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(Neuf heures cinquante-neuf minutes)
Le Président (M. Lemieux): La commission du budget et de
l'administration est réunie ce matin afin de poursuivre le débat
sur le discours sur le budget.
M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?
Le Secrétaire: Oui, M. le Président, M. Paré
(Shefford) remplace M. Dufour (Jonquière).
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le secrétaire.
M. le député de Bertrand.
Discussion générale (suite)
M. Parent (Bertrand): Alors, on reprend les activités. Je
remercie M. le ministre d'être là ce matin, encore une fois, en
l'absence des députés ministériels.
Deux ou trois commentaires sur ce qui s'est passé hier et je vais
permettre à mon collègue, le député de Shefford,
qui s'est présenté ce matin, de poser des questions au ministre
des Finances concernant son champ d'activité. Quelques commentaires par
rapport à ce qui s'est passé hier. Le ministre des Finances nous
a remis un tableau concernant le nombre d'enfants, les familles monoparentales
ou biparentales, et les salaires. Même si tout cela était
daté de 1982, il y a des chiffres qui y sont mis, en bas, et qui disent
que 77 % de tous les enfants se retrouvent dans les familles qui gagnent 20 000
$ et plus. C'est ce que nous disait le ministre hier. Par contre, le tableau,
on peut le faire sur 20 000 $ et plus, mais on peut le faire aussi en partant
de 25 000 $ et moins. Le seul commentaire - c'est un commentaire que je fais au
ministre et qui vient, un peu et même beaucoup, appuyer les dires du chef
de l'Opposition, hier - si vous prenez les trois colonnes de l'ensemble des
enfants, les trois premières colonnes, cela fait 45 % des enfants qui se
retrouvent chez les familles qui gagnent 25 000 $ et moins. Alors, les 10,9,
les 11,8 et les 22,2, grosso modo, cela donne 45 %. Alors, tout près
d'un enfant sur deux se retrouve dans une famille où le revenu
était de moins de 25 000 $. Si on prend la tranche - même aller
jusqu'à 35 000 $, parce que 25 000 $ pour élever une couple
d'enfants, c'est loin d'être énorme - à 35 000 $, 69 % des
enfants se retrouvent, en 1982... Je ne sais pas comment on pourrait ramener
cela au chiffre de 1988, mais c'est assez... Ce tableau-là parle
beaucoup. Je pense que, même si on parle de salaires de 35 000 $, on
retrouve 70 %, 69 %, pour être plus exact, des enfants dans ces
familles-là. Je pense que cela commence à être important.
Il ne s'agit pas de hauts revenus, loin de là! Alors, je voulais
apporter cet éclaircissement et je voudrais laisser, puisqu'on...
M. Levesque: Si on me permet justement... M. Parent
(Bertrand): ...Oui, certainement.
M. Levesque: Juste une remarque. On vient de m'indiquer que le
tableau, étant daté de 1982, les 25 000 $ seraient maintenant 33
000 $, avec une transposition. C'est pour cela qu'il faut être
prudent.
M. Parent (Bertrand): Mais à 33 000 $ pour élever
une couple...
M. Levesque: On vous a donné le tableau même s'il
était daté de 1982 pour être en toute transparence et vous
aider également pour la discussion.
M. Parent (Bertrand): Ce n'est pas une critique que je fais au
ministre des Finances, c'est une observation qui nous fait quand même
réaliser que même en 1982, où un salaire actualisé
de 25 000 $ - le sous-ministre nous dit que c'est 33 000 $ - même
à cela, qu'on s'arrête pour y penser, élever deux, trois ou
quatre enfants avec une trentaine de mille dollars, c'est loin d'être des
familles riches. C'est une observation qui vient appuyer que les familles se
trouvent très souvent dans les bas salariés.
M. le Président, j'aimerais que le député de
Shefford puisse exercer un petit peu son droit de parole pour ne pas se
ramasser en fin de session... J'ai plusieurs autres sujets et je m'ajusterai
selon mes collègues.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Shefford.
Programme d'accès à la
propriété
M. Paré: Oui, Merci M. le Président. Très
rapidement, pour revenir sur un sujet sur lequel on a déjà eu la
chance de discuter avec le ministre des Finances, il s'agit du nouveau
programme d'accès à la propriété. Je voudrais,
très rapidement, faire le tour de la situation de l'habitation et
rappeler certaines choses ainsi que corriger certaines affirmations qui se sont
tenues.
L'ancien gouvernement du Parti québécois avait mis sur
pied un programme d'accès à la propriété
résidentielle en 1982, programme qui avait d'ailleurs aidé
près de 60 000 ménages, amené des subventions très
importantes de plusieurs dizaines millions de dollars. Ce programme
d'accès à la propriété avait pour
but - cela le dit de toute façon - de permettre à des
ménages d'accéder à la propriété
résidentielle. Donc, cela aidait les ménages les plus
démunis et les ménages à revenu moyen. Évidemment,
ce ne sont pas les plus pauvres de la société, certainement pas
les bénéficiaires de l'aide sociale qui peuvent devenir
propriétaires. Donc, il s'adressait aux gens qui manquaient un peu de
capital pour pouvoir accéder à la propriété. En
même temps, ce programme avait aussi un côté nataliste.
Quelqu'un qui profitait du programme d'accès à la
propriété pouvait avoir une subvention, dans le sens d'un
paiement, une aide de 2000 $ pour la naissance du deuxième enfant, et
ensuite, 4000 $ qui étaient enlevés sur cette dette, à la
naissance du troisième et des autres enfants.
Quand vous arrivez, sur deux ans, avec 3000 $ d'aide à la
naissance du troisième enfant, je dois vous dire que n'avez rien
inventé. On a donné plus. On donnait dans notre programme
d'accès à la propriété, 2000 $ au deuxième
et 4000 $ au troisième. C'était un bon programme qui n'aidait pas
seulement les plus démunis, j'en conviens, sauf que, comme je vous le
disais tantôt, ce ne sont pas seulement les plus démunis, ce ne
sont surtout pas les plus démunis qui peuvent accéder à la
propriété.
La semaine passée, quand je vous ai posé la question
à l'Assemblée nationale à savoir pour quelle raison vous
aviez ramené un programme presque avec le même nom, après
avoir aboli celui qui existait et qui était plus généreux,
vous avez dit que c'était nous qui l'avions aboli. Je dois vous dire que
j'ai voulu déposer le décret du 16 avril 1986 et le leader du
gouvernement a refusé. Sauf qu'on a la preuve, et on a les chiffres.
Tout est là, c'est un fait, c'est une réalité. Ce n'est
pas nous qui avions aboli le programme d'accès à la
propriété résidentielle au printemps 1986, c'est vous. La
preuve c'est qu'encore en 1985, il y a eu presque 8000 ménages qui en
ont profité et encore des milliers en 1986, sur la fin du programme.
Donc, c'est un programme qui était en place, qui était maintenu
et que vous avez aboli. Un programme qui était plus
généreux que celui que vous nous ramenez maintenant. Puisque avec
vous, maintenant, il n'y a plus de subvention directement impliquée dans
ce programme d'accès à la propriété
résidentielle rattachée à la naissance des enfants, donc,
on avait un programme qui était plus généreux, plus
accessible et qui avait aussi un côté nataliste. Vous l'avez aboii
pour nous ramener un programme qui est moins généreux et cela a
été reconnu de toute part.
Mais je voudrais aussi englober cela dans le secteur de la construction.
On sait qu'il y a eu, en 1987, à peu près 75 000 logements mis en
chantier, construits. On sait que pour cette année, selon les
prévisions - non seulement les prévisions des gens du milieu,
mais selon les premiers chiffres des premiers mois de 1988 - il va y avoir une
baisse dramatique de la construc- tion au Québec. On va passer de 75 000
constructions en 1987, 75 000 logements, et en 1988, on va se ramasser à
45 000. Et vous en aviez fait état dans les premières pages je
pense, même dans la toute première page de votre budget, où
vous dites: Si cela a si bien été en 1987, bravo, on peut
être bien content mais c'est en grande partie grâce à la
construction. Et là, en 1988, on se ramasse avec des chiffres qui
viennent confirmer les prévisions: une baisse dramatique au niveau de la
construction. Plus du tiers ou à peu près le tiers de moins de
mises en chantier en 1988 par rapport à 1987.
On aurait pu espérer, depuis que vous l'avez aboli, que le
programme d'accès à la propriété qu'on demande,
soit remis sur pied. On aurait pu espérer que ce soit un programme au
moins aussi alléchant que celui qu'on avait mis sur pied et que vous
avez aboli. Un programme qui aurait pu être vraiment un programme
d'accès, avec une connotation nataliste, puisque vous avez un beau
discours sur la famille. Un programme qui aurait pu aussi avoir une orientation
d'incitation à la construction. Pourtant, avec les mesures et avec les
critères, avec le peu d'aide que vous apportez, on sait
déjà que cela n'aura certainement pas les effets que vous avez
escomptés et ce, pour plusieurs raisons. Entre autres, je pourrais vous
citer un télégramme qui est tout récent, daté du 18
mai - donc, cela ne fait pas longtemps - qui vient de l'Association provinciale
des constructeurs d'habitations du Québec et qui dit que les effets du
programme sur la construction neuve seront mineurs sinon marginaux, surtout
dans les régions de Montréal et de Québec, à un tel
point qu'on dit qu'il n'est pas question de réviser à la hausse
les prévisions de 45 000 mises en chantier pour cette année.
Donc, le programme aura tellement peu d'effets sur la construction qu'on
dit, tout de suite après l'étude par l'Association provinciale
des constructeurs d'habitation du Québec, donc des gens qui connaissent
bien le secteur, qu'il n'est pas question de réviser à la hausse
les prévisions qui sont à la baisse cette année par
rapport à l'an passé. Donc, cela n'aura pas d'effet sur la
construction.
Déjà, le maire de Montréal, M. Doré et le
responsable du secteur de l'habitation à la ville de Montréal, M.
Gardiner, ont dit que c'était même un programme
antimontréalais, dans le sens qu'il n'est pas applicable à
Montréal et qu'il aura même des effets, encore une fois,
négatifs par rapport à la croissance de la population de
Montréal, dans le sens que si les gens veulent profiter de ce programme,
ils devront quitter Montréal. Et, justement ce matin, on retrouve dans
le journal La Presse de Montréal une étude qui a
été faite. Je ne sais pas si vous avez eu le temps de la lire,
mais c'est extraordinaire qu'on soit allé chercher ces
chiffres-là, de la part des journalistes et de l'étude qui a
été faite auprès des maisons qui s'occupent de vente de
maisons.
ils s'en viennent nous dire que, effectivement, pour des gens... Le
titre est significatif, une maison à moins de 75 000 $ à
Montréal, oubliez cela. C'est cela qui est le titre, et quand on y va,
on se rend compte que présentement, sur l'île de Montréal,
le nombre de maisons à vendre coûtant 75 000 $ et moins est de
136. Et quand on regarde les chiffres maintenant, cela va plus loin que cela,
ce sont surtout des maisons de deux chambres à coucher. Est-ce que c'est
cela que les familles vont rechercher, des maisons de deux chambres à
coucher, quand on sait que, pour être admissible au programme, il faut
avoir déjà deux enfants? Donc, normalement ce que les familles
vont rechercher c'est trois chambres à coucher. On va plus loin en
disant, et je vais vous lire le petit paragraphe: "M. Normand Harvey croit,
lui-aussi, - et c'est quelqu'un dans le domaine de la vente d'immeubles - qu'un
acheteur peut trouver une maison de moins de 75 000 $ dans l'île de
Montréal. Peut-être même tout près du centre-ville,
dit-il, mais dans plusieurs cas, ce sont presque des taudis."
Et on retrouve la même chose lorsqu'on prend les situations de
Laval et de la rive sud. Sur la rive sud, on dit: Si vous êtes capables
d'en dénicher une au prix de 75 000 $, dans certains cas il faudra
investir entre 15 000 $ et 20 000 $ dans la rénovation. Je ne sais pas
si c'est comme cela qu'on prévoit aider les plus démunis, ils
n'auront pas les moyens. Est-ce qu'on peut... Je veux parler de ceux qui sont
juste à la marge, c'est-à-dire ceux du secteur moyen, ayant des
revenus moyens, ceux qui, malheureusement dans votre budget seront les plus
pénalisés, ceux qui paient le plus d'impôt parce qu'ils ne
profiteront pas des rabais des hauts salariés - 50 000 $ et plus - et
qu'ils n'ont pas l'aide apportée aux plus démunis, donc, la
classe des contribuables normaux, ceux chez qui on va toujours chercher
l'argent et que ce programme-là aurait pu aider, comme notre programme
aidait. Parce que c'était surtout pour aider cette classe de revenus
moyens, qui demandait un peu d'aide pour accéder à la
propriété, notre programme était plus
généreux. On l'a aboli. On en ramène un et on se rend
compte qu'à 75 000 $, ce n'est pas applicable.
Et ce qu'il faut aussi retenir, c'est que 75 000 $, maximum, cela
comprend le prix des terrains. Quand on sait à quel point en est la
spéculation, une minute seulement, ah mon Dieu! - quand on sait que,
depuis les dernières années, la spéculation a fait
augmenter les taux et que, de plus en plus, il ne faut pas l'oublier, à
cause des infrastructures dans les municipalités, les conseils
municipaux ont décidé d'inclure dans le prix des terrains le prix
des infrastructures, ce qui fait en sorte que les prix vont être
terribles.
Donc, ma question, M. le ministre... C'est que votre programme à
notre avis n'est pas applicable et on se rend compte que, finalement, il n'y a
pas eu beaucoup de préparation là-dedans ou bien, on ne voulait
pas qu'il soit applicable. Vous avez dit à l'Assemblée nationale,
en réponse à une question que je vous ai posée, que vous
étiez prêt à regarder et à réviser ce
programme qui n'est même pas encore parti mais qui, déjà on
s'en rend compte, n'est pas applicable. Finalement ce n'est pas un bon
programme. Vous aviez dit que vous étiez prêt à regarder
pour réviser le programme. Est-ce qu'on peut savoir si vous avez
commmencé à regarder cela, de quelle façon on peut le
réviser et de quelle façon vous prévoyez pouvoir le
réviser pour que déjà, en 1988, des familles puissent
accéder à la propriété dans un programme acceptable
et qui réponde aux demandes qui viennent, autant de la ville de
Montréal que de Québec, pour qu'on puisse réviser à
la hausse le prix des maisons et du logement pour que les grands centres du
Québec puissent aussi en profiter?
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre des
Finances.
M. Levesque: Alors, M. le Président, j'aimerais, à
ce moment-ci, apporter quelques commentaires à la suite des propos qui
viennent d'être tenus par le député de Shefford. Le
député de Shefford a commencé à évoquer un
programme antérieur du gouvernement précédent, programme
connu sous le sigle, je pense, de PAPR - "papè-re", pas
"pépère", PAPR - et on semble nous dire que cela aurait
été beaucoup mieux que l'on puisse continuer ce programme. (10 h
15)
Si on regarde pour un instant ce que comportait ce fameux programme qui
a eu, évidemment, sûrement des retombées positives, je ne
le nie pas, je ne le conteste pas, mais lorsque l'on regarde les conditions,
les modalités, qu'est-ce que l'on retrouve? On trouve que selon ce
programme, qui était en vigueur, d'après ce que nous dit le
député, au temps du départ du gouvernement
précédent, en décembre 1985, la valeur de la
propriété incluant le terrain, ne devait pas dépasser 60
000 $. Je comprends qu'il y a peut-être une petite inflation qu'il faut
ajouter à cela, mais 60 000 $, depuis 1985, si vous prenez le taux
d'inflation, à peu près à 4 %, vous allez voir que vous
n'atteindrez pas 75 000 $. Alors, au lieu de vous élever comme vous le
faites, et de commencer à nous faire des leçons, vous devriez
retourner à vos textes.
Lorsque le député de Shefford nous parle des conditions et
des modalités du programme, il ne semble pas faire de comparaison entre
ce qu'il avait pour aider ces gens et ce qu'il avait du point de vue de la
prise en charge des intérêts. Nous, nous avons dit que nous
prenions en charge les intérêts sur une somme de 7000 $ pour sept
ans. Qu'avions-nous dans le fameux programme? Il prenait charge des
intérêts pour la première année, oui, mais la
deuxième année, c'était seulement les deux tiers. À
partir de la
troisième - pas pour sept ans mais pour cinq ans -
quatrième, cinquième année, c'était un tiers des
intérêts.
Pourquoi le député de Shefford n'a-t-il pas
mentionné cela en toute transparence? A-t-il oublié ou quoi?
Est-ce qu'il manque de mémoire tout d'un coup? Je n'ai pas entendu le
député de Shefford parler de cela, moi. Quand on prend en charge
les intérêts pour sept ans, on les prend en charge à 100 %.
Mais, pourquoi copierait-on un programme qui en prend la première
année et qui commence à diminuer tout de suite à presque
rien? Moi, je veux savoir pourquoi. Pourquoi n'a-t-il pas mentionné
cela? Pourquoi ne l'avez-vous pas mentionné? Pourquoi? Est-ce que ce
n'est pas correct cela? Quand on veut réellement faire une analyse de
situation et qu'on ose apporter des comparaisons sur des programmes
antérieurs, alors, qu'on en parle des programmes antérieurs et
qu'on fasse les comparaisons qui s'imposent.
Et là, à un moment donné, il arrive et dit: Nous
autres, on avait une politique de remise de capital quand il y avait un
deuxième enfant, et plus quand il y en avait un troisième. Mais
il aurait dû être ici pendant qu'on a eu la critique de son parti
sur la politique nataliste d'où est-ce qu'on allait avec cela? Hein?
C'est extraordinaire de venir nous dire le contraire en quelques minutes,
quelques heures. Là on fait l'apologie d'une politique nataliste qui
appartenait au Parti québécois. On vient se vanter ce matin, le
25 mai, alors que le 24 mai on déchirait nos vêtements. Avez-vous
entendu les critiques hier de mesdames les collègues du
député?
On attaquait à fond de train les versements faits pour les
enfants. Politique nataliste, sans aucun sens. Aujourd'hui, on vient se vanter
qu'on avait une politique nataliste. Pourquoi? Mais tâchez d'avoir un peu
de cohérence. À un moment donné, on ne comprendra plus ce
que vous dites de l'autre côté. Je comprends que M. le
député de Bertrand - lui est là et il est comme nous
autres, il est témoin - veut donner une chance à tous ses
collègues de venir faire un petit tour.
M. Parent (Bertrand): Ne me mêlez pas à cela, M. le
ministre parce que vous allez voir que je suis agressif. M. le
Président, il m'attaque.
M. Levesque: Ah non, je n'attaque pas du tout. Je veux
préciser que le député de Bertrand... Lui, pour la
première fois il a éclaté, parce que d'habitude il garde
son calme. D'habitude il respecte le règlement. Il vient de faire un
peu...
M. Parent (Bertrand):... Des voix: Ha, ha, ha!
M. Parent (Bertrand): Après tout, si le ministre des
Finances le permet. Je m'excuse, M. le ministre.
M. Levesque: Pas de problème. Errare humanum est. Alors je
disais que quand on veut critiquer un programme parce qu'il a une teinte
nataliste, on ne vient pas quelques minutes après ou quelques heures
après nous faire des leçons sur le même sujet, mais
à l'inverse. J'aimerais cependant revenir, parce que le
député de Bertrand, lui, assiste à toutes les
séances. Mais il y a de ses collègues qui viennent faire un petit
tour; ils ne savent pas ce qui s'est dit avant et ils ne savent pas ce qui va
se dire après et là, ils pontifient un peu. Un instant! Si vous
aviez été ici hier, vous auriez eu l'occasion d'avoir des
données sur ce problème. Est-ce que je vais me permettre de
fatiguer le député de Bertrand en répétant des
choses? Il va dire: Vous nous avez tout dit cela hier. Je ne voudrais pas me
faire reprocher cela par le député de Bertrand.
Hier, on m'a justement parlé des programmes d'accès
à la propriété. J'ai eu l'occasion, par exemple, de dire -
cela est important pour le député de Shefford d'avoir cela - au
moins, j'ai essayé de donner au député de Bertrand et
à la commission tous les renseignements disponibles. J'ai même
été plus loin, j'ai même... Tout à l'heure, quand le
député de Bertrand a commencé, on discutait sur: Où
retrouve-t-on les enfants? Dans telle et telle catégorie. J'ai tout
donné ce que j'avais. À vous aussi, je peux donner tous les
renseignements si vous voulez simplement les regarder objectivement.
