que nouveau locataire.

n(16 h 10)n

La quête du locataire idéal par les associations de propriétaires est une pratique qui coûte cher en respect des droits de la personne et de la vie privée. Le bureau d'avocats Tibshirani ? je ne sais pas si je le prononce très bien ? eux, font carrément du trafic de renseignements personnels. Donc, on achète des jugements de la Régie du logement et les formulaires d'offre de location. Naturellement, plus que vous êtes prêts à vendre de l'information personnelle, plus le bureau d'avocats va vous offrir un montant d'argent qui va être plus alléchant.

À ce bureau d'avocats, nul besoin du consentement du locataire pour transmettre ces informations à une tierce personne qui est en l'occurrence souvent un propriétaire. Ces informations servent à mettre sur pied une liste de mauvais locataires que les propriétaires peuvent consulter librement et gratuitement.

Le gouvernement du Québec se doit donc d'intervenir en fonction de l'intérêt collectif et non pas en fonction d'intérêts dits individuels et spéculatifs. Le gouvernement a la responsabilité sociale de procurer à tous les citoyennes et citoyens du Québec le droit à un logement décent et à un coût respectant sa capacité de payer.

Le Regroupement est, comme je le disais tantôt, contre l'utilisation d'un formulaire de location parce que, quel que soit le formulaire de location, ce formulaire ne sert qu'à exercer une discrimination et une discrimination à l'endroit des populations les plus vulnérables de notre société.

De plus, quand on regarde les informations contenues dans le projet de loi n° 26 qui est présentement à l'étude, nous les jugeons non nécessaires à la location d'un logement. Nous aimerions que vous preniez surtout en considération, à la page 4 du mémoire qui a été produit du Regroupement... où le juge Pigeon dit que «"nécessaire", en droit, veut dire une chose absolument indispensable, ce dont on ne peut rigoureusement pas se passer. En somme, une nécessité inéluctable».

La première... Bon. La fameuse date de naissance. Au niveau des groupes logement, c'est sûr qu'on demande le retrait de la date de naissance, car cette information ouvre la porte à une enquête de crédit. Et, quand on dit enquête de crédit, c'est évident qu'on va disqualifier les ménages locateurs en fonction de leurs revenus ou, plus précisément, en fonction de leur manque de revenus ou d'un revenu qui n'est pas sur une base régulière comme, disons, exemple, un travailleur autonome.

L'autre chose, c'est qu'avec la date de naissance on ouvre la porte à l'étude de crédit, donc on ouvre la porte à Equifax. Et, quand, chez Equifax, vous pouvez avoir accès au dossier d'un locateur... et à l'intérieur du dossier du locateur, vous retrouvez les informations suivantes: l'adresse actuelle et les adresses précédentes du consommateur, donc lire locataire ? c'est à la page 7 du mémoire ? ou de la consommatrice; le numéro d'assurance sociale du consommateur; la liste des membres d'Equifax ou des parties autorisées qui ont reçu une copie de la fiche de crédit pour un octroi de crédit ou pour une autre raison; l'histoire de crédit ou information bancaire; toutes les cartes de crédit actives avec une cotation référant à la régularité de paiement, le numéro de la carte de crédit, le nom des autres personnes mis au compte, le solde au compte, les mensualités minimum et la limite de crédit autorisée.

Donc, la date de naissance permet d'accéder à des informations que l'actuel projet de loi cherche à empêcher. De plus, notre profil de consommateur n'a rien à voir avec nos habitudes de paiement de loyer. Que je paie Visa ou bien La Baie, c'est quoi le rapport avec le loyer?

Deuxième information. Les cordonnées de l'ancien propriétaire doivent rester des informations à divulguer sur une base volontaire. Premièrement, les nouveaux ménages qui sont à la recherche d'un premier logement ne pourront pas, eux, donner ce type d'information, puisque c'est leur premier logement. Dans d'autres circonstances, il se peut qu'un locataire ne veuille pas divulguer cette information, puisqu'il peut y avoir... soit le locataire a utilisé des recours à la Régie du logement en termes de fixation de loyer pour obliger le propriétaire à faire des réparations urgentes et nécessaires, et ce locataire-là n'aura pas... c'est-à-dire, le propriétaire de ce locataire-là n'aura pas nécessairement le goût de donner des bonnes références, puisqu'il a utilisé des recours même si la loi lui concède ce type de recours là.

Et l'autre chose aussi, c'est que ça ouvre la porte à des... ça peut ouvrir la porte à certains préjugés ou à des vengeances, dans le sens qu'on peut, à un moment donné, dire que, moi, ce locataire-là, je vais le blaster parce qu'il n'a pas finalement marché comme, moi, j'aurais souhaité qu'il marche en tant que propriétaire.

J'aimerais porter à votre attention aussi qu'à l'intérieur du bail obligatoire on retrouve déjà les coordonnées de notre ancien logement, si on en possède un. Donc, on retrouve déjà notre ancienne adresse et la ville où on demeurait. Donc, normalement, si on est un peu débrouillard ? et je pense que les associations de propriétaires sont assez vite là-dessus ? normalement, il est assez facile de trouver le nom du propriétaire.

Bon, numéro d'immatriculation du véhicule automobile dans les cas où il y a un stationnement en location. Là, j'avoue que, dans un premier temps, on s'est tous posé la question: pourquoi ce type d'information? Alors, on s'est dit: c'est seulement une occasion de permettre au propriétaire investisseur de collecter davantage de renseignements sur un locataire et en cas de poursuite. Alors, là, c'est toujours l'idée qui est sous-entendue, c'est que tous les locataires du Québec sont potentiellement des fraudeurs.

Et on aimerait attirer à votre attention que c'est comme si on infantilisait les locataires, à savoir que, quand on possède un espace de stationnement, c'est comme si on n'était pas capable de gérer soit les périodes de déneigement ou soit gérer qui stationne à notre place.

Et, concernant les formulaires d'offre de location, on aurait une couple de commentaires à vous faire, à savoir que, si jamais le gouvernement permet les formulaires de location, nous espérons que les formulaires qui ne respectent pas les informations contenues dans la loi éventuellement... c'est-à-dire que, si les propriétaires en rajoutent d'autres ou en collectent d'autres, on espère que ça va être considéré comme de la cueillette illégale, donc possibilité de poursuite en dommages et intérêts punitifs.

Notre autre commentaire, c'est: si le gouvernement permet encore une fois l'usage de formulaires d'offre de location, nous espérons que le candidat locataire qui est obligé d'en remplir 20, 30 fois avant de dénicher un logement... nous espérons que ça ne liera pas le locataire comme c'est le cas à l'heure actuelle, c'est-à-dire que, quand on signe un formulaire d'offre de location, à l'heure actuelle, ça nous engage à signer éventuellement un bail. Alors, on espère que, si jamais il y a un formulaire d'offre de location et que les candidats locataires doivent en compléter un certain nombre, que...

La Présidente (Mme Doyer): ...qu'il vous reste trois minutes.

Mme Thibault (Anne): O.K. Et l'autre affaire, j'aimerais vous souligner qu'aucune solution n'est apportée concernant le phénomène des visites en groupe. Comme je le disais tantôt, ça a un effet sur la surenchère au niveau du coût des logements. Alors, nous, ce qu'on vous propose, c'est vraiment de procéder à un registre des baux au niveau de la Régie du logement pour permettre à un locataire de consulter le registre et être en mesure d'utiliser le recours prévu par la loi qui est la révision du coût du loyer par le nouveau locataire.

Au niveau du non-paiement de loyer, je veux dire, là, ce qu'on aimerait, c'est que la loi introduise des motifs sérieux au niveau du non-paiement de loyer. Présentement, on n'a pas d'argent, il n'y a pas de motif qu'un locataire peut évoquer. Pourtant, la perte d'emploi, une rupture, la fin d'une cohabitation, la maladie sont des motifs sérieux qui peuvent conduire un locataire en difficulté temporaire de payer son loyer. Cette ouverture éviterait des drames humains et beaucoup d'humiliation pour les ménages locataires.

Et, moi, je vais vous citer mon expérience à la Régie du logement. Je suis allée à Village olympique vendredi passé où, en une demi-journée que j'étais là, j'ai vu au moins quatre, cinq ménages qui sortaient de l'audition, qui avaient la moitié de l'argent de leur loyer en poche et qui étaient en train de supplier un propriétaire, comme dans les romans de Dickens ou de Émile Zola, comme si on était rendu au début du siècle, pour ne pas perdre le toit qu'ils avaient sur la tête.

n(16 h 20)n

On est bien conscient qu'au niveau de la pauvreté, O.K., les évictions de locataires pour cause de pauvreté, on est bien conscient que ce n'est pas la loi qui régit les relations locataires-propriétaires qui va régler le problème. Le problème se situe avec d'autres ensembles de mesures gouvernementales comme, entre autres, procéder à l'abolition complète de la coupure du partage de logement, l'augmentation des barèmes d'aide sociale et l'augmentation du salaire minimum afin de tenir compte des dépenses réellement encourues par les ménages locataires.

Et l'autre chose, aussi, c'est l'allocation-logement unifiée ou le supplément au loyer, là, c'est de l'aide que l'État verse aux ménages pour combler une partie entre le revenu et le loyer. On aimerait ça qu'il y ait un contrôle obligatoire là-dessus parce que, quand des fonds publics sont engagés ? cette année, c'est 125 millions, c'est pas des pinottes ? qui sont versés en aide aux logements, on aimerait ça que l'État contrôle les hausses de loyer pour être en mesure de... bon, un, une saine gestion et, deux, au moins contrôler la surenchère au niveau du prix des logements. Je m'arrête parce qu'on n'a plus de temps.

La Présidente (Mme Doyer): Je vous remercie, Mme Thibault. Alors, je vais donner la parole à la ministre des Affaires municipales et de la Métropole.

Mme Harel: Merci, Mme la Présidente. J'apprécierais si vous me mentionniez, dans l'échange qu'on va faire, peut-être la moitié du temps, pour que mes collègues qui, ce matin, auraient souhaité des échanges aussi aient le temps de le faire cet après-midi.

La Présidente (Mme Doyer): Oui. Dans 10 minutes, je vous le dis.

Mme Harel: Parfait, merci. Alors, bienvenue, M. Cusson, bienvenue, Mme Thibault, et bienvenue, vous tous qui voulez par votre présence manifester votre appui à leur position, à celle que vous m'avez exprimée quand vous êtes venus me voir à Montréal et celle que vous exprimez à Québec aujourd'hui.

J'aimerais savoir, Mme Thibault, vous dites: Il faut faire la distinction ? vous avez commencé comme ça votre présentation ? entre les petits propriétaires occupants et ceux qui sont des propriétaires, et vous avez...

Mme Thibault (Anne): Investisseurs.

Mme Harel: Investisseurs. Bon. Alors, vous, quand vous dites ça, vous voulez quoi? Que la loi prévoie une différence de fonctionnement lorsque c'est un propriétaire occupant ou lorsque c'est un propriétaire investisseur? Est-ce que c'est ça?

Mme Thibault (Anne): Non, on ne pense pas que la loi doit prévoir des mécanismes différents, sauf que ce qu'on veut spécifier, c'est que la majorité des locataires, ils ont comme propriétaires des propriétaires investisseurs. Et ce qu'on aimerait souligner, c'est que, si le gouvernement veut donner une aide pour permettre à des gens d'accéder à la propriété de leur logement, que ce soit sous forme d'un bungalow ou sous forme d'un immeuble avec un ou deux ou trois logements à Montréal, que ça ne se fasse pas sur le dos des locataires, donc que ce soit des mesures qui soient à côté.

Mme Harel: Bon, regardez, moi, j'ai ici un document de travail qui a été préparé par l'INRS-Urbanisation-Culture et Société. Alors, ce document de travail porte sur la réalité du logement privé au Québec, et c'est fait depuis octobre 2001. Et ce que ça m'indique, c'est ceci: Les logements situés dans des immeubles de un à trois logements ? on peut dire que ce sont de petits logements, là...

Mme Thibault (Anne): ...

Mme Harel: ...c'est des triplex, trois logements ? sont possédés essentiellement par des individus ou des groupes de personnes apparentées ? ça, ça veut dire parents, là, vous savez, un couple, enfin ? à 91,8 %, et la moitié habitent l'immeuble. Donc, les immeubles de trois logements et moins appartiennent à un individu ou un couple, si vous voulez, à 91,8 %. C'est le cas des immeubles de quatre et cinq logements. Là, ça passe de 91,8 % à 90,5 %. Ça, ça veut dire que, neuf fois sur 10, tous les immeubles au Québec de cinq logements et moins appartiennent, soit à des individus, une personne seule ou à un couple, conjoints de fait ou époux.

Et donc la réalité du logement privé au Québec est très, très, très largement, vraiment très, très, très, très largement une réalité de petits propriétaires. Ça ne signifie pas que les buildings, si vous voulez, de plus de cinq logements, mais tous les cinq logements et moins qui sont quand même majoritaires ? disons, moi, j'habite à Montréal puis il y a beaucoup de triplex évidemment ? à 91,8 %, c'est presque 92 %. Première réalité. Donc, cette réalité des petits propriétaires qui habitent l'immeuble même ou qui sont propriétaires en tant qu'individus et non pas en tant que corporation ou numéro, etc., c'est la plus importante pour les cinq logements et moins.

Et puis il y a aussi le fait ? je crois que c'est un autre aspect important dans ce que vous avez mentionné à la page 7 de votre mémoire, là ? tout ce qu'Equifax peut donner comme information, bien, c'est contre ça justement... c'est ces abus-là qu'on vient encadrer en ne permettant plus que ces informations-là soient transmises. En d'autres termes, à partir du moment où il y a une loi qui dit: «Les renseignements nécessaires sont les suivants», si on met la date de naissance, la date de naissance ne permettra plus de donner le numéro d'assurance sociale, ne permettra plus de donner finalement toutes ces autres informations, là, que vous avez décrites dans votre mémoire.

Vous allez me dire: La date de naissance va permettre l'enquête de crédit auprès d'un tiers évidemment dans le contexte du consentement du locataire. Et là, si je l'ai bien compris, votre démonstration, vous dites: On ne veut pas de cette enquête de crédit auprès d'un tiers. C'est ce que je comprends. Vous dites: On ne veut pas d'enquête de crédit auprès d'un tiers. Si le locateur veut s'informer, qu'il demande à la personne, puis il fera foi de ce qu'elle lui dira, mais on ne veut pas, même avec le consentement de la personne, qu'il aille plus loin. C'est ça que je comprends.

M. Cusson (Denis): Le consentement, dans le contexte actuel, ça devient une obligation. Si je ne donne pas mon consentement à l'enquête de crédit, qu'est-ce que va faire le propriétaire? Est-ce qu'il va accepter ma demande que je lui fais pour le logement? Probablement pas. Le consentement va devenir une obligation de permettre l'enquête de crédit. Mais, en plus, ce que vous me dites, c'est que ça voudrait dire que le propriétaire irait chercher le dossier de crédit, puis Equifax enlèverait du dossier de crédit qu'il remet au propriétaire le numéro d'assurance sociale, le numéro de compte en banque, le numéro de carte de crédit, le solde au compte? Il resterait quoi du dossier de crédit? Il ne resterait plus rien dans le dossier de crédit. Donc, à quoi ça sert de demander le numéro... la date de naissance pour aller chercher un document qui serait épuré de toute l'information que les propriétaires cherchent à avoir?

Puis, concernant la question de la propriété, de la concentration de la propriété...

Mme Harel: Écoutez, ce que vous nous dites présentement... ça ne fait pas partie du crédit, là, le numéro d'assurance sociale. Ce n'est pas ça, ça ne fait pas partie du crédit.

M. Cusson (Denis): Non, mais ça fait partie du dossier de crédit. Quand je fais venir mon dossier de crédit, mon numéro d'assurance sociale apparaît. On a mon solde au compte.

Mme Harel: Parce que, présentement, ce n'est pas interdit?

M. Cusson (Denis): Ça apparaît tout, c'est tout de l'information qui est sur le dossier.

Mme Harel: Parce que, présentement, ce que je comprends de ce qu'on m'a expliqué, c'est un état de droit. C'est la loi sur les renseignements personnels dans le secteur privé qui a été adoptée par le gouvernement libéral en 1993. Alors, dans cette loi-là, ce qu'on dit, c'est: Lorsqu'il y a consentement, on peut aller chercher des renseignements personnels nécessaires. Mais on ne définit pas le mot «nécessaires», de là toute la difficulté, l'ambiguïté parce que le nécessaire devient tout, tout, tout, alors que le projet de loi qui est devant nous, c'est pour encadrer le nécessaire à seulement la date de naissance.

Alors, vous me dites: Oui, mais, nécessairement, cette date de naissance va donner lieu à plus. C'est ça que je veux comprendre, là. Dans la loi, actuellement, tout ce qui est décision de Cour, Régie du logement, tout autre tribunal, c'est toujours public, ça. Donc, par exemple, quelqu'un qui n'a pas payé son loyer, qui a déguerpi, qui a eu une décision contre lui de la Régie, c'est d'ordre public, ça. C'est public. Alors, ce n'est pas quelque chose qui est secret, c'est un tribunal; toute décision du tribunal est d'ordre public.

Donc, si c'est d'ordre public, on peut avoir accès à ça. Et je comprends que, quand on fait appel à des firmes comme Equifax ou d'autres, c'est pour avoir ce genre d'information là.

M. Cusson (Denis): Dans les décisions de la Régie du logement, je n'ai pas la date de naissance du client ou du propriétaire ni du locataire, j'ai le nom et l'adresse. Donc, seulement avec le nom et l'adresse du locataire, je peux savoir s'il y a eu effectivement une décision rendue contre lui où il était fautif. Mais, là aussi, il faut voir que, dans...

Mme Harel: On peut confondre, hein! Il peut y avoir plusieurs personnes du même nom. Je rencontrais encore une Lise Thibault hier.

M. Cusson (Denis): Bien, oui. Mais, sauf que je donne l'adresse, mais je donne mon adresse actuelle. Dans mon adresse actuelle, dans mon comportement dans les 12 derniers mois, est-ce qu'il y a une décision à la Régie du logement qui dit que je n'ai pas payé, que j'ai démoli le logement, que j'ai déguerpi? S'il n'y en a pas, pourquoi qu'on me mettrait sur le dos quelque chose qui pourrait dater de trois, quatre ou cinq ans? Pourquoi? Alors que, dans la dernière année, j'ai démontré qu'en fonction de ma situation, je suis capable de payer un loyer de tant d'argent, le dernier logement que j'occupais, puis même que je peux encore avoir une marge de manoeuvre pour un logement un peu plus cher.

n(16 h 30)n

Mme Harel: Ce qu'on me fait valoir ici, c'est que l'article 13 actuel, là, de la loi actuelle sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé, n'autorise pas un agent de renseignements à donner le numéro d'assurance sociale sans le consentement du locataire. L'article dit: «Nul ne peut communiquer à un tiers les renseignements personnels contenus dans un dossier qu'il détient sur autrui ni les utiliser à des fins non pertinentes à l'objet du dossier, à moins que la personne concernée n'y consente ou que la présente loi le prévoit.» Alors, comme ça ne serait pas prévu aussi dans la loi, il ne pourrait pas le faire, sauf la date de naissance, évidemment.

Et là je reviens, parce que mon temps va se terminer, je reviens à l'essentiel. Dans le fond, vous, vous dites, l'essentiel, dans votre démonstration, c'est de dire: Les locataires sont assujettis à des propriétaires investisseurs. Je ne le pense pas. Honnêtement, je pense qu'avec le genre de propriétés qu'on appelle tenures, avec des trois logements et moins, des triplex, surtout des quadruplex ou des quintuplex... Puis c'est surtout essentiellement des propriétaires individuels, je pense.

Mais, au-delà de ça, je comprends ce que vous faites valoir. Parce que dans le fond ce que vous venez faire valoir ? vous l'avez d'ailleurs intitulé sur votre mémoire, la première page de votre mémoire porte le titre de... Je ne sais pas si...

Une voix:Le droit au logement.

Mme Harel:Le droit au logement, hein, c'est bien ça?

Une voix:Pour le droit à un logement.

Mme Harel:Pour le droit à un logement, hein, c'est le titre. C'est votre revendication, c'est votre mobilisation, c'est votre mission. Cependant, ni la Charte canadienne des droits ni la Charte québécoise des droits et libertés de la personne ne reconnaissent le droit au logement. On a... Et je comprends que vous le revendiquez, mais ce n'est pas quelque chose à l'intérieur duquel il y a déjà eu un consensus de société. On reconnaît qu'il ne doit pas y avoir de discrimination, mais le droit au logement, ce n'est pas reconnu dans aucun dispositif de notre droit, là. Il faut accepter ça, là.

