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Version finale

31e législature, 4e session
(6 mars 1979 au 18 juin 1980)

Le mardi 20 novembre 1979 - Vol. 21 N° 214

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude du projet de loi no 54 - Loi sur le recouvrement de certaines créances


Journal des débats

 

Étude du projet de loi no 54

(dix heures dix-huit minutes)

Le Président (M. Lacoste): À l'ordre, messieurs!

La commission permanente des consommateurs, coopératives et institutions financières est réunie pour étudier article par article le projet de loi no 54, Loi sur le recouvrement de certaines créances.

Les membres de la commission sont: M. Lavigne (Beauharnois) qui remplace M. Beausé-jour (Iberville); M. Gagnon (Champlain) qui remplace M. Bisaillon (Sainte-Marie); M. Goulet (Bellechasse), M. Marquis (Matapédia) qui remplace M. Laberge (Jeanne-Mance); M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys), M. Michaud (Laprairie) qui remplace M. Lefebvre (Viau); M. Baril (Arthabaska) qui remplace M. Paquette (Rosemont); M. Joron (Mille-Îles) qui remplace Mme Payette (Dorion); M. Samson (Rouyn-Noranda) et M. Saint-Germain (Jacques-Cartier).

Les intervenants sont: M. Fontaine (Nicolet-Yamaska), M. Bisaillon (Sainte-Marie), M. Giasson (Montmagny-L'Islet), M. Gosselin (Sherbrooke), M. Gravel (Limoilou), Mme LeBlanc-Bantey (Îles-de-la-Madeleine), M. Perron (Duplessis), M. Raynauld (Outremont).

Agents de recouvrement (Suite)

Au moment de notre ajournement, nous étions rendus à l'article no 9. M. le ministre, à l'article 9.

M. Joron: M. le Président, tout d'abord, il y a un nouvel amendement que nous aimerions soumettre à l'article 12. Peut-être pourrait-on le faire distribuer tout de suite. C'est un amendement assez mineur. On en parlera tout à l'heure. Vous pouvez le faire distribuer.

Le Président (M. Lacoste): M. le député de Jacques-Cartier.

M. Saint-Germain: M. le Président, avec votre permission et la permission de la commission, j'aurais quelques questions à poser sur les articles déjà adoptés. Je vous dis tout de suite que c'est simplement une question d'éclaircissement. Il n'est pas question de revenir et de faire un débat là-dessus, je vous le promets bien. Si j'avais cette permission, j'aurais deux ou trois questions à poser, comme je le disais, sur les articles que nous avons déjà adoptés.

Le Président (M. Lacoste): L'article...

M. Saint-Germain: Entre autres, à l'article 6, alinéa 4, on dit: "Le présent chapitre ne s'applique pas au recouvrement, auprès d'un commerçant, d'une créance qui a pris naissance dans l'exploitation de son commerce.

J'aimerais connaître la portée exacte de cet article. Est-ce que cela veut dire que, si un commerçant veut recouvrer une créance, et qu'il a recours à un agent, il ne se trouve pas à être soumis à la loi?

Le Président (M. Lacoste): Auparavant, est-ce qu'il y a un consentement pour rouvrir la discussion à l'article 6? Consentement.

M. Michaud: II n'y a pas de problème.

M. Joron: Cependant, on ne passera pas la matinée là-dessus, j'espère.

M. Saint-Germain: Non, je vous l'ai promis, parole d'honneur.

Le Président (M. Lacoste): II y a un consentement. Article 6.

M. Joron: Avec plaisir.

C'est sûr que le commerçant dont vous avez parlé dans votre exemple va être soumis à la loi en tant que créancier. Maintenant, le chapitre III de la loi ne s'appliquera pas au recouvrement de cette créance si elle est évidemment exigée d'un autre commerçant. Autrement dit, le chapitre III ne visera pas le recouvrement d'une créance par un agent de recouvrement si ce recouvrement se fait auprès d'un commerçant et que cette créance a pris naissance dans l'exploitation de son commerce.

M. Saint-Germain: Cela veut dire que cet agent de recouvrement ne sera soumis, si vous voulez, qu'aux quatre premiers articles comme tout créancier.

M. Joron: Oui, l'agent...

M. Saint-Germain: Et le commerçant.

M. Joron: ... et le commerçant comme créancier. Attention! Il y a une chose. Par interprétation, il se pourrait qu'un pareil agent de recouvrement soit obligé quand même de détenir un permis, mais le recouvrement comme tel ne sera pas assujetti aux autres dispositions de ce chapitre.

M. Saint-Germain: Si un agent de recouvrement avait, à cause de la loi, certaines difficultés en ce qui a trait aux créances ordinaires, il pourrait se spécialiser dans ce genre de créance et il ne serait pas soumis à la loi. Est-ce que j'interprète l'article comme il se doit?

M. Joron: C'est cela. Maintenant, encore une fois, comme je le disais, il n'est pas absolument certain qu'il ne pourra pas détenir de permis. La

loi lui impose un permis par l'article 5, mais cela va s'arrêter là, finalement.

M. Saint-Germain: Entendu. Une dernière question: À l'article 3, deuxième alinéa, on dit "Communiquer avec le débiteur si celui-ci l'a avisé de communiquer avec son conseiller juridique". D'après les représentants de certains agents de recouvrement, il y aurait là un inconvénient sérieux, parce qu'il y a des débiteurs qui vont dire, du moins oralement, qu'ils ont un conseiller juridique, bien qu'en fait, ils se servent simplement de cet argument pour éviter les contacts directs avec l'agent de recouvrement. Est-ce que c'est l'avocat ou le débiteur qui doit aviser qu'il a un conseiller juridique?

M. Joron: C'est le débiteur qui doit donner cet avis, mais c'est un avis écrit. Il ne faut pas oublier que ce paragraphe a été amendé.

M. Saint-Germain: C'est un des amendements que nous avons eus.

M. Joron: C'est ça. C'est un avis écrit, mais qui va émaner du débiteur.

M. Saint-Germain: Je vous remercie. Permis (suite)

Le Président (M. Lacoste): Maintenant, nous étudions l'article 9. Est-ce que l'article 9 est adopté?

M. Saint-Germain: Un instant, si vous voulez bien. Je vais essayer de me retrouver. Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Lacoste): L'article 9 est adopté. Article 10.

M. Joron: M. le Président, juste avant, j'ai omis tout à l'heure de présenter aux membres de la commission M. Monty, qui est le directeur du contentieux de l'Office de la protection du consommateur.

M. Saint-Germain: Merci beaucoup.

Le Président (M. Lacoste): Article 10. Est-ce que l'article 10 est adopté?

M. Saint-Germain: Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Lacoste): L'article 10 est adopté. Article 11.

M. Saint-Germain: Ne trouvez-vous pas que la rédaction de l'article même, lorsqu'on dit que le président peut refuser... Il me semble que c'est négatif et que ça peut prêter à bien des interprétations de la part du président? Si on avait dit, comme dans l'ancienne loi: Le président peut refuser... Dans l'ancienne loi on dit: Le solliciteur doit éta- blir à la satisfaction du président... Il me semble que c'est plus clair et que ça laisse moins de latitude au président, si vous voulez. C'est plus positif.

M. Joron: C'est plus positif, oui, c'est peut-être plus positif. Je ne suis pas sûr que ce soit plus clair, par exemple. On aurait pu dire: Le président émet un permis à moins que... C'est une façon de dire à l'envers la même chose, mais là, je ne sais pas, quant à moi... C'est peut-être en concordance aussi avec le langage employé dans d'autres lois correspondantes.

C'est sûr que cette disposition, telle que rédigée, se rapproche de celle prévue à l'article 325 de la loi 72. Pour ce qui est de la rédaction de l'article 10, paragraphe e), du projet de loi 26, il ne faut pas oublier que, lorsque l'article dit: "Etablir que sa situation financière est conforme aux normes prescrites...", ça laisse entendre que celui qui demande un permis doit faire la démonstration que sa situation financière est bonne, alors que l'article 11, tel que rédigé, laisse plutôt entendre que, si le président a des raisons de croire que celui qui demande un permis a une situation financière précaire, à ce moment-là seulement, il pourra compléter son enquête et refuser éventuellement l'émission du permis.

L'article 10e du projet de loi 26 laisse entendre que c'est automatique, que celui qui demande un permis doit faire la démonstration que sa situation financière est saine, alors que l'article 11 du projet de loi 54 n'oblige pas... C'est une sorte de présomption que ceux qui font une demande de permis ont une situation financière saine, mais, si le président est informé que ce n'est pas le cas, à ce moment-là, il peut refuser l'émission du permis.

Le texte de l'ancienne loi était: "Une personne qui sollicite un permis "doit" — c'est une obligation — établit que sa situation financière est conforme aux normes prescrites. " II faut qu'elle vienne et qu'elle fasse la démonstration de sa situation financière, alors que, dans la nouvelle rédaction, elle n'est pas obligée de faire ça. Sauf que, si le président, par ailleurs, est informé que la situation financière de la personne n'est pas bonne, c'est le président qui a en quelque sorte le fardeau de la preuve. Ce n'est pas le gars qui est obligé de faire sa preuve lui-même comme c'était le cas dans l'ancienne loi. Cela me semble moins pire, moins onéreux comme démarche pour celui qui sollicite un permis.

M. Saint-Germain: C'est que je n'ai aucun doute...

Le Président (M. Lacoste): M. le député de Jacques-Cartier.

M. Saint-Germain: ... que c'est à peu près le même genre de rédaction que celle de la Loi sur la protection du consommateur. On a fait exactement les mêmes critiques sur la Loi sur la protection du consommateur. Je ne suis pas légiste ni juriste, mais il me semble que ce sont des termes...

D'ailleurs, cela m'a été confirmé par certains avocats. C'est vrai que, lorsqu'un avocat dit oui, un autre peut dire non...

M. Joron: C'est pour ça que j'en ai amené deux ce matin.

M. Saint-Germain: Est-ce qu'ils s'accordent au moins tous les deux sur la signification de "peut"? Ceux qui peuvent fournir une caution, est-ce que ce n'est pas suffisant? Si une compagnie d'assurances, par exemple, prend sur sa responsabilité financière de cautionner un agent de recouvrement, est-ce...

M. Joron: Le fait qu'un agent de recouvrement puisse obtenir un cautionnement, ce n'est pas nécessairement parce que sa situation financière est bonne. (10 h 30)

D'accord, la compagnie qui émet le cautionnement peut tenir compte de sa situation financière afin de voir si c'est un bon risque, mais il n'y a pas nécessairement un lien entre le fait de déposer un cautionnement et le fait d'avoir une situation financière exempte de tout soupçon, si l'on veut.

Quant au mot "peut", il ne faut pas oublier que le président ne peut pas refuser l'émission du permis pour n'importe quel motif. Il doit exercer cette discrétion d'une façon judiciaire, et si celui qui demande le permis n'est pas satisfait de cette décision, il peut aller en appel. Même là, avant d'aller en appel, le président, s'il veut refuser l'émission d'un permis, doit convoquer celui qui a demandé le permis et alors le demandeur peut faire la preuve que sa situation financière est bonne. Voyez-vous, le président exerce sa discrétion; il convoque le demandeur, avant de refuser le permis et il rend sa décision. Si le demandeur n'est pas satisfait, il peut aller en appel à la Cour provinciale, etc.

M. Saint-Germain: C'est très bien que la loi permette d'aller en appel à la suite d'une telle décision, c'est même indispensable. Mais il reste que même si on a raison, aller en appel vous savez les difficultés que cela peut comporter au point de vue du temps et de l'argent.

M. Joron: C'est justement...

M. Saint-Germain: II vaut mieux que la loi soit à ce point claire que les appels soient très peu nombreux.

M. Joron: D'accord, mais on verra plus loin que selon les dispositions sur l'appel, tout est très expéditif, les délais sont courts, on procède par requête. Cela va en Cour provinciale et, finalement, ce ne sont pas des délais très longs.

M. Saint-Germain: Alors, au deuxième paragraphe, c'est encore, à mon avis, plus général. Dans l'ancienne loi, on se servait du mot "probité" qui a une signification plus restreinte; ici on emploie le mot "honnêteté", un terme beaucoup plus général et beaucoup plus difficile à cerner.

M. Joron: Dans l'ancienne loi, celle de 1974, c'est un peu ce qu'on disait tout à l'heure, c'était pire encore, me semble-t-il, parce que là on disait: Une personne qui sollicite un permis doit, encore une fois, établir à la satisfaction du directeur sa probité, sa compétence et toute autre qualification prescrite. C'est comme si le gars était obligé de se présenter et dire: Je vais vous expliquer pourquoi je suis un homme honnête, etc. Cela disait: Doit établir sa probité, sa compétence et toute autre qualification prescrite alors qu'ici, à l'instar de la Loi sur la protection du consommateur, c'est le président qui se réserve le droit de refuser un permis "s'il est d'avis que la conduite démontre..."

À ce moment-là, c'est à lui d'en faire la preuve. L'individu qui est mis en question, son droit d'appel... je ne sais pas. Enfin, c'est le même genre d'argument que ce qu'on disait tout à l'heure.

C'est une disposition qu'on retrouve dans plusieurs autres lois des provinces canadiennes. Je peux vous citer, entre autres, la loi de Terre-Neuve, où on dit que l'émission d'un permis peut être refusée "if such person has demonstrated incompetency or untrustworthiness to carry on the business of a collection agency." Ce sont des dispositions qu'on retrouve...

M. Saint-Germain: "Worthiness", ça ne veut pas dire probité, ça?

M. Joron: "Trustworthiness, untrustworthiness." Non digne de confiance. C'est ce que ça veut dire, indigne de confiance.

M. Saint-Germain: Les termes en anglais, comme de raison, c'est difficile. J'avoue être impuissant à en connaître la signification exacte relativement aux termes français. De toute façon, M. le Président, puisqu'il en est ainsi...

Au quatrième alinéa, je crois que c'est encore pire: "Si le demandeur ne satisfait pas à une exigence prescrite par la présente loi ou par règlement". On laisse le cabinet bien libre. Je me demande s'il ne serait pas mieux de préciser les cas de refus dans la loi même plutôt que de laisser au règlement le soin de le faire. Là, c'est assurément un chèque en blanc remis au ministre et au cabinet.

M. Joron: Là-dessus, ce paragraphe va un peu de soi. Par exemple, la loi impose la fourniture d'un cautionnement, le règlement va venir préciser quelle sorte de cautionnement, quel montant, sous quelle forme il doit être fourni. Si, par exemple, un agent de recouvrement ne fournit pas le cautionnement tel qu'il a été précisé par règlement, c'est normal que le président de l'office puisse refuser l'émission d'un permis.

C'est ça l'embêtement, on ne peut pas tout prévoir dans les lois. Je sais que c'est agaçant,

tout le temps, chaque fois que paraît le mot règlement dans un projet de loi, ça m'agace moi-même aussi, mais il y a quand même des choses qui peuvent difficilement être incorporées à la loi, sous peine de passer notre temps à amender les lois tous les trois mois, dès l'instant où on change une formule, où on change un montant.

Au rythme d'inflation que l'on connaît ces années-ci, un permis de $100 ne vaudra plus grand-chose dans peu de temps. On voudra changer le montant de $100 pour $125 ou $150. À tout bout de champ, on amenderait nos lois.

En fait, les règlements sont censés, par définition, couvrir des choses mineures et non pas introduire des principes qui n'existaient pas dans la loi. Ils sont censés plutôt voir à la plomberie. Mais je pense que c'est impossible qu'on ne mette pas le mot. Dès l'instant où on enlève le mot, à ce moment-là, cela devient bien plus difficile d'interprétation.

M. Saint-Germain: Je sais pertinemment que, dans nos lois, on ne peut pas toujours enlever les règlements. Cela me semble être évident, mais il y a un équilibre à maintenir. Ce n'est pas un reproche qui doit s'adresser exclusivement au gouvernement actuel, mais on s'aperçoit depuis quelques années que, de plus en plus, les règlements prennent une importance qui semble être exagérée pour bien des gens.

M. Joron: Dans tous les gouvernements du monde, malheureusement.

M. Saint-Germain: Ici, dans ce paragraphe, étant donné que les termes sont très larges, très vagues, on laisse au cabinet la liberté de faire à peu près les règlements qu'il veut. C'est dire qu'on a bien beau discuter des alinéas qui sont inclus, mais que, par des règlements, on peut défaire tout cela.

M. Joron: Non, je ne pense pas, quand même. On ne peut pas défaire par des règlements l'essence même d'une loi ou son principe.

M. Saint-Germain: Lorsque, dans la loi, on se limite à des généralités, à des mots comme honnêteté, où le président peut refuser, c'est vaste, et si vous vous mettez à définir quand, par des règlements, le président peut, vous changez la signification que les paragraphes 1, 2 et 3 peuvent avoir.

C'est la raison pour laquelle je dis qu'il me semble y avoir là actuellement un abus relativement à la teneur des articles. Voilà, M. le Président.

Le Président (M. Lacoste): Est-ce que l'article 11 est adopté?

M. Saint-Germain: Adopté.

Le Président (M. Lacoste): Adopté. Article 12. Il y a un amendement présenté par le ministre. Est- ce que nous pouvons considérer l'amendement du ministre comme faisant partie du projet de loi?

M. Saint-Germain: Cet amendement-là.

M. Joron: Oui, c'est la partie qui est soulignée sur la copie qu'on vous a distribuée qui est changée et qui devient "en vertu de la partie VII ou en vertu des articles 381 ou 383 du Code criminel." C'est un changement d'article. Peut-être peut-on expliquer pourquoi.

L'ancien texte citait...

Le Président (M. Lacoste): II y a consentement.

M. Joron: Pour que l'amendement du ministre soit...

M. Saint-Germain: Oui, M. le Président. Le Président (M. Lacoste): Consentement.

M. Joron: L'ancien texte du paragraphe 3 citait les articles 330 et 331 du Code criminel. Ces deux articles-là sont situés dans la partie VII du Code criminel, partie qui est intitulée "Infractions contre les droits de propriété". Exemples: le vol, l'escroquerie, etc. L'amendement a pour but, si on veut, d'étendre la portée de ce qui était autrefois prévu dans ce paragraphe-là. Au lieu de parler simplement d'infractions à deux articles, 330 et 331, ce sera une infraction prévue à la partie VII du Code criminel.

Pourquoi a-t-on ajouté l'article 383 du Code criminel?

L'article 383 apparaissait dans le projet de loi no 26. Sans le citer, c'est un article qui porte sur les commissions secrètes qu'une personne peut exiger d'une autre. Exemple: Un agent de recouvrement dit: Si tu me paies $50, je te donne un délai de cinq jours de plus pour payer ta dette; c'est ce genre de choses qui est prohibé par le Code criminel. On sent le besoin d'y faire référence aussi, comme on l'avait fait en 1974 dans le projet de loi 26.

Le Président (M. Lacoste): M. le député de Jacques-Cartier.

M. Saint-Germain: Dans le premier alinéa, M. le Président, le président peut refuser de délivrer un permis à un demandeur qui, au cours des trois années antérieures à sa demande, a été déclaré coupable d'une infraction à une loi ou à un règlement dont l'office doit surveiller l'application. L'office a bien des responsabilités maintenant. Il me semble que c'est très rigoureux. Du moment qu'un agent va enfreindre même un règlement — cela peut être mineur; il peut même le faire dans la complexité de toutes les lois qui sont la responsabilité de l'office, il peut même le faire sans trop s'en rendre compte - à un moment donné, il peut perdre son permis.

