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Version finale

33e législature, 1re session
(16 décembre 1985 au 8 mars 1988)

Le jeudi 29 octobre 1987 - Vol. 29 N° 35

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude du rapport annuel 1986-1987 de la Commission d'accès à l'information


Journal des débats

 

(Dix heures neuf minutes)

Le Président (M. Trudel): Je constate qu'on a quorum. Mme la secrétaire, est-ce qu'on a des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. Brassard (Lac-Saint-Jean) est remplacé par M. Filion (Taillon).

Le Président (M. Trudel): D'accord. C'est tout?

La Secrétaire: Oui.

Le Président (M. Trudel): La commission se réunit, ce matin, pour procéder à l'étude du rapport annuel 1986-1987 de la Commission d'accès à l'information, conformément à l'article 119.1 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels.

M. le président, mesdames les commissaires, au nom de la commission, il me fait plaisir de vous saluer pour la deuxième fois en 1987, non pas que vous ayez produit deux rapports annuels dans une année, mais vous vous souvenez que nous étions en retard dans l'examen de votre rapport précédent.

Nous sommes, étant donné l'été et toutes les autres circonstances, à peu près dans les délais pour vous recevoir cette année. En tout cas, les délais me semblent beaucoup plus raisonnables que ceux de l'an dernier.

Bienvenue à cette commission. Tout comme au mois de janvier dernier, les choses vont se dérouler de façon détendue, comme c'est toujours le cas à la commission de la culture, de façon aussi informelle que possible, et de façon - comme le dit M. le député de Taillon - efficace. J'ai la chance d'avoir un président de commission à ma commission, parce que M. ie député de Taillon est également - vous le savez -président de la commission des institutions.

Je siège à la commission de M. le député de Taillon comme membre et il siège à la mienne, à l'occasion, comme membre, ce qui nous permet d'apprendre l'un de l'autre comment diriger les travaux de commission. Cela aide d'avoir un président à côté de soi.

Sans plus tarder, nous allons commencer. J'aurai quelques remarques préliminaires. M. le député, je pense que vous en avez. Quant à moi, ce sera très court. M. le président, vous nous ferez une déclaration qui lancera le débat par la suite. M. le député de Taillon, s'il vous plaît.

M. Filion: M. le Président, on m'a distribué les notes du président pour là présentation du rapport. De mon côté, j'aimerais bien entendre d'abord les commentaires préliminaires du président.

Exposé du président de la Commission d'accès à l'information

M. Marcel Pépin

M. Pépin (Marcel): M. le Président, MM. les députés, il me fait grand plaisir, une fois de plus, de vous rencontrer et de faire avec vous le bilan de l'année qui vient de s'écouler et dont les principales activités ont été rapportées dans le rapport annuel que vous avez sûrement eu l'occasion de parcourir.

Je ferai ressortir les principales activités de la commission, sans revenir sur toutes et chacune d'entre elles. Je commencerai par la fonction principale de la commission, à savoir l'exercice de son mandat quasi judiciaire.

La commission a reçu, au cours de l'année que nous examinons ce matin, soit entre le 1er avril 1986 et le 31 mars 1987, 282 demandes de révision, dont plus de la moitié portaient sur des demandes d'accès aux documents des organismes publics. Je rappelle pour mémoire que la commission a juridiction sur 3600 organismes publics et parapublics au Québec.

Je dois attirer votre attention sur le fait que le tiers de ces 282 demandes ont finalement été retirées à la suite du désistement du demandeur qui, le plus sauvent, a obtenu satisfaction après que l'organisme eut été avisé qu'une demande de révision était parvenue à la commission. Finalement, la commission a donc eu à régler quelque 168 dossiers au cours de l'année. À cet effet, elle a tenu 129 auditions, soit à Québec, à Montréal ou dans l'une ou l'autre des autres villes du Québec, habituellement dans la capitale judiciaire, le chef-lieu judiciaire de la région. Les autres causes furent réglées sur dossier.

Au chapitre de la nature des décisions rendues, la compilation des statistiques

révèle que, pour l'accès aux documents, la majorité des demandes est accueillie en totalité ou en partie, alors qu'au contraire, les demandes d'accès aux renseignements personnels ont été, plus souvent qu'autrement, rejetées. Comme par les années passées, ce sont les municipalités qui ont reçu le plus de demandes d'accès aux documents, suivies de près par les ministères. Évidemment, ce sont les citoyens qui formulent le plus de demandes, suivis des groupes de pression, des entreprises et, en toute fin, des journalistes. Pour ce qui est des demandes d'accès aux renseignements personnels formulées par les citoyens concernés, ce sont les organismes gouvernementaux qui reçoivent le plus de requêtes, suivis des organismes qui appartiennent au réseau des affaires sociales.

En outre, je crois intéressant de fournir une dernière statistique relative au nombre d'appels téléphoniques adressés à la commission au cours de cette année financière. Le personnel de la commission, tant à ses bureaux de Québec que de Montréal, a répondu en effet à près de 4000 demandes d'information verbales provenant soit des citoyens, des responsables de l'accès, des journalistes ou, enfin, de divers groupes au Québec. Ces demandes ont le plus souvent trait aux objectifs généraux de la loi.

J'aimerais aussi insister sur le deuxième volet de la loi relatif à la protection des renseignements personnels. Ce chapitre confie en effet plusieurs fonctions de contrôle et de surveillance à la commission, fonctions que je voudrais d'abord décrire brièvement. Par exemple, la commission peut, sur demande écrite, accorder à une personne ou à un organisme l'autorisation de recevoir des renseignements personnels, sans le consentement des personnes concernées, à des fins d'étude, de recherche ou de statistique. Au cours de l'année, la commission a reçu 57 demandes de ce type. Si elle les a approuvées pour la plupart, elle a cependant fixé diverses conditions, de manière à assurer le caractère confidentiel des renseignements personnels qui sont ainsi accordés aux chercheurs.

Par ailleurs, la commission a reçu 21 demandes d'enquête à la suite de plaintes de citoyens. Il s'agissait surtout de plaintes relatives à la divulgation de renseignements personnels sans le consentement de la personne concernée. La commission a aussi pour fonction de donner son avis sur des projets de loi et des projets de règlement et des ententes de transfert de renseignements personnels et les projets de décret. En tout, la commission a donné 15 avis de tous ordres au gouvernement ou aux diverses commissions parlementaires qui étudient les projets de loi.

J'aimerais attirer votre attention sur l'avis relatif à un nouveau projet de règlement sur les prêts. Je dois préciser que tous les avis de la commission sont, en même temps et le même jour, acheminés aux membres des commissions parlementaires, c'est-à-dire que l'Opposition en prend connaissance en même temps que le gouvernement. En 1984, le gouvernement adoptait, en vertu de la loi sur l'accès aux documents, un règlement qui prescrit les frais de photocopie de documents, d'une part, et qui prescrit également la gratuité pour l'obtention de copie de renseignements personnels, d'autre part.

Cependant, au cours de la dernière année financière, le gouvernement a proposé l'adoption d'un nouveau règlement à ce sujet. L'avis de la commission sur ce projet de règlement était dans le sens de maintenir la gratuité en matière d'accès aux renseignements nominatifs. Si, par contre, le gouvernement n'avait pas l'intention de souscrire à ce principe, la commission recommandait de fixer à un minimum de 40 pages la franchise sur ce type de document photocopié. Ce projet de règlement est encore à l'étape de la prépublication. Nous avons également fourni des avis de ce genre à 14 autres reprises au cours de l'année.

La commission avait aussi pour tâche de référer les dispositions législatives qui entrent en conflit avec la loi sur l'accès aux documents. C'est ainsi que le 30 avril 1986, elle était en mesure de remettre au gouvernement un rapport qui, plus tard, fut déposé à l'Assemblée nationale, lequel constituait l'aboutissement d'un mandat amorcé en 1984. Ce rapport identifiait les dispositions inconciliables avec la Loi sur l'accès aux documents et formulait de nombreuses recommandations. Un projet de loi visant à concrétiser un certain nombre de ces recommandations devrait être adopté, nous dit-on, d'ici la fin décembre.

La Loi sur l'accès aux documents confie aussi à la commission le rôle d'en surveiller l'application et de faire enquête sur son fonctionnement et sur son observation. La commission a donc adopté un programme qui vise à vérifier comment les organismes publics. s'acquittent des obligations qui leur incombent en vertu de la loi.

Les enquêteurs de la commission ont visité huit organismes publics et vérifié, par exemple, si la liste de classement était disponible, si le règlement sur les frais était appliqué et, surtout, si l'organisme avait des mesures de sécurité adéquates à l'égard des renseignements personnels. C'est surtout à ce chapitre que les enquêteurs ont décelé les lacunes les plus évidentes. En effet, ils ont noté, entre autres, que plusieurs organismes n'assuraient pas la confidentialité des renseignements nominatifs de façon satisfaisante, qu'ils ne tenaient pas de registre de consultation des dossiers et qu'un bon nombre de fichiers n'avaient pas été

déclarés.

Au terme de chacune de ces vérifications, la commission transmet un rapport à l'organisme et formule des recommandations qui visent à assurer le respect de la loi. Dans la plupart des cas, les organismes acceptent d'emblée de corriger les lacunes que la commission a portées à leur attention. Depuis que nous avons commencé ce programme de vérification, nous avons toujours tenté d'établir une collaboration régulière avec les organismes visités de manière à mettre à leur disposition toute l'expertise de la commission en cette matière.

À la reprise des travaux de l'Assemblée, le ministre des Communications a déposé, il y a quelques jours, le rapport de la commission sur la mise en oeuvre de la loi sur l'accès, cinq ans après son adoption. C'est un rapport assez volumineux que vous avez en main, je pense, et qui s'intitule "Une vie privée mieux respectée, un citoyen mieux informé".

Il va sans dire qu'un travail de cette ampleur a mobilisé une grande partie de nos effectifs durant la dernière année financière. Un comité a été mis sur pied afin d'identifier, d'abord, les sujets qui méritaient un examen particulier et afin de compléter avec l'ensemble du personnel de la commission divers mandats de recherche. C'est ainsi que la commission a été en mesure de remettre ce rapport au ministre, le 1er octobre, tel qu'exigé par la clause crépusculaire. Je dois dire à ce sujet que je dois remercier le personnel de la commission de même que mes collègues commissaires pour avoir réussi - c'est un record, me dit-on, dans la fonction publique - à remettre tous nos rapports à temps, sans une seule journée de retard...

Des voix: Ha! Ha!

Le Président (M. Trudel): C'est sûrement un record.

M. Pépin: ...depuis cinq ans.

Comme par les années passées, la commission a été appelée à faire connaître son expérience, notamment à des organismes similaires dans d'autres provinces ainsi qu'à l'étranger. C'est ainsi que le Québec a participé à la Conférence des commissaires à la protection des données nominatives, à Lisbonne, où nous avons fait le bilan de nos activités. Il y a quelques semaines, j'ai eu le grand plaisir d'accueillir ici à Québec la Conférence internationale des commissaires à la protection de la vie privée où 19 pays étaient représentés et où les commissaires européens de même que canadiens et un certain nombre d'Américains ont eu l'occasion de se familiariser avec le travail qui se fait au Québec sur ces questions.

L'essentiel des travaux de la commission est diffusé par la publication de ses décisions par la Société québécoise d'information juridique. Alors, les décisions de la commission sont publiées dans un fascicule comme celui-là, ce qui permet évidemment à tous les organismes, à tous les citoyens et même à tous les députés qui le veulent de connaître un peu mieux la jurisprudence de la commission etcomprendre l'orientation, l'interprétation de la loi chez nous. Évidemment, si l'un ou l'autre d'entre vous souhaitez prendre connaissance des décisions de la commission, il nous fera plaisir de vous en faire parvenir des exemplaires.

La commission publie également, quatre fois l'an, un bulletin de liaison à l'intention des 3600 responsables de l'accès... Ce bulletin, que j'ai eu l'occasion déjà de vous distribuer, s'appelle L'Accès. À chaque publication, il traite de l'un ou l'autre des problèmes les plus souvent rencontrés dans l'application de cette loi. D'ailleurs, une page de ce bulletin est réservée au ministère des Communications, à son service de la loi sur l'accès, pour diffuser des messages aux responsables.

La commission a aussi continué à diffuser largement son dépliant intitulé Comment exercer un droit de recours auprès de la commission, en français et en anglais, par l'entremise des bureaux de Communication-Québec.

Cette année, nous avons également pris en charge la préparation du répertoire des responsables qui est mis à jour annuellement et qui est diffusé largement aux responsables et au grand public.

Enfin, comme par les années passées, mes collègues et moi, de même que le personnel de la commission, les cadres et les professionnels ont eu l'occasion de rencontrer plusieurs groupes pour des conférences ou des colloques où nous profitons de l'occasion pour expliquer un peu mieux le travail que nous faisons.

Nous étions conscients, il y a cinq ans - puisqu'il y aura bientôt cinq ans que la commission a été créée - que l'implantation d'une réforme de cette envergure dans l'ensemble de l'administration publique et parapublique québécoise exigerait une forte dose de patience puisque la loi demande en somme aux organismes de modifier complètement, dans certains cas, leur manière traditionnelle d'agir en matière d'accès à l'information et de protection des renseignements personnels. L'expérience nous a enseigné que l'adhésion à la réforme est maintenant une réalité dans la majorité des organismes. Il reste encore beaucoup de chemin à parcourir dans certains secteurs. Mais dans l'ensemble, il est juste d'affirmer que le Québec enregistre un progrès important en ces matières et qu'il constitue

un modèle pour les autres provinces canadiennes et également pour d'autres pays à l'extérieur du Canada.

Dans les années qui viennent, il faudra consacrer encore plus d'effort et d'énergie à mieux faire connaître non seulement les exigences de la loi, mais aussi les raisons qui justifient une protection accrue des renseignements personnels et un accès plus large aux documents qui sont détenus par les organismes publics. À son rôle de surveillant de l'application de la loi, la commission devra ajouter celui de promoteur de ses droits fondamentaux et d'informateur du grand public afin que tous les citoyens puissent bénéficier également, dans toutes les régions du Québec, des mêmes services et des mêmes droits.

La commission devra également s'engager dans des démarches préventives, surtout en matière de protection des renseignements personnels de manière à éliminer à la source certains dangers potentiels quant à la dissémination injustifiée de renseignements personnels. La collaboration du gouvernement sera essentielle pour mener à bien cette lourde tâche, car la tentation est toujours très forte de sacrifier allègrement la vie privée au profit de contrôle financier de plus en plus sophistiqué dans l'application des programmes de soutien au revenu, notamment. La loi est très claire. C'est le citoyen et non l'administration que la loi protège. Il ne faudrait pas qu'une loi devant protéger le citoyen contre l'administration devienne petit à petit un outil pour renforcer l'arbitraire administratif contre le citoyen.

Il nous faut malheureusement constater que ce danger est encore très réel. Les échanges de renseignements entre organismes publics et même entre gouvernements sont tellement nombreux et tellement faciles grâce au perfectionnement des outils informatiques qu'il y a risque de travestir l'esprit de la loi si on interprète de façon trop étroite les besoins du gouvernement en matière de contrôle financier. C'est pour mieux expliquer les objectifs du législateur et mieux faire comprendre au citoyen ses droits et devoirs que la commission réclame un mandat plus explicite en matière d'information tout en poursuivant son travail d'éducation auprès des organismes assujettis. Grâce à la jurisprudence accumulée, grâce aussi à son programme de vérification qui a permis de corriger plusieurs situations anormales au plan de la protection de la vie privée, la commission estime qu'elle est maintenant en mesure de fournir aux organismes les outils nécessaires pour appliquer avec équité les exigences de la loi.

Nous sommes confiants qu'à l'aube de cette deuxième étape, tous les utilisateurs de la loi, de même que les organismes sauront partager eux aussi leur expérience avec les parlementaires de manière à rendre et la loi et la commission plus efficaces dans le but, bien sûr, de mieux servir le citoyen. Je vous remercie de votre bonne attention.

Le Président (M. Trudel): Merci, M. le président. Vous avez présenté tantôt les nouvelles commissaires. Peut-être pourriez-vous nous les présenter de nouveau parce quele Journal des débats est une machine qui ignore la présence de ces dames. Peut-être pourriez-vous profiter de l'occasion pour nous présenter également les autres membres du personnel de la commission.

M. Pépin: J'allais le faire. J'ai à ma droite, Mme Thérèse Giroux, qui est avec nous depuis le 15 décembre 1982; à ma gauche, Mme Carole Wallace, qui s'est jointe à la commission au mois de juillet 1987. Je profite également de l'occasion pour signaler la participation fort importante et très remarquée et remarquable de Mme Caroline Pestieau qui nous a quittés au printemps 1987, mais dont le travail à la commission continue encore à porter fruit.

Le Président (M. Trudel): Merci. M. le député de Taillon.

