L'utilisation du calendrier requiert que Javascript soit activé dans votre navigateur.
Pour plus de renseignements

Accueil > Travaux parlementaires > Travaux des commissions > Journal des débats de la Commission de la culture

Recherche avancée dans la section Travaux parlementaires

La date de début doit précéder la date de fin.

Liens Ignorer la navigationJournal des débats de la Commission de la culture

Version finale

33e législature, 1re session
(16 décembre 1985 au 8 mars 1988)

Le lundi 2 juin 1986 - Vol. 29 N° 14

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude détaillée du projet de loi 61 - Loi modifiant la Loi sur la Société de radiotélévision du Québec


Journal des débats

 

(Quinze heures trente-trois minutes)

Le Président (M. Trudel): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission de la culture reprend ses travaux et procède à l'étude détaillée du projet de loi 61, Loi modifiant la Loi sur la Société de radiotélévision du Québec. Quand nous nous sommes quittés... J'y renviendrai tantôt. Je vais d'abord m'enquérir des remplacements.

La Secrétaire: M. Brassard (Lac-Saint-Jean) remplace M. Godin (Mercier) et M. Cannon (La Peltrie) remplace M. Maciocia (Viger).

Le Président (M. Trudel): Vous avez les remplaçants. Nous avons quorum. Nous pouvons donc déclarer la séance ouverte. Je rappellerais que, quand nous nous sommes quittés, jeudi soir dernier à 22 heures, le député de Lac-Saint-Jean nous entretenait de la nécessité de faire comparaître la Fédération nationale des communications de la CSN et je lui avais dit qu'il lui resterait, à la reprise des travaux aujourd'hui, quatre minutes.

M. le député de Lac-Saint-Jean, je vous cède la parole pour quatre minutes.

Reprise du débat sur la motion

proposant la tenue d'une consultation

particulière avec la FNC

M. Brassard: M. le Président, quatre minutes, c'est évidemment très peu pour parler d'une des fédérations les plus importantes de la CSN. Je pense qu'on comprend facilement la nécessité d'entendre cette fédération puisqu'elle regroupe des travailleurs qui sont directement concernés par tout le secteur des communications. Il arrive que les employés de Radio-Québec sont affiliés à cette fédération. Par conséquent, ce serait là, à tout le moins, l'occasion ou la possibilité de permettre aux travailleurs syndiqués de la société Radio-Québec de se faire entendre, d'exprimer leur point de vue sur un dossier qui les concerne directement, au plus haut chef.

Je considère, cependant, que la venue de la Fédération nationale des communications de la CSN ne constitue pas, à mon point de vue, un témoignage complet et suffisant. Il faudrait sans doute examiner la possibilité d'en ajouter d'autres de façon que ces audiences particulières qu'on souhaite voir se tenir permettent à plusieurs intervenants dans le domaine de se faire entendre des membres de cette commission. D'autant plus que ce que se prépare à faire le ministre des Communications concernant Radio-Québec - je pense, en particulier, à l'abolition de la régionalisation, à ia fermeture de quatre bureaux dans quatre régions du Québec - ce qu'il s'apprête à faire, ce qu'il a l'intention de faire, vous en conviendrez avec moi, a des effets négatifs sur l'emploi à Radio-Québec. Ce n'est un secret pour personne, puisque le ministre et le P.-D.G. de Radio-Québec ont déjà indiqué que cette opération, ce bouleversement des structures, cette fermeture de bureaux régionaux entraînerait des pertes d'emplois et des mises à pied. Par conséquent, il m'apparaît essentiel dans les circonstances que ceux-là mêmes qui seront touchés par ces mesures, par ces mises à pied, par le biais, bien sûr, de l'organisme syndical qui les représente, puissent se faire entendre. Cela m'apparaîtrait tout à fait normal, légitime et plus que souhaitable.

C'est pour cette raison que j'ai présenté cette motion pour que la Fédération nationale des communications de la CSN puisse témoigner devant cette commission, de façon à mettre en lumière les effets et les impacts négatifs en termes de perte d'emplois des mesures qu'entend prendre le ministre concernant Radio-Québec. Ce n'est pas le seul aspect négatif de ces bouleversements faits par le ministre, mais c'est sans aucun doute un des éléments les plus néfastes puisqu'il touche directement des salariés de l'entreprise. Alors, pour cette raison, j'espère que mes collègues vont appuyer cette motion et faire en sorte que cette audition particulière de la Fédération nationale des communications puisse se tenir. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): Merci, M. le député de Lac-Saint-Jean. Je dois dire que j'admire votre profond respect du temps qui vous a été imparti. Vous l'avez fait en 3 minutes et 59 secondes.

M. Brassard: Très respectueux.

Le Président (M. Trudel): Est-ce qu'il y a d'autres membres de la commission qui veulent s'exprimer sur la motion d'amendement du député de Lac-Saint-Jean?

Mme la députée de Johnson.

Mme Juneau: Merci beaucoup, M. le Président. Si j'interviens en faveur de l'acceptation par votre formation politique, de l'acceptation par votre ministre responsable de recevoir à cette commission parlementaire la fédération nationale de la CSN, c'est pour beaucoup de raisons, M. le ministre. Premièrement, vous vous souvenez qu'en Chambre, il y a à peine quelques jours, je déposais une pétition signée par 453 employés membres d'associations semblables dans tous les syndicats. Vous souvenez-vous de cela, M. le Président? Toutes ces personnes faisant partie de ce même syndicat souhaitaient à tout prix que le ministre se rende compte de l'importance d'aller de l'avant avec son engagement électoral, son engagement personnel et celui de sa formation politique, d'aller de l'avant, dis-je, avec ce qu'il avait consenti pour gagner le vote des Québécois le 2 décembre. Il reprend sa parole. C'est vraiment triste de penser que le ministre, que j'ai toujours connu comme un homme de parole, un homme d'une extrême délicatesse envers ses semblables, puisse changer aussi rapidement. Je dirais qu'il a fait un virage à 90 degrés; tout à coup, parce qu'on lui a imputé des responsabilités en matière de communications, le ministre reprend sa parole.

C'est aberrant de savoir que le ministre ne pourra vraisemblablement pas ou ne veut pas ou se voit contraint è ne pas accepter que la fédération de la CSN vienne nous éclairer sur certaines facettes extrêmement importantes de Radio-Québec. Entre autres, M. le ministre, les facettes importantes sur lesquelles ces syndicats veulent venir informer ou éclairer le ministre sont, d'une part, l'importance de la coupure de 8 000 000 $ par rapport à un budget de 61 000 000 $, parce que ces gens trouvent que le très petit budget qu'ils recevaient était justifié.

Si, éventuellement, on finissait par comprendre ou admettre que le ministre ne pouvait faire autrement que faire appliquer sa coupure de 8 000 000 $, soit 13 % du budget, je pense qu'il serait tout à l'avantage du ministre de pouvoir écouter ces gens, parce qu'on aimerait bien avoir des réponses concernant les employés faisant partie de cette fédération, premièrement dans les neuf régions du Québec, mais spécifiquement dans les quatre régions qui doivent être coupées ou rayées de la "map". Appelez-les comme vous voulez. De toute façon, ces quatre régions vont disparaître et j'ai ouï-dire - je ne sais pas si c'est confirmé - qu'on a même eu des dates auxquelles le ministre s'apprêtait à poser certaines actions concrètes qui vont être vraiment le mot de la fin pour ces quatre régions du Québec.

J'ai, à quelques reprises, personnellement posé des questions au ministre en Chambre et lors de l'interpellation, et je pense que le ministre, même en conférence de presse, n'a pas été capable de renseigner la population sur l'état des conventions collectives qui jouent en ce moment pour ces employés. Je me souviens très bien aussi que le ministre a parlé d'une centaine de mises à pied probablement.

Mais le ministre sait pourtant que ces mises à pied touchent des gens faisant partie d'une fédération ou d'un syndicat protégé. Donc, ces employés doivent être localisés ou il faudra toucher à leurs conventions collectives. Je ne sais pas si le ministre a pensé de quelle façon il va intervenir dans les conventions collectives de ces employés. Je pense que le ministre va peut-être avoir des surprises lorsqu'il commencera à toucher aux conventions collectives des syndicats de la fédération de la CSN. Je ne suis pas sûre que le ministre va être en mesure de réaliser la compression qu'il s'apprête à faire, parce qu'il y a des choses à respecter. Je ne sais pas, non plus, si le ministre a pensé au fait qu'à cause des baux qui sont déjà signés par ces quatre stations régionales qui doivent disparaître il y aurait également des coûts pour des bris de contrats.

Je pense qu'en ce qui a trait à tout cela, le ministre aurait eu avantage à recevoir, ici, en commission parlementaire les différentes associations et fédérations dont on lui a fait mention à plusieurs reprises, mes collègues et moi. Il n'y a rien de honteux, il n'y a rien de gênant à recevoir des groupes qui peuvent nous éclairer et, par le fait même, nous rendre en mesure de pouvoir intervenir avec diligence et de façon éclairée, évitant ainsi les remous qu'une telle décision prise - j'oserais dire -en catimini a créés dans la population tout entière du Québec. (15 h 45)

Le ministre a coupé quatre régions. Bien sûr, vous allez dire: En laissant les cinq autres régions, on va minimiser le bruit, on va attacher, ni plus ni moins, ces régions ensemble et on va les empêcher de réagir trop fortement concernant les quatre qui seront touchées. Mais, comme vous le voyez, le ministre n'a pas réussi, même en promettant que ces cinq régions demeureraient ouvertes, à fermer complètement le bocal parce que tous les gens de ces régions protégées sont quand même restés inquiets. Ils sont restés inquiets parce qu'ils ne savent pas si, dans un autre coup de baguette, ça sera leur tour de passer au couperet ou à la hache ou, employez l'épithète que vous voulez. Ces régions sont inquiètes aussi d'avoir eu une bouée sans corde, comme le disait un journaliste dans un hebdo régional.

Je pense que la fédération nationale de la CSN serait tout à fait en mesure de faire comprendre au ministre l'importance d'un être humain sur le marché du travail, l'importance pour un syndicat de défendre ses employés, car aujourd'hui un syndicat, dans une société gouvernementale a pour fonction de débattre des problèmes et d'éclairer le ministre sur une éventuelle prise de décision qui serait néfaste aux employés représentés par cette fédération.

Pour tous ces motifs, M. le Président, j'interviens au nom de mon collègue, le député de Lac-Saint-Jean, qui a apporté cette motion lorsqu'on a terminé nos travaux. J'interviens en faveur de mon collègue et j'interviens en faveur de tous les membres du syndicat de la fédération de la CSN afin que Je ministre daigne écouter ces gens-là. Je pense que le ministre sera drôlement surpris des éclairages que cette fédération pourra apporter. J'espère que le ministre va consentir à ce que la motion de mon collègue de Lac-Saint-Jean puisse être acceptée de façon positive.

Merci beaucoup, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): Merci, Mme la députée de Johnson. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants sur cette question?

Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: Oui, M. le Président. Juste une seconde, si c'est possible, M. le Président. Est-ce qu'on peut interrompre nos travaux pour deux secondes?

Le Président (M. Trudel): On peut suspendre nos travaux pour quelques secondes.

Mme Harel: On peut y aller, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): Mme la députée de Maisonneuve, la parole est à vous pour dix minutes.

Mme Harel: Merci. J'aimerais m'associer à la motion du député de Lac-Saint-Jean ayant pour but la Fédération nationale des communications. J'aimerais rappeler à nos collègues de cette commission l'importance de cette fédération. Sans doute êtes-vous déjà informés que la Fédération nationale des communications regroupe 4000 membres dans tout le Québec, c'est-à-dire plus de 75 syndicats répartis dans l'ensemble des régions du Québec et oeuvrant dans le journalisme, tant écrit qu'électronique, représentant les journalistes de la radio, de la télévision, de l'édition et, également, de la câbiodistribution. D'ailleurs, la Fédération nationale des communications produit et publie six fois par année un bulletin, une revue qui s'intitule "La Dépêche" et qui permet à l'ensemble des artisans des communications au Québec de garder le contact et d'être en étroite liaison les uns avec les autres.

Pourquoi, M. le Président, serait-il opportun d'entendre les représentants de la Fédération nationale des communications hors le fait qu'elle représente les artisans qui ont permis la performance que nous tous, maintenant, reconnaissons à ce qu'est devenu Radio-Québec? On sait que des résultats dignes de mention ont été, durant les dernières années, obtenus par Radio-Québec en termes d'augmentation significative de sa productivité, en termes, évidemment, d'augmentation assez remarquable de son auditoire. Quand on pense que l'auditoire a pratiquement doublé de 1980 à 1985 et que, de 500 000 en 1980, l'auditoire s'approche maintenant à près de 3 000 000 à la fin de 1985, c'est donc là un fait remarquable. Il faut reconnaître que tes artisans, le personnel de Radio-Québec ne peut pas y avoir été indifférents. Ils y ont été étroitement associés. Ils connaissent bien, pour y avoir été impliqués, cette maison qu'ils appellent, d'ailleurs, la maison mère et, ils auraient certainement intérêt à nous en parler pour nous faire valoir les difficultés qu'ils rencontrent, mais aussi les solutions qu'ils préconisent.

Je vous rappelle que la Fédération nationale des communications n'a pas simplement comme souci la défense des intérêts de ses membres. La Fédération nationale des communications est certainement une des instances, dans la société québécoise, les plus sensibles à la promotion de la liberté de presse. Il faut constater que la Fédération nationale des communications a des relations très suivies au niveau fédéral avec l'ensemble des intervenants en matière de communications et que cette fédération participe de façon régulière, en présentant des mémoires, en y dépêchant des représentants, aux audiences des commissions sur la radio et la télévision canadiennes. La Fédération nationale des communications s'est donné également, en plus de la promotion de la liberté de presse, une responsabilité de promotion des médias, dans l'ensemble des régions du Québec.

Je crois que cette fédération est représentative du milieu des artisans des communications. Je rappelle qu'il s'agit là des journalistes de l'ensemble de ce qu'on considère être les médias de communication au Québec. Je pense qu'ils auraient certainement des choses à nous communiquer. Je vous donne un exemple. J'ai reçu, la semaine dernière, un coup de téléphone d'un représentant de cette fédération qui, moi, montréalaise, parfois tentée d'adopter le modèle de l'impérialisme culturel montréalais à l'égard des régions, me morigénait en me rappelant que, si les cotes d'écoute ne sont

pas celles de Montréal, elles ont, par ailleurs, parfois, une valeur que n'ont pas, à l'inverse, en termes de qualité et de conséquences pour la région des interventions qui peuvent en résulter, les cotes d'écoute montréalaises. L'exemple qu'il me donnait était celui d'une émission produite à Rimouski en collaboration avec le cégep de Rimouski, sur le reboisement, en m'indiquant qu'il n'y avait pas plus de 3000 personnes qui assidûment regardaient cette émission, mais que ces 3000 personnes suivaient littéralement un cours en écoutant ladite émission. D'ailleurs, le cégep, je crois même, proposait à ceux ou celles qui le désiraient, de passer un examen à la fin de cette émission. Quels que soient, finalement, les résultats scolaires qui pouvaient en résulter, il y avait un bénéfice net que cette région pouvait rapporter du fait même que les artisans du reboisement dans la région étaient mieux au fait des techniques, étaient mieux au fait de l'ensemble des nouvelles technologies dans le domaine. J'ai pensé que, finalement, ces 3000 personnes qui syntonisaient cette émission produite à Rimouski en collaboration avec les organismes de Rimouski valaient bien des émissions de consommation de masse qui n'ont finalement aucun effet. S'il y avait là respect intégral d'une mission éducative, c'en était donc un bon exemple. De tels exemples, je crois comprendre, de la part de certains représentants de cette fédération que je connais mieux personnellement, qu'ils en auraient à notre disposition pour à peu près l'ensemble des régions du Québec. Cela pourrait nous amener à adopter sans doute une attitude, d'une certaine façon, plus responsable, je dirais, à l'égard des régions.

Depuis que ce débat a commencé sur Radio-Québec, je dois dire que j'ai bénéficié beaucoup de la problématique qui a pu en être développée. Je ne vous cacherai pas que ce qui se fait à la maison mère sur Fullum, vu de Montréal, c'est parfois considéré comme étant de loin supérieur à ce qui peut se faire ailleurs. Cela m'amène, d'ailleurs, parfois à comparer cette espèce de modèle d'impérialisme montréalais à une sorte de modèle bien connu d'impérialisme culturel américain.

Je rappelais, d'ailleurs, à mes collègues, à la commission parlementaire de la culture, qu'André Mélançon, réalisateur du film bien connu "La Guerre des tuques" - film qui a eu un succès dans toutes les régions du Québec et qui démontre qu'il y a intégration possible multiethnique ailleurs qu'à Montréal puisque c'est le bon exemple d'intégration d'un jeune Vietnamien dans la région de Charlevoix - raconte que, pour mettre en vente son film - un film, donc, qui a eu tout le succès qu'on connaît - pour le faire visionner dans une séance à cet effet à des distributeurs américains, il a dû leur laisser croire que ce film avait été réalisé en anglais, parce que, expliquait-il dans l'entrevue, aucun d'entre eux ne se serait déplacé s'il avait su d'avance que le film avait été réalisé en français. Vous vous rendez compte des subterfuges qu'il faut utiliser pour mettre notre cinéma, même les films les meilleurs, dans le circuit et je crois que c'est un peu l'équivalent pour les artisans des régions de mettre leurs productions dans le circuit montréalais. À preuve, le témoignage de Pascal Gélinas, le président intérimaire, qui est venu à notre commission de la culture déposer un mémoire pour l'Association des réalisateurs et réalisatrices de films du Québec et qui, ignorant tout de l'actuelle controverse qui...

Le Président (M. Trudel): Mme ta députée de Maisonneuve, je me permets de vous faire remarquer deux choses: la première, c'est qu'il vous reste une minute et, deuxièmement, sans vouloir être trop strict...

Mme Harel: Sur la pertinence?

Le Président (M. Trudel): ...je vous ramènerais à la pertinence du débat, à notre article 211. Je crois que vous vous en êtes éloignée. C'était fort intéressant, mais vous en êtes très loin.

Mme Harel: Je vais m'en rapprocher en vous rappelant les propos...

Le Président (M. Trudel): Quand vous rappeliez votre passé, c'était peut-être beaucoup plus pertinent.

Mme Harel: ...mêmes de M. Gélinas. Je vous disais donc qu'il était tout à fait à l'écart de la controverse actuelle sur cette question de la régionalisation et qu'il nous mettait en garde et mettait en garde le gouvernement dans l'actuelle voie dans laquelle il s'engageait avec Radio-Québec de confier à des maisons de production de Montréal - compte tenu que les décisions se prendraient à Montréal en tout cas, pour les régions - le soin d'aller en régions filmer les émissions qu'on souhaiterait ensuite présenter sur l'ensemble du réseau.

Je crois - et je vais terminer là-dessus, M. le Président - que c'est finalement ce qui m'a convaincue de la nécessité de tenir ce débat sur la régionalisation pour la raison suivante: dans l'ensemble de nos médias électroniques, quand entendons-nous parler des régions? Lorsque cela va mal. Je dis toujours que les mauvaises nouvelles se promènent vite, mais jamais les bonnes nouvelles. Il suffit, d'ailleurs, de regarder n'importe quel média pour s'en rendre compte. Les seules nouvelles que l'on ait...

Le Président (M. Trudel): Mme la députée de Maisonneuve, s'il vous plaît!

Mme Harel: Je termine, M. le Président, en vous disant que, finalement, avoir de bonnes nouvelles des régions, c'est aussi avoir des nouvelles de leur propre définition de ce qu'elles sont et c'est ce qui nous amène à faire le débat actuel. Je vous remercie.

Le Président (M. Trudel): Merci, Mme la députée de Maisonneuve. Y a-t-il d'autres intervenants? M. le député de Saint-Jacques. (16 heures)

M. Boulerice: M. le Président, lorsque nous nous sommes quittés jeudi soir, je vous avoue que j'avais peu d'empressement à regagner mon comté puisque j'étais porteur d'une nouvelle effroyable, soit que le ministre avait refusé d'inclure à la liste des intervenants possibles à une commission parlementaire le Comité social centre-sud. Tout le monde connaît, ma collègue de Maisonneuve connaît très bien l'implication sociale et culturelle même du Comité social centre-sud et je dois vous avouer que ceux qui gravitent autour de ce comité - M. le ministre, écoutez-moi bien encore une fois -étaient fort déçus de votre attitude. Je leur ai fait part d'une sans doute présence de votre part dans un débat avec moi quant à l'objet de votre refus. Confiant que vous seriez capable d'accomplir un mouvement de redressement et me faisant, malgré tout, plaideur de votre cause, M. le ministre, connaissant vos qualités je me suis dit que nous reprendrions sans doute cet après-midi et que vous auriez cette fois-ci...

Le Président (M. Trudel): M. le député de Saint-Jacques, est-ce que vous pourriez reprendre sur la motion d'amendement du député de Lac-Saint-Jean.

M. Boulerice: ...de bien meilleures dispositions quant à la motion présentée par mon honorable collègue, la députée de Johnson, pour inclure la Fédération nationale des communications.

M. le Président, le ministre des Communications et néanmoins cher ami, le député de Westmount, a balayé du revers de la main une longue liste d'intervenants, les considérant - et je suis obligé de reprendre cette expression qu'il maîtrise parfaitement maintenant je l'espère - comme des deux de pique. Voilà qu'on lui propose maintenant de ne pa3 ajouter l'injure à l'insulte en renvoyant encore à cette tablée des deux de pique un organisme qui dans le domaine des communications au Québec a fait ses preuves, il s'agit de la Fédération nationale des communications.

Ma collègue et amie, la députée de Maisonneuve, a bien fait part de la réalité que sous-entendait la formation de ce syndicat. Premièrement, il serait bon de l'ajouter, lorsque je suis intervenu en Chambre en vous disant quelles sont les grandes réalisations du Québec des 25 dernières années, j'aurais dû mentionner un mouvement syndicaliste au Québec qui s'est développé et qui n'est pas sous tutelle américaine ou étrangère, mais un mouvement syndicaliste essentiellement, purement d'essence québécoise, comme la Fédération nationale des communications. Cette fédération, vous le savez, comprend 4000 membres répartis dans 75 unités à l'intérieur du Québec - j'ai le plaisir de vous le répéter - et qui, comme vous le disait ma collègue de Maisonneuve, sont du domaine journalistique écrit ou électronique.

M. le ministre, allez-vous une fois de plus refuser d'entendre celles et ceux qui dans ce domaine comptent au Québec? Nous avons un intérêt particulier, d'ailleurs, à parler de ce qui compte au Québec actuellement. Allez-vous refuser d'entendre celles et ceux qui comptent au Québec par leur formation professionnelle qui ne fait aucun doute dans l'esprit de tous et qui comptent à cause de l'expertise qu'ils ont dans un domaine de pointe, dans un domaine d'avenir, celui de la radio et des télécommunications, et qui peuvent ajouter au débat qui nous préoccupe actuellement, un éclairage extrêmement important qui ne pourra que mieux vous faire comprendre la pertinence des propos que l'on tient et vous faire réfléchir quant aux recommandations que certains - d'où viennent-ils, d'où viennent-elles - semblent vouloir vous faire quant à Radio-Québec et qui, à mon point de vue, causeront un grand tort à la radiotélédiffusion du Québec, surtout dans son mandat de régionalisation qui est, d'ailleurs, inhérent à la loi qui a mis sur pied, l'Office de la radiotélédiffusion du Québec?

Donc, M. le Président, après avoir balayé du revers de la main une liste extrêmement importante d'organismes aussi sérieux que l'Association nationale des téléspectateurs... Dieu sait que, quand on veut parler de télévision, M. le ministre, en parler avec l'Association nationale des téléspectateurs m'apparaît la chose la plus normale, la plus légitime, voire même la plus sensée pour un ministre responsable de la radiotélédiffusion du Québec! Après avoir balayé, comme je vous le disais, du revers de la main une motion non exhaustive que vous présentait ma collègue, la députée de Johnson, vous avez aujourd'hui - Ciel! que l'occasion est belle pour vous et j'ose espérer que vous la saisirez au vol! -l'occasion de vous reprendre, je dirais même, M. le ministre, de vous refaire et d'engager un débat qui ne sera qu'extrêmement profitable pour l'avenir de Radio-Québec, en amorçant en commission parlementaire une

discussion avec cette Fédération nationale des communications qui, je vous le répète, représente les éléments les plus avertis, les éléments les plus aguerris - pas dans le sens de chicanes ou de luttes - dans cette complexité des télécommunications au Québec et des gens qui, encore une fois, de par leur expérience, seront capables...

Naturellement, vous ne trouverez pas cela dans le cahier que vous avez devant vous. C'est plutôt à mes paroles que vous devez vous fier. M. le ministre, vous ne trouverez pas mieux que les gens de la Fédération nationale des communications pour vous expliquer toute l'importance, si on ne veut pas se retrouver avec un coeur et un corps nourris, mais des membres atrophiés, qu'il y a pour Radio-Québec de maintenir non pas, comme je vous le disais, ses bureaux avec fausses façades de carton-pâte qui vont rester dans différentes régions, mais bien des centres de production régionale pour Radio-Québec. M. le Président, Dieu sait que la Fédération nationale des communications n'a pas assisté, malheureusement, parce qu'elle avait d'autres obligations, à la commission de la culturel il faut des centres de production, de diffusion. Je ne vous référerai pas de nouveau à l'excellent texte que publiait en fin de commission notre collègue, vice-première ministre et ministre des Affaires culturelles, sur l'importance de maintenir des centres de production et de diffusion à l'intérieur, de l'ensemble du Québec.

M. le ministre, j'appuie sans aucune réserve la résolution présentée par ma collègue, la députée de Johnson, et je vous demande, cette fois, de mettre de côté cette attitude obstinée, qu'on ne vous connaissait pas et qu'on se flattait, d'ailleurs, de ne pas trouver en vous, tellement vous étiez reconnu comme un homme d'ouverture et un homme d'esprit, et d'enfin amorcer un dialogue.

Pourquoi refusez-vous cela dans un sujet aussi important? Pourquoi refusez-vous de tenir une commission parlementaire sur un sujet aussi important, lorsque, en plus, il a fait l'objet d'un engagement électoral, piétiné et déchiré, encore une fois, alors que votre collègue, vice-première ministre, a eu plus de courage, elle, a respecté un élément de programme du Parti libéral et a tenu cette commission parlementaire sur la culture?

Je vous remercie, M. le Président, et j'aurai un amendement à apporter tantôt à l'issue du vote sur l'amendement précédent.

Le Président (M. Trudel): Merci, M. le député de Saint-Jacques. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants sur la motion de M. le député de Lac-Saint-Jean? S'il n'y a pas d'autres intervenants, je...

Mme Juneau: M. le député de Sherbrooke demandez-vous le vote?

Le Président (M. Trudel): M. le député de Sherbrooke, vous demandez le vote?

Une voix: II va finir par parler, lui.

Mme Juneau; Vote nominal, s'il vous plaît, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): Vote nominal? Mme Juneau: Vote nominal.

Le Président (M. Trudel): Je relis la motion du député de Lac-Saint-Jean puisqu'elle date déjà de jeudi, à 21 h 50, ou quelque chose comme cela. "Qu'en vertu de l'article 244 des règles de procédure de l'Assemblée nationale ta commission de la culture, avant d'entreprendre l'étude article par article du projet de loi 61, Loi modifiant la Loi de la Société de radiotélévision du Québec, tienne des consultations particulières avec l'organisme suivant: la Fédération nationale des communications de la CSN. Que ces consultations particulières soient tenues par la commission le 5 juin 1986 à compter de 10 heures et que l'organisme mentionné plus haut soit convoqué en conséquence."

Vote par appel nominal. M. French (Westmount)?

M. French: Contre, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): M. Audet (Beauce Nord)?

M. Audet: Contre, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): M. Boulerice (Saint-Jacques)?

M. Boulerice: Pour, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): M. Brassard (Lac-Saint-Jean)?

M. Brassard: Pour.

Le Président (M. Trudel): M. Hains (Saint-Henri)?

M. Hains: Contre, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): M. Hamel (Sherbrooke)?

M. Hamel: Contre, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): Mme Harel (Maisonneuve)?

Mme Harel: Pour.

Le Président (M. Trudel): Mme

Hovington n'est pas là. Mme Juneau (Johnson)?

Mme Juneau: Pour, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): M. Khelfa (Richelieu)?

M. Khelfa: Contre, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): Mme Pelchat (Vachon)?

Mme Pelchat: Contre, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): M. Cannon (La Peltrie)?

M. Cannon: Contre, M. le Président.

La Secrétaire: Contre: 7; pour: 4; abstentions: 1.

Le Président (M. Trudel): La motion du député de Lac-Saint-Jean est rejetée. M. le député de Saint-Jacques.

Motion proposant la tenue d'une consultation particulière avec les partis reconnus au Québec

M. Boulerice: M. le Président, j'ai le plaisir, en vertu de l'article 224 des règles de procédure de l'Assemblée nationale, de présenter la motion suivante: "Que la commission de la culture, avant d'entreprendre l'étude article par article du projet de loi 61, Loi modifiant la Loi sur la Société de radiotélévision du Québec, tienne des consultations particulières avec l'organisme suivant: les partis politiques reconnus au Québec. Que ces consultations particulières soient tenues par la commission les 4, 5 et 6 juin 1986 à compter de 10 heures et que l'organisme mentionné soit convoqué en conséquence."

Le Président (M. Trudel): Est-ce qu'on peut en avoir une copie?

M. Boulerice: Je vous en remets une copie, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): Merci, M., le député de Saint-Jacques.

M. le député de Saint-Jacques, après consultation, votre motion est acceptable et vous pouvez commencer à la débattre. Je présume que vous voulez vous en faire le proposeur.

M. Boulerice: Absolument, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): Je vous cède la parole, M. le député de Saint-Jacques, sur votre motion.

M. Boulerice: M. le Président, le gouvernement précédent, et cela, les Québécois se le rappeleront bien, n'a jamais hésité, d'aucune façon que ce soit, à mettre sur pied des commissions parlementaires. Nous avons même tenu des commissions parlementaires à la suite de certaines allégations de députés membres de l'Opposition à l'époque. Nous pratiquions la démocratie dans son sens véritable. Je vous ferai grâce de l'étymologie, mais c'est de cela que nous nous rapprochions lorsque, pour nous, nous parlions de démocratie. Nous avons tenu des commissions parlementaires à l'époque où notre formation politique était présente et notre gouvernement permettait à d'autres formations politiques de se présenter. Il permettait même, M. le Président, à des représentants d'instances de sa propre formation politique de se présenter en commission parlementaire. (16 h 15)

Je vous donnerai, à titre d'exemple, la commission parlementaire sur la loi 101. J'ai eu le plaisir, à l'époque, en tant que président du Conseil régional de Montréal-centre, de venir me faire le porte-parole de mes douze autres collègues présidents de conseils régionaux du Parti québécois, pour présenter une position qui n'était pas divergente de notre exécutif national, mais plutôt convergente avec, forcément, ses distinctions; et cela s'était fait.

Il y a même eu, d'ailleurs, à l'époque une autre commission, celle sur les gens à pourboire où, de nouveau, la région que j'avais l'honneur de présider était intervenue en commission parlementaire. Cela avait donné lieu, d'ailleurs, à un incident assez cocace: un député de votre formation, je pense, sous toute réserve, le député de Hull, s'était demandé: Quand le Parti libéral, lui, avait-il présenté un mémoire? Comme il ne se le rappelait pas, eh bien c'était de toute évidence que le Parti libéral n'avait pas de mémoire, hors de tout doute.

