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Version finale

31e législature, 4e session
(6 mars 1979 au 18 juin 1980)

Le vendredi 25 mai 1979 - Vol. 21 N° 96

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Question avec débat: L'indifférence du gouvernement face aux revendications du Conseil du statut de la femme


Journal des débats

 

Question avec débat

(Dix heures huit minutes)

La Présidente (Mme Cuerrier): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission permanente des consommateurs, coopératives et institutions financières se réunit ce matin pour discuter la question avec débat de Mme le député de L'Acadie à Mme le ministre des Consommateurs, Coopératives et Institutions financières. Le sujet en est: L'indifférence du gouvernement face aux revendications du Conseil du statut de la femme.

J'aimerais rappeler, avant que nous débutions, que nous sommes assujettis pour ce débat en particulier à l'article 162A de notre règlement quant au droit de parole et aux interventions des participants. Mme le député de L'Acadie, en l'occurrence, a donc, comme Mme le ministre, un droit de parole privilégié. Les premières interventions doivent se limiter à 20 minutes pour Mme le député de L'Acadie et à 20 minutes pour Mme la ministre; ensuite, nous pouvons procéder en tenant bien compte du fait que le droit de parole privilégié n'est pas un droit exclusif de parole.

Mme la député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Bonjour Mme la Présidente, bonjour Mme la ministre. Il me fait extrêmement plaisir ce matin que nous ayons cette opportunité de pouvoir discuter du rapport qui fut remis par le Conseil du statut de la femme à Mme le ministre responsable du conseil et intitulé "Egalité ou indépendance".

Mme Payette: Le rapport du Conseil du statut de la femme est intitulé "Egalité et indépendance".

Mme Lavoie-Roux: Qu'est-ce que j'ai dit?

Le Présidente (Mme Cuerrier): Oui, vous avez fait un lapsus, Mme la député. À l'ordre s'il vous plaît!

Exposé du sujet Mme Thérèse Lavoie-Roux:

Mme Lavoie-Roux: Pas beaucoup, pas beaucoup. Je vous remercie. Ce rapport fut remis à Mme le ministre le 20 septembre 1978. On pourrait y lire, à la page 17, que "le Conseil du statut de la femme a acquis la conviction que seule une volonté politique élaborée à partir d'une approche globale de la situation des femmes du Québec et d'une analyse de leurs problèmes pourrait amener les changements souhaitables."

Évidemment, que nous apportions ce débat aujourd'hui, Mme la Présidente, ceci semble assez logique, compte tenu du fait que Mme le ministre nous avait promis qu'au mois de novembre nous aurions déjà un plan d'action adopté par le gouvernement ou qui serait soumis à la Chambre par le gouvernement. Ceci avait été promis pour le 15 novembre 1978.

Nous nous trouvons maintenant à huit mois du dépôt de ce rapport et il n'y a toujours pas de plan d'action. Nous ne savons toujours pas où le gouvernement se situe face à cette politique globale. Sans aucun doute, certains gestes isolés ont été posés. On sait, par exemple, que certains ministères ont maintenant une personne embauchée ou un fonctionnaire à qui on donne comme fonction de s'occuper de voir à l'application de certaines dispositions de ce rapport "Egalité et indépendance". Mais on se rappellera que la présidente du Conseil du statut de la femme avait beaucoup insisté sur le fait qu'il ne suffisait pas de procéder à la pièce, mais qu'il fallait d'abord que le gouvernement affirme sa volonté politique d'accepter ce rapport dans sa globalité et, au moins, ensuite procède suivant un échéancier, tenant compte, évidemment, de certaines disponibilités financières ou d'autres contraintes que tout gouvernement peut avoir. Mais nous nous sommes réveillés le 15 novembre sans avoir ce plan promis par Mme le ministre, et nous sommes finalement arrivés au 30 janvier 1979 alors qu'on nous annonçait la création d'un comité de trois ministres pour élaborer le plan d'action gouvernemental qui demeure toujours inconnu.

Il ne faut pas s'étonner non plus que nous apportions ce débat, compte tenu que le gouvernement avait fait un événement politique du dépôt de ce rapport du Conseil du statut de la femme, ce qui, pour moi, m'apparaissait quand même assez significatif parce qu'il y a d'autres conseils avi-seurs de différents ministères et jamais, à ma connaissance, on n'a procédé avec un tel déploiement de publicité et accordé un tel caractère politique quand un autre conseil déposait un rapport.

Compte tenu de cette utilisation politique qu'on en a voulu faire, on aurait espéré que les actions auraient suivi assez rapidement. D'autant plus que le Conseil du statut de la femme — je tiens à le souligner à ce moment-ci — a fait le travail gigantesque, dans une année, de recueillir toutes ces données, de les condenser, de développer sa problématique, mais il ne partait pas de rien. Le Conseil du statut de la femme avait déjà entre les mains des rapports intéressants, par exemple en tout ce qui touche l'éducation ou d'autres études qu'il avait faites. (10 h 15)

II y a plusieurs ministères d'impliqués, Mme la Présidente. Je voudrais quand même... Non, j'y reviendrai peut-être en conclusion. Il y a plusieurs ministères d'impliqués. Où en sont rendus les ministères? Évidemment, nous avions demandé au ministre des Finances d'être ici présent parce qu'une grande partie de ce rapport ou de l'application des recommandations de ce rapport sont reliées à des mesures fiscales importantes et à une

réforme de la fiscalité au moins dans certains domaines. M. le ministre des Finances, en Chambre, nous a répondu qu'il n'était pas prêt, alors qu'il fut questionné sur le sujet, à rendre compte de l'engagement de son ministère.

La présidente du Conseil du statut de la femme espérait qu'avec le discours du budget on aurait des nouvelles intéressantes en ce qui regardait le rapport du conseil. Je cite Mme Bonenfant, dans le Soleil du 29 mars 1979: "M. Parizeau a oublié les femmes. Alors que le premier ministre Lévesque avait consacré trois pages du discours du trône à la condition féminine, pas une seule fois le mot "femme" n'a été prononcé dans le discours du budget de M. Parizeau. Pourtant, le gouvernement aurait pu consacrer quelques crédits à la condition féminine." Sans doute on nous rétorquera qu'on a accordé des crédits supplémentaires au Conseil du statut de la femme lui-même. Mais, quant à la mise en application des recommandations, on n'a rien vu dans le discours du budget. Voilà pour le ministre des Finances.

Qu'en est-il du ministère de l'Éducation? Évidemment, on est à réviser les manuels scolaires pour justement enlever les caractères sexistes qui s'y retrouvent. C'est là une opération qui coïncide — et c'est probablement fort heureux — avec la révision des manuels scolaires à cause de la conversion au système métrique. N'eût été cette coïncidence, on se demande où on serait rendu. Pour le reste, au ministère de l'Éducation, du côté de l'orientation, très peu de choses sont faites. Du côté des programmes, très peu de choses sont faites. On n'a qu'à se rappeler que dans toutes la discussion du livre vert et la longue tournée de consultation qu'a faite le ministre à ce moment-là, il n'a pas tenu compte de recommandations qu'il avait déjà entre les mains et qui se retrouvent maintenant à l'intérieur du rapport du Conseil du statut de la femme.

Il y avait également des recommandations qui touchaient le Haut-Commissariat à la jeunesse, aux loisirs et aux sports. On est toujours à tenter de rédiger un livre blanc sur les sports et les loisirs où, enfin, on tiendra compte des problèmes spécifiques des femmes dans le monde des loisirs et des sports. Mais on a vu tout récemment que ce livre n'est pas encore déposé et que le livre vert sur les loisirs et les sports était tout à fait muet quant aux problèmes relatifs aux femmes dans ces domaines.

Si on se tourne du côté du ministère des Affaires sociales, j'ai eu l'occasion cette semaine d'aborder des problèmes qui avaient été signalés dans le rapport touchant, par exemple, l'augmentation de l'usage de l'alcool, du tabac, des soins psychiatriques, des soins médicaux donnés aux femmes. À ma grande surprise, là encore, on m'a rassurée en me disant qu'une personne était maintenant à l'intérieur du ministère des Affaires sociales qui s'occuperait, entre autres, de voir à ce que le recrutement des femmes se fasse d'une façon plus équitable. Mais on est toujours devant l'absence de recommandations très concrètes.

Je ne vous en donnerai qu'un exemple. Je me suis enquise auprès du ministre à savoir si, au moins, le chapitre touchant la santé avait été distribué à travers les institutions du réseau des Affaires sociales. J'avais omis de poser la même question au ministre de l'Éducation la semaine précédente. Je crains fort que j'aurais eu la même réponse: Non, on n'y avait pas pensé. On a accepté ma suggestion. J'en suis fort aise. Cela ne coûte rien mais cela implique que les gens sont vraiment conscients des problèmes et veulent vraiment faire quelque chose.

Un autre problème qui a été souligné à plusieurs reprises dans le rapport est la discrimination au travail. À travail égal, salaire égal. Je ne vous donnerai que deux exemples de l'inertie du gouvernement. Je pense que j'ai eu l'occasion de souligner en Chambre, à la période des questions, le fait que les offres que le ministre de la Fonction publiques a faites au Syndicat des fonctionnaires — c'est, d'ailleurs, l'avis du Conseil du statut de la femme qui a donné un avis à ce moment — justement continuaient d'ignorer les recommandations du conseil du statut. Dans les offres du gouvernement, on y retrouve que les femmes reçoivent toujours les salaires les plus bas, que les augmentations de salaires sont plus faibles et même, dans certains cas, inexistantes pour la première année de la convention pour plusieurs catégories d'emplois où les femmes sont majoritaires, que par un jeu de classification beaucoup de femmes qui répondent aux mêmes exigences qu'un homme pour un emploi équivalent recevraient un salaire plus bas. Le Conseil du statut de la femme concluait: "Si le gouvernement considère que l'accession des femmes a l'autonomie est un objectif valable et prioritaire, il devrait alors réviser ses offres en fonction des recommandations contenues dans la politique d'ensemble."

Ce fut assez intéressant de voir la réponse du ministre de la Fonction publique qui nous a dit: Écoutez, si cela s'en va à la table des négociations, ils le réclameront. Là-dessus, je partage totalement l'avis de la présidente du conseil qui dit: "Le gouvernement doit assumer un rôle de leadership dans ce domaine. Que dire du rapport sur la non-discrimination dans les avantages sociaux, le rapport Boutin, que le gouvernement a déjà en main depuis décembre 1976 et sur lequel il n'a pas encore agi? Dans les recommandations du rapport, à la page 246, on demande de prendre les mesures nécessaires pour modifier la Chartre des droits et libertés de la personne pour éliminer les aspects discriminatoires particulièrement en ce qui touche l'âge, l'état civil et le sexe.

Il me reste combien de temps, Mme la Présidente? Cinq minutes. Je vous assure que c'est très bref. Je ne veux pas continuer l'énumération ministère par ministère. Nous aurons l'occasion d'y revenir. Ce que je trouve quand même plus inquiétant, c'est qu'alors que le gouvernement a en main ce rapport touchant la condition féminine dans lequel on fait état de tous les aspects discriminatoires qui touchent à la femme il continue de légiférer, d'abord, d'une façon parcimonieuse en ce qui touche les femmes et d'autres fois même en semblant être tout à fait inconscient de ces réalités.

Je viens de donner un exemple dans les offres du gouvernement aux syndiqués de la fonction publique. Je pourrais en ajouter un autre dans le projet de loi sur les conditions minimales de travail où, encore une fois, ce sont les femmes, les plus démunies, celles qui travaillent en services domestiques, celles qui sont collaboratrices de leur mari ou dans les milieux agricoles. Évidemment, ceci s'applique aussi aux hommes, quant à cela. Ces femmes ne sont pas couvertes si elles ne résident pas chez leur employeur et travaillent moins de 30 heures par semaine. Je pense qu'on a encore là, à l'égard des immigrantes en particulier et à l'égard des femmes les plus démunies, des femmes qui veulent travailler à temps partiel, une disposition qui va, à mon point de vue, totalement à l'encontre des recommandations du conseil. D'ailleurs le conseil qui s'est présenté a fait les mêmes observations.

On nous rétorquera également qu'on a enfin un congé de maternité. C'est vrai que je serais de mauvaise foi de ne pas reconnaître que le gouvernement a reconnu le principe du congé de maternité pour les femmes qui sont sur le marché du travail. Et encore faut-il qu'elles soient bénéficiaires de l'assurance-chômage. C'est une condition sine qua non. Alors, vous voyez déjà le grand nombre de femmes qui ne sont pas admissibles au congé de maternité, qu'il s'agisse des travailleuses autonomes, qu'il s'agisse des travailleuses domestiques, qu'il s'agisse des femmes au foyer. On pourrait ajouter un grand nombre d'autres personnes à qui cela ne s'applique pas. Je ne voudrais pas ici entrer dans les difficultés techniques que l'application de la loi présente.

En conclusion, compte tenu du temps qui m'est alloué, je fais miennes ces paroles de la présidente du Conseil du statut de la femme. Elle disait, le 19 décembre 1978: "II est temps que le gouvernement québécois respecte ses engagements et qu'il dise clairement où il loge en matière de condition féminine. Le Conseil du statut de la femme a produit dans les délais prévus sa politique d'ensemble pour les Québécoises: "Egalité et indépendance". Il semble que le gouvernement soit incapable d'en faire autant, a-t-elle ajouté." La présidente disait ces choses en décembre, nous avons été beaucoup plus patients, nous sommes maintenant huit mois plus tard et nous sommes toujours devant le silence du gouvernement.

J'aurai peut-être l'occasion plus tard de prendre quelques minutes pour présenter certaines critiques du rapport du conseil, ce que nous n'avons jamais eu l'occasion de faire. Il y a quand même certains aspects, à mon point de vue, qui devraient être critiqués. J'aurais aussi voulu attirer l'attention du ministre, je sais qu'elle en est fort consciente, sur toute la question du problème de la violence à l'égard des femmes. À cet égard, nous aurions souhaité que le gouvernement assure au moins la permanence des maisons d'accueil pour les femmes battues ou des femmes en situation de détresse.

On a accordé certaines subventions qui, on le sait, demeurent toujours très aléatoires et empêchent ces maisons d'accueil de faire des plans plus permanents pour répondre à des besoins qui, malheureusement, je le crains, vont demeurer permanents pour encore un assez long temps. Je vous remercie, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Cuerrier): Mme la ministre et responsable du Conseil du statut de la femme.

Réponse du ministre

Mme Lise Payette

Mme Payette: Je voudrais remercier Mme le député de L'Acadie d'avoir permis de faire ce qu'il est convenu d'appeler une sorte de bilan dans le dossier de la condition féminine. J'ai entendu les commentateurs de la télévision, juste avant que nous commencions le débat, encore une fois dire que le ministre responsable de la condition féminine avait à répondre aujourd'hui à une question avec débat. Je tiens encore une fois, madame, à faire cette mise au point. Je ne suis pas le ministre responsable de la condition féminine, je suis le ministre responsable du Conseil du statut de la femme; c'est pourquoi nous avons cru bon, ce matin, d'inviter à cette question avec débat les trois ministres qui font partie du comité interministériel qui est responsable non plus de la condition féminine, mais de l'application des recommandations du Conseil du statut de la femme dans ce rapport qui a pour titre: Egalité et indépendance.

C'est probablement un événement historique, ce matin, parce que ce sera certainement la première fois, dans cette noble enceinte, comme nos collègues l'appellent, qu'on a l'occasion de parler pendant presque trois heures d'un sujet comme celui qui nous rassemble aujourd'hui, la condition féminine. C'est un sujet qui n'a jamais vraiment réussi à trouver sa place à l'intérieur de ces murs sauf depuis, je crois, la présence de Mme le député et des autres femmes qui font partie de cette Assemblée nationale. C'est un matin où on retrouve plus de femmes assises à ces fauteuils qu'il n'en a jamais eu au Québec même si elles ne sont pas toutes élues.

Je crois qu'il est bon, Mme la Présidente, de souligner à Mme le député de L'Acadie que, quand il faut à un conseil consultatif un an pour réunir les éléments nécessaires, l'information nécessaire et pour écrire un document comme celui que le Conseil du statut de la femme nous a remis, on ne peut s'attendre, je crois, honnêtement à ce qu'un gouvernement puisse réaliser l'ensemble des recommandations dans une période de six mois. Je pense que madame a l'honnêteté de reconnaître cette situation. Elle a fait allusion au fait que le lancement de cette politique d'ensemble a été un événement politique.