Alors, comment on aménage? Moi, j'en suis... Comment on aménage, comment on gère à la fois le droit à un propriétaire aussi de faire payer son loyer? Parce qu'il est bien possible qu'en début de mois... peut-être qu'à la fin du mois, comme vous dites, il faut qu'il paie son hypothèque, juste à la fin, mais dans le mois il faut qu'il paie ses intérêts. Alors, si le loyer est au début du mois, c'est parce qu'il n'a pas d'intérêts à payer.

Mme Thibault (Anne): Alors, moi, j'aimerais ça vous renverser un peu la balle puis vous dire: Qu'est-ce qu'on fait avec les ménages locataires qui ne pourront pas accéder à un logement dans le contexte actuel?

Mme Harel: Bien, on va faire 4 000...

Mme Thibault (Anne): Parce qu'il y en a encore beaucoup de monde qui vivent encore chez leurs parents, qui vivent encore chez des amis, qui vivent... qui n'ont pas réussi à se loger.

Mme Harel: En tout cas, moi, je peux vous dire: J'ai fait une annonce de programmation d'AccèsLogis, de 1 425 nouveaux logements, c'était il y a deux semaines, j'ai annoncé qu'en mars j'aurais l'occasion d'en faire un autre 1 325, donc on est rendu à 2 750 juste pour 2002, puis à ça j'espère bien, mais tout ça regarde bien, ajouter 1 600 autres logements abordables, dont 80 % seront à 350. Ça, c'est pour l'année 2002. Ça va être exceptionnel, là, ce qu'on va faire cette année. Quand j'additionne tout, ça fait 4 300 pour 2002. Et, l'année après, on a annoncé, dans le cadre du Logement abordable, qu'on voulait tout faire en deux ans... c'est 4 600 logements abordables plus 1 325. Alors, on va en faire 6 000 dans la deuxième année puis 4 350 dans la première. C'est ça qu'on va faire.

Mme Thibault (Anne): Mais il y a quand même présentement au Québec autour de 60 000 ménages locataires qui consacrent 50 % et plus de leurs revenus pour se loger. C'est un ménage locataire sur quatre qui est à un taux d'effort...

Mme Harel: Faites attention, par exemple, hein, parce qu'il y a une étude... Justement, moi aussi, j'étais préoccupée par ça, puis j'ai fait faire une vérification. Il y a le quart de ces ménages qui sont des personnes âgées qui habitent des résidences avec services, et dans le coût de leur loyer il y a le coût de leur repas. Alors, quand on dit qu'ils consacrent plus de 50 %, oui, mais en incluant à la fois services, repas et logement, d'une part. D'autre part, il y a aussi un autre pourcentage, de mémoire, je ne m'en rappelle pas, mais on pourrait l'avoir sûrement d'ici la fin de nos travaux, où finalement dans le 50 % il y a des étudiants, toutes les résidences d'étudiants.

Alors, oui, il y a des familles encore, et ce sont surtout les familles avec beaucoup d'enfants qui sont actuellement les plus en difficulté. Et la construction qu'il faut faire l'an prochain puis l'autre année, c'est essentiellement aussi de grands logements. Mais faites attention avec le chiffre que vous mentionnez.

La Présidente (Mme Doyer): Je vous remercie, Mme la ministre. Alors, je donnerais la parole à Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, Mme Thibault, M. Cusson, du Regroupement des comités logement et associations de locataires du Québec, je vous souhaite la bienvenue. Merci, pour le mémoire assez étoffé, on bénéficie toujours de vos avis M. Cusson. On est en contact avec vous, et j'ai eu le plaisir de vous rencontrer il y a quelque temps justement sur ce dossier.

Je note dans votre présentation que vous avez finalement situé les causes de la problématique qu'on essaie de traiter aujourd'hui. On s'attaque davantage aux symptômes, mais la véritable crise du logement est à l'origine finalement de la crise dans les rapports avec les locataires et les propriétaires. Parce qu'il fut un temps où les propriétaires accordaient des mois de loyer d'avance, ils donnaient des avantages pour attirer les candidats locataires, et aujourd'hui on est dans un autre registre, celui de la rareté qui fait que certains propriétaires sont beaucoup plus sélectifs et qui fait que... comme vous l'avez expliqué, qu'à la suite du bail qui a été introduit en 1996, on a vu apparaître le fameux formulaire de collecte de données que vous contestez vigoureusement.

Mais il faut, à mon avis, toujours rappeler le contexte dans lequel on fait ce débat-là. La ministre est très optimiste. Et, moi-même, je l'ai encouragée, le 26 octobre, j'ai eu une interpellation sur la crise du logement. Pendant deux heures on a échangé. Et évidemment, Mme la ministre est très forte de ses statistiques, et moi, je suis très forte de la condition humaine qui est derrière ces statistiques-là. Et je sais que, malgré les annonces qui ont été faites dans le budget de la ministre des Finances, qui est d'ailleurs actuellement en commission parlementaire, à l'étude, les fameux 500 millions de dollars annoncés, ils ne sont pas encore là, ils ne sont pas encore attachés. Donc, on souhaite que cet argent-là soit injecté dans le logement, particulièrement dans le logement social. Mais ce n'est pas encore chose faite.

Ceci étant dit, je voudrais revenir à la distinction que vous avez faite, Mme Thibault, concernant les propriétaires occupants et les propriétaires investisseurs. Ce que je sais, moi, de ce dossier, et ce qui m'a été dit, et vous pouvez peut-être le confirmer ou l'infirmer, c'est que, dans la plupart des cas, les relations entre les propriétaires et les locataires sont des relations harmonieuses, sans problèmes, mais qu'il y a un segment minoritaire de propriétaires et de locataires qui se trouve être finalement dans une relation conflictuelle.

Et la distinction que vous avez faite, est-ce qu'elle a un lien avec la nature de ce conflit? Est-ce que vous trouvez que, lorsque le propriétaire est occupant, qu'il habite dans les mêmes lieux, que les relations sont plus cordiales, sont plus conviviales que lorsqu'il s'agit de propriétaires investisseurs? Le lien que vous avez fait ou l'opposition que vous avez faite entre les intérêts collectifs et les intérêts spéculatifs, est-ce qu'on les retrouve dans toutes les catégories de propriétaires ou seulement chez quelques uns?

Mme Thibault (Anne): Moi, là, je vais vous parler à titre de coordinatrice au comité logement, là, c'est l'expérience que je possède, mais je pense que l'expérience se reproduit dans d'autres quartiers populaires à Montréal. C'est évident que des spéculateurs immobiliers, eux, la différence, c'est qu'ils sont là seulement pour le profit qu'ils peuvent retirer de l'investissement qu'ils font, alors qu'un propriétaire occupant, lui, ce qu'il va vouloir avoir, c'est un toit sur la tête. Il va entretenir plus sa maison, et c'est ça qu'il va... il va profiter des locataires pour payer une partie de son hypothèque, naturellement, hein? Parce que, quand on est locataire, on peut l'être pendant 40 ans, 45 ans, là, en général, à Montréal, et c'est sûr qu'en bout de ligne on finit par la payer la maison, hein, nous autres aussi, mais sauf qu'on n'a pas le capital. Donc, c'est sûr qu'au niveau d'un propriétaire occupant la pression sur le locataire est moindre qu'un propriétaire investisseur.

Je vais vous donner un exemple. Moi, dans le quartier chez nous, il y a une compagnie qui s'appelle Bonaparte. C'est une société en commandite. Eux autres, ils possèdent des actions dans la compagnie, et eux autres, ils viennent, à notre connaissance, d'acquérir cinq immeubles dans le quartier. Oui, il y a du 20 logements, il y a du 30 logements, mais il y a du six logements là-dedans et il y a du trois logements aussi là-dedans. Alors, ce n'est pas nécessairement vrai que, la typologie de l'immeuble, qu'on peut dire qu'un triplex, c'est propriétaire occupant.

n(16 h 40)n

Dans notre quartier, cette compagnie-là achète depuis quatre mois tout le style... le stock de logements qu'ils peuvent acheter dans un rayon qui entoure la venue du CHUM, là, du futur centre hospitalier universitaire, qui est prévu, là, proche du métro Rosemont. Alors, c'est sûr que ce spéculateur-là, lui, il est vorace, il fait signer... Il a tout vidé. Ce n'est pas compliqué, il a tout vidé les logements. Il en reste deux, locataires, sur les 100 unités de logement qu'il vient d'acquérir, et les loyers ont augmenté de 200 $ entre le départ d'un locataire puis l'arrivée du nouveau. C'est ça, les investisseurs. Ces gens-là ne sont pas intéressés de loger les gens, ils sont intéressés de profiter de la situation.

Mme Houda-Pepin: Bien, je devrai quand même nuancer ce que vous dites, parce que, dans toute catégorie, disons, de professionnels ou de gens dans la société, on trouve du bon monde et des gens qui sont peut-être... qui ont des tendances à vouloir tromper les gens. On ne vit pas dans le monde idéal, on vit dans un monde réel. Mais sans généraliser, disons, attaquons-nous aux problèmes là où est-ce qu'ils sont. Puis la première chose qu'on doit faire, c'est de mesurer, disons, la gravité de la situation pour apporter une réponse qui soit tout à fait efficace aussi pour résoudre cette question.

Dans votre mémoire, dans votre présentation, vous vous opposez catégoriquement à tout formulaire de collecte de données personnelles préalablement à la signature du bail. Et vous dites que, dans le bail... il y a un bail et puis là-dedans il y a le nom, le prénom, le numéro de téléphone, l'adresse du locataire et du locateur, et cela suffit. Vous dites aussi, à la page 7 de votre mémoire, qu'un propriétaire contrevient à la Charte des droits et pose un geste discriminatoire s'il choisit parmi plusieurs candidats locataires la personne qu'il estime la plus en mesure financièrement de payer le loyer.

Alors, si le propriétaire ne peut pas choisir à partir du critère de la capacité de payer, supposons qu'il y a une annonce qui est faite dans le journal, le propriétaire reçoit une dizaine d'appels, 10 personnes, 10 candidats pour le même logement, selon quel critère est-ce que le propriétaire doit choisir, parce qu'il faut qu'il choisisse parmi la dizaine de personnes qui sont toutes en demande de loyer? C'est quoi, le critère déterminant, selon vous, pour que ce propriétaire-là choisisse un locataire qui va quand même payer, là, parce qu'il faut qu'il paie. Parce que, même si on essaie d'opposer...

Une voix: ...

Mme Houda-Pepin: Permettez-moi juste de compléter mon analyse, parce qu'ici on cherche, nous, le point d'équilibre puis on compte sur vous pour nous aider à le trouver, ce point d'équilibre là. C'est officiel, là, on ne sortira pas d'ici avec des positions diamétralement opposées, il faut qu'il y ait un point de rencontre. C'est notre responsabilité puis c'est ce qu'on recherche. Mais on ne peut pas partir, d'un côté, les gros méchants qui sont les propriétaires, puis les grosses victimes, ce sont les locataires, ce n'est pas vrai. Il y a des locataires qui sont heureux de leur situation, il y a des propriétaires qui sont heureux dans leur situation également, mais, entre les deux, il y a des problèmes, et on les retrouve dans les deux catégories. Bon. Maintenant, comment est-ce qu'on peut résoudre justement les cas problématiques?

On a une régie du logement qui réagit a posteriori. Mais, lorsqu'on se retrouve dans une situation de rareté de logements, vous avez raison, vous avez des préoccupations qui sont légitimes, que certains propriétaires se servent de ce contexte de rareté pour, bon, bien, augmenter les loyers, pour être plus pointilleux sur la sélection des candidats, et ainsi de suite. Mais, si vous avez 10 candidats, un logement ? 500 $, 4 1/2 ? et puis le propriétaire, il faut qu'il choisisse un locataire. Sur quoi il doit se baser?

M. Cusson (Denis): Pourquoi, quand le propriétaire se retrouve avec 10 ou 15 ou 20 demandes de logement en même temps... C'est à partir de ce moment-là, quand il ramasse les demandes puis qu'ensuite il se met à faire un choix, il fait son choix de façon discriminatoire. S'il prenait les demandes au fur et à mesure qu'elles rentrent, il y aurait beaucoup moins de discrimination qui se ferait parce qu'il étudierait à la valeur chacune des demandes. Là, quand vous avez... Si le propriétaire se donne le choix de recevoir 15 demandes et qu'il met sur le plateau, dans l'ordre, ceux qui ont les meilleurs revenus, il fait une discrimination sur la base des conditions sociales. C'est bien triste, vous lui donnez le libre choix de choisir parmi le meilleur des candidats au niveau économique, mais il fait son choix en vertu des conditions sociales de la personne. Et ça, c'est contraire à la Charte.

Mme Houda-Pepin: Oui, d'accord. Nous ne parlons pas de la condition sociale globalement, nous parlons de quel est le critère de sélection pour vous. Vous me dites...

M. Cusson (Denis): À l'heure actuelle, le critère qu'on veut nous imposer...

Mme Houda-Pepin: Attendez, excusez-moi...

M. Cusson (Denis): ...c'est le critère économique.

Mme Houda-Pepin: Bon, d'accord. Vous me dites: Le premier arrivé, premier servi. Mais supposons que les premiers arrivent le même jour, là, tu sais, l'annonce est faite, puis, dans la même journée, on est...

M. Cusson (Denis): ...à la porte, on ne passe pas trois en même temps à la porte. Ha, ha, ha!

Mme Houda-Pepin: Non, non, non, non. Dans la même journée, on reçoit des appels de gens qui sont... Comment est-ce que... Moi, je cherche à trouver une solution. Supposons que, vous, vous êtes propriétaire, et c'est vous qui êtes dans cette situation-là, comment est-ce que vous allez résoudre ça?

M. Cusson (Denis): Je vais prendre le premier. La façon de faire, c'est qu'il y a un premier qui est arrivé, il n'y en a pas 15 qui arrivent en même temps. C'est là que rentre la question de processus discriminatoire, c'est quand vous en recevez... vous en prenez une tonne, de demandes, et que, là, vous faites un choix. Vous faites le choix en fonction de quoi? Vous le faites en fonction des critères qui sont de nature discriminatoire parce qu'on y va en fonction de protéger l'investissement. Puis là-dessus, c'est qu'on part sur les préjugés pour protéger sa question d'investissement.

Comment savoir que l'hôtesse de l'air de Canada 3000, au mois de mars, avril, qui est venue pour louer un logement... elle avait une bonne condition de travail. Au mois de novembre, elle se retrouve avec quoi, madame l'hôtesse de l'air de Canada 3000? Elle se retrouve sans emploi. Elle, elle se retrouve en non-paiement de loyer au mois de décembre parce qu'elle a perdu son emploi en novembre. Mais elle a passé tous les critères de sélection au mois d'avril, puis elle a peut-être disqualifié des gens qui étaient à un salaire minimum, madame peut-être de Wal-Mart, qui, elle, avait un salaire stable, bas, mais elle n'a pas perdu son emploi. Mais, elle, peut-être qu'elle n'a pas de logement à l'heure actuelle parce que, à nos yeux, au mois de mars, avril, quand j'avais à choisir, parmi mes 15, entre une caissière de Wal-Mart puis une hôtesse de l'air, je choisis quoi? Vous allez dire que le propriétaire est légitime de choisir l'hôtesse de l'air? C'est ça que vous me... c'est ça, la pratique, à l'heure actuelle.

Puis c'est ça que, nous, on dit: Si madame de Wal-Mart est arrivée la première pour solliciter le logement, j'analyse. Elle a-tu la capacité de payer? Elle me l'a démontrée, la capacité de payer, j'ai contacté l'ancien propriétaire, elle n'a jamais été en retard dans ses paiements de loyers. Pourquoi je ne lui louerais pas tout de suite, à cette madame-là, plutôt que de la mettre sur une liste? Je vais attendre, des fois qu'il y aurait peut-être meilleur que vous, madame. C'est ça qu'on se fait dire, à l'heure actuelle.

Mme Houda-Pepin: D'accord. À la page 7, toujours, de votre mémoire, vous soutenez à peu près la même opinion que celle de la Commission des droits de la personne quand vous dites que l'enquête de crédit n'est pas nécessaire pour déterminer les habitudes de paiement de loyer d'une personne. Donc, vous êtes contre la recherche d'informations auprès d'un locateur précédent, si j'ai bien compris? Ou est-ce que vous êtes favorable à ça? Est-ce que le propriétaire peut s'adresser à l'ancien propriétaire pour s'informer sur les habitudes de crédit du candidat à la location?

Mme Thibault (Anne): Il y a bien des locataires qui vont donner cette information-là de par eux autres mêmes. O.K.? Nous, ce qu'on considère, les conseils qu'on donne aux gens finalement, quand ils sont à la recherche de logement, puis que les gens ne veulent pas donner une série d'informations personnelles, et qu'ils veulent démontrer qu'en tant que locataires ils respectent leurs engagements financiers, alors ce qu'on leur dit, c'est: Apportez des comptes d'Hydro-Québec, apportez des comptes de Bell Canada, apportez comme quoi vous avez une régularité au niveau du paiement de factures qui ont trait à votre logement. Parce que c'est un logement que je m'en vais louer, là. Ça fait que c'est ça qu'on dit aux locataires. Bon, c'est sûr que, là, on a l'air un peu dans le champ, parce que ça ne passe pas pantoute, là, mais les propriétaires, ils aiment mieux les formulaires où est-ce qu'on puisse faire un choix plus éclairé, mettons. Mais, nous, c'est les informations...

Dans les années, là, soixante-dix, quatre-vingt, là, la location d'un logement ne passait pas par une panoplie d'étapes comme celles qu'on connaît à l'heure actuelle. Les gens se rencontraient, on se donnait des informations, on prenait le temps de s'asseoir, de discuter et de regarder, et, si finalement il y avait à conclure un bail, il y avait conclusion d'un bail. Si ça ne nous intéressait pas, on allait ailleurs. Mais il n'y avait pas comme tout un processus qu'on est en train d'instaurer à l'heure actuelle qui fait en sorte que c'est vraiment les personnes les plus démunies qui passent à côté, et c'est dommage, des logements les plus intéressants. C'est eux autres qui se retrouvent en bout de ligne avec des logements détériorés. Ça leur coûte encore plus cher de chauffage, et là on arrive dans un cercle vicieux que, quand on arrive avec les gros comptes de chauffage au mois de décembre, bien, c'est là que le locataire fait un choix de temps en temps: une fois je paie mon loyer, l'autre fois je paie mon compte de chauffage. Je veux dire, on arrive dans des situations comme celles-là à cause de ça, là.

n(16 h 50)n

Mme Houda-Pepin: Est-ce que... Je sais que vous êtes contre l'utilisation du formulaire de cueillette de données personnelles préalablement à la signature du bail. Donc, c'est ce que vous nous recommandez dans votre mémoire, vous ne voulez rien savoir de ça. Mais, s'il fallait faire un bout de chemin de votre part, le fameux point de rencontre, quelles sont les informations qui vous semblent minimalement nécessaires? Puisque vous demandez un encadrement législatif, quelles sont les informations qui vous sont minimalement nécessaires pour permettre aux propriétaires de définir ou de déterminer les habitudes de paiement de son futur locataire?

Mme Thibault (Anne): On ne peut pas faire... Moi, je me refuse de faire des concessions là-dessus parce que avec la date de naissance on a accès à toutes les informations auxquelles notre dossier d'Equifax est inclus. On l'a vu, on vous le dit, on l'a fait, la démarche. On est allé le faire. On est sorti avec des dossiers chez Equifax, et ça nous donne la date de naissance, nos numéros de cartes de crédit puis la régularité de nos paiements au niveau des cartes de crédit. Ça fait que, si on vous concéderait la date de naissance, on sait qu'on vous concède le numéro d'assurance sociale aussi en même temps, nos numéros de cartes de crédit. L'autre affaire que, moi, je trouve grave, c'est que, vous n'y avez pas porté nécessairement attention, mais le bureau d'avocats que je vous dis qui fait du trafic de renseignements personnels, c'est sérieux? O.K.

Mme Houda-Pepin: Oui, ça, c'est ma prochain question.

Mme Thibault (Anne): O.K. Je veux dire... Nous, on est allé, on est allé et on a joué le rôle de la Commission d'accès à l'information dans ce dossier-là. On s'est fait passé pour des propriétaires, et je vous jure que c'était pas rigolo. Alors, même si on a une loi qui protège que, quand on recueille de l'information, on n'est pas censé la divulguer, non seulement eux autres la divulgue, mais ils l'achètent à des propriétaires qui vendent ces renseignements-là sans le consentement du locataire qui a signé sur le formulaire. Et, en plus, avec ces informations-là, ils confectionnent des banques de données de mauvais payeurs. Moi, j'ai bien de la misère à vous concéder plus que le nom, l'adresse et le numéro de téléphone parce que, même avec les lois existantes à l'heure actuelle, on est pogné avec un problème, puis c'est rendu qu'on trafique des informations personnelles. Et même les associations de propriétaires, là, cette compagnie de bureau d'avocats, là, ils l'annoncent dans leur journal à leurs membres.

