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(Onze heures trente-huit minutes)
Le Président (M. Trudel): À l'ordre, s'il vous
plaît!
Je constate que nous avons quorum et que nous pouvons donc
commencer.
La commission de la culture se réunit pour procéder
à l'étude des crédits budgétaires du
ministère des Communications pour l'année 1987-1988. M. le
ministre, vous savez mieux que moi comment les choses se passent, puisque vous
avez été de ce côté-ci de la table à un
moment donné et que, l'an dernier, vous avez défendu vos
crédits.
Je ne pense pas qu'il y ait de remplacements, Mme la
secrétaire.
La Secrétaire: Oui, M. Godin (Mercier) est remplacé
par M. Filion (Taillon).
Le Président (M. Trudel): Pour la Commission
d'accès à l'information, je présume.
La Secrétaire: Oui.
Le Président (M. Trudel): Peut-être, Mme la
députée de...
Mme Juneau: Johnson.
Le Président (M. Trudel): ...de Johnson.
Décidément, ce matin, cela va très bien.
Mme Juneau: Vous vous êtes coupé.
Le Président (M. Trudel): Oui, effectivement.
Pourriez-vous demander à M. Filion de venir ce matin? Je sais que mon
collègue Filion préside cet après-midi la commission des
institutions qui va étudier les crédits du Conseil
exécutif. Si M. Filion veut être ici pour la Commission
d'accès à l'information, il serait peut-être...
M. French: M. le Président, il faudrait signaler à
M. Pépin et compagnie de s'approcher à ce moment-là, mais
je vois par les visages que ce n'est pas l'entente. D'accord.
Mme Juneau: Non, si M. Filion vient ce matin, c'est pour...
M. French: Pour autre chose. Mme Juneau: ...autre
chose.
M. French: Parlez-moi de cela.
Mme Juneau: Vous vous en doutiez, cher ministre.
Le Président (M. Trudel): Sous réserve des ententes
secrètes...
Mme Juneau: Un rien vous attrape.
Le Président (M. Trudel): ...dont je ne suis pas partie,
je l'accepte.
M. le ministre, je vous souhaite la bienvenue ainsi qu'à vos
collaborateurs qu'on aura l'occasion d'interroger tantôt. Je vous
cède immédiatement la parole. Quand vous aurez terminé, je
reconnaîtrai Mme la députée de Johnson et, par la suite, on
s'engagera dans la discussion de vos crédits, programme par programme.
M. le ministre.
Remarques préliminaires M. Richard
French
M. French: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir de
vous présenter aujourd'hui les crédits détaillés du
ministère des Communications pour l'année 1987-1988.
Cet exercice consiste principalement à analyser les
dépenses de l'année précédente et à examiner
celles prévues pour l'année à venir. Avant d'entrer dans
le détail budgétaire, j'aimerais profiter de l'occasion qui m'est
offerte pour mettre en perspective l'action du ministère des
Communications et pour dégager certaines interventions ou
préoccupations qui me tiennent particulièrement à
coeur.
Parlons d'abord des caractéristiques de l'action du MCQ. L'an
dernier, à cette période, après quelques mois de
familiarisation, je vous avais présenté les grands axes de
développement de mon ministère. Aujourd'hui, avec plus de recul,
j'aimerais vous faire part des réalisations découlant des
orientations et à partir desquelles on peut identifier certains des
programmes de la structure budgétaire.
Les principaux champs d'action sont les suivants: d'abord,
l'infrastructure gouvernementale d'informatique et de
télécommunications, élément pas très en vue,
mais combien important; l'information aux citoyens; le développement
technologique et économique du Québec par ses entreprises de
communication; les infrastructures de
diffusion, notamment la télévision et la radio. Dans
chacun de ces secteurs d'intervention, nous pourrons citer certaines
réalisations significatives.
Mais avant de commenter ces activités, permettez-moi de vous
livrer une autre perspective. Je voudrais vous présenter une dimension
du rôle du ministère des Communications qui m'était encore
étrangère il y a un an. Cette dimension n'est pas évidente
à la première lecture du rapport d'activités, ni
même à l'analyse de chacun des programmes. Elle mérite
d'autant plus d'être soulignée qu'elle permet d'évaluer la
juste portée de certaines réalisations.
Au fil des questions ou des préoccupations qui ont
mobilisé les énergies du ministère, j'ai constaté
qu'il s'y dégageait une constante. En effet, la plupart de ces questions
affectent, à des niveaux variables, trois aspects différents: le
culturel, l'économique et le technologique.
Si l'impact sur l'un ou l'autre de ces aspects n'était
qu'accidentel ou occasionnel, il n'y aurait pas lieu d'en faire mention, mais
tel n'est pas le cas. J'ai pu me rendre compte que ces trois aspects
n'évoluaient pas d'une façon isolée, mais interagissaient
les uns sur les autres. J'en suis arrivé ainsi à constater que
les interventions majeures du ministère avaient un impact non pas sur un
seul aspect, mais sur un ensemble que je qualifierais
d'écosystème des communications.
Cet ensemble, qu'on peut illustrer sous la forme d'un triangle dont les
trois pôles sont la culture, l'économie et la technologie,
mérite d'être qualifié d'écosystème, car il
en a la sensibilité. De fait, une action qui vise un des aspects
provoque des réactions -j'oserais même dire qu'elle amorce des
mutations - dans les deux autres aspects.
Sur les plans administratif et politique, cette réalité a
des conséquences. Il est souvent difficile de dissocier les trois
aspects et de les aborder d'une façon isolée. Lorsque l'approche
sectorielle est praticable, elle risque souvent d'être
réalisée au détriment d'une économie d'ensemble.
Enfin, l'approche globale généralement souhaitable oblige
à des efforts majeurs de concertation entre les différentes
autorités, publiques et privées, concernées par les divers
aspects.
J'aimerais illustrer ces propos qui risquent d'être un peu
théoriques par quelques exemples. D'abord, les technologies de
l'information. Les technologies de l'information regroupent tout ce qui traite,
stocke ou véhicule de l'information sous toutes ses formes et,
notamment, l'information électronique. Le traitement de l'information
électronique se fait en particulier grâce à des
logiciels.
Quand on aborde la question du logiciel, on en perçoit d'abord,
bien sûr, l'aspect technologique, puisqu'elle est indissociable de
l'informatique. Cette technologie étant majoritairement en langue
anglaise, le problème culturel est rapidement posé. Trop souvent,
au Québec, on doit travailler avec des logiciels en langue anglaise.
Nous sommes ainsi consommateurs de produits technologiques et culturels
produits è l'extérieur. L'impact économique aussi est
évident.
À ce diagnostic s'impose une solution: le développement de
logiciels francophones à portée multilingue. Une telle action
aurait un effet sur les trois aspects. Par le développement de logiciels
proprement québécois, nous maîtrisons une partie de la
réalité technologique. En développant des loqiciels
francophones, nous respectons les caractéristiques culturelles du
Québec- En développant des logiciels francophones à
portée multilingue, nous transformons en atout ce qui était
à l'origine un handicap de minorité culturelle et nous
développons un produit exportable. Par l'exportation, nous créons
des emplois et nous stimulons le développement économique.
Cette illustration décrit bien, à mon avis, l'interaction
entre les trois aspects et la nécessité d'intervenir pour
influencer l'ensemble de ce que j'appelle l'écosystème de la
communication d'aujourd'hui.
Cet exemple n'est pas fictif, bien au contraire. Le diagnostic et la
solution que je -viens d'effleurer sont conformes aux efforts que le
ministère des Communications consacre depuis un certain temps à
la question des logiciels et aux travaux du comité Canada-Québec,
qui implique notre homoloque fédéral, sur le développement
du logiciel d'expression française.
En termes opérationnels, ce type d'intervention nécessite
la collaboration des gouvernements canadien et québécois et
même de l'ensemble des États de la francophonie. On a pu voir, ce
matin, dans Le Devoir, l'une des ramifications de cette collaboration
internationale dans le domaine du logiciel ou de l'informatique... À un
niveau plus local, il ne faut pas sous-estimer les énergies à
consentir pour assurer la concertation des divers ministères et des
industries concernées.
Deuxième exemple: la télévision. On peut aborder le
problème de la télévision sous différents angles.
Le plus évident est sans doute celui de la pénétration
massive de produits culturels de langue anglaise. Alors, abordons
l'écosystème sous cet angle.
Le problème identifié est celui de l'attrait de
productions télévisuelles en langue anglaise. Qu'il s'agisse
d'émissions diffusées en anglais ou traduites, le problème
est semblable; seul le niveau d'acuité diffère. Les productions
étrangères font donc concurrence à la production
québécoise.
Le problème est culturel, mais aussi économique. Les
productions comme Dallas et Dynastie disposent de budgets de
production qui n'ont aucune commune mesure avec ce que nous connaissons
ici. Or, ces productions ont déjà été
rentabilisées sur un marché local - le marché des
États-Unis -de plus de 200 millions d'Américains avant
d'être vendues au Québec. Bien que nos productions soient
proportionnellement considérables et très prisées par le
public québécois, elles luttent à armes inégales
quant aux budgets de production, le marché local québécois
n'étant pas comparable. Autrement dit, on peut acheter Dynastie ou
Dallas pour quelque chose comme 40 000 $ l'heure sur le marché
québécois, alors que cela prend dix ou vingt fois cela pour
produire une émission comparable au Québec.
La solution au problème culturel est donc d'augmenter la
diversité et la qualité des productions québécoises
pour faire contrepoids. Cela signifie notamment investir plus. Nous
voilà devant l'économique. Mais, pour justifier des
investissements plus substantiels, il faut avoir accès à des
marchés extérieurs, notamment dans les pays de la francophonie.
De nombreux efforts sur les marchés français et européen,
notamment avec TV5, s'inspirent de cette préoccupation.
Mais la télévision, c'est aussi une technologie, notamment
celle de la câblodistribution dans laquelle le Québec
détient une expertise enviable. Les interventions du ministère
pour faciliter l'accès de cette technologie québécoise aux
marchés européens visent, outre l'aspect technologique, à
favoriser aussi l'exportation de productions télévisuelles.
Ainsi, la technologie et la culture s'épaulent réciproquement
dans leurs efforts avec, à l'avant-scène, l'intérêt
économique.
La boucle de l'écosystème se trouve ainsi fermée,
mais nous pourrions prolonger le jeu des interactions dans le secteur de la
télévision. Par exemple, la télévision interactive
est sur le point de s'implanter plus largement et de façonner notre
quotidien. L'impact est culturel, puisque la télévision
interactive va modifier notre façon de vivre et de communiquer, mais il
est aussi économique. En aidant des entreprises
québécoises à investir dans la recherche et le
développement et à expérimenter cette
télévision, nous avons fait en sorte que le véhicule
technologique soit d'inspiration et d'appartenance
québécoises.
En termes pratiques, la solution des problèmes inhérents
à l'écosystème de la télévision
nécessite plus qu'une action unique. II faut miser sur toute une
panoplie de moyens aussi variés que souples. On peut mentionner, entre
autres: la négocation d'une entente d'harmonisation Canada-Québec
sur le développement de la télévision francophone; la
production d'études, tel le rapport du comité
Canada-Québec sur la télévision, la réalisation ou
le financement de recherches; la création de consortiums dans le domaine
de la coproduction et dans le domaine de la câblodistribution; la
négociation d'ententes internationales; la participation à des
tribunes internationales, tel le sommet francophone, etc.
Troisième exemple qui nous permet de démontrer
l'importance de ce concept culture-économie-technologie, la radiophonie.
La radio a une composante technologique indéniable. La production et la
retransmission des émissions radiophoniques nécessitent
l'utilisation de technologies perfectionnées, bien que souples
comparativement à d'autres médias.
Dans ce contexte, l'État peut être sollicité pour
contribuer au développement des infrastructures et au fonctionnement du
média. Il est aussi concerné par l'utilisation des ondes et la
gestion de l'espace radiophonique en fonction des besoins de la
collectivité.
Un des impacts majeurs de la radio est d'ordre culturel. La culture
populaire est largement influencée par la radiophonie. Or, encore une
fois, il est impossible de dissocier culture et économie. Ainsi, la
radio est-elle un véhicule privilégié pour la chanson. Il
ne fait aucun doute qu'en favorisant la diffusion de chansons francophones la
radio favorise le développement chez les Québécois d'un
sentiment d'appartenance culturelle et invite à la consommation des
produits culturels d'ici.
Un fort pourcentage de Québécois associent leurs achats de
disques à l'écoute de la radio. La diffusion de chansons
québécoises francophones se traduit par un impact
économique important pour le Québec. On peut résumer cette
situation par les syllogismes suivants: plus la radio diffuse de chansons
québécoises, plus les qens achètent de disques
québécois, et plus les disques québécois sont
rentables, plus les artistes sont en mesure de créer de nouvelles
oeuvres. Dans ce cas particulier, l'interaction entre la culture et
l'économie, rendue possible par la technologie radiophonique, est on ne
peut plus évidente.
Quatrième exemple, la gestion quotidienne.
L'écosystème des communications basé sur l'interaction
entre la culture, l'économie et la technologie se vérifie dans la
gestion quotidienne des organisations. Je prendrai pour exemple le
ministère et, plus spécifiquement, l'intégration de la
bureautique à Communication-Québec.
Grâce à l'implantation de diverses fonctions bureautiques
telles que le courrier électronique, le traitement de textes et surtout
la banque de renseignements, le mandat de renseignement des citoyens et des
citoyennes du Québec qui est dévolu à
Communication-Québec se réalise à l'intérieur d'une
structure organisationnelle moderne.
L'environnement bureautique dans lequel travaille aujourd'hui le
personnel de Communication-Québec est le fruit d'un développement
technologique adapté à l'organisation. Pour répondre aux
besoins particuliers de son service de renseignements,
Communication-Québec a commandé à une entreprise
québécoise une technologie sur mesure. L'effort de recherche et
de développement ainsi provoqué a permis è l'entreprise en
question d'acquérir, dans ce domaine particulier, une expertise unique
en son genre. Elle a pu par la suite tirer profit de cette expertise pour
s'implanter sur les marchés étrangers - le Japon dans le cas qui
nous concerne - ouvrant ainsi la voie non seulement à sa propre gamme de
produits, mais aussi aux produits d'autres entreprises
québécoises.
Comme on peut le voir, le modèle d'écosystème, avec
ses trois pôles culturel technologique et économique, peut se
manifester tout autant dans la gestion quotidienne d'une organisation que dans
les autres activités déjà mentionnées. Je me limite
donc à ces quelques exemples, mais il serait possible de
compléter une démonstration analogue avec d'autres
préoccupations actuelles du ministère*
Le rôle de l'État. Cette complémentarité
évidente entre les trois aspects qui constituent
l'écosystème des communications influence, dans une certaine
mesure, la nature de l'intervention de l'État. Une première
condition préalable à l'intervention gouvernementale dans des
enjeux de cette nature est la perspective. Le milieu fourmille
d'intérêts, de forces et de ressources en présence. Ces
énergies évoluent avec leur intérêt et leur vision
propres. Il importe que les grands enjeux soient identifiés et mis en
perspective. Il est alors possible de mobiliser les ressources en
présence et de les inviter à collaborer de façon à
favoriser la concertation sur la base d'un intérêt commun.
Dans l'écosystème des communications, le ministère
s'efforce de dégager les enjeux majeurs, de rendre disponibles ou
d'acquérir les informations nécessaires à une
intervention. Il favorise la rencontre et la collaboration de tous les agents,
publics ou privés, qui peuvent contribuer à la solution d'un
problème ou au développement d'un secteur.
L'État ne peut plus jouer un rôle intégrateur par le
contrôle de la production, ïl doit cependant jouer un rôle de
catalyseur, d'accélérateur, de "facilitateur" et ce, notamment en
offrant une perspective d'action et en favorisant l'harmonisation des
énergies en présence. Dans une réalité aussi
complexe que celle des communications, il importe de trouver des modes d'action
originaux et imaginatifs pour influencer le cours des choses dans le sens du
meilleur intérêt des Québécois.
Permettez-moi maintenant, M. le Président, de relever certaines
des principales activités menées en 1986-1987 par le
ministère - c'est à la page 16.
Bilan des activités. D'abord, la diminution de la
publicité gouvernementale. Je m'étais engaqé
l'année dernière à réduire les dépenses de
publicité de moitié. C'est chose faite. Le budget publicitaire du
gouvernement est passé de 22 000 000 $ à quelque 11 000 000 $ en
1986-1987. Ces coupures ne touchent pas la publicité obligatoire,
c'est-à-dire prévue par la loi, telle que les appels d'offres,
les offres d'emploi, etc. Ainsi, seules les campagnes publicitaires visant
à faire connaître les programmes et les services du gouvernement
ou encore à promouvoir le tourisme ainsi que des produits, telles les
obliqations d'épargne et les publications gouvernementales, ont
été autorisées cette année.
Je tiens d'ailleurs à vous souligner que, selon Media Measurement
Services de Toronto, qui a recensé les 100 plus importants utilisateurs
de publicité au Canada en 1986, le gouvernement du Québec arrive
au trente-cinquième rang, loin derrière le gouvernement du Canada
qui occupe le premier rang avec des dépenses de plus de 63 000 000 $ et
le gouvernement de l'Ontario qui occupe, pour sa part, le septième rang
avec des dépenses de 26 000 000 $.
La télévision. En matière de
télévision, le ministère a mis en place des
mécanismes de concertation avec, d'une part, le gouvernement
fédéral et, d'autre part, les intervenants du secteur.
Grâce à l'entente de concertation signée avec le
gouvernement fédéral, le ministère dispose d'une tribune
lui permettant de se faire entendre et de faire valoir la différence du
Québec au moment de l'établissement de politiques en
matière de télévision francophone.
Le ministère a également collaboré
étroitement avec des entreprises afin de faire avancer des projets
concrets développés par des Québécois tels que la
télévision interactive ou la télédistribution
réqionale améliorée. Nous travaillons aussi très
activement à accroître les exportations de nos produits
audiovisuels. Nous avons ainsi favorisé la création de plusieurs
consortiums, visant à vendre l'expertise québécoise en
matière de càblodistribution, à accroître les
coproductions internationales ou encore à diffuser nos émissions
en Europe et en Afrique du Nord.
Le ministère a également analysé très
sérieusement le rapport Caplan-Sauvageau sur la radiodiffusion. Nous
appuyons la plupart des positions énoncées dans le rapport et, en
particulier, celles qui démontrent l'importance de tenir compte de
la
spécificité francophone du Québec en radio ou en
télévision.
TV5 en Amérique. Depuis janvier 1986, un consortium
québécois diffuse, sur la chaîne européenne TV5, une
soirée de programmation par semaine. Des pourparlers sont en cours pour
implanter cette chaîne en Amérique du Nord, notamment pour
déterminer les modalités de financement. Si le modèle de
TV5-Europe est adopté, chacun paiera les frais de fonctionnement en
proportion du temps d'antenne occupé, soit une somme de 1 500 000 $ pour
le Canada, dont moins de 500 000 $ assumés par le gouvernement du
Québec. L'implantation de cette chaîne en Amérique
permettra aux francophones d'ici de visionner des émissions produites en
français par les chaînes françaises, belges, suisses et
canadiennes.
Quatrième point, la radio. Souvent le parent pauvre des
politiques de communications, la radio a attiré, depuis un an, une
attention particulière. Plusieurs études et analyses ont
été réalisées ou le seront sous peu pour mieux
connaître ce secteur d'activité. Le ministère a, de plus,
participé à la mise sur pied du comité tripartite
ACRTF-MCC-MCQ - MCC étant notre homologue fédéral - sur
l'industrie de la radio et a collaboré à la mise en oeuvre de la
Semaine de promotion de la chanson française d'ici qui se tient
actuellement. Des actions sont également prises pour favoriser
l'ouverture à la France et à la francophonie internationale. Pour
la prochaine année, le secteur de la radio comptera parmi mes
priorités, au même titre que la télévision. Quand je
dis "mes priorités", je veux évidemment dire celles du
ministère des Communications.
Cinquième point, le logiciel. Le secteur spécifique du
logiciel a mobilisé des énergies importantes, l'année
dernière. Le comité Canada-Québec sur le
développement du logiciel d'expression française,
créé en février 1986, a réalisé, au cours de
l'année, quatre études sur la situation de cette industrie au
Québec. Les résultats des travaux du comité ont
été déposés le 20 mars dernier. Ce rapport contient
26 recommandations, dont un grand nombre visent à modifier notamment les
critères de sélection et d'évaluation des demandes d'aide
financière présentées à l'entente
Canada-Québec. Un plan d'action vient aussi expliciter les interventions
respectives des ministères des Communications du Canada et du
Québec relativement au domaine du logiciel.
D'autres actions ont également été prises au cours
de l'année, notamment pour faire respecter le droit d'auteur en
matière d'utilisation de logiciel. De plus, la création d'un
centre francophone de recherche sur l'informatisation des organisations (CFRIO)
a été annoncée le 23 mars par mon ministère et le
ministère des Communications du Canada. Ce centre, qui regroupe des
universitaires et des entreprises, va contribuer à accentuer la
recherche et le développement dans le domaine de l'adaptation des
technologies de l'information en milieu francophone.
La francisation de l'informatique. Qu'il s'aqisse d'ordinateurs de
grande puissance, de mini ou de micro-ordinateurs, il est essentiel que les
utilisateurs puissent travailler dans leur langue au Québec. C'est
pourquoi mon ministère s'est penché sur le problème de la
francisation informatique, notamment sur la saisie et l'affichaqe des
caractères accentués et la standardisation des claviers
français. (12 heures)
Au cours de la dernière année, le ministère a
produit plusieurs publications, dont une a une diffusion internationale: le
Guide conceptuel pour la réalisation technique de logiciels de langue
française à portée multilingue. C'est un modeste
best-seller dans le domaine. Il a aussi participé à des
comités nationaux et internationaux sur le développement du
français en informatique. Le ministère a notamment fait deux
propositions majeures à des comités de normalisation canadiens:
l'une touche l'adoption d'un clavier plus adéquat pour les utilisateurs
francophones alors que l'autre porte sur la standardisation des règles
de classement alphabétique au Canada. Ces travaux seront poursuivis au
cours de la prochaine année ainsi que les mesures de sensibilisation
déjà menées au sein de l'administration qouvernementale
pour assurer la francisation du matériel informatique utilisé par
les ministères et organismes.
La politique canadienne de télécommunications. Dans le
secteur de la politique nationale des télécommunications, le
ministère a été très actif au cours des douze
derniers mois. Comme vous le savez, le gouvernement fédéral est
à redéfinir sa politique en cette matière et tes
gouvernements des provinces, dont celui du Québec, ont un rôle
important à jouer dans cette redéfinition des consensus à
l'échelle pancanadienne.
Au cours des travaux qui ont réuni les intervenants
gouvernementaux, j'ai assumé la coprésidence d'un comité
fédéral-provincial qui a étudié la question des
normes nationales en matière d'interconnexion et révisé
les rôles et les responsabilités des gouvernements en
matière de télécommunications. Nos travaux ont notamment
porté sur les conséquences de ta concurrence internationale en
matière de télécommunications, sur la tarification et
l'universalité des services de télécommunications et sur
l'importance des télécommunications dans le développement
économique régional.
Au cours de la conférence fédérale-provinciale et
territoriale sur les télé-
communications, qui s'est tenue à Edmonton les 2 et 3 avril
dernier, les gouvernements participants se sont entendus sur six principes
généraux: l'adoption d'une approche proprement canadienne
relativement aux problèmes et aux politiques de
télécommunications; l'accès universel au service
téléphonique de base et à des prix abordables; la
concurrence internationale de l'industrie canadienne - cela doit être la
compétitivité internationale de l'industrie canadienne, et une
évolution technologique au profit de tous les Canadiens; l'objectif de
développement régional, équitable et
équilibré; l'importance de la responsabilité
gouvernementale pour le développement de politiques, puisque les
organismes réglementaires ont pris le leadership dans ce dossier depuis
une quinzaine d'années. On n'a rien contre les organismes
réglementaires, soit dit en passant.
Les ministres ont aussi signé un protocole d'entente
reflétant un consensus de base en ce qui a trait à la politique
sur l'interconnexion et au partage des responsabilités gouvernementales
en matière de télécommunications.
Le répertoire téléphonique du gouvernement. Un
nouveau répertoire téléphonique gouvernemental a
été publié en septembre 1986. Vous avez peut-être
constaté que la présentation est plus attrayante, mais
l'élément majeur est sans doute les changements apportés
au contenu même, notamment le fait d'indiquer le nom du responsable des
fonctions identifiées dans le répertoire. Cela correspond
à une volonté d'accroître l'efficacité des
communications au sein de la fonction publique en permettant aux fonctionnaires
et aux citoyens de communiquer avec une personne clairement
identifiée.
L'exposition régionale à Hull. Afin de répondre aux
besoins des régions et de permettre aux ministères et organismes
moins présents en région de se rapprocher de la population, le
ministère des Communications a, pour la première fois, mis de
l'avant un projet d'exposition à titre de promoteur. Le salon
Info-Services plus, tenu au Palais des congrès de Hull du 30 octobre au
2 novembre 1986, a regroupé non moins de 43 exposants gouvernementaux,
para et périgouvernementaux et a attiré 10 500 visiteurs. Trois
thèmes principaux y ont été traités:
l'économie et le travail; l'éducation et la culture; le service
aux citoyens et citoyennes.
L'expérience ayant été un franc succès, le
ministère agira de nouveau en 1987-1988 à titre de promoteur de
salons régionaux de ce genre. C'est ainsi que le prochain salon
Info-Services plus se tiendra dans la région de
l'Abitibi-Témiscamingue et l'ouverture se fera ce soir.
Il ne s'agit là, bien sûr, que de quelques dossiers
importants. J'aurais pu m'attarder sur plusieurs autres, tout aussi
intéressants, mais je suis conscient que mon temps est compté. Je
vous inviterais donc à consulter le bilan d'activités du
ministère pour avoir plus de détails sur les autres
activités menées en 1986-1987.
Je terminerai, M. le Président, par un bref aperçu des
principales données financières concernant le
ministère.
D'abord, les crédits périmés. Le ministère
s'est toujours fait un devoir de livrer les crédits fixés par- le
Conseil du trésor et même de dépasser les quotas
établis.
Les crédits périmés pour 1986-1987 seront de
l'ordre de 7 600 000 $. 1 700 000 $ proviennent du centre serveur
québécois de banques catalographjques pour les
bibliothèques; 1 000 000 $ viennent du plan de redressement du Bureau
central de l'informatique; 600 000 $ proviendront des traitements et 4 300 000
$ sont dus à ce qu'on appelle la friction du système,
c'est-à-dire les sommes qui ne peuvent être
dépensées au cours de l'exercice compte tenu des délais du
processus administratif.
Compressions budgégaires. L'objectif des compressions
budqétaires fixé par le ministère en 1987-1988 est, quant
à lui, de 9 500 000 $. Les deux tiers de cet objectif seront
réalisés par des récupérations touchant
l'indexation, les budgets du service du courrier et messageries et la provision
de la hausse des tarifs téléphoniques ainsi que les
économies découlant de la réorganisation de la Direction
générale des télécommunications.
Le reste provient de diverses sources telles que la réduction du
budget du Programme d'aide au développement des médias
communautaires (PAMEC), l'abolition du Proqramme d'aide aux organismes de
défense des intérêts des usagers des moyens de
communication (PODIUM), l'économie découlant du plan de
redressement du BCI.
Transfert de services au ministère des Approvisionnements et
Services. Les services de courrier et messageries gouvernementales, d'entretien
de machines de bureau et de reprographie gouvernementale ont été
transférés sous la responsabilité du ministère des
Approvisionnements et Services à l'automne 1986. Cette opération
se traduit, en 1987-1988, par un transfert de 313 postes et une diminution du
budget de l'ordre de 29 800 000 $. Je pense que si on veut comprendre
l'évolution du budget du ministère, Mme la députée
et M. le Président, il est essentiel de constater ce changement assez
majeur.
Globalement, le budget du ministère, excluant les organismes qui
en dépendaient, était de 164 000 000 $, en 1986-1987. Il passera,
cette année, à 133 000 000 $. L'énoncé d'une liste
de chiffres étant toujours fastidieuse, je vous épargnerais,
M.
le Président, l'énumération des variations
budgétaires et vous référerais plutôt au texte du
bilan et orientations que vous avez déjà reçu,
Maintenant, il me fera plaisir de répondre à vos questions
et à celles des membres de cette commission concernant les
activités et les budgets de mon ministère. Merci!
Le Président (M. Trudel): Merci, M. le ministre. Vous
savez fort bien que ce n'est pas moi qui vais... La tradition veut que vous
vous adressiez à moi, alors que vous allez discuter avec Mme la
députée pendant la majeure partie de la journée, mais
j'aurai quelques questions évidemment. Je reconnais maintenant Mme la
députée de Johnson pour ses remarques préliminaires.
Mme Carmen Juneau
Mme Juneau: Merci, M. le Président. L'année 1986
aura été marquée par des événements majeurs
et significatifs dans le monde québécois des communications. Je
n'en citerai que quelques-uns: tout d'abord, le rapport Caplan-Sauvageau qui
propose des voies de solution pour assurer l'avenir de notre système de
radiodiffusion, particulièrement en ce qui touche la reconnaissance de
la spécificité francophone de notre système de
radiodiffusion.