La Société canadienne d'hypothèques et de logement,
par exemple, révèle dans ses données que le prix moyen des
maisons individuelles neuves s'établissait, en 1987, à 68 000 $
à Trois-Rivières, à 75 000 $ à Québec,
à 86 000 $ à Montréal et à 98 000 $ à Hull.
Ce sont des moyennes. Cela ne veut pas dire qu'il n'existe pas de maison et de
terrain dont l'ensemble se vend moins cher.
Dans la région de Montréal, la Société
canadienne d'hypothèques et de logement nous dit, pour la région
de Montréal, qui semble vous préoccuper d'une façon
particulière puisque vous avez cité le maire Doré: 45 %
des maisons unifamiliales neuves ont été achetées à
un prix inférieur à 80 000 $; 45 %. On n'a pas pris ces
décisions d'une façon inconsidérée. Le prix moyen
des maisons serait encore plus faible si on avait considéré, dans
l'échantillon, les maisons usagées, les condos, les maisons
jumelées, les maisons en rangée.
Par contre, pour compléter le portrait, la société
Royal Lepage arrive à d'autres conclusions. Pour tout vous dire, encore
dans un but de transparence et non pas comme vous, seulement pour sortir ce
qu'il y a de pire et cacher l'autre partie, la valeur moyenne des maisons pour
la maison Royal Lepage, c'est 105 000 $ pour Montréal. Une maison
individuelle, d'après Royal Lepage, coûtait, le 1er janvier 1988,
entre
76 000 $ et 150 000 $ dans la région de Montréal. Les prix
moyens des maisons contenues dans ces études de Royal Lepage
correspondent à des modèles types de résidence qui
surestiment la valeur réelle du marché et qui ne correspondent
pas nécessairement à des types de maisons visés par le
nouveau programme.
À titre d'exempie, la maison individuelle type - vous avez fait
référence à cela - comprend trois chambres à
coucher, un sous-sol non fini et un garage intérieur pour une voiture.
De plus, les prix indiqués comprennent la commission du courtier,
environ 7 %. La superficie totale, à l'exception du garage, est de 1200
pieds carrés, alors que le terrain mesure 5500 pieds carrés. Les
catégories de résidences, telles les maisons en rangée et
les maisons jumelées, n'apparaissent pas dans ces études.
Pourtant, le prix moyen de ces types de résidences est plus faible.
Alors, en résumé, nous n'avons pas pris ces chiffres au
hasard, pas plus que le montant de 60 000 $ qui faisait partie du programme
antérieur dont se vante le député de Shefford. Il
était limité à 60 000 $, incluant le terrain. Nous l'avons
mis à 75 000 $. C'est une augmentation, je pense, qui se défend,
surtout avec les statistiques dont nous disposions.
Maintenant, je le dis. Je l'ai dit jusqu'à maintenant, j'ai
répondu au député de Shefford lorsqu'il m'a
interrogé à l'Assemblée nationale et je lui dis encore la
même chose. Nous ne sommes pas fermés; nous ne sommes pas sourds
à toute suggestion qui serait de nature à nous amener à
faire des modifications dans les modalités du programme. Ce serait
réellement antidémocratique comme attitude que de dire: Nous
avons dit cela, c'est dans le ciment et vous ne pourrez plus jamais y toucher.
Ce n'est pas vrai.
Le Président (M. Lemieux): En conclusion,
M. le ministre.
M. Levesque: En conclusion, M. le Président, je dis que
j'aurai l'occasion, dans les prochains jours, d'en discuter avec le ministre
responsable. Je ne suis pas responsable des programmes d'habitation. Quand vous
avez des questions à poser en habitation, normalement, vous les posez
à mon collègue, le ministre des Affaires municipales et
responsable de l'Habitation. Vous allez continuer à faire cela parce que
c'est lui qui va prendre charge de ce programme.
D'ailleurs, cela n'a pas été fait sans consultation,
encore une fois, et sans études approfondies. Mais s'il y a des erreurs
qui ont pu se glisser dans l'appréciation de la valeur des terrains, de
la valeur particulièrement sur l'île de Montréal, c'est le
seul endroit où nous avons entendu dire qu'il y avait un
problème, mais je n'ai pas d'objection à le reconsidérer
à la suite des recommandations que je pourrais recevoir - s'il y a lieu
- de la part de mon collègue, le ministre responsable du programme.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le ministre des
Finances. M. le député de Saint-Louis.
Le taux de chômage
M. Chagnon: Merci, M. le Président. Hier, j'ai eu
l'occasion de saisir la commission de certaines réflexions que vous avez
pu faire sur le budget: la problématique qui s'était posée
au gouvernement lorsqu'il était arrivé à Québec -
le nouveau gouvernement - la problématique budgétaire qui nous
avait amené au document: L'urgence d'un redressement et ensuite, j'ai eu
l'occasion de vous parler de la réorganisation institutionnelle
d'État en ce qui concerne les hôpitaux. C'est une institution
sociale extrêmement importante à Québec, l'organisation ou
l'aide à la famille.
Vous vous souviendrez, M. le Président, qu'hier, le
député de Bertrand nous a parlé des écarts qui
existent entre le niveau de chômage au Québec et celui que vous
retrouvez en Ontario. On sait également qu'il y a eu une
évolution extrêmement intéressante dans l'évaluation
des revenus faite par le ministre des Finances dans le budget qu'il a
déposé.
Mais on sait que si cette évaluation des revenus a
été intéressante, c'est qu'il y a un taux de chômage
qui est en diminution au Québec. L'an dernier, par exemple, pour
l'année 1987-1988, il y a eu au-delà de 100 000 emplois
créés, donc, des revenus supplémentaires pour
l'État ainsi que pour le ministère des Finances à
redistribuer, ce qui est sa fonction sociale que d'être le redistributeur
de la richesse collective.
Mais on peut regarder ce qui a été fait sur le plan
économique depuis deux ans. D'une part, les agents économiques du
Québec se sont sentis sécurisés de voir un gouvernement
qui avait effectivement l'intention de diminuer les niveaux de déficit,
de diminuer les niveaux de taxation et d'aider l'entreprise, non plus par le
saupoudrage de subventions à gauche et à droite créant la
compétition entre les entreprises déjà existantes - on a
vu cela souvent dans le passé - ils se sont senties
sécurisées par un gouvernement qui se voulait beaucoup plus
sérieux dans l'organisation et le contrôle de ses dépenses.
Cela a permis de créer un climat nouveau, un climat de confiance chez
les agents économiques du Québec, ce qui a fait en sorte que le
taux de chômage, qui était de l'ordre de près de 13 % en
1985, est rendu à 9,3 %. 9,3 %, c'est encore beaucoup trop
élevé pour ce qu'on voudrait voir au Québec. On a
hâte de le voir baisser à un niveau qui pourrait être
comparable à celui de l'Ontario, même si ce n'est jamais
arrivé dans l'histoire du pays. Mais regardons là d'où on
est parti. De réduire son taux de chômage de 4 %, c'est
déjà un exploit. Enfin, près de 4 %, 3,7 % plus
précisément. (10 h 30)
Quand on regarde la situation de Montréal
et de Toronto, on est bien obligé de constater qu'entre 1977 et
1984, le Québec a été le plus gros exportateur d'emplois
en Ontario par toutes sortes de moyens fiscaux, économiques ainsi que
politiques. Quand on a un discours politique qui dit au monde: Si vous
n'êtes pas contents, allez-vous-en... Nous, on prend le chemin le plus
court entre deux points, on s'en va n'importe où mais on y va. Si vous
n'êtes pas contents, sacrez votre camp, disaient-ils. Il y a un paquet de
gens, un paquet d'entreprises et un paquet de sièges sociaux qui sont
partis de Montréal, qui sont partis du Québec et qui ont
transféré leurs affaires en Ontario. On s'est trouvé
à être nos propres exportateurs d'emplois vers l'Ontario.
Aujourd'hui, quand on dit: C'est épouvantable, il y a une
différence de près de 4,5 %, soit un écart quasiment du
simple au double entre le taux de chômage du Québec et celui de
l'Ontario, on peut bien s'évertuer et déchirer sa chemise, comme
disait le ministre des Finances tout à l'heure, mais il n'en demeure pas
moins qu'une grande partie de cet écart a été
causée, bâtie, provoquée par des politiques
gouvernementales québécoises, non seulement sur le plan culturel
mais aussi sur le plan économique. La façon dont on a
géré le Québec pendant dix ans a certainement
contribué à "déflationner" cet esprit d'entrepreneurship,
cet esprit d'initiative qu'on voit apparaître au Québec depuis
deux ou trois ans.
Le député de Bertrand mentionnait, entre autres, le niveau
d'emploi chez les jeunes. Il trouvait - et je suis d'accord avec lui -
extrêmement élevé le taux de chômage de 14 % que nous
avons chez les jeunes au Québec. Il faut se rappeler que lorsqu'on est
arrivé ici, le taux de chômage chez les jeunes dépassait
les 20 %. Il y avait un jeune sur cinq qui était chômeur, li
devait y en avoir un sur deux à l'école, un peu moins que 60 %
des 50 % qui restaient au travail et un jeune chômeur sur cinq,
assisté social ou les deux pieds dans les trappes à
pauvreté, pour reprendre un cliché qui fait son chemin par les
temps qui courent.
Un jeune sur cinq en proie non seulement à des problèmes
de recherche d'emploi, mais aussi très souvent - et encore une fois le
député de Bertrand a raison - pris dans un dilemme d'organisation
de sa formation personnelle. Vous remarquerez que dans la formation de ces
jeunes qui étaient dans l'incapacité de se trouver du travail, il
y avait un grand nombre de jeunes qui avaient décroché au niveau
secondaire généralement et parfois au début du
cégep. Hier, i'Oppo-sition disait: C'est épouvantable, c'est
scandaleux. On ne met pas en place des politiques de formation et de recyclage
de la main-d'oeuvre. Pour le bénéfice de l'Opposition, je vais
lui dire que le vrai scandale a été de ne pas suivre les
recommandations des groupes de travail en formation professionnelle qui avaient
déposé leur rapport au début de l'année 1976, soit
en février ou en mars 1976. Pendant dix ans, au ministère de
l'Éducation, on ne s'est jamais soucié de la formation
professionnelle.
La première véritable réforme reconnue dans tous
les milieux de l'éducation, du niveau secondaire au niveau
collégial au Québec, a d'abord été faite, pondue,
bâtie avec le livre blanc accepté, débattue dans les
commissions scolaires et dans les collèges et mise en place depuis
l'automne 1987. Nous sommes donc dans la première année de la
mise en place ou du fonctionnement d'une réforme de l'enseignement
professionnel. Le milieu, le système de l'éducation l'attendait
depuis douze ans.
Je vais vous dire ce que cela a provoqué dans le champ. Cela a
fait en sorte que les deux tiers des polyvalentes du Québec,
bâties et payées à grands frais, ont vu disparaître
petit à petit tous leurs secteurs d'enseignement professionnel.
Là-dessus, je pourrais inviter le député de Shefford et le
député de Bertrand à visiter la polyvalente de Mortagne
à Boucherville, la polyvalente à Granby... Aidez-moi, M. le
député, pour le nom de la polyvalente à Granby...
M. Paré: J.-H.-Leclerc.
M. Chagnon: ...J.-H.-Leclerc - merci - la polyvalente Leclerc ou
la polyvalente De Mortagne ou n'importe quelle polyvalente dans vos secteurs
respectifs. Vous irez voir le secteur de l'enseignement professionnel, vous
allez voir un secteur vidé, vidé parce que pendant douze ans, il
ne s'est pas fait d'investissement dans le matériel, dans
l'équipement de ces polyvalentes. Jamais on n'a modernisé ces
équipements, jamais on n'a formé et amélioré la
formation des maîtres, jamais! On s'est donc retrouvés dans une
situation où on était complètement
déconnectés du marché du travail.
Déconnectés, on l'était déjà en 1977, mais
on l'est devenu de façon outrageusement mal placée, mal foutue en
1985-1986. On a tout fait finalement pour décourager la formation de
techniciens dans toutes sortes de secteurs. On a gardé des cours qui
étaient déjà dépassés et pour lesquels la
demande du marché du travail était en diminution constante et
flagrante en 1976-1977. De la tôlerie et de la mécanique, on en
faisait et on en avait drôlement moins besoin en 1975-1976 et on en avait
de moins en moins besoin en 1985-1986.
Heureusement que certaines commissions scolaires ont, de leur propre
chef, sans avoir de subventions particulières, développé
des secteurs comme la robotique, la bureautique, l'informatique et des secteurs
de pointe sur le plan du marché du travail. Je pense à la
tôlerie aérienne, à l'aviation et à des secteurs
comme ceux-là pour lesquels leurs finissants en secondaire V ou
secondaire VI sont automatiquement placés soit chez Pratt & Whitney,
chez Canadair et chez...
La conclusion que je vous amènerai, puisqu'il me reste une
minute, comme vous me le laissez savoir...
Le Président (M. Lemieux): II vous reste 30 secondes.
M. Chagnon: Bon, alors je vous remercie. La conclusion, c'est
que, oui, il y a un taux de chômage qui est différent au
Québec et en Ontario. Le taux de chômage est trop
élevé au Québec, nous en sommes fort conscients. Oui, il y
a un taux de chômage entre Montréal et Toronto qui passe du simple
au double aussi, ce que nous trouvons navrant. Mais c'est encore un taux de
chômage ou une création d'emplois en Ontario qui a
été provoquée très souvent par notre propre faute
à cause de politiques gouvernementales qui ont été
établies ici et qui ont fait fuir les capitaux, qui ont fait fuir les
ressources humaines, principale richesse naturelle du Québec vers
l'Ontario d'une part. Deuxièmement, on a eu carrément un manque
d'intérêt flagrant pendant dix ans dans la réforme de nos
ressources humaines, dans la formation de la main-d'oeuvre, par le biais de la
formation professionnelle de niveau secondaire et collégial, ce qui fait
en sorte qu'on a aujourd'hui de plus grands et de plus graves problèmes
de formation, même en face d'un éventuel
libre-échange...
Le Président (M. Lemieux): En conclusion, M. le
député de Saint-Louis, s'il vous plaît.
M. Chagnon: ...qui fait en sorte que cette... Vous me laisserez
seulement terminer en deux secondes, en disant...
Le Président (M. Lemieux): ...en deux secondes.
M. Chagnon: ...que la formation de la main-d'oeuvre est un
problème qui dure depuis au moins douze ans. En 1976, on avait une
réforme qui s'en allait et qui ne s'est jamais faite et aucune
réforme n'a été faite depuis, entre 1976 et 1985 et cela
est malheureux, mais ce n'est pas la faute du gouvernement actuel. Merci.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le
député de Saint-Louis. M. le député de
Shefford.
Programme d'accès à la
propriété (suite)
M. Paré: Merci, M. le Président. Je vais reprendre
un peu les comparaisons entre l'ancien et le nouveau programme parce que je
n'ai rien à cacher. Je vous ai dit que le nôtre était
beaucoup plus généreux, et il était plus accessible aussi.
Je vais l'expliquer. Premièrement, pour l'ancien programme PAPR
contrairement à votre programme PAAP, je ne sais pas si vous allez
l'abréger, mais dans le programme d'accès à la
propriété, nous avions ajouté: résidentielle. Pour
y être admissible, il fallait avoir un enfant alors que, maintenant, vous
obligez qu'on ait deux enfants. C'est déjà une limite assez
importante, connaissant la situation des ménages actuels. Donc, une
première contrainte supplémentaire par rapport à l'ancien
programme.
Quand vous parlez maintenant de l'aide qu'on apportait par rapport
à l'aide actuelle. Oui, ce n'était pas la totalité des
intérêts qui était payée. Par contre, vous, c'est
sur un maximum de 7000 $, 10 %, alors que dans notre programme c'était
10 000 $, donc sur un montant plus important. C'était sur 10 000 $ alors
que vous, c'est sur 7000 $.
Quand on fait le total de l'aide apportée aux couples, c'est
à peu près 5500 $ pour l'ancien programme sur la base de l'aide
totale alors que présentement c'est encore 5500 $. La différence
c'est que dans le nôtre, c'était sur cinq ans alors que vous,
c'est sur sept ans. Cela veut donc dire beaucoup moins d'aide pour les
premières années puisque c'est sur une période plus
longue. De plus dans notre programme, il y avait l'aide de 2000 $ à la
naissance du deuxième enfant. Le deuxième apportait un rabais de
dettes de 2000 $ alors que dans le vôtre, il faut avoir le
deuxième enfant et il n'apporte pas un sou et, il y avait 4000 $ pour le
troisième.
Quand on parle de la valeur des terrains, dans notre programme
c'était 60 000 $ en 1982, vous c'est 75 000 $. Là-dessus, vous
êtes revenus sur les autres chiffres. Heureusement que vous n'avez pas
seulement cité la Société canadienne d'hypothèques
et de logement de 1987; vous êtes revenus sur les autres qui sont
beaucoup plus réalistes. Demandez cela à tout le monde. Demandez
cela au maire Doré de Montréal. Demandez cela au maire Pelletier
de Québec. Allez voir les évaluations municipales. Allez voir la
Chambre de commerce de Montréal et l'Association provinciale des
constructeurs d'habitations du Québec et allez voir tous les autres
organismes qui ont apporté des chiffres ici, que ce soit Royal Lepage,
Century 21 ou toutes les grandes firmes de courtage et vous allez vous
apercevoir que les chiffres ont terriblement changé.
Si on y va seulement sur une base annuelle d'indexation, 60 000 $
à 75 000 $, je dois vous dire que vous auriez peut-être raison si
c'était cela. Mais la réalité, dans le domaine de
l'habitation, dans le domaine immobilier, c'est complètement
différent, à cause des deux dernières années. C'est
reconnu par tout le monde. On en a eu la preuve l'an passé en commission
parlementaire à Montréal sur la levée du moratoire pour
transformer les immeubles locatifs en copropriétés
résidentielles. On s'est aperçu à quel point la
spéculation due au fait qu'en 1987, il s'est bâti
énormément de maisons, à quel point cela devenait
inquiétant. Des maisons se vendent à Montréal
présentement quatre fois plus cher qu'elles ne se vendaient en 1985. Je
ne parle plus d'une augmentation de 10 % ou 12 %. 200 % et 300 % plus
élevé seulement à cause de la spéculation dans des
quartiers où on sait qu'on va transformer en copropriétés
résidentielles. Là, je parle des places où vous dites
qu'on peut avoir des logements à prix plus économiques. Je
parle de Plateau Mont-Royal, de Centre-Sud, de Pointe-Saint-Charies,
là où normalement on disait qu'il y avait des logements pas chers
et on s'aperçoit que c'est rendu des coins très
spéculatifs.
C'est la même chose à Québec, dans les quartiers
Saint-Roch, Limoilou et Saint-Jean-Baptiste. Donc, où on pensait
être capable d'acheter des maisons peu dispendieuses, souvent des taudis,
ce n'est pas possible et les chiffres dans La Presse de ce matin nous le
prouvent. De plus, l'APCHQ (l'Association provinciale des constructeurs
d'habitations du Québec) vient nous dire exactement la même chose.
Les prix ont tellement changé.
Je vous écoutais tantôt quand vous avez donné votre
dernière série de chiffres en nous disant: Bien, écoutez,
le député de Shefford donne les chiffres les pires. Je vais vous
en donner d'autres. Puis, vous nous donnez les chiffres en nous disant:
À Montréal, on dit qu'on peut avoir des bungalows entre 76 000 $
et 140 000 $. Votre prix c'est 75 000 $. C'est inapplicable. Je vous le dis, si
je me battais ce matin juste pour mon comté ou ma région je vous
dirais: Bien, bravo! Chez nous, cela va s'appliquer selon les mêmes
chiffres que je pourrais ressortir et qui ont été
publiés.
Tous les chiffres, dans la région de Montréal, je ne parle
pas seulement de Montréal, je parle de Laval, de la rive sud, c'est
partout au-dessus de 75 000 $. Beloeil, c'est un peu moins cher, 75 625 $.
