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(Dix heures sept minutes)
Le Président (M. Lemieux): A l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission du budget et de l'administration est réunie ce
matin pour poursuivre sa consultation générale sur l'avant-projet
de loi sur les caisses d'épargne et de crédit. Dans un premier
temps, nous allons entendre la Confédération des caisses
populaires et d'économie Desjardins du Québec.
Est ce qu'il y a des remplacements, M. le secrétaire?
Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Leclerc
(Taschereau) remplacera M. Fortin (Marguerite-Bourgeoys).
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le secrétaire.
Est-ce que le porte-parole de l'organisme la Confédération des
caisses populaires et d'économie Desjardins du Québec pourrait
s'identifier et nous présenter les personnes qui l'accompagnent?
Confédération des caisses populaires et
d'économie Desjardins du Québec
M. Béland (Claude): Merci, M. le Président. Je suis
Claude Béland, président du Mouvement Desjardins. J'aimerais vous
présenter ceux qui m'accompagnent: à ma droite, M. Guy Bernier,
président du conseil d'administration de la confédération;
à ma gauche, M. Jacques Bertrand, premier vice-président du
conseil d'administration de la confédération et M. Henri-Paul
Trudel, qui est le deuxième vice-président; à
l'extrême droite, M. Jean-Guy Larochelle, conseiller juridique de la
confédération et, à sa gauche, Me Gérard Coulombe,
qui est conseiller juridique conseil.
Le Président (M. Lemieux): Merci. Est-ce que les membres
de cette commission acceptent l'ordre du jour, à savoir qu'à 10
heures, nous entendons la Confédération des caisses populaires et
d'économie Desjardins; à 12 heures, la Fédération
des caisses populaires Desjardins de Montréal et de l'Ouest du
Québec; à 15 heures, l'Union des producteurs agricoles; à
16 heures, le Regroupement des cabinets de courtage d'assurance du
Québec; à 17 heures, l'Association des courtiers d'assurances de
la province de Québec? L'ordre du jour est-il adopté? Voulez-vous
noter, M. le secrétaire, que l'ordre du jour est adopté?
Permettez-moi maintenant de vous rappeler les règles de
l'audition. Vingt minutes sont consacrées, d'abord, à
l'exposé de votre mémoire; suivra une période de quarante
minutes de discussions avec les membres de cette commission.
Une voix: Deux heures.
Le Président (M. Lemieux): Excusez-moi, c'est vrai, dans
le cas de la confédération, effectivement, il s'agit d'une
période de deux heures, de 10 h 7 à midi. Alors, sans plus
tarder, je vais écouter votre mémoire.
M. Béland: M. le Président, si je comprends bien,
j'ai 40 minutes, au maximum.
Le Président (M. Lemieux): Effectivement. M.
Béland: Merci.
Le Président (M. Lemieux): Dans votre cas, je dirais que
c'est exceptionnel, puisque pour la plupart des autres organismes, les
règles étaient de 20 minutes et de 40 minutes pour la discussion
avec les parlementaires. Vous pouvez maintenant procéder.
M. Béland: On l'apprécie grandement, M. le
Président. Je voudrais vous remercier de cette occasion que vous nous
donnez de présenter le point de vue du Mouvement Desjardins sur cet
avant-projet de loi, loi évidemment, qui est extrêmement
importante pour l'ensemble de notre mouvement.
En plus de ceux qui sont à la table ici en avant, j'aimerais vous
souligner la présence des représentants de chacune des
régions. Vous savez que le Mouvement Desjardins est constitué de
dix fédérations régionales et d'une
fédération de caisses de groupes. Nous avons ici des
représentants de chacune des régions, soit les
représentants des fédérations de Montréal, de
l'Ouest du Québec, de Québec, du Centre du Québec, de
Richelieu-Yamaska, de Lanaudière, de l'Estrie, du
Saguenay-Lac-Saint-Jean, du Bas-Saint-Laurent, de la Péninsule et des
îles, de l'Abitibi ainsi que les représentants de la
Fédération des caisses d'économie. Je pense que vous avez
là un témoignage éloquent de l'intérêt que
porte l'ensemble du mouvement à cet important projet de loi. Aussi, le
mémoire que nous avons déposé à la commission est
le résultat d'une très vaste consultation. Même s'il a
fallu faire rapidement, cette très vaste consultation, elle a
été faite dans les semaines qui ont suivi le dépôt
de lavant-projet de loi, c'est-à-dire après le milieu de juin.
Malgré le fait qu'on se soit retrouvés en plein
été, normalement en période de vacances, je dois vous dire
que ce sont vraiment des milliers de dirigeants qui se sont réunis un
peu partout dans les différentes régions du Québec pour
faire connaître leur point de vue sur cet
avant-projet de loi. Je peux dire que notre mémoire, en fait,
contient les réactions et les commentaires majoritaires de milliers de
dirigeants de nos caisses.
En plus, ce mémoire a été entièrement
r»vu Le conseil d'administration a consacré une journée
entière à l'étude de notre mémoire Cette
réunion a eu lieu le 16 août dernier. C'est avec plaisir que je
peux vous dire que notre mémoire a finalement été
adopté à l'unanimité, à la fin de la
journée, par toutes les fédérations qui sont membres de la
Confédération.
Il est vrai qu'à première vue, M. le Président,
notre mémoire peut sembler volumineux et peut laisser croire que le
Mouvement Desjardins a plusieurs revendications à formuler, mais quand
on y regarde de plus près, on se rend compte que, peut-être dans
un esprit de collaboration - on est habitués à cela - ou de
coopération - nous pratiquons ça dans Desjardins - on a
formulé - peut-être trop - plusieurs suggestions qui sont
véritablement d'ordre technique. On s'est permis de les inclure dans
notre mémoire en pensant que ces remarques là pourraient
être utiles lorsque viendra le temps de rédiger la loi d'une
façon finale.
D'ailleurs, je pense qu'il ne faut pas se surprendre qu'il y ait tant de
petites suggestions en regard de plusieurs articles. Il ne faut pas oublier que
la loi qui nous régit depuis 1963, loi qu'on est rendus à
connaître presque par coeur, c'est une loi qui contient 157 articles.
Celle qu'on nous propose maintenant en contient 575. C'est un changement
majeur, au moins en quantité, et il n'est pas surprenant qu'on ait eu
tant de suggestions à vous formuler. Je reconnais que ce fut un travail
colossal. Même si on attend la loi depuis longtemps, il faut admettre que
la reprise des travaux concernant cette loi est quand même relativement
récente. Je reconnais qu'au cours des derniers mois, un travail colossal
a été effectué. Je voudrais profiter de l'occasion pour
remercier d'abord le ministre responsable d'avoir tenu ses engagements parce
que, pour nous, c'est extrêmement important d'être capables de
respecter les échéances qu'on s'était fixées.
J'aimerais souligner le travail important qui a été
effectué par le personnel du ministère, un travail intense,
compétent, et par le personnel du bureau de l'Inspecteur
général. (10 h 15)
Je le répète et je l'ai dit souvent, d'une façon
générale nous sommes satisfaits de l'économie de
l'avant-projet de loi et des objectifs qu'il poursuit. Là-dessus, on
s'entend. On est particulièrement satisfaits de la reconnaissance du
caractère coopératif des caisses et du caractère
coopératif du Mouvement Desjardins. Avec ce nouvel habit
législatif, les caisses vont demeurer des entités distinctes,
autonomes, avec, d'un côté, leurs conseils d'administration
constitués essentiellement de dirigeants bénévoles et, de
l'autre côté, des employés permanents des caisses. Les
caisses Desjardins ont toujours réussi ce mariage harmonieux entre les
bénévoles qui représentent leur milieu et qui fixent les
orientations de leur caisse, et les permanents qui exécutent les mandats
qu'on leur confie. Cela fait que Desjardins, en vertu do la loi actuelle.
n'était pas une grande entreprise C'est plutôt un grand
regroupement de petites entreprises et nous sommes heureux de constater que,
dans la nouvelle loi, cela n'a pas changé. Desjardins ne deviendra pas
une grande entreprise. Ce sera un grand regroupement de petites entreprises. La
plus grosse de nos caisses ou la plus grosse en termes d'actifs a à peu
près 200 000 000 $. La plus petite a 300 000 $ d'actifs et cela ne
change pas. Cela reste des entités autonomes, distinctes, mais qui ont
eu la sagesse au cours de leur histoire de se regrouper sous une même
bannière pour se donner plus de force, pour se donner une meilleure
image, pour se donner des moyens plus importants.
De plus, avec la nouvelle loi, et cela nous plaît, le
contrôle des caisses continuera à ne pas s'exercer en fonction du
capital détenu par les membres. On n'est pas des entreprises
capitalistes et on n'a pas l'intention de l'être non plus, mais on est
satisfaits de voir qu'on va continuer à fonctionner en vertu des
règles démocratiques, de sorte que la propriété de
chaque caisse était et demeurera largement répartie entre tous
les membres, c'est la règle de l'égalité, et de sorte
aussi que les caisses et le Mouvement Desjardins sont et demeureront
inaliénables. II n'y a pas d'OPA, d'offres publiques d'actions,
possibles sur le Mouvement Desjardins et je pense que dans le contexte actuel,
c'est rassurant. Le Mouvement Desjardins ne s'achète pas et de l'autre
côté, il ne se vend pas.
Avec la nouvelle loi, on continuera d'être des entreprises
différentes qui introduisent les règles de
l'égalité des individus et les règles de la
démocratie dans les affaires financières. C'est évident
que de telles règles ne font pas des caisses des entreprises
financières comme les autres. Nous sommes heureux que la loi reconnaisse
ces différences car je pense qu'il faut admettre, j'allais dire
malheureusement, que ces règles ne sont pas comprises facilement par
tous. On ne vit pas dans un environnement qui rend la compréhension de
ces règles facile. En certains milieux, on est portés à
penser, si on les écoute, qu'il ne devrait pas exister de formes
différentes d'entreprises au Québec et qu'il ne devrait y avoir
qu'une seule forme d'entreprises.
Parce que les caisses font des affaires et qu'elles réussissent,
on en conclut qu'elles sont ou qu'elles devraient être des entreprises
capitalistes, comme si on ne pouvait pas faire des affaires sous la forme
coopérative, comme si les coopératives devaient être
uniquement des entreprises pauvres, petites et charitables et que, dès
qu'elles deviennent le moindrement importantes, il faudrait leur donner un
autre habit. Dès qu'elles deviennent des entreprises
financièrement
solides, en fait, dès qu'elles dérangent les autres formes
d'entreprises, il faudrait qu'elles adoptent les mêmes règles du
jeu que les autres.
À entendre certains intervenants, on en vient à comprendre
qu'on voudrait que le Québec n'ait qu'un seul régime pour les
entreprises, soit le régime capitaliste, pas d'entreprises publiques ou
d'État et surtout pas d'entreprises coopératives, surtout celles
qui réussissent. Pour ceux-là, faire des affaires sur une base
démocratique avec l'aide de bénévoles constitue une
concurrence déloyale. Un peu plus et on prohiberait le
bénévolat dans les affaires économiques ou
financières!
J'insiste sur ce point parce que Desjardins tient à son
caractère coopératif. Il a été notre force et il
l'est encore. Il assure notre permanence parce qu'il nous rend
inaliénables et parce qu'on croit surtout que c'est essentiel à
notre mouvement et que c'est bon pour le Québec.
Dès qu'on comprend qu'il est utile et souhaitable que les caisses
soient différentes, il ne faut pas essayer de les entrer dans le moule
des entreprises traditionnelles. Les caisses s'inspirent des valeurs qui ne
sont pas les mêmes que les autres entreprises. Il faut établir
solidement cette prémisse si on veut donner au Mouvement Desjardins une
loi qui lui convienne et qui l'aide à progresser. C'est pour cela que
dans ce sens-là, je dis que nous sommes satisfaits de l'avant-projet de
loi quand il reconnaît ce caractère coopératif des caisses
En permettant aux caisses l'exercice de la démocratie et en favorisant
l'autodiscipline et l'autoréglementation, l'avant-projet de loi favorise
l'exercice de la démocratrie.
On est également satisfaits de l'avant-projet de loi en ce qu'il
donne suite à certaines des intentions exprimées par le
gouvernement dans le livre sur la réforme des institutions
financières qui a été déposé en octobre
dernier. En permettant à des groupes financiers d'avoir des liens
commerciaux et, en particulier, en permettant au Mouvement Desjardins de
créer des sociétés de portefeuille qui pourront regrouper
les entreprises exerçant des activités commerciales, le
gouvernement donne suite à ce qu'il avait annoncé.
On est satisfaits également de voir que le gouvernement
encourage, jusqu'à une limite qui nous semble raisonnable, les caisses
à investir dans du capital de risque des entreprises locales. Il y a
longtemps qu'on parle, au Québec, des difficultés qu'ont les
petites entreprises à se capitaliser. On aura là une nouvelle
source de capital qui pourra certainement être bénéfique
pour ces dernières et, également, pour le développement
économique des régions.
On se réjouit également que l'avant-projet de loi
reconnaisse que la garantie offerte par la capitalisation des caisses sera
calculée sur la base de l'ensemble des caisses affiliées. En
faisant cela, on reconnaît la solidarité des caisses entre elles
et la garantie qu'offre l'ensemble du réseau. Ce sont autant de points
qui nous font dire que nous sommes satisfaits de l'économie
générale de ce projet législatif.
Par contre, il nous apparaît qu'il y a quelques points faibles,
des points qui méritent d'être regardés de plus près
et qui méritent même d'être modifiés. Autrement, on
serait peut-être malheureux de vivre avec certaines des modalités
qui apparaissent dans la loi.
D'abord, je dois vous dire, M. le Président, que nous sommes
très surpris et même déçus que l'avant-projet de loi
ne donne pas suite aux intentions que le livre sur la réforme des
institutions financières avait annoncées en regard du
décloisonnement de l'offre des produits financiers. Quand cette
proposition a été déposée par le gouvernement, cela
a été un peu l'euphorie, en tout cas dans bien des milieux, parce
qu'on disait: Voilà une mesure dynamique progressive. On constatait la
volonté très ferme, qui a été maintes fois
répétée par la suite dans de nombreux discours et dans des
déclarations, de procéder non seulement au décloisonnement
de la propriété des institutions financières...
Écoutez, on ne se serait pas réjouis de cela. On est
décloisonnés au point de vue de la propriété depuis
toujours. La formule coopérative a toujours permis le
décloisonnement des institutions financières. Le Groupe
Desjardins d'assurance générale, c'est dans Desjardins depuis
1944; l'Assurance-vie Desjardins; 1948. Cela n'avait rien de nouveau, le
décloisonnement de la propriété. Ce qui nous
intéressait et ce qui nous semblait innovateur, c'était le
décloisonnement de l'offre des produits, parce que cela nous semblait
bénéfique pour le consommateur. D'ailleurs, on vit
déjà des expériences dans les caisses par l'offre de
produits d'assurances et on a les réponses des consommateurs qui
trouvent cela, non seulement bénéfique au point vue des
coûts, mais aussi au point de vue de l'accessibilité aux
produits.
Maintenant, on peut vendre de l'assurance partout dans toutes les
caisses, parce qu'il y a des caisses partout au Québec. Plus on va
implanter ce service, mieux le Québec va être servi. D'ailleurs,
la documentation qui accompagnait le livre sur la réforme des
institutions dans le communiqué de presse qui annonçait cette
nouvelle, disait ceci. Les diverses régions du Québec et les
diverses clientèles d'épargnants et d'emprunteurs sont mieux
desservies que les clientèles similaires du reste du Canada et
même des États-Unis, et cela tient en grande partie à la
présence d'un réseau de caisses d'épargne et de
crédit uniques en Amérique du Nord. Nous avons compris que
c'était Desjardins. Et on ajoutait: II reste cependant place à
des améliorations - alors, cela nous donnait de l'espoir - et c'est
l'intention du gouvernement, avec la réforme proposée, de
favoriser les clientèles en région et d'améliorer au
profit de tous l'accès-
sibilité aux services et aux produits financiers.
Or, c'est clair que cette nouvelle accessibilité ne se fait pas
tout simplement par un décloisonnement de la propriété des
Institutions financières. Ce n'est pas cela qui rend le produit
accessible. C'est le décloisonnement de l'offre des produits.
D'ailleurs, le quatrième principe de la réforme ajoutait
que: Le gouvernement entend permettre le développement de réseaux
de distribution des services financiers. Ce sont les consommateurs,
principalement ceux des régions éloignées qui
bénéficieront d'un tel principe, notamment grâce au
regroupement en un même lieu - donc, cela veut dire dans le même
endroit - de tous les services financiers requis.
Or, quand on examine le projet de loi attentivement, ces intentions ne
sont certes pas exprimées clairement. Au contraire, l'article 3 confine
les caisses, comme anciennement, dans les strictes activités
d'épargne et de crédit. La seule ouverture qu'on trouve dans la
loi, c'est une disposition qui permet au gouvernement de donner des permissions
ad hoc sur une base discrétionnaire et temporaire, ce qui est moins
généreux, d'ailleurs que ce qui existe déjà dans la
Loi sur les assurances. Je l'ai ici et on y dit que dans les pouvoirs dos
compagnies d'assurances la vente des produits d'une autre institution
financière et pour les activités autres que financières
est autorisée par le ministre. Dans la Loi sur les fiducies, j'admets
que c'est: Toute autre activité doit être autorisée par le
gouvernement.
Même si le gouvernement donne la permission, c'est une disposition
qu'il sera difficile d'exercer puisque dans la loi, on contraint les caisses
à utiliser leurs immeubles uniquement pour leurs propres fins alors que
les fins sont l'épargne et le crédit. En d'autres termes, cela
veut dire qu'on ne peut pas louer nos immeubles à d'autres institutions
financières. Cela nous apparaît important, le droit de louer des
espaces à d'autres fournisseurs de services financiers, c'est essentiel.
Cela doit apparaître clairement dans la loi. Je comprends qu'il peut y
avoir des opinions de conseillers juridiques qui disent: Tout est là
dans la loi. Ils sont plus habiles que nous parce que nous ne l'avons pas
trouvé. Si on ne fait pas ce changement, cela fera perdre des droits
acquis à Desjardins. Même si cette disposition relative à
la location des locaux était précisée, on ne peut pas se
satisfaire d'une permission discrétionnaire et temporaire
accordée par le gouvernement. Le décloisonnement des services
financiers nécessite des investissements trop importants, ce sont des
millions, c'est sérieux, pour qu'on puisse se soumettre à limiter
la durée à la discrétion du gouvernement.
D'ailleurs, la Commission des valeurs mobilières du Québec
s'apprête actuellement à étudier et même à
autoriser une certaine forme de distribution de valeurs mobilières dans
le réseau des banques. Je ne vois pas pourquoi la même ouverture
ne serait pas accordée aux institutions financières à
charte québécoise. Je ne vois pas pourquoi il faudrait attendre
que la concurrence se fasse dans le réseau des banques et ensuite se
dépêcher à changer notre loi et à la rendre plus
claire. Vous comprenez qu'à ce point de vue, on souhaite ardemment que
la nouvelle loi des caisses donnent suite aux intentions que le gouvernement
avait exprimées et qu'elle le fasse d'une façon évidente
pour éviter que les tribunaux soient obligés de les
interpréter. Je préfère que ce soit le gouvernement qui
fasse les lois plutôt que les tribunaux, malgré tout le respect
que j'ai pour les tribunaux. Et que les droits acquis de Desjardins soient
expressément reconnus.
Un autre chapitre, M. le Président, qui a provoqué
beaucoup de réactions chez nous est celui relatif aux transactions
intéressées, aux conflits d'intérêts et à la
responsabilité des dirigeants bénévoles chez nous.
C'est évident qu'avec l'actuelle importance du mouvement, on
reconnaît qu'une certaine réglementation est nécessaire.
Là n'est pas la question. Mais ce qu'on regrette, c'est que
l'orientation proposée dans l'avant-projet de loi ait été
copiée ou développée en faisant référence
aux rêgles qu'on applique aux Institutions traditionnelles. À
notre sens, cela ne tient pas compte de la réalité
coopérative.
Il nous semble que le statut et le rôle des dirigeants
bénévoles font qu'on ne peut leur imposer sans distinction les
règles relatives aux personnes intéressées dans des
entreprises à capital-actions. Il ne faut pas oublier qu'un membre de
caisse est déjà un usager. On ne peut pas être membre d'une
caisse si on n'est pas usager de la caisse. En acceptant un poste de dirigeant,
un membre ne se place pas dans une situation de gain ou d'enrichissement
personnel, c'est un bénévole, mais il se met en situation de
responsabilité, il se met au service de la collectivité. Il
n'acquiert pas plus de droit de vote, il garde un vote. En acceptant
d'être au service de la collectivité, les dirigeants des caisses
ne revendiquent pas des droits ou des pouvoirs, ils acceptent tout simplement
d'être en devoir. Je pense qu'on ne peut pas essayer de
réglementer tous ces dirigeants bénévoles avec autant
d'ardeur qu'on le fait dans l'avant-projet de loi, parce que ce que cela va
donner comme conséquence, c'est qu'on va les démotiver. Et ce qui
a fait la force du Mouvement Desjardins depuis 87 ans, on risque de le
perdre.
On souhaite que soient maintenues les règles de divulgation
d'intérêts actuellement en vigueur lors d'une prise de
décision et de retirer l'obligation de la divulgation écrite et
annuelle imposée aux dirigeants par l'avant-projet de loi. Pourquoi
faudrait-il divulguer tous ses intérêts? On ne sait d'ailleurs pas
ce que veut dire le mot "intérêts" dans la loi. Est-ce que je dois
déclarer des actions de Cascades ou de Bell Canada et être
obligé de me mettre à nu parce que je veux
me mettre au service de la collectivité? On pense qu'il suffit de
confier au comité de déontologie des fédérations la
responsabilité d'établir la liste des personnes liées et
les règles qui les concernent. On a des mécanismes de
contrôle et de surveillance chez nous, cela surfit. Je pense qu'il faut
restreindre la notion d'intérêt à celle qui est susceptible
de présenter des situations conflictuelles, non pas à toutes les
situations. (10 h 30)
En résumé, nous pensons que ces exigences sont beaucoup
trop grandes; des exigences qui risquent de démotiver nos
bénévoles. C'est la même chose relativement aux
dispositions concernant les crédits accordés aux dirigeants. Cela
obligerait plusieurs d'entre eux, parce qu'ils se sont mis au service de la
collectivité, à emprunter à d'autres institutions
financières. C'est pourquoi on demande ou on souhaite que ces
dispositions relatives aux crédits à l'égard des
dirigeants et des personnes qui leur sont liées soient
retranchées et de confier plutôt au comité de
déontologie la responsabilité d'établir l'ensemble des
règles qui porte sur le crédit aux dirigeants.
De la même façon, on pense qu'on est allés un peu
loin dans les contraintes qu'on impose aux directeurs de caisse. Hier, vous
avez eu la présentation d'un mémoire à ce sujet. Je dois
vous dire que si vous regardez notre mémoire, on appuie les demandes de
l'association des directeurs avec quelques nuances près.
Quant à la capitalisation, c'est le troisième point, avec
l'avant-projet de loi, le gouvernement reconnaît l'importance d'une
capitalisation adéquate pour les institutions financières et fait
en sorte d'accorder au réseau des caisses des moyens nouveaux pour
accroître cette capitalisation. On est évidemment d'accord avec
cela parce que le problème de la capitalisation pour Desjardins,
à cause de sa croissance rapide, est un problème important.
Cependant, il nous semble que certaines modifications devraient
être apportées pour faciliter la rémunération de ces
parts. On ne comprend pas pourquoi les caisses les plus faibles ne pourraient
pas rémunérer les parts permanentes. On sera dans un cercle
vicieux, on ne pourra pas en émettre parce qu'ils n'auront pas les
réserves suffisantes. On veut qu'elles se capitalisent justement pour
qu'elles aient de meilleures réserves et soient plus solides. On pense
que ces dispositions sont contraignantes.
On pense qu'on devrait faciliter la transférabilité et la
liquidité. On a suggéré dans notre mémoire un
remboursement à la retraite, et non seulement au décès et
les rendre plus facilement accessibles, en permettant la souscription par
versements. Je n'ai pas besoin de vous dire et d'insister beaucoup sur le fait
qu'on aurait aimé trouver, quelque part dans la loi ou dans le
préambule, une certaine indication que ces parts permanentes
bénéficieront d'un avantage fiscal.
Je comprends que vous allez me dire que je ne suis pas à la bonne
place, mais il reste quand même que dans l'avant-projet de loi, on a fait
une liste de toutes les lois qui seront modifiées. On aurait aimé
voir une indication qu'une loi fiscale, quelque part, serait modifiée
pour répondre à nos demandes ou à nos souhaits. On le
sait, pour favoriser une meilleure capitalisation des entreprises à
capital-actions, y compris les banques qui ont leur siège social au
Québec, le gouvernement a consenti, depuis plusieurs années, des
avantages fiscaux importants aux actionnaires de ces entreprises. Ce sont des
centaines de millions dont les banques ont profité. Même le
ministre des Finances du temps, quand il a déposé le projet de
loi qui créait les REA, s'est empressé de dire: Ce sera
accessible aux coopératives d'épargne et de crédit, il n'y
a pas de raison qu'elles soient exclues. Cela n'a jamais été
fait. Le Mouvement Desjardins souhaite à nouveau que le gouvernement
fasse en sorte d'accorder des avantages fiscaux relatifs aux parts permanentes.
Il nous semble que ces avantages mériteraient d'être comparables
à ceux qui ont été consentis aux autres entreprises
faisant affaire au Québec, en particulier les autres institutions
financières.
Nous avons aussi fait quelques remarques importantes relativement aux
placements. Nous pensons que devrait être reconnu le droit d'une caisse
de louer, en tout ou en partie, un immeuble qu'elle détient, pas
simplement en termes de décloisonnement, mais en termes de
rentabilité. Pourquoi une caisse qui a acheté un immeuble plus
grand que ses besoins actuels, en prévision de l'avenir, ne
pourrait-elle pas avoir le droit de louer l'espace qu'elle n'utilise pas
entre-temps? Il me semble que cela fait défaut. On a demandé
aussi que les pouvoirs de placements des fédérations soient revus
afin de leur donner accès, dans des limites raisonnables, à la
gamme des titres et d'Instruments financiers qui leur permettraient de jouer
efficacement leur rôle. À ce sujet, l'avant-projet de loi nous
semble trop limitatif. On a dans notre mémoire toute une liste de
titres, nous semble-t-il, qui devraient nous être accessibles.
En plus, on pense que la limite de 3 % de l'article 402, qui est
reliée à la détention des placements par les
fédérations, devrait être modifiée de façon
que cela n'entrave pas le développement des sociétés de
portefeuille et de la caisse centrale. Ce sont des organismes qui appartiennent
à Desjardins. Si on maintient la limite, on ne pourra pas aller beaucoup
plus loin, et on sera même obligés de se restreindre. En plus, que
les investissements des caisses, en vue de la détention des
sociétés de portefeuille par le Mouvement Desjardins, puissent
être rémunérés. Ce qui veut dire que l'article 2,
paragraphe 4°, ne peut s'appliquer à la confédération.
Si la confédération ne peut pas rémunérer son
capital social, nos sociétés de portefeuille vont avoir de la
difficulté à fonctionner.
Un autre chapitre qui nous semble extrêmement important parce que
là aussi on pense qu'on exagère les exigences, c'est celui sur
l'inspection des caisses. C'est évident qu'on est d'accord pour
maintenir une fréquence d'inspection des caisses qui va assurer un bon
contrôle et une bonne surveillance dans les caisses. C'est ce qu'on fait
depuis toujours d'ailleurs. Mais actuellement on fait une inspection par caisse
tous les 18 mois environ et une vérification par année.
L'avant-projet de loi suggère une inspection par année.
D'ailleurs, on ne sait pas ce que cela vient corriger, ce que cela vient
améliorer, mais ça impose surtout des coûts additionnels
énormes au Mouvement Desjardins. On parle de coûts additionnels de
l'ordre de 8 000 000 $. Encore là on ne pense pas que cette mesure et
cette dépense additionnelle soient justifiées par ce que cela va
apporter. Il faut tout de même essayer de corriger une situation quand on
modifie une loi. On ne pense pas que cette mesure soit justifiable par rapport
aux besoins et par rapport aux coûts. Nous suggérons de faire une
vérification par année et une inspection par caisse tous les 24
mois. D'ailleurs, aujourd'hui avec les moyens technologiques, avec
l'informatique, on peut vérifier les caisses à distance. On a les
informations presque quotidiennement et il nous semble que les moyens dont on
dispose sont suffisants pour assurer à notre service d'inspection de
jouer son rôle.
Alors voilà, M. le Président, l'essentiel de nos demandes.
Je ne vous ai évidemment mentionné que celles qui nous
apparaissaient les plus importantes.
Hier, le ministre délégué aux Finances et à
la Privatisation, M. Pierre Fortier, a fait une excellente présentation
du Mouvement Desjardins. C'est évident que je n'ai pas l'intention de la
reprendre. D'ailleurs, je préfère laisser plus de temps à
la période de questions. Mais j'aimerais quand même ajouter que ce
mouvement démocratique qu'est le nôtre est, en premier lieu, un
vaste réseau de Québécois et de Québécoises
engagés dans une oeuvre économique qui est unique et qui fait
l'admiration de bien des gens, ici comme ailleurs. J'arrive d'ailleurs, avec
quelques-uns de mes collègues, d'un voyage où on a assisté
à une réunion internationale des coopératives
d'épargne et de crédit. Toutes les coopératives du monde
étaient là; 39 pays étaient représentés. Et
on avait invité le Mouvement Desjardins à venir présenter
ce qu'on a appelé le "jewel of the crown", le joyau de la couronne,
parce que c'est clair que le mouvement coopératif
québécois est un exemple, non seulement par sa réussite,
mais par son fonctionnement. Et on nous a consacré une journée
pour qu'on explique au monde ce qu'était le Mouvement Desjardins.
Les milliers de dirigeants et de dirigeantes qui représentent les
4 200 000 membres de caisses Desjardins attendent une nouvelle loi avec
beaucoup d'espoir. Avec les 29 000 employés du Mouvement Desjardins, ils
veulent continuer de bâtir une institution financière et
socio-économique forte, dynamique, inaliénable qui saura
répondre à leurs aspirations et à celles des
générations futures, tout en permettant le développement
continuel du Québec. Je vous remercie, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. Béland. M. le
ministre délégué aux Finances et à la
Privatisation.
M. Fortier: Avant de commencer, M. le Président,
étant donné que nous disposons de deux heures, est-ce que je
pourrais prendre quinze minutes parce que hier on était limités
à des périodes de dix minutes?
M. Garon: On suit le règlement.
Le Président (M. Lemieux): Malheureusement, M. le ministre
délégué aux Finances et à la Privatisation, je me
dois d'appliquer l'article du code..
M. Fortier: Je demande le consentement. Est-ce que le
député de Lévis serait d'accord pour qu'on prenne quinze
minutes, parce que les sujets...
M. Garon: Je pense que ta meilleure façon, c'est de suivre
le règlement. Autrement, cela finit par du barguinage qui n'en finit
plus et qui parfois même jusque dans le milieu de la nuit, comme on a
déjà vu, et on se fait reprocher cela après.
Le Président (M. Lemieux): Déjà, on a un
accroc au règlement relativement à la durée de cette
audition des caisses.
M. Fortier: M. le Président, j'indique tout de suite au
Mouvement Desjardins que si je ne peux pas répondre à vos
demandes, c'est parce que le règlement s'applique.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Lemieux): Je me dois d'appliquer...
M. Fortier: Alors, prenez-en note. C'est le député
de Lévis qui a indiqué qu'il fallait s'en tenir au
règlement.
Le Président (M. Lemieux): Excusez-moi, M. le ministre.
J'aimerais vous faire remarquer que je dois appliquer strictement l'article 169
dans votre cas et aussi dans le cas du député de Lévis qui
n'aura pas plus de temps.
M. Fortier: Je ne m'en prends pas à vous, M. le
Président, parce que par consentement mutuel, on peut ici modifier
toutes les règles de l'Assemblée nationale.
Le Président (M. Lemieux): Effectivement. Alors, la parole
est à vous, M. le ministre.
M. Fortier: Allons-y, M. le Président. Je vais essayer de
procéder le plus rapidement possible. Vous comprendrez qu'en dix
minutes, tous les points qui ont été soulevés ne pourront
pas trouver réponse et j'ai des questions. Dans un premier temps,
j'aimerais remercier M. Béland pour les bons mots qu'il a eus à
mon égard. Il est vrai qu'on a pris ce projet très au
sérieux et je crois que l'Inspecteur général des
institutions financières, M. Bouchard, et son contentieux ont
travaillé très fort depuis le moment, M. Béland, où
vous êtes devenu président de la confédération. Le
député de Lévis s'inquiétait hier des délais
depuis 1984. Je suis le ministre responsable depuis l'automne 1986 et depuis
votre élection en particulier, on a mis tout en oeuvre, je dis
absolument tout en oeuvre, et vous le savez, pour arriver avec un avant-projet
de loi qui puisse être discuté. Vous-même avez dit, dans vos
remarques préliminaires, que vous n'aviez pas eu tout le temps
nécessaire pour aller chercher les commentaires du mouvement. Tout cela
pour dire qu'on essaie de progresser le plus rapidement possible.
Mon deuxième mot serait de dire qu'il s'agit d'un projet de loi
public et je sais que vous le reconnaissez. Donc, il ne s'agit pas d'un projet
de loi privé. Il ne s'agit pas nécessairement du projet de loi
proposé par le Mouvement Desjardins. Je crois qu'on a pris dans le
passé très bonne note des commentaires, des recommandations, des
demandes du Mouvement Desjardins. Sans vouloir être brutal à ce
sujet, je dois indiquer tout simplement qu'en définitive nous
écoutons vos demandes et nous allons tout faire pour essayer de
satisfaire à certaines d'entre elles. Mais finalement, les
parlementaires autour de cette table auront à décider du contenu
du projet de loi, et je crois que vous le reconnaissez parce qu'il s'agit pour
nous d'assumer nos responsabilités vis-à-vis de toute la
population du Québec. Il est vrai que le Mouvement Desjardins, c'est
quasiment 4 000 000 de personnes. On peut dire que cela représente
à peu près tous les électeurs du Québec.
J'indiquais hier, dans mes remarques, je crois que vous le savez, que j'avais
une profonde admiration pour le Mouvement Desjardins et je crois que tous les
députés autour de cette table connaissant le travail des
bénévoles depuis le début du siècle et de ceux qui
sont là présentement. Je crois qu'on est tous fiers du Mouvement
Desjardins. Mais, justement à cause de son importance, certains diront
malheureusement...
Mais je crois que le gouvernement doit prendre en considération
les difficultés d'institutions financières, des
difficultés qui sont survenues dans d'autres provinces canadiennes et
même dans d'autres pays. Je ne crois pas qu'on puisse imputer des motifs
inavoués au gouverne- ment lorsque ce dernier s'inspire de situations
désastreuses qui se sont produites dans d'autres provinces canadiennes.
Il est vrai que jusqu'à maintenant le Mouvement Desjardins s'est
très bien acquitté de sa tâche. On peut dire que depuis
environ 20 ans, depuis les années soixante-dix, c'est devenu une
institution financière majeure au Québec. Il recueille
présentement le tiers de tous les dépôts des
Québécois. Justement à cause de son importance, il faut
absolument que nous ayons des règles qui préservent et qui
garantissent les dépôts des Québécois. Cela dit,
j'admets qu'il y a des ajustements à faire dans l'avant-projet de loi et
c'est précisément la raison pour laquelle nous avons une
commission parlementaire.
J'aimerais, dans un premier temps, parler des conflits
d'intérêts. Nous en avons parlé hier. Un membre du
mouvement est venu exprimer son point de vue bien ouvertement. Des notaires
sont également venus nous dire qu'ils étaient en conflit
d'intérêts, mais mon Dieu, que cela se pratiquait depuis je ne
sais combien d'années et que cela devrait continuer. (10 h 45)
Une voix: C'est historique.
M. Fortier: Les mêmes notaires étaient venus nous
dire, il y a deux mois, qu'ils étaient les mieux placés,
n'étant pas en conflit d'intérêts dans le domaine de la
planification financière. Je dois admettre que j'ai de la
difficulté à concilier la demande de la Chambre des notaires qui,
dans le cas de la planification financière, ne voulait pas permettre
à des gens payés à commission, de faire leur planification
financière parce qu'ils n'avaient aucun conflit d'intérêts.
Hier, ils sont venus nous dire: Mon Dieu, s'il y avait des conflits
d'intérêts, ce n'était pas important après tout.
Tout ça pour dire que je crois qu'il y a des ajustements à
faire, mais j'aime autant vous dire tout de go que je ne crois pas que le
gouvernement ou l'Assemblée nationale puisse déléguer
toute la responsabilité de la déontologie au Mouvement
Desjardins. Je crois que le gouvernement a mis certaines dispositions dans le
projet de loi, je pense aux articles 208 et 209, et que je sache, dans votre
présentation à tout le moins, vous n'avez pas invoqué ces
articles plus particulièrement. Ce sont des articles assez
sévères. Vous avez parlé, bien sûr, de l'article 203
et j'ai de la misère à concilier votre demande avec l'article
203. Ce n'est pas l'article 203, mais celui qui traite de la
rémunération. Lequel est-ce, M. Bouchard? On y parle de
rémunération et on y dit qu'une caisse peut souscrire. Je parle
de l'article où on traite justement de la limite d'emprunt que peut
faire un dirigeant bénévole. Lequel est-ce? C'est l'article 251
probablement.
Mais il est dit très clairement à l'article 253,
justement, que c'est le comité de déontologie qui
détermine les règles pour les bénévoles. C'est pour
cela que vous sembliez indiquer
dans votre présentation que le gouvernement était
allé trop loin et je crois que vous faisiez écho en particulier
à tout ce qui touche la divulgation annuelle et là-dessus,
j'admets qu'on peut faire des adoucissements. Mais l'article 253 dit: Une
caisse ne peut consentir du crédit à l'un de ses dirigeants ou
à une personne qui lui ost liée pour un montant total
oxcédant le salaire annuel de ce dirigeant s'il est rémuné
ré - là, on parle d'une personne rémunérée -
ou, s'il ne l'est pas, le montant déterminé par le comité
de déontologie. Alors, le Mouvement Desjardins souhaiterait qu'on dise:
Pour les bénévoles, laissez-nous le soin de déterminer les
règles dans les cas des prêts qui seront consentis. C'est
justement ce que dit l'article 253 qui impose une limite pour ceux qui sont
rémunérés, mais pour ceux qui ne sont pas
rémunérés, c'est exactement ce que vous indiquez.
C'est la raison pour laquelle je crois que votre demande principale, en
ce qui concerne les conflits d'intérêts, touche la divulgation
annuelle et vous avez indiqué, M. Béland, qu'il serait, bien
sûr ridicule de demander à un bénévole de nous dire
s'il détient 50 actions de Bell Canada, 30 actions de Cascades, et tout
ça. Là n'est pas la question. Notre intention était
plutôt de savoir, dans une déclaration annuelle, si une personne
contrôlait 10 % de Bell Canada ou 10 % de Cascades. Comme de raison, ce
sont des cas bien particuliers. De toute façon, je puis vous indiquer
immédiatement qu'on pourrait continuer la conversation plus tard,
à un autre moment, afin d'essayer de trouver des adoucissements puisque
l'intention n'était pas d'obliger une personne à déclarer
totalement son portefeuille total de valeurs mobilières.
J'aimerais quand même préciser. On parle de conflit
d'intérêts et de transactions intéressées. Les
transactions intéressées sont plus importantes parce que comme
vous le savez, notre politique vise à permettre les liens commerciaux et
le gouvernement fédéral et tous ceux qui s'opposent en
particulier aux liens commerciaux le font parce qu'ils disent qu'il y a des
dangers pour la santé financière des institutions
financières. Prenons un exemple. Il est certain que si la
fédération de Montréal a un lien particulier avec Culinar,
ce n'est qu'une hypothèse, ou une autre société
industrielle ou commerciale et que cette société industrielle ou
commerciale est en difficultés financières, la dernière
chose que nous souhaiterions, c'est que la fédération de
Montréal se mette à injecter de l'argent dans cette
société. Et c'est la raison pour laquelle il y a des dispositions
très sévères concernant les transactions
intéressées. Là, on ne parle pas d'individus, mais de
transactions intéressées entre des composantes du mouvement Je
voulais simplement clarifier et vous demander si vous ne croyez pas,
étant donné les motifs qui nous animent, que ces règles
concernant les transactions intéressées ne devraient pas
exister.
Nous permettons les transactions intéres- sées, mais on
croit qu'elles doivent être contrôlées et, en particulier,
s'il y a des transferts d'actifs, que ces transferts d'actifs soient
autorisés par l'inspecteur des institutions financières. Donc, ma
question est double. Dans le cas de l'article 253, je croyais que cela
répondait à votre demande. Dans le cas des transactions
intéressées, je crois que vous avez une; demande1 dans
votre texte, indiquant que pour les services rendus par la
confédération, ils ne devraient pas être rendus
nécessairement à la juste valeur marchande. Compte tenu de ce que
je viens de dire pour les transactions intéressées, je me
demandais si vous aviez des commentaires à faire eu égard
à l'objectif que nous avons et qui est d'assurer la santé
financière du mouvement, même en permettant les liens commerciaux
avec le Mouvement Desjardins.
