L'utilisation du calendrier requiert que Javascript soit activé dans votre navigateur.
Pour plus de renseignements

Accueil > Travaux parlementaires > Travaux des commissions > Journal des débats de la Commission de la culture

Recherche avancée dans la section Travaux parlementaires

La date de début doit précéder la date de fin.

Liens Ignorer la navigationJournal des débats de la Commission de la culture

Version finale

33e législature, 1re session
(16 décembre 1985 au 8 mars 1988)

Le mercredi 23 avril 1986 - Vol. 29 N° 4

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude des crédits du ministère des Communautés culturelles et de l'Immigration 1986-1987


Journal des débats

 

(Dix heures six minutes)

Le Président (M. Trudel): À l'ordre, s'il vous plaît! Je constate que l'on a quorum. C'est tout à fait juste, mais on l'a. La commission peut procéder, maintenant, à l'étude des crédits budgétaires du ministère des Communautés culturelles et de l'Immigration pour l'année 1986-1987.

Est-ce qu'il y a des remplacements? II n'y a pas de remplacement de votre côté, M. le député de Mercier? Pas de remplacement de l'autre côté, non plus?

M. Godin: On est irremplaçables!

Le Président (M. Trudel): Vous m'enlevez les paroles de la bouche, M. le député de Mercier.

Mme la ministre, au nom de la commission de la culture, je vous souhaite la bienvenue pour la défense des crédits de votre ministère. Je souhaite également la bienvenue à vos collaborateurs, que vous allez san3 doute nous présenter dans un moment. Je reconnais parmi eux certaines figures que je n'avais pas revues depuis plusieurs années, notamment votre sous-ministre en titre que je n'avais pas revu depuis presque 25 ans, ce qui ne nous rajeunit pas, ni l'un ni l'autre.

Une voix: Wow!

Le Président (M. Trudel): Mme la ministre, je pense que vous avez une déclaration préliminaire à faire. Est-ce que vous avez le texte de cette déclaration, madame?

Mme Robic: Oui, j'ai le texte. Et, si vous me le permettez, je vais demander qu'il soit distribué immédiatement.

Le Président (M. Trudel): II me fait plaisir de vous accorder cette permission, Mme la ministre.

Une voix: C'est de la belle collaboration.

Le Président (M. Trudel): Par la suite, j'imagine que le député de Mercier aura des remarques préliminaires à faire. M. le député?

M. Godin: Oui, mais sans texte.

Le Président (M. Trudel): Mais sans texte!

M. Godin: De la pure improvisation. Mme Robic: On voit l'expérience, là.

Le Président (M. Trudel): Mme la ministre, la parole est à vous.

Remarques préliminaires Mme Louise Robic

Mme Robic: Merci beaucoup, M. le Président.

M. le Président, Mmes et MM. les membres de la commission, permettez-moi, tout d'abord, de vous dire combien je suis heureuse de me retrouver parmi vous aujourd'hui pour dresser un rapide bilan des activités de mon ministère au cours de la dernière année et pour esquisser, tout au moins dans les grandes lignes, ce que j'entrevois être les actions du ministère au cours de l'année qui s'en vient.

Mais, d'abord, si vous me donnez l'autorisation, M. le Président, je souhaiterais vous présenter, parmi les principaux collaborateurs et collaboratrices qui m'accompagnent, M. Régis Vigneau, sous-ministre, M. Roger Prud'homme, sous-ministre adjoint, ainsi que Mme Renée Desmarais, la directrice de mon cabinet. Mais, également, sur la ligne de feu à l'arrière, j'aimerais vous présenter Mme Johanne Sénécal, avocate, qui a la charge des cas d'immigration au cabinet; Mme Éleni Bakopanos, qui s'occupe des communautés culturelles; Mme Francine Breton, mon attachée de presse. Du ministère, je voudrais vous présenter M. Laporte, à la recherche, M. Tremblay, à l'administration, et M. Lemay, directeur des Finances. Alors, vous voyez que je suis bien accompagnée, vous pourrez poser plusieurs questions. Je pense qu'il y a certainement quelqu'un dans le groupe qui pourra trouver la réponse. Bien sûr, je voudrais - je pense que tout le monde la connaît - vous présenter Mme Juanita Westmoreland-Traoré, qui est la présidente du Conseil des communautés culturelles et de l'immigration.

Je vois que vous avez tous le

volumineux cahier préparé par le ministère en vue de cette séance de la défense des crédits. Je suis persuadée que vous l'avez tous lu, d'une page à l'autre. D'ailleurs, je me permets, en ce moment, de remercier toutes les personnes qui ont travaillé à la préparation de ce document qui, je pense, est complet et dans lequel vous pouvez trouver certainement, je dirais, presque toutes les réponses aux questions que vous pourriez avoir.

Vous comprendrez, M. le Président, que je n'ai pas l'intention de vous imposer un très long discours, dans lequel je ne ferais, à toutes fins utiles, que reprendre l'essentiel des éléments qui ont déjà été portés à votre connaissance par ce cahier, ainsi que par le cahier du Conseil des communautés culturelles et de l'immigration. De plus, nous aurons amplement l'occasion au cours des quelques heures de discussion qui sont prévues avant l'adoption des crédits, de revenir sur les informations ponctuelles que contient ce cahier et, au besoin, de les compléter. Je me contenterai donc pour l'instant d'attirer votre attention sur quelques grands thèmes qui méritent qu'on s'y attarde davantage.

Je me permettrai, tout d'abord, de vous dire quelques mots du Conseil des communautés culturelles et de l'immigration qui fêtera d'ailleurs au mois de juin sa première année d'existence. Malgré les difficultés inhérentes à la mise sur pied d'un tel organisme, le conseil a su fournir des avis précieux sur les niveaux d'immigration, le rapport Plaut concernant les revendicateurs du statut de réfugié et des modifications réglementaires. Je puis assurer les membres de cette commission que je compte voir le conseil jouer un rôle primordial dans la détermination des niveaux d'immigration pour 1987, de même que dans toutes les autres questions touchant les communautés culturelles. La compétence et la qualité de ses membres, ainsi que leur engagement social personnel sont autant de garanties quant à la pertinence de leurs avis.

L'année dernière, le Québec a accueilli 14 721 ressortissants étrangers. C'est un nombre équivalant aux entrées de l'année 1984, mais qui représente une diminution de 28 % par rapport à la moyenne annuelle du mouvement migratoire pour la période de 1975 à 1984. La baisse dans les niveaux d'immigration avait commencé en 1983, conséquence directe des difficultés économiques du Canada, du Québec et de l'ensemble du monde occidental. Il est, par ailleurs, intéressant de noter que, malgré cette baisse du nombre des entrées d'immigrants en chiffres absolus, le Québec non seulement a maintenu son taux d'attraction par rapport à l'ensemble du Canada, mais l'a légèrement augmenté si l'on en croit les chiffres comparatifs que nous avons obtenus du fédéral pour les onze premiers mois de 1985.

Le Vietnam, Haiti et la France sont, comme en 1984, les trois principaux pays de dernière résidence de nos nouveaux concitoyens. Il me semble intéressant de noter que 41 % des immigrants que nous avons reçus venaient du continent asiatique. Il n'y a, par ailleurs, rien de surprenant dans ce pourcentage lorsqu'on connaît les efforts déployés par mon ministère pour favoriser la réunification des familles au Vietnam et le recrutement d'investisseurs à Hong Kong.

Le mouvement de la réunification des familles compte à lui seul pour 41 % de tout le mouvement migratoire de l'année 1985. Ce pourcentage est tout à fait normal par rapport aux années antérieures et s'explique très bien par le fait que la politique de réunification familiale a toujours été un élément essentiel dans la politique migratoire tant québécoise que fédérale.

Quant aux immigrants investisseurs, le ministère multiplie ses efforts afin de favoriser leur venue au Québec. Ces entrepreneurs amènent ici des capitaux importants en plu3 d'avoir une très bonne expérience d'affaires. Il importe de mentionner également que ces entepreneurs contribuent aux relations commerciales du Québec avec l'étranger. Les nombreux contacts qu'ils entretiennent avec leur pays d'origine permettent à des entreprises québécoises de trouver de nouveaux débouchés extérieurs.

Durant l'année 1985, 505 immigrants investisseurs ayant comme destination le Québec ont reçu un visa d'immigrant. Ces personnes déclarent disposer d'un capital total de 260 000 000 $. Le capital moyen déclaré par investisseur en 1985 a légèrement augmenté, atteignant 515 000 $ comparativement à 477 000 $ pour l'année 1984.

En 1985, les principaux pays fournisseurs de candidats immigrants au Québec ont été, par ordre d'importance, Hong Kong, les pays du Proche Orient et la France. Près de 70 % du nombre total des candidatures retenues par le ministère proviennent de ces régions. (10 h 15)

Le ministère a fait une dernière évaluation de son programme à l'intention des gens d'affaires en 1983. Cette évaluation portait sur la période 1972-1982. Depuis janvier 1986, une nouvelle évaluation du programme des immigrants investisseurs portant sur la période 1983-1984 est en cours de réalisation. Cette étude permettra de mesurer l'impact économique des investissements réalisés au Québec au cours des dernières années. En plus, elle permettra d'obtenir des renseignements sur la structure économique des entreprises des immigrants investisseurs qui sont arrivés au Québec dans

les trois dernières années; d'obtenir de3 indications de type socio-économique sur le rôle de ces entreprises; d'évaluer le degré de satisfaction de ces immigrants face à leur expérience d'intégration sociale et économique au Québec; d'évaluer le degré de satisfaction de ces investisseurs quant à l'aide gouvernementale obtenue dans la réalisation de projets d'affaires et d'établir le profil type de ces investisseurs et des facteurs ayant motivé leur désir de s'établir au Québec.