Donc, M. le Président, en permettant aux partis politiques reconnus au Québec, donc à leurs instances aussi, de se présenter à la commission parlementaire, ce que nous visons vraiment à faire, c'est rendre justice à ces hommes et à ces femmes de bonne volonté, à ces militants et militantes du Parti libéral qui, depuis des années, ont travaillé d'arrache-pied pour porter leur parti politique au pouvoir et qui ont des convictions profondes, j'en suis certain, quant au développement culturel, au développement éducatif et au développement social du Québec. Ces gens-là sont aujourd'hui littéralement trahis par le silence de celles et ceux qu'ils ont élus le 2 décembre et sur un sujet aussi important que l'avenir de

Radio-Québec se retrouvent sans aucune voix, sans aucune expression articulée. En toute justice pour la démocratie au Québec, ce rôle de justiciers envers votre propre parti, si vous n'êtes pas prêts à le jouer, nous sommes prêts, nous, à le jouer pour le bénéfice de la démocratie. Je pense que nous nous devons d'apporter cet élément de justice afin de permettre aux représentants des partis politiques reconnus au Québec de faire part de leur vision du développement de Radio-Québec.

Donc, il y aura comme première possibilité de donner aux militants et militantes du Parti libéral ce droit de parole qu'ils se sont fait littéralement confisquer le 2 décembre au soir, au profit d'une aile parlementaire beaucoup plus docile aux diktats de son whip, de son leader ou de son chef que motivée par la reconnaissance bien légitime qu'elle devrait avoir du travail des militants et des militantes en écoutant les propos qu'ils leur tiennent et les invitations pressantes qui leur sont lancées de défendre des dossiers pertinents. Cela m'apparaîtrait d'autant plus à propos que les résultats du 2 décembre montrent hors de tout doute que plusieurs de ces députés muets ont été élus dans des régions et que ce sont, malheureusement, les régions qui écopent dans le plan de redressement de Radio-Québec.

Le Québec n'est pas, non plus - et cela, j'espère que le ministre le comprend bien - une société monolithique. Vous savez très bien quel intérêt nous avons toujours porté à la pluralité de l'expression politique. Nous avions l'intention - mais là, il y a eu encore votre refus obstiné en Chambre - à un moment donné, de proposer un mode de réforme électorale qui aurait permis à d'autres tendances politiques de s'exprimer dans le débat politique au Québec. Malheureusement, votre refus prive le Québec de vivre une démocratie dans sa véritable essence. Sur un sujet qui est très pertinent, qui n'est pas un propos de taverne, je pense qu'il serait intéressant que nous puissions entendre en commission parlementaire des gens qui, au Québec, ont le goût de faire des choses, ont des idées, partagent des idéologies qui sont peut-être différentes des vôtres et des nôtres, mais qui, par contre, ont également reçu un appui de la part de la population du Québec le 2 décembre lorsque le vote s'est exprimé. Pourquoi, donc, refuser à ces gens qui, en vertu de notre système électoral, ne sont peut-être pas présents, une certaine reconnaissance, une certaine justice, et leur permettre de s'exprimer en commission parlementaire sur les orientations et le sens avoué - ou le sens inavoué peut-être - que vous voulez donner à Radio-Québec?

M. le Président, je pense que le ministre a vraiment là la dernière chance de redevenir raisonnable. Pour employer une expression qui a cours dans certains établissements, dans mon comté, et dans le sien, c'est littéralement un "last call" qui vous est donné, M. le ministre...

M. French: Pas dans mon comté.

M. Boulerice: ...d'écouter ceux qui, au Québec, articulent les réflexions politiques, les partis politiques reconnus au Québec et, forcément, ces militantes et ces militants qui ne sont pas uniquement bons, je l'espère, au Parti libéral, pour faire du porte-à-porte ou pour aller recueillir l'argent dans les campagnes de financement ou "paqueter" les stades pour diverves manifestations partisanes.

Laissez la chance aux Québécois et aux Québécoises de participer à ce débat et, de grâce, puisque votre ligne de parti muselle votre aile parlementaire, M. le ministre, laissez la chance aux militants de votre parti et notamment à la Commission Jeunesse qui, elle, fait des efforts, d'ailleurs, au niveau de votre parti, pour adopter une ligne de pensée originale. Ils sont faibles en organisation, on l'a vu récemment dans un comté en particulier, mais au niveau de la réflexion je pense qu'ils seraient capables d'apporter certaines choses quant à l'avenir du Québec. Allez-vous les priver de cette tribune d'expression? En plus d'être le croque-mort de Radio-Québec, M. le Président, le ministre est-il le fossoyeur de l'expression démocratique des militants et des militantes du Parti libéral et des autres partis politiques? J'ose espérer que non. Je pense que c'est effectivement sa dernière chance, son "dernier appel"j sinon, j'ai bien peur qu'il sera discrédité à tout jamais comme ministre des Communications dans l'opinion publique. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): Merci, M. le député de Saint-Jacques. Y a-t-il d'autres membres qui veulent s'exprimer? M. le député de Lac-Saint-Jean,

M. Brassard: M. le Président, que voilà une motion on ne peut plus pertinente! Je voudrais, en commençant, rendre hommage au député de Saint-Jacques pour l'à-propos d'une motion semblable. Je pense qu'il est tout à fait approprié d'inviter les partis reconnus au Québec à venir devant cette commission parlementaire témoigner sur ce dossier majeur de Radio-Québec. C'est, d'ailleurs, maintenant une coutume, depuis quelques années, que nous avons instaurée, nous, du Parti québécois. Nous en sommes très fiers, d'ailleurs, et je pense que c'est une manifestation éminemment démocratique que d'inviter les partis politiques reconnus à se présenter devant les commissions parlementaires, à déposer des mémoires et à

témoigner sur un certain nombre de sujets majeurs pour la société québécoise.

II faut bien le dire, M. le Président: Au sein des partis politiques modernes, il existe parfois des distinctions très évidentes et parfois même des divergences entre ce qu'il est convenu d'appeler l'aile parlementaire, les députés, les élus qui constituent l'aile parlementaire et qui exercent le pouvoir quand leur formation politique est majoritaire, et les instances dirigeantes de ce parti qui sont constituées de militants, de bénévoles élus à différents niveaux du parti, que ce soit au niveau du comté, de la région ou au niveau national. Il est essentiel, quand se déroulent des débats majeurs sur des sujets importants dans une société, que l'on donne, la parole aux instances dirigeantes des partis, que l'on donne la parole aux militants des partis.

Il est évident que cela ne signifie nullement, en contrepartie, de bâillonner l'aile parlementaire, les élus. Ils ont toujours, que ce soit en Chambre ou en commission parlementaire même ou ailleurs sur d'autres tribunes, des possibilités nombreuses de s'exprimer publiquement. Donc, du côté de l'aile parlementaire des partis politiques, on ne peut pas identifier de problèmes majeurs relativement à l'expression d'opinion. Les tribunes sont là et les institutions parlementaires sont là également pour cela.

Trop souvent, cependant, les militants n'ont pas l'occasion et ne disposent pas des tribunes appropriées pour se faire entendre. Dans ces circonstances, il est important qu'une commission parlementaire comme la nôtre donne l'occasion aux militants d'exprimer leur point de vue, l'occasion à ce qu'on appelle très souvent la base d'un parti politique de s'exprimer. Que ce soit le nôtre ou celui des ministériels, peu importe le parti, il arrive que la base d'un parti, les militants d'un parti soient vraiment enracinés dans leur milieu. Ils ont des racines profondes dans leur milieu et ils sont bien arrimés aux aspirations profondes de leur milieu et de leur communauté. Il y a un lien très fort entre les militants d'un parti politique et les aspirations, les attentes, les espoirs d'un milieu et d'une communauté. Par conséquent, en permettant aux militants de s'exprimer, on permet du même coup aux communautés régionales de s'exprimer et d'exprimer leurs aspirations.

Pour le Parti québécois, je suis sûr que cette motion du député de Saint-Jacques sera fort bien accueillie par les instances du parti. Je suis persuadé que les exécutifs régionaux, que les exécutifs de comté et l'exécutif national du parti seront très heureux de participer à cette commission parlementaire et de répondre à l'appel du député de Saint-Jacques. Pour ce qui est du Parti libéral du Québec, c'est également une belle occasion.

Dans les circonstances, on peut presque parler, sur Radio-Québec en tout cas, de trahison. Le Parti libéral du Québec a carrément trahi son propre programme politique. En tout cas, il a abandonné l'élément de son programme politique concernant Radio-Québec. Je vous le rappelle brièvement, M. le Président. Lors de la campagne électorale, le Parti libéral s'était engagé à geler les crédits consacrés à Radio-Québec - ce qui n'a pas été le cas puisqu'il y a une coupure de 8 000 000 $ qui lui est imposée - et, deuxièmement, il s'était engagé à tenir une commission parlementaire publique pour permettre à tout le monde de se prononcer et de s'exprimer sur les orientations de Radio-Québec.

Voilà un engagement intéressant, un engagement faisable et réalisable, qui n'est pas farfelu. C'est très simple à réaliser et à concrétiser. Malheureusement, le Parti libéral a carrément trahi et abandonné cet engagement, par son aile parlementaire, par le gouvernement, par les élus. La question que l'on peut se poser ici à cette occasion, M. le Président, est la suivante: Est-ce que les instances dirigeantes du parti, est-ce que les militants du Parti libéral sont d'accord avec cet abandon, cette trahison perpétrée par les parlementaires du Parti libéral? C'est une question pertinente. Pour le savoir, il faudrait, évidemment, que ces instances dirigeantes du Parti libéral puissent défiler devant nous, venir témoigner devant nous et s'exprimer sur cette question. (16 h 30)

J'aimerais, comme mon collègue de Saint-Jacques, en tout cas, entendre l'exécutif du Parti libéral. J'aimerais également entendre la Commission Jeunesse, qui manifeste une certaine autonomie - ii faut le dire - par rapport au pouvoir. C'est très admirable de sa part. II serait intéressant d'entendre la Commission Jeunesse du Parti libéral sur le dossier de Radio-Québec. Plusieurs des jeunes qui composent la Commission Jeunesse proviennent de régions où l'on va carrément et purement abolir la régionalisation. J'aimerais entendre, en particulier, le vice-président du Parti libéral, M. Luc Harvey, candidat libéral dans mon comté aux dernières élections, qui est devenu, à la suite de sa défaite du 2 décembre, vice-président du Parti libéral du Québec. C'est une personne qui vient d'une région. Je serais très intéressé, quant à moi, en tout cas, à connaître le point de vue de Me Harvey sur cette question. Je suis persuadé qu'il ne manquerait pas de rappeler l'engagement pris par le Parti libéral. Il ne manquerait pas d'exprimer son accord avec cet engagement.

M. le Président, la motion du député de Saint-Jacques est, en quelque sorte, je dirais, une main tendue vers nos collègues ministériels. Nous leur fournissons, en

quelque sorte, l'occasion de sauver l'honneur puisqu'ils s'apprêtent à commettre, à perpétrer une véritable trahison par rapport à leur engagement électoral concernant Radio-Québec. Nous leur tendons la main. Nous leur disons: Faites en sorte que votre parti ne se déshonore pas sur cette question et vienne ici devant nous rappeler son engagement et exprimer de nouveau son accord avec cet engagement.

Pour toutes ces raisons, M. le Président, je pense que la motion du député de Saint-Jacques est on ne peut plus pertinente. Est-ce que d'autres partis politiques reconnus accepteraient l'invitation? Cela reste à voir. Je souhaite, en tout cas, que les deux principaux partis, les deux principales formations politiques du Québec acceptent cette invitation qui leur est faite, mais il y a peut-être d'autres formations politiques également, moins importantes, sans doute, mais ce ne sont pas là, les deux seuls partis politiques au Québec. Le NPD-Québec s'est, d'ailleurs, prononcé au sujet des coupures à Radio-Québec. Il pourrait être intéressé à venir témoigner également. Je ne pense pas qu'on doive limiter cette invitation aux deux seules grandes formations politiques, que ce soit le Parti libérai et le Parti québécois, mais je pense que l'appel doit être général. Il serait intéressant d'entendre également les partis moins importants que le Parti libéral et le Parti québécois.

Voilà, pour toutes ces raisons, M. le Président, vous devez comprendre que c'est avec grand plaisir et sans réserve que je voterai en faveur de la motion du mon collègue de Saint-Jacques.

Le Président (M. Trudel): Merci, M. le député. Est-ce que d'autres intervenants voudraient se faire entendre sur la motion du député de Saint-Jacques?

Mme la députée de Johnson.

Mme Juneau: Merci, M. le Président. Je pense qu'il est peut-être important de définir, au tout début, les raisons qui me motivent à prendre la parole sur la motion du député de Saint-Jacques. Nous avons tous, à l'intérieur de chacun des 122 comtés du Québec, des hommes et des femmes qui, en atteignant l'âge de voter, se font une idée très précise de ce qu'est un parti politique. Ces hommes et ces femmes, dis-je, s'en vont quelquefois vers le Parti libéral parce que, idéologiquement, cela correspond à ce qu'ils vivent, ce qu'ils souhaitent et ce qu'ils demandent à la société. En d'autres temps, ces hommes et ces femmes optent pour le Parti québécois.

Mais avant ces deux seules formations politiques qui, aujourd'hui, représentent les 122 comtés du Québec, il y avait, entre autres, dans mon comté... Je pense que personne n'ignore que je suis représentante d'un comté qui a déjà été représenté par un ancien premier ministre à l'Assemblée nationale, soit Daniel Johnson, sous une formation politique qui s'appelait l'Union Nationale à l'époque. Je pense que, dans le coeur de bien des Québécois et surtout dans le coeur de plusieurs militants de mon comté, il y avait une grande place et il y a toujours une grande place pour des gens qui, à l'époque, comme je le disais tout à l'heure, faisaient partie de l'Union Nationale et combattaient vivement pour tout ce qu'ils croyaient être bon pour la collectivité. Aujourd'hui, on a deux formations politiques qui sont représentées à l'Assemblée nationale et je pense que les gens qui ont élu la formation qui est en face de nous, le 2 décembre dernier, sont en train de se poser de sérieuses questions. Ils se demandent comment il se fait que les gens de ce parti avaient, durant la campagne électorale, pris des engagements importants concernant ce que l'on discute aujourd'hui et que cette même formation politique découvre, après l'élection et après être bien assise sur son siège, que ce n'est plus un engagement qu'elle doit tenir. J'ai même ici un article qui vient du Journal de Montréal, de samedi 26 avril, et qui dit qu'il y a des députés libéraux, des députés de la formation politique que nous avons en face de nous qui commencent à grogner. Je voudrais vous citer juste quelques petits passages de quelqu'un que vous connaissez bien, Normand Girard, un de vos membres, je pense...

M. Boulerice: Non, c'est Maurice Girard.

Mme Juneau: En tout cas, ce M. Girard, dans le Journal de Montréal du 26 avril, disait: "Plusieurs députés libéraux commencent à avoir de la grogne à son égard et ils se demandent si leur ministre -c'est vous M. le ministre - n'a pas choisi simplement de protéger le P.-D.G." Ce ne sont pas des gens de ma formation politique et ce n'est pas un journaliste reconnu de notre formation politique. Il dit aussi: "Telles sont les principales confidences - parce qu'il n'avait pas le droit de mentionner leurs noms - recueillies au cours de la semaine auprès d'un certain nombre de députés libéraux soucieux de l'avenir de Radio-Québec en régions." M. le ministre, il y a des gens dont je suis certaine qu'ils vous en ont fait part. Je sais bien que vous ne l'avouerez pas devant nous aujourd'hui, mais je suis certaine qu'ils vous en ont parlé. Ils vous en ont parlé et cela a dû certainement vous ébranler un peu de voir que, même des membres de votre formation politique, avaient de la grogne. Pourquoi avaient-ils de la grogne? Parce qu'eux aussi pensaient que, du fait qu'ils avaient été élus démocratique-

ment par les gens de leur comté, ils devaient être liés par des engagements qu'ils avaient pris en campagne électorale et qu'ils ont laissé tomber par la force des choses. Je ne sais pas si ce sont des membres de notre commission parlementaire; ce sont peut-être quelques-uns de ceux-là, et j'aimerais bien savoir qui vous faisait de la grogne.

M. French: Moi aussi.

Mme Juneau: Levez la main, ceux qui étiez en faveur de Radio-Québec.

M. Boulerice: Ce n'est pas grave, on ne vous verra pas, on ne dira pas vos noms.

Une voix: Que ceux et celles qui grognent lèvent la main!

Mme Juneau: C'est cela. À part cela, M. Girard dit encore que: "ceux-ci reconnaissent avoir été impuissants à faire entendre raison au ministre des Communications quant à la nécessité pour lui de respecter le programme du parti politique auquel il appartient." M. le Président, à la place du ministre, je pense que j'écouterais les membres de ma formation politique, au moins quelque peu, et je leur donnerais raison, parce que lui aussi est embarqué dans le même bateau. Il a, lui aussi, pris les mêmes engagements. Ce serait peut-être important qu'on puisse entendre ici et ces gens qui ont la grogne et les gens de notre côté qui croient aussi que ce serait important que tous les membres d'un parti politique reconnu soient assis ici près de nous en train de nous informer de la nécessité, du bien-fondé que les régions du Québec demeurent intactes, d'une part, et que la compression qui a été annoncée par le président du Conseil du trésor, sinon diminuée, en tout cas appliquée de façon à conserver nos acquis.

M. le Président, je vous en ai parlé tout à l'heure, je viens d'un ancien comté de l'Union Nationale qui est, aujourd'hui, fièrement un comté du Parti québécois depuis deux mandats; j'en suis l'heureuse élue et j'en suis très fière. Je vous dirais que, dans mon comté, j'ai beaucoup de membres qui veulent venir se faire entendre ici. Dernièrement, cela fait quelques semaines, on a eu une rencontre, une réunion de l'exécutif, comme cela doit se faire de votre côté. J'imagine que, dans les comtés où cela grognait, il a dû y avoir des réunions d'exécutif et que ces gens-là souhaiteraient avoir la possibilité de se faire entendre.

Chez nous, M. le Président, il y a même une résolution qui a été prise par les militants et les militantes de mon comté qui comprennent l'importance de cette loi, parce que nous, en Estrie, on se trouve à passer sous le couperet du ministre. Nous sommes une région du Québec qui va perdre ses ailes, ses antennes - appelez-les comme vous voudrez - mais nous sommes une des régions sacrifiées.

Moi, quand je fais un sacrifice, j'aime toujours savoir pourquoi je le fais. À cette occasion, je ne comprends pas comment il se fait que le ministre sacrifie la région de l'Estrie, entre autres. Il faut avoir de bonnes raisons. Si le ministre évoque le fait qu'on est en difficultés financières et tout cela, je vais juste lui rappeler ce qu'il a dit en conférence de presse, qu'il apporterait 3 000 000 $ de plus. Je ne comprends pas pourquoi le ministre va apporter un fonds spécial de 3 000 000 $ pendant que ces quatre régions - dont la mienne, M. le ministre - coûtent environ 3 000 000 $. Je ne comprends pas l'idée du ministre, d'offrir de la main gauche 3 000 000 $ et, de la main droite, de couper le cou de ces quatre régions. Je ne comprends vraiment pas et je souhaiterais que les militants de mon comté et les militants de toute la région de l'Estrie puissent venir s'exprimer en commission parlementaire. Je souhaite, M. le ministre, que vous soyez très ouvert à cette motion de mon collègue de Saint-Jacques de pouvoir recevoir les membres de toutes les formations politiques reconnues à cette commission parlementaire. Merci beaucoup, M. le ministre.

Le Président (M. Trudel): Merci, Mme la députée de Johnson. Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: Merci, M. le Président. Cette motion du député de Saint-Jacques afin d'entendre en commission parlementaire les représentants des partis politiques autorisés peut sembler paradoxale, du fait qu'on peut croire que les points de vue des partis sont représentés par les membres respectifs de cette commission qui y siègent. Vous savez sans doute, M. le Président, qu'un paradoxe n'est qu'une apparence de contradiction et qu'il n'en est pas vraiment, véritablement une puisqu'on doit donc constater que les partis politiques, les formations politiques existent en dehors des caucus qu'elles ont fait élire ici au Parlement. (16 h 45)

D'ailleurs, une des grandes réalités que les partis apprennent au fil des années, c'est que, souvent, les gouvernements sont les cimetières des partis politiques, c'est-à-dire que les gouvernements, en n'agissant pas de la façon qui leur est indiquée par leur parti politique, par le programme de leur parti politique, en faisant fi des engagements électoraux ou des programmes de leurs partis respectifs, conduisent leur parti à une sorte de désaffection sur le plan local et régional.

Je crois que la motion du député de Saint-Jacques convie les représentants des partis politiques autorisés à venir nous exprimer les points de vue qui ont été développés dans les formations politiques de manière qu'il puisse y avoir une saine vitalité et une pluralité d'opinions qui se manifestent dans le cadre de ce débat sur la régionalisation et sur l'avenir de Radio-Québec, compte tenu de l'ampleur de la compression à laquelle il doit faire face.

M. le Président, ce n'est pas étonnant, d'ailleurs, qu'il y ait ces motions pour entendre des intervenants qui ont une expertise en matière de radiocommunications. C'était déjà un souhait formulé par le Parti libéral au moment où il était dans l'Opposition. Je rappelle, d'ailleurs, au ministre des Communications, qu'il a lui-même présidé quelques séances de la commission de la culture, auxquelles la secrétaire de la commission, qui est la même, assistait, lesquelles séances avaient lieu pour donner suite à la proposition du député de Louis-Hébert de convoquer une commission parlementaire. Ces séances de la commission ont eu lieu il y a quand même un bon moment, en décembre 1984 et en janvier 1985. J'ai quelques procès-verbaux des séances de la commission, une le 12 décembre 1984 en particulier, où le député de Louis-Hébert faisait motion afin d'étudier et d'examiner l'ensemble du dossier concernant Radio-Québec tenant compte des dispositions législatives existantes, des gestes annoncés par Radio-Québec ou par le ministre et d'entendre à ce sujet toutes les personnes et organismes qui peuvent être utiles, permettant ainsi à la commission de faire un rapport éclairé sur cette situation.

Mme Juneau: C'est un éminent membre libéral?

Mme Harel: Cette proposition émanait du député de Louis-Hébert qui invoquait l'importance de l'avenir de Radio-Québec, qui invoquait à l'époque sa préoccupation vu qu'il y avait des réflexions qui se poursuivaient au niveau gouvernemental sur l'avenir de Radio-Québec. Il n'y avait pas de décisions. Il n'y avait donc à l'époque que des réflexions gouvernementales.

Par exemple, je cite la lettre que le député de Louis-Hébert faisait parvenir au président de la commission, le 3 décembre 1984, pour lui demander la convocation de la commission de la culture où il disait: "Depuis plusieurs mois, un débat de fond - il n'était pas devant une proposition de loi modifiant la structure de Radio-Québec; il fait allusion à un débat de fond - s'est engagé sur l'avenir de Radio-Québec, son mandat et les moyens dont cette société d'État doit disposer pour atteindre ses objectifs."

Le député de Louis-Hébert faisait valoir la nécessité de convoquer une séance de travail de la commission de la culture pour examiner une proposition afin d'entendre les intervenants, disait-il, toutes les personnes et organismes qui peuvent être utiles, permettant ainsi à la commission de faire un rapport éclairé sur la situation.

Je rappelle donc qu'il s'agissait d'une motion du député de Louis-Hébert au moment où un débat, certes, s'engageait, mais non pas où il y avait un projet de loi qui était déposé devant cette Chambre, projet de loi modifiant substantiellement les structures de Radio-Québec. Il fait donc référence à un débat de fond qui, selon lui, justifiait, à l'époque, une commission parlementaire pour entendre toute personne et organisme qui tenaient à faire valoir leur point de vue de manière à permettre à la commission de faire un rapport éclairé sur la situation. C'est donc dire, M. le Président, que, si cette proposition du député de Louis-Hébert valait en décembre 1984 et en janvier 1985, elle vaut d'autant plus dans le contexte de l'étude d'un projet de loi où nous sommes présentement. Compte tenu de l'incertitude qui continue à flotter sur l'avenir de Radio-Québec, compte tenu du débat justifié concernant la façon dont Radio-Québec doit s'acquitter de son mandat, je crois qu'il serait utile de procéder à ces consultations particulières et j'invite donc les membres de cette commission à retenir cette motion qui ne l'avait pas été en décembre 1984.

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Trudel): Mme la députée, je me suis informé, il vous restait au moins trois minutes, je pense, mais si vous avez terminé...

Mme Harel: Cela va me permettre, M. le Président, de simplement rappeler la politique culturelle, évidemment, qui est maintenant bien connue, du Parti libéral dans le domaine de Radio-Québec. Cette politique du Parti libéral a été longuement expliquée, je crois, pendant la campagne électorale. Cette politique consistait à "reconnaître l'importance du rôle de Radio-Québec dans l'épanouissement éducatif, culturel et social de la collectivité québécoise et, en conséquence, à prendre l'engagement, premièrement, de convoquer une commission parlementaire pour discuter du mandat, des orientations et des modes possibles de financement et des objectifs futurs de Radio-Québec." Je crois que cet engagement tient toujours, malgré que d'autres engagements puissent, évidemment, ne pas être retenus, notamment celui qui, en quatrième lieu, consistait à développer de nouvelles formules d'autofinancement partiel visant une proportion d'environ 25 % du budget

d'opération de Radio-Québec, connaissant l'état de la situation dans le domaine de la télévision éducative et certainement, également, des règlements qui les régissent. Si tant est que cette disposition dans l'ensemble des engagements électoraux ne puisse pas être maintenue, il demeure que les trois autres engagements sont souhaitables, dont celui de convoquer une commission parlementaire et, notamment, celui de geler le budget d'opération de Radio-Québec au niveau actuel pendant toute la durée de cette étude et également l'engagement de créer un groupe de travail pour préparer, conjointement avec la direction de Radio-Québec, un plan de redressement à l'intérieur de ce gel prévu durant l'étude en commission parlementaire. Il faut reconnaître, M. le Président, que si cet engagement a lieu, c'est certainement parce que, d'une certaine façon, les porte-parole du Parti libéral devaient sentir l'inquiétude qui flottait dans l'opinion publique, les rumeurs qui circulaient durant cette campagne électorale quant aux tracasseries que pouvait subir Radio-Québec à la suite de l'élection d'un gouvernement libéral. Cet engagement ferme qui avait été pris durant la campagne était certainement fait pour rassurer la population, mais il faut bien voir qu'elle en est maintenant...

Le Président (M. Trudel): Mme la députée, autant je vous ai donné du temps plus tôt, autant je suis obligé de vous en retirer maintenant puisque vous avez dépassé vos dix minutes. Je vous permettrai une phrase finale. Vous étiez dans une envolée que je me voudrais d'interrompre brutalement.

Mme Harel: Alors, je terminerai simplement en vous disant, M. le Président, que je serai vraiment intéressée à savoir des auteurs de ces engagements électoraux durant cette campagne quelles étaient les motivations qui les animaient à ce moment. Merci.

Le Président (M. Trudel): Merci, Mme la députée de Maisonneuve. Est-ce qu'il y a d'autres invervenants sur la motion du député de Saint-Jacques? On va mettre la motion du député de Saint-Jacques aux voix.

Une voix: Vote nominal.

Le Président (M. Trudel): Vote nominal sur la motion du député de Saint-Jacques demandant que les partis politiques reconnus au Québec soient invités, etc. C'est le même texte que les autres.

Mme Juneau: Vous pouvez la lire, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): En faites-vou3 la demande, Mme la députée de Johnson? Mme Juneau: S'il vous plaît.

Le Président (M. Trudel): Cela me fait plaisir de la lire pour vous et pour les autres membres de la commission. La motion du député de Saint-Jacques se lit comme suit: "Qu'en vertu de l'article 244 des règles de procédure de l'Assemblée nationale la commission de la culture, avant d'entreprendre l'étude article par article du projet de loi 61, Loi modifiant la Loi sur la Société de radiotélévision du Québec, tienne des consultations particulières avec les organismes suivants: les partis politiques reconnus au Québec. Que ces consultations particulières soient tenues par la commission les 4, 5 et 6 juin 1986 à compter de 10 heures et que les organismes mentionnés soient convoqués en conséquence.

M. le député de Saint-Jacques.

M. Boulerice: Mon droit de conclusion, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): Vous savez qu'en vertu de l'article 217, M. le député de Saint-Jacques, il n'y a pas de droit de réplique en commission.

M. Boulerice: L'article 217!

Le Président (M. Trudel): Nous passons donc au vote par appel...

M. Boulerice: L'article 217, vous avez dit?

Le Président (M. Trudel): M. le député de Saint-Jacques, vous étiez ici jeudi dernier, puis cela fait...

M. Boulerice: C'est la semaine passée, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): J'en ai encore parlé tantôt.

M. Boulerice: J'ai été très préoccupé durant toute une fin de semaine à essayer d'excuser le ministre des Communications.

Le Président (M. Trudel): M. le député de Saint-Jacques, s'il vous plaît, je vous dis qu'en vertu de l'article 217...

M. Boulerice: Vous avez bien raison, l'article 217 dit: "En commission, il n'y a aucun droit de réplique. "Article 218: La réplique clôt le débat." Je m'excuse, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): Nous passons maintenant au vote par appel nominal. M. French (Westmount)?

M. French: Contre, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): M. Audet (Beauce-Nord)?

M. Audet: Contre, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): M. Boulerice (Saint-Jacques)?

M. Boulerice: Pour, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): M. Brassard (Lac-Saint-Jean)?

M. Brassard: Pour.

Le Président (M. Trudel): M. Hains (Saint-Henri)?

M. Hains: Contre.

Le Président (M. Trudel): M. Hamel (Sherbrooke)?

M. Hamel: Contre, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): Mme Harel (Maisonneuve)?

Mme Harel: Pour.

Le Président (M. Trudel): Mme

Hovington (Matane)?

Mme Hovington: Contre.

Le Président (M. Trudel): Mme Juneau (Johnson)?

Mme Juneau: Pour.

Le Président (M. Trudel): M. Cannon (La Peltrie)?

M. Cannon: Contre, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): Mme Pelchat (Vachon)?

Mme Pelchat: Contre, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): And the results are?

La Secrétaire: Quatre pour, sept contre et une abstention. M. Khelfa...

Le Président (M. Trudel): Je m'excuse, M. Khelfa. Je m'en excuse, M. le député de Richelieu.

M. Khelfa: Vous êtes tout excusé, mais je suis contre, M. le Président.

La Secrétaire: Quatre pour, huit contre et une abstention.

Le Président (M. Trudel): M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: M. le Président, j'aurais une motion à soumettre à cette commission, laquelle se lirait comme suit...

Mme Pelchat: C'est un oubli?

Motion proposant la tenue d'une

consultation particulière avec les

SSJB, les SNQ du Québec et les

comités régionaux de Radio-Québec

M. Brassard: "Qu'en vertu de l'article 244 des règles de procédure de l'Assemblée nationale la commission de la culture, avant d'entreprendre l'étude article par article du projet de loi 61, Loi modifiant la Loi sur la Société de radiotélévision du Québec, tienne des consultations particulières avec les organismes suivants: Les sociétés Saint-Jean-Baptiste du Québec et les sociétés nationales des Québécois du Québec et les porte-parole des comités régionaux de Radio-Québec. Que ces consultations particulières soient tenues par la commission les 4, 5 et 6 juin 1986 à compter de 10 heures et que les organismes mentionnés soient convoqués en conséquence.