M. Cusson (Denis): Puis en plus, pour ajouter par exemple, pour Equifax...

Mme Houda-Pepin: D'accord. Merci d'avoir répondu à ma question avant que je ne la pose. Mais j'en ai une autre pour vous, parce que le temps nous presse, je suis désolée.

À la page 13 de votre mémoire, vous parlez de la violence conjugale et les victimes d'agressions sexuelles. C'est une problématique qui me touche beaucoup et qui me préoccupe, et j'ai parlé avec différents groupes de femmes concernant cette problématique-là. Et, en fait, ce que vous demandez, c'est la modification de l'article 1974 du Code civil du Québec pour y introduire les motifs de violence conjugale et d'agressions sexuelles afin de permettre à une femme victime de cette violence conjugale de pouvoir résilier, en fait, sa responsabilité vis-à-vis du bail dans un délai d'un mois. J'apprécierais que vous puissiez élaborer là-dessus, parce que je pense que c'est un point important.

Mme Thibault (Anne): Même si ce point-là n'est pas inclus comme tel dans le projet de loi n° 26, comme c'est un projet de loi qui est un peu pour être légiféré au niveau des urgences, parce que dans le rapport annuel de la Régie on nous annonce que peut-être qu'il y aurait éventuellement une plus grande ouverture au niveau de la réforme des relations locataires-propriétaires, il nous apparaissait très pertinent dans ce contexte-ci de permettre à des femmes, principalement, qui sont victimes de violence conjugale ou d'agressions sexuelles dans leur logement de pouvoir mettre fin à leur bail en donnant un délai d'un mois pour des raisons de sécurité et d'intégrité par rapport à ces femmes-là. Parce que, quand on est en situation de violence conjugale et qu'on a signé un bail à deux ou que, si on est marié, on est solidairement responsables, les deux du bail, ça devient, en plus d'avoir à subir une forme... de la violence conjugale, en plus le tracas du souci financier dans le sens qu'on reste responsable du bail jusqu'à la fin du terme du bail, donc en général jusqu'au 30 juin de l'année en cours... alors nous on se disait: Ça fait bizarre que, bon, tu es tapochée par ton mari puis en même temps tu es comme liée avec lui à un bail où ce que tu t'engages à payer un montant de loyer, et souvent on n'a pas les reins assez solides en tant que femmes pour être en mesure de quitter le mari ou de quitter le conjoint violent, d'aller se trouver un nouveau logement puis en même temps continuer à payer sa part sur l'ancien logement. Alors, ça nous apparaissait une demande qui était très appropriée dans le contexte de la commission parlementaire.

Mme Houda-Pepin: D'accord, Mme Thibault, je vous remercie et M. Cusson. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Doyer): Merci, Mme Thibault. Merci, Mme la députée de La Pinière. Je donnerais la parole au député de Roberval.

M. Laprise: Merci beaucoup, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Doyer): Il reste six minutes à l'équipe ministérielle, six minutes et demie.

M. Laprise: Merci. Je félicite quand même le rapport qui vient d'être présenté. Vous savez que le projet de loi est dans le but de garantir les droits des locataires et de créer un climat de confiance entre le locataire et le locateur. Je pense que c'est un objectif du projet de loi. Et, également, la réforme proposée contribuerait à la construction d'une relation contractuelle de bonne entente. Ça fait partie également des objectifs du projet de loi.

Le projet de loi n° 26 propose également des recours plus variés, plus rapides et plus efficaces aux propriétaires, qui devraient encourager de futurs propriétaires à mettre des logements locatifs sur le marché. Alors, c'est bien évident qu'il y a toujours une partie de la population qui semble être pénalisée quand on connaît bien souvent une activité économique plus dense. On reconnaît que Montréal ont repris quand même du poil de la bête depuis 1994. Moi, je suis député et puis, quand on est arrivé au pouvoir, on sentait que Montréal avait beaucoup de logements vides. D'ailleurs, le taux de location à ce moment-là à Montréal était assez élevé, et on constatait que le locataire à ce moment-là avait plusieurs choix. Aujourd'hui, c'est le propriétaire qui a plusieurs choix. Mais par contre le gouvernement vient suppléer, par ses politiques de l'aide au logement, par ses politiques également de construction de nouveaux logements et par ses politiques de rénovation des vieux logements.

Est-ce qu'au niveau de votre groupe vous vous assurez que toutes les avenues sont utilisées, à savoir les coopératives, par exemple? Est-ce qu'actuellement vous vous dites que les privés achètent des blocs appartements pour les rénover, pour les... Est-ce qu'à ce moment-là les gens qui ont des revenus moindres pourraient se regrouper, renforcir leur action dans des coopératives qui leur permettraient d'avoir accès à des programmes gouvernementaux pour rénover les logements et avoir des logements qui seraient selon leurs revenus?

Mme Thibault (Anne): Je vais vous dire une affaire: Soyez assuré qu'on fait tous les efforts disponibles pour utiliser au maximum les unités de logement social qui nous tombent sous la main. Ça, je peux vous le garantir. Il n'y a pas aucun problème avec ça. Notre problème, souvent, c'est que le programme AccèsLogis, comme on le connaît à l'heure actuelle, nous donne des maux de tête, dans ce sens qu'il est difficile de l'appliquer dans des quartiers centraux de Montréal compte tenu, un, de la valeur des immeubles qui est constamment à la hausse. Et aussi, il faut toujours s'assurer que, un coup acheté, et les logements un peu rénovés, là, pour qu'ils correspondent à certaines normes, il faut toujours s'assurer que les loyers, en bout de ligne, vont rester des loyers que les gens qui habitent ces quartiers-là vont être en mesure de payer. Notre idée, nous, ce n'est pas de faire venir du nouveau monde dans des quartiers. Notre but, à nous autres, c'est d'être capables de loger la population locataire le mieux possible, mais à un prix respectant sa capacité de payer.

M. Laprise: C'est là que vous constatez vous-même que, au niveau de l'entreprise privée, construire des logements, les rénover également, aujourd'hui, au prix que ça coûte, ça devient très dispendieux. C'est pour ça que les loyers ont pris... ont accéléré au niveau de l'augmentation du logement. Il y a eu sûrement une accélération, au niveau de l'augmentation des logements, très grosse.

Mme Thibault (Anne): La construction de nouveaux logements dans le secteur résidentiel présentement, moi, il ne s'en fait plus, et la réponse est toute trouvée. Quand vous avez un ménage locataire sur deux qui consacre déjà 30 % et plus de ses revenus pour se loger, ce n'est pas là la voie intéressante pour des gens qui construisent. Où est-ce que c'est intéressant, et c'est où est-ce qu'on le voit, c'est que dans les centres urbains ils vont construire du condo, dans le neuf, et souvent, dans les plus petites municipalités, ils vont concentrer leur activité plus vers des résidences pour personnes âgées. C'est parce que c'est là que l'argent peut être réalisé. Quand vous avez une population qui n'a déjà pas les moyens de payer les loyers à l'heure actuelle, où est-ce qu'ils ont un certain contrôle, imaginez dans le neuf, où est-ce que ce n'est pas contrôlé pendant cinq ans, c'est évident que ce n'est pas là que l'argent est à faire.

La Présidente (Mme Doyer): Merci, Mme Thibault. En conclusion, il reste deux minutes. Je donnerais la parole à Mme la ministre.

n(17 heures)n

Mme Harel: Merci. Dans ce que vous décrivez avec AccèsLogis cependant, il faut que vous mentionniez que la moitié des logements construits ? à date il y en a eu 6 000, puis là on s'apprête à en construire encore un autre 6 500 ? peuvent bénéficier, pour la moitié des logements, du supplément au loyer, qui permet à un ménage de ne pas consacrer plus que 25 % de son revenu pour se loger ? qu'on a reconduit, de toute façon.

D'autre part, il faut aussi que vous preniez en considération que le marché s'ajuste, hein. Vous savez que, cet automne, quand on compare à l'an passé, la plus forte hausse de la construction, c'est dans le marché locatif privé. Alors que les condos puis les édifices à bureaux, ça a tout piqué du nez, le marché locatif privé, lui, s'est remis à fonctionner. C'est, je pense, 18 % d'augmentation du nombre d'unités par rapport à l'an passé. On avait connu une situation semblable à celle qu'on a connue. Rapidement, en 1999, c'était autour de 4 %, le taux de vacance à Montréal. En 1996, c'était 6. Et puis, en l'espace de deux ans, c'est devenu 11/2. Mais il faut voir, c'est très lié à l'économie, parce qu'il n'y a pas plus de monde. Il y a plus de ménages qui occupent plus de logements. Actuellement, à Montréal, 60 % de tous les logements sont occupés par deux personnes et moins. La plus forte hausse, c'est par une personne toute seule. Alors, il y a plus de ménages, mais pas plus de monde, parce que les gens fractionnent. Plutôt que d'être à deux ou à trois, ils ne sont plus plusieurs, ils sont chacun dans leur logement.

Mais il y a, avec ce qu'on va faire, je pense, avec le Logement abordable qu'on veut à 80 % consacrer à du logement à 350 $ par mois, qui donne droit à l'allocation-logement aussi... L'allocation-logement, c'est celle qui est versée mensuellement. Actuellement, elle peut aller jusqu'à 80, mais la moyenne de ce qui est versé, c'est 45 $ par mois. C'est pour des personnes de plus de 55 ans ou celles qui ont des enfants, à revenus assez modestes. Alors, évidemment, il y a tout cela.

Il y a quelque chose, cependant. Je vous écoutais tantôt et je me disais: Vous reconnaissez que le propriétaire puisse vérifier la capacité de payer. Je ne me trompe pas, là, vous l'avez répété quelques fois. Vous voudriez qu'il la vérifie dans un certain ordre, que ce soit premier arrivé, premier servi ? comme vous avez dit à Mme la députée de La Pinière ? mais vous acceptez qu'il vérifie la capacité de payer. Est-ce que je comprends que c'est le cas?

Mme Thibault (Anne): Moi, je vais vous dire une affaire, le locataire est capable de vérifier lui-même sa propre capacité de payer un loyer. Un locataire qui a 400, 510 $ de l'aide sociale par mois, il ne va pas louer un logement à 500 $ par mois. Faut bien être clair là-dessus, là, hein.

Mme Harel: Mais, Mme Thibault, pour être claire justement, vous avez dit tantôt ? je ne veux pas reprendre les galées ? vous avez dit qu'il faudrait que ça se fasse selon un certain ordre. Vous avez répondu à une question de Mme la députée en disant: Oui, premier arrivé, premier servi, puis qu'il vérifierait la capacité de payer. Je peux comprendre...

M. Cusson (Denis): C'est la façon de le faire, la façon de faire, parce que la façon...

Mme Harel: ...qu'on discute sur la manière, mais la capacité de payer auprès du locataire, ça, vous acceptez que le propriétaire ait le droit de le faire.

M. Cusson (Denis): Ce que l'on veut... Ce que le propriétaire a à vérifier, si on peut dire, c'est: Est-ce que la personne... Parce que, son inquiétude, c'est: Il va-tu payer son loyer demain matin? La seule façon de vérifier, c'est: Déjà que je donne mon adresse actuelle, il peut contacter mon propriétaire actuel, puis en plus il peut aller dans le bureau de la Régie du logement, pitonner mon nom puis voir si j'ai une cause cette année en non-paiement de loyer. Donc, est-ce que cette personne-là a été capable de payer son loyer dans la dernière année? Il me semble que oui. Qu'est-ce que ça me prend de plus pour vérifier si la personne est capable de payer ou non ce logement-là, sinon de partir du préjugé que les gens achètent au-dessus de leurs moyens, puis j'ai des revenus de 1 000 piastres par mois puis je vais me prendre un logement inévitablement qui est à 800 piastres? C'est ça que, je pense, il faut faire attention, c'est qu'il faut partir du fait que les propriétaires sont de bonne foi, il faut partir du principe que le locataire aussi est de bonne foi quand il va pour louer un logement. Il ne va pas prendre un logement qui est au-dessus de ses moyens.

La Présidente (Mme Doyer): Je vous remercie, M. Cusson, Mme Thibault. Je vous remercie.

M. Cusson (Denis): Je voudrais peut-être...

La Présidente (Mme Doyer): Ça serait terminé.

M. Cusson (Denis): ...en profiter pour remettre à la commission les lettres d'appui à notre mémoire que l'on a reçues à date, de près de 40 organismes, dont sept CALACS, par rapport à la violence faite aux femmes.

Documents déposés

La Présidente (Mme Doyer): Merci, M. Cusson.

Mme Houda-Pepin: Mme la Présidente, très rapidement. Est-ce que la ministre pourrait nous déposer l'étude de l'INRS, la dernière?

La Présidente (Mme Doyer): Mme la ministre.

Mme Harel: Je vais vérifier auprès des gens qui me l'ont transmise. Je vous le dirai...

Mme Houda-Pepin: D'accord. Merci.

Mme Harel: ...dans le courant de l'après-midi.

La Présidente (Mme Doyer): D'accord. On reviendra. Merci.

(Changement d'organisme)

La Présidente (Mme Doyer): Alors, les travaux de la commission vont recommencer, c'est-à-dire se continuer avec les membres de la Commission d'accès à l'information du Québec, représentée par Mme Jennifer Stoddart, présidente, et Me André Ouimet, secrétaire général. Vous avez 20 minutes.

Une voix: ...

n(17 h 10)n

La Présidente (Mme Doyer): Oui, oui, à partir du moment où vous êtes prêts. Oui, Mme Stoddart.

Commission d'accès à l'information (CAI)

Mme Stoddart (Jennifer): Mme la Présidente, Mme la ministre, Mmes et MM. les députés, au nom de la Commission d'accès à l'information, je vous remercie beaucoup de nous inviter ici pour venir exposer notre avis sur le projet de loi n° 26, dit la Loi modifiant la Loi sur la Régie du logement et le Code civil, et, d'entrée en jeu, je tiens à vous préciser que ce projet, au demeurant fort important, qui vise à mieux encadrer le marché locatif, suscite les commentaires de la Commission sur la seule question de l'utilisation des renseignements personnels, c'est-à-dire les nom, adresse, date de naissance, numéro de téléphone.

Dans notre présentation, nous vous ferons part, à partir de notre expérience avec le public qui s'informe ou qui se plaint à la Commission, de quelques observations sur ce projet de loi par rapport à la protection des renseignements personnels. Dans un deuxième temps, nous vous ferons des suggestions quant aux quelques modifications qui pourraient être apportées au projet de loi.

Premièrement, j'aimerais faire une mise en scène en parlant des pratiques actuelles de collecte des renseignements. La réalité dans le domaine du logement est bien connue. L'expression populaire traduit bien cette réalité: Les logements sont rares, dit-on. L'impressionnisme de cette affirmation trouve cependant un fondement dans les statistiques et, à l'heure actuelle, nous convenons que le taux de vacance est de 2,2 %, semble-t-il, à l'échelle du Québec, et il est moins de 1 % dans certaines parties de la métropole. Cette situation engendre elle-même une nouvelle réalité, et la Commission constate que, lorsque le nombre de locataires aspirants dépasse le nombre de logements à louer, elle modèle de nouvelles pratiques.

Dans un marché qui favorise le propriétaire, ceux-ci sont amenés à faire une présélection des candidatures en faisant compléter des formulaires prélocation qui requièrent souvent beaucoup d'informations. L'aspirant locataire n'a pratiquement pas le choix de les fournir sous peine de voir sa candidature rejetée. De fait, le problème de la cueillette des renseignements personnels dans le cadre de la location résidentielle est en émergence depuis plusieurs années. La Commission en a une connaissance directe par le biais des appels du public qui souhaite être informé de ses droits. Elle a aussi reçu des plaintes, au cours des années, où elle a pu examiner de longs formulaires dispensés par des locateurs, surtout des grandes conciergeries. Ces formulaires exigeaient, par exemple, de connaître l'état marital, le numéro d'assurance sociale, le numéro d'immatriculation de la voiture, la date de naissance et l'âge des enfants dans la famille, le numéro de permis de conduire, le numéro de compte bancaire, le numéro de carte de crédit, et sans doute que j'en ai oublié.

Face à cette situation, la Commission a publié, au printemps dernier, un bulletin d'information qui rappelle aux uns et aux autres leurs droits et obligations en cette matière. Nous y reviendrons. Ce document est déposé à l'intention des membres de la commission parlementaire. Je crois que vous avez une copie.

De son côté, le projet de loi n° 26 constitue la réponse gouvernementale à cette problématique. Il vise à limiter le nombre de renseignements qui peuvent être requis de manière licite, préalablement et au moment de la conclusion du bail. On ne peut que louer cette initiative de Mme la ministre des Affaires municipales et de la Métropole. L'intervention du législateur est justifiée, car la situation actuelle donne sûrement lieu, dans de nombreux cas, à des pratiques discriminatoires et peu respectueuses de la vie privée des individus.

Je souhaite parler maintenant de la nécessité de cueillir des renseignements personnels, donc l'application du principe de la nécessité. Je l'ai déjà dit, la Commission a pris connaissance de l'ampleur du problème de différentes sources, notamment à travers les dossiers de plaintes qui lui ont été soumises au cours des années. Malgré différentes démarches, elle n'arrive cependant pas à obtenir des études objectives sur l'étendue du problème de la collecte des renseignements des futurs locataires. La vision globale est encore floue, la perspective impressionniste. Vraisemblablement, cette collecte est motivée par la volonté fort compréhensible des propriétaires de logements d'éviter des candidats qui présentent des risques financiers. En ce cas, la collecte de renseignements personnels vise à minimiser les chances d'encourir des pertes monétaires. Combien de locateurs demandent des renseignements personnels donnant ouverture aux enquêtes de crédit? Auprès de combien de candidats à la location? Des questions... Les questions, pardon, sont importantes pour l'application de la Loi sur le secteur privé et demeurent jusqu'ici sans réponse, du moins pour la Commission d'accès.

À l'heure actuelle, on prévoit, dans le Code civil du Québec, des mécanismes de recouvrement des créances auprès de la Régie du logement. Ces actions en recouvrement, une fois analysées, doivent révéler certaines tendances qui décriraient la nature du lien possible entre l'absence de renseignements personnels sur un individu et la difficulté de recouvrir une mauvaise créance. Quelles sont-elles? Quel pourcentage de locataires et de propriétaires en sont affectés? En l'absence d'informations précises sur ce sujet et de réponses à ces questions, la Commission admet et reconnaît néanmoins l'existence d'un certain lien entre les pertes financières des propriétaires et l'absence d'information sur les habitudes de paiement. Sinon, l'approche la plus respectueuse de la vie privée des citoyens serait de limiter encore plus que ne le fait le projet de loi n° 26 la collecte de renseignements personnels.

Ces questions sont fondamentales car les réponses doivent constituer la justification des mesures qui s'étendent à tous les locataires ? et j'insiste, à tous les locataires ? selon le projet de loi n° 26. La collecte des renseignements et leur utilisation ne se justifie que par le principe de la nécessité. Autrement dit, avons-nous une situation objective qui justifie une intervention législative pour la première fois dans le Code civil du Québec au regard de la collecte de renseignements sensibles auprès de tous les aspirants locataires? Faut-il rappeler qu'au Québec les ménages locataires représentent à peu près 44 % de tous les ménages?

Je passe maintenant aux principes contenus dans la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé, qu'on va appeler, pour simplifier, Loi sur le secteur privé. Entrée en vigueur en 1994, cette loi prépondérante sur toutes les autres lois édicte des principes de base en matière de protection de renseignements personnels. Notons en premier lieu que cette loi prévoit qu'on ne peut recueillir que les renseignements nécessaires à l'objet du dossier. Le projet de loi est-il en accord avec ce principe fondamental? Avec respect, nous ne le croyons pas.

Dans le projet de loi n° 26, on présume que pour valider les habitudes de paiement de chaque locataire aspirant, les mêmes renseignements sont nécessaires indépendamment des parties en présence. Or, en matière des droits et libertés, en l'occurrence le droit à la vie privée et à la protection des données, les tribunaux préconisent une approche qui repose sur des cas individuels et précis lorsque cela est possible. Dans cette foulée, pourquoi ne pas retenir une approche plus individualisée? Le fait de modifier le Code civil du Québec pour définir ce qui est nécessaire pourrait, dans certains cas, brimer les droits des uns, alors que, pour d'autres, ceux qui sont de mauvaise foi et qui effectivement présentent des candidatures à risque, la formule est réductrice.