Ensuite, cela va toujours en augmentant. Dans toutes les régions il y a
trois places où c'est en dessous de 75 000 $. C'est pour cela que je
vous dis: si je me battais seulement pour chez nous, tant mieux! Ce serait
extraordinaire. Il y a Granby, Shawinigan-Sud et Trois-Rivières selon
les villes importantes du Québec qui pourraient accéder
présentement à votre programme. Donc, un beau programme? Il faut
avoir deux enfants. On vient de limiter terriblement. Il faut que ce soit 75
000 $ la maison et le terrain. On vient de limiter encore d'une façon
énorme l'accès à votre programme.
Finalement, je comprends que vous n'ayez pas mis beaucoup d'argent dans
cela, c'est vous qui l'avez aboli. Nous on mettait en moyenne - on voulait
justement qu'il y ait de la construction et de l'accès à la
propriété - 27 000 000 $ par année dans ce programme.
C'était la réalité des choses. Là, je ne vous parle
pas de prévisions et de budgets à venir. Je parle de
dépenses effectuées qui sont comptabilisées et qu'on peut
vérifier. (10 h 45)
Nous, on consacrait 27 000 000 $ de subventions par année
à ce programme d'aide. Vous, vous ne mettez que 9 000 000 $ pour
l'année 1988. Vous savez très bien que c'est un programme qui ne
sera pas très utilisé, puisqu'il ne s'agit que de 9 000 000 $. De
plus, connaissant la situation où, maintenant, les pauvres sont plus
pauvres et les riches sont plus riches, ceci étant dû à
toutes sortes de choses, dont les tables d'impôt depuis deux ans, les
salaires qui augmentent moins vite que les coûts... Allez voir les
chiffres et vous allez vous en rendre compte. Ce n'est pas de mon cru. Ce sont
des chiffres qui sont disponibles.
L'aide que vous apportez est de 65 $ par mois. C'est l'aide maximale, 65
$, alors qu'il a été prouvé, par les mêmes
associations de spécialistes que j'ai énumérées
tantôt, que pour passer de locataire à propriétaire, il en
coûte entre 250 $ à 300 $ par mois de plus, à cause des
coûts différents entre un logement et une propriété
dont on est propriétaire, tous ces coûts que cela occasionne sans
qu'on ne puisse rien y faire. Comme on le dit dans le journal ce matin, si on
achète une maison de 75 000 $ présentement dans la région
de Montréal, cela veut dire qu'on devra mettre entre 15 000 $ et 20 000
$ de plus en rénovations. Sans compter cela, c'est 250 $ par mois. Qui,
certainement pas les plus pauvres de la société, mais qui,
même parmi les gens à revenu moyen, va vouloir profiter de votre
programme à 65 $, quand on sait que cela va coûter 250 $ de plus
par mois pour devenir propriétaire?
Est-ce que c'est vraiment un incitatif? Je vous dis que non. Quand vous
me dites: On est prêt à regarder cela, s'il faut changer des
choses. Je vous le dis tout de suite. Il y a une chose que je vous invite
à changer: c'est la valeur de 75 000 $, si vous voulez vraiment qu'il y
ait un véritable programme d'accès pour aider les locataires
à devenir propriétaires et, en même temps, que cela ait un
minimum d'influence sur la construction, alors qu'actuellement, cela n'en a pas
du tout.
Je vous ai cité l'Association provinciale des constructeurs
d'habitations du Québec qui dit: On ne modifie pas d'un seul appartement
les prévisions de 45 000 logements, malgré que ce soit 30 000 de
moins que l'an passé, parce que ce programme n'aura aucun effet sur la
construction. Si vous voulez que cela ait un minimum d'effet, il faudrait,
à tout le moins, s'organiser pour changer le plafond de 75 000 $. C'est
un minimum.
Quand vous me dites: On a fait notre devoir et il faut consulter le
ministre responsable de l'Habitation, je dois vous dire que j'aurais
aimé lui poser une question, mais il n'y était pas. Cela, c'est
une autre affaire dont on n'a pas à discuter ici. Mais il n'y a pas eu
de consultation, je peux vous dire cela - en tout cas, pas publique - en ce qui
concerne ce programme d'accès à la propriété qu'on
demande depuis longtemps. Je dois vous dire et pour en avoir parié
à plusieurs intervenants, que cela nous a été
annoncé comme cela, comme le programme PARCQ l'avait été.
Mais ce qui nous inquiète également, c'est qu'on annonce un
programme, comme cela, et qu'avant même qu'il soit mis en application,
avant même qu'on ait signé la première formule, on dit:
Mais si on se rend
compte que le programme n'est pas bon, on est prêt à
changer les formules.
Vous ne me ferez pas croire que c'est parce qu'on a beaucoup
consulté ou que c'est un programme qui nous intéressait vraiment.
Sinon, la première chose qu'on fait, quand on a un programme auquel on
croit vraiment, on se prépare, on est sûr que c'est un bon
programme, on le défend 100 milles à l'heure et on essaie d'en
faire profiter les gens au maximum. On ne dit pas: On vous l'annonce. Si vous
pensez qu'il n'est pas bon, d'accord, on va le modifier tout de suite. C'est un
peu ce que fait le ministre Bourbeau. Pour le programme PARCQ, c'est la
même chose. Cela fait deux ans qu'il est en application, et cela fait
deux ans qu'on annonce des modifications à tous les deux mois environ,
parce qu'il n'est pas applicable.
J'espère que, dans ce cas-ci, on va aller plus vite, et je vous
invite à le faire. J'espère que les propos que vous avez tenus
tantôt, le fait de donner des chiffres, des explications, le fait de le
dire et d'insister là-dessus: On est prêt à faire des
modifications, si justifiées... li n'y a rien de moins sûr que
cela. Vous nous laissez entendre que vous êtes prêt à
regarder cela, mais peut-être que vous n'êtes pas
véritablement prêt à le modifier, qu'il n'y a rien
d'entrepris en ce sens, soit d'examiner de véritables modifications.
Le Président (M. Lemieux): En conclusion...
M. Paré: Est-ce que vous êtes prêt à
prendre l'engagement de changer le plafond qui était inacceptable pour
l'ensemble du Québec, mais spécialement pour Montréal et
Québec?
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le
député de Shefford. M. le ministre des Finances.
M. Levesque: M. le Président, en me référant
aux derniers propos du député de Shefford, je dois lui rappeler
des choses peut-être désagréables. Il semble nous
reprocher, à mots à peine voilés, que nous soyons
prêts, si peu de temps après le budget, à apporter
certaines modifications au lieu de se battre pour défendre notre projet,
comme il le dit si bien.
Mais elle est là, justement, la différence essentielle. Il
vient de toucher un point essentiel, la différence entre nos partis
politiques. Nous ne sommes pas un parti de doctrinaires, de gens qui ont la
vérité, l'exclusivité de la vérité. On a
vécu pendant neuf ans avec ces gens qui nous ont assommés avec
leur attitude intransigeante, intolérante: C'est là. C'est
ça, et il n'y a pas autre chose. Il n'y a pas moyen de discuter.
C'était cela. Ils défendaient leur point de vue même s'ils
savaient qu'ils avaient tort, parce que le Parti québécois,
c'était la vérité. Nous n'avons pas la
vérité. Nous tendons vers la vérité. C'est parce
que nous tendons vers la vérité, au Parti libéral du
Québec, que nous sommes prêts à nous amender
régulièrement. Il n'y a pas de honte à cela. Il s'agit
simplement de gérer les affaires publiques avec un minimum
d'humilité, de sens commun, de pragmatisme et avec un sens
démocratique.
Je sais que je suis libérai, je l'ai toujours été,
non pas parce que je suis toqué, mais parce que je pense que le Parti
libéral du Québec reflète des attitudes et des valeurs qui
me plaisent justement dans le sens démocratique. C'est que j'aime le mot
"liberté". J'aime le mot qui dit que nous avons du respect pour la
population que nous desservons. Nous n'essayons pas d'imposer quoi que ce soit
à la population. Nous demandons à la population de nous indiquer
ce qu'elle désire. Voilà la différence. C'est pourquoi je
n'ai aucune hésitation à dire que si vous avez raison, M. le
député de Shefford - même si vous êtes dans
l'Opposition et que vous tenez des propos qui sont, on le sait, dictés
par votre appartenance au Parti québécois - nous allons
travailler dans le sens que vous nous direz.
Mais, avez-vous raison ou avez-vous tort? On consulte alors des gens de
l'extérieur, comme la Société canadienne
d'hypothèques et de logement. Vous avez dit d'un revers de la main: Eux
autres, ils ne connaissent pas ça. Vous le savez. Fini, eux autres.
Merci de nous avoir donné d'autres exemples, mais eux autres, la
Société canadienne d'hypothèques et de logement, ils ne
connaissent rien. Pourquoi dire cela? On va d'abord examiner ce que la
Société canadienne d'hypothèques et de logement dit. Ils
sont dans le domaine. Ce sont des gens responsables. Ils disent que 45 % des
maisons unifamiliales neuves ont été achetées à un
prix inférieur à 80 000 $ en 1987, dans la région de
Montréal. Je me dis que je ne peux pas nier cela. Je regarde cela.
Par contre, j'ai un autre son de cloche de Royal Lepage. Je ne l'ai pas
caché. Je vous l'ai dit. Vous ne pouvez pas me reprocher de vous cacher
quelque chose, je vous donne tout le portrait. Contrairement à ce que
vous avez fait, vous - M. le Président, je ne devrais pas m'adresser au
député de Shefford, je m'excuse - mais ce que le
député de Shefford a fait, contrairement à ce que je viens
de dire, c'est qu'il ne donne toujours qu'une partie du tableau. C'est ce que
je n'aime pas de quelqu'un. Quand on plaide, je pense qu'un juge accepte
toujours mieux un avocat qui plaide et qui essaie de montrer au moins
quelques-uns des arguments qui n'aident pas sa cause. Le juge lui donne
beaucoup plus de crédibilité...
Une voix: Ce sont toujours des questions posées par le
juge...
M. Levesque: C'est cela. Alors quand le député de
Shefford, par exemple, nous dit: Nous autres, c'est 10 000 $ et vous autres,
c'est 7000 $, point à la ligne, il oublie de dire que ce sont 10 000 $,
oui, mais pour les logements
neufs, et 6000 $ pour les logements existants. Pourquoi ne l'a-t-il pas
dit? Les maisons mobiles, 4000 $. C'est toute une série de nuances
extrêmement importantes. Pas un mot. On dit: C'est 10 000 $. Bon. Ce sont
des demi-vérités que je me sens obligé de relever.
Avant de terminer, parce que je ne veux pas passer ma journée
là-dessus - je sais que le député de Bertrand a autre
chose à son menu, d'après la pile de documents qu'il a devant lui
- je rappellerais tout gentiment et aussi poliment que je le puis au
député de Shefford, que nous n'avons pas le même objectif
qu'ils avaient, eux, parce que en 1981, quand le programme PAIRE a
été mis de l'avant, ils avaient surtout un problème dans
le domaine de la construction. On manquait de logements. C'était une
situation un peu difficile. Je pense que l'un des objectifs était de
stimuler la construction. La construction, à cette époque,
était d'environ 20 000 unités de logement.
Une voix: Combien était-ce l'an dernier?
M. Levesque: L'an dernier, nous avons battu le record de tous les
temps: 75 000 unités. Vous étiez dans la vingtaine de mille dans
ce temps-là. Je comprends, M. le Président, que leur objectif
était de stimuler la construction. Mais nous, ce n'est pas le but que
nous recherchons avec ce programme, ce n'est pas de stimuler la construction.
Si, comme effet secondaire, cela stimule la construction, il est sûr que
nous ne sommes pas contre, mais ce n'est pas là notre objectif. Notre
objectif fait partie d'un ensemble de mesures pour aider la famille
québécoise. Le député de Shefford dit: Ah! C'est la
grande chute de la construction résidentielle! Un instant! Un instant!
11 ne faut pas être un oiseau de malheur, un prophète de malheur.
Il faut, à mon sens, regarder les chiffres tels qu'ils sont. Nous venons
de passer en 1987 l'année record, 75 000 nouvelles mises en chantier
dans le domaine résidentiel. En 1988, pensez-vous que la construction,
tel que les chiffres du budget l'indiquent, va subir une chute comme celle que
le député de Shefford vient d'annoncer? Mais pas du tout! Pour
deux raisons principales. La première, c'est que dans la construction
non résidentielle, il y a une augmentation substantielle qui va prendre
justement la relève. Mais même dans la construction
résidentielle - le député de Shefford a parlé de 45
000. Je ne sais pas où il a pris cela. S'il avait lu le budget, à
l'annexe D-16 - ce que nous avons prévu, c'est 51 000 nouveaux logements
pour 1988. Si l'on considère ce qui se passe actuellement dans la
construction résidentielle, pour les quatre premiers mois, selon une
extrapolation que l'on fait régulièrement, nous sommes dans une
lancée non pas de 51 000, mais de 65 000, au moment où je vous
parle.
Si c'était le cas, ce serait la deuxième plus haute chute
de l'histoire du Québec. Somme chute! Peut-être que vous, vous
voyez quelque chose qui va se passer le mois prochain, le mois suivant et que
tout va tomber, mais je n'ai pas de raison de vous croire. Et je dis à
nouveau que ce n'est pas l'objectif que nous poursuivons actuellement dans le
domaine de la construction. Ce n'est pas là notre objectif, mais je
comprends qu'il puisse avoir été celui du gouvernement
antérieur, en 1981-1982. Ce n'était pas 70 000 unités,
c'était 20 000 environ. Je comprends que l'objectif poursuivi à
ce moment-là, était sûrement louable. Je tenais à
faire cette distinction.
Le Président (M. Lemieux): En conclusion, M. le ministre
des Finances.
M. Levesque: En conclusion, je pense que c'est assez.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le ministre des
Finances. M. le député de Mille-Îles.
M. Bélisle: Merci, M. le Président. Je vais
m'attaquer directement, comme le ministre des Finances vient de le faire,
à la problématique du fameux programme qui poursuit,
d'après la page 15 du discours sur le budget, les objectifs suivants:
"Ce programme s'adressera aux familles ayant deux enfants ou plus et n'ayant
jamais été propriétaires d'une résidence
principale. Afin d'aider les familles à fournir la mise de fonds
nécessaire à l'achat d'une résidence principale, le
gouvernement garantira pendant 7 ans un prêt qui pourra atteindre 10 % de
la valeur de l'hypothèque jusqu'à un maximum de 7000 $."
Je vais aborder directement l'argument que le député de
Shefford a avancé tantôt devant la commission. Le
député de Shefford nous a dit: Pour passer du statut de locataire
au statut de propriétaire, d'après les statistiques et les
chiffres que j'ai, il en coûte environ 300 $ par mois à un couple
ou à un individu. Je vais certainement lui donner raison. Mais quand on
fait le calcul, comme il l'a fait tantôt, en disant que l'aide que
l'État est prêt à apporter à cette personne - on
reviendra à la valeur de la résidence tantôt - est
d'environ 65 $, si on calcule une hypothèque de 60 000 $. (11
heures)
On sait très bien que sur une résidence d'une valeur de 75
000 $, ce qui est hypothécable, c'est 80 % de la valeur de la
propriété. C'est la norme qui existe dans les institutions
financières du Québec. 80 % de 75 000 $, 60 000 $; 60 000 $
à un taux de 10 %, 6000 $ par année, à 10 %, 600 $ par
mois; 11 %, 660 $ cela, donne environ 65 $. Je suis d'accord avec le
député de Shefford sur cela. Si toutefois la valeur était
changée - et je reviendrai tantôt sur la valeur - et qu'on prenait
l'hypothèse de 100 000 $. 80 % d'une résidence de 100 000 $, 80
000 $; 80 000 $ à 11 %, 8800 $; 8800 $ à 10 %, 880 $
divisé par 12 mois donne à peu près 75 $ par mois.
Voici ce que je dis au député de Shefford: Par un
programme qui vise à aider des familles de deux enfants à
accéder à la propriété, l'État ne doit pas,
en mettant des sous sur la table dans ce programme, favoriser les gains
individuels non imposables et les gains de capitaux sur des résidences
personnelles. Je m'explique. Si i'aide annuelle de l'État se chiffre au
montant donné, et est répartie sur une période, supposons,
de sept ans - le montant est de 660 $, de 880 $ s'il s'agit d'une
résidence de 100 000 $ - nous obtenons tout près de 5000 $. Sur
une valeur de 100 000 $ dont l'hypothèque est de 80 000 $, donc 880 $
multiplié par sept, cela donne 6000 $. Je pense qu'on peut facilement
constater que sur un capital, une valeur totale de 75 000 $, la valeur d'une
résidence achetée augmente chaque année beaucoup plus
rapidement que le taux d'inflation. Voilà ce qu'on peut constater
d'après les statistiques et même l'expérience qu'on vit sur
le marché de Montréal ou dans la région
métropolitaine de Montréal.
Le message que je veux transmettre ce matin, est le suivant: Je ne pense
pas qu'un programme gouvernemental d'accès à la
propriété puisse aller au-delà du quart ou du tiers de ce
que cela coûte de plus pour accéder à une
propriété. Le député de Shefford a raison, je lui
donne raison. Cela coûte 300 $. Si l'État est prêt à
offrir jusqu'à 85 $ par mois, ou 75 $, ou 65 $, comme c'est le cas
présentement, entre le quart ou le tiers, si on augmente à 300 $
par mois... La différence entre le 300 $ par mois, multiplié par
douze, c'est 3600 $. Si l'État va jusqu'à 850 $, je
considère que cela fait une différence d'environ 2500 $ par
année de revenu net que le couple met dans sa résidence. Si c'est
sur une résidence de 100 000 $, et que la valeur de la
propriété augmente de 6 %, 7 % par année, que ce n'est pas
imposable car c'est une résidence familiale et que le gain
réalisé par la suite lors de la vente n'est pas imposable, je ne
vois pas comment l'État pourrait aller jusqu'à un montant de 150
$, 200 $ ou 300 $ par mois, pour permettre à tous ceux qui sont
locataires présentement à Montréal de devenir
propriétaires, compte tenu du gain personnel qu'un individu
réalise.
Lorsqu'une jeune famille s'achète une propriété
pour la famille - tout le monde a vécu cela - elle se serre la ceinture.
On se serre la ceinture pendant deux ou trois ans. C'est le
phénomène normal que toutes les familles vivent au Québec.
Si l'État offrait 200 $, ou 250 $, ou 300 $ par mois, pour inciter tous
les locataires du Québec à devenir propriétaires, moi je
ne suis pas d'accord, parce que l'État permettrait aux gens de
réaliser automatiquement un gain de capital sur le dos du Trésor
public. Je pense qu'il y a une limite qu'il faut atteindre. Est-ce le quart, 65
$? Est-ce le tiers, 85 $ ou 90 $? Est-ce un peu plus que le tiers, 40 %? Je ne
le sais pas, mais certainement pas - ce que vous n'avez pas dit dans votre
intervention - aller vers le 300 $ qui est le coût supplémentaire
total qu'assume une famille pour devenir propriétaire, parce que
l'État n'enregistre pas de gain de l'autre côté. Le gain
est non imposable. J'imagine que le ministre des Finances, ses analystes et ses
conseillers financiers ont analysé l'écart et ce qui est
équitable.
Une chose qui m'importe. Cela me fait "péter les bretelles" quand
je vous entends parler du maire Doré, qui dit que c'est une mesure
anti-Montréal. M. le ministre des Finances, vous me permettrez de vous
faire une suggestion. Je vous suggère d'examiner le fameux programme
Opération 20 000 logements, que l'ex-administra-tion de Montréal
avait mis de l'avant et qui avait eu un succès phénoménal
à Montréal. Vous êtes d'accord avec moi? Vous faites signe
que oui, M. le député de Shefford. Vous avez raison. Cela a eu un
très beau succès. Le but de l'Opération 20 000 logements
était de donner accès à la propriété
à des gens qui n'y avaient pas accès, soit les locataires. On n'a
pas visé des résidences de 100 000 $, et cela ne fait pas
tellement longtemps que ce programme a été retiré du
marché. Il faut peut-être examiner les modalités de ce
programme.
