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Version finale

33e législature, 2e session
(8 mars 1988 au 9 août 1989)

Le mardi 28 février 1989 - Vol. 30 N° 23

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Examen des orientations, des activités et de la gestion de la Société de la Place des Arts


Journal des débats

 

(Dix heures vingt-cinq minutes)

Le Président (M. Audet): Je déclare ouverte ia séance de la commission des affaires culturelles. Le mandat de la commission est de procéder à l'examen des orientations, des activités et de la gestion de la Société de la Place des Arts de Montréal. Mme la secrétaire, est-ce que vous pouvez annoncer les remplacements?

La Secrétaire: M. Leclerc (Taschereau) remplace M. Trudel (Bourget).

Le Président (M. Audet): D'accord. Merci. L'ordre du jour d'aujourd'hui prévoit une rencontre avec les représentants de la Société de la Place des Arts. Merci, Mme la députée. Dans un premier temps, je voudrais leur souhaiter la bienvenue. Comme j'ai eu l'occasion de vous le mentionner tantôt, M. Trudel est retenu pour cause de maladie. Il a peut-être abusé hier soir de certaines bonnes choses. Aujourd'hui, II doit entrer à l'hôpital pour intoxication alimentaire, je pense.

M. Boulerice: C'est la notion judéo-chrétienne de la culpabilité.

Le Président (M. Audet): II vous prie de l'excuser. Je sais que M. Trudel aurait souhaité ardemment être présent aujourd'hui avec nous pour discuter de votre société.

J'aimerais, madame, que vous puissiez nous présenter les gens qui vous accompagnent, s'il vous plaît.

Mme Touchette Robitaille (Danièle): Merci M. le Président. Je vous présente M. Guy Morin, directeur général de la Société de la Place des Arts, M. Raymond Dionne, Mme France Fortin et M. Yves Lefebvre.

Le mandat de la SPA

Le Président (M. Audet): D'accord, je vous remercie. Un petit mot pour débuter. On m'a transmis une note ce matin pour résumer en gros - ce n'est peut-être pas dans notre ordre du jour - le mandat de la Société de la Place des Arts.

La Société de la Place des Arts de Montréal, telle qu'on la connaît aujourd'hui, fut constituée en 1982. Il s'agit d'une corporation au sens du Code civil qui a son siège social dans le territoire de la Communauté urbaine de Montréal. Les affaires de la société sont administrées par un conseil d'administration composé de neuf membres, nommés par le gouvernement, dont trois sont recommandés par la Communauté urbaine de Montréal. Leur mandat est, au plus, de quatre ans. Cette société a succédé à la Régie de la Place des Arts, créée par une loi sanctionnée !e 16 juillet 1964. À l'époque de la régie, le conseil d'administration comptait neuf membres nommés par le lieutenant-gouverneur en conseil après consultation auprès du maire de Montréal. Quatre membres étaient nommés par la ville.

Au cours de la commission, on pourra s'intéresser à l'impact du changement intervenu en 1982 alors que la régie est devenue société. En effet, le passage d'une régie à une société a des implications non négligeables. En 1988, il est peut-être temps de vérifier si les attentes formulées en 1982, lors de la création de la Société de la Place des Arts, ont été satisfaites à la lumière du bilan de ses réalisations.

D'abord, le mandat. En 1964, la Régie de la Place des Arts pouvait posséder, améliorer et administrer un centre culturel et monter des spectacles. La société s'est vu confier un mandat qui dépasse, et de loin, la simple gestion d'immeubles. Elle a pour fonction d'administrer la Place des Arts de Montréal ainsi que de présenter, monter et produire des spectacles. De plus, avec l'autorisation du gouvernement, la société peut exercer ses pouvoirs sur des biens autres que la Place des Arts, acquérir, aliéner, hypothéquer ou prendre à bail un immeuble, conclure un contrat de plus de trois ans à l'exception d'un contrat de moins de cinq ans dans lequel ia société est locatrice et contracter un emprunt qui porte le total des sommes empruntées par la société, et non encore remboursées, au-delà du montant déterminé par le gouvernement.

Il y a d'autres points qu'on pourra possiblement discuter, par exemple, les relations du travail, ta structure budgétaire etc. Les gens de la société sont ici. On a des questions à leur poser. Ils ont possiblement des remarques à nous faire. Dans un deuxième temps, je vais céder la parole à ma collègue, députée de Vachon. Mme la députée, avez-vous un mot à ajouter sur cela, à la suite des remarques préliminaires?.

Mme Pelchat: J'aimerais tout simplement souhaiter à Mme Touchette Robitaille la bienvenue et un bon mandat. Peut-être Mme Robitaille a-t-elle quelques remarques préliminaires à nous adresser?

Remarques préliminaires

Mme Danièle Touchette Robitaille

Mme Touchette Robitaille: Je vous remercie. M. le président de la commission parlementaire sur la culture, Mmes et MM. les députés. C'est avec un grand plaisir que je m'adresse à vous aujourd'hui sur un sujet qui, depuis un peu plus d'un an, me tient beaucoup à coeur. Il s'agit

évidemment de la Place des Arts. J'aimerais vous en parler sur plus d'un plan. J'aimerais, entre autres, partager avec vous, une rétrospective des moments merveilleux que nous y avons vécus, !a plupart d'entre nous, en assistant à un spectacle. Mais, rassurez-vous, je résisterai à la tentation et essaierai d'être aussi brève que possible.

Indissociable de notre évolution culturelle, !a Place des Arts, après seulement 25 ans, est déjà riche d'histoire. Elle nous inspire dans notre démarche aussi bien que dans notre vision de l'avenir. Je voudrais aussi, au cours de cet exposé, vous faire cheminer avec moi sur le plan historique, soit depuis 1963, et même avant, il serait également opportun de vous faire connaître les principaux changements que vit notre institution depuis quelques temps, qu'elle vivra encore plus intensément dans les années à venir. En effet, la Place des Arts a amorcé un virage important aussi bien sur !e plan physique, c'est-à-dire les immeubles et les équipements, que dans la réalisation de son mandat.

Le 2 février 1956, a été sanctionné le "bill" 25 permettant la création d'une corporation chargée de construire et d'administrer, dans !a cité de Montréal, une salle de concert. Appelé Le Centre Sir Georges-Etienne Cartier, la nouvelle corporation reçoit ses lettres patentes le 15 mars 1957.

Le 14 juillet 1964, sanctionnée par Is "bill" 46, la Régie de la Place des Arts de Montréal succède à la corporation Le Centre Sir Georges-Etienne Cartier. Le "bill" 46 stipule que !a régie peut posséder, améliorer, entretenir et administrer, dans la ville de Montréal, un centre culturel, y compris l'actuelle salle de concert, il y est également stipulé que la régie peut monter des spectacles, un élément nouveau par rapport au "bill" 25. À ce moment-là, le gouvernement du Québec et la ville de Montréal se partagent, à part égale, la responsabilité du déficit d'exploitation de la régie, y compris l'intérêt et l'amortissement des emprunts contractés pour acquitter les dettes du centre Sir Georges-Etienne Cartier.

Août 1982, un nouveau changement de statut juridique Intervient. L'Assemblée nationale du Québec adopte la ioi 52, créant ainsi la Société de la Place des Arts de Montréal, qui remplace la régie. À compter de ce moment, la société relèvera uniquement du ministère des Affaires culturelles du Québec. C'est en accord avec le ministère que la société élabore ses politiques culturelles et ses projets de développement. Le conseil de la société est composé de neuf membres nommés par le gouvernement du Québec, dont trois après consultation auprès de la Communauté urbaine de Montréal.

Notre mandat est exprimé par le législateur à l'article 20 de sa loi en ces termes, comme vous le mentionniez précédemment, M. le Président: "La société a pour fonctions d'administrer la Place des Arts de Montréal ainsi que de présenter, monter et produire des spectacles. "

Depuis le 21 septembre 1963, date d'inauguration de la grande salle, devenue la salle Wilfrid-Pelletier, cette dernière reçoit, au fil des ans, lus plus grands noms de la musique, de l'opéra, de la danse classique et moderne, du théâtre, des variétés, du Jazz, du music-hall, bref, cie l'ensemble des arts d'Interprétation. Une programmation de qualité est rapidement devenue une tradition chez nous. En 1967, à l'occasion de l'Exposition universelle, la construction des théâtres Maisonneuve et Port-Royal allait permettre à la Place des Arts d'offrir aux Montréalais et, bien sûr, à l'ensemble des Québécois, une programmation encore pius diversifiée. 1972 fut également une année importante puisque la Place des Ans inaugurait son service d'animation. À ce jour, ce service a attiré près de 600 000 personnes è ia Place des Arts â l'heure du midi, à la sortie du bureau à 17 heures, ainsi que les samedis et dimanches matin. Après 17 années d'activités d'animation et des centaines de mini-spectacies, on peut certes prétendre que la Place des Arts fut i'un des pionniers dans ce domaine. Elle avait compris l'importance de développer dos programmes ce familiarisation aux arts de la scène. De plus, ie Théâtre du Café do la Place, la quatrième salle de spectacles du complexe, agit à titre de producteur et offre une programmation régulière, et ce depuis dix ans.

Depuis 25 ans, la Place des Arts a accueilli plus de 25 000 000 de spectateurs dans ses salles à l'occasion de près de 19 000 représentations. C'est donc vous dire jusqu'à quel point ce complexe théâtral a fait et continue de faire partie de nos vies.

Messieurs les parlementaires, ia Place des Arts d'aujourd'hui n'est certes plus celle d'hier, et surtout pas celle de demain. L'industrie culturelle s'est modifiée et plusieurs facteurs nous ont obligés, depuis quelques années, à amorcer un virage qui n'est d'ailleurs pas entièrement complété. Ainsi, l'aspect extérieur se modifie, puisque des projets immobiliers se matérialiseront dans les prochaines années, de façon a achever le quadrilatère de la Place des Arts, et ce, grâce à l'appui de la ministre des Affaires culturelles du Québec et du gouvernement. La construction du musée d'Art contemporain de Montréal sur notre site et, souhaitons-le, celle du Conservatoire d'art dramatique et du Conservatoire de musique, le réaménagement scénique de la salle Wilfrid-Pelletier, la construction d'un stationnement souterrain additionnel de 350 espaces, l'ajout d'une cinquième salle de spectacles et, nous l'espérons, ie réaménagement extérieur du quadrilatère feront enfin de ia Place des Arts le véritable coeur culturel de Montréal, pour ne pas dire le coeur de Montréal, il va de soi que de devenir le coeur culturel de Montréal oblige et obligera de plus en plus la Place des Arts à assumer son rôle de leader culturel au Québec.

D'autres éléments Importants contribuent

également à faire en sorte que la Place des Arts se transforme, et ici, je veux me référer à l'exercice de notre mandat. Mais avant d'en parier, permettez-moi de dire quelques mots sur la problématique avec laquelle nous sommes appelés à composer nos scénarios. Ainsi, le départ probable de l'OSM, le nombre de plus en plus réduit de producteurs, les coûts de production sans cesse plus élevés, les problèmes financiers que connaissent les organismes résidant à la Place des Arts, la compétition de plus en plus forte, compte tenu du réaménagement et de la construction de nouvelles salles de spectacles à Montréal, en plus de la nécessité d'assurer la relève chez nos artistes, nos créateurs et notre clientèle, tout cela constitue, pour la Place des Arts, de grands défis qu'elle doit relever si elle veut poursuivre avec efficacité la mission que lui a confiée le gouvernement.

En réponse à cette problématique, nous devions donc amorcer un virage. Premièrement, au cours des trois dernières années, la Place des Arts a exercé de façon beaucoup plus engagée son rôle de coproducteur de spectacles, rôle que lui confiait d'ailleurs le législateur, comme je le mentionnais précédemment, et ce, depuis 1964. À titre d'exemple, parlons de Starmania, opéra populaire créé par Luc Plamondon et Michel Berger, réalisé conjointement par la Société de la Place des Arts de Montréal et un producteur privé, la Compagnie de comédie musicale de Montréal inc., Starmania fut présenté à Montréal, Québec, Ottawa, ainsi que dans 37 autres municipalités du Québec, permettant ainsi à de nouveaux talents de se faire connaître et, à la Place des Arts, de rayonner à l'extérieur de ses murs.

Un deuxième exemple de coproduction: La comédie musicale Gala, écrite par Jean-Pierre Ferland et Paul Baillargeon et qui sera présentée au printemps prochain. 18 représentations seront jouées à Montréal, Québec et Ottawa et, possiblement en France, à l'automne ou au printemps de 1990. Gala est réalisée grâce, bien sûr, au soutien de l'État, mais également grâce à l'injection, par l'entreprise privée, de sommes importantes nécessaires au paiement des coûts de préproduction. Il s'agit d'une production réalisée conjointement par la Société de la Place des Arts de Montréal, le Centre national des arts d'Ottawa et un producteur privé, les Productions Chalange inc.

Deuxièmement, II est évident que nous ne pouvons nous en tenir qu'à nos productions pour assurer une programmation. Le mandat prévoit, pour nous, le rôle de locateur. Nous sommes, depuis l'origine, un locateur de salles de spectacles et nous continuerons de jouer ce rôle. Or, depuis quelques années, une de nos préoccupations consiste à occuper les salles douze mois par année, et ce, afin d'offrir une programmation plus complète, plus variée et d'assurer des revenus. Pour ce faire, la Place des Arts a attiré des événements annuels d'Importance, tel le

Festival international de jazz de Montréal, le Festival juste pour rire, le Festival des films du monde. Ces événements devaient se tenir chez nous.

