L'utilisation du calendrier requiert que Javascript soit activé dans votre navigateur.
Pour plus de renseignements

Accueil > Travaux parlementaires > Travaux des commissions > Journal des débats de la Commission du budget et de l'administration

Recherche avancée dans la section Travaux parlementaires

La date de début doit précéder la date de fin.

Liens Ignorer la navigationJournal des débats de la Commission du budget et de l'administration

Version finale

33e législature, 1re session
(16 décembre 1985 au 8 mars 1988)

Le mardi 31 mars 1987 - Vol. 29 N° 49

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Consultation particulière dans le cadre de l'examen des orientations, des activités et de la gestion de la Commission des valeurs mobilières du Québec


Journal des débats

 

(Quinze heures vingt-trois minutes)

Le Président (M. Lemieux): À l'ordre, s'il vous plaît!

La comission du budget et de l'administration... À l'ordre, s'il vous plaît! La commission du budget et de l'administration est réunie aujourd'hui afin de poursuivre ses consultations particulières dans le cadre de l'examen des orientations, des activités et de la gestion de la Commission des valeurs mobilières du Québec. M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

Le Secrétaire: M. le Président, pour la séance il n'y a aucun remplacement.

Le Président (M. Lemieux): Permettez-moi de vous faire lecture de l'ordre du jour.

À 15 heures, nous allons entendre l'Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes.

À 15 h 45, M. Gilles Delisle, de Sonam Inc.

À 16 h 30, l'Association pour la protection des investisseurs du Québec.

À 17 h 15, les Systèmes financiers Iceberg.

A 20 heures, M. Jacques Forget, du journal Finance.

À 21 heures, M. Pierre Fortier, ministre délégué aux Finances et à la Privatisation.

Il y a une légère erreur. À 21 heures, il s'agit d'entendre la Commission des valeurs mobilières du Québec et, à 21 h 30, M. Pierre Fortier, ministre délégué aux Finances et à la Privatisation.

J'aimerais vous rappeler le cadre général du mandat de la présente commission. Alors, permettez-moi de vous rappeler brièvement les objectifs de la démarche que cette commission parlementaire a entreprise depuis le printemps dernier.

Premièrement, je veux souligner que nos travaux sur la Commission des valeurs mobilières du Québec ont été entrepris de l'initiative des membres de la commission parlementaire et même sur proposition du vice-président de la commission, le député de Lévis, qui est présentement retenu à la commission de l'Assemblée nationale, et non pas, comme on l'a écrit, sur mandat du gouvernement. Il faut comprendre que les travaux de cette commission sont indépendants de la réflexion qui a été entreprise par le gouvernement sur les institutions financières. Si le ministre délégué aux Finances et à la Privatisation participe à nos travaux en fin de journée, c'est à titre de témoin comme les autres personnes et organismes que nous entendons aujourd'hui.

Deuxièmement, cette séance de consultation particulière poursuit la démarche de consultation et de recherche que nous avons amorcée en octobre et au début de ce mois, en entendant la Commission des valeurs mobilières du Québec, la Bourse de Montréal et l'Association canadienne des courtiers en valeurs mobilières.

Troisièmement, je veux rappeler que l'objectif premier de notre démarche est de nous éclairer comme parlementaires sur le rôle actuel et futur de la Commission des valeurs mobilières du Québec, son fonctionnement et ses activités. Nous cherchons à identifier les forces et les faiblesses de l'organisme, à voir s'il y a lieu de suggérer des améliorations dans son fonctionnement, ou tout simplement à constater que tout va bien et à l'appuyer dans l'exécution de sa mission. Notre rôle se veut positif. Nous ne sommes pas une commission d'enquête. Notre tâche est de nous assurer que la Commission des valeurs mobilières du Québec remplit adéquatement son rôle avec efficacité et efficience. Puis, s'il y a lieu, nous pouvons recommander à l'Assemblée nationale, au gouvernement et à l'organisme lui-même les mesures qui nous apparaissent susceptibles d'améliorer ou de consolider la Commission des valeurs mobilières du Québec. Je rappelle encore que notre point de vue est celui de la population qui veut un marché boursier fort et dynamique, tout en assurant la protection des épargnants.

Maintenant, est-ce qu'il y a des membres qui veulent faire des remarques d'ouverture? M. le député de Sainte-Anne.

Remarques préliminaires M. Maximilien Polak

M. Polak: M. le Président, J'en aurais pour deux ou trois minutes, car je dois siéger à la commission de l'Assemblée

nationale dans une vingtaine de minutes, autrement, je l'aurais certainement dit au cours de nos travaux aujourd'hui. J'ai participé à nos travaux depuis le début quand notre commission est allée à Montréal rencontrer tous les organismes, et j'ai été très impressionné par la nature et la qualité de nos travaux et aussi par votre présidence et par la vice-présidence. Je pense qu'on a vraiment travaillé en équipe et d'aucune manière partisane.

Je voudrais simplement souligner que, pour moi, l'aspect qui me semble le plus important - là, je parle à titre personnel -c'est la protection du petit épargnant, que je trouve être de toute première importance. J'ai toujours émis cette opinion pendant nos travaux. Notre mandat était d'examiner les orientations, les activités et la gestion de la Commission des valeurs mobilières du Québec. À un moment donné, la pauvre commission, presque, est devenue un peu la victime, car tout le monde donnait son opinion à savoir comment améliorer la Commission des valeurs mobilières. À plusieurs occasions, je me rappelle, les autres intervenants ont posé des questions.

Quant à moi, la commission joue un rôle très important. Personnellement, je crois que son rôle devrait être accru concernant la protection du petit épargnant et je ne voudrais pas, d'aucune manière, qu'on ait l'impression que c'était un peu la commission qui était la victime et qui était attaquée par tout le monde dans les mémoires. Je suis très content de savoir qu'on lui a accordé un droit de réplique aujourd'hui même.

Je sais qu'on aura un rapport à un moment donné, mais je voudrais souligner que d'autres députés trouvent aussi cet aspect de protection important: le député de Lévis, le député de Bertrand et des députés de notre formation, également. Des cas comme Canadian Tire, par exemple, nous ont enseigné beaucoup de choses, et c'est ce que je voudrais dire personnellement, car, pour moi, c'est très important. Encore une fois, je voudrais souligner le grand respect que j'ai pour les travaux de la Commission des valeurs mobilières. Si jamais on se laisse aller à critiquer ou si, dans des mémoires, elle a été critiquée par d'autres intervenants, c'est ma tendance naturelle de toujours protéger celui qui est sous l'attaque et je voudrais me porter à sa défense.

C'est tout ce que j'ai à dire. Je vous remercie beaucoup. Je pars pour une autre commission. Je regrette de ne pouvoir rester ici jusqu'à la fin de nos travaux.

Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie, M. le député de Sainte-Anne. Effectivement, une des préoccupations de cette commission et de l'ensemble des membres de cette commission est la protection du petit épargnant, entre autres.

Nous savons tout l'apport intellectuel que vous avez apporté à notre commission et que vous continuerez d'apporter, et nous vous en remercions. Vous aurez d'ailleurs l'occasion de siéger en sous-soumission afin d'étudier l'ensemble des recommandations. On vous remercie de votre collaboration. Si l'occasion vous est permise de revenir nous voir, cela nous fera plaisir, M. le député de Sainte-Anne. Merci.

Dans un premier temps, est-ce que, M. le député de Bertrand, vous avez une déclaration d'ouverture à faire?

M. Parent (Bertrand): Non, pas particulièrement.

Auditions

Le Président (M. Lemieux): Alors, je demanderais au premier groupe, l'Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes, de bien vouloir prendre place ici, en avant.

Dans un premier temps, j'aimerais vous rappeler approximativement la durée de l'audition. Vous aurez de 15 à 20 minutes pour votre exposé et suivra une période de 25 à 30 minutes d'échanges entre les membres de cette commission. J'aimerais que chacun d'entre vous s'identifie - nom et qualité - ou que le président ou le responsable de l'organisme identifie les personnes qui l'accompagnent afin de permettre les discussions et l'enregistrement au Journal des débats.

Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes

M. Bégin (Robert): M. le Président, MM. les députés, comme vous l'avez dit, nous représentons l'Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes. J'ai, à ma droite, M. René Massicotte, premier vice-président et directeur général de l'Assurance-vie Desjardins, et, à ma gauche, M. Yves Millette, vice-président et directeur responsable du bureau francophone de l'association à Montréal. Mon nom est Robert Bégin, président du conseil de l'association canadienne, pour le mandat qui va se terminer bientôt, et dans mon temps libre, je suis aussi président et chef de la direction de l'Industrielle-Alliance.

Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie, M. Bégin. Nous sommes prêts à vous entendre, vous pouvez procéder.

M. Bégin: C'est M. Yves Millette qui va se charger de la présentation originale.

M. Millette (Yves): M. le Président, MM. les députés, madame, L'Association canadienne des compagnies d'assurances de

personnes est une association qui regroupe environ 110 compagnies d'assurances de personnes représentant 98 % du marché de I'assurance-vie au Canada. Depuis quelques années et, spécialement au Québec, depuis 1984, avec l'adoption de la loi 75, l'industrie des assurances de personnes a cherché à décloisonner ses activités et à les étendre parmi les autres piliers des institutions financières, comme le permettait la loi 75. Face à cette situation, notre industrie a été à même de constater certaines des limites du cadre de contrôle actuel des institutions financières, tant dans les lois que dans les organismes de contrôle, et notre présence ici, aujourd'hui, est reliée à ce fait.

De façon générale, les compagnies d'assurances québécoises ont été le lieu d'éclosion de l'entrepreneurship des Québécois et, plus spécialement en matière d'institutions financières, nos groupes financiers se sont étendus dans les divers aspects de l'industrie des produits financiers. Cette nouvelle situation nous a menés à entrer en contact plus spécialement aujourd'hui avec la Commission des valeurs mobilières et c'est ce dont nous voulons vous entretenir.

Les nouveaux produits d'assurances apparaissent rapidement et les consommateurs veulent des produits de plus en plus adaptés à la situation actuelle. Cela nous a menés à modifier, entre autres, nos produits d'assurances pour les rapprocher des besoins des consommateurs, plus spécialement quant au partage du risque en matière de rendement des placements faits par les compagnies d'assurances. À ce chapitre, aujourd'hui, plusieurs produits financiers peuvent varier, soit quant à la prime, soit quant au montant de la prestation, en fonction de la fluctuation des taux d'intérêt ou en fonction du rendement des placements.

Effectivement, cela a mené la Commission des valeurs mobilières du Québec à s'intéresser aux produits des compagnies d'assurances, plus spécifiquement aux produits variables versés dans des fonds distincts. Cette intervention de la commission a remis plus particulièrement en cause la répartition des pouvoirs des organismes de surveillance et de contrôle au Québec où, jusqu'à maintenant, il n'y avait pas eu de chevauchement entre les différents organismes.

Cette réglementation met en cause un aspect un peu théorique qui est le problème de la réglementation par institution face à la réglementation par activité. La réglementation par activité voudrait qu'un organisme réglemente un champ d'activité donné et que tous les intervenants en ce domaine soient soumis à la juridiction. La Commission des valeurs mobilières est un peu de cette nature, comme la Régie des rentes du Québec, lorsqu'elle fait le contrôle des régimes supplémentaires de rentes, est aussi un organisme de contrôle par activité.

Par ailleurs, un organisme de réglementation par institution serait plutôt du genre de celui de l'Inspecteur général des institutions financières qui, jusqu'à ce jour, s'occupait de la réglementation des compagnies d'assurances de personnes - pour prendre notre industrie - à l'exclusion de tous les autres, sauf lorsqu'il y avait des produits spécifiques, comme les régimes supplémentaires de rentes ou les produits variables, dont au moins 75 % de la prime n'étaient pas garantis. Dans tous les autres cas, l'Inspecteur général des institutions financières avait une juridiction globale.

Or, dans l'administration des caisses de retraite, l'intervention de la Commission des valeurs mobilières a eu pour effet - du moins dans une bonne partie des fonds distincts - d'ajouter un organisme de contrôle à ceux déjà existants, c'est-à-dire l'Inspecteur général des institutions financières et la Régie des rentes pour l'application de la Loi sur les régimes supplémentaires de rentes. Comme la philosophie de la Commission des valeurs mobilières est différente, parce qu'elle s'applique à des produits de valeurs mobilières et non pas nécessairement à des produits de rentes, on a assisté à trois façons de contrôler l'industrie des assurances qui étaient différentes dans leur conception. Donc, une telle intervention amène un problème qui est de taille, même si l'intervention sur les fonds distincts est relativement mineure, puisque ce ne sont que 10 000 000 000 $ d'actifs sur l'ensemble des actifs gérés par l'industrie de l'assurance-vie, 10 000 000 000 $ sur l'ensemble des régimes supplémentaires de rentes. Cela peut paraître assez peu, finalement, mais il s'agit d'un problème de taille parce que cela vient ajouter un organisme de réglementation dont la philosophie est différente. On voudrait, à cet égard-là, que le gouvernement indique clairement que l'orientation des politiques appartient au gouvernement et non pas aux organismes de surveillance, quels qu'ils soient, pas uniquement la Commission des valeurs mobilières, mais tous les organismes de surveillance.

De plus, notre organisation aimerait que, pour accompagner le décloisonnement qui se fait jour, le gouvernement et cette commission regardent la possibilité d'harmoniser les organismes de contrôle de façon à éviter les empiétements et les conflits de juridiction qui pourraient exister entre les organismes. Évidemment, l'idéal serait d'entreprendre la révision complète des organismes de contrôle, mais une adaptation de la situation actuelle pour éviter les chevauchements serait déjà un grand pas dans ce domaine.

On a eu le même problème au niveau

des réseaux de distribution, plus spécifiquement en ce qui concerne les conseillers en planification financière. Le conseiller en planification financière est, à toutes fins utiles, le symbole du décloisonnement des institutions financières, mais en ce qui a trait à la distribution des produits. Lorsque la Commission des valeurs mobilières a manifesté son intention de réglementer ce champ d'activité, on s'est retrouvé avec exactement le même problème, où un organisme de contrôle offrait de réglementer un secteur d'activité qui était plus large que le mandat que la loi lui donnait. À ce moment-là, encore une fois, comme l'industrie de l'assurance-vie est impliquée dans le domaine de la planification financière, puisque la planification financière est un organisme multidisciplinaire, à ce moment-là, dis-je, notre industrie souhaite que la réglementation dans ce domaine tienne compte de l'ensemble des intervenants et qu'elle ne soit pas exclusivement réservée à un groupe. Nous pensons que la réglementation de la planification financière doit s'étendre à l'ensemble des intervenants, que ce soit les comptables, les assureurs-vie ou toutes les autres organisations, et que tous ces organismes, y compris la Commission des valeurs mobilières et l'Inspecteur général des institutions financières, soient impliqués dans la mise en place d'un cadre de réglementation qui tiendrait compte de la présence de tous les intervenants dans ce domaine.

Enfin, notre association met de l'avant, depuis maintenant quelque temps, des principes d'autoréglementation pour réglementer ou autoréglementer l'industrie des institutions financières et, à cet égard, on soulève trois exemples de mécanismes d'autoréglementation que notre industrie tente d'élaborer. Le premier concerne un fonds de compensation pour les assurés qui, contrairement à l'assurance-dépôts, serait de nature privée, c'est-à-dire qu'il serait administré par l'industrie elle-même. Celle-ci veut mettre de l'avant des tests de solvabilité pour rendre public, pour rendre accessible à tout le monde l'état de la situation financière des compagnies d'assurances de façon à autoréglementer ce secteur et de façon à l'autodiscipliner et à faire disparaître les industries qui seraient en mauvaise situation financière, pour éviter des pertes aux consommateurs.

Pour ce qui est de la distribution des produits, l'Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes propose la mise en place d'un conseil des assurances qui regrouperait les intervenants, soit les agents d'assurances et les compagnies d'assurances de personnes, pour discipliner et pour former les gens qui font la distribution des produits des institutions financières et plus spécialement des compagnies d'assurances. Cet organisme, le Conseil des assurances, aurait pour fonction de prendre la succession du Surintendant des assurances ou de l'Inspecteur général des institutions financières dans la discipline et la formation des vendeurs d'assurances.

Enfin, le troisième mécanisme d'autoréglementation que notre association met de l'avant est, dans le dossier du libre-échange, un accord de libre-échange avec les États-Unis pour ouvrir les marchés des institutions financières par-delà les problèmes de frontières ou de territoires des États.

Cela fait un peu le tour du mémoire que nous avons présenté. Nous serons heureux de répondre à vos questions. Merci infiniment, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie, M. Millette.

J'aurais une première question relativement à la page 2 de votre mémoire, quatrième paragraphe, où vous faites état de ceci. Vous nous dites: "Le système de surveillance et de contrôle canadien s'est élaboré au cours des années et l'État a fait preuve de pragmatisme en évitant autant que possible la duplication et les chevauchements et en utilisant du mieux qu'il pouvait ses ressources. " Relativement à cet aspect, et j'ajoute le paragraphe qui suit, est-ce que vous pourriez nous faire une récapitulation des principaux points de chevauchement en matière de contrôle et de surveillance entre l'association et la Commission des valeurs mobilières dans le cadre du décloisonnement comme tel? Est-ce que c'est possible pour vous, de façon succincte?

M. Millette: Oui.

Le Président (M. Lemieux): De façon pratique aussi.

M. Millette: Les deux dossiers actuellement à l'étude sont le dossier des fonds communs de placements lorsque les compagnies d'assurances administrent ce qu'on appelle des fonds distincts pour l'administration plus spécialement des caisses de retraite où, à ce moment-là, la compagnie d'assurances agit un peu comme gestionnaire de fonds pour les retraités. La Commission des valeurs mobilières a revendiqué juridiction alors que la Régie des rentes a déjà une part de juridiction et que l'Inspecteur général des institutions financières a aussi une part de juridiction. C'est effectivement le premier domaine. Le deuxième domaine où il y a eu des pourparlers, c'est dans les contrats individuels. À ce moment-là, les contrats qui ne garantissent pas un retour de 75 % de la prime sont considérés comme des valeurs mobilières. Mais, avec la vogue actuelle des fonds communs de placements, l'industrie des

assurances n'a pas jugé bon d'émettre elle-même ce genre de contrat, mais elle l'a fait par le biais de filiales qui sont elles-mêmes régies par la Commission des valeurs mobilières. À ce moment-là, il y avait un problème chez les vendeurs, c'est-à-dire ceux qui mettaient en marché ces produits. En septembre 1986, il y a eu une entente entre la Commission des valeurs mobilières et l'Inspecteur général des institutions financières qui permet aux agents d'assurances et aux distributeurs de fonds mutuels de cumuler leurs activités. Enfin, le troisième secteur où il y a des chevauchements présentement, c'est concernant les conseillers en planification financière, où effectivement les assureurs-vie, les agents d'assurances y ont des activités importantes. De plus en plus, avec le décloisonnement, nos forces de vente sont appelées à vendre divers produits financiers et, à ce moment, nous sommes très intéressés par le dossier des conseillers en planification financière. (15 h 45)

Le Président (M. Lemieux): Merci, M. Millette. Par rapport à ces chevauchements, voyez-vous des solutions d'une nature concrète qui pourraient peut-être résoudre ou amorcer une solution eu égard à cette problématique?

M. Millette: Oui, il y en a sûrement. Il y a sûrement des solutions à court terme qui peuvent régler des problèmes précis. Par exemple, si la Commission des valeurs mobilières juge que, en matière de fonds distincts, l'information aux consommateurs n'est pas suffisamment grande, la commission pourrait recommander que la Loi sur les régimes supplémentaires de rentes soit modifiée de façon que l'information donnée aux consommateurs soit plus importante. C'est un exemple précis et à très court terme pour régler un aspect particulier du dossier. Cela ne réglera pas les champs de conflits potentiels et à venir qui naissent du décloisonnement auquel on assiste présentement. Pour donner un exemple, en matière de dépôt, qui aura la juridiction lorsque le dépôt ne sera pas régi par la Loi sur l'assurance-dépôts? Est-ce que ce sera la Commission des valeurs mobilières? Est-ce que ce sera l'inspecteur général? Effectivement, les produits que notre industrie met en marché, les REER plus exactement, pourraient être sujets à discussion dans un avenir plus ou moins rapproché. À l'heure actuelle, les REER sont considérés comme des assurances, parce qu'ils sont vendus par des assureurs mais tous les gens savent que c'est très près de la notion de dépôt. Â ce moment, on pourrait avoir... Là, le débat deviendra d'autant plus important que les fonds qui sont gérés par les compagnies d'assurances dans ce domaine dépassent largement 10 000 000 000 $.

Le Président (M. Lemieux): Merci. M. le député de Mille-Îles.

M, Bélisle: D'abord messieurs, merci de votre venue devant la commission parlementaire pour tenter de nous éclairer un peu plus en profondeur sur votre perception des choses face à la Commission des valeurs mobilières du Québec.

J'ai plusieurs questions et, entre autres, je vais commencer avec une ouverture que vous m'avez faite et qui m'a fait un peu sursauter. Lorsque vous... Il faut parler sans gêne, même s'il y a beaucoup de personnes dans la salle qui peuvent vous écouter ou peuvent avoir affaire à vous directement ou indirectement dans le futur immédiat ou lointain.

Le Président (M. Lemieux): Conversation à huis clos enregistrée.

Des voix: Ah! Ah! Ah!

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Mille-Iles.

M. Bélisle: M. Millette, vous dites: II y a eu une entente entre l'inspecteur général et la Commission des valeurs mobilières du Québec. Vous venez de mentionner cela dans la fin de votre discours. Est-ce que vous trouvez cela normal, vous, qu'il y ait des ententes comme cela qui se fassent à un moment donné dans le temps, 1986, concernant de nouveaux produits qui sont apparus sur le marché, où une information additionnelle qui doit être fournie relativement à certains produits et où... Moi, je suppose que c'est par rapport à des produits qui existaient depuis une dizaine d'années peut-être. Quelle est votre réaction face à cela?

M. Millette: D'abord, du côté de l'Inspecteur général des institutions financières, l'entente a été entérinée par un règlement d'application de la loi qui a été adopté par le gouvernement. Donc, ce n'est pas finalement... C'est peut-être impropre de dire qu'il y a eu une entente entre les deux institutions, cette entente a été entérinée par le gouvernement. Donc, même du côté de la Commission des valeurs mobilières du Québec, le gouvernement était purement au fait de ces choses. Cela n'a pas été une décision unilatérale de la part des organismes de contrôle, cela a été entériné par le Conseil des ministres.

M. Bélisle: Je suis au courant de cela mais ce n'est pas cela que je vous pose comme question. Vous souriez mais j'aimerais savoir, derrière votre sourire, ce que vous pensez de toute cette concertation entre l'Inspecteur général des institutions

financières et la Commission des valeurs mobilières du Québec pour établir un certain contrôle additionnel relativement à votre domaine d'activités. Est-ce que vous avez été consultés? Est-ce -que vous êtes d'accord avec cette façon de faire? Est-ce que cela vous impose des contrôles ou des contraintes supplémentaires? Quel est le coût de ces contraintes pour le public, etc. ?

M. Millette: Premièrement, oui, on a été consultés puisque la Commission des valeurs mobilières avait tenu des audiences et que nous nous sommes présentés à ces audiences. Deuxièmement, est-ce que nous trouvons normal qu'il en soit ainsi? Je pense que, si on parle dans l'absolu de qui doit adopter des politiques, on en revient à la première des recommandations. D'après nous, les organismes de surveillance et de contrôle devraient avoir un mandat défini dans la loi. Les orientations et les politiques devraient être données par le gouvernement. C'est certain. C'est le gouvernement ou le Conseil des ministres ou, dans la mesure où les lois ne le prévoient pas déjà, l'Assemblée nationale qui devrait orienter les institutions financières ou le contrôle de l'industrie des institutions financières. C'est ce que nous demandons, d'ailleurs.

M. Bélisle: Oui, je comprends, M. Millette, mais, à la page 3 de votre document, au cinquième paragraphe, vous nous dites que, dans l'administration des caisses de retraite, on retrouve des fiduciaires, des sociétés de fiducie, des conseillers en placements et des sociétés d'assurances. Vous terminez en disant: "C'est ici que la Commission des valeurs mobilières a voulu imposer sa philosophie d'information aux épargnants mais uniquement aux sociétés d'assurances. "

Vous deviez certainement en écrivant cela avoir un petit relent de mécontentement, je suppose. Vous aimeriez peut-être que la règle soit appliquée à d'autres. Vous vous demandez peut-être pourquoi elle a été appliquée seulement à vous.

M. Millette: Qu'elle ne soit pas appliquée du tout ou qu'elle soit appliquée à tout le monde. Mais il faudrait faire un choix. Pas uniquement à nous. On est dans un monde concurrentiel où on est en concurrence avec ces gens-là. C'est nettement le sens des représentations qu'on a faites à la commission et au gouvernement jusqu'à maintenant, dans ce dossier particulier.

M. Bélisle: Quant aux représentations que vous avez faites là-dessus, vis-à-vis de la Commission des valeurs mobilières, est-ce que cela a apporté une modification de sa vision des choses ou bien si elle s'en est tenue exactement à sa position de départ là-dessus?

M. Millette: Non. La position de la commission a évolué à ce niveau.

M. Bélisle: Est-ce que l'association que vous représentez est satisfaite de l'évolution de la Commission des valeurs mobilières sur ce point?

M. Millette: Si on parle du dossier précis, oui, parce qu'il y a des discussions qui sont engagées, qu'on est capable de se parler et qu'on n'est pas en chicane avec la commission. Lorsque nous négocions avec la Commission des valeurs mobilières les questions d'orientations politiques, cela nous dérange plus.

M. Bélisle: Quand vous parlez d'orientations politiques, pourriez-vous être un peu plus explicite là-dessus?

M. Millette: Oui. Quand on parle d'orientations politiques, ce sont les orientations qui ont trait aux vocations des organismes, qui ont trait aux produits. Parce que, lorsqu'on parle de la question des fonds communs de placements, il y a une exemption dans la Loi sur les valeurs mobilières qui prévoit que les fonds des compagnies d'assurances, que les contrats de rentes et d'assurances ne sont pas assujettis, sauf certains contrats qui n'ont pas une garantie de 75 % de la prime. Mais la commission vient parler de choses qui sont en dehors de cela. Nous considérons que les régimes de rentes échappent complètement à la juridiction de la Commission des valeurs mobilières, entre autres, et les contrats d'assurance, peu importe leur garantie. Nous considérons également qu'il n'appartient pas à la commission de déterminer ce qui est de l'assurance, ce que sont des rentes et ce qui n'en est pas. À la limite, ce sont les tribunaux mais, de préférence, le gouvernement ou l'Assemblée nationale, lorsqu'il s'agit de questions de législation.

M. Bélisle: Est-ce que vous avez eu à vous adresser aux tribunaux pour faire trancher cette question de définition et de juridiction quant aux rentes, etc. ?

M. Millette: Nous n'avons pas eu à nous adresser aux tribunaux parce que nous avons toujours maintenu des discussions avec la commission.

M. Bélisle: Est-ce que je dois comprendre, M. Millette, que, même, aujourd'hui, il n'y a rien qui soit finalisé là-dessus?

M. Millette: Non. Il y a toujours des

discussions avec la commission.

M. Bélisle: C'est ce que je dois comprendre.

M. Millette: En ce qui a trait au dossier des fonds communs de placements.

M. Bélisle: Au sujet des fonds communs de placements, des fonds de retraite, c'est cela?

M. Millette: Oui.

M. Bélisle: Les rentes variables, est-ce qu'on en parle également?

M. Millette: Tout ce genre de dossier, effectivement, fait l'objet de pourparlers avec la Commission des valeurs mobilières.

Le Président (M. Lemieux): Cela va, M. le député de Mille-Îles?

M. Bélisle: Oui, M. le Président.

Le Président (M, Lemieux): Merci, M. le député de Mille-Îles. M. Millette, à la page 3 de votre mémoire - avant de donner la parole au député de Bertrand - vous nous dites, dans le dernier paragraphe: "Si la commission a de bonnes raisons de croire que la divulgation n'est plus adaptée aux conditions contemporaines et ne procure plus au public les protections souhaitables lorsqu'il s'agit de contrats comportant le recours à des fonds communs, elle doit alors se demander, avant que soit modifiée l'organisation du contrôle, en quoi la législation... " et on continue. Vous avez parlé tout à l'heure de problèmes dans les fonds de placements comme tels. Pourriez-vous expliciter être beaucoup plus concrètement, le mécanisme comme tel dans le réel, et essayer de nous décrire quelles sont ces frictions, ces chevauchements, le mécanisme comme tel? Ce n'est pas clair pour moi ici dans la dernière partie.

M. Millette: Ce n'est pas nécessairement clair pour nous non plus; cela relève de la juridiction fondamentale de la commission qui est de bien informer le consommateur. La Commission des valeurs mobilières nous dit que dans un cas comme celui-là les consommateurs doivent être bien informés. Nous sommes d'accord pour dire que les consommateurs doivent être bien informés, mais la commission ne s'est jamais véritablement étendue sur les lacunes de l'information. L'information donnée n'est pas l'information prévue par la Loi sur les valeurs mobilières, mais est-ce suffisant pour dire que l'information n'est pas suffisante? Or, c'est dans ce sens-là que les discussions ont toujours eu lieu.

Quant à nous, il nous est apparu qu'il n'y avait jamais eu véritablement de plainte de la part des consommateurs, que la Régie des rentes s'occupait de ce secteur-là, que finalement il n'y avait peut-être pas de raison autre qu'une ressemblance dans la définition du produit pour justifier une intervention de la commission dans ce cas précis.

Le Président (M. Lemieux): Pourriez-vous nous dire, M. Millette, à quoi ressemblent les contrats comportant le recours à des fonds communs de placements?

M. Millette: Ce sont dans 90 % des cas des contrats collectifs qui sont vendus à des employeurs qui prévoient la gestion des fonds accumulés dans les caisses de retraite, conformément à la Loi sur les régimes supplémentaires de rentes. Un contrat est émis qui prévoit les obligations des uns et des autres, et qui prévoit qu'à maturité une rente peut être achetée auprès de cet assureur ou d'un autre assureur, selon les contrats qui sont ouverts, pour permettre au rentier d'acheter sa rente et de se détacher du régime supplémentaire de rentes.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Bertrand.

M. Parent (Bertrand): Merci, M. le Président. Au nom de l'Opposition, je vous souhaite la bienvenue et j'excuse mon collègue, le député de Lévis, qui est retenu actuellement dans une autre commission dont il est vice-président.

J'avais premièrement des questions, M. Millette, moi aussi à la page 3, face à ce qu'a mentionné le président de la commission, dans la même foulée des préoccupations que vous avez en ce qui concerne le régime supplémentaire des rentes qui est inadapté. Vous dites au début de la page 4: "II s'agit là d'un problème général, de taille, qui ne devrait pas être réglé à la pièce au niveau d'un organisme de contrôle. C'est tout l'équilibre du système de surveillance et de contrôle des institutions financières qui est alors touché. " Alors, si c'est un problème général qui ne doit pas être réglé à la pièce, comment préconisez-vous le règlement de ce problème que vous soulevez en page 3?

M. Millette: On pense qu'il ne doit pas s'agir d'un problème qui doit être réglé à la pièce parce que dans le cadre du décloisonnement le nombre de frictions potentielles risque d'être beaucoup plus important, et on voudrait qu'il y ait un effort global de révision de l'ensemble des organismes de contrôle pour que, premièrement - c'est notre première recommandation - l'orientation des politiques appartienne au

gouvernement et non à l'organisme, et que, deuxièmement, chacun des organismes, s'il doit y en avoir plus d'un, ait une vocation qui soit clairement définie et bien cernée pour que nous sachions très bien à quoi nous en tenir, en sachant que, si on met en marché tel genre de produit, il soit clair qu'on appartienne à telle juridiction.

Évidemment, on a une préférence pour avoir un seul organisme de contrôle ou, à tout le moins, un organisme de contrôle par type d'institution. C'est beaucoup plus facile pour nous, parce qu'à ce moment-là on a à entrer en contact avec un seul organisme de contrôle et une seule philosophie de contrôle. C'est beaucoup plus simple pour nous. (16 heures)

M. Parent (Bertrand): Concernant le décloisonnement, vous mentionnez, au tout début de votre mémoire, que l'industrie de l'assurance des personnes a été la première à préconiser le décloisonnement des institutions financières et qu'elle s'est associée très tôt à la loi 75. À la page 7 de votre mémoire, lorsque vous parlez de l'autoréglementation comme voie d'avenir, vous dites: "Le décloisonnement et l'internationalisation des institutions financières posent de nouveaux défis que la structure... Ainsi, dans le débat actuel sur le décloisonnement des institutions financières, certaines propositions auraient . pour effet de donner une portée extraterritoriale à des législations amenant un chassé-croisé... Ce genre de situation est propice au déclenchement de mesures de représailles entre juridictions. L'Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes s'oppose à la généralisation d'une telle situation entre le fédéral et les provinces... "

Je vois un peu une contradiction. Est-ce que vous êtes favorables au décloisonnement? Si oui, de quelle façon le voyez-vous? Ne le voyez-vous pas de façon générale?

M. Millette: Ce qui est visé par notre association, si on parle des organismes de contrôle, ce sont les organismes de contrôle dans chacun des États. Ce n'est pas notre but et il n'est pas de notre ressort non plus de susciter des querelles constitutionnelles ou des questions de juridiction entre chacune des provinces et le gouvernement fédéral. Dans ce cas précis, on se réfère au mémoire que nous avons déposé devant le Parlement ontarien concernant la loi sur les fiducies, qui comprend des mesures extraterritoriales.

C'est dans ce sens qu'on dit que nous nous opposons à ce que des lois aient des mesures extraterritoriales parce qu'on assiste, à ce moment, à des effets de domino qui sont absolument incontrôlables. Une société d'assurances ou une société de fiducie qui va vouloir faire affaire dans un État donné pourrait être obligée de changer l'ensemble de ses activités ou l'ensemble de ses états financiers pour satisfaire aux exigences de cet État alors qu'ici, au Québec, les lois nous permettraient de faire tout autre chose ou des choses complémentaires ou différentes.