L'ensemble de ces renseignements permettra au ministère de mieux connaître sa clientèle, de mieux cibler ses efforts de promotion et de prospection, de définir les activités de son service d'aide à l'établissement et de systématiser le travail de suivi et d'évaluation de ces programmes.

Les statistiques que je viens de vous citer, en ne prenant en compte que le nombre de ressortissants étrangers qui 9ont arrivés en 1985 au Québec à titre d'immigrants, cachent une partie importante de la réalité que nous avons vécue au cours de l'année dernière. En effet, ces statistiques ne comprennent pas les 6800 personnes qui sont arrivées au Québec pendant la même période et qui y ont demandé le statut de réfugié. Je reviendrai, d'ailleurs, un peu plus loin sur cette question des revendicateurs, mais je tenais en ce moment à préciser que les chiffres officiels quant aux entrées des ressortissants étrangers qui comptent s'établir au Québec sur une base permanente sous-estiment largement la réalité.

Malgré cette sous-estimation, nous avons eu en 1985 un solde net positif de près de 5000 personnes pour les neuf premiers mois de l'année en ce qui concerne le mouvement migratoire international. Bien sûr, ce solde net ne comprend pas les revendicateurs qui sont arrivés au Québec, de telle sorte que, si l'on devait compter toutes les personnes qui sont arrivées chez nous pour y vivre à demeure et comparer ce chiffre au nombre de sorties à destination de l'étranger, nous aurions un solde migratoire net de plus de 11 000 personnes. Il s'agit là d'un chiffre qui se compare avantageusement à la moyenne du solde net d'immigration internationale pour la période 1972-1980.

Plus encourageantes encore sont les données dont nous disposons concernant le mouvement migratoire interprovincial. En effet, celles dont nous disposons pour les neuf premiers mois de l'année nous indiquent une très nette diminution du nombre de Québécois ayant décidé d'aller vivre dans une autre province canadienne. Si ce mouvement s'est poursuivi au cours des trois derniers mois de 1985, cette année aura connu les plus faibles sorties depuis plus de 20 ans.

Par ailleurs, le nombre des entrées a, de son côté, légèrement augmenté par rapport à la moyenne des trois dernières années, ce qui fait que, au total, le Québec aura connu en 1985 un solde migratoire interprovincial net négatif certes, mais de 2000 à 3000 personnes seulement. C'est là une performance que nous n'avons pas connue au cours des 20 dernières années.

Je suis donc très heureuse, M. le Président, d'informer les membres de cette commission que, pour la première fois depuis 1974, le Québec aura eu en 1985 un solde migratoire total positif. Je suis d'autant plus heureuse d'annoncer ces résultats devant cette commission qu'on se souviendra qu'une des recommandations les plus importantes du rapport de la commission de la culture sur l'étude de l'impact culturel, social et économique des tendances démographiques actuelles sur l'avenir du Québec comme société distincte, rendu public en septembre 1985 par son président, M. Richard French, fixait justement comme objectif au ministère de réduire chaque année de moitié le déficit migratoire de l'année précédente. Je puis donc vous dire aujourd'hui que c'est mission accompliel

Je m'en voudrais, enfin, de clore cette partie de mon exposé sur l'immigration sans dire quelques mots sur la question des revendicateurs du statut de réfugié. Nous savons tous que la question de la détermination du statut de réfugié est de la compétence du gouvernement fédéral. Aussi, je me garderai bien d'aborder cet aspect de la question, tout en soulignant cependant que nous suivons de très près les travaux fédéraux relatifs à cette question.

Mais il y a un autre aspect qui nous touche directement. Je veux parler, bien sûr, des mesures d'accueil que le Québec a mises en place pour venir en aide à ces personnes. En 1985, à la suite d'une entente administrative que nous avons eue avec le gouvernement fédéral, le Québec a été en mesure de recevoir à ses bureaux toutes les personnes ayant déposé une demande de statut de réfugié. C'est ainsi que nous savons que 5240 personnes ont déposé une telle demande au Québec. Ce chiffre ne comprend, d'ailleurs, que les chefs de famille, de telle sorte que si l'on y ajoute les dépendants il y a eu au Québec, en 1985, 6800 personnes qui ont demandé le statut de réfugié.

Malgré quelques mesures prises par le gouvernement fédéral pour accélérer l'étude des dossiers, un revendicateur doit attendre trois ans, voire même quatre ans avant d'obtenir une réponse définitive. Ces délais sont tout à fait inadmissibles. À l'instar des Églises canadiennes et de très nombreux organismes non gouvernementaux oeuvrant auprès de ces personnes, j'ai demandé à mon homologue fédéral qu'il mette tout en oeuvre pour raccourcir de façon importante ces délais qui engendrent tant de problèmes et tant d'injustices. Nous savons que plus de 11 000 de ces revendicateurs sont actuelle-

ment au Québec en attente d'une décision du gouvernement fédéral.

Vous comprendrez, dans ces circonstances, que je sois très préoccupée par les suites qui seront données par le gouvernement fédéral à ce dossier. J'ai eu, il y a quelque temps, l'occasion de rencontrer M. Walter McLean, ministre responsable du dossier de l'immigration. Nous avons eu l'occasion d'aborder plusieurs sujets d'intérêt commun au nombre desquels, vous vous en doutez bien, figuraient en très bonne place les revendicateurs du statut de réfugié.

Je suis heureuse d'informer cette commission que mon homologue fédéral s'est montré très préoccupé par la situation qu'on connaît présentement au Québec et m'a assurée de sa collaboration pour que nous soyons mieux en mesure de nous faire entendre dans ce dossier. Je suis également heureuse de faire part à cette commission que des suites ont effectivement été données à ma rencontre avec M. McLean et que le 11 avril dernier il y avait une réunion du comité mixte de l'entente Couture-Cullen.

C'est important à noter puisque la dernière rencontre remontait déjà à trois ans. Au cours de cette réunion du comité mixte, les coprésidents ont convenu de mettre sur pied un groupe de travail qui a pour mandat de faire, tant à M. McLean qu'à moi-même, des recommandations quant aux solutions à adopter, notamment sur le traitement qui sera accordé aux revendicateurs déjà présents au Canada, quant aux services publics qui doivent être assurés aux revendicateurs mais aussi quant au partage des coûts entre les différents niveaux de gouvernement.

Je tiens à faire remarquer qu'il y a plusieurs années que nous avions essayé infructueusement d'établir ce genre de contact avec le gouvernement fédéral sur le dossier des revendicateurs. Évidemment, nous ne pouvons préjuger des résultats auxquels arrivera le groupe de travail, mais je suis, quant à moi, très réconfortée de voir qu'au moins la communication dans ce dossier a enfin été établie par les autorités fédérales.

Pour ce qui est de notre gouvernement et puisque les revendicateurs du statut de réfugié ont, au Québec, accès aux services de santé et aux services sociaux, à l'aide sociale, à l'aide juridique et à l'éducation primaire et secondaire, nous avons maintenu une concertation très étroite avec le ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, le ministère de la Santé et des Services sociaux, le ministère de la Justice et le Secrétariat aux affaires intergouvernementales canadiennes. II nous faut être particulièrement vigilant dans ce dossier afin que les mesures qui seront annoncées, je l'espère très bientôt, par le gouvernement fédéral protègent tout à la fois les droits des revendicateurs et ceux de la société qui les reçoit.

Je suis très heureuse de constater que ministre après ministre, gouvernement après gouvernement, le Québec a raison d'être fier de son action envers les plus démunis de la terre. Les objectifs poursuivis dans le domaine de l'accueil des réfugiés par le gouvernement auquel j'appartiens s'inscrivent dans la continuité historique de la générosité québécoise. Par ailleurs, il nous faut être conscient des coûts engendrés par la présence, sur notre territoire, de plus de 11 000 personnes qui sont toujours en attente d'une décision du gouvernement fédéral. Comme je le disais il y a quelques instants, nous avons, en concertation avec les autres ministères québécois impliqués, commencé à analyser de façon détaillée ces coûts et je compte adresser très prochainement un mémoire au Conseil des ministres qui fera le point sur cette question.

Avant de quitter le domaine de l'immigration pour vous entretenir de la question des communautés culturelles et de l'adaptation des immigrants, je souhaiterais attirer l'attention des membres de la commission sur l'exercice de détermination des niveaux d'immigration que nous avons entrepris pour l'année 1987. Pour l'année en cours, soit 1986, le gouvernement précédent a déterminé, par une décision du Conseil des ministres, que le Québec accueillerait sur son territoire 18 000 ressortissants étrangers, c'est-à-dire que nous devrions recevoir entre 15 % et 18 % de tous les ressortissants étrangers arrivant au Canada.