Troisièmement, la Place des Arts s'est également fixée comme objectif de développer de nouvelles clientèles. Ainsi, à titre d'exemple, le 5 septembre 1988, elle décidait d'ouvrir ses portes et, à cette occasion, grâce à l'appui du milieu des affaires, plus de 17 000 personnes ont pu visiter pour la première fois les coulisses de la Place des Arts. Le 25 septembre 1988, onze concerts gratuits étaient également présentés à plus de 8000 personnes.

Une autre manifestation du même genre, les Noëls du monde, fut tenue le 18 décembre dernier. Un public nombreux partageait les us et coutumes artistiques de plus d'une trentaine de groupes ethniques différents. Nous entendons répéter ce genre d'initiative.

Quatrièmement, soutenir nos institutions culturelles fut également une priorité au cours des dernières années. C'est la raison pour laquelle la Place des Arts mettait sur pied, l'an dernier, deux séries d'abonnement de danse intitulée "Les feux de la danse Banque Royale", saison 1988-1989, où nous pouvions retrouver les Grands Ballets canadiens, le Ballet national du Canada, Martha Graham, le Kirov et ainsi de suite. Si le projet est devenu possible, c'est grâce au soutien du secteur privé. Or, il est impératif qu'on l'on doive favoriser davantage cet arrimage avec le milieu des affaires, lequel manifeste de plus en plus d'intérêt à s'associer avec le milieu culturel, mais ce, à la condition d'être à la hauteur de leurs attentes.

Ceci m'amène donc à vous parler de l'aspect financier. La Place des Arts constitue en quelque sorte une PME avec un budget de dépenses de fonctionnement pour l'année 1988-1989 d'environ 10 000 000 $ équilibré par des revenus composés, en partie, des revenus de location et des revenus des services auxiliaires, soit environ 6 000 000 $ et également par une subvention de fonctionnement d'environ 4 000 000 $.

D'autre part, la Place des Arts offre à ses utilisateurs un service de vente de billets ayant représenté pour 1987-1988 des transactions totalisant 17 000 000 $. J'aimerais porter à votre attention, sur la foi des multiplicateurs économiques établis par le Conseil des arts du Canada, que les dépenses attribuables à la Place des Arts ainsi qu'aux spectateurs fréquentant ces salles auraient représenté en retombées économiques pour la région montréalaise, pour l'année 1987-1988, environ 65 000 000 $. La Place des Arts a été construite au coût de 49 000 000 $. Ce montant inclut à la fois les terrains, la construction des édifices, les équipements, le mobilier, les oeuvres d'art et les frais de financement temporaire durant la construction. Aujourd'hui, la valeur de remplacement d'un tel complexe est évaluée à 200 000 000 $ et les projets de terminaison du quadrilatère ajouteront à cette

valeur une somme de 75 OOO 000 $.

Quelques mots sur les résultats d'exploitation de la Place des Arts. Je crois qu'il vaut la peine de souligner que pour les deux dernières années, la société a réussi à dégager, compte tenu de la subvention budgétaire qui nous avait été accordée, un surplus cumulatif de 1 400 000 $. Cette situation assez exceptionnelle n'est pas le fruit du hasard, mais, au contraire, est due aux efforts conjugués de l'administration et de tous les employés de la Place des Arts. Nous avons prouvé qu'il est possible de gérer les équipements culturels de façon à maximiser les ressources qui nous sont confiées, voir même de réussir à vivre avantageusement avec des budgets équilibrés, ce qui permettra de répondre davantage à nos objectifs. A ce propos, je me permets de vous signaler que le libellé actuel de notre loi constitutive, qui exige que tout surplus soit retourné au fonds consolidé du revenu, n'encourage guère la recherche de surplus, alors que ces mêmes surplus pourraient servir au développement accéléré de notre mission et, par conséquent, profiter au milieu des arts d'interprétation et, évidemment, au grand public. Nous avons porté ce fait à l'attention des autorités compétentes et nous espérons vivement qu'il sera possible de trouver prochainement le moyen législatif de nous donner, à cet égard, une plus grande flexibilité. Même si la Place des Arts, au cours des deux derniers exercices financiers, a réalisé des surplus d'opération, il n'en demeure pas moins que, malgré tous les efforts déployés dans le but d'accroître ces revenus et de maintenir à un niveau relativement faible l'augmentation de ses dépenses, cette dernière sera toujours, dans les conditions actuelles, un organisme dépendant partiellement de l'État. La Place des Arts est un bien public au service des Québécois. Nous croyons, à cet effet, que son rôle est largement différent des salles qui appartiennent à des intérêts privés et qui sont donc principalement orientées vers le profit, alors que notre mission se veut avant tout culturelle. (10 h 45)

II n'en demeure pas moins que nous entendons prendre toutes les dispositions nécessaires pour réduire graduellement notre déficit d'opération sans toutefois compromettre cette mission culturelle. À ce sujet, j'aimerais reprendre un passage du mémoire présenté par la Place des Arts au comité consultatif des projets de construction de la salle de l'OSM et du musée d'Art contemporain de Montréal, en juillet 1986. Ce passage se lit comme suit: Certaines valeurs de notre civilisation, celles qui ont réussi à traverser l'épreuve du temps et sont parvenues jusqu'à nous, méritent aussi d'être transmises aux générations à venir. Voilà, pourquoi, appelons les choses par leur nom, nous avons des temples pour abriter, conserver, et montrer les oeuvres d'art d'hier et d'aujourd'hui: ce sont les musées. Pour perpétuer les formes d'art universel comme le théâtre, la musique, l'art lyrique et la danse, ce sont les salles comme la Place des Arts. La vie culturelle au Québec, et particulièrement à Montréal, n'aurait certainement pas connu l'essor et la vigueur qu'elle affiche aujourd'hui sans la Place des Arts. Si nous voulons qu'elle continue à remplir sa mission, soit contribuer à perpétuer les formes d'art universel, comme le théâtre, la musique, l'art lyrique et la danse, elle devra également mettre en priorité son rôle en matière d'éducation auprès du grand public. Le vieillissement de la population, la venue sur le territoire d'un pourcentage élevé d'allophones, la faiblesse de nos programmes de formation aux arts en milieu scolaire, tout ceci nous incite à augmenter notre contribution dans cette direction.

Finalement, la Place des Arts aura de plus en plus à jouer un rôle important de soutien aux organismes culturels utilisant nos espaces. Nous ne pouvons rester insensibles aux problèmes financiers et organisationnels de ces entreprises culturelles. Nous leur offrons notre plus entière collaboration et, pour ce faire, entendons être à l'écoute du ministère et des organismes. N'oublions pas que Montréal n'aurait pas le titre de ville Internationale qu'on lui reconnaît aujourd'hui sans un grand orchestre, une maison d'opéra et une troupe de ballet majeure. La Place des Arts, une fois complétée, deviendra un véritable centre culturel international et constituera pour la ville de Montréal et le Québec, notamment en raison de ses aménagements extérieurs, un pôle d'attraction touristique majeur et, pour l'ensemble des Québécois, une richesse que nous serons fiers de léguer aux générations futures.

M. le Président, nous vous remercions de votre accueil et nous sommes disposés à répondre à vos questions.

Le Président (M. Audet). Je vais céder la parole à mon collègue de Saint-Jacques.

M. André Boulerice

M. Bouierice: Je vous remercie, M. le Président. Mme la présidente... c'est cela. Porte-parole de l'Opposition en matière de culture, comme je m'amuse à le dire pour provoquer certaines réactions de la ministre, puisqu'on connaît notre relation - je l'appelais comment, déjà - amoureuse d'une étrange solitude contre ministre de la Culture... Donc, Mme la présidente, M. le directeur général, mesdames et messieurs, je suis vraiment très heureux de vous accueillir ici. Je vais me permettre deux commentaires. Je suis persuadé, à ce moment-ci, d'être, non pas uniquement le porte-parole de l'Opposition, mais de l'ensemble de mes collègues, surtout des Montréalais, des "Montréalistes" comme dit Doris Lussier avec cette pointe d'humour qu'on lui connaît bien. Je pense que nous sommes très fiers et très orgueilleux de cette Place des Arts et de la société qui la sous-tend. Je feuilletais votre rapport annuel et j'y

voyais, d'ailleurs - et je ne me gêne pas de vous le dire - des images qui me rappelaient de très agréables sofrées. Quelquefois, malgré la vie parlementaire, il nous arrive d'avoir des loisirs. Votre service des relations publiques, d'ailleurs, fait un excellent travail. Il nous informe et informe tous les députés, tout au moins le porte-parole de l'Opposition, sur les spectacles à venir. Le système de réservations fonctionne très bien et comprend aussi que l'on puisse décommander une venue attendue et reportée au lendemain.

Ceci dit, Je pense qu'on a d'excellents services à la Place des Arts. Je pense que nous, Montréalais, en sommes très fiers. Je vois notamment aussi que, par solidarité sans aucun doute, vos collègues du Grand Théâtre de Québec sont ici, peut-être pour voir un peu comment la chose se passe. Je voudrais vous le dire, à vous et également à vos collègues du Grand Théâtre, pour qui, d'ailleurs - j'en suis persuadé - les Québécois, c'est-à-dire ceux de la ville de Québec, ont les mêmes sentiments que nous, Montréalais, avons pour la Place des Arts. Les mots "mandat de surveillance" et "surveillance", je vous l'avoue, ne sont pas tellement à propos dans le titre. Dans le sens où nous l'employons, "surveillance" ne signifie pas que nous allons fondre sur vous et essayer de trouver la petite bibitte, comme on dit en québécois courant. C'est bien plutôt un échange entre une société d'État relevant du ministère des Affaires culturelles, donc de la commission de la culture, et les membres de la commission. Ce n'est pas un tribunal, ce n'est pas une inquisition.

Cela dit, M. le directeur général, je dois vous avouer que je suis vraiment très heureux de vous voir ici. Malheureusement, certaines rumeurs avaient circulé selon lesquelles vous quittiez votre poste, parce que vous étiez plutôt tenté de devenir chef d'orchestre. Il semble que vous ayez renoncé à cette ambition pour le bien-être de la Place des Arts et qu'on vous a encore comme directeur général. Je me permets cette remarque, compte tenu de la longue amitié qui nous unit, M. le directeur général, et je vous l'avais déjà annoncée.

Mme la présidente, vous avez donné, à mon point de vue, un compte-rendu très fidèle des activités de la Place, non pas uniquement pour cette année, mais en présentant une rétrospective, depuis le début de son existence, des grands événements qui s'y sont déroulés. Je sais qu'il y en aura un magnifique, d'ailleurs, vendredi soir, avec les Grands Ballets canadiens. On aura sans doute le plaisir de s'y revoir.

Si vous me le permettez, M. le Président, j'aimerais d'abord poser certaines questions forcément d'ordre technique et, dans un deuxième volet, si vous le voulez bien, nous discuterons de questions peut-être un peu plus philosophiques. J'emploie ce terme, mais je parle des perspectives d'avenir de la Société de la Place des Arts de Montréal qui, quoique située à Montréal, sert également le Québec en entier.

Les entrées ne sont pas exclusives aux Montréalais.

Pour ce qui est de la gestion financière, selon le rapport annuel 1986-1987, la société a enregistré un excédent de 603 372 $, pour être bien précis. Dans son dernier rapport, le Vérificateur général recommandait de retourner cet excédent au fonds consolidé du revenu, conformément à la loi constitutive de la Place des Arts. Le rapport révèle, par ailleurs, qu'un fonds de production de 500 000 $ a été créé à même cet excédent de 1986-1987. Quelle suite a été donnée à la recommandation du Vérificateur général?

Création d'un fonds de production

Mme Touchette Robitaille: Le vérificateur, certes, a tout à fait raison de recommander le retour au fonds consolidé, puisque c'est l'article 32 de la loi. Toutefois, nous espérons que, prochainement, Mme la ministre pourra faire émettre un décret nous permettant de conserver une somme de 500 000 $, laquelle serait vouée à un fonds de production et de coproduction, étant donné qu'il s'agit également d'un volet très important de la Place des Arts. Je me permettrais peut-être d'ajouter également qu'il nous semble extrêmement important, à ce stade-ci, d'être préoccupé sur le plan contenu. Nous investirons énormément dans le béton, si je peux m'exprimer ainsi, au cours des prochains mois, avec les constructions que nous avons sur le site, mais il serait également très important de penser en termes de mission culturelle, donc possiblement d'aide à la création, par le biais de ce volet de coproduction que nous avons déjà exercé avec Starmania, que nous exerçons avec Gala et que nous pourrions possiblement exercer dans d'autres secteurs.

M. Boulerice: Ai-je bien compris, Mme la présidente, que le fonds n'est pas encore constitué? Vous souhaitez qu'il le soit, mais il ne l'est pas encore.

Mme Touchette Robitaiile: M. le directeur général.

M. Morin (Guy): M. Boulerice, le fonds est constitué, mais nous n'avons pas de décret couvrant ce fonds et l'utilisation que nous pourrions en faire. Nous attendons toujours ce décret qui nous permettra de récupérer ces 500 COQ $. Mais je profite de l'occasion pour dire que ça couvre l'exercice d'il y a maintenant presque deux ans, alors qu'on a eu un autre surplus, depuis. Sur 1 400 000 $, il y aura 500 000 $ d'affectés à un fonds de production. Le solde sera retourné, techniquement, au fonds consolidé de la province; ce sera retourné, somme toute, au gouvernement du Québec. C'est évident que plus nous aurons d'argent à notre disposition pour aider à la création, au contenu

et à la coproduction, mieux seront le milieu et le public et mieux on remplira notre mission. Nous en sommes là, nous attendons le décret.