Ce qui arrive là-dedans, j'ai bien l'impression d'avoir raison de le croire, c'est que vous allez éli-

miner un tas d'agents de recouvrement qui ne sont pas nécessairement malhonnêtes. Personne ne va se plaindre de ceux qui oeuvrent dans le milieu au détriment des intérêts de la population, mais les agents de recouvrement correspondent certainement à un besoin. Ils sont là pour satisfaire un besoin qui existe. D'ailleurs, il y a des maisons très honorables comme les caisses populaires, l'union régionale ou certaines banques qui font affaires avec certains agents de recouvrement. Je me demande si, avec la rigueur de cette loi, on n'élimine pas la profession ou l'occupation. Du moins, on va la diminuer et on va la restreindre énormément. Cela me semble absolument évident.

M. Joron: Je ne suis pas de l'avis du député de Jacques-Cartier, M. le Président. D'abord, il n'y a pas un nombre énorme de telles agences qui fonctionnent au Québec, à l'heure actuelle. Je ne vois pas en quoi — cette loi encadre peut-être mieux leurs activités — cela les ferait disparaître. Les services qu'elles rendent — c'est dans le domaine des services — sont réels, ils vont continuer d'être en demande, mais pourvu que les services soient rendus selon des cadres que définit la loi, il n'y aurait finalement, entre vous et moi, que l'agent de recouvrement qui ne pourrait satisfaire aux critères que cette loi édicte. J'ai l'impression que, déjà, c'est une agence de recouvrement avec laquelle je ne voudrais pas faire affaires. Si elles ne sont pas capables de satisfaire à cela, il y a vraiment quelque chose qui ne va pas. Je n'ai pas l'impression — je ne les connais pas toutes — qu'on va faire disparaître des agences. S'il arrivait que les exigences de cette loi avaient cet effet, j'ai l'impression que ce serait peut-être un service à rendre à la population en général. Si une agence n'est pas capable de se soumettre à cela, je me dis...

M. Saint-Germain: Les agences ne savent pas exactement la portée de la loi et exactement comme elle va être appliquée. Quand je dis cela, je parle des agents de recouvrement qui sont bien prêts, qui admettent, premièrement, qu'il doit y avoir une loi pour gérer leurs activités; deuxièmement, qu'ils sont bien prêts à la suivre et qui ont bonne intention. Vous créez tout de même une insécurité terrible. Quand vous arrivez à un tel article qui est la perte d'un permis, il faut tout de même avouer que c'est très sérieux pour un agent de recouvrement en corporation, ou celle qui perd son permis, c'est son gagne-pain.

M. Joron: Certainement. (10 h 45)

M. Saint-Germain: Vous avez un article, comme l'article 12, qui devrait, à mon avis, être beaucoup plus précis. Quand vous traitez d'infraction, l'article 12 devrait être plus restrictif. Au moins, il y a certainement des règlements, même si pour un agent de recouvrement, par malheur, il arrivait, soit par lui-même ou par l'entremise de son représentant qu'une brèche ait été faite, on ne peut pas tout de suite dire que cet agent de recouvrement ne veut pas se soumettre à la loi, parce que c'est tellement complexe. Quand vous parlez de toutes les lois qui sont sous la responsabilité de l'office, cela en fait des lois et des règlements, croyez-moi. Si un agent de recouvrement ne suit pas un règlement de l'office, ce n'est pas nécessairement le règlement ou les articles de cette loi, c'est tout ce qui concerne l'office, c'est vaste. Il y a certainement des gens de bonne volonté, comme il y a des marchands de bonne volonté qui...

M. Joron: II faut lire l'article tel qu'il existe. L'article ne dit pas que, automatiquement, si un règlement a été enfreint au cours des trois dernières années, ça y est! On dit: Le président peut refuser de délivrer un permis. Il y a une certaine discrétion de juger, de voir si c'est une contravention à un règlement qui a pu être faite par inadvertance, d'une façon mineure ou qui n'a pas beaucoup d'importance ou qui ne se rattache pas directement aux activités de l'agence de recouvrement comme telle. Le président se sert de son jugement. Evidemment, vous me direz qu'un président peut se tromper, mais c'est pourquoi il y a un droit d'appel aussi.

M. Saint-Germain: C'est cela.

M. Joron: L'individu est quand même protégé.

M. Saint-Germain: Le ministre vient de mettre le doigt dans la plaie. Il ne faut pas idéaliser le comportement du président. C'est un homme comme vous et moi, M. le Président, qui peut avoir ses préjugés, ses sautes d'humeur et c'est toujours dangereux de laisser à un fonctionnaire autant d'autorité, à mon avis. Si j'étais agent de recouvrement, j'avoue que j'aime mieux être optométriste, parce que je me sens moins mal à l'aise, au moins, comme optométriste.

M. Joron: II doit y avoir un...

M. Saint-Germain: Je sais pertinemment ce que je peux faire et ce que je ne peux pas faire.

M. Joron: Je ne sais pas, il doit y avoir des règlements de, comment l'appelle-t-on? l'Ordre des optométristes?

M. Saint-Germain: Oui, certainement.

M. Joron: Comment appelez-vous ça, l'association...

M. Saint-Germain: Ils sont faciles à interpréter. On sait pertinemment quand on va fauter et quand on ne fautera pas, croyez-moi. Parce que là, je pense que les agents de recouvrement ne peuvent malheureusement pas en dire autant. Si les dames s'en mêlent, M. le Président, je démissionne.

M. Joron: Regardez, je peux vous citer une statistique qui est contenue dans le rapport annuel de l'Office de la protection du consommateur pour l'année 1978/79.

Pour cette année — vous savez que l'office, actuellement, émet des permis aux vendeurs itinérants et aux vendeurs d'automobiles d'occasion — il y a eu 8228 permis d'émis.

À des vendeurs.

À des vendeurs itinérants et à des vendeurs d'automobiles d'occasion.

M. Saint-Germain: Combien de permis, dites-vous?

M. Joron: 8228.

M. Saint-Germain: Merci, oui.

M. Joron: Sur ces 8228, il y a eu finalement trois refus d'émission.

Ce n'est pas beaucoup.

Il y a eu dix auditions de tenues et, là-dessus, trois se sont soldées par un refus d'émission de permis. C'est quand même négligeable. Il faut dire que les lois dont l'office va surveiller l'application, ce ne sont pas toutes les lois qui concernent le domaine de la consommation. Jusqu'à aujourd'hui, il y a la loi 72, qui entrera en vigueur au printemps, et il y aura ce projet de loi no 54. Cela fait quand même deux lois dont l'office doit surveiller l'application. Ce n'est pas l'ensemble des lois qui concernent la consommation, parce qu'il y a un paquet de lois qui relèvent de l'Agriculture ou d'autres ministères qui touchent le domaine de la consommation, parce que c'est un domaine très vaste. Mais, comme tel, l'office aura à surveiller l'application de la loi 72 et du projet de loi no 54.

M. Saint-Germain: Toutes les lois qui s'en viennent, qui seront incluses. Vous l'avez dit. La Loi sur la protection du consommateur, c'est tellement vaste.

M. Joron: C'est une grosse loi.

M. Saint-Germain: Oui, c'est très compliqué et c'est bien flou. J'ai bien peur que les avocats vont avoir bien du plaisir avec ça. Cela va remplacer l'assurance automobile, jusqu'à un certain point. Quelques lois comme celle-là et...

Le Président (M. Lacoste): Est-ce que... M. Saint-Germain: Enfin, M. le Président...

Le Président (M. Lacoste): ... Est-ce que le nouvel article 12 est adopté?

M. Saint-Germain: Que voulez-vous? S'il n'y a pas moyen de bonifier la loi, c'est difficile de prolonger le débat.

M. Joron: Les commentaires du député de Jacques-Cartier, M. le Président, j'en suis sûr, inspireront sûrement ceux qui auront à l'appliquer.

Le Président (M. Lacoste): Est-ce que le nouvel article 12 est adopté, M. le député de...

M. Joron: Ce n'est pas perdu.

M. Saint-Germain: Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Lacoste): Adopté. L'article 13.

M. Saint-Germain: Les articles 13 et 14 sont adoptés, M. le Président.

Le Président (M. Lacoste): Un instant. L'article 13 est adopté, ainsi que l'article 14. Article 15.

M. Saint-Germain: Nous sommes dans le même genre d'articles, M. le Président. "Le président peut suspendre ou annuler le permis d'un titulaire qui, au cours de la durée du permis, cesse de satisfaire aux exigences que la présente loi ou les règlements prescrivent pour la délivrance d'un permis...

M. Joron: II doit manquer un mot.

M. Saint-Germain: Ce que j'ai dit précédemment s'applique là aussi.

Le Président (M. Lacoste): Est-ce que l'article 15 est adopté?

M. Joron: Adopté.

M. Saint-Germain: Adopté.

Le Président (M. Lacoste): Adopté. J'appelle l'article 16. Est-ce que l'article 16 est adopté?

M. Saint-Germain: Vous savez bien qu'au moins les personnes ici pourront être entendues. Je crois que voilà quelque chose de positif. Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Lacoste): L'article 16 est adopté. J'appelle l'article 17. Est-ce que l'article 17 est adopté?

M. Saint-Germain: Adopté.

Le Président (M. Lacoste): L'article 17 est adopté. J'appelle l'article 18.

M. Joron: Cela prend du mieux.

M. Saint-Germain: Oui, c'est vrai que ça prend du mieux parce qu'il y a plus de précision, comme vous le voyez, dans ces textes-là, M. le Président. Alors, ça éclaircit la loi.

Le Président (M. Lacoste): Est-ce que l'article 18 est adopté?

M. Saint-Germain: C'est dommage qu'on n'ait pas pu atteindre le même but dans les autres.

M. Michaud: Adopté.

M. Saint-Germain: L'article 18...

Le Président (M. Lacoste): M. le député de Jacques-Cartier.

M. Saint-Germain: Pour quelle raison a-t-on diminué la durée du permis?

M. Joron: Elle n'a pas été diminuée en fait, elle était d'un an dans la loi de 1974.

M. Saint-Germain: Excusez-moi, alors, retournons la question. Pourquoi a-t-elle été augmentée?

M. Joron: Parce que le gouvernement actuel est plus généreux que le précédent.

M. Saint-Germain: On modifie l'ancienne loi, que ce soit en moins ou en plus, il y a une explication.

M. Joron: C'est votre meilleure, ce matin.

M. Saint-Germain: II avait raison pour avancer ou reculer.

M. Joron: En fait, ça diminue les formalités qu'un agent de recouvrement aurait à accomplir, le nombre de fois qu'il va les accomplir, et il y a aussi une raison de concordance avec les permis qui seront émis en vertu de la loi no 72 aux commerçants itinérants, aux prêteurs d'argent et aux commerçants qui exploitent des studios de santé. Les permis sont de deux ans maintenant.

M. Saint-Germain: Vous savez, on a beau rire, mais ma question n'était pas si bête, surtout si on regarde le deuxième alinéa: "Le président peut toutefois délivrer un permis pour une période moindre s'il juge que l'intérêt du public est en jeu ou pour une raison d'ordre administratif". Comme vous voyez, on peut aussi bien avancer que reculer parce que, si le permis, dans l'ancienne loi, était d'un an, le président peut maintenant décider de le mettre à six mois. Ma question s'adressait aussi bien à pourquoi le diminuer comme pourquoi l'augmenter. La loi donne au président beaucoup plus de latitude pour allonger la période ou la diminuer. Vous voyez, en lisant attentivement, on trouve qu'à peu près n'importe quelle question peut se poser sur certains articles.

M. Joron: Je veux signaler une chose. À la deuxième ligne, il y a peut-être une faute de frappe dans le projet de loi. Je lis la deuxième ligne: "II est renouvelé aux conditions prescrites par la présente loi est par règlement". Il faudrait lire "et" par règlement. Il y a un "s" de trop dans ce mot-là. Ce n'est pas un arrangement, ça s'arrange.

Le Président (M. Lacoste): Remplacer "est", à la deuxième ligne, par le mot "et".

M. Joron: Est-ce que cela se fait automatiquement ou s'il faut faire des amendements chaque fois?

M. Saint-Germain: Je n'ai pas très bien compris, excusez-moi.

M. Joron: Le premier paragraphe a deux lignes. À la fin, on dit: par la présente loi "est" par règlement. Alors, c'est "et".

M. Saint-Germain: Evidemment.

M. Joron: Cela va?

Le Président (M. Lacoste): Cela va?

M. Saint-Germain: II me semble qu'on aurait pu définir un peu plus clairement ce qu'on entend par raison administrative et ce qu'on entend par intérêt public. C'est vaste, l'intérêt public. Cela peut comprendre tellement de choses.

M. Joron: II me semble que cela doit être drôlement difficile à définir, à moins de procéder par voie d'exemples. On ne voit pas cela dans des textes législatifs.

M. Saint-Germain: Non, il y a moyen de définir au lieu de mettre un terme aussi... On peut définir dans la loi pour quelles raisons le président peut diminuer la longueur de temps où le permis reste légal.

M. Joron: En fait, ce sont des circonstances qui se produisent d'une façon exceptionnelle et qu'on ne peut pas toujours prévoir. Par exemple, un agent de recouvrement fait affaires seul, il décède. Son épouse ou son frère demande un permis pour pouvoir continuer, pour liquider ses affaires, et la personne croit avoir besoin de trois mois pour cela. Un permis pourrait être émis pour trois mois, mais c'est un exemple parmi d'autres qui peuvent se produire et on ne peut pas les prévoir.

M. Saint-Germain: Vous avez des articles, en cas de décès, pour ce qui arrive avec les permis. Il y a dans la loi, si je ne m'abuse, des articles qui prévoient les cas de décès. Alors, pourquoi ne pas avoir élaboré plus clairement ces articles si c'est la raison pour laquelle on peut diminuer ou augmenter le temps?

M. Joron: C'est cela. Le cas de décès, c'est un cas. Il peut y en avoir d'autres. J'ai parlé — l'exemple n'était peut-être pas le meilleur — prenez un cas de maladie, il n'est pas prévu.

Le Président (M. Lacoste): Est-ce que l'article 18 est adopté?

M. Saint-Germain: Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Lacoste): L'article 18 est adopté. Article 19. Est-ce que l'article 19 est adopté?

M. Saint-Germain: Ici, de nouveau, on fait entrer la question des règlements. Dans la loi, il n'y avait pas de réglementation en 1974. C'est la raison pour laquelle je dis qu'on abuse des règlements.

M. Joron: L'article 15 de l'ancienne loi disait quand même: Le directeur autorise le transfert, dans les cas visés à l'article 14, sur paiement des droits exigibles et aux conditions prescrites. Les conditions prescrites, il devait y avoir, j'imagine, ou il y aurait eu des règlements afférents à cette loi.

M. Saint-Germain: L'article 14, dans l'ancienne loi, dit: Les droits que confère un permis ne peuvent être valablement transportés à une autre personne, sauf dans les cas de décès du détenteur de permis.

M. Joron: Lisez le suivant. L'article 15.

M. Saint-Germain: Je ne l'ai pas, monsieur le Président.

M. Joron: C'est celui que je viens de vous lire. Il dit: "Le directeur autorise le transfert, dans les cas visés à l'article 14, sur paiement des droits exigibles et aux conditions prescrites." Les conditions ne sont pas définies. Elles apparaissaient dans les règlements. C'est toujours la même chose. Il faut prévoir des formes pour que ces choses-là se fassent.

Le Président (M. Lacoste): Est-ce que l'article 19 est adopté?

M. Saint-Germain: Adopté.

Le Président (M. Lacoste): L'article 19 est adopté. Article 20. Est-ce que l'article 20 est adopté?

M. Saint-Germain: Adopté.

Le Président (M. Lacoste): L'article 20 est adopté. Article 21. Est-ce que l'article 21 est adopté?

M. Saint-Germain: Adopté.

Le Président (M. Lacoste): L'article 21 est adopté. Article 22. Est-ce que l'article 22 est adopté? (11 heures)

M. Saint-Germain: Quand vous dites, à l'article 21, qu'un titulaire de permis doit faire des affaires sous un nom ou une dénomination sociale qui comporte l'expression "agence de recouvrement" ou "agent de recouvrement". On m'a fait comprendre ou on a essayé de me faire comprendre que des compagnies qui font du recouvrement n'avaient pas, dans leur dénomination sociale, les expressions incluses dans la loi 21. On n'a aucune objection. On admet très facilement que tout agent de recouvrement ou toute dénomination sociale doit nécessairement s'identifier. On admet ce principe, il n'y a pas de discussion. Mais on se demande si, au lieu de changer la dénomination qui existe depuis bien des années, une compagnie qui a fait de l'annonce est reconnue sous tel nom, on ne doit pas simplement obliger les intéressés à ajouter le titre "agent de recouvrement" ou "agence de recouvrement", avec la même importance, la même grandeur de lettres ainsi de suite, afin qu'il n'y ait pas ambiguïté et que tout le monde soit assuré que c'est un agent de recouvrement.

Cela leur permettrait tout de même de conserver intacte leur ancienne dénomination.

M. Joron: En fait, l'article 21 aura pour effet d'obliger certaines agences à introduire ces expressions dans leur nom ou dénomination sociale. Finalement, c'est une formalité à accomplir, ce n'est pas si onéreux. Si on compare l'effet de la loi 101 auprès d'un grand nombre de commerçants qui ont dû modifier leur nom, leur raison sociale, je pense que finalement, l'exigence se réduit à peu de choses. Je ne crois pas que ça puisse affecter la clientèle d'un agent de recouvrement, s'il change son nom. Ce n'est pas à cause du nom qu'un créancier fait affaires avec une agence de recouvrement, si le service est bon, peu importe les changements de nom.

Encore une fois, c'est vraiment une formalité.

M. Saint-Germain: Pourquoi?

M. Joron: Cela peut s'appeler Saint-Germain, ou je ne sais trop; le fait d'ajouter "agence de recouvrement" n'est pas bien compliqué, entre vous et moi.

M. Saint-Germain: Non, mais pourquoi obliger les gens à faire des choses qu'ils n'aiment pas? Pour des raisons bien particulières, il peut arriver qu'une compagnie, qu'un agent de recouvrement, une corporation tienne à avoir son nom. Écoutez, c'est bien humain, il me semble que c'est normal. Pourquoi, par une loi, les obliger à changer de nom, quand vous pouvez réellement les accommoder sans le faire? Pourquoi toujours agir d'autorité?

M. Joron: C'est-à-dire qu'on ne les oblige pas à changer leur nom, ils peuvent s'appeler la compagnie X, Y, Z, et être bien fiers de leur nom, vouloir le garder. Ils peuvent le faire. Tout ce qu'on leur demande, c'est d'ajouter avant, après, en dessous, par-dessus, je ne sais où, "agence de recouvrement" pour que ça s'identifie.

M. Saint-Germain: Alors, si on disait la compagnie Joron Limitée, agence de recouvrement, est-ce que ça irait?

M. Joron: Oui.

M. Saint-Germain: Cela irait.

M. Joron: La compagnie continue de garder son ancien nom, avec une virgule au bout...

M. Saint-Germain: Cela ne semble pas clair dans le texte.

M. Joron: Doit comporter l'expression. Alors, c'est libre à la compagnie en question de le mettre où ça lui convient, de l'appeler l'agence de recouvrement Saint-Germain ou Saint-Germain et Fils, agence de recouvrement, comme vous voulez, mais le nom va continuer. Le nom sous lequel elle a été antérieurement connue va continuer. Sauf qu'elle va comporter quelques mots de plus pour identifier sa fonction.