Nous avons eu aussi l'achat de Télé-Métropole par
le groupe Vidéotron dont les activités gagnent la France,
notamment, dans le dossier de la privatisation de TF 1.
Nous avons vu aussi, en 1986, l'entrée en ondes d'un nouveau
réseau québécois qui se nomme Quatre Saisons. Nous avons
eu aussi l'achat de la société de
télécommunications par l'entreprise québécoise
Mémotec et la trop brève odyssée du quotidien
montréalais Le Matin.
Par contre, le bilan de l'action du ministre québécois des
Communications est, quant à lui, beaucoup moins significatif. Le
ministre semble vouloir se confiner à un rôle de gestionnaire*
C'est, à mon point de vue, regrettable pour le domaine des
communications du Québec.
Il a entrepris une opération de délestage de certaines
responsabilités de son ministère. Il vient juste, dans son
discours d'ouverture, de nous en énumérer quelques-unes. Il s'est
départi des services de courrier, de messageries, d'entretien des
machines de bureau et de reprographie de son ministère au profit du
ministère des Approvisionnements et Services.
Il a cédé au ministère des Affaires culturelles la
responsabilité de conservation des films du gouvernement du
Québec jusque-là prise en charge par la banque de films du
Québec et le ministre sait ce que ça veut dire; il sait à
quel point ceci est inquiétant pour le patrimoine.
Dans le dossier de Radio-Québec, les coupures de 8 0Q0 000 $ se
sont traduites par l'abolition de quatre stations régionales dont celle
de ma région, l'abolition des comités régionaux à
la suite de l'adoption du projet de loi 61, l'abandon de la programmation
diffusée en détachement réseau, la réduction
à néant du budget et du personnel des bureaux régionaux
survivants et la mise à pied de plus de 100 employés de cette
société. C'est un triste bilan, M. le ministre. Le ministre aura
beau dire que les cotes d'écoute ont augmenté depuis lors, cela
ne saurait faire oublier pour autant que la présence régionale au
sein de la programmation s'en trouve diminuée, tristement
diminuée.
En déposant, en mars 1987, le bilan et les perspectives de la
Société de radiotélévision du Québec, le
ministre nous a démontré ou a essayé de nous
démontrer qu'il était le sauveur de Radio-Québec et, quand
Radio-Québec semblait compromise à la suite des coupures et du
rapport Gobeil, le ministre s'est vanté des mérites de son
scénario qui a mis, à toutes fins utiles, la
régionalisation de Radio-Québec par terre. C'est maintenant
à Montréal qu'on va décider désormais de ce qui va
se passer dans nos régions, à la suite de la création
d'une direction de coordination des activités régionales.
Les bureaux régionaux, dont les effectifs se résumeront
désormais à un professionnel et à un employé de
soutien, deviennent de simples exécutants des décisions prises en
haut, à Montréal. En plu3 de réaliser une privatisation
partielle de Radio-Québec, en transférant 25 % du budget de sa
production au secteur privé, le ministre gèle l'aide de
l'État à Radio-Québec pour une période
indéterminée. Toute croissance du budget de Radio-Québec
passera dorénavant par un accroissement de ses revenus autonomes.
Voilà l'oeuvre du sauveur qui a pris ses décisions sans tenir de
commission parlementaire sur l'avenir et le mandat de Radio-Québec,
contrairement à l'engagement de son parti pendant la campagne
électorale.
Tout à l'heure, je l'ai entendu parler de ses crédits
périmés. Invoquant des motifs budgétaires, le ministre
s'attaque une fois de plus à la dimension régionale des
communications en abolissant le Programme d'aide au développement des
médias communautaires. Il a aboli PAMEC et le Proqramme d'aide aux
orqanismes de défense des intérêts des usaqers des
médias, PODIUM. Désormais, ces organismes, les
télévisions communautaires, les radios communautaires en milieu
urbain et les médias écrits communautaires, doivent se passer de
l'aide du ministère des Communications et ceci, depuis le 1er avril.
Je ne trouve pas que c'est à nous, les régionaux,
d'accepter facilement que ces crédits périmés se passent
sur le dos des gens des régions. Nous condamnons sans
réserve...
M. French: M. le Président, est-ce que je peux demander
à Mme la députée de répéter? Je ne suis pas
certain d'avoir compris.
Mme Juneau: Vous avez coupé un montant de 1 200 000 $ au
budget de cette année.
M. French: Mais ce n'étaient pas des crédits
périmés, Mme la députée.
Mme Juneau: Non, je m'excuse. C'est moi qui ai fait erreur.
M. French: Bon. D'accord. Je pense qu'on se comprend.
Mme Juneau: La coupure de 1 200 000 $ touchait les programmes
PAMEC et PODIUM. Encore une fois, ceci s'est fait sur le dos des
régions.
Nous condamnons sans réserve cette décision qui va
à ('encontre des intérêts des gens de nos régions.
Les médias communautaires sont souvent les seuls véritables
outils d'information dont disposent ces gens sur les plans régional et
local. Cela est d'autant plus vrai que les coupures
répétées è Radio-Canada et les coupures
récentes à Radio-Québec empêchent celles-ci de se
doter de moyens pour assurer une véritable information
régionale.
Nous trouvons qu'il est irréaliste de demander è ces
organismes d'atteindre en si peu de temps le seuil d'autofinancement de leur
activité. Eux qui réussissent déjà è aller
chercher 30% de leurs revenus dans leur milieu et, parfois, un peu plus. Nous
condamnons le cynisme du ministre dans ses réactions tardives. Il aura
mis sept mois à répondre au rapport Caplan-Sauvageau, indiquant
que son ministère continuera, comme par le passé, à
promouvoir le développement des médias communautaires qui sont,
eux aussi, un élément de la spécificité
francophone. (12 h 15)
C'est un beau discours que le ministre vient de nous faire: 1 200 000 $
dans l'aide aux médias communautaires ont été
coupés. C'est un lieu où nos jeunes, qui voulaient aller dans le
secteur des communications, faisaient souvent les premiers pas, dans les radios
communautaires.
Dans le dossier de la vente d'UniMédia - c'est ce qui nous touche
le plus en ce moment - le ministre, qui prétendait surveiller le dossier
depuis quelques jours, a dit, la semaine dernière, que cela ne relevait
plus de lui. Franchement, le ministre se lave les mains de la transaction
d'UniMédia après avoir tenté d'intéresser des
intérêts québécois dans la transaction, qui
était déjà conclue, semble-t-il, depuis le 24
décembre. Cela n'est pas étonnant que le dossier se soit
retrouvé sur le bureau du premier ministre.
Ce que nous demandons - nous l'avons demandé en Chambre à
plusieurs reprises mais, des réponses, on n'en a pas eu - c'est un
moratoire de trois mois sur cette transaction comme cela a été
fait en 1973, afin de permettre soit la constitution d'un "joint venture"
québécois, tel que je l'ai demandé au ministre au
début de la semaine, ou la présentation de contre-offres par des
intérêts québécois en vous signalant qu'il n'y a pas
que Québécor et Power Corporation qui peuvent acheter
UniMédia. Cogéco en a parlé cette semaine et Gesco aussi;
il pourrait tout aussi bien y avoir un "joint venture" québécois,
M. le ministre, qui serait intéressé par l'achat
d'UniMédia, mais il aurait fallu que vous vous impliquiez beaucoup plus
que comme vous avez semblé le faire.
Je vais m'arrêter là dans mes remarques
préliminaires, parce que je pense que ce qui est important, c'est
d'aller tout de suite au dossier d'UniMédia. Si vous me le permettez, M.
le ministre, nous allons...
M. French: M. le Président.
Le Président (M. Trudel): Mme la députée de
Johnson, avez-vous terminé vos remarques préliminaires?
Mme Juneau: Oui, M. le Président.
Le Président (M. Trudel): Je rappelle qu'il n'y a pas eu
de séance de travail pour discuter la façon dont les choses
allaient se dérouler. C'est au choix. S'il y a entente entre M. le
ministre et Mme la députée, on peut procéder, dans un
premier temps, à une discussion générale sur l'ensemble
des activités du ministère ou alors, à défaut
d'entente, on devra y aller proqramme par programme.
M. French: M. le Président.
Le Président (M. Trudel): M. le ministre.
M. French: Je suis prêt, pour ce qui est de l'étude
programme par programme versus une discussion générale, à
me rallier à ce que Mme la députée voudrait bien. Il y a
deux choses, cependant; je voudrais répliquer à certaines de ses
affirmations dans ses commentaires et, deuxièmement, j'aimerais
l'inviter à procéder à l'élément ou au
programme qui touche la Régie des services
publics puisque cela risque d'être rapide. M. le juge Tremblay et
ses collègues sont ici pour répondre aux questions de la
commission à ce sujet-là. Cela permettrait de...
Le Président (M. Trudel): Mme la députée, si
vous êtes d'accord, on pourrait procéder...
Mme Juneau: Oui, effectivement.
Le Président (M. Trudel): ...à l'étude du
programme 6, si vous avez des questions, et on pourrait par la suite
libérer rapidement les membres de la régie.
M. French: En se rappelant, M. le Président, que
j'aimerais épuiser mon droit de réplique aux affirmations de Mme
la députée.
Le Président (M. Trudel): Oui. De toute façon, M.
le ministre, vous pouvez intervenir quand bon vous semble et autant de fois que
vous le voulez sans aucun problème.
Régie des services publics
M. French: M. le Président, je vais me lever pour une
raison symbolique puisque M. Tremblay a un statut juridique indépendant,
qui ne découle pas du ministre, mais de l'Assemblée nationale. Je
soulignerais cependant qu'on ne saurait interroger M. le juge Tremblay sur les
projets que le gouvernement pourrait avoir en vue d'une réforme de la
régie, etc., puisque cela relève du ministre et que cela doit
être une réponse du gouvernement.
Le Président (M. Trudel): Oui. Vous admettez cependant, M.
le ministre, que l'on peut vous interroger sur les projets que vous pourriez
avoir.
M. French: Absolument. Certainement, mais je pars...
Le Président (M. Trudel): Très bien.
M. French: ...pour le moment parce que je pense que M. le juge
Tremblay devrait comparaître indépendamment, tout comme son
statut.
Le Président (M. Trudel): Je suis tout à fait
d'accord avec vous. Alors, Mme la ministre.
Mme Juneau: Merci.
Le Président (M. Trudel): Je vous donne des promotions
rapides. Il faudra attendre encore quelques années, malheureusement pour
vous.
Mme la députée, je vous reconnais et vous cède la
parole, si vous voulez échanger des propos avec M. le juqe à qui
je souhaite, par ailleurs, la bienvenue à la commission. Mme la
députée.
Mme Juneau: Quant à vos qualifications, M. le
Président, cela peut prendre moins de temps que vous ne le pensez. On ne
sait jamais.
Le Président (M. Trudel): La question, Mme la
députée?
Une voix: Elle le sait, voyons!
Le Président (M. Trudel): Vous n'êtes pas gentil,
vous. Allez-y, Mme la députée.
Une voix: Vous courez après, cher ami.
Mme Juneau: Ma seule question porte sur le programme 6. Est-ce
qu'il y a eu un scénario dans la révision tarifaire de Bell
Canada et quelle a été l'implication du Québec?
M. Tremblay (Jean-Marc): Vous parlez de la révision
tarifaire, le... Oui.
Le Président (M. Trudel): Je m'excuse, monsieur.
Auriez-vous l'amabilité de vous identifier formellement pour les besoins
du Journal des débats. .À l'enregistrement, ils vont
être complètement perdus si vous ne le faites pas.
M. Tremblay (Jean-Marc): Jean-Marc Tremblay, président de
la Régie des services publics.
Le Président (M. Trudel): Merci, monsieur.
M. Tremblay (Jean-Marc): Si je comprends votre question, vous
faites allusion à la requête en rééquilibrage des
taux de Radio-Québec.
Mme Juneau: C'est cela.
M. Tremblay (Jean-Marc): Je dois vous dire que, ce
rééquilibrage se faisant par un organisme semblable au
nôtre mais de juridiction fédérale qui est le CRTC, vous
comprendrez très bien que la régie n'a pas à intervenir
dans le dossier auprès du CRTC. Je pense que le ministère des
Communications se charge de ce travail.
Quant à nous, ce qu'on fait, c'est qu'on peut prévoir,
comme orqanisme de réglementation ayant juridiction sur seize compagnies
du Québec, les impacts et les conséquences si, par hasard,
était accordée la requête telle que libellée. On est
quand même dans l'expectative de la décision qui sera rendue, car
je pense que ce serait de mauvais aloi
que de préjuger d'une décision rendue aussi longtemps
qu'on n'en connaîtra pas les tenants et aboutissants et tous les
paramètres. Mais soyez sûre qu'on est éveillés
à la situation et qu'on a déjà des travaux
préparatoires ou péliminaires de faits pour que la population du
Québec, qui est sous notre juridiction, n'ait pas à subir les
effets néfastes d'une réglementation émanant d'une autre
juridiction.
Mme Juneau: Je voulais savoir si, éventuellement, il y
avait des scénarios préparés au cas où il y aurait
une acceptation, soit exactement ce que Bell demande ou une autre proposition.
Je voulais savoir si des scénarios avaient été
préparés par vous dans le but de protéger nos
utilisateurs.
M. Tremblay (Jean-Marc): Vous me permettrez de ne pas entrer dans
les détails étant donné que, dans ces scénarios,
des auditions publiques sont prévues et qu'il y aura, à ce
moment, du sub judice, etc., qui serait à venir. Mais je peux vous
assurer que la régie est très consciente de sa
responsabilité sur les entreprises du Québec. Si, par hasard,
pour vous donner un exemple, une baisse des taux de l'interurbain de 20 % de
Bell Canada avait un impact sur la santé financière d'une de nos
entreprises, on a prévu des scénarios pour faire en sorte que nos
entreprises puissent rester dans une santé financière
réellement importante et suffisante pour assurer le service de base au
meilleur prix possible à tous les abonnés de leur territoire,
Mme Juneau: II y a seize compagnies québécoises.
Est-ce qu'éventuellement, cela pourrait avoir des retombées sur
elles si une chose ou l'autre était acceptée?
M. Tremblay (Jean-Marc): Il y a douze compagnies sur seize qui
sont raccordées directement à Bell. Canada. C'est sûr,
à ce moment, qu'il y a un contrat de trafic, un contrat d'échange
entre les deux pour que le trafic de la petite compagnie soit acheminé
par Bell et vice versa. Alors, il y a des montants et des conventions entre les
deux.
C'est évident que, pour employer un terme du jargon, si une des
compagnies en met moins dans le panier où se fait le partage, c'est
sûr qu'il y en aura moins à redistribuer. C'est cette partie qui
est importante pour nous parce que vous croyez bien qu'il faudra quand
même que l'entreprise ait l'argent nécessaire pour assurer le
service. Si l'interurbain baisse pour des fins de concurrence ou autres, c'est
sûr que l'impact peut être sur le local. il nous faut alors faire
en sorte que, si c'est la seule solution, l'augmentation du local ne soit pas
telle qu'elle empêche les gens d'avoir le service de base. C'est
là notre préoccupation comme organisme. Nous en sommes
très conscients et nous faisons le maximum, à l'intérieur
de notre juridiction, pour nous assurer que l'intérêt public soit
sauvegardé.
Mme Juneau: Je vous remercie beaucoup, monsieur. Cela va
aller.
Le Président (M. Trudel): Mme la députée,
est-ce que vous considérez que le programme 6, Régie des services
publics, est adopté?
Mme Juneau: Oui, M. le Président.
Le Président (M. Trudel): Adopté. Merci, M. le
président.
Mme Juneau: Merci. Bonjour. Remarques préliminaires
(suite)
Le Président (M. Trudel): Peut-être, M. le ministre,
voudriez-vous répondre immédiatement, tout en engageant la
discussion avec Mme la députée de Johnson?
Richard French (réplique)
M. French: Si vous me permettez, j'aimerais, M. le
Président... Je vais juste prendre les affirmations de Mme la
députée une à une. On va sans doute avoir quelques heures
pour en discuter.
Le premier point que j'aimerais faire ressortir, puisque cela a
été dit sur un ton que j'ai perçu comme critique, cela m'a
inquiété. Vous dites que je me suis départi des
activités de messageries, de courrier et d'entretien des machines de
bureau, etc. J'aimerais bien souligner, pour Mme la députée, que
les trois quarts sinon 80 % de ces activités étaient au
ministère des Approvisionnements et Services qui existait il y a trois
ou quatre ans. On a décidé, pour d'autres raisons, de le
reconstituer et j'ai redonné à César ce qui relevait de
César. Ce n'est pas une décision de haute politique, je vous
l'avoue. C'est un intérêt pour l'efficacité de la
machine.
Pour ce qui est de la banque de films du Québec, on peut en
discuter en détail, si vous voulez mais, essentiellement, c'est un
mandat qui relève du ministère des Affaires culturelles.
Mme Juneau: C'était à vous, avant.
M. French; C'est vrai; par un accident historique, ça
relevait du ministère des Communications du Québec, mais avec les
compressions budgétaires actuelles on a décidé qu'on ne
pouvait pas continuer à entreprendre un certain nombre
d'activités,
dont celles concernant des archives qui ne relèvent pas de nos
responsabilités, de notre lot. Radio-Québec, quant à moi,
j'aimerais bien vous suggérer, Mme la députée... Je n'ai
pas consulté le président de Radio-Québec, mais vous avez
le droit à chaque année de convoquer un organisme autonome. Si
vous voulez convoquer un organisme autonome qui s'appelle Radio-Québec,
loin de moi l'idée de m'y opposer.
Je pense que Radio-Québec a une histoire extrêmement
intéressante. Pour ma part, je serai très heureux de vous
permettre et de permettre à l'ensemble de la commission d'examiner en
long et en large tout ce qui se fait à Radio-Québec.
Mme Juneau: C'est ce qu'on s'est tué à vous dire,
l'année dernière.
M. French: Là, vous avez la preuve que nos politiques sont
correctes. Examinez-les, si vous n'avez pas peur, madame; je vous mets au
défi. M. le Président, Mme la députée a
présenté une série d'arguments au sujet de
Radio-Québec, dont le principal pourrait peut-être nous
intéresser; c'est la dimension régionale. Elle a affirmé
que nous avons fermé les stations. Elle a affirmé que nous avons
abandonné le détachement régional, c'est-à-dire le
deuxième canal de satellite qui coûtait 1 000 000 $ par
année et qui diffusait 45 minutes dans chaque région, attirant
des auditoires de 2000 personnes et moins. Elle a aussi affirmé que nous
avons réduit à néant le personnel dans d'autres bureaux
régionaux. Elle a également pleuré la perte... Elle a
également regretté la perte...
Des voix: Déploré.
M. French: Déploré, merci. Déploré.
Elle a également déploré la perte des émissions
régionales. Bon! Revoyons un peu quelle a été la
démarche du gouvernement et de Radio-Québec dans ce dossier.
D'abord, la situation, le statu quo ante tant regretté par Mme la
députée était une situation où 13 % du budget de
Radio-Québec était dépensé pour atteindre moins de
1 % de son auditoire par les émissions produites et diffusées en
région. On s'est dit: II y a sans doute de meilleures choses à
faire avec cet argent. En abandonnant le détachement... Je pourrais
dramatiser cela d'une autre façon, M. le Président. Cela a
coûté 11 $ par tête de pipe d'auditoire pour les
émissions diffusées sur le plan national. Et cela a
coûté 88 $ pour atteindre le même auditeur par une
émission produite et diffusée en région.
Il aurait été intéressant si les auditoires des
émissions produites en région étaient normaux, mais ces
auditoires parfois ne se percevaient même pas dans les sondages de BBM
dans les régions. Dans d'autres cas, on pouvait les évaluer
à environ 800 personnes, 1000 personnes, 1200 personnes; le maximum
était à peu près de 3000 personnes, ce qui constituait un
grand succès. En abandonnant le détachement, nous avons fait en
sorte - je vais attendre que Mme la députée ait les deux
oreilles, pas juste une seule, dirigées vers moi...
Une voix: Elle est bien branchée, là.
M. French; Oui, elle est très bien branchée.
Mme Juneau: Je vous en prie, M. le ministre, je m'excuse.
M. French: Mme la députée, en abandonnant le
détachement et la prétention de neuf télévisions
indépendantes, nous avons pu faire en sorte, dans le magazine qui est
diffusé deux fois par semaine à Radio-Québec dont la
production est essentiellement régionale, que la programmation produite
en région soit vue par plus de personnes dans un mois - peut-être
deux semaines, mais je vous dis un mois parce que je suis certain que c'est un
mois - que toute la production régionale de toutes les régions du
Québec pendant toute l'année précédente.
Évidemment, le magazine fonctionne pendant 37 semaines, il ne fonctionne
pas juste un mois. Alors, pour ce qui est des qens qui regardent la production
régionale sur l'écran de Radio-Québec, l'auditoire est
multiplié par plusieurs facteurs. La saisie par les
Québécois des images venant des régions est beaucoup plus
forte maintenant, avec le régime actuel, qu'auparavant. (12 h 30)
Mme la députée a évoqué la production en
région et elle a laissé entendre que nous avions abandonné
cette responsabilité. Je pense qu'il y a deux ou trois choses qu'il
faudrait mentionner pour qu'elle comprenne bien. Elle a déploré
aussi l'objectif de transfert de 25 % des budgets de production vers le secteur
privé pour l'année 1990-1991.
Pour la première fois cette année, Radio-Québec a
signalé à l'ensemble des producteurs indépendants, y
compris ceux et celles en région, quels seraient ses besoins. Aucun
diffuseur de télévision québécoise n'a jamais
posé un tel geste. Dans le document qui s'appelle "Appel de projets,
juin 1987" on peut voir qu'il y a deux séries complètes
d'émissions régionales, soit 37 émissions de 30 minutes
chacune, en plus du magazine qui existe déjà et qui est à
peu près majoritairement régional d'origine, et des autres
coproductions indépendantes. Ce serait l'éducation formelle qui
se fait parfois en région. Par exemple, l'un des plus grands
succès d'éducation formelle en ondes à
Radio-Québec, c'est une série sur la
sylviculture produite dans le Bas-du-fleuve, si je ne m'abuse.
Finalement, tous les producteurs indépendants sont admissibles à
des programmes d'acquisition et de coproduction de Radio-Québec et ils
sont là à part entière.
Donc, je pense que d'affirmer que Radio-Québec a abandonné
son intérêt pour la télévision en région et
que les gens ont été privés d'images venant des
régions à la suite des changements que nous avons entrepris
à Radio-Québec, de la réforme que nous avons entreprise,
c'est exagérer et fausser la réalité. Qui plus est, on
peut le démontrer parce que l'écoute en région à
Radio-Québec est soit stable ou a augmenté de façon
significative. La part de marché de Radio-Québec n'a jamais
été faramineuse dans la plupart des régions
périphériques du Québec mais on va de 2 % a 4 % ou de 4 %
à 7 % de part de marché dans divers endroits. En aucune
région du Québec l'écoute de Radio-Québec, la part
de marché de Radio-Québec n'a baissé. C'est la seule
télévision québécoise qui peut l'affirmer face
à l'arrivée de Quatre Saisons dans le marché. Le bilan de
Radio-Québec est hautement positif. Encore une fois, je vous
suggère si cela vous intéresse, messieurs et mesdames de la
commission de la culture, de demander à Radio-Québec de venir
vous voir. Vous pourrez examiner en long et en large ses activités.
Pour ce qui est du PAMEC, je dirai simplement, Mme la
députée, que cela nous fait plaisir de répondre aux
questions. Je crois qu'il y a des questions importantes à poser. On va
faire le débat.
Pour ce qui est du rapport Caplan-Sauvageau, le seul point que je
voudrais relever, c'est l'histoire de sept mois. Je comprends que cela vous ait
frustée; cela a fruste le ministre aussi. La nécessité a
été...
Mme Juneau: De ne pas être capable de le
déposer?
M. French: Excusez-moi?
Mme Juneau: De ne pas être capable d'intervenir?
M. French: Oui, de ne pas être capable de répondre
plus rapidement. La raison était fort simple. On a entrepris une entente
d'harmonisation avec nos partenaires fédéraux et, de part et
d'autre, on a voulu étudier cela, Maintenant, je constate qu'on n'est
pas arrivé trop tard pour influencer le courant du débat parce
que la Chambre des communes, le comité homologue au Parlement
fédéral a pris beaucoup plus de temps que cela pour
l'étudier. Ils ont même demandé qu'on remette à plus
tard les décisions importantes dans ce domaine à cause du temps
que cela leur prenait pour étudier le problème. Nos
recommandations sont arrivées tout à fait à temps au
comité spécial de la Chambre des communes qui a
étudié le rapport Caplan-Sauvageau et cela n'a pas
empêché ou changé quoi que ce soit aux résultats.
Cela me fera plaisir si vous voulez parler davantage du rapport
Caplan-Sauvageau et je suis heureux que vous en souligniez l'importance, tout
comme le dossier d'UniMédia lequel, j'imagine, va nous intéresser
dans les heures et les minutes à venir.
Le Président (M. Trudel): Merci, M. le ministre. Mme la
députée.
Mme Juneau; Est-ce que je peux demander au ministre de déposer le
document dont il a fait mention tout à l'heure?
M. French: On ne peut pas le déposer, Mme la
députée, mais je vous le donnerai. On ne peut pas le
déposer, M. le Président, n'est-ce-pas?
Le Président (M. Trudel): Oui. M. le ministre, vous avez
oublié vos règles de procédure.
M. French: Excusez-moi! Cela me fait plaisir de le
déposer.
Le Président (M. Trudel): Je peux accepter, ce que je fais avec
grand plaisir le dépôt du document. Si vous en avez quelques
copies...
M. French: D'accord, c'est le seul document que nous avons,
malheureusement.
Le Président (M. Trudel): Alors, on va le donner è
Mme la députée tout en souhaitant...
Une voix: On va le prendre pareil.
M. French: C'est "hot off the press". C'est hier qu'on l'a
présenté aux producteurs indépendants.
Une voix: Pas de fuite?
Le Président (M. Trudel): Est-ce que vous pouvez en faire
parvenir à la commission de façon qu'on puisse en donner aux
autres membres?
M. French: C'est vous qui êtes spécialisé
dans les fuites, ce n'est pas moi.
Mme Juneau: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Trudel): Mme la députée,
est-ce que vous êtes prête à...
Mme Juneau: Je pense qu'on va commencer les questions car,
même si je revenais sur certaines choses dites par le ministre, cela
deviendrait un dialogue...
Le Président (M. Trudel): Souhaitez-vous procéder
programme par programme?
Mme Juneau: On pourrait peut-être...
Le Président (M. Trudel): C'est à votre...
Mme Juneau: Si vous me le permettez, M. le Président, je
souhaiterais commencer par le programme 5, je pense, c'est... On va y aller
d'une discussion générale à propos d'UniMédia.
M. French: M. le Président, on me signale que...
Le Président (M. Trudel): M. le ministre.
M. French: ...j'ai oublié de déposer, devant la
commission, le rapport d'activités du ministère des
Communications 1986-1987. Est-ce que c'est la partie que j'ai sautée
dans mon discours?
Une voix: Oui.
M. French: Je suis terriblement malheureux. Je suis
extrêmement fier de ce rapport d'activités parce que c'est
l'équivalent...
Mme Juneau: Vous avez sauté le meilleur.
M. French: Excusez-moi?
Mme Juneau: Vous avez sauté le meilleur.
M. French: Je ne le savais pas. C'était dans vos
intérêts, Mme la députée, je vous prie de croire que
c'était pour vous permettre...
Le Président (M. Trudel): Est-ce que...
M. French: Je vais vous expliquer ce que c'est parce que...
Le Président (M. Trudel): En avez-vous plus d'une copie
cette fois-ci, M. le ministre?
M. French? Oui, je pense que vous avons une copie pour tout le
monde cette fois-ci.
C'est l'équivalent d'un rapport annuel mais c'est un an avant le
temps où on a normalement un rapport annuel. Lorsque j'étais chez
vous, lorsque j'étais dans l'Opposition, j'étais tellement...
M. Boulerice: Vous avez déjà été chez
nous, M. le ministre, avouez-le. Ce n'est pas un crime, au contraire.
Des voix: Ha! Ha!
M. French: ...frustré par le retard des rapports annuels
que j'ai demandé a mon ministère si on ne pouvait pas faire mieux
pour avoir une information plus pertinente et plus tôt dans l'horaire
parlementaire.
Donc, c'est l'équivalent du rapport annuel pour 1986-1987. Je le
dépose ici pour que tout le monde soit saisi, de façon plus
ponctuelle, des renseignements pertinents. Je vais demander à tous mes
collègues de faire la même chose, c'est-à-dire que,
lorsqu'ils font le recueil des données et des renseignements pour
l'étude des crédits, de déposer un rapport
d'activités qui tiendrait lieu de rapport annuel formel et qui
permettrait à tout le monde d'être saisi des renseignements de
façon plus "timely".
