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Version finale

33e législature, 2e session
(8 mars 1988 au 9 août 1989)

Le mercredi 1 mars 1989 - Vol. 30 N° 41

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Examen du rapport annuel du Vérificateur général pour l'année financière terminée le 31 mars 1988


Journal des débats

 

(Dix heures treize minutes)

Le Président (M. Lemieux): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission du budget et de l'administration a reçu le mandat d'entendre ie

Vérificateur général dans le cadre de l'examen de son rapport annuel pour l'année financière se terminant le 31 mars 1988. M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

Le Secrétaire: Non, M. le Président, ii n'y a pas de remplacement pour la séance.

Organisation des travaux

Le Président (M. Lemieux): Permettez-moi de vous rappeler les règles de procédure, pour l'exécution de ce mandat, telles qu'établies le 18 août 1987. La séance débutera par une période de déclarations d'ouverture répartie selon l'ordre suivant: nous entendrons, dans un premier temps, M. le Vérificateur général, pour une durée de quinze minutes; nous entendrons le porte-parole de l'Opposition, pour une durée de quinze minutes, et le porte-parole des députés ministériels, pour une durée de quinze minutes également.

La période des déclarations d'ouverture ne sera pas suivie de réplique ou de commentaire de la part des membres ou du Vérificateur générai. Une période de discussion avec le Vérificateur général suivra celle des déclarations d'ouverture et se poursuivra jusqu'à la fin de la séance, à 18 heures. Les groupes parlementaires disposeront d'un temps de parole égal, en respectant l'alternance dans les interventions, et le temps de parole inutilisé par un groupe parlementaire sera disponible pour l'autre groupe et ce, en vertu d'une décision rendue par la commission de l'Assemblée nationale, le 3 décembre 1986.

La période de discussion avec le Vérificateur général débutera par l'intervention du porte-parole de l'Opposition. Les membres de la commission disposeront d'un temps de parole de vingt minutes par intervention, ie temps de réponse du Vérificateur général sera imputé au temps de parole du député qui pose la question.

Maintenant que je vous ai exprimé la façon dont nous devons procéder, je vais donner immédiatement la parole à M. le Vérificateur général du Québec pour sa déclaration d'ouverture.

Remarques préliminaires M. Rhéal Châtelain

M. Châtelain (Rhéal): Merci. M. le Président. Pour une troisième année consécutive, la commission que vous présidez entend le Vérifica- teur générai sur son rapport annuel à l'Assemblée nationale. Comme vous l'avez signalé, cette année, i! s'agit du rapport annuel déposé à l'Assemblée nationale à la fin de 1988, et qui porte sur l'année financière terminée !e 31 mars 1988.

Le Vérificateur général considère qu'il est de son devoir de répondre à votre invitation, et c'est avec empressement qu'il collabore à vos travaux. Je vous remercie bien sincèrement de l'intérêt que vous portez à l'accomplissement de mon mandat.

Je ferai une revue, tout à l'heure, de l'ensemble du contenu de mon dernier rapport annuel. Je voudrais tout d'abord traiter de deux questions que l'on retrouve dans la première partie consacrée aux remarques générales. J'ai relevé le fait que des modifications ont été apportées aux conventions comptables du gouvernement afin d'améliorer Sa présentation de !'information financière. La récente réforme des conventions comptables, commencée en 1986, s'est poursuivie en 1987 et en 1988. Les dernières modifications portent sur les frais d'émission des emprunts de même que les primes et les escomptes sur ceux-ci ainsi que sur l'inscription de la dépense et du passif se rapportant aux régimes de retraite. L'une de ces modifications a vu le gouvernement comptabiiiser par anticipation en 1988 un amortissement additionnel du passif non inscrit au titre des régimes de retraite.

J'indique toutefois dans mon rapport et mes observations sur les états financiers du gouvernement de l'année financière qui s'est terminée le 31 mars 1988, que la partie non amortie du passif des régimes de retraite devrait être comptabilisée. J'ai donc formulé à nouveau une restriction et des commentaires sur l'inscription incomplète des obligations du gouvernement envers ses différents régimes. Certaines autres pratiques comptables ont été améliorées au cours des dernières années à l'endroit de l'inscription des contributions pour le service courant de certains régimes et de celle des obligations relatives aux services antérieurs.

L'autre point des remarques générales que j'aimerais souligner, M. le Président, est celui de la coopération des responsables de la gestion. Aussi bien dans les ministères que dans les organismes et les entreprises du gouvernement, cette coopération est essentielle à la réalisation efficace du mandat qui est confié au Vérificateur général. Il est de mon devoir d'informer l'Assemblée nationale des cas où je n'ai pu obtenir ie plein concours des dirigeants et autres responsables de la gestion. J'attire l'attention de la commission sur les difficultés que j'ai connues, à cet égard, lors de l'accomplissement de mon mandat, auprès de la Commission de la santé et de la sécurité du travail, puisque je n'ai pu

obtenir la réaction de sa haute direction à nos conclusions de vérification. C'est !à, d'ailleurs, une anomalie que j'ai signalée dans mon rapport.

À la fin de la présentation détaillée des résultats de la vérification effectuée auprès de la CSST, aux pages 186 et 187 de mon rapport, je reviens sur l'importance d'obtenir le concours des dirigeants et des gestionnaires. D'après l'expérience vécue auprès des ministères, des organismes et des entreprises du gouvernement au cours de nos vérifications, l'expression du point de vue des dirigeants et des gestionnaires contribue régulièrement de façon fort utile à la validation de nos travaux.

Lorsque nous sollicitons les commentaires des entités vérifiées, nous cherchons avant tout à renseigner adéquatement l'Assemblée nationale et les autres personnes à qui la loi nous 'ait obligation de faire rapport. Dans le cas de la CSST, nous devions ainsi faire aussi rapport au Conseil des ministres qui nous avait demandé cette vérification par décret. Nous tenons à ce que nos conclusions de vérification soient éprouvées et appuyées par les commentaires d'interlocuteurs valables. De plus, ces commentaires des gestionnaires et des dirigeants permettent l'exercice d'un suivi sur la mise en place éventuelle des améliorations qui s'imposent. Dans le cas de la CSST, les démarches nombreuses que nous avons entreprises pour obtenir le concours additionnel des dirigeants à la validation de nos travaux sont demeurées sans réponse. Par son attitude purement passive, la direction a rendu plus difficile le travail du Vérificateur général et n'a pas permis cette dernière validation. Elle a plutôt communiqué sa réaction aux représentants des médias d'information, une fois que le rapport du Vérificateur général a été déposé à l'Assemblée nationale. Il s'agit là de la part de la CSST d'une façon pour le moins discutable de concevoir l'imputabilité envers l'Assemblée nationale.

Je me garderais bien de vouloir poursuivre un débat sur la place publique. Au contraire, cette question doit être replacée sur la bonne voie d'une imputabilité externe, c'est-à-dire devant l'Assemblée nationale. J'aimerais donc vous remettre, M. le Président, pour dépôt ici même devant cette commission, si vous le jugez à propos bien entendu, une réponse écrite aux commentaires que la CSST a fait connaître par la voie des médias le 14 janvier 1989. Nous en avons des exemplaires, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): On a autorisé le dépôt, M. le Vérificateur général.

M. Châtelain: M. le Président, après ces considérations générales, je voudrais présenter un aperçu, évidemment très bref, du rapport de l'année 1988. La première partie du rapport comporte des remarques générales sur le contrôle parlementaire sur les fonds publics, sur les vérifications intégrées et sur la présentation de l'information financière du gouvernement.

Sous le titre du contrôle parlementaire sur les fonds publics, le Vérificateur général discute, encore cette année, de l'obligation de rendre compte. La gestion qui se veut responsable doit s'acquitter de son devoir d'imputabilité, depuis l'attribution des responsabilités et i'octroi des fonds jusqu'à la reddition de comptes, inclusivement.

Le rôle de la vérification est déterminant pour la crédibilité des efforts de communication des responsables de la gestion. C'est ainsi qu'au cours des dernières années, les professionnels de la vérification se sont interrogés sur les moyens de satisfaire aux attentes légitimes du public à l'égard de la vérification. La commission Mac-Donald, formée par l'institut canadien des comptables agréés, a recommandé des déclarations plus complètes de la direction dans les états financiers, et l'élargissement des responsabilités de la vérification, afin de renseigner adéquatement le public.

Nous savons tous que le public attache de plus en plus d'importance à la reddition de comptes des responsables de la gestion des fonds privés. Dans ce contexte, nous ne voyons pas, M. le Président, comment l'administration publique pourrait échapper à la politique de grand livre ouvert qui a de plus en plus cours dans l'entreprise privée. C'est dans la personne du haut fonctionnaire que s'identifie le plus clairement ia gestion. Il serait donc normal, dans notre régime démocratique, de voir les sous-ministres et les dirigeants d'organismes répondre de la qualité de leurs gestes administratifs devant l'Assemblée nationale. C'est cette dernière qui, en définitive, leur confie un pouvoir d'exécution de programmes de l'État, selon des critères de gestion optimale des ressources.

Au cours des séances d'août 1987 et de février 1988, la commission du budget et de l'administration a entendu le Vérificateur général sur ses rapports annuels. Celui-ci se réjouit de constater qu'elle scrute à nouveau les résultats de sa vérification. Cependant, il est bon de rappeler que le rapport annuel du Vérificateur général ne prendra tout son sens et n'atteindra vraiment son utilité que le jour où les hauts fonctionnaires seront appelés à rendre compte de leur gestion à l'externe. Le témoignage des hauts fonctionnaires en commission parlementaire, devenu une pratique établie et même courante dans d'autres Législatures, favoriserait l'excellence dans la gestion publique.

Une partie de l'accomplissement de la mission gouvernementale est confiée à certains organismes et à des entreprises du gouvernement, dont Se budget de fonctionnement n'est pas assujetti au vote complet de l'Assemblée nationale. Il importe, dans ces cas, que les liens d'imputabilité soient bien établis pour que le bailleur de fonds, l'Assemblée nationale en définitive, soit informé adéquatement. Nous

revenons donc encore cette année, dans la deuxième partie du rapport, sur la nécessité d'une loi-cadre pour les organismes et les entreprises du gouvernement.

Au Canada, les vérificateurs législatifs des deux paliers supérieurs de juridiction gouvernementale se sont montrés préoccupés, depuis quelques années, de leur rôle dans l'évaluation du risque de fraude. De plus, par le biais des commissions MacOonald et Treadway, la profession comptable, au Canada et aux États-Unis, s'est penchée non seulement sur la validité des contrôles internes et la sécurité des biens physiques, mais surtout sur l'intégrité de l'information financière. C'est pourquoi le Vérificateur général aménage ses programmes de vérification de façon à refléter une préoccupation accrue envers l'évaluation des risques de fraude.

Toujours sous le même titre du contrôle parlementaire, le Vérificateur général décrit ensuite en quoi consiste l'exercice de la vérification législative. Elle doit se prononcer annuellement sur la fidélité des états financiers et elle étend aussi sa portée jusqu'à rejoindre, de façon cyclique, la qualité de la gestion. Cette année encore, c'est dans le livre des comptes publics préparé par le ministère des Finances qu'on trouve l'opinion du Vérificateur général sur la fidélité de la présentation des états financiers et ses observations sur ces mêmes états. Le Vérificateur général complète son exposé sur le contrôle parlementaire en insistant sur la coopération essentielle des responsables de la gestion pour réaliser efficacement son mandat. J'ai d'ailleurs traité plus tôt ce point dans mon exposé.

Le deuxième thème des remarques générales est celui des missions de vérification intégrée. On y indique que la vérification intégrée a été développée en réponse aux besoins particuliers du secteur public. On y définit les objectifs et la nature de ces vérifications, qui sont effectuées en vertu du mandat confié par la Loi sur le Vérificateur général.

J'attire ici votre attention, M. le Président, sur un changement que nous avons apporté à la présentation de notre rapport, cette année. Par les années passées, le Vérificateur général exposait, dans cette partie, un sommaire des résultats des missions de vérification intégrée. Cette pratique a été discontinuée, cette année, pour éviter de sacrifier, par souci de synthèse, les nuances d'un rapport détaillé. Nous poursuivons cependant, pour l'instant, notre réflexion sur l'utilité de cette approche.

Les remarques générales se terminent par des commentaires sur la présentation de l'information financière du gouvernement. J'ai mentionné plus tôt, dans cet exposé, l'essentiel du contenu de cette section, notamment en ce qui a trait aux conventions comptables. Le Vérificateur général y aborde aussi la question des dépenses additionnelles de 849 000 000 $ imputées par le gouvernement à Cannée financière 1987-1988, à titre d'inscription anticipée de dépenses. La conformité de cette opération aux lois et aux règlements est examinée et commentée dans cette partie de notre rapport; son traitement comptable, par ailleurs, est discuté dans nos observations sur les états financiers du gouvernement dans les comptes publics.

La notion de l'entité comptable du gouvernement est par la suite soulevée. Le gouvernement devrait poursuivre ses efforts afin de fournir un compte rendu complet de la nature et de l'étendue des activités et des ressources financières dont il est responsable, y compris celles qui ont trait à ses organismes et à ses entreprises et ce, par le biais de ses états financiers. Le Vérificateur général fait à nouveau une observation sur le délai de présentation des états financiers du gouvernement. Ces états devraient être dressés dans un meilleur délai après la fin de l'année financière, c'est-à-dire en temps encore utile, et publiés tôt après la reprise des travaux de la session d'automne de l'Assemblée nationale. Nous traitons enfin, dans cette sous-section, des travaux de recherche de l'Institut canadien des comptables agréés, pertinents au secteur public, et de l'information financière publiée par le gouvernement en supplément aux comptes publics annuels.

La deuxième partie du rapport de 1988 débute à la page 29. Elle présente les résultats de la vérification financière et de la conformité du gouvernement et de ses ministères, des fonds spéciaux et des fonds renouvelables, des organismes et des entreprises du gouvernement. Cette partie expose également les résultats de cinq missions de vérification intégrée, de deux études d'envergure gouvernementale et de la vérification de l'allocation des subventions au ministère de la Santé et des Services sociaux dont il a été fait mention dans la première partie.

La communication des résultats comporte les constatations et recommandations du Vérificateur général qui sont suivies, sauf exception, là où nous les avons obtenus, des commentaires de l'entité vérifiée. Je reviens encore cette année sur la nécessité d'une loi-cadre sur les organismes et les entreprises du gouvernement. Le rapport aborde d'abord cette question de façon sommaire, comme je l'ai mentionné tantôt, à la page 14 des remarques générales, et plus en détail aux pages 78 et suivantes. C'est là un sujet que vous connaissez bien puisque nous en avons discuté au cours des séances du 18 août 1987 et du 25 février 1988. Il faut en arriver à ce que le compte rendu des responsables de la gestion de ces entités gouvernementales soit de nature à rassurer l'Assemblée nationale sur le fait que les ressources confiées par le Parlement pour la réalisation des objectifs qu'il a approuvés sont gérées avec l'importance qu'il convient à l'économie, l'efficience et l'efficacité.

Dans un souci de saine gestion des fonds publics, il importe que le gouvernement exerce auprès de ses organismes et de ses entreprises

un rôle de coordination, d'orientation et de contrôle. Il doit pouvoir leur imposer des contraintes et des mesures de contrôle susceptibles de mieux encadrer leur autonomie. On doit tenir compte que le tout premier objectif de ces entités est d'ordre public et que leur financement est généralement assuré à même les fonds publics. Une loi-cadre confirmerait le devoir de surveillance de l'Assemblée nationale sur ces entités du secteur public et elle renforcerait le contrôle que le gouvernement exerce sur leur administration. Elle le ferait tout en préservant la souplesse et l'autonomie d'action qui leur sont nécessaires.

Le manque de lignes directrices sur le compte rendu et sur la vérification des organismes et entreprises du gouvernement peut compromettre la qualité et la quantité de l'information utile au bailleur de fonds et entacher d'insuffisance l'exercice de l'imputabilité.

Le Vérificateur général revient donc sur cette question depuis plusieurs années. C'est depuis 1982 qu'il suggère l'adoption d'une loi-cadre sur la constitution, la direction et le contrôle des organismes et des entreprises du gouvernement. Cette année, il dresse un état de la situation en ce qui a trait à ces trois aspects de leur imputabilité. Il conclut avec le régime d'imputabilité souhaité en fonction des mêmes critères exposés dans l'état de la situation.

La troisième et dernière partie du rapport, qui commence à la page 259, rend compte de la gestion de l'organisation du Vérificateur général. Cette partie fournit des renseignements généraux sur l'organisation, ses devoirs et ses responsabilités, la structure organisationnelle et la planification des activités de vérification. En plus, on y décrit l'évolution de la pratique professionnelle et la participation et l'appui du Vérificateur général aux travaux et aux programmes de recherche de la Conférence canadienne des vérificateurs législatifs, de la Fondation canadienne pour la vérification intégrée, de l'Ordre des comptables agréés du Québec, de l'Institut canadien des comptables agréés et, enfin, de l'Association des comptables généraux licenciés du Canada.

Le Vérificateur général rend également compte, dans cette partie de son rapport, de l'implantation de la bureautique au sein de son organisation. Le rapport d'activités se termine avec la présentation d'informations sur la gestion des ressources humaines, matérielles et financières.

Conformément à la Loi sur le Vérificateur général, celui-ci soumet ses prévisions budgétaires annuelles au Bureau de l'Assemblée nationale pour qu'elles soient ensuite incluses au budget des dépenses, déposé devant l'Assemblée nationale elle-même. Le rapport comporte deux annexes où se retrouvent le texte de la Loi sur le Vérificateur général et les objectifs généraux de son organisation.

Je termine en faisant le voeu, une fois de plus, que la haute direction des ministères, organismes et entreprises du gouvernement puisse être invitée à venir témoigner de sa gestion devant les parlementaires. Il serait bon que les dirigeants fassent part de leur point de vue sur les constatations du Vérificateur général et des suites qu'Us entendent leur donner. (10 h 30)

Je vous remercie, M. le Président, de m'entendre devant la commission que vous présidez. C'est avec plaisir que je répondrai à vos questions et que je fournirai les renseignements que vous jugerez utiles. Le cas échéant, avec votre permission, bien entendu, j'aurai recours à mes principaux collaborateurs qui se sont joints à moi, ici. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le Vérificateur général. M. le porte-parole de l'Opposition, M. le député de Bertrand.

M. Jean-Guy Parent

M. Parent (Bertrand): Merci, M. le Président. Il me fait plaisir que nous puissions, ce matin, rencontrer le Vérificateur général. Deux de mes collègues, tout au moins, se joindront à moi, dans les prochaines minutes: le député de Lévis, bien sûr, et la députée de Chicoutimi qui a des questions spécifiques concernant les services de santé.

De façon générale, cette rencontre, pour la troisième année consécutive, M. le Président, avec le Vérificateur général, en est une fort importante. On conviendra et on se souviendra que l'année dernière, l'exercice n'avait pas été futile, puisqu'il avait permis d'éclaircir certains points, dont, particulièrement, tout l'impact au chapitre des nouvelles règles comptables. Dans mon esprit, si on veut que ça puisse déboucher sur autre chose qu'un excellent dialogue qui se fait une fois l'an, une rencontre cordiale et amicale, je pense qu'il va falloir que certaines règles du jeu soient changées. Personnellement et au nom de l'Opposition, je peux vous dire, M. le Président, que je trouve un peu aberrante la situation dans laquelle on se retrouve, c'est-à-dire dans un dialogue de sourds quant à différentes recommandations qui ont été faites - et j'y reviendrai tantôt - qui rejoignent aussi les propos du Vérificateur général, soit sur toute cette notion de l'imputabilité.

Le Vérificateur général, d'une part, parle à des gens, fait rapport à l'Assemblée nationale; nous parlons au Vérificateur générai, mais entre les deux, le pont n'est pas établi. Même si ça fait trois ans qu'on le clame tout haut, on se retrouve dans une situation - vous me passerez l'expression - de cul-de-sac, et je trouve ça extrêmement déplorable pour tous les membres de la commission. Vous savez, en tant qu'élus, en tant que députés à l'Assemblée nationale, c'est beau de nous mettre sur tableau et de publier le rôle que doivent jouer les élus, c'est beau de

laisser entendre à la population que nous jouons un rôle actif, mais s'il y a un endroit où nous pouvons, dans le simple rôle de député en commission parlementaire, et plus d'une fois à l'exercice que nous faisons ce matin, c'est-à-dire dans un exercice qui pourra être répété tout au cours de l'année, exercer vraiment notre rôle, c'est en travaillant en étroite collaboration avec le Vérificateur général, mais avec les outils nécessaires, et je le répète, ces outils, nous ne les avons pas.

Alors, pour la troisième année consécutive, les membres de cette commission du budget et de l'administration ont la chance d'examiner les explications sur votre rapport annuel, bien que l'exercice soit relativement nouveau et qu'on puisse y voir un certain progrès, si je compare à celui d'il y a deux ans et de l'année dernière. Je doute cependant, M. le Président, de plus en plus, que cette rencontre puisse déboucher sur des solutions aux problèmes soulevés dans le fameux rapport du Vérificateur général.

Rappelons d'abord que le Vérificateur général fait son rapport à l'Assemblée nationale, et ce n'est pas le fait du hasard. Ce rapport est déposé à l'Assemblée nationale parce que ses membres - c'est-à-dire nous, qui sommes là pour représenter les gens - ont la responsabilité du contrôle des dépenses de l'État, parce que le contrôle des dépenses appartient aux députés par qui le gouvernement doit faire vérifier ses engagements financiers, et doit faire accepter son budget.

Le système parlementaire britannique, M. le Président, a favorisé l'érosion des pouvoirs des parlementaires. Le fait que les membres du gouvernement soient choisis parmi les groupes parlementaires majoritaires a fait en sorte que les députés ont abandonné progressivement des pouvoirs aux mains des membres du gouvernement. Ces derniers ont la responsabilité de dicter des politiques à suivre, de déterminer, avec l'approbation du gouvernement, les enveloppes budgétaires. Par contre, la gestion quotidienne des politiques gouvernementales est confiée à l'administration publique, et compte tenu de l'importance de l'activité gouvernementale et du nombre impressionnant des politiques à administrer, on se doute bien que les ministres ne peuvent tout contrôler. Par conséquent, les fonctionnaires ont vu leurs pouvoirs s'accroître de façon sensible, sans qu'un système d'imputabilité n'ait été mis en place. Et cela, on le sent. Je peux vous dire que depuis trois ans, en étant à l'intérieur de la machine, on sent cela de plus en plus. Je pense que le fait de le décrier, le fait de le soulever, le fait de le porter à l'attention par la voie des commissions parlementaires, donc par la voie publique, à mon grand désarroi, n'a absolument donné aucun résultat jusqu'à présent. J'espère que l'exercice d'aujourd'hui ne sera pas un exercice futile et qu'il pourra déboucher sur quelque chose, sinon il y aurait peut-être lieu que tous et chacun d'entre nous autour de la table, remettions notre rôle en question sur l'exercice qu'on tente de faire, un exercice qui, je pense, est sérieux.

Le Vérificateur général a reçu de son côté, M. le Président, le mandat du Parlement de vérifier la gestion des fonds publics et d'en faire rapport à ce même Parlement. Jusqu'à il y a trois ans, le processus de vérification s'arrêtait à l'étape du dépôt, à l'Assemblée nationale, du rapport du Vérificateur général. Cependant, depuis trois ans, on a ajouté l'étape qui est l'audition du Vérificateur général, ce qu'on fait ce matin. On ne petit toutefois pas s'arrêter là et espérer voir les problèmes se régler du simple fait qu'il y a un rapport de déposé et que les parlementaires entendent l'auteur de ce rapport. Comme je l'ai mentionné tantôt, cette rencontre et cet exercice même du dépôt que nous faisons ensemble en décembre et l'exercice que nous faisons, ce matin, le 1er mars est futile si on ne peut pas aller plus loin. J'en prends pour preuve qu'on retrouve, année après année, les mêmes remarques du Vérificateur général. Quant à moi, je peux comprendre que le Vérificateur général ait à soulever année après année des remarques parce qu'il n'y a pas eu de corrections d'apportées mais année après année, on se rend compte que finalement, cela est devenu, dans mon livre à moi - vous me passerez l'expression - une farce monumentale. C'est rendu à un point tel que les tours d'ivoire dans lesquelles se sont enfermés souvent des fonctionnaires de quelque boîte que ce soit, mais des boîtes gouvernementales, font en sorte, que le Vérificateur général dise quoi que ce soit, qu'on s'en fout et qu'on s'en fout éperdument. Je ne pointe personne du doigt mais je pense que les députés ici en ont assez. Je me dis qu'on va arrêter le mandat du Vérificateur général, à la limite, parce qu'il met temps et énergie pour pointer des anomalies du doigt et qu'il n'y a pas de suite. Ce n'est pas normal qu'après trois ou quatre ans, on ait à rapporter la même chose, la même lacune et qu'on la répète même textuellement. Vous savez de quoi je veux parler, M. le Vérificateur général. On les pointe du doigt et rien n'est changé. On a vu cette année un organisme, entre autres, comme la CSST, ne pas collaborer du tout. Que ce soit la CSST, que ce soit n'importe quel organisme, si on n'a pas pleine et entière collaboration, je vous dis: Vous, vous avez à remettre votre rôle en question et nous, nous avons notre rôle à remettre en question.

L'audition du Vérificateur général ne changera rien à cela sans un véritable processus d'imputabilité. Premièrement, je ne comprends pas que le Vérificateur général soit d'accord avec cela et le défende et, deuxièmement, que les députés concernés, particulièrement, par la voie de la commission, soient aussi d'accord et que, finalement, nos voix ne portent pas afin qu'il y ait des changements. Si un tel processus d'imputabilité n'est pas mis en place, à mon avis, M. le Président, c'est la crédibilité même du Vé-

rificateur général et celle des parlementaires qui sont mises en cause. À ce stade, notons que l'absence de réponse, pour prendre un exemple, de la part de la CSST aux remarques du Vérificateur général contenues dans son dernier rapport annuel, est une illustration du peu de sérieux qu'on accorde à ses remarques. À quoi bon s'expliquer puisque, de toute façon, il n'y aura pas de suite. C'est devenu, dans mon livre à moi, le mot de passe dans tous les organismes de la fonction publique: le Vérificateur général, qu'il vérifie ce qu'il veut bien vérifier, on lui donnera les réponses qu'on veut bien lui donner; de toute façon, il n'y aura pas de suite. C'est alarmant parce qu'on se dit: Ce travail-là, s'il a été bien fait - et j'ai tout lieu de croire qu'il a été bien fait - et qu'il n'y a pas de suite, vous-même, en tant que Vérificateur général, avez sûrement à remettre en doute ce travail sérieux même avec les améliorations apportées au cours des deux dernières années, du moins celles sont j'ai pu prendre connaissance.

On notera que les explications fournies par les organismes vérifiés sont présentées dans le rapport annuel du Vérificateur général, pour le bénéfice des parlementaires. Cette présentation permet aux députés de voir les deux côtés de la médaille. Cette année, entre autres, à la CSST, on note non seulement un manque d'intérêt de l'organisme pour les remarques du Vérificateur général, mais un mépris pour le Parlement. Je pense que c'est en ce sens que nous devons le prendre. Le principe de l'imputabilité paraît donc essentiel, M. le Président. C'est pourquoi mon collègue, le député de Lévis, qui se joindra à nous tantôt, a écrit au président de la commission du budget et de l'administration, lui demandant de convoquer des séances de travail afin de discuter de tout cet aspect en séances de travail. À mon avis, il n'a jamais obtenu de réponse à cette demande. On pourra tantôt débattre de cet aspect, mais laissez-moi revenir à l'essentiel, à la toile de fond de tout ce travail fait par le Vérificateur général.

Il a aussi été demandé que certains représentants de l'administration soient présents aujourd'hui. Cela nous aurait permis de mieux comprendre les problèmes. Pour nous, iI ne s'agit pas d'une commission d'enquête, il ne s'agit pas d'essayer de mettre qui que ce soit en boîte, c'est clair. Il s'agit pour nous, en tant que parlementaires, d'être capables d'avoir les explications concernant les anomalies et, surtout, pourquoi on n'y a pas donné suite. Cela me semble tout à fait logique. En tant que parlementaires, il ne s'agit pas de se prendre pour d'autres, il s'agit de s'acquitter de notre tâche. Quand il sortira des éléments de scandale, entre guillemets, c'est-à-dire qu'on arrivera à des sommes d'argent importantes mal utilisées, à des pertes de contrôle au niveau Informatique, ou quoi que ce soit, des choses qui ont été pointées du doigt depuis trois ans, et tout d'un coup, ça sortira dans les médias comme un scandale, on dira: Comment se fait-il qu'il y en ait qui n'ont pas fait leur job? Pourtant, on essaie de faire notre job, mais si on ne nous donne pas le coffre à outils nécessaire, tout ce qui est fait actuellement nous fera paraître ridicules tantôt. Je le dénonce et j'aimerais bien que d'autres collègues de cette commission puissent en faire autant, s'ils croient profondément à cet aspect. Sinon, M. le Président, on aura beau rencontrer le Vérificateur général deux, trois, quatre, cinq fois par année, ce sera charmant, on aura une excellente conversation, mais il n'y aura pas de changement.

Malheureusement, il ne semble pas y avoir de volonté politique de permettre aux députés de jouer pleinement leur rôle, et je le déplore. Cette absence de volonté politique fera en sorte, j'en ai bien peur, que l'exercice d'aujourd'hui risque d'être futile, voire inutile. Qu'on ne se surprenne pas si, l'an prochain, les éditorialistes tiennent, à l'égard des parlementaires, des propos sévères comme ce fut le cas au mois de décembre dernier, et je pense que, dans une certaine mesure, ils ont eu raison.

J'en profite pour inviter les membres de cette commission à réfléchir sur cette question qui, à mon avis, est fondamentale. Peut-être pourrons-nous ajouter une étape supplémentaire qui permettra d'exercer des pressions additionnelles sur l'administration pour que l'an prochain, et je dirais même demain matin, les choses commencent à changer.

Je terminerai cette présentation sommaire, à cause du peu de temps qui nous est dévolu, mais on aura la chance de discuter tout au cours de la journée. Concernant l'allure générale des commentaires du Vérificateur général, il y a des choses que je déplore. Je l'ai soulevé l'année passée, mais cette année, ça prend des formes encore plus gigantesques, toutes ces nouvelles applications sur le plan de la présentation des états financiers, les nouvelles règles du jeu, les nouvelles règles comptables.

Sur le fond, je pense qu'on peut être d'accord et trouver intéressant d'avoir le portrait plus global, donc l'insertion des organismes et des résultats financiers à l'intérieur du portrait, si on veut, et dans la présentation. Mais si on pousse un peu plus loin, on se rend compte actuellement - je pense qu'on s'en rendra compte, et je le porte à l'attention du Vérificateur général - que ça risque d'être dangereux. J'aurai la chance de m'expliquer là-dessus au cours de la journée. (10 h 45)

Un autre volet qui risque d'être dangereux - je le porte à l'attention du vérificateur comme je le pense - c'est toute cette question de pouvoir apposer et de pouvoir disposer des sommes, tel que le cas des 849 000 000 $, c'est-à-dire Imputer des dépenses par anticipation, l'année passée donc l'exercice qui est terminé et, dans le présent exercice, être capable de faire le jeu contraire, c'est-à-dire qu'au lieu de

849 000 000 $ de dépenses anticipées qu'on a décidé de mettre, cette année, des revenus anticipés de 625 000 000 $, de faire le jeu comptable. À partir du moment où nous acceptons ces règles, et nous ne les condamnons pas, on se ramasse dans une situation qui fait en sorte qu'on ne peut plus lire le portrait exact qu'est le gouvernement du Québec, parce que si vous pouvez imputer d'avance des dépenses, vous pouvez, à la fin d'une année, biaiser les résultats. Et pourquoi prend-on une photographie et pourquoi prend-on une fin d'année qui se lit un 31 mars? C'est pour en avoir le portrait le plus exact. Et si, par une simple écriture, un simple trait de crayon, et dans le cas des 849 000 000 $, d'ailleurs, vous le portez à l'attention...

Le Président (M. Lemieux): Je m'excuse, M. le député de Bertrand, s'il vous plaît, brièvement. Vous avez déjà terminé, mais je vous laisse un petit peu aller.

M. Parent (Bertrand): Je conclus. D'accord. Je termine en vous disant...

Le Président (M. Lemieux): Je vous laisse aller, prenez trois ou quatre minutes.

M. Parent (Bertrand):... M. le Président, si ces 849 000 000 $ ont pu être faits, même sans toutes les approbations nécessaires au niveau des crédits, comme vous le mentionniez très bien dans le début de votre rapport, ce dont je m'inquiète, c'est que si on a pu le faire pour quelques centaines de millions de dollars, qui sont quand même importants, près de 1 000 000 000 $, on peut, à ce moment, déjouer. Sans être expert-comptable, qui que ce soit, on est capable de comprendre qu'on est en train de biaiser totalement. Je trouve ça dangereux, parce que ça ouvre la porte, finalement... Que cela ait été fait dans le passé, dans telle condition, avec telle explication, je me dis qu'il va falloir, à un moment donné, tirer une ligne. Je dois vous dire que, d'abord, depuis le changement des règles comptables, ensuite, depuis tout l'avènement de ces choses qui se sont produites au 31 décembre 1988, j'ai beaucoup de misère à faire la lecture du portrait exact pour être capable de faire des comparatifs. Tout ça est relativement... C'est beau, mais par rapport à quoi? On n'est plus capable d'aller chercher le comparable. Et cela, sans dire qu'il y a des gens qui jouent avec les chiffres, si les présentations sont faites de sorte qu'elles soient acceptées, nous ne pouvons plus rien dire. C'est-à-dire qu'un portrait est là, il semble beau, mais quelle est la réalité? Au-dessus de quelque ligne partisane que ce soit, quel que soit le député, quel que soit le ministre, quel que soit le gouvernement en place, on n'a pas le droit de biaiser des états financiers. Quand je dis "biaiser", c'est un petit peu ce qu'on fait, inconsciemment ou consciemment, je ne veux pas en douter.

Le Président (M. Lemieux): En conclusion, M. le député de Bertrand.

M. Parent (Bertrand): C'est terminé, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): Merci. M. le député de Mille-îles.

M. Jean-Pierre Bélisle

M. Bélisle: Merci, M. le Président. D'abord, bienvenue au Vérificateur général et à son personnel. Nous sommes toujours heureux de vous voir devant nous. Au cours des trois dernières années - et je suis sûr que le député de Bertrand sera d'accord avec moi pour dire qu'on a fait un pas en avant, et c'est là que je m'inscris en faux avec la perspective de son analyse de la situation - on est passé d'une situation où, de 1977 à 1985, systématiquement, l'Assemblée nationale et le gouvernement du Québec payaient des sommes très importantes pour le Vérificateur général. On demandait au Vérificateur général, en vertu de la loi, de déposer son rapport, chaque année, à l'Assemblée nationale, rapport que, une fois déposé, certaines personnes lisaient, je le suppose, je l'espère, tout au moins, et sur lequel les parlementaires ne se sont jamais penchés, de 1977 à 1985, sur l'étude du document devant nous aujourd'hui qui s'intitule le rapport à l'Assemblée nationale par le Vérificateur général du Québec". On sait très bien qu'il y avait une raison à ça. La raison, c'est que c'était embêtant, politiquement, de faire venir sur la place publique le Vérificateur général avec son personnel et de lui donner une occasion de s'exprimer publiquement. Je ne pense pas qu'on ait fait marche arrière depuis 1985. Je pense, au contraire, que le gouvernement actuel, que la formation ministérielle actuelle et que tous mes collègues, le député de Lafontaine, le député de Prévost, le député de Vanier et ceux qui sont membres de la formation ministérielle, le député de Mille-Îles qui parle en ce moment, on a tout fait pour insister, dans une première étape importante, pour que le Vérificateur général soit entendu devant l'Assemblée nationale à la commission du budget de l'administration. Pour moi, il n'y pas eu de marche arrière. Il y a eu une marche avant, mais peut-être pas assez rapide à mon goût également. Je partage l'avis exprimé par le député de Bertrand là-dessus. Il nous reste beaucoup de route à faire. Mais de là à qualifier le dépôt du rapport à l'Assemblée nationale, la venue du Vérificateur général devant nous, en trois ans consécutifs, les trois premières années... de là à dire que cela se déroule d'une telle façon qu'il existe un dialogue de sourds, à tout le moins, M. le député de Bertrand, je pense que vous entendez très bien, vous comprenez très bien, vous

lisez très bien et vous avez l'occasion de vous exprimer publiquement. Si vous aviez été partie et membre de la Législature de 1976 à 1985, vous n'auriez pas eu le droit de vous exprimer en commission parlementaire écoutée par les médias nationaux, la presse et la télévision qui rapporteront demain nos commentaires vraisemblablement sur le rapport du Vérificateur général. Je suis sûr que vous n'êtes pas un sourd. Je ne suis pas un sourd. On ne peut pas taxer le Vérificateur général d'être sourd. Or, ce n'est pas un dialogue de sourds.

Je voudrais clarifier une chose bien importante dès le départ. J'ai relevé cela dans ce que vous avez dit tantôt. Lorsque vous lisiez un texte qui était devant vous, M. le député de Bertrand, vous avez affirmé que c'était - j'ai bien noté l'expression - le système parlementaire britannique qui avait conduit à un tel état de fait, état actuel où, l'Exécutif, le Conseil des ministres et le bureau du premier ministre ont, au cours des années, accaparé de plus en plus de pouvoir au détriment de l'Assemblée nationale et des parlementaires. Mol, je pense que ce n'est pas le système parlementaire britannique qui a causé ça. Ce n'est pas le système dans lequel nous vivons. Les députés de l'Opposition, les députés ministériels, il y en a, ont toujours eu l'occasion, à l'Assemblée nationale, de se lever, de parler aux journaux et d'exprimer à haute voix leur opinion en disant: Telle chose ne fonctionne pas rondement dans telle régie d'État, telle chose ne fonctionne pas correctement à la CSST ou à l'Hydro-Québec. On parlera tantôt des sociétés d'État qui ne sont pas soumises à la vérification par votre département, M. le Vérificateur général. Mol, je pense plutôt que c'est un ensemble de circonstances qui a amené ça. Au lieu de mettre le blâme sur le système parlementaire britannique qui est un excellent système, je pense plutôt que c'est la complexité de la machine gouvernementale qui s'est amplifiée de façon phénoménale au cours des 30 dernières années. Si on regarde le budget du gouvernement du Québec de 1960 et celui de cette année ou de l'an prochain, c'est le jour et la nuit. Les besoins se sont multipliés. Les programmes se sont multipliés par 100 et par 150. De ce fait, presque inévitablement sans s'en rendre compte, je ne veux pas pointer du doigt en disant: Ce sont les parlementaires et les députés qui nous ont précédés, de quelque formation que ce soit, qui sont responsables de ne pas avoir exercé leurs responsabilités. C'est un ensemble de circonstances qui a fait qu'il y a eu une concentration du pouvoir qui était à l'origine au Parlement, à l'Assemblée nationale et, traditionnellement, au tout début, au Parlement britannique qui a fait que, présentement, cela s'est concentré dans les mains du pouvoir exécutif. Il y a là une nuance importante et il faut bien la faire.

Maintenant, c'est sûr qu'iI y a beaucoup de choses à dire sur l'ensemble de votre rapport. On n'aura même pas tout dit à la fin de la journée. On aura peut-être besoin d'une autre journée. Je suis entièrement d'accord, et je pense que mes collègues également le sont, que l'imputabiiité et la reddition de comptes, comme le disait le député de Bertrand tantôt, c'est absolument essentiel. Le contrôle administratif doit être - je vais réutiliser le terme - contrôlé à nouveau par l'appareil et par le processus législatif. En fin de compte, ce sont nous, les députés, tous et chacun dans notre comté, qui sommes responsables et redevables vis-à-vis de la population. Chaque fois que je me présente devant mes électeurs et que quelqu'un se plaint d'un organisme d'État ou d'une politique, d'un programme ou de la façon qu'une politique ou un programme est, par exemple, appliqué dans un centre d'accueil, c'est à moi, comme représentant du peuple qu'on pose la question. On fait rarement la distinction en disant: Mais, ce n'est pas vous le responsable, c'est celui qui administre le programme. On dit: C'est vous autres, les hommes, les femmes politiques qui êtes responsables. En réalité, je me demande où est la responsabilité jusqu'à un certain point de notre côté comme homme politique, quel que soit le parti politique qui occupe la fonction gouvermentale quand tous les pouvoirs sont concentrés dans la machine administrative.