Quand le maire de Montréal nous dit, pour faire les manchettes,
que c'est une mesure antiMontréal, je lui demanderais d'être un
peu plus prudent dans ses déclarations, et peut-être de commencer
à considérer l'ensemble du développement de la ville de
Montréal dans le contexte de la région métropolitaine de
Montréal, où demeurent 3 000 000 de personnes.
L'agglomération montréalaise, ce n'est pas la ville de
Montréal. Ce sont toutes les villes qui l'entourent. Ce qui
m'amène à la valeur de la résidence. Quand vous parlez de
la région métropolitaine de Montréal, c'est autant
Mas-couche, Terrebonne - dont le député est un de vos
collègues, M. le député de Shefford -
Sainte-Thérèse, Boucherville, Châteauguay,
Dollard-des-Ormeaux. Pour toutes ces villes, quand on parle de valeur et que le
plancher est établi à 75 000 $, selon ma modeste connaissance du
marché, c'est juste et équitable. Ce qu'on devrait
peut-être faire, à mon avis, c'est de faire une exception pour
trois zones: une zone pour l'île de Montréal, et je ne parle pas
de la ville de Montréal, je parle de 111e de Montréal, une pour
l'île Jésus, qui est Laval, et une pour une partie située
très près de la rive sud de Montréal, où la valeur
de base devait peut-être être un peu plus élevée. On
devrait peut-être adapter le paragraphe. Pour les gens qui demeurent
à Saint-Hyacinthe ou dans une région où la valeur de base
de la résidence est de 75 000 $, je pense que c'est une valeur juste
pour les inciter à faire un premier pas vers l'accès à la
propriété, à leur première résidence. Un
couple avec deux enfants ne va pas se faire construire une maison de 100 000 $,
125 000 $ ou 150 000 $. L'État n'a pas à encourager
l'accès à des propriétés d'une valeur de 100 000 $,
125 000 $ ou 150 000 $ en région, alors qu'une valeur semblable
n'existe
pas. Alors, ce que je pense...
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Mille-Îles.
M. Bélisle: En conclusion, M. le Président, je
crois qu'il faut bien réfléchir à cette mesure. Le
député de Shefford nous dit: Cela coûte 300 $ pour passer
du statut de locataire à celui de propriétaire. Je suis d'accord,
mais je crois que l'État n'a pas à assumer le fardeau total du
passage du statut de locataire à celui de propriétaire. La part
prévue actuellement dans le budget se situe au quart environ; on devrait
peut-être aller vers le tiers, mais au-delà du tiers, je pense que
ce serait injuste et inéquitable pour l'ensemble des autres
contribuables du Québec.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le
député de Mille-Îles. M. le député de
Bertrand.
M. Parent (Bertrand): Oui, M. le Président. Je dois vous
dire que je trouve cela un peu inéquitable que l'Opposition, selon les
règles du jeu qui sont fixées - je ne dis pas que c'est de votre
faute - place son mot pour dix minutes, a à rétorquer d'abord
à ce que le ministre dit, puis à ce qu'un autre
député a dit, ou à l'expliquer, ce qui fait qu'on peut
placer un dix minutes à peu près à toutes les trente
minutes. D'autant plus que c'est nous, en tant qu'Opposition, qui voulons
essayer de faire ce travail. Je trouve cela un peu pénible. Il y a une
demi-heure, le député de Saint-Louis a dit des choses et on n'a
même pas eu la chance de s'exprimer. Tout compte fait...
M. Levesque: Est-ce que le député me permettrait?
Ce qu'il vient de dire est intéressant.
Le Président (M. Lemieux): Oui, M. le ministre.
M. Parent (Bertrand): Oui.
M. Levesque: II faut dire qu'on était partis de 25 heures
de débat sur le discours sur le budget, n'est-ce pas? Je me pose des
questions aussi. Je n'en ai pas parlé avec mes collègues, mais on
a changé cela il y a quelques temps. Je pense que c'était il y a
quelques années, peut-être deux ou trois. Pardon? En 1984.
Auparavant, les députés profitaient, comme pour le discours
inaugural, d'une période de 25 heures à la Chambre, à
l'Assemblée nationale, en plénière. Ce n'était pas
en commission, c'était à l'Assemblée nationale
siégeant comme telle. Comme on l'a fait pour les quelque dix ou douze
heures que nous avons au début, il nous en reste une heure et demie
à faire, donc vers treize heures et demie. Alors, on a dit:
Peut-être que ce serait mieux qu'on aille en commission plutôt que
de faire en sorte que la Chambre soit immobilisée d'une certaine
façon par le débat. Par contre, quand on arrive ici en commission
parlementaire, quel est le but de notre exercice? Est-ce que c'est de continuer
le débat, où chaque député qui n'a pas parlé
en Chambre ou qui n'en a pas eu l'occasion, puisse s'exprimer ici? J'avais
compris que c'était un peu cela qui se continuait en commission. Par
contre, cela a évolué à un point tel que maintenant, c'est
comme si on était aux crédits. Ce n'est pas tout à fait,
je pense, l'esprit qui a présidé à ce changement. Je
m'interroge. Je n'ai pas de solution à proposer, mais je m'interroge sur
la procédure. Je me demande si la commission de l'Assemblée
nationale ne pourrait pas s'interroger elle-même, à la
lumière de l'expérience vécue depuis quatre ans, pour voir
si c'est cela que l'on veut.
Vous savez que les députés qui n'avaient pas toujours
l'occasion de s'exprimer, par exemple, sur leurs comtés, sur les besoins
régionaux, profitaient beaucoup du débat sur le discours sur le
budget pour faire part - en tout cas, moi je l'ai fait combien de fois, je ne
me rappelle plus - sur des sujets qui leur tenaient à coeur. Il n'y a
pas souvent de législation présentée qui nous permette
tellement d'en parler ou il n'y a pas d'occasion. Alors, on profitait de cette
occasion ou du discours inaugural. Il y a en eu deux discours inauguraux au
cours de 1986, 1987 et 1988. Le débat sur le discours sur le budget est
coupé de moitié maintenant. Le débat est coupé de
moitié, pour revenir ici en commission. Maintenant, peut-être que
le député de Bertrand a ses propres idées a cet
égard. Je m'interroge, mais je n'arrive pas à des
conclusions.
M. Parent (Bertrand): M. le Président, si vous permettez,
j'aimerais reprendre la parole. Le ministre m'a interrompu pour faire valoir
son point de vue, mais ce dont je me plains justement, c'est qu'on n'ait pas
assez de temps de parole de ce côté-ci.
Le Président (M. Lemieux): J'aimerais vous faire
remarquer, M. le député de Bertrand, que j'applique d'une
manière très élargie le règlement. Si
j'étais restrictif, je me devrais d'appliquer l'article 209,
relativement au temps de parole, ce qui vous accorderait 100 minutes et 600 du
côté ministériel. C'est aussi aberrant que cela. Je
n'applique pas l'article 209 de façon restrictive et j'y vais par la
règle de l'alternance. Je pense que vous êtes...
M. Parent (Bertrand): Oui, oui. J'ai compris tout cela.
D'ailleurs, je vous ai entretenu hier à ce sujet, M. le
Président.
Le Président (M. Lemieux): Et vous...
M. Parent (Bertrand): Je ne veux pas faire un débat sur
la...
Le Président (M. Lemieux): Non, non, je
voudrais...
M. Parent (Bertrand): ...procédure.
Le Président (M. Lemieux): Non, mais je sens, à
titre de président, le besoin de vous faire part que j'applique la
procédure qui a été déterminée par une
décision de la commission de l'Assemblée nationale, le 23 mai
1984, relativement aux articles 179 et 180 de nos règles de
procédure. Je comprends vos observations, mais je dois aussi m'en tenir
aux règles de procédure qui ont été
établies. Je retiens la suggestion du ministre des Finances, ainsi que
la vôtre, et on pourra peut-être en faire part, lors d'une
prochaine réunion de la commission de l'Assemblée, aux gens
concernés.
M. Parent (Bertrand): Alors, si vous le permettez, je vais
m'exprimer en une minute à ce sujet et je continuerai avec mes autres
points. Ce n'est pas que je ne veuille pas qu'on vienne en commission.
Là n'est pas la question. Je pense que c'est une bonne chose que l'on
vienne en commission. Le ministre disait tantôt que cela donne la chance
à certains collègues de s'exprimer. De notre côté,
on n'a pas ce problème. Tout le monde peut s'exprimer, en termes de
nombre. Non, mais c'est vrai. Je regarde les choses. En ce qui concerne la
critique, c'est beau de parler pendant deux heures de temps et
éventuellement de parier encore une autre demi-heure demain, mais le
dialogue qui doit s'établir doit nous permettre de connaître les
deux revers de la médaille et d'échanger des propos. Ce que je
trouve valable en commission, c'est qu'on peut échanger des propos. Sauf
que ce que je veux expliquer aujourd'hui, c'est que de la façon dont les
règles du jeu sont établies, après que j'ai parlé,
vous avez la chance d'intervenir, ce qui est normal, mais, qu'intervienne un
autre député et que par la suite, vous puissiez intervenir, on se
comprend, cela fait du six pour un, en termes de temps. Même si vous ne
l'avez pas appliqué à la lettre, je ne suis pas... Je ne vous
fais aucun blâme, M. le Président. Je vous dis que nous essayons
de ce côté-ci d'avoir le maximum d'informations et que les
députés du côté ministériel, c'est bien
sûr, ne sont pas là pour vous poser des questions. Ils sont
là pour continuer à flatter dans le même sens le ministre
des Finances. Je n'ai pas entendu beaucoup de critiques de la part des
députés ministériels.
Une voix: Comment voulez-vous, avec un excellent budget comme
celui-là? (11 h 15)
M. Parent (Bertrand): Voyez-vous, M. le Président, comment
voulez-vous? Je ne suis même pas capable d'avoir la parole. Je trouve
cela dommage et je tenais à le souligner.
Le Président (M. Lemieux): J'en prends bonne note, M. le
député de Bertrand. Vous avez la parole.
M. Parent (Bertrand): Quant aux propos...
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Saint-Louis, vous voulez avoir !a parole? Je m'excuse.
M. Parent (Bertrand): D'accord. Cela n'ajoutait pas... Quant aux
propos qui ont été tenus à la suite de... Je pense que mon
collègue, le député de Shefford, a fait une excellente
démonstration. J'ai compris que le ministre, avec son collègue de
l'Habitation, est prêt à réviser certaines choses.
Voilà un bon point de marqué qui pourra donner des
résultats concrets.
J'aimerais rappeler à mon ami et collègue, le
député de Mille-Iles, qu'hier soir et ce matin, il s'est permis
de donner beaucoup de leçons. Hier soir, il donnait des leçons au
professeur Parizeau en lui disant qu'il n'a rien à apprendre de lui, en
lui disant un tas de choses semblables; ce matin, il a dit au maire de
Montréal de se mêler de ses affaires.
Une voix:...
M. Parent (Bertrand): Si vous permettez.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Mille-Îles, M. le député de Bertrand a la parole.
M. Parent (Bertrand): Est-ce que je peux m'exprimer
tranquillement?
Le Président (M. Lemieux): Oui, M. le député
de Bertrand.
M. Parent (Bertrand): Je sais que cela ne plaît pas mais...
Le député de Mille-Îles dit des choses de ce
côté-ci que j'écoute attentivement. Là, c'est
à mon tour à rétorquer. Je me permets de dire au
député de Mille-Îles qu'il n'a pas de leçon à
donner à M. Parizeau ni au maire de Montréal ni à qui que
ce soit. Pas plus que moi j'en ai à donner à qui que ce soit mais
je me permets de souligner cela. Je trouve cela un peu fort.
En ce qui regarde le ministre des Finances, dans un premier temps, il
nous dit: Nous autres, au Parti libéral, on est tout à fait
ouverts, on n'est pas dogmatiques. On est à la recherche de la
vérité. Voilà qu'il nous fait depuis hier de longues
démonstrations pour nous dire que l'ancien gouvernement était,
depuis dix ans, un gouvernement pourri. Ce gouvernement-là est un bon
gouvernement.
M. Levesque: Je n'ai pas employé ce mot-là.
M. Parent (Bertrand): Vous n'avez pas employé ce
mot-là mais...
M. Levesque: Vous avez interprété cela
parce que vous savez ce que c'était. Moi, je ne le sais pas.
M. Parent (Bertrand): Si vous permettez, M. le ministre, vous et
vos collègues, vous vous dépêchez de démontrer que
tout ce qui a été fait depuis dix ans n'était pas bon.
Mais là, tout d'un coup, c'est bon. C'est cela, essentiellement, la
démonstration que vous faites. Ne tombez pas justement dans ce que vous
reprochez aux autres de ne pas faire.
M. Levesque: II y a des objectifs louables.
Recherche et développement
M. Parent (Bertrand): II y a eu beaucoup de choses qui ont
été faites au cours des dix dernières années. Je
pense qu'elles auraient avantage à être copiées. Il y a eu
des erreurs dans le passé comme il y en a actuellement. Tout est
question de priorité, pour autant que chacun des gouvernements est
concerné.
On a laissé le dossier de l'habitation qui vogue bien. J'aimerais
revenir sur le dossier recherche et développement. Je suis, là
aussi, très préoccupé. J'aimerais que le ministre des
Finances puisse, dans ce domaine aussi, être capable non pas de me donner
raison mais de réviser incessamment ce qu'il a fait dans le budget. Je
ne pense pas que le ministre des Finances...
Hier, il m'a fait la démonstration qu'il avait suivi en bonne
partie les recommandations du Conseil de la science et de la technologie. Je ne
pense pas que le ministre des Finances ait vraiment saisi toute l'ampleur du
déficit en matière de recherche et de développement qui se
produit au Québec. J'aimerais attirer l'attention du ministre des
Finances sur quelques conclusions et quelques faits très précis
concernant la recherche et le développement et les juxtaposer par
rapport aux mesures qui ont été prises dans le budget,
supposément de l'ordre de 1 800 000 000 $.
D'ailleurs, les faits sont maintenant très clairs. On sait que ce
n'est pas 1 800 000 000 $ qui seront investis au cours des cinq prochaines
années et qui sont des nouveaux programmes. On sait que c'est l'ensemble
de ce qui existe déjà, plus quelques petites mesures. On retrouve
cela au tableau A-93, c'est-à-dire l'annexe A, page 93, où on
s'aperçoit qu'une fois ie tout décortiqué, des 1 800 000
000 $, il reste 516 000 000 $, sur les cinq prochaines années. De ces
516 000 000 $, il y a toutes les choses annoncées depuis deux ans qui
sont incluses dans ce qu'on appelle "nouvelles initiatives", comme le mentionne
le tableau.
Si on va un petit peu plus loin, à la page 95, on
s'aperçoit que l'impact financier des mesures en matière de
recherche et de développement, pour l'année en cours, est de 1
000 000 S pour le gouvernement et de 13 000 000 $ pour l'année
prochaine. Alors, on est de loin...
Quand le ministre des Finances se permet de dire à l'Opposition
et au député de Bertrand: Donnez-nous toute la
vérité, pas une demi-vérité, je me permets de dire
au ministre que c'est également important de donner tout le vrai visage.
Quand le Conseil de la science et de la technologie - pas n'importe qui, pas
juste l'Opposition de son côté - dit de façon très
explicite, dans son rapport, que la situation au Québec est urgent et
qu'il faut apporter des correctifs, et quand il dit que le conseil est d'avis
que les avantages fiscaux liés à la recherche et au
développement sont nécessaires et doivent être maintenus,
d'accord, le ministre a suivi cela. Cependant, d'autres mesures d'ordre
budgétaire doivent être mises de l'avant dans les plus brefs
délais, afin d'accroître de façon plus significative
l'effort d'investissements dans la recherche et le développement au
Québec. Cette partie n'est pas là; c'est toute cette partie qui
est le nerf de la guerre, si on veut, concernant la recherche et le
développement.
Le ministre nous dit de façon très explicite, dans son
budget: II y a d'excellents programmes. Il y a des sommes d'argent qui sont
prévues là et on les continue. Hier, le ministre a affirmé
des choses avec lesquelles je ne peux pas être d'accord. Il a dit: On est
le gouvernement qui en a fait le plus en matière de recherche et de
développement. M. le ministre, prenez votre tableau à la page 93
et tout ce qui est dans la ligne du haut, la majorité des programmes et
des choses qui sont prévus en matière de recherche et de
développement, pour 1 300 000 000 $, étaient là avant
1986, vérification faite. Alors pour 1 300 000 000 $, vous n'annoncez
absolument rien de nouveau et je ne trouve pas cela correct; je trouve que
c'est une demi-vérité.
Quant aux choses que vous avez mises de l'avant, le Conseil de la
science et de la technologie nous dit de façon très explicite,
aux pages 44 et 45 - je vais les citer au texte, parce qu'il a fait l'analyse
de ce qui se passait depuis quelques années: "Mais ce qui est
plutôt inquiétant, c'est le fait que l'importance relative des
dépenses de la recherche et du développement dans les industries
hautement technologiques au Québec diminue dans l'ensemble canadien
depuis 1981.
On nous explique, en somme, qu'il ressort de l'analyse de ces quelques
indicateurs que le secteur industriel hautement technologique au Québec
diminue en importance dans ce contexte canadien. Par ailleurs, bien que les
indicateurs globaux des dépenses de R et D, de recherche et de
développement, font apparaître, entre 1983 et 1985, une
légère amélioration - on se souvient de la période
1983-1985 - de l'écart qui séparait le Québec et
l'Ontario, tout porte à croire que la situation se
détériorera en 1986 et en 1987. On dit un peu plus loin que,
d'une part, la comparaison des mesures mises en place au Québec
et en Ontario au cours des deux dernières années - on
parle de 1986 et 1987 - afin d'accroître les investissements dans la
recherche et le développement fait apparaître un effort massif
d'investissements du gouvernement de l'Ontario. Il en a mis pour 1 000 000 000
$ sur (Jix ans, ce qui est loin du cas du Québec dont on mentionne,
à la page suivante, que l'effort est d'environ 10 000 000 $ par
année comparativement à 100 000 000 $ pour celui de
l'Ontario.
Au Québec, dit le Conseil de la science et de la technologie,
outre l'amélioration des avantages fiscaux visant à stimuler la
recherche et le développement, le gouvernement québécois
n'a pas, dans les deux dernières années, instauré de
nouveaux programmes. Les nouvelles injections budgétaires
annoncées par le gouvernement du Québec au cours des deux
dernières années sont de beaucoup moins importantes. Là,
on nous donne quelques exemples de chiffres.
Ce sur quoi je veux attirer l'attention du ministre, c'est à quel
point c'est important pour l'avenir de nos entreprises et
particulièrement dans le cadre du libre-échange et l'importance
que le ministre des Finances, s'il veut bien être capable de
réviser cette situation-là, l'importance des sommes d'argent
qu'on doit mettre en matière de recherche et de développement en
injections directes et en stimulation, afin qu'on puisse obtenir des
résultats concrets, parce que c'est vraiment... à moins que le
ministre ne puisse me démontrer le contraire. Dans ce qu'il a
annoncé dans le discours sur le budget, il n'y a rien à part les
deux petites mesures que je reconnais... Pour reprendre l'explication du
ministre, il faut donner tous les crédits et tous les points, mais il y
en a pour quelques millions. D'ailleurs, l'impact qui est mentionné
à la page 95 pour le gouvernement est tellement minime; on parle de 1
000 000 $ cette année et 13 000 000 $ l'année prochaine.
Ce que j'en déduis, c'est que le ministre des Finances et le
gouvernement n'ont pas mis l'accent là où ils auraient dû
le mettre. J'aimerais entendre le ministre des Finances à savoir s'il
est prêt à réviser cette situation, non pas à
l'occasion du prochain discours sur le budget mais d'essayer de voir avec son
collègue, le ministre du Commerce extérieur et du
Développement technologique, ou son remplaçant, puisque le titre
et le ministère comme tels vont disparaître et que le
Développement technologique va se retrouver en partie à
l'Enseignement supérieur et en partie à l'Industrie et
Commerce... Il reste un fait, c'est que c'est capital.
On voit ce qui se passe actuellement avec les contrats
fédéraux. On voit ce qui se passe dans la concurrence dans le
monde. Ceux qui ont réussi à se placer au carrefour de
l'innovation en recherche et développement ont été
capables de faire face à n'importe quelle concurrence. Sur le plan
pan-canadien, je trouve que le Québec est en arrière sur
l'Ontario. S'il y a deux provinces qui sont industrialisées, ce sont
bien ces deux-là.