M. French: Excellent appareillement d'organimes, Jacques!

Le Président (M. Trudel): M. le député de Beauce-Nord.

M. Audet: Est-ce qu'on peut présenter une motion de blâme à l'endroit de la députée de Johnson pour avoir oublié autant d'organismes dans sa première motion?

Le Président (M. Trudel): Vous savez que les députés des deux côtés de cette table ont droit à toutes les motions.

M. Brassard: Oui, présentez-la!

Le Président (M. Trudel): Pendant que vous devisez gentiment de part et d'autre, je vais suspendre deux minutes, histoire de voir si la motion est recevable.

(Suspension de la séance à 16 h 59)

(Reprise à 17 h 1)

Le Président (M. Trudel): J'ai lu la motion... M. le député de Saint-Jacques, s'il vous plaît! J'ai lu la motion de M. le député de Lac-Saint-Jean avec, évidemment, une grande attention. Je vous avoue que, pour les

raisons que je vais invoquer, j'ai eu de la difficulté à la recevoir. Je la reçois cependant. Mais je vous explique que je vois moins la pertinence de faire comparaître la Société Saint-Jean-Baptiste et les différents groupes de la Société nationale des Québécois, si on parle surtout, dans le projet de loi 61, d'une restructuration administrative. Je ferai remarquer, d'autre part, qu'il faudrait spécifier, quand on parle des porte-parole des comités régionaux de Radio-Québec, dans la mesure où on a déjà rejeté une motion qui demandait que les présidents des comités régionaux... Il faudrait qu'on sache quels sont les porte-parole des comités régionaux de Radio-Québec. J'ai la très nette impression, quand on parle des porte-parole régionaux de Radio-Québec, qu'on parle des présidents.

Je vais accepter cette motion du député de Lac-5aint-Jean, mais avec beaucoup plus de réticence que les autres parce que cela m'apparaît beaucoup moins évident et un tantinet répétitif.

M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: Je vous remercie, M. le Président.

J'essaierai d'ailleurs, en même temps que je vais défendre ma motion, d'en démontrer la pertinence. Je vous dirai tout d'abord qu'il m'apparaissait quasiment tout à fait anormal que la commission tienne des audiences particulières sans que des porte-parole, des représentants des comités régionaux soient appelés à venir témoigner devant nous. Or, par une de vos décisions, que je respecte d'ailleurs, c'était devenu impossible puisque vous aviez jugé irrecevable une motion qui réduisait la liste déjà présentée par la députée de Johnson, mais en mentionnant toutefois dans votre décision, je vous le rappelle, que vous l'aviez rejetée parce qu'elle ne comportait pas d'éléments nouveaux. Nous nous sommes pliés de bonne grâce à votre décision. Cette fois-ci, cependant, sans en faire un débat, je vous signale que, s'il est vrai que les porte-parole des comités régionaux, en tout cas, les comités régionaux comme tels, se retrouvent dans d'autres motions qui ont été battues déjà par cette commission, il reste qu'il y a un élément nouveau et ce sont les sociétés Saint-Jean-Baptiste et les sociétés nationales du Québec.

Pourquoi cette motion? Pour une raison très simple. C'est à leur demande même que je présente cette motion. Non pas qu'ils m'ont contacté directement pour m'inciter à présenter cette motion, mais par voie de conférence de presse - j'ai devant moi le communiqué de presse - les sociétés Saint-Jean-Baptiste, de même que les sociétés nationales des Québécois ont réclamé la tenue d'une commission parlementaire. J'ai ici devant moi un communiqué de presse qui faisait suite à une conférence de presse, en date du 29 mai 1986, et dont le premier paragraphe est le suivant: "Nos régions sont les premières concernées par les fermetures de stations régionales de Radio-Québec annoncées par le gouvernement. Nous nous unissons aujourd'hui pour demander publiquement une commission parlementaire sur l'avenir de Radio-Québec."

On retrouvait à cette conférence de presse M. Babin, porte-parole du groupe et également président de la Société Saint-Jean-Baptiste de la Mauricie. 11 y avait aussi la Société Saint-Jean-Baptiste de Québec et celle de 5herbrooke, de même que les sociétés nationales des Québécois de la capitale et de l'Outaouais. On retrouvait ensemble cinq sociétés du Mouvement national des Québécois qui réclamaient en choeur une commission parlementaire sur l'avenir de Radio-Québec et qui, déjà, se prononçaient contre l'abolition de la régionalisation de Radio-Québec considérant Radio-Québec comme étant un outil de développement régional aussi bien au niveau culturel qu'économique. Pour ces raisons, je pense qu'en bonne démocratie il est normal que l'on accède à des demandes légitimes comme celle-là. Cela m'apparaît une demande parfaitement légitime.

Le Mouvement national des Québécois est un mouvement fort ancien qui a des racines profondes dans toutes les régions du Québec, qui est très actif, qui est très vigilant concernant l'évolution de la société québécoise, qui intervient fréquemment et à bon escient, d'ailleurs, et de façon très positive dans la plupart des grands débats qui passionnent la société québécoise ou qui ont agité la société québécoise dans le passé. Ils ont l'habitude de témoigner devant des commissions parlementaires et je pense que leur point de vue serait très intéressant.

C'est pour cette raison qu'on les retrouve dans la motion que j'ai présentée. Il y a un paragraphe de leur communiqué de presse qui me semble intéressant et que je n'hésite pas à vous citer également. C'est que les représentants de ces cinq sociétés se disent prêts à participer à un groupe de travail qui aurait pour objectif de préparer des solutions aux fermetures annoncées. Voilà une offre très positive de ces sociétés faite au ministre. Les sociétés Saint-Jean-Baptiste et les sociétés nationales disent au ministre: Écoutez, nous connaissons bien les régions, nous connaissons bien les attentes et les aspirations des régions, nous sommes disposés à vous aider à participer à des comités de travail de façon à trouver des solutions aux fermetures annoncées. Je pense qu'un tel appel ou une telle offre mérite d'être considérée par le ministre.

D'autre part, l'autre élément de ma proposition, ce sont évidemment les comités régionaux. Je ne veux pas préciser plus

longuement. Je suis convaincu que ma collègue de Johnson, qui connaît bien les comités régionaux, leur rôle, leurs fonctions, va sûrement en parler mieux que moi, mais je pense qu'il est absolument essentiel que si les syndicats ne sont pas convoqués, si les syndicats regroupant les travailleurs de Radio-Québec ne sont pas convoqués par l'entremise de la Fédération nationale des communications, puisque ma motion a été rejetée, si les partis politiques ne sont pas convoqués' - on vient de voter contre cette motion pourtant tout à fait intéressante du député de Saint-Jacques et, donc, les partis politiques ne viendront pas témoigner - à tout le moins il m'apparaît essentiel, nécessaire, indispensable que les porte-parole des comités régionaux le soient. Cela pourrait être les présidents dans certains cas, cela pourrait être aussi les directeurs régionaux; ce sont les comités régionaux eux-mêmes qui désigneront leurs porte-parole pour venir témoigner devant cette commission.

Ce sont les plus touchés, ce sont les comités régionaux qui sont touchés. Les neuf comités régionaux qui existent actuellement au sein de Radio-Québec sont abolis purement et simplement, disparaissent. On maintient certains bureaux ouverts, on en ferme d'autres, mais les comités régionaux comme tels, eux, disparaissent, sont carrément abolis. Il me semble qu'on pourrait au moins les entendre avant de passer à l'étude détaillée du projet de loi. Est-ce que c'est une revendication illégitime? Est-ce que c'est une réclamation farfelue, scandaleuse que de permettre à ceux qui vont mourir de saluer le ministre? Comme on disait dans la Rome antique: "Ceux qui vont mourir te saluent." On pourrait au moins permettre à ceux qui vont mourir de saluer le ministre et de venir devant la commission parlementaire avant de sombrer dans le néant puisque c'est là sa volonté. En tout cas, encore une fois, c'est un dernier effort, un des derniers efforts que l'on fait. On en fera quelques autres encore, mais on arrive au bout du rouleau, je dirais, parce qu'on devient, dans une circonstance comme celle-là, envahi par la désespérance en quelque sorte.

Des voix: Ah! Ah! Ah!

M. Brassard: On en arrive à désespérer et à...

M. French: ...trop tôt.

M. Brassard: ...lancer la serviette parce qu'on se bute à un mur de pierre, on se bute à une intransigeance absolue de la part du ministre. C'est une tentative qui m'apparaît, en tout cas, raisonnable de dire au ministre: Écoutez! Au moins, entendons les porte-parole des instances qu'on va abolir. Ce n'est pas beaucoup ce qu'on demande là. On réduit notre liste à peu de chose: les sociétés Saint-Jean-Baptiste qui viennent tout juste de réclamer d'intervenir dans le débat et les porte-parole des comités régionaux. Voilà une demande qui m'apparaît raisonnable. Ne pourrait-on pas faire consensus là-dessus? Il me semble que si on pouvait faire un consensus là-dessus, cela ne prendrait pas beaucoup de temps. Je pense qu'en une demi-séance tout au plus, au maximum une séance, on pourrait entendre ces groupes-là. C'est peu de chose. Est-ce que cela retarderait indûment l'étude détaillée du projet de loi? Je ne le pense pas. Je pense qu'on arrive vraiment avec une demande on ne peut plus raisonnable, nous de l'Opposition. On a restreint et on restreint, depuis des heures, nos exigences, nos revendications. Je pense qu'on en est arrivé au minimum, au strict minimum. Le minimum, c'est de permettre aux comités régionaux de se faire entendre. Ce sont eux les plus directement touchés, les plus concernés par le bouleversement de structures engendré par le projet de loi. Est-ce que le ministre ne pourrait pas convenir qu'il s'agit là d'une demande on ne peut plus raisonnable? Est-ce que les membres de la majorité ne pourraient pas sur cette motion faire consensus avec les membres de l'Opposition, pour une fois, de façon qu'on puisse à tout le moins tenir une audience particulière, mais vraiment à son strict minimum? C'est un dernier appel. C'est un appel angoissé que je lance. Un appel angoissé.

Le Président (M. Trudel): M. le député...

M. Brassard: J'essaie, évidemment, de me contraindre et...

Une voix: Un appel de détresse.

M. Brassard: Oui, presque un appel de détresse aux ministériels pour qu'ils répondent à la main tendue et qu'on accepte cette motion parfaitement raisonnable.

Le Président (M. Trudel): Merci, M. le député de Lac-Saint-Jean.

Mme la députée de Johnson.

Mme Jumeau: Merci beaucoup, M. le Président. Vous comprendrez facilement pourquoi, de la même façon que mon collègue, le député de Lac-Saint-Jean, j'interviens, comme je fais partie d'une région qui a eu le malheur - je ne sais pas quel terme employer - de tomber sous le couperet du ministre des Communications.

Les comités régionaux étaient composés de sept membres nommés par le gouvernement, soit pour chaque comité quatre personnes recommandées par des organismes

socio-économiques, populaires et culturels de la région, deux personnes recommandées par les institutions d'enseignement de la région, une personne choisie parmi et par les employés de Radio-Québec travaillant dans nos régions, M. le Président. Ce n'est pas n'importe qui. Ce sont des gens de nos régions, des gens qui ont des choses à dire. Depuis que vous avez décidé de ne rien entendre, M. le ministre, on a eu à quelques reprises, dans les journaux régionaux, des manifestations d'états d'âme et des réclamations de la part de ces personnes dûment nommées par les groupes socio-économiques, par toutes les institutions dont je vous ai fait mention tout à l'heure. Je pense, entre autres, à M. Jacques Lessard, qui est le directeur de Trois-Rivières, qu'un de vos députés a vilipendé de façon presque irrespectueuse. J'oserais dire que, lorsqu'un de vos députés a dit que la tête de M. Jacques Lessard ne valait pas 900 000 $, je pense, à mon point de vue, que ce député n'aurait jamais dû faire cette intervention malheureuse, M. le Président. On ne fait pas d'intervention de cette nature lorsqu'on parie... (17 h 15)

Le Président (M. Trudel): Mme la députée de...

Mme Juneau: ...d'un directeur régional...

Le Président (M. Trudel): Je ne veux pas vous empêcher de défendre un de vos ex-collègues...

Mme Juneau: Mais, M. le Président...

Le Président (M. Trudel): ...candidats, mais je vous rappellerai la pertinence du débat, s'il vous plaît.

Mme Juneau: ...je vous parlais, non pas de l'ex-collègue-candidat, mais je vous parlais du directeur régional de Trois-Rivières. Si vous avez confondu, c'est votre problème, M. le Président. Je vous parlais du directeur régional de Radio-Québec. Je pourrais vous parier aussi de M. Antonin Collard. Vous n'allez pas dire que c'est un autre de nos candidats. M. Antonin Collard est le directeur régional de Chicoutimi. Je voudrais vous parler aussi de M. Gaston Bachand, de l'Estrie. Allez-vous me dire, M. le Président, que c'est un autre de nos candidats?

M. French: Vous signez le bulletin de votre candidat.

Mme Juneau: Je m'excuse, M. le Président, je m'excuse auprès du ministre aussi. Ce n'est pas un de nos candidats.

M. French: Vous signez le bulletin de votre candidat.

Mme Juneau: C'est notre directeur régional en Estrie. Lui aussi a réclamé de la part du ministre cette commission parlementaire parce que nous, en Estrie, M. le Président, on a aussi des choses très importantes à dire et je pense que le directeur régional, M. Bachand, lorsqu'il a fait état dans les journaux de ce que la ministre responsable à la Condition féminine avait dit contre la région de l'Estrie, concernant cette fermeture éventuelle, M. le Président... Je pense que M. Gaston Bachand, qui est notre directeur régional, aurait bien des choses à dire, lui aussi, concernant la station Radio-Québec en Estrie.

Je voudrais simplement aussi vous mentionner que le gouvernement supprime Radio-Québec en Estrie sous prétexte que la région est bien desservie. Je parle de l'Estrie parce que vous comprendrez très bien que je suis native de là, donc je connais le coin amplement pour être capable de vous en parler pendant dix, quinze, vingt ou trente minutes...

M. French: C'est assez.

Mme Juneau: Vous croyez, M. le ministre? Est-ce que vous voulez intervenir? Non.

Vous avez dit que, si vous coupiez l'Estrie, c'était parce qu'on était bien desservis par d'autres réseaux et stations de télévision. Mais, M. le ministre, avez-vous oublié que, nous aussi, les Estriens, nous payons des impôts comme le reste des Québécois? On a le droit de conserver, sinon un centre administratif, au moins un certain pourcentage d'heures de télévision par mots à Radio-Québec et, répétons-le, pas de la télévision produite par des penseurs intellectuels de Montréal, M. le Président, mais de la télévision conçue par des gens d'ici, pour des téléspectateurs d'ici.

Déjà, sur certains dossiers comme la cartographie, le textile, le sommet socio-économique de l'Estrie, une maison de production privée de télévision est impliquée, ce qui contribue à alléger le fardeau financier de la production. C'est dans cette veine qu'il faut poursuivre et non pas en faisant appel à la maison mère, M. le Président. Si le ministre avait accepté d'écouter, non seulement le comité régional provenant de la région de l'Estrie, mais aussi les trois autres comités régionaux, soit celui de Hull, de Trois-Rivières et de Québec, tel qu'exigé par eux, ce sont des expressions de pensée qu'il aurait pu écouter et il aurait pu se faire une idée plus juste que celle qu'il a prise hâtivement et qu'il s'est dépêché de mettre à exécution parce que, à ce qu'on a entendu, il fallait que ce projet de loi soit adopté avant le 20 juin à tout prix. Je ne

sais pas ce qui presse le ministre autant que cela pour faire adopter en vitesse ce projet de loi avant le 20 juin. Je pense qu'une loi, pour bien s'adapter aux coutumes et aux besoins des gens qui vivent ici au Québec, doit être le reflet des gens, et, si on fait une loi barbare qui coupe les régions, M. le Président... Je crois que les gens ont le droit de s'élever et de clamer leurs droits, au moins, pour qu'on leur donne la chance de s'exprimer ici en commission parlementaire pour être capable de définir ce qui va et ce qui ne va pas. Dans un premier temps, ces directeurs régionaux, en plus des présidents régionaux qui faisaient, qui font partie encore, jusqu'à ce que le ministre ait complètement cisaillé les régions, tous ces gens, dis-je, qui font encore partie du conseil d'administration en tant que tel avaient exprimé au ministre le fait que, s'il ne pouvait passer outre, ils pouvaient vivre avec cette compression tout en travaillant de façon différente. La raison pour laquelle les gens de l'Estrie seraient venus ici en commission parlementaire comme les autres personnes des autres régions, c'était tout simplement pour aider le ministre. Nous savons à quel point un ministre responsable doit prendre politiquement des engagements. C'est donc dans le but principal de soulager le ministre et de l'aider à prendre une décision qui serait tout à fait selon la volonté des gens qui vivent ici au Québec et principalement dans les quatre régions données. Il se peut donc, M. le ministre, que, si vous acceptez éventuellement de rencontrer ces gens, vous allez vous apercevoir que, dans leurs commentaires, dans leur vue d'ensemble de ce qu'est Radio-Québec, ils pourront informer le ministre de façon adéquate et substantielle. Je souhaite de tout mon coeur, pour les gens que je représente avec fierté, les gens de la région de l'Estrie, que vous leur donniez une écoute attentive et que vous leur donniez le privilège, parce que c'est un privilège, de venir auprès des élus de chacun des comtés du Québec s'exprimer et de leur dire combien il est important de les entendre et de les écouter. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): Merci, Mme la députée de Johnson. Je vais reconnaître Mme la députée de Matsonneuve.

Mme Harel: Merci, M. le Président. Je crains de ne pas pouvoir terminer mon intervention de dix minutes, puisque je devrai peut-être monter à l'Assemblée pour prendre la parole, alors je vais immédiatement faire cette intervention sur cette motion visant à entendre les représentants et porte-parole des sociétés nationales des Québécois en régions, de même que les porte-parole régionaux de Radio-Québec.

M. le Président, vous imaginez-vous la réaction, le tollé de protestations qui aurait suivi, si, à une demande de rencontre des porte-parole d'Alliance Québec, lors du précédent gouvernement, les réactions auraient été que ce n'était pas utile de les entendre puisque la plupart d'entre eux s'exprimaient par la voix du parti d'Opposition. Imaginez ce qu'on peut penser comme véhémence des réactions pour protester contre le fait qu'on confonde un mouvement, Alliance Québec, un mouvement légitime qui représente à bon droit les intérêts de ses membres, avec les intérêts du parti d'Opposition. Ce qui m'étonne beaucoup, c'est qu'on ne se rende pas compte, lorsqu'on entend cette réaction selon laquelle ce n'est pas nécessaire d'entendre les porte-parole des sociétés nationales en régions, qu'il s'agirait de péquistes qui n'auraient pas de légitimité pour représenter les intérêts de leurs membres et de leur région... Je me prononce fermement, M. le Président, contre cette sorte de hauteur arrogante. Il est facile de constater qu'il n'y a pas beaucoup de clientèles qui aient été l'otage du Parti québécois dans aucune des élections que nous avons tenues; à preuve, nos élections partielles. Je suis bien placée pour le savoir étant députée d'un comté qui a connu un député de l'Opposition durant une courte période, après une élection partielle. Il n'y a pas de clientèle captive, il n'y a pas de porte-parole qui soient des otages. Il y a des porte-parole qui sont audacieux, qui sont courageux, mais qui ont à coeur l'intérêt de leur région. Je crois que ce qui est en cause, c'est plus une défiance profonde à l'égard d'un certain projet de régionalisation, parce que, si on fait le reproche aux porte-parole de la Société nationale des Québécois d'être, tout compte fait, d'accord avec l'Opposition actuelle et, donc, on conclut qu'ils en seraient pour autant péquistes, il faut voir qu'il en va de même pour les représentants des MRC, les municipalités régionales de comté, un des projets de structuration régionale qui a obtenu l'appui de l'ensemble des intervenants municipaux et régionaux et où on retrouve des porte-parole qui se sont toujours dits très favorables à cette régionalisation.

Ce seraient donc là encore des péquistes qu'on ne devrait pas écouter. Il en va de même de l'ensemble des structures régionales. Qu'on pense aux conseils régionaux de la culture, aux conseils régionaux des loisirs, à l'ensemble de ce projet de régionalisation dont on pouvait lire, sous la plume de Jean-Paul L'Allier, dans le Devoir de samedi, que le reproche qu'on pouvait faire au gouvernement précédent était peut-être de ne pas être allé assez loin en termes de soutien au développement culturel régional. Il en donnait une démonstration en signifiant que des change-

ments apportés pour une somme de 2 000 000 $ ou 3 000 000 $ au système d'éclairage ou de son du Grand Théâtre de Québec allaient de soi, mais qu'une salle de concert, par exemple, ou de théâtre à Baie-Comeau tardait depuis plus d'une décennie et que cette salle, disait-il, aurait pourtant certainement pour effet, d'abord, de diffuser nos produits culturels, mais aussi de permettre à la population de ne pas se sentir défavorisée, de ne pas se sentir, d'une certaine façon, abandonnée sur le plan culturel, à la merci, finalement, du média électronique qui lui parle de ce qui se passe ailleurs en lui présentant des images d'ailleurs.

Je crois que l'intérêt d'entendre les représentants régionaux, tant des sociétés nationales que des organismes de Radio-Québec, des organismes régionaux, c'est que sans doute ils ont quelque chose de constructif à dire au ministre sur la façon d'appliquer ses restrictions budgétaires. Ils ont une certaine expertise. Je me rappelle, par exemple, la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal, que je connais mieux que les autres sociétés en régions, qui, au moment du développement radiophonique, a été l'initiatrice de bien des radios en régions. Par exemple, la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal détenait des actions fondatrices dans des radios le long du fleuve, dans la Gaspésie, sur la Côte-Nord, parce que, pour les sociétés nationales, le développement des communications de masse francophones a été au coeur même du projet qu'elle s'est donné de promotion des intérêts des francophones en Amérique du Nord. Il y a là une expertise certaine. (17 h 30)

Pensons tout simplement au développement des radios chez les francophones hors Québec. Pensons au développement actuel d'une radio française chez les francophones d'Amérique, nos cousins du sud, qui bénéficient actuellement de subventions des sociétés Saint-Jean-Baptiste grâce à des fondations qui ont été créées pour développer la radiophonie chez les francophones hors Québec. Pensons simplement à Vancouver où une expérience soutenue par le Mouvement national des Québécois et par le ministère des Communications permettra sur la Place de l'Exposition une radio communautaire francophone, tout cela grâce à l'initiative du Mouvement national des Québécois. Il faut voir qu'il y a là une expertise qui, certes, aurait été extrêmement intéressante pour la mise en oeuvre des solutions plus adéquates à l'égard de Radio-Québec.

M. le Président, j'imagine le sort qui sera fait à cette motion. Je le déplore. Je pense que cela aurait certainement pu être intéressant d'entendre les porte-parole des sociétés régionales et des bureaux régionaux de Radio-Québec. Merci.

Le Président (M. Trudel): Merci, Mme la députée de Maisonneuve. Est-ce qu'il y a un autre intervenant sur la motion du député de Lac-Saint-Jean?

M. Boulerice: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): M. le député de Saint-Jacques.

Une voix: C'est difficile.

M. Boulerice: Oui, c'est effectivement une situation extrêmement difficile et pénible que vous faites vivre à Radio-Québec, à la population du Québec qui écoute cette télévision, aux membres de cette commission parlementaire, à ceux de notre formation et à la vôtre également puisqu'il semble y avoir un bâillon de toute évidence.

Bien entendu, je vais appuyer sans aucune réserve la motion présentée par mon collègue, député de Lac-Saint-Jean et whip en chef de ma formation politique, afin d'inviter la Société Saint-Jean-Baptîste et la Société nationale des Québécois. Mon collègue faisait part tantôt de ses humanités en vous citant cette phrase célèbre: "Ave Caesar, morituri te salutant", Salut César, ceux qui vont mourir te saluent. C'est un peu le sentiment qui anime les stations régionales. Je ne demeurerai pas en reste et je dirai, M. le ministre, que je suis profondément déçu de vous voir, tel Zeus sur son olympe westmountais, brandir vos foudres sur Radio-Québec et surtout rester sourd aux suppliques de ces pauvres mortels qui, en bas de cet olympe où vous siégez, vous supplient de réfléchir et d'écouter les sages qui s'offrent pour vous conseiller. Je dis bien les sages.

M. le ministre, vous avez été, depuis le début de cette question, à mon point de vue, atrocement méprisant. D'abord, vous avez traité Radio-Canada de vache sacrée du PQ, ce que les nombreux artisans et artisanes de cette télévision d'État ne méritaient sûrement pas. Vous avez été, M. le ministre, tout aussi méprisant en rejetant une liste impressionnante d'organismes que l'on vous suggérait pour éclairer vos propos, des gens qui, au Québec, se sont donné une crédibilité, des gens qui, au Québec, sont respectés par le sérieux de leurs propos et le travail qu'ils font depuis des années. Là, en dernier recours presque, M. le Président, nous vous proposons d'inclure la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal comme interlocuteur à cette commission parlementaire. Est-ce que vous ajouterez encore au mépris, M. le ministre, comme vous l'avez si malheureusement fait depuis le tout début de la commission, en rejetant de nouveau - ce qui semble possible puisqu'il y a consigne du vote comme il y a consigne du

silence chez nos amis d'en face - un organisme qui, au Québec, depuis près de 150 ans est au service de la nation et qui l'a, d'ailleurs, prouvé par des interventions non partisanes tout au long de son histoire dans les sujets qui sont les plus préoccupants pour la survie de la communauté francophone au Québec et au Canada même, soit la langue, la culture, les traditions? Cela a été la marque de commerce, M. le ministre, de la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal avec, plus récemment, d'autres relais qui sont ces sociétés nationales des Québécois que l'on rencontre partout en province et qui sont, elles aussi, profondément impliquées dans cette vie nationale, cette vie régionale, et qui contribuent, justement, à assurer la crédibilité globale de cette société nationale qu'est la Société Saint-Jean-Baptiste du Québec.

Le gouvernement précédent, comme le vôtre, a confié, dans une très large mesure, a la Société Saint-Jean-Baptiste l'organisation d'un des événements les plus importants pour notre collectivité: celui de notre fête nationale qui, malheureusement, a failli être changée, modifiée, n'eût été notre vigilance et celle de la population du Québec.

Lorsque l'on confie à cette puissante -et surtout très sérieuse - société nationale, M. le ministre, l'organisation d'un événement aussi important pour la vie d'un peuple - et vous avez vu avec quelle fierté mon collègue de Viger, ce matin, soulignait la fête nationale de la république italienne comment pouvez-vous, encore une fois, songer - comme je suis persuadé que vous êtes en train de le faire - à balayer du revers de la main l'addition d'un intervenant aussi prestigieux quand on sait pertinemment que rien de ce qui est solide, durable et bénéfique pour le peuple du Québec n'a été fait sans le concours de la Société Saint-Jean-Baptiste?

Il s'agit de relire tous les manuels d'histoire écrits dans ce pays pour voir que la Société Saint-Jean-Baptiste a défendu les causes justes avec cet esprit visionnaire qu'on lui connaît. Cette société, M. le Président, j'ose espérer que le ministre n'ira pas encore, là aussi, comme il l'a fait depuis je ne sais pas exactement combien d'heures, la. rejeter et la lancer dans sa boîte déjà très remplie de deux de pique, comme je l'ai appelée avec beaucoup d'humour et surtout beaucoup de tristesse, parce que cela-témoigne du mépris qu'il affiche envers les intervenants que nous lui avons suggérés. Est-ce que la Société Saint-Jean-Baptiste, les sociétés nationales des Québécois et les porte-parole régionaux des antennes de Radio-Québec, après, eux, avoir été traités de "vaches sacrées du PQ", vont devenir des deux de pique? Je pense, M. le ministre, que vous avez atteint maintenant ce qu'on appelle et ce qui se comprend très bien dans votre comté - et vous allez me permettre d'employer l'idiome courant dans votre comté, "the fail-safe point". Au-delà d'un dernier refus, M. le ministre, je pense que vou3 atteignez un point de non-retour. Pour emprunter une autre expression qui est plus française et qui dit: Au-delà de cette limite, votre ticket n'est plus valide, je vous dirais, M. le ministre, que le rejet que vous feriez de cette motion que nous vous présentons -et j'ose espérer que vous ne le ferez pas -ferait effectivement qu'au-delà de cette limite votre ticket ne serait plus valide, c'est-à-dire, dans votre cas, votre crédibilité, M. le ministre, en tant que ministre des Communications du gouvernement du Québec et de ministre chargé de protéger - je sais que vous en êtes . capable - la culture française au Québec.

M. le ministre, à l'exemple de mon collègue, je vous supplie, pour l'avenir de Radio-Québec, pour la place que vous occuperez dans l'histoire du Québec aussi, de prendre en très sérieuse considération la motion qui vous est présentée par mon collègue le député de Lac-Saint-Jean, et cette fois-ci de ne pas donner le signal, en tant que ministre et principal porte-parole à cette table, de cette cavale éhontée de "non" que nous avons malheureusement entendus trop souvent depuis le début de la commission. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): Merci, M. le député de Saint-Jacques. Est-ce que d'autres députés veulent s'exprimer sur la motion du député de Lac-Saint-Jean?

Je vais mettre cette motion aux voix en vous...

Mme Juneau: Vote nominal.

Le Président (M. Trudel): Toujours, Mme la députée de Johnson.

Mme Juneau: Merci.

Le Président (M. Trudel): Oui, M. le député de Beauce-Nord.

M. Audet: Est-ce qu'on ne peut pas enregistrer le même vote au lieu de toujours voter comme cela?

Mme Juneau: Non, je pense qu'il est important que, chaque fois qu'on a une motion, M. le Président, on puisse entendre vraiment, par chacun des membres de cette commission, son accord ou son refus.

M. Boulerice: Et l'histoire retient...

Le Président (M. Trudel): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Brassard: M. le Président, une petite question de règlement. Je comprends que...

Le Président (M. Trudel): Non, c'est moi qui décide des questions de règlement, M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: Je soulève une question de règlement.

Le Président (M. Trudel): Quel article invoquez-vous?

M. Brassard: Je fais référence à l'allusion que vient de faire le député.

Le Président (M. Trudel): Je peux peut-être...

M. Brassard: Non.

Le Président (M. Trudel): Je pense que tout le monde se comprend.

M. Brassard: C'est simplement pour dire que je comprends que vous commenciez à être gêné de...

Le Président (M. Trudel): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Brassard: ...voter contre.

Le Président (M. Trudel): Je vais maintenant lire la motion...

M. Brassard: Je comprend cela.

Le Président (M. Trudel): ...qui va être...

M. Brassard: Je comprends votre gêne.

Le Président (M. Trudel): ...mise aux voix par... À l'ordre, s'il vous plaît!

Je fais maintenant lecture de la motion du député de Lac-Saint-Jean qui va être mise aux voix. À l'ordre, s'il vous plaît! La motion se lit comme suit: "Qu'en vertu de l'article 244 des règles de procédure de l'Assemblée nationale la commission de la culture, avant d'entreprendre l'étude article par article du projet de loi 61, Loi modifiant la Loi sur la Société de radiotélévision du Québec, tienne des consultations particulières avec les organismes suivants: les sociétés Saint-Jean-Baptiste du Québec, les sociétés nationales des Québécois du Québec et les porte-parole des comités régionaux de Radio-Québec. Que ces consultations particulières soient tenues par la commission les 4, 5 et 6 juin 1986 à compter de 10 heures et que les organismes mentionnés soient convoqués en conséquence."