Le Président (M. Lemieux): M. le président.
M. Béland: M. le Président, je suis très
heureux d'entendre le ministre dire que, quant à l'article 204, il y a
sûrement des discussions qu'on peut entretenir pour essayer d'adoucir ces
dispositions.
Quant à l'article 253, dans le fond, c'est qu'il y a toute la
notion des personnes liées. On trouve que cela va très loin quand
on parle du dirigeant d'une caisse. Il ne faut pas oublier aussi que, dans la
loi, on dit que cela s'applique aux personnes liées, donc le conjoint,
les associés, le fils, la fille, etc. Alors, il y a toute une panoplie
de personnes qu'on vise simplement parce que quelqu'un est dirigeant d'une
caisse. Là-dessus, on a demandé des précisions. Pour
l'article 253 aussi, on s'interrogeait sur la question des immeubles. Je ne
sais pas si M. Larochelle voudrait ajouter sur la subtilité de cet
article.
M. Larochelle (Jean-Guy): On trouvait que la disposition
n'était pas uniforme en ce qui concerne les dirigeants, surtout ceux qui
sont rémunérés. Particulièrement, on se
réfère à une limite en ce qui concerne un montant qui peut
être couvert par une hypothèque. Partant de là, comme M.
Béland l'exprime, cela touche aussi non seulement la personne qui est
rémunérée par la caisse - d'ailleurs, l'article ne
précise pas par qui la personne est rémunérée, on
ne précise pas si elle est rémunérée par la
caisse.
M. Fortier: On parle de quelqu'un qui est
rémunéré par le Mouvement Desjardins. On ne parle pas de
quelqu'un rémunéré par le gouvernement du Québec ou
une société privée.
M. Larochelle: Après en avoir fait la lecture, on a
compris que l'intention était cela. Mais on demandait des ajustements
par rapport à l'article 253 en ce qui concerne des précisions
à cet égard. Aussi, cela vise, comme je le mentionnais, le
directeur de la caisse, les personnes
autorisées à consentir du crédit, ainsi que les
personnes qui leur sont liées. Cela vise la question des compagnies,
dont le directeur ou la personne qui est autorisée à consentir du
crédit à des actions jusqu'à concurrence de 10 % et les
associés. Par exemple, toutes ces personnes seraient limitées
quant au montant qu'elles pourraient emprunter à la caisse à un
montant qui équivaudrait à celui qui ne peut pas dépasser,
par exemple, un montant garanti par hypothèque. Alors, toutes ces
personnes qui font des affaires, qui ont des liens avec la caisse se verraient
empêchées, comme le dirigeant rémunéré, de
faire des emprunts pour leurs besoins à la caisse.
M. Fortier: La difficulté...
Le Président (M. Lemieux): Je m'excuse, M. le ministre,
votre temps de parole est terminé; d'ailleurs, il est terminé
depuis deux minutes. M. le député de Lévis, vous avez la
parole.
M. Garon: M. le Président, je voudrais remercier les gens
du Mouvement Desjardins d'avoir présenté un document
étoffé et qui est surtout très clair, au fond. On n'aurait
quasiment pas besoin de poser des questions. C'est pour cela que ma
première question s'adresserait plutôt au ministre. Je voudrais
savoir, puisque c'est une des principales interrogations que vous posez ici
aujourd'hui et, vous vous êtes même référé au
livre sur la réforme des institutions financières, si le ministre
est toujours d'accord avec son livre sur la réforme des institutions
financières et sur le décloisonnement de l'offre des produits
financiers, tel qu'il a été mentionné par le Mouvement
Desjardins.
M. Fortier: Est-ce que j'ai droit de parole, M. le
Président?
Le Président (M. Lemieux): Oui, M. le ministre, dans le
temps...
M. Fortier: Là, je voulais respecter le
règlement.
Le Président (M. Lemieux): ...de parole du
député de Lévis. M. le ministre.
M. Fortier: Bien sûr, pour répondre très
brièvement au député de Lévis, je ne renie
absolument pas la politique que j'ai mise de l'avant. Bien sûr, on a
parlé de décloisonnement par filiales. Une des demandes, si vous
lisez le texte du Mouvement Desjardins, on va plus loin que cela parce que...
D'ailleurs, comme les banques, le Mouvement Desjardins voudrait que tout
représentant de la caisse puisse vendre de l'assurance ou d'autres
produits financiers. Ce n'est pas la politique du gouvernement. La politique du
gouvernement veut permettre le décloisonnement par filiales. Par
filiale, cela peut signifier que le Mouvement Desjardins a une filiale dans le
domaine de l'assurance générale. Je l'ai toujours dit, je suis en
faveur - et la loi le permet présentement selon notre jurisconsulte - de
permettre à un représentant de la Société
d'assurance générale d'avoir un poste à l'intérieur
de la caisse et de vendre de l'assurance générale.
Le Mouvement Desjardins a pris une participation dernièrement
dans Disnat. En conséquence, notre politique de décloisonnement
par filiales devrait permettre aux représentants de Disnat, selon les
règles de la Commission des valeurs mobilières... À ce
sujet, j'aimerais dire qu'étant donné qu'on a une commission
parlementaire sur le décloisonnement des intermédiaires, j'irai
au Conseil des ministres prochainement; on va établir une politique
générale et, éventuellement, si les membres de la
commission sont d'accord, le ministre pourra obtenir un pouvoir de directives
pour faire en sorte que la même politique s'applique partout et puisse
même influencer la Commission des valeurs mobilières.
Je sais que la Commission des valeurs mobilières, par
l'instruction générale Q-24 - je crois - devrait permettre au
Mouvement Desjardins d'avoir à l'intérieur de ses caisses un
représentant de Disnat ou d'avoir une personne autorisée à
cet effet.
C'est donc pour répondre au député de Lévis.
Oui, le gouvernement, le ministre qui vous parle, est convaincu qu'on doit
permettre le décloisonnement par filiales et faire en sorte que le
représentant de Disnat puisse se retrouver à l'intérieur
de la caisse et qu'un représentant d'assurances générales
puisse se retrouver également à l'intérieur de la
caisse.
C'est un décloisonnement différent de ce que certaines
personnes peuvent demander. C'est ce que j'appelle le décloisonnement
par filiales utilisant le réseau. Le jurisconsulte croit - je crois que
les avocats du Mouvement Desjardins sont d'accord - que la loi actuelle le
permet. Mais le contentieux de l'inspecteur des institutions financières
croit que l'avant-projet de loi devrait le permettre également. Mais
j'ai pris bonne note de votre commentaire en ce sens que, comme disait
Talleyrand, si cela va sans dire, cela ira encore mieux en le disant. En tout
cas, on va y réfléchir et c'est là, je crois, où on
devra, à la suite de cette commission parlementaire, examiner si on doit
être plus explicite ou si le texte actuel est assez explicite.
Enfin, le contentieux de l'inspecteur me dit que le texte actuel est
suffisamment explicite. Mais j'ai pris bonne note de vos commentaires.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le ministre. M. le
député de Lévis, vous pouvez continuer.
M. Garon: J'aimerais demander à M. le président si
c'est cela qu'il voulait dire ou si c'est ce qu'il recherche d'avoir un
représentant de Disnat dans les caisses populaires ou si c'est
cela qui...
M. Béland: Le problème actuellement, vous le savez,
M. le député de Lévis, c'est que même si c'est clair
dans la loi actuelle, ce n'est pas clair pour tout le monde, ce n'est
môme pas clair pour certains juges. Alors, je me dis que si c'est
l'intention du législateur, il faudrait que le législateur le
dise clairement, parce que, sans cela, ce sont les juges qui vont faire le
décloisonnement au Québec et qui vont faire la loi.
Apparemment, ce n'est pas clair dans la loi, même s'il y a des
jurisconsultes qui disent que c'est clair. Mais il y a des juges qui disent que
ce n'est pas si clair que cela. Alors, c'est la belle occasion, si c'est
l'intention du gouvernement de faire le décloisonnement de l'offre des
produits financiers de rendre cela clair. Si on veut s'en remettre aux
tribunaux, on ne sait pas ce qu'on va avoir en fin de compte. C'est là
qu'est toute la question et on a même des conseillers juridiques qui nous
disent que dans lavant-projet de loi cela va être pire, parce que je ne
peux pas installer un vendeur d'assurances chez moi ou dans une caisse si je ne
peux lui louer un coin de mon local.
Quand on dit dans la loi que les caisses peuvent acquérir des
immeubles, mais ne les utiliser pour leurs fins et que les fins, c'est,
à l'article 3, l'épargne et le crédit, je vais
probablement me faire dire par des jurisconsultes ou des juges: Vous ne pouvez
pas louer pour des fins de vente d'assurances.
Alors, il faut rendre cela clair. Si c'est l'intention du gouvernement,
je dis bravo, on est bien contents et on ira probablement plus loin
après si la Commission des valeurs mobilières le permet. Mais il
faut s'assurer que je peux installer dans le local de la caisse des gens qui
sont des représentants d'autres institutions financières. On ne
veut pas commencer l'histoire des pharmacies en mettant un rideau pour montrer
que l'assureur n'est pas dans la caisse, que le vendeur de valeurs
mobilières n'est pas dans la caisse et faire des espèces de
divisions psychologiques. Faisons-le clairement et si c'est l'intention du
gouvernement, je dis: Comme il y a des doutes, disons-le clairement. (11
heures)
M. Garon: Pensez-vous qu'avec les amendements apportés, je
ne sais pas si vous êtes au courant - vos conseillers juridiques le sont
-vous allez vous référer aux sociétés de fiducie?
Quand le projet de loi a été déposé, il
était clair, à notre avis. Il disait qu'on pouvait offrir les
produits d'une autre institution financière. Mais en cours de
débat, le ministre a amendé la loi pour faire sauter cette
disposition et introduire la notion, dans le préambule de l'article ou
dans le premier paragraphe, d'intermédiaire financier.
Sans donner mon opinion personnelle - je l'ai assez donnée
là-dessus dans le temps - qu'en pensez-vous? Pensez-vous qu'en faisant
cela on clarifiait le projet de loi ou si on ne le rendait pas plus ambigu?
M. Béland: Ce qu'on nous propose actuellement, c'est ce
qu'on retrouve dans la Loi sur les sociétés de fiducie, en somme.
On dit: Vous êtes des entreprises d'épargne et de crédit.
Pour les autres activités, vous viendrez demander la permission au
gouvernement. Nous disons que même si le gouvernement nous le donne, ce
n'est pas clair qu'on peut louer à d'autres fournisseurs de services
financiers. Il faut clarifier la question du droit de louer ou de sous-louer.
Ensuite, on devrait avoir dans la loi, tout de suite, comme dans la Loi sur les
assurances, la vente des produits des autres institutions financières.
C'est notre point de vue. Le reste, cumuler des fonctions, que le vendeur
d'assurances soit en même temps un vendeur de valeurs mobilières,
on comprend que cela fait partie de l'autre dossier des intermédiaires
financiers. On est prêts à s'y soumettre. Dans l'immédiat
au moins, on veut être capables de sous-louer des parties de nos caisses
pour pouvoir asseoir un représentant des compagnies d'assurances ou un
représentant d'une compagnie de courtage en valeurs mobilières.
On veut avoir ce qu'il y a dans la Loi sur les assurances qui permet la vente
des produits d'une autre institution financière.
M. Garon: Je me rappelle quand j'étais professeur en
institutions financières à la Faculté de droit, j'invitais
chaque année entre 1970 et 1976, dans le cadre du cours sur les caisses
d'épargne et de crédit, M. Alfred Rouleau. Il me disait que son
rêve était que les caisses populaires deviennent un genre de
centre commercial de produits financiers où quelqu'un pourrait trouver
toute la gamme - s'habiller de la tête aux pieds sur le plan financier -
en pouvant faire de bons choix puisqu'il n'y aurait pas d'avantages à
vendre un produit plus que l'autre La caisse pourrait offrir tous ces produits.
Tout cela n'est pas d'hier, en 1970 et 1976. Ce n'était pas une vue
personnelle. C'était une orientation du mouvement. Pensez-vous qu'avec
lavant-projet de loi tel que rédigé actuellement, vous pourriez
arriver à offrir cette gamme de produits financiers pour habiller
entièrement votre membre?
M. Béland: À notre avis, ce n'est pas clair. On
pense même que cela donne lieu à des interprétations dans
le sens contraire. On ne pourrait pas le faire. Si c'est vraiment aussi le
rêve du ministre de créer les supermarchés financiers, il y
aurait avantage à ce que cela soit évident dans la loi, pour
éviter toute contestation et que la volonté du gouvernement soit
clairement établie. Cela ne nous semble pas clair. C'est notre opinion.
On peut se tromper. Mais on pense qu'il y aurait de la place pour de
l'amélioration.
Le Président (M. Lemieux): Vous avez
terminé, M. le député de Lévis. Je viens de
le demander au secrétaire. M. le ministre délégué
aux Finances et à la Privatisation, vous avez la parole.
M. Fortier: J'aimerais continuer sur le même sujet. Hier,
nous avons eu des représentations touchant l'article 216. Certaines
personnes s'insurgent que le gouvernement puisse ajouter ou soustraire. Cela
est indépendant. Même si nous accédions à votre
demande, M. Béland, en ce qui touche un point particulier, il y aura
toujours dans l'avenir, compte tenu du décloisonnement, d'autres
situations que nous n'avons pas prévues et que nous ne pouvons pas
prévoir actuellement.
Dans votre mémoire, vous avez fait objection à l'article
216 qui permettrait au gouvernement d'autoriser ou de retirer un pouvoir. Cela
n'a pas de bon sens. C'est ce que j'aimerais expliquer. La difficulté
que nous avons, c'est que M. Bernier prend toujours des initiatives assez
considérables. Lorsque M. Bernier a pris l'initiative de commencer
à vendre des voyages dans ses caisses, la difficulté que nous
aurions dans l'avenir, c'est que peut-être nous pourrions
interpréter la loi, si nous étions trop généreux,
en disant: Vous avez le droit de vendre n'importe quoi. Je voulais indiquer
à M. Béland que nous n'avons pas l'intention d'autoriser le
Mouvement Desjardins à vendre des voyages dans les caisses. C'est la
raison pour laquelle le gouvernement s'est donné un pouvoir. À
supposer qu'un avocat puisse interpréter la loi en disant. La nouvelle
loi permet au Mouvement Desjardins de vendre des voyages dans les caisses, nous
voulons avoir le pouvoir de le retrancher. Même si on accédait
à votre demande - et c'est ce que je voulais vous dire - de clarifier le
point particulier que vous soulevez, il y aura toujours des situations dans
l'avenir où le gouvernement devrait statuer pour augmenter ou, je ne
l'espère jamais, pour soustraire. J'admets que c'est un pouvoir qui est
d'ailleurs balisé. Les banquiers disaient hier qu'il s'agissait d'un
pouvoir qui était trop grand et non public. Mais il faut bien comprendre
qu'au Québec, en particulier, tout décret de ce genre est
approuvé par le gouvernement et prépublié durant 45 jours,
en tout cas il y a des délais qui font que ces décrets sont
connus de tous et qui permettent à tout individu de faire des
représentations au gouvernement. Il ne s'agit pas d'une décision
unilatérale. Vous avez noté, M. Béland, que dans la Loi
sur les compagnies d'assurances en particulier, le ministre peut statuer
d'office, j'admets que c'est un pouvoir très considérable, tandis
qu'ici le ministre doit aller au Conseil des ministres faire approuver un
décret, le faire publier dans la Gazette officielle,
prépublication, publication et permettre à tout le monde de
faire valoir son point de vue.
Je ne mentionnais pas cela comme argument contre ce que vous aviez dit,
mais simplement pour dire que même si on accédait à votre
demande, l'article 216, pour nous en tout cas, s'imposait pour baliser
l'avenir, mais pour autant que l'avenir soit un peu incertain.
Le Président (M. Lemieux): Oui, M le président.
M. Béland: M. le ministre, la partie qui nous
inquiète, c'est étant donné qu'il faudrait toujours
demander au gouvernement la permission d'instaurer un nouveau service, une fois
qu'il va soit l'accorder ou la refuser... S'il la refuse, il va interdire
l'exercice pour toujours, mais s'il l'accorde, on ne voit pas pourquoi, il se
réserve, après l'avoir accordée, le droit d'en interdire
l'exercice. On est dans un nouveau modèle. Il n'est pas question
maintenant de lancer de nouveaux services puisqu'on est contraints de demander
la permission au gouvernement. Une fois que vous l'aurez accordée,
pourquoi vous réservez-vous le pouvoir d'en interdire l'exercice? C'est
ce qui nous Inquiète. On dit: On va investir, avec la permission du
gouvernement, pour lancer, par exemple, la vente d'assurance dans les caisses
et, ensuite, après des pressions de part et d'autre, le gouvernement va
changer d'idée et va en interdire l'exercice. Cela nous semble
discrétionnaire et temporaire.
M. Fortier: Sur l'exemple que vous donnez, je suis
entièrement d'accord. Alors, on pourrait discuter ensemble afin de
savoir de quelle façon (e gouvernement aurait un pouvoir pour
éviter que le mouvement prenne des initiatives qui débordent le
secteur des institutions financières.
M. Béland: Bien, il ne serait pas autorisé. M.
Fortier: Ha, ha, ha! Oui.
M. Béland: Vous l'arrêteriez, parce que vous ne
l'auriez pas autorisé. On parle d'autorisation et on parle en même
temps d'interdiction d'exercice. Alors, on se dit: Une fois que c'est
autorisé, cela veut dire que ce n'est pas permanent. Et cela, c'est
inquiétant. Cela ralentit évidemment notre enthousiasme, cela
ralentit nos investissements.
M. Fortier: Mais sur la question de la sous-location, je pense
que c'est un aspect qu'on va regarder attentivement parce que,
indépendamment de sous-location à l'intérieur de la
caisse, si vous vous souvenez de certains intervenants qui étaient
contre l'idée du Mouvement Desjardins de vendre de l'assurance dans les
caisses, ils disaient: Que les caisses, à ce moment-là, vendent
de l'assurance dans le sous-sol ou au deuxième étage. Mais pour
accéder, même à cette demande de ceux qui s'opposaient
à la vente d'assurance dans les caisses, il faudrait au moins que le
Mouvement Desjardins ou que les caisses puissent sous-louer...
M. Béland: ...le sous-sol.
M. Fortier: . dans le sous-sol ou au deuxième
étage, mais qu'il puisse sous-louer à l'intérieur du
même édifice ou quelque chose du genre.
M. Béland: C'est exact.
M. Fortier: C'est un aspect qu'il faudrait examiner et
savoir...
M. Béland: Merci.
M. Fortier: Est-ce que j'ai... Pardon? Il reste un peu de
temps?
Le Président (M. Lemieux): Oui
M. Fortier: Sur la question de la capitalisation, je crois qu'il
s'agit là d'un aspect très important. Vous avez formulé
certaines demandes sur la rémunération, je pense qu'on pourrait
en discuter; je pense qu'on n'a pas d'objection de principe à regarder
certains des détails importants que vous avez évoqués. De
toute façon, je pense bien que lorsqu'on va aborder tout le
détail de la fiscalité, étant donné que,
normalement, lorsque les gens arrivent à 65 ans, qu'ils veulent... Parce
qu'il pourrait arriver que ces parts permanentes se retrouvent dans un REER et
qu'à 65 ans, la personne doive prendre une décision. Donc, il va
falloir qu'on examine cela.
Bien sûr, le ministre des Finances s'inquiète, lui, de la
flexibilité trop grande qui serait donnée, parce que s'il donne
un abri fiscal, il ne voudrait pas que les gens, une année, se mettent
à acheter des parts permanentes ou des parts privilégiées
pour les racheter l'année suivante, pour en racheter l'année
d'après, pour toujours bénéficier de l'abri fiscal. Enfin,
vous connaissez toute la réglementation qui entoure le Régime
d'épargne-actions, mais je crois quand même qu'on peut
répondre à plusieurs des demandes que vous avez
formulées.
Bien sûr, vous avez exprimé l'idée qu'il aurait
été préférable qu'il y ait des dispositions dans
l'avant-projet de loi. Comme vous le savez, il y a des discussions et le
ministre des Finances et son ministère sont en train d'examiner le
détail. Je peux vous dire d'ores et déjà que c'est en
bonne voie. Bien sûr, la loi n'est pas encore adoptée. Le ministre
des Finances, lui, ne veut pas franchir le Rubicon avant d'y être rendu
On ne connaît pas la date et le moment où vous aurez besoin de
cette disponibilité, mais l'intention est de donner une déduction
fiscale à l'achat de parts permanentes des caisses populaires, avec un
programme initial avec certaines contraintes, mais je ne suis en mesure de
faire aucune annonce au nom du ministre des Finances présentement.
En ce qui concerne la capitalisation, c'est un point important, conflit
d'intérêts, décloisonnement. Il y avait un aspect qui ne me
vient pas à l'esprit... En ce qui concerne la capitalisation, je crois
qu'un point important était le fait que... Dans le mémoire de la
fédération de Montréal qu'on va entendre
immédiatement après, on dit: Écoutez, il faudrait
également permettre la capitalisation des fédérations.
Comme vous le savez, depuis un an qu'on a discuté de ce sujet ensemble,
parce qu'il s'agit d'un sujet extrêmement important, la discussion qui
s'est faite entre nous - je le dis bien ouvertement - est à savoir:
Est-ce qu'on devrait favoriser la capitalisation des caisses, est-ce qu'on
devrait favoriser la capitalisation des fédérations ou est-ce
qu'on devrait favoriser la capitalisation de la
confédération?
On peut penser - c'est une des options -qu'un titre Desjardins au niveau
de la confédération puisse être vendu et ne pas permettre
des émissions d'actions au niveau des fédérations et des
caisses. Étant donné que vous dites que votre mémoire a
reçu l'appui de toutes les fédérations, ce n'est pas
évident, en lisant le mémoire de la fédération de
Montréal, que cette dernière a appuyé fortement le
mémoire de la confédération. Est-ce que je pourrais vous
demander si vous avez fait l'unanimité sur la capitalisation? Vous
savez, le ministre des Finances lit les journaux comme tout le monde, chaque
fois que je le rencontre, il dit: Où sont-ils branchés? Est-ce au
niveau de la confédération, de la fédération ou des
caisses?
Le Président (M. Lemieux): Une minute, M. le ministre.
M. Fortier: Alors, bien sûr, on peut presser le ministre
des Finances de statuer, mais tant que la confédération n'a pas
fait l'unanimité avec toutes ses fédérations, le ministre
des Finances peut retarder sa décision.
Le Président (M. Lemieux): M. Béland.
M. Béland: M. le Président, d'ailleurs, j'ai
noté que dans le discours d'ouverture du ministre, hier, il faisait
allusion, justement, à cette grande question à savoir si on
devait capitaliser au niveau de la confédération ou des
fédérations. Hier soir, je dois vous dire que nous avons
réuni l'exécutif et nous avons pris la décision de changer
notre mémoire à la dernière minute au sujet de la
suggestion que la capitalisation se fasse au niveau des
fédérations. Cette décision avait été prise
le 16 août. En la revoyant et en constatant les difficultés que
cela comporte, hier, l'exécutif, d'une façon unanime, même
si cela ne représente pas tout le grand conseil, a décidé
de s'en tenir à sa première proposition qui est celle de la
capitalisation locale, c'est-à-dire au niveau des caisses. La seule
nuance que nous avons faite est dans notre mémoire, on pense que
puisqu'un fonds de stabilisation est prévu dans chacune des
caisses, on devrait prévoir également un fonds de
stabilisation pour assurer le rendement de ces parts et qu'il devrait y avoir
un fonds de stabilisation au niveau de la fédération. Si
c'était accepté, cela faciliterait la distribution de ces parts
au niveau des caisses, cela rassurerait le consommateur, le membre d'une
caisse, et je pense qu'on n'a pas besoin, à ce moment-là, de
monter la capitalisation au niveau des fédérations.
M. Fortier: Je crois que votre idée d'avoir un fonds de
stabilisation...
Le Président (M. Lemieux): Vous avez terminé, M. le
ministre.
M. Fortier: ..pour les caisses est un aspect très
intéressant et on est d'accord.
Le Président (M. Lemieux): Excusez-moi, M. le ministre. M.
le député de Lévis.
M. Fortier: J'ai de la misère à vous dire que je
suis d'accord, parfois.
M. Garon: M. le Président, j'aimerais dire qu'il est
absolument inconcevable qu'on retrouve un article comme l'article 216. Les
pouvoirs d'un groupe doivent se retrouver dans la loi et non pas,
éventuellement, dans une décision du Conseil des ministres. Ce
n'est pas normal. Par exemple, dans la Loi sur les compagnies d'assurances, on
voit déjà qu'elles peuvent offrir en vente des produits
d'institutions financières, ils sont déjà clairement dans
la loi. À l'article 33.2, on dit tout simplement: Le ministre peut
autoriser une compagnie d'assurances à exercer une activité autre
que celles prévues à l'article 33.1, mais à l'article
33.1, les pouvoirs sont précis. Il peut y avoir des queues de renard sur
les antennes d'automobile, mais ce n'est pas l'automobile au complet qui est
modifiée. Je pense que cette façon de légiférer
serait complètement anormale puisqu'on viderait l'Assemblée
nationale de sa fin qui est d'établir, dans des lois publiques, des
pouvoirs d'entreprises régies par des lois publiques. (11 h 15)
Deuxièmement, concernant les avantages fiscaux des parts
permanentes, disons que c'est peut-être normal qu'on ne retrouve pas cela
dans un avant-projet de loi mais je pourrais dire tout simplement que le
ministre des Finances a pris l'habitude de lever des impôts
considérables par déclaration ministérielle. Il pourrait
sûrement annoncer, par déclaration ministérielle, des
avantages fiscaux qui se retrouveraient dans le projet de loi. Le projet de loi
ne peut pas être déposé avant le 18 octobre puisque la
session doit reprendre à cette date, je pense. Mais il serait
très facile pour le ministre des Finances, le matin même, de faire
une déclaration ministérielle annonçant quels seront les
incitatifs fiscaux concernant les parts permanentes qui se retrouveraient dans
le projet de loi que déposera en même temps le ministre
délégué aux Finances, Alors la boucle serait
bouclée. Au cas où il manquerait d'imagination, je lui donne le
truc. Et...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Fortier: On vit dans le même édifice.
M. Garon: Troisièmement, je pense que pour les parts
permanentes... J'ai remarqué que plusieurs ont dit que,
rédigé comme tel, les parts permanentes seraient peu attrayantes
parce qu'elles seraient transmlssibles seulement au décès. Et
j'étais content de voir que vous avez comparé un peu avec des
actions de Solidarité, un bon succès, et qui vont dans le sens,
je pense bien, du genre de capitalisation que recherche le Mouvement Desjardins
avec une perspective de développement et avec une perspective
économique et sociale également.
Plusieurs groupes ont dit que l'avant-projet de loi va enlever
l'autonomie aux caisses locales. J'aimerais vous demander si vous êtes du
même avis. J'ai même remarqué qu'à la page 4 de votre
mémoire vous dites que "dans l'ensemble l'autonomie des caisses est
reconnue". J'ai remarqué aussi hier que les directeurs des caisses
semblaient s'inquiéter de la perte d'autonomie des caisses locales.
J'aimerais avoir vos commentaires là-dessus parce que je pense que c'est
fondamental.
Le Président (M. Lemieux): M. Béland.
M. Béland: L'autonomie, par définition, c'est le
droit de se gouverner par ses propres lois. Or, si je veux faire mes propres
lois, par exemple si je veux rester isolée comme caisse, je peux dire:
Je suis autonome et je me gouverne par mes propres lois et celles du
gouvernement évidemment, mais je fais mes propres règlements.
Mais dans un esprit de solidarité, dans un esprit de démocratie,
les caisses, au cours de leur histoire, ont compris qu'en se regroupant sur une
base d'égalité et sur une base démocratique, elles se
donnaient une force encore plus grande. Vous savez, quand on veut fonder des
caisses et qu'on dit aux gens: Regroupez-vous, vous allez être plus
forts, est-ce que les gens perdent leur autonomie parce qu'ils font cela? Au
contraire, c'est dans l'exercice de leur autonomie. Elles acceptent la
règle démocratique qui invite à la solidarité de se
rendre à la décision de la majorité. C'est cela la
coopération. C'est un bon mélange de l'autonomie des gens qui
décident par eux-mêmes mais qui décident de jouer la
règle démocratique de se rendre solidaires de la décision
de la majorité. Dans ce sens-là la loi actuelle respecte cela. On
n'aurait pas aimé que l'Inspecteur général dise, par
exemple, ou que la loi dise: C'est nous qui décidons telle ou telle
chose. Là on aurait dit: Vous nous brimez dans l'exercice de la
démocratie. Si on avait dit C'est la Confédération, sans
consulter ses caisses, sans consulter ses fédérations, qui a le
pouvoir de faire cela, c'est le président qui décide cela, on
aurait été contre cela. Mais ce n'est pas cela que la loi nous
dit.
La loi nous invite, d'une façon autonome, à continuer
à appliquer la règle démocratique et à se rendre
solidaires de la décision de la majorité. Donc, elle nous invite
à l'autoréglementation et à l'autodiscipline. Tant que
cela va être comme ça, on peut dire que les caisses restent
autonomes. Si les caisses trouvent que la démocratie n'a pas d'allure ou
s'il y a des fédérations qui trouvent que c'est mieux que la
démocratie s'arrête à la région, on peut parler
d'une démocratie régionale. On n'aura pas un mouvement. On aura
onze mouvements. Je pense que la démocratie doit jouer selon les
structures que le mouvement s'est donné. Dans ce sens-là on a dit
dans notre mémoire - et tout le monde a été unanime - que
c'est vrai que cela respecte l'autonomie des caisses. Les caisses continuent
d'être capables de décider de s'affilier à une
fédération et les fédérations continuent
d'être capables de décider de s'affilier à une
confédéra tion. Ce n'est pas obligatoire. C'est volontaire. C'est
démocratique. Alors les caisses restent autonomes.
Vous allez me dire: Oui, mais c'est difficile dans un mouvement rendu
aussi important que Desjardins de se séparer de Desjardins. C'est pour
cela que les caisses ne se séparent pas. Elles sont assez intelligentes
pour dire: C'est encore là que j'ai plus de force. Mais s'il y a des
caisses qui pensent devenir plus fortes, plus dynamiques en se séparant
et en s'en allant ailleurs, elles peuvent le faire. Donc, cela prouve qu'elles
sont encore autonomes, comme un membre d'une caisse peut, s'il le veut, se
retirer de sa caisse s'il trouve que cela ne fonctionne pas bien.
M. Garon: Dans la structure des caisses, on a vu, lors de la
présentation des directeurs de caisse hier, que l'avant-projet de loi,
tel que rédigé, interdit aux gérants de caisse - le projet
de loi les appelle maintenant des directeurs de caisse - d'être
élus dans la structure administrative et que cela pourrait avoir des
changements considérables. On a même dit hier qu'à
l'assemblée générale des caisses, sur quelque 250
personnes, cela pourrait en changer autant qu'une centaine. Est-ce que vous
avez des chiffres? On a comparé aussi l'Abitibi et la Gaspésie et
on a dit qu'à cause des distances, en Abitibi, souvent c'étaient
des permanents qui occupaient des fonctions parce qu'avec des
bénévoles, ce serait beaucoup plus difficile.
M. Béland: À la confédération, que la
nouvelle loi prévoie que les membres du conseil doivent être
majoritairement des représentants des bénévoles, des
dirigeants élus, des dirigeants bénévoles et non pas des
permanents salariés, cela nous plaît. On pense encore, nous, que
le mouvement appartient aux membres. Il n'appartient pas aux salariés.
Comme je le disais tout à l'heure, Desjardins a toujours
été un mariage harmonieux entre les bénévoles et
les permanents. Assurons-nous que le contrôle est toujours entre les
mains des dirigeants bénévoles, des membres, des vrais
propriétaires qui travaillent conjointement avec une minorité de
permanents salariés et je pense que le mouvement va continuer à
se développer. À la confédération, cela ne nous
cause pas de problème. Non seulement je ne le pense pas, mais je suis
sûr que cela ne cause pas de problème en ce qui concerne les
fédérations et pour ce qui est des caisses, forcément, les
conseils de caisse sont presque majoritairement composés de
bénévoles. Il n'y a que le directeur qui est un salarié
qui peut siéger sur le conseil d'une caisse. Il y a un salarié et
tous les autres administrateurs sont des bénévoles. Vous voyez
que cette règle-là, on l'applique et cela ne nous cause pas de
problème. Ce à quoi vous vous référez probablement,
c'est quand arrive le temps de choisir parmi ces gens-là pour qu'ils
siègent, évidemment, au sein des institutions et des
corporations. Là, il y a toute la question de la disponibilité
des gens. Des jetons de présence, parfois, dans ces corporations, cela
ne suffit pas
M. Garon: Les comités de surveillance, les comités
de crédit.
M. Béland: Concernant les comités de surveillance,
on dit dans notre mémoire que, pour autant que la règle de la
majorité des bénévoles soit respectée, on ne voit
pas pourquoi un directeur de caisse ne pourrait pas siéger sur une
commission de crédit ou un conseil de surveillance d'une
fédération. On a besoin de son expertise. On a besoin de son
expérience, mais pour autant que cela reste une majorité de
bénévoles. Alors, une commission de crédit de cinq membres
avec trois dirigeants bénévoles élus et deux permanents,
cela nous plaît. Mais dire qu'on ne veut pas du tout qu'ils aillent
siéger sur les commissions de crédit, cela nous semble un peu
exagéré, et peut-être pas utile.
M. Garon: En fouillant un peu la question avec les gens des
caisses hier, en fait, on a réalisé que ce n'est pas que
l'ancienne loi - la loi actuelle au fond - le permettait; c'est qu'elle ne
l'interdisait pas.
M. Béland: Au contraire, on fonctionne comme cela
actuellement.
M. Garon: En l'absence d'interdiction, vous avez
développé une pratique.
M. Béland: C'est exact.
M. Garon: Certains ont parlé d'un mixte de
bénévoles et d'employés. Comment voyez-vous la
façon dont cela devrait être réglementé? Est-ce que
cela devrait être réglementé? Pensez-vous que cela ne
devrait pas être interdit comme dans le passé et dans le cas d'une
réglementation, qu'est-ce qui devrait être autorisé?
M. Béland: Comme je viens de le dire, la
réglementation qui prévoit que... Pour autant qu'une
majorité de bénévoles siège sur ces
différents comités, on n'a aucune objection, c'est
évident, à la participation, parce qu'on en a besoin, on ne peut
pas s'en passer. On a besoin de la participation des directeurs.
M. Garon: Les vice-présidents de fédération.
On parle actuellement de vice-présidents de fédération,
les postes de président et vice-président...
M. Béland: Dans notre mémoire, on a dit qu'on
n'avait pas d'objection à ce qu'un directeur de caisse... Il va se faire
élire démocratiquement de toute façon. Ce sont ses pairs
qui vont l'élire. Si les gens trouvent que c'est bon que ce soit cette
personne-là qui soit vice-président, nous, personnellement,
à la confédra-tion, dans notre mémoire, on a dit qu'on
n'avait pas d'objection à cela.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. Béland.
M. le ministre délégué aux Finances et à la
Privatisation.
M. Fortier: On a pas mal couvert les points les plus importants.
Je laisserai la parole à mes collègues. Mais il y a un point qui
est important. Le député de Lévis a abordé une
discussion sur l'autonomie des caisses. Je lisais dernièrement
l'historique des institutions financières du Québec qui couvrait
partiellement l'historique du Mouvement Desjardins. On s'aperçoit que,
de tout temps, l'autonomie des caisses a été un sujet
privilégié à l'intérieur du Mouvement Desjardins.
Je crois que, depuis la première étape de la création de
la confédération ou de ce qu'on appelait la
fédération en 1932, cela a évolué. Il y a eu des
débats politiques importants dans le temps - on ne parle pas des gens
qui sont là aujourd'hui - mais plutôt durant les années
quarante. Au-delà des personnalités et des débats
passés, M. Béland, dans le fond, la structure proposée
dans l'avant-projet entérine dans une très grande mesure ce qui
existe déjà, quoiqu'on y donne un peu plus de muscle à
l'occasion; alors l'idée est, comme vous dites, qu'une caisse qui veut
n'appartenir à aucune fédération peut exister. En fait, il
y en a une au Québec, la caisse de Rimouski, qui est seule et qui
n'appartient à aucune fédération. Elle n'appartient pas
à la confédération Desjardins. Mais elle doit appartenir
à une fédération si elle n'est pas autonome. D'ailleurs,
à l'avenir, on ne permettra plus la création de nouvelles caisses
sauf avec la permission du ministre, mais je peux vous dire que le ministre
sera très réticent.
La fédération assume donc des responsabilités
très importantes de supervision et de réglementation.
Ensuite, il y a les fonctions de la confédération.
Certains, je pense, voudraient que la confédération soit
plutôt une espèce de forum de discussions sans aucune
autorité. J'aimerais que vous nous expliquiez, dans le fond, quel est le
rôle actuel de la confédération, parce qu'on retrouve
à la confédération des outils extrêmement
importants; la caisse centrale en est un. Est-ce que vous pourriez nous faire
un état de ces responsabilités par les organes de la
confédération qui, je crois, sont plus que des forums de
discussions, mais qui sont, en fait, des organes de contrôle importants,
si on pense à la caisse centrale qui va chercher du crédit
additionnel et tout ça. Pourriez-vous nous dire depuis quand cet
état de choses existe, car, en relisant cet historique, j'ai eu
l'impression qu'il y a eu une époque charnière, je pense, durant
les années soixante-dix, où les militants, les gens du Mouvement
Desjardins ont décidé de s'unir et de déléguer
certaines fonctions à la fédération et certaines fonctions
à la confédération. Quand on regarde la progression
phénoménale du Mouvement Desjardins, on peut se demander si ce ne
sont pas justement ces choses-là qui ont fait son succès.
Pourriez-vous nous expliquer ce rôle de la confédération ot
nous dire dans quelle mesure il respecte l'autonomie des caisses et que dans le
fond, il est bénéfique pour tout le mouvement?
M. Béland: La confédération a toujours
été ce que les fédérations, d'une façon
majoritaire et démocratique, ont voulu qu'elle soit, c'est
évident. Ce sont les fédérations, d'ailleurs, qui ont
constitué la confédération en 1932 pour des besoins,
alors, d'inspection et de vérification. Elles ont confié à
la confédération la responsabilité - et ce n'était
pas contesté - de faire l'inspection et la vérification de
l'ensemble des caisses. On a mis ça au niveau provincial et on en est
restés là pour un bon bout de temps. Mais, avec le temps, des
besoins nouveaux se sont créés et, vers 1963, des caisses sont
devenues assez importantes et elles ont commencé à faire beaucoup
de transactions d'épargne-chèques. Elles en faisaient depuis
longtemps, mais le volume était tellement grand que certaines caisses
ont dit: On a besoin de s'informatiser. Les fédérations se sont
réunies, ont formé un comité d'informatisation et ont
confié à la confédération la mise sur pied d'un
système-mouvement.
Vous avez raison de dire que c'est durant les années soixante-dix
que la progression de Desjardins a commencé de façon
spectaculaire
parce qu'il a fallu 63 ans pour accumuler le premier milliard. En 1972,
ce fut le deuxième. Mais, de 1972 à 1975, on s'est rendus
à environ 9 000 000 000 $ et, ensuite, cela est monté
jusqu'à 35 000 000 000 $; on parle de 35 000 000 000 $ aujourd'hui.
Quand on voit cette progression, on s'aperçoit que, petit à
petit, lorsque les fédérations ont réalisé que,
pour leurs caisses, il était utile de se regrouper, elles ont
donné des responsabilités nouvelles à la
confédération. C'est dans ce sens-là que je dis que la
confédération est toujours ce que les fédérations
veulent qu'elle soit. J'admets que parfois - c'est toujours pareil dans
l'exercice d'une démocratie - on discute longuement quelle
responsabilité on va donner à la confédération.
Mais d'autres gestes qui ont été posés ont
été très bénéfiques pour le mouvement, comme
la Corporation de fonds de sécurité. Encore là, c'est
à travers les crises fréquentes de l'économie
québécoise et mondiale - ce n'est pas la faute du Québec -
que les caisses ont senti le besoin, à un moment donné, de se
regrouper (11 h 30)
La Corporation de fonds de sécurité, c'est un autre
organisme que les fédérations ensemble se sont donné pour
être plus fortes. En 1979, ce fut la Caisse centrale. On a senti le
besoin qu'on ne pouvait pas rester isolés, chacune des
fédérations ne pouvait rester isolée; il fallait aller sur
les marchés internationaux. Aller sur les marchés internationaux,
onze institutions séparées, ce n'est pas aussi efficace; on a
donc créé la Caisse centrale. Aujourd'hui, la Caisse centrale est
le fournisseur de capitaux pour Desjardins
Donc, ce sont les besoins et la sagesse des dirigeants du mouvement qui,
dans un geste de solidarité, à un moment donné,
décident de se redonner des organismes provinciaux, qui font que
l'ensemble du Mouvement Desjardins en profite. Si la
confédération n'était pas là et que chacune des
fédérations avait sa caisse centrale, sa petite corporation de
fonds de sécurité - il y en a qui en auraient des grosses
d'autres des petites - si on avait chacun des images séparées, le
Mouvement Desjardins ne serait pas ce qu'il est aujourd'hui, cela me semble
évident.