Je pense que c'est beaucoup plus qu'un événement politique. Mme le député se souviendra qu'à cette occasion nous avions réussi à régionaliser le lancement du travail du Conseil du statut de la femme, que le lancement s'est fait dans les huit ou neuf régions du Québec au même moment et que les députés de l'Opposition, comme les députés ministériels, y avaient été invités. Nous

pensons que ce qui concerne 52% de la population est politique, mais est national également, c'est-à-dire que c'est un document qui a une très grande importance et qui concerne tous les membres de cette Assemblée nationale et non seulement le gouvernement. Ce n'était pas un événement politique partisan, puisque madame y était et d'autres députés y étaient également. C'était un événement politique dans le sens où il concerne tous les représentants de la population, puisque la population féminine est majoritaire au Québec. (10 h 30)

Mme le député de L'Acadie a laissé entendre que le gouvernement n'avait pas manifesté sa volonté politique de réaliser les recommandations du Conseil du statut de la femme. Je crois qu'elle a oublié un certain nombre de déclarations. Elle a oublié, par exemple, les déclarations du premier ministre au moment où il a reçu le document, déclarations qui m'apparaissent, à moi, comme un engagement formel, avec — si mes souvenirs sont exacts — des nuances qui permettaient de dire: En deux ou trois ans, nous espérons avoir réalisé l'ensemble des recommandations. Depuis ce temps, je pense qu'à plusieurs reprises, madame, plusieurs membres du gouvernement ont eu l'occasion de répéter qu'ils avaient endossé les objectifs à atteindre, c'est-à-dire l'égalité et l'indépendance des femmes.

À certains moments nous avons nuancé — et le Conseil du statut de la femme l'a fait également — la formulation de certaines de ses recommandations. Le conseil, je crois — je pense être bien placée pour en parler — n'a jamais eu la prétention de dire que toutes ces recommandations devaient être réalisées exactement de la façon dont elles étaient formulées. Le Conseil du statut de la femme a fait un travail considérable en peu de temps. Les membres de ce conseil sont d'accord pour nous dire que ce qu'il faut atteindre ce sont les objectifs, c'est-à-dire l'égalité et l'indépendance des femmes du Québec, mais que les moyens d'y parvenir peuvent être nuancés par le gouvernement, c'est-à-dire qu'il se peut que, dans les six mois que nous venons de vivre, par exemple, certaines de ces recommandations aient déjà besoin d'être remises à jour, d'être rafraîchies. Il n'y a rien qui vieillit plus rapidement, Mme la Présidente, qu'un rapport si on le fige dans le temps. Dans ce sens, nous allons essayer, comme gouvernement, de faire en sorte que la réalisation des objectifs soit obtenue et en essayant d'ajuster au fur et à mesure les recommandations s'il est nécessaire de les remettre à jour.

Dans ce sens, le comité ministériel est en contact étroit avec le Conseil du statut de la femme par mon intermédiaire et par l'intermédiaire des fonctionnaires qui sont attachés à ce comité interministériel. Nous avons pris l'engagement, auprès du Conseil du statut de la femme, au fur et à mesure de l'évolution des travaux de ce comité interministériel, par rapport au rapport du Conseil du statut de la femme, de consulter le conseil chaque fois qu'une réalisation d'un ministère nous apparaissait différer de la recomman- dation du document du Conseil du statut de la femme et de bien vérifier avec les membres du conseil si elles continuent de penser que les moyens que nous prenons permettent d'arriver aux mêmes objectifs que ceux qui sont prévus dans ce document.

Mme le député de L'Acadie a fait allusion au fait qu'elle aurait souhaité ici ce matin, Mme la Présidente, la présence du ministre des Finances. S'il est vrai qu'elle aurait souhaité la présence du ministre des Finances, elle aurait dû souhaiter à ce moment-là la présence des 26 ministres composant le gouvernement puisque chacun d'entre eux a une responsabilité plus ou moins grande dans le dossier de la condition féminine. Et quand j'ai expliqué, au tout début, que je n'était pas le ministre responsable de la condition féminine, c'est que je continue de dire que mes collègues — nous sommes 26 — sont tout aussi responsables que je le suis de la condition féminine. Le ministre des Finances n'a pas plus besoin d'être ici, madame, dans les circonstances, que le ministre des Affaires sociales ou le ministre de l'Éducation. Il y a trois ministres membres du comité interministériel qui répondent des actions, des engagements de leurs collègues et des différents ministères qui sont nommément impliqués dans la réalisation des objectifs du Conseil du statut de la femme.

Elle a fait allusion aux conditions minimales de travail qui est un projet de loi qui est devant cette Assemblée. Je pense pouvoir l'assurer, Mme la Présidente, que les représentations nécessaires ont été faites auprès du ministre pour qu'il tienne compte de la situation des femmes qui font un travail de maison et, dans ce sens, je pense avoir réussi à attirer l'attention du ministre du Travail sur cette question. Il faudra maintenant voir comment cela se concrétise dans les semaines à venir. Elle a fait allusion aux congés de maternité en disant que c'était finalement peu de chose, que cela ne touche que les femmes qui travaillent à l'extérieur. Je pense qu'il faut bien comprendre que le congé de maternité est essentiellement au départ une mesure qui a été revendiquée par les femmes qui travaillent à l'extérieur du foyer. Je crois qu'il faut comprendre qu'un congé de maternité, c'est justement l'outil dont les femmes qui veulent exercer une profession ou un métier ont besoin pour avoir la liberté de choix, c'est-à-dire qu'elles ont besoin de ce congé de maternité pour pouvoir, à certains moments de leur existence, faire un choix libre d'arrêter cette partie de leur vie pendant une période de temps pour pouvoir mettre au monde les enfants qu'elles désirent. Je pense qu'il était essentiel de reconnaître ce droit des femmes qui travaillent à l'extérieur du foyer avant d'aller plus loin dans cette politique.

Cela ne veut pas dire qu'il ne faille pas aller plus loin, mais il ne faut pas, non plus, que le congé de maternité devienne une mesure strictement nataliste, parce que ce serait, à mon avis, une grave erreur de penser qu'une seule mesure nataliste puisse être utile aux femmes du Québec. Je crois que, si un gouvernement veut se donner

une politique nataliste — et c'est probablement éminemment souhaitable dans la société dans laquelle nous vivons — il ne suffit pas d'une mesure comme le congé de maternié, mais d'un ensemble de mesures. Il faut également que ces femmes puissent avoir l'assurance d'un logement décent, qu'elles puissent avoir l'assurance, justement, de cette liberté de choix à laquelle je faisais allusion pour pouvoir faire leur vie comme elles l'entendent, pour pouvoir poursuivre des objectifs de réalisation personnelle, tout en pouvant assumer en même temps les charges qui sont essentiellement celles des femmes, qui sont des charges biologiques et qui font qu'à un moment donné de leur vie elles doivent marquer un temps d'arrêt pour pouvoir mettre au monde des enfants.

Mme le député a fait allusion à ce congé de maternité en disant que, finalement, c'est bien peu de chose. Je lui rappellerai que, comme toute autre chose dans un gouvernement, il y a un commencement, il y a un début. J'ai l'impression que nous avons un pied dans la porte, si je puis utiliser cette expression, et que nous finirons par aller chercher beaucoup plus. Tout gain à l'intérieur d'un gouvernement est un gain progressif. Il faut un début quelque part et il faut continuer les revendications pour essayer d'obtenir davantage. Comme dans tout autre domaine social, le progrès viendra avec le temps.

Mme le député a fait allusion également aux centres d'accueil en ce qui concerne la violence faite aux femmes dans notre société. Il me fait plaisir de lui rappeler qu'il n'y avait que deux de ces centres qui existaient l'an dernier et qu'il y en a douze maintenant, cette année, Mme la Présidente. Nous allons pouvoir, au cours des minutes et des heures qui vont suivre, nous attacher à chacun des sujets en particulier. Je voulais juste faire un survol général à partir de ce que Mme le député de L'Acadie avait dit jusqu'à maintenant et nous allons pouvoir reprendre chacun des secteurs l'un après l'autre, si elle le désire, pour pouvoir faire le point sur ce qui est déjà réalisé, ce sur quoi nous travaillons et ce qui est à venir.

Je pense également devoir lui faire la remarque suivante. Nous avions demandé au Conseil du statut de la femme de faire l'effort de produire un rapport qui soit une politique d'ensemble. Mme le député se souviendra à quel point cette demande a été critiquée par les organismes féminins et féministes au départ. Je crois, cependant, et je pense avoir trouvé un certain support dans tous ces organismes depuis qu'on a vu le résultat et qu'on a vu enfin, réunies dans un seul document, des revendications des femmes du Québec qui remontaient parfois jusqu'à dix ou quinze ans et qui étaient éparpillées à travers les organismes, c'est-à-dire que vous aviez dans une région un organisme qui se battait depuis des années pour un domaine en particulier, un autre organisme qui faisait la même chose pour autre chose. Mais jamais personne n'avait eu un survol de la situation complète des femmes et cette position particulière du Conseil du statut de la femme, qui en fait un conseil consultatif, permettait justement de demander que ce travail soit fait une bonne fois.

Je pense qu'à partir du moment où nous avons fait cette demande d'une politique globale, nous constatons de notre côté que nous sommes heureux d'avoir cette politique globale, mais que nous en sommes aussi, jusqu'à un certain point, victimes. C'est-à-dire qu'il est, je pense, inutile et impossible de faire ce matin un bilan qui dirait, par exemple, qu'il y a 212 des recommandations qui sont ou réalisées ou en cours de réalisation. Je ne pense pas que c'est de cette façon qu'il faille aborder ce rapport maintenant, et je ne pense pas qu'on puisse, de façon mathématique, dire que 15% est réalisé, que 12% est en voie de réalisation. Je crois qu'on n'y arrivera plus. On peut tout simplement essayer d'expliquer comment les dossiers avancent, jusqu'à quel point nous avons réussi non seulement à réaliser des choses concrètes, mais à faire évaluer les mentalités à l'intérieur de la machine gouvernementale. Vous savez, Mme la Présidente, comme nous le savons tous, que cet appareil gouvernemental a quelque chose de monstrueux dans le fait qu'il soit complexe, qu'il soit multiple, dans le fait que ce soit malgré tout une machine qui reste extrêmement lourde. Je crois que personne d'entre nous ne pourrait dire jusqu'à quel point c'est fait.

Quand Mme le député de l'Acadie souligne — je ne sais pas si elle est bien consciente de ce qu'elle fait quand elle le fait — qu'il y a une personne dans le ministère chargée particulièrement de ce dossier, que nous marquons là des points, certains journalistes se sont amusés à dire qu'il y avait, à l'intérieur de la machine gouvernementale, une machine parallèle. Je pense pouvoir dire, sans révéler de secret d'État, que c'est probablement vrai et que le dossier de la condition féminine est devenu une sorte de machine parallèle qui oeuvre a l'intérieur de la machine gouvernementale — j'allais dire avec discrétion, ce ne serait probablement pas le bon mot — avec efficacité, avec une présence qui est extrêmement utile et concrète partout. Je puis aussi vous assurer que pratiquement tous les documents qui sont acheminés à un moment ou à un autre vers le Conseil des ministres ou vers les comités de développement sont examinés soit par ces personnes-ressources à l'intérieur des ministères, soit par le comité interministériel, soit par le Conseil du statut de la femme qui a des représentantes à plusieurs comités dans plusieurs ministères.

Ils le sont effectivement par les comités de développement avec la lunette de la condition féminine et des documents venant de ministères qui ont des responsabilités plus importantes que d'autres dans le document du Conseil du statut de la femme sont également examinés avec la lunette de la condition féminine au Conseil des ministres. Je pense que ce changement de mentalité est probablement la plus grande réussite depuis deux ans et demi qui nous amène ensuite à faire un bilan qui n'est peut-être pas quantitatif — je ne souhaite pas qu'il le soit — mais qui peut être qualitatif.

Je vais m'arrêter pour ma part ici; je sais que je n'ai probablement pas épuisé les minutes qui me sont allouées. Il me reste quatre minutes; alors

je vais céder ces quatre minutes et, pour bien concrétiser le fait que nous sommes trois ministres du comité interministériel présents aujourd'hui, je cède à mes collègues le droit de parole.

Mme Lavoie-Roux: Je pense que j'ai le droit de parole?

La Présidente (Mme Cuerrier): Oui, Mme le député de L'Acadie, vous avez le droit de parole maintenant.

M. Bellemare: J'espère qu'on aura notre part parce qu'en vertu du règlement 162A tout député a le droit de parole aussi. Ont un droit privilégié celui qui pose la question et...

La Présidente (Mme Cuerrier): Certainement, nous en avons fait la remarque tantôt. Mme le député.

Discussion générale

Mme Lavoie-Roux: Je veux rassurer le député de Johnson. Je n'ai pas l'habitude de prendre plus de temps qu'il n'est nécessaire. Je voudrais simplement revenir sur quelques remarques du ministre. La raison pour laquelle nous avons convoqué ce débat était vraiment de savoir si le gouvernement était à la veille d'adopter un plan d'action global. Je suis tout à fait d'accord qu'il ne s'agissait pas pour le gouvernement que même d'ici l'an prochain, toutes les recommandations soient mises en application. D'ailleurs, certaines devront être nuancées, certaines devront être examinées de plus près. C'est un rapport sur lequel le gouvernement doit se pencher et faire siennes certaines des recommandations ou adopter sa politique d'ensemble. Ce qu'elle vient de nous dire, c'est qu'il n'est pas prêt à faire cela. Elle vient de nous dire: Ici, on fait des progrès dans un sens; vous allez voir qu'on met certains outils à certains endroits mais la recommandation du Conseil du statut de la femme était vraiment qu'il fallait d'abord se prononcer sur une politique d'ensemble, quitte, après cela, à créer un échéancier. (10 h 45)

Est-ce qu'on commence, par exemple, avec les femmes au foyer? On parle d'autonomie. Est-ce qu'on commence par assurer l'autonomie? De quelle façon l'assure-ton? Est-ce qu'on commence par les personnes âgées? Est-ce qu'on commence au bas de l'échelle dans un autre sens, dans le domaine de l'éducation, dans le domaine des affaires sociales? À ce moment-ci, j'ai l'impression que nous sommes toujours dans autant d'imprécision que nous l'étions alors que nous avons posé des questions au mois de décembre. Le ministre dit: Mme la député aurait aimé que le ministre des Finances soit ici. Elle aurait dû inviter les 24 autres ministres, ou 26, j'ignore le nombre exact. Je dois lui dire que par un hasard de circonstances, j'ai eu l'occasion de débattre cette question avec le ministre de l'Éducation, qui est fortement touché par mes recommandations, avec le ministre des Affaires sociales, parce que j'étais également aux crédits des affaires sociales, avec le ministre des Affaires culturelles, parce que j'étais aux crédits des affaires culturelles. Peut-être faudrait-il que j'aille à l'étude des crédits du ministère des Finances. Jusqu'à nouvel ordre, cela n'est pas encore dans mes fonctions.

Il reste que Mme le ministre admettra quand même qu'un point important du rapport sur l'égalité et l'indépendance, c'est d'assurer l'autonomie qui débouche sur une liberté de choix. Cette autonomie, tant au foyer et particulièrement au foyer, doit se concrétiser par les recommandations de nature fiscale qui se retrouvaient à l'intérieur du rapport. À ce moment-ci, nous sommes vraiment devant un vide. Je ne voudrais pas citer les journaux parce qu'on pourrait passer la matinée à citer des journaux. Le ministre des Finances est critiqué dans la population pour son silence sur cette possible réforme de la fiscalité. Maintenant, si ce n'est pas le modèle qu'il veut retenir — c'est une décision gouvernementale, je suis tout à fait d'accord avec vous autres — qu'il nous en présente un autre, qu'il nous donne une alternative.

Je voudrais, à ce moment-ci, rappeler que je citais tout à l'heure quelques actions du gouvernement qui, à mon point de vue, m'apparaissent contraires, justement à ce désir d'assurer plus d'autonomie, plus de reconnaissance aux droits des femmes.