Le Président (M. Lacoste): M. le ministre, je m'excuse, j'avise les membres que, selon la présidence, l'article 21 est adopté.

M. Joron: Considérons qu'on discute...

M. Saint-Germain: On discute quoi, qui l'a adopté?

Le Président (M. Lacoste): Vous-même.

M. Saint-Germain: Je vois que ce n'est pas facile de travailler seul contre l'ensemble du gouvernement.

Le Président (M. Lacoste): Ce n'est pas plus grave que ça.

M. Saint-Germain: J'aurais besoin d'un ou deux avocats qui auraient des opinions contraires aux gens d'en face.

M. Joron: On peut vous en prêter un si vous voulez.

M. Saint-Germain: J'en aurais besoin. Continuons.

M. Joron: On disait tout à l'heure que quand vous en mettez deux ensemble, ils ne sont jamais d'accord.

Le Président (M. Lacoste): Article 22.

M. Saint-Germain: Si je l'ai adopté, M. le Président, je ne reviendrai pas sur ma parole.

Le Président (M. Lacoste): Est-ce que l'article 22 est adopté?

M. Saint-Germain: Adopté, M. le Président. Le Président (M. Lacoste): Adopté. Article 23. M. Saint-Germain: Adopté.

Le Président (M. Lacoste): Adopté. Article 24.

M. Saint-Germain: Ne trouvez-vous pas, à l'article 24, que quinze jours, c'est bien court? Trente jours, cela ne créerait pas plus d'embêtement relativement à l'application de la loi et cela donnerait peut-être...

M. Joron: On a mis quinze jours — c'est un peu plus laxiste que l'ancienne loi ne l'était. Je vous lis l'article 17 de l'ancien projet de loi de 1974. Il disait: "Toute corporation ou société doit aviser sans délai le directeur de tout changement..." On a dit: Sans délai, cela peut être un peu "toffe".

M. Saint-Germain: À la limite, oui, je l'avoue. Je ne défendrai pas cet article de l'ancienne loi, M. le Président.

M. Joron: C'est pour cela qu'on a mis quinze jours.

M. Saint-Germain: On m'a fait des représentations à savoir que quinze jours, c'était court, considérant que si on déménage, cela occasionne des soucis.

M. Joron: À moins que le député de Jacques-Cartier ne préfère qu'on écrive: "Dans un délai fixé par règlement"?

M. Saint-Germain: Là, ce serait normal. On ne saurait absolument pas à quoi s'attendre. Cela pourrait être une journée comme deux ans.

Le Président (M. Lacoste): Est-ce que l'article 24 est adopté?

M. Saint-Germain: II n'y a pas moyen, M. le Président? Quinze jours, c'est indiscutable?

M. Joron: C'est le délai qui est accordé dans la loi 72, pour les titulaires de permis. Je pense qu'il est matériellement suffisant. C'est une raison de concordance encore.

M. Saint-Germain: On revient toujours à une loi qui n'a pas encore été mise en application, qui n'a pas encore fait ses preuves et qui va comporter bien des difficultés.

M. Joron: Cela nous permettra de toutes les changer en même temps.

M. Saint-Germain: C'est cela, oui. Ce n'est pas l'Evangile, votre Loi sur la protection du consommateur, M. le ministre, étant donné que je n'ai pas le droit de m'adresser à M. l'avocat. Vous n'en êtes peut-être pas responsable à 100%, mais vous allez avoir la responsabilité de l'appliquer un jour, à moins que vous ne fassiez comme pour la loi de 1974 sur les agents de recouvrement, découvrir qu'elle n'est simplement pas applicable.

Le Président (M. Lacoste): Est-ce que l'article 24 est adopté?

M. Saint-Germain: Adopté, M. le Président. Le Président (M. Lacoste): Adopté. Article 25.

M. Saint-Germain: Si j'étais juge, je vous dis qu'il y a des avocats qui... Si un jour je pouvais parler aux avocats d'autorité. Continuons. Article 25.

Le Président (M. Lacoste): Est-ce que l'article 25 est adopté?

M. Saint-Germain: Pour quelle raison voulez-vous réglementer jusqu'à la manière de vérification comptable? Vous dites: "... vérifiés par un expert comptable, selon la forme prescrite par règlement." Là, vous êtes rendu que vous dites au comptable quoi faire.

M. Joron: Regardez ce que disait l'ancienne loi: "Un détenteur de permis doit, en la manière et aux périodes prescrites — c'était d'ailleurs encore plus large — fournir au directeur un rapport détaillé de ses affaires, accompagné des états financiers vérifiés par une personne ayant droit d'exercer comme comptable agréé." C'est encore plus laxiste. J'ai l'impression qu'on a un peu resserré.

M. Saint-Germain: Un comptable devrait savoir comment s'y prendre pour établir le bilan, l'actif et le passif, en somme, la comptabilité d'une corporation. Là, vous allez par règlement, imposer à un comptable la façon de procéder. Il me semble que vous poussez la réglementation à l'extrême.

M. Joron: Ce n'est pas un pouvoir réglementaire qui va être nécessairement exercé. S'il s'avérait qu'il faille faire un règlement pour prescrire la forme, pour en avoir des semblables dans tous les cas, le pouvoir pourrait être exercé, ou sinon...

M. Saint-Germain: Pourquoi réservez-vous des pouvoirs qui peut-être ne seront pas appliqués? Vous ne le savez même pas. Où est l'importance de cela? Si cela n'est pas assez important pour que cela saute aux yeux, pourquoi le mettre dans une loi au cas où... Cela me semble être aberrant d'une certaine façon. On est rendu dans cette société au point où n'importe quelle loi ou n'importe quel règlement peut... Il y a des gens en haut qui peuvent penser, mais il y a des gens dans la société qui peuvent penser par eux-mêmes aussi, croyez-moi, et avec grande compétence.

M. Joron: C'est évident, mais il ne faut pas oublier l'objet de toutes ces lois. C'est un peu comme celle de la Commission des valeurs mobilières, par exemple, qui exige évidemment qu'une entreprise qui veut émettre des titres produise un prospectus, produise des états financiers, des états financiers pro forma, etc., selon les formes prescrites, parce que les commissions de contrôle et de surveillance qui sont là pour protéger le public ne peuvent pas être à la merci, je ne sais pas, des formes que voudrait bien emprunter n'importe quel comptable. Il faut quand même qu'on ait le pouvoir d'exiger que les états financiers au moins rapportent les renseignements qui sont absolument nécessaires. Je comprends qu'on pourrait dire: "selon les formes usuelles de la pratique comptable", mais ce serait encore peut-être plus large d'interprétation à ce moment-là.

M. Saint-Germain: II y a un code de déontologie des comptables. Il y a une expertise. On dit que ce sont des experts. Je comprends bien que, pour ce qui regarde les valeurs mobilières... D'autant plus qu'on ne sait même pas, d'après votre dire, puisque monsieur parle en votre nom, M. le ministre, si ce sera nécessaire ou pas. Cela me semble être... Si j'étais comptable, il me semble que je ne serais pas trop heureux.

M. Joron: C'est qu'on ne couvre pas seulement les comptables agréés non plus là-dedans. Cela peut être un CGA, cela peut être un...

Une voix: Un expert comptable.

M. Saint-Germain: Un expert comptable, en autorité, qu'il porte un titre ou l'autre, c'est un expert.

M. Joron: C'est parce que l'ancienne loi disait qu'il fallait que ce soit un CA, un comptable agréé, là, on dit "un expert comptable", ce qui ouvre la porte à...

M. Saint-Germain: ... ou des choses semblables, oui.

M. Joron: C'est cela, dans un sens, on est plus permissif mais, en étant plus permissif, il faut s'assurer que l'ensemble va respecter certaines formes aussi.

M. Saint-Germain: Enfin! continuons.

Le Président (M. Gagnon): L'article 25 est-il adopté?

M. Saint-Germain: Adopté.

Compte en fiducie

Le Président (M. Gagnon): Adopté. L'article 26?

M. Saint-Germain: Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Gagnon): Adopté. L'article 27.

M. Saint-Germain: Pour quelle raison limitez-vous à un seul compte les agents de recouvrement pour ce qui regarde les dépôts de leur argent en fiducie? Cela peut créer des inconvénients assez

sérieux. Un exemple pratique, par exemple: je crois qu'on m'a dit la vérité. On m'a dit que l'Union régionale de Montréal, par exemple, faisait appel à un agent de recouvrement de temps à autre. Il me semble évident que ces gens voudront bien que cet argent qui est en fiducie soit déposé dans une caisse populaire, mais le même agent peut aussi avoir comme client une banque, car certaines banques font aussi... Il va demander la même chose. Pour quelle raison? Ensuite, il peut arriver que, pour une raison ou pour une autre, on aimerait avoir deux ou trois comptes en fiducie. Où est l'inconvénient, si vous voulez, d'avoir...

M. Joron: L'inconvénient, en fait, d'en avoir qu'un seul, c'est de faciliter de beaucoup la vérification, d'une part, et d'éviter peut-être, si on multipliait cela à l'extrême, si on ne mettait pas une limite quelque part, qu'on puisse imaginer autant de petits comptes en fiducie un peu partout. On pourrait en imaginer 25 ou 30, etc. Cela devient presque incontrôlable et invérifiable en fin de compte. (11 h 15)

Je pense qu'à la fois pour l'agence de recouvrement et pour les autorités qui ont à faire les vérifications, c'est beaucoup plus facile de n'en avoir qu'un seul. Quant à l'argument: Est-ce que le fait... Si, par exemple, une agence avait deux ou trois institutions financières comme clientes et que chacune de ces institutions financières exigeait que ce soit chez elle que le compte en fiducie soit détenu, je ne pense pas d'abord que la circonstance va se présenter tellement souvent. Je ne pense pas non plus que cela empêcherait une agence de continuer à avoir le compte ou le contrat d'une autre institution financière, parce qu'elle peut aussi y garder d'autres types de comptes. En dehors de ses comptes en fiducie, elle peut y garder ses comptes ordinaires ou n'importe quoi d'autre.

M. Saint-Germain: Non...

M. Joron: II ne s'agit pas de faire affaires avec d'autres institutions financières. Pour ce qui est de l'argent déposé en fiducie, cela m'apparaît beaucoup plus simple qu'il soit dans un seul bloc, en entier à la même place. C'est beaucoup plus facile à vérifier. Il y a aussi une concordance avec des lois qu'on a, encore une fois, précédemment adoptées, comme la loi 72 qui a la même exigence.

M. Saint-Germain: C'est entendu que, si vous vous mettez à la place du président de l'office, c'est beaucoup plus simple, c'est clair. Le ministre a mentionné que, pour l'agent de recouvrement, cela ne peut pas lui créer de grandes difficultés. C'est dommage que nous n'ayons pas eu, même si cela n'eût été qu'une courte commission parlementaire là-dessus, on aurait pu écouter ces gens nous dire que cela pouvait leur créer des embêtements très sérieux, qu'ils s'opposent très fortement à cet article. Le ministre a parlé d'un abus où on pourrait avoir un nombre... c'est l'autre extrê- me. Il me semble qu'entre les deux, sans créer d'embêtements dans la vérification, on pourrait au moins augmenter le nombre, mettre un maximum où tout le monde pourrait oeuvrer sans difficulté, soit au niveau de la vérification, soit au niveau des agents de recouvrement. Il me semble que c'est normal que ces agents de recouvrement puissent faire affaires dans plusieurs villes et puissent faire affaires traditionnellement avec quelques banques aussi. Ce n'est pas rare qu'on puisse faire affaires avec deux ou trois banques. Limiter, obliger les agents de recouvrement à un compte, soi-disant pour faciliter la vérification, il me semble que c'est un abus de pouvoir, parce qu'on pourrait avoir une moyenne, au moins. Pourquoi essayer de faciliter la vérification aux fonctionnaires d'une façon aussi draconienne? Il me semble qu'il y a là un abus d'autorité. Une chose que je peux vous dire, c'est qu'assurément, aussi bien les agents de recouvrement eux-mêmes que l'association des agents s'opposent fortement à cette optique. Même s'il y avait trois, quatre, cinq ou six comptes au maximum, cela ne créerait pas de difficulté, et cela pourrait plaire à tout le monde.

M. Joron: La crainte que certains peuvent avoir, finalement, ce serait que, n'ayant qu'un seul compte en fiducie dans une institution financière, un agent de recouvrement qui aurait plusieurs institutions financières comme clientes pourrait avoir à craindre de perdre les autres comme clientes.

M. Saint-Germain: C'est une objection, parce qu'il y en a, en fait, qui se sont arrangés comme cela.

M. Joron: Oui. Je sais qu'il doit y en avoir qui sont dans ce cas, mais cela me semble une crainte non fondée. La pratique le dira, mais je ne pense pas que la crainte soit fondée pour la raison que je vous donnais tout à l'heure: Cette agence, cette corporation, en dehors de ces comptes en fiducie, peut faire d'autres affaires bancaires avec une autre institution financière. En premier lieu, il faut bien dire que, si une institution financière recourt aux services d'une agence en particulier, cela doit être parce qu'elle est satisfaite de ses services. Ce n'est pas pour ce que représente, comme volume d'affaires pour la banque, d'avoir le compte en fiducie. Vous avez vu les montants, ce ne sont pas des montants énormes, ces affaires. Ce n'est pas avec cela qu'une banque fait de bien grosses affaires.

Pour ma part, je pense que le premier principe de base, c'est que si une banque ou une autre institution financière choisit une agence, c'est parce qu'elle la trouve bonne et trouve qu'elle donne de bons services. Ce n'est pas parce qu'elle a un petit compte de $25 000 en fiducie qu'elle va changer d'idée.

M. Saint-Germain: Oui, mais pourquoi... Si les agents de recouvrement... Quant à moi, je ne suis pas agent de recouvrement, pas plus que le

ministre. Nous, c'est sur papier, et le ministre, comme je vois, a beaucoup plus à la mémoire l'Office de la protection du consommateur. C'est clair que c'est plus facile pour eux. Mais pourquoi d'autorité? Lorsque les gens sont unanimes à dire que, dans la vie de tous les jours, dans leur pratique de tous les jours, ça leur crée des embêtements. D'ailleurs, combien d'hommes d'affaires font affaires, pour une raison ou pour une autre, avec deux ou trois banques? Il ne s'agit pas d'avoir 25 comptes, pour toutes sortes de raisons, des raisons pratiques, parce que ce sont des gens qui se déplacent, à un moment donné. Il y a un employé qui demeure à telle place et c'est commode d'avoir un compte là. Toutes ces choses, ce sont des choses qui arrivent.

Mais pourquoi, lorsque les gens, qui doivent se soumettre à cette loi, vous disent, sans arrière-pensée, d'une façon bien désintéressée...

M. Joron: Écoutez...

M. Saint-Germain:... que ça leur crée... Pourquoi se battre pour essayer de prouver que ce n'est pas vrai?

M. Joron: ... voulez-vous, je vais vous proposer ceci? On peut suspendre l'article et, pendant ce temps-là, on va contacter les gens du comité de législation pour voir s'ils ont objection. Vous savez le pouvoir des juristes dans notre système.

M. Saint-Germain: Vous savez, ça ne m'impressionne...

M. Joron: On verra un peu plus tard, à la fin de la séance, si on a la réponse. Suspendons-le pour l'instant, si vous le voulez bien, et on y reviendra.

M. Saint-Germain: Je n'ai pas d'objection, M. le Président, à le suspendre, mais, si on se fie aux juristes, on n'ira pas loin. Je ne pense pas que ce soit là une décision de juristes. Je pense que c'est une décision politique. Au point de vue des législations, qu'on mette deux comptes ou trois comptes, je ne peux pas voir...

M. Joron: Remarquez, je ne pense pas que ce soit une décision éminemment politique, non plus. C'est une question...

M. Saint-Germain: De gros bon sens. M. Joron: ... c'est ça.

M. Saint-Germain: Bon! Alors, suspendu, M. le Président.

Le Président (M. Lacoste): Est-ce qu'il y a consentement pour suspendre l'étude de l'article 27?

M. Saint-Germain: Consentement.

Le Président (M. Lacoste): Article 28.

M. Saint-Germain: Les articles 28 et 29, quant à moi, sont adoptés, M. le Président.

Le Président (M. Lacoste): Article 28, adopté. Article 29, adopté. Article 30. Est-ce que l'article 30 est adopté?

M. le député de Jacques-Cartier.

M. Saint-Germain: À l'article 30, M. le Président, si je ne m'abuse, c'est un bris de la tradition du droit corporatif. Les gens s'incorporent pour limiter leurs responsabilités à la compagnie et voilà qu'ici, on brise cette tradition, on veut rendre les individus personnellement responsables pour des activités qu'ils ont au nom d'une corporation.

Il me semble que tout ceci est un abus, M. le Président. Je ne crois pas que...

M. Joron: II y a une limite, par contre. C'est vrai. C'est une dérogation dans le sens que vous dites, ce principe général. Mais c'est limité aux sommes devant être placées dans un compte en fiducie. Cela, il ne faut pas l'oublier. Cela n'ouvre pas une responsabilité illimitée à l'administrateur. "... conjointement et solidairement responsable du compte en fiducie avec la corporation", cela ne va pas au-delà de ça.

M. Saint-Germain: Alors, si ce n'est pas plus important que ça, M. le Président, pourquoi briser... faire du droit nouveau pour une chose qui n'a que très peu de portée?

M. Joron: Je ne pense pas que ce soit du droit nouveau. On le retrouve encore une fois dans la loi 72, mais possiblement...

M. Saint-Germain: Oui, mais là, ce n'est pas fort, ce n'est pas l'évangile, la loi 72, croyez-moi.

M. Joron: Ce n'est peut-être pas du droit bien vieux, mais pas complètement nouveau.

M. Saint-Germain: Quant à ça non; c'est encore du droit nouveau, oui.

M. Joron: En fait, le but principal de cet article, c'est d'éviter, par exemple, qu'un administrateur se réfugie derrière ce qu'on appelle le "voile corporatif" pour être exempt de toute responsabilité, parce qu'on sait très bien qu'en pratique, il arrive souvent qu'une compagnie, c'est finalement une personne qui agit.

Alors il ne serait pas normal qu'on l'exempte de toute responsabilité, alors que finalement c'est elle qui a posé le geste. Bien sûr, il y a le moyen de défense de prévu. Si elle fait la preuve de sa bonne foi et que ces choses-là se sont produites sans sa connaissance, il est bien évident que cette personne ne sera pas tenue responsable.

M. Saint-Germain: C'est ça et vous renversez la preuve aussi. Il suffira que la personne impli-

quée ait eu connaissance de l'infraction pour être réputée en être partie, à moins qu'elle ne prouve qu'elle n'y a pas acquiescé. C'est elle qui doit prouver qu'elle n'y a pas acquiescé. On renverse le fardeau de la preuve. C'est contraire au principe fondamental de notre droit pénal qui veut qu'un inculpé soit innocent jusqu'à ce qu'il soit prouvé qu'il est coupable. Mais pourquoi ça?

M. Joron: II ne faut pas oublier une chose. L'article 30 traite de la responsabilité civile d'une personne. En droit pénal ou en droit criminel, il y a un fardeau de preuve. En vertu du Code criminel, une personne est présumée innocente tant qu'on n'a pas prouvé, hors de tout doute raisonnable, qu'elle est coupable, mais ici, dans le cadre de l'article 30, c'est une responsabilité civile.

Le Président (M. Lacoste): Est-ce que l'article 30 est adopté?