C'est dans ce sens qu'on souhaite une harmonisation. Nos demandes de réglementation par institution se situent à l'intérieur du cadre de la juridiction. Par exemple, lorsqu'on demande un organisme unique au Québec, c'est au Québec et non pas au Canada qu'il est demandé.

M. Parent (Bertrand): De façon générale, comment sont vos relations avec la commission?

M. Millette: La Commission des valeurs mobilières du Québec? On a toujours eu des relations très correctes avec les gens. On a discuté largement les dossiers qu'on avait à discuter avec eux. On n'a jamais refusé d'en parler. Je pense que de leur côté ils ont fait des ouvertures et les discussions ont toujours été ouvertes. Nos points de vue sont souvent à l'opposé, mais il y a toujours eu un dialogue entre la commission et notre association.

M. Parent (Bertrand): Merci pour l'instant.

Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le député de Bertrand. M. Bégin et M. Massicotte, vous avez quand même une large expertise dans le domaine des assurances. Est-ce qu'il vous serait possible de donner à cette commission votre point de vue sur le décloisonnement des institutions financières'' Comment voyez-vous cela? Une question qui est très large, mais qui serait fort intéressante eu égard à l'expertise que vous avez dans le domaine des assurances. M. Massicotte ou M. Bégin, un ou l'autre.

M. Massicotte (René): Oui, je peux vous donner mon opinion personnelle,, Évidemment, celle de l'association c'est une chose que je vais laisser à M. Bégin, si vous voulez.

Le Président (M. Lemieux): Oui.

M. Massicotte: Je suis, comme M. Bégin vous l'a dit tantôt, à l'Assurance-vie Desjardins. Dans le Mouvement Desjardins, vous savez que nous avons passablement d'activités en matière de décloisonnements; diverses institutions financières font partie du Mouvement Desjardins. Nous-mêmes, à l'Assurance-vie Desjardins, avons beaucoup de collaboration avec les caisses populaires, par exemple, en matière d'assurance. Nous avons des collaborations avec Visa Desjardins en matière d'assurance aussi. Nous en avons avec le Groupe Desjardins assurances générales pour combiner les assurances-vie et

les assurances IARD. Inutile de vous dire que je suis favorable au décloisonnement et qu'on en pratique déjà passablement à l'intérieur des lois existantes, d'ailleurs. Le décloisonnement est probablement une chose inévitable, qu'on doit regarder positivement, et c'est ce que nous essayons de faire. Je vous parle de mon point de vue en tant que dirigeant d'une institution qui fait partie du Mouvement Desjardins.

Le Président (M, Lemieux): Je ne sais pas si le sourire de M. Bégin signifie qu'il acquiesce à vos propos, mais j'aimerais bien l'entendre sur cet aspect aussi.

M. Bégin: Dans un certain sens, oui, c'est un acquiescement. C'est surtout le fait que l'industrie, de façon générale, envie depuis longtemps le Mouvement Desjardins, parce qu'il a justement accès à ce décloisonnement bien avant tout le monde et, bien sûr, bien avant le changement des lois.

Par contre, l'association a vu apparaître la loi 75 au Québec avec une certaine anxiété dans le reste du Canada, mais aussi beaucoup d'envie. Plusieurs mémoires que nous avons présentés aux autorités fédérales depuis l'adoption de la loi 75, et aussi l'Ontario et les autres provinces, s'appuyaient sur le décloisonnement dans la province de Québec. En ce qui me concerne particulièrement, durant mon mandat, j'ai eu l'occasion de parler du Québec comme d'un leader en ce domaine.

Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie, M. Bégin. Est-ce que vous avez autre chose à ajouter? Cela va, M. Massicotte? Vous n'avez pas autre chose à ajouter?

M. Massicotte: Non merci, M. le Président. Cela va.

Le Président (M. Lemieux): Cela va. M. Millette, à la page 6 de votre mémoire, relativement à votre troisième recommandation - vous avez un paragraphe de trois lignes en haut - au cinquième paragraphe, vous dites ceci: "Mais il y a une limite au cumul d'activités et, pour bien servir le consommateur, il faut songer à réunir des équipes multidisciplinaires où chacun des professionnels pourra apporter sa contribution à la planification financière globale d'un individu et à la réalisation de ce plan. "

Comment entrevoyez-vous cette constitution d'équipes multidisciplinaires, de façon pratique, dans les faits, de façon constante, dans la vie de tous les jours?

M. Millette: Évidemment, ce n'est pas pour exercer les mêmes activités, mais le principe pourrait être celui de la clinique médicale, par exemple, où vous pouvez vous présenter et où des spécialistes de diverses formations, des pharmaciens, des dentistes et des médecins de diverses spécialités, sont présents pour vous offrir un ensemble de services. Donc, cela pourrait, de façon très résumée, être l'approche.

On a parlé des supermarchés financiers. On a parlé d'équipes ou de bureaux où des gens pourraient travailler ensemble à la planification globale des individus. Il y a plusieurs concepts qui se développent actuellement.

Le Président (M. Lemieux): Une autre question. La profession de planificateur financier, comment la voyez-vous? Qui devrait la réglementer, d'après vous?

M. Millette: La profession de planificateur financier, quant à nous, n'est pas une profession unique. C'est plutôt l'image même du décloisonnement où plusieurs professionnels s'occupent de planification financière. On parle des comptables. On peut parler des notaires, on peut parler des avocats fiscalistes; on a des spécialistes en fiscalité. On peut parler des agents d'assurances, des agents d'immeubles. On peut parler d'à peu près tous les professionnels qui s'occupent de votre portefeuille et, à un degré ou l'autre, ces gens s'occupent de la planification financière de vos affaires.

On sent, avec le décloisonnement, le besoin d'intégrer de plus en plus ces choses. Donc, on voit véritablement l'activité de planification comme une activité multidisciplinaire qui devrait être réglementée en collaboration avec l'ensemble de3 organismes qui représentent les intervenants.

Le Président (M. Lemieux): Merci, M. Millette.

À la page 2 de votre mémoire, au dernier paragraphe, vous dites: "D'une part, la Loi sur les valeurs mobilières est fort différente de la Loi sur les assurances ou de celle sur les régimes supplémentaires de rentes quant à sa finalité: alors que ces dernières visent à la fois la solvabilité de l'émetteur et le maintien de saines relations avec les participants, la Loi sur les valeurs mobilières vise la divulgation complète des-conditions de fait relatives aux titres ou valeurs émis au public sans se. préoccuper de la santé financière de l'émetteur".

J'aimerais vous poser une question d'une manière assez directe: Est-ce que vous croyez que la Commission des valeurs mobilières devrait étudier les prix ou intervenir dans les prix?

M. Millette: Je pense que, à l'heure actuelle, aucun des organismes de surveillance en matière d'institutions

financières ne regarde les prix. Je ne pense pas que la Commission des valeurs mobilières devrait le faire.

Le Président (M. Lemieux): Si cela devenait abusif, croyez-vous que la Commission des valeurs mobilières devrait le faire?

M. Millette: Devrait...

Le Président (M. Lemieux): Ou doit le faire?

M. Millette: Si cela devenait abusif, je pense que la commission pourrait à tout le moins avoir le pouvoir de soumettre des rapports au gouvernement, mais je ne pense pas que la commission devrait avoir le pouvoir de juger elle-même si des choses sont abusives ou non.

Le Président (M. Lemieux): Merci. M. le député de Jonquière.

M. Dufour: Concernant la recommandation 3, vous semblez avoir certaines appréhensions envers la Commission des valeurs mobilières concernant la planification financière. Non seulement vous dites que vous ne voulez pas que la Commission des valeurs mobilières réglemente seule les activités de conseiller en planification, mais vous dites, en même temps, que vous ne voulez pas qu'elle reconnaisse un groupe donné d'individus comme organisme d'autoréglementation.

Quelle est la crainte des compagnies d'assurances par rapport à cette reconnaissance possible ou potentielle de la Commission des valeurs mobilières?

M. Millette: Le problème n'est pas la reconnaissance de la Commission des valeurs mobilières. Nous considérons que la Commission des valeurs mobilières n'a pas une juridiction complète sur l'ensemble des questions qui sont soulevées par la planification financière. Dans ce sens, nous croyons que la Commission des valeurs mobilières n'est pas l'organisme qui a juridiction suffisante pour le faire. Premièrement, elle ne pourrait le faire qu'en partie et, deuxièmement, nous croyons que si la Commission des valeurs mobilières devait reconnaître un organisme d'autoré-glementation, quel qu'il soit, comme il n'y a pas, à l'heure actuelle, d'organisme d'autoréglementaion multidisciplinaire, je pense qu'on ne réussirait pas à régler l'ensemble du problème mais uniquement une partie du problème.

Notre but là-dedans, c'est d'arriver à une situation où l'ensemble de la question de la planification financière va être étudié et non pas certains aspects spécifiques reliés à la vente de valeurs mobilières, par exemple, qui est de la juridiction de la Commission des valeurs mobilières. Nous souhaitons que cela soit fait de façon globale parce que nos systèmes de distribution par agents d'assurances chez nous comporte un volet de planification financière non négligeable. Il est évident qu'on ne peut pas vendre une police d'assurance à un individu sans faire une certaine planification de ses besoins. Donc, nécessairement, l'agent d'assurances participe à la planification financière des besoins d'un individu.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Jonquière.

M. Dufour: Vous dites, à la page 3: J'y reviens car il y en a plusieurs qui y ont fait allusion mais il me semble que cela ne m'a pas plus éclairé. Au cinquième paragraphe, vous dites: "C'est ici que la Commission des valeurs mobilières a voulu imposer sa philosophie d'information aux épargnants mais uniquement aux sociétés d'assurances". Est-ce que vous avez une indication à savoir pourquoi la Commission des valeurs mobilières a agi comme cela dans votre cas? Il y a peut-être quelque chose que je ne suis pas capable de saisir. Mais n'est-ce pas parce que vous avez une autre approche ou d'autres accès différents au marché ou que vous avez une façon de pénétrer le marché qui n'est pas comme les autres? N'est-ce pas pour cela? Vous avez une réponse de la Commission des valeurs mobilières qui vous a dit: Vous, on vous astreint et les autres, on ne les astreint pas. On dirait qu'il s'est passé quelque chose et j'aimerais bien le savoir, si vous le savez. Si vous ne le savez pas, on va demander à la commission de nous le donner plus tard.

M. Millette: La commission nous a dit qu'elle souhaitait éventuellement enlever le même privilège qui appartient aux compagnies de fiducie dans le domaine des fonds communs de placements. Dans le cas précis des compagnies de fiducie, la commission jugeait qu'elle devait d'abord, au préalable, obtenir un amendement à sa Loi sur les valeurs mobilières. C'est ce qui a amené notre intervention auprès de la commission en disant: C'est deux poids deux mesures. Si vous devez modifier la loi pour les fiducies, pourquoi ne devez-vous pas la modifier pour les assurances? Le dëbat s'est engagé sur cette question. Évidemment, nous sommes en concurrence avec les fiducies dans le domaine des fonds communs de placements, notamment pour les régimes de retraite. (16 h 15)

Le Président (M. Lemieux): Est-ce que vous avez terminé, M. le député de Jonquière? Oui, M. le député.

M. Dufour: Je pense bien - je veux juste conclure là-dessus - pouvoir peut-être réserver cette question à la Commission des valeurs mobilières. II me semble qu'il y a un élément qui m'échappe par rapport à cela. Cela n'éclaire pas tellement ma lanterne. J'ai l'impression qu'une compagnie d'assurances a un accès différent par rapport aux investisseurs potentiels ou à la planification financière, si on veut l'appeler comme cela. Je comprends qu'il se fait un investissement. La compagnie d'assurances, l'agent rencontre les individus et a une approche complètement différente, à mon sens, en tout cas, à mes yeux, à première vue par rapport à la compagnie de fiducie, à l'institution ou à un courtier comme tel.

M. Millette: Il n'y a pas vraiment de différence entre la mise en marché faite par un courtier en valeurs mobilières et celle faite par une compagnie d'assurances. Les deux reposent sur un représentant qui va rencontrer les clients. Je pense que le système est un peu semblable.

Effectivement, pour les compagnies de fiducie ou pour les banques, le système de distribution est différent puisque les gens se rendent eux-mêmes à la succursale. On a effectivement deux types de mise en marché qui peuvent être différents selon le genre d'institution. Lorsqu'on parle de régime de retraite, de caisse de retraite collective, la méthode de mise en marché est la même pour tout le monde.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Jonquière.

M. Dufour: Vous parlez de l'ensemble des intervenants dans le dossier faisant partie d'un organisme conseillant le gouvernement. En quoi - et j'essaie de relier cela avec vos propos antérieurs en ce sens que vous ressemblez peut-être à des compagnies de fiducie - votre groupe apportera-t-il des choses supplémentaires à ce qui existe déjà?

M. Millette: Vous parlez des conseillers en planification financière?

M. Dufour: Vous parlez à un moment donné d'autoréglementation, de conseiller le ministre, vous le dites à quelque part.

M. Millette: Oui, c'est en matière de conseils en planification financière parce que ce qu'on recommande, finalement, c'est la constitution d'un organisme de contrôle multidisciplinaire qui regroupe tous ceux qui ont quelque chose à dire dans ce domaine.

M. Dufour: Ce que vous revendiquez, ce n'est pas nécessairement propre à votre groupe à l'Association des assureurs.

M. Millette: Absolument pas, non.

M. Dufour: Cela peut être au... D'accord, merci.

Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie, M. le député de Jonquière. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Mme la députée de Matane, M. le député de Montmorency, cela va? Pas de problème. Je vous remercie de votre collaboration et de la présentation de votre mémoire qui est très intéressant. J'espère qu'on aura l'occasion de se revoir et je vous invite, MM. Millette, Bégin et Massicotte, à suivre les travaux de cette commission dans l'avenir et nous vous remercions, encore une fois, de votre présence aujourd'hui. Merci.

J'invite maintenant, M. Gilles Delisle, de Sonam Inc., à bien vouloir prendre place, s'il vous plaît! M. Delisle, vous pouvez commencer votre exposé. Nous n'avons pas de mémoire comme tel. Je pense qu'il s'agit d'un exposé verbal que vous voulez nous faire.

M. Delisle (Gilles): Exact.

Le Président (M. Lemieux): Nous allons écouter votre point de vue et vos recommandations.

M. Delisle: D'accord. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): Vous pouvez commencer, M. Delisle.

M. Gilles Delisle

M. Delisle: Effectivement, je n'ai pas de mémoire. D'abord, je n'ai pas eu le temps d'en préparer un par écrit comme tel. J'ai quand même des notes et quelques faits en mémoire à vous relater même si je n'ai pas de mémoire, n'ayant pas les ressources financières ni les ressources humaines des organismes qui se sont adresssés à vous jusqu'à maintenant. J'espère simplement que les quelques propos que je saurai vous tenir vont quand même être assez limpides pour que vous puissiez les comprendre facilement.

Mon nom est Gilles Delisle, je suis ingénieur et promoteur immobilier depuis dix ans. Je vous remercie de m'avoir invité et j'espère que ces quelques propos sauront mettre, entre guillemets, de "l'input" intéressant dans le débat. Je viens le faire ici en toute humilité, n'étant qu'un petit émetteur et un petit distributeur de produits en valeurs mobilières.

Je suis donc émetteur, c'est-à-dire quelqu'un qui fait des prospectus et qui les émet dans le public, et je suis aussi courtier en valeurs mobilières, avec permis restreint, depuis 1982 parce que, en fait, de 1980 à

1986, il n'y avait à peu près personne qui pouvait distribuer le genre de produits que je faisais, c'est-à-dire des immeubles en copropriété indivise ou en société en commandite. Je fais donc partie de ce dont vous parlait le président de la Commission des valeurs mobilières au début de mars dernier, lorsqu'il parlait des gens qui étaient à la fois émetteurs et distributeurs. Si je viens m'entretenir avec vous cet après-midi, c'est que j'ai eu quelques difficultés avec la Commission des valeurs mobilières et que j'aimerais que d'autres, si possible, n'encourent pas les mêmes difficultés s'ils viennent à passer au travers des mêmes périples.

Je viens, bien sûr, vous faire état le plus rapidement possible des quelques problèmes que j'ai vécus, mais surtout vous apporter des suggestions qui vont peut-être aider à régler le problème en partie. Venons-en d'abord aux faits pour ensuite parler des petits problèmes. En fait, avant de... C'est cela, excusez-moi. Donc, en tant qu'émetteur je vais vous parler plutôt du Fonds national d'immeubles que nous avons lancé en 1982. C'était un fonds destiné à recueillir des sommes d'argent du petit, moyen et gros investisseur pour acheter de l'immeuble; plutôt que de prêter aux banques, plutôt que de prêter en hypothèque, de carrément acheter l'immobilier et profiter de la plus-value et du rendement de caisse.

Comme émetteurs, donc, on a répertorié, acheté et distribué aux clients, puis géré, à part le Fonds national d'immeubles, quatorze complexes immobiliers de 100 logements et plus, et c'étaient en presque totalité des abris fiscaux. En fait, certains oseront peut-être même dire que je travaillais contre les augmentations de revenus des députés puisque les abris fiscaux réduisent les impôts, sauf que les abris fiscaux dans l'immobilier sont faits, semble-t-il, pour stimuler la construction.

Le Président (M. Lemieux): On n'a pas d'augmentation souvent, vous savez.

M. Delisle: C'est pour cela que j'y fais référence. Donc, j'allais dire que la construction génère de l'activité économique et que l'activité économique améliore le statut. Donc, en améliorant, on espère que cela va quand même contribuer à vous donner une meilleure rémunération future. Trêve de plaisanterie, on a fait pour environ 123 000 000 $ d'immeubles au cours des dix dernières années, environ 25 000 000 $ d'investissements et le reste en hypothèques, forcément, sur quatorze complexes immobiliers. Vous allez voir pourquoi je vous dis cela, c'est pour établir les faits. Donc, sur quatorze, il y en a un qui a été une perte totale. C'était un projet de construction; donc, cela n'a pas été rose.

Trois sur quatorze n'ont pas perdu et n'ont pas gagné non plus, ont fait un léger gain. Sur quatorze donc, sept ont eu des rendements composés annuels sur le capital investi de 25 % à 60 % annuellement. Donc, comme moyenne, c'est très intéressant, et n'importe quel courtier en valeurs mobilières, quel qu'il soit, pourrait difficilement se vanter d'avoir une moyenne de dix au bâton. Cela totalise environ 800 investisseurs, et c'est donc la toile de fond qui sert de préambule.

Avant de vous parler de la Commission des valeurs mobilières et des quelques petits déboires, j'en conviens, que j'ai eus avec elle, je dois vous dire que je respecte moi aussi, comme plusieurs d'entre vous l'ont mentionné jusqu'à maintenant, la Commission des valeurs mobilières, autant l'institution d'ailleurs que les gens qui la comprennent. On en voit la nécessité, entre autres, dans des cas comme ceux qu'on a mentionnés déjà, Daperli, les Placements Debluc, etc. Ce sont des gens qui travaillent très fort, souvent sous pression, et qui n'ont peut-être pas la structure de rémunération qui devrait aller avec leur tâche, comme ce serait possible dans le secteur privé. Pour cela, je leur lève mon chapeau, parce que ce sont des gens toujours disponibles et qui travaillent très fort. Chapeaul

Je ne viens donc pas contester ces gens-là, ni la Commission des valeurs mobilières elle-même, mais regarder avec vous ce qui pourrait être fait pour améliorer davantage son intervention. La Commission des valeurs mobilières, pour faire ce qu'elle fait - comme dit une certaine publicité - a des pouvoirs énormes, et elle doit en avoir forcément. Le problème que pose cependant ce rôle discrétionnaire, comme on l'a appelé jusqu'à maintenant, c'est que c'est administré par des individus. Or, le danqer, lorsqu'un individu possède beaucoup de pouvoirs, c'est qu'ils deviennent arbitraires ou subjectifs. Je ne veux surtout pas tirer ici de pierres. J'oserais dire: Que celui qui n'a jamais été partial dans cette salle se lève et accuse la CVMQ d'être partiale: Je ne pourrais pas vous dire que je ne l'ai jamais été non plus. Mais les compagnies que je dirigeais ou que je dirige encore ont eu des problèmes importants presque chaque fois qu'on a déposé un prospectus à la Commission des valeurs mobilières, et celui dont je veux vous parler le plus, c'est le Fonds national d'immeubles, parce que j'ai très peu de temps à ma disposition.

Ce fonds, on l'a lancé en 1982 et on a lancé une firme de courtage, comme je l'ai dit, avec permis restreint en même temps, pour distribuer ce genre de produit qui était, à ce moment-là, à peu près inconnu. On a été les premiers à le faire sur le marché. Le malheur, c'est que, n'ayant pas d'expérience, le courtier en valeurs mobilières a payé des

"finder's fees", entre guillemets, sous forme de commissions inscrites dans les livres, croyez-le ou non, à des non-inscrits. Ce qui a eu l'heur, et je les comprends, d'horrifier les gens de la Commission des valeurs mobilières.

Donc, le courtier a dû arrêter de distribuer pendant six mois - je dis bien six mois - alors qu'on a fait une inspection très approfondie parce qu'on pensait que, si on avait découvert cela à la surface, qu'est-ce qu'il y a dans le fond? On n'a rien trouvé. Il y a deux ou trois personnes qui ont donc travaillé pendant six mois chez nous. Pendant ce temps-là, on a eu des dépenses, parce que c'est quand même une compagnie qui coûte 35 000 $ par mois, avec toute sa structure. Quand on arrête un courtier de distribuer... On distribuait nous-mêmes à ce moment-là, exclusivement le Fonds national d'immeubles, alors on a arrêté aussi la distribution du Fonds national d'immeubles. Donc, les investisseurs qui avaient déjà investi 1 600 000 $ ou 1 700 000 $ dans le fonds... On a acheté des immeubles en décembre 1983 plutôt qu'en juin 1983, parce qu'on attendait que la commission termine son inspection.

Donc, on avait environ 1 800 000 $ vers la fin de 1983 d'investi. On s'en est allé devant les commissaires parce que, semble-t-il, ils avaient découvert des problèmes sérieux, sauf que rien n'a été retenu devant les commissaires. On a été condamnés à deux jours de suspension, je pense bien de façon qu'il n'y ait aucune journée. Notre permis a donc été remis en vigueur après deux jours et on a continué. Évidemment, cela a coûté beaucoup d'argent, forcément. On a renouvelé le prospectus du Fonds national d'immeubles devant la Commission des valeurs mobilières. Elle a exigé plusieurs changements et dans le prospectus du Fonds national d'immeubles, et dans les structures de notre courtier en valeurs mobilières. Cela aussi a coûté évidemment très cher. Mais on l'a fait et tout est revenu dans l'ordre.

Un an plus tard, en 1984, cette fois, la commission ou des employés de la Commission des valeurs mobilières n'étaient pas d'accord avec la nouvelle formule de calcul de la valeur journalière que l'on attribuait aux unités du fonds immobilier. On nous a donc demandé d'arrêter volontairement la distribution du fonds et d'aviser nos trois courtiers, qui nous distribuaient à ce moment-là, que nous n'avions plus le droit de distribuer jusqu'à nouvel ordre de la Commission des valeurs mobilières.

Ayant déjà été arrêtés pendant six mois l'année précédente, il était évident que, si nous faisions cet arrêt volontaire, c'en était fini du fonds que je dirigeais. J'ai donc refusé et j'ai exigé d'aller devant les commissaires une deuxième fois. Les commissaires nous ont donné raison. L'évaluation, de la façon qu'on l'a formulée, a été acceptée à 100 %. On s'est même excusé devant nous. Cela a entraîné des frais d'avocats importants. Évidemment, les détenteurs y ont écopé pour une bonne partie.

En 1985, l'année suivante, à cause de facteurs qui sont étrangers au Fonds national d'immeubles, dans lesquels je n'entrerai pas ici, il nous a paru clair qu'il fallait, soit fusionner le fonds immobilier, soit le vendre ou en céder le contrôle à quelqu'un d'autre, à une institution financière ou à quelqu'un qui avait un qros pouvoir de distribution. Nous avons travaillé pendant neuf mois pour trouver une niche au fonds. Après neuf mois, nous avons finalement trouvé un autre fonds immobilier qui était d'accord pour fusionner avec le nôtre et en faire un seul qui aurait alors environ 3 500 000 $ d'actifs. Dans notre tête et dans la leur, cela prenait au moins 5 000 000 $ pour que cela fasse vraiment des profits intéressants. On était donc prêts à fusionner en janvier 1986. On a rencontré les gens de la commission à la fin de décembre 1985. On nous dit: Un instant! Vous êtes en inspection actuellement au fonds immobilier. Votre prospectus est en règle, mais vous êtes en inspection. Il y a quatre ou cinq petites choses qui ne sont pas tout à fait à notre goût. On aimerait que vous révisiez tel ou tel registre, que vous fassiez telle ou telle chose, etc. Enfin! la même chose pour l'autre fonds. Leur prospectus étant en renouvellement, pour eux, c'était encore pire. On nous dit: Avant que cela soit renouvelé des deux côtés, restez tranquilles, on vous avisera quand on vous dira oui. On était, souvenez-vous, en décembre 1985. On nous a dit oui, effectivement, mais en avril 1986. Pendant la période des REER, si importante parce qu'on a plus de la moitié de nos fonds qui étaient dans les REER, janvier et février ont été complètement - excusez le terme -"muffés", et pour nous, et pour l'autre fonds immobilier, parce qu'on était entre deux et qu'on ne savait pas quel genre de campagne publicitaire il fallait faire. Oh, malheur! Est arrivé ce qui devait arriver. En fait, on a fait une réunion de part et d'autre, chacun de nos détenteurs d'unités et de nos fiduciaires, au mois de mai. Des deux côtés, il a été accepté que la fusion se fasse le mois suivant, soit au mois de juin. Mais eux, entre-temps, ont eu des petits problèmes de distribution à leur tour. Ils ont distribué moins que ce qu'ils prévoyaient. Finalement, pour une foule de raisons, ils ont décidé au mois de juin, après les deux réunions annuelles des détenteurs, de ne plus fusionner. La seule issue qui restait, c'était de liquider. Donc, la valeur de l'unité du fonds qui était de 12, 45 $ en décembre 1985

sera vraisemblablement, lorsque la dissolution sera terminée, d'environ 3, 60 $. (16 h 30)

Ce que je reproche en fait à la Commission des valeurs mobilières, c'est, dans ce cas précis, sans parler des multiples autres, le style fonctionnaire que l'on a adopté face à ce problème. La commission connaissait très bien les problèmes de parcours des deux fonds. On lui avait bien dit que cela prenait un fonds plus gros et que c'était important de le faire à ce moment-là. Ce que je lui reproche, c'est de ne pas avoir eu cette vision. C'était impérieux pour les petits investisseurs qu'il y ait une fusion, pas pour moi. Je me désistais et je m'en allais du décor.

Donc, on a dit: Vous avez des règles à suivre. Vos registres ne sont pas en ordre. D'abord, mettez-vous en ordre avec nous et, ensuite, on verra. Actuellement, j'ai déjà vendu l'un des deux actifs qui restaient dans le fonds. Il en reste un à vendre et on devrait être bon pour distribuer les fonds aux détenteurs au mois d'avril ou au mois de mai prochain, mais ils auront 30 % ou 35 % de ce qu'ils auraient eu, à mon avis, si on avait pu réaliser la fusion, car, à ce moment-là, cela aurait été un deuxième départ.

Actuellement, la Commission des valeurs mobilières regarde au-dessus de nos épaules pour voir s'il n'y a pas eu irrégularités ou mauvaise gestion. On est en inspection depuis le mois de novembre dernier; depuis cinq mois, deux personnes travaillent à temps partiel pour voir si, par malheur, il n'y aurait pas eu des choses qui n'auraient pas été correctes. Je les comprends, c'est leur travail. Le problème, c'est que - sauf le respect que je leur dois -ils ne connaissent pas le domaine de l'immobilier et ils ne comprennent pas exactement les problèmes qui s'y posent. Il est vraisemblable qu'on va, encore une fois, se présenter devant les commissaires parce qu'ils vont trouver des poux. Il est vraisemblable qu'on va découvrir, comme les deux ou trois autres fois, que, dans les circonstances, on a fait tout ce qu'on pouvait. Cela va coûter encore 10 000 $ ou 15 000 $ d'avocats et une bonne partie de cela sera payée, encore une fois, par les petits investisseurs.

Dans notre industrie, le "timing" - et je pense que Paul Guy l'a déjà mentionné - est très important et ils en sont conscients. Quand tu planifies une prise de contrôle ou une fusion, cela se fait à ce moment-là. Ce n'est plus nécessairement bon deux, trois ou quatre mois plus tard, et nous l'avons vécu. C'est la même chose et c'est encore pire, j'oserais dire, dans les prospectus d'abris fiscaux que je faisais auparavant, parce que, lorsque tu présentes un prospectus et qu'on l'approuve en janvier, c'est difficile de le vendre pour le 31 décembre.

Des voix: Ha! Ha!

M. Delisle: Les problèmes qui existent, en fait, c'est soit personnaliser un débat ou une situation, de la particulariser, ou d'être arbitraire ou subjectif, comme je vous l'ai mentionné. Le danger - en général, ces gens sont de bonne foi et, je dois l'avouer, je ne pense pas que quiconque à la Commission des valeurs mobilières ait jamais été vraiment de mauvaise foi, je tiens à le mentionner -comme ils manquent souvent de perspectives parce qu'ils ne connaissent pas notre industrie, ils perdent la perspective et voient très bien l'arbre malade, mais oublient de considérer la forêt autour. Comment pouvons-nous donc pallier l'arbitraire, si cela est possible? Voici quelques suggestions que je vous soumets bien humblement pour ce qu'elles valent.

Quant à la question que vous avez posée tout à l'heure, M. le Président, sur la réglementation quant aux prix, aux jugements de valeur et à l'appréciation - j'allais dire que je suis forcément contre - il faut être dans le milieu pour le savoir - et je vous répondrai tantôt si vous avez des questions là-dessus. Comment assurer la protection de l'épargnant, comme le disait tout à l'heure M. Polak, qui a malheureusement dû quitter, tout en ayant des modifications à suggérer?

Regardons donc rapidement qui fait quoi ou qui devrait faire quoi dans ce fichu marché. Il y a trois intervenants principaux, vous le savez: la Bourse, les courtiers et la commission. On parle ici plutôt de l'émission de prospectus, parce que je pense qu'il y a très peu de contestation quant au reste de leur travail, s'il en est. Les courtiers dépensent - j'imagine que vous êtes au courant - entre 50 000 $ et 100 000 $ par prospectus. Avec le nombre de prospectus qui ont été déposés à la commission l'an dernier, selon le président, cela représente environ 50 000 000 $ que les épargnants - parce que c'est toujours compris dans les prix d'émission - paient pour vérifier tout ce que la Commission des valeurs mobilières revérifie par la suite. En fait, le courtier en valeurs mobilières - excusez, j'ai un petit problème dans mes feuilles - est obligé de vérifier si tout ce qui est écrit est vrai, de s'assurer que tout ce qui devrait être écrit l'est et que rien d'autre ne peut affecter la valeur des titres. Il est obligé aussi de voir à la protection du client, parce que c'est lui qui lui vend, et il devra vivre avec son client par la suite; il est vraiment, aux yeux de la loi - croyez-le ou non - à 100 % responsable de son prospectus. Pour partager ses responsabilités, il paie des comptables agréés et des avocats qui eux-mêmes sont responsables, devant leurs ordres respectifs, de leurs gestes.

Le courtier, lui, doit voir à tout le reste, parce qu'évidemment l'avocat ou le

bureau d'avocats doit vérifier tout ce qui est légal, et le comptable, la même chose, tous les chiffres. À mon sens, une fois que tout ça est fait et qu'on a dépensé - combien ai-je dit tout à l'heure - 100 000 000 $ ou 50 000 000 $, 50 000 000 $ l'an dernier là-dessus, la Commission des valeurs mobilières doit s'assurer que tout ce qui est pertinent est écrit, que tout ce qui n'est pas écrit n'est pas pertinent et que toutes les mises en garde sont bel et bien à leur place. Tout ce qu'elle fait en surplus, à mon sens, est outrancier, soit à l'égard du courtier en valeurs mobilières, parce que, si la commission, par exemple, dit: Ce titre-là ne devrait pas être mis dans le public, c'est une injure au courtier qui le présente. Si elle dit: Ce titre-là, il manque telle ou telle chose à l'intérieur, légalement, elle fait injure à l'avocat qui, lui, a mis son nom sur le prospectus, et ainsi de suite. On pourrait multiplier à l'infini les exemples. Je pense que tout est en place et que la Commission des valeurs mobilières devrait effectivement avoir le mandat et les pouvoirs de surveiller et de s'assurer que tous les intervenants font bien leur travail, parce que, lorsque la CVMQ repasse en arrière, regarde par-dessus l'épaule et revérifie tout ce que le courtier, l'avocat et le comptable ont déjà vérifié à grands coups financiers, c'est de la duplication en très grande partie et cela coûte très cher.

L'autre grand danger des organismes publics - vous avez à en superviser plusieurs, vous en savez sûrement quelque chose - c'est qu'ils sont peut-être moins intéressés à contrôler d'autres organismes qu'à le faire à leur place, parce que ça peut augmenter leur propre pouvoir et leur propre importance. J'achève. Je ne dis pas que c'est cela que fait la Commission des valeurs mobilières. Peut-être ai-je tout à fait tort dans l'évaluation que je viens de vous faire rapidement. Mais c'est un danger que je vois et c'est une suggestion que je fais. Donc, le premier élément de suggestion: que chacun fasse son travail et que la commission, si elle n'a pas déjà ce pouvoir, qu'on le lui donne, mais qu'elle ne fasse pas de duplication sur ce plan-là.