Je voudrais simplement revenir, par exemple, sur la question de la non-indexation des prestations d'aide sociale, alors qu'elles touchent les familes monoparentales dans une proportion de 68%, où les femmes sont chefs de famille. Le gouvernement refuse l'indexation. Je ne veux pas entrer dans le débat fédéral-provincial. Il y a un point douloureux, un point qui n'est pas ce qu'il devrait être. Je suis d'accord là-dessus. Mais il reste que même dans une mesure comme celle-là, alors que ce sont des femmes qui vivent en dessous du seuil de la pauvreté, le gouvernement — c'est quand même une mesure sur laquelle le ministre des Finances a dû avoir un mot à dire — l'a refusé aux familles les plus démunies, aux femmes seules en majorité, aux familles monoparentales dont 68% des chefs de famille sont des femmes.

Enfin, je pourrais citer une foule de mesures comme cela. C'est pour cela que c'est difficile pour nous de saisir où le gouvernement s'en va, comment il conçoit le plan d'ensemble alors qu'il propose des lois, il pose des gestes qui, justement, ne concordent pas avec les recommandations du rapport du conseil.

Un autre exemple, le congé de maternité. Le gouvernement a une occasion, par la Loi sur les normes du travail, de l'imbriquer dans ce projet de loi, tel qu'il a été demandé par une foule d'organismes. Le gouvernement refuse. On va continuer avec un congé de maternité cahin-caha qui n'est pas imbriqué dans un projet de loi qui pourrait couvrir un plus grand nombre de personnes, qui sont des travailleuses.

Enfin, je ne veux pas m'étendre davantage. Je le regrette encore une fois, ce n'est pas un bilan à savoir qu'on a fait 12% dans un ministère, 13% dans l'autre. D'ailleurs, je pense que vous seriez totalement incapables de nous répondre dans ce sens ce matin.

Il s'agit vraiment de savoir où le gouvernement s'en va comme politique d'ensemble touchant la condition féminine, les droits des femmes au Québec, qu'elles soient au foyer, qu'elles soient sur le marché du travail, et dans quelle mesure il pose les gestes qui vont leur assurer la plus grande autonomie. On parle beaucoup d'égalité dans le rapport sur la condition féminine. Il n'est peut-être pas dans le titre, mais il aurait peut-être été bon qu'un mot soit dans le titre. C'est le mot "autonomie", celle des femmes, qui doit se concrétiser dans tous les domaines où elles se retrouvent. J'arrête ici mes propos, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Cuerrier): Mme le ministre. M. le ministre

M. Laurin: Mme la Présidente, personnellement, je préfère le mot "indépendance" de la femme, à l'autonomie de la femme; je pense que cela va beaucoup plus loin et que cela correspond d'une façon beaucoup plus juste à l'objectif que l'on doit se fixer.

Mme Lavoie-Roux: Cela correspond plus à votre schème politique aussi.

M. Laurin: Non, le problème n'est pas la politique au sens où l'entend le député de L'Acadie, en ce sens que le problème ne relève pas de la partisanerie politique, mais il relève de la politique au sens noble du terme qui est l'art de l'administration de la cité, des choses publiques. En ce sens, ce gouvernement ne regrette en rien d'avoir fait du problème de la promotion de la condition féminine une des priorités, une des images de marque de son action politique et législative, budgétaire au cours des prochaines années.

En effet, il faut quand même se rappeler que ce n'est que depuis que ce gouvernement est en place qu'on aborde d'une façon véritablement sérieuse et profonde le problème de l'amélioration de la condition féminine. Avant nous, on a créé des conseils et c'était sûrement louable. Ce Conseil du statut de la femme a produit sûrement des études étoffées et il faut l'en féliciter et s'en réjouir. Mais il aura fallu attendre l'arrivée de ce gouvernement pour que ce problème soit vraiment saisi dans toute son ampleur, son urgence, son acuité et qu'on décide véritablement de l'attaguer de front, de l'attaquer résolument.

C'est dès le premier discours inaugural que le premier ministre a annoncé que ce gouvernement entreprendrait une étude en profondeur du problème de la condition féminine et qu'il en confiait le mandat au Conseil du statut de la femme. Ce Conseil du statut de la femme a répondu avec beaucoup d'ardeur à l'invitation qui lui était faite et, dans les délais requis, il a produit un excellent rapport, "Egalité et indépendance", qui est en soi une problématique de la condition féminine, qui est une politique d'ensemble de la conditin féminine; d'abord, parce qu'il touche tous les sujets, il s'adresse à plusieurs ministères et il essaie de saisir le vécu quotidien des femmes dans leur devenir, à partir du moment où elles sont enfants jusqu'à la période de réalisation, et dans tous les secteurs où elles exercent leurs activités. Cela se termine par une série imposante de recommandations.

Le premier ministre à bon droit a voulu en faire un événement politique au sens noble du terme pour bien marquer le leadership que le gouvernement entendait assumer dans cette opération urgente, importante et qui n'avait que trop tardé de réforme des institutions aussi bien que des mentalités. Je pense qu'il appartient au chef d'un gouvernement d'assumer ce rôle politique qui a pour but de sensibiliser la population et toute la population au problème très important auquel on a affaire.

Par la suite, il est devenu très clair que le gouvernement entendait non plus se contenter de discours, mais passer à l'action. Qu'est-ce qui s'est passé? Le ministre responsable du Conseil du statut de la femme a demandé à chacun des ministères de se saisir des recommandations et des études du rapport et leur a demandé un inventaire. Ceci a été fait. Dans un temps relativement court, chaque ministère a produit un rapport faisant l'inventaire, le bilan à la lumière des considérations du rapport; ensuite, les mesures qui pouvaient être prises immédiatement et, ensuite, un échéancier de réalisations pour les autres mesures qui devaient être prises dans l'avenir.

Mais le gouvernement ne s'est pas contenté de cette mesure initiale; par la suite, pour bien marquer sa volonté de passer de l'étape des discours à l'étape des réalisations, pour bien marquer sa volonté de faire passer dans les faits les changements que souhaitent les auteurs du rapport et, avec elles, toutes les femmes, il a voulu que cette responsabilité devienne une responsabilité gouvernementale. C'est la raison pour laquelle il a créé ce comité ministériel qui a des caractéristiques particulières en ce sens qu'on y retrouve, à côté du ministre responsable du Conseil du statut de la femme, deux ministres d'État, c'est-à-dire dont l'une des fonctions est justement d'identifier les priorités du gouvernement et d'essayer de les réaliser; deuxièmement, de coordonner les actions de divers secteurs; troisièmement, de stimuler les actions sectorielles et intersectorielles.

Les ministres d'État sont très bien placés, par la présidence qu'ils assument de leur comité de développement, pour voir à exercer ce rôle d'aiguillon, ce rôle de stimulus, ce rôle de coordination et même ce rôle d'appropriation budgétaire, le moment venu, puisqu'ils jouent un rôle très important dans la préparation des estimations budgétaires du gouvernement. À ce comité ministériel, on retrouve le premier fonctionnaire de l'État, c'est-à-dire celui qui a pour mission d'imprimer un élan, une action à tous les fonctionnaires du gou-

vernement, de tous les ministères, et qui a la capacité de circuler, si je peux employer cette expression, avec beaucoup d'aisance dans tous les coins et recoins du système de la fonction publique et qui peut ainsi exercer un rôle non seulement de prestige, mais d'influence extrêmement marquée.

Donc, ce comité ministériel a été formé depuis déjà quelque temps, il a tenu déjà plusieurs réunions et une de ses premières actions a été justement de s'assurer que dans chacun des ministères on trouve un répondant, on trouve une personne ressource qui soit en relation constante avec ce comité pour les diverses fins de l'application du rapport. En plus de ce haut fonctionnaire de l'État, nous avons créé un groupe de travail, composé de personnes qui, pour certaines, ont travaillé à l'élaboration du rapport du Conseil du statut de la femme et qui, pour d'autres, sont reconnues comme des expertes dans ce domaine. Ce groupe de travail poursuit justement cette entreprise de stimulation, de surveillance, de réflexion, de coordination et déjà, après quelques semaines, on peut dire que ce travail commence à rapporter des fruits.

On a souligné tout à l'heure qu'il y a un problème quantitatif et un problème qualitatif. Je pense que les deux aspects sont importants. Il importe que dans chacun de ces ministères on ait une personne en autorité qui soit responsable de l'application pour ce ministère des recommandations du Conseil du statut de la femme. On peut dire maintenant que ceci est bien en place et que dans chacun des ministères certaines des recommandations du Conseil du statut de la femme sont soit déjà appliquées ou en voie d'application, soit par des mesures très concrètes, quotidiennes, soit par des appropriations budgétaires, soit par la préparation de programmes qui entreront en vigueur au cours de l'année ou dans les années qui suivent. Ce qu'il y a de plus important — je l'ajoute avant de l'oublier — c'est que ces personnes, qui sont les correspondantes du comité ministériel dans chacun des ministères, ont une place importante dans ces ministères.

Pour ne mentionner qu'un exemple, la personne responsable de l'application du programme au ministère de l'Éducation siège au bureau des sous-ministres et elle se rapporte directement aux sous-ministres. Donc, il n'y a aucun risque que ses recommandations, que ses paroles, que ses actions ne retiennent pas l'attention des hautes autorités du ministère. Il en est ainsi dans chacun des ministères. Donc, il est très important, comme on l'a souligné, que cette armature soit en place dans chacun des ministères et que les personnes qui constituent cette armature soient bien au fait de tous les problèmes et poussent de leur côté pour la réalisation des recommandations. (11 heures)

II y a aussi un problème qualitatif et je pense que nous avons fait beaucoup de progrès également dans cette direction. Ce qui est important, quand il s'agit de régler un problème de minorité, qu'il s'agisse d'une minorité linguistique ou d'une minorité sociologique, c'est de rappeler à cor et à cri, sans cesse, l'importance de ce problème, de sensibiliser les gens afin que justement on rattrape les retards du passé et que tous les jours on travaille à changer les mentalités.

Je pense qu'on peut vous dire maintenant, Mme la Présidente, qu'après seulement quelques mois les mentalités sont en train de se transformer profondément dans chacun des ministères. Les hauts fonctionnaires, et de haut en bas, sont de plus en plus sensibles à la dimension disons "féminine" — entre guillemets — de chacun des problèmes qu'on étudie, de chacun des projets de loi qui sont en préparation. Cette préoccupation est en train de devenir une obsession et peut-être même une hantise, et il n'y a pas d'autre moyen d'effectuer le changement, dans les mentalités, dans les esprits, qui est indispensable et qui est préalable, d'ailleurs, au changement dans l'ordre des institutions, dans l'ordre des mesures et des réalisations concrètes.

Je pense que le grand mérite de ce comité ministériel a été de travailler à l'avancement de cette mentalité de changement dans chacun des ministères, en même temps, bien sûr, qu'il pousse quantitativement pour l'application de chacune des recommandations du Conseil du statut de la femme. On parle de politique d'ensemble. On s'est posé la question: Est-ce qu'on va "perdre du temps" — entre guillemets — pour encore passer de longs mois à préparer une politique d'ensemble alors que déjà nous avons une problématique d'ensemble dans le rapport du Conseil du statut de la femme qui, pour le moment, nous satisfait et nous donne beaucoup de pain sur la planche, ce qui nous permet de passer à l'action immédiatement? Nous sommes pressés, étant donné que ce problème est urgent depuis très longtemps, qu'il a été négligé et qu'il est important, au nom de la justice sociale, au nom de la justice humaine, de l'humanisme, d'appliquer dans les plus brefs délais les mesures qui vont redresser les injustices les plus criantes, les lacunes, les carences les plus significatives. C'est cet impératif d'action, Mme la Présidente, qui nous pousse dans nos réunions du comité ministériel et dans tout ce qui se fait actuellement dans chacun des ministères.

Je pourrais dire, par exemple, qu'à l'intérieur du secteur — qui est le mien — du développement culturel, nous avons déjà créé un comité "Femme et culture" qui réunit les répondantes ou les coor-donnatrices de chacun des ministères sectoriels. Ce comité "Femme et culture" surveille de très près l'application des recommandations dans chacun des secteurs qui relèvent de sa compétence ou de son autorité et, également, examine d'un oeil critique, dans le sens de la condition féminine, chacun des projets de loi qui sortent des ministères sectoriels relevant du développement culturel. Je pense que la même préoccupation existe dans les autres comités de développement. Ce comité "Femme et culture", par exemple, regarde de très près ce qui se passe au ministère de l'Éducation. Le ministère de l'Éducation est évidemment un ministère très important pour l'application des recommandations car on sait que les stéréotypes culturels se créent surtout à l'école; se créent

d'abord dans la famille, bien sûr, mais ensuite et d'une façon prépondérante à l'école. C'est donc là un lieu privilégié d'action pour modifier, transformer ces stéréotypes culturels. Il devient important de s'attaquer au problème sous plusieurs angles, aussi bien sous l'angle de la représentation des femmes dans l'enseignement, dans les hauts postes de direction, dans les jurys, dans les nominations que dans les manuels, évidemment, les manuels scolaires, les inventaires professionnels afin de changer l'attitude des conseillers en orientation, les inventaires de professions, la façon dont on y travaille.

Je ne veux pas énumérer tous les problèmes qui se posent dans le domaine de l'éducation, nous en sommes très conscients, mais je voulais simplement rappeler cela ici pour dire qu'aussi bien au comité ministériel de la condition féminine qu'au comité de développement culturel, avec son comité "Femme et culture", on se préoccupe d'une façon quotidienne de ces problèmes afin que les actions nécessaires soient prises au ras du sol aussi bien qu'aux échelons les plus élevés pour que des actions significatives soient apportées, qu'on puisse rapporter progrès dans les plus brefs délais.

Pour terminer, Mme la Présidente, je voulais simplement signifier qu'à mon avis — j'en suis convaincu — ce gouvernement passera à l'histoire pour avoir été le premier qui aura véritablement embrassé la totalité du problème et qui aura apporté des réformes vraiment profondes, significatives, dans un domaine qui constitue une des urgences et une des priorités fondamentales que notre société doit se fixer à l'heure actuelle.

M. Bellemare: Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Cuerrier): M. le député de Johnson.

M. Bellemare: ... je ne serai pas long, madame. Je voudrais simplement noter pour une fois que c'était — comme le disait le ministre tout à l'heure — un événement historique que nous vivons ce matin d'avoir la présence de tant de femmes et que la discussion se fasse entre femmes sur un sujet qui est des plus importants. Seulement, ma première remarque se situe au niveau de la formulation de la question de ce débat. Mme le député de L'Acadie blâme le gouvernement de son indifférence envers les revendications du Conseil du statut de la femme. Il est aisé pour le ministre de répondre qu'il n'est pas indifférent.

Par exemple, dans l'article de la Presse du 23 mai, que vous avez lu sûrement, Mme Bonenfant, au cours d'une conférence de presse à l'UNESCO, déclare: "Le Québec avait accepté de satisfaire un certain nombre de revendications contenues dans ce rapport, notamment le principe de la révision du Code civil, celle des manuels scolaires présentant une image phallocratique de la femme et l'allongement des congés de maternité." Voici, pour un politicien, une réponse adéquate malgré qu'elle ne soit peut-être pas satisfaisante. Nous ne croyons pas que nos amis d'à côté ou d'en face cernent les fondements mêmes du débat de ce matin. Le Conseil du statut de la femme est un organisme gouvernemental créé en 1973. Il est de bonne guerre, cependant, pour prendre l'expression du député de L'Acadie, que cet organisme créé sous un régime libéral et continué sous le régime péquiste devienne un cheval de bataille commun à ces deux partis. Je le comprends.

Nous sommes convaincus que la question de ce débat aurait dû être réaliste pour permettre à toutes les femmes de véritablement savoir que le gouvernement avance non pas à pas de tortue, mais rapidement dans ce domaine. Nous ne nions pas que le gouvernement parle plus qu'il n'agit présentement. C'est bon, les beaux discours comme en a fait dernièrement madame le ministre. D'un côté, nous ne dévaluons pas non plus, nous ne dénigrons pas le Conseil du statut de la femme car les recommandations qu'il suggère sont habituellement nécessaires. Le travail que Mme Bonenfant y fait est très louable et nous l'en félicitons. Mais même si celui-ci fut fondé à la suite de différentes demandes répétées de certains groupes de pression féministes et après un rapport fédéral, le rapport Byrd — il en fut ainsi pour d'autres provinces — le Conseil du statut de la femme demeure toujours et demeurera à jamais un organisme gouvernemental. Il est donc un organisme parmi plusieurs autres.