Au début de février de cette année, j'ai rencontré personnellement une cinquantaine de représentants des organismes que nous avons décidé de consulter cette année pour nous aider à mieux déterminer les niveaux d'immigration pour l'année 1987. Je souhaiterais que les membres de cette commission puissent, eux aussi, nous faire part de leurs voeux sur cette délicate question. Faut-il augmenter le nombre d'immigrants, ou faut-il, au contraire, le maintenir à son niveau actuel? Si nous devions aller vers une augmentation, celle-ci devrait-elle être légère, quelques milliers de personnes, ou beaucoup plus importante comme certains nous le suggèrent? Notre approche doit-elle être essentiellement économique, c'est-à-dire que les niveaux d'immigration devraient chercher à compenser des pénuries de main-d'oeuvre, ou faut-il que nous ayons une approche davantage démographique? Si nous devions aller vers une augmentation, il nous faudrait alors décider dans quelle catégorie d'immigrants devrait avoir lieu cette augmentation.

Ce sont là autant de questions que nous devons nous poser et pour lesquelles je compte recevoir des avis de cette commission. J'estime, quant à moi - et c'est,

d'ailleurs, une idée maîtresse de la politique de notre gouvernement et de notre parti -que la meilleure façon d'attirer chez nous des immigrants et de les retenir chez nous une fois qu'ils sont ici, c'est de travailler à l'établissement d'un Québec socialement juste et économiquement fort. (10 h 30)

L'immigrant, une fois sélectionné, ayant obtenu son visa du gouvernement fédéral, arrive un beau jour à l'aéroport de Mirabel ou de Dorval. Alors, commence une autre des tâches très importantes de mon ministère, celle de l'aider dans son adaptation au Québec. Qu'il soit réfugié ou immigrant investisseur, qu'il soit francophone, anglophone ou allophone, qu'il vienne seul ou qu'il vienne rejoindre sa famille, le nouvel immigrant aura néanmoins, dans tous les cas, besoin d'être aidé, guidé, orienté dans son adaptation au Québec. Bien sûr, les problèmes rencontrés ne seront pas les mêmes, mais il nous appartient, justement, de mettre à la disposition de tous les immigrants qui viennent s'établir chez nous des services adaptés à leur situation.

Au cours des années, le ministère a développé toute une série de programmes et d'actions visant à aider l'immigrant à s'intégrer le plus harmonieusement possible à la société québécoise. Que l'on pense, entre autres, à nos COFI qui ont permis, au cours de la dernière année, à environ 2200 immigrants de bénéficier de cours à temps plein pendant une période de 30 semaines pour apprendre le français. Que l'on songe également à toute la série de cours à temps partiel, de cours intensifs, de cours sur mesure qui, chacun essaie de répondre aux besoins spécifiques de notre clientèle. Pensons également aux services que nous offrons dans le domaine de la traduction et de la reconnaissance des diplômes étrangers, dans le domaine de l'orientation scolaire et professionnelle. Ces services aident nos nouveaux concitoyens à mieux s'orienter sur le marché du travail québécois.

Vous ne serez pas surpris d'apprendre que ce sont les plus démunis de nos nouveaux concitoyens, je veux dire les réfugiés, qui ont requis cette année encore notre plus grande attention. Bien sûr, les services que nous offrons à ces personnes sont beaucoup plus étendus que ceux requis par l'ensemble de la population immigrante. Cette situation me paraît tout à fait normale. Je puis vous assurer que, malgré les compressions budgétaires que nous avons réalisées à l'instar de tous les autres ministères, j'ai veillé à ce que ne soit pas remise en cause la qualité de l'accueil que nous leur réservons.

Cet immigrant que nous avons sélectionné à l'étranger, que nous avons accueilli à l'aéroport et aidé dans ses premiers jours, ses premières semaines, voire même ses premiers mois de vie au Québec, nous le retrouverons très bientôt au sein de l'une de nos nombreuses communautés culturelles qui contribuent tant à la richesse du patrimoine québécois.

Vous êtes certainement tous au courant du recensement des effectifs qui se fait présentement dans tous les ministères de la fonction publique. Ce recensement nous permettra de déterminer précisément combien de membres des communautés culturelles ou des communautés visibles sont actuellement membres de la fonction publique. Tel que l'indique le programme de notre parti, nous verrons, à l'analyse de sondages, à prendre des mesures pour que les communautés culturelles soient mieux réparties, mieux représentées dans la fonction publique.

À ce point de vue, je sais que mon ministère peut servir d'exemple pour les autres, ce qui, d'ailleurs, est assez normal puisque nous avons un pourcentage d'environ 20 % de membres des communautés culturelles. Je ne prétendrai surtout pas que c'est là l'objectif que nous voulons atteindre dans l'ensemble de la fonction publique. Cela serait irréaliste et ce n'est pas l'orientation de notre gouvernement que de faire miroiter aux communautés culturelles des promesses que nous savons ne pouvoir tenir. D'une façon beaucoup plus modeste, mais aussi, je tiens à le souligner, d'une façon beaucoup plus réaliste, nous souhaitons voir leur nombre augmenter et atteindre une représentation significative, tout en visant à long terme une représentation véritablement proportionnelle. Je sais que cet objectif ne sera pas facile à atteindre, mais je m'engage à prendre toutes les mesures, y compris les mesures législatives, pour que nous l'atteignions au cours de notre mandat.

Vous me permettrez, M. le Président, de rappeler l'orientation fondamentale de notre parti et de notre gouvernement envers les communautés culturelles. Nous croyons à la nécessité de faire une meilleure place aux citoyens québécois membres de3 minorités culturelles non seulement par souci de justice à leur égard, mais aussi parce que l'apport actuel de ces citoyens à la vie économique, sociale, culturelle et politique est largement au-dessous de son énorme potentiel.

Nous avons à leur égard la responsabilité impérieuse et urgente d'entreprendre des actions qui auront pour objectifs l'acceptation, l'intégration et la valorisation des minorités culturelles. Pour faciliter l'acceptation de ces citoyens à part entière, il faudra sensibiliser la majorité à la présence des minorités culturelles de manière à modifier progressivement les mentalités. Ainsi, il nous faudra cesser de dire: Nous et les autres, et prendre conscience de l'enrichissement qu'apportent les communautés culturelles à l'économie, à la

culture, à la démographie et au patrimoine du Québec.

Les membres des communautés culturelles, ce ne sont pas les autres Québécois, ce sont tout simplement des Québécois. De plus, il nous faudra veiller à l'intégration de ces concitoyens en leur assurant l'accessibilité à tous les services auxquels ils ont droit. Des actions ont déjà été prises en ce sens dans le passé. Il nous faut voir à les compléter, à les diversifier.

Enfin, il nous faudra prendre les moyens pour assurer la valorisation des communautés culturelles en les aidant à s'intégrer aux secteurs d'activités où elles sont actuellement sous-représentées. Je pense, bien sûr, à des secteurs importants de notre vie collective où se font les véritables choix de société, à l'Assemblée nationale, à la fonction publique, dans les différentes institutions locales et même à Radio-Québec.

M. Godin: Ce n'est pas encore vendu?

Mme Robic: Ce n'est que lorsque nous aurons atteint ces trois objectifs que j'aurai, quant à moi, le sentiment du devoir accompli. Je sais que la tâche ne sera pas facile, que les embûches seront nombreuses, mais les difficultés, pour être grandes, ne m'apparaissent tout de même pas insurmontables. Je compte sur l'appui unanime de cette commission, M. le Président, pour m'aider dans la poursuite de ces objectifs.

Le Président (M. Trudel): Merci, Mme la ministre.

Si M. le député d'Arthabaska peut me laisser céder la parole au député de Mercier.

M. Gérald Godin

M. Godin: M. le Président, Mme la ministre, ainsi que ses collaborateurs que je reconnais en partie, on sait bien que je ne peux que me réjouir à ce bilan dans lequel je reconnais presque les propos qui auraient pu être les miens. Par ailleurs, nous sommes ici pour parler de l'avenir, un peu de ce qui s'en vient et des coupures, qualifiées dans un document du Trésor de votre gouvernement, de "rationalisation interne". Nous aimerions savoir le plus tôt possible où iront ces coupures, - avoir une liste, si possible, des programmes qui ont été ou qui seront coupés, de manière que nous puissions vraiment étudier les crédits de votre ministère.

Mme Robic: On vous donne la liste immédiatement, M. le député de Mercier.

M. Godin: Merci, Mme la ministre. Je reconnais bien là l'efficacité de votre ministère et sa transparence. Je vais donc vous saisir un peu de ce qui nous préoccupe, nous de l'Opposition, face à cette clientèle qui est la vôtre au ministère. D'abord, je constate que, pour ce qui est des réfugiés, de l'aide aux sinistrés, il y a une coupure cette année. Il y a également abolition d'un poste de secrétaire aux réfugiés. La coupure de ce poste a fait grincer des dents le Haut-Commissariat aux Nations Unies pour les réfugiés. Je crois que cela contredit un peu ce que votre discours disait pour ce qui touche à l'accueil du Québec et à sa tradition d'hospitalité. J'aimerais savoir quels sont vraiment les changements que vous voulez faire à cet égard, si ce poste sera occupé par une autre personne ou remplacé par un autre poste équivalent et surtout si l'action que cette personne-là faisait dans le passé va se continuer.