Deuxième suggestion. En ce qui concerne les particularités, et des prospectus principalement, d'abord, il n'est pas facile pour un émetteur de naviguer dans le flou sans connaître les règles. En début de mars, le président de la Commission des valeurs mobilières vous disait qu'il y avait 30 instructions générales au Québec et une cinquantaine en Ontario. C'est vrai et on me dit que celles de l'Ontario sont beaucoup plus précises, en plus, que celles du Québec. Ce que j'encourage, c'est qu'on en fasse dans tous les domaines où c'est possible, de façon que l'on connaisse les règles du jeu, qu'on sache ce qui est permis et ce qui ne l'est pas. T'est sûr que ce n'est pas possible de tout indiquer et de tout écrire. Mais plus on en a, je pense, mieux c'est.

Outre cela, une fois qu'on a davantage d'instructions générales, je pense qu'il est essentiel qu'on ait, pour les prospectus publics, un temps défini, comme on a dans les prospectus privés ou les "private placements". Par exemple, lorsque vous déposez un prospectus, on dit: Dans les quinze jours ou dans les vingt jours, peu importe le temps - ce n'est pas important, mais qu'on le sache - vous allez avoir soit vos observations, soit un refus. Par exemple, si c'est quinze jours, que la seizième journée, automatiquement, cela passe sur le bureau de quelqu'un d'autre. Je suggérerais soit un comité très simple, formé du président de la Commission des valeurs mobilières et de deux autres commissaires ou du président de la Commission des valeurs mobilières, un de l'ACCOVAM et un de la Bourse, qui seraient saisis du problème. Car c'est là, messieurs et mesdames, que sont les problèmes. Ce n'est pas toujours dans un refus, c'est dans un délai. Comme je vous le disais tout à l'heure, c'est bien difficile, le 2 janvier, de distribuer un produit pour le 31 décembre précédent. S'il y avait un comité restreint comme cela - et cela se fait déjà très rapidement - à la Commission des valeurs mobilières - il ne me reste que trois feuilles - à ce moment-là, on pourrait, à quelques heures d'avis, motiver un refus ou motiver un délai indu.

En dernier lieu, une autre suggestion: que l'on engage donc à la Commission des valeurs mobilières et surtout dans le domaine de l'immobilier des gens qui connaissent l'immobilier. J'ai beaucoup de respect pour les employés de la commission et je sais qu'ils font leur possible. Mais, avec la meilleure volonté du monde, un mécanicien de machinerie lourde aurait beaucoup de difficulté à devenir, du jour au lendemain, inspecteur dans une fabrique de viande. Je n'ai rien contre les opérateurs de machinerie lourde, ils font sûrement un bon travail et ils sont sûrement qualifiés pour leur travail, mais je ne leur ferais pas confiance demain matin comme inspecteurs de viande. Le problème, c'est qu'aucun employé à la CVMQ n'a jamais construit d'immeubles, n'a jamais acheté et revendu d'immeubles, n'a jamais fait lui-même de prospectus et, pour nous, dans le domaine de l'immobilier, c'est, je pense, un problème très important.

En fait, l'objectif de ces quelques suggestions serait d'assurer davantage l'impartialité, de connaître davantage les règles du jeu et de connaître les délais au-delà desquels on aurait automatiquement un recours devant un comité restreint. Je ne pense pas que ce soit la meilleure solution au monde, mais il y a sûrement un filon là à exploiter. J'arrête là-dessus et je vous

remercie de votre attention.

Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie, M. Delisle. J'aurais une seule question. Selon vous, quelle a été la cause fondamentale de vos déboires? De façon claire, nette et précise, comme une ligne droite entre a et b.

M. Delisle: Ma perception - je dis bien "ma perception", car je pense qu'on ne peut jamais être certain de cela - c'est que, contrairement aux tribunaux de droit commun, certaines gens sont ou ont été catalogués à la CVMQ ou par certains employés de la CVMQ. Lorsque tu t'appelles Untel ou lorsque tu esUntel, ce n'est pas pareil.

Dans les tribunaux de droit commun, je pense, sauf erreur, au Canada, en tout cas, et au Québec, que tu es innocent tant qu'on ne prouve pas ta culpabilité; alors que le sentiment que j'ai depuis quatre ans, c'est que je suis d'abord coupable et j'ai à prouver que je ne le suis pas.

Le Président (M. Lemieux): Merci. M. le député de Mille-Îles.

M. Bélisle: Dans cette même veine, est-ce que ce n'est pas parce qu'il n'y a tout simplement pas d'appel des décisions qui sont données?

M. Delisle: J'en ai parlé avec quelqu'un de la Commission des valeurs mobilières qui m'a dit: Oui, tu avais seulement à téléphoner au président, le président est toujours là.

M. Bélisle: Oui, mais être en appel de ses propres décisions, ce n'est pas tellement un appel régulier, comme on peut dire.

M. Delisle: Exactement, c'est cela. Donc, le seul recours que j'aie eu jusqu'à maintenant a été, quand j'en ai eu jusque-là, de dire: Je veux aller devant les commissaires. Et on m'a toujours donné raison jusqu'à maintenant. Je propose donc qu'il y ait un comité impartial ou plus impartial qui jugerait des cas théoriques de partialité. Je ne dis pas qu'on a été partial avec moi. Je pense qu'on l'a été.

M. Bélisle: Quant aux 800 petits investisseurs dont vous avez parlé tantôt, quelle était votre technique de commercialisation pour aller chercher l'épargne auprès de ces personnes?

M. Delisle: II y a eu deux volets. Le premier, c'était qu'on était associé à un groupe multidisciplinaire. On était déjà une douzaine d'années en avance, car on faisait, il y a dix ans, ce qui est en train de se manigancer - excusez le terme actuellement dans les qrosses corporations. Le premier volet, c'étaient des références de gens qui travaillaient avec nous. Le deuxième a été le Salon d'éparqne-placement, des conférences, des livres, des allocutions, des tournées dans la province, etc.; et la publicité aussi.

M. Bélisle: Cela m'Intéresse de savoir ce qui s'est passé avec le "finder's fee". Avez-vous été obligé de faire une passe-passe? Est-ce que la situation a été légalisée'?

M. Delisle: Pas que je sache.

M. Bélisle: C'est-à-dire que c'est demeuré aux personnes à qui cela a été payé.

M. Delisle: Oui, on a payé des amendes cependant. (16 h 45)

M. Bélisle: C'est cela, d'accord.

Votre recommandation concernant le groupe tripartite, pas simplement le groupe de l'intérieur, cela me plaît beaucoup. Je vais vous le dire au départ, je trouve cela très correct. La formule par laquelle, M. Delisle, vous venez de nous suggérer, dans les cas limites ou pour les litiges, pour les délais... Et les délais, on pourrait en sortir des cas jusqu'à demain matin. Vous n'êtes pas le seul cas devant la Commission des valeurs mobilières, cela remonte à 1970, 1972, 1975 et 1976; il y a même des cas qui ont entaché la réputation financière du Québec. On en parlera peut-être tantôt, à la fin de l'après-midi, ou ce soir.

Ce que je retiens, M. Delisle, c'est que vous faites une comparaison et que vous dites: II y a des avocats, des comptables et des courtiers, vous estimez le chiffre à environ 50 000 000 $, tout ce qui est nécessaire pour rendre les offres conformes à ce que les règlements et la loi exigent. Vous mettez cela dans la balance de l'autre côté et vous dites: De l'autre côté, la Commission des valeurs mobilières c'est 3 500 000 $ de budget, 4 000 000 $?

Le Président (M. Lemieux): 5 000 000 $.

M. Bélisle: 5 000 000 $ de budget. Vous vous posez la question: Comment peut faire, avec 5 000 000 $, une commission des valeurs mobilières alors qu'on investît à 50 000 000 $, 75 000 000 $, 100 000 000 $ / pour réussir à faire ce qu'eux... Est-ce cela votre problème intellectuel?

M. Delisle: Je pense que vous avez bien compris.

Le Président (M. Lemieux): Cela va, M.

le député de Mille-Îles?

M. Delisle: Le problème, c'est qu'il y a duplication, à mon sens; je peux me tromper, mais, je vois là un problème de duplication. Qu'on laisse faire les courtiers et qu'on exige qu'ils fassent leur travail, mais, outre cela, que la commission fasse le sien, mais ne chevauche pas sur des fixations de prix ou des... En tout cas, vous avez eu de multiples énoncés là-dessus dans le passé.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Bertrand.

M. Parent (Bertrand): Merci. M. Delisle, je crois que vous avez passé par des tourments assez difficiles.

M. Delisle: Épiques.

M. Parent (Bertrand): De plus en plus, dans le domaine immobilier, il y a formation de sociétés en commandite et je suis un peu surpris, voire estomaqué, qu'il n'y ait pas de spécialiste à la commission qui soit capable de bien saisir l'essentiel à l'intérieur du prospectus. Vous me confirmez qu'il n'y en a pas.

M. Delisle: Si vous posez la question à la commission, elle va vous dire que, oui, elle a un très grand spécialiste en immobilier - que je respecte beaucoup, d'ailleurs - mais je peux vous dire, parce que je suis de l'autre côté de la clôture, que cela n'est pas quelqu'un de l'immobilier. Vous savez, j'imagine, parce que vous étiez dans un domaine spécialisé auparavant, que, quand on connaît son domaine; on le connaît, quand on ne le connaît pas, comme vous le disiez tout à l'heure, on a beau se pencher pardessus l'épaule de l'autre, ce qu'on va trouver, c'est souvent "irrelevant" et, ce qui est "relevant", on ne le trouvera pas.

M. Parent (Bertrand): Une deuxième question concernant les délais. Cela m'a frappé, vous avez dit: Un refus, c'est plus ou moins grave; un délai, c'est très grave quand on est dans l'attente. Ce délai semble ne pas avoir été l'objet d'un cas ou deux, cela a été un peu systématique. Est-ce que, selon vous, la vraie raison des délais était, soit dans votre cas, qu'il y avait de l'obstruction systématique, ce qui pourrait être un cas, ou si c'était de façon générale, parce qu'il y a eu beaucoup de plaintes, parce qu'on manque de personnel à la commission, parce qu'ils sont débordés? Vous avez dit en début de présentation, vous avez insisté beaucoup là-dessus, M. Delisle, que ce sont des gens qui font leur possible.

Il reste que, sur le marché, et on l'a vu encore à la fin de l'année 1986, plusieurs ont dû se retirer parce qu'il y avait engorgement. J'en connais qui sont très déçus et cela retarde actuellement des projets immobiliers importants dans le domaine de l'hôtellerie. Est-ce que, dans votre cas, selon votre expérience vécue au cours des dernières années, c'était à la suite d'engorgements ou s'il y avait de l'embêtement systématique sur vos dossiers?

M. Delisle: II y a eu de l'engorgement, sauf que, quand on sait quel est le problème d'engorgement et qu'on nous dit d'avance, ce qui était le cas, que cela ne pourra pas prendre moins que X temps, personnellement, je suis capable de vivre avec cela.

Dans des cas précis, ce qui est arrivé, c'est que les analystes nous disaient: D'accord, venez chercher votre prospectus, c'est fini; apportez-nous votre chèque et, cet après-midi, je vous donne votre visa final. Là, ils nous rappelaient quelques heures après et nous disaient: Non, c'est arrêté à tel endroit et je n'ai plus l'autorité. Donc, reportez-vous à M. Untel et là, cela prenait une, deux ou trois semaines de plus. C'est cela que j'ai eu de la difficulté à vivre avec, si vous me permettez l'expression anglaise.

M. Parent (Bertrand): Est-ce que, M. Delisle, les fois que vous êtes comparu... Vous dites que - je ne connais pas la procédure - mais un individu qui se sent, entre guillemets, "lésé" peut demander de comparaître. Vous avez eu recours à cette mesure ultime, vous avez été entendu et vous avez eu gain de cause. Est-ce qu'il est de coutume que des gens utilisent cette pratique de comparaître devant les commissaires pour être entendus, pour voir, finalement, leur cas décidé ou tranché, selon votre expérience ou d'après ce que vous connaissez du milieu?

M. Delisle: II faudrait poser la question principalement aux commissaires eux-mêmes. Je pense que cela a eu lieu dans certains cas, sauf que c'est une procédure qu'on ne peut pas utiliser toutes les deux semaines. C'est là mon regret. Déranger les cinq ou les six commissaires de la commission, le président et trois ou quatre avocats d'un bord et trois ou quatre de l'autre pour un problème, on se tanne de cela. Oui, à ma connaissance, cela s'est produit à quelques reprises, mais combien de fois, il faudrait le demander aux commissaires eux-mêmes.

Le Président (M. Lemieux): C'est ce qu'on va faire, M. Delisle.

M. Parent (Bertrand): J'ai une dernière question parce que le temps presse. Votre recommandation, essentiellement, c'est que vous ne voulez pas avoir de duplication et que chacun des professionnels impliqués dans

la rédaction du prospectus, lorsqu'ils apposent leur signature sur le plan professionnel, qu'ils soient comptables, avocats ou autres, ne devrait pas ètre révisé ou regardé par-dessus l'épaule par la commission. Comment voyez-vous, à ce moment-là, la "responsabilité", entre guillemets, que doit porter la commission? Je veux bien qu'on accélère en ne faisant pas de duplication, mais vous semblez nous dire que les professionnels prendront leurs responsabilités, et vous en tant que promoteur. Est-ce bien ce que j'ai saisi? Si c'est cela, ça me cause des problèmes.

M. Delisle: Non, c'est évidemment beaucoup plus complexe. Je ne voulais pas dire - en tout cas, si c'est ça que j'ai dit, je m'en excuse - que la commission devrait simplement se confiner dans un rôle de "rubber-stamping", si vous me permettez l'expression. Loin de là. Ce que je vois, c'est qu'elle fasse exactement le même travail qu'elle fait maintenant, sauf qu'elle ne refasse pa3 les choses qui ont déjà été faites et qu'elle ne porte pas de jugement sur des choses qui ont déjà été décidées par le marché, par le courtier, par les avocats ou les comptables. Qu'elle vérifie ce qu'elle a à vérifier: est-ce que tout est dit? est-ce que tout ce qui est dit devrait être dit? est-ce que tout ce qui doit être dit est là et est-ce que tout ce qui n'est pas là n'est pas dit, etc., les "disclosures". Qu'elle fasse son travail et, le reste, qu'elle le laisse faire aux autres.

Pour répondre à la question que vous avez posée tout à l'heure, M. le Président, au précédent intervenant, pour savoir, par exemple, si les prix devenaient abusifs, ce qui se passe, le marché se réajuste. Regardez, l'automne dernier, les articles qui ont été publiés dans La Presse et d'autres journaux. Vous avez vu une quinzaine d'émissions publiques qui ont réajusté leurs prix tout à coup. Et ce n'est pas la Commission des valeurs mobilières, je pense, qui a fait cela. C'est qu'à un moment donné, lorsque le marché s'emballe, et c'est, je pense, ce qui était en train d'arriver, cela s'est produit, il se réajuste de lui-même. Le prix des actions depuis ce temps-là s'est réajusté. Il faut faire confiance. C'est un marché. On décrit le marché des valeurs mobilières comme le marché absolu de l'offre et de la demande. Qu'on le laisse jouer! Qu'on arrête de jouer à la mère!

Le Président (M. Lemieux): On vous remercie, M. Delisle. Malheureusement, on a dépassé notre temps, mais c'était très intéressant. On vous remercie pour votre collaboration et vos commentaires, ainsi que votre présence.

Nous allons maintenant demander à l'Association pour la protection des investisseurs du Québec de bien vouloir prendre place, s'il vous plaît!

Association pour la protection des investisseurs du Québec

Le Président (M. Lemieux): Voulez-vous vous identifier? Vous êtes président de cet organisme?

M. Blanchard (Jean-Guy): Je suis M. Blanchard, président de l'orqanisme.

Le Président (M. Lemieux): Est-ce que vous pourriez nous donner un peu l'historique de cet organisme? Le nombre de gens que vous représentez, et ainsi de suite.

M. Blanchard: J'allais commencer par cela.

Le Président (M. Lemieux): Cela va.

M. Blanchard: MM. les commissaires, je suis ici au nom de l'Association pour la protection des investisseurs du Québec, c'est-à-dire l'APIQ.

Le Président (M. Lemieux): Je m'excuse du lapsus. Ce sont tous des députés, encore pour le moment.

M. Blanchard: Je m'excuse.

Le Président (M. Lemieux): Peut-être que le député de Jonquière, un jour, sera commissaire, mais, pour le moment, ce sont tous des députés.

M. Blanchard: Tous des députés. Je vous félicite d'avoir été élus.

L'histoire de l'APIQ, c'est l'histoire de l'occupation d'un créneau. C'est l'histoire de l'occupation d'un mandat dévolu à la CVMQ, mais que la sclérose de celle-ci a laissé libre. L'APIQ est née de l'impuissance des intervenants des milieux de la finance à s'autodiscipliner. N'ayant une existence légale que depuis trois semaines, l'association doit ' certainement répondre à un besoin et/ou à un malaise puisqu'elle a déjà l'appui de plusieurs milieux: universitaire, journalistique et même d'hommes d'affaires - M. Lemaire nous a téléphoné - et ce, presque sans publicité et sans argent.

Les dossiers s'accumulent - n'ayez pas peur, je vais résumer un peu - ils ne sont pas encore étoffés comme on le voudrait, mais on devine que ce n'est que la pointe de l'iceberg. C'est la raison pour laquelle nous avons sollicité de vous présenter, MM. les députés, ce court mémoire, conscients tout de même de nos limites, inhérentes à toute organisation en devenir.

De plus, nous tenons à vous souligner que les points de vue exprimés ne sont pas

nécessairement des points de vue de haute voltige. On ne parle pas de milliards. C'est la chose financière vue d'en bas. N'étant que les figurants de la scène financière, nous ne faisons qu'appréhender encore, sans être naïfs toutefois, qu'au royaume du Danemark il y a quelque chose de pas correct.

Le Président (M. Lemieux):... de pouvoir.

M. Blanchard: Oui, monsieur, vous avez des lettres.

Le Président (M. Lemieux): Vous pouvez continuer, c'est ce que j'ai lu dans votre mémoire.

M. Blanchard: Le mandat de la Commission des valeurs mobilières. II est tout de même étonnant qu'il ait fallu l'annonce d'une commission parlementaire sur la CVMQ pour que le mandat de celle-ci commence à être connu du public. Il est tout de même étonnant que la CVMQ ne commençât à lever le voile sur la possibilité que des investisseurs se servent d'informations privilégiées - et ce, devant un auditoire hilare - si vous l'avez vu à la télé - trois jours seulement avant que la Presse canadienne annonce la commission parlementaire. C'est comme si la CVMQ découvrait son mandat en même temps que le public.

Nous savons maintenant, parce que d'autres que la CVMQ nous l'ont dit, que le mandat de celle-ci est et était toujours, avant cette commission, d'assurer la protection des épargnants, de régir l'information des porteurs de valeurs mobilières et du public, d'encadrer l'activité des professionnels et de favoriser, par ce fait, le bon fonctionnement du marché.

La CVMQ et la protection des investisseurs. Â notre connaissance, jamais l'ACCOVAM, la Bourse ou la CVMQ ne sont intervenues pour dénoncer certains abus. Nous n'oserions pas dire qu'on s'y entend comme larrons en foire, mais pour pasticher M. le député Garon, disons que c'est un des rares ménages à trois n'ayant pas besoin de conseiller matrimonial. Comme quoi "three is not a crowd" en ce cas particulier.

Tout se passe comme si les pressions pour une certaine éthique devaient venir de l'extérieur de cet univers clos de la finance. Par exemple, il a fallu à l'automne 1986 - là on parle des lois du marché - la presse écrite, le Point à Radio-Canada et l'émission Questions d'argent à Radio-Québec, entre autres - ce n'était pas le marché qui a fait cela - pour ramener les actions REA à un prix plus conforme à la réalité. Ceux qui ont acheté en juin ont payé trop cher. Pourtant, en soufflant le prix des actions, on volait littéralement le petit investisseur et toute la population indirectement puisque les REA sont des abris fiscaux. Comme quoi il n'y a pas que les passeurs d'héroïne qui ont des valises à double fond. Il y a des hommes d'affaires, MM. les députés, et de la finance qui font aussi des "passes" plutôt que des affaires. Et pendant ce temps, la CVMQ chicanait Cambior parce qu'elle avait fait une semaine intensive de publicité.

La fiche signalétique d'un petit investisseur, je vous la résume. MM. les députés, pour respecter l'horaire de cette commission, je passerai ce chapitre. De toute façon, si vous désirez connaître le petit investisseur, lisez-le et touchez-en un mot à la CVMQ. Vous comprendrez que ce qui est méconnaissance chez un investisseur s'appelle ignorance chez un courtier ou un conseiller financier.

Le Président (M. Lemieux): Vous passez à 2. 1. 3...

M. Blanchard: Je passe à 2. 1. 3, page 5.

Le Président (M. Lemieux): La commission et son manque de leadership. On vous écoute.

M. Blanchard: La commission et son manque de leadership. Le moins qu'on puisse dire, c'est que la CVMQ n'assume pas son leadership dans son rôle de protection des petits investisseurs. La meilleure protection, c'est encore la connaissance. La CVMQ ne pourrait-elle pas sortir des "pénombres sacristines" le mécanisme de base de l'investissement? Au lieu de se plaindre d'avoir trop de plaintes, que ne voit-elle pas la chose d'une façon positive... Ne prône-t-on pas sur le plan de la santé que la médecine préventive est préférable aux valiums? Dans un premier temps, pourquoi la CVMQ, en accord avec la Bourse et l'ACCOVAM, ne tente-t-elle pas une certaine rationalisation des moeurs et habitudes du courtage? Dans un deuxième temps, pourquoi ne fait-elle pas un effort de diffusion de cette rationalisation?

S'il est vrai que ce qui se conçoit bien s'énonce clairement et que les mots pour le dire arrivent aisément, il y a parmi les employés de nos maisons de courtaqe "at large" beaucoup d'adeptes de la pilule parce qu'ils conçoivent très mal. Par exemple, si vous avez un compte sur marge et un RÉER autogéré - ce ne sont pas des affaires prises dans les airs - il faudra au moins une heure et quatre ou cinq intervenants pour connaître le procédé de la maison de courtage, ce qui ne signifie pas que les autres maisons de courtage fonctionnent de la même façon. La moindre démarche devient très lourde parce qu'il est difficile de trouver l'interlocuteur valable. Je vous mets au défi de téléphoner à l'heure du

dîner, alors que les petits investisseurs dînent, pour essayer de rejoindre une compagnie de courtage. Vous allez être à la diète. Que la CVMQ ne s'étonne pas d'avoir tellement de plaintes quand on sème comme à dessein tellement d'embûches. (17 heures)

D'ailleurs, si on avait un supra-organisme pour colliger les plaintes sur le service des plaintes de la CVMQ, il serait peut-être surchargé lui-même parce qu'on n'attaque pas le mal à sa base et que la CVMQ ne connaît pas justement la fiche signalétique du petit investisseur.

La CVMQ ne pourrait-elle pas faire des représentations auprès du gouvernement pour civiliser les institutions financières dans le domaine des valeurs mobilières comme ce fut le cas dans celui des emprunts? (17 heures)

Nous croyons cela d'autant plus important qu'avec le décloisonnement - on en parlait tout à l'heure avec les assurances -les maisons de courtage se multiplient. Le gouvernement n'interviendra-t-il pas dans le cas des taux des cartes de crédit? Le créancier n'est-t-ïl pas tenu maintenant d'expliquer à l'emprunteur ce à quoi ce dernier s'engage, le vrai taux d'intérêt, etc. ? Par contre, quand vous signez, par exemple, une entente relative à un régime d'épargne-actions du Québec de l'institution XYZ -tout simplement pour un régime d'épargne actions - il y a au verso quatorze pouces de petites lignes pour dégager ladite institution de toute responsabilité, du genre - il y a tout les temps du conditionnel que vous voulez - l'institution XYZ peut, à sa discrétion, agir a tout égard en votre nom ou a la suite d'instructions que vous avez ou auriez données par télégramme, câblogramme ou radiogramme, mais elle n'encourra aucune responsabilité du fait d'avoir ou ne pas avoir agi ou encore d'avoir commis une erreur dans l'exécution de vos ordres.

Un porte-parole de la CVMQ nous a déjà dit que la Bourse, c'était la libre entreprise, et qu'il fallait prendre des risques. Mais, ma foi, il faudrait peut-être expliquer cela aux institutions financières. Dans la même veine, ne pourrait-on pas exiger d'une institution financière qu'elle explique ce à quoi s'engage un petit investisseur quand il signe une convention sur marge? L'institution financière peut décider n'importe quand et soudainement de rayer une action trop volatile comme valeur marginale. Elle peut décider sans autre forme de procès de ne plus "marginer" les actions de la Bourse de Vancouver. C'est arrivé avec Pemberton. L'institution financière peut se tromper en établissant votre marge, oublier une valeur, par exemple. De toute façon, en fin de compte, l'investisseur fera les frais de l'erreur puisque certaines conventions de marge comportent expressément la clause suivante: "Si nous ne pouvons pas vous aviser avant 16 heures vous êtes responsable. " Si t'investis, ne pars pas en voyage. Nous avons un cas où l'institution financière a fait trois erreurs en trois semaines. Comme le personnel du service à la clientèle est surchargé, il faut parfois quelques heures pour obtenir un éclaircissement et corriger l'erreur si possible avant 16 heures. Le consommateur, l'emprunteur et maintenant l'assuré, puisqu'on sait par l'ACQ que toutes les compagnies d'assurances n'ont pas la force de Gibraltar, jouissent d'un minimum de protection. Même les animaux ont la SPCA. Seuls les investisseurs semblent régis par les lois de la jungle.

Jusqu'ici et délibérément, nous sommes restés au niveau de l'individu. Pour emprunter un terme qui eut ses heures de gloire, nous sommes restés au niveau du vécu de l'investisseur. On parlait beaucoup de vécu en 1960. À un autre niveau, plus subtil, et qui touche les investisseurs comme collectivité, peu importe ses connaissances de la jungle financière, la CVMQ brille - comme les trous noirs de l'espace sidéral - par son absence ou du moins par son manque d'efficacité.

Nous n'insisterons pas sur les activités douteuses de ceux qui se servent d'informations privilégiées, dont nous avons parlé plus haut. La CVMQ a déjà pudiquement levé le voile sur eux. Espérons qu'elle a su se scandaliser.

Il paraît que certaines maisons de courtage gonfleraient artificiellement le prix des actions d'une deuxième ou troisième émission, La Presse, 10 mars 1987. Encore une fois, c'est un analyste financier et non la CVMQ qui découvre le pot aux roses. Il est vrai qu'on ne peut demander à la CVMQ de lever un deuxième voile de l'autre main. Trop de pudeur devient parfois indécent.

Que dire de tout le domaine des actions subalternes où la CVMQ n'est pas très loquace? Elle ne tousse que lorsque sa contrepartie ontarienne a le rhume. On pourrait parler de Canadian Tire, de Cascades, de la vente de Donohue à Dofor, de ce qui va arriver des 10 % de petits actionnaires, de Berkley à Sherbrooke. Qui les défend?

À notre connaissance, la CVMQ n'a jamais produit une pensée originale sur les grands dossiers avec ou sans système d'ordinateur. C'est à regretter parfois que la Commission des valeurs mobilières ontarienne n'ait pas juridiction au Québec. C'est comme si la Commission des valeurs mobilières du Québec venait de réaliser tout à coup qu'elle manque de fonds, que son système d'ordinateur est désuet, qu'elle est dépassée, quoi. Enfin, pour une commission de surveillance, on ne peut pas dire qu'elle ait son monde à l'oeil. On a l'impression que la

CVMQ ne se questionne que depuis l'avènement de cette commission, à croire, MM. les députés, que la crainte est le commencement de la sagesse.

La CVMQ et le contrôle de l'information. Qui l'eût cru? La CVMQ a également comme mandat de régir l'information des porteurs de valeurs mobilières et du public et d'encadrer l'activité des professionnels. Sur ce point, nous pensons de la CVMQ ce que pense M. Paul Guy de son propre système informatique. Je cite: "insuffissant, désuet et parfois défaillant, ce qui pose des problèmes de fiabilité. " Parce que, en fait, le système d'ordinateur ne peut être meilleur que ceux qui le "pitonnent". Â l'heure du décloisonnement, d'une augmentation de 113 % des investisseurs, d'un nombre record d'émissions, alors que l'Ontario est déjà à mettre en place des mécanismes pour au moins minimiser les conflits d'intérêts, alors qu'elle pénalise déjà un peu plus lourdement que nous ceux qui abusent des informations privilégiés, la Commission des valeurs mobilières voudrait bien, je cite son président: Être prête à suivre plusieurs de ces règles. "Ces règles", ce n'est pas un possessif, c'est un démonstratif. Par "ces règles", on entend celles de l'Ontario évidemment. Comme on n'a pas fait ses devoirs, on copie. En fait de leadership ou d'intention de leadership, on a déjà vu mieux. 2. 2. 1 De la publicité et de la compétence des courtiers et conseillers financiers. Les représentants des compagnies d'assurances en parlaient tout à l'heure, c'est très intéressant. L'APIQ aimerait que s'installe un certain code de déontologie ou d'éthique de la publicité. Alors que les gouvernements peuvent poursuivre en justice le boucher du coin pour avoir trompé le client de 0, 10 $ sur un kilogramme de soc de porc, tout se passe dans ce milieu comme si les institutions financières avaient tous les droits et aucun devoir. Par exemple, une maison à escompte annoncera: Vous voulez transférer votre compte? C'est facile, vous nous en donnez l'instruction et nous nous chargerons du reste. Allez-y voir! Vous donnez vos instructions: liste de vos valeurs, feuille dûment estampillée, etc. Deux semaines plus tard, vous apprenez que c'est à vous de faire le transfert. C'est quoi, l'affaire au juste?

Durant janvier et février, les journaux débordaient d'annonces vantant les avantages du REER. Or, à notre connaissance, seul le FSTQ, quoique en très petits caractères - la vertu, comme la CVMQ, étant trè3 pudique -soulignait que l'achat des fonds réduit le montant admissible au REA. Ce qui fait que plusieurs investisseurs - lisez les lettres aux journaux - se trouvent avec trop de l'un ou de l'autre, les abris fiscaux jouant les uns contre les autres. Ces institutions financières peuvent-elles rejeter le blâme sur les petits investisseurs ignorant tous les raffinements et les méandres des lois fiscales quand leurs propres courtiers ou conseillers financiers ne sont pas eux-mêmes à la hauteur de la situation?

Par exemple, l'APIQ a fait le tour de plusieurs trusts, fiducies et maisons de courtage en posant les questions suivantes sur les REER autogérés, cinq petites questions que je dirais presque naïves: Pouvons-nous mettre des FSTQ dans un REER autogéré? Puis-je placer des actions REA dans ce genre de REER? Cinq questions, elles sont là. Un conseiller sur huit a pu répondre à ces questions sans être obligé d'aller consulter quelqu'un d'autre ou de nous rappeler. Nous avons même eu des réponses loufoques - je vous jure que c'est vrai - par exemple: Des actions accréditives, c'est quoi? C'est un conseiller financier qui me parle.

Les courtiers d'une maison d'escompte, embêtés par ces questions, nous ont dît: "On appellera la société de fiducie XYZ et on vous téléphonera". Tant qu'à faire, nous avons appelé nous-mêmes la société XYZ qui nous affirma que la société de courtaqe était pas mal fatiguante et qu'elle ne connaissait rien. C'est rassurant.

Et après, on viendra nous parler de l'ignorance des petits investisseurs et du décloisonnement. Enfinl le décloisonnement cela ne fait pas sérieux si le seul résultat est de diluer la valeur des conseils donnés -enfin, donnés - si un conseiller en tout devient un conseiller en rien. Tout de même c'est avec nos économies qu'il joue!

Ne faudrait-il pas que la CVMQ oblige, par exemple, une maison de courtage, comme celle dont on parle ci-haut, à identifier son fonctionnement et a avoir des gens compétents en fin de compte? C'est déjà assez complexe sans que s'immiscent des intermédiaires prenant une "cut" au passaqe. Ou, alors, que la maison de courtaqe continue à vendre des actions et la fiducie à gérer.

Il est assez aberrant comme investisseurs de se faire dire qu'en ce moment dans telle institution tout le monde est sur le REER et que l'administration courante fonctionne au ralenti... Ronjour compétencel Espérons que les toilettes sont toujours nettoyées. 2. 3. 1 Des petits et grands problèmes des investisseurs. Globalement, le rôle de la CVMQ est de favoriser par ses interventions le bon fonctionnement du marché. Or, il est évident que, si les prémisses sont faussées, la conclusion risque de l'être.

L'APIQ a commencé à colliger quelques plaintes pour monter ses dossiers. Si on me pose la question tout à l'heure, on a 292 lettres, 122 appels. Il est clair qu'en ce qui

concerne le petit investisseur, il y a quelque chose qui bloque le bon fonctionnement du marché. Dans certains cas, on ne sait pas trop qui blâmer. Le laxisme de la CVMQ? L'incompétence ou le manque de morale de certains courtiers? L'aveuglement ou l'ignorance de certaines maisons de courtage? Jugez par vous-mêmes. Nous vous donnons en vrac des faits terre à terre tirés des lettres et appels téléphoniques reçus, il y en a une quinzaine. Cela se résume à ceci: Certains sont des vrais cas de cauchemar. Je reçois des choses à peu près épaisses comme ça...

Le Président (M. Lemieux): Ce sont tous des cas, du paragraphe a au paragraphe m?

M. Blanchard: Tous des cas. Par exemple, le petit investisseur qui attend son argent depuis 35 jours.

Le Président (M. Lemieux): Des situations concrètes et...

M. Blanchard: J'ai des lettres ici et des dossiers.

Le Président (M. Lemieux): Cela va. C'était pour savoir. Vous dites qu'ils ont été contre-vérifiés par l'association.

M. Blanchard: Effectivement, parce qu'elle nous les envoie.

Le Président (M. Lemieux): Vous compendrez que nous n'avions pas votre mémoire en main et que nous n'avions qu'un résumé, si je comprends bien.