C'est sûr que la démographie québécoise fait
qu'on a des concentrations de population: Québec, Montréal. Mais,
fort heureusement, ces fédérations ont toujours consenti à
utiliser leur force et à ne pas laisser tomber le reste de la province,
mais à faire en sorte que le reste de la province aussi profite et
collabore à cette grande force qui est nationale, qui est à
l'ensemble du Québec.
Dans ce sens-là, l'autonomie des caisses est encore plus forte
qu'elle ne l'a jamais été, parce que cette force qu'elles se sont
donnée par leurs organismes fédératifs et
confédéral, cette force-là, évidemment, profite
à l'ensemble des caisses, c'est évident. Aujourd'hui, on est
capables de dire que chacune des caisses est la porte d'entrée sur
l'ensemble des services, n'importe quelle caisse. Je vais aller en Abitibi,
à Sainte-Rose de Poularies ou Roquemaure, à Saint-Zacharie dans
la Beauce, vous rentrez là. vous êtes capables d'avoir le service
du crédit commercial; même si ce n'est pas la caisse qui lo fait
directemont, elle va vous mettre en rotation avec le service du crédit
industriel, avec le Mouvement Desjardins. Dans ce sens-là, l'autonomie
des caisses est encore plus forte, plus vivante. Les caisses sont plus fortes
et plus vivantes qu'elles ne l'ont jamais été, grâce
à leur sagesse de se regrouper. C'est cela qu'est la force d'un
mouvement. Je pense qu'on pourrait donner l'exemple de bien d'autres domaines
aussi, où de petits détaillants se sont regroupés pour se
donner une plus grande force. C'est cela le Mouvement Desjardins
d'aujourd'hui.
M. Fortier: Merci
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Lévis.
M. Garon: Vous dites, à la page 4 du mémoire.. Ce
que vous venez de dire, c'est assez mal compris Les banques nous ont dit que
vous n'étiez plus des coopératives mais des corporations et que
c'était aussi bien de finir le job. Même les notaires nous ont dit
que, maintenant, votre loi ressemblait de plus en plus à la Loi sur les
compagnies de capital-actions, que c'était quasiment semblable et une
bonne chose. Alors, je suis content de voir que vous indiquez les
caractères des coopératives qui sont mal compris.
J'aimerais - pour revenir là-dessus - à la page 4, vous
dites que l'avant-projet de loi reconnaît généralement le
caractère coopératif des caisses. Cela m'a frappé, le mot
généralement. Y a-t-il des aspects du projet qui, pour vous,
s'éloignent du caractère coopératif? Si oui, lesquels.
M. Béland: Je pense que quand on essaie d'appliquer aux
dirigeants bénévoles les règles intégrales qu'on
applique aux administrateurs de compagnies à capital-actions, je pense
que là il y aurait des nuances à faire pour reconnaître
notre véritable caractère coopératif. Je pense qu'il faut
protéger nos bénévoles. Il faut les remercier de ce qu'ils
rendent comme services, plutôt que de leur imposer trop de contraintes.
Quand on a dit généralement, c'est qu'on avait en tête
peut-être cette nuance qu'il faudrait apporter à l'égard de
nos dirigeants bénévoles.
M. Garon: Avez-vous déjà fait des statistiques? Je
ne me rappelle pas le rapport Carter, mais je me rappelle le rapport Porter -
je pense bien qu'en vieillissant, apparemment on se rappelle plus facilement ce
qui est plus lointain. On disait que 30 % des prêts de plus de 100 000 $
étaient faits à des compagnies qui étaient liées,
d'une façon ou d'une autre, à un administrateur de banque, qui
était sur un
conseil d'administration d'une autre compagnie, etc. Est-ce que vous
avez déjà fait des statistiques...
M. Béland: Non.
M. Garon:... au Mouvement Desjardins, pour montrer quelle est la
proportion des prêts qui pourrait être faite, pour faire une
comparaison avec les banques?
M. Béland: À l'oeil, je peux vous dire qu'elle est
infime parce que la règle de base... vous le savez, M. Garon, dans les
caisses, on a des limites. C'est l'assemblée générale qui
établit les limites sur les prêts. On a évolué comme
cela. M. Desjardins nous disait toujours: C'est mieux de faire 100 prêts
de 1000 $ qu'un prêt de 100 000 $, et on a vécu avec cette culture
et cette habitude. Il n'y a pas de concentration des prêts chez nous, pas
du tout. Mais cela ne nous a jamais semblé très utile de faire
l'étude en question, parce qu'on sait déjà que, comme
résultat, je pense qu'on ferait la preuve facilement que c'est largement
réparti, même notre crédit. Je suis convaincu de cela.
M. Garon: Tantôt, j'ai posé une question à
laquelle vous n'avez répondu qu'à un bout. Il y a un bout sur
lequel j'aimerais revenir. Dans l'état actuel des choses, qu'il s'agisse
de la confédération ou de la fédération, quelle est
la proportion des gens qui sont des employés et qui sont des
bénévoles?
M. Béland: À la confédération?
M. Garon: Que ce soit à la confédération ou
à la fédération. Je sais que les directeurs de caisse ont
dit... Ils nous ont parlé d'assemblées générales.
Ils nous ont dit: 100 sur 250.
M. Béland: Je pense que M. Bertrand de la
fédération de Québec a une réponse.
M. Bertrand (Jacques): C'est 50-50. M. Béland: Au
conseil? M. Bertrand: Au conseil.
M. Béland: Ah bon! C'est 40-60 à la
fédération de Montréal, 40 bénévoles et 60
salariés. À Québec, c'est 50-50. C'est pas mal la
même proportion un peu partout.
M. Garon: Et à la confédération?
M. Béland: À la confédération, c'est
une grande majorité de salariés. Je pense qu'on en a 8 sur 32, 8
bénévoles sur 32 administrateurs.
M. Garon: À chacun des niveaux, dans votre esprit, c'est
la majorité ou cela changerait-il par niveaux, la proportion de
bénévoles-employés?
M. Béland: C'est-à-dire que si on appliquait la
nouvelle loi, on se retrouverait avec une majorité de
bénévoles à tous les niveaux.
M. Garon: Mais une majorité simple vous voulez dire
ou...
M. Béland: Oui, une majorité simple. Alors, sur 33
administrateurs qu'on aura chez nous, avec la nouvelle loi, on aura 17
bénévoles.
M. Garon: Mais la loi ne dit pas cela actuellement.
M. Béland: Non, la loi nous a laissés libres
à ce point de vue. La nouvelle loi va nous inviter à respecter
cette règle.
M. Garon: De quelle façon?
M. Béland: En disant que le conseil des
fédérations et de confédération doit être
constitué majoritairement de non-salariés.
M. Garon: Est-ce que c'est dit quelque part actuellement?
M. Béland: Oui, dans l'avant-projet de loi et on n'a pas
d'objection à cela.
M. Fortier: Dans l'avant-projet de loi. Vous ne l'avez pas
lu?
M. Garon: Moi, je ne viens pas d'Outre-mont, alors, je ne sais
pas tout!
M. Fortier: Ha, ha, ha!
M. Garon: Par rapport aux mémoires des directeurs de
caisse, vous avez dit en, gros: On est d'accord, mais vous avez laissé
entendre qu'il pouvait y avoir des points sur lesquels vous n'étiez pas
d'accord.
M. Béland: La seule nuance, M. le Président, c'est
que quand les directeurs de caisse disent: On veut avoir le droit de
siéger aux commissions de crédit de la fédération
ou aux conseils de surveillance, nous disons: Oui, mais pour autant que vous
vous retrouviez parmi une majorité de bénévoles. On ne
serait pas favorable à ce que la commission de crédit, par
exemple, d'une fédération soit entièrement ou
majoritairement composée de directeurs de caisse, parce qu'à
travers l'approbation du crédit - c'est la position de la
confédération - il y a toujours l'application de politiques de
crédit.
Comme ce sont les directeurs de caisse avec leurs commissions de
crédit qui sont appelés à appliquer les règles de
crédit dans les caisses, on pense que les commissions de crédit
des confédérations doivent être constituées
d'une
majorité de bénévoles, mais en profitant de
l'expertise et de l'expérience des directeurs.
M. Garon: Hier, la Fédération des travailleurs du
Québec est venue et nous a parlé d'un problème
d'assurabilité et de cautionnement des employés. Ils nous ont dit
que, dans certains cas, cela pouvait devenir une cause de congédiement
et qu'à ce moment-là, ils n'avaient plus de recours, comme en
vertu de la convention, puisque, là, on dit: Oui, mais là, vous
n'êtes plus assurables. Ils ont le sentiment que cela devrait être
fait de façon différente pour que l'employé garde tous ses
recours, comme dans n'importe quel congédiement et que cela doit
être pour une cause. Je ne sais pas si vous êtes au courant
du...
M. Béland: C'est-à-dire que la loi actuelle exige
que tous nos employés soient couverts par un cautionnement, en cas de
fraude ou de vol. Donc, le cautionnement est fourni par un assureur. Quand,
après avoir fait son enquête ou obtenu des informations,
l'assureur décide qu'il ne veut plus assurer M. Untel parce qu'il trouve
que c'est un trop grand risque, c'est évident qu'on n'est plus capables
de respecter la loi. Le conseil d'administration de la caisse dit: Je ne peux
plus respecter la loi. Je suis obligé de te fournir de l'assurance, mais
comme tu n'es plus assurable, je suis obligé de te suspendre
jusqu'à ce qu'on règle ton cas. Je ne peux pas conduire de
voiture si quelqu'un décide que je ne suis pas assurable. C'est la
même chose.
D'un côté, vous avez des ministères qui nous disent:
II faut que vous soyez absolument couverts à 100 %. Évidemment,
si on va dans le domaine des relations de travail, ils disent. Une minute! Les
règles de cautionnement ne nous empêcheront pas d'exercer les
règles ordinaires en matière de relations de travail. Nous sommes
contraints par la loi de fournir un cautionnement pour nos employés et
de les assurer. Quand on ne trouve pas d'assureur, ils ne peuvent plus exercer
leur fonction. On n'a pas le choix. Ce n'est pas par goût qu'on fait
cela, c'est par obligation.
M. Garon: Quand vous dites: On ne trouve plus d'assureur... Le
point soulevé est que l'assurance est faite aussi par Desjardins.
À ce moment, l'employé se trouve démuni parce que c'est la
compagnie d'assurances de Desjardins qui dit qu'il n'est plus assurable alors
qu'il serait peut-être assurable ailleurs. Ils trouvaient qu'il y avait
une certaine perte de recours de l'employé par rapport à son
emploi quand il le perdait pour cette raison.
M. Béland: Dans toutes les corporations, c'est la
même chose. Ces cautionnements sont en vertu d'une police
maîtresse. J'imagine que dans les banques, c'est le même
problème. C'est rare qu'un assureur consente à assurer un
individu seul, en matière de manoeuvres frauduleuses ou pour essayer de
se protéger contre de mauvais agissements. La police va coûter
très cher. C'est toujours réparti dans une police globale. On
appelle cela comme cela: un cautionnement global ou une police globale. Assurer
un individu pour ce genre de service, cela doit être extrêmement
silencieux.
Le Président (M. Lemieux): Est-ce que vous avez
terminé, M. le député de Lévis.
M. Garon: Oui.
Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie. M. le
ministre, vous permettez?
M. Béland, j'aimerais essayer de vous ramener sur des... Vous
savez, il y a une différence entre la politique et la science
politique, et la philosophie corporatiste et le vrai corporatisme. J'aimerais y
aller sur un plan plus concret et me substituer à certains de mes
commettants dans mon comté, qui est celui de Vanier, où on a un
fort taux de familles monoparentales et où le salaire est
inférieur à la moyenne nationale. Je vois ici un des commettants
de mon comté - le messager, M. Ge-nest - qui aimerait peut-être
vous poser des questions. Je vais essayer de me substituer à lui.
J'aimerais vous parler des problèmes inhérents aux frais
de services qui, parfois, nous paraissent abusifs. Je vais vous donner des
exemples, les frais pour les comptes inactifs. Que les déposants
utilisent leur compte ou non, ils paient toujours des frais. Les frais
exigés pour les comptes inactifs ont-ils leur raison d'être
lorsque aucune transaction n'est effectuée dans le compte? Les frais
d'effet refusé: le déposant qui reçoit un chèque
sans provision suffisante est-il responsable de ce manque de fonds? Pourtant,
on va lui charger des frais. Les erreurs de caisse: certains frais
imposés aux déposants découlent directement d'erreurs de
la part de la caisse. Exemple: des arrêts de paiement non
respectés, des frais arbitraires.
Ce qui m'a paru le plus aberrant, récemment - l'exemple m'a
été donné par le député de Mille-Îles
- c'est que lorsqu'on est membre d'une caisse, on prend une part sociale. Cela
nous coûte, je crois, 5 $. Lorsqu'on vient pour fermer notre compte, on
dit à la caissière: Équilibrez-moi le débit et le
crédit. Elle nous arrive et fait le tour: 1, 82 $. Elle nous remet 1, 82
$. On lui dit: Notre part sociale? Elle dit: Ce sont des frais
d'administration. Je trouve cela...
Une voix: Des frais de fermeture de compte.
Le Président (M. Lemieux): Des frais de fermeture de
compte, pardon. Dans un premier temps, vous avez des avocats à la table
des témoins ou derrière vous. Nemo debet esse judex in propria
causa: c'est une règle de justice naturelle selon laquelle personne ne
peut se faire
justice soi-même. Je trouve cela curieux qu'on impose des frais de
fermeture à des gens ayant payé une part sociale. C'est quoi, la
philosophie corporatiste? Cet aspect m'intrigue. (11 h 45)
Ma question serait la suivante: Ne trouvez-vous pas que tout
déposant devrait avoir accès à un compte de base pour lui
permettre d'effectuer des transactions de débit, dépôt ou
des virements de frais? Autre question: Est-ce que les caisses ont l'intention
de prendre des mesures pour indiquer les frais exigés pour chacun des
produits et services qu'elles offrent? Je prends les banques comme exemple,
à l'article 202 de la Loi sur les banques, on oblige à divulguer
tout au moins certains frais de service. C'est une partie de ma question. La
deuxième partie, c'est la suivante: On constate qu'un fort pourcentage
de la clientèle des caisses, ce sont des femmes. J'ai entendu quelques
mémoires ici où on a fait état qu'il semblait exister une
certaine discrimination envers les femmes. Je regarde la table des
témoins, je n'en vois pas, je regarde derrière, je n'en vois pas
beaucoup non plus. J'aimerais vous entendre parler un peu là-dessus. Y
a-t-il des programmes... ? Il y en a une à ce qu'on me dit.
M. Fortier: Ha, ha, ha! Levez-vous.
Le Président (M. Lemieux): Y a-t-il des programmes
d'accès à l'égalité dans les caisses populaires? Si
vous n'en avez pas, je peux vous envoyer d'excellents curriculum vitae. Vous
savez, cela fait partie de la tâche d'un député d'aider ses
commettants à se trouver un emploi. L'autre aspect. J'ai parfois
l'impression que les caisses ont oublié... Pardon?
M. Garon: Dans les tâches bénévoles... Dans
les employés, il y en a beaucoup.
Le Président (M. Lemieux): C'est cela, effectivement, dans
les tâches bénévoles. Effectivement, M. le
député de Lévis. Il y a un autre aspect où on a
reçu - je pense aux gens qui viennent me voir parfois dans mon
comté - il semble parfois que les caisses ont oublié que c'est
aux petites gens qu'elles doivent leur succès, là où elles
sont rendues aujourd'hui. On sent dans certaines caisses - je suis bien
conscient qu'elles ont une certaine autonomie -un manque d'organisation.
Lorsque les gens font une plainte aux caisses, ils sont perdus dans votre
système actuellement. C'est curieux parce que ce sont des caisses
locales et ils ont de la misère à avoir des réponses.
Souvent, on les traite comme des chiens dans un jeu de quilles, pour employer
une expression de chez nous, typiquement du Lac-Saint-Jean, ils sont un peu
perdus. Dans ce sens-là, ne pourrait-il pas y avoir des directives
générales, internes, soit de la part de la
fédération ou de la confédération où on
pourrait peut-être essayer de faire en sorte que, tout au moins, les
consommateurs, les petites gens, puissent savoir à qui s'adresser pour
avoir des réponses valables. C'est l'ensemble de mes Interrogations.
J'aimerais bien entendre vos réponses. Comme je vous dis, je me suis
substitué à M. Genest qui est l'un de mes commettants.
M. Béland: Je dois dire, M. le Président, qu'il y a
beaucoup de vos commettants et probablement pas seulement les vôtres,
mais dans mon courrier quotidien, je reçois beaucoup de lettres de
membres de caisses, énormément. Je dois vous dire que j'ai des
lettres dans le sens des remarques que vous avez faites. J'ai aussi beaucoup de
lettres, et beaucoup plus, dans l'autre sens, de gens qui disent: C'est donc
merveilleux le service que j'ai eu à ma caisse, c'est donc merveilleux
le dévouement de mon directeur de caisse qui m'a permis d'avoir ma
première maison et qui est même venu m'aider dans telle
circonstance. Vous savez, Desjardins est fait de gens du Québec. Les
gens du Québec sont de toute nature: certains sont très
généreux, d'autres le sont moins et on retrouve cela dans les
caisses. Il y a des caisses qui sont des bijoux. On reçoit des lettres
de félicitations pour dire: Je n'ai jamais vu un service comme cela.
Ce qui est merveilleux, c'est que cela permet à votre commettant
d'aller à sa caisse, à son assemblée
générale et de dire qu'il n'aime pas le service et qu'il exige
des changements. Il peut faire des démarches pour amener toute la
paroisse dans sa caisse, je ne peux pas faire cela à la banque, moi. Il
peut amener toute la paroisse et dire: On va aller à la caisse, cela n'a
pas d'allure comment on est traités dans notre caisse. C'est tout de
même un avantage qu'on a à la caisse et qu'on n'a pas dans
d'autres institutions financières. Je suis un peu surpris... Être
reçu comme un chien dans un jeu de quilles dans les caisses, ce n'est
pas ce que je vis en tout cas dans la mienne.
Le Président (M. Lemieux): Je parle d'expériences
de gens. Je ne voudrais pas... Il ne faut quand même pas
généraliser. Je vous parle d'expériences de gens qui,
parfois...
M. Béland: Oui, il peut arriver un matin qu'on...
Le Président (M. Lemieux):... c'est-à-dire qu'ils
ne savent pas où s'adresser pour les plaintes comme telles.
M. Béland: II peut arriver un matin qu'on se retrouve
devant une caissière qui est de mauvaise humeur...
Le Président (M. Lemieux):.. ou qui n'a pas
l'information.
M. Béland:... ou le caissier. On peut toujours
évidemment utiliser le guichet automatique.
Le Président (M. Lemieux): Et, effectivement, ils paient
pour le guichet automatique. Je ne pense pas que ce soit eux qui l'aient
demandé. Mais tout de même, j'aimerais vous entendre aussi sur les
frais de service.
M. Béland: Sur ce, je peux vous dire que les directives
générales qui viennent des fédérations, à ce
moment-là, ce sont les fédérations qui traitent avec leur
caisse, les directives générales sont certainement dans le sens
du service. C'est notre marque de commerce.
Quand vous me parlez des comptes inactifs, M. le Président, un
compte est Inactif pour le membre, il n'est pas Inactif pour la caisse, il
coûte quelque chose. Qu'on stationne 5 $ à la caisse, cela
crée un folio et l'informatique perçoit pour cela, cela
coûte de l'argent à la caisse. Si, par exemple, dans une caisse,
j'avais 1000 membres avec un compte inactif et un seul membre qui avait 1 000
000 $ de dépôt, ce membre se dépêcherait de dire:
Aie! Pourquoi je paie pour les milliers de membres qui sont inactifs avec la
caisse? C'est là qu'est venue la notion des frais d'utilisation de
service. Quand on utilise les services d'une caisse, on ne peut pas demander
que ce service soit gratuit ou qu'il soit payé par les autres membres
qui, eux, sont actifs, il y aurait là une inéquité. Quand
un membre est inactif et qu'il maintient un compte ouvert, un folio ouvert, il
y a des coûts, el ces coûts, évidemment, il faut les faire
payer à quelqu'un, et les membres actifs ont toujours dit, en
assemblée générale: Cela n'a pas d'allure, j'ai un compte
de dépôt à terme, je ne fais pas de chèque, je ne
fais pas de transaction avec la caisse et mon voisin d'à
côté passe son temps à faire seulement des chèques,
vous êtes obligé d'engager deux caissières pour lui et deux
commis pour traiter sa compensation, pourquoi est-ce que je paie pour cela?
C'est là qu'est venue toute la notion des frais d'utilisation de
service.
D'ailleurs, j'ai des pochettes que je vais distribuer, avec votre
permission. Parce que cela fait partie de nos préoccupations actuelles,
on a élaboré notre politique de frais d'utilisation de service,
on a même amélioré un peu toute notre politique de
divulgation, on aura, dans toutes les caisses, d'ici le 15 septembre, des
mini-affiches, des velox qui seront mis à la disposition des caisses
pour dévoiler les coûts de chacun des services. Chez Desjardins,
on n'a jamais été réticents à la divulgation; au
contraire, on a toujours été très transparents. C'est une
politique connue et qui sera intensifiée chez Desjardins dans les
semaines qui viennent.
Quant aux femmes, je pourrais vous rendre la pareille, je n'en vois pas
beaucoup autour de la table.
Le Président (M. Lemieux): Permettez-moi de vous dire que,
sous le présent gouvernement, il n'y a jamais eu autant de femmes dans
l'his- toire du Québec.
M. Béland: Dans les caisses aussi, M. le
Président.
Le Président (M. Lemieux): Permettez-moi de vous le dire,
même s'il n'y en a pas beaucoup à cette commission parlementaire,
elles sont membres d'autres commissions parlementaires.
M. Béland: Au mois de mars dernier, j'en étais
à mon deuxième discours à l'assemblée
générale de la confédération, et dans chacun de ces
discours, j'ai fart appel aux femmes Je ne pense pas qu'on doive faire appel
seulement aux hommes, les femmes pensent que Desjardins est un mouvement
d'hommes. Il faut dire que cela ne fait pas tellement longtemps que les hommes
ont pris ce siège; avant, il appartenait à des étrangers
Maintenant, les hommes québécois sont assis sur ce siège,
les femmes arrivent déjà pour dire: Tasse-toi que je prenne ta
place. C'est vrai qu'en certains milieux, il peut y avoir un peu de
réticence, mais d'une façon générale, il n'y en a
pas. Il y a de plus en plus de femmes qui sont directrices de caisse et qui
sont dirigeantes de caisse II y en a énormément, en tout cas, de
plus en plus; ce n'est pas assez, mais on fait des efforts énormes.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. Béland. M. le
député de Lévis, excusez-moi, à la suite des
réponses de M. Béland, j'ai pris deux ou trois minutes de plus.
Vous avez la parole.
M. Garon: Merci. Hier - c'est à cela que je faisais
référence quand je vous posais une question - les gens du service
d'aide aux consommateurs sont venus et ont fait un certain nombre de
représentations. Dans un certains cas, on disait qu'on exigeait un
montant pour le paiement de factures de compagnies publiques. J'étais
surpris parce qu'à la caisse où je vais, cela ne coûte
rien, assez que je me disais: Je paie mes comptes à la caisse parce que
je sauve les timbres et les enveloppes, quand elles ne sont pas fournies. Mais
on laissait entendre qu'il pouvait y avoir des ententes entre la caisse et les
compagnies et que la compagnie pouvait verser un montant pour agir comme
personne qui reçoit le paiement.
Par exemple, pour Hydro-Québec, Bell Canada, Vidéotron,
Ultramar, quand je chauffais à l'huile, on passait par la caisse. Est-ce
qu'ils vous paient pour rendre ce service ou si c'est un service que vous
rendez aux membres, qu'ils puissent payer leur compte à la caisse
populaire sans frais, pour ceux qui n'exigent pas de frais? Je ne sais pas s'il
y en a d'autres qui en exigent.
M. Béiand: M. le Président, la négociation
entre les grands fournisseurs, Bell, Hydro-Québec, se fait chez nous par
la caisse centrale et
cela doit se régler avec la caisse centrale. C'est-à-dire
que la caisse centrale négocie avec Bell en lui disant: Parfait, je vais
faire la perception de tes comptes, mais on cherche à rentabiliser cette
grande opération à ce niveau. C'est-à-dire ou bien Bell va
maintenir un dépôt, ou on va profiter du transit, il y a toujours
des compensations pour Desjardins. Cela se règle à ce niveau.
Ensuite, une fois que le service est négocié, on dit au
réseau: Maintenant, vous pouvez recevoir le paiement
d'Hydro-Québec ou de Bell, et chacune des caisses, ensuite,
reçoit des recommandations de la part de sa fédération
pour ces frais. Il y a des caisses qui disent: Nous, on va le facturer aux
membres, d'autres caisses disent: On va prendre cela à même nos
excédents, nos bénéfices. On va faire une dépense
de la caisse et on va le payer. C'est un service qu'on considère commun.
Alors, il n'y a pas de négociation qui se fait entre la caisse et Bell
Canada ou Hydro-Québec. C'est simplement une fois que le service est
négocié, qu'il est mis à la disposition du réseau.
C'est le reseau qui décide comment il le traite. C'est pour cela que
dans votre caisse, ils ne chargent rien, mais si vous étiez membre d'une
autre caisse, il est possible, qu'il y aurait une charge.
M. Garon: J'écoutais la radio ce matin et on parlait
justement de ces questions-là. Je ne sais pas si c'est à la suite
de la rencontre avec le service d'aide aux consommateurs. On indiquait à
ce moment-là que vous aviez déjà fait une étude. Je
pense que c'est un M. Dufresne. Est-ce qu'il n'y a pas un M. Dufresne qui est
vice-président au Mouvement Desjardins? On se référait
à un M. Dufresne.
M. Béland: Lefebvre... Jacques Lefebvre.
M. Garon: Pas Dufresne, vous avez raison, Lefebvre. On disait que
les services, d'après l'étude qui aurait été .
faite, seraient 40 % meilleur marché, alors qu'ils vous coûtent 30
% plus cher, en comparaison avec les banques. Est-ce qu'il y a eu une
étude de faite là-dessus pour comparer les frais de service, par
rapport aux banques? Et pourquoi sont-ils plus chers aux caisses? Cela
coûte plus cher de service aux caisses. On disait qu'on chargeait 40 %
meilleur marché, même si cela coûtait aux caisses 30 % de
plus.
M. Béland: Je n'ai pas les rapports devant moi. Je me
souviens d'avoir vu cela. Je sais que nos revenus provenant des frais
d'utilisation de services, les revenus des caisses, sont beaucoup moindres que
ceux qu'on voit dans les banques. Autrement dit, les banques font plus d'argent
avec les frais d'administration ou de service, que les caisses. C'est le double
dans les caisses. Si nous faisons 0,30 $ par 100 $ d'actif, les banques en font
0,60 $. Quant aux coûts, pour cette partie-là, je ne suis pas
capable de vous répon- dre, à moins que quelqu'un ici puisse
répondre. C'est vrai. On est une organisation de services et on rend
service à beaucoup de gens, à beaucoup de petites gens et c'est
coûteux. C'est vrai.
M. Garon: À la page 15, quand vous demandez que les
caisses puissent effectuer des opérations à l'extérieur du
Québec, quels sont les types d'opérations que le Mouvement
Desjardins souhaiterait faire à l'extérieur du Québec?
M. Béland: On est déjà très
sollicités par les fédérations francophones hors
Québec, fédérations des caisses populaires de l'Ontario,
de l'Acadie et du Manitoba. Et on fournit d'ailleurs certains services quand
les lois ne nous empêchent pas de le faire. On le fait
déjà. D'ailleurs, je suis heureux de voir que dans l'avant-projet
de loi - je ne l'ai pas mentionné - on nous fasse cette ouverture claire
en disant: Si vous voulez offrir des services hors Québec, vous pourrez
le faire. Et cela vise, dans un premier temps, les fédérations
francophones hors Québec parce qu'on est déjà en relation
avec elles, mais cela pourrait évidemment s'étendre plus loin,
s'il y avait des demandes.
M. Garon: Je vois qu'on tire sur la fin. Je sais que le Mouvement
Desjardins souhaite avoir un nouvel habit légal le plus rapidement
possible. Et je sais que le ministre va avoir une dernière intervention,
j'aimerais vous donner l'occasion de nous dire, comment vous voyez les
prochaines semaines, en termes du nouveau projet de loi, avec votre
possibilité de réagir à ce nouveau projet de loi. Parce
que vous pouvez être parfaitement heureux et pouvoir venir nous dire:
Nous sommes parfaitement heureux. Ou vous pouvez, sur un certain nombre de
points, souhaiter des changements quand le projet de loi sera
déposé. J'aimerais entendre de votre part, comment vous voyez les
prochaines semaines concernant ce projet de loi qui devrait être
déposé par le gouvernement. J'aimerais bien que ce ne soit pas la
dernière journée et qu'on fasse cela dans le temps des
fêtes, de nuit. Cela ne serait pas élégant, je pense.
M. Béland: J'ai déjà entendu, ce matin, des
choses rassurantes. Quand on me dit que la fiscalité devrait être
acceptée, quand on me dit que l'article 204 au sujet des dirigeants
bénévoles va être revu et qu'il y a lieu de discuter
encore, cela me rassure. Quand on me dit que le gouvernement a l'intention de
faire le décloisonnement et que c'est juste une question de
rédaction, cela me rassure un peu. Ce qui me rassure le plus, c'est que
le ministre m'a quand même fait une ouverture en disant: II faudrait
qu'on se parle. Alors j'ai compris que la porte n'était pas
fermée et qu'à ce moment-là... C'est sûr que ce
n'est pas le Mouvement Desjardins qui fait la loi. On ne la négocie
même pas. Mais
je suis heureux de voir, au moins, qu'on puisse faire d'autres
suggestions et j'ai bon espoir qu'à ce moment-là on aboutira
à un projet de loi qui devrait satisfaire le Mouvement Desjardins.
M. Garon: Mais pour être bien sûr que le
décloisonnement va se faire, il faudrait que le député de
Mille-Îles soit aussi d'accord avec le ministre parce qu'il semble que
là-dessus il est aussi pesant que le ministre. (12 heures)
M. Bélisle: Mes positions sont officiellement connues, M.
le député de Lévis.
M. Garon: Personnellement, je pense que ce serait une bonne
chose, quand le projet de loi sera déposé, à cause de
l'ampleur du projet, l'avant-projet de loi contient 575 articles, il serait
souhaitable qu'après le dépôt du projet de loi, ce devrait
être le plus tôt possible, à l'automne, pour que vous ayez
le temps de réagir, le Mouvement Desjardins devrait être
invité pour réagir devant la commission parlementaire qui va
être appelée à étudier le projet de loi,
peut-être même avant la deuxième lecture du projet.
Le Président (M. Lemieux): En conclusion, M. le
député de Lévis.
M. Garon: J'aimerais tout simplement, en terminant, remercier les
gens du Mouvement Desjardins d'avoir produit un document aussi précis.
C'est évident qu'à la suite de la commission parlementaire,
derrière cela, il y a toute une conception des choses. Par mes
questions, j'ai essayé le plus possible de vous fournir l'occasion
d'expliquer le fonctionnement concret Parfois, on lit les papiers, les
articles, et ce n'est pas toujours évident comment cela fonctionne. Tous
ceux qui sont venus témoigner hier et votre présence aujourd'hui
ont permis, à la commission, de mieux comprendre comment cela fonctionne
et, parfois aussi, de mieux saisir l'implication des bénévoles.
Plusieurs personnes pensaient, par exemple, que... Je suis persuadé
qu'avant que vous répondiez 8 sur 33, si vous aviez fait passer un test,
nous, on aurait dit Les 33 devraient être des salariés. Par
rapport aux fédérations, que ce soit moitié moitié.
Actuellement, à 40-60 ou moitié moitié, cela apporte un
éclairage. J'ai le sentiment, personnellement, que le Mouvement
Desjardins n'est pas assez connu dans son fonctionnement. Souvent, des choses
sont véhiculées et ce n'est pas assez connu la façon dont
cela fonctionne, comment cela se passe, comment les décisions se
prennent. C'est cela qui m'a frappé au cours de ces deux
journées. Nous avons essayé autant que possible de vous donner
l'occasion de compléter votre mémoire en expliquant pourquoi
telle et telle mesure était importante. Qu'on laisse ensuite au ministre
et aux membres de la commission le choix, l'idée qu'ils voudront bien se
faire de tout cela, mais qu'au moins ce soit mieux connu. Nous espérons
aussi que le projet de loi sera déposé le plus rapidement
possible.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le
député de Lévis. M. le ministre.
M. Fortier: M. le Président, je prends note avec beaucoup
de plaisir de la collaboration qui m'est offerte par le député de
Lévis. Comme ce fut le cas en 1963 - j'ai relu les débats - le
premier ministre Jean Lesage et le chef de l'Opposition, M. Daniel Johnson,
avaient collaboré pour produire la loi qui vous a gouvernés ou
qui a gouverné les caisses d'épargne et de crédit
jusqu'à maintenant. Le député de Lévis m'offre sa
collaboration et je l'accepte avec beaucoup de plaisir. Je pense qu'on va, avec
la collaboration de tous les parlementaires d'ailleurs, tenter de faire le
point le plus tôt possible, de déposer le projet de loi. Comme
vous le savez, notre intention était, si possible, de faire en sorte que
le projet de loi soit adopté avant Noël. Compte tenu du fait que je
sais que des modifications devront être faites et pour prendre en
considération les commentaires d'hier, d'aujourd'hui et de demain, je
crois que les modifications ne seraient pas majeures. En conséquence,
cet échéancier peut être réaliste, quoiqu'il faut
toujours composer non seulement avec les juristes du bureau de l'inspecteur,
mais avec le bureau des lois non seulement de l'Assemblée nationale,
mais du ministère de la Justice, et ce n'est pas un
procédé qu'on contrôle tout à fait. Avec . la
collaboration de tous, j'ose penser qu'on puisse arriver à un projet de
loi avant Noël, si possible. En tout cas, pas trop longtemps après,
si jamais, il y avait des délais. Je peux vous assurer de toute ma
collaboration pour tenter d'arriver à cette conclusion le plus tôt
possible.
M. Garon: Avant que le président dise un mot...
Le Président (M. Lemieux): Oui
M. Garon: ...j'ai remarqué avec beaucoup de satisfaction,
comme père de trois filles, et pas do garçon, que vos personnes
de confiance ici étalent trois femmes qui, sûrement, vous
faisaient rapport de ce qui se passait devant cette commission.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le
député de Lévis.
Dans un premier temps, j'autorise le dépôt des documents
dont vous avez fait état tout à l'heure. Je vous remercie au nom
des deux groupes parlementaires de votre participation à cette
consultation générale sur l'avant-projet de loi sur les caisses
d'épargne et de crédit.
Je vais suspendre quelques minutes afin de permettre au prochain groupe,
la Fédération des
caisses populaires Desjardins de Montréal et de l'Ouest du
Québec, de prendre place à la table des témoins.
(Suspension de la séance à 12 h 6)
(Reprisé à 12 h 16)
Fédération des caisses populaires
Desjardins de Montréal et de l'Ouest du Québec
Le Président (M. Lemieux): À l'ordre, s'il vous
plaît!
Veuillez prendre place. La commission du budget et de l'administration
poursuit ses travaux relativement à la consultation
générale sur l'avant-projet de loi sur les caisses
d'épargne et de crédit. Nous allons entendre, maintenant,
là Fédération des caisses populaires Desjardins de
Montréal et de l'Ouest du Québec. Est-ce que le porte-parole de
l'organisme pourrait s'identifier, s'il vous plaît, et présenter
les gens qui l'accompagnent?
M. Bernier (Guy): M. le Président, mon nom est Guy
Bernier; je suis le président et le chef de direction de la
Fédération des caisses populaires Desjardins de Montréal
et de l'Ouest du Québec. Je vous présente, tel que
suggéré, les membres de notre délégation. A mon
extrême gauche, M. Jocelyn Proteau qui est le directeur de la caisse
populaire de Sainte-Geneviève-de-Pierrefonds et membre de
l'exécutif de la fédération; à ses
côtés, M. Yvan Guérin qui est le président de la
caisse populaire Saint-Pierre-Apôtre de Longueuil et le deuxième
vice-président de notre fédération; à ma gauche
immédiate, M. François Richard qui est le premier
vice-président et directeur général de la
fédération; à mon extrême droite, M. Gérard
Chabot qui est le président de la caisse populaire de la ville de
Saint-Pierre et membre du comité exécutif de la
fédération; à mes côtés aussi, M. Paul-Yvon
Lesage, le directeur général de la caisse populaire de
Sainte-Thérèse-de-Blainville et premier vice-président du
conseil de notre fédération. Merci, M. le Président
Le Président (M. Lemieux): Merci. Alors, les règles
de l'audition, cette fois-ci, sont de 20 minutes consacrées à
l'exposé de votre mémoire; suivra une période de 40
minutes de discussion avec les membres de cette commission. Nous vous
écoutons relativement à votre exposé.
M. Bernier: Merci, M. le Président. La
Fédération des caisses populaires Desjardins de Montréal
et de l'Ouest du Québec n'a pas l'intention de reprendre tous les
arguments qui ont déjà été présentés
plus tôt à la commission par notre confédération.
Afin de dissiper tout malentendu quant aux raisons qui ont motivé notre
intervention, nous tenons à souligner que notre fédération
est d'accord avec l'ensemble des commentaires et recommandations que la
confédération a consignés dans son mémoire. Nous
voulons exprimer aussi, auprès du ministre Fortier, notre satisfaction
sur les grandes orientations de l'avant-projet de loi que nous avions eu
l'occasion, évidemment, de discuter avec nos porte-parole de la
confédération et sur lesquelles nous sommes d'accord, comme toute
la question de la garantie du réseau au plan des
fédérations, tout ce qui entoure la base d'endettement des
caisses et le calcul tel que suggéré pour évaluer,
d'abord, l'endettement, toute la question des sociétés de
portefeuille qui a fait le sujet de nombreuses discussions à notre
fédération et en consultation avec nos secteurs
géographiques et tout ce qui concerne l'autoréglementation, quant
à la loi.
Alors, notre mémoire se veut, en quelque sorte, un
complément de celui de la confédération. Et afin que vous
soyez mieux en mesure d'en comprendre la portée, je pense que vous avez
eu les textes, vous avez pu vous rendre compte que la fédération
de Montréal est une des composantes majeures du Mouvement Desjardins.
Elle a 42 % des actifs de Desjardins; elle regroupe 50 % des membres de
Desjardins; elle est administrée par 4500 dirigeants
bénévoles; elle emploi 9400 personnes pour une masse salariale
qui dépasse les 200 000 000 $ et ses actifs dépassent maintenant
les 12 000 000 000 $ et elle a aussi un très grand territoire
géographique, en partant de l'Abitibi-Témiscamingue en passant
par l'Outaouais, les Hautes et les Basses Laurentides et toute la région
de Montréal et la rive sud.
C'est dans le respect des besoins et des attentes de sa structure de
base des 326 caisses, que notre fédération a décidé
d'entreprendre, dès le dépôt de l'avant-projet de loi, un
vaste marathon de consultations dans chacun de nos onze secteurs
géographiques pour avoir la réaction de nos caisses sur le
document qui contient quelque 500 articles.
Le mémoire que nous présentons reflète les
principales réactions de nos caisses affiliées face à cet
avant-projet de loi, et on nous a demandé d'insister sur certains
aspects du projet de loi avec lequel les caisses doivent conjuguer
quotidiennement leur réalité et leur environnement.
Il faut rappeler également que la majorité de nos caisses
sont situées aux centres névralgiques du commerce et de
l'industrie. Ces caisses font face à une concurrence extrêmement
forte de la part des autres institutions financières, principalement
dans la grande région de Montréal.
Notre mémoire contient trois chapitres. Le premier concerne
l'autonomie de la caisse; le deuxième, la divulgation des
intérêts des dirigeants et le troisième chapitre, le
partage des responsabilités et les rôles des
fédérations et de la confédération. Dans la
première section, ce qui nous apparaît primordial, c'est la remise
en
question que soulève l'avant-projet de loi par rapport à
l'autonomie de la caisse. On en a parlé un peu plus tôt ce matin,
et on dit que depuis la fondation de la première caisse populaire, en
1900, à Lévis, les caisses n'ont pas dévié de leur
philosophie fondamentale qui est la coopération appuyée par une
structure démocratique.
