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Version finale

33e législature, 2e session
(8 mars 1988 au 9 août 1989)

Le jeudi 14 avril 1988 - Vol. 30 N° 4

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Ministère des Finances (Ministre délégué aux Finances et à la Privatisation)


Journal des débats

 

(Dix heures huit minutes)

Le Président (M. Lemieux): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission du budget et de l'administration commence ses travaux ce matin. Nous sommes réunis afin de poursuivre l'étude des crédits budgétaires du ministère des Finances pour l'année financière 1988-1989, soit les progammes 1 à 5 et 8. M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Hamel (Sherbrooke) remplace M. Fortin (Mar-guerrte-Bourgeoys).

Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le secrétaire. Une période de quatre heures a été allouée à l'étude des crédits de ces programmes en deux blocs, soit deux heures trente ce matin et une heure trente cet après-midi. Il a été convenu avec le représentant de l'Opposition et les parlementaires du groupe ministériel que nous allions débuter par les déclarations d'ouverture ou remarques préliminaires. Nous allons ensuite consacrer une enveloppe de deux heures sans temps déterminé à la Caisse de dépôt et à Loto-Québec, en un premier temps, pour poursuivre dans l'après-midi avec les crédits du ministère des Finances.

Dans un premier temps, j'inviterais M. le ministre des Finances à nous faire ses remarques préliminaires. M. le ministre des Finances, s'il vous plaît.

Remarques préliminaires M. Gérard D. Lévesque

M. Levesque: M. le Président, membres de la commission, M. le secrétaire, nous étudions aujourd'hui les crédits budgétaires du ministère des Finances pour l'exercice financier 1988-1989. En premier lieu, M. le Président, permettez-moi d'attirer votre attention sur le fait que les crédits à voter pour les programmes 6 et 7, c'est-à-dire ceux de l'Inspecteur général des institutions financières et ceux de la Commission des valeurs mobilières du Québec, ont été discutés et adoptés hier avec la participation de mon collègue, le ministre délégué aux Finances et à la Privatisation. Dans ce cas, nos discussions n'auront pas à porter sur ces crédits.

En conséquence, le document que vous avez en main, je pense - oui, celui-là - les membres de la commission également...

Le Président (M. Lemieux): Effectivement, M. le ministre. L'ensemble des membres de la commission a ce document.

M. Levesque: Alors, ce document ne fait pas référence aux crédits de ces programmes. Je tiens également, M. le Président, comme vous l'avez évoqué vous-même, à souligner que MM. Jean Campeau, président-directeur général de là Caisse de dépôt et placement du Québec et David Clark, président de la Société des loteries et courses du Québec, et quelques-uns de leurs collaborateurs et collaboratrices - ils sont peu nombreux - sont présentement avec nous et, comme le veut la tradition, ils pourront répondre aux questions que les membres de cette commission jugent à propos de leur poser.

Avant que nous commencions nos discussions, permettez-moi d'exposer brièvement certains éléments significatifs tant sur la structure administrative du ministère des Finances que sur les crédits eux-mêmes que nous aborderons plus en détail, si je comprends bien, cet après-midi.

Vous trouverez dans le document que nous vous avons remis le nouvel organigramme du ministère des Finances. On y observe que certaines modifications organisationnelles ont été apportées au secteur des politiques fiscales ainsi qu'au bureau du Contrôleur des finances. Au cours des années précédentes, le secteur des politiques fiscales comptait trois directions: la Direction des politiques de taxation, celle de l'analyse et des prévisions fiscales et celle des relations financières intergouvernementales. À celles-ci, s'ajoutait, sous la responsabilité immédiate du sous-ministre, la Direction générale de la recherche économique.

Depuis, nous avons décidé de regrouper les trois directions du secteur des politiques fiscales sous deux directions générales, soit la Direction générale des politiques financières intergouvernementales et de l'analyse fiscale et budgétaire, et la Direction générale des politiques de taxation et prévision des revenus autonomes. Quant à la Direction générale de la recherche économique, elle est demeurée intacte et relève, maintenant, du sous-ministre adjoint aux politiques fiscales. Ces regroupements ont été effectués afin de mieux intégrer nos travaux en regard des développements rapides et majeurs qui se produisent dans le secteur de la fiscalité tant des entreprises que des particuliers. On peut penser ici a la réforme fiscale québécoise, à celle du gouvernement fédéral et enfin à la réforme fiscale américaine.

Maintenant, vous trouverez dans l'organigramme la nouvelle structure administrative du bureau du Contrôleur des finances. L'ancienne structure datait de cinq ans; l'analyse du fonctionnement des secteurs d'activité du bureau du Contrôleur des finances a permis de faire ressortir certaines améliorations souhaitables sur le plan des systèmes d'information et d'inter-

prétation, ainsi que sur le plan de la gestion de l'information.

Les objectifs de cette réorganisation se résument ainsi: amélioration des services à la clientèle - c'est-à-dire que notre clientèle, ce sont les ministères et les organismes - clarification des rôles et des responsabilités en matière de vérification et enfin, amélioration de la gestion de l'information. Ainsi, la Direction générale des systèmes d'information fournit maintenant tout le soutien informatique autre que celui nécessaire à SYGBEC. S-Y-G-B-E-C, pour les besoins du Journal des débats.

La Direction générale des opérations comprend les 23 directions comptables réparties dans les ministères. La Direction générale de la vérification effectue les opérations de vérification spécialisée et enfin une nouvelle unité sous la responsabilité du contrôleur adjoint centralise l'interprétation et la confection des comptes publics et des états financiers. Cette réorganisation de bureau du Contrôleur des finances a permis de rationaliser les effectifs réguliers et son personnel d'encadrement, comme on le verra à l'étude détaillée des crédits. Vous savez que le Contrôleur des finances est présent dans chacun des ministères du gouvernement par des employés de notre ministère qui sont en fonction physiquement dans chacun des ministères du gouvernement.

Maintenant, M. le Président, vous me permettrez de détailler quelque peu les crédits du ministère, c'est-à-dire ceux des programmes que nous étudierons. Ces crédits s'élèvent à 3 293 750 400 $ par rapport à 3 095 977 900 $ en 1987-1988, soit une augmentation de 6, 4 %. De ce montant, 2 917 076 000 $ représentent des crédits permanents ou statutaires et n'ont donc pas à être votés. C'est surtout le cas du service de la dette. Le solde de 376 688 400 $ se subdivise lui-même en trois blocs. Les crédits de fonctionnement proprement dits du ministère, pour un montant de 59 152 400 $, les crédits du fonds de suppléance de 300 811 800 $ et enfin les crédits de transfert de 16 724 200 $, soit la gestion de certains emprunts des organismes du réseau de la santé. La comparaison des crédits de fonctionnement de 1987-1988, soit 51 000 000 $, avec ceux du présent exercice, soit 59 000 000 $, fait ressortir évidemment une augmentation qui pourrait paraître substantielle de 8 000 000 $. Cet écart est dû en bonne partie à la création des fonds spéciaux de l'informatique et des télécommunications dont les crédits ont été transférés du ministère des Communications aux différents ministères utilisateurs. Les membres de la commission vont probablement retrouver la même explication un peu partout, alors que les ministères passeront devant cette commission. Les crédits du ministère des Finances relatifs à ces deux fonds s'élèvent respectivement pour l'informatique à 4 400 000 $ et pour les communications à 850 000 $. L'écart de 840 000 $ s'explique également par un ajustement sur le coût des loyers. Vous savez qu'on a déménagé l'an dernier. Nous étions dans l'édifice Honoré-Mercier, autrefois l'édifice "C", et nous sommes maintenant à l'ancien palais de justice, ce qui explique que notre loyer a été modifié et qu'il y a un écart de 840 000 $ relativement au loyer payable à la Société immobilière du Québec.

Quant au solde de l'augmentation des crédits de 1988-1989 par rapport à 1987-1988, il est imputable, comme vous le devinez bien, aux augmentations salariales prévues aux conventions collectives du gouvernement - ce qui intéresse tout particulièrement le député de Saint-Louis. En 1987-1988, 1173 années-personnes étaient allouées au ministère, alors que pour l'exercice actuel le ministère en disposera de 1134 soit une réduction de 39 postes réguliers. Cet effort est surtout le résultat de la réorganisation des activités du bureau du Contrôleur des finances, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, et d'une rationalisation des opérations dans les autres secteurs du ministère.

Maintenant si vous le voulez, nous pourrions prendre les principaux postes de dépenses. Évidemment, nous allons commencer par le service de la dette qui fait partie de l'héritage. Les crédits du service de la dette publique sont en hausse de 2, 3 % en 1988-1989. Par rapport aux dépenses probables de 1987-1988 qui présentent des crédits périmés de 19 200 000 $, la croissance est de 3 %, soit 85 400 000 $. Il y a deux facteurs dont il faut tenir compte. Il y a l'augmentation du volume de la dette, parce que malgré tous nos efforts nous n'avons pas encore un déficit zéro, alors la dette doit augmenter encore pour quelque temps, d'une façon peut-être moins spectaculaire et moins dramatique, je l'espère bien, mais elle doit encore augmenter. C'est un premier facteur. L'autre facteur, c'est évidemment le service de la dette lui-même qui est affecté par le volume et par les taux d'intérêt.

L'augmentation du volume de la dette par rapport à l'an dernier amène une croissance de 186 200 000 $ des dépenses probables du service de la dette en 1988-1989 comparativement à 1987-1988. Un niveau moyen du taux d'intérêt applicable à la dette un peu inférieur à l'an passé amène, par ailleurs, une réduction de 84 100 000 $ et divers autres facteurs, une diminution de 16, 7 %. On en reparlera au cours de l'après-midi.

La croissance du service de la dette a été plutôt raisonnable au cours des dernières années, soit de 3, 9 % en 1986-1987 et de 2, 2 % prévue pour 1987-1988. Celle de 3 % prévue pour 1988-1989 s'inscrit dans la même veine. On se souviendra qu'au cours des onze années précédentes, la croissance annuelle du service de la dette avait été en moyenne de 22 % et des sommets de 36, 9 % et 37, 9 % ayant été atteints en 1980-1981 et 1981-1982 à la suite de l'explosion des taux d'intérêt et de la croissance importante des niveaux de déficit.

Avec des niveaux de déficit plus raisonnables, bien qu'encore trop élevés, la croissance de la dette publique incluant l'effet de la variation des taux de change sur la dette en monnaies étrangères a pu être ramenée à 8,4 % en 1986-1987. Je ne parle pas du service de la dette, mais de la dette elle-même. Elle a pu être ramenée à 8,4 % en 1986-1987 et à 4,7 % en 1987-1988. Cela se compare à une augmentation annuelle moyenne de 17,7 % au cours de la période de 1975-1976 à 1985-1986, un sommet de 29,3 % ayant été atteint en 1980-1981. On reviendra là-dessus si les membres de la commission veulent insister.

Maintenant, le fonds de suppléance. C'est le deuxième poste important que je veux aborder brièvement, il est toujours difficile d'apprécier la croissance des sommes inscrites au fonds de suppléance puis transférées aux divers programmes réguliers des ministères et organismes en cours d'année. En effet, les sommes portées au fonds de suppléance représentent d'abord une réserve générale en vue de pourvoir aux dépenses imprévues à l'intérieur d'une limite - vous savez que cette limite existe - de 10 % du crédit qu'on veut ainsi augmenter. On ne peut pas augmenter un crédit de plus de 10 % et cela, dans le cadre des programmes réguliers.

En outre, on y inscrit des provisions pour des augmentations de salaire des employés des secteurs public et parapublic, pour le règlement éventuel de certaines ententes collectives ou de dossiers litigieux, et pour certains projets particuliers dont la mise en oeuvre est susceptible d'être retardée. La préservation de la position de négociation du gouvernement - et j'insiste là-dessus parce que j'aurai peut-être des questions auxquelles je déciderai de ne pas répondre - demande alors qu'on n'inscrive pas de façon spécifique en début d'année les montants en cause dans la programmation détaillée des ministères. On les retrouve en bloc. Lorsqu'on me demandera possiblement: Voulez-vous détailler certaines de ces rubriques, je m'y refuserai simplement parce que, justement, il y a des domaines où nous sommes en négociation, et je n'ai pas l'intention de dévoiler quelles sommes nous avons mises de côté pour telle ou telle situation. On comprendra cela assez facilement.

Cependant, nous ferons rapport à la commission des sommes que nous avons mises de côté, c'est clair. Vous avez, dans les documents qu'on vous a remis, tous les détails disponibles et publiables dans le sens de la protection des intérêts de l'État.

Les crédits 1988-1989 incluent une réserve de 65 000 000 $ pour des dépenses imprévues et des provisions atteignant 235 400 000 $ pour l'ensemble des autres dossiers dont la majeure partie serait destinée à l'indexation des salaires à compter de diverses dates, selon les catégories de personnel. La réserve générale pour imprévus de 1988-1989 à 65 000 000 $ se compare à des crédits prévus à cette fin de 75 000 000 $ en 1987-1988, soit 50 000 000 $ intégrés aux crédits initiaux et 25 000 000 $, comme vous le savez, dans les crédits supplémentaires de mars dernier.

On sait qu'il n'y a pas de dépenses inscrites au fonds de suppléance puisque les crédits qui y apparaissent ne servent qu'à des virements vers des programmes réguliers. Pour 1987-1988, il est toutefois prévu, pour le moment, que 6 000 000 $ des crédits du fonds de suppléance seront périmés au moment de la fermeture des livres.

J'en profite à ce moment-ci pour vous dire qu'il faudra peut-être attendre au discours sur le budget pour avoir des chiffres mieux finalisés, si vous voulez, sur l'année 1987-1988. Dans plusieurs remarques que j'aurai à faire, je me baserai plutôt sur l'exercice 1987-1988, étant donné que je devrai garder certains chiffres qui n'apparaissent normalement qu'au moment du discours sur le budget. Autrement dit, même si je savais, au moment où je vous parle, qu'il y a certaines corrections à apporter à ces chiffres, je ne les apporterai pas à ce moment-ci simplement parce que ces données doivent attendre le discours sur le budget. Cette réserve étant faite, j'essaierai d'être le plus transparent possible, comme je l'ai toujours été.

Les déficits accumulés par les hôpitaux au cours de la période 1982-1985 et qui ont dû être pris en charge par le gouvernement se chiffraient à 282 600 000 $. C'est un autre sujet que je veux aborder en touchant justement ces postes, ayant abordé le service de la dette, le fonds de suppléance, j'en arrive présentement à cet élément, a la loi 130, laquelle - vous vous rappelez, on l'avait discutée ici en commission - avait autorisé les crédits requis pour rembourser le capital des emprunts à terme contractés pour financer ces déficits, de sorte que seuls les intérêts sur ces emprunts demandent de nouveaux crédits. Il n'est plus question des déficits des hôpitaux, sauf qu'il faut continuer à payer les intérêts des anciens emprunts.

Ces intérêts étant dus par le gouvernement au moment où ils deviennent échus selon les conditions des emprunts contractés par chacun des hôpitaux pour financer leur déficit, les crédits d'une année correspondent aux déboursés à effectuer.

Sur base d'exercice, ces intérêts seraient de 19 300 000 $ en 1987-1988 sur des emprunts en cours de 245 400 000 $ avec un taux effectif de 8,8 %, alors qu'ils sont prévus à 16 200 000 $ en 1988-1989 sur des emprunts en cours de 194 400 000 $ avec un taux effectif de 8,3 %.

Vous voyez que nous avons pris en charge au début 282 600 000 $. À mesure que cela se résorbe maintenant, on a évidemment chaque année une réduction consacrées aux intérêts, étant donné qu'il ne s'accumule pas d'autres déficits comme il a été décidé dans le temps. J'espère que cela va continuer.

Les crédits requis pour payer les intérêts échus en 1988-1989 sont estimés à 16 700 000 $, soit 8,6 % de moins que les crédits de

18 300 000 $ votés en 1987-1988, dont 2 500 000 $ sont prévus être périmés.

Enfin, il faut noter que depuis la fin de 1985-1986, à la suite de l'énoncé d'une politique claire et de la mise en place de contrôles rigoureux à cet égard, les centres hospitaliers n'ont encouru aucun nouveau déficit de fonctionnement à être pris en charge par le gouvernement.

Maintenant, un mot sur le financement. Est-ce que j'ai dépassé mon temps, M. le Président? (10 h 30)

Le Président (M. Lemieux): Non, M. le ministre. Il vous reste environ huit minutes. Est-ce que c'est exact?

M. Levesque: II me reste encore trois ou quatre minutes encore pour terminer.

Le Président (M. Lemieux): Ah bon! Je m'excuse. Vous auriez terminé, M. le ministre.

M. Levesque: Est-ce que je peux avoir la permission de mon collègue pour terminer? Si on a les réponses tout de suite ce sera peut-être cela de gagné sur les questions qu'on aura à poser.

M. Parent (Bertrand): Allez-y. Je n'aurai plus de questions à vous poser. C'est merveilleux.

M. Levesque: Tant mieux! Un mot sur le financement. Je pense qu'une partie importante de nos activités, ce sont nos opérations de financement.

Ces opérations menées au cours de 1987-1988 se sont inscrites dans la poursuite des principaux objectifs que s'est fixés le ministère des Finances en cette matière au cours des dernières années. Ces objectifs sont les suivants. Premièrement, ne pas augmenter la part de la dette libellée en monnaies étrangères et, si possible, accroître sa proportion en dollars canadiens de façon à réduire le risque global de l'ensemble de la dette. C'est là une chose.

Deuxièmement, accroître la proportion de la dette à taux fixe par rapport à celle à taux variable pour fixer une plus grande partie du coût de la dette en période de taux d'intérêt relativement bas, comme nous le connaissons présentement, et pour disposer de plus de flexibilité pour recourir aux instruments de dette à taux variable en cas de besoin.

Troisièmement, négocier des termes d'emprunt relativement longs pour éviter de trop fréquents recours au marché à des fins de refinancement et se soustraire aux aléas de la conjoncture des marchés financiers. Il faut toujours tenir compte de la conjoncture. Il y a quelques années, lorsque les taux d'intérêt étaient très élevés, j'imagine qu'on recherchait plutôt des termes plus courts. Maintenant, la situation étant plus favorable, nous recherchons des emprunts relativement plus longs, comme il se doit.

Les nouveaux emprunts réguliers de l'année 1987-1988 excluant les opérations de refinancement facultatif réalisées pour profiter de la possibilité de renégocier certains emprunts déjà en cours à des conditions plus avantageuses, ont été contractés dans une proportion de plus de 85 %, en dollars canadiens. En outre, bien qu'on ait observé une réduction substantielle des fonds disponibles sur les marchés pour des échéances supérieures à dix ans, le gouvernement a pu obtenir une échéance moyenne de plus de seize ans sur l'ensemble de ses nouveaux emprunts, excluant évidemment les obligations d'épargne.

Pour les opérations de refinancement facultatif, les nouveaux emprunts de remplacement ont presque entièrement été effectués dans les mêmes devises que les emprunts qui faisaient l'objet d'un remboursement anticipé. Ces opérations, en plus d'allonger l'échéance moyenne des emprunts refinancés de près de dix ans, permettront au gouvernement de réaliser des économies nettes en intérêts estimées à 17 000 000 $ annuellement. Alors, en prenant avantage des possibilités que nous avions d'aller renégocier les anciens emprunts, de les rembourser d'avance et de faire de nouveaux emprunts de remplacement, cette méthode d'opération, cette gestion de la dette, a fait en sorte que nous puissions avoir une épargne de 17 000 000 $ annuellement.

Il faut enfin noter que la part de la dette libellée en dollars canadiens a pu être augmentée de deux points de pourcentage en 1987-1988. En tenant compte des contrats d'échange de devises, elle s'établit à près de 70 % au 31 mars 1988. Quant à la dette, portant intérêt à taux fixe, elle atteint maintenant 82,5 % de la dette totale, ce qui représente une amélioration de plus de six points de pourcentage au cours des deux dernières années.

Maintenant, une partie importante de la tâche confiée au ministre des Finances par la Loi sur l'administration financière consiste à gérer les finances publiques du Québec. Ainsi, l'article 1 de la loi confie au ministre des Finances la responsabilité de conseiller le gouvernement en matière de politique économique, fiscale et budgétaire, et de gérer le fonds consolidé du revenu et de la dette publique. De plus, en vertu du décret 1239-81 du 1er mai 1981, le ministre des Finances doit approuver les enveloppes budgétaires totales de chacun des ministères et le coût des mandats pécuniaires aux tables de négociations collectives. Dans ce contexte, il est important, deux ans et demi après le début de notre mandat, de rappeler les objectifs que nous nous étions fixés et d'examiner ce qui a été accompli jusqu'à maintenant à cet égard.

Lorsque nous sommes arrivés au pouvoir, notre gouvernement s'était fixé les objectifs suivants: 1- orienter davantage le régime fiscal vers la croissance économique; 2- faire évoluer

les dépenses conformément aux besoins de la population, mais de façon compatible avec la capacité de payer de notre société; 3- améliorer la flexibilité financière du gouvernement; 4-cesser d'emprunter pour financer les dépenses d'épicerie.

Un mot sur l'économie. Comme en 1986, l'économie du Québec a été exceptionnellement vigoureuse en 1987; croissance de 4,8 % selon le Conférence Board; 100 000 nouveaux emplois à temps plein ont été créés. Il s'agit de la meilleure performance en quatorze ans. Les politiques fiscales et budgétaires adoptées par le gouvernement ne sont pas étrangères à de tels résultats, je veux bien le souligner modestement. Quant à la fiscalité, les mesures appliquées depuis décembre 1985 ont augmenté de façon importante le caractère concurrentiel de la fiscalité québécoise. Ainsi, lors de l'énoncé des politiques budgétaires du 18 décembre 1985, le gouvernement a devancé d'un an la réduction des taux marginaux d'impôt prévue pour 1987, de 30 % à 28 %. En conséquence, l'écart Québec-Ontario de dix points de pourcentage du taux marginal maximum a été ramené à quatre points dès le 1er janvier 1986. De même, lors du dernier discours sur le budget, des mesures importantes ont été annoncées pour améliorer le régime fiscal des familles. Une réduction d'impôt a été annoncée pour les familles à faible et moyen revenu et nous avons introduit le programme APPORT pour faciliter le retour sur le marché du travail des conjoints de familles bénéficiant de l'aide sociale.

Je ne voudrais pas passer sous silence le fait que nous avons arrêté l'ascenseur des taxes sur les carburants et le tabac, en mai 1986, en plus d'avoir aboli la surtaxe sur les carburants dans les régions périphériques dès décembre 1985. Nous avons également mis de l'avant une série de mesures visant à favoriser les activités de recherche et développement au Québec.

Un mot sur les dépenses avant de terminer. La solution aux problèmes des finances publiques du Québec passait par une diminution de la croissance des dépenses, tout en préservant quand même les acquis. Par une gestion serrée des dépenses, le gouvernement a réussi à en limiter la croissance à 3 % en 1986-1987 et à 5,5 % en 1987-1988. Les efforts du gouvernement se sont traduits par une réduction de la part de ses dépenses dans le PIB, qui est passée de 25,2 % en 1985-1986 à un peu plus de 23 % en 1987-1988. Cette part s'établissait à 26 % en 1983-1984; cette performance a été atteinte tout en répondant aux besoins pressants de la population.

Pour 1988-1989, le gouvernement entend poursuivre la même orientation. L'objectif de croissance des dépenses est de 5,5 %, comparativement à une projection de 4,1 % pour l'inflation et de 7,5 % pour le PIB. Malgré cette restriction dans le rythme de croissance des dépenses, ce sont près de 3 100 000 000 $ que le gouvernement a canalisés vers des activités considérées comme prioritaires depuis 1986-1987. De cette somme, le secteur de la santé a accaparé à lui seul une somme prioritaire additionnelle de 1 100 000 000 $.

Quant au déficit et aux besoins financiers - ce sera ma dernière remarque - la performance remarquable de l'économie du Québec au cours des deux dernières années ainsi que les efforts soutenus pour contrôler les dépenses publiques ont contribué au progrès important réalisé sur la voie de l'assainissement des finances publiques. Lors du dernier discours sur le budget, le gouvernement a annoncé son intention de poursuivre les efforts entrepris en 1986-1987 pour rétablir la situation financière du gouvernement et remettre les finances du Québec sur des bases solides. L'objectif du déficit a donc été fixé à 2 400 000 000 $ en 1987-1988. On sait que, dans la synthèse du 31 décembre, c'est maintenant un montant de 2 350 000 000 $ qui est prévu, ce qui représente une baisse de 469 000 000 $ par rapport à l'année précédente - je parle du déficit - et une baisse de près de 1 000 000 000 $ par rapport à 1985-1986. C'est une performance, je pense, qui mérite d'être soulignée.