Le Président (M. Trudel): M. le ministre, nous sommes
doublement saisis d'abord par... Juridiquement, nous nous saisissons du rapport
et, deuxièmement, nous sommes saisis par la rapidité avec
laquelle vous produisez ce rapport. Est-ce qu'on pourrait avoir des copies
d'ici à la fin de la journée pour les autres membres de la
commission? Au retour, après le déjeuner.
M. French: Eux veulent l'avoir.
Le Président (M. Trudel): On leur en donnera une
copie.
M. French: Je vais le déposer à l'Assemblée
nationale vers la fin de la semaine prochaine. On en a seulement quelques
copies. On s'excuse de ne pas en avoir assez pour tout le monde. L'année
prochaine. Excusez-moi, Mme la députée.
Le Président (M. Trudel): Merci. Mme Juneau: M. le
Président. Discussion générale
Le Président (M. Trudel): Alors, vous êtes au
proqramme 5 ou sur une discussion générale, Mme la
députée?
Mme Juneau: On va y aller d'une discussion
générale.
Le Président (M. Trudel): Allez-y.
Mme Juneau: Mais cela correspond quand même au programme
5.
Avant de commencer là-dessus, je voudrais féliciter le
ministre pour avoir déposer assez hâtivement son rapport. Le
ministre mérite des félicitations. Je suis contente.
M. French: Cela vient de...
Le Président (M. Trudel): II y a des applaudissements
faciles de ce côté-ci aujourd'hui.
Une voix: J'allais dire: Cela vient de sa longue
expérience dans l'Opposition.
M. French: Cela vient de ma longue expérience, là
où vous êtes.
Le Président (M. Trudel): M. le ministre, profitez des
félicitations, j'ai comme l'impression qu'il n'y en aura pas beaucoup.
Cela fait partie des règles du jeu.
Vente d'UniMédia
Mme Juneau: On vient de vous envoyer les fleurs et voilà
le pot.
M. le Président, comme on l'a mentionné tout à
l'heure, j'aimerais qu'on discute du très important dossier
d'UniMédia. Depuis une semaine et demie, je pense, depuis mercredi de
l'autre semaine, on a commencé à s'inquiéter d'une
transaction qui, semble-t-il, n'est pas appréciée du tout du
côté du Québec, des Québécois francophones et
des intérêts québécois. Il nous semble
extrêmement important de poser des questions au ministre pour avoir des
réponses à celles qu'on a posées en Chambre et pour
lesquelles on n'a pas eu réponse. J'espère que le ministre
aujourd'hui pourra nous aider à voir clair dans ce dossier.
Si vous me le permettez, M. le ministre, je voudrais savoir tout de
suite: Quand avez-vous été informé de la transaction? Il
n'a pas été possible de le savoir depuis une semaine et demie
qu'on vous pose des questions là-dessus,
M. French: Mme la députée, au meilleur de mon
souvenir, j'ai été informé -on est le 4 juin, l'annonce a
été faite mercredi de la semaine dernière - à peu
près une semaine à dix jours avant de la possibilité d'une
transaction qui aurait pour effet qu'UniMédia deviendrait la
propriété d'un groupe venant de l'extérieur du
Québec.
Mme Juneau: Une semaine à dix jours, avez-vous dit.
M. French: Avant l'annonce finale. Cela peut être deux
semaines, Mme la députée. Je vous donne le genre de "timing".
Cela confirme, si j'ai bien compris, à peu près ce que le premier
ministre a dit sur le délai dont il bénéficiait, à
partir de l'avis.
Mme Juneau: M. le ministre, comment se fait-il, d'abord, en
réponse à ma première question, que cela faisait trois ou
quatre semaines que vous faisiez des efforts pour que des entreprises
québécoises fassent des offres''
M. French: Je répète que je n'ai aucun autre
désir que celui de vous informer le plus précisément
possible, c'est ce que j'essaie de faire. Il se peut que ce soient trois ou
quatre semaines, je pense que c'est à peu près trois semaines,
mais je n'en ai pas pris note, je n'ai pas écrit cela dans mon
carnet.
Mme Juneau: M. le ministre, vous venez de dire une semaine,
peut-être deux semaines, et en réponse à ma première
question en chambre, vous avez répondu: Cela fait trois à quatre
semaines que je tente d'intéresser des entreprises
québécoises à l'achat d'UniMédia. Cela ne concorde
pas du tout avec ce que vous m'avez répondu en Chambre.
M. French: Que le gouvernement... Vous êtes
intéressée par les détails, Mme la députée,
j'essaie de vous donner un détail. Ma réponse, c'était que
le gouvernement...
Mme Juneau: Ne vous fâchez pas, M. le ministre, je vous
écoute, je suis tout oreille.
M. French: ...a essayé de chercher. Je n'ai pas dit que
j'ai moi-même essayé de chercher cela. Deuxièmement, je
vous dis tout de suite que je ne pourrais pas, pour le moment, vous affirmer
précisément à quel moment j'en ai été saisi,
mais c'est entre trois ou quatre semaines, au maximum, une semaine à dix
jours, au minimum, pendant cette période. Je me souviens d'avoir
parlé pendant à peu près une minute ou deux avec Me
Lalonde au téléphone, lequel m'indiquait que des efforts
étaient faits pour encouraqer M. Francoeur à rencontrer et
à discuter avec des acheteurs québécois dont
l'intérêt pour l'entreprise était connu au
gouvernement.
Mme Juneau: M. le ministre, quand avez-vous parlé une
minute ou deux avec Fernand Lalonde? Était-ce au mois de février,
était-ce une semaine ou dix jours avant, quand''
M. French: La discussion dont je parle se situe durant cette
période, les deux ou trois semaines dont je vous parlais.
Écoutez, Mme la députée, je vous dis tout de suite que si
nous procédons avec une suite minutieuse comme celle que vous essayez de
faire, je suis prêt, mais je refuserai de répondre à
beaucoup de questions si des
imprécisions de l'ordre de celles que vous soulevez
systématiquement vous paraissent une tentative de ma part de ne pas vous
informer convenablement. Je vais m'asseoir avec Fernand Lalonde et tous les
autres et on va regarder cela en détail pour que je puisse avoir toute
la lumière possible pour vous donner des réponses
précises. Je n'ai pas intérêt à vous donner des
réponses qui ne sont pas aussi précises et claires que possible.
J'essaie de vous informer au meilleur de mon souvenir, mais si vous avez un
intérêt de cet ordre je serai obligé de vous dire: Je ne
peux vous l'affirmer avec suffisamment de précision et je dois donc
refuser de répondre à la question jusqu'à ce que j'aie eu
des discussions, des suivis avec d'autres acteurs pour me permettre de me
situer dans cela.
Mme Juneau: Vous comprendrez bien, M. le Président, que
l'importance du dossier de la vente d'UniMédia... Je ne comprends pas
comment il se fait que le ministre, sachant qu'on s'en venait étudier
les crédits, alors que cela fait dix jours qu'on parle du dossier
d'UniMédia, n'ait pas eu le temps de parler à Fernand Lalonde. Il
devait bien s'attendre que l'Opposition arrive avec des questions très
précises sur la vente d'UniMédia à des
intérêts de Toronto. À mon point de vue, il serait
extrêmement important, si vous n'êtes pas en mesure de
répondre aux questions de l'Opposition, que M. Lalonde soit assis
près de vous et qu'on puisse avoir le coeur net de ce qui se passe dans
cette transaction. Ne jugez-vous pas utile de vous en être enquis avant
aujourd'hui, ou bien si vous n'avez pas jugé cela utile? Il me semble
que ce serait important qu'on puisse avoir M. Lalonde si c'est lui seul qui a
fait la transaction d'UniMédia-Hollinger. Vous êtes pourtant le
ministre des Communications. (12 h 45)
M. French: Mme la députée, je n'ai aucune intention
de convoquer M. Fernand Lalonde pour me rejoindre au banc des
accusés.
Mme Juneau: Sacrifice!
M. French: Tout ce que je vous dis, c'est que je n'ai pas
l'intention de vous offrir une version des faits qui s'avérerait par la
suite imprécise. Donc, dans une telle circonstance, je vais certainement
faire tout mon possible pour clarifier dans votre esprit ce qui s'est
déroulé. Mais je n'ai aucune espèce d'intention... S'il
s'agît d'une semaine ici et d'une semaine par là, je ne suis pas
en mesure aujourd'hui de vous offrir toute la précision que vous semblez
chercher.
Mme Juneau: M. le ministre, ne convenez-vous pas que le dossier
d'UniMédia relève du ministre des Communications?
M. French: Le dossier d'UniMédia est une
responsabilité gouvernementale dans la mesure...
Mme Juneau: Précisément de votre
ministère.
M. French: Si vous me permettez de finir, Mme la
députée. Plus précisément dans la mesure où
il y avait concentration de la presse au Québec, c'était
certainement une préoccupation. Je vous signale cependant que la
dimension de la vente d'UniMédia aux intérêts non
québécois qui, d'après vous, soulève un
tollé de protestations dans tout le Québec - affirmation avec
laquelle je ne suis peut-être pas tout à fait d'accord -
relève également de l'intérêt d'autres ministres et
du premier ministre dans la mesure où des actions, que pourrait poser le
gouvernement du Québec dans un tel dossier, risqueraient fort de
créer des réactions qui pourraient être contre les
intérêts du Québec et des Québécois
investissant à l'extérieur ainsi que des Québécois
qui voudraient voir venir au Québec les investissements provenant de
l'extérieur. Il est clair dans notre esprit que, dans la mesure
où les entrepreneurs québécois aimeraient investir dans le
domaine des communications à l'extérieur du Québec, on ne
peut pas agir avec impunité, on ne peut pas agir sans provoquer des
réactions pour le seul motif que les acheteurs viennent d'une compagnie
qui a un siège social à l'extérieur du Québec ou
que les acheteurs ne sont pas de langue française. C'est un dossier qui
intéresse le ministre des Communications et l'ensemble du gouvernement
et, au premier chef, le premier ministre.
Mme Juneau: Le premier ministre me disait, lors de la
période des questions, que M. Lalonde était intervenu
personnellement auprès de M. Francoeur dans cette transaction. Est-ce
que vous êtes au courant? Est-ce que vous étiez au courant? Est-ce
qu'on va vous mettre au courant?
M. French: J'étais au courant, Mme la
députée, que les discussions avaient lieu entre le premier
ministre et M. Francoeur et entre Me Lalonde et M. Francoeur.
Mme Juneau: Quand, M. le ministre? Le 24 décembre? Il y a
trois semaines?
M. French: Mme la députée, j'étais conscient
que M. Lalonde était en contact avec M. Francoeur probablement depuis
l'automne dernier.
Mme Juneau: L'automne?
M. French: Out. Puisque avec les rumeurs publiées dans Le
Devoir, le gouvernement s'est rendu compte qu'il y avait danger de
concentration de la presse au Québec ou qu'il y avait potentiellement
danger avec la vente possible du troisième groupe de presse au
Québec. Nous avons donc voulu suivre la situation. Me Lalonde a eu des
conversations avec M. Francoeur, l'automne dernier, au sujet de la
concentration de la presse au Québec stimulée par la vente
possible d'UniMédia, occasionnée par la vente potentielle.
Maintenant, je vous rappelle qu'en même temps M. Francoeur disait que son
entreprise n'était pas à vendre, qu'il n'avait pas d'acheteur,
qu'il n'avait pas d'offre. Alors, la nature de ces conversations étaient
sans doute une espèce de discussion générale disant que si
jamais, il faudrait que.
Mme Juneau: Comment cela se fait-il... Le ministre vient de me
dire que c'était en novembre qu'il avait entendu parler par M. Lalonde
du cas d'UniMédia, entre autres. Vous avez parlé de concentration
de la presse et vous avez parlé du dossier d'UniMédia, de la
vente possible d'UniMédia.
M. French: Les deux vont de pair. Je ne voulais pas indiquer cela
autrement, Mme la députée.
Mme Juneau: M. le ministre des Communications, comment se
fait-il, en ce cas, que M. Lalonde ait été engagé
seulement le 5 février, sur votre recommandation?
M. French: Essentiellement, M. Lalonde s'occupait du dossier
à notre demande, mais il n'avait pas voulu facturer le gouvernement
jusqu'à ce qu'il ait un volume de travail intéressant. Vous
voulez des réponses, vous en avez.
M. Boulerice: II manque juste Mendelssohn pour accompagner
cela.
M. Filion: M. le ministre, vous venez de dire que M. Lalonde
était au dossier avant son engagement,
M. French: C'est cela.
M. Filion: C'était à votre connaissance?
M. French: Oui.
M. Filion: Depuis quand Me Lalonde était-il au dossier,
à votre connaissance?
M. French: Environ depuis septembre ou octobre.
M. Filion: À votre connaissance, si vous le savez, comment
Me Lalonde est-il entré au dossier en septembre ou octobre?
M. French: Parce que Me Lalonde avait été le
ministre responsable du dossier de la concentration de la presse dans l'ancien
gouvernement libéral, et, à ce moment-là, je lui avais
demandé de me conseiller à cause de son intérêt et
de son expérience. II habite dans mon comté et je le voyais.
J'avais des conversations avec lui. C'est ainsi que s'est amorcé ce
processus.
M. Filion: Donc, si je comprends bien, en septembre ou octobre,
vous demandez Me Lalonde parce que vous le connaissez. Vous savez qu'il est
l'un des conseillers du premier ministre qui s'intéresse
également au dossier. Vous lui demandez de suivre le dossier pour vous,
en quelque sorte. À ce moment-là, Me Lalonde, en septembre,
octobre, novembre et décembre, vous tient au courant puisque c'est vous
qui lui avez demandé d'être au dossier. Est-ce qu'il vous donne
à l'occasion des informations concernant la transaction
d'UniMédia? En deux mots, vous lui donnez un mandat. Il vous fait
rapport de temps en temps?
M. French: Je veux être précis parce que
l'Opposition...
M. Filion: À peu près.
M. French: C'est cela mon problème. Je ne veux pas... Si
je vous donne un à peu près, je ne veux pas me le faire mettre
sous le nez après. C'est mon problème, M. le
député. Je vous réponds au meilleur de mes souvenirs et
avec la meilleure capacité possible, mais je ne veux pas me faire dire
plus tard que je n'ai pas été cohérent ou précis.
C'est cela mon problème.
Je me rappelle qu'encore une fois, c'était la concentration de la
presse, le contrôle des médias au Québec qui animait notre
approche à ce moment-là. Me Lalonde aurait parlé à
M. Francoeur et celui-ci lui aurait indiqué que la compagnie qui
était le sujet de la rumeur, soit Power Corporation, s'était
désistée ou ne lui avait pas proposé d'offre et que si
jamais il y avait d'autres développements il notifierait Me Lalonde et
cela, encore une fois, dans le contexte de la concentration de la presse au
Québec.
Maintenant, dans ce même contexte puisque je veux que cela soit
clair, j'aimerais vous "briefer", vous informer aussi convenablement que
possible, je peux vous donner la date. Mais pendant quelque temps, au cours de
l'hiver dernier, Me Lalonde et moi-même avons rencontré
André Desmarais et un des conseillers juridiques de Power Corporation
pour leur indiquer qu'au yeux du gouvernement l'acquisition du Soleil comme
partie du groupe UniMédia par Power
créerait peut-être des problèmes de concentration de
la presse quotidienne au Québec et que si Power ou Gesco avait envie
d'acquérir UniMédia le gouvernement aimerait - puisque ce n'est
qu'un souhait que l'on peut émettre dans ces circonstances -que Power
Corporation amène un autre acheteur pour Le Soleil. Power a pris
bonne note des désirs du gouvernement. Nous nous sommes quittés
là.
M. Filion: Cela est durant l'hiver...
M. French: C'est durant l'hiver, vers février.
M. Filion: Mais après le mois de décembre 1986?
Est-ce que vous...
M. French: Je ne veux pas l'affirmer de façon absolue, M.
le député. J'irai aux sources. On va en prendre note et on va
essayer de savoir à quelle date cela s'est fait.
M. Filion: Avant ou après Noël, vous ne pouvez
pas...
M. French: Bien, je ne veux pas risquer...
M. Filion: Vous ne pouvez pas risquer, d'accord.
M. French: J'aimerais bien vous dire: "Je pense que c'est
après Noël", mais je ne veux pas me faire dire, plus tard: "Vous
avez dit que c'était après Noël et c'était avant
Noël."
M. Filion: L'engagement...
M. Audet: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Trudel): M. le député de
Beauce-Nord. Allez-y, votre question de règlement.
M. Audet: Merci. Je pense qu'il me semble un peu curieux, ce
matin, d'essayer d'obtenir toutes sortes d'informations de la part du ministre
des Communications à propos de la vente d'UniMédia. On se
rappellera, dans les derniers débats de la Chambre, à la
période des questions, qu'il y a eu une demande, de la part de
l'Opposition, pour la tenue d'une commission parlementaire pour discuter de la
vente d'UniMédia. Le ministre a mentionné, tantôt, que
c'est un dossier qui concerne plusieurs intervenants au point de vue du
gouvernement et qu'à son sens il n'y a pas, à ce stade-ci, de
concentration de la presse comme telle.
Mme Juneau: M. le Président...
Le Président (M. Trudel): Un instant,
Mme la députée...
M. Audet: Alors, je pense qu'il est peut-être
inopportun...
Mme Juneau: ....
Le Président (M. Trudel): Quel article du règlement
invoquez-vous, M. le député?
M. Audet: On peut rapporter cela à la pertinence ou...
Mme Juneau: Justement, c'est de la pertinence, c'est un de ses
dossiers.
Le Président (M. Trudel): Un instant!
M. Audet: Bien, si on tient compte des débats qui se sont
tenus, cette semaine, en Chambre, c'est peut-être un peu impertinent ou
peut-être pas à propos de les tenir ici, ce matin.
Mme Juneau: M. le Président...
M. Filion: M. le Président, il y a quand même deux
éléments...
Le Président (M. Trudel): Non, une minute, je ne vous ai
pas reconnu, M. le député, parce que...
M. Filion: D'accord.
Le Président (M. Trudel): ...Mme la députée
avait demandé la parole avant vous.
M. Audet: Si on veut débattre la tenue d'une commission
parlementaire, je pense qu'on peut le faire, mais de là à
harceler le ministre...
Mme Juneau: M. le Président...
Le Président (M. Trudel): Mme la...
M. Audet: ...sur des questions bien strictes sur ce dossier, je
pense que... Il y a eu une demande de faite en ce sens et le ministre va rendre
une réponse, je pense, dans les jours qui viennent.
Mme Juneau: M. le Président...
Le Président (M. Trudel): Merci, M. le
député. Mme la députée.
Mme Juneau: Je pense que le député, qui en est
à sa deuxième année dans l'étude des
crédits, devrait savoir que l'Opposition a le droit de poser les
questions qui lui semblent valables pour savoir ce qui se passe
aux crédits dans le ministère dont elle fait la critique.
Il me semble important... C'est le droit de l'Opposition de poser les questions
qu'elle veut bien poser.
Le Président (M. Trudel); Merci, Mme la
députée. Une seule autre intervention parce que je pense que la
décision est relativement facile à prendre dans ce cas-là.
M. le député.
M. Audet: Je ne nie pas ce que la députée...
Mme Juneau: II n'a pas de droit de réplique.
Le Président (M. Trudel): Mme la députée, je
regrette, -j'ai le droit, comme président...
M. Audet: Je ne nie pas...
Le Président (M. Trudel): Le président a
droit...
Mme Juneau: Vous, mais pas lui.
Le Président (M. Trudel): Ce n'est pas une
réplique. Le président a droit de décider qu'il n'est pas
encore suffisamment informé. Si vous avez un autre point à faire
valoir, vous le ferez. Je reconnais, pour deux secondes, M. le
député de Beauce-Nord sur la même question de
règlement.
M. Audet: Je ne nie pas les propos ou l'argument que Mme la
députée de Johnson vient d'apporter ici et selon lequel, au
chapitre des crédits, le débat peut être très large.
Je suis d'accord avec cela, sauf que, dans ce contexte-ci, il y a eu une
demande de la part de l'Opposition pour la tenue d'une commission parlementaire
qui serait à part l'étude des crédits afin de discuter du
dossier particulier. C'était le but de mon intervention.
Le Président (M. Trudel): Votre droit de parole, je le
reconnais, sauf que vous répétez ce que vous m'avez donné
comme argument et je me sens suffisamment informé pour prendre une
décision. Cela me semble absolument évident... La règle de
la pertinence en commission - j'ai un collègue, l'an dernier, qui a
rendu une décision à ce sujet - doit être appliquée
de façon beaucoup plus large qu'à l'Assemblée nationale au
moment de la période des questions ou d'un débat sur un projet de
loi.
Donc, sur la règle de la pertinence, je pense que,
là-dessus, ma décision est claire. Mme la députée
est dans son droit le plus strict de poser les questions qu'elle veut.
Maintenant, je dois ajouter que le ministre peut, en tout temps - cela est sa
responsabilité - en vertu de l'article 82, refuser de répondre
à une question.
Troisièmement, pour M. le député de Beauce-Nord, le
ministre a accepté cette discussion avec Mme la députée.
Si le ministre veut éventuellement y mettre fin, il y mettra fin; il
dira: Mme la députée, je veux changer de sujet ou je n'ai plus
rien à dire. Comme il est 13 heures, telle est ma décision non
appelable, je suspends les travaux de cette commission jusqu'à 15 h 30,
je crois...
Une voix: Quinze heures.
Le Président (M. Trudel): Quinze heures.
(Suspension de la séance à 13 heures)
(Reprise à 15 h 12)
Le Président (M. Trudel): À l'ordre, s'il vous
plaîtl
La commission de la culture reprend ses travaux.
Mme Juneau: M. le Président, ce matin nous étions
à évaluer l'implication du ministère des Communications
dans le dossier fort important de la vente d'UniMédia à des
intérêts torontois. Dans ce dossier, j'aimerais que le ministre
essaie de répondre à la question suivante. Entre le 24
décembre, moment de la parution dans les journaux de l'enqagement de M.
Black et de M. Francoeur concernant la vente d'UniMédia, et le 27 mai,
date de l'annonce de la transaction, à votre connaissance, combien de
fois M. Lalonde est-il intervenu dans le dossier auprès de M. Francoeur
et combien de fois M. Lalonde a-t-il rencontré M. Francoeur?
M. French: Mme la députée, le problème
à propos de cette question, c'est que le 24 décembre
était, pour moi, une date sans signification jusqu'à samedi
dernier. Alors, il est difficile de vous dire ce qui a commencé le 24
décembre. Comprenez-vous le problème? J'essaierais plutôt
de dire que je connais les activités de Me Lalonde entre septembre et
l'annonce. D'accord?
Mme Juneau: Entre septembre et l'annonce?
M. French: Je ne veux pas m'"enligner" avec le 24 décembre
qui ne veut rien dire, sauf rétroactivement. Ma mémoire n'est pas
très fidèle là-dessus.
Le mandat de Me Lalonde, rappelons-le, était de conseiller le
gouvernement au sujet de la concentration de la presse puisque Me Lalonde avait
une expérience à partir de son
expérience ministérielle au gouvernement
précédent dans le domaine en question. Il a, entre autres,
d'ailleurs, préparé un projet de loi pour la
réglementation de la presse écrite au Québec.
Mme Juneau: Au moment où on se parle?
M. French: Non, entre 1973 et 1976, Mme la députée.
D'accord?
Mme Juneau: Ahl Excusez-moi.
M. French: Je vous explique le pourquoi de l'intervention de Me
Lalonde. Le 26 novembre, après les articles parus dans Le Devoir
qui ont fait état de la possibilité de la vente
d'UniMédia à Power Corporation, M. Lalonde et moi-même
avons rencontré M. André Desmarais et le conseiller juridique de
Power Corporation.
Mme Juneau: En 1973, cela?
M. French: Excusez-moi. Non, non. Je vous ai expliqué
pourquoi nous avons engagé Me Lalonde. Cela avait trait à ses
occupations ministérielles entre 1973 et 1976. Là, on revient
à septembre, octobre et novembre 1986.
Mme Juneau: D'accord.
M. French: Le 26 novembre - vous vous rappelez la question
à savoir si cela s'est situé avant ou après Noël,
là je suis allé aux sources. C'était le 26 novembre, en
tout cas selon mon agenda. Nous avons dit à Power Corporation, à
ce moment-là, que l'achat d'UniMédia par Power ne
présentait pas de problème comme tel pour la concentration dans
l'esprit du gouvernement du Québec, mais qu'on souhaitait, quant au
Soleil, que Power Corporation invite un autre acheteur à se
porter acquéreur du Soleil. Est-ce qu'on est sur la même
longueur d'onde jusqu'ici, madame?
Mme Juneau: Oui, je vous suis toujours.
M. French: Se rappelant que le gouvernement n'avait qu'un pouvoir
moral... On n'avait pas le droit de dire à Power Corporation de ne pas
faire ceci et on n'avait pas le droit de dire à M. Francoeur de ne pas
faire cela. Avant le 26 novembre, M. Lalonde aurait pris contact avec M.
Francoeur et M. Francoeur aurait dit à M. Lalonde ce qu'il a dit
publiquement, soit qu'il n'y avait pas d'offre de Power Corporation et qu'il
n'avait pas eu d'offre d'autres acheteurs, à l'époque.
D'accord?
Ce qui s'est passé entre Me Lalonde et M. Francoeur
subséquemment, je ne peux pas en parler en détail, mais, s'il y a
eu contact entre Me Lalonde et moi-même pendant les mois de
décembre, janvier, février, mars et avril, cela a
été des contacts relativement sporadiques, au meilleur de mon
souvenir toujours. D'accord? C'étaient des contacts relativement
sporadiques. Jusqu'à la date que je pense être, au meilleur de mes
capacités - parce que m'avez demandé d'être aussi
précis que possible, c'est ce que j'essaie de faire - le 13 mai - je
crois que c'est le 13 mai; je ne peux pas vous l'affirmer avec une certitude
absolue, mais c'est le meilleur calcul qu'on a pu faire. Sous toutes
réserves donc, le 13 mai, je reçois un appel de Me Lalonde, qui
m'informe qu'il est question qu'UniMédia soit achetée par un
groupe de l'extérieur du Québec et qu'il n'y avait pas de
problème de concentration, selon ce qu'il pouvait voir. Cela ne
créait pas un problème de concentration.
Me Lalonde m'a dit, en même temps -je vous dis ce que Me Lalonde
m'a dit à ce moment-là - que M.' Bourassa avait communiqué
avec Me Francoeur et qu'il lui avait demandé de faire en sorte que des
groupes québécois qui avaient signalé au gouvernement leur
intérêt pour l'achat d'UniMédia soient en mesure d'avoir
accès aux données nécessaires pour faire une offre et
aient le temps nécessaire de la faire. J'ai parlé, le même
jour - je crois encore, sous toutes réserves, mais je pense que
c'était le même jour - avec M. Bourassa, qui m'a dit qu'il avait
rencontré M. Francoeur, qui a confirmé la version que je viens de
vous donner: qu'il faisait des efforts pour que les groupes
québécois qui avaient siqnalé leur intérêt au
gouvernement aient accès aux données et qu'il espérait
susciter des offres d'acheteurs québécois qui seraient
comparables à l'offre que M. Francoeur considérait d'un groupe de
l'extérieur du Québec.
Mme la députée, vous avez soulevé une question que
je considère comme importante parce qu'il est important, pour moi, que
ma parole soit prise au sérieux. Vous avez dit en Chambre, la semaine
dernière: Vous avez fait des efforts depuis trois ou quatre semaines;
d'accord? Pouvez-vous maintenant voir que j'ai dit que c'était le
gouvernement et non pas moi-même? C'est le premier point. Et,
deuxièmement, si une ou deux semaines avant le 13 mai, M. le premier
ministre et M. Fernand Lalonde ou les deux avaient été en contact
avec le vendeur, pour moi, lorsque j'ai parlé en Chambre du 28 ou du 29
mai - je ne sais pas ce que j'ai dit -c'est une question de semaines avant,
à savoir que cela tombait à l'intérieur des
tolérances raisonnables d'un effort de décrire ce qui s'est
passé.
Mme Juneau: Mais, M. le ministre, vous avez parlé de
rencontres très sporadiques de Me Lalonde avec les principaux
intervenants.
M. French: Non, excusez-moi, ce n'est pas ce que j'ai dit.
Écoutez, madame, ne me regardez pas comme cela, j'essaie d'être
clair. Ce que j'ai essayé de dire, et je pense que je l'ai dit, c'est
que les co.ntacts entre Me Lalonde et moi avaient été sporadiques
pendant ce temps-là.
Mme Juneau: Mais M. Lalonde n'avait pas à faire de rapport
sur ce fameux dossier qui est, en réalité, censé
être un de vos dossiers. N'avait-il pas à faire rapport de ces
rencontres entre M. Francoeur, au bureau du premier ministre puisque c'est lui
qui a travaillé dans le dossier, et vous?
M. French: Mme la députée, Me Lalonde avait la
responsabilité de voir à ce que la concentration des
médias, en ce qui a trait au ministre des Communications, ne soit pas
menacée. Dans le mesure où Me Lalonde ne me contactait pas, je
présumais qu'il n'y avait pas de problème de concentration de
presse imminente au Québec.