Vote sur appel nominal. M. French (Westmount)?

M. French: Contre, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): M. Audet (Beauce-Nord)?

M. Audet: Contre, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): M. Boulerice (Saint-Jacques)?

M. Boulerice: Pour, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): M. Brassard (Lac-Saint-Jean)?

M. Brassards Pour.

Le Président (M. Trudel): M. Hains (Saint-Henri)?

M. Hains: Contre.

Le Président (M. Trudel): M. Hamel (Sherbrooke)?

M. Hamel: Contre, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): Mme

Hovington (Matane)?

Mme Hovington: Contre, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): Mme Juneau (Johnson)?

Mme Juneau: Pour, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): M. Khelfa (Richelieu)?

M. Khelfa: Contre, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): Mme Pelchat (Vachon)?

Mme Pelchat: Contre.

Le Président (M. Trudel): Je m'excuse, M. Cannon (La Peltrie)?

M. Cannon: Je suis contre également.

Le Président (M. Trudel): Merci, M. le député de La Peltrie.

La Secrétaire: Pour: 3; contre: 8; abstentions: 1.

Le Président (M. Trudel): La motion du député de Lac-Saint-Jean est rejetée.

Mme Juneau: Est-ce qu'on peut voter par procuration, parce que ma collègue est allée en Chambre faire un autre discours?

Le Président (M. Trudel): Non, madame. Mme Juneau: Cela ferait 4 pour.

Le Président (M. Trudel): II m'est arrivé dans une autre commission et à un autre moment d'être obligé de m'absenter...

Mme Juneain Ce n'est pas possible, M. le Président?

Le Président (M. Trudel): Ce n'est pas possible.

Boulerice: En vertu de quel article déjà?

Des voix: Ha! Ha! Ha!

Le Président (M. Trudel): M. le député de Saint-Jacques, je vous demanderais de me faire confiance là-dessus. Vous le savez aussi bien que moi. Oui, Mme la députée de Johnson.

Motion proposant la tenue d'une consultation particulière avec

l'UDA et les producteurs télévisuels indépendants du Québec

Mme Juneau: J'aurais une motion à apporter à ce moment-ci: "Qu'en vertu de l'article 244 des règles de procédure de l'Assemblée nationale la commission de la culture, avant d'entreprendre l'étude article par article du projet de loi 61, Loi modifiant la Loi sur la Société de radiotélévision du Québec, tienne des consultations particulières avec les organismes suivants: l'Union des artistes et les producteurs télévisuels indépendants du Québec. Que ces consultations particulières soient tenues par la commission les 4, 5 et 6 juin 1986 à compter de 10 heures et que les organismes mentionnés soient convoqués en conséquence."

Le Président (M. Trudel): Je vous remercie, Mme la députée de Johnson. Je vais suspendre pour quelques secondes avant de statuer sur la recevabilité de la motion.

(Suspension de la séance à 17 h 46)

(Reprise à 17 h 47)

Le Président (M. Trudel): Mme la députée de Johnson, je vais recevoir votre motion, vous faisant quand même la remarque suivante: L'Union des artistes a été entendue par la commission de la culture pendant de nombreuses heures à l'occasion de la consultation générale sur le statut économique de l'artiste et du créateur. Il a été question, lors de cette consultation avec l'Union des artistes, de Radio-Québec.

Cela étant dit...

M. Boulerice: M. le Président...

Le Président (M. Trudel): Laissez-moi terminer, je n'ai pas terminé, M. le député. Cela étant dit, j'accepterais la motion puisque les producteurs télévisuels indépendants du Québec, c'est un organisme nouveau, quoique l'Union des artistes, j'aie plus de difficulté à l'accepter. Mais, compte tenu que l'audition des producteurs télévisuels indépendants du Québec est un fait nouveau, je vais accepter votre motion. Avant de vous céder la parole, je vais écouter M. le député de Saint-Jacques qui m'a l'air très impatient.

M. Boulerice: Je m'oppose, M. le Président, à votre décision sur la recevabilité pour ce qui est de l'Union des artistes.

Le Président (M. Trudel): M. le député, vous n'avez pas à vous opposer, j'ai reçu la motion de la députée de Johnson.

M. Boulerice: Mais vous avez enlevé l'Union des artistes!

Le Président (M. Trudel): Je n'ai pas enlevé l'Union des artistes!

M. Boulerice: Vous ne l'avez pas enlevée?

Le Président (M. Trudel): Non. M. te député, ce que j'ai dit...

M. Boulerice: J'en suis heureux.

Le Président (M. Trudel): ...c'est que je trouvais plutôt risqué de voir...

M. Boulerice: ...parce que cette galée se serait promenée, M. le PrésidentI

Le Président (M. Trudel): ...l'Union des artistes. Alors, j'accepte votre motion, je la déclare recevable.

Mme Juneau: Merci beaucoup. Étant donné que vous êtes bien conscient que je n'ai pas pu participer è la commission sur le statut de l'artiste, vous comprendrez très bien que je ne sois pas au courant de tout ce qui s'est dit. J'aurais dû - j'en conviens -faire venir les galées et relire avec attention tout ce qui s'est dit lors de la commission parlementaire sur le statut de l'artiste. Malheureusement, avec les travaux qu'on a de ce temps-ci, je pense qu'il est facile de comprendre qu'on n'a pas pu éplucher à notre guise tout ce qui s'est dit sur le statut de l'artiste à cette commission parlementaire.

Si j'ai insisté, M. le Président, pour

apporter cette nouvelle motion à la commission, c'est que je pense qu'il est important, comme le disait... J'ai entendu le tout début de l'intervention de M. Turgeon, le président de l'Union des artistes, où il faisait une comparaison entre l'UDA et l'UPA. Vous vous souvenez, M. le Président, comment l'image qu'il avait donnée lors de la lecture de son mémoire était représentative à la fois de ce que représentait pour lui l'Union des artistes, l'UDA, et de ce que représentait l'UPA pour nos producteurs agricoles.

Je pense que, si l'UPA travaille pour les gens de la production agricole, autant l'UDA fait des pieds et des mains pour que les artistes représentés par elle le soient par des gens bien informés. Je pense que M. Turgeon est venu apporter un éclairage important sur le statut de tous les artistes du Québec.

Si j'ai voulu ajouter dans ma motion les producteurs indépendants, M. le Président, c'est que vous savez très bien qu'à cause et grâce à la société Radio-Québec des producteurs indépendants, dans certains cas, ont vu le jour et, dans d'autres cas, ont grandi. Ils ont grandi parce que Radio-Québec leur a donné un souffle de vie. Ils ont grandi parce qu'on leur a donné l'occasion de fabriquer en régions des choses qu'on ne pouvait vraiment pas faire à Montréal, non pas qu'on n'avait pas tous les outils nécessaires, mais on n'avait pas l'âme, on n'avait pas la vie, les coutumes de nos régions.

Ces producteurs indépendants, dis-je, ont été un apport important pour chacune de nos régions et Radio-Québec leur a donné ce qu'il fallait pour qu'ils soient capables de produire en régions des émissions à saveur régionale. Bien sûr, Radio-Québec a été le gagne-pain de ces producteurs indépendants. Bien sûr, Radio-Québec a permis à ces porte-parole régionaux de graver sur pellicule la vie, les us et coutumes de nos régions respectives. Bien sûr, Radio-Québec leur a permis de diffuser dans tout le Québec et, grâce à leurs moyens de producteurs indépendants, d'exprimer à la face et au visage de tous les Québécois et Québécoises ce qui se passait dans nos différentes régions.

Je me souviens très bien, M. le Président, lors de l'interpellation que nous avons eue en présence du ministre responsable, lui avoir demandé si, dans le fonds spécial de 3 000 000 $ qu'il injectait dans la société Radio-Québec, éventuellement, il avait songé aux producteurs indépendants. Le ministre, si ma mémoire est fidèle, a répondu: Au moment où on se parle, je n'ai pas tout à fait défini l'utilisation de ces 3 000 000 $, mais ce n'est pas une mauvaise idée que cela puisse aider les producteurs indépendants. J'espère que le ministre, depuis ce jour de l'interpellation, est arrivé à la conclusion que les producteurs indépendants avaient fait un travail exceptionnel et avaient survécu grâce à l'aide et à la participation importante que Radio-Québec apporte dans chacune de nos régions du Québec. Donc, l'importance que les producteurs indépendants soient présents à cette commission n'a d'égal que les productions elles-mêmes que ceux-ci ont présentées à tout le Québec.

Les producteurs indépendants qui ont, comme je l'ai dit tout à l'heure, grandi grâce aux efforts de Radio-Québec, souhaiteraient intervenir pour vous indiquer à quel point c'est important que des montants d'argent leur soient décernés encore en vue d'une programmation régionale tout à fait ressemblante à chacune de nos régions.

M. le Président, je suis inquiète de savoir comment, en Abitibi-Témiscamingue, les producteurs indépendants s'y sont pris pour produire une émission traitant des réalités de la jeunesse d' Abitibi-Témiscamingue, comment elle vit, comment elle grandit, ce qu'elle espère devenir. Je pense que c'est par des producteurs indépendants que l'on a pu en connaître davantage sur les jeunes de l'Abitibi. Les femmes d'Abitibi-Témiscamingue se sont vu présentées au petit écran de L'autre télévision grâce aux producteurs indépendants. Qui mieux que nos producteurs indépendants d'Abitibi-Témiscamtngue aurait pu définir, sur le petit écran, ce qu'est la vie des femmes en Abitibi-Témiscamingue?

Je pense aussi, M. le Président, aux producteurs indépendants du Bas-Saint-Laurent qui ont fait des émissions qui s'appellent "Les décideurs de l'an 2000". Je suis persuadée que les producteurs indépendants du Bas-Saint-Laurent ont mis tout leur talent et leur dynamisme pour faire toute la lumière sur "Les décideurs de l'an 2000", provenant du Bas-Saint-Laurent. Il serait important d'entendre et d'écouter tout ce que les producteurs indépendants pourraient nous apporter comme éclairage.

Je pense aussi à l'autre facette de la motion que je viens de vous présenter. Je pense à ces artistes qui ont eu la chance de venir exprimer devant le petit écran ce que, personnellement, ils vivent par rapport à leur art. Dans mon comté, M. le Président, j'ai trois artistes dont une est venue présenter son imagination et sa façon de penser à Radio-Québec, la semaine dernière, à Trois-Rivières. Cette femme s'appelle Josseline Deschênes et elle écrit des livres pour enfants. Je pense que c'est la seule femme au Québec qui a exporté des livres pour enfants en France.

Le Président (M. Trudel): Le temps file, Mme la députée.

Mme Juneau: Oui, je veux bien, M. le Président, mais vous me permettrez de terminer en vous disant que, comme cette femme écrivain de mon comté qui a eu le privilège, par des producteurs indépendants, de venir exprimer à L'autre télévision son art et sa façon de vivre ici au Québec, tous les artistes pourraient, de la même façon, venir exprimer en commission parlementaire comment elles et ils vivent leur art et comment elles et ils peuvent nous l'exprimer à travers L'autre télévision. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): Je vous remercie, Mme la députée de Johnson. Il est 18 heures moins quelques fractions de seconde. Je suspends les travaux de la commission jusqu'à 20 heures ce soir.

(Suspension de la séance à 17 h 59)

(Reprise à 20 h 5)

Le Président (M. Trudel): À l'ordre, s'il vous plaît! Je constate qu'on a quorum.

Une voix: Je ne vous jouerai pas de mauvais tours.

Mme Juneau: Je pense que c'était à M. le député de Lac-Saint-Jean.

Le Président (M. Trudel): Nous allons poursuivre l'étude détaillée du projet de loi 61...

Mme Juneau: M. le Président...

Le Président (M. Trudel): ...Loi modifiant la Loi sur la Société de radiotélévision du Québec. Mme la députée de Johnson, vous aviez terminé votre intervention en présentant...

Mme Juneau: Oui, M. le Président... Le Président (M. Trudel): ...une motion.

Mme Juneau: ...mais j'ai toujours constaté que vous étiez très compréhensif et le deuxième intervenant de ma formation politique était le député de Lac-Saint-Jean.

Le Président (M. Trudel): Est-ce qu'on ne pourrait pas commencer par M. le député de Saint-Jacques qui, à la rigueur, pourrait nous lire les Fables de La Fontaine...

Mme Juneau: Si le député de Saint-Jacques veut s'exprimer...

Le Président (M. Trudel): ...à défaut d'imagination?

Mme Juneau: ...libre à lui, mais puisque vous souhaitez...

Le Président (M. Trudel): M. le député de Saint-Jacques, êtes-vous prêt à...

M. Boulerice: Une question de règlement, M. le Président. Vous dites: "À défaut d'imagination". À ce chapitre, je pourrais vous reprocher qu'un certain temps vous en avez eu, mais, grand bien vous fasse, vous avez préféré déchirer votre imagination.

Le Président (M. Trudel): M. le député de Saint-Jacques, est-ce que vous avez...

M. Boulerice: La parole?

Le Président (M. Trudel): Oui, vous avez la parole. Ah! Voici le député...

M. Boulerice: Voici le député.

Le Président (M. Trudel): ...de Lac-Saint-Jean.

Des voix: Ha! Ha! Ha! M. Brassard: Cela va bien.

Le Président (M. Trudel): À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Lac-Saint-Jean, si vous voulez la parole, je vous la cède; sinon...

M. Brassard: Oui, oui, oui.

Le Président (M. Trudel): ...M. le député de Saint-Jacques avait commencé à...

M. Brassard: S'il veut...

Le Président (M. Trudel): Non, il avait...

Une voix: Des entourloupettes.

M. Brassard: Allez, mon cher collègue.

Le Président (M. Trudel): Qu'à cela ne tienne, disent-ils.

Mme Juneau: L'UDA et les producteurs régionaux.

Le Président (M. Trudel): La parole est à M. le député de Lac-Saint-Jean?

M. Brassard: Oui, certainement, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): Je vous la cède avec grand plaisir.

M. Brassard: M. le Président, voilà deux

organismes qu'il conviendrait d'entendre. Je pense que mon collègue de Saint-Jacques serait plus en mesure que moi de parler de l'Union des artistes, compte tenu de sa compétence en cette matière et du fait qu'il n'y a pas si longtemps encore, quelques jours à peine, il a pu dialoguer avec cet organisme à l'occasion de la commission parlementaire portant sur le statut de l'artiste.

Quant aux producteurs télévisuels indépendants du Québec, M. le Président, je vous signale que . j'avais déjà fait une tentative de les inviter, sous forme d'amendement. Vous vous le rappelez sûrement. J'avais échoué dans ma tentative pour des raisons sans doute fort valables en vertu de notre règlement. Mais, cette fois-ci, nous nous reprenons parce que nous jugeons important que les producteurs télévisuels indépendants du Québec fassent entendre leur point de vue sur Radio-Québec, pour la raison principale suivante: c'est que la régionalisation de Radio-Québec, on l'a maintes fois signalé, souligné, a permis dans les régions, en particulier, dans la nôtre, mais, je pense, dans toutes les régions du Québec, à des producteurs indépendants de se consacrer à leur métier, alors qu'autrefois, avant la régionalisation, ces producteurs étaient généralement condamnés au chômage et à l'inaction. Le fait que des comités régionaux se soient créés en régions, le fait que ces comités régionaux aient été responsables d'une programmation et d'une production à caractère régional et que ces comités aient confié également à des firmes régionales le soin de produire un certain nombre d'émissions, cela a eu des effets bénéfiques, cela a permis littéralement à certaines firmes de venir au monde. Des firmes qui n'existaient pas auparavant, des petites firmes de production ont pu se constituer, produire et permettre, par conséquent, à des artisans et à des artistes de chez nous d'exercer leur art, d'acquérir une certaine expérience et de consolider leur compétence.

Il suffit, d'ailleurs, en cette matière, M. le Président, de jeter un coup d'oeil sur un document de Radio-Québec, sur sa production régionale 1985-1986, où l'on retrouve la liste des émissions produites par les différentes régions du Québec. Il y a, évidemment, tout ce qu'on appelle production autonome, mais il y a également une large part de ce qu'on appelle de la coproduction. On retrouve, dans chacune des régions du Québec, des petites firmes de production. J'aimerais en donner quelques exemples; par exemple, dans le Bas-Saint-Laurent, la firme L'Imagerie Inc. On retrouve cette petite firme responsable d'un certain nombre de productions commandées en quelque sorte par la région du Bas-Saint-Laurent, et c'est ainsi dans chacune des régions du Québec. Par exemple, dans le centre du Québec, les Films

Michel Audy, les Films Cinoptique. Ce sont là de petites firmes de production télévisuelle qui donnent l'occasion et la chance à des producteurs, à des artisans de se faire valoir. Chez nous, c'est la même chose, dans ma région; il y a au moins deux firmes qui ont vu le jour grâce à la régionalisation et qui ont pu ainsi procurer du travail à certains artisans de la production télévisuelle.

C'est pour cette raison, je pense, qu'il serait intéressant d'entendre les producteurs télévisuels indépendants du Québec parce qu'ils pourraient nous indiquer de façon très concrète les effets bénéfiques, l'impact bénéfique de la régionalisation de Radio-Québec dans nos différentes régions au chapitre de la création d'entreprises de production et de la création d'emplois pour les producteurs et les artisans télévisuels du Québec. Voilà pour cet organisme.

Quant à l'Union des artistes, faut-il insister et vous dire que cet organisme, cette organisation fort respectable au Québec regroupe tous les artistes de la scène au Québec, les comédiens, les réalisateurs, les producteurs et que, à ce titre-là, il serait intéressant de l'entendre sur le sort que le ministre réserve à Radio-Québec. Je suis persuadé qu'elle aurait des recommandations extrêmement positives et une opinion très précise, sinon catégorique, sur la loi qui est actuellement à l'étude devant nous.

Voilà, M. le Président. C'est une dernière tentative que l'on fait pour essayer de convaincre le ministre d'entendre au moins quelques organismes sur le dossier de Radio-Québec. Je dirais que c'est la déception qui nous habite actuellement ce soir parce que nous avions cru que le ministre avait un sens démocratique très développé; il nous l'avait démontré dans le passé. On voit qu'il a bien changé depuis quelques semaines et qu'il fait fi de toute vie démocratique et de toute manifestation démocratique, se refusant farouchement, catégoriquement à entendre qui que ce soit sur ce dossier. Le ministre, malheureusement, détient tranquillement la vérité. Il est un détenteur tranquille de la vérité, il est en possession tranquille de la vérité. Il n'a pas besoin d'entendre qui que ce soit. Il est inutile de demander à des organismes d'exprimer leur point de vue, c'est tout à fait sans intérêt pour lui. La vérité absolue, il la possède et c'est ce qui fait que, depuis jeudi dernier, nous tentons vainement de le convaincre de se livrer à un exercice éminemment démocratique qui consiste à permettre à des organismes, à des intervenants de se faire entendre en commission parlementaire. C'est là une opération qu'on pourrait qualifier de banale dans une démocratie. Mais cette opération, qu'on pourrait qualifier de banale dans une vie démocratique normale, force nous est de

constater qu'elle est impossible à faire avec un ministre qui possède la vérité absolue et qui refuse d'être à l'écoute de qui que ce soit.

C'est fort malheureux, M. le Président, mais il y a là une dernière occasion, sans doute, pour le ministre de retrouver au tréfonds de lui-même le sens de la démocratie et d'accéder à la demande que ma collègue de Johnson vient de lui faire par le biais de cette motion, invitant l'Union des artistes et les producteurs télévisuels indépendants du Québec à témoigner devant cette commission. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): Merci, M. le député de Lac-Saint-Jean. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants qui veulent se faire entendre sur cette motion de la députée de Johnson? Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: Merci, M. le Président. Mon collègue, le député de Lac-Saint-Jean, nous a indiqué que ce serait sans doute la dernière motion que cette commission aurait à entendre avant que nous entreprenions l'étude article par article du projet de loi. Puisque c'est la dernière motion, il me semblait qu'il serait peut-être intéressant de faire part à cette commission de certaines réflexions qui me sont venues à la suite de ce débat et de cette controverse venus du dépôt de ce projet de loi.

Je vous parlais, un peu plus tôt des propos qui ont été tenus par la président intérimaire de l'Association des réalisateurs et réalisatrices du Québec lors de notre commission parlementaire, sur le statut de l'artiste. Je vous disais - et j'insiste là-dessus - que ces propos étaient tenus par un artisan du cinéma qui n'était pas du tout impliqué dans la controverse actuelle concernant Radio-Québec. Ce président intérimaire de l'association des réalisateurs est lui-même le représentant des réalisateurs et réalisatrices du Québec et il faut se rappeler que cette association regroupe l'ensemble des créateurs de cinéma les plus prestigieux. Incidemment, Denys Arcand en est membre. Il faisait valoir que l'Institut québécois du cinéma venait de terminer une tournée régionale, justement, dans le but de répondre à une question qui était posée à ce moment-là à la commission et qui était d'établir un constat de ce qui pouvait se passer ou ne pas se passer en dehors des grands centres. Je dois vous dire que c'est un euphémisme parce que "de3 grands centres" se limitait plutôt à "du grand centre" qui était le centre métropolitain de Montréal. Il disait ceci: Comment obtenir à Sherbrooke ou au Lac-Saint-Jean, par exemple, la crédibilité que l'on demande aux producteurs ou aux réalisateurs? Comment obtenir l'expérience? Si on veut, dans ces régions, avoir accès à de la fiction - il parlait, évidemment, au nom des réalisateurs - c'est très difficile puisqu'on n'en a pas fait une fois encore avant. On a peut-être fait beaucoup de documentaires. Je me permettrais, d'ailleurs, de mentionner que les coupures exercées à Radio-Québec sont dramatiques pour toute la production privée où dans chacun de ces centres vous aviez de petites compagnies qui produisaient, à la demande de Radio-Québec, différents types de documents.

Je n'avais pas été très sensibilisée à cette question de la production régionale. Il y avait, évidemment, un document intitulé "La production régionale à Radio-Québec 1985-1986, Le Québec, c'est tout un monde à regarder. C'est à neuf que l'on entend le présenter." Il y a la présentation de la programmation et des productions pour chacune des régions. D'une certaine façon, il est possible que notre souci de mieux connaître le monde nous éloigne d'une connaissance plus profonde des régions du Québec elles-mêmes. Dans son intervention selon laquelle cela pouvait avoir des conséquences dramatiques sur la production privée elle-même dans les centres, ce président intérimaire faisait valoir ceci - et je le rappelle rapidement parce que je crois que c'est important pour la suite des choses, quelle que soit l'issue de ce débat et de ce vote que l'on aura en Chambre - II y a un fonds de 3 000 000 $ qui semble avoir été conservé à cette fin, c'est-à-dire pour de la production régionale. Mais on se demande vraiment comment il sera administré, à partir de quels critères. On risque, encore un fois, avec ce type de fonds, de se retrouver dans la situation où Radio-Québec (Montréal) fera affaires avec un producteur de Montréal qui, lui, peut-être, enverra ses équipes en régions pour faire les tournages. Enfin, concluait-il, il faudrait être vigilant pour s'assurer que ce montant de 3 000 000 $ stimule une production régionale.

Je crois que c'est là certainement essentiel à l'ensemble de cette réflexion que nous poursuivons présentement et je souhaite que ces propos soient retenus par les personnes en autorité à Radio-Québec. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): Merci, Mme la députée de Maisonneuve. M. le député de Saint-Jacques.

M. Boulerice: M. le Président, je pense que je me dois de reprendre les propos de mes collègues ici, autour de cette table. Je pense que c'est une espèce de dernier appel que l'on lance au ministre des Communications en espérant qu'il daigne bien l'entendre comme il daigne bien vouloir nous écouter autour de cette table sur un sujet aussi sérieux que celui de Radio-Québec.

On a soumis, depuis le début de cette commission, une liste d'intervenants qui, à mon point de vue, étaient probablement - et, là, je reprends toujours les paroles que j'ai prononcées aux différentes interventions précédentes - des organismes qui, je crois, au Québec ont fait leurs preuves par leur implication dans tous les domaines, par le sérieux des propos qu'ils ont toujours tenus et surtout par cette richesse d'expérience qu'ils ont, chacun dans son domaine.

À tour de rôle, lorsqu'on a appelé ces intervenants pour une éventuelle commission parlementaire sur Radio-Québec, vous les avez tous rejetés, organisme après organisme, peu importe ce qu'ils étaient, et Dieu sait que vous êtes bien placé pour savoir ce qu'ils représentent puisque vos fonctions antérieures vont ont déjà amené à rencontrer ces gens-là.

Donc, en dernière tentative, nous ajoutons les producteurs indépendants et l'Union des artistes. À la défense de ces deux derniers organismes, je pense que les propos de ma collègue, la députée de Maisonneuve, lorsqu'elle rapportait les paroles de M. Gélinas, de l'Association des réalisateurs et des réalisatrices, étaient drôlement pertinents. Ce n'est pas uniquement M. Gélinas qui est intervenu au niveau de la commission parlementaire pour bien faire ressortir les conséquences extrêmement négatives qui résulteraient, au niveau des régions, de la disparition des centres de production. Je le répète: C'est, d'une part, une création d'emplois qui va disparaître et, quand on connaît le coût de la formation dans ce domaine, je pense qu'on n'a pas les moyens de gaspiller les énergies qu'on a mises à les former et, deuxièmement, de dépenser pour les relocaliser dans un autre endroit, dans une autre région. Il va se trouver des régions qui vont être considérablement appauvries quant à leur possibilité de faire état de leurs particularités, d'une part, et, deuxièmement, ce qui est très légitime quand on habite une autre région, d'enrichir le contenu national d'une télévision d'État à partir d'une expérience qui leur est commune, d'un point de vue qui leur est commun et qui surtout leur est différent également. Je n'ai pas la prétention de croire que les gens de la Mauricie ou les gens de l'Outaouais perçoivent les mêmes phénomènes de société ou vivent les mêmes événements d'une façon identique à celle de Montréal.

Donc, vous avez des gens reliés à ce domaine de la production - production cinématographique, production vidéo même, puisque c'est une utilisation que Radio-Québec fait fréquemment - qui, demain, vont se retrouver sans aucune possibilité de production dans une région. Autre résultat: vous allez vous retrouver avec une région sans aucune possibilité de refléter ce qu'elle est, ce qu'elle a fait de sa propre personnalité au cours des ans lorsque, finalement, on lui a donné le moyen de le faire. Ce moyen de le faire, c'étaient les antennes et les centres de production régionaux de Radio-Québec.

Maintenant, pour ce qui est de l'Union des artistes du Québec qui est invitée, la question va se poser encore, la question se posera toujours. C'est un des organismes les plus prestigieux du Québec pour ce qui est de la culture. Il rassemble celles et ceux qui font de notre culture ce qu'elle est, des gens qui sont venus en commission parlementaire et qui nous ont fait part des énormes difficultés qu'ils vivent, qui ont eu l'avantage, fort heureusement, d'être très écoutés, contrairement à ce qui se passe à cette commission, par la ministre responsable du dossier. Ce sont des gens qui nous ont souligné, puisque l'Union des artistes n'est pas uniquement un phénomène montréalais, mais un phénomène régional, leur très grande inquiétude pour ce qui est des régions, tant au niveau du travail qu'au niveau du cinéma.

Finalement, c'est ce portrait un petit peu triste que nous a dressé l'Union des artistes. Il y a au moins trois députés de la partie gouvernementale qui devront reprendre leurs travaux, relire la transcription des débats et se sensibiliser une seconde fois à l'état inquiétant de la culture en régions. Ils s'apercevront que les intervenants ont posé un diagnostic extrêmement sévère, extrêmement lourd qui devrait inquiéter le ministre, à mon point de vue. Mais cela ne semble pas l'inquiéter.

Donc, c'est effectivement le dernier amendement que nous proposons en n'étant pas dupes vu qu'il y a une majorité ministérielle qui va finir par imposer sa volonté. Je pourrais peut-être reprendre une autre de ces Fables de La Fontaine que je citais tantôt: "Ainsi, certaines gens, faisant les empressés, s'introduisent dans les affaires: ils font partout les nécessaires, et, partout importuns, devraient être chassés." Je pense que. c'est ce qui qualifie fort bien les actions du ministre dans le domaine de Radio-Québec actuellement. Je pense que mes collègues et moi-même avons fait le travail que nous avions à faire face à cette population du Québec qui nous a élus, face à cette population du Québec pour laquelle nous avons beaucoup de respect, qui n'a peut-être pas voté pour nous, mais qui s'attendait à voter pour un monde meilleur, tout au moins en ce qui concerne Radio-Québec, et qui se rend compte de façon très triste que ceux qui devaient la défendre ne semblent pas du tout intéressés à le faire. Ils font plutôt des gorges chaudes des propos que tient une Opposition responsable sur ce sujet. (20 h 30)

En tout cas, quant à moi, M. le

Président, j'aurai été, tout au long de ce débat, en accord avec moi-même, ce qui est important. En effet, dans les minutes qui ont suivi mon élection à titre de député de Saint-Jacques, la première interview que j'ai donnée, c'était à la télévision de Radio-Québec et, quand "l'intervieweuse" m'a demandé ce que j'allais faire maintenant que j'étais dans l'Opposition, je lui ai dit: Madame, nous nous occuperons d'un dossier fort important, celui de Radio-Québec et si, par malheur, le pire devait survenir, madame, ne vous inquiétez pas, nous vous rétablirons dans vos droits lorsque le temps sera venu! C'est l'engagement que je prends envers les gens de Radio-Québec.

M. le Président, je n'ai surtout pas de félicitations à faire à ce ministre, il me déçoit au plus haut point et la déception est un sentiment qu'il m'est toujours très difficile de surmonter. J'aurais cru que son sens démocratique était beaucoup plus fort que ça et j'aurais cru que les gens du Parti libéral étaient gens de parole, mais il ne semble pas que ce soit des gens de parole puisque un autre élément de fraude électorale vient d'être découvert, soit les engagements du Parti libéral face à Radio-Québec, qui sont, encore une fois, là comme dans bien d'autres domaines, foulés au pied, déchirés, brûlés, mis à la poubelle. La devise du Québec est: "Je me souviens" et je pense que les gens de Radio-Québec, autant ceux qui la font que ceux qui l'écoutent, se souviendront, M. le Président. Je vous remercie.

Le Président (M. Trudel): Merci, M. le député de Saint-Jacques. J'essaie de me souvenir; il vous restait, je pense, fort peu de temps. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants sur la motion de la députée de Johnson? Je vais donc la mettre aux voix. Est-ce qu'on veut que je la relise?

Mme Juneau: Cela serait peut-être important. Cela fait un petit bout de temps qu'on discute là-dessus, M. le Président; cela serait important pour que tout le monde soit bien saisi de la motion.

Le Président (M. Trudel): Je vais en saisir les membres la commission immédiatements "Qu'en vertu de l'article 244 des règles de procédure de l'Assemblée nationale la commission de la culture, avant d'entreprendre l'étude article par article du projet de loi 61, Loi modifiant la Loi sur la Société de radiotélévision du Québec, tienne des consultations particulières avec les organismes suivants: l'Union des artistes, les producteurs télévisuels indépendants du Québec. Que ces consultations particulières soient tenues par la commission les 4, 5 et 6 juin 1986 à compter de 10 heures et que les organismes mentionnés soient convoqués en conséquence".