Pour ce qui est des années suivantes, on peut rappeler que, lors du dernier budget, le gouvernement avait annoncé qu'en l'absence de récession économique il poursuivrait la réduction du déficit qui devrait se situer en 1989-1990 sous la barre des 2 000 000 000 $. Les besoins financiers nets du gouvernement seraient alors inférieurs à 1 000 000 000 $ et ce, pour la première fois depuis plus de dix ans. Pour avoir une idée encore plus récente de l'évolution, je vous suggère d'écouter attentivement le discours sur le budget.

En conséquence, les efforts du gouvernement pour réduire son déficit et ses besoins financiers nets, le rapport de la dette directe du gouvernement - dette à long terme et bons du Trésor - sur le PIB a commencé à diminuer l'an dernier. Quant au rapport de la dette totale du gouvernement sur le PIB, c'est-à-dire non seulement notre dette contractée sur les marchés financiers, mais aussi nos engagements comptabilisés à l'égard des régimes de retraite, il plafonnera l'an prochain. En 1984-1985, le gouvernement avait emprunté pour financer 1 100 000 000 $ d'épicerie; en 1986-1987, ce montant était réduit à 113 000 000 $; depuis ce temps, le gouvernement a complètement cessé d'emprunter pour financer l'épicerie.

Le Président (M. Lemieux): Je m'excuse, M. le ministre, mais je ne voudrais...

M. Levesque: C'est fini, c'est fini.

Le Président (M. Lemieux): ...pas abuser - c'est fini? - de la gentillesse du député...

M. Levesque: Je n'ai pas l'intention...

Le Président (M. Lemieux): ...de Bertrand.

M. Levesque: ...de dévoiler ici les mesures de mon prochain budget, c'est ce que j'allais vous dire. Il s'agira cependant d'un budget très important puisque nous annoncerons alors une réforme majeure de la fiscalité québécoise tout en poursuivant le redressement des finances publiques du Québec.

M. le Président, je tiens à vous remercier de nous avoir permis de dépasser un peu le temps. Je ne veux pas taxer davantage la patience des membres de la commission et je remercie chacun d'entre eux d'avoir manifesté une telle ouverture d'esprit et, je le répète, une telle patience.

Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie. Vous me permettrez, M. le ministre, de remercier tout particulièrement le député de Bertrand pour cette ouverture d'esprit puisque vous savez que je dois faire appliquer les règles d'une manière assez stricte pour l'ensemble des parlementaires. Le député de Bertrand a collaboré positivement, M. le député de Bonaventure, pour que vous puissiez dépasser votre temps. Quant à moi, vous allez m'excuser. C'est le député de Sherbrooke qui va présider puisque je dois vous quitter pour des obligations qui m'appellent dans mon comté.

Avant de partir, j'aimerais laisser le message suivant, pour le moment où on parlera de la Caisse de dépôt: J'espère qu'on interrogera le président de la Caisse de dépôt sur la possibilité pour la Caisse de dépôt de soutenir d'une manière plus active le développement régional et nos PME en régions. Je laisse ce message et je passe la parole au député de Bertrand.

M. Jean-Guy Parent

M. Parent (Bertrand): Merci, M. le Président. Je vais essayer de ne pas abuser et de ne pas suivre le sillon du ministre des Finances. Je n'ai pas appris grand-chose de nouveau dans la présentation sommaire que nous a faite le ministre. J'aurais aimé que le ministre, sans nous dévoiler les grandes lignes de son futur budget, puisse au moins nous tracer un peu mieux le portrait de ce que l'année 1988-1989 nous réserve en ce qui concerne le ministère des Finances.

Avant de brosser le tableau que je vois, en plus de souhaiter la bienvenue au ministre des Finances et à son sous-ministre, M. Séguin, je voudrais, de mon côté, souhaiter la bienvenue au président de la caisse de dépôt, M. Campeau, et à ses collaborateurs, ainsi qu'à M. David Clark, président de Loto-Québec et à ses collaborateurs. Si l'Opposition a accepté et concouru à ce qu'il y ait un bloc de deux heures ce matin à l'intérieur d'un bloc de quatre heures - vous savez, on est régis dans le temps - c'est qu'on a cru bon que ces deux sociétés puissent venir, à ce moment-ci en avril 1988, lors de l'étude des crédits, à l'intérieur de l'enveloppe de quatre heures du ministre des Finances, puisque ces deux importantes sociétés relèvent du ministre des Finances, et nous avions certes des questions, des préoccupations concernant la prochaine année.

En ce qui a trait à la Caisse de dépôt et placement, elle joue un rôle primordial et on a vu, en décembre dernier, qu'on a apporté un assouplissement à sa loi et j'espère que nous aurons la chance de discuter de ces aspects et du rôle davantage dynamique de la caisse de par la flexibilité qu'elle peut maintenant avoir avec les allégements apportés à sa loi.

Quant à Loto-Québec, on sait qu'elle génère autour de 400 000 000 $ de revenus pour le gouvernement du Québec. Pour prendre une expression bien connue, c'est une vache à lait importante. Cependant, je pense que les membres de la commission et l'Opposition se posent des questions sur la façon dont cela se passe à Loto-Québec, et nous aurons la chance d'approfondir ce sujet au cours des prochaines minutes. À M. Campeau et à M. Clark, je souhaite la bienvenue à cette commission parlementaire. (10 h 45)

En ce qui a trait aux finances publiques, au ministère des Finances, je consacrerai peu de temps à l'aspect des chiffres parce que le document présenté sur ce que j'appelle la partie cuisine, partie des chiffres, nous donne passablement d'information, élément par élément, programme par programme, sur les raisons de la diminution et de l'augmentation à l'intérieur de l'ensemble du budget de cette année. Donc, je ne consacrerai pas trop de temps à cet aspect parce que c'est l'aspect cuisine et, comme je l'ai mentionné, il y a plusieurs réponses aux questions que je me posais à l'intérieur du document. Je voudrais, certes, cet après-midi consacrer le maximum de temps pour discuter avec le ministre des Finances de deux ou trois aspects dont je vais immédiatement l'informer pour qu'il puisse préparer les réponses en conséquence.

Bien sûr, l'aspect du programme, par exemple, Études des politiques, économiques et fiscales, c'est-à-dire le programme 1, qui vise à conseiller le gouvernement en matière de politique financière, économique et fiscale et des relations financières avec le gouvernement fédéral, est d'une priorité, à mon avis, très grande parce que de plus en plus on se rend compte qu'on est dans un carcan dans nos relations fédérales-provinciales. D'un côté, le ministre des Finances a été le premier à dénoncer l'année dernière et encore cette année la partie de l'assiette fiscale qu'on n'est pas capables de récupérer.

D'un autre côté, je m'appuierai sur un exemple très précis du rapport spécial qui vient d'être soumis par le Conseil de la science et de la technologie. On parle beaucoup, ces derniers

temps, de recherche et développement, et de l'importance des incitatifs fiscaux pour la recherche et développement. Je m'appuierai sur ce rapport qui vient d'être publié il y a quelques semaines à peine par le Conseil de la science et de la technologie qui, soit dit en passant, est un organisme gouvernemental relevant, que je sache, du ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science. Mais le rapport est très bien fait et il souligne plusieurs points à l'attention du ministre des Finances. Le rapport dit explicitement: "Le présent mémoire - c'est un mémoire - porte en particulier sur les effets de la réforme fiscale fédérale et sur les incidences, sur les incitatifs fiscaux à la recherche et développement pour le Québec."

Rappelons que, lors du discours sur le budget le 30 avril dernier, le ministre des Finances du Québec avait accru sensiblement les avantages fiscaux liés à la recherche et au développement, mais que certaines mesures perdent de leur intérêt à la suite de la réforme fiscale fédérale. Le conseil présente donc, à cet effet, un certain nombre de suggestions ayant pour objectif de maintenir l'avantage comparatif du Québec en regard des incitatifs fiscaux pour la recherche et le développement. Alors, pris sur ce volet-là, il me semble important de voir ce que le ministre des Finances entend faire et de quelle façon il a l'intention de s'y prendre à partir d'un exemple très concret.

Je souligne très rapidement dans cette présentation sommaire, M. le Président, quelques recommandations du conseil au ministre des Finances. Le conseil a présenté ce rapport en mars, justement pour qu'il puisse prendre certaines de ses recommandations en considération. "Malgré cette volonté du Québec - disent-ils -de ne pas réduire ces mesures d'incitation fiscale liées à la recherche et développement, il faut réaliser que le projet fédéral de la réforme fiscale aura pour effet de diminuer sensiblement leur impact." Alors, à toutes fins utiles, ce que le conseil nous dit en matière d'incitatifs fiscaux, c'est que, même si le Québec fait des efforts, si le fédéral va dans un autre sens, on aboutit à une annulation des efforts. Et cela me semble drôlement important parce que c'est dans cette approche-là que le gouvernement du Québec, le ministre des Finances, aura des outils pour être capable soit de relancer soit de freiner l'aspect de recherche et développement.

Comme on l'a vu au cours de la dernière année, le fait qu'on ait, jusqu'à un certain point, appliqué certaines mesures ou harmonisé dans certains domaines - et je pense, par exemple, au domaine des actions accréditives - cela a produit des effets négatifs. Par exemple les 100 000 000 $ d'impact que vous aviez annoncés, M. le ministre, quant aux incitatifs fiscaux en recherche et développement, à toutes fins utiles, le conseil nous dit que cela a été drôlement surestimé, et on parle d'à peu près 20 %, soit 20 000 000 $ à 25 000 000 $ sur les 100 000 000 $ qui vont être utilisés par rapport aux 100 000 000 $ que vous aviez prévus. C'est dommage dans un sens parce que l'incitatif n'a pas été rejoint pour différentes considérations.

Un autre point important, la question de l'harmonisation. À la page 32, le conseil dit au ministre des Finances: "Gardant à l'esprit la nécessité de maintenir l'avantage fiscal comparatif du Québec, le conseil invite le ministre des Finances du Québec à reconsidérer l'opportunité d'harmoniser les règles fiscales québécoises concernant les activités de recherche et développement, entre autres les mesures restrictives proposées dans la réforme fédérale." C'est, à mon avis, l'aspect ou un des volets importants afin de savoir de quelle façon le ministre, sans nous dévoiler quoi que ce soit du prochain discours sur le budget... Je ne voudrais pas être la cause d'une fuite, veuillez me croire, M. le ministre, mais je voudrais quand même savoir quelles vont être vos réactions à ce récent rapport et quelle va être votre approche.

J'ai l'impression que, depuis quelques années, le ministère des Finances du Québec est "sur un pilote automatique". On s'en va avec des mesures, il manque un peu d'innovations et, dans mon jargon à moi, un peu de leadership pour prendre des nouvelles routes, des nouvelles avenues. J'aimerais que l'actuel ministre des Finances prenne de nouvelles initiatives dans ce sens, que ce soit auprès d'Ottawa ou que ce soient des mesures qui concernent vraiment de nouveaux leviers pour permettre à l'économie de bien aller. Effectivement, l'économie va bien, mais c'est à cause d'une conjoncture générale. Il n'est pas dit qu'à la fin de 1988 et en 1989 on ne connaîtra pas un contexte économique beaucoup plus difficile. Il faudra qu'il y ait des mesures incitatives dans ce sens. Le rapport le mentionne très bien; on a des arrérages importants sur le plan de la recherche et développement et on dit, à la page 44 dudit rapport, particulièrement au cours des années 1986 et 1987. Cela touche vraiment le gouvernement actuel. Au bas de la page 44, on fait mention de cet aspect.

L'autre volet que j'aborderai cet après-midi, c'est celui qui apparaît au programme 3 Comptabilité gouvernementale. On dit que le programme vise à exercer le contrôle, à régulariser les dépenses, à préparer les états financiers et à apporter aux gestionnaires toute l'information comptable pertinente. Vous comprendrez, M. le Président, qu'à la suite d'interventions que j'ai faites récemment, à la suite d'interventions que j'ai faites à quelques reprises concernant la présentation des états financiers, la dette et particulièrement le déficit, je vais revenir à la charge. Cela me semble important que l'information pertinente comptable apparaisse dans les documents qui seront publiés avec le discours sur le budget. Même si cela ne plaît pas au ministre des Finances, même s'il a laissé entendre que le député de Bertrand pouvait ne pas être dans un

état de santé normal, je devrai, oui, parce que votre réponse... C'est-à-dire que j'étais peut-être un peu malade.

M. le ministre des Finances, avec tout le respect que je vous dois, vous savez fort bien que la présentation des prochains états financiers et de l'évolution du déficit du Québec est importante. Vous savez exactement ce à quoi je fais allusion. Si le ministre des Finances du Québec veut continuer à répéter que les finances publiques du Québec et le déficit s'améliorent, je veux bien, mais il faudra les replacer dans leur contexte. À moins que le ministre des Finances du Québec ne contredise ce que le Vérificateur général du Québec a dit à cette commission, à savoir que les effets des nouvelles conventions comptables... Je ne dis pas qu'il ne fallait pas que les conventions comptables s'appliquent ou ne s'appliquent pas. C'est un autre débat. Mais les effets des nouvelles conventions comptables au 31 mars 1987 ont eu un impact favorable au gouvernement de plus de 500 000 000 $.

Le Vérificateur général a aussi confirmé, et le ministre des Finances le sait fort bien, que le déficit du Québec au 31 mars 1987 - je le dis, je le répète et je vais le répéter tant et aussi longtemps que je serai député parce que j'y crois - n'a pas diminué par rapport au 31 mars 1986 et ce, sur la même base comparative. Je défie qui que ce soit, y compris le ministre des Finances, de me prouver le contraire, et même le déficit du Québec sur la base comparative des années antérieures est de l'ordre de 3 300 000 000 $. Qu'on ne vienne pas nous dire qu'on a baissé le déficit du Québec de 1 000 000 000 $, ça ne prend pas, ça ne prendra pas et je prendrai tous les moyens pour le dénoncer. Je pense que ça fait partie, entre guillemets, pas de l'honnêteté du ministre, mais de l'honnêteté du gouvernement de dire les choses telles qu'elles sont. Je demanderai et j'exigerai que lors du prochain discours d'ouverture qui sera prononcé à la fin du mois - j'aurai à faire la réplique puisque je suis le porte-parole - qu'on ait ces tableaux comparatifs pour savoir exactement où on s'en va sur cette base comparative, M. le ministre.

Qu'on dise dorénavant que le déficit est de 2 400 000 000 $ ou de 2 300 000 000 $, je veux bien, mais le jeu comptable fait en sorte qu'il faut le rétablir sur la base comparative. Si on veut dire qu'il a diminué de 500 000 000 $, il faut le comparer à quelque chose et, jusqu'à maintenant, je ne sais pas ce qu'il sera au 31 mars 1988, mais j'espère qu'il aura diminué réellement parce que le contexte économique est bon et certains efforts ont été faits. Je suis assez honnête pour le reconnaître, sauf qu'au 31 mars 1987 les derniers états financiers pour la dernière année financière du gouvernement montraient que le déficit du Québec n'avait pas diminué d'un iota, mais qu'il avait augmenté sur la même base comparative. C'est confirmé par le Vérificateur général et s'il faut qu'on fasse revenir le Vérificateur général dès le début de la nouvelle année, on le fera, mais je pense qu'il serait plus correct que le ministre des Finances ou le gouvernement nous donne au moins ces chiffres-là parce que la population s'y perd. Je pense qu'on doit montrer de la transparence et le ministre des Finances a toujours eu cette transparence. Je ne comprends pas ce qui a pu se passer, particulièrement l'année dernière.

En dernier point, je questionnerai aussi sur l'évolution très accentuée du fonds de suppléance, qui passe à 300 000 000 $, une augmentation de 125 000 000 $ soit de 71 %. Cela me semble important. On sait que le fonds de suppléance a des réserves générales. Dans mon jargon, quand j'étais à là mairie, on appelait ça des coussins. Il y a toujours des places pour avoir des coussins, des marges de manoeuvre, mais, cette année, une augmentation de 71 % à ce chapitre, ça me semble important. C'est une augmentation de 125 000 000 $ additionnels. J'ai eu un peu l'impression que le ministre s'est gardé des réserves pour poser quelques gestes et j'aimerais qu'il puisse peut-être nous entretenir là-dessus.

M. le Président, puisque le temps avance rapidement, je veux être assez respectueux et donner la chance aux différents intervenants de parler avant l'ajournement du midi. Voilà les principaux points que j'aurai à couvrir cet après-midi tout en touchant aussi au caractère des chiffres. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Hamel): Merci, M. le député de Bertrand. Y aurait-il d'autres parlementaires qui souhaiteraient intervenir dans le cadre des remarques préliminaires? Merci.

Tel que convenu...

M. Levesque: M. le Président... Le Président (M. Hamel): Oui?

M. Levesque: Est-ce que nos règles ne permettent pas qu'il y ait une minute ou deux simplement pour...

M. Parent (Bertrand):... M. le ministre.

M. Levesque: Je voulais simplement vous remercier.

M. Parent (Bertrand): J'en doute.

Le Président (M. Hamel): Très brièvement, M. le ministre, s'il vous plaît!

M. Levesque: Très brièvement. Je remercie, en effet, le député de Bertrand de faciliter nos travaux en nous indiquant à l'avance les points. Ce n'est pas quelque chose qu'on retrouve normalement chez certains parlementaires, du moins ceux que j'ai connus dans l'Opposition actuelle; ils n'ont pas toujours manifesté autant

d'esprit d'ouverture et d'efficacité. En sachant que nous abordererons ces trois points cet après-midi, je pense que ceci nous amène à concentrer notre attention sur ces trois points majeurs. J'accepte que ces trois points auraient avantage à être discutés et qu'on apporte le meilleur éclairage possible sur ces trois points, quitte à ce qu'il y ait d'autres points de soumis par nos collègues de l'équipe ministérielle. Dans ces trois points, je pense qu'il est important que nous puissions toucher la recherche et le développement, mais évidemment pour autant que cela concerne le ministre des Finances, parce que je n'ai pas l'intention de vous parler de la politique du gouvernement en matière de recherche et développement, le contenu lui-même étant plutôt de la responsabilité de certains de mes collègues, particulièrement le ministre du Commerce extérieur et de la Technologie ainsi que le ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science. (11 heures)

Deuxièmement, quant à la question favorite du député de Bertrand touchant le déficit et les conventions comptables, j'aurai beaucoup de plaisir à revenir pour essayer de le convaincre. Et nous essaierons, chacun de notre côté, j'imagine, de nous convaincre de la justesse de nos propos à ce sujet et de notre propre vision des choses. Quant au troisième sujet, le fonds de suppléance, je pense avoir les renseignements qui satisferont le député de Bertrand.

Cela dit, je vous remercie, M. le Président, et je remercie la commission.

Le Président (M. Hamel): Merci, M. le ministre. Je rappellerai simplement à M. le député de Bertrand que, en vertu de l'article 287, le ministre qui répond de ses crédits peut intervenir en tout temps, évidemment en tenant compte du laps de temps que nous avons.

Tel que convenu, nous allons entendre la Caisse de dépôt et placement. J'inviterais maintenant M. le président de la Caisse de dépôt et placement du Québec à s'approcher. M. le président, auriez-vous l'amabilité, dans un premier temps, de nous présenter les gens qui vous accompagnent et, ensuite, si vous le souhaitez, de faire une brève présentation.

Caisse de dépôt et placement du Québec Audition du président

M. Campeau (Jean): Avec plaisir, M. le Président. À ma droite, M. Michel Nadeau, premier vice-président, responsable des relations avec les déposants de la Caisse de dépôt, responsable de la planification de la Caisse et de la répartition de l'actif. À ses côtés, M. Alain Tessier, directeur des ressources comptables et, à ma gauche, M. Claude Ferland, premier vice-président, responsable du revenu fixe, ce qui inclut obligations, marché monétaire ou marché à court terme et hypothèques à la Caisse de dépôt.

Le Président (M. Hamel): Merci.

M. Campeau: Comme vous le suggérez, je pourrais lire un bref exposé pour faire l'introduction aux débats, si vous le voulez bien.

Le Président (M. Hamel): Très bien, M. le président.

M. Campeau: Mesdames et messieurs les membres de la commission parlementaire. Au cours de 1987, la Caisse a encaissé des revenus nets de 2 800 000 000 $, soit à peu près le même montant qu'en 1986, 2 900 000 000 $.

Les revenus d'intérêt et de dividendes ont été de 2 200 000 000 $, alors que la vente de placements a rapporté 613 000 000 $. De ces revenus de 2 800 000 000 $, les déposants ont retiré 465 000 000 $ pour leurs besoins de liquidités. On verra plus tard que certains déposants ont retiré et que d'autres ont accru le montant de dépôts qu'ils avaient chez nous. Le reste, soit 2 400 000 000 $, a permis d'augmenter l'actif de 25 000 000 000 $ à 27 400 000 000 $. Il s'agit évidemment de la valeur comptable. La valeur de réalisation, la valeur au marché, a progressé de 800 000 000 $ pour atteindre le chiffre record de 28 800 000 000 $.

Les rendements obtenus par nos gestionnaires ont été supérieurs à ceux de la plupart des indices comparables des divers marchés financiers. En voici quelques données: le portefeuille obligataire, un rendement de 4,2 % contre, pour l'indice financier de McLeod, 3,9 %; le rendement du portefeuille d'hypothèques résidentielles, commerciales et industrielles, 9,3 % contre 8,7 % pour l'indice; le marché des titres à court terme a procuré un rendement de 9,1 % contre, cette fois-ci, 8,5 % pour l'indice concernant les effets de commerce à échéance de 30 jours.

D'autre part, le portefeuille d'immeubles a, quant à lui, permis de réaliser un rendement de 14,5 % contre un indice de 11,4 %. Le portefeuille d'actions canadiennes, par ailleurs, a affiché un résultat légèrement inférieur à celui de notre indice de référence, soit 4,6 % contre à 5,8 %. Ces chiffres sont commentés un peu plus loin dans la présentation.

Nos gestionnaires, ainsi que leur compétence, leur connaissance du marché et leur habileté, le tout évidemment jumelé à des politiques et pratiques de placement dynamiques, constituent une des forces maîtresses de la Caisse dans l'atteinte de ses objectifs fondamentaux que sont le rendement optimal des sommes sous gestion et l'enrichissement du milieu par une contribution soutenue à l'essor économique du Québec. En 1987, la Caisse n'a pas dérogé à cette ligne de conduite qu'elle se fixe année après année depuis 22 ans.

Il faut aussi se rappeler un objectif plus conservateur qui guide notre démarche, c'est-à-dire assurer la protection du capital, bien

entendu; le préserver contre l'érosion de l'inflation. Avec un rendement global de 4,7 %, soit 0,5 % de plus que l'inflation, cet objectif a été atteint encore une fois.

À la Caisse, bien évidemment, les résultats d'une seule année ne constituent pas l'unique indicateur de rendement. Dans les années fastes, nous l'avons toujours souligné. L'exercice 1987 nous rappelle que l'évaluation réelle d'une institution comme la Caisse doit être faite à tout le moins sur un horizon à moyen terme, sinon à long terme.

Depuis le début du cycle économique de 1982-1987, le rendement annuel moyen a été de 16,9 %, soit 12 % de plus que l'inflation. Sur dix ans, le rendement de 12,8 % représente un écart positif de 5,7 % par rapport à l'inflation. Ces résultats dépassent les attentes actuarielles les plus optimistes.

À ce moment-ci, si vous le permettez, j'aimerais vous parler de façon un peu plus explicite de nos deux principaux véhicules de placement qui sont, d'une part, les actions et, d'autre part, les obligations. Dans ce dernier domaine, la hausse des taux d'intérêt durant l'année a fait baisser temporairement la valeur théorique du portefeuille de la Caisse. Comme je l'ai dit, les gestionnaires de la Caisse ont affiché un rendement de 4,2 % contre à 3,9 % pour l'indice McLeod.

Ce résultat a été obtenu tout en maintenant un marché secondaire ordonné pour les titres d'émetteurs publics québécois. On se rappellera que, dans le discours de deuxième lecture de M. Lesage, il était mentionné que la Caisse de dépôt et placement du Québec se devait de maintenir un marché ordonné sur tous les titres d'obligations du secteur public québécois.

Dans le domaine des actions, dissipons tout de suite la vision de pertes gigantesques colportée par quelques organes de presse l'automne dernier. Le portefeuille de la Caisse a chuté en octobre comme celui de toutes les autres institutions. Mais, pour l'année, il faut parler d'une augmentation de la valeur de notre portefeuille d'actions québécoises et canadiennes de 300 000 000 $. La valeur du portefeuille approchait les 8 000 000 000 $ à la fin de décembre dernier.

Notre indice financier, l'indice TSE 300, a avancé de 5,8 % alors que les gestionnaires de la Caisse ont décroché un gain de 4,6 %. Un seul facteur peut expliquer cet écart: La hausse de 42 % des titres aurifères en 1987. La Caisse n'a pas voulu spéculer dans ce secteur qui, incidemment, a subi une baisse de 20 % en janvier et en février 1988. Si on exclut la partie des titres aurifères, l'indice TSE 300 a monté dé 2,5 % seulement. Donc, sans les aurifères, la Caisse avec ses 3,2 % a mieux fait sur le marché boursier que l'indice. Soulignons ici la valeur et la vigueur des placements dans les petites et moyennes entreprises du Québec. La Caisse a doublé ses investissements dans les PME en 1987 en injectant 80 000 000 $ dans 40 entreprises, dont 15 en dehors de la région de Montréal.