Je suis obligé de vous dire que mon diagnostic était que,
pendant ce temps-là, effectivement, il n'y avait pas de danger. Le
problème était Québécor et Power Corporation
principalement. Québécor et Power ne se sont pas pointés
dans le dossier; en tout cas, pas avec une telle probabilité d'un achat
pour que Me Lalonde croie bon de me contacter.
Mme Juneau: M. le Président, le ministre doit certainement
savoir qu'il peut aussi y avoir de la concentration canadienne, non seulement
de la concentration québécoise. Dans le cas de Conrad Black et de
Peter White, en achetant UniMédia, eux aussi, ils ont une concentration,
mais canadienne.
M. French: Mme la députée, il y a deux jours, le
député de Bertrand nous a annoncé que n'importe quelle
concentration serait préférable à la perte du
contrôle québécois - entre guillemets - "quote, unquote".
Si vous venez me dire que ce n'est pas ça, la politique de votre parti,
on va parler de la concentration. Dans lequel...
Mme Juneau: Excusez-moi.
M. French: Est-ce que c'est la position de votre parti ou non?
Quelle est votre optique? Si vous voulez de la concentration, moi, ça me
ferait plaisir. Mais ce n'est pas exactement le même son de cloche qu'on
entend. La semaine dernière, vous m'avez demandé pourquoi
Québécor n'avait pas accès aux données.
Consultation faite, madame, Québécor, est-ce que c'est un cas de
concentration?
Mme Juneau: M. le Président, il n'y a pas que
Québécor qui aurait voulu faire une offre à
UniMédia. On l'a lu dans les journaux, et vous l'avez lu aussi, que
"Cogesco" est intéressée.
M. French: Cogéco.
Mme Juneau: Cogéco, oui. Je pensais à une autre en
même temps. Il pourrait aussi tout aussi bien y avoir deux ou trois
entreprises québécoises qui pourraient s'unir et acheter
UniMédia.
M. French: Je suis content de parler au moins du fond et des
principes. Je pense que ce serait intéressant de discuter de la question
de la concentration. Je vous dis, madame, que, dans la mesure où il est
possible de trouver un qroupe suffisamment puissant pour acheter
UniMédia au Canada et dans la mesure où ce groupe aurait
déjà l'expérience dans l'imprimé, les journaux
quotidiens au Canada...
Écoutez, je ne vous prête aucune intention. Si vous me
permettiez de compléter...
Mme Juneau: Vous ne répondez pas. M. le ministre, vous ne
répondez pas. Je vous ai parlé d'un "joint venture"
québécois. Je ne vous ai pas parlé d'un "joint venture"
canadien.
M. French: Non, mais vous avez parlé, auparavant, Mme la
députée, à un autre et vous avez évoqué - il
me semble, en tout cas, ou corrigez-moi - que l'achat par le groupe Hollinger
d'UniMédia crée un problème de concentration.
Mme Juneau: À l'échelle canadienne.
M. French? Parfait. C'est de ça que j'essaie de parler, si vous
me permettez de finir. Je répète. Quant à trouver une
entreprise canadienne, y compris les entreprises québécoises,
suffisamment puissante financièrement pour acheter UniMédia et
suffisamment expérimentée dans le domaine de l'imprimé sur
une base quotidienne, il est difficile d'imaginer une entreprise qui satisfait
ces critères et qui crée moins de problèmes de
concentration que Hollinger.
Si vous voulez parler de la concentration sur le plan national,
Hollinger contrôle neuf quotidiens au Canada avec une circulation
combinée de moins de 50 000 exemplaires par jour. Et si vous voulez
savoir, par ordre d'ampleur, ce que cela veut dire, Québécor, en
termes de quotidien, c'est plus de 400 000 par jour. Je répète
qu'il est difficile d'imaginer une entreprise de presse suffisamment puissante
pour acheter UniMédia, suffisamment connaissante pour la
gérer efficacement, qui aurait créé un plus petit
problème de concentration que Hollinger.
Mme Juneau: Pour nous, M. le Président, ce qui est
important, c'est que l'on ait le temps de voir clair dans toute cette
situation. Tout le monde a remarqué que cela s'est fait très
vite. Depuis mercredi dernier qu'on le sait, que le public est en mesure de
voir ce que cela a comme ampleur dans les communications. Le Soleil, ce n'est
pas un hebdo de chez nous, en région, pas tout à fait; Le
Droit non plus, Le Quotidien, non plus. Donc, ce qui est important pour
nous, M. le ministre, c'est que vous acceptiez qu'il y ait une commission
parlementaire sur le sujet, sur la vente d'UniMédia. Cela s'est
déjà fait et vous le savez très bien. En plus, on
souhaiterait nécessairement avoir un moratoire pour donner la chance aux
gens, qui veulent venir s'exprimer en commission parlementaire, de se
préparer. Vous allez voir qu'il y a plusieurs intérêts,
plusieurs associations qui viendraient s'exprimer en commission parlementaire.
Le moratoire, il y en a eu un en 1973. Je suis ailée chercher au service
de recherche ce qui a été dit, à l'époque, et on
pourrait facilement dire la même chose, utiliser les mêmes
arguments et è ce moment-là faire ce que l'on a fait en 1973,
pour éviter ce que l'on veut éviter.
M. French: Je vous remercie, Mme la députée,
de vos conseils, que je prends au sérieux. Nous allons discuter de cela
au Conseil des ministres et le gouvernement annoncera sans doute la semaine
prochaine sa décision dans cette question. J'ai quand même
été rassuré du télégramme que Conrad Black a
envoyé aujourd'hui ou hier soir à Monique Giguère,
présidente du Syndicat des journalistes de Québec, dans lequel il
dit: Je vous remercie d'avoir eu l'amabilité de me faire parvenir copie
du télégramme que vous avez envoyé à M. Robert
Bourassa, premier ministre du Québec. Je comprends parfaitement le
désir du Syndicat des journalistes de Québec de recevoir des
garanties de ma part quant à l'indépendance du Soleil en
tant qu'entreprise de presse et quant à l'indépendance de la
rédaction, en particulier. Je m'empresse de vous rassurer sur ce point.
Comme je l'ai dit en public lors de l'assemblée générale
annuelle de Hollinger Inc., le 2 juin, il n'y aura aucun changement dans la
politique d'information du Soleil, du Droit et du Quotidien de Chicoutimi. Je
puis vous garantir que ces trois grands quotidiens, qui sont d'une telle
importance pour les populations de leurs régions respectives et en fait
pour toute la population du Québec, continueront de jouir de toute la
latitude et la liberté nécessaires pour poursuivre leur mission
d'information, tant sur le plan professionnel que sur le plan culturel, compte
tenu bien sûr de leurs moyens et des moyens de leurs
propriétaires.
Nous sommes fiers de pouvoir renouveler notre association avec le grand
monde du journalisme québécois. J'espère pour ma part
développer d'excellentes relations professionnelles avec le Syndicat des
journalistes de Québec et ses membres. Je vous prie de croire à
l'expression de mes sentiments les plus respectueux. Conrad Black,
président, Hollinger Inc.
Mme Juneau: Vous savez très bien, M. le ministre, que s'il
venait en commission parlementaire et était interrogé, autant par
l'Opposition que par des personnes qui veulent se faire entendre, on pourrait
peut-être obtenir certaines garanties, qui seraient pour nous
indispensables, à savoir qu'il n'arrivera pas les problèmes que
peut susciter la vente d'UniMédia à des intérêts
torontois.
Je voyais ici, en commission parlementaire, M. Bourassa qui
répondait à une question de M. Charron à l'époque.
Il disait: Si le gouvernement ou la commission parlementaire décide que
la vente n'est pas légale ou que la vente ne répond pas à
une situation désirable, le gouvernement a toujours le loisir de faire
adopter les lois nécessaires. Si cela s'est fait en 1973 à cause
des inquiétudes sur la vente du Soleil, cela ne pourrait-il pas se faire
aujourd'hui, étant donné que c'est d'une extrême importance
ce que l'on vous demande? (15 h 30)
M. French: Mme la députée, la réponse que je
vous donnerais serait la suivante: Au nom de la concentration de la presse un
gouvernement a posé des qestes en 1973 et, en 1987, à cause du
lieu géographique et/ou de la langue des propriétaires de
l'entreprise acheteuse un gouvernement prendrait une autre décision ou
la même décision, selon son analyse de la situation? Mais je vous
soumets que le contexte économique, le contexte social et politique et
les raisons invoquées pour l'intervention sont foncièrement
différentes.
Mme Juneau: Pourquoi?
M. French: Parce que, dans le cas de 1973, il s'agissait de
concentration et, dans le cas de 1987, il s'agit du lieu géographique
où sièqe l'entreprise et de la lanque des
propriétaires.
Mme Juneau: Nonobstant le télégramme que vous venez
de recevoir de M. Black vous garantissant toutes sortes de protections pour
l'autonomie du Soleil, qu'est-ce qui arriverait si, au bout de six mois ou un
an, M. Black se retournait de bord et disait: Moi, je vends à d'autres,
à Southam News ou à d'autres.
Qu'est-ce qui arriverait?
M. French: À Southam News? Une voix: À
Southam News.
Mme Juneau: À Southam News. M. Black a-t-il donné
dans ce télégramme la garantie que la compagnie qui
rachèterait, elle, pourrait offrir les mêmes garanties? Est-ce que
c'est quelque chose qui va se transmettre dans un contrat?
M. French: Madame, si vous connaissez un mécanisme, pour
la vente de n'importe quelle entreprise de presse, garantissant ce genre
d'engagement pris publiquement par un propriétaire, je serais
intéressé à regarder cette trouvaille, mais ce n'est pas
plus vrai pour Québécor, Southam ou Gesco que c'est vrai pour
UniMédia.
Mme Juneau: Si on avait un peu plus de temps, M. le ministre, ne
pensez-vous pas que ce serait beaucoup plus sécuritaire pour ce qu'on
est en train de discuter, c'est-à-dire les garanties?
M. French: Mme la députée...
Mme Juneau: On a une semaine, le premier ministre l'a dit
à deux reprises: On a une semaine. Cela n'a pas de bon sens de...
M. French: Le gouvernement est conscient de vos
préoccupations et cela sera certainement considéré par le
premier ministre et par le Conseil des ministres. Je vous soulignerai cependant
qu'il y a des implications fiscales extrêmement importantes pour le
vendeur dans le "timing" de la vente. Le gouvernement aurait besoin de raisons
extrêmement probantes s'il devait retarder la vente.
Le Président (M. Hamel): M. le député de
Beauce-Nord avait demandé d'intervenir tantôt.
M. Audet: Oui, on parlait de concentration. J'aimerais, M. le
ministre, vous expliquer un peu quel est le but de mon intervention. On
regarde, par exemple, un article de La Presse du 5 juin concernant
Cogéco et dans lequel M. Francoeur dit que, pour lui, il n'est pas
question de céder ses actifs ou sa compagnie au groupe Cogéco des
frères Audet. Selon moi, M. Francoeur excluait le groupe Cogéco.
Deuxièmement, il faut regarder aussi d'autres secteurs, parce que pour
UniMédia il ne faut pas seulement regarder les quotidiens, c'est une
chose qu'il faut regarder quand on parle de concentration de la presse, mais
aussi la presse régionale. On avait une sortie la semaine
dernière de M. Brassard, le whip du Parti québécois, qui
disait que tout cela n'était pas drôle.
Si on regarde le contexte du Saquenay - -Lac-Saint-Jean, au niveau des
hebdos régionaux, on a les Réveil qui appartiennent à
Quebecor et on a aussi les hebdos d'UniMédia qui appartiennent à
M. Francoeur. Alors, on se retrouve en situation avec UniMédia et
Quebecor strictement, que ce soit au niveau de la presse régionale ou au
niveau de la presse nationale comme les quotidiens. Il y a aussi
Progrès-dimanche qui appartient à UniMédia, mais Quebecor
était en grosse guerre avec lui.
On regarde la région de Drummondville où Quebecor n'a pas
pu faire de percée et où c'est strictement UniMédia. On
regarde la rive sud de Québec, ici, où on a les hebdos
régionaux: Les Peuple, La Tribune et tout cela qui appartiennent
à Quebecor; on a aussi UniMédia qui est dans le portrait. Pour
Power, dans certaines régions, c'est la même chose.
Je pense que vous serez d'accord avec moi pour dire que, s'il y avait eu
transaction pour une concentration, on vient d'assister purement et simplement
à une concentration au niveau de la presse locale et régionale et
au niveau des quotidiens aussi, que ce soit Power avec La Presse ou Le Journal
de Montréal et Le Journal de Québec.
Si, d'un autre côté, comme j'ai mentionné, on
rejette Coqéco et si on regarde ce qui se passe avec Quebecor, alors
qu'il y a toujours eu une grosse guerre, une grosse compétition entre
les hebdos régionaux et tout cela, qu'est-ce qui reste finalement?
Je pense que vous allez être d'accord avec moi pour dire que, si
cela avait été Quebecor qui avait été dans le
dossier, par exemple, il y aurait eu danger imminent de concentration de la
presse, et avec Power aussi* C'est important de le démontrer dans ce
cas-là, parce que l'Opposition semble rejeter cette
hypothèse.
M. French: M. le député, je pense que votre
intervention est pertinente. Prenons ces acheteurs évoqués un
à un. Quebecor, c'est, sur la base des quotidiens, à peu
près 80 % de la circulation francophone du Québec qui passe entre
les mains d'une seule entreprise.
Dans le cas de Power, il y a possiblement un problème concernant
Le Soleil, en tout cas, c'est le diagnostic du gouvernement jusqu'à
nouvel ordre. Je ne sais pas où l'Opposition loge là-dessus,
paraît-il que le député de Bertrand n'est pas le
porte-parole de l'Opposition. Je suis heureux de l'apprendre et je pense que
l'Opposition est d'accord, en tout cas, pour ce qui est de Quebecor,
malgré la question que Mme la députée m'a posée en
Chambre l'autre jour.
Mme Juneau: D'accord, c'était le cas
de Southam News.
M. French: II reste Cogéco et je pense que c'est le cas le
plus intéressant et le plus important. Première constatation,
Cogéco est extrêmement impressionnante comme entreprise.
Cogéco est un élément fort dans le domaine
télévisuel et de la câblodistribution au Québec,
très progressiste, très agressif, intéressé
è faire des percées en radio et en télévision, et
le gouvernement a le plus grand respect pour Cogéco.
On peut néanmoins remarquer par les commentaires de M. Francoeur
qu'il n'avait pas, paraît-il - je le dis sous toute réserve, me
basant uniquement sur ce qu'il a dit dans la presse et sur ce que tout le monde
a pu lire - envie de vendre son entreprise à Cogéco. On peut
peut-être imaginer que c'est à cause de la dynamique industrielle
particulière aux médias imprimés, hebdos et
quotidiens.
Remarquons d'abord que Québécor est verticalement
intégré: imprimeries, pâtes et papiers, journaux, annonces
publicitaires, brochures, dépliants à la porte, messageries, etc.
Donc, un formidable concurrent pour UniMédia ou les entreprises qui vont
gérer UniMédia par la suite.
Analyse hypothétique, mais peut-être crédible:
besoin de liquidités, besoin de muscle financier, besoin de
connaissances dans le domaine de la presse hebdomadaire et quotidienne. Je
remarque également une participation soutenue, un désir de la
part de M. Francoeur - en tout cas, c'est ce qu'il déclare - de rester
dans le portrait.
Je ne sais pas si c'est M. Francoeur seul ou avec ses deux partenaires
qui est d'accord là-dessus mais, en tout cas, c'est l'indice que donne
M. Francoeur. Ne serait-il pas concevable que M. Francoeur ait voulu vendre -
je fais de la spéculation; honnêtement, je ne veux pas
présenter ce que je vous dis comme un diagnostic qui viendrait d'autres
personnes que moi, après avoir regardé la presse qui est
disponible pour tout le monde - aux gens expérimentés dans ce
domaine?
N'était-il pas possible que l'enterprise qui créait le
moins de problèmes sur le plan de la concentration, qui avait la
puissance financière nécessaire, qui connaissait le
Québec, ait été le groupe Hollinger? En tout cas, il me
semble au moins concevable que cela ait pu être le diagnostic de M.
Francoeur.
Mais là, encore une fois, c'est hypothétique ce que je
vous dis. Ce qui est clair, c'est que celui ou celle qui prendra le
contrôle d'UniMédia a des investissements importants à
consentir, des décisions stratégiques extrêmement
importantes à prendre, puisque le concurrent, lui, fait des ravages. Il
est très fort, le concurrent, très très fort.
Le Président (M. Hamel): Mme la députée de
Johnson.
Mme Juneau: M. le Président, je trouve que d'avoir
laissé une semaine aux entreprises québécoises pour faire
des offres dans le cas de la vente d'UniMédia, c'est injuste envers nos
compagnies québécoises, parce qu'elles n'ont pas eu le temps de
se préparer et, à certains égards, elles n'ont même
pas eu le droit d'accès aux livres.
À ce moment-là, est-ce que vous ne croyez pas, M. le
ministre, que d'autres compagnies auraient pu faire des offres, si,
éventuellement, elles l'avaient su à temps et si elles avaient eu
la chance, comme peut-être Conrad Black et M. White l'ont eue, d'avoir
toutes les informations pertinentes pour faire des offres valables pour l'achat
d'UniMédia?
M. French: Mme la députée, j'ai déjà
regretté et je regrette encore aujourd'hui qu'aucune entreprise
québécoise acceptable pour le vendeur n'ait pu faire une offre
qui lui fût satisfaisante.
Je dois vous mentionner que, lorsque quelqu'un passe 45 ans de sa vie
dans une entreprise et la lance d'un petit hebdo jusqu'à un empire de
presse de la taille d'UniMédia, il a certains droits. Entre autres, il a
le droit de décider à qui et quand il va vendre, il a le droit de
rester dans son entreprise comme celui de sortir de son entreprise. Ce sont les
droits les plus stricts de M. Francoeur.
Le gouvernement précédent et le gouvernement actuel n'ont
pas légiféré pour réglementer le marché ou
la propriété des médias écrits au Québec. En
l'absence d'une telle loi, que ce gouvernement-ci n'a pas l'intention d'inviter
l'Assemblée nationale à endosser et que le qouvernement
précédent pendant neuf ans n'a pas invité
l'Assemblée nationale à endosser, les prérogatives du
gouvernement à l'endroit d'un vendeur sont assez modestes et ce sont ces
prérogatives que le premier ministre a exercées à
l'endroit de M. Francoeur.
Si ces prérogatives n'ont pas eu pour l'Opposition une suite
satisfaisante, je ne peux que le regretter, mais la notion de
décréter un moratoire implique, me semble-t-il, qu'il y ait un
pouvoir légal, une loi qui relève du gouvernement, pour
arrêter une telle transaction. Malheureusement, il n'y a pas de tel
pouvoir entre les mains du gouvernement du Québec.
Mme Juneau: En 1973, que s'est-il passé quand les
frères Gilbert se sont vu empêcher de vendre Le Soleil? Vous me
faites rire avec votre pouvoir moral. Vous avez, semble-t-il, toutes les
possibilités en tant que gouvernement de faire quelque chose. Pourquoi
ne le faites-vous pas? C'est
ce que l'on se demande.
M. French: On ne fait pas, madame, en 1987, pour UniMédia,
sur la base d'un raisonnement portant sur l'origine géographique de
l'entrepise acheteuse ou sur la langue de ses propriétaires, ce que l'on
a fait en 1973 sur celle d'un raisonnement portant sur la concentration.
Mais de toute façon, en 1973, Mme la députée, ce
n'était pas un instrument légal. Je ne peux pas vous le dire de
façon absolue, mais ma compréhension du cas, c'est que le
gouvernement a invité les vendeurs à reconnaître qu'il y
avait une telle opposition contre la concentration de la presse qu'on l'a
évitée.
Mme la députée, rappelons-le, la situation au
Québec était celle-ci: si Power avait réussi en 1975
à acheter Le Soleil, elle aurait contrôlé 70 % de la
circulation quotidienne francophone au Québec. Et ce n'est pas du tout
la situation dans laquelle on se trouve actuellement, ni pour la concentration
comme telle. En fait, il ne s'agit pas de concentration, il s'agit, encore une
fois, de l'origine géographique et de la langue des acheteurs; telles
sont leurs raisons. Vous voyez une levée de boucliers partout, je vois
des préoccupations très légitimes, ici et là, mais
les Québécois ne se battent pas dans les autobus. La caricature
en page éditoriale dans Le Soleil d'aujourd'hui en dit long.
Une voix: C'est cela, l'indifférence.
Mme Juneau: Je ne sais pas quel pouvoir légal vous avez eu
en 1973 et que vous n'avez plus aujourd'hui, mais vous pourriez l'utiliser pour
l'occasion.
M. French: La loi n'a jamais été
déposée. Il n'y a jamais eu de loi de déposée,
c'était l'intérêt du gouvernement. Mme la
députée, j'aimerais répéter qu'il est concevable
qu'un gouvernement réglemente contre la concentration de la presse. Ce
n'est pas impossible. Vous ne l'avez pas fait, nous ne l'avons pas fait et nous
n'avons pas l'intention de le faire, mais c'est concevable. Mais il est peu
concevable qu'un gouvernement décide de légiférer, de
créer une loi qui aurait pour effet de dire: Si vous venez de
l'extérieur du Québec et que vous voulez acheter une entreprise
dans le domaine de la presse écrite au Québec ou des
communications - pourquoi pas ou de l'industrie culturelle, etc., vous n'en
avez pas le droit à moins d'avoir l'approbation du gouvernement. En tout
cas, ce gouvernement-ci he le fera pas et votre gouvernement ne l'a pas fait
non plus. (15 h 45)
Mme Juneau: M. le ministre, d'après ce qu'on peut voir, il
n'y aura pas au Conseil des ministres grand appui à la demande d'une
commission parlementaire. Mon recherchiste me fait part qu'il reste à
peine une heure et, comme on n'a pas touché aux autres dossiers du
ministère, on souhaite à tout le moins que ce qu'on a dit
aujourd'hui fasse réfléchir le ministre sur l'importance que
représente la vente d'UniMédia à des Intérêts
torontois. On souhaite que le ministre accepte de véhiculer le fait
qu'une commission parlementaire serait d'une utilité capitale pour
donner la chance aux gens de s'exprimer et aussi pour voir s'il y aurait
possibilité que des gens du Québec soient
intéressés à et capables d'acheter UniMédia;
d'ailleurs ils le sont, il l'ont fait savoir.
M. French: M. le Président, je prends bonne note des
commentaires de Mme la députée de Johnson.
Rapport Caplan-Sauvageau
Mme Juneau: On va poursuivre la discussion de façon
générale, si vous le permettez, M. le ministre, entre autres, sur
le rapport Caplan-Sauvageau.
M. French: Oui, Mme la députée.
Mme Juneau: Est-ce que vous êtes en train de nous annoncer
que la transaction vient de tomber à l'eau?
M. French: Ha! Ha! Non, Mme la députée. Je vous
écoute.
Mme Juneau: Concernant le rapport Caplan-Sauvageau, les
réactions à la reconnaissance de la spécificité du
système québécois nous apparaissent tout à fait
décevantes. À notre point de vue, le ministre s'en remet trop au
secteur privé dans ce cas-là. Il est inquiétant de voir
que les réactions à la reconnaissance de la
spécificité du système québécois ne sont pas
ce qu'on souhaiterait qu'elles soient.
Il est étonnant de lire, à la paqe 9 du texte
intitulé "Les réactions du ministère des Communications au
rapport Caplan-Sauvageau", qu'il "continuera comme par le passé à
promouvoir le développement des médias communautaires qui sont,
eux aussi, un élément de la spécificité
francophone". C'est une intention très louable, mais qui ne se situe
qu'au niveau du discours, parce qu'on n'a pas vu tellement de suites à
cela. Dans les faits, l'action est tout â fait malheureuse par contre et
d'après ce que l'on entend. On a eu l'abolition de TVC par le biais de
PAMEC, alors que le rapport Caplan-Sauvageau citait le cas
québécois comme un modèle à suivre par les autres
provinces et par le fédéral, en matière d'aide au
développement des médias communautaires.
M. le ministre, pouvez-vous faire le point sur les démarches
entreprises afin de faire reconnaître la spécificité
francophone du système québécois, tel que
recommandé par le rapport "Caplan-Sauvageau?
M. French: Mme la députée, vous avez
mentionné beaucoup d'éléments. Je vais essayer de
répondre et vous me corrigerez ou vous me poserez d'autres questions, si
mes réponses ne couvrent pas ce que vous évoquez.
La spécificité du système francophone est un
élément très important pour le gouvernement du
Québec dans sa vision du développement des infrastructures de
communications pour les francophones québécois et les
francophones canadiens. Pourquoi? Il y a eu une espèce de philosophie au
CRTC, tant pour la radio que pour la télévision, voulant que les
prémisses et les principes qui régissent le cadre de
réglementation du système francophone soient le miroir des
principes et des prémisses qui régissent le cadre de
réglementation du système de l'autre langue, c'est-à-dire
qu'il y a réciprocité ou effet de miroir entre les deux
systèmes. Ceci crée des problèmes, quand la taille du
marché franco-canadien se situe à peu près à 6 000
000, 6 500 000 au maximum, alors que la taille de - l'autre marché se
situe autour de 18 000 000 et a des besoins linguistiques différents.
Deux exemples. Les formats musicaux utilisés par le CRTC pour
catégoriser les demandes et les permis dans le domaine des postes de
radio viennent de l'expérience du marché nord-américain et
donc, essentiellement, de l'expérience du marché
américain. Nous faisons une recherche importante cette année dans
la foulée de notre priorité radio pour 1987-1988 et on va se
poser la question: Quelle est l'application et quel est l'effet, notamment sur
la chanson française et sur l'information locale, de l'adoption des
formats musicaux et des catégorisations de postes, adoptés tels
quels du système anglophone et notamment américain, sur le
marché québécois et sur la radio
québécoise?
Un autre exemple serait l'arrivée de la télévision
payante et des services spécialisés dans le marché de la
télévision payante au Québec, alors que, dans notre
situation, te financement de la télévision payante par abonnement
volontaire s'avère un moyen très faible de financement des
services spécialisés et seule une philosophie qui dirait que tous
les abonnés doivent souscrire un montant minimal de leurs
mensualités, automatiquement par le fait même d'être
abonné, pourrait servir à financer suffisamment les services
spécialisés dont les Québécois francophones ont
besoin, compte tenu de leur situation dans un marché
nord-américain et qui est fortement influencée par la
télévision américaine. Donc, voilà deux exemples
où
Caplan-Sauvageau, le ministère des Communications du
Québec et, je pense, le ministère des Communications du Canada
sont d'accord pour essayer d'amener le CRTC, l'organisme réglementaire
qui finalement a l'autorité - reconnaissons-le, c'est une
autorité indépendante non seulement du gouvernement du
Québec, mais aussi, dans une certaine mesure, du ministère
fédéral -à reconnaître davantage cette
spécificité et nous nous affairons à leur faire voir ce
que cela veut dire dans les faits.
Nous avons eu des rencontres avec le CRTC au cours desquelles nous avons
pu exposer nos préoccupations. Nous avons les meilleures raisons de
penser que nous faisons des progrès, mais, évidemment, le CRTC
est dans une situation difficile. D'abord, le rôle d'arbitre, dans un
domaine comme celui-ci, n'est jamais un rôle très plaisant et on a
un peu un jeu qui semble nul: quand vous plaisez aux uns, vous déplaisez
aux autres. Le CRTC se trouve dans cette situation: sous pression. Nous
espérons que la nouvelle loi fédérale sur la
radiodiffusion va nous aider, nous les autorités politiques tant
provinciales que fédérales, à avoir davantage d'input, si
vous voulez, d'influence, non pas sur qui va demander et va avoir un permis du
fédéral, mais plutôt quelles seront les prémisses
des décisions d'octroi de permis, de contrats, quelles
catégories, quelles conditions, etc.
Une voix: Sur les règles du jeu.
Mme Juneau: Face aux six demandes de permis pour des projets de
canaux spécialisés devant le CRTC, en rapport avec la
reconnaissance de notre spécificité francophone, quelle est votre
position, M. le ministre? La position du gouvernement du Québec?
M. French: Je ne suis pas sûr d'avoir tout à fait
compris, madame. La demande pour les permis dans des services
spécialisés...
Mme Juneau: Oui, les canaux spécialisés.
M. French: Oui, mais c'est que nous avons mis beaucoup de
pression. Depuis que je suis arrivé au ministère, nous avons mis
beaucoup de pression, demandant que les auditions aient lieu et que le
financement se fasse par une mensualité de service de base. Cette
idée est ressortie des recherches que le ministère a faites sous
le gouvernement précédent et qui ont amené à ta
conclusion que c'était la meilleure façon de procéder.
Nous avons endossé cela avec enthousiasme et nous faisons des pressions.
Maintenant, on a eu des problèmes, dont le fait que Caplan-Sauvageau...
Excusez-moi?
Mme Juneau: Depuis que vous êtes là.
M. French: Oui, mais je vous explique pourquoi, Mme la
députée.
Mme Juneau: D'accord.
M. French; Cela n'a rien à voir avec le changement de
gouvernement ici. Nous avons eu des problèmes, d'abord, parce que MM.