D'autre part, ce qui nous inquiète aussi, c'est la francisation des revendicateurs du statut de réfugié. Ils sont 11 000 au Québec. Nous voudrions savoir quelles mesures le ministère entend prendre pour s'assurer que la francisation sera faite et de quelle manière, car nous savons que ces personnes sont sollicitées présentement par les commissions scolaires anglophones pour grossir les rangs de leurs élèves et que, par conséquent, une telle action des écoles anglaises pourrait tout simplement annuler les effets de la loi 101. Donc, nous aimerions savoir si, à votre connaissance, ces revendicateurs, 11 000 présentement au Québec, vont déjà vers un système scolaire quelconque, français ou anglais, ou si le ministère prend ses responsabilités en s'assurant que la francisation de ces revendicateurs se fait dans les structures du ministère ou ailleurs au Québec.

Quant à ce qui touche M. McLean, votre homologue fédéral, nous aimerions savoir quelle position vous avez prise quant à la revendication traditionnelle du Québec qui était que le Québec soit chargé de ce qui touche les réfugiés au Québec et des prestations qui accompagnent leur établissement au Québec. Nous savons très bien que le fédéral accroche des montants d'argent à des villes généralement peu assimitatrices ou peu intégratrices vers le français, alors que le Québec aurait peut-être intérêt à ce que ces personnes qui viennent ici s'installent à Sherbrooke, à Trois-Rivières ou ailleurs, pour s'assurer que leur intégration à la communauté française se fait de façon rapide. En effet, si on laisse le marché libre pour le choix des cités, des municipalités, on sait très bien que c'est Montréal qui est choisie pour des raisons évidentes et que l'intégration a moins de chance de se faire, à Montréal, vers le français que si elle se faisait à Trois-Rivières ou à Sherbrooke.

Deuxièmement, nous savons aussi que, quand les réfugiés cessent d'aller à Trois-Rivières ou à Sherbrooke, il y a des COFI

qui ferment, il y a des postes de professeurs qui se perdent et, par conséquent, les effets économiques de ces fermetures de COFI dans les régions sont assez importantes pour ces régions-là. Est-ce que votre ministère a une position là-dessus? Si oui, laquelle et est-ce que vous l'avez déjà abordée avec M. McLean quand vous l'avez vu à Ottawa récemment?

Également, pour ce qui touche l'égalité en emploi, vous vous engagez à prendre des mesures législatives, s'il le faut. Nous aimerions savoir d'abord quelle est présentement la définition du ministère de ces personnes. Est-ce qu'il y a une entente, en fin de compte, sur ce qu'est un membre d'une communauté culturelle visible ou non visible, parce que je sais que cela préoccupe le ministère depuis fort longtemps et les ministres qui se succèdent? J'aimerais savoir si vous avez trouvé la quadrature du cercle, parce que je sais qu'à une autre commission, la commission des institutions, nous discutons également cette question, pour savoir quelles personnes au Québec devraient être admissibles à des postes en vertu des règlements d'égalité en emploi. Quelles mesures précises et concrètes allez-vous suggérer à vos collègues pour s'assurer que l'objectif visé par votre gouvernement soit atteint dans le mandat qui a commencé il y a quelques mois?

Voilà les préoccupations que nous avons présentement du côté de l'Opposition, Mme la ministre. J'ai terminé, M. le Président. Je cède la parole à qui la demandera.

Le Président (M. Trudel): Merci, M. le député de Mercier. Est-ce que d'autres membres de la commission auraient des remarques préliminaires à faire? Mme la ministre, voulez-vous exercer...

Mme Robic: Oui.

Le Président (M. Trudel): ...votre droit de réplique tout de suite? On pourrait passer ensuite à l'étude...

Mme Robic: Certainement.

Le Président (M. Trudel): Vous ne voulez pas exercer votre...

Mme Louise Robic (réplique)

Mme Robic: Non, je pense que je peux répondre à certaines des préoccupations du député de Mercier en lui disant que c'est vrai qu'il y a, dans le budget, des coupures dans l'aide aux réfugiés. Mais c'est là, encore une fois, que les chiffres ne disent pas toute la vérité puisque vous savez qu'il y avait eu un transfert des responsabilités et qu'il y avait eu deux fonds de créés, un fonds aux réfugiés et un fonds aux sinistrés.

Nous continuons à administrer le fonds d'aide aux réfugiés et le fonds d'aide aux sinistrés est maintenant la responsabilité du ministère des Relations internationales. Ce montant, qui appartient maintenant au ministère des Relations internationales, représente la coupure chez nous de l'aide aux réfugiés. Il n'y a pas de différence. Nous avons les mêmes montants pour aider ces personnes.

Quant à la personne responsable au ministère, vous avez raison, des compressions budgétaires nous ont forcés à faire une certaine rationalisation de notre personnel, mais je veux, encore une fois, vous rassurer. Ces personnes ne sont pas ignorées. Nous avons, bien au contraire, remis la responsabilité au service... M. Vigneau, rappelez-le-moi.

M. Vigneau (Régis): L'ensemble de la tâche qui est accomplie par la secrétaire déléguée a été remis aux directions qui en sont responsables tant pour l'accueil que pour la sélection. (10 h 45)

Mme Robic: Je suis sûre qu'ils seront aussi bien traités à ce niveau. Nous n'oublions pas l'importance des réfugiés.

Quant au problème des revendicateurs, comme je le disais dans mon discours, c'est un problème qui nous touche de très près. On a fait savoir à M. McLean qu'il fallait absolument trouver des solutions, et des solutions rapides, puisque le problème ne fait que grossir. Je suis heureuse qu'on ait réussi une rencontre du comité mixte après trois ans sans rencontre, également qu'il ait consenti à former un sous-comité où nous allons être consultés à ce niveau. Je pense que c'est un pas très positif, un pas très important qui a été fait.

Vous avez parlé également des revendicateurs et des cours de français. Comme vous le savez, nous avons eu l'an dernier un projet pilote qui nous a démontré que, malgré qu'il y ait eu 1000 personnes inscrites à ce projet pilote, à la mi-chemin nous avions perdu 50 % de nos élèves. Cela est important. Mais, je suis d'accord avec vous pour dire que c'est important qu'on puisse aider ces gens à apprendre la langue. Cela va faire partie de nos discussions avec M. McLean et cela va faire partie d'un mémoire au Conseil des ministres.

J'ai également parlé dans mon discours de législation pour l'égalité en emploi, mais je pense que je parle de l'obligation contractuelle à ce moment-là et vous savez que le ministre de la Justice déposera bientôt un projet de règlement sur l'égalité en emploi. Nous travaillons avec le ministère à ce dossier.

Le Président (M. Trudel): M. le député de Mercier, si vous me le permettez, est-ce que vous entendez procéder à la discussion

programme par programme ou élément par élément ou si vous préférez y aller...

Discussion générale

M. Godin: Non. On pourrait peut-être revenir sur quelques points que la ministre a abordés...

Le Président CM. Trudel): Très bien.

M. Godin: ...quitte à ce que nous passions le plus tût possible, quand vous serez prête, Mme la ministre, à l'adoption, par consentement ou autrement, des programmes que vous soumettez.

Sur la question du projet pilote dans lequel 1000 revendicateurs ont suivi des cours, vous dites que 50 % ont quitté. Est-ce qu'on a fait une analyse pour savoir pourquoi ils avaient quitté ces cours? Est-ce que cela tient à la qualité des cours ou à d'autres facteurs?

Mme Robic: Si vous me le permettez... M. Godin: Oui. Allez-y.

Mme Robic: ...je vais donner la parole à M. Prud'Homme. Peut-être qu'il peut vous donner une meilleure évaluation que moi de la situation.

M. Prud'Homme (Roger): Nous sommes à examiner à l'heure actuelle les raisons qui ont motivé le départ de ces stagiaires qui peuvent être multiples, soit pour des raisons familiales, soit parce qu'à certaines occasions ils se trouvent des emplois plus ou moins connus. Nous sommes à examiner ce qu'il en est pour pouvoir répondre à leurs besoins . éventuellement.

M. Godin: Merci, M. le Président. Je voudrais aussi savoir, dans votre rencontre avec M. le ministre McLean, si la question a été abordée du transfert au Québec d'autres responsabilités qui touchent l'immigration. Puisque, dans le programme de votre parti, vous développez l'idée que le Québec soit plus responsable en ce qui touche l'immigration, est-ce que vous avez abordé la question du transfert d'autres responsabilités concernant l'établissement des réfugiés au Québec, par exemple?

Mme Robic: Vous comprendrez, M. le député de Mercier, que cela va faire partie des ententes constitutionnelles. Je vais laisser mon confrère, M. Rémillard, dresser la liste - peut-être que "demandes" n'est pa3 tout à fait le mot juste - de ses demandes auprès du gouvernement fédéral.

M. Godin: Merci, M. le Président, cela répond à cette question-là.

Puisque vous parlez de la place des nouveaux Québécois, même à Radio-Québec pour reprendre votre expression, pour l'émission Arrimage qui a été sabrée, dans les propositions reçues par lettre, est-ce qu'il y autre chose? Est-ce que d'autres mesures qui ont été prises par vous et votre ministère pour que ce secteur de télévision réservé à nos nouveaux citoyens soit maintenu ou, du moins, soit remplacé par autre chose. Est-ce qu'il y a eu des suites à votre lettre, autrement dit?