Mme Juneau: Vote par appel nominal.

Le Président (M. Trudel): Un vote par appel nominal» Je me retrouve dans mes papiers, Mme la députée. Voila! M. French (Westmount)?

M. French: Contre, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): M. Audet (Beauce-Nord)?

M. Audet: Contre, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): M. Boulerice (Saint-Jacques)?

M. Boulerice: Avec la même détermination que mon collègue, mais dans un sens contraire: pour, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): M. Brassard (Lac-Saint-Jean)?

M. Brassard: Avec autant de vigueur que mon collègue de Saint-Jacques, je suis pour.

Le Président (M. Trudel): M. Hamel (Sherbrooke)?

M. Hamel: Je suis contre, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): Mme

Hovington (Matane)?

Mme Hovington: Je suis contre, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): Mme Juneau (Johnson)?

Mme Juneau: Pour, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): Est-ce que je vois M. Khelfa? M. Khelfa (Richelieu)?

M. Khelfa: Je suis contre, M. le Président, et j'écoute.

Le Président (M. Trudel): M. Cannon (La Peltrie)?

M. Cannon: Contre, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): Mme Pelchat (Vachon).

Mme Pelchat: Contre, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): Je pense que je vous ai passée, je m'en excuse. Mme Harel (Maisonneuve)?

Mme Harel: Pour, M. le Président.

La Secrétaire: Contre: 7; pour: 4; abstentions: 1.

Le Président (M. Trudel): La motion est rejetée: 4 pour, 7 contre et une abstention.

M. Boulerice: Pour le bénéfice de Radio-Québec.

Étude détaillée

Le Président (M. Trudel): Est-ce que la commission est prête à passer à l'article 1 du projet de loi 61?

Mme Juneau: Après avoir déployé tant d'efforts, M. le Président, nous allons entreprendre l'étude de l'article 1, comme vous l'avez mentionné.

Composition du conseil d'administration

Le Président (M. Trudel): Nous sommes à l'article 1 du projet de loi 61. "L'article 6 de la Loi sur la Société de radiotélévision du Québec est modifié; 1° par la suppression du paragraphe c; 2 par le remplacement du paragraphe d par les suivants: d) cinq personnes nommées par le gouvernement, domiciliées dans différentes régions du Québec autres que celle de Montréal; d.l) cinq personnes nommées par le gouvernement, dont une représentant les milieux de l'éducation nommée sur la recommandation du ministre de l'Éducation." Est-ce qu'il y a " des députés qui veulent intervenir sur l'article 1?

Mme Juneau: On aimerait entendre le ministre.

Le Président (M. Trudel): M. le ministre, on va vous céder la parole.

M. French; Cet article vise à modifier la composition du conseil d'administration de la société. Il sera composé dorénavant de treize personnes nommées par le gouvernement. Le conseil d'administration comprendrait le président, le P.-D.G., dix personnes dont cinq domiciliées à l'extérieur de la région de Montréal et une représentant les milieux de l'éducation nommé sur la recommandation du ministre de l'Éducation, et une personne choisie parmi les employés de la société. Cette modification donne suite à l'abrogation des comités régionaux et de leurs structures dont chacun doit déléguer son président au conseil d'administration de la société.

L'article vise donc à réduire la taille du conseil d'administration, tout en préservant l'équilibre entre la métropole et la province, si je peux m'exprimer ainsi.

Mme Juneau: Avez-vous d'autres commentaires, M. le ministre?

M. French: Si vous voulez me poser d'autres questions, Mme la députée. Je ne veux pas faire un discours, je pense que c'est relativement clair, mais, s'il y a des questions, cela me fera plaisir de répondre.

Mme Juneau: Je pense qu'on va intervenir sur l'article 1 pour commencer, M. le Président, et, si notre formation politique a un amendement à présenter, on le fera après. Cela va?

Le Président (M. Trudel): Je vous rappelle que, si vous avez des amendements à présenter à l'article 1, il faudrait le faire à l'article 1 et non pas...

Mme Juneau: On intervient sur l'article pour commencer.

Le Président (M. Trudel): Allez-y!

Mme Juneau: Bon. C'est moi qui vais commencer? D'accord. Excusez-moi, avant de commencer, M. le Président, est-ce que nos interventions doivent durer 10 minutes ou 20 minutes?

Le Président (M. Trudel): C'est 20 minutes, puisque nous sommes sur le fond et non plus sur la forme.

Mme Juneau: Merci beaucoup, M. le Président. Le ministre a dit: "L'article 6 de la Loi sur la Société de radiotélévision du Québec est modifié par la suppression du paragraphe c." Qu'est-ce que c'est, le paragraphe c de l'ancienne loi de Radio-Québec? C'est: "les présidents de comités régionaux nommés en vertu de l'article 19.6, sans excéder le nombre de 10." Cela veut dire qu'on enlève les présidents des comités régionaux complètement, comme cela, les neuf présidents. C'est cela que cela veut dire, n'est-ce pas? Si on regarde ce qu'est et ce que veut dire un conseil d'administration, je prétends encore que les neuf présidents régionaux, représentants de nos neuf stations régionales, avaient et ont toujours leur place dans le conseil d'administration de Radio-Québec.

Pourquoi un conseil d'administration et ces comités? Le conseil d'administration constitue un organe suprême de Radio-Québec. Il a pour fonction d'orienter, de réglementer et de surveiller l'action de ceux qui ont pour mandat de gérer une institution qui, en l'occurrence, est Radio-Québec. Le comité exécutif constitue l'organe décisionnel qui relève immédiatement du conseil d'administration et dont les décisions engagent l'ensemble de la société. Enfin, les comités de programmation et de vérification

constituent des organes consultatifs qui, à la demande du conseil d'administration et à celle du comité exécutif ou de leur propre chef, procèdent à des analyses et formulent des avis à l'intention du conseil d'administration.

En 1984-1985, M. le ministre, le conseil d'administration s'est réuni à six reprises, tandis que le comité exécutif tient 15 séances. Pour leur part, les comités de programmation et de vérification se sont réunis trois fois chacun. Voilà l'importance, M. le Président, qu'un conseil d'administration composé de 21 membres occupe dans une société aussi importante que Radio-Québec. Avant que le ministre impose une coupure de 8 000 000 $ à Radio-Québec, je pense que les 21 membres qui faisaient partie du conseil d'administration ont fait un excellent travail ensemble et étaient capables à la fois de discuter, de raisonner, de prendre des décisions et d'être en mesure de bien représenter la société Radio-Québec.

Le conseil d'administration est formé d'un président, d'un président-directeur général, des présidents de chacun des neufs comités régionaux et de neuf autres personnes dont deux représentants du milieu de l'éducation et une personne choisie parmi les employés de Radio-Québec.

Ce qui m'inquiète, dans tout cela, c'est ce que penseront les téléspectateurs, les gens du Québec qui syntonisent Radio-Québec! Et je me demande aussi ce que cela fera parmi ces présidents régionaux comme retombées politiques., Je m'inquiète toujours de ce qui va arriver au ministre par rapport à la décision qu'il vient de prendre, un homme qui est en haute estime, je pense, parmi les Québécois et un homme qui a toujours été à la hauteur. Je me demande ce qui va lui arriver et cela m'inquiète, franchement. Je sais que les présidents de comités qui faisaient partie du conseil d'administration de Radio-Québec étaient des gens - M. le ministre, si vous ne le savez pas, mais je suis sûre que vous le savez - très influents dans leurs milieus respectifs. Vous savez, les présidents des comités régionaux n'étaient pas des gens pigés au hasard. C'étaient des gens en qui chacune de nos régions représentées au conseil d'administration avait mis une confiance "inquantifiable", parce qu'elle s'était dit: II faut que ce soit des gens vraiment représentatifs de notre milieu.

Si je prends le président du comité de l'Abitibi-Témiscamingue, ce n'était pas le dernier venu, M. le Président. Le président du comité de l'Abitibi-Témiscaminque, qui faisait partie du conseil d'administration à Radio-Québec, était M. Adrien Boucher. Il n'avait pas été choisi au hasard. M. Adrien Boucher était le directeur des services éducatifs de la commission scolaire de Val-d'Or, à Val-d'Or. C'est un homme très influent dans son milieu et un homme très respecté de ses congénères. Je pense que le ministre est en train de creuser un fossé pratiquement insurmontable entre sa position, la position de tous les membres de son parti et, d'un autre côté, les gens qui se voient, du revers de la main, rejetés complètement.

Le président du Bas-Saint-Laurent, quant à lui, était nul autre que M. Robert Olivier, responsable du département des arts plastiques et professeur au cégep de Rivière-du-Loup, à Rivière-du-Loup. Avez-vous pensé, M. le ministre, à la sorte de ravage que cela a fait à l'intérieur du cégep, le fait que vous l'ayez renvoyé du revers de la main comme cela, en le faisant sortir d'un conseil d'administration aussi important, car c'est ainsi qu'il est perçu dans tout le Québec, que celui de la société Radio-Québec'? Que croyez-vous qu'un bonhomme comme M. Robert Olivier, professeur au cégep de Rivière-du-Loup, va faire, ou qu'il est en train de faire, je ne le sais pas, dans son milieu éducatif? Il va dire: Le Parti libéral qu'on a élu, on le regrette. On le regrette. On ne peut pas faire autrement que de le regretter, parce que, vraiment, il a manqué de confiance en nous. On était là pour faire du bon travail, on l'a toujours fait, et, maintenant, il n'a plus confiance en nous. Parfois, le vent vire vite, M. le Président.

M. Boulerice: Sur une question de règlement, M. le Président. Pourriez-vous demander à ceux que j'appellerais les "outsiders" d'avoir un peu plus de respect envers les membres de droit de cette commission qui veulent parler et qui veulent écouter?

Le Président (M. Trudel): Je pense que les membres de la commission, M. le député de Saint-Jacques, ont compris le message.

Mme la députée de Johnson.

M. Cannon: Excusez-moi, M. le Président. Est-ce que le député pourrait définir, traduire "outsiders", venant de sa bouche? - Qu'est-ce que cela signifie en français?

M. Boulerice: En dehors ou de l'autre côté.

M. Cannon: Merci beaucoup, M. le député.

Le Président (M. Trudel): M. le député faisait référence à ceux qui, n'étant pas membres de la commission, ont le plaisir d'assister à nos travaux ce soir.

Mme la députée de Johnson.

Mme Juneau: Merci, M. le Président. J'étais en train d'essayer de démontrer au ministre quel tort il était en train de se

faire, à la fois à lui personnellement, à son équipe, et quel tort il va faire en ce qui a trait à la confiance qui a été témoignée par la population le 2 décembre envers son parti et qui est en train de se retirer. (20 h 45)

Dans le centre du Québec, la personne qui faisait partie du conseil d'administration de Radio-Québec était nul autre que Jean-Jacques Dubuc, coordonnateur des techniques audiovisuelles au cégep de Trois-Rivières. Je pense aussi, dans le cas de M. Dubuc, qu'il va certainement, dans son entourage immédiat, raconter ce qui se fait et ce qui est en train de lui arriver personnellement en tant que personne responsable d'un dossier aussi important que cette télévision éducative qu'est Radio-Québec.

Je pense au président de la Côte-Nord, M. Jean-Guy Rousseau. Lui non plus, ce n'est pas un bonhomme qui a été pris au hasard comme cela, pas du tout. M. Rousseau est directeur général adjoint de la ville de Baie-Comeau.

Une voix: Ce n'est pas un deux de pique.

Mme Juneau: Non, je comprends donc! M. Rousseau est un homme qui occupe un poste important à Baie-Comeau. Avez-vous pensé que ce bonhomme-là va faire un tort et, avec raison, M. le Président, irrécupérable à la formation politique que nous avons devant nous? Pourquoi? Parce que cette formation politique fait fi de toutes les condidérations qu'un homme comme M. Jean-Guy Rousseau peut apporter à la société Radio-Québec.

En Estrie, M. le Président, un bonhomme que j'estime énormément, que je connais fort bien et que, je pense, M. le Président, votre ministre aurait eu avantage à écouter, M. Jean Chouinard, qui est directeur du centre audiovisuel de l'Université de Sherbrooke. Ce n'est pas n'importe qui, ce n'est pas un gars pigé au hasard, ce n'est pas un numéro, Jean Chouinard.

Une voix: Ce n'est pas un deux de pique.

Mme Juneau: Ce n'est pas un deux de pique, Jean Chouinard. C'est un bonhomme très intelligent et qui a un rayonnement autour de lui, M. le ministre - et c'est ce qui m'inquiète - très large et une écoute abondante de ses collègues de l'Université de Sherbrooke. Je pense que le ministre fait une grave erreur en laissant tomber Jean Chouinard, le président de Sherbrooke, un bonhomme à qui toute l'Estrie faisait confiance. M. le ministre, vous auriez dû, à mon point de vue, écouter non seulement vos directeurs régionaux, non seulement votre entourage, dirais-je, non seulement le P.-D.G., mais notre président de Sherbrooke, M. Chouinard.

Dans la Gaspésie, on a M. Francis Pelletier, animateur culturel à Sainte-Anne-des-Monts. Mon collègue de Saint-Jacques, un homme très cultivé et un homme qui prend la culture comme l'air pur qu'il respire, un besoin essentiel à la vie, doit connaître certainement M. Pelletier qui est animateur culturel à Sainte-Anne-des-Monts. Ce n'est pas n'importe quel deux de pique, comme vous le dites. C'est un homme très important en culture, un homme qui fait un travail exceptionnel dans son coin. Le ministre n'a pas eu confiance, non plus en lui. Du revers de la main, il a dit: Je m'excuse, M. Pelletier, mais on n'a plus besoin de vous.

Dans l'Outaouais, qui avait-on comme présidente du comité et qui était à la fois membre du conseil d'administration? Je me demande si les gens de l'autre côté, assis en face de moi, le savent. Ceux qui ne le savent pas, vous pourriez lever la main pour savoir qui est le président ou la présidente du comité de l'Outaouais. Je suis certaine qu'il n'y en a pas un qui le sait. La présidente du comité de l'Outaouais et membre du conseil d'administration de Radio-Québec était Mme Monique Cyr.

M. French: C'était une libérale.

Mme Juneau: Monique Cyr? Je ne sais pas de quelle allégeance elle est, mais, si elle est libérale, M. le ministre, vous allez le regretter, elle va se revirer contre vous. Mme Monique Cyr, directrice générale de la commission scolaire d'Outaouais-Hull. Elle n'aurait pas été nommée à la commission scolaire comme directrice générale parce que si elle n'avait pas eu les connaissances ou l'intelligence ou la possibilité de remplir le poste auquel on l'avait conviée. Je pense que Mme Monique Cyr était une femme qui avait toutes les qualités pour être membre du conseil d'administration de Radio-Québec. Je plains le ministre de ne pas avoir considéré l'importance du poste qu'occupait cette dame à l'intérieur du conseil d'administration de Radio-Québec.

Je pense à la région de Québec ici, même la religion s'en était mêlé. M. le ministre, y en a-t-il encore de l'autre côté -je les vois sourire, je les vois lever le nez -un qui sache qui était le président du comité de la région de Québec? Je suis sûre que non. M. Gilles Poulin. Que fait M. Gilles Poulin? Curé de la paroisse de Stoneham et Tewkesbury. Vous trouvez cela drôleî On pourrait peut-être dire au curé que le Parti libéral rit de cela. Si le curé, M. Gilles Poulin, a été nommé au conseil d'administration de la société Radio-Québec, c'est que cet homme avait la confiance des siens. S'il avait la confiance des siens, c'est

qu'il l'avait méritée, cette confiance. Il l'avait méritée et il a été nommé au conseil d'administration de Radio-Québec. Le ministre n'est pas intéressé à avoir un bonhomme comme M. Poulin, comme le curé de la paroisse de Stoneham et Tewkesbury. Pour lui, ce n'est pas important; c'est de réduire la taille du conseil d'administration, point à la ligne.

Il reste une région, je pense, que je n'ai pas mentionnée, la région du Saguenay— Lac-Saint-Jean. Qui est-ce dans la région du Saguenay—Lac-Saint-Jean? Le président du comité c'est M. Lucien Gendron. Ce n'est pas un deux de pique, M. Lucien Gendron. M. Lucien Gendron, savez-vous quel poste il occupe dans la vie publique?

Une voix: II était président du conseil.

Mme Juneau: Oui. À la fois aussi. J'y arrivais, cher collègue. M. Gendron est vice-recteur, administration et finances, de l'Université du Québec è Chicoutimi-Nord. Je suis certaine que je vous ai appris des choses, les gens de l'autre côté. Je suis certaine de cela. En plus de cela, M. Lucien Gendron était le président du conseil d'administration. Vous trouvez cela drôle! On pourrait peut-être demander à M. Gendron comment il trouve vos interventions, c'est-à-dire nulles, parce que vous n'en faites pas. Deuxièmement, on pourrait peut-être lui demander s'il trouve cela drôle, s'il trouve acceptable qu'un parti comme le vôtre ait pris des engagements pendant la campagne électorale et qu'il trompe les gens aujourd'hui. Je ne sais pas si M. Lucien Gendron va apprécier cela.

Le président du conseil d'administration de Radio-Québec qui, lui aussi, au bon gré du ministre, va lever les pattes, parce que ce n'est pas important, ce ne sont pas des gens importants. Ce qui est important pour le ministre et pour sa formation politique, c'est de nommer des gens et d'avoir les ficelles dans les doigts, qu'il va être capable de manier è sa façon. Il va nommer qui il veut: Quels critères va-t-il exiger de ces gens? Nul ne le sait! Ce sera selon la fantaisie du Parti libéral et selon la fantaisie ou l'humeur du ministre.

M. le Président, le ministre a toujours été reconnu comme un homme très affable, qui ne change pas souvent. Par contre, lorsqu'une journée nous sommes intervenus en Chambre, lors de son droit de réplique, je l'ai vu fâché. Il était fâché, il montrait des copies de presse, rouge de colère; c'est vrai que c'est sa couleur, mais le ministre était fâché. Pourquoi? Parce qu'il n'aime pas qu'on le contredise. C'est juste pour cela.

Parce qu'on a osé présenter une motion de report en Chambre, d'une part et, d'autre part, parce que mon collègue, le député d'Abitibi-Ouest, a présenté une motion de scission, là, le ministre était fâché. Il a dit: Assez, c'est assez! Là, il a dit qu'il ne pouvait pas accepter que, nous de l'Opposition, nous entravions la marche de ce qu'il avait conclu dans sa tête, c'est-à-dire se débarrasser du conseil d'administration, couper dans Radio-Québec, en fin de compte, arranger cela à sa manière. Je pense que, si le ministre avait le privilège de faire une autre loi, ce serait la loi 23 pour effacer les 23 membres de l'Opposition. C'est cela qu'il ferait parce qu'il n'aime pas cela qu'on présente des motions de report, parce qu'il n'aime pas cela qu'on critique. Le ministre ne veut pas qu'on le dérange quand il a décidé d'agir, tout seul, entouré d'un nombre restreint de membres. Le ministre n'aime pas qu'on le contredise.

C'est malheureux parce qu'il aurait eu avantage à écouter les gens avant de partir en grande et de dire: C'est final, on enlève les membres du conseil d'administration, on coupe dans Radio-Québec, on ne veut pas les entendre en commission parlementaire. C'est "final bâton", ça va passer par là! Le ministre a beau nous dire cela, on n'y croit pas. On croit qu'il aurait eu avantage à écouter non seulement l'Opposition, mais les gens qui l'entourent et les gens qui font partie du conseil d'administration depuis 1979, donc, des gens qui connaissent ce qu'est Radio-Québec. Je souhaite, M. le ministre, que nous, les membres de l'Opposition, soyons en mesure de vous faire entendre raison et, enfin, de sauver votre poste de ministre, oserais-je dire, en vous rendant capable d'écouter d'autres personnes que celles qui vous ont mai renseigné et mal informé. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: M. le Président, nous en sommes donc à l'article 1. Après de multiples et vaines tentatives pour ramener le ministre à la raison et réveiller en lui son sens démocratique, il a décidé de se comporter dans ce dossier en petit despote, en petit potentat et d'imposer ses diktats au Parlement et à l'ensemble de la société québécoise.

On veut donc, par l'article 1 de ce projet de loi, modifier substantiellement, je dirais même radicalement, l'article 6 de la Loi sur la Société de radiotélévision du Québec qui porte sur la composition du conseil d'administration. Qu'en est-il, donc, du conseil d'administration actuel? Je pense qu'il est important de se rappeler que la loi, actuellement, constitue le conseil d'administration de Radio-Québec de la façon suivante: II y a d'abord les présidents des comités régionaux qui sont nommés en vertu d'un autre article de la loi, tout en n'excédant pas le nombre de dix, et des

personnes en nombre égal à celui des présidents visés dans le paragraphe c. (21 heures)

Et c'est cela, l'élément majeur de la composition du conseil d'administration actuel, c'est la présence des présidents régionaux en tant que membres du conseil. Je pense que, pour comprendre la composition du conseil actuel, il faut remonter à 1979, à l'origine, faire un bref rappel historique sur la régionalisation. On sait qu'en 1978-1979 M. Guy Rocher a été mandaté pour présider un comité de travail du Comité ministériel de développement culturel pour faire des recommandations sur le développement de Radio-Québec. Le coeur de ce rapport Rocher, je pense - tout le monde s'en souviendra - c'est la régionalisation. La principale recommandation, la recommandation, je dirais, centrale du rapport Rocher, c'est de proposer que Radio-Québec soit régionalisée.

Évidemment, dans le rapport, longuement et fort justement, d'ailleurs, on justifie ce choix de la régionalisation. On en indique les raisons. Je pense qu'il n'est peut-être pas inutile d'en mentionner quelques-unes: c'est ainsi qu'on fait mention des différences régionales, on fait mention de l'existence d'un esprit régional dans les régions du Québec. Et ces entités régionales ayant une existence réelle, il est tout à fait pertinent et souhaitable qu'on les reconnaisse dans la structuration de la société Radio-Québec. J'indique tout de suite également que cette proposition de régionalisation avait été suivie d'une véritable consultation en commission parlementaire, ce que nous n'avons pas réussi à obtenir depuis jeudi dernier.

Donc, à l'origine de la composition du conseil d'administration actuel, il y a cette proposition majeure, fondamentale du rapport Rocher visant à régionaliser Radio-Québec. Cette proposition a été agréée par le gouvernement d'alors et cela a donné lieu à un projet de loi qui a été adopté à l'unanimité, je le signale. C'est peut-être intéressant de le signaler à nos collègues libéraux qui n'étaient pas là à ce moment-là: le projet de loi qui présentait la régionalisation de Radio-Québec a été adopté unanimement par l'Assemblée nationale. Donc, votre propre parti avait accepté à l'époque le principe de la régionalisation.

Par conséquent, en partant du fait qu'on régionalise Radio-Québec et qu'on implante des comités régionaux - on en reparlera tout à l'heure, ma collègue en a parlé longuement - il était essentiel aussi que cette régionalisation, que cette mise en place de la régionalisation de Radio-Québec se reflète dans la composition même du conseil d'administration de Radio-Québec. De là les amendements qui ont été apportés à cette époque à la composition du conseil d'administration de Radio-Québec, de façon que les présidents régionaux fassent partie, ex officio, je dirais, du conseil d'administration. C'est ainsi qu'on assurait une sorte de cohésion ou de cohérence entre la régionalisation qu'on mettait en place dans les régions avec les comités régionaux, les bureaux régionaux et le conseil d'administration qui reflétait, d'une certaine façon, très largement, cette régionalisation par la présence des présidents régionaux.

On peut donc dire - je pense qu'on peut encore l'affirmer jusqu'à ce que ce conseil disparaisse et soit remplacé par un autre, en tout cas il existe toujours actuellement - que ce conseil d'administration tel que constitué était représentatif. On ne pouvait mettre en doute sa représentativité, en tout cas sa représentativité régionale. Comme l'a longuement signalé tout à l'heure ma collègue de Johnson, la présence des présidents régionaux assurait au sein du conseil même une représentativité régionale forte, solide et réelle.

Or, que nous propose le ministre des Communications? Un bouleversement complet de la composition du conseil, un bouleversement complet de la structure même de Radio-Québec. D'abord, la suppression du paragraphe c: c'est le premier alinéa de l'article 1 du projet de loi qui est devant nous. Le paragraphe c concerne la présence des présidents régionaux. Cela signifie donc que le ministre, d'un trait de plume, évince les présidents régionaux du conseil d'administration de Radio-Québec; donc, il annule la représentativité régionale qu'on retrouvait au sein dudit conseil. Je pense que c'est une proposition fondamentale avec laquelle je ne peux être d'accord. On l'a longuement expliqué en Chambre, à l'Assemblée nationale, et ici même en commission: Nous sommes farouchement opposés, comme formation politique, à l'éviction du conseil d'administration des représentants des régions, en l'occurrence des présidents régionaux. Donc, nous sommes fermement opposés à la suppression du paragraphe c de l'article 6 de la loi actuelle.

En supprimant le paragraphe c, on se retrouve avec un conseil d'administration constitué de personnes qui seront toutes nommées directement par le gouvernement, c'est-à-dire par le ministre. Il faut bien connaître la façon de procéder pour les nominations au sein des conseils d'administration des sociétés d'État. C'est vrai que, formellement, légalement, c'est le gouvernement, le Conseil des ministres, qui nomme, qui désigne. Mais, en réalité, c'est évident que c'est le ministre responsable qui choisit et c'est lui qui nomme, qui désigne.

Donc, on va se retrouver avec un conseil d'administration totalement constitué de personnes nommées par le ministre. J'ai mentionné en Chambre, ainsi que plusieurs de mes collègues, qu'on se retrouverait, finale-

ment, avec un conseil d'administration qu'on pourrait qualifier d'un comité de "yes-men", de béni-oui-oui; c'est comme cela qu'on appelait les indigènes, à l'époque coloniale, qui étaient à la dévotion des métropolitains et des colonisateurs.

L'autonomie de ce conseil sera, en pratique, nulle. Actuellement, au moins, on avait un conseil d'administration qui jouissait d'une relative autonomie. La meilleure preuve de cela, c'est la façon dont il s'est comporté dans le cadre de l'opération compressions budgétaires. On a vu qu'il s'est refusé, exerçant son autonomie, ses responsabilités, à entériner purement et simplement les recommandations du ministre et du président du Conseil du trésor. Il a pris une décision qui ne satisfaisait pas le ministre; on l'a bien vu par la suite. C'était la preuve, en tout cas, qu'on avait un conseil d'administration relativement autonome.

Avec le conseil d'administration tel que proposé par le ministre dans le projet de loi actuel, on se retrouve avec un conseil d'administration dont l'autonomie est pratiquement nulle, inexistante.

Une voix: Des boubou-oui-oui..

M. Brassard: Oui, et il va devenir, en quelque sorte, un bureau d'enregistrement des volontés du ministre. C'est cela qu'on va avoir comme conseil d'administration de Radio-Québec avec le projet de loi actuel; c'est un bureau d'enregistrement des décisions, des volontés du ministre. D'ailleurs, il suffit de voir ce qui s'est passé. Pourquoi le ministre n'est-il pas content? Pourquoi le ministre propose-t-il ce projet de loi? C'est parce que l'actuel conseil d'administration lui a résisté. Il a opposé une résistance.

Une voix: C'est cela.

M. Brassard: II a refusé de se plier à ses quatre volontés, d'obtempérer à ses volontés. Alors, le ministre s'est retourné et il a présenté un projet de loi à l'Assemblée nationale afin de bouleverser la composition du conseil d'administration parce que ce dernier exerçait son autonomie.

Une voix: Voilà!

M. Brassard: Donc, cela ne satisfaisait pas le ministre. Un conseil autonome cela le dérange et l'embarrasse. Alors, il présente un projet de loi pour se retrouver avec un conseil d'administration qui est un simple bureau d'enregistrement, une courroie de transmission, comme le diraient les marxistes-léninistes, pour acheminer les décisions du camarade ministre.

Une voix: Comrade French!

M. Brassard: Ou simplement, si vous voulez une autre image, une caisse de résonnance. C'est avec cela qu'on va se retrouver, - une caisse de résonnance où l'on va retrouver uniquement l'écho des paroles, des diktats du ministre. C'est cela, la proposition qui est devant nous actuellement, je le signale à mes collègues ministériels qui ne s'en sont peut-être pas aperçus. C'est cela. On va se retrouver avec un conseil d'administration de cette nature. Je pense qu'on ne peut, nous en tout cas, accepter cela.

Par conséquent, on se retrouve aussi avec un conseil d'administration où l'ingérence politique va être extraordinairement facile. J'ai relu rapidement les débats de l'Assemblée nationale portant sur le projet de loi qui introduisait la régionalisation, à l'époque, en 1979, présenté par M. O'Neil. Les représentants libéraux de l'époque, M. Forget et M. Rivest, s'inquiétaient beaucoup de la possibilité ou du danger d'ingérence politique du ministre des Communications, du gouvernement dans le conseil d'administration de Radio-Québec. Il y avait beaucoup d'inquiétudes. À plusieurs reprises, dans les débats, on voit les députés libéraux de l'époque s'inquiéter de cela. Ce qu'on proposait à ce moment-là, qui existe actuellement, c'est qu'il y ait au moins une certaine garantie d'autonomie puisque au moins neuf des membres du conseil d'administration étaient désignés par la base en quelque sorte, par les comités régionaux. Le ministre n'avait pas droit de regard là-dessus. Il y avait au moins cette garantie-là. Mais, dans le cas qui nous occupe, plus aucune garantie; tout le monde est nommé par le ministre, par le gouvernement. Je pense que, à ce moment-là, l'inquiétude qu'avaient les libéraux de l'époque, en 1979, est encore beaucoup plus présente: le danger d'ingérence politique.

M. le Président, je voudrais également faire une remarque concernant le paragraphe d où l'on indique: "cinq personnes nommées par le gouvernement, domiciliées dans différentes régions du Québec autres que celle de Montréal." Je veux simplement vous dire, M. le Président, qu'il s'agit là de poudre aux yeux. Nous ne sommes pas dupes de cette tentative du ministre de faire croire qu'il maintient une certaine forme de représentativité régionale. Nous ne sommes pas dupes de cette manoeuvre; il s'agit là de poudre aux yeux. C'est vrai que cinq personnes devront être domiciliées dans différentes régions du Québec, mais elles seront tout aussi nommées par le gouvernement que les cinq autres que l'on retrouve à d.l), que le président ou que le directeur général.

Alors, le simple fait d'être domicilié dans différentes régions n'assure pas nécessairement - je vous le signale, M. le

Président - la représentativité régionale. Ce n'est pas du tout la même chose que pour les personnes que nommait tout à l'heure ma collègue de Johnson, qui sont désignées par les organismes régionaux et qui sont vraiment représentatives du milieu régional. Ce n'est pas du tout la même chose, c'est simplement le domicile. Elles vont être nommées directement, de toute façon, par le ministre. Dans cet article, il n'y a aucune garantie que l'on aura vraiment une véritable représentativité régionale de ces cinq personnes, aucune garantie. En plus, quand on sait la façon dont sont nommées les personnes, par le gouvernement, aux divers conseils d'administration actuellement, c'est ce qui se passe, on peut être assuré que l'une des conditions, ce sera de posséder sa carte du Parti libéral. On peut être assuré de cela.