Quelques mots maintenant sur nos autres activités de placement. La stratégie de la Caisse privilégiait nettement les hypothèques en 1987, notre institution ayant déboursé un montant record de 520 000 000 $. Cette décision fut très heureuse, car les hypothèques nous ont procuré le meilleur rendement, 9,3 %, de tous nos véhicules de placement pour l'année 1987. Les gestionnaires ont de nouveau surclassé l'indice financier. Les immeubles nous ont rapporté 14,5 %, soit des revenus de loyers de 8 % et une appréciation de la valeur des édifices de 6,5 %. Celle-ci a été établie par une firme d'évaluateurs indépendants. De son côté, l'indice financier en ce domaine a progressé de 11,4 % au cours de l'année. La Caisse a obtenu un rendement de 9,1 % sur ses valeurs liquides par rapport à 8,5 % pour l'indice de marché comparable.

Enfin, un mot sur le portefeuille international qui n'a pratiquement pas bronché, moins de 0*5 %. Comme la plupart des autres gestionnaires de fonds, la Caisse a limité ses investissements au Japon, cette année, à 31 % environ. Le yen est très élevé et le prix des actions nous semble excessif. À la surprise de tous, le marché nippon a été très performant en 1987. Cependant, la pondération des titres japonais dans l'indice international a touché 43 % du total. Ayant volontairement sous-pondéré, par rapport à nos investissements internationaux, ses investissements au Japon, la Caisse doit donc se satisfaire d'un rendement neutre par rapport aux 10,4 % de l'indice international.

En conclusion, la Caisse a très bien traversé la tourmente financière de 1987. Ses gestionnaires ont protégé le capital et réalisé des rendements presque toujours supérieurs à ceux des indices de marché. Il était impossible d'obtenir des rendements élevés alors que les marchés obligataire et boursier n'offraient que des rendements minuscules. Dans une période difficile, l'objectif d'un gestionnaire est de bien protéger le capital, et c'est mission accomplie pour la Caisse de dépôt et placement en 1987. À moyen terme, je répète que le rendement annuel de 16,9 % depuis le début du cycle économique et financier demeure toujours très satisfaisant et confirme la qualité de notre gestion.

À ce moment-ci, M. le Président, j'aurais d'autres faits saillants que je pourrais énumérer pour deux ou trois minutes encore, si vous le permettez. Parfait?

Le Président (M. Hamel): Très bien.

M. Campeau: Quelques transactions importantes au cours de l'année qui ont pu caractériser notre institution au cours des derniers mois.

La Caisse a acheté pour 900 000 000 $ de nouvelles obligations du gouvernement du Québec,

soit plus de 60 % des titres du gouvernement émis sur le marché canadien, contre 48 % en 1986. Pour quelque 270 000 000 $ de nouveaux titres, d'autres émetteurs du secteur public québécois, ce qui porte la valeur comptable du portefeuille à revenu fixe à plus de 17 300 000 000 $, dont plus de 10 000 000 000 $ concernent des titres émis ou garantis par l'État québécois.

La Caisse a réalisé plusieurs placements privés auprès de grandes entreprises, soit CDC Sciences de la vie, Sceptre Resources et Memotec Data qui, un peu plus tard, a été impliquée dans l'achat de TéléGlobe. La Caisse a aussi profité de la conjoncture pour réaliser des ventes de placements de 200 000 000 $. Au 31 décembre, la valeur de réalisation du portefeuille de placements dans la grande entreprise totalisait 1 470 000 000 $ et concernait 31 entreprises réparties dans 10 des 14 secteurs boursiers. (11 h 15)

L'année 1987 a également été caractérisée par un nombre record d'investissements dans les entreprises de plus petite envergure, mais dont l'impact sur la croissance de tout le Québec est primordial. Solution des plus intéressantes au financement public, la Caisse a joué un rôle financier important auprès des moyennes entreprises en croissance en réalisant des placements de l'ordre de 81 000 000 $ dans 40 entreprises du Québec, dont 15 en régions, tel que mentionné un peu plus tôt. De plus, la Caisse a affecté 8 000 000 $ à l'achat d'actions de seize moyennes entreprises inscrites en Bourse, en plus de participer aux deux premières émissions du Régime d'épargne-actions du Québec réalisées après le troisième lundi d'octobre, soit celles du Groupe Goyette de Saint-Hyacinthe et d'Industries Cover de Québec.

Je ne voudrais pas non plus passer sous silence les sommes importantes qui ont été consacrées aux investissements liés à l'industrie de la construction au Québec. Le volume des placements hypothécaires, tel que mentionné, a atteint un sommet historique de 520 000 000 $.

Tout ces résultats qui émanent d'un ensemble de décisions ne sont pas le fruit du hasard. Ils découlent de choix effectués quant à l'équilibre à maintenir entre les divers véhicules de placement de la Caisse de dépôt, compte tenu de l'évolution de la conjoncture et des stratégies arrêtées sur chaque marché. Par exemple, nous avons effectué des ventes nettes de plus de 230 000 000 $ durant les mois qui ont précédé la correction boursière. Par ailleurs, nous avons reconstruit la position de notre portefeuille d'actions canadiennes en investissant plus de 700 000 000 $ dans ces valeurs au cours des deux derniers mois de l'année 1987.

Nous avons cru, et nous le croyons encore, que les titres à revenu variable offrent, sur une longue période, des perspectives de rendement fort intéressantes. De 1976 à 1986, le rendement indiciel moyen des actions s'est élevé à 16,5 % par année, comparativement à 12,4 % pour les hypothèques et à 11,7 % pour les obligations à long terme. Allongez la période de référence sur 20 ou 30 ans, il en est toujours de même. Cette décision d'augmenter notre proportion de valeurs à revenu variable depuis les années quatre-vingt, notamment par l'ajout de titres internationaux au début de 1983, s'inscrit dans cette perspective.

Par ailleurs, un sain équilibre entre les actions et les obligations permet d'obtenir un rendement optimal pour nos déposants, tout en assurant au secteur public québécois une source de financement stable et non négligeable. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Hamel): Merci, M. le président. Je reconnais, maintenant, M. le député de Bertrand.

Discussion générale Impact des changements législatifs

M. Parent (Bertrand): Merci, M. le Pré sident. Je tiens à vous remercier, M. Campeau, pour cette présentation. Je passerai rapidement aux questions. En décembre dernier, la Caisse demandait au gouvernement du Québec d'apporter certaines modifications pour être capable d'avoir un peu de marge de manoeuvre à l'intérieur des enveloppes afin d'agir, si on veut, avec les pourcentages et les plafonds que vous aviez. Est-ce que je pourrais connaître, dans un premier temps, l'impact et ce que ceci va donner pour les années 1988 ou 1989 avec cette marge de manoeuvre que vous réclamiez et que vous avez obtenue en bonne partie? Est-ce que cet impact va aussi se traduire de façon importante par l'accélération dans des investissements dans des PME même si on a fait le double au cours de la dernière année? Quelle est l'orientation pour l'année 1988 face à cette diversification et quel impact cela risque-t-il d'avoir dans les régions et dans des secteurs particuliers?

M. Campeau: Si vous me le permettez, M. le Président, je demanderais à M. Nadeau, qui est premier vice-président à la planification de répondre à cette question.

Le Président (M. Hamel): M. Nadeau, s'il vous plaît.

M. Nadeau (Michel): Je vais répondre surtout à la première partie sur les changements législatifs adoptés au mois de décembre dernier. Ces changements, en relevant le niveau de la clause omnibus de la Caisse de dépôt, nous ont permis d'investir très rapidement 700 000 000 $ durant les deux derniers mois, après la correction d'octobre, et d'augmenter encore plus nos investissements dans le marché boursier, au début de 1988. Le résultat de ce changement a

été de permettre à la Caisse de dépôt de réaliser un profit, un gain, d'augmenter son portefeuille, grâce à des profits, à des gains, de 1 000 000 000 $ depuis la correction du mois d'octobre. L'effet principal de ces changements législatifs, c'est d'avoir permis d'augmenter le pourcentage, la proportion des actions très rapidement après la correction et, depuis la correction du mois d'octobre, le marché boursier canadien et américain a progressé de 17 %. Pour la Caisse, cela s'est traduit par une augmentation de la valeur de son portefeuille d'un peu plus de 1 000 000 000 $.

Pour ce qui est des moyennes entreprises...

M. Campeau: Dans les moyennes entreprises au Québec, depuis les années 1981-1982, nous avons commencé à investir dans le capital-actions sur un capital un base. Beaucoup de progression a été faite, mais il nous reste encore beaucoup de chemin à faire pour rejoindre un plus grand nombre de moyennes entreprises au Québec. Pour répondre au voeu du président permanent de la commission, qui en a parlé tout à l'heure, la Caisse de dépôt, avec certains intervenants régionaux et certaines institutions financières régionales, à pensé à établir ou à créer des fonds de croissance pour les petites entreprises et pour des placements qui pourraient varier de 50 000 $ jusqu'à 500 000 $ en capital. À l'heure actuelle, dans les moyennes entreprises, la Caisse de dépôt investit très rarement moins de 500 000 $.

Il y a encore au Québec une lacune ou un manque d'argent pour ces petites entreprises. Cela demande beaucoup de travail et beaucoup d'implication pour trouver les bonnes. Par le système pensé par la Caisse et de concert avec des institutions financières régionales qui, bien souvent, ont été à l'origine des idées et avec qui on peut coopérer, on tente d'investir, de créer des fonds de croissance dans certaines régions pour couvrir ces petites institutions. Par la suite, celles qui auront réussi, celles qui auront progressé pourront être financées directement à la Caisse par l'entremise de notre département des moyennes entreprises.

Quand on regarde les chiffres absolus, comme vous le soulignez, M. Parent, la Caisse a encore beaucoup de chemin à faire dans les moyennes entreprises. On a beau avoir plusieurs investissements, nos investissements en dollars ne sont pas encore tellement élevés. Je pense qu'ils totalisent 250 000 000 $.

Investissements dans les PME

M. Parent (Bertrand): M. le Président, l'image de la Caisse de dépôt est excellente au Québec. On sait que c'est un levier économique, c'est un chef de file. Sauf que j'ai un peu l'impression, étant donné que je parle à plusieurs dirigeants d'entreprises de façon régulière, surtout dans les PME québécoises, qu'on ne connaît pas cette possibilité d'accès à la Caisse. Ma question, c'est: Est-ce que la Caisse de dépôt et placement a l'intention de faire un effort vraiment dynamique d'approche, de sensibilisation, pas pour entrer dans n'importe quel type d'entreprise. Je sais que le secteur manufacturier vous intéresse particulièrement. Mais s'il y avait, par exemple, une stratégie d'approche pour au moins laisser savoir aux dirigeants de PME québécoises, dynamiques qui ont besoin de capital ou qui ont besoin d'un partenaire dynamique, surtout avec la venue du libre-échange, je pense que la Caisse de dépôt et placement du Québec devient l'organisme par excellence pour participer activement au capital-actions de ces entreprises-là.

Actuellement, l'image qu'on a de la Caisse, mis à part pour ceux qui y sont plus près, n'est pas connue dans ce sens-là. Et je pense que cela lui nuit dans le sens que beaucoup de chefs d'entreprise, beaucoup de personnes qui pensent expansion, qui pensent même acquisition, fusion, ne pensent pas nécessairement à la Caisse parce que, pour l'ensemble des Québécois et l'ensemble des gens qui sont dans le domaine des moyennes entreprises, la Caisse agit surtout au niveau - on connaît ses participations plus connues, notamment dans Provigo pour l'alimentation, mais dans tous les secteurs d'activité - des grandes entreprises. Et là je pense qu'il y aurait lieu de faire des efforts. Il y en a peut-être qui sont prévus ou enclenchés, mais je vois là une lacune et j'aimerais savoir si elle peut être corrigée rapidement puisqu'il y a un intérêt, vous l'avez dit, et le portefeuille de 250 000 000 $ que vous avez actuellement pourra être accru de façon importante.

M. Campeau: C'est une lacune qui existait sûrement dans les années passées et que nous avons tenté de corriger, par exemple, par la présence de membres du personnel de la Caisse dans les chambres de commerce et aussi par notre présence dans les colloques régionaux. Nous avons aussi une revue - le nom de la revue est Savoir faire - que nous distribuons et que nous envoyons aux principales moyennes entreprises dans le Québec et je pense qu'on a une liste qu'on améliore toujours. C'est une revue qui est, je pense, trimestrielle ou, à l'occasion, peut-être seulement semestrielle et qui tente de faire connaître les investissements de la Caisse à ces dirigeants, à ces propriétaires d'entreprise. On me dit que notre revue est envoyée à 3000 entrepreneurs du Québec.

Et les cadres de la Caisse tentent de prendre la parole dans des rencontres et d'aller faire des discours, tenir des colloques dans différentes chambres de commerce pour faire connaître la Caisse sur ce côté. Quant à moi, dans la plupart de mes interventions publiques, je me fais toujours un devoir de souligner la présence de la Caisse de dépôt dans les moyennes entreprises. Mais comme vous l'avez souligné

tout à l'heure, puisque vous avez cette réaction-là, il nous reste encore du chemin à faire en ce qui concerne la publicité de la Caisse de dépôt. Dans certains milieux, on se rend compte que la Caisse de dépôt n'est pas encore connue à fond, du moins ses activités.

Maintenant, la Caisse de dépôt fait toujours un peu peur aux entrepreneurs. Plusieurs nous disent: On est trop petit pour faire affaire avec vous. On a quand même une équipe de gestionnaires de moyennes entreprises fort dynamique qui essaie de se mettre au service des entrepreneurs. Et on essaie de faire connaître aussi que nos investissements sont limités à 30 %. Nous ne sommes donc pas un partenaire dangereux pour l'entrepreneur qui va garder 51 % ou 70 % selon le cas. Je pense qu'il faut encore répéter ces détails importants de la Caisse de dépôt durant les prochaines années. Leur dire exactement ce qu'elle veut faire. Et peut-être que, dans notre publicité ou dans notre prochain rapport annuel, on devrait encore avoir un impact plus important sur les petites et moyennes entreprises.

Achat d'obligations

M. Parent (Bertrand): Dans un autre ordre d'idées... On peut continuer, M. le Président? Vous avez mentionné, tantôt, que vous avez acheté un peu plus de 60 % de l'émission des obligations du Québec comparativement à 47 % ou 48 %, l'année dernière, si ma mémoire est bonne. Qu'est-ce qui oriente votre décision d'acheter tel bloc par rapport à tel bloc et qu'est-ce qui fait que, cette année, il y a eu un achat aussi important d'obligations? (11 h 30)

M. Campeau: D'abord, le pourcentage est basé sur les emprunts du gouvernement du Québec qui ont été faits en monnaie canadienne, au Canada. Cela n'inclut pas les emprunts qui auraient pu être faits aux États-Unis ou ailleurs sur le marché international. Deuxièmement, ce qui oriente nos choix, ce sont les besoins de la Caisse. Chaque année, dans la répartition de nos actifs, qui relève de M. Nadeau, on décide la façon dont nous allons investir les fonds de la Caisse de dépôt, à savoir combien dans les cinq véhicules principaux: en obligations, en actions, en hypothèques, en immeubles et en placements à court terme, ce dans quoi la province est aussi incluse. Par la suite, dans le volet des obligations, on détermine dans notre budget combien nous allons réserver ou consacrer aux secteurs public et parapublic. Par la suite, on descend: secteurs parapublic et public, gouvernement du Québec, sociétés d'État, municipalités et commissions scolaires.

Le ministre des Finances ne m'en voudra pas de faire ce commentaire que je devrais lui laisser faire, mais il y a un avantage pour lui à venir à la Caisse de dépôt et à y satisfaire une partie de ses emprunts. D'autre part, la Caisse de dépôt doit reconnaître qu'elle compte des déposants, tels la Régie des rentes et la Régie de l'assurance automobile, pour ne nommer que ceux-là. Si la régie des rentes, par exemple, du gouvernement fédéral retourne à chacune des provinces tout l'argent qu'elle perçoit, nous, à la Caisse de dépôt, n'en retournons qu'une partie par le moyen d'emprunts du gouvernement.

Après avoir décidé la façon dont l'argent va être réparti dans nos véhicules, la Caisse de dépôt a quand même le devoir de participer au financement public du gouvernement du Québec. Ce devoir nous est rappelé dans le discours de deuxième lecture de M. Lesage, lors de la création de la Caisse de dépôt: "La Caisse de dépôt devra maintenir un marché ordonné dans les obligations des secteurs public et parapublic québécois et devra participer au financement du gouvernement du Québec." C'est en regard de toutes ces considérations que nous fixons le budget, les montants d'argent que nous allons réserver ou les sommes d'obligations que nous allons acheter, au cours de l'année, dans les marchés primaires, dans les secteurs public ou parapublic.

Rôle de la Caisse lors des privatisations des socitétés d'État

M. Parent (Bertrand): Dans un autre ordre d'idées, parce qu'il y a peu de temps à notre disposition et que je me pose plusieurs questions. Quand est arrivé le dossier de privatisation de Domtar, le gouvernement du Québec a décidé, à la fin, de ne pas aller de l'avant parce qu'il n'y avait apparemment pas de preneur qui était à sa satisfaction, comme je l'ai mentionné, hier, au ministre délégué à la Privatisation lors de l'étude des crédits de son ministère. Dieu merci! D'abord, comme représentant de la population, comme parlementaire, comme député à l'Assemblée nationale, je suis préoccupé par tout l'aspect économique, et je me demande comment la Caisse de dépôt et placement et vous, M. Campeau, vous étiez placés pour être capables d'intervenir. C'est un dossier aussi important que celui d'une société d'État qui allait être vendue et cela reviendra probablement parce qu'elle faisait partie d'une liste d'entreprises stratégiques dont il fallait se départir. Comment la Caisse de dépôt, dans un moment comme celui-là, est-elle capable de se virer rapidement ou sera capable d'intervenir dans un dossier aussi important, un dossier moteur, celui d'une société qui s'appelle Domtar qui peut passer dans les mains d'entreprises privées et même sous un contrôle hors Québec? J'ai une préoccupation de ce côté-là.

On a vécu le cas. Il a finalement bien tourné parce que le dossier a été fermé, mais cela me préoccupe. Sur le même sujet, je vous dirai qu'on a vécu l'autre partie de Dofor, qui était Donohue, qui est passée dans les mains majoritaires ou presque majoritaires de M. Péladeau et M. Maxwell. Quelle attitude la Caisse

de dépôt va-t-elle prendre dans l'avenir dans le dossier de toutes ces importantes sociétés qu'on veut garder sous le contrôle québécois? Est-ce qu'elle va jouer, avec un autre partenaire, un rôle pour faire en sorte de garder le contrôle québécois? C'est ma première préoccupation. Toujours dans le dossier des privatisations, on a appris, le 31 mars dernier, la privatisation de Seleine, une mine de sel qui est passée aux mains des Américains. Après questionnement, le ministre délégué à la Privatisation a dit hier: I! n'y avait pas d'autre offre québécoise valable. Il y en avait, mais elles n'arrivaient pas, finalement, avec l'offre de Canadian Sait, qui appartient aux Américains. Voilà, ce n'est peut-être pas un domaine dit prioritaire comme le domaine des pâtes et papiers, j'en conviens, mais il reste que voilà une richesse naturelle, une entreprise qui passe aux mains des Américains. On avait investi beaucoup au cours de ces dernières années, on avait eu des pertes, bien sûr, mais on était rendu au point de rentabilité.

Je donne trois exemples, mais, dans le cas de Mines Seleine, est-ce que vous avez été pressenti par des partenaires, est-ce que vous avez travaillé sur le dossier où vous auriez pu être intéressé? Comment cela peut-il se passer quand d'autres sociétés d'État risquent de passer entre les mains de contrôle aussi important, sociétés qui doivent rester québécoises? Le seul organisme, la seule planche de salut, le seul levier économique que les Québécois ont pour être capables de faire une intervention, c'est la Caisse de dépôt. Comment cela se passe-t-il, quelle est votre priorité et pourquoi vous êtes-vous préoccupé, certes, dans certains cas, du cas de Domtar, mais, dans d'autres cas, finalement, du moins n'avons-nous pas eu vent que vous étiez présents? Je donnais le cas de Mines Seleine, peut-être que ce n'était pas un domaine intéressant, mais il y a eu des partenaires québécois, dont je n'ai pas les noms, qui ont effectivement soumissionné et sont arrivés 15 000 000 $ ou 20 000 000 $ plus bas sur 35 000 000 $, et on aurait pu garder le contrôle québécois.

Voilà le volet du rôle de la Caisse de dépôt lors du transfert de sociétés québécoises importantes qui risquent de passer sous contrôle hors Québec.

M. Campeau: Cela me permet, M. le Président, de parler de la philosophie de la Caisse de dépôt. D'abord, j'aimerais revenir au double objectif de la caisse qui est profitabilité et soutien à l'essor économique du Québec. La Caisse se doit, dans tous ses investissements, de chercher la profitabilité. Elle ne donne pas de subvention et elle ne doit pas investir dans des canards boîteux. Donc,, sur ce point, une entreprise aura beau être bien établie au Québec et créer beaucoup d'emplois, si elle n'est pas rentable, la Caisse hésitera grandement avant de mettre son argent et exigera des garanties de l'autre côté, pour sûr. Donc, profitabilité, essor économique et pas de subvention.

Deux mots sur la privatisation de Domtar et Donohue. Les critères exigés par le gouvernement dans les demandes de soumission répondaient aux objectifs de la Caisse de dépôt. Le gouvernement s'était assuré, dans ses critères de demandes de soumission, que le contrôle de ces deux compagnies demeure québécois. Je me rapporte à Donohue, où le bloc d'actions qui appartenait au gouvernement a été acheté par une compagnie qui comprend deux actionnaires, M. Pierre Péladeau au bout, de Québécor, et Robert Maxwell, d'une compagnie d'Angleterre, M. Péladeau ayant le contrôle du holding, je pense que c'est 51 %, et l'autre 49 %. Donc, le critère de garder le contrôle québécois était protégé. La Caisse n'a pas eu a intervenir et n'est pas intervenue dans Donohue; elle n'avait pas d'actions ou très peu.

Dans le cas de Domtar, nous sommes partenaire avec la Société générale de financement. Celle-ci était libre de vendre son bloc et les critères que le gouvernement demandait pour la vente ne pouvaient pas susciter d'alerte a la Caisse de dépôt. La Caisse de dépôt devait être vigilante, mais cela ne suscitait pas d'alerte. La transaction n'a pas été réalisée et on continue à être partenaire avec SGF. À ce moment-là, la Caisse de dépôt n'était pas vendeur et ne l'est pas encore, aujourd'hui, mais souvenons-nous bien, Domtar - rendement, essor économique -est, à long terme, un bon investissement. Je veux bien être délicat; je ne voudrais pas le recommander à des particuliers. Je ne sais pas ce qu'il va faire au cours des deux prochaines années - je parle à long terme - il sera peut-être très bon, au cours des deux prochaines années, mais je ne voudrais pas me... Les investissements de la caisse ne sont pas nécessairement des investissements pour des particuliers; cela dépend des objectifs.

Chaque fois que la Caisse de dépôt fait un investissement dans une compagnie, elle cherche un partenaire. Pour nous, c'est difficile d'investir pour garder le contrôle au Québec si on n'a pas un partenaire compétent pour suivre la compagnie. C'est très difficile pour la Caisse de dépôt d'être le majeur ou le partenaire. Cela lui amène beaucoup de complications et elle ne veut pas intervenir dans les activités au jour le jour; elle veut, bien sûr, suivre l'orientation de la compagnie et les grandes décisions majeures, mais elle ne veut pas intervenir. La philosophie de la caisse est toujours de se trouver un bon partenaire; cela a été le cas pour Provigo; cela a été le cas pour Domtar avec la SGF et c'est aussi le cas, actuellement, avec Noverco ou Gaz Métropolitain. Je pourrais en citer d'autres; dans Vidéotron, c'est M. Chagnon qui est venu voir la Caisse de dépôt, qui a investi lourdement. Elle est un bon partenaire, mais il y a vraiment là un leader qui fait progresser la compagnie.

Dans sa mission d'essor économique du

Québec, la Caisse de dépôt ne peut prendre une compagnie et la diriger elle-même; elle doit toujours s'assurer qu'il y a un partenaire valable à la tête de la compagnie ou, a tout le moins, dans la compagnie. C'est notre philosophie. Quand nous avons une participation importante comme celle que nous avons déjà eue avec Provigo, une participation qui frisait les 30 %, ce n'était qu'une participation temporaire qui ne se voulait pas permanente. Il fallait qu'on trouve un bon partenaire qui pourrait intervenir plutôt que la Caisse de dépôt.