Il y a un autre phénomène fondamental. C'est que l'Exécutif, malgré la complexité de tous les programmes et de la machine administrative, un ministre n'a pas le temps nécessaire, n'a pas les ressources nécessaires, n'a pas les moyens nécessaires pour effectuer un contrôle total des organismes qui sont sous sa responsabilité. Ce serait tellement facile, et je plaide en ce sens aujourd'hui, que le vaste réservoir de talents qu'est l'Assemblée nationale... Je vais vous donner des exemples et j'en ai un à ma droite. Le député de Prévost est un agriculteur, un professionnel du domaine de l'agriculture. Le député de Prévost a passé à peu près 40 ans de sa vie dans ce domaine. Ce serait totalement indiqué comme prescription, comme un médecin qui donnerait une prescription, que les talents du député de Prévost soient utilisés un peu également, non seulement comme parlementaire à l'Assemblée nationale, mais comme une poutre dans l'analyse de ce qui se passe au ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. Je vais vous donner un autre exemple. Le député de Fabre, mon collègue de Laval, est un courtier d'assurances. Il a passé 25 ans de sa vie dans cette profession. Au cours de prochaines années, I va falloir que ces talents, que ce soit dans l'assurance, que ce soit le député de Prévost dans l'agriculture, que ce soit le député de Bertrand qui a une expérience dans le domaine commercial comme chef d'entreprise, il va falloir que ces talents d'administrateur, de professionnel soient utilisés, non seulement comme parlementaires à l'Assemblée nationale, mais dans l'analyse de la gestion de l'ensemble de l'appareil de

l'État. Cela ne signifie pas seulement de faire parader, M. le député de Bertrand, les membres des organismes et des régies devant nous une fois par année. On ne réglera pas le problème comme ça. Cela va être une parade qui va passer. Lorsque je regarde M. Châtelain, le Vérificateur général, je suis sûr que, dans sa petite tête, le contrôle total et complet de la machine gouvernementale signifie aussi utiliser ce vaste réservoir de potentiels et de talents qu'est l'Assemblée nationale, mais aussi l'affecter à la branche exécutive. Je vais lancer une idée qui va peut-être paraître farfelue: Pourquoi, au Québec, n'imaginerait-on pas de nommer par décret ministériel dans chacun des ministères des députés qui seraient responsables, mais redevables à leur ministre, de superviser la gestion d'une partie d'un ministère? Pourquoi ne fait-on pas ça? Je pense qu'on en est rendus là. Le Québec des années quatre-vingt-dix doit s'orienter vers là et surtout le Québec des années deux mille.

Les meilleurs expériences qu'on a vécues, M. le député de Bertrand, et je pense que vous allez être d'accord avec moi, ce sont les mandats d'initiatives qu'on s'est donnés. Vous semblez sourire. Je pense que vous partagez peut-être ce que je dis. À la commission du budget et de l'administration, on a vécu une expérience unique, je pense, dans les commissions: Nous avons eu l'initiative d'étudier, d'essayer d'améliorer le fonctionnement de la Commission des valeurs mobilières du Québec. Cela s'est déroulé sur une période d'une année presque complète. Je me souviens même que le député de Bertrand, qui avait obtenu des informations particulières à un moment donné, m'a mis la puce à l'oreille concernant une longue démarche que j'ai faite dans ce dossier. Je pense qu'on a tous appris par l'expérience vécue. Il est vrai que les fonctionnaires responsables de la gestion ne sont pas intéressés à rendre compte, ne veulent pas rendre compte de leur gestion, peut-être pour une raison fondamentale que je mettrais sur le compte de l'expérience humaine: parce qu'ils n'ont pas été habitués à le faire. (11 heures)

À partir de la journée zéro où ils sont nommés, s'il n'est pas écrit dans leur mandat qu'ils doivent nous rendre compte, je pense qu'on rate le bateau dès le départ. On l'a vu avec la Commission des valeurs mobilières du Québec. On a eu peine et misère à essayer d'obtenir des documents complets représentant des études faites à même les fonds publics par des professeurs des HEC. On est encore loin de l'objectif qu'on veut atteindre, c'est sûr, mais, encore là, je pense qu'on n'utilise pas assez souvent les moyens mis à notre disposition, tels que les commissions de l'Assemblée nationale, les mandats d'initiative. Plus on utilisera ces moyens, mieux ce sera pour l'ensemble de la machine administrative, les gens se diront: Une année, ce sera peut-être notre tour d'être vérifiés, regar- dés, scrutés à la loupe. Dans le fond, ce serait pour améliorer l'ensemble de la situation.

Il y a quelque chose de fondamental qui n'existe pas en termes d'administration au Québec et qui devrait exister et, tantôt, j'aimerais vous entendre là-dessus. Dans tous les programmes fondamentaux, on s'est plaint de boulimie, quel que soit le gouvernement à la tête du Québec. Chaque fois qu'on crée un programme, il s'incruste, à cause de notre manque de contrôles sévères, une propension à essayer d'augmenter d'année en année le budget initial qu'on donne pour couvrir tel programme. On n'a jamais réussi à découvrir comment contrôler cette situation. J'aimerais vous entendre tantôt sur l'opportunité d'avoir, dans toutes les lois au Québec, une clause qu'on appelle présentement "Sunset Clause" et qui obligerait l'Assemblée nationale à revoir tous les programmes fondamentaux et les besoins. Selon moi, on ne se sortira jamais de ce problème de boulimie qui nous affecte en tant que machine administrative si on n'est pas obligés par les lois à revoir, d'abord comme parlementaires et, en même temps, avec votre aide, M. le Vérificateur général, ces programmes fondamentaux qui reviennent chaque année.

Hier, j'ai fait une démonstration. J'ai tenté d'aborder un sujet - j'en parlerai plus longuement à d'autres moments, M. le Président -quand j'ai parié des fameuses fioles du laboratoire de l'État que sont les finances publiques de l'État où, chaque année, année après année, on met les mêmes ingrédients. On s'aperçoit que le résultat chimique du liquide dans la fiole est réduit d'année en année. Je me disais que, comme chercheurs...

Le Président (M. Lemieux): En conclusion, M. le député de Mille-Îles.

M. Bélisle:... ce qu'on devait faire était, tout au moins, de se poser la question, à savoir si on ne devrait pas changer complètement la formule de base et essayer de trouver d'autres formules imaginatives. Dans ce sens, M. le Vérificateur général, je vous ai lancé une question; j'en aurais beaucoup d'autres tantôt Mes questions s'attarderont surtout au secteur de la santé et des services sociaux, qui me semble une pièce maîtresse de votre rapport et qui préoccupe beaucoup les Québécois et, surtout, les gens de mon comté.

Je suis très heureux que vous soyez ici ce matin. Quant à nous, de la formation ministérielle, nous n'avons pas l'impression que ce sera un dialogue de sourds.

Discussion générale

Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le député de Mille-Îles. M. le député de Bertrand.

M. Parent (Bertrand): Quand on parle de

dialogue de sourds, il faut comprendre il faut le mettre dans la perspective. Je rappellerai au député de Mille-Îles que, si nous le prenons à la lettre, Je veux dire que si c'était un dialogue de sourds, on ne resterait pas ici. Mais quand on pense à ce qui a été réclamé depuis trois ans, et particulièrement au cours de la dernière année, et qu'il n'y a pas eu de suite pour qu'on puisse se retrouver au 1er mars 1989 avec, non seulement la parade des gens qui sont là, mais qu'il y ait un début de lueur d'espoir que, à la suite des recommandations qui ont été faites par le Vérificateur général quant à l'imputabilité, à la suite des hauts cris des membres de cette commission sur ce point, on en soit toujours au point mort. Pour moi, cela demeure un dialogue de sourds dans cette perspective. Ceci dit, on va essayer d'utiliser le temps qui nous est dévolu aujourd'hui pour avancer dans l'étude du rapport du Vérificateur général. Il n'est quand même pas facile d'aborder un rapport aussi volumineux, avec autant de points portés à l'attention des parlementaires. On va essayer de procéder quand même dans l'ordre, pour avoir des réponses ou des explications sur ce que veulent dire certains commentaires du vérificateur. Peut-être un dernier commentaire touchant les propos du député de Mille-Îles. Il concerne ce qui s'est fait dans le passé, ce qui ne s'est pas fait et qui aurait dû se faire. Je voudrais seulement lui rappeler - lui comme moi, on n'était pas là - que c'est en 1984 que les règles du jeu ont été changées. Je ne suis pas sûr qu'il faille dire que le gouvernement antérieur ne voulait pas voir le vérificateur là. Ce n'est pas si simple que ça. C'est une conclusion très rapide. De toute façon, même si on en discutait toute la journée, je ne suis pas sûr qu'on se mettrait d'accord, je suis encore moins sûr qu'on ferait avancer le débat. Qu'on dise: On est là, on est en place. Nous, qu'avons-nous fait depuis trois ans? Nous, que peut-on faire aujourd'hui pour que, demain, cela change et que, l'année prochaine, on ne soit pas encore à "brailler" - vous me passerez l'expression - ici autour de la table et à dire au Vérificateur général: Cela n'a pas de bon sens que vous ayez encore à mettre 50 %, 60 % de vos recommandations qui sont une copie du texte de l'année dernière, parce que tout le monde s'en fout littéralement? C'est l'impression que j'ai. Si on est capable de me prouver le contraire... Selon les discussions que nous avons eues à quelques reprises avec le vérificateur, on s'est rapidement mis d'accord sur ce point. Par rappport à ce qui s'est fait dans le passé, ce qui se fait aujourd'hui, je dis: Oui, il y a eu une amélioration: aujourd'hui, on peut au moins se parler. Maintenant qu'on se parle, maintenant qu'on a un rapport, on a une responsabilité qui nous est dévolue, essayons donc de jouer notre rôle. Mettons-nous tous dans le même sens, et ramons dans le même sens. Si tout le monde, les élus et le Vérificateur général rament pour obtenir davan- tage, je pense qu'on va faire avancer le débat de façon importante.

Quant à la question de la comparution des gens qui sont là et qui doivent répondre de leurs faits et gestes. Je le répète: Pour moi, cela ne devra pas se faire strictement dans une espèce de parade où on aura chacun dix minutes parce que, là non plus, on n'avancera pas. Il faudrait que cette commission prenne l'allure d'une espèce de commission permanente où, mois après mois, on puisse avancer, comme on l'a fait dans des commissions d'initiative, si on veut, qu'on a pu enclencher. Malheureusement, on n'en a fait qu'une; on aurait dû en faire quelques autres, parce que je pense qu'on a mis le doigt sur des choses. C'est toujours fatigant pour ceux qui sont dans l'administration de leur organisme, de leur boite, de leur "fiole" - pour reprendre votre expression - de voir que, après que le vérificateur soit passé, des députés veulent se mettre le nez là où cela ne les regarde pas. On n'a peut-être pas à aller dans le quotidien, on n'a surtout pas à faire de l'ingérence, mais on à des comptes à nous rendre. Dans ce sens, ce qui s'est passé à la CSST est assez marquant. Le Vérificateur général a été très clair sur ce point.

Étant donné que le temps avance rapidement et je sens qu'on va manquer de temps pour passer à travers tout cela, M. le Président, ce n'est pas la façon dont vous voulez procéder, mais ma collègue, la députée de Chicoutimi, veut justement enclencher sur un secteur qui touche les services de santé. Je ne sais pas si elle prend une partie de mon temps ou de son temps, mais je voudrais qu'elle puisse commencer...

Le Président (M. Lemieux): Je dois faire respecter la règle de l'alternance. Je suis dans l'obligation de revenir de ce côté-ci... À condition que j'aie le consentement. Je pense que Mme la députée de Chicoutimi n'est plus membre de la commission.

M. Gobé: M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): Oui.

M. Gobé: Je n'ai rien contre la députée de Chicoutimi, mais ne pourrait-on pas peut-être suspendre quelques minutes pour en parier avec mes collègues?

Une voix: Parier de quoi?

M. Gobé: Le consentement qu'on donnerait à Mme la députée de siéger à cette commission puisqu'elle n'est pas membre.

Le Président (M. Lemieux): Je vais plutôt suspendre une minute.

(Suspension de la séance à 11 h 10)

(Reprise à 11 h 12)

M. Parent (Bertrand):... soit considéré comme un remplacement, qu'elle remplace un collègue officiellement.

Le Président (M. Lemieux): Bon, cela va.

Mme Blackburn: Si vous me permettez de m'expliquer. Ce matin, la commission des affaires sociales siège, c'est la consultation sur les services de garde. Comme je m'étais engagée à participer à une partie de cette commission, je suis venue ici parce qu'il y avait un dossier qui m'intéressait particulièrement. J'apprécie que vous ayez accepté que je prenne la parole à cette commission.

Le Président (M. Lemieux): On est entièrement d'accord, Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Sauf que je ne pourrai pas y être plus longtemps que jusque vers midi, pour vous rassurer.

Le Président (M. Lemieux): Mme la députée de Chicoutimi, nous tenons quand même pour acquis qu'il y a un remplacement, et qu'il y avait consentement préalablement. Vous allez remplacer, je crois, le député de Terrebonne?

Imputabilité des fonctionnaires

Le Président (M. Lemieux): Est-ce que cela va? Oui. Dans le respect de la règle de l'alternance, je vais intervenir très brièvement puisque M. le député de Bertrand avait la parole. Je vais prendre la parole pour le parti ministériel, très brièvement, pour vous permettre par après d'intervenir, Mme la députée de Chicoutimi.

Je vais peut-être revenir sur un sujet du début. Je suis bien conscient que les règles du jeu doivent changer et que ce sont les élus qui contrôlent les fonds publics. Je me rends compte aussi, - étant moi-même, ayant été et étant toujours, en vertu de la loi 51, un ancien fonctionnaire, que souvent, et même très souvent, les vraies décisions sont prises par des fonctionnaires, par une haute fonction publique qui, effectivement, n'a pas à répondre de ses gestes devant l'Assemblée nationale ou devant les élus. Je suis de ceux qui pensent que tout cela doit et devrait changer.

Mais il faut aussi regarder la réalité, les faits et la conjoncture d'une manière non pas utopique ou philosophique, mais très concrète. On se rend compte qu'une commission parlementaire, trop souvent, je le dis bien sans pointer du doigt des gens ou des individus, demeure un forum partisan. C'est un des gros problèmes qui fait que, actuellement, les mandarins du pouvoir, nos hauts fonctionnaires, nos administrateurs d'État, qualifiés commme tels dans la Loi sur ia fonction publique, ne veulent pas venir en commission parlementaire. Ils n'ont pas le goût de faire les frais, si je puis m'exprimer ainsi, de "crêpage" de chignon pour mousser le capital politique d'une formation politique ou d'une autre. Ils n'ont pas le goût non plus de publiciser ou faire la publicité des parlementaires. J'ai fait des recherches sur cet aspect, comme tel, de l'imputabilité des fonctionnaires. Il y a eu quelques précédents qui ont été peu heureux et peu concluants. C'est difficile pour un président de commission d'essayer de toutes ses forces de faire avancer les choses, parce qu'il y a des comportements, des habitudes. S'il y a une tradition parlementaire, il existe aussi une tradition dans la fonction publique. Sans vouloir jeter le blâme aux fonctionnaires de la haute fonction publique, je comprends leur réticence et leur résistance parfois à se réfugier derrière leurs ministres qui, par la tradition, a une responsabilité parlementaire. Il est évident que, moi aussi, je veux que les choses avancent et, effectivement, le député de Lévis m'a écrit à cet effet au mois de décembre. Au mois de décembre, nous avions l'étude du projet de loi 70 et du projet de loi 103. Le mandat même d'entendre le Vérificateur général devant cette commission, qui ne relève pas de cette commission, n'était pas encore réglé. J'ai dû écrire plusieurs fois, m'adresser aux autorités responsables afin qu'on nous défère ce mandat et non seulement j'ai dû le faire, mais je suis allé plus loin en tant que président de cette commission. J'ai même préparé ici un projet d'amendement aux règlements de l'Assemblée nationale afin qu'une fois pour toutes, ce soit clair et clarifié, à savoir: Où le Vérificateur général sera-t-il entendu, devant la commission de l'Assemblée nationale ou devant la commission du budget et de l'administration?

Peut-être que le député de Bertrand aurait tendance à dire: Oui, mais le passé, c'est le passé; ce qui a été fait a été fait. Mais une tradition débute quelque part. Peut-être que cela doit et cela devra débuter avec nous. Il est vrai que, pendant une période de dix ans, il y avait quand même des membres du Conseil exécutif, et même le secrétaire général du gouvernement à cette époque, M. Louis Bernard, qui en était membre à part entière et qui avait une connaissance de la fonction publique, a écrit dans son livre, L'administration publique, que l'imputabilité devait se faire et doit se faire. Pendant qu'il était secrétaire général du Conseil exécutif, qu'a-t-il fait, lui, pour faire avancer les choses? Pendant que ces gens-là étaient au Conseil exécutif, qu'ont-ils fait pour faire avancer les choses? Je ne veux pas leur faire un reproche. Le député de Bertrand n'y était pas; je n'y étais pas. Mais il y a un constat de fait qui est quand même là. Jamais, moi, on ne m'a approché pour discuter du fond comme tel ou pour me faire des suggestions dans ce sens-là. On aurait pu me parler du modèle des comptes publics qui existe à Ottawa où on y voit la planification des travaux, comment elle se fait, l'audition du Vérificateur

général, l'audition des gestionnaires et dirigeants d'organismes. Il aurait peut-être été intéressant pour notre commission d'aller y faire un tour.

Je vous dis que nous voulons que les choses avancent. Nous voulons que les choses changent parce que nous croyons que, tantôt, comme parlementaires, nous n'aurons pas le choix. Comme l'a dit si bien mon collègue, nous avons des responsabilités. Les premières responsabilités que nous avons sont envers ceux et celles - je ne le dis pas naïvement - qui nous ont élus. C'est pourquoi nous nous devrons tantôt, d'un côté comme de l'autre, de modifier nos comportements politiques afin que nous en arrivions à plus d'efficience et d'efficacité dans ie domaine de l'administration publique.

C'est ce que j'avais à dire comme commentaires qui ont été faits à la fois par le parti de l'Opposition, le parti ministériel et le Vérificateur général. Mme la députée de Chicoutimi, vous avez la parole.

Secteur ds la santé et des services sociaux

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Permettez-moi d'abord de saluer M. Châtelain et les personnes qui l'accompagnent. J'ai fait comme tout bon député porte-parole de l'Opposition dans un domaine, je dois dire que j'ai examiné un peu le rapport dans son ensemble, mais plus particulièrement le volet qui concerne la santé et les services sociaux. Certains commentaires reviennent - je dois l'avouer - assez régulièrement, mais il y en a certains sur lesquels j'aurais aimé vous entendre. Je vais être relativement brève.

En matière de planification, vous dites au ministère de la Santé et des Services sociaux que vous constatez qu'il n'y a pas de véritable politique d'ensemble en santé et en bien-être et que, curieusement, l'enveloppe qui prend le plus de ressources, celle des centres hospitaliers de courte durée, 4 700 000 000 $, ne fait pas l'objet... Il y a une déficience particulière en matière de planification de ce secteur. Ce que vous constatez, lorsqu'il y a de la planification, c'est davantage... j'allais dire, ce n'est pas dans une planification systématique d'ensemble, mais c'est davantage à l'occasion de feu. On éteint un feu. Donc, c'est une planification de pompier, selon ce que j'ai cru comprendre.

Vous dites aussi - je voudrais avoir une explication là-dessus - au paragragne 14. 14: "Les faiblesses constatées ne facilitent pas l'organisation et l'allocation optimale des ressources sur le territoire'. Là, évidemment, je me demandais si cela avait trait à la quantité des ressources affectées par territoire dans les régions ou si, tout simplement, c'est à l'intérieur d'un territoire même pour savoir si elles étaient bien utilisées.

Le commentaire de la ministre, c'est qu'en matière de répartition des ressources, elle s'apprêtait à développer une méthode de répartition régionale des crédits de développement, et que cette méthode a été utilisée en 1987-1988 et en 1988-1989. Est-ce à dire que vous n'aviez pas vu les résultats de la méthode? Comment cela s'est-il passé pour que vous fassiez ce type de commentaires? Je cite: "II importe de préciser qu'en matière de répartition des ressources, ie ministère vise l'allocation optimale des ressources sur le territoire québécois. Dans cette optique, il a développé une méthode de répartition régionale des crédits de développement qui lui sont octroyés. Cette méthode a été utilisée dans la plupart des secteurs, notamment ceux de l'alourdissement de la clientèle, la déficience intellectuelle. " Mais vous dites, par ailleurs, plus haut: "Les faiblesses constatées ne facilitent pas l'organisation et l'allocation. " Est-ce à dire que les méthodes qui ont été mises en place ne sont pas satisfaisantes ou que vous n'en avez pas encore vu les effets?

Le Président (M. Lemieux): M. le Vérificateur général.

M. Châtelain: M. le Président, en réponse à cette question, c'est sûr que le système en place ne permet pas l'organisation et l'allocation optimale des ressources sur le territoire, à l'intérieur du territoire. Nous avons déploré le manque d'une politique d'ensemble, comme vous l'avez signalé. Nous ne critiquons pas la politique, nous critiquons le fait qu'elle n'existe pas comme telle. Il n'est pas du domaine du Vérificateur général de critiquer une politique, mais de constater si elle existe ou non et, ensuite, si elle peut servir à une bonne allocation des ressources.

Pour répondre d'une façon plus détaillée, M. le Président, à la question de la députée, je demanderais, avec votre permission, à M. Arthur Roberge, directeur principal chez le Vérificateur général, responsable des vérificateurs qui se sont penchés sur ce secteur, de prendre la parole.

Le Président (M. Lemieux): Voulez-vous vous identifier, nom et prénom, avec votre titre, pour les fins de l'enregistrement du Journal des débats.

M. Roberge (Arthur): Arthur Roberge, directeur principal. Est-ce que je peux répondre à la question de madame?

Le Président (M. Lemieux): Oui, cela va.

M. Roberge: Ici, c'est bien sûr que, lorsqu'on dit: "Les faiblesses constatées ne facilitent pas l'organisation et l'allocation optimale des ressources sur le territoire", c'est sur le territoire du Québec. Ce n'est pas à l'intérieur d'une région particulière plus que dans une autre.

Mme Blackburn: C'est pour l'ensemble.

M. Roberge: C'est pour l'ensemble. Main-

tenant, ce qu'on reproche, c'est le manque de politique d'ensemble qui fait qu'à un moment donné, un secteur de la santé... Par exemple, si on parle du désengorgement des urgences, des problèmes qu'on peut régler à l'intérieur de ce secteur, alors les solutions qu'on apporte peuvent avoir des répercussions sur d'autres secteurs, si on parie des soins à domicile, etc. Ce sont des secteurs interreliés. Un manque de politique d'ensemble fait que l'allocation optimale des ressources est rendue plus difficile dans le domaine de la santé et des service sociaux.

Mme Blackburn: Et cela ne traite pas - si vous me le permettez, M. le Président - de l'équité dans la répartition entre les régions, parce que sa réponse porte davantage sur une méthode de répartition régionale des crédits. J'ai l'impression que la réponse n'était pas tout à fait... C'est pour ça que j'étais restée un peu sur...

M. Roberge: Sur votre appétit.

Mme Blackburn:... mon appétit par rapport à la réponse qui était faite. Cela n'a pas l'air de répondre à la question que vous posez.

M. Roberge: D'accord. Ici, vous avez raison.

C'est bien évident qu'on ne discute pas de l'équité de l'allocation des ressources entre les régions.

Mme Blackburn: De l'équité interrégionale. D'accord. Mais ce que vous dites, c'est qu'on n'a pas de politique qui nous permette d'avoir une vision un peu plus intégrée de la santé et des services sociaux de manière à voir les répercussions d'un manque d'action dans les domaines suivants: l'engorgement des urgences, les carences en matière de maintien à domicile, l'utilisation des ambulances, le fait qu'on les utilise pour se rendre à l'urgence. D'accord, cela va bien, mais la réponse, en fait... Cela ne répond pas à la question, c'est ce que je voulais vérifier, parce que je demandais si vous vous étiez penché - et cela m'étonnait - sur l'équité en matière de répartition entre les régions. J'imagine que non, ce n'est pas de votre ressort.

Processus budgétaire. Au paragraphe 14. 24, je voudrais comprendre un peu car vous dites: "La subvention octroyée à un établissement constitue l'essentiel du budget à l'intérieur duquel il doit opérer; par conséquent, son montant peut influer directement sur le niveau des soins qu'il dispensera à la population. " Donc, c'est à l'administrateur, ce n'est plus à l'État. Est-ce que vous nous compreniez là-dedans? Vous continuez: "S'il obtient une enveloppe budgétaire dont l'augmentation ne compense pas entièrement la hausse de ses coûts d'opération, l'établissement devra faire connaître au ministère les moyens qu'il entend prendre pour atteindre l'équilibre budgétaire. "

Est-ce que vous avez pu constater si, effectivement, les enveloppes budgétaires accordées aux établissements compensent ou ne compensent pas entièrement le coût des opérations? Je pense aux coûts additionnels pour les médicaments. On pense à certains coûts qui ne sont pas entièrement indexés. Est-ce que vous vous êtes aussi penché là-dessus?

Le Président (M. Lemieux): Vous pouvez continuer.

M. Roberge: Je peux continuer? Le Président (M. Lemieux): Oui.

M. Roberge: Non. Ici, en fait, il y a des institutions ou des établissements qui doivent soumettre des plans d'équilibre budgétaire lorsque la hausse ou le montant global du budget qu'ils obtiennent est inférieur au coût. du système, etc. On demande à cet établissement de transmettre au ministère les moyens qu'il entend prendre pour pouvoir équilibrer, avec le budget que le ministère lui octroie, ses dépenses et ses revenus.

Mme Blackburn: À ce moment-là, est-ce que vous ne faites pas l'analyse, à savoir si, effectivement, les enveloppes consenties, par exemple, aux centres hospitaliers de courte durée, compensent effectivement la hausse des coûts et correspondent au coût réel de fonctionnement?

M. Roberge: Non.

Mme Blackburn: C'est une remarque en passant pour expliquer le processus.

M. Roberge: C'est ça.

Mme Blackburn: Est-ce que vous avez eu, tel que le dit le commentaire du ministère: "Par contre, le ministère reconnaît que les règles sont imprécises quant à l'utilisation qui peut être faite... " Non, ça va. Là-dessus, je pense que j'ai trouvé la réponse.

Une autre question, la rémunération du personnel d'encadrement des centres hospitaliers de soins de courte durée. Au paragraphe 14. 47, vous dites: "Lorsque les vérificateurs externes font mention dans leurs rapports de salaires versés aux cadres, à des montants plus élevés que ceux qui sont admis par la réglementation, le ministère diminue d'autant les dépenses admissibles de rétablissement. Cependant, le ministère n'exerce aucune sanction quand les vérificateurs externes ne relèvent pas de tels écarts, bien qu'il dispose dans le rapport financier annuel de l'information nécessaire pour les dépister lui-même. " Autrement dit, ça me rappelle quelque chose qu'on vivait à l'époque, c'est que les rapports annuels des établissements ne sont pas lus ou ne sont pas utilisés aux fins auxquelles ils

pourraient être utilisés.

M. Roberge: Ils ne sont pas complètement utilisés. Ils sont quand même utilisés, mais ils pourraient l'être davantage.

Mme Blackburn: D'accord. Il arrive qu'on n'aurait pas besoin d'enquêteur ni de vérificateur externe pour nous donner des informations dont on dispose dans les rapports et qu'on n'utilise pas.

M. Roberge: Oui. Ici, si vous me permettez, on fait référence, entre autres, à l'annexe B des états financiers des établissements où on voit la rémunération du personnel d'encadrement d'un établissement, sa classification. Toute cette information existe dans les états financiers.

Mme Blackburn: Les avantages, etc.

On sait que la ministre a fait adopter une loi sur la rémunération du personnel d'encadrement dans le secteur de la santé et des services sociaux, mais vous n'avez pas encore vu les effets de l'application de cette loi, vous n'avez pas à vérifier ça non plus, par rapport aux rémunérations ou aux avantages qui sont accordés.

M. Roberge: En fait...

Mme Blackburn: Cela fait seulement un an.

M. Roberge:... depuis l'automne dernier, mais à ce jour, nous n'avons pas pu...

Mme Blackburn: L'automne dernier. Vous n'avez pas encore vu les effets.

M. Roberge: Non. (11 h 30)

Mme Blackburn: Une question qui me préoccupe depuis déjà un certain nombre. de mois, c'est la gestion des ressources humaines. Je ne ferai pas un long exposé là-dessus, on sait qu'il y a une pénurie de personnel en soins infirmiers. Cependant, selon les analyses qui sont faites, ce n'est pas parce qu'il manque effectivement de personnel, de main-d'oeuvre, dans ces secteurs d'activité, mais bien que les conditions de travail qui lui sont faites finissent par amener beaucoup de ces personnes à l'étranger, à l'extérieur, aux États-Unis ou dans d'autres provinces canadiennes. Elles changent carrément de métier ou encore elles s'engagent dans des agences privées, des agences de placement.

J'ai ici en main un rapport qui nous donne les tarifs demandés par différentes agences de placement auxquelles ont recours les hôpitaux, les centres d'accueil, les centres d'hébergement moins - ce sont surtout les centres d'accueil, accueil et d'hébergement - les hôpitaux de courte durée et de longue durée. Lorsqu'ils sont en pénurie de personnel il y a différentes pratiques. Il y en a qui y vont exclusivement lorsqu'ils sont en pénurie... il y a certains centres hospitaliers et centres d'accueil qui vont aux agences privées à l'année et il y en d'autres qui y vont pour toutes sortes de congés: la Saint-Jean-Baptiste, Pâques, Noël, et ainsi de suite. J'ai la liste ici. Les tarifs qui sont demandés par ces agences de placement varient de 175 $ - c'est la plus petite entreprise - par jour à 325 $. Dans un cas, une infirmière de l'agence Hélène Quévillon - pour ne pas la nommer - a travaillé dans un hôpital, l'hôpital Charles Lemoyne, et, selon les Informations que j'ai devant moi, en travaillant aux soins intensifs la nuit du 24 juin 1988, le coût pour l'employeur a été de 1050 $. Mon intuition me dit que le recours de plus en plus grand à des agences privées par les établissements de santé au Québec diminue la qualité, l'humanisation des soins, tout ce que vous pouvez imaginer. En plus, je suis loin d'être certaine que c'est vraiment une économie. Est-ce que vous vous êtes penché sur cette question? Sincèrement, c'est une question que je me pose depuis que j'ai le dossier.

M. Châtelain: M. le Président, non, nous ne nous sommes pas penché sur ces problèmes pour la simple raison que nous n'avons pas encore effectué d'étude au niveau des institutions mêmes dans le secteur hospitalier. Nous avons débuté notre étude, comme vous le voyez, au ministère, l'an dernier. Cette année, nous poursuivons notre étude au niveau de certaines institutions et non pas dans le secteur hospitalier, mais c'est le genre de chose qu'éventuellement nous regarderons effectivement.

Mme Blackburn: Quels types d'Institutions sont visés cette année dans votre étude?

M. Châtelain: II y en a plusieurs. Je peux demander à M. Roberge.

Mme Blackburn: Oui, si ce ne sont pas les centres hospitaliers.

M. Châtelain: Non, non, d'accord.

Mme Blackburn: Ah, c'est dans d'autres...

M. Châtelain: Oui, c'est dans le secteur des services sociaux.

Mme Blackburn: Évidemment, parce qu'il n'y a pas juste...

M. Châtelain: Oui, c'est dans le secteur des services sociaux.

M. Roberge: Je peux donner une précision. Actuellement, en 1988-1989, nous faisons certains établissements des services sociaux, dont les centres d'accueil, de réadaptation, les CLSC, les

CRSSS et les CSS. Nous étudions actuellement l'utilisation des subventions qui est faite par ces établissements. Peut-être qu'on pourrait voir ces choses à ce moment-là. Nous sommes actuellement dans le domaine des établissements de services sociaux.

Mme Blackburn: Évidemment, cela peut sembler mineur lorsqu'on compare l'enveloppe globale des hôpitaux, sauf que c'est fait dans le but d'une rationalisation. Je ne suis pas sûre que la pratique que je vois... On nous dit qu'il y a 50 % du personnel qui est à temps complet dans les hôpitaux. Cela génère un taux de roulement important, mais, en plus, à un moment donné, un désintéressement, une démobilisation et on recourt... Dans la liste que j'ai, sur une quinzaine d'établissements il y en a huit qui ont recours aux agences toutes les fins de semaine. Ce n'est pas mineur. Ce sont des informations qui ont été recueillies par du personnel sur place. Je trouve que cela mérite d'être examiné. Je ne sais ce que vous en pensez.

M. Châtelain: M. le Président, nous prenons note des commentaires de la députée. On verra en temps et lieu lorsque nous effectuerons des travaux là-dessus.

Mme Blackburn: Je ne continuerai pas sur les commentaires que vous avez faits dans votre rapport, qui sont pertinents à mon avis, lorsque vous parlez de la gestion des ressources humaines. Vous dites, entre autres, que le ministère a des responsabilités importantes dans la détermination des conditions de travail, responsabilités qu'il partage avec les associations patronales et les syndiqués. C'est une des constatations que je trouve pertinentes, mais sur lesquelles je m'interroge également. Est-ce que vous êtes satisfait de la réponse du ministère qui vous dit, au deuxième alinéa du paragraphe 14. 80 à la page 255: "Une politique de main-d'oeuvre n'est qu'un des moyens d'améliorer la gestion des ressources humaines à condition que tous les acteurs aient un grand souci de cette main-d'oeuvre et de l'impact... " Je me disais qu'une telle réponse me laissait un peu sur ma faim.

M. Roberge: Si j'ai bien compris, c'est à la page 255, le deuxième alinéa du commentaire, pour les syndiqués et les cadres. On pense que cela répond en partie à notre commentaire. Quand ils disent: "Une politique de main-d'oeuvre n'est qu'un des moyens", c'est sûr, mais c'est quand même un moyen très Important. Actuellement, le ministère, tel qu'il le déclare ailleurs et tel qu'on le dit, a commencé a établir une politique de main-d'oeuvre, entre autres, sur le personnel en soins infirmiers, et il s'apprête à le faire pour d'autres catégories de travailleurs.

Mme Blackburn: J'ai également une question sur la sécurité. C'est toujours à la page 255. Je pense que vous faites surtout référence aux exercices requis pour fins d'évacuation et ainsi de suite. Est-ce que vous vous êtes penchés sur les aspects de la sécurité touchant la manipulation et la gestion des déchets biomédicaux et la sécurité pour les employés. J'ai eu l'occasion de visiter des laboratoires. Je ne sais pas si cela se dit ici, mais je pense devoir le dire, j'ai la conviction que certains laboratoires dans nos hôpitaux du Québec seraient condamnés par la CSST s'ils étaient dans une entreprise privée. Je ne suis par sûre qu'il faille dire cela, mais j'ai la conviction qu'il y a des laboratoires dans nos établissements publics qui sont complètement désuets et qui sont des menaces pour la sécurité des employés et des travailleurs, sûrement. Cela m'a assez déroutée, parce que c'est un réseau que je ne connaissais pas bien, que je commence à connaître un peu mieux, et je me suis permis des petites visites. Est-ce que vous vous êtes penchés sur cet aspect de la question, à la fois la gestion des déchets biomédicaux et la sécurité pour le personnel? Vous l'avez fait généralement pour les usagers, mais pour le personnel?

M. Châtelain: M. le Président, est-ce que je pourrais...

Le Président (M. Lemieux): II vous reste environ une minute, mais, M. le Vérificateur général, vous pouvez donner votre réponse.

M. Châtelain: D'accord. Est-ce qu'on pourrait demander à M. Guy Breton, vérificateur général adjoint de répondre à cette question?

M. Breton (Guy): Guy Breton, vérificateur général adjoint. La sécurité dont on fait part ici, c'est la réglementaire, celle qui résulte du fait que les organismes doivent rapporter au ministère qu'ils ont suivi les règlements concernant la sécurité. Et comme toute cette étude s'est faite au ministère l'an dernier, qu'elle se fait cette année dans les établissements de services sociaux et, probablement l'an prochain, dans les centres hospitaliers, nous en sommes à ceux qui recevaient l'information. On constate que, dans la documentation qu'ils reçoivent, il y avait certaines lacunes. Donc, on n'est pas encore allés voir directement sur les lieux.

Mme Blackburn: Comme le cas de l'hôpital Saint-François-d'Assise, où finalement, c'est un problème de pollution interne qui risque d'affecter aussi la santé. Ce n'était pas dans cette perspective, mais davantage les obligations qui sont faites aux établissements de rendre compte des mesures de sécurité qu'ils mettent en place, et c'est là-dessus que vous vous êtes penchés.

M. Breton: Exact.

Mme Blackburn: Bien. Je vous remercie infiniment.

Le Président (M. Lemieux): Merci, Mme la députée de Chicoutimi. M. le député de Mille-Îles.

M. Bélisle: Merci, M. le Président. On aborde un sujet qui m'intéresse beaucoup. Je pense que le député de Lévis qualifierait le ministère de la Santé et des Services sociaux, dans son langage coloré, de mammouth gouvernemental, et la question...

Mme Blackburn: À Ottawa, on appelle cela des dinosaures, non?

M. Bélisle: Mais M. le député de Lévis appelle cela un mammouth, Mme la députée de Chicoutimi. Voici la question que tous se posent. Comment fait-on pour contrôler le mammouth? Le mammouth est gros au ministère de la Santé et des Services sociaux. Il est de 9 400 000 000 $, soit 33 % environ des dépenses gouvernementales. Ce sont 800 établissements subventionnés, aie! Ce sont 4 600 000 000 $ en centres hospitaliers de courte durée, les hôpitaux où on se fait traiter; centres d'accueil d'hébergement et centres hospitaliers de soins de longue durée, 1 000 000 000 $; centres d'accueil et de réadaptation, 672 000 000 $; centres locaux de services communautaires, 465 000 000 $; centres de services sociaux, 313 000 000 $ et conseils régionaux de la santé, 47 000 000 $, avec, bien entendu, les services assurés, c'est-à-dire ce que la Régie de l'assurance-maladie paie, 1 900 000 000 $, tout près de 2 000 000 000 $. Cela compose le total des 9 400 000 000 $.

Je pense que la question de base revient à ce que j'ai dit hier à la commission du budget et de l'administration, il faut peut-être cesser de penser qu'on va régler les problèmes dans un ministère semblable seulement avec l'injection de fonds supplémentaires. Et votre rapport, en ce sens-là, M. le Vérificateur général, m'amène à la question de base que je vous ai posée tantôt et à laquelle vous n'avez pas encore répondu. Je vais me servir du paragraphe 14. 13. Vous nous dites, à la page 245 de votre rapport, et je vous cite textuellement: "Le ministère devrait diffuser annuellement une version consolidée et complète de ses orientations et de ses priorités. Dans les faits, il diffuse ses orientations auprès des différents intervenants concernés, mais au fur et à mesure de leur élaboration et sans en rappeler l'ensemble. " Ce que je comprends, c'est qu'on joue au pompier. Peut-être qu'on joue au pompier parce qu'on n'a pas d'autre choix que de jouer au pompier. Le problème est tellement énorme et tellement gros, il y a tellement d'intervenants. Il y a 800 établissements, 800 directeurs généraux, si je ne m'abuse. Il y a peut-être 1600 directeurs généraux adjoints. C'est une machine absolument, presque gargantuesque jusqu'à un certain point, qui engouffre des sommes phénoménales, 9 400 000 000 $ par année. Je reviens à ma question fondamentale. Même si on répondait à votre demande d'une diffusion annuelle des priorités du ministère, je vous l'accorde, ce serait déjà mieux, mais on ne réglera pas le problème, M. le Vérificateur général. On continuerait à faire du "patchage". On publiciserait dans notre société des belles orientations qui sécuriseraient tout le monde et on se retrouverait toujours poignés avec 9 400 000 000 $ et un système où certains disent qu'il y a des manques et des ratés à certains endroits.