M. Saint-Germain: Je me demande en toute sincérité, M. le Président, pourquoi être si draconien, agir avec une telle autorité vis-à-vis de choses qui sont importantes, mais d'une importance tout de même relative. Je crois qu'il y a un certain abus là.

M. Joron: Chacun a son avis là-dessus. Je ne crois pas que la mesure soit draconienne, d'une part, parce qu'elle se limite à une responsabilité qui a rapport aux comptes en fiducie. Ce ne sont pas les affaires générales de la compagnie, ce sont les comptes en fiducie seulement dont il est question, et c'est là pour la protection du public.

Il me semble que ce n'est pas exagéré, d'autant plus, bien entendu, que l'individu en question peut toujours faire preuve de sa bonne foi. Je ne trouve pas ça draconien.

M. Saint-Germain: Le gouvernement est habitué à ce genre de lois. On s'habitue à ça, à se servir de la matraque de façon continue, à briser les traditions, à toujours avoir cette crainte... On dirait qu'on part avec des préjugés. Du moment qu'on est en affaires, qu'on forme une compagnie, le monde est riche, on ne s'enrichit pas toujours avec honnêteté... On dirait que ça crée une atmosphère lourde, ça crée de l'insécurité, à mon avis, de façon tout à fait inutile.

Que le gouvernement essaie de protéger l'argent qui est en fiducie et le fasse, personne ne s'opposera à ça, absolument personne. Mais qu'on oblige, qu'on brise les traditions au point de vue du droit corporatif et qu'en plus on présume de la culpabilité des gens du moment... Dans des champs d'activités, des fois, la personne qu'on va accuser ou qui doit se défendre n'a rien à y voir. Il me semble qu'il y a là un abus. On peut protéger les comptes en fiducie sans aller si loin que ça, voyons.

M. Joron: Mais cette question de présomption de la culpabilité, je ne suis pas de votre avis. Il n'y a pas de présomption de culpabilité. Encore une fois, l'article 30 parle de droit civil, mais plus loin...

M. Saint-Germain: Vous savez, je veux bien. On peut...

M. Joron: ... on va pouvoir discuter de cette question-là dans le cadre d'autres articles à portée pénale et on verra qu'il n'y a jamais de présomption de culpabilité. Il y a toujours un fardeau de preuve de la part de la poursuite et il y a certains moyens de défense prévus.

M. Saint-Germain: Vous savez, il faut être prudent. Je ne dis pas que, par l'entremise de son conseiller, le ministre n'est pas sincère, pas du tout. Je ne dis pas qu'il n'a pas droit à son opinion, pas du tout, mais j'ai aussi consulté des avocats de renom, des avocats très compétents qui me disent absolument le contraire. C'est une façon de procéder qui, dans les milieux autorisés et compétents, est loin de faire l'unanimité. (11 h 30)

Je crois qu'à titre de législateur, on doit se méfier, hormis qu'on aurait prouvé que la façon ordinaire de procéder se soit montrée tout à fait incomplète ou tout à fait impuissante à garantir ces sommes d'argent, mais la preuve n'est pas faite. Si on procédait de la façon régulière pour s'apercevoir, avec l'application de la loi, qu'il y a des trous dans la loi, qu'il y a des pertes d'argent pour le public qu'on ne peut pas récupérer, il faudrait faire quelque chose. On aurait une preuve, mais là, tout à fait sur papier, tout à fait par un raisonnement froid, loin de la vie de tous les jours, on arrive, et bang! Il me semble que c'est une façon de légiférer qui est inacceptable.

Il faut toujours bien se fier à l'honnêteté et au désintéressement de l'ensemble des citoyens et, pour autant que la loi est claire et précise, on peut s'attendre, normalement, que l'intérêt public soit protégé sans jamais aller à l'extrême.

M. Joron: Enfin, on ne va pas à l'extrême, dans le sens qu'on ne crée pas là une présomption de malhonnêteté ou quoi que ce soit. On protège davantage le public, si vous voulez, en rendant l'individu qui est propriétaire d'une agence de recouvrement plus responsable, si vous voulez, mais dans la limite du compte en fiducie.

M. Saint-Germain: Vous créez des précédents pour cela. Ce serait plus facile d'en créer tout à l'heure. D'ailleurs, on le dit, c'est un précédent. On l'a fait dans la loi no 72, qui n'est même pas appliquée. Je ne peux pas accepter cet article, M. le Président. Si le ministre croit qu'il n'y a pas lieu de le modifier, il sera accepté sur division. J'aurai fait mon devoir. Je ne peux pas faire plus.

Le Président (M. Lacoste): Est-ce que l'article 30 est adopté?

M. Joron: Sur division.

Le Président (M. Lacoste): L'article 30 est adopté sur division.

M. Saint-Germain: Sur division.

Le Président (M. Lacoste): Article 31. Est-ce que l'article 31 est adopté?

M. Saint-Germain: Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Lacoste): Adopté. Article 32. Est-ce que l'article 32 est adopté?

M. Saint-Germain: Excusez-moi. J'aurais une question à l'article 31, si on me le permettait.

Le Président (M. Lacoste): Est-ce qu'il y a consentement?

M. Saint-Germain: De revenir... M. Joron: Oui.

Le Président (M. Lacoste): II y a consentement.

M. Saint-Germain: J'ai fait erreur, c'est mon erreur ici, l'article 31 est adopté, M. le Président, je m'excuse.

Le Président (M. Lacoste): L'article 31 est adopté.

Obligations et interdictions

Article 32.

M. Saint-Germain: L'article 32 dit: "Le mandat par lequel un créancier confie à un titulaire de permis le recouvrement d'une créance doit être consigné dans un écrit conforme au modèle prescrit par règlement." Est-ce qu'on peut entendre par là que, par rapport à ce contrat qu'il y a entre un débiteur et un agent de recouvrement, l'agent de recouvrement peut simplement faire accepter sa formule, la forme, si vous voulez, la teneur, par le président, ou si le président va simplement lui-même rédiger une formule qui sera universelle?

M. Joron: En réponse à cette question, tel que l'article est rédigé, cela donne ouverture à l'existence de plusieurs modèles de contrats, mais ces modèles vont évidemment être élaborés au moyen de consultations avec les milieux intéressés et, si on peut arriver à une seule formule de mandat qui serait applicable à tout le monde, avec consultation, il y en aura seulement une qui apparaîtra dans le règlement.

M. Saint-Germain: L'ancienne loi voulait que cette formule soit acceptée par le président.

M. Joron: C'était une approbation, effectivement.

M. Saint-Germain: Est-ce que cela a créé des inconvénients, au point de vue de l'application de la loi?

M. Joron: La loi n'a pas été appliquée, justement.

M. Saint-Germain: C'est la loi de 1974.

M. Joron: Oui, c'est ça. Mais, à l'article 32, même si on dit: "un écrit conforme au modèle prescrit par règlement", vous savez qu'en langage législatif, même lorsqu'on a du singulier, ça comprend le pluriel, Alors, théoriquement, il pourrait y avoir plusieurs modèles de mandats, comme il pourrait n'y en avoir qu'un. Ce sont des choses à déterminer dans la rédaction des règlements, avec consultation, bien sûr.

M. Saint-Germain: II semblerait que, si vous limitez les agents de recouvrement à une seule formule, ça va créer des difficultés pour bien des gens.

M. Joron: Oui, mais justement, il y a des modalités qui sont possibles, par exemple, établir un modèle unique pour certaines mentions et laisser la liberté à chaque agent d'ajouter des choses qui lui sont plus personnelles. Ce sont toutes des possibilités.

Incluant des clauses minimales: après ça, le reste...

L'article 32 n'est pas un carcan.

M. Saint-Germain: Ne croyez-vous pas que ce sont des choses qui auraient dû être déterminées avant la rédaction de l'article? Il me semble qu'il n'y a rien là de tellement complexe. Là, on accepte cet article sans savoir quel va en être le résultat. Cela peut être aussi bien plusieurs formules, une seule formule. C'est laissé complètement à la discrétion des règlements.

M. Joron: Cela aurait été un peu difficile d'essayer de tout prévoir, les multiples types de mandats que la pratique des affaires de tous les jours peut commander. Il me semble que c'est plus souple et que c'est à l'avantage, autant, je pense, des agences, c'est-à-dire de ne pas être poignées dans un carcan que la loi aurait défini de façon trop serrée.

M. Saint-Germain: C'est assurément plus souple pour le gouvernement, parce qu'il peut faire ce qu'il veut. On ne peut pas avoir plus de souplesse que ça pour l'activité gouvernementale.

M. Joron: Pour l'agence également.

M. Saint-Germain: Je veux dire que c'est tout de même un article qui est simple. Je crois que le dialogue avec les représentants des agences de recouvrement aurait pu être fait bien avant. Au lieu d'étudier un article ambivalent, on aurait voté sur quelque chose de concret, qui aurait été établi après un dialogue entre les agents de recouvrement et les autorités gouvernementales. À mon avis, c'est comme ça, légiférer.

M. Joron: À ma connaissance, cet article n'a pas soulevé d'objection de la part de l'Association des agents de recouvrements. Ce n'est pas sorcier.

M. Saint-Germain: On m'a... M. Joron: Communiqué?

M. Saint-Germain: ... personnellement soumis des objections, assez sérieuses.

M. Joron: La consultation dont vous parlez sera permanente; dans le cas de l'élaboration du règlement, avant de faire des modèles semblables, il me semble qu'il va de soi qu'on consulte les gens de la profession et c'est finalement ensemble que ces modèles seront élaborés.

M. Saint-Germain: Vous savez, c'est bien beau de dire que ça va de soi, les consultations, mais, lorsqu'on a l'autorité en main... Ce n'est pas aussi facile pour celui qui sera obligé de se soumettre aux obligations de cet article et qui ne sait même pas, lorsque la loi est étudiée, ce que ça va contenir exactement. Nous non plus, à titre de législateur, on ne le sait pas réellement. C'est bien beau de promettre qu'il y aura consultation, ainsi de suite. Je peux facilement croire au désintéressement du ministre, mais le gouvernement, c'est tellement une grosse machine et on a tellement d'obligations, à titre de ministres, que ces choses sont remises aux fonctionnaires. Cela ne se fait pas tel que ça devrait se faire.

Le Président (M. Lacoste): Est-ce que l'article 32 est adopté?

M. Saint-Germain: Sur division, M. le Président.

Le Président (M. Lacoste): Adopté sur division. Article 33. Est-ce que cet article est adopté?

M. Saint-Germain: Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Lacoste): Adopté. Article 34. Il y a un amendement de la part du ministre. Est-ce que nous pouvons considérer l'amendement du ministre comme faisant partie de la loi?

M. Saint-Germain: Je n'ai pas d'objection, M. le Président. Mais quel est cet amendement? Est-ce que je l'ai?

M. Joron: On peut prendre les différents paragraphes un par un.

Le Président (M. Lacoste): On pourrait peut-être considérer votre amendement comme étant un nouvel article. Est-ce qu'il y a un accord là-dessus?

M. Joron: On va discuter de cela, tel qu'amendé.

Le Président (M. Lacoste): D'accord. Nouvel article 34. M. le ministre.

M. Joron: Au deuxième paragraphe, à moins que le député de Jacques-Cartier ait une question sur le premièrement. Je n'ai pas de commentaire à 1°.

M. Saint-Germain: Moi non plus.

M. Joron: À 2°, l'amendement avait pour but d'ajouter "de faire parvenir un avis écrit", pour que ce soit plus clair et qu'il n'y ait pas de mauvaise interprétation. Est-ce que cela va pour 2°?

M. Saint-Germain: Que cet avis soit envoyé par écrit, c'est certainement une amélioration, M. le Président. Mais il y a quelque chose de fondamental. Si l'agent de recouvrement ne peut pas parler au débiteur, il faut tout de même admettre que cela va le handicaper sérieusement dans le but qu'il veut atteindre pas son travail. Ses moyens de faire pression — je ne parle pas de pression indue ou d'exagération — vont être de beaucoup diminués. Il faut se demander si ce n'est pas là un article qui va faire disparaître une bonne partie des agents de recouvrement, parce que leurs moyens de travailler efficacement vont être diminués.

Il faut tout de même admettre que si ce n'est pas la majorité des débiteurs, il y en a une bonne partie qui sont sérieusement de mauvaise foi. Si on ne peut pas communiquer oralement avec ces gens-là, les lettres vont aller au panier, tout simplement.

Le Président (M. Lacoste): Est-ce que le nouvel article 34 est adopté?

M. Saint-Germain: II y a aussi les heures, M. le Président.

M. Joron: C'est à la demande de l'Association des agences de recouvrement qu'on a changé de neuf heures à vingt et une heures pour de huit heures à vingt heures.

M. Saint-Germain: C'est ce qu'on m'avait demandé aussi. Je suis heureux de voir que le gouvernement s'est rendu à ces représentations.

M. Joron: II en est de même pour le dernier paragraphe qui est ajouté, après l'alinéa 8°, qui se lit comme ceci maintenant, si on lit le texte tel qu'amendé. Il y a un ajout qui serait: "L'avis prévu au paragraphe 2° du premier alinéa est valable pour trois mois à partir de la date où il est envoyé au titulaire de permis et vaut pour toutes les créances que ce titulaire est chargé de recouvrer du débiteur pour un même créancier."

C'est également à la demande de l'Association des agences de recouvrement que nous avons ajouté ce paragraphe.

M. Saint-Germain: C'est pour un même créancier seulement. C'est une autre demande. Cela va. (11 h 45) "À l'exception du paragraphe 5 du premier alinéa et malgré le paragraphe 2 de l'article 6, le présent article s'applique également lorsqu'un agent de recouvrement réclame..." Je suppose que le dernier paragraphe a été demandé.

Le Président (M. Lacoste): Le nouvel article 34 est-il adopté?

M. Saint-Germain: Un instant, s'il vous plaît!

Le Président (M. Lacoste): M. le député de Jacques-Cartier.

M. Saint-Germain: Est-ce qu'il ne vous semble pas que trois mois, c'est un laps de temps un peu trop long pour le même avis?

Le Président (M. Lacoste): M. le ministre.

M. Joron: C'est un délai nécessairement arbitraire, comme tout délai qu'on fixe dans une loi. On peut toujours dire qu'on aurait pu mettre deux mois ou quatre mois. C'est une longueur qui a paru raisonnable tout simplement, pour les mêmes raisons qu'on fixe la majorité à 18 ans. Une personne peut être aussi mûre à 17 ans, etc. Il y a toujours une partie d'arbitraire lorsqu'on donne une précision mathématique dans un texte de loi. Trois mois, cela paraît raisonnable, tout simplement.

M. Saint-Germain: C'est bien long pour un agent de recouvrement qui reçoit un avis par écrit disant qu'on doit, avec le créancier, procéder exclusivement par écrit. Cela dure trois mois.

M. Joron: Quand les paiements sont mensuels, ce n'est quand même pas...

M. Saint-Germain: J'ai bien l'impression que...

Le Président (M. Lacoste): Le nouvel article 34 est-il...

M. Saint-Germain: Trois mois, cela ne semble pas exagéré?

Le Président (M. Lacoste): Le nouvel article 34 est-il adopté?

M. Saint-Germain: Adopté.

Le Président (M. Lacoste): Le nouvel article 34 est adopté. Article 35. L'article 35 est-il adopté? M. le député de Jacques-Cartier.

M. Saint-Germain: Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Lacoste): L'article 35 est adopté.

Appels

L'article 36?

M. Saint-Germain: Adopté.

Le Président (M. Lacoste): Article 36, adopté. L'article 37. L'article 37 est-il adopté?

M. Saint-Germain: Adopté.

Le Président (M. Lacoste): Article 37, adopté. L'article 38. L'article 38 est-il adopté?

M. Saint-Germain: Adopté.

Le Président (M. Lacoste): L'article 38 est adopté. L'article 39. L'article 39 est-il adopté?

M. Saint-Germain: L'article 38 ou 39?

Le Président (M. Lacoste): On est rendu à l'article 39.

M. Saint-Germain: Article 39, adopté.

Le Président (M. Lacoste): L'article 39 est adopté. L'article 40. L'article 40 est-il adopté?

M. Saint-Germain: Adopté.

Le Président (M. Lacoste): L'article 40 est adopté. L'article 41. L'article 41 est-il adopté?

M. Saint-Germain: Un instant, M. le Président! Adopté.

Le Président (M. Lacoste): L'article 41 est adopté. L'article 42?

M. Saint-Germain: Adopté.

Le Président (M. Lacoste): L'article 42 est adopté. Article 43? Est-ce que l'article 43 est adopté?

M. Saint-Germain: Adopté.

Le Président (M. Lacoste): L'article 43 est adopté. Article 44? Est-ce que l'article 44 est adopté?

M. Saint-Germain: Adopté.

Le Président (M. Lacoste): L'article 44 est adopté.

Preuve, procédure et recours civils

Article 45? Est-ce que l'article 45 est adopté?

M. Saint-Germain: Adopté.

Le Président (M. Lacoste): L'article 45 est adopté. Article 46? Est-ce que l'article 46 est adopté?

M. Saint-Germain: Adopté.

Le Président (M. Lacoste): L'article 46 est adopté. Article 47? Est-ce que l'article 47 est adopté?

M. Saint-Germain: Adopté.

Le Président (M. Lacoste): L'article 47 est adopté. Article 48? Est-ce que l'article 48 est adopté?

M. Saint-Germain: Adopté.

Le Président (M. Lacoste): L'article 48 est adopté. Article 49? Est-ce que l'article 49 est adopté? M. le député de Jacques-Cartier.

M. Saint-Germain: L'article 49 semble soulever bien des commentaires. Est-ce que, par la teneur de cet article, on ne va pas beaucoup plus loin que les dommages et intérêts du Code civil basés sur la notion de "faute"?

Le Président (M. Lacoste): M. le ministre.

M. Joron: Non, on ne va pas plus loin, parce que cet article 49 ne prévoit pas la possibilité de dommages et intérêts exemplaires. La personne qui va intenter un recours en vertu du projet de loi 54 devra démontrer qu'il y a eu manquement à la loi, devra démontrer qu'elle a subi un dommage. C'est à partir de ce moment qu'il pourra y avoir un jugement en sa faveur. Il n'est pas question de dommage exemplaire ou de dommage punitif, comme il y en a dans le projet de loi 72. En plus des dommages et intérêts réels, on permet au consommateur d'exiger des dommages et intérêts exemplaires, mais ce n'est pas le cas ici dans ce projet.

Il s'agit de vrais dommages.

C'est cela.

M. Saint-Germain: Si cet article n'existait tout simplement pas, est-ce que, par le Code civil, les gens n'auraient pas la même protection?

Le Président (M. Lacoste): M. le ministre.

M. Joron: Là-dessus, l'utilité de l'article 49 est la suivante: le projet de loi prévoit un cautionnement pour indemniser les personnes qui subissent des dommages à la suite de la violation de la loi. Il y a donc tout un système d'indemnisation qui va être précisé dans le règlement pour violation de la loi 54. Il paraît normal que le recours qui va donner ouverture à cette indemnisation soit prévu dans le texte même de la loi, pour ne pas avoir la situation où, par exemple, une personne obtiendrait jugement en vertu du Code civil et demande à être indemnisée en vertu d'une loi particulière comme celle-ci. Le début, comme la fin de tout le système d'indemnisation, se trouve dans la loi 54 et le règlement. C'est l'utilité d'avoir l'article 49.

Le Président (M. Lacoste): Est-ce que l'article 49 est adopté? M. le député de Jacques-Cartier.