Exposé du critique de l'Opposition

M. Claude Filion

M. Filion: Je vous remercie M. le Président. On sait que, finalement, la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels représentait, à l'époque, d'abord comme l'a mentionné le président lui-même, une certaine révolution à cause des comportements établis d'une bonne partie des organismes, à cause des traditions qui s'étaient installées au fil des années. Cette loi a été rendue possible du fait qu'il existait un solide consensus parmi les parlementaires, à l'époque, pour faire en sorte qu'une telle opération législative puisse, premièrement, voir le jour et, deuxièmement, être viable. Nous approchons maintenant les cinq ans de vie et, à voir la qualité du rapport de mise en oeuvre que j'ai eu l'occasion de feuilleter, je pense qu'on peut dire que l'enfant a grandi rapidement et solidement sur ses pattes et il doit peut-être atteindre maintenant, si vous me passez l'expression, une certaine vitesse de croisière. (10 h 30)

Le rapport de mise en oeuvre, qui n'est pas le propos principal de notre réunion de ce matin, constitue quand même un document fondamental dans l'historique de la loi et de la Commission d'accès à l'information. Il faut toujours se rappeler qu'ici, nous sommes au coeur de la vie

démocratique. Quand on dit qu'un citoyen est mieux informé, on veut dire qu'il est plus conscient, qu'il comprend davantage les mécanismes sociaux qui l'entourent. Cela veut tout dire, un citoyen mieux informé. Quand on dit également - c'est l'autre volet de la loi - qu'on doit protéger des individus, cela découle un peu d'un droit traditionnel qui est le droit au respect pour chaque individu, le droit à sa vie privée.

Je l'ai souvent souligné et je le répète ce matin, ce n'est pas facile parfois de concilier ces deux exigences d'avoir accès à l'information qui peut ou pourrait nous concerner et, en même temps, garantir que le caractère confidentiel de certains gestes ou certains traits de caractère des individus sont protégés. C'était un mandat délicat à l'époque qui avait été confié à la commission. Je dois souligner, au nom de ma formation politique, que le mandat - on peut le dire - a été rempli d'une façon remarquable. Pour ceux qui me connaissent, je n'emploie pas souvent ces expressions, mais je livre quand même ici l'essentiel de ma réflexion.

On a quand même devant nous certains défis extrêmement importants. Le développement technologique fait en sorte qu'il est maintenant possible de regrouper de façon concertée, à différents endroits, toute une base d'information sur chaque citoyen et citoyenne du Québec. Les méthodes de compilation de ces informations sont absolument colossales. Les moyens se développent aussi rapidement que l'informatique et circulent aussi rapidement que peut le faire l'informatique.

Les solutions pour contrer cette évolution technologique - il faut bien se le dire franchement - demeureront partielles; par exemple, la Commission d'accès à l'information vient ici, nous dépose son rapport annuel, nous a déposé son rapport de mise en oeuvre et c'est à nous, législateurs et parlementaires, de faire en sorte que les éléments de réforme contenus dans le rapport de mise en oeuvre soient véritablement de taille à contrer les tendances, dans certains cas, de la technologie et, dans d'autres cas, à aider les tendances de la technologie. Mais la technologie va toujours se développer plus rapidement que les réflexes parlementaires ou législatifs de n'importe quelle société. On a une loi qui est considérée comme excellente, on a une commission qui a fait un boulot remarqué par l'ensemble des autres provinces, entre autres, et probablement des autres pays, si je me fie aux commentaires recueillis à l'occasion de la dernière conférence de la part des gens qui travaillent avec moi -malheureusement je ne pouvais pas y être personnellement - mais il faut garder ce pas, il faut rester d'avant-garde dans ce secteur. C'est un défi, cette fois-ci, pour la commission et pour les parlementaires. D'où l'importance du travail effectué par la commission concernant le rapport de mise en oeuvre qu'elle nous a déposé et d'où l'importance du travail que nous aurons à effectuer et que le ministre également, comme responsable du dossier, aura à effectuer dans les mois qui viennent. D'ailleurs, nous pourrons peut-être étudier ce rapport de mise en oeuvre au début de l'an prochain, la commission parlementaire, comme le prévoyait la clause crépusculaire déjà mentionnée.

Une année remarquable également, parce que la commission a su produire son étude sur les dispositions inconciliables qui, comme vous l'avez mentionné, a fait l'objet de travaux à l'occasion du dépôt du projet de loi. En tout cas, du côté de l'Opposition, on espère bien, comme vous l'avez souligné, faire en sorte que d'ici à décembre prochain soit adoptée la totalité du projet de loi. Il reste encore certaines dispositions législatives qui sont en suspens, etc. Certaines ont fait l'objet de débats vigoureux, d'ailleurs, à l'occasion de la commission parlementaire.

J'ai plusieurs questions à poser à la membre de la commission. J'en profite pour saluer son président, bien sûr et également Mme Thérèse Giroux, qu'on a déjà eu l'occasion de recevoir, ici, au parlement, et Mme Wallace, pour qui c'est la première visite parlementaire. Je vais limiter ici, M. le Président, mes remarques préliminaires pour entamer, quand vous le jugerez à propos, la phase d'échanges avec les membres de la commission.

Le Président (M. Trudel): Merci, M. le député. On peut quand même procéder aux questions presque immédiatement, dans la mesure où les remarques préliminaires que j'avais à faire ressemblent tellement aux vôtres qu'il serait probablement inutile de les répéter. On n'est pas habitué de voir cela, semble-t-il, dans ce parlement, mais je me rallie complètement aux paroles du député de Taillon en ce qui concerne...

J'emploie plus souvent l'adjectif "remarquable" que le député de Taillon et cela ne veut pas dire que j'accorde moins d'importance à ce mot. Quand je dis que quelque chose est remarquable, c'est quelque chose de remarquable; je m'associe à ce que le député de Taillon a dit des travaux de votre commission, M. le président.

Moi aussi, j'ai lu avec un intérêt... Étant un insomniaque, malheureusement, je voulais feuilleter le rapport hier soir; je l'ai lu hier soir. Sur vos cinq ans d'activité, je dois vous dire, dès le départ, que j'ai été impressionné par la qualité de son contenu, par la qualité de sa rédaction.

On voit que la commission, à sa présidence et en son sein, contient un certain nombre de communicateurs. Cela se

lit dans vos rapports; cela se lit surtout dans les titres que vous donnez à vos différents documents. Quelqu'un qui est assez prêt de vous et de moi, M. le président, me disait, en parlant de vous - je ne nommerai pas cette personne, mais je vous le dirai en privé tantôt - de toute façon, si ces gens-là de la commission veulent faire autre chose dans quelques années, ce que je ne vous souhaite pas, ce que je ne nous souhaite pas, étant donné le remarquable travail qu'ils accomplissent, s'ils ont l'intention de faire autre chose, je pense que n'importe quelle maison de publicité ou de rédaction serait fort heureuse de les accueillir.

Tout cela pour vous dire que, de ce côté-ci - je pense bien que je me fais le porte-parole de mes collègues - vous avez devant vous des gens qui sont autant d'appui que vous en aurez besoin et qui sont disposés à vous suivre aussi loin que possible de façon que les droits collectifs et les droits privés des personnes soient respectés.

Je vais céder la parole à M. le député de Taillon tout en me permettant d'intervenir après lui, car j'ai l'impression que M. le député de Taillon et moi aurons un peu les mêmes questions. J'inviterais aussi mes collègues du côté ministériel à intervenir quand bon leur semblera. On va faire cela de façon aussi informelle que possible. M. le président.

M. Pépin: M. le Président, j'ai passé plusieurs années, comme vous le savez, à Ottawa, en tant que journaliste. Or, là-bas, on s'adresse aux députés en les appelant les "honorables" députés. Je m'engage, à compter de maintenant, à m'adresser aux députés de l'Assemblée nationale en disant les "remarquables" députés.

Des voix: Ha! Ha!

Le Président (M. Trudel): M. le député de Taillon.

M. Filion: Vous aurez du chemin à faire auprès de vos anciens collègues journalistes.

M. Pépin: Oui. Ha! Ha!

Questions et réponses

Le Président (M. Trudel): Merci, M. le président. M. le député de Taillon, s'il vous plaît.

Accumulation et divulgation des renseignements

M. Filion: M. le Président, j'ai vraiment le goût de commencer avec une question générale, si vous le permettez - sentez-vous bien à l'aise, car j'ai plusieurs questions sur le rapport lui-même - qui découle un peu de ce que je disais tantôt ainsi que des commentaires recueillis lors de la conférence qui a été tenue à Québec.

Je pense que le ministre des Communications résumait un peu ma pensée, mais je vais la formuler autrement. Les possibilités de savoir aujourd'hui, à cause des développements de la technologie, sont en train de dépasser et, peut-être à jamais, toutes les possibilités de garder le secret. L'information est compilée, ordonnée, classée et diffusée avec une précision et une rapidité hors de l'ordinaire. La possibilité de garder le secret est un peu à contre-courant; ce sont des digues et des murs qu'on essaie d'ériger dans nos sociétés de moins en moins étanches. Je ne dis pas que je suis convaincu, je sais qu'il y a un long degré de réflexion au niveau de la commission à cet effet, mais peut-être voudriez-vous réagir à partir de votre rapport à ce sujet?

M. Pépin: Je crois qu'il faut, au départ, faire une distinction entre ce qu'on appelle communément les documents administratifs d'un organisme quelconque, qu'il s'agisse d'un gros ministère ou d'une petite commission comme la nôtre, et les renseignements à caractère personnel qui sont accumulés pour la gestion de programmes, de programmes universels surtout.

Dans le cas des documents administratifs, j'aimerais partager votre jugement, à savoir qu'ils sont très bien classés, très bien conservés et presque éternellement accessibles. Or, ce n'est pas tout à fait le cas. Nous constatons régulièrement que l'informatique n'a pas pénétré toutes les sphères de l'administration, au contraire. Il s'écrit encore beaucoup de choses et il se compile encore beaucoup de documents et même nous, qui sommes relativement jeunes, je dois confesser que, il n'y a pas tellement longtemps, avons désespérément cherché un document. Nous l'avions déjà perdu et nous n'avons que cinq ans d'âge. Alors, j'imagine que le ministère de l'Agriculture qui vogue allègrement vers ses 150 ans d'histoire au Québec - 132 ans, je pense - a dû aussi en perdre quelques-uns en cours de route. Pour les documents administratifs, il y a encore un problème de classification et un problème de repérage toujours réel un peu partout.

Dans le cas des renseignements personnels - c'est là que je vous rejoins - il est bien sûr que les outils informatiques modernes permettent une assimilation à peu près illimitée, de renseignements sur les individus. Ces mêmes outils se perfectionnent régulièrement et permettent maintenant des croisements qui sont non seulement possibles, mais faciles, non seulement entre organismes, mais également entre gouvernements. Par exemple, il n'y a rien de plus simple que de comparer la banque de données de l'assurance-chômage avec la banque de

données de l'aide sociale au Québec. C'est aussi simple que faire un appel téléphonique.

Cette situation fait en sorte, comme vous le disiez tout à l'heure, qu'il est possible et même évident que la technologie précédera toujours un peu la législation en ces matières. Je pense, après y avoir beaucoup réfléchi, et surtout après avoir observé ce qui se passe, que le travail que nous pouvons faire sur le plan législatif et sur le plan administratif, dans le cas d'une commission comme la nôtre, c'est d'abord d'être présents, d'alerter les gens. Contrairement à ce qu'on pourrait penser, les gestionnaires de l'administration sont également conscients, tout à coup, du danger que comportent ces outils pour les citoyens et sont très conscients qu'ils sont assez collaborateurs pour trouver des solutions.

Le gouvernement, l'administration a une responsabilité, c'est de ne pas donner à ces gestionnaires des mandats contradictoires. Si on dit au sous-ministre: Vous devez absolument vérifier un certain nombre de renseignements dans un certain nombre d'organismes et qu'on dit au même sous-ministre, durant la même semaine, qu'il doit aussi protéger la vie privée, le pauvre monsieur vient me voir et me demande: Comment je fais cela? Je lui dis: II faudrait aller parler à votre ministre. C'est ce qui se produit non seulement ici, mais dans tout le monde occidental actuellement, parce que la technologie permet des choses qui n'étaient même pas imaginables il y a quinze ans. Dans ce sens, je crois que là où nous devons être vigilants, c'est dans ce que j'appelais, au cours de mes remarques préliminaires, les démarches préventives pour bien faire saisir aux gestionnaires, qui ont d'autres préoccupations que les nôtres, que cette préoccupation doit être constante chez eux. (10 h 45)

Je crois qu'éventuellement - c'est déjà commencé en France, et surtout en Allemagne - il faudrait même intervenir auprès des gens qui fabriquent des logiciels pour bien s'assurer qu'on peut enlever un certain nombre de renseignements personnels dans les banques lorsqu'il s'agit de faire des croisements à des fins de contrôle. Nous en sommes à cette étape de notre réflexion. Nous sommes très conscients de fait que non seulement cela va vite, mais cela va trop vite; et en même temps, nous sommes aussi conscients qu'on ne peut pas arrêter cela parce que c'est un outil de gestion moderne et il s'agit de le domestiquer, non pas de se laisser envahir par lui.

M. Filion: Cela répond un peu à mes craintes vis-à-vis de ce que je qualifierais de contrôle intégré du citoyen.

M. Pépin: ...à certains moments...

M. Filion: On semble faire de la science fiction, M. le Président, mais en réalité, cela n'en est pas, même si j'ai eu l'occasion de lire, au cours de l'été, un livre absolument formidable là-dessus - c'est un roman - où on aboutit à deux catégories de citoyens, ceux qui sont fichés et la réponse est: d'accord; tu peux tout faire ce que tu veux dans la société, et les autres qui ne sont pas intégrés, ne sont pas fichés ou sont rejetés par le système et font partie d'une autre société. Je dois vous avouer que...

Le Président (M. Trudel): Vous n'avez pas cité un document, auquel cas je vous aurais demandé de le déposer, mais vous avez cité un livre. Pourrait-on avoir le titre, parce que cela m'intéresse?

M. Filion: Je vais vous l'envoyer. Malheureusement, cela m'échappe, j'ai oublié le titre.

Le Président (M. Trudel): D'accord.

M. Filion: Je vais vous l'envoyer et je l'enverrai au président aussi; c'est une lecture formidable.

Le Président (M. Trudel): ...

Demandes de révision

M. Filion: Bon. Revenons au rapport proprement dit. En ce qui concerne les demandes de révision, vous avez signalé 282 demandes, c'est toujours l'accès aux documents qui prime. Je pense que c'est à peu près dans la proportion de deux pour un: 176 demandes pour l'accès aux documents alors qu'il y a eu 96 demandes pour les renseignements personnels. C'est la deuxième année consécutive que je remarque à l'examen d'ensemble de rapports annuels qu'il y a plus de demandes de révision pour l'accès aux documents que pour l'accès aux renseignements personnels. Est-ce qu'il y a eu renversement de cette tendance depuis deux ans?

M. Pépin: Non. M. Filion: Non?

M. Pépin: La tendance se maintient et je crois que c'est facile à expliquer. Dans la plupart des cas, le dossier personnel de l'individu qui est détenu par un organisme public est donné spontanément, parce que cela ne pose pas de problème. Je le faisais remarquer l'an passé, je crois que cela se maintient. Là où il y a des objections, c'est lorsque, en même temps que survient ce désir d'avoir accès à son dossier personnel, il y a un conflit de travail entre la personne et l'organisme. Lorsqu'il y a conflit de

travail, vous savez très bien, vous qui êtes avocat, M. Filion, que les avocats essaient de gagner du temps. C'est une façon de gagner du temps que de refuser l'accès en référant le tout à la commission. Évidemment, cela explique pourquoi les cas sont moins nombreux et cela explique aussi pourquoi, très souvent, l'accès est refusé aussi. La loi sur l'accès est assez rigide là-dessus. Nous avons convenu, les autres commissaires et moi, de recommander au gouvernement dans un rapport que vous aurez l'occasion d'étudier plus tard de modifier un peu la loi là-dessus, parce qu'actuellement, nous estimons qu'elle est un peu vexatoire pour les individus en matière d'accès aux renseignements personnels, notamment lorsqu'il y a un conflit de travail.

M. Filion: Donc, on peut dire qu'il y a une augmentation de l'utilisation par les syndicats ou les associations accréditées de la loi sur l'accès aux documents ou si...

M. Pépin: Non, cela reste encore... C'est un peu le côté charmant de cette loi, cela reste vraiment un outil pour le simple citoyen. Notre plus grosse clientèle, c'est le simple citoyen de toutes les régions du Québec. Évidemment, la loi n'est pas encore aussi connue que certaines autres lois. En même temps que nous vous disons que nous devrions avoir des outils pour la mieux faire connaître, nous sommes aussi très conscients que, si jamais elle était mieux connue, nous serions rapidement submergés.