Je reviens à la question de base que je vous ai posée quand je vous ai demandé: Est-ce que les solutions qui sont à l'horizon ne sont pas des solutions de repenser en profondeur le système? Des ministères avec un budget de 1 500 000 000 $, comme le ministère des Transports du Québec, c'est une dimension plus administrable, plus gérable, plus facile à administrer. Il y a moins d'intervenants et de répondants. Une de mes questions: Est-ce qu'on n'a pas là la constatation que, malgré tous les beaux rapports, toutes les belles synthèses qu'on pourrait faire, il faudrait s'en aller vers des ministères et des départements plus petits? Par exemple, est-ce qu'il ne faudrait pas que le ministère de la Santé et des Services sociaux en ce moment ait trois ou quatre entités différentes et trois ou quatre personnes, ou deux personnes, ministres, ou deux cabinets, ou deux ou trois niveaux sous-ministériels qui pourraient s'occuper, si c'est le cas, de ce mammouth qu'on pourrait réduire à une dimension... On pourrait faire de la politique, faire de la prévision, faire de la planification. Si vous me demandez de faire la planification de l'Empire State Building et que j'ai le personnel simplement pour construire une école, je ne pourrai pas le faire. C'est la dimension du problème.

De plus, l'autre question, c'est: Est-ce que ça n'établit pas de façon probante la nécessité pour les lois fondamentales ou les besoins fondamentaux dans des programmes fondamentaux, tels que la santé et les services sociaux, qu'il y ait une règle qui oblige l'Assemblée nationale à revoir en profondeur, à tous les cinq ans, les programmes gouvernementaux, à donner une orientation de base, et nous-mêmes, comme société, à se remettre en question? Cela ne veut pas dire que, la même année, on aura tous les mêmes programmes qui seraient remis en question. Mais peut-être qu'on pourrait regarder en profondeur le secteur de la santé et des services sociaux en 1994 et, en 1996, on pourrait regarder la justice. On pourrait regarder, en 1997, les relations du travail, et ainsi de suite. Alors, il y a deux questions fondamentales de base avant que j'aille dans les autres sections qui concernent la santé et les services sociaux.

Le Président (M. Lemieux): M. le Vérificateur général.

M. Châtelain: Merci, M. le Président. Évidemment, il y a plusieurs...

M. Bélisle: II y a du jus.

M. Châtelain:... facteurs à considérer dans les questions du député. Il y en a une de base qui touche non pas au fonctionnement du système, mais à la constitution, à la structure du système même. Je pense que ça dépasse évidemment la compétence du Vérificateur général, c'est-à-dire son mandat. Il revient évidemment à l'Assemblée nationale, au gouvernement, de proposer à l'Assemblée nationale des politiques de ce côté-là. Je pense bien que la commission Rochon s'est justement penchée sur la structure du système en place; elle a fait des recommandations. Ce n'est pas au vérificateur de faire des recommandations à ce sujet. (11 h 45)

Cependant, cela dit, quant à la façon de procéder pour contrôler les coûts dans le secteur, pour s'assurer qu'il y a une planification raisonnable dans le secteur, pour s'assurer qu'il y a une bonne allocation des ressources, ce n'est pas parce que le système est gros qu'on doit procéder par "patchage" ou à la pièce. C'est sûr que le système est gros et que c'est très difficile, mais je pense que plus le système est gros, plus les exécutants doivent avoir des orientations et savoir où ils s'en vont ou ce qu'on essaie d'atteindre. A ce moment-là, à la base même, il faut une politique d'ensemble, non seulement une politique stratégique d'ensemble, mais aussi un programme d'implantation de cette politique. C'est à partir d'un tel programme que les exécutants ou les directeurs généraux pourront bien gérer leur boîte. Alors, ce n'est pas parce que c'est difficile et que c'est gros qu'il ne faut pas le faire. Je pense que plus c'est gros, plus ça s'impose.

Quant à l'opportunité d'une "Sunset Clause" pour les différents programmes, surtout les gros programmes gouvernementaux, je ne peux qu'applaudir des dispositions qui feraient en sorte que le gouvernement, d'une part, et l'Assemblée nationale, d'autre part, se pencheraient sur la nécessité de continuer de tels programmes, sur la nécessité de les continuer dans leur forme actuelle ou de les amender. Mais je m'empresse d'insister pour dire que ce n'est pas du domaine du Vérificateur général. Le Vérificateur général peut dire cependant qu'il appuiera tout ce qui favorisera l'imputabilité envers l'Assemblée nationale.

M. Bélisle: M. le Vérificateur général, pour revenir tout de suite à ce qui est relié à ça, quand on dit que ce n'est pas parce que c'est gros qu'il ne faut pas mettre une machine en place pour faire la planification et l'évaluation, admettez que plus la machine est grosse, plus la machine est complexe, plus c'est difficile de contrôler ce qui la contrôle.

À la même page, à la page 245, vous parlez des méthodes d'évaluation. Je vais vous poser une question à laquelle je pense, vous n'avez pas de réponse: Combien y a-t-il d'employés au ministère de la Santé et des Services sociaux chargés, au moment où l'on se parle, de faire l'évaluation des systèmes? Combien y a-t-il de médecins ou de gens de profession médicale, qui ont oeuvré dans le domaine médical - écoutez bien celle-ci - parmi ces évaluateurs, qui font partie des analystes des besoins, des performances?

Quand vous dites ici qu'ils sont supposés avoir une bonne idée parce qu'ils ont été dans le système... À la page 245, au paragraphe 14. 8, vous dites, et je vous cite: "Les travaux d'évaluation, les travaux de vérification interne et ceux de contrôle de la qualité portent surtout sur les mécanismes administratifs et l'organisation des services socio-sanitaires, mais accordent peu d'importance au coût, à la performance et à l'efficacité des programmes. " J'aurais deux questions à poser. Quand je vais voir un plombier, c'est pour me faire faire un système de plomberie; quand je vais voir un électricien, c'est pour un système d'électricité; quand je veux avoir une estimation de coût, je ne vais pas voir un plombier quand c'est pour mon système d'électricité, je vais voir un électricien. Quand je vous demande le nombre de personnes responsables de l'évaluation, je vous pose comme sous-question importante: Combien y a-t-il de médecins qui ont oeuvré dans le système de la santé parmi ces évaluateurs?

M. Châtelain: M. le Président, je pense bien que notre commentaire ne porte pas sur le nombre et, comme le député l'a bien prévu, on n'a absolument pas le renseignement sur le nombre d'employés concernés par l'évaluation des programmes ou encore le nombre de médecins. Ce sur quoi on s'est penchés, c'est sur la qualité de l'évaluation faite. Y en avait-il suffisamment? Était-ce sur les bons secteurs, et ainsi de suite? On a fait des commentaires à cet effet.

Je pourrais demander à M. Roberge, avec votre permission, de compléter ma réponse.

M. Roberge: Sur ce sujet, à la page 244, au paragraphe 14. 9, on dit que depuis 1987, il y a eu une direction générale, au ministère de la Santé et des Services sociaux, qui s'est vu confier la responsabilité de clarifier la mission et les priorités du ministère, de proposer les orientations, les objectifs et stratégies, et de les évaluer périodiquement. Donc, depuis 1987, il y a une volonté de centraliser les efforts d'évaluation. Maintenant, cela comprend le personnel d'une direction générale.

M. Bélisle: Je vous vois sourire quand vous dites cela. Vous dites que cela comprend le personnel d'une direction générale. Ce que vous ne semblez pas nous dire, mais que je pense que vous pourriez peut-être le dire, c'est que le personnel n'est pas suffisant pour faire l'évalua-

tion de ce que vous exigez.

M. Roberge: Non ce n'est pas ça.

M. Bélisle: Non, ce n'est pas ça? Ce n'est pas dans ce sens-là que vous le dites?

M. Roberge: Non, pas du tout. En fait, ce que j'ai dit, c'est que cela comprenait le personnel normal que l'on peut retrouver dans une direction générale au ministère de la Santé et des Services sociaux.

M. Bélisle: Savez-vous combien il y a de personnes à la direction générale qui procèdent, non pas à la planification des besoins futurs, mais à l'évaluation? Au bas de la page 245 de votre rapport... Combien y a-t-il de personnes qui évaluent les performances des 800 établissements? Combien y en a-t-il?

M. Roberge: Pour vous le dire, il faudrait à ce moment-là... Ici, je n'ai pas la réponse à votre question.

M. Bélisle: Vous voyez, le ministère de la Santé et des Services sociaux est tellement complexe et tellement gros que la réponse serait difficile à obtenir. La réponse n'est pas évidente. Alors, le point que je fais, M. le Vérificateur général, et que j'ai fait depuis le départ, c'est que j'aime autant avoir un gros problème scindé en petits problèmes, pour avoir un meilleur contrôle.

Je vais passer à un autre point parce que je sais que mon temps court et j'ai beaucoup de choses à ajouter. C'est évident, comme vous l'avez dit, M. Roberge, qu'en 1987 le gouvernement actuel a fait des efforts importants pour systématiser, pour régler le problème des déficits des hôpitaux. Vous le dites dans votre rapport en page 247. C'est excellent. Le gouvernement vous a écouté. Encore une fois on vous écoute, le gouvernement du Parti libéral vous a écouté. Il y a eu une injection de 133 000 000 $, 14, 28 %. C'est dans votre rapport, à la page 247. Mais il y a une question qui me préoccupe et j'aimerais connaître la réponse: Est-ce que le fait que les déficits dans les hôpitaux sont maintenant réglés... C'est-à-dire que là on semble leur dire: Essayez de prendre les revenus qu'on vous donne avec les revenus autonomes que vous avez, versus vos dépenses, puis essayez d'en arriver à zéro, à ne pas faire de déficit annuel. M. Roberge, d'après votre vérification sur le terrain, est-ce un objectif qui est accepté de bonne grâce par les centres hospitaliers, par les établissements. Est-ce reconnu comme étant un objectif valable ou si on se dit simplement que c'est le ministère, c'est le gouvernement, et que s'il manque de l'argent on en mettra dedans.

Le Président (M. Lemieux): Parle-t-on de l'équilibre budgétaire, M. le député de Mille-îles?

M. Bélisle: On parte de l'équilibre budgétaire des différents états financiers, différents budgets de tous les 800 établissements qui sont là. Est-ce que vous avez perçu sur le terrain une volonté de dire: Oui, depuis 1987-1988, le gouvernement du Parti libéral a réglé le problème des déficits et maintenant, il faut s'aligner chaque année sur le fait d'être des administrateurs rigoureux et sévères de l'enveloppe qui nous est donnée.

Le Président (M. Lemieux): Pour reprendre en sous-question, il parle de volonté, avez-vous vu aussi sur le terrain un changement au niveau de la gestion depuis qu'ils ont à atteindre l'équilibre budgétaire?

M. Roberge: Ici, à la page 247, ce que l'on expose en fait, ce sont les données financières ou la représentation financière de ces établissements depuis quelques années. On note que le ministère a essayé d'améliorer la situation financière de son réseau d'établissements. C'est factuel, c'est ce qu'on a vu. Quand vous me demandez s'il y a une volonté de continuer à améliorer cette santé financière, la seule chose que je peux vous dire c'est que les faits sont là. D'une part, la situation financière est meilleure ici; d'autre part, il y a une volonté, bien sûr, pour le ministère, de forcer les établissements à atteindre l'équilibre budgétaire. C'est ce que l'on voit dans les directives que le ministère transmet aux établissements.

M. Bélisle: M. Roberge, ce n'est pas le ministère.

Le Président (M. Lemieux): M. le Vérificateur général.

M. Bélisle: On est assurés que le ministère actuel, la ministre actuelle et le gouvernement actuel ont une volonté que ce soit inspecté, mais l'évaluation c'est aussi l'autre bout de la ligne. L'autre bout de la ligne c'est celui qui reçoit le budget d'établissement et qui le dépense. Quand on me parle d'évaluation et du processus d'évaluation, il faut aller jusqu'au bout de la ligne. Je veux savoir, finalement, ceci M. Roberge. Avez-vous vérifié, dans le cours de votre enquête, de votre inspection, de votre cheminement intellectuel, si les établissements comprenaient maintenant que la rigueur administrative et le déficit zéro l'équilibre financier parfait, c'est compris, c'est accepté comme règle?

Le Président (M. Lemieux): M. le vérificateur, vouliez-vous ajouter quelque chose?

M. Châtelain: D'accord. Je pense qu'on ne peut pas répondre spécifiquement à la dernière question du député, parce que notre travail, nous l'avons fait essentiellement auprès du

ministère. Nous avons constaté que le ministère avait mis beaucoup d'ordre quant au règlement des déficits. Maintenant, comment cela est-il accepté par les institutions? On ne peut pas se prononcer. Nous ne sommes pas encore allés aux institutions elles-mêmes. Alors, de quelle façon les directeurs généraux perçoivent-ils cette nouvelle approche du ministère? On ne peut absolument pas se prononcer.

Le Président (M. Lemieux): II n'y a aucune vérification intégrée de faite. Est-ce que vous avez l'intention d'en faire?

M. Châtelain: Absolument pas auprès des institutions. Ce que nous avons fait, cette année, c'est une vérification auprès du ministère et surtout en ce qui concerne l'allocation des subventions, c'est-à-dire quelles sont les études faites auprès du - ministère avant que les subventions soient allouées aux institutions et quel contrôle est exercé par la suite. Mais on s'est limité à ça. Nous nous sommes restreints tout simplement à l'étude en ce qui concerne le ministère.

M. Bélisle: M. le Vérificateur générai, je sais que mon temps s'écoule rapidement, c'est toujours le cas à l'Assemblée. Il y a quelque chose qui m'a estomaqué dans la section des services de santé et services sociaux. C'est à la page 251. J'aime vous indiquer la page de votre rapport, parce que ça vous donne l'occasion de regarder et de répondre avec plus de précision aux commentaires que je vous fais; 14. 50: Évaluation de la performance des établissements. Je vais vous citer le passage de votre rapport: "Dans notre rapport annuel à l'Assemblée nationale de 1984 - il faut le faire; c'est il y a cinq ans - nous avions souligné le mérite qui revenait au ministère d'avoir développé au fil des ans une méthode d'évaluation de la performance des centres hospitaliers. "Le ministère pouvait ainsi estimer pour chaque établissement la productivité relative des ressources qui lui étaient allouées. " C'est quand même important; c'est 4 600 000 000 $. "Cette méthode fut cependant abandonnée à la même époque, sa validité étant remise en cause, autant par les gestionnaires des établissements que par ceux du ministère. " J'aimerais avoir des éclaircissement là-dessus. Est-ce que quelqu'un pourrait m'expliquer quelles sont les raisons pour lesquelles on a abandonné un système de comparaison de performance ou d'analyse de performance d'un établissement hospitalier. C'est une chose absolument essentielle.

M. Roberge me fait signe que oui. Est-ce que c'est oui, cette fois-là?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Roberge: Écoutez, je pense que...

M. Bélisle: Ah, c'est non?

M. Roberge: Non. Bien, non, oui.

M. Bélisle: Ah, c'est oui?

M. Roberge: Est-ce que je peux répondre?

Le Président (M. Lemieux): On va vous donner le temps.

M. Roberge: Vous dites que c'est une méthode d'évaluation qui vous semble essentielle, parce que c'est un budget de 4 700 000 000 $. On le pensait aussi en 1984, lorsqu'on soulignait le mérite qui revenait au ministère d'avoir développé cette méthode. On dit qu'elle fut abandonnée à la même époque, sa validité étant mise en cause. Ce qui est arrivé, en fait, c'est que des gestionnaires du ministère et des établissements ont relevé des déficiences dans cette méthode ou dans son application dans sa comparabilité entre les différents établissements qui ont parfois des activités de nature différente et, c'est sûr, elle n'était pas parfaite.

Maintenant, le ministère en était conscient et, actuellement, des travaux sont en cours pour essayer d'améliorer cette méthode et, un jour, de pouvoir avoir des rapports d'évaluation sur les établissements.

M. Bélisle: Quant à moi, M. le Vérificateur général, c'est un outil fondamental de gestion qui, je l'espère, en tout cas, je le souhaite, devrait exister le plus rapidement possible. Mais je me demande comment on peut administrer un mammouth ou un dinosaure de 9 400 000 000 $ si on n'a même pas de grille d'évaluation comparative de l'hôpital Saint-Luc face à l'hôpital Laval à Québec, etc. Que ce soit au moins par secteur ou département, que ce soit la cardiologie analysée par rapport à la cardiologie à l'Institut de cardiologie de Montréal ou que ce soit la maternité de la Cité de la santé analysée par rapport à un autre département de maternité, j'y perds mon latin jusqu'à un certain point, parce qu'on ne pourra jamais porter de jugement d'efficacité sur le système si on n'a pas un système d'évaluation comparatif sur la performance. Comme dirait mon ami - comment s'appelle-t-il le fameux enquêteur - Élémentaire, mon cher Watson! Disait Sherlock Holmes. (12 heures)

Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le député de Mille-Îles, vous avez terminé. M. le député de Bertrand.

M. Parent (Bertrand): Oui, M. le Président. Je vais poursuivre durant quelques minutes dans le ministère de la Santé et des Services sociaux parce que plusieurs points qui ont été soulevés faisaient partie des questions que je me posais et un peu dans la même foulée... Si l'on se promène d'un ministère à l'autre, on risque d'en perdre

notre latin; alors, je vais essayer de liquider la partie, même si ma collègue en a fait un bout. Dans la dernière lancée du député de Mille-Îles, à la page 251 sur la question d'évaluation de la performance, pourquoi - et je prends cela à titre d'exemple, mais je le retrouve à quelques autres endroits à l'intérieur de votre rapport - si le Vérificateur général pensait et pense depuis 1984 que c'est une bonne chose, ne le met-on pas comme recommandation pour vraiment porter à l'attention des élus et à l'attention du gouvernement et faire, jusqu'à un certain point, une forme de pression... Pourquoi dans ce cas-là n'a-t-on pas fait une recommandation dans le sens qu'il serait hautement recommandable de considérer cela et d'aller dans ce sens-là?

M. Châtelain: M. le Président, en réponse à cette question, je pense que je pourrais donner une réponse générale pour commencer. Quand on parie d'évaluation de la performance, on parle surtout de l'évaluation des programmes et de l'évaluation de l'efficacité. Éventuellement, on veut faire une étude sur l'ensemble des systèmes mis en place au gouvernement, justement sur l'évaluation de leur efficacité, et à ce moment-là on se penchera beaucoup plus sur divers aspects de ce que vous soulevez, M. le député. On fera des recommandations précises, mais qui seront d'application générale, vous savez, pour l'ensemble du gouvernement. Alors, nous ne nous sommes pas encore donné de mandat spécifique sur l'évaluation de l'efficacité comme telle ou sur l'évaluation de programmes; cela va venir. Cependant, ici, évidemment, nous avons fait référence au fait qu'il y avait un système à un moment donné, que le ministère a laissé tomber en cours de route. On me dit que le système ne fonctionnait pas très bien et c'est peut-être la raison pour laquelle on l'a laissé tomber, il était peut-âtre un peu trop théorique. Maintenant, pourquoi n'avons-nous pas fait de recommandation ici, spécifiquement à ce sujet-là? C'est parce que, comme on le souligne au paragraphe 14. 51, le paragraphe suivant, des travaux sont actuellement en cours au ministère, en vue de développer des systèmes d'information sur l'évaluation de la performance et on n'a pas jugé utile d'avoir à faire la recommandation parce que le ministère faisait les études; donc, la recommandation n'était pas nécessaire dans ce cas spécifique.

M. Parent (Bertrand): D'accord, mais toujours de façon générale et en prenant cet exemple-là sur le spécifique, je me dis qu'il serait tout à fait opportun que vous puissiez, en tant que Vérificateur général, lorsque vous trouvez qu'il manque un système de contrôle, qu'il s'agisse de l'évaluation des ressources humaines ou du système, de la santé ou ailleurs, faire la recommandation vraiment claire à savoir qu'on devrait être capable... et l'année suivante, revenir à la charge si cela n'a pas été fait. À mon point de vue, dans le courant normal des activités, au rythme où cela se déroute, il est bien sûr que là, à l'article 14. 51 vous dites que des travaux sont en cours comme dans d'autres secteurs et on s'aperçoit que des améliorations sont en train d'être faites; mais demain matin, s'il y a un changement de ministre ou des changements à l'intérieur du ministère ou un changement de gouvernement... Vous savez il n'y a pas toujours cette espèce de continuité, et le seul qui a un peu de mordant, c'est le Vérificateur général qui, année après année, peut reporter cela à l'attention de... Quant à moi, j'y verrais là davantage de mordant si, dans votre rapport, vous puissiez être plus catégorique quant à ce genre de recommandations si, à la lueur de l'analyse que vous en faites, vous trouvez que c'est un manque et que vous trouvez même que, par exemple, dans ce cas-là, en 1984, il y avait effectivement quelque chose qui avait été amorcé; peut-être que c'était trop théorique, je ne le sais pas, mais ce que je veux dire, c'est que le principe demeure là.

Toujours à l'intérieur des services du ministère de la Santé et des Services sociaux, je prends, par exemple, le paragraphe 14. 80 à la page 255. Vous soulevez le fait et vous faites une recommandation à savoir que le ministère devrait prendre toutes les mesures pour que cessent dans les établissements des pratiques que les gens ont eux-mêmes identifiées comme étant illégales. On se souviendra que dans le rapport antérieur de l'année 1987 et même de l'autre avant, des pratiques illégales étaient pointées du doigt. Maintenant, il y a des commentaires de la part du ministère que vous soulevez: Le ministère reconnaît qu'il doit poursuivre ses efforts visant à régulariser dans les établissements des pratiques jugées illégales.

Il me semble qu'on est en train de glisser. On avait pointé des choses du doigt. On avait pointé des illégalités et je pense qu'elles ne sont pas corrigées au moment où l'on se parle. Donc, je me pose la question. Il aurait dû y avoir, sur ce point que je prends à titre d'exemple, une analyse plus poussée pour savoir jusqu'à quel niveau ces irrégularités se continuent actuellement et d'y aller de façon plus catégorique quant à vos recommandations pour qu'elles cessent une fois pour toutes. Mais, dès que cela a été rapporté et pointé du doigt à une première reprise, il n'est pas normal que deux ans plus tard on se retrouve encore avec de bons voeux du ministère qui dit qu'il reconnaît qu'il faut qu'il continue à faire des efforts. C'est un voeu pieux.

Sur ce cas spécifique, vous aviez pointé des choses du doigt et elles se continuent. Je pense qu'il y aurait lieu qu'il se passe finalement quelque chose. J'aurais aimé voir dans votre rapport sur ce suivi de dossier, des faits rapportés très précisément et voir où on en est dans ces pratiques.

M. Châtelain: M. le Président, évidemment, U s'agit ici de deux études différentes d'une année à l'autre auxquelles on fait référence. On retrouve le même problème, c'est-à-dire le problème qu'on avait soulevé lors de l'étude. Je pense bien que c'est la vérification d'optimisation des ressources que nous avions faite à la Régie de l'assurance-maladie du Québec. C'est à cet endroit qu'on avait soulevé ces problèmes. Ici, nous les avons revus mais en ce qui concerne le ministère.

Prenons la vérification que nous avions faite l'an passé. Éventuellement, nous allons exercer un suivi sur cette vérification, mais nous laissons toujours un certain temps s'écouler avant d'exercer ce suivi, peut-être deux ou trois ans et c'est ce que nous ferons sur les constatations spécifiques que nous avions faites l'an passé.

Cependant, ici, nous les avons vues d'un autre côté. Nous les avons vues en ce qui concerne le ministère. Mais il y a quand même une chose assez consolante. L'an passé, quand nous avions soulevé ces faits, l'organisme gouvernemental en question n'acceptait pas d'emblée nos commentaires à ce sujet. M n'acceptait pas, justement, nos constatations comme telles. Au moins, nous notons déjà un certain progrès. En ce qui concerne le ministère, on les accepte maintenant. On semble accepter nos constatations et nos recommandations parce que le ministère, dans sa réaction, fait ressortir, justement, qu'il va prendre action de ce côté. Nous allons exercer ce suivi mais normalement on n'exerce pas l'année suivante un suivi sur nos constatations. Nous attendons quand même deux ou trois ans avant de pouvoir exercer un suivi pour permettre, évidemment, au ministère ou à l'organisme en question de prendre action et pour que nous puissions constater ce qui s'est réalisé dans les faits.

Présentation de l'information financière du gouvernement

M. Parent (Bertrand): J'aimerais, en terminant, et avant de passer à autre chose, suggérer quelque chose. Est-ce qu'il ne serait pas possible ou pensable, M. le Vérificateur général, d'avoir dans le prochain rapport, au 31 mars 1989, une section qui pourrait être un résumé sous forme de tableau qui pourrait nous dire: À l'intérieur du ministère de la Santé et des Services sociaux, il y avait 8, 10, 12 ou 20 points rapportés, mais de façon très synthétique, ce qui fait que sur quelques pages 8,5 X 11, nous aurions un, deux ou trois ans après, une espèce de taux de réalisation, de pourcentage par rapport à vos recommandations. Cela aurait comme effet que chacun des ministères verrait très bien que ce n'est pas dans des phrases à droite et à gauche et un peu perdues parfois dans ie texte, mais cela pourrait avoir une espèce de fiche d'analyse qui ferait en sorte que ces points précis seraient suivis année après année et qu'il deviendrait assez gênant que la deuxième ou troisième année soit encore pointée du doigt comme étant un problème non réglé et les problèmes pourraient être quantifiés. Alors, j'aimerais retrouver cela parce que vous savez qu'on fait l'exercice un peu plus en profondeur; mais encore là, beaucoup de choses nous échappent. Oui, mais de mémoire, cela s'est passé telle ou telle année. Et comme vous le dites, des fois, vous passez deux ou trois ans où vous ne revenez pas immédiatement à la charge. S'il y avait cette espèce de fiche, de suivi par le ministère des points qui ont été portés à votre attention, où il aurait dû y avoir des correctifs, il me semble drôlement important qu'à ce moment-là les ministères se sentent vraiment suivis. Le travail des parlementaires, de même que celui des médias qui suivent cela pourraient être facilités; ils pourraient mieux codifier les correctifs. Parce qu'un des bons signes de la gestion du gouvernement et au ministère est de savoir s'il y en a qui se préoccupent de ceux qui ont pointé des choses du doigt. Si on était capables d'avoir ça mais de l'avoir en suivi, comme je le dis, colonne après colonne, année après année. J'en fais la suggestion.

M. le Président, j'aimerais que le vérificateur nous parle un peu des commentaires que j'ai faits au départ, quel est son point de vue sur toute question des nouvelles présentations des règles comptables dans le sens dont j'ai parlé ce matin mais particulièrement ce qu'on retrouve au chapitre des dépenses additionnelles? Je n'ai pas entendu ses commentaires et cela me semble important, d'autant plus que dans les comptes publics publiés en novembre 1988, on avait, dans les notes additionnelles, les observations du Vérificateur général. À la page 42 des comptes publics 1987-1988, volume 1, on avait la note suivante: L'anticipation de cet amortissement - dont il a toujours été question depuis ce matin dans ma présentation et qui me préoccupe au plus haut point - nuit à la comparabilité des états financiers et rend difficile pour l'électeur la compréhension de l'évolution du déficit d'une année financière à l'autre. Pour assurer la continuité dans l'information financière, il est souhaitable que les conventions comptables utilisées par le gouvernement pour fins de présentation des états financiers ne subissent pas de modifications ponctuelles dans leur application d'une année financière à l'autre.

À mon avis, c'est une petite note comme ça qui se retrouve à la fin d'un paragraphe mais qui donne tout son sens à cette préoccupation qui fait en sorte que si on continue cette pratique, je vous dis qu'on ne s'y retrouve plus. Pour ma part, je trouve cela extrêmement important pour être capable de dire à quoi on se réfère et où nous en sommes rendus. J'aimerais vous entendre là-dessus parce que j'y ai passé une quinzaine de minutes de présentation et on a embarqué finalement sur des sujets spécifiques. Cela me

semble, en tout cas, un problème de fond sur lequel J'aimerais vous entendre et avoir la chance de discuter et même de continuer cet après-midi si le temps le permet.

Le Président (M. Lemieux): M. le vérificateur.

M. Châtelain: M. le Président, je ne peux qu'appuyer d'emblée les commentaires du député à ce sujet Comme nous le déplorons évidemment dans nos observations sur les états financiers, un tel procédé fait en sorte que les états financiers manquent de comparabilité d'une année à l'autre. Nous n'avons pas fait de restrictions dans notre opinion sur les états financiers à ce sujet pour deux raisons. Premièrement, dans les états financiers mêmes, dans le résultat des opérations de l'année, le gouvernement a fait ressortir qu'il s'agissait de dépenses additionnelles. Donc, le gouvernement les a identifiées juste à la dernière ligne avant le montant du déficit de l'année. Il y avait donc une divulgation. D'autre part, le gouvernement anticipait cet amortissement qui normalement, selon ses conventions comptables, aurait été appliqué aux années suivantes et posait un geste qui allait dans le sens des recommandations du Vérificateur général, mais il faut s'entendre. Le Vérificateur général a déploré dans le passé que les obligations envers les régimes de retraite n'étaient pas amorties assez rapidement. Donc, en anticipant évidemment, on augmentait l'amortissement de cette année-là et cela allait dans le sens des recommandations du Vérificateur général. Donc, on ne pouvait qu'applaudir ce geste. Mais cela au chapitre des conventions comptables ou ce que nous visons dans les conventions comptables, il y a cet accroc cependant au grand principe qui veut qu'il n'y ait pas de changement dans les conventions comptables de façon ponctuelle d'une année à l'autre parce que cela défait évidemment la comparabilité des états financiers. C'est pour cela que nous l'avons déploré dans les observations mêmes, si bien que, pour l'année qui s'est terminée le 31 mars 1988, le montant amorti aux fins des régimes de retraite est supérieur à celui qui aurait été amorti normalement. Le montant qui sera amorti durant l'année subséquente, nous ne le connaissons pas encore parce que le gouvernement peut encore changer sa convention comptable de façon ponctuelle, mais, normalement, le montant serait diminué pour l'année subséquente. (12 h 15)

C'est encore plus évident lorsqu'on regarde les paiements faits aux assistés sociaux. Le treizième paiement, par exemple. Nous ne disons pas que ce geste est illégal parce qu'il est permis par la loi, mais sur le plan comptable cependant, c'est une autre chose. L'imputation elle-même est légale; quand on dit l'imputation, cela a été imputé cette année-là au point de vue comptable. C'est légal, on ne peut donc pas dire que c'était illégal. La Loi sur l'administration financière le permettait; la loi qui prévoit le versement d'allocations de services sociaux le permettait également. Durant une année, les paiements aux assistés sociaux représentent des paiements de treize mois. Pour l'année subséquente, il y aura normalement des paiements pour onze mois. Cela devient évident que la comparabilité est détruite d'une année à l'autre. C'est ce que nous déplorons dans nos observations sur les états financiers.

M. Parent (Bertrand): On se comprend à ce sujet. Vous dites que, sur l'objectif visé, on est d'accord. Dans le cas du régime de retraite, vous aviez pointé certaines choses du doigt. A partir du moment où le gouvernement pose des gestes à ce sujet, vous dites: Bravo! Cependant, même si on va dans ce sens, je déplore cette façon de faire, même si elle est à l'intérieur de la légalité; comme vous le mentionniez, ce sont des gestes dits illégaux, mais ces gestes ne sont pas suffisamment transparents pour les mettre en perspective comparable.

Je me demande jusqu'où peut aller ou ce que peut y faire le Vérificateur général. D'abord, vous êtes la seule personne qui peut rétablir un peu les faits pour remettre les choses dans leur contexte. Vous savez qu'on dit aujourd'hui que le déficit du Québec est rendu à 1 600 000 000 $. Je veux bien, mais 1 600 000 000 $ par rapport à ce qu'il était avant; c'est relatif. Il est à 1 600 000 000 $ par rapport à ce qu'il était, soit 3 000 000 000 $, dit-on, il y a trois ans. Si tout ça est sur une même base comparative, je dis: Bon, cela va; vous l'endossez et c'est parfait. Les états financiers sont là. Sauf que les chiffres sont interprétés de façon comparative et là on est en matière de finances publiques et de capital politique, qu'on le veuille ou non. On peut faire beaucoup d'extrapolation indiquant qu'on a diminué le déficit et que les finances publiques se sont beaucoup améliorées, sauf que, si dans les faits - toujours à partir de cet exemple-là - sur la base comparative, ce n'est pas exact, alors, tout le monde s'est fait leurrer finalement.

Dans mon rôle à l'Opposition, je suis convaincu que ce n'est pas exact parce que je remonte la filière et je suis capable d'aller au plan des comparatifs. L'année passée, on a démontré que vous aviez endossé que, sur une base comparative, durant l'année de changement, le déficit, plutôt que d'être de 3 100 000 000 $, était de 2 900 000 000 $ ou de 3 000 000 000 $ et qu'il n'avait donc, à toutes fins utiles, pas changé. Vous savez que c'est assez dramatique à voir parce que plus on s'éloigne du point où I y a eu des changements dans les règles comptables, plus viennent s'ajouter d'autres éléments maintenant que l'on joue avec les règles - je dis joue, entre guillemets, c'est-à-dire que l'on fait des pratiques comptables comme les avances faites cette année - et plus les états financiers

ne veulent rien dire. C'est dans ce sens-là que je disais ce matin au Vérificateur général, dans mon introduction: Je veux bien qu'on y aille avec de nouvelles règles du jeu et qu'on prenne les résultats de toutes les sociétés d'État, les bonnes, les mauvaises et qu'on les consolide pour avoir un meilleur portrait mais, là, on est en train de se faire jouer un tour dans l'autre sens, c'est-à-dire que je n'ai pas l'impression, et j'ai même la conviction qu'au 31 mars 1988, le portrait que j'ai n'est pas un portrait fidèle. S'il ne l'était pas avant, il l'est encore moins là. On n'a pas le portrait fidèle de ce que c'est, surtout pas que vous êtes capable de faire suivre d'une année à l'autre ce que j'appelle le comparable. Vous nous disiez, l'année passée, que vous le faisiez pour l'année de transition mais, dans deux ou trois ans on ne peut pas être capable de remonter. Oui, mais c'est quand même assez grave. Où en est-on rendu en termes de déficit parce qu'on a changé les règles comptables? Sur papier, on est rendu à la moitié de ce qu'on était il y a trois ans. Comme j'ai dit au ministre des Finances, hier: Écoutez, c'est excellent, bravo, si ce sont les vrais chiffres - moi, je n'en suis pas convaincu - et continuez encore trois ans et 1 600 000 000 $, il n'en restera plus, bravo! Je pense que ce n'est pas ainsi non plus que ça marche. Dans ce sens, je demande - oui, J'ai terminé - au Vérificateur général: Qu'est-ce qu'il est possible de faire pour rétablir les choses dans leur contexte et éviter particulièrement... Des gestes ont été posés, par exemple, dans le cas des 840 000 000 $ l'année passée et des 625 000 000 $ dans le sens contraire cette année. On en est rendu à avoir de la difficulté à avoir la vraie lecture.

Le Président (M. Lemieux): M. le Vérificateur général.

M. Châtelain: J'ai le temps de répondre, M. le Président?

Le Président (M. Lemieux): Oui, allez-y.

M. Châtelain: D'accord. Évidemment, le député a touché à divers aspects. Quand j'ai parié de la légalité ou de la conformité, on aime mieux employer le mot "conforme" quand on parle d'états financiers de la présentation, etc. Il y a deux choses là-dedans. Nous avons dit que c'était conforme, que c'était légal ou conforme aux lois, l'imputation elle-même. C'est vrai, c'était strictement conforme aux lois, l'imputation; j'ai bien dit l'imputation. Il y a un autre aspect que j'ai mentionné et que je mentionne également dans la partie 1 du rapport, lorsque je discute de l'information de l'Assemblée nationale.

Vous parlez d'imputabilité. Vous avez demandé: Quelle information avons-nous à l'Assemblée nationale quand nous avons ça? Eh bien, je pense que l'ai fait ressortir que bien qu'il s'agissait de crédits permanents, qui n'ont pas à être votés par l'Assemblée nationale, ces crédits, c'est-à-dire la demande de crédits, même s'il s'agit de crédits permanents doit paraître dans les prévisions budgétaires qui sont déposées à l'Assemblée nationale. Je pense que j'ai fait ressortir à ce sujet que l'article 39 de la Loi sur l'administration financière n'avait pas été respecté, parce que l'Assemblée nationale, on parle toujours d'imputabilité, n'avait pas été avisée, avant la fin de l'année financière, du montant complet qui serait imputé. L'imputation elle-même est légale, mais l'avis qui avait été donné à l'Assemblée nationale n'avait pas été donné complètement. L'Assemblée nationale n'avait pas été avisée complètement du montant qui serait éventuellement imputé, bien que celui-là était légal. C'est un aspect de l'imputabilité ou de l'information, si vous vouiez, du Parlement.

Concernant la comparabilité des états financiers d'une année à l'autre, lorsqu'il y a des changements dans les conventions comptables, les règles veulent que les chiffres de l'année précédente soient redressés pour assurer cette comparabilité. C'est ce que le gouvernement a fait, mais non pas dans les comptes publics comme tels. Dans le document qu'on appelle maintenant Rapport financier... Je pense que ce document a changé de titre, on l'appelait auparavant Fascicule des états financiers. Les chiffres ont été redressés ici. Les résultats des années précédentes ont été redressés pour refléter les modifications des conventions comptables comme si elles avaient été appliquées rétroactivement depuis le début. Là, la comparabilité est assurée dans ce document.

Mais je suis d'accord avec le député que ça rend quand même la comparabilité difficile si on est obligé de faire référence à des documents comme celui-là pour faire le lien avec les résultats qui avaient été communiqués dans le passé. D'autre part, nous avons fait un exercice à partir de ce document pour essayer d'identifier quels étaient les changements qui étaient dus, c'est-à-dire les changements dans les résultats, justement aux modifications des conventions comptables. On a le document. Si vous êtes intéressés à l'avoir, nous l'avons. Cela fait ressortir les différences dans les résultats qui proviennent justement de ces changements et de quel niveau ces différences proviennent? Évidemment, il y en a qu'on ne peut pas quantifier.

Par exemple, le fait que le gouvernement inscrit maintenant tous les comptes à payer à la fin de l'année. On ne sait pas quel aurait été le montant des comptes à payer qui n'aurait pas été inscrit. On ne le sait pas, ils sont tous inscrits. On ne peut pas établir le montant de ce qu'aurait été le résultat. La variation proviendrait de la différence d'une année à l'autre, entre le montant inscrit au début de l'année et le montant inscrit à la fin de l'année. On ne peut pas la déterminer. Une autre chose qu'on ne peut pas déterminer non plus c'est, si le gouvernement

avait fonctionné selon les anciennes conventions comptables, aurait-il posé certains gestes qu'il a posés? Cela non plus on ne le sait pas. On ne peut pas l'assumer. Mais nous, comme vérificateur, évidemment, on regarde les faits, on regarde ce qui s'est fait. On ne peut pas assumer ce qui aurait été fait. Mais nous avons un document qui fournit peut-être une information additionnelle quant à l'influence, si vous voulez, que les conventions comptables ont eue sur les résultats ou sur les états financiers. Nous avons ce document. Cela fournit tout simplement une information qui est disponible à divers endroits, mais nous, nous l'avons regroupée dans un document.

Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le Vérificateur général. Simplement en ce qui a trait à la présentation de l'information financière du gouvernement, il est peut-être important de regarder si, d'une manière concrète, le gouvernement a apporté des améliorations aux pratiques de gestion financière et à la présentation des états financiers comme tels. Pour ce qui est des conventions comptables, M. le Vérificateur général, vous avez entériné en partie - je me souviens de votre dernier rapport annuel - la pratique de notre gouvernement. Mais, au-delà de tout cela, d'une manière concrète, je me suis amusé à dresser une liste des améliorations qui ont été apportées par le ministère des Finances et le contrôleur des finances à la pratique de la gestion financière et à la présentation des états financiers. C'est ce qui me fait dire que l'audition du Vérificateur général a des résultats même en ce qui concerne le contrôleur des finances et le ministère comme tel.

Je vous en lis quelques-unes: Les comptes rendus deviennent de plus en plus complets et pertinents et reflètent la volonté d'améliorer la pratique de gestion. Pensons aux inscriptions des comptes à payer en fin d'année, aux inscriptions des placements en actions dans ces entreprises et à la valeur de consolidation selon une méthode modifiée de comptabilisation. Il y a aussi une démarche qui est faite vers une présentation plus fidèle des obligations du gouvernement et vous l'avez soulevé souvent dans votre rapport. En ce qui concerne les régimes de retraite, il y a un amortissement additionnel en 1987-1988. Cela constitue quand même un effort de rattrapage du passif non Inscrit au titre des régimes de retraite. Il y a aussi le plein coût pour le service courant de tous les régimes qui est inscrit aux dépenses. Il y a les intérêts non comptabilisés sur le RREQOP qui sont amortis sur la durée estimative du reste de la carrière active des participants au régime. Il y a les obligations non comptabilisées relatives au service antérieur des participants. Il y a les prises en compte à compter de 1989-1990 de l'écart d'expérience entre le taux de référence de la détermination des hypothèses de rendement des évaluations actuarielles et le taux d'intérêt imputé sur le solde de compte du passif. Et pour la première fois en 1987-1988, vous avez un état de l'emploi des crédits qui accompagne le rapport de l'excédent des dépenses sur les crédits. On se rend compte, en termes concrets et pratiques, depuis 1986-1987, que les conventions comptables ont été améliorées pour qu'on s'approche davantage de la vraie réalité de l'image financière la plus exacte possible.