M. Saint-Germain: Pourquoi vous servez-vous du terme "toucher"? Il me semble que "toucher", c'est un terme qui est très vague et qui risque de donner lieu à des poursuites qui pourraient être farfelues. Ne croyez-vous pas? Pourquoi "toucher"? Ce n'est pas un terme nouveau.

M. Joron: L'article accorde un recours en dommages et intérêts. C'est bien entendu qu'une personne qui intente un recours en dommages et intérêts devant un tribunal doit avoir un intérêt. C'est elle qui doit avoir subi le dommage. Donc, que ce soit le terme "toucher" ou un autre terme, si vous voulez, le terme "toucher" n'est pas plus large que tout autre, il reste que la personne qui veut intenter un recours doit, comme n'importe qui qui se présente devant un tribunal, faire valoir son intérêt à intenter la poursuite, faire valoir que c'est elle qui a subi le dommage...

Et non pas quelqu'un d'autre.

C'est cela. Il faut désigner la personne en question.

Le Président (M. Lacoste): Est-ce que l'article 49 est adopté?

M. Saint-Germain: C'est parce que, d'après le dire de certains avocats, c'est un terme qui est très vague, qui est mal défini et, comme les amendes qui en découlent peuvent être très considérables, on est inquiet relativement à la rédaction de cet article.

M. Joron: Qu'est-ce qu'on suggérerait comme... La personne touchée par le manquement... C'est l'équivalent de dire quoi? La personne visée ou la personne qui a subi un manquement? Pour ma part, j'ai l'impression que ce sont des arguties de linguistes. Cela veut tout dire la même chose, enfin...

M. Saint-Germain: Je ne suis ni juriste, ni avocat, M. le Président; si le ministre voulait bien me prêter son équipe, on pourrait en discuter, mais, seul, je n'oserais pas soumettre...

M. Joron: Oui, c'est ça.

M. Saint-Germain: ... un autre terme ou une autre rédaction à l'article, de façon à le clarifier.

M. Joron: C'est parce que je ne crois pas que le problème soit vraiment dans l'emploi du mot "touchée". Il est certain que la personne qui intente un recours en justice, il faut que ce soit elle qui ait subi le dommage. Prenons un exemple, disons, un peu grossier. Un agent de recouvrement, pour les fins de l'exemple, insulte un homme. L'épouse de cet homme dit: Écoutez, vous n'avez pas le droit d'insulter mon mari ou de le harceler comme vous l'avez fait. Moi, ça me touche. Si elle se présente devant un tribunal pour réclamer des dommages, à cause de ce manquement-là... ... la personne touchée... ... vous pouvez être certain que le tribunal va juger qu'elle n'a pas d'intérêt pour intenter la procédure. C'est le mari lui-même qui devrait le faire. De toute façon, l'intérêt pour intenter une procédure judiciaire, c'est une des conditions pour intenter pareil recours et c'est le tribunal qui a le contrôle de ça. Alors, qu'on emploie le mot "touchée" ou tout autre mot ici, je ne crois pas que ça cause des problèmes d'application.

Le Président (M. Lacoste): Est-ce que l'article 49 est adopté? M. le député de Jacques-Cartier.

M. Saint-Germain: C'est parce que cet article est presque une invitation, si vous voulez, aux gens à se servir des tribunaux et, comme je le disais...

M. Joron: Remarquez que...

M. Saint-Germain: Pourquoi, puisque vous me le demandez, ne pas se servir du mot "préjudice" par exemple? Remplacer "préjudice"...

M. Joron: Au lieu de "touchée" par le manquement, on dirait "la personne qui a subi préjudice"?

M. Sant-Germain: Bien oui.

M. Joron: La personne qui subit le préjudice peut demander des dommages-intérêts?

M. Saint-Germain: Bien oui.

M. Joron: La personne qui en subit un préjudice, oui...

M. Saint-Germain: Parce que c'est toujours un préjudice qui donne droit aux dommages. Il me semble que c'est un terme qui est régulier, qui est compris de tout le monde.

M. Joron: Attendez un peu.

Quant à moi, ça veut dire la même chose.

M. Saint-Germain: Cela me semble être un mot un peu plus souvent employé dans le Code civil comme dans les lois et qui veut bien dire ce qu'il veut dire. C'est clair, c'est précis.

M. Joron: II y a toujours le mot "préjudiciée"... La personne "préjudiciée" peut demander des dommages-intérêts.

Voulez-vous qu'on le suspende pendant qu'ils pèsent les mots et on y reviendra?

M. Saint-Germain: Pendant que vous y êtes, vous avez ici "si une personne manque à une obligation".

M. Joron: ... que lui impose la présente loi...

M. Saint-Germain: II me semble que ceci est bien large. Il me semble que c'est un mot qui est vague. Si on disait: Si une personne ne respecte pas une obligation, il me semble que c'est plus précis.

M. Joron: C'est un négatif, remarquez...

M. Saint-Germain: Manquer à une obligation, ne respecte pas une obligation, c'est clair et précis.

M. Joron: Je pense que toutes les lois sont à peu près faites dans ce langage. Je ne me réfère pas à la loi 72. Je me réfère à toutes nos lois. Manquer à une obligation, je pense que c'est un terme consacré dans...

M. Saint-Germain: Est-ce que c'est un terme consacré aussi bien défini que si on disait: Si une personne ne respecte pas une obligation... Est-ce que ça, ce n'est pas plus précis, plus clair, mieux défini? (12 heures)

M. Joron: Ne pas respecter une obligation et manquer à une obligation, quant à moi c'est la même chose.

M. Saint-Germain: Quel est le terme habituellement employé par les légistes?

M. Joron: Je dois vous dire qu'il n'y a pas de terme consacré pour ça, à mon sens.

On ne parle pas de n'importe quelle obligation, on parle d'obligation que lui impose la présente loi.

M. Saint-Germain: Si une personne ne respecte pas une obligation que lui impose la présente loi, il me semble que c'est... Enfin, vu qu'on suspend l'article, regardez donc tout ça.

M. Joron: D'accord, on suspend l'article 49.

Le Président (M. Lacoste): Consentement pour suspendre l'article 49? L'article 49 est suspendu. J'appelle l'article 50. Est-ce que l'article 50 est adopté?

M. Saint-Germain: Un instant! À l'article 50 on semble trouver que le terme de trois ans est très long. Par exemple, supposons qu'une personne perd son emploi parce qu'un agent de recouvrement n'a pas respecté les obligations de la loi. Ses employeurs sont devenus au courant de sa situation financière, etc., et cette personne perd son emploi. Cette personne peut apprendre qu'elle a perdu son emploi par les activités d'un agent de recouvrement et que lesdites activités de cet agent de recouvrement sont la cause de la perte de son emploi. Si je ne m'abuse, en supposant que cette personne apprend six mois ou un an après qu'elle a perdu son emploi à cause des activités d'un agent de recouvrement, elle a encore trois ans pour prendre action. Ce qui veut dire qu'à un moment donné un agent de recouvrement ou même le représentant d'un agent de recouvrement n'est plus à l'emploi de la compagnie et l'agent de recouvrement reçoit une action trois ans et demi plus tard. Cela me semble être très long.

Si l'action se prend après trois ans et demi, avant que cela soit passé devant les tribunaux, on est rendu à un nombre d'années qui me semble exagéré.

M. Joron: Le délai de trois ans, en matière de droit personnel, c'est le délai de prescription qui

est proposé dans le rapport de l'Office de révision du Code civil. C'est pour ça qu'on a mis trois ans, c'est aussi le délai de prescription général qui apparaît dans la loi 72. Ce n'est pas un évangile, mais c'est simplement une volonté d'être concordant avec ce qui s'en vient dans ces matières-là. Si l'article 49 n'existait pas, il y aurait, comme on le disait tout à l'heure... Les recours seraient moins clairs, ce serait moins lié au fonds d'indemnisation prévu par le dépôt en fiducie, mais il y aurait quand même un recours devant le Code civil et le Code civil, selon la recommandation du comité de révision, va aboutir avec cette prescription de trois ans. J'ai donc l'impression qu'on va avoir des trois ans uniformément partout. C'est pourquoi on l'a mis là, c'est pour ne pas avoir à amender la loi lorsque le Code civil le sera. On anticipe un peu sur quelque chose qui est déjà connu.

Le Président (M. Lacoste): Est-ce que l'article 50 est adopté?

M. Saint-Germain: C'est l'explication du terme de trois ans qui apparaît dans cette loi-là.

Le Président (M. Lacoste): Est-ce que l'article 50 est adopté?

M. Saint-Germain: Un instant, s'il vous plaît, M. le Président.

Le Président (M. Lacoste): M. le député de Jacques-Cartier.

M. Saint-Germain: Adopté.

Le Président (M. Lacoste): L'article 50 est adopté. L'article 51.

Règlements

M. Saint-Germain: Ici, on tombe à peu près dans la même discussion qu'on a eue tantôt au quatrième alinéa: "Prescrire des modèles d'avis de réclamation et de mandat de recouvrement. "

M. Joron: C'est ce qu'on a vu préalablement. En fait, on retrouve regroupées ici plusieurs évocations de ce qu'on vient de voir précédemment. On les retrouve toutes ici. Cela définit, en fait, le champ des règlements. Vous en avez probablement déjà une idée par l'avant-projet de règlement qu'on vous a remis la semaine dernière. En fait, il faut dire qu'ils ne sont pas si nombreux que cela les règlements, vous en avez déjà une bonne idée, bien que ce ne soit qu'un avant-projet, encore. Il y en avait aussi long de prévu, sinon plus, dans l'ancien projet de loi no 26, d'ailleurs. Je ne sais pas si vous l'avez devant vous. Je vais vous faire grâce de le lire, parce qu'il était deux fois plus long que celui-là.

M. Saint-Germain: Je ne veux pas défendre la loi de 1974 non plus, M. le Président, mais vous éliminez tout de même toute possibilité d'initiative et de distinction qui peut être un élément important dans ce commerce où, tout de même, il existe de la concurrence. Il me semble que c'est extrêmement rigide.

Le Président (M. Lacoste): Est-ce que l'article 51 est adopté?

M. Saint-Germain: On peut tout de même simplement exiger que le formulaire soit déposé auprès du directeur. C'est donc l'agent qui déciderait lui-même du formulaire et après cette décision, il pourrait simplement le faire accepter par le directeur. C'est plus qu'une nuance. C'est une différence extrêmement importante à mon avis. Vous ne croyez pas?

M. Joron: En fait, là-dessus, ou bien on prescrit le modèle des avis de réclamation par règlement avec consultation des milieux intéressés, ou bien on donne le pouvoir au président d'accepter ou de refuser les modèles d'avis de réclamation que les agents vont lui soumettre. Je ne suis pas certain que les agents préféreraient cette dernière solution.

Dans toute cette question de règlement, je pense effectivement que quand des règlements prévoient la forme des avis, les ceci, les cela, toutes les formes par lesquelles cette activité d'affaires se conduit, c'est à l'avantage de l'industrie — enfin ce n'est pas une industrie, mais de la profession concernée — de savoir clairement quels sont les instruments d'opération. J'ai vu un exemple un peu semblable dans le secteur dont j'étais responsable avant le remaniement ministériel. Les distributeurs détaillants d'huile à chauffage ont longtemps demandé justement que le gouvernement prescrive un contrat type de fourniture qui les lie avec leurs fournisseurs, les raffineries. C'était quelque chose qui était demandé par tous les commerçants, non pas que l'on devait faire un contrat type qui était le seul valable, mais un contrat avec les clauses minimales qui permettaient à tout le monde de savoir un peu plus clairement à quoi s'attendre, comment la "business" se déroule, etc. Il y a un avantage à avoir des formes prescrites par rapport à l'absence de modèle, il y a un avantage pour les professionnels impliqués aussi.

M. Saint-Germain: Je ne soutiendrai pas que, nécessairement, c'est au désavantage des agents de recouvrement, j'avoue que je n'ai pas eu le renseignement sur cet alinéa précisément, mais il faudrait au moins le savoir. D'ailleurs, je le répète, M. le Président, je crois que cela aurait été très facile, en commission parlementaire, de dialoguer et d'arriver à des conclusions valables sur ces points donnés. À mon avis, cela dépend jusqu'à quel point on veut réglementer la libre entreprise pour protéger les individus. On peut soulever ce débat dans la teneur d'un tel alinéa. Enfin, on ne fera pas cela ce matin.

Le Président (M. Lacoste): Est-ce que l'article 51 est adopté?

M. Saint-Germain: C'est très vague. Il y a certains renseignements, on devrait au moins savoir dans quelles circonstances ces renseignements devraient être donnés. Cela peut aller très loin, les pouvoirs qu'on veut donner au président de l'office, "déterminer les renseignements qu'un titulaire de permis doit fournir au président, à un débiteur ou à un créancier."

Il me semble qu'on aurait pu être rigoureux dans la rédaction de cet alinéa.

M. Joron: Encore une fois, c'est assez difficile...

M. Saint-Germain: À moins d'établir dans quelles circonstances certains renseignements devront être donnés.

M. Joron: Généralement, ce type de renseignements seront exigés dans le cadre d'une demande de permis. Ils le seront aussi dans une circonstance plus particulière, quant au rapport annuel qu'un titulaire de permis doit fournir au président. Un instant, que je le retrouve.

Encore une fois, d'une façon plus spécifique, les renseignements demandés peuvent être ceux annoncés par l'article 25, alinéa 3, au sujet des états financiers qui doivent être accompagnés des renseignements prescrits par règlement. Alors, c'est un type de renseignements que peut exiger le président, lorsque le rapport annuel est fourni, mais ce n'est quand même pas limitatif. La dernière ligne de l'article 25.

M. Saint-Germain: Oui.

M. Joron: Le cadre est bien défini.

M. Saint-Germain: C'est le cadre dans lequel...

M. Joron: C'est un des cadres dans lesquels les renseignements peuvent être exigés. Mais il y en a d'autres, comme les demandes de permis. Le président peut exiger...

M. Saint-Germain: Cela ne s'applique pas nécessairement, exclusivement...

M. Joron: Ce n'est pas ce que j'ai dit. C'est un exemple de cas où ce pouvoir réglementaire peut s'appliquer. Il y en a d'autres.

M. Saint-Germain: Vous le déterminez ici, dans l'article 25. C'est bien défini.

M. Joron: Oui.

M. Saint-Germain: Pourquoi dépasser? Si vous croyez qu'il est nécessaire d'aller plus loin, pourquoi ne pas le définir?

M. Joron: Un exemple, justement, dans le cas d'une demande de permis, où certains renseignements peuvent être demandés, les nom et adresse de certaines personnes. Par exemple, le président...

(12 h 15)

M. Saint-Germain: S'il s'agit d'avoir juste le nom et l'adresse, il n'y a pas d'objection. Pour les renseignements pertinents à l'obtention d'un permis, il n'y a pas d'objection. Mais si vous ne mettez pas de limite, on peut faire des abus.

M. Joron: C'est sûr qu'on peut toujours abuser des pouvoirs d'une loi. Prenez un autre exemple. Encore une fois, c'est difficile de cerner les cas précis où des demandes de renseignements peuvent être faites par le président. Le président peut refuser de délivrer un permis s'il est d'avis que le demandeur n'est pas en mesure, en raison de sa situation financière, d'assumer les obligations qui découlent de son activité. Article 11, paragraphe 1.

Le président pourrait demander certains renseignements de nature à l'éclairer sur la situation financière du demandeur d'un permis. Encore là, ce seraient des renseignements qu'il pourrait demander en vertu de ce pouvoir qui est prévu ici.

M. Saint-Germain: Je n'ai pas d'objection à cela, quand vous les définissez comme tels. Mais lorsque vous gardez cette généralité qu'il y a là, c'est là qu'on peut faire des abus.

M. Joron: Je pense bien que cela s'interprète, de toute façon.

M. Saint-Germain: Vous avez deux raisons, qui me semblent être bien décrites, pour lesquelles le président peut demander des renseignements pertinents.

M. Joron: II y a une foule de raisons. C'est cela, le problème. On ne peut pas toutes les déterminer. Prenez le cas où un transfert de permis peut être effectué à la suite du décès du titulaire. Le président peut demander la preuve que le titulaire est mort, en exigeant un certificat de décès.

Bien que la loi ne le prévoie pas, par ailleurs.

Il y a une foule de cas où le président a intérêt à demander des renseignements. Ce n'est justement pas possible de tout prévoir cela.

M. Saint-Germain: Ce n'est pas possible?

M. Joron: Écoutez, on peut avoir une énumération qui ne sera jamais exhaustive, mais une énumération considérable, qui couvrirait des pages et des pages.

M. Saint-Germain: Mais il pourrait y avoir une énumération suffisante pour que le président soit bien renseigné sur la situation financière du type, pour voir s'il est mort ou s'il n'est pas mort. Ce n'est pas difficile à prévoir.

Il peut, si le coeur lui en dit, aller beaucoup plus loin que cela. La loi le lui permet.

M. Joron: II y a quand même un minimum de...

M. Saint-Germain: Lorsque vous dites qu'il n'y a pas moyen ou qu'il y a tellement de renseignements qu'on ne peut pas prévoir, je m'excuse, mais je ne peux pas aller si loin que cela. On peut certainement prévoir quelle sorte de renseignements le président doit nécessairement recevoir. Cela me semble évident.

M. Joron: II y a sûrement des renseignements qui ont rapport à l'application de la loi ou à l'exercice de ce qu'on parle. Il n'a pas d'affaire à demander des renseignements au sujet de quelles sortes de sports il préfère pratiquer ou je ne sais quoi.

M. Saint-Germain: II a l'entière liberté de déterminer les renseignements qu'un titulaire de permis doit fournir au président, à un débiteur ou à un créancier. C'est vaste. Cela comprend tout. Il n'y a aucun problème là, aucune limite. Il s'agirait de dire que c'est impossible.

M. Joron: On pourrait, si cela vous satisfait, ajouter "aux fins de l'application de la présente loi."

M. Saint-Germain: II y aurait au moins une certaine barrière.

M. Joron: J'en fais un amendement. Voulez-vous que l'on suspende celui-là aussi? On va rédiger ensemble les trois articles où on peut avoir des amendements et on les amènera à la toute fin?

M. Saint-Germain: Oui. Au paragraphe 10, on dit "exempter, aux conditions qu'il détermine, une catégorie de personnes ou de créances de l'application totale ou partielle de la présente loi." J'avoue, qu'on puisse, par règlement, exempter une catégorie de personnes ou une catégorie de créances de l'application totale ou partielle de la présente loi, passer réellement la limite, M. le Président. Je crois que c'est absolument inacceptable que le gouvernement s'arroge le pouvoir de décider à qui la loi s'appliquera ou ne s'appliquera pas. Je crois que c'est là un pouvoir qui appartient exclusivement à la Législature. Je ne crois pas que la Législature doive se départir de ce pouvoir. C'est absolument un principe de base dans notre démocratie et dans notre système parlementaire. C'est absolument inconcevable qu'on en arrive là. Là, je crois qu'il y a un abus flagrant. Je crois que, dans son ensemble, l'Assemblée nationale devrait fortement s'opposer à cet alinéa. Je ne sais pas qui est responsable de la rédaction de cet alinéa, mais, pour un législateur, c'est un article qui est absolument inacceptable pour aucune considération. C'est la limite, présenter un projet de loi et laisser, par règlement, la liberté au cabinet de dire: Cela s'applique à l'un et cela ne s'applique pas à l'autre, etc. Cela ne tient pas debout. C'est un abus flagrant. Si on ne peut pas prévoir immédiatement qui sera soumis et qui ne sera pas soumis à la loi, c'est aberrant.