Demandes de renseignements à des fins de recherche, d'étude ou de statistique

M. Filion: Je vais me permettre une boutade. Lorsque dans votre mini-rapport, dans votre présentation de ce matin, vous catégorisez ceux qui vous formulent le plus de demandes, vous parlez des citoyens, des groupes de pression, des entreprises, des journalistes. J'ai l'impression qu'il va falloir ajouter les députés, parce que je sais qu'il y a quelques députés de ma formation qui ont dû communiquer avec vous à l'occasion. Peut-être que cela va être une nouvelle catégorie dans les années à venir.

L'autre question porte sur les demandes d'autorisation de recevoir des renseignements pour les fins de recherché, études, statistiques. J'ai remarqué, et vous me corrigerez, qu'il y a 57 demandes. Je trouve cela assez énorme. Cela veut dire à peu près qu'à chaque semaine au Québec il y a un organisme qui demande l'autorisation de recevoir des communications sur tout un lot de statistiques qui peuvent être détenues par un des 3600 organismes, ministères ou peu importe. Vous avez mentionné dans votre rapport et également dans votre texte les balises qui sont fixées pour ces demandes. Je trouve cela quand même un peu élevé. Peut-être que vous pourriez nous rassurer là-dessus.

M. Pépin: Je crois d'abord, M. Filion, qu'il faut dire qu'il y a beaucoup plus que 57 recherches ou études qui se font au Québec avec comme matière de base les renseignements personnels obtenus sans le consentement des personnes concernées. Par exemple, tout le réseau des affaires sociales. C'est le directeur des services professionnels dans les hôpitaux, par exemple, qui donne cette autorisation. Nous avons convenu de maintenir cette formule parce qu'il se fait de la recherche médicale sur place dans les hôpitaux sur une base presque permanente: des études de cas, des comparaisons de cas, etc.

Donc, il faut tout de suite multiplier par peut-être quatre ou cinq. Ensuite, il y a aussi tous ceux qui donnent ces renseignements sans se préoccuper au préalable d'obtenir l'autorisation prévue dans la loi. Mais nous avons un cerbère très efficace chez nous, M. Clarence White, qui est le directeur du service de la vérification et qui constate régulièrement dans les organismes qu'il y a eu transfert sans autorisation et cela finit par se savoir. C'est comme cela que je pense que nous en aurons beaucoup plus à l'avenir parce que lorsqu'une université, par exemple, se fait pincer en flagrant délit, eh bien, c'est assez curieux mais, très rapidement, toutes les autres universités le savent et se mettent tout à coup à appliquer la loi. C'est comme cela que je crois que c'est un phénomène qui ira en croissant.

Il y a divers types de demandes de communication de renseignements nominatifs à des fins d'étude et de recherche mais la plupart concernent et sont reliées, de près ou de loin, à la santé des individus mais aussi beaucoup à des études sociologiques de comportement de la population aussi en matière de crime ou des choses comme cela.

Nous sommes extrêmement vigilants là-dessus. La commission a préparé, a adopté il y a déjà deux ans et demi, des critères qui ont été publiés dans cette brochure et qui déterminent les exigences de la commission en matière de transfert de renseignements à des fins de recherche. Je suis heureux de vous dire que la Commission d'accès à l'information est la seule, à ma connaissance, qui a fait ce genre de travail, qui a mis ses critères par écrit avec les justificatifs. Ces critères ont été examinés dans d'autres juridictions. Je sais, j'ai appris très récemment que la Suisse, par exemple, s'est inspirée presque intégralement de nos critères pour adopter sa propre politique de même que le Conseil de l'Europe qui l'a proposée intégralement à ses membres.

M. Filion: II serait intéressant, M. le Président, de déposer ce document.

Le Président (M. Trudel): II a été distribué, je pense, mais je pourrais le déposer de nouveau.

M. Pépin: Oui. Je peux le faire. Cela me fera plaisir. Il s'intitule "L'accès aux renseignements nominatifs à des fins de recherche, d'étude ou de statistique".

M. Filion: D'accord. Bref, 57 demandent représentent finalement peut-être un quart ou un cinquième de l'ensemble des demandes, certaines étant...

M. Pépin: Des recherches qui sont faites.

M. Filion: ...statuées par des instances déléguées ou en tout cas des instances décentralisées.

M. Pépin: C'est juste.

M. Filion: D'accord. Je pense que cela va sur ce sujet.

Le Président (M. Trudel): Sur le même sujet ou vous voulez...?

M. Gardner: Non, sur un autre sujet. Êtes-vous d'accord?

Le Président (M. Trudel): Sur la question de la recherche, il n'y a pas d'autre question. M. le député d'Arthabaska.

Renseignements fournis aux députés

M. Gardner: Merci M. le Président. M. le président de la Commission d'accès à l'information, lors de la rencontre du 28 janvier dernier, lors de l'étude du rapport annuel 1985-1986, vous vous souvenez qu'on avait eu une grosse discussion - une grosse -en tout cas, de deux ou trois pages dans le Journal des débats, sur le rôle d'un député face à l'information possible que nous obtenions avec une certaine facilité dans les ministères. Vous vous souvenez que vous aviez parlé de craintes révérencieuses envers les députés, vous aviez parlé aussi... Je vous avais suggéré de donner des directives ou encore des suggestions aux députés sur la confidentialité des documents. Vous aviez parlé d'un guide possible afin de donner des directives aux fonctionnaires qui ont à gérer ces dossiers, également, des droits des députés pour intervenir... Vous vous souvenez que même le député de l'Opposition, le député de Saint-Jacques, et moi étions d'accord là-dessus. Vous aviez dit que vous en preniez bonne note. Je vois dans votre rapport qu'il n'y a rien là-dessus. Vous n'avez rien écrit là-dessus. Depuis ce temps, j'ai quasiment regretté d'en avoir parlé, parce que dans certains ministères, je ne sais pas ce qui s'est passé, on ne veut même plus donner de renseignement, même si je suis toujours député d'Arthabaska. Je ne sais pas trop.

Avez-vous fait l'étude qu'on vous avait suggérée. On vous avait même suggéré de venir nous voir dans nos bureaux de député. Je n'ai pas eu de visite. Avez-vous fait une étude ou êtes-vous arrivé à une conclusion là-dessus?

M. Pépin: M. Gardner, je ne vous avais pas oublié, au contraire. Votre suggestion que j'ai acceptée d'emblée, je l'ai trouvée, pour reprendre l'expression à la mode ce matin, remarquablement difficile à exécuter au cours des mois qui ont suivi; en ce sens qu'en relisant les débats de cette commission, j'ai été en mesure, je pense, de décoder un peu, de façon très claire vos attentes en ce qui concerne un guide comme celui-là. Je suis privilégié en un sens de ne pas être avocat, ce qui me permet, à certains jours, d'argumenter de façon différente avec les juristes. Mais je n'ai pas encore le pouvoir d'interpréter la loi différemment de ce qu'elle dit. Alors, nous avons fait ce travail dont vous parliez. Je m'étais engagé à le soumettre au président de votre commission, M. Trudel, ce que j'ai fait. M. Trudel a un exemplaire de ce que nous avons pu produire, ma compréhension de notre démarche. Je sais qu'il appartient maintenant au président de la commission de la culture de donner suite à cette initiative. Je crois que ce serait peut-être à lui maintenant de poursuivre là-dessus. Je dois vous dire que nous avons travaillé très fort, M. Gardner, pour essayer de donner une réponse à votre préoccupation.

M. Gardner: Merci de cet effort qui vous a semblé très difficile. Je vous félicite de ne pas être un avocat. Moi non plus je n'en suis pas un, sans déprécier, bien sûr, les avocats. Mais, on les apprécie beaucoup...

M. Pépin: Surtout celle qui est à ma droite.

M. Gardner: Oui. Mais ce que je voudrais... Cela veut donc dire qu'il va falloir en discuter ici avec notre président de commission, si je comprends bien. Il y a un rapport.

M. Pépin: M. Trudel va... M. Gardner: Merci.

Le Président (M. Trudel): En effet, j'ai rencontré M. le président de la Commission d'accès à l'information à la fin de

septembre, début d'octobre, mi-octobre plutôt, une semaine avant la reprise des travaux. Il m'a remis un projet de guide, enfin est-ce un guide, Le député et la loi sur l'accès, qui répond, pour l'essentiel, aux questions que tes députés se posaient l'an dernier, au début de cette année, à l'occasion de notre rencontre avec la commission. (11 heures)

C'est un document qui est bien fait mais délicat et qui mérite, à mon avis, et c'est pour cela que je vous en parle tout de suite après entente avec M. le président de la commission, une étude approfondie, d'abord, de la part des membres de cette commission. Je suggérerais, à cette fin, une séance de travail à huis clos. On pourrait se faire, à la fois, les défenseurs et les promoteurs auprès de nos collègues d'un tel document. D'ailleurs, je ne veux pas en discuter ici puisque vous n'avez pas encore ce document. Le problème que j'ai vu tout de suite c'est, tout en respectant intégralement la loi actuelle, si vous nous obligez à la respecter, ce qu'on doit faire de toute façon, on nous obligerait du même coup à -le mot est peut-être un peu fort bureaucratiser le lien et la relation entre nos commettants et nous. Par exemple, l'une des façons d'éviter de nous faire reprocher éventuellement d'avoir des renseignements nominatifs en notre possession sans y avoir droit ou sans y avoir été autorisés, serait de nous faire autoriser dans chaque cas par notre commettant à être son représentant auprès de l'administration. À mon avis, c'est une première réaction et je voudrais qu'on en discute. Je pense que, ce matin, nous n'aurons pas le temps de le faire mais nous pourrons sûrement le faire en une autre occasion; ce qui, à tout le moins, pourrait enlever beaucoup de spontanéité à la nécessaire relation entre le député et son commettant, d'une part. D'autre part, il y a, bien sûr, c'est ce que le président soulignait tantôt, le côté des fonctionnaires qui, eux, doivent obéir à la loi. Très souvent, ils nous disent: Bien, écoutez, est-ce que vous avez un mandat? Est-ce que la solution ne serait pas d'amender la loi éventuellement? Si on y arrivait, au mois de janvier ou février, après la commission, lors de la reprise des travaux au mois de mars, au printemps, à tout le moins, ne serait-ce pas de dire simplement dans un article, soit de la loi de la Législature, soit encore de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels que, sous son serment d'office, le député peut avoir accès, etc. Ce sont des éléments de solution dont le président et moi avons discuté privément et dont j'aimerais discuter avec les membres de la commission avant d'aller plus loin et de donner ce projet. Le président va dire: M. le Président de la commission de la culture, voici, à la suite de votre demande, un projet. Ce n'est pas un texte définitif du côté de la Commission de l'accès à l'information. Ce n'est surtout pas un texte définitif de notre côté, vous ne l'avez pas vu. J'ai suggéré au président ceci: J'ai dit: M. le président, je vais communiquer après la commission, une fois que nous aurons rendu publique l'existence du document. Je comprends le président, il avait reçu un mandat de la commission. Il l'a fort bien rempli - je ne dirai pas de façon remarquable, cette fois-là - parce qu'on avait une certaine divergence d'opinions quoiqu'on se rejoignait quand même sur l'essentiel. J'ai dit au président: Écoutez, on va en parler à la commission et je vais suggérer, si mes collègues sont d'accord, de faire une séance de travail. Je sais que le député de Taillon n'aime pas les choses à huis clos, mais il y aurait peut-être des parties de cette réunion qui devrait se faire à huis clos. J'ai dit au président de la commission: J'aimerais aussi que, soit un commissaire, soit quelqu'un de la commission assiste à cette réunion de travail autour d'un document de travail pour voir quelle solution on pourrait apporter à un problème réel qui doit protéger les droits des individus et qui doit aussi faciliter le travail des députés. D'une façon générale, ce n'est pas particulièrement cela. Pour me répéter, la réaction que j'ai eue devant le projet de la commission, c'est de me dire: C'est déjà assez difficile - le président a apprécié ces arguments - dans bien des cas, pour un citoyen d'aller voir son député et de lui exposer vraiment ses problèmes personnels -on dit souvent qu'on a remplacé les curés et qu'on remplace aussi les psychologues - s'il fallait que chaque fois qu'un citoyen vienne nous voir on dise: Cher monsieur, veuillez d'abord signer ce papier, j'avoue que ce n'est pas évident comme solution. Cela dit, je pense que ce rapport est un excellent instrument de travail et de discussion pour les membres de la commission.

Je vous suggérerais, si vous êtes d'accord, de commenter la réponse que M. le président vous a donnée, M. le député d'Arthabaska. J'aimerais entendre les commentaires de M. le député de Taillon sur cette question. Je suggérerais une séance de travail dans des délais tout à fait raisonnables, de façon qu'on puisse profiter des discussions que nous aurons au mois de janvier ou février sur le rapport d'activité de cinq ans, la clause crépusculaire, de façon que si jamais l'une des solutions possibles s'avérait être un amendement à la loi, cela puisse être fait en temps utile. M. le député de Taillon.

M. Filion: Écoutez, j'aimerais mieux passer... je n'ai pas de commentaires à faire à ce stade.

Le Président (M. Trudel): Je vais vous donner copie.

M. Filion: Quant à moi, j'aimerais mieux examiner avec le président son rapport. J'ai écouté de part et d'autre les préoccupations autour de la table. Je pense qu'on aura d'autre temps. Vous avez dit tantôt que les avocats sont là souvent, malheureusement, pour amener des délais; moi, je veux en gagner, j'aime mieux traiter du rapport.

M. Pépin: II y a aussi des avocats remarquables.

M. Filion: Pardon?

M. Pépin: II y a aussi des avocats remarquables.

Résultats du programme de vérification

M. Filion: Ha! Ha! On parlait de remarquables communicateurs. Vous dites dans votre mini-mémoire et un peu partout... Vous avez raison, la loi a fait son bout de chemin, elle est connue, il y a une amélioration de la situation. Mais en même temps, la commission s'est livrée cette année - l'année qui est le sujet du rapport, en 1986-1987 - a un programme d'examen sur le fonctionnement et l'observation de la loi. La commission a sélectionné treize organismes, probablement parce qu'elle n'a pas eu le temps de faire les treize, elle en a pris huit. Elle s'est dit: On va aller sur le terrain voir véritablement comment la loi est mise en application directement â chacun des endroits. Huit endroits ont été choisis: le CLSC de Mont-Joli, l'hôpital de Chicoutimi, l'Office municipal d'habitation de Montréal-Nord, le Cégep de Trois-Rivières, la ville de Laval, le relais Saint-François Inc., le Centre de services sociaux Outaouais-Hull et la Commission scolaire régionale de Granby.

Je cite le rapport textuellement: "Les vérificateurs ont pu constater que certaines obligations prévues dans la loi sur l'accès étaient respectées. Ils ont, par ailleurs, décelé plusieurs lacunes importantes." J'en énumère quelques-unes: fichiers de renseignements non déclarés à la commission, cueillette de renseignements inutiles, non-respect de l'article 65 qui est relatif à l'information donnée à la clientèle au cas de cueillette de renseignements, omission de procéder à l'épuration des dossiers lorsque les renseignements peuvent et doivent être enlevés; omission d'enregistrement des consultations des fichiers de renseignements, personnes mal, peu ou pas informées; confidentialité des renseignements nominatifs non assurée de façon acceptable; perception illégale de frais pour l'accès, on donne un exemple là-dessus d'un endroit, je pense, où cela coûtait 15 $, etc.

Cela m'a frappé, M. le Président, on marche au pifomètre, mais voilà que vous avez procédé à cette enquête; vous avez choisi ces huit organismes. Voici donc ma première question: dois-je comprendre que, pour les cinq autres, cela va se faire en 1987 probablement? Deuxièmement, je comprends aussi, pour être tout à fait complet, qu'une série de recommandations ont été envoyées aux organismes, donc cela a un effet immédiat très intéressant, mais comme espèce de test, ce n'en est pas un, parce que c'est uniquement huit organismes sur 3600, mais il demeure que les lacunes que vous avez relevées sont importantes, y avait-il un manque d'intérêt finalement chez ces organismes-là? Enfin, quel était le problème à la source de toutes ces infractions?

M. Pépin: D'abord, je dois préciser que les cinq autres organismes ont tous été également visités, sauf un, je pense, douze des treize. C'est parce que le rapport est fait en fonction d'une date précise qui est le 31 mars; cela a été fait peut-être en avril, mai ou juin.

Évidemment, le propre d'une vérification, c'est d'essayer de déterminer dans quelle mesure la loi est respectée et que des méthodes adéquates sont utilisées pour la protection des renseignements personnels parce que, dans le cas des vérifications, c'est presque exclusivement sous l'angle de la protection de la vie privée que se fait cette vérification. Il y a des lacunes.