Mme Robic: J'ai eu un échange de correspondance avec M. Girard et avec M. French qui m'assurent, justement, que cette partie de la population ne sera pas oubliée dans la programmation de Radio-Québec. On a convenu de continuer la discussion et ils m'assurent qu'il y aura une représentation équitable. Ce qu'elle sera, en ce moment, je ne peux vous le dire, mais je suis le dossier de très près. D'ailleurs, ie ministre des Communications m'assure que je serai mise au courant et consultée.

M. Godin: Dans votre liste, que je vous remercie, de porter à notre connaissance, je vois que, dans le domaine des paiements de transferts, il y a des coupures assez importantes. Ne croyez-vous pas que ces programmes visaient précisément à ce que les communautés culturelles se sentent chez elles au Québec? Si on coupe ces programmes pour lesquels elles se battaient ne croyez-vous pas que leur perception du Québec changera et qu'elles se sentiront moins bien ici qu'avant ces coupures et que, par conséquent, les chiffres très roses que nous voyons seront modifiés dans l'avenir puisque ces programmes correspondaient à des suggestions récoltées parmi les communautés culturelles à l'époque?

Mme Robic: Je m'excuse. Vous parlez exactement de quel programme?

M. Godin: Les paiements de transferts. Par exemple, tout l'art du monde est coupé. Je vois qu'il y a d'autres programmes... Par exemple, Emploi jeunesse a été coupé. Sachant par des renseignements qui me sont venus entre-temps que ces programmes aidaient les communautés culturelles à avoir des emplois pour elles, des emplois permanents ou temporaires pour assurer la vitalité des organismes, il y a peut-être un lien à faire entre le fait qu'on a perdu moins de citoyens l'an passé qu'auparavant parce qu'il y avait précisément une animation, enfin, un dynamisme des communautés culturelles qui tenait en partie au fait qu'elles étaient aidées. Maintenant qu'elles ne le seront plus, est-ce que nous ne risquons pas de revenir à la situation d'avant 1985?

Mme Robic: Je ne le pense pas, M. Godin. Je pense que oui, malheureusement, quand on est en compressions budgétaires, il y a Certaines choses que l'on doit mettre de côté. Ce n'est jamais de gaieté de coeur, vous le comprendrez. J'espère que le dynamisme du ministère va compenser pour les compressions. Vous parlez du programme d'acquisition d'oeuvres d'art, c'est juste. Ce n'est pas un programme qui disparaît. C'est un programme que, pour une année, nous allons suspendre. Je pense que c'est une bonne initiative. J'espère qu'on pourra revoir ce programme dans un avenir rapproché. Quant au programme Emploi jeunesse, c'était un programme précis pour l'Année internationale de la jeunesse et il était prévu que pour cette année il n'aurait qu'un budget de 50 000 $. Les organismes étaient avisés d'avance à ce niveau.

On parle du fonds d'urgence. Les baisses dans le fonds d'urgence représentent la réalité. Ce sont des sommes que nous croyons être adéquates pour répondre aux besoins. On avait peut-être des budgets plus élevés, mais ces budgets n'ont pas servi. Le besoin n'était pas là. On a essayé de prévoir d'après l'expérience passée et d'allouer un montant adéquat.

M. Godin: Je reviens une dernière fois sur la question de l'homologue fédéral. Je comprends que c'est votre collègue du MRI qui va discuter du "package" constitutionnel, d'une part. D'autre part, votre position à vous comme ministre et comme ministère sera-t-elle celle qui était traditionnelle, c'est-à-dire que le Québec veut avoir plus de responsabilités, pas seulement sur la source de la rivière, c'est-à-dire choisir les immigrants dans les pays, mais également ici pour s'assurer que l'implantation se fasse au Québec dans des villes et des régions choisies si possible par le Québec et non plus laissées à la discrétion du fédéral? J'imagine qu'il y aurait des discussions entre chaque ministre et son homologue fédéral. Quelle sera votre position, Mme la ministre de l'Immigration, sur cette question?

Mme Robic: Vous comprendrez que cette position, j'aimerais la faire connaître au Conseil des ministres avant de la dévoiler à cette table.

M. Godin: Quoique nous pourrions peut-être, comme commission, vous donner un appui concret si jamais vous aviez des difficultés à la faire passer. Donc, si on le savait un peu avant, comptez' sur notre appui à tous. Je pense que je parle au nom de mes collègues du gouvernement aussi. Soyez assurée que nous ferons en sorte que vous ne serez pas seule dans le désert si jamais il y avait des difficultés ou des refus. Mais il faudrait quand même le savoir un peu à l'avance pour être sûrs qu'on appuie les bonnes revendications.

Mme Robic: D'accord. Je vous remercie et je me servirai certainement de vos appuis. Cela ne se refuse pas, des appuis. Je vous remercie beaucoup.

M. Godin: Je n'ai pas de question supplémentaire.

Le Président (M. Trudel): Est-ce qu'on est prêt, M. le député de Mercier, à y aller programme par programme?

M. Godin: Oui, nous sommes prêts. Communautés culturelles et immigration

Le Président (M. Trudel): Nous passons au programme 1, Communautés culturelles et immigration. Vous êtes sans doute, M. le député de Mercier, à l'élément 1, Communautés culturelles et services aux immigrants.

M. Godin: Oui.

Le Président (M. Trudel): M. le député de Mercier, la parole est à vous.

M. Godin: Consentement. On accepte cela. Adopté.

Le Président (M. Trudel): Adopté? L'élément 1 du programme 1, Communautés culturelles et services aux immigrants, est adopté.

Toujours dans le programme 1, élément 2, Recrutement et sélection des immigrants. M. le député de Mercier.

M. Godin: Pas de remarque. Consentement, M. le Président. Pas de problème. Adopté.

Le Président (M. Trudel): Consentement également. Donc, l'élément 2 du programme 1, Recrutement et sélection des immigrants, est adopté?

M. Godin: Oui.

Le Président (M. Trudel): Adopté. Élément 3 du programme 1, Direction et gestion interne.

M. Godin: Consentement, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): L'élément 3 du programme 1, Direction et gestion interne, est adopté.

Des voix: Adopté.

M. Godin: Pas de chicane.

Le Président (M. Trudel): Adopté. Le programme 1, Communautés culturelles et immigration, est adopté. Vous êtes bien d'accord, M. le député de Mercier?

M. Godin: Consentement, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): Merci. Le programme 1 est adopté.

Nous passons au programme 2, Conseil des communautés culturelles et de l'immigration. C'est un programme qui ne comporte pas d'élément. Donc, M. le député de Mercier, vous avez la parole sur le programme 2.

Conseil des communautés culturelles et de l'immigration

M. Godin: J'ai dit ce que j'avais à dire tout à l'heure. Consentement, encore une fois.

Le Président (M. Trudel): Donc, le programme 2, Conseil des communautés culturelles et de l'immigration, est adopté.

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Trudel): Adopté. M. le député de Mercier, êtes-vous prêt a adopter l'ensemble des crédits du ministère des Communautés culturelles et de l'Immigration pour l'année 1986-1987?

M. Godin: Oui, mais nous aimerions savoir, concernant le Conseil des communautés culturelles, quel est le plan de travail. Quels sont les objectifs du conseil pour cette année, Mme la ministre?

Mme Robic: Si vous me le permettez, M. le député, je vais passer la parole à la présidente, Mme Westmoreland-Traoré.

Mme Westmoreland-Traoré (Juanita):

Merci. M. le Président, comme c'est la première année du conseil, nous avons mis un accent spécial sur la préparation de certains documents d'instrumentation et de recherche qui nous permettront d'accomplir un travail efficace. Au cours de la première année, nous avons d'abord préparé un programme de consultation dans les différents milieux. Ce programme va nous permettre de constituer une banque sur les recherches qui sont déjà effectuées soit en matière d'immigration, soit en matière de communautés culturelles. On aura ainsi une bibliographie qui tiendra compte à la fois des études réalisées et des études en cours, et nous pourrons de cette façon avoir une certaine multiplication de nos actions en pouvant puiser dans les différents milieux, soit dans le milieu universitaire, soit au niveau d'autres organismes de recherche, comme l'INR5, par exemple, pour stimuler des recherches et pouvoir faire des recommandations significatives.

Nous allons aussi accomplir un programme de consultation et de recherche dans cinq domaines. L'un de ces domaines concerne justement les médias, un autre, l'éducation, un troisième, l'emploi, un quatrième, l'intégration et un cinquième concerne les relations des communautés culturelles avec le commerce et la coopération. Maintenant, ce programme de consultation va nous permettre d'affirmer que nos avis sont représentatifs des actions et des opinions dans le milieu. (11 heures)

Dans une deuxième phase, nous avons un programme de recherche cette année à la lecture duquel on se rend compte que c'est surtout un programme d'élaboration de projets préliminaires de recherche. Nous mettons l'accent sur des recherches pour l'opération annuelle des niveaux d'immigration. Nous faisons une recherche sur le profil statistique des revendicateurs du statut de réfugié présentement au Québec. Ce sont deux recherches importantes en matière d'immigration. Nous avons ensuite une recherche qui concerne les programmes d'accès à l'égalité. Nous avons fait une présentation devant la commission sur le projet de règlement en matière d'accès à l'égalité et nous continuons ces études. Nous faisons une mise au point et une recherche spéciale sur l'obligation contractuelle.