Le Président (M. Hamel): Merci, M. Campeau.

Je reconnais maintenant le député de Mille-Îles.

Valeurs à court terme

M. Bélisle: Merci, M. le Président. Bonjour, M. Campeau.

J'ai une longue série de questions, mais je vais essayer d'être le plus bref possible en prenant d'abord la page 21 du document intitulé "États financiers et statistiques financières de 1987".

Je vais commencer par un petit monologue et, ensuite, je vais vous lancer la balle. C'est évident, lorsqu'on regarde la page 21 et qu'on la met en correspondance avec la page 2 de votre rapport annuel, le moins qu'on puisse dire, c'est que la Caisse de dépôt suit très bien les cycles économiques. Je regarde la page 21, en 1980, la valeur de réalisation de l'unité en dollars, chacune des unités dans le fonds de placement qu'on peut appeler la Caisse de dépôt était de 784 $. En 1980-1981, des événements importants surviennent, la crise, les hauts taux d'intérêt, diminution de 110 $ par unité; en 1981, on passe de 784 $ à 694 $.

En 1982, immédiatement après, on fait un bond presque automatique en l'espace d'un an et on remonte de 126 $ par unité. La correction s'est faite en l'espace d'une année. Le cycle économique a continué d'augmenter; on est passé, par la suite, du plateau de 800 $, en 1982, à 835 $, en 1983, et on augmente sensiblement jusqu'en 1986, modérément jusqu'à 859 $ pour replonger, en 1987, à 814 $. Mais, au lieu de piquer une plonge de 110 $ par unité, M. Campeau, on a piqué une plonge de seulement 45 $ par unité.

Je dois constater que, d'une part, la plonge n'a pas été aussi dramatique. Je voudrais essayer de disséquer avec vous un peu les raisons pour lesquelles cela n'a pas été aussi dramatique. Il me semble que la Caisse de dépôt a peut-être un peu appris de l'expérience qu'elle a vécue en 1981; cela ressort dans les chiffres. Je voudrais surtout attirer votre attention sur différentes données qui ressortent de ce fameux tableau. Après, on passera à d'autres tableaux. (11 h 45)

Les valeurs à court terme qui sont passées, en 1986, de 892 000 000 $ à 704 000 000 $ m'apparaissent, à première vue, comme celles qui ont le plus influencé la diminution en termes de valeur de chacune des unités. Je voudrais que vous m'expliquiez en quoi consistent les valeurs à court terme. Quelle était votre stratégie du début d'octobre, disons deux semaines avant le 19 octobre, la fameuse date fatidique, face à ces valeurs à court terme quant à l'achat, à la vente, aux réserves, etc., que vous aviez déjà mises en place au début de l'année et pour quelle raison il y a un écart de presque 200 000 000 $ qui se reflète, en fin de compte, dans la baisse de 45 $ par unité.

Je vois tous les autres chiffres et, à part des modifications mineures à d'autres postes, il me semble que c'est là le gros bobo où on a subi les contrecoups de l'effet général des marchés internationaux. M. Campeau, loin de moi l'idée de vous dire que vous avez mal fait et que la Caisse a mal fait. Je comprends que la Caisse est un organisme très spécial. Vous avez raison de dire qu'il faut regarder cela à moyen terme.

Je voudrais savoir quelle leçon on a tiré de l'expérience qu'on vient de vivre et comment on va modifier nos stratégies pour faire qu'advenant une autre récession, un krach disons en 1991, en 1992, au lieu d'éviter une baisse de 110 $ comme en 1981, une baisse de 45 $ qu'on a diminuée de moitié en 1987, on pourrait peut-être être encore meilleurs dans notre performance de gestion des fonds publics. M. Campeau.

M. Campeau: C'est sûrement un souhait que je partage. D'autre part, je ne souhaite pas de récession en 1991 et 1992.

M. Bélisle: M. Campeau, vous savez très bien qu'étant donné que toute chose est très aléatoire dans le domaine financier, je pense que le but et l'objectif principal des gestionnaires de la Caisse de dépôt et placement du Québec est de prévoir l'avenir. Pour prévoir l'avenir, on prend le passé, on tire une ligne, on tire des leçons et on ajuste notre stratégie.

Je vous demande: À propos des valeurs à court terme qui me semblent être ce qui a le plus influencé la valeur à l'unité, quelles sont les leçons que vous tirez de votre expérience du krach concernant la stratégie que vous aviez et comment pouvez-vous améliorer la performance sur ce poste? Si la performance avait été meilleure sur ce poste, on se serait peut-être presque maintenu à la valeur de l'unité de l'année passée malgré le krach à la Bourse.

M. Campeau: Vous permettrez que M. Nadeau réponde à la question, M. le Président.

Le Président (M. Hamel): Certainement.

M. Nadeau: L'évolution de notre stratégie, au cours de l'année 1987, a été la suivante. Elle

se divise en deux étapes: jusqu'au mois d'août, nous voyions le marché boursier monter. Les taux d'intérêt montaient également. Ce que nous avons fait à partir du mois de juin, cela a été de commencer à réduire le poids de nos actions dans notre portefeuille en vendant pour environ 230 000 000 $. C'est ce que nous avons fait au cours de l'été.

Arrive la correction boursière du mois d'octobre. Nous avons dit: Les autorités financières vont réagir en baissant les taux d'intérêt. Nous avons pris des liquidités, nous les avons amenées dans le marché obligataire pour profiter de la baisse des taux d'intérêt. Comme vous le savez, quand les taux baissent, la valeur d'un portefeuille monte et vice versa. Donc, à mesure que les indices boursiers baissaient, nous gagnions du côté des obligations.

Il est important de se rappeler qu'au cours des neuf premiers mois la Bourse avait augmenté de 30 %. Arrive octobre; elle baisse de 25 % et nous terminons l'année avec 5 %. Donc, cela ne valait pas la peine, parce que nous savions que notre capital était bien protégé, de prendre une baisse trop forte de notre portefeuille d'obligations parce que nous sommes allés chercher justement ce rendement de 5 %.

Nous avons liquidé une partie de notre portefeuille d'actions avant la correction. Ensuite, parce que les prix étaient beaucoup moins élevés, nous avons racheté ces actions après avoir profité de la baisse des taux d'intérêt au cours des mois de novembre et décembre.

Maintenant, les chiffres auxquels vous faites référence, les valeurs à court terme. Le court terme a été un facteur très positif, l'an passé. Le court terme a été le véhicule, après les hypothèques, qui a procuré le meilleur rendement. Ce que nous avons fait, nous avons dégagé du court terme durant l'été en vendant des actions et on a ensuite été reloger ce court terme en titres obligataires durant le mois d'octobre et, ensuite, on a racheté des actions en novembre, décembre. Le marché nous a donné raison. Il y avait des gens qui disaient: Non, on s'en va en récession, nous étions optimistes malgré tout. Comme je l'ai mentionné tout à l'heure, la Bourse s'est appréciée de 17 % depuis le 19 octobre. Juste un point sur la valeur de réalisation des unités. Ici, il faut voir cela comme si c'était un fonds mutuel. La valeur de réalisation a une importance, mais c'est le nombre d'unités détenues par chaque déposant qui est encore plus important.

Investissements dans le développement régional

M. Bélisle: M. Campeau, dans tout ce qu'on a parlé de développement régional et tout le reste - parce que je sais que le temps file très rapidement - j'ai bien entendu ce que vous avez dit. Vous soulignez la vigueur des placements dans les petites et moyennes entreprises du

Québec. La Caisse a doublé ses investissements dans les PME en 1987 en injectant 80 000 000 $ dans 40 entreprises dont 15 en dehors de la région de Montréal. Je suis un de ceux qui souhaiteraient... Je sais que ce n'est pas facile parce que, quand on prend dans votre état financier toutes les entreprises dans lesquelles vous avez des actions, Dieu sait qu'il y en a. II y en a peut-être 170, 175, je ne sais pas trop, d'après la liste que vous avez ici. Il y a des corporations qui sont pancanadiennes, il y en a qui sont situées en Ontario, il y en a qui sont situées au Québec. C'est difficile d'avoir un bilan régional de tout cela. C'est très difficile à faire.

Je me fais le porte-parole un peu d'un certain groupe de députés qui aimerait peut-être que l'exercice soit fait, qu'il nous soit communiqué pour bien nous faire comprendre l'état de la situation concernant l'influence que le fonds de placement qu'est la Caisse a dans le développement économique régional. Je suis sûr que le ministre des Finances, qui s'est fait un des avocats les plus agressifs du développement économique régional ne m'en voudra pas de vous demander cela. C'est parce que, quand je fais cette comparaison, vous ne pouvez pas m'em-pêcher, quand je regarde à la page 19 l'ensemble des placements, actions et valeurs convertibles qui s'élèvent à 6 722 000 000 $, et quand vous me dites, M. Campeau, que vous soulignez la vigueur des placements des petites et moyennes entreprises du Québec sachant que c'est le royaume des petites et moyennes entreprises au Québec et vous dites que, cette année, on a investi 80 000 000 $ dans les petites et moyennes entreprises, je sais qu'il y a d'autres montants qui ont été déjà placés dans les petites et moyennes entreprises par la Caisse dans les années précédentes. Mais, 80 000 000 $ sur 6 722 000 000 $, cela ne fait pas beaucoup. Je me demande, quand je regarde la Loi sur la Caisse de dépôt et placement, si on n'est pas rendus à une époque, si on veut réellement développer nos régions au Québec, si on a une volonté politique de le faire, où il faut éviter de prendre la formulation des articles 24, 25, 26, 27 et 28 où on dit: "La Caisse peut", et en arriver aux articles 30 et 31, vous imposer un "doit" avec un pourcentage de l'actif que vous avez, si on veut réellement le faire.

Vous allez me dire peut-être: C'est une question politique et je ne veux pas m'en mêler. Je vous demande au départ une chose: Essayez donc de nous faire, si c'est possible, avec toutes les réserves qu'on peut avoir, et je connais les réserves qu'on peut avoir, une sorte de bilan des interventions de la Caisse par le biais des aides, des prêts, des contributions au capital-actions des entreprises sur le plan régional au Québec, parce que je pense que c'est une des avenues des prochaines années. C'est une demande que je vous fais tout simplement.

M. Campeau: Si vous le permettez, M. le Président, avant de répondre à la question, je fais juste un aparté. Premièrement, la Caisse de dépôt, avec le restant de son actif, investit dans les hypothèques dans les immeubles et dans les obligations au Québec. Donc, souvent, on dit: Dans telle région, la Caisse de dépôt n'a pas investi, jusqu'à ce qu'on découvre, par exemple, que la Caisse de dépôt a des obligations dans un hôpital d'une région, un cégep ou une université bien située. Donc, la Caisse de dépôt investit dans des structures selon les obligations. Alors, elle investit dans les régions, mais c'est souvent caché comme vous le soulignez. Peut-être que cela devrait être ressorti à un moment donné.

Quant à notre portefeuille d'actions de 8 000 000 000 $, il n'y a pas de doute que ce serait agréable de pouvoir bien limiter ce qui est investi au Québec et ce qui a été investi ailleurs au Canada et partout. Par exemple, nos investissements dans Provigo ne paraissent pas dans nos moyennes entreprises, c'est une grande entreprise. Cela n'empêche pas qu'il y a des retombées importantes au Québec. Il en va de même aujourd'hui de Domtar, de Noverco, de Vidéotron ou de Canam-Manac.

M. Bélisle: Vous comprendrez, M. Campeau, que je ne veux pas faire un long débat là-dessus, mais vous dites 8 000 000 000 $. C'est exact parce que vous ajoutez des titres étrangers de 1 220 000 000 $. On peut débattre longtemps du bien-fondé d'investir 1 220 000 000 $ de notre fonds de placement québécois, et on peut dire que c'est une mesure de sécurité, à l'extérieur ou non. C'est une question sur laquelle les analystes financiers peuvent se pencher. Je pense qu'il y a quand même une juste proportion qu'il faut peut-être étaler et qu'il faut peut-être établir et qu'il faut regarder.

Je ne veux pas m'attarder plus longtemps. J'ai juste une dernière question pour vous et celle-là, je vais vous le dire, c'en est une "cochonne". Au Québec, il y a un débat qui va se faire et de plus en plus au cours des prochaines années; c'est un débat sur la concentration du capital dans certaines entreprises, dans une poignée d'entreprises qui vont diriger notre société et qui vont décider des choix de tous et chacun dans la société québécoise.

La Caisse de dépôt est propriétaire d'actions de Provigo et de Steinberg. Vous êtes dans une belle position. Présentement, on a sur la place publique une centrale syndicale très importante et beaucoup d'autres qui commencent à penser que la concentration du capital - je suis un de ceux-là et je l'ai déjà dit à l'Assemblée nationale dans d'autres domaines qui relèvent du secteur financier - ce n'est pas nécessairement une bonne chose pour la société québécoise et pour les consommateurs au Québec. La FTQ va même jusqu'à parler de la protection du domaine agricole, car l'achat des produits fait par Steinberg représente 600 000 000 $; c'est l'acheteur le plus important au Québec. Vous êtes dans une position bien spéciale.

Je veux savoir quelle est la position de la Caisse de dépôt, présentement. Elle joue sur deux tableaux. Vous avez un dossier évident où j'aurais beaucoup de difficulté, si j'étais à la place de quelqu'un de la Caisse de dépôt, à dire: Oui, on va appuyer Provigo ou on va inciter nos gens au conseil d'administration de Provigo à procéder à l'acquisition d'une partie des actifs de Steinberg ou de Steinberg. J'aimerais savoir comment vous en arrivez à prendre une décision dans un cas semblable. Si la décision n'est pas prise, que vous nous le disiez bien honnêtement. Est-ce qu'il ne serait peut-être pas préférable pour la Caisse de dépôt, dans un cas semblable, où elle est un peu dans une sorte, non pas de conflit d'intérêts, mais de position publique très spéciale, de jouer un jeu neutre et de se retirer un peu sur la bande et de laisser les événements se dérouler? C'est une question de fond qui préoccupe les propriétaires de commerces de meubles et tous ceux qui sont propriétaires de petites entreprises au Québec. On se demande, à un moment donné, si ce n'est pas seulement une petite "gang", une poignée qui va contrôler toutes les décisions des Québécois. Vous avez une partie de responsabilités là-dedans.

Le Président (M. Hamel): Merci, M. le député de Mille-Îles. M. Campeau, s'il vous plaît.

M. Campeau: La Caisse de dépôt est la Caisse de dépôt et placement du Québec. Donc, chaque entrepreneur a une entrée à la Caisse de dépôt et peut faire affaire avec elle, pourvu, bien entendu, qu'il satisfasse aux critères de rendement. Donc, ce n'est pas parce que nous sommes déjà dans une industrie, que nous avons déjà investi dans une compagnie ou dans une industrie particulière, que nous allons refuser un investissement dans une autre compagnie de la même industrie qui serait en compétition directe avec des investissements que nous avons déjà. Il faut admettre que c'est un sujet fort délicat et il faut être prudent sur la façon dont nos investissements vont être faits.

Cela dit, Steinberg, comme je l'ai déclaré il y a quelques semaines, est un bon citoyen corporatif québécois que la Caisse voudrait voir continuer. La Caisse a, d'autre part, des investissements importants dans Provigo et a transigé avec Métro-Richelieu dans des hypothèques et dans d'autres genres d'investissements. Métro-Richelieu et Provigo décident de s'unir ensemble pour acheter une partie des magasins. La Caisse ne fait pas partie de cette transaction. La Caisse n'a pas été consultée là-dessus et n'a pas à l'être. Elle se doit, comme vous le dites si bien, de rester sur le côté de la bande. D'autre part, nous avons eu des rencontres avec certains acheteurs éventuels de Steinberg et, si nous pouvons trouver un partenaire acceptable à la Caisse de dépôt, qui pourrait acheter Steinberg

ou une partie de l'alimentation, la Caisse pourrait facilement être investisseur nonobstant les sommes qu'elle a investies chez Provigo ou chez Métro-Richelieu.

M. Bélisle: M. Campeau, est-ce que l'objectif de la Caisse de dépôt en faisant ses placements dans du capital-actions d'entreprises est d'éviter la concentration du capital dans une poignée d'entreprises au Québec et de répartir, de maintenir, d'augmenter, d'accroître la concurrence, le meilleur système que l'homme ait pu inventer sur le plan économique? C'est ma question. (12 heures)

M. Campeau: Écoutez, avant...

M. Bélisle: Je sais que ce n'est pas facile, M. Campeau.

M. Campeau: Non, mais écoutez! Au point de vue économique, le Québec a encore beaucoup de chemin à faire. Il a été créé, au Québec, des entreprises qui n'existaient pas avant. Aujourd'hui, vous avez un choix d'entrepreneurs. La Caisse de dépôt doit stimuler et épauler ces entrepreneurs et être un partenaire avec eux. Est-ce qu'elle aura la solution parfaite? Je ne le sais pas. Est-ce qu'elle va diriger l'économie comme cela se fait au Japon? Non. Il y aura toujours des aléas comme cela qui ne sont pas parfaits. J'affirme que la Caisse de dépôt doit soutenir l'économie avec ses limites d'intervention. Elle ne peut pas avoir plus de 30 % des actions dans une compagnie; donc, cela la limite dans son intervention.

D'autre part, je partage votre commentaire disant: Dans ce cas précis, est-ce qu'elle devrait rester de côté et ne pas faire d'interférence dans l'achat Métro-Provigo? Jusqu'à un certain point. S'il y a un partenaire qui se présente à la Caisse, un bon partenaire qui peut nous prouver qu'en achetant la section alimentaire Steinberg il y a moyen de faire de l'argent, avec toutes les autres conditions qu'on pourrait lui demander, elle pourrait fort bien aider à ce que Steinberg demeure au Québec et demeure concurrentiel avec les autres chaînes d'alimentation dont vous faites mention. Est-ce qu'elle doit être à l'origine de cela? J'en doute un peu.

Le Président (M. Hamel): Voici, nous avions convenu d'une heure, nous avons atteint cette heure. J'avais reconnu M. le député de Saint-Louis et M. le député de Bertrand qui avaient aussi une toute petite question à poser à M. Campeau. Si les deux partis sont d'accord, nous irons jusqu'à 12 h 5 et nous entendrons ensuite Loto-Québec. M. le député de Saint-Louis.

Rendements prévus

M. Chagnon: Tout d'abord, je voudrais remercier mon collègue, le député de Bertrand, d'accepter cet ajout à notre temps. Trois petites questions fort brèves. Vous avez dit tout à l'heure que vous aviez eu 16,9 % de rendement moyen dans le cycle économique 1982-1987. Vous avez comparé votre rendement moyen de 16,9 %, en le trouvant excellent, surtout s'il était comparé à un rendement moyen de l'inflation à 4 %. Est-ce que vous pourriez m'indiquer à quel endroit vous pouvez faire une comparaison avec un rendement moyen d'inflation de 4 % dans le cycle économique 1982-1987?

M. Campeau: Le taux d'inflation de 4,5 % est le taux d'inflation publié par Statistique Canada. C'est un taux annuel...

M. Chagnon: Pour 1982-1987?

M. Campeau: Oui, depuis cinq ans - en 1982, je suis moins certain - mais pour toutes les autres années, l'inflation n'a jamais dépassé la barre de 5 %.

M. Chagnon: En 1982-1983, le taux d'inflation était plus de 5 %?

M. Campeau: Pour 1983, j'en douterais fort. En 1982 peut-être, je ne suis pas certain, mais nous sommes convaincus que le taux annuel moyen de 1982 à 1987 est de 4,5 %.

M. Chagnon: D'accord. Je le vérifierai. Deuxième question. Lorsque vous nous parlez - je trouve qu'il y a tout lieu de le croire et de s'en réjouir avec vous - année après année - puisque cela fait déjà trois ans que nous nous rencontrons ici, en commission parlementaire, à l'étude des crédits - non seulement de la grande compétence, mais du rendement supérieur de la Caisse de dépôt par rapport à l'indice TSE - année après année, les paramètres sont toujours excellents pour la Caisse de dépôt - on est portés à conclure que ce sera toujours ainsi. Est-ce que vous avez un bilan prospectif à nous donner? Quels sont, compte tenu des indicateurs économiques que vous étudiez déjà à la Caisse de dépôt, les pourcentages de rendement que vous prévoyez pour chacun des portefeuilles que vous avez? L'an prochain, on pourra au moins comparer votre estimation avec le rendement que vous croyez pouvoir atteindre.

M. Nadeau: Effectivement, nous gérons notre portefeuille à partir de ce que nous appelons les rendements attendus. Pour chacun des véhicules, nous établissons un rendement attendu et les véhicules offrant le meilleur rendement... L'an passé, nous prévoyions que les taux hypothécaires allaient demeurer stables et nous offrir ce rendement de 9,5 %. Donc, on investit massivement dans les véhicules les plus prometteurs, disons. Ces calculs de rendements attendus font partie de la stratégie interne. Vous comprendrez que, pour ne pas donner certains

éléments à différents joueurs sur le marché financier, il serait difficile pour la Caisse de dévoiler ces rendements parce que c'est là qu'on va investir massivement. Ce serait mettre toutes nos cartes sur la table en début d'année comme cela.

M. Chagnon: Vous remarquerez que, pour le législateur, cela devient plus compliqué de pouvoir savourer ce sentiment de satisfaction que vous avez à l'égard du rendement de la Caisse par rapport, entre autres, à l'indice TSE ou par rapport à d'autres indices. Nous en avions discuté abondamment l'an dernier. Ce serait plus palpitant, en tout cas, pour le métier de législateur, de pouvoir comparer vos prévisions avec vos rendements.

M. Nadeau: Je pense que, pour le législateur et pour les déposants, l'élément le plus important est le résultat en termes de dollars. Il me semble que c'est peut-être la façon dont on peut nous évaluer parce qu'à certains moments il peut aussi y avoir de la chance. Nous pouvons investir dans un domaine qui performe encore mieux que nous ne l'avons cru. Alors, nos rendements attendus ou espérés ne sont peut-être pas significatifs. Ce qui est important, c'est le rendement. Et, dans le domaine du placement, les conseillers en placements tant publics que privés, tout le monde évalue ainsi la performance.

Le Président (M. Hamel): Une dernière très, très brève question, M. le député de Saint-Louis.

Engagement du personnel

M. Chagnon: L'an dernier, M. le président, vous aviez souligné quelques problèmes pour l'engagement de personnel à la Caisse de dépôt compte tenu du questionnement dont vous nous faisiez part à l'égard des salaires que vous deviez payer à la Caisse de dépôt. Avez-vous plus de facilité cette année pour obtenir des gestionnaires pour vos portefeuilles? J'ai cru comprendre que certaines maisons de courtage avaient libéré plusieurs membres de leur personnel depuis un certain 19 octobre.

M. Campeau: Généralement, les gens qui sont libérés... Non, ce ne serait pas une bonne réponse, je pense.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Campeau: Je ne veux pas parler des personnes qui ont été libérées par les maisons de courtage.

M. Chagnon: Je peux vous dire que ce ne serait pas une bonne réponse.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Campeau: Mais disons que c'est un fait qu'il y a moins de pression à l'heure actuelle. Dans le domaine financier, la demande pour du nouveau personnel est moins forte qu'elle n'était. D'autre part, ce n'est que partie remise parce qu'au Québec, dans le domaine des institutions financières, avec les nouvelles règles, les nouvelles maisons pullulent, et il va y avoir encore beaucoup de demandes dans les institutions financières. La demande est très forte surtout pour les gestionnaires francophones. Disons qu'on a un temps de répit un peu.

D'autre part, la Caisse de dépôt a maintenant une échelle de salaires qu'on peut dire moyenne. Alors, nous ne sommes pas ceux qui payons le plus ni ceux qui payons le moins. Notre objectif est de rester moyens. Une telle échelle peut nous permettre de garder la plupart de nos gestionnaires et d'aller en chercher à l'extérieur, parce qu'il y a aussi de grands avantages à venir travailler à la Caisse de dépôt, surtout à la sortie de l'université alors que la Caisse de dépôt est un excellent élément de formation. Ma foi, pour quelqu'un qui sort de l'université, s'il a à choisir entre faire un MBA ou venir à la Caisse de dépôt, peut-être que c'est un choix de 50-50.

Le Président (M. Hamel): Merci...

M. Chagnon: Je vous remercie, M. le président.

Le Président (M. Hamel): Merci, M. le député de Saint-Louis et merci, M. Campeau. Je reconnais maintenant M. le député de Bertrand, très brièvement aussi.