La question que j'aurais à vous poser... Au moment où on se parle, quel geste le plus concret et le plus pratique, d'après vous, selon votre analyse, le gouvernement devrait-il faire quant à la présentation de l'information financière, eu égard à toutes les améliorations qui ont été faites depuis environ trois ans? Il ne faut pas se le cacher et je ne veux pas faire de la petite politique. Je pense que le député de Bertrand a assez de profondeur et d'ouverture d'esprit pour comprendre qu'il s'agit d'un constat et d'un état de fait. Quel type d'information serait la plus utile possible, devrait apparaître à l'information financière du gouvernement, au moment où l'on se parle?

M. Châtelain: Nous le faisons déjà ressortir dans notre rapport. Il est évident que la réforme que le gouvernement a faite dans les conventions comptables depuis trois ans constitue une amélioration sensible. Cette réforme fait suite - je ne dis pas que c'est pour cela que la réforme a été faite - aux recommandations du Vérificateur général dans beaucoup de cas. Nous déplorons encore le fait que la présentation de l'information financière n'est peut-être pas parfaite et pourrait être améliorée sensiblement encore. Nous le faisons ressortir surtout sur deux aspects dans notre rapport. Premièrement, il s'agit des obligations relatives aux régimes de retraite. Ce sont des dettes réelles du gouvernement, bien qu'elles devront être payées dans des années encore peut-être assez éloignées. Il s'agit d'obligations réelles du gouvernement. Elles devraient être reflétées à la face même des états financiers ou, du moins, des mesures devraient être prises pour qu'une inscription soit faite de façon graduelle disons, mais plus conforme à la réalité, à la face même des états financiers. Je pense que ce n'est pas une invention de notre part de dire cela. Maintenant, l'Institut canadien des comptables agréés, par son comité de recherches sur la comptabilité et la vérification dans le secteur public, a justement publié une prise de position sur ce sujet et cela va exactement dans le sens de ce que nous recommandons depuis plusieurs années. C'est un aspect. L'autre aspect, c'est l'intégralité comme telle. Je fais abstraction de la comparabilité des états financiers d'une année à l'autre...

Le Président (M. Lemieux): D'accord. (12 h 30)

M. Châtelain:... cela se fait d'une façon ponctuelle, mais je parle, disons, dans l'ensemble.

L'autre aspect, c'est l'intégralité des états financiers. Il y a eu une amélioration sensible à ce sujet, lorsque le gouvernement a accepté ou a adopté une convention comptable voulant que les organismes et entreprises du gouvernement apparaissent maintenant aux états financiers sur la base de la valeur de consolidation. On tient compte maintenant, dans l'évaluation ou dans l'inscription de la valeur du placement, des résultats de ces entités. C'est déjà une amélioration et ça va dans le sens de l'intégralité des états financiers.

Mais ce qu'il manque maintenant, c'est que dans certains cas, comme le recommande maintenant l'institut canadien des comptables agréés, certains de ces organismes devraient tout simplement être purement consolidés avec les données du gouvernement. Il y en a qui devraient être consolidés comme tels, il y en a d'autres qui devraient apparaître, comme ils apparaissent dans le moment, sur la base de la valeur de consolidation. Alors, il reste ces deux aspects: les obligations envers les régimes de retraite, d'une part, et l'intégralité des états financiers, d'autre part, pour tenir compte de l'ensemble des activités du gouvernement, même dans ses organismes et ses entreprises.

Le Président (M. Lemieux): Ce qui apparaît dans votre rapport, d'ailleurs.

M. Châtelain: Oui.

Le Président (M. Lemieux): Cela va. M. le député de Bertrand.

M. Parent (Bertrand): Pour terminer sur ce volet - on pourra passer j'imagine à d'autres volets par la suite - M. le Vérificateur général, tantôt, vous nous parliez de gestes posés qui sont des gestes légaux mais qui n'ont pas suivi la procédure habituelle. Le cas qui n'a pas respecté l'article 39, comme vous le mentionnez à 3. 19 de votre rapport, à la page 23, "Bien que la dépense au titre des régimes de retraite soit pourvue par des crédits permanents, la Loi sur l'administration financière prévoit cependant, à l'article 39, l'obligation d'indiquer distinctement les crédits permanents dans les prévisions budgétaires. À notre avis, cette obligation n'a pas été observée dans le cas actuel, puisque la grande partie des crédits permanents requis pour l'amortissement accéléré n'a pas été incluse dans les prévisions budgétaires et déposées à l'Assemblée nationale. "

C'est soulevé, c'est dans un paragraphe qui se retrouve dans le rapport. Vous me permettrez de dire que je trouve ça grave et important parce qu'il y a une espèce de précédent qui est créé là. Il s'en est peut-être fait dans le passé, je ne connais pas tout l'historique, mais au cours de la dernière année, si je regarde et j'analyse ce qui s'est fait, II y a une anomalie qui a échappé aux membres de l'Assemblée nationale, parce que cela ne leur a pas été présenté, et parce qu'il y a eu des gestes de posés avec des idées précises derrière la tête. Quand le ministre des Finances a décidé de faire les présentations de cette façon, si on veut, après la fermeture dans le temps de l'année financière, je trouve que le Vérificateur général devrait, non pas seulement souligner un geste comme ça, posé par qui que ce soit, mais ne pas le laisser passer. À mon avis, cela constitue un précédent dangereux. Une fois qu'on l'a fait une année, on se dit qu'on n'a peut-être pas suivi la filière qu'on devait suivre, mais on est dans la légalité et à la fin, de toute façon, ça ne change pas grand-chose. Je dis que cela nous a amenés à changer le portrait. Si le Vérificateur général ne fait pas sévèrement cette remontrance et même s'il défend la répétition d'un tel geste, on se ramasse dans une situation où ce geste est posé et devient un précédent.

Cela me préoccupe parce que je suis un des 122 membres de l'Assemblée nationale. Je me dis qu'on n'a rien eu à dire; on a vu passer ça, on a dû subir ça. On a même avec ça changé, à la face, les chiffres. Alors, si c'est permis - on est en matière de comptes publics - imaginez-vous la dimension que ça peut comporter. Je ne suis pas comptable, sauf que je me dis: Est-ce que l'Institut canadien des comptables agréés l'ICCA, est d'accord avec de telles pratiques, même si elles sont jugées comme étant légales? Cela me pose toute la question du rôle du Vérificateur général dans le cas très précis de ce qui s'est passé là-dedans et qui fait en sorte qu'il est au même titre, à l'article 3. 19, que des milliers de recommandations que vous avez faites, les unes étant plus ou moins graves, d'autres étant beaucoup plus graves. Je trouve que cela est un élément très grave et ça ne doit pas passer inaperçu, cela doit éviter qu'il y ait répétition. À mon avis, le Vérificateur général a toute une responsabilité à ce niveau-là parce que s'il ne le fait pas, qui peut le faire? Qui peut le pointer du doigt? Qui peut dire, finalement, à quelque gouvernement ou à quelque ministre des Finances que ce soit: Écoutez, cela n'est pas correct de faire ça de cette façon-là? C'est là le premier volet.

Le deuxième volet que je voulais toucher sur ces présentations, c'est quand vous disiez tantôt: Écoutez, if y a une nouvelle présentation qui est faite et qui s'appelle maintenant Rapport financier ou quelque chose comme ça, dans laquelle on a suivi notre recommandation d'aller chercher le comparable. Sauf que, ce que je trouve de pas correct, c'est que si aujourd'hui vous dites: Nous demandons qu'il y ait un comparable pour qu'on puisse s'y retrouver, il faut aller plus loin que ça. C'est-à-dire que le comparable n'est valide qu'à une seule condition: II faut partir de ce qu'on avait avant le changement, donc les règles comptables telles qu'elles existaient en 1985-1986, les règles comptables antérieures, les règles du jeu. Il faut partir avec

ça et dire, s'il n'y avait pas eu ces modifications-là, de quoi le portrait aurait l'air aujourd'hui? Cela me semble fondamental.

Ce que fait le gouvernement, et à bon escient, c'est qu'il présente les choses comme il veut les présenter. Il fait un comparable mais un comparable qui dit: aujourd'hui les nouvelles règles comptables sont telles et si on avait eu dans le passé les nouvelles règles comptables, voici ce que cela aurait donné. Donc, on fait un comparatif rétroactif avec les nouvelles règles comptables mais appliquées dans le passé, appliquées cinq ans, dix ans en arrière. Mais ça ne veut plus rien dire parce que les chiffres connus, les chiffres qui étaient sur la place publique et le portrait qui était connu était un portrait qui disait: au 31 mars 1985 ou au 31 mars 1986, voici quel était le portrait de l'État. Voici quel était le portrait de... Mais comment pouvez-vous, en matière de revenus, parce que tous les revenus et toutes les dépenses sont corrigés rétroactivement avec votre nouvelle façon de faire la comparaison... Et ça ne donne pas la bonne base. La bonne base... Et là, dans mon livre, c'est le devoir du Vérificateur général - et si je suis dans l'erreur qu'on me le dise - de dire: Si on veut comparer, on va partir de ce qu'on avait avant. On va dire: Si les règles n'avaient pas changé, voici ce dont cela aurait l'air mais maintenant, c'est ça le portrait d'aujourd'hui. Mais ça me semble fondamental.

Le Président (M. Lemieux): M. le Vérificateur général.

M. Châtelain: Je comprends bien, M. le Président, pour employer un mot français, le "thrust" de la question du député, et je sympathise également avec cette position, dans le sens que l'information que nous avons aujourd'hui présente l'information selon les nouvelles règles comptables... Elle ne présente pas l'information selon les anciennes règles comptables. Mais qu'est-ce que vous voulez? En comptabilité, même selon les recommandations de l'Institut canadien des comptables agréés, il faut présenter l'information toujours selon les nouvelles règles comptables et redresser ou corriger, si vous voulez, les états financiers des années précédentes. Alors la comparaison ne peut se faire que dans cette direction-là et non pas dans les années à venir. On ne peut pas faire ça. Mais quand même, je sympathise avec la position qui est prise par le député dans le sens qu'il voudrait savoir quel était ou quel a été l'effet sur le montant du déficit de l'année en cours dû au changement des règles comptables. Mais les principes comptables ne fonctionnent pas comme ça, c'est d'une autre façon.

Cependant, comme je l'indiquais plutôt, M. le Président, nous avons fait le calcul mais à partir des données qui sont là. Remarquez bien qu'il n'y a rien de chinois là-dedans. Nous avons refait le calcul à l'inverse dans le sens que nous avons un tableau qui indique le résultat réel tel qu'il a été publié dans les états financiers lors de ces années-là et puis maintenant le résultat qui aurait été obtenu selon... Excusez-moi, c'est l'inverse. Les résultats qui ont été redressés mais les résultats qui auraient été obtenus selon les anciennes règles comptables pour montrer la différence. Je pense que ça va dans le sens de la question du député. Nous avons fait ce tableau-là. Il est disponible.

M. Parent (Bertrand): J'aimerais sûrement en avoir une copie. J'imagine que les autres membres de la commission aussi. Je ne sais si ça doit se faire formellement ou informellement. Je dis au Vérificateur générai que je ne m'accroche pas aux détails, mais ça m'intéresse. Parce que vous comprendrez que c'est fort important même si, comme vous le dites, les règles comptables veulent que cela se fasse de cette façon, je le veux bien, sauf qu'à ce moment, je vous dis que si on veut être capable de tenir un discours cohérent et de parler de ce qui se faisait il y a trois ans et quatre ans, que voulez-vous, c'est ça qui est, pour nous, quand même très important. Il faut être capable d'avoir ces bases comparatives.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Mille-Îles.

M. Bélisle: Sans vouloir mettre du vinaigre dans la sauce préparée par le député de Bertrand... J'ai écouté avec beaucoup d'attention ce qu'il disait et ce que vous disiez et ça me fait sourire quand même, parce que si je me rapporte à des événements qui...

Le Président (M. Lemieux): Je m'excuse, M. le député de Mille-Îles, le député de Bertrand n'a pas terminé.

M. Bélisle: II n'a pas terminé? Excusez-moi.

Le Président (M. Lemieux): Je pensais que c'était un léger commentaire, mais la parole est toujours au député de Bertrand. Il lui reste même dix minutes.

M. Parent (Bertrand): Écoutez, j'ai dit, sur ce point, ce que j'avais à dire, et on pourra passer à autre chose après, étant donné qu'il faut essayer de rendre l'utilisation du temps en séquences suivies, pour qu'on puisse s'y retrouver. Ce temps, on le mettra en banque pour tantôt. Si le député de Mille-Îles a des commentaires additionnels à faire là-dessus, il peut bien les faire...

Le Président (M. Lemieux): Oui, mais je voulais, avant, être certain que ça pouvait fonctionner, en ce qui vous regarde, puisqu'il vous restait dix minutes. Cela va, M. le député de Mille-Îles, on les emmagasinera.

M. Bélisle: Ce qui me fait sourire, c'est que ce problème n'est pas nouveau, M. le député de Bertrand. Non, mais permettez-moi... Je vais poser une question au Vérificateur général.

M. Châtelain, est-ce que c'est déjà arrivé, dans le passé, au cours des années où vous avez été Vérificateur général, que des processus comptables, conventions comptables, règles comptables, à part ce qui vient d'être modifié, ce qui semble, en grande partie, suivre vos recommandations, et où c'était difficile pour le lecteur qui regardait les états financiers et qui comparait 1982 à 1981 ou à 1978 ou à 1976 d'avoir la juste vision des choses? Est-ce que cela s'est déjà passé au cours de ces années?

M. Châtelain: Je ne comprends pas le sens de la question.

M. Bélisle: Le sens de la question, c'est qu'on semble dire que quand on fait une modification aux conventions comptables ou aux règles comptables, on a de la difficulté à retrouver le sens, le fil de la comparaison, à travers le temps. C'est cela le point, essentiellement. Bon, il semble que ce soit le point.

M. Parent (Bertrand): Si vous me le permettez, M. le Président, pour qu'on se comprenne bien, les modifications comptables qui ont été appliquées l'année dernière, à l'exercice financier 1987, sont des modifications comptables majeures qui changent le cours normal des présentations, et non pas quelques modifications mineures. Au cours des années - je suis sûr que le Vérificateur général pourra le dire - il y a eu des améliorations, mais qui ne venaient pas changer le cours normal et le portrait global. Ces modifications sont des modifications majeures, et c'est pour ça que ça change le portrait, qu'on le veuille ou non, dans le bon ou dans le mauvais sens. Je prétends que ça ne reflète plus, en tout cas dans le sens comparatif. Dans le passé, il y a eu des modifications, mais c'étaient des modifications mineures.

M. Bélisle: Vous savez, M. le Vérificateur général, en 1982, quand il n'y avait pas... Il n'y a pas toujours une consolidation des états financiers des différentes sociétés d'État, HydroQuébec, reliées avec le gouvernement du Québec et on ne peut pas tout mettre ça dans le même état financier, parce que je pense que c'est une de vos recommandations majeures dans votre rapport. Vous souhaitez, pour qu'on ait un vrai tableau de la situation, qu'on fasse un bilan consolidé des filiales et des sociétés d'État à part entière. Je pense que le fil historique de la comparaison, ça fait longtemps qu'il a été cassé, en 1982, quand il y a eu... Peut-être que l'absence de consolidation a permis à certains de prendre 4 200 000 000 $ à une place et de le "shifter" dans les états financiers du gouvernement. À ce moment-là, je vais vous dire quelque chose, c'était une modification majeure, en termes d'analyse. C'est impossible, pour quelqu'un qui n'a pas fouillé, quand on regarde les états financiers comparatifs du gouvernement - et je peux donner des tableaux au député de Bertrand, là-dessus - de comprendre ce qui s'est passé, entre 1981 et 1982, avec l'état du déficit, et c'est un des cas qui est peut-être le plus patent dans les finances publiques du Québec.

Je comprends et je souscris à ce que le député de Bertrand dit, qu'il faut, autant que possible, en règle générale... mais si on avait l'aspect de la consolidation, cela serait quelque chose d'important comme acquis, cela nous aiderait à comprendre, dans l'ensemble, parce que ça intégrerait tout au complet. Mais je pense qu'il ne faut pas aller jusqu'à dire que c'est la première fois que ça se passe. Cela s'est passé pour 4 200 000 000 $, en 1982, et il n'y a personne qui a fait de plat quant à la comparaison des états financiers entre 1978, 1976, 1972 et 1982 ou 1981, sauf qu'il y a eu des choses majeures qui se sont passées. (12 h 45)

Je note dans votre document que vous dites, d'une part, sur cela, et je vous cite à la page 23, le paragraphe 3. 16: "Le Vérificateur général s'est montré préoccupé ces dernières années du fait que le gouvernement n'inscrivait pas assez rapidement l'amortissement de ce passif non inscrit. Il appuie, donc, tout effort du gouvernement pour en accélérer l'inscription. " Vous vous souvenez des discussions qu'on a eues il y a deux ans sur le fonds de retraite où tout le monde était perdu? Vous vous souvenez de cela? Donc, cela est une modification qui est faite là. C'est difficile, au moment actuel, d'essayer de comparer avec 1978. Il n'y a pas de mesure de comparaison. Il ne faut pas s'étonner de cela. Il faut peut-être souhaiter que tout soit consolidé, que tout soit noté, que tout soit déclaré pour une totale transparence. Mais, nom de Dieu, if y en a qui ont fait des absences de transparence de 4 200 000 000 $ en 1982. Je vous passe un papier que si vous regardez les états financiers comparés du gouvernement, il faut trouver l'explication parce que cela ne s'explique pas tout seul.

Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le député de Mille-Iles. M. le Vérificateur général.

M. Châtelain: Oui, d'accord. M. le Président, je pense bien que, par exemple, dans le paragraphe 3. 16, on fait ressortir clairement que, comme je l'ai indiqué tantôt, l'amortissement accéléré qui a été fait, abstraction faite de la conformité de l'opération, aide à la comparabilité, d'accord, cela va évidemment dans le sens des recommandations du Vérificateur général. C'est sûr. Nous l'avons indiqué. Maintenant, concernant les chiffres redressés, les états financiers redressés d'une année à l'autre, je pense que dans le

document qui est donné ici, qu'on appelle maintenant Rapport financier et où on présente les données des dix dernières années, les chiffres ont tous été redressés pour tenir compte que depuis quelques années - trois ans, je crois - on tient compte de la valeur des placements dans les sociétés d'État sur la base de la valeur de consolidation.

M. Bélisle: Ce qui n'était pas fait auparavant.

M. Châtelain: Je ne le sais pas. Il faudrait que j'aille voir ce qui s'est fait en 1978, mais en tout cas, là, les chiffres sont donnés d'une façon redressée.

M. Bélisle: Oui, mais c'est une amélioration notoire sur la présentation qui était faite avant. C'est sûr que c'est difficile pour le lecteur de comprendre, de suivre et de comparer. L'état exact de la situation, je suis d'accord avec vous, avec exactitude, personne ne la connaît. On la connaît à peu près. Je parlais, hier, d'un laboratoire des finances publiques de l'État. C'est réellement un laboratoire. On le sait. On essaie de donner un tableau très précis ou un portrait précis de la situation. Mais plus précisément, quand on commence à prendre l'objectif et à le "focusser" sur le petit détail, le menu détail, cela améliore, mais c'est sûr qu'on ne peut pas voir par la même lorgnette les Images qu'on regardait il y a dix ans quand on change le focus. C'est dans la normalité des choses. Je pense que c'est sain pour le système. Toutes les améliorations qui ont été faites, incluant ce que vous venez de mentionner, comme l'inscription des titres, des valeurs qui appartiennent au gouvernement dans les sociétés d'Etat, des placements à la véritable valeur, cela n'existait pas avant. Cela donne un drôle de beau tableau! J'aimerais voir les états financiers de 1978, 1981, 1982 ou 1983 redressés avec la véritable valeur qu'avaient ces placements à cette époque. Je vous garantis que je vous achèterais votre document sur cela.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Bertrand.

M. Parent (Bertrand): En attendant qu'il y ait une transaction entre le député de Mille-Îles et le Vérificateur général, je voudrais être bien clair. Je ne le mets pas en doute. D'ailleurs, je l'ai dit, je pense, très souvent, que c'est une amélioration dans le bon sens. Sauf que, moi, je pense qu'on va se retrouver dans quelques années dans un système où on va avoir de la misère et c'est déjà le cas. Je ne dis pas que ce n'est pas une amélioration d'avoir tout le portrait global. Ce que je dis, si on veut être capable d'évaluer le portrait global que nous avons au 31 mars 1988 ou que nous aurons dans quelques jours au 31 mars 1989, si on veut être capable de parier intelligemment et de comparer les choses qui sont comparables, il faut avoir le portrait qu'on avait antérieurement, en tout cas, sur une courte période de temps. C'est tout ce que je dis. Moi, je veux bien qu'on aille dans le sens d'une amélioration sinon, on ne fera Jamais d'amélioration. Cela donne suite à des recommandations du Vérificateur général et je ne pense pas qu'on soit parti fortement en guerre sur cela. Pour être capable de comparer des choses comparables - que le résultat net soit positif ou négatif, c'est une autre analyse et c'est une autre "game" - je me dois de demander en tant que député, avec la conviction profonde que j'ai, d'avoir des outils comparables pour savoir à quoi je me réfère et savoir jusqu'à quel point on améliore les choses. Une fois que c'est dit, on passe, on continue, on s'en va vers autre chose, sauf que je veux être capable de savoir de quoi je parie. Si je ne réussis pas à convaincre les gens de mon point et que vous réussissez à les convaincre, je dirai que le meilleur vendeur l'emporte, mais il reste que ça ne change pas le portrait des choses. Je ne voudrais pas, en tant que député de cette Assemblée nationale, en 1989, avoir l'impression que tout s'est tellement amélioré, et pour prendre l'exemple typique, qu'on a vraiment diminué, dans les faits, de 1 600 000 000 $ le déficit du Québec. Si on a diminué le déficit réel de 1 600 000 000 $, je dis bravo, j'applaudis, sauf que je n'en suis pas à cette conclusion, et loin de là, Dieu merci. J'ai le droit d'avoir mes convictions profondes et je crois qu'en tant que membre de cette Assemblée, je dois m'attendre que les autres, qui ne sont pas d'accord avec moi, défendent leur point de vue et on se respectera. Mais je vous dis que je voudrais au moins avoir les chiffres avec lesquels je pourrais travailler sur une base comparative.

Je termine en disant que si, maintenant, les profits des sociétés d'État... Tant mieux s'il y a plus de profits que de pertes, je ne dis pas que ce n'est pas correct, à un moment donné, qu'on ait corrigé certaines situations. Je suis bien placé pour dire que je ne suis responsable de rien dans le passé, c'est bien facile à dire, mais je pense que si des correctifs ont été apportés, s'il y avait des canards boiteux vraiment irrécupérables et qu'on a fait des choses avec, tant mieux. Si, aujourd'hui, on fait 700 000 000 $ ou 800 000 000 $ de profit à Hydro-Québec, je dis: Tant mieux, à la condition qu'on démontre qu'on a suivi la ligne de conduite pour être capable de donner des services aux gens et d'entretenir un bon réseau, de faire ci, de faire ça. Mais à partir du moment où je retrouve, dans mes revenus consolidés, les revenus d'Hydro-Québec et qu'à la fin de l'année, c'est un détail, mais qu'avec 750 000 000 $, je change le portrait du Québec juste par cette insertion, je ne dis pas que je ne suis pas content qu'Hydro-Québec fasse des profits, mais je dis qu'il y a un rapport direct de cause à effet. Quand on augmente les tarifs d'Hydro-Québec - on le verra la semaine prochaine, on l'a fait l'année dernière et l'année

d'avant - de 5 % ou de 6 %, on s'en va directement vers une taxe, mais ces 6 % vont générer 300 000 000 $ qui, à la fin, se retrouvent dans les états financiers. Par rapport à ce qui se passait avant, ce n'est pas la comparaison juste. C'est juste ça que je dis.

Dans ce sens, j'ai peut-être une phobie là-dessus, mais ça fait partie des choses auxquelles je crois profondément, et je me dois de faire la lumière ou, du moins, de donner les deux côtés de la médaille, et le Vérificateur général doit aussi essayer de nous éclairer là-dedans sans, pour autant, essayer de mettre qui que ce soit dans l'eau chaude, de façon que les hommes et les femmes politiques tirent les conclusions qu'ils veulent à partir de ce qui est là. Je pense que c'est le rôle du Vérificateur général de nous donner des informations à la lueur des questions posées dans le but d'avoir ce que j'appelle les outils. Voilà, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le député de Bertrand. Il vous reste du temps, M. le député de Bertrand.

Commission de la santé et de la sécurité du travail

M. Parent (Bertrand): D'accord. Je voudrais entrer un peu dans le dossier de la CSST. J'hésitais à le faire parce qu'on a peu de temps, on va ouvrir une "canne* pour le dîner et ce ne sera pas nécessairement une "canne" de crevettes. Sans entrer dans les détails parce qu'on va y revenir cet après-midi, j'aimerais quand même, au cours des quelques minutes qui nous restent... Cela fait partie de la façon de faire, à 13 heures, il faudra lever l'ancre et reprendre à 15 heures. Dans le cas de la CSST, il y a ce que j'appelle un cri d'alarme de notre part et de la part du vérificateur. Depuis la publication de votre rapport, j'aimerais savoir s'il y a eu quelques réactions ou quelques commentaires, quelque ouverture d'esprit. Est-ce que quelque chose s'est passé depuis la présentation du rapport et les commentaires qui ont suivi dans les journaux concernant la non-collaboration de la direction de la CSST, et même un peu une attitude non souhaitable vis-à-vis du Vérificateur général? J'aimerais savoir si, entre ce que nous avons là comme commentaires, comme analyse et avant qu'on embarque dans le jus, quelque chose s'est passé qui a eu comme réaction de permettre de doser ce qu'on pourra faire cet après-midi.

M. Châtelain: M. le Président, concernant la vérification intégrée que nous avons faite à la CSST, il n'y a pas de changement à la situation que nous avons décrite dans le rapport et à la situation que j'ai décrite ce matin, ici, dans mon exposé d'ouverture et également à ce que nous indiquons dans le document que nous avons remis au président - et je pense qu'il a été déposé à la commission au début - il n'y a pas de chan- gement à cela. On n'a pas eu d'autre rencontre avec la direction de la CSST concernant les résultats de notre vérification intégrée et concernant les commentaires que la CSST a publiés dans les journaux. Peut-être que je ne l'ai pas bien dit, il y a des commentaires qui ont été publiés dans les journaux par un journaliste qui a rencontré les représentants de la CSST. Voilà. Il n'y a pas eu de changement de ce côté-là. Cependant, nous sommes toujours les vérificateurs de la CSST, nous continuons nos travaux de vérification régulière, par exemple, la vérification d'attestation financière sur les états financiers de la CSST. Nous avons la coopération de la CSST, et les gestionnaires responsables de la préparation des états financiers travaillent avec nous; nous avons leur coopération de ce côté-là. Nos commentaires, les commentaires que nous avons soulevés ce matin et que nous soulevons dans notre rapport quant à l'attitude passive, si vous voulez, de la direction de la CSST sont dans le sens qu'elle n'a pas voulu nous transmettre sa réaction à nos commentaires. Je le souligne, c'est un procédé essentiel de vérification d'obtenir la validation des autorités dans un organisme comme celui-là. Il n'y a pas eu de changement de ce côté-là.

M. Parent (Bertrand): Est-ce que vous avez eu quelques échanges avec le ministre responsable sur le plan politique, à la suite de votre rapport?

M. Châtelain: Je n'ai pas eu d'autres échanges avec le ministre sauf ceux qu'il a eus avec moi peut-être le lendemain de la publication du rapport ou quelques jours après pour demander au Vérificateur général s'il serait prêt à coopérer, par exemple, avec la CSST, avec le ministre et ainsi de suite, pour offrir des suggestions quant à un programme d'amélioration ou d'implantation des recommandations du Vérificateur général. Au cours de cette conversation, j'avais indiqué notre empressement à coopérer. Le Vérificateur général veut l'amélioration. Il n'y a pas eu d'autre développement depuis.

M. Parent (Bertrand): Sans dévoiler quoi que soit, est-ce que le ministre semblait un peu surpris de cette attitude et de ce qui se trouvait dans le rapport ou si c'était pour lui...

M. Châtelain: Est-ce qu'il était surpris de savoir ce qu'il y avait dans le rapport?

M. Parent (Bertrand): Voici ce que je veux dire. D'après les propos qu'il a pu tenir, est-ce que cela a été une surprise ou si cela a été une chose à laquelle il s'attendait ou dont il était déjà au courant?

M. Châtelain: M. le Président, je ne sais pas si je dévoile quelque chose de confidentiel.

J'avais déjà eu des discussions avec le ministre de tutelle auparavant, quant à cette attitude, donc cela n'a pas été une surprise pour le ministre d'apprendre que la direction de la CSST n'avait pas réagi à nos commentaires lorsque notre rapport a été publié.

M. Parent (Bertrand): On n'ira pas plus loin avant le dîner, M. le Président Est-ce qu'on pourrait avoir le dépôt pour fins d'étude du document afin que je puisse l'étudier pendant l'heure du dîner?

Le Président (M. Lemieux): J'autorise le dépôt.

M. Parent (Bertrand): Je suggérerais, M. le Président, qu'on reprenne...

Le Président (M. Lemieux): Nous allons suspendre nos travaux jusqu'à 15 heures.

M. Parent (Bertrand): Avec le dessert pour l'après-midi.

(Suspension de la séance à 12 h 59)

(Reprisée 15 h 9)

Revenus, dépenses et déficits

Le Président (M. Lemieux): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission du budget et de l'administration reprend ses travaux relativement à l'audition du Vérificateur général conformément au mandat qui lui a été octroyé. M. le Vérificateur, vous avez déposé ce matin un document de deux pages qui concerne les revenus, dépenses et déficits selon les conventions comptables 1986 et antérieures. Pour 1988, pouvez-vous nous expliquer la signification au chapitre des comptes à payer non pourvus de la note numéro 1?

M. Châtelain: Oui. Je pense que ce que nous expliquons, M. le Président, dans la note numéro 1, c'est que pour les comptes à payer non inscrits, dans ces cas-là, on ne peut pas déterminer l'effet de la modification aux conventions comptables sur les résultats de l'année. Parce que pour le savoir, il faudrait savoir exactement quel serait le montant qui n'aurait pas été inscrit selon l'ancienne convention comptable. Mais on ne peut pas le déterminer, c'est impossible de déterminer quel montant n'aurait pas été inscrit parce que dans le passé...

Le Président (M. Lemieux): Est-ce que les dépenses après le 30 avril étaient effectivement inscrites dans le passé? Est-ce qu'on les inscrivait?

M. Châtelain: Dans le passé, il y avait seulement une partie des comptes à payer qui était inscrite et une partie...

Le Président (M. Lemieux): D'accord.

M. Châtelain:... qui était substantielle qui n'était pas inscrite. Mais cela variait d'une année à l'autre. Alors maintenant que tout est inscrit, on ne peut pas déterminer, si cela avait été l'ancienne convention, quel aurait été le montant inscrit et quel montant n'aurait pas été inscrit. C'est impossible. Et l'effet que cela aurait eu sur le résultat, c'est la différence d'une année à l'autre, la fluctuation dans le montant total des comptes à payer non inscrits. C'est simplement la fluctuation d'une année à l'autre qui aurait eu une influence sur les résultats de l'année. Par exemple, si une année donnée le montant avait été de 1 000 000 000 $, à la fin de l'année suivante, cela aurait été de 1 100 000 000 $. L'influence sur le déficit aurait été de 100 000 000 $. Mais là, ne le sachant pas, on ne peut pas dire quelle est l'influence de ce changement-là sur le résultat.

Le Président (M. Lemieux): II n'y a pas une somme de 875 000 000 $? Est-ce qu'elle aurait été anticipée, cette...

M. Châtelain: Là, il est question évidemment de ce qu'on appelle les dépenses additionnelles ou l'amortissement anticipé ou les dépenses anticipées dont il a été question ce matin. Maintenant, est-ce que le gouvernement aurait anticipé ces dépenses-là s'il avait présenté ses états financiers selon les anciennes conventions comptables? Nous ne le savons pas. C'est hypothétique pour nous parce qu'à ce moment-là, dans les livres, le déficit inscrit aurait été supérieur à celui qui est indiqué selon les nouvelles conventions. Peut-être qu'à ce moment-là le gouvernement n'aurait pas jugé bon d'anticiper les dépenses. Nous ne le savons pas, évidemment.

Le Président (M. Lemieux): Cela va. Merci de ces précisions. M. le député de Lafontaine.

M. Gobé: Merci, M. le Président. M. le Vérificateur...

Le Président (M. Lemieux): M. le Vérificateur.

M. Gobé:... je vois que vous avez fait une vérification sur la gestion des ressources informatiques...

Le Président (M. Lemieux): Un instant, M. le député de Lafontaine. M. le Vérificateur général.

M. Châtelain: Excusez-moi. Avant de reprendre sur un autre sujet, M. le Président, je ne voudrais pas empiéter sur le temps du dépu-

té...

Le Président (M. Lemieux): Oui, d'accord.

M. Châtelain: Tout simplement, je voudrais apporter une précision. Ce matin, il a été question de la CSST et en réponse, je pense, au député de Parent, à savoir... Une voix: Bertrand.

M. Châtelain: Au député de Bertrand, excusez-moi! Je ne suis pas habitué.

M. Parent (Bertrand): On m'appelle souvent M. Bertrand.

M. Châtelain: En réponse à ses questions, à savoir s'il y avait eu du progrès, si on avait eu d'autres rencontres avec la direction de la CSST concernant plus particulièrement la vérification intégrée que nous avons faite. J'ai dit non, il n'y a pas eu de changement. Tout simplement, je voudrais préciser que depuis, nous avons eu une correspondance avec la présidente de la CSST, à la suite des articles qui ont paru dans les journaux, concernant le pourcentage de demandes d'indemnisation qui seraient considérées admissibles ou non admissibles à la suite des commentaires et des constatations que nous avions formulés dans notre rapport. La présidente avait indiqué, justement, qu'elle avait fait d'autres études qui démontraient qu'on n'avait peut-être pas raison, dans certains cas. Alors nous, on a demandé à la présidente les résultats de l'étude qu'elle a faite de son côté et, en réponse, elle nous a signifié qu'elle serait bientôt en contact avec nous. On formerait un comité pour tout réviser ça. Donc, il y a eu un progrès de ce côté. Je m'excuse, je n'avais pas pensé à cet aspect, ce matin, et je voulais le préciser.

Le Président (M. Lemieux): Cela va. M. le député de Lafontaine... M. le député de Bertrand.

M. Parent (Bertrand): Oui, juste pour une question de bon fonctionnement, je n'ai pas d'objection à ce que vous donniez la parole au député de Lafontaine, sauf que si on change de sujet, ça va juste compliquer les choses et j'avais quelques commentaires ou questions concernant votre intervention.

Le Président (M. Lemieux): On va continuer avec vous, M. le député de Bertrand. Cela va, M. le député de Lafontaine? J'ai fait un commentaire pour emmener des précisions, mais le député de Bertrand serait en droit de me faire remarquer que je devrais respecter le principe de l'alter-nance, à même s'il ne s'agissait que d'un commentaire. M. le député de Bertrand, allez-y.

M. Gobé: M. le Président, étant donné la grande pertinence des questions du député de Bertrand, j'ai concédé, d'une manière...

M. Parent (Bertrand): C'est pour votre éclairage, mon cher collègue. Écoutez, je tiens à remercier le Vérificateur général pour le document déposé à midi, parce que c'est quelque chose que j'avais réclamé et je trouve important d'avoir ce portrait sous les anciennes conventions comptables. D'autre part, à la suite des propos du député de Vanier, tantôt, j'ai deux commentaires et des éclaircissements à obtenir de vous.

Quant à la fameuse note des comptes à payer, donc, ce qu'on appelle dans le jargon des comptables le "cut off", la ligne qu'on tire - est-ce qu'on rentre, si on veut, les comptes à payer ou si on les laisse courir - les nouvelles règles comptables prévoient qu'on rentre tout. Sauf que dans ma compréhension, la première année, ça peut faire un changement, mais sur une période de deux ou trois ans, ça ne fait plus de changement parce qu'à partir du moment où on a apporté le correctif de les rentrer, l'année suivante, le correctif fait que cette modification peut vraiment faire un changement sur une année, mais elle nous rejoint, la deuxième année, si on a joué à ça. Est-ce que c'est exact?

M. Châtelain: C'est exact plus ou moins. Je vais essayer de l'expliquer. C'est vrai que d'une année à l'autre, une fois que la convention comptable est en place et qu'elle est suivie d'une année à l'autre, la modification ne devrait pas avoir tellement d'influence parce que, dans des circonstances normales, le montant total des comptes à payer ne devrait pas varier beaucoup. Cependant, si je regarde au cours des dernières années avant la modification des conventions comptables - j'ai des chiffres ici - la variation d'une année à l'autre, si je la regarde... Supposons que je prenne les années 1983 à 1986, les quatre dernières années, les variations étaient de 108 000 000 $, c'est-à-dire le changement d'une année à l'autre, 578 000 000 $, 425 000 000 $. Mais ce n'est pas toujours du même côté. Il y aurait eu une diminution dans deux années, une de 108 000 000 $, une de 578 000 000 $ et une augmentation les autres années de 425 000 000 $ et de 195 000 000 $. Voyez-vous, cela fluctue. Les chiffres au gouvernement sont tellement considérables, cela peut quand même fluctuer. Mais en circonstances normales, en conditions normales, cela ne devrait pas varier tellement.

M. Parent (Bertrand): Oui, mais il y a un autre volet par rapport à ce que vous venez de mentionner. Au 31 mars 1987, première année de l'application des nouvelles règles comptables, normalement, on aurait dû avoir une augmentation des comptes à payer. À cause de ces nouvelles règles, on rentre tout au 31 mars 1987. Au 31 mars 1988, s'il y a un réajustement par rapport à la première année, là, vous avez un

plein douze mois mais un vrai douze mois. On se comprend?

Une voix: Oui.

M. Parent (Bertrand): Alors, au 31 mars 1988, le portrait qu'on a du déficit à ce moment-là est corrigé par le fait même.

M. Châtelain: II est corrigé. Comme je le disais tantôt, la convention comptable ne devrait pas avoir tellement d'influence à ce moment-là.

M. Parent (Bertrand): D'accord. On se comprend sur ce point. Alors, la compréhension du tableau que vous avez déposé ce matin - je termine sur cela parce qu'on va avoir certainement d'autres sujets à aborder - c'est que les chiffres de gauche, si on veut, pour l'année 1987, par exemple, c'est le déficit réel annoncé, les 2 800 000 000 $ au 31 mars 1987 parce qu'on doit toujours lire 31 mars. Au 31 mars 1987, tes chiffres réels - vous marquez dans la colonne de gauche - sont 2 800 000 000 $, 2 819 000 000 $. Ce sont les chiffres réels. De l'autre côté, à l'extrême droite, avec les modifications et les règles comptables antérieures si on les avait appliquées, donc, si on n'avait pas modifié, c'est 3 096 000 000 $. C'est cela?

M. Châtelain: Voilà. Oui.

M. Parent (Bertrand): Au 31 mars 1988, on fait le même jeu. Le déficit annoncé est de 2 374 000 000 $ et le déficit modifié, si on veut, sans les nouvelles conventions comptables, serait de 2 928 000 000 $.

M. Châtelain: D'accord.

M. Parent (Bertrand): C'est la compréhension du tableau.

M. Châtelain: Oui, évidemment, toujours avec la caution ou les réserves que nous avons apportées tantôt. Évidemment, il y a toujours cela. La fluctuation dans les comptes à payer qu'on ne connaît pas.