M. French: Pas plus que ce que vous avez fait, vous autres.

M. Brassard: On peut être assuré que ces cinq personnes et ces dix personnes vont certainement détenir... (21 h 15)

M. French: Veux-tu gager, Jacques?

M. Brassard: Oui, oui.

M. French: Veux-tu gager par rapport à la situation actuelle quant au conseil d'administration?

M. Brassard: D'accord, on va parier... M. French: Anytime!

M. Brassard: ...tantôt. On peut suspendre pour parier, M. le Président.

M. French: Non, non, on va laisser faire la suspension.

M. Brassard: On peut suspendre pour parier, mais je suis persuadé que ce sera une des conditions des nominations.

Le Président (M. Trudel): M. le député de Lac-Saint-Jean, je vous ferai remarquer que la commission n'est pas un endroit de jeux.

M. Brassard: Oh!

M. French: Ahl ça, c'est bien.

Le Président (M. Trudel): Je ferais la même remarque à M. le ministre des Communications.

M. Boulerice: Mais d'enjeux.

Le Président (M. Trudel): Mais d'enjeux, vous avez raison, M. le député.

M. Brassard: Vous avez raison. D'ailleurs, je ne suis pas un joueur, M. le Président, je ne parie jamais. Mais je prends bonne note de la remarque du ministre. On vérifiera quand il constituera son conseil d'administration.

M. French: Vous regarderez bien si c'est encore le ministre actuel, aussi, Jacques.

M. Brassard: Oui, oui. M. French: Oui.

M. Brassard: J'aurais une dernière remarque, M. le Président, sur le nombre. Dans ses interventions en Chambre, le ministre a souventefois mentionné que l'actuel conseil d'administration, constitué de 23 personnes, était beaucoup trop lourd et, par conséquent, inefficace.

Ce que je me dis à ce sujet, c'est: Qu'est-ce qui importe vraiment? Est-ce d'avoir un conseil d'administration vraiment représentatif des divers milieux, des diverses régions, donc d'assurer le caractère représentatif du conseil d'administration? Est-ce que c'est cela qui est important, évidemment, au risque d'avoir une certaine lourdeur, admettons-le? Il est peut-être préférable, à mon avis, de viser la représentativité au risque de se retrouver avec un conseil peut-être un peu lourd quant au nombre de personnes. En tout cas, c'est le choix que je fais. C'est ma préférence.

Je constate que ce n'est pas celle du ministre. Il préfère en réduire le nombre. À tout le moins, si, en réduisant le nombre, il en maintenait le caractère représentatif, on pourrait essayer de trouver un consensus...

Le Président (M. Trudel): M. le député de Lac-Saint-Jean, pouvez-vous accélérer, s'il vous plaît?

M. Brassard: Alors, pour toutes ces raisons, M. le Président, il est évident que je m'oppose fermement à la proposition du ministre que l'on retrouve à l'article 1 de ce projet de loi et qui a pour effet de modifier, de fond en comble, la composition du conseil d'administration actuel.

Le Président (M. Trudel): Merci, M. le député de Lac-Saint-Jean. Mme la députée de Maisonneuve, vous avez demandé la parole.

Mme Harel: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): II me fait plaisir de vous la céder, madame.

Mme Harel: Donc, à l'article 1 du projet de loi, M. le Président, pour donner suite aux propos que l'on entend dans cette commission concernant l'allégeance politique qui dominerait chez les présidents des comités régionaux qui siégeaient au conseil d'administration de Radio-Québec, je dois vous dire que je souhaiterais presque qu'il y ait un test qui soit faite Je crois que cette sorte d'évaluation serait certainement extrêmement éloquente sur l'autonomie de ces personnes en regard de ce projet de loi que l'on discute présentement.

Ce test, à mon point de vue, serait le suivant: comment ces personnes auraient-elles réagi si tant est que le gouvernement précédent avait déposé un projet de loi similaire visant, notamment, à abolir les structures régionales? Je crois que, hors toute autre considération, c'est le seul test qui peut nous faire clairement comprendre le degré de représentativité de ces personnes en regard du mandat qui leur était confié par les régions. Voyez-vous, ce n'est pas possible d'être dans une société où on peut reprocher à des gens leur allégeance politique. Je ne les connais pas. Je ne connais aucun d'entre eux. Je remercie ma collègue, députée de Johnson, d'avoir permis aux membres de cette commission de connaître tout au moins la feuille de route de certains d'entre eux en nous mentionnant les fonctions professionnelles qu'ils assumaient respectivement dans leur région.

Personnellement, je ne connais aucun d'entre eux. Je ne connais l'allégeance politique d'aucun d'entre eux. D'une certaine façon, je vous assure que, pour la poursuite de ce débat, cela m'indiffère complètement. Étaient-ils plutôt péquistes que libéraux? L'étaient-ils? D'ailleurs, voilà une question qui n'est pas pertinente et je crois, M. le Président, que vous pourriez fort bien utiliser la règle de la pertinence de nos débats, justement, pour écarter ce sujet-là. Ce n'est donc ni pertinent à nos débats, ni pertinent au débat que nous tenons sur cette question de la régionalisation.

La vraie question, c'est bien plus de savoir si, quel que soit le gouvernement, ils allaient plus s'identifier à leur région et s'ils allaient davantage en être les porte-parole et se distancer de la direction centrale, encore une fois quel que soit le gouvernement. Je crois que c'est le seul test que l'on puisse, politiquement, envisager, c'est-à-dire, comment ces gens auraient réagi si tant est qu'un gouvernement du Parti québécois avait décidé que la régionalisation coûtait trop cher, qu'elle n'était pas efficace, qu'elle n'apportait pas de rendement suffisant et qu'il fallait donc conséquemment abolir les structures régionales. M. le Président, je crois vraiment au mérite de cette question. Compte tenu du degré de représentativité que ces gens me semblent détenir, ils auraient adopté exactement les mêmes attitudes, le même comportement, les mêmes positions que celles qu'ils adoptent présentement à l'égard de ce dossier. C'est, je crois, le seul test valable et légitime que l'on puisse leur faire passer, sur lequel on puisse évaluer la crédibilité de leurs propos.

Relisons un rapport préparé le 25 avril 1978 qui s'intitule "Rapport du Comité de travail du comité ministériel permanent de développement culturel sur le développement de Radio-Québec", préparé par un comité composé de' Guy Rocher, président, Pierre-A. Deschênes, Guy Doré, Adélard Guillemette, Léo Jacques, Real Michaud et M. Miville-Deschênes, comme secrétaire. Ce rapport avait sans doute été demandé parce que le gouvernement de l'époque, en 1978, d'une certaine façon, hésitait à financer de manière généreuse le développement régional. C'est intéressant de faire lecture de ce rapport maintenant, huit ans après que ses principales conclusions ont été retenues, pour comprendre d'abord que cela a certainement insufflé un second souffle à Radio-Québec, cette régionalisation et aussi cette affirmation claire d'un mandat éducatif.

Essentiellement, c'est un rapport qui porte sur deux aspects. Premièrement, qu'est-ce qu'une télévision éducative? Deuxièmement, faut-il ou ne faut-il pas une télévision régionalisée? Concernant ce deuxième aspect des conditions essentielles considérées pour assurer le succès de la régionalisation, on fait également mention, à l'occasion de la consultation tenue en 1975, d'une demande unanime, dans chaque région, dit-on, d'un certain nombre d'émissions qui soient plus près des intérêts régionaux et dans lesquelles on puisse se retrouver davantage. La télévision régionale peut servir d'instrument au développement régional. Elle peut contribuer à sensibiliser la conscience de la population aux réalités régionales, aux besoins de la région et aux problèmes spécifiques de la région. Partant, dit-on, elle peut contribuer à ce que des solutions soient trouvées et apportées, à ce que de nouveaux développements soient engagés et à ce que de nouvelles activités soient mises en train.

Je crois que, d'une certaine façon, c'est ce que Radio-Québec a tenté par la suite de développer dans sa programmation régionale qui, certainement, n'obtenait pas partout le même succès et ne manifestait pas la même performance, mais on peut dire qu'il y avait une sorte d'engagement qui était prometteur.

Sans doute, doit-on maintenant se poser la question: Qu'en sera-t-il avec cet amendement proposé à la Loi sur la Société de radiotélévision du Québec visant à modifier la loi de manière qu'on supprime la structure régionale et qu'on supprime la présence des présidents des comités régionaux au conseil d'administration de Radio-Québec?

Est-ce qu'on peut croire, M. le Président, que les personnes nommées par le gouvernement seraient, malgré leur domicile en régions, représentatives pour autant de cette sorte d'esprit régional, de cette sorte de fierté dont, je crois, mon collègue, le député de Lac-Saint-Jean, est porteur, de cette manière de penser et de faire, qui n'est pas toujours comprise, d'ailleurs, dans les grands centres urbains? Je me rappelle son intervention qui a pu en étonner quelques-uns, mais qui, réflexion faite, a certainement eu de l'écho dans sa propre région et qui a certainement de l'écho dans les réflexions qu'on doit faire, à savoir que les éditorialistes des grands médias nationaux sont eux-mêmes parfois très insensibles à cette question d'un esprit régional à développer, à cette question d'une culture régionale à constater et de structures régionales à épauler et à soutenir.

Je crois qu'il peut certainement y avoir une perte pour l'ensemble de la société québécoise, y compris pour nos concitoyens des centres urbains, du fait qu'il y ait une sorte d'érosion de l'appartenance régionale au Québec. Cette appartenance est une manifestation de l'enracinement et elle est certainement une des conditions essentielles au succès du maintien en régions d'une population dynamique, active, qui se projette vers l'avenir en n'ayant pas l'impression d'être en perte à l'égard des grands centres.

Dans les conditions qui étaient examinées a l'époque pour assurer le succès de la régionalisation, on pouvait lire qu'il fallait envisager la régionalisation de la production. On lisait ceci: Cette production peut être faite de deux manières. Cette production doit, d'abord, disait-on, absolument relever de la responsabilité des régions de manière qu'elle soit faite dans des studios locaux en régions ou avec l'aide de cars mobiles, ou encore à l'extérieur de la région, dans d'autres régions, ou même au centre national, à Montréal, mais toujours sous la responsabilité de la région à l'origine de cette production. C'était là, semble-t-il, un élément jugé essentiel pour maintenir une régionalisation efficace et assurer une suffisante autonomie de la gestion régionale pour qu'on ait en régions ce sentiment de liberté nécessaire pour assurer aux personnes qui s'engageaient la garantie qu'elles allaient agir selon les besoins locaux immédiats. (21 h 30)

Qu'en sera-t-il maintenant à partir du centre montréalais? On peut certainement craindre qu'il n'y ait une tout autre conception de l'appartenance régionale ou de la fierté régionale, une tout autre conception des priorités régionales. Ces priorités peuvent être certainement diluées dans les perspectives montréalaises et dans la définition que Montréal peut faire des régions comme étant plus des filiales que des entités propres. M. le Président, je crois que mon collègue de Saint-Jacques aurait un amendement à proposer à ce stade-ci.

Une voix; Non.

Mme Harel: Non, pas immédiatement? Il va d'abord intervenir?

Une voix: II va d'abord intervenir.

Mme Harel: Ah, bon! Alors, je vais le laisser d'abord intervenir. Je vais simplement conclure en souhaitant que nous puissions bonifier ce projet de loi. On peut souhaiter le faire par l'introduction d'amendements qui seraient retenus par les membres de cette commission parlementaire et qui pourraient assurer un meilleur équilibre régional dans cette représentation qui pour tout de suite peut certainement causer préjudice à la régionalisation de la production et de la programmation. Je vous remercie, M. le Président,

Le Président (M. Trudel): Merci, Mme la députée de Maisonneuve. Si je comprends bien, je cède maintenant la parole à M. le député de Saint-Jacques.

Une voix: Bravo!

M. Boulerice: M. le Président, quant aux modifications du conseil d'administration de la Société de radiotélévision du Québec, je me rappelle que le ministre a dit en Chambre - j'ai été, d'ailleurs, à ce moment sidéré d'entendre une telle chose - que c'était impossible de fonctionner avec un tel nombre de personnes au conseil d'administration. Cela nous a fait rire et nous a, d'ailleurs, poussés à lui suggérer d'aller faire les mêmes recommandations au premier ministre puisque vraiment à 24 ou 25 ce doit être extrêmement difficile pour lui de fonctionner. Je pense que c'était un argument très faible. S'il y a de nombreuses personnes qui siègent au conseil d'administration du Conseil des ministres et à celui de Radio-Québec, il y a également de nombreuses personnes, sensiblement le même nombre, dans les collèges d'enseignement général et professionnel et, à ce que je sache, les cégeps cheminent bien, fonctionnent bien et donnent une éducation de qualité. J'ai, d'ailleurs, été en mesure de le vérifier puisque j'étais tout récemment dans deux cégeps de l'île de Montréal. Si cela vous intéresse, je suis allé à celui d'Ahunstic où il y a un excellent département de design et à celui du Vieux-Montréal où il y a un excellent département de photographie. Il faut croire que la programmation pédagogique au cégep du Vieux-Montréal ne souffre pas de la présence d'une vingtaine de personnes au conseil

d'administration. Il faudrait également penser aux conseils de commissaires des commissions scolaires, M. le ministre, des conseils que vous connaissez sans doute fort bien. Un conseil de commissaires regroupe jusqu'à au moins 49 personnes. Cela ne les empêche pas de bien fonctionner. Il y a même d'autres organismes qui ont des conseils d'administration d'un nombre assez important. Je pense que "The Westmount Municipal Affairs" avait un conseil d'administration assez impressionnant. J'ai eu le plaisir de les rencontrer à l'époque où j'étais le président du Parti québécois de ce comté. Rien ne m'indique dans les travaux de "The Westmount Municipal Affairs" que le nombre, quant à lui, soit un handicap pour ce qui est de la qualité.

M. le ministre, là encore où je trouve profondément aberrants les propos que vous tenez, c'est qu'en plus - je suis obligé de le répéter - de traiter Radio-Québec de vache...

Une voix: Hein?

M. Boulerice: Ah oui! Il a traité Radio-Québec de vache sacrée du PQ... vous taxez les conseils d'administration de partisaneries. M. le ministre, quand je vous entends dire des choses comme celles-là, je me dis: Ah! C'est peut-être un mécanisme de l'esprit et un jour peut-être inconsciemment souhaite-t-il se faire accuser de la même chose, mais avec justesse, cette fois, ce qui sera tant pis pour lui. Mais, c'est tout de suite, immédiatement tant pis pour lui, parce que ce n'est pas nous.

Écoutez, je pourrais vous donner de nombreux exemples. Le conseil d'administration de certains musées dont les nominations ont été faites, somme toute, très récemment par le gouvernement péquiste précédent, par le ministre en titre, M. Richard. Est-ce que nos considérants sont purement partisans lorsque nous avons nommé, au conseil d'administration du musée de Joliette, M. Serge Joyal, qui est votre grand frère d'Ottawa? Est-ce que nous avons été partisans lorsqu'il y a eu la nomination, comme président du conseil d'administration de l'Hôtel-Dieu de Montréal, de votre grand-père d'Ottawa, Marc Lalonde? M. le Président, quand le ministre taxe les nominations que nous avons faites d'essentiellement partisanes, je peux réfuter très allègrement ses accusations. Dans son pari et sa gageure avec mon collègue, je l'informe que j'y suis tout de suite pour le double.

Quand je regarde la composition projetée du conseil d'administration, il est de toute évidence que c'est une véritable prise de contrôle ministérielle sur le conseil d'administration de Radio-Québec. Véritable prise de contrôle. Que l'on jette aux orties ces représentants bénévoles régionaux qui oeuvraient au Québec et qui étaient très fiers de cette participation à Radio-Québec, puisque cela faisait partie de leur engagement comme citoyens du Québec, préoccupés de tous les tenants et aboutissants de nos politiques éducatives et culturelles!

Quand on regarde «le remplacement du paragraphe d par "cinq personnes nommées par le gouvernement, domiciliées dans différentes régions du Québec autres que celle de Montréal", M. le Président, cela va très vite. Il suffirait d'en nommer une de Laval, une de Saint-Lambert, une de Joliette et, à ce moment, ce seraient effectivement d'autres régions que celle de Montréal, mais des régions qui n'auront véritablement rien à voir avec le véritable sens que nous, nous avons voulu donner à l'appellation "région" à l'intérieur du Québec.

Il n'y a rien de nouveau sous le soleil et c'est donc vrai. Probablement un des politiciens les plus visionnaires du Québec intervenait le 12 juin 1979 à cette commission que nous, nous avons tenue -nous n'avions pas peur des commissions, nous - et il disait, ce visionnaire - c'était l'ancien député de Bourget, l'honorable Camille Laurin - "Donc, il me paraît qu'il faut adopter ce projet de loi, que l'Opposition doit revenir sur la fin de non-recevoir qu'elle vient d'apporter. Qu'elle ne se laisse pas aveugler" - là, c'est bien entendu, je ne m'adresse plus à l'Opposition, mais au gouvernement - "par les frais que cela peut encourir. Il est vrai qu'il peut coûter cher de mettre dans un conseil d'administration local ou de mettre dans un conseil d'administration central des représentants de toutes les couches de la société, et de tous les secteurs de la société. Mais qu'est-ce que l'on veut, M. le Président? Préfère-t-on des conseils d'administration qui fonctionneront d'une fonction adéquate parce qu'ils ne seront constitués que de représentants d'un seul secteur?"

Mme Juneau: M. le député, je m'excuse, mais là-bas il y a tellement de bruit que j'ai peine à vous entendre. •

Le Président (M. Trudel): Est-ce qu'on peut demander aux membres de la commission de reprendre leur place, s'il vous plaît?

M. Boulerice: M. le Président, je me suis arrêté à 21 minutes 28 secondes; je vais me reprendre, si vous le voulez bien.

Le Président (M. Trudel): M. le député de Saint-Jacques, vous dites que vous vous êtes arrêté à 21 minutes 28 secondes; vous avez dépassé d'une minute 28 secondes les 20 minutes auxquelles vous aviez droit.

M. Boulerice: Je m'excuse, c'est un

compte à rebours, M. le Président. Un compte è rebours, c'est pour les explosions et c'est ce qu'est en train de faire le Parti libéral avec Radio-Québec, une explosion. "Mais qu'est-ce que l'on veut, M. le Président, disait ce célèbre et exceptionnel député de Bourget? Préfère-t-on des conseils d'administration - vous m'écoutez bien, M. le ministre - qui fonctionneront d'une façon adéquate parce qu'ils ne seront constitués que d'un représentant d'un seul secteur et, habituellement, le secteur le plus riche, le plus élitiste?" Votre proposition de conseil d'administration sera sans doute le Sénat où iront s'asseoir vos bénévoles lorsqu'ils auront fini de vous conseiller, si jamais ils finissent par finir." Je préfère, continuait le député de Bourget, le Dr Laurin, pour ma part, voir dans un conseil d'administration des représentants de toutes les classes sociales, de tous les secteurs de la population, puisque l'éducation est une obligation pour tous, et de les voir discuter, même d'une façon virile, même au prix de tensions, car il y a des tensions créatrices, car il y a des conflits inévitables, car il y a des polarisations temporaires qui se résolvent finalement en consensus harmonieux qui vont dans le sens de la création." Propos éminemment visionnaires de ce que s'apprêtait à faire, si par malheur il arrivait au Québec, un gouvernement dirigé par le Parti libéral qui, comme on le dit d'ailleurs dans la fable de La Fontaine "Le serpent et la lime", essaie de toucher à tant de beaux ouvrages, mais n'y réussit pas.

Donc, la proposition que vous faites, M. le ministre, quant au conseil d'administration vise de façon pure et simple à évacuer cette concertation et cette présence des régions à l'intérieur du conseil d'administration de Radio-Québec. J'espère que vous adopterez la même attitude que nous quant aux nominations non partisanes. Le conseil d'administration que vous vous apprêtez à nommer ne répondra en aucune façon au but visé par la création de Radio-Québec et les structures qui ont été établies. Ce seront tout simplement des individus sur lesquels le ministre pourra agir de façon directe, constante, immédiate, quotidienne et ce que vous dénonciez à cette commission parlementaire, eh bien, M. le Président, pourra se révéler exact, mais cette fois-ci, c'est vous qui en serez les utilisateurs, c'est-à-dire une intervention directe du ministre dans le processus décisionnel de Radio-Québec. D'ailleurs, c'était votre collègue qui disait: On procède à une modernisation de la Loi sur la Société de radiotélévision du Québec. C'est le temps d'insérer dans cette loi des garanties un peu plus explicites quant à l'indépendance de la direction de la société vis-à-vis du pouvoir politique. M. le ministre, la composition que vous êtes en train de projeter pour le conseil d'administration de

Radio-Québec vous ouvre toutes grandes les portes pour arriver à ces agissements. Si ce n'est pas vous qui le faites, ce sera celui qui éventuellement pourrait vous remplacer dans un potentiel remaniement ministériel. On écoute bien ce qui se passe de l'autre côté.

Une voix: On n'est pas des animaux.

M. Boulerice: Donc, M. le Président, je pense que le libellé, tel que vous le projetez pour l'article 1, est totalement inacceptable pour ma formation politique puisqu'il trahit l'esprit de la loi et vient en profonde contradiction avec les propos que vous avez tenus au moment où on étudiait la Loi sur la Société de radiotélévision du Québec au mois de juin 1979 et ceci en commission parlementaire, je vous le rappelle. Sur ce point, M. le Président, je pense avoir été très clair et je vous informe que j'ai l'intention de déposer un amendement à l'article 1.

Le Président (M. Trudel): Est-ce que vous avez le texte, M. le député?

Motion proposant d'avoir 12 représentants des régions

M. Boulerice: J'ai plaisir à vous le lire: "L'article 1 du projet de loi modifiant la Loi sur la Société de radiotélévision du Québec est remplacé par le suivant: 1. L'article 6 de la Loi sur la Société de radiotélévision du Québec (LRQ, chapitre S-ll.l) est modifié: 1. par la suppression du paragraphe c; 2. par le remplacement du paragraphe d par les suivants: d)' douze personnes nommées par le gouvernement, chacune à titre de représentant d'une des douze régions administratives du Québec; d.l) deux personnes nommées par le gouvernement sur recommandation d'organismes représentants les milieux de la télévision au Québec -puisqu'il s'agit d'une télévision, M. le ministre - d.2) une personne nommée par le gouvernement à titre de représentant des milieux de l'éducation sur recommandation d'organismes représentatifs de ces milieux."

Nous ne le laissons pas explicitement au ministre de l'Éducation puisque c'est bien lui qui faisait ces remarques sur la tentative de mainmise du ministre sur le conseil d'administration, nous l'avons bien écouté.

Le Président (M. Trudel): M. le député, je viens d'en recevoir une copie, je vais suspendre quelques minutes pour...

M. Boulerice: Juger de sa recevabilité.

Le Président (M. Trudel): ...juger de sa recevabilité. Comme vous commenciez à plaider immédiatement, j'allais vous dire...

M. Boulerice: Je n'ai pas plaidé encore.

Le Président (M. Trudel): ...attendez que je le reçoive.

Une voix: Est-ce qu'on va pouvoir en avoir des copies?

Le Président (M. Trudel): Oui, on va en faire des copies pour les membres de la commission. Il en manque quelques-unes, mais je vais suspendre les travaux pour quelques minutes.

(Suspension de la séance à 21 h 49)

(Reprise à 21 h 53)

Le Président (M. Trudel): À l'ordre, s'il vous plaît! J'inviterais les nombreux députés que les travaux de la commission de la culture passionnent, en dehors des membres de la commission qui sont toujours les bienvenus, à baisser le ton un peu de façon qu'on puisse s'entendre.

J'ai pris connaissance, M. le député de Saint-Jacques, de l'amendement que vous proposez et je le juge recevable. Je présume que je vous cède immédiatement la parole pour en débattre. Mme la députée de Johnson.

M. Brassard: Ce qui n'enlève pas le droit de parole du député de Saint-Jacques par la suite?

Le Président (M. Trudel): Évidemment pas.

Mme juneau: On voulait que vous nous rassuriez.

Le Président (M. Trudel): Ce n'est pas un droit de conclusion, ni un droit de réplique. C'est un droit de parole sur votre amendement.

M. Boulerice: Sur un amendement en vertu de quel article?

Une voix: 262. M. Boulerice: 262?

Le Président (M. Trudel): M. le député de Saint-Jacques, j'ai cédé la parole à Mme la députée de Johnson sur l'amendement que vous avez proposé. Mme la députée de Johnson.

Mme Juneau: Si mon collègue, le député de Saint-Jacques, a fait cet amendement, M. le Président, c'est que nous sommes tous conscients - et je pense que les gens du Parti libérai aussi doivent en être conscients - que, dans le Québec, il n'y a pas que neuf régions, celles déjà représentées par les neuf stations régionales de Radio-Québec, mais qu'il y a en fait douze régions. En plus de l'Abitibi-Témiscamingue, du Bas-Saint-Laurent, du centre du Québec, de la Côte-Nord, de l'Estrie, de la Gaspésie, îles-de-la-Madeleine, de l'Outaouais, de la région de Québec, du Saguenay—Lac-Saint-Jean, il y a aussi la Montérégie, les Laurentides-Lanaudière et Montréal. Nous croyons fermement que, si nous avions un représentant par région, nous aurions à la fois un portrait complet de l'ensemble des régions administratives du Québec. Un portrait complet signifie, à mes yeux, être en mesure de représenter les gens, les us et coutumes de chacune de ces régions très représentatives que sont les douze régions du Québec. Je trouve malheureux qu'au lieu de penser à permettre à ces douze régions une représentation équitable, à l'inverse, on décide d'en enlever quatre. Au lieu d'en ajouter trois, on en enlève quatre.

Je pense qu'il y a un point auquel nous devons faire face et qui n'a pas encore été mentionné dans les interventions de mes collègues depuis le début de l'étude article par article. Je disais donc que, dans toutes ses interventions depuis le début de l'étude de la loi sur Radio-Québec, le ministre a toujours souligné l'urgence du redressement, de compressions budgétaires, de la répartition de l'enveloppe budgétaire, du financement de certaines sociétés. En fait, tout ce que le ministre a dit, c'est comment on peut appliquer une compression budgétaire, mais il a oublié que tous ces comités régionaux, tous ces présidents régionaux qui faisaient partie du conseil d'administration étaient des bénévoles, étaient des gens - comme je vous l'ai mentionné tout à l'heure - qui avaient, dans la vie quotidienne, une occupation fort importante et étaient rémunérés pour l'emploi qu'ils occupaient, leur poste dans différents cégeps, universités, commissions scolaires, et n'étaient pas rémunérés parce qu'ils faisaient partie du conseil d'administration de Radio-Québec. Je pense que c'est peut-être erroné de faire croire que c'est à cause de l'obligation de faire une compression budgétaire de l'ordre de 8 000 000 $ ou de 13,3 %, si vous le voulez; il ne faudrait donc pas utiliser un subterfuge semblable pour dire qu'on raye quatre régions du Québec.

Il nous apparaît à nous, de notre formation politique, que c'est un effort négatif parce que vous pourriez appliquer votre compression de la même façon ailleurs; le conseil d'administration avait pris la décision d'appliquer votre compression de façon qu'il y ait une préservation de toutes les stations existantes.

Donc, M. le ministre, si, aujourd'hui, on vous demande de bien vouloir non seulement accepter les neuf régions déjà représentées au sein du conseil d'administration, mais

ajouter les trois régions dont je viens de vous faire mention, c'est-à-dire Montérégie, Laurentides—Lanaudière et Montréal, c'est que nous croyons que ces trois régions ont, elles aussi, leurs artistes, ont, elles aussi, leur culture, ont, elles aussi, leur besoin de s'exprimer devant ce petit écran qui s'appelle L'autre télévision.

Dans un article du Soleil du 17 mai 1986 - ce n'est pas vieux cela, M. le Président, cela fait quelques jours à peine -le signataire de l'article, M. Michel Pomerleau, un journaliste qui a été envoyé en collaboration spéciale pour faire un article sur Radio-Québec, disait - j'espère que le ministre m'écoute parce que c'est important qu'il entende cela - :"la réduction du nombre d'administrateurs est, dans les faits, moins une attaque à la prétendue lourdeur de cette instance qu'à sa simple composition. Treize administrateurs ou vingt et un, la différence ne peut garantir une plus grande vivacité du conseil d'administration. Ce qui est changé, par contre, c'est la représentation régionale sur ce conseil. Elle était de 52 % et - avec ce que le ministre s'apprête à faire - elle est maintenant de 38 %. "La modification à l'administration de Radio-Québec est, d'ailleurs, révélatrice de cette nouvelle conception qui fleurit dans les télévisions publiques et vise à donner priorité à l'efficacité concurrentielle."

Donc, si c'est un faux prétexte que le ministre a utilisé en disant: On y est obligé à cause de l'urgence d'un redressement, à cause d'une compression budgétaire, si c'est un faux prétexte, puisque les présidents qui font partie du conseil d'administration sont des bénévoles, j'aimerais bien que le ministre l'explique non seulement aux membres de cette commission, mais à toutes les personnes qui ont, pour cette télévision éducative, un attrait important par rapport à ce qu'on diffuse à partir de chacune des régions. Je pense, M. le ministre, qu'il est urgent que vous puissiez expliquer à tous les Québécois et Québécoises si vraiment ce ne sont pas les compressions qui vous font agir ainsi. Je pense qu'il serait important, avant qu'il soit trop tard, que vous puissiez nous expliquer les raisons, les vraies raisons, j'entends, qui vous ont amené à prendre la décision que vous avez prise.

Est-ce que ce serait le fait que M. Rémi Bujold, qui est le directeur de cabinet de M. Bourassa... Ce n'est pas moi qui l'ai dit, j'ai ici un extrait du Soleil. Écoutez bien cela. C'est surprenant d'entendre de telles choses de la part d'un directeur de cabinet d'un premier ministre. Personnellement, j'ai été renversée d'entendre ça. Écoutez bien. Je ne vous le cache pas, M. le ministre, ça me fait de la peine d'entendre des choses comme celles-là, parce que j'ai beaucoup de respect pour vous. Je pense que vous êtes capable de prendre des décisions sans qu'elles soient feutrées et filtrées par le bureau du premier ministre. M. Bujold, j'imagine qu'il a dû se faire taper sur les doigts le lendemain du jour où cela a paru dans les journaux. Je vois des gens qui sont intéressés. Le député de Saint-Henri a hâte d'entendre ce que j'ai à dire, il a peut-être passé par-dessus cet article-là. M. le député de Saint-Henri, je vous ferai faire une photocopie. Voici ce qu'il a dit, M. Bujold: "Le cabinet de Robert Bourassa exerce une mainmise complète sur l'appareil gouvernemental et sur la chose politique à Québec. Actuellement, tout remonte au bureau du premier ministre à Québec et rien n'est laissé au hasard - M. le Président, je n'invente pas cela, je le lis -comme le confirme en entrevue le chef de cabinet de Robert Bourassa, Rémi Bujold". M. le ministre, j'ai été peinée de lire un article comme celui-là, vraiment peinée, parce qu'on a l'impression que les ministres font "une job de bras". Je dis bien "une job de bras" et, en fait, ils ne décident rien. C'est Rémi Bujold et le premier ministre. Ce sont ses dossiers.

Le Président (M. Trudel): Sur l'amendement, Mme la députée.