Précisons ensuite que la Loi sur le secteur privé spécifie que la collecte de renseignements auprès de tiers ne peut être faite qu'avec le consentement de la personne concernée. Le projet de loi, voulant limiter certaines pratiques répréhensibles, a néanmoins pour effet de légitimer la collecte de plusieurs renseignements standardisés de tous ceux et celles qui, un jour, chercheront un logement pour leur famille, un chalet, ou même un pied-à-terre. On laisse entendre que la règle du consentement est écartée. Il est vrai que les lois s'interprètent les unes par rapport aux autres. Il est aussi vrai que, à titre de loi prépondérante, la Loi sur le secteur privé continuera à s'appliquer dans toute sa rigueur. Le malaise que nous ressentons est au niveau du message que véhicule ce projet de loi. En permettant une cueillette généralisée de la date de naissance, ne laisse-t-on pas entendre que cet identifiant permettra à son détenteur d'avoir accès à des banques de données dont l'une des clés est justement cet identifiant?

n(17 h 20)n

En conséquence, deux effets du projet de loi sont à prévoir: ou l'on conclura que les seuls renseignements qu'un propriétaire peut recueillir sont limités à ceux prévus au Code civil du Québec ou encore les propriétaires feront fi du consentement et se serviront des mêmes renseignements recueillis pour avoir accès à d'autres renseignements auprès de tiers. L'un ou l'autre des scénarios n'est pas conforme à l'esprit de la loi, non plus qu'aux règles qui devraient à notre avis gouverner les rapports locataire-locateur.

Le troisième principe de la Loi sur le secteur privé sur lequel j'attirerais votre attention est relié à l'obligation de destruction des renseignements personnels dont la détention n'est plus nécessaire. Or, le projet de loi actuel ouvre la porte par son silence au spectre de l'édification chez tous les locateurs de banques de données sur les citoyens qui ont dans le passé cherché un logement.

Au moment où les événements du 11 septembre et leurs suites dans les sociétés occidentales nous rappellent à quel point notre vie privée est fragile, la Commission reste perplexe devant une mesure qui ne peut que faciliter pour une personne mal intentionnée le vol d'identité. La date de naissance ajoutée au nom, adresse et numéro de téléphone constituent un excellent début pour amorcer des manoeuvres frauduleuses, voire criminelles. En général, plus il y a de renseignements personnels qui circulent aux mains de plus en plus de personnes, plus le vol d'identité est facilité.

J'arrive, en conclusion, aux recommandations de la Commission. Pour l'observateur attentif du monde de la location résidentielle, il est évident que les renseignements personnels que requiert un locateur d'un candidat à la location et d'un locataire méritent d'être précisés de façon à permettre aux uns et aux autres de connaître les règles qui régissent leurs droits et obligations. Il en est de même des règles visant la conservation et l'utilisation de ces mêmes renseignements. Ces règles ne sont pas faciles à établir, nous en convenons. Cependant, notre défi est de réussir cette difficile conciliation des intérêts de chacun. C'est dans cette perspective que la Commission a déjà publié une fiche, un bulletin d'information sur le bail et la production des renseignements personnels. Les échos que nous en avons sont très positifs. Largement distribuée et utilisée, elle se veut la contribution de la Commission dans ce dossier. Elle s'ajoute aux plaintes, au cours des années, que la Commission traite dans ce secteur.

Aussi, afin de contribuer à nouveau d'une manière constructive au débat, permettez-moi de vous présenter quelques propositions qui, à notre avis, auraient sans aucun doute l'avantage de bonifier les règles à l'étude aujourd'hui. Ces propositions auraient en outre pour bénéfice d'assurer au projet sous étude le respect intégral des principes que nous retrouvons aux lois avant-gardistes dont s'est doté le Québec au cours des dernières décennies et qui visent à assurer aux citoyens la protection des renseignements personnels.

Premièrement, première proposition. En matière de cueillette, il nous faut souligner que le vol d'identité, tel que nous l'avons décrit, n'est pas un phénomène sans racines au Québec. Inquiet, le gouvernement du Québec est d'ailleurs intervenu rapidement à ce sujet. Un projet de loi modifiant le Code civil en matière de documents d'état civil, le projet de loi n° 47, est actuellement à l'étude devant l'Assemblée nationale. Il faut donc limiter les cueillettes de renseignements personnels. Seuls les renseignements qui sont absolument nécessaires devraient être recueillis au sujet d'un éventuel locataire. Afin de favoriser la transparence dans le respect du principe du consentement, l'éventuel locataire devrait pouvoir faire lui-même preuve de ses habitudes de paiement et, s'il le désire, consentir à ce qu'un locateur vérifie auprès d'un tiers ses habitudes. Ce n'est pas faire preuve d'angélisme que d'imaginer que le consentement d'une des pierres d'assise de la Loi sur le secteur privé, loi prépondérante, soit favorisé et encouragé dans toutes les lois du Québec. À notre avis, cela doit être clairement rappelé dans le projet de loi.

Deuxième proposition. En matière de conservation, le principe veut que le renseignement que l'on ne détient pas ne risque pas de se retrouver dans les mains de quelqu'un qui n'y a pas droit. À cet égard, il nous faut donc recommander, compte tenu du flou juridique actuel, que les règles relatives à la destruction des renseignements personnels soient énoncées spécifiquement afin d'éviter la constitution de superbanques de données dans le secteur privé. Et finalement, quant aux dommages et intérêts punitifs, le projet de loi précise que la Régie du logement pourrait en accorder en cas de violation des droits découlant de la disposition législative sur la cueillette de renseignements.

En raison de l'expertise de la Commission d'accès et de ses membres à ce sujet, nous estimons que la Commission devrait, la Commission d'accès devrait elle aussi avoir la possibilité d'accorder des dommages punitifs. Nous pouvons élaborer un peu plus longuement lors de la période des questions sur ces suggestions. Soit moi ou mon collègue Me André Ouimet, qui est à ma gauche, secrétaire de la Commission et directeur des services juridiques, pourra répondre à vos questions. Je vous remercie beaucoup, Mme la Présidente, de cette occasion d'intervenir.

La Présidente (Mme Doyer): Merci, Mme Stoddart. Alors, je donne la parole à Mme la ministre des Affaires municipales et de la Métropole.

Mme Harel: Merci, Mme la Présidente. Alors, bienvenue, Mme Stoddart. J'imagine que vous avez déjà, depuis votre nomination, été reçue par plusieurs commissions parlementaires, mais c'est la première fois, je crois, que nous vous recevons ici, à la commission parlementaire d'aménagement du territoire. Alors, bienvenue. Et je comprends que c'est Me Ouimet qui vous accompagne. C'est bien ça? Vous allez m'aider à réconcilier ce que vous nous dites ce soir. Dans le fond, deux ou trois grandes recommandations, l'une étant de faire en sorte que le locataire fasse lui-même preuve de ses habitudes de paiement ou que cette habitude de paiement soit vérifiée auprès d'un tiers avec son consentement.

Deuxièmement ? c'est bien ça ? vous nous recommandez que la Commission ait aussi droit d'appliquer des dommages punitifs. Mais là ça relève d'un autre ministre qui n'est pas moi. Puis troisièmement... Quel était le troisièmement ou le deuxièmement?

Mme Stoddart (Jennifer): La destruction des données.

Mme Harel: Ah, la destruction, d'accord, destruction des données une fois transmises. Bon. Ceci dit, dans ce CONTACT ? en fait, ça s'intitule Info-conseils sur la confidentialité des renseignements personnels ? alors, vous énumérez les principes, les balises qui doivent guider l'application de la loi. Alors, vous dites deux grands principes: respect du droit à la vie privée, caractère indispensable des renseignements recueillis. Ensuite, vous nous dites les renseignements personnels qui peuvent être demandés, ensuite les renseignements personnels qui ne peuvent pas être exigés. Dans ceux qui peuvent être demandés, il y a deux catégories: ceux qui peuvent être demandés pour vérifier le comportement du futur locataire puis l'autre catégorie, c'est ceux qui peuvent être demandés pour établir des habitudes de paiement. D'un côté, les comportements; de l'autre côté, les habitudes de paiement. Puis vous avez ceux qui ne peuvent pas être exigés.

Alors, dans ceux qui peuvent être demandés, vous dites que le propriétaire, dans les deux cas, peut recueillir avec son consentement des renseignements relatifs aux habitudes de paiement d'un futur locataire. Alors là, ça peut se faire auprès du propriétaire antérieur ou auprès du candidat locataire lui-même avec une série d'informations qu'il devra à ce moment-là lui-même fournir: une attestation du respect de ses obligations par son institution financière... Donc, ça va encore plus loin, dans le fond. Pour établir ses habitudes de paiement, vous dites: L'éventuel locateur peut demander au candidat locataire, j'imagine, ses carnets de chèques. «Attestation du respect de ses obligations par son institution financière.» Est-ce que c'est à ça que vous faites...

Mme Stoddart (Jennifer): Une preuve de...

Mme Harel: Alors, c'est quoi? Des fois, il y a des mots comme ça. Je me rappelle, au ministère des Relations avec les citoyens, ils me parlaient de l'«espace public commun» et je leur avais demandé: Est-ce que c'est un stationnement? Mais c'était de bien d'autre chose plus visionnaire.

Mais alors, l'«attestation du respect de ses obligations par son institution financière», c'est quoi?

Mme Stoddart (Jennifer): Bien, ça pourrait être une lettre du gérant de banque disant: Mme Stoddart...

Mme Harel: Mais, si on est sur l'aide sociale, par exemple, est-ce que vous pensez qu'on va aller voir son gérant de banque pour avoir la lettre?

Mme Stoddart (Jennifer): Bien, peut-être on irait à d'autres...

Mme Harel: Du gérant de caisse, mettons qu'on est dans une caisse. Parce qu'il n'y a pas beaucoup de banques qui nous acceptent.

Mme Stoddart (Jennifer): ...d'autres choses. Par exemple... Oui, mais enfin, ça pourrait... on pourrait... Vous savez, il y a de la jurisprudence. Ça arrive que les personnes sur l'assistance sociale empruntent de l'argent pour acheter des maisons et qu'ils ont donc auprès de leur banque... Ils peuvent avoir des...

Mme Harel: Des personnes sur l'aide sociale qui empruntent de l'argent? Bon, ce n'est pas...

Mme Stoddart (Jennifer): Oui. Il y a un cas bien connu sur lequel j'ai pu travailler quand j'ai travaillé à la Commission des droits de la personne...

Mme Harel: Ah oui?

Mme Stoddart (Jennifer): Et c'est dans l'Outaouais.

Mme Harel: Alors, c'est l'exception de l'exception, sûrement.

Mme Stoddart (Jennifer): Et ça existe, une personne sur l'aide sociale qui a emprunté l'argent pour acheter une maison.

n(17 h 30)n

Mme Harel: Mais, disons, les gens de mon quartier, moi, qui me demandent, là, en général: Qu'est-ce que ça veut dire, l'attestation du respect de ses obligations par son institution financière? je leur dirais: Une lettre de votre directeur de caisse.

Mme Stoddart (Jennifer): Oui, c'est ça.

Mme Harel: Ensuite, une attestation du respect de ses obligations par un propriétaire précédent, une lettre du propriétaire antérieur, tout autre document attestant du respect de ses obligations par un organisme, une entreprise de biens ou de services qui requiert des paiements échelonnés dans le temps: Hydro-Québec...

Mme Stoddart (Jennifer): Et voilà.

Mme Harel: Hydro, par exemple...

Mme Stoddart (Jennifer): Un plan de paiement de gaz, par exemple, sur une base mensuelle.

Mme Harel: Bon. Et les extraits pertinents de son dossier de crédit. Donc, ça signifie que la personne doit payer à ce moment-là pour aller chercher son dossier de crédit ? Equifax, je pense que ça coûte 15 $. Dans le fond, ce que vous dites, c'est que le candidat locataire pourrait avoir à fournir, pour établir ses habitudes de paiement, des extraits de son dossier de crédit.

Mme Stoddart (Jennifer): ...échéance. Ce qu'on dit, c'est: Si c'est nécessaire dans ce cas-là.

Mme Harel: Bon, d'accord, prenons-le comme nécessaire, ça peut arriver. Alors, si vous l'écrivez, ce n'est pas parce que ce n'est pas théorique, ça doit être possible.

Mme Stoddart (Jennifer): Ça peut être exigé dans certains cas, oui.

Mme Harel: Je suis très contente de ça, c'est pour dire aux gens comment ? vous nous dites ? les balises qui doivent guider les citoyens et les citoyennes dans ces situations, autant locateurs que locataires... Donc, il est possible à ce moment-là, pour établir les habitudes de paiement, que le candidat locataire ait à fournir au propriétaire ? je lis bien là ? les extraits pertinents de son dossier de crédit.

Mme Stoddart (Jennifer): C'est ce qu'on dit: Ils peuvent fournir. Lui, il peut.

Mme Harel: Il peut. Si on lui demande, il peut le faire. Il n'est pas obligé.

Mme Stoddart (Jennifer): Il peut consentir à le fournir.

Mme Harel: Il peut consentir, mais c'est lui-même qui le fournit. Ça veut dire que c'est lui qui va, par exemple, chercher les extraits de son dossier en payant pour l'obtenir. C'est ça qui est là-dedans. O.K.

Ce qui m'a beaucoup surprise, surtout en regard de ce que vous nous dites ce soir, c'est juste la page à côté, la vérification du crédit. Alors là je le lis: «Afin d'établir les habitudes de paiement d'un futur locataire, un propriétaire a la possibilité de recourir aux services d'un agent de renseignements personnels, communément appelé bureau de crédit. En premier lieu, il doit obtenir le consentement du locataire. À partir de ce consentement, cette démarche peut s'effectuer avec un minimum de renseignements personnels. Ainsi, avec le nom, le prénom, les adresses, actuelle et antérieures, ainsi que la date de naissance de l'éventuel locataire, le repérage d'une fiche personnelle peut se faire dans les banques de données des agents de renseignements personnels, et ce, de manière très efficace.»

Donc, ce que vous nous dites, en d'autres termes, c'est, d'une part, soit que, pour établir ses habitudes de paiement, il a à fournir une lettre de son directeur de caisse, ou une lettre de son propriétaire précédent, ou des reçus de ses comptes de Bell téléphone ou d'Hydro-Québec, et les extraits pertinents de son dossier de crédit. Tout ça peut être conjonctif. On peut lui demander tout cela, et tout cela peut être considéré comme pouvant être demandé. Alors, avec son consentement, bien évidemment, mais tout ça peut lui être demandé, additionné. Et en plus, pour établir les habitudes de paiement d'un futur locataire, un propriétaire peut recourir aux services d'un bureau de crédit avec les nom, prénom, adresses, actuelle et antérieures, et la date de naissance de l'éventuel locataire.

Comment je réconcilie ça avec ce que vous disiez tantôt: faire lui-même preuve de ses habitudes de paiement?

Mme Stoddart (Jennifer): Oui. C'est parce que, Mme la ministre, ce sont des alternatives, dépendant de la situation, C'est ça qu'on essaie de dire.

Mme Harel: Ah! vous voudriez... Vous me dites que c'est «ou, ou»? «Ou, ou»?

Mme Stoddart (Jennifer): Non, la façon...

Mme Harel: Si c'est alternatif, ce serait «ou», mais il n'est pas là, le «ou, ou», hein. Il n'est pas là.

Mme Stoddart (Jennifer): Enfin, «ou, ou», ça pourrait être, dans certains cas, l'un ou l'autre, ou l'autre ou l'autre. Mais, dans d'autres cas, ça peut être l'un et l'autre et l'autre, parce que un et deux et trois peut-être ne marchent pas ou ne sont pas suffisants, ou la personne vient de déménager au Québec, donc n'a pas de compte d'Hydro-Québec, ou... Vous savez, il y a plusieurs... Ce qu'on dit, c'est qu'il y a plusieurs façons d'établir sa capacité de payer. Il y a plusieurs façons d'établir qu'on serait un bon locataire potentiel.

Donc, ce qui est nécessaire à recueillir dans chaque cas peut être fort différent. C'est peut-être ça, notre message central. On en convient, ce n'est pas nécessairement quelque chose qui est facile, peut-être, à rendre dans la législation parce que ça reste plus au niveau des principes qu'une liste fermée de renseignements qui peuvent être cueillis. Mais chaque personne se présente un peu différemment devant le marché de la location, avec son histoire, ses regroupements: Est-ce que c'est un couple? Est-ce que c'est une famille, etc.? Et donc, ce qu'on dit, c'est: Pour chaque situation, il faut regarder le principe de la nécessité: Qu'est-ce qui est nécessaire de recueillir comme renseignements personnels pour établir la capacité de payer de cette personne?

Mme Harel: Donc, je pars du principe que vous dites: Le propriétaire a droit d'établir la capacité de payer. Pour établir cette capacité de payer, il peut recueillir, avec le consentement du locataire, et lui réclamer tout ce qui est ici requis, imprimé, et il pourrait aussi, et à la place ou en même temps, faire aussi une enquête de crédit avec la date de naissance.

Mme Stoddart (Jennifer): C'est ça. Si tout cela...

Mme Harel: S'il y a consentement.

Mme Stoddart (Jennifer): Oui, s'il y a consentement.

Mme Harel: Donc, la date de naissance, ça ne vous inquiète pas?

Mme Stoddart (Jennifer): Si elle est nécessaire, si elle est nécessaire dans ce cas-là. Ce qui nous inquiète, c'est que tous les locataires du Québec seraient obligés à donner, obligatoirement, pour même être considérés pour la conclusion d'un bail, leur date de naissance.

Mme Harel: Qui va la juger nécessaire? Il va tous falloir aller vérifier auprès de la Commission d'accès si, dans le cas précis, c'était ou pas nécessaire?

Mme Stoddart (Jennifer): Non. Je pense que c'est un principe qui peut être assimilé par l'ensemble des locateurs. Je pense qu'il y a des principes de règles de vie dans la société. Notre société a assimilé relativement bien, par exemple, les principes de la non-discrimination dans le logement. Je sais que ça existe encore. Mais, si on parlait de ce phénomène-là il y a 25 ans, on ne l'aurait pas compris.

Mme Harel: Je vous reviens à cette pratique des choses, hein, parce que tout ça ne se joue pas dans des bureaux mais dans la vraie vie, avec 1,2 million de locataires annuellement, hein, qui renouvellent leur bail. Alors, dans la vraie vie, quand vous nous dites ce qui est nécessaire, qui va évaluer ce qui est nécessaire? Est-ce que ce qui est nécessaire dans le cas d'une personne assistée sociale est différent de ce qui est nécessaire, je ne sais pas, moi, dans le cas d'un député? Est-ce que ce qui est nécessaire varie dépendamment de la personne que vous rencontrez?

Mme Stoddart (Jennifer): Ce qui est nécessaire peut varier dépendant des parties en présence. C'est le locataire qui doit ...le locateur, pardon, qui loue le logement, qui a le fardeau de ne pas cueillir plus que ce qui est nécessaire pour établir la capacité de paiement.

Mme Harel: Ça signifie que vous acceptez là, ce que vous venez de me dire, que ce qui est nécessaire soit différent selon les parties. C'est-à-dire, ce qu'on va demander peut-être à quelqu'un qui a un genre de métier x va être différent de celui qui n'a pas de métier, par exemple, ou etc. Les renseignements nécessaires pour vous, l'interprétation que vous en faites, ça dépend du client?

Mme Stoddart (Jennifer): Oui, les renseignements peuvent être différents, dépendant de la capacité de payer ou le profil de la personne qui se présente.

Mme Harel: Est-ce que vous en avez parlé avec la Commission des droits de la personne?

Mme Stoddart (Jennifer): On a lu la présentation de la Commission des droits de la personne, on sait qu'elle se préoccupe de la cueillette des renseignements personnels. On sait aussi que la majorité des personnes parlaient de la différence entre peut-être ce qu'on pourrait appeler la condition sociale. Une des choses qui nous préoccupent, Mme la ministre, c'est qu'il nous semble, d'après les statistiques qu'on peut avoir, qu'il y a relativement peu de mauvais payeurs, et on a entendu ce matin de quelqu'un de notre organisme qui suivait la commission parlementaire, les travaux, que, dans le petit nombre de mauvais payeurs, il y a encore un très petit nombre de personnes assistées sociales. Donc, malgré tous les préjugés qu'on peut avoir à leur égard, leur capacité de paiement, leurs habitudes de paiement sont aussi bonnes, sinon meilleures que l'ensemble de la population. Donc, c'est une évaluation ? on revient à ça ? qui doit être adaptée à la personne et ses habitudes de paiement antérieures, la preuve de ses habitudes.

Mme Harel: Mais vraiment, vous m'étonnez à tous égards, je ne m'attendais pas à cette réponse-là, d'abord, parce que la loi dit «nécessaire à l'objet du contrat qu'est le bail» et non pas «à la nature du locataire». La loi est très, très claire là-dessus...