Ce qui a toujours fait la force du Mouvement Desjardins, c'est
l'ensemble, c'est la décentralisation des pouvoirs de décision,
l'implication et l'engagement des dirigeants bénévoles de
l'ensemble des caisses populaires qui a fait en sorte qu'on a toujours
réussi à motiver les gens de la base et à leur donner
suffisamment le sentiment qu'ils avaient quelque chose à avoir avec
l'orientation de leur caisse, avec l'administration locale, avec leur
spécificité et leur particularité et tous les dossiers du
milieu, et on croit qu'il a fait le succès de Desjardins.
L'avant-projet de loi, à notre avis, remet en question la
philosophie et les fondations sur lesquelles reposent le mouvement; il vise
à diminuer considérablement l'autonomie des caisses en
transférant une partie importante de leurs pouvoirs soit aux
fédérations, soit à la confédération, soit
à l'inspecteur général et même au gouvernement.
Ce que nous appréhendons dans tout cela, c'est le fait que le
centre des décisions ait de plus en plus tendance à
s'éloigner des membres et se retrouve à des paliers où les
membres ne peuvent pas intervenir directement par le biais des dirigeants de
leur caisse. Je m'explique. Quand, dans la loi, on voit souvent qu'une
décision, une autorisation ou un règlement doit passer par la
fédération ou la confédération, le cas
échéant - cela veut dire la confédération - et que
la structure de Desjardins fait en sorte que les membres s'expriment à
l'assemblée générale de la caisse et que l'ensemble des
caisses a un contrôle sur leur fédération par leur
assemblée générale, les caisses n'étant pas
affiliées à la confédération directement, la
structure de l'assemblée générale de la
confédération n'est pas une assemblée
délibérante où on rend des comptes opérationnels.
C'est plus une structure de coordination.
Même si nous reconnaissons les obligations inhérentes
à la notion du réseau, nous notons que dans l'avant-projet de
loi, on permet à la confédération d'intervenir, par
exemple, sur la disposition des trop-perçus des caisses, même
celles qui ont atteint leur base d'endettement. Si une caisse individuellement
a atteint sa base d'endettement, l'interprétation du texte de
l'avant-projet de loi nous laisse croire que même là, on pourrait
intervenir dans cette caisse pour l'obliger à ne pas distribuer de
ristournes pour permettre à son réseau de
fédération d'atteindre la base d'endettement
générale. Cette disposition va à l'encontre de la
tradition et des règles de la coopération qui veulent que les
assemblées des propriétaires usagers soient souveraines, dans les
limites du règlement de la fédération
Si on reconnaît que les fédérations doivent
intervenir dans les caisses qui n'ont pas leur base d'endettement, nous croyons
que les autres devraient disposer elles-mêmes de leur trop-perçu.
On fait des recommandations en rapport avec l'autonomie de la caisse,
instamment, que la future loi accorde une plus grande autonomie aux caisses,
tel que prévu dans l'avant-projet de loi. On a noté toute une
série d'articles par rapport à cela: 47, 63, 71, 81. C'est
à travers tout cela qu'on sent un certain mouvement de centralisation
des décisions et des pouvoirs vers le haut plutôt que d'essayer de
maintenir le contrôle et le pouvoir de décision vers la base.
La deuxième partie de notre mémoire, M. le
Président, a été touchée largement ce matin au
sujet des dirigeants de caisse. On appuie sur ce point, en particulier, parce
que cela fait sursauter nos dirigeants bénévoles. Il y en a
plusieurs qui se demandaient s'ils étaient obligés de se
déshabiller et de divulguer à tous les ans tous leurs
intérêts reliés directement aux opérations de la
caisse ou non, et ceux des personnes liées. Cela aurait comme
résultat de démotiver certains administrateurs
bénévoles.
La dernière partie de notre mémoire touche le rôle
des fédérations et de la confédération. La
Fédération des caisses populaires de Montréal et de
l'Ouest du Québec, comme toutes les autres, est une unité
autonome administrée par des représentants de caisses. On
considère que les fédérations sont des institutions
régionales opérationnelles au niveau de la gestion des fonds de
liquidité de leurs caisses affiliées. Cela a un rapport direct
sur un ensemble de services conseils qui facilitent le fonctionnement de la
caisse. Or, l'avant-projet de loi semble vouloir renverser la pyramide
Desjardins en faisant émaner le pouvoir, comme je l'ai dit plus
tôt, pas de la base mais du sommet, c'est-à-dire de la
confédération. Exemple: La proposition de l'avant-projet de loi
visant à faire approuver tous les règlements de la
fédération et de la confédération suscite de vives
inquiétudes pour les dirigeants des caisses. On dit que la caisse doit
faire approuver ses règlements par la fédération et la
confédération, le cas échéant. Les
règlements de la confédération doivent être
autorisés par la confédération, c'est-à-dire que
l'assemblée générale n'est plus souveraine pour passer ses
règlements. Le règlement de régie interne d'une
fédération doit être dicté par la
confédération. Le pouvoir qu'une assemblée
générale doit détenir en rapport avec l'adoption de son
règlement ne devrait pas être transporté ailleurs.
Même si Desjardins s'est drôlement discipliné sur l'adoption
de ses règlements pour avoir une certaine compatibilité - il y a
un certain nombre de règlements compatibles d'une
fédération à l'autre - et même si on procède
avec des modèles de règlements - des règlements types -
qu'on étudie au niveau de la
confédération pour faire des suggestions aux
fédérations et aux caisses, on devrait permettre aux
fédérations et aux caisses, d'une façon autonome, à
leur assemblée générale, d'adopter leurs propres
règlements de régie interne. (12 h 30)
Les fédérations ne sont pas toutes dotées des
mêmes ressources pour assurer les structures en rapport avec les services
qui sont offerts aux caisses affiliées. Dans le cas de notre
fédération, pour nous, ces services existent. La
fédération étant opérationnelle, nous avons des
mécanismes de réglementation qui sont prévus au niveau de
la confédération dans l'avant-projet de loi, qui auront comme
résultat d'enlever aux caisses leur spécificité
coopérative qui a fait leur force et qui leur a permis de se distinguer
des autres institutions financières.
Nous sommes d'accord pour que les normes de liquidité soient du
ressort de la confédération, mais nous croyons aussi que les
fonds qui sont confiés à la fédération par les
caisses, qui ont des comptes à rendre aux délégués
des caisses lors des assemblées générales, soient
gérés au niveau des fédérations. On
considère que ce point est d'autant plus important que la gestion des
fonds a un impact direct sur les résultats financiers des caisses. On
imagine mal qu'à un palior différent, qu'à un autre
palier, on fasse toutes les règles du Jeu pour établir les
mécanismes de gestion des fonds et que les personnes qui vont faire cela
n'aient pas de comptes à rendre aux assemblées
générales où les caisses évaluent la performance et
le rendement de leur propre fédération.
La gestion de ces fonds - il faut le dire - a un impact direct sur le
résultat des caisses. Alors, les caisses vont à leur
assemblée générale demander des comptes à la
fédération.
Toutes ces considérations étant faites, M. le
Président, nous recommandons que le législateur puisse
considérer que les pouvoirs actuels des caisses, et des
fédérations en particulier, surtout sur la gestion des fonds,
demeurent ce qu'ils sont actuellement. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M Bernier. M. le
ministre délégué aux Finances et à la
Privatisation.
M. Fortier: La fédération de Montréal pose
des questions fort importantes touchant l'autonomie des caisses et l'autonomie
des fédérations. La difficulté, je pense bien, pour nous
ici, c'est de chercher à se substituer au Mouvement Desjardins dans son
ensemble sur l'organisation qu'il. veut se donner. Bien sûr,, nous avons
discuté à plusieurs reprises de certains principes de base.
Lorsque vous dites, M. Bernier, que les fonds de liquidité, de
dépôts et d'investissement devraient être laissés aux
fédérations, cela doit vouloir dire que si la
confédération n'intervient pas - et là, c'est une
décision de la confédération de décider parmi ses
fédérations si elle doit intervenir ou non - le gouvernement et
le législateur vont se sentir très mal à l'aise de laisser
des fonds aussi importants à une espèce
d'autoréglementation qui ne serait soumise à aucun contrôle
gouvernemental. Comme vous le savez si bien, pour nous, c'est une
décision, je pense bien, qui ne dépend pas de nous. L'alternative
qu'on a mise sur la table au Mouvement Desjardins et c'est pour cela que
j'indiquais hier qu'à la suite d'un avant-projet de loi - et M. le
député de Lévis y fait souvent référence, il
existait en 1984 - les discussions ont été reprises à
partir de 1986 - quand j'ai été nommé ministre - en vue
justement d'un changement de philosophie de la base parce qu'en 1984, il
était dit clairement que chaque caisse était
contrôlée par l'inspecteur des institutions financières. Si
le Mouvement Desjardins, dans son ensemble, veut revenir à cela, je n'ai
pas d'objection. On va réécrire le projet de loi pour dire que
chaque caisse est soumise à l'autorité de l'inspecteur des
institutions financières.
Nous, au gouvernement, on ne peut pas se laver les mains des
déposants du Québec et on ne peut pas ignorer complètement
les faillites bancaires qui ont eu lieu dans l'Ouest canadien et en Ontario. Ne
me demandez pas et ne demandez pas au gouvernement de donner une espèce
d'autoréglemontation en disant Tout s'est bien passé depuis 1903
et vous devriez encore nous faire confiance. C'est une proposition qu'on
n'accepte pas et qu'on n'acceptera jamais; je serai bien clair
là-dessus. En définitive, soit que le Mouvement Desjardins nous
dise: Écoutez, nous préférerions que la
confédération et les fédérations n'interviennent
pas. À ce moment-là, on va réécrire le projet de
loi pour dire que l'ispecteur des institutions financières
détermine les fonds de liquidité, de dépôts et
d'investissements, de quelle façon les surplus sont disposés,
etc.
Ce qui me surprend, dans le fond, M. Bernier, c'est que vous ayez pris
la peine de dire, en préambule, que votre mémoire se voulait
complémentaire à celui de la confédération, mais
vous venez nous dire - et vous dites dans votre texte - que l'avant-projet de
loi remet en question la philosophie des fondations sur lesquelles repose tout
le Mouvement Desjardins. M. Béland, il y a une demi-heure, nous a dit
exactement le contraire. Je n'ai pas siégé au conseil
d'administration de la confédération et je ne veux pas m'obliger
à demander à l'inspecteur d'exiger le procès-verbal de la
réunion pour savoir qui a voté en faveur et qui a voté
contre, mais M. Béland nous a dit que toutes les
fédérations étaient d'accord, et vous semblez dire le
contraire. Je ne crois pas que, comme ministre, je vais me porter en juge pour
savoir si votre mémoire correspond à ce qui a été
décidé au niveau de la confédération. Si la
fédération de Montréal a voté et que la
confédération n'a pas voté... Ce sont des débats
internes au niveau de la confédération et je ne voudrais pas
être juge
en cette matière; je préfère prendre la parole du
président de la confédération qui nous a dit que la
présentation qu'il a faite avait été
entérinée par toutes les fédérations du
Québec.
C'est la raison pour laquelle je me sens très mal à l'aise
devant votre mémoire; j'aime mieux vous le dire tout de go. Si c'est
vrai que la confédération n'a pas reçu l'appui d'une
fédération aussi Importante que celle de Montréal, on va
reprendre toute la discussion et oublier le projet de loi pour Noël. On va
reprendre toute la discussion. On en a certainement pour six mois encore, parce
que cela fait un an qu'on discute de cela, et à ce moment-là, on
va remettre en question tout le projet de loi parce que vous vous attaquez au
fondement même de toutes les discussions, et vous en étiez partie,
vous le savez, on s'est réunis à plusieurs reprises. À ce
moment-là, quand vous dites que votre mémoire se veut
complémentaire à celui de la confédération, je dois
vous dire que vous vous attaquez à des principes de base dont on a
discuté depuis que j'ai été nommé ministre.
À ce moment-là, votre présentation me rend fort mal
à l'aise vis-à-vis des déclarations du président de
la confédération et fort mal à l'aise parce que mes
légistes ont travaillé sur des concepts que je croyais avoir
été acceptés par le Mouvement Desjardins. Ce n'est pas
à moi de décider si oui ou non c'est cela, je ne veux pas
m'ingérer à l'intérieur de la politique et des
décisions du Mouvement Desjardins. Mais, à ce moment-là,
je dois vous dire que si c'est vraiment le point de vue de la
fédération de Montréal, il faudra reprendre toute la
discussion avec la confédération.
M. Bernier: Sur les principes, sur les grandes orientations qui
concernent la garantie du réseau, la base d'endettement et le
portefeuille d'autoréglementation, on est d'accord. Dans notre
mémoire, à la page 13, on dit: "Les dirigeants des caisses
conçoivent que les normes de liquidité soient du ressort de la
confédération." On ne met pas cela du tout en question Je
voudrais bien me faire comprendre, parce que vous semblez dire qu'on veut
rapatrier toute la détermination des fonds. On est d'accord, aussi, sur
la question des fonds d'investissement, que le règlement et les
règles du jeu soient établis au niveau de la
confédération. D'ailleurs, on n'aura pas le choix parce que si on
est d'accord avec les sociétés de portefeuille, il faudra
être d'accord également avec la politique des fonds
d'investissement, parce que c'est relié aux sociétés de
portefeuille. En rapport avec le fonds de dépôts à terme,
lesquels sont les vases communicants entre les caisses populaires, là
aussi, les règles du jeu sont établies au niveau de la
confédération, à savoir de quelle façon ces fonds
doivent être constitués.
Là où on en est - excusez-moi, si je ne me suis pas bien
expliqué au départ - c'est que la gestion de ces fonds dort
rester au niveau des fédérations. Cela ne vient pas en
contradiction, sauf qu'il y a une tendance, partout dans la loi. C'est toujours
la confédération, le cas échéant", "la
confédération, le cas échéant." D'après nos
conseillers juridiques, cela veut dire qu'ils peuvent toujours prendre les
décisions. Le cas échéant, si c'est "à
défaut de". Si la fédération n'est pas capable d'assumer
ses responsabilités, que la confédération intervienne, on
est 100 % d'accord. Sauf que, lorsque les fédérations sont en
mesure d'assumer leurs responsabilités vis-à-vis de leurs
caisses, que les fédérations sont opérationnelles -
à la planche comme on dit - les fédérations s'occupent de
la gestion des fonds - que la confédération dise: Les normes de
liquidité ne doivent pas être inférieures à tel
pourcentage, on pense que c'est: ce qu'on fait, on est d'accord avec cela et on
l'appuie Sauf qu'à partir du moment où les règles sont
établies, à l'intérieur de ces règles - parce qu'il
appartient aux gestionnaires des fédérations qui font rapport
directement aux caisses par rapport à leur performance - la gestion doit
être faite par les fédérations.
Je pense qu'on n'est pas en contradiction, M. le ministre, avec la
confédération là-dessus.
M. Fortier: S'il me reste un peu de temps...
Le Président (M. Lemieux): Oui, il vous reste un peu de
temps, M. le ministre.
M. Bernier: Sauf que ce qui nous inquiète, c'est toujours
"le cas échéant". Et l'autre partie, que nos caisses acceptent
très mal, c'est que le règlement de régie interne doit
être entériné. Normalement, le règlement interne
d'une société relève de son assemblée
générale. Le règlement d'une fédération
relève de son assemblée générale. Si
l'assemblée générale adopte un règlement et
qu'à la confédération, il y a une petite table en haut qui
va faire en sorte de déterminer ce qui est bon pour Montréal ou
pour un autre, on pense que les gens sont capables - ils l'ont
démontré - d'adopter un règlement de régie interne
sans recevoir automatiquement la bénédiction, parce que
l'assemblée générale est souveraine dans une compagnie,
comme dans une caisse ou une fédération. C'est surtout
là-dessus que nous disons que les principes de cette philosophie qui
font en sorte qu'on se donne nos règlements et qu'on les accepte en
assemblée générale...
Le Président (M. Lemieux): En conclusion, s'il vous
plaît.
M. Bernier: ...aux trois quarts du vote des membres
présents - et on ne peut pas les modifier sans avoir les trois quarts
des votes des membres présents à l'assemblée
générale - nous disons que c'est la confédération
qui va décider quelle sorte de règlement on doit leur donner.
Le Président (M. Lemieux): Merci. M. le
député de Lévis.
M. Garon: Si vous avez quelque chose à ajouter...
M. Bernier: Non, cela va.
M. Garon: Cela va. Au fond, ce que je ne sais pas - et je pense
que c'est ce que vous essayez de dire actuellement - c'est si la
fédération de Montréal et de l'Ouest du Québec et
la confédération sont en accord. C'est un peu cela que le
ministre vous a demandé. Y a-t-il un accord ou un désaccord
là-dessus?
M. Bernier: Sur quoi?
M. Garon: Sur les points que vous souligniez
particulièrement.
M. Bernier: Moi, je présume que la
fédération de Montréal a présenté à
la confédération, le 16 août, un mémoire faisant
état de tous ces points, en détaillant chacun des articles sur
lesquels on désirait une précision, une modification ou un
partage, et on voulait faire interpréter ce que c'était, "le cas
échéant". "Le cas échéant": chaque fois que la
confédération est la dernière citée, elle a
toujours le pouvoir de tout faire, incluant le fait d'aller dire à une
caisse populaire: Vous ne paierez pas de ristournes parce que la
confédération a décidé, à l'autre palier en
haut, que cette caisse ne devait pas payer de ristournes. D'après notre
compréhension du texte, cela voudrait dire que même si une
fédération recommandait à une caisse de verser des
ristournes ou acceptait que cette caisse puisse le faire, la
confédération pourrait dire: Non, non, "le cas
échéant", c'est nous autres. On juge étant donné la
base d'endettement global de cette fédération n'a pas atteint le
niveau de 5 %, qu'aucune des caisses ne pourra verser de ristournes, incluant
celles qui ont largement dépassé leur base d'endettement. Il y en
a qui sont à 6 % et 7 % dans le moment.
Ce pouvoir qui est donné à la confédération
d'intervenir dans le règlement de régie interne d'une
fédération et d'une caisse - les caisses ne sont pas
affiliées à la confédération, elles sont
affiliées aux fédérations - ce pouvoir d'intervention
directe, à moins que la fédération n'intervienne pas,
évidemment à ce moment-là, on accepte. Si la
confédération n'intervenait pas dans une situation difficile, que
le gouvernement intervienne, on est tout à fait d'accord avec cela, mais
à partir du moment où on a démontré que l'instance
qui doit intervenir n'est pas intervenue. Ce qui ressort encore le plus, je le
répète, c'est la question du règlement de régie
interne - faire approuver à un niveau où les caisses ne sont
même pas affiliées. Les caisses vont faire approuver leur
règlement de règle interne par une instance où elles ne
sont pas affiliées, soit à la confédération; elles
sont affiliées à leur fédération. Les
règlements peuvent varier d'une fédération à
l'autre, selon, évidemment aussi, les opérations que chacune des
fédérations fait. On pense qu'on devrait maintenir le statu quo,
à savoir qu'une assemblée générale est souveraine
et capable d'adopter ses règlements. (12 h 45)
M. Garon: Concernant les ristournes, vous dites: Si une caisse
populaire satisfait aux exigences au point de vue de sa base d'endettement,
mais que pour l'ensemble de la fédération, il y a un manque, elle
devrait quand même être capable de déclarer des ristournes,
parce qu'elle a satisfait aux exigences. Dans votre esprit, qui compenserait
à ce moment-là le manque de liquidités ou le manque
vis-à-vis la base d'endettement d'autres caisses de la
fédération?
M. Bernier: La partie des réserves que ces mêmes
caisses font. Si on observe le comportement de la répartition des
bénéfices au cours des dernières années, à
60 %, les bénéfices sont versés aux réserves,
même dans le cas des caisses qui ont une base d'endettement de 4 %, 5 %
et 6 %. La loi actuelle, c'est 3,5 %. Alors, on sait que ces caisses-là
contribuent déjà à l'amélioration de la base
d'endettement général. Il y aura également le capital
permanent. On a un pouvoir de capitalisation dans la nouvelle loi. La seule
question difficile par rapport au capital permanent - je pense qu'hier on a
fait une ouverture là-dessus à la confédération,
dans la discussion au niveau de l'exécutif - c'est l'incapacité
pour les caisses qui devront émettre du capital permanent de payer
l'intérêt. Comment pourront-elles vendre du capital permanent si
elles ne sont pas capables de payer l'intérêt? On pense, au niveau
des fédérations - comme on le fait, par exemple, pour les fonds
de développement - que l'ensemble des caisses devraient alimenter un
fonds de stabilisation ou un fonds de prévoyance au niveau de la
fédération, avec l'accord de la fédération
évidemment, parce que c'est le fonds qui aura à débourser.
Quand une caisse veut émettre des parts permanentes, le fonds
alimenté par l'ensemble des caisses d'une fédération
pourrait rémunérer les parts permanentes d'une caisse qui n'est
pas en mesure de le faire. Cela va grandement aider à la capitalisation
parce qu'autrement, on a beau dire qu'on pourra émettre des parts
permanentes, mais si on n'est pas capable de les rémunérer, on ne
pourra pas en émettre. Les caisses qui en ont le plus besoin, ce sont
celles qui ne sont pas capables de payer. Dans ce contexte, on pense qu'avec le
fonds de stabilisation au niveau de la fédération, on pourrait
faire l'émission de parts permanentes.
M. Garon: J'ai compris que M. Béland a dit tantôt,
concernant le rapport présenté par la confédération
- d'ailleurs, vous étiez à la table, à la droite de M.
Béland - qu'il y avait unani-
mité dans le mouvement. On a dit que le mémoire
était unanime. Il y avait eu des consultations et des discussions, mais,
qu'à la fin, si je ne me suis pas trompé et si j'ai bien compris,
M. Béland a dit que c'était...
M. Fortier: Sur la question de la capitalisation?
M. Garon: Non, sur l'ensemble du mémoire de la
confédération. J'ai compris, selon le mémoire, que
c'était un mémoire unanime qui avait été
présenté à tous et que tout le monde était d'accord
là-dessus.
M. Bernier: Oui, parce que le mémoire de la
confédération, avec ses annexes, est censé contenir les
demandes que les caisses populaires de la Fédération de
Montréal lui ont adressées, qu'elles ont déposées
le 16 août et qui ont été acceptées. Toutes les
demandes que je vous mentionne actuellement, les points précis, ont
été acceptés par la confédération au mois
d'août et ils sont supposés être incorporés dans son
mémoire.
M. Garon: Les points que vous soulevez dans le mémoire
particulier dont vous parlez actuellement. Est-ce ce que vous voulez dire?
M. Bernier: Oui.
M. Garon: Tous ces points ont été inclus dans le
mémoire qu'on vient d'étudier entre 10 heures et midi.
M. Bernier: Les caisses de la Fédération de
Montréal avaient soulevé des points qui ont été
soumis à la confédération. On devait de toute
façon, pour se présenter devant la commission, déposer
notre document le 19 août, je pense, et la confédération a
tenu son assemblée le 16 août. On ne pouvait pas présumer
que toutes nos demandes, toutes les demandes des caisses de la
Fédération de Montréal seraient acceptées par
l'ensemble des autres fédérations. Alors le conseil, à une
réunion qui a eu lieu avant le 16 août, avait décidé
de toute façon de présenter à la commission un
mémoire pour attirer son attention sur les trois points majeurs que je
vous soumets. Nous les avons également soumis à la
confédération qui les a acceptés.
Dans notre esprit, si le gouvernement donne suite aux demandes
exprimées par la confédération et qui étaient
annexées à son mémoire, cela répondrait à
nos préoccupations.
Le Président (M. Lemieux): Vous avez terminé, M. le
député de Lévis?
M. Garon: Est-ce que je pourrais avoir une minute?
Le Président (M. Lemieux): Une minute?
Une minute, brièvement, et la réponse brève
aussi.
M. Garon: Votre mémoire est là pour mettre plus de
force sur certains points qui vous apparaissent très importants et avec
lesquels la confédération n'est pas en désaccord.
M. Bernier: Exactement. M. Garon: Merci.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le
député de Lévis. M. le député de
Mille-Îles.
M. Bélisle: Merci, M. le Président. M. Bernier,
est-ce que des frais d'ouverture de compte sont exigés par les caisses
d'épargne et de crédit, par les 326 institutions qui font partie
de votre fédération?
M. Bernier: M. Richard.
M. Richard (François): Pas à ma connaissance.
Chacune des caisses est libre. Il pourrait y avoir des exceptions, mais
l'ouverture d'un compte implique normalement la souscription à une part
sociale.
M. Bélisle: C'est exact. C'est-à-dire 5 $
payés, on est membre et on obtient une part sociale. Vous devez
comprendre que le petit incident qui a été
révélé ce matin et qui m'est arrivé personnellement
dans une caisse de la Fédération de Montréal où je
me suis retrouvé au comptoir avec un compte inactif depuis quelque
temps, mais où j'avais un solde. Je ne contestais pas du tout les frais
de compte inactif qui m'avaient été imposés; cela est une
autre paire de manches. On a tout simplement refusé de me remettre ma
part, alors que j'ai été membre pendant tout près d'une
douzaine d'années de cette caisse et qu'on a déguisé cela
en frais de fermeture Cela me laisse très froid vis à vis de la
condition d'être un membre coopérant chez Desjardins. C'est une
chose ou une autre. Vos frais de 5 $ de départ, ce n'est pas une
participation comme membre ou comme coopérant, si vous imposez des frais
de fermeture de 5 $, parce que vous confisquez la part à la fin; ce sont
d'autant plus des frais d'ouverture. Je pense que vous devriez à tout le
moins corriger cela rapidement auprès de vos 326 caisses, en
réunion, et éclaircir cette situation qui me semble pour le moins
totalement abracadabrante.
M. Bernier: M. Bélisle, je reçois une
correspondance assez abondante de plaintes. La Fédération de
Montréal a un service des plaintes qui fait que des sociétaires
de caisses viennent directement à la fédération; quand ils
vont chez M. Béland, il me les renvoie. Sa correspondance, c'est moi qui
y réponds quand cela touche les caisses de la Fédération
de Montréal.
M. Bélisle: C'est utile de savoir cela, d'accord.
M. Bernier: Nous avons une personne responsable des plaintes.
Elle va dans la caisse; elle enquête sur toutes les circonstances de la
plainte ou du traitement qui a été donné au
sociétaire. Dans certains cas où l'informatique a fait des
charges administratives sur un compte inactif, avant qu'il soit
renversé, et que cela a eu comme résultat d'éteindre le
montant de 5 $, ou les 7 $, ou les 10 $... Remarquez que, parfois, ce sont des
charges que le système distribue dans la province et dans les
caisses.
M. Bélisle: Ce n'est pas de cela que je parle, M.
Bernier.
M. Bernier: Chaque fois que le membre, chez nous, a
demandé d'être remboursé et qu'il a identifié son
livret, la recommandation de la fédération qui a
été faite à la caisse, a été de retourner
dans les virements qui ont été farts et de payer le membre.
M. Bélisle: Ce que je vous expose, c'est ceci: une
caissière au comptoir a refusé de remettre une part sociale
à un membre. Cela m'est arrivé personnellement. Je n'ai pas
besoin de vous en donner plus, je pense que vous pouvez faire vos
vérifications et essayer de voir si dans d'autres caisses... D'autres
m'ont rapporté que cela se faisait systématiquement. Je pense que
vous avez un problème de base avec votre part de membre. Si vous voulez
être considéré comme un mouvement coopératif, il va
falloir que vous considériez, quand quelqu'un quitte une caisse, de lui
remettre sa part de membre.
M. Bernier: Je suis d'accord avec vous.
M. Bélisle: Deuxième question: l'article 14 du
règlement de la Fédération de Montréal. Vous
obligez une caisse qui est membre à confier à la
société Le Groupe Desjardins, assurances générales,
l'assurance globale, l'assurance-cautionne-ment, etc. Trois cent vingt-six
caisses font partie de votre fédération. Quel est le montant
total des primes annuelles payées par vos 326 caisses à la
société le Groupe Desjardins, assurances
générales?
M. Bernier: Je ne pourrais pas vous le dire de mémoire,
sauf que cela comprend l'assurance globale qui assure non seulement les
employés, mais l'ensemble de toutes les transactions de la caisse. C'est
une couverture...
M. Bélisle: Ou les dirigeants, ceux qui sont membres du
conseil d'administration et tout le reste. Vous pourriez peut-être faire
une vérification et nous envoyer cette information, M. Bernier?
M. Bernier: Cela assure aussi l'argent.
M. Bélisle: Vous pourriez peut-être faire une
vérification et nous envoyer cette information concernant le montant
total de primes payées et également, par le fait même,
est-ce que vous connaissez le montant des pertes annuelles que la compagnie,
qui s'appelle Assurance générale des caisses Desjardins, remet
aux caisses populaires, qu'elle paie chaque année? Vous le
connaissez?
M. Bernier: Oui, parce que cela fait varier la prime
évidemment.
M. Bélisle: C'est cela, c'est pour cela. Est-ce que vous
êtes capable de me donner un chiffre?
M. Bernier: Je ne peux pas vous le donner maintenant.
M. Bélisle: Est-ce que vous pourriez nous l'envoyer, M.
Bernier?
M. Bernier: Je pourrais certainement vous donner toute cette
information.
M. Bélisle: Vous vous engagez à nous envoyer
cela?
M. Bernier: Absolument.
M. Bélisle: Bon. Pour les cinq dernières
années?
M. Bernier: Si vous voulez.
M. Bélisle: D'accord. M. Bernier, à l'article 133.7
du projet de loi, on dit que "le conseil d'administration doit notamment exiger
de toute personne ayant l'administration ou la garde des fonds de la caisse un
cautionnement adéquat et, le cas échéant, conforme aux
règlements de la fédération à laquelle la caisse
est affiliée - je fais référence au mémoire de la
FTQ d'hier et à de nombreux cas litigieux de la Fédération
de Montréal où des caisses ont été mises en
tutelle, et je n'ai pas besoin de les nommer. Je pense que tout le monde sait
à quoi je fais référence. J'aimerais savoir si vous seriez
bien embêté si, dans le projet de loi, M. Bernier, on enlevait la
dernière partie du 7° et que ce serait le gouvernement qui dicterait
le contenu du contrat de cautionnement et non la fédération et,
en plus de cela, si on permettait à une caisse de s'assurer, mais pas
auprès d'une institution qui fait partie du même groupement
financier, c'est-à-dire la poche gauche du même habit avec lequel
la fédération est liée et avec les autres
sociétés affiliées? Vous ne pensez pas que cela serait
peut-être mieux, en termes de protection, pour les employés, pour
vos gérants directeurs-généraux de succursale, pour les
membres bénévoles
de vos conseils d'administration?
M. Bernier: À ce compte-là, au lieu de
déposer nos sommes d'argent en fiducie, on devrait les déposer au
Trust Royal si on suit votre raisonnement jusqu'au bout. Le Mouvement
Desjardins a un réseau d'institutions qui ont leur conseil
d'administration propre, qui ont leur code de déontologie et qui ont
leur mode de fonctionnement dans l'industrie de l'assurance. Le Groupe
Desjardins suit les normes de l'industrie de l'assurance et il assure non
seulement des caisses populaires, mais il est aussi dans le marché de
l'assurance en général.
Nous avons mis sur pied dans le temps, il y a déjà
plusieurs années. Je me rappelle, l'histoire nous rappelle que c'est M.
Vaillancourt. À ce moment-la, les caisses populaires étaient
considérées un peu comme des institutions très
différentes des institutions financières traditionnelles. Nous
avons été amenés à mettre sur pied nos propres
institutions d'assurance parce qu'il était difficile d'obtenir ce genre
de services.
Pour la fédération, il est important que nos
employés puissent offrir, patte blanche, une police de garantie de
fidélité. On a une société qui a son propre conseil
d'administration, qui établit ses normes, qui est dans l'industrie de
l'assurance et c'est avec cette société qu'on fait affaire.
M. Bélisle: Vous ne trouvez pas que c'est...
M. Bernier: II n'y a rien jusqu'à maintenant qui nous dise
que le Groupe Desjardins ne se soit pas comporté comme un assureur qui
doit avoir ses exigences et observer les règles du jeu.
M. Bélisle: Est-ce que les caisses affiliées
à votre fédération sont au courant annuellement des
montants de perte payés par l'assurance générale
Desjardins?
M. Bernier: Oui
M. Bélisle: C'est transmis. Est-ce que les membres de
chacune des caisses affiliées sont au courant?
M. Bernier: Je ne suis pas sûr que chacun des 2 000 000 de
membres ait cette information, mais les conseils d'administration produisent un
rapport annuel. D'ailleurs, le Groupe Desjardins fait toujours son
assemblée générale ouverte au mois de mars chaque
année.
M. Bélisle: D'accord.
M. Bernier: Toutes ces informations sont disponibles.
M. Bélisle: Je suppose que vous n'avez pas
nécessairement tous les sociétaires des 326
Institutions de la région de Montréal qui se
présentent à votre assemblée annuelle. Il doit y en avoir
une petite partie qui reste chez elle.
Pour revenir à ma dernière question, M. Bernier, parce que
je n'ai pas beaucoup de temps et que celui-ci me presse...
M. Bernier: Les rapports sont postés à chacune des
caisses. (13 heures)
M. Bélisle: À chacune des caisses, je vous
l'accorde. Mais de là à savoir si chaque caisse transmet, en bout
de course, l'information aux coopérants membres à part
entière, c'est une autre paire de manches. Concernant les conflits
d'intérêts des dirigeants à l'intérieur d'une
organisation aussi importante que la vôtre, à l'intérieur
d'une fédération, M. Bernier, comment un membre d'une caisse
populaire affiliée peut-il connaître le traitement annuel, le
salaire, le revenu gagné, le fonds de retraite des gens d'une
fédération, tous les petits avantages qui font partie du fait
qu'on fait effectivement partie d'une organisation ou d'une institution
à un certain moment donné? C'est très important que ces
informations soient transmises à ceux qui sont à la base de votre
mouvement, si vous voulez que votre mouvement demeure un mouvement de base au
Québec. Présentement, je ne pense pas que cela se fasse, que cela
se transmette. Comment réagissez-vous à cela?
M. Bernier: Je ne suis pas sûr non plus que tous les
actionnaires des banques connaissent exactement le salaire des cadres
supérieurs des banques et que ce soit exigé par la loi. Dans le
Mouvement Desjardins, au niveau des fédérations, les
décisions qui concernent les structures salariales, les traitements, les
avantages sociaux des cadres et de l'ensemble des employés - les
employés, c'est par bloc et les cadres, c'est plus individuellement,
d'après des échelles qui sont établies selon des
études de marché - sont prises » par un conseil
d'administration composé de personnes qui émanent des caisses
populaires. Chez nous, il y avait 23 administrateurs, il y en a 22 maintenant,
qui, chaque année, ont à établir où se situe dans
le marché l'évaluation des tâches et des fonctions...
Le Président (M. Lemieux): En conclusion, puisque la
parole doit être au député de Lévis.
M. Bernier: Ce sont eux qui prennent les décisions, mais
ce sont des délégués des caisses.
Le Président (M. Lemieux): Merci Vous avez terminé,
M. le député de Mille-Îles.
M. Bélisle: Je n'ai pas terminé, mais le temps est
trop court. J'en aurais pour longtemps.
Le Président (M. Lemieux): Je crois que, dans le rapport
annuel de multinationales comme
Bell Canada, ces choses-là apparaissent, y compris le salaire du
président.
M. le député de Lévis, en conclusion.
M. Garon: II faut dire que, dans ces compagnies-là,
personne n'aspire aux hautes fonctions, parce que les salaires sont de l'ordre
de plusieurs centaines de milliers de dollars. Personne ne pense qu'il peut
prendre la place du président... de Bell.
Le Président (M. Lemieux): ...faire des comparaisons. M.
le député de Lévis, allez-y.
M. Fortier: De toute façon, c'est plus élevé
qu'un député.
Le Président (M. Lemieux): C'est sûrement plus
élevé, et même qu'un ministre.
M. Garon: Dans certains cas, c'est quasiment aussi
élevé que tous les députés ensemble. La question
que j'aimerais poser s'adresse autant au ministre...
Le Président (M. Lemieux): Est-ce qu'il y a consentement
puisque nous devons poursuivre?
M. Bélisle: Consentement.
Le Président (M. Lemieux): Consentement. Allez-y, M. le
député de Lévis.
M. Garon: ...le temps, c'est parce qu'on l'a
dépassé.
M. Bélisle: On n'applique pas le règlement? M. Garon:
On applique le règlement.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Mille-Îles, si j'avais eu à appliquer le règlement comme M.
le député de Lévis, vous auriez été
coupé puisque M. le député de Lévis vous a
octroyé, trois minutes de plus. M. le député de
Lévis.
M. Bélisle: Je remercie le député de
Lévis de sa gentillesse.
Le Président (M. Lemieux): Allez-y, M. le
député de Lévis.
M. Garon: Le député de Mille-Îles a fait des
affirmations sur ce que, à la suite de la rencontre avec la
Fédération des travailleurs du Québec, qui parlait du
fonctionnement, des employés, j'ai soulevé tout à l'heure
avec le président de la fédération. Je ne suis pas
convaincu, à moins que j'aie mal compris, que ce que le ministre a dit
c'est ce qu'a dit le député de Mille-Îles. J'ai
plutôt le sentiment que le ministre a dit qu'il regarderait cette
question dans le cadre de la Loi sur l'assurance-dépôts, mais je
n'ai pas compris qu'il ait dit qu'il dicterait ou rédigerait
lui-même le contrat de fonctionnement.
M. Fortier: C'est une suggestion que le député de
Mille-Îles fait. Mon Dieu, si les députés à cette
table ne peuvent pas faire de recommandations. Dans notre formation politique,
M. le député de Lévis, nos députés font des
recommandations au ministre, ce à quoi je me suis engagé d'avance
en m'assurant que les députés soient ici. D'ailleurs, je suis
bien heureux et je les remercie d'y assister. Je les ai invités ce soir
à dîner, parce que je veux avoir le bénéfice de
leurs commentaires. Si le député de Mille-Îles a des
recommandations pertinentes à faire à ce sujet, je pense que
c'est un sujet important, on va l'examiner.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Lévis, poursuivez.
M. Garon: M. le Président, ce n'est pas cela que je dis.
J'aimerais savoir et j'aimerais que le ministre nous répète ce
qu'il a pris comme engagement hier. Il a pris un engagement concret qui,
à mon avis, n'était pas de la nature de ce que dit le
député de Mille-Îles. Que le député de
Mille-Îles fasse des suggestions au ministre, j'ai l'impression que,
parfois, le ministre est obligé de les écouter malgré lui,
mais ce n'est pas cela que je demande. Il a pris un engagement concret hier et
j'aimerais qu'il nous en fasse état. Est-ce ce qu'a dit le
député de Mille-Îles ou autre chose? Mais que, plus tard,
il change d'idée, ça! Sur le décloisonnement, on voit
qu'il est en train de changer d'idée.
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre.
M. Fortier: II est très influent. Si vous vous rappelez,
dans la loi sur les fiducies c'est à sa demande qu'on avait
modifié des pouvoirs du ministre pour les transformer en décrets
du gouvernement. C'est pour cela que les députés sont ici. Pour
répondre à votre question, très sérieusement, j'ai
indiqué à la FTQ que les représentations qu'elle nous
avait faites étaient importantes et que, si l'écriture de
l'avant-projet était telle que cela pouvait être
interprété de façon trop spécifique
vis-à-vis d'un individu... Je lisais, hier, si vous vous en souvenez,
l'article en question dans lequel on dit que l'assurance doit s'appliquer
à un individu particulier. C'est pourquoi j'ai indiqué à
M. Fernand Daoust que nous aurions des discussions avec eux et qu'on
regarderait les textes de la Régie de l'assurance-dépôts.
Parce que, si le texte de loi indique qu'un individu en particulier et si cela
permet à la compagnie d'assurances de dire: M. Tartem-pion, nous ne
l'assurons plus, bon, on va examiner cela. Il se peut si c'est une assurance
générale pour une caisse en particulier - peut-être M.
Bernier pourra me répondre - si l'assu-
rance n'est pas spécifique. Le texte de loi dit qu'un individu
doit être protégé par la compagnie d'assurances. La
question que Je posais à M. Daoust - je n'avais pas la réponse
moi même - c'était d'indiquer... De toute façon, il se peut
que cette disposition de la loi soit un peu redondante parce que, même si
on l'enlevait, la Loi sur l'assurance-dépôts s'applique aux
caisses populaires. Là on dit aux fins du paragraphe d de l'article 31,
qu'une caisse doit détenir une police d'assurance contre les risques de
détournement.
Il semblerait que, de toute façon, dans la Loi sur
l'assurance-dépôts, on soit déjà
protégés. Si c'est le cas, j'ai indiqué qu'on examinerait
cette disposition qui est moins spécifique à un individu en
particulier. De toute façon, celle-ci assurerait le genre de protection
que le gouvernement recherche, soit que les individus à
l'intérieur d'une caisse soient protégés par une police
d'assurance. C'est l'indication que j'avais à donner.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le ministre. M. le
député de Lévis, en conclusion, vous avez repris vos trois
minutes, en conclusion, s'il vous plaît.
M. Garon: Non, essentiellement, je n'ai pas eu trois
minutes...
Le Président (M. Lemieux): C'est parce que vous avez
posé une question au ministre et votre temps de parole est inclus dans
la réponse du ministre.