Cependant, le Conseil du statut de la femme ne représente pas toutes les femmes du Québec. De nombreux organismes féminins, notamment le Cercle des fermières, ne s'identifient pas au Conseil du statut de la femme, L'AFEAS, la Fédération des femmes du Québec, le Regroupement des femmes québécoises, pour ne nommer que ceux-là, car il y en a environ 475, tous demandent depuis nombre d'années des mesures auxquelles le gouvernement du Parti québécois continue à faire la sourde oreille. Pour un gouvernement qui se veut transparent, refuser d'écouter des revendications qui sont très légitimes de groupes qui forment la base même de la population est à notre avis une preuve de plus qu'il n'est pas aussi transparent qu'il veut bien le laisser croire.

Ces groupes appuient la plupart des recommandations du Conseil du statut de la femme, mais ils demandent aussi des mesures spécifiques mieux adaptées à leurs besoins particuliers. Il est normal et légitime que, dans une démocratie, des femmes ne s'identifient pas à un seul organisme, fût-il le Conseil du statut de la femme. Elles s'identifient et participent plus souvent à des organismes régionaux et locaux qui expriment leurs besoins souvent bien particuliers.

Les femmes au foyer — et c'est là qu'est mon gros point ce matin — qui composent la majeure partie des femmes du Québec sont dans une situation extrêmement difficile présentement. Elles n'ont pas de revenu propre. Donc, lors de leur retraite, elles se retrouvent dans une proportion de sept sur dix en deçà du seuil de la pauvreté. C'est la statistique qui nous donne cela.

Pendant leurs années au foyer à élever leurs enfants, elles n'ont pas accumulé de fonds de retraite, de régime de rentes, de sorte qu'elles se

trouvent parfois démunies. Il faudrait également encourager le travail à temps partiel, mais en y incluant des bénéfices marginaux équitables, tels que la participation à un régime de retraite, à un régime de rentes, des congés de maladie, des congés spéciaux, ceux-ci proportionnels au nombre d'heures travaillées, bien entendu. Ainsi, beaucoup de femmes concilieraient leur rôle familial et leur rôle social. Notamment, les femmes collaboratrices, qui consacrent environ 23 à 27 heures de travail à l'entreprise familiale et qui ne touchent aucun revenu et aucun bénéfice marginal, ne peuvent donc pas participer, entre autres, au régime de retraite, à la caisse de retraite ou à l'assurance-chômage. De toute façon, toutes les femmes au foyer devraient avoir un droit de cotiser au Régime de rentes du Québec, car actuellement une femme au foyer n'a pas le droit d'y participer.

Les femmes au foyer, qui ont la tâche d'élever des enfants, apprécieraient souvent quelques heures de divertissement et de détente si elles avaient l'opportunité d'obtenir un service de garde adéquat dans leur quartier ou dans leur région. Plusieurs groupes, tels que l'AFEAS, le Cercle des fermières, la Fédération des femmes du Québec, RAIF, le Regroupement des femmes québécoises et les organismes locaux sont favorables à ces mesures pour les femmes au foyer. Ils pressent le Conseil du statut de la femme d'en faire des priorités. Il y a donc un dénominateur commun entre les différents groupes féministes. En d'autres termes, tous travaillent à la promotion des femmes et c'est très bien. Mais le Conseil du statut de la femme demeure toujours un organisme gouvernemental. Il a donc un pouvoir particulier et une variété de ressources que n'ont pas les autres groupes. Il est donc, de par sa position, favorisé. Nous tenons à répéter que c'est pour ces quelques raisons majeures que nous croyons que la question est mal posée et qu'elle aurait dû parler de l'indifférence du gouvernement face aux revendications des différents groupes féministes qui désirent promouvoir la situation de la femme. Le premier problème à analyser serait la situation des femmes au foyer, des femmes collaboratrices à l'entreprise familiale.

Je termine, Mme la Présidente. Nous tenons à poser une question supplémentaire au ministre, toujours selon l'article de la Presse du 23 mai 1979 et je cite: "Le Québec avait accepté de satisfaire un certain nombre de revendications contenues dans ce rapport, notamment le principe de la révision du Code civil, celle des manuels scolaires qui présentent une image phallocratique de la femme et l'allongement des congés de maternité." Constatant cet ordre de priorités, quand le gouvernement prendra-t-il pour priorité la situation de la femme au foyer?

La Présidente (Mme Cuerrier): Mme la ministre pourrait peut-être répondre.

Mme Payette: Mme la Présidente, je suis très heureuse que le député de Johnson nous amène à parler particulièrement des femmes au foyer, c'est- à-dire des femmes qui ne travaillent pas, comme on dit en général. Je pense qu'il est bon de rappeler, Mme la Présidente, que ces femmes qui ne travaillent pas travaillent, en fait, selon une évaluation qui a été faite récemment par Statistique Canada, 92 heures et demie par semaine. Si on payait ces femmes au salaire minimum, c'est-à-dire $3.47 l'heure, cela fait un salaire d'environ $325 par semaine. Quand le député de Johnson nous dit que ces femmes ne reçoivent pas de salaire je pense que le rapport du Conseil du statut de la femme, en ce qui concerne le salaire à la femme au foyer, a apporté un éclairage intéressant sur cette question et a permis de bien faire la distinction entre le rôle social que joue la femme au foyer et le rôle conjugal que joue la femme au foyer.

Je pense que les propositions qui sont dans ce rapport sont des propositions intéressantes et nouvelles. Je ne crois pas que la société dans laquelle nous vivons doive percevoir des impôts de tous ses citoyens pour payer une femme au foyer qui joue un rôle conjugal, c'est-à-dire qui s'occupe des affaires du foyer, qui s'occupe de son mari au foyer, qui prépare un souper chaud parce que son mari rentre de travailler. Je ne pense pas qu'il s'agisse là, quand il s'agit des soins à apporter à une personne qu'on aime qui est le mari, en l'occurrence, d'un rôle social que l'ensemble de la société doive payer.

Cependant, quand une femme choisit d'être au foyer pour y élever de jeunes enfants — le rapport parle des enfants de zéro à douze ans — je crois qu'il s'agit là véritablement d'un rôle social. Je pense qu'à ce moment-là une femme au foyer qui a la charge d'élever de jeunes enfants joue, pour l'ensemble de la société, un rôle qui mérite d'être rémunéré. Je dis de la femme parce qu'on a insisté pour parler de la femme, mais j'aimerais mieux parler de la personne au foyer. Qu'est-ce qui empêcherait, par exemple, que la femme soit au foyer pour s'occuper des enfants de zéro à six ans et le père au foyer pour s'occuper des enfants de six à douze ans? (11 h 15)

La personne au foyer pourrait recevoir une "indemnité de disponibilité", puisque c'est comme cela que le rapport l'appelle. Nous parlons également de la personne au foyer qui est chargée de garder des personnes âgées ou des personnes invalides à la maison. Je crois qu'il faut faire une nette distinction — je pense que le député de Johnson comprendra — et les organismes qui, depuis des années, parlaient d'un salaire pour la femme au foyer comprennent bien de quoi il s'agit. On est bien conscient qu'une femme peut faire un choix libre d'être une femme au foyer qui s'occupe d'un mari. Mais cela n'est pas un rôle social, et je crois qu'il y a...

M. Bellemare: Est-ce que le ministre me permettrait simplement une question? Je ne parlais pas de salaire, je parlais de participation à des régimes déjà établis qui permettraient à la femme au foyer de bénéficier de certains apports, le jour de sa retraite. Cela est complètement différent.

Mme Payette: Je pense cependant me souvenir que le député de Johnson a parlé du salaire de la femme au foyer. C'est pour cela que j'y revenais parce que c'est une des propositions importantes du rapport du conseil et c'est une des propositions qui concerne le ministre des Finances. Je crois que c'est important d'y revenir. Je pense que le député de Johnson est d'accord pour convenir que cette partie qui concerne l'autonomie financière des femmes, la possibilité pour elles de disposer d'argent librement, d'en faire ce qu'elles veulent, de ne plus avoir à quémander ce qui est nécessaire pour, dans leur cas, soit s'assurer la possibilité de réaliser un certain nombre de choses, de retourner aux études dans certains cas ou de se procurer certains biens, c'est une des chevilles importantes de ce rapport.

Dans ce sens, je crois qu'il est bon de nuancer ce que je viens de dire, comme il est bon également de souligner que personne, je crois, n'avait été aussi précis quant à des changements à apporter au système fiscal du Québec que ce rapport. Aussi précis et aussi imprécis, jusqu'à un certain point, parce que cela doit s'insérer dans l'ensemble des lois fiscales. Je pense que personne, du Conseil du statut de la femme, n'a jamais pensé que cette proposition pouvait être réalisée dans un court laps de temps. Les membres du conseil ont dit qu'elles ne seraient pas étonnées qu'il faille deux ou trois ans pour mettre en application, pas nécessairement non plus les propositions qui sont faites dans le rapport, mais des choses qui ressemblent à ces propositions, qui sont réalisables et qui permettent d'atteindre les objectifs fixés par le document. Je crois que personne ne s'attendait à ce que des mesures fiscales concernant les femmes, de ce genre de mesures fiscales dont on parle, soient réalisées dans le premier budget qui a été présenté après le rapport du conseil; c'était physiquement impossible.

Je crois cependant pouvoir affirmer à ce moment-ci que nous avons maintenant en place un comité qui représente le comité ministériel qui est devant vous, le ministère des Finances, et qui se penche présentement sur la question fiscale concernant les femmes qui, éventuellement, nous fera des propositions à partir du document du Conseil du statut de la femme et dans le sens d'atteindre les mêmes objectifs. Il fallait fouiller toute la question; il fallait pouvoir voir dans quelle mesure ces recommandations s'inséraient dans les lois fiscales existantes; qu'est-ce qu'elles impliquent comme changement profond de mentalité en ce qui concerne la fiscalité. Je pense qu'il est important de savoir que non seulement le ministre des Finances a été étonné de cette recommandation, mais des hommes et des femmes du Québec ont été étonnés également de la recommandation du Conseil du statut de la femme. Plusieurs hommes n'ont pas du tout envie de se voir enlever le "déductible" pour personne dépendante dont ils bénéficient dans leur rapport d'impôt.

Je crois qu'il y a un changement de mentalité important qui doit se faire, autant dans la population qu'à l'intérieur de l'appareil gouvernemental.

Ce comité existe; il est au travail présentement et nous aurons bientôt des suggestions quant à la possibilité de réaliser ce qui concerne la situation financière des femmes.

La Présidente (Mme Cuerrier): J'ai entendu Mme le député de L'Acadie qui avait l'intention de poser une petite question courte, mais le député de Marguerite-Bourgeoys m'avait déjà demandé la parole.

Mme Lavoie-Roux: Je lui cède mon droit de parole, je reviendrai après.

La Présidente (Mme Cuerrier): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Je vous remercie. Mme la Présidente, je pense qu'on doit féliciter le député de L'Acadie d'avoir présenté cette question aujourd'hui qui fait référence directe au rapport du Conseil du statut de la femme rendu public en octobre dernier.

Le Conseil du statut de la femme, qui a été créé par l'ancien gouvernement libéral en 1973 — j'ai eu l'honneur d'en être le premier ministre responsable — avait eu au départ un mandat très large, une liberté totale d'action et de choix des priorités sous la direction de Mme Robillard, qui a été à sa tête pendant cinq ans. Le Conseil du statut de la femme est parti de loin, a dû créer littéralement, c'est-à-dire faire de rien, pour en arriver tout d'abord à aller au plus pressé, mettre sur pied l'organisme lui-même et prendre l'initiative de la direction même des activités lors de l'Année internationale de la femme, en 1975, qui a donné quand même une impulsion assez considérable à la sensibilisation dans le monde, comme c'était une année internationale, mais aussi en particulier au Québec. Le conseil était donc fort bien armé et préparé lorsqu'il a reçu le mandat de faire cette politique d'ensemble qui nous a été proposée en octobre dernier.

Il a été rendu public, ce rapport "Egalité et indépendance", lors d'assemblées tenues à Québec et à Montréal, en particulier, je ne sais pas s'il y a eu d'autres endroits, quelques autres régions aussi. J'ai assisté à l'assemblée tenue à Montréal et j'y ai participé. Je pense que c'était Mme Caroline Pestieau qui présidait la réunion à Montréal. J'ai pris l'engagement, comme député de l'Opposition, de rappeler au gouvernement ses responsabilités de temps à autre relativement à ce rapport. Voilà que, huit mois plus tard, nous sommes ici pour voir ce que le gouvernement a fait. Le Conseil du statut de la femme a posé une condition — vous vous souvenez, Mme la Présidente, vous étiez d'ailleurs présente à cette réunion — dans le rapport et aussi dans la présentation, à Montréal en tout cas, et je suis sûr aussi à Québec. Il a posé comme condition sine qua non de satisfaction de sa part l'acceptation globale, pas complète, pas entière, pas à 100%, mais globale par le gouvernement de ce rapport. C'est important. Le Conseil du statut de la femme ne

veut pas, ne prendra pas au sérieux des actions ponctuelles, des actions incomplètes, à la pièce, ce qui semble vouloir se faire actuellement. J'y reviendrai.

Devant cette demande du Conseil du statut de la femme, on a eu quoi? On a eu ce que Mme le ministre nous a répété ce matin. On a eu des déclarations du premier ministre, des déclarations de Mme le ministre et d'autres ministres, on a eu des réponses à des questions, parce que nous sommes revenus à la charge ici au mois de novembre. Au mois de décembre, j'ai demandé à Mme le ministre: Qu'est-ce qu'il arrive? Vous nous avez promis que vous feriez une proposition au Conseil des ministres le 15 novembre. Je lui avais laissé encore trois semaines. Là, elle a, sans les identifier, accusé certains de ses collègues de se traîner les pieds. On a fait un pacte ensemble et on a dit: On va les surveiller. Ce qui nous est arrivé, après cela, naturellement...

Mme Payette: Je ne sais pas s'il y a des questions de privilège à la question avec débat, mais je n'ai jamais fait de pacte avec le député de Marguerite-Bourgeoys. Je suis incapable, madame.

La Présidente (Mme Cuerrier): Nous considérons cette intervention comme une remarque et non une question de privilège.

M. Lalonde: Mme la Présidente, j'avais fait une offre au ministre, qu'elle a pu refuser malheureusement. Je pourrais relire le journal des Débats. J'avais offert ma collaboration, ma contribution la plus entière pour surveiller ses collègues qui étaient fautifs.

M. Bellemare: Dans le Soleil il est question d'une déclaration assez concordante avec ce que dit le député.

M. Lalonde: Oui.

La Présidente (Mme Cuerrier): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Mme la Présidente, on a fini l'année 1978 là-dessus, sur l'insatisfaction de Mme le ministre à l'égard de ses collègues, en espérant que son avertissement serait entendu. En janvier, ce qu'on apprend, c'est la formation d'un comité; on a entouré Mme le ministre de deux hommes. Fort bien, je n'ai pas d'objection, mais encore faut-il savoir de quoi il s'agissait. Si, à ce moment, le comité avait fait une réunion publique, avait réuni la presse ou qu'ici, en Chambre, on avait fait une déclaration ministérielle exprimant la volonté politique du gouvernement d'accepter globalement le rapport du Conseil du statut de la femme, on saurait où on s'en va.