Pour répondre à votre question, M. le député de Taillon, je serais presque tenté de faire une comparaision avec un autre domaine d'intérêt public qui a été au centre de nos préoccupations comme Québécois depuis environ une dizaine ou une vingtaine d'années, qui est l'environnement. Si on se reporte 20 ans en arrière, les gens qui prêchaient des interventions différentes, un comportement différent de la population pour protéger davantage notre environnement surtout en ce qui concerne l'eau, par exemple, étaient plutôt solitaires, au début et, petit à petit, c'est devenu une préoccupation de l'ensemble de la population et, aujourd'hui, personne ne remet en cause cette préoccupation constante qu'a tout le monde. Au début, c'étaient quelques groupes isolés. Maintenant, ce sont toutes les municipalités. Il n'y a pas un seul gouvernement qui peut ne pas s'en préoccuper, tous les citoyens s'en préoccupent.

Je crois qu'en ce qui concerne la vie privée, c'est un peu la même chose. Avant que les administrations soient fortement informatisées, il n'y avait pas une préoccupation très présente pour la protection des renseignements personnels,

parce que c'était déjà tellement difficile de fouiller dans les caisses de dossiers pour trouver des renseignements personnels qu'il y avait tout de suite là une sorte de barrière, une protection naturelle contre la curiosité malsaine, pourrait-on dire.

Mais avec l'informatique, tout à coup, on découvre que c'est devenu plus facile. Mais avant que cette préoccupation devienne une préoccupation constante, une préoccupation spontanée, je crois qu'il faut y mettre un peu de temps. C'est ce que j'appelais, au début, cette patience nécessaire pour créer cet environnement préoccupant.

C'est comme cela que nous constatons, évidemment, un certain nombre de choses. Mais nous avons également constaté... Prenons un exemple. La plupart des hôpitaux sont plus ou moins gérés de la même façon. Un dossier de patient dans un hôpital à Chicoutimi ne diffère pas tellement d'un dossier de patient de la ville de Laval ou de Rigaud.

Là, nous constatons un certain nombre de choses puis, nous faisons des suggestions. Nous savons que, par le biais de l'Association des hôpitaux avec laquelle nous sommes en relation, avec une seule vérification, un certain nombre de choses vont être corrigées de façon générale au Québec. Il y a aussi des débats, des discussions, parce que la loi dit: Vous devez protéger les dossiers médicaux de telle façon, mais il y a aussi la pratique courante dans l'hôpital. On ne peut pas mettre un dossier médical dans un coffre-fort à toutes les trois minutes, parce qu'il y a toutes sortes de gens qui s'en servent.

Alors, nous essayons de trouver avec eux des solutions adéquates. C'est le but de cette démarche que nous faisons actuellement pour essayer d'imprégner les organismes de cette préoccupation. Nous n'avons pas été répressifs jusqu'ici. Moi, je crois davantage, à cette étape où nous sommes, à l'éducation et à la prévention.

Bien sûr, il faudra un jour aussi sévir lorsqu'il y a mauvaise foi. Nous avons un cas présentement d'une municipalité qui s'acharne à recueillir des renseignements qui me paraissent absolument inutiles pour la municipalité, dangereux pour les individus et dont l'usage est douteux. Si la municipalité en question continue de refuser de construire un tel fichier sur ces individus au nom d'une vague mission de profil sociologique de sa population, là, nous sévirons. Nous sévirons devant les tribunaux, au besoin.

M. Filion: D'accord. C'était ma question suivante et cela allait dans le même sens. Je pense que c'est l'an dernier, sûrement l'an dernier, que je l'avais évoqué et je le reprends. Une poursuite pénale comporte une certaine valeur pédagogique. Je l'ai dit l'an dernier; on avait échangé un peu là-dessus. Vous citez le cas d'un exemple d'une municipalité qui, encore une fois, s'acharne à obtenir des renseignements, malgré qu'elle ait été avisée cinq fois. Il me semble que c'est peut-être le temps de sonner la fin de tous les délais de compromission, de bonne entente avec ces organismes publics.

La loi a été votée, cela fait déjà suffisamment longtemps pour qu'on sache quelle est la volonté du législateur et, dans certains cas, ce n'est pas par répression qu'il faut le faire, mais à cause de la valeur pédagogique et de la valeur d'exemplarité qu'il peut y avoir dans certains cas.

Vous me corrigerez si je me trompe. Il n'y a aucune poursuite pénale, en tout cas, durant l'exercice 1986-1987 et ne comprenez pas mon intervention comme voulant dire: II faut absolument le faire; non. Mais, dans certains cas, comme vous le dites, il ne faut pas avoir peur de le faire, encore une fois, à cause de la valeur d'exemplarité pour tous ces organismes. (11 h 15)

J'ai été frappé de voir, M. le Président, que le ministère du Revenu du gouvernement du Québec faisait partie de la liste des délinquants sur ce répertoire de fichiers, à la page 26 de votre rapport: "Parmi les 23 ministères vérifiés, un seul ne disposait pas d'une liste de classement de ses documents. Il s'agit du ministère du Revenu." Je ne me trompe pas non plus en disant que le ministère du Revenu était également, à l'époque, l'un des ministères qui n'avait pas fourni à la commission son fichier de renseignements.

Bien sûr, ce n'est pas la Commission d'accès à l'information qui va poursuivre le gouvernement du Québec, mais, maudit! il faudrait à un moment donné sonner l'alarme et, si le ministère du Revenu du gouvernement du Québec est toujours en position de délinquance, est-ce que telle municipalité dans nos comtés, elle-même, ne se sentirait pas un peu justifiée de dire: Écoutez, attendez. Laissez-nous du temps, etc. Est-ce que telle corporation hospitalière ou telle commission scolaire ne pourrait pas dire: Même le ministère du Revenu n'a toujours pas rempli ses obligations, alors pourquoi le ferait-on?

Je ne veux pas m'éterniser là-dessus. J'ai remarqué dans votre rapport de mise en oeuvre les remarques que vous aviez faites au sujet des poursuites pénales. D'abord, ce sont un peu des avocasseries, mais le problème, la mens rea... et vous suggériez d'en faire une question de responsabilités strictes. Je suis évidemment sensible à ces arguments parce que, si vous intentez une poursuite, vous aimez bien qu'elle soit accueillie par le tribunal et qu'elle ne soit surtout pas rejetée, vous en prenez si peu. Alors, j'ai saisi votre remarque dans le

rapport de mise en oeuvre et, peut-être, en janvier prochain, faudra-t-il examiner cela pour permettre de donner une assise légale dans les cas où la commission jugerait bon d'intenter une poursuite, qu'elle ait un cadre juridique satisfaisant.

Le Président (M. Trudel): M. le député, vous...

M. Pépin: J'allais inviter Mme Giroux, qui a travaillé sur ce volet particulier du rapport, à fournir peut-être d'autres explications.

Mme Giroux (Thérèse): M. le député, vous avez effectivement un peu devancé la remarque que je voulais faire. Je pense que la commission croit également que le temps est peut-être maintenant arrivé de mettre fin à l'attitude beaucoup plus tolérante, ou enfin de prévention ou de discussion avec les organismes. Justement, le temps serait peut-être venu de faire certaines démarches. Cependant, dans l'état actuel de la loi, c'est l'article - je ne me souviens pas de son numéro - qui oblige...

M. Filion: 158 à 165...

Mme Giroux: Voilà, qui fait référence à la notion de "sciemment". Alors, le fardeau de preuve, lorsqu'on intente une poursuite pénale qui fait référence à la notion de sciemment, est extrêmement élevé, d'où la recommandation que nous avons faite dans le rapport sur la révision de la loi. Je pense qu'au cours de la prochaine année il y aura des développements à ce sujet.

M. Filion: Est-ce que je me trompe, mais il n'y a jamais eu de poursuite pénale par la commission?

M. Pépin: II n'y a eu aucune poursuite pénale, mais il n'y a pas eu, non plus, M. le député, de résistance aux recommandations de la commission de façon brutale. Je vous donne aussi de...

M. Filion: De résistance consciente? M. Pépin: Oui.

M. Filion: C'est-à-dire en connaissance de cause.

M. Pépin: C'est cela. Bien sûr, il y a eu des gens qui nous opposaient des impératifs administratifs ou des choses comme cela, un peu comme je le disais dans mes remarques préliminaires, mais pas d'objection ou d'obstruction au travail de la commission comme telle de façon évidente.

Je vous donne l'exemple du résultat d'une approche un peu plus pédagogique que nous avons adoptée. Je pense que je peux citer la municipalité. Nous avons reçu une plainte concernant la municipalité de Pointe-Claire. Les enquêteurs ont constaté qu'il y avait effectivement dans cette municipalité une collecte de renseignements dont l'usage n'était pas nécessaire à l'accomplissement des mandats municipaux habituels. Mais il n'y avait pas non plus, derrière cette démarche de la municipalité, nécessairement un objectif d'accumuler des données sur ses citoyens à des fins pernicieuses, pas du tout. Nous avons finalement constaté qu'il s'agissait d'une firme qui vend des formulaires de recensement municipal. Cette compagnie, à Pointe-Claire et à plusieurs autres endroits... Là-dessus, il y a toutes sortes de questions qui ne sont pas pertinentes. La ville achète le formulaire, mais elle n'achète pas nécessairement le concept d'aller chercher des renseignements non nécessaires. On en a discuté avec ces gens et, finalement, cela va se traduire, selon les dernières nouvelles, par une modification du formulaire de cette firme pour toutes les municipalités.

C'est ce genre de travail que nous essayons de faire plutôt que de poursuivre la ville de Pointe-Claire pour dire: Vous avez erré, vous avez peut-être quelque chose d'illégal techniquement devant la loi. Nous essayons plutôt de corriger l'ensemble du problème quand c'est possible de le faire.

M. Filion: Je pense qu'il n'y a pas de doute là-dessus, on se comprend bien, la médecine préventive, douce, conciliatoire, est toujours la meilleure, sauf qu'à un moment donné, dans certains cas, il est bon de sonner la fin de la récréation, dans certains dossiers. Le cas échéant, peut-être qu'il y a d'autres endroits où les délais sont plus longs, on réagit un peu moins vite. Souvent, les organismes ne disent pas non, il faut se comprendre. 3600 organismes, ce sont des organismes publics. Ce n'est pas vrai que ces gens vont envoyer promener la Commission d'accès à l'information, mais parfois, c'est un peu plus long, parfois on va chercher un peu plus d'argent pour des frais de photocopie. Comme vous le disiez dans votre rapport, le personnel n'est pas informé du tout alors qu'il aurait dû l'être.

Cela a une valeur pour raccourcir les délais pour les autres organismes. En deux mots, cela accentue la prise de conscience et, en ce sens, je rejoins tout à fait vos propos ainsi que ceux de Mme Giroux.

M. Pépin: ...qui sera sûrement réglé d'autant plus que l'arrivée de Mme Watters renforce, je pense, l'équipe des durs à la commission.

Des voix: Ha! Ha!

M. Filion: Pour concrétiser, je pense...

M. Pépin: Le clan des durs, devrais-je dire.

M. Filion: Est-ce que mes confrères voudraient intervenir ou si je peux passer à la question suivante?

Le Président (M. Trudel): Sur le même sujet et pour conclure un peu dans le même sens que vous, M. le député de Taillon, pour reprendre toujours le même mot depuis le début, je trouve la commission d'une remarquable patience, c'est le moins qu'on puisse dire.

À la page 26, vous dites: "Sauf quelques exceptions, les organismes ont accepté d'emblée de collaborer à l'atteinte de cet objectif." C'était au moment où vous l'avez rédigé. Est-ce qu'au moment où l'on se parle, la plupart de ces exceptions ont fini par se conformer à vos demandes ou s'il y a encore des organismes récalcitrants? Est-ce qu'il serait possible d'aller au-delà, à moins que vous m'indiquiez que pour des raisons importantes, vour préféreriez que ce ne soit pas le cas? Est-ce qu'il y a moyen d'avoir le nom des récalcitrants? Vous avez parlé tantôt de la ville de Pointe-Claire qui n'est pas dans ce groupe, mais si vous préférez garder l'anonymat de votre mémoire, on va respecter cela pour l'instant.

M. Filion: Page 26, deuxième colonne, troisième paragraphe.

Le Président (M. Trudel): Page 26, oui, juste avant le 3.5, Le rayonnement de la commission. Vous dites...

M. Filion: Les organismes dont j'ai cité la liste tantôt. Vous dites qu'il y en a...

Le Président (M. Trudel): Parmi les huit, on dit: "Sauf quelques exceptions, les organismes ont accepté d'emblée de collaborer à l'atteinte de cet objectif". C'est remarquable, mais ce sont les récalcitrants qui m'intéressent aujourd'hui.

M. Pépin: Je devrai consulter...

Le Président (M. Trudel): Je veux dire aussi que je partage l'opinion du député de Taillon sur le ministère du Revenu et je souhaite qu'avec le nouveau ministre, qui est un spécialiste, celui qui vient d'être nommé, les choses pourront changer.

M. Pépin: Si M. le Président le permet, je demanderai à M. White de prendre le fauteuil qui est là, il pourra vous donner la réponse précise.

Le Président (M. Trudel): Sûrement. M. White.

M. White (Clarence): M. le Président, MM. les députés, dans les dossiers de vérification, les organismes avec lesquels nous avons encore des discussions sur les huit qui sont mentionnés à la page 25 du rapport sont les suivants: la ville de Laval, le Relais Saint-François Inc., à Sherbrooke, le Centre de services sociaux Qutaouais-Hull et la Commission scolaire régionale de Granby, qui est la Commission scolaire régionale Meilleur.

Le Président (M. Trudel): Un taux de récalcitrants de 50 %.

M. White: C'est cela. On a des échanges sur les recommandations, il y a même un des organismes où les premiers échanges qu'on a eus sont complètement insatisfaisants. L'organisme nous dit: On fait cela de même parce qu'on fait cela comme cela. Mais ce sont des organismes avec qui nous avons des dossiers ouverts, qui sont actuellement en cours de vérification.

Le Président (M. Trudel): Vous poursuivez les négociations, je présume. Vous vous êtes fixé une limite à votre remarquable patience. Vous prenez la peine et je trouve votre programme fort intéressant. D'ailleurs, les questions du député ont l'avantage d'être... De temps à autre, il faut donner des avantages à l'Opposition. L'avantage d'être dans l'Opposition, c'est qu'on a le choix des premières questions. J'avais, moi aussi, toute une série de questions sur le programme de vérification que je trouve fort intéressant. Je me dis: Voilà un programme à la fois absolument nécessaire, très utile et que vous accomplissez de façon intéressante. Comme je le disais tantôt, vous avez un taux de récalcitrants de 50 %. Vous êtes en négociation avec eux. Est-ce que vous avez l'intention de poursuivre les négociations longtemps ou, comme le disaient tantôt le député et Mme la commissaire, de commencer à serrer légèrement la vis? Je pense qu'après cinq ans, me servant entre autres de ma lecture de ta nuit dernière, il serait peut-être temps, ne serait-ce que pour donner l'exemple à l'occasion, de serrer la vis dans certains cas.

M. Pépin: Je crois qu'il faut distinguer sur quel point précis porte la difficulté ou la négociation en question. S'il s'agit, par exemple, d'un programme d'information du personnel, l'équipe de vérification peut se déclarer insatisfaite des propositions qui sont faites pour informer le personnel. Là-dessus, il y a une discussion pour fournir des outils ou des moyens pour le faire. Cela n'a pas le même type de gravité que s'il y avait, par

exemple, transfert illégal de renseignements d'un organisme à l'autre au détriment des citoyens, de façon évidente. C'est pour cela que j'hésite un peu à répondre globalement à votre question. Tout dépend sur quoi porte la discussion ou la négociation, mais il y a de toute évidence, à l'occasion, des organismes qui, tout en ne refusant pas de coopérer avec nous, font en sorte que cette coopération tarde.

Le Président (M. Trudel): Une dernière question sur ce sujet qui anticipe un peu sur votre rapport de 1987-1988. Vous avez dit tantôt que douze des treize organismes avaient été vus au moment où on se parle. Est-ce que parmi les quatre autres, il y a des récalcitrants?

M. White: II y a des organismes qui viennent d'avoir notre rapport. Je peux difficilement vous dire s'il y a des récalcitrants à cette étape-ci. Des quatre organismes...

Le Président (M. Trudel): Avez-vous la liste de ces quatre organismes pour compléter la discussion?

M. White: Oui. Il y en a même un qui ne l'a pas encore eu. Il s'agit de l'Université Laval... Une seconde, s'il vous plaît.

Le Président (M. Trudel): La liste des quatre autres?

M. White: Oui, c'est cela: le CRSSS du Montréal métropolitain, l'Université Laval, la Société d'habitation du Québec et la Commission scolaire Baldwin-Cartier. Le dossier de la SHQ est presque terminé; on pense pouvoir le fermer d'ici un mois.

Le Président (M. Trudel): Est-ce que le treizième est au courant que vous allez le visiter?

M. White: Non. On a décidé de l'abandonner.

Le Président (M. Trudel): Donc, votre vérification va se limiter à douze pour le moment.