M. Boulerice: À cela Je répliquerai, M. le directeur général, que lors de l'étude des engagements financiers et des crédits du ministère l'an dernier, j'avais effectivement fait cette remarque à partir d'un exemple d'une autre société d'État que vous connaissez bien d'ailleurs, qui sera voisine de la vôtre. Cette société avait aussi enregistré certains excédents, mais, malheureusement, elle aussi, voyait ses excédents confisqués et, dans un certain sens, revenir dans les coffres de l'État; cela pouvait donc gêner certains projets internes de développement qu'elle souhaitait avoir et qu'elle avait décidés. Donc, vous demandez la même chose. Si ce n'est pas la totalité, vous demandez, tout au moins, qu'une certaine partie puisse rester à la Place des Arts, comme une certaine autre partie resterait au Grand Théâtre, ou, si on prend l'exemple des musées, au musée de la Civilisation ou au musée d'Art contemporain, de manière, en fin de compte, à ne pas pénaliser ceux qui ont été de bons gestionnaires, parce que je présume que les excédents, vous les avez faits parce que vous étiez de bons gestionnaires, et non pas des radins.

Mme Touchette Robitaille: II s'agit tout simplement de revenus additionnels, qui, des fois, sont difficiles à prévoir en début d'année - s'il est possible de louer une salle un peu plus tard, au cours des mois, pourquoi pas? - ou de dépenses qui ont pu être comprimées au cours de l'année. On arrive ainsi à un surplus. Donc, l'écart entre les revenus et les dépenses qui s'est agrandi au cours de l'année produit ainsi un surplus, grâce à une gestion plus serrée.

M. Boulerice: On regarde un excédent qui vient de l'année 1986-1987, M y en a même aussi de 1987-1988. Est-ce que la demande que vous présentez, Mme la présidente, est en fonction uniquement des deux excédents dont on fait explicitement mention ici, dans votre texte, ou bien si ce serait une mesure courante pour chaque excédent, peu importe l'année où l'excédent arrive?

Mme Touchette Robitaille: Je pense qu'il est difficile, M. le député, de prévoir ou d'annoncer des tendances aux surplus, en ce moment. Ces deux dernières années ont produit des surplus, c'est juste, mais il n'y a quand même pas de tendance carrément établie. Si la Place des Arts entreprenait des actions de plus en plus soutenues côté coproduction, peut-être ces surplus pourraient-ils être moindres; il y aura sûrement aussi des cycles difficiles à prévoir en ce moment. Tout simplement, ce qui serait souhaitable, dans le cadre contenu ou dans le cadre création, c'est peut-être que la Place des Arts puisse, dans la mesure du possible, compter - parce que pour des réalisations à moyen et à long termes, II est bon de pouvoir compter sur certaines choses disponibles - sur un fonds lui permettant de planifier, à moyen ou à long termes, des coproductions pour encourager de plus en plus les efforts de création chez nous, de façon à vraiment axer sur le côté mission culturelle, sur le côté éducation et sur le côté relève, autant chez nos artistes que, d'une certaine façon, en même temps, chez le futur auditoire que sont les enfants d'aujourd'hui. (11 heures)

M. Boulerice: Ce décret, vous le souhaitez, vous nous l'exprimez, et je vous donnerai ma position immédiatement: je le dis souhaitable. Donc, je suis entièrement d'accord avec vous. Vous permettrez ainsi, justement comme vous l'avez dit, la mise en place d'un fonds de production. Est-ce que vous avez déjà quelques idées quant à l'utilisation de ce fonds de production, quelques projets spécifiques?

Mme Touchette-Robitaille: Nous avons certains projets pour lesquels nous n'avons pu nous compromettre jusqu'à maintenant, puisque ce fonds, à toutes fins utiles, n'est pas à notre disposition pour les raisons que nous venons d'élaborer. Il y a certains projets, dont sûrement M. le directeur général pourrait vous parler, mais que nous n'avons pu les mettre sur pied, puisqu'il n'y a rien de sûr à ce moment-ci. Le directeur général aurait quelque chose à ajouter là-dessus, si vous permettez.

Le Président (M. Audet): Allez-y.

M. Morin: D'une part, ce fonds n'est pas un fonds de subventions. Lorsque nous utiliserons ces sommes, c'est principalement pour être en coproduction avec le secteur privé sur une base, en autant que faire se peut, de 'partnership". Alors, il y a donc possibilité de retour sur investissement, puisqu'il s'agit d'investissements. Ainsi, les 500 000 $ pourraient permettre de faire beaucoup plus que les 500 000 $ d'investissement sur une période d'années donnée, s'il y a des succès dans les démarches entreprises avec les associés. C'est l'exemple de Gala - c'est l'exemple de Starmania - où nous investissons à raison du tiers de l'investissement total, le Centre national des arts, le tiers et le producteur privé, le tiers. C'est la première remarque que je voudrais faire sur le fonds, il ne s'agit pas de subventions, mais bien d'investissements sur une base d'affaires.

D'autre part, il faut mentionner que nous voulons privilégier le secteur de la comédie musicale et ce, pour une raison évidente. Au Québec, le gouvernement du Québec, le ministère des Affaires culturelles n'a pas de programme concernant la comédie musicale et, pourtant, c'est une forme de l'industrie des arts de la scène qui permet d'avoir des créateurs, des

artisans, des chanteurs, des comédiens, des danseurs. Finalement, presque tous les participants à cette Industrie se retrouvent dans une comédie musicale. Voilà pourquoi nous entendons priviiigier la comédie musicale. Bien sûr, on ne pourra pas coproduire plusieurs comédies musicales par année. Lorsqu'on aura coproduit une ou peut-être deux comédies musicales par année, ce sera notre pouvoir d'intervention, ce sera notre limite d'intervention. Mais, avec des fonds additionnels, peut-être pourrions-nous aller un peu plus loin et un peu plus rapidement, ce qui n'empêche pas toutefois de regarder d'autres types de projets, de coprésentations ou des produits culturels importants venant souvent d'autres pays, mais qui, de toute façon, ne pourraient pas venir sur notre territoire, s'il n'y avait pas une intervention de la Place des Arts. Là, à ce moment, nous pouvons agir comme coprésentateur ou comme présentateur et utiliser les sommes du fonds de production, mais on n'entend pas le faire pour entrer en compétition avec le secteur privé. Ce serait strictement dans les cas où un produit ne pourrait pas être présenté ou, en principe, ne pas être présenté par le secteur privé. Un bon exemple? Au mois de juin, nous présenterons Le Cid qui n'a pas été présenté à Montréal depuis nombre d'années. C'est le genre de produit important sur le plan culturel que ne pourrait pas se permettre de présenter un producteur privé. Enfin, il pourrait toujours le faire, mais à grands risques, alors que nous le faisons, et nous sommes ravis de le faire, parce que c'est important sur le plan culturel et nous avons bon espoir d'être capables de ie rentabiliser. Mais s'il arrivait que nous ne le rentabilisions pas, voilà ie rôle de Place des Arts, celui d'être capable de supporter de telles présentations. Là, se termine mon commentaire.

M. Boulerice: Vous avez dit, M. Morin, qu'il n'y avait pas de subventions dites normées pour les comédies musicales. Mais rappelez-moi, puisque vous étiez quand même très près... Il y avait eu une politique, je crois, d'annoncée par l'ancien ministre de la Culture, M. Richard, sur les comédies musicales. Je pense que c'était cinq par année. C'est ça?

M. Morin: Vous voulez que je vous rappelle de quoi il s'agissait? Je peux essayer, si vous êtes indulgent à mon égard, ce dont je doute! Vous l'avez prouvé tout à l'heure, M. Boulerice. Notre gouvernement, par le biais du ministère des Affaires culturelles, avait un programme qui invitait les producteurs de comédies musicales à se présenter à un concours et une comédie musicale était primée. Je crois que cela a duré deux ans. Ce programme a pris fin il y a deux ans effectivement. Je ne sais pas pourquoi, je ne suis pas au ministère des Affaires culturelles, mais, de toute façon, ie programme n'existe plus. Il n'en demeure pas moins que le besoin demeure et voilà pourquoi, on est intéressé, on est motivé à supporter ce secteur d'activités. Mais il faut dire que nous sommes beaucoup plus prêts des producteurs aussi. C'est un dialogue quotidien que nous avons avec ces gens. Il y a plein de projets dont nous entendons parler. Bien sûr, il ne faut pas acquiescer à toutes les demandes, mais il faut quand même les regarder. Il y a plein de projets très importants pour le milieu artistique, les arts de la scène et pour le Québec finalement. On annonçait récemment - c'était dans les journaux - la possibilité de faire une comédie musicale sur Nelligan. Si on ne le fait pas, qui va le faire? Il y a plein de choses de cette nature qu'il faut regarder. Il faut, bien sûr, le faire avec notre crayon, par exemple, parce que l'escalade se fait rapidement dans ce domaine et on peut se retrouver avec des éléphants blancs qui n'auront aucun seuil de rentabilité. C'est là aussi notre rôle d'essayer de maintenir un équilibre à la fois culturel et financier. Donc, ce programme est terminé au ministère et on essaie de contribuer.

M. Bouierice: Donc, votre association pour la présentation de Gala est une espèce d'incitatif que vous allez mettre sur pied. Et, pour empêcher... Comme vous le dites, il faut regarder également avec son crayon, je suis bien d'accord avec vous et le fait de vous adjoindre deux autres maisons, à ce moment-là, rend le risque financier moins élevé.

M. Morin: J'aurais un dernier commentaire, un commentaire sur le commentaire. Notre plus grand désir aussi est d'établir une collaboration, non pas ponctuelle mais permanente, avec le Grand Théâtre. Il y a deux grandes maisons, propriétés de l'État, dans le domaine des arts de la scène, le Grand Théâtre et la Place des Arts. On est ravi déjà d'avoir la collaboration du Grand Théâtre, mais je pense que, et nous sommes d'accord, les deux institutions doivent faire des rapprochements qui soient plus systématiques parce que cela nous permettra de faire des projets plus intéressants, plus importants et surtout plus réguliers, plus fréquents. Et ce rapprochement avec le Grand Théâtre nous apparaît fort important sur le plan de la production.

M. Boulerice: Je suis heureux de vous entendre dire cela. M. le Président, je vais m'adresser à vous. Cette commission a toujours des règles formelles mais également des attitudes très informelles. Si mes collègues veulent intervenir immédiatement, je ne suis pas partisan nécessairement de la séparation des blocs. Il n'y aura pas de Yalta pour la commission de la culture. Je ne sais pas... Je vois Mme la députée de Vachon qui est très intéressée par le dossier de la Place des Arts parce qu'elle est dans la grande région métropolitaine de Montréal. Donc, Mme la députée, on peut faire le va-et-vient de part et d'autre.

Mme Pelchat: Je remercie le député de Saint-Jacques. M. Morin, est-ce que la participation financière de la Place des Arts à la comédie musicale Gala se fera à même votre surplus budgétaire accumulé comme cela a été le cas pour Starmania, par exemple?

M. Morin: Même pas, madame, parce qu'on n'a pas l'autorisation d'utiliser ce fonds encore. À même le budget annuel, on a une provision pour fins de programmation, de contenu et on la prend à même ce budget.

Mme Pelchat: Votre participation à la comédie musicale Starmania a-t-elle été faite à même le surplus cumulatif ou le surplus annuel de l'année 1986-1987?

M. Morin: Cela a été pris à même les moyens financiers annuels, à même le budget de l'année, effectivement.

Mme Pelchat: Donc, c'était prévu dans le plan de développement annuel.

M. Morin: Oui.

Mme Pelchat: Est-ce qu'il n'est pas possible, à ce moment-là, de prévoir dans le plan de développement annuel une participation à une comédie musicale ou à tout autre projet dont vous faisiez mention tout à l'heure?

M. Morin: Écoutez, la création d'un fonds de production se fait à partir de plusieurs motivations, dont l'une est de traiter à distance avec les intervenants du milieu. Si nous nous attaquions à des projets strictement à partir de la Place des Arts, je pense que nous pourrions nous faire taxer, à un moment donné, d'utiliser des fonds à mauvais escient ou de faire du favoritisme ou je ne sais quoi, alors qu'en ayant des règles établies à l'intérieur d'un fonds de production, il faut les suivre pour pouvoir réaliser des projets avec le secteur privé. On se sent plus à notre aise de le faire de cette façon et on se sentira d'autant plus à notre aise qu'on n'a pas posé de geste encore. C'est l'une des raisons.

Mme Pelchat: M. le député de Saint-Jacques vous a demandé de rappeler quel était le programme quant aux comédies musicales. Vous en avez fait mention. Est-ce que vous pourriez me dire quelles comédies musicales ce programme a subventionnées? Quelles furent ces productions pendant ces deux années d'existence?

M. Morin: Madame, je pense que la dernière fut présentée au Spectrum et avait pour titre "1929". Je ne peux pas vous donner cela comme valeur sûre, puisque je ne suis pas attaché au ministère des Affaires culturelles.

M. Boulerice: Vouos êtes sûrement trop jeune pour vous en rappeler...

Réaménagement de la Place des Arts

Mme Pelchat: On pourrait aller sur un autre sujet à moins que mon collègue de Saint-Jacques ne veuille continuer sur les comédies musicales. Concernant, le réaménagement scénique de la salle Wilfrld-Pelletler, j'aimerais savoir où en sont rendus les développements de ces travaux et les échéanciers du réaménagement comme tels.

Mme Touchette Robitaille: Sur le plan technique, je vais laisser M. le directeur général répondre.

M. Morin: C'est sur un plan de calendrier. Nous suivons le calendrier à une semaine près, ce qui veut dire que nous serons fermés - la salle Wilfrid-Pelletier seulement - cet été et l'été prochain. Mais rassurez-vous on a réussi à avoir deux expositions majeures durant ces deux étés, qui auront lieu dans les foyers de la salle Wilfrid-Pelletier. Cet été...

Mme Touchette Robitaille: Les trésors du Pérou.