Représentation dans les CA des entreprises

M. Parent (Bertrand): Très brièvement. Un premier point pour mentionner que le rapport financier est présenté moins de trois mois après la fin de l'année financière. Je trouve cela excellent pour une entreprise de cette envergure et j'espère que le ministre des Finances, qui fait marche arrière, prendra exemple sur les sociétés d'État comme la Caisse de dépôt et de placement qui sont capables de nous présenter un rapport financier public dans les trois mois qui suivent la fin de l'exercice financier pour qu'on puisse en discuter. C'est de l'histoire passée, mais tout cela pour dire qu'au gouvernement du Québec, on attend neuf mois l'accouchement des états financiers. Lorsqu'on commence à en discuter, on est un an plus tard. On parle toujours un an en arrière et on a de la misère à apporter des correctifs. Je tenais à préciser que c'est un bel exemple: la Caisse de dépôt, qui brasse des milliards de dollars et qui est capable, dans les 90 jours, d'avoir des états financiers et de parler avec des chiffres à jour.

Deuxièmement, je vous demande de nous soumettre, aux parlementaires - cela m'intéres-

se - dans les prochains jours ou les prochaines semaines, dès que cela vous sera possible, la liste des 40 entreprises, les PME, dans lesquelles vous avez investi 80 000 000 $, par secteurs d'activité de même que par région, du moins avec le détail là-dessus. Quels montants ont été investis et dans quoi? J'aimerais avoir cette liste parce que, bien sûr, elle est insérée dans la grande liste, à la fin du rapport, mais on ne peut pas retrouver ce bloc-là. J'aimerais avoir cette information.

Dernier point. Malheureusement, notre temps est déjà écoulé et ce fut trop court pour autant de questions. Je sais que la Caisse de dépôt comme actionnaire, qu'elle soit minoritaire, et elle l'est toujours, mais qu'elle soit très très minoritaire, a normalement toujours un représentant au conseil d'administration de l'entreprise pour surveiller ses intérêts. J'imagine que cette présence au conseil d'administration se négocie. Je me demande jusqu'à quel point la Caisse de dépôt pourrait jouer un rôle plus actif encore dans certaines décisions qui sont prises parfois par des entreprises. Du fait que la Caisse de dépôt et placement soit présente, comme actionnaire, dans telle ou telle entreprise, je pense qu'elle pourrait davantage être incitative, par son représentant, du fait que, parfois, ces entreprises québécoises, dans lesquelles la Caisse de dépôt investit l'argent des Québécois, déménagent et rapatrient une partie importante de leurs activités dans une autre province.

Je donne un exemple qui est d'actualité. C'est le cas de Spar Aerospace où vous avez des petites sommes d'investies, mais vous êtes actionnaire, à ce que je vois. Quand ces gens-là décident de déménager plusieurs de leurs activités importantes en Ontario parce que les contrats ne sont pas venus au Québec, je me demande si la Caisse de dépôt, dans un cas semblable - il y a sûrement d'autres cas qui se présentent - peut être assez incitative pour essayer de jouer un autre rôle, mais un rôle aussi d'actionnaire québécois, et essayer de faire des pressions pour garder des activités ici et ainsi éviter qu'elles s'en aillent. Voilà un exemple.

Le Président (M. Hamel): Très brièvement, M. Campeau, s'il vous plaît!

M. Campeau: Un administrateur, quel qu'il soit, n'a pas tout le pouvoir. Nos administrateurs, bien sûr, connaissent notre double mandat. Ils s'efforcent de le faire connaître aux compagnies. Je pense que le travail doit être fait avant. Ce n'est pas une fois que quelque chose est décidé qu'il faut se lever. C'est avant qu'il faut parler. La Caisse de dépôt, dans la limite de ses pouvoirs, et les administrateurs qu'elle suggère au conseil d'administration, dans la limite de leurs pouvoirs, s'efforcent, bien entendu, de penser québécois, mais ils ne sont pas les seuls.

Cela me permet de rappeler que la Caisse de dépôt a toujours sa politique de représentation proportionnelle. Selon elle, si un actionnaire a 10 % des actions, il devrait y avoir 10 % des membres du conseil d'administration qui devraient le représenter, ce qui n'est pas accepté par tout le monde. C'est surtout accepté et facilement accepté par les nouveaux partenaires avec qui nous faisons affaire. Généralement, chez eux, l'individu est propriétaire et, en même temps, directeur général et n'a aucune objection à voir la Caisse de dépôt à son conseil d'administration. Il souhaite même sa venue par l'entremise de ses administrateurs. C'est plus difficile dans le cas où une compagnie, ou le "management" d'une compagnie, est composé de gens qui ne sont pas actionnaires ou ne sont pas de gros actionnaires. Pour eux, c'est un peu sauvegardé.

Le Président (M. Hamel): Je vous remercie, M. Campeau. Je remercie le député de Bertrand ainsi que les collègues qui vous accompagnent de votre participation à la séance de ce matin. Sans plus tarder, j'inviterais la direction de Loto-Québec à prendre place. Merci, M. Campeau. (12 h 15)

M. Campeau: Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Hamel): C'est un plaisir.

Veuillez prendre place, chers collègues, s'il vous plaît! Nous sommes déjà en retard de quinze minutes. J'implore votre bienveillante collaboration, messieurs les parlementaires, s'il vous plaît!

Bienvenue, M. le président de Loto-Québec. Voulez-vous, s'il vous plaît, identifier la personne qui vous accompagne? Si vous voulez quelques minutes de présentation, il nous fera plaisir de vous entendre.

Loto-Québec Audition du président

M. Clark (David): Très bien. D'abord je vous remercie vivement de nous avoir permis d'exposer notre situation à la commission. Je vous présente M. Denis Vandry qui est le vice-président rattaché à la direction générale. M. Vandry est chez nous depuis 1974, donc depuis plus longtemps que moi.

Le Président (M. Hamel): Très bien. Merci.

M. Clark: Je peux faire rapidement un tour d'horizon pour voir où nous en sommes. D'abord, notre année financière se termine le 31 mars. Nous n'avons donc pas les données exactes pour l'exercice que nous venons de compléter. Cependant, nous savons déjà et nous avons déjà annoncé au ministre que nous avons atteint nos objectifs pour l'année. Je dois dire que ce fut sans doute l'année la plus difficile dans l'histoire de Loto-Québec, car nous avons démarré l'année

au milieu d'un conflit de travail avec plus des deux tiers de nos employés. Évidemment, il fallait que les gestionnaires fassent marcher la boîte et répondent le mieux possible à la demande des consommateurs. Ensuite, nous avons eu un besoin criant de capacités informatiques pendant toute l'année, car nos produits informatisés ont pris une plus grande part du marché que prévu il y a cinq ans quand nous avions renouvelé le système. Comme la plupart des gens le savent, nous avons souffert, en janvier, d'une présumée fraude sur l'un des produits que nous gérons avec les autres provinces, le Provincial. On pouvait donc croire que cela puisse miner de beaucoup la confiance des consommateurs en Loto-Québec.

Par contre, nous avons eu de très bonnes occasions durant l'année. Nous avons d'abord eu la signature de nos conventions collectives qui assurent, je crois, d'excellentes conditions de travail à tous nos employés. Je dois dire aussi que tout le monde travaille très fort et je suis très satisfait de la performance de l'ensemble de nos employés cette année. Ensuite, dans le cas du projet ENJEU, pour renouveler notre système informatique, un jury a procédé au choix des fournisseurs et nous avons déjà entrepris les négociations. Il faut négocier tous les détails des ententes avec les fournisseurs pour pouvoir procéder et cela va nous permettre, au cours des trois prochaines années, de renouveler notre système central informatique et de presque tripler sa capacité, donc de rendre de bien meilleurs services à la clientèle et de remplacer aussi 2900 vieux terminaux, qui sont là depuis 1978 en moyenne, par de nouveaux terminaux beaucoup plus performants et d'ajouter entre 500 et 600 nouveaux terminaux chez de nouveaux détaillants qui en méritent, mais qui n'en ont pas encore.

Je dois aussi dire que ce dernier trimestre a certainement été le meilleur de l'histoire de Loto-Québec et on peut donc croire que la présumée fraude n'a pas eu un impact durable sur la confiance de la population. Nos objectifs étaient quand même relativement timides cette année et nous les avons atteints difficilement. Nos ventes ont augmenté d'environ 3 %; nous avons dépassé 1 000 000 000 $ comme chiffre d'affaires pour la première fois de notre histoire; notre effectif est stable depuis un an, et les frais d'administration et les bénéfices nets ont aussi augmenté de 3 %. Mais, si on regarde le contexte à plus long terme, depuis cinq ans, nos ventes totales ont augmenté de 90 %; notre effectif a augmenté de 2 %; nos frais d'administration ont augmenté de 22 % et notre bénéfice net de 130 %. Je crois donc qu'en misant de façon intelligente sur la technologie et en rendant nos employés de plus en plus efficaces et capables de rendre service, cela a permis à Loto-Québec de poursuivre sa croissance de productivité depuis cinq ans.

Si on regarde vers l'avenir, par rapport à l'année qu'on vient de commencer, nous prévoyons augmenter les ventes d'un taux supérieur au taux d'inflation et le profit net devrait évidemment augmenter encore plus. Nous prévoyons continuer à modifier certains de nos produits pour les rendre plus attrayants à la population. Nous venons même d'annoncer le retrait d'un produit qui a été vendu dans tout le Canada pour le remplacer par un nouveau produit à 20 $ qui sera sporadique, mais qui devrait être intéressant et, dès que nous aurons implanté le nouveau système central informatisé, nous pourrons envisager des modifications ou de nouveaux lancements dans le domaine des produits informatisés. Voilà la présentation.

Le Président (M. Hamel): Merci, M. Clark. J'inviterais maintenant M. le député de Bertrand.

M. Parent (Bertrand): Merci, M. le Président...

Le Président (M. Hamel): Tout en vous prévenant que nous avions convenu de suspendre nos travaux à 12 h 30 pour les reprendre plus tard cet après-midi, à 15 h 30 environ. M. le député de Bertrand.

Discussion générale Sécurité des systèmes

M. Parent (Bertrand): Merci, M. le Président. Vous me savez respectueux du règlement. On va donc s'organiser a l'intérieur du temps que nous avons et on va se revoir après le dîner.

Merci d'être là, M. Clark et vos collaborateurs. J'ai mentionné tantôt, dans la présentation de départ, que Loto-Québec générait beaucoup beaucoup d'argent. C'est une société on ne peut plus rentable. Mais la question qu'on se pose en tant que représentants de la population et députés à l'Assemblée nationale, c'est que les bénéfices étant tellement disproportionnés par rapport à tout ce qui se fait, à tout genre de commerce, est-ce que l'administration de ventes de tout près de 1 000 000 000 $ est une administration réellement saine? Et est-ce que même s'il reste toujours des bénéfices, il n'y aurait pas lieu justement d'avoir davantage de rendement à Loto-Québec? Des bénéfices de 400 000 000 $, M. le Président, c'est beaucoup d'argent. On a souvent l'impression et on entend souvent les gens dire qu'il se fait beaucoup de gaspillage. C'est une image qui est donnée. Je ne dis pas qu'elle est fondée. Je pense qu'on va avoir besoin de rassurer la population, d'une part.

Quand il arrive des événements comme ceux que vous avez mentionnés tantôt, la fameuse présumée fraude ou les événements de fraude endébut d'année 1987, et que nous vivons de plus

en plus à l'ère de l'informatique, à l'ère où tout est contrôlé et géré par les ordinateurs, et que de plus en plus on s'en va vers un monde où les plus grandes fraudes seront dans le domaine des ordinateurs parce qu'il y a des gens qui se spécialisent justement à essayer d'apprendre à contrôler et à savoir comment détourner ces machines très intelligentes, je me préoccupe au plus haut point de l'aspect sécurité dans le cas de Loto-Québec. Oui, on a pu mettre à jour ou découvrir des choses, mais j'imagine qu'il ne faudrait pas qu'il arrive un autre événement semblable, à courte échéance, pour miner toute la crédibilité d'une société aussi importante que Loto-Québec. Je pense que le gouvernement, le ministre des Finances et nous tous en serions pénalisés parce que les bénéfices de Loto-Québec peuvent entrer et venir dans les poches du gouvernement, donc bénéficier à l'ensemble des contribuables.

Mais la journée qu'on perdra cela parce que des gens diront: On savait que c'était arrangé ou on savait qu'il y en a qui réussissaient à aller chercher les combinaisons ou peu importe... Alors, l'aspect sécurité est peut-être le seul volet auquel je vais toucher avant le dîner. Sans nous dévoiler quoi que ce soit, vu l'évolution très avancée de l'informatique, que vous avez vous-même mentionnée, vu les contrôles qui se font avec les postes de distribution de plus en plus nombreux que vous avez, ce qui est excellent et qui permet d'éviter les engorgements et d'augmenter les points de vente, donc, le fait que de plus en plus on s'en va vers cette automatisation, est-ce qu'on peut nous donner l'assurance, à la direction de Loto-Québec, qu'il y a un nombre de mesures suffisamment importantes qui sont prises de façon régulière en termes... Pour bien se comprendre, y a-t-il suffisamment dans les différents jeux, des "spot checks" pour assurer le plein et entier contrôle et pourvoir en tout cas essayer de prévoir les détournement par l'informatique? C'est ce volet, et cet après-midi je reviendrai sur deux ou trois autres points, concernant les points de vente particulièrement.

Le Président (M. Lemieux): M. Clark.

M. Clark: Vous avez évoqué la possibilité de gaspillage. Je pense que dans l'ensemble la gestion est très saine. Personnellement, je ne vois pas de gaspillage. Par contre, c'est évident que, quand on dépense 15 000 000 $ ou 16 000 000 $ par année en publicité, il est difficile de dire que tout dollar est parfaitement rentable. Mais, en général, nos activités et nos actions comme cela, on les évalue au fur et à mesure et on essaie toujours de rendre les dépenses et l'utilisation des ressources de plus en plus efficace.

Maintenant, en parlant de sécurité, il est évident que, lorsqu'on a eu le choc de janvier, avec ce qui se passait avec le Provincial, nous avons tout de suite révisé tous nos systèmes de sécurité. Nous n'avons pas trouvé vraiment de lacunes dans le domaine de l'informatique. Mais je crois que l'important, c'est que, comme la technologie progresse constamment dans ce domaine, il faut aussi que nous progressions avec les moyens de la technologie. C'est sûr qu'il y a toujours des gens qui vont tenter d'entrer dans nos systèmes et c'est évident qu'on doit constamment réviser nos systèmes, les améliorer et utiliser toutes les ressources technologiques possibles pour rendre nos systèmes le plus sécuritaires possible.

C'est ce que nous faisons. Moi j'ai la certitude que nos systèmes d'informatique sont les plus sécuritaires du Québec et sans doute de l'Amérique du Nord. Je n'ai pas vu de banques qui sont au même niveau que nous, et c'est évident que pour nous c'est primordial. L'une des raisons pour modifier notre système central, c'est pour bénéficier de ce qu'offre la technologie pour augmenter la sécurité sur tous les plans. La sécurité dans le domaine de l'informatique n'est pas uniquement une question de système informatique. C'est aussi une question d'employés, de procédés, de vérifications externes et internes. C'est aussi la possibilité de mettre des barrières physiques. Par exemple, vous ne pouvez pas entrer directement dans notre système central sans passer par des barrières; il faut que quelqu'un vous branche. Donc, vous pouvez mettre des moyens de sécurité et de vérification à plusieurs niveaux, précisément pour empêcher que les gens puissent entrer à l'intérieur des systèmes, et c'est ce que nous faisons.

M. Parent (Bertrand): L'aspect de la sécurité; la sécurité est-elle faite par des gens de l'interne? De quelle façon procédez-vous? Quels services retenez-vous pour faire ces vérifications constantes quant à la sécurité?

M. Clark: Tous les trois ans, je crois, nous faisons un appel d'offres pour la vérification de nos tirages, par exemple. À ce moment-là, nous choisissons, par jury, la firme de vérification québécoise qui répond le mieux à nos critères. Nous venons de faire un changement; c'était Samson, Bélair jusqu'à il y a un mois. On a fait un autre concours et la nouvelle firme est - il faudrait que je retrouve le nom parce que je l'ai oublié - mais c'est une firme très reconnue au Québec.

Maintenant, pour la vérification interne, nous avons notre propre équipe, Coopers, Ly-brand, Laliberté, Lanctôt. Évidemment, nos comptes sont vérifiés par le Vérificateur général du Québec. Quand nous voyons des possibilités d'améliorer nos systèmes ou même si nous nous posons des questions sur la sécurité éventuelle d'une partie du système, souvent nous lançons des appels de soumissions pour faire un travail spécial. C'est évident que nous travaillons très fréquemment avec les plus grandes firmes

d'informatique du Québec ainsi qu'avec certaines firmes de vérification comptable, pour des parties de système et pour des parties du domaine de la sécurité. Je crois que c'est important que ce soit toujours un mélange de gens de l'intérieur et de gens de l'extérieur, précisément pour pouvoir bénéficier de la meilleure technologie et des meilleures connaissances dans ces domaines.

Le Président (M. Hamel): M. le député de Bertrand, une dernière question?

Nouvelles mesures pour l'exploitation des kiosques

M. Parent (Bertrand): Une dernière question, M. le Président. De votre personnel, on faisait parvenir récemment, en février 1988, une lettre à des organismes sans but lucratif qui exploitent des kiosques et on y mentionnait qu'il y avait changement, si j'ai bien compris, de différentes mesures: entre autres, l'entente d'exploitation d'un kiosque serait limitée à cinq ans, au terme duquel le kiosque serait offert aux associations sans but lucratif accréditées et

Loto-Québec limiterait......à six le nombre de kiosques gérés par une même association. Étaient-ce de nouvelles mesures apportées sur ces deux volets? Si oui, pourquoi maintenant la question des cinq ans? Il semble qu'en régions et particulièrement auprès de certains organismes, cela crée une préoccupation. Pour les organismes c'est une source de fonds et ils se demandent si au bout de cinq ans il n'y aura plus de possibilité de renouvellement.

M. Clark: En fait, nous avons annoncé trois nouvelles mesures en même temps. La première mesure et la plus concrète dans l'immédiat c'est que nous avons accepté pour la première fois de défrayer la moitié du coût des loyers des kiosques gérés par des OSBL. II faut dire que la grande majorité de nos kiosques est remise à des associations de charité qui deviennent nos détaillants et les kiosques représentent environ 15 % de nos ventes d'année en année. Or, nous avons évalué, depuis quatre ans, la rentabilité des kiosques pour les OSBL. Elle a baissé en dollars constants, si on veut, et en payant la moitié du loyer, cela signifie que Loto-Québec paiera 500 000 $, du point de vue global somme qu'elle ne payait pas précédemment. Donc, les OSBL ont 500 000 $ de moins à défrayer. Cela devrait augmenter la rentabilité nette de 1 200 000 $ à 1 700 000 $ pour l'année qui vient, ce qui se compare très avantageusement avec la rentabilité d'il y a quatre ans qui était de 1 300 000 $ environ.

Donc, c'était le premier geste qu'on posait, mais en même temps on a annoncé aux OSBL que, du fait qu'il y avait 70 associations qui géraient actuellement un ou plusieurs de nos 179 kiosques, et du fait aussi qu'il y avait 88 autres associations qui satisfaisaient à nos critères, qui étaient qualifiées pour la gestion d'un kiosque, mais qui n'avaient pas eu la possibilité de le faire, il fallait qu'on implante une nouvelle politique pour permettre aux autres associations d'avoir droit au chapitre également. Or, nous ne voulons pas le faire de façon brutale, c'est évident, et nous n'excluons pas la possibilité que les OSBL qui gèrent actuellement nos kiosques puissent continuer. Cela se fera par concours, chaque fois, en invitant les OSBL de la région à postuler pour un kiosque et on fera les modifications de concert avec les OSBL qui gèrent déjà des kiosques, mais il faut quand même se donner certains règlements pour permettre une saine rotation de ces kiosques.

De plus, si les gens ont suffisamment de préavis, surtout les OSBL qui gèrent plusieurs kiosques déjà, cela ne devrait pas avoir un impact négatif sur leur financement, pour autant qu'ils puissent prévoir et trouver d'autres moyens. Vous me direz que c'est très difficile de trouver des moyens de financement pour les OSBL de nos jours, mais si on regarde le cas des OSBL, par exemple, qui gèrent huit ou neuf kiosques, on les réduira à un maximum de six kiosques, au taux d'un kiosque par année, mais on les invitera à choisir les kiosques qu'ils veulent remettre. Donc, ce sont les moins rentables, c'est évident. Pour ces OSBL il y aura moyen de conserver la même rentabilité que par le passé.

Pour les OSBL qui ne gèrent qu'un ou deux kiosques, cela devient beaucoup plus critique parce que cela peut représenter une partie importante de leur financement. À ce moment-là, il faudra qu'on le fasse sur plusieurs années, qu'on leur donne plusieurs années de préavis, qu'on leur permette de postuler pour le renouvellement du kiosque et qu'on planifie cela de la meilleure façon possible.

Le Président (M. Hamel): Merci, M. Clark, merci, messieurs.. Alors, tel que convenu, je suspends les travaux de la commission jusqu'à cet après-midi à environ 15 h 30 après les affaires courantes. Merci.

(Suspension de la séance à 12 h 35)

(Reprise à 15 h 17)

Le Président (M. Lemieux): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission du budget et de l'administration reprend ses travaux pour poursuivre l'étude des crédits budgétaires du ministère des Finances pour l'année financière 1988-1989, soit les programmes 1 à 5 et 8.

Nous en étions à étudier l'organisme d'État Loto-Québec et la parole était au député de Bertrand.

M. le député de Bertrand, vous pouvez continuer. Je pense qu'il nous restera environ 20

minutes pour Loto-Québec et après, nous allons passer aux crédits du ministère des Finances. M. le député de Bertrand.

M. Parent (Bertrand): Merci, M. le Président. Est-ce qu'il serait possible de fermer la porte arrière?

Je reprends juste là où on avait laissé avant l'heure du dîner, aux nouvelles directives émises, particulièrement dans le cas des organismes sans but lucratif qui exploitent des kiosques. Vous, M. Clark, vous nous avez donné quelques explications quant aux modifications. D'une part, il y a trois types de modifications. J'aimerais que vous puissiez nous donner, éventuellement, pour les membres de la commission, mais aussi pour répondre aux questions de différentes associations qui en sont préoccupées actuellement, quelque chose de plus clair, peut-être par écrit.

Ce que vous avez mentionné tantôt, c'est qu'il y aura une politique, bien sûr, qui va faire en sorte que vous allez limiter le terme à cinq ans. Ce n'est pas sûr, dans certains cas, s'il y aura renouvellement et, dans d'autres cas, s'il n'y aura pas renouvellement, primo. Secondo, pour ceux qui en ont plus qu'un actuellement, c'est un traitement différent. Celui qui n'en a qu'un, si j'ai bien compris, pourrait être admissible à un renouvellement. Ceux qui en ont six, sept ou huit, vous allez les limiter à six. Mais ceux-là vont se voir appliquer une autre formule. Alors, il va être important, dans les plus brefs délais, que nous puissions avoir cette espèce de directive ou de politique le plus clairement possible, de façon à ce que les organismes à but non lucratif exploitants de kiosques, ne soient pas actuellement vraiment préoccupés. Parce que la seule lettre d'avis, semble-t-il - j'ai été contacté par un groupe - qui leur ait été envoyée ne comportait pas, d'ailleurs, toutes les explications que vous nous avez données. Les explications que vous nous avez données, je pense qu'il va y avoir lieu, bien sûr, de les mettre les plus claires possible parce que cela va toucher ces gens-là de façon très importante. Il y va même de la survie de certains organismes, parce que c'est devenu leur source de financement. C'est ma première demande.

Le deuxième point, M. le Président, c'est que vous avez mentionné qu'il y a maintenant 50 % du loyer qui est défrayé par Loto-Québec pour aider aux coûts croissants. J'ai un peu peur que les propriétaires de centres commerciaux voyant cette mesure, deviennent un peu ambitieux. On sait que quelques groupes seulement contrôlent les centres commerciaux. En tout cas, je peux parler de la région que je connais, qui est la grande région de Montréal, où vous avez beaucoup de dépositaires. Ces gens-là vont vite prendre le truc, sachant très bien qu'ils n'affectent qu'à 50 % l'organisme exploitant et que l'autre partie vient de Loto-Québec. Alors, ils vont peut-être, sur une période de deux ou trois ans, éventuellement, doubler les tarifs, sachant très bien que vous allez leur fournir 50 % du montant.

Il y aurait aussi peut-être lieu de s'assurer de certaines mesures pour que ces groupes, de même que vous, ne vous fassiez pas exploiter par les opérateurs et les grandes sociétés immobilières qui contrôlent les centres commerciaux.

M. Clark: Je pourrais peut-être répondre à ces deux points. D'abord, je suis tout à fait d'accord avec ce que vous dites. En ce qui concerne les nouvelles politiques des kiosques, nous nous donnons environ deux ou trois mois de période de consultation parce que nous voulons rencontrer tous les OSBL qui gèrent actuellement des kiosques avant de fixer de façon définitive notre politique de rotation des kiosques. Nous voulons vraiment tenir compte des points de vue de tous les OSBL actuels; ensuite, nous allons proposer notre politique au conseil d'administration de Loto-Québec et c'est seulement à partir de ce moment-là que nous pourrons indiquer la politique ferme.