Caplan et Sauvageau étaient très en retard dans la
rédaction de leur rapport et, deuxièmement, parce que le
comité spécial de la Chambre des communes du Canada a voulu
retarder encore davantage les auditions, parce qu'il voulait faire son propre
rapport. Finalement, nous pensons que c'est le moment et nous espérons
que, pour janvier ou février, les services spécialisés
pourront être en place.
Une voix: Les audiences ont lieu le 20 juillet.
M. French: Les audiences ont lieu le 20 juillet et nous
espérons que l'octroi de permis sera pour janvier, février. Je
vous le dis, le principe que nous revendiquons et que vous revendiquiez, comme
gouvernement, n'est pas nécessairement adopté. On n'a pas la
garantie que le CRTC va adopter cette position. Avant la fin du mois, on va
répéter formellement notre demande sur la question du
financement.
Mme Juneau; M. le Président, vous savez que certaines
études viennent de nous démontrer que, dans les stations de
radio, il y a environ 30 % de chansons francophones, tandis que les normes sont
de 55 %. Cela vient tout juste de sortir, c'est même en
deçà de 30 %. Pour assurer une présence accrue de la
chanson francophone à la radio et ce, notamment, par un
approvisionnement accru en production musicale francophone, qu'est-ce que vous
préconisez?
M. French: Mme la députée, votre question est on ne
peut plus pertinente. D'abord, il y a un problème de surveillance du
CRTC vis-è-vis des stations de radio. Je pense que personne ne le met en
doute, sauf, peut-être, certains radiodiffuseurs, mais il y a un
problème de surveillance important. Je crois que l'abus n'est pas
généralisé, mais il y a des problèmes
sérieux. On est d'accord là-dessus. Donc, il y a un
problème pour le CRTC et nous nous joignons aux autres pour dire:
Établissons des règles raisonnables et suivons les règles.
Ne faisons pas cette espèce de condition nominale avec une pratique
autre. Nous ne marchons pas là-dedans, nous pensons que ce n'est pas la
meilleure façon de procéder. Vous savez cependant que la
contrepartie de ce problème, laquelle est évoquée par les
radiodiffuseurs, c'est le manque de production francophone. Ma collègue,
la ministre des Affaires culturelles, a des programmes... Juste entre
parenthèses parce que ce n'est pas la défense de ses
crédits - il n'y a pas d'autre industrie de chansons populaires ou de
disques qui soit aussi appuyée par ces deux gouvernements que
l'industrie québécoise et canadienne. Il n'y en a pas.
Montrez-les-moi, on peut aller n'importe où au monde, il n'y en a pas.
Je ne dis pas que c'est nécessairement tout. Je ne dis pas qu'on ne peut
pas faire mieux. Je ne dis pas qu'on ne devrait pas faire mieux, mais je dis
qu'au point de vue du financement -c'est pour le MAC que je parle, ce n'est pas
pour moi - et de l'implication du secteur public "dans la production de disques
populaires, il n'y a pas d'autre industrie qui soit aussi subventionnée
par le fédéral et par nous, mais surtout par le
fédéral.
Troisième point: Qu'est-ce que le ministère fait dans ce
dossier? J'ai parlé du CRTC, j'ai parlé du ministère
fédéral des Communications, j'ai parlé du ministère
provincial des Affaires culturelles. Pour le ministère des
Communications du Québec, il y a deux choses importantes dont j'ai
déjà parlé. Les formats musicaux. Est-ce possible que
l'adoption des formats musicaux, faite pour le marché anglophone, ait
des impacts négatifs sur la chanson française d'ici? Je pense que
c'est fort possible. C'est une recherche que nous faisons cette année,
au ministère, et que nous considérons importante.
Mme Juneau: Quand sera-t-elle terminée?
M. French: Au courant de cette année, avant
décembre. Deuxième initiative, Mme la députée, dans
ce domaine, nous étudions le problème de la distribution du
disque français à la radio parce qu'il me semble... Je ne
comprends pas le problème, je vous l'avoue. Paraît-il qu'il y a un
problème de distribution physique des disques aux radios, ce qui me
semble presque inconcevable, mais paraît-il que c'est un problème.
C'est un problème d'acheminement du produit aux radios francophones du
Québec et nous étudions également ce problème.
Mme Juneau: Est-ce que l'étude va être rendue
publique?
M. French; Oui, normalement nous rendons ce genre d'études
public, aussi rapidement que possible, oui.
Mme Juneau: Cela ne pourrait pas aussi être le fait qu'en
1985 la SODICC avait 3 000 000 $ pour le dossier et qu'en 1986 elle n'a plus
que 1 000 000 $?
M. French: Mme la députée, je pense que je ne
devrais pas m'aventurer dans le domaine de la SODICC parce que ce n'est...
Mme Juneau: C'est les Affaires culturelles.
M. French: ...pas de ma responsabilité. Il y a une partie
de la SODICC qui relève de ma responsabilité, mais ce n'est pas
cette partie-là. (16 heures)
Mme Juneau: Ce matin, le ministre a beaucoup parlé de
l'exportation de nos produits. Au-delà des consortiums, quelles mesures
concrètes le ministre envisage-t-il pour accroître l'exportation
de nos produits télévisuels?
M. French: Je vais essayer de les énumérer l'une
après l'autre, Mme la députée. Primo, TV5 qui est notre
fenêtre en France, en Belgique et en Suisse, d'ailleurs, partout en
Europe où il y a câblodistribution pour francophones, soit dans 17
pays. Mais il ne faut pas charrier, je dis bien là où il y a des
francophones et là où il y a le câble. Le câble, en
Europe, à part la Belgique et peut-être la Suisse et la Hollande,
n'a pas une pénétration énorme, surtout dans notre
marché principal où il y a moins de 1 000 000 de foyers qui ont
le câble, en France, ce qui est très mince. Il faut donc bien
délimiter notre "exposure".
Mme Juneau: Avez-vous dit moins de 1 %?
M. French: Moins de 1 000 000 de foyers ont le câble,
même beaucoup moins. Il n'y a pas 200 000 foyers qui ont le câble,
en France, pour le moment. Tout cela pour dire que TV5 est une fenêtre
par laquelle peu de gens regardent actuellement. Mais nous espérons et
nous avons fait le pari que cela va augmenter et que la
pénétration et la popularité de TV5 nous permettront de
faire apprécier nos produits en Europe.
Deuxième tentative: la promotion de la coparticipation des
entreprises québécoises et françaises dans le domaine
télévisuel. Par exemple, l'achat par. Vidéotron, de 3 % de
la cinquième chaîne en France, et un "joint venture" possible,
mais non concrétisé encore, entre Astral Beilevue Pathé et
Canal Plus, la station de télévision payante francophone,
très florissante.
Troisième tentative: nous avons demandé au gouvernement
français de modifier ses critères de réglementation pour
que le produit québécois, dans le domaine
télévisuel, soit perçu comme l'équivalent d'un
produit européen plutôt que comme un produit du reste du monde.
Autrement dit pour les fins de la réglementation, l'achat de productions
cinématographiques ou télévisuelles, surtout
cinématographiques, parce que c'est ce qui nous concerne et que Canal
Plus achète 365 films par année. Or, l'année
dernière, films québécois: zéro; films canadiens:
zéro. Pourquoi? Parce que les films canadiens et québécois
sont considérés non pas comme des produits européens, mais
comme des produits américains ou britanniques. Ils sont donc en
concurrence avec des films assez musclés, financièrement et
artistiquement, et qui ont une tradition et un auditoire en France. On se
trouve donc absent à cause de ce problème de
réglementation. D'où la troisième initiative: demander au
gouvernement français d'alléqer ses... Nous avons parlé
avec le CRTC français, ie CNCL, Commission nationale de communications
et libertés - un titre pittoresque - nous pensons avoir fait du
progrès et nous pensons que le CNCL montre de l'intérêt et
de la compréhension pour notre problème.
Quatrième initiative: tentative de renégocier, avec nos
partenaires fédéraux et français, l'entente de
coproduction entre la télévision et le cinéma pour
faciliter davantage de coproductions québéco-françaises,
dans le domaine télévisuel. Quel est le problème? Le
problème, c'est que les ententes ou les principes d'entente sont faits
pour un film, c'est-à-dire qu'on fait un film dans une période
limitée. Vous avez une vedette française et une autre vedette
québécoise, des acteurs québécois et un producteur
français. Bon. Dans une situation télévisuelle où
vous avez 37 ou 40 épisodes et où vous faites du tournage pendant
beaucoup plus longtemps, il est à peu près impossible de
satisfaire aux exiqences de coproduction et de produire une série
d'émissions télévisuelles. On demande donc de rendre cette
entente plus flexible, notamment en invitant les Français à faire
avec nous le jumelage d'émissions, selon lequel une émission
serait produite en France et une autre au Québec, avec la participation
d'experts de l'autre pays et tout cela, et les deux émissions seraient
considérées comme canadiennes, pour les fins de la
réglementation canadienne, et françaises, pour les fins de la
réglementation française. Le groupe de travail des trois
gouvernements devrait se réunir dans les prochaines semaines. Donc, le
CRTC a changé de point de vue et, pour les fins de la
réglementation canadienne, les émissions coproduites avec le
Québec, sur la base d'un jumelage, seraient acceptées comme
contenu canadien, pour nos télédiffuseurs.
Mme Juneau: À votre ministère, est-ce qu'un budget
est déjà prévu pour la coproduction ou le jumelage?
M. French: Nous ne finançons pas directement la production
de contenus au
ministère. Ce financement est fait essentiellement par
Téléfilm Canada surtout et par la Société
générale du cinéma. Maintenant, il en est question, mais
je pense que c'est hypothétique à ce moment-ci, dans le contexte
budgétaire, d'indiquer que le ministère des Communications serait
en mesure de s'impliquer dans ce domaine, parce que cela coûte
très cher. Nous essayons de trouver un moyen d'avoir un grand impact
avec un investissement modeste. On ne l'a pas trouvé encore. On est
peut-être sur la piste, mais on n'a pas d'argent pour le moment, de toute
façon.
Télédiffusion de TV5
Mme Juneau: On pourrait passer à un autre programme.
M. le Président, j'aimerais bien savoir où en sont rendues
les négociations entre les différents partenaires quant à
la télédiffusion de TV5 au Québec. Est-ce que c'est
envisagé pour 1988?
M. French: Excellente question, Mme la députée!
C'est la négociation la plus ardue et la plus complexe que j'aie eu le
privilège d'observer. Essentiellement, dans les auditions que vous avez
évoquées, la proposition est maintenant devant le CRTC. En gros -
on me corrigera si je fais erreur - la demande envisage un tarif mensuel, pour
tous les abonnés du câble, comme source principale de financement,
plus l'argent des gouvernements participants. L'engagement financier du
gouvernement du Québec serait de l'ordre de 500 000 $ par
année.
Mme Juneau: 500 000 $?
M. French: De 500 000 $ par année. Et l'engagement du
gouvernement du Canada serait d'à peu près trois fois cela. Cela
s'explique - vous me permettrez - si cela voua intéresse., Le
gouvernement du Canada était très préoccupé par le
fait que le signal aille de l'Atlantique au Pacifique. Je vous avoue que, pour
nous, c'était moins prioritaire parce que les francophones, après
Thunder Bay... On a évolué mais, pour plusieurs dizaines ou
centaines de milliers de dollars, on n'était pas en mesure
d'entreprendre cela vis-à-vis des contribuables québécois.
Voilà pourquoi il y a un écart entre les contributions des deux
gouvernements. L'entrée en ondes est fascinante. Ce serait probablement
en janvier, février, si le CRTC le veut bien.
Je veux signaler deux choses au moins qui sont très
intéressantes. D'abord, on va avoir un téléjournal
quotidien d'une demi-heure, avec très peu d'écart par rapport
à l'heure où il passe en France. Deuxièmement, on va faire
de nouvelles productions canadiennes qui vont passer pour la première
fois, pour les auditoires canadiens, sur TV5. Tout le cash-flow
généré sera utilisé pour la production
canadienne.
Si cela peut vous intéresser, !a négociation a
été difficile essentiellement pour la raison suivante. On a
dû convaincre le gouvernement de la France, alors que TVFQ était
achetée par les Québécois par le biais du cable, que, pour
ce qui est de TV5, les Français devraient payer pour distribuer leur
produit au Canada. C'est une transaction, comme vous pouvez l'imaginer, qui
n'est pas nécessairement facile, mais on l'a faite.
Mme Juneau: Quels sont les documents sur les modalités
quant à la participation de la gestion de la programmation de TV5?
M. French: Voua voyez un membre du consortium. M. Girard pourrait
peut-être vous parler du consortium, sî cela vous plaît,
madame. Non? Avons-nous un document qui décrit la structure? Non, on ne
l'a pas avec nous, j'en suis presque certain, mais on peut vous le fournir.
Mme Juneau: C'est sur les modalités de la
participation.
M. Frenchs Vous voulez dire des membres du consortium ou de la
participation des gouvernements? C'est dans la requête publique qui est
devant le CRTC. On va vous envoyer une copie de Ia requête.
Mme Juneau: Quant à la proportion du contenu
québécois dans la proqrammation, M. le ministre...
M. French: Le contenu québécois? La production au
Québec? Mais c'est français, alors 90 % de la production nouvelle
sera faîte au Québec, sinon 100 %. On me signale qu'elle est
actuellement en français à 100 %, avec un contenu de 75 %
européen et 25 % québéco-canadien. Cependant, la question
est-elle: Dans la production nouvelle, quelle est la proportion ou... Pour la
grille horaire, c'est trois quarts, un quart. Maintenant, quelle proportion de
notre quart va être originale, une production nouvelle?
Une voix: Ce sera la totalité des 25 % puisque...
M. French: Oui, environ.
Une voix: ...ce sont les télédiffuseurs et les
producteurs indépendants québécois qui vont la faire.
M. French: Ce sera une première diffusion...
Une voix: ...environ 20 % de diffusion
originale et 5 % de reprises.
M. French: D'accord, des 25 %, il y aura 20 % de production
originale et 5 % de reprises. Excusez-moi, je pensais qu'il y avait plus de
reprises, c'est pour cela que j'étais un peu... Il faut souligner que
ces décisions sont prises par un consortium avec une diversité
d'acteurs et le gouvernement ne dicte pas... D'ailleurs, les gouvernements ne
sont pas membres du consortium. On ne dicte pas la conduite...
Mme Juneau: M. le Président, si vous nous permettez, on
pourrait continuer dans les programmes et on adoptera tout è la fois, en
dernier, l'ensemble des programmes des crédits, si vous permettez.
D'accord? On pourrait faire la discussion ainsi et, après, on adopterait
cela...
M. French: Je suis prudent comme d'habitude, mais...
Le Président (M. Hamel): ...rationnel.
Communication-Québec
Mme Juneau: M. le ministre, au sujet de la relocalisation des
trois bureaux de Communication-Québec, pourrait-on avoir plus de
détails entourant la relocalisation des bureaux de Thetford-Mines,
Valleyfield et Montréal?
M. French: Oui, il va falloir que j'aille aux sources,
Jean-Paul... Mme la députée, voulez-vous passer à une
autre question pendant qu'on va chercher quelqu'un qui pourra vous donner ces
renseignements. Thetford-Mines, Valleyfield et,..
Mme Juneau: Thetford-Mines, Valleyfield et Montréal.
M. French: Ah! Pour Montréal, on peut répondre,
c'est un problème qu'on connaît depuis très longtemps.
Comment et par où commencer? Il est évident que la situation
à Montréal n'est pas salubre, n'est pas acceptable, que l'air
n'est pas, à mon sens, acceptable, les employés sont insatisfaits
de leurs locaux; il n'y a pas d'ouverture sur l'extérieur, il n'y a pas
de fenêtre, c'est très difficile. On a donc l'intention, cet
été, de déménager la totalité de
l'unité de Communication-Québec, sauf le comptoir pour les
passants, au 22e étage, dans la tour sud-est du complexe Desjardins.
Selon les discussions avec la Société immobilière du
Québec, le dossier se déroule normalement.
J'ai peut-être quelqu'un qui pourrait nous aider pour Valleyfield
et Thetford-Mines. M. Gagné est le directeur général de
l'administration. Mme la députée nous demande quels sont les
détails de la relocalisation de Communication-Québec à
Valleyfield et Thetford-Mines; je pense que c'est fait à
Montréal, Mme la députée.
M. Gagné (Jean-Paul): Dans le cas de Thetford-Mines...
M. French: Jean-Paul Gagné.
M. Gagné: Oui, Jean-Paul Gagné, directeur
général de l'administration. Dans le cas de Thetford-Mines, le
bureau reste au même endroit où il était, il n'y a pas de
changement, à notre connaissance. À Valleyfield, on a
déménagé le bureau pour une question
d'accessibilité, c'est-à-dire qu'on tente de rendre les bureaux
de Communication-Québec le plus facilement accessibles à la
population, c'est-à-dire dans des circuits où il y a beaucoup de
circulation piétonnière en particulier. À Montréal,
il y a un projet de relocalisation à la Place Desjardins, mais au
même endroit où il est actuellement, sauf qu'il sera dans des
bureaux, au lieu d'être dans un endroit où la qualité de
l'air est très discutable, c'est-à-dire au sous-sol, au niveau
des stationnements de la Place Desjardins. (16 h 15)
M. French: Là, tu parles de Montréal. On est tous
d'accord. C'est une situation inacceptable et on va la régler.
Mme Juneau: Et à Valleyfield vous dites qu'il n'y a pas eu
de...
M. Gagné: À Valleyfield, le bureau a
été changé, mais pour une raison d'accessibilité de
la population.
Mme Juneau: Ahî C'est Thetford-Mines, alors, qui ne bouge
pas?
M. French: Dans ce concept, il n'y a pas de changement.
M. Gagné: II n'y a pas de changement. Thetford reste
là.
Mme Juneau: À la page 16 de l'étude des
crédits de votre ministère, c'est bien indiqué, au
cinquième paragraphe...
M. French: Relocaliser trois bureaux, effectivement:
Thetford-Mines, Valleyfield et Montréal.
M. Gagné: Exact. On est allé en appel d'offres.
C'est-à-dire que la SIQ est allée en appel d'offres, pour ce
bureau, à notre demande. Mais, à la suite d'une entente avec le
propriétaire qui nous louait les locaux et à la suite d'une
entente concernant le réaménagement des locaux, on a
décidé de rester là.
Mme Juneau: Ce n'est pas la même situation que pour le cas
de Montréal où c'était...
M. French: Non, c'est un autre...
M. Gagné: Le bail était échu; c'est
cela.
Mme Juneau: ...des locaux inadéquats?
M. French: Le bail était échu et il a
été obligé de...
Mme Juneau: Ah!
M. French: Donc, relocalisation, ce n'est pas exactement le mot
qui aurait dû être utilisé, Mme la députée.
Cela aurait pu être une relocalisation, mais pas
nécessairement.
Mme Juneau: À la suite de l'entente qui est intervenue
avec le gouvernement fédéral, Communication-Québec est
devenu l'unique guichet de renseignements sur les programmes et les services
des deux paliers de gouvernement. Est-ce que le ministre peut faire le bilan de
cette expérience en termes d'accroissement du nombre de demandes et de
l'embauche du personnel? La participation financière d'Ottawa a-t-elle
été de 650 000 $ pour 1986, comme prévu dans
l'entente?
M. French: Augmentation, ébauche... Mme Juneau:
Embauche du personnel... M. French: Oui, l'embauche.
Mme Juneau: ...participation financière d'Ottawa.
M. French: Participation financière d'Ottawa.
Mme Juneau: Est-ce que cela a été, tel que
prévu, 650 000 $?
M. French: Oui, c'est un contrat légal et je suis... Mme
la députée, cette année, Communication-Québec a
répondu globalement à 900 000 demandes dont 15 % -disons 125 000
- sont des demandes fédérales, conformément aux
prévisions initiales. C'est le bureau de Montréal qui
reçoit la proportion la plus élevée de demandes
fédérales. En termes d'embauche, on va aller aux sources. En
termes de financement, évidemment, c'est tel que prévu.
Mme Juneau: Et l'embauche?
M. French: On va aller aux sources, précisément.
Mais, si je vous le donne dans l'ordre de grandeur, je pense qu'on peut dire
qu'il y avait quelques personnes d'engagées à temps plein ou
à temps partiel comme permanents de la fonction publique
québécoise. La grande majorité a été
engagée, pour le moment, à titre d'occasionnel, la grande
majorité des exagents de renseignements fédéraux.
Mme Juneau: Vous venez de me dire que c'est surtout à
Montréal qu'il y a eu des demandes pour le gouvernement
fédéral. Est-ce qu'il y a eu l'embauche nécessaire,
à Montréal, pour donner un service adéquat?
M. French: Mme la députée, j'aimerais bien vous
répondre de façon définitive, mais on vient d'ajouter
quatre agents de renseignements de plus à notre bureau de...
Mme Juneau: Montréal,
M. French: Oui, il continue d'y avoir un taux de rejet - je vous
le dis - inacceptable à Montréal et on continue de travailler et
on va espérer l'améliorer. Moi, je suis...
Mme Juneau: Mais quels correctifs entendez-vous...
M. French: C'est justement l'embauche de personnel additionnel.
C'est essentiel, Mme la députée. L'autre correctif, c'est que
nous utilisons les organismes multiplicateurs autour de nous,
c'est-à-dire qu'on essaie de faire en sorte que les renseignements
gouvernementaux qui pourraient être utiles pour un groupe qui travaille,
disons, dans les garderies ou dans le domaine des femmes violentées,
leur soient fournis d'abord afin qu'ils n'aient pas besoin de se
référer à nous constamment. Leur clientèle va
être renseignée sur le gouvernement du Québec à
partir de cette relation qu'ils auront, eux-mêmes, avec nous.
Mais je vous avoue que plus on est efficace, plus on a des contacts,
plus les gens nous demandent. Alors, c'est un peu cela, le problème des
renseignements qouver-nementaux. Je dois rendre hommage aux gens qui
travaillent à Communication-Québec. Je suis personnellement
convaincu - je n'étais pas sans expérience dans le dossier avant
d'entrer en politique - que c'est probablement le meilleur, sinon... En tout
cas, c'est un des meilleurs services de renseignements gouvernementaux au
monde. Le moral y est excellent et les gens travaillent très
efficacement, à mon sens.
Mme Juneau: Le ministre a choisi le volet des renseignements,
dans le fond de Communication-Québec et cela a apporté
l'abolition de 25 postes d'agent d'information dans...
M. French: Oui.
Mme Juneau: ...l'ensemble des régions. Depuis cette date,
Communication-Québec n'assume plus les services aux ministères et
organismes dans le cadre de ses opérations régionales. Le
ministre ne reconnaît-il pas que sa décision diminue la
qualité de l'accès à l'information gouvernementale des
gens en région?
M. French: Mme la députée, mon diagnostic est de ne
pas confirmer votre conclusion. Nous avions un choix à faire. Vous avez
vous-même évoqué le problème des rejets
téléphoniques. Le gouvernement précédent, à
la fin de son mandat, et le nouveau gouvernement ont fait beaucoup moins de
tournées ministérielles et beaucoup moins de présences en
région. Si nous avons décidé de faire ce
changement-là, c'était entre autres à cause de ce
changement de comportement de la part des ministres et des ministères
qui, répétons-le, a commencé il y a deux ans et demi,
trois ans. Deuxièmement, il faut reconnaître que de plus en plus
le ministère et les organismes se sont dotés eux-mêmes
d'agents d'information.
Le choix des priorités est toujours pénible, mais nous
avons choisi d'accentuer la réponse du marché ou de la
clientèle qui nous demande des renseignements, plutôt que
d'essayer d'avoir des agents qui poussent l'information vers les gens. On a
trouvé que la première était une priorité.
Mme Juneau: Est-ce que cela occasionne des dépenses
supplémentaires aux gens qui veulent obtenir des renseignements?
Sont-ils obligés d'appeler dans les ministères respectifs, les
organismes où on ne donne plus l'information de
Communication-Québec? Qu'est-ce que cela fait au sujet...
M. French: Les agents d'information et les agents de
renseignements, vous me permettrez de dire que je n'y comprenenais rien
moi-même avant d'arriver là. C'est un peu subtil.
Les agents d'information avaient la responsabilité de diffuser
l'information, les communiqués de presse, de faire les relations
publiques, ils dirigeraient l'information vers la population. Les agents de
renseignements acceptaient les demandes de la population et y
répondaient. Donc, entre les deux activités, on a
décidé d'arrêter de pousser l'information et d'augmenter
notre capacité de répondre aux demandes qui étaient
décidées par les clients qui venaient nous voir et nous
demandaient des choses.
Afin de répondre au rejet et à l'affluence dans nos
bureaux, c'était mieux de se concentrer sur le volet renseignements.
Mme Juneau: Avez-vous pu évaluer si les ministères
ont pris la relève?
M. French: On n'a pas pu évaluer, mais on n'a pas eu de
plainte des ministères et organismes. Il ne faut pas croire qu'on n'a
plus d'agents d'information, on en a moins. Cela n'est pas qu'on les a tous
recyclés, mais on en a recyclé un certain nombre puisqu'on avait
besoin d'années-personnes pour l'activité renseignements.
Mme Juneau: Pour ce qui est des modules jeunesse à
Communication-Québec, il y a 38 postes d'agent d'information pour la
jeunesse qui ont été abolis. Cette décision se traduit
pour les jeunes par une perte d'un répondant spécialisé et
approprié à leurs besoins. Pourquoi une telle décision et
est-ce que les jeunes devront s'en remettre aux préposés aux
renseignements qui sont déjà débordés de
travail?
M. French: II n'y a pas de décision. C'était la
suite en bonne et due forme de la décision que le gouvernement
précédent a prise. Je n'avais pas à prendre une
décision. Si j'avais décidé de maintenir les qens en
poste, cela aurait été une décision; ce que je n'ai pas
fait. J'étais d'accord avec le gouvernement précédent que,
pour une période de temps, il y avait une possibilité -que ce
soit deux ans - que ces jeunes fassent une contribution importante à
Communication-Québec. Ce qu'ils ont fait. La moyenne d'âge de ces
"jeunes" - entre guillemets - est actuellement de 27 ou 28 ans. Il y en a
plusieurs de 30, 35, 37 ans. Il faut des fois imaginer que l'on parle des
jeunes flos et filles. Ce n'est pas exactement cela. La moyenne d'âge est
de 29 ans.
Mme Juneau: À l'aide sociale, en bas de 30 ans, ce sont
des jeunes.
M. French: Du tac au tac, Mme la députée,
félicitations. Mais ils ne sont pas allés vers l'aide sociale. Il
y en a beaucoup qui ont trouvé de l'emploi, j'en ai rencontré. Je
me promène un peu dans nos bureaux de Communication-Québec. J'ai
rencontré des ex-employés, membres de modules de jeunesse, qui
sont employés à temps plein ailleurs, parce que leur
expérience était tellement pertinente, parce qu'ils ont fait des
contacts dans la communauté. L'expérience a été
heureuse.
Actuellement, nous pensons que les agents de renseignements qui restent
sont capables de faire face à l'ensemble des demandes. D'ailleurs, pour
la très qrande majorité, ces jeunes ne faisaient plus de
renseignements jeunesse, ils faisaient les renseignements, tout court.
Publicité gouvernementale
Mme Juneau: Dans le programme Information et publications
gouvernementales, en juin dernier, vous vous adressiez au Publicité Club
de Montréal dans le but de discuter de modes d'attribution des contrats
de publicité gouvernementale. Est-ce que le ministre peut nous indiquer
quels sont les objectifs poursuivis par cette démarche? Entend-il ou
a-t-il modifié le mode d'attribution des contrats de publicité
gouvernementale? Si oui, dans quel sens? Et dans quel but?
M. French: D'accord. Lorsque je suis arrivé au
ministère, Mme la députée, on a pu constater un malaise
dans le processus d'attribution des contrats de publicité. Je vais
essayer de résumer la situation, aussi précisément que
possible. Dans l'attribution des contrats de publicité gouvernementale,
le gouvernement donnait des contrats annuels et renouvelés chaque
année. Cependant, il demandait aux agences de publicité de faire
une présentation spéculative qui impliquait des dépenses
phénoménales allant de 30 000 $, 40 000 $, 50 000 $, à 60
000 $. Entre autres, il demandait un "jingle", les graphiques, toute la
thématique. Les agences nous disaient: Écoutez, nous sommes
prêts à faire cela pour trois ans, mais nous ne sommes pas
prêtes à faire cela pour un an. D'ailleurs, on pense que pour
trois ans, ce n'est pas vrai que cela va vous aider à prendre une bonne
décision et vous n'avez pas besoin de faire cela. C'était cela,
la consultation que nous avons eue avec le Publicité Club, entre
autres.
Nous avons fait une série de changements peut-être plus
mineurs. Mais, sur le fond et l'aspect essentiel, Mme la députée,
les changements ont été: primo, plus de présentation
spéculative et, secundo, des contrats pluriannuels. Donc, nous avons
réformé le système de cette façon, nous avons
accepté chacune des demandes et des recommandations du Publicité
Club, du conseil des agences et du COGEP, un organisme-parapluie qui regroupe
tous les intervenants dans le domaine. Nous avons accepté la
totalité de leurs demandes et nous avons gardé sur le plan du
rôle du ministre une pratique identique à celle du gouvernement
précédent, puisque l'industrie a dit qu'elle l'aimait. Nous avons
adopté la même pratique.