Mme Stoddart (Jennifer): L'objet... d'accord.

n(17 h 40)n

Mme Harel: ...c'est les renseignements requis nécessaires, les renseignements nécessaires à l'objet du contrat. Alors, normalement, le contrat, c'est un bail. Que vous soyez député, que vous soyez recherchiste, que vous soyez ministre, que vous soyez n'importe quoi ou rien, ce n'est pas vous qui déterminez les renseignements nécessaires, c'est le bail, enfin l'objet du contrat, la nature du contrat, le louage. Et puis, c'est sûr que vous pouvez penser que ce n'est pas beaucoup, parce que sur 1,2 million... mais c'est quand même 35 000 causes annuellement entendues à la Régie du logement de mauvais payeurs. Sur 1,2 million, on peut dire que c'est 5 %. Mais, sur les 35 000, il est bien évident que ça fait 35 000 propriétaires qui, bon an, mal an, ont un problème. Je ne sais pas, quand vous dites que ce n'est pas beaucoup, est-ce que, pour vous, le 35 000, ce n'est pas beaucoup?

Mme Stoddart (Jennifer): En fait, objectivement, oui, comme somme, ça peut être beaucoup. Cependant, nous regardons l'application du principe de la nécessité à l'ensemble des Québécois et Québécoises qui cherchent à conclure des baux et nous voyons que c'est de 5 à 7 % de tous les baux qui seront signés, on se comprend bien là, dans une année, et c'est là où la Commission se pose la question de l'application du principe de la nécessité de le rendre obligatoire pour tous, sachant que tous... et ça ne semble pas être juste une question de condition sociale, ça semble un problème également réparti parmi la population qui a 5 à 7 % de mauvais payeurs et tous les autres seraient de bons payeurs. Donc, pourquoi instaurer une cueillette obligatoire de renseignements personnels quand, peut-être, moins d'information, ce serait approprié dans leur cas.

Mme Harel: Alors donc, je vois bien votre... Tout repose sur votre interprétation du fait que le renseignement nécessaire n'est pas celui requis pour l'objet du bail de location mais celui requis à cause du client, en fait, du demandeur. Mais ça, je vais vous dire, je vais faire vérifier cette interprétation parce qu'elle me semble, disons, elle me semble porter, si vous voulez, à controverse, notamment par la Commission des droits, mais enfin. Parce que, à ce moment-là, ça pourrait être basé sur la condition sociale ou basé sur tous les autres motifs. Dépendamment des clients, on demanderait des choses différentes.

Bon. Vous dites dans CONTACT que... vous nous dites: «Ainsi, avec les nom, prénom, adresse et date de naissance, le repérage peut se faire dans des banques de données, etc.» Dans le mémoire, vous dites non à la date de naissance, mais, dans votre CONTACT, vous dites oui. Qu'est-ce qui, entre-temps, s'est produit pour changer l'opinion de la Commission? Remarquez, ce n'est pas grave. La Commission des droits a changé aussi. Alors là, eux... ce n'est pas compliqué là, je suis dans un terrain mouvant. La Commission des droits trouvait que 10 jours, c'était assez; là, elle trouve que ce n'est pas assez. Vous, la date de naissance, c'était oui; là, c'est rendu non. Alors donc...

Mme Stoddart (Jennifer): Oui, c'est effectivement une question fort complexe. Quand on l'a publié, on l'a publié en prévision de la saison du logement, je pense, fin février, etc. Par la suite, vous avez déposé le projet de loi que nous étudions aujourd'hui. Je répète qu'on dit: Il est admissible que et il est normal qu'un propriétaire ou un locateur vérifie la capacité de paiement pour quelqu'un, de quelqu'un. Pour ce faire, entre autres moyens, si cela est nécessaire, il peut aller dans une banque de crédit avec le consentement de la personne. La différence avec ce qu'on a dit là et nos propos aujourd'hui, c'est que le projet de loi n° 26 propose de rendre obligatoire pour tout le monde, tous les locataires, sans évaluer comment s'applique dans leur cas le critère de la nécessité, le fait de donner la date de naissance. Donc, on estime que c'est peut-être... on peut mettre un point d'interrogation sur sa nécessité dans 93 ou 95 % des cas. Et donc, on a une vaste collecte de dates de naissance auprès de la population... tout le monde qui, une fois dans leur vie, est locataire. Et c'est ça qu'on dit, selon les principes par lesquels la loi sur le secteur privé s'applique... n'est pas nécessaire.

Mme Harel: Mais est-ce qu'il n'y a pas une destruction des données?

Mme Stoddart (Jennifer): Bien, voilà une de nos suggestions que vous pourrez mettre dans votre projet de loi: qu'il y ait une destruction obligatoire. Évidemment, il est difficile de faire l'inspection, de savoir si ces données sont détruites. Mais je pense que la Régie du logement a une campagne d'information assez efficace auprès des gens, beaucoup d'information, brochures, un bail type, et ça pourrait être répété que toute information, tout renseignement personnel doit être détruit après qu'on n'a plus besoin de le détenir. Je pense que tout le monde n'est pas au courant, et ce serait important de rappeler ce principe.

Mme Harel: Je crois que c'est une excellente suggestion que vous nous faites.

Je lis l'article 6 de la loi sur les renseignements personnels dans le secteur privé. Alors, ce serait... c'est toute la question de «nécessaires», de l'article 5: «La personne qui recueille des renseignements personnels afin de constituer un dossier sur autrui ou d'y consigner de tels renseignements ne doit recueillir que les renseignements nécessaires à l'objet du dossier.» Et on ne fait jamais, jamais référence, «les renseignements nécessaires», dépendamment, si vous voulez, du client. Alors là je vois une autre interprétation, là.

Mme Stoddart (Jennifer): Avec déférence, je pense que c'est parce qu'on dit: le dossier est individualisé ou personnalisé, par ménage, par famille, par personne, tout comme son dossier de crédit est personnel et...

Mme Harel: Vous pensez, par exemple, qu'on pourrait accepter, par exemple, qu'il y ait plus de renseignements requis, jugés nécessaires, si la personne est un membre d'une communauté culturelle ou si c'est une personne...

Mme Stoddart (Jennifer): Non, non, non. C'est le contraire, justement on dit «individualisé». On peut être membre de toutes sortes de groupes qui s'identifient par différentes caractéristiques, et c'est dans son cas individuel ou le cas de cette famille qu'on doit recueillir les renseignements nécessaires.

Mme Harel: Ce n'est pas moi qui vais vous faire la démonstration que, lorsque ça devient systémique... Ça a beau être individuel, quand c'est systémique... c'est individuellement appliqué, mais ça devient un biais systémique. Alors, si c'était individuel... par exemple, on pourrait se rendre compte que les renseignements dits nécessaires pour la signature d'un bail sont plus nombreux, ces renseignements-là, lorsqu'il s'agit, individuellement, cas par cas, de membres de communautés culturelles, de minorités visibles, de personnes avec... sur l'aide sociale, etc., c'est appliqué individuellement. Mais il pourrait y avoir, même appliqué individuellement par des gens qui ne se connaissent pas, un biais systémique.

Mme Stoddart (Jennifer): Oui, enfin, si ça arrive, je pense qu'il s'agirait là d'un beau cas de discrimination, si, systématiquement...

Mme Harel: Mais que vous réglez comment, si ça s'est appliqué individuellement?

Mme Stoddart (Jennifer): Bien, je pense, voilà, c'est un cas pour la Commission des droits de la personne, qui justement est spécialisée dans les enquêtes de discrimination systémique.

Mme Harel: Écoutez, vous avez l'air de penser que ça...

Mme Stoddart (Jennifer): Mais, chaque cas individuel... chaque cas a un aspect individuel, et si, globalement, tous ces cas-là s'identifient entre eux, ont des liens entre eux, ont un motif de... par rapport au motif de discrimination, bien là, c'est un cas de discrimination. Mais, individuellement, ce n'est pas justifié que par l'application d'un assisté, dans ce cas-là, qui est indépendamment de...

Mme Harel: Mais, si c'est un cas de discrimination systémique appliqué par 50, 60, 100 000 personnes propriétaires individuellement, mais qui appliquent juste le fait de demander plus de renseignements à certains qu'à d'autres, vous faites quoi? Vous envoyez des personnes victimes, les 10, 15, 20 000 personnes, à la Commission des droits?

Mme Stoddart (Jennifer): Mais ça dépend si la discrimination, c'est par rapport à un motif de la Charte, c'est-à-dire, c'est leur race, leur sexe, etc., leur handicap. Si, systématiquement, indépendamment de ces facteurs-là, on demande trop de renseignements, plus qu'ils sont nécessaires, ce qu'on préconise, c'est qu'à ce moment-là on pourrait recourir à la Régie du logement, comme, je pense, le projet de loi suggère. Ou, nous, on demande aussi, à la Commission d'accès, parce qu'on prétend qu'on a accumulé au cours des années une certaine expertise dans la question de la vie privée... On a le problème actuellement qu'on ne peut pas donner de dommages-intérêts, et plusieurs personnes qui viennent nous voir disent: Franchement, bon, mais... écoutez, on a déposé une plainte, mais, finalement, on voit que nous ne donnez pas de dommages-intérêts, alors, bon, je laisse tomber.

La Présidente (Mme Doyer): Merci, Mme Stoddart. Alors, je vais donner la parole à Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, Me Stoddart et Me Ouimet, merci beaucoup. C'est dommage qu'on n'ait pas un mémoire écrit, je sais qu'on vous a un peu bousculés. Donc, vous nous avez fait une proposition orale, une présentation orale.

n(17 h 50)n

Ce matin, on a écouté la Commission des droits de la personne. Et, Me Stoddart, non seulement vous représentez l'expertise de la Commission d'accès à l'information, mais vous avez déjà été vice-présidente de la Commission des droits de la personne, donc vous avez les sensibilités voulues pour mesurer l'impact, en fait, de la discrimination dans le logement en particulier.

En tout cas, sur la base de ce que vous nous avez donné, ce que je comprends et qui tranche un peu avec ce que nous avons entendu, notamment par la Commission des droits de la personne, c'est que vous trouvez légitime pour un propriétaire, un locateur de demander certains renseignements à des fins précises qui sont celles d'établir les habitudes, la capacité de payer du locataire. Ça, je le comprends, c'est clair dans votre esprit. Et, vous, dans votre document CONTACT, vous nous expliquez que, à première vue, les renseignements personnels qui établissent l'identité du futur locataire pourraient suffire, notamment le nom, le prénom et l'adresse complète de l'individu, mais que, dans certains cas, le propriétaire pourrait demander, avec le consentement du nouveau locataire, du candidat locataire, il peut demander d'autres informations, notamment les coordonnées d'un propriétaire actuel ou antérieur. Ça, c'est un deuxième niveau. Si on n'arrive pas à établir la crédibilité du candidat au logement sur le plan de sa capacité financière de payer, on peut réclamer, dans un deuxième temps, des coordonnées de l'ancien propriétaire. Et puis, dans un autre niveau, à un autre niveau, on peut également, toujours par consentement, toujours par consentement, demander des informations qui permettent d'établir les habitudes de paiement du futur locataire, et c'est sur une base volontaire. C'est ça que vous proposez, vous, il faut que ça se fasse sur une base volontaire et non pas de façon coercitive et de façon encadrée comme le propose le projet de loi. C'est peut-être là la nuance entre ce que vous nous proposez et ce que le projet de loi n° 26 nous propose. Est-ce que j'ai bien compris votre raisonnement?

Mme Stoddart (Jennifer): Enfin, oui, avec peut-être la nuance que je pourrais apporter, c'est que nous trouvons que l'initiative d'essayer d'encadrer cette situation qui est très difficile et dans laquelle des avis sont opposés est une belle initiative. Cependant, on proposerait que ce soient des principes qui soient encadrés plutôt que de faire un menu, si on veut, des renseignements personnels obligatoires à donner. Donc, c'est une légère différence sur ce qui est, ce qui serait dans le projet de loi, et on propose d'ajouter le principe de la destruction des renseignements.

Mme Houda-Pepin: D'accord, très bien. Et vous avez dit que la Commission d'accès à l'information exprime un malaise ? c'est le terme que vous avez utilisé ? face à la cueillette généralisée des informations, parce que, tout en reconnaissant au propriétaire privé la légitimité de recueillir des informations personnelles pour des fins d'établissement de la crédibilité du candidat locataire, vous dites que faire cette cueillette de façon systématique, ça pourrait déboucher sur des abus. Et vous avez donné, notamment, le critère de la date de naissance et vous avez évoqué aussi le projet de loi n° 47 qui est devant nous actuellement à l'étape... je pense qu'on a fait l'étude article par article, c'est un projet de loi de cinq articles, qui a été modifié pour resserrer le contrôle sur la délivrance des états civils. On sait que c'est un papier qui servait autrefois à l'obtention du passeport et, dans la suite des événements du 11 septembre, on s'est rendu compte qu'il y avait une faille là. On est loin d'avoir fermé toutes les failles de notre système, mais, quand même, il y a eu ce geste qui a été posé.

Donc, je sais aussi que vous êtes sensibilisée à la question des banques de données, vous en avez parlé aussi. Je vous ai écoutée avec grand intérêt lors de l'étude du projet de loi n° 161 sur le cadre juridique des technologies de l'information et, dans tout ce qui s'appelle banque de données et fait référence justement à ce projet de loi, qui est devenu une loi... Et vos préoccupations sont légitimes, à mon point de vue, parce que les législateurs ne sont pas nécessairement tous conscients des risques potentiels que l'on court lorsqu'on constitue des banques de données généralisées, entre les mains de qui qu'elles se trouvent. Le groupe avant vous qui s'est présenté, le Regroupement des locataires, ils nous ont parlé d'une maison d'avocats qui commercialise justement les informations sur les locataires. On parle aussi d'une liste de mauvais locataires, et ainsi de suite. Donc, ça, c'est les abus que vous relevez, en tout cas qui vous inquiètent et sur lesquels vous voulez que, comme législateur, on puisse avoir une certaine prise.

Par rapport à la conservation et à la destruction de ces renseignements-là, qu'est-ce que vous proposez concrètement? Comment est-ce que le législateur, dans un projet de loi comme celui-là, peut s'assurer que nous avons vraiment fermé la porte à ce type d'abus?

Mme Stoddart (Jennifer): Bien, je pense qu'il faudrait, dans le projet de loi et donc dans un éventuel amendement du Code civil, dans la partie afférente à la location résidentielle, rappeler le principe de la destruction nécessaire des données qui ne sont plus requises, et peut-être assortir cette partie-là d'un certain recours pour quelqu'un qui découvre qu'on détient ou utilise mal, en fait... L'intérêt, ce n'est pas de les détenir en soi, mais de les mal utiliser à l'avenir, peut-être de façon frauduleuse. Donc, je pense qu'on pourrait prévoir des sanctions dans la loi.

Mme Houda-Pepin: D'accord. Est-ce que, parce que, dans votre CONTACT, là, vous parlez aussi de votre rôle comme Commission. Est-ce que vous avez fait des enquêtes sur les abus en rapport avec la problématique qu'on discute, les abus qui ont été dénoncés? Combien d'enquêtes avez-vous faites, le cas échéant?

Mme Stoddart (Jennifer): Oui. Je n'ai pas la somme totale des enquêtes depuis l'institution de la Commission. Ce que je sais, c'est que, dans la saison du logement de cette année, nous avons à peu près 200 appels, soit plaintes ou demandes d'information par téléphone, et on essaie d'aider les gens en leur donnant l'information au téléphone. Dans les plaintes écrites, on en a une douzaine qui ont été déposées ce printemps; plus de la moitié ont été réglées à l'amiable, quelques dossiers sont toujours ouverts parce que les locateurs sont en train de regarder comment refaire leur formulaire de location. Certaines personnes se sont désistées aussi parce qu'elles ont compris que, dans la loi actuelle, la Commission ne peut que faire des ordonnances, elle ne peut pas chercher des dommages-intérêts, elle peut encore moins donner des logements, ordonner qu'on conclue un bail, et elle ne demande pas ce pouvoir non plus. Alors, pour certaines personnes, c'est ça qu'elles recherchent, et donc elles retirent leurs plaintes.

Mme Houda-Pepin: D'accord. Dans le mémoire du Regroupement des comités logement et associations de locataires du Québec, aux pages 3 et 4 de leur mémoire ? c'est le groupe qui s'est présenté devant nous avant vous ? ils sont très sévères avec la Commission d'accès à l'information. Je voudrais vous donner l'occasion peut-être d'expliquer votre position sur cette question-là, et la meilleure façon, ce serait de vous lire un extrait de leur mémoire.

n(18 heures)n

Ils disent: «L'administration de la Commission d'accès à l'information fait encore fausse route dans sa fiche-conseil CONTACT ? celle-ci. L'avis de la Commission va à l'encontre de l'esprit de la loi, dénature son contenu et enlève même les protections qu'on y retrouve. En utilisant des formulations du genre "le propriétaire peut recueillir certaines informations, si le locataire y consent", on ouvre la porte à ce que le propriétaire peut exiger toutes sortes d'informations ou refuser de louer parce que le/la locataire n'a pas consenti à donner les informations demandées. En utilisant des formulations de ce genre, la Commission d'accès à l'information dénature la loi. Dans cette loi, afin de protéger les renseignements personnels et la vie privée, c'est celui qui collecte l'information qui doit démontrer que "les renseignements sont nécessaires" pour l'obtention du bien ou du service. La notion de "nécessaire" est extrêmement importante ici. Les tribunaux, dont la Commission d'accès à l'information, ont rendu de nombreuses décisions concernant cette question sur des sujets autres que le logement. La Commission d'accès à l'information retient dans ses décisions l'interprétation qu'en a donnée l'honorable juge Pigeon sur ce propos.» Et ils nous donnent le texte concernant la signification du mot «nécessaire» selon la rédaction et l'interprétation des lois par le juge Louis-Philippe Pigeon. Qu'est-ce que vous répondez à ça?

Mme Stoddart (Jennifer): Je réponds que je ne reconnais pas l'interprétation de la fiche CONTACT que vous venez de me lire. Il me semble que c'est assez clair, ce qu'on dit, on peut tous le lire: «Le mot "nécessaire" ? je cite en bas de la première page ? est utilisé dans la loi pour marquer le caractère absolument indispensable d'une action quelconque. Le propriétaire doit donc s'assurer de ne recueillir que les renseignements absolument indispensables lors de ses échanges avec d'éventuels locataires.» Il me semble que ça va exactement à l'encontre de ce que vous venez de me lire.

Je me permets de vous rappeler que ça a été... Cette fiche CONTACT a été rédigée avec toute l'expertise dont on disposait et nous avons une longue histoire dans l'interprétation de ces deux lois, et nos interprétations sont soumises régulièrement en appel à la Cour du Québec. Donc, on peut dire qu'on est au courant de la dernière évolution de la jurisprudence. Et je pense, au point de vue légal, c'est assez précis, ce qu'on dit là, et je ne comprends pas cette interprétation.

Mme Houda-Pepin: Je voulais vous donner l'opportunité justement de clarifier ce point-là, parce que, comme on reçoit différentes opinions, c'est important qu'on sache exactement quelle est la fiabilité ou la crédibilité des propos qui sont tenus par différents organismes. Quant à moi, j'ai toujours, en fait, considéré la Commission d'accès à l'information comme un organisme majeur sur lequel on peut se fier quand il s'agit, en tout cas, du respect de la liberté et des renseignements personnels et confidentiels.

Sur la notion de consentement ? parce que dans votre fiche CONTACT vous revenez souvent là-dessus: par consentement, le propriétaire peut demander, etc. ? ce matin, nous avons entendu un groupe qui nous a dit que le consentement, c'est relatif, parce que lorsque vous êtes dans un rapport de force entre propriétaire et locataire, quand vous êtes à la recherche d'un logement, vous êtes finalement quelqu'un de très vulnérable et vous allez consentir facilement ? d'ailleurs, la Commission des droits de la personne a développé là-dessus ? vous allez consentir facilement pour permettre l'invasion de votre vie privée. Qu'est-ce que vous répondez à ça? Parce que c'est une notion-clé dans votre avis, finalement.

Mme Stoddart (Jennifer): C'est une excellente, je veux dire, question et observation, et qui nous trouble, également. On dit dans la jurisprudence que le consentement doit être libre et éclairé. Alors, libre, on comprend. Éclairé, on imagine que ça veut dire, dans le contexte: on comprend les conséquences de donner son consentement, on comprend aussi les conséquences de ne pas le donner. D'accord? Le consentement, c'est par rapport à la situation qu'on a devant soi.

Ceci étant dit, ces observations plutôt juridiques sur la nature du consentement ne nous aident pas avec le problème qui existe par ailleurs de la pénurie de logements et le fait que je peux donner un consentement libre et éclairé, c'est-à-dire sachant que je n'aurai pas de logement si je ne consens pas, dans une conjoncture, alors que si la conjoncture était plus favorable, par exemple, pour le locataire, je ne le donnerais pas. Mais peut-être mon collègue a quelque chose à ajouter sur la nature du consentement.