M. Garon: Non, j'ai posé une question au ministre pour
dire...
Le Président (M. Lemieux): On ne peut pas poursuivre
jusqu'à 14 heures, M. le député de Lévis.
M. Fortier: C'est ce que j'avais dit hier.
M. Garon: Non, non. Oui, je reconnais que c'est ce que vous avez
dit hier.
M. Fortier: Mais le député apporte une nouvelle
recommandation.
M. Garon: Mais je ne trouvais pas que ce que le
député de Mille-Îles disait était ce que vous aviez
dit hier. Là, ce que vous avez dit correspond à ce que vous aviez
dit hier.
M. Fortier: II a le droit de faire des recommandations.
Le Président (M. Lemieux): Alors, en conclusion, M. le
député de Lévis.
M. Garon: Je voudrais remercier la Fédération des
caisses populaires Desjardins de Mont- réal et de l'Ouest du
Québec. Les propos qui ont été tonus m'ont paru clairs. Je
suis content d'apprendre, au fond, que la fédération de
Montréal et de l'Ouest du Québec et la
confédération sont sur la même longueur d'onde. Les propos
du ministre m'avaient amené à penser qu'il y avait un
désaccord et les questions que j'ai posées m'ont permis de bien
comprendre ce que vous vouliez dire dans votre mémoire, votre accord
avec le mémoire de la confédération et que votre
mémoire servait à expliquer davantage les points qui vous
paraissaient majeurs et que vous avez voulu souligner au sein de la
fédération. Je vous remercie.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le
député de Lévis. M. le ministre
délégué aux Finances et à la Privatisation, s'il
vous plaît.
M. Fortier: C'est malheureux qu'on n'ait pas eu plus de temps. M.
le Président, je le comprends bien; d'ailleurs, on a un horaire assez
chargé. J'aimerais dire à M. Bernier que la lecture de l'article
408 ne semble pas m'indiquer qu'on parle de gestion et qu'il y ait une
délégation de la gestion des fonds. Je ne crois pas que vous ayez
raison d'avoir cette appréhension vis-à-vis de la
délégation de la gestion, parce que je viens de lire l'article
408, et on n'y parle pas de délégation de gestion.
Néanmoins, sur certains points techniques comme ceux-là, parce
que vous en faites des questions de principe, il se peut que ce soient
plutôt des questions techniques d'écriture et, si c'est le cas, si
cela ne change pas la philosophie générale que la
confédération a acceptée, je suis bien prêt à
avoir des discussions avec vous. Car, comme je l'ai indiqué à M.
Béland, dans des cas d'écriture de certains articles, dans la
mesure où cela ne change pas la philosophie de l'avant-projet, on est
très réceptif à des commentaires.
Sur la question, entre autres, des responsabilités de la
confédération et de la fédération - c'est le point
fondamental et vous avez soulevé aussi la question du paiement des
ristournes - là, c'est toute la question de la responsabilité du
réseau. Comme vous le savez, dans la mesure où une caisse est en
difficulté, c'est la fédération qui intervient. Si une
fédération était en difficulté, elle aurait recours
au fonds de sécurité et elle pourrait être appuyée
par une autre fédération. Quant à nous, nous
désirons qu'il y ait une responsabilité du réseau des
caisses à l'intérieur d'une fédération, mais,
éventuellement, il se peut qu'il y ait une responsabilité du
réseau d'une fédération à l'égard d'autres
fédérations. Dans cet esprit, vous comprendrez donc que, si
plusieurs fédérations devaient intervenir pour aider une
fédération en difficulté, il faudrait bien que la
confédération ait le pouvoir d'édicter des
règlements. C'est la raison pour laquelle j'ai essayé de
comprendre votre point de vue. Je suis bien prêt à vous rencontrer
à nouveau pour en discuter, mais ce
que je voulais vous dire et je pense que j'ai été
très clair c'est que je n'ai pas l'intention de changer la philosophie
de base. Je ne suis pas tout à fait d'accord avec vous que l'intention
du législateur soit de brimer les droits des sociétaires. Au
contraire.
Il reste que nous avons accepté de déléguer
certaines responsabilités au mouvement sous une forme
d'autoréglementation et c'est pour cela que je dis soit que le mouvement
les prenne ou non. S'il ne les prend pas, on va réécrire le
projet de loi pour donner des responsabilités à l'inspecteur.
Quant à moi, je préférerais la formule qui est devant nous
à savoir que les fédérations et la
confédération assument des responsabilités
d'autoréglementation, mais à l'intérieur de cette
philosophie - je conclus là-dessus, M. le Président - s'il y a
moyen de faire des ajustements, je suis bien prêt à en
discuter.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le ministre. Je
remercie les représentants de la Fédération des caisses
populaires Desjardins 4 de Montréal et de l'Ouest du Québec pour
son mémoire relativement à la consultation générale
sur l'avant-projet de loi, Loi sur les caisses d'épargne et de
crédit au nom des deux groupes parlementaires.
Je suspends les travaux qui reprendront à 15 heures avec l'Union
des producteurs agricoles.
(Suspension de la séance à 13 h 12)
(Reprisée 15 h 8)
Union des producteurs agricoles
Le Président (M. Lemieux): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission du budget et de l'administration reprend ses travaux
relativement à la consultation générale sur l'avant-projet
de loi, Loi sur les caisses d'épargne et de crédit.
Nous allons maintenant entendre l'Union des producteurs agricoles.
J'inviterais les gens de l'Union des producteurs agricoles à bien
vouloir prendre place à la table des témoins, s'il vous
plaît. Est-ce que le porte-parole de l'organisme peut s'identifier, et
présenter la personne qui l'accompagne?
M. Beaudoin (André): Oui. André Beaudoin,
représentant de l'Union des producteurs agricoles du Québec et Me
Michel Lord, conseiller juridique de l'union des producteurs.
Le Président (M. Lemieux): Merci. Voici les règles
de l'audition. Vous avez 20 minutes pour votre exposé. Suivra une
période de 40 minutes de discussion avec les membres de cette
commission. Sans plus tarder, vous pouvez nous exposer votre
mémoire.
M. Beaudoin: Si vous le voulez bien, on va procéder avec
la lecture et on pourra ensuite argumenter sur cette base. Michel.
M. Lord (Michel): Comme on le sait, les caisses d'épargne
et de crédit, avec le Mouvement Desjardins en tête de file,
occupent une place centrale dans l'économie du Québec.
Nées au début du siècle, ces institutions ont connu un
développement tout à fait remarquable, notamment et surtout au
cours des dernières décennies.
Ces institutions comptent maintenant parmi les grands outils collectifs
que se sont donnés les Québécois et les
Québécoises: des outils bien particuliers, des outils dont ils
sont les seuls propriétaires, des outils sur lesquels ils ont l'entier
contrôle et des outils dont ils sont fiers avec raison. Cette très
grande fierté est, bien sûr, partagée par les agriculteurs
et les agricultrices de même que par les producteurs et les productrices
de bois qui ont, de tout temps, été très
étroitement associes au développement de la formule
coopérative, notamment en matière financière. On
comprendra donc le vif intérêt de l'Union des producteurs
agricoles pour l'avant-projet de loi sur les caisses d'épargne et de
crédit. En outre de divers commentaires d'ordre général,
nous limiterons cependant notre intervention à la délicate
question de l'attribution des ristournes.
Pour mémoire, nous rappelons que l'Union des producteurs
agricoles est l'organisation syndicale et professionnelle qui représente
officiellement les quelque 50 000 producteurs et productrices agricoles que
compte encore le Québec d'aujourd'hui. Notre organisation regroupe
également ceux et celles qu'on désigne comme des producteurs de
bois. Les propos qui suivent valent généralement pour les deux
groupes indistinctement.
Comme c'est souvent le cas pour les coopératives, les caisses
sont d'abord nées d'un besoin de services. Au fil des ans, les services
offerts se sont multipliés et surtout les points de service ont
essaimé. Comme l'Union des producteurs agricoles, les caisses ont le
rare privilège en même temps que la très lourde
responsabilité d'être présentes sur l'ensemble du
territoire québécois. C'est sans doute ce qui explique que les
caisses font maintenant partie de notre vie de tous les jours. C'est le cas,
notamment, pour les agriculteurs et pour les agricultrices qui font très
massivement et de plus en plus affaire avec les caisses. Cette
omniprésence est et doit demeurer l'élément de force des
caisses; il faut espérer que celles-ci accentueront encore davantage
leurs efforts en cette direction.
Parallèlement et en même temps, les caisses ont peu
à peu réalisé la force de l'action collective et elles ont
accepté que cette action profite à l'ensemble de la
collectivité québécoise. On connaît la suite: une
réussite qu'on a peine à mesurer, tant ses effets sont divers et
multiples et même plusieurs restent à venir.
À l'heure où les institutions financières
nord-américaines sont en pleine ébullition à la suite de
la déréglementation que l'on sait, l'Union des producteurs
agricoles croit qu'il importe que le gouvernement du Québec s'assure que
les caisses disposent toujours et plus que jamais des instruments qu'il faut
pour jouer dans les ligues majeures.
La plupart des réformes proposées sont séduisantes,
tant celles visant une meilleure intervention économique que celles
visant une meilleure protection du public. D'autres nous laissent perplexes.
C'est le cas surtout de celles visant à accroître l'Intervention
gouvernementale. N'étant pas des experts en ces matières, nous
laisserons à d'autres le soin de se prononcer et de juger de la
pertinence et de la justesse de ces réformes. Nous espérons
cependant vivement que la réforme à l'étude permettra aux
caisses de continuer leur incessante progression: droit devant!
Mais la réussite n'est pas tout et il ne faut pas être
prêt à n'importe quoi pour elle. Les caisses doivent demeurer
différentes, sensibles aux besoins de leurs membres, fidèles aux
grands principes qui les régissent depuis toujours: démocratie,
équité, justice.
D'une façon générale, nous estimons que
l'avant-projet de loi, malgré un grand bond en avant, maintient le
caractère particulier des caisses. Diverses mesures prévues
viennent même ajouter aux garanties existantes et nous croyons qu'il faut
nous en réjouir.
Il est cependant un élément de réforme qui, sous
des dehors anodins, s'inspirant même de précédents, non
seulement nous apparaît plein de dangers, mais pourrait avoir pour effet
d'anéantir l'un des fondements les plus caractéristiques de
l'action coopérative, c'est-à-dire une équitable
répartition des excédents et autres avantages sur la base de
l'utilisation des services. Nous nous référons ici, bien
sûr, à l'article 272 projeté, lequel prévoit que
"les ristournes peuvent varier selon la nature des opérations
effectuées avec la caisse. "
Certaines personnes seront peut-être un peu surprises de notre
opposition, l'estimant injustifiée, mal fondée,
prématurée. Notre opposition s'appuie pourtant sur
l'expérience passée récente, une expérience
vécue par des milliers d'agriculteurs et d'agricultrices qui se sont vus
injustement privés de sommes parfois fort Importantes leur étant
dues.
Il y a quelques années, en effet, diverses caisses avaient
adopté comme politique d'exclure les prêts agricoles à
intérêts réduits aux fins du calcul et du versement des
ristournes. Quand on sait l'importance de ces prêts, on devine
aisément les incidences en résultant pour les agriculteurs et les
agricultrices. Convaincus d'être l'objet d'une grave injustice, mais
aussi parce qu'ils demandent de fervents coopérateurs, il n'était
pas question pour les agriculteurs et les agricultrices de tolérer une
telle pratique. Ils étaient même prêts à recourir aux
tribunaux pour faire reconnaître leurs droits. (15 h 15)
À la suite de discussions avec la direction du Mouvement
Desjardins, il avait été convenu de faire cesser cette pratique.
On nous avait cependant prévenus que des amendements législatifs
seraient sollicités. Nous constatons aujourd'hui que le gouvernement
semble prêt à donner suite aux demandes formulées. Selon
nous, il s'agirait d'une grave erreur.
Certains penseront sans doute que notre position est pleine de failles,
en outre d'être honteusement corporative. Ainsi, certains disent qu'en
raison des taux réduits à eux et à elles consentis, les
agriculteurs et los agricultrices ne peuvent prétendre à un
trop-perçu et sont donc à juste titre exclus du versement des
ristournes. Nous leur répondons que l'octroi d'un taux avantageux aux
environs du taux préférentiel n'est pas un cadeau qui nous vient
du ciel. C'est plutôt un taux établi en fonction de l'importance
des transactions en cause et du très faible risque pour l'institution
prêteuse. C'est un fait bien connu que les prêteurs font de
l'argent même au "prime rate", lequel a cessé depuis longtemps
d'être consenti aux meilleurs clients.
Mais, il y a plus. En raison de leur nature même, comme leur nom
l'indique d'ailleurs, les trop-perçus sont des montants qui ont
été versés en trop par les membres utilisateurs, des
sommes leur appartenant donc. Quand on exclut certaines personnes du versement
de ces ristournes, on les vole donc tout simplement carrément.
Si l'exemple donné ne suffit pas ou est jugé trop
corporatif, il est aisé d'imaginer une multitude d'autres abus possibles
pouvant tous mener tout droit à la discrimination, à la
discrimination systématique même. Ainsi, en ne visant que les
grands prêts ou que les dépôts d'une certaine importance, on
pourrait en venir à ne favoriser qu'un seul groupe au détriment
de tous les autres moins bien nantis. Même permise par la loi,
l'injustice demeurerait injustice. Nous espérons donc vivement que le
gouvernement n'hésitera pas à faire marche arrière pour
maintenir et réaffirmer le principe d'une distribution des
excédents au prorata des opérations effectuées avec la
caisse.
Nous sommes bien conscients qu'une disposition similaire à celle
a l'étude existe déjà dans la Loi régissant les
coopératives, notamment los coopératives agricoles. Sans vouloir
prendre fait et cause pour cette dernière, nous croyons devoir rappeler
qu'il s'agit de situations tout à fait différentes et d'aucune
façon comparables. En outre de ne viser qu'une seule grande même
clientèle, les coopératives agricoles gèrent souvent
diverses entreprises: meuneries, quincailleries, garages, machinisme agricole,
etc, dont la rentabilité peut varier considérablement. Dans un
tel contexte, il est tout à fait juste et raisonnable d'en tenir compte
dans l'affectation des trop-perçus pour le versement des ristournes
en
particulier.
En bref, même si le Québec vit à l'heure d'un
"entrepreneurship" étonnamment dynamique et prometteur, l'Union des
producteurs agricoles croit qu'il faut se garder à tout prix de laisser
tomber ou de négliger la poignée de grands outils collectifs que
nous nous sommes progressivement donnés, dans le domaine financier
notamment, pour mieux décider de notre présent et de notre futur.
Fidèles à un long passé riche d'enseignement, notre foi en
la formule coopérative demeure inébranlable.
Cette orientation centrale et profondément déterminante
nous est dictée non seulement par l'importance des forces collectives en
cause et par ce qu'elles peuvent nous rapporter, mais aussi et surtout à
cause des grands idéaux depuis toujours poursuivis, par les caisses
notamment, idéaux qui doivent continuer à inspirer notre
société tout entière: démocratie,
équité, justice. Pour cette raison, nous nous opposons
farouchement aux modifications qu'on veut introduire aux règles
régissant l'attribution des ristournes. Merci.
Le Président (M. Lemieux): Merci. M. le ministre
délégué aux Finances et à la Privatisation.
M. Fortier: Oui, merci M. Lord pour votre présentation. Je
suis tout à fait d'accord avec la conclusion à la page 7, lorsque
vous dites que le Québec vit à l'heure d'un "entrepreneurship"
étonnamment dynamique et que l'Union des producteurs agricoles en est un
élément très important. Je pense qu'on le reconnaît
tous. Au début, à la page 4, vous dites: "D'une façon
générale, nous estimons que l'avant-projet de loi, malgré
un grand bond en avant, maintient le caractère particulier des caisses.
Diverses mesures prévues viennent ajouter aux garanties existantes et
nous croyons qu'il faut nous en réjouir. " Ce que vous dites, c'est
qu'en général vous êtes d'accord avec l'avant-projet de
loi, mais que vous avez un problème particulier que vous voulez
évoquer ici qui touche les prêts agricoles garantis dans une
très grande mesure.
J'imagine que plusieurs producteurs agricoles sont membres des caisses
populaires ou d'autres sont membres des caisses d'établissement qui ont
maintenant fusionné les sociétés d'entraide. Si
l'information que j'ai est valable, ces prêts agricoles font en sorte que
le gouvernement paie les premiers 4% - est-ce bien cela? - du prêt et que
le producteur agricole doit payer 50 % de l'excédent de 4 %. Alors,
seulement pour rendre les choses pratiques pour tout le monde, s'il s'agit d'un
prêt à 10 %, le gouvernement paie 4 % et le producteur agricole
paie 50 % de l'excédent, donc 3 % sur un prêt de 4 %.
À ce sujet, j'aimerais laisser la parole au député
de Prévost, qui est lui-même producteur agricole et qui a
été impliqué dans ce genre de dossier. À
première vue, comme vous le dites vous-même dans votre
présentation, votre position semble un peu ambiguë parce que vous
dites: Que pour certains producteurs agricoles il y a certaines dispositions
qui permettent de différencier le paiement des trop-perçus.
À première vue, je dois admettre que, quand je regarde la
définition même du prêt agricole garanti, ce que paie le
producteur agricole ne semble pas justifier votre demande, dans la mesure
où il n'y a certainement pas de trop-perçu payé par le
producteur agricole lui-même. J'aimerais laisser la parole au
député de Prévost.
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre, je dois
respecter la règle de l'alternance. Il vous reste, de votre temps,
environ sept minutes. Alors, avec le consentement du député de
Lévis pour permettre à un producteur agricole de s'exprimer, sans
quoi je devrai passer la parole au député de Lévis et vous
emmagasinerez huit minutes. M. le député de Lévis, est-ce
que vous permettez au député de Prévost, un producteur
agricole, de pouvoir s'exprimer sur le temps du ministre?
M. Garon: II pourra s'exprimer après l'Opposition. En
vertu de la règle de l'alternance, il reste beaucoup de temps et il
pourra intervenir après.
Le Président (M. Lemieux): Effectivement, M. le
député de Lévis.
Une voix: Des fois, c'est lui. M. Garon: Pardon?
Le Président (M. Lemieux): On reviendra toute l'heure
avec...
M. Garon: J'ai déjà donné beaucoup de
consentements au ministre délégué aux Finances et à
la Privatisation lors de l'étude d'une loi, le printemps dernier et
après son discours en Chambre a été abominable. À
partir d'aujourd'hui et à l'avenir, il serait peut-être mieux de
s'en tenir au règlement, avec le ministre délégué
aux Finances et à la Privatisation. Personne ne pourra se plaindre.
Je voudrais saluer les représentants de l'Union des producteurs
agricoles. J'aimerais savoir si ce dont vous parlez dans votre mémoire
est une pratique usuelle ou quelque chose qui a commencé
récemment ou encore quelque chose qui... Je n'avais jamais entendu
parler de ce que vous dites à la page 5, soit qu'à la suite de
discussions avec la direction du Mouvement Desjardins il avait
été convenu de faire cesser cette pratique. Voulez-vous dire de
réduire les ristournes, parce qu'on considérait que vous aviez
déjà une subvention du gouvernement?
M. Lord: C'est cela.
M. Beaudoin: II y a une chose qu'on aimerait préciser
immédiatement. D'abord, on aimerait distinguer cela des prêts
subventionnés et faire plutôt un bloc de ce qu'on appelle, nous,
les prêts à taux d'intérêt réduit. Je pense
que c'est une chose que le gouvernement intervienne dans un mode de subvention
et qu'il ait choisi de le faire par le biais du taux d'intérêt,
mais l'application de cette mesure-là ne devrait pas faire des
sociétaires distincts à l'intérieur d'un mouvement
coopératif. Et cela est la base de notre argumentation. Je voulais le
préciser au départ.
Deuxième chose. Pour répondre à M. Garon, c'est une
pratique qui n'est pas nécessairement récente et qui ne
s'applique pas nécessairement à l'ensemble du territoire du
Québec. Cela varie d'une caisse à l'autre. Ce sont des
décisions Si on se souvient, l'article 86b, à nos yeux, ne
permettait pas de faire deux groupes de sociétaires distincts.
Malgré cela, il y a des caisses qui ont décidé de voir la
chose autrement, et c'est là-dessus qu'on dit qu'il y a une pratique qui
s'est faite depuis quelques années ou en tout cas qui a
été portée à l'attention de l'Union des producteurs
agricoles depuis quelques années. Entre autres, on peut notamment donner
le cas de l'Abitibi et d'une caisse de l'Estrie, plus particulièrement
celle de Coaticook.
M. Garon: Mais la pratique de l'Office du crédit agricole,
si ma mémoire est bonne, était que le cultivateur payait le taux
d'intérêt normal mais qu'il recevait deux fois par année un
chèque de l'Office du crédit agricole pour tenir compte d'une
partie des intérêts qu'il avait à payer. Par exemple, si on
dit 3 % sur 10 000 $, cela veut dire 300 $. Si le taux d'intérêt
était de 10 %, il pouvait recevoir un chèque de 150 $, je pense,
au mois de novembre et un autre de 150 $ au printemps. Mais, il payait le plein
taux d'intérêt à sa caisse.
M. Beaudoin: À la caisse
M. Garon: Alors, ce que je ne comprends pas c'est qu'on dise la
caisse populaire. Selon l'article ici, "les ristournes peuvent varier selon la
nature des opérations effectuées avec la caisse." Habituellement,
les opérations avec la caisse, cela peut être soit des
dépôts, soit des emprunts et les caisses décident
habituellement, soit de faire bonifier, cela équivaut à bonifier
le taux d'intérêt reçu sur les dépôts en
versant une ristourne à même les trop-perçus, soit de
donner un montant qui équivaut à réduire le taux
d'intérêt payé sur les emprunts. Ce que je ne comprends
pas, c'est comment cela pouvait se faire dans une caisse de payer une ristourne
moins forte sur un prêt agricole, alors que pour la caisse... Si je
comprends bien, vous voulez dire qu'on voulait vous verser une ristourne moins
forte parce que vous bénéficiez du taux
préférentiel plutôt que d'un prêt à la
consomma- tion dont le taux d'intérêt aurait été
plus élevé ou encore d'un prêt hypothécaire qui
aurait normalement été plus élevé que le taux
préférentiel, mais moins élevé que le taux
d'intérêt sur un prêt à la consommation.
M. Beaudoin: La description que vous faites correspond exactement
à la pratique, en tout cas à l'interprétation de certaines
caisses au Québec. C'est là-dessus que l'Union des producteurs
agricoles, particulièrement dans la cause de Coaticook, a
décidé de poursuivre sur le plan juridique parce que justement
cela ne correspond pas à notre interprétation de la chose Face
à sa caisse locale, le producteur a effectivement une opération
tout à fait normale, au même titre que n'importe quel
sociétaire.
M. Garon: Est-ce que la caisse déterminait à ce
moment-là un montant en fonction de l'intérêt payé
sur les emprunts? Comment cela fonctionnait-il?
M. Beaudoin: Elle ne permettait pas aux sociétaires
producteurs de bénéficier de ce trop-perçu ou de cette
ristourne. Le producteur était carrément exclu: il ne pouvait pas
se prévaloir de son droit de sociétaire pour obtenir cette
ristourne-là. C'est comme ça...
M. Garon: C'est-à-dire que, lorsqu'on déterminait
une ristourne, il n'y en avait pas pour lui.
M. Beaudoin: C'est ça
M. Garon: Quand vous parlez de la cause de Coaticook, c'est
quoi?
M. Beaudoin: C'est une caisse qui a décidé
d'interpréter l'article 86b de la façon dont on vient de le
décrire et les producteurs de cette localité ont
décidé que c'était une injustice flagrante pour les
sociétaires qu'ils étaient envers cette caisse. Ils ont
décidé de poursuivre la caisse.
M. Garon: Est-ce qu'il y a eu... M. Lord: Si on me le
permet M. Garon: Pardon?
M. Lord: La cause est actuellement pendante. C'est une cause qui
concerne...
M. Garon: Pendante devant...?
M. Lord: La cause est pendante. On prévoit qu'elle va
être entendue cet automne.
M. Garon: II y a eu une poursuite? M. Beaudoin: Oui,
absolument
M. Garon: De la part de qui? De la part du producteur?
M. Beaudoin: Un groupe de producteurs de Coaticook.
M. Garon: Est-ce que cela s'est fait ailleurs? En quelle
annéo cela s'est-il fait?
M. Beaudoin: En 1985.
M. Lord: 1984-1985.
M. Beaudoin: 1984-1985.
M. Garon: Une action a été entreprise.
M. Beaudoin: Oui. Des cas ont été portés
à notre attention en Abitibi, entre autres. Il y a d'autres cas au
Québec. Il faut dire une chose aussi. Ce qui fait qu'il n'y a
peut-être pas tant de cas que cela actuellement, je dirais, mis de
l'avant, c'est qu'un bon nombre de caisses ne donnent pas de trop-perçus
à leurs membres. Donc, la question ne se pose pas Mais on sait fort bien
que plusieurs caisses ont cette approche, cette perception de l'article 86b.
Dans le mémoire qu'on présente aujourd'hui, on dit: À
notre satisfaction, l'article 272 ne vient absolument pas corriger cela. Au
contraire, d'une certaine façon, il vient rendre la chose encore plus
ambiguë, moins précise qu'elle ne l'était à l'article
86 b.
M. Garon: Je n'ai pas l'article 86b en mémoire, mais cela
doit ressembler un peu à cela. L'avez-vous?
M. Lord: L'article 86b disait que les ristournes étaient
versées au prorata des opérations effectuées avec la
caisse. L'article 272 vient ajouter que les ristournes pourront varier selon
l'opération.
M. Garon: Selon la nature des opérations plutôt
qu'au prorata.
M. Beaudoin: C'est cela.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le
député de Lévis.
M. le député de Prévost. (15 h 30)
M. Forget: J'aurais quelques questions à vous poser. Vous
avez mentionné des caisses dans J'Estrie. Comme administrateur de
caisse, comme producteur agricole, chez nous à la Caisse
Saint-Jérôme, la distribution des ristournes était
partagée également selon le chiffre d'affaires de la caisse. Par
contre, pour les industriels, par exemple, le taux d'intérêt
était moindre et les ristournes étaient moindres. Je me demandais
tantôt si c'étaient des prêts privilégiés
qu'on avait pour la classe agricole. À ce moment-là, je
trouverais juste que la caisse donne moins de ristournes, parce qu'on retire
moins de profits. Si c'est sur les prêts agricoles comme tels, où
la caisse retire le même taux que les autres, je trouve cela malheureux.
Cela relève quand même du conseil d'administration de la caisse Un
peu comme les coopératives, lorsqu'on fait la dis tribution des
ristournes. Par exemple, on va donner tel pourcentage pour la meunerie et dans
la quincaillerie, où les revenus sont moindres, on donne moins. Dans
votre cas, c'est tout à fait spécial.
M. Beaudoin: Je voudrais préciser qu'on comprend qu'une
coopérative fonctionne de façon démocratique et que dans
ce sens-là, on pourrait arriver à la conclusion que finalement,
les producteurs n'ont qu'à s'exercer dans leur milieu pour faire
corriger la situation, sauf que l'avant-projet de loi prend soin d'indiquer
dans les notes explicatives la modification qu'on veut apporter à
l'orientation à donner au trop-perçu. L'Union des producteurs
agricoles trouve qu'il serait fort simple de corriger la situation de
façon précise, de la clarifier dans le texte de loi, de
façon à ce qu'on n'ait pas à se battre dans 1400 endroits
différents au Québec, c'est-à-dire dans l'ensemble des
caisses. Vous comprendrez que si l'interprétation est ambiguë, on
risque des répétitions de la cause de Coaticook. Quant à
présenter un nouveau texte de loi, on souhaiterait du moins qu'à
ce chapitre les choses soient précises.
M. Forget: À ce moment-là, il n'y aurait pas juste
la classe agricole; il y aurait peut-être les commerçants d'autres
produits, des commerces et, à un moment donné, la caisse pourrait
décider de ne pas leur payer de ristourne. Cela pourrait
s'interpréter comme cela également.
M. Beaudoin: Absolument.
M. Forget: Donc, on pourrait comprendre tout cela dans le projet
de loi, et je serais d'accord.
M. Beaudoin: C'est pour cela qu'on précise dans notre
mémoire que tel que cela est mentionné, on pourrait très
bien se réveiller dans quelques années avec des
réglementations qui favoriseraient nettement des groupes d'individus par
rapport à d'autres, et on trouverait cela malheureux.
M. Forget: Ce qui m'inquiète, encore une fois, c'est que
si un producteur agricole dans une certaine région était
favorisé d'un prêt spécial à un intérêt
moindre, cela deviendrait compliqué. Avec cet article, on pourrait
permettre à un agriculteur de ne pas avoir un prêt spécial
avec un intérêt moindre. Cela m'inquiète un petit peu.
M. Beaudoin: Nous disons que si les ristournes ou les
trop-perçus sont donnés au prorata des intérêts
versés, les producteurs qui bénéficient de taux
d'intérêt privilégiés vont automatiquement avoir une
ristourne inférieure et, selon nous, c'est tout à fait
normal.
Ce qu'on trouve anormal, par exemple, c'est qu'un producteur soit exclu
comme sociétaire, qu'il soit isolé parce qu'il
bénéficie d'une subvention d'intérêts du
gouvernement ou encore parce qu'il a un prêt garanti et que de ce fait,
l'institution lui accorde un taux d'Intérêt
privilégié, que ce producteur soit carrément exclu de son
droit de recevoir des trop perçus au même titre que n'importe quel
autre sociétaire.
M. Forget: Je trouve drôlement malheureux que le conseil
d'administration de ces caisses prenne une telle décision. Mais je puis
vous dire une chose: chez nous, on n'a jamais tenu compte de ça. Par
contre, je voudrais quand même vous dire, encore une fois, que c'est
extrêmement délicat parce que dans certains cas, les caisses
populaires font des prêts spéciaux à des taux moindres
à certains agriculteurs. Mais, comme vous l'avez mentionné, on
pourrait en tenir compte lorsqu'on fait la répartition. C'est comme
ça que tu l'as expliqué, si j'ai bien compris, que si jamais il y
avait un prêt à taux moindre, on pourrait en tenir compte dans la
répartition des ristournes. Non, ce n'est pas clair?
Une supposition qu'il est à 10 % d'intérêt et que la
caisse prête à 11%, il n'y a que 1 % de marge de profit pour la
caisse, mais le prêt ordinaire est à 13 %. Ce sont des prêts
spéciaux comme tels que certaines caisses font à certains
agriculteurs, comme on faisait également chez nous aux industriels.
Alors, lorsqu'on arrive à la répartition des ristournes, il faut
en tenir compte. C'est un autre volet
M. Beaudoin: II y a une chose qu'il faut bien préciser.
Quand une institution financière réduit le taux
d'intérêt, c'est parce qu'elle estime que son taux de risque est
différent et il faut aussi tenir compte de ça. Finalement,
l'intervention de l'Union des producteurs agricoles sur ce point précis
se résume fort simplement. Ce qu'on dit, c'est que l'article 272 ne
devrait créer aucune inéquité dans l'ensemble des
sociétaires. Je pense que c'est absolument essentiel dans la poursuite
des objectifs d'une coopérative et dans ce sens, on pense que notre
intervention est tout à fait la bienvenue.
M. Forget: Oui, d'accord, mais par contre, il faut quand
même être prudents là-dessus Là, je ne te suis pas
tout à fait et j'aime autant te le dire, parce que je trouve dangereux,
lorsqu'on arrive pour faire la répartition, que les gens ont payé
moins...
M. Garon: Question de règlement.
Le Président (M. Lemieux): Oui, M. le député
de Lévis.
M. Garon: J'aimerais que le député vouvoie nos
témoins parce que ce n'est pas l'habitude de tutoyer les gens qui
viennent devant la commission parlementaire.
M. Forget: Oh! Excusez-moi.
Le Président (M. Lemieux): J'aimerais tout simplement dire
au député de Prévost qu'il a à la fois
vouvoyé et tutoyé à l'occasion. Alors, M. le
député de Prévost, s'il vous plaît, adressez-vous au
président et il n'y aura pas de problème Je pense que cela s'est
fait d'une manière très très amicale et entre producteurs
agricoles, M. le député de Lévis. Vous pouvez continuer,
monsieur.
M. Bélisle: Ce que le député de Lévis
n'est plus.
M. Garon: Non, c'est pour maintenir le décorum.
Le Président (M. Lemieux): M. le député
de
Lévis, je prends votre remarque sur le décorum, mais soyez
assuré qu'à l'avenir je l'appliquerai à la lettre en
toutes circonstances...
M. Bélisle: ...sur les droits des producteurs agricoles,
M. le député de Lévis.
Le Président (M. Lemieux): y compris lorsque les gens
"somnambulent" M. le député de Prévost.
M. Forget: J'ai terminé.
M. Fortier: Le vouvoiement n'est pas dans le règlement,
voyons donc! Je n'ai jamais vu ça.
Le Président (M. Lemieux): Le règlement
prévoit qu'on doit s'adresser au président.
M. Bélisle: ...l'Opposition de sa loyale
majesté.
Le Président (M. Lemieux): Avec toute
déférence, M. le député de Jonquière, vous
ave/ demandé la parole Non'> J'avais cru. M le député
de Lévis.
M. Garon: M. le Président, je dois dire que le taux
préférentiel dont parlent ici les représentants des
producteurs agricoles devant nous - ils ont raison - sauf que c'est un taux
très rare. Si le taux préférentiel s'applique aux
agriculteurs, c'est parce qu'il a été négocié il y
a plusieurs années, et pour deux raisons: parce que, d'abord,
l'expertise fournie par l'Office du crédit agricole pour les prêts
- il y a un certificat qui est
fourni par l'Office du crédit agricole - fait que si le
cultivateur a son prêt, on reconnaît qu'il y aura une subvention de
prêt, donc que le prêt est accepté pour les fins de l'Office
du crédit agricole. L'expertise, l'analyse - ce qui n'empêche pas
la caisse, si elle veut la refaire, de la refaire - mais pour une grande
partie, on se fie à l'analyse qu'a fait l'Office du crédit
agricole; deuxièmement, c'est parce qu'il y a une assurance qui touche
tous les prêts. Autrement, les agriculteurs, si cela n'avait pas
été négocié globalement avec les institutions
financières privées - coopératives, banques ou autres -
n'auraient pas bénéficié du taux
préférentiel.
Le taux préférentiel, au fond, c'est le meilleur taux des
institutions financières. Il ne doit pas y avoir beaucoup de
catégories de gens qui empruntent auprès des caisses populaires
qui ont le taux préférentiel. Le gros des prêts, ce sont
des prêts à la consommation, des prêts hypothécaires.
La caisse populaire, de façon générale, ne fait pas du
prêt d'affaires à des montants assez gros - d'une façon
générale, je dis bien, au niveau de la caisse locale - pour qu'on
puisse établir des taux préférentiels. Je pense que c'est
un privilège qui a été négocié pour les
agriculteurs. Remarquons bien une chose - je me rappelle très bien
comment cela s'est passé - les banques ont sorti pendant un an ou un an
et demi; elles n'avaient pas voulu embarquer là-dedans et les caisses
populaires ont continué. Elles ont été les seules à
continuer, d'ailleurs, durant un an ou un an et demi, avant que les banques ne
rappliquent.
Quand les gens nous parlent ici, ils parlent d'une situation qui les
touche personnellement. Je ne connais pas beaucoup d'entreprises - on pourrait
dire qu'on parle des commerces, des affaires - habituellement, les commerces
ordi- . naires, les affaires ordinaires, n'ont pas le taux
préférentiel dans les institutions financières. C'est le
meilleur taux, le plus sécuritaire qui est donné dans le cadre
des opérations commerciales et les opérations d'affaires. Je
pense que ce que les gens nous représentent ici, les
représentants de l'Union des producteurs agricoles, est une situation
particulière à eux; je serais bien étonné que,
d'une façon générale, on puisse faire des
catégories; mais il doit y avoir des niveaux de prêts
différents dans les caisses. Le prêt à la consommation est
à tel niveau; le prêt hypothécaire, parce qu'il y a plus de
garanties, est habituellement à un autre niveau, et le prêt
préférentiel dont bénéficient les cultivateurs est
à un niveau plus bas. Alors, j'imagine que c'est la pratique, au fond,
des caisses, parce que vous avez bien dit qu'il s'agit de cas peu nombreux; ce
n'est pas une pratique généralisée. On a dû
appliquer un pourcentage en fonction du taux payé; alors la ristourne
devait être plus forte sur le plan consommation, moins forte pour le
prêt hypothécaire et un peu moins forte pour l'agriculteur qui
avait le taux préférentiel, ou c'était uniquement pour les
agriculteurs. Là, je pense que cela pourrait être discriminatoire,
mais cela a dû être en fonction du taux payé par chacun.
Est-ce que j'ai raison ou tort? Je ne le sais pas parce que je n'ai jamais
entendu parler de cela.
M. Beaudoin: M. le Président, dans le cas qu'on mentionne
actuellement, c'est que les producteurs étaient carrément exclus
de leur droit de recevoir leur quote-part du trop-perçu.
M. Garon: Parce qu'ils avaient le taux
préférentiel.
M. Beaudoin: Absolument.
M. Garon: Et des ristournes, en l'occurrence,
représentaient quel pourcentage du taux d'intérêt?
M. Beaudoin: Ce qu'on a là-dessus, c'est que
dépendamment d'une caisse à l'autre, cela varie de 2 % à
10 % ou 12 % de l'enveloppe d'intérêts versés. Nous
estimons que cela peut varier pour chacun des producteurs et productrices
impliqués dans ces dossiers entre 500 $ et 1000 $ par
sociétaire.
M. Garon: Alors, 5000 $, cela en fait beaucoup.
M. Beaudoin: Oui.
M. Garon: Si c'est 10 %, cela veut dire qu'il payerait 50 000 $
d'intérêts par année. Cela m'apparaît un peu fort. Si
vous dites que le taux, c'est 2 % à 10 % de l'intérêt
payé et s'ils paient entre 1000 $ et 5000 $ d'intérêts,
cela veut dire que... c'est-à-dire du montant qu'ils viennent de perdre,
cela voudrait dire qu'ils payeraient entre 10 000 $ et 50 000 $
d'intérêt. Cela me paraît un peu fort.
M. Beaudoin: J'ai bien mentionné de 500 $ à 1000 $
et c'est le cas...
M. Garon: C'est 500 $ à 1000 $. M. Beaudoin:
Oui.
M. Garon: D'accord. Alors, au fond, c'est parce que vous avez le
taux préférentiel. Dans ces cas-là, c'est parce que vous
bénéficiez du taux préférentiel. La caisse
considérait que c'était déjà assez bon
marché par rapport aux taux qu'elle chargeait qu'elle ne voulait pas en
mettre davantage là-dessus, parce que sa marge de profit devait
être moins forte sur un taux préférentiel que sur un taux
de prêt à la consommation Mais ce n'est pas parce que le
gouvernement le subventionne, je ne pense pas. Je pense que cela ne doit pas
avoir affaire à ça, parce que, pour la caisse, vous payez le taux
d'intérêt normal qui vous est demandé comme
taux préférentiel.
M. Beaudoin: Absolument.
M. Garon: C'est clair, ce que vous me dites. Je vous
remercie.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le
député de Lévis. M. le ministre
délégué aux Finances et à la Privatisation.
M. Fortier: M. le Président, je relisais l'article 272
durant la discussion et on dit ici que des ristournes peuvent varier selon la
nature des opérations effectuées avec la caisse et elles peuvent
être versées en parts permanentes ou en parts
privilégiées. Réellement, je comprends bien que vous ayez
certaines appréhensions. Mais, tel que rédigé, l'article
272 permettrait à la caisse de faire ce que vous demandez. Alors, c'est
plutôt une appréhension que vous avez qu'autre chose, parce que,
tel que libellé, l'article 272 dit simplement que les ristournes peuvent
varier selon la nature des opérations. Donc, par nature, on peut
facilement concevoir, comme dit le députe de Lévis, que si
certains prêts sont faits à des taux privilégiés, la
caisse populaire "retire" un bénéfice moins considérable
et lorsqu'ils font les ristournes, ils prennent cet élément en
considération et cela fait l'unanimité autour de la table,
d'après ce que je peux voir.
De toute façon, je crois que vous en avez tenu compte dans vos
commentaires généraux sur le projet de loi. Vous vous êtes
rendu compte qu'on donne des pouvoirs de réglementation en particulier
aux fédérations, parce que j'ai remarqué qu'une de vos
représentations indiquait qu'une caisse en particulier pouvait
interpréter cet article d'une façon différente de celle
d'une autre caisse et que vous avez dit qu'en définitive il va y avoir
1400 interprétations différentes.
Quand on a préparé l'avant-projet de loi, on s'est
posé la question: Est-ce que le gouvernement, comme on le fait dans
d'autres institutions financières... Si vous lisez la Loi sur les
fiducies, on dit très clairement que l'inspecteur ou le gouvernement
peut... Dans la loi, d'ailleurs - ce n'est pas seulement l'inspecteur - il y a
des articles très spécifiques sur le crédit.