M. Blanchard: Non, vous avez le mémoire.

Le Président (M. Lemieux): C'est-à-dire qu'on avait une table des matières préalablement.

M. Blanchard: Vous avez le mémoire.

Le Président (M. Lemieux): Je suis d'accord, j'ai le mémoire, mais, le mémoire ne nous est parvenu que très dernièrement.

M. Blanchard: Ah!

Le Président (M. Lemieux): C'est en ce sens que je m'exprime alors que, dans certains cas, nous avons en main les mémoires depuis une semaine, une semaine et demie.

M. Blanchard: D'accord.

Le Président (M. Lemieux): C'est la raison pour laquelle je vous posais la question. Vous pouvez continuer.

M. Blanchard: Je passe, vous pouvez lire aussi bien que moi ces petits faits. Cela tourne toujours autour de l'incompétence du personnel, du manque de déontologie de la part des courtiers. 2. 3. 2 Conséquences néfastes de ces dysfonctionnements. Par cette énumération qui n'est pas exhaustive, nous essayons de vous signifier que sous une apparence boursière euphorique, il y a déjà, en filigrane, quelque chose de malsain.

La plupart des 113 % de nouveaux investisseurs sont issus d'un marché "bullish", un marché boursier haussier. À moins de croire au Père Noël, cela ne pourra pas durer toujours. Qu'arrivera-t-il si jamais le marché fait un angle de 180° et devient "bearish"? Comment pourront se défendre et tenir le coup des investisseurs qu'on a réduit à des "acheteux" passifs? Quelle stratégie pourront leur conseiller des courtiers et des conseillers financiers formés à la sauvette et qui ne sont en fait que des vendeurs, et quasiment sous pression? Il suffira d'un raz de marée. Il suffira d'une baisse un peu persistante pour faire fuir, et pour longtemps, ces investisseurs de l'ère du REA. On a trop abusé de ces investisseurs par des ratios trop élevés - entre parenthèses, on appelle souvent les investisseurs de REA des "Mickey Mouse"; s'il y a des "Mickey Mouse", c'est qu'il y a trop de "Walt Disney" dans les coulisses - des prix artificiellement gonflés, des prises de profit trop rapides, des courtiers trop affamés. Ces investisseurs vont certainement disparaître dans le décor. Il y aura panique parce qu'il y aura eu abus. Le risque est qrand de liquider toute une génération parce qu'on aura oublié de cultiver la crédibilité et la confiance. Est-ce que les intervenants en valeurs mobilières, la CVMQ en tête, ont déjà réfléchi à la question? Qu'auront à gagner les courtiers et les maisons de courtage quand le marché secondaire se sera rétréci comme peau de chagrin et manquera de liquidités? Que deviendra entrepreneurship québécois une fois les "Reaqueux" disparus, comme on les appelle souvent? Â ce que nous sachions, ce n'est pas l'investisseur institutionnalisé qui achète des actions de 1 $ et de 2 $ de sociétés à faible capitalisation. Il n'y aura plus de Cascades, de Canam-Manac, de Memotec parce qu'il n'y aura plus de petits investisseurs, ou il y en aura moins, en tout cas. L'APIQ souhaiterait que la CVMQ daigne s'intéresser à tous ces irritants énurnérés plus haut parce qu'elle a comme mandat d'assurer le bon fonctionnement du marché. Nous souhaiterions que la CVMQ joue son rôle de catalyseur parmi tous les intervenants financiers. Nous souhaiterions qu'au lieu de suivre quelques règles des autres, elle fasse preuve d'assez de dynamisme pour que le monde de la finance suive ses propres règles à elle. Nous croyons

qu'avec la disparition du petit investisseur disparaîtrait une certaine dynamique du marché. 3. 1 En guise de panégyrique. L'APIQ ne peut pas être contre des subventions plus généreuses à la CVMQ; on ne peut pas être contre la vertu. Cependant, l'APlQ aimerait bien que la CVMQ présente une réflexion musclée et agressive sur ses projets et ses préoccupations. L'APIQ regrette que la CVMQ ait attendu si longtemps pour transmettre un signal d'alarme au gouvernement. Cette situation critique d'aujourd'hui ne doit pas être le fruit d'une génération spontanée, in vitro. Nous comprenons mal que depuis 1983, elle n'ait pas su à peu de frais - nous insistons sur à peu de frais -alerter l'opinion publique. Nous pensons qu'elle aurait eu la complicité, une bonne complicité de tout le monde journalistique et universitaire que la chose préoccupe, parce qu'on est en train de l'avoir pour rien. Elle a tout de même le poids d'un organisme institutionnel et, en principe, respectable. Que serait-il arrivé sans l'heureuse initiative de cette commission? Récemment, la CVMQ est venue exposer devant cette commission ce qu'elle ne pouvait pas faire. Nous aurions aimé qu'elle expliquât ce qu'elle voudrait faire. Sur le décloisonnement, nous savons qu'elle est prête à suivre quelques règles de l'Ontario et qu'elle voudrait un peu de quincaillerie pour publier les transactions d'initiés à temps. À part cela, "niet". Nous caricaturons à peine.

Nous aimerions savoir le fruit de sa réflexion sur le dossier des actions subalternes et du décloisonnement. De concert avec la Bourse et l'ACCOVAM, comment interviendra-t-elle, si elle intervient, dans les histoires des actions du REA à ratio trop élevé, dans celle des actions gonflées d'une deuxième émission? Que pense-t-elle d'un code de déontologie pour les courtiers? Quel est son plan d'action pour l'amélioration et un meilleur contrôle de la formation des courtiers et des conseillers financiers de nos supermarchés? A-t-elle un politique en vue pour trouver des solutions aux nombreuses plaintes des petits investisseurs? Nous pensons que la CVMQ souffre de léthargie chronique. Nous pensons que la CVMQ ne sait pas s'imposer et imposer. Elle a perdu son sifflet pour siffler la fin de la récréation. En somme, elle manque d'innovation et de créativité et, nous le répétons, de leadership. Et cela, des millions et/ou des ordinateurs ne sauront le lui faire acquérir. 3. 2 Recommandations.

Sans prétention de notre part, nous pensons que la CVMQ devrait attaquer sur deux fronts. En bas de gamme, sur ce qui influence de près la microtransaction mobilière, a savoir un code de déontologie pour les courtiers et les maisons de courtage, une formation plus sérieuse des intervenants, une diffusion de l'information et d'informations en collaboration avec la Bourse et les maisons de courtage, un contrôle sévère de la publicité, la standardisation et/ou la rationalisation du fonctionnement des maisons de courtage - quand tu sais comment l'une fonctionne, tu ne sais pas comment l'autre fonctionne, et n'appelle pas à l'heure du dîner - des responsabilités assumées par les institutions financières envers les petits investisseurs, un bureau de plaintes sérieux et efficace.

En haut de gamme, au niveau de la macrotransaction, dossier, réflexion, enfin quelque chose sur les actions subalternes, avant l'Ontario, contrôle des informations privilégiées, dossier, réflexion sur le décloisonnement, dossier sur les influences indues et artificielles sur le prix des actions. Enfin, nous croyons que si la CVMQ n'assume pas ses mandats, c'est toute la société qui en paiera le prix. Nous croyons également qu'il manque à la CVMQ quelque chose de plus subtil que des millions et de la quincaillerie. En d'autres termes, que la CVMQ ait besoin d'argent, c'est évident. Mais ce dont elle a besoin d'abord assez drôlement par les temps qui courent, c'est d'entrepreneurship, et cela, elle ne peut l'acheter ni se faire subventionner. Par contre, nous trouverions assez étrange de diluer son pouvoir au profit d'autres organismes. Demanderions-nous à General Motors de promouvoir l'APA? On ne demande pas aux loups de surveiller la bergerie. (17 h 15)

Si vous me le permettez, je suis arrivé à Québec - une minute - il pleuvait, à Montréal aussi. Une petite réflexion, si vous me permettez l'expression dans cette auguste Assemblée, d'un "ti-cul". Dans le journal Les Affaires, page 10, le dernier... Pauvre Soficorp, la première à annoncer un fonds québécois, mais la dernière à obtenir l'autorisation de la Commission des valeurs mobilières du Québec. Au moment de mettre sous presse, Soficorp n'avait toujours pas reçu le feu vert de la commission. Soficorp a eu du mal à prouver qu'elle avait les compétences nécessaires en tant que gestionnaire. Mais, pour M. Guy Shedleur, vice-président chez Soficorp, "on s'acharne indûment contre nous". D'autres affirment que, dans cette foulée, il y aurait là un règlement de compte, M. Shedleur ayant été employé de la commission avant de joindre Soficorp.

Ce n'est peut-être pas vrai, je l'espère...

Le Président (M. Lemieux): C'est le dernier numéro...

M. Blanchard:... mais, si c'est vrai... C'est sous la plume de Jean-Pierre Roy dans

Les Affaires. Si c'est vrai... Je me dis qu'on se pose des questions. Quand on n'a pas d'argent pour faire son travail et qu'on fait de la basse politique... Il y a d'autre chose à faire avec l'argent. Si ce n'est pas vrai, qu'on le réfute, car on ne sait plus quoi penser; le petit en bas ne sait plus quoi penser. Merci.

Le Président (M. Lemieux): Merci, M. Blanchard. Effectivement, nous trouvons votre mémoire intéressant ainsi que certaines des recommandations» mais j'aurais peut-être une question à vous poser, qui m'intrigue un peu. L'Association pour la protection des investisseurs du Québec, d'où tient-elle sa légitimité? Vous avez combien de membres? Nous parlons d'une charte provinciale ou fédérale?

M. Blanchard: Provinciale.

Le Président (M. Lemieux): Provinciale. Incorporée depuis quand?

M. Blanchard Trois semaines.

Le Président (M. Lemieux): Trois semaines? Combien de membres avez-vous?

M. Blanchard: En règle?

Le Président (M. Lemieux): En règle, oui.

M. Blanchard: En règle, environ 50, monsieur. Cela fait trois semaines... Avant qu'on s'organise, nous avons eu exactement 250 lettres de demande de carte et environ une centaine de coups de téléphone.

Le Président (M. Lemieux): Est-ce qu'il s'agit, pour l'ensemble, de représentants du milieu des institutions financières?

M. Blanchard: Non, si vous voulez l'historique, dans le moment, on a eu "des offres", d'universitaires, de gens des HEC ou de l'UQAM. On en a eu du monde journalistique, de la publicité, de différents niveaux qui nous ont offert des analystes financiers, comme M. Gagnon qui est à Berkley, qui ont offert de nous aider, enfin, de faire partie du corpus qu'on voudrait former. Je ne prétends pas, loin de là, avoir la compétence pour discuter d'options et de choses comme ça.

On est en train de former un corpus. Évidemment, on le fait sur le bras. Cela fait trois semaines. On vient de faire imprimer les cartes. Il y a des gens qui nous envoient de l'argent pour faire partie...

Le Président (M. Lemieux): Quelle est votre formation, M. Blanchard?

M. Blanchard: Enseignant, monsieur.

Le Président (M. Lemieux): Vous êtes enseignant. Â quel niveau enseignez-vous?

M. Blanchard: Si je vous dis en secondaire I, est-ce que vous allez me penser assez brillant quand même?

Le Président (M. Lemieux): Non, non. C'est tout simplement à titre... Écoutez...

M. Blanchard: Secondaire I.

Le Président (M. Lemieux): Cela va.

Une voix: Enseignant?

Le Président (M. Lemieux): Enseignant, oui. Maintenant, M. le député de Lafontaine, vous avez demandé la parole.

M. Gobé: Oui, M. Blanchard, on peut dire que vous n'y allez pas avec le dos de la cuiller dans votre mémoire. Je m'interroge à savoir si vous, personnellement, vous avez des raisons particulières de mettre autant d'accent sur les courtiers, car tout le monde y passe. Dans votre mémoire, on voit tout le mondes on voit les courtiers, on voit la Bourse en filigrane, on voit la commission. Avez-vous des problèmes, vous-même, qui vous ont amené à réagir fortement? Cela m'inquiète. Vraiment, vous y allez et vous tapez. Il s'agit d'une institution importante pour le Québec, et il doit y avoir une certaine crédibilité pour ces organismes, que ce soit la Bourse ou que ce soit la commission. J'aimerais que vous m'expliquiez ce qui vous motive vraiment à faire cela.

Le Président (M. Lemieux): II faudrait peut-être, M. Blanchard, que vous qualifiiez d'une façon nette et précise ce en quoi la Commission des valeurs mobilières du Québec manque d'entrepreneurship, on sent cela tout au long de votre mémoire.

M. Blanchard: Oui.

Le Président (M. Lemieux): D'une façon très concrète.

M. Blanchard: Oui, oui. Très concrète. D'abord, je m'attendais à cette question. Il y a deux questions. Pour moi, chaque fois qu'on lit quelque chose, à moins que le petit investisseur n'ait pas accès au grand dossier, on entend parler de l'Ontario. Pour Canadian Tire, enfin on a dit - j'ai lu cela dans les journaux - qu'on suivrait quelques règles de l'Ontario. Mais, jamais on ne sent quelque chose qui vient. Quand on a parlé des actions trop gonflées du REA, des actions trop chères, c'est venu de journalistes, de gens qui sont autour de la chose financière.

Ceux qui en ont acheté avant le mois de novembre les ont payées trop cher. Dans le moment, dans la presse, on dit qu'on gonfle la deuxième ou la troisième émission. C'est un analyste financier qui a dit cela. Si vous appelez...

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Lafontaine.

M. Blanchard: Je répondrai à M. le député de Lafontaine après. Si vous appelez au service des plaintes... C'est évident que ce qui m'a éveillé à cela, c'est parce que, moi-même, j'ai eu des problèmes, c'est parce que mon collègue en a eu, c'est parce que, à moment donné, quand on a investi, on parle avec des investisseurs. Des jeunes ont eu des problèmes. Quand on est pris dans les dédales. Il y a un pauvre bonhomme qui m'a envoyé son dossier; la compagnie de courtage vient de lui faire perdre environ 200 $ de "warrant". Son dossier est épais comme ça.

J'admets disons - je voulais tout de même faire un... On a entendu si peu sauvent les petits investisseurs - que tout n'est pas pourri. Il ne faut pas charrier tout de même. Je ne voudrais pas qu'on déforme trop ma pensée. Mais je voulais que cela sorte. Remarquez que, à un coin de rue, on ne met pas un feu rouge parce que cinq personnes ne se font pas tuer. On en met un parce que cinq personnes peuvent se faire tuer. C'est un peu la même chose dans ces histoires. Je ne dis pas que tous les investisseurs ont toujours de gros problèmes, mais il y a trop de gens qui ont des problèmes. Le gars qui t'appelle et qui te dits Hey! je suis machiniste, moi. Quand j'appelle durant mon "lunch time", bon, excusez... Je pensais que c'était à moi.

Le Président (M. Lemieux): Non, non, cela va, monsieur.

M. Blanchard: Quand j'appelle pendant mon temps de lunch...

Le Président (M. Lemieux): Rapidement, s'il vous plaît, car M. le député de Mille-Îles a une question aussi.

M. Blanchard:... le "boss" veut que je retourne à ma machine. Cela prend une ou deux heures. Cela n'arrive pas qu'à moi; moi, j'ai le temps, remarquez bien, de tenir une heure au téléphone. Le gars qui finit à midi et qui recommence à une heure, lui, il n'a pas le temps. Les erreurs se multiplient. Vous ne pouvez pas avoir au bout du fil la personne compétente pour savoir quelque chose. C'est difficile. Il faudrait que quelqu'un y voit.

Le profil de l'investisseur a changé. Ce n'est plus le gars qui était libre de son temps et tout cela. C'est le gars qui travaille de 8 heures à 4 heures et qui a 20 minutes pour manger. Souvent, le gars qui investit 2000 $ ou 3000 $, c'est son profil à lui. C'est pour cela que je dis qu'il faudrait peut-être s'attacher à cela, aller voir les maisons de courtage et leur dire: Mais toi, qui vas-tu voir? Que vas-tu voir? Si tu appelles la Commission des valeurs mobilières et que tu leur dit: J'ai perdu mes "warrants"; j'ai perdu 260 $, on va te répéter: On a 160 plaintes avant vous. Les warrants", pendant ce temps, ont foutu le camp.

Le Président (M. Lemieux): On vous remercie, M. Blanchard. M. le député de Mille-Îles, une question brève avec une réponse brève, si possible, M. Blanchard. M. le député de Mille-Îles.

M. Bélisle: M. Blanchard, vous me laissez perplexe.

M. Blanchard: Oui?

M. Bélisle: Oui, c'est bon. Vous recommandez, à la page 18, entre autres, à la recommandation A, dans le domaine de la microtransaction mobilière, un code de déontologie pour les courtiers et les maisons de courtage. Et vous dites, un peu plus haut: "Nous pensons que la CVMQ devrait attaquer sur deux fronts. " Est-ce que je dois comprendre, de la façon que vous l'avez écrit, que vous souhaiteriez que la Commission des valeurs mobilières du Québec s'implique dans la définition d'un code de déontologie pour les courtiers et les maisons de courtage?

M. Blanchard: Si elle ne s'implique pas, qui va le faire? Si je comprends bien, tout à l'heure, il y a avait les messieurs des assurances qui étaient ici et qui disaient: On parle seulement de 10 000 000 000 $. Nous, on parle seulement de 3000 $. Évidemment, ces gens ne veulent pas que la CVMQ intervienne trop. Je pense que c'est le rôle du gouvernement, par ses institutions, de contrebalancer les pouvoirs des deux.

M. Bélisle: D'accord. J'ai bien compris. Ce n'était pas clair parce que les deux paragraphes étaient séparés. Mais votre opinion, c'est que la CVMQ devrait peut-être imposer ou suggérer - peut-être que c'est...

M. Blanchard: Elle a une force morale suffisante pour l'imposer. Remarquez, si vous me permettez une explication, dans le fond, je n'en veux pas personnellement à la CVMQ, je serais bien niaiseux, ce n'est pas une personne la CVMQ, Je serais content, le petit investisseur serait fier et je serais fier que "mon association", que je fais sur le bras, y allant de ma poche, ne soit plus

nécessaire. Je m'occuperais de mes petites affaires et c'est tout. Comprenez-vous*? J'aimerais que la CVMQ se brasse un peu.

M. Bélisle: À B, votre seconde recommandation, c'est une formation plus sérieuse des intervenants. Je dois comprendre, si je relis ce que vous venez de nous dire, que vous aimeriez que la CVMQ s'implique dans la formation des courtiers et des gens du milieu.

M. Blanchard: Remarquez que j'ai toujours pensé que cela relevait d'elle.

M. Bélisle: Pardon?

M. Blanchard: J'ai toujours pensé que cela relevait de la CVMQ. Enfin, je ne sais pas si c'est une corporation fermée... le courtier...

M. Bélisle: Est-ce que vous ne pensez pas, M. Blanchard - une dernière question, M. le Président...

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Mille-Îles.

M. Bélisle: À la page 19, à l'avant-dernière ligne, on lit: "Demanderions-nous à General Motors de promouvoir l'APA?" Ce que vous souhaitez, dans le fond, c'est que la CVMQ devienne une sorte de protection du consommateur financier ou de denrées financières.

M. Blanchard: Remarquez que j'en serais très à l'aise...

M. Bélisle: Pardon?

M. Blanchard: J'en serais très heureux. Je pense qu'on ne peut pas être contre la vertu.

M. Bélisle: Vous iriez jusqu'à dire que la CVMQ devrait s'impliquer dans le mécanisme de la fixation du prix des actions et...

M. Blanchard: Le prix de l'action... Il me semble, je ne sais pas, cela doit former... Il doit y avoir une espèce de consensus que la CVMQ pourrait faire. Elle doit avoir une certaine autorité morale. C'est une institution, c'est un organisme... Écoutez, il ne faut pas attendre qu'il ait dix émissions de passées et d'avoir acheté les profits anticipés de deux ans. Les forces du marché, ce n'est pas vrai qu'elles jouent toujours. Parfois elles sont faussées. Il ne faut pas être naïf non plus. Je suis bien pour la libre entreprise, mais je ne suis pas pour la naïveté à ce point.

Le Président (M. Lemieux): Une dernière question, M. le député... M. le député de Mille-Iles, avez-vous terminé?

M. Bélisle: Oui.

Le Président (M. Lemieux): Une dernière question, M. le député de

Lafontaine, et nous allons entendre Systèmes financiers Iceberg.

M. Gobé: M. Blanchard, vous semblez prôner un renforcement des mesures, pas de coercition, mais de surveillance et d'intervention de la CVMQ. Ne vous interrogez-vous pas à savoir si peut-être, dans ce domaine plus particulier de la finance et de l'investissement, on ne devrait pas laisser faire le jeu de la qualité, de la compétition? Quand on voit que certains courtiers - comme vous dites - ne rappellent pas leurs clients ou font des erreurs, je peux vous assurer que dans n'importe quel autre commerce, quand je ne suis pas satisfait - je m'interroge à savoir pourquoi vous ne 3emblez pas aller dans cette voie - je change de commerce ou je change de marque de voiture, ou de machine à laver, ce que vous voudrez. Pourquoi est-ce qu'on ne peut pas appliquer cela... Vous savez, quand les gens investissent leur argent, j'ai l'impression qu'ils prennent un risque d'investissement et c'est à eux de faire un choix. On est quand même dans une société qu'on veut libéraliser, semble-t-il. On veut peut-être éviter plus de réglementation qu'on n'en a actuellement. Cela va un peu en contradition par rapport à ce qu'on veut avoir comme nouveau genre de société. Avez-vous quelque chose à dire là-dessus?

M. Blanchard: Je ne sais pas sur quoi vous vous basez pour dire qu'on veut un nouveau genre de société. Je n'ai pas l'impression qu'on veut avoir un nouveau genre de société.

M. Gobé: La déréglementation, quand même...

M. Blanchard: On est dans une société où on veut privatiser, si c'est ce que vous voulez dire, je suis bien d'accord avec cela, on ne peut pas être contre la vertu encore une fois. Mais acheter des valeurs mobilières, ce n'est pas acheter un frigo. Il y a une maudite différence. Si vous partez d'un courtier, que vous allez à l'autre et que vous avez la même maudite affaire, cela vous donne quoi? Vous n'avez quelque... Essayez-, le!

M. Gobé: Vous semblez présumer que les courtiers, l'un comme l'autre, ne sont pas bons.

M. Blanchard: Non, mais c'est vous...

M. Gobé: II doit y en avoir des bons et des pas bons, c'est comme dans tous les commerces.

M. Blanchard: Monsieur...

Le Président (M. Lemieux): Je ne voudrais pas, M. le député de Lafontaine, que cela devienne une polémique, s'il vous plaît.

M. Gobé: Non, mais...

M. Blanchard: Non. C'est la première fois que je le vois, je ne lui en veux pas.

Le Président (M. Lemieux): S'il vous plaît!

M. Gobé: On annonce des choses qui mettent, je pense, en lumière, la qualification - excusez-moi, monsieur -...

M. Blanchard: Oui, mais... Est-ce que vous savez qui est le petit investisseur?

M. Gobé:... de toute une profession, de tout un groupe de gens et on dit: L'un n'est pas bon, l'autre ne rappelle pas. On semble vouloir généraliser. Je ne crois pas que les courtiers, globalement, sont des gens qui sont incapables, qui ne rappellent pas leurs clients. Moi-même je fais affaire avec un courtier, je peux vous assurer qu'il me rappelle, et s'il ne me rappelle pas, je l'engueule. Il verra à me rappeler la prochaine fois sinon je vais changer.

Je crois qu'il ne faut pas essayer de dramatiser et de donner à la population ou aux médias une image qui a certainement des bonnes raisons d'être développée pour certaines erreurs qu'il y a, mais ce n'est pas la majorité et ce n'est pas généralisé. Ma question était la suivante: Pourquoi n'avez-vous pas plus de nuances dans votre mémoire? Ce n'est pas une critique envers vous, mais c'est parce qu'il n'est pas nuancé du tout.

M. Blanchard: Concernant les critiques, je suis habitué.

M. Gobé: C'est en bloc, c'est monolithique. On entre là-dedans et on donne de grands coups de sabre sur tout le monde.

M. Blanchard: Tout d'abord, si on me permet une mise au point, quand vous dites: Moi, j'appelle mon courtier, monsieur, avec tout le respect que je vous dois, vous êtes député, il y a une maudite différence avec le machiniste quand il appelle son courtier, premièrement. Il ne faut pas oublier qu'on parle des investisseurs ordinaires.

Vous dites: Chanqez de courtier. Vous lirez la fiche signalétique du petit investisseur. Je ne vous dis pas que tous les courtiers... Il y a de bons courtiers. Le petit investisseur ne peut pas magasiner comme vous dites, ce n'est pas si facile. Tu appelles, tu veux acheter 300 actions de Grilli, on ne te passe pas le vieux courtier chevronné, on te passe celui qui vient d'arriver, qui n'est pas tout le temps encadré. Ce n'est pas si facile que vous le dites. Entre un machiniste qui appelle, je n'ai rien contre les machinistes, remarquez mon père en était un... On oublie parfois qui on est quand on appelle. C'est évident, si vous appelez, qu'on vous répond et qu'on fait attention, c'est évident...

Le Président (M. Lemieux): Une dernière question, il ne reste que cinq minutes, au député de Jonquière. Nous apprécions, monsieur, le langage direct de votre mémoire, écoutez, on n'est pas là pour vous brimer dans la façon de dire les choses. Vous l'avez fait à votre manière et nous vous en remercions. Ce n'est pas que je ne partage pas l'avis de mon collègue, le député de Lafontaine, mais je comprends qu'il ait quand même certains points d'interrogation et certaines préoccupations eu égard à la teneur directe de vos écrits.

M. le député de Jonquière, vous avez la parole. (17 h 30)

M. Dufour: II y a une chose que je voulais ajouter par rapport au mémoire qui est devant nous. Vous dites, à la troisième ou à la quatrième ligne avant la fin: "Nous trouverions assez étrange de diluer son pouvoir au profit d'autres organismes" et là vous parlez de la CVMQ.

M. Blanchard: Oui, je me suis trompé là.

M. Dufour: Deux petites questions qui ne sont pas complexes: dans les recommandations, vous parlez de "standardisation et/ou rationalisation du fonctionnement des maisons de courtage". C'est quoi exactement ce que vous préconisez?

M. Blanchard: C'est un exemple.

M. Dufour: Quand on parle de rationalisation...

M. Blanchard: Le fonctionnement des maisons de courtage est assez complexe et il est différent d'une maison à l'autre. Faites l'essai, mais ne vous présentez pas comme étant un député: appelez un courtier et dites comme j'en donnais l'exemple que vous avez un REER autogéré et que vous voulez tout simplement faire passer des valeurs de votre portefeuille dans votre REER autogéré, vous

passez une heure au téléphone. Si c'est si simple que cela, comment se fait-il qu'il y en a quatre ou cinq employés qui ne savent pas quoi faire? Je veux dire: Tu demandes combien c'est pour une marge; tu peux appeler trois employés et ils vont te donner trois choses différentes. Je veux dire que ce sont des irritants, celai

M. Dufour: Oui, je comprends, mais je ne sais pas...

M. Blanchard: Bien qu'on rationalise pour que la façon de passer d'un REER autogéré à son portefeuille soit à peu près identique partout.

M. Dufour: Oui, mais l'investisseur qui appelle un courtier, vous ne pensez pas qu'il a une protection... En tout cas, il ne faut pas que vous donniez le problème à tout le monde. L'investisseur qui a besoin d'un renseignement, il appelle son courtier; si son courtier est un niaiseux, il n'appellera pas deux fois, je ne pense pas, moi, surtout l'épargnant de 1000 $ ou 2000 $, Celui qui a 25 000 $ ou 50 000 $ va peut-être oublier 1000 $ en chemin, mais celui qui n'a que 2000 $ à placer... Là, je trouve que si vous allez trop loin dans votre démarche, c'est que vous faites injure... Tout à l'heure, vous avez dit ou quelqu'un a dit: II ne faut pas faire injure à l'avocat ou aux gens qui font les prospectus.

Le Président (M. Lemieux): Surtout pas aux avocats, M. le député de Jonquière.

M. Dufour: Voilà, et là on fait presque injure à l'investisseur. Je ne sais pas si vous êtes allé trop loin.

M. Blanchard: Bien, faire injure à l'investisseur, il faudrait peut-être le demander aux investisseurs ou que je vous apporte les 200 lettres qu'on a, à peu près, pour que vous les lisiez et vous aurez peut-être des surprises.

M. Dufour: Peut-être un autre point. Quand vous parlez de haut de gamme au niveau de la macrotransaction, quand, dans a, c et e, vous parlez des dossiers, voulez-vous dire par là que la CVMQ n'a pas de documents suffisants, à point"?

M. Blanchard: Remarquez, encore là, la CVMQ... On a toujours dit: En Ontario, ils font cela, mais ici, ils ne font pas cela. On va suivre quelques-unes de ces règles. Nous aimerions voir un peu de leadership là-dedans, qu*on sache ce qu'elle en pense, ce qui arrive et ce qu'elle va faire. Est-ce que je peux dire juste un mot à M. le député de Lafontaine avec humour? Je pense que M. le député de Lafontaine a le sens de l'humour.

J'ai peut-être été un peu raide, mais je voulais que cela fasse un impact.

Le Président (M. Lemieux): Oui, je vous l'ai dit tout à l'heure

M. Blanchard: Non, non. J'espère qu'il a le sens de l'humour. M. le député de Lafontaine est resté ici pendant que je parlais, il n'est pas sorti.

Le Président (M. Lemieux): Merci.

M. Dufour: J'ai un point, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): Oui, M. le député de Jonquière, brièvement, s'il vous plaît!

M. Dufour: Votre association n'est pas connue pour le moment. J'aurais aimé vous poser une dernière question. Quand vous dites qu'il y a certaines informations qui sont en petits caractères en arrière d'un contrat, etc., est-ce que votre association, au point de vue de l'assurance, parce que les contrats sont écrits en petites lignes aussi, a l'intention un jour de s'attaquer à ces problèmes?

M. Blanchard: Pour commencer, on a assez de problèmes comme c'est là et on n'a pas de budget. On va commencer par régler les problèmes de ceux qui nous écrivent et des membres, et on ira voir pour l'assurance après, si cela marche.

M. Dufour: C'est parce qu'ils sont considérés comme des courtiers aussi.

M. Blanchard: Oui, mais, là, on parle des valeurs mobilières et immobilières.

M. Dufour: D'accord.

Le Président (M. Lemieux); Un instant, s'il vous plaît. Merci, M. Blanchard de votre participation à cette commission.

Nous allons entendre les Systèmes financiers Iceberg et leurs représentants. Nous avons une demi-heure environ. Nous allons, tout à l'heure, suspendre les travaux de la commission pour les reprendre à 20 heures et nous allons continuer avec vous à 20 heures. Vous ne serez pas pénalisés. Pouvez-vous, dans un premier temps, vous identifier, identifier l'organisme que vous représentez et nous dire depuis combien de temps il existe, faire un très bref historique?

Systèmes financiers Iceberg Inc.

M. Lassonde (Normand): À ma droite, Mme Nicole Dumouchel, qui est chargée pour notre compagnie du développement du réseau

international. Mon nom est Normand Lassonde, je suis président du conseil d'administration de la compagnie Systèmes financiers Iceberg. Notre société est une société d'informatique, spécialisée en valeurs mobilières. Notre clientèle se recrute principalement chez les conseillers financiers, les gérants de fonds, les courtiers, les trésoriers de compagnies aux États-Unis, au Canada et en Europe. On a également fait des travaux spécialisés pour la Bourse de Montréal, la Bourse de Vancouver, la Bourse de Milan, Nomura Securities au Japon, le Japan Fund et la Banque Royale du Canada.

Compte tenu du temps qui est un peu court, je vais sauter certains paragraphes. Alors, si vous pouvez lire en filigrane.

Le Président (M. Lemieux): Vous pouvez prendre le temps nécessaire, quitte à revenir à 20 heures, s'il le faut. Il y a des choses assez intéressantes dans le mémoire; alors, prenez le temps qu'il vous faut.

M. Lassonde: Nous sommes très conscients que la tâche des membres de cette commission parlementaire et, par conséquent, du législateur ne sera pas facile, puisque, dès que l'on traite de la CVMQ, c'est la loi du silence qui s'applique.

Dans leur mémoire, la Bourse de Montréal et l'ACCOVAM sont allées à la limite de ce qu'elles pouvaient dire sans s'exposer aux mesures de rétorsion de la CVMQ. Ces deux organismes ont conjointement affirmé que la Commission des valeurs mobilières fait de la réglementation économique hors de son mandat. La réplique du président de la CVMQ leur a vite fait comprendre qu'ils en avaient déjà trop dit. Les députés qui ont cherché à en savoir plus ont dû rester sur leur appétit. La porte s'est malheureusement refermée aussi vite qu'elle avait été ouverte.

Cette loi du silence découle directement des vastes pouvoirs discrétionnaires dont dispose la CVMQ. Cet organisme a le pouvoir de faire et de défaire, d'admettre ou de ne pas admettre, de permettre ou de ne pas permettre. Elle a également le pouvoir d'agir rétroactivement, ce qui lui confère un pouvoir absolu.

La décision de présenter aujourd'hui notre position et de demander que la CVMQ soit mise sous tutelle par le gouvernement nous expose à des mesures de rétorsion de la part de la CVMQ. Ces mesures peuvent être très dommageables à notre compagnie et à ses actionnaires. Nos responsabilités d'administrateurs nous ont fait très longuement hésiter avant de venir témoigner, sachant qu'en le faisant nous pourrions hypothéquer lourdement notre avenir, puisque, pour fonctionner comme conseillers financiers, gérants de fonds ou pour un éventuel financement public, nous devons obtenir les permis requis de la CVMQ.

Si nous avons finalement décidé de venir témoigner, c'est que nous croyons que la situation a atteint un niveau critique qui, cependant, peut être corrigé. Nous sommes persuadés également que le législateur désire vraiment protéger l'épargnant québécois, tout en assurant la croissance économique des entreprises de cette province.

Dans les deux prochains chapitres, nous allons traiter de l'état de la question pour en arriver à des recommandations que nous espérons constructives.