Au moins, on devrait être près, mais je comprends qu'il y a
un recul, un retard qui a été pris. Mais un effort énorme
a été fait depuis 1980-1981. Il fallait donc, au cours des
années et dès qu'on avait une marge de manoeuvre, ce qui est les
cas actuellement, être capables de dégager des sommes importantes
pour créer un fonds.
La suggestion - j'essaie d'être créatif pour trouver une
formule - qui pourrait peut-être être utilisée par le
ministre, est à savoir pourquoi on n'aurait pas augmenté le
pourcentage du fonds de santé des entreprises, par exemple, de 3,2 %
à 3,5 % ou à 3,6 %. Cela aurait été une part de
l'employeur et une autre partie aurait pu être accordée par le
gouvernement, soit 1 $ du gouvernement pour 1 $ qui serait payé par
l'employeur et créer ainsi un fonds spécial de quelques centaines
de millions de dollars, ce qui ferait qu'on serait capable de faire un certain
rattrapage eu égard au Québec par rapport à l'Ontario.
M. le ministre des Finances, ce n'est pas seulement une critique pour
dire que tout ce que vous avez fait n'est pas bon. Ce que je dis, c'est que ce
que vous avez avancé, et preuve à l'appui dans cette
matière, ne correspond à absolument rien. C'est un écran
de fumée. Je pense que le ministre du Commerce extérieur et du
Développement technologique est également d'accord avec cela.
Hier, vous m'avez dit: On ne peut pas satisfaire les besoins de tout le
monde. Je réitère ce matin, je reviens à la charge sur
cette question de recherche et développement parce que j'ai vécu
dans ce milieu et que je continue à être en contact avec les
milieux d'affaires. Je sais à quel point se situe le succès du
Québec en matière économique pour les années
quatre-vingt-dix et deux mille. Il est directement relié aux efforts que
nous semons aujourd'hui en matière de recherche et du
développement. Je serais le premier à applaudir si le
gouvernement du Québec était capable de créer un fonds
spécial en matière de recherche et développement par une
formule quelconque. J'en ai déjà suggéré une qu'on
a examinée d'un peu plus près et il y en a certainement
d'autres.
Si on créait ce fonds et si on rendait davantage incitatrice
toute cette prise de conscience de nos PME québécoises de
l'importance de faire de la recherche et développement - il faut ajouter
des sommes importantes aux mesures que vous avez actuellement, comme le
recommande le Conseil de la science et de la technologie - je pense qu'on
aurait fait un pas en avant en fonction de ce que vous avez mentionné
hier, avec vos collègues. Je suis d'accord là-dessus. Il faut
planifier. Il faut se préparer aux lendemains plus difficiles. C'est
aujourd'hui, en 1988, qu'on est en position et qu'on a la marge de manoeuvre
pour prendre une partie de ces sommes et les injecter en recherche et
développement.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le
député de Bertrand. M. le ministre des Finances.
M. Levesque: Je suis d'accord avec le député de
Bertrand lorsqu'il souligne l'importance de la recherche et du
développement comme facteur de développement économique
essentiel. Je ne peux que souscrire à sa préoccupation que je
partage et que mon collègue, le ministre du Commerce extérieur et
du Développement technologique, partage également. D'ailleurs,
lorsque le député de Bertrand nous parle de l'effort que nous
devons faire, j'en suis. Mais l'effort que nous devons faire se situe à
divers niveaux et ne se retrouve pas nécessairement et
entièrement dans un discours sur le budget. Il faut bien comprendre
qu'il y a d'autres moyens qui peuvent être utilisés pour appuyer
cet objectif de stimuler la recherche et le développement. Cependant,
les mesures budgétaires sont importantes, assez importantes pour
être même déterminantes. (11 h 30)
Le député nous dit: L'Ontario, vous savez, consacre 1 000
000 000 $ sur 10 ans pour la recherche et le développement et nous
annonçons 500 000 000 $ sur cinq ans. Je parle des nouvelles mesures, je
ne parle pas des anciennes. Cela peut se comparer, à mon sens, si on
veut simplement faire ce genre de comparaison.
Je reviens aux recommandations du Conseil de la science et de la
technologie. Or, je pense que c'était hier, j'avais l'occasion de
reprendre point par point les suggestions que le conseil nous faisait. Je pense
que j'ai fait la preuve que, parmi les diverses mesures qui pouvaient
être intégrées au budget, il y en a qui sont de la nature
de celles que l'on retrouve dans les crédits budgétaires. Sur le
plan fiscal, je pense que nous avons répondu adéquatement aux
suggestions et aux recommandations du Conseil de la science et de la
technologie. À un point tel que nous avons même été
plus loin, lorsque l'on considère ce que nous avons ajouté dans
le domaine des consortiums pour la recherche précompétitive.
Je pense que le Conseil de la science et de la technologie, s'il avait
à faire une évaluation du budget, se dirait satisfait des mesures
budgétaires qui ont été des mesures fiscales. D'ailleurs,
cela a été très bien reçu dans les milieux que le
député de Bertrand prétend fréquenter. J'avais, par
exemple, ici, une réaction assez significative de M. John Reid,
directeur - je retrouve cela dans la Gazette du 14 mai 1988: "The moves were
greeted as very "outward-looking" by John Reid, senior adviser and director of
the 300-member Canadian Advanced Technology Association... " Je continue
simplement parce que je n'ai pas l'intention de lire tout l'article qui est
très positif vis-à-vis les mesures contenues dans le budget
relativement à la recherche et au développement. Il dit ceci:
'The variety of our R & D measures introduced in recent years makes
Québec rather competitive with its rivais in the technology sector...
and will likely help attract high-tech businesses which otherwise would have
chosen to set up shop in such areas as Southern Ontario or North Carolina.
"
Pour des gens qui sont au courant autant que ces gens-là, ils
disent que nos politiques sont telles que des industries reliées
à la recherche et au développement préféreraient
maintenant le Québec à d'autres régions aussi reconnues
que le sud de l'Ontario et la Caroline du Nord. Je vous assure que ce sont
là des remarques fort encourageantes pour les mesures que nous prenons.
Mais si c'était seulement cela, on pourrait dire: C'est merveilleux,
mais ce n'est pas encore suffisant. Ce n'est pas seulement cela. Comme je l'ai
mentionné - je crois que je l'ai dit hier à un moment
donné on se demande si on se répète ou non - à
l'égard des mesures complémentaires ou mesures fiscales, le
ministre du Commerce extérieur et du Développement technologique
doit rendre public bientôt un document pour consultation sur les mesures
supplémentaires que le gouvernement se propose d'adopter pour stimuler
le développement technologique au Québec. Ce document s'inscrira
à l'intérieur d'un processus de consultation qui se termine par
la tenue, en octobre prochain, d'une conférence des principaux
intervenants en matière de développement technologique au
Québec. Or, je dis au député de Bertrand: bravo pour son
intérêt dans le domaine de la recherche et du
développement. Lorsqu'il se préoccupe de ces mesures qui touchent
ce secteur important, il ne fait que renchérir sur nos propres
préoccupations. Je pense que nous allons dans la même
direction.
Ce que je citais tout à l'heure indiquait que ce n'est pas
commencé aujourd'hui. Il y a des mesures qui ont été
prises antérieurement mais qui ont été substantiellement
augmentées dans le deux derniers budgets 1987-1988 et 1988-1989; c'est
cela que nous disons. Cette augmentation est très substantielle pour
autant qu'un budget et pour autant que la fiscalité nous permette
d'être Imaginatifs et d'appuyer concrètement les efforts des
industries dans ce domaine. Il ne faut pas oublier non plus qu'il y a d'autres
façons aussi que nous allons retrouver dans le budget qui n'apparaissent
pas dans ces chiffres mais qui sont de nature à aider à la
recherche et au développement. Prenons, par exemple, la mesure sur
l'amortissement accéléré à 100 %, que nous
retrouvons présentement et qui n'aurait pas été là
si nous étions harmonisés au gouvernement fédéral.
Nous avons pris des mesures spécifiques au Québec pour encourager
les investissements au Québec et des investissements souvent qui sont de
la nature de ceux dont on parle, c'est-à-dire dans la recherche et le
développement. Là, nous avons justement des mesures pour
favoriser le transfert technologique. Il y a des mesures qui touchent, par
exemple, et nous l'avons inclus, à l'informatique et toute l'industrie
des ordina-
teurs. Alors, il y a là dans ces mesures spécifiques au
Québec un encouragement additionnel et ce n'est pas simplement
théorique.
Pour cette année, ces amortissements
accélérés, cette mesure va nous coûter 40 000 000 $
et, dès l'an prochain, 84 000 000 $ au minimum, comme dirait le
député de Saint-Louis. Alors, ce ne sont pas des mesures
symboliques, ce sont des mesures qui coûtent à l'État des
sommes fort importantes et qui sont là également dans le sens des
préoccupations qui honorent le député de Bertrand. Merci,
M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le ministre des
Finances. M. le député de Lafon-taine.
Programme d'accès à la
propriété (suite)
M. Gobé: M. le Président, tout d'abord, avant de
donner un peu mon point de vue, pour le bénéfice de mon
collègue, le député de Bertrand qui, tout à
l'heure, a semblé reprocher à notre ami et collègue le
député de Mille-Îles, de donner des leçons au maire
de Montréal, j'aimerais faire une mise au point. Je ne pense pas qu'il
soit de notre intention de donner des leçons au maire de Montréal
mais il serait peut-être bon de rappeler quelques faits lorsqu'il dit que
le programme d'accessibilité à la propriété est
anti-montréalais. La question qu'il aurait dû se poser, c'est:
Où peut-on encore construire des maisons à Montréal? Que
ce soit 75 000 $ ou 100 000 $, je peux vous assurer qu'il n'y a pas à
Montréal maintenant beaucoup de terrains qui restent pour construire des
maisons individuelles pour que les gens puissent accéder à la
propriété. Il y a peut-être des endroits où on peut
faire des condominiums et là, à 75 000 $, cela peut rentrer
dedans. Je ne vois pas de quelle manière il pourrait prétendre
qu'on est antimontréalais en mettant des programmes qui permettent
d'acheter une maison de 75 000 $.
Autre chose: je pense que si on parlait d'être
anti-montréalais, on pourrait dire que ce sont peut-être les
hausses de taxes de la ville qui pourraient faire fuir les gens en dehors de
Montréal. On pourrait faire un grand débat là-dessus. En
terminant sur ce point, vous savez, si on a une maison de 100 000 $, on paie
des taxes pour 100 000 $. À Montréal, elles sont très
chères. Je ne vois pas comment une famille à faible revenu
pourrait, même avec une aide du gouvernement pour accéder à
la propriété, payer ces taxes de presque 3000 $ par année
que l'achat d'une maison comme cela lui occasionnerait. Alors, on comprendra
que les gens pourraient être plus tentés d'aller en
périphérie, en banlieue, où les taxes sont moins
élevées, où les terrains sont moins chers et où le
coût de la propriété va donc être plus à leur
capacité et à leurs besoins. Maintenant, on pourrait dire: Cela
prendrait du transport en commun. Ce serait une autre histoire. Je pense que le
maire ne veut pas que le métro traverse à Laval et il ne veut pas
qu'on fasse de pont non plus. Alors, je comprends que ces gens auront de la
difficulté à venir travailler à Montréal.
Ceci étant dit, M. le Président, j'aimerais revenir sur
les 3000 $ que le ministre annonce dans son budget pour la venue du
troisième enfant. Il y a beaucoup de choses qui se sont dites. On dit:
On ne fera pas un troisième enfant pour 3000 $. C'est évident que
personne ou peu de gens, je présume, vont se mettre à faire ce
genre de calcul. Je crois que ce serait peut-être aller à
rencontre de l'esprit de la réforme du ministre. Notre population, notre
société, est plus mature que cela. Il faut quand même
considérer que ce programme a été fait ailleurs. Ce n'est
pas seulement dans les officines du ministre des Finances qu'on a
décidé cela. On voit qu'en France, il y a cinq ou six ans, il y a
eu un programme comme celui-là et il y a eu un boom des naissances. Il
est évident que cela n'a pas continué. L'effet immédiat de
ce programme, de cette mesure, est d'un an ou dix-huit mois. Après cela,
on assiste à une restabilisation des naissances.
M. Chagnon: C'est comme les bulles dans le Champagne, cela ne
dure pas.
M. Gobé: Cela ne dure pas, il faut le brasser souvent.
Ceci pour dire que c'est un premier pas. On s'est rendu compte
dernièrement, et notre gouvernement s'en est rendu compte, qu'on avait
une situation de dénatalité très forte. Jamais on n'avait
parlé de cela avant. On en a parlé l'an dernier. On a
commencé au congrès du Parti libéral à Laval
à découvrir comme cela qu'on avait un problème de
dénatalité, que dans quelques années, dans quelques
décennies, au Québec, on se retrouverait, les
Québécois, si ce n'est minoritaires, du moins très peu
nombreux si on ne faisait pas appel à l'immigration.
M. Chagnon: Cette fois-là, on avait la journée pour
corriger la situation.
M. Gobé: C'est cela, mon cher collègue.
Malheureusement, cela n'a pas donné grand résultat dans votre
cas. Mais...
M. Parent (Bertrand): M. le Président, cela manque de
sérieux.
Le Président (M. Lemieux): C'est très
sérieux, au contraire.
M. Parent (Bertrand): Si vous vous comprenez, moi je ne vous
comprends pas.
M. Gobé: On se rend compte maintenant que notre
gouvernement, qui prend ses responsabilités dans ce dossier,
dérange peut-être un peu
l'Opposition, qui a manqué le bateau lorsqu'ils étaient au
gouvernement. Je pense que ce n'est pas depuis deux ans ou dix-huit mois qu'on
a découvert que le taux de natalité au Québec
n'était pas assez fort ou qu'on avait des problèmes dans cette
direction. Je trouve cela dommage qu'aujourd'hui une mesure de notre
gouvernement, qui n'est pas forcément parfaite, on le conçoit -
mais je ne crois pas qu'il y ait de solution miracle dans ce domaine - soit
décriée, qu'on veuille en remettre... Je crois qu'on devrait
plutôt regarder le côté positif. Il y a du court terme, du
moyen terme et du long terme. Actuellement, on essaie surtout de pallier au
court terme. Je crois que dans les budgets subséquents et par d'autres
mesures ou des mesures supplémentaires, le ministre et notre
gouvernement arriveront avec des mesures subséquentes
supplémentaires.
Maintenant, je me demande moi aussi quelles pourraient être ces
mesures. Je me demande s'il n'y aurait pas, du côté des garderies,
de l'aide pour les trois ou quatre premières années, en termes
peut-être de dégrèvement de taxes municipales ou en termes
d'aide au transport ou des choses directes pour accommoder les familles, ou
d'aide à l'habillement. On voit qu'il y a certains pays comme la France
qui, pour des familles à bas revenu, ont un service d'habillement pour
les enfants. Vous voyez les mères de famille ou les parents qui se
rendent une fois par année avec un bon d'habillement, pas des
habillements usagés de la Saint-Jean-Baptiste, des habits neufs dans les
magasins qui appartiennent à l'Assistance publique ou au services
publics français. Ils reçoivent un trousseau, avec des souliers
et des vêtements pour habiller leurs enfants. (11 h 45)
Je crois qu'il y a là des mesures qu'on pourrait mettre de
l'avant. Je ne vois pas comment on pourrait décrier cette mesure.
D'ailleurs je pense que dans la population, et je l'ai vu dans mon
comté, les gens l'ont trouvée très positive, les gens ont
été très satisfaits. Je pourrais dire que dans ma propre
rue, il y a trois de mes électeurs qui vont profiter de ce programme.
C'est peut-être la promesse électorale que j'avais faite de faire
quelque chose pour eux. Donc, j'ai pu dire: On a au moins fait cela. Soyez
assurés qu'on va faire autre chose un peu plus tard.
Il y a d'autres choses intéressantes qu'on peut voir dans ce
budget, il y a quelque chose qui va dans le sens de la famille: l'abolition de
la récupération des allocations familiales. Cela, on n'en a pas
beaucoup parlé, mais je peux vous dire que cela a peut-être
été une des principales critiques que les gens m'ont faite
après mon élection. Les gens me traitaient d'hypocrite. Ils
disaient: Comment, vous arrivez, vous nous payez des allocations familiales et
vous les ramassez par en arrière. J'ai eu beau dire que c'était
l'ancien gouvernement qui l'avait fait, les gens ne me croyaient pas.
Maintenant qu'on l'a enlevée, là ils nous croient. Ils se rendent
compte que cela a été fait sous l'ancien gouvernement. On leur
dit: Voyez-vous, ce n'était pas nous; on l'enlève; on a compris
que c'était antifamilial, antinataliste. L'ancien gouvernement n'avait
pas vu qu'on avait un problème de natalité au Québec. Il
pensait que les allocations familiales étaient faites pour acheter je ne
sais trop quoi, du luxe ou des choses dont on n'avait pas besoin. Alors, il
avait dit: On va le reprendre, mais vu qu'on a peur de le dire à cause
des élections qui s'en viennent...
M. Duhaime était une espèce d'illusionniste, il avait dit:
On les récupère par en arrière, personne ne le sait et,
comme cela, cela nous permet de maintenir une espèce d'image devant les
gens qu'on est des gens qui s'occupent de la famille. Mais, le résultat
a été que quand on faisait notre rapport d'impôt, on avait
ce qu'on appelle un cadeau de M. Duhaime, pas un cadeau de Grec mais un cadeau
de Duhaime. C'est, je crois, un des points majeurs, c'est un des points
importants. On a rétabli, pour l'ensemble des gens, la
crédibilité de notre gouvernement. Vous savez, on ne peut pas
éternellement faire croire aux gens qu'on les aide ou qu'on les incite
à avoir des familles et rire d'eux comme cela en augmentant leurs
impôts et en allant chercher ce qu'on leur donne.
Je crois, M. le Président, que le budget de notre gouvernement
n'est pas forcément un budget familial, mais c'est un budget nataliste
à court terme. On est là pour quelques années encore, si
j'en crois ce que la population nous dit et les réactions qu'on a eues a
ce budget. Alors, on aura certainement le temps - et je suis certain que notre
commission va y travailler et le ministre aussi - de préparer des
mesures et des programmes qui vont faire que les enfants qui seront
supplémentaires - on a parlé de 40 000, grâce à ce
programme - et les autres qui vont venir pourront continuer à être
épaulés pour l'avenir. Je suis certain que cela va permettre de
relever le taux de natalité du Québec.
Il y a aussi un petit côté qu'on n'a peut-être pas vu
là-dedans. Vous savez, on a maintenant beaucoup d'ethnies au
Québec, beaucoup de Néo-Québécois, qui viennent des
pays du tiers-monde ou d'Amérique centrale et qui ont un taux de
fécondité ou de naissance beaucoup plus élevé que
les Québécois. Vous savez que ces gens-là ont, dans leur
pays - je termine, M. le Président - un taux de natalité qui est
bien souvent de 4 ou 5. Lorsqu'ils arrivent au Québec, ils conservent
généralement le même comportement, peut-être un de
moins, mais ils ont un comportement de natalité qui est différent
de celui que nous avons au Québec. Je suis certain que ces montants
d'argent ne vont pas leur permettre forcément d'avoir plus d'enfants,
mais de s'intégrer plus facilement à notre communauté et
de s'intégrer plus facilement à la société
québécoise parce que, en recevant de l'aide
supplémentaire pour leurs enfants, cela va leur permettre de
vivre décemment et non de se retrouver dans le cercle de la
pauvreté que les immigrants ou les ethnies qui arrivent au Québec
connaissent généralement lorsqu'ils ont des familles nombreuses.
Alors, je crois que c'est peut-être...
Le Président (M. Lemieux): En conclusion, M. le
député de Lafontaine.
M. Gobé: En conclusion, M. le Président,
rapidement, je crois que cette mesure des 3000 $ et cette mesure d'accession
à la propriété sont un excellent début. Cela n'a
pas été improvisé. On voit que cela a été
fait ailleurs. Cela a été testé en Europe. Cela a
réussi et je suis certain que le ministre, dans ses budgets
subséquents, arrivera avec des mesures qui nous permettront de
continuer. C'est le premier étage de la fusée qu'on a
lancée. Il reste trois autres étages à décrocher
pour être sur orbite. Je suis certain que le ministre sait sur quelle
planète il va nous emmener dans ce domaine.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le
député de Lafontaine. Excellent. M. le député de
Bertrand.