Mais ce que je vous ai indiqué, c'est un peu notre pensée actuelle, ce que nous allons exposer aux OSBL. Je dois ajouter que nous avons l'intention, durant la première année, de ne remettre en cause qu'environ 15 kiosques sur les 179. Chaque année, nous en remettons en cause environ quinze de façon naturelle. Donc, c'est un roulement normal pour la première année. Les OSBL ont déjà fait leurs budgets pour l'année et nous ne voulons pas avoir d'impact sur ces budgets. Par la suite, nous avons l'intention de remettre en question peut-être entre 20 et 30 kiosques par année, au maximum. C'est notre point de vue au départ. Nous allons faire cela en consultation avec les OSBL.

Quant au deuxième point, le fait que les propriétaires de centres commerciaux, sachant que nous allons défrayer la moitié du coût du loyer, risquent de devenir plus ambitieux, il faut d'abord dire que c'est Loto-Québec qui négocie les loyers des kiosques dans les centres commerciaux et, en général, les centres commerciaux sont beaucoup moins exigeants parce que les kiosques sont gérés par des OSBL et ils le savent. Je ne pense pas que le fait de payer 50 % change cette situation parce que c'est quand même l'OSBL qui paie les autres 50 %, donc, il y a toujours un impact financier sur l'OSBL C'est pour cela que nous avons écarté, dès le départ, l'idée de payer l'ensemble des loyers des kiosques parce que le seul résultat aurait probablement été de faire tripler les loyers.

Nous avons quand même un pouvoir de négociation assez important auprès des propriétaires de centres commerciaux parce que nous n'acceptons pas à n'importe quelle condition de mettre un kiosque dans un centre commercial. Dans bien des centres commerciaux, nous avons négocié pendant trois ou même six mois avant d'accepter de mettre un kiosque. En général, le

kiosque est attirant pour le centre commercial parce que, d'abord, c'est une oeuvre sociale intéressante: nos produits sont très en demande et cela crée donc une certaine circulation dans le centre commercial. Nous avons aussi d'autres moyens de vendre nos billets et les propriétaires de centres commerciaux le sachant, les négociations se font normalement de façon très, correcte, je crois.

M. Parent (Bertrand): Merci, M. le président. Si vous me le permettez, j'aurais deux ou trois autres questions. Malheureusement, on n'a pas tout le temps qu'on voudrait parce qu'il ne faut pas oublier M. le ministre.

Vous avez mentionné ce matin, lorsque j'ai fait allusion à des dépenses qui seraient peut-être plus ou moins bien contrôlées... Je ne voulais pas dire, et je voudrais juste être clair, je ne voulais pas insinuer - si c'est ce que j'ai fait, je m'en excuse - qu'il y a mauvaise gestion ou que le contrôle n'est pas assez serré. Je vous dis que, vu de l'extérieur et voyant passer l'ensemble des millions, on peut, en regardant les états financiers, se poser certaines questions. Je vous dirais que, dans ce sens-là, il serait intéressant, et j'en fais la demande à M. le Président de la commission, que cette commission prenne l'initiative d'organiser une visite à Loto-Québec, avec M. le ministre et les membres de la commission, pour être capables de visualiser et comprendre et vous faire expliquer sur place ce qui se passe en matière de sécurité, de contrôle ou de budget, particulièrement sur l'aspect publicité, qui sont des gros morceaux chez vous. M. le Président, je ne sais pas si cela pourrait être intéressant. J'en ai glissé un mot de façon informelle, tantôt, avant de recommencer. Je pense que cela pourrait être intéressant d'aller voir ce qui se passe sur les lieux à Loto-Québec. Pas dans un but, entre guillemets, d'enquête, on se comprend, mais dans un but d'informer vraiment les élus et particulièrement les membres de cette commission.

Je fais cette demande. Je ne sais pas si elle est dans les règles, mais je la fais à vous aussi, M. le Président, si vous voulez bien nous recevoir.

Le Président (M. Lemieux): Effectivement, elle est dans les règles. À la prochaine séance de travail, M. le député de Bertrand, on n'aura qu'à la soumettre aux membres de la commission parlementaire. Nous en discuterons et nous voterons sur la présente motion. Je ne pense pas que cela crée de problème. D'ailleurs, on s'est déjà promis d'aller visiter le ministère du Revenu dans la même optique. Je pense que ce serait extrêmement intéressant et enrichissant pour les membres de cette commission. Vous pouvez continuer, vous avez encore la parole.

M. Parent (Bertrand): J'imagine que vous allez nous recevoir, M. le Président.

M. Clark: Nous serions ravis de vous recevoir.

Dépenses de publicité

M. Parent (Bertrand): Justement, dans l'esprit de l'évolution des frais administratifs de Loto-Québec, je n'ai pas fait une analyse poussée, exhaustive, sauf qu'à première vue j'ai essayé de regarder le tableau 1983 à 1987, donc, les cinq dernières années, et j'ai essayé de voir la relation du chiffre d'affaires avec le ratio publicité-communications. À ce chapitre, je m'aperçois, pour prendre un exemple, qu'en 1983 et en 1984 vous avez dépensé, bon an mal an, 15 000 000 $ en publicité et communications à ce poste qu'on retrouve dans les états financiers dans votre rapport annuel à la page 22.

Donc, 15 000 000 $, cela a été à peu près statutaire en 1983 et en 1984 et les ventes sont passées, en 1983, de 541 000 000 $ à 662 000 000 $. Donc, pas d'augmentation dans ce budget, si je comprends bien. C'est une augmentation des ventes de quelque 120 000 000 $. Autre phénomène. Si on regarde un peu plus loin, en 1984 et 1985, alors entre ces deux années, augmentation de 1 000 000 $ pour la publicité et les communications et on a à peu près le même type d'augmentation, même un peu moins, c'est-à-dire qu'on met 1 000 000 $ de plus dans la publicité et on augmente que de 80 000 000 $ les ventes. On continue cette comparaison et 1986 avec 1987, le budget est resté le même, 17 650 000 $ et les ventes sont passées de 883 000 000 $ à 998 000 000 $. À toutes fins utiles, c'est de 110 000 000 $ à 115 000 000 $ de plus sans augmentation du budget de la publicité et des communications.

Ma question est fort simple. Y a-t-il vraiment - vous avez dû faire l'analyse - un rapport entre l'augmentation des enveloppes budgétaires de la poussée que vous pouvez faire sur le plan de la publicité et du marketing et le rapport des ventes, mais, normalement, cela devrait être relié. Dans ce cas, qu'on augmente ou qu'on n'augmente pas, les ventes augmentent quand même. Je me pose des questions.

M. Clark: Je pense que la réponse à cela, c'est que, d'abord, les actions que nous pouvons poser pour avoir le plus d'influence sur le marché, c'est toute la formulation des produits que nous faisons. En 1982, nous avons lancé le 6/49 et, trois ou quatre ans plus tard, nous sommes passés à deux tirages par semaine au 6/49. Ces deux actions en soi ont beaucoup plus d'impact sur notre marché que la publicité qu'on peut investir pour le lotto 6-49. En général, sur les produits qui sont vendus, les jeux sur numéros sont de nature très active parce que, si le gros lot n'est pas gagné, les gens ont tendance à réinvestir tant que . cela ne sera pas gagné et ce sont des produits qui sont très prenants à long terme parce que c'est excitant

comme produit, au fond. Ces produits nécessitent beaucoup moins de dépenses publicitaires une fois lancés que nos loteries passives, comme la Mini Loto, l'Inter Loto, le Provincial ou que les instantanées. L'instantanée est un produit très simple: on gratte, on gagne ou on perd.

Les instantanées, il faut les changer à peu près tous les deux mois et nous pouvons mettre sur le marché deux ou trois produits en même temps. Les instantanées reçoivent en moyenne, à peu près, 3 % ou 4 % du chiffre d'affaires en dépenses publicitaires alors que le 6/49 ne nécessite que moins de 1 % des ventes en publicité. La publicité est beaucoup moins rentable pour les tirages du Lotto 6/49 que pour les instantanées. Ce qui se passe depuis cinq ans, c'est que nos ventes des produits informatisés augmentent continuellement parce que ce sont des produits plus actifs. Nos ventes des produits passifs sont stagnantes et ont même baissé depuis quelque temps. Les produits passifs nécessitent un peu plus de publicité en pourcentage de ventes que les produits actifs. Mais, comme les produits actifs représentent de plus en plus de nos ventes totales, cela nécessite moins de publicité en pourcentage de ventes. Les instantanées commencent même à connaître une croissance plus fulgurante que les produits informatisés et nécessitent énormément de publicité.

Si vous faites le total de chaque année, vous pouvez voir une stagnation, une augmentation légère, ou une augmentation qui ne semble pas avoir de lien avec le volume total de ventes. Mais si vous regardez chaque segment du marché, si vous regardez les instantanées, vous verrez qu'au fur et à mesure que notre publicité a augmenté, lés ventes ont augmenté, que les loteries passives, qui ont été très attaquées par le Lotto 6/49, ont quand même maintenu un bon pourcentage sur le marché grâce à la publicité, mais les ventes ont baissé. Ce qu'il faut ajouter, c'est que, partout aux États-Unis, ces loteries sont mortes, elles ont totalement disparu de la circulation. Pour nous, c'est beaucoup plus rentable de les garder en vie grâce à la publicité et aux changements apportés aux produits que de les laisser mourir. Finalement, on parle d'un domaine assez complexe. La vraie réponse, c'est en regardant chaque type de produit qu'on peut examiner les dépenses publicitaires et indiquer dans quelle mesure cela fut rentable. Est-ce que mes explications sont claires? C'est un peu complexe, mais...

Une voix: On comprend très bien.

M. Parent (Bertrand): Je comprends que ce n'est pas un rapport direct, c'est plus complexe que cela.

M. Clark: C'est très direct pour les produits comme les instantanées. Chaque instantanée et chaque lancement - on en lance à peu près neuf par année - nécessite des dépenses minimales de 500 000 $ pour chaque jeu en publicité. Donc, déjà, vous avez dépensé entre 4 000 000 $ et 5 000 000 $ par année. Les instantanées représentent 165 000 000 $ du chiffre d'affaires et cela représente 60 % de plus qu'il y a trois ans. C'est un produit en pleine croissance, en fait.

Dépenses de développement

M. Parent (Bertrand): Je vous remercie, M. le Président. Je remarque, par le fait même, qu'en deux ans, entre 1985 et 1987, les dépenses administratives ont diminué au cours des trois dernières années. J'espère, de ce que je vois là, que c'est un signe direct de bonne gestion, passer de 18 000 000 $ à 17 400 000 $ au 31 mars 1987.

Dans le domaine de la recherche et dudéveloppement, c'est également intéressant. En 1984, il n'y avait pas de postes ou, du moins, il n'y avait pas de dépenses. Vous parliez d'à peu près 608 000 000 $ en recherche et développement pour trouver, j'imagine, de nouveaux moyens et là on est rendu à 1 200 000 $.

M. Levesque: C'est 600 000 $.

M. Parent (Bertrand): C'est 600 000 $. Est-ce que j'ai dit 600 000 000 $? Excusez-moi, je suis habitué avec les millions, M. le ministre. Merci de me corriger là-dessus, vous avez raison sur ce point.

Alors, c'est 600 000 $ et on est rendu à un montant de 1 200 000 $ qui a été dépensé l'année dernière. Il est intéressant de voir que vous poussez l'application de la recherche et du développement qui, j'imagine, donne des résultats assez intéressants.

M. Clark: Oui, si je peux répondre à cela, c'est que nos dépenses dans ce domaine sont surtout des dépenses de développement. Ce groupe s'occupe presque uniquement des nouveaux types de jeu de hasard ou des nouveaux moyens de livrer des jeux de hasard aux consommateurs. Actuellement, le budget augmente depuis deux ans parce que nous avons fait un test avec ce qu'on appelle les GALOTS, les guichets automatiques de loteries et il y a eu des coûts pour maintenir ces guichets. Mais c'est seulement une fois qu'on aura complété les tests qu'on saura si c'est rentable pour Loto-Québec d'en acheter à long terme.

Dans les autres domaines du développement, il s'agit surtout d'essais qu'on fait conjointement avec le projet Minitel, le projet Alex de Bell, le projet Vidéoway de Vidéotron. Nous essayons de faire partie de tous les projets qui ont un avenir important dans le domaine de la télématique parce qu'au fond nous sommes une institution financière et nous sommes énormément influencés par la technologie. Donc, il faut absolument que

nous protégions notre avenir dans ce domaine. C'est surtout là que nous avons des dépenses en développement.

Contribution sociale de la Caisse

M. Parent (Bertrand): Merci. Dans un autre ordre d'idées, une contribution au bilan de l'intégration sociale que vous appelez, dans votre bilan une contribution au cours de l'année 1987 de 1 000 000 $ à Rendez-Vous 87 par rapport à des subventions - jusqu'à présent, on parle de 100 000 $ - bourses, recherches universitaires ou acquisition d'oeuvres d'artistes, d'oeuvres d'art, dis-je! Pourquoi? Contribution basée sur quoi? Et qui peut vous faire une demande? Pourquoi, particulièrement en 1987, Loto-Québec a décidé de contribuer pour une somme de 1 000 000 $ à Rendez-vous 87?

M. Clark: Pour nous, Rendez-Vous 87 était un événement qui avait un impact financier et économique important, surtout pour la ville de Québec. Il faut dire aussi que nous sommes de très grands annonceurs à la télévision et lors des parties de hockey. Nous nous sommes dit, finalement, qu'il serait intéressant de faire un essai avec un projet comme cela puisque cela nous permettrait de lancer un volet supplémentaire à l'un de nos produits instantanés, de voir si cela nous permettrait d'aller chercher un marché supplémentaire et de lever des fonds supplémentaires. On ne pouvait pas avoir le droit d'utiliser Rendez-Vous 87 sans payer un certain montant à l'organisation qui préparait cet évènement-là. Ils avaient besoin d'argent. Donc, on a fait l'essai. Évidemment, on a demandé l'accord du ministre des Finances avant. Je dois dire que cela nous a permis d'aller chercher grâce à ce volet du jeu instantané environ 2 000 000 $ de bénéfices supplémentaires par rapport à ce qu'on avait prévu: II y a eu un troisième montant de 1 000 000 $ qui a été versé à l'organisation de cet événement. Normalement, nous ne faisons pas cela, mais il a été intéressant de faire l'essai pour voir si cela pouvait nous donner un autre volet de produits supplémentaires et, en même temps, aider à des événements qui ont un impact important au Québec.

M. Parent (Bertrand): Merci. Une dernière question puisque le temps est à peu près écoulé, M. le Président. J'aimerais me tourner vers l'avenir, 1988-1989 et les années subséquentes. Où s'en va Loto-Québec? On a un rythme croissant, vous avez, j'imagine, un plan de stratégies; et vous avez des objectifs particuliers à atteindre. Mais jusqu'où va aller Loto-Québec? Est-ce que c'est sans bornes? Est-ce que c'est limité vis-à-vis de tel marché cible? Est-ce qu'il y a moyen, sans... Bien sûr, je comprends que je vous demande de répondre en peu de temps à une grande question. Il serait intéressant de savoir un peu vers quoi vous vous dirigez comme société d'État.

M. Clark: Peut-être que la meilleure façon de situer notre avenir, c'est d'abord de dire que nous voyons notre avenir potentiel non pas uniquement dans le domaine des loteries, mais dans tous les domaines potentiels des jeux de hasard, d'autant plus que la télématique va faire en sorte qu'il va être difficile de distinguer entre un type de jeu et un autre type de jeu, peut-être d'ici dix ans.

Deuxièmement, au Québec, les jeux de hasard représentent à peu près 1, 5 % du produit interne, alors qu'en Espagne, par exemple, ils représentent à peu près 6 %. Je pense que 6 %, c'est beaucoup trop. Il y a des abus et il ne faudrait pas aller jusque là. On pourrait facilement monter à 2 % du produit interne sans créer d'abus d'une quelconque importance, à mon avis, si c'est bien administré. Donc, je crois que pendant les prochaines années, il pourrait y avoir un avenir de croissance pour Loto-Québec, mais il faut toujours faire cela, comme on l'a dit au début lorsque l'organisation a été créée, dans l'ordre et la mesure et surtout il faut que ce soit fait en accord avec les valeurs de la population québécoise. Donc, il faut absolument éviter de créer des abus et des problèmes et il faut toujours lancer vos jeux de telle sorte que cela se fasse un peu avec l'approbation globale de la population.

M. Parent (Bertrand): Merci, M. le Président. Je lisais quelque part par rapport à votre implication dans différents organismes, toujours dans l'intégration sociale, qu'il y a 400 000 $, cette année, qui seraient allés en commandite à des organismes de course à pied, de randonnée, etc. Est-ce que, précisément, Loto-Québec n'est pas bien placée pour essayer peut-être d'appuyer une certaine élite de la jeunesse qui veut percer dans différentes disciplines et qui a peu de moyens? Les services sont fournis soit par l'ensemble de la municipalité soit par les différents organismes. Lorsqu'on arrive à l'élite, nos jeunes ont peu de chance, à part aller chercher, à l'occasion, quelques commandites de grandes sociétés qui veulent se faire une publicité, mais je vois qu'en 1987 Loto-Québec y a été pour 400 000 $ dans des organismes de courses à pied, de randonnées cyclistes et de festivals populaires, mais vis-à-vis de la jeunesse et particulièrement vis-à-vis de l'élite sportive des jeunes, y aurait-il moyen d'envisager ou avez-vous quelque chose de prévu dans ce sens? Ce sera ma dernière question.

Le Président (M. Lemieux): M. le Président, pour compléter l'intervention du député de Bertrand, vous savez, on a peu de Sylvie Bernier et de Gaétan Boucher au Québec. Je pense que, parfois, un organisme comme le vôtre... Actuellement se tient dans la région de Québec le

championnat junior de jeunes élèves prometteurs au tennis, entre autres. On ne voit pas d'organismes d'État comme tels pouvoir venir en aide un peu à cette élite. Sur le volet social comme tel, pour rejoindre la préoccupation du député de Bertrand, je me demande si l'État ne pourrait pas, par votre intermédiaire, par l'intermédiaire des organismes d'État, jouer un rôle à cet effet. Je pense au volet social comme tel.

M. Clark: Par le passé, nous avons déjà été impliqués dans les Jeux du Québec. Nous avons fait certaines contributions dans le domaine de l'élite sportive.

Ce qui nous a toujours gênés dans ce domaine, c'est que, normalement, les loteries devraient se vendre aux adultes, aux majeurs et avec l'élite il faut commencer quand ils sont très jeunes. Nous sommes un peu gênés d'aller subventionner ou faire des commandites reliées à des gens qui ne devraient pas normalement acheter nos produits. C'est là le premier point.

Deuxièmement, tout l'argent que nous faisons sous forme de bénéfices est versé à l'État québécois, sauf qu'il y a environ un montant d'environ 10 000 000 $ par année qui est versé au gouvernement fédéral depuis une entente qui a mené à la disparition de Loto-Canada. L'ensemble de nos bénéfices après ce versement va au gouvernement du Québec. Nous trouvons que le gouvernement est beaucoup mieux placé que nous pour décider où il faut verser cet argent.

Le Président (M. Lemieux): C'est peut-être plus difficile pour nous de convaincre M. le ministre des Finances que de vous convaincre.

Nous vous remercions. Est-ce que vous avez terminé, M. le député de Bertrand?

M. Parent (Bertrand): Oui, M. le Président. Sauf que le dernier commentaire de M. le président voulant qu'on envoie environ 10 000 000 $ au gouvernement fédéral, j'ai plutôt vu 20 000 000 $. Est-ce que c'est exact, le paiement au gouvernement canadien? On parle de 19 000 000 $.

M. Clark: Oui. Pour expliquer cela, il y a eu deux ententes. La première entente a mené à la disparition de Loto-Canada. Sous cette entente, toutes les provinces se sont engagées à verser 24 000 000 $ constants depuis la date de l'entente. Maintenant, c'est rendu à peu près à 33 000 000 $ ou 34 000 000 $ par année. Notre part est d'environ 10 000 000 $.

En plus, il y a eu une autre entente convenue, il y a environ trois ou quatre ans, où, pour aider le financement aux Jeux de Calgary, le gouvernement du Québec a accepté, avec les gouvernements des autres provinces, de verser un montant supplémentaire de 100 000 000 $ sur trois ans. Pourquoi? Parce que les Jeux Olympiques de Montréal avaient reçu un certain verse- ment grâce à la Loterie olympique. Le gouvernement de l'époque avait donc jugé que c'était tout à fait normal que cela fonctionne dans les deux sens.

Maintenant, ce versement pour les Jeux de Calgary s'est terminé en décembre 1987. Notre part de ce versement a été entre 25 000 000 $ et 30 000 000 $ environ sur trois ans. Maintenant, c'est fini. À partir de maintenant, c'est un montant d'environ 10 000 000 $ par an qui devrait être versé au gouvernement du Canada.

M. Parent (Bertrand): Merci, M. le Président. Au nom de ma formation politique, je vous remercie de votre présence de même que celle de vos collaborateurs.

Le Président (M. Lemieux): Nous vous remercions, M. le Président, de Loto-Québec au nom de tous les membres de cette commission. Je souhaite au député de Bertrand qu'un jour ce soit son tour. Merci.

M. Clark: Cela nous a fait plaisir.

Le Président (M. Lemieux): Nous allons maintenant procéder à l'étude des crédits du ministère des Finances. Nous allons attendre quelques instants.

M. Parent (Bertrand): M. le Président, ce que j'ai suggéré ce matin, je pense que cela convenait aussi au ministre des Finances. Je pensais qu'on aurait une heure et demie ou deux heures. Finalement, il ne nous reste, à toutes fins utiles, que 60 ou 62 minutes, environ une heure. J'ai proposé ce matin de toucher trois volets en particulier qui touchent indirectement les programmes 1 et 3, mais je préférerais qu'on parle des trois volets que j'ai mentionnés ce matin et qu'on se garde dix ou quinze minutes à la fin pour approuver la partie de la cuisine. On la fera à la fin. On va toucher à l'essentiel parce qu'il semble que M. le ministre des Finances ait des choses à me révéler. (15 h 45)

Le Président (M. Lemieux): Est-ce qu'il y a consentement à cet effet? Il n'y a pas de problème. Alors, j'appelle immédiatement le programme 1, Étude des politiques économiques et fiscales. M. le député de Bertrand.

Étude des politiques économiques et fiscales

M. Parent (Bertrand): Brièvement, ce matin, j'ai soulevé le point concernant la préoccupation que nous avons dans des relations financières avec le gouvernement fédéral, des politiques fiscales. On a un programme ou on a des conseillers à l'intérieur du gouvernement en matière de politiques. J'ai dit à M. le ministre des Finances, à titre d'exemple que, je voulais prendre ce qui se passe actuellement en matière

non pas de recherche et développement, parce , que je sais que ce n'est pas du ressort du ministre, mais beaucoup plus comme un exemple où le gouvernement fédéral, de par des politiques et des décisions du ministre fédéral des Finances, vient anéantir des efforts qui sont faits parfois par le gouvernement du Québec, et cela a été le cas dans la dernière année. Je me réfère aussi, et particulièrement - j'aimerais qu'on s'entretienne sur les réactions de la part du ministre - au rapport de mars 1988 du Conseil de la science et de la technologie qui a été fait dans un but très particulier.

Même s'il relève du ministre de l'Enseignement supérieur, ce mémoire avait particulièrement pour but d'attirer l'attention du ministre des Finances, à la veille de son prochain budget, sur certaines mesures qu'ils aimeraient voir en matière de recherche et développement.

Étant donné que la finance et la recherche et le développement font partie de mes préoccupations, j'aimerais savoir si le ministre des Finances, d'abord, a pris connaissance dudit rapport et s'il peut nous donner des exemples précis de différentes recommandations. J'ai cité, ce matin, ceux de la page 27: "Malgré cette volonté du Québec de ne pas réduire ses mesures d'incitation fiscales liées à la recherche et au développement, il faut réaliser que le projet fédéral de réforme fiscale aura pour effet de diminuer sensiblement leur impact." Comment les conseiller à l'intérieur du programme 1? Comment le ministre va-t-il travailler son affaire pour qu'on puisse être capables d'avoir non pas, d'un côté, à Ottawa, des mesures qui s'en vont dans un sens et nous dans un autre?

Aussi, je formule des demandes dans le sens de la page 32, par exemple, où, gardant à l'esprit la nécessité, a dit le Conseil de la science et de la technologie, de maintenir l'avantage fiscal comparatif du Québec, le conseil invite le ministre des Finances du Québec à reconsidérer la possibilité d'harmoniser les règles fiscales québécoises concernant les activités en recherche et développement aux autres mesures restrictives proposées dans la réforme fiscale fédérale.

J'aimerais entendre le ministre sur cette question et cette façon de procéder avec les ressources qu'il a. J'aurai d'autres questions par la suite sur ce volet qu'on pourrait vider d'abord.