D'après nous, le Québec vit sur une espèce de bombe à retardement qui menace d'éclabousser les épargnants et l'industrie financière lorsqu'elle éclatera et ce, à cause de la négligence de la CVMQ.

Dans son mémoire déposé en commission parlementaire le 4 mars dernier, le président de la commission, M. Paul Guy, a reconnu explicitement que les plaintes des investisseurs mettaient des mois, sinon des années, à être entendues. M. Guy a également reconnu que la CVMQ n'exerce pratiquement pas de contrôle sur l'utilisation des fonds recueillis par les compagnies auprès du public.

D'autre part, on peut évaluer à environ 200 000 000 $ les sommes en trop qu'ont dû verser les actionnaires pour se procurer des titres REA à cause de la réglementation de la CVMQ. Ces sommes ont été versées à des bureaux de comptables et d'avocats pour la préparation de prospectus soumis à la commission.

Afin d'aider les membres de la commission parlementaire dans leur analyse du dossier, nous reprendrons, point par point, les énoncés ci-haut cités. Il existe quelques signes avant-coureurs qui laissent croire que, dans certains cas, l'argent recueilli dans le cadre d'une émission REA est utilisé à d'autres fins que celles prévues lors de l'émission publique.

Par exemple, une compagnie impliquée dans les vidéos interactifs a fait un brusque virage pour se lancer dans les emballages d'aluminium. Une compagnie manufacturière ayant fait une émission de près de 6 000 000 $ pour favoriser son expansion a tout simplement décidé de retarder l'expansion et de tirer des revenus d'intérêts de ce placement.

Une autre compagnie de portefeuilles a décidé de faire de même, si bien que, sur les 10 000 000 $ recueillis du public, prè3 de 9 000 000 $ n'ont pas été utilisés et servent à générer des revenus d'intérêts. Dans les deux derniers cas, les actions de ces compagnies ont chuté de moitié dans un marché généralement haussier.

Heureusement - et j'insiste sur ce paragraphe pour ne pas élever des épouvantails alors qu'il n'y en a pas - dans les cas cités, on ne peut associer ces

décisions corporatives à des manoeuvres frauduleuses. Je ne connais pas personnellement de manoeuvres frauduleuses dans les cas auxquels je fais référence ici, puisque les sommes d'argent recueillies lors de l'émission publique n'ont pas été dilapidées. Mais la question demeure que les investisseurs ont été jusqu'à un certain point leurrés sur l'utilisation des fonds et qu'il peut exister une relation directe entre la chute du prix des actions et le fait que l'argent recueilli n'ait pas été utilisé aux fins prévues.

Or, il nous semble que c'est précisément le rôle de la Commission des valeurs mobilières de protéger les épargnants en s'assurant que les fonds recueillis auprès du public servent aux fins annoncées par les dirigeants de la compagnie pour les inciter à investir. En fait, ce paragraphe est le noeud de notre mémoire et de nos recommandations.

À la CVMQ, il n'existe aucun mécanisme de vérification systématique de l'utilisation des fonds après une émission publique. Ce n'est que lorsqu'il y a dépôt d'une plainte que la commission enquête. Très souvent, il est peut-être trop tard pour agir. Ce problème est littéralement une bombe à retardement. Ce n'est qu'une question de semaines ou de mois avant que les investisseurs ne soient placés devant des faits accomplis plus graves. D'ailleurs, face à l'incurie de la commission, une association privée de défense des petits épargnants, ayant son siège social à Laval, vient d'être créée. Le Protecteur du citoyen a également reçu plusieurs plaintes sur les activités de la commission.

L'information financière que reçoit un investisseur est, à notre avis, un élément majeur pour sa protection puisque c'est à partir de ces informations qu'il peut réagir dans ses décisions d'acheter ou de céder ses actions. La négligence de la commission se reflète aussi à ce niveau. Une fois leurs placements faits, les investisseurs, dans une proportion d'environ 70 %, ne sont plus informés des activités de la compagnie dont ils sont devenus actionnaires. Â titre d'organisme de contrôle, la CVMQ n'a rien fait depuis des années pour résoudre ce problème.

La CVMQ se libère de ses obligations à cet égard en prétendant que ce sont les journaux qui doivent informer les investisseurs. Or, les journaux, financiers ou autres, n'ont jamais reçu de mandat gouvernemental pour assumer le rôle de la CVMQ dans ce domaine. Les compagnies ne sont pas à blâmer pour cette situation puisque, régulièrement, elles communiquent leurs résultats trimestriels, semestriels ou annuels. Mais ces rapports ne se rendent tout simplement pas aux actionnaires puisque, dans 70 % des cas, les certificats d'actions ne sont pas inscrits au nom de l'actionnaire, mais au nom de ta maison de courtage où l'actionnaire fait affaire.

J'ajouterai seulement une parenthèse ici. C'est que ce problème n'est pas limité au Québec. Il y a des tentatives qui ont été faites en Ontario et en Colombie britannique pour essayer de résoudre ce problème. Il se présente au Québec, mais il n'est pas unique au Québec.

En résumé, nous affirmons que la négligence de la CVMQ sur le plan du contrôle de l'utilisation de3 fonds et sa négligence à s'assurer que les actionnaires reçoivent les informations financières auxquelles ils ont droit constituent une dérogation grave au mandat que la CVMQ a reçu du gouvernement pour la protection du public.

On s'est beaucoup interrogé, au cours des derniers mois, sur le niveau des prix des émissions publiques faites dans le cadre du REA. Ce que l'on sait moins, c'est que la CVMQ est directement responsable des coûts attibuables à un financement public, coûts qui se répercutent sur le prix des actions. Du fait de son rôle de plaque tournante dans les mécanismes de financement public au Québec, nous estimons que la commission est directement responsable de la réorientation de 200 000 000 $ recueillis du public qui auraient dû grossir le capital des compagnies émettrices. Ces fonds ont, en fait, servi à payer des honoraires professionnels.

À cause de l'attitude de la commission, les coûts de financement public au Québec sont prohibitifs. Ces coûts varient généralement entre 100 000 $ et 400 000 $. Si nous établissons la moyenne à 250 000 $ et l'appliquons aux 800 émissions que la Commission des valeurs mobilières dit avoir supervisées, nous en arrivons à un coût de 200 000 000 $. Il nous faut insister ici sur le fait que, sur les 200 000 000 $, pas un seul dollar n'a été utilisé pour l'expansion ou la modernisation des entreprises. Avec ces 200 000 000 $, les actionnaires frustrés de cette somme auraient pu participer au financement et devenir actionnaires de 40 nouvelles compagnies ayant réalisé une nouvelle émission de 5 000 000 $ chacune.

On pourrait vite être tenté de pointer du doigt les bureaux d'avocats ou de comptables et de les tenir responsables de ces coûts exorbitants en disant qu'ils ont pesé un peu fort sur le crayon. Mais, au contraire, tous ceux qui participent au lancement d'une émission publique, les administrateurs de compagnies, les comptables, les courtiers et les avocats, vous diront que c'est la réglementation étouffante et tâtillonne de la CVMQ qui fait monter en flèche les honoraires professionnels.

(17 h 45)

Pour illustrer jusqu'à quel point la réglementation est insidieuse, on note qu'en moyenne les éléments d'informations

financières entrant dans la composition d'un prospectus doivent être revus et corrigés de sept à dix fois entre leur conception originale, le "lay-out", et le dépôt du prospectus final.

Nous soutenons donc que la commission manque à son mandat de protection du public quand, à cause de sa réglementation, elle oriente vers les cabinets de comptables et d'avocats des sommes qui, normalement, auraient permis au public investisseur d'obtenir une plus grande tranche du capital-actions des compagnies émettrices.

Nous avons démontré que la protection de l'épargnant n'était pas le pivot central de l'activité de la Commission des valeurs mobilières. La question qui se pose alors est la suivante: Avec un budget annuel de 5 000 000 $ et un personnel de 85 employés, que fait la Commission des valeurs mobilières du Québec?

Il semble que le cheval de bataille de la Commission des valeurs mobilières soit la réglementation économique. Il s'agit là d'une prérogative du législateur que s'est appropriée la Commission des valeurs mobilières. Quant à savoir si la Commission des valeurs mobilières est réellement bien consciente du dépassement de son mandat, la réponse du président de l'organisme est tout à fait claire et en dit long sur la perception qu'il a de son rôle. Alors qu'il était interrogé par un député lors de sa comparution en commission parlementaire le 4 mars dernier, M. Paul Guy a déclaré, en citant un auteur américain, que la CVMQ devait avoir une influence omniprésente. Bref, c'est l'État dans l'État.

La CVMQ agit comme un frein à l'expansion économique du Québec alors que tous les agents économiques - on pourrait citer le gouvernement, via le ministère de l'Industrie et du Commerce, les entreprises et même les syndicats, par exemple, le Fonds de solidarité FTQ - rivalisent d'ingéniosité pour faire avancer le Québec dans ce domaine. Le capital est le nerf de la guerre dans l'industrie et le commerce. Or, c'est la Commission des valeurs mobilières du Québec qui a la main haute sur la formation du capital puisqu'elle exerce un monopole sur cette question.

L'influence pernicieuse de la commission est facilement mesurable. Jadis capitale financière du Canada, Montréal a succombé aux coups de butoir successifs de la commission au point où, il y a quelques années à peine, la Bourse de Montréal ne comptait plus que pour 10 % du volume des transactions canadiennes. On se demandait même, à l'époque, si la Bourse était pour survivre comme entité autonome. La remontée de la Bourse de Montréal, qui enregistre aujourd'hui environ 20 % des transactions canadiennes, est due, dans l'ordre, à M. Jacques Parizeau, parrain de

REA, à M. Pierre Lortie, ancien président de la Bourse de Montréal, à M. André Desaulniers, président de McNeil Mantha, et à M. Pierre Brunet, président de Lévesque, Beaubien. Ce sont leurs efforts conjugués, surtout à l'origine du REA, qui font qu'aujourd'hui environ 11 % des Québécois possèdent des actions et participent à l'essort économique du Québec. Or, ce développement s'est fait malgré l'opposition farouche de la Commission des valeurs mobilières du Québec.

Ces batailles ont trouvé leur apothéose quand la CVMQ s'est opposée à la première émission publique de Cascades en 1982. Cette opposition a duré pendant des mois. Il aura fallu l'intervention massive de plusieurs personnalités pour faire enfin comprendre à la CVMQ que la réglementation économique n'est pas de son ressort.

Deuxième facteur mesurable, il existe aujourd'hui moins de maisons de courtage indépendantes qu'il n'y en avait il y a dix ans alors qu'il y a 225 000 Québécois de plus qui possèdent des actions. Au fil des ans, la commission a mis sur pied une régle-mentation tellement massive qu'il devient presque impossible aujourd'hui de démarrer une maison de courtage. Ceux qui ont réussi à se faufiler entre les mailles de la commission sont au nombre de cinq: de Leeuw et Associés, Deragon & Langlois, Richard Drapeau, Disnat, qui a été rachetée par McNeil Mantha, et Soficorp. On parle de cinq maisons sur une période de huit, dix ans.

Un autre exemple de réglementation économique.

Pour assurer sa prépondérance sur le marché des options, la Bourse de Montréal avait salué avec empressement la mise sur pied d'un fonds d'options piloté par M. Philippe Barette, une autorité internationalement reconnue dans ce domaine. À cause des délais et de la réglementation de la CVMQ, ce fonds n'est jamais devenu opérationnel. Soit dit en passant, les services de M. Barette ont été retenus par la Rourse de Sydney en Australie pour aller implanter un système d'options là-bas.

Or, ce qui fait précisément la force des marchés américains, ce sont, justement, les "boutiques" spécialisées qui développent un haut degré d'expertise dans une niche particulière. Au Québec, la Commission des valeurs mobilières bloque systématiquement l'éclosion de telles boutiques.

On aura un autre exemple de réglementation chez les conseillers financiers. Une réglementation tatillonne empoche l'émergence de firmes de conseillers indépendants. Au sein de cette commission parlementaire formée de députés, donc de gens avertis, qui peut nommer dix conseillers financiers connus à part Bolton, Tremblay, Jariskowsky et Montreal Investment Manage-

ment? Je n'ai pas mis le nom de Timmins pour vous donner la chance de le rajouter. Enfin, pour signaler jusqu'à quel point l'omniprésence de la CVMQ peut se faire sentir, mentionnons que, pour gérer le fonds de pension d'Alcan, un employé d'Alcan nommé à ce poste par la compagnie a dû obtenir un permis de la commission. Récemment, avant de mettre sur pied son service d'achat et de vente d'entreprises, la firme de comptables RCMP a dû se plier aux exigences de la commission et obtenir un permis.

Bien qu'elle dispose déjà d'un arsenal complet de règlements, la commission n'hésite nullement à imposer à des compagnies québécoises des lois étrangères. C'est ainsi que, dans sa décision no 8128, la commission a soumis deux compagnies québécoises, dont notre compagnie, à des lois américaines. Qu'on en juge. Ce qui suit est un extrait de la décision no B128: "Le procureur de la direction de l'encadrement du marché a cherché à établir si les services fournis par les deux sociétés sont susceptibles d'être sous l'emprise de la loi en se tournant vers l'interprétation des textes et autorités en regard de la situation à l'étude. Puisque le droit canadien des valeurs mobilières ne semble pas fournir d'éclaircissements à cet effet, il a trouvé dans le droit et les autorités américaines quelques exemples précis et pertinents. " Je ferai remarquer que cette décision a été prise non pas par les fonctionnaires de la Commission des valeurs mobilières, mais par les commissaires de la Commission des valeurs mobilières. Nous pensons que c'est à la lumière de cas semblables que doivent Être jugés les abus de la commission dans l'utilisation de ces pouvoirs discrétionnaires.

L'intervention de la commission peut revêtir un caractère encore plus dramatique quand elle heurte de plein fouet les politiques mises de l'avant par le législateur, qui s'adressent à l'ensemble du secteur industriel et commercial du Québec.

L'intervention de la commission dans les cas de sociétés de placements dans l'entreprise québécoise, les SPEQ, est un cas frappant. C'est un cas typique de réglementation économique édictée à ['encontre des décisions prises par le Parlement. Rappelons brièvement les faits. Pour régler le problème de la sous-capitalisation des entreprises québécoises et à la suite des recommandations de la commission Saucier, le Parlement, dans son discours sur le budget d'avril 1985, annonçait la création de sociétés de placements dans l'entreprise québécoise. Le gouvernement décidait alors de confier l'administration de cette loi à la Société de développement industriel du Québec. La CVMQ a réagi violemment à cette brèche créée dans son monopole. Elle organisa un lobbying intense auprès des fonctionnaires et finalement obtint une juridiction partagée avec la SDI sur les SPEQ.

Mais il semble que cette victoire n'était pas suffisante. Au début de 1986, la SDI montait un kiosque au Salon de l'épargne-placement de Place Bonaventure à Montréal, afin de promouvoir des programmes comme celui des SPEQ. La CVMQ intervint alors pour faire supprimer des tablettes du kiosque de la SDI des documents sur les SPEQ qu'elle jugeait trop publicitaires. La SDI en fut réduite à ne distribuer que le texte de loi sur les SPEQ.

La CVMQ ne s'arrêta pas là. En décembre 1985, la compagnie Volcano décidait de faire une émission publique en se prévalant des dispositions de la loi sur les SPEQ. C'est un contingent d'une dizaine de personnes qui se présenta devant la Commission des valeurs mobilières à Montréal. Ce contingent comprenait les officiers de la compagnie et plusieurs avocats. La commission refusa carrément le projet et força Volcano à s'orienter vers le REA. Une autre compagnie de portefeuilles se buta à la commission après avoir dépensé en vain 105 000 $ pour faire un financement public en vertu des dispositions de la loi sur les SPEQ.

Pour camoufler son intervention, la commission n'a jamais fait connaître publiquement sa position concernant les SPEQ, même si à plusieurs reprises les journaux ont demandé de la faire connaître. Cependant, plus d'un an et demi après la création des SPEQ, il n'en existe aucune qui soit publique et cotée en Bourse.

Les sociétés de placements dans l'entreprise québécoise ont été créées pour faciliter la capitalisation des PME québécoises. Sur des milliers d'entreprises québécoises, moins de 300 ont utilisé le cadre d'une SPEQ pour faire un financement. Parce qu'ils n'ont pas accès au marché secondaire qui est fermé par l'intervention de la commission, les actionnaires de ces SPEQ n'ont aucun moyen de transiger publiquement leurs actions. Nous croyons que ces entreprises québécoises devraient être libres d'accéder au marché public en choisissant elles-mêmes le cadre juridique et fiscal mis à leur disposition par le gouvernement, qu'il s'agisse des REA, des SPEQ, des sociétés en commandite ou autres.

À notre avis, il n'est pas du ressort de la Commission des valeurs mobilières de faire de la réglementation économique en s'opposant aux véhicules fiscaux créés par le gouvernement pour un financement public.

Nous sommes maintenant arrivés à la page 20. Nous essaierons de ne pas être uniquement négatifs et d'apporter des éléments de solution ou de donner des pistes au législateur. Nous avons formulé brièvement nos recommandations. Ce que nous proposons

serait une chirurgie majeure au rôle de la CVMQ. D'après nous, il faut non seulement enlever à la CVMQ tout pouvoir décisionnel, mais également tout pouvoir de réglementation. Son rôle devrait se restreindre uniquement aux enquêtes.

La formation du capital. En vertu du principe que les fraudes ne se produisent pas lors de la formation du capital, mais lors de l'utilisation des fonds, nous sommes d'avis que la formation du capital devrait être laissée à elle-même, sans surveillance. Aujourd'hui, les forces du marché sont telles que la concurrence se charge elle-même de la répartition de l'épargne publique. La formation du capital se ferait d'autant plus rapidement et efficacement qu'elle ne serait pas réglementée.

D'ores et déjà, nous pouvons mesurer d'une façon très précise les bienfaits d'une déréglementation dans le secteur de la formation du capital. Il nous suffit de regarder l'évolution d'un secteur non réglementé par la Commission des valeurs mobilières, soit celui des coopératives financières et industrielles. Le Mouvement Desjardins avec ses 30 000 000 $ d'actifs, La Laurentienne, Rona, Agropur et la Coopérative fédérée ne sont que quelques exemples de groupes privés mus strictement par l'épargne québécoise qui ont connu une croissance phénoménale. Par exemple, si Alphonse Desjardins devait aujourd'hui faire face à la Commission des valeurs mobilières, il lui en coûterait entre 300 000 $ et 400 000 $ avant de pouvoir accepter son premier dépôt de 0, 10 $.

Si la formation du capital doit être laissée libre, l'utilisation des fonds, par contre, doit être surveillée et, à notre avis, surveillée très étroitement. C'est précisément à ce niveau que la CVMQ pourrait le mieux remplir son rôle de chien de garde de l'épargnant. Les fraudes ou les tentatives de fraude se produisent par l'utilisation non conforme des fonds recueillis auprès du public.

Au même titre qu'un corps de police n'a pas l'autorité d'interpréter les lois, ce qui est l'apanage des tribunaux, la CVMQ devrait avoir l'unique mandat de vérifier si l'utilisation des fonds est faite en conformité avec les déclarations initiales des émetteurs telles que décrites dans le prospectus déposé. S'il s'avère que l'utilisation des fonds n'est pas conforme au prospectus, la commission devrait alors en saisir la Cour supérieure qui déciderait s'il y a matière à poursuite contre les administrateurs de la compagnie fautive. Ce pouvoir, à notre avis, serait insuffisant. Ce pouvoir d'enquête devrait être assorti également de mesures préventives établies par le gouvernement, mesures qui auraient non seulement l'immense avantage de décourager les fraudeurs, mais qui limiteraient très largement les dégâts, si jamais une opération douteuse était tentée.

Ces mesures préventives pourraient prendre la forme d'une fiducie temporaire qui réglerait les conditions de l'utilisation des fonds recueillis. Cette fiducie demeurerait inopérante tant que l'utilisation des fonds s'avère conforme au prospectus. Par contre, elle pourrait constituer un blocage de fonds si l'utilisation de ces derniers est faite de façon non conforme. Evidemment, c'est un mécanisme neuf à créer. On peut s'inspirer de deux mécanismes qui sont déjà fort bien rodés avant de mettre en vigueur une telle fiducie. Par exemple, depuis plusieurs années, le gouvernement permet des déductions fiscales aux investisseurs qui financent des projets d'exploration minière. Cependant, les travaux d'exploration doivent être complétés ou au moins déjà démarrés pour que l'investisseur ait droit à sa déduction fiscale. En clair, cela signifie que les fonds levés lors d'une émission publique doivent être pleinement utilisés pour les fins auxquelles ils ont été levés, sinon les déductions fiscales ne sont pas accordées.

Dans le secteur immobilier, il existe une pratique qui a pour effet de protéger l'institution financière qui a prêté sur hypothèque. Les sommes d'argent servant à la construction d'une résidence ne sont déboursées qu'au moment où les travaux ont bel et bien eu lieu. Généralement, l'institution financière déboursera 25 % du capital lorsque les fondations d'une maison sont en place, 25 % lorsque les murs sont levés, 25 % lorsque les panneaux de gypse sont installés et 25 % lorsque l'ensemble est complété.

En s'inspirant de ces deux exemples, le législateur pourrait en quelque sorte exiger que les compagnies émettrices se conforment à l'utilisation des fonds telle que décrite au prospectus. Si, pour une raison ou pour une autre, une compagnie ne pouvait utiliser les fonds tel que prévu, la fiducie pourrait requérir qu'un nouveau projet ou une nouvelle utilisation des fonds soit soumise à l'approbation des actionnaires avant de libérer ces fonds.

Le Président (M. Lemieux): Nous devons terminer à 18 heures, mais, avec le consentement, on pourrait continuer deux minutes. Est-ce que c'est possible de continuer deux minutes, M. le député de Jonquière?

M. Dufour: On pourrait compléter.

Le Président (M. Lemieux): Et nous reviendrons à 20 heures pour la période de questions. Est-ce que vous le permettez, M. le député de Lafontaine? Cela va?

M. Gobé: Cela va aller.

Le Président (M. Lemieux): Consentement, vous pouvez continuer. Vous pouvez passer immédiatement au prospectus standard.

M. Lassonde: Je vais passer au prospectus standard. C'est surtout par le biais du prospectus que la commission fait de la réglementation économique et contrôle la formation du capital parce que, finalement, c'est la commission qui a un droit de vie ou de mort sur chacun des prospectus qui lui sont soumis. Or, il appert de plusieurs témoignages que les investisseurs ne lisent pas le prospectus avant de faire un placement. Donc, le rôle du prospectus comme outil d'information est marginal. Il peut, par contre, être vu comme un contrat entre la compagnie émettrice et l'investisseur quant à l'utilisation future des fonds. Si tel est le cas, le coeur du prospectus devrait être consacré à l'utilisation future des fonds.

Dans un tel contexte, un prospectus standard est possible. Ce prospectus standard a deux avantages: il met fin aux pouvoirs discrétionnaires disproportionnés de la commission et il réduirait peut-être de 50 % à 70 % les honoraires de comptables et d'avocats. Visuellement, le prospectus standard pourrait ressembler à une feuille de déclaration d'impôt, à un contrat d'assurance ou à un contrat hypothécaire standard.

Enfin, le recours à la tutelle s'impose lorsque le gouvernement découvre qu'un de ses organismes déborde le cadre de son activité prescrite, s'arroge des pouvoirs qu'il n'a pas ou applique mal les lois dont il doit assurer l'exercice ou met en danger l'ordre public. C'est précisément le cas de la Commission des valeurs mobilières qui s'acquitte mal de son mandat de veiller à la protection des épargnants. Dans un avenir immédiat et sans attendre la nouvelle loi de 1988, nous suggérons que le gouvernement réaffecte au moins 65 % du personnel de la commission aux enquêtes relatives à l'utilisation des fonds recueillis auprès du public. Merci.

Le Président (M. Lemieux): Nous vous remercions pour le mémoire que vous nous avez soumis, pour votre présence, pour l'information que vous nous avez donnée et pour l'intérêt que vous manifestez au mandat de cette commission relativement aux orientations et aux activités de gestion de la Commission des valeurs mobilières du Québec. Nous allons suspendre et nous reviendrons à 20 heures pour la période de questions relativement à votre mémoire.

Nous suspendons les travaux de cette commission jusqu'à 20 heures ce soir.

(Suspension de la séance à 18 h 3)

(Reprise à 20 h 14)

Le Président (M. Lemieux): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission du budget et de l'administration reprend ses travaux. Nous avions écouté la présentation du mémoire présenté par Systèmes financiers Iceberg Inc. Est-ce qu'il y a des membres de cette commission qui veulent intervenir? Dans un premier temps, préalablement, M. le député de Lafontaine, je tiens à m'excuser de mon retard. J'étais en compagnie de M. Saint-Pierre, qui est le consultant de la commission. Les discussions ont été un peu longues et orageuses, si je puis dire, et très enrichissantes. Alors, c'est la raison pour laquelle je suis en retard et je m'en excuse. Combien, M. le député de Jonquière, je l'ignore.

Est-ce qu'il y a des membres de cette commission qui veulent intervenir relativement au mémoire présenté par Systèmes financiers Iceberg Inc. ? M. le député de Lafontaine.

M. Gobé: M. Lassonde, j'ai pris connaissance avec grand intérêt de votre mémoire, bien qu'à l'occasion j'aie eu quelques sursauts. Il semble y avoir... Si j'ai mal compris, vous me le direz. Peut-être que je n'ai pas perçu exactement toutes les nuances. Il y a des contradictions à certains moments dans ce que vous présentez. Vous reprochez à la CVMQ un certain laxisme quant à son application des règlements qu'il y a actuellement. Vous lui reprochez de contrôler la concurrence économique. À un moment donné, vous dites; Mais, il n'y en a pas assez. Dans certaines phrases, à certains endroits, on dirait que vous semblez reprocher à la CVMQ de ne pas aller plus loin encore. J'aurais une autre question pratique, mais que vouliez-vous... Je ne comprends pas. D'un côté, on déréglemente et, comme vous le proposez à la fin, la CVMQ devient un chien de garde juste pour surveiller, un vérificateur au-dessus de tous les organismes. D'après vous, est-ce qu'elle est là pour mettre des réglementations et des lois? Il semble qu'il n'y en ait pas assez dans certains secteurs.

M. Lassonde: En fait, à la page 20, qui est une de nos principales...

Le Président (M. Lemieux): Peut-être pour reprendre un peu l'argumentation du député de Lafontaine, effectivement, lorsqu'il parle de contradictions, si vous regardez la page 10 de votre mémoire, vous dites dan3 la "Réglementation étouffante": "Au contraire, tous ceux qui participent au lance- ment d'une émission publique, administrateurs -de compagnies, comptables, courtiers et avocats vous diront que c'est la régie-

mentation étouffante et tâtillonne de la CVMQ qui fait monter en flèche Ies honoraires professionnels. " Si on regarde à la page 6 de votre mémoire, vous dites qu'à la Commission des valeurs mobilières, il n'existe aucun mécanisme de vérification systématique de l'utilisation des fonds après une émission publique. Un peu plus haut, vous dites aussi: "Or, c'est précisément le rôle de la CVMQ de protéger les épargnants en s1 assurant que les fonds recueillis auprès du public servent aux fins annoncées par les dirigeants de la compagnie pour les inciter à investir. " Il semblerait qu'il y ait certaines contradictions à ce niveau-là. Est-ce qu'effectivement, vous trouvez que la Commission des valeurs mobilières a une réglementation trop étouffante ou considérez-vous que la Commission des valeurs mobilières n'est pas suffisamment bien armée pour jouer son rôle relativement à la protection du petit épargnant? C'est un peu dans le sens du député de Lafontaine, je pense. Est-ce que c'est exact, M. le député de Lafontaine?

M. Gobé: Oui. Les grandes lignes, M. le Président.

M. Lassonde: Voici, à la page 20 qui est une de nos principales recommandations, notre position est très très claire. C'est d'enlever tout pouvoir décisionnel et de réglementation à la Commission des valeurs mobilières. Donc, on ne veut pas que la commission... On pense que les lois devraient être approuvées par le Parlement et par les parlementaires et que, dorénavant, ce ne soit plus du ressort de la Commission des valeurs mobilières. On suggère aussi de lui enlever toute interprétation de ces lois qui pourrait être faite par les tribunaux. Donc, notre position sur la Commission des valeurs mobilières est très très claire. Qu'on lui enlève tout pouvoir décisionnel et qu'on lui enlève tout pouvoir de réglementation. Donc, il ne lui reste que les pouvoirs d'enquête.

Concernant la réglementation actuelle de la Commission des valeurs mobilières pour faire référence à la page 6 où on dit que c'est une réglementation étouffante, c'est que toute la réglementation actuelle de la Commission des valeurs mobilières vise à fermer l'entrée, jusqu'à un certain point, de nouvelles compagnies cotées en bourse. Donc, cette réglementation est très étouffante. Cela prend des prospectus énormes. Il faut les reprendre de sept à dix fois. Il y a des modifications constantes. Donc, toute l'artillerie lourde, si vous voulez, de la commission est dirigée sur les prospectus. Ce que nous proposons, c'est de diriger cette artillerie une fois que la formation du capital a été faite, et non pas avant.

Je vais vous donner une statistique qui donne un portrait global et assez fiable de la situation. À la Bourse de Vancouver, il y a 1600 titres cotés. À la Bourse de Toronto, il y en a 3000. À la Bourse de Montréal, il y en a à peu près 1200. Des compagnies strictement québécoises à la Bourse de Montréal, il y en a à peu près de 500 à 550. Et la base industrielle du Québec et de l'Ontario concernant les PME est quasi identique. Il y a plus de grosses compagnies en Ontario, mais la base de PME est identique. Or, comment se fait-il qu'au Québec il n'y ait que 500 ou 550 compagnies cotées en bourse contre 300 à Toronto et 1600 à Vancouver? Ce qu'on dit, c'est que la commission, par sa réglementation économique, ferme la porte à des entreprises qui pourraient accéder au marché boursier. Donc, il y a une élimination qui se fait.

M. Gobé: Est-ce que vous ne croyez pas plutôt que la différence entre les Bourses de Vancouver, Toronto, Montréal s'explique peut-être par une histoire différente de l'entreprise, une structure différente? En d'autres termes, je vois mal comment l'action de la commission pourrait limiter l'accès des entreprises ou la volonté d'aller en bourse. Je me demande si ce n'est pas plutôt à cause, justement, d'un héritage, d'une tradition différente de l'entreprise québécoise.

M. Lassonde: Non. Il y avait une tradition solidement implantée au Québec d'entreprises qui allaient à la Bourse, particulièrement dans le domaine minier. Il était un moment donné où la Bourse de Montréal avait sa juste part du marché, il y avait une tradition très bien établie. Il y a eu des scandales miniers. La Commission des valeurs mobilières est intervenue. Au lieu d'intervenir à la pièce, elle a fait le grand ménage, si bien que, pendant des années, il n'y a pas eu de titres miniers ici, sauf ceux de l'Ontario ou de la Colombie britannique qui venaient faire de l'exploration au Québec. Alors, on pense que le bassin de petites et de moyennes entreprises est suffisamment grand ici pour avoir une Bourse qui a peut-être entre 7500 et 3000 titres cotés. Si on prend le secteur de l'agriculture qui est quand même important ici, il n'y a aucune société d'agriculture cotée à la Bourse. Il y a plusieurs secteurs dans cela où on a une présence à peu près négligeable. Si on prend dans les techniques biologiques, la seule compagnie - et c'est tout récent - est l'Institut Armand-Frappier. On a des autorités mondiales ici à Montréal dans le domaine de la biotechnologie, alors que ces entreprises poussent comme des champignons sur le marché américain, font des financements publics et maintiennent leur leadership. Ici, on l'a fait par expérience: Aller essayer de faire une émission publique sur un projet, et cela ne fonctionne pas au

Québec. Si vous voulez exploiter des serres en hiver, chauffées à l'électricité, c'est un projet, cela ne passera jamais. Alors, tout ce qui est projet ici est systématiquement bloqué. C'est ce qui fait qu'on s'étonne beaucoup qu'il y ait beaucoup de REA. Â mon avis on est encore très loin du potentiel des entreprises québécoises ici.

M. Gobé: Encore là le problème d'un fonds de capital de risque qu'il n'y a pas et qu'on devrait avoir pour ce genre de projet; est-ce qu'il appartient au marché de financer ces projets?

M. Lassonde: Ce qu'on pense, c'est que la Bourse ou le fait d'être coté donne une visibilité à l'entreprise, donne une visibilité aux actionnaires qui voient ce qui se passe. Il y a au moins un prix. Alors, je pense que en tout cas la commission pourrait répondre à cela - la commission a peur des manipulations boursières de petits stocks, de petites compagnies. On peut prendre le cas récent de la Bourse de Londres où la Bourse, sans demander l'autorisation des compagnies, va les lister. Donc, à la Bourse de Londres, on a pris exactement la position contraire, c'est de dire: On veut afficher le prix des actions de compagnies alors qu'ici on fait exactement le contraire, on préfère avoir un marché assez informe, assez dilué, un marché privé, ce qui explique le cas des SPEQ dont je parlais.

M. Gobé: J'aurais un commentaire à faire.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Lafontaine. Brièvement et, s'il vous plaît, une réponse brève.

M. Gobé: Dans votre mémoire, vous mentionnez une somme d'à peu près 20Q 000 000 $ qui serait la part des frais d'honoraires perçus par les comptables et les avocats lors de la préparation de prospectus. Vous semblez vous élever un peu contre ce fait et vous arrivez à la fin avec un prospectus standard. Je m'interroge sur une chose, à savoir pourquoi vous voulez enlever le comptable. Je me dis: Si je veux acheter des actions, le prospectus, je ne le lis peut-être pas complètement, peut-être rapidement, mais au moins je sais qu'il a été préparé par un comptable et on sait que, dans notre tradition d'affaires au Québec, les comptables sont les seules personnes autorisées ou qui sont généralement en autorité pour émettre des opinions sur les états financiers d'une entreprise pour plusieurs années. Je trouve que dans votre but, dans votre intention - je n'en doute pas - de protéger le public, on ouvrirait là une brèche, et c'est pareil dans le cas des avocats, il faut préparer les pro forma. Vous parlez des réglementations qu'il faut suivre, que la CVMQ devrait faire suivre...