M. Ouimet (André): En fait, il y a deux principes, hein, dont on parle depuis tantôt: de la nécessité de la cueillette et du consentement. Le bail est un contrat; un contrat un peu particulier, mais un contrat. Alors, ce que la Commission dit, c'est, d'une part, compte tenu qu'il y a deux parties en présence, compte tenu que ces parties-là ont souvent des caractéristiques bien différentes... J'écoutais tantôt le groupe qui nous a précédés et je crois que c'est Mme la ministre qui soulignait que, dans beaucoup de cas, ce sont des petits propriétaires. Un petit propriétaire va peut-être avoir besoin de plus ou de moins de renseignements qu'un autre propriétaire. Alors, c'est dans ce sens-là que la Commission disait: Bien, la cueillette de renseignements et le consentement qui va avec risquent de varier selon les cas. Mais on convient avec vous que la notion de consentement n'est pas toujours simple. Elle n'est pas plus simple dans le cas, par exemple, de l'assurance qu'elle peut l'être en matière de logement.

Mme Houda-Pepin: D'accord. Je lis dans le mémoire de la Commission des droits de la personne, à la page 4, que «la loi interdit de refuser d'acquiescer à une demande de bien ou de service à cause du refus de la personne qui formule la demande de fournir un renseignement personnel sauf si la collecte est nécessaire à la conclusion ou à l'exécution du contrat ou est autorisée par la loi», ce qu'on est en train de discuter.

Par ailleurs, la question de la conservation des données, je voudrais revenir là-dessus. Est-ce que vous souhaiteriez que dans la loi, dans le projet de loi n° 26, il y ait des dispositions particulières par rapport à la conservation des renseignements personnels?

Mme Stoddart (Jennifer): Oui, voilà, une de nos suggestions les plus fermes, c'est de stipuler surtout qu'ils doivent non seulement être conservés que pour le temps pour lequel ils doivent servir, ne pas être donnés à d'autres personnes et détruits après usage, si on peut dire. Mais mon collègue a quelque chose à ajouter.

M. Ouimet (André): Oui. En fait, dans les cas, par exemple, où il s'agit de candidats locataires, on pourrait prévoir que, dès que l'objet est accompli, c'est-à-dire que la location est terminée, on devrait obliger le propriétaire à détruire tous les documents qu'il a requis dans le cadre de la location.

Mme Houda-Pepin: Parce qu'il y a la conservation, mais il y a aussi le transfert des données, hein. Parce qu'on peut ne pas les conserver dans sa banque de données, mais on peut constituer une banque de données commune dans laquelle on transfère les renseignements personnels.

M. Ouimet (André): C'est ça que la Commission avait en tête lorsqu'elle parle de risque de création de superbanques de données.

Mme Houda-Pepin: D'accord. Mme Stoddart, dans une des réponses, vous avez dit que vous auriez probablement souhaité que le projet de loi plutôt encadre des principes, des principes au lieu des menus détaillés de ce que devraient contenir finalement l'information, les renseignements personnels exigés avant la conclusion d'un bail. Si je reviens à l'idée des principes, pourriez-vous nous dire quels sont les principes que vous auriez aimé voir dans ce projet de loi à la place de la nomenclature détaillée de ce que devrait obtenir un propriétaire comme information préalablement au bail?

Mme Stoddart (Jennifer): Oui, certainement. Premier principe, ce serait que le locataire doive faire preuve de sa capacité de payer par ses habitudes de paiement antérieures.

Mme Houda-Pepin: O.K. Ça, c'est ce qu'on retrouve dans votre fiche CONTACT?

Mme Stoddart (Jennifer): Oui. C'est-à-dire qu'on admet qu'il est raisonnable de dire qu'un locataire doit prouver qu'il est capable de payer le bail selon les conditions qui sont celles qui sont en discussion. Donc, le locataire fait preuve de sa capacité de payer en prouvant ses habitudes de paiement antérieures. D'accord?

Deuxièmement, que le locateur peut cueillir seulement les renseignements personnels nécessaires à cette vérification des habitudes de paiement. D'accord?

Mme Houda-Pepin: Et là vous ne sentez pas le besoin de les préciser...

Mme Stoddart (Jennifer): Non.

Mme Houda-Pepin: ...les informations nécessaires?

Mme Stoddart (Jennifer): Non, parce que ce qui est nécessaire peut être différent selon les cas. Et, on répète, on a compris, selon les meilleures recherches qu'on a pu faire ? mais il manque beaucoup d'informations à ce sujet ? qu'il n'y a que 5 % de mauvais payeurs. Et on répète que donc le danger qu'on court de demander trop de renseignements d'un ensemble de personnes pour un petit nombre qui semble avoir des problèmes à payer est le fait qu'on ne sait pas par des études le lien entre la cueillette des renseignements et les mauvaises... la capacité de payer. Ceux qui sont les mauvais payeurs, est-ce que c'est ceux à qui on a négligé de cueillir des renseignements? Voyez-vous?

Mme Houda-Pepin: Oui, je comprends bien votre point de vue, parce que votre souci, c'est de dire: S'il y a effectivement 5 % de mauvais payeurs, essayons de régler ce problème et de trouver des solutions qui vont répondre à cette problématique-là au lieu de se mettre à recueillir des informations généralisées sur tout candidat locataire. Je comprends bien votre point de vue.

Mme Stoddart (Jennifer): C'est ça.

Mme Houda-Pepin: Alors, merci, M. le Président. Je vais donner la parole à mes collègues et, s'il me reste un peu de temps, je le reprendrai après. Non, il n'en reste pas? D'accord, merci.

Le Président (M. Laprise): Alors, on vous remercie beaucoup, madame. On remercie Mme la ministre, on remercie également Mme la présidente, et j'ai l'impression que le droit de l'un, je pense, doit respecter le droit de l'autre.

Mme Stoddart (Jennifer): Oui, c'est ça, un principe qu'on connaît.

n(18 h 10)n

Mme Harel: Écoutez, on a vraiment eu dans le courant de la journée, vraiment, deux présentations contraires ? vraiment: celle de la Commission des droits et celle de la Commission d'accès. En fait...

Mme Houda-Pepin: ...pas tellement. Je me permettrais, Mme la...

Mme Harel: Mais c'est intéressant, parce que, vous, ce que vous dites, c'est: Le pire danger, c'est de constituer une banque à partir de la date de naissance, alors que la Commission des droits dit: Le pire danger, c'est finalement de discriminer à partir de motifs interdits mais qui seront l'objet, si vous voulez, d'informations dues au fait... En fait, vous êtes... J'efface et je me reprends. Vous, vous dites: Le pire danger, c'est la banque de données. Alors, vous êtes prêts, en contrepartie, à ce que les renseignements requis soient différents selon la personne. Donc, soient différents, et vous l'acceptez, qu'ils puissent être différents, que la personne soit d'une minorité visible ou membre d'une communauté culturelle ou récemment immigrante. Vous ne pouvez pas faire autrement, parce que vous laissez...

Mme Stoddart (Jennifer): ...d'accord, Mme la ministre.

Mme Harel: Bien non, mais c'est ce qui va arriver. Il ne faut pas être théorique là-dedans, là. Si vous dites: Les renseignements requis sont ceux jugés nécessaires, jugés nécessaires par le propriétaire.

Mme Stoddart (Jennifer): Selon les habitudes, la capacité de payer.

Mme Harel: Et vous avez ajouté même... Plus loin, vous avez ajouté: Les propriétaires peuvent vouloir plus de renseignements, dépendamment s'ils sont propriétaires occupants ou encore propriétaires investisseurs. Alors, ça va très, très loin. Ça veut dire qu'un propriétaire pourrait être mis dans la situation d'avoir droit à plus de renseignements qu'un autre.

Le Président (M. Laprise): Mme la ministre...

Mme Harel: Ça va mener à ça, ce que vous...

Le Président (M. Laprise): ...je crois que le temps est écoulé. On vous remercie tout le monde.

Mme Stoddart (Jennifer): Mais il doit appliquer ses principes, lui, dans la cueillette...

Le Président (M. Laprise): Ceci met fin...

Mme Stoddart (Jennifer): La cueillette des renseignements est, elle, soumise au principe de la non-discrimination. Donc, c'est les habitudes de paiement, et les habitudes de paiement des gens de différents milieux peuvent être également similaires...

Mme Harel: Attendez. C'est important, ce que vous dites, là, parce que ça vient de faire une nuance. Mais si vous dites: C'est soumis à la non-discrimination, ça veut dire que s'il demande des renseignements à plusieurs candidats locataires, il faut qu'il demande les mêmes renseignements, que le candidat locataire soit noir, immigrant, etc.

Mme Stoddart (Jennifer): Voilà, dans la même situation objective, oui, absolument.

Mme Harel: Même situation objective? Tantôt, vous avez dit: C'est individualisé.

Mme Stoddart (Jennifer): Situation objective par rapport à sa capacité de payer et non pas sa couleur ou sa condition sociale.

La Présidente (Mme Doyer): Alors, je vous remercie, Mme Stoddart...

Mme Stoddart (Jennifer): Oui, merci.

La Présidente (Mme Doyer): ...M. Ouimet.

(Changement d'organisme)

La Présidente (Mme Doyer): Alors, j'inviterais La Ligue des propriétaires de Montréal à se présenter, s'installer, et peut-être dire quel est le nom de la personne qui accompagne M. Pierre Aubry, président-directeur général.

La Ligue des propriétaires
de Montréal

M. Aubry (Pierre): Oui, et, avec moi, j'ai M. Sam Bustros, qui est un propriétaire membre chez nous.

La Présidente (Mme Doyer): Je vous souhaite la bienvenue et je donnerais la parole à Mme la ministre des Affaires municipales et de la Métropole pour 20 minutes, pour la...

Mme Harel: Bien. Vous êtes pressée, là, vous, ce soir!

La Présidente (Mme Doyer): Oh non! excusez-moi.

Mme Harel: Bien oui.

Des voix: Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Doyer): Oui, oui. J'avoue un peu de fatigue. Alors, je vous donne la parole pour 20 minutes.

Mme Houda-Pepin: Bien oui, certainement, c'est pour ça qu'on est là. C'est pour ça qu'on est là!

La Présidente (Mme Doyer): Ah oui, vraiment!

Une voix: On brûle les étapes.

La Présidente (Mme Doyer): À vous la parole pour 20 minutes. Je m'excuse. Voilà.

M. Aubry (Pierre): Bon. Mme la ministre, je ne vous ferai pas de surprise, vous savez un peu ce qu'on pense depuis assez longtemps, puis je ne vous demanderai pas des dommages et intérêts pour des choses qui sont en discussion.

La Ligue des propriétaires est une association de propriétaires qui existe depuis au-delà de 80 ans, fondée en 1921 pour faire valoir les droits des propriétaires et intervenir, à l'occasion, comme on le fait aujourd'hui.

On a été très surpris de voir le projet de loi que vous avez présenté, le projet de loi n° 26. On a été tellement surpris de son amplitude et des limitations qu'il apportait qu'on a consulté avec les autres associations de propriétaires et on a demandé à Me Raymond Doray de faire une présentation sur le point tout spécifique qui était les informations qu'on peut demander, et on l'a inclus dans notre mémoire comme les autres groupements, les autres associations ont fait: la CORPIQ ce matin, et demain vous aurez l'Association des propriétaires du Québec et aussi le RPHL.

Maintenant, en premier... Si vous voulez, on pourra revenir sur la section qui nous a été donnée par Me Doray et qui vous a été expliquée ce matin, c'est de la page... à aller jusqu'à la page 15.

Une voix: ...

M. Aubry (Pierre): De la page 3 à la page 16 inclusivement, c'est la section que Me Doray nous a préparée et sur laquelle nous sommes pleinement d'accord, et que vous allez retrouver aussi chez les autres associations.

Maintenant, tout d'abord, je vous entendais, Mme Harel, le 26 octobre dernier, parler sur un document qui était: Étude comparative de la législation sur le contrôle des loyers au Canada entre 1950 et 2000. J'aimerais peut-être faire un recul là-dessus. Ce rapport-là a bien été imprimé, publié par la Régie du logement et la Société d'habitation du Québec, mais les deux organismes ne l'ont pas endossé, c'était la responsabilité de celui qui l'a écrit. Et ce rapport-là aussi ne couvre que la période jusqu'à 1996, et cette période-là, je comprends, basée sur le recensement, ne montre pas ce qui est subvenu par la suite, qui est la crise du logement qui s'est installée.

Et ce document-là, en plus, à la lecture, quand on le lit tranquillement, on réalise qu'on s'inquiète beaucoup sur la situation des locataires, sur l'effet que le contrôle des loyers a fait sur les locataires, mais on ne parle nulle part de l'effet sur les propriétaires qui... On parle de loyers maintenus bas mais on ne parle pas de réduction de rentabilité, et on compare trois provinces qui sont le Québec, l'Ontario et la Colombie-Britannique. Mais si on regarde tout particulièrement trois villes de ces provinces-là, qui seraient Montréal, Toronto et Vancouver, on ne trouve pas les mêmes sortes de comparaisons. C'est que, quand on regarde les statistiques de la Société centrale d'hypothèques, qui sont publiées maintenant ? elles ne sont pas encore montées sur cahier mais elles sont disponibles à la Société centrale d'hypothèques ? on retrouve le tableau qu'on a reconstruit à la page 18, qui montre le nombre de logements dans des édifices de moins de 20 logements. À Montréal, ça représente 65 % des édifices, alors qu'à Toronto et Vancouver on a absolument l'inverse. C'est peut-être ce que vous notiez tout à l'heure, le rapport de l'INRS, là. C'est vrai que Montréal et Toronto et Vancouver, ce ne sont pas des choses comparables.

n(18 h 20)n

Même plus que ça, on compare Montréal, une ville de petits propriétaires, et Toronto et Vancouver; ce sont des villes de grands propriétaires. Et quand on étudie le comportement d'un petit propriétaire, c'est quelqu'un qui n'est pas très, très versé dans les études économiques; c'est quelqu'un qui a fort probablement gagné sa vie à autre chose; et ça lui prend du temps à réagir à certains phénomènes économiques. Le grand propriétaire, au contraire, est normalement une entreprise avec des capitaux très importants d'investis et qui va faire des études à court terme, à long terme et de toutes les choses qui peuvent se présenter, les contraintes gouvernementales de fixation de loyers, toutes sortes de choses.

Ce qui est arrivé effectivement, c'est qu'il y a une vingtaine d'années, à Toronto, avec l'établissement des contrôles de loyers, le taux de vacance s'est abaissé considérablement et il est resté bas depuis ce temps-là, ne passant en haut de 1 % que juste pour une légère période de 1991, 1992, 1993, alors qu'à Montréal, ça a continué à fluctuer. Excepté, là, ça a fluctué pendant un temps. Mais maintenant les petits propriétaires ont compris un message qui est moins intéressant, c'est que ce n'est pas aussi intéressant qu'autrefois d'être propriétaire de logements locatifs.

Si on veut rentrer un peu dans des preuves de ça, si vous allez à la page 20, c'est des chiffres qui sont publiés mensuellement par la Société centrale d'hypothèques. Pour 2001, je regrette, c'est juste 10 mois, mais ça donne quand même une idée. Et la quatrième colonne, c'est les logements locatifs mis en chantier au cours des années, et on réalise qu'en 2001, il n'y en a pas beaucoup de logements mis en chantier.

Je vous reproduis à la fin, en annexe, le dernier rapport qui est... Maintenant, si on met ça sur graphique, ça nous montre un peu plus qu'est-ce qui se passe. À la page 21, on voit l'évolution des taux de vacance puis on voit aussi l'évolution des mises en chantier et on réalise que, bien que le taux de vacance ait pris une chute considérable, il n'y a pas de relance des logements mis en chantier. Il y a une résistance, les gens n'en veulent pas. Vous me direz: Ah! là, on est dans une bonne période, les taux d'intérêts sont faibles, ça devrait relancer la construction. Je n'y crois pas parce que j'ai vu, à La Ligue des propriétaires il y a quelques années, en 1981, des taux d'intérêt à 21 % et j'ai vu beaucoup de propriétaires qui sont venus nous voir avec la grande panique; et pas seulement la grande panique, mais la grande perte, perdre leurs édifices parce que, devant les taux d'intérêt sur hypothèque à 21 %, ou bien on paie ou bien on rembourse. Et si on a une hypothèque, c'est parce qu'on ne peut pas rembourser. Puis quand le taux d'intérêt se multiplie par trois ou par quatre, alors que les intérêts représentent normalement la moitié du loyer, ça fait une bombe épouvantable qu'un propriétaire ne peut pas normalement supporter.

Les indices de la Régie ne nous ont pas aidés considérablement dans la réaction à ces variations des taux d'intérêt et on nous dit continuellement que l'intérêt ou l'hypothèque, ce n'est pas un facteur qui est directement intégré dans le calcul de la Régie du logement. À long terme, oui. Peut-être à long terme, mais un problème de taux d'intérêt de 21 %, ce n'est pas un problème à long terme, c'est un problème criant et immédiat.

Est-ce qu'un propriétaire a quand même le goût de se laisser tenter par un taux d'intérêt à 6 % ou 5 % dans le moment, quand il doit s'engager à très long terme avec une hypothèque qu'il devra rembourser ou payer l'intérêt du temps? Un propriétaire fait très attention pour ne pas se mettre le pied dans la trappe. Puis vous voyez, à la page 23, je vous montre l'évolution des taux d'intérêt. Je n'avais pas les derniers chiffres, mais, dans le moment, c'est alentour de 5 %. Il y a une évolution au cours des années. Là, c'est 5 %, mais pour combien de temps? C'est la question que les propriétaires ne peuvent pas comprendre, qu'ils ne peuvent pas contrôler, ça dépend de tellement de choses qui sont hors de notre contrôle.

Les indices de la Régie du logement ne nous ont pas aidés au cours des années. Je comprends bien, pour les avoir suivis depuis longtemps, que les indices sont basés sur des statistiques, mais statistiques que beaucoup de propriétaires remettent en discussion. Quand, il y a deux ans, le prix de l'huile à chauffage a presque triplé et que, quelques mois après, la Régie du logement nous dit que les augmentations vont être minuscules, ça n'encourage pas un propriétaire à dire: La Régie est équitable envers moi.

Ce qui arrive, c'est qu'il y a un effet à long terme, qui est le désintéressement des propriétaires. Ils ne ressentent pas que les indices de la Régie du logement leur font justice, et ils ne sont pas protégés contre les hausses des intérêts. Et maintenant, ils se disent: Oui, mais, si je ne fais pas d'argent dans ça, pourquoi investir dans le logement? Et du moment qu'un propriétaire commence à penser comme ça, vous avez l'effet qu'on constate maintenant ? pas qu'on envisage mais qu'on constate: depuis 10 ans, les propriétaires ne veulent pas être propriétaires de logements locatifs.

En même temps, la qualité des locataires s'est dégradée. Après 10 ans de taux de vacance très élevés, des propriétaires qui acceptent pas mal n'importe qui parce qu'on est mal pris, ça a laissé les mauvais locataires rentrer dans les logements. On a essayé, par des consultations avec vous, de trouver une méthode pour cerner... Faites attention aux mots, je ne dis pas les assistés sociaux. Il y a un groupe de mauvais locataires qui se cachent en dessous du parapluie de l'assistance sociale et, ceux-là, on a essayé de les cerner et on n'a pas pu trouver de méthode. Votre gouvernement ne nous a pas considérablement aidés dans ça, on n'a pas trouvé la méthode. Les propriétaires n'aiment pas ça puis ils ont subi des pertes considérables à cause de ça.

n(18 h 30)n

Maintenant, d'autres petits irritants qui nous arrivent depuis quelques années. Là, votre projet de loi mentionne, à l'article 21, «Le locateur ne peut exiger d'un candidat locataire le versement d'une somme d'argent, à quelque titre que ce soit.» La définition de ça peut être trois montants différents: ça peut être un montant lors de l'engagement à une demande de location ? on demande 25 $ pour payer l'enquête de crédit ? ça, c'est une chose; ça peut être dans un autre cas un acompte significatif pour bloquer le locataire à ce qu'il respecte, au moins pendant quelques jours, la signature qu'il a apposée comme quoi il est intéressé; ça peut être un dépôt de garantie à long terme, garantir que les meubles dans le logement ne seront pas endommagés.

Il y a trois choses. La première chose, une garantie pour une enquête de crédit, je pense que pas beaucoup de gens sont intéressés à ça. Un dépôt pour garantir qu'un contrat éventuellement sera signé, ça, je pense que beaucoup de propriétaires veulent cette manière d'engagement là parce qu'on réalise souvent qu'on fait des démarches d'enquête de crédit ou de recherche de qualifications du locataire, et, quand on dit: Oui, je vous accepte comme locataire, il dit: Ah! j'ai loué ailleurs. Ça fait que le fait d'avoir un certain dépôt bloque les positions pendant au moins quelques jours pour qu'on puisse faire un travail équitable. Je pense que cette partie-là d'un dépôt pourrait et devrait continuer à être acceptable avec vous.