M. White: C'est cela. On a un nouveau programme qui a été soumis à la commission pour le mois prochain.

Le Président (M. Trudel): Merci. Cela termine mes questions sur le sujet.

M. Filion: Oui. Ma question est la suivante: L'échantillonnage que vous avez fait pour choisir ces douze organismes... On a parlé de huit dans votre rapport, vous avez fait la liste des lacunes avec un taux de récalcitrants assez élevé. Est-ce que vous avez des raisons de croire que cet échantillonnage est conforme à l'ensemble des 3600 organismes? Je remarque que vous avez pris des organismes de petite taille, de moyenne taille et de grande taille. Ce que vous me dites à propos de ces huit, est-ce qu'il y a des raisons de croire qu'on ne le retrouverait pas si on arrivait avec un programme complet, ce qui est impossible à imaginer, mais une vérification pour l'ensemble des 3600 organismes, ce qui nous donnerait une lecture tout à fait exacte de l'application de la loi au Québec aujourd'hui? (11 h 30)

M. Pépin: Évidemment, le programme a été conçu en tenant compte de nos ressources. Le personnel de la commission n'a pas changé depuis trois ans maintenant. Par exemple, le fait d'avoir à préparer un rapport comme celui-là à même nos ressources, tout en continuant nos opérations courantes, et les commissaires étant occupés aussi dans le volet quasi judiciaire, fait en sorte que c'est évident qu'on ne peut pas envisager une vérification de 200 organismes par année.

Voici ce que nous avons fait. Nous avons fait un programme de vérification qui tient compte des grands secteurs d'activité au Québec, c'est-à-dire le secteur des services sociaux, le secteur scolaire, le secteur administratif, gouvernement ou organismes comme la SHQ, et le secteur municipal. Nous avons aussi tenu compte, comme vous le disiez, de la taille différente d'un certain nombre d'organismes. C'est beaucoup plus long d'aller faire la vérification à l'Université Laval qu'au Relais Saint-François de Sherbrooke.

Nous avons tenu compte également d'une certaine répartition régionale de manière à profiter d'une certaine présence en région où on constate que les médias, notamment dans certaines régions, pénètrent moins, les quotidiens pénètrent moins dans les régions périphériques et les gens sont moins familiers avec la loi. Donc, cela nous permet aussi de les alerter.

C'est comme cela que, dans la première année, nous avons retenu ces critères. La deuxième année, nous avons retenu d'autres critères où nos vérificateurs sont un peu mieux alertés aux problèmes. Ils ont deux programmes parallèles, en fait. Ils ont le programme de la vérification complète aussi en vertu des critères de l'année précédente, et ils ont aussi ce qu'on appelle des "spot-checks". Ils ont un programme de vérification rapide de problèmes précis dans des secteurs précis d'activité au Québec. Cela est évidemment susceptible d'apporter des résultats très différents l'an prochain.

M. Filion: Je vous remercie. Avec la permission de mes collègues, je voudrais

peut-être aborder un autre chapitre.

M. Pépin: M. Filion, j'ai oublié aussi de vous dire qu'en ce qui concerne les déclarations de fichiers, parce qu'on parlait de délinquants, peut-être qu'on peut vous apporter des précisions.

M. Filion: Vous voulez dire des précisions sur..,

M. Pépin: Depuis la dernière fois qu'on s'est vu, est-ce que cela s'est amélioré parce que vous aviez demandé qu'on vous envoie la liste?

M. Filion: Oui.

M. Pépin: Alors, je ne sais pas où on en est, mais je pense que cela s'améliore un peu.

Contrôles du milieu informatique

M. Filion: Oui. Je vais y revenir un peu plus tard peut-être au cours de l'avant-midi.

Je voudrais aborder avec M. le président ainsi qu'avec les commissaires, les représentants de la commission, tout le problème du contrôle du milieu informatique au sein, en particulier, des organismes du gouvernement du Québec. Le Vérificateur général, dans son rapport de 1985, écrivait à la page 75, en parlant du ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, au chapitre toujours de l'informatique, que le contrôle exercé sur les mots de passe du milieu informatique est insuffisant. Leur confidentialité est mal protégée et, dans quelques cas, ils sont facilement identifiables.

De plus, le ministère n'a pas établi de politique sur la fréquence de leur modification ou de leur révision, etc. Toujours, le vérificateur, dans son rapport de mars 1985: "Nous avons également constaté des déficiences dans les contrôles mis en place pour préserver l'intégrité du contenu des bases de données servant à la gestion des subventions et des prestations d'aide sociale." Cela, c'est en parlant du ministère de la Main-d'Oeuvre et de la 5écurité du revenu.

Toujours dans le même rapport, page 136, en traitant cette fois-ci de la Régie de l'assurance-maladie du Québec, le Vérificateur général écrivait que, d'abord, il avait procédé à un examen, que les demandes de paiement pourraient être soustraites... mais en résumé, les fichiers contenant les mots de passe pour accéder aux fichiers de renseignements détenus par la RAMQ sont facilement accessibles à des personnes non autorisées. "Elles peuvent ainsi prendre connaissance de données confidentielles, entrer dans des transactions non autorisées ou détruire des données importantes."

Dans son rapport de 1986, évidemment pour l'année terminée le 31 mars 1986, le Vérificateur général, toujours en ce qui concerne le contrôle de l'information informatisée - passez-moi la redondance - au sein des organismes gouvernementaux écrivait: L'examen des contrôles exercé nous a révélé encore cette année un manque de rigueur dans l'accessibilité aux données et aux programmes informatiques. Des éléments portant è conséquence peuvent être l'objet d'interventions non autorisées dont la détection a posteriori n'est pas assurée.

On parlait, à ce moment, de la Régie de l'assurance automobile du Québec, la RAAQ. Bref, le Vérificateur général, dans son rapport de 1985 et dans celui de 1986, nous dit: La RAMQ - comme information, elle, elle en a une jolie tonne - la RAAQ, dans le secteur de l'automobile, va chercher des renseignements à savoir si on a mal aux yeux, n'importe quoi, il y a beaucoup de choses à la RAAQ également comme information, et le ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, toutes les personnes qui sont assistées par l'État y sont fichées et catégorisées, or, il y a un paquet de renseignements là-dedans. Voilà trois organismes qui détiennent une masse de renseignements que je n'ose pas imaginer.

Le Vérificateur général nous dit dans ses rapports 1985, 1986, que le contrôle informatique est insuffisant, l'accessibilité aux données est beaucoup trop grande à des personnes non autorisées. De plus, la possibilité de modifier le contenu des données informatisées est trop grande.

Ma question est la suivante: La commission, d'une façon directe ou indirecte, a-t-elle fait des représentations ou des démarches auprès de ces organismes pour s'assurer que le contrôle informatique de toutes les données qui y sont contenues est vraiment étanche et a été resserré?

M. Pépin: Bien sûr, nous avons pris connaissance du rapport du Vérificateur général et la direction de l'évaluation chez nous en a fait un examen précis. Il y a un certain nombre de démarches qui ont été faites par la commission auprès - je ne sais pas si c'est de tous les organismes que vous avez mentionnés - d'un certain nombre, mais pas uniquement là-dessus, parce qu'il y a aussi d'autres problèmes que nous avons constatés, Ce n'est pas nécessairement uniquement un problème de mots de passe, la gestion de l'informatique. C'est fondamentalement aussi le pourquoi de la cueillette, l'usage qui en est fait, les types de transferts, l'encadrement juridique de tout cela. Je pense que vous auriez une réponse peut-être un peu plus précise de ce qui se fait en matière de vérification actuellement

de la part de M. White, s'il veut bien compléter.

M. White: On peut reprendre l'exemple de la RAMQ parce que sans qu'on fasse une vérification, cela fait au moins deux ou trois enquêtes que nous faisons à la RAMQ, à la Régie de l'assurance-maladie du Québec sur des plaintes de citoyens nous disant qu'il y a eu divulgation de renseignements sans leur consentement. Nous avons été à même de constater qu'à la Régie de l'assurance-maladie du Québec, c'est peut-être vrai ce que le vérificateur dit qu'une personne peut modifier une donnée dans le système, sauf que le système, c'est une chaîne de montage. Pour qu'il y ait modification, pour qu'il y ait falsification d'un dossier, il faut que ce soit fait à partir du début, c'est-à-dire à l'entrée de demandes de paiement. Parce que voici ce que l'on fait. On y traite des demandes de paiement des professionnels de la santé. D'accord? C'est ce qu'on y fait. On traite là des demandes de paiement. Il faut que le système soit modifié ou soit changé à partir de l'entrée de la demande de paiement jusqu'à sa sortie.

M. Filion: Ces gens émettent des cartes aussi, par exemple.

M. White: Ils émettent des cartes, mais ils n'ont pas grands renseignements sur les individus quand ils émettent des cartes. Nous sommes arrivés à la conclusion que, entre autres dans un cas de plainte, c'était impossible.., En plus, nous sommes même allés vérifier. Nous avons fait vérifier par un expert la bande de protection déposée à la Brinks, cela doit être Sécur inc., aujourd'hui. Nous l'avons fait même vérifier, parce que, pour qu'il y ait une modification, il fallait que même les bandes soient modifiées. Il fallait que la bande soit coupée. Nous sommes arrivés à la conclusion que ce n'était pas possible et que cela prenait un paquet de monde pour pouvoir faire cette modification et que, une seule personne ne pouvait pas falsifier la banque de données. Cela prenait plus qu'une personne. Je ne sais pas ce que la RAMQ a fait comme remarques au vérificateur. Je sais que les gens en informatique à la RAMQ voulaient faire des remarques au vérificateur. Ils n'étaient pas d'accord du tout avec l'interprétation que le vérificateur faisait du système de la RAMQ.

Pour ce qui est de la RAAQ, la Régie de l'assurance automobile du Québec, je pense qu'il n'y a pas besoin que le système soit étanche. La RAAQ donne des informations à tour de bras; elle en donne 10 000 par mois. Même si le système d'informatique n'est pas ce qu'il y a de plus étanche, la RAAQ fait circuler 10 000 informations au minimum par mois présumément à la suite du consentement des individus à toutes sortes de gens: aux compagnies d'assurances, à la police naturellement. La police n'est même pas dans les 10 000. On ne sait même pas qui à la police demande accès aux banques de données.

Le Président (M. Trudel): M. White, de quelle nature sont ces renseignements qui circulent?

M. White: Dans le dossier de conducteur?

M. Filion: C'est-à-dire?

M. White: Les points de démérite entre autres, les accidents.

M. Filion: Est-ce que je peux obtenir votre dossier sur les points...

M. White: Si vous êtes un assureur, oui; si vous êtes courtier, oui. Récemment, des gens ont porté plainte à la commission pour cela. Des gens ont vu leurs primes d'assurances augmentées et se sont demandé pourquoi. La raison est très claire. C'est la RAAQ qui a communiqué présumément à partir d'un consentement qu'on fait signer à la personne concernée, ce que j'appelle un consentement avec le revolver sur la tempe: Si tu ne signes pas, tu n'es pas assuré. Alors, les gens signent et consentent à ce que la RAAQ fournisse des renseignements et la RAAQ fournit les dossiers et l'information. Alors, le système informatique à la RAAQ...

Le Président (M. Trudel): Là, vous êtes en train de nous dire que la RAAQ, un organisme paragouvernemental, fait circuler à cette vitesse, 10 000 par mois, il faut le faire!

M. White: Oui, oui, c'est 10 000 par mois. C'est cela.

Le Président (M. Trudel): Sans compter, dites-vous, ce qui pourrait se donner aux forces policières sous d'autres... 10 000 renseignements nominatifs avec des consentements plus ou moins exprimés.

M. White: Oui. On pourra même vous en reparler dans la prochaine année des consentements à la RAAQ.

Le Président (M. Trudel): J'espère qu'on va s'en reparler, mais on pourrait peut-être en parler tout de suite aussi.

M. Pépin: II faut dire aussi que c'est à l'occasion d'une enquête sur plainte du citoyen que les vérificateurs ont constaté

qu'il y avait ce type de consentement un peu douteux ou enfin qui, pour nous, suscite, à tout le moins, des questions. C'est l'outil par lequel un certain nombre de gens intéressés à connaître le dossier de conducteur des individus utilisent pour les obtenir de la RAAQ. À ma connaissance, la RAAQ justifie sa coopération ou sa collaboration au nom de la sécurité routière.

Le Président (M. Trudel): M. le député de Sherbrooke, vous avez une question?

M. Hamel: Est-ce qu'il y aurait un formulaire type dans lequel il y aurait un paragraphe évidemment écrit en six points où on demande presque implicitement l'autorisation de faire enquête dans ce sens ou si c'est chaque fois une démarche précise? (11 h 45)

M. White: Ce qu'on a vu jusqu'à maintenant, en tout cas dans la plainte que nous avons traitée - d'ailleurs notre rapport n'est pas soumis aux commissaires, c'est pour cela que je fais attention à ce que je dis -c'est qu'il s'agissait d'un carton de 2 sur 4, ce n'est pas en bois, c'est en carton...

Une voix: C'est moins assommant.

M. White: ...sur lequel est inscrit le numéro de permis de conduire de la personne et son nom. Cela dit ceci: Par la présente, j'autorise la Régie de l'assurance automobile du Québec à fournir des renseignements concernant mon dossier de conducteur à telle compagnie d'assurances. Et signature. C'est ce qu'on retrouve actuellement.

Le Président (M. Trudel): C'est à l'occasion de cette plainte que vous avez découvert que c'était quelque chose qui se faisait quotidiennement, ou à peu près, parce que, à 10 000 $ par mois, il faut le faire quotidiennement, oui?

M. White: C'est-à-dire qu'on a aussi entendu une entrevue à la radio d'un agent d'information de la RAAQ qui a lui-même révélé qu'un maximum de 10 000 informations par mois étaient communiquées. Tout cela s'est fait dans un objectif de prévention des accidents. Je vous dirai que nous avons trouvé un autre cas où la RAAQ était impliquée - ce n'était pas la RAAQ comme telle, c'était la police - l'Opération nez rouge. Toute personne qui s'inscrit comme bénévole à l'Opération nez rouge voit son dossier de conducteur vérifié à la RAAQ. Ce dossier est vérifié par la police. Toute personne qui s'inscrit comme bénévole à "nez rouge", son dossier est vérifié.

M. Gardner: Est-il bonifié?

M. Hamel: M. le Président.

Le Président (M. Trudel): M. le député de Sherbrooke.

M. Hamel: Juste une seconde, si vous permettez.

Une voix: Excusez.

M. Hamel: Dans le cas où le client ou l'assuré refuse de signer cette petite carte, il est plus ou moins sujet au chantage du renouvellement de sa police. À ce moment-là, il va aux droits de la personne. C'est presque cela finalement.

Une voix: Oui.

M. Hamel: Quand vous disiez un revolver sur la tempe tantôt, c'était cela.

M. White: Si tu ne signes pas, la compagnie ne prend pas le risque de t'assurer.

M. Hamel: C'est cela. Très bien. Merci, cela va.

M. Filion: Si je combine ce que vous venez de nous dire, à savoir qu'il y a beaucoup d'informations qui sortent de la RAAQ avec ce que le Vérificateur général nous dit depuis deux ans sur le contenu des informations, encore une fois transmettre une information, si elle est exacte, c'est une chose, si elle est inexacte, c'est une autre chose. Ce qu'il nous dit, je le lis en entier, c'est à la page 99 du rapport du Vérificateur général, Les contrôles en milieu informatique à la Régie de l'assurance automobile du Québec: "L'examen des contrôles exercés par la régie nous a révélé, encore cette année -en 1985, on n'avait rien vu en ce qui concerne la RAAQ, il n'y avait pas d'allusion dans le rapport - un manque de rigueur dans l'accessibilité aux données - cela rejoint ce que vous dites - et aux programmes informatiques. Des éléments portant à conséquence peuvent être l'objet d'interventions non autorisées dont la détection a posteriori n'est pas assurée."

Ce que cette phrase veut dire, c'est qu'on peut entrer dans l'ordinateur, y mettre une information inexacte et la détection a posteriori de l'information inexacte n'est pas assurée. Combinez ce que nous dit le Vérificateur général avec ce que vous dites et on a un système en place qui peut égorger injustement un tas de citoyens. Évidemment, ce serait intéressant... Je veux continuer quand même, pour être tout à fait honnête. Le Vérificateur général nous disait: "La régie a apporté, en 1986, certaines mesures correctives pour remédier à la majorité des faiblesses que nous avions

constatées. Nous proposons de vérifier ces mesures dans le cadre de notre prochaine vérification."

Bien sûr, on va les surveiller. Avec ce que vous nous dites aujourd'hui, je pense qu'on va les vérifier doublement et triplement. Encore une fois, c'est trois organismes, on n'a pas parlé des autres exemples que j'ai... c'est-à-dire, vous avez mentionné la RAMQ, on vient de parler de la RAAQ, mais on n'a pas parlé du ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, j'aimerais cela... Je ne sais pas si vous avez eu l'occasion de communiquer avec ces gens, où en sont vos démarches?