La question des femmes immigrantes nous préoccupe aussi. C'est la raison pour laquelle nous avons élaboré et accompli certains travaux préliminaires sur la femme dans les communautés culturelles et l'institution de parrainage. Il y a des textes à la fois juridiques, réglementaires et certaines questions de mise en oeuvre qui préoccupent le conseil.

Quant aux investisseurs, le conseil entend faire une étude sur la participation des entrepreneurs des communautés culturelles. C'est une étude que nous désirons mener en collaboration avec le ministère parce que nous sommes conscients que celui-ci a déjà fait certaines études à ce sujet-là. L'étude que nous entreprenons ne concerne pas uniquement les immigrants investisseurs mais les entrepreneurs des communautés culturelles en général.

Nous avons d'autres éléments dans notre liste de priorités, mais cela vous donne peut-être une idée du programme que nous entreprenons. Nous le souhaitons réaliste dans un premier temps.

Le Président (M. Trudel): Merci, Mme la présidente du Conseil des communautés

culturelles.

M. le député de Mercier, avez-vous d'autres questions sur le programme 2?

Les femmes immigrantes

M. Godin: Oui. Pour revenir sur un point, celui de la femme immigrante, Mme la ministre, quelles sont les priorités du ministère ou de la ministre pour l'année qui commence avec votre budget?

Mme Robic: Vous savez d'ailleurs que la femme immigrante constitue un de mes dossiers prioritaires. Nous allons avoir le dépôt d'un programme triennal à ce sujet qui sera remis au ministre de la Condition féminine. Il nous fera plaisir d'ailleurs d'en faire parvenir une copie à cette commission. Il y aura plusieurs choses de suggérées et, une fois le dépôt fait et les recommandations acceptées, nous nous mettrons en marche pour essayer de faire l'implantation de ces recommandations.

M. Godin: Je voudrais savoir plus précisément les priorités de la ministre. Je comprends que vous remettrez un document et je m'en réjouis, mais qu'y aura-t-il dans ce document, si c'est possible?

Mme Robic: Ce document est présentement au stade de finition. Je ne voudrais pas dévoiler ici des choses, je vais laisser les gens le faire.

M. Godin: Donc, on devra lire la presse pour savoir...

Mme Robic: Oui.

M. Godin: On a vu dans la presse déjà quelques engagements,

Mme Robic: C'est cela. C'est sûr que je peux en mentionner une parce que je l'ai dit souvent, l'accessibilité aux cours de français pour les femmes, c'est pour moi une priorité. On doit les aider, c'est quelque chose dans mes rencontres... Vous savez que je me promène un peu partout, je rencontre des groupes différents, entre autres, des groupes de femmes, de maisons de femmes et ce qui revient souvent, c'est ce problème de la femme immigrante qui n'a pas le droit aux cours de COFI. C'est une chose à laquelle je voudrais m'intéresser tout particulièrement et c'est un autre sujet de discussion avec mon homologue fédéral.

M. Godin: Est-ce que je comprends donc que les maisons de femmes immigrantes seront une des priorités de votre ministère pour l'année qui vient?

Mme Robic: Certainement. J'ai vu des choses extraordinaires qui se font là. Si on peut améliorer et les aider, on le fera certainement avec grand plaisir.

M. Godin: Est-ce qu'il y a des points du budget de votre ministère qui portent précisément là-dessus? Est-ce qu'on pourrait voir les chiffres concrets et précis, puisqu'il s'agit ici de crédits et non pas de paroles verbales uniquement?

Mme Robic: D'ailleurs, il y a les subventions qu'on peut accorder. Vous comprendrez que je ne suis là que depuis quelques mois. Nous avons eu plusieurs choses à voir, tout était nouveau pour moi. J'aimerais avoir la chance de regarder tous ces programmes pour voir ceux qui sont les plus efficaces et peut-être faire des petits ajustements pour m'assurer précisément qu'on n'ignore pas une partie importante de notre immigration, la femme qui a besoin d'aide.

M. Godin: Est-ce que je conclus qu'il y a un programme dans votre budget qui est présentement étudié au Trésor et ailleurs et qui portera sur le financement des maisons pour la femme immigrante au Québec?

Mme Robic: Je pense qu'il y a déjà en place de ces maisons. J'ai d'ailleurs rencontré des femmes de ces maisons qui m'ont fait certaines remarques, certaines recommandations. Je vais demander à mon ministère de regarder cela et, dans cette optique, nous pourrons certainement endosser certaines de ces recommandations.

M. Godin: Avez-vou3 une idée du montant que vous y consacrerez?

Mme Robic: Non. Je vous avoue qu'en ce moment je ne pourrais pas vous donner les chiffres exacts du montant qu'on y consacrera.

M. Godin: Mais, dans la mesure où il y a des coupures dans d'autres programmes, il devrait y avoir des transferts d'un programme à un autre. Peut-on savoir ici, à l'étude des crédits, quel programme vous allez réduire, combien de programmes comme l'Art du monde seront coupés pour financer ces maisons? On veut savoir, au fond, dans quoi on s'embarque comme année financière, ici, aux crédits.

Mme Robic: Vous avez raison de poser la question. J'aimerais pouvoir vous donner la réponse aujourd'hui et je ne peux pas vous la donner. Je me suis réservé justement le droit dans le budget... J'ai pris un budget global qu'on a alloué et vous avez la répartition, mais je me donne un temps de réflexion avec les fonctionnaires du ministère pour pouvoir, à un certain moment, faire certains

vases communicants. Je veux vous assurer cependant que ma priorité, c'est de ne pas réduire la qualité des services que l'on donne aux immigrants.

M. Godin: Ce n'est pas une réponse qui...

Mme Robic: La qualité des services, cela ne dépend pas nécessairement des montants d'argent.

M. Godin: On le sait très bien, sauf que, parfois, cela peut être le coup de pouce qui permet à l'organisme de se doter d'un service. On sait bien que l'argent n'est pas tout, mais, connaissant un peu les gens du milieu et surtout sachant ce qu'ils me disent depuis le 2 décembre... Ils disent précisément qu'il y a beaucoup de paroles verbales, mais très peu de gestes concrets, c'est-à-dire de coups de pouce réels, j'entends financiers, donc en capital, qui leur permettraient de passer des paroles aux actes, Mme la ministre.

Mme Robic: Certainement. Vous comprendrez, M. Godin, que quand je suis arrivée le 2 décembre plusieurs des montants avaient déjà été distribués. Je ne pouvais certainement pas faire de grandes actions à ce moment-là mais, si, aujourd'hui, vous approuvez mon budget, cela me fera grand plaisir de passer à l'action.

Le Président (M. Trudel): M. le député de Viger, vous aviez demandé la parole.

M. Maciocia: Pour enchaîner avec la question du député de Mercier, je crois que Mme la ministre devrait garder des réserves aussi en regardant les demandes qui sont faites au ministère. Je crois que Mme la ministre va se laisser une certaine marge de manoeuvre parce qu'elle ne peut pas prévoir, en réalité, dans quel domaine, quel organisme et qui va faire ces demandes. Je crois vraiment que Mme la ministre devrait avoir cette possibilité de voir de quelle manière les organismes vont faire des demandes et établir ses priorités à ce sujet.

M. Godin: Mme la ministre dit qu'en arrivant au ministère il y avait peu de fonds disponibles.

Mme Robic: C'était la fin de l'année.

L'égalité en emploi

M. Godin: C'est peut-être ce qui explique qu'on a perdu moins de gens en 1985 que depuis 20 ans. Je reviens sur un autre point qui est important, l'égalité en emploi. Mme la ministre, j'aimerais savoir de façon plus concrète, encore une fois, et plu3 précise de quelle manière vous allez suggérer à votre collègue de la Justice d'arriver à un résultat, que vous établissez vous-même, à une proportionnalité du nombre de personnes dans la fonction publique par rapport à ce qu'ils sont réellement au Québec. Encore une fois, au-delà des voeux pieux - les voeux pieux, tout le monde est d'accord avec cela, on peut tous en faire - quels sont les moyens concrets, parce que, au fond, c'est ce qui m'intéresse ici, ce matin, après avoir été six ans chez vous... On a eu beaucoup de voeux pieux nous aussi et on a cherché des moyens concrets de parvenir à un objectif.... Maintenant, à votre ministère, avec le programme de votre parti qui a été élu le 2 décembre, concrètement, qu'est-ce que vous allez faire pour que le conseil soit satisfait des résultats dans quatre ans ou dans trois ans?

Mme Robic: C'est sûr que, quand on gèle des postes, ce n'est pas facile d'atteindre certains objectifs. C'est pour cela que je vous parle de long terme et non pas de court terme. Mais, en parlant de gestes concrets, je pense qu'on en a posé un certain nombre. Si vous regardez la composition des comités qu'on a formés depuis le début, je pense qu'il y a eu une volonté politique des membres du Conseil des ministres de s'assurer qu'il y ait une représentation dans tous ces organismes. C'est un début. C'est très peu, je vous l'accorde. Nous allons continuer dans ce sens. Je sens l'appui de mes collègues dans ce domaine.