Il y a l'autre chose qui n'existe pas ici, qui est carrément interdite, mais qu'on retrouve dans beaucoup d'autres États, et provinces, et pays, c'est carrément un dépôt pour garantir à long terme le paiement du loyer, un dépôt qui peut être d'un mois, de deux mois. En France, c'est standard. En Ontario, c'est standard aussi. Oui?

La Présidente (Mme Doyer): Excusez-moi, il vous reste deux minutes.

M. Aubry (Pierre): Oui, O.K. Maintenant, ce qui arrive, c'est que la dernière phase de restreindre les informations qu'on peut demander à un strict minimum, c'est peut-être le crémage sur le gâteau qui fait qu'un propriétaire devient absolument désintéressé et dégoûté d'être propriétaire. Ce qu'il nous faut, c'est des identifiants, des identifications très personnelles, très pertinentes pour le locataire, ce qui se fait dans le moment par des enquêtes de crédit et qui semble vouloir nous être enlevé. Ça serait bon aussi qu'il y ait des identifications dans les jugements de la Régie du logement un peu plus que qu'est-ce qu'on a dans le moment.

Et je pense qu'en regard de la crise du logement qui est à se présenter, en accord avec les autres associations et un petit peu en désaccord avec ce que le CORPIQ a dit ce matin, mais que CORPIQ est maintenant d'accord, il faut qu'on revoie à fond ce projet de loi. Il faudrait le retirer, le réétudier, quitte à faire des états généraux pour réétudier en profondeur et refaire un partage des droits et de responsabilités de chacun des deux, propriétaire comme locataire, pour rétablir une certaine confiance et permettre à l'économie de se relancer dans ce secteur-là. Merci.

La Présidente (Mme Doyer): Merci, M. Aubry. Alors, je vais donner la parole à Mme la ministre des Affaires municipales et de la Métropole.

Mme Harel: Merci, Mme la Présidente. Alors, M. Aubry, M. Bustros, qui l'accompagnez. M. Aubry, j'ai posé la question à M. Courtemanche, le nouveau président de CORPIQ, ce matin: «Est-ce que vous proposez qu'on retire le projet de loi?», il m'a dit non. Et les personnes qui l'accompagnaient ont d'ailleurs plaidé pour que la partie qui les agrée du projet de loi soit maintenue et que l'autre partie soit changée. Alors, vous comprenez bien que, dans les rapports locataire-locateur, il y a une partie pour les uns puis une partie pour les autres, un équilibre. Mais il a été très clair. Alors, vous, vous franchissez un pas de plus, vous dites: Retirez le projet de loi. Alors, je vois que c'est une position différente de celle de la CORPIQ.

M. Aubry (Pierre): On a parlé ensemble, avec CORPIQ, puis ils apprécieraient plutôt qu'on retire le projet de loi maintenant, si vous voulez une intervention.

Mme Harel: Bien, en tout cas, ils ne l'ont pas dit quand je leur ai posé la question aujourd'hui, ils ont dit le contraire.

M. Aubry (Pierre): Oui, mais là il y a des changements comme ça, là, qui arrivent.

Mme Harel: Bon. Écoutez, je voudrais simplement essayer de réconcilier les chiffres qu'on retrouve à la page 20 de votre mémoire, qui sont complètement différents de ceux que m'a fournis le ministère et qui sont aussi de Statistique Canada. Alors, ce que j'ai...

Une voix: De la SCHL.

Mme Harel: De la SCHL. Alors, moi, ce qu'on me dit, c'est ceci ? puis j'ai des tableaux d'ailleurs pour le prouver ? c'est que le secteur locatif a pris de la vigueur dans les centres urbains du Québec. Les mises en chantier se sont accrues en 1999 de 36,2 %; en 2000, de 7,3 %, pour 3 697 logements. Vous voyez, en 1999 il y a eu 3 444 logements, en 2000 il y a eu 3 697, et de janvier à août, moi, c'étaient les chiffres de janvier à août, donc six mois, là, c'était une augmentation, par rapport à l'année d'avant, de 18,6 %. Et on m'a dit: Les logements mis en chantier dans le secteur de la copropriété sont en nombre équivalent à celui de logement locatif. Alors que le condo était beaucoup plus demandé, maintenant ce serait moitié-moitié. Alors, j'ai les pourcentages ici: marché locatif, la copropriété, etc...

Une voix: ...chiffres pour le Québec ou pour le Canada?

Mme Harel: Ça, c'est les chiffres pour le Québec. J'ai ceux de l'Ontario. Par exemple, le pourcentage d'augmentation est plus élevé au Québec qu'en Ontario pour la construction de logements locatifs. Alors...

Mme Houda-Pepin: Oui. Est-ce que la ministre pourrait nous déposer ces chiffres pour qu'on puisse analyser avec les mêmes paramètres qu'elle?

Mme Harel: Bien, oui, certainement, certainement.

La Présidente (Mme Doyer): Vous les déposez maintenant?

Documents déposés

Mme Harel: Certainement, je vais vous remettre les tableaux.

M. Aubry (Pierre): Bon, Mme la ministre, peut-être pour clarifier. Les chiffres que je vous donne, ce sont des chiffres de Montréal métropolitain, puis, si vous allez après la page 31, vous allez avoir le communiqué de la Société centrale d'hypothèque, qui ne parle pas du même ton quand on parle de Montréal métropolitain. Le ton de l'intervention est très différent de ce que vous venez de me dire, et vous allez retrouver, en bas de la troisième page, vous allez retrouver exactement les chiffres qui sont, dans ce cas-là, cumulatifs 10 mois et qui sont reproduits dans notre dernière ligne. Je ne parle pas du Québec en général, je parle de Montréal métropolitain.

Mme Harel: Bon, écoutez, on va certainement en prendre connaissance. Je vous remercie de ce dossier-là, parce que c'est quand même récent. C'est un communiqué qui date du 8 novembre.

M. Aubry (Pierre): C'est ça. C'est ça.

Mme Harel: Alors, on va le vérifier. Moi, ce sont des chiffres qu'on me donne pour les centres urbains. Si c'est le cas, regardez, à la page 2 du communiqué, on dit: «L'île de Montréal, quant à elle, tire moins bien son épingle du jeu avec une baisse de 12 %.» Alors, on va vérifier ça.

M. Aubry (Pierre): Moi, je vous parle de Montréal.

Mme Harel: Bon, d'une part. D'autre part, on va convenir ensemble que, depuis le 11 septembre dernier, il n'y a plus grand chose, si vous voulez, à l'abri lorsque des investisseurs comme ceux dont vous nous avez parlé veulent faire de l'argent rapidement. Il y en a certains qui doivent regretter de ne pas avoir investi dans l'immobilier, qui n'a peut-être pas la caractéristique d'être spéculatif comme l'auront été tous les secteurs de la technologie de l'information, mais qui auront aussi la caractéristique d'être lucratif sans être spéculatif. On est dans une drôle de période où les investisseurs se sont habitués à des profits moyens de 45 %. Alors, le logement leur est apparu insignifiant. Sauf qu'il y en a qui ont pris des bonnes débarques, comme vous savez, hein, et qui vont revenir à...

Une voix: ...

Mme Harel: ...ils vont revenir à des valeurs plus sûres cependant. Puis, parmi les valeur sûres, il y aura, je pense, l'immobilier, vraisemblablement.

n(18 h 40)n

Ceci dit, j'ai l'impression en vous écoutant, M. Aubry, que tout va mal. Vous-même, êtes-vous propriétaire?

M. Aubry (Pierre): J'étais propriétaire.

Mme Harel: Puis qu'est-ce que vous...

M. Aubry (Pierre): J'ai perdu.

Mme Harel: Vous avez perdu tout?

M. Aubry (Pierre): Oui.

Mme Harel: Vous étiez un gros, moyen, petit?

M. Aubry (Pierre): Un moyen.

Mme Harel: Vous aviez combien de logements?

M. Aubry (Pierre): Soixante.

Mme Harel: Soixante? Puis qu'est-ce qui s'est passé?

M. Aubry (Pierre): C'est que la rentabilité n'étant pas là, ça ne peut pas donner un résultat.

Mme Harel: Mais la rentabilité était-elle due à des problèmes...

M. Aubry (Pierre): Dix ans d'augmentations de loyer inexistantes alors que les coûts continuaient à augmenter, ça a fait des ravages dans beaucoup d'endroits.

Mme Harel: Étiez-vous à Montréal?

M. Aubry (Pierre): Oui.

Mme Harel: Sur l'île même?

M. Aubry (Pierre): Sur l'île.

Mme Harel: Et, quand vous dites «des augmentations», vous n'avez pas pu...

M. Aubry (Pierre): Dix ans de temps sans augmentation.

Mme Harel: C'est vous-même qui avez choisi de ne pas augmenter?

M. Aubry (Pierre): Bien, vous savez, là, si on augmente et qu'on perd nos locataires, on était pas mieux placé. C'était la conjoncture à Montréal. Quand vous regardez les taux de vacance, là, des 7, 8, 9 %, c'est des taux de vacance qui tranquillement enlèvent toute la capacité de se défendre. Et il y a un grand nombre de propriétaires qui ont fait ça. Les chiffres ne sont pas facilement disponibles parce qu'il y a toujours un acquéreur par la suite. Ça peut être l'institution financière, ça peut être quelqu'un d'autre qui reprend la bâtisse, mais les statistiques ne sont pas claires dans ce sens-là, pour nous montrer quel est l'effet dévastateur, mais beaucoup de propriétaires se sont fait prendre dans ce sens-là.

Mme Harel: Vous, vous avez réussi à vendre?

M. Aubry (Pierre): Non.

Mme Harel: Vous avez vendu?

M. Aubry (Pierre): Non, je n'ai pas vendu. J'ai laissé aller.

Mme Harel: Ah! Et ça a été racheté. Est-ce que c'est encore...

M. Aubry (Pierre): Ah bien, là, je ne sais pas qui c'est qui a ça. Ça, ce n'est plus mon problème.

Mme Harel: Bon. Alors donc, vous avez, vous, connu des problèmes.

M. Aubry (Pierre): Je l'ai vécu très précisément. Je ne suis pas le seul. Il y a beaucoup des gens de La Ligue des propriétaires qui ont ce problème-là, et ça a été, dans les environs, une traînée de poudre chez beaucoup de propriétaires. La rentabilité n'y est pas, et ces propriétaires-là ne seront plus des propriétaires de logements locatifs.

Mme Harel: Et vous, M. Bustros, vous avez une expérience qui est aussi négative?

M. Bustros (Sam): J'ai une expérience dans l'immobilier. Je suis propriétaire actuellement d'immobilier. Mais je peux vous dire que ma rentabilité baisse année après année, jusqu'au point de dire: Est-ce que ça ne vaut pas mieux de vendre que de garder? Parce que... Je vais vous donner juste un exemple. J'ai pieuté, l'année passée, une maison, urgence, 25 000 $. Je l'ai emprunté, je suis allé à la... Pieuter, mettre des pieux, supporter la propriété parce que le sol en dessous de la propriété s'est miné. Des choses qui arrivent de ce temps-ci étant donné qu'on a un manque d'eau flagrant. Le 25 000 $ que j'ai emprunté, l'intérêt que je paie à la banque en prêt hypothécaire est supérieur que l'intérêt... que le montant que vous m'accordez en pourcentage pour les rénovations majeures.

Mme Harel: Est-ce que vous avez une subvention?

M. Bustros (Sam): Je n'ai pas de subvention, Mme la ministre.

Mme Harel: Qu'est-ce que vous avez alors?

M. Bustros (Sam): J'ai pris un prêt hypothécaire de la banque, j'ai payé du 8 point quelque chose pour cent ? au moment que j'ai eu besoin du prêt, c'était le taux, O.K. ? puis, quand je suis venu à repasser la facture aux locataires, ce qui était totalement légal, selon les règles de l'art, le pourcentage que le gouvernement m'accorde sur mes rénovations majeures est inférieur que le pourcentage que, moi, je paie sur mon prêt hypothécaire. Alors, je me suis... Si je regarde froidement, l'argent que je reçois, additionnel du locataire, n'est pas égal à la somme d'argent que je paie à la banque. Je dois en donner un petit peu de ma poche.

Mme Harel: Parce que vous voudriez rentabiliser le tout en combien d'années? Parce que c'est un...

M. Bustros (Sam): On rentabilise une bâtisse dans 20 ans, Mme la ministre.

Mme Harel: Disons, dans le cas, en l'occurrence, ce prêt que vous avez eu.

M. Bustros (Sam): Ce prêt, c'est 20 ans.

Mme Harel: Il était fait sur 20 ans aussi pour le pieutage?

M. Bustros (Sam): Pour le pieutage, était sur 20 ans. On calcule 8 $ du 1 000 $ emprunté, le paiement par mois.

Mme Harel: Mais ce qui est intéressant, ça reste cependant sa capacité de profiter, sur des déductions d'impôts, des dépenses faites pour faire un revenu dans l'immobilier. Ça veut dire que ce pieutage, vous avez donc pu l'utiliser, si vous voulez... ou votre comptable, j'imagine, j'espère que vous avez un assez bon comptable qui vous aura facilité les choses pour que vous puissiez en déduire une partie, en tout cas l'amortir en partie.

M. Bustros (Sam): Oui, certainement, Mme la ministre. Mais, si vous calculez, je préfère mieux payer 12 500 $ d'impôt et avoir 12 500 $ dans mes poches que payer 25 000 $ au contracteur qui a fait le pieutage, parce que l'impôt, c'est seulement 50 % de vos revenus que vous donnez. L'autre 50 %, vous le gardez. Alors, si j'ai un profit de 50 000 $, je donne 25 000 $ comme impôt aux deux paliers de gouvernement, il m'en reste 25. Mais, si seulement j'ai 25 000 $ de profits, il m'en reste rien que 12. L'autre 50, il ne me reste plus rien.

Mme Harel: Pour un an. Mais vous avez aussi la possibilité d'amortir les années subséquentes.

M. Bustros (Sam): Oui, oui, oui, j'ai la possibilité d'amortir, mais, pour cette année-là je n'en ai pas le profit. L'année prochaine, je suis poigné avec le même problème: la limitation de mes revenus.

Mme Harel: Vous avez raison de dire que l'immobilier, il faut toujours un peu... Comme un autre investissement, ce n'est seulement l'immobilier. Des gens me disent: Il faut voir les choses sur un certain moyen terme. Parce que ceux qui avaient des actions, là, de la compagnie canadienne...

Des voix: Nortel.

Mme Harel: Nortel, alors, eux, s'ils ont vu ça dans l'année, là, je vous dis qu'ils étaient mal pris. Mais il faut qu'ils le voient sur un certain temps. C'est un peu comme ça qu'il faut voir, je pense, l'immobilier, sur un certain temps, une certaine durée.

M. Bustros (Sam): Je suis d'accord avec vous qu'il faut le voir sur un long terme, mais il faut que les pourcentages accordés soient légèrement plus réels versus la réalité que ce qu'on a, O.K.?

Si vous m'avez demandé la parole, j'aimerais aussi vous mentionner quelque chose. Comme personne ne me connaît, j'aimerais me présenter. Mon nom, vous l'avez. Je suis un immigrant. Je suis venu en 1965. J'avais 15 ans. Mon premier emploi était laveur de vaisselle. Aujourd'hui, je suis propriétaire. J'en loue dans votre secteur, sur Orléans et Sainte-Catherine, sur Wurtele et Ontario, c'est direct dedans. Le centre d'aide Hochelaga-Maisonneuve, la bâtisse appartient à la famille. Alors, lorsque vous parlez de propriétaires et vous dites que le propriétaire est une personne qui abuse du locataire, si on regarde dans le fait réel, on dit: 99 % des gens, le locataire est un client, le propriétaire est le vendeur. Alors, c'est client, vendeur, ce n'est pas abusé et abuseur. On a à peu près juste 1 %.

Lorsqu'on parle de logements locatifs bon marché, j'en ai, des quatre et demie à 325 $, que je loue à des assistés sociaux. Et sur les assistés sociaux on fait des recherches de crédit. Le but, ce n'est pas de savoir combien d'argent qu'ils gagnent, c'est qu'est-ce qu'ils font avec leur argent. Si vous avez un budget de 700 $ par mois et que vous en dépensez 600 $ à autre chose que l'essentiel de votre vie, vous n'arrivez pas. Mais, si vous en avez un budget de 50 000 et vous dépensez 40 000 dans les clubs, vous n'en avez pas plus. Alors, ce n'est pas le montant qui est intéressant, c'est qu'est-ce que les gens font avec leur argent. Puis, une recherche de crédit, c'est ça que ça fait, ça nous dit les habitudes des gens.

Puis, lorsque la commission vient dire ici: La carte de crédit, ça n'a pas d'affaire. Ce n'est pas véridique. Lorsqu'on regarde les choses telles quelles aujourd'hui, si on ne paie pas notre carte de crédit, qu'est-ce qu'on a? L'étape suivante, c'est une saisie de salaire. Une saisie de salaire, qu'est-ce qu'elle fait? Le propriétaire n'a pas d'argent, le propriétaire perd. Puis, moi, je peux vous dire: Si je perds pendant trois mois réguliers du loyer de 400 $, je ne suis plus capable d'arriver. C'est aussi serré que ça pour gérer. En contrepartie, on donne du service à nos clients. Alors, c'est ça qu'on vient de défendre aujourd'hui.

Mme Harel: Mais, ça va bien avec vos locataires?

M. Bustros (Sam): Oui, ça va très bien. Je n'ai même pas 1 % de perte. Tout le monde me paie. Je fais des recherches de crédit, je m'assure que les gens paient comme il faut, je m'assure que les gens respectent leurs droits et respectent mes droits. Puis, lorsqu'on est propriétaire... Puis, je ne sais pas si vous avez déjà été locataire dans un bloc appartement, soyez rassurée que, si la personne au deuxième étage fait la musique forte, la personne au quatrième étage va l'entendre. Alors, le but du propriétaire, c'est s'assurer de ça.

n(18 h 50)n

Puis, lorsqu'on parle de loyers de 1 000 $, Mme la ministre, on n'a pas ce problème-là. On parle surtout des problèmes de 300, 325, 350. J'en ai, des locataires à ces prix-là, puis il ne faut pas penser que des gens fortunés ou des gens qui vont faire 40 000 ou 50 000 vont louer ces appartements. C'est le type de clientèle que je cible. C'est un type de clientèle bien précis, mais ces gens-là il y en a 99 % des gens, sont bien, honnêtes et respectueux. Puis ce que vous êtes en train de faire, vous êtes en train de faire une loi pour le 1 % de la population qui n'est pas respectueuse des lois.

Mme Harel: Bien.

La Présidente (Mme Doyer): Vous avez terminé, Mme la ministre?

Mme Harel: Bien, je ne sais pas. Mme la députée va reprendre, et puis...

Mme Houda-Pepin: Non, non, vous pouvez continuer, Mme la ministre.

Mme Harel: Je terminerai, je terminerai.

La Présidente (Mme Doyer): Il vous reste quatre minutes.

Mme Harel: Quatre minutes. D'accord.

La Présidente (Mme Doyer): Oui. Alors, Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup. Alors, M. Aubry et M. Bustros, de La Ligue des propriétaires de Montréal, merci pour le témoignage et pour le mémoire que vous nous avez présenté, qui est assez bien étoffé. Vous avez fait vos devoirs. Il y a beaucoup de statistiques. Vous avez aussi corrigé quelques chiffres que la ministre nous a donnés effectivement à d'autres occasions.

Mais au-delà des chiffres ce que je retiens de votre présentation, c'est que vous êtes venus nous dire que les propriétaires, et particulièrement les petits propriétaires que vous représentez, ne sont pas nécessairement des gens qui sont des spéculateurs en puissance, ce n'est pas des gens qui veulent abuser, mais c'est des gens d'abord qui ont gagné leur vie durement. Et vous êtes d'ailleurs le témoignage vivant, je suis persuadée. Je ne sais pas ce que M. Aubry a fait de sa vie, mais j'ai, moi, rencontré quelques propriétaires et je sais que c'est des gens qui ont travaillé durement, des chauffeurs de camion, des travailleurs de la construction, et, donc, avec leurs économies, l'économie de leur vie, ils se sont acheté des immeubles pour y habiter mais aussi pour générer quelques revenus.

Et je voudrais reprendre aussi le commentaire de la ministre, qui faisait la comparaison entre l'investissement dans le logement, qui rapporte, mais peut-être à moyen terme, Dieu en décidera, et les nouvelles technologies, qui sont montées en flèche, mais qui ont piqué.