M. Parent (Bertrand): On se comprend. Avec la note qu'il y a là, mais on se comprend.

M. Châtelain: II y a les 875 000 000 $ aussi, évidemment. À ce moment-là, moi, je ne le sais pas.

M. Parent (Bertrand): C'est cela.

M. Châtelain: Qu'est-ce que le gouvernement aurait fait? Plus que cela, je ne le sais pas.

M. Parent (Bertrand): Mol, non plus, je ne le sais pas. Un montant de 849 000 000 $.

M. Châtelain: Un montant de 848 000 000 $.

M. Parent (Bertrand): Alors, c'est 849 000 000 $ qui se trouvent inscrits là. Par contre, si toujours cette dépense anticipée qui a été mise l'année passée pour des fins que le gouvernement aura à justifier, cette année dans les prévisions, on est rendu au troisième trimestre, après conversation ou échange avec le ministre des Finances hier, on s'aligne toujours avec 625 000 000 $ de prévus, si je ne m'abuse, en sens contraire. On retrouvait cela dans le discours sur le budget à la page B6, si ma mémoire est bonne. C'est cela. Au tableau B6 du discours sur le budget, en annexe, on avait cette prévision pour 1988-1989 où, là, on faisait l'écriture contraire. Au lieu d'une dépense inscrite par anticipation, on voit un revenu inscrit par anticipation de 625 000 000 $ si on s'en va dans ce qu'on avait prévu. Alors, cela marche dans les deux sens comme de raison. Pour moi, cela complète. Je vais laisser la parole au député de Lafontaine qui veut parler, je pense, de la CSST. Est-ce exact?

M. Gobé: Non, mon cher collègue. M. Parent (Bertrand): Allez-y.

Le Président (M. Forget): Merci beaucoup. Le député de Lafontaine.

Gestion des ressources informatiques

M. Gobé: Merci, M. le Président. Non, je ne parlerai pas de la CSST mais plutôt de la gestion des ressources informatiques. Comme je disais précédemment, vous avez fait une vérification, du moins un début de vérification, d'après ce que je peux voir, sur la gestion des ressources informatiques du gouvernement. Je le comprends bien car, en effet, vous mentionnez que cela représente en 1987-1988 275 000 000 $ de budget, soit environ 6 % des dépenses du gouvernement. Ce qui est quand même assez conséquent et assez fort. Aussi, je m'interroge à savoir pourquoi, lorsqu'on lit à 12. 4, vous dites: "Notre vérification vise à nous assurer que la ressource informatique est gérée avec un souci d'économie, d'efficience et d'efficacité et que les gestionnaires rendent compte des responsabilités qui leur sont attribuées. Pour atteindre cet objectif de vérification, nous avons réparti la fonction informatique par activités et par types de ressources et nous en avons prévu l'examen sur plus d'une année. Ainsi, les secteurs d'intérêt suivants ont été retenus. " Je vois que vous avez fait: coordination de l'activité informatique, développement des systèmes informatiques. Pour le reste: équipements et logiciels d'exploitation, systèmes en opération, bureautique et micro-informatique, gestion des ressources humaines et sécurité de l'information, vous n'avez rien fait, alors que lorsqu'on lit votre rapport on se rend

compte que dans plusieurs ministères, et les années précédentes aussi, vous faites mention que, d'abord, U y a peu de sécurité. On le lit à toutes les pages, je crois. Chaque fois qu'il y a un système informatique quelque part, on lit dans vos rapports que ce n'est vraiment pas efficace en termes de protection de l'information, de la confidentialité. Je me demande pourquoi vous l'avez mise en dernier. Pourquoi l'avez-vous mise une autre année plus loin?

Je vois aussi: équipements et logiciels d'exploitation. Quand je lis votre mise en rubrique, au début en 12.4, on se dit vu que c'est un souci d'économie, d'efficience et d'efficacité, je me suis rendu compte que, chez le vérificateur depuis quelques années, à chaque fois qu'on vérifie des engagements financiers de certains ministères, peu de ministères font appel à la soumission publique pour renouveler leur parc de micro-informatique ou d'ordinateurs tout simplement, ou même d'imprimantes, en d'autres termes de matériel informatique. On se rend compte aussi que les gens ont pris l'habitude de faire appel à des contrats négociés en arguant que c'est un système qui est déjà établi depuis de nombreuses années, c'est du remplacement de matériel, un peu comme si on changeait une voiture pour une autre. Je m'interroge à savoir s'il n'y a pas là un danger, si les activités informatiques du gouvernement ne sont pas sur le pilote automatique, c'est-à-dire si les fonctionnaires ou les gestionnaires, comme vous les appelez, n'ont pas décidé que c'est comme cela que cela fonctionne. On ne cherche pas à voir s'il n'y a pas meilleur coût, s'il n'y a pas meilleur matériel. Quand on parle d'économie, d'efficience et d'efficacité, je me demande si le but est atteint. Aussi quand je vois que vous avez mis cela en troisième et que vous ne l'avez pas vérifié, cela me laisse quelque chose sur l'estomac, même si c'est après le dîner, qui était très bon, remarquez bien. Bien qu'on pourrait peut-être comprendre, c'est vrai qu'il faut commencer par le début et dire: coordination de l'activité informatique, c'est important. Et après cela, vous avez: développement des systèmes informatiques. Peut-être que cela peut expliquer vos recommandations. Vos réflexions peuvent expliquer, peut-être - ce que je mentionnais avant - le peu de changement ou le pilote automatique sur les logiciels et les équipements. Lorsqu'on lit vos remarques, on voit en 12.29 que vos vérifications vous ont permis de constater que, à toutes fins utiles, il n'y a pas grand-chose qui se fait qui respecte les normes fixées. À ce moment-là peut-être que c'est dû à cela. J'aimerais que vous m'expliquiez pourquoi cette chose-là et aussi si vous entendez faire une vérification sur l'acquisition des systèmes et si vous pensez qu'il y a là matière à voir si des économies sont faisables - je pense qu'il y en a, mais c'est vous le vérificateur - peut-être un peu plus élaborer sur tout cela. Je sais qu'il y a beaucoup de collègues, même de l'Opposition, le député de Mille-Îles et le député de Vanier, à l'occasion, qui questionnent aussi les ministres ou du moins les fonctionnaires qui accompagnent les ministres lorsqu'ils viennent débattre leurs engagements. C'est à tous les ministères qu'on retrouve cela, ou presque tous. J'aimerais en savoir un peu plus long de votre part sur la situation globale de l'informatique au gouvernement.

M. Châtelain: Oui, M. le Président. Il y a divers aspects à cette question. Pour commencer, je dois préciser qu'il s'agit d'une étude qui va se faire sur plusieurs années. C'est la première année d'une étude d'envergure. On vous l'avait déjà annoncé lors des réunions antérieures, ici, que nous nous penchions sur l'ensemble de la fonction ou des activités informatiques au gouvernement, parce qu'il y a des sommes astronomiques qui sont en cause. D'ailleurs, d'année en année, comme le député vient de le signaler, nous avons eu à déplorer des manques de sécurité et ainsi de suite, de ce côté-là. Ici, cette année, nous avons fait rapport sur les deux premiers aspects que nous mentionnons au paragraphe 12.4: la coordination de l'activité informatique et le développement des systèmes.

Au sujet de la sécurité de l'information et ainsi de suite, où il s'agit de facteurs sur lesquels nous avons apporté des commentaires dans le passé, mais sur une base ad hoc, dans des ministères en particulier, nous voulons nous pencher sur ce problème dans l'ensemble du gouvernement. D'ailleurs, les commentaires que le député vient de relever, qui apparaissent au paragraphe 12.29, confirment exactement ce que nous avons trouvé dans le passé.

Avec votre permission, M. le Président, je demanderais à M. Jean-Noël Thériault, responsable de cette étude sur l'informatique, à notre bureau, s'il peut développer mes commentaires et répondre aux questions du député.

M. Thériault (Jean-Noël): Jean-Noël Thériault, directeur de la vérification, responsable du projet Optique ou projet sur la vérification des ressources informatiques au gouvernement.

Le Président (M. Lemieux): Cela va.

M. Thériault: La nomenclature que vous avez à 12.4 n'est pas nécessairement séquentielle; elle ne se réalisera pas nécessairement à partir de la coordination jusqu'à la sécurité de l'information. Ce sont des choses qu'on entend faire sur plusieurs années. Même si la sécurité de l'information apparaît au septième rang, cela ne veut pas dire que ce sera réalisé comme septième activité dans la quatrième ou la troisième année de la réalisation de l'ensemble du projet.

Une des raisons pour lesquelles on n'a pas exécuté cette vérification au cours de la première année, c'est que nous avons quand même

soulevé, au cours des deux ou trois dernières années, plusieurs lacunes sur le plan de la sécurité informatique. C'était des vérifications ad hoc où, en vertu d'une méthodologie de vérification des systèmes informatiques, nous avons soulevé ça et nous avons jugé opportun, au début du projet Optique, de ne pas commencer par la sécurité informatique. Évidemment, il était plus pratique et plus approprié, je pense, de commencer par les grands ensembles, par exemple, la coordination gouvernementale de l'activité informatique, le rôle du Conseil du trésor, du ministère des Communications, le développement des systèmes informatiques où on avait fait très peu d'interventions antérieurement. On sait quand même quelles sont les sommes, je ne dirais pas astronomiques, mais importantes, qui sont consacrées au développement. Nous avons jugé bon de commencer par ces deux activités.

Évidemment, c'est dans une optique - sans vouloir faire un jeu de mots avec le projet - le tiret d'optimisation de nos ressources. Nous avons affecté un certain nombre de personnes là-dessus. Idéalement, il aurait été plaisant et peut-être utile pour la commission de l'Assemblée nationale qu'on fasse le tour de tout ça dans une année, mais c'est pratiquement impossible. On a établi un calendrier de réalisation et on a commencé par les grands ensembles.

Lorsque vous faites référence au paragraphe 12. 29, il faut bien comprendre que les commentaires qui sont apportés là-dessus portent, on l'a bien dit, sur certains aspects seulement de la gestion des systèmes en développement, dans un premier temps. C'est pour se familiariser davantage avec ce monde de l'informatique au gouvernement du Québec. On est allé sur de petits ensembles, les aspects plus techniques, dont les outils de support au développement, et les commentaires qui sont apportés à 12. 29 concernent les outils de support au développement. Là, on parle de méthodologie, de façon de travailler, au niveau technique, à l'intérieur de la gestion et du développement des systèmes informatiques.

Est-ce qu'il y a des points que j'ai oubliés? Je peux...

M. Gobé: Vous êtes à 12. 29. À 12. 30, vous concluez ou, du moins, vous dites: "Les faiblesses observées dans la mise en oeuvre de ces actions sont telles que, non remédiées, elles peuvent compromettre l'atteinte des objectifs visés. " Est-ce qu'on parle des objectifs de l'informatisation du gouvernement ou des objectifs...

M. Thériault: Non. Ce sont les objectifs sur le plan des outils de support au développement seulement. On parie de méthodologie de travail. Cet ensemble est à l'intérieur du projet de développement des systèmes informatiques. On a subdivisé, par exemple, la planification stratégique, à long terme, la planification annuelle, on regarde les outils de travail dont les ministères se sont dotés. Ce sont quand même des outils qui sont assez dispendieux, on a vu des ministères importants qui avaient dépensé au-delà de 1 000 000 $ dans ces outils. Nos commentaires ne portent que sur ces aides au travail dans le développement des systèmes informatiques. On parie des micro-ordinateurs, on parie des logiciels qui aident les développeurs à amener les nouveaux systèmes. C'est seulement à ce niveau. C'est un niveau beaucoup plus microscopique, ce n'est pas au niveau des grands ensembles du développement comme tel. C'est à l'intérieur de développement des outils de travail, si l'on veut. Entre guillemets, c'est un peu pour se faire la main en tant que vérificateur, pour être bien familier avec le domaine et porter le meilleur jugement possible sur l'année qui est en cours et pour l'an prochain.

M. Gobé: À 12. 37, vous arrivez encore avec d'autres... Évaluation postimplantation des systèmes informatiques. Si je comprends bien, dans certaines organisations, personne ne fait l'analyse du système une fois implanté. On parle du système complet: la quincaillerie, le logiciel, ces choses-là. (15 h 30)

M. Thériault: Oui. Lorsqu'on développe un système informatique, on fait une analyse préliminaire, d'abord. On établit les besoins, on essaie de savoir où on s'en va et, à un moment donné, on met ce système en place. Quelques mois plus tard, normalement environ 18 mois, une certaine période après son implantation, il faut faire une espèce de "post mortem", une analyse de la situation, pour savoir quelles sont les erreurs qui ont été apporter, et, dans les ministères que nous avons examinés, cela ne se fait à peu près pas. On ne rend pas compte de ce qui se passe, cela se fait de façon verbale, c'est un peu trop... Il y a des choses qui se font, mais ce n'est pas organisé ou systématique. Étant donné les montants dépensés, je pense qu'il est bon, après un certain temps, de faire le point sur ce qu'on a mis en place et de conclure pour savoir si ce qu'on avait prévu s'est réalisé, si on rencontre les besoins, si le système fonctionne normalement, etc..

M. Gobé: Cela veut dire qu'une fois que le système est installé, il est laissé à lui-même. Le chef de service joue un peu avec; à l'occasion, il peut faire une évaluation, mais ce n'est pas un spécialiste.

M. Thériautt: On parie de quelqu'un d'indépendant, c'est-à-dire quelqu'un qui n'a pas participé au projet, qui n'a pas été père ou mère du système qui a été mis en place. Ce peut être quelqu'un qui est dans la même boîte, mais qui jette un coup d'oeil neutre sur ce qui se passe. Est-ce qu'on a rendu la marchandise, finalement? La grande question: est-ce que ce système tel qu'on l'avait prévu répond aux besoins, dans le temps? Est-ce qu'il a rendu la marchandise et

quelles sont les erreurs - entre guillemets - qui ont pu être commises en cours de développement, et qu'on évitera peut-être de commettre dans un développement futur?

M. Gobé: C'est-à-dire que cette évaluation peut aussi bien comprendre la sécurité, les coûts...

M. Thériault: Elle pourrait comprendre cela.

M. Gobé:... les conditions de travail pour le personnel, ces choses-là.

M. Thériault: Oui, tous les besoins, ce que c'était supposé faire, et est-ce que cela le fait effectivement, et est-ce que le système est aussi performant qu'il devait l'être?

M. Gobé: C'est beaucoup qu'il y ait sept des neuf organisations vérifiées qui n'avaient pas, à la date de la vérification, attribué à un responsable la tâche de procéder... Sept sur neuf.

M. Thériault: Oui.

M. Gobé: Un peu plus loin vous dites que 27 "des 31 systèmes informatiques examinés n'ont pas fait l'objet d'un rapport d'évaluation permettant, entre autres de savoir" enfin, les différentes choses... C'est quoi ces 27 des 31 systèmes? Un système particulier, ou est-ce dans le même organisme, ou dans différents organismes?

M. Thériault: Ce sont 27 systèmes que nous avons répertoriés dans différents organismes, et pour lesquels il aurait dû y avoir un rapport d'évaluation postimplantation, parce que la période écoulée était suffisamment longue, et il n'y en avait pas eu. Il y a eu des rapports informels, qu'on nous a dit avoir été faits verbalement. Comme vérificateur, ce n'est pas facile à prouver. Ce qu'on cherche, c'est un rapport écrit, en bonne et due forme.

M. Gobé: Est-ce qu'à la limite un organisme qui aurait un système informatique d'une certaine marque, je ne sais pas, Philips, Comterm ou autre, et qu'on ne sait pas s'il fait l'affaire ou pas, décide de le remplacer, parce qu'il semble désuet, et ne va pas en appel d'offres, on fait un appel négocié et cela continue?

M. Thériault: II faut faire attention. Quand on parle de système informatique, on ne parle pas d'équipement informatique, d'IBM ou..,

M. Gobé: Mais il n'y a pas de système sans équipement.

M. Thériault: Non, bien sûr, mais quand on fait une évaluation postimplantation, ce qu'on veut préciser c'est un système. On parle d'un système de paye, par exemple. C'est ce de genre de système dont on parle. Évidemment, c'est aussi relié à un équipement, parce que si on veut faire un système qui traite un nombre très important de données, il est possible que cela amène des changements d'équipement. Mais ce n'est pas exclusivement l'équipement.

M. Gobé: Est-ce que ce manque de contrôle peut entraîner des coûts pour la province, des coûts qui seraient évités s'il y avait plus de vérification, plus d'évaluation?

M. Thériault: Cela permettrait sûrement, si on faisait une bonne évaluation postimplantation, en bonne et due forme, d'éviter de répéter certaines erreurs. Évidemment, ce n'est pas quantifiable comme tel, mais bien sûr, quand on dit: Dans tel genre de projet, dans tel genre de système, on n'a pas eu de contrôle, par exemple au niveau de la gestion des projets, on n'en a pas rendu compte à des étapes bien précises, à l'avenir il faudrait le faire, parce que cela nous a coûté... Les échéanciers fixés ont été dépassés, les coûts ont possiblement doublé, voici les erreurs qu'on a commises, et à l'avenir I ne faudrait pas les répéter et exercer un contrôle plus serré à ces étapes. Ce qui ne se fait pas. On n'allume pas les lumières rouges 18 mois plus tard! Peut-être que le système prévu ne répond pas, ou répond mal, aux besoins, de telle sorte que les usagers peuvent en arriver à développer des sous-systèmes, avec toutes sortes de choses greffées à côté, des choses manuelles, et on ne s'en rend pas nécessairement compte dans cette mer d'informatique. Un système qui n'est pas performant peut continuer à rouler ainsi. Et cela entraîne des coûts récurrents annuellement, et on n'en est pas nécessairement conscient, d'où l'utilité de faire une bonne évaluation postimplantation.

M. Gobé: Est-ce que vous avez l'intention de faire les prochaines vérifications sur les équipements, logiciels, systèmes en application? Sur quoi voulez-vous les faire l'année prochaine? La suite du feuilleton?

M. Thériault: Les prochaines... Ce qui est en cause finalement. La suite du roman feuilleton cette année, pour ce qui est du développement des systèmes: on va parler de planification annuelle, on regarde tout l'aspect de la planification stratégique et opérationnelle, et on regarde également, en complément, tout ce qui est gestion de projets, toute la mécanique qui est associée à cela. Est-ce que les différentes méthodologies utilisées pour gérer les projets de développement d'importance sont appropriées, est-ce qu'on les suit correctement, est-ce qu'on allume la lumière rouge au bon moment, chemin faisant, si on parle de lumière rouge après implantation? Il y a également à faire le point au moment où on développe. On regarde cet aspect cette année.

M. Gobé: Quand vous entrez dans les ministères ou les organismes, quelle est votre impression? Vous entrez dans la jungle, dans quoi?

M. Thériault: C'est une impression. Non, ce n'est pas une jungle. C'est qu'évidemment...

M. Gobé: Vous y êtes allés? Je présume que vous allez sur place, que vous rencontrez les gens...

M. Thériault: Oui, on rencontre évidemment tous les différents sous-ministres du gouvernement du Québec...

M. Gobé: Quel est votre impression? M. Thériault: C'est une...

M. Gobé: Est-ce que c'est l'inspecteur de l'impôt qui entre dans une compagnie?

M. Thériault: Non. Nous avons une excellente collaboration des gens, des sous-ministres et des dirigeants d'organismes qui sont engagés dans le secteur public. Il y a eu quand même, depuis quelques années, beaucoup de mesures qui ont été prises. Évidemment, c'est peut-être un peu lent, plus lent que... On aimerait que ça aille plus vite; par exemple, dans le domaine de la sécurité, il y a de nouvelles normes qui doivent être en place, qui tardent un peu à venir, mais, il y a des choses qui se font. Ce n'est pas un monde inactif, décadent, l'informatique; cependant, ça roule moins vite qu'on pourrait le souhaiter.

M. Gobé: Au sujet de la sécurité, cela ne vous effraie pas un peu de voir que, même si ce n'est pas dans ce paragraphe ou dans ce chapitre, mais on le voit dans tous vos rapports...

M. Thériault: Oui.

M. Gobé:... mais cela ne vous inquiète pas de savoir que quelqu'un peut laisser l'ordinateur ouvert, aller se promener ailleurs et que, là, je peux changer quasiment n'importe quoi?

M. Thériault: C'est une préoccupation constante. D'ailleurs, nos deux ou trois derniers rapports ont fait état, à chaque année, de ces lacunes en matière de sécurité dans les vérifications qu'on peut appeler "verticales". C'est une des bonnes raisons pour laquelle on revient à l"horizontal" de telle sorte qu'on va couvrir tout ce beau monde sur les mêmes points dans l'ensemble du gouvernement. Cela a été décalé tout simplement d'une année, parce qu'on n'a pas voulu mettre la charrue devant les boeufs. On a regardé la façon que c'était encadré, administré et tout cela, et, cette année, on va descendre au niveau de la sécurité. Cela se fait cette année, en partie.

M. Gobé: Se pourrait-il qu'il y ait des coûts, des dépenses, des fraudes financières qui se fassent à cause du manque de sécurité dans l'informatique?

M. Thériault: S'il y en a?

M. Gobé: Oui.

M. Thériault: Si c'est possible?

M. Gobé: Se pourrait-il? Je ne sais pas, je ne veux rien lancer.

M. Thériault: Vous savez, c'est toujours possible.

M. Gobé: On voit que ça se fait dans différentes... Parfois, dans les journaux, dans les revues, on lit que dans tel ministère en Angleterre, en France ou aux États-Unis, il y a eu des petits malins qui sont entrés dans le système. Je crois que leurs systèmes sont plus sophistiqués que les nôtres sur le plan de la sécurité. Mais, puisque les nôtres n'ont pas ou peu de sécurité, d'après votre rapport, est-ce qu'on peut être sujet à ce genre de choses?

M. Thériault: Oui. Vous savez, la sécurité absolue, que ce soit la sécurité au niveau physique, au niveau logique, l'accès des données, cela n'existe pas. Je pense qu'il y aura toujours des fins fins qui vont être capables d'y accéder par quelque moyen. Évidemment, le rôle des gestionnaires est de mettre en place les mesures d'un bon père de famille, même peut-être un peu plus, dans le cas de certaines données qui sont vraiment très importantes.

C'est possible, sauf qu'avec nos vérifications depuis nombre d'années, on n'a pas eu connaissance, ou cela n'a pas été porté à notre attention, qu'il y ait eu pareil accès non autorisé ou des choses semblables. Mais, en ce qui concerne la sécurité informatique, ce qu'on soulève, ce sont les dangers potentiels. On dit: II y a tels fichiers qui existent dans tel ministère. C'est mal protégé. Voici tel type de données et vous vous exposez à avoir tel problème. On a déjà, d'ailleurs, si vous faites le tour des dernières années, des organismes ou des ministères où il y avait des lacunes à ce chapitre.

M. Gobé: On n'est plus dans ce chapitre, mais vous avez dû le voir dans d'autres études. Quant à l'achat du matériel informatique, avez-vous des suggestions à faire pour obtenir un meilleur contrôle là-dessus?

M. Thériault: En ce qui concerne l'achat du matériel informatique, si on compare ça avec le reste des achats du gouvernement, il y a eu un

décret émis en 1984 qui a resserré toutes ces acquisitions. Le sous-ministre doit prendre connaissance de toute acquisition de 50 000 $. Cela fait que, lorsqu'on parle d'acquisition d'équipement informatique, c'est beaucoup plus serré que dans les acquisitions d'équipement d'autre nature. En ce qui regarde l'informatique et la bureautique, il y a un petit spécial, soit une plus grande surveillance qui est demandée du Conseil du trésor. Évidemment, ça n'empêche pas les abus, et on n'en a pas observé parce qu'on n'a pas encore exploré ce domaine d'activité. Mais, au départ, on a déjà resserré le contrôle sur les acquisitions d'équipement informatique.

M. Gobé: Ma question s'adresserait à votre patron.

M. Thériault: Oui.

M. Gobé: C'est une question qui relève certes directement de lui. N'êtes-vous pas inquiet devant cette espèce de système qui s'est mis à l'intérieur de certains ministères ou organismes qui fait que des compagnies ont un marché captif? On sait qu'il y a Comterm, une compagnie québécoise qui est très bonne d'ailleurs, il y a Philips et peut-être une autre. On voit très souvent revenir ces mêmes compagnies sur invitation. On a même vu dernièrement... Je voyais que c'était un sous-traitant. C'était un distributeur qui était le seul. Il n'y avait pas de soumission, m'a-t-on dit, parce que c'était le seul qui était agréé auprès du ministère. Ce n'était même pas le manufacturier qui était agréé, c'était le distributeur, alors que j'étais certain qu'il y avait d'autres distributeurs ou je présume, sans être certain, qu'il y a d'autres distributeurs de ce produit au Québec. Alors, on ne demandait pas de soumission, en disant: Bien, cette compagnie est agréée et ce distributeur est le distributeur agréé. C'est un exemple que je vous donne. Je n'ai pas gratté beaucoup pour découvrir ça, remarquez bien. Ce n'est pas ma job ou, du moins, je n'ai pas le temps ni les moyens de le faire. Mais vous, n'êtes-vous pas inquiet devant cette tendance? Ne voit-on pas des dizaines et des centaines de milliers de dollars qui échappent au gouvernement et qui pourraient être investis ailleurs pour des besoins plus criants?

M. Châtelain: M. le Président, la technologie, dans beaucoup de cas, limite le choix, c'est vrai, et il y a évidemment des risques inhérents, lorsque les choix sont limités. Bien sûr, c'est une chose qui nous inquiète, nous, comme vérificateur en vérification intégrée, lorsqu'on veut assurer l'économie.

D'autre part, le gouvernement a des politiques. Le gouvernement doit avoir des politiques, c'est son devoir d'en émettre. Il doit tout de même favoriser le développement d'une certaine industrie, et ainsi de suite. À ce moment-là, ce n'est pas au vérificateur de critiquer la politique comme telle, mais c'est au vérificateur de s'assurer que la politique est respectée. Dans ces cas, nous devons nous limiter au respect de la politique. Cependant - là-dessus, je suis d'accord avec le député - là où les technologies limitent le choix, il y a des inquiétudes, et le vérificateur s'inquiète, c'est vrai.

M. Gobé: Vous comprendrez, M. le Vérificateur général, que le ministre dans son ministère n'a absolument pas les moyens ni le temps de vérifier chaque achat d'informatique. On s'en remet donc à des gestionnaires. On sait comment ça marche dans le système: les gens nouent des amitiés, prennent des habitudes. À la fin, lorsqu'on regarde le total de la facture informatique, les 10 % d'achats d'équipement peuvent représenter 2 000 000 $, 3 000 000 $ ou 4 000 000 $, et peut-être plus, et cela année après année.

Le Président (M. Lemieux): En conclusion, M. le Vérificateur général.

M. Châtelain: D'accord. L'important pour nous, M. le Président, c'est qu'il y ait transparence, qu'il y ait une politique, que la politique soit connue et respectée. S'il en est ainsi, il y aura évidemment beaucoup moins de danger et moins de risque par la suite.

Le Président (M. Lemieux): Merci. M. le député de Bertrand, je pense que vous êtes sur la même lancée, l'informatique.

M. Parent (Bertrand): Oui. Maintenant qu'on a abordé ce sujet, je vais complété mes préoccupations, préoccupations qui rejoignent d'ailleurs plusieurs de celles du député de Lafontaine. Vous comprendrez, M. le Vérificateur général, que le domaine de l'informatique prend de plus en plus de place à l'intérieur du gouvernement et de tous les ministères, et il me semble que le Vérificateur général devrait mettre beaucoup d'énergie pour la vérification intégrée, pour une année ou deux, parce qu'il y a des choses qu'on ne pourra pas corriger dans trois ou quatre ans et qui doivent être rapidement pointées du doigt.

Je peux vous dire, pour avoir fait les engagements financiers des ministères dont je suis responsable, que je suis inquiet du peu de contrôle qu'on a là-dessus. Quand je dis peu de contrôle, je pense qu'un ministre responsable de son ministère, qui qu'il soit, n'a pas le temps de s'occuper de cuisine et encore moins de quincaillerie et de logiciel. On sait que, dans ce domaine, il y a une espèce de chasse gardée: si tu entres dans le gouvernement avec ta quincaillerie, c'est forcément le principe du bras dans le tordeur, c'est-à-dire qu'on n'a pas le choix, lorsqu'on veut augmenter de cinq, dix, quinze postes de travail, ou que l'on veut ajouter à son logiciel de base, il faut acheter du même fournisseur. C'est une préoccupation, à mon avis, qui

nous démontre... Pas plus tard qu'hier, au ministère des Finances, on se posait des questions. Je ne suis pas sûr qu'on sait vraiment ce qui se passe actuellement, mais on a octroyé un contrat, de mémoire, de 750 000 $ à Comterm -je n'ai rien contre Comterm, ça aurait pu être Ogivar ou d'autres - sans même faire de soumission, donc sur invitation, parce que, a-t-on dit, Comterm rencontrait les normes, et tout cela. (15 h 45)

Alors, en matière d'informatique, je sens que l'on déborde beaucoup de toutes les politiques qui existent au gouvernement. On ne suit pas les normes pour Rosalie, la machine, et, quand on les suit, je me suis rendu compte que, dans le cas des soumissions sur invitation, ce n'est pas toujours le choix du plus bas soumissionnaire qui s'applique, particulièrement quand il s'agit de programmes spéciaux et quand il s'agit de l'expérience en informatique, même le plus bas soumissionnaire peut être disqualifié par un comité de sélection, et à peu près dans tout l'octroi de ces contrats-là, c'était flagrant. Il y a un petit comité de sélection et je ne mets personne en doute, sauf que, nonobstant le prix soumissionné par une firme, nonobstant les qualifications, il y a quelqu'un, à un moment donné, qui forme un comité de sélection composé de trois personnes et des contrats sont octroyés.

Je pense qu'il faudra que le Vérificateur général porte une attention très particulière autant à des firmes qui sont des fournisseurs en matière de quincaillerie et de logiciels qu'à des firmes qui ont de l'expertise pour suggérer les améliorations et l'optimisation des programmes, etc. En cette matière, je trouve qu'il y a urgence, parce que vous comprendrez qu'il y a des choses que même si on les vérifie dans un an ou dans une couple d'années, on ne pourra apporter des correctifs qui seront simultanés. Dans ce cas-là, il me semble qu'on devra vivre pendant plusieurs années avec des décisions qui ont été prises, et si elles ne sont pas pointées du doigt et si on ne sent pas qu'il y a une certaine forme de vérification, la nature humaine étant ce qu'elle est, je pense qu'il y a beaucoup de possibilité de passer à côté de la machine. C'est une préoccupation que j'ai et j'aimerais vous entendre là-dessus. J'aurais un autre point du côté informatique avant de passer à un autre sujet.

M. Châtelain: M. le Président, nous avons les mêmes préoccupations que celles qui ont été exprimées par le député. Évidemment, les sommes astronomiques en cause, le fait que le champ de la concurrence chez les fournisseurs est passablement limité, le fait qu'il s'agit de domaines nouveaux qui sont en développement constant rendent tout ce secteur-là exposé à un certain risque de mauvaise administration. C'est une des raisons pour lesquelles nous avons mis sur pied cette étude d'envergure que nous avons commencée l'an dernier. Quant aux préoccupations du député, nous allons nous pencher exactement sur ces secteurs-là au cours de la présente et de la prochaine année. Tout le secteur des soumissions, de l'évaluation et de l'octroi des soumissions, nous allons le regarder de très près à cause justement de l'élément de risque qu'il contient.

Comme Je le disais tantôt, ce qu'il faut assurer, c'est l'existence d'une politique et la transparence. Dès que cette politique sera connue, qu'elle sera respectée, qu'elle sera connue de tout le monde, on aura éliminé joliment le risque, et on s'assurera que tous les soumissionnaires qualifiés seront considérés sur un pied d'égalité et que les développements se feront dans l'ordre dans les ministères, c'est bien sûr.

Nous avons les mêmes préoccupations que le député et nous voulons poursuivre justement nos études de ce côté-là, entre autres, dans les ministères et les organismes.

M. Parent (Bertrand): Toujours sur la même lancée, il y a beaucoup de locations qui se font dans ce domaine au lieu d'achats et, à l'inverse, parfois on fait des achats et on aurait peut-être avantage à faire des locations. Ce que je veux dire, c'est qu'en cette matière il y a un jeu énorme qui se fait, parce que même des logiciels cela se loue, et je ne suis pas sûr que lorsqu'on prend la décision de les louer parce qu'on en a un urgent besoin, on nous dit que ce n'était pas disponible autrement et que c'est la meilleure façon. Alors, toute cette question de location au lieu d'achat et parfois, dans certains cas, on a procédé directement à un achat avec une explication un peu boiteuse. On aurait peut-être dû aller... Voici une question que je posais hier au sujet du ministère des Finances: Pourquoi avez-vous loué ce logiciel pour 24 mois? De mémoire, c'était 48 000 $. Quel prix auriez-vous payé pour acheter le logiciel? On n'avait pas la réponse. Il me semble que, peut-être, il y a des jeux de passe-passe au-dessus de tout le monde en ces matières, et vous comprendrez qu'on n'a pas les outils pour aller chercher cette information.

Un dernier point sur la question de l'informatique avant de revenir au dossier de la CSST. Dans le 12. 37, toujours la gestion des ressources informatiques, quand vous mentionnez en haut de la page 231 que sept des neuf organisations vérifiées n'avaient pas, au moment de votre vérification, attribué à un responsable la tâche de procéder à l'évaluation postimplantation et 27 des 31 systèmes informatiques examinés n'ont pas fait l'objet d'un rapport d'évaluation permettant, entre autres, de savoir si les avantages qu'on cherchait, etc., et si le système les satisfait... Ce que cela m'indique, c'est que, dans la très grande majorité des cas, pour ne pas dire à 90 %, ce qui est le cas, dans 90 % des cas que vous avez vérifiés, il n'y a pas cette préoccupation - et là, on parie vraiment d'allumer les lumières - chez les administrateurs, les gens qui sont là, de dire:

On a quelqu'un qui sera capable d'évaluer tout cela. Si on répartit cela à l'intérieur de l'ensemble de la machine, on peut s'imaginer ce que cela peut représenter et le chiffre que je retiens, c'est que 90 %, si on faisait une extrapolation de votre échantillonnage, n'ont personne qui fait le suivi de dossiers ni personne qui fait l'évaluation de tout cela, et on continue à un rythme effarant, voire accéléré. Dans certains ministères, on est actuellement sur un plan triennal, et 1988-1989, cela rentre, et on fait tout ce qu'on a à faire pour les dix prochaines années, on l'achète là. On peut s'imaginer que s'il n'y a pas d'évaluation au bout et s'il n'y a pas quelqu'un qui prend soin de cela...

Ce que cela m'indique, c'est qu'il n'y a pas, de façon générale, à l'intérieur de tous les ministères et les organismes, actuellement, une préoccupation de ce suivi-là. Cela me semble très gros. Je me demande, à part de l'avoir souligné à la page 231 dans des commentaires, parce que quand on les analyse comme il faut, on s'aperçoit de la proportion que cela peut prendre, ce qu'il y a d'autre que vous pouvez faire pour allumer les lumières parce que c'est gros, neuf organismes sur dix.

M. Châtelain: C'est sûr que c'est très important, M. le Président, comme le député l'a signalé. D'ailleurs, nous en avons déjà discuté ici en commission, en réponse aux questions des députés, il n'y a pas beaucoup plus que l'on peut faire nous, comme vérificateur, que de le signaler dans notre rapport, faire des recommandations et des suivis et faire rapport à nouveau à l'Assemblée nationale; d'ailleurs, c'est ce que nous faisons. Peut-être que, pour la prochaine étape, ce serait bien de convoquer les gestionnaires pour leur demander quels sont les moyens qu'ils veulent prendre pour corriger la situation, leur demander des comptes rendus ici et exercer des suivis auprès des gestionnaires eux-mêmes, leur demander de venir fournir les explications ici même.

M. Parent (Bertrand): M. le Président, à moins qu'un autre collègue ne veuille poser des questions en informatique, j'aimerais profiter de mon temps pour aborder un autre sujet ou revenir au domaine de la CSST.

Le Président (M. Lemieux): Oui. M. le député de Prévost a un sujet particulier, mais on va laisser aller M. le député de Bertrand. Combien reste-t-il de temps, M. le secrétaire? Onze minutes. Vous pouvez...

M. Parent (Bertrand): Est-ce que cela touche au domaine de l'informatique, M. le député?

Le Président (M. Lemieux): Non. C'est un tout autre sujet.

Commission de la santé et de la sécurité du travail (suite)

M. Parent (Bertrand): D'accord. En ce qui concerne la CSST, il y a beaucoup de choses qui me chicotent là-dedans, mais je vous ramènerais à 9. 27, qui se trouve en bas de la page 155. Dans ce cas-là, je me dis que c'est tout de même quelque chose qui est assez important. On a actuellement le cas d'un accidenté... D'abord, à votre avis, 30 % des réclamations présentées à la CSST étaient douteuses au départ, selon ce que vous rapportez à ce point-là. Dans les articles 9. 30 à 9. 32, on donne, par exemple, quelques cas que je veux seulement préciser pour les fins du Journal des débats: Lorsqu'un accidenté n'est pas de retour au travail 14 jours après le début de son incapacité, son employeur doit expédier à la commission, dans les deux jours suivants, un avis qui permettra de statuer sur l'admissibilité de ce travailleur. On sait, en pratique, à la suite de votre vérification, selon vos conclusions, qu'il s'écoule en moyenne 21 jours au lieu de deux, avant que l'employeur n'expédie cet avis. Des pénalités sont prévues si les délais ne sont pas respectés, mais la commission n'en impose pas. Je pense qu'au départ la possibilité qu'une décision soit prise rapidement est passablement réduite, si cela se passe après 21 jours au lieu d'après deux jours. Je pense que, dans ce sens-là, il y a énormément d'argent qui est impliqué là-dedans. Pourriez-vous me dire, dans cet exemple que je mentionne, de quelle façon et dans quelle mesure ces retards engendrent des coûts? Puis, est-ce qu'il y a une évaluation qui a été faite ou qui sera faite dans la vérification Intégrée de ce que ceci pourrait engendrer comme anomalie?

M. Châtelain: M. le Président, avant de demander à M. Gilles Bédard, Vérificateur général adjoint, de répondre plus spécifiquement à la question du député, il y a peut-être un commentaire général que j'aimerais faire sur la conformité de l'admissibilité quand on mentionne que, dans au moins 30 % des cas de réclamations, l'admissibilité était douteuse. Nous précisons bien ici que c'est au moment de leur acceptation par la commission. C'est au tout début, lorsque la commission se prononce pour la première fois sur l'admissibilité. Cette admissibilité, selon nous, était douteuse, mais il peut y avoir quand même des études de faites par la suite par la commission. La commission peut faire d'autres études, plus approfondies, plus tard, qui pourront faire en sorte de déterminer l'admissibilité d'une façon plus précise ou encore, justement, de justifier l'admissibilité. Ce que nous disons, c'est qu'au moment où la décision est prise, soft dès le début, dans 30 % des cas cette admissibilité est douteuse. Je voulais apporter cette précision, parce que cela pourrait être mal interprété.

Concernant le nombre de jours et les coûts que cela peut représenter, est-ce que je pourrais,

M. le Président, demander à M. Gilles Bédard, Vérificateur général adjoint, de répondre à la question du député?

Le Président (M. Lemieux): M. Bédard, s'il vous plaît.

M. Bédard (Gilles): En regard de l'admissibilité, je pense que M. Châtelain a suffisamment explicité cela. En regard des délais pour établir l'admissibilité, bien sûr, je pense que nous reprochons ici à la commission de ne pas mettre en branle des mécanismes pour faire en sorte d'obtenir des employeurs l'information pertinente le plus rapidement possible pour statuer sur l'admissibilité. Est-ce que cela peut engendrer des coûts? Bien sûr, la responsabilité de la commission est de statuer le plus rapidement possible sur l'admissibilité de l'accidenté. Donc, si elle n'a pas toute l'information, elle pourrait être tentée, et j'extrapole, de décréter l'admissibilité de tel individu sans avoir toute l'information requise. C'est ce que nous commentons dans le paragraphe précédent, mais, comme le disait M. Châtelain, nous ne disons pas que les 30 % auxquels nous faisons allusion ne sont pas admissibles. Nous disons qu'au moment où la décision a été prise, l'information n'était pas suffisante pour pouvoir déterminer si les gens l'étaient ou non.

Quels sont les coûts qui peuvent être encourus? Comme je vous le disais tantôt, je ne peux qu'extrapoler. L'information est nécessaire. La commission devrait l'obtenir. Elle devrait mettre sur pied des mécanismes pour l'obtenir, pour être capable de statuer le plus rapidement possible avec toute l'information dont elle a besoin pour déterminer l'admissibilité. Mais, on ne peut pas identifier les coûts qui se rapportent à cela.