Mais qu'est-ce qu'on a eu, ce matin? On a eu des explications: Voici ce qu'on a fait et ce qu'on va faire. Sauf qu'on n'a pas accepté le rapport encore. J'ai pris le ministre des Finances à témoin de cette attitude. En février, je lui ai posé la question:

Est-ce qu'il va accepter la recommandation du Conseil du statut de la femme en ce qui concerne la fiscalité? Il m'a reproché de vouloir violer le secret du budget. Je me suis naturellement tu, quelque peu contrit d'avoir attenté à la virginité fiscale du ministre. Alors je me suis dit: Puisque le ministre ne veut pas parler de cette question à cause du secret du budget, il annonce — j'ai été trop optimiste — que dans son budget on va avoir des nouvelles là-dessus. Nous avons tous lu le budget, il n'y a rien, il n'y a pas un mot. Je ne peux pas lui reprocher de ne pas avoir accepté nommément et verbatim la recommandation du Conseil du statut de la femme, mais au moins on aurait espéré que le ministre dise: Je l'étudie encore, je vais faire une recommandation. En réponse à ma question, au mois de février, il nous a annoncé une déclaration. Trois mois plus tard, on a déjà eu un budget et depuis ce temps on n'a rien eu, pas un mot de la part du ministre des Finances.

Quand j'entends les deux ministres qui nous ont parlé tantôt nous décrire leur réseau, l'armature, comme dit le ministre d'État au développement culturel — l'un des deux gardiens du ministre responsable du Conseil du statut de la femme — et nous dire qu'il y a une personne ici qui parle au sous-ministre, imaginez-vous que cela nous rassure. La personne au ministère de l'Éducation qui est responsable de la condition féminine parle au sous-ministre. À ce moment, tout est réglé pour eux autres. Mais ce n'est pas cela qu'on veut. Le gouvernement se défile, actuellement, concernant la condition féminine. Mme le ministre nous dit: Vous savez, je ne suis pas responsable de la condition féminine. C'est vrai, elle est seulement responsable du Conseil du statut de la femme. Mais nous devons avoir une politique de ce gouvernement.

On dirait que le gouvernement ne veut pas accepter la politique du Conseil du statut de la femme. Le ministre d'État, tantôt, disait que le rapport constitue une problématique intéressante, une politique d'ensemble de la condition féminine. Mais c'est la politique d'ensemble de la condition féminine du Conseil du statut de la femme que nous avons, non pas celle du gouvernement, et le gouvernement ne veut pas l'accepter huit mois après la publication du rapport. Qu'il l'ait étudié, d'accord, mais qu'il nous dise si c'est sa politique ou non. Pourquoi il ne veut pas l'accepter? C'est bien simple, parce que lorsque ce n'est pas sa politique, il ne peut pas être comptable envers l'Assemblée nationale de l'application de sa politique, des succès ou des échecs de sa politique. Il pourra toujours dire: On ne l'a jamais acceptée. On a réalisé un certain nombre de choses, mais cela n'a jamais été notre politique. C'est contre cela que le Conseil du statut de la femme voulait se garder, voulait se protéger lorsqu'en présentant son rapport il nous a dit: Nous voulons, nous désirons une acceptation globale de la part du gouvernement. (11 h 30)

Après la création, le développement des comités ministériels ou autres qu'on nous a décrits tantôt jusqu'en février — il y en a apparemment

encore — cela n'empêche pas Mme la présidente du Conseil du statut de la femme, dans le bulletin de février 1979, de dire dans son éditorial: "Le rapport "Pour les Québécoises, égalité et indépendance", est toujours sans réponse concrète de la part du gouvernement" et ce n'est pas de petites actions isolées qui vont faire des réponses concrètes. Si le ministre responsable du Conseil du statut de la femme veut tenir sa parole, la promesse qu'elle a faite ici — je peux la lui rappeler par le biais de la transcription des débats — en réponse à des questions, que d'ici deux ou trois ans la politique du Conseil du statut de la femme serait largement réalisée, à ce moment-là, le gouvernement doit, premièrement, l'accepter globalement. Il doit, premièrement, déclarer sa volonté politique en disant qu'il l'accepte, ce qu'il n'a pas fait encore. Deuxièmement, il doit nous donner des échéanciers.

Le ministre d'État au développement culturel nous a dit tantôt qu'il y a eu des échéanciers de réalisation par les ministères. Quand a-t-on entendu parler de cela? Est-ce que cela a été rendu public? Si le public ne le sait pas, comment peut-on savoir que le gouvernement fait quelque chose pour, ensuite, le tenir à l'oeil, le rappeler à l'ordre, l'encourager à aller plus loin et plus rapidement? On n'a pasd'échéancier. C'est le gouvernement qui doit nous donner un échéancier de réalisation, faire de la planification. Cela prend de la planification pour arriver ensuite à un bilan. D'ailleurs, on a tellement peur, du côté du gouvernement, de se faire poser des questions là-dessus que Mme la ministre, tantôt, nous a dit: Vous savez, des bilans, on n'en fera pas. Je ne crois pas à ça, moi, faire un bilan pour dire qu'on est rendu à 15% ou à 20% de ceci et de cela, non! C'est qualitatif. Qualitatif, on sait très bien qu'il n'y a pas de thermomètre pour cela.

D'avance, on nous dit qu'on ne fera pas de bilan. Ce n'est pas très rassurant. Huit mois après la publication d'un rapport qui est le résultat de cinq ans de travail sérieux, pas toujours facile, au contraire, je dirais toujours difficile, par le Conseil du statut de la femme, qui est le résultat de l'investissement de centaines de milliers de dollars de la part des "payeurs de taxes", on n'a pas l'essentiel, on n'a pas ce qui est indispensable pour savoir où on s'en va dans la condition féminine au Québec, c'est-à-dire une politique du gouvernement.

J'espérais que la question du député de L'Acadie soit l'occasion de cette déclaration de volonté politique: Oui, nous acceptons globalement le rapport du Conseil du statut de la femme. J'espérais encore après huit mois que Mme le ministre et son entourage ministériel prennent l'occasion, profitent justement de cette question pour nous dire: Maintenant, nous l'avons. On aurait dit: Au moins, on est avancé. Cela a été plus lent qu'on le pensait, mais au moins on aurait fait quelque chose. Je suis extrêmement déçu. On nous a fait faire encore une fois une valse-hésitation ici. On n'a pas de politique, mais on fait quelque chose. On est rendu qu'on nous décrit dans les détails ce qu'on fait, mais ce n'est pas ce qu'on veut. On veut savoir ce que le gouvernement veut. On a besoin d'une déclaration officielle de la part du gouvernement pour savoir si le gouvernement prend à sa charge le rapport du Conseil du statut de la femme globalement, quitte à en modifier ici ou là les recommandations, quitte à les adapter. Le Conseil du statut de la femme le dit lui-même: II ne s'attend pas que cela soit accepté et réalisé mot à mot, non, mais globalement et c'est important. C'est ce que le conseil a demandé. Je suis extrêmement déçu de voir qu'on n'est pas plus avancé qu'avant, sauf des déclarations ronflantes, des voeux pieux. Malheureusement, ce n'est pas plus que cela. Ce sont même des réserves d'une si grande prudence qu'on nous dit d'avance qu'on ne fera pas de bilan parce qu'on a tellement peur d'être comptable envers la population d'une véritable politique. Merci, Mme la Présidente.

Mme Payette: Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Cuerrier): Mme la ministre.

Mme Payette:... je suis étonnée que le député de Marguerite-Bourgeoys se dise déçu; tout ce qu'il vient de dire, Mme la Présidente, est déjà fait. Le gouvernement a accepté la politique d'ensemble du Conseil du statut de la femme à plusieurs reprises. D'abord par la bouche du premier ministre, lors de la réception de ce document; de nouveau dans le discours inaugural du premier ministre, cette année, et de nouveau dans l'arrêté en conseil qui crée le comité interministériel dont le mandat est essentiellement la réalisation de la politique d'ensemble telle qu'énoncée par le document du Conseil du statut de la femme. Ce n'est pas le mot à mot du mandat mais c'est le sens du mandat. Donc, c'est l'acceptation globale du rapport global du Conseil du statut de la femme et j'en suis très fière.

Je suis prête à reprendre ici la promesse à laquelle le député de Marguerite-Bourgeoys faisait allusion, que d'ici deux ou trois ans, l'ensemble de ces mesures ou d'autres atteignant les mêmes objectifs seront réalisées. Donc, je ne vois pas pourquoi il est déçu. Il a essayé de reprendre au compte de l'ancien gouvernement le rapport du Conseil du statut de la femme en disant qu'on y avait travaillé depuis cinq ans. J'en suis infiniment désolée parce que ce n'est pas le cas. Le Conseil du statut de la femme a été créé sous l'autorité du député de Marguerite-Bourgeoys, mais si vous saviez, Mme la Présidente, le mal qu'il a eu à continuer d'exister, ce Conseil du statut de la femme, sous le deuxième ministre responsable de ce conseil où, pendant des mois, madame, les seules choses que ce conseil a pu faire c'est d'écrire au ministre pour tenter de définir de quelle façon on allait pouvoir communiquer les uns avec les autres. J'ai eu en main cette correspondance avec le ministre de l'époque et c'est infiniment regrettable de penser que l'ancien gouvernement a laissé perdre toutes ces années dans le domaine de la condition féminine.

Ce rapport a été commandé par le présent gouvernement; il a été demandé, il a été sollicité;

nous avons payé pour les travaux qui ont été faits. Les femmes qui y ont travaillé, madame, y ont mis des heures au-delà de tout ce qu'on peut exiger de personnes qui travaillent un rapport comme celui-là; elles y ont mis également leur coeur et cela, j'en suis certaine. Je pense que depuis que nous avons en main ce document, nous avons réagi comme elles le souhaitaient, c'est-à-dire que nous avons refusé de travailler recommandation par recommandation; nous avons eu le respect de ce rapport global, ce rapport d'ensemble. Le conseil nous avait laissé la liberté — je pense qu'il se devait de le faire mais on nous l'a signalé — de défaire ce qui avait été fait parce qu'il n'y a pas véritablement de priorité indiquée dans ce rapport du Conseil du statut de la femme. On laissait au gouvernement la possibilité de se donner des priorités ou d'accepter de travailler sur l'ensemble des recommandations. Notre choix a été de ne pas défaire ce que le conseil avait fait et de tenter de travailler en même temps, de la même façon, avec la même volonté politique sur la mosaïque complète que représente ce rapport du Conseil du statut de la femme.

Quand le député de Marguerite-Bourgeoys dit que nous nous refusons à faire un bilan, c'est le contraire de ce que j'ai dit au tout début. J'ai remercié Mme le député de L'Acadie de nous permettre de faire un bilan de ce qui a été fait. Nous avons, depuis le début de cette question avec débat, fait un bilan de la volonté politique, et c'est ce que demandait la question de Mme le député de L'Acadie. Si on souhaite que nous fassions un catalogue de réalisations, je pense que nous sommes en mesure de faire une sorte de catalogue satisfaisant, à beaucoup d'égards, dans bien des domaines, moins satisfaisant dans d'autres domaines, mais cela ne fait pas huit mois, madame, que nous avons ce rapport; cela fait six mois que nous y travaillons. Et, en six mois, je pense que nous pouvons affirmer que nous sommes satisfaits de la volonté politique, du changement de mentalité et des réalisations de catalogue dont nous disposons.

Nous pouvons, dans un survol rapide, faire le tour des secteurs, le tour des ministères pour effectivement faire le bilan de la situation, au moment où on se parle, de ce qui est réalisé, de ce qui est en voie de réalisation et de ce qui est en voie de se préparer à être réalisé. On comprendra la difficulté de mettre en mots ce qui est en voie de se réaliser. Il s'agit parfois d'un comité, mais tout commence comme cela à l'intérieur de l'appareil gouvernemental, d'un comité qui, à un moment donné, est chargé de voir les implications, de voir à l'insertion d'une recommandation dans un programme existant. Je pense que nous pouvons faire une sorte de bilan comme celui-là; nous sommes en mesure de le faire ce matin.

Si vous permettez, Mme la Présidente, j'aimerais présenter à ceux qui sont ici la responsable du Groupe de travail du comité interministériel, Me Christine Tourigny. C'est avec elle, si vous permettez, qu'on va commencer à faire ce bilan, secteur par secteur, puisqu'on le souhaite.

La Présidente (Mme Cuerrier): Madame, en votre nom personnel.

Mme Tourigny (Christine): Mme la Présidente, si on regarde les recommandations que le Conseil du statut de la femme a faites, on se rend compte qu'il y a quatre grands ministères visés plus directement et de façon plus importante par ces recommandations. Ce sont les ministères de la Justice, des Affaires sociales, de l'Éducation et du Travail. Bien sûr, d'autres ministères sont concernés. Dans certains cas, il y a peu de recommandations, mais certaines sont très importantes. On peut peut-être commencer par les quatre ministères dont je viens de parler. Si on commençait par le ministère des Affaires sociales, il se fait au ministère des Affaires sociales beaucoup de choses. Évidemment, c'est celui à qui s'adressent le plus grand nombre de recommandations. Le ministère des Affaires sociales a mis sur pied déjà une structure interne qui n'est pas seulement assurée par une personne qui serait la coordonna-trice de ces mesures, mais qui assure au sein de chaque direction générale l'aspect condition féminine de chaque dossier. Ces personnes font rapport elles-mêmes à la coordonnatrice qui, elle, a un lien direct avec le bureau des sous-ministres et avec le comité ministériel, le groupe de travail.

Plus concrètement, où en sont les Affaires sociales dans ce domaine? Dans un premier temps, je pense qu'on peut parler d'un projet de loi sur les services de garde qui, toutes choses étant normales, devrait être déposé devant cette Chambre avant l'ajournement des travaux d'été. C'est un projet important qui permettra la réalisation d'un certain nombre de recommandations du conseil. D'autre part, toujours du côté des Affaires sociales, madame la ministre a souligné tout à l'heure que douze centres de dépannage pour les femmes en difficultés — donc, les femmes victimes de violence — seront maintenant subventionnés cette année par rapport à deux qu'on avait l'an dernier qui étaient subventionnés par le ministère. Vous n'êtes pas sans ignorer non plus que des cliniques de service de planification des naissances ont été mises sur pied et que 18 centres hospitaliers ont déjà accepté de participer à ce programme. Il y a beaucoup d'autres mesures, dont les brochures que le ministère publiera ces jours-ci, concernant en particulier les soins à l'enfant.

Du côté de la santé, de nombreux travaux sont en cours, plus particulièrement une politique antitabac qui sera dévoilée par le ministère incessamment et une politique antialcool qui est en voie d'élaboration et qui devrait pouvoir être rendue publique dans les mois qui viennent. D'autre part, des études plus particulières sur la santé sont en cours. Ce sont des études qui traitent des soins à l'accouchement, des cours prénataux qui se donnent actuellement et des études sur les électrochocs sont actuellement faites par le comité sur la santé mentale. On peut souligner aussi que des programmes de dépistage du cancer au col de l'utérus sont sur le point d'être complétés et de-

vront pouvoir fonctionner d'ici trois ou quatre mois au plus tard.

Du côté du ministère du Travail, la Loi des accidents du travail a été modifiée, comme vous le savez, de façon à accorder les mêmes bénéfices au conjoint des travailleuses et au conjoint des travailleurs. Mme la ministre a parlé tout à l'heure des congés de maternité. Vous savez ce qui s'est fait. On ne reviendra pas là-dessus, de même que sur le projet de loi 126 qui vise quand même un plus grand nombre de travailleuses que ce qui existait auparavant et qui, s'il est adopté tel quel, couvrira le conjoint de l'employeur et ses enfants, sauf pour ce qui est de la durée du travail et des congés annuels.

M. Bellemare:... certains droits de cotiser au Régime de rentes du Québec? (11 h 45)

La Présidente (Mme Cuerrier): M. le député de Johnson, j'ai une demande de Mme le député de L'Acadie. Je vous reconnaîtrai après.

Mme Lavoie-Roux: Mme la Présidente, je remercie Mme Tourigny des informations qu'elle vient de nous donner. Elle nous a même donné des nouvelles que nous ne connaissions pas, par exemple, qu'un projet de loi sur les services de garde sera déposé d'ici la fin de l'année. Je voudrais revenir sur un point particulier. Quand on nous parle des douze centres de dépannage qui existent, ou des quatorze alors qu'il n'en existait que douze, je tiendrais à rappeler, Mme la Présidente, que ce sont encore les organismes...

Mme Payette: Pardon! Mme le député vient de faire une erreur. Il y en avait deux l'an dernier et il y en a douze, cette année, de financés.

Mme Lavoie-Roux: Oui, mais cela ne changera rien à ce que je veux dire. D'accord, il y en avait deux et il y en a quatorze. Ce sont là des initiatives des organismes féminins eux-mêmes.