Le Président (M. Lacoste): M. le ministre.

M. Joron: En fait, le problème que vous soulevez, c'en est un d'envergure pour ce qui est de la répartition des pouvoirs entre le législatif et l'exécutif, mais, dans le cadre du projet de loi qu'on étudie actuellement, ce paragraphe 10 de l'article 51 n'est pas un pouvoir absolu de faire des exemptions à l'application de la loi, parce que le pouvoir réglementaire doit s'exercer dans certaines limites. Un pouvoir réglementaire ne peut pas avoir pour effet d'enlever justement tout l'effet d'une loi, ne peut pas être contraire à l'application de la loi.

Egalement, tel que ce paragraphe est rédigé, on voit: "exempter, aux conditions qu'il détermine, une catégorie de personnes ou de créances de l'application totale ou partielle de la présente loi." Ce ne sont évidemment pas des individus en particulier qui seront favorisés par rapport à d'autres. C'est justement là une des limites du pouvoir d'exemption.

L'exemption, quand il y en a une, s'adresse à une certaine universalité de personnes ou de créances. Ce n'est pas un cas particulier. Ce n'est pas une discrimination, si on veut. Ce type de pouvoir, on le retrouve dans plusieurs lois des autres provinces canadiennes. Ce n'est pas un précédent dans la législation québécoise. Je peux vous donner simplement un exemple de la commodité de cet article, parce que c'est cela avant tout. C'est pour éviter d'avoir à revenir devant l'Assemblée nationale à chaque fois qu'on veut faire un amendement qui n'a pas une très grande portée. On a, à l'article 6, une énumération de personnes à qui le chapitre III ne s'applique pas. Cette énumération comprend peut-être une douzaine ou une quinzaine de personnes. Il est possible qu'il y ait des omissions. Ce n'est pas nécessairement exhaustif. Il peut arriver, à un moment donné, dans l'application d'une loi, que le législateur n'ait pas du tout l'intention de régir les activités d'un type de personnes en particulier. Au moyen du pouvoir réglementaire, on pourra faire une exemption sans, encore une fois, avoir besoin de revenir devant l'Assemblée nationale.

Il serait utile, pour exemplifier ce qu'on veut dire, de relire l'article 6. On dit: "Le présent chapitre ne s'applique pas — on va comprendre pourquoi, on parle justement de catégories de personnes — au curateur public, à un avocat, un notaire, un agent d'assurance, un huissier, un shérif, un syndic, un liquidateur, un séquestre, un tuteur, un curateur, un exécuteur testamentaire, un fiduciaire ou une compagnie de fidéicommis..." Il est bien possible qu'on puisse en avoir oublié une, deux ou trois, ou que, dans les prochaines années, apparaissent une catégorie de personnes ou d'institutions, comme celles qui sont décrites ici, qui, de par la nature même de leurs fonctions, devraient être exemptées.

Le Président (M. Lacoste): M. le député de Jacques-Cartier.

M. Saint-Germain: M. le Président, que cette exemption puisse s'appliquer à une catégorie de personnes ou à une personne en particulier...

M. Joron: ... pas à une personne en particulier.

M. Saint-Germain: ... ce n'est pas là le principe. S'il fallait que cela s'applique à une personne en particulier, ce serait inimaginable. Cela ne tient pas.

M. Joron: C'est sûr. D'accord. C'est évident.

M. Saint-Germain: Qu'on puisse exempter une catégorie de personnes, je crois qu'en somme, ce n'est pas un argument valable. Si on n'a pas été capable de prévoir, à l'article 6, une catégorie de personnes à laquelle la loi ne devra pas s'appliquer...

Écoutez, l'Assemblée nationale, je crois, représente bien la population. En somme, l'Assemblée nationale peut comprendre très facilement si la loi doit s'appliquer ou non à une catégorie de personnes en particulier ou non. Je ne vois aucun désavantage, dans ces conditions, à revenir avec un amendement pour exclure ou inclure un groupe particulier, s'il arrive que, par l'expérience, encore plus prouvée à l'Assemblée nationale, un tel groupe de personnes doit être exempté. Mais qu'on le fasse par règlement et qu'on essaie de faire croire qu'on doit, dans ces conditions, se dispenser de la volonté de l'Assemblée nationale, je n'y crois pas, M. le Président, je n'y crois absolument pas! Dans ces conditions, on peut changer la portée de la loi énormément, et ce n'est pas l'inconvénient ou les inconvénients qu'il pourrait y avoir à revenir à l'Assemblée nationale avec un amendement, ce n'est pas en relation de l'importance qu'il y a pour l'Assemblée nationale de toujours déterminer à qui la loi s'applique et à qui elle ne s'applique pas. Cela me semble fondamental. C'est un droit qui devrait être respecté. Les petits inconvénients qui pourraient arriver au gouvernement dans l'application de la loi, telle qu'elle est rédigée, ne sont absolument rien à comparer avec ce principe qui est fondamental dans notre système parlementaire. S'il faut revenir, revenons. Ce sera une loi... Elle sera considérée importante ou non. Ce sera la responsabilité de l'Assemblée nationale de le déterminer et c'est à elle, et à elle seule, que reste l'obligation de déterminer si la loi peut être amendée ou non amendée. Cela ne devrait jamais se faire par règlement, jamais! C'est un précédent extrêmement dangereux. Ce paragraphe devrait absolument être biffé.

M. Joron: II y a un mérite à l'argumentation du député de Jacques-Cartier là-dedans, bien entendu, sauf que le problème qu'il soulève, je ne sais pas s'il nous appartient ici de le régler par un précédent, parce que le même pouvoir existe dans d'autres de nos lois, il existe dans toutes les autres provinces. Alors, c'est...

M. Saint-Germain: Écoutez, là...

M. Joron: ... une discussion d'une très grande envergure que vous soulevez là.

M. Saint-Germain: Écoutez!

M. Joron: Je ne pense pas que ce soit à l'occasion du dixième paragraphe de l'article X de notre loi qu'on va la régler.

M. Saint-Germain: Je crois qu'il y a là-dedans suffisamment de matière, M. le Président, à s'opposer catégoriquement. Je crois que c'est un abus flagrant de la réglementation. Les inconvénients que pourraient subir certaines personnes sont mineurs en enlevant le paragraphe, et pourquoi se gêner de revenir, dans ces conditions, à l'Assemblée nationale? Cela, je n'y crois pas.

Ce n'est pas d'ailleurs sur ces genres de discussions que les longs débats se font et, si l'Assemblée nationale juge à propos de faire un long débat parce qu'on veut, dans un amendement à la loi, inclure ou exclure un groupe, c'est qu'elle aura jugé que c'est important. Si elle juge que c'est mineur, ça passera sans discussion.

Le Président (M. Lacoste): Nous avons eu tantôt une demande à l'effet de suspendre l'étude de l'article 51. Est-ce qu'il y a consentement pour...

M. Joron: Je n'ai pas autre chose à ajouter au sujet de l'article 51, paragraphe 10. Est-ce qu'on suspend toujours l'article afin d'amender les autres paragraphes, quitte à...

M. Saint-Germain: Vous pourrez passer au paragraphe 10 parce qu'autrement, la discussion...

M. Joron: On va y penser en même temps. On suspend également l'article 51.

Le Président (M. Lacoste): Nous avons le consentement pour suspendre l'étude de l'article 51.

M. Saint-Germain: À quelle heure finit-on, M. le Président?

Le Président (M. Lacoste): 12 h 30.

M. Saint-Germain: Je n'ai pas objection personnellement pour ce soir ou cet après-midi. On devrait terminer avec une autre courte séance.

M. Joron: J'ai une conférence ce soir. Voulez-vous qu'on arrête là et qu'on revienne cet après-midi avec...

M. Saint-Germain: D'accord. Est-ce qu'on revient cet après-midi?

M. Joron: Pendant ce temps-là, on peut peut-être en voir quelques autres et on arrêtera dans cinq minutes.

Le Président (M. Lacoste): Est-ce qu'il y a consentement pour...

M. Saint-Germain: Si on veut bien...

M. Joron: C'est juste pour avoir la réponse, à savoir quand on revient.

M. Saint-Germain: On l'aura en Chambre, je suppose.

M. Joron: Oui.

Le Président (M. Lacoste): D'accord. La commission ajourne ses travaux sine die.

Suspension de la séance à 12 h 31

Reprise de la séance à 16 h 02

Le Président (M. Lacoste): À l'ordre, messieurs!

La commission permanente des consommateurs, coopératives et institutions financières est réunie pour étudier article par article le projet de loi no 54, Loi sur le recouvrement de certaines créances.

Les membres de la commission sont: M. Lavigne (Beauharnois) qui remplace M. Beausé-jour (Iberville); M. Alfred (Papineau) qui remplace M. Bisaillon (Saint-Marie); M. Goulet (Bellechasse); M. Marquis (Matapédia) remplace M. Laberge (Jeanne-Mance); M. Raynauld (Outremont) remplace M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys); M. Mi-chaud (Laprairie) remplace M. Lefebvre (Viau); M. Baril (Arthabaska) remplace M. Paquette (Rosemont); M. Joron (Mille-Îles) remplace Mme Payette (Dorion), M. Samson (Rouyn-Noranda), M. Saint-Germain (Jacques-Cartier).

Les intervenants sont: M. Fontaine (Nicolet-Yamaska); M. Bisaillon (Sainte-Marie) remplace M. Gagnon (Champlain); M. Giasson (Montmagny-L'Islet); M. Gosselin (Sherbrooke); M. Gravel (Limoilou); Mme LeBlanc-Bantey (Îles-de-la-Madeleine); M. Perron (Duplessis); M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys) remplace M. Raynauld (Outremont).

Au moment de l'ajournement de nos travaux, nous avions suspendu l'article 51. Nous étions rendus à l'article 52.

M. Joron: Avant d'aborder l'article 52, M. le Président, je voudrais faire une mise au point, s'il vous plaît.

Pour répondre à une question qu'avait posée M. le député de Jacques-Cartier ce matin, à propos de l'application de l'article 6, paragraphe 4, c'est une exemption au sujet du recouvrement auprès d'un commerçant, d'une créance qui a pris naissance dans l'exploitation de son commerce.

L'agence de recouvrement qui ne fait que recouvrer les créances auprès d'un commerçant, telle que décrite au paragraphe 4, n'aura pas à être titulaire d'un permis, si elle ne fait que cela.

M. Saint-Germain: ... même le permis.

M. Joron: Non.

M. Saint-Germain: Merci.

Le Président (M. Lacoste): Maintenant, l'article 52.

M. Saint-Germain: Pour quelles raisons exemptez-vous du permis dans des cas semblables? Je vous demande cela parce que de par la loi, il est bien possible que l'Association des agents de recouvrement se reforme pour se donner une importance un peu plus considérable et vous allez laisser tout un champ d'activité ouvert à tout le monde. Si on veut réellement que les agents de recouvrement continuent à oeuvrer, malgré la rigueur de la loi, comme je l'ai dit ce matin, c'est peut-être là un champ d'activité qui pourrait être une porte de sortie pour eux ou qui pourrait prendre dans le partage de leurs revenus une part beaucoup plus considérable que dans le passé. Voilà que vous laissez ce champ ouvert à tout le monde.

Le Président (M. Lacoste): M. le ministre.

M. Joron: En fait, on sait très bien que la loi s'applique pour régir les relations entre le créancier et le débiteur et que ce n'est pas nécessairement une relation qui coïncide avec celle du commerçant et du consommateur. On sait très bien quand même que le but d'une loi comme celle-là, c'est de protéger non pas le consommateur, mais le débiteur qui, dans la plupart des cas, est consommateur. Pour ce qui est de la perception des créances entre commerçants, ce qui sera le cas quand l'article 6, paragraphe 4, va s'appliquer, généralement, on ne sent pas le besoin d'intervenir dans ces relations-là.

Bien sûr, le chapitre II du projet de loi va s'appliquer à ce type de recouvrement de créances, mais, comme tel, le régime spécial du chapitre III pour les agents, on ne sent pas le besoin, pas plus qu'on l'a senti dans le cadre du projet de loi no 26, de remettre cette exception-là en question.

Le Président (M. Lacoste): M. le député d'Outremont.

M. Raynauld: M. le Président, je me souviens d'une clause semblable qui a été adoptée à propos d'un autre projet de loi dont je ne me souviens pas exactement la nature, mais sans doute que cela devait être sur la protection du consommateur. L'expression était semblable aussi dans cet autre projet de loi-là. Je trouve cette expression extrêmement ambiguë, parce qu'il faut bien comprendre que, si j'ai compris, cela s'applique non pas à un commerçant qui a des créances auprès de ses consommateurs, mais à un commerçant avec un autre commerçant. Autrement dit, cela ne s'applique pas lorsque le commerçant veut réclamer une créance d'un autre commerçant qui lui a vendu des produits...

Une voix: Un fournisseur.

M. Raynauld: ... un fournisseur, mais cela ne s'applique pas de l'autre côté. En ce qui concerne les consommateurs, il y a une agence de recouvrement de ces dettes-là, des consommateurs envers un commerçant, là la loi s'applique. "Qui a pris naissance dans l'exploitation de son commerce", c'est une expression qui se rapporte seulement aux achats du commerçant et qui ne se rapporte pas aux rentes de ce commerçant auprès des consommateurs. Je dis que cette expression est ambiguë. Il me semble qu'on aurait pu se forcer pour trouver autre chose que cela, parce qu'un commerçant qui exploite son commerce, tout le monde comprend à première vue qu'il s'agit bien des ventes qui sont faites au consommateur dans l'exploitation de son commerce; c'est ce que cela veut dire.

Eaton vend à tous les jours, et dans l'exploitation du commerce de Eaton, il y a une créance qui vient tout à coup, parce qu'il y a un consommateur qui n'a pas payé sa dette. À ce moment, le chapitre s'applique. Quand vous dites que cela ne s'applique pas dans l'exploitation de son commerce, vous faites référence aux achats que Eaton fait auprès d'un autre commerçant ou d'un manufacturier. L'agent de recouvrement est libre de faire ce qu'il veut, suivant la théorie que vous défendez, qui est une bonne théorie, entre vous et moi. On est obligé de supposer à ce moment que ce sont non seulement des adultes consentants, mais connaissants. On dit: D'accord, on n'a pas besoin de protection spéciale. Remarquez que je pense la même chose ici de tous les consommateurs, mais c'est une autre question.

Il me semble ici que si on doit revenir encore à une exploitation comme celle-là, je suggérerais fortement au ministre d'essayer de prendre cette suggestion en délibéré, et de trouver une autre formule que celle-là, parce que les gens qui lisent cela vont se dire - j'en suis absolument certain — que dans toutes les relations avec les commerçants, à ce moment, les agents de recouvrement ne sont pas soumis à la loi. Ce n'est pas l'intention du tout. Il faudrait réexaminer cette expression qui est utilisée ici, qui prête à confusion.

M. Joron: Dans ce paragraphe, les mots importants finalement sont "auprès d'un commerçant". Tout de suite, cela dit que la créance qui va être exemptée, c'est quand le commerçant est un débiteur. C'est comme cela qu'on s'était exprimé dans le projet de loi no 26 où on disait: "lorsque le débiteur est un commerçant et que la créance qui fait l'objet de recouvrement a pris naissance dans l'exploitation de son commerce." Cela a été pour traduire cette idée.

Il semble qu'on n'ait pas trouvé une meilleure expression.

Remarquez qu'évidemment c'est une autre formulation qu'on a cru meilleure que celle qui est employée ici, mais c'est pour dire la même chose. On pense qu'elle est meilleure que celle qui est employée ici, mais...

Le Président (M. Lacoste): M. le député de Jacques-Cartier.

M. Saint-Germain: Si un commerçant devient consommateur en ce sens qu'il achète une machine à polycopier, par exemple, pour son propre usage. Il achète une marchandise dont il se sert dans l'exploitation de son commerce, mais qu'il ne revend pas. Qu'est-ce qui arrive? Est-ce qu'il est considéré comme un consommateur, en partant de là?

M. Joron: C'est quand même une notion qui a trait à l'application de la loi 72. Dans l'exemple que vous donnez, si le commerçant s'achète une machine à photocopier pour ses besoins personnels — cela peut se produire — et qu'il ne s'en sert pas dans son commerce...

M. Saint-Germain: Prenez une caisse enregistreuse...

M. Raynauld: Non, il s'en sert dans son commerce.

M. Joron: Ah! Écoutez, s'il s'en sert dans son commerce, c'est une créance qui prend naissance dans l'exploitation de son commerce. Il s'achète une caisse enregistreuse pour l'exploitation de son commerce. Donc, elle va être exemptée... elle répond parfaitement à la description qui est faite au paragraphe 4. Mais si un commerçant ou un épicier s'achète une voiture pour son usage personnel, non pas une voiture de livraison, mais pour son usage à lui, ou n'importe quel autre bien, il va être considéré comme n'importe quel débiteur.

M. Saint-Germain: Dans vos discussions avec les représentants de l'Association des agents de recouvrement, est-ce que vous avez discuté de ce permis ou de ce non-permis que doit posséder celui qui recouvre des créances d'un commerçant dans l'exploitation de son commerce? Avez-vous eu un avis là-dessus?

M. Joron: On n'a pas eu de remarques particulières là-dessus. L'idée d'avoir un permis, à ma connaissance, n'avait pas été contestée lorsqu'on l'a imposée en vertu du projet de loi no 26.

M. Saint-Germain: Oui, mais, écoutez, vous avez rédigé cette loi...

M. Joron: Oui.

M. Saint-Germain: ... et vous m'avez dit ce matin qu'il y avait un permis. Là, après analyse, vous revenez pour dire qu'on n'a pas besoin de permis. C'est donc dire que ce n'est pas facile d'interprétation. Comment voulez-vous qu'on ne puisse pas ou qu'on puisse, si vous voulez, pour un profane qui lit cette loi et même s'il veut bien l'analyser, à la lecture de cet alinéa, en déduire ce que vous avez déduit avec... hésitation, remarquez

bien, après y avoir réfléchi, l'avoir mûri? C'est beaucoup, ça. Alors, le fait qu'il n'y en a pas eu, est-ce que vous croyez qu'il n'y aurait pas eu lieu, tout de même, avant de prendre une décision, de savoir si les agents de recouvrement auraient voulu ou non, libre au législateur, au cabinet ou au ministre de prendre sa décision. Peut-être... Je ne le sais pas. Je ne connais pas assez les agents de recouvrement, dans l'exploitation de leur commerce de tous les jours, pour savoir s'il y a pour eux un inconvénient ou un actif dans le fait qu'il n'y a pas de permis nécessaire pour oeuvrer là-dedans, mais, comme je vous le dis, il m'a été dit et expliqué que beaucoup d'agents de recouvrement, vu la rigueur de la loi, vont laisser tomber les consommateurs ordinaires pour essayer de se créer une clientèle parmi les commerçants, où ce sera plus facile. Si vous enlevez le permis, vous laissez ce champ d'activité grand ouvert. Est-ce qu'ils le considéreront comme étant un actif ou un passif ou est-ce que ce sera dans leur intérêt ou dans l'intérêt de la communauté ou non? Je ne le sais pas. Mais c'est une question qui aurait dû être étudiée et vue à fond.

M. Joron: Disons que...

Le Président (M. Lacoste): M. le ministre.