M. Morin:... c'est une exposition sur l'art du Pérou, la civilisation Inca. A l'été 1990 ce sera une exposition sur Napoléon. Donc, le calendrier est suivi rigoureusement, peut-être à une semaine près. C'est évident que c'est très lourd comme calendrier, mais ça devrait être terminé à l'automne 1990 de façon complète.

Mme Pelchat: En ce moment, quelle est l'utilisation, la possibilité maximale de la salle Wilfrid-Pelletier et...

Mme Touchette Robitaille: Ce qu'elle peut offrir maintenant...

Mme Pelchat: Oui.

Mme Touchette Robitaille:... et ce qu'elle pourra offrir plus tard?

Mme Pelchat: Maintenant, vous l'utilisez à 100 % ou si elle est utilisée...

Mme Touchette Robitaille: Je dirais à environ 84 %.

Mme Pelchat: Et ce réaménagement permettra...

Mme Touchette Robitaille: Le réaménagement va permettre tout d'abord une beaucoup plus grande flexibilité, une plus grande possibilité de spectacles. Maintenant, avec les technologies modernes, plusieurs salles dans le monde offrent

à des troupes des possibilités que nous ne pouvons offrir. Nous avons tout de même une salle qui a 25 ans, primo. Deuxièmement, cette flexibilité va même se traduire par des économies pour les utilisateurs. Je vous donne un exemple. Lorsque l'opéra, au cours de sa période, doit céder sa place à l'OSM, la période de montage-démontage peut coûter environ de 5000 $ à 10 000 $. Avec le nouveau dégagement de 65 pieds sur les deux côtés dont nous bénéficierons. il sera possible de conserver les décors sur scène, de les replacer de façon différente, d'éviter les montages-démontages et de permettre ainsi le concert de l'Orchestre symphonique. Donc, une économie pour les utilisateurs de salles.

Mme Pelchat: Cela va, M. le Président.

Le Président (M. Audet): Merci, Mme la députée de Vachon. J'aurais une question à poser à Mme la présidente. Dans votre allocution, au début, vous avez soulevé le rôle et l'importance de la société comme leader dans le développement des arts. Est-ce que votre statut d'organisme sans but lucratif - cela en est ainsi par votre loi - ne devrait pas être assoupli? On sait que vous voulez jouer davantage un rôle de leadership, quand vous avez des excédents par exemple, comme c'est arrivé récemment. Vous voulez faire un fonds avec cela, c'est bien. Je pense que c'est une excellente initiative. Est-ce que la loi ne devrait pas être assouplie à cet égard pour vous permettre, des fois, de prévoir peut-être d'autres activités ou d'autres interventions dans le milieu des arts? Est-ce que vous n'avez pas un assouplissement à suggérer pour cela, quelque chose... ? (11 h 15)

Mme Touchette Robitaille: Une chose extrêmement importante qui nous préoccupe, c'est l'aspect relève, l'aspect éducation. Avec la présence éventuelle des deux conservatoires, celui d'art dramatique et celui de musique, je pense à une interaction extrêmement positive sur tout le quadrilatère. Pour les jeunes artistes, il y aura possibilité d'avoir très facilement accès à de la création, à des oeuvres, peut-être même une chance de se produire, de briser la glace face à un public. Je pense qu'un des volets de la mission, également, c'est ce volet relève, ce volet éducation, tant chez les jeunes artistes que chez les jeunes auditoires, qui seront les auditoires de demain. Cela donnera peut-être même la possibilité aux jeunes artistes de se produire davantage en milieu scolaire ou cégépien.

Gestion de la société

Le Président (M. Audet): D'accord. Toujours dans le cadre de ce statut, au chapitre des conventions collectives, on sait qu'avant, le gouvernement était responsable des négociations concernant le salaire de vos employés. Du moins, c'est ce que je comprends à la lecture des notes que j'ai. Maintenant, vous avez un rôle relatif sur le pian de ces ententes collectives. Dans le cadre de votre statut, est-ce que ça ne crée pas parfois des problèmes dans les négociations et ces choses-là, d'avoir un budget à équilibrer et des choses comme ça?

Mme Touchette Robitaille: Je demanderais à M. le directeur généra! de répondre, M. le Président.

M. Morin: Ce ne sont que des problèmes, monsieur.

Le Président (M. Audet): Pardon?

M. Morin: Ce ne sont que des problèmes.

Le Président (M. Audet): Ce ne sont que des problèmes? Alors, il doit certainement y avoir des solutions. Quelles solutions proposeriez-vous à ça?

M. Morin: Peut-être que je saisis mal le sens de votre question. Bien sûr, nous avons plusieurs conventions avec lesquelles nous sommes appelés à travailler. Cela se fait dans un cadre relativement harmonieux, malgré tout. Il y a un historique là-dessus. Je crois que vous avez reçu un tableau où vous voyez le nombre de conventions en vigueur. Avec votre permission, j'aimerais faire témoigner Me Fortin, qui s'occupe des relations du travail, pour savoir si c'est vraiment harmonieux. Que je sache, ça l'est; si ça ne l'est pas, je vais l'apprendre ce matin.

Le Président (M. Audet): D'accord, allez-y.

Mme Fortin (France): Si je comprends bien, votre question, M. le Président, porte effectivement sur l'intervention gouvernementale. La Place des Arts doit faire approuver ses mandats de négociation, ses mandats d'approbation des conventions collectives et, effectivement, c'est assez lourd. Nous avons dix groupes syndiqués et M. Morin avait raison en vous disant qu'il croyait que les relations étaient harmonieuses, je pense qu'elles le sont. Ces gens doivent être assez patients, parce que c'est assez long. De temps en temps, les délais d'approbation, etc., peuvent créer à la table certains petits problèmes, mais ils peuvent être réglés.

Le Président (M. Audet): À ce moment-là, vous avez certainement à l'esprit une mesure d'assouplissement pour aider la société à régler elle-même ses problèmes, lis se règlent dans l'harmonie, ça va quand même bien, mais le jour où l'harmonie sera rompue, le problème ne sera pas nécessairement plus gros, il sera cependant plus difficile à régler. Sur le plan de l'assouplissement, vous n'avez pas...

Mme Fortin: Écoutez, la loi est très claire, c'est le gouvernement qui détermine les conditions de travail. Même si... Nous avons dix conventions collectives, il y a quand même un groupe de non-syndiqués, et le gouvernement détermine quand même les conditions de travail des employés de la société. Dans certains cas, il faut non seulement négocier avec le syndicat, mais aussi avec le gouvernement qui, bien sûr, a le souci que ses sociétés poursuivent dans une même ligne de pensée relativement aux conditions de travail. C'est à cet égard que le législateur, dans sa sagesse, a inclus ce genre de disposition. Nous le comprenons. Cependant, il faut également apprendre à vivre avec et à faire en sorte que, malgré certains délais administratifs qui, de temps en temps, deviennent pénibles à vivre, on finisse par les signer. Et la vie continue.

Le Président (M. Audet): D'accord. Merci. M. le député de Saint-Jacques et porte-parole de l'Opposition en matière de culture, vous avez la parole.

M. Boulerice: Mme Fortin, vous nous dites: "le législateur, dans sa sagesse", mais on ne sait jamais, quand les gens nous disent ça, si c'est un compliment ou un reproche. Selon le rapport 1986-1987, la Société de la Place des Arts avait une dette à long terme de A3 000 000 $, ce qui représente des intérêts annuels d'à peu près 4 000 000 $ ou 4 500 000 $, quelque chose comme ça. Dans le rapport, si je vous cite correctement, je pense que vous disiez que cette situation laissait la société dans une situation peut-être défavorable par rapport à d'autres centres culturels; est-ce que vous pourriez nous en décrire les conséquences comme telles, très immédiates, chez vous?

M. Morin: D'une part, il faudrait citer deux exemples, et deux exemples extrêmes: le modèle américain et le modèle européen. Si nous prenons le cas du Lincoln Center, par exemple, qui est peut-être le complexe culturel le plus important aux États-Unis, vous avez une valeur de remplacement d'environ 350 000 000 $. Il n'y a pas un sou de dette à long terme, et pourtant, l'État n'a pas Investi plus de 10 % de la valeur nominale; la balance étant le résultat de levées de fonds dans le secteur privé, notamment de la fondation Rockefeller. C'est le modèle idéal, bien sûr, alors qu'en Europe, c'est exactement le contraire. Quel que soit le complexe, surtout si on se dirige vers l'est, on s'aperçoit que le gouvernement intervient presque à 100 %.

Nous nous trouvons à peu près à mi-chemin, avec une dette obligataire de l'ordre de 51 000 000 $. Cette dette obligataire pourrait être moindre ou pourrait être plus élevée si nous étions aux États-Unis ou si nous étions en Europe. Elle serait moindre aux États-Unis et plus élevée en Europe. C'est une question purement d'écriture, dans le fond, parce que cette dette, en vertu d'un acte de fiducie, le gouvernement en a l'entière responsabilité de paiement sur une base annuelle.

Le gouvernement intervient annuellement pour payer et le capital et l'intérêt. Aux livres, vous avez toujours à traîner ce boulet, qui s'appelle la dette obligataire. Une écriture pourrait simplement, enfin, une écriture, c'est simplifier la chose à l'extrême, mais une disposition pourrait permettre de faire disparaître ce déficit et de le passer dans une autre société, ou au gouvernement comme tel. Là, n'est pas notre propos Nous disons simplement que la Place des Arts traîne un boulet de l'ordre de 51 000 000 $, et que nous ne pouvons rien pour nous défendre contre cette dette obligataire. La privatisation de la Place des Arts demeure encore quelque chose de très éloigné, que je sache, même s'il en a été question au cours des deux dernières années. De toute façon, ce n'est pas à la Place des Arts de se pencher sur cette dimension. À chaque année, on peut se faire et on se fait dire très souvent par les médias: Vous avez un déficit. Et on confond déficit d'opération avec déficit d'opération plus service de la dette. SI vous additionnez les deux, vous vous retrouvez en haut de 7 000 000 $, alors qu'en réalité, on se sent responsables, nous, pour les déficits d'opération, mais on ne se sent pas de responsabilité pour la dette obligataire. Alors on serait simplement plus à notre aise si cette dette obligataire était placée dans un autre bilan.

M. Boulerice: Appelé communément service de la dette. Le service de la dette, j'ai toujours dit qu'il était à l'État ce qu'une hypothèque domiciliaire était aux simples individus. C'est une vision, malheureusement, que ne partage pas ma vis-à-vis, mais cela sera un autre débat que je ferai avec elle.

Je vais être prudent avec les chiffres, parce que c'est toujours important. Il y a eu une augmentation de revenus de 26, 4 % en 1986-1987, et ceux-ci sont demeurés sensiblement stables en 1987-1988, c'est-à-dire que c'était de 8 024 392 $ contre 7 939 501 $. Pour l'année en cours, que prévoyez-vous? Je vous avais prévenu, M. le directeur général!

Mme Touchette Robitaille: L'année est encore jeune, M. le député!

M. Bouierice: Pardon?

Mme Touchette Robitaille: L'année est encore jeune!

M. Bouierice: Ah! oui, l'année est encore jeune!

M. Morin: Vous savez, une grève de trois jours, une annulation majeure peut changer beaucoup une saison à la Place des Arts, alors c'est difficile pour nous de prévoir ce que nous

allons faire dans l'année. Mais après un semestre ou près d'un semestre, je pense que nous pouvons dire sans trop nous tromper que nous rencontrons à peu près les budgets établis.

M. Boulerice: La subvention de fonctionnement qui vous est versée... Vous allez me dire que l'année est plus que jeune, que celle de 1989-1990 n'est pas encore commencée, mais je vais au-delà des réponses tout de suite. La subvention de fonctionnement versée par le ministère s'élevait à 4 026 000 $ en 1986-1987, elle était au même montant en 1987-1988 et à 4 258 000 $ cette année. Est-ce que cela vous paraît suffisant?

Mme Touchette Robitaille: Si l'on s'en réfère aux deux dernières années de budgets, aux deux dernières années des états financiers, je pense que cette subvention nous permet de rencontrer ou de vraiment bien marier les revenus et les dépenses de la société.

M. Boulerice: Donc, vous me dites qu'elle permet à la société d'enregistrer de nouveaux excédents avec une subvention de cette importance?

Mme Touchette Robitaille: Ce n'est pas tout à fait ce que j'ai dit. J'ai tout simplement dit que c'était le cas en ce qui concerne l'établissement des revenus et des dépenses que nous faisons en début d'année. Il se peut qu'au cours de l'année, pour répondre un peu à votre deuxième volet, il y ait des surprises tant sur le plan des revenus excédentaires que sur le plan des dépenses excédentaires. Les cycles ne sont pas toujours les mêmes. Les cycles peuvent être positifs ou négatifs. Nous avons vécu de très bonnes années. Par contre, rien ne nous dit qu'au cours des exercices suivants, nous n'aurions pas, peut-être, des dépenses supplémentaires dues à des problématiques auxquelles nous ne pouvons répondre en ce moment. Donc, pour un budget qui est planifié en début d'année, il est fort difficile de prévoir des tendances positives ou négatives qui pourraient survenir au huitième, au neuvième ou au dixième mois.

M. Boulerice: L'appétit venant en mangeant, j'aurais le goût de vous poser comme deuxième question: Si je vous donne plus, qu'est-ce que vous allez en faire?

Mme Touchette Robitaille: Davantage de contenu.

M. Boulerice: Je vais passer à... Mme Robitaille, pour ce qui est des taux d'occupation, si on regarde, si on tient compte des hauts taux d'occupation des salles - je pense qu'on a là des choses intéressantes - par quels moyens la Société de la Place des Arts envisage-t-elle de hausser ses revenus?