Mme Payette: Ce sont des centres financés par le ministère des Affaires sociales.

Mme Lavoie-Roux: Ils ont dû se regrouper, ils ont fait des demandes. Je l'ai dit au départ, ce sont des subventions annuelles qui n'assurent aucunement la permanence de ces centres de secours pour les femmes en détresse.

Mme Payette: Mme la Présidente, cela va... Mme Lavoie-Roux: Mme la Présidente...

Mme Payette:... exactement dans le sens des recommandations du Conseil du statut de la femme et dans le sens du désir de ces femmes qui se sont regroupées qui désirent rester autonomes à l'intérieur de ces centres.

Mme Lavoie-Roux: Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Cuerrier): Madame...

Mme Lavoie-Roux: ... j'aimerais quand même pouvoir parler sans être continuellement interrompue. Je pense que j'ai respecté le droit de parole que le ministre a utilisé aussi largement qu'elle en avait le droit d'ailleurs. Ce que je dis, c'est que, puisque Mme le ministre fait référence aux recommandations du conseil, on demandait qu'il y ait une permanence d'assurée à ces centres-là. Nous en sommes encore à des subventions annuelles, à une première subvention annuelle, et les critères demeurent très aléatoires pour l'octroi de ces subventions. Nous l'avons soulevé à l'étude des crédits du ministère des Affaires sociales. Pour ce qui est de l'usage du tabac, des études sur l'usage du tabac et des études sur l'usage de l'alcool — cela peut peut-être être simplement une erreur — au ministère des Affaires sociales, on nous a dit que c'était l'alcool qui s'en venait et que le tabac était à venir. Enfin, cela peut être simplement une question d'erreur dans la formulation. Mais nous en sommes toujours aux études, Mme la Présidente. Quand on parle du ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre, évidemment, on nous cite la correction qui est faite à la Commission des accidents du travail, mais nous sommes toujours devant un gouvernement qui a fait des offres qui justement ne respectent pas le principe "à travail égal salaire égal". Il a fait des offres qui sont discriminatoires. C'est un geste que le gouvernement vient de poser...

Mme Payette: Mme la Présidente, question de règlement.

Mme Lavoie-Roux: ... quand même au cours des derniers mois.

La Présidente (Mme Cuerrier): Sur une question de règlement, Mme le ministre.

Mme Payette: Est-ce que, dans une question avec débat comme celle que nous vivons ce matin, Mme le député de L'Acadie veut mettre fin à l'énumération que nous avions commencée des réalisations? J'ai l'impression tout à coup qu'elle ne veut pas entendre ce que nous avons à dire quant au bilan.

Mme Lavoie-Roux: Je regrette, Mme la Présidente, c'est mon temps de parole, je crois. Vous avez utilisé vos 20 minutes; c'est à mon tour.

La Présidente (Mme Cuerrier): II s'agit maintenant d'une question avec débat. Vous pouvez poser une seule question à la fois si vous le voulez et attendre que Mme le ministre réponde, ou vous pouvez poser toutes vos questions à la fois et Mme le ministre pourra intervenir après. C'est une question de choix et la façon dont on veut organiser le fonctionnement de la commission.

Mme Lavoie-Roux: Alors, je vais poser...

M. Bellemare: D'après le règlement, le temps est limité, pour chacune des questions, à 20 minutes.

La Présidente (Mme Cuerrier): Mme le député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Je pense, Mme la Présidente, qu'il fallait quand même remettre les choses dans leur perspective. Le ministre des Affaires sociales, pas plus tard qu'avant-hier, reconnaissait lui-même que même s'il y a une armature de mise en place ou qu'on essaie de mettre en place — on ne nous a parlé, à ce moment-là, que d'une seule personne, de toute façon — il y avait énormément de choses à faire, que peu de choses étaient en marche, que du point de vue médical, du point de vue psychiatrique, les problèmes demeuraient entiers. J'espère qu'on va se pencher là-dessus, mais il ne faut pas dire, à ce moment-ci, ou laisser créer l'impression que tout cela est en voie de réalisation.

Je vais quand même poser une question précise à Mme le ministre. Vous vous souviendrez que l'an dernier, au mois de juin — cela fait exactement un an — j'avais demandé ce qu'il advenait des recommandations du rapport Boutin qui sont reprises par le Conseil du statut de la femme.

On demande que la Charte des droits et libertés de la personne soit modifiée pour qu'on y enlève toute discrimination touchant le sexe, l'état civil ou l'âge. Ce rapport, cela fait pratiquement trois ans que le gouvernement l'a entre les mains. C'est un geste qui ne coûte pas de sous, il n'y a pas de contraintes budgétaires. J'ai quand même discuté des implications budgétaires possibles avec celui qui a rédigé le rapport et on se trouve toujours devant une inaction même si le ministre des Affaires sociales avait dit: Je suis d'accord et je recommande au ministre de la Justice de faire ces corrections. Je demande à Mme le ministre: Qu'en advient-il?

La Présidente (Mme Cuerrier): Vous avez, madame, un droit de réplique et un droit de réponse aux questions, comme Mme la député évidemment. Mme la ministre.

Mme Payette: La question est posée; je réponds à la question, Mme la Présidente. Le rapport Boutin, qui a été terminé en 1976, a été déposé à l'Assemblée nationale en juin 1978. Depuis ce temps, un groupe de travail a été formé pour donner suite aux recommandations du rapport Boutin. Des changements dans la situation sociale pourraient justifier des modifications aux recommandations, cependant. Ce groupe de travail est composé, entre autres, de représentants du ministère des Affaires sociales, du ministère de la Justice, du ministère des Finances, du Conseil du statut de la femme; il s'est réuni à différentes reprises et a remis un rapport au ministre des Affaires sociales au mois d'avril 1979. Par ailleurs, la mise en application des recommandations du rapport Boutin exige une modification à la Charte des droits et libertés de la personne et cette modification à la charte, ainsi que d'autres demandées par le Conseil du statut de la femme dans son rapport "Egalité et indépendance" sont envisagées actuellement par le ministère de la Justice pour l'automne 1979 ou le printemps 1980.

La Présidente (Mme Cuerrier): Mme la député.

Mme Lavoie-Roux: Je ne puis m'empêcher de souligner mon étonnement devant de tels délais. Si tous les comités qu'on nous a décrits dans les minutes qui ont précédé doivent agir avec la même lenteur alors qu'il s'agissait d'un rapport qui était complet, qui a été remis en décembre 1976, on peut vraiment se poser des questions sérieuses quant aux résultats qui seront atteints par ces autres comités qui doivent s'attaquer à d'autres recommandations du rapport du Conseil du statut de la femme.

Mme Payette: Je crois que le grand souci du ministre de la Justice au moment d'intervenir quant à des amendements à la Charte des droits et libertés de la personne est de mettre ensemble tous les amendements qui devront être présentés à ce moment-là. Quand on connaît, madame — vous en savez quelque chose comme nous tous — la lenteur des travaux en cette Chambre, le ministre de la Justice pense pouvoir déposer ces amendements à l'automne 1979; nous espérons avoir l'appui de l'Opposition pour que ce soit adopté le plus rapidement possible.

M. Lalonde: Mme la Présidente, si vous me le permettez, le ministre de la Justice a été beaucoup plus rapide pour amender la Charte des droits et libertés de la personne concernant l'orientation sexuelle. J'aurais souhaité qu'il y ajoute justement ces amendements. Il a été très rapide et il a eu la collaboration de tout le monde à ce moment-là.

Mme Payette: Le rapport, à ce moment-là, du comité dont nous parlons ce matin n'était pas encore connu, n'était pas déposé et je crois, effectivement, qu'il est raisonnable de la part du ministre de la Justice...

Mme Lavoie-Roux: II a été déposé en décembre 1976.

Mme Payette: ... de vouloir regrouper les amendements à intervenir pour l'automne.

Mme Lavoie-Roux: Mme la Présidente, je ferai remarquer au ministre que ce rapport avait été remis au gouvernement en décembre 1976.

Mme Payette: Ce rapport a été remis au gouvernement en 1976. Cependant, l'évolution de notre société fait en sorte que ses recommandations avaient besoin d'être revues avant de pouvoir de nouveau être envisagées. C'est le travail qui a été fait par le comité dont je viens de parler.

Mme Lavoie-Roux: Une autre question que je voudrais poser. Je vais la faire très courte parce que je sais que mon collègue de D'Arcy McGee voudrait prendre quelques minutes. Que se fait-il de concret à l'égard de l'accès au travail pour les femmes qui ont passé un nombre X d'années au foyer à élever leur famille? On sait que, souvent, elles ne peuvent pas défrayer leurs frais de scolarité, que les bourses et les prêts leur sont très difficiles d'accès. Il y a aussi toute la question des programmes qui doivent être accordés aux besoins que les femmes expriment. Je voudrais savoir où on en est sur ce point, quel est, en fait, l'aide qu'on est prêt à donner aux femmes qui désirent retourner sur le marché du travail après avoir vécu au foyer pendant X années.

M. Laurin: Je vais répondre à cette question, Mme la Présidente. Une directive a été donnée, à tous les établissements d'enseignement, de consentir des avances, garanties par le ministère de l'Éducation, aux étudiants qui attendent une bourse ou un prêt. De plus, des études sont en cours pour mettre sur pied un régime pédagogique d'aide aux étudiants à temps partiel. Évidemment, les premières personnes visées sont les femmes qui sont en situation de recyclage, qui sont en situation de divorce, de séparation ou de veuvage.

Mme Lavoie-Roux: Les étudiantes à temps partiel pourront bénéficier de ces prêts et bourses.

M. Laurin: Attendez que l'étude dont on parle...

Mme Lavoie-Roux: Vous êtes à faire l'étude.

M. Laurin: ... en arrive à des recommandations. Encore une fois, une directive a été donnée à tous les établissements d'enseignement pour qu'on consente des avances, garanties par le ministère de l'Éducation, aux étudiants qui attendent une bourse ou un prêt, ce qui veut dire, évidemment, cela va de soi, que ces personnes sont admissibles aux prêts et bourses.

Mme Lavoie-Roux: Les étudiantes à temps partiel seront toutes admissibles.

M. Laurin: Évidemment, on ne peut pas se substituer aux organismes qui doivent étudier ces demandes.

Mme Lavoie-Roux: Ce que je veux dire...

M. Laurin: L'action est entreprise et elle aura des suites.

Mme Lavoie-Roux: Mais cela n'est pas encore une ressource dont les femmes peuvent se prévaloir.

M. Laurin: II y a déjà un geste qui a été posé. D'autres gestes seront posés en temps et lieu. Je suis très étonné qu'un parti qui s'est laissé traîner les pieds pendant des années sur toutes ces questions nous reproche maintenant des délais que justifient simplement les processus normaux.

Mme Payette: D'autre part, Mme la Présidente, les services d'éducation aux adultes, à l'intérieur des cégeps, sont présentement en train de mettre en place des programmes qui s'adressent directement aux femmes dont parle le député de L'Acadie pour l'automne prochain, dans certains cas, et pour janvier, dans d'autres.

Mme Lavoie-Roux: Mme la Présidente, je suis au courant de ceci. D'ailleurs, cela existe depuis un certain nombre d'années, mais je voudrais simplement souligner particulièrement au ministre d'État au développement culturel qu'à ma con-sance si certains cégeps justement ont pris un leadership dans cette direction, on exerce encore une discrimination quant au choix des cours que les femmes peuvent suivre. Non seulement, il y a cette discrimination quant au choix des cours, mais on ne s'efforce même pas, partant de préjugés qu'on a à l'égard des femmes qui ont élevé des familles pendant X années... Je vais vous donner un exemple très concret: on va les éloigner des cours de mathématiques, et on sait fort bien qu'un cours de mathématiques — et je pense que là-dessus le ministre sera d'accord avec moi — va vous être vraiment utile si vous voulez poursuivre des études ultérieures. Déjà, on pose ce genre de barrière. Enfin, il y a tout ce domaine qui demande...

M. Laurin: Les mentalités ne se changent pas en un jour et Mme le député de L'Acadie le sait. Des efforts sont faits dans ce sens pour changer les mentalités au niveau des programmes d'orientation, des conseillers en orientation. Mais ce qui est effectif, c'est que maintenant huit cégeps proposent des programmes spéciaux pour les femmes: Nouveau départ, Femmes vivantes, Repartir, et ainsi de suite, dans plusieurs cégeps répartis aux quatre coins du Québec, Trois-Rivières, Bois de Boulogne, Rosemont et tous les autres. Je pense qu'il y a déjà des progrès dont on peut se féliciter et ce progrès va se continuer au cours des prochaines années.

M. Bellemare: Madame, juste une question très courte pour donner la chance au député de D'Arcy McGee...

La Présidente (Mme Cuerrier): M. le député de Johnson.

M. Bellemare:... je ne voudrais pas lui enlever son privilège. Je voudrais savoir si les groupes de pression ont quelque chose de fait vis-à-vis du ministère, vis-à-vis du statut pour que la femme au foyer ait le droit de cotiser au régime de rentes.

La Présidente (Mme Cuerrier): Mme le ministre.

Mme Payette: Mme la Présidente, cela fait partie des recommandations qui ont été soumises ou déférées au comité chargé de représenter le comité interministériel et le comité du ministère des Finances. C'est un des sujets qui touchent essentiellement au système de fiscalité et c'est ce groupe de travail qui doit nous faire des recommandations à nous et au ministre des Finances, dans les circonstances. C'est un comité qui vient d'être formé, qui réunit donc des représentants du comité interministériel et des représentants du ministère des Finances. Nous espérons que d'ici quelques semaines, tout au plus quelques mois, nous aurons des réponses en ce qui concerne la fiscalité et la possibilité d'intervenir l'an prochain dans le prochain budget, et éventuellement fixer un échéancier et peut-être évaluer ce qu'il est possible de réaliser dans un deuxième budget. (12 heures)

M. Bellemare: Est-ce que le ministre pense qu'à la reprise de la session d'automne il y aura une prévision spéciale dans une loi qui y pourvoirait?

Mme Payette: C'est peut-être un peu tôt pour prendre cet engagement. Ce que je peux prendre comme engagement cependant, c'est de faire rapport éventuellement sur les résultats des travaux de ce comité, le plus rapidement possible, puisqu'on est tout à fait d'accord pour reconnaître que c'est une des parties très importantes du rapport du Conseil du statut de la femme.

M. Goldbloom: Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: M. le député de D'Arcy McGee.

M. Goldbloom: Je voudrais intervenir brièvement. Vous savez que l'Opposition officielle en proposant ce débat a souhaité, voire même réclamé la présence et la participation du ministre des Finances. Il y a une raison assez fondamentale à cela. Vous connaissez le règlement encore mieux que nous, Mme la Présidente; quand il s'agit de proposer des mesures qui n'impliquent pas des dépenses, qui n'impliquent pas l'emploi des deniers publics, n'importe quel député peut présenter des projets de loi. Mais, quand il s'agit de proposer de dépenser des deniers publics, il faut qu'un ministre se fasse responsable de cette loi devant la Chambre.

Il ne s'agit pas ici d'écrire tout simplement de nouveaux textes de loi afin d'accorder une meilleure reconnaissance à la femme dans notre société; il s'agit de faire des investissements. C'est là où la participation du ministre des Finances aurait été extrêmement utile à cette discussion. Au moins, je présume qu'il prendra connaissance du journal des Débats, je présume que ses collègues lui en feront rapport, mais ce n'est quand même pas la même chose que si un ministre participe directement, écoute les revendications, lui qui doit déterminer les priorités d'investissement du gouvernement, lui qui doit proposer à ses collègues, au niveau du Conseil du trésor et au niveau du Conseil des ministres, des choix, parce qu'il y a toujours des choix à faire. On ne peut tout faire et il faut choisir où placer l'argent, où utiliser les deniers disponibles.

Dans l'histoire du Québec, les gouvernements successifs ont été soumis à des pressions considérables dans divers domaines et ont dû réagir, ont dû agir. Il y a eu des pressions dans le domaine agricole, il y a eu des demandes d'investissement dans le domaine agricole, dans le réseau routier, dans l'éducation, dans les affaires sociales, dans l'environnement et il y a eu des réactions de la part du gouvernement. Si nous avons demandé ce débat aujourd'hui, c'est en partie pour exercer, au nom de l'opinion publique, au nom des femmes du Québec, des pressions de cette nature sur le gouvernement pour que des investissements se fassent.