M. White: Si je ne vous ai pas parlé du ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, c'est parce que l'on n'a pas vraiment fait d'enquête, de vérification. Actuellement, nos démarches auprès du ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu portent plutôt sur des avis que nous avons à donner sur du couplage de fichiers pour l'instant.

Alors, je ne peux pas vous parler du système informatique. Je sais qu'il y a un gros système informatique qui est un système informatique-réseau où à peu près tous les centres sont reliés. Il y a quelque chose comme plus de 500 terminaux, même en province. Mais ces choses existaient même à l'époque où c'était au ministère de la Santé - comment l'appelait-on à l'époque - l'aide sociale était...

M. Filion: C'était Main-d'Oeuvre et Sécurité du revenu qui était avec Santé et Services sociaux.

M. White: Oui, c'est cela. C'était la partie qui était à la Santé. En tout cas, c'était la partie de l'aide sociale. Alors, tous les réseaux, tout le territoire était informatisé à l'époque. Mais je ne peux pas vous en parler plus que cela. On n'a pas fait de vérification là-dessus.

M. Filion: D'accord. Pour être plus précis, M. le Président, si vous me le permettez, en 1985, le Vérificateur général parlait également de la Régie de l'assurance-automobile. Il donnait encore plus de détails sur les logiciels d'exploitation et leurs composantes: "L'usage de certains programmes de service très spécialisés (utilitaires) permettant de modifier ou de détruire des données ou des programmes ne fait pas l'objet d'une autorisation particulière et la régie etc."

C'est à la page 133 du rapport de 1985.

En ce qui concerne le ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, qu'on se comprenne bien. Ce n'est pas un blâme vis-à-vis de la Commission d'accès à l'information. Ses ressources ne lui permettent pas de contacter chacun des 3600 organismes, chacun des ministères du gouvernement ou chacun des principaux organismes et de vérifier auprès d'eux les...

J'aurais tendance peut-être, je ne sais pas, mais, en tout cas, à faire une réflexion sur la possibilité pour la commission, dans le cadre de son programme de vérification, de s'attaquer - je le suggère bien modestement, parce qu'il y a des arguments pour et contre - aux principaux réservoirs d'information que constitue notamment - je le donne comme exemple - le ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu. Combien est-ce qu'il doit y avoir de personnes et de fichiers là? 700 000 personnes aujourd'hui, grosso modo, dépendent directement ou indirectement de l'aide sociale. Je ne parle pas de familles, je parle de personnes. Alors, cela commence à faire... Étant donné les enquêtes effectuées par ce qu'il est convenu d'appeler les "boubou macoutes" qui vont chercher des informations on ne peut plus directement et que ces informations sont souvent colligées dans un dossier qui, lui-même, entre dans l'ordinateur, je vais vous dire ceci: le contrôle de l'information au ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu est extrêmement important. Mais j'en fais simplement un objet de réflexion. C'est tout. Mais étant donné la puissance du réservoir d'information, il n'y a pas de doute que cela devrait... En tout cas, quant à nous, parlementaires, cela excite notre curiosité. Je ne sais pas s'il y a d'autres interventions sur ce sujet-là.

Le Président (M. Trudel): M. le député de Viger.

M. Maciocia: J'ai seulement une question. Étant donné qu'on a parlé de 10 000 renseignements par mois de la RAAQ et tout cela, est-ce qu'on pourrait connaître la position de la commission vis-à-vis de ces renseignements.

M. Pépin: Vous voulez dire notre position vis-à-vis de ces transferts. Je vais essayer d'être le plus précis possible. La loi dit que les renseignements personnels détenus par un organisme public, en l'occurrence la Régie de l'assurance-automobile, sont confidentiels, à moins que la personne ne consente - la personne concernée - à les divulguer.

Alors, là, il y a deux problèmes dans le cas de la RAAQ. Il y a le problème du consentement un peu bidon. C'est-à-dire, juridiquement, est-ce que ce type de consentement est valable? Il y a ce problème. Il y a le deuxième problème qui est celui que le Code de la sécurité routière donne à la RAAQ un certain nombre

d'autorisations globales. N'est-ce pas monsieur?

Enfin, on donne à la RAAQ non seulement la permission, mais le devoir même de transmettre à la police ou à d'autres un certain nombre de renseignements.

M. Filion: Mais les chiffres de 10 000 excluent ceux que l'on donne à la police, par exemple.

M. Pépin: II y a deux volets à cela. Quant à nous, notre position est toujours la même. Il s'agit de limiter de la façon la plus rigide possible les transferts de renseignements sans le consentement des personnes. À cela, on nous oppose très souvent l'exigence d'autres lois, des ententes, sur lesquelles on doit donner un avis ou, encore, on nous dit: C'est pour appliquer notre propre politique, à nous, de sécurité routière ou autre chose qu'on a besoin de la collaboration d'autres. C'est tout cela qui exige de la part de la commission souvent beaucoup d'analyses et d'examens de ces problèmes avant d'en arriver è trouver exactement la situation réelle.

Notre position là-dessus, comme sur autre chose, viendra à mesure que nous poursuivrons notre politique de vérification où on peut même émettre des ordonnances pour arrêter les transferts ou même pour détruire les dossiers.

M. Maciocia: Vous avez parlé tantôt de consentement bidon.

M. Pépin: Oui.

M. Maciocia: Je le comprends. Mais la commission a-t-elle des moyens pour arriver, disons, à régler ce problème de consentement bidon?

M. Pépin: D'abord, il y a un débat légal qui se fait lorsqu'une compagnie d'assurances estime avoir le consentement de la personne et que la personne estime ne pas l'avoir donné. Notre problème, c'est un plaignant qui dit: Je n'ai pas donné mon consentement; ou: La signature qui apparaît là n'est pas la mienne. Lorsque nous avons un tel cas, nous pouvons intervenir, même sur le plan pénal. Mais il faut d'abord établir cela.

M. Maciocia: D'accord. Mais s'il existe vraiment, c'est très difficile d'avoir, comme vous venez de dire, quelqu'un qui n'ait pas signé réellement. Je suis convaincu que ces gens-là signent pour être protégés. Vous savez très bien qu'il n'est pas facile aujourd'hui de s'assurer à un certain moment si une compagnie vous refuse son assurance; en trouver d'autres devient très difficile.

Alors, à ce moment-là, la personne est obligée de signer et, comme je le disais tantôt, il devient très difficile pour vous de savoir s'il y a quelqu'un, parmi les centaines ou les milliers qui ont signé ce formulaire, qui n'a vraiment pas signé. À ce moment-là, que devrait faire la commission pour arrêter...

M. Pépin: Le pouvoir? Nous avons un pouvoir d'ordonnance. Nous pouvons ordonner, par exemple, à la RAAQ, de cesser tout transfert. Si la RAAQ poursuit et ne respecte pas l'ordonnance, d'autres mesures peuvent être prises. Nous pouvons aussi utiliser un pouvoir de destruction de fichiers. Mais, encore là, comme je vous le dis, il s'agit toujours d'un problème beaucoup plus global qu'un cas particulier et notre souci, c'est d'essayer d'assurer la sécurité de tous les citoyens en même temps et non uniquement de répondre à la plainte d'un seul. C'est notre souci.

M. Maciocia: Parfait.

Le Président (M. Trudel): M. le député de Taillon.

M. Filion: Je pense que cela va là-dessus. C'est à suivre à plus d'un niveau.

M. Maciocia: Ah oui!

Faire connaître la loi et les services de la commission

M. Filion: Je voudrais aborder, avec votre permission, un certain volet. Vous l'aviez bien souligné dans votre mémoire, aux pages 11 et 12, et vous l'avez d'ailleurs repris dans votre texte de ce matin, ce mandat de diffusion, d'information et d'éducation concernant la loi d'accès. Vous écrivez, dans votre rapport annuel, à la page 11, première colonne: "La commission regrette cependant de n'avoir pu davantage faire connaître la loi et les services de la commission, tant par manque de ressources que faute d'un mandât explicite pour ce faire. Après cinq ans, nous constatons que l'une des plus évidentes faiblesses de cette réforme est d'être encore trop méconnue, non seulement du grand public, mais aussi des organismes assujettis eux-mêmes."

Tout comme le démontrent en partie les vérifications que vous avez faites.

Et vous continuez: "Alors que le gouvernement n'hésite pas, lorsqu'il estime que l'intérêt public le commande, à prendre les mesures énergiques pour promouvoir une réforme, il faut bien convenir que les efforts pour faire connaître les droits et obligations de la loi sur l'accès furent plutôt sporadiques et en général modestes."

Quelle solution... Bien sûr, il y a un aspect budgétaire à ces remarques que vous

faites sur ce volet éducatif, ce volet informatif de la commission. Est-ce que, dans les solutions que vous avancez, se situe uniquement une implication financière et budgétaire ou s'il y a autre chose également par rapport à cette carence que vous notez dans votre rapport? (12 heures)

M. Pépin: II y a, d'une part, une difficulté de réconcilier et d'harmoniser deux mandats. À cause de son caractère de tribunal, la commission est soumise, est contrainte à une certaine obligation de réserve. Conséquemment, elle est un peu limitée dans les efforts de promotion qu'elle peut faire sous ce volet.

Par ailleurs, elle constate que dans son mandat de surveillance et de contrôle, l'une des lacunes les plus évidentes est un manque à la fois d'information et de stimulant pour alerter les organismes et le public. Tant que le public ne sera pas alerté, tant qu'il ne sera pas très conscient de ses droits, la pression sur les organismes pour assurer ses droits sera plus faible. Donc, nous sommes un peu dans un cul-de-sac et, en plus, nous n'avons pas de mandat explicite. Nous en avons un vaguement implicite, mais nous n'avons pas le mandat explicite d'assurer l'information. Conséquemment, nous n'avons pas de budget publicitaire et nous n'avons pas non plus de ressources de service proprement dites à cet égard.

Notre solution serait peut-être, lorsqu'on étudiera l'orientation prochaine de la commission, d'essayer de régler ces problèmes, soit que ce soit un ministère ou l'Assemblée nationale elle-même, il faudra qu'il y ait un organisme quelconque qui soit responsable de renseigner la population sur ses droits. Je vous donne un exemple qu'on constate régulièrement. Nous approchons de la période des fêtes, la Commission des normes du travail va publier les annonces dans tous les médias écrits pour rappeler aux gens leur droit à des congés, leur droit à leurs normes minimales. Nous ne pouvons pas faire cela. Nous ne pouvons pas le faire, parce que nous n'avons pas le mandat explicite et nous n'avons pas non plus le budget. Je signale dans le rapport annuel qu'il y a là une lacune et qu'il faudra trouver une solution quelque part.

M. Filion: Cela me surprend que vous n'ayez pas de mandat explicite. Est-ce que, dans les pouvoirs, dans les fonctions de la commission, le texte est insuffisant pour asseoir un mandat explicite?

M. Pépin: Dans le projet de loi 65 qui a été déposé ici à l'Assemblée nationale, ce mandat explicite existait et il a été retiré. Lorsqu'une procédure comme celle-là intervient, il est encore plus clair que le mandat explicite n'existe pas.

M. Filion: Le projet de loi 65, c'est celui qui a donné lieu à la loi.

M. Pépin: Oui, c'est juste.

M. Filion: D'accord. Vous en parlez sûrement, je ne l'ai pas vu dans le rapport de mise en oeuvre, mais cela doit en faire partie.

Cela va sur cette question parce que, effectivement, je pense que vous soulevez bien le problème, une fonction d'adjudication qui incombe à la commission en même temps qu'une fonction d'information. Vous n'êtes pas le seul organisme, d'ailleurs, à vivre ce problème, mais ce n'est pas toujours facile de faire la marque entre les deux.

Je retiens quand même l'importance de l'éducation, ne serait-ce que parce que cela cadre parfaitement bien avec la médecine douce qui est la meilleure dans toutes les circonstances. Pour qu'elle soit efficace, il faut quand même avoir une chance d'afficher les prescriptions. Je pense que cela va sur ce volet informatique et éducationnel, si on veut, de la commission.

Le Président (M. Trudel): Du côté ministériel, est-ce qu'il y a des questions? Je m'associe aux remarques du député de Taillon, j'avais une question qu'il vient de poser. Je pense que cet aspect de l'éducation, vous soulignez fort bien, d'ailleurs, dans votre rapport, qu'il est respecté. C'est non seulement important, mais essentiel. Il faudra que le gouvernement trouve des moyens de vous donner les ressources nécessaires pour accomplir cette fonction tellement importante.

M. le député de Taillon, sur un autre sujet?

Déclarations de fichiers

M. Filion: Oui, sur un autre sujet. Oui, mais, en tout cas, dans mes notes j'en suis rendu, peut-être que je pourrais donner la parole à votre représentant dont le nom m'a échappé tantôt... Pourriez-vous m'éclairer, M. le Président?

Le Président (M. Trudel): M. Clarence White.

M. Filion: M. Clarence White, concernant les fichiers.

M. White: Je peux vous faire état des déclarations de fichiers au 22 octobre 1987; ce sont les statistiques que j'ai au 22 octobre. 5ur 26 ministères, j'ai 26 ministères qui nous ont fait des déclarations de fichiers.

M. Filion: Le ministère du Revenu... M. White: Le ministère du Revenu nous

a fait ses déclarations de fichiers au cours de l'été.

M. Filion: D'accord.

M. White: Alors, le ministère du Revenu nous a fait ses déclarations de fichiers.

Le Président (M. Trudel): Je vous disais tantôt, M. le député de Taillon, qu'on pourrait peut-être mettre des espoirs dans le nouveau ministre.

M. Filion: Oui.

Le Président (M. Trudel): Des espoirs, non pas désespoir.

Des voix: Ha! Ha! Ha!

Le Président (M. Trudel): M. White, je m'excuse...

M. White: Sur 148 organismes gouvernementaux, il y en a encore 25 qui ne nous ont pas encore donné signe de vie. Quant aux établissements de santé et services sociaux, sur un total de 733, on en a 110 qui ne nous ont pas produit de déclarations de fichiers. Concentrés au niveau des centres d'accueil: 51. Il me reste encore 34 centres hospitaliers et 23 CLSC. Quant aux établissements scolaires, sur un total de 463 organismes, 54 n'ont pas fait de déclarations de fichiers. On retrouve dans cela 25 commissions scolaires, 25 établissements privés subventionnés sur 186, j'ai trouvé cela bon et je pense qu'à la commission tous les gens sont d'accord avec cela. Les établissements privés subventionnés étaient les établissements dont on s'attendait à moins de réponse. Je devrais vous dire qu'au lieu de 54, c'est 53, parce que je vois que j'avais deux universités dans mes statistiques et, depuis hier, il reste une université seulement, l'Université du Québec à Trois-Rivières; cette dernière nous a produit ses déclarations de fichiers. 5ur le plan municipal, sur 2248 organismes, 514 au 22 octobre n'avaient pas encore fait leurs déclarations de fichiers. Sur cela, il y a 327 municipalités et 126 offices municipaux d'habitation.

M. Filion: Est-ce que je dois comprendre que le Secrétariat aux affaires intergouvernementales qui, lui aussi, était délinquant l'an dernier, est...

M. White: Le Secrétariat aux affaires intergouvernementales n'est plus considéré comme étant un organisme, le secrétariat relève du Conseil exécutif...

M. Filion: D'accord.

M. White: ...alors, n'est plus considéré comme étant un organisme.

M. Filion: Qu'en est-il des corps policiers maintenant?

M. White: Je n'ai pas les derniers chiffres, je n'ai pas la dernière étude, parce qu'on est en train de travailler ce secteur. Je sais que certains corps policiers nous ont fait des déclarations de fichiers, d'autres ne l'ont pas fait. Quand je dis: Certains nous en ont fait, je peux vous dire que le SPCUM a fait ses déclarations de fichiers, la ville de Longueuil a fait ses déclarations de fichiers. Il y a un certain nombre de petites municipalités qui nous ont fait de bonnes déclarations de fichiers, mais il y a des municipalités importantes qui n'ont pas fait de déclarations de fichiers de la police sur les opérations policières. On ne parle pas de personnel policier, on parle des opérations. Il y a la ville de Laval qui ne nous a pas fait de déclarations de fichiers. Il y a la Sûreté du Québec qui n'a pas fait de déclarations de fichiers, c'est-à-dire le ministère du Solliciteur général pour la Sûreté du Québec.

M. Filion: D'accord. Alors, peut-être pour résumer, ces fichiers feront partie d'un répertoire de fichiers, je pense qu'on avait avancé à un moment donné le chiffre de 10 000 fichiers qui seraient détenus grosso modo par 3600 organismes publics - je vois que le président sourit. Est-ce qu'il serait encore exact de dire qu'il y a environ 10 000 fichiers de renseignements détenus par les 3600 organismes publics, évidemment, des fichiers de renseignements sur les citoyens et citoyennes du Québec? Est-ce que ce chiffre correspond un peu à la réalité?