M. Parent (Bertrand): Maintenant le côté administration et financement du système. Dans le tiers des dossiers examinés sur un échantillon de 142 - vous dites: choisis pour les fins de cette étude - la durée effective de la période de consolidation, celle-ci étant définie comme le temps qu'il faut pour qu'une lésion soit guérie ou que l'état de santé d'un travailleur soit définitivement stabilisé, était sans rapport avec la durée prévue apparaissant sur l'attestation médicale fournie à la commission. Dans la moitié des cas où la durée prévue était de quatorze jours ou moins, la consolidation a pris 75 jours et plus, voire plus de 265 jours pour quelques cas. Pour les six dossiers où la durée prévue était de moins de huit semaines, il a fallu plus de 28 semaines pour l'atteindre. Cela spécifie, dans le fond, l'ensemble des délais relevant de la machine qu'est la CSST. J'aimerais savoir, M. le Vérificateur général, si ces cas-là sont dus premièrement à un manque d'agents ou, en ce qui concerne l'organisation qu'est la CSST, est-ce que c'est un manque de rigueur?

Qu'est-ce qui peut être fait? Demain matin, si on le voulait, est-ce qu'on pourrait apporter assez rapidement des correctifs pour être capable d'accélérer l'examen de tous ces cas qui sont actuellement dans la machine? Est-ce que nous pouvons, nous en tant qu'élus, faire des pressions auprès du ministère ou du ministre concerné pour qu'on soit capable de rendre cela plus vivable et surtout plus opérationnel, évidemment, pour autant que vous êtes concerné à la suite de cette étude, de cette vérification que vous avez faite? (16 heures)

M. Bédard: Je me reporte particulièrement au commentaire 9. 38 et aux suivants sur la qualité et la pertinence de l'information médicale. À cet égard, au moment de notre vérification, la commission n'avait pas précisé, en tant que telle, ce qui constituait une information médicale de bonne qualité et suffisante pour les décisions qu'elle a à prendre. Alors, on ne pouvait pas se servir de ce qui existait. Donc, on a fait la démarche suivante. On a eu recours à des experts en santé et sécurité du travail pour nous aider à juger des degrés de qualité et de suffisance de l'information médicale pour notre prise de décision et ils nous ont donné les critères sur lesquels on devait s'appuyer. Ils nous ont aidés dans ce domaine. Finalement, on n'avait pas l'impression, d'après la discussion que nous avons eue avec nos experts, de demander des choses absolument impossibles, puisqu'on a pu conclure dans ces dossiers-là. Je pense que la commission pourrait mettre en branle des mécanismes qui feraient en sorte qu'elle pourrait exiger de l'information qui fasse en sorte que l'information soit pertinente et valable pour en arriver à une décision.

M. Parent (Bertrand): Si je comprends bien l'analyse que vous en faites est jusqu'à un certain point un manque de volonté. Au point de vue administratif, c'est un manque de rigueur et non pas...

M. Bédard: Je ne conclurais pas que c'est un manque de volonté. Je pense, qu'on peut apprécier la commission à sa juste valeur de par son ampleur. C'est quelque chose d'énorme et qui n'est pas toujours facile à gérer. Par contre, il est évident qu'on a indiqué certaines lacunes qui méritent amélioration. Les recommandations qu'on a faites seront applicables sur une courte période de temps.

M. Parent (Bertrand): Vous dites sur une courte période de temps. Autrement dit après votre passage et votre vérification intégrée, j'imagine de toute façon que vous continuez, dans ce sens-là - cela ne s'arrête pas la journée du dépôt - mais on pourrait à l'intérieur des six prochains mois, dans ce sens-là - une période comme cela, voir si vos recommandations sont suivies ou voir des modifications ou des change-

merits de comportement ou des améliorations quant aux lacunes que vous avez relevées.

Est-ce quelque chose de réalisable et de pensable s'il y a une volonté d'y donner suite ou est-on dans une situation où on ne s'en sortira pas et, l'année prochaine, on va être encore au même point? J'aimerais avoir votre évaluation en tant que Vérificateur général.

M. Châtelain: M. le Président, un vérificateur est toujours prudent, je pense bien.

M. Parent (Bertrand): Vous êtes très très prudent.

M. Châtelain: Je ne dirais pas que, sur une période de six mois, il serait possible de mettre en place les mécanismes qui assureraient le respect des recommandations que nous avons formulées. Il y a des recommandations qui sont quand même passablement d'envergure et qui demandent encore beaucoup de réflexion, d'autres études et des actions d'envergure additionnelles de la part de la commission. Je ne crois pas que ce serait possible dans tous les cas de s'attendre qu'il y ait de l'action d'ici à six mois. Dans certains cas, quand il s'agit d'actions routinières et répétitives de la part de la commission, mais dans d'autres cas, ce ne serait pas possible.

M. Parent (Bertrand): Cela va. Je pense que le député de Prévost pourra avoir son temps après mon collègue, le député de Lévis.

Le Président (M. Lemieux): Mais, vous avez terminé votre temps, M. le député de Bertrand. Donc, M. le député de Prévost, vous avez vos minutes.

M. Forget: Est-ce qu'il est prévu de continuer dans le même sens?

M. Parent (Bertrand): Je ne pense pas que vous soyez obligé de parler de la CSST.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Prévost, vous avez vos vingt minutes.

Régie des assurances agricoles du Québec

M. Forget: M. le Président, M. le Vérificateur général. Voici, ma question concerne l'assurance-récolte et l'assurance-stabilisation. Je regarde la section du rapport concernant les assurances collectives, ce qu'il dit, et, de la façon dont cela fonctionne, cela n'existe pas ici. Les explications que vous donnez ne sont pas tout à fait exactes, parce que, en assurances collectives, on est considéré par zones et, à l'intérieur des zones, on trouve à sélectionner des agriculteurs pour aller faire l'échantillonnage. Il y a un échantillonnage qui est fait et, ici, cela m'apparaît qu'il n'aurait pas d'échantillonnage de fait. Ici, c'est tiré au sort. Par exemple, pour une zone, je pense que c'est huit agriculteurs qui sont échantillonnés pour les fins du contrôle ni plus ni moins et cela n'apparaît pas du tout ici. Est-ce pour être le plus équitable possible?

M. Châtelain: M. le Président, je comprends que le député signale qu'il y a une chose qu'on ne mentionne pas. C'est assez difficile pour moi de lui demander dans quel paragraphe on en parle si on ne le mentionne pas, mais dans quelle section du rapport, M. le député?

M. Forget: Ah! C'est à la page 204.

M. Châtelain: Sous le titre Échantillonnage?

M. Forget: Oui.

M. Châtelain: D'accord.

M. Forget: Si vous regardez les commentaires de la régie, elle dit tout simplement que c'est normal pour ce qui est de l'échantillonnage. C'est sûr que cela s'arrête le 30 avril, mais, par contre, aussi bien pour l'assurance individuelle que collective, cela arrête le 30 avril. Si, le 30 avril, par exemple, cela regarde les bovins, les bovins sont comptés, mais cela n'apparaît pas non plus ici.

M. Bédard: M. le Président, on dit à cet égard, et M. Deblois pourra peut-être compléter par la suite, que la régie privilégie une méthode d'échantillonnage reconnue et que, dans ce contexte, nous avons analysé la méthode qu'elle utilisait. Nous disons que la régie n'a pas respecté sa propre méthode et qu'à cet égard, dans certains secteurs, elle a fait plus d'échantillons. Si on se rapporte au paragraphe 10. 45, on dit: "La régie a effectué dans l'ensemble plus d'échantillons que nécessaires. " À cet égard, cela lui a occasionné des coûts additionnels. Par la suite, on dit qu'elle n'a pas non plus, dans l'extrapolation de ses résultats, vérifié ou évalué la fiabilité des résultats qu'elle avait obtenus selon cette méthode.

Vous, vous me dites que quelque chose n'est pas exact. On dit que la régie n'a pas respecté la propre méthode d'échantillonnage qu'elle s'était elle-même donnée et qu'à cet égard elle a encouru des coûts additionnels, étant donné ce qu'il en coûte pour aller échantillonner sur place. Deuxièmement, l'extrapolation de ces résultats n'est pas fiable, parce qu'elle n'a pas respecté sa méthode dans son ensemble.

M. Forget: Je ne suis pas tout à fait d'accord avec vous. Si je regarde l'ensemble - je me suis quand même occupé de cela pendant plusieurs années - je pense que l'échantillonnage était assez précis. Remarquez que j'ai bien mentionné que c'était cinq ou six agriculteurs par zone. Si on arrivait avec un échantillonnage

pour tous les agriculteurs, cela deviendrait drôlement coûteux, et cela, sur le plan collectif. Mais, concernant l'agriculture, le système individuel, indépendant, est fait pour tous les agriculteurs. Vous avez votre plan de ferme et vous fonctionnez à partir de ce plan. Je pense que cela n'apparaît pas ici; je n'ai vu nulle part ces explications sur le plan individuel, sur le plan de la ferme et la façon dont cela fonctionne quant à l'assurance-récolte.

M. Deblois (Roger): Roger Deblois, directeur de la vérification.

Concernant le système individuel, il s'agit de déterminer les sites et les champs qui seront échantillonnés afin de déterminer leur rendement.

M. Forget: C'est ça. Exactement.

M. Deblois: D'accord. Ce n'est pas nécessairement le nombre d'assurés. Au niveau collectif, on va échantillonner le nombre d'assurés et le nombre de sites.

M. Forget: Au niveau du système collectif, ce sont des personnes dont les noms sont tirés au sort, dans le secteur donné, qui seront échantillonnées.

M. Deblois: On détermine les sites qu'on va échantillonner à partir du détail de la zone, appelons cela comme ça. Lorsqu'on a établi la zone et qu'on a tous les assurés du collectif à l'intérieur de ça, on détermine un nombre de sites ou un nombre d'échantillons qu'on va échantillonner dans cet ensemble de zones.

M. Forget: C'est tiré au sort.

M. Deblois: Oui, dans un sens. C'est une méthode...

M. Forget: Pour être le plus équitable possible.

M. Deblois: Oui.

M. Forget: D'accord. Mais ces champs-là sont quand même échantillonnés?

M. Deblois: Oui.

M. Forget: Alors, si on fait ça comme ça... M. Deblois: Ils sont échantillonnés... M. Forget: ...c'est pour déduire les coûts.

M. Deblois: On a une méthode d'échantillonnage et on procède à partir de cette méthode d'échantillonnage qu'on s'est donnée. Si, pour une zone donnée, cela donnait, par exemple, dix sites à échantillonner, la régie s'est donné un nombre minimum de 25 échantillons. D'accord?

M. Forget: C'est-à-dire trois visites.

M. Deblois: Alors, on a fait quinze échantillons de trop. C'est ce qu'on dit Ici, dans le commentaire. On a fait plus d'échantillons que prévu. Elle s'était également donné un maximum. Si, dans une zone donnée, selon la méthode d'échantillonnage, on devait en vérifier 45, supposons, elle s'est donné comme maximum 35 échantillons.

Si on prend l'ensemble des zones de la province, elle a fait plus d'échantillons que sa méthode lui déterminait d'en faire.

M. Forget: Normalement, par champ, c'est trois échantillons qu'ils peuvent. D'accord? Cela dépend de l'année également, de la température. À un moment donné, pour une raison donnée, vous avez une sécheresse au mois d'août et vous voyez les agriculteurs se plaindre à la régie. Naturellement, cela peut demander quatre visites à un moment donné.

M. Deblois: Oui, si on est dans le foin, par exemple, selon les récoltes qu'on fait, c'est ça.

M. Forget: Foin ou maïs, tout dépend de l'année.

M. Deblois: C'est ça.

M. Forget: Lorsqu'on parle du niveau individuel, à ce moment-là, tous les champs sont échantillonnés...

M. Deblois: Sur avis de dommage, les champs sont mesurés et échantillonnés pour le rendement, oui, au niveau individuel.

M. Forget: Moi, cela me frappe présentement, lorsque vous parlez de 100 000 $. On avait des fois de la difficulté avec les inspecteurs pour venir vérifier, prendre les échantillonnages comme tels, parce qu'ils manquaient de temps. Et vous, vous arrivez avec un surplus. Tout dépend des régions ou quoi?

Le Président (M. Lemieux): M. Bédard.

M. Bédard: Écoutez, je pense qu'l y a deux points importants là. Dans ce qu'on dit, nous, on ne vient pas de mettre en cause la régie si elle devrait en faire plus ou si elle devrait en faire moins. Je pense que ce sont des spécialistes et on pourra en discuter avec eux. Ce qu'on dit, nous, c'est qu'une méthode d'échantillonnage, à partir du moment où vous avez déterminé que, pour avoir quelque chose de représentatif, vous devez faire un nombre minimum d'échantillons tel que votre méthode vous le dicte, vous devez la respecter par la suite. Si, dans un secteur donné, vous devez aller prélever à 45 endroits et qu'à un moment donné vous vous limitez à 35 parce

que vous vous êtes donné ça comme maximum, si vous prenez par ta suite les résultats de ces 35 pour extrapoler, pour donner, l'ensemble des rendements ou ce que vous voulez en conclure, la réponse ou l'extrapolation n'est pas valable. Elle n'est pas vérifiée en tant que telle, puisqu'elle ne respecte pas la norme. Le contraire est exact aussi. Si vous en faites trop, par la suite, vu que vous n'êtes pas uniforme dans l'application, c'est dangereux pour l'extrapolation de vos résultats.

Nous disons alors que si la régie - nous ne disons pas qu'elle dépense trop - avait respecté ses propres normes à l'égard des échantillons, elle aurait économisé un montant de 100 000 $. Donc, elle a dépensé plus. Elle a dépensé 100 000 $ de plus que sa propre norme exigeait. C'est juste ça qu'on dit.

M. Forget: Maintenant, ici, dans le rapport, on dit: "La régie constate également qu'elle dispose à l'heure actuelle, pour certaines cultures, de données sur les rendements de production étalées sur 12 ans. " Je trouve ça...

M. Bédard: Vous faites référence à quel paragraphe?

M. Forget: Attendez un peu. À la page 203. M. Bédard: Oui.

M. Forget: Paragraphes 1, 2, 3, 4. Je trouve ça lourd, moi, douze ans.

M. Deblois: C'est pour établir le rendement assuré, cela. Oui? Pour établir le rendement assuré...

M. Forget: Oui, c'est ça. C'est exactement ça.

M. Deblois:... elle garde des statistiques et, actuellement, elle a des statistiques pour douze ans.

M. Bédard: Si vous me permettez. Au point 10. 37 de la page 202, à la troisième ligne, on dit que, pour attribuer le rendement assuré, la régie utilise présentement une période de référence de sept ans. À l'intérieur de cette période, elle utilise le rendement exact et dans certains cas elle fait une certaine estimation puisqu'elle n'a pas eu de réclamation. Donc, dans cette période courte de sept ans, elle a des rendements réels et elle a des rendements estimatifs. On dit que c'est dangereux, parce que c'est une courte période. D'ailleurs, un peu plus bas, dans le commentaire, vous allez voir que même les cabinets d'actuaires-conseils estiment que, pour que ce soit valable, on devrait aller sur une période de 15 à 25 ans.

C'est juste cela notre commentaire. La régie nous dit: Douze ans, pour certaines récoltes.

Nous, nous disons que la régie utilise généralement une méthode de sept ans et que, pour cette méthode-là, elle utilise des résultats réels pour quelques années, et pour d'autres des résultats estimatifs. Des experts prétendent selon ce qu'on a pu trouver, qu'on devrait utiliser une évaluation basée sur une période de 15 à 25 ans et c'est ce qu'on recommande à la régie.

M. Forget: Par contre, ici, je remarque concernant l'assurance qu'il ne faut pas oublier aussi qu'ils tiennent toujours compte quand même des bovins que vous avez au printemps. Ils font quand même lecture des bovins que vous avez dans votre étable. Si je regarde, ils font mention qu'ils n'en tiennent pas compte, mais ils en tiennent toujours compte.

M. Deblois: En ce qui concerne les grandes cultures, en particulier?

M. Forget: Oui, concernant les assurances collectives. (16 h 15)

M. Deblois: Oui. D'ailleurs, dans un paragraphe, on dit qu'ils ne font pas la vérification des unités animales.

M. Forget: Mais vous payez selon les unités animales que vous avez par contre.

M. Deblois: Exactement.

M. Forget: Oui, mais si vous payez plus cher, automatiquement, vous êtes plus assurés, mais vous êtes pénalisés aussi.

M. Deblois: Actuellement, ils paient selon les unités animales déclarées.

M. Forget: Au printemps.

M. Deblois: Oui. Maintenant, depuis 1988, on dit qu'on va faire une vérification de ces unités animales chez le producteur pour ce qui concerne (es grandes cultures, bien entendu. D'accord?

M. Forget: D'accord. Parfait! Merci.

Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le député de Prévost. M. le député de Lévis.

M. Garon: Quelles sont les principales différences que vous avez observées dans les méthodes de vérification de l'assurance-agricole depuis 1986, 1987, 1988, comparé à antérieurement, notamment dans la vérification des unités assurées?

M. Deblois: En ce qui concerne les méthodes d'échantillonnage?

M. Garon: De vérification.

M. Deblois: Actuellement, en ce qui concerne le mesurage, par exemple, les programmes de stabilisation prévoient qu'elles doivent être mesurées à 100 %. Au cours des deux dernières années, la régie les a mesurées à 50 %. Maintenant, on nous dit qu'à partir de 1988 on va mesurer à 100 %, tel que le programme le demande. En ce qui concerne les unités animales, par exemple, en récolte...

M. Garon: Mais auparavant est-ce qu'on mesurait à 100 %?

M. Deblois: Je ne pourrais pas vous le dire. Nous avons commencé en 1986-1987. Ce sont les deux années pour lesquelles on a vérifié.

M. Garon: Pour le dénombrement des animaux assurés?

M. Deblois: Je ne pourrais pas vous le dire. Au cours des deux ou trois dernières années, on n'avait pas fait le décompte des unités animales. C'est difficile de dire le décompte. Je ne voudrais pas dire le décompte; ce sont plutôt des unités animales. Ce n'est pas un vrai décompte.

M. Garon: Non, mais comme les porcs, les veaux, les boeufs assurés par l'assurance-stabilisation, par exemple.

M. Deblois: En stabilisation? M. Garon: Oui.

M. Deblois: Actuellement, on fait beaucoup de décomptes en stabilisation. Selon la production, on peut y aller une fois, deux fois, trois fois par année. C'est dans leurs directives d'établir ces décomptes.

M. Garon: Est-ce qu'on a changé de méthode au cours des dernières années?

M. Deblois: Oui. Je pense que, d'année en année, on fait une mise à jour des directives.

M. Garon: Non, les méthodes pour vérifier les unités assurées. Par exemple, quelqu'un dit: J'assure 3000 cochons. Il a peut-être 3000 cochons, peut-être moins.

M. Deblois: Oui. On va aller vérifier sur place. On va faire un décompte sur place.

M. Garon: C'est ce que je demande. Au cours des quatre dernières années, quels ont été les changements? Il y a eu des changements dans les méthodes de vérification et je vous demande si vous avez regardé cela ou non.

M. Deblois: Je sais qu'il y a eu des changements, mais je ne pourrais pas vous préciser lesquels. On n'a pas de commentaires à faire sur l'assurance-stabilisation, croyons-nous. On l'a vérifié, mais cela respectait bien les directives et le contenu qu'elle s'était donnés. On n'a pas de commentaires a faire de ce côté-là.

Conventions comptables du gouvernement

M. Garon: Dans un rapport Inclus dans les comptes publics de 1987-1988 - un livre rouge - pour l'année financière terminant le 31 mars 1988, à la page 42, vous dites au sujet de la note concernant l'amortissement additionnel du passif non inscrit des régimes de retraite: La note complémentaire 4 mentionne que les dépenses de 1987-1988 tiennent compte d'un amortissement additionnel de 673 000 000 $, pour le passif actuariel non inscrit des régimes de retraite des fonctionnaires, des enseignants, de certains enseignants et du RREGOP. Les dépenses en supplément de l'amortissement déjà imputé à l'année financière 1987-1988, au montant de 529 100 000 $, représentent l'application ponctuelle à l'année financière 1987-1988 de l'amortissement qui aurait été imputable aux années financières 1988-1989 et 1989-1990, selon la convention comptable en vigueur.

Vous ajoutez le commentaire suivant: L'anticipation de cet amortissement nuit à la comparabilité des états financiers et rend difficile pour le lecteur la compréhension de l'évolution du déficit d'une année financière à l'autre. Pour assurer la continuité dans l'information financière, il est souhaitable que les conventions comptables utilisées par le gouvernement pour fins de présentation des états financiers ne subissent pas de modifications ponctuelles dans leur application d'une année financière à l'autre.

J'aimerais que vous en disiez un peu plus concernant cette façon de faire du gouvernement et de quelle façon cela ne donne pas le portrait réel de la situation, pour 673 000 000 $.

M. Châtelain: Je ne sais pas si on se prononce sur le fait que ça ne donne pas le portrait réel. Ce que l'on fait ressortir, c'est ceci...

M. Garon: En tout cas, pas facilement comparable, si vous voulez.

M. Châtelain: D'accord. Le gouvernement avait une convention comptable concernant les régimes de retraite et l'amortissement des obligations envers les régimes de retraite. Le gouvernement la suivait. Il l'a modifiée graduellement de toute façon; il a fait de petites modifications - bien, des petites, il y a des chiffres quand même assez importants - au cours des dernières années à cette convention comptable. Mais, il l'a améliorée au moins dans le sens où le Vérificateur général l'avait recommandé dans plusieurs cas.

Ce qui est arrivé dans ce cas particulier sur lequel on attire l'attention ici, c'est que, pour

une année donnée, c'est-à-dire la dernière année, en 1987-1988, le gouvernement a apporté une autre modification à sa convention comptable, mais d'une façon ponctuelle. C'est une modification qui s'est appliquée seulement à cette année-là, c'est-à-dire que le gouvernement a anticipé l'amortissement, selon sa convention comptable disons régulière, ce qu'il aurait amorti en 1988-1989 et 1989-1990, du moins une partie de cela, et II l'a imputée à l'année 1987-1988. Alors, ce qu'on dit, c'est qu'il s'agit d'une modification ponctuelle pour cette année-là à sa convention comptable. Donc, cela est ponctuel, mais cela nuit à la comparabilité parce que, si on met en place une pratique comptable et qu'on l'applique pour une année donnée seulement, évidemment, dans les autres années, elle n'est pas appliquée de la même façon et cela vient nuire à la comparabilité.

Dans le fond, ce qui arrive, c'est qu'on se trouve à avoir indirectement l'amortissement de trois ans dans un an et s'il n'y a pas d'autres modifications à la convention comptable pour l'année en cours, pour l'année 1988-1989, il n'y aura presque rien d'amorti. Le montant qui a été anticipé ne sera pas amorti dans l'année en cours, alors cela nuit à la comparabilité. Je pense que ce que je dis est clair. Disons qu'en 1986-1987, il y avait l'amortissesment représentant une année d'amortissement; en 1987-1988, il y avait l'amortissement qui représentait l'équivalent de trois années d'amortissement; en 1988-1989, il n'y en aura peut-être pas. Je ne peux pas dire ce que le gouvernement va faire en 1988-1989. Il y aura peut-être un autre amortissement de façon ponctuelle, je ne le sais pas.

Pour la continuité de l'information, il faut quand même que les mêmes conventions comptables soient appliquées d'une façon continue, d'une année à l'autre, et c'est ce qu'on fait ressortir. Cela ne veut pas dire qu'il ne doit pas y avoir amélioration des conventions comptables. C'est bien sûr que, si on améliore les conventions comptables, si on les modifie pour les améliorer, il y a quand même un manque de continuité l'année où il y a une modification. Il ne faut quand même pas dire qu'on ne peut pas modifier les conventions comptables en vue de les améliorer.

M. Garon: Quel est l'effet net quand on regarde l'année 1987 avec cet amortissement anticipé?

M. Châtelain: Je pense que le montant est donné. L'amortissement additionnel a été de 673 000 000 $. Ce n'est pas nous qui l'inventons.

M. Garon: Non, non.

M. Châtelain: II est donné dans les états financiers à part ça. Il est clairement dans les états financiers; ce montant est présenté à la face même des états financiers comme une dépense additionnelle.

M. Garon: Comme une dépense additionnelle. M. Châtelain: Oui, oui.

M. Garon: L'effet net sur le déficit, c'est que ça fait paraître un déficit plus grand en 1987.

M. Châtelain: Bien oui. D'ailleurs, vous l'avez dans le document que vous citez. À la page 13, me dit-on, vous le voyez, tout à fait au bas de l'état. Vous avez, pour commencer, l'excédent des dépenses sur les revenus avant les dépenses additionnelles qui était de 1 525 000 000 $, ensuite les dépenses additionnelles de 848 000 000 $, avec comme résultat que le déficit des opérations budgétaires est de 2 374 000 000 $.

M. Garon: Oui. Je m'excuse, on me soufflait quelque chose à l'oreille et j'ai manqué vos dernières phrases.

M. Châtelain: D'accord. Je signalais que l'effet de cette dépense additionnelle apparaît à la face même des états financiers. Elle apparaît tout à fait au bas de l'état qui est intitulé Revenus et dépenses. C'est à la page 13 des comptes publics.

M. Garon: Donc, cela fait paraître le déficit plus grand de 673 000 000 $.

M. Châtelain: Bien, l'effet net est de 848 000 000 $. Tantôt...

M. Garon: Ah non! Là, vous parlez des revenus. Vous n'êtes pas dans la même chose. Tantôt je parlais de l'amortissement additionnel du passif...

M. Châtelain: Oui, mais...

M. Garon:... non inscrit des régimes de retraite.

M. Châtelain: D'accord. Tantôt on parlait de 673 000 000 $...

M. Garon: Oui.

M. Châtelain:... mais les 673 000 000 $ sont compris dans les 848 000 000 $ qui apparaissent au bas de la page 13.

M. Garon: Je voulais y venir.

M. Châtelain: Le solde apparaît plus loin. Le solde qui est de 176 000 000 $ est commenté à la page 42, au paragraphe c. Si vous vous en souvenez, il s'agit des paiements des prestations

d'assistance sociale.

M. Garon: Je voulais en venir aux 848 800 000 $ qui apparaissaient à la politique budgétaire du 30 septembre 1988. Est-ce qu'il est courant pour des gouvernements de faire des opérations comme celle-là? Vous êtes là pour renseigner le public. Normalement, un gouvernement entre dans son année les dépenses de l'année et les revenus de l'année et il fait la même chose pour l'année suivante. Pensez-vous que c'est une bonne façon d'indiquer la réalité au public que de payer des dépenses d'avance pour faire gonfler le déficit d'une année? Au fond, c'est ça l'effet net. Cela gonfle le déficit de 1987, parce qu'on paye d'avance des choses qu'on aurait dû payer en 1988 ou en 1989 et qu'on paye en 1987. Est-ce une comptabilité qu'on voit souvent dans les pays dits démocratiques ou qui ont des systèmes de comptabilité organisés et qui essayent de montrer le portrait réel à leur population?

M. Châtelain: II y a deux choses là-dedans. C'est que, d'une part, le gouvernement établit sa propre politique budgétaire et c'est le gouvernement qui établit ses propres conventions comptables. Il a autorité pour le faire et il l'a fait ici. Alors, maintenant ce n'est pas à moi à prêter des intentions au gouvernement pour ce qu'il a fait. Ce n'est pas à moi. Je regarde...

M. Garon: Je n'ai pas demandé cela. Je n'ai pas parlé de ça. J'ai dit: Est-ce que c'est normal?

M. Châtelain: Normal? Attendez. Je vais vous dire une chose qui est moins normale en comptabilité d'exercice; je vais vous parler comme un comptable. En comptabilité d'exercice, prenons justement les versements d'aide sociale. ici, le gouvernement - et je ne dis pas que c'était illégal - a compté l'an passé l'équivalent de 13 mois de versements d'aide sociale, mais ce n'est pas très normal de verser 13 mois dans une année. L'année suivante, si le gouvernement ne fait pas de modifications, il va y avoir seulement 11 mois de comptés. Alors, si on parie de comparabilité ou de continuité d'une année à l'autre, ce n'est pas très comparable d'avoir 13 mois dans une année et 11 mois dans l'autre. D'accord?

Maintenant, si je reviens aux 673 000 000 $ dont on discutait tantôt, c'est bien sûr que c'est peut-être anormal d'arriver et de changer une convention comptable de façon ponctuelle et d'escompter une année l'équivalent de trois années d'amortissement. C'est bien sûr que ce n'est pas normal. Voici l'autre question qu'il faut se poser: est-ce une amélioration? Je dis que c'est une amélioration. Si je regarde cette année-là seulement, je dis que c'est une amélioration parce que, justement, dans le passé, on a signalé que le gouvernement n'amortissait pas assez rapidement ses obligations envers les régimes de retraite. Alors, en faisant ça, il pose un bon geste, parce qu'il amortit une somme additionnelle. Nous disons: Bravo! Alors, c'est bien à ce moment-là. Évidemment, cela ne dit pas grand-chose quant à la comparabilité, si l'année suivante le gouvernement n'applique pas une convention comptable encore une fois de façon ponctuelle et n'impute pas encore un montant additionnel, disons l'équivalent de trois années. Nous applaudirions si le gouvernement amortissait l'équivalent de trois années, mais je ne suis pas persuadé qu'il va le faire. Je ne sais pas s'il va le faire. D'accord?

Alors, il y a deux choses. C'est un geste dans la bonne direction que d'augmenter l'amortissement. D'autre part, ça ne dit pas grand-chose sur la comparabilité si le gouvernement ne suit pas d'une façon continue, ensuite, cette convention comptable.

M. Garon: Mais, quel a été l'effet sur le plan de la comptabilité? Entendons-nous, la présentation ne peut pas tromper le monde. Je pense que c'est ça. Alors, quel est l'effet en 1988 d'avoir payé en 1987, 625 000 000 $, sauf de montrer - je ne sais pas si c'est ça que vous appelez être bon - 673 000 000 $ en déficit de moins en 1988 pour des dépenses qui sont normalement assumées en 1988?

M. Châtelain: Ce n'est pas un déficit de moins. C'est un déficit de plus en 1988.

M. Garon: Non, en 1987, l'année où vous l'avez payé.

M. Châtelain: Non, mais là le montant additionnel qui est imputé à 1988...

M. Garon:... sept, 1987-1988.

M. Châtelain: Oui, oui. 1987-1988, d'accord. Le montant additionnel qui est imputé à 1987-1988 a eu comme résultat, évidemment, d'augmenter le déficit. (16 h 30)

M. Garon: De 1987-1988?

M. Châtelain: Oui, oui.

M. Garon: Mais de le diminuer d'autant, de 673 000 000 $, en 1988-1989.

M. Châtelain: Peut-être. Je ne le sais pas, l'année n'est pas terminée, le gouvernement n'a pas encore préparé ses états financiers.

M. Garon: Non, non, je vous parie des prévisions budgétaires.

M. Châtelain: Ah!

M. Garon: Selon les prévisions budgétaires,

cela aura contribué à montrer que le déficit était de 673 000 000 $ moins élevé en 1988-1989.

M. Châtelain: Oui, d'accord. Mais ce n'est pas à moi à me prononcer sur les prévisions budgétaires comme telles, comme vérificateur. Je vais me prononcer sur les états financiers, sur la comparabilité, ainsi de suite.

M. Garon: Une fois que l'année est finie. M. Châtelain: Oui, oui.

M. Garon: Mais si on suit les indications du gouvernement, en 1988-1989, le fait d'avoir imputé ces dépenses en 1987-1988, ça va imputer 673 000 000 $ de moins en dépenses en 1988-1989. Alors, cela a contribué à montrer un déficit plus élevé en 1987-1988 et à faire paraître le déficit moins élevé en 1988-1989.

M. Châtelain: Je ne sais pas si c'est une question de le faire paraître tel. Cela le diminue en 1988-1989. C'est sûr, parce qu'il y a 673 000 000 $ qui ont été transportés d'une année à l'autre.

M. Garon: C'est une façon de montrer des choses qui ne sont pas exactes.

M. Châtelain: Je ne voudrais pas commenter des choses qui ne sont pas de mon domaine.

Évidemment, ce n'est pas à moi à me prononcer sur les prévisions.

M. Garon: Je vais vous poser la question suivante. Si je formais le gouvernement l'année prochaine et si je décidais de payer d'avance, pour les prochaines années, 1 500 000 000 $, pour que ça ait l'air la première année d'un gros déficit dont j'ai hérité d'une façon épouvantable et, après ça, montrer au moment des élections que j'ai réduit le déficit considérablement, parce que j'ai payé d'avance ces dépenses. Ne pensez-vous pas que je pourrais agir de cette façon? Vous avez l'air de dire que ça pourrait être correct.

M. Châtelain: Ah, non!

M. Garon: C'est cela, le fond du problème.

M. Châtelain: Je ferais ce que j'ai fait cette année, M. le Président. J'ai indiqué dans mon rapport le manque de comparabilité d'une année à l'autre. C'est ce que je ferais.

M. Garon: Non, non, je comprends, si on regarde juste l'aspect de la comparabilité, sauf que l'effet net sur la population, ça a l'air de gonfler un déficit une année pour réduire artificiellement le même déficit les années suivantes.

M. Châtelain: Oui, mais, M. le Président, au moment où vous feriez ça, il faudrait quand même que vous changiez vos conventions comptables et je pense que le Vérificateur général se prononcerait sur la qualité de vos conventions comptables, si elles sont bonnes ou non, si c'est une amélioration ou non.

M. Garon: Mais, si je faisais la même chose qui a été faite là: changer les conventions comptables pour 1987 uniquement? Alors, je les change la première ou la deuxième année de mon mandat, en vue que les dépenses soient moins fortes la troisième et la quatrième année, donc que le déficit paraisse plus bas. Je n'ai changé qu'une année les conventions comptables. Vous vous prononcez un petit peu, moralement, comme ça, sauf que l'effet politique est beaucoup plus considérable.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Châtelain: Je ne me suis pas prononcé sur la deuxième ni la troisième année, dans votre exemple.

M. Garon: Non, vous dites: Je ne le sais pas s'il va laisser ça comme ça.

M. Châtelain: Je ne le sais pas, mais je vais le savoir.

M. Garon: Selon ce qui est annoncé par le ministre des Finances, c'est qu'il va laisser ça comme ça.

M. Châtelain: On le verra dans les états financiers. Bien sûr, une convention comptable est réflétée dans les états financiers.

M. Garon: Est-ce que le fait d'augmenter par convention, c'est une façon de faire? Augmenter les dépenses une année et les faire paraître moins fortes les années suivantes cette opération-là, trouvez-vous que c'est bon sur le plan de la présentation des choses?

M. Châtelain: Écoutez, cela dépend de la modification que vous avez faite.

M. Garon: Comme cela, tout simplement.

M. Châtelain: Cela dépend de la modification, parce que, si on parle de cette transaction, de cette modification, comme je l'ai dit tantôt, la modification qui a été faite de façon ponctuelle en 1987-1988 va dans le sens des recommandations du Vérificateur général. Alors, je ne peux pas dire que ça a été un changement mauvais.

M. Garon: Sauf que vos prévisions budgétaires ne vont pas dans le même sens.

M. Bélisle: II n'y en a pas de prévisions budgétaires.

M. Garon: M. le Président, je pense que j'ai la parole.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Mille-Îles.

M. Châtelain: Le Vérificateur général ne s'est pas prononcé sur les prévisions budgétaires. Il se prononcera, éventuellement, sur les états financiers de 1988-1989. Ensuite, bien sûr, on verra s'il y a eu des modifications d'apportées aux conventions comptables ou encore si on a assuré la continuité dans l'application des conventions comptables. On le verra.

Comme cette année, si le gouvernement n'a pas assuré cette comparabilité et cette continuité, le Vérificateur général fera encore des observations dans son rapport. C'est sûr.

Le Président (M. Lemieux): En conclusion, M. le député de Lévis. Il vous reste une minute.

M. Garon: Des fois, vous vous plaignez que votre rôle n'est pas pris assez au sérieux. Ne pensez-vous pas qu'en faisant toutes ces distinctions-là vous y contribuez? Vous faites des distinctions un petit peu jésuitiques, au fond, alors qu'en réalité... Non! Je pense que...

Vous dites: Je ne sais pas ce qu'il va faire dans l'avenir, cela a l'air d'une modification ponctuelle, mais vous ne pouvez pas l'assumer pour l'avenir. Mais, si le gouvernement fait cela de façon ponctuelle comme actuellement, vous dites: Je ne regarde pas les prévisions budgétaires. Je comprends cela, mais nous ne pouvons pas regarder cela comme cela nous autres. Il nous faut regarder l'ensemble, le "package deal". Le gouvernement nous indique que l'an prochain il ne le fera pas, d'après ce qu'on a vu dans les prévisons budgétaires. Si on tranche la réalité comme un salami, on a du salami.

M. Châtelain: M. le Président, je pense bien que le Vérificateur général ne s'est pas gêné dans ses observations. Il a dit clairement et je vais répéter l'observation qui a été lue: Pour assurer la continuité de l'information financière, il est souhaitable que les conventions comptables utilisées par le gouvernement pour fins de présentation des états financiers ne subissent pas de modifications ponctuelles dans leur application d'une année financière à l'autre. C'est clair. Si elles subissent des modifications ponctuelles, ces modifications vont être décriées par le vérificateur, comme il l'a fait cette année.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Mille-Îles.

M. Bélisle: Merci, M. le Président. Je suis abasourdi d'entendre ce que j'entends. Cela me renverse. Le député de Lévis, étant donné que c'est l'ex-ministre de l'Agriculture, je comprends qu'il ait des expressions comme trancher la réalité comme un salami", mais franchement comme expert dans le "coupage" du salami, ces gens ont été de drôles d'experts de 1976 à 1985. Les rondelles étaient tellement minces qu'on ne les voyait même pas dans les assiettes. Je le répète encore une fois, ils ont refusé, M. le Vérificateur général, de vous voir. Cela fait juste trois ans de suite que vous venez nous voir à l'Assemblée nationale, pour exposer votre rapport et discuter avec nous. On a fait des efforts depuis 1985 pour redresser les finances de l'État en suivant vos recommandations, M. le Vérificateur général.

Je vais revenir à la page 23 de votre rapport. Même si le député de Lévis essayait de vous le faire dire, parce que maintenant vous êtes un mauvais jésuite d'après ce que je viens d'entendre... Vous faites des distinctions jésuitiques qui ne font pas son affaire. Quand ceia ne fait pas son affaire, il ne peut pas marquer de point avec cela. Quand cela fait son affaire, vous êtes un dieu. Pour moi, vous n'êtes ni un dieu, ni un jésuite, vous êtes un bon fonctionnaire. On prend le bon et on prend tous les commentaires qui font ou ne font pas notre affaire. À la page 23, vous avez dit et je vais lire l'article 3. 16... Le député de Lévis, comme d'habitude n'écoute pas. Ce n'est pas étonnant, c'est parce qu'il n'a pas lu le rapport. Je vais vous lire ce que vous avez écrit. "Les dépenses additionnelles imputées à 1987-1988 comprenaient une somme de 673... " Prenez-le le rapport!

M. Garon: Question de règlement. M. Bélisle: 673 000 000 $.

Le Président (M. Lemieux): Question de règlement, M. le député de Lévis.

M. Garon: Au lieu de vous amuser, M. le Président, j'aimerais que vous fassiez respecter le règlement et que le député de Mille-Îles s'adresse à vous comme tous les députés sont supposés le faire. Je ne me suis pas adressé au député de Mille-Îles. Je ne m'adresse jamais au député de Mille-Îles; de la hauteur d'où je le regarde, je ne le vois pas. J'aimerais qu'on s'adresse à vous comme tout le monde.

M. Bélisle: M. le Président, dites-donc au député de Lévis qu'il prenne le document à la page 23 et qu'il lise l'article 3. 16, s'il sait lire.

Le Président (M. Lemieux): S'il vous plaît! D'abord, s'il s'amuse, j'aimerais faire remarquer au député de Lévis que je suis cette audition depuis le début et que je ne m'amuse pas. J'aimerais faire remarquer au député de Mille-Îles de s'adresser effectivement au président. On

continue.