Les nouvelles technologies, dans le contexte actuel, on est dans la nouvelle économie. Et c'est normal, lorsqu'il y a un nouvel axe de développement économique, et on l'a vu d'ailleurs avec l'industrialisation, que ça va très vite, mais en cours de route il y a une restructuration, donc ça tombe et après ça reprend. Et c'est ce qu'on est en train d'assister actuellement dans les investissements dans les technologies de pointe. Ils sont partis à grande vitesse, et certains se sont cassé la gueule, alors ils reviennent avec une restructuration de la nouvelle économie, puis on va assister à une remontée des technologies de l'information.

Dans le domaine de l'habitation, on est face à un secteur qui est stagnant. Et, vous l'avez démontré, c'est que, depuis plusieurs années, vos dépenses parfois excèdent vos revenus, vous n'êtes pas capable d'avoir des augmentations de loyer substantielles qui vous permettent, disons, de garder la flamme pour rester dans l'industrie parce que ce n'est pas payant pour vous. Et je ne sais pas lequel des groupes qui a parlé de... je pense que c'était la CORPIQ qui disait qu'il faut considérer que les propriétaires sont des entreprises, donc, c'est comme ça, des petites entreprises, et que c'est tout à fait légitime, lorsqu'on s'engage dans l'économie de marché, que, lorsque l'on a un investissement, on puisse avoir un retour sur son investissement. Mais en même temps vous êtes dans un secteur qui est, disons, sur le plan social... qui correspond à un besoin important, un droit pour les citoyens de se trouver un logement.

Et tout ça pour dire que, moi, je suis... je vous écoute et ça ne me laisse pas indifférente. Vous avez dit, à la page 27 de votre mémoire que le projet de loi n° 26 est le pire des irritants que vous ayez eu dans la série des événements que vous avez vécus dans l'industrie. Et, à la page 16, vous énumérez vos recommandations particulièrement en ce qui a trait à l'article 21 du projet de loi, qui est l'article qui vous préoccupe.

Et, si je mets ça en parallèle avec ce que nous avons entendu, notamment de la Commission des droits de la personne, notamment de la Commission d'accès à l'information, ce que vous demandez, vous, comme recommandation à la page 16, c'est assez vaste, hein? Vous demandez«le nom, l'adresse, la date de naissance et le numéro de téléphone du proposant locataire; le nom de l'employeur, le salaire annuel, le caractère permanent ou occasionnel de l'emploi ainsi qu'un consentement pour vérifier l'exactitude de ces renseignements».

Vous demandez également «le nom, l'adresse et le numéro de téléphone du propriétaire actuel du proposant locataire et, si ce dernier a déménagé au cours des deux dernières années, les noms, adresses et numéros de téléphone des locateurs antérieurs, au cours des deux dernières années; un consentement permettant au locateur de vérifier auprès du (ou des) locateur(s) antérieur(s) le comportement du proposant locataire relativement ? et ça, c'est la première fois que je vois ça ? à l'entretien du logement, à la jouissance paisible des lieux, au respect des biens du locateur et au paiement assidu du loyer».

Donc, vous êtes là en train d'introduire la notion de la qualité du locataire. Est-ce qu'il prend soin finalement du bien qu'on lui confie? Parce que jusque là on parlait tout simplement de l'enquête de crédit.

Également, «une autorisation visant à obtenir un rapport de crédit auprès d'un agent de renseignements personnels et exceptionnellement le numéro d'assurance sociale lorsque les autres renseignements recueillis ne permettent pas d'identifier positivement le proposant locataire aux fins d'obtenir un rapport de crédit; le cas échéant, les nom, date de naissance, adresse, numéro de téléphone de la caution ainsi qu'une autorisation de celle-ci à obtenir un rapport de crédit à son sujet».

Et, finalement, «au moment de la signature du bail, le locateur devrait être en droit d'obtenir le modèle et le numéro d'immatriculation du véhicule du locataire, si le bail inclut un espace de stationnement. Le numéro de téléphone au travail du locataire devrait également être fourni au propriétaire pour des situations d'urgence ? feu, inondation, cambriolage, etc.»

Alors, si je mets ça en parallèle avec ce qui nous a été dit par les autres groupes qui vous ont précédé, je me dis: Où est le juste milieu? Avez-vous besoin de tout ça pour faire une enquête de crédit? Avez-vous besoin de tout ça?

M. Aubry (Pierre): Non, non, ce n'est pas pour faire une enquête de crédit. Pour faire une enquête de crédit, on a besoin de quelques identifiants très précis.

Mme Houda-Pepin: Allez-y, lesquels?

M. Aubry (Pierre): Bon, écoutez, là, ça peut être nécessairement le nom, l'adresse, et ça peut être la date de naissance, ça peut être le numéro d'assurance sociale, qui est le meilleur identifiant qui existe pour le moment, pour nous permettre de ne pas faire une erreur sur la personne. On veut le rapport de crédit sur telle personne, pas sur une autre. Il faut qu'on l'identifie bien, ça, c'est la première chose à faire. Maintenant, c'est la même chose, si c'est un endosseur, bien, il faut un peu le même... il faut un bon identifiant.

Maintenant, vous vous demandez pourquoi qu'on veut tant de renseignements? Pensez sincèrement à quelle est la responsabilité qu'assume un locataire qui loue un logement? Il a une responsabilité. Il peut mettre le feu, il peut cultiver du pot, il peut avoir une piquerie, il peut démolir le logement ? ça, on en a vu plusieurs. Puis, si vous regardez les feux qui arrivent dans les édifices à logements multiples, c'est quasiment toujours des feux de cuisine ou des feux de fumeurs. Feux de cuisine, feux de fumeurs, ce sont des feux de locataires. Si le locataire... si on n'est pas capable de s'assurer...

n(19 heures)n

Mme Houda-Pepin: Excusez-moi de vous interrompre, M. Aubry. Comment l'enquête de crédit va vous permettre de savoir que quelqu'un potentiellement peut mettre le feu dans l'appartement, par exemple?

M. Aubry (Pierre): Non, ça va nous... L'enquête de crédit va nous rapprocher d'une connaissance des habitudes du locataire. Ça peut être s'il a fait faillite, s'il a des mauvaises créances contre lui, ça peut nous indiquer ça, ce qui nous fait nous poser la question. On peut confronter le locataire avec et lui dire: Écoute, là, tu n'as pas payé telle chose, telle chose, telle chose, c'est quoi, l'histoire? L'histoire peut être bonne ? ça peut être un divorce, ça peut être d'autre chose ? mais il y a une histoire puis on veut la comprendre parce que, si c'est tout simplement du gaspillage, on veut le comprendre aussi.

Les cartes de crédit, c'est vrai, c'est vrai que la carte de crédit, ce n'est peut-être pas le meilleur guide pour quelqu'un qui paie bien, mais il n'y en a pas d'autres dans le moment.

Mme Houda-Pepin: D'accord. M. Aubry, moi, je voudrais... Pour le bénéfice de chacun d'entre nous, je voudrais savoir le processus de cueillette des données. Supposons que je viens vous voir pour louer un de vos appartements, vous allez me faire remplir un formulaire dans lequel il y a un certain nombre de données que je consens à vous fournir, d'accord? Vous faites quoi avec ça? Expliquez-moi le cheminement critique par lequel passent les informations et qu'est-ce que vous faites de ces informations une fois que vous avez complété votre recherche.

M. Aubry (Pierre): La première chose, c'est... Bien, il y a un regard rapide: Est-ce qu'il y a un emploi? Est-ce que c'est un emploi rémunérateur? Ça, c'est un premier regard très rapide. On peut choisir de faire une enquête de crédit à ce moment-là. Bon.

Pour faire l'enquête de crédit, on a certains renseignements précis qui nous permettent d'accéder à la fiche de crédit. La fiche de crédit, confrontée avec les informations qu'on a déjà, peut nous confirmer que l'adresse est réellement la bonne adresse du locataire, peut nous confirmer que son emploi est bien celui qu'il nous dit être son emploi, va nous confirmer s'il a des dettes de crédit, quelle sorte de dettes qu'il peut avoir dans le crédit. Si c'est Household Finance et des compagnies comme ça en grosses quantités, on va dire: Bien là il va avoir des problèmes tout à l'heure, bon, ce qui nous fait craindre cette personne-là.

S'il n'a pas de carte de crédit, bien, on dit: C'est quelqu'un qui paie comptant, il n'y a pas de problème de ce côté-là. Et, après ça, un coup que la décision est prise, effectivement, les renseignements sont là, mais le propriétaire, il va faire quoi avec ça? Il ne fera pas... Il n'ira pas voler à la banque, personnifier et des choses comme ça. Non, non.

Mme Houda-Pepin: Mais, les commentaires qui nous ont été faits par la Commission d'accès à l'information, les préoccupations concernant la constitution de banques de données... puisque ces documents, ces informations, vous les conservez, vous les conservez où? vous en faites quoi?

M. Aubry (Pierre): Les propriétaires les conservent avec le bail. Normalement, les informations, ils les ont là puis... Écoutez, ça a servi une fois, puis, s'ils veulent les conserver, ça, c'est de...

Mme Houda-Pepin: À votre connaissance, est-ce qu'il y a des banques de données qui existent actuellement sur les locataires, sur ce qu'on appelle les mauvais locataires?

M. Aubry (Pierre): Écoutez, en dehors de Equifax et Trans Union, il y en a peut-être, mais pas à notre connaissance. Il se peut que certaines agences de recouvrement vont avoir une liste de jugements à collecter, c'est évident que ça fait une certaine banque de données, mais qui est très, très limitée parce que c'est des comptes à recevoir qui leur ont été transférés. Mais il n'y a pas de banques de données qui se font à part de ça.

Mme Houda-Pepin: D'accord. Que répondez-vous au groupe qui vous a précédé qui a dit qu'en principe vous devriez accorder le logement à la première personne qui postule au lieu de faire une sélection?

M. Aubry (Pierre): Ça, c'est une petite folie furieuse. C'est qu'on ne choisit pas... Écoutez, l'ancienneté, ce n'est pas toujours le meilleur guide. Premier arrivé, premier servi, ce n'est pas toujours le meilleur guide. Le mauvais locataire a le droit à un logement autant que le bon locataire? Non, je ne crois pas, là. Quelqu'un qui est un mauvais payeur, ce n'est pas toujours décelable, mais le propriétaire, je crois qu'il devrait quand même... on devrait lui laisser une certaine marge de manoeuvre encore, dire: Bien, écoute, je choisis entre deux personnes sur lesquelles je vais choisir celui qui est le meilleur pour moi.

Mme Houda-Pepin: Tantôt, dans son intervention, la ministre nous a rappelé que la Régie du logement traite 35 000 causes relatives à l'augmentation du... à la fixation du loyer par année.

Mme Harel: Non, pas l'augmentation.

Mme Houda-Pepin: De la fixation, c'est ce que j'ai dit: la fixation du loyer.

Mme Harel: Non, c'est le non-paiement.

Mme Houda-Pepin: Le non-paiement, le non-paiement de loyer.

M. Aubry (Pierre): Le non-paiement. Le non-paiement.

Mme Houda-Pepin: Bon. Alors, seriez-vous d'accord pour, par exemple ? je lance ça comme idée ? la mise sur pied d'un comité consultatif qui relèverait de la Régie du logement et qui serait évidemment représentatif des gens, des propriétaires privés et des associations de locataires, et qui pourrait formuler des avis sur la fixation de loyer, les conditions de fixation de loyer, les augmentations s'il y a lieu? Est-ce que vous pensez qu'on peut arriver à ce genre de cohésion, à ce genre d'harmonie pour travailler ensemble?

Parce que je vous écoute. Je comprends que les propriétaires se sentent lésés et ils se sentent, d'une certaine manière, attaqués par le gouvernement via la réglementation, via... dans leur capacité de faire du profit, dans leur capacité de régénérer l'industrie, dans leur capacité de réinvestir dans l'industrie. Et, en même temps, on écoute les gens de l'autre côté qui nous disent qu'il y a beaucoup de spéculation, il y a beaucoup d'abus. Est-ce qu'un comité aviseur où vous seriez assis, où vous pouvez fournir régulièrement, compte tenu aussi de l'évolution du contexte, hein... La situation évolue, la situation économique évolue, les prix des produits évoluent, notamment les produits énergétiques. Est-ce que vous pensez que ça serait une solution?

M. Aubry (Pierre): Les indices de la Régie du logement, toute la mécanique a été pondue dans les années, je crois, 1981, dans ces années-là, et il n'y a pas eu de révision à la base de la philosophie. Puis on a vécu des variations, des variations, des hausses...

Une voix: ...

M. Aubry (Pierre): On a vécu des variations assez fortes à la hausse, à la baisse, et les propriétaires ne se sont pas directement adaptés à ça. Ils n'ont pas suivi ce que la Régie leur aurait accordé. Il serait temps qu'on revoie la méthode de fixation à la base pour essayer de la rendre plus équitable.

Mme Houda-Pepin: D'accord. Mais ce comité aviseur rattaché, est-ce que ça serait une solution? Est-ce que ça serait une avenue porteuse peut-être de...

M. Aubry (Pierre): Oui, d'accord. Je pense que toutes les associations ici seraient d'accord là-dessus.

Mme Houda-Pepin: D'accord. Je reprendrai mon droit de parole après, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Doyer): Merci. M. le député de Roberval.

M. Laprise: Merci beaucoup, Mme la Présidente. En termes d'homme d'affaires, en fait, quelqu'un qui décide de bâtir 100 logements aujourd'hui, le bois n'est pas cher, l'intérêt est bas, quel est le pourcentage de perte qu'il peut envisager avant de... Comme dans n'importe quel business, il faut toujours regarder les possibilités de perdre des choses à la fin de l'année. Sur cinq ans, disons, il y a des mauvaises années, il y a des années moins bonnes, des années meilleures, mais, sur cinq ans, on peut dire qu'il y a une moyenne qui est acceptable. Quel est le pourcentage de perte soit en logement ou encore des coûts imprévisibles que vous n'avez pas prévus en termes de chauffage pour garder quand même la rentabilité de votre projet, là?

M. Aubry (Pierre): Une bâtisse... Un propriétaire qui déciderait de construire aujourd'hui n'envisage pas de rentabilité pour de nombreuses années, tellement que j'en ai interviewé... j'en ai fait interviewer à la télévision, des propriétaires qui avaient dégagé des terrains, ils avaient démoli des maisons pour pouvoir construire, entre autres dans Longueuil, puis, quand est arrivé le temps, avec les subventions de la ville, avec les permis de construction, tout, il a dit: Non, moi, je ne marche pas. Je ne marche pas. Je ne suis pas capable de faire mes frais, je ne marche pas. Puis il n'allait même pas dans du condo, ce n'était même pas rentable.

n(19 h 10)n

Puis il y a plusieurs autres propriétaires qui nous ont dit ça. Ça, c'est des vrais investisseurs, là, qui sont prêts à aller de l'avant, ils disent: Non, dans le contexte actuel, il n'y a pas moyen. Il faut... Écoutez, c'est quasiment quelque chose qui est difficile à entendre, il faut régler... les loyers augmentent...

Mme Harel: Oui, mais je ne peux pas ne pas vous dire que, moi, j'ai des amis, là, qui sont depuis longtemps... les grands-parents, les parents puis, maintenant, ce sont leurs enfants. Ils sont dans l'immobilier à Montréal, dans les quartiers de Montréal. Puis, ma foi, qu'ils ont donc une belle vie! Je peux dire: Ma foi, qu'ils gagnent bien leur vie. Et ce sont des appartements un peu comme ceux que vous décriviez, M. Bustros. Alors, pourquoi? Là, là, je vous entends puis je me dis: Mon Dieu! ça a tellement l'air pénible, ça a tellement l'air négatif, et il a tellement l'air à ne pas avoir d'argent! Tout à coup, je me ressaisis, mais je dis: Voyons! Je pense à un tel, une telle, un tel, voyons! Alors, qu'est-ce que c'est? Il y a comme deux discours complètement séparés.

Je rencontrais l'APCHQ dernièrement, les propriétaires qui font la construction et qui pourtant, eux, me disent qu'il y a encore bien de l'argent à faire. Alors, je sens qu'il y a comme deux discours puis je ne comprends pas pourquoi ils sont si irréconciliables.

La Présidente (Mme Doyer): Une minute, il vous reste une minute, puis ensuite...

M. Aubry (Pierre): Recontactez ces familles-là.

Mme Harel: Ah! Bien, je les vois régulièrement, encore dimanche dernier.

M. Aubry (Pierre): Oui, puis demandez-leur là s'ils trouvent que la Régie du logement leur fait justice. Il y a des choses comme ça, il y a des petits points qui vont les piquer.

Mme Harel: Je vais vous dire, eux, à partir du moment où ils ont un bon concierge, ils trouvent que la vie va très bien.

M. Aubry (Pierre): Ah oui! Ça, d'accord.

Mme Harel: Pour le reste, ils ne se plaignent de rien; c'est ce qu'ils disent.

La Présidente (Mme Doyer): Alors, je vous remercie, puis il reste trois minutes à Mme la députée de La Pinière, et je vais conclure les travaux.

Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup, Mme la Présidente. Moi, je pense qu'il ne faut pas mettre en doute la parole des gens qui viennent témoigner devant nous, d'autant plus qu'ils témoignent de leur propre expérience...

Mme Harel: Je ne la mets pas en doute. Mais on ne peut pas mettre en doute non plus la parole de ceux qui nous disent...

Mme Houda-Pepin: Excusez-moi, Mme la Présidente! C'est mon droit de parole. Donc, moi, je prends pour acquis que les gens qui viennent nous parler et faire des présentations, quels que soient les groupes qu'ils représentent, ils essaient de nous témoigner des difficultés qu'ils rencontrent. Et c'est notre responsabilité de les écouter avec la plus grande des ouvertures, même si on n'est pas d'accord nécessairement avec tout ce qui se dit.

Moi, ce que je comprends de ça, tout en étant sensible aux besoins des locataires, et je comprends qu'il y ait des discriminations, et tout ça, puis on est tout à fait contre ces actes et ces abus, mais je me dis: Il ne faut pas tuer une mouche avec un marteau. Si on a 1 % des cas qui sont problématiques, mais il faudrait trouver la solution à ce 1 %, comme disait d'ailleurs justement la Commission d'accès à l'information, au lieu de s'engager dans une cueillette de données tous azimuts, pour effectivement avoir le risque de créer des banques de données qu'on ne contrôlerait pas. Pourquoi ne pas trouver le moyen de cerner le problème auquel on veut s'adresser? Ça, c'est la première des choses.

Deuxièmement, la ministre me dit qu'elle a parlé aux gens de l'Association de la construction. On parle, là, de la construction neuve, hein? Alors, évidemment, ça dépend à quel moment vous intervenez dans le processus de l'habitation.

Mais, ceci étant dit, moi, je voudrais terminer en vous demandant, M. Aubry, quel est le chemin que vous êtes prêt à faire pour...

La Présidente (Mme Doyer): ...compléter, Mme la députée. Il n'y a pas de temps.

Mme Houda-Pepin: C'est terminé? Il n'y a plus de temps. Désolée, M. Aubry.

La Présidente (Mme Doyer): Même pour vous, même pour vous, là.

Mme Houda-Pepin: Je suis désolée, M. Aubry. Mais, en tout cas, on aura l'occasion de vous parler de vive voix en dehors de nos travaux. Je voulais vous remercier. Je voulais remercier M. Bustros qui nous a aussi édifiés avec son témoignage. Et je voudrais, Mme la Présidente, en terminant, rappeler à la ministre, en vertu de l'article 214, que j'attends toujours le dépôt des documents qu'elle a cités, et elle sait très bien que, lorsqu'un ministre cite un document, il le dépose. Alors, je parle ici de la Commission des droits de la personne, le fameux mémoire qui vous a été présenté.

Mme Harel: Alors, l'avis de la Commission, je le répète, c'est un avis que la députée doit demander à la Commission. Moi, je...

Mme Houda-Pepin: Non, non. Mais la ministre l'a cité, donc, en vertu de nos règlements, l'article 214, si un document est cité, il peut être déposé à la commission.

Mme Harel: C'est ça, mais c'est évidemment à la discrétion, alors... Les avis, je ne les dépose pas, mais vous pouvez le demander à la Commission, c'est ce que j'ai dit un peu plus tôt.

Mme Houda-Pepin: Alors, merci beaucoup, M. Aubry et...

La Présidente (Mme Doyer): Est-ce que je pourrais quand même prendre le temps de conclure, vu que c'est moi la présidente?

Des voix: Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Doyer): Alors, la commission ayant accompli son mandat pour aujourd'hui, j'ajourne les travaux à demain, mercredi le 21 novembre 2001, à 10 h 30, dans cette même salle. Et je vous remercie, MM. Aubry et Bustros.

(Fin de la séance à 19 h 16)



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