Ma question suivante est un peu dans le même souffle. Quand la publication de ce répertoire des fichiers peut-elle être prévisible? Quelle forme prendra-t-elle?

M. White: Je peux vous répondre sur le nombre de fichiers. Au 22 octobre, pour 3618 organismes assujettis à la loi, nous avons reçu 11 039 déclarations de fichiers.

M. Filion: Au maximum donc, cela va peut-être rejoindre plutôt 15 000. En tout cas, cela va être plus près de 15 000 que de 10 000 compte tenu qu'il y a encore des délinquants.

M. White: Oui. Vous avez effectivement raison.

Le Président (M. Trudel): Excusez-moi, M. White. Il y avait de l'activité dans mon coin. Pourriez-vous répéter votre chiffre?

M. White: Nous avons reçu 11 039

fichiers pour 3618 organismes. Mais sur cela, il faut dire qu'il y en a seulement 2915 qui ont fait des déclarations. Alors, c'est 11 000 pour 2915.

M. Filion: D'accord pour 2915. Vous avez dit que c'est 3000 combien? Je m'excuse.

Une voix: C'est 3618.

M. Filion: Ah! 3618. Donc, on va probablement être près de 15 000.

Le Président (M. Trudel): 15 000.

M. Filion: La deuxième partie de ma question était celle-ci: quand peut-on attendre la publication de ce répertoire des fichiers et quelle forme est-ce que cela aura? Ce sera quand même un document assez imposant que plusieurs personnes vont vouloir consulter.

Tout en vous remerciant pour les statistiques sur les organismes délinquants qui sont très bien faites, qui viennent de nous être remises ainsi que le tableau récapitulatif, M. le Président.

M. Pépin: Alors, en ce qui concerne le répertoire, M. Filion, j'ai souhaité presque jusqu'à la dernière minute pouvoir vous en faire cadeau aujourd'hui même. Malheureusement, il y a un petit bout de l'opération qui nous échappe. C'est que c'est le service des publications gouvernementales qui a présentement la matière brute. On m'informait ces jours-ci que c'était pour le début de novembre? Non? Le début de décembre, je m'excuse.

Le Président (M. Trudel): Cela nous fera un cadeau de Noël.

M. Pépin: Alors, la première partie du répertoire ne touche que les organismes gouvernementaux. Il y aura ensuite les organismes sociaux, santé et services sociaux, scolaires et municipaux dans des répertoires différents.

Quelle sera la forme exacte? Je sais qu'il y a eu des discussions avec les spécialistes des publications gouvernementales. Je crois bien qu'on a dû retenir le meilleur format possible mais, malheureusement, je ne suis pas en mesure de vous dire exactement si cela prendra une forme ou une autre. Je ne m'en souviens plus.

M. Filion: Comment cela va-t-il être divisé?

M. Pépin: Cela va être divisé par ministères et organismes gouvernementaux, le premier.

M. Filion: D'accord. Ensuite, il y aura évidemment le ménage dans ces fichiers. Il y a du recoupement, de l'information de trop, des fichiers inutiles, etc. Est-ce que je me trompe quand je dis qu'il y a quand même une épuration de ce nombre de fichiers qui devra se faire?

M. Pépin: Sans aucun doute. D'ailleurs, dès hier, nous avons rencontré le secrétaire de la commission, M. White et moi-même, les dirigeants du ministère des Affaires culturelles. Nous avons convenu de discuter ensemble d'une formule efficace pour faire cet éloge nécessaire éventuellement, parce que notre loi prévoit la destruction des renseignements personnels devenus inutiles, mais sous réserve de la Loi sur les archives. Là il faut harmoniser les deux volets de l'administration québécoise sous cet angle, en particulier.

M. Filion: Ça va. Je vous remercie. On va attendre, M. le Président, ce cadeau de Noël; juste le feuilleter, ça va être un peu long. On peut avoir des surprises également. De voir tous les fichiers dans ces 15 000 fichiers de renseignements, ça veut dire qu'un citoyen va se retrouver d'abord dans combien de fichiers. On va être surpris de voir dans combien de fichiers on se retrouve. Quand je parlais un peu plus tôt, dans mes remarques préliminaires, M. le Président, de cette espèce de contrôle intégré du citoyen, imaginez-vous la force du fichier qui regrouperait les données de ces 15 000 fichiers. Quand je parlais de contrôle, de surveillance intégrée du citoyen, c'est de cela que je parlais. Pour cela, on parle uniquement d'organismes publics. Cela m'amène à poser une question.

Le Président (M- Trudel): M. le député, vous permettez une remarque. Il y a également une question au président de la commission. Tout le monde s'entend sur ce chiffre, 15 000 ou autour de. Un peu plus, un peu moins, mais sûrement autour de cela. Pour une population de quoi? De 6 000 000... (12 h 15)

M. Filion: De 6 500 000, de 6 750 000. De 6 500 000.

Le Président (M. Trudel): De 6 500 000. Avez-vous une idée de certains chiffres comparatifs ailleurs? Soit au Canada, soit ailleurs. Vous parliez tantôt de vos rencontres avec vos collègues des autres provinces. Enfin, du Canada et surtout de l'étranger. A-t-on une petite idée si on se situe dans la bonne, la moins bonne ou la très bonne moyenne? La très bonne moyenne, ce n'est pas nécesairement une bonne chose dans ce cas-là.

M. Pépin: Je crois que dans le cas de l'accumulation de renseignements personnels, c'est à peu près la même chose dans l'ensemble des démocraties occidentales, dans le sens que nous fonctionnons tous un peu avec les mêmes méthodes de gestion. Il faut bien quand même se rappeler que c'est un type de société que nous avons choisi. De la naissance à la mort, tous les citoyens ont accès à l'un ou l'autre des nombreux programmes universels, que ce soit l'assurance-santé ou les allocations familiales. Ensuite, au cours de la vie, il y a toujours à un moment ou l'autre un programme auquel les citoyens participent, soit obligatoirement, on n'a pas le choix de participer au Régime de rentes, ou volontairement par exemple, profiter de l'aide sociale.

Cette situation fait en sorte que, nécessairement, l'administration collige les renseignements sur les individus à diverses étapes de leur vie et pour diverses fins. Si on n'avait pas de programme de prêts et bourses, le ministère de l'Éducation aurait moins de renseignements sur les étudiants, mais c'est un choix de société que nous avons fait. On peut multiplier comme cela les exemples. Je crois que si on prend d'autres gouvernements, d'autres États qui ont des programmes un peu similaires aux nôtres, ils ont nécessairement à peu près les mêmes obligations de colliger des renseignements.

Ce qui est nouveau et ce qui fait notre préoccupation, c'est que, maintenant, c'est informatisé, c'est très facile d'accès et un dossier peut s'enrichir - si on me passe l'expression - s'engraisser, devrais-je plutôt dire, aisément et surtout peut s'échanger facilement. C'est là qu'est la préoccupation. Ce n'est pas tellement le cumul de ces renseignements comme le fait qu'ils peuvent être entreposés de façon éternelle et qu'il n'y a pas de droit à l'oubli là, c'est cela le problème.

Le Président (M. Trudel): Je suis tout à fait d'accord avec votre point de vue, M. le président. M. le député de Taillon, est-ce que vous avez une autre question?

M. Filion: Oui. Effectivement, je partage un peu votre point de vue, d'ailleurs c'est ce que j'évoquais, le fait que c'est normal, cela en prend des renseignements, mais imaginez la force de concentration de ces fichiers mis ensemble. On parle uniquement d'organismes publics. C'est ce que j'allais dire. On ne parle pas des organismes privés. On parle de 3600 organismes publics, ici. Les organismes privés, c'est un autre secteur et je voudrais un peu l'aborder avec vous. On sait que la loi ne concerne que le secteur public, la juridiction de la commission s'arrête en somme à ces 3600 organismes publics. Dans votre rapport de mise en oeuvre, j'anticipe peut-être un peu et le président me rappellera à l'ordre, mais je sais que c'est une question qui l'intéresse, dans votre rapport de mise en oeuvre, dis-je, aux pages 66 et suivantes vous écrivez: II s'agit là d'une question qui mérite un examen approfondi par les autorités concernées. Il y a un groupe de travail interministériel qui existe dirigé apparemment par le ministère de la Justice auquel la commission, sauf erreur, est associée. Est-ce que les membres de la commission peuvent nous dire où en est la réflexion à ce niveau? Est-ce que la commission, d'abord, avec un mandat explicite, pour reprendre le mot de tantôt, et des ressources appropriées, serait dans la possibilité de mener à terme une mission aussi importante que celle de rejoindre les organismes privés?

M. Pépin: Je pense que mes collègues me permettront peut-être de tenir pour acquis un consensus qui se dessine chez nous. Â compter du moment où la raison d'être, l'adhésion de la commission à la protection de la vie privée ne fait aucun doute et que notre mandat se limite au secteur public, il est bien sûr que la vie privée, c'est un tout. Ce n'est pas sectionné. La vie privée est aussi importante, le dommage est aussi fort lorsqu'il est commis par une entreprise privée que par un organisme public. Donc, on ne peut pas ne pas être d'accord avec une protection accrue de la vie privée. Cela dit, est-ce que la commission souscrit à un programme, a une mesure dans l'immédiat ou dans un avenir prévisible qui engloberait le secteur privé pour la protection des renseignements personnels? Sur ce, nous n'avons pas pris d'engagements, nous ne sommes pas encore, je pense, en mesure de fournir au gouvernement des indications, de meilleurs outils possible. Il y a un problème de juridiction tout d'abord, il y a un problème de frontière, si on veut. Même si une loi québécoise interdisait à American Express d'utiliser les renseignements que cette firme collige à chaque fois que vous utilisez votre carte, elle n'aurait qu'à s'installer aux îles Cayman et, par un satellite, faire la même chose. Il y a toutes sortes de problèmes de ce genre-là. Ce que j'ai dit régulièrement chaque fois que j'ai été interrogé là-dessus, c'est que le gouvernement doit, par contre, amorcer sa réflexion là-dessus et se tenir prêt parce que, nécessairement, d'ici, je pense, dix ans encore mais nécessairement un jour, à l'échelle canadienne, des initiatives seront prises dans ce sens-là. La seule chose qui retient actuellement, c'est qu'aux États-Unis, assez curieusement, ce n'est pas du tout une préoccupation et c'est aux États-Unis que sont situées les plus grandes banques privées de renseignements sur les personnes et ce

n'est pas du tout une préoccupation publique, très peu, dans le secteur privé, j'entends.

À cause de cela évidemment, il y aura toujours un peu un problème ici au Canada et au Québec parce que, comment faire pour protéger ici ce qui circule abondamment à l'échelle continentale?

M. Filion: Dans un contexte de libre-échange, pourrait-on même ajouter... Mais en attendant, il y a quand même des problèmes particuliers que vous rencontrez eu égard à votre absence de juridiction dans le secteur privé. Je pense au cas Citicom, sans me prononcer du tout, je ne sais pas s'il est réglé d'ailleurs, alors je ne veux pas me prononcer sur le fond, mais uniquement pour l'expliquer aux membres de la commission en même temps. Un citoyen demande un renseignement à la ville de Québec... C'est au sujet d'un projet de développement domiciliaire ici à Québec, et la ville de Québec répond: Le document en question qui est le plan de développement à la ville de Québec, cela nous tente plus ou moins de le donner et puis, on le remet au promoteur immobilier qui est situé en Ontario. Comme la commission n'a évidemment pas juridiction sur les organismes privés en Ontario, cela pose un problème, mais je ne veux pas dire qu'il n'y a pas de... Je ne veux pas me prononcer du tout sur les faits de la cause, mais uniquement expliquer qu'entre-temps, quand je dis entre-temps, je veux dire jusqu'à ce qu'une décision ou une orientation définitive soit prise sur l'ensemble du problème de la juridiction sur le secteur privé, il demeure que des cas vont se présenter sur une base ponctuelle et qui pourraient quand même devenir de plus en plus importants.

M. Pépin: Uniquement pour vous donner une précision, M. le député, en ce qui concerne le cas que vous venez de soulever, je vous informe, de même que vos collègues, que Mme Giroux a signé une décision éblouissante de sagesse dans le cas que vous avez cité et on vous en fera parvenir une copie volontiers si cela vous intéresse.

En ce qui concerne le secteur privé, j'ajoute que notre préoccupation à ce moment-ci... On parlait tout à l'heure des consentements qui sont donnés, par exemple, aux assureurs pour obtenir des renseignements, pas uniquement à la RAAQ. Cela peut être n'importe où. Lorsqu'on signe, on autorise même les assureurs à aller dans les hôpitaux chercher votre dossier, dans le cas des assurances-vie, dans certains cas, etc.

Notre préoccupation à nous, c'est qu'une fois que l'assureur a obtenu le renseignement, il peut s'en servir uniquement pour prendre une décision sur la police qu'il offre à son client. Mais il peut aussi garder ce document, garder ce renseignement, l'échanger avec d'autres, enrichir, engraisser une banque commune. Cela peut se promener à l'échelle de l'Amérique. C'est là qu'est notre préoccupation; là, on n'a pas de juridiction.

C'est pour cela que c'est à la source qu'on peut toujours intervenir parce que, ensuite, on perd la place. Cela disparaît dans le décor. On sait très bien que demain matin, aujourd'hui même, on peut aller acheter... Il y a des gens qui font un commerce de banques de noms avec divers types de renseignements. Où sont-ils pris, ces noms-là? Très souvent, ils proviennent du secteur public par ce genre de situation-là.

Cela, c'est notre préoccupation. Si nous avons une intervention ponctuelle à faire pour la protection du citoyen face au secteur privé, ma première recommandation, ce sera de s'occuper d'abord de cela, d'exiger de donner au gouvernement un certain pouvoir sur les renseignements qui proviennent des services publics, mais qui sont ensuite dans les mains des entreprises privées.

Le Président (M. Trudel): ...M. le député d'Arthabaska?

M. Gardner: II m'a répondu. Sur la vente... Il y en a qui vendent cela?

Vente de données informatiques par le ministère de la Justice

M. Filion: II me reste deux sujets à traiter. Le premier, c'est la vente des données informatiques par le ministère de la Justice. J'en ai parlé aux membres de la commission lors de l'étude des crédits du ministère des Communications. À l'époque, vous m'aviez dit: II y a tout le problème de savoir si la commission a juridiction sur les greffes. Vous m'aviez dit à l'époque: On va vérifier. C'est un examen qui est en cours à la commission. La commission peut-elle nous informer de cet examen et nous dire également si elle a examiné le problème que je lui ai soumis qui est le suivant: le ministère de la Justice vend à des firmes de crédit les renseignements colligés dans les greffes des palais de justice, sur des plaintes non seulement d'ordre pénal, mais également d'ordre civil, possiblement matrimonial, etc. D'ailleurs, cette pratique n'est pas récente. Elle date déjà et, encore une fois, ce n'est pas quelque chose de récent. J'avais posé cette question au président lors de l'étude des crédits. Je ne sais pas s'il peut, à ce moment-ci, m'informer de l'état de la réflexion de la commission. Est-ce que des démarches ont été entreprises? Est-ce que vous avez vérifié le dossier?

M. Pépin: D'abord, il n'y a pas eu une vérification comme telle. Nous devons choisir un peu notre programme et cela n'en a pas

fait partie, pour une raison bien simple. Il y a, à la base de cette question, un problème d'interprétation légale. Les tribunaux ne sont pas assujettis à la loi. Le greffe des tribunaux est assuré par le ministère de la Justice qui, lui, est assujetti à la loi. Est-ce que le document accumulé par le greffe est un document judiciaire du tribunal ou administratif du ministère? On n'est pas entré dans cette question. (12 h 30)

Une chose est sûre, et je l'ai dit ici devant cette commission et je le redis volontiers: il y a quelque chose d'un petit peu indécent dans cette manière d'agir, dans le sens que, même si c'est public au greffe, au plumitif du palais de justice, un certain nombre de renseignements sur les individus, on exporte ce caractère public, on le publicise même en en faisant le commerce. Là, si la loi n'est pas heurtée directement, à tout le moins, son esprit l'est, et je crois que le ministère de la Justice a été, autant par vous, M. le député, que par nous et par d'autres, alerté à cette question. La réponse du ministère de la Justice est que, à partir du moment où un document est public, il est public tout le temps. Alors, nous avons, dans notre rapport ici, examiné ce problème et nous proposons une solution: interdire le caractère, si on veut, "exportable" d'un document public.