Le Président (M. Lemieux): M. le ministre des Finances.

M. Levesque: M. le Président, les questions que le député de Bertrand a posées ce matin et qu'il continue de poser touchent deux sujets d'actualité. Il a d'abord évoqué la question des transferts fédéraux et, justement, il a également évoqué le fait qu'à maintes reprises j'avais déploré certaines attitudes du gouvernement fédéral à cet égard. En deuxième lieu, il a apporté comme illustration de sa préoccupation le . sort qu'avait réservé le gouvernement fédéral à une mesure en particulier qui touchait la recherche et le développement. Ce sont ces deux sujets que je veux aborder le plus brièvement possible, mais il faut tout de même que j'aie quelques minutes pour le faire.

Tout d'abord, si on regarde les transferts fédéraux, j'aimerais simplement apporter certains chiffres pour la discussion. Il faut bien comprendre qu'on ne critique pas le gouvernement fédéral pour le plaisir de le faire. Après tout, les gouvernements, qu'ils soient fédéral, provincial ou municipal, sont tous au service des mêmes citoyens. Je pense qu'il est beaucoup mieux que l'on puisse s'entendre dans l'intérêt des citoyens que de se critiquer mutuellement simplement pour le plaisir de le faire ou pour faire de la politique partisane. Lorsqu'il arrive des situations comme celle-ci, je pense qu'il est bon de faire le point et je ne reproche certainement pas au député de Bertrand de le souligner.

Les transferts fédéraux en général. Je n'ai pas l'intention de refaire la nomenclature des paiements de péréquation comme les versements pour le financement des programmes établis dans le domaine de la santé et dans le domaine de l'éducation postsecondaire ou encore les versements du gouvernement fédéral au titre du bien-être ou de l'assistance publique, ou encore des transferts fédéraux relatifs à des programmes d'entente-cadre ou d'entente auxiliaire, etc., avec le gouvernement fédéral; ce sont tous différents chapitres. Si on met cela ensemble et qu'on regarde ce qui s'est passé disons, depuis cinq ans, on voit que les transferts fédéraux ont plafonné, contrairement aux autres dépenses des gouvernements qui ont augmenté, soit a cause de l'inflation, ou à cause des besoins croissants.

Par exemple, si je regarde le chiffre de l'ensemble des transferts fédéraux pour 1983-1984, il est de 6 336 500 000 $. Si je regarde ce qui arrive en 1987-1988, plusieurs années plus tard, c'est 6 310 000 000 $, presque le même chiffre. Si on regarde cela en pourcentage des revenus budgétaires du Québec, on voit qu'en 1983-1984 cela représentait 28,9 % de nos revenus; en 1984-1985, 28,4 %; en 1985-1986, 26 %; en 1986-1987, 23,2 %; en 1987-1988, 22,5 %. Il est sûr que nous devons nous inquiéter de la situation qui découle en partie, évidemment, il faut le reconnaître, de l'amélioration de la situation économique du Québec lorsque l'on pense aux paiements de péréquation, mais aussi des changements aux règles gouvernant les programmes de transfert. On a eu des changements de la formule de péréquation qui ont eu lieu en 1982-1983. Il y a eu ensuite la désindexa-tion de la contribution fédérale au financement de la santé et de l'enseignement postsecondaire, la loi C-96 en particulier, en vigueur depuis le 1er avril 1986.

Plusieurs mesures ont été prises par le gouvernement fédéral justement pour diminuer la croissance des transferts, alors que nous con-

naissons des augmentations de coûts, particulièrement dans le domaine de la santé avec le vieillissement de la population et les technologies nouvelles dans le domaine médical. Je l'ai répété à maintes reprises et j'en ai fait part au gouvernement fédéral et mes collègues ministres des Finances des autres provinces ont également eu l'occasion de s'en plaindre au gouvernement fédéral. Évidemment, la réponse du gouvernement fédéral est de reconnaître cela, mais il a un déficit tel qu'il ne peut pas faire davantage. En résumé, c'est un peu la réponse que nous avons eue.

Pour terminer ce volet, je ne voudrais pas non plus être complètement négatif vis-à-vis du gouvernement fédéral. Je pense qu'on peut rappeler qu'en 1987 on a eu l'obtention d'une compensation pour l'impact négatif du recensement de 1986 dans le domaine de la péréquation, pour les années 1985-1986 et 1986-1987. On se rappellera que les chiffres du recensement étaient moindres que ceux qui avaient été prévus. Donc, il aurait fallu que nous remettions de l'argent au gouvernement fédéral. Là, nous avons eu une entente qui nous a épargné une compensation de 144 000 000 $ pour 1987-1988. Il faut aussi dire que, malgré que la formule de péréquation soit demeurée un peu stable, il y a eu une petite bonification de 35 000 000 $.

Il y a eu aussi, récemment, devant la réforme fiscale fédérale qui nous amène, si on veut s'harmoniser jusqu'à un certain point, une augmentation de dépenses, particulièrement pour la première année de la mise en oeuvre de la réforme. Nous avons négocié avec le gouvernement fédéral une entente en vertu de laquelle certains versements que nous devions faire au gouvernement fédéral seraient retardés, de sorte que ceci nous donne, pour l'année 1988-1989, une marge de manoeuvre de 244 000 000 $. Cela va être payé quand même, mais cela ne sera pas sur la même année. Ceci nous permet de faire le pont pour faciliter, justement, la réforme fiscale. Cela ne paye pas tout, mais, au moins, cela nous aide à progresser.

Il y a également eu la signature de deux ententes avec le gouvernement fédéral qui n'avaient pas été encore signées. Même l'ancien gouvernement ne les avait pas encore signées. C'étaient les jeunes contrevenants, 143 000 000 $, en 1988-1989, et 35 000 000 $ par année par la suite, la réadaptation professionnelle des invalides, 11 000 000 $, en 1988-1989, et 4 000 000 $ par année, par la suite, également l'aide à la recherche médicale et la loi sur les brevets pharmaceutiques, 25 000 000 $ sur quatre ans, de 1987 à 1991. Donc, ce n'est pas tout à fait complètement négatif, mais il faut réellement regarder un peu autour pour trouver des choses pour nous réjouir, car en résumé il y a eu un plafonnement depuis quatre ou cinq ans qui fait que ce n'est pas du côté des transferts fédéraux que nous pouvons chercher une amélioration des revenus. Au contraire, les pourcentages - c'est cela qui compte - des transferts fédéraux dans les revenus du Québec ont continuellement diminué. C'est une chose.

On nous amène comme illustration, justement, de l'action fédérale, le cas de la recherche et du développement. Le député de Bertrand dit: Voyez, il y a un cas où vous avez apporté certaines mesures et l'action du gouvernement fédéral semble annuler ce que vous avez voulu faire dans votre dernier budget. Il y a beaucoup de vérité là-dedans. Ce n'est pas pour rien, d'ailleurs, que le Conseil de la science et de la technologie a préparé ce mémoire, intitulé "Les Avantages fiscaux associés aux activités de recherche et de développement", daté de mars 1988, où ce document fait justement une analyse assez fidèle de ce qui s'est passé, en plus de souligner, évidemment, l'importance de la recherche et du développement dans notre économie, qui rappelle la réforme fiscale du gouvernement fédéral qui venait nous embêter royalement - si on peut employer le mot - dans nos efforts dans la recherche et le développement.

Mais il ne faudrait pas, encore là, exagérer: ce ne sont pas toutes les mesures que nous avons mises de l'avant dans notre budget du 30 avril 1987 qui sont mises en cause ou en péril. Ce ne sont pas toutes les mesures, parce que plusieurs de ces mesures ont été mises de l'avant, ont été mises en oeuvre, ont été appréciées par le monde de la recherche et du développement. Il y a un volet de l'ensemble des mesures, important volet, mais pas le seul, dont les effets ont été pratiquement annulés par la réforme fiscale du gouvernement fédéral annoncée le 16 décembre 1987. Je pense que le Conseil de la science et de la technologie, tout comme le député de Bertrand, a raison de s'inquiéter de ce volet et nous suggère certaines façons de contourner cette difficulté. (16 heures)

Je dois dire au député de Bertrand que nous n'avons pas l'intention, comme je l'ai d'ailleurs dit dans ma déclaration ministérielle du 18 décembre 1987, de nous rendre tout simplement et sortir le drapeau blanc. Le gouvernement fédéral ne veut pas reconnaître ou ne veut pas marcher dans le sens de... Alors, nous, nous ne faisons plus rien. Non, cela n'est pas du tout le cas. Et je tiens à attirer l'attention du député de Bertrand et de la commission sur le fait que ce volet touchait des encouragements, des avantages fiscaux que l'on donnait à des contribuables pour les encourager, justement, à investir dans la recherche et le développement. Le gouvernement fédéral a trouvé que cette façon d'aborder le problème ne correspondait pas a sa politique et ne correspondait pas non plus à l'esprit de la réforme fiscale, touchant en particulier les abris fiscaux. Autrement dit, il nous disait: Procédez autrement, car nous, nous ne marcherons pas là-dedans; ce n'est plus notre politique, voilà.

Et qu'est-ce que nous faisons? Nous allons tenir compte, évidemment, dans la mesure du

possible, des recommandations que nous avons reçues des personnes concernées. Nous allons tenir compte, dans la mesure du possible également... Plusieurs, il faut le dire, pas seulement le Conseil de la science et de la technologie, mais plusieurs intervenants dans le monde de la recherche et du développement nous ont fait part de l'impossibilité qu'ils avaient de profiter de ce volet qui était fort généreux et qui apparaissait dans notre dernier budget. Et il nous ont sûrement fait des recommandations. Nous ne pouvons pas retenir toutes les recommandations, mais nous allons faire en sorte d'apporter, dans le prochain budget, je l'espère bien, j'espère bien être prêt pour cela... Je ne peux pas vous faire part, comme je vous le dis, du prochain budget; on va laisser cela à ceux qui s'occupent des fuites; mais moi, je ne suis pas responsable de cela. Alors, je ne peux pas vous dire à ce moment-ci ce qui va se passer, mais je veux rassurer le député de Bertrand et la commission que nous sommes très sensibles à cet aspect du problème.

Nous avons mis de l'avant dans le discours sur le budget 1987-1988, plusieurs millions de dollars pour l'aide à la recherche universitaire. Une hausse de 10 à 20 % du crédit d'impôt sur les salaires pour la recherche dans l'entreprise. Congé fiscal aux chercheurs étrangers qui viennent au Québec pour faire de la recherche et du développement. Synergie entre les universités et l'entreprise: un nouveau crédit d'impôt remboursable, égal à 40 % des dépenses de recherche et développement faites en milieu universitaire pour les entreprises. Non-imposition des crédits d'impôt fédéraux et québécois, recherche et développement. Et ensuite, évidemment pour les entreprises qui ont besoin de financement: introduction de la déduction de 133,33 % pour la recherche et le développement financés par des sociétés en commandite créées pour les entreprises et de 166,66% pour la recherche et le développement financés par des sociétés en commandite créées pour la recherche et le développement et faites en collaboration, entreprises et université.

Évidemment, c'est lorsque l'on touche les sociétés en commandite que les problèmes commencent. C'est le volet où nous avons eu certains problèmes.

Le Président (M. Lemieux): M. le ministre... M. Levesque: Le fédéral a décidé...

Le Président (M. Lemieux): M. le ministre des Finances: il vous reste environ trois minutes parce que nous avons convenu de voir trois blocs. Ce qui fait environ vingt minutes par bloc. Alors, M. le député de Bertrand me faisait signe...

M. Levesque: Alors je vais...

Le Président (M. Lemieux): ...si parfois. Oui.

M. Levesque: ...essayer, en trois minutes, de terminer, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): Merci.

M. Levesque: Je vous remercie de me donner ce préavis que j'apprécie au plus haut point.

Le Président (M. Lemieux): Merci.

M. Levesque: Le fédéral a décidé, dis-je, de ne plus accorder de déduction fiscale pour les investisseurs dans des sociétés en commandite, en recherche et développement, avec, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, son projet de réforme du 16 décembre 1987. Les projets de sociétés en commandite créés avant cette date ont eu droit aux déductions fiscales et ont pu procéder. Toutes les autres mesures reliées directement aux entreprises fonctionnent, notamment les crédits d'impôt dont le crédit remboursable de 40 % pour la synergie entreprises et universités.

Il ne faut pas oublier que j'ai fait des représentations. Avant de passer au budget qui s'en vient, j'ai essayé de convaincre le gouvernement fédéral de changer d'approche, j'ai eu des rencontres et il y a eu de la correspondance de ma part et de la part du sous-ministre qui a communiqué également avec le sous-ministre des Finances à Ottawa. Nous avons fait des démarches entre des comités de fonctionnaires, on a tout fait de ce côté-là et, si nous ne pouvons pas arriver à convaincre le gouvernement fédéral de changer d'approche, nous avons l'intention de trouver une autre solution. Mais pour terminer, si je me rappelle bien ce matin, le député de Bertrand avait parlé du fait que, si ce volet de notre politique n'était pas fonctionnel à cause du gouvernement fédéral, cela voulait peut-être dire qu'une centaine de millions de dollars que nous avions annoncés ne seraient pas consacrés à ia recherche et au développement. Or, je tiens à lui préciser qu'après un examen de la situation et étant donné que la plupart des volets de notre politique ont été mis en oeuvre et se sont avérés efficaces, ce n'est pas 100 000 000 $, mais à peu près 19 000 000 $ qui ne seront pas, à cause de cela, consacrés à ces fins pour l'année 1988, mais on verra, par la suite, quels seront les effets d'une politique que nous pourrons mettre de l'avant s'il y a lieu, si nous ne pouvons pas nous entendre avec le gouvernement fédéral et, à ce moment-là, dès le prochain budget, je pense que je pourrai répondre à votre question, mais je ne peux pas aller plus loin pour le moment.

Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le ministre des Finances.

M. le député de Bertrand, je vais appeler le programme, comme il a été convenu?

M. Parent (Bertrand): Non.

Le Président (M. Lemieux): Non. Vous allez continuer dans la même veine et on va adopter les programmes ensemble?

M. Parent (Bertrand): M. le Président, si vous le permettez, n'appelez rien pour l'instant.

Le Président (M. Lemieux): Allez-y, M. le député de Bertrand.

M. Parent (Bertrand): Je demanderais et ferais appel à la bonne foi et à la bonne diligence du ministre pour que l'on puisse essayer de condenser les réponses. Au rythme où on va là, en une heure, si vous prenez 20 minutes pour répondre, je vais pouvoir vous poser trois questions.

Le Président (M. Lemieux): Vous comprendrez, M. le députe de Bertrand, que M. le ministre a droit à 20 minutes après chacune des interventions.

M. Parent (Bertrand): Je comprends tout cela.

Le Président (M. Lemieux): Cela va.

M. Parent (Bertrand): J'ai bien dit, avant, que je faisais appel à la bonne foi du ministre; sans cela, on n'ira pas loin.

Deux commentaires et une question sur ce que le ministre vient de mentionner. Les questions des transferts fiscaux fédéraux, c'est un long débat. On ne le fera pas et on ne le réglera pas ici, aujourd'hui, j'en suis conscient, sauf que le ministre nous fait un constat d'échec de la situation à toutes fins utiles, parce qu'on voit, année après année, le pourcentage diminuer. Ce qui fait que à toutes fins utiles, on est en perte de ce côté.

Ce que je dis au ministre des Finances et au gouvernement, c'est qu'il faudra changer de stratégie et d'attitude, parce qu'on est en demande, qu'on supplie et qu'on essaie de ravoir notre juste part. On n'a pas gain de cause, parce que les résultats sont là pour le prouver. Qui que ce soit, le gouvernement libéral ou un autre gouvernement qui soit là, dans la situation dans laquelle on se retrouve en 1988 et, si on regarde les dernières années, on est en perte de vitesse. Le résultat est là. Là-dessus, on doit être d'accord.

Je pense qu'il est temps qu'il y ait une stratégie globale de développée, un plan stratégique qui soit développé et qui devrait amener le gouvernement du Québec à la table avec le gouvernement du Canada, avec une série de mesures dans le jeu de la négociation pour qu'on ne sorte pas perdant comme on l'est. La façon dont cela se passe actuellement, je sais que ce n'est pas si simple que cela, mais je dis juste qu'on est en perte de vitesse.

Deuxièmement, quant à la recherche et au développement et quant au rapport du Conseil de la science et de la technologie, la démonstration est faite par le Conseil de la science et de la technologie, ni le ministre du Commerce extérieur, que j'ai interviewé pendant plusieurs heures dans la journée de mardi, ni vous-même ne remettez en question les conclusions du Conseil de la science et de la technologie. Je pense qu'ils ont assez bien ciblé les problèmes et ils ont suggéré certaines pistes intéressantes. Voici où il va falloir changer notre fusil d'épaule: Je pense qu'au gouvernement du Québec, le ministère des Finances et le ministre des Finances vont devoir peut-être exercer un leadership dans ce domaine. Je conçois mal, M. le ministre des Finances, qu'on ait perdu l'initiative, par exemple, dans le cas des incitatifs fiscaux dans le domaine des accréditives, parce que c'est le Québec, je pense, de la petite histoire que je connais, qui avait pris l'initiative dans ce domaine, et le fédéral nous avait suivis.

L'année passée, au cours de l'année 1987, je vous posais des questions en Chambre et mes collègues vous en posaient face à ce qui s'en venait comme mesures incitatives concernant par exemple les accréditives. Vous avez dit: On va attendre. C'est là que je ne suis pas d'accord et je me permets de dire que je pense que le gouvernement doit cesser d'être en attente ou à la remorque du gouvernement fédéral parce qu'en ces matières, si on ne prend pas une forme de leadership et si on ne montre pas que dans le cas du Québec... Pour le reste des provinces, pour l'Ontario, pour l'Ouest ou les Maritimes, chacune selon ses priorités, il est bien sûr qu'on n'a pas tous la même vision. Sur le plan national, c'est bien sûr que le gouvernement canadien a une autre vision. Mais je pense que le Québec doit s'imposer en ces matières, mettre de nouvelles idées et de nouvelles formules et lancer de nouvelles formes parce qu'il y en a d'intéressantes de proposées là-dedans. Mais je suis sûr que vos collaborateurs, les gens autour de vous, ont sûrement des façons de reprendre l'initiative.

Dans le sens du message que je veux vous passer, M. le ministre des Finances, je pense que le Québec se doit de jouer un rôle de leader et de reprendre l'initiative dans ces mesures. L'exemple de la recherche et du développement est un bel exemple. Cela m'inquiète quand le ministre des Finances nous dit: Écoutez, on va attendre de voir ce que le fédéral va faire et après cela on va s'harmoniser. La question que je pourrais vous poser, c'est: Qu'est-ce que signifie s'harmoniser pour vous? On va s'ajuster en fonction de? Est-ce que cela veut dire pour vous que, si le gouvernement fédéral se désengage dans le domaine de la recherche et du développement parce qu'il ne croit plus aux incitatifs dans le domaine des accréditives - de la façon dont il l'a vu sur le plan national, c'était moins

important et il se désengage - que nous sommes obligés de trouver des formules pour compenser? Je pense que le gouvernement du Québec n'a pas mis sur la table ses positions très claires, ce qu'il entend privilégier et les mesures qu'il entend prendre. J'ai hâte de voir dans le discours sur le budget. J'ai hâte parce que cela va être important de marquer le pas et de prendre l'initative. Si vous le faites, je vous applaudirai et, si vous ne le faites pas, je vous dénoncerai dans le cadre de la fonction que j'ai à faire parce que cela semble être vraiment quelque chose d'important. Vous avez là un document en or et des recommandations en or. Ce n'est certes pas la panacée à tous les maux, ce n'est certes pas la solution à tout, mais c'est un constat important: Perte de vitesse en recherche et développement ces dernières années. On voit ce que l'Ontario fait, soit la création d'un fonds de plusieurs centaines de millions, 100 000 000 $ par année sur dix ans, soit 1 000 000 000 $. Le gouvernement du Québec devrait commencer à penser à des formules importantes pour créer des fonds et inciter finalement l'entreprise privée ' à embarquer aussi là-dedans.

Tout cela pour vous dire que je pense qu'on est un peu pris au piège et qu'on est a la remorque, car on a pris le roulant, on est dans le wagon arrière et on n'a pas de locomotive en avant. Mais je pense que le Québec peut, en matière d'incitation, en matière de mesures fiscales... Le ministre des Finances, le ministère des Finances ont un rôle très important à jouer dans ce sens. Je pense que, selon les gestes qui seront posés, il va falloir qu'on continue d'être à la remorque du gouvernement fédéral ou bien qu'on prenne l'initiative.

Voilà ce que j'avais à dire sur ce volet. Étant donné l'heure, je...

M. Levesque: Je voudrais simplement, M. le Président...

Le Président (M. Lemieux): M. le ministre des finances. (16 h 15)

M. Levesque: ...dire deux mots. En ce qui concerne les transferts fédéraux, je pense qu'il ne faut pas simplement regarder la diminution sur l'ensemble. Comme je l'ai indiqué tout à l'heure, il y avait une diminution sur l'ensemble. Mais il ne faut pas seulement regarder cela. Je pense qu'il est important de regarder deux autres facteurs, deux autres volets à l'intérieur de cela, c'est la péréquation et les transferts également au titre du bien-être social. Dans ces deux cas-là, je ne demande pas qu'il y ait d'augmentation, si on pouvait avoir une économie qui serait telle que nous n'aurions plus besoin de cela. Alors, il faut bien comprendre, je pense bien que le député de Bertrand est d'accord avec moi, que si on arrivait à la situation de l'Ontario, par exemple, où on a pas un cent en péréquation, moi, j'aimerais encore mieux cela, vous savez; mais si la situation est différente, bien, je veux avoir ma part de la péréquation. D'ailleurs, le Québec présentement a plus de la moitié des fonds fédéraux versés au chapitre de la péréquation. Je pense qu'il est important de dire que, le jour où la péréquation baissera à cause d'une économie encore plus forte au Québec, je ne m'en plaindrai pas. Mais je pense cependant que les règles de base de la péréquation devraient tenir compte de certains facteurs qui seraient encore plus favorables au Québec. Cela, c'est une autre histoire, on n'a pas le temps de le faire, comme le dit le député de Bertrand, on n'a pas le temps d'entrer dans le détail.

Une autre chose que j'aimerais dire cependant au titre des transferts fédéraux, c'est que, pour le bien-être aussi, les versements des transferts ont baissé, parce que justement l'économie du Québec a été meilleure et il y a eu certaines mesures de contrôle et, là encore, les versements des transferts fédéraux au chapitre du bien-être ont diminué. Là encore, on n'est pas pour s'en plaindre. Ce dont je me plains le plus, c'est au chapitre de la santé et de l'éducation postsecondaire, parce là le gouvernement fédéral a diminué sa participation, parce que beaucoup de ces programmes, que ce soit l'assurance-hospitalisation ou l'assurance-santé, ont été faits de bonne foi par les deux niveaux de gouvernement où il y avait un partage, disons, de 50-50 et maintenant on s'en va plus vers 60-40. Cela veut dire qu'à mesure que les coûts augmentent, la participation du gouvernement du Québec augmente également. Alors, nous ne sommes pas d'accord pour cela. Je pense qu'il faut faire des distinctions quand on parle, autrement dit, des transferts fédéraux.

Il y a une deuxième chose que je voulais mentionner. Le député parle des accréditives. Je dois dire que j'en ai parié avant. Je n'ai pas attendu le 16 décembre 1987. J'en ai parlé avant. Les fonctionnaires en ont parlé également avec leurs homologues fédéraux. Nous avons insisté. Le premier ministre, en conférence fédérale-provinciale, où j'étais présent, a fait une sortie justement pour les accréditives. Le gouvernement fédéral n'a pas bougé. Il a fait ce qu'il avait l'intention de faire, mais nous ne nous sommes pas harmonisés le 18 décembre, si vous vous rappelez. Le 18 décembre, nous avons apporté notre propre politique. Nous nous sommes harmonisés en général avec plusieurs des mesures mises de l'avant par le gouvernement fédéral, mais nous avons fait exception dans certaines, dont les accréditives. Nous avons apporté notre propre formule que nous avons même enrichie. Mais ne nous demandez pas de payer pour le gouvernement fédéral. On peut aller jusqu'à un certain point, mais on ne peut pas se substituer complètement à un autre gouvernement. Quant à savoir ce que nous allons faire dans l'avenir, bon, il y a le budget.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de

Bertrand,

M. Parent (Bertrand): Oui. On va passer à Tautre volet. Sur la question des accréditives, vous avez bougé en réaction, oui. Le fédéral, à la suite de vos demandes, n'a pas bougé, c'est vrai, et c'est un constat d'échec par rapport aux pressions du premier ministre et de vous-mêmes dans les séances fédérales-provinciales. Comme le résultat net, vous avez passé d'un effort de 166 et 2/3 à 133 et 1 /3, que je sache.