Pour les très gros contrats, parce que l'industrie était
très intéressée à ce que tout le monde ait
l'occasion de se présenter, plutôt que de se fier â Rosalie,
nous sommes allés par appels d'offres dans les journaux pour inviter les
gens à soumissionner pour la plupart des gros contrats.
Mme Juneau: Entre autres, M. le Président, il y a un
contrat en particulier sur lequel nous aimerions bien avoir des informations.
On voudrait avoir des détails sur le contrat de 60 000 $ à
Communications Marcy, l'entreprise de publicité dans le cadre de
l'entente fédérale-provinciale, s'il vous plaît.
M. French: Communications Marcy a eu ce contrat non pas par le
processus d'octroi que je viens de vous décrire, mais à la suite
d'une décision du comité de coordination de l'entente
fédérale-provinciale pour le développement des industries
de communication qui est une sous-entente des ententes EDER qui existent dans
plusieurs ministères et organismes fédéraux et
provinciaux. Je suis informé par un des membres du comité qu'il y
a eu un appel d'offres.
Mme Juneau: Pour quel contrat? (16 h 30)
M. French: Excusez-moi, je ne comprenais pas du tout quel
était l'essentiel de votre question. Le contrat est pour la coordination
de la Semaine des technologies de l'information, qui est justement cette
semaine, où il y a quatre ou cinq événements importants,
dont l'organisation du Carrefour international d'information
électronique, le CIIEL dont j'avais le dépliant ici tantôt,
deuxièmement, le Salon de l'informatique et de la bureautique de
Montréal... Excusez-moi, on m'informe que le contrat est principalement
pour organiser le CIIEL, le Carrefour international d'information
électronique.
Mme Juneau: Je pensais que c'était le ciel bleu.
Le Président (M. Trudel): Ce n'est pas une petite
commande, M. le ministre!
Des voix: Ha! Ha! Ha!
Mme Juneau: Vous parlez du ciel...
Une voix: À l'ordre, M. le Président!
M. French: Pour le compte des deux gouvernements.
Le Président (M. Trudel): Je comprends qu'on ait dû
recourir à une maison de publicité pour organiser le ciel. Je
comprends cela.
Mme Juneau: C'est bleu ciel.
Une voix: Les couchers de soleil sont dans les rouges. C'est plus
poétique.
Mme Juneau: Le ministre peut-il nous confirmer si c'est la
même firme de publicité qui a obtenu le contrat pour le sommet de
la francophonie?
M. French: Non, je ne peux pas le confirmer. Je ne dis pas non,
madame, je n'ai aucune idée de la firme qui a reçu le contrat
pour le sommet de la francophonie. De toute façon, Mme la
députée, si elle a eu un contrat de publicité, ce n'est
pas le gouvernement du Québec qui le lui a octroyé parce que tout
cela passe par nous, mais on n'est pas au courant qu'elle ait reçu un
contrat pour le sommet de la francophonie.
Une voix: Ce soir.
M. French: Serait-ce possible que ce soit le gouvernement
fédéral? En tout cas, ce sont des nouvelles pour nous. Serait-il
possible que ce soient les deux gouvernements ensemble qui l'aient fait?
Une voix: Tu es trop vite, Carmen. Mme Juneau: Je sais
ça.
Une voix: Tu es six mois avant ton temps.
M. French: On m'informe que ce sont les deux ministères,
le ministère des Affaires extérieures et le ministère des
Relations internationales, qui ont engagé
Communications Marsy. C'est pour cela que cela n'est pas passé
par nous. Nous sommes un peu l'arbitre de ces activités, pour le
gouvernement comme tel, mais, lorsqu'il s'agit d'une opération
fédérale-provinciale, nous n'avons pas le même
rôle.
Mme Juneau: Le ministre peut-il nous confirmer que cette firme
est dirigée par Mme Lucette Saint-Amand, ex-directrice des
communications du Parti libéral du Québec?
M. French: Je ne sais pas à quel moment elle a
été permanente du PLQ, mais ce n'était pas durant mes
années avec le parti, lesquelles remontent à dix ans. Tout ce que
je puis vous dire, c'est que Mme Saint-Amand est certainement quelque part,
dans cette compagnie. Je ne peux affirmer qu'elle y est X ou Y, mais elle est
là, comme elle était, il y a X années, permanente du
PLQ.
Mme Juneau: Comme cela, elle est membre depuis longtemps, car
elle a fourni de bons montants en 1984, 1985 et 1986 à la caisse
libérale, et son mari aussi.
M. French: Mme la députée, je suis heureux que vous
soyez toujours fidèle au poste.
Mme Juneau: II faut croire qu'ils sont encore membres du Parti
libéral.
M. French: J'imagine qu'ils veulent exercer leur droit
démocratique, mais c'est peut-être une raison naïve. J'avais
pensé que c'était peut-être cela.
Mme Juneau: En 1984, 1985 et 1986, madame a donné 150 $,
750 $ et 500 $ et son époux a donné 500 $, 1700 $ et 1600 $.
Une voix: Cela n'a pas rapport.
Mme Juneau: C'est quand même un bon montant...
Le Président (M. Trudel): Bon, madame...
Mme Juneau: ...pour la caisse électorale du Parti
libéral.
M. French: Madame la députée, vous avez fait votre
travail suivant...
Une voix: II n'y a pas à être jaloux parce qu'ils
n'ont pas donné au PQ.
Le Président (M. Trudel): À l'ordre, s'il vous
plaît! Nous sommes sur un terrain...
Mme Juneau: Un terrain rouge.
Le Président (M. Trudel): Mme la députée,
vous avez d'autres questions pour M. le ministre, j'en suis convaincu, parce
que vous avez encore au moins une heure devant vous.
Mme Juneau: Oui, j'en ai d'autres. Ne les envoyez pas tout de
suite.
Le Président (M. Trudel): Ah bon!
Une voix: ...M. le Président?
Mme Juneau: ...à la caisse électorale?
Le Président (M. Trudel): Non, madame la
députée...
M. French: Quand même, j'essaie gentiment d'oublier vos
interventions à cet effet. Ne brassez pas ma cage, là.
Le Président (M. Trudel): ...je pourrais peut-être
poser des questions, mais je ne veux pas... J'aurais peut-être quelques
questions à poser concernant Radio-Québec...
Mme Juneau: Sur la caisse électorale? Le
Président (M. Trudel): Non. Une voix: Sur la vôtre non
plus.
Le Président (M. Trudel): Sur Radio-Québec, quand
on y arrivera. Si jamais...
Mme Juneau: Cela s'en vient.
Le Président (M. Trudel): J'en aurais moi aussi sur vos
caisses électorales, mais ce n'est pas l'endroit pour le faire.
Une voix: Quand vous voudrez.
Mme Juneau: M. le Président, je voudrais savoir aussi si
les 6 100 000 $ - à la page 27 de vos crédits, le premier
paragraphe en haut - de publicité que le ministère du Tourisme a
accordés cette année pour des campagnes de publicité, cela
provient de votre budget des communications?
M. French: Non, le budget qui paie les contrats vient des
ministères et organismes respectifs.
Mme Juneau: Respectifs?
M. French: Oui.
Mme Juneau: Alors, cela ne vient pas de chez vous?
M. French: L'argent ne vient pas de chez nous.
Révision des tarifs de Bell Canada
Mme Juneau: Bon. Concernant les révisions tarifaires pour
Bell - je sais que ce n'est pas vous qui décidez cela, on en a
parlé ce matin - je sais que Bell a déposé une
requête auprès du CRTC proposant un rééquilibrage de
ses tarifs qui se traduisait par une diminution des coûts des services
interurbains accompagnée d'une augmentation du coût du service
local de base. Compte tenu de l'impact de cette proposition sur
l'universalité de l'accès à un service
téléphonique è prix abordable et ce, plus
particulièrement pour les familles à faible revenu et les
personnes âgées qui devront assumer une hausse du prix pour le
service de base, sans pour autant être compensées par la
réduction des tarifs interurbains, est-ce que le ministre peut nous
indiquer quelle est la position du gouvernement dans ce dossier? Le juge en
parlé tout à l'heure...
M. French: Mme la députée, j'aimerais vous
répondre dans le sens étroit de votre question. Avec votre
permission, je vais essayer d'ajouter d'autres éléments. Nous
sommes en train d'analyser la demande de Bell et analyser si, oui ou non, nous
voulons intervenir puisque les autidions ne se feraient qu'à l'automne.
Nous sommes intervenus déjà dans ce genre de dossiers - presque
toujours, me dît le sous-ministre - et nous n'hésiterons pas
à le faire une autre fois.
Cependant, le contexte général dans lequel évolue
la téléphonie au Canada nous force à poser cette question
que vous avez bien articulée, l'accessibilité, et nous nous
efforcerons à l'avenir de la poser de façon
répétitive. Un rééquilibrage, cela s'en vient.
Toute la question reste dans la rapidité avec laquelle ce
rééquilibrage va se faire sentir. Il va sans dire que nous sommes
complètement d'accord avec vous sur le plan de la
nécessité de préserver l'accessibilité à un
prix abordable. Mais il y a une pression nord-américaine qui fait en
sorte qu'inévitablement nous allons avoir des prix qui s'apparentent
davantage au coût réel. Et vous savez que le coût
réel du service local est plus élevé que le
coût...
Ce rééquilibrage, donc, doit être géré
et non pas être pris en catastrophe, à la dernière minute.
Nous voilà devant la problématique de la réglementation de
la téléphonie, une des deux ou trois problématiques
principales pour les dix prochaines années. Je ne vous cache pas que
tous les gouvernements cherchent, en ce moment, comment ils vont gérer
cela. Encore une fois, il est très prioritaire de préserver
l'accès universel à un prix abordable. Bell envisage, pour
préserver l'accessibilité pour ceux qui ont des revenus modestes,
une solution à un prix très raisonnable, comme les lignes
partagées par deux ménages. Il y a quand même des solutions
de ce genre qui sont aussi envisageables.
Mme Juneau: Au moment où on se parle, on a seulement les
garanties pour une année que le prix sera considéré
à un point, mais on ne sait pas pour les années
subséquentes ce qui va arriver. Ce sont éventuellement les
petites gens qui vont être aux prises avec un problème
semblable.
M. French: Voyez-vous, Mme la députée, pourquoi
nous allons année par année? C'est parce que c'est un organisme
réglementaire et une compagnie. Les hommes et femmes politiques n'ont
aucun rôle, ou à peu près, actuellement. Le gouvernement du
Québec nomme le juge Tremblay et ses associés, le gouvernement du
Canada nomme André Bureau et ses associés; ce sont de bonnes
gens, mais qui fonctionnent avec "le roi" et rien d'autre, Je n'ai pas le
pouvoir de donner une directive. Le gouvernement du Canada, actuellement, n'a
pas le pouvoir de donner une directive au CRTC. Donc, c'est de l'improvisation
annuelle... De l'improvisation, c'est un peu fort; c'est plutôt de la
planification annuelle parce que cela arrange les règles et la
compagnie. Comme résultat, tant et aussi longtemps que les gouvernements
fédéral et provinciaux ne se sont pas entendus sur une politique
nationale des télécommunications, tant et aussi longtemps que les
hommes et femmes
politiques, comme vous et moi, seront obligés d'échanger
des voeux pieux, on n'aura pas beaucoup de pouvoir de levier sur le
système.
Mme Juneau: Mais vous avez 60 jours pour faire des
recommandations avant que cela ne devienne officiel. Il faut qu'il y ait des
modifications.
M. French: Nous sommes déjà intervenus et nous
pouvons continuer d'intervenir, mais c'est un pouvoir dont
bénéficient tous les autres citoyens du Canada. Ce n'est pas plus
que cela; cela a peut-être plus de pouvoir moral parce que c'est nous.
Mais, on a le même statut que n'imparte quel autre . intervenant. Ce
n'est pas un pouvoir de directive, ni un rôle politique que nous jouons
à ce moment-là et nous avons l'intention, encore une fois,
d'évaluer l'occasion de faire cela dans ce cas qui nous concerne.
Mme Juneau: Si j'ai bien compris, votre idée n'est pas
faite là-dessus, ce n'est pas complet, vous allez...
M. French: C'est vrai, Mme la députée. On analyse
le dossier et le sous-ministre m'informe. Je vous souligne que c'est
extrêmement complexe.
Le Président (M. Trudel): M. le député de
Beauce-Nord a demandé d'intervenir...
M. Audet: M. le Président, j'aimerais...
Le Président (M. Trudel): M. le député, je
vous reconnais.
Mme Juneau: Pas sur une question de règlement
toujours?
M. Audet: Non, non.
Le Président (M. Trudel): Vous savez que les
députés sont des deux côtés de la table, mais
là on est du même côté de la table.
Mme Juneau: Bien oui.
Le Président (M. Trudei): À ma gauche et à
ma droite, on a le droit d'intervenir en commission parlementaire.
Mme Juneau: ...de cela.
Le Président (M. Trudel): M. le député de
Beauce-Nord.
M. Audet: M. le Président, j'aimerais savoir si vous
étiez en train de parler du protocole d'entente
fédérale-provinciale sur les
télécommunications?
M. French: Oui. Ce n'est pas un protocole d'entente, c'est une
négociation fédérale-provinciale en bonne et due forme qui
devrait déboucher sur une entente qui pourrait peut-être
même être constitutionnaiisée par la suite.
M. Audet: Ce que vous avez signé à Edmonton? C'est
cela?
M. French: Oui, c'est un mémoire d'entente. Excusez-moi,
oui.
M. Audet: D'accord. Maintenant, j'aimerais savoir quelles sont
les implications de cette entente quant au partage des responsabilités?
Vous en avez parlé un peu tantôt, je pense?
M. French: Non, mais la question est pertinente dans le sens que
vous voulez savoir quel serait l'impact sur les compagnies
québécoises.
M. Audet: C'est cela, oui.
M. French: La question est très importante. Le
gouvernement du Québec réglemente environ 12 % à 14 % des
téléphones sur ce territoire.
Mme Juneau: ...être bientôt?
M. French: Comment cela?
Mme Juneau: ...prend à nos questions.
M. French: Ahî Quel serait l'impact et comment cela se
déroule-t-il? Bell Canada a un marché dans les deux provinces.
Actuellement, les Ontariens font plus d'appels interurbains que les
Québécois. Il y a également une "transsubvention", comme
on a dit tantôt, entre les revenus d'interurbains et les revenus du
service local. Il y a une "transsubvention" Ontario-Québec, un
interfinancement, donc, une forte possibilité qu'une séparation
de Bell en deux entités génère une hausse des coûts
pour les Québécois. Pour cette raison, le gouvernement
hésite encore à endosser la notion de Bell-Québec dans
l'éventualité d'un changement de prémisses
réglementaires, du cadre réglementaire dans le domaine des
télécommunications au Canada.
On a quand même des possibilités d'imaginer que, pour ce
qui est de Bell Canada, les trois gouvernements concernés pourraient
faire en sorte que les bancs, qui entendent les cas pour Bell Canada, aient des
représentants des trois gouvernements. Un pouvoir de directive pourrait
être exercé par un conseil des ministres des
télécommunications des trois gouvernements, des communications
des trois gouvernements. Cela reste un moyen terme car, avant
d'arriver à cette étape, nous devons régler le
problème national et avoir une entente qui clarifie les relations des
deux niveaux de gouvernement dans le domaine des
télécommunications, une situation éminemment floue
actuellement à cause des pressions juridiques ou judiciaires et autres.
Tant et aussi longtemps que nous n'avons pas réglé ce
problème, nous ne sommes pas à l'étape de voir comment
l'Ontario, le Québec, le Canada et Ottawa pourraient réglementer
conjointement Bell Canada. (16 h 45)
Le Président (M. Trudel): Adopté? Mme la
députée.
Mme Juneau: Oui...
Le Président (M. Trudel): Votre tour est maintenant venu,
le député de Beauce-Nord ayant terminé son
intervention...
Mme Juneau: Bon.
Le Président (M. Trudel): ...pour le moment.
Mme Juneau: On a failli faire une question de privilège,
M. le Président. En tout cas, on va continuer.
Une voix: Elle devient agressive.
M. French: Elle n'oublie pas!
Le Président (M. Trudel): La tradition...
M. Audet: M. le Président, il serait plus important
d'adopter des programmes étant donné qu'on commence à
être à court de questions.
Mme Juneau: On n'est pas à court de questions. On a le
droit de se parler.
M. French: ...des priorités.
Le Président (M. Trudel): Mme la députée, vous
connaissez ma patience légendaire. C'est connu de tout le monde, de
toute façon.
M. Audet: Ah oui?
Le Président (M. Trudel): Alors, prenez tout le temps
qu'il vous faut. On a jusqu'à 17 h 40, au minimum. Je pense que c'est
l'entente que...
Une voix: 17 h 30?
M. French: Non, c'est parce qu'on a commencé avec dix
minutes de retard.
Le Président (M. Trudel): Paraît-il que la
commission a commencé en retard.
Mme Juneau: M. le Président, il y a eu une question en
Chambre concernant tes logiciels pour le ministère de la Défense,
pour l'éducation francophone. Est-ce que vous avez eu des
détails.
M. French: Moi, Mme la députée, je ne peux que vous
dire...
Mme Juneau: Le contrat a encore été donné
à Toronto par une firme qui n'avait pas d'expertise.
M. French: Je suis d'accord, Mme la députée. Mon
collègue, le ministre de l'Industrie et du Commerce, a fait
confectionner une liste d'entreprises potentiellement intéressées
à ce genre de contrat. Il l'a livrée. Je parle de bien avant le
contrat; ne me demandez pas le jour.
Mme Juneau: ...
M. French: Oui, c'est ça! Il l'a livrée au
ministère fédéral et j'ai vu ta lettre qu'il a
écrite à son ou sa collègue è l'époque. Je
regrette de ne pas l'avoir avec moi.
Mme Juneau: Ils l'ont perdue à la livraison.
M. French: C'est comme il l'a dit. Il va falloir faire en sorte
que "the postman rings twice", parce que le qouvernement du Canada est
resté imperméable à ces représentations.
Mme Juneau: Cela doit être parce qu'il y a eu un suivi
extraordinaire.
M. French: Mme la députée, libre à vous de
tirer les conclusions que vous voulez, mais je peux vous dire que le
gouvernement du Québec a fait diligence dans ce dossier.
Mme Juneau: On n'est pas d'accord, mon recherchîste et moi,
sur une question. Je ne sais pas ce qu'on va faire.
Le Président (M. Trudel): Mais il travaille assez fort;
faites-lui plaisir une fois de temps en temps.
M. French: Oui, faites-lui...
Mme Juneau: Je pense que je vais le laisser s'amuser...
Le Président (M. Trudel): Vous avez, d'ailleurs, un
excellent recherchiste, je dois l'admettre.
M. French: ...
Mme Juneau: Je vais lui laisser poser la question.
M. French: ...
Le Président (M. Trudel): Cela ne me surprend pas. Il est
correct, lui.
Mme Juneau: Si tu veux absolument la poser, je vais te laisser la
poser. C'est ça. M. le Président, je voudrais parler au ministre
concernant... En mars dernier, à Montréal, devant des
représentants de l'industrie de l'électronique et des
communications, Mme Vézina a déclaré qu'Ottawa
dépenserait 8 000 000 000 $, d'ici à 1995, en équipements
d'électronique et de communication pour répondre aux besoins des
différents ministères fédéraux. Est-ce que le
ministre a posé des gestes concrets afin de maximiser la part des
entreprises québécoises dans l'attribution de ces contrats du
gouvernement fédéral, en espérant qu'on sera plus chanceux
qu'avec Ie3 logiciels?
M. French: Mme la députée, la quincaillerie de ce
genre n'est pas principalement de mon ressort comme ministre.
L'équipement comme tel n'est pas principalement du ressort du
ministère des Communications. Donc, pour ce qui est de l'attribution des
responsabilités à l'intérieur du gouvernement du
Québec, c'est mon collègue, le ministre de l'Industrie et du
Commerce, qui a la principale responsabilité.
Notre spécialité, c'est le logiciel avec X autres
intervenants au gouvernement. L'information électronique et un certain
nombre... dans un budget relativement modeste, certains aspects de la
câblodistribu-tion. Mais on n'a pas la responsabilité principale
de promouvoir l'industrie manufacturière au Québec.
Cependant, dans le domaine qui vous intéresse, nous avons fait
des représentations au gouvernement du Canada pour nous assurer que,
dans cette foulée d'achats, on acquière des logiciels bilingues,
entre autres, ce qui aurait pour effet de favoriser grandement l'industrie
québécoise de logiciels et il a accepté.
Mme Juneau: À ce moment-là, si vous dites que cela
ne relève pas de votre ministère, n'y aurait-il pas lieu que le
ministre responsable, que ce soit celui de l'Industrie et du Commerce ou celui
des Approvisionnements et Services, puisse faire une demande tout à fait
précise afin que nos entreprises québécoises aient leur
part du gâteau?
M. French: Je suis d'accord avec vous, madame, mais je ne peux
pas parler pour mon collègue.
Mme Juneau: Vous pouvez peut-être lui passer le mot.
M. French: Je vais lui passer le message, madame.
Mme Juneau: Bon. Quelles sont les actions concrètes
envisagées par le ministre pour assurer un suivi aux recommandations du
rapport du comité sur le développement des logiciels d'expression
française et ce, afin d'assurer un avenir de l'industrie
québécoise dans ce secteur qui voit actuellement 70 % du
marché lui échapper?
M. French: Mme la députée, il y a eu un rapport
fédéral-provincial sur les logiciels d'expression
française comportant 24 recommandations qui ont été
endossées par le gouvernement du Canada, par le gouvernement du
Québec et par l'industrie. Mme MacDonald et moi avons rendus publics le
rapport et les études sous-jacentes. À l'intérieur de
l'entente, et d'ailleurs dans le domaine des communications, nous investissons
à peu près 1 000 000 $ par année dans le
développement de logiciels. On vient d'ouvrir un centre de recherche
francophone sur l'informatisation des organisations, à Laval, le
CEFRÏO, afin que l'impact de l'informatique et des logiciels sur les
organisations et le volet francophone soient plus particulièrement
étudiés et analysés au bénéfice de
l'ensemble des Québécois. C'est un investissement de presque 1
000 000 $ des deux gouvernements. Si vous voulez qu'on dépose le rapport
ou le suivi, cela nous fera plaisir. Je pense que vous avez probablement
déjà le rapport.
D'accord. Mme la députée, le fameux best-seller, le
rapport sur le logiciel à portée multilingue, est très
important parce que c'est la description de l'architecture d'un logiciel qui
est conçu dans une lanque -notamment le français, dans notre cas
- pour être subséquemment adapté dans une série
d'autres langues. La structure interne s'apprête à un usage
multilingue. C'est peut-être la pièce maîtresse de notre
stratégie pour l'industrie du logiciel au Québec.
Société de
radio-télévision du Québec
Mme Juneau: Étant donné que l'heure file
très rapidement et que le président a manifesté, tout
à l'heure, son intention d'intervenir, je voudrais passer au dossier de
Radio-Québec, avec une question bien précise. Je sais que M. le
président de Radio-Québec avait bien hâte qu'on lui pose
des questions.
Le Président (M. Trudel): Je comprends, il est ici depuis
ce matin. C'est tellement plus détendu par rapport aux questions de l'an
dernier à pareille date.
Mme Juneau: Je crois bien! On peut
bien se détendre, il n'y a plus rien dans nos régions.
Le Président (M. Trudel): Mme la ministre, Mme la
députée, on pourrait bien...
Mme Juneau: Merci, cela fait deux fois...
Le Président (M. Trudel): Je veux que vous soyez
nommée. Je vous le dis: s'il y a quelqu'un qui fait un effort pour vous,
c'est bien moi.
Mme Juneau: M. le Président, j'ai une question très
précise è poser au ministre. À la suite de la fermeture
des bureaux régionaux, vous avez payé les primes de
séparation aux employés mis à pied. Cela a
coûté 1 800 000 $ au ministre, en 1986. Est-ce que le ministre
peut nous indiquer combien il en a coûté pour respecter les baux
des locaux des quatre stations régionales fermées?
Une voix: ...c'est Gilbert. Mme Juneau: II est ici.
M. French: Ce n'est pas cela. C'est Gilbert qui pose les
questions, cela devrait être Gilbert qui réponde aux
questions.
Le Président (M. Trudel): Le show de Gilbert et
Gilbert.
M. French: Avez-vous une autre question, car lorsque le grand
expert arrivera, on se verra.
Mme Juneau: J'avais oublié une fraction de la question et
je voudrais savoir combien et pour combien d'années encore... Je sais
que, l'année dernière, on avait discuté que des baux de
dix ans avaient été signés et qu'il restait encore sept ou
huit ans ou quelque chose comme cela. Quel est le portrait dans l'ensemble?
M. French: Je vais essayer de récapituler la question pour
le bénéfice du vice-président à l'administration de
Radio-Québec, M. Gilbert Buzaré. La question était: II y a
eu fermeture de certains bureaux régionaux; quel a été le
coût des primes de séparation? Est-ce exact?
Mme Juneau: Non. M. French: Non.
Mme Juneau: La séparation, c'est 1 800 000 $.
M. French: C'est cela. Quel a été le coût de
l'achat des baux et pour combien d'années étaient ces baux?
Mme Juneau: Quatre stations régionales ont
été fermées.
M. Buzaré (Gilbert): II faut que je vous résume, M.
le Président. Dans le cas de Sherbrooke, le bail était de dix ans
et d'environ 80 000 $ par année. Nous avons réussi à
sous-louer à la compagnie...
Mme Juneau: II restait combien d'années, monsieur?
M. Buzaré: II restait huit ans. Mme Juneau: Huit ans.
M. Buzaré: Nous avons réussi è sous-louer
à ia compagnie Radiomutuel. D'accord?
Mme Juneau: Oui.
M. Buzaré: Dans le cas de Québec, le bail se
terminait à la fin du mois de juillet, cette année. Il n'a donc
pas été renouvelé, et il va se terminer. Il faut dire que,
dans le cas de Québec, on avait déjà sous-loué une
partie importante, environ la moitié des espaces.
Dans le cas de Trois-Rivières, ce bail durait encore pour environ
six ans et le coût de la totalité du bail était d'environ
240 000 $. Nous avons réglé pour 150 000 $ avec le
propriétaire, pour terminer complètement le bail, en être
libéré au complet. Finalement, dans la région de Hull, le
bail est encore en vigueur. Nous en avons sous-loué une partie
importante et le bail est encore en vigueur.
Mme Juneau: Pour combien d'années encore?
M. Buzaré: II reste encore un an.
Mme Juneau: II reste encore un an. À combien?
M. Buzaré: II reste un peu plus d'un an. Il reste un
montant de 75 000 $ à verser pour la durée de ce bail.
Mme Juneau: La sous-location à Sherbrooke a-t-elle
été identique au coût du bail?
M. Buzaré: Tout à fait.
Mme Juneau: Tout à fait? Si je comprends bien, celui de
Québec se termine. Il n'y a pas d'autres dépenses
supplémentaires qui se sont ajoutées?
M. Buzaré: Dans le cas de Sherbrooke, le seul coût
additionnel au bail s'applique à
une commission de 15 000 $ que nous avons payée à une
agence d'immeubles pour trouver le client.
Mme Juneau: 15 000 $.
M. Buzaré: Oui. C'est le seul coût inhérent
à la cession du bail à une autre firme.
Mme Juneau: Je vous remercie. M. le Président, j'aimerais
savoir maintenant la partie de la production par le secteur privé. Je
pense que c'est 25 % ou je ne sais trop combien; est-ce que le ministre
pourrait faire le point là-dessus?
M. French: Mme la députée, l'objectif que le
gouvernement a demandé à Radio-Québec d'atteindre, c'est
25 % de son budget de production par des producteurs indépendants pour
l'année fiscale 1990-1991, mais les 25 % pourraient également
comprendre la prestation d'équipements et de plateaux de tournage par
Radio-Québec aux producteurs indépendants. Le chiffre pour cette
année impliquerait un montant de presque 9 000 000 $ de productions
indépendantes, en 1990-1991. Le chiffre pour l'année en cours est
de 5 000 000 $. Pour l'année dernière, il était de 2 000
000 $.
L'engagement que demande le gouvernement à Radio-Québec
est une extension presque mécanique de l'engagement que
Radio-Québec avait pris à l'endroit du CRTC lors du
renouvellement de son permis. Nous avons encouragé Radio-Québec
à atteindre cet objectif et nous pensons qu'avec le document que nous
avons pu déposer aujourd'hui, il est évident que
Radio-Québec entreprend cette démarche avec beaucoup
d'efficacité. (17 heures)
Mme Juneau: Cela va-t-il se traduire par des mises à
pied?
M. French: Par le processus d'attrition, cela permettra à
Radio-Québec d'atteindre ses objectifs dans la gestion de son corps
d'emploi.
Mme Juneau: Combien de mises à pied à peu
prè3?
M. French: II n'y a pas de mises à pied, madame. On
procédera par attrition.