Dépenses additionnelles

M. Bélisle: Je répète. M. le Président, veuillez demander au député de Lévis de prendre le document à la page 23 et de lire l'article 3. 16 du rapport du Vérificateur général qui dit: "Les dépenses additionnelles imputées à 1987-1988 comprenaient une somme de 673 000 000 $ pour l'amortissement accéléré du passif non inscrit des régimes de retraite. Le Vérificateur général s'est montré préoccupé, ces dernières années, du fait que le gouvernement n'inscrivait pas assez rapidement l'amortissement de ce passif non inscrit, il appuie donc tout effort du gouvernement pour en accélérer l'inscription. " Fin de la citation et fin du paragraphe 3. 16. il faut, M. le Président, avoir été totalement absent de nos débats à la commission du budget et de l'administration depuis 1986. En début d'année, à chaque reprise, quand le Vérificateur général est venu devant nous, on a posé moult questions sur la comptabilité des régimes de retraite, du passif qui est inscrit et de celui qui n'y était pas inscrit. Est-ce que vous vous rappelez, M. le Vérificateur général, toute la longue discussion que nous avons eue là-dessus, il y a deux ans? Vous en avez même fait état l'année passée dans votre rapport, à la suite de la discussion qu'on a eue. Vous vous souvenez de cela?

M. Châtelain: Bien sûr!

M. Bélisle: M. le Président, vous pourriez peut-être faire vérifier les galées pour voir si le député de Lévis était présent à nos débats, s'il écoutait, s'il était attentif à nos débats. Ce que je vois, M. le Président, avec grand regret, c'est qu'il n'a pas compris ce qu'on a dit en 1986, il n'a pas compris ce qu'on a dit en 1987 et il ne comprend pas plus encore ce qu'on dit en 1989 et ce que le Vérificateur général dit.

Est-ce que c'est possible, ponctuellement, dans un exercice financier, pour une question de conjoncture...

Le Président (M. Lemieux): S'il vous plaît, M. le député de Lafontaine, M. le député de Lévis, attendez les élections générales, on verra après.

M. Bélisle:... ou de bonne administration, que dans une année quelconque on ait une convention comptable qui existe, mais qu'on se retrouve dans une position où on décide de faire ce que le gouvernement de 1976 à 1985 n'a jamais voulu faire ou n'a jamais été capable de faire, soit de dire: On a tellement bien administré et II y a tellement de dollars dans la caisse, on va prépayer et on va l'amener presque à l'équivalence ou à la correspondance et en diminuant l'amortissement du passif, du régime de retraite qui traîne? Est-ce que c'est ce que je dois comprendre, que c'est une bonne mesure administrative de le faire? Si je me trompe, dites-le-moi.

M. Châtelain: M. le Président...

Le Président (M. Lemieux): Oui, M. le vérificateur.

M. Châtelain:... comme je l'ai signalé tantôt, cette modification m'apparaît ponctuelle pour cette année. Elle allait dans le sens des vérifications du Vérificateur général. Donc, le Vérificateur général ne pouvait pas s'opposer à cette modification comme telle. C'était une amélioration, oui. Mais l'aspect qui est dangereux dans tout cela, au point de vue comptable, c'est la non-continuité, la non-comparabilité d'une année à l'autre. C'est ça. C'est l'aspect ponctuel.

M. Bélisle: Mais ce qui importe avant tout, ce n'est pas le langage que comprennent les comptables entre eux quand ils lisent les états financiers, c'est la situation financière qui est fidèlement reflétée dans les états financiers, en disant: Mais là, on est capable de payer nos obligations dans les fonds de pension. L'Etat doit des sommes dans les fonds de pension et lorsque l'État n'a plus d'argent, je pense que son premier devoir n'est pas de se poser comme question: La convention comptable est-elle respectée ou pas, mais c'est de mettre les sous dans la caisse à ce moment-là pour payer les obligations qu'on n'a pas été capable de payer depuis quinze ans. Êtes-vous d'accord avec moi, M. le Vérificateur général?

M. Châtelain: Je ne sais pas ici s'il s'agit.. Dans le présent, on parle d'amortissements. Il n'y a pas de sous qui ont été mis dans la caisse. Il était beaucoup plus question du montant du déficit qui apparaissait aux livres à ce moment-là.

M. Bélisle: D'accord. Dans l'ensemble... C'est tellement partial, c'est tellement une petite vue de la réalité de ce qui s'est passé depuis quinze ans ce qui a été amené ce matin alors que le député de Lévis, je m'excuse, M. le Président, n'était pas présent quand le député de Bertrand a parlé de tout ce sujet avec nous ce matin et qu'on a fait l'étude exhaustive de toute la situation. J'aimerais vous poser une question. Le document rouge que vous avez devant vous et que vous avez montré tantôt, est-ce que vous voulez me donner la date exacte de sa publication?

M. Châtelain: II y en a deux. Il y a celui-là et j'ai montré l'autre aussi. Je ne sais pas lequel des deux.

M. Bélisle: Montrez-moi celui que le député

de Lévis a cité à la page 42.

M. Châtelain: C'est celui-là. Ce sont les comptes publics...

M. Bélisle: Les comptes publics.

M. Châtelain:... de l'année financière terminée le 31 mars 1988.

M. Bélisle: À quelle date a-t-il été publié?

M. Châtelain: Je ne sais pas si la date est donnée, mais je sais que cela a été déposé en

Chambre vers la fin de décembre, c'est-à-dire avant l'ajournement de décembre.

M. Bélisle: D'accord.

Une voix: Est-ce que vous voulez...

M. Bélisle: Non, mais...

M. Garon: Le député de Lévis était là, lui.

M. Bélisle: Oui, le député de Lévis est toujours là, mais il est absent d'esprit.

M. le Vérificateur général, toutes les modifications qui ont été faites et toute la non-inscription des comptes à payer pour les mois qui dépassaient le mois d'avril, les mois de mai, juin, est-ce qu'on a été obligé de corriger à la suite de votre demande, de votre recommandation pour montrer un esprit plus fidèle de la situation? Si vous aviez à refaire votre tableau que vous nous avez déposé tantôt, il faudrait corriger 1986, il faudrait corriger 1985, il faudrait corriger 1984 et 1983 au chapitre des dépenses.

M. Châtelain: Non, parce que les modifications ont été faites en 1987.

M. Bélisle: Oui, mais à l'inverse, ce qui n'était pas...

M. Châtelain: Oui, si on présentait, il faudrait...

M. Bélisle: Comprenez-moi bien. M. Châtelain: Oui, d'accord. Allez-y.

M. Bélisle: On ne peut pas jouer sur les deux tableaux en même temps. On ne peut pas dire que le gouvernement actuel a modifié des conventions comptables pour que ça fasse son affaire et dire que l'ancien gouvernement ne comptabilisait pas toutes les dépenses en ne calculant pas dans chaque état financier les comptes à payer qui entraient au mois de mal et au mois de juin. Il n'y a pas deux poids, deux mesures. Si on veut avoir la vraie comparabiltté, la comparabllité suprême, idéale, II faudrait refaire votre tableau, n'est-ce pas?

M. Châtelain: Si c'était possible. Si c'était possible parce qu'on...

M. Bélisle: Si c'était...

M. Châtelain:... ne peut pas le faire. Comme on l'indiquait à la note 1, il y a une note 1, comme on...

M. Bélisle: Oui.

M. Châtelain:... a Indiqué, pour les deux dernières années, on ne peut pas faire le calcul.

M. Bélisle: Oui.

M. Châtelain: Alors, si on veut assurer une comparabilité, on ne peut pas faire le calcul pour quatre ans et ensuite ne pas le faire pour les deux autres années. C'est impossible de le faire. (16 h 45)

M. Bélisle: C'est ça. C'est impossible. Même pour 1983, 1984, 1985, 1986?

M. Châtelain: Écoutez, on peut vous donner la variation dans ces années-là.

M. Bélisle: Vous me l'avez donnée tantôt.

M. Châtelain: Oui, je l'ai donnée tantôt, mais on ne peut pas le faire pour les deux dernières années, c'est cela.

M. Bélisle: D'accord. Prenons 1986. Vous avez dit: 875 000 000 $ de variation. C'est exact?

M. Châtelain: Je vais essayer de trouver mes tableaux.

M. Bélisle: J'ai noté quatre chiffres tantôt: 875 000 000 $ pour 1986; 425 000 000 $ de comptes à payer non comptabilisés pour 1985, de variation; 578 000 000 $ pour 1984; et 108 000 000 $ pour 1983. Est-ce que je vous ai bien compris?

M. Châtelain: Le premier chiffre c'est 195 000 000 $, en 1986.

M. Bélisle: 195 000 000 $, d'accord. Excusez-moi. Alors, 195 000 000 $; 425 000 000 $ pour 1985; 578 000 000 $ pour 1984 et 108 000 000 $ pour 1983.

M. Châtelain: Mais ce n'est pas dans le même sens pour chacune des années.

M. Bélisle: Non. C'est parce que c'est vous qui avez donné les chiffres tantôt et je veux être bien sûr de bien comprendre.

M. Châtelain: Pour les deux dernières années, dans les quatre années dont on parle,

pour 1985 et 1986, cela représente une augmentation dans les comptes à payer non inscrits. Donc, cela aurait augmenté le déficit. Dans les deux années précédentes, c'était une diminution dans les comptes à payer. Donc, cela aurait, on parle toujours des comptes à payer, d'une année à l'autre, non inscrits, diminué le montant du déficit.

M. Bélisle: D'accord. Une augmentation pour les deux dernières années et une diminution pour les deux années 1983 et 1984.

M. Châtelain: Oui.

M. Bélisle: Mais on parle seulement de la variation.

M. Châtelain: Oui, c'est seulement la variation.

M. Bélisle: Ce n'était pas le montant total des comptes à payer non inscrits.

M. Châtelain: Non.

M. Bélisle: Si on ajoutait, en 1983, 1984, 1985 et 1986, le montant total des comptes à payer non inscrits aux dépenses réelles de 1983, 1984, 1985 et 1986, il y aurait des changements majeurs aux dépenses réelles, n'est-ce pas? Cela varierait.

M. Châtelain: Oui, bien sûr.

M. Bélisle: Le chiffre de 1986 n'aurait pas été de 27 222 000 000 $. Il aurait été d'un mosus de gros paquet plus gros que cela.

M. Châtelain: Dans deux années, le déficit aurait été supérieur; dans deux autres années, il aurait été inférieur.

M. Bélisle: Si on voulait, dans l'idéal, avoir la comparabilité parfaite, sans tenir compte de l'absence de respect d'une règle de consolidation avec la passe d'Hydro-Québec de 1982 dans les états financiers, qu'on ne retrouve nulle part... Mais cela, on n'en parlera pas. C'était juste 4 300 000 000 $. On ne parlera même pas de cela. Si on avait à le faire, il faudrait prendre chacune des années et faire la modification de l'ensemble des comptes à payer non inscrits au mois de mai et au mois de juin, effectivement, qui auraient dû s'accumuler et s'ajouter au déficit. Cela veut dire que la première colonne que vous avez là, Résultats réels, serait complètement modifiée pour 1982, 1983, 1984, 1985 et 1986 et là on aurait une idée beaucoup plus juste du véritable tableau.

M. Châtelain: C'est vrai pour ces quatre années-là. Mais dans deux années, vous auriez des diminutions et, dans deux autres années, vous auriez des augmentations. La raison pour laquelle on ne l'a pas fait c'est qu'on ne pouvait pas le faire pour les deux dernières années.

M. Bélisle: Merci, M. Châtelain. Embarquez là-dessus, M. le député de Lévis.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Lévis.

M. Garon:... les règles comptables du temps qui étaient... M. le Président, est-ce que je peux demander au Vérificateur général si les règles comptables du temps étaient les mêmes d'une année à l'autre concernant ces montants que vous venez d'indiquer?

M. Châtelain: Je ne crois pas qu'il y ait eu de changement dans les règles comptables au cours de ces quatre années, dans les conventions comptables, il faut s'entendre, exception faite du cas qui a été soulevé par le député de...

Le Président (M. Lemieux): De Mille-Îles. M. Bélisle: En 1982.

M. Châtelain: Mais on parle de la Loi sur Hydro-Québec à ce moment-là, je pense bien. C'est cela?

M. Bélisle: C'est cela.

M. Châtelain: Mais cela n'était pas une modification aux conventions comptables comme telle, c'était une loi qui a imposé cette transaction. Mais il n'y a pas eu de modification, que je sache. Il n'y en a pas eu dans ces années-là.

M. Garon: Vous pariez d'un changement de la Loi sur Hydro-Québec. C'est assez public une loi, ce n'est pas fait à la cachette.

M. Châtelain: Oui, je comprends.

Imputabilité des fonctionnaires (suite)

M. Garon: Concernant l'imputabilité, le président a parié souvent d'imputabilité, il y a eu des velléités, il s'est manifesté quasiment comme le grand réformateur de la commission pour parier de l'imputabilité. Sauf, remarquez, que cela a été des velléités.

Maintenant, un débat que je trouve intéressant, c'est celui concernant la CSST. À mon avis, c'est un beau débat où il pourrait y avoir imputabilité, non pas dans le sens de condamner, mais dans le sens qu'il ait lieu ouvertement. Quand on parie d'imputabilité, les gens... Je vois bien que le député de Vanier a essayé ou n'a pas essayé, sauf qu'on n'est pas plus avancés sur ce plan. Son bilan à ce point de vue aura été de zéro. Mais je pense qu'il y a un point important à souligner. Les implications politiques ne sont

pas comme les gens pensent. C'est souvent un débat administratif sur une façon de voir les choses. Dans votre rapport, je pense que vous avez souligné votre façon de voir les choses. D'autres ont dit une autre façon. Il aurait été bon, par exemple, qu'il y ait justement en commission parlementaire un véritable débat où les gens à propos desquels vous avez fait des commentaires auraient pu donner leur opinion et qu'il y ait un échange à ce sujet; je pense qu'il aurait pu y avoir une façon.

C'est à ce sujet que j'ai écrit au président au mois de décembre. Je lui ai demandé qu'on ait une réunion pour discuter de quelle façon se ferait la rencontre avec vous dans le sens de donner une place à l'imputabilité et non pas en essayant de fendre un cheveu en quatre, parce qu'à chaque année, jusqu'à maintenant, la commission du budget et de l'administration était chargée de vous recevoir et que cela aurait sans doute été son rôle aussi d'essayer de rencontrer les fonctionnaires visés dans votre document, sans qu'il y ait de véritable implication politique.

J'ai déjà dit, par exemple, concernant les assurances agricoles, que vous aviez déjà fait des commentaires dans le passé et que les gens chez nous n'étaient pas d'accord avec vous. Uniquement en termes de présentation des assurances, en termes de faire les choses à la façon des assurances. Je me rappelle qu'on avait parlé, j'avais lu votre rapport, et les gens me disaient: On n'est pas d'accord avec cette façon de voir les choses. Je pense que dans une administration, il peut y avoir deux visions des choses sans que personne ne soit de mauvaise foi. J'ai le sentiment que le fait qu'il n'y ait pas, sur le plan de l'imputabilité, de témoignage des fonctionnaires pour répondre aux commentaires que vous faites sur leur administration, ce n'est pas bon. Cela fait, à mon avis, souvent paraître que l'administration publique est, dans certains cas, condamnable, alors que ce sont parfois des questions d'opinion ou des façons de voir les choses. Je pense que cela ne va pas dans le sens de dire...

Je me rappelle quand le ministère de la Défense d'Ottawa avait des bérets de telle grandeur pour 1000 ans à venir. Je ne suis pas convaincu que c'était la bonne façon. L'armée américaine, vous l'avez vu, avait du ketchup pour 500 ans à venir...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Garon: Je vous dis 500 ans et je n'en suis pas certain, mais c'était pour pas mal d'années de ketchup pour l'armée américaine. Je pense que c'est vraiment une autre chose.

Souvent, sur le plan de la présentation des choses, il y a différentes façons de voir la présentation de documents, sans que les gens soient de mauvaise foi. Parce qu'ils privilégient telle ou telle chose, ils tiennent compte davantage de tel et tel élément qui leur paraît d'ail- leurs... Je déplore que jusqu'à maintenant iI n'y ait pas eu de rencontre pour aller dans ce sens-là, ce qui serait, à mon avis, une amélioration des choses parce que pour beaucoup de choses du document, ce n'est pas sur le plan politique que les ministres qui ont pris des décisions... Quoiqu'on dise que le ministre soit responsable de tout, cela a été des décisions administratives. Le fait qu'on n'aille pas plus loin, je pense que c'est déplorable parce que cela ne contribue pas à améliorer la gestion publique autant que cela pourrait. On pourrait savoir il y a des façons de voir les choses sur le plan, par exemple, de la CSST, que le vérificateur dise: Voici mon opinion; l'autre dit telle autre chose. Ensuite, le débat étant fait, il y aurait moyen de conseiller sur des façons de faire à la suite de ce débat. Mais le débat n'a pas lieu. Personne n'a parlé de donner des commentaires. On l'a vu dans les commentaires des journaux, parce que les gens n'avaient pas d'autre place à ce moment-là, le débat n'ayant pas lieu là où il aurait dû avoir lieu. Le débat ne devrait pas avoir lieu dans les journaux parce que les journaux ne se partent, pas au fond. Ici, il pourrait y avoir une véritable discussion au cours de laquelle les députés pourraient avoir un véritable rôle à jouer, essayer de se faire une opinion, n'étant souvent pas comptables eux-mêmes, et essayer de voir les choses de façon à préserver la meilleure présentation des affaires publiques.

Je veux le déplorer encore une fois cette année. Cela ne donne pas grand-chose de le déplorer, mais nous, nous étions prêts à faire ce travail. C'est pour ça que j'ai offert au président de la commission, sachant d'ailleurs, c'est ce qui est arrivé, que ce serait encore la commission du budget et de l'administration qui serait mandatée pour vous rencontrer... J'aurais souhaité que le président collabore là-dedans; j'aurais aimé que cette séance de travail ait lieu pour qu'on discute sereinement. Je ne sens pas qu'on est dans des choses où il y a vraiment des implications politiques. À mon avis, c'est un débat qui est assez technique, mais qui est important. Il peut arriver, à des endroits, il y en ait, mais pour plusieurs de ces questions, il n'y a pas vraiment d'implications politiques. Au contraire, je pense qu'on aiderait les ministres à se faire une opinion dans certains cas. Il y a des organismes comme le vôtre, celui du Protecteur du citoyen, qui sont là pour jouer un rôle objectif. Comme ministre, je me rappelle avoir eu des gens à mon bureau et de ne pas avoir été capable... Espérant avoir un arbitrage impartial, je les ai envoyés moi-même au Protecteur du citoyen pour que ce dernier évalue le cas au ministère concerné; après cela, on voyait ce qu'il avait dit par rapport à ça. Cela me paraissait que la personne était traitée de façon plus impartiale, sans préjuger qu'on soit d'accord ou pas d'accord sur son analyse. Après, quand son analyse est faite, on peut dire: Oui, mais on n'est pas d'accord avec ça ou on est d'accord. Je

pense que c'est comme ça que les cas sont traités normalement aux ministères par rapport au Protecteur du citoyen. Cela devrait être la même chose par rapport au Vérificateur général, lequel ne relève pas du gouvernement, mais de l'Assemblée nationale, concernant ses fonctions.

J'aimerais savoir de votre part, s'il y avait une réunion sur l'imputabilité des fonctionnaires, imputabilité non pas dans le sens d'accuser, mais dans le sens de rencontrer, au lieu de dire "faire comparaître", un terme qui a peut-être des aspects plus péjoratifs, mais de rencontrer des gens visés dans l'analyse des commentaires qui sont faits dans votre rapport, de quelle façon souhaiteriez-vous que ce soit fait pour qu'il y ait un débat correct?

M. Châtelain: M. le Président, j'ai eu l'occasion de faire des commentaires sur ce sujet à maintes occasions dans le passé. Évidemment, j'ai vécu une expérience ailleurs, dans une autre juridiction, mais à un palier supérieur de gouvernement où les fonctionnaires sont appelés à témoigner en commission parlementaire devant le Comité des comptes publics en l'occurrence, où le débat est complètement dépolitisé. Les ministres ne sont pas présents lors des discussions; ce sont les hauts fonctionnaires qui sont présents. L'absence du ministre favorise déjà la non-politisation du débat. Je ne voudrais pas que mes propos soient vus d'une façon péjorative. Le débat est nettement dépolitisé, il est question évidemment des sujets qui sont relevés dans le rapport du vérificateur et le Vérificateur général ne se prononçant pas sur des aspects politiques, mais se prononçant exclusivement sur des aspects administratifs - d'ailleurs ici, la loi sur le Vérificateur général lui défend de se prononcer sur les aspects politiques - alors le débat étant limité à ce qui apparaît dans le rapport du Vérificateur général, il est non partisan, non politique et il devient productif. Comme le député l'a signalé, c'est ma recommandation et c'est ce qui se fait dans d'autres forums où j'ai déjà participé à des travaux de cette nature, les hauts fonctionnaires ne sont pas appelés là d'une façon punitive; ils ne sont pas appelés à rendre compte pour se faire punir ou pour se faire reprendre. Les fonctionnaires, je parle des hauts fonctionnaires autres que le Vérificateur général, il faut s'entendre, sont surtout là pour expliquer, pour faire la lumière sur ce qui s'est fait et surtout pour faire part des mesures qu'ils entendent prendre si, en l'occurrence, iI y a lieu d'améliorer certaines situations qui ont été déplorées. Les députés sont là pour prendre connaissance des constatations du vérificateur et faire la lumière sur ses constatations, mais surtout pour savoir s'il y aura des suites de données. C'est ce qui est important. Et lorsque le débat est dépolitisé de cette façon, il devient beaucoup plus productif. Je m'excuse, parce que nous ne sommes pas, à ce moment, dans un forum de l'Assemblée nationale comme telle, où on met en présence des opposants politiques. C'est dans ce sens. Alors, toute l'orientation de l'exercice est une orientation positive car, dans le fond, c'est aux députés à qui on doit rendre compte. En fin de compte, c'est l'Assemblée nationale, ils sont les représentants du peuple et c'est à eux qu'on doit rendre compte. Alors, les députés exercent leur rôle. C'est bien dit, même dans la Loi sur l'Assemblée nationale, les députés ont un rôle de surveillance à faire. C'est une façon pour les députés d'exercer ce rôle de surveillance auprès de l'administration. (17 heures)

M. Garon: Et le débat se faisait de quelle façon? Les fonctionnaires viennent, ensuite vous réagissez comment?

M. Châtelain: Oui.

M. Garon: Est-ce que vous pourriez nous décrire un peu de quelle façon se fait ce débat dans les autres endroits que vous avez connus?

M. Châtelain: La façon dont le débat se fait, il se fait à peu près de cette façon-ci. D'abord, il y a le comité directeur - j'appelle ça le comité directeur de la commission - qui est formé de députés, du président et du vice-président, il y a entente a ce niveau quant aux sujets qui seront discutés lors des réunions à venir. Il faut s'entendre, il y a des réunions de façon régulière. À l'endroit auquel on fait référence, il y a des réunions deux fois par semaine, mais pendant une heure et demie chaque fois, les mardis et les jeudis. D'avance, il y a un calendrier de réunions, il y a un agenda d'établi, on sait quels sont les sujets, c'est-à-dire qu'on établit les sujets, qui sont dans le rapport du Vérificateur général, qui seront discutés; les hauts fonctionnaires visés par ces sujets sont convoqués, alors ils savent d'avance que, tel jour, ils devront venir témoigner devant la commission.

Une fois en réunion en commission, le président donne la parole au Vérificateur général, mais tout simplement pour un très bref exposé, je ne dirais même pas de quelques minutes, mais de quelques secondes, sur le sujet même qui va faire l'objet de la discussion ce matin-là.

Une fois terminé cet exposé préliminaire, les députés prennent la parole à tour de rôle, et il n'y a pas nécessairement alternance des partis. Le débat est tellement dépolitisé qu'on ne peut même pas dire à quel parti - selon la nature du débat, il faut s'entendre, selon l'orientation que prend la discussion - les députés appartiennent. Chaque député, à tour de rôle, a le droit de parole ou le droit de poser des questions pendant une dizaine de minutes, ce qui veut dire que le même député peut poser des questions... Son tour peut revenir. Une fois que son temps est écoulé et qu'il n'a pas fini la ligne de questions qu'il avait entreprise, on va même voir un député de l'autre parti lui donner son temps pour qu'il

puisse continuer à poser des questions. Je dis ça tout simplement pour illustrer comment le débat est dépolitisé.

Alors, ça se fait comme ceci, et c'est fixé d'avance. Il peut y avoir deux ou trois réunions avec les mêmes témoins, c'est-à-dire les mêmes hauts fonctionnaires, et les questions sont posées, par l'entremise du président, directement au haut fonctionnaire lequel fournit les explications. Le président s'assure que le débat n'est pas politisé, qu'on ne pose pas des questions de nature politique aux hauts fonctionnaires, des questions qui devraient normalement être posées à un ministre et non pas à un haut fonctionnaire. Il s'en assure.

Ces débats sont tenus régulièrement. Pendant une session, disons chaque année, on peut passer à travers l'ensemble des sujets importants du rapport du Vérificateur général. Et régulièrement, disons à tous les deux ou trois mois, le comité en question dépose un rapport à la Chambre sur les sujets qu'il a discutés et fait même des recommandations à la Chambre même. Ces rapports sont déposés en Chambre.

Pour aller plus loin, les députés, la commission même ou le comité peuvent même exercer des suivis auprès des hauts fonctionnaires, c'est-à-dire que les députés ou la commission peuvent demander, par exemple, aux hauts fonctionnaires: Voulez-vous, s'il vous plaît, nous faire rapport d'ici trois mois, d'ici six mois, sur la mise en application ou sur l'implantation des recommandations du Vérificateur général que nous avons acceptées, et pour lesquelles nous croyons que vous devriez prendre action? Il y a des suivis qui sont exercés par le comité lui-même sur les recommandations du Vérificateur général.

En gros, M. le Président, c'est la façon dont on procède.

M. Garon: Est-ce que le Vérificateur général ou les gens de son bureau sont présents lors de ces délibérations?

M. Châtelain: Oui. Il est généralement accompagné de deux ou trois responsables de son bureau, qui sont responsables du secteur qui fait l'objet de la réunion. Voyez-vous, le sujet est déterminé d'avance. Les deux ou trois directeurs ou gestionnaires de son bureau qui sont responsables de ce secteur, de cette vérification, sont présents. Il n'y a que le Vérificateur général et deux ou trois autres personnes de son bureau qui sont là, à ce moment.

M. Garon: Leur est-il parfois demandé de réagir par rapport à ce que disent les gens du secteur qui est analysé à la commission parlementaire?

M. Châtelain: Oui. Les questions sont posées aux hauts fonctionnaires. Les hauts fonctionnaires fournissent une réponse et un député peut se questionnner sur le genre de réponse ou sur la pertinence de la réponse qu'il a obtenue, à savoir: Est-ce que cela peut solutionner le problème qui a été soulevé par le Vérificateur général? À ce moment-là, le député peut poser la question directement au Vérificateur général: Pensez-vous que ce sera suffisant, M. le Vérificateur général? Il y a une discussion, mais c'est une discussion qui est très productive. Il faut quand même que je l'indique, le Vérificateur général n'agit pas comme un procureur pour essayer d'embêter les hauts fonctionnaires. Ce n'est pas son rôle. Il n'est pas là pour essayer d'embêter les gestionnaires. Il est là pour fournir les explications, tout simplement.

M. Garon: Est-ce qu'il y a plusieurs endroits où ça se fait comme ça?

M. Châtelain: Oui, M. le Président, cela se fait d'un bout à l'autre du Canada, dans presque toutes les autres juridictions. Je parle au niveau fédéral et provincial. Cela se fait sensiblement de cette façon, à une ou deux exceptions près. Je peux mentionner pertinemment qu'en Ontario, cela se fait. En Colombie britannique, cela se fait régulièrement. En Alberta, cela se fait aussi régulièrement. Cela se fait ailleurs, peut-être de façon moins régulière, à l'exception du Québec, il faut s'entendre. Sauf une autre exception, je pense que des hauts fonctionnaires sont également appelés à témoigner. Cela ne se fait peut-être pas d'une façon aussi régulière que je l'ai décrit. En Ontario, en Alberta, en Colombie britannique et au fédéral, cela se fait d'une façon régulière.

M. Garon: Ce n'est sans doute pas par cet aspect de la société distincte qu'on valorise le Québec.

M. Châtelain: Je n'ai pas de commentaire là-dessus.

M. Garon: Vous n'en pensez pas moins.

Le Président (M. Lemieux): En conclusion, M. le...

M. Garon: Combien me reste-t-il de temps?

Le Président (M. Lemieux): II vous reste une minute, M. le député de Lévis.

M. Garon: Cela ne prendra pas la minute. Je ne sais pas s'il y a quelqu'un d'autre ou si je vais continuer.

Le Président (M. Lemieux): Avez-vous terminé, M. le député de Lévis?

M. Garon: II me reste une minute. Avant d'aborder un autre sujet, je me dis que si quelqu'un d'autre demande la parole, je reviendrai après.

Le Président (M. Lemieux): Je voulais simplement faire le commentaire suivant. Il semble peut-être facile, en apparence, de tracer cette ligne entre ce que pourrait être le pouvoir administratif et le pouvoir politique. J'ai quand même dit ce matin que toute une tradition a été établie au Québec, une tradition - je ne voudrais pas employer une tradition - qu'il n'est pas facile de faire bouger, puisqu'on a des comportements, on a des attitudes. Lorsque j'écoutais le Vérificateur général, j'ai eu l'occasion, moi aussi, dans le cadre de trois conférences des comptes publics du Canada - à laquelle vous participiez et à laquelle je présidais celle de la Saskatchewan - d'étudier l'ensemble du processus administratif de la Commission des comptes publics du Canada et de celle des autres provinces, chose que je trouve très intéressante, car j'ai toujours cru que les gestionnaires se doivent de répondre devant les élus de la qualité de leurs gestes administratifs. C'est une chose qui devrait et qui devra probablement se faire dans l'avenir puisque, en dernier ressort, il n'en demeure pas moins que nous sommes les représentants des contribuables. Ce n'est pas facile de tracer cette ligne entre le politique et l'administratif. Je me souviens que, même du temps où M. Parizeau était ministre des Finances, il n'était pas d'accord avec le fait que ses fonctionnaires ou son sous-ministre puisse comparaître en son absence. Quant à l'imputabilité, nous avons déjà fait certains pas. Qu'on pense au mandat d'initiatives qu'on peut se donner. Nous l'avons fait avec la Commission des valeurs mobilières. Vous savez, lorsque nous aurons en face de nous des fonctionnaires, cela demande aussi toute une nouvelle structure, tout un nouveau cheminement. Il nous faudra des recherchistes, il nous faudra des professionnels. Le budget de la commission devra être revu, à mon avis. On se devra d'être assistés. Cela n'aura et devrait n'avoir qu'un effet bénéfique.

Je voyais dans votre rapport que, sous l'ancien gouvernement, on avait construit un pont qui ne menait nulle part et un stationnement qui ne servait pas. Je pense à celui du Bic, 800 000 $ et 700 000 $. Je me disais: Si le fonctionnaire était devant moi, avait à répondre de ses gestes administratifs, dans quelle mesure, à un certain moment donné, ne toucherait-on pas aux politiques et le ministre n'écoperait pas, excusez l'expression, des gestes administratifs qu'un fonctionnaire pourrait poser? C'est tout cet amalgame qu'on se devra de revoir, qu'on se devra d'expertiser avant d'en arriver à dire: Nous décidons de convoquer les fonctionnaires en commission parlementaire. La première chose qu'on aura à faire... Si on a écouté et si on a étudié le fonctionnement de ce qui se passe ailleurs, le prochain mandat de cette commission sera peut-être de se déplacer à Ottawa pour assister à deux ou trois séances du Comité des comptes publics. Lorsque M. le vérificateur me dit que c'est apolitique... Vous savez, quand j'ai le député de Lévis d'un côté et le député de Lafontaine de l'autre côté, parfois, ce n'est pas facile d'être apolitique. Je sais toute la générosité du député de Lévis et je pense que c'est un excellent député, de même que le député de Lafontaine, mais je comprends que, lorsqu'il y a un parti au pouvoir et un parti de l'Opposition, il y en a parfois qui sont là pour donner des jambettes aux autres. C'est ce genre de choses que je voudrais éviter lorsqu'on commencera à en arriver à convoquer les hauts fonctionnaires. Déjà, je l'ai mentionné ce matin, j'avais fait des recherches à cet effet. Quelques tentatives qui se sont avérées négatives. Si on décide d'aller de l'avant, je ne voudrais pas qu'on ne marque pas de point. On ne peut pas se permettre de passer à côté. On ne peut pas se permettre de ne pas marquer d'une façon positive, sans ça, ce sera un recul pour nous, comme parlementaires. On a aussi à bâtir une crédibilité dans ce domaine et ce sera un recul aussi, je dirais, pour l'efficience, l'efficacité et le rôle de surveillance qu'on a à faire comme parlementaires. C'est le commentaire que j'avais à faire là-dessus.

M. le député de Lévis, la parole est à vous.

M. Garon: M. le Président, vous me faites penser à la mère de famille qui ne voudrait pas que son enfant marche parce qu'il y aurait un danger qu'il tombe. Il ne marchera jamais. Cela n'a pas de bon sens. Aujourd'hui, on n'est pas... En faisant des rencontres comme celles dont on parle, on serait sans doute la dernière province du Canada à le faire ou l'avant-dernière. On n'est pas dans l'innovation, on n'est pas dans le mur du son. Quand vous parlez, c'est beaucoup plus en termes de gestion du passé qu'en termes de maîtrise de l'avenir. Gérer le passé, je n'ai pas d'ambition dans ce sens-là. Je me dis: Le passé est fait. Mais, ce que j'aurais aimé, par exemple, dans l'avis de fonctionnaires du ministère des Loisirs, de la Chasse et de la Pêche, pourquoi dit-on qu'il y a un pont et qu'il ne mène nulle part? Pourquoi? Je ne sais pas pourquoi. Il y en a qui me l'ont dit à travers les branches: Le gouvernement a changé ses orientations de sorte que c'est resté en plan, un plan d'ensemble qui était abandonné. Est-ce vrai? Je ne le sais pas. On m'a dit ça. Il aurait été utile, par exemple, parce que ce sont les fonds des contribuables qu'on doit protéger, de pouvoir le faire. Si le ministre, quel qu'il soit, a donné une mauvaise orientation, il passera dans l'histoire pour celui qui a fait une mauvaise orientation. Pourquoi essayer de protéger les gens qui auraient donné de mauvaises directives? Si ce n'est pas lui et s'il y a eu un changement d'orientation politique, ce qui est possible aussi, et que cela a donné ce résultat, les gens le sauront. Cela finit là. Sauf que je pense qu'en mettant la poussière en dessous du tapis, on crée... C'est bien plus mauvais pour l'administration publique parce que lorsque les gens voient

ça actuellement, ils n'ont pas d'explication. Des fois, il y en a et des fois, B n'y en a pas. Il y a de la mauvaise gestion. (17 h 15)

Dans l'ensemble d'un gouvernement, je pense bien que si personne croyait qu'il y a de la mauvaise gestion, il n'y aurait pas eu de vérification intégrée et il n'y aurait pas eu... Je vous ferai remarquer qu'on a parié de M. Parizeau. C'est lui qui a insisté pour que le Vérificateur général - tout le monde n'était pas d'accord là-dessus - et là-dessus, on est en avance sur plusieurs autres, analyse la gestion du gouvernement. Je pense que par la Loi sur le Vérificateur général - j'aimerais que le député de Vanier mette ça dans sa pipe, cela pourrait y rester un bout de temps étant donné qu'il ne fume pas la pipe - c'est M. Parizeau, justement, qui a voulu que le Vérificateur général ait des pouvoirs plus grands, non pas seulement de regarder la beauté des colonnes de chiffres, mais d'analyser la gestion du gouvernement. Je peux vous dire, comme quelqu'un qui a participe aux décisions, que cela n'était pas vendu d'avance. Je ne révélerai pas de secret en disant ça, mais je vais vous dire que cela a été un très bon débat. Pourquoi cela a-t-il été accepté? Cela aussi, c'était, à ce moment-là... Cela pouvait être bien plus dangereux que de faire voir les fonctionnaires pour dire: Pourquoi est-ce écrit là? Qu'est-ce que vous avez fait? C'était bien plus dangereux, c'était bien plus... Quand le député de Vanier, le président, parle de la commission, il n'est plus unanime, monsieur. S'il avait fallu que M. Parizeau ne soit plus unanime comme ça, jamais il n'y aurait eu une Loi sur le Vérificateur général. Il y a une loi; le Vérificateur général peut analyser la gestion du gouvernement, avec les dangers que ça comporte, de dire au gouvernement: Vous avez une mauvaise gestion là-dessus. Sauf que dans une société moderne, on n'est plus dans le temps de Cromwell, ça fait partie des instruments qu'on se donne de faire vérifier.

Je vais vous dire une chose, dans un ministère, j'ai été un des premiers à avoir mis un vérificateur interne au ministère de l'Agriculture. J'aimais autant le savoir s'il y avait quelque chose qui n'était pas correct que de ne pas le savoir. Pourquoi a-t-on mis un vérificateur interne? Sa job était de "checker" à l'année, à temps plein pour vérifier. Justement pour qu'on corrige les affaires. Mais il y avait le risque. Ils disent occasionnellement: Telle chose n'est pas correcte. Tant mieux! S'il le découvrait plus rapidement, tant mieux encore pour qu'on puisse changer des choses. C'est ça, au fond, l'administration publique étant donné que c'est la loi des grands nombres, qu'on puisse faire ces activités. Je trouve ça. Si on va dans le sens... Le vérificateur aujourd'hui, et c'est très important, parce que je pense que le pendant de la modification de la Loi sur le Vérificateur général, c'est justement que les gens puissent venir se défendre. Sur le plan de la gestion, il n'y a pas juste une façon de faire les choses. Il peut y avoir plusieurs façons de faire les choses. Le Vérificateur général a maintenant le mandat d'analyser la gestion et de dire aux gens: Telle chose n'est pas correcte ou telle chose a telle lacune. Actuellement, parce que le président ne réussit pas vis-à-vis de son gouvernement - je ne fais pas partie des caucus du gouvernement, des députés libéraux - ou ne tente pas assez fort pour que ça puisse se faire, je ne sais pas ce qui se passe là. La seule chose que je vois, c'est qu'il n'arrive rien. Je trouve cela même que le pendant n'est pas là de gens qui devraient pouvoir être appelés justement pour dire comment eux voient ça. Le Vérificateur général porte un jugement. J'en connais des cas, j'ai connu des gens qui, lorsque le Vérificateur général portait un jugement, disaient: Je ne suis pas d'accord là-dessus. Dans certains cas, c'est évident, il doit y avoir un correctif le plus vite possible. Dans d'autres cas, c'est moins évident et, dans d'autres cas, ce n'est pas évident du tout. Dans d'autres cas, des fois, ce sont des écoles de pensée. Des gens qui voient ça de telle façon et d'autres qui voient ça de telle autre façon et il y a un choix à faire qui n'est peut-être pas mauvais dans un cas comme dans l'autre. Mais le fait que le Vérificateur général puisse faire l'analyse de la gestion et que ceux qui sont analysés et commentés dans le rapport ne puissent pas dire comment ils voient ça, ce n'est pas correct. Je trouve ça tout simplement, juste sur ce plan, pas correct. Cela serait beaucoup plus simple pour l'administration publique, beaucoup plus valorisant, parce que c'est démoralisant pour l'administration publique quand elle est dans le livre du Vérificateur général. Pour tout le monde, c'est une forme d'accusation. Ne nous contons pas d'histoire, on est là. Ce ne sont pas des prix Méritas que distribue le Vérificateur général, ce ne sont pas des Prix du Québec, il distribue habituellement des commentaires sur les choses qui devraient être changées. Quand vous êtes là-dedans et que la personne ne peut rien dire, je ne trouve pas ça correct. Je trouve que ce serait bon qu'on puisse faire comparaître tes fonctionnaires justement pour qu'ils puissent dire leurs choses et le vérificateur est là, la personne sait qu'elle ne pourra pas dire n'importe quoi parce que les députés vont dire au vérificateur: Vous, qu'en pensez-vous? il peut arriver des cas où des gens disent: C'est une façon de voir les choses, on ne la partage pas pour telle raison. Mais ce serait sain parce que les gens qui regarderaient ça diraient: Voici des gens qui travaillent à améliorer l'administration publique. Tandis que comme ça se passe maintenant, je trouve qu'on a tous l'air d'une "gang" de "gnochons". Regardez les commentaires de tous les journaux, cette année, au rapport du Vérificateur général, ce sont des commentaires désobligeants de tout le monde, particulièrement pour les députés de la commis-

sion. On a tous passé pour une "gang" de deux de pique. Pourquoi? Ne nous contons pas d'histoire, c'est parce qu'on ne va pas plus loin, alors qu'ils disent: Le rapport qui est là, comme d'habitude, sera sur les rayons. Il va tomber un peu de poussière dessus, mais on engagera sans doute un jour quelqu'un pour enlever la poussière sur les livres. Sauf que ce n'est pas ce que les gens souhaitent; ils souhaitent aller plus loin. Ce n'est pas vrai que tant... Quand on a fait des discussions sur la Loi sur le Vérificateur général, je me rappelle à quel point certains avaient peur des conséquences. Tantôt, le député a parlé, par exemple, des mandats d'initiatives. Je vous ferai remarquer que c'est encore sous l'ancien gouvernement que le règlement a été changé également là-dessus. Les mandats d'initiatives, pensez-vous que tout le monde embarquait comme du beurre dans la poêle en disant: Pas de problème, on va enquêter. Il y en a qui disaient ce que vous dites, sur le plan politique. Mais il a été trouvé plus sain de changer le règlement pour que les gens justement... Le rôle des parlementaires, c'est d'aller voir. C'est leur travail. Juste la crainte d'être enquêté, c'est déjà bon. La crainte, c'est le commencement de la sagesse. Des fois, la crainte... Pensez-vous que, quand un ministre va en Chambre tous les jours et qu'il ne sait pas s'il va se faire poser des questions, c'est mauvais? S'il avait fallu être... jamais il n'y a eu de planification au parlement, au cas où on poserait des questions et que le député aurait découvert quelque chose. Tout ça pour que ce soit plus ouvert, que ce soit plus vérifié, mais que les gens puissent se défendre. On a des systèmes en place où les gens sur lesquels on porte des jugements ne peuvent faire aucun commentaire et où, parce que tout ce débat n'a pas lieu... Là, le rapport du Vérificateur général n'a pas toute l'ampleur qu'il devrait avoir et, pour le bien-être de l'ensemble des citoyens, et ceux qui font ça pour les citoyens, ce sont les députés de l'Assemblée nationale. C'est notre travail de faire ça et, actuellement, on ne peut pas le faire parce que quelqu'un au gouvernement n'accepte pas que... ou à la présidence, je ne sais pas qui donne les ordres à qui là-dedans, mais il arrive qu'on regarde le document et la grande partie concernant la gestion et l'administration commentée dans le document, on ne peut en faire l'étude.