Nous avons reconnu de part et d'autre que le régime fiscal du Québec n'est pas encore pleinement équitable en ce qui concerne les femmes. Il y a plus que cela: dans les régimes de retraite, dans les régimes d'indemnisation, ce n'est pas encore une situation parfaitement équitable. Les services sociaux destinés aux femmes sont-ils pleinement, adéquatement développés ou faut-il des investissements additionnels? Je crois que oui. En somme, la liberté et l'autonomie de la femme ne sont pas encore aussi complètes, aussi étanches, aussi bien définies que celles de l'homme. Pour changer cela, pour établir une vraie justice sociale, il faudra changer des régimes, changer des organismes et il faudra utiliser les deniers publics à cette fin.

Prenons l'exemple fondamental dont nous avons parlé à plusieurs reprises depuis le début de cette discussion. Le domaine du travail, est-il effectivement organisé de façon à accueillir véritablement la femme, à la traiter équitablement, à permettre à la femme de ne pas être obligée de faire un choix de tout ou rien, c'est-à-dire la maternité ou la carrière? Il faudra — j'en parle en connaissance de cause en vertu de ma formation professionnelle — reconnaître le fait que si l'évolution de notre société nous mène, depuis un bon moment déjà, à une situation où, sur le plan temporel, la présence des parents auprès des enfants est moindre que par le passé — je parle des parents, des deux — il faudra que la qualité de ses contacts soit meilleure.

On constate, depuis toujours, que l'on peut être parent sans formation précise, sans préparation particulière. C'est un défaut de notre société qui doit être corrigé. Il y a peut-être deux fonctions importantes dans la société auxquelles on peut accéder sans jouir d'une formation précise et structurée: être parent et être député. Dans les deux cas, il me semble souhaitable que nous pensions un peu à la formation de ceux qui vont exercer ces responsabilités.

Je reviens au marché du travail.

La Présidente (Mme Cuerrier): Je vois que vous avez terminé votre paragraphe et que vous

partez sur quelque chose d'autre. Je croyais que votre collègue vous avait dit que certaines personnes, qui sont participantes, ont des contraintes et que nous devrions ajourner à 12 h 30. Bien sûr, quand il y a une intervention, il est tout à fait normal qu'il y ait une autre intervention. Nous avions dit que la conclusion de Mme la député de L'Acadie pourrait commencer à 12 h 10 et que celle de Mme la ministre pourrait commencer à 12 h 20, mais entre cela — et je croyais que vous le saviez, M. le député — il n'y a pas moyen, si vous prenez tout ce temps, que Mme la ministre puisse intervenir sur ce que vous dites vous-même, à moins que nous n'allions jusqu'à 13 heures, ce qui pourrait fort bien se faire, nous avons tout ce temps.

M. Goldbloom: Mme la Présidente, je ne voudrais pas créer de difficultés à mes collègues. Si vous me permettez de terminer mes remarques dans l'espace de deux minutes, disons, je céderai la parole à ceux ou celles qui auront à la prendre.

La Présidente (Mme Cuerrier): Nous dépasserons un peu 12 h 30, simplement.

M. Lavoie-Roux: On pourra dépasser de trois ou quatre minutes, peut-être.

Mme Payette: Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Cuerrier): Madame...

Mme Payette: ... je veux souligner que je n'ai pas d'objection, pour ma part, à rester jusqu'à 13 heures, si M. le député veut utiliser son droit de parole au maximum.

La Présidente (Mme Cuerrier): M. le député.

M. Goldbloom: Mme la Présidente, je n'ai besoin que de deux ou trois minutes au plus pour terminer mes commentaires. Je voulais revenir au milieu du travail. N'est-il pas toujours vrai que le pourcentage des femmes parmi les chômeurs est plus élevé que leur pourcentage dans la population? N'est-il pas toujours vrai que les emplois que l'on peut appeler féminins se situent plutôt aux bas niveaux hiérarchiques, aux bas niveaux des salaires et que ces emplois sont moins stables? N'est-il pas vrai que nous avons besoin de structurer des programmes d'aide pour que la femme puisse accéder plus facilement au marché du travail? Je pense à la définition de bassins d'emplois à temps partiel, de répertoires de ce genre d'emplois, de services d'intégration.

Mme la Présidente, une chose me préoccupe particulièrement. Nous avons parlé brièvement des congés de maternité et, en regardant l'ordonnance générale no 17, je constate qu'il y a, à l'article 9, la possibilité pour la femme d'être mutée à une autre tâche s'il y a lieu de croire qu'il y a un danger pour sa santé ou pour la santé de son foetus. J'aimerais avoir l'assurance que le ministre de l'environnement et le ministre du Travail se préoccupent particulièrement des recherches qui se poursuivent de plus en plus intensément sur cette question de l'exposition de la femme enceinte à des contaminants qui pourraient affecter sa santé et celle de son enfant.

J'aurais voulu parler de beaucoup d'autres choses; je me limite à cela. Je dis, en terminant, qu'il ne suffit plus de sensibiliser. Nous sommes sensibilisés. Il ne suffit plus d'étudier; il faut passer à l'action ou bien la justice sociale que nous visons tous ne sera pas atteinte.

La Présidente (Mme Cuerrier): Mme la ministre.

Mme Payette: Mme la Présidente, à la suite de ce que vient de dire le député de D'Arcy McGee, je crois qu'il faut que je vous signale que nous dépasserons midi trente à cause du fait qu'il a utilisé son droit de parole maintenant et que je pense que nous avons effectivement encore des choses à dire. Pour accommoder Mme le député, nous nous limiterons à quelques minutes au-delà de midi trente, mais je pense qu'il serait injuste maintenant de laisser Mme le député enchaîner sans que nous puissions répondre de ce côté-ci, surtout que j'ai l'impression que maintenant on parle pour nous empêcher de faire ce bilan sectoriel que nous avons commencé à faire tout à l'heure.

Mme Lavoie-Roux: Mme la Présidente, là-dessus, vous nous prêtez des intentions qui n'existent pas.

M. Goldbloom: Mme la Présidente, je proteste vigoureusement. Ce n'était point mon intention. J'ai retranché bien des choses que j'avais à dire justement pour permettre à Mme le ministre de parler à sa guise.

La Présidente (Mme Cuerrier): Alors, Mme la ministre, vous pouvez faire vos remarques.

Mme Payette: Mme la Présidente, je vais inviter mon collègue à faire une partie de ce bilan et je continuerai dans les dix minutes qui me seront allouées à la fin.

M. Laurin: II est maintenant établi que le gouvernement accepte le rapport du Conseil du statut de la femme et que le comité ministériel de la condition féminine a reçu pour mandat de réaliser les recommandations du rapport. Dans le secteur qui m'intéresse particulièrement, beaucoup d'actions sont en cours. On ne se contente pas de sensibiliser, ce qui continue d'être nécessaire, mais des actions très concrètes sont en cours. J'ai parlé tout à l'heure du comité "Femme culture" qui est constitué de sept membres responsables des dossiers sectoriels dans les ministères membres du CMPDC. Ce comité a un travail très important; il évalue les rapports sectoriels venant des ministères, il fait des recommandations sur les dossiers intersectoriels, par

exemple, la politique du livre, la politique de l'éducation professionnelle dans les arts; il propose des plans d'action conséquents à tous les ministères et, en ce sens, il répond à une priorité indiquée par le Conseil du statut de la femme, à savoir que le gouvernement doit établir des mécanismes de concertation entre les ministères pour favoriser une approche globale de la condition féminine. En ce sens, c'est son rôle d'engager les ministères les uns par rapport aux autres.

Je voudrais aussi ajouter que tous les ministères relevant du secteur du développement culturel ont maintenant produit leurs plans d'action dans les délais prévus, qu'ils ont identifié les ressources humaines responsables de la mise en application et que, déjà, des plans d'action sont en réalisation dans chacun des ministères. Par exemple, sur le plan de la publicité, mon secteur a joint ses efforts au comité sur le sexisme en publicité qui fait de l'excellent travail actuellement, pour les raisons qui ont déjà été données en public. Dans mon secteur, on a établi un comité sur le sexisme dans la publicité gouvernementale. Le directeur des communications du ministère des Communications est la cheville ouvrière de ce comité et doit déposer son rapport en septembre 1979; le travail est très avancé. Il est entendu à l'avance que les recommandations de ce comité, une fois approuvées par le CMPDC, notre comité ministériel, seront intégrées au code de déontologie de la publicité gouvernementale. En même temps, évidemment, ce groupe de travail continue d'offrir sa collaboration au groupe plus général qui travaille sur le sexisme en publicité. (12 h 15)

On sait l'importance de la télévision dans la transmission de l'image des femmes. C'est sur ce point que nous espérons que l'action va apporter des changements. À Radio-Québec, à la demande du ministre des Communications, on a évalué l'ensemble des recommandations qui concernent cette institution, et déjà, une action partielle est amorcée. Par exemple, on incite particulièrement les femmes à participer au stage de perfectionnement technique qui s'effectue dans cet organisme.

Dans l'éducation, évidemment, il y a beaucoup de recommandations qui s'adressent non seulement au ministère de l'Éducation, mais au réseau scolaire autonome par le biais du ministère de l'Éducation. Il est donc évident qu'on ne peut pas tout faire en un jour — d'ailleurs, Paris ne s'est pas bâtie en un jour — puisqu'il faut intégrer l'action du réseau à celle du ministère. C'est donc une stratégie d'ensemble que le ministère de l'Éducation devra développer et à laquelle il travaille intensément actuellement. J'ai déjà donné quelques réponses précises à des questions qui m'avaient été posées, mais il est évident que ce n'est que le bout du panier et que des 55 recommandations qui s'adressent au ministère de l'Éducation, il y aura sûrement des réalisations qu'on pourra annoncer, le cas échéant, au fur et à mesure que des réalisations pourront être faites.

J'ai parlé des cégeps tout à l'heure. Je voudrais aussi parler de ce qui se fait pour la désexisation du manuel scolaire. Beaucoup de travail a déjà été fait dans ce sens. Une grille d'analyse de la sexisation des manuels a déjà été mise sur pied. On l'applique aux manuels déjà utilisés afin de les corriger dans les plus brefs délais. En plus, cette grille et cette analyse vont servir de devis à la production des nouveaux manuels scolaires qui, comme on le sait, en vertu de la nouvelle politique du ministère de l'Éducation, vont se multiplier au cours des prochaines années.

Il y a aussi un gros effort qui est fait sur la désexisation de l'inventaire des intérêts professionnels en vue du processus d'orientation, justement pour que les femmes ne se cantonnent plus uniquement dans les programmes, les vocations ou les professions dans lesquelles elles ont été obligées jusqu'ici de se cantonner. C'est là une action à long terme. Là aussi, il faut changer les mentalités, les attitudes autant que les instruments concrets qui incarnent ces attitudes. Le travail est quand même commencé, et selon la recommandation du Conseil du statut de la femme, on vise à retenir des critères d'évaluation qui respectent l'élimination à souhaiter de ces stéréotypes sexistes et qui, surtout, visent à promouvoir l'égalité réelle et effective des femmes.

De même, le ministère de l'Éducation actuellement vise systématiquement à rayer les stéréotypes sexistes dans les publications du ministère qui traitent de l'éducation. Il vise à les rayer également dans tout ce qui sort du ministère en termes d'informations professionnelles et scolaires. Je pense que les résultats s'en feront sentir assez rapidement.

En ce qui concerne le ministère des Affaires culturelles, il y a là un comité qui a été formé, qu'on appelle le CIPEC, le comité d'implantation du programme d'égalité des chances. En même temps que la création de ce comité, un programme complet, intégral a été mis sur pied, que je considère personnellement comme un excellent outil de travail. Ce que nous visons, au ministère des Affaires culturelles, c'est d'axer nos efforts vers la femme créatrice, car les statistiques nous révèlent que les femmes sont aussi créatrices que les hommes et même davantage, mais que l'aide des ministères ne leur était pas consentie de la même façon. Il faut donc corriger ce phénomène. Il faut donc viser à accroître les montants d'aide à la création pour les femmes. Il faut favoriser la production des créations chez les femmes. Il faut mieux reconnaître également que les efforts des femmes dans le processus de la création, et CIPEC a déjà mis sur pied un programme pour réaliser ces objectifs. Ce n'est pas seulement au niveau de la création d'un comité, mais également, nous avons rencontré tous les directeurs généraux, toutes les directions du ministère des Affaires culturelles pour que chacune adopte son propre programme en conformité avec les politiques du ministère et développe une politique d'égalité des chances dans son secteur.

Depuis aussi le début de cette action, tous les jurys — ils sont nombreux au ministère des Affaires culturelles — sont composés d'hommes et

de femmes et on se préoccupe également d'assurer une égalité de chances aux femmes pour ce qui concerne les nominations. Il est vrai que, pour le Haut-Commissariat à la jeunesse, aux loisirs et aux sports, le travail dépend un peu de la parution du livre blanc sur la politique des loisirs. Je le regrette personnellement, mais ceci n'empêche pas quand même le Haut-Commissariat à la jeunesse, aux loisirs et aux sports d'avoir fait une analyse détaillée des recommandations formulées dans le rapport "Egalité et indépendance", d'avoir défini ses objectifs, d'avoir formulé les actions qu'il doit entreprendre. Je pense que le léger délai ou retard dû à la période de réflexion autour du livre blanc sur les loisirs n'empêchera pas, à très brève échéance, le Haut-Commissariat à la jeunesse, aux loisirs et aux sports, à son tour, de se lancer dans la même direction.

Ceci est un trop bref résumé des actions en cours dans les ministères qui relèvent du développement culturel. Je veux simplement terminer en disant qu'il y a des plans d'action sectorielle qui sont déjà en application dans chacun des ministères qui relèvent du développement culturel. En ce qui concerne le défi majeur qui se pose au ministère de l'Éducation, on est en train de voir à mettre en place les mécanismes, les hommes, les personnes, les projets, les plans d'action qui vont assurer des progrès rapides dans ce secteur.

La Présidente (Mme Cuerrier): Puisque nous n'avons plus d'opinants, Mme le député de L'Acadie, selon l'entente dont il avait été question, vous auriez dix minutes maintenant pour conclure et, ensuite, Mme le ministre disposera aussi de dix minutes.

Mme Lavoie-Roux: Mme la Présidente, je voudrais prendre ces quelques minutes, d'une part, pour faire certaines suggestions de bonne foi au ministre touchant le rapport du Conseil du statut de la femme. Il y a toujours danger, quand on prépare une politique ou un rapport sur la condition féminine, de laisser en marge un grand nombre de femmes ou, du moins, de créer la perception qu'un grand nombre de femmes sont laissées en marge. C'est dans ce sens-là que j'aimerais demander au ministre qu'une plus grande publicité soit faite pas nécessairement dans le sens de la diffusion de l'ensemble du rapport, mais davantage de l'interprétation des recommandations qui sont à l'intérieur de ce rapport. C'est ainsi, par exemple, que les femmes au foyer ont la perception qu'elles ont été laissées de côté alors que — je l'ai abordé dans la première partie — une grande partie qui pourrait assurer l'autonomie se retrouve à l'intérieur des recommandations touchant la fiscalité. Alors, je pense qu'il y aurait là une bonne occasion de faire réaliser aux femmes qu'une grande majorité d'entre elles n'ont pas été laissées en marge.

Également, le ministre d'État au développement culturel nous a fait une énumération des mesures qui sont prises, mais encore une fois ce sont des mesures qui touchent des recomman- dations importantes avec lesquelles je suis d'accord. Mais il ne faut pas oublier que le gouvernement doit toujours concentrer ses efforts sur les femmes les plus démunies. À ce moment-ci, je voudrais rappeler au gouvernement que, quand il légifère, il ne doit jamais perdre de vue que la grande majorité des femmes se trouvent souvent parmi ces femmes qui sont facilement oubliées. Je veux parler des femmes chefs de famille monoparentale. Je ne redirai pas les inactions du gouvernement là-dessus.