Le Président (M. Lemieux): Question brève, M. le député de Lafontaine.

M. Gobé: Je termine, M. le Président. Excusez-moi, mais je trouve cela important.

Le Président (M. Lemieux): Je n'en doute pas.

M. Gobé: Si on ne met pas d'avocats dans le dossier ou peu, moi comme consommateur, comme petit épargnant, petit investisseur qui veux mettre mes 2000 $ ou 3000 $ par année - il faut dire que député, on n'est pas riche - je m'inquiète, je vous dis qu'il n'y a pas d'avocat qui a vérifié.

Le Président (M. Lemieux):... à dire, M. le député de Lafontaine.

M. Gobé: Excusez-moi, c'est une réflexion personnelle. Il n'y a pas de comptables agréés, l'Ordre des comptables n'a pas vérifié cela, je suis un peu inquiet. Je ne peux pas souscrire à cela, à moins que vous n'ayez des...

Le Président (M. Lemieux): Brièvement, s'il vous plaît.

M. Gobé: Qu'est-ce qui vous amène à faire cela, réellement?

M. Lassondes Ce n'est pas du tout le sens de la remarque. Il n'est pas question d'enlever les avocats ou les comptables de ce dossier; il est question de réduire les coûts. Alors, où intervient la Commission des valeurs mobilières? C'est partout à l'intérieur du prospectus. Ce que nous suggérons, nous: par exemple, dans un prospectus standard, il pourrait y avoir 20 façons d'évaluer une compagnie: la valeur aux livres, les bénéfices par action, etc. II y a peut-être 20 moyens comptables ou mathématiques d'évaluer la santé financière d'une compagnie. Alors, qu'on mette ces 20 et qu'on rajoute les chiffres.

M. Gobé: Les compagnies ne sont pas toutes pareilles. Vous savez comme moi que chaque entreprise a son histoire, ses fluctuations. Standardiser les... ces choses-là.

Le Président (M. Lemieux): S'il vous platt, M. le député de Lafontaine. Je pense que sans cela, cela va...

M. Gobé: D'accord, M. le Président. Je vous remercie. Excusez-moi. Mon cher monsieur, j'aurais aimé continuer, mais malheureusement...

Le Président (M. Lemieux): C'est parce que le député de Jonquière m'a posé une question et j'en aurais une petite. Il y a aussi M. le député de Mille-Îles qui m'a posé une question. J'en aurais une petite brève. C'est qu'à la page 5 de votre mémoire vous dites que "l'argent recueilli dans le cadre d'une émission REA est utilisé à d'autres fins que celles prévues lors de l'émission publique". Je me souviens de la question du député de Montmorency que l'on retrouve à la page R-1943, à la page 1 des épreuves, et qui est la suivante: "Qu'est-ce que la commission fait ou pourrait faire pour s'assurer que, dans la continuité des choses, ce qui s'est avéré exact dans le prospectus ou dans la présentation demeure?" On avait une réponse du président de la Commission des valeurs mobilières à l'époque qui nous disait ceci: "De ce côté-là, il n'y a pas de doute que la commission pourrait faire beaucoup. On pourrait facilement examiner, à chaque fois qu'il y a une émission, voir l'emploi et l'utilisation des fonds. Mais je dois vous dire que ce serait difficile à faire et que cela demanderait des ressources considérables. On ne peut pas faire cela. Maintenant, on peut examiner les états financiers et voir ce que l'entreprise a fait avec les fonds. Ce qui est fait de façon systématique par la commission. " Ce que semble nous dire le président de la Commission des valeurs mobilières, c'est qu'effectivement il y a un certain contrôle qui s'effectuerait relativement à l'utilisation des fonds. Ce que je veux vous demander, et je veux la réponse brève: Est-ce que c'est apparent pour vous? Est-ce que vous trouvez que ce n'est pas suffisant?Est-ce que la réponse du président de la Commission des valeurs mobilières vous apparaît suffisante ou voudriez-vous qu'à ce niveau-là il y ait un peu plus de recherches ou d'enquêtes qui soient faites ou beaucoup plus de suivi?

M. Lassonde: Ce n'est pas les informations que j'ai.

Le Président (M. Lemieux): Bon.

M. Lassonde: Je ne connais aucun mécanisme de contrôle systématique. Probablement, ce à quoi fait allusion M. Guy, c'est qu'effectivement les compagnies doivent remettre des rapports trimestriels à la Commission des valeurs mobilières et à la Bourse de Montréal. Or, il est possible que la Commission des valeurs mobilières réétudie ces rapports trimestriels. Mais je n'ai jamais vu d'intervention de la commission pour comparer l'utilisation des fonds dans le prospectus avec les résultats financiers.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Mille-Îles et après, M. le député de Jonquière. Pardon, M. le député de Jonquière. Vous avez demandé la parole avant, je m'excuse. M. le député de Jonquière.

M. Dufour: Merci. Vous écrivez, à la page 20 de votre mémoire, que "si la formation du capital doit être laissée libre, l'utilisation des fonds par contre doit être surveillée". Ceci vous permet de conclure en disant: "Les fraudes ou tentatives de fraudes se produisent par l'utilisation non conforme de fonds recueillis auprès du public. " L'affirmation me semble, à première vue, assez grosse parce que vous dites là que vous pouvez laisser la concurrence jouer pour recueillir des fonds dépendant de... sans que cela ne soit soumis à certaines formes de contrôle pour ramasser des fonds. Quand vous avez des fonds, vous dites: Là, c'est dangereux et c'est là que cela pourrait frauder. Est-ce qu'on ne pourrait pas arriver avec une même assertion en disant que, même en allant percevoir des fonds par un processus, pas un processus, mais un...

Une voix: Prospectus.

M. Dufour:... prospectus qui serait un peu mensonger sur les bords s'il n'est pas surveillé... Est-ce qu'on ne pourrait pas être aussi malhonnête envers les clients éventuels? (20 h 30)

M. Lassonde: Je ne pense pas. Ce qui fait qu'à mon avis il n'y ait pas eu de scandale financier depuis le début des REA ou depuis l'engouement des gens ici, cela ne tient pas à la Commission des valeurs mobilières. Cela tient au travail fait par les courtiers. Il ne faut pas oublier que les courtiers au Québec étaient habitués à vendre "du" Bell Canada, "du" Canadien Pacifique, une clientèle assez conservatrice. Alors, les premières émissions de Cascades, etc. ont été faites sur la pointe des pieds, on peut dire, avec des vérifications très très rigoureuses de la part des maisons de courtage, de sorte que, même si on ouvrait la porte en réduisant la paperasse, je pense que les maisons de courtage défendraient leur clientèle. Il serait assez surprenant qu'on voie des...

M. Dufour: Je ne parlerai pas plus longtemps sur ce sujet puisque cela devient une question d'opinion à certains moments. Chacun vit avec ses expériences. Vous avez cité des compagnies qui n'avaient pas respecté ce qui était inscrit sur leur prospectus et qui n'ont pas utilisé les sommes recueillies pour les fins qui étaient dites ou écrites. Est-ce qu'il y a une façon de s'opposer à cela, de faire des plaintes ou êtes-vous complices des gens qui n'ont pas

utilisé l'argent à bon escient?

M. Lassonde: II y a deux choses. Il y a une petite expérience avec la SODEQ. Si ma mémoire est fidèle, SODEQ Lanaudière a recueilli des fonds et ne les a jamais utilisés; }e pense que c'était de l'ordre de 1 000 000 $. Au moment où ils ont voulu faire une deuxième émission, il y a eu un blocage. On a dit: Vous n'avez pas utilisé la première somme de 1 000 000 $, alors ne venez pas sur le marché pour en chercher d'autre. C'est le seul cas, à mon avis, où il y a eu une intervention sur l'utilisation des fonds. Je pense que c'est SODEQ Lanaudière.

Il est clair qu'on ne peut pas parler de dilapidation de fonds si quelqu'un retient des fonds et les place en certificat de dépôt. Je pense qu'on n'en est pas là. Ce ne sont pas des cas de fraude comme tels. Par contre, dans les cas où il y aurait une bifurcation assez forte des activités de la compagnie, si vous avez investi dans des vidéos en croyant que cette compagnie produirait des vidéos et que deux ou trois mois après, vous vous retrouvez investisseur d'une compagnie qui fait de l'emballage d'aluminium, il n'est pas sûr que, si on vous avait dit cela à ce moment-là, vous auriez investi dans cette compagnie.

Ce qu'on propose, c'est que, s'il y a un changement majeur - il faut vraiment qu'il soit majeur - les actionnaires soient consultés à nouveau et aient leur mot à dire là-dessus.

Le Président (M. Lemieux): Vous avez terminé, M. le député de Jonquière? M. le député de Mille-Iles.

M. Dufour: Je n'ai pas terminé.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Bertrand, on entendra votre argumentation tout à l'heure. C'est avec raison que le député de Lafontaine me faisait remarquer tout à l'heure qu'on manque de temps à cause d'un horaire assez chargé et très précis, eu égard aux comparutions qui doivent se faire. Nous avons déjà pris du retard pour M. Forget. Je 8ut3 d'accord avec la suggestion du député de Lafontaine et, effectivement, dans le cadre de ces activités, la prochaine fois, on fera en sorte d'avoir beaucoup plus de temps. M. le député de Lafontaine, c'est avec raison que vous avez fait remarquer cela tout à l'heure. M. le député de Mille-Îles.

M. Bélisle: Systèmes financiers Iceberg Inc. est une société d'informatique spécialisée qui donne des services comparables à une banque électronique de données à plusieurs clients spécifiques comme les banques, les institutions financières, les maisons de courtage et tout le reste.

J'aimerais savoir si vous devez d'abord vou3 enregistrer sous une forme ou sous une autre auprès de la Commission des valeurs mobilières du Québec.

M. Lassonde: On a un cas assez précis qui date du 24 mars. On est autorisé par la Commission des valeurs mobilières à vendre nos services, c'est-à-dire un abonnement à un ordinateur, pour desservir une clientèle institutionnelle, les banques, les maisons de courtage, les fiducies, etc. Par contre, on nous interdit de vendre à l'investisseur privé.

M. Bélisle: Les analyses que vous faites, est-ce que ce sont des analyses avec textes, paragraphes dans lesquels vous émettez une opinion dans le style: Les Services financiers Iceberg vous suggèrent de prendre tel type plutôt que tel autre dans les métaux précieux ou si ce sont seulement des informations de nature graphique, d'analyse économique de marché?

M. Lassonde: C'est ça.

M. Bélisle: Que voulez-vous dire par "c'est ça"? Je ne vous comprends pas.

M. Lassonde: On fait des analyses de tendance du prix des actions, des taux d'intérêt, de l'inflation et des monnaies étrangères.

M. Bélisle: Est-ce que vous indiquez d'une façon ou d'une autre, avec les graphiques que vous faites, un choix à la personne qui reçoit l'information? Est-ce que vous la conseillez quant à un choix à faire?

M. Lassonde: Non. Ce que reçoit le client, c'est un graphique où sont indiqués le haut, le bas et la fermeture de ces actions, avec deux lignes ou deux courbes. On fournit à l'utilisateur un manuel d'interprétation de ces courbes.

M. Bélisle: Comment se fait-il, effectivement, M. Lassonde, que vous n'ayez pas le droit de transmettre ces informations à des individus, des gens, au commun des mortels, parce qu'il me semble que, si ce sont des analyses graphiques des tendances de marché économique, ce serait peut-être important pour que l'investisseur qui le désire puisse s'abonner à vos services?

M. Lassonde: Je suis le premier à ne pas le comprendre. C'est qu'on juqe nos services assez bons pour les vendre aux courtiers en valeurs mobilières, mais on a des réserves sur les investisseurs privés.

Le Président (M, Lemieux): Voulez-vous prendre la parole, madame?

Mme Dumouchel (Nicole): Peut-être que je peux ajouter que, sur la qualité de nos services, premièrement, pour s'abonner, cela coûte relativement cher. Cela prend déjà un équipement informatique spécialisé, même si c'est de la micro-informatique. On élimine donc l'investisseur qui n'a pas un portefeuille assez important pour être capable de se payer ce service. II reste que nous avons des investisseurs individuels. Ils ne sont pas canadiens. Plutôt, ils sont canadiens, mais ils ne sont pas québécois. Ils sont américains, européens, autrichiens, australiens et autres, ce qui fait qu'il y a une portion de notre clientèle à qui nous allons devoir dire: Maintenant, nous n'avons plus le droit de vous donner nos services. Ou encore, ils passent par les États-Unis pour les acheter.

M. Bélisle: Juste pour contourner la réglementation?

Mme Dumouchel: C'est la réglementation américaine qu'on impose.

M. Bélisle: Ah bon!

M. Lassonde: Cela fait une situation assez curieuse. Effectivement, on a le droit de vendre à l'extérieur à des investisseurs privés, sauf au Québec.

M. Bélisle: Sauf au Québec. Bon.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Mille-Îles.

M. Bélisle: Oui. Deuxième question au sujet des SPEQ. J'ai été estomaqué de lire ce que vous avez écrit à la page 16. Est-ce vrai, cette affaire-là ou non? Vous vous en allez au Salon de l'épargne-placements. La SDI a un comptoir, un présentoir avec des fascicules sur les SPEQ, qui est un programme gouvernemental, et en l'espace d'un tour de passe-passe, il y a quelqu'un qui se présente et qui dit: Non, non, ça, ça rentre derrière le comptoir et vous ne distribuez pas ça à personne, parce que c'est trop publicitaire. Étiez-vous là, M. Lassonde, quand ça s'est passé?

M. Lassonde: On était trois témoins, oui.

M. Bélisle: Étiez-vous là, vous?

M. Lassonde: Personnellement, oui. Mais c'est Mme Nicole Dumouchel qui essayait d'obtenir les prospectus de la SDI.

Mme Dumouchel: Comme nous étions dans le développement des SPEQ, nous avions travaillé de très près avec la SDI, avec M. Jean-Louis Pitt, pour développer les SPEQ. Il faut comprendre que, lorsque les REA sont arrivés sur le marché, cela a été toute une éducation. La SDI avait produit un dépliant gris et rouge, qui décrivait de façon très professionnelle ce qu'était une SPEQ et la loi. D'autant plus que les règlements fiscaux venaient d'être adoptés. Personne ne savait trop ce qu'on faisait. Nous référions les gens qui venaient à notre kiosque au kiosque de la SDI pour chercher l'information. Les gens de la SDI sont venus me voir personnellement, avec M. Lassonde et M. Gilles Imbault, vice-président, pour nous dire que les dépliants avaient été retirés par les conseillers juridiques ou les représentants de la Commission des valeurs mobilières, parce qu'ils étaient trop publicitaires. On avait des photocopies d'un article de loi que personne ne comprenait parce qu'on n'avait pas toujours toute l'équipe d'avocats pour les interpréter à la population. Nous avons ététémoins de cela. Nous avions un dépliant qui restait dans nos bureaux, mais nous n'avons plus revu ces dépliants par la suite, au Salon de l'épargne-placements.

Le Président (M. Lemieux): Je sais que vous n'avez pas terminé, M. le député de Mille-Îles.

M. Bélisle: Non, cela va. Merci.

Le Président (M. Lemieux): Merci. M. le député de Bertrand, s'il vous plaît.

M. Parent (Bertrand): Je vous remercie, M. le Président. Je tiens à vous féliciter, M. Lassonde et madame, pour la présentation de ce mémoire. Vous n'y allez pas avec le dos de la cuiller, sauf que, connaissant votre franc-parler, je pense que vous pouvez faire avancer Ies choses au sein de la commission. Je suis un petit peu estomaqué de certaines choses, particulièrement de votre proposition au sujet du prospectus standard qui pourrait se résumer à quelque chose de très simple, même, peut-être, à mon avis, de ce côté-là un peu trop simple. Essentiellement, vous dites - et là-dessus, je pense qu'on peut être d'accord - qu'il y a beaucoup trop de frais entourant cela. Qu'on le simplifie, oui. Mais - et, d'ailleurs, vous en apportez une dimension - le contrôle de la part de la commission par rapport à l'utilisation des fonds et par rapport au suivi de dossiers me semble drôlement importante, à cause de la protection du consommateur.

Il est arrivé en 1984 et 1985 particulièrement, au moment où la SDI a mis de l'avant son programme d'aide à la capitalisation avec les 400 000 $ qu'on payait entièrement... L'idée de la SDI était très correcte à ce moment-là et était de favoriser - vous vous souviendrez - les PME pour aller sur le REA et elle subventionait jusqu'à 400 000 $ qui représentaient les coûts d'études de faisabilité et l'émission du

premier prospectus.

Or, on sait qu'il y a certaines entreprises qui ont encaissé à travers deux ou trois filiales d'entreprises appartenant au même propriétaire deux ou trois fois les 400 000 $. Alors, ça m'a, à ce moment, relativement choqué et ça, ce sont des cas qu'on a pu voir.

C'est donc dire que toute l'utilisation des fonds et tout ce qui est dit ou apporté, si on n'a pas de contrôle, je pense que c'est très dangereux; c'est-à-dire que vous parlez de bombe à retardement à un moment donné. Je ne le souhaite pas, sauf que la montée vertigineuse qu'on a connue... On est rendu à quelque 11 % des Québécois qui s'adonnent à ces açtivités-là et on espère que ça va pouvoir monter, parce que toutes les statistiques montrent qu'il y a de la place pour aller de ce côté-là, pour continuer à augmenter. Sauf qu'à partir du moment où il arrivera des événements importants qui vont faire en sorte que les gens vont se mettre à avoir peur à cause de titres qui, finalement, ont été un peu faussés, je pense qu'on va accuser un recul et peut-être qu'on aura pendant plusieurs années des Québécois qui auront peur de faire des affaires.

Effectivement, on sait - je pense que le député de Lafontaine le précisait tantôt -que l'épargnant, en général, ne lit pas le prospectus. Mais quand tu te tapes un prospectus en long et en large, tu t'aperçois que, d'abord, il y a du stock dedans et quand tu commences à vérifier chacune de ces choses-là, c'est garanti qu'il y a des choses qui sont dans les zones grises.

Pour moi, toute l'importance du contrôle - j'aimerais savoir vos commentaires par rapport à ça - c'est de s'assurer que les fonds vont être utilisés pour les fins pour lesquelles ils devraient être utilisés, que l'information qui est mise là-dedans soit de la bonne information, de façon...

C'est bien sûr, en ce qui concerne les pro forma, il y a différentes façons de faire des pro forma, de montrer un projet d'entreprise. Il y a différentes façons aussi de présenter les dernières années financières d'une entreprise avec des notes explicatives. Mais tout ça, dans l'interprétation, je pense que c'est très dangereux par rapport à l'avenir de tout ce qui se passe sur le plan de la crédibilité des titres en Bourse et, particulièrement, ceux qui sont sur le Régime d'épargne-actions.

Moi, ça me préoccupe beaucoup, parce que s'il y a une, deux ou trois bombes qui éclatent et qui sortent au grand jour, je pense qu'on va se ramasser avec un problème sur les bras et c'est un problème qui va regarder ceux qui dirigent et je ne fais pas de politique avec ça. Je me sentirais tout aussi responsable et c'est peut-être ça, cette préoccupation qu'on a de s'assurer, en ce qui concerne la Commission des valeurs mobilières, de ne pas s'en aller nécessairement dans le chemin dans lequel on s'en va.

Le Président (M. Lemieux): M.

Lassonde.

M. Lassonde: En ce qui concerne le prospectus comme tel, la Commission des valeurs mobilières s'est rendu compte, je crois, des coûts exorbitants et a créé ce qu'on appelle un prospectus simplifié, il y a quelques années. Alors, voilà, d'après moi, une très bonne idée qui a été mal utilisée.

Elle n'a permis le prospectus simplifié que pour les très grosses compagnies, alors que les coûts, c'est la petite entreprise qui les a. Si on fait un financement de 1 000 000 $ ou de 2 000 000 $, le rapport entre frais comptables et frais d'avocats est très élevé. Si l'émission est de 10 000 000 $ ou de 20 000 000 $, ça devient abordable.

Le prospectus simplifié, qui aurait été. une excellente idée si ça avait été appliqué à la PME, ne profite qu'à ceux qui ont une note d'information permanente, comme Alcan, Bell ou de très grosses compagnies comme celles-là. Je pense que ce serait aller dans le sens du prospectus simplifié, de le simplifier encore, mais surtout de permettre aux petites entreprises de l'utiliser. (20 h 45)

Quant à votre autre question sur l'utilisation des fonds, en fait, c'est le coeur de nôtre mémoire de dire: Si les gens qui font des émissions d'actions sont sérieux, ils n'auront rien contre le fait qu'on aille sporadiquement vérifier l'utilisation des fonds si on a des doutes là-dessus. Je le mentionne brièvement, l'industrie minière connaît aujourd'hui une explosion en Abitibi et la plupart de ses émissions sont structurées pour donner des déductions fiscales, mais à la condition que les travaux soient faits. Donc, je ne pense pas que cela pose beaucoup de problèmes à la Commission des valeurs mobilières de vérifier l'utilisation des fonds. Depuis qu'il y a eu un boum minier, je pense qu'il n'y a eu aucun scandale minier, alors que c'était la plaie durant les années cinquante ici. Voilà une industrie, parce qu'on a vérifié l'utilisation des fonds, qui est très prospère aujourd'hui et dans laquelle il n'y a aucun scandale. Je pense qu'il s'aqirait de s'inspirer de cette méthode et de l'étendre à un plus grand nombre de compagnies.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Bertrand, oui, une dernière question.

M. Parent (Bertrand): Peut-être une dernière question rapidement, à cause du temps qui presse. Il est invraisemblable que cela coûte 300 000 $ ou 400 000 $ pour

faire un prospectus pour une émission de 1 000 000 $ et sensiblement le même prix pour en faire un de 5 000 000 $, 6 000 000 $, 10 000 000 $ ou 20 000 000 $. Peut-être que la formule, c'est d'y ! aller avec quelque chose de simplifié, sauf que, normalement, plus l'émission est petite, plus l'entreprise est petite et plus les risques, peut-être, sont élevés.

Je ne sais pas comment on pourrait résoudre le problème, mais si on pouvait avoir des coûts simplifiés de petites émissions, ce qui ferait en sorte que le pourcentage de coûts serait plus abordable, on permettrait finalement à beaucoup de titres... Est-ce que, dans le fond, on ne veut pas éliminer ceux-là?

M. Lassonde: C'est un problème très réel, car plus la compagnie est petite, évidemment, plus les risques augmentent. Aux États-Unis, les Américains investissent beaucoup dans des projets, dans des idées. Trois ou quatre professeurs de biotechnologie vont lancer une entreprise; ils font une émission de 5 000 000 $. La compagnie n'aura aucun record de dividendes, aucun record de profits et, tout d'un coup, elle va chercher 5 000 000 $. On n'a pas ce genre de chose ici et cela manque.

Si on met les choses un peu en perspective, on pourrait très bien créer de petits fonds mutuels dans lesquels on pourrait regrouper cinq ou six compagnies, faire une émission de 4 000 000 $ ou 5 000 000 $ et répartir l'argent au prorata des entreprises membres, sauf que l'actionnaire détiendrait une action de ce petit fonds, mais son risque serait partagé entre quatre ou cinq entreprises. Il serait donc beaucoup moins vulnérable. Ce serait une avenue.

Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie, M. Lassonde. Je vous remercie aussi, madame, du mémoire que vous nous avez présenté. Je demanderais maintenant à M. Jacques Forget, du journal Finance, de bien vouloir prendre place, s'il vous plaît.

J'espère, M. Forget, que l'épaisseur de votre dossier n'est pas le contenu de votre mémoire.

Une voix: C'est le résumé.

M. Forget (Jacques): Je l'espère aussi. On est en ondes. Messieurs, j'ai cru quand même...

Le Président (M. Lemieux): Préalablement, M. Forget, effectivement, nous n'avons pas reçu copie de votre mémoire. Nous allons écouter votre exposé et, s'il y avait possibilité que vous exprimiez votre point de vue entre 10 à 15 minutes, s'il vous plaît, afin que les membres de la commission puissent vous interroger. C'est un peu la procédure qui a été suivie tout au long de la journée.

Nous vous laissons aller immédiatement afin qu'il n'y ait pas de perte de temps.

M. Jacques Forget

M. Forget (Jacques): Vous êtes bien aimables de me recevoir en l'absence de document écrit. J'ai quand même cru bon de me présenter devant cette commission. Je suis le journaliste financier qui a probablement le plus d'expérience au Québec notamment en matière de couverture des marchés boursiers et j'ai connu trois administrations différentes à la commission. C'est un peu de cela que je voudrais vous entretenir, peut-être sous forme de questions et réponses. Je n'ai pas l'intention de faire un long baratin.

J'ai commencé dans le métier à l'âge de 22 ans. On était vers 1972 et aujourd'hui nous sommes en 1987, et j'ai connu l'évolution des marchés financiers québécois et l'évolution de la Commission des valeurs mobilières comme institution. Allons droit au but. Je suis tout à fait d'accord avec les représentations faites par M. Guy - cela va sans doute le surprendre - selon lesquelles il manque de ressources pour couvrir le mandat qui a été donné initialement à la Commission des valeurs mobilières. Par contre - et je vais le surprendre encore - je pense qu'il serait inutile de lui donner plus de ressources.

La Commission des valeurs mobilières a été créée un peu à la rescousse du développement des marchés, on a dû la réorienter au début des années soixante-dix parce qu'il y avait une absence de contrôle des marchés financiers à Montréal et il y a eu des actes regrettables qui ont été commis aux dépens de3 investisseurs d'ici et des investisseurs d'ailleurs.

La commission a maintenant un triple mandat: un mandat législatif, puisqu'elle peut édicter des énoncés de politique; un mandat global administratif, où elle fait de la suveillance et du contrôle et un mandat policier où elle interdit à certaines personnes de pratiquer des métiers dans le commerce des valeurs mobilières. C'est le cas un peu de M. Lassonde à qui on interdit, semble-t-il, de distribuer son produit au public. Moi, j'ai connu une expérience similaire récemment où on m'a demandé d'enregistrer un mensuel d'information boursière que nous avons lancé - La Bourse - ou de cesser de le publier.

Donc, elle a trois mandats et il m'apparaît assez clairement que cette confusion de mandats a entraîné une espèce de dégénérescence dans son processus de fonctionnement où le mandat est beaucoup trop grand pour les gens qui sont en place et cela crée des conflits, des conflits de rôle

qui sont regrettables et dont l'ensemble de la collectivité fait les frais.

Je pense que la commission ne devrait plus avoir de mandat législatif à proprement parler. Il devrait y avoir un ministère des Institutions financières en bonne et due forme. Tout ce qui a trait à l'organisation des institutions financières québécoises devrait être débattu devant l'Assemblée nationale et ce n'est plus au président de la commission, en quorum limité, à adopter des politiques aussi importantes que la question de la propriété des maisons de courtage, par exemple, ce qui a été fait en 1982, ou même la question des tarifs dans l'industrie du courtage.

Voilà pour l'ensemble de l'aspect législatif. On peut intégrer à cela aussi la désignation des différents métiers dans le commerce des valeurs mobilières. Je pense que tout ce débat devrait avoir lieu à l'Assemblée nationale. C'est vous que cela regarde. Ce sont les parlementaires que cela regarde.

Pour ce qui est du travail de surveillance et de contrôle, c'est essentiellement le mandat de la commission. Je pense qu'il est maintenant bien fait. Il y a une tradition qui s'est implantée à la commission. Les professionnels de la commission ont les choses bien en main depuis cinq ou dix ans. On sait rapidement ce qui se passe sur le marché boursier à Montréal ou dans le domaine des institutions financières.

Le troisième aspect, l'aspect policier, devrait être, à mon avis, aussi relégué complètement au système judiciaire. Il est tout à fait malencontreux... Enfin, c'est un peu comme si on demandait aux policiers -j'utilise une expression bien terre à terre -de rendre la justice. Les policiers ont un mandat à faire, c'est la protection du citoyen dans le cadre de l'application des lois et lorsqu'il y a contravention, ils défèrent le prévenu ou le citoyen devant l'administration de la justice. C'est exactement de cette façon que devrait fonctionner la Commission des valeurs mobilières. Cela empêcherait des conflits de personnalité, des conflits de rôles qui font vraiment dégénérer le système.

Pour résumer ma pensée, la Commission des valeurs mobilières a obtenu à sa création un mandat assez large qui a été élargi dans les années soixante-dix parce qu'il y avait un besoin d'intervention certain, mais je pense qu'on est allé beaucoup trop loin à cette époque et c'est la raison pour laquelle on a de la difficulté maintenant à gérer les marchés spéculatifs au Québec. Il faudrait maintenant se donner des outils pour que ce qui est devenu une partie importante de l'activité économique, voire culturelle, au Québec - puisqu'il y a 11 % des Québécois qui ont maintenant des portefeuilles - soit très bien régi et qu'il n'y ait pas un régime de droits particuliers, si vous voulez, qui finisse par léser certains citoyens - et j'ai été au nombre de ceux-là - un système de droits particuliers qui a dégénéré un peu et sur lequel l'administration judiciaire a plus ou moins de contrôle; donc un système de droits particuliers qui s'est mis en place.

C'est, si vous voulez, l'essence de mon intervention. J'ai bâti un squelette, c'est une intervention assez courte. Si vous voulez que nous discutions, je suis prêt à vous donner des exemples et à discuter.

Le Président (M. Lemieux): Merci, M. Forget, du journal Finance. Est-ce qu'il y a des membres de cette commission qui veulent poser des questions?

M. le député de Bertrand.

M. Parent (Bertrand): Oui. M. Forget, votre recommandation quant au rôle du policier, c'est qu'il devrait aller davantage au ministère de la Justice, si j'ai bien compris, dans les cas où il y aurait enquête. Actuellement, de la façon que cela fonctionne - et vous me corrigerez si ce n'est pas correct - lorsqu'il y a des cas douteux, à moins qu'on ne porte plainte formellement, il n'y a aucune espèce d'enquête. S'il y a une plainte formelle, la Commission des valeurs mobilières entreprend une enquête actuellement. Est-ce exact?

M. Forget (Jacques): Je ne pense pas; je ne suis pas un professionnel du droit des valeurs mobilières, mais je pense que ta commission a son propre pouvoir d'enquête. Vous n'avez pas tout à fait saisi le sens de mon intervention, La commission a un pouvoir de régimenter, si vous voulez, qui participera ou ne participera pas au commerce des valeurs mobilières à différents niveaux; d'accord? Elle donne des permis; elle a donc le pouvoir judiciaire, quasi judiciaire, de donner ou de ne pas donner de permis. Je pense que ce pouvoir quasi judiciaire devrait être transféré à la Cour provinciale qui est l'organisme de surveillance de la Commission des valeurs mobilières parce qu'il y a trop de conflits de personnalités, il y a trop de conflits d'intérêts qui entrent en ligne de compte. Je ne nommerai pas de cas précis. L'histoire de Systèmes financiers Iceberg en est un. À mon avis, la commission devrait plaider son cas devant un tribunal plutôt que d'avoir à prendre une décision: Non, on donne un permis restreint à Iceberg. Je pense que justice serait faite et on ne tomberait pas dans le piège, si vous voulez, du système où la personne qui rend la décision finale, qui rend la décision qui affecte les droits de l'individu, est à la fois juge et partie. C'est le système que nous connaissons actuellement,

M. Parent (Bertrand): Cela va pour l'Instant.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Mille-Îles.

M. Forget (Jacques): Juste pour terminer.

Le Président (M. Lemieux): Oui, vous pouvez terminer.

M. Forget (Jacques): Ce n'est pas sur les fraudes, c'est vraiment sur les droits des individus dans la participation du commerce des valeurs mobilières.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Mille-Îles.

M. Bélisle: Un journal comme le vôtre, M. Forget, le journal Finance, est-il obligé présentement, par la réglementation, de s'enregistrer auprès de la Commission des valeurs mobilières du Québec?

M. Forget (Jacques): Non, nous avons droit à une exemption qui est prévue dans la loi, à la condition que nous fassions du journalisme - évidemment, il peut y avoir un débat à savoir ce qu'est le journalisme financier - et que nous ne fassions du conseil financier que de façon incidente. J'ai moi-même fait jurisprudence il y a quelques années alors que la Cour provinciale a sanctionné le fait que je fasse du conseil financier. Je faisais vraiment du conseil financier dans une chronique qui s'appelait "Qu'est-ce qu'on achète, M. Forget?" qui était assez populaire. Pour faire ce genre de chronique, il faut s'enregistrer auprès de la commission si on veut détenir des titres sur lesquels on donne des opinions d'investissement. Actuellement, nous avons un ancien journaliste qui est un collaborateur, M. Gérard Bérubé, qui est un très bon chroniqueur boursier qui a été formé à Finance, qui est devenu conseiller financier enregistré auprès de la commission parce qu'il a décidé de publier une lettre financière, qui est le titulaire du portefeuille Finance et qui, à l'occasion, détient des titres recommandés dans son portefeuille. L'une des clauses du permis a été qu'il divulgue ses intérêts, non pas en termes de quantité, mais qu'il divulgue à côté des différentes positions de titres qu'il détient ou qu'il ne détient pas - donc, ce n'est pas indiqué - pour son propre compte, les titres en portefeuille. Cela me paraît tout à fait acceptable comme norme.

M. Bélisle: Deuxième question quant aux pouvoirs "policiers" de la Commission des valeurs mobilières du Québec. Que pensez-vous personnellement des pouvoirs de la

Commission des valeurs mobilières du Québec de procéder de façon discrétionnaire à l'émission d'ordonnances des interdictions de transiger, de cesser des opérations simplement sur des rumeurs, des appels téléphoniques, même si après on se demande quelquefois s'il y a des vérifications même mineures qui sont faites?