Mme Juneau: Oui, M. le Président, je parle sur l'amendement. Je suis en train de demander pourquoi le ministre se laisse passer un sapin comme celui-là. Cela n'a pas de bon sens. M. Bujold décrit, d'ailleurs, M. Bourassa comme étant le président du conseil d'administration. Il en parle comme d'un président de conseil d'administration. On avait M. Gendron, vous n'en voulez plus. M. Bujold décrit M. Bourassa comme le président du conseil d'administration, ce qui confirme cette vision très centralisée de la gestion de l'État. Est-ce que cela vous ouvre des petites lumières? J'espère que le contact se fait. Cela vous ouvre des lumières sur le fait que tout se passe au niveau du cabinet du premier ministre. Cela me fait de la peine de voir qu'on fait faire des "jobs de bras" par les ministres responsables de dossiers et qu'en fait ce n'est pas là que la décision est prise. C'est décevant. À mon point de vue, M. le ministre, je pense que j'accepterais très mal le fait qu'on me confie un dossier et que, par la suite, un chef de cabinet vienne me dire: Ce n'est pas vous qui décidez, tout se décide au bureau du premier ministre.

Savez-vous ce qu'a dit M. Bujold? Ministres muselés. Je ne sais pas ce que cela veut dire, mais, si je lis entre les lignes: "Selon certaines informations, le bureau du premier ministre a muselé les ministres au cours des premières semaines." Je ne sais pas ce que cela veut dire exactement et jusqu'à quel point on a eu le muselage en question, mais on aurait peut-être raison de

se poser des questions là-dessus. On a fait des mises en garde sur certains points de vue. Je suis certaine, quand ils parlent de certains points de vue, qu'ils ont parlé des points de vue du ministre.

Le Président (M. Trudel): Mme la députée, je ne veux pas vous interrompre trop longtemps.

Mme Juneau: II voulait avoir douze régions représentées au Québec.

Le Président (M. Trudel): J'ai de la difficulté pour le moment, je me trompe peut-être, à voir la pertinence.

Mme Juneau: M. le Président, je suis en train de vous dire que le ministre a fait des représentations au bureau du premier ministre pour que les douze régions du Québec soient représentées, on ne l'a pas écouté. Je suis en train de vous décrire cela et vous pensez que ce n'est pas pertinent.

Le Président (M. Trudel): Continuez, Mme la députée.

Mme Juneau: Je suis sûre que le ministre a fait des représentations. Ce n'est pas le ministre qui, tout de suite, est arrivé en disant: On fait une coupure, on coupe quatre régions, on laisse faire Ies autres, etc. Ce n'est pas vrai. Je ne crois pas à cela. Je pense que le ministre a fait des efforts considérables pour que les douze régions du Québec soient représentées au niveau du conseil d'administration de la société Radio-Québec. Je connais le ministre depuis fort longtemps et je suis sûre que cette intervention a été faite au bureau du premier ministre et qu'est-ce qui est arrivé? Il a été muselé. Ce n'est pas mot qui le dis, c'est l'article.

Le ministre a été muselé comme les autres ministres parce que tout se décide au cabinet du premier ministre.

Une voix: Au bunker.

Mme Juneau: Au bunker, c'est cela. Les ministres n'ont rien à dire, Ils n'ont qu'à exécuter. Je suis persuadée que, si le ministre avait la latitude qu'on croyait qu'il avait, cela ferait longtemps qu'il aurait mis un peu d'ordre dans tout cela. Le ministre sait très bien qu'en appliquant les décisions qui viennent d'en haut il se fait personnellement du tort. Je n'aime pas cela. Je ne me sens pas bien avec cela. J'aimerais mieux que le ministre, de toute autorité, puisse dire: Oui, les douze régions du Québec vont pouvoir être représentées au conseil d'administration. Oui, c'est important qu'on ait une représentation régionale. Oui, c'est important que nos douze régions soient là pour communiquer au petit écran toutes les facettes de notre culture régionale de nos douze régions du Québec.

Je pense que le ministre, comme bien d'autres dans son cas, a été obligé de se plier à un ordre qui venait d'en haut. C'est malheureux.

Une voix: Les cisailles "gobeilliennes".

Mme Juneau: . Les cisailles "gobeilliennes". C'est ce qui est arrivé, je pense, et le ministre est obligé de vivre avec cette compression. Même à cela, je reviens encore à mon idée maîtresse: c'est le fait que les présidents régionaux qui siégeaient au conseil d'administration étaient des présidents bénévoles. Donc, aucune espèce de relation avec la compression que la société Radio-Québec a été obligée d'accepter; ils s'apprêtaient à le faire.

Donc, M. le Président, je souhaite énormément que le ministre, avant qu'il soit trop tard, fasse un petit ménage dans tout cela et qu'il puisse dire à ceux et à celles qui font semblant de ne pas comprendre l'importance de ce qu'on vit que douze régions au Québec, c'est ce qu'il souhaite. C'est ce que nous souhaitons tous. J'espère que le ministre va faire le nécessaire et qu'il va accepter notre motion. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): Merci, Mme la députée de Johnson. Je reconnais maintenant le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: À moins que le ministre ne soit intéressé à...

Le Président (M. Trudel): Vous savez que vous avez un droit d'intervention de cinq minutes, mais vous êtes libre de l'utiliser ou pas.

M. Brassard: ...faire son intervention.

M. French: Merci, M. le Président. Je pense que je vais accumuler les impressions et livrer mes réponses à la fin des interventions de mes amis d'en face.

M. Brassard: C'est dommage, on aurait aimé vous entendre. On va finir par croire que c'est vrai, ce que l'article du journal dit: Les ministres sont vraiment bâillonnés, muselés. C'est désolant.

M. le Président, je pense que le député de Saint-Jacques vient de démontrer que l'Opposition a l'intention de faire un travail constructif sur ce projet de loi. C'est ce que nous faisons, d'ailleurs, depuis le début, en tentant, d'abord, de faire en sorte que cette commission parlementaire puisse entendre les intervenants intéressés. Malheureusement, ce fut un échec à cause de l'entêtement borné

du ministre et de ses collègues, mais nous persévérons, nous continuons à faire un travail constructif sur ce dossier. Je pense que la meilleure preuve, c'est cet amendement que propose le député de Saint-Jacques à l'article 1.

Voilà un amendement, d'abord, qui prend acte de la disparition des présidents régionaux au conseil d'administration puisque, comme vous le constatez, l'amendement proposé par le député de Saint-Jacques reprend l'alinéa 1 du projet de loi qui est devant nous, c'est-à-dire la suppression du paragraphe c, la disparition des présidents régionaux.

Ce n'est pas de gaieté de coeur qu'on fait cela, sauf qu'il faut bien prendre acte du fait que le projet de loi a franchi l'étape de l'adoption du principe et que, par conséquent, l'un des principes de ce projet de loi est l'abolition de la régionalisation, l'abolition des comités régionaux, force nous est de le reconnaître. Nous en prenons acte à regret et nous tenterons par la suite, tout en exprimant notre résignation en quelque sorte face à l'abolition de la régionalisation, de bonifier le projet de loi, de l'améliorer et surtout, puisqu'on est à l'article 1 portant sur la composition du conseil d'administration, d'améliorer sa représentativité.

Quant à l'article 1 proposé par le ministre, on l'a indiqué, nous quatre, tout à l'heure, à l'occasion de nos interventions, cette composition d'un conseil d'administration révèle une très faible représentativité. Nous voulons nous acharner maintenant à améliorer la représentativité du conseil d'administration de Radio-Québec. C'est l'objet de l'amendement proposé par le député de Saint-Jacques. (22 h 15)

Donc, ce que nous proposons, c'est d'abord que toutes les régions du Québec aient droit à un représentant au sein du conseil d'administration. Il y en a douze, ce sont les douze régions administratives. Peut-être qu'il s'en ajoutera d'autres. On sait que la carte des régions est sur la planche à dessin; il est possible qu'il s'en ajoute d'autres, mais, au moment où l'on se parle, il y a douze régions administratives. Ma collègue de Johnson les a énumérées tout à l'heure. Quant à nous, il nous apparaît essentiel, si l'on veut se retrouver avec un conseil d'administration de Radio-Québec le moindrement représentatif des divers milieux du Québec, qu'à tout le moins chacune des régions administratives du Québec puisse avoir un représentant au conseil d'administration. C'est l'objet de l'amendement.

Le but que nous poursuivons en faisant cela, c'est, évidemment, de faire en sorte que, même si les comités régionaux disparaissent, même si la régionalisation est carrément anéantie, à tout le moins, la représentation régionale ne soit pas totalement évacuée du conseil d'administration et que l'on conserve la forme la plus large possible de représentation régionale.

Ce que nous suggérons, c'est qu'il y ait deux personnes qui soient nommées par le gouvernement, mais sur recommandation d'organismes représentant les milieux de la télévision au Québec. On en a longuement parlé à l'occasion de certaines motions. Il est évident que tout le milieu des artisans, des créateurs, des producteurs, des diffuseurs, tous ceux et celles qui gravitent au sein du milieu télévisuel au Québec sont directement et fortement intéressés par l'avenir et le fonctionnement de Radio-Québec. On l'a vu, par exemple, à l'occasion de la dernière motion que l'on a présentée pour inviter des organismes. Il s'agissait du regroupement des producteurs télévisuels indépendants. Aussi, il y avait l'Union des artistes, une autre organisation très connue du monde artistique. Il nous apparaîtrait donc essentiel qu'au conseil d'administration ce monde de la télévision, représentant les artisans, les créateurs, les producteurs et les diffuseurs, soit représenté. Nous prévoyons deux personnes issues de ces milieux. Cela tombe sous le sens que c'est là une proposition tout à fait raisonnable et acceptable aussi, je l'espère, de la part du ministre.

L'autre élément, M. le Président, c'est la nomination, la désignation d'une personne, à titre de représentant du milieu de l'éducation, sur recommandation d'organismes représentatifs de ces milieux. Je n'ai pas besoin de le répéter, Radio-Québec est une télévision éducative. La mission de Radio-Québec est d'abord et avant tout une mission éducative. C'est une télévision éducative reconnue comme telle et, dans sa loi constitutive, c'est clairement indiqué que Radio-Québec est une télévision éducative qui doit se consacrer à l'éducation et au développement de la culture au Québec et qui doit viser un certain nombre d'objectifs que l'on retrouve dans le domaine de l'éducation.

Par conséquent, cela nous apparaît tout à fait normal qu'une personne - ce n'est pas considérable - soit nommée au conseil d'administration à titre de représentant des milieux de l'éducation. D'ailleurs, c'est ce que l'on retrouve dans le projet de loi du ministre. Il prévoit une personne représentant les milieux de l'éducation. Donc, il considère comme tout à fait normal que ce soit le cas.

La différence, cependant, est énorme, est considérable. Il disait tout à l'heure, au début, qu'il fallait assurer une meilleure représentativité" du conseil d'administration. Comment assurer une meilleure représentativité du conseil d'administration? Je pense que c'est en faisant en sorte qu'il

y ait le moins de dépendance possible entre les membres du conseil d'administration et le ministre. C'est le gouvernement qui nomme, mais il faut faire en sorte que le conseil soit le plus autonome possible. Comment y arriver? Je pense que notre amendement atteint cet objectif. D'abord, par le fait, comme je le mentionnais, qu'il y a douze personnes qui représentent les régions et on pourrait prévoir, on pourrait examiner...

Le Président (M. Trudel): On m'avertit qu'il y aurait un incendie au complexe G et, pour ceux qui auraient leur voiture au complexe G, il y aurait peut-être moyen de suspendre les travaux de façon que vous puissiez aller la récupérer. On va suspendre les travaux pendant quinze minutes, le temps de se retourner.

(Suspension de la séance à 22 h 22)

(Reprise à 22 h 39)

Le Président (M. Trudel): Après cette suspension suspecte, j'espère qu'il ne vous est pas arrivé trop de dommages. Le député de Lac-Saint-Jean avait la parole et il lui reste encore dix minutes. M. le député de Lac-Saint-Jean, si vous voulez poursuivre.

M. Brassard: M. le Président, si vous le permettez, je vais avaler ma pastille d'abord.

Le Président (M. Trudel): Ce qui va me donner le temps d'en prendre une en attendant. On en distribue, en voulez-vous?

M. Brassard: Bon. C'est bon pour éclaicir la voix!

Nous en étions à l'amendement proposé par le député de Saint-Jacques. Je signalais, avant la sonnerie d'alarme, qu'il était nécessaire qu'à tout le moins une personne représente les milieux de l'éducation au conseil d'administration, ce qui était, d'ailleurs, le cas dans la proposition du ministre.

Là où on diffère avec le ministre, c'est sur le mode de désignation. Il est aussi important que l'origine de la personne désignée. Autant il est important, quant à nous, qu'il y ait des personnes qui représentent les milieux de la télévision, autant il est important qu'il y ait des personnes qui représentent les milieux de l'éducation au conseil d'administration, autant alors est-il important de bien préciser le mode de désignation de ces personnes de façon à assurer la plus large autonomie possible au conseil d'administration. C'est pourquoi je vous ferai remarquer que, si les deux personnes représentant les milieux de la télévision sont nommées, bien sûr, par le gouvernement, elles le sont sur recommandation d'organismes représentant les milieux de la télévision, de la même façon que celle représentant les milieux de l'éducation est nommée par le gouvernement, mais sur recommandation des organismes représentatifs de ces milieux.

C'est là un mode de désignation qui n'est pas nouveau. Je vous signale, M. le Président, que ce mode de désignation n'est pas particulièrement original. On le retrouve à maintes occasions et dans divers milieux, diverses sociétés d'État, conseils d'administration d'institutions. Je pense à tout le réseau de la santé et des services sociaux. Je pense également au conseil d'administration du réseau des collèges, des cégeps où un certain nombre de personnes nommées le sont toujours à partir de recommandations des organismes au milieu. Il s'agit du milieu de l'éducation dans ce cas et du milieu de la télévision dans te cas des deux autres. Cela assure, cela donne une garantie que ces personnes sont vraiment représentatives et, tout en étant nommées par le gouvernement, elles n'ont pas le sentiment d'être dépendantes du ministre ou du gouvernement. Donc, elles éprouvent un sentiment d'autonomie beaucoup plus large et plus réel.

Je pense qu'au cours des travaux de cette commission il y aurait peut-être lieu de considérer un mode de désignation se rapprochant de celui-là pour ce qui est des douze personnes représentant les douze régions administratives du Québec, de façon qu'on atteigne l'objectif d'un conseil représentatif, c'est l'objectif premier, mais également d'un conseil jouissant d'une large automonie par rapport au pouvoir politique, par rapport au ministre, par rapport au gouvernement.

Pour toutes ces raisons, je pense que la proposition du député de Saint-Jacques devrait récolter l'assentiment des membres de cette commission et, particulièrement, j'espère que le ministre regardera d'un oeil favorable une proposition comme celle-là. Elle ne va pas à l'encontre du principe du projet de loi - on considère qu'il a été adopté à l'Assemblée nationale - mais, très évidemment, à mon point de vue, elle améliore et elle bonifie l'article traitant de la composition du conseil d'administration de Radio-Québec. J'ai hâte d'entendre les remarques du ministre et je souhaiterais beaucoup, pour le plus grand bien de Radio-Québec, pour le meilleur intérêt de Radio-Québec, que le ministre donne son assentiment à cet excellent amendement de mon collègue de Saint-Jacques. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): Merci, M. le député de Lac-Saint-Jean. Mme la députée de Maisonneuve

Mme Harel: J'aimerais m'associer à l'amendement proposé par le député de Saint-Jacques visant, si j'ai bien compris le sens de votre amendement, M. le député, à modifier la loi qui est déposée pour étude devant cette commission de manière à réintroduire les présidents des comités régionaux de chacune des régions du Québec. Sans doute fera-t-on valoir que c'est là une structure relativement lourde compte tenu du nombre de personnes qui y participent. Cela dit, je pense qu'il faut comprendre que, dans le domaine de la liberté d'expression, dans le domaine de la liberté d'opinion, dans le domaine des manifestations qui en résultent dans les médias de communication, il faut être très sensible à une représentation élargie des intérêts. Mes collègues vous ont fait valoir que des conseils d'administration dont la composition équivaut à ce nombre ont un degré d'efficience et d'efficacité qui ne semble pas hypothéquer leur fonctionnement et qu'il ne semble pas que ce soit là le principal problème vécu par Radio-Québec depuis l'adoption de cette loi, en juin 1979, qui assurait une composition de 23 membres. J'ai lu à peu près tout ce qui a pu s'écrire sur les difficultés, à l'occasion, que Radio-Québec a pu rencontrer dans son développement et, à ce que je sache, nulle part n'a-ton mentionné que cette composition de 23 personnes était un handicap, majeur ou mineur, au fonctionnement de Radio-Québec. Par ailleurs, M. le Président, ce que permet une telle composition, c'est certainement de garantir l'indépendance du conseil et, donc, de la société Radio-Québec à l'égard du pouvoir politique, puisqu'on sait que les présidents régionaux sont nommés par un comité représentatif dans chacune des régions. Il faut comprendre que le nombre de 23 résulte de la volonté de maintenir une représentation gouvernementale qui équilibre en nombre la représentation régionale. C'est un choix, cette représentation régionale; je ne veux pas revenir là-dessus, je pense qu'on s'en est longuement expliqué.

Si tant est qu'elle n'est pas retenue, la difficulté qui se présente, c'est donc un conseil d'administration qui serait entièrement et exclusivement nommé par le gouvernement. En quoi est-ce là une difficulté plus grande que celle que l'on retrouve dans des dizaines d'autres conseil d'administration, offices, régies, commissions où le gouvernement très souvent nomme entièrement les conseils d'administration? Encore une fois, je pense que, dans ce domaine stratégique des communications de masse, dans ce domaine où on doit avoir un souci plus grand, démontrer une sensibilité encore plus grande que dans bien d'autres secteurs ou dans bien d'autres dossiers, puisque c'est le domaine de la liberté d'expression, on peut sérieusement s'interroger sur la pertinence d'un conseil d'administration exclusivement nommé par le gouvernement. Pensons, par exemple, à la loi qui créait la Commission d'accès à l'information, en se rappelant que le président de cette commission doit être, à ma connaissance, nommé par un vote de l'Assemblée, par un vote de la Chambre qui requiert l'approbation des deux tiers non seulement des députés présents, mais, je crois des députés qui siègent dans cette Chambre. C'est donc une exigence très grande pour en assurer le caractère le plus représentatif et pour non seulement en garantir les conditions d'autonomie, mais également pour en garantir les apparences, puisqu'on exige un vote des deux tiers non pas des membres présents, je le répète, mais des membres qui siègent dans cette Chambre pour la Commission d'accès à l'information. Je crois qu'il en va de même pour la présidence de la Commission des droits de la personne et également pour la nomination du Protecteur du citoyen. Il en est ainsi puisque ce sont là des secteurs névralgiques et qu'on doit certainement assurer non seulement la pleine et entière marge de crédibilité à ceux qui ont à en diriger la destinée, mais qu'on doit aussi certainement en garantir toutes les apparences, encore une fois.

Je voudrais, M. le Président, vous faire part d'un voyage récent que j'ai .fait en Catalogne. Cela va vous étonner, mais j'ai représenté l'Assemblée nationale, à la demande du président de notre Assemblée, dans le cadre d'un congrès de parlementaires de peuples aux langues minoritaires. Dans le cadre de ce congrès qui s'est déroulé à Barcelone, en Espagne, j'ai pu rencontrer les représentants de la télévision catalane, une chaîne qui a été mise en place il y a à peine quatre années et qui avait délégué des représentants pour venir examiner et étudier plus à fond les structures de fonctionnement de la télévision de Radio-Québec, donc de notre télévision dite québécoise de Radio-Québec. Elle avait très minutieusement étudié tout ce fonctionnement pour adopter, par la suite, un mode de fonctionnement qui, tout en étant différent et tout en étant conforme aux traditions politiques catalanes -elles sont, évidemment, fort différentes, puisqu'il existe un mode de scrutin proportionnel ayant comme conséquence la multiplication des partis politiques - assure une représentation des partis politiques par le biais de porte-parole siégeant au conseil d'administration, mais qui sont élus par l'Assemblée nationale catalane; cela exige le vote des deux tiers.

Les représentants du conseil d'administration de cette télévision catalane, que j'ai pu rencontrer, il y a peine un mois maintenant, dans le cadre de ce séjour à ce congrès, m'ont fait part de leur très vif intérêt à suivre le débat qui se poursuivait sur l'avenir de la télévision éducative au

Québec. Ils voulaient suivre le débat sur la régionalisation puisque le conseil d'administration au complet est venu, il y a deux ans, faire un séjour de plus d'une semaine pour s'imprégner des diverses activités, des choix de programmation, des grandes orientations de Radio-Québec. C'est donc un débat qui, certainement, les passionne. D'ailleurs, j'ai pris l'engagement ferme de leur faire parvenir l'ensemble de nos travaux pour qu'ils puissent mieux connaître ce qui en résultera.

Mais il demeure, M. le Président, que chaque société, évidemment, choisit un type de structure pour sa télévision qui convient à sa personnalité propre, qui convient à sa sensibilité particulière. Il y a des sociétés qui sont extrêmement politisées. La vie quotidienne est extrêmement politisée et il faut comprendre en regard de quoi ces sociétés se choisissent un type de gestion, un type d'administration qui assure une représentation politique et partisane avec une sorte d'équilibre, mais qui, encore là, comme je vous le disais, est balisée par un vote à l'Assemblée nationale qui maintient une sorte de balance des inconvénients dans ce type de représentation, puisque l'Assemblée est chargée d'en maintenir, d'une certaine façon, les proportions indépendamment du parti qui est au pouvoir.

C'est un choix qui a été fait dans, semble-t-il, un certain nombre de sociétés européennes. Que ce soit le gouvernement seul, en l'absence de l'Assemblée nationale, qui vienne, maintenant, entièrement nommer le conseil d'administration, c'est un choix qui est fait dans d'autres sociétés, dans des sociétés démocratiques, j'en conviens, mais est-ce que c'est un choix qui correspond à ce qu'on peut considérer comme souhaitable? Je m'interroge beaucoup sur le fait que cet amendement, s'il n'était pas adopté, nous ramènerait à la proposition principale qui est une composition exclusivement nommée par le gouvernement.

C'est donc en ayant en tête à la fois des préoccupations de représentation régionale au sein du conseil, mais aussi certainement en étant préoccupée d'un mode de nomination qui assure la représentativité la plus grande possible, la crédibilité la plus grande possible aux représentants qui auront à siéger à ce conseil que je fais part à cette commission de mon intention de voter en faveur de cet amendement. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): Merci, Mme la députée de Maisonneuve. Est-ce qu'il y a d'autres membres de la commission qui veulent intervenir sur la motion d'amendement du député de Saint-Jacques? M. le député de Saint-Jacques» Oh, surprise!

M. Boulerice: M. le Président, je voudrais, d'abord, remercier ma collègue, députée de Johnson et porte-parole officielle de l'Opposition en matière de communications. Je veux également remercier le député de Lac-Saint-Jean et whip en chef de l'Opposition, et la députée de Maisonneuve, vice-présidente de la commission de la culture, pour l'appui qu'ils apportent à l'amendement que j'ai présenté qui touchait l'article 1 du projet de loi modifiant la Loi sur la Société de radiotélévision du Québec.

Je voulais que l'article 6 de la Loi sur la Société de radiotélévision du Québec soit modifié "1. par la suppression du paragraphe c; 2. par le remplacement du paragraphe d par les paragraphes suivants." Je me permets de vous les relire pour votre bonne compréhension, M. le ministre. "d) douze personnes nommées par le gouvernement, chacune à titre de représentant d'une des douze régions administratives du Québec; "d.l) deux personnes nommées par le gouvernement sur recommandation d'organismes représentant les milieux de la télévision au Québec." Je pense que je vous en ai tantôt souligné l'importance. "d.2) une personne nommée par le gouvernement à titre de représentant des milieux de l'éducation sur recommandation d'organismes représentatifs de ces milieux."

Bien entendu, M. le Président, à voir le sto7cisme dont vous faites preuve à l'intérieur de cette commission, les amendements que l'on vous présente sont recevables pour vous hors de tout doute, sauf que, comme l'invoquaient mes collègues tantôt, malheureusement les ficelles sont peut-être tendues et tenues par d'autres, ce qui vous empêche de faire connaître vos véritables couleurs dans le débat qui nous préoccupe! Cela, je ne vous en tiendrai pas rigueur, M. le ministre, malgré tout. (23 heures)

Bien entendu, si on a hâte d'écouter vos commentaires particuliers sur l'amendement présenté, on a bien hâte, par contre, d'entendre le point de vue des députés du parti gouvernemental membres de la commission qui, loin d'avoir fait un abus de parole, ont plutôt pratiqué le contraire, c'est-à-dire la vertu du silence. Le silence peut, dans un débat comme celui qui nous préoccupe actuellement, être interprété comme une vertu dont vous me permettrez de douter, bien entendu.

J'aimerais entendre, en plus de vos propos, les commentaires que vont peut-être faire les représentants de la partie gouvernementale. M. le Président, à l'exemple des autres amendements que j'ai eu l'honneur de présenter à cette commission, vont-ils se refuser une autre fois à voter, en définitive, pour leurs concitoyens, puisqu'il s'agit, je le disais au point d, de "douze personnes

nommées par le gouvernement, chacune à titre de représentant d'une des douze régions administratives"? Est-ce que les députés du parti ministériel, M. le Président, vont, comme je l'indiquais tantôt, se refuser a donner, enfin, une voix à ceux et celles qui, de bonne foi, le 2 décembre les ont élus? Est-ce qu'ils vont plutôt adopter cette attitude totalement méprisante? Ciel, M. le Président, qu'on n'aura jamais trop insisté sur le mot "méprisante" quand il s'agit de qualifier l'attitude des représentants de la partie gouvernementale à cette commission de la culture sur Radio-Québec! Ils se sont permis avec vous, selon vos indications peut-être, quand venait le temps de la motion antérieure d'une commission parlementaire, de refuser la parole même à leur propre parti politique, ce qui, de mémoire d'homme, ne s'est jamais vu dans notre Parlement.

J'aimerais, d'ailleurs, qu'on poursuive la reconstitution des débats qui a été stoppée par les coupures budgétaires de l'actuel gouvernement. C'est vrai qu'un peuple sans histoire est un peuple qui se gouverne mieux.

Cela dit, M. le Président, je continue dans la foulée de l'amendement qui nous préoccupe.

Le Président (M. Trudel): J'allais vous ramener à la pertinence du sujet.

M. Boulerice: C'est pertinent, M. le Président, l'histoire. On a tendance à oublier l'histoire et on se retrouve dans des situations... Je vous ai lu le Dr Laurin, d'ailleurs. Il nous a écrit avant son terme une page d'histoire qu'on est en train de vivre ici, en vous mettant vous-mêmes en garde à l'époque. Vous ne l'avez pas écouté et, aujourd'hui, vous êtes dans la situation. C'est vous qui en portez l'odieux.

Donc, M. le Président, dans l'histoire de ce Parlement, le parti ministériel se permet de refuser un droit de parole à son propre parti en commission parlementaire, ce que le mien, en tout cas, n'a jamais fait. Au contraire, l'exemple est là et prêche en notre faveur. À deux reprises, en commission parlementaire, les instances démocratiques de notre parti ont pu s'exprimer sur des enjeux qui faisaient l'objet de préoccupations de la part des Québécois.

M. le Président, après avoir refusé à leur parti de pouvoir s'exprimer, vont-ils maintenant refuser le droit de parole à ceux qui ont voté pour eux? Vont-ils leur dire: Vous n'étiez bons qu'à voter pour nous, vous n'étiez bons qu'à faire le pointage, les téléphones, ces bonnes vieilles parades auxquelles on a pu assister dans certains comtés, qui ajoutaient à ce folklore électoral qu'on croyait en train de disparaître au Québec? Poser des affiches et des pancartes, vous n'êtes bons que pour cela. Chers électeurs et électrices qui m'avez élu - je m'adresse aux députés des régions - vous êtes bien gentils, vous êtes bien bons, mais vous n'êtes pas assez bons, par contre, à notre point de vue, pour que l'on puisse se permettre de vous faire siéger au conseil d'administration de Radio-Québec. Le refus, M. le Président, d'adopter cet amendement que j'ai déposé et qui reçoit un appui unanime et enthousiaste de mes collègues, parce qu'eux ont appris à vivre une certaine forme de démocratie à l'intérieur de notre parti, le rejet que cet amendement va subir... C'est celai On est tellement certains de l'issue du vote avec cette dictature de la majorité que vous pratiquez depuis le 2 décembre, avec cette force des 99 qui voudraient bien écraser les 23, mais les 23 représentent encore 40 % de la population au moment où l'on se parle. Il y a des sondages qui s'en viennent dans quinze jours. Lisez cela attentivement! Donc, M. le Président, est-ce que l'on va de nouveau, en rejetant cet amendement, continuer de la part du parti gouvernemental à littéralement insulter tous ceux qui, au Québec, ont la faculté de comprendre, de saisir et, après cela, ont la volonté de s'exprimer sur les sujets qui préoccupent l'ensemble des Québécois?

Surtout, M. le Président, que l'amendement que nous proposons, comme le disait ma collègue, la députée de Maisonneuve, se retrouve dans bon nombre d'organismes québécois qui ont un mode de nomination exactement similaire ou identique à celui-là. Ceci nous permettrait d'éviter ce qui se glisse dans l'original de l'article 1 du projet de loi que le ministre des Communications a présenté qui, lui, au contraire, vise une mainmise politique pure et simple de l'administration, de la haute direction du corps politique constitué que l'on appelle conseil d'administration de la radiotélévision nationale du Québec, Radio-Québec.

Ma collègue vous a fait part d'une expérience particulière, quand même récente, en Catalogne que j'ai eu également le plaisir de voir sur place et qui demande certains raffinements et des pratiques politiques qui, comme elle le disait, doivent être balisées. Mais, avec le projet de loi présenté par le ministre, nous en serions non pas au modèle que l'on a toujours vécu au Québec qui est un modèle démocratique, non pas au modèle catalan qui est un modèle particulier, mais on en arriverait à très brève échéance au modèle allemand. Tout le monde sait que les principales chaînes de télévision, Norddeutsch et Suddeutsch Televizion, sont sous la tutelle des partis politiques sociaux-démocrates, chrétiens-démocrates.

Donc, l'amendement que nous présentons éviterait cette mainmise politique sur le corps constitué qu'est le conseil d'administration de Radio-Québec et nous permettrait, en plus, de revenir à l'esprit

initial qui a présidé à la création de Radio-Québec. Cet esprit s'est, d'ailleurs, traduit dans une loi née d'une volonté politique on ne peut plus ferme de la part du gouvernement, adoptée finalement par l'Opposition que vous étiez à l'époque, pour une télévision avec des antennes régionales et des représentants régionaux. Donc, la proposition, qui vous est présentée pourrait à cet égard nous permettre de revenir à cette Radio-Québec que le législateur et la population voulaient au moment de sa création.

Quant à la recommandation d'organismes représentant les milieux de la télévision au Québec, est-ce que vous pourriez être contre un tel amendement? N'acceptons-nous pas, M. le ministre, aux conseils d'administration des hôpitaux des représentants du corps médical qui sont les spécialistes de la médecine dans un hôpital? N'acceptons-nous pas dans de puissantes et importantes sociétés d'État du Québec des représentants issus du milieu, qui connaissent très bien ce milieu? Les ingénieurs forestiers connaissent très bien l'industrie du bois dans le cas de Domtar où nous pouvons nommer des membres au conseil d'administration puisque nous sommes partie prenante dans le financement de Domtar. D'ailleurs, en tant que gouvernement, en tant qu'État, lorsqu'il s'agissait d'avoir des comités, enfin, originaux - Exemple: il y avait un comité consultatif sur l'immigration, sur l'éducation, le Conseil supérieur de l'éducation il était tout à fait normal, il était légitime que l'on ait des gens qui étaient justement, des représentants de ces milieux de l'éducation, ce qui nous a permis d'avoir des pédagogues, des chercheurs, voire même des parents.