S'il n'y avait pas eu de changement de gouvernement, ce serait déjà fait. Je vous le dis franchement, parce que c'était le pendant tellement normal de l'adoption de la Loi sur le Vérificateur général. C'est tellement évident que, quand on a donné un mandat beaucoup plus large, le Vérificateur général du Québec est sans doute celui qui a aujourd'hui le mandat le plus large au Canada en termes d'analyse du gouvernement. Je ne sais pas si je me trompe en disant ça, mais, en tout cas, en termes de mandat, je pense bien que son mandat n'est pas plus restreint que celui des autres. Il est sans doute plus large. Au cours des rencontres sur les comptes publics du Canada, j'ai constaté que le Vérificateur général n'avait pas l'air gêné de son mandat au Québec. Mais, actuellement, comme députés, on est gênés parce qu'on est à peu près le seul Parlement qui ne va pas plus loin que ça dans l'analyse des comptes publics. On est à peu près le seul Parlement qui, après avoir donné, et là je vais le dire parce qu'il faut rendre à César ce qui est à César, sous l'ancien gouvernement, des pouvoirs plus grands au Vérificateur général, avoir donné des pouvoirs plus grands en commission parlementaire d'avoir des mandats d'initiatives, pouvoir y faire actuellement comparaître les fonctionnaires... Nous, on est minoritaires. Vous pouvez bien faire les propositions que vous voudrez; si le part! ministériel continue à dire non, il n'arrivera rien. Sauf qu'il serait souhaitable qu'on commence le plus rapidement possible. Je suis convaincu qu'il pourrait arriver, à l'occasion, d'avoir des... J'ai le sentiment, comme... vous analysez le rapport du Vérificateur général, à moins que le ministre ait donné des directives très précises, que c'est lui qui sera au "bat" à ce moment-là. Si ce n'est pas lui qui n'a pas dit de faire les choses incorrectement, il ne sera pas... C'est de la gestion, de l'administration. L'application des lois marche de cette façon. Il y en a qui ne le croient pas. Je me rappelle quand la loi sur l'accès à l'information a été adoptée et que l'UPA voulait avoir accès à des renseignements au ministère, je n'étais même pas au courant, c'est le sous-ministre qui avait... Le contentieux qui relève de la justice dans le ministère l'avait avisé. Il lui avait dit: Maintenant que la loi sur l'accès à l'information est adoptée, il y a des renseignements que l'UPA ne peut avoir. Il a dit ça au sous-ministre qui a avisé l'UPA qui m'avait appelé pour me rencontrer en me disant ça. Elle n'a jamais cru que je n'étais pas au courant. Tout ça s'est fait sans même que je sois au courant parce que c'était l'administration de la loi. Le contentieux a avisé le sous-ministre qui a dit: C'est ça maintenant. Je l'ai su pour la première fois quand l'UPA m'a appelé pour me dire: Cela n'a pas de bon sens. On n'est pas d'accord avec ça. Je lui ai dit: On va regarder ça. Mais j'ai senti qu'elle n'avait jamais cru que cela s'était fait de cette façon. Sauf que c'était sur le plan de la gestion, c'était en fonction de l'administration de la loi existante. Je pense qui si on se voile les yeux, ce n'est pas bon. On a l'air d'un Parlement en culottes courtes, des demi-députés et ce n'est pas bon pour la fonction de député non plus. Les règlements ont été changés quant à la fonction de député pour qu'on puisse avoir plus d'initiatives. Des lois ont été changées pour... Je pense que le Parlement du Québec... Je ne pense pas que l'administration au Québec soit la pire au monde. Au contraire, beaucoup de choses ont été faites, pour lesquelles on peut se regarder sans se désoler en regardant les autres, mais il y a des choses qu'on ne fait pas actuellement, qu'on

devrait faire et où l'on est en retard. C'est l'un des aspects pour lesquels on devrait commencer au plus vite. Le Vérificateur général nous en donne un exemple: deux fois par semaine à Ottawa, deux fois par semaine où les gens se réunissent pendant une heure et demie. Je ne dis pas qu'il faudrait se réunir deux fois par semaine, mais il faudrait, au moins, dire: On va mettre immédiatement en place, le plus rapidement possible, une procédure par laquelle on prendrait le document section par section et par laquelle on ferait venir les fonctionnaires des ministères. Je suis persuadé que ça valoriserait la fonction publique, la gestion publique du Québec. Je suis persuadé que c'est une question de gestion.

Même si un ministre est ministre sur le plan politique et administratif, il est chef sur tous les plans. Tout le monde sait concrètement aujourd'hui que les pouvoirs de nomination... Qui nommez-vous, comme ministre? Vous avez le pouvoir, comme premier ministre, de nommer les ministres. Je pense bien que, la plupart du temps, c'est sur recommandation du ministre qu'on nomme les sous-ministres et sous-ministres adjoints, et c'est à peu près tout, tous les autres fonctionnaires étant nommés par la fonction publique. Je ne dis pas que, dans certains cas, il n'y a pas de pression; c'est possible. Mais, essentiellement, c'est ça.

Au sujet de l'application des lois, un haut fonctionnaire ne peut pas aller à rencontre de l'application d'une loi. Si le ministre donnait des directives d'aller à l'encontre de la loi, il serait bon qu'il soit dénoncé, parce que ça ne marche pas ainsi. Si le ministre n'aime pas une loi, il la fait changer. La façon de faire n'est pas de dire aux fonctionnaires: Ne l'appliquez pas, mais de la changer. Quand on est au gouvernement, on peut changer les lois.

Alors, la seule chose qu'il puisse arriver comme implication politique, c'est quand le ministre donne des directives de faire des choses qu'on ne devrait pas faire, parce que la loi et les règlements ne le permettent pas. Je ne vois pas en quoi... et, sur ce, je suis content des propos du Vérificateur général. Moi, je ne vois pas beaucoup en quoi les implications politiques... à moins que les chefs des ministères, c'est-à-dire les ministres, ne donnent des directives qui ne sont pas correctes. Par exemple, dans le cas des BCP à Saint-Amable, j'aimerais savoir pourquoi on n'avait pas de permis depuis deux ans. Est-ce le contentieux qui n'a pas fait sa job? Est-ce celui qui a administré les permis qui n'a pas fait sa job? Est-ce que le sous-ministre a donné une directive? Le ministre a-t-il donné une directive? Je ne le sais pas, mais je trouve qu'il n'est pas normal que quelqu'un qui, pour exploiter une entreprise, a normalement besoin d'un permis en vertu de la loi ait pu l'exploiter pendant deux ans sans permis. Quelque chose s'est passé au plan administratif que je ne sais pas, mais qui n'est pas bon, qui ne constitue pas une saine administration. Et le fait que, dans l'analyse de la gestion, ces choses puissent être examinées en fonction du rapport du Vérificateur général, c'est très bien. On devrait commencer immédiatement à agir en ce sens, et non pas voir les dangers que voit le député de Vanier. Personne n'aura une croix Victoria pour faire ça. Ce n'est pas un acte de bravoure que de le faire.

J'aimerais savoir du Vérificateur général si, dans l'administration des choses... Selon moi, deux organismes me semblent avoir des mandats un peu semblables, non pas aux mêmes fins, mais semblables: le Protecteur du citoyen et le Vérificateur général. Jusqu'à quel point, parce que ce sont deux fonctions qui relèvent de l'Assemblée nationale et que tous deux ont pour tâche de protéger le citoyen sous des aspects différents, y a-t-il une collaboration entre les deux? Est-ce qu'il y a échange d'informations? Est-ce qu'il y a une relation entre ces deux organismes? (17 h 30)

M. Châtelain: M. le Président, il y a très peu de relation comme telle. Il y en a eu, à un moment donné, avec le prédécesseur du Protecteur du citoyen actuel. Mes commentaires ne vont pas du tout à l'encontre de l'actuel Protecteur du citoyen. Il y en a eu à l'époque, parce que le Protecteur du citoyen envisageait des modifications à sa loi, et il savait que nous étions passés par une telle expérience. Il y a eu ce genre de consultations, de même que des consultations sur les façons de s'y prendre pour rédiger un rapport parce que, comme vous le dites, nos relations avec l'Assemblée nationale sont approximativement de même nature, c'est vrai. Mais nous n'avons pas beaucoup d'autres relations d'affaires; non, nous n'en avons pas beaucoup comme telles. Je ne dis pas qu'on ne devrait pas en avoir, parce qu'à un certain moment donné, je sais que nous avons des cas qui nous sont soumis, ce n'est pas à la pocheté, mais de temps à autre... Il y a des personnes qui communiquent avec nous parce qu'elles ont des problèmes; certains de ces cas relèvent du Protecteur du citoyen et on les lui réfère. Rarement la situation inverse se présente, évidemment, mais il n'y a pas beaucoup de relations entre les deux, il y a quelques échanges d'idées quant à la façon d'administrer nos organisations respectives, c'est vrai. Avec le nouveau Protecteur du citoyen, je dois admettre qu'il n'y en a pas eu beaucoup, mais, comme je l'ai dit tantôt, ça n'a rien à voir avec le nouveau Protecteur du citoyen. On n'a pas encore eu l'occasion d'échanger des opinions ou de se rencontrer.

Il y a une autre personne, également, qui est dans une situation peut-être encore un peu similaire, c'est le Directeur général des élections. Nous avons eu passablement d'échanges, dans le passé, justement, sur les façons d'opérer nos organisations respectives, mais ça se limite à ça.

M. Garon: Par rapport à - parce que le

débat n'a pas lieu, faute de forum, sauf des commentaires de part et d'autre - ce que vous avez dit concernant la CSST, et les commentaires qui ont été faits, d'autre part, par les syndicats et les patrons, aujourd'hui, à la suite de tout ça, quelles seraient vos réactions?

M. Châtelain: Quand vous dites " tout ça", je ne sais pas au juste...

Réactions au rapport du Vérificateur général

M. Garon: Je veux dire les commentaires ou les réactions qui ont eu lieu à la suite de la publication de votre rapport annuel.

M. Châtelain: Le député fait peut-être allusion à ceci. C'est que lorsque nous avons déposé notre rapport annuel, qui comprenait notre rapport sur la CSST, on ne bénéficiait pas de la réaction de la direction de la CSST à nos constatations et à nos recommandations. On l'a déploré, on l'a d'ailleurs signalé dans le rapport.

À la suite de la publication de notre rapport, un journaliste a rencontré la présidente de la CSST et également des membres du conseil d'administration de la CSST, des membres qui représentaient les employeurs, d'une part, et les employés, d'autre part. Ces personnes ont fait connaître leurs réactions au rapport du Vérificateur général par l'entremise des journaux. Je ne conteste pas leur droit de réfuter les constatations du Vérificateur général, absolument pas. Cependant, je ne crois pas que les journaux représentent le bon forum pour s'acquitter d'un devoir d'imputabilité qui, dans le fond, est envers l'Assemblée nationale. Le Vérificateur général est au service de l'Assemblée nationale, il représente l'Assemblée nationale, il détient son mandat de l'Assemblée nationale et c'est à elle qu'il fait rapport. Alors, si on a des commentaires à faire sur ses constatations et ses recommandations, ceux-ci devraient apparaître dans le rapport du Vérificateur général qui, lui, est destiné à l'Assemblée nationale. Donc, l'imputabilité doit s'exercer au niveau de l'Assemblée nationale, et non pas dans les médias. C'est clair.

Lorsque nous avons pris connaissance des réactions de la CSST - quand je dis la CSST, je fais allusion aux personnes auxquelles j'ai fait référence tantôt - par l'entremise des journaux, plutôt que de répondre de la même façon, parce que n'avons pas cru que c'était le bon médium, nous avons voulu assurer le respect de l'autorité de l'Assemblée nationale. Nous avons préparé des réactions aux commentaires qui ont été avancés par ces personnes, dans les journaux. Nous avons justement préparé un document qui répond à tous ces commentaires, et nous l'avons présenté, ce matin, à la commission parlementaire, et je pense que le président l'a déposé. Je dis cela pour signaler que nous croyons que c'est ici le forum où l'on doit s'acquitter de notre devoir d'imputabilité.

M. Garon: il faut dire que quand votre rapport est déposé à l'Assemblée nationale il est rendu public.

M. Châtelain: Oui, d'accord mais...

M. Garon: Les médias le prennent un soir et après, ils écrivent des résumés.

M. Châtelain: L'information est destinée à l'Assemblée nationale. En d'autres mots, la primauté de l'Assemblée nationale est assurée, elle est protégée, elle est respectée. C'est là que l'imputabilité doit s'exercer. Ensuite, évidemment, c'est public, c'est une bonne chose que ce soit public. Je ne dis pas que c'est une mauvaise chose, absolument pas. Après tout, vous êtes les représentants du peuple. Il s'agit de fonds public. Le public doit être informé, bien sûr. Mais il faut respecter quand même ce canal d'autorité qu'est l'Assemblée nationale. La même chose pour ceux qui réagissent au rapport du Vérificateur général. Il faut que leurs commentaires soient adressés à l'Assemblée nationale, par l'entremise du rapport du Vérificateur général, bien sûr. Le Vérificateur général publie la réaction dans son rapport. Le Vérificateur général publie les réactions des gestionnaires ou des dirigeants, même si cela ne lui fait pas plaisir, parce que ce ne sont pas tous des commentaires qui sont flatteurs envers lui. Il les publie quand même, toujours dans le respect de l'autorité de l'Assemblée nationale. Cela permet à l'Assemblée nationale d'être informée, d'avoir une information qui est éprouvée, qui est soutenue par des interlocuteurs valables. Cela permet également à l'Assemblée nationale, non seulement de pouvoir apprécier la portée des commentaires, mais aussi de pouvoir exercer plus tard un suivi, justement, sur ces constatations. En d'autres mots, cela permet à l'Assemblée nationale d'exercer son rôle de surveillance. Cela fait partie du mandat de l'Assemblée nationale. C'est bien dit dans la Loi sur l'Assemblée nationale.

M. Garon: Vous auriez souhaité, au fond, que la CSST vous réponde pour que vous puissiez marquer leurs commentaires dans votre rapport?

M. Châtelain: Évidemment, bien sûr. C'est ce que nous avons recherché.

M. Garon: Est-ce que vous avez eu des raisons pour lesquelles cela n'a pas été fait?

Le Président (M. Lemieux): En conclusion, M. le député de Lévis.

M. Châtelain: La raison qui a été invoquée par la présidente - et je l'ai communiquée dans le rapport - c'est qu'elle ne voulait pas être en

situation potentielle de conflit d'intérêts, dans le sens qu'elle ne voulait pas influencer le travail du Vérificateur générai. Je n'essaie pas d'interpréter... C'est à peu près ce qu'elle m'a dit par écrit, qu'elle ne voulait absolument pas influencer, orienter le travail du Vérificateur général de quelque façon que ce soit, qu'elle lui laissait entière liberté d'agir comme bon lui semblait. C'est peut-être louable de penser comme cela. N'empêche que cette réaction des gestionnaires et de la haute direction fait quand même partie de la validation des constatations du Vérificateur général. Vous savez que lorsqu'on fait une vérification intégrée, ce n'est pas seulement en vérification financière. On se fonde sur des critères qui sont non seulement quantitatifs, mais aussi, comme vous l'avez dit vous-même tantôt, des critères qui sont souvent qualitatifs. À ce moment-là, la réaction des gestionnaires, des dirigeants nous est très valable, à savoir si nous sommes sur la bonne voie dans nos recommandations. Cela fait partie d'un travail de validation. C'est normal, c'est ce qui se fait régulièrement ailleurs et ici à Québec, c'est-à-dire dans nos autres travaux et également dans d'autres juridictions. Cela se fait partout ailleurs. Le dirigeant donne sa réaction. Sans cela le vérificateur va peut-être travailler dans le noir. Il faut que le vérificateur soit assuré qu'il est sur la bonne voie. Cela fait partie d'une validation. On n'a pas bénéficié de cette collaboration de la part de la haute direction de la CSST et nous l'avons signalé dans le rapport.

M. Garon: Merci.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Mille-Îles.

Vérification des organismes et des entreprises du gouvernement

M. Bélisle: Je m'en voudrais, M. le Président, de laisser partir le Vérificateur général sans aborder un chapitre Important de son rapport, le chapitre 6, qui concerne la vérification des organismes et des entreprises du gouvernement. On n'en a malheureusement pas parlé aujourd'hui parce qu'on n'a pas eu le temps. On a touché à plusieurs autres sujets, c'est pour cela qu'au début de la matinée... J'ai été un peu désolé de vous voir partir à la fin de la journée, parce qu'il y a encore beaucoup de travail à faire et on aurait intérêt à continuer le dialogue qu'on a entrepris aujourd'hui. Mais essayons dans ces quelques minutes d'en venir au fait. 31 mars 1985: 152 organismes et entreprises relevant directement du gouvernement du Québec. Vous faites une comparaison, à la page 78 de votre rapport. C'est très intéressant quand vous comparez les actifs, les passifs et les dépenses gérées par ces organismes et ces entreprises. Je pense que ça vaut la peine d'être répété. Les actifs des entreprises et organismes relevant du gouvernement, 40 000 000 000 $, les passifs, 33 000 000 000 $, les dépenses de ces entreprises et de ces organismes, 13 000 000 000 $ comparativement aux actifs du gouvernement, 20 000 000 000 $, les passifs, 30 000 000 000 $ et 25 000 000 000 $ de dépenses budgétaires, bien entendu, retrouvées aux états financiers. De là l'importance, si on calcule simplement en termes de dépenses, que nous échappent, oui, il faut bien le dire, nous échappent a nous, parlementaires, des organismes qui injectent dans la société par voie de dépenses courantes, de salaires, d'achats de biens et services, d'influence directe sur la machine économique de notre société, presque la moitié de ce que le gouvernement du Québec représente à lui seul. Je vous accorde entièrement mon appui en disant que c'est absolument, non seulement Inacceptable, mais c'est totalement contre-indiqué lorsqu'on veut avoir un bloc qui est le bloc gouvernemental qui influence et qui oriente la démarche économique dans tel ou tel secteur ou dans telle ou telle région du Québec.

Vous avez dit à la page 70 de votre rapport - ma première question touche à cela - à l'article 6. 9 et je vous cite: 'Nous croyons cependant que toute nomination d'un vérificateur autre que le Vérificateur général devait être fondée sur des motifs sérieux et exceptionnels. " Vous avez dans les pages 73, 74, 75, 76, 77 de votre rapport un long état des entreprises qui vous étaient confiées pour vérification. Il y a en fin de compte 52 organismes du gouvernement, 29 entreprises du gouvernement, 10 autres entités, 91 qui vous sont confiées comme vérification, 55 qui sont confiées à des vérificateurs autres que le Vérificateur général du Québec, c'est-à-dire à des firmes de vérificateurs privées. Alors, on peut parler d'une proportion de 2 sur 3, grosso modo, dans l'ensemble de la situation. Alors, deux entreprises ou organismes gouvernementaux vous sont confiés comme vérification et une ne l'est pas. Quand vous énoncez comme principe de base qu'il faut des motifs sérieux et exceptionnels, laissez-moi vous poser la question directe. Quels sont les motifs sérieux et exceptionnels pour faire que tout ce qui touche Hydro-Québec ne vous soit pas confié?

M. Châtelain: Évidemment, quand on dit cela, pour commencer, il faut réaliser que le Vérificateur général est le représentant de l'Assemblée nationale. Les organismes et les entreprises du gouvernement détiennent un mandat de l'Assemblée nationale, à la suite d'une loi adoptée par l'Assemblée nationale. Quelle est la personne la mieux placée pour faire rapport à l'Assemblée nationale à la suite d'une vérification? Parce que le client, dans le fond, comme dans votre exemple, ce n'est pas Hydro-Québec.

M. Bélisle: Non, non.

M. Châtelain: Le client est l'Assemblée nationale.

M. Bélisle: C'est sûr.

M. Châtelain: Alors, le Vérificateur général agit pour et au nom de l'Assemblée nationale à ce moment-là et il fait rapport à l'Assemblée nationale. C'est le vérificateur qui, de par son rapport annuel, a une communication directe avec l'Assemblée nationale. Aussi, par sa présence ici en commission parlementaire, c'est lui qui a un lien privilégié avec l'Assemblée nationale. Donc, c'est lui, au départ, qui est dans la meilleure position, vu ses contacts, son mandat, son allégeance et ainsi de suite, c'est lui qui est dans la meilleure position, dis-je, pour exercer ce rôle de vérificateur.

Maintenant, vous soulevez la question d'Hydro-Québec. Hydro-Québec est peut-être un cas qui n'est ni à gauche ni à droite. Est-ce qu'il s'agit d'une entreprise qui a des activités de nature gouvernementale ou des activités de nature industrielle, commerciale? Disons que c'est peut-être plus industrielle et commerciale que gouvernementale. Il faut s'entendre. Mais, il faudrait définir ces termes. Ce sont des termes qui sont très difficiles à définir. Alors, le cas d'Hydro-Québec est peut-être très difficile à trancher. Il y aurait des cas... Je vais prendre un cas qui serait pas mal plus clair. Prenons la SNA, par exemple. D'accord?

M. Bélisle: Oui.

M. Châtelain: Je ne crois pas qu'on puisse dire que la SNA est engagée réellement dans des activités de nature gouvernementale, sans définir les termes. D'accord?

M. Bélisle: Oui.

M. Châtelain: Si on prend d'autres entreprises, on peut dire qu'il y a des entreprises qui sont dans des opérations de nature pas mal gouvernementale. Prenons la Régie de l'assurance-maladie. Là, ce n'est pas bien bien industriel. D'accord? Par exemple, l'émission de permis à la Régie de l'assurance automobile, peu importe. D'accord?

M. Bélisle: Oui.

M. Châtelain: Alors, dans le passé, la position que nous avons prise est celle-ci. Lorsque nous sommes dans un domaine d'activité réellement gouvernementale, on devrait demander au Vérificateur général d'agir comme représentant de l'Assemblée nationale et d'agir pour son client, lui qui a un lien privilégié, à cause de la nature de ses activités. Auprès de la SNA, je dois vous dire que le vérificateur n'a jamais témoigné d'ambitions pour aller faire la vérification parce qu'un bureau du secteur privé est joliment en bonne position, à ce moment-là, pour faire un bon travail de vérification. (17 h 45)

Je ne parle pas de vérification intégrée parce que ici, dans la Loi sur le Vérificateur général, quand on parle d'entreprises du gouvernement, les vérificateurs du secteur privé n'ont pas un mandat de vérification intégrée auprès de ces entreprises. On doit dire par contre que dans certaines de ces entreprises, la notion de profit est présente et elle doit être présente. Par exemple, à la SNA, je pense bien que la notion de profit doit être présente. Dans d'autres entreprises, ce n'est pas la notion de profit qui doit guider. Alors, là où ce n'est pas la notion de profit ou de "bottom line" comme on le dit souvent en anglais, là où ce n'est pas le critère, disons, d'évaluation de la performance, on parle de vérification intégrée. Dans ces cas, il devrait y avoir des vérifications intégrées et lorsqu'on parle de vérification intégrée, on se rapproche joliment des activités de nature gouvernementale et du rôle du Vérificateur général.

C'est pour cela que je dis, qu'en général, cela devrait être le Vérificateur général qui devrait agir pour et au nom de l'Assemblée nationale. C'est l'Assemblée nationale qui est le client et c'est le Vérificateur général qui est le mieux placé pour agir en son nom.

M. Bélisle: M. Châtelain, vous n'avez pas écrit un chapitre complet pour venir nous dire aujourd'hui que vous êtes satisfait de l'état de la situation.

M. Châtelain: Non, il faut s'entendre. On regardait un cas bien spécifique.

M. Bélisle: D'accord, mais laissez-moi vous en faire...

M. Châtelain: C'est-à-dire qu'on regardait la nomination du vérificateur comme tel. Cependant, il y a autre chose dans ce chapitre.

M. Bélisle: Je le sais mais arrêtons-nous à cela. Commençons avec le premier point.

M. Châtelain: Oui.

M. Bélisle: Vous avez le mandat de vérification de toutes les filiales de la Caisse de dépôt. Quand vous nous sortez le critère du profit, je pense aux immeubles Cadev, les immeubles Cadimont, les Jardins de Mérici, la Place Dupuis, la Société immobilière Trans... Non, TransQuébec, vous ne l'avez pas. Le Développement Pasteur, Cogir Consultants, Cadim... Il doit y avoir des notions de profit là-dedans aussi et des notions de rentabilité, ce sont des sociétés immobilières, des sociétés de gestion.

M. Châtelain: Oui, bien sûr. Ce n'est pas le seul critère. Il faut s'entendre.

M. Bélisle: Je comprends. Je vous ramène à votre déclaration de principe. Vous dites: Quand il y a des motifs sérieux et exceptionnels. Dans ma compréhension de cette expression, cela n'a rien à voir avec des distinctions comme, quand il y a une activité qui est plutôt à caractère commercial ou à caractère économique, cela doit être une firme privée et quand ce n'est pas à caractère commercial ou économique, cela devient public. Dans mon livre, cela ne tombe pas de même.

M. Châtelain: Dans le cas que nous relevons ici, les filiales de la Caisse de dépôt, sauf exception, nous sommes les vérificateurs des filiales. C'est une situation normale parce que nous sommes les vérificateurs de la maison-mère. Nous sommes les vérificateurs de la Caisse de dépôt.

M. Bélisle: Oui, je comprends.

M. Châtelain: C'est une situation normale.

Le conseil d'administration de la Caisse de dépôt est bien d'accord pour que nous soyons les vérificateurs des filiales aussi.

M. Bélisle: Comprenez-moi bien, M. Châtelain. Revenons au principe de base.

M. Châtelain: Oui.

M. Bélisle: Depuis que le gouvernement est effectivement propriétaire et seul actionnaire d'Hydro-Québec et que le dividende versé chaque année est inclus dans nos états financiers, ne trouvez-vous pas que la distinction commence à s'éliminer un peu entre services gouvernementaux et parapubiics? Ce qui est à caractère commercial, économique ou non économique n'a plus tellement de sens. Quelle est la distinction entre donner le droit, délivrer un permis de la Régie de l'assurance automobile pour conduire sur une route du Québec en exigeant un tarif et un permis pour un branchement d'électricité nécessaire au fonctionnement d'une entreprise? Vous savez, la distinction entre ce qui est public avec un grand "P" et ce qui n'est pas public avec un petit "p", je ne la vois pas.

Si vous me parlez de motifs sérieux, exceptionnels, de secrets d'État, s'il y en avait, ou de motifs d'ultraconfidentialité, je comprendrais votre expression et votre principe de base où vous dites: Dans des cas exceptionnels. Mais l'exception n'est pas un sur trois. Puis, lorsque vous dites: Pour des motifs sérieux de confidentialité, exemple, le Directeur général des élections, je vous comprends un peu plus. Je comprends votre principe. Mais je vois que vous essayez là de... ou je comprends mal, ce n'est pas assez articulé, ce n'est pas assez bien défini, effectivement, comme catégorisation.

M. Châtelain: Oui, mais vous avez pris un autre exemple. Quand vous prenez l'exemple d'Hydro, il ne faut pas seulement regarder les activités, mais aussi la nature de la bête, sa constitution, sa structure. Hydro, c'est un monopole. Le 'bottom line" ne veut pas dire grand-chose dans un monopole. D'ailleurs, les taux d'Hydro sont approuvés par le gouvernement. Alors, si je poursuivais le principe que j'avançais tantôt, je vous dirais en outre que le Vérificateur général devrait avoir son mot a dire à Hydro.

M. Bélisle: Oui.

M. Châtelain: C'est vrai.

M. Bélisle: Oui.

M. Châtelain: On est bien d'accord. Les choses font que, historiquement, cela a toujours été fait par un vérificateur du secteur privé.

Une voix: Oui.

M. Châtelain: Bien, nous avons fait un progrès. Depuis l'adoption de la loi, en 1985, le Vérificateur général a maintenant un droit de regard sur Hydro ou peu importe, sur toute la vérification faite des entreprises du gouvernement par d'autres vérificateurs. Alors, le Vérificateur général a maintenant un droit de regard sur les travaux qui sont faits là.

M. Bélisle: Comprenez bien mon point de vue, M. le Vérificateur général. Tant que vous n'aurez pas le mandat de l'Assemblée nationale de faire la vérification d'une société d'État comme Hydro-Québec, nous, parlementaires autour de cette table, n'aurons pas l'occasion de faire le contrôle "exposed" de votre vérification. Non seulement le contrôle nous échappe-t-il en ce moment - parce qu'il vient de la commission parlementaire, le député de Bertrand, je pense, a siégé longtemps à la commission de l'économie, à quelques reprises, et ce devait être des présentations très belles, très audio-visuelles, très tout ce que vous voulez - mais comme parlementaires, comme responsables de la gestion vis-à-vis de nos électeurs, nous ne sommes pas bien informés, il ne faut pas se le cacher.

Alors, ce que je lis dans l'ensemble et ce que je décode du message que vous avez livré dans votre chapitre 6 en entier, vous n'avez pas écrit ce chapitre, je le répète encore une fois, en consultant les organismes et entreprises gouvernementaux, un à un, simplement pour le plaisir de venir nous dire que, historiquement, c'est deux sur trois et que peut-être, quand I y a profit... Non. Je pense que le message que vous voulez nous passer est que, si on veut réellement rendre l'ensemble de l'appareil transparent et imputable, il faut qu'on en vienne à ce que la mandat de vérification soit général, sauf exception et pour des motifs sérieux, comme la

confidentialité, dans le cas du Directeur général des élections ou pour des organismes semblables, mais ce serait là l'extrême exception, le 0, 5 % dans l'échantillon. Est-ce que c'est ce que je dois comprendre comme message ou si je me trompe?

M. Châtelain: Vous ne vous trompez pas. Ce que je ne comprenais pas tantôt, c'est que je pensais que le député ne faisait référence qu'au choix du vérificateur, mais ça va beaucoup plus loin que ça, parce que vous replacez tout dans le contexte de l'imputabilité envers l'Assemblée nationale.

M. Bélisle: C'est exact.

M. Châtelain: À ce moment-là, on parle du chapitre 6 en entier de notre rapport annuel...

M. Bélisle: C'est exact.

M. Châtelain:... où l'on revient, comme je le signalais ce matin, M. le Président, sur la nécessité d'une loi-cadre qui va établir un cadre d'imputabilité pour l'ensemble de ces organismes et entreprises, qui va assurer aux parlementaires ce manque d'information que vous déplorez, qui va établir des balises qui feront en sorte que vous pourrez exercer votre rôle de surveillance quand vous serez appelés à voter à l'Assemblée nationale sur des fonds additionnels, pour ces organismes et entreprises. Vous serez alors exactement au courant.

M. Bélisle: Ou sur des demandes de tarifs.

M. Châtelain: Voilà.

M. Bélisle: Tout ça a une incidence. Si mon intervention a tout simplement permis de clarifier votre voeu sous-jacent au chapitre 6, elle aura été utile.

M. Châtelain: Oui. M. le Président, vous savez, nous avons fait un effort additionnel cette année dans notre rapport annuel pour développer davantage ces aspects, dont la nécessité, justement, d'une loi-cadre.

M. Bélisle: D'accord, merci. Conclusions

Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le député de Mille-Îles. Peut-être en conclusion, M. le député de Bertrand, en guise de remarques préliminaires, c'est-à-dire, pardon, en remarques finales.

M. Parent (Bertrand): Les préliminaires ayant été faites, nous en sommes rendus au dessert.

Le Président (M. Lemieux): Les préliminaires ont été faites ce matin.

M. Jean-Guy Parent

M. Parent (Bertrand): J'aimerais, au nom de l'Opposition, en terminant cette brève journée où plusieurs commentaires ont été apportés et où on a répondu à plusieurs questions, bien que d'autres soient restées un peu plus en suspens, rappeler ce que mon collègue, le député de Lévis, a soulevé, soit l'importance de tous les principes d'imputabilité. Je ne voudrais pas revenir là-dessus, mais j'aimerais dire à quel point ça nous tient à coeur et à quel point nous aimerions voir bouger les choses. Si vous, M. le Président, et si nous, membres de cette commission, posons des gestes en ce sens, nous pourrons certainement voir cela se concrétiser.

Deuxièmement, sur le plan de la rigueur, le Vérificateur général, de par son rôle, a à rappeler à l'ordre ou à pointer du doigt les organismes gouvernementaux et les ministères. Il n'est pas de mon intention, à titre de député, de rappeler à l'ordre le Vérificateur général, ce n'est pas là mon intention. Mais j'aimerais voir beaucoup plus de rigueur de la part du Vérificateur général dans son prochain rapport, un peu comme il l'a fait sur certains points aujourd'hui dans le sens suivant. Lorsqu'il y a des anomalies importantes - je fais référence à l'article 3. 19 qui a trait aux 849 000 000 $ - à l'occasion d'un geste posé par le gouvernement, par un ministère ou par un ministre, en l'occurrence le ministre des Finances, si c'est un geste qui est reprochable jusqu'à un certain point parce qu'il n'a pas suivi la filière qu'il devait suivre et que ça risque de créer des précédents, à mon avis, il doit être réprimandé plus fort et avec plus de vigueur qu'il ne l'a été, jusqu'à présent. J'ai trouvé que c'était passer la chose en douce.

De plus, il faut exiger plus de transparence dans toute cette question de la nouvelle présentation - je reviens là-dessus - des états financiers, l'élément de transparence, parce que les règles du jeu ont changé, il faut avoir cette transparence et exiger du gouvernement que nous puissions non seulement voir les petites notes de référence, mais voir très clairement à la simple lecture, que ce soit des états financiers, du rapport, du matériel des comptes publics ou peu importe, de tout ce qui se publie, et non pas l'un par rapport à l'autre, qu'on puisse s'y retrouver quant aux revenus, aux dépenses, aux déficits qui sont des chiffres de référence, exiger ou du moins recommander fortement, comme vous l'avez confirmé aujourd'hui... Sauf que ce qui se passe ici, en commission parlementaire, ce n'est pas transcrit textuellement dans les journaux et ce n'est pas arrivé aux oreilles de tout le monde qui devrait peut-être l'entendre. Cela s'est passé ici. il y a des perroquets. On sait que, les choses étant ce qu'elles sont, parfois cela ne reste pas plus loin

que la porte ici.

J'aimerais que les voeux que vous avez transmis aujourd'hui... La transparence que vous-même avez su démontrer afin de donner les outils aux parlementaires, par exemple, sur des bases comparatives telles que nous l'avions demandé, à mon avis, si elle pouvait se retrouver dans un prochain rapport du Vérificateur général, avec ces mises en garde très claires, cela aiderait certes tout le monde à comprendre la même chose et non pas à être en zone grise parce qu'on se pose la question: Qui dit vrai? Alors, il y a quelqu'un qui, à un moment donné, doit être capable de trancher, doit savoir ce qui est vrai et ce qui n'est pas vrai. Je pense que, pour le Vérificateur général, il y a plusieurs points, surtout la question de la présentation, et vous-même, vous y avez déjà apporté cette année...

Le Président (M. Lemieux): En conclusion, s'il vous plaît, monsieur.

M. Parent (Bertrand): ...des améliorations. Vous avez déjà pointé des choses du doigt et vous avez forcé la présentation ou le changement de leur présentation. Je pense qu'il y a encore là un bout de chemin à faire important.

Je conclus en disant que nous allons, en tout cas, en tant que parlementaires et membres de cette commission, essayer de continuer à travailler pour améliorer les choses. Je tiens à vous remercier, M. le Vérificateur général.

Le Président (M. Lemieux): Merci, M.^ le député de Bertrand. M. le député de Mille-Îles, en remarques finales.

M. Jean-Pierre Bélisle

M. Bélisle: La même chose, dans la même veine que le député de Bertrand. Je suis toujours heureux de voir les gens du bureau du Vérificateur général et le Vérificateur général lui-même qui viennent nous voir; on a une discussion sérieuse. La seule chose que je souhaite, M. le Président, c'est qu'on puisse se retrouver plus rapidement et qu'on fasse un autre pas sans s'illusionner sur la possibilité de faire des grands pas à la fois. Je suis plutôt un partisan d'une démarche prudente, lente, mais au moins d'une démarche suivie. Je pense que, présentement, sans se lancer des fleurs, si on regarde l'évolution depuis trois ans et demi, il y a encore des étapes importantes à franchir, mais on est réellement sur la bonne voie. Ce n'est pas une question de dire qu'on fait tous du bon travail et de s'encenser mutuellement, mais je pense qu'on approche lentement de l'objectif ultime que, tous, on s'est fixé, c'est-à-dire d'avoir un système qui soit beaucoup plus imputable et beaucoup plus efficace. Petit a petit, on devrait réussir. J'ai bon espoir que cette année, au cours des prochaines semaines, au cours des prochains mois, il va y avoir des étapes supplémentaires de franchies. Possiblement, après une prochaine campagne électorale, on pourrait faire un autre grand pas.

Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le député de Mille-Îles. Je suis certain que notre démarche étapiste va donner des résultats positifs. M. le Vérificateur général, en conclusion.

M. Rhéal Châtelain

M. Châtelain: Merci, M. le Président. Tout d'abord, un sincère remerciement de nous avoir entendus aujourd'hui. Nous avons pris bonne note des recommandations et des suggestions que les membres de votre commission ont faites en vue de l'amélioration du service que nous rendons à l'Assemblée nationale. Notre espoir, évidemment, c'est que notre rapport ait des suites. On en a discuté aujourd'hui. Je vous fais part de notre grande satisfaction d'avoir pu vous rencontrer. C'est réconfortant, c'est même stimulant de pouvoir le faire. C'est un honneur, un plaisir, mais c'est notre devoir. Vous êtes non seulement notre patron; dans un sens, vous êtes aussi notre client et nous devons allégeance, évidemment, à notre client. Nous sommes là pour vous servir. Vous pouvez être assurés de notre entière allégeance et de notre coopération. Il nous fera toujours plaisir de répondre à votre invitation. Je vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie, M. le Vérificateur générai.

La commission ayant accompli son mandat d'entendre le Vérificateur général du Québec, nous ajournons nos travaux sine die.

(Fin de la séance à 18 h 1)

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