Mais il y a également un changement de mentalité qu'il faut susciter au Québec. Il y a un discours qu'il faut tenir au niveau, non seulement du gouvernement, mais de l'industrie privée. Peut-être qu'à ce moment-là, en tenant un genre de discours, en faisant découvrir à la population les qualités et les compétences de ces personnes, on pourra faire un bout de chemin dans ce domaine.

M. Godin: Mme la ministre, le conseil vous a remis, a remis au ministère, il y a quelques mois, un avis précisément au sujet de l'égalité en emploi avec des revendications très précises. Vous en avez pris connaissance. Quelle est votre position là-dessus, point par point, s'il y a moyen?

Mme Robic: II faudrait que j'aie le document devant moi. Je vous avoue que... J'attendais le dépôt du projet de règlement du ministre de la Justice et je m'attendais à m'asseoir avec ce groupe; c'est à ce moment, encore une fois, que l'on pourra présenter un projet et que ce projet touchera les communautés culturelles.

M. Godin: Est-ce que les revendications du conseil des communautés ont été

intégrées à l'avis du ministère ou du ministre fait au ministre de la Justice?

Mme Robic: Je m'excuse.

M. Godin: Est-ce que Ie3 revendications du conseil des communautés, qui ont été présentées à la commission sur l'égalité en emploi, ont été intégrées à vos revendications faites à votre collègue de la Justice?

Mme Robic: Cela a été remis à mon collègue de la Justice, oui.

M. Godin: Est-ce que le "contract compliance", l'engagement contractuel, à l'heure actuelle, fait partie de votre manière d'envisager une solution à ce problème?

Mme Robic: Certainement que je ne le mets pas de côté. C'est peut-être une solution qu'on aura à envisager sérieusement.

M. Godin: Est-ce que vous la partagez ou si vous croyez que c'est un moyen parmi d'autres d'y parvenir?

Mme Robic: C'est un moyen parmi d'autres. C'est peut-être le seul moyen, mais je suis certainement ouverte à la discussion. Peut-être que la commission pourra nous faire des recommandations également à ce sujet.

M. Godin: Donc, on peut conclure que l'engagement contractuel fait partie des moyens que vous envisagez, Mme la ministre, pour parvenir à l'objectif que visent et le conseil et le programme du Parti libéral.

Mme Robic: Certainement.

M. Godin: Et maintenant du gouvernement.

Mme Robic: Certainement.

M. Godin: On n'en a pas plus que cela pour l'instant.

Mme Robic: On n'écarte aucun moyen.

M. Godin: Maintenant, la question que je posais au début, c'était de savoir quels critères vous avez retenus pour déterminer qu'une personne devait bénéficier de tel programme ou non. Quels sont vos critères au ministère pour déterminer si une personne fait partie d'un groupe visé par le programme ou non?

Le Président (M. Trudel): Vous comprendrez, M. Godin, que le comité du ministère de la Justice n'a pas fini de travailler dans ce domaine. Alors, cela serait prématuré pour moi de m'avancer et de vous donner certains de ces critères.

M. Godin: Est-ce que le ministère de la Justice va devoir se pencher vers votre ministère...

Mme Robic: Certainement.

M. Godin: ...pour avoir votre opinion et votre expertise? Est-ce qu'on peut savoir ici, dans cette commission, quels critères vous allez suggérer au ministère de la Justice pour que les programmes visent les personnes qui devraient y avoir droit?

Mme Robic: Encore une fois, je pense que c'est une série de discussions qui vont avoir lieu à l'intérieur de mon ministère et avec le comité du ministère de la Justice.

M. Godin: On parlait d'un programme triennal, Mme la ministre, pour ce qui touche l'égalité en emploi. Est-ce qu'on peut en savoir plus sur ce programme?

Mme Robic: Non. C'est un programme triennal qui touche la femme immigrante. Cela touche plusieurs sujets, entre autres, on travaille... L'égalité en emploi, cela touche les femmes, mais cela touche tous les membres des communautés culturelles. On le regarde en ce sens.

M. Godin: Dans le programme triennal dont vous parlez...

Mme Robic: Cela touche à la femme immigrante. (11 h 15)

M. Godin: Qu'est-ce que vous allez inclure dans ce programme triennal de manière que mes collègues de la commission' et moi sachions un peu ce vers quoi on s'en va?

Mme Robic: Comme je vous le disais, dès qu'il sera déposé, cela nous fera plaisir d'en faire parvenir une copie aux membres de cette commission.

M. Godin: Vous, personnellement, vous n'avez pas encore fait votre lit par rapport à ce que devrait contenir ce programme triennal.

Mme Robic: Je vous avoue que ce que je vois me plaît beaucoup et cadre très bien avec le programme de notre parti.

M. Godin: Ce que vous voyez dans votre tête ou dans le programme qui s'en vient? Dans votre esprit à vous ou dans le texte qui s'en vient? Vous me dites que ce que vous voyez vous plaît beaucoup. Ce que vous voyez où?

Mme Robic: II y a des personnes qui travaillent dans ce domaine en ce moment. Ce n'est pas moi qui prépare le document. À mesure qu'on avance... Voyez-vous, cela paie d'avoir des experts ici. On me dit: Les thèmes qui seront abordés dans le document seront l'apprentissage du français, l'accessibilité a l'information, les conditions de travail et la formation des adultes, l'accessibilité aux programmes de santé de même qu'aux services sociaux et communautaires, les lois et règlements de l'immigration ou autres et l'incitation" et le soutien à la présence des femmes immigrées dans la structure de la société d'accueil. Vous voyez que c'est pas mal complet. Il y a plusieurs sujets. À mesure qu'on avance dans la préparation, comme je vous dis, je suis d'accord avec ce que je vois et ça me plaît de voir le sérieux du travail qui est fait.

M. Godin: Nous savons que les femmes immigrées au Québec occupent des emplois souvent au salaire minimum et des emplois peu rémunérés et peu satisfaisants. Elles sont dans des ghettos d'emplois féminins, je veux dire des sous-ghettos. Est-ce que votre ministère a des idées pour sortir ce groupe de personnes de ces ghettos d'emplois et de sous-salaires?

Mme Robïc: C'est vrai que ces femmes subissent de grandes injustices quand elles travaillent dans certaines catégories d'emploi et, parce qu'elles ne connaissent pas la langue, elles sont absolument démunies, elles ne peuvent pas s'aider elles-mêmes à se sortir de ces ghettos. Certainement qu'il va falloir se pencher sérieusement sur ce problème et trouver des solutions qui ne sont pas faciles, je pense que vous êtes bien placé pour le réaliser parce que je suis sûre que vous avez certainement dû essayer d'aider ces femmes. C'est là peut-être que j'aurai besoin de votre appui quand il s'agira de s'assurer que ces femmes peuvent connaître leurs droits et là il faudrait leur faire connaître leurs droits dans leur langue parce qu'elles ne connaissent pas d'autres choses.

Il faudrait peut-être penser à un affichage à l'intérieur de certaines compagnies où les femmes pourraient au moins connaître leurs droits dans leur langue et donner une information qui puisse les aider. À ce niveau, j'aurai un peu besoin de votre aide, M. Godin.

M. Godin: Quand vous dites, madame, que vous allez vous pencher sur le dossier, pensez-vous que les femmes immigrantes vont se réjouir de tels engagements, que vous allez vous pencher sur le dossier, suivre le dossier? Vous allez donc vous pencher sur un tas de dossiers pendant l'année en cours? Attention aux maux de dos, aux maux de reins. Nous aimerions que ce soit plus concret, Mme la ministre, et que nous sachions ici en commission, qui est la seule occasion de l'année de se rencontrer, vous la ministre et nous les membres de la commission et du gouvernement, ce que vous entendez faire pour que ces problèmes se règlent, l'égalité dans l'emploi, d'une part, et, d'autre part, la sortie des ghettos d'emplois dits féminins sous-payés pour les femmes immigrantes.

Mme Robic: Vous comprendrez, M. Godin, que, si dans six ans vous n'avez pas réussi à régler tous les problèmes, vous ne pouvez pas vous attendre que dans quatre mois je vais vous donner toutes les solutions à ces problèmes. Je vous assure que non on ne perdra pas des années à faire des rapports et des études. Il y a le document sur la femme immigrante qui est sur le point d'être déposé. J'ai déjà donné instruction pour que tout de suite on puisse mettre en marche certaines mesures concrètes. On ne fera pas tout du jour au lendemain, mais certainement que nous allons faire des actions; celles qui peuvent être prises immédiatement seront prises immédiatement.

M. Godin: Quant aux six ans, je peux vous dire, pour l'avoir vécu, que le 2 décembre le peuple du Québec a congédié l'ancien gouvernement et, sur la foi des programmes de votre parti et des engagements écrits dans les journaux et ailleurs, vous a confié le mandat de régler les problèmes qu'il vivait.

Mme Robic: Mais pas le 3 décembre.