Mme Touchette Robitaille: Nous avons 268 jours payants à la Place des Arts. Nous mentionnions tout à l'heure, M. le député, qu'avec ce réaménagement scénique à la salle Wilfrid-Pelletier, une plus grande flexibilité due au réaménagement du côté jardin nous permettra possiblement d'avoir des troupes que nous n'avons pu avoir à cause de...

Une voix:... un exemple?

Mme Touchette Robitaille: Je dois vous dire que je n'ai aucun exemple à l'esprit, sauf que, si je compare notre salle avec des salles absolument équipées comme, par exemple, à New York ou ailleurs aux États-Unis, il y a peut-être évidemment certains types de produits que nous n'avons pu produire, compte tenu de certaines contraintes sur le plan équipement, comme tel. Donc, il est concevable de penser que nous pourrions avoir davantage de jours payants, surtout si certains décors complexes pouvaient demeurer sur la scène et permettre parallèlement à d'autres troupes ou artistes de se présenter. Alors, ceci est une possibilité, mais cette salle ne sera complétée qu'en 1990, comme nous l'avons mentionné. Évidemment, nous allons planifier au maximum qu'il nous est possible de planifier à ce stade-ci. Mais il faut quand même y aller au fur et à mesure, avec les événements.

Le Président (M. Audet): M. le député de Richelieu.

M. Boulerice:... je m'excuse.

Le Président (M. Audet): Continuez...

M. Boulerice: Non, mais de peur qu'on perde le...

Le Président (M. Audet): Allez-y, complétez votre...

M. Boulerice: Quand vous parlez de 268 jours, est-ce que vous parlez uniquement de la salle Wilfrid-Pelletier?

Mme Touchette Robitaiile: Wilfrid-Peiletier, oui.

M. Boulerice: D'accord, Cher collègue...

Concertation et milieu artistique

M. Khelfa: Merci. Dans un premier temps, Mme la présidente, permettez-moi de vous féliciter et de vous remercier de l'excellent travail que vous accomplissez et surtout de l'excellente présentation que vous nous avez faite aujourd'hui. Votre travail pour la culture ne rayonne pas seulement à Montréal, mais à travers le Québec et à l'extérieur du Québec aussi. (11 h 30)

A titre d'information, j'aimerais avoir des explications concernant la concurrence. Vous avez effleuré le sujet, vous avez dit qu'à l'heure actuelle, la concurrence est assez forte dans le milieu. J'aimerais savoir quel est le potentiel du marché? Est-ce que vous avez fait une évaluation du potentiel global du marché en fonction, bien sûr, des nouvelles techniques, de la technologie et des goûts changeants du client? Avez-vous évalué, bien sûr, ses effets et ses conséquences sur la qualité de vos productions? Est-ce que vous avez fait une évaluation? Vous avez parlé de la concurrence, est-ce que je peux connaître votre analyse à ce sujet?

Mme Touchette RobitailIe: Le nombre de salies augmente beaucoup à Montréal. Certaines salles n'ont été qu'annoncées, elles n'existent toujours pas. Je pense qu'il est difficile, à ce stade-ci, d'évaluer l'impact de ce que sera cette vie culturelle à Montréal dans quatre ou cinq ans étant donné que certaines salles sont encore à l'état de projet.

Par contre, qu'on le veuille ou non, il faut quand même faire face à une certaine réalité, c'est-à-dire que la concurrence augmente, qu'il y a de plus en plus de salles. C'est une réalité qui existe. D'autre part, certains points m'apparaissent essentiels. Autant, sur le pian des affaires, nous assistons à une globalisation, une internationalisation, une unification des forces et à une concertation, autant, dans le domaine des arts, il m'apparaît très important et réaliste de penser que ce monde des arts en général devra se concerter de plus en plus et même qu'il y ait, en sus, des arrimages faits avec d'autres secteurs. Je pense entre autres au tourisme, et je pense également au milieu des affaires. De toute façon, même si toutes ces salies existaient d'ici cinq ou dix ans, nous devrions continuer à produire et à monter des spectacles qui représentent vraiment notre culture. De façon à ne pas nous marcher sur les pieds, nous devrons peut-être vous concerter davantage entre salles et autres intérêts - je faisais référence au tourisme et au monde des affaires - pour présenter des choses qui puissent avoir une certaine relation entre elles ou, tout au moins, qui n'aient pas le même intérêt en même temps.

M. Khelfa: Est-ce que ce processus de concertation est commencé ou si c'est un objectif visé?

Mme Touchette Robitaille: Je dois vous dire que nous entendons le mettre sur pied très prochainement. Les trois premiers gestes de l'automne sont très significatifs: les portes ouvertes de fin de septembre sont déjà un premier geste, il y avait des commanditaires; le 25 septembre, c'était une Journée commanditée par les papiers Scott, et les Noels du monde par Bell et par Bombardier. Nous avons approché certaines personnes du milieu des affaires et nous nous rendons compte que, de leur part, entre autres, il y a un désir d'Identification et de "partnership", si vous me pardonnez l'anglicisme, pour vraiment pénétrer le marché. Je pense qu'on assiste vraiment à une interaction et à une conscientisation. Si Montréal veut vraiment devenir une ville importante, tous et chacun. qu'il s'agisse du monde culturel, du monde des affaires, du monde du tourisme, ont intérêt, dans leur secteur, à collaborer avec les autres de façon qu'il y ait des Interactions, évidemment en ce qui nous concerne, pour notre milieu.

M. Khelfa: À ce moment-là, vous éliminez la concurrence.

Mme Touchette Robitaille: Non, elle ne s'élimine...

M. Khelfa: Avec cette concertation, vous pouvez éliminer la concurrence, en réalité

Mme Touchette Rooitaiile: C'est-à-dire que l'aspect négatif de la concurrence est éliminé, mais la concurrence demeure, et elle peut être très saine. Elle l'est en affaires, pourquoi pas sur le plan culturel?

M. Khelfa: J'ai le goût de vous poser la question: Quel est le plus grand concurrent de votre organisme?

M. Morin: Je vais vous surprendre, M. le député, c'est le VCR. C'est la télévision sous la forme VCR, les cassettes magnétoscopiques. J'ai devant moi une étude qui s'appelle The American and the arts" qui vient d'être publiée concernant les quatre dernières années aux États-Unis, et les modèles québécois et canadien sont les mêmes que le modèle américain. Dans le domaine de l'opéra, de la musique symphonique, de la danse, même du sport, et davantage du sport d'ailleurs, il y a une baisse d'assistance moyenne d'environ 14 % au cours des quatre dernières années, au profit de deux grands volets. Le premier est non pas la télévision traditionnelle, mais bien le VCR, je ne sais pas trop comment le traduire, disons le vidéo, et, d'autre part, une vie plus active des citoyens, on fait plus de photos, on a plus d'activités de participation. C'est démontré aussi de ce côté. Il s'ajoute à cela également le phénomène du nombre d'heures de loisir disponible. Contrairement à ce qu'on peut penser, le nombre d'heures de loisir diminue au lieu d'augmenter depuis quatre ans et il diminue considérablement, parce que le couple travaille, parce qu'on est passé d'une industrie primaire et secondaire davantage vers du tertiaire, donc beaucoup d'entreprises de services, où on voit des gens s'impliquer, ce qui fait que beaucoup d'heures de loisir disparaissent au profit de la participation dans l'entreprise, etc. Alors, la grande compétition ne vient pas

d'autres salles, mais à la fois du vidéo, de la participation et du manque de temps.

M. Khelfa: Je vous remercie eî je vous souhaite une excellente concertation.

M. Morin: Merci.

La Président (M. Audet): Merci. M. le député de Saint-Jacques.

M. Boulerice: M. Morin, j'avais entendu parier de cette étude, malheureusement, je ne l'ai pas. Si, par bonheur, vous en avez une deuxième copie, je vais vous confisquer la vôtre. Je voulais vous poser une question là-dessus. Effectivement, c'est un sujet de discussion très pertinent, et je pense qu'il y a eu un article, dans le Times ou le Newsweek, peu importe, il y a quelque temps là-dessus. Est-ce que, de mémoire - puisque vous avez l'ouvrage, vous l'avez donc lu - ce fameux syndrome du VCR, disons qu'on va l'appeler comme ça, se fait uniquement au détriment de ce qu'on appelle - vous employez l'expression variétés - la musique populaire, ou bien au détriment de ce qu'on appelle la partie classique, c'est-à-dire la danse, le ballet, l'opéra, le concert, parce que vous n'êtes pas sans savoir qu'il y a une certaine insatisfaction quant au branchement du VCR sur la télévision à qui on reproche de ne pas présenter, autant que l'on en présentait, autrefois, des concerts, des ballets, etc. ?

M. Morin: La réponse est en plusieurs volets, et je vais essayer d'être bref. Cela touche tous les secteurs, incluant les variétés. Il y a là une baisse aussi importante que dans le secteur classique. Prenons l'exemple de la musique symphonique où vous avez une perte de 14 % sur quatre ans, alors que vous avez une augmentation de 17 % du nombre de personnes regardant une émission de télévision présentant de la musique symphonique. Vous pouvez voir un concert symphonique magnifique sur un VCR, et peut-être ne vous rendrez-vous pas à la Place des Arts pour voir le même concert, et c'est vrai pour les variétés également. Maintenant, il y a deux secteurs, je me permets de l'ajouter, où il y a des augmentations, le domaine de la muséologie et celui du cinéma. Ce sont les deux seuls secteurs où il y a des augmentations.

Maintenant, cela m'amène peut-être à un propos qui est... Dans Montréal, sept à huit projets de salles se réaliseront peut-être dans les deux ou trois prochaines années. La Place des Arts ne s'oppose pas à ce qu'il y en ait plus, c'est ça une industrie qui est forte. Sur Broadway, il y a plus d'une salle et c'est vivant, c'est dynamique, alors qu'il y ait sept ou huit salles de plus, ce n'est pas une tragédie, c'est à cela que Mme la présidente faisait un peu allusion, il y a quelques instants. Notre préoccupation est de nous assurer que les salles soient pour les bonnes choses, que toutes les salles ne fassent pas la même chose, qu'H y ait une bonne répartition, un bon étalement des forces. Mais si on sa retrouve avec sept nouvelles salles qui font de la musique classique, ou sept nouvelles qui ne font que des variétés, ce sera catastrophique pour l'ensemble. C'est une question de planification et c'est là notre Inquiétude. Elle ne porte pas sur le nombre de salies, mais sur leur vocation.

M. Boulerice: D'accord. La programmation des activités. Selon les informations qui nous ont été transmises par les statistiques d'occupation, puisqu'on en était là, le nombre de spectateurs est passé de 982 000, en 1986-1987, à 947 000, en 1987-1988, soit, grosso modo, une diminution de 3, 5 %, tandis que Se nombre de représentations passait de 924 à 860 et quelques, donc une diminution d'environ 6, 5 %. Vous avez parlé du VCR, tantôt, mais comment expliquer cette diminution de représentations?

M. Morin: Tout est fonction de la qualité du contenu, M. le député. S! n'y a pas d'alternative à l'excellence, du moins je n'en connais pas. Plus nous serons en mesure de présenter des produits de haute qualité, des produits haut de gamme, plus le pourcentage d'assistance sera élevé. Nous pouvons attribuer cela plus particulièrement à deux ou trois événements qui se sont produits au cours des deux derniers excercices. Pensons, entre autres, au Festival de jazz, qui a pris racine à la Place des Arts et qui joue à la salle Wilfrid-Pelletier à presque 100 % d'assistance, avec les meilleurs jazzmen du monde. Cela représente peut-être moins de production, mais un plus haut taux d'assistance.

Nous avons aussi commis nos erreurs, vous savez, nous avons même ce privilège. Nous nous trompons effectivement, à l'occasion, mais nous visons surtout à avoir des spectacles de haute qualité, que ce soit dans une discipline ou l'autre. C'est le secret de la formule. Nous visons l'objectif d'avoir plus de spectacles, bien sûr, mais ce qui compte aussi c'est d'avoir un pourcentage maximal d'assistance à chacun des spectacles. C'est ce qui est arrivé, on l'a vu récemment avec l'Opéra de Montréal. La Bohème y a joué à presque 100 % d'assistance, soit 98 %. C'était un spectacle merveilleux. Et, si nous présentions quelque chose de moins grande qualité, on aurait un pourcentage moins fort. C'est aussi vrai pour le phénomène des abonnements. Que ce soit un abonnement pour l'orchestre symphonique, l'opéra, la danse ou n'importe quoi, le niveau d'abonnement est plus ou moins élevé selon la qualité du produit. Nous ne sommes pas différents des autres secteurs d'activité économique dans ce domaine; il faut avoir de l'excellence.

M. Boulerice: Donc, au sujet de la diminution de représentations, on ne doit pas lire les

chiffres uniquement pour les chiffres comme tels. Disons qu'il y a, non pas un tamisage - aidez-moi à trouver le terme, M. le directeur général - mais un resserrement des critères de sélection de la Place des Arts, à savoir qu'on est bien prêts à donner 30 représentations, mais qu'on n'en donnera pas 35, si elles ne contribuent pas au prestige qu'a toujours voulu se donner et que doit toujours continuer à se donner la Place des Arts. C'est donc dans ce sens qu'il faut voir ça. D'accord.