M. Filion: Parce que, encore une fois, mon point est le suivant: premièrement, dans les greffes de palais de justice il y a de l'information sur toutes les poursuites qui auraient pu être intentées, les poursuites frivoles, les poursuites qui sont réglées, les poursuites... je vous poursuis pour libelle -mais la poursuite pour libelle, elle va être là votre avocat oublie de produire sa déclaration de règlement hors de cour, la poursuite va rester là. Et, si je suis une compagnie, je vous poursuis. Encore une fois, il y a un règlement. C'est payé. Mais vous n'avez pas pris d'avocat, vous avez payé directement à la compagnie. L'avocat était paresseux, il n'a pas produit de désistement de sa plainte. Cela va être encore dans votre fichier et ça va aller au bureau de crédit et quand vous allez à la banque vous ne saurez pas que c'est à cause de ça qu'on vous refuse un prêt. Premièrement.

Deuxièmement, les informations qui sont contenues dans les greffes de palais de justice ont été colligées pour des fins judiciaires. Et ça j'ai été absolument frappé - là où je rejoins vraiment, en tout cas, je dépasse votre surprise quant à moi et le caractère indécent - je trouve ça tout à fait inacceptable que le ministère de la Justice se prête au commerce suivant. J'ai obtenu les détails. Le ministère de la Justice vend, évidemment, en masse, ces données judiciaires compilées dans les palais de justice. Il y a quatre contrats qui existent entre le ministère de la Justice et les firmes que je vais énumérer pour la production et la livraison en masse de données judiciaires. D'abord avec la compagnie Écho de la cour inc.

Une voix: Le petit journal.

M. Filion: Oui, c'est le petit journal. D'ailleurs, ils ont fait allusion au fait que le député de Taillon trouvait que ça n'avait pas d'allure. Mais là je leur ai envoyé une lettre. Je ne sais pas s'ils vont en faire écho dans leur journal. Avec Écho de la cour, un contrat au montant de 600 $ par mois. On voit que les chiffres ne sont pas faramineux. Ce n'est pas ça qui va régler les problèmes de Gérard D. Levesque quand les rapports d'impôt vont être moins élevés au mois d'avril à cause du krach. Donc, un contrat avec Écho de la cour inc., au montant de 600 $ où les données fournies sont utilisées pour la publication du journal Écho de la cour. Avec la compagnie Sokuedit inc., un contrat de 300 $, un autre de 600 $ par mois pour la production du journal La Semaine commerciale. C'est intéressant ça, La Semaine commerciale. La Semaine commerciale parle de l'activité commerciale. Voici la liste des poursuites intentées contre Y, et tout ça. Un autre contrat avec la compagnie Acrofax. Excusez, il y a deux contrats avec Sokuedit: un de 300 $ et un autre de 600 $ par mois, ça fait trois. Le quatrième contrat avec la compagnie Acrofax, 600 $ par mois. Ce que dit le contrat, ce qu'il prévoit, c'est que les informations seront utilisées pour les fins d'affaires de la compagnie. La compagnie Acrofax, on n'a pas de contrôle là-dessus. Sur quoi on a le contrôle, ce sont les ministères, etc.

Une fois que les données sont rendues chez la compagnie Acrofax ou toute autre compagnie, comme le mentionnait bien le président tantôt, on en perd complètement le contrôle. Le total du revenu des quatre contrats, c'est 25 200 $ par annnée, dans un budget pour le ministère de la Justice, ou celui du Solliciteur général, en tout cas, cela rejoint le milliard. Je trouve cela tout à fait inacceptable. Je ne suis pas un spécialiste encore de la loi d'accès à l'information, mais je vous le dis moi, en tout cas, cela heurte l'esprit de la loi, nous dit le président, puis, malgré tout, le ministère de la Justice persiste. Il faut dire qu'il y a possibilité que ces informations soient transmises à SOQUIJ, nous a dit le ministère de la Justice. Quant à nous, que la Société québécoise d'information juridique, qui pourrait peut-être décider de mettre fin à ces contrats, c'est la chose à faire. Parce que des informations, on les collige aux fins pour lesquelles elles sont colligées, autrement c'est pervertir le

sens des fichiers qui sont contenus dans les palais de justice.

Je ne sais pas si vous voulez réagir, M. le président, je ne vous le demande pas parce que pour moi, cela s'adresse au ministère de la Justice. Cela fait plusieurs fois, les gens le savent, j'ai avisé le ministre, il ne bouge pas. Par contre, d'un autre côté, dans Le Devoir du samedi 26 septembre j'ai trouvé fantastique de voir qu'en France, la Commission nationale de l'informatique et des libertés, un organisme d'État, veille à la confidentialité des dossiers de la justice. Cela va beaucoup plus loin que ce qu'on demande d'arrêter de vendre à Acrofax qui revend à des organismes de crédit.

En France, ce que nous dit ici la Presse canadienne, bien sûr... mais M. Alain Simon, qui est un membre de la CNIL, en France, devant la conférence internationale des commissaires, que vous avez eu l'occasion d'écouter directement... Toutes ces informations avaient établi des profils qui, après, s'en vont dans les banques et dans les organismes avec qui on fait affaire. Alors, le profil de M. Untel est mauvais parce qu'il a reçu deux poursuites judiciaires en 1978. La commission veille toujours à ce qu'aucune décision ne soit prise sur le seul fondement d'un profil. C'est ainsi qu'il serait illégal pour un organisme propriétaire de logements de confectionner une liste de mauvais locataires ou de mauvais payeurs. C'est un problème qu'on a vécu ici au Québec. Cela va loin, parce qu'ils ne veulent pas, je donne un exemple... les jugements des tribunaux, lorsqu'ils sont informatisés ne doivent pas contenir les noms des victimes de viol, d'attentat au meurtre, ni ceux des victimes d'accidents qui ont subi des incapacités physiques importantes, non plus que ceux des personnes citées de façon diffamatoire dans certains ouvrages. Imaginez-vous, en France, ils sont rendus à interdire la publication des noms des victimes d'accidents qui ont des handicaps, alors qu'ici, on prend le greffe du palais de justice, on le vend à des compagnies pour 400 $ par mois et puis cela contient manifestement la liste des demandeurs qui ont subi des handicaps à la suite d'accidents de toute nature. Je me dis: Dans ce secteur-là, on a vraiment un bout de chemin à faire. Si la commission peut agir, je l'invite à le faire. Si elle ne peut pas agir, parce que la loi n'est pas suffisamment claire, c'est ce que j'ai cru comprendre de l'intervention du président, c'est pour cela que je dis ce que je dis ce matin. J'invite d'ailleurs les membres de la commissien à partager mes propos. J'ai sensibilisé le ministre responsable à quelques reprises, mais cela ne bouge toujours pas. Voilà!

M. Pépin: Le seul commentaire que je peux faire, M. Filion, là-dessus, c'est que vous avez cité deux exemples classiques d'effets pervers de l'informatique. Il y a à peine cinq ans, probablement que ce n'était pas un problème au ministère de la Justice, parce que ce n'était pas informatisé. Maintenant que c'est informatisé, cela devient facile. Voici un autre problème qui s'en vient. En France, M. Simon nous a parlé de cela aussi, c'est la mise sur la saisie informatique des décisions judiciaires, des décisions de la cour. Cela aussi peut devenir assez percutant comme effet parce qu'actuellement il faut quand même aller l'acheter la décision de fa cour, elle est sur support papier, mais lorsque l'on pourra avoir un résumé sur support informatique en pitonnant chez soi, la justice devient très accessible, mais il peut aussi y avoir d'autres effets imprévisibles.

M. Filion: J'ai juste une dernière question.

Le Président (M. Trudel): Est-ce que cela porterait sur l'incident de l'Assemblée nationale il y a quelques semaines?

M. Filion: Vous avez deviné.

Le Président (M. Trudel): J'avais deviné. Je vous laissais lire parce que j'avais l'intention d'en parler, mais allez-y, puis je compléterai.

M. Filion: Vous l'avez deviné. On siège souvent ensemble à différents... On change de siège à l'occasion, alors il y a des présidents qui ont des atomes crochus à l'occasion.

Une voix: Pas croches,

Identification personnelle

M. Filion: On essaie. Or, vous nous aviez parlé, la dernière fois, du problème de l'utilisation des "identifiants" - je ne sais pas si c'est un mot. Vous nous citiez un cas intéressant, quand vous êtes entré à l'Assemblée nationale, on vous a demandé certaines choses, je pense que c'était le numéro de l'assurance sociale ou celui de l'assurance-maladie qui sont de plus en plus fréquemment utilisés comme "identifiants" et constituent une clé d'entrée à de vastes réservoirs de renseignements personnels. Vous nous faisiez part en juillet dernier de vos inquiétudes là-dessus. En somme, y a-t-il des protestations courtoises qui ont été effectuées et qui ont donné des résultats? Je sais que dans votre rapport de mise en oeuvre, vous proposez des pistes qui sont quand même intéressantes pour l'avenir. J'en cite quelques-unes: limiter le pouvoir des organismes d'exiger une pièce d'identité

particulière; laisser aux citoyens la liberté de s'identifier au moyen de la pièce de son choix, obliger chaque organisme à constituer son propre système de codification. Or, je vous inviterais peut-être très librement à nous faire part de vos observations sur... D'abord quand vous êtes entré à l'Assemblée nationale ce matin, quand vous êtes entré, est-ce qu'on vous a demandé des pièces d'identité?

M. Pépin: II n'y a rien de changé. M, Filion: II n'y a rien de changé.

M. Pépin: Évidemment, c'est un problème général. Il faut quand même reconnaître que là aussi le législateur a des attitudes contradictoires. D'une part, c'est tabou en régime parlementaire britannique, enfin, en régime de tradition démocratique britannique, d'avoir des cartes d'identité formelles comme cela existe en France, en Allemagne, en Autriche ou ailleurs. C'est tabou, on n'en a pas.

Donc, si on n'en a pas, on n'est pas obligé d'en produire, parce qu'on n'en a pas. Mais en même temps, le législateur dit un peu partout: Ce service est accessible à quelqu'un qui justifie son identité. Puis il autorise des organismes à faire identifier les gens. Finalement, ce qui arrive, c'est que les "identifiants" qui circulent, les plus communs, sont utilisés et cela entre dans les moeurs.

Je crois qu'il y a une réflexion de base là-dessus. Si on continue de dire aux gens de s'identifier, un peu partout, il va falloir qu'on dise quel outil d'identification devient l'outil légal. Si c'est le passeport, on va tous le traîner notre passeport.

On arrive à l'Assemblée nationale. J'ai remarqué que Mme Giroux a présenté sa carte de la RAMQ. Moi, j'ai une carte de fonctionnaire que j'ai fait faire parce qu'un jour, alors que M. Bertrand était ministre et qu'il était aussi leader parlementaire, il m'a demandé de venir le rencontrer ici à 23 h 30 dans un marathon de fin de session. Je n'ai jamais pu entrer à l'Assemblée nationale. On me disait: II faut vous identifier. J'ai dit: C'est le ministre. Ils ont dit: Le ministre ne répond pas à son bureau. J'ai dit: II est en Chambre. Je n'ai pas pu. C'est là que je suis allé chercher ma carte de fonctionnaire. Comme cela, j'entre sans problème. Mais peut-être que Mme Wallace a présenté son permis de conduire. Je ne sais pas. C'est un peu aux caprices des gens. C'est un premier problème. Il faudra que le législateur se branche un jour. Si on demande aux gens de s'identifier, il faudra dire avec quoi.

Une autre chose, c'est que la solution fédérale, la proposition du comité des Communes, au fédéral, qui étudie la Loi sur la protection des renseignements personnels veut rendre illégale l'utilisation des cartes de la RAMQ ou du numéro d'assurance sociale. Et encore là, c'est d'après moi, un peu angélique de faire cela. Parce que la banque, la société de fiducie ou la compagnie d'assurances vous oblige à donner votre numéro d'assurance sociale. Ensuite, ces entreprises - nous n'avons pas juridiction sur elles - peuvent faire ce qu'elles veulent. Avec le résultat que le numéro d'assurance sociale est devenu "l'identifiant" le plus généralisé et peut-être qu'il faudrait que le gouvernement fédéral dise: La carte d'identité au Canada, c'est le numéro d'assurance sociale. On le saurs. C'est là qu'est le problème.

Je pense que vous avez pleinement raison de vous en soucier parce que c'est une porte d'entrée, c'est une clé dans de très grosses banques. Là, tout le monde a la clé. Alors, même si on met des policiers devant la porte, quand tout le monde a la clé, il y a plus de chance que cela passe.

Le Président (M. Trudel): II y a un deuxième problème. Le problème qu'on a vécu cet été à l'Assemblée nationale, tout le monde ou presque l'a lu dans les journaux, ce bonhomme qui donne son numéro d'assurance sociale en entrant - j'allais dire comme vous et moi, on a en principe un truc, vous avez une carte - et qu'on arrête à la sortie. Le problème qui s'est posé, en plus de se demander ce que l'on va exiger comme identification, c'est la confidentialité. On s'est engagé à l'Assemblée nationale à assurer les mesures de sécurité. On va garder pour nous le renseignement que l'on va obtenir. Je ne sais pas combien de temps cette personne-là est restée à l'Assemblée nationale, au Parlementaire, je présume que c'est une heure trente, le temps de bien déjeuner. En une heure trente, on a eu le temps de faire circuler l'information et de dire: Monsieur, on vous arrête - je ne me souviens pas - parce que vous n'avez pas payé un repas précédent ou quelque chose comme cela. Pour moi, c'est au moins aussi important que le problème que vous soulevez, c'est-à-dire le premier problème: "l'identifiant". Oui, si on s'entendait sur une façon de s'identifier qui pourrait être le numéro d'assurance sociale, je me ralierais à cela; mais c'est de dire: Primo, on doit, à mon avis, commencer par donner l'exemple. Est-ce que, pour les fins de l'Assemblée nationale, on ne doit pas garder cela secret? Ce n'est pas ce qui a été fait, manifestement. Mais je trouve cela grave, personnellement.

M. Pépin: Je peux vous dire simplement que c'est un problème sous enquête actuellement.

Conclusions

M. Filion: On a déjà retenu les membres de la commission pour un peu plus que le temps prévu. De mon côté, vu qu'il est déjà passé 12 h 45, je suis prêt à conclure très brièvement. Tout simplement, je remercie le président et mesdames les commissaires, ainsi que l'équipe qui s'est déplacée pour les accompagner, d'avoir bien voulu se prêter à cet exercice annuel.

Je remarquais que... Qui se plaint de ne pas être invité? C'est le Vérificateur général ou le Protecteur du citoyen?

Le Président (M. Trudel): Le Vérificateur général, on l'a reçu.

M. Filion: Ah, on l'a reçu. Vous savez, il y a de petits organismes qui se sont plaints de ne pas être reçus par la commission. Je dois vous dire qu'en ce qui me concerne, cela ne risque pas de vous arriver, les échanges étant toujours très intéressants et très fructueux. Le rapport en général est bien fait également. Il y a des rapports annuels que l'on reçoit où on n'apprend rien. Il faut aller fouiller les chiffres pour essayer de trouver des tendances ou des orientations.

Dans vos rapports annuels, vous l'écrivez. En ce sens-là, également, je voudrais vous féliciter parce que c'est un des problèmes que l'on rencontre. Les rapports annuels, pour arriver à comprendre ce qui se passe dans l'organisme, il faut soi-même se déguiser en mathématicien et aller voir les tendances dans les chiffres, etc. Vous le faites bien; ce qui rend notre travail d'autant plus aisé. Je compte bien que l'on puisse se revoir pour discuter de l'important rapport de la mise en oeuvre conformément à la clause crépusculaire de la loi le plus tôt passible. Quant à nous et comme porte-parole du Parti québécois, il ne faut pas laisser traîner ce type de réflexion, il faut s'en saisir, quitte à mieux réfléchir par la suite. Je compte bien y consacrer toutes les énergies nécessaires pour faire en sorte que, comme je disais au début de mon intervention, la phase de croisière, ou de maturité, en fait, de ce jeune homme bien en santé puisse être bien remplie. Alors voilà! Merci.

Le Président (M. Trudel): Merci, M. le député de Taillon. Je vous remercie, M. le président, mesdames les commissaires. Je ne peux pas vous donner une date définitive, la décision gouvernementale est en gestation, mais il est certain qu'il y aura une commission parlementaire. Je peux vous le dire, soyez prudents, entre le 25 janvier et le 10 février - parce que les dates ne sont pas encore arrêtées - tenez-vous libres quelques-uns d'entre vous parce qu'il y aura une consultation générale qui sera annoncée incessamment par le gouvernement. Les dates ne sont pas définitives, encore une fois, mais c'est autour de ces dates-là.

Encore une fois, merci de votre disponibilité d'abord, à tous les membres de la commission et à son président en particulier. Au plaisir de vous revoir.

Sachez que vous pouvez toujours compter sur notre appui, je me fais sûrement le porte-parole de tous les membres de la commission, et sur celui de son président en particulier. Merci beaucoup.

M. Pépin: C'est moi qui vous remercie.

Le Président (M. Trudel): La commission, ayant accompli son mandat, suspend ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 12 h 48)

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