M. Joron: ... je dois vous dire que, dans la rencontre qu'on a eue avec l'Association des agents de recouvrement, on ne nous a pas soulevé ce point, à savoir: Nous, on est assujettis à un permis et ceux qui ne font du recouvrement qu'auprès des commerçants ne sont pas assujettis.

M. Saint-Germain: On peut facilement déduire...

M. Joron: Je dois vous avouer que...

M. Saint-Germain:... qu'ils n'ont même pas vu dans cet alinéa 4 la signification que vous venez de lui donner, comme je vous le dis, parce que vous-même avez dû hésiter et étudier avant d'en arriver à cette conclusion.

M. Raynauld: M. le Président, est-ce que je pourrais poser une question?

Le Président (M. Lacoste): M. le député d'Outremont.

M. Raynauld: Quel serait l'inconvénient que cet alinéa se lise à peu près comme suit: "ou recouvrement des créances auprès des commerçants".

Une voix: Le chapitre ne s'applique pas.

M. Joron: Voulez-vous on va faire une chose? Comme, de toute façon, on est...

M. Raynauld: Quel serait l'inconvénient de cette histoire-là?

M. Joron: Je vais faire une suggestion. Comme on va à l'encontre du règlement depuis le début, cet article ayant été adopté ce matin, je ne m'oppose pas à ce que l'on en rediscute, mais il y a toujours la possibilité d'apporter des amendements au moment du dépôt du rapport en Chambre. Je retiens la suggestion du député de Jacques-Cartier et du député d'Outremont et on verra si on ne peut pas trouver un langage plus clair d'ici là. (16 h 15)

M. Saint-Germain: Vous penserez au permis en même temps, M. le ministre, si je peux vous demander ça. S'il doit y avoir là permis ou pas.

M. Joron: Oui, sur la suggestion qui vient d'être faite, je pense que l'inconvénient c'est qu'il y aurait une ambiguïté si on dit "recouvrement des créances auprès de commerçants". Quelqu'un qui a la qualité de commerçant peut s'acheter un bien, par exemple, pour usage personnel, alors que ce n'est pas en sa qualité de commerçant qu'il va acheter le bien, d'où l'utilité de préciser "créance qui a pris naissance dans l'exploitation de son commerce". C'est pour ça...

M. Raynauld: Je comprends tout ça, mais la raison pour laquelle on veut exempter les commerçants, c'est que ceux-ci étant en affaires, ils sont capables de se défendre tout seuls. S'ils se défendent pour des affaires qu'ils font pour $500 millions par année, ils sont peut-être capables de se défendre tout seuls quand ils achètent un appareil de télévision.

Le Président (M. Lacoste): J'appelle donc l'article 52. Est-ce qu'il est adopté?

M. Saint-Germain: À l'article 52...

Le Président (M. Lacoste): M. le député de Jacques-Cartier.

M. Saint-Germain: ... est-ce qu'on ne trouve pas que ce délai de 30 jours est relativement court, si on considère que ces règlements peuvent être assez complexes, avoir une portée assez importante, pour permettre leur publication, donner le temps de se réunir, de les étudier et de revenir pour faire des suggestions au ministre. Il me semble...

M. Joron: Le délai de 30 jours est celui que l'on retrouvait dans la loi 74 et qu'on retrouve dans la loi 72 et à peu près, me semble-t-il, dans toutes nos lois. Il ne faut pas commencer à faire de la législation d'exception pour ce cas-ci.

En pratique, c'est toujours un délai supérieur à 30 jours qui est accordé. Je prends un exemple, le projet de règlement général dans le cadre de la loi no 72 où il se fait de la consultation depuis le mois de février 1979. La publication a eu lieu au mois de septembre et la consultation a repris après le mois de septembre. En pratique, cela ne pose pas d'inconvénient. C'est toujours plus long en pratique, en fait.

M. Saint-Germain: Oui, mais si 30 jours ne peuvent pas être observés, pourquoi l'inclure dans la loi et laisser le tout au bon vouloir de l'exécutif? Je ne veux pas faire un débat là-dessus. Passons. Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Lacoste): L'article 52 est adopté.

Infractions et peines

Article 53.

M. Saint-Germain: Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Lacoste): Article 53, adopté. Article 54. Est-ce que l'article 54 est adopté? M. le député de Jacques-Cartier, sur l'article 54.

M. Saint-Germain: II me semble que les amendes sont extrêmement considérables. Une corporation coupable d'une infraction à la présente loi ou à un règlement est passible d'une amende minimale cinq fois plus élevée. Cela veut dire $500 pour une première offense, $1000 pour une deuxième et un maximum dix fois plus élevé que ce qui est prévu à l'alinéa précédent. Vous tombez au maximum. Vous arrivez avec des amendes de $20 000 et de $40 000. Je me demande s'il y a beaucoup de corporations dans ce champ d'activité qui pourraient subir de telles amendes sans bien souvent fermer leurs portes tout simplement.

M. Joron: Chaque fois qu'on met un chiffre quelque part, il y a quelque chose d'arbitraire là-dedans, c'est évident. On se guide à partir de quoi? Sur ce qui se passe un petit peu ailleurs. On se guide un peu sur ce que l'ancien gouvernement avait prévu dans sa loi de 1974, il y a déjà cinq ans, cinq années d'inflation. Vous voyez, dans l'article 38 de l'ancienne loi, on disait: "Une corporation coupable d'une infraction à la présente loi est passible d'une amende d'au moins $500 et d'au plus $25 000". On allait jusqu'à $25 000 déjà en 1974. On n'a pas changé l'ordre de grandeur vraiment si on tient compte de l'inflation. $25 000 à $40 000 c'est à peu près cela qui s'est passé depuis cinq ans.

M. Saint-Germain: Vous y allez, M. le ministre!

M. Joron: Non, c'est cela, à toutes fins utiles, cinq années d'inflation à 10%.

M. Raynauld: C'est beaucoup et ce n'est sûrement pas la raison qui amène...

M. Joron: Tout ce que je dis, c'est que l'ordre de grandeur est semblable à celui que l'on retrouvait dans la loi que le gouvernement antérieur avait adoptée en 1974. On n'a pas exagéré les montants, c'est dans le même ordre de grandeur.

M. Saint-Germain: II faut tout de même admettre qu'en 1974, cette loi n'a pas été promul- guée; on ne sait pas pourquoi, on ne le saura probablement jamais. Si cela avait été une loi parfaite, je suppose qu'elle l'aurait été.

M. Joron: Elle a pourtant été adoptée, par contre.

M. Saint-Germain: Elle n'a pas fait ses preuves non plus. Elle a été adoptée après de longues discussions, de très longues discussions.

M. Joron: Je ne m'en souviens pas, je n'étais pas en Chambre à cette époque.

M. Saint-Germain: Mais ce n'est pas l'évangile.

Le Président (M. Lacoste): Le député d'Outremont.

M. Raynauld: M. le Président, je voudrais demander au ministre — on adopte une loi — si sa seule défense c'est que c'était dans le projet de loi de 1974. Est-ce que $40 000 pour une offense maximale, le ministre considère que ce serait normal et que c'est tout à fait défendable pour une infraction? Il y a beaucoup d'infractions dans cette loi. Est-ce que c'est l'objectif de vouloir, par des amendes comme ça, faire fermer les portes des agences de recouvrement? C'est ça, l'intention?

M. Joron: Ce n'est certainement pas l'intention, ça me semble évident. Sauf que le législateur a à prévoir une fourchette à l'intérieur de laquelle les tribunaux doivent apprécier. On ne peut pas se substituer aux tribunaux. Ce sera aux tribunaux, dans une fourchette très large, de $200 à $4000 — c'est large en diable — de pondérer, selon la gravité de l'offense.

Nous, on a des limites inférieures et supérieures à tracer, elles sont très éloignées l'une de l'autre. C'est la marge de manoeuvre qui est celle des tribunaux. On n'a pas à se substituer aux tribunaux.

M. Raynauld: M. le Président, si on n'a pas à se substituer aux tribunaux, pourquoi est-ce qu'on a un maximum? On n'a qu'à ne pas le mettre.

Que vous vous assuriez que les tribunaux imposent une amende d'au moins $100 pour une première infraction, je comprends cela et je comprends que cela pourrait être, dans le cas d'une corporation, cinq fois plus, donc, $1000, $500 pour une première infraction et $1000 pour une deuxième. Si c'est cela l'argumentation, je suggérerais fortement qu'on enlève le maximum et qu'on dise: Au moins $100 pour une première amende et qu'on laisse aux tribunaux de juger.

M. Joron: Non, c'est dans l'économie générale de nos lois; on y retrouve toujours un plancher et un plafond.

M. Saint-Germain: Je sais pertinemment qu'il y a de grosses corporations qui, à un moment donné, se sont foutées de la loi à cause d'amen-

des minimes. Cela entrait simplement dans le compte des dépenses et on pouvait se permettre de faire une annonce, une vente, des activités commerciales en dehors des lois et des règlements. On a vu l'ouverture des magasins en dehors des heures ouvrables légales, par exemple.

Si vous avez un champ d'activité avec des maisons comme Steinberg ou d'autres, on peut comprendre que l'amende va monter à $30 000 pour les dissuader de poursuivre des activités illégales. Mais vous êtes dans un champ d'activité où je ne crois pas qu'il y ait beaucoup de maisons, de sociétés, de corporations qui peuvent se comparer et qui ont les moyens financiers de grosses maisons comme cela.

Si un juge allait imposer, pour une raison ou pour une autre, une telle amende, cela aurait des conséquences excessivement graves. Ces compagnies, au point de vue financier, c'est loin d'être des monstres. Il y a tout de même des gens qui travaillent d'une façon honnête. Comme je le disais ce matin, il y en a qui sont engagés par les caisses populaires ou des entreprises excessivement respectables et je crois que c'est à leur crédit.

Mais si vous arrivez avec une amende semblable pour des infractions qui peuvent rester mineures... C'est très complexe, cette loi.

M. Joron: Encore une fois, comprenons-nous bien, ce n'est pas nous qui imposons les amendes, quand il y a infraction, c'est le juge.

M. Saint-Germain: Mais vous en fixez le maximum.

M. Joron: Pour répondre à votre question, il y a des agences qui sont passablement plus importantes que d'autres, je ne sais pas jusqu'à quel point, parce que je n'ai pas vu les états financiers de toutes les agences de recouvrement qui existent au Québec, mais il n'y a rien qui interdit de croire non plus que des agences de recouvrement, s'il n'en existe pas de très puissantes au point de vue financier à l'heure actuelle, il ne pourra pas s'en constituer dans les années qui viennent. Il n'y a rien qui interdit à de grandes corporations d'entrer dans ce champ, de créer des filiales ou quoi que ce soit.

C'est la raison que vous avez très bien décrite vous-même. Pour que l'amende soit dissuasive, si on était face à une corporation qui aurait d'énormes moyens financiers, il faut que ce soit autant dissuasif pour le gros que cela l'est pour le petit. C'est la raison pour laquelle on ouvre une fourchette de cette grandeur. Et, encore une fois, je le répète, elle ressemble aux fourchettes qu'on retrouve dans d'autres lois également.

M. Raynauld: Je ne suis pas sûr de cela. J'aimerais savoir cela. Ces fourchettes, c'est courant?

M. Joron: Dans la Loi sur la protection du consommateur, par exemple, on en a de $1000 à $40 000 dans le cas de... Il y en a de $2000 à $100 000 même, dans le cas d'une compagnie qui récidive.

C'est pour les cas de récidive dans les deux ans. De toute façon, là, on discute des maximums d'amendes. C'est bien certain que les maximums sont rarement imposés par les tribunaux. Les tribunaux ont toute une série de critères qui leur permettent de pondérer l'amende eu égard à l'importance de l'infraction, eu égard au fait qu'ils ont affaire à un récidiviste, à une personne qui commet des infractions répétées. Je pense que, sans trop s'avancer, on peut dire que dans au-delà de 90% des cas où les tribunaux ont à sévir, ce sont les minimums qui sont imposés. Je pense qu'il y a peu de danger qu'une amende maximale soit imposée pour une infraction mineure, alors qu'elle est rarement imposée même pour des infractions plus graves.

Dans les faits, il ne faut pas présumer non plus que les agents de recouvrement vont nécessairement contrevenir à la loi. Ils vont toujours être sujets aux amendes.

M. Saint-Germain: Avec la difficulté d'interprétation de bien des textes, on peut tout de même croire que des gens même bien intentionnés puissent à un moment donné pécher contre un règlement sans qu'il y ait vraiment de mauvaise volonté de leur part. Quand on parle de harcèlement, etc., ce sont des termes tellement larges.

M. Joron: Les tribunaux vont l'apprécier justement.

M. Saint-Germain: Même de bonne foi...

M. Joron: On verra plus loin qu'ils ont les moyens de défense pour établir leur bonne foi.

Le Président (M. Lacoste): L'article 54 est-il adopté?

M. Raynauld: Sur division.

M. Saint-Germain: Sur division.

Le Président (M. Lacoste): L'article 54 est adopté sur division. L'article 55. L'article 55 est-il adopté?

M. Saint-Germain: Adopté.

M. Raynauld: C'est encore chanceux qu'il n'y ait pas de peine de prison.

Le Président (M. Lacoste): L'article 55 est adopté. L'article 56. L'article 56 est-il...

M. Raynauld: II faut mettre de l'ordre. Le Président (M. Lacoste): Pardon?

M. Raynauld: II faut mettre de l'ordre dans la société.

Le Président (M. Lacoste): L'article 56 est-il adopté?

M. Saint-Germain: L'article 56. "Lorsqu'une corporation commet une infraction à la présente loi ou à un règlement, un administrateur ou un représentant de cette corporation qui a eu connaissance de l'infraction est réputé être partie à l'infraction et est passible de la peine prévue au premier alinéa de l'article 54 à moins qu'il n'établisse, à la satisfaction du tribunal, qu'il n'a pas acquiescé à la commission de cette infraction." Il y a tout de même là plus qu'une nuance. Puisque le ministre aime toujours revenir à la loi de 1974, dans la loi de 1974, on dit qu'il doit avoir participé, consenti ou acquiescé, tandis qu'ici, il peut se faire pincer juste par le fait qu'il a pris connaissance de l'infraction à un moment donné. Je me demande pourquoi il y a autant de rigueur. (16 h 30)

M. Joron: En fait, je pense que si un administrateur a acquiescé à la commission d'une infraction, c'est normal qu'il soit considéré sur le même pied que la corporation. Dans l'article, encore une fois, ce n'est pas une présomption de culpabilité, on dit bien: "un administrateur ou un représentant de cette corporation qui a eu connaissance de l'infraction". Le poursuivant a donc le fardeau de prouver que l'administrateur en question a eu connaissance. À partir du moment où cette preuve est faite, c'est là que l'administrateur peut établir qu'il n'a pas acquiescé à la commission d'infraction. S'il réussit à le faire...

M. Saint-Germain: ...

M. Joron: II a son fardeau à lui.

M. Saint-Germain: C'est cela.

M. Joron: ... mais lui montrer qu'il n'a pas acquiescé tout simplement, mais il ne faut pas oublier qu'il a le premier fardeau de la preuve. Il faut établir qu'il a eu connaissance de l'infraction. Cela appartient à la poursuite. Tant que ce n'est pas fait, l'administrateur...

N'est pas visé.

Si la poursuite ne réussit pas à démontrer la connaissance de l'infraction...

M. Saint-Germain: Vous admettez tout de même que ces termes de l'article 56 présentement sont plus sévères, plus difficiles pour l'administrateur. Cela le met dans une situation de faiblesse au point de vue des tribunaux relativement à l'ancienne loi de 1974. Est-ce que j'ai raison ou pas?

M. Joron: Quel article de la loi de 1974 citez-vous? L'article 39?

M. Raynauld: L'article 39. Il me semble que c'était bien suffisant à l'article 39 qu'on dise que quelqu'un, pour commettre une infraction, devait avoir participé, consenti ou acquiescé. Ici, c'est du vrai maccarthysme, cette histoire. C'est la condamnation par association. Je trouve cet article absolument odieux. Il faut absolument proposer un amendement. Ce que je propose, c'est de revenir à la formulation qu'il y avait à cet article 39 de la loi de 1974 où on disait: "Tout officier, administrateur, employé ou agent de cette corporation qui a prescrit ou autorisé l'accomplissement de l'infraction ou qui y a consenti, acquiescé ou participé est réputé partie à l'infraction et est passible de la peine prévue."

M. Saint-Germain: Sans compter qu'il faut toujours tenir compte de la lourdeur des amendes.

Le Président (M. Lacoste): M. le député d'Outremont, est-ce que vous en faites un amendement?

M. Raynauld: Oui, j'en fais un amendement. Maintenant...

M. Alfred: ... n'est pas très aimable, M. le député.

M. Raynauld: Je propose qu'après les mots "corporation qui", on change les mots qui suivent par les suivants: "qui a consenti, acquiescé ou participé est réputé partie à l'infraction et est passible". Après les mots "corporation qui", je change les mots qui suivent de façon que cela se lise "de cette corporation qui a consenti, acquiescé ou participé est réputé partie à l'infraction et est passible de la peine prévue."

M. Joron: ... partie à l'infraction...

M. Raynauld: ... réputé être partie à l'infraction et est passible de la peine prévue... Bien, participer... C'était là-dessus que j'hésitais, mais, dans la loi de 1974, on n'a pas dit autre chose que ça, c'est-à-dire "a participé" et, tout de suite après, c'est "est réputé être partie à l'infraction".

M. Joron: Parce que c'est inscrit "qui y a consenti, acquiescé ou participé". Alors, là, ça va.

M. Raynauld: Ah oui! c'est ça. "... commet une infraction..." Oui, c'est ça. On pourrait encore dire: "... qui y a..."

M. Joron: Alors...

Le Président (M. Lacoste): On va le suspendre.

M. Joron: ... je vous demanderais, M. le Président, pendant que les légistes se penchent sur la rédaction, qu'on suspende l'article. On reviendra avec les autres...

M. Saint-Germain: Entendu, M. le Président.

Le Président (M. Lacoste): En fait, il s'agirait d'enlever, à la troisième ligne, les mots "a eu connaissance de l'infraction...", d'accord...

M. Raynauld: "... est réputé être..." Le Président (M. Lacoste): Bon! par... M. Raynauld: "... qui y..."

Le Président (M. Lacoste):... "qui y a consenti, acquiescé ou participé est réputé être..." et le restant?

M. Raynauld: C'est ça.

Le Président (M. Lacoste): "... être partie à l'infraction et est passible...", de sorte que l'article 56 se lirait comme suit: "Lorsqu'une corporation commet une infraction à la présente loi ou à un règlement, un administrateur ou un représentant de cette corporation qui y a consenti, acquiescé ou participé est réputé...

M. Raynauld: "... être..."

Le Président (M. Lacoste): ... être partie à l'infraction et est passible de la peine prévue au premier alinéa de l'article 54, à moins qu'il n'établisse, à la satisfaction du tribunal, qu'il n'a pas acquiescé à la commission de cette infraction." C'est bien ça? Je juge l'amendement recevable. Maintenant, il y a eu une demande de...

M. Joron: Qu'on suspende...

Le Président (M. Lacoste):... suspendre l'article 56. Est-ce qu'il y a consentement?

M. Saint-Germain: Entendu, M. le Président.

Le Président (M. Lacoste): L'article 56 est donc suspendu. Article 57.

M. Saint-Germain: À l'article 57, tout de même, est-ce qu'il n'est pas rare de voir la complicité dans un statut de nature civile?