Je voudrais parler aussi d'une catégorie de femmes qu'on oublie trop souvent, celles qui sont âgées entre 55 et 65 ans. Il y a aussi les femmes âgées dont le mémoire fait état. Ces femmes célibataires âgées entre 55 et 65 ans souvent n'ont pas été sur le marché du travail ou encore ont des difficultés à s'employer sur le marché du travail. Elles vivent dans des conditions extrêmement difficiles. J'ai souligné au moment de l'étude de la loi 1 sur le supplément au revenu de travail que cette catégorie de femmes seules — je pense que cela pourrait s'appliquer également à des hommes — se retrouvent dans des situations de détresse assez grande et de misère que l'on ignore. Je pense qu'elles se sont senties en dehors de ce rapport parce qu'on fait constamment allusion aux femmes divorcées, aux familles monoparentales, aux femmes mariées, etc. Mais des femmes célibataires, on en parle peu. C'est quand même, dans notre société, une proportion de femmes assez importante.

Il y a une autre chose aussi qu'il faudrait interpréter, à mon point de vue. Le rapport, qui a été étudié dans un contexte des conditions de vie pour les femmes, a créé l'impression qu'on voulait nier aux hommes la contribution qu'ils avaient faite à la société et qui n'a pas toujours été, comme souvent c'est perçu, un obstacle à l'épanouissement des femmes. Je pense qu'il faut quand même reconnaître que les hommes, soit à titre de conjoint, soit à titre de parent, de père, etc., demeurent une partie intégrante de la vie des femmes et qu'ils ont été dans notre société, pour plusieurs femmes, une source aussi d'épanouissement, de développement et de réalisation. Je peux concevoir que cela ne soit peut-être pas explicité dans ce rapport.

M. Laurin: On en parle.

Mme Lavoie-Roux: Oui, mais il faudrait quand même réaliser que si on veut obtenir une collaboration de tout le monde, il nous faut la collaboration des femmes et il nous faut la collaboration des hommes. C'est dans ce sens que le rapport aurait profit à être interprété peut-être sous un autre angle ou dans une perspective que plusieurs ne saisissent pas ou peut-être ne veulent pas saisir, peu importe.

Il y a aussi dans le rapport, je pense, certaines recommandations qui ont été faites sur l'allocation de disponibilité pour les parents avec des enfants de zéro à douze ans. Cela me semble insuffisant si jamais cette recommandation était retenue — par-

ce qu'on n'a pas d'indication ce matin que ceci sera retenu par le ministre des Finances — et on devrait peut-être étendre cette période de zéro à seize ans. Je pense que les femmes devraient encore pouvoir garder ou faire ce choix qu'elles se sentent peut-être la responsabilité de rester avec leurs enfants adolescents. À ce moment-là, compte tenu des difficultés, parfois, du travail partiel, même si elles ont plus de temps disponible, je trouve qu'on met là une mesure qui m'apparaît un peu trop limitative et qui pourrait, dans l'évolution des choses, limiter le choix des femmes.

Je voudrais simplement en résumé dire que même si ce débat a permis un échange, a sans doute permis au gouvernement de faire le point et permis — c'est de bonne guerre — de dire que le gouvernement d'avant n'avait rien fait — il conviendra au moins que le gouvernement précédent lui avait laissé un outil précieux qui lui a permis de réaliser le rapport sur l'égalité et l'indépendance — il ne faut jamais oublier qu'un gouvernement se situe dans le temps. On pourrait repartir du départ. Qu'est-ce qui a été une cause principale de l'évolution de la condition féminine? Cela a été la réforme de l'éducation; cela a été l'avènement des cégeps et, enfin, on se situe dans un processus. On dit que le gouvernement d'avant n'avait pas fait assez. Évidemment, si un gouvernement se fait élire, c'est qu'on pense qu'il va faire un peu mieux, et s'il ne faisait pas un peu mieux ou s'il ne faisait pas davantage, s'il ne suivait pas l'évolution des choses et l'évolution des mentalités, il faudrait se questionner sérieusement. Je pense que, quand même, ce qu'il faut regretter, c'est que le ministre nous dit: On a accepté le plan d'ensemble; cela semble être l'acceptation officielle qu'on a obtenue ce matin. Jusqu'à maintenant, cette acceptation avait été faite par bribes ici et là...

Mme Payette: C'était déjà fait. Cela avait été fait de façon très officielle.

Mme Lavoie-Roux: C'est difficile de comprendre quand même toutes les remarques de la présidente du Conseil du statut de la femme qui a dit plusieurs fois — le député de Marguerite-Bourgeoys l'a citée — Nous n'avons pas encore d'adoption ou de prise de position officielle.

Mme Payette: C'était avant le discours inaugural.

Mme Lavoie-Roux: L'Opposition officielle, pour sa part, déplore — même si le ministre nous a fait une longue description tant des intentions du gouvernement que de l'armature qu'il était à mettre en place — qu'il n'y ait pas de bilan plus concret — puisque c'était cela que le ministre responsable du Conseil du statut de la femme voulait faire ce matin — des actes qui ont été posés par le gouvernement en vue de rendre ce rapport opérationnel. Nous continuerons, en tant qu'Opposition officielle, à promouvoir l'accession des femmes à une autonomie toujours plus grande et plus complète. (12 h 30)

Je puis assurer peut-être les femmes qui nous écoutent et d'autres que nous talonnerons le gouvernement, que nous ne nous contenterons pas de comités. On a vu tout à l'heure une démonstration de ce qu'un comité peut faire. On a un rapport en main depuis 1976 et, là, on nous parle de 1980 où peut-être on l'actualisera. Si le même sort devait arriver aux comités et aux structures qu'on nous a décrits durant deux heures, je pense qu'on se retrouvera à la fin du mandat du présent gouvernement avec bien peu de progrès quant à l'amélioration de la condition de la femme au Québec. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Cuerrier): Mme le ministre.

Mme Payette: Mme la Présidente, Mme la député de L'Acadie a beaucoup de difficultés à être un homme politique. Elle redevient honnête et reconnaît que le gouvernement a fait beaucoup de choses depuis deux ans et demi. Je voudrais lui souligner qu'elle a tenté de m'entraîner sur...

Mme Lavoie-Roux: Est-ce que vous faites une différence entre une femme ou un homme politique?

Mme Payette: II y a une différence entre un homme et une femme politique, Mme la député de L'Acadie, surtout quand on parle de la condition féminine. Je voulais cependant lui faire remarquer qu'elle a tenté de m'entraîner sur un terrain qui nous conduirait à la promotion de l'homme, madame, et je m'y refuse. Je pense que ce n'est pas parce qu'on améliore la condition féminine qu'on enlève quoi que ce soit à ceux qui partagent nos vies. Je voudrais, cependant, lui demander pourquoi elle n'est pas intervenue tout à l'heure quand le député de Marguerite-Bourgeoys de nouveau, avec mépris cette fois-ci, a souligné qu'on m'avait donné deux gardiens dans ce comité interministériel. Je suis très heureuse, Mme la Présidente, de travailler avec deux collègues qui prennent à coeur autant que moi et autant que tous les hommes québécois devraient le faire le sujet que nous avons discuté ce matin.

Mme la député de L'Acadie a dit qu'elle trouvait bien peu ce qu'envisageait même le rapport du Conseil du statut de la femme comme indemnité de remplacement pour des femmes qui s'occuperaient d'enfants de 0 à 12 ans. Elle souhaiterait que cela aille plus loin. Elle sait que les choses se font en progressant à l'intérieur d'un gouvernement et je me dis que, si nous arrivons à obtenir de mettre le pied dans la porte, ce sera comme pour les soins dentaires; on finira par se rendre à 18 ans, j'en ai l'impression.

Mme Lavoie-Roux: Une question de règlement.

Mme Payette: Mme la Présidente, je refuse le droit de parole à Mme le député de L'Acadie parce que j'ai en main un certain nombre de choses dont je veux parler maintenant. Le programme d'égali-

té, madame, dans l'emploi. La mise en place d'un programme d'égalité des chances pour les femmes au ministère de la Fonction publique au cours de 1978, c'est déjà fait. La préparation d'une politique d'implantation de programmes d'égalité des chances pour les femmes dans la fonction publique; l'objectif de cette politique est d'assurer un meilleur équilibre dans la représentation des hommes et des femmes à tous les niveaux et dans tous les secteurs d'emploi de la fonction publique. Une consultation sur cette politique est actuellement en cours auprès des ministères et organismes. Les modifications au Code civil concernant la famille...

Mme Lavoie-Roux: Question de règlement.

La Présidente (Mme Cuerrier): Sur une question de règlement.

Mme Lavoie-Roux: Je voudrais simplement faire remarquer que le programme d'égalité des chances dans la fonction publique de Québec remonte à juin 1974.

La Présidente (Mme Cuerrier): Mme le député de L'Acadie, s'il vous plaît.

Mme Lavoie-Roux: La vérité a ses droits, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Cuerrier): Vous auriez pu demander...

Mme Payette: II faudrait savoir, Mme la Présidente, s'il s'agit du même...

La Présidente (Mme Cuerrier): II ne s'agit pas d'une question de règlement actuellement. Nous sommes à faire la conclusion. Mme le ministre.

Mme Payette: Les modifications au Code civil concernant la famille feront l'objet d'un projet de loi dont l'adoption est normalement prévue avant la fin de 1979. On sait que les commissions parlementaires ont eu lieu à la fin du mois de mars, madame; il n'y a donc pas de retard. Un autre projet de loi avant la fin de 1979 concernant la perception des pensions alimentaires. Même s'il n'est pas possible de créer immédiatement un tribunal de la famille, le ministère fera en sorte qu'un service de perception des pensions alimentaires soit mis sur pied, normalement, avant la fin de cette année. La violence envers les femmes, la participation du ministère à des colloques, la mise sur pied de campagnes d'information, le développement de cours adaptés aux femmes, la création d'un comité ad hoc pour élaborer un protocole d'entente pour le traitement des victimes d'offenses à caractère sexuel; publication et diffusion auprès des organismes de la position du ministère. Le ministre a soutenu, madame, la position du Conseil du statut de la femme à une conférence fédérale-provinciale et a recommandé la modification du Code criminel d'après ces recommandations du Conseil du statut de la femme.

Participation du ministère de la Justice à des colloques et campagnes d'information sur les enfants victimes d'abus sexuels et adoption, on le sait, de la Loi sur la protection de la jeunesse. Les recommandations concernant les femmes indiennes ont été transmises au gouvernement fédéral. En ce qui concerne le divorce et le tribunal de la famille, ces dispositions ont été incorporées au rapport de l'Office de révision du Code civil, mais rien, madame, n'est possible sans un amendement à l'Acte de l'Amérique du Nord britannique. Le ministre de la Justice a suscité des discussions qui ont entraîné une entente sur la récupération par le Québec de la juridiction permettant de légiférer dans ce domaine. Cette entente a été signée en février 1979.

Le ministère envisage actuellement un amendement à cet Acte de l'Amérique du Nord britannique. En attendant que cet amendement soit possible, le ministère a mis sur pied, dans certains cas, sur une base d'expérience, et dans d'autres, sur une base permanente, des services auxiliaires dans le domaine de sa juridiction, par exemple, des services d'expertise psychosociale, des services de réconciliation.

Encore dans le domaine de la violence envers les femmes, Mme le député de L'Acadie a fait allusion — je fais une parenthèse avant d'enchaîner sur les autres documents — aux femmes chefs de famille monoparentale. C'est vrai qu'elles sont nombreuses, il y en a de plus en plus au Québec. Je ne pense pas qu'on puisse nier que le projet de loi qui sera en troisième lecture dans cette Chambre, la semaine prochaine, et qui prévoit un supplément au revenu touche directement, et plus directement encore que quiconque, ces femmes qui sont véritablement au bas de l'échelle.

Mme Lavoie-Roux: Pourquoi coupez-vous les prestations d'aide sociale à ces femmes?

Mme Payette: Dans le domaine du travail, Mme la Présidente, la Loi des accidents du travail a été modifiée de façon à accorder les mêmes bénéfices aux conjoints des travailleuses et des travailleurs. Le projet de loi no 126, quand il sera adopté, couvrira le conjoint de l'employeur et ses enfants, sauf pour la durée du travail et les congés annuels. Il y a aussi l'entrée en fonction d'une personne responsable, au ministère du Travail, particulièrement chargée du domaine de la condition féminine. Dans le domaine des affaires municipales, la Loi instituant la Régie du logement et modifiant le Code civil et d'autres dispositions législatives, présenté à la fin de 1978, accordera au gouvernement le pouvoir d'établir par règlements les exigences minimales relatives à l'habitation et à l'entretien du logement et de définir un logement impropre à l'habitation. Ces règlements pourront constituer le code d'habitabilité du Québec.

Dans le domaine de l'immigration, la réglementation faisant suite à la nouvelle loi 77, adoptée en novembre 1978, permet de tenir compte des possibilités d'emploi des deux conjoints, lors d'une demande de résidence permanente, permet

également aux conjoints n'ayant pas de possibilité d'emploi de faire une demande d'immigration à titre de conjoints au foyer, sans distinction de sexe, des possibilités pour les immigrants allophones, quel que soit leur statut de travail, de suivre des cours de langue avec allocations payées par le gouvernement du Québec. Actuellement, 65% de la clientèle des COFI est composée de femmes. On pourrait continuer comme cela pendant un bon moment. Mais je m'arrêterai pour prendre les dernières minutes pour dire ce qui suit.

Je pense pouvoir affirmer que dans aucun autre pays au monde, actuellement, un gouvernement fait autant, non seulement pour la réalisation de choses concrètes en ce qui concerne la condition féminine, mais véritablement fait de cette condition une de ses préoccupations principales et tente d'assumer un leadership dans le domaine du changement des mentalités. Mme la Présidente, même quand nous pourrons nous rasseoir ici, les unes en face des autres, pour nous dire que toutes les recommandations du Conseil du statut de la femme ont trouvé une réponse, que toutes ces recommandations ont été réalisées, nous n'aurons fait que commencer à améliorer la condition de la femme du Québec. Nous savons parfaitement, sans pouvoir l'évaluer, que même toutes ces interventions gouvernementales ne pourront que donner un élan, ne pourront que remettre en place des situations discriminatoires qui ont fait en sorte que nos mentalités, et même dans cette Chambre, nos mentalités sont discriminatoires. Nous en sommes toutes victimes, les femmes qui siègent dans cette Assemblée nationale, des deux côtés de la Chambre.

Je pense que ce changement de mentalité, nous souhaitons qu'il commence ici et qu'il descende jusqu'à la base. Nous pensons que le gouvernement doit assumer un leadership dans ce sens. Nous avons fait nôtre le document du Conseil du statut de la femme et nous allons plus loin, parce que nous pensons que notre rôle est encore plus grand que celui qui nous est indiqué dans ce document. Nous pensons que nous devons, par nos actions, mais également par nos attitudes, faire en sorte que la discrimination puisse finalement disparaître complètement de nos moeurs et de notre façon de vivre.

Je voudrais souligner également que c'est un souhait de la part du gouvernement que beaucoup plus de femmes occupent des postes importants à l'intérieur de l'appareil. Nous souhaitons que le chiffre de 24% de femmes qui se montrent intéressées à ces postes, augmente considérablement.

Il y a une discrimination que les femmes exercent souvent vis-à-vis d'elles-mêmes en se privant parfois d'aller jusqu'au bout des possibilités qu'elles ont, souvent à cause de la situation qui leur est faite dans la société, souvent aussi parce que les difficultés sont difficiles à surmonter et qu'il est tentant, même pour nous, à certains moments, de mettre de côté ce que nous avons véritablement envie de faire pour nous reposer de temps en temps.

J'invite toutes les femmes du Québec à non pas nous laisser seules nous débattre avec cette question, mais à faire de la condition féminine un sujet de préoccupation quotidienne. Que toutes les femmes du Québec, solidairement, sans se rattacher à une association ou à une autre, mais solidairement, en appartenant à des associations, parce qu'il faut s'unir, se regrouper, mais solidairement dans le sens de véritablement ne jamais se lâcher, fassent de la condition féminine non pas un cheval de bataille, mais notre espoir d'avenir.

La Présidente (Mme Cuerrier): C'était la question avec débat de Mme le député de L'Acadie au ministre responsable du Conseil du statut de la femme.

La commission des consommateurs, coopératives et institutions financières ajourne ses travaux sine die.

Fin de la séance à 12 h 42

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