Départ éventuel de i'OSM

II y aurait une autre question que je voudrais poser, parce qu'on n'a pas la réponse en fait, on l'a eue il y a quelques années - relativement à la Maison de l'Orchestre symphonique qui devait être située coin Berri-de Montigny. Nous en avons souvent discuté, M. le directeur général. Je sais qu'il y a eu abandon du projet, sinon moratoire, si je peux employer cet euphémisme, mais qu'arrive t il actuellement de l'Orchestre symphonique? Est-il encore à la Place des Arts? Va-t-il continuer à y être? Est-ce que la rumeur voulant qu'il soit localisé en face du centre Sheraton, à côté du prestigieux édifice du puissant groupe Lavalin, un endroit très centre-ville ouest, est fondée? Ce doit être préoccupant pour la Place des Arts comme telle, parce que 20 % de son taux d'occupation provient de la fréquentation des concerts symphoniques. Si l'orchestre partait, comment combleriez-vous ces 20 %, qui représentent un morceau important du gâteau, si je peux employer cette image? (11 h 45)

Mme Touchette Robitaille: M. le député, c'est en effet une de nos grandes préoccupations, mais en même temps, il s'agirait là, peut-être, d'une question à poser à l'Orchestre symphonique de Montréal, puisqu'il s'agit en réalité du désir de I'OSM d'avoir sa propre salle. Vous vous souvenez sans doute qu'à l'origine, la Place des Arts a été conçue pour abriter justement une salle de concert. Elle est devenue, par surcroît, une maison d'opéra et de ballet. La Place des Arts a eu comme locataire et a toujours comme locataire I'OSM et elle en est fort contente. Donc, dans un sens comme dans l'autre, la Place des Arts sera très heureuse de conserver I'OSM comme locataire et, en même temps, elle devra s'organiser si I'OSM quittait. Cela, je vous le soulignerai, rend notre problématique de développement un peu plus complexe - je le mentionnais d'ailleurs dans mon allocution du début - puisqu'il y a ce point d'interrogation face au départ ou non de I'OSM.

Ce que vous mentionnez face à un taux d'occupation de 20 % de la salle par I'OSM est juste. Il nous faudra donc, quand nous en arriverons à ce moment développer un autre créneau.

M. Boulerice: Est-ce que vous avez des hypothèses, d'autres créneaux?

Mme Touchette Robitaille: II y a un deuxième orchestre à Montréal, l'Orchestre métropolitain, qui pourrait - c'est concevable - devenir l'orchestre résident de la Place des Arts. Pour le moment, l'Orchestre symphonique y est toujours. Nous souhaitons continuer à l'avoir comme locataire, si tel est son désir.

M. Boulerice: L'Orchestre métropolitain ne serait pas résident de la salie Wilfrid-Pelletier, il serait résident d'une des salles, Port-Royal ou Maisonneuve. C'est là d'habitude qu'il s'exécute.

Mme Touchette Robitaille: C'est juste, sauf que les vocations pourraient être changées au cours des années. C'est une possibilité.

M. Boulerice: Donc, cette hypothèse, pour vous - comment dirais-je - ce n'est peut-être pas angoissant comme tel dans le sens que vous pouvez continuer demain, mais, histoire de savoir où vous devez aller parce qu'il y a des choses à planifier, c'est une question qui devrait être éclaircie pour vous le plus rapidement possible.

Mme Touchette Robitaille: Tout à fait. En ce qui concerne la planification, le plan culturel et le contenu, il serait beaucoup plus facile pour nous, en tout cas au chapitre du développement, de pouvoir conjuguer, non plus avec des hypothèses, mais peut-être avec des certitudes.

M. Boulerice: M. le Président, je ne sais pas si mes collègues veulent continuer à ajouter.

L e Président (M. Audet): Mme la députée.

Mme Pelchat: Mon collègue de Saint-Jacques m'a soufflé la question de l'Orchestre symphonique, mais j'aimerais quand même y revenir tout simplement pour ajouter à ses propos. Si je me souviens bien, lorsqu'il a été question du moratoire concernant les équipements culturels dont la maison de l'Orchestre symphonique, l'un des éléments très importants dans la décision du gouvernement et de la ministre, c'était effectivement le trou, le vide qu'allait occasionner le départ de l'Orchestre symphonique de Montréal de la Place des Arts. Je pense que c'était aussi peut-être pour permettre à la Place des Arts de réagir, de se retourner de bord, comme on dit dans le milieu, afin de prévoir ou d'identifier un utilisateur potentiel pour ne pas que, du jour au lendemain, avec une subvention de 30 000 000 $ annoncée pour la Maison de la musique, on se retrouve avec un utilisateur qui ait 20 % de moins. C'est beaucoup pour une société. Je ne le dis pas pour faire des débats politiques, mais c'était à mon sens une décision sage, faite en fonction de la gestion du gouvernement. La Place des Arts, c'est une société d'État. Alors, quand on se tire soi-même dans les pattes en accordant

d'un côté une subvention de 30 000 000 $ et en créant un vide de l'autre... C'est tout de même l'État qui assume les déficits de cette société dans un sens comme dans l'autre. Je tenais à le souligner. L'Orchestre symphonique est en ce moment en levée de fonds. De ce que j'en sais, on en est à identifier certains sites. Le député de Saint-Jacques en a mentionné. Est-ce qu'à ce moment-là, on ne peut pas dire qu'on est face d'une hypothèse en train de se confirmer à plus ou moins brève échéance? Est-ce que cela ne vous place pas vraiment dans la situation de penser que, d'ici trois ans, l'Orchestre symphonique aura ou sera sur le point de quitter?

Mme Touchette Robitaille: Tout à fait madame. De toute façon, soyons quand même réalistes. Il y avait deux autres points que je tenais à mentionnner. L'Orchestre symphonique occupe les locaux en milieu de semaine. Si l'Orchestre symphonique quittait la salle Wilfrid-Pelletier, cela nous permettrait peut-être, au chapitre de la location, de la disponibilité des salles une plus grande flexibilité pour des troupes que nous aimerions inviter. Deuxièmement, nous comptons présenter, comme vous le savez peut-être, d'ici six à huit mois, un plan de développement au ministère des Affaires culturelles face justement à ce départ possible de l'OSM. Qui plus est, s'il y a - et il y aura, effectivement - réaménagement de la salle Wilfrid-Pelletier, cela permettra, vous le mentionniez tout à l'heure, une utilisation plus versatile, si je peux m'exprimer ainsi, et attirera peut-être d'autres productions qui n'y vont pas à l'heure actuelle.

Mme Pelchat: Vous avez parié tout à l'heure de 268 jours d'occupation en ce moment à la salle Wilfrid-Pelletier. Après le réaménagement, j'aimerais savoir, en nombre de jours, l'augmentation que vous prévoyez, après coup?

Mme Touchette Robitaille: Est-ce que nous avons vérifié le nombre de jours?

M. Morin: Mme la présidente, environ 60 possibilités de plus par année. C'est une question de montage et de démontage. Vous avez un grand nombre de jours de montage et de démontage qui, à toutes fins utiles, vont diminuer d'à peu près 75 % à 80 %. Au lieu de monter un spectacle pendant sept jours, on va le monter sur un plateau et c'est ce plateau amovible qui va transporter le décor. Cela permet de sauver des jours de montage et de démontage, ce qui représente à peu près une soixantaine de jours potentiels dans l'année. C'est énorme comme potentiel. C'est ce qui va permettre également, non seulement des représentations, mais des répétitions qui ne pouvaient pas se faire. C'était un des grands malheurs de l'Orchestre symphonique de Montréal qui voulait souvent répéter sur scène, mais qui ne pouvait le faire autant que leur cédule le leur permettait. Cela va permettre de le faire davantage.

Parachèvement du quadrilatère

Mme Pelchat: Au chapitre des orchestres symphoniquds, je pense aussi qu'un locateur comme la Société de la Place des Arts doit miser sur d'autres intervenants, d'autres utilisateurs surtout, quand on voit, vous l'avez vous-même mentionnné, la baisse d'assistance aux concerts des orchestres symphoniques. Et on voit, en ce moment, au Québec, qu'il y a plusieurs orchestres symphoniques en difficulté. Je ne veux pas nommer de noms, mais je pense que le cas de i'OSQ est bien connu. Dans ce sens-là, il faudra aussi que les locateurs diversifient leur programmation.

J'aurais une autre question. Cela concerne le moratoire de 1985 sur les équipements culturels. Je lis dans le rapport annuel de 1985-1986 concernant la construction du musée d'Art contemporain, et je cite: "La construction et l'aménagement du musée d'Art contemporain de Montréal sur l'emplacement de la Place des Arts, propriété de la société, avaient débuté au cours de l'exercice de 1985 - on se souvient du fameux trou - et les travaux de construction ont cessé à la suite de l'imposition d'un moratoire par le gouvernement du Québec. " Encore là, je ne veux pas faire de partisanerie. Je ne veux pas défendre le gouvernement et je pense que la ministre des Affaires culturelles est bien en mesure de se défendre, mais il faudrait peut-être rappeler que le musée d'Art contemporain avait clairement signifié, à la fois à Sa ministre et à la commission Gohier, que ce n'était pas évident que ce qu'on avait proposé au musée d'Art contemporain, c'était vraiment ce que le musée désirait. Je pense que le moratoire a été aussi établi en concertation avec le musée. Puisque ce sont vos terrains, votre location, est-ce que vous pouvez nous informer à l'heure actuelle de l'avancement des travaux sur le site de la Place des Arts?

Mme Touchette Robitaille: Nous en sommes, pour le moment, aux travaux sous le musée, c'est-à-dire les 360 espaces de stationnnement. Les travaux se font selon l'organigramme prévu et la construction du musée devrait débuter tel que prévu.

Mme Pelchat: II a été question, à un moment donné, je ne l'ai pas retrouvé, d'une petite salle de spectacles...

Mme Touchette Robitaille: Une cinquième salle.

Mme Pelchat:... qui serait partagée à la fois par le musée, par le MAC et par la Société de la Place des Arts. Ce projet tient-il toujours?

Mme Touchette Robitaille: Tout à fait. C'est une cinquième salle de spectacles d'environ 360 places, dont le principal utilisateur sera le musée d'Art contemporain. Les conservatoires, s'ils se retrouvaient sur le site, pourraient également en profiter, éventuellement, comme d'un tremplin, si vous voulez, pour les jeunes artistes. Je vous rappellerai également qu'il s'agissait d'une cinquième salle, dont les besoins à Montréal avaient été identifiés par le rapport Pluram.

Mme Pelchat: Une salle intermédiaire pour... Un autre aspect du réaménagement du quadrilatère, c'est l'extérieur de la Place des Arts, avez-vous un projet spécifique et des échéanciers aussi à ce niveau?

Mme Touchette Robitaille: À ce stade-ci, il s'agit d'un projet, purement d'un concept. Il faut se souvenir que différents équipements, à la Place des Arts, ont été construits à des époques différentes. Avant d'en faire le coeur culturel de Montréal, il s'agit d'abord et avant tout d'un travail d'unification sur le site de façon à relier vraiment, à corelier tous les éléments. Je pense à Wilfrid -Pelletier, aux salles Maisonneuve, Port-Royal, au musée d'Art contemporain et, possiblement, aux conservatoires. Donc, un travail de liaison. En plus, c'est un quadrilatère qui peut devenir un attrait touristique majeur, extrêmement Important. Donc, nous avons à coeur ie parachèvement du quadrilatère, de façon qu'enfin la Place des Arts soit complétée.

Mme Pelchat: On sait qu'en ce moment, particulièrement à l'été, les pelouses de la Place des Arts sont très utilisées autant par les passants que par les artistes qui viennent...

M. Boulerice: Et pour bien d'autres choses, madame.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Pelchat: Je n'y vais pas suffisamment souvent, M. le député de Saint-Jacques.

M. Boulerice: M. le directeur général et moi en avons longuement discuté.

Mme Pelchat: Dans l'aménagement extérieur, est-ce que cet aspect de l'utilisation, je devrais dire, populaire, des sites de la Place des Arts, sera conservé? En fait, l'accessibilité du public au lieu comme tel, au quadrilatère de la Place des Arts...

Mme Touchette Robitaille: Nous avons soumis un concept très excitant au ministère des Affaires culturelles, excitant, parce qu'en plus de la beauté et de la noblesse de ce petit espace physique qu'est le quadrilatère, avec le nombre d'équipements culturels qui vont s'y retrouver éventuellement, il fallait évidemment penser en termes "place publique". On pense évidemment verdure, mais, même si on en veut beaucoup, il y a quand même un nombre de pieds carrés restreint. Le concept prévoyait, entre autres, sans entrer dans tous les détails, à l'étage Inférieur, donc, au sous-sol, une interrelation, c'est-à-dire des points, comment pourrais-je dire? une Interrelation de tous les éléments entre eux. Ce concept permettra, par temps froid ou pluvieux, aux gens qui viennent du complexe Desjardins, du métro, de se rendre, de façon souterraine, tout autant au musée d'Art contemporain qu'aux salles, à la billetterie et même, éventuellement, aux conservatoires.

À l'étage supérieur, donc, ce qui se voit, on retrouverait une entrée majestueuse, non seulement pour la salle Wilfrid-Pelletier, mais une entrée qui conférerait, à la fois, beaucoup d'importance au musée d'Art contemporain, ce qui est extrêmement Important. Ce projet, ce concept plutôt, a été soumis au musée d'Art contemporain qui en est fort satisfait. Il y aurait tout d'abord des emmarchements absolument spectaculaires menant à la salle. Plutôt que d'avoir une série d'agoras qui, vides, sont quand même, peut-être, un peu déconcertantes et peuvent, en plus, représenter certains problèmes sur le plan de la sécurité, ces emmarchements majestueux et pratiques constitueraient une agora qui, si vide, si non occupée, serait absolument explicable et qui, au moment d'un festival de jazz ou peut-être d'autres manifestations populaires, serait l'endroit idéal où le public pourrait s'asseoir et observer les événements de la rue ou d'ailleurs. Je pense qu'il s'agit là des principaux éléments. Un espace vert entourerait la salle Wilfrid-Pelletier et rejoindrait également l'emplacement des conservatoires, ce qui, pour les étudiants, serait un endroit de repos idéal au moment des sorties de cours. (12 heures)

Dans les éléments principaux, je l'ai mentionné... Ah! à ne pas oublier, évidemment, le jardin de sculptures qui se retrouvera sur le site! il y aura également des projets pour des pièces d'eau, de façon à vraiment animer, puisque la remarque a été passée, c'est très intéressant, à savoir que le Québec est une province d'eau, mais que nous utilisons fort peu cette richesse que nous avons. Il s'agit donc d'un élément d'animation qui, en plus, pourrait même couper certains bruits de la rue pour les gens qui viendraient se reposer à l'intérieur du site.