M. Forget (Jacques): Dans le cas spécifique des interdictions de transiger, il ne m'est pas apparu qu'il y ait eu des injustices flagrantes, des abus de la part de la commission. Au contraire, c'est un secteur où la commission agit avec vigilance, mais en même temps avec discernement. Ce que vous soulevez, le pouvoir de la commission d'émettre des ordonnances, revient à l'explication que je donnais au député qui siège à ma droite, le député M. Parent (Bertrand), à savoir que, dès qu'il y a matière à rendre une décision qui affecte les droits des citoyens, les droits des participants au marché des valeurs mobilières, hormis le cas des infractions, il faudrait, à mon avis, que ce soit fait par une tierce partie, qui puisse juger de l'affaire de façon froide, de façon neutre et qui a la formation juridique pour le faire; d'accord? Je pense que cela devrait être réintégré au rôle de la Cour provinciale, qui est la cour de juridiction de contrôle de surveillance de la Commission des valeurs mobilières. Le cas des ordonnances, c'est un cas patent. Évidemment, selon l'urgence de la chose, la commission pourrait demander à ce qu'elle soit entendue de façon urgente ou non. Dans notre droit commun, vous savez, il y a des injonctions qui peuvent être prises immédiatement, en quelques heures. C'est la même chose dans le cas des ordonnances de non transiger. Si on s'aperçoit qu'un titre qui ouvre à 5 $ le matin se retrouve trois jours plus tard à 15 $, que c'est une compagnie qui a peu d'actifs, un peu boîteuse, on peut très bien, dans la soirée, présenter en Cour provinciale l'équivalent d'une injonction qui équivaut à une ordonnance de non-transaction jusqu'à temps qu'il y ait enquête de façon que les pouvoirs des citoyens soient protégés. (21 heures)

Je pense que la formule que nous connaissons actuellement, peut-être pas dans le cas des ordonnances de non transiger, mais où la commission qui a le pouvoir d'enquête, qui a le pouvoir policier a aussi, si vous voulez, le pouvoir de décider des droits des parties, c'est un système qui a donné lieu à des abus.

M. Bélisle: Et même là, dans le cas d'une injonction provisoire, la personne qui serait soumise à une enquête ou, éventuellement, à l'ordonnance d'injonction, même devant le juge, en Cour provinciale, aurait l'occasion de se faire entendre, tout au

moins, de façon préliminaire,

M. Forget (Jacques): Oui, exactement.

M. Bélisle: Ce qui n'est pas le cas en ce moment.

M. Forget (Jacques): Pas toujours. On ne peut pas certifier que justice a été rendue selon les règles de la justice naturelle, dans ce genre de cas. Je ne dis pas que cela ne l'est pas; je dis qu'on ne peut pas certifier, selon mon expérience, en tout cas.

M. Bélisle: Sans faire de cas. Maintenant, la dernière question, pour moi, c'est la question des délais dans les décisions. M. Gilles Delisle qui est venu nous voir cet après-midi a été fort articulé concernant les déboires de son entreprise avec les délais de la commission pour rendre une décision, pour un prospectus, pour la possibilité de faire valider, d'obtenir le visa du prospectus et tout le reste.

M. Forget (Jacques): Je suis convaincu que ce prolongement des délais, c'est une arme dont se sert la commission très souvent pour porter atteinte à des entreprises sur lesquelles elle porte un jugement; cela m'apparaît assez évident. La meilleure façon de rendre une entreprise non opérante, c'est, par exemple, à un certain moment de l'année, lui retirer tel ou tel pouvoir. Dans le cas des actions accréditives, quand on est à la fin de novembre ou en décembre et qu'on met au début de janvier la vente des actions accréditives, cela n'a plus aucun intérêt pour les investisseurs.

Il y a le cas immédiat d'un nouveau fonds. Il s'agit des placements Soficorp qui émettaient des fonds mutuels dans la période des REER. C'est la grosse période où les gens peuvent acheter ce genre de produits pour les mettre dans leur REER. Bon, bien, on les a plantés juste à ce moment-là. C'est seulement au Québec qu'ils ont été plantés. Je ne juge pas du bien-fondé de la chose.

M. Bélisle: Que pensez-vous de la suggestion faite par M. Delisle, je pense, cet après-midi, où, dans des cas exceptionnels qui pourraient être définis dans la loi, une personne pourrait faire appel à un comité tripartite: le président de la Commission des valeurs mobilières, le président de la Bourse et peut-être quelqu'un de l'ACCOVAM? Ces gens prendraient une décision après un délai de rigueur pour que la Commission des valeurs mobilières soit obligée de rendre une décision, disons, à l'intérieur d'une période de 15 ou de 21 jours.

M. Forget (Jacques): Ce système existait ou existe encore en Colombie britannique. Quand vous déposez un prospectus, la Super Intendant of Brokers de la Colombie britannique a tant de jours pour refuser le prospectus. Je ne sais pas si cela existe encore, mais cela existait. Évidemment, il y a des périodes de l'année où la commission est surchargée. Elle a elle-même, je pense, vu à ce problème en donnant des dates limites de dépôt des prospectus. C'est un peu l'équivalent de ce que vous me dites.

Je pense qu'il ne faut pas que la commission puisse utiliser ses pouvoirs - si vous voulez - d'enquête ou de surveillance de façon à retarder les processus, de façon à porter préjudice aux individus. Cela pourrait être une formule. Je sais que c'est une formule utilisée en Colombie britannique, II faudrait voir les tenants et les aboutissants. Il pourrait y avoir une formule où, à partir du moment où le prospectus est déposé et où les gens, évidemment, déposent leur prospectus en temps opportun, la commission a trois semaines ou un mois pour donner son aval ou non.

Je dois vous dire qu'on se plaint beaucoup de ce qui se passe actuellement. Il y a un aspect organisationnel, mais il y a un aspect humain aussi. Tant les gens de la commission que les gens de l'extérieur, des maisons de courtage sérieuses, sont un peu renversés du tatillonnage qui sévit actuellement à la Commission des valeurs mobilières. M. Lassonde vous a parlé des prospectus qui étaient retournés de sept à dix fois. Je connais des firmes sérieuses, des maisons de courtage sérieuses qui n'ont rien à se reprocher et qui souffrent de cela. C'est très coûteux et c'est vraiment du tatillonnage. On se demande qui, à la commission, dans les services juridiques ou parajuridiques, est en train de se bâtir un fief ou un capital en jouant ainsi avec les prospectus.

M. Bélisle: Je vous remercie, M. Forget.

M. Forget (Jacques): Je vous en prie.

Le Président (M. Lemieux): Nous allons maintenant en respectant la règle de l'alternance, donner la parole au député de Jonquière et nous allons terminer avec le député de Lafontaine. M. le député de Jonquière.

M. Dufour: J'ai bien écouté votre exposé. Vous parlez d'un manque de ressources et, en même temps, vous dites que vous êtes opposé au fait d'en donner plus. Donc, je pense que votre exposé est assez concluant de ce côté. Vous dites un peu plus loin que le mandat législatif devrait être enlevé à la Commission des valeurs mobilières et que cela devrait retourner aux membres de l'Assemblée nationale. Est-ce

que vous pensez, selon les connaissances que vous avez, que l'Assemblée nationale va être plus pratique, plus rapide ou meilleure dans ses décisions par rapport à la Commission des valeurs mobilières? C'est une question de...

M. Forget (Jacques): Vous me demandez évidemment de poser un jugement sur les élus.

M. Dufour: Bien, c'est ce que vous avez avancé. Je suis obligé d'aller là-dessus.

M. Forget (Jacques): Je pense qu'il y a un dénominateur commun qui fait que, finalement, on n'était pas si mal servi que cela; quand on l'est, il y a un débat politique qui s'engage. Dans le cas actuel, il n'y a pas de débat politique. Il y a Finance qui fait un éditorial, Les Affaires font un éditorial; c'est limité à cela, il n'y a pas de débat politique. Je pense qu'il aurait au moins fallu poser la question: Comment traite-t-on nos maisons de courtage? Cette question aurait dû être posée dans le cadre d'un débat à l'Assemblée nationale avec des représentations. Est-ce qu'on doit laisser les étrangers, les non-résidants québécois, les autres institutions financières prendre des participations dans des maisons de courtage?

Quand le débat a été fait à la commission, il y a eu une décision majoritaire, il y a eu une dissidence. J'ai pondu un éditorial qui disait: Ce qui est important, c'est de conserver l'esprit d'entreprise dans le commerce des valeurs mobilières, donc de permettre que les entrées soient faciles. Si on permet à tout le monde d'acquérir des maisons de courtage, toutes les institutions financières qui ont de fortes capitalisations par rapport aux courtiers... Vous savez que les courtiers sont des partenaires à la base, un peu comme les comptables et les avocats qui, après plusieurs années, se bâtissent un capital. Ce n'est que cela. Si on ne préserve pas cela, cela changera substantiellement le système financier qu'on connaît au Québec. Il sera beaucoup moins ouvert, ça nous rapprochera des sociétés qui sont plus traditionnelles comme, par exemple, en Europe. En Suisse, il n'y a plus de courtiers, ce sont les banques qui sont courtiers; en Allemagne, c'est la même chose. C'est beaucoup plus difficile de financer une PME de cette façon. Voyez-vous?

À mon avis, c'est un débat qui devrait se faire à l'Assemblée nationale. Il devrait y avoir un ministère des institutions financières en bonne et due forme. On ne sait plus où il est passé. On a un ministre qui s'occupe de la privatisation et qui, en même temps, est délégué aux institutions financières; on a un Surintendant des institutions financières, si je comprends bien, qui a été créé par le gouvernement précédent. Cela devient un peu compliqué. Il y a déjà eu un ministère des Institutions financières et il semble qu'on n'ait pas pu trouver, du moins pas pendant assez longtemps, de ministres qui connaissent l'organisation financière. C'est nouveau, on n'enseignait pas cela dans les facultés de droit, ou assez peu, et, aux HEC, on formait des comptables.

 mon avis, un ministère des institutions financières est essentiel pour comprendre l'évolution de la société dans les sociétés de fiducie, dans les compagnies d'assurance-vie, dans les compagnies d'assurances de personnes, dans les maisons de courtage et dans les autres institutions qui se créent. Pour les caisses d'entraide, c'était cela, le problème. Il y a eu une absence de contrôle ministériel comme tel de cette institution qui croissait très rapidement. Par ailleurs, il y a eu des pressions politiques, on a perdu le contrôle et il n'était plus possible d'intervenir à partir d'un certain moment.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de... Oui.

M. Forget (Jacques): II n'y avait personne qui suivait les dossiers. II y en avait quand même au niveau des fonctionnaires, mais au niveau politique, l'épargne des Québécois, l'épargne investie dans les institutions prend une importance telle qu'il m'apparatt que cela devient une nécessité d'avoir un ministère actif au niveau politique pour qu'on débatte des évolutions, quelle sorte de société nous voulons nous donner à ce niveau.

M. Dufour: Une dernière question...

Le Président (M. Lemieux): Une dernière courte question, M. le député de Jonquière.

M. Dufour:... qui concerne Systèmes financiers Iceberg sur les coopératives financières industrielles. Vous avez parlé un peu de ce qui est arrivé dans les caisses d'entraide. Dieu sait que tout le monde est au courant, parce que j'ai l'impression qu'il y a beaucoup de gens à cette table qui ont perdu quelques sous au cours de cette opération. Ce n'est pas nécessairement mortel, par exemple. Est-ce que vous êtes d'accord que ces mouvements doivent aussi faire l'objet d'une certaine surveillance?

M. Forget (Jacques): II n'y a aucun doute là-dessus. Vous savez, la surveillance est là. Les professionnels de la commission ou de3 ministères le font actuellement. Dans le cas des caisses d'entraide, on n'a pas su à quel moment et comment régler le problème à un moment déterminé, et on l'a réglé

d'une façon politique à un autre moment. Je me suis opposé au règlement intervenu en juin 1981, quand on n'a pas voulu que les caisses d'entraide soient liquidées dans le Mouvement Desjardins. Il y a eu une évolution par la suite et, aujourd'hui, l'entraide économique, qui est un mouvement beaucoup plus limité qu'il ne l'était, vient de se lier avec Les Coopérants. Donc, il vient de se rattacher à une grande institution financière. À mon avis, c'est ce qui aurait dû se produire dès juin 1981, quand les taux d'intérêt ont fait en sorte qu'il y avait insolvabilité.

Il y a de la surveillance, il y a des contrôles. Je vois ce qui se passe sur le marché. financier. Quand il y a des représentations un peu farfelues, on le voit assez rapidement. Il y a aussi les différents secteurs d'activité, les PME, les plus grandes institutions, il y a le secteur de la liste minière montréalaise. J'ai suggéré que soit créé un bureau minier dans le cas de la liste minière montréalaise, où la commission, la Bourse de Montréal et les intervenants de l'industrie de l'exploration minière puissent se rencontrer régulièrement pour pouvoir comprendre ce qui se passe de part et d'autre.

Dans le cas de l'industrie de l'exploration minière, ce sont toutes de petites compagnies où les gens qui les contrôlent ont, dans presque tous les cas, des ressources trop limitées pour mener à bon terme une entreprise dans toutes ses dimensions. Ce sont des gens qui ont fait du jalonnage, ce sont des promoteurs, des géologues. Ils connaissent une partie de leur métier mais ils n'en connaissent pas suffisamment pour mener à terme l'entreprise comme telle. C'est ce qui fait que cela va cahin-caha. Je me suis toujours intéressé â ce journalisme et j'ai dû régulièrement intervenir, ne serait-ce, par exemple, qu'au plan des communications. Il n'y a pas de règle standard pour expliquer une découverte minière. D'accord? 11 y a eu des cas, notamment des cas qui impliquaient des sociétés d'État, des filiales de la SOQUEM, où les cheveux dressaient vraiment sur la tête.

Ce serait le genre de normes que la commission devrait adopter de façon assez officielle, notamment après discussion avec la Bourse de Montréal qui régit aussi ce marché, après discussion avec l'Association des prospecteurs. J'entends des bruits derrière moi. Peut-être a-t-on un autre point de vue, mais je puis vous dire qu'il y a des façons très différentes de publier des résultats de forage. Une filiale d'une société d'État nous annonçait, à un moment donné, qu'elle avait découvert 1 000 000 de tonnes à 0, 40 en or à Val-d'Or. On n'a plus jamais entendu parler de rien, évidemment, on n'avait pas les carottes, les intersections.

C'est comme cela qu'il faut que ce soit divulgué.

Je pense que la direction actuelle de la commission devrait écouter certaines recommandations, notamment certaines qui ont été faîtes ici où on a suggéré qu'il y ait des comités mixtes, ne serait-ce que de dialogues, avec les intervenants du milieu, pour qu'on discute un peu. Il faut comprendre ce qui se passe de l'autre côté de la barrière. Vous savez, j'ai un journal financier. II n'y a aucun doute que j'ai une lourde responsabilité, mais mes ressources sont limitées. J'ai une entreprise qui doit faire des profits, premièrement. Deuxièmement, les journalistes financiers ne sortent pas de l'université, il faut les former. Ce sont des gens qui ont des "cours en finances", entre guillemets, ou des cours en économie -ils sont plus nombreux - et il faut leur expliquer ce qu'est la Bourse et comment fonctionnent les marchés financiers, que c'est très complexe; il y a la Bourse, les marchés obligatoires, les marchés à terme, etc. Ce qui arrive souvent, c'est qu'après un an ou deux, ils trouvent cela trop compliqué et ils s'en vont ailleurs. J'ai essayé, après les audiences qui ont débouché sur une décision assez estomaquante, de renouer le dialogue avec la commission,, J'ai ici un document où il y a eu échange de lettres et j'ai dit à la commission? Écoutez, ce que vous venez de faire me porte préjudice, parce que les gens ne veulent plus faire de journalisme. Ils vont s'occuper de leur portefeuille personnel et Ils ne prendront plus le risque de parler de compagnies dans lesquelles ils peuvent avoir un intérêt, ne serait-ce que comme journalistes. Pourquoi ne rouvre-t-on pas le débat? Pourquoi ne se rencontre-t-on pas? Et pourquoi est-ce que vous ne faites pas des audiences? La commission a ditï Non, il n'est pas question de faire des audiences. Vous avez porté en appel à la Cour provinciale la décision que nous avons rendue. Attendons que le jugement soit rendu. Cet événement date presque déjà d'une année et l'événement initial, quant à la décision, date de février 1986. Nous sommes maintenant presque en avril 1987. La convocation datait d'octobre 1985.

Je pense que les comités de consultation pourraient avoir du bon sens à condition qu'on veuille comprendre ce qui se passe dans la pratique. Si la commission veut continuer à adopter une politique d'intransigeance, une politique que je qualifierais de jacobiniste, parce qu'il y a absence de contrôle politique au palier supérieur, elle va finir par en payer le prix, car les tribunaux supérieurs vont se réveiller à un moment donné et vont dire - et c'est déjà arrivé: Écoutez, ceci, c'est une enquête non constitutionnelle. La responsabilité personnelle des membres de la commission est engagée. Voici combien il vous en

coûtera pour avoir porté préjudice à telle entreprise ou à tel individu. C'est ce qui va arriver d'ici peu,

Le Président (M. Lemieux): Merci, M. Forget. M. le député de Lafontaine, une question brève, s'il vous plaît!

M. Gobé: Je vais être bref étant donné que j'ai pris pas mal de temps avec l'autre intervenant.

M. Forget, vous suggériez il y a quelque temps, vous disiez: La commission a un pouvoir de police et un pouvoir de juge en même temps; il faudrait remettre cela à la Cour provinciale, peut-être. Mais est-ce que vous ne craignez pas - je m'interroge et vous avez répondu à ma question quasiment -que cela va prendre deux ou trois ans avant d'avoir des jugements? Que faites-vous pendant ce temps-lâ? Oans le cas où il y a injonction, la compagnie reste sous injonction pendant quoi, six mois, sept mois...

M. Forget (Jacques): Est-ce que vous êtes juriste de formation?

M. Gobé: Non, non, je ne suis pas juriste, mais je connais les cours, je sais que cela prend du temps.

M, Forget (Jacques): Si vous étiez juriste, vous auriez la réponse, parce que, dans le Code de procédure civile, vous savez qu'il y a des dispositions pour des injonctions interlocutoires ou même pour des injonctions ultra rapides, interlocutoires provisoires, comme on les appelle, où on n'entend même pas l'autre partie et l'autre partie fait appel et est entendue après. Le processus de droit commun en matière de procédure existe déjà dans les cas qu'on connaît. La Commission des valeurs mobilières a, en matière financière, un pouvoir exorbitant qui n'existe nulle part ailleurs en droit...

M. Gobé:... celle-là, on n'a pas beaucoup de temps. Ma question était...

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Lafontaine, voulez-vous laisser continuer, s'il vous plaît?

M. Forget (Jacques):... même pas dans les causes... Vous savez, dans les causes de meurtre... Je pense que je réponds à votre question. Vous savez, même dans des causes de meurtre, on peut remettre des gens en liberté. On redonne au citoyen le pouvoir de fonctionner normalement dans la société, même dans des causes de meurtre. Or, dans des causes strictement financières, bien que ce soit important, mais, parfois, les capitaux engagés sont assez insignifiants, il y a interruption des droits immédiatement. Là, joue ce qu'on appelle un supposé pouvoir discrétionnaire. Je connais des cas qui sont blanc bonnet, bonnet blanc. Il y a peut-être des gens qui ont moins d'expérience dans certains cas derrière certaines sociétés, mais c'est vraiment blanc bonnet, bonnet blanc. Il y en a qui passent et il y en a qui ne passent pas. (21 h 15)

M. Gobé: Écoutez, cela n'enlève pas le droit d'appel, cela n'enlève pas l'attente d'être sur le rôle et puis...

M. Forget (Jacques): Oui, cela enlève le droit d'appel et je vais vous dire pourquoi, parce que vous avez le choix d'appeler devant la commission ou d'appeler de la décision de la commission. Moi je peux vous dire que je...

M. Gobé: Dans le cas où cela irait devant un tribunal, comme vous le suqqériez, là, on entre dans un processus judiciaire normal, avec tout ce que cela comporte de délais, de temps, d'appels, d'auditions. Et qu'est-ce qu'on fait d'une entreprise qui a des problèmes et qui vit une situation dangereuse pendant ce temps-là? Est-ce qu'on la ferme?

M. Forget (Jacques): Non, je pense qu'il vous manque des éléments pour comprendre.

M. Gobé: II me semble que vous avez répondu vous-même. Vous dites que, depuis 1986, vous êtes en cour avec la commission, ce n'est pas réglé encore. Pendant tout ce temps-là, vous imaginez les préjudices que cela peut créer.

M. Forget (Jacques): Non, mais, moi, j'ai demandé et j'ai obtenu la levée de la décision de la commission. Il aurait peut-être été plus sage que la commission, percevant certaines choses, porte tout le débat devant un tribunal indépendant, exigeant, si elle le croyait à propos, que certaines mesures soient prises immédiatement si elle croit l'intérêt public menacé. C'est ce qu'elle a fait, mais à rebours, si vous voulez, en imposant sa décision. Alors, plutôt que de demander qu'il y ait des mesures interlocutoires de prises, c'est moi qui ai demandé que, provisoirement à tout le moins, jusqu'à la décision finale, les mesures qui me concernaient soient levées. Cela revient un peu au même.

Je pense que c'est important que vous saisissiez que, compte tenu de la complexité du système, du développement, du nombre d'interventions et du pouvoir extrême qui se concentrent au niveau de la présidence de la commission, il est vraiment opportun de ramener vers le pouvoir judiciaire, vers une tierce partie, tout ce qui a trait aux droits des intervenants dans le marché des valeurs mobilières. Cela n'enlève rien à la protection

du public parce que la commission, comme organisme de surveillance et de contrôle, pourra toujours plaider et arguer qu'il y a imminence de danger tellement important, que le droit du public est tellement menacé qu'il faut prendre des mesures provisionnelles. Alors, elle devra toutefois le plaider plutôt que ce sait l'inverse, qu'elle applique une mesure et que les gens se présentent immédiatement en Cour provinciale pour avoir une mesure provisionnelle pour faire lever telle ou telle ordonnance, telle ou telle décision. C'est simplement une question de mécanique.

Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie, M. Forget. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Alors, comme il n'y a pas d'autres interventions... Oui, M. - le député de Montmorency.

M. Séguin: M. Forget, que pensez-vous de certaines allusions, reproches ou accusations formulés à la Commission des valeurs mobilières - devant nous, en tout cas - selon lesquelles la commision intervenait, que ses décisions étaient souvent des interventions économiques dans le processus financier et non pas des mesures de contrôle pour protéger l'intérêt public, mais que cela avait un effet pratique à influencer le cours de... D'ailleurs, votre prédécesseur, je pense... Il y a une allusion dans leur mémoire, aussi, selon lesquelles le rôle de la commission était une intervention dans le processus économique ou financier. Le voyez-vous un peu comme cela ou non?

M. Forget (Jacques): Je ne comprends pas très bien ce que veut dire le processus économique ou financier.

M. Séguin: Par exemple, il y a une discrétion dans les décisions de la commission qui fait que, si la commission décide de ne pas permettre, par exemple, aux prédécesseurs dans la compagnie d'émettre aux particuliers leurs logiciels, c'est une décision subjective de contrôler le marché des valeurs mobilières dans...

M. Forget (Jacques): Écoutez, moi, je reviens à l'intervention initiale que j'ai faite, c'est que, une fois que la commission comme organisme de surveillance et de contrôle en arrive à la conclusion qu'un individu doit avoir tel ou tel droit, à mon avis, elle ne devrait plus avoir le pouvoir d'imposer sa décision, elle devrait référer le tout à un tribunal et, selon le degré d'urgence de la situation, elle devrait demander d'être entendue soit dans le cours normal des vacations du tribunal, soit de façon urgente. C'est un peu ce qui se passe en droit du travail où, si vous voulez, il y a des commissaires-enquêteurs, il y a différents paliers et il y a un tribunal du travail, qui est une division de la Cour provinciale ou de la Cour supérieure - je ne m'en souviens plus - mais, quand il y a un problème de jugement, lorsqu'il y a une décision affectant les droits des parties qui est rendue, mais ce ne sont pas les commissaires-enquêteurs qui la posent ou, enfin, le Tribunal du travail a toujours la possibilité d'intervenir.

Écoutez, je ne suis pas du tout un spécialiste du droit du travail, ce n'est peut-être pas une bonne comparaison, mais, au niveau des libertés fondamentales, au niveau des règles de justice naturelle, il m'apparaît évident, compte tenu du développement de l'organisme qu'est la Commission des valeurs mobilières, compte tenu du système, que tout ce qui est judiciaire ou quasi judiciaire, que tout ce qui affecte les droits des parties, les droits et obligations, soit instamment transmis à une autorité indépendante et que ce ne soient pas Ies enquêteurs, qui deviennent partiaux assez rapidement, qui aient à juger des droits des parties. Il y aura une jurisprudence qui pourra s'établir, car là on est obligé de se référer à la jurisprudence américaine. Je ne trouve pas cela très drôle.

Le Président (M. Lemieux): Vous avez terminé, M. le député de Montmorency? Cela va. Nous vous remercions, M. Forget, du journal Finance,

M. Forget: Je ne vous ai pas assommés avec mes dossiers, comme vous pouvez voir.

Le Président (M. Lemieux): Pardon? Nous avons apprécié votre intervention et vos commentaires. Nous vous remercions de vous être déplacé pour venir témoigner devant cette commission. Merci.

Maintenant, je demanderais aux membres de la Commission des valeurs mobilières du Québec de bien vouloir prendre place afin de donner leur réplique. Dans la mesure du possible, eu égard à l'efficacité, sans vouloir restreindre le droit de parole des membres de la Commission des valeurs mobilières, j'apprécierais qu'ils soient les plus brefs possible. Je suis bien conscient, M. le président de la Commission des valeurs mobilières, que vous avez entendu beaucoup de choses. C'est très difficile. Je ne veux pas vous brimer, d'aucune façon. Mais essayez d'être le plus bref possible, s'il vous plaît!

Commission des valeurs mobilières du Québec

M. Guy (Paul): M. le Président, je vais essayer.

Le Président (M. Lemieux): Je vous comprends.

M. Guy: Ce ne sera pas facile.

Le Président (M. Lemieux): Nous vous écoutons.

M. Guy: Je crains que je ne sois obligé dans certains cas de me répéter, c'est-à-dire de répéter ce que j'avais déjà dit devant cette commission. En tout cas, je vais essayer d'être aussi bref que possible.

SI je prends les intervenants dans l'ordre où ils sont parus, l'Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes l'ACCAP, a parlé de chevauchement. Je pense qu'il est important de faire le point sur cette question. II y a une différence fondamentale entre certains organismes. Si on prend l'Inspecteur général des institutions financières ou l'Inspecteur général des banques à Ottawa et la Commission des valeurs mobilières, un des organismes, en fait, a surtout à coeur la solvabilité de l'institution, alors que la Commission des valeurs mobilières, elle, n'a pas du tout cet élément à contrôler. C'est surtout la protection des épargnants et, en fait, s'assurer que l'information circule. Un exemple qu'on peut donner est assez simple. L'Inspecteur général des banques a entre les mains des informations sur la solvabilité d'une banque. Disons qu'il sait qu'une banque a certains problèmes financiers, il ne donnera pas cette information au public, alors qu'une commission des valeurs mobilières, si elle avait cette information, s'assurerait que cette information est rendue publique afin que tous les participants au marché des valeurs mobilières, c'est-à-dire que tous les actionnaires et le public en général puissent être conscients de cette information et réagir en conséquence.

Il y a une différence fondamentale entre les deux organismes. Il est important, je pense, de faire cette distinction. Il n'y a pas de chevauchement du fait qu'il y a deux organismes qui régissent une même institution. La Commission des valeurs mobilières peut fort bien régir l'activité en valeurs mobilières d'une fiducie, alors que l'Inspecteur général des institutions financières peut fort bien régir cette fiducie en ce qui concerne son activité de fiducie. Il n'y a pas nécessairement de contradiction dans cela.

Maintenant, on a parlé des fonds communs, des fonds d'investissement des assurances. La commission a commencé un processus, et c'est pour indiquer que ce processus n'a pas été une imposition de la commission, mais plutôt une interrogation. Le premier avis de la commission concernant les fonds communs des sociétés d'assurances a été publié le 8 février 1985. Nous sommes maintenant en 1987. La commission n'a rien imposé depuis ce temps-là; depuis le début de 1985, elle est en discussion avec l'association, avec les sociétés d'assurances, pour voir s'il n'y a pas moyen d'en arriver à un consensus sur cette question.

La commission est encore d'avis qu'en ce qui concerne les fonds d'investissement des assurances qui sont placés auprès des épargnants par rapport à ceux qui sont placés auprès des entreprises, ils "devraient être soumis aux mêmes rèqles que les autres fonds d'investissement qui sont placés auprès du public. Elle est du même avis en ce qui concerne les fonds d'investissement des fiducies. Notamment, en Ontario, on vient de publier, il y a quelques semaines, un projet de règlement qui abolit la dispense qui a été accordée aux sociétés de fiducie en ce qui concerne leurs fonds communs, c'est-à-dire les sommes mises en commun pour les régimes d'épargne-retraite, les régimes d'épargne-logement et autres régimes semblables. Il n'y a pas de raison aujourd'hui, dans le système de décloisonnement, que ces institutions bénéficient des dispenses qu'elles ont eues dans le passé, dans d'autres conditions.

Maintenant, en ce qui concerne les conseillers en planification financière, là encore, c'est un dossier que la commission a dû examiner parce qu'il n'y avait personne d'autre qui s'intéressait à ce problème-là. Et la commission a eu un certain nombre de plaintes concernant les conseillers en planification financière. Il y a même eu des émissions à la télévision où on a rapporté certains problèmes concernant les conseillers en planification financière. La commission a tenu des audiences publiques avec ses homologues des autres provinces, de l'Alberta et de l'Ontario.

La commission fera éventuellement, en ce qui concerne les conseillers en planification financière, de toute façon, des recommandations au gouvernement. Et le gouvernement prendra la décision sur ce qu'il veut faire concernant cette activité-là, si elle doit être réglementée ou non. Ce n'est pas la commission qui va décider cela. De toute façon, la commission n'a jamais prétendu que son mandat était suffisamment large pour couvrir tous les conseillers en planification financière, c'est tout le contraire. Si on voulait même les réglementer, on en réglementerait seulement une petite partie, alors qu'il y en aurait d'autres qui ne le seraient pas. Et le point de vue de la commission est que tous devraient être réglementés de façon égale. De toute façon, c'est un dossier qui sera éventuellement présenté au gouvernement, qui prendra la décision appropriée. En ce qui concerne l'ACCAP, c'est à peu près tout ce que je voulais dire.

L'intervention de M. Delisle était intéressante sous plusieurs aspects. D'abord, parce que la dernière fois, bien entendu, certains organismes ont contesté le pouvoir

de la commission de publier ou d'adapter des instructions générales, trouvant qu'on en avait trop. M. Delisle, lui, trouve qu'on n'en a pas assez. Je pense que c'est assez intéressant quand même. On en a moins que l'Ontario, mais cela ne veut pas dire... C'est difficile de faire une analyse à partir des chiffres, parce qu'il faut dire qu'au Québec nous avons incorporé plusieurs dispositions des anciennes instructions générales dans le règlement, qui font maintenant partie du règlement sur les valeurs mobilières. On a peut-être moins tendance à réglementer ici qu'en Ontario. Mais cela n'a pas l'air d'être bon, car on nous dit qu'on devrait en avoir plus. Il faudra voir ce qu'on peut faire à ce sujet.

Dans le cas des délais trop longs, M. Delisle a fait une suggestion intessante, mais qu'il serait difficile de mettre en application, compte tenu des chartes des droits de la personnes, aussi bien du Québec que du Canada. La commission a été obligée de mettre en place un système qui distingue d'une façon très nette les pouvoirs délégués au directeur, ou au chef de service qui exerce ces pouvoirs, et la commission elle-même, de façon à ne pas entacher, en fait, le processus de révision d'une décision qui aurait été rendue par une personne qui exerce un pouvoir délégué. Il serait assez difficile, si un délai est trop long, que le dossier soit soumis à la commission. Cela enlèverait en quelque sorte le pouvoir à la personne qui peut rendre la décision et ce serait une intervention de la commission dans le processus de décision d'une personne qui a le pouvoir délégué. Ce serait assez difficile de faire cela.

Ce qui arrive, et je crois que ce sont des cas quand même d'exception - il n'y en a pas beaucoup, sur plus de 700 prospectus l'année dernière, qui peuvent se plaindre de cet élément - dans plusieurs cas ou dans les cas où les délais sont réellement trop longs, je reçois de temps en temps des appels du courtier ou du cabinet d'avocats qui me disent: Qu'est-ce qui arrive avec mon dossier? Il semble que cela traîne un peu. J'appelle le directeur et je lui demande ce qui arrive avec ce dossier. Je n'interviens pas dans le processus de décision, je m'informe en fait de la raison pour laquelle le dossier ne progresse pas plus rapidement.

On ne peut pas être plus d'accord avec M. Delisle sur le fait qu'on devrait avoir plus de spécialistes dans certains domaines, mais je dois dire que, comme toutes les autres commissions de valeurs mobilières, ce n'est pas facile et ce n'est pas seulement un manque de postes. Ce n'est pas facile de recruter des spécialistes, car il faudrait avoir des spécialistes dans plusieurs domaines. (21 h 30)

Aussi, la plupart des commissions de valeurs mobilières, aussi bien au Canada qu'ailleurs, ont-elles surtout des généralistes, car on connaît la difficulté de trouver des spécialistes dans plusieurs domaines et de les embaucher pour un organisme public. Maintenant, il y a la procédure - M. Delisle en a fait mention - suivant laquelle on peut faire appel d'une décision d'un directeur auprès de la commission, et la commission, au Québec, est reconnue comme pouvant donner des réponses très rapidement. La commission siège, pour réviser une décision d'un directeur, dans des délais très très courts. Elle a siégé même en fin de semaine, entre Noël et le Jour de l'an. À plusieurs reprises, les gens peuvent en appeler d'une décision d'un directeur. Ils peuvent avoir une audience le lendemain, si c'est une affaire assez urgente. Alors, je pense que c'est reconnu et, dans la communauté financière, les avocats et les courtiers en sont conscients. Il n'y a pas de problème à avoir une révision d'une décision d'un directeur. Si la chose est urgente, cela va se faire très très vite.