Mme Juneau: II n'y aura pas de mises à pied du tout?
M. French: On ne peut pas garantir qu'il n'y aura pas de mises
à pied. En tout cas, je ne pourrai pas le garantir. Peut-être que
le président voudrait le faire, mais ce que j'essaie de vous dire, c'est
que la conception du gouvernement était d'atteindre les objectifs du
niveau d'emploi à Radio-Québec avec cet objectif de production
indépendante par l'attrition.
M. Girard (Jacques): II y a un autre élément
important à souligner à l'égard de la production
indépendante, c'est que le recours aux producteurs indépendants
permet d'allonger nos budgets de façon siqnificative puisque le recours
à la production indépendante nous permet d'obtenir des fonds de
Téléfilm Canada. Pour un investissement, par exemple, de 1 000
000 $ de la part de Radio-Québec, on peut obtenir ultimement 2 000 000
$, 2 500 000 $ ou 3 000 000 $ en valeur de programmation parce qu'il y a un
investissement de la part des producteurs indépendants et un
investissement significatif de la part de Téléfilm Canada.
Pour ce qui est du nombre de personnes, ce qui nous semble être
réaliste, c'est que, sur une période de quatre ans, d'ici
à 1990-1991, il pourrait y avoir abolition de 48 postes; ce qui
correspond, qrosso modo, à l'attrition naturelle.
Mme Juneau: Mais, en fait, ce qui a motivé le ministre
à faire une chose comme celle-là, c'est une question
financière.
M. Girard: C'est-à-dire que c'est...
M. French: Excusez-moi de vous interrompre, car, ici, c'est une
question politique. Ce qui a motivé le ministre, cela a
été de s'assurer que Radio-Québec produise les meilleures
émissions possible pour l'écran au meilleur coût possible
pour le contribuable et que Radio-Québec contribue au
développement d'une industrie de production de télévision
indépendante.
Nous pensons, entre autres, que sans une industrie de production de
télévision indépendante florissante nous ne
réussirons pas à faire l'exploitation que nous visons comme un
objectif primordial pour le succès de l'industrie
québécoise de la télévision.
Mme Juneau: Est-ce que le ministre trouve normal, à
présent, que toutes les décisions soient prises à
Montréal et qu'il ne reste que quelques exécutants dans les
régions?
M. French: Mme la députée, la direction
régionale de Radio-Québec est basée à
Montréal. J'avais personnellement le désir que la direction
régionale soit dans les régions. C'est à la suite de
lettres que j'ai reçues des employés de Radio-Québec en
région qui, eux, s'exprimaient en faveur majoritairement, et même
très majoritairement, pour l'emplacement de la direction
régionale de Radio-Québec à Montréal que, dans la
mesure où c'est dans mes prérogatives de prendre une telle
décision du
conseil d'administration de Radio-Québec, j'ai consenti à
cet emplacement.
Mme Juneau: Êtes-vous en train...
M. French: Les producteurs indépendants en région
se sont exprimés exactement dans le même sens. Donc, j'ai dû
me rallier à l'idée que la direction régionale devait
être localisée à Montréal.
Mme Juneau: Vous êtes en train de me dire que c'est sur la
recommandation des gens des régions que vous êtes parvenu à
L'idée de mettre toute la direction à Montréal concernant
les régionaux?
M. French: Madame, je suis en train de vous dire que je peux
produire - avons-nous les lettres? - les lettres des producteurs
indépendants en région et des employés de
Radio-Québec. On leur a demandé: Pensez-vous que cela devrait
être à Québec ou à Montréal? Ils nous ont dit
que cela devrait être à Montréal. Il y avait M.
François Saint-Laurent, président de l'Association
québécoise des producteurs de cinéma et de
télévision en région, M. Laval Gaqnon, agent de recherche
et de développement, Radio-Québec, SaguenayLac-Saint-Jean,
M. Daniel Beauchesne, directeur régional à Rimouski, qui a fait
un sondage, et M. Mario Santerre, directeur régional de
l'Abitibi-Côte-Nord.
Mme Juneau: II n'y a plus de directeurs régionaux dans les
bureaux. Ils sont tous à Montréal à présent.
M. French: À l'époque, il y en avait. Je vous dis
que les gens qui travaillent en région, quel que soit leur titre, se
sont exprimés en faveur de l'emplacement à Montréal de la
direction régionale de Radio-Québec.
Mme Juneau: Encore cette année, la Société
Radio-Québec mettra-t-elle à la disposition des écoles, ou
de l'éducation, ou de la santé et des services sociaux, des
organismes sans but lucratif, le rapport annuel 1985-1986 et les versions
préliminaires?
Je m'excuse, M. le ministre, e3t-ce qu'il y aura encore, à la
disposition de l'éducation et des services sociaux, des services comme
il y en avait, des émissions? Cela a-t-il été
annulé?
M. Girard: II y a deux réponses précises. La
première, c'est que, depuis l'intégration de la Direction de la
production et de la distribution du matériel didactique du
ministère de l'Éducation qui est devenue la Direction de la
télévision éducative formelle à
Radio-Québec, le système de prêt qui existait au
ministère de l'Éducation continue d'exister. Nous sommes en train
de revoir complètement toute la question du prêt et de la vente de
nos émissions tant aux organismes à but non lucratif qu'aux
organismes à but lucratif ou aux particuliers. Le problème qu'il
nous faut réqler avant d'en arriver à une solution, c'est le
problème de la libération des droits, que ce soit avec la SARDEC,
que ce soit avec l'Union des artistes ou que ce soit avec les autres groupes
qui représentent soit les artistes, soit les musiciens, soit les
compositeurs, soit les auteurs, soit les interprètes.
Mme Juneau: Vous êtes en train de réévaluer
cela?
M. Girard: Nous sommes en train de réévaluer cela
et d'en arriver à une solution qui nous permettrait d'autofinancer le
service en faisant payer par une certaine catégorie d'organismes ce
qu'il nous en coûte pour faire l'enregistrement de la cassette. Pour les
autres organismes nous allons tenter de faire un profit minimal. Mais
l'objectif est d'autofinancer le service.
Mme Juneau: Comme le reste. M. le Président, vous voulez
poser une question sur Radio-Québec?
Le Président (M. Trudel): J'ai quelques questions. Je vais
les poser tout de suite parce qu'il nous reste peu de temps.
Mme Juneau: Le temps achève. Trois minutes.
Le Président (M. Trudel): Si vous voulez poser des
questions sur les réqions, chère amie, ce matin, je vais vous
rendre immédiatement la parole. Je suis dans une réqion qui
s'appelle l'est de Montréal et je voudrais en discuter un peu avec le
président ou avec le ministre. M. le ministre, je vous adresse ma
question parce que, même si c'est le président de la
société que je vise, une collègue à moi, la
députée de Maisonneuve, a déjà
décidé, dans une décision devenue historique, que les
questions doivent d'abord s'adresser au ministre qui, lui, consent ou ne
consent pas à les adresser aux gen3, y compris, soit dit en passant, les
présidents d'organisme. Cela m'a un peu surpris comme décision.
Comme la députée de Maisonneuve est la vice-présidente de
cette commission, je m'en voudrais de ne pas la suivre sur son terrain.
Donc, M. le ministre, je vous ai écrit, j'ai également
écrit à M. le P.-D.G. de Radio-Québec. On sait que
Radio-Québec considère la possibilité de
déménager. Je dis bien la possibilité parce que je suis
Informé qu'il reste quelques propositions sur la table, dont une qui
voudrait que Radio-Québec demeure là où elle est
située et que ce soit
agrandi ou que d'autres édifices environnants soient mis à
sa disposition. L'autre possibilité c'est celle que - vous comprendrez
facilement les raisons pour lesquelles c'est celle que je privilégie, si
j'avais à prendre une décision - je privilégierais et qui
veut que Radio-Québec aille plus encore dans l'est. Je vois sourire, le
président, car Radio-Québec est déjà située
dans l'est de Montréal, ce que j'appelle le centre-est; j'aimerais
l'avoir plus dans l'est, donc dans la...
Mme Juneau: Dans son comté.
Le Président (M. Trudel): Non, pas du tout. Au contraire
je suis en train de faire du travail pour la députée* de
Maisonneuve parce que la RIO, la Régie des installations olympiques, est
située dans le comté de Maisonneuve, deux rues à l'ouest,
malheureusement, du comté de Bourget. Pour terminer cette longue
introduction, j'aimerais demander au ministre...
Mme Juneau: Ce préambule.
Le Président (M. Trudel): Ce préambule.
Mme Juneau: C'était rendu que la cloche sonnait.
Le Président (M. Trudel): Où est rendu ce dossier
et, si mes informations sont exactes, est-ce qu'une décision va
être prise incessamment? Quelles sont les chances - je ne veux pas que le
président prenne la décision à la place de son conseil,
mais j'aimerais avoir une opinion quantitative -que la RIO accueille
incessamment les installations de Radio-Québec.
M. French: M. le Président, je vais répondre
à la question dans la mesure où je dois, moi, piloter le dossier
auprès du Conseil des ministres, car c'est une décision du
Conseil des ministres. Il y a effectivement trois séries de
décisions liées qui se posent devant Radio-Québec dans le
dossier de son déménagement. Il y a, d'abord, la fameuse
cité de l'audiovisuel qui va ou ne va pas être établie sur
le terrain de Radio-Canada.
Il y a, deuxièmement, divers projets de plateaux de tournage qui
vont ou ne vont pas voir le jour ailleurs dans la région de
Montréal; par exemple, Cité du havre, Merl Oppenheim, Studios
Panavision.
Troisièmement, il y a le réaménagement de
Radio-Québec. Ce réaménagement n'est pas sans incidence
sur les deux autres et vice-versa. Il y a actuellement trois ou quatre
possibilités qui restent quant à la relocalisation de
Radio-Québec, soit à la Régie des installations
olympiques, soit une construction nouvelle et une rénovation sur le site
actuel, soit un autre entrepreneur qui nous a fait une proposition et soit,
dis-je toujours, une participation partielle ou totale à un autre projet
qui pourrait voir le jour sur le terrain de Radio-Canada ou ailleurs.. Les
chances, dans tout cet ensemble de possibilités, pour la RIO sont
raisonnables. La RIO n'a nullement été exclue. La RIO reste dans
la course. Je pense que votre curiosité est très légitime,
compte tenu de vos intérêts, mais j'hésiterais à
dire plus, parce qu'on est au milieu d'un processus de prise de décision
plutôt délicat et parce qu'une légion
d'intérêts se conjuguent autour de cette question.
J'hésiterais à aller plus en détail, puisqu'il y a une
certaine confidentialité qui doit être maintenue autour de cette
prise de décision.
Le Président (M. Trudel): Merci, M. le ministre. Je pense
que, dans une conversation un peu privée avec le président, ce
matin, il a été question que le bail se terminerait incessament
et qu'il pourrait peut-être y avoir discussion pour le prolonger de
quelques mois de plus, mais, quand pensez-vous être en mesure de prendre
cette décision?
M. French: J'espère qu'on va être capable de le
faire avant la fin de juillet, mais je ne serais pas surpris de m1
apercevoir qu'on ne le pourra pas. Donc, on prolongera d'un an le bail actuel;
comme vous le savez, c'est un "rolling five-year"...
Le Président (M. Trudel): Merci. Mme la
députée de Johnson, je vais vous céder la parole à
condition que vous me la recédiez, parce que j'ai une deuxième
question, mais je vais la redonner aux régions pour la suite.
Mme Juneau: Non, allez-y!
Le Président (M. Trudel): Je pensais que vous vouliez
parler tout de suite. Je vais vous poser une deuxième question et Mme la
députée...
M. French: Excusez-moi, M. le Président, quelles sont les
plans pour la Commission d'accès à l'information? Sans le
député de Taillon, on ne peut pas...
Mme Juneau: II vient.
M. French: Lorsqu'il arrivera, on sera toujours d'accord pour que
cela finisse à 17 h 40?
Le Président (M. Trudel): Oui. Autre question, M. le
ministre, qui porte sur le projet dont on entend beaucoup parler de ce
temps-ci, le projet de TV5 dont Radio-Québec, si je ne ne trompe pas,
fait partie. Double question. La première, je suis un consommateur,
à l'occasion, parce que je n'ai pas le temps de regarder très
souvent la
télévision, peut-être un petit peu plus que vous de
toute façon, de TVFQ et j'aimerais savoir quelles seront les
conséquences sur TVFQ? Est-ce qu'il y a de la place pour les deux sur le
marché du Québec?
M. French: Non. Je veux que cela soit clair. TV5 remplace
TVFQ.
Le Président (M. Trudel): TV5 remplacera...
M. French: Ce qui ne veut pas dire que la programmation actuelle
à TVFQ ne se retrouverait absolument pas dans le "package" de TV5. Mais
j'émets le souhait -comme vous le savez, c'est une relation "at arm's
length", alors je n'ai pas le droit -qu'Apostrophes reste.
Une voix: Je pense que c'est déjà acquis.
Le Président (M. Trudel): C'est fait.
M. French: Apostrophes est dans le "package".
Le Président (M. Trudel): De toute façon, vous avez
répondu à ma question, c'était assez clair.
M. French: On me signale que cela va être ici plus
rapidement qu'avant par rapport à sa diffusion en France.
Le Président (M. Trudel): Mme la députée de
Matane, vous avez demandé la parole?
Mme Hovington: Oui.
Le Président (M. Trudel): Je vous reconnais.
Mme Hovington: Merci.
Le Président (M. Trudel): Vous êtes reconnue.
Mme Hovington: Officiellement. Mon collègue me disait tout
à l'heure que, peut-être cet après-midi, vous avez
touché un petit peu la question que je voulais vous poser, mais
étant donné que j'ai dû m'absenter vous m'excuserez s'il y
a répétition. Je ne sais pas si vous l'avez touchée
véritablement. À la suite des compressions budgétaires de
l'an passé, je vois dans votre historique, à la page 2
-j'aimerais bien tire cela à Mme la députée de Johnson:
"Depuis l'exercice 1981-1982...
Mme Juneau: Je sais lire. (17 h 15)
Mme Hovington: ...les enveloppes budgétaires consenties
par le gouvernement à Radio-Québec s'inscrivent dans un contexte
de resserrements." C'était déjà commencé depuis
1981-1982. À la suite de ces changements et de ces compressions
budgétaires effectués l'an passé et aussi des changements
de structure après l'adoption de la loi 61 qui a été
sanctionnée le 19 juin 1986 et qui a modifié la Loi sur la
Société de radiotélévision du Québec - il y
a eu des changements importants dans la structure administrative de la
société et la fermeture de postes en région, remarquez que
j'ai eu la chance de garder le mien en Gaspésie, à Saint-Omer, et
aussi dans les régions périphériques - je voudrais savoir
si ces mesures ont eu un impact très grand sur la cote d'écoute
ou sur la programmation ou sur les...
M. French: En Gaspésie, la cote d'écoute a
doublé. Je ne sais pas si c'est un rapport de cause à effet, mais
c'est le cas. Pour ce qui est de l'impact sur le produit vu à
l'écran, je dirai que l'impact est imperceptible, tel qu'annoncé
lorsqu'on a fait la réforme.
Mme Hovington: Quel est le chiffre, M. le ministre?
M. French: Les cotes d'écoute?Mme Hovington:
Oui.
M. French: CIVK, part du marché 1985, 2 %; part du
marché 1986, 4 %.
Une voix: Cela a doublé.
Mme Juneau: Est-ce vous qui avez demandé de poser cette
question?
M. French: Honnêtement, non. Mme Juneaus Ah!
M. French: Je vous jure, Mme la députée.
Mme Juneau: Non, j'avais...
Mme Hovington: C'est par intérêt personnel. Je n'ai
pas M. Gilbert à côté de moi.
Mme Juneau: J'avais cru.
Une voix: J'avais des questions, Mme la
députée.
Mme Juneau: J'ai une toute dernière question. Avez-vous
terminé, madame?
Mme Hovington: Cela dépend de la réponse. Est-ce
que M. le ministre a quelque
chose à ajouter?
M. French: D'autres chiffres. II y a eu hausse dans quatre ou
cinq régions et stabilité dans les autres régions. Je peux
tout lire, mais je pense que c'est peut-être un exercice fastidieux que
je vous épargnerai.
À Matane, c'était stable à 4 % de la part du
marché.
Mme Hovington: Merci beaucoup.
Mme Juneau: Juste une toute petite en terminant, M. le ministre.
Vous avez annoncé l'arrêt des programmes PAMEC et PODIUM, mais
vous aviez dit que, possiblement, l'OPDQ pourrait investir certains montants
pour aider ces...
M. French: Très rapidement, Mme la
députée.
Mme Juneau: S'il vous plaît!
M. French: Très rapidement. Il y aurait un programme de
500 000 $ cette année pour les télévisions communautaires
ayant entre 750 et 6000 abonnés.
Mme Juneau: À l'OPDQ?
M. French: Oui. C'était au ministère des
Communications avec l'argent de l'OPDQ. C'est 750 abonnés au minimum,
parce que plus petit que cela, excusez-moi, mais cela ne se fait pas. C'est
malheureux, mais cela ne se fait pas. Et plus que 6000, il y a pas mai de
télévisions communautaires qui s'autofinancent à plus de
6000 actuellement. Alors, on va offrir aux autres la possibilité
de s'équiper pour qu'elles puissent s'autofinancer. On va leur acheter
un nouvel équipement qui leur permettrait d'aller dans la production
vidéo en région, etc. Bref, de gagner leur pain.
Deuxièmement, le gouvernement du Canada, nous l'espérons
et nous avons très bon espoir, annoncera très rapidement, dans
les prochains jours, un programme de financement de transition pour les
coûts de fonctionnement de 500 000 $. Donc...
Mme Juneau: Est-ce que cela va être sous forme de
subvention?
M. French: Oui, mais cela ne sera pas nécessairement
récurrent, Mme la députée. C'est cela qui est important.
Cela va être sur une base de deux ans.
Mme Juneau: Une base de deux ans?
M. French: On me dit que cela va être sur une base de deux
ans. C'est 1 000 000 $ sur deux ans. Donc, les télévisions
communautaires ont les appuis financiers dont elles ont besoin pour s'ajuster
au nouveau contexte.
Mme Juneau: Je vous remercie, M. le ministre.
M. French: M. le Président, je pense que je comprends que
nous allons maintenant...
Le Président (M. Trudel): C'est parce qu'il y avait le
député de Beauce-Nord qui m'avait...
M. Audet: Juste une petite question.
Le Président (M. Trudel): ...demandé la parole.
M. Audet: M. le Président, on regarde au...
Mme Juneau: Cela ne touche pas au temps de M. Filion. C'est
terminé la...
M. French: Mais écoutez...
M. Audet: Non, je ne veux pas enlever de temps, je...
Une voix: D'accord, il n'y a pas de problème.
Le Président (M. Trudel): Qui n'a pas de problème?
Personne n'a de problème. Alors...
M. Filion: Je n'ai pas de problème dans la mesure
où cela ne touche pas à ma petite demi-heure.
M. French: Je pense que la commission...
Une voix: Je pense qu'il y aurait intérêt
à...
Le Président (M. Trudel): D'accord.
M. French: Je ne peux pas parler pour la commission ni pour le
député...
Le Président (M. Trudel): Non, effectivement.
M. French: ...mais j'aimerais dire que nous, nous sommes
prêts à nous y prêter de bonne foi.
Le Président (M. Trudel): M. le député, vous
pouvez...
M. Audet: Cela concerne le mémoire de Radio-Québec.
À la page 1, on a les performances. On a eu une augmentation de
l'auditoire moyen de 16,8 % à l'automne 1986.
Deuxièmement, le coût par téléspectateur a
diminué de 7 % en 1986- 1987. À la page 4, si on regarde les
revenus autonomes anticipés pour la prochaine année, on a une
augmentation prévue de 22 %. Alors, ma question est la dernière
concernant Radio-Québec. Est-ce que le ministre me permet, à ce
stade-ci, de féliciter les organisateurs ou les directeurs de
Radio-Québec pour le magnifique travail qu'ils ont fait pendant cette
année, compte tenu des mesures budgétaires auxquelles ils ont eu
à faire face?
Des voix: Ha! Ha!
M. French; Je suis très content, mais ce n'est pas politique, Mme
la députée.
Mme Hovington: Ce n'est pas politique, c'est réaliste.
M. French: Je suis très content de dire à la
direction de Radio-Québec qu'elle a travaillé dans des
circonstances pas toujours faciles et qu'elle a fait un excellent travail. Vous
êtes d'accord avec la moitié de ce que je dis et d'autres
personnes seront d'accord avec l'autre moitié. C'était difficile
pour les directeurs de Radio-Québec et ils ont fait un excellent
travail.
Le Président (M. Trudel): Merci, M. le ministre. Il me
fait plaisir d'accueillir mon collègue, le président de la
commission des institutions. J'ai l'impression qu'on se rend visite
aujourd'hui. Je vais visiter sa commission à l'occasion, parce qu'il est
en commission aujourd'hui.
Avec M. le député de Taillon, nous allons maintenant
aborder...
M. French: M. le député... M. le ministre...
Le Président (M. Trudel): Merci. C'est venu plus vite que
je ne le pensais.
M. French: M. le Président...
Le Président (M. Trudel): Ah! voilà!
M. French: Est-ce que je peux dire que je n'ai pas l'intention de
rester à côté du président de la commission, ce
n'est pas à moi de le faire. Le président est nommé par
l'Assemblée nationale et je ne suis pas à ma place à ses
côtés.
J'aimerais remercier les membres de la commission et les dirigeants de
Radio-Québec, les membres de mon ministère qui m'ont
assisté et, plus particulièrement, Mme la députée
de Johnson et son recherchiste pour l'excellent travail que nous avons accompli
aujourd'hui.
Le Président (M. Trudel): Merci, Mme la
députée me faisait remarquer qu'au moment où nous allons
passer au programme 7 on pourrait peut-être adopter les crédits
des programmes 1, 2, 3, 4, 5, 6, ayant déjà été
étudiés ce matin, et 8.
Mme Juneau: Nous sommes d'accord, M. le Président.
Le Président (M. Trudel)s Quand M. le député de
Taillon aura terminé,..
Mme Juneau: C'est ce qui avait été convenu.
Le Président (M. Trudel): ...avec le président de
la commission, nous adopterons ce programme, ce qui fera qu'au moment où
nous ajournerons les travaux de la commission tous les crédits du
ministère des Communications auront été
adoptés.
Vous êtes d'accord, Mme la députée?
Mme Juneau: Tout à fait d'accord et je tiens aussi, M. le
ministre, à vous remercier ainsi que vos précieux collaborateurs,
et le mien par le fait même.
M. French: On a donc adopté tout ça. Le
Président (M. Trudel): 1, 2... M. French: Merci.
Le Président (M. Trudel): Au moment où on se parle,
il nous reste le programme 7 à adopter et ce sera fait, M. le
ministre.
M. Filion: Ne partez pas quand même, M. le ministre.
M. French: Je ne vais pas partir, mais, je ne veux pas être
è côté du président qui, lui, parle pour
lui-même et indépendamment du pouvoir.
Commission d'accès à l'information
Le Président (M. Trudel): M. le président, ça me
fait plaisir de vous souhaiter de nouveau la bienvenue devant la commission. On
a eu le plaisir de vous rencontrer quelques fois depuis un an et demi. C'est
toujours pour nous un plaisir.
Je vais maintenant reconnaître le député de Taillon
qui est porte-parole de l'Opposition.
M. Filion: M. le président, peut-être aviez-vous
préparé quelques commentaires pour en faire part aux membres de
cette commission.
M. Pépin (Marcel): J'ai le sentiment, M. le
député de Taillon, que le ministre des
Communications est tellement soucieux de bien surveiller sa juridiction
qu'il oublie qu'aujourd'hui, c'est son tour et non pas le mien...
M. French: C'est mon tour?
M. Pépin: ...en ce sens que la commission comparaît
à deux reprises: une fois, auparavant, devant la commission de
l'Assemblée nationale pour l'examen de son rapport annuel et, à
l'autre reprise, dans le cadre du programme 7 du ministère des
Communications dont le ministre est responsable.
Évidemment, je n'ai pas la prétention de vouloir me
substituer au ministre et je n'ai pas préparé de
déclaration préliminaire. Je peux vous en faire une très
brève, à savoir que tout va très bien et que je n'avais
pas prévu poser le moindre problème aujourd'hui à la
commission mais tenter, dans la mesure de mes modestes moyens, de
répondre à quelques interrogations que les membres de la
commission pouvaient avoir quant à l'usage des fonds qui nous ont
été votés par l'Assemblée nationale dans le cadre
du programme 7 du ministère.
M. Filion: Merci, M. le Président. Mes premières
remarques vont dans le même sens, parce qu'elles s'adressent directement
au ministre qui est appelé à défendre, auprès de
son collègue, le ministre des Finances et, à l'occasion,
auprès de son collègue, le président du Conseil du
trésor, les questions financières et budgétaires qui
finissent, bien sûr, par aboutir à votre organisme, mais qui
passent néanmoins entre ses mains, donc, qui sont de sa
responsabilité.
J'ai effectivement passé à travers les crédits. Il
n'y a pas beaucoup de questions qui s'attachent à ça, sauf de
façon générale, évidemment, lorsque je me suis
aperçu que les crédits à voter pour nous sont de 2 243 600
$ en 1987-1988, et que la différence avec l'année 1986 est de 29
300 $. J'ai trouvé ça un peu mince comme marge, étant
donné que je me souvenais et je me souviens encore un peu de ce qui
avait été discuté lors de vos passages, à
différents degrés, ici, à l'Assemblée nationale.
D'ailleurs, cette différence de 29 300 $ répond presque
essentiellement à la nécessité de l'indexation
prévue au chapitre des traitements du personnel sous la gouverne de la
Commission d'accès à l'information.
Ma première question va un peu au ministre. Est-ce que le
ministre des Communications, responsable encore une fois du budget de la
commission, considère que cette mince marge de manoeuvre, qui n'en est
pas une finalement parce qu'elle est dévolue à l'indexation, est
de nature à permettre à la commission d'éviter cette
espèce d'étranglement, si vous me passez l'expression, sur le
plan financier face à ses responsabilités qui sont immenses,
quand on songe aux répertoires qui doivent être produits par la
commission? Songeons en particulier - vous me corrigerez là-dessus, M.
le ministre - au fait que la Commission d'accès à l'information
sera l'hôtesse, en septembre 1987, de l'assez unique Conférence
annuelle des commissaires à la protection des données nominatives
qui regroupe l'ensemble des commissaires au Canada - et cela inclut un
commissaire canadien - qui ont un peu les mêmes responsabilités
que M. le président de la commission que nous avons devant nous. Je
prévois qu'il y aura des dépenses un peu inhérentes
à cette conférence. Également, quant au répertoire
des responsables, je note que la production de ce répertoire semble en
tout cas - vous me corrigerez, M. le ministre ou M. le président -
devoir maintenant être assumée par la commission en lieu et place
du ministère. Donc, eu égard à ces deux facteurs et eu
égard au surplus à l'ensemble du contexte que nous avait
décrit M. le président lors de sa dernière visite à
l'Assemblée nationale, est-ce que le ministre des Communications
considère comme suffisante cette très mince augmentation des
budgets de la commission?
M. French: J'aimerais d'abord féliciter le
député de Taillon d'avoir emballé une question fort simple
avec quelque chose de tout à fait élégant et
extraordinaire.
La différence, telle que nous la voyons, c'est 165 000 $ par
rapport à l'année dernière. Peu importe, il n'y a pas eu
de compressions budgétaires cette année par rapport aux
compressions qui existaient dans tous les autres programmes. La chose que
j'aimerais souligner particulièrement à l'attention du
député de Taillon, c'est que, l'année
précédente, les crédits périmés
représentaient 41 % du budget total de l'organisme et que, cette
année, les crédits périmés ont été de
14 % du budget de l'organisme. Je vous souligne donc que la différence
dans les crédits périmés a été
considérablement plus importante que la différence dans le net du
budget. Vous avez aussi évoqué une série de
problèmes plus précis que, peut-être, le président
aimerait clarifier.
M. Pépin: Effectivement, M. le député. La
progression du budget de la commission sera très mince. Ceci s'explique
de différentes façons. La première, évidemment,
c'est que le personnel permanent de la commission n'augmente pas. Je crois que
ceci s'inscrit dans une politique générale du gouvernement qui a
été demandée à tous les ministères et
organismes soit d'essayer de s'acquitter des mandats avec la même masse
salariale.
Dans un organisme comme la commission d'accès, la plus grosse
dépense n'est pas pour le fonctionnement, mais fondamentalement pour le
traitement, À partir du moment où ces dépenses de
traitement sont à peu près stables, il est bien sûr
prévisible que les dépenses de fonctionnement, les
dépenses globales n'augmenteront pas beaucoup. Je dois cependant dire
que la commission avait reçu des mandats limités dans le temps.