Recherche et développement (suite)
M. Parent (Bertrand): Oui, merci M. le Président. Deux ou
trois points pour terminer sur le volet recherche et développement.
J'aimerais, par la suite, brosser le tableau concernant l'ensemble des outils
pour le développement économique qui apparaissent ou qui
n'apparaissent pas dans le budget.
En ce qui concerne recherche et développement, je pense que le
ministre a bien saisi le but poursuivi. J'ai compris que le ministre partageait
mes objectifs. Là où on s'entend moins, c'est que je ne vois pas
dans le discours sur le budget, dans ses annexes, les mesures concrètes,
qui vont avec la volonté du gouvernement. De l'analyse que je fais de
ces i 800 000 000 $ qui ont été annoncés, je retire qu'il
y a très peu de chose de ce côté-là. Si le ministre
est convaincu qu'il faut donner toute l'importance nécessaire pour aider
les entreprises et aussi favoriser les individus sous forme d'investissements,
il faut que le gouvernement du Québec injecte des sommes directement ou
offre des programmes directs pour la recherche et le développement,
probablement par la même formule de création qui a
été faite en Ontario, en 1986, avec la création d'un fonds
qui a mis sur pied pour 1 000 000 000 $ pour les dix prochaines années.
C'est dans cette avenue que devrait s'engager le gouvernement du Québec
afin de mettre toutes les énergies, tous les efforts pour créer
l'impact qu'il doit créer.
Le ministre du Commerce extérieur et du Développement
technologique a annoncé, lors d'une conférence à Transtech
en novembre dernier, et il l'a répété en Chambre à
plusieurs reprises: L'objectif du Québec est d'atteindre 2 % de son PIB
pour 1991 - disait-il, de mémoire - en matière de dépenses
en recherche et développement. On sait qu'on est aux alentours de 1,3 %
actuellement. Je ne vois pas comment cela se fera, avec les mesures qui ont
été annoncées cette année, avec ce qu'il y a dans
la machine, même si le ministre nous dit: Écoutez, ce n'est pas
tout, il y a d'autres choses qui peuvent venir à part le discours sur le
budget. Tant mieux, je l'espère. J'espère que mon insistance de
ce côté-là va permettre d'accélérer la
création de programmes et l'injection de crédits. Ce n'est pas
tout d'en parler, il faut aussi avoir les crédits correspondants. Si on
veut atteindre un minimum de 2 % du PIB, il faut absolument, et ce, dès
cette année, ajouter des mesures incitatives additionnelles directes
à celles qui existe actuellement.
Si je regarde tout ce contexte de recherche et développement pour
nos entreprises, tout ce qui s'appelle les outils pour faire face à la
compétition, je pense que dans le cadre du libre-échange il
aurait dû y avoir, M. le ministre des Finances, un ensemble de mesures et
de crédits concernant les outils dont auront besoin les PME
québécoises pour faire face au libre-échange. Je pense que
l'occasion était belle, dans le discours sur le budget, d'annoncer une
série de mesures.
On sait et on vit ces jours-ci tout le débat qui prévaut,
tant au Parlement canadien, aujourd'hui même, qu'au Sénat
américain concernant toute cette ampleur que prend le
libre-échange. On sait que c'est dans sept mois, pratiquement jour pour
jour, que va entrer en vigueur le traité de libre-échange
signé le 2 janvier dernier. Donc, une série de mesures vont
entrer en vigueur le 1 er janvier 1989.
Ce que j'ai déploré et ce que je déplore encore
aujourd'hui, c'est qu'on attend, d'une part, après le gouvernement
fédéral et d'autre part, à l'intérieur des
ministères, que ce soit Industrie et Commerce, que ce soit Commerce
extérieur, le signal qui aurait normalement été
donné par le ministre des Finances, étant donné que c'est
lui qui détient un peu les cordons de la bourse avec le président
du Conseil du trésor. Le signal aurait dû venir dans le discours
sur le budget puisque ce sont les prévisions et l'orientation que prend
le gouvernement pour les douze prochains mois. Or, rien de concret n'est
annoncé dans les mesures à prendre pour faire face au
libre-échange, tant en matière de main-d'oeuvre, de programmes de
recyclage, d'aide aux PME québécoises pour faire face à
cette nouvelle compétitivité. Je le déplore et
j'espère qu'il y aura d'autres mesures.
Quant aux ensembles d'outils de développement économique,
je tiens à féliciter... Je pense que c'est important que le
Régime d'épargne-actions, les actions accréditives et
l'aide aux entreprises cinématographiques aient été
soit
conservés, soit améliorés. Cependant, je me pose la
question face à cela: Est-ce que l'actuel gouvernement du Québec
sait exactement où il s'en va?
Je prends l'exemple de l'industrie cinématographique. Le 11
novembre 1986, de mémoire, M. le Président, le ministre des
Finances avait réduit la déduction fiscale de 150 % à 100
%. Depuis, il l'a remontée, lors du discours sur le budget à 166
2/3 %. J'ai un peu l'impression qu'on pose un geste dans un sens, puis un autre
dans un autre sens. Si on était à 150 % et qu'on l'a
rabaissé à 100 % est-ce que c'était stratégique de
le remontrer à 166 2/3 %, tout cela sur une période de moins de
24 mois? Je me pose des questions.
Sur les actions accréditives aussi, le 11 novembre 1986, le
ministre des Finances avait éliminé la déduction fiscale
de l'ordre de 66 2/3 % et l'a remontée de 33 1/3 %. Autrement dit, il a
fait un jeu où il est passé de 166 2/3 % à 100 %. Il est
remonté à 133 1/3 %. Dans le budget, on n'a rien qui est
annoncé de ce côté-là. Par contre, le
fédéral a décidé, ces dernières semaines, de
prolonger ces mesures, pour une période d'environ six mois. Mais on sait
que de nouveaux programmes s'en viennent au niveau du fédéral. Le
ministre des Finances m'a donné l'impression... J'ai suivi ce dossier de
très près. On sait que le dossier des actions accréditives
est important en matière de création d'emplois au niveau
régional. Au Québec, cela a eu un effet extraordinaire.
D'un côté, je félicite le ministre de ne pas avoir
réduit. Par contre, je me dis: Est-ce qu'il sait où il s'en va?
J'aimerais qu'il puisse nous le dire ce matin. D'autre part, j'ai l'impression
que le ministre des Finances réagit à ce qui se passe à
Ottawa. Ottawa pose un geste, va dans un sens et nous, on se réajuste,
tandis que, ce qui aurait été préférable, comme le
Québec l'a fait il y a quelques années avec son Régime
d'épargne-actions, aurait été de prendre le leadership. Si
le Québec, en matière des actions accréditives, de
l'industrie cinématographique ou du Régime épargne-actions
gardait l'initiative, je pense qu'on placerait Ottawa dans une position
beaucoup plus fâcheuse, c'est-à-dire qu'il serait obligé de
suivre, sinon c'est lui qui en aurait l'odieux. Être constamment en
réaction et à la remorque du fédéral, c'est
inquiétant.
Une autre mesure qui a été annoncée et qu'on n'a
pas touchée beaucoup - je n'ai pas pu en mesurer toute l'ampleur - est
ceiie où le ministre amène un plafond de 15 % au niveau de
l'ensemble de ce qu'il appelle les investissements stratégiques,
c'est-à-dire l'ensemble des mesures que pourront prendre les individus
pour être capables d'aller chercher certaines déductions. On sait
que le plafond du Régime d'épargne-actions était
passé de 12 000 $ à 5500 $. Le plafond du 5500 $ saute sur les
REA. Mais, d'un autre côté, on garde le 10 % de plafond au niveau
du revenu total des Régimes d'épagne- actions, mais on englobe le
tout dans une enveloppe totale de 15 %. Je n'ai pas de chiffres à
l'appui, mais comme première analyse, et pour en avoir discuté
avec quelques personnes, j'ai l'impression que c'est une mesure qui va
pénaliser les gens qui se prévalaient de cela. En ce sens, je
m'interroge sur le bien-fondé de cette fameuse enveloppe totale de 15 %
pour engloutir tout cela. Je ne suis pas sûr que ce soit une bonne
mesure. J'aimerais certes avoir des informations et des explications
additionnelles. (12 heures)
Si je regarde l'ensemble des mesures et des outils pour le
développement économique, tant face au libre-échange que
face aux mesures qui sont des outils excessivement importants, pour n'en citer
que trois: les actions accréditives, les Régimes
d'épargne-actions et toute l'aide à l'industrie
cinématographique, je me dis: Est-ce que le gouvernement du
Québec inscrit tout cela dans une stratégie globale de
développement économique? Voilà, pendant deux ans et demi,
j'ai été critique, jusqu'à il y a six mois, en
matière d'industrie et de commerce. J'ai réclamé, sans
jamais l'obtenir, une politique globale en matière de
développement économique, c'est-à-dire une
stratégie de développement économique. Tantôt, on
décide de privatiser, ce qui était des mesures très
à la mode dans le dernier discours sur le budget qui ont fait l'objet de
plusieurs rapports. On privatisait, on sortait l'État de ces entreprises
et on les retournait à l'entreprise privée. C'est un discours
qu'on tenait, avec lequel je n'étais pas d'accord pour la plupart de ces
privatisations.
On a demandé d'arrêter, de freiner cela. Tout est
arrêté, on n'entend plus parier de privatisation. C'est pour cela
que je suis inquiet et je me demande si le gouvernement sait où il s'en
va en matière de développement économique, à part
de dire qu'on est sur une vague, que cela va bien, qu'on a créé
certains éléments d'un bon climat. Je pense que cela prend plus
que cela. Cela prend une stratégie globale qui, à court terme,
peut donner des pertes, mais qui, à moyen et à long terme, va
donner des résultats.
Il n'y a pas de stratégie, il n'y a pas de plan
stratégique de développement économique du gouvernement,
depuis qu'il est en place. Pendant qu'il privatisait, on a fait des
nationalisations, on a acheté les chantiers navals. On sait que c'est
une erreur de parcours, preuves à l'appui pour Tintant. L'avenir nous
prouvera peut-être autre chose, je l'espère. C'est un geste qui
allait tellement à rencontre d'un discours qui était tenu disant:
On se retire. Tout à coup on voit la nécessité de dire:
Non, on plonge et on s'en porte acquéreur par la Société
générale de financement. On le voit aussi pour ce qui touche les
services ambulanciers actuellement. Est-ce qu'on est train de nous faire la
démonstration que la façon dont a agi le Parti
québécois dans plusieurs dossiers, dans le passé,
était nécessaire et que c'est vraiment la bonne solution: ni
trop
à gauche, ni trop à droite et c'est que dans certains cas
seulement qu'il faut intervenir? Je pense que oui. Si le gouvernement actuel
est en train de démontrer cela en douce, j'aimerais bien qu'il
l'inscrive dans le cadre d'une stratégie. Si les gestes qu'il pose
actuellement, si les outils qu'il retire un jour, en novembre 1986, qu'il remet
au cours de 1987 et qu'il réajuste en 1988, ne s'inscrivent pas dans le
cadre d'une politique globale, on cherche à jouer quel jeu?
Le monde économique, les investisseurs, l'ensemble des
Québécois et des Québécoises ont besoin de savoir
où s'en va le gouvernement en matière de stratégie de
développement économique. Il serait important - je termine
là-dessus, M. le Président, parce que vous me faites signe que
mon temps est terminé - que le ministre des Finances nous dise, quant
à ces mesures, pourquoi il a agi de cette façon au cours des deux
dernières années, pourquoi il a rétabli certaines choses
au niveau où elles étaient, pourquoi le gouvernement n'a pas
encore fait connaître sa stratégie de développement
économique, pour savoir exactement où l'on s'en va et s'il a
l'intention de faire cela puisqu'il ne l'a pas fait dans le dernier discours
sur le budget.
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre des
Finances.
M. Levesque: M. le Président, je ne sais pas si, en dix
minutes, je pourrai faire le tour du jardin où m'invite le
député de Bertrand, tellement j'ai de choses à dire
là-dessus. C'est clair que notre politique économique est une
politique rationnelle, une politique basée sur la réalité,
une politique qui suit des buts et des objectifs bien définis et qui
utilise des moyens appropriés. J'aurai l'occasion dans quelques minutes,
je l'espère bien, de pouvoir vous donner quelques chiffres
inédits relativement à des prévisions économiques
faites par le Conférence Board du Canada, qui vont certainement vous
édifier. Si ces prévisions se réalisent, elles vont
réduire à néant toute l'argumentation que vous essayez de
nous faire depuis plusieurs jours.
Je tiens à vous dire immédiatement, M. le
Président, tout d'abord, que le budget vise à créer des
emplois permanents dans des secteurs d'avenir et non de ces emplois
temporaires, généralement associés avec des mesures visant
la création directe d'emplois subventionnés. On a connu cela.
Le budget renforcera le potentiel de l'économie, accroîtra
significativement la compétitivité des entreprises et stimulera
les investissements. J'ai parlé des mesures d'amortissement tout
à l'heure, ces mesures d'amortissement accéléré de
100 % pour la machinerie et l'équipement utilisés à des
fins de transformation, pour les ordinateurs et le matériel
informatique, 124 000 000 $, 40 000 000 $ plus 84 000 000 $ au cours des deux
années de 1988-1989 et 1989-1990; l'abolition graduelle de la taxe
spéciale sur les corporations de raffinage; les mesures de bonification
de l'aide du gouvernement québécois pour la recherche et le
développement.
Tout cela viendra renforcer les mesures adoptées au cours des
deux dernières années. Ces mesures sont de nature à
créer une économie plus moderne, plus concurrentielle, seul gage
de création d'emplois durables.
Je réfère le député de Bertrand et la
commission à l'annexe A, page 90. Là, c'est clair comme de l'eau
de roche, si je peux employer cette expression limpide.
Des voix: Ha, ha, ha! Une voix: Cela coule bien!
M. Levesque: Oui! Le taux de rendement interne après
impôt d'un projet d'investissement: regardez où se situe le
Québec avant la réforme, après la réforme et
après les budgets provinciaux. Je suis sûr que vous verrez avec
satisfaction la place qu'occupe le Québec en vue d'attirer les
investissements: la place numéro un. Regardez ce qui se passe au
Québec, en Ontario, au Massachusetts, au Michigan, à New York. Le
taux de rendement interne après impôt d'un projet d'investissement
pour une grande entreprise de fabrication de matériel de
télécommunications, pour des entreprises réalisant 100 %
de leurs affaires dans chacune des juridictions analysées - pour
être complet - regardez ce qui arrive: le Québec est le
numéro un. Il est en meilleure position que n'importe quel autre
État canadien ou américain pour recevoir des investissements.
Cela ne peut pas être plus clair que le tableau que vous avez devant les
yeux.
Nous sommes donc dans une situation de bonne, d'excellente
compétitivité dans toute l'Amérique du Nord. Nous avons
des incitatifs à l'investissement, comme je viens de le mentionner. Nous
avons favorisé le capital de risques en améliorant tous ces
véhicules d'investissement, tous ces véhicules d'investissement
stratégiques. Nous avons augmenté les mesures de recherche et de
développement, comme je l'ai mentionné tout à l'heure.
Nous attendons un plan d'action sur le recyclage, comme il avait
été mentionné. À ce propos-là, il y a des
sommes fort importantes qui ont été apportées dans ce
domaine. Par exemple, prenez le domaine de la main-d'oeuvre et de l'emploi, en
1987-1988: 97 000 000 $ pour la protection et le développement de
l'emploi; 109 000 000 $ dans les crédits de cette année;
formation professionnelle de la main-d'oeuvre, 133 000 000 $ en 1987-1988; 156
000 000 $ en 1988-1989.
Alors, les exemples sont là de sommes qui sont justement dans les
crédits et que l'on passe sous silence lorsqu'on s'en tient simplement
au discours sur le budget. Mais le gouvernement a prévu
d'accélérer l'action de l'Etat dans ce domaine-là.
Je pourrais même ajouter à ce que j'ai
annoncé tout à l'heure et qui est fort encourageant, que,
dans le budget actuel, nous avons eu des prévisions sur 1988 que
certains députés de l'Opposition ont semblé mettre en
doute lorsque nous avons parlé, par exemple, des mises en chantier. Nous
avons dit que nous avions prévu 51 000 mises en chantier et que, pour
les quatre premiers mois, on était rendu à 65 000. Si on veut en
faire une moyenne annuelle, parce que je ne dis pas qu'on est rendu à 65
000, mais je dis que les quatre premiers mois indiquent que c'est plus que
prévu, à un point tel que la moyenne actuelle serait plus
près de 65 000 que de 51 000. L'Opposition nous dit que ce sont 45 000.
Je ne sais pas où ils ont pu pêcher cela, mais ils disent cela.
Autrement dit, on voudrait dire, si je comprends bien le message qui m'arrive
de l'autre côté, que nos prévisions sont trop optimistes,
que nous portons des lunettes rosés quelque part pour voir l'avenir. Si
on regarde - et ceci est inédit, je pense que cela devait être
publié à midi et comme il est 12 h 10, je pense que j'ai le droit
de vous en faire part - le Conférence Board du Canada, dans ses
prévisions trimestrielles, nous dit ceci: Vous avez prévu 4,8 %
de croissance, parce que les chiffres n'étaient pas tous entrés
au moment où nous avons dit que, pour 1987, le Québec avait
atteint 4,8 % de croissance, or, d'après le Conférence Board du
Canada, nous avons été trop modestes. C'est 5,2 % de croissance
économique en 1987...
Des voix: Ha! Ha!
M. Levesque: Si c'est le cas - et je n'ai aucune raison de ne pas
accréditer cela jusqu'à un certain point, je n'ai aucune raison
de douter de ces prévisions qui, généralement, sont des
données relativement fiables - ce pourcentage de 5,2 % ferait en sorte
que le Québec serait en première place dans tout le Canada et
devant chacune des provinces, incluant l'Ontario dont la croissance, elle, a
été révisée à 4,7 % pour 1987. Encore une
fois, d'après le Conférence Board du Canada, pour nous, ce serait
5,2 %.
Quand on regarde 1988, c'est également intéressant. Il ne
faudrait pas oublier de regarder cela. Par contre, on me dit qu'on avait
échappé une province, et c'est le Nouveau-Brunswick, dont le taux
de croissance est à 6,2 %. Je m'excuse, je ne l'avais pas vu. Mais tout
est relatif. Je pense bien qu'on est encore en bonne compagnie avec l'Ontario
qui est à 4,7 % et nous à 5,2 %. Dans notre budget, en 1988, et
là c'est vrai, nous sommes les premiers, sans aucune exception,
d'après le Conférence Board du Canada. Alors que nous
prévoyons dans notre budget une augmentation de la croissance de 3,5 %,
le Conférence Board du Canada nous dit: Non, ce n'est pas 3,5 %, c'est
plutôt 4,2 %. Quand je regarde cela, je vous assure que c'est...
Une voix: C'est réjouissant.
M. Levesque: ...c'est encourageant. Ce doit être que la
recette est bonne. Depuis la semaine dernière, on nous dit qu'on n'a pas
la bonne recette, mais je suis porté à penser que si ces chiffres
finissent par devenir réalité... Au moins, on ne peut pas nier
ceux de 1987 parce qu'ils sont maintenant du passé. Quand on corrige
à la hausse au mois de mai ce qui est arrivé dans les douze mois
de l'année précédente, je pense qu'on a de bonnes raisons
d'être heureux de cette situation.
Le Président (M. Lemieux): Veuillez conclure, M. le
ministre. (12 h 15)
M. Levesque: Ah! J'ai de la misère à conclure, M.
le Président, tellement c'est beau.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Levesque: J'ai beaucoup de difficulté à laisser
ces chiffres-là qui sont fort encourageants.
Des voix: Ha, ha, ha!
Une voix: Appréhendez-vous des augmentations a
posteriori?
M. Levesque: On va même jusqu'à prévoir un
taux de chômage moins élevé que celui que nous avons
prévu, etc. Comme j'ai terminé, M. le Président, je ne
pourrais pas terminer sur une meilleure note d'encouragement et d'optimisme.