Maintenant, l'Association pour la protection des investisseurs du Québec. Là, j'en aurais beaucoup à dire et je vais essayer de limiter mon intervention, vu que le temps est quand même... Il est assez tard. La première remarque, c'est qu'on est dans un régime de réglementation qui n'est pas unique. Le régime de réglementation sur les valeurs mobilières au Québec, ce n'est pas en vase clos. C'est un régime de réglementation qui est semblable en Amérique du Nord et il serait difficile, sinon impossible, de commencer à remettre en question tout ce régime au Québec, alors qu'ailleurs on aurait un régime différent. Je pense qu'il faudrait faire attention de ne pas essayer de tout changer. Cette association a mentionné que le Québec était à la remorque de l'Ontario et cela m'agace beaucoup.

Le Président (M. Lemieux): Nous nous en doutions, M. Guy, que cela vous agaçait.

M. Guy: Cela m'agace beaucoup parce que c'est tout à fait le contraire. Je pense que cela dénote le peu de connaissances de la personne qui a présenté le mémoire. Je pense que, dans tout le Canada, la commission du Québec est reconnue pour son leadership. D'abord, en ce qui concerne les innovations, le prospectus simplifié, qui est maintenant utilisé partout au Canada, a été mis en place par la Commission des valeurs mobilières du Québec. La division internationale à la Bourse de Montréal, c'est-à-dire la possibilité pour une société étrangère de s'inscrire à la Bourse de Montréal avec des règles, des obligations d'information continue plus simplifiées, c'est également un élément qui a été mis en place par la commission et qui sera maintenant suivi par la Bourse de New York. La Bourse

de New York a présenté à la Commission des valeurs mobilières des États-Unis un projet semblable. L'inscription permanente des représentants, on est les seuls au Canada à avoir cela. C'est encore une innovation du Québec. Je reviendrai tout à l'heure sur d'autres questions dans ce secteur-là.

On a parlé également de Canadian Tire. Je pense qu'il faut expliquer un peu le processus. Canadian Tire, d'abord, c'est une audience conjointe des deux commissions: Québec et l'Ontario. Il y a une collaboration très étroite entre la Commission des valeurs mobilières de l'Ontario et la Commission des valeurs mobilières du Québec en ce qui concerne les offres publiques. Quand il s'agit d'une offre publique qui est faite essentiellement sur le territoire de l'Ontario, "l'entente", entre guillemets, entre les deux commissions, c'est que la commission du Québec laisse la commission de l'Ontario régler, en quelque sorte, le problème: soit qu'il y ait une audience conjointe, soit que le problème soit réglé essentiellement par la commission de l'Ontario, mais quand même en collaboration et discussion avec la commission du Québec. Quand l'activité prend surtout place au Québec, c'est le Québec qui s'en occupe. On a vu, dans le cas de Canadian Tire, que c'était surtout à l'initiative de l'Ontario avec consultation du Québec; il y a eu une audience conjointe. Dans le cas de Cascades, c'est à l'initiative du Québec que l'affaire s'est faite: une audience conjointe avec l'Ontario qui a eu lieu à Montréal. Dans le cas de Campbell Resources, dernièrement, c'est le Québec qui a réglé entièrement le problème avec l'accord de l'Ontario, parce que 90 % des actionnaires étaient au Québec» Il faut penser dans ces cas-là qu'on n'est pas en vase clos et qu'il y a nécessité d'uniformité; les deux commissions travaillent en étroite collaboration dans ces questions.

En ce qui concerne l'information, là encore, c'est assez difficile de comprendre les propos de cette association parce que nous sommes la seule commission au Canada qui fasse de l'information. La commission publie une foule de dépliants et de brochures. Elle participe à des salons, aussi bien à Montréal et à Québec qu'en régions, de façon à informer le plus possible les épargnants sur divers sujets. Là-dessus, il n'y a pas une autre commission au Canada qui fasse cela. On n'est pas à la remorque de l'Ontario ou on ne fait pas ce que l'Ontario fait, on est de beaucoup en avance, même. La commission de l'Ontario est venue visiter notre commission il y a quelque temps. Elle a pris des copies de toutes les brochures et dépliants qu'on avait pour essayer d'imiter ce qu'on faisait dans ce secteur. Je pense qu'il serait difficile de dire qu'on suit les autres.

Maintenant, en ce qui concerne les actions subalternes, c'est une autre question qui a été soulevée. Je voudrais faire le point là-dessus une fois pour toutes. En ce qui concerne les subalternes, toutes les modifications faites dans le REA concernant les actions subalternes l'ont été à la suite des recommandations que la commission a faites au gouvernement. La commission s'est toujours préoccupée des actions subalternes. Ce n'est pas parce que ce n'est pas publié dans les journaux que la commission ne fait rien. La commission a également demandé à la Bourse de Montréal de mettre en place des mécanismes de protection bien avant la déclaration dans les journaux de la Bourse de Toronto disant que la Bourse de Toronto était pour mettre en place des mécanismes de protection concernant les actions subalternes. Je pense que c'est un ensemble d'éléments qui ont été complètement ignorés dans ce mémoire. Je pense que c'est un manque de connaissance du secteur. Je ne sais pas où on a pris ces informations.

Maintenant, en ce qui concerne le décloisonnement, c'est un autre secteur. Les règles sur les conflits d'intérêts; j'ai dit dans une conférence qu'on serait peut-être prêt à suivre plusieurs des règles que l'Ontario avait annoncées, cela ne veut pas dire qu'il n'y avait pas de rèqles au Québec. Il y en a en place depuis 1983. Alors, on ne suit pas encore l'Ontario là-dessus. Il y a déjà des règles en place. On peut toujours Ies améliorer. Si les autres nous suggèrent de meilleures règles, on est prêt encore à les examiner.

On est revenu souvent sur la question de l'utilisation des fonds. Je sais que cette question préoccupe bien des gens, à savoir qu'est-ce qu'on fait avec les fonds qu'on a sollicités auprès du public. Rien entendu, je l'ai dit, et je n'ai pas besoin de le répéter parce que le président de la commission a répété ce que j'avais dit lors de ma dernière comparution, je pense qu'il est clair qu'il ne serait pas possible pour la commission d'examiner chaque cas, chaque émetteur pour savoir ce qu'il a fait des fonds qu'il a sollicités. Je pourrais donner l'exemple de la publicité de Speedy Muffler où, quand on a remplacé le silencieux, il y a quelqu'un qui court après la voiture pour s'assurer que tout est bien en place. Je pense que, s'il fallait faire cela, cela nous prendrait un nombre d'inspecteurs absolument incroyable pour aller voir dans chaque entreprise ce qu'on a fait des fonds. Ce n'est pas possible de faire cela. Cela ne veut pas dire qu'on ne fait pas une certaine vérification. Je pense que vous l'avez dit tout à l'heure, la vérification qu'on fait, c'est tout ce qu'on peut faire à l'heure actuelle.

Maintenant, le nombre de courtiers. On a mentionné qu'il y avait moins de courtiers, qu'il ne s'était pas créé de nouvelles maisons de courtage au Québec, mais je pense que cela est un phénomène qui n'est pas limité au Québec. La concentration dans le domaine

du courtage, c'est un phénomène mondial. Ce n'est pas seulement au Québec. Le nombre de courtiers de plein exercice diminue, il n'augmente pas. Par contre, il faudrait souligner, quand on a dit cela, qu'au Québec on a le plus grand nombre de nouveaux courtiers spécialisés. On en a beaucoup plus qu'en Ontario, beaucoup plus qu'ailleurs. On a un grand nombre de courtiers qui sont spécialisés soit dans les fonds d'investissement, soit dans les contrats d'investissement, soit dans d'autres secteurs. Il y a eu un développement absolument incroyable dans ce secteur au Québec.

Je sais que mon... J'en aurais tellement à dire. Les SPEQ. Cela, c'est une autre affaire parce que les SPEQ, je peux en parier en connaissance de cause parce que j'ai participé justement aux discussions qui ont mené à la mise en place du régime des SPEQ. Les SPEQ, c'étaient des sociétés qui ne devaient pas être de grandes sociétés. C'étaient de petites sociétés. Le but des SPEQ justement, ce n'était pas d'en faire des sociétés cotées en Bourse. C'étaient des petites. C'était pour que les propriétaires de l'entreprise ou les employés puissent investir dans leur entreprise et avoir un dégrèvement fiscal pour cela. Cela n'a jamais été l'intention du gouvernement - la politique fiscale n'a jamais dit cela - que les SPEQ pourraient solliciter l'épargne de l'ensemble du public et mettre cela dans une entreprise. C'était tout le contraire. C'était que les propriétaires d'entreprises, bien souvent, n'investissent pas dans leur entreprise parce que leurs fonds sont bloqués et ils préfèrent le faire d'une autre façon. C'était une façon de leur permettre d'investir dans leur entreprise tout en ayant un dégrèvement fiscal.

Il ne faut pas blâmer la commission parce qu'il n'y a pas eu de SPEQ cotées en Bourse. On n'a rien du tout à voir avec cela. Les sociétés cotées en Bourse, on dit qu'il y en a un nombre plus petit au Québec. Oui, mais au Québec c'est un développement qui est très récent. II faut dire que les sociétés qui ont fait appel à l'épargne du public au Québec, on ne va pas loin. On a commencé il y a quatre ou cinq ans. Il n'y en avait presque pas avant cela. Ce n'est certainement pas surprenant qu'on en ait moins qu'ailleurs. Cela ne veut pas dire qu'on ne rattrapera pas les autres, mais on en a moins. C'est vrai. C'est une situation normale et elle s'explique assez facilement.

Je vais passer assez vite. Je veux juste dire quelques mots sur l'intervention de M. Forget. Sur la question des interdictions, je pense qu'il est faux de dire - je ne dis pas que c'est M. Forget qui a dit cela, mais M. Forget a parlé des interdictions - que les règles de justice naturelle ne sont pas respectées. M. Forget a bien dit que la commission exerçait ce pouvoir avec discernement et avec vigilance, et c'est exact, et les règles de justice naturelle sont respectées. La loi permet à la commission de rendre la décision avant d'entendre l'autre partie, mais on doit l'entendre dans les quinze jours.

Ce n'est pas très différent d'une injonction interlocutoire où l'injonction peut être rendue, prononcée par le tribunal sans entendre l'autre partie. Ce sont des cas d'urgence. Dans les cas d'urgence, la commission n'a pas l'obligation d'entendre l'autre partie avant de prononcer son interdiction. Dans les autres cas où l'urgence est moins grande, la commission, habituellement, entend l'autre partie avant de prononcer l'interdiction. Maintenant, sur la question des comités mixtes, la commission a déjà suivi ce processus dans l'adoption de l'instruction générale no 4 sur les sociétés d'exploration minière. La commission a suivi un long processus qui a duré plus d'un an. Un comité formé de géologues, l'Association des prospecteurs, en fait, tous les gens qui étaient concernés par cette question ont travaillé avec la commission à mettre en place cette instruction générale.

C'est une instruction générale qui a reçu le consensus de l'ensemble de ces gens. C'est dommage, M, Forqet a parlé de la décision de 19B6. Je ne voulais pas en parler. Mais la décision de février 1986 a été rendue par la commission et elle a été portée en appel par M. Forget. Maintenant, on est rendu, aujourd'hui, en mars 1987. Cela n'a pas été entendu en appel. Je ne suis pas responsable de cette situation. Je ne veux pas discuter de la décision. Elle a été portée en appel. Le tribunal jugera si la commission avait raison ou non. Après cela, on verra. Mais jusqu'à ce que l'appel soit entendu, je n'ai rien à dire là-dessus.

Il y a toujours une possibilité. M. Forget l'a mentionné. Je pense que c'est important. Quand une décision est rendue par la commission, il y a toujours possibilité que la décision soit suspendue pendant appeL La même possibilité existe quand une décision est rendue par un directeur. Une personne peut s'adresser à la commission pour faire suspendre la décision. Lorsqu'on a eu une demande, la commission a suspendu des décisions des directeurs en attendant leur révision par la commission. Il est toujours possible de faire suspendre une décision soit par la commission, soit par la Cour provinciale pendant qu'on fait appel de cette décision.

M. le Président, je crois que, dans le peu de temps que j'avais, j'ai couvert pas mal tous les points que je voulais couvrir. Si vous avez des questions, je serais certainement prêt à y répondre.

Le Président {M. Lemieux); Nous vous remercions, M. le président de la Commission

des valeurs mobilières. Effectivement, nous devons entendre M. le ministre délégué aux Finances et à la Privatisation. Je permettrai une courte question au député de Bertrand. Une très courte question, M. le député de Bertrand. (21 h 45)

M. Parent (Bertrand): Oui, d'accord. M. le Président, on n'a entendu que quelques commentaires de certaines personnes qui ont à transiger avec la commission. J'aimerais savoir s'il est vrai qu'il y a eu, au cours de la dernière année, une espèce d'enquête ou un sondage par les étudiants des HEC ou de l'Université du Québec auprès de votre clientèle, soit des firmes d'avocats, de courtiers, etc., pour connaître leur satisfaction. Si tel est le cas, est-ce qu'il serait possible d'avoir ces résultats, qui semblaient, selon ce que j'ai entendu, fort intéressants parce que certains auraient aussi livré beaucoup de commentaires dans ce sondage d'opinion ou cette étude de satisfaction de la part de ceux qui transigent avec vous?

Le Président (M. Lemieux): M. le président de la Commission des valeurs mobilières.

M. Guy: La commission a fait faire une étude, pour laquelle elle a donné un contrat après soumissions. Je crois que c'est une équipe des Hautes études commerciales qui fait l'étude pour la commission. On n'a pas encore eu le rapport de cette étude. Je n'ai pas d'idée du contenu, des résultats, parce que le rapport ne nous a pas encore été remis. Il s'agissait surtout d'une étude qui devait servir à la gestion interne de la commission, c'est-à-dire permettre à la commission d'apporter certains correctifs, s'il y avait lieu, dans certains secteurs, ou d'améliorer des services si des services étaient mal perçus ou mal rendus. Je n'ai pas encore les résultats. Alors, je ne peux pas faire de commentaires sur l'étude.

M. Parent (Bertrand): On espère, quand vous les aurez, que vous pourrez nous en faire bénéficier.

M. Guy: Peut-être. Des voix: Ha! Ha!

Le Président (M. Lemieux): M. Guy, est-ce que...

M. Parent' (Bertrand): Vous Êtes très prudent.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Mille-Iles, brièvement.

M. Bélisle: Peut-être que oui ou peut- être que non?

M. Guy: Peut-être que oui, peut-être que non.

Le Président (M. Lemieux): Est-ce que vous pourriez, M. le président... Écoutez, je pense que les membres de la commission... Est-ce que vous pourriez nous le faire parvenir, si c'est possible?

M. Guy: Je ne m'engagerai pas à le faire pour la simple raison, comme je vous l'ai dit - je pense que c'est assez important - que c'est un outii de gestion interne. C'était le but de cette étude. Ce n'est pas une étude pour aider le public. C'est pour aider la commission, dans sa gestion, à savoir: Est-ce qu'elle doit améliorer certains services? Est-ce qu'elle doit ajouter certains services? Est-ce qu'elle doit apporter certains correctifs?

Le Président (M. Lemieux): Mais vous êtes bien conscient, M. le président de la Commission des valeurs mobilières, que le mandat de notre commission est justement de regarder, en vertu de notre règlement, les orientations et les activités de gestion de la Commission des valeurs mobilières.

M. Bélisle: M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Mille-Îles, s'il vous plaît.

M. Bélisle: Je ne veux pas conclure sur une mauvaise note et je ne veux pas relever ce qui a été dit la dernière fois. On a de petites impressions, mais le "peut-être", moi, je ne l'aime pas du tout, mais pas du tout, pas du tout, mais pas du tout. Je pense que le travail qu'on a fait ici a été très sérieux. Le temps qu'on s'est donné ou qu'on a mis des deux côtés de cette commission, c'est pour essayer d'améliorer l'administration d'un organisme public qui est payé par les impôts des citoyens. J'aimerais avoir une réponse positive de votre part, mais pas une réponse où je sens un sentiment de méfiance vis-à-vis de nous autres. J'aimerais, en tant que représentant des contribuables, que vous envoyiez à M. le président de la commission, dans les meilleurs délais - c'est une demande que je formule, M. le Président - le résultat de cette enquête statistique où il ne devrait pas y avoir de secrets d'État. Je ne pense pas que ce soient des secrets d'État qu'on va vous livrer là-dedans. Cela va peut-être nous aider à compléter nos recommandations et cela va peut-être vous aider à vous améliorer, avec notre vision des choses.

Le Président (M. Lemieux): M. le président de la Commission des valeurs mobilières.

M. Guy: Je pense, M. le Président, qu'on ne se comprend pas. Il y a une incompréhension. Ce n'est pas du tout une question... Je pense que tout le monde, moi le premier, trouve l'exercice ici très important. Cela n'a rien à voir avec cela. Je pense que c'est comme n'importe quelle entreprise qui, à un moment donné, fait faire une étude pour l'aider dans sa gestion. Est-ce qu'on doit rendre cette étude publique? Moi, je ne le pense pas. Je pense que c'est ça l'affaire. C'est une question d'outil de gestion interne. C'est cela la question. Ce n'est pas une question de méfiance. Ce n'est pas de dire: Est-ce qu'on devrait donner le rapport à quelqu'un? Il s'agit de savoir si une entreprise va dévoiler publiquement: Voici ma gestion; il y a telle faille; je dois l'améliorer à tel endroit. Je ne suis pas convaincu et je pense que c'est ça l'affaire.

Le Président (M. Lemieux): Écoutez, vous n'êtes pas sans savoir que nous aurions le pouvoir de vous demander ce document en vertu de la Loi sur l'Assemblée nationale. On n'aurait qu'à présenter une motion. Ce n'est pas l'intention de cette commission de le faire. Je pense qu'on a procédé avec beaucoup de collaboration et de concertation de part et d'autre.

Nous avons pris sous réserve la demande du député de Mille-Îles. Je verrai ce que les autres membres de la commission auront à dire. Nous allons entendre tout à l'heure M. le ministre délégué à la Privatisation. Mais l'exercice de cette commission se veut dans un cadre beaucoup plus communicatif, vous le comprendrez. Elle ne veut pas, et je l'ai dit dès le début, jouer un rôle d'enquêteur. Elle est là tout simplement pour respecter son mandat réglementaire qui lui a été donné dans le cadre de la réforme parlementaire.

Je vais conclure là-dessus. J'inviterais M. le... Je vous remercie d'abord, M. le président de la Commission des valeurs mobilières de vous être déplacé, de nous avoir fait part de vos observations qui, je vous l'avoue, sont très enrichissantes. Je ne voudrais pas que vous ayez l'impression que cela se termine sur une mauvaise note. Je ne le crois pas. Comme le dit le député de Mille-Îles, ce n'est pas fini. Nous allons maintenant entendre M. le ministre délégué à la Privatisation et aux Finances. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Guy: Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): M. le ministre.

M. Fortier: Est-ce qu'on doit terminer automatiquement à 22 heures ou si on peut déborder de quelques minutes?

Le Président (M. Lemieux): Non. Je crois que nous aurons te consentement pour vous entendre en totalité. Il y a plus de deux heures que vous attendez, M. le ministre.

M. Fortier: Oui.

Le Président (M. Lemieux): Depuis le début que vous suivez les travaux de cette commission, je crois qu'il y aura effectivement consentement pour que nous ayons à vous entendre en totalité, M. le ministre.

M. Pierre-C. Fortier

M. Fortier: Bien, ce n'est pas pour moi. C'est pour vous.

Mes premiers mots sont pour féliciter les deux côtés de la Chambre, comme on dit. Quand j'étais dans l'Opposition, alors que nous avions changé le règlement, j'avais souhaité à maintes reprises moi-même qu'une commission puisse, en l'absence du ministre responsable, étudier un sujet comme celui-là. Je dois dire que j'ai suivi les débats de loin mais que je les ai suivis quand même. Je m'en réjouis parce que ce ne sont pas des sujets qui sont faciles. Comme vous avez pu le voir, ce sont des sujets techniquement difficiles. L'audition que vous avez eue des différentes personnes qui sont venues ici a pu donner aux membres de la commission un éclairage qui vous permettra de faire des recommandations, le cas échéant, à l'Assemblée nationale.

Je voudrais que mon intervention soit très claire. Je ne voudrais pas intervenir puisque les règles - excusez ma voix, M. le Président. J'ai eu une très mauvaise grippe la semaine dernière - de la commission voulaient justement qu'une commission parlementaire puisse étudier un sujet en l'absence du ministre. Alors, je crois que l'intention des nouveaux règlements de la Chambre voulait justement permettre aux membres d'une commission de faire des recommandations sans égard nécessairement à ce que le gouvernement pouvait penser.

Mais, lorsque vous m'avez invité, j'ai quand même cru que cela pourrait être utile de vous donner quelques éclairages sur ce que je pouvais peut-être penser sur certains aspects. Vous m'aviez posé deux questions en particulier. D'une façon générale, comme vous le savez, M. le Président, j'aurai à faire des recommandations au gouvernement avant le mois de janvier 1988. Le rapport sera déposé à l'Assemblée nationale. Le législateur a voulu qu'avant janvier ]988 j'aie à faire des recommandations précises sur la loi.

Je dois vous dire qu'après avoir écouté et après avoir étudié le dossier moi-même je ne crois pas qu'il faille faire des changements qui seraient d'ordre substantiel, c'est-

à-dire de changer la loi de fond en comble, Je crois qu'il y a peut-être des ajustements, il y a peut-être des orientations à donner. Et je voudais peut-être aborder le sujet en tentant de répondre aux deux questions que vous m'avez posées.

La première question était: quelle est la conception du ministre du rôle de la Commission des valeurs mobilières dans les initiatives et le développement des activités de nature économique? Bien sûr, j'ai entendu différents intervenants parler de ce sujet. Il faudrait définir ce qu'est une intervention de nature économique parce qu'on a parlé de réglementation économique, et j'avais l'impression qu'on utilisait le concept pour de très nombreuses applications, autant pour un règlement très précis, très détaillé que pour une orientation générale.

J'aimerais tout simplement dire qu'en vertu de l'article 276, bien sûr, la commission est chargée d'administrer la loi. Ce n'est donc pas le ministre qui a la responsabilité de l'administration de la loi. Cela vaut autant pour l'Inspecteur général des institutions financières. Ce dernier est chargé de l'administration de la loi, mais c'est la commission qui en est responsable.

Vous connaissez la mission de la commission puisque vous en avez étudié les différents objectifs qui sont dans la loi même. On a fait allusion à ses nombreuses attributions et en particulier au fait que la commission peut, en vertu de l'article 274 de la loi, établir des instructions générales définissant les exigences de l'application de l'article 276, à l'intérieur de la discrétion qui lui est conférée, et cette discrétion est très grande.

À mon avis, la mission principale de la commission est de protéger les épargnants; je crois que c'est très clair. La commission a également comme fonction de s'assurer de la bonne marche du marché des valeurs mobilières. C'est là un objectif qui est difficile à atteindre, bien sûr. La commission pose de nombreux gestes, comme M. Paul Guy vient de vous le dire. Mais, dans la mesure où la commission pose des gestes qui pourraient peut-être aller dans le sens d'une politique économique, ce qu'on appelle en anglais le "policy-making", je crois, à ce moment-là, que le gouvernement ou le ministre responsable devrait être en mesure de donner cette orientation. J'ai peut-être l'impression que c'est ce que plusieurs des intervenants ont voulu dire, M. Forget et d'autres. Autrement dit, dans quelle mesure le gouvernement, qui, en 1983, a délégué à peu près totalement, M. Forget l'a bien signifié... Il n'existe plus de ministère des Institutions financières. Je n'ai plus de fonctionnaires, au ministère des Finances, qui ont la responsabilité des institutions financières. Les responsabilités ont été déléguées totalement à l'Inspecteur général des institutions financières, qui a absorbé la quasi-totalité des fonctionnaires qui étaient au ministère des Institutions financières. D'autre part, le législateur a délégué au président de la Commission des valeurs mobilières l'administration de la Loi sur les valeurs mobilières.

Il reste donc que, selon la loi, le ministre des Finances est quand même responsable de ces lois, mais n'a pas sous ses ordres, de façon tangible, des fonctionnaires, comme on en trouve dans d'autres ministères. Mais, en réponse à votre question, je crois que le gouvernement a certainement une responsabilité dans le secteur de ce qu'on peut appeler la politique économique; j'entends par là, bien sûr, les questions de propriété étrangère. Doit-on ou non permettre à des étrangers de posséder des maisons de courtage au Québec? Doit-on ou non permettre à des étrangers d'acheter des compagnies d'assurances existant au Québec? Je crois que ce sont des questions fondamentales d'orientation économique auxquelles le gouvernement et le ministre de tutelle devraient être en mesure de donner certaines orientations. Je m'en aperçois chaque fois que nous avons des réunions fédérales-provinciales, d'autant plus qu'il y a une nécessité de négocier certains de ces problèmes avec d'autres gouvernements, que ce soit celui de l'Ontario ou le gouvernement fédéral. Il faut donc que le ministre puisse, à un certain moment, donner la direction et la ligne de conduite que le gouvernement désire tracer.

C'est la raison pour laquelle je dis, dans le petit texte que j'avais préparé, que, bien sûr, la commission peut procéder par instructions générales, comme l'y autorise la loi. Je croirais - c'est difficile à définir à ce moment-ci - que dans la mesure où ces instructions générales sont reliées à une politique économique elles doivent être au préalable approuvées par le ministre. Par ailleurs, j'aimerais insister là-dessus, je ne crois que nous voulions revenir à l'état de fait qui existait dans le passé ou dans les années très antérieures - c'est plus récent dans le cas de l'Inspecteur général des institutions financières - où le ministre avait le pouvoir de donner des directives en ce qui concerne le traitement de tel et tel dossier. Autrement dit, la Commission des valeurs mobilières a un rôle quasi judiciaire et a un rôle administratif. Je ne crois pas que l'on veuille revenir à ce qui existait antérieurement, il y a plusieurs années, où le ministre avait peut-être un pouvoir d'intervention. II n'a pas ce pouvoir; je ne crois pas qu'il devrait l'avoir. (22 heures)

Mais, dans la mesure où la commission propose de nouvelles politiques qui peuvent avoir des incidences économiques et qui peuvent également avoir un impact non

seulement sur les sociétés qui oeuvrent dans le secteur valeurs mobilières mais dans d'autres secteurs qui relèvent de l'Inspecteur général des institutions financières - et vous avez entendu aujourd'hui d'ailleurs le représentant du secteur des assurances de ce secteur - je crois qu'à ce moment-là le ministre doit jouer un rôle, et, dans la mesure où on peut définir ce rôle d'orientation économique, je crois que le ministre responsable, au nom du gouvernement, devrait pouvoir intervenir.

En ce qui concerne la deuxième question que vous m'avez posée, à savoir s'il y a lieu d'établir un mécanisme de communication, j'aimerais dire tout d'abord que les relations avec le président sont très faciles. J'ai établi des contacts avec lui. De toute façon, l'article 303 de la loi me permet, en tant que ministre responsable, de demander au président de la Commission des valeurs mobilières de fournir tout renseignement et tout rapport qui me sont nécessaires pour comprendre les activités de la commission. Est-ce qu'on peut se poser la question: Est-ce que, dans la mesure où la commission voudrait traiter de sujets qui pourraient avoir un impact dans le domaine de l'économique ou de l'orientation économique, le ministre devrait, dans la loi, pouvoir compter sur des pouvoirs plus étendus? Je ne suis pas en mesure d'en traiter aujourd'hui. Vous avez entendu les différentes personnes et les différentes associations qui sont venues en commission parlementaire. Vous serez vous-même en mesure de faire des recommandations et je recevrai ces recommandations avec beaucoup d'à-propos. J'ai demandé moi-même au comité consultatif que j'ai formé de se pencher sur cette question. Je ne suis pas sûr qu'il soit nécessaire de faire des amendements à la loi. S'ils étaient nécessaires, ces amendements seraient, de toute façon, très minimes et uniquement pour doter le ministre de certains pouvoirs d'orientation économique vis-à-vis de certaines activités d'importance de la commission.

Le Président (M. Lemieux): Est-ce que vous avez terminé, M. le ministre?

M. Fortier: J'ai terminé. J'avais d'autres aspects, mais étant donné l'heure, M. le Président, j'ai abrégé le texte.

Le Président (M. Lemieux): Est-ce qu'il y a des interventions? M. le député de Bertrand.

M. Parent (Bertrand): Très brièvement, M. le ministre, quand, au haut de la page 6, vous mentionnez qu'à votre avis la mission principale de la commission est d'assurer la protection des épargnants, on est tout à fait en accord. Ce que je comprends mal, c'est l'importance que doit avoir, à mon avis, la volonté politique de vouloir tout mettre en oeuvre en fonction de cette mission principale qu'est la protection des épargnants et je ne sens pas, là-dedans et dans la réponse que vous nous fournissez aujourd'hui, une volonté politique. Elle semble être beaucoup plus en réaction, à savoir si la commission - et je pense que la commission continuera de bien faire son travail -propose des initiatives ou des choses pour assurer davantage cette mission... Par rapport à l'évolution de ce marché, au cours des dernières années, et par rapport à ce qui se présente pour les prochaines années à venir, il me semble fondamental et important qu'un certain leadership soit assuré avec une volonté politique, et je ne la sens pas de votre part en tant que ministre délégué.

Le Président (M. Lemieux): M. le ministre.

M. Fortier: Remarquez bien qu'on ne m'avait pas posé pertinemment la question là-dessus. Il est certain - et je crois que le président de la Commission des valeurs mobilières l'a souligné lui-même - que la protection de l'épargnant amènera la commission et le ministre qui vous parle à proposer des amendements à la loi sur la Commission des valeurs mobilières. C'est donc dire que nous avons déjà, en consultation avec la commission, dégagé certains amendements qui seront requis pour donner plus de "dents" à la loi et que, très bientôt, si vous voulez prendre cela comme un intérêt à cet aspect de la protection de l'épargnant, j'aurai à déposer des amendements à la loi sur la Commission des valeurs mobilières. J'ose espérer le faire prochainement.

Ces amendements toucheront principalement les offres publiques d'achat et tout le secteur des initiés. Je crois que c'est l'un des aspects impartants puisque, comme vous le savez, après ce qui s'est passé à New York - vous n'avez qu'à lire les journaux -et après ce qui s'est passé à Londres en particulier, il est important que nous protégions les épargnants contre les agissements de personnes qui ont accès à une information privilégiée. Lorsque je déposerai ce projet de loi, ces quelques amendements à la loi, vous verrez également que nou3 proposerons à l'Assemblée nationale d'augmenter les pénalités lorsqu'il y aura infraction. On a souligné, je crois, que les pénalités étaient peut-être trop faibles, L'Ontario a déjà proposé des amendements à sa loi dans ce sens. Nous irons exactement dans le même sens puisque les pénalités seront de l'ordre du million de dollars ou de trois à quatre fois les bénéfices qui pourront être encourus par ceux qui auraient été

avantagés par une information privilégiée.

M. le député, je voudrais vous rassurer. Si je n'ai pas insisté là-dessus, c'est que les autres aspects étaient ceux dont je voulais traiter. Mais je voudrais vous rassurer; toutes les initiatives de la commission pour s'assurer de la protection de l'épargnant reçoivent mon entière collaboration.

Si vous me le permettez, M. le Président. On a fait état des ressources dont aurait besoin la commission pour remplir sa mission. Je vous rappellerai que je ne suis responsable de ce dossier que depuis cinq mois. Dès le début, j'ai voulu, comme vous l'avez fait vous-même, comprendre le dossier et voir quels étaient les gestes que nous devions poser. De fait, la commission avait fait des demandes, et deux en particulier dont l'une touchant tout le secteur de l'informatique. À mon avis, c'était une demande très légitime que j'ai transmise au Conseil du trésor. Je n'ai pas reçu l'approbation finale, mais on m'Indique que nous avons obtenu du Conseil du trésor \ un montant de 663 000 $; c'est donc un budget important. Cela permettra à la Commission des valeurs mobilières de se doter d'un système informatique qui lui permettra en particulier de se brancher aux ordinateurs de la Bourse de Montréal, de faire le traitement de données et cela permettra à ses analystes d'avoir accès à la meilleure information.

En ce qui concerne le personnel, j'ai déjà entamé des discussions avec la Commission des valeurs mobilières à ce sujet. Je sais que vous avez posé des questions au président de la Commission des valeurs mobilières. J'ose espérer que votre rapport indiquera ce que les membres de la commission pensent à ce sujet. Je suis en période de réflexion. Soyez assurés que je suis bien conscient que la commission doit traiter de très nombreux dossiers, en quantité beaucoup plus considérable qu'il y a deux ans ou quatre ans. En bon administrateur, il était nécessaire, pour moi, de faire le tour du jardin, de voir ce qui était fait avec le personnel en place. Je peux vous assurer que s'il me fallait retourner au Conseil du trésor pour obtenir des sommes d'argent supplémentaires, si les besoins sont confirmés, à ce moment-là, c'est un geste que je poserai avec beaucoup de plaisir.

Le Président (M. Lemieux): Est-ce qu'il y a d'autres interventions ou d'autres questions à poser à M. le ministre? Comme il n'y a pas d'autres interventions, M. le ministre, je vous remercie de nous avoir fait état de notes relativement à la consultation particulière que nous tenons dans le cadre des activités, des orientations et de la gestion de la Commission des valeurs mobilières. Nous vous remercions de votre présence et de votre collaboration. M. Fortier: Merci.

Le Président (M. Lemieux): Nous ajournons sine die les travaux de la commission.

(Fin de la séance à 22 h 9)

Document(s) associé(s) à la séance