On a tenté par des lois subséquentes, n'en déplaise à la députée de Vachon, d'augmenter le nombre de ces partipants issus directement du milieu. Je pense que ce serait très mal vu, M. le ministre, que vous rejetiez, dans l'amendement que j'ai présenté, l'idée de nommer deux personnes représentant les milieux de la télévision. Quant aux milieux de l'éducation - on vient d'en parler tantôt, il y a effectivement une mission éducative à Radio-Québec - là encore, il ne fait aucun doute que nous nous devons d'avoir un représentant de ces milieux. Vous remarquez, par contre, que dans le libellé il est dit "sur recommandation d'organismes représentatifs de ces milieux." Ce n'est pas nécessairement le ministre qui recommande et cela, je vous l'ai dit, c'est inspiré par les interventions qu'a faites l'ancien chef du Parti libéral et actuel ministre de l'Éducation, lors de la commission sur Radio-Québec en 1976. Il craignait trop de pouvoirs au ministre. Je suis certain qu'il est à la recherche de la même médecine maintenant, même s'il a changé de titre, à différents aspects, n'est- ce pas? Cela pourrait être le Conseil des collèges, cela pourrait être l'Association des directeurs généraux des commissions scolaires, cela pourrait être la Fédération des commissions scolaires du Québec, cela pourrait être, je ne sais pas comment s'appelle son pendant. Voyez-vous, il y a de la latitude, il y a de la place, puisque le nombre des intervenants est beaucoup plus grand et plus le bassin est grand meilleures sont les chances de trouver la personne compétente, c'est bien entendu, vous le savez mieux que moi. Donc, il y aura possibilité de trouver un représentant pour les milieux de l'éducation qui pourra siéger au conseil d'administration de Radio-Québec. (23 h 15)

Voila, M. le ministre, l'argumentation que j'avais l'honneur de vous présenter sur cet amendement. Encore une fois, ce que je souhaiterais le plus vivement, M. le ministre, serait qu'enfin, enfin, enfin, les représentants de la partie gouvernementale s'expriment très ouvertement sur le contenu de ça et quant aux réprésentations régionales, parce que, voyez-vous, je me rappelle ce slogan, durant la campagne électorale, qui était: "Votez pour du solide". Comment puis-je juger du solide des propos de la partie gouvernementale quand je n'entends aucun mot et que j'apercevais tantôt des positions, même sur des chaises, qui m'apparaissaient presque gélatineuses? Or, je ne crois pas que l'on puisse faire du solide avec de la gélatine. Cela ne fait pas, à mon point de vue, d'excellentes briques pour construire cet édifice. J'aimerais qu'enfin il y ait quelque chose de pertinent qui vienne de l'autre côté et que, devant la situation qui est faite à Radio-Québec, il y en ait qui mettent leurs culottes l'autre bord et qui nous disent vraiment...

Le Président (M. Trudel): Est-ce que vous voulez encore nous suggérer, M. le député de Saint-Jacques, une soirée aux Foufounes électriques? C'est pour cela que vous proposez aux gens de mettre leurs culottes? Il vous reste trente secondes, M. le député de Saint-Jacques.

M. Boulerice: Ce que je vous dis, c'est, si ce n'est pas du courage, ayez au moins du respect envers non pas uniquement vos concitoyens, non pas uniquement vos électeurs, mais également vos militants; ça, c'est important. Et je vous conseille de le pratiquer; nous, on l'a fait et ça nous est rentable. Prenez notre expérience.

Le Président (M. Trudel): M. le député, est-ce qu'on peut considérer cette dernière phrase comme étant la fin de vos remarques sur votre amendement?

M. Boulerice: Oui, M. le Président. Si,

par malheur, cet amendement devait subir le même sort que les autres, j'ai le plaisir de vous informer que je vous en apporterai un autre.

Le Président (M. Trudel): Merci, M. le député de Saint-Jacques. Est-ce que d'autres députés veulent s'exprimer sur l'amendement proposé par le député de Saint-Jacques? Oui, M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: II me semble que, dans les circonstances, il y a un amendement sérieux qui a été déposé par le député de Saint-Jacques. J'aimerais que le ministre sorte de son silence méprisant et nous donne, au moins pendant quelques minutes, son point de vue sur cet amendement.

M. French: Oui, M. le Président, j'avais l'intention de le faire.

Des voix: Bravo!

Le Président (M. Trudel): M. le ministre, la parole est à vous.

M. French: Évidemment, j'épargnerai à la commission l'expression de la plénitude de mes réactions face aux divers aléas de l'argumentation qu'on vient d'entendre allant de la télévision en Catalogne...

Une voix: Jusqu'au Jell-O.

M. French: ...jusqu'au Jell-O. Cela a été digne de cette émission de Radio-Québec, que nous aimons tous, la Ligue nationale d'improvisation.

Une voix: Ils ont une excellente cote d'écoute.

M. French: Excellente cote d'écoute. On va décerner nos évaluations, nos prix, à la fin de la commission parlementaire, mais je vais quand même commenter directement l'amendement qui, à mon sens, malgré la reconnaissance, d'une certaine façon, du principe du projet de loi. Il se veut essentiellement un renversement de l'exercice que nous avons entrepris face à la taille du conseil d'administration. Je veux me concentrer sur deux choses: la taille et la représentativité. On nous a offert, comme c'était à prévoir, une argumentation sur l'ampleur du conseil d'administration qui démontrait, encore une fois, l'incapacité de nos amis d'en face de distinguer entre un conseil d'administration et une série d'autres instances politiques et représentatives. Un conseil d'administration n'est pas une instance politique, ni une instance représentative. Un conseil d'administration a pour but de gérer une entreprise ou un organisme gouvernemental qui opère comme une entreprise. Ceux et celles parmi nous qui ont eu l'occasion d'être membres d'un conseil d'administration, d'une entité qui fonctionnait dans un marché ou dans quelque chose qui s'apparentait à un marché, savent que le genre de décisions qui sont prises, le genre de suivi gui est exigé des opérations d'une société d'Etat exigent un certain "focus", une certaine cohérence, une certaine économie de discussions ou une certaine concentration de discussions que seul un conseil d'administration d'une taille d'au plus quinze personnes, je pense, pourrait apporter. On sait qu'il n'y a aucune autre entreprise de télévision du pays, y compris les télévisions publiques, qui a un conseil d'administration de plus de quinze personnes.

Le conseil d'administration de Radio-Québec ne sera plus une -entité politique ou le reflet d'une série de débats politiques traduits par les nominations utilisées pour composer le conseil d'administration de Radio-Québec. Il n'y aura plus dix Radio-Québec, il n'y aura qu'une Radio-Québec. C'est ainsi que, tel que prévu si perspicacement par le député de Saint-Jacques, nous ne pouvons pas voter pour le projet d'amendement proposé par l'Opposition.

La représentativité est une question que je trouve plus intéressante, plus troublante, plus difficile. J'ai voulu trouver un moyen d'indiquer dans la loi la volonté du législateur de voir une diversité géographique au conseil d'administration et j'ai réussi de peine et de misère a convaincre les conseillers juridiques que la notion de la région de Montréal versus le reste du Québec pouvait, quand même, trouver une place dans une loi du Québec. Car, pour les conseillers juridiques et les rédacteurs de lois, de telles conceptions restant floues et redéfinissables par décret, leur définition ou leur utilisation dans un projet de loi crée des problèmes.

Ce n'est pas, non plus, une question mineure ou un fait mineur que nous ne puissions pas représenter simultanément - et nous n'avons pas l'intention d'essayer de représenter simultanément - toutes les douze régions administratives du Québec. Peut-être pourrait-on, à la limite, en soustrayant Montréal, faire une espèce de rotation, mais encore je vois mes conseillers juridiques en train de rouler les yeux parce que c'est extrêmement complexe comme moyen. Cependant, il y aurait peut-être moyen de trouver quelque chose dans ce domaine-là, mais sûrement pas de cette taille-là et sûrement pas à partir de la prémisse que l'essentiel des changements voulus est une plus grande mainmise du gouvernement sur le conseil d'administration et, d'autre part, que, compte tenu de la réglementation actuellement en place, il n'y a pas de possibilité de politisation.

Je pense que la députée de Maisonneuve a bien dit que, dans le fond, la

question des nominations partisanes n'est pas pertinente. On fait des changements à Radio-Québec, non pas parce qu'on pense que les nominations ont été partisanes, bien qu'il y en ait eu un certain nombre qui ont été partisanes, mais parce qu'on pense que cela va être plus efficace par la suite. Deuxièmement, c'est clair, il y aura sûrement moins de nominations partisanes s'il y a 13 nominations au lieu de 70 à faire. C'est quantitavement à peu près indéniable et, qui plus est, il n'y en aurait pas plus proportionnellement, non plus.

Tout cela pour dire que ce n'est pas le nombre, ni la structurite entourant les nominations au conseil d'administration qui font ou ne font pas qu'il y a abus partisan des nominations. On va juger des nominations par la qualité des hommes et des femmes qui les acceptent. Je n'ai aucune crainte face à cela. Le gouvernement précédent a fait de bonnes nominations, pas toutes, mais quelques-unes. Nous allons en faire autant, sinon plus, et nous allons essayer aussi fort que lui d'éviter qu'il n'y ait distorsion ou déformation de la représentativité, dans tous les sens et non pas juste géographiquement, de la société québécoise au sein du conseil d'administration de Radio-Québec. Nous ne le ferons sûrement pas par une loi amendée de la façon précise qui nous est suggérée actuellement, M. le Président, par l'Opposition.

Le Président (M. Trudel): Merci, M. le ministre. Est-ce que d'autres députés veulent intervenir sur le sujet?

M. Hamel: Est-ce qu'on peut passer au vote?

Le Président (M. Trudel): M. le député de Sherbrooke demande qu'on passe au vote sur l'amendement proposé par le député de Saint-Jacques.

Mme Juneau; Je remarque que, le député de Sherbrooke est fort sur le vote. C'est toujours lui...

M. French: C'est un jeune homme prometteur dans la politique, Mme la députée.

Le Président (M. Trudel): À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Saint-Jacques, s'il vous plaît! Avant qu'on me le demande, étant donné que cela fait quand même quelques minutes qu'on n'a pas entendu l'amendement, je me permets de vous le relire pour passer au vote par appel nominal.

L'amendement tel que proposé par le député de Saint-Jacques se lit comme suit: "L'article 1 du projet de loi modifiant la Loi sur la Société de radiotélévision du Québec est remplacé par le suivant: 1. L'article 6 de la Loi sur la Société de radiotélévision du Québec (LRQ, chapitre S-ll.l) est modifié: 1. par la suppression du paragraphe c; 2. par le remplacement du paragraphe d par les suivants: d) Douze personnes nommées par le gouvernement, chacune à titre de représentant d'une des douze régions administratives du Québec; d.l) Deux personnes nommées par le gouvernement sur recommandation d'organismes représentant les milieux de la télévision au Québec; d.2) Une personne nommée par le gouvernement à titre de représentant des milieux de l'éducation sur recommandation d'organismes représentatifs de ces milieux."

M. le député de Saint-Jacques.

M. Boulerice: Je voudrais demander un vote scindé, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): Nous ne pouvons pas scinder un vote, M. le député. Nous allons procéder à un vote par appel nominal.

M. Boulerice: Mais non, je veux scinder la proposition.

M. French: Vous n'avez pas le droit de la scinder.

Le Président (M. Trudel): Vous allez être obligé de me citer le règlement. On ne peut pas scinder...

M. Boulerice: Cela n'a pas marché. Tant pis!

Le Président (M. Trudel): Pour le vote par appel nominal, je demanderais la collaboration des députés membres de cette commission.

M. French (Westmount)?

M. French: Contre, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): M. Audet (Beauce-Nord)?

M. Audet: Contre.

Le Président (M. Trudel): M. Boulerice (Saint-Jacques)?

M. Boulerice: Pour.

Le Président (M. Trudel): M. Brassard (Lac-Saint-Jean)?

M. Brassard: Pour.

Le Président (M. Trudel): M. Hamel (Sherbrooke)?

M. Hamel: Contre.

Le Président (M. Trudel): Mme Harel (Maisonneuve)?

Mme Harel: Pour.

Le Président (M. Trudel): Mme

Hovington (Matane)?

Mme Hovington: Contre.

Le Président (M. Trudel): Mme Juneau (Johnson)?

Mme Juneau: Pour.

Le Président (M. Trudel): M. Khelfa (Richelieu)?

M. Khelfa: Contre.

Le Président (M. Trudel): M. Cannon (La Peltrie)?

M. Cannon: Contre.

Le Président (M. Trudel): Mme Pelchat (Vachon)?

Mme Pelchat: Contre.

La Secrétaire: Pour: 4, Contre: 7 et une abstention.

Le Président (M. Trudel): L'amendement est rejeté par sept voix contre quatre.

Oui, M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: M. le Président, ayant écouté avec beaucoup d'intérêt les propos rares du ministre, j'aurais une motion d'amendement à proposer et elle se lirait comme suit: "Le paragraphe d de l'article 1 du projet de loi modifiant la Loi sur la Société de radiotélévision du Québec est remplacé par le suivant...

Le Président (M. Trudel): M. le député de Lac-Saint-Jean...

M. Brassard: Oui, pardon?

Le Président (M. Trudel): ...je vous ferai remarquer ceci. J'étais mélangé dans mes feuilles, j'avais les feuilles de temps pour l'amendement de votre collègue de Saint-Jacques qui est maintenant rejeté. En regardant ma feuille de temps sur l'article 1, je me rends compte que vous avez épuisé vos vingt minutes de droit de parole.

Mme Juneau: C'étaient trois minutes, oui.

Le Président (M. Trudel): Je vous ferai remarquer qu'il ne vous reste rien et qu'il restait à Mme la députée de Maisonneuve six minutes trente secondes et à M. le député de Ssint-Jacques, quatre minutes. Alors, peut-être pourriez-vous, dans un geste de collaboration...

M. Brassard: Vas-y, mon cher.

Le Président (M. Trudel): M. le député de Saint-Jacques, je vous écoute.

Motion proposant d'avoir 9 représentants des régions

M. Boulerice: J'ai l'honneur de vous proposer un autre amendement qui est de remplacer le paragraphe d de l'article 1 du projet de loi modifiant la Loi sur la 5ociété de radiotélévision du Québec par le suivant: "d) Neuf personnes nommées par le gouvernement sur recommandation d'organismes socio-économiques populaires et culturels domiciliées dans différentes régions du Québec autres que celle de Montréal."

Le Président (M. Trudel): M. le député, est-ce que vous pouvez m'apporter une copie de votre amendement, s'il vous plaît?

M. Boulerice: Avec beaucoup de plaisir, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): Je vais suspendre les travaux pour quelques minutes.

(Suspension de la séance à 23 h 32)

(Reprise à 23 h 36)

Le Président (M. Trudel): M. le député de Saint-Jacques, s'il vous plaît! M. le député de Saint-Jacques, à l'ordre, s'il vous plaît!

Je déclare l'amendement du député de Saint-Jacques recevable. Oui, M. le député?

M. Brassard: Sur un point de règlement. Relativement à l'interprétation que vous avez donnée tout à l'heure quant à la possibilité de présenter des amendements ou des sous-amendements, ce qui revient également au même, vous avez indiqué que, parce que mon temps de parole sur l'article était épuisé, je n'avais pas la possibilité à ce moment-là de présenter un amendement. Heureusement, il restait du temps au député de Saint-Jacques à ce moment-là et, compte tenu de cette interprétation, il a pu présenter l'amendement. Cependant, il aurait pu arriver que les quatre députés de l'Opposition aient épuisé tout leur temps et qu'on se retrouve, par conséquent, complètement paralysés dans les circonstances et incapables de présenter soit des amendements ou des sous-amendements au projet de loi, ce qui, vous en conviendrez, est l'essence même du

travail en commission. L'étude détaillée d'un projet de loi en commission consiste précisément non seulement à examiner les articles, mais également à bonifier le projet de loi, à l'améliorer, à présenter, donc, des amendements et des sous-amendements.

Avec tout le respect que je vous dois, M. le Président, il me semble que cette interprétation ne respecte pas tout à fait l'esprit du règlement. Je pense que ce que le règlement indique, c'est que, sur un article de loi, sur un amendement et sur un sous-amendement, le temps de parole d'un député est limité à 20 minutes. Cela, j'en conviens, mais je ne pense pas que l'esprit du règlement soit d'empêcher un député de présenter quelque amendement ou quelque sous-amendement que ce soit.

Je vous réfère, entre autre, à l'article 196 qui dit: "Sauf dispositions contraires, toute motion de fond peut être amendée." Donc, c'est la possibilité pour tout député de présenter des amendements à des articles d'un projet de loi. Il me semble que c'est un principe fondamental du règlement et si, par votre interprétation, en quelque sorte, vous entravez de façon très grave la possibilité pour un membre de la commission de présenter amendements et sous-amendements, il me semble que cela va à l'encontre de l'esprit même du règlement. J'aimerais, M. le Président, que vous preniez avis de cette question-là parce qu'elle m'apparaît importante puisqu'elle peut s'appliquer aussi à d'autres commissions. Je souhaiterais que vous preniez avis de cette question-là, que vous examiniez vous-même, bien sûr, mais aussi avec l'aide de conseillers en droit parlementaire, la jurisprudence et les précédents pour en arriver à un avis sur cette question parce que cela constituerait un précédent grave, à mon avis, susceptible d'entraver et de paralyser le fonctionnement même d'une commission parlementaire.

Le Président (M. Trudel): M. le ministre, sur le point de règlement.

M. French: C'est sûr que ce règlement aurait tendance à entraver le bon fonctionnement d'une obstruction systématique, mais il est clair que le temps de parole, dans une commission parlementaire, se définit et fonctionne de la même façon qu'à l'Assemblée nationale. Si on a fait son intervention et qu'on a écoulé son temps, on ne peut pas se lever quinze minutes plus tard, à sa guise, pour présenter un amendement, pour faire une autre motion. C'est très clair qu'on a une enveloppe de temps limité et on utilise cette enveloppe de temps à la fin, si nécessaire, ou on peut l'utiliser en morceaux pour proposer des amendements, ce que certains membres de l'Opposition n'ont pas fait vis-à-vis de l'article 1. Ils feront mieux la prochaine fois.

Le Président (M. Trudel): M. le ministre, M. le député de Lac-Saint-Jean, je prends bonne note de vos remarques. Je maintiens ma décision. Sans suspendre nécessairement les débats pour ce soir - on pourrait poursuivre sur l'amendement proposé par votre collègue - j'accepte de vous fournir, au cours de la journée de demain, si on peut trouver un peu de temps, la jurisprudence à l'appui de ma décision, qui est exactement - à moins que je me sois mal exprimé ou qu'on ait mal compris cette décision de jeudi dernier - semblable à celle que j'ai rendue jeudi soir dernier. L'article 196 existe, bien sûr, l'article 69 du code Lavoie et l'article 170 du recueil Geoffrion disent bien qu'il faut encore avoir un temps de parole. Ce que j'ai dit, c'est que, dans votre cas précis et dans le cas de Mme la députée de Johnson, chronométré chez vous et à l'arrière ici, il ne restait plus de temps. J'ai reconnu qu'il restait du temps pour votre formation. Une façon, à mon avis, de se sortir de ce dilemme, c'est, lorsqu'on fait des interventions, de se garder quelques minutes pour pouvoir faire d'autres amendements.

Alors, tel est le sens de ma décision. Avec grand plaisir, j'accepte de la mettre par écrit, demain, et de vous redonner ce que j'avais donné à votre collègue de Gouin, jeudi soir dernier, la jurisprudence à l'appui de cette décision et les deux... Non, c'est sur une autre décision où il y avait deux précédents. Je vais faire l'étude.

Si vous voulez, on peut peut-être poursuivre. Il .reste quinze minutes et, dans le courant de la journée de demain, je rendrai une décision pleine.

M. Brassard: Alors, je demanderais la parole sur l'amendement proposé par mon collègue de Saint-Jacques.

Le Président (M. Trudel): Comme l'amendement a été déclaré recevable, je vous cède la parole, M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: M. le Président, j'ai bien écouté, tout à l'heure, les propos du ministre, je l'ai dit tantôt. Évidemment, il a souligné le trop grand nombre de personnes constituant le conseil d'administration. Je pense que l'amendement proposé par le député de Saint-Jacques pourrait répondre à ses voeux. L'article 1.d) indique "cinq personnes nommées par le gouvernement domiciliées dans différentes régions du Québec autres que celle de Montréal"; nous le remplaçons par le suivant: "Neuf personnes nommées par le gouvernement sur recommandation d'organismes socio-économiques populaires et culturels domiciliées

dans différentes régions du Québec autres que celle de Montréal." (23 h 45)

Pourquoi neuf, d'abord? Nous proposons neuf personnes au lieu de cinq. Vous conviendrez que ça rappelle le nombre actuel de personnes représentant les régions, c'est-à-dire les neuf présidents régionaux qui siègent actuellement au conseil d'administration de Radio-Québec. Donc, le chiffre neuf fait référence aux neuf régions du Québec où Ton retrouvait à la fois des comités régionaux et des bureaux régionaux. Le chiffre neuf s'explique ainsi. Il fait donc référence à ces neuf régions qui ont eu la chance pendant quelques années d'avoir des bureaux régionaux et des comités régionaux de Radio-Québec. Quatre de ces neuf régions, malheureusement, verront leur bureau fermer d'ici à quelques semaines, à la suite du diktat du ministre, de l'ordre formel du ministre de fermer la boutique dans ces quatre régions dont l'Estrie, la région de ma collègue de Johnson. Quant aux cinq autres, on supprime les comités régionaux mais on garde les bureaux ouverts. Ils deviennent en quelque sorte, selon l'expression utilisée par le comité régional de chez nous, la région du Saguenay—Lac-Saint-Jean, des comptoirs techniques de Radio-Québec obéissant aux directives de la centrale, donc, n'ayant plus aucun lien avec quelque comité régional que ce soit. Voilà l'origine, l'explication du chiffre neuf.

M. French: Le chiffre neuf, c'est?

M. Brassard: L'explication du chiffre neuf fait référence au fait qu'il existait et qu'il existe encore, pour un certain temps, dans neuf régions du Québec, à la fois des bureaux régionaux et des comités régionaux. Donc, il y avait neuf régions qui avaient l'insigne honneur et l'insigne privilège d'avoir une présence réelle de Radio-Québec chez elles. Nous disons qu'il serait normal que ces neuf régions, à tout le moins, se voient reconnaître la possibilité de déléguer une personne chacune au nouveau conseil d'administration de Radio-Québec. Par cet amendement, nous tentons de maintenir la présence véritable des régions au conseil d'administration, d'assurer le maintien d'une présence régionale effective au sein du conseil d'administration. Je vous signale que cela réduit de douze à neuf, par rapport à la précédente motion du député de Saint-Jacques, le nombre de membres du conseil d'administration, comme le souhaitait le ministre.

D'autre part, une autre caractéristique de cet amendement, c'est qu'il assure à la présence régionale la majorité au sein du conseil d'administration. C'est un choix qu'on fait. C'est un choix politique, c'est évident. Nous avons déjà choisi, en 1979, d'assurer aux régions une majorité au sein du conseil d'administration. Il nous semble que cette majorité devrait être maintenue, conservée aux régions. En fixant à neuf le nombre des personnes choisies dans les différentes régions du Québec, on se trouve à maintenir et à assurer la majorité à la présence régionale au sein du conseil d'administration puisque les neuf représentants des régions s'ajoutent aux cinq personnes nommées par le gouvernement, dont une représentant le milieu de l'éducation - je me réfère au projet de loi du ministre - plus les trois autres, c'est-à-dire le président, le P.-D.G. et la personne représentant les employés, ce qui fait neuf personnes originaires des régions et les représentant et huit autres personnes représentant divers milieux. Donc, cela assure une majorité aux régions. Il nous semble, en tout cas, que ce serait souhaitable que le ministre accepte qu'on maintienne dans le nouveau conseil d'administration cette majorité à la présence régionale.

Je dirais que c'est là aussi l'occasion rêvée pour nos collègues libéraux de redevenir raisonnables, de reprendre contact avec la réalité régionale. Il y en a plusieurs qui sont issus de régions. C'est là une occasion de retrouver, je dirais, leurs racines régionales en acceptant cette proposition tout à fait raisonnable, et de retrouver le sens de l'honneur. Ce que nous leur proposons là, je pense, c'est ce qu'on pourrait appeler un compromis honorable en matière de composition du conseil d'administration, où l'on réduit, quand même, le nombre des personnes composant cedit conseil, répondant ainsi à la volonté du ministre, mais où l'on maintient la majorité aux régions au sein dudit conseil. Je pense que les députés libéraux venant des régions devraient sauter sur l'occasion et accepter cette offre d'un compromis honorable, raisonnable dans les circonstances.

L'autre élément important de cette motion d'amendement, M. le Président, c'est le fait que ces neuf personnes sont nommées par le gouvernement sur recommandation d'organismes socio-économiques populaires et culturels des régions. Ai-je besoin de vous signaler que, toutes les régions du Québec, que ce soit le Saguenay—Lac-Saint-Jean, l'Est du Québec, l'Abitibi, la Mauricie, le milieu communautaire est d'une richesse inouïe, considérable? II y a une vitalité dans les organismes communautaires qui est tout à fait remarquable, extraordinaire dans les régions. Je pense à la nôtre. Je pense à une expérience comme celle qu'on a vécue il y a quelques mois, qui était le sommet sur le développement régional; d'autres sommets ont suivi, d'ailleurs, l'un dans l'Outaouais il y a quelque temps. C'est là une manifestation de la richesse du milieu communautaire des régions.

Par conséquent, compte tenu de cette richesse du milieu communautaire des régions - on n'a qu'à penser, entre autres, aux conseils régionaux nombreux; j'espère que le gouvernement va les maintenir en place - il nous semble approprié et à propos de faire en sorte que ces organismes communautaires soient appelés et invités à faire des recommandations de personnes. Encore là, je reviens un peu sur ce que j'ai dit tantôt, mes collègues aussi, c'est une procédure connue - ce n'est pas une procédure originale, c'est un mode de désignation connu, qui est éminemment démocratique parce qu'on fait appel aux organismes du milieu - de faire des recommandations. C'est le gouvernement qui choisit, qui nomme, mais à partir des recommandations faites par les intervenants, par les organismes socio-économiques représentatifs du milieu.

Il nous semble qu'une proposition comme celle-là assurerait l'indépendance des membres du conseil d'administration...

Une voix: Bravo!

M. Brassard: ...- oui, on peut aller jusque-là, si cela vous convient - une large autonomie des personnes nommées, qui ne se sentiraient pas sous la tutelle du ministre ni du gouvernement. Ces personnes auraient le sentiment réel et véritable, d'ailleurs, de représenter des organismes, un milieu, non pas simplement d'avoir été désignées ou élues par le ministre, par le pouvoir politique, ce qui leur assurerait une évidente autonomie au sein du conseil d'administration. Elles ne se sentiraient pas, je dirais, en dette politique à l'égard du ministre pour les avoir nommées; elles auraient bien plus le sentiment de représenter le milieu que de représenter le ministre ou le pouvoir politique.

Voilà pourquoi cet amendement me semble - je reprends l'expression - un compromis honorable, compte tenu des propos tenus tantôt par le ministre, que nous avons écoutés avec beaucoup d'attention, je vous le signale. Je fais remarquer à mes collègues ministériels que, contrairement à ce qu'ils font très souvent quand on s'exprime, nous avons été très attentifs aux propos du ministre. C'est vrai qu'il est très avare de commentaires, très avare de remarques; alors, on les accueille avec un intérêt très vif. On boit ses paroles quand le ministre daigne nous parler. On a écouté très attentivement ses propos tantôt. À moins que je n'aie mal compris...

M. Bouierice: Vous avez bien compris.

M. Brassard: ...mais je pense que j'ai bien compris ses remarques, je pense que cet amendement du député de Saint-Jacques va dans le sens des propos tenus tout à l'heure par le ministre. Si on accepte cet amendement, on atteint les objectifs du ministre, on réduit le nombre de membres, c'est ce qu'il souhaite. Il veut assurer une meilleure efficacité du conseil d'administration, c'est légitime comme objectif. Toutefois, on atteint l'autre objectif qui est d'assurer une représentation majoritaire, réelle des régions au sein du conseil et de faire jouer un rôle déterminant aux milieux communautaires, aux organismes, en les impliquant dans le processus de désignation des personnes nommées. Pour tout cela, M. le Président, j'aimerais beaucoup, cette fois-ci, que les... On me signale un élément intéressant, je ne conclurai pas tout de suite, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): Vous avez encore du temps, M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: Toujours dans le même article dont parlait tantôt ma collègue de Johnson, M. Bujold a des propos excellents qui confirment ce que je viens de dire. Le chef de cabinet du premier ministre, lui-même, entérine...

M. Boulerice: L'amendement et les propos du ministre.

M. Brassard: ...et votre amendement et mon argumentation, aussi les propos du ministre, je pense. "Sur les conseils d'administration, dit-il, ce qui importe, c'est la compétence - tout le monde en convient -et la représentation régionale du milieu." Excellent, cela.

M. Bouierice: C'est mot à mot.

M. Brassard: "Je travaille là-dessus, dit-il, avec Pierre Bibeau et avec M. Bolduc; on regarde cela avec les ministres impliqués." J'espère, M. le Président, qu'ils sont en train de regarder cela avec le ministre des Communications. "Ce qui importe, dit-il, c'est la compétence et la représentation régionale du milieu." Cela va directement dans le sens de la motion du député de Saint-Jacques. Je trouve que c'est vrai que c'est ce qu'on appelle un argument d'autorité, qui a la valeur qu'on veut bien lui donner. C'est le chef de cabinet du premier ministre. Je trouve que cela a une certaine valeur. C'est un argument d'autorité que j'invoque tout de même pour faire en sorte que, à propos de cet amendement, mes collègues de la commission l'adoptent sans coup férir. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Trudel): Merci, M. le député de Lac-Saint-Jean. II est 23 heures 59 minutes et quelques secondes; alors, si vous n'y voyez pas d'objection...

M. Boulerice: Je vais prendre les quelques minutes qui restent, M. le Président.

Le Président (M. Trudel). M. le député de Saint-Jacques, il ne vous reste pas quelques minutes, il vous reste quelques secondes.

M. Boulerice: Quelques secondes. Et bien, je vais faire ce qu'on fait quand il reste quelques secondes avant minuit, dire au ministre que la nuit porte conseil sur mon amendement, de bien y réfléchir jusqu'à demain, surtout qu'il fait le pont entre le directeur de cabinet de son chef, lui-même, et le porte-parole de l'Opposition en matière de culture. Enfin, en si peu de temps, M. le ministre, vous nous auriez amenés à l'unanimité grâce à l'aide de vos anciens amis de Westmount.

Le Président (M. Trudel): M. le député de Saint-Jacques, je vous ferais remarquer que vous utilisez déjà du temps qui vous serait très précieux pour demain. Alors il est minuit et, sur ce, la commission ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 23 h 59)

Document(s) associé(s) à la séance