Ici, dans la loi sur le Mouvement Desjardins, on n'est pas allés
aussi loin que cela. On a dit: II y a une certaine autoréglementation
qui se fait. Ils nous ont laissé le mouvement s'auto-réglementer.
Mais plus que cela, nous allons donner aux fédérations des
pouvoirs de définir les règles de crédit, quitte à
ce que les fédérations les fassent approuver par la
confédération. (15 h 45)
Donc, l'autoréglementation est réellement
déléguée à la fédération et j'oserais
penser, que dans un cas comme celui que vous soulevez, un règlement de
la fédération pourrait facilement régler le
problème d'une interprétation qui serait ponctuelle par une
caisse en particulier qui voudrait l'interpréter différemment.
C'est un premier élément.
L'autre élément que vous avez dans votre mémoire et
sur lequel j'aimerais revenir, c'est que, dans la Loi sur les
coopératives qui a été adoptée en janvier 1984 - je
crois qu'à ce moment-là M. Parizeau était le ministre
responsable des coopératives - à l'article 151... Je dois vous
dire que nous n'avons pas cherché à faire plaisir à l'un
ou à l'autre. On s'est inspirés exactement de l'article 151 de la
Loi sur les coopératives et, à ma connaissance, jamais personne
ne s'est plaint de l'article 151 de la Loi sur les coopératives.
L'article 151 de la Loi sur les coopératives dit ceci: "Le taux de
ristourne peut être différent selon la nature ou la qualité
des produits ou des services qui ont fait l'objet des opérations. "
Mutatis mutandis, on prend exactement l'article 151 qui vous gouverne dans le
domaine agricole et on l'a mis ici pour les caisses populaires. Autrement dit,
j'espère que vous réalisez qu'on n'a pas cherché à
donner un privilège spécial, on a pris exactement ou à peu
près le même article.
J'oserais penser, eu égard à ce que je viens de dire sur
le fait que les fédérations auront un droit de
réglementation vis-à-vis des caisses, qu'en définitive,
vous avez certaines appréhensions, mais cela me semble des
appréhensions un peu inutiles dans la mesure où on a repris
exactement l'article 151 de la Loi sur les coopératives et on en a fait
l'article 272 de la Loi sur le Mouvement Desjardins, mais en plus, avec un
pouvoir de réglementation donné aux fédérations.
Avez-vous quelques commentaires à faire à ce sujet?
M. Beaudoin: Oui. Tout d'abord, vous parlez de l'article 151, il
est clair dans notre esprit que ce qu'on remet en cause, ce n'est pas l'article
151, mais comme on l'a exprimé dans notre mémoire, c'est qu'on
précise que dans le cas, par exemple, des coopératives agricoles,
il faut comprendre que les activités sont fort différentes d'un
secteur à l'autre. On a parlé de meunerie, de machinerie agricole
et on est en mesure de comprendre et de concevoir que, dans ces cas
précis, il est tout à fait nécessaire de distinguer les
activités de telles coopératives. Sauf que dans le cas qui nous
préoccupe par rapport aux coopératives d'épargne, c'est
que les modes de fonctionnement sont fort simples. Il y a, d'un
côté, des prêteurs et de l'autre côté, des
emprunteurs. Nous disons que la pratique veut qu'il y ait actuellement
discrimination dans certaines caisses. Pour préciser davantage, quand
vous soulignez qu'une des garanties qu'on a comme producteurs agricoles, c'est
le fait que les fédérations peuvent s'autoréglementer. On
a, à la lumière de notre connaissance, des cas qui, finalement,
ont été réglementés par la fédération
régionale de caisse. Dans ce sens-là, pour nous, ce n'est pas
tout à fait une garantie de bon fonctionnement. D'autant plus que dans
ce cas
précis qu'on met en lumière aujourd'hui, je vous
fêtai remarquer que l'actuel président du Mouvement Desjardins, M.
Béland, s'était entendu avec l'Union des producteurs agricoles
comme quoi finalement cette pratique était inéquitable envers ce
groupe de sociétaires et que, lui, recommanderait, d'une part, à
ses gens de faire en sorte d'éviter cette pratique. Et d'autre part, il
ferait en sorte de suggérer au gouvernement de légiférer
sur cette question. Or, l'appréhension, c'est que la seule place qu'on
retrouve dans la loi un point pr6cis qui parle do cotte question, c'est
justement l'article 272 qui, à nos yeux, est encore plus large, plus
ambigu, il laisse plus de place à interprétation que l'article
86b. C'est la raison pour laquelle on pense que c'est quelque chose qui
pourrait nous jouer des tours importants dans l'avenir et qu'il serait facile
de corriger à ce moment-ci dans l'esprit que le législateur a
voulu lui donner.
M. Fortier: Étant donné que l'article 151 ne pose
pas de problème, pourquoi l'article 272 créerait-il des
problèmes? C'est pour cela que j'ai une appréhension, que j'ai de
la misère à matérialiser dans les faits, parce qu'on dit,
à l'article 272, que les ristournes peuvent varier selon la nature des
opérations, et je pense que la discussion qu'on a eue fait en sorte que
si quelqu'un paie un taux d'intérêt plus faible que normal, il
reçoit une ristourne plus faible et s'il paie un taux
d'intérêt plus fort, il reçoit une ristourne plus forte. Si
un taux d'intérêt est plus bas, c'est probablement parce que le
gouvernement leur garantit l'emprunt. Ce que vous ne demandez pas, dans le
fond, c'est que si un producteur agricole a payé un taux
d'intérêt plus bas que la garantie du gouvernement et s'il
reçoit la même ristourne qu'il aurait obtenue s'il avait
payé un taux d'intérêt plus fort... Ce n'est pas ce que
vous demandez. L'article tel que libellé dit exactement cela.
Ce que j'essaie de dire, c'est que la philosophie qui nous a
guidés, c'est qu'on aurait pu adopter l'attitude que nous étions
pour réglementer toutes les règles de crédit du Mouvement
Desjardins. On n'est pas allés dans cette direction. Dans le fond, vous
nous dites que pour un cas bien particulier, on devrait le spécifier,
alors que pour le reste, on ne le fera pas. Je peux vous donner d'autres
exemples. L'association des banquiers nous a fait des représentations
à savoir que nous devrions dire très clairement dans la loi que
le Mouvement Desjardins ne devrait pas prêter plus que 75 % de la valeur
marchande des propriétés. On va prendre cela en
considération, mais encore là, si on était pour
répondre à toutes ces demandes, on s'éloignerait de
beaucoup du principe qui nous a guidés, selon lequel nous
édictons des règles générales, des principes
généraux, mais comme le disait le député de
Prévost, en définitive, on va laisser les membres... Quand vous
parlez des producteurs agricoles, ce sont des gens qui sont membres d'une
caisse populaire, donc qui peuvent faire valoir leur point de vue lors d'une
assemblée annuelle.
Le Président (M. Lemieux): Brièvement, puisque vous
êtes sur le temps de parole du député de Lévis, M.
le ministre vient de terminer son temps de parole.
M. Beaudoin: II y a d'abord une chose que jo voudrais
préciser ou corriger dans votre intervention. D'abord, ce n'est pas le
gouverne ment du Québec qui garantit les prêts des producteurs
agricoles, ce sont les producteurs eux-mêmes qui garantissent leurs
prêts par le biais de la loi 49. Je pense que c'est quelque chose qu'il
est tout à fait important de souligner à ce moment-ci.
Deuxièmement, on ne demande pas de réglementer davantage,
mais tout simplement d'insérer dans le texte de loi un principe qui ne
va absolument pas à rencontre du mouvement coopératif, mais qui
vient tout simplement garantir davantage l'esprit même de la
coopération en disant qu'au lieu de l'article 272 tel que
libellé, on souhaite voir un article qui irait dans le sens que les
trop-perçus iraient au prorata du pourcentage d'intérêt
versé par sociétaire. C'est un principe, ce n'est pas une
réglementation très stricte. À ce moment-là, on se
garantit que l'ensemble des sociétaires au Québec seront
traités sur le même pied. C'est tout simplement ce principe qu'on
aimerait voir inclus dans le texte.
Le Président (M. Lemieux): Merci. M. le
député de Lévis.
M. Garon: M. le Président, c'est justement ce que je
voulais signifier. Lorsque le taux préférentiel a
été négocié, à ce moment-là, la
garantie gouvernementale était donnée par le gouvernement. Le
nouveau gouvernement libéral a pris le pouvoir, et maintenant, il fait
assumer cette garantie par les cultivateurs eux-mêmes qui paient des
primes importantes pour garantir eux-mêmes les prêts agricoles. La
situation a changé depuis que les libéraux ont pris le pouvoir.
Ce qui a peut-être induit le ministre en erreur, c'est que j'ai dit
qu'à ce moment-là, il y avait la garantie gouvernementale plus
l'expertise de l'Office du crédit agricole, et aujourd'hui, il n'y a
plus la garantie gouvernementale. Il y a une garantie, l'assurance-prêt
agricole, qui est payée par les agriculteurs. Je suis persuadé
que le député de Prévost pourra en dire un mot parce
que...
Le Président (M. Lemieux): ...parole.
M. Garon: Non, je vais demander à M. Beaudoin. Comment
explique-t-on maintenant ce que coûte l'assurance-prêt payée
par les agriculteurs eux-mêmes plutôt que par les garan-
ties dans un fonds où le gouvernement met des montants pour
maintenir un fonds de 10 000 000 $?
M. Beaudoin: C'est 1,85 % du montant du prêt plus taxe sur
les assurances. Par exemple, dans un cas type au Québec, sur un emprunt
de 200 000 $, cela fait quelque 4100 $.
M. Garon: Par année?
M. Beaudoin: Non, pour la durée du prêt.
M. Garon: M. le Président, vous ne m'empêcherez pas
de dire que, parfois, changer de gouvernement, cela peut coûter cher,
notamment aux cultivateurs. Je veux le dire parce que je sais à travers
quoi je suis passé dans le temps. Si cela n'avait pas été
du Mouvement Desjardins, les agriculteurs n'auraient jamais eu de taux
préférentiel, parce qu'à ce moment-là, tout le
secteur bancaire a lâché J'avais demandé au Mouvement
Desjardins s'il pouvait continuer et le Mouvement Desjardins avait
accepté de prêter au taux préférentiel, et pendant
un an ou un an et demi, ils ont été les seuls. Finalement, lors
de la nouvelle négociation, les banques sont revenues. Mais si cela
n'avait pas été du Mouvement Desjardins, je pense bien
qu'à ce moment-là, depuis ce nombre d'années-là,
les taux auraient été plus élevés pour les
agriculteurs dans tout le Québec; depuis des années, je ne
pourrais pas vous dire la date, mais cela doit faire maintenant autour de sept
ou huit ans. Je pense que c'est bon de rendre à César ce qui
appartient à César, parce qu'ils ont accepté de continuer.
Un an ou un an et demi après, les institutions financières ont
accepté de se joindre.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Lévis, permettez-vous au député de Prévost de
parler sur votre temps de parole? À un producteur agricole, oui?
M. Forget: Écoutez, je suis producteur agricole depuis
1952. Je suis membre des caisses populaires depuis 1945 et je peux vous dire
que j'ai beaucoup fait affaire avec les caisses populaires. Mais c'est
arrivé durant ma vie comme producteur agricole, au cours de
l'année 1958, que les caisses n'ont pas voulu me prêter. Ce sont
les banques qui m'ont financé. C'est malheureux, mais ce sont des choses
qui se sont produites. Alors il faut faire attention lorsqu'on dit que ce sont
juste les caisses. J'ai beaucoup d'admiration pour eux, mais par contre il faut
dire la vérité. Alors les producteurs agricoles sont des hommes
d'affaires et on est obligés de jouer avec ce qui est disponible pour
nous. C'est la raison pour laquelle je ne voudrais pas laisser de
côté le rôle que les banques ont joué pendant des
années auprès des agriculteurs du Québec.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le
député de Prévost.
M. Fortier: II a emprunté, lui. Des voix: Ha, ha,
ha!
M. Garon: Est-ce que cela voudrait dire, M. le Président,
qu'il avait été refusé par l'Office du crédit
agricole? Parce qu'à ce moment-là, la plupart des cultivateurs
qui étaient solvables passaient par l'Office du crédit agricole
et c'étaient seulement ceux qui étaient refusés qui
allaient voir les autres.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Prévost.
M. Forget: Écoutez, je peux vous dire une chose. Lorsque
j'ai débuté, je n'ai pas demandé de prêt à
l'Office du crédit agricole. Et il y a une autre chose vous savez - pas
méchamment -mais dans ces années-là, il fallait être
très près du député concerné.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Garon: Dans les années 1940, j'étais bien plus
près de ma première communion que des prêts agricoles.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Lemieux): Alors, M. le
député de Lévis, en conclusion.
M. Fortier: D'autres commentaires, M. le député de
Lévis?
Le Président (M. Lemieux): En conclusion, M. le
député de Lévis?
M. Garon: En quelle année avez-vous dit? M. Fortier:
En 1958.
M. Forget: J'ai parlé de 1958, mais je suis agriculteur
depuis 1952. Je suis encore agriculteur.
M. Garon: En 1958.
M. Forget: Pour vous répondre, je viens justement de faire
un prêt encore.
M. Garon: Un emprunt. Vous avez fait un prêt ou un
emprunt?
M. Forget: Un emprunt, pas un prêt.
M. Garon: Parce qu'on me dit que vous êtes un cultivateur
fortuné. Cela aurait pu être vous qui prêtiez aux
autres.
M. Forget: Non, très pauvre. Je suis encore
pauvre.
Le Président (M. Lemieux): Comme plusieurs.
M. Fortier: II a réussi. Qu'est-ce qu'il a contre ceux qui
réussissent?
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Lévis, en guise de conclusion.
M. Garon: J'ai remarqué justement que la nouvelle
politique du Parti libéral visait surtout uniquement ceux qui
réussissent, parce que dans le porc...
Le Président (M. Lemieux): Avec de la pertinence, s'il
vous plaît, monsieur.
M. Garon: Non, non, c'est bon. Dans le porc, on n'assure plus
l'assurance-stabilisation...
M. Bélisle: Question de règlement.
Le Président (M. Lemieux): Question de
règlement.
M. Garon: ...pour ceux qui ont une production qui est faible.
Le Président (M. Lemieux): Question de règlement,
M. le député.
M. Garon: On assure sans limite...
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Lévis, question de règlement.
M. Garon: ...ceux qui ont une production très
élevée.
Le Président (M. Lemieux): Question de règlement.
M. le député de Mille-Îles.
M. Bélisle: Je voudrais ramener le député de
Lévis dans notre ère moderne au lieu de l'ère de
Duplessis.
M. Garon: Non, mais justement, je suis dans ce qu'il y a de plus
moderne.
Le Président (M. Lemieux): Je m'excuse... M.
Bélisle: Son idole.
M. Garon: Je lui disais que dans l'assurance-stabilisation, on a
élevé les minimums pour assurer de moins en moins les petits et
on a enlevé complètement les maximums pour assurer les gros.
C'est peut-être une influence du député de
Prévost.
Le Président (M. Lemieux): Alors en guise de conclusion,
M. le député de Lévis.
M. Garon: Je voudrais remercier les gens de l'Union des
producteurs agricoles parce qu'au fond le but était de bien comprendre
les représentations qu'ils ont faites et de faire le tour de la
question. Indépendamment des décisions qui seront prises - parce
que c'est le gouvernement qui gouverne, l'Opposition indique les
problèmes dans les solutions - mais je pense bien que vous avez
marqué votre point d'une façon très claire. En tout cas,
pour l'Opposition, ce que vous avez dit est très clair.
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre...
M. Garon: Je ne peux pas parler au nom de la majorité
libérale.
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre
délégué aux Finances et à la Privatisation.
M. Fortier: J'aimerais remercier les gens de l'Union des
producteurs agricoles. Je pense que vous avez défendu votre point de vue
avec beaucoup d'à-propos et si nous avions des questions additionnelles,
il nous fera plaisir de prendre contact avec vous pour statuer
éventuellement sur la décision que nous prendrons.
Le Président (M. Lemieux): En conclusion, messieurs.
M. Beaudoin: En fait, la seule chose qu'on souhaité, c'est
que le texte de loi mis de l'avant par le gouvernement du Québec fasse
en sorte que l'ensemble des sociétaires membres d'une coopérative
d'épargne soient traités équitable-ment et sur le
même pied.
Le Président (M. Lemieux): Merci. Alors au nom des deux
groupes parlementaires, je veux vous remercier de votre participation à
cette consultation générale. Nous allons suspendre environ une ou
deux minutes pour permettre au prochain organisme, soit le Regroupement des
cabinets de courtage d'assurance du Québec de bien vouloir prendre place
à la table des témoins.
(Suspension de la séance à 16 heures)
(Reprise à 16 h 6)
Regroupement des cabinets de courtage d'assurance du
Québec
Le Président (M. Lemieux): À l'ordre, s'il vous
plaît!
À l'ordre, M. le député de Prévost.
La commission du budget et de l'administration reprend ses travaux avec
l'Association des courtiers d'assurances... Pardon.
M. Fortier: Ne vous trompez pas, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): Excusez-moi Je n'avais pas en
main le bon ordre du jour. C'est le Regroupement des cabinets de courtage
d'assurance du Québec.
Est-ce que le responsable de l'organisme voudrait bien s'Identifier et
Identifier ceux qui l'accompagnent?
M. Pelland (Pierre): Avec plaisir. Mon nom est Pierre Pelland,
vice-président de cet organisme. À mon extrême gauche, M
Jean-Marie Derome, directeur général, et Me André Bois,
notre conseiller juridique.
Le Président (M. Lemieux): Merci Les règles de
l'audition sont les suivantes: 20 minutes sont d'abord consacrées
à l'exposé de votre mémoire et une période de 40
minutes de discussion suivra entre les parlementaires. Vous pouvez
procéder. Nous vous écoutons.
M. Pelland: M. le Président, M. le ministre, M. le
député de Lévis, mesdames et messieurs les
députés. Au nom de mes collègues, je vous remercie de nous
fournir l'occasion de vous entretenir sur cet important sujet cet
après-midi.
Dans son ensemble, l'avant-projet de loi reçoit l'approbation du
RCCAQ, puisque le texte de loi proposé voue les caisses à un seul
domaine d'activité, soit celui de l'épargne et du crédit.
Ce domaine d'activité est certes élargi puisque les caisses
pourront recourir à de nouveaux moyens de cueillette de capitaux et de
l'épargne et qu'on leur reconnaît également le droit
d'offrir divers systèmes de paiement. Néanmoins, nous comprenons
de l'avant-projet de loi que les caisses, même munies de nouveaux outils,
demeurent des coopératives d'épargne et de crédit.
Les représentations faites aujourd'hui par les dirigeants du
Mouvement Oesjardins de même que les propos qu'ils tiennent dans d'autres
forums indiquent que ceux-ci ne sont pas satisfaits et qu'ils réclament
pour les caisses le statut de banque universelle ou de magasin
général en services financiers selon le concept envisagé
par les membres du Comité d'étude sur les institutions
financières en 1967. Sans discuter du mérite de cette approche,
nous désirerions uniquement attirer votre attention sur les
véritables mobiles qui nous paraissent inspirer cette revendication de
pouvoirs.
Premièrement, le Mouvement Desjardins a constaté à
la fin de 1986 que 8 % des membres détenaient 60 % de l'épargne.
En chiffres réels, si on calcule actuellement 27 000 000 000 $ de
dépôts, ces 60 % d'épargne représentent 16 200 000
000 $ aux mains de 8 % des membres. Deuxièmement, en 1987, 80 000 000 $
de REER détenus dans des caisses furent transférés
à d'autres institutions financières Ces modifications profondes
ont eu pour conséquence que la loyauté presque totale que les
consommateurs manifestaient à l'égard de leur institution est
devenue beaucoup moins forte qu'auparavant. Troisièmement, le Mouvement
Desjardins anticipe et appréhende que ces grands détenteurs
d'épar gne, les fameux 8 % ou les 250 000 membres, se retrouvent parmi
les personnes les plus âgées, lesquelles font et feront l'objet de
pressions concurrentielles de la part des compagnies d'assurances offrant la
transformation de ces épargnes en rentes. Ayant constaté ces
tendances, les dirigeants du Mouvement Desjardins ont développé
une stratégie qui vise à assurer la loyauté et à
modérer la mobilité de leurs grands épargnants. Cette
stratégie privilégie les moyens suivants.
Premièrement, le Mouvement Desjardins cible la clientèle
qui suit: la clientèle ayant dépassé le cap des 55 ans,
les "empty nesters" - pour utiliser leur propre expression - et les cols blancs
de 35 à 45 ans. Deuxièmement, les caisses privilégient le
rôle-conseil comme lien essentiel avec ce marché cible.
Troisièmement, la caisse doit offrir des services complémentaires
- assurances, fiducie, etc. - principalement pour conserver les membres,
notamment les 250 000 qui représentent 60 % de son
passif-dépôt. Quatrièmement, les services
complémentaires, soit ceux des institutions du Mouvement Desjardins,
doivent être offerts dans les locaux des caisses en évitant le
cloisonnement dans la caisse qui résulterait de l'introduction
d'employés ou d'agents des institutions Desjardins.
Critique de la stratégie. En soi, la stratégie est tout
à fait légitime puisqu'elle participe d'un esprit - je vais
utiliser un terme tabou dans le milieu - elle participe d'un esprit capitaliste
et de libre entreprise qui fait partie de notre système. En revanche,
cette stratégie non avouée trahit le principe coopératif
dont le Mouvement Desjardins est le principal gardien au Québec et dont
il affecte de se réclamer pour obtenir des réformes
législatives. La coopération fait partie du contrat social
québécois et tous les petits entrepreneurs, incluant les cabinets
de courtage que nous défendons, sont parties à ce contrat. On ne
saurait donc changer des éléments essentiels de cette clause du
contrat social sans se préoccuper de l'impact des changements sur des
agents économiques importants qui font partie intégrante de la
communauté.
Enfin, comme le dit un auteur bien connu, Fernando Noël: "Fille du
besoin, la coopération peut s'éteindre avec lui".
Nous reconnaissons également qu'il était avantageux de
fournir un traitement préférentiel au Mouvement Desjardins
lorsqu'il y avait un vacuum au niveau des institutions financières pour
aider les petits épargnants. Cependant, ce vacuum n'existe plus. Donc,
quant à nous, les règles de compétition normales devraient
s'appliquer. Il existe maintenant d'autres entreprises très
québécoises qui voient en. Desjardins un compétiteur
injustement favorisé. Cela n'a rien à
voir avec le fait d'être jaloux d'un mouvement coopératif
à succès, comme semble le prétendre M. Béland. Le
Mouvement Desjardins semble vouloir tous les avantages accordés à
ses compétiteurs, mais le moins possible de leurs contraintes.
La nomenklatura du Mouvement Desjardins persiste à
méconnaître que plusieurs des besoins de la première
moitié du présent siècle en matière
d'épargne, de crédit et de moyens de paiement peuvent maintenant
être satisfaits presque partout dans la province par de nombreuses
institutions financières capitalistes ou mutualistes.
Enfin, l'offre par les caisses des produits - des institutions du
Mouvement Desjardins est un procédé fondamentalement incompatible
avec la démocratie coopérative. En effet, contrairement à
une règle d'action coopérative fondamentale, le membre se fait
offrir non pas un service de la coopérative elle-même mais d'une
institution lointaine sur laquelle il n'a aucun contrôle. Il n'est plus
un propriétaire usager.
Par ailleurs, quel contrôle peut avoir un membre de caisse sur une
compagnie à capital-actions telle que Location Pierre Lafleur,
maintenant crédit bail Desjardins inc, qu'il ne peut rejoindre que par
la fédération par le biais de la confédération, par
le biais d'une compagnie de portefeuille par surcroît? Comment ce membre
peut-il se considérer propriétaire usager d'un service de cette
lointaine compagnie? (16 h 15)
De plus, nous sommes d'opinion qu'il est illusoire de penser que toutes
les nouvelles stratégies du Mouvement Desjardins viennent
démocratiquement de la base. Nous pensons plutôt que le mouvement
est fortement dirigé par ses cadres permanents et qu'ensuite les
idées ou projets sont vendus avec plus ou moins de pression vers la
base.
L'avant-projet de loi a donc notre appui dans ses grandes lignes, dans
la mesure où il évite précisément le
déviationnisme préconisé par les dirigeants du Mouvement
Desjardins.
Concernant les détails techniques du projet de loi, je laisse
maintenant la parole à Me Bois, notre conseiller juridique. Merci.
M. Bois (André): Le premier article - l'article 3 - qui
attire notre attention concerne la description des objets d'une caisse, plus
précisément l'alinéa 3 où on donne à la
caisse la mission "de favoriser la coopération avec d'autres organismes
coopératifs". La notion "d'organismes coopératifs" n'est
définie nulle part dans le projet de loi. Pour éviter toute
ambiguïté et pour que cela ne soit pas interprété
comme signifiant le pouvoir de conclure des ententes de réseaux avec des
Institutions de Desjardins, nous proposons simplement de substituer aux termes
"organismes coopératifs" le mot "coopératives"! En faisant cela,
le législateur suivrait la terminologie déjà
employée dans la Loi sur les coopératives, adoptée en
1982, et serait sans doute fidèle à l'esprit qui l'animait ici,
parce que nous avons compris du discours d'ouverture de M. Fortier et des
propos qui ont été tenus ce matin, que ce qui est
envisagé, c'est la coopération avec d'autres coopératives
non financières: coopératives agricoles ou coopératives
d'habitation et coopération avec des coopératives d'autres
provinces. Alors, je pense qu'on ne trahirait pas ce but si on
remplaçait les mots "organismes coopératifs" par
"coopératives". On ne pense pas s'enfarger dans la sémantique
quand on propose cela, parce que dans un autre forum, il y a environ trois
semaines, un témoin qui était à la même place ce
matin et que j'interrogeais me disait: Nous avons le droit de le faire puisque
nous encourageons la coopération entre organismes coopératifs. Je
lui ai demandé: Qu'est-ce qu'un organisme coopératif? Il a
répondu: Ce sont les autres institutions qui sont parties du Mouvement
Desjardins. Alors, notre préoccupation à cet égard me
semble déjà justifiée par une expérience
vécue.
Le deuxième point - on en a parlé abondamment lors des
discours d'ouverture - c'est l'article 216. Nous sommes très
préoccupés que la possibilité d'élargir le domaine
d'activité des caisses puisse être décidée par le
Conseil des ministres. Le regroupement a une grande confiance dans les
engagements politiques de ceux qui sont actuellement ses interlocuteurs mais
bien des choses peuvent changer, et il préfère que tout
élargissement de pouvoirs se fasse en vertu d'un débat public.
Nous trouvons que c'est une anomalie de recourir à cette
procédure pour trois raisons qui sont déjà
énoncées dans le mémoire. D'abord, cette forme - j'appelle
cela de la législation déléguée - on la voit
normalement dans des matières qui ne sont pas d'intérêt
public comme la présente matière. Élargir les pouvoirs
d'une institution financière, c'est une matière
d'intérêt public Je conçois que l'on puisse
légiférer en matière de largeur des chenilles d'une
motoneige par règlement ou de certaines mesures de protection sur les
chantiers de construction par règlement, mais pas en cette
matière. L'autre motif également qui nous amène à
avoir des réticences à propos de l'article 216, c'est qu'il nous
semble que si ce qui est recherché par le législateur, c'est une
réaction assez rapide à un nouvel environnement économique
- je ne parle pas ici de la prohibition, je parte d'un nouveau pouvoir - le
mécanisme de la révision quinquennale, comme on le voit dans
d'autres législations financières, à la suite de
recommandations de l'inspecteur général, pourrait être le
mécanisme approprié. Autrement dit, si on s'inquiète de ce
que la loi puisse vite devenir désuète et qu'il faille s'adresser
au cabinet pour de nouveaux pouvoirs, il me semble qu'une révision
législative à tous les cinq ans serait le mécanisme
approprié.
Dans notre mémoire, on propose une alternative qui se retrouve
à la page 6. On dit:
Très bien, si le gouvernement ou le législateur retenait
encore la solution du décret - vous connaissez notre position au sujet
de la vente d'assurances dans les caisses - très bien, autorisez de
nouveaux pouvoirs, mais pas la vente d'assurances dans les caisses.
Le troisième point technique est regroupé sous les
commentaires relatifs aux articles 223 et 228, notamment à l'article 228
où on nous dit que des tiers ne peuvent pas invoquer contre une caisse
le fait qu'elle ne poursuit pas ses objets ou outrepasse ses pouvoirs. Ces
dispositions sont manifestement calquées de la partie 1A de la Loi sur
les compagnies, nous en sommes conscients, mais quant à nous, c'est une
greffe qui n'est pas appropriée. C'est un bananier greffé sur un
pommier. Voici pourquoi. C'est qu'on comprend aisément que sous la
partie 1A, en vertu de laquelle une compagnie a la même capacité
qu'une personne humaine - sauf évidemment, les droits intimement
rattachés à la personne humaine - on prévoit qu'un tiers
ne puisse pas opposer à la compagnie qu'elle n'a pas les pouvoirs
requis, puisque ayant tous les pouvoirs d'une personne physique, on peut donc
présumer qu'elle est normalement habilitée.
Également, sous la partie 1A, comme les statuts n'ont plus valeur
d'actes publics au sens où un juge n'en a pas connaissance judiciaire
-comme c'était autrefois le cas pour les lettres patentes qui
étaient un acte de la couronne - un tiers n'est pas censé
connaître, premièrement, rindoor management" ou la gestion interne
qui limiterait les pouvoirs des différents officiers de la compagnie.
Autrement dit, les dispositions des articles 223 et 228 se comprennent bien
dans un contexte où la corporation a tous les pouvoirs d'une personne
physique.
Dans le cas des caisses populaires, la disposition n'est pas
appropriée parce que la législation sur les caisses est une
législation par objets. Les caisses sont créées
primordialement pour un objet ou deux: cueillette de l'épargne et le
crédit. On nous répliquera sans doute que le mot "tiers" veut
dire les gens qui contractent avec la caisse. Si c'est cela qu'on voulait dire,
bien respectueusement, je pense que ce n'est pas le terme approprié. On
aurait pu calquer la loi fédérale à cet égard, qui
parle de personnes qui traitent avec la compagnie. On utilise une
périphrase parce que, dans notre droit, le mot "tiers" désigne
des gens parfaitement étrangers à la compagnie, des gens qui ne
sont pas partie dans une relation contractuelle avec la compagnie. Autrement
dit, l'article 228 ce que cela veut dire - un plaideur honnête pourrait
le soutenir - c'est qu'un étranger - comme actuellement le regroupement
qui est devant la cour, n'est-ce pas, qui se prévaut de l'article 9.11
de la Loi sur les syndicats professionnels - ne pourrait pas invoquer l'ultra
vires, ne pourrait pas soutenir cela.
Ce qui nous fait dire cela ou ce qui permettrait de considérer
l'argument comme receva- ble - je ne vous dis pas qu'on ne pourrait pas
argumenter dans le sens contraire - c'est un autre article où on limite
la possibilité des tiers d'attaquer les actes de la compagnie aux seuls
cas de transactions intéressées. Alors, nous disons: Comme le
pouvoir d'intervenir dans l'exercice ou la possibilité d'intervenir dans
l'exercice du pouvoir des caisses est limité aux cas de transactions
intéressées, cela veut dire que, dans les autres cas, on ne peut
pas intervenir.
Alors, je résume donc: là-dessus. Ces articles sont
normalement le corollaire d'une disposition qui ne se retrouve pas ici. Cette
disposition, c'est l'article 123.29 de la partie 1A de la Loi sur les
compagnies qui dit que les compagnies ont toute la capacité d'une
personne physique. C'est pour cela que dans les autres articles, on dit:
Puisqu'elle a toute la capacité d'une personne physique, on peut
présumer que la compagnie est habilitée.
L'autre point, c'est l'article 257.8 qui concerne l'usage des immeubles
par la caisse. Il en a été question, ce matin. Tout ce que nous
avons à vous dire là-dessus, c'est que nous sommes d'accord avec
la disposition, à savoir qu'une caisse ne peut utiliser un immeuble
qu'à son propre usage, c'est-à-dire à ses propres fins,
à ses propres objets, soit les opérations d'épargne et de
crédit. La disposition nous apparaît tout à fait
appropriée, parce qu'actuellement on déguise des transactions ou
des ententes de réseaux sous des baux. On justifie, de façon
très artificielle, des ententes de réseaux. On le justifie en
disant que la caisse a le pouvoir de louer. C'est assez étrange, par
exemple, parce que le bail - que ce soit sur la rue Saint-Jacques ou à
Paspébiac - c'est 3500 $ partout, peu importe la valeur locative.
Notre dernier point, c'est l'article 460 qui concerne le pouvoir de
placement des sociétés de portefeuille qui sont
créées pour détenir des intérêts financiers
ou des intérêts commerciaux. Une de nos préoccupations
concerne une certaine ambiguïté au paragraphe 1 de l'article 460.
Nous nous interrogeons à savoir si une compagnie de portefeuille
détenue par la confédération peut ou pourrait
contrôler un cabinet de courtage d'assurance ou un cabinet qui est
intermédiaire en produits d'assurances. L'ambiguïté, selon
nous, vient du fait qu'aux deux premières lignes de l'article 460, on
dit que des actions peuvent être acquises d'une personne morale qui a
comme activité principale des affaires d'assurances. Au demeurant,
"affaires d'assurances", cela veut dire l'opération d'assurance
elle-même. Mais le petit problème, c'est que dans d'autres lois,
notamment la Loi sur les courtiers d'assurances, le vocable "affaires
d'assurances" est également utilisé en rapport avec l'acte
d'intermédiaire de marché. Évidemment le contexte est
différent, j'en conviens, mais est-ce que ce n'est pas désirable
d'éviter des litiges à ce propos si, effectivement, le
législateur ne voulait pas
permettre à la société de portefeuille
d'acquérir des actions de cabinets de courtage? Il y a une proposition
qui est faite à la page 12 du mémoire au sujet de la
rédaction, que nous croyons, bien respectueusement, souhaitable.
En terminant notre propos là-dessus, il y a une mention qui n'est
pas contenue dans notre mémoire et qui est la suivante. Au début
de la loi, quand on dit que les caisses sont des coopératives et
qu'elles obéissent à des règles d'actions
coopératives, nous avons observé que, contrairement à la
Loi sur les coopératives, on a omis un paragraphe qui est
l'alinéa 1 de l'article 4 de la Loi sur les coopératives
où on dit que "l'adhésion - et là je parle de la Loi sur
les coopératives - d'un membre à la coopérative est
subordonnée à l'utilisation des services offerts par la
coopérative - pas par une compagnie du réseau, mais par la
coopérative - et à la possibilité pour la
coopérative de les lui fournir". Nous observons ici - et c'est ce
à quoi M. le vice-président vous référait tout
à l'heure, à la notion de propriétaire usager -
dans...
Le Président (M. Lemieux): En conclusion, s'il vous
plaît!
M. Bois: Oui, je termine là-dessus... dans les
revendications que vous avez entendues ce matin - pas dans votre projet, mais
dans les revendications que vous avez entendues ce matin - qu'on voudrait
qu'une foule de services, autres que financiers, soient offerts par
l'intermédiaire de la coopérative comme porte d'entrée. Je
dis, je soumets et je termine là-dessus, qu'il s'agit d'une
contravention à un principe fondamental d'une règle
coopérative qui est enchâssé dans la Loi sur les
coopératives. Merci.
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre
délégué aux Finances et à la Privatisation.
M. Fortier: Merci M. Pelland et M. Bois. Comme d'habitude, vos
présentations sont toujours brèves mais très
étoffées. Je vais y aller, dans les premières dix minutes
qui me sont données, de quelques commentaires, et si j'ai le temps je
reviendrai par la suite. Je vais commencer peut-être par la fin, par
l'article 460, en ce qui concerne la possibilité pour une
société de portefeuille...
Une voix:...
M. Fortier: Vous savez comme moi que, d'une part, dans la loi,
dans la législation actuelle, la propriété des maisons de
courtage est réglementée par la Loi sur les courtiers
d'assurances. D'autre part, vous savez également que, très
probablement, comme je l'ai indiqué, dans la prochaine loi touchant les
intermédiaires, cet aspect-là va également être
touché. Donc, que ce soit dans la loi actuelle sur les courtiers ou dans
la nouvelle loi qui modifiera la Loi sur les courtiers et qui touchera les
intermédiaires, mais qui touchera d'une façon plus
particulière les courtiers d'assurances, à ce moment-là,
on indiquera si oui ou non et dans quelle mesure - comme votre regroupement l'a
suggéré, en particulier, et il y a eu d'autres
représentations - cela sera possible. Cela ne me semble pas être
l'endroit idéal pour le toucher dans la Loi sur le Mouvement Desjardins,
comme cela ne serait pas l'endroit idéal pour le toucher dans la Loi
privée touchant La Laurentienne, parce que de toute façon, dans
une loi plus générale, ce problème va être
évoqué et d'ailleurs vos représentations ont
été étudiées avec beaucoup d'attention.
En ce qui concerne - pour revenir au début de votre
mémoire - l'article 3 et vos commentaires touchant les organismes
coopératifs, comme de raison, je l'ai indiqué hier au
début de notre commission parlementaire, on se retrouve ici 25 ans
après 1963 pour tenter de trouver un nouvel habit législatif au
Mouvement Desjardins et je suis le premier à admettre... (16 h 30)
D'ailleurs, comme vous le savez, dans l'avant-projet de loi que nous
déposons, il y a une disposition qui va faire qu'à tous les cinq
ans, il y aura une remise en question, comme c'était le cas d'ailleurs,
dans la Loi sur les valeurs mobilières. Cela n'a pas été
fait depuis 25 ans, et on constate que le Mouvement Desjardins s'est
développé. Il y a eu des interventions ponctuelles du
législateur qui a autorisé le Mouvement Desjardins, à
différentes étapes, soit d'acheter une compagnie d'assurance-vie
ou soit d'acheter une compagnie d'assurance générale, et ce
matin, sans revenir sur le débat qu'on a eu avec la
Fédération de Montréal, et je ne voudrais pas entrer dans
le sujet plus particulier de la discussion que mon collègue, le
député de Mille-Îles, avait amorcée sur la question
du cautionnement. Mais je crois que ce que M. Bernier a dit est typique de
plusieurs interventions qui ont été faites, dans le passé,
de la part du Mouvement Desjardins. C'est qu'à certains moments, M.
Bernier nous indiquait que les caisses populaires n'étaient pas
considérées par les autres compagnies d'assurances comme
étant des institutions financières et qu'elles avaient de la
difficulté à se trouver de l'assurance. En définitive,
elles ont donc décidé de se doter d'une compagnie d'assurance
générale. Et quand on examine l'historique des différentes
sociétés dont s'est doté le Mouvement Desjardins, on se
rend compte qu'il y a eu des interventions ponctuelles autorisées par le
législateur, par des bills privés, très souvent, et
maintenant c'est la première fois, je crois, qu'on essaie de discuter de
l'ensemble de la conjoncture totale entourant la politique ou les politiques
qui devraient nous guider en ce qui a trait au Mouvement Desjardins. C'est pour
cela que j'ai de la misère; je crois que vous avez raison
peut-être sur un "stricto sensu" si on interprétait la loi
très
rigidement en parlant d'organismes coopératifs. Mais les faits,
depuis 25 ans, sont que le Mouvement Desjardins, avec l'approbation du
législateur, s'est doté de différentes institutions,
quelques fois de mutuelles d'assurance-vie, d'autres fois, il s'agissait de
compagnies à capital- actions.
L'autre fois, je regardais l'autorisation qui avait été
donnée d'acheter la Fiducie du Québec, à un autre moment
donné, qui a été achetée. Donc, il est vrai que
cela n'a pas toujours été, on aurait pu souhaiter qu'une
coopérative comme le Mouvement Desjardins crée toujours des
institutions coopératives que ce soit dans le domaine des fiducies, de
l'assurance-vie, de l'assurance générale et tout cela. Mais mon
seul commentaire est qu'on ne peut pas réécrire l'histoire et je
ne crois pas que je puisse recommander à l'Assemblée nationale de
dire: Bien, oublions tout ce qui s'est fait depuis 30 ans et peut-être
que cela aurait été préférable, il y a 30 ans,
qu'on passe une disposition dans la Loi sur les caisses d'épargne et de
crédit en disant: Dans l'avenir, si le Mouvement Desjardins
décide de se créer différentes Institutions, II faudrait
que cela soit des organismes coopératifs. Les faits sont là. Les
faits sont que le Mouvement Desjardins s'est doté, de temps en temps,
d'une mutuelle d'assurance-vie et d'autres fois, de compagnies à
capital-actions, mais ce sont les faits.