Alors, voici en gros... Il y a beaucoup d'autres détails que j'aimerais vous communiquer, mais, en gros, je pense que je vous ai transmis l'esprit de ce concept.

Mme Pelchat: Quel est le budget imparti par le ministère des Affaires culturelles pour le réaménagement du quadrilatère?

M. Morin: II n'y a pas de budget d'établi.

Parlez-vous de l'aménagement extérieur?

Mme Pelchat: Du quadrilatère au complet, exception faite de la salle Wilfrid-Pelletier. Le coût du réaménagement de la salle est de 10 000 000 $, peut-être plus...

M. Morin: C'est 11 400 000 $ pour la salle; 28 000 000 $ pour le musée d'Art contemporain; 6 000 000 $ pour le stationnement. Pour les conservatoires, bien sûr, il n'y a pas encore de chiffres d'établis, puisqu'il n'y a pas de décision de prise à ce sujet. La même chose est vraie pour les aménagements extérieurs qui ne sont pas encore arrêtés. C'est au niveau des concepts, mais on peut penser que le coût des aménagements extérieurs variera entre 4 000 000 $ à 8 000 000 $ environ.

Mme Pelchat: Me permettez-vous une question? Vous parliez tout a l'heure de concertation et de partenariat avec l'entreprise privée, avec différentes personnes. J'aimerais savoir si la Société de la Place des Arts fait bon ménage avec la ville de Montréal? Si oui, quel est l'état du ménage, si je peux m'exprimer ainsi? Avez-vous...

Une voix: La chambre à coucher de la nation.

Mme Pelchat:... un partenariat, une collaboration? S'il y a une municipalité, une ville, un endroit qui profite du rayonnement de la Société de la Place des Arts, c'est bien Montréal. Elle en tire bien profit, j'en suis certaine, mais participe-t-elle de quelque façon que ce soit à la société?

Mme Touchette Robitaille: Cette concertation est vraiment à établir sur plus d'un plan.

Mme Pelchat: Vous dites qu'elle est vraiment à établir, madame?

Mme Touchette Robitaille: À établir sur plus d'un plan, sur plus d'un palier. Entre autres, évidemment, avec la ville de Montréal, il serait souhaitable d'en arriver à des liens extrêmement étroits puisque, comme vous le dites si bien, il y a des retombées économiques pour la ville qui sont Importantes.

Nous en sommes, je dirais, aux premiers balbutiements de cette concertation. Nous entendons tout d'abord avoir une première rencontre, peut-être à l'automne. Il faut des projets de longue haleine. Même si nous projetons possiblement - je dis bien que tout ceci est à l'état de projet - rencontrer différents intervenants, qu'il s'agisse d'intervenants du ministère du Tourisme, de la ville, des affaires et même des autres salles, il faut vraiment avoir une interrelation de façon à ne pas présenter les mêmes produits aux mêmes endroits ou à des endroits différents en même temps.

Même si cela était réalisé à l'automne, iI s'agirait en fait d'une rencontre pour l'année suivante, mais je pense que si on ne commence pas par is commencement, c'est-à-dire au printemps pour une rencontre à l'automne, nous ne commencerons jamais.

Donc, oui, nous vouions intéresser tous les paliers, y inclus la ville.

Mme Pelchat: Qu'est-ce que la Société de la Place des Arts est en droit d'attendre de la ville de Montréal?

Mme Touchette Robitaille: II faudrait tout d'abord leur poser ia question et venir vous répondre éventuellement.

Mme Pelchat: Vous avez quand même des attentes? Peut-être M. Morin pourrait-il ajouter...

Mme Touchette Robitaille: Au départ, il s'agit d'établir un dialogue beaucoup plus étroit. Ce dialogue pourrait peut-être nous laisser développer de part et d'autre des attentes qui, à ce stade-ci, ne sont pas très précises ou qui seraient peut-être irréalistes, compte tenu du dialogue un peu plus éteint à l'heure actuelle.

Mme Pelchat: Concernant les autres intervenants culturels à Montréal, surtout si on pense aux événements majeurs comme le Festival des films du monde... vous avez mentionné le Festival du jazz, le Festival juste pour rire. Ces Intervenants sont en constante relation avec la Place des Arts.

Mme Touchette Robitaille: Lorsque je pense...

Mme Pelchat: Allez-y.

Mme Touchette RobitaBie: Lorsque je pense à d'autres intervenants, je pense, par exemple, au musée des Beaux-Arts où, cette année, nous avions une exposition majeure, l'exposition Chagall, où i! aurait peut-être été souhaitable, si on l'avait prévu d'avance, de penser en termes d'événement Chagall un peu partout à travers Montréal, soit en même temps ou tout au cours de l'année, de façon à vraiment souligner Chagall et de vraiment faire de Montréal un pôle d'attraction sur le plan culturel qui soit d'autant plus remarquable. C'est en ce sens que je parie de concertation, aussi bien avec d'autres salles, d'autres organismes, d'autres sociétés et, également, avec le milieu du tourisme qui devrait être absolument intégré, quitte à penser en termes de produit - les Anglais utilisent les mots "package deal" - de façon à vraiment souligner le plus possible chaque relief de chaque société.

Mme Pelchat: Merci. Cela va, M. le Prési-

dent.

Le Président (M. Audet): Cela va, Mme le députée? M. le député de Saint-Jacques.

M. Boulerice: Oui, M. le Président. Je ne peux m'empêcher, avant de revoir nos amis de la Place des Arts, d'ajouter quelques remarques aux propos de ma collègue, la députée de Vachon, qui posait una question pour savoir ce qui en est avec la vilIe de Montréal, Mme la présidente a renvoyé te question au parti gouvernemental en disant quil faudrait la leur poser. J'aurais le goût de lui dire que si ses collègues ministres trouvent le bon ton pour interpeller les élus municipaux montréalais, les réponses viendront sûrement, M. le Président. Ma collègue, la députée de Vachon, a fort heureusement parlé du musée d'Art contemporain qui sera situé à côté de la Place des Arts. Elle n'est pas sans savoir que le directeur général de la Place des Arts et son collègue, le député de Saint-Jacques, n'ont jamais renié leurs premières amours. Qu'il y ait eu moratoire parce que certains devis, certaines choses que j'ai même appelées des coquetteries architecturales sa soient glissées... M. Morin sait fort bien que j'ai été président du comité de construction du musée. Qu'il y ait eu moratoire pour que le musée revoie, ceia va, mais je pense que Ie musée a d'ailleurs très bien fait son job, si on me permet uns expression anglaise à moi aussi. Ce qui était important d'abord et avant tout, c'était de prendre la décision politique de sortir ce musée d'un endroit plus qu'excentrique au centre-ville de Montréal et de l'amener véritablement dans un endroit qui doit porter son nom de Place des Arts. Je pense que l'ajout du musée là-dessus est bien. Que vous ayez, Mme la députée, fait également allusion à cette salle multidisciplinaire, c'est un long débat qui a animé le conseil d'administration du musée, auquel d'ailleurs, M. Morin a prêté un concours on ne peut plus valable. Les oreilles du ministre ont été bienveillantes à notre requête et, finalement, on l'a eu.

Je vais conclure là-dessus pour ce qui est du musée d'Art contemporain, Mme la présidente, en vous disant tout simplement une chose. Je circule... Vous savez la Place des Arts a bien des qualités, elle a malheureusement un seul petit défaut, elle est à 500 mètres de la circonscription de Saint-Jacques, c'est très près, mais ce n'est pas à l'intérieur. Vous connaissez mon impérialisme culturel pour ce qui est des équipements, ils doivent tous être chez moi, mais là, je vols les gens du Grand Théâtre sourire: Rassurez-vous, je ne demanderai pas de vous rapatrier dans ma circonscription. Ha, ha, ha!

J'ai remarqué l'affiche, Mme la présidente, qui mettait beaucoup plus en évidence ce qui existe actuellement que ce qui va arriver. Je dois vous avouer que j'ai été un peu agacé. J'ose espérer qu'elle va être changée prochainement par une photographie plus futuriste que celle qu'il y a là. Je vois, par ce hochement de la tête, M. le directeur général, que vous allez réduire ma frustration.

M. Morin: On s'en doutait, M. Lefebvre, directeur des communications, pourrait vous dire quand ce projet va changer.

M. Lefebvre (Yves): Dans un mois environ.

M. Boulerice: Dans un mois environ. Alors... M. Lefebvre (Yves): Oui.

M. Boulerice: Un engagement ferme. Soyez certains que je vais aller vérifier, non pas que je ne vous croie pas, mais c'est mon côté fouineur.

M. Morin: On vous voit rarement à la Place des Arts, de toute façon.

M. Boulerice: Pardon?

M. Morin: On vous voit rarement à la Place des Arts.

M. Boulerice: Pardon?

M. Morin: On aimerait vous voir plus souvent à la Place des Arts.

M. Boulerice: Mais nous nous sommes vus !a semaine dernière, M. le directeur générai. Nous nous sommes vus régulièrement à l'opéra.

Voici la question philosophique que je vous annonçais comme entrés en matière, il y a quelques minutes. La Place des Arts, que! est son rôle, comment doit-elle se situer en tant que complexe culturel dans la métropole francophone de l'Amérique?

Rôle de la Place des Arts

Mme Touchette Robitaille: Je pense qu'il est très important que la Place des Arts conserve, maintienne, soutienne et développe son rôle de leader culturel au Québec, et ce, en soutenant, peut-être d'abord et avant tout, les grandes disciplines que sont la musique, le théâtre, la danse et l'opéra, Nous nous verrons dotés également, cette année et au cours des deux prochaines années, d'équipements absolument merveilleux qui parachèvent physiquement un quadrilatère qui était en manque sur ce plan. Au cours de ce parachèvement, nous devrons nous pencher de plus en plus activement sur la question du contenu. J'en reviens encore à cette question de coproduction. Si la Place des Arts peut s'associer avec certains producteurs privés de façon à aider ou permettre à certains secteurs du monde culturel d'exister, c'est possiblement un volet qui devrait être de toute première importance face au leadership culturel qu'elle doit assumer.

M. Boulerice: Est-ce que vous me dites que vous allez, dans la programmation et le contenu - je vais employer une expression qui peut, à prime abord, sembler péjorative, mais qui ne S'est absolument pas, je pense qu'elle s'inscrit dans un courant qui va de plus en plus se développer - vous tourner vers la francophonie, qui est un immense bassin culturel, autant pour ce qui est de la consommation, c'est bien entendu, que pour la création?

Mme Touchette Robitaille: Vous pariez de francophonie, mais je pense que sur le pian musical, entre autres, ou sur le plan opéra, il n'y a pratiquement pas de frontières, puisqu'il n'y a pas véritablement de langage; c'en est un vraiment universel et international. Je pense que la Place des Arts doit également représenter ou présenter tout d'abord !'héritage culturel qui est le nôtre, celui de demain, et également présenter des spectacles qui soient en conformité avec les goûts de ses auditeurs.

Un autre rôle important sur lequel je m'en voudrais de ne pas élaborer un petit peu, c'est le rôle éducationnel de la Place des Arts. À cause du vieillissement de la population et parce que les enfants sont peut-être moins initiés aux arts - je me réfère aux nombreux concerts de M. Wilfrid Pelletier auxquels j'ai assisté dans ma jeunesse et aux nombreuses pièces de théâtre auxquelles nous assistions - il y a peut-être pour les jeunes de cinq, dix ou quinze ans une méconnaissance de cette partie de notre vie qui est extrêmement importante. Dans ce volet, la Place des Arts a un rôle très important à jouer. C'est en ce sens que je me réjouis d'avance, d'une certaine façon, de ce projet des conservatoires, puisqu'il s'agit d'une façon pour les jeunes de se manifester, et pour d'autres jeunes de constater ce que certains jeunes artistes ont fait comme choix et ce que cela donne comme mode de vie.

M. Bouierice: Dans votre programme d'animation, Mme la présidente, avez-vous des liens avec les institutions d'enseignement de niveau primaire et secondaire? (12 h 15)

Mme Touchette Robitailie: Tout à fait. L'animation de la Place des Arts est, en fait, une familiarisation. Il s'agit de donner la possibilité de visionner ou d'entendre certains spectacles à des heures... Il s'agit de spectacles beaucoup plus courts et à des prix beaucoup plus modiques. Donc, c'est une familiarisation tant pour le grand public que pour le très jeune auditoire. De plus, il s'agit également de développer des clientèles. Récemment, nous avons eu des présentations-midi de grands spectacles - je pense entre autres aux répétitions de l'Orchestre métropolitain - ce qui permet à des gens, à l'heure du lunch, de venir entendre un concert que peut-être ils n'entendraient pas. Donc, de plus en plus, au-delà de l'animation, nous assistons vraiment à des mini-spectacles en salle à des heures beaucoup plus accessibles. Cette animation sera encore sûrement repensée au cours des ans, face à toute ta dimension que la Place des Arts veut se donner sur le plan de la relève, de l'éducation et de la familiarisation avec les arts.

M. Boulerice: Je suis heureux de vous entendre tenir ce discours, Mme Touchette Robitailie, qui est celui de créer très tôt des habitudes de consommation. J'ai toujours dit que la consommation de produits culturels est différente, mais l'initiation se fait comme pour n'importe quel autre type de consommation. Je fais toujours la blague de la saucisse Hygrade "plus les gens en mangent plus lis l'aiment, plus ils l'aiment plus ils en mangent". Donc, plus on fait consommer les produits culturels à la nouvelle génération, plus elle sera consommatrice au moment de l'adolescence, de l'âge adulte.