M. Godin: Nous ne sommes plus le 3 décembre; nous sommes " maintenant le 23 avril bientôt le 1er mai, pour les travailleurs et travailleuses du Québec. Après ces quelques mois et, surtout, après huit ans dans l'Opposition à méditer et à réfléchir sur ce que le Québec vivait comme problèmes et après avoir livré au Québec des engagements précis imprimés dans les journaux ethniques et autres, nous trouvons que cela a peu évolué comme réflexion depuis la victoire de votre parti, devenu le gouvernement le 2 décembre. Nous sommes déçus - personnellement, j'en parle à titre de membre de l'Opposition - de voir qu'il n'y a rien de nouveau qui se fait depuis que vous êtes là et que tout ce qu'on a comme engagement, c'est de se pencher sur la question, de suivre les dossiers et, au fond, de laisser filer la rivière comme elle allait avant, à peu de chose près. Donc, où est le gain pour les femmes immigrantes d'avoir changé de gouvernement le 2 décembre dernier?

M. Maciocia: Si vous permettez, Mme la ministre, je comprends très bien que,

depuis le 2 décembre, cela fait quatre mois qu'on est là et que le gouvernement... Vous avez dit que la population vous a rejetés le 2 décembre justement en acceptant le programme du Parti libéral. Il faut dire que la population vous a donné neuf ans pour essayer de résoudre ces problèmes. Vous comprendrez qu'il faut au moins laisser le temps à la ministre d'essayer de les résoudre. Il y a seulement quatre mois qu'on a été élus. Alors, vous comprendrez qu'on a quand même quatre ans et probablement plus, parce que, constitutionnellement, on a cinq ans, vous le savez très bien, vous l'avez déjà vécu, plus de quatre ans, quatre ans et demi pour chaque mandat... Alors, vous comprendrez qu'on devrait donner ce temps-là à la ministre pour faire valoir le programme du parti et faire en sorte que la population nous réélise la prochaine fois justement parce qu'on aura tenu nos engagements à son endroit.

M. Godin: M. le Président, je pense que cela ne fait pas quatre mois; cela fait huit ans et quatre mois, bientôt dix ans.

M. Maciocia: On était dans l'Opposition.

M. Godin: Oui, mais dans l'Opposition, justement, on a le temps de réfléchir et de regarder ce que les clientèles des ministères souhaitent et veulent. On voit les problèmes de façon plus objective peut-être. Nous avions l'espoir que dans cette commission de l'étude des crédits nous aurions à nous mettre sous la dent des choses beaucoup plus consistantes - Mme la ministre, je m'excuse de vous le répéter - que ce que nous avons ce matin qui ne sont que, je le répète, des paroles verbales, ce qu'on appelle en anglais "jobbering". Nous espérions qu'au moins les engagements de votre parti dans la campagne électorale auraient des suites concrètes rapidement. Ce matin était l'occasion pour nous de vérifier si, effectivement, après huit ans au purgatoire, le Parti libéral avait réfléchi aux problèmes vécus par les femmes immigrantes, en particulier sur la question de l'égalité en emploi qui était une promesse concrète et formelle, et s'était demandé quels moyens concrets, quels chemins concrets, précis et palpables seraient présentés aux citoyennes du Québec. Je suis déçu et je pense que je ne serai pas le seul.

Mme Robic: Alors, j'espère que votre déception ne durera pas trop longtemps et qu'on pourra poser des gestes concrets très bientôt. Cela ne veut pas dire, parce que vous n'avez rien vu d'éclatant, parce qu'on n'a pas fait les premières pages des journaux, qu'on ne fait rien. On fait beaucoup. Vous comprendrez qu'il y a des problèmes complexes. Moi, le 2 décembre, je ne savais pas que je serais la ministre des

Communautés culturelles et de l'Immigration. Donc, je n'avais pas étudié le dossier. Il a fallu que je l'étudié, que je me donne le temps. Personne ne va me forcer la main à prendre des décisions rapides. Bien au contraire, j'ai l'intention de connaître et de saisir très bien mes dossiers pour, précisément, pouvoir mettre en oeuvre les programmes du Parti libéral auxquels je crois. On n'a jamais dit à la population du Québec que ces programmes seraient mis en place le 3 décembre. Plusieurs seront mis en place au cours de notre premier mandat. À ce moment-là, la population pourra voir que ce n'étaient pas seulement des paroles mais que c'étaient des actions. Vous savez qu'avant les actions il faut s'assurer qu'on prend les bonnes mesures pour arriver à établir nos programmes d'une façon solide et réaliste.

Le Président (M. Trudel): Merci, Mme la ministre. M. le député de Mercier.

M. Godin: Pas d'autres commentaires pour l'instant.

Le Président (M. Trudel): Est-ce que vous jugez que vous êtes en mesure d'adopter pour la deuxième fois le programme 2? Je ferais remarquer qu'on l'a déjà adopté et que j'ai quand même laissé la discussion se poursuivre.

M. Godin: Une dernière question, Mme la ministre, pourquoi le programme Tout l'art du monde, parmi d'autres programmes qu'il y avait au ministère, pourquoi celui-là en particulier?

Mme Robic: Parce que, malgré que c'est un bon programme, je vous en félicite, c'est peut-être là où cela faisait le moins mal. Vous avez parlé de qualité de services tout à l'heure, et alors 50 000 $ dans l'accueil et l'adaptation c'était plus important à conserver. Et je pouvais très bien dire qu'on pouvait sauter une année dans ce programme et, si, l'année prochaine, nos budgets nous le permettent, le remettre sans endommager la qualité de nos services pour lesquels, dans le fond, nous existons, le service à l'adaptation, à l'accueil et le service aux communautés culturelles.

M. Godin: En formation linguistique, Mme la ministre, il y a une coupure de 3 % du nombre de jours; peut-on savoir pourquoi vous coupez de 3 %? La formation linguistique, l'entente fédérale provinciale. Est-ce que vous prévoyez une baisse du nombre des clients?

Mme Robic: Encore en se fiant à ce qui s'est passé l'année dernière, nous avons réalisé qu'on pouvait diminuer sensiblement

le nombre d'heures sans pour cela priver qui que ce soit des cours des COFI.

M. Godin: Quant aux revendicateurs du statut de réfugié, Mme la ministre, quel est la position du ministère face au rapport du rabbin Plaut? Est-ce que le ministère aura un document, un mémoire là-dessus à soumettre au fédéral, une position officielle du ministère pour l'appuyer ou nuancer ou modifier en profondeur ou autrement la recommandation du rabbin Plaut?

Mme Robic: Je pense que vous en aviez fait l'étude au moment où vous étiez en poste si je ne me trompe pas.

M. Godin: Effectivement, c'était à l'époque. Qu'est-ce que c'est devenu justement? Ma question est précisément celle-là, qu'est-ce que c'est devenu depuis le nouvel Eden qui a commencé le 2 décembre paraît-il?

Mme Rabic: C'est certainement, on pense, un rapport important et c'est également ce genre de rapport qui va faire partie de toutes nos discussions avec mon homologue fédéral et en comité d'ailleurs.

M. Godin: Quelle est votre position, à vous en tant que ministre, sur ce rapport et sur le mémoire du ministère?

Mme Robic: Comme je vous l'ai dit, je commence à donner mon opinion en comité et en commission, et après je vous reviendrai sur la place publique.

M. Godin: Donc, il faudra suivre vos conférences de presse plutôt que votre commission parlementaire, si je comprends bien.

On propose l'adoption des crédits du ministère, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): Est-ce que vous êtes prêt à adopter l'ensemble des crédits du ministère, M. le député de Mercier?

M. Godin: Oui, M. le Président.

Adoption des crédits

Le Président (M. Trudel): L'ensemble des crédits du ministère des Communautés culturelles et de l'Immigration est-il adopté?

M. Maciocia: Adopté.

Le Président (M. Trudel): Mme la ministre, en vous remerciant de votre comparution devant nous ce matin et en remerciant les membres de la commission pour le ton serein et rapide, je dois dire, avec lequel la discussion s'est déroulée, j'ajourne les travaux de la commission sine die.

M. Godin: M. le Président, un dernier mot, si vous le permettez.

Le Préaident (M. Trudel): M. le député de Mercier.

M. Godin: D'abord, je voudrais remercier Mme la ministre de nous remettre une liste ventilée de ses coupures; c'est une tradition qui devrait être maintenue dans l'avenir. Deuxièmement, nous souhaitons, en terminant, que nous passions du stade des engagements, des promesses et des paroles verbales à celui plus concret des engagements formels de la ministre et du ministère pour que les problèmes déjà mentionnés soient résolus pour les femmes immigrantes et pour l'égalité en emploi des groupes ethniques au Québec. Je vous avoue que, pour l'instant, nous avons peu à nous mettre sous la dent et surtout peu de progrès à dévoiler aux clientèles du ministère, que cette commission attendait avec impatience. Je pense que, malheureusement, ils auront peu à se mettre sous la dent, eux aussi, par rapport aux progrès qui devraient se concrétiser le plus tôt possible, je le souhaite et je l'espère, sinon, nous vous reverrons peut-être dans des termes moins gentils, polis et bon chic, bon genre.

Mme Robic: M. Godin, j'ai la réputation d'avoir été une femme d'action; je vais essayer de conserver cette réputation à l'intérieur de mon ministère.

Le Président (M. Trudel): Merci, Mme la ministre. M. le député de Mercier. Les travaux de la commission sont ajournés sine die.

(Fin de la séance à 11 h 31)

Document(s) associé(s) à la séance