M. Levesque: 100 à 133.

M. Parent (Bertrand): Vous étiez à 166 avant. On était à 166 et le résultat net est de 133, en tout cas.

M. Levesque: Vous parlez de décembre 1987 ou 1986?

M. Parent (Bertrand): On parle de décembre 1987.

M. Levesque: 1987. Ce n'est pas là que cela s'est passé. C'est en 1986.

M. Parent (Bertrand): Le résultat net.

M. Levesque: C'est cela. En 1987, comme je l'ai mentionné, on est passés de 100 à 133. Ce à quoi vous vous référez, cela s'est passé avant cela, c'est en 1986.

M. Parent (Bertrand): Comme résultat net, on a été en 1986 à 166, aujourd'hui on est à 133. Il y a un effet aussi à cause des mesures du fédéral.

M. Levesque: Je pense qu'il est important de ne pas mêler les choses.

M. Parent (Bertrand): Je comprends mais...

M. Levesque: Lorsque nous sommes arrivés à la réforme en 1987, je le répète encore une fois, le 18 décembre 1987, la situation était à 100, elle a été portée à 133,33. Ce qui vous a fait dire des choses pas tout à fait exactes - j'essaye de trouver une façon polie de vous le dire - c'est qu'en 1986, lorsque nous avons touché au RE A, lorsque nous avons touché au cinéma, nous avons touché également aux accréditives, parce qu'il fallait diminuer également pour éviter que l'un ne se lance sur l'autre. On se rappellera, il y avait eu du côté des REA une faveur ou ferveur telle que ... L'ancien gouvernement avait commencé à poser certains gestes de cette nature, l'ancien ministre des Finances avait lui-même posé des gestes pour éviter que l'État ait à payer des sommes trop fabuleuses dans certains de ces abris fiscaux. J'ai continué dans le même sens. C'était en 1986. Là, nous avons réduit, si ma mémoire est fidèle, de 166 à 133. Malgré cela, il y a eu pour 600 000 000 $ d'investissement dans le secteur minier, bien que nous ayons baissé.

M. Parent (Bertrand): Imaginez-vous si vous m'aviez pas baissé.

M. Levesque: Cela a coûté 200 000 000 $ à l'État. On pourra s'en reparler si on veut. D'ailleurs, ce que je peux faire pour faciliter les choses aux membres de la commission, c'est peut-être leur donner les vrais chiffres pour qu'on s'entende très bien là-dessus et qu'on voit les coûts. Peut-être que cela pourrait être fait.

M. Parent (Bertrand): D'accord. L'autre volet que je voulais toucher, M. le Président, toujours avec les contraintes de temps, c'est celui qui regarde le contrôle et la présentation des états financiers et particulièrement les informations comptables pertinentes. J'y ai touché ce matin. Je ne fais que resituer le contexte. J'ai demandé au ministre et je redemande à cette commission que le ministre des Finances puisse, pour les fins de la bonne compréhension de l'état des finances publiques, lors du prochain budget, dans ses cahiers, dans ses annexes, nous présenter un ou deux tableaux illustrant l'effet - c'est simple - des nouvelles conventions comptables pour qu'on puisse simplement resituer cela dans son décor. Même si le ministre continue à persister à dire que je suis dans l'erreur, je l'ai défié et je le défie toujours de le prouver concrètement. Je ne suis pas dans l'erreur. Si je suis dans l'erreur, il faudra dire au Vérificateur général qu'il est dans l'erreur. Je ne pense que ce soit dans cette voie que le ministre veuille s'engager. Je vous prie de me croire, M. le ministre, je ne veux pas faire de petite politique ou de politique partisane. Je veux regarder les chiffres tels qu'ils sont. Je vous demanderai de répondre à la question: Est-ce que l'effet des nouvelles conventions comptables au 31 décembre 1987 était de l'ordre de 500 000 000 $ ou 524 000 000 $ et était-ce un effet positif pour le gouvernement? Si c'est de l'ordre de 500 000 000 $ comme nous a confirmé le Vérificateur général et comme j'en ai la conviction profonde, cela veut dire par le fait même que le déficit du Québec est toujours sur la base des anciennes conventions comptables. Je comprends que les anciennes conventions comptables ne sont plus là. On fait affaire avec les nouvelles. Je comprends que le vérificateur voulait qu'on ait de nouvelles conventions comptables, mais il reste que, si on compare avec le passé, il faut comparer avec les normes qui existaient avant. Il est important de comprendre l'évolution du déficit du Québec, l'évolution des finances publiques et de connaître les vrais chiffres. Sinon on risque de se perdre en conjectures, et c'est pour cela que ma demande au ministre des Finances est très claire, très explicite, c'est de mettre ce tableau sur cette

base comparative, pour qu'on puisse savoir que maintenant les résultats des sociétés d'État, dividendes ou pas dividendes, les résultats des sociétés d'État, les 508 millions, par exemple, que cette année Hydro-Québec, au 31 décembre I987, a faits maintenant, s'en vont directement abaisser le déficit du Québec, et le ministre des Finances le sait. Et il y en a d'autres qui viennent s'ajouter à cela. Ce qui fait que cela change passablement le portrait.

Je comprends que ce sont de nouvelles conventions comptables. Si on a changé les règles du jeu, on ne peut plus dire que maintenant le déficit est rendu à deux milliards trois cent cinquante millions. Il faut juste le replacer dans son contexte et j'insiste à nouveau pour que le ministre puisse nous présenter ce tableau. Sinon on devra le travailler, on devra aller le chercher, on devra, encore là, prendre les moyens qui s'imposent pour aller le chercher. Mais c'est important d'avoir les chiffres tels qu'ils étaient et les chiffres avec les nouvelles conventions comptables, et on tirera les conclusions qu'il y a à tirer de ce côté-là. Alors, je réitère cette demande. Elle est importante, et j'y tiens particulièrement.

Le Président (M. Lemieux): M. le ministre des Finances. M. le ministre des Finances, vous avez la parole.

M. Levesque: M. le Président, je ne veux pas critiquer le député de Bertrand d'une façon qui pourrait lui paraître injuste. Je sais fort bien ce à quoi il voudrait en arriver. Il voudrait diminuer, sur le plan politique, il voudrait diminuer un peu l'impact de ce que tout le monde reconnaît, à savoir que nous sommes en train de faire l'assainissement des finances publiques. Et pour ce faire, il utilise un moyen, qu'il a le droit d'utiliser, je ne le conteste pas. Il dit: Si on prenait les anciennes conventions comptables, votre déficit diminuerait moins vite que ce que vous dites. C'est un peu ce qu'il m'a dit. Et moi, je lui réponds ceci: Premièrement, quelles que soient les méthodes comptables que nous employons, depuis que nous sommes au pouvoir jusqu'à aujourd'hui, la diminution du déficit est considérable. Il parlait de défi, je le défie, lui aussi, de contredire cela. Mais il ne veut pas venir jusqu'à aujourd'hui. Il voudrait qu'on arrête à la première année de notre administration. Parce que là il y a un chiffre qui l'intéresse. Et il dit: Là, à ce point-là, n'allez pas ailleurs, n'allez pas après cela, mais allez juste là, et si vous prenez l'anpienne convention comptable, ah! là vous ne baissez pas tant que vous dites. Je ne contredis pas cette chose, mais je lui dis: Attention, regardons la situation, regardons les faits. Un fait important que le député de Bertrand doit retenir, c'est que, lorsqu'il regarde les livres officiels si vous voulez, il lui manque une importante donnée. Je parle des livres officiels, je parle des budgets ou des discours sur le budget. Il lui manque une donnée importante qu'il va retrouver dans "Urgence d'un redressement", publié par le ministère des Finances, au mois de mars I986. Là il va retrouver une donnée qui n'apparaissait pas dans les discours sur le budget, et particulièrement à cause du fait que, lorsque le ministre des Finances, le 23 avril I985, a fait ses prédictions triennales, il a indiqué un déficit prévu pour l'année 1986-1987 de deux milliards neuf cent soixante-dix millions. Or, un mois après qu'il eut fait cette déclaration officielle en Chambre dans son discours sur le budget, un mois après, à peine un mois après, les chiffres qu'il obtenait du Conseil du trésor et des autres instances gouvernementales lui indiquaient que cette prévision n'était pas exacte. (16 h 30)

Par la suite, il s'est révélé que le chiffre - c'est ce que nous avons appris en arrivant au pouvoir - n'était pas 2 970 000 000 $, mais beaucoup plus de l'ordre de 4 500 000 000 $. Ceci a été affirmé solennellement dans un document officiel aussi, déposé par le ministère des Finances le 5 mars 1986. Mais cela, le député de Bertrand ne le dit pas. Si nous n'avions rien fait, quel aurait été le déficit en 1986-1987? 4 500 000 000 $ plus les 200 000 000 $ que nous avions nous-mêmes ajoutés dans notre minibudget du 18 décembre 1985: 4 700 000 000 $. Et, parce qu'il trouve un chiffre de 3 100 000 000 $, de 3 200 000 000 $ ou de 3 300 000 000 $, il dit: Ah! Ah! 100 000 000 $! Ce n'était pas à 100 000 000 $, mais à 1 700 000 000 $ auxquels nous devions faire face.

Je dis que, parce que nous avons pris les mesures nécessaires, parce que nous avons réduit de 1 000 000 000 $... On se rappellera que le président du Conseil du trésor avait annoncé, exécuté et fait en sorte de couper les dépenses de 1 000 000 000 $. Nous avons pris d'autres mesures d'ordre fiscal, nous avons également pris d'autres mesures administratives et nous avons réussi à diminuer ces 4 700 000 000 $ à 3 300 000 000 $, plus exactement à 3 098 000 000 $, si on tient compte du fait qu'en plus de faire ce grand ménage nous avons ajouté un autre ménage d'environ 200 000 000 $, qui étaient des comptes à recevoir qui n'étaient plus là. Ils apparaissaient comme des comptes à recevoir pour 209 000 000 $.

Nous avons profité de ce grand ménage, encore une fois dans un effort additionnel de transparence, pour radier ces comptes à recevoir qui n'étaient plus récupérables, qui étaient devenus des irrécupérables. Si nous tenons compte du fait que le gouvernement antérieur avait abandonné cette pratique parce qu'il ne voulait pas empirer la situation... Dans les trois années précédentes, il avait radié 16 000 000 $. Dans une seule année, nous avons radié 209 000 000 $. Qu'est-ce que cela veut dire? Cela veut dire que nous avons posé des gestes qui aujourd'hui voudraient servir de prétexte au

député de Bertrand pour dire: Bien, cela n'existe pas, ces choses-là. Cela existait. Malheureusement, c'était la situation dans laquelle nous nous sommes trouvés en arrivant au pouvoir.

Maintenant que j'ai dit cela, reprenons les chiffres, parce que le député de Bertrand aime les chiffres. Avant de vous les donner, je vais répéter une chose pour que ce soit bien clair. Mais avant de répéter, je vais faire des comparaisons. Le député de Bertrand aimerait qu'on fasse des comparaisons entre le vieux et le neuf. Je vais faire des comparaisons. Mais avant de ce faire, je vais lui dire une chose: Si on a changé de méthode de conventions comptables, ce n'est pas pour arriver à certaines fins. C'est parce que, depuis des années, le Vérificateur général avait dénoncé les conventions comptables utilisées auparavant. Pourquoi le Vérificateur général les dénonçait-il? Parce que ces conventions comptables étaient de nature à ignorer mais également à cacher - et c'est cela, le pire - au public, sauf dans des notes très discrètes, très pudiques aux états financiers, les pertes effectuées par les sociétés d'État. On n'a qu'à penser, par exemple, à Quebecair, à l'amiante, à Sidbec-Normines, etc. Tout cela, c'était à part: Cachez-nous cela, ces histoires-là! Mais c'étaient des fonds publics qui étaient derrière cela. Le Vérificateur général dit: Vous n'avez pas le droit de faire cela. Montrez les opérations du gouvernement, mais montrez également les opérations des sociétés d'État. Si vous faites de l'argent, montrez-le. Mais si vous en perdez, montrez-le également. C'est ce que nous avons fait. C'est vrai que cela a eu pour effet de changer quelques chiffres, quelque part. C'est clair. Mais c'est à la demande du Vérificateur général que nous l'avons fait.

Il faut dire également que par les mesures que nous avons prises: mesures de privatisation, de contrôle, de rationalisation, certaines de ces sociétés d'État qui perdaient de l'argent en ont moins perdu, ou n'en perdent plus du tout, ou même font des profits, comme c'est le cas de Sidbec depuis deux ans.

Évidemment, cela améliore les chiffres. Cela n'aurait pas paru dans les anciennes conventions comptables. Aujourd'hui, tout est là. Tout est transparent. Et maintenant, on me permettra de regarder les chiffres, même en faisant les comparaisons que j'hésite à faire. Je vais vous dire pourquoi j'hésite à les faire. C'est parce que le Vérificateur général nous dit: Faites cela comme ça. Oubliez cela, vos anciennes conventions. Cela ne marche plus.

L'institut canadien des comptables agréés nous dit comment faire quand on change les conventions comptables. Pour la première année, on fait les changements et on garde les chiffres selon les anciennes méthodes et les chiffres selon la nouvelle méthode, pour l'année en cours, l'année où on les introduit. Puis, on ajoute des années antérieures. Je pense qu'on a une dizaine d'années. On a publié toutes les comparaisons en vertu des anciennes conventions comptables. Voici la liste, année après année, pour les dix dernières années. Et, en vertu des nouvelles conventions comptables, ce que cela aurait été avec les nouvelles. On l'a fait. On l'a publié. Pour l'année où on a introduit ces nouvelles conventions comptables, on l'a fait également.

Le député de Bertrand nous dit: Maintenant, vous allez le faire à l'avenir. Justement! L'institut canadien des comptables agréés nous dit: Non! C'est fini. Montrez-leur tout ce que cela aurait été pour le passé. Montrez-leur pour l'année où cela a lieu. Mais pour l'avenir, c'est fini. Ce n'est pas moi qui le dis. Ce sont les normes reconnues par l'institut canadien des comptables agréés. Ne me demandez pas de faire plus que cela.

Malgré cela, je vais vous donner les chiffres. Vous les avez. Vous n'avez qu'à prendre les états financiers de 1986-1987, page 18, je crois. Vous allez retrouver tout cela. Mais, si vous voulez, je vais vous les donner.

Quel était le déficit budgétaire? Vous me permettrez... La seule année où bloque le député de Bertrand, c'est 1986-1987. La seule année... Il ne veut pas parler de 1987-1988, encore moins de 1988-1989. Il ne parlera pas de ces affaires-là. Cela va faire une diminution de déficit de 500 000 000 $. Wo! On ne parlera pas de cela. On va parler juste de 1986-1987.

Si on prend 1982-1983, selon les anciennes conventions comptables, le déficit était de 3 049 000 000 $. En 1983-1984, 3 613 000 000 $. En 1984-1985, 3 233 000 000 $. En 1985-1986, 3 141 000 000 $. C'est là, en 1986-1987, que vous trouvez les 100 000 000 $ de plus. Mais vous ne tenez pas compte des 209 000 000 $, qu'on a radiés en créances qui n'étaient plus là. Parce que, si on fait cela, si on en tient compte, c'est 3 098 000 000 $. Évidemment, si on tenait compte des 4 500 000 000 $ qui était le véritable chiffre du déficit de cette année, si nous n'avions pas pris les mesures, ce serait une augmentation fantastique du déficit que nous aurions vécue, à cause de l'ancienne administration. Mais, à cause des mesures que nous avons prises, c'est ce que nous avons connu.

Depuis ce temps-là, comme vous le savez, cela a continué de baisser, en 1987-1988, en vertu des anciennes conventions comptables. Nous n'avons plus les chiffres à publier parce que nous n'avons pas... Si on les publiait, on s'apercevrait là encore que cela baisse.

Selon les conventions modifiées depuis 1986-1987, évidemment, nous arrivons à 2400 000 000 $, 2 100 000 000 $, 3 000 000 000 $. En 1984-1985, savez-vous ce que c'était? Vous n'avez pas parlé de cela. D'après vos anciennes conventions, c'était 3 200 000 000 $. Si on avait utilisé les mêmes conventions dans ce temps-là, cela aurait été 3 800 000 000 $, votre déficit. En 1985-1986, 3 300 000 000 $. En 1986-1987, 2 800 000 000 $. Cette année, cela va être 2 350 000 000 $,

d'après la synthèse du 31 décembre dernier.

Une autre façon, en terminant, ce serait peut-être plus juste de prendre le pourcentage du PIB. Parce que là quelles que soient les conventions, il y a toujours une diminution du déficit. Les anciennes conventions comptables, à partir de 1982 jusqu'à 1987-1988, c'est comme ceci: 3,54 % du PIB; 3,37 %; 3,20 %; 2,88 %; 2,77 %; 2,30 %, en 1987-1988. Vous voyez que, continuellement, par rapport au PIB, le déficit diminue. Selon les nouvelles conventions comptables, vous voyez 2,81 %; 2,28 %; 3,76 %; 3,07 %; 2,36 % en 1986-1987; 1,5 %, en 1987-1988. Vous voyez ce qui arrive.

C'est que, depuis que nous sommes là, qu'on le veuille ou non, le déficit a considérablement baissé. Je demanderais au député de Bertrand, qui s'accroche à ce 1986-1987, sans tenir compte de ce que nous avons trouvé dans les livres en arrivant au pouvoir... Même à cela, il ignore les 209 000 000 $ que nous avons radiés, contrairement aux pratiques antérieures du gouvernement précédent. S'il tient compte de cela, il y a encore une diminution du déficit par rapport à l'année précédente.

Je vous le dis comme je le vois. Je vois les chiffres tels qu'on me les fournit. Je les transmets aussi librement et avec autant de transparence que je peux le faire. Mais si le député de Bertrand ne veut pas croire ce que je dis, s'il ne veut pas tenir compte de toutes les nuances que j'apporte, je l'invite à venir au ministère et à interroger tous ceux qui sont avec moi. Ils vont vous dire la même chose parce que c'est la vérité vraie. Et d'autant plus vraie qu'elle correspond aux demandes du Vérificateur général. Cela n'a pas été fait autrement.

Si le Vérificateur général, d'après le député de Bertrand, dit: Oui. Il a reconnu quoi? Il a reconnu ce que je viens de dire. Il n'a pas reconnu autre chose. Il a reconnu, en vertu des anciennes conventions comptables, les chiffres que je viens de donner, qui se retrouvaient d'ailleurs dans mes états financiers. Prenez les états financiers publiés au mois de décembre 1987, pour l'année 1986-1987 et on trouvera ce que le Vérificateur général a lui-même reconnu comme vrai. Mais on ne peut pas, tout de même, accepter un chiffre sans tenir compte de tous les autres et, surtout, sans tenir compte des circonstances que je viens de préciser.

Adoption des crédits

Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie, M. le ministre des Finances. Malheureusement, il ne nous reste que deux minutes. Alors, je dois prendre ce temps pour adopter les programmes du ministère des Finances. Est-ce que le programme 1, Études des politiques économiques et fiscales est adopté?

M. Parent (Bertrand): Adopté.

Le Président (M. Lemieux): Est-ce que le programme 2, Gestion de la... S'il vous plaît, M. le député de Sainte-Anne, s'il vous plaît! Est-ce que le programme 2 Gestion de la trésorerie et de la dette publique est adopté?

M. Parent (Bertrand): Adopté.

Le Président (M. Lemieux): Est-ce que le programme 3 Comptabilité gouvernementale est adopté?

M. Parent (Bertrand): Adopté.

Le Président (M. Lemieux): Le programme 3 est adopté. Est-ce que le programmé 4, Fonds de suppléance est adopté?

M. Parent (Bertrand): Adopté.

Le Président (M. Lemieux): Est-ce que le programme 5, Gestion interne et soutien est adopté?

M. Parent (Bertrand): Adopté.

Le Président (M. Lemieux): Est-ce que le programme 8, Statistiques, prévisions socio-économiques et recherches d'ensemble est adopté?

M. Parent (Bertrand): Adopté.

Le Président (M. Lemieux): Est-ce que l'ensemble des crédits budgétaires du ministère des Finances, pour l'année financière 1988-1989, sont adoptés?

M. Parent (Bertrand): Adopté.

Le Président (M. Lemieux): Alors, nous allons ajourner maintenant les travaux au mardi 19 avril.

M. Parent (Bertrand): M. le Président, est-ce que je pourrais avoir une minute dans la conclusion?

Le Président (M. Lemieux): Oui, M. le député de Bertrand, vous avez une minute en conclusion.

M. Parent (Bertrand): Dans la dernière heure, j'ai eu la parole pendant à peu près cinq minutes. Je veux juste dire, en terminant - je ne reprendrai pas le débat - au ministre des Finances, qu'avec tout le respect que je lui dois - je n'en ai pas contre sa personne - je dois lui dire que les explications qu'il a apportées, aujourd'hui, n'ont absolument rien de nouveau, rien que je ne connaissais pas.

Le ministre des Finances peut rester dans ses convictions. Je vais rester dans les miennes parce que j'ai de profondes convictions de ce

côté-là. On aura la chance de reprendre ce débat. Je suis même prêt à aller au ministère, parce que j'ai des exercices à faire. Je peux vous dire que je trouve dommage que vous preniez cela de la façon dont vous le prenez actuellement, à savoir que je veux essayer de diminuer.

Vous savez, quand on est critique dans l'Opposition, M. le ministre des Finances, on a à dénoncer des situations. Si on le fait et qu'on parle à tout et à travers, qu'on dit des faussetés, on y perd sa crédibilité. Je ne veux pas perdre ma crédibilité. Quand j'ai avancé ce que j'ai avancé et quand je continue à soutenir ce que j'ai à soutenir, c'est que je pense profondément que je suis dans le droit chemin. Vous pouvez l'interpréter comme bon vous semble, je dois vous dire que vous ne m'avez pas convaincu, aujourd'hui, loin de là. Je pensais que vous étiez pour m'apporter de nouveaux éclaircissements. Mais ce ne sont pas de nouveaux éclaircissements. Pour votre gouverne, les 209 000 000 $ de comptes radiés ont été dans la démonstration que j'ai faite, dans la conférence de presse de février. Vous vérifierez dans les documents. J'ai exclu expressément ces 209 000 000 $ pour arriver au chiffre de 3 300 000 $. Il est exclu, et de cela aussi, j'en ai acquis la profonde conviction.

M. Levesque: Malheureusement, il n'y est pas. Les gens, ici, me disent qu'il n'y est pas non plus. C'est 3 098 000 000 $, si vous l'excluez.

M. Parent (Bertrand): Je vous dis qu'il est...

M. Levesque: Que voulez-vous? Il n'y a qu'un chiffre qui est bon, pas deux.

M. Parent (Bertrand): Là-dessus, je tiens quand même à vous remercier, M. le ministre des Finances, de même que vos collaborateurs, de ces crédits. J'aurai la chance de poursuivre cette discussion dans un autre lieu.

Le Président (M. Lemieux): Brièvement, pour le parti ministériel, en guise de conclusion. M. le député de Limoilou.

M. Després: M. le Président, moi aussi, au nom du parti ministériel, j'aimerais remercier le ministre des Finances de sa présence pour l'étude des crédits ainsi que la présence de tous les fonctionnaires du ministère des Finances. Merci.

Le Président (M. Lemieux): Alors, la commission ajourne ses travaux. M. le ministre des Finances.

M. Levesque: Je vous remercie, M. le Président. Je remercie les membres de la commission. Je remercie en particulier mon critique, le député de Bertrand, dont je ne doute pas de l'objectivité. Je ne doute pas non plus de sa sincérité. Mais que voulez-vous? Errare humanum est. C'est permis à tout le monde.

Je vous remercie, M. le Président. Je regrette de ne pas avoir pu aborder un sujet, le fonds de suppléance qui avait été mentionné par le député de Bertrand. J'avais toutes les réponses à lui donner. Mais je pourrais peut-être simplement lui dire que le gros de la différence provient du fait qu'on n'a pas de convention collective, comme il le sait, à partir du 1er janvier 1989. Il faut prévoir certaines sommes pour l'augmentation des salaires. Normalement, il n'y a pas de diminution. Il y a une augmentation. On a tenu compte là-dedans de l'offre qui avait été faite, récemment, par le président du Conseil du trésor, qui a fait une offre, comme vous vous rappelez, de 4 %. On a ajouté cela au fonds de suppléance pour faire face à la situation si tel était le cas.

Je comprends que le député de Bertrand avait trouvé qu'il y avait un saut qui n'apparaissait pas dans les explications du cahier rouge. Je suis heureux de l'ajouter en dernière instance. Les autres renseignements, il pourra les obtenir chez nous, s'il le désire.

Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie, M. le ministre des Finances ainsi que vos fonctionnaires et les membres de la commission. Nous ajournons maintenant nos travaux au mardi 19 avril, 10 heures, afin d'entreprendre l'étude des crédits du ministère des Approvisionnements et Services. Merci.

(Fin de la séance à 16 h 49)

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