C'est pour cela que j'ai de la misère à me
réconcilier avec votre interprétation qui est strictement,
légalement peut-être très légitime. Lorsqu'on
regarde l'historique du Mouvement Desjardins, j'ai de la misère à
réconcilier, et il faut bien constater que cela dépasse toutes
les formations politiques, que ce soit le Parti libéral du Québec
en 1963, l'Union Nationale avant le Parti libéral, parce que je crois
que Daniel Johnson - je relisais dernièrement les commentaires, lorsque
la loi en 1963 avait été votée - que l'Union Nationale,
avant 1963, avait pris certaines dispostions en faveur du Mouvement Desjardins,
le Parti libéral du Québec en 1963, d'autres dispositions plus
tard sur l'Union Nationale et d'autres, par la suite, du Parti
québécois. Alors, il faut bien se rendre compte que le Mouvement
Desjardins est une grosse entité qui s'est développée avec
l'approbation de tous les gouvernements de toutes les formations politiques, et
on ne peut pas renier cette réalité. Donc, c'est pour cela que je
le dis, mon commentaire sur votre définition des organismes
coopératifs me semble difficile à appliquer d'une façon
stricte parce que la vérité historique ne va pas dans ce
sens-là.
En ce qui concerne, bien sûr, toute la question du
décloisonnement, on en a dit un mot ce matin, j'ai simplement
indiqué qu'il y avait matière à réflexion.
Vous-mêmes, les courtiers d'assurances, l'avez dit lorsque nous avons
débattu la Loi sur les fiducies en particulier. Nous avons
retranché une disposition et le député de Lévis l'a
indiqué clairement, une disposition qui pouvait être
interprétée d'une façon trop libérale et le
ministre avait un pouvoir personnel très important. On a mis une
disposition donnant au gouvernement un pouvoir d'ajouter certains pouvoirs
parce qu'on ne peut pas toujours prévoir l'avenir et on a repris ces
dispositions dans la loi actuelle. Tout cela pour dire que, bien sûr,
nous croyons qu'il est important d'avoir la disposition de l'article 216. On
croit que c'est important. Certaines personnes nous ont fait des commentaires
affirmant que ce serait odieux de retrancher une autorisation qui aurait
été donnée par la suite. On va examiner cela. Tout
simplement pour dire que nous croyons que c'est un moyen terme parce que c'est
très difficile de prévoir l'avenir dans ce genre de chose. Bien
sûr, on évoquait ce matin te fait qu'il n'est certainement pas
dans notre esprit d'empêcher le Mouvement Desjardins - disons - de vendre
des valeurs mobilières parce qu'il est maintenant actionnaire de Disnat.
Il peut y avoir d'autres produits financiers.
Vous avez fait des représentations en ce qui concerne les
assurances. Nous croyons, et le jurisconsulte nous a dit que dans la loi
actuelle c'était permis. Vous avez contesté en cour sa
disposition. Mes conseillers juridiques me disent que dans la loi actuelle nous
ne faisons que continuer ce qui semblait être la réalité
actuelle. Alors, nous allons examiner cela dans les semaines qui viennent.
Mais, tout simplement, ce pouvoir de l'article 216 nous semblait quand
même nécessaire pour répondre à des initiatives qui
pourraient venir d'autres instances législatives. Il faut bien penser
que dans un an le législateur va probablement modifier la Loi sur les
banques. Il pourrait donner de nouveaux pouvoirs aux banques. À ce
moment-là, il faut être en mesure de réagir assez
rapidement Bien sûr, tous les cinq ans, il y aura un rapport non pas de
l'inspecteur, mais du ministre responsable sur l'application de la loi.
Mais, comme vous le savez, c'est un processus qui est quand même
assez lent. Une fois le rapport déposé, il faut qu'il y ait une
commission parlementaire et il faut déposer un projet de loi. Alors, on
peut penser que les modifications, tous les cinq ans, pourront prendre à
peu près un an et demi avant que les nouvelles mesures
législatives soient prises. Tout cela pour dire que les commentaires que
vous avez faits sur le mouvement coopératif et sur les stratégies
qu'il met en place, et vous l'avez dit vous-même pour ce qui est de
certaines stratégies. On ne peut pas les blâmer de définir
des stratégies de marketing. Vous dites: Ce n'est peut-être pas
nécessairement relié à la philosophie coopérative
comme telle. Enfin, on ne peut pas nier à une société
coopérative de définir une stratégie de marketing qui soit
plus précise. Vous évoquez, je pense bien, certaines informations
que vous aviez sur la concentration des actifs à l'intérieur du
Mouvement Desjardins et qu'il semblait y avoir
une stratégie allant dans ce sens-là.
Le Président (M. Lemieux): En conclusion, M. le
ministre.
M. Fortier: Alors, en conclusion, je reviendrai tout à
l'heure sur des points plus spécifiques. Tout cela pour dire que
j'aurais de la difficulté, quant à moi,, à empêcher
le Mouvement Oesjardins de reconnaître que, dans la panoplie des
compagnies qu'il a, certaines d'entre elles, soit à capital-actions ou
mutuelles...
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre.
M. Fortier: ...ne fassent pas partie de l'ensemble du Mouvement
Desjardins.
Le Président (M. Lemieux): S'il vous plaît, nous
empiétons sur le temps du député de Lévis. M. le
député de Lévis.
M. Garon: M. le Président, j'aimerais demander aux gens du
Regroupement des cabinets de courtage d'assurance du Québec, s'ils
considéreraient équitable que, dans la Loi sur les assurances, le
législateur ait donné à l'article 33.1, dans un cadre de
décloisonnement, le pouvoir à e) d'offrir en vente, les produits
d'une institution financière, clairement, pour les compagnies
d'assurances; et ensuite, à l'article 33.2, le ministre peut autoriser
une compagnie d'assurances à exercer une activité autre que
celles prévues à l'article 33.1. Il y a un régime qui a
été établi pour les compagnies d'assurances dès
1984. Alors que, pour les caisses d'épargne et de crédit, on ne
voudrait pas qu'il y ait les mêmes pouvoirs. Vous ne faites pas de
représentations a l'effet que les compagnies d'assurances devraient
avoir des pouvoirs limités pour se cantonner, elles aussi, dans leur
secteur. Je ne comprends pas trop.
M. Bois: C'est un problème très ponctuel. On vous a
rappelé, hier, dans le mémoire de l'Association des banquiers
canadiens que l'ensemble des banques à charte au Québec ont des
actifs de 46 000 000 000 $. Le Mouvement Desjardins seul a des actifs de 33 000
000 000 $, je crois, certes avec un faisceau de caisses, mais qui sont
maintenant toutes réunies au sommet. Et, une dernière
donnée que je veux vous rappeler. On le rappelait à une autre
commission parlementaire. Les actifs canadiens de la Banque Royale, la plus
grosse banque au Canada, étaient de 50 000 000 000 $ à la fin de
1986.
La question d'équité ici s'apprécie justement
à cause de la présence dont on se réjouit certes, mais de
la grande concentration économique des caisses. Je conçois
aisément qu'une compagnie d'assurances, disons La Sauvegarde qui en
aurait peut-être besoin, puisse vendre certains produits de la Great-West
ou vendre les produits d'une autre compagnie de fiducie. Cela pourrait
l'aider.
Je concevrais également que La Laurentienne qui n'a pas 1400
points de vente puisse, de façon accessoire à son activité
principale, offrir en vente des produits fiduciaires.
Mais dans le cas des caisses, puisque vous invoquez la notion
d'équité, il y a un élément fondamental et
primordial dont il faut tenir compte, c'est le grand poids financier du
Mouvement Desjardins au Québec et de son omniprésence partout.
Tant mieux si, comme vous le disiez si bien, cela résulte de la
solidarité des Québécois. Je lisais un petit peu la
parabole. Il faut faire attention que l'éléphant ne bouscule pas
les moutons en arrivant dans la bergerie. Et c'est pour cela qu'on invoquait
tout à l'heure le contrat social. On a dit: Écoutez, les
courtiers appartiennent autant au Mouvement Desjardins, c'est une fibre du
contrat social québécois. Mais, si à un moment
donné il écrase parce qu'il a trop de pouvoir, bien c'est
dangereux. C'est la réponse. C'est vrai qu'il y a, au demeurant, un
illogisme, M. le député de Lévis, mais comme on le disait
au début du mémoire, c'est un cas ponctuel. Voilà le
problème.
Également, on n'ignore pas non plus que le Mouvement Desjardins -
et on s'en réjouit - est une source importante dans le financement
obligataire de la province de Québec. Je regardais la Gazette
officielle du mois d'août et je voyais l'intervention du Mouvement
Desjardins et la marge de crédit du gouvernement. C'est un agent
économique très important. Or, devant un organisme qui a ce
poids-là, qui nous finance chez nous - tant mieux - il faut y aller avec
circonspection quand on lui donne le pouvoir pour ne pas écraser les
petits entrepreneurs. Voilà.
M. Garon: Est-ce que votre groupement s'est prononcé
contre le libre-échange avec les États-Unis?
M. Bois: Le mouvement n'a émis aucune opinion à ce
sujet-là.
M. Garon: La concurrence avec les États-Unis ne vous fait
pas peur?
M. Bois: Non.
M. Garon: La caisse locale vous fait peur.
M. Bois: La caisse locale fait peur dans le sens que, sous le
couvert d'un prêchi-prêcha coopératiste, sous le couvert
d'aide aux membres et avec un langage qui est digne d'une Église
évangélique de la Caroline du Sud, on réclame toutes
sortes de pouvoirs. Alors on dit: Faisons tomber le voile. C'est pour cela que
M. Pelland vous disait tout à l'heure - ce sont des documents que nous
avons - "8 % des membres détiennent 60 % de l'épargne". Que
détiennent les autres 92 %? Je comprends la préoccupation
maintenant. Au début ce n'était pas cela. C'était
la parade des dix sous. Il n'y avait pas de financement et le gars de la
Davie Shipbuilding qui avait sa petite enveloppe brune à la fin de la
semaine marqué 26,95 $, il n'avait aucun endroit où le
déposer. Les gens qui voulaient des hypothèques n'avaient aucun
endroit où aller. Mais maintenant c'est différent. Je ne dis pas
qu'ils n'ont pas leur place Je ne dis pas qu'on ne doit pas en faire la
promotion. Mais pas sous le couvert du salut de l'économie
québécoise. C'est ce qu'on dit. On dit: M. Pelland et bien des
membres du regroupement étaient des administrateurs de caisses, dans
leur intérêt n'est-ce pas, comme des notaires, comme des avocats,
comme un peu tout le monde. Ils trouvaient leur intérêt comme
bénévoles. Alors, c'est leur fibre. Mais ils disent qu'ils ne
veulent pas se faire écraser sous ie couvert d'une sorte
d'idéologie qui est maintenant vidée d'une partie de sa
sincérité. C'est un jugement de valeur qui est porté
là. Certes, dans certains milieux, on le considérera injuste,
mais quand on lit certains documents qui disent qu'il faut absolument
éviter que ces 8 % partent et pour cela, il faut leur offrir des
services complémentaires Quand on voit cette préoccupation
à l'égard des grands épargnants, c'est leur terme,
à l'égard des "empty nesters" et il manque tout simplement le
terme "DINKS", quand on voit cette préoccupation-là, on se dit:
C'est loin du curé de Saint-Tite qui était président de la
caisse et qui aidait ses ouailles à leur salut spirituel par leur salut
matériel. On dit: Qu'on arrête de nous prêcher cela si on
veut un discours mutualiste, oui, mais coopératiste, peut-être
moins. (16 h 45)
M. Garon: Comment expliquez-vous? Vous reprochez, au fond, aux
caisses populaires d'avoir trop grandi. Est-ce que vous reprochez, parce que 4
000 000 de Québécois sont devenus membres des caisses populaires,
d'avoir fait erreur, qu'on aurait dû les garder petites?
M. Bois: Je ne reproche pas d'avoir trop grandi. D'abord, on est
heureux du projet de loi, sauf des éléments techniques. On
s'adresse aux revendications qui sont faites à l'Assemblée
nationale, les revendications de pouvoirs, et on dit: Les gens des caisses,
vous avez eu ce qu'il vous fallait, tant mieux; continuez, mais ne venez pas
réclamer d'autres pouvoirs en vous réclamant du salut des
membres, parce qu'on n'y croit pas; ne venez pas réclamer ces pouvoirs
additionnels parce que votre discours sonne faux, vous les réclamez
parce que vous avez une base de capitalisation insuffisante; vous ne voulez pas
que les dépôts sortent; si vous n'avez pas peur, vous, les
caisses, de la libre concurrence et du libre-échange, si vous n'avez pas
peur de l'extérieur, sortez, allez dans le Maine, allez dans le Vermont,
mais ne demandez pas au maire du village de vous donner les pouvoirs de la
police. On ne fait pas le reproche; on en est fiers. Tout le monde est fier de
cette plus grosse entreprise financière québécoise parce
que c'est ce qu'elle est. On dit: Quand vous réclamez, vous, Desjardins
- je ne parle pas de la loi - mais quand vous réclamez un tas de
pouvoirs, soit celui d'être une coopérative de services financiers
- lisez bien son mémoire - il n'y a pas de différence entre cela
et le rapport de 1967, celui de M. Pari/eau et autres, où on demandait
le magasin à rayons. C'est cela qu'il demande. On dit: Peut-être
un jour, mais, pour l'instant, prenez garde de ne pas bousculer d'autres agents
économiques québécois: courtiers, La Solidarité, la
Saint-Maurice, les Coopérants-Alliance. Faites attention, il y a
d'autres petits intervenants économiques à côté.
C'est ce que nous disons, et nous sommes de ces petits
intervenants-là.
M. Garon:...
Le Président (M. Lemieux): Merci. M. le
député de Lévis, excusez-moi, mais votre temps de parole
est terminé.
M. le député de Mille-Îles.
M. Bélisle: C'est très intéressant, M. le
Président, d'entendre présentement le niveau élevé
de ce discours. Je veux féliciter M. Bois pour le contenu profond de ce
qu'il nous dit parce que j'ai eu, moi aussi, l'impression ce matin d'entendre
un discours évangélique. Je ne sais pas si c'est de la Caroline
du Sud ou de la Caroline du Nord, mais je pense que ça sonne, c'est
trop, on en met trop, on est trop bons, on est trop parfaits, on est trop trop.
C'est la politique ou la philosophie du trop trop. Cela m'agace. Dans ma vie
personnelle, je ne suis pas trop trop, j'ai des défauts, j'ai un peu de
qualités, mais c'est passable. Mais quand on est trop bons, trop
excellents, on est meilleurs, on englobe toute la société, on est
presque le Québec, parce que c'est cela qu'on nous a dit ce matin, c'est
qu'on était le Québec, et parce qu'on est le Québec, on va
imposer ce qu'on veut au gouvernement du Québec. L'impression que j'ai
eue quand j'ai lu le texte de la Confédération, c'est qu'on veut
tout avoir, mais on ne veut rien donner en contrepartie.
Vous soulevez une question, M. Bois, qui est la question la plus
importante pour la société québécoise de l'an 2000.
La question la plus importante, ce n'est pas de savoir si tel ou tel pouvoir va
être accordé à telle ou telle institution
financière, mais c'est de savoir si l'Assemblée nationale du
Québec, et non le gouvernement, est capable de mettre une limite
raisonnable dans l'intérêt des citoyens du Québec à
la concentration du capital au Québec. Cela soulève des questions
par rapport à Provigo, par rapport au Mouvement Desjardins, par rapport
à la Caisse de dépôt. Le débat qu'on a
présentement, c'est de savoir si une petite poignée
d'intervenants et de décideurs vont décider de l'avenir
économique de 6 500 000 Québécois, si les petits
entrepreneurs ont encore leur place au Québec, si les
intervenants économiques moyens ou de petite taille ont encore leur
place. Je suis d'un Desjardins avec de nouveaux pouvoirs, comme vous le dites,
M. Bois, d'un Desjardins qui s'ouvre sur des marchés extérieurs
au Québec et qui ne prend pas une partie de la tarte que des
intervenants économiques au Québec bouffent raisonnablement en
rendant des services qui n'ont jamais été décriés
par aucun des citoyens ou aucun des consommateurs au Québec. On est
satisfaits de nos courtiers en valeurs mobilières au Québec qui
font un excellent travail. On est satisfaits de nos courtiers d'assurances au
Québec, nos compagnies d'assurances comme les Provinces Unies ou les
autres compagnies québécoises, Le Groupe Commerce. Ils rendent
d'excellents services. La preuve même c'est que les taux d'administration
dans le dollar de prime est à peu près quinze sous plus bas que
ce qu'on retrouve à l'Assurance générale Desjardins. Il
n'y a pas de problème là.
Il faut peut-être se poser la véritable question à
savoir pourquoi le Mouvement Desjardins veut tant entrer dans certains
secteurs. Je suis convaincu irrévocablement que c'est pour
accroître la capitalisation et prendre une certaine partie importante du
montant des primes versées au Québec, se l'accaparer sans tenir
compte des conséquences auprès des autres intervenants
économiques dans ce qu'on appelle le grand mouvement, le mouvement
québécois, le Mouvement Desjardins.
J'aimerais voir au Québec, et je ne serais pas contre, d'autres
mouvements coopératifs aussi importants que Desjardins. J'aimerais voir
une autre confédération réunissant des coopérants
qui feraient une concurrence à Desjardins! Je serais pour cela. Je
trouverais cela sain et excellent.
Quand on tente de surmonopoliser une société et d'accorder
trop de pouvoirs à une institution qui a déjà
d'énormes pouvoirs, M. Bois, je fais référence à la
page 13 de votre texte... Je n'ai pas lu le livre de l'économiste Ingo
Walter - vous deviez me donner la référence tantôt - mais
je pense qu'il a entièrement raison. Il y a des conséquences
à la surconcentration du capital, et il faudra que le gouvernement du
Québec et que les partis politiques au Québec
réfléchissent très sérieusement à la
situation. Est-ce qu'on veut d'un Desjardins à 35 000 000 000 $,
à 50 000 000 000 $, à 75 000 000 000 $, à 90 000 000 000
$, à 115 000 000 000 $ d'actifs? Est-ce qu'on en veut un
concentré seulement au Québec? Est-ce qu'on veut plutôt
qu'on s'ouvre à d'autres marchés extérieurs? Ce sont
toutes ces questions qui n'ont pas de réponse pour le moment.
Je vais vous avouer que je suis très embarrassé par le
texte de l'article 216, tel qu'il est écrit. Je pense aussi que
Desjardins est embarrassé. Il nous a dit ce matin qu'il était
embarrassé. Il préfère voir clairement dans la loi les
pouvoirs... Je pense que le député de Lévis est
embarrassé avec cela aussi. Il nous l'a dit hier. L'article 216 vous
embarrasse aussi- On se demande un peu où on doit se brancher dans tout
le débat.
J'ai noté votre recommandation sur l'article 216. Je comprends
qu'à certains moments, il faut réagir rapidement à cause
de certaines circonstances, surtout dans le domaine économique mais si,
au cours des 25 dernières années, il n'y a pas eu de
révision en profondeur de la loi, je vous avoue que je ne vols pas,
à court terme, malgré une prévision d'une loi au
fédéral, des problèmes tellement importants qui seraient
causés au mouvement coopératif au Québec pour que, du jour
au lendemain, on ait à modifier les règles de jeu fondamentales
et les pouvoirs fondamentaux accordés à une institution comme
Desjardins.
Je partage votre point de vue à la page 5 qui dit que la
révision de la loi par une mécanique quinquennale est
possiblement suffisante. J'aimerais ajouter, M. Bois, que je voudrais
peut-être vous entendre, pendant les courts moments qui nous restent,
parce que la question de la concentration du capital est très
intéressante. Présentement, les États-Unis, qui ont
déjà fait le débat sur le décloisonnement, sont
à l'époque de ne pas parler de décloisonnement. Ils
parlent maintenant de mettre des limites à la concentration du capital.
Ils prennent conscience présentement des conséquences
néfastes du décloisonnement qu'ils ont fait il y a quinze ans et
présentement ils sont en train de présenter au Sénat
américain et au Congrès des États-Unis des lois pour
limiter la concentration du capital.
Je veux bien croire, comme le député de Lévis,
qu'il ne faut peut-être pas regarder en Ontario ou du côté
de la frontière américaine, mais il ne faut peut-être pas
faire l'autruche non plus et peut-être retenir de l'expérience des
autres qu'on n'a pas tout inventé, qu'on a peut-être des choses
particulières, mais qu'on aurait certainement intérêt
à regarder ce qui se fait ailleurs. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le
député de Mille-Îles.
M. le député de Lévis.
M. Garon: M. le Président, je suis un peu
étonné. C'est le ministre qui parle au nom du gouvernement ou
c'est le député de Mille-Îles. Là, il y a vraiment
les deux. À un moment donné, il faudra que le ministre mette ses
pantalons. Il ne pourra pas jouer sur tous les tableaux en même temps.
C'est lui qui a publié un document en mars 1987. C'est lui qui a
parlé du décloisonnement des institutions financières.
C'est lui qui a dit qu'il souhaitait même que Desjardins devienne un
mammouth: ce que Desjardins n'a jamais dit qu'il voulait devenir. C'est lui qui
a dit ça. C'est lui qui a dit qu'il fallait avoir le
décloisonnement de la propriété des Institutions
financières. C'est lui qui a dit
également qu'il fallait avoir le décloisonnement dans la
vente des produits d'institutions financières. C'est lui qui a dit qu'il
fallait que les prêts, les emprunts, le commerce de valeurs
mobilières, les fiducies et les assurances, tout cela soit en
concurrence. Je trouve cela gentil d'écouter le député de
Mille-Îles, mais à un moment donné, il faudra qu'un
gouvernement existe. Qui parle au nom du gouvernement ici, M. le
Président? Est-ce le ministre ou le député de
Mille-Îles? Ce que le député de Mille-Îles et le
ministre dit, c'est contradictoire. C'est le contraire.
Le Président (M. Lemieux): Dans notre formation politique,
M. le député de Lévis, c'est la liberté
d'expression. Vous m'avez posé une question et je vous réponds:
c'est la liberté d'expression.
M. Garon: Non, c'est parce qu'il faut que je m'adresse à
vous.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Garon: Je n'ai pas le choix en vertu du règlement.
Le Président (M. Lemieux): C'est bien, M. le
député de Lévis.
M. Garon: Par politesse et par élégance, c'est
comme ça que le règlement dit qu'on doit faire. Alors, comme je
suis un député...
Le Président (M. Lemieux): J'ai cru bon vous
répondre.
M. Garon:... discipliné, je le fais. Je dois dire
qu'à un moment donné, il faudra que le gouvernement dise ce qu'il
veut, parce que là, je ne sais plus qui parle au nom du gouvernement. Je
ne sais plus si c'est le ministre ou si c'est le député de
Mille-Îles, mais à un moment donné, il faudra que le
premier ministre décide, puis s'il veut renvoyer le député
d'Outremont à ses activités de député et nommer le
député de Mille-Îles ministre, il devra le faire, mais
à un moment donné, on ne peut pas avoir deux expressions au nom
du gouvernement.
J'aimerais savoir s'il y a vraiment décloisonnement des
institutions financières. Vous n'avez pas l'air de souffrir du
décloisonnement qui a été entrepris pour les compagnies
d'assurances. Vous dites: Que ce soit mis dans la loi, pas dans un
décret éventuel du gouvernement, dans la Loi sur les compagnies
d'assurances, qu'elles ont le droit d'offrir en vente les produits
d'institutions financières. Vous dites: Pour nous, pas de
problème pour les compagnies d'assurances. En plus, on dit qu'on peut
leur donner des pouvoirs additionnels. L'article 216 dit même qu'on peut
les interdire dans le cas des caisses d'épargne et de crédit sans
dire ce qu'ils peuvent faire concrètement par rapport au
décloisonnement annoncé par le ministre. Je dis: Un gouvernement
ne peut pas parler des deux côtés de la bouche en même
temps. Un gouvernement est là pour dire: II y a une ligne de
pensée qui s'applique à tout le monde ou qui ne s'applique pas
à tout le monde.
Je suis bien sympathique à ce que vous nous dites, mais je dis
qu'on est dans le cadre actuellement d'une politique gouvernementale
annoncée officiellement dans un livre du gouvernement qui a
été publié, puis où il semble y avoir eu un accord
assez général sur te décloisonnement. Je vous dirais
même plus que cela. Dans la Loi sur le camionnage, on a dit: on
déréglemente, puis on devance le mouvement canadien même.
Il y a eu des comités de déréglementation du gouvernement
qui ont dit: on déréglemente pour qu'il n'y ait plus de
compétition. Il y a même eu le comité des sages sur lequel
il y avait des banquiers. À propos, il y avait beaucoup de monde du
mouvement coopératif: il y avait des banquiers, des présidents de
banque et même deux; les plus représentés c'étaient
les banquiers. Ils ont dit au gouvernement qu'ils avaient trouvé cela
gentil qu'il fallait déréglementer. Actuellement, on ne sait plus
où s'en va le gouvernement. Ce n'est pas normal dans une
société organisée que l'on ne sache pas où s'en va
le gouvernement. J'entends ce que vous dites; je comprends tout ce que vous
dites, sauf qu'à ce moment-ci c'est au gouvernement de dire ce qu'il
veut; et là, s'il veut appliquer ses règles du
décloisonnement pour un, oui et pour l'autre, non, ou s'il va ramener
tout le monde sur un pied d'égalité en disant: Je reviens aux
quatre piliers. Les fiducies feront de la fiducie; les assurances feront de
l'assurance, et les caisses d'épargne et de crédit recevront des
dépôts et feront des prêts, et les commerçants ou les
gens dans le domaine des valeurs mobilières agiront; sauf qu'en
attendant, il y a une banque qui est en train d'acheter une entreprise de
valeurs mobilières et le gouvernement n'a pas l'air de se prononcer
contre cela. (17 heures)
Alors, est-ce que le décloisonnement - c'est là qu'est la
grosse question - jouera uniquement contre le Mouvement Desjardins? Le
gouvernement devra le dire à un moment donné ou bien il va dire:
Je permets à la Laurentienne d'agir dans le domaine du
décloisonnement, avec les coudées franches; je vais permettre
à d'autres d'agir dans le domaine, avec les coudées franches. Par
ailleurs, Desjardins, non. Le gouvernement, à un moment donné, le
ministre en parlant au nom du gouvernement, il va falloir qu'il mette ses
pantalons et qu'il dise: Bon, je ne suis pas en culotte courte, je ne suis pas
en "baby doll" - pas en "baby doll", je voulais dire...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Fortier: On le prévoit, mais on ne l'a
pas vu encore!
M. Garon: Je voulais dire en costume de bébé, en
salopette ou...
M. Fortier: En costume de bébé!
M. Garon: ...en couche.
M. Fortier: C'est féministe.
M. Garon: En couche. Je me suis fourvoyé.
Le Président (M. Lemieux): Une minute, M. le
député de Lévis.
M. Fortier: Cela ne se peut pas.
M. Garon: Je pense qu'à ce moment-ci, c'est au
gouvernement de dire ce qu'il va faire et de ne pas jouer sur les mots, ni sur
l'ambiguïté. Je pense qu'essentiellement le message du
président du Mouvement Desjardins, ce matin, était: Cela ne peut
pas être gris. Pour qu'on se poursuive devant les tribunaux, ce doit
être clair, ce qui va se passer, ce que le gouvernement veut par rapport
à cela. Maintenant, tout le monde marche sur la déclaration du
mois de mars 1987 qui n'a été contredite par aucune autre
déclaration ministérielle. Ce que vous me dites, c'est clair.
Le Président (M. Lemieux): En conclusion, M. le
député de Lévis.
M. Garon: Je n'ai pas besoin de vous poser davantage de
questions, ce que vous dites est clair. Maintenant, il faut connaître les
intentions du gouvernement. Je pense bien que s'il y a décloisonnement
dans des activités des institutions financières, il y en a pour
tout le monde ou bien il n'y en a pas seulement pour un ou pour deux, alors
qu'on dit qu'on ne voudra pas pour l'autre.
Le Président (M. Lemieux): En conclusion, M. le
député de Lévis.
M. Garon: J'ai terminé.
Le Président (M. Lemieux): Vous avez terminé?
Merci. Alors, il est 17 heures, le mot de la fin, M. le député de
Lévis.
M. Garon: Je vous remercie et je... Le Président (M.
Lemieux): Merci.
M. Garon: ...ne vous blâme en aucune façon de faire
valoir vos représentations et de dire comment vous voyez cela, mais je
pense qu'à un moment donné, le gouvernement va devoir parler.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le
député de Lévis. M. le ministre
délégué aux
Finances et à la Privatisation. Mot de la fin, conclusion.
M. Fortier: Vous me donnez combien de temps? Une
demi-seconde?
Le Président (M. Lemieux): Allez-y, allez-y.
M. Fortier: Alors, dans une demi-seconde, ce que j'ai à
dire, c'est ce que je pense bien que je ne pourrai pas commenter tous les
détails des remarques du député de Lévis, je vais
simplement dire que je trouve cela désolant. Il engueulait quasiment les
gens qui sont devant nous pour qu'ils viennent nous dire ce qu'ils pensent.
Non! Si on s'est réuni en commission parlementaire, c'était
justement parce qu'on voulait entendre...
M. Garon: Ce n'est pas vrai.
M. Fortier: ...les intervenants nous dire: Faites attention. Il
est vrai que le Conseil des ministres a adopté une politique; il est
vrai que le ministre responsable a fait état de certains principes, dont
le quatrième, qui est de permettre le développement des
réseaux de distribution des services financiers en utilisant le
réseau. Mais je crois qu'on ne doit pas vous engueuler parce que vous
venez nous dire: Faites attention, nous, les coutiers d'assurances ou les
bureaux de courtage, nous existons; donc, vous devez prendre cela en
considération.
Je pense que cela vous a pris cinq ans, au Parti
québécois, pour finalement vous convaincre que vous étiez
un parti indépendantiste, ne venez pas nous accuser de prendre quelques
heures pour discuter du décloisonnement des institutions
financières! Vous savez, on ne prendra pas cinq ans!
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre, s'il vous
plaît!
M. Fortier: On ne prendra pas cinq ans pour statuer.
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre.
M. Fortier: Nous croyons à certains principes...
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre.
M. Fortier: Bien oui, je conclus, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): Oui, vous concluez mais vous
enfreignez le règlement.
M. Fortier: M. le Président, soyez gentil...
Le Président (M. Lemieux): Non, mais vous le savez...
M. Fortier: ...mais donnez-moi au moins une demi-seconde, je
conclus.
Le Président (M. Lemieux): Là, le
député de Lévis, vous savez...
M. Fortier: Je conclus en une demi-seconde.
M. Garon: Je partais sur mon temps, moi, tantôt.
Le Président (M. Lemieux): Oui.
M. Fortier: Alors, s'ils ont pris cinq ans pour régler le
problème à savoir s'ils étaient indépendantistes ou
non, nous, nous pouvons bien prendre quelques heures...
Le Président (M. Lemieux): Bon!
M. Fortier: ...pour discuter du décloisonnement des
institutions financières. Soyez assurés qu'en temps et lieu, le
gouvernement fera son lit, mais là, dans le moment, on est ici pour
entendre les intervenants qui sont devant nous. Je vous remercie d'être
venus nous dire ce que vous pensez.
Le Président (M. Lemieux): Merci de votre
coopération, M. le ministre. Comme mot de la fin, est-ce que vous avez
quelque chose à ajouter? Ça va?
M. Bois: On vous remercie. Deuxièmement, on a confiance au
bon jugement du législateur qui ne doit pas toujours procéder
comme s'il s'agissait d'une équation mathématique. Le dosage,
c'est bien important. Parfois, II faut donner les cuillères doubles aux
plus faibles pour qu'ils se remettent d'une maladie et d'autres ont besoin de
moins de vitamines. Voilà, cela, c'est le bon jugement.
Le Président (M. Lemieux): Merci Nous savons tous que la
modération a bien meilleur goût! Sur ce, je vous remercie au nom
des deux groupes parlementaires pour votre participation à cette
consultation générale. Nous suspendons nos travaux pour environ
une minute afin de permettre à l'Association des coutiers d'assurances
de la province de Québec de prendre place.
(Suspension de la séance à 17 h 5) (Reprise à 17 h
7)
Association des courtiers d'assurances de la province
de Québec
Le Président (M. Després): A l'ordre, s'il vous
plaît!
Nous allons maintenant entendre l'Association des courtiers d'assurances
de la province de Québec. Dans un premier temps, est-ce que le
porte-parole de l'organisme pourrait s'identifier et présenter les gens
qui l'accompagnent?
M. Lavigueur (Jacques): Je vous remercie, M. le Président.
Je voudrais vous présenter notre délégation qui se
compose, à mon extrême droite, de M. Régent Frappier, notre
premier vice-président, de M. Richard Mongeau, notre conseiller
juridique, et à ma gauche, de la directrice générale, Mme
Diane Paradis. Je suis Jacques Lavigueur, président de l'Association des
courtiers d'assurances de la province de Québec
Le Président (M. Després): Je vous rappelle
maintenant les règles de l'audition. Vous avez 20 minutes qui sont
accordées pour l'exposé de votre mémoire, après
cela suivra une période de discussion de 40 minutes avec: le groupe
ministériel et celui de l'Opposition. Je vous invite à nous
présenter votre mémoire dès maintenant.
M. Lavigueur: Je vous remercie, M. le Président.
M. le Président, l'Association des courtiers d'assurances de la
province de Québec tend ici, ce soir, à réaffirmer
à cette commission parlementaire les propos qu'elle tenait
déjà le 2 juin dernier et qui reprenaient les grands
thèmes de son attitude face au décloisonnement des institutions
financières. M. le ministre se souviendra, M. le Président, que
nous avons appuyé cette réforme en y trouvant toute la protection
du public qu'elle doit contenir, ce qui nous apparaît comme primordial.
Nous croyons donc qu'en exposant notre point de vue à cette commission
parlementaire au sujet du projet de loi qui traite des caisses d'épargne
et de crédit, nous devons reprendre ce même souci; nous croyons
que le législateur en est quand même très conscient,
puisqu'en lisant cet avant-projet de loi, nous y reconnaissons le souci du
ministre et du législateur de vouloir intégrer au projet de loi
toutes les réformes qui protégeraient le plus possible ce public
consommateur de produits financiers et, particulièrement, d'assurances,
puisque nous représentons ici les 5700 membres de notre profession qui
oeuvrent au Québec.
M. le Président, notre propos sur l'avant-projet de loi nous
amène à vous dire que pour nous, le Mouvement coopératif
des caisses populaires Desjardins dont il est fait mention dans le projet de
loi sur les caisses d'épargne et de crédit est plus qu'un
mouvement coopératif. Déjà, nos confrères sont
venus vous dire tout à l'heure que pour eux, il s'agissait d'un
mouvement pyramidal qui avait une portée économique beaucoup plus
grande que celle d'une compagnie d'assurances parmi tant d'autres. Nou6
reconnaissons également que si nous faisions ici allusion à la
Saint-Maurice, au Groupe Commerce ou à ces compagnies-là, nous
aurions un souci peut-être moins étendu de la défense des
intérêts du consommateur, parce que nous serions conscients qu'il
ne s'agirait là que d'un consommateur d'un
seul des produits de ce décloisonnement que le gouvernement
semble vouloir nous proposer dans l'ensemble de son projet de loi. Pour nous,
donc, il s'agit d'un consommateur de plusieurs produits financiers. Le souci du
gouvernement de garder ce consommateur dans un cadre déontologique qui
nous assure que les règles du jeu seront suivies nous apparaît
important et c'est ce que nous avons souligné dans le mémoire que
nous vous avons livré, à la page 4, et je voudrais vous lire
cette partie: "Le décloisonnement envisagé lors de la
réforme des institutions financières au Québec est
susceptible de donner lieu aux abus déjà constatés sur le
marché américain."
Vous savez, M. le Président, nous avions repris l'exemple du
marché américain lors de notre présentation du 2 juin
parce que nous y voyions non pas un élément précurseur,
mais nous y voyions et, encore, nous constatons que certaines des
méthodes appliquées aux États-Unis sur un marché
plus vaste se retrouvent effectivement au Québec au sein de la
distribution des produits pour lesquels nous nous sommes
spécialisés depuis 75 ans. Je continue en lisant, à la
page 4, en haut: "Les caisses populaires, leurs fédérations et la
confédération bénéficieront certes d'une refonte de
leur loi;" et pour cela, nous en sommes redevables à la
Législature, mais, et c'est là notre souci des règles du
jeu, nous disons que "leur nouvel encadrement législatif devra cependant
tenir compte de l'expérience acquise en analyse de l'évolution
nord-américaine des institutions financières."
Pour continuer notre propos, nous aimerions vous entretenir, toujours
à la page 4, à la section 2, au dernier paragraphe, de ce qui
nous semble être possiblement la pierre angulaire de cet avant-projet de
loi, c'est-à-dire l'aspect déontologique qui est quand même
très bien couvert. Mais voici notre propos et je lis le texte: "La
création de comités de déontologie pour la
confédération et de chaque fédération est
susceptible de répondre aux voeux exprimés par la majorité
des groupes concernés par le décloisonnement des institutions
financières, notamment: la protection des consommateurs en ce qui a
trait à l'utilisation d'informations privilégiées, les
ventes forcées, la concurrence déloyale et les conflits
d'intérêt. L'on doit, en effet, prendre conscience que les
institutions financières, y compris le Mouvement Desjardins, n'ont pas
de tradition déontologique. L'extension des pouvoirs des membres du
Mouvement Desjardins est de nature à engendrer de nombreuses situations
où l'intérêt respectif des caisses et des consommateurs
pourra être divergent."
Je pourrai répondre à des questions plus précises,
si bon vous semble. "L'élaboration de règles pertinentes par les
comités de déontologie des différentes
fédérations permettra, entre autres, une réflexion sur les
moyens à prendre afin de protéger les consommateurs lors de
l'utilisation par les caisses des pouvoirs décou- lant de l'application
de ce nouveau cadre législatif. L'application de ces règles par
les comités de surveillance et leur adaptation subséquente est
susceptible de créer, au fil des ans, une tradition
déontologique - justement - qui ne pourra que profiter à
l'ensemble du Mouvement Desjardins ainsi qu'à toute sa clientèle.
"L'association croit donc que la mise en place des mécanismes
d'autoréglementation décrits à l'avant-projet de loi est
essentielle dans le nouveau cadre législatif proposé pour le
Mouvement Desjardins. Nous ne pouvons qu'encourager le ministre à
maintenir - M. le Président - la position énoncée à
cet égard dans lavant-projet de loi." (17 h 15)
Notre propos, également, voudrait se porter sur les autres
activités des caisses telles que décrites à partir de la
page 5 de notre mémoire. Pour vous exprimer notre point de vue, nous
avons choisi, à la page 6, le deuxième paragraphe, où nous
disons que nous croyons que le ministre responsable du décloisonnement
des institutions financières au Québec devrait être
extrêmement prudent avant de se prévaloir des pouvoirs que lui
confère l'article 216 de l'avant-projet de loi relativement à
l'extension des activités des caisses.
Là, M. le Président, j'aurais un commentaire qui n'est pas
dans le texte, pour vous dire qu'après mûre réflexion - et
je sais que d'autres groupes sont venus exprimer cette même crainte, ce
qui veut possiblement dire qu'elle est partagée par d'autres que notre
groupe - cette prudence irait même jusqu'à demander de
procéder par amendement législatif plutôt que par
décret gouvernemental, dans le cas où il y aurait des changements
substantiels à accorder aux activités déjà
exercées par le Mouvement Desjardins, ou enfin, selon l'avant-projet de
loi. Pourquoi ce commentaire? C'est parce que, pour nous, la stabilité
du marché financier est fortement ébranlée toutes les fois
que les règles du jeu sont changées de façon importante.
Nous venons de vivre, M. le Président... Je voudrais le redire à
M. le ministre, parce que nous avons apprécié sa sagesse de ne
pas bousculer trop rapidement les propos qu'il nous adressait au sujet du
décloisonnement, c'est que nous avons apprécié sa
compréhension que nous sommes des intermédiaires d'institutions
financières qui, autrefois, il faut se le rappeler, n'étaient que
des institutions à but unique. Il était facile, donc, pour ces
compagnies d'assurances d'avoir une vue de souscripteur au risque que nous leur
présentions, alors que maintenant nous avons affaire à des
financiers, et déjà le débat s'élargit. On voit
déjà que l'attitude des institutions que nous représentons
est différente. Qu'est-ce que ce serait si demain nous pouvions leur
accorder encore d'autres pouvoirs? Nous aurions donc à faire face
à une attitude encore nouvelle. Avant même que toute l'extension
de l'avant-projet de loi soit déjà déposée, nous
vivons déjà dans le
moment des changements importants. Alors, nous disons - je reviens
à mon texte de la page 6 - que nous sommes convaincus qu'une telle
extension des activités devrait être précédée
d'un débat de fond, parce que chaque fois qu'on introduit une nouvelle
activité ou une nouvelle mesure qui peut changer les règles du
jeu dans notre domaine des institutions financières, il s'avère
que beaucoup d'intervenants peuvent être touchés d'une
façon importante Une telle éventualité ne peut être
envisagée avant qu'une solide tradition déontologique n'ait
été établie au sein de l'ensemble des institutions
financières oeuvrant dans le domaine du crédit au Québec.
M. le Président, nous sommes très reconnaissants envers le
ministre de l'avoir reconnu dans ses propos de lavant-projet de loi. Il faut
être conscients, par exemple, qu'étendre les pouvoirs de la caisse
à la vente d'assurances ferait en sorte que l'ensemble des autres
institutions financières exigerait d'obtenir la permission de vendre ce
produit aussi. Ou bien on décloisonne, ou bien on ne décloisonne
pas. Les autorités concernées pourraient alors se voir
forcées d'acquiescer et ce, malgré l'absence de toute tradition
déontologique de la part de ces autres institutions. L'effet
d'entraînement résultant de l'utilisation de l'article 216 de
l'avant-projet de loi en ce qui a trait à l'assurance devrait donc
être soigneusement examiné, si l'on veut assurer la protection de
l'ensemble des consommateurs, ce qui est notre préoccupation, M. le
Président.