Comme il n'y a pas de décision prise quant aux conservatoires, vous l'avez mentionné vous-même tantôt, ne jugeriez-vous pas peut-être plus intéressant, c'est un autre dossier, d'avoir la Maison du théâtre pour l'enfance et la petite enfance sur le site plutôt que les conservatoires, puisqu'il doit y avoir une salle pour ce théâtre?

Mme Touchette Robitaille: M. le directeur général.

M. Morin: On a eu des rencontres avec la Maison du théâtre, il y a deux ans maintenant. C'est un problème à la fois technique et logistique. Construire une salle de 400 places ou de près de 400 places aussi polyvalente que possible n'est guère facile, surtout si on veut marier à la fois musique et théâtre. La configuration de la scène n'est pas la même. Les problèmes acoustiques, les problèmes d'éclairage ne sont pas les mêmes, etc. Si on ajoute par surcroît du théâtre pour enfants, on a un problème technique additionnel avec les questions de scénographie, d'une part. D'autre part, on a un problème de logistique, parce que le théâtre pour enfants se fait à des heures où les conservatoires sont opérationnels ou utilisent les salles davantage, exception faite peut-être des samedis, bien que les conservatoires aient annoncé qu'ils avaient l'intention d'utiliser les salles à une fréquence importante, très importante même.

Alors, on ne peut pas accueillir, à toutes fins utiles, toutes les clientèles dans cette petite salle qui sera, en passant, absolument non rentable mais combien importante, parce que c'est une salle de 400 places. Vous ne pouvez pas vous attendre à la rentabilité d'une salle de 400 places, c'est se conter des histoires. C'est aussi très important parce que vous aurez là une salle d'essai, une salle expérimentale, une salle où les conservatoires enverront leurs étudiants aussi bien d'art dramatique que de musique. La Maison

du théâtre pour enfants prendrait quelque chose comma 150... Sa demande, c'est 150 utilisations par année, alors que les conservatoires de musique et d'art dramatique en demandent tout près de 200 et que le musée d'Art contemporain nous demande une utilisation, non pas en nombre de jours d'utilisation mais en pourcentage, de 40 %. Si je fais l'addition de tout ceci, on a une utilisation de près de 180 % de l'espace et du temps. Alors, on a un problème de logistique et des choix à faire sur ce plan.

Je reprends ce que Mme la présidente de la Place des Arts vient de mentionner. La Maison du tréâtre pour enfants, c'est important, mais les conservatoires le sont aussi si on veut préparer cette relève professionnelle en milieu artistique. C'est une tragédie de voir nos jeunes entrer dans les conservatoires. Une tragédie, premièrement, pour le public qui investit beaucoup d'argent dans les conservatoires par le biais des taxes et, deuxièmement, pour ces jeunes qui en sortent et qui n'ont pas tous les débouchés qu'ils devraient avoir. Malheureusement, ils n'ont pas sur le plan professionnel l'accueil qu'ils pourraient et qu'is devraient avoir. Et d'être sur les lieux, en temps d'études, leur permettra justement cette transition de passer des études à la carrière beaucoup plus facilement et leur ouvrira des portes de toutes sortes. Cela nous stimulera beaucoup, nous autres, de voir ces étudiants des conservatoires sur les lieux. En réponse, pour terminer, je dis qu'on n'a pas de place pour avoir la Maison du théâtre pour enfants, en plus de ce même petit théâtre, à moins que vous ne nous suggériez d'en construire un sixième.

Puis-je ajouter ajouter une chose, monsieur? Vous me le permettez, madame?

M. Boulerice: Je vous en prie.

M. Morin: Tout à l'heure, sur la question de la francophonie, cela me préoccupait beaucoup. Je voulais ajouter tout simplement une chose à ce que Mme la présidente de la Place des Arts vient de mentionner. À juste titre, la Place des Arts, dans la prochainl décennie, sera appelée à sortir de la Place des Arts. Et plus la Place des Arts en sortira, plus elle sera efficace sur le plan de sa mission et sur le plan de la francophonie. Le rayonnement que nous pourrrons avoir, comme leader culture, dans les autres salles, que ce soit au Québec, dans les autres provinces du Canada ou è l'étranger, et notamment à l'étranger, peut être extrêmement intéressant. Cela impose que nous nous donnions une programmation, un plarn de développement en conséquence qui permettront à nos productions, à nos projets de programmation, etc., de naître à la Place des Arts, mais d'être diffusés à l'extérieur, par la suite, ce qui n'était pas vraiment fait dans le passé. C'est là qu'on véhiculera nos valeurs québécoises, qu'on véhiculera nos meilleures créations. Cela permettra à nos artistes de se déplacer, et c'est peut-être la meilleure carte de visite et la meilleure carte d'affaires que nous pouvons avoir en pays étrangers et à l'extérieur.

Mme la présidente mentionnait tout à l'heure l'exemple de Starmania - nous étions dans trente quelques villes - l'exemple de Gala avec laquelle on ira sans doute à Paris, peut-être en Espagne et peut-être aux États-Unis, mais ce n'est qu'un commencement. Si cela fait partie de notre plan de développement, reste à voir si on a les moyens et tout ce qu'il faut pour se rendre jusque là, mais dans une décennie, sur le p!an de la francophonie, la Place des Arts, c'est peut-être l'un des véhicules privilégiés que devrait avoir le Québec pour véhiculer le fait français, et cela hors de tout doute. Cela ne nous empêchera pas de véhiculer ce qui se fait dans les autres langues, bien sûr, mais on privilégiera tout ce qui se fait en français; c'est certain que c'est une préoccupation qus nous avons constamment.

M. Boulerice: Avant de conclure et de prendre congé, je vais me permettra une toute dernière question, Vous avez parlé, Mme la présidente, de vieillissement de population, un fait observable qui, paraît-il, est irréversible, en tout cas, c'est notre cas à tous et chacun, malheureusement pour nous. Vous n'êtes pas sans savoir, puisque vous avez aussi bien d'autres préoccupations dans la vie, que, très souvent, vielliesse est synonyme de baisse de revenu et d'appauvrissement. Donc, pour une très large partie de la population actuelle, mais une partie de plus en plus grande demain et après-demain, ce phénomène de vieillissement sera statistiquement beaucoup plus élevé, sans pour autant qu'on ait l'assurance que l'équation vieillesse, baisse de revenus soit corrigée. Cela m'amène à parler des loisirs culturels des personnes âgées, du troisième âge, on parle même maintenant de quatrième âge. Cela n'est pas un reproche que je fais à la Place des Arts, tout le monde sait que pour chaque chose, il y a des coûts, sauf que je m'aperçois, malheureusement, qu'une bonne partie de cette population, à cause de cette adéquation - vieillesse, baisse de revenus, coût d'achat d'un billet - ne peut se permettre très souvent des spectacles présentés à la Place des Arts, auxquels elle aimerait bien assister. Je ne vous cacherai pas que ce serait, à mon point de vue, une heureuse sortie du traditionnel bingo que nous, députés, fréquentons régulièrement, parce que ça fait partie de nos obligations, mais nous souhaitons tous, pour nos concitoyens - je vois d'ailleurs la députés de Vachon acquiescer à mon propos - autre chose que ce divertissement que je ne qualifie pas de négatif. Donc, y a-t-il des mesures d'envisagées pour permettre l'accès aux activités de la Place des Arts aux personnes du troisième âge, en tenant compte de leur revenu?

Mme Touchette Robitaille: J'aurais deux réponses pour vous, M. le député. Tout d'abord,

cette année, nous avons un peu oeuvré à la familiarisation du grand public avec l'ouverture des portes, le 5 septembre - ce qui était évidemment gratuit, et une première. Ensuite, il y eut la journée du 25 septembre, avec les onze concerts en salle, commandite des Papiers Scott, et les Noëls du monde, si ma mémoire est fidèle, le 15 ou le 16 décembre. Ce sont des événements qui, en fait, dans la vie de la Place des Arts ne sont ni plus ni moins que des premières, qui ont été de grands succès et que nous entendons répéter. Est-ce que ce sera la même chose ou des choses différentes? Nous avons eu des partenaires - c'est en ce sens, tout à l'heure, que je parlais de concertation et de partenariat - et je pense qu'il sera de plus en plus intéressant de penser en ces termes sur le plan culturel, pour pouvoir offrir des produits accessibles, sinon gratuits au public.

Deuxièmement, nous avons également parlé d'animation. Je vous ai mentionné que cette animation serait sûrement réacheminée ou repensée, mais il y a toujours ces répétitions, gratuites pour le grand public, de concerts qui ont lieu en salle en soirée et qui sont disponibles à des prix modiques, ces midi-animations, qui présentent d'une façon condensée... Récemment, il y a eu un midi-animation par la troupe de Martha Graham avec des explications très accessibles qui démystifiaient, et à des prix modiques. Donc, ces deux volets, je pense, peuvent répondre à votre préoccupation.

M. Boulerice: M. le Président, je n'ai plus d'autre question. Enfin, je pourrais en trouver plusieurs, mais je sais que nous sommes limités dans le temps. Vous me permettrez de remercier Mme Robitaille, Mme Fortin, M. Dionne et M. Levebvre de leur présence parmi nous, des explications fort intéressantes qu'ils ont données et des réponses fournies aux questions qu'on leur a posées. Vous avez bien vu que le mandat de surveillance n'avait pas cette connotation un peu inquiétante qu'il pouvait avoir à première vue. Au contraire, je pense que c'est toujours, pour la commission de la culture tout au moins, un exercice que nous, députés, savourons. J'espère qu'il en a été ainsi pour vous.

M. Morin a dû remarquer que je l'avais momentanément omis dans mes remerciements, c'est pour une excellente raison, M. le Président, c'est qu'il m'a tantôt injustement accusé d'être absent de la Place des Arts. Aussi, je voudrais terminer mon commentaire en lui disant, d'une part, mon amitié et, d'autre part, que je lui promets d'y être très bientôt. Je prends même l'engagement formel devant cette commission d'y être vendredi soir. Si, par malheur, il devait être absent comme il l'était aux deux représentations où je suis allé...

Une voix: Ha, ha, ha!

M. Boulerice: Mon secrétariat avait vérifié sa présence - j'aurais bien aimé l'inviter à prendre un verre après - et on m'avait dit qu'il était absent... Compte tenu des propos malicieux qu'il a tenus aujourd'hui à mon égard, il y aura un deuxième mandat de surveillance, mais cette fois-ci il s'exercera uniquement sur la personne du directeur général. Ha, ha, ha!

M. Morin: Ha, ha!

M. Boulerice: Si vous voulez bien me permettre, M. le Président, et si M. Morin me le permet, mon cher Guy, j'ai jeté le gant. Maintenant, il y a un duel entre nous quant à notre fréquentation de la Place des Arts. Ha, ha!

M. Morin: Ha, ha!

M. Boulerice: Encore une fois, je vous remercie beaucoup de votre présence et de votre participation à cette commission. J'ajouterais cependant encore une phrase. M. Morin me demandait tantôt si la commission se réunissait toujours dans cette très belle salle. Je lui ai dit que la commission de la culture est une commission quand même importante et, comme on sait que vous êtes des gens qui travaillez à l'envers du décor, qui nous en faites apprécier de beaux, on a cru que c'était un juste retour des choses que de vous en offrir un d'égale beauté. Je terminerai sur cette poésie, M. le directeur général. Encore une fois Mme la présidente, mesdames, messieurs, merci de votre présence. Je remercie aussi mes collègues et M. le Président, tout en soulignant que notre président d'office est sans doute très malheureux de ne pas être ici aujourd'hui. Nous allons tous lui souhaiter un prompt rétablissement.

Le Président (M. Audet): Merci M. le député. Mme la députée de Vachon.

Mme Pelchat: Mme Touchette Robitaille, M. Morin, au nom de mes collègues de la formation ministérielle, j'aimerais vous remercier de vos explications. Je pense que c'est un exercice de surveillance très enrichissant pour tous les membres de la commission et je dois vous dire que cela nous permet de nous rapprocher un peu plus des organismes d'État, de peut-être mieux en comprendre le fonctionnement et d'en apprécier certainement les administrateurs. Je vous remercie.

Le Président (M. Audet): Mme la présidente, M. le directeur général, peut-être un petit mot en conclusion.

Mme Touchette Robitaille: M. le Président, mesdames, messieurs les députés, nous vous remercions de votre écoute, de votre bienveillance et nous vous invitons à la Place des Arts.

Mme Pelchat: J'y vais vendredi.

Mme Touchette Robitallle: Avec grand plaisir. Nous y serons d'ailleurs.

Le Président (M. Audet): D'accord Mme la présidente, M. le directeur général, mesdames, messieurs, messieurs et mesdames de la commission, je vous remercie d'abord pour cette rencontre. Je pense que cela a été très enrichissant même si, initialement, cela s'annonçait un peu difficile étant donné l'absence du président. Comme M. le député de Saint-Jacques et comme ma collègue de Vachon l'ont mentionné, vous avez dû vous rendre compte que c'est un exercice de surveillance, mais un exercice de bienveillante surveillance. Il y a eu des discussions qui ont été très Instructives pour les membres de la commission. Je voudrais dire à M. le directeur général que si le député de Saint-Jacques est absent vendredi, il pourra en faire part à la commission. Nous verrons à prendre les mesures. Je vous remercie sincèrement de vous être déplacés, d'être venus nous rencontrer. Je vous souhaite un bon retour et la meilleure des chances dans l'accomplissement de votre mandat et de vos objectifs. Merci bien.

La commission, ayant accompli son mandat, ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 12 h 33)

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