J'espère bien que ces chiffres, qui se retrouvent sûrement dans la
réalité de 1987, se retrouveront également dans la
réalité de 1988 et des années suivantes dans le meilleur
intérêt des Québécois et des
Québécoises.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Saint-Louis.
M. Chagnon: Merci, M. le Président. Je vois, à la
mine réjouie du député de Bertrand, l'euphorie qui se
dégage des bonnes nouvelles que le ministre des Finances vient de nous
annoncer.
M. Parent (Bertrand): Je suis très heureux, très
heureux.
M. Chagnon: Je n'en doute pas.
M. Parent (Bertrand): Parce que je fais partie des
Québécois comme vous.
Formation professionnelle
M. Chagnon: C'est cela, c'est ce que je dis. Vous m'avez
forcé un peu, M. le Président, à conclure rapidement tout
à l'heure. J'étais parti sur une lancée, on parlait de
l'enseignement professionnel et de la formation professionnelle,
et vous savez...
M. Bélisle: Lance et compte!
M. Chagnon: ...pour avoir eu dans le passé à
m'intéresser particulièrement à ces questions de
formation, j'allais dire que le gouvernement précédent avait,
pendant dix ans, négligé ce dossier. Il n'y avait aucun
intérêt gouvernemental en matière de formation
professionnelle. Pendant dix ans, ce qui s'est vécu dans l'ensemble des
secteurs secondaire et collégial au Québec, a été
d'abord une désuétude de l'équipement, et des pertes de
clientèle plus qu'importantes pour un secteur d'enseignement qui a
été dévalorisé pendant des années et des
années.
Cela a aussi créé des mises en disponibilité chez
les enseignants. Il y a au-delà de 1100 postes mis en
disponibilité encore aujourd'hui dans le secteur de l'enseignement
professionnel. 1100 postes à 40 000 $ le poste, cela vous donne 44 000
000 $, un peu moins, moins 5 %, cela fait donc environ 40 000 000 $ à 42
000 000 $ de coûts annuels à l'État pour son personnel mis
en disponibilité à la suite d'une absence de politique en
matière de formation professionnelle. Il m'apparaft absolument
évident que la formation professionnelle et le recyclage de la
main-d'oeuvre sont parmi les éléments les plus importants pour
s'ajuster, comme l'a souligné le député de Bertrand,
à de nouvelles politiques, à de nouvelles règles du jeu
dans le secteur économique, comme le sera, entre autres, la
libéralisation des échanges économiques entre le Canada et
les États-Unis.
Je veux aussi parler de la situation macro-économique, la
situation de l'emploi. J'étais très heureux au moment où
le budget a été annoncé - et le ministre des Finances en
parlait tout à l'heure - de l'amortissement
accéléré de 100 % sur les nouveaux investissements
manufacturiers. Cela implique un tas de compagnies, des PME - le
député de Bertrand sait ce que c'est que les PME, il en a
dirigées lui-même, Visbec et d'autres probablement - dans
lesquelles les conseils d'administration avaient à prendre des
décisions quant aux amortissements à faire, aux investissements
à faire dans leurs propres compagnies pour qu'elles deviennent plus
compétitives, plus productives et en vue d'augmenter le caractère
ou la qualité de leurs produits.
Pour ces compagnies, le fait de pouvoir amortir de façon
accélérée, de pouvoir amortir 100 % de leurs
investissements va certainement accélérer et précipiter
cet investissement. Cela veut dire en fin de compte une augmentation du nombre
d'emplois, une diminution du nombre de chômeurs et un
intérêt particulier pour des jeunes Québécoises et
Québécois à se former pour aller travailler dans ces
secteurs de pointe de la transformation manufacturière et industrielle
pour le Québec. Quand on regarde la structure économique du
Québec, on s'aper- çoit - c'est assez évident - que ce
n'est pas le secteur secondaire, le secteur manufacturier ou industriel qui est
le plus développé, c'est peut-être aujourd'hui l'un de nos
avantages lorsqu'on regarde le dossier sur le libre-échange. Par contre,
c'est celui qu'il va nous falloir développer pour entrer en
compétition avec le secteur américain. C'est pour cela que
l'amortissement de 100 % pour les nouveaux investissements prend une importance
très grande. Plusieurs personnes m'en ont parlé en bien de cet
amortissement.
Il faut aussi voir que le discours sur le budget est relativement... Je
présume que quand on a fini de le lire, on est fatigué. Il a
quelque 32 pages, mais il y a des annexes pour quelque 100 pages. Quand on
regarde à cette clause du budget, l'amortissement
accéléré est de 100 %. Il faut comprendre comment cela va
s'opérer. Il faut faire une mini-recherche. Ce n'est pas long. C'est
fort bien fait ce document. On regardera aux annexes des pages 78 et 79,
comment on va organiser l'amortissement des nouveaux investissements et les
déductions fiscales pour les nouveaux investissements et on s'apercevra,
c'est assez logique, que ce sont d'abord les sociétés
autochtones, en deux mots, les compagnies du Québec qui vont profiter de
cet amortissement.
Si vous faites affaire à l'extérieur, c'est
précisé dans les annexes, pour le taux d'amortissement de 100 %
on dit: Par ailleurs, le mécanisme actuel de répartition du
revenu imposable entre les provinces fait en sorte que la valeur du nouvel
amortissement de 100 % accordé au Québec sera moins importante
pour les entreprises faisant également des affaires à
l'extérieur du Québec. Cela veut dire que les entreprises
autochtones, les petites et moyennes entreprises dont la
propriété est généralement québécoise
très majoritairement sont les plus favorisées par cette
déduction de l'investissement, l'amortissement de 100 %. Je suis
convaincu que cela va avoir un effet direct sur l'emploi. Un effet direct aussi
important à tout le moins que des éléments importants de
la structure économique comme ceux dont on a parlé tout à
l'heure, les mises en chantier, par exemple.
Si on regarde aussi les SPEQ et les REA, je suis d'accord avec le
député de Bertrand lorsqu'il dit que la place faite aux SPEQ et
aux REA dans le budget est intéressante à plusieurs points de
vue. Elle est intéressante pour des fins de capitalisation dans des
entreprises locales et dans des entreprises autochtones. Elle est
intéressante aussi pour des fins pédagogiques dans notre
population, pour apprendre comment investir dans le secteur boursier,
particulièrement avec les REA. Lorsqu'on est passé de 6,5 %
à 11 % de gens au Québec qui détenaient un portefeuille
d'actions, je pense que c'est extrêmement intéressant. Cela a
été fait depuis sept ou huit ans. C'est en 1980 ou en 1981
l'année où on a lancé les REA? En 1979. Alors depuis 1979,
cela fera près de neuf ans, cela fera dix ans l'an
prochain. C'est intéressant de pouvoir voir la continuité
de cette opération dans le budget.
Dans le comté chez nous, dans le centre-ville de Montréal
il y a beaucoup de gens qui sont dans la production de films. Il y a plusieurs
maisons de production dans le centre-ville qui font soit du film, soit de la
télévision ou du moins de la production
télévisuelle ou cinématographique. Je dois vous dire que
la déduction de 166 % qui est annoncée dans le budget a eu l'heur
de plaire joyeusement à l'ensemble de cette industrie. Ce qu'il y a
d'intéressant quand on regarde cette industrie, c'est que c'est une
industrie qui, à faible capitalisation, crée beaucoup d'emplois
chez des gens qui sont généralement pigistes. C'est assez curieux
de voir comment les industries culturelles sont génératrices
d'emplois par rapport à d'autres types et d'autres secteurs de
l'industrie. Par exemple, pensons à la construction comme Pechiney dans
l'aluminerie, un investissement de 1 500 000 000 $ à Bécan-cour
qui va appporter 800 emplois permanents. Cela revient cher de l'emploi
évidemment en termes d'investissements. Il y a même plus que cela,
1 750 000 $ la "job".
Quand on regarde dans les entreprises culturelles, dans les industries
culturelles, on est étonné de constater à quel point
l'investissement de base peut créer un nombre d'emplois importants et
assez rémunérateurs. Ce ne sont pas des emplois précaires,
ce sont des emplois rémunérateurs. Mais pour une catégorie
de travailleurs qui préfèrent un travail à la pige, un
travail qui n'est pas nécessairement régulier, automatique,
routinier. Et cette déduction a augmenté de 133 % à 166 %.
Évidemment, cela fait plaisir à l'ensemble des gens qui
s'occupent de la production. Ces derniers souhaitent que le gouvernement
fédéral réagisse de la même façon, ayant eu
à subir des pertes importantes quant aux déductions
imposées lors du dernier discours sur le budget et surtout de
l'avant-dernier discours sur le budget du gouvernement
fédéral.
Il y a dans le budget, dans les investissements publics, 400 000 000
$...
Le Président (M. Lemieux): 30 secondes, M. le
député de Saint-Louis.
M. Chagnon: Vous êtes un cerbère, un gardien du
temps absolument épouvantable. Comme c'est probablement la
dernière fois que j'aurai à parler... Fort malheureusement, je
suis comme le député de Bertrand, je me sens spolié dans
mon temps.
Une voix: Viens t'asseoir ici, il y a de la place pour deux.
M. Chagnon: Je ne vois pas pourquoi vous vous plaignez,
d'abord.
Une voix: Parce que vous parlez trop.
M. Chagnon: Je tirerai les conclusions suivantes. Le budget qui
nous a été présenté, compte tenu de la situation
budgétaire dans laquelle on était parti il y a trois ans et des
améliorations qui ont été faites dans le secteur de la
santé - particulièrement dans le secteur d'une institution
sociale extrêmement importante pour nous au Québec, la famille -
de la situation réelle de l'emploi qui s'améliore et qui
accélérera le processus de l'amélioration de la situation
de l'emploi et de la décélération du chômage, parce
qu'il met en place des outils économiques extrêmement riches et
ingénieux, dans certains cas... Je pense que mes collègues sont
en faveur du budget, M. le Président. Mais j'invite...
Une voix: J'espère.
M. Chagnon: On ne sait jamais. Il y a toutes sortes de choses qui
se sont passées ici dans le passé. Mais j'invite aussi mon
collègue de l'Opposition à vendre l'idée nouvelle - c'est
vrai, je le constate - à ses collègues députés qui
sont venus nous voir aussi, et de voter en faveur de ce budget qui fait en
sorte d'améliorer la situation des Québécoises et des
Québécois en réduisant leurs impôts de 1 250 000 000
$ et en diminuant leur déficit de 750 000 000 $ pour l'année
financière 1988-1989 et aussi pour 1989-1990 un peu, en ce qui concerne
la diminution d'impôt. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le
député de Saint-Louis. M. le député de
Bertrand.
M. Parent (Bertrand): Alors... M. Chagnon: Convaincu?
Situation générale
M. Parent (Bertrand): Vous verrez cela. J'écoute
attentivement et je vais prendre les recommandations du ministre. Je vais y
penser d'ici à demain.
M. le Président, l'heure avance et plusieurs points n'ont pas
été touchés, sauf que j'aimerais d'abord revenir sur un ou
deux points. Le ministre nous dit, et à la page 90 il y a un tableau qui
nous le montre, que le Québec est en avance sur l'Ontario, le
Massachusetts, le Michigan, New-York et tout cela. D'abord, c'est le taux de
rendement interne après impôt, un projet d'investissement et ce,
dans une entreprise de fabrication de matériel de
télécommunications. C'est très spécifique. On a
sorti cela d'une étude qui a été faite, une analyse
comparative.
Est-ce que le ministre peut me dire la date de cette comparaison? Est-ce
qu'on a la date de comparaison de ce tableau? Habituellement, on inscrit
toujours à quelle année cela se rapporte.
M. Levesque: Le tableau date de 1988, après impact des
mesures.
M. Parent (Bertrand): D'accord. Ce que je veux dire, c'est
qu'avant la réforme le Québec était en avant.
Après, le Québec est en avant de 0,5 % de moins. Même s'il
est éloquent sur cette base comparative, j'aimerais peut-être
avoir le même tableau comparatif en 1985, car je ne suis pas sûr
que c'est à la suite des nouvelles mesures qui sont prises par le
gouvernement actuel. Tout cela pour dire que c'est beau de montrer la situation
comparative d'un Québec dans le cas d'un investissement dans tel
secteur, mais la question que je pose est celle-ci: Est-ce que le même
tableau qui aurait été pris en 1985, en 1984 ou en 1986 n'aurait
pas été sensiblement le même? (12 h 30)
II faut faire attention. Vous m'avez appris - ne serait-ce que cela que
j'ai appris dans cette étude du budget - à toujours donner les
deux côtés de la médaille. Je pense que là, le
ministre est un petit peu fautif. Il tient pour acquis que cette situation est
créée par ce gouvernement. Je dis: Attention, attention.
D'ailleurs, c'est dans cet esprit que je le ramènerai à sa propre
annexe, à la page 77, où le ministre des Finances reconnaît
enfin des choses qui ont été faites au cours des dernières
années et qui permettent certainement au gouvernement de
bénéficier d'une certaine lancée. Il dit, à la page
77: "Depuis 1981 - M. le député de Mille-Îles,
écoutez cela - le Québec possède un régime
d'imposition des sociétés qui se distingue sensiblement de celui
prévalant dans les autres provinces canadiennes où les
impôts sur les profits constituent la principale source de financement
auprès des sociétés. Depuis 1981, au Québec, la
taxation des entreprises repose sur le principe d'un taux de taxation
équivalent, s'appliquant à la masse salariale..." et on s'en va
ainsi de suite.
Il faut rendre à César ce qui est à César.
Il faut aussi reconnaître que les outils, que les mesures mises en place
ces dernières années, dans plusieurs cas, sont des outils qui
bénéficient et qui aident la croissance qu'on connaît
actuellement. Pas entièrement, mais autant je ne voudrais pas que le
ministre des Finances et le gouvernement prennent tous les crédits,
autant on ne voudrait pas non plus jeter le blâme sur tout ce qui s'est
fait dans le passé. En juste équité, oui, les mesures
prises dans les années 1980, 1981, comme le dit le ministre à la
page 77, et qui font en sorte que les PME québécoises, les
entreprises québécoises sont en situation de concurrence, sont en
situation où le taux qu'on leur impose pour les impôts, les
différents mécanismes qu'on a mis en marche qui ont permis une
certaine explosion des PME québécoises, entre autres, sur les
marchés boursiers, l'accessibilité à la bourse,
l'accessibilité des investisseurs au Régime
d'épargne-actions d'ailleurs le ministre confirme, en ne touchant pas le
Régime d'épargne-actions, que ce sont des choses
extrêmement bonnes.
Hier, le député de Saint-Louis disait, un petit peu du
revers de la main - et cela m'a fait mal car il me semble qu'il a une meilleure
connaissance du milieu que cela - que l'entrepre-neurship
québécois se portait bien, mais que ce n'était pas
à cause de ce qui s'était passé ces dix dernières
années, mais que c'était à la suite de mesures prises
depuis deux ans, deux ans et demi. Je ne suis pas d'accord du tout. Je ne suis
pas un fanatique et une personne avec des oeillères, mais j'ai
vécu depuis ces dernières dix, quinze années, dans le
milieu des affaires et je peux vous dire que l'ensemble du milieu des affaires
est très conscient que l'ensemble des mesures prises depuis dix ans,
sont des mesures qui font que l'entrepreneurship québécois est ce
qu'il est aujourd'hui. Tant mieux si le ministre nous annonce que le
Conférence Board confirme pour 1987 que la croissance a
été à 5,2 au lieu de 4,8. Tant mieux si les
prévisions de 3,5 comme croissance pour cette année se
manifestent au-dessus de 3,5. Je ne suis pas une autruche qui se met la
tête dans le sable. Il ne serait pas honnête de la part de qui que
ce soit, pas seulement de moi personnellement, mais de n'importe quel critique
de ce côté et cela ne serait pas crédible de dire: Cela n'a
pas de sens, ces gens sont dans les patates ou se sont trompés. Cela
confirme des choses.
La seule chose que je dis au ministre des Finances et cela résume
un peu ce que j'ai voulu faire pendant ces dix dernières heures, les
deux heures que j'ai faites en Chambre et la demi-heure que j'aurai à
faire en Chambre en tant que critique, c'est que j'ai essayé de mettre
le doigt sur certaines choses qui avaient été faites dans le
budget, avec lesquelles je n'étais pas d'accord, et de lui dire pourquoi
je n'étais pas d'accord. Les mesures que l'on a pointées du doigt
sont des mesures qui ne vont pas dans le bon sens, dans le sens que nous
voyons. C'est une question de choix, on me dira, mais quand on pointe des
choses sur l'habitation, quand on pointe des choses sur la recherche et le
développement, la famille, ce sont là, M. le ministre - et vous
l'avez reconnu dans certains cas - des choix que vous avez faits, mais il y a
peut-être lieu de rajuster votre tir.
Que ce soit l'Opposition ou que ce soit le gouvernement, on est tous
ici, 122 députés à l'Assemblée nationale, qu'on
soit ministre, qu'on soit député ministériel ou qu'on soit
député dans l'Opposition, on a tous la même mission, celle
d'essayer de mener le Québec à bon port, c'est-à-dire de
mener le Québec dans les meilleures conditions possible, d'obtenir le
maximum de rendement.
Même si je suis un simple député de l'Opposition, je
dirai au ministre des Finances que j'ai essayé de faire mon travail avec
le plus d'objectivité possible, parce que pour moi c'est important. Si
cela va bien au Québec et que le gouvernement actuel peut en ramasser
les fruits, tant mieux pour lui. Bien sûr j'aimerais cela être
dans ses chaussures, mais j'aime encore mieux que cela aille bien que
cela aille mal pour dire: Je vais en profiter politiquement, parce que quand
cela va mal, ce n'est pas drôle.
Le ministre des Finances était de l'autre côté de la
table quand cela allait mal et je pense que cela ne devait pas être
drôle. Tu peux bien tomber sur ia tête du gouvernement, tu peux
bien lui dire un tas de choses, sauf que quand cela va mal, quand tu connais
une crise économique ou quand tu connais des difficultés, je me
dis que ce n'est pas drôle pour qui que ce soit, parce que c'est
l'ensemble de la population qui le subit.
Quand cela va bien, quand la croissance économique est ce qu'elle
est par un ensemble de mesures qui existaient avant... Ne nous leurrons pas, ce
n'est pas l'arrivée d'une équipe d'élite qui a fait que
tout a changé, comme ce n'est pas le fait que le Parti
québécois ait été là pendant dix ans qui a
fait que c'est comme cela aujourd'hui.
Le Président (M. Lemieux):...
M. Parent (Bertrand): Oui, je conclus, M. le
Président.
Le Président (M. Lemieux):...
M. Parent (Bertrand): C'est un ensemble, un mélange de
situations. Mais ce que j'ai de la difficulté à comprendre, pour
conclure, c'est que malgré le fait que tout cela aille bien, le fait
qu'on soit des champions quant à la croissance économique
à travers le Canada, le numéro un, comme nous le dit le ministre
des Finances, on se retrouve, malgré tout cela, avec le double du
chômage qu'il y a en Ontario. Comment cela se fait-il? Voilà un
exemple, un parmi tant d'autres, et je me dis: II y a quelque chose qui fait
que si cela va si bien - parce que si cela allait un peu moins bien au
Québec, on aurait des bonnes explications - et qu'on se retrouve dans
une position comme cela eh ce qui concerne le chômage que je donne comme
exemple - il y a d'autres exemples, la recherche et le développement
sont certes d'autres exemples - on n'a pas le droit d'être en
arrière. Il faudrait être au moins nez à nez dans ce
sens-là.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le
député de Bertrand. M. is ministre, vous allez avoir de 12 h 37
à 12 h 47 et on va se conserver du temps pour des remarques finales de
12 h 47 à 12 h 53. M. le ministre, vous allez conclure dans les
remarques finales de 12 h 53 à 13heures.
M. Chagnon: Le député...
Le Président (M. Lemieux): Pardon?
M. Chagnon:...
Le Président (M. Lemieux): Pardon?
M. Chagon: Vous avez dit le député de
Mille-Îles?
Le Président (M. Lemieux): Non, je m'excuse. C'est
dû à mon mauvais rhume. J'ai dit M. le ministre.