Je voudrais terminer ce propos de notre mémoire à la page
7, M. le Président, au paragraphe où nous traitons du fait que
l'association croit également que la commission devrait se pencher sur
la portée exacte de l'article 228 de l'avant-projet de loi. Quelles sont
ces personnes visées par l'expression "tiers" et en quelles
circonstances cet article pourrait-il s'appliquer? Nous souhaitons en effet
qu'il soit impossible d'invoquer cet article pour empêcher les
consommateurs, par exemple, de faire valoir leurs droits ou d'exercer un
recours à rencontre d'une caisse. Nous voulons vous dire que notre souci
porte sur la définition du mot "tiers" et sur son application pratique
plutôt que sur la façon dont est écrit l'article, si
l'explication qu'on nous donne nous semble valable dans les circonstances.
M. le Président, je termine en lisant les trois recommandations
toutes simples que nous avions à la lecture de lavant-projet de loi. Ces
recommandations sont les suivantes: "a. Que la création des
comités de déon tologie par les fédérations et
l'extension du rôle des conseils de surveillance des caisses soient
maintenues lors de la présentation du projet de loi; "b. Qu'il soit
précisé que les règles relatives à la protection
des renseignements à caractère confidentiel interdisent
l'utilisation de tels renseignements lors de toute sollicitation de la
clientèle des caisses afin d'inciter ces personnes à se procurer
d'autres produits financiers. "c. Que toute extension des pouvoirs des caisses
en vue de leur permettre de distribuer de l'assurance IARD -
c'est-à-dire l'assurance pour dommages matériels - soit
précédée d'une consultation structurée de
l'ensemble des intervenants concernés."
Et nous vous remercions, M. le Président.
Le Président (M. Després): Merci, M. Lavi gueur. M.
le ministre délégué aux Finances et à la
Privatisation.
M. Fortier: Merci, M. le Président.
M. Lavigueur, votre mémoire est empreint de sagesse comme vous
l'aviez fait lors de la présentation d'un mémoire sur le
décloisonnement des intermédiaires. Parce que je sais que c'est
un sujet qui vous importe beaucoup, j'aimerais préciser
immédiatement que très, très bientôt, j'irai au
Conseil des ministres au sujet du décloisonnement des
intermédiaires et que j'y ferai approuver les principes de base
sous-jacents. Et aussitôt que cela sera fait, nos juristes travailleront
sur le projet de loi qui sera approuvé par le Conseil des ministres dans
un avenir prochain.
Mais il y a une chose que j'ai retenue de la commission parlementaire
sur les intermédiaires - et vous l'avez noté - c'était la
nécessité de contrôler, d'assujettir, de réglementer
tout ce qui touche la déontologie. Je pense que tous les
intermédiaires, surtout les courtiers, avaient insisté
là-dessus, et d'ailleurs, j'avais donné des instructions à
cet effet-là. C'est la raison pour laquelle - et cela me fait plaisir de
voir que vous l'ayez noté - nous avons mis des dispositions très
sévères, à un point tel que - vous n'étiez pas ici
ce matin, ni hier - le Mouvement Desjardins, la Fédération de
Montréal, les notaires et d'autres représentants nous ont dit:
Écoutez, vous allez trop loin, cela n'a pas de bon sens. Mais j'ai
indiqué au Mouvement Desjardins, ce matin, qu'il n'était pas
question pour nous de reculer sur les principes. Bien sûr, s'il y a des
dispositions qu'on peut alléger vis-à-vis des
bénévoles, on va le faire. Mais d'une façon
générale, les règles touchant la déontologie pour
la confédération, la fédération et les caisses
vont... Il n'y en a pas dans le moment. La loi actuelle ne couvre absolument
rien et, donc, lavant-projet de loi et le projet de loi vont conserver, dans
une très grande mesure, toutes les dispositions. C'est pour cela que
pour votre première recommandation, j'aimerais vous dire que vous avez
gain de cause dès le départ, parce que je suis convaincu, et
toute la discussion que nous avons eue à plusieurs reprises - pas
seulement en commission parlementaire, mais avant - m'avait convaincu qu'il
fallait avoir des dispositions très sévères touchant la
déontologie. D'ailleurs, j'en avais averti le Mouvement Desjardins par
lettre. C'était au printemps, au mois de mars. Si M. Bouchard se
souvient bien, j'avais écrit à M. Béland pour dire:
Écoutez,
compte tenu du décloisonnement, il est évident qu'il faut
absolument avoir des règles de déontologie, et je crois qu'on va
ajouter à cela, pour préciser dans la loi à qui un
individu pourrait se plaindre, qu'il doit y avoir un comité de plaintes
ou des individus dans la caisse ou à la fédération
à qui on peut formuler des plaintes touchant la déontologie.
Donc, je voudrais vous rassurer là-dessus immédiatement et je
vous remercie de votre appui pour dire que cet aspect-là est important
pour nous et qu'on a bien l'intention de le conserver.
En ce qui concerne l'article 216, vous n'êtes pas le seul groupe
qui ait fait des représentations. Vous dites: Nous sommes convaincus
qu'une telle extension des activités devrait être
précédée d'un débat de fond. J'aimerais vous dire
que la loi ou la réglementation entourant la promulgation d'un tel
décret est entourée justement de plusieurs dispositions qui vont
dans ce sens-là, parce qu'il y a un préavis de 45 jours. À
ce moment-là les intervenants ont le droit de se faire valoir. Quinze
jours plus tard, on peut retourner au Conseil des ministres et faire publier le
décret dans la Gazette officielle. Tout cela pour dire qu'il ne
s'agit pas d'un processus qui est caché. C'est un processus très
visible, qui prend à peu près plus de 90 jours lorsqu'il n'y a
pas perte de temps. Mais je suis bien conscient que la décision qui est
appréhendée en ce qui concerne les assurances est une
décision importante et qu'elle ne devrait pas être prise en
catimini. Je crois que c'est là le sens de votre intervention de dire:
Écoutez, n'essayez pas de nous passer cela en douce au mois de juillet,
lorsque tout le monde est parti en vacances. Et je pense bien que ce n'est pas
du tout notre intention.
La deuxième recommandation que vous avez concerne les
règles relatives à la protection des renseignements à
caractère confidentiel. Dans la loi, on retrouve des dispositions
à ce sujet. Encore là, le principe qui nous guide, c'est de
permettre au Mouvement Desjardins de s'autoré-glementer, mais on a
toujours une porte de sortie parce qu'on dit: Si l'inspecteur ou le ministre
n'était pas satisfait de l'autoréglementa-tion, nous avons des
dispositions réglementaires qui nous permettraient d'intervenir. Je n'ai
pas l'article exactement, mais on a une disposition concernant la protection
des renseignements à caractère confidentiel qui irait dans le
sens de vos appréhensions. J'ai reçu des plaintes de courtiers
d'assurances qui nous disaient: Écoutez, l'information court trop
librement à l'intérieur d'une caisse et il faudrait absolument
qu'il y ait des directives à ce sujet. Je me réfère en
particulier aux pouvoirs réglementaires du gouvernement, à
l'article 501, où on dit: "Le gouvernement peut, par règlement:
11° déterminer des conditions et restrictions à la
circulation de l'information à l'intérieur d'une caisse ou d'une
fédération, ou entre une caisse et les personnes morales faisant
partie du même groupe que la fédération à laquelle
elle est affiliée, ou entre une caisse ou une fédération
et une personne intéressée, afin de réduire les risques de
conflits d'intérêts." Si on l'a mis là, c'est à la
suite de vos recommandations et on n'a pas du tout l'intention de l'abroger.
Nous aurons donc les outils pour discipliner les gens, si nécessaire. On
espère que ce ne sera pas nécessaire, mais si ça l'est,
nous aurons des dispositions réglementaires extrêmement
importantes.
Votre dernière recommandation touche l'extension des pouvoirs de
la caisse en vue de lui permettre de distribuer de l'assurance IARD. J'ai
noté dans votre propos empreint de sagesse que vous mettez de l'avant ce
que j'appellerais une politique progressive. Vous dites: Écoutez, nous
provenons d'un système où les quatre piliers étaient
indépendants; nous nous dirigeons de toute évidence - je n'ai
jamais caché nos intentions là-dessus - vers une politique
où il y aurait un décloisonnement des institutions
financières. Je ne sais pas si j'interprète mal vos propos, mais
vous dites, dans le fond: Si c'est vrai qu'on part de A pour aller à B,
laissez-nous le temps de nous ajuster. Ce n'est pas une chose facile à
faire que de graduer ce genre de décision et ce serait difficile de
faire des consensus continuellement, mais il est vrai que, pour moi, ce qui est
prioritaire - c'est pour cela que j'essaie de travailler le plus rapidement
possible; malheureusement, on est pris avec des priorités qui ne sont
pas toujours convergentes - c'est le décloisonnement des
intermédiaires. Je redis aujourd'hui qu'il est vrai que pour vous
permettre de survivre et même de vous développer, il faut
absolument vous donner des moyens, par une nouvelle loi touchant les courtiers
d'assurances et les intermédiaires en général, de
développer de nouveaux produits, de profiter du décloisonnement
et non pas de vous faire avaler par un groupe qui est considéré
par plusieurs comme étant trop considérable présentement.
C'est une question d'évaluation. J'ai pris bonne note de votre
philosophie que je qualifierais de progressiste, à savoir que s'il y
avait moyen pour le gouvernement de graduer ces changements, ce serait la
meilleure façon de le faire.
C'étaient les quelques commentaires que j'avais à faire et
je reviendrai par la suite, si nécessaire, M. le Président.
Le Président (M. Després): Merci, M. le
ministre.
Vous avez la parole, M. le député de Lévis.
M. Garon: M. le Président, je voudrais remercier
l'Association des courtiers d'assurances de son mémoire. À la
page 3, en citant la Fédération canadienne des entreprises
indépendantes, l'association fait allusion a la multiplication et
à l'augmentation des frais de services exigés par les
institutions de crédit et de dépôt et elle parle de frais
directs et indirects, etc. Ce matin, j'ai cru comprendre que le Mouvement
Desjardins a indiqué qu'il était d'accord pour que
l'obligation de divulgation soit comprise dans le projet de loi sur les caisses
d'épargne et de crédit. Est-ce que les courtiers accepteraient de
se soumettre aux mêmes règles de divulgation des frais qu'ils
exigent de leurs clients? (17 h 30)
Le Président (M. Després): M. le
président.
M. La vigueur: Si vous me permettez, je voudrais répondre
à la question en soulignant deux points de vue qui sont, à mon
sens, essentiels à l'exercice de notre profession actuellement. De
divulguer nos honoraires pour nous, les courtiers, c'est aussi simple que de
demander à quiconque de s'informer auprès des assureurs quelles
sont les honoraires que nous recevons et comme nous faisons à peu
près dix fois l'ouvrage pour ce que nous recevons en
rémunération, nous ne sommes sûrement pas opposés
à ce que ce soit discuté sur la place publique parce que nous
croyons que nous faisons un bon ouvrage pour ce que nous recevons en
rémunération.
Ce qui nous préoccupe beaucoup au sujet de votre remarque c'est
que si on distribue l'assurance par les courtiers, la règle du jeu sera
évidemment appliquée à tout le monde parce que les
compagnies sont nombreuses, il y en a au-delà de 100. Le responsable aux
institutions financières le sait bien. Elles sont nombreuses et
très compétitives. À cause de cela, il faut faire une
règle du jeu qui est de donner une distribution équitable
à chacun. Je pense que nous avons reçu dans le passé plus
d'aide à la distribution, pour les courtiers en tout cas, par le moyen
des produits que par le moyen économique C'est pour cela que nous avons
chez nous des groupements qui pensent qu'il est important de représenter
le côté économique dans le moment. Quand la distribution
serait faite par des institutions de type épargne et crédit, il
arrive que le geste de la distribution répétitive par les
services qu'on donne, par exemple une police automobile ou ailleurs, pourraient
se cacher à l'intérieur d'une rémunération qui ne
serait pas l'objet d'un contrat qu'on appelle le contrat d'agence dans notre
cas. Là, les règles du jeu sont très
différentes
Je vous donne un exemple très précis, M le
Président. Si je distribue une assurance automobile pour 12 % d'une
prime de 300 $, je reçois 36 $, peu importe le nombre d'heures que je
passerai dans l'année à recevoir les demandes de changements
d'automobiles, les changements de créanciers ou les rencontres à
la suite d'un sinistre. Si je peux, à l'intérieur de mon
système, imposer pour chaque fois que je donne une réponse, un
papier ou que je remets un document à mon client, ce que j'appelle des
frais de service, là ma rémunération n'est plus
fixée au début du contrat, elle est en pleine expansion tout au
fur et à mesure. Donc, pour nous les courtiers de divulguer, c'est
là ma réponse à la question que vient de me poser M. le
député de l'Opposition, il y aurait deux temps, deux mouvements,
à cette réponse. Le courtier dirait: Oui, je dévoile une
rémunération fixe pour l'ensemble de mon contrat et le mouvement
à qui on demanderait de faire la même chose répondrait:
Voici ma rémunération par acte. Mais lui, le multipliant tant de
fois par année, le résultat final du côté du
mouvement serait sûrement en ampleur si ce n'est pas d'autres
façons, plus grand que ce que nous recevons. Nous ne serions pas
traités équitablement et nous pensons que nous devrions au moins
pouvoir avoir les mêmes règles du jeu.
Le Président (M. Després): Merci, M Lavigueur.
M. le député de Lévis.
M. Garon: C'est toujours dans une perspective de protection du
consommateur. Vous vous êtes référé à la
protection du consommateur. Je pense bien qu'ici on se réfère
à la protection du consommateur et non pas à la protection des
institutions. Est-ce que vous seriez prêt à ce que les courtiers
aient les mêmes obligations? Il est question d'obligation légale
pour les caisses d'épargne et de crédit dans la loi de
divulgation des frais de services, des taux payés pour les
dépôts avec toute la liste, les taux imposés pour les
emprunts selon les catégories, les frais de services. Si je paie un
compte de Bell Canada, combien cela coûte-t-il? Si je ferme un compte
d'épargne, combien cela coûte-t-il, tous les frais imposés.
C'est une question d'obligation légale.
On dit que les caisses et les banques, c'est pareil. Il est question
actuellement dans la révision de la loi de l'obligation légale de
divulgation de tous les frais de services imposés par les caisses
d'épargne et de crédit, ce à quoi ils ont acquiescé
ce matin. C'est ce que j'ai compris en tout cas.
Est-ce que les courtiers, dans le domaine de l'assurance, sont
prêts à ce que ce soient les mêmes obligations concernant
les compagnies d'assurances, les courtiers, les agents d'assurances pour
l'information des consommateurs pour qu'ils sachent ce qu'ils paient en termes
d'assurances et en termes de commissions ou de frais de services qui ne sont
pas de l'assurance proprement dite, puis les frais de services aussi Quand vous
dites: les services rendus, combien le consommateur paie-t-il pour cela,
toujours dans la même prespective de protection du consommateur?
Là on parle de concurrence entre les institutions financières. Il
faudrait que les gens soient soumis aux mêmes règles. C'est pour
cela que je vous demande: obligation légale que définira le
législateur dans un projet de loi. D'ailleurs, le législateur
nous dit qu'au nom du gouvernement le ministre devait déposer cet
automne un projet de loi sur les intermédiaires financiers. Alors les
intermédiaires de marché, qu'est-ce que vous en pensez?
Êtes-vous d'accord pour que les mêmes obligations de divulga-
tion par rapport aux caisses d'épargne et de crédit
existent aussi dans le domaine de l'assurance et pour ses agents
également?
Le Président (M. Després): M. Lavigueur.
M. Lavigueur: Merci, M. le Président. Je suis content que
M. le député insiste pour avoir ma réponse. Elle sera plus
incisive la deuxième fois que la première. Si on doit donner une
divulgation de la rémunération d'un contrat dans le cas des
courtiers et une rémunération - ce que j'appelle honoraires au
compteur - dans le cas des institutions d'épargne et de crédit,
il ne s'agit sûrement pas des mêmes choses. Je compare des pommes
avec des pommes. Je pense que vous nous demandez de déclarer au public
ce que nous recevons comme rémunération, alors que notre
rémunération est fixe et invariable et elle fait partie du prix
d'achat du service qu'il vient chercher chez nous. Si on paie une prime
d'assurance de 352 $ et que les 36 $ que je vous ai mentionnés
tantôt sont inclus à l'intérieur, il ne peut plus changer.
Alors, quelle divulgation additionnelle voulez-vous que je donne au
consommateur à part que s'il n'est pas satisfait du prix total quand il
vient chez nous, qu'il aille ailleurs et j'ai perdu mon client? Mais Desjardins
pourrait continuer, parce que c'est au compteur que l'on parle Divulgation au
compteur veut dire: Donnez-moi le taux horaire et je finirai par savoir combien
cela va coûter. Cela peut coûter drôlement cher, pas mal plus
cher que 36 $ pour une police d'assurance automobile.
Vous voulez nous faire dire que c'est la même chose, mais ce n'est
pas la même chose. On ne pourrait pas divulguer sur la même base,
à moins que vous nous donniez un taux horaire et à ce
moment-là le public devrait payer pas mal plus cher pour la même
police automobile.
M. Garon: Dans une perspective de divulgation, il s'agit que le
consommateur puisse savoir ce qu'il paye et pourquoi. Alors, s'il encaisse un
chèque, on dit: C'est 0, 40 $ par chèque, puis si tu as 100 $ de
dépôt, dans ton compte d'épargne avec opérations, tu
as un chèque gratuit par 100 $, mais il le sait. C'est ce que l'on
demande, l'obligation légale d'indiquer ces choses-là. Par
exemple, si les différentes compagnies ne paient pas le même
montant au courtier, cela devrait être divulgué, pour le
consommateur, c'est cela la protection, c'est qu'il puisse savoir ce qui se
passe: combien paie-t-il pour son assurance, de frais de commission et de frais
de courtage ou de frais de services que vous rendez? Je n'ai jamais
prétendu que vous ne rendiez pas de service, mais combien cela
coûte-t-il? De la même façon qu'il le saura par rapport aux
caisses d'épargne et il pourra changer de caisse. Si une caisse demande
un montant et une autre demande un autre montant, il dira: Je change.
Il faut que ce soient les mêmes obligations par rapport aux
différentes institutions finan- cières. C'est cela au fond que je
veux dire. Il faut que tout le monde soit traité équitablement,
en fonction de l'information au consommateur et pour que le consommateur puisse
évaluer tout cela, mais en fonction d'obligations légales
intelligentes déterminées par le législateur.
M. Lavigueur: Encore une fois, M. le Président, nous
souscrivons à toute réglementation qui traiterait tous les
intermédiaires sur le même pied. Nous croyons que lorsqu'on vient
acheter un produit chez nous, le fait d'avoir été
intermédiaire pour le public est inclus dans le prix que paie le
consommateur. Cela ne demande pas de spécification, mais quand je vais
déposer 100 $ à la banque, si on me retire 0, 35 $ par semaine
par la suite, évidemment je devrai savoir au bout de l'année
combien il me restera. Cela demande peut-être une spécification du
taux horaire. Ce sont deux choses différentes. Notre grand souci et vous
l'avez bien dit, M. le député de l'Opposition est de
protéger le consommateur, mais nous l'avons traité ce
point-là en disant que nous croyons que nous sommes déjà
aux confins de la compétition la plus féroce et que nous ne
pouvons pas aller plus loin que dire au consommateur. Voici le prix final de la
transaction pour laquelle vous avez demandé notre médiation. Lui
divulguer autre chose que la portion de ce que l'on garde à
l'Intérieur de ce service que nous donnons, ne ferait qu'imposer la
même obligation au cultivateur, lorsque justement, M. le
Président, M. le député de l'Opposition va bien comprendre
mon exemple: quand le cultivateur va sur le marché et qu'il
présente son chou au consommateur, il devrait peut-être lui dire:
C'est 0, 25 $, mais j'ai 0, 07 $ pour mon service. Ce serait un peu aberrant.
Il faudrait aller jusque-là si on est pour avoir une divulgation aussi
claire auprès du consommateur.
Le Président (M. Després): Merci, M. Lavigueur. La
parole est au député de Mille-Îles.
M. Bélisle: M. Lavigueur, vous avez très bien
compris et l'exemple des choux et des pantalons, l'exemple de tout bien qui est
offert en vente au Québec. Le député de Lévis
mélange les tomates avec les bananes, les choux avec... Je ne comprends
pas son truc. Quand il nous parle de divulgation de frais de services, c'est
une infime partie des revenus d'une institution financière, soit une
banque ou une caisse d'épargne et de crédit. Il faudrait
peut-être, si on voulait être juste et avoir un véritable
tableau... Là, je ne suis pas sûr, M. le député de
Lévis et je ne sais pas si vous êtes d'accord avec moi, M.
Lavigueur, que le Mouvement Desjardins serait prêt à
déclarer ses écarts entre les taux chargés sur
l'hypothèque et le montant auquel il emprunte les sommes d'argent qu'il
a besoin pour se permettre d'avoir une opération de prêts.
Là, on pourrait commencer à voir si Desjardins est
véritablement compétitif, que Desjardins donne les
meilleurs..., combien cela coûte au consommateur. C'est cela qu'on
devrait avoir comme divulgation. J'attends une proposition du
député de Lévis parce que... Où je suis totalement
étonné, c'est que je regarde des propositions
évangéliques, que le député de Lévis va
certainement appuyer parce que c'est la proposition principale de leur prochain
programme électoral que j'ai dans les mains, 7.3: "Le gouvernement
favorisera la propriété et la gestion coopérative des
institutions financières." Voilà! Le chat est sorti du sac
L'uniformisation tout le monde va déclarer ses taux. Il va y avoir un
Québec unique, une façon normale de fonctionner. Ce seront toutes
des coopératives. On va les favori ser. On va tous fonctionner...
L'entreprise privée, c'est trop compliqué. On ne connaît
pas cela, de toute façon, on n'en fait pas partie. C'est votre "bag",
mais j'aimerais bien savoir, effectivement, comment vous allez favoriser la
propriété et la gestion des coopératives des institutions
financières au Québec. Si vous voulez rendre coopératif le
mouvement La Laurentienne, M le député de Lévis, j'attends
vos suggestions. J'ai bien hâte de voir votre chef là-dessus.
Cela étant dit, je vais vous parler d'autres sortes de
divulgations, M. Lavigueur, et j'aimerais savoir ce que vous en pensez Comme
citoyen, comme Individu, est-ce que vous êtes membre d'une caisse
d'épargne et de crédit, M. Lavigueur?
M. Lavigueur: Je l'ai été longtemps. M le
Président.
M. Bélisle: Vous ne l'êtes plus maintenant, si je
comprends bien.
M. Lavigueur: C'est bien cela.
M. Bélisle: Ah bon, je comprends! Est-ce que c'est...
M. Lavigueur: Pour les mêmes raisons que vous pouvez
penser.
M. Bélisle: Ah bon! Est-ce que c'est depuis
récemment que vous n'êtes plus .
M. Lavigueur: Ah non, non!
M. Bélisle: Non.
M. Lavigueur: Cela fait quelque temps.
M. Bélisle: Vous avez déjà compris.
Divulgations additionnelles, salaires, fonds de retraite, avantages sociaux.
Est-ce que vous pensez que ce serait bien que le sociétaire, le
coopérant, celui qui est membre d'une caisse locale sache, connaisse les
salaires, les avantages sociaux, et les fonds de retraite que les gens
obtiennent et gagnent au niveau d'une fédération ou d'une
confédération? Est-ce que ce serait normal de savoir que dans les
services qu'il paie dans son chèque au comptoir, les 0,30 $ qui sont
chargés, le 11/2 % ou les 2 % qui sont chargés sur son
hypothèque, ce que cela lui coûte de services, qu'est-ce que la
caisse ou sa caisse accepte de déléguer à la
fédération pour payer les gens qui occupent des postes et qui
soi-disant rendent des services en retour à ces coopérants?
Est-ce que vous trouvez cela normal ou anormal de connaître cela un petit
peu, qu'il y ait une divulgation totale, complète, sans maquiller la
véritable situation financière d'une entreprise?
M. Lavigueur: M. le Président, c'est difficile de
répondre parce que c'est hors de notre mandat. Nous avons quand
même à oeuvrer dans un système très
compétitif et, pour nous, la même opération serait
très difficile à exercer. AJors, je ne voudrais pas me prononcer
sur celle que pourrait avoir, éventuellement, un mouvement comme celui
que vous décrivez.
M. Bélisle: Pas d'autre question, M. le
Président.
Le Président (M. Després): Oui si, avec le
consentement du député de Lévis, est-ce qu'on pourrait
permettre une courte question au ministre?
M. Garon: Les règles, le règlement.
Le Président (M. Després): C'est le
règlement, M. le député. Je m'excuse, M. le ministre, la
parole est au député de Lévis. (17 h 45)
M. Garon: C'est parce que je suis partisan du principe que si un
règlement est bon on le garde, s'il n'est pas bon on le change. On ne le
laponne" pas. M. Lavigueur a dit tout à l'heure, M. le Président,
une phrase que j'ai bien aimée, puisque on aime bien les phrases souvent
avec lesquelles on est d'accord, mais quand il a dit: Ou bien on
décloisonne, ou bien on ne décloisonne pas. Je ne sais pas s'il
était ici juste un peu auparavant quand il y avait le Regroupement des
cabinets de courtage, je disais justement que c'est le choix que devrait faire
le gouvernement: il décloisonne ou il ne décloisonne pas. Mais
s'il ne décloisonne pas, il ne décloisonne pour personne et s'il
décloisonne, il décloisonne pour tout le monde. Ce ne peuvent pas
être deux régimes en disant qu'un type d'institutions
financières va pouvoir faire toutes les opérations et qu'un autre
type, lui, va être cantonné dans son champ. Je pense par exemple
à une loi, la Loi sur les assurances; en 1984, quand le ministre des
Finances du temps qui était le plus cohérent disait qu'il
décloisonnait mais il la donnait aux compagnies d'assurances, à
l'article 33.1, qui dit: Toute compagnie d'assurances conçue en vertu
des lois du Québec peut, entre autres, e) offrir en vente les produits
d'une
institution financière." Alors, les compagnies d'assurances ont
ce pouvoir-là. À l'article 33.2, en plus des autres, comme
fournir le financement des primes d'assurances et des cotisations de rentes,
faire du crédit-bail, gérer des immeubles même, exercer
à l'égard des contrats de rentes qu'elle administre et des sommes
assurées qu'elle conserve pour le bénéfice d'autrui des
activités de compagnies de fidéicommis, une compagnie
d'assurances peut exercer ces activités-là, elle peut en exercer
en vertu de la Loi sur les fidéicommis, exercées à
l'égard des activités pour lesquelles une autre loi lui
reconnaît compétence des activités d'une compagnie de
fidéicommis. Elle peut exercer en vertu de la Loi sur les compagnies de
fidéicommis. En plus, à l'article 33.2, qui disait: ... Puis il
s'agissait là de pouvoirs supplémentaires, remarquez bien,
uniquement de pouvoirs supplémentaires en plus des pouvoirs
généraux. On disait à l'article 33.2: Le ministre peut
autoriser une compagnie d'assurances à exercer une activité autre
que celles prévues à l'article 33.1. Le ministre pouvait donner
en plus des pouvoirs additionnels. Là je remarque qu'on semble d'accord
pour faire en sorte qu'il n'y ait pas décloisonnement pour les caisses
d'épargne et de crédit mais on ne dit pas un mot concernant les
pouvoirs qu'on donnait aux compagnies d'assurances dans une perspective de
décloisonnement. Alors, c'est la question que j'aimerais vous poser.
Est-ce que vous aimeriez que les compagnies d'assurances reviennent
cantonnées aux secteurs où elles étaient avant la loi de
1984 ou considérez-vous que d'une façon équitable on
devrait traiter les quatre piliers de la même façon, y inclus les
caisses d'épargne et de crédit comme le législateur a
traité les compagnies d'assurances?
Le Président (M. Després): M Lavigueur.
M. Lavigueur: Merci, M. le Président Non, notre souci est
plutôt relié à voir à ce que tous les
éléments de ce casse-tête qui s'appelle le
décloisonnement entrent à leur place dans un délai quand
même raisonnable pour que, au moment où, M. le Président,
comme dit M. le député de l'Opposition, que s'il y avait un temps
défavorable à quiconque, ce serait justement parce que les
morceaux ne sont pas encore en place et que certains profitent - parce que
là on parle dans le milieu des affaires, quand cela bouge - justement du
fait que l'un doit attendre avant que l'autre rentre en action. Ce qui nous
fait peur dans le moment, je vais vous le dire, c'est que nous avons des
représentations à notre bureau qui ont été, je
pense, adressées au ministre aussi et aux institutions
financières. Les représentations du public sont les suivantes: Si
c'est vrai que je peux avoir tel ou tel service ailleurs, pourquoi ne puis-je
l'avoir chez vous? Nous expliquons que tout cela va découler des
différentes lois qui vont faire que le décloisonnement sera un
ensemble harmonieux et c'est cela qui nous inquiète. On sait que le
ministre fait son possible pour arriver à nous donner tout cela dans un
temps raisonnable mais nous croyons, comme vous le dites, comme le dit monsieur
le député de l'Opposition, qu'il pourrait y avoir un
désavantage réel si, parce qu'on a arrêté certaines
permissions et qu'on en permet d'autres, qu'entre les deux, il y ait
évidemment des inconvénients à la population.
Nous croyons quand même que le gouvernement est très
conscient de ce point de vue et nous l'avons déjà exprimé
lors de la commission parlementaire du 2 juin. Nous la redisons ici, suite
à votre question, nous sommes sastisfaits à condition que tous
les éléments du casse-tête viennent fermer le cercle que
l'on appelait autrefois une compétition cloisonnée et qu'on
appellera demain la compétition décloisonnée. La
règle du jeu est que si elle est cloisonnée, elle le sera pour
tout le monde et si elle est décloisonnée demain, elle le sera
pour tout le monde. Entre les deux, faisons attention qu'on ne prenne pas
avantage justement, comme le public nous dit en ce moment, parce que les
règles ne sont pas encore précisées si vous voulez, qu'on
ne joue pas dans le territoire des autres en prétextant que cela
viendra, mais nous n'avons pas encore les règles du jeu.
Les intervenants qui sont venus ici devant la commission parlementaire
ont essayé d'exprimer le fait qu'ils voulaient avoir ces permissions
additionnelles et nous disons, quand ils les auront, qu'ils pourront le faire.
En ce moment, ils ne les ont pas et ils ne devraient pas le faire.
M. Garon: Les compagnies d'assurances ont le pouvoir de
décloisonner à l'heure actuelle, la loi est claire. Est-ce que
vous croyez que les pouvoirs qui ont été donnés aux
compagnies d'assurances par la loi de 1984 devraient être accordés
aux caisses d'épargne et de crédit tels quols?
M. Lavigueur: Je pense, M. le Président, que le
député de l'Opposition doit savoir que mon groupe et mol vivons
tous les jours dans un vécu, dans un jour le jour, qui nous montre que
ce n'est pas parce que 1984 est passé puis que 1988 ou 1989 s'en vient
que les gens ont arrêté d'évoluer. Il se passe dans le
champ des choses, en ce moment, qui sont un peu difficiles à comprendre
mais nous comprenons que nous passons d'un ensemble de lois qu'on appelait
cloisonné comme le dit monsieur le député de l'Opposition
avant 1984. Maintenant, après 1988 ou 1989, je ne le sais pas,
aussitôt qu'on aura fini tout cela, ce sera un ensemble de lois
décloisonné.
En ce moment, des gens qui sont partis ni de l'un ni de l'autre viennent
évidemment proposer des façons, à nous les
intermédiaires, de représenter leurs services au public et nous
sommes un petit peu mêlés face aux interpréta-
tions que font les uns et les autres mais c'est normal que le
législateur prenne le temps, comme disait M le ministre, de bien
réfléchir avant de mettre toute cette législation en
branle. Nous sommes confiants qu'on y arrivera.
Le Président (M. Després): Merci, M La vigueur. M.
le député de Lévis.
M. Garon: Concernant l'article 216, vous avez indiqué,
remarquez bien qu'on est d'accord, qu'il faudrait procéder beaucoup plus
par amendements plutôt que par décret ministériel pour
changer les secteurs d'activités d'une institution financière.
Par ailleurs, seriez-vous d'accord que le ministre fasse également des
amendements aux lois existantes pour que ce soit vrai également des
pouvoirs qu'il a donnés à d'autres, notamment dans le domaine de
l'assurance? Il a donné ces pouvoirs récemment et il le sait.
M. Lavigueur: Le but de notre intervention, M. le
Président, est de dire à tout le monde ici à la commission
parlementaire que nous voulons avoir des règles du jeu identiques pour
tous les intervenants. Si ce que vous suggérez, M. le
député de l'Opposition, c'est justement que ces règles du
jeu soient les mêmes pour tout le monde, nous souscrivons comme vous
à ce souhait. C'est cela qu'il faut viser
M. Garon: Je vous remercie.
Le Président (M. Després): M. le ministre
M. Fortier: Dans votre mémoire, M. Lavigueur, à la
page 7, on dit: Dans un autre ordre d'idées, l'association croit
également que la commission devrait se pencher sur la portée
exacte de l'article 228. Le Regroupement des bureaux de courtage avait
évoqué cet article On n'a pas eu l'occasion d'en discuter. Je
pense qu'il a une certaine importance dans la mesure où vous voudriez,
ou enfin ceux qui ne sont pas directement partie à une transaction.. Je
pense bien que c'est votre appréhension. Vous vous posez la question:
Est-ce qu'on pourrait intervenir? Avec votre permission, M. le
Président, j'aimerais demander à M. Bouchard d'expliciter
l'analyse qui a été faite de l'article et des
considérations qu'on voudrait évoquer avec vous.
Le Président (M. Després): M Bouchard
M. Bouchard (Jean-Marie): M le Président, c'est que le
projet de loi prévoit que la caisse d'épargne et de crédit
est une corporation par objets qui est nettement prévue à
l'article 211 qui dit qu'elle a la pleine jouissance des droits civils dans la
réalisation de ses objets, par opposition, par exemple, à une
corporation axée par la partie 1a de la Loi sur les compagnies qui n'a
plus d'objet et qui a la capacité juridique d'une personne physique,
comme vous le savez.
Ayant la capacité d'une corporation par objet s'oppose
évidemment la question de l'ultra vires. Vous connaissez la
jurisprudence à savoir que, jusqu'à ce que les corporations
soient créées par lettres patentes, on se posait la question
d'invoquer la nullité des actes par une corporation lorsque cela pouvait
excéder ses objets ou pas. Ce que l'article 228 dit, le mot "tiers"
comprend évidemment toute personne qui n'est pas partie à un acte
dune caisse. Une personne qui est partie à un acte d'une caisse ou d'un
jugement liant la caisse où une personne n'est pas un tiers au sens de
l'article 228 pourrait invoquer l'ultra vires des pouvoirs d'une caisse. Par
ailleurs, les autres personnes qui, comme telles, n'auraient pas
d'intérêt direct avec la caisse ne pourraient pas attaquer les
actes d'une caisse pour le motif d'ultra vires, mais pourraient le faire pour
toute autre raison d'incapacité ou de nullité, par exemple,
observance d'une procédure, observance des règles du Code civil,
de telle sorte que c'est pour empêcher que des individus puissent
invoquer constamment la règle de l'ultra vires en dehors des cas qui
sont nécessaires pour la protection de leurs droits dans leurs relations
contractuelles avec la caisse. Et c'est un article qui n'est pas nouveau. C'est
un article qui a été repris de l'article 32 de la Loi sur les
coopératives et qui est au même effet.
D'un autre côté, l'article 228 est complété
par l'article 223 et c'est très important. L'article 223 dit très
bien que, non seulement un inspecteur général, mais toute
personne qui a un intérêt suffisant, peut demander au tribunal
l'annulation d'une transaction susceptible de léser gravement les
intérêts des membres de la caisse et qui a été
conclue avec une personne intéressée ou avec une personne
liée à un dirigeant de la caisse, contrairement aux dispositions
de la présente loi. Alors l'intérêt suffisant qui est
prévu à l'article 223 est celui qui est prévu à
l'article 55 du Code de procédure, de telle sorte qu'il est clair qu'il
s'agit d'un intérêt direct, personnel, immédiat, tel que
dégagé par la jurisprudence, et on n'a pas à
prévoir ici dans la loi ce qui est considéré comme
étant un intérêt suffisant Donc, explicitement, l'article
228 comprend toute personne. Cela comprend toute personne, y compris le
ministre, y compris l'Inspecteur général, y compris, en somme,
tout, sauf les personnes qui sont directement liées à l'acte et
qui, elles, pourraient invoquer la cause ultra vires lorsqu'elles sont en
relations contractuelles avec la caisse.
Le Président (M. Després): Merci, M Bouchard. M.
Lavigueur.
M. Lavigueur: M. le Président, j'aurais une question
à la suite de l'explication qu'on vient d'avoir et qui est très
appréciée, en passant. M. le Président, est-ce qu'il se
pourrait qu'une fédération d'associations de consommateurs telle
que la Fédération nationale des associations de
consommateurs du Québec soit incluse dans la définition
qu'on vient de nous donner?
Le Président (M. Després): M. Bouchard
M. Bouchard: Pour répondre à cette question, il
faut vérifier les pouvoirs que possède la
fédération. Il s'agit de savoir si une association a le droit de
parler au nom de ses membres. À ce moment-là, il s'agit de savoir
si l'arrêt Finley s'applique ou pas, et ce qui est prévu ici, ce
n'est pas l'intérêt public comme tel, c'est l'intérêt
des individus. Alors il appartiendrait aux tribunaux de déterminer si
elles ont l'intérêt de le faire ou pas.
Le Président (M. Després): Cela va? M. La
vigueur: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Després): M. le ministre, est-ce
que vous avez d'autres questions?
M. Fortier: Je crois qu'on a fait le tour du sujet. Je ne sais
pas si le député de Lévis veut conclure.
Le Président (M. Després): M. le
député de Lévis, est-ce que vous avez d'autres questions?
On va vous inviter à conclure.
M. Garon: M. le Président, je voudrais remercier
l'Association des courtiers d'avoir présenté son mémoire
et fait valoir son point de vue, parce que le but de la commission
parlementaire est de bien cerner la vision des choses de ceux qui viennent
témoigner en commission. Mon but à cette commission a
été d'essayer d'explorer la pensée, de donner la chance
à ceux qui étaient devant nous de faire davantage connaître
leur pensée concernant toute cette question de la Loi sur les caisses
d'épargne et de crédit et aussi sur le décloisonnement des
institutions financières, dans lequel le gouvernement s'est
engagé par la déclaration du mois de mars 1987, laquelle allait
dans le même sens que ce que voulait faire le ministre des Finances du
précédent gouvernement, peut-être pas dans toutes les
modalités, mais en termes d'objectif de décloisonnement. Je vous
remercie d'être venus et d'avoir fait valoir les représentations
de votre groupe.
Le Président (M. Després): M. le ministre.
M. Fortier: On a toujours des relations suivies. On va continuer
à en avoir. Il est important de faire part de vos remarques
publiquement, Une commission parlementaire est un lieu privilégié
pour le permettre à tous ceux qui nous écoutent et à tous
ceux qui viennent en commission, et par le biais des journaux, le public est
quelquefois informé de ce qui se passe Ici. C'est enregistré au
Journal des débats.
Je crois qu'il est important que vous témoigniez, que nous en
prenions connaissance et que nous puissions vous poser des questions pour
préciser votre mémoire. Je vous remercie d'être venus de
Montréal et de visiter Québec, comme nous l'apprécions
tous, nous Montréalais. Merci.
Le Président (M. Després): Au nom des membres de
cette commission, j'aimerais remercier l'Association des courtiers d'assurances
de la province de Québec d'avoir participé à cette
commission. M. Lavigueur.
M. Lavigueur: J'ai un mot de la fin, M. le Président, si
vous me le permettez.
Le Président (M. Després): Oui, avec plaisir.
M. Lavigueur: Merci beaucoup. Nous sommes 5700 membres de 2300 ou
2400 cabinets qui sont essentiellement partie des 97,4 % que forment les
petites entreprises de moins de 20 employés du Québec qui,
semble-t-il, selon les statistiques que nous avons lues dernièrement
dans les journaux du Québec, ont donné quelque 250 000 emplois et
plus aux Québécois. Ces entreprises ont besoin de regroupements
comme le nôtre pour s'exprimer. Il nous a fait plaisir de vous dire que
nous sommes très confiants que l'avenir des Québécois
passera par ces petites entreprises que nous représentons avec beaucoup
de fierté. Merci de nous avoir écoutés.
Le Président (M. Després): Merci, M. Lavigueur.
Nous ajournons nos travaux à demain, 10 heures.
(Fin de la séance à 18 h 01)