Notamment, le plus gros de ces mandats, c'était la révision de
toutes les dispositions inconciliables avec la loi sur l'accès. Ce
travail est terminé maintenant. Le rapport a été remis
à la commission. Le ministre a - avez-vous déposé le
projet de loi? (17 h 30)
M. French: Oui.
M. Pépin: Ce volet du travail étant fait, les
ressources affectées à ce mandat ont été maintenant
affectées davantage aux autres mandats. C'est comme cela que nous
n'avons pas eu besoin d'augmenter sensiblement le personnel. Quant aux deux
autres projets dont vous avez parlé, le répertoire
nécessitera une dépense additionnelle à la commission et
nous avons prévu qu'à même le budget de fonctionnement qui
a été accordé, étant donné que
c'était dans le domaine des communications justement que nous avions une
marge de manoeuvre un peu plus forte, nous pouvions l'absorber. Je suis
confiant de pouvoir réussir.
Quant à la Conférence annuelle des commissaires à
la protection des données nominatives, il s'agit d'une conférence
internationale et non pas pancanadienne. Il y aura seize pays de
représentés. La dépense pour la commission sera finalement
assez limitée puisque, outre les services habituels d'hôte que
nous devrons rendre et qui sont marginaux, le principal poste sera la
traduction simultanée et aussi peut-être quelques
réceptions, mais, de ce côté, j'ai le sentiment qu'il y
aura également la contribution d'autres organismes du gouvernement du
Québec.
M. Filion: Les Affaires internationales.
M. Pépin: Les Affaires internationales ou
l'Assemblée nationale elle-même, puisque la commission
relève de l'Assemblée nationale.
M. Filion: D'accord. Je vous en prie.
M. Pépin: Je puis vous dire que, si nous avions 1 000 000
$ de plus, nous pourrions embaucher des vérificateurs en
conséquence et nous pourrions les occuper, mais nous avons convenu de
nous accommoder des mêmes progressions des dépenses qui sont
allouées en général à l'ensemble des orqanismes du
gouvernement. Nous espérons pouvoir rendre service à notre
clientèle le plus judicieusement possible dans le cadre d'un budget
comme celui-là.
M. Filion: D'accord. Encore une fois, le ministre a raison.
J'avais confondu deux chiffres, quand je parlais de 29 300 $. Je regardais les
autres dépenses et les traitements et tout ça. Alors,
l'augmentation est de 165 000 $, comme il l'a spécifié. Alors,
c'est une erreur, encore une fois, une confusion de chiffres.
La dernière fois que nous vous avions vu, nous avions appris que
vous évaluiez à environ 21 % la proportion d'organismes publics
ou parapublics qui n'avaient pas encore remis leur liste des fichiers de
renseignements personnels qu'ils possèdent. D'un autre
côté, j'ai noté une somme d'environ 30 000 $ pour la
production de ce répertoire des fichiers. Est-ce que maintenant il y a
une évolution, parce que, quand même, je pense que j'avais
signalé un peu ma stupéfaction vis-a-vîs de ce pourcentage
assez énorme? Est-ce qu'au moment où on se parle on peut dire
qu'au moins le gouvernement s'est plié à la loi qu'il avait
lui-même, en quelque sorte, déposée à
l'Assemblée nationale et est-ce qu'on peut dire que c'est chose faite:
les organismes publics et parapublics se sont conformés à la loi
maintenant?
M. Pépin: Malheureusement, ce n'est pas chose faite dans
le sens que tous les organismes "délinquants" - entre quillemets -n'ont
pas encore tous produit la déclaration qui est obligatoire selon la loi.
Cependant, dans le cas des ministères et des principaux organismes qui
relèvent directement du gouvernement du Québec, c'est fait. C'est
dans le secteur parapublic qu'il y a encore des difficultés et, plus
particulièrement, dans le secteur municipal où je dirais de
mémoire qu'environ 80 % des organismes qui n'ont pas remis leurs
déclarations de fichiers sont des organismes qui ont moins de 20
employés.
M. Filion: Le ministre a-t-il écrit à ses
collègues responsables de ces organismes qui ne se sont pas encore
conformés à la loi? C'est tout à fait inacceptable. La
dernière fois, on avait une couple de ministères, si ma
mémoire est bonne. Je pense qu'il y avait même les Finances, je
peux me tromper, mais il me semble...
M. French: Sûrement, M. le député de
Taîllon, que les Finances ont été un problème
de taille pour nous sous l'ancien ministre des Finances.
M. Filion: L'ancien ministre des Finances.
M. French: L'ancien ministre des Finances n'avait pas une grande
confiance dans la loi.
M. Filion: Cela fait 18 mois.
M. French: Maintenant, le ministère des Finances s'est
conformé»
M. Filion: Oui, mais cela ne s'est réglé qu'il y a
seulement trois ou quatre mois aux Finances.
M. French: Enfin, le ministère des Finances
résistait.
M. Filion: Quand vous dites l'ancien ministre des Finances, je ne
comprends pas.
M. French: Je vous dis que l'ancien ministre des Finances a
traîné, dans le cas d'un des organismes sous sa
responsabilité, la commission en cour. Ce fut l'une des plus importantes
causes. Il a été débouté finalement et la
commission a eu la juridiction que nous avions toujours réclamée
pour elle. Mais il y avait une attitude de résistance à ce
ministère.
M. Filion: Mais qu'il ait pris des poursuites judiciaires, je
n'en suis pas là. Je pense que chacun a le droit d'intenter des
poursuites pour faire valoir ses droits, s'il croit en avoir, etc. Ce dont je
parle, cela fait quand même 18 mois que le ministre des Finances actuel
est en poste, mais, de toute façon, c'est réglé depuis une
couple de semaines ou de mois. Ma question concernait plus les organismes
parapublics qui relèvent de vos collègues, M. le ministre des
Communications. Est-ce qu'il n'y aurait pas lieu de leur rappeler que la loi
est en vigueur et qu'elle s'applique à tout le monde?
M. French: M. le député, je pense que c'est une
bonne idée. Je vais d'ailleurs demander maintenant au président
de m'informer des noms des municipalités en question. Je vais parler
à mon collègue et on va essayer de les alerter. Mais j'aimerais
bien que vous notiez deux choses, M. le député. D'abord, on s'est
fait dire que les municipalités sont des gouvernements. Ce sont les
créatures juridiques et constitutionnelles de l'Assemblée
nationale et du gouvernement du Québec, mais ce sont des gouvernements.
Ce ne sont pas des organismes subordonnés, dans leur esprit à
eux. Deuxièmement, ce sont des municipalités plutôt petites
et je pense qu'on peut comprendre un peu naturellement pourquoi il y a un
problème. En tout cas, je pense que votre suggestion est une excellente
suggestion et je serais prêt à la faire si je reçois la
liste des organismes en question.
M. Pépin: Je peux vous fournir cette liste dès
demain.
Le Président (M. Trudel): Merci. M. le
député de Viger.
M. Maciocia: Une brève question. Est-ce que, parmi ces
organismes municipaux, il y a les conseils municipaux, c'est-à-dire les
conseillers et les maires des municipalités?
M. Pépin: C'est-à-dire que c'est la
municipalité. C'est la municipalité comme organisme public qui a
la responsabilité de fournir à la commission, pour une
éventuelle publication dans un répertoire, la liste des fichiers
de renseignements personnels qui sont détenus par elle.
M. Maciocia: C'est-à-dire les membres du conseil
municipal? Non.
M. Pépin: C'est-à-dire le conseil comme
organisation juridique.
M. French: M. le député, les bureaux de
députés comme les bureaux de membres du conseil ne sont pas sous
l'empire de la loi.
Le Président (M. Trudel): On en avait discuté,
d'ailleurs.
M. Filion: Oui, cela avait été discuté lors
du dernier passage.
M. Pépin: Là, ce n'est pas votre correspondance
personnelle.
M. Filion: Ma prochaine question concerne les procédures
d'accès à des documents, en particulier en ce qui concerne
l'article 47 de la loi qui fixe ce délai de 20 jours dont on a
déjà parlé ensemble. Ce délai de 20 jours est le
délai à l'intérieur duquel le responsable d'un organisme
quelconque doit fournir le renseignement correspondant à la demande.
Vous l'aviez soulevé - je trouvais cela intéressant parce que
j'ai eu à le vivre à mon bureau de comté - et
également dans le bulletin de liaison de la Commission d'accès
à l'information du 24 février 1987 mention est encore faite de ce
délai de réponse qui est un devoir - je cite le titre du bulletin
- un devoir du responsable souvent mal compris. C'est parce que les
responsables ont l'impression que c'est un délai: on laisse
écouler 20 jours et, à l'expiration des 20 jours, on peut fournir
le renseignement. En d'autres mots, c'est mal compris. C'est comme si
c'était un délai-plancher au lieu d'être un
délai-plafond.
Cela me préoccupe un peu, encore une fois, parce qu'à mon
bureau de comté j'ai eu à vivre un cas où c'était
précisément cela. Écoutez, les 20 jours, on va attendre
qu'ils
passent. J'ai dit: Mais non, ce n'est pas ce que la loi dit; c'est le
contraire. C'est une suggestion que je fais au ministre. Je ne sais pas si on
peut le faire à l'intérieur d'un projet de loi par papillon. De
deux choses l'une; on pourrait rendre la loi plus claire pour éviter la
confusion dans l'esprit des responsables ou bien on fait de l'information pour
mieux renseigner, par voie de lettres, ces organismes-là. C'est un
"mailing" considérable, mais enfinï Ce délai est mal
compris, mal saisi dans bien des cas et il faudrait que son
interprétation soit la suivante.
C'est une réflexion que je fais avec une suggestion à deux
volets, l'un ou l'autre. Je suis sensible à cette question, parce que,
comme je vous le disais, je l'ai vécu à mon bureau de
comté. Si la personne était restée chez elle et
n'était pas venue me voir, elle serait encore là, avec cette
impression. En plus de cela, souvent, le citoyen ou la citoyenne, qui demande
un renseignement, en a besoin rapidement, parce que c'est un renseignement
requis pour un formulaire ou pour une demande qui va ailleurs. En somme, c'est
pour compléter un dossier souvent urgent, et là, on se bute
à ce délai. Parfois, le responsable est de bonne foi et dit: Je
respecte le délai de 20 jours; et c'est compréhensible. Encore
une fois, je me permets cette suggestion à deux volets. Est-ce que le
problème continue à exister, si je me fie à votre
bulletin?
M. Pépin: Bien sûr, le problème existe encore
et je pense qu'il existera toujours. J'ai le sentiment que c'est un peu une
conséquence de la nature humaine. Lorsqu'un organisme a hâte de
diffuser un document, il n'attend pas 20 jours, il n'attend même pas une
demande. Lorsqu'il a des ennuis à le diffuser, il retarde le plus
longtemps possible, C'est un peu comme l'impôt; c'est au plus tard le 30
avril de chaque année et beaucoup de gens, je pense, déposent
leur rapport d'impôt dans la boîte aux lettres le 30 au matin.
Là-dessus, je suis d'accord avec vous, M. le député, qu'il
y a peut-être un effet un peu pervers de la loi avec cette expression "au
plus tard dans 20 jours". La loi n'a pas été conçue, par
exemple - c'est celui que je donne souvent - pour autoriser le responsable de
l'information sur l'état des routes au ministère des Transports
à prendre 20 jours pour dire s'il va pleuvoir ou s'il va neiger demain.
Il est bien sûr que ce n'est pas fait dans cet esprit-là. Je ne
dis pas que c'est ce qui se produit au ministère des Transports, loin de
là.
Cette loi prévoit l'accès à des documents. Une
foule de documents, auparavant, étaient disponibles sur-le-champ. Je
pense aux résolutions des conseils municipaux qui étaient
disponibles dans l'heure qui suivait la réunion du conseil.
Maintenant, si le greffier décide de prendre 20 jours pour
répondre, il y a là un effet pervers désolant. II est
arrivé que de tels effets soient portés à notre
connaissance; nous le déplorons et c'est le sens du rappel que nous
avons fait.
Par ailleurs, je peux examiner avec le ministre des moyens de faire
appliquer l'expression "avec diligence" qui est écrite, je crois,
à l'article 47. Mais, qu'est-ce que cela veut dire, "avec diligence"?
Devant un tribunal, tout le monde dira que, 20 jours, c'est rapide, d'autant
plus que les tribunaux prennent deux ans avant de se prononcer. Alors, c'est
cela, notre problème.
Je crois que la réponse à cela, c'est de le rappeler
constamment, de faire une éducation interne et, idéalement, que
le gouvernement, lui-même, donne l'exemple le plus souvent possible par
ses principaux ministères.
M. Filion: Est-ce que, dans le courant de la dernière
année, il y a eu des infractions pénales à la loi?
M. Pépin: II n'y a pas eu de poursuites pénales, il
y a eu des infractions ou des dérogations. Pour qu'il y ait poursuite de
la part de la commission, il faut que cette dernière estime qu'il y a
eu, sciemment, infraction â la loi et, volontairement, abus probant. Nous
n'avons pas estimé qu'il y avait matière à poursuite
pénale dans les dossiers que nous avons examinés jusqu'ici.
M. Filion: Un commentaire rapide.
D'ailleurs, depuis l'existence de la commission, il n'y a pas eu de
poursuite pénale.
M. Pépin: Non. (17 h 45)
M. Filion: Vous savez, il y a toute une vertu pédagogique
à une poursuite. Je ne veux pas dire qu'il faut en prendre uniquement
pour enseigner aux autres ce qu'il ne faut pas faire. Par contre, avec la
publicité qui en découle, souvent, une poursuite dit à
ceux qui pourraient être intéressés de faire la même
chose: Grouillez-vous. La loi d'accès existe. Si évidemment... Je
disais un peu la même chose à la Commission des droits de la
personne, dans le cas d'infractions pénales, on est plutôt
réticent, comme président d'orqanisme, d'envoyer le dossier au
bureau du Procureur général, parce que c'est long. Une fois rendu
au bureau du Procureur général - j'ai appris cela en
étudiant la loi 101 - cela peut prendre bien du temps avant qu'un
dossier rendu au Procureur qénéral...
M. Pépin: La loi précise que c'est la commission
qui entreprend les poursuites.
M. Filion: Ah! c'est la commission directement! Vous avez cette
chance-là. Vous n'êtes pas comme la Commission de protection de la
langue française.
M. Pépin: Ou la malchance.
M. Filion: Ce n'est qu'un commentaire. Si jamais, à un
moment donné, vous avez un cas de mauvaise foi, une bonne poursuite,
avec la publicité qui en découle, encore une fois, je ne vous dis
pas de poursuivre seulement pour poursuivre, mais, lorsque vous avez un dossier
qui réunit les éléments essentiels d'une infraction, c'est
mon avis qu'avec la publicité qui en découle on obtient en peu de
temps beaucoup d'impact, si l'on veut, d'une telle opération. Mais,
encore une fois, il faut être de bonne foi, il faut que le dossier s'y
prête tout à fait.
Une dernière question, avant de passer à un sujet
important: Est-ce que le gouvernement a déjà utilisé le
pouvoir que lui confère l'article 145, à savoir d'ordonner par
décret à un organisme public de surseoir, pour la période
qu'il indique, à l'exécution d'une décision de la
commission?
M. French: II faut que ce soit déposé à
l'Assemblée nationale, je crois. Alors, ma réponse est non.
M. Filion: Vous avez raison. La réponse est non, dans la
dernière année.
M. French: Je peux vous dire, M. le député, que
celui qui a le plus vertement critiqué cet article-là, c'est
celui qui vous parle.
M. Filion: Cela doit être malaisé pour vous de
l'utiliser.
M. French: Je comprends.
M. Filion: C'est l'avantage d'avoir été dans
l'Opposition un peu avant.
Le Président (M. Trudel): Je vois que le
député de Taillon est en train de trouver des charmes à
l'Opposition.
M. Filion: Pas des charmes, mais essayer de faire contre mauvaise
fortune.:, comment dit-on?
Le Président (M. Trudel): Je vous comprends, M. le
député.
M. Filion: Bon coeur contre mauvaise fortune. Vous n'avez pas eu
cette occasion-là, M. le Président, sauf erreur.
Le Président (M. Trudel): Pour d'autres raisons, je fais,
contre mauvaise fortune, bon coeur.
M. Filion: La dernière chose que j'ai gardée pour
la fin, c'est la suivante, M. le président et M. le ministre. Je
m'adresse aux deux, indistinctement. À l'étude des crédits
du ministère de la Justice, nous avons appris - je le dis sous toute
réserve, mais, en tout cas, c'est à 99,99 % - que le
ministère de la Justice vendait ses bandes ou bobines contenant
l'ensemble des données du greffe civil. Cela comprend les
procédures judiciaires: X contre Y, puis, probablement, madame X contre
monsieur Y dans une cause matrimoniale. Je ne sais pas encore. Donc, il vendait
toutes les bobines contenant l'ensemble des procédures judiciaires
rendues à diverses étapes et cela, c'est important, parce que
n'importe qui peut poursuivre n'importe qui au Québec. On n'est pas
comme au Japon. Au Japon, avant de poursuivre quelqu'un, il faut déposer
une somme de 50 000 $. C'est peut-être pour cela qu'il y a moins de
poursuites au Japon, mais, ici, il y en a en masse. N'importe qui peut
poursuivre n'importe qui et, au ministère de la Justice, encore une
fois, nous avons appris qu'on avait procédé et
procédait...
Ce n'est pas nouveau, cela dure depuis déjà un certain
temps et je me fous pas mal depuis combien de temps cela dure. Si cela remonte
à trois ans. De ma part, il n'y a pas de partisanerie
là-dedans.
Le ministère vendait donc ses bobines à des compagnies du
genre du Bureau de crédit de Montréal, du genre d'Acrofax, qui
est une filiale du Bureau de crédit de Montréal, compagnies qui
reçoivent ces belles bandes et, cela leur fait plaisir, prennent ces
belles bandes-là et les font coucher avec l'ordinateur une couple de
nuits pour permettre à leur propre ordinateur d'intégrer toutes
les données que contiennent ces bandes, pour pouvoir satisfaire tous
leurs clients sur le nombre de poursuites qu'aurait reçues M.
Tartempion. Le problème, c'est que ces poursuites et ces renseignements
ne contiennent pas le jugement qui a été rendu. Je
considère cela comme étant extrêmement important.
M. le ministre, n'importe qui peut vous poursuivre demain matin pour
n'importe quoi. La différence est: Va-t-il gagner sa cause? Mais les
bandes du palais de justice ne contiennent pas ces renseignements. On tient
uniquement, encore une fois, l'état du dossier. II y a eu un bref
d'assignation contre M. Untel et, après, allez voir votre gérant
de banque. S'il y a quelqu'un qui a décidé de vous poursuivre,
allez voir votre gérant de banque pour lui expliquer que votre avocat a
présenté une requête en irrecevabilité et que le
juge lui a donné raison. Non. Le gérant de banque ou le directeur
de la compagnie de finances, lui, va prendre cela et va dire: Wop! regarde donc
cela, des poursuites importantes contre
le ministre, on ne lui prête pas d'argent. Ou contre n'importe
quel individu, citoyen, professionnel,
Le Président (M. Trudel): J'apprécie que vous
changiez d'exemple.
M. Filion: Oui, étant donné que
c'était...
Le Président (M. Trudel): Cela se pourrait, M. le
député, oui.
M. Filion: Oui, mais, peu importe, n'importe qui peut poursuivre
n'importe qui, c'est cela qu'il faut comprendre et c'est un système dans
lequel on vit, on est en démocratie, il faut seulement payer le timbre
et payer un avocat pour qu'il prenne la cause. Il y a un tas de poursuites qui
existent, qui sont de nature folichonnes, dilatoires etc. Évidemment, ce
qui n'est pas correct là-dedans, ce n'est pas que, lorsqu'un jugement
est rendu, il y a un juge qui s'est penché sur le bien-fondé, a
pesé les deux arguments, a pris connaissance de la défense et a
donné son jugement. Pour moi, à ce moment-là, il est
correct que le renseignement soit donné de façon
systématique et j'insiste là-dessus.
Le deuxième volet de ma question ou du problème, c'est que
n'importe qui peut entrer demain au palais de justice et pitonner le nom de Jos
Bleau, sauf qu'on ne peut pas pitonner tous les noms. La différence,
c'est que le ministère prend cela en bloc, les renseignements qui se
trouvent là-dedans, et pouf! il entre cela dans l'ordinateur pour
satisfaire une clientèle de plus en plus volumineuse: les
propriétaires, les gérants de banque, les compagnies de
crédit, etc. Le Bureau de crédit de Montréal a bien des
abonnés, il ne manque pas de clientèle. Donc, le deuxième
volet, c'est que cela se fait en bloc, ce n'est pas sur une base de
renseignements individuels, c'est en bloc que cela se fait. Et le
ministère de la Justice le fait moyennant rémunération.
J'avance tout cela à 99,99 %, parce que le ministre a été
pris un peu à la déconvenue lorsque ma question a
été posée et il n'a pas voulu me le certifier à 100
%, mais en tout cas»
Je pose la question suivante: Cette pratique d'un ministère
important du gouvernement - je ne vous poserai pas la question à savoir
si cela va à rencontre ou pas de la loi, parce que je pense que c'est
aux juristes de décider - M. le ministre responsable de cette dimension
de notre démocratie, ne croyez-vous pas qu'il y a lieu d'intervenir pour
la faire cesser? Peut-être que je pourrais poser, avant, une question au
président: A-t-Il été mis au courant de cette
pratique?
M. Pépin: Nous n'avons pas reçu de plainte
formelle, M. le député de Taillon. Cependant, évidemment,
j'ai pris connaissance des reportages, dans la Gazette, sur la question et j'ai
été très étonné. Le problème qui se
pose, pour nous, c'est que la loi, comme vous le savez, ne trouve pas
application devant les tribunaux judiciaires. Par ailleurs, il y a tout te
volet de l'administration de la justice qui, elle, dépend du
ministère de la Justice qui, lui, est soumis à la loi comme tous
les autres ministères, alors, il y a un problème juridique
à déterminer où commence et où s'arrête la
juridiction de la commission dans ce problème particulier qui touche le
greffe. C'est un examen qui est en cours, actuellement, à la
commission.
Bien sûr, nous allons essayer d'obtenir tous les faits et
connaître les raisons et, surtout, les modalités de ces transferts
massifs de renseignements, mais il y a une chose que je peux vous dire tout de
suite, c'est que, même si c'était légal, en ce sens que les
tribunaux judiciaires ne sont pas assujettis à la loi, il est, bien
sûr, étonnant et malheureux qu'une pratique comme celle-là,
si elle existe vraiment, se fasse, parce que cela va carrément à
['encontre, à tout le moins, de la philosophie qui sous-tend la loi et
qui consiste à protéger les renseignements personnels,
c'est-à-dire à s'assurer que les renseignements personnels qui
sont colligés ne servent qu'aux fins pour lesquelles ils ont
été colliqés. Je ne crois pas que, même dans
l'administration de la justice, les renseignements personnels qui sont
colligés doivent servir à des agences de
récupération de crédit, par exemple, ou quelque chose
comme cela.
Maintenant, d'autres vont arguer que, la justice étant publique,
cela peut servir partout. Le principe de la loi d'accès, c'est que le
caractère même public de certains renseignements n'est pas
exportable, ceux-ci doivent servir uniquement aux fins pour lesquelles ils ont
été colliqés. Autrement, par exemple, le nom et l'adresse
de tout le monde seraient accessibles, peu importe dans quelle banque de
données ils se trouvent, puisque c'est accessible au registre de la
population, au registre de l'état civil.
C'est dans ce sens-là qu'il y a un problème. Je ne veux
pas blâmer nécessairement les qens du ministère de la
Justice qui ont fait cela, dans le sens que la notion même de protection
de la vie privée... Il y a une éducation importante à
faire à ce sujet et nous sommes les premiers conscients que, depuis
trois ans que la commission le fait, le ministère des Communications le
fait, l'Assemblée nationale le fait, à l'occasion, mais que cela
prendra un peu de temps avant que tout le monde soit sensibilisé.
Notre expérience démontre que les
informaticiens, quel que soit le ministère pour lequel ils
travaillent, n'ont qu'un souci: c'est l'efficacité, la rapidité
de la transmission de leurs données et que la vie privée n'est
pas une de leurs préoccupations, parce qu'on ne leur a pas
inculqué cela. Alors, c'est là qu'est notre travail. Notre
intervention, c'est de leur souligner ce genre de danger et je crois que c'est
ce que vous faites aujourd'hui et ce que je veux bien concourir, avec vous,
à faire.
Maintenant, nous n'avons pas fait l'examen de ce cas en particulier et,
lorsque nous l'avons fait, nous serons en mesure, évidemment,
d'intervenir s'il y avait contravention à la loi.
Le Président (M. Trudel): M. le député, si
vous permettez, on peut peut-être excéder encore
légèrement. Mais on a déjà excédé
d'à peu près cinq minutes l'enveloppe globale qui avait
été demandée par l'Opposition pour les différents
aspects du ministère. Je ne voudrais pas couper court une
discussion.
On peut peut-être se fixer 18 heures, très
précisément, cela nous donne encore cinq minutes pour
étudier, si le ministre est d'accord, bien sûr, quand même
une question qui est extrêmement importante.
M. Pépin: M. le Président, si vous me permettez, je
voudrais, seulement pour fins de précision, ajouter que la bonne foi est
présente partout. Je vous donne un exemple: pour entrer ici, à
l'Assemblée nationale, aujourd'hui, pour venir répondre à
votre invitation, j'aurais dû normalement contrevenir à la
loi.
Comme cela m'est arrivé, il y a trois ans, je me suis
assuré de me faire faire une carte d'identité du ministère
des Communications qui indique bien mes noms, adresse et autres renseignements.
Mais l'Assemblée nationale me demande de lui donner mon numéro de
la Régie d'assurance-maladie du Québec. Or, le numéro
d'assurance-maladie du Québec ne doit pas servir à d'autres fins
que celles de l'administration du programme d'assurance-maladie du
Québec. Il y a une foule de situations, comme celle-là, où
les gens agissent de bonne foi, ainsi. Je sais pourquoi cela se fait ici. C'est
probablement qu'un informaticien a dit: Voilà, il y a un moyen
d'identification qui existe; je le prends. C'est tout; je n'ai pas posé
d'autres questions.
M. Filion: II reste deux minutes. Si le ministre veut
répondre, en tout cas, il pourra répondre. En ce qui concerne la
pratique du ministère de la Justice, je la considère comme
totalement inacceptable, hautement immorale. Je vais vous dire, M. le ministre,
si vous pourrez... Le ministre de la Justice est au courant. On a traité
de cette question, hier soir ou avant-hier soir, je ne me souviens plus. Je
considère un peu aberrant que le gouvernement, par son ministère
qui, lui-même, doit assurer la justice, transmette des informations.
J'insiste sur le caractère partiel de ces informations. J'ai
déjà pratiqué le droit. Dans une poursuite, ce sont la
défense, le contenu des procédures qui sont importants. Ces
informations contiennent des causes de libelle et contiennent peut-être -
je ne sais pas - des accusations pour lesquelles il n'y a pas eu de jugement de
rendu. Si un individu est accusé et présumé innocent, mais
l'autre va le savoir, lui. Je ne sais pas si cela touche le domaine
pénal et criminel. En tout cas, cela touche le domaine civil. C'est
totalement inacceptable.
Alors, je vous soumets la situation, d'autant plus que: À quoi
assistons-nous actuellement? M. le président l'a soulevé, lors
d'une de nos rencontres, et je le soulève à nouveau, parce que
vous êtes au courant: nous assistons à la prolifération, je
dirais, à l'explosion de l'informatisation.
Aujourd'hui, les renseignements, ce n'est plus en parlant qu'ils se
transmettent. Ils se transmettent par bande, par cassette. Appelez-cela comme
vous voulez. Cela, je vais vous le dire, en contient des renseignements et les
erreurs sont possibles là aussi, comme ailleurs.
Alors, voyez-vous, le ministère est là et envoie les
renseignements au Bureau de crédit de Montréal ou à des
firmes qui s'en servent. Pourquoi? Pour quelles fins utilisent-ils ces
renseignements? Sûrement pas, comme l'a bien mentionné le
président il y a une minute, pour les fins pour lesquelles les
renseignements ont été colligés. Ils s'en servent pour
leurs propres fins. Donc, avec un esprit, un regard, une vision très
particulière, pour des besoins qui ne sont pas du tout ceux du greffe,
des palais de justice.
Le Président (M. Trudel): M. le député, il
est 18 heures.
M. Filion: Je soulève donc...
Le Président (M. Trudel): Malheureusement.
M. Filion: Si vous voulez réagir, il n'y a pas...
M. French: Je dirai tout simplement que je trouve le diagnostic
du député très pertinent et que je suis d'accord avec
lui.
Le Président (M. Trudel): Je me permets, comme
président, de partager l'avis de mon collègue, le
président de l'autre commission, et c'est tout à fait aberrant
comme situation. C'est le moins qu'on puisse dire.
Sur ce, je pense, M. le député de
Taillon, que vous êtes d'accord pour adopter...
M. Filion: Adopté.
Le Président (M. Trudel): ...le programme 7.
M. le ministre, il reste, dans les civilités d'usage, è
souligner que tous les crédits...
M. Filion: On va avoir plus de temps l'an prochain.
Le Président (M. Trudel): ...de votre ministère
sont adoptés.
Sur ce, ayant accompli son mandat, la commission ajourne ses travaux
sine die.
(Fin de la séance à 18 h 1)