M. Chagnon: Ah bon!
Le Président (M. Lemieux): Je m'excuse, M. le
député de Saint-Louis.
M. Levesque: Je m'excuse, M. le Président. Est-ce que je
pourrais vous demander, si je terminais avant 12 h 47, comme vous dites, un de
mes collègues aurait peut-être quelques mots à ajouter
et...
Le Président (M. Lemieux): Oui.
M. Levesque: ...pourrait prendre de mon temps. D'accord?
Le Président (M. Lemieux): Oui, avec consentement du
député de...
Une voix:...
Le Président (M. Lemieux): Oui, cela va, M. le
ministre.
M. Levesque: Je verrai où je serai rendu dans quelques
minutes.
Le Président (M. Lemieux): D'accord.
M. Parent (Bertrand): Je ne suis pas inquiet, vous allez utiliser
toute l'enveloppe. Vous avez sûrement beaucoup de choses à me
dire.
M. Levesque: Non! Ha, ha, ha! Je voulais simplement reprendre un
peu à partir des propos que vient de tenir le député de
Bertrand qui me reproche, quelquefois, de revenir sur le passé et
d'attaquer l'ancien gouvernement dune façon un peu trop dure. Mais c'est
lui qui m'y invite lorsqu'il vient, encore une fois, dire: Ce n'est pas si pire
que cela, l'ancien gouvernement, etc. C'est lui qui m'invite encore à le
faire et je n'ai pas l'intention de m'acharner sur l'ancienne administration.
Mais iorsque le député de Bertrand dit: Vous avez une bonne
croissance, vous avez une conjoncture favorable, et qu'il arrive à
certaines conclusions, je lui dis qu'il ne faut pas penser que l'ancienne
administration a seulement connu des années difficiles.
Je comprends que 1981-1982, c'était moins rosé et ce
n'était pas facile. Mais l'ancien gouvernement a connu des bonnes
années en 1977, 1978, 1979, 1980. C'étaient des belles
années, ça. Qu'est-ce qu'il a fait durant ce
temps-là? C'est là qu'il nous a créé tous
les problèmes. Ce n'est pas pendant la récession qu'il nous a
posé le plus de problèmes, c'est avant. C'est alors que cela
allait bien. C'est là le plus grand reproche que nous lui faisons. C'est
d'avoir tout lâché pendant trois ou quatre ans et s'être
aperçu par après: Tiens, les mauvais jours arrivent, qu'est-ce
qu'on fait? Là, il était mal pris.
C'est cela qui résume ma pensée. Je n'attaque pas le
gouvernement, l'ancienne administration pour rien. Je ne dis pas que parce que
cela va bien, c'est facile. Au contraire. Quand cela va bien, il y a des choix
à faire aussi. Les choix que nous avons faits depuis décembre
1985 ont été souvent difficiles. On a dû dire non souvent
à des choses qui pourtant se défendaient. On aurait pu laisser
aller les choses, ouvrir les vannes. Mais au contraire, nous avons agi avec
beaucoup de prudence. Je me rappelle l'ancien chef de l'Opposition qui me
traitait d'écureuil engrangeur. Je me laissais dire cela sachant qu'un
jour cette attitude prudente aurait des dividendes. Pas pour nous autant que
pour la population. Nous nous sommes mis dans une position aujourd'hui qui est
rassurante, je pense, que nous n'aurions pas connue, même avec la
croissance, si nous avions disposé de nos excédents à
mesure dans des dépenses accélérées. Il ne faut pas
aller bien loin. On n'a qu'à regarder ailleurs au Canada. Vous allez
trouver des exemples des provinces qui, à mesure que les revenus
entraient, par l'autre porte cela sortait en dépenses...
Une voix: L'Ontario?
M. Levesque: Je ne veux pas donner d'exemple. Je sais que le
député de Bertrand ou les membres de la commission peuvent
trouver facilement de quoi je parle.
Le député de Bertrand m'a référé
à un tableau en disant: Cela allait bien avant, parce que vous avez dit
à un moment donné, alors que le député de Bertrand
parlait, par exemple, des...
M. Parent (Bertrand): ...à la page 90.
M. Levesque: Non. Il y avait l'autre; page 77, je pense. Depuis
1981, le député de Bertrand disait: Voyez-vous, ce n'était
pas si mal que cela. Vous avez gardé le régime d'imposition des
sociétés. Mais encore là, vous avez un exemple où
nous n'avons pas hésité à l'écrire et pas seulement
à le dire. Parfois les paroles s'envolent. Nous l'avons écrit:
depuis 1981. Nous n'avons pas dit: Depuis notre arrivée au pouvoir. Nous
avons été justes, transparents dans les textes. "Depuis 1981, le
Québec possède un régime d'imposition des
sociétés qui se distingue sensiblement de celui prévalant
dans les autres provinces, etc." Nous avons donné les raisons pour
lesquelles nous avons maintenu ce système.
Nous n'avions pas deux langages. Pas un langage pour la galerie, un
autre langage pour la commission, un autre langage pour les amis et un autre
langage pour les adversaires, etc. Non, un langage. Il est là. Il rend
justice à une situation. Pourquoi avons-nous conservé ce
régime? Nous l'expliquons, aux pages 77 et 78. Mais i! ne faut pas
oublier pourquoi ce régime a été institué.
Peut-être pas pour les mêmes raisons que nous le conservons.
C'est qu'en 1981, on était en pleine récession. Le
gouvernement s'est aperçu que les revenus provenant de l'impôt sur
les sociétés étaient considérablement
réduits ou en danger de l'être. Alors, en utilisant une
imagination créatrice, ils ont dit: La meilleure façon de faire
cela, c'est de ne pas se fier sur les profits. Les sociétés ne
font plus de profits. On va imposer directement sur quelque chose dont elles ne
peuvent s'échapper. C'est la masse salariale dans le financement des
soins de santé et la taxe sur le capital. Là, c'est sûr
qu'on va être payé. Elles ne peuvent pas s'en tirer. C'est
pourquoi cela a été fait dans le temps. Ce n'est pas une question
de politique économique à long terme, un choix... Je
n'étais pas dans l'esprit du ministre des Finances du temps, mais je
connais suffisamment le contexte de l'époque pour dire qu'on avait
besoin de chaque cent possible et si les sociétés ne payaient
plus, on allait trouver un moyen de les faire payer. Aujourd'hui, on garde ce
régime, mais pas pour les mêmes raisons. On le conserve pour les
raisons énumérées ici. (12 h 45)
Mais même en conservant ce régime, il ne faudrait pas
penser que c'est ce qui nous rend concurrentiels aujourd'hui. Cela peut
contribuer parmi l'ensemble de tous les facteurs, mais j'invite ie
député de Bertrand et les membres de la commission à
regarder la page 95 de l'annexe A. Là, il y a un graphique qui va vous
indiquer le fardeau fiscal supplémentaire des entreprises. En 1985, vous
voyez que le fardeau additionnel au Québec était de 9,6 % par
rapport à l'Ontario. En conservant le même régime - donc ce
n'est pas à cause du régime - on diminue en 1989 à 1 %; de
9,6 %, on passe à 1 %. Ce sont des mesures prises par le gouvernement,
pas en changeant le régime, mais en changeant certaines mesures que l'on
retrouve en particulier dans les budgets successifs et particulièrement
dans le budget de cette année qui nous rend concurrentiels à 1 %
près avec nos voisins de l'Ontario. Je pense que cela valait la peine
d'ajouter ces quelques remarques, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): II vous reste deux minutes, M.
le ministre.
M. Levesque: Je vais demander...
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Saint-Louis.
M. Levesque: Seulement pour dire au député de
Bertrand, qui m'avait dit que je les prendrais toutes, que je ne les prendrai
pas toutes, il me reste deux minutes.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Saint-Louis, deux minutes.
M. Chagnon: On va virer scouts ici. D'écureuil engrangeur
on passe à chevreuil, je ne sais pas quoi.
M. Parent (Bertrand): Le ministre n'a pas
réalisé...
M. Chagnon: Ha, ha, ha!
M. Parent (Bertrand): ...c'est trop important.
M. Chagnon: Deux minutes, M. le Président, ce n'est
vraiment pas très long pour qualifier un budget comme celui-ci. Le
député de Bertrand a tout à fait raison. Mais l'Opposition
a souvent dit: Si jamais il y a récession, comment allez-vous ajuster
votre tir? Le tir pour une éventuelle récession, car là
cela va bien, mais dans une éventuelle récession? I! est en train
de se préparer aujourd'hui, en baissant son déficit. C'est
exactement ce qu'il nous faut faire dans une situation comme celle-ci. C'est la
marque de la sagesse d'un gouvernement qui sait prévoir.
Malheureusement, je me rappelle aussi pour avoir vécu de
très près 1982 et 1983 au moment des négociations ici,
à l'intérieur, au Conseil du trésor, qu'on s'arrachait les
cheveux pour essayer de boucler la boucle parce qu'il était
évident que les dépenses allaient dépasser très
largement les revenus escomptés. On ne voyait aucune espèce de
lumière au bout du tunnel, sauf de seulement être capable de payer
les salaires à la fin de l'année. Lorsque le gouvernement a pris
la décision dramatique de couper pendant trois mois 20 % du salaire de
ses employés, ne vous imaginez pas que le gouvernement était bien
fier de le faire. Personne. Je n'ai pas vu de député
ministériel de l'époque applaudir à cette
décision-là, mais on était pris en catastrophe devant une
situation qui n'avait pas été envisagée. Or, justement la
marque d'un bon gouvernement, c'est de pouvoir faire... Pardon?
Le Président (M. Lemieux): Vous avez terminé, M. le
député de Saint-Louis.
M. Chagnon: L'art de gouverner, M. le Président, c'est de
prévoir et c'est justement ce que ce gouvernement cherche à
faire.
Le Président (M. Lemieux): Conclusion excessivement rapide
et...
M. Chagnon: Merci. Ce n'est pas long cela.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le
député de Saint-Louis. M. le député de Bertrand, en
remarques finales pour cinq minutes.
Remarques finales M. Jean-Guy Parent
M. Parent (Bertrand): En remarques finales, je reprendrai sur la
lancée sur laquelle le député de Saint-Louis a
terminé, c'est-à-dire l'art de prévoir. Pour prendre un
exemple apporté hier par le député de Mille-Îles et
que le député de Saint-Louis mentionne aussi, je pense que le
Parti québécois a été le premier gouvernement
à demander à Hydro-Québec de faire un plan de
développement annuel. Que je sache, HydroQuébec existait avant
1976; que je sache le gouvernement était administré par le
même premier ministre. Le gouvernement du Parti québécois a
demandé à Hydro-Québec de faire son premier plan de
développement dans les années 1980. Je pense que c'est justement
à cause de cela aussi, parce que le gouvernement du Parti
québécois était beaucoup plus prévoyant que vous ne
le laissez entendre. Le fait que les travaux de la Baie James avaient
été enclenchés avec une offre qui allait beaucoup plus
au-delà de la demande. On a réalisé en 1980 qu'il fallait
réviser, qu'il y avait des surplus importants. On s'est ramassé
dans une situation où il a fallu que le gouvernement du Parti
québécois, en 1981, en pleine période de crise, soit
obligé d'arrêter certains travaux pour être capable de les
échelonner dans le temps. C'est une réalité qui s'est
vécue dans ces années-là. Ni vous, ni moi n'étions
là sauf que c'est une réalité qui s'est passée.
En ce qui concerne les derniers commentaires que j'ai apportés
sur l'exercice qu'on vient de faire, je me demande pourquoi, si les conditions
sont si favorables... Je n'ai pas lieu de douter des résultats
annoncés par le ministre des Finances citant les chiffres du
Conférence Board par rapport à la croissance économique du
Québec de la dernière année, 5,2 %, par rapport à
ce qui s'aligne pour la prochaine année. Dans cet esprit, pourquoi le
ministre de l'Énergie et des Ressources a-t-il recommandé une
augmentation des tarifs d'Hydro-Québec pendant que les chiffres
d'Hydro-Québec prévoyaient une croissance de 2,8 %? Ce n'est pas
il y a un an, ce n'est pas il y a six mois, c'est il y a une couple de mois. On
prévoyait une croissance économique de 2,8 % pour être
très conservateurs. On sait qu'Hydro-Québec enregistre des
bénéfices et je suis très heureux qu'elle en enregistre
sauf que tout bonnement, on va chercher, encore là, dans les poches des
contribuables. Cette année, on aurait pu faire une exception. On avait
un bel exemple, on aurait pu faire en sorte qu'on n'impose pas une nouvelle
taxe au contribuable québécois pour aller chercher des
bénéfices additionnels. On savait que la croissance
économique était bien au-dessus de ce que prévoyait
Hydro-Québec; d'ailleurs, on l'avait souligné ici
même, en commission.
Quand je parle de l'avenir, moi aussi j'espère, comme le ministre
des Finances, que les choses vont continuer à bien aller.
J'espère que le ministre des Finances va pouvoir terminer sa
carrière avec le sourire aux lèvres, heureux. Le fait que cela
aille bien, il veut peut-être rester plus longtemps mais je ne suis pas
convaincu de cela. J'espère que le ministre des Finances va continuer
à avoir beaucoup de bon temps comme ministre des Finances parce qu'il
est dans une bonne période. Mais je n'ai pas la même impression,
chiffres à l'appui; j'ai carrément l'impression que cela ne va
pas si bien que cela. Tantôt, quand mon collègue le
député de Shefford a dit au ministre qu'une chute importante des
mises en chantier dans la construction de logements était prévue
pour la prochaine année, vous vous demandiez où il prenait cela.
Ce sont des chiffres de l'APCHQ. Peut-être qu'ils se trompent, tant
mieux! Sauf que des 75 000 qu'il y a eu l'année passée,
probablement que cela sera 45 000, peut-être 50 000. C'est encore beau,
vous me direz. Ce que je veux dire c'est que le haut de la courbe, j'ai
l'impression qu'on l'a atteint. Quand on parle des 100 000 emplois,
l'année passée, je ne suis pas sûr qu'on va atteindre cela
cette année. Je ne citerai pas à nouveau les statistiques parce
que le ministre va me dire que ce sont des statistiques prises de mois à
mois, sauf que l'allure que cela prend, c'est qu'on ne revivra pas cela cette
année, ni l'année prochaine, des chiffres de création
d'emplois de 100 000. J'ai un peu l'impression que, la courbe redescendant, le
ministre des Finances se doit non seulement d'être vigilant, mais c'est
aussi un signe non seulement d'être l'écureuil engrangeur. Il est
temps de sortir un peu de la mise de côté qu'il y a eu dans la
grange pour être capable de faire de l'investissement au bon endroit
comme certains exemples précis qu'on lui a donnés, que je lui ai
apportés et que d'autres de mes collègues lui ont
apportés. Je pense que les points qu'a apportés ma
collègue de Marie-Vicîorin, hier soir, étaient excellents;
ceux qu'ont apportés le député de Laviolette, le chef de
l'Opposition et le député de Shefford...
Le Président (M. Lemieux): En conclusion, M. le
député.
M. Parent (Bertrand): ...c'étaient des points excellents.
L'exercice que nous avons fait en commission pendant dix heures nous a permis
d'avoir des informations. Je remercie le ministre de même que son
sous-ministre et tous ces gens qui l'accompagnent qui ont pu nous donner des
informations additionnelles. Lorsqu'on est mieux éclairé, on peut
être plus constructif. Alors, je remercie le ministre en ce sens.
J'espère, cela ayant été aussi la chance de notre part de
passer certains messages, que le ministre a pu retenir un tant soit peu pour
qu'on voie appa- raître au cours des prochains mois, avant ou dans le
prochain budget, des mesures qui lui auront été
suggérées. Je vous remercie.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le
député de Bertrand. M. le ministre des Finances.
M. Gérard D. Levesque
M. Levesque: M. le Président, nous terminons à ce
moment-ci ces dix heures de discussions en commission parlementaire sur le
budget 1988-1989. Je ne peux clore cet exercice sans vous remercier, M. le
Président, de la façon dont vous avez présidé nos
travaux, d'une façon absolument exemplaire, bien appuyé par M. le
Secrétaire général et son équipe. Je tiens aussi
à réitérer, comme l'a fait le député de
Bertrand, nos remerciements à nos adjoints, d'un côté comme
de l'autre de la table, au pluriel de ce côté-ci et au singulier
de l'autre. Je voudrais tout particulièrement remercier les membres
ministériels de la commission: le député de
Mille-Îles, le député de Saint-Louis, le
député de Lafontaine, vous-même, M. le Président,
qui avez participé activement à cette commission, ainsi que le
député de Limoilou, le député de Prévost qui
avait à se partager apparemment entre deux commissions. Je tiens
à dire que j'ai bien apprécié leur contribution fort
importante à cette discussion et, à tout seigneur tout honneur,
le député de Bertrand, qui fait un travail d'autant plus louable
qu'il est difficile. Je tiens à lui dire que j'ai apprécié
l'objectivité avec laquelle il nous habitue à aborder les
problèmes et à aborder une discussion dans une atmosphère
qui est celle que nous privilégions, c'est-à-dire une
atmosphère de discussion entre, j'allais dire gentiihommes mais il y a
aussi quelques collègues du sexe féminin qui sont venus et je ne
voudrais pas les oublier non plus.
Ceci étant dit, je ne peux que terminer en vous remerciant encore
une fois, M. le Président de la commission, et en vous disant combien
cela a été agréable pour mes collègues et moi de
venir appuyer un budget qui a reçu tellement l'approbation de la
population, d'après tout ce que nous pouvons voir. Le budget a
été commenté de toutes les façons possibles par les
médias. Je pense que cela a même surpris beaucoup de gens,
beaucoup de spécialistes, beaucoup d'analystes de par le contenu
très substantiel du budget. J'imagine que ce qui a le plus frappé
ceux qui ont pris connaissance du budget, c'est l'ampleur des diminutions
d'impôt, particulièrement pour les familles, diminutions
d'impôt de l'ordre de 1 257 000 000 $ pour une pleine année 1989,
dont 61 % pour les familles, 772 000 000 $ de diminution d'impôt pour la
famille québécoise. Ce qui a également frappé les
gens, les analystes, c'est qu'en ce faisant, on pouvait à la fois
diminuer le déficit d'une façon aussi spectaculaire, plus de la
moitié depuis que nous sommes là, baisser le déficit
à
1 600 000 000 $, et les besoins financiers nets, déjà en
1988-1989, sous la barre du 1 000 000 000 $, nous acheminant vers 500 000 000 $
dans l'année... 750 000 000 $ l'an prochain et 500 000 000 $
l'année suivante. Je pense que ces facteurs, ajoutés à
d'autres évidemment que nous retrouvons dans le budget,
particulièrement dans le développement régional. Nous n'en
avons peut-être pas assez parlé.
Une chose que je regrette c'est qu'on n'ait pas suffisamment
parlé de tous ces programmes de développement régional.
Par exemple, l'aide que nous apporterons aux petites municipalités de
7500 habitants et moins dans le domaine des aqueducs et des égouts, des
routes, des programmes d'emploi, enfin toute une série...
Une voix: La forêt
M. Levesque: ...la forêt, l'environnement. Je vous
remercie, je remercie mes collègues d'en ajouter parce que je peux en
oublier. Ce budget est tel que j'ai été très heureux
d'avoir à le discuter avec mes collègues de la commission. Je
vous remercie encore une fois, chacune et chacun. Nous nous retrouverons, M. le
député de Bertrand, pour la finale, si on peut employer le mot,
à l'Assemblée nationale demain après-midi où vous
ferez le point. Mon dernier propos, c'est un voeu que je veux formuler en
reprenant celui qui a été formulé par mon collègue
le député de Saint-Louis, lorsqu'il a invité le
député de Bertrand à convaincre ses collègues,
à persuader ses collègues qu'il serait dans l'avantage même
de la formation politique dont ils font partie d'appuyer le budget. Merci, M.
le Président.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le ministre des
Finances. Je remercie l'équipe ministérielle, le critique de
l'Opposition officielle en matière de finances ainsi que M. le ministre
lui-même et les fonctionnaires qui vous ont accompagné, pour votre
bonne collaboration. La commission a complété son mandat, soit de
poursuivre le débat sur le discours sur le budget. J'ajourne maintenant,
sine die. Nous allons nous transformer dans quelques minutes en séance
de travail.
(Fin de la séance à 13 h 2)