M. Joron: Remarquez que c'est une loi qui a une nature à la fois civile et pénale.

M. Saint-Germain: Et pénale. Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Lacoste): L'article 57 est donc adopté. Article 58?

M. Saint-Germain: Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Lacoste): L'article 58 est adopté. Article 59?

M. Saint-Germain: Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Lacoste): L'article 59 est adopté. Article 60? Est-ce que l'article 60 est adopté?

M. Saint-Germain: À l'article 60, M. le Président...

Le Président (M. Lacoste): M. le député de Jacques-Cartier.

M. Saint-Germain:... est-ce qu'il n'y aurait pas lieu de mieux définir ce qu'on entend par "une infraction subséquente"? Est-ce qu'il ne faudrait pas préciser ce qu'est l'infraction subséquente? Est-ce la répétition d'une même infraction pour laquelle il y a eu un jugement ou est-ce une autre infraction qui ferait suite à un jugement déjà existant? Ce serait peut-être important de... On pourrait croire que c'est la deuxième hypothèse qui est surtout retenue, de la façon dont l'article a été rédigé. Parce qu'il y a tellement d'infractions dans la loi que ce serait aller très loin que de dire qu'un type d'infraction en serait une subséquente si elle n'est pas exactement de la même nature.

M. Joron: Ce qui arrive, c'est qu'on sait que la loi punit plus sévèrement les récidives qui sont commises dans un délai de deux ans, d'accord? Alors, cet article veut simplement faciliter la preuve. Si, par exemple, il y a une poursuite en vertu de l'article X et que ma poursuite veut démontrer que c'est une récidive, elle peut produire un jugement de condamnation; d'accord? Et l'article a pour but d'éviter à la poursuite d'avoir à démontrer que ce jugement a été prononcé à la suite d'une infraction antérieure à celle qui fait l'objet de la présente poursuite. C'est une présomption. Si, effectivement, l'infraction qu'on prétend antérieure a été commise après celle qui fait l'objet de la poursuite, c'est évident que le prévenu va pouvoir le prouver, mais c'est simplement une présomption pour éviter à la poursuite d'avoir à démontrer, par le jugement produit, qui reproche une infraction antérieure, qu'elle a été effectivement commise antérieurement. Le jugement fera preuve qu'elle est antérieure.

Encore une fois, ce n'est qu'une présomption et, si ça ne correspond pas aux faits, le prévenu va pouvoir démontrer le contraire.

M. Saint-Germain: En supposant qu'il a été condamné...

Le Président (M. Lacoste): M. le député de Jacques-Cartier.

M. Saint-Germain: ... ou qu'il y a eu un jugement porté contre lui pour une infraction donnée et que la deuxième infraction n'est plus la même, ne concerne pas le même...

M. Joron: Écoutez, j'ai dit que les récidives sont punies plus sévèrement, mais ce sont évidemment les récidives au sujet d'une même infraction. On le voit dans le texte.

M. Saint-Germain: Ce doit nécessairement être le même genre d'infraction.

M. Joron: Oui.

M. Raynauld: Ce n'est pas dit dans la loi.

M. Joron: Un instant! Prenez l'article 54, paragraphe 2: "pour une infraction subséquente à une même disposition de la présente loi ou d'un règlement commise dans un délai de deux ans...

M. Saint-Germain: Article 52...

M. Joron: Article 54, paragraphe 2.

M. Raynauld: M. le Président...

Le Président (M. Lacoste): M. le député d'Outremont.

M. Raynauld: ... il me semble qu'il n'est pas évident que l'article 60 se limite aux infractions de même nature. Il me paraîtrait important, justement, compte tenu du fait que les amendes sont beaucoup plus sévères lorsqu'il s'agit d'une deuxième ou d'une troisième condamnation que lors de la première, de l'indiquer dans cet article. Pour ne pas seulement dire: La production d'un jugement antérieur condamnant un prévenu en vertu de la présente loi, il me semble qu'on devrait dire: La production d'un jugement antérieur condamnant un prévenu en vertu du même article ou de la même disposition, comme il est dit à l'article 54: "à une même disposition de la présente loi". Cela fait présumer qu'une infraction reprochée est une infraction subséquente. Cela me paraîtrait sensé.

M. Joron: Je me suis peut-être mal exprimé. J'ai donné cet exemple parce que, dans la plupart des cas, ça va s'appliquer aux cas de récidive, mais le poursuivant peut quand même avoir intérêt à démontrer qu'un prévenu commet plusieurs infractions à la loi justement pour demander au tribunal de lui imposer une amende plus sévère, sans que ce soit nécessairement la même infraction qui soit répétée. D'accord, ça va s'appliquer pour les récidives, mais, aussi, pour d'autres infractions.

M. Raynauld: Vous dites exactement le contraire de ce que vous venez de dire. À ce moment-là, il est évident que ce n'est pas pour une condamnation portant sur la même disposition de la loi, mais, justement, vous admettez que c'est pour couvrir des cas où les infractions seraient commises en vertu de dispositions différentes.

On pourrait avoir quelqu'un qui est condamné parce qu'il n'avait pas son permis et, un an après, il a son permis et il est condamné parce qu'il a eu un comportement inacceptable ou illégal au sens de la loi, et on va considérer ça comme une deuxième offense. Cela me paraît excessif.

M. Joron: J'ai bien précisé, j'ai dit que l'article va s'appliquer surtout dans les cas de récidive, mais il va en plus s'appliquer dans d'autres cas où ce n'est pas une récidive à une même infraction. C'est simplement ça. C'est un article purement procédurier. Encore une fois, c'est une présomption. Si ça ne correspond pas aux faits, le prévenu va pouvoir démontrer facilement que l'infraction reprochée dans le jugement qu'on dépose n'est pas antérieure. Il n'y a pas de substance là-dedans.

M. Raynauld: J'en reste...

M. Saint-Germain: Si on lit bien l'article: "La production d'un jugement antérieur — on ne définit pas le genre de jugement, mais simplement la production d'un jugement antérieur — condamnant un prévenu en vertu de la présente loi — cela reste très général — fait présumer que l'infraction reprochée est une infraction subséquente". Je ne sais pas si les légistes ont une autre interprétation, mais, en bon français, ça me semble être ça, comme le député d'Outremont l'a dit. D'autant plus que... Est-ce qu'il y a une relation entre ça et la loi des consommateurs?

M. Joron: Oui, c'est la reprise de l'article 286 de la loi no 72. (16 h 45)

M. Saint-Germain: Bon, et si l'agent de recouvrement ne pèche pas contre cette loi, mais pèche contre la Loi sur la protection du consommateur, est-ce que cela ne pourrait pas être interprété...

M. Joron: Non, c'est un jugement antérieur condamnant un prévenu en vertu de la présente loi.

M. Saint-Germain: II y a un paragraphe qui semble faire un rapprochement entre la loi du consommateur et cette loi.

M. Joron: Oui, dans un article antérieur, il est effectivement fait référence à d'autres lois dont l'office doit surveiller l'application. Mais ici, par le texte même de l'article, je pense que c'est évident que cela s'applique aux jugements qui ont porté sur les infractions commises à cette loi.

M. Saint-Germain: Mais alors pourquoi vous opposez-vous à préciser la réelle signification? Ne pourrait-elle pas être plus claire pour réellement savoir sur quoi on dit oui ou non?

M. Joron: Cela me paraît clair comme formulation, je dois vous l'avouer.

M. Raynauld: C'est très clair. Cela s'applique à toutes les infractions, quelle que soit leur nature.

M. Saint-Germain: C'est cela? Est-ce que c'est ce que ça veut dire?

M. Joron: Oui.

M. Saint-Germain: Alors, c'est...

M. Raynauld: C'est effectivement très clair.

M. Saint-Germain: Comme agent de recouvrement, vous avez un, deux, trois représentants. Mettons-nous dans les faits pratiques. Vous enga-

gez quelqu'un. Vous croyez avoir bien fait, avec la meilleure intention du monde. Voilà que ce représentant ne suit pas vos directives, soit par ignorance, par malhonnêteté ou par manque de responsabilité. Quelle que soit la raison, vous êtes responsable de ce représentant. Vous en engagez un autre au bout d'un an ou six mois ou tout de suite et il vous arrive encore la même chose. Vous êtes dans des conditions extrêmement difficiles. Vous obligez les gens, même les gens de bonne volonté... Je crois bien que quelqu'un qui engage un représentant, un agent de recouvrement qui engage un représentant est de bonne volonté. Steinberg peut engager un employé et être de bonne volonté, mais, si cet employé vole son employeur, qu'est-ce que vous voulez? il le fout à la porte, mais il a cru bien faire en l'engageant. Il ne faut pas présumer que celui qui va engager un représentant comme agent de recouvrement ne veut pas bien faire. Voilà que son représentant se met les pieds dans les plats. Voilà qu'il y en a un autre, à un moment donné qui, en moins de deux ans, se met les pieds dans les plats à son tour. Il est pris avec une amende qui peut aller jusqu'à $4000 au maximum. Il me semble que c'est extrêmement rigoureux, pour un commerçant. Il est toujours sur la glace vive, si vous voulez, constamment, même s'il y a de la bonne volonté. Vous ne lui donnez aucune chance.

M. Joron: Ce n'est pas cet article précis qui rend la loi rigoureuse, c'est le fait qu'il commet des infractions ou qu'il récidive. C'est un article de procédure.

M. Saint-Germain: Je vous donne un exemple bien précis: un type qui a un permis peut être condamné pour une infraction subséquente sans qu'il y ait de sa part plus de mauvaise volonté que cela, à cause de la complexité de la loi.

M. Joron: S'il a de bonnes excuses à faire valoir, il peut s'en servir comme moyen de défense.

M. Saint-Germain: II y a un minimum. Le juge est obligé de dire: C'est une deuxième offense. Il est obligé de dire cela. Du moment que le juge va dire: II est coupable, il est pris par les minimums et maximums, il va bien falloir qu'il marche. Il n'a pas le choix.

M. Joron: Le juge ne sera pas obligé de dire: C'est une présomption simplement que le jugement antérieur qu'on produit portait sur une infraction antérieure à celle qui fait l'objet de la poursuite présente. C'est la seule portée de l'article 60. Ce n'est pas plus que cela. Dans le droit substantif, encore une fois, c'est vraiment un article de procédure.

Il faut quand même faire la preuve de...

M. Raynauld: Non, il ne sera pas obligé de faire la preuve. Si je comprends cet article-là, c'est pour éviter de faire la preuve.

M. Joron: Non, la présomption.

M. Raynauld: Eviter de faire la preuve que c'est un deuxième jugement.

M. Joron: Pour éviter de faire la preuve que le jugement antérieur que je produis portait sur une infraction antérieure à celle qui fait l'objet de la poursuite actuelle. Mais encore une fois, c'est une présomption qui peut être renversée.

M. Raynauld: Est-ce qu'elle peut être renversée...

M. Joron: Oui, c'est présumer... Si effectivement...

M. Raynauld: Si on n'est pas obligé de faire la preuve de ça, présumer...

M. Joron: Ce serait présumer...

M. Raynauld: Le juge dit: Vous n'avez pas besoin d'en faire la preuve, je présume que c'est ça, c'est marqué dans la loi.

M. Joron: D'accord. Si effectivement...

M. Raynauld: Je présume que ça se rapporte...

M. Joron: Oui, d'accord, il peut accepter la présomption si elle n'est pas renversée, c'est bien sûr, mais le prévenu, s'il dit: Écoutez, le jugement...

M. Raynauld: Mais s'il n'a pas de preuve devant lui, comment peut-il la renverser?

M. Joron: Pardon?

M. Raynauld: S'il n'y a pas de preuve qui lui est donnée, le juge est obligé de suivre les preuves qu'il reçoit...

M. Joron: Oui.

M. Raynauld: Or, il n'y a pas de preuve de présentée.

M. Joron: C'est une preuve par présomption. Encore une fois, la présomption peut être renversée par le prévenu. Si le prévenu dit: Écoutez, le jugement antérieur que vous produisez porte sur une infraction postérieure à celle pour laquelle je suis poursuivi, le juge n'aura pas le choix, c'est un fait. Hors, la présomption est renversée.

M. Saint-Germain: Monsieur, si on reprend l'exemple que je vous ai donné tout à l'heure, est-ce qu'il tient, mon exemple? Si j'ai un employé qui ne suit pas le règlement, j'en porte la responsabilité; au bout d'un an, si j'en ai un autre qui, dans un autre règlement, s'enfarge de nouveau, me voilà en cour. Qu'est-ce qui m'arrive?

M. Joron: Si le poursuivant veut démontrer que le prévenu n'en est pas à sa première infraction...

M. Saint-Germain: C'est mon représentant.

M. Joron: Oui, d'accord. C'est sûr que ce sont des choses qui pourraient être mises en preuve et que le juge pourrait apprécier pour imposer plus que le minimum d'une amende.

M. Saint-Germain: II a été mis en preuve que mon premier représentant a fauté.

M. Joron: Oui.

M. Saint-Germain: II a été mis en preuve que mon deuxième représentant a fauté. On n'a pas mis en preuve ma bonne intention. Admettons que j'en ai une. Je suis un homme bien intentionné, j'ai de la crédibilité, je déplore la situation, mais c'est une situation de fait. Le juge ne peut pas faire autrement que de me condamner au minimum.

M. Joron: C'est sûr. Quand l'article 60 réfère à un jugement antérieur, c'est qu'il y a eu jugement. Donc, le prévenu a été déclaré coupable et il n'a pas réussi à produire une défense de bonne foi.

M. Saint-Germain: Pour une deuxième offense, si je suis en corporation, ça veut dire combien? Un minimum de cinq fois plus, $1000.

M. Raynauld: Au minimum $1000.

M. Saint-Germain: Pour une première offense.

M. Raynauld: Non, une deuxième offense, au minimum $1000. Cela peut aller jusqu'à $40 000 pour une deuxième offense.

M. Saint-Germain: Ce n'est pas facile. Est-ce que vous trouvez que c'est normal qu'un type puisse opérer dans ces conditions sans inquiétude et qu'il puisse le soir dormir tranquille, certain de son affaire?

M. Joron: Comme je l'ai dit, cet article en était un de procédure, il ne crée pas d'obligation supplémentaire pour le commerçant.

M. Raynauld: En 1974, on n'avait pas cru nécessaire de mettre cet article. C'est du droit nouveau.

M. Joron: Si on me permet, ce qui arrive si on n'a pas cet article, c'est qu'il faut faire venir le greffier de la cour déposer le jugement. C'est tout simplement que ça coûte plus cher de faire venir le greffier que de déposer le jugement. C'est la seule différence que ça produit. Il faut faire venir le greffier, si on n'a pas l'article 60, tandis que là on n'a pas besoin de faire venir le greffier et de le faire témoigner.

C'est purement procédurier.

Admettons qu'il n'y a pas d'article 60, il n'y a rien qui empêche la couronne de faire la preuve que c'est une récidive, en faisant, comme on vient de le dire, venir le greffier déposer un jugement antérieur.

M. Raynauld: Ce qui nous préoccupe... je serais prêt à accepter cette interprétation, mais il me semble qu'il y a plus que ça là-dedans. C'est ça le problème. Présumer que l'infraction reprochée est une infraction subséquente, personnellement, je préférerais que ce soit la même infraction. Quand quelqu'un récidive, il le fait dans la même affaire. On ne met pas un gars en prison en disant que c'est la deuxième fois: La première fois, tu as commis un vol de $5 à l'étalage et la deuxième fois tu as commis un meurtre. Donc, c'est le deuxième meurtre. C'est ça que je voudrais éviter.

Quand on dit que ça présume que l'infraction reprochée est une infraction subséquente, j'aurais aimé qu'il soit indiqué une infraction de même nature. À ce moment-là, on dit que ça restreint la portée. Mais si j'étais convaincu qu'il s'agissait simplement d'éviter qu'un greffier ne vienne déposer un jugement, je serais bien d'accord avec l'article 60, mais je ne suis pas convaincu de cela. Je pense qu'il ne s'agit pas seulement d'éviter le coût; ça évite le coût de faire venir le greffier, oui, mais l'article, comme je le lis, veut dire autre chose que ça. Cela veut dire que cette présomption va pouvoir s'appliquer à tous les types d'infraction en vertu de la loi et qu'à ce moment-là, cela va être le défendeur — c'est comme cela que vous l'appelez — qui aura à faire la preuve que ce n'est pas la même infraction, que ce n'est pas la même affaire. C'est lui qui va avoir le fardeau de se défendre sur ce sujet, quand on aurait pu demander que si on impose des amendes beaucoup plus élevées pour une deuxième offense, ce soit le demandeur qui ait à faire la preuve que c'est une deuxième fois. C'est là-dessus que j'en suis. Il me semble que là, on fait déplacer le fardeau de la preuve et cela me paraît aller beaucoup plus loin que simplement dire qu'on veut éviter les $50. On n'exigera pas que ce soit le greffier qui vienne déposer le jugement. C'est cela mon problème.

Le Président (M. Lacoste): M. le député de Papineau.

M. Alfred: J'ai beaucoup de difficulté à suivre le député d'Outremont. J'ai de la difficulté à comprendre. Vous dites, par exemple, la même personne qui fait la même chose, la répétition de la même faute. Vous ne dites pas la même personne qui pourrait commettre des fautes similaires et qui...

Il y a la personne qui commet des fautes et la personne qui commet des fautes similaires. Par exemple, la personne qui a violé une jeune fille et la même personne qui, demain, fait un vol de banque. Cette même personne se trouve dans deux situations différentes.

M. Raynauld: Nous sommes d'accord, on veut que ce soit des infractions similaires. Vous le dites vous-même. Je voudrais que ce soient des infractions similaires. Enfin, M. le Président, je pense qu'on ne va pas retarder cela. On va adopter cela sur division, si le ministre ne veut pas accepter la vigueur de nos argumentations et la force de nos arguments.

Le Président (M. Lacoste): Est-ce que l'article 60 est adopté?

M. Saint-Germain: Sur division, M. le Président.

Le Président (M. Lacoste): Adopté sur division. Article 61.

M. Saint-Germain: Adopté.

Le Président (M. Lacoste): Adopté. Article 62.

M. Saint-Germain: L'article 62 est un autre article qui est inspiré de la Loi sur la protection du consommateur. C'est un article qui va très loin. Il ne faut tout de même pas oublier qu'il y a des débiteurs qui sont réellement récalcitrants. Et c'est aller relativement loin pour protéger ces débiteurs qui sont récalcitrants. Vous savez, il y a bien des gens qui achètent, et cela même quand ils savent qu'ils ne sont pas capables de payer. Cela peut mener à des situations assez cocasses.

M. Joron: L'exercice du pouvoir qu'on retrouve dans cet article n'est pas automatique. Il faut que le procureur général ou la personne autorisée par le procureur général qui poursuit le demande, d'une part, et ensuite que le tribunal décide s'il doit l'exercer ou pas. C'est vrai que c'est inspiré de l'article 288 de la Loi sur la protection du consommateur.

Le Président (M. Lacoste): Est-ce que l'article 62 est adopté?

M. Raynauld: M. le Président, je voudrais au moins exprimer mon opposition à l'adoption de cet article 62. Je pense qu'on a un système judiciaire qui a fait ses preuves depuis très longtemps. Et les peines qui sont prévues sont des peines qui se rapportent à un acte qui a été posé. (17 heures)

Cet article 62, même s'il s'inspire d'une autre loi, est un article qui va plus loin. On dit: La peine qu'on vous impose n'est pas encore suffisante. Les amendes qu'on vous impose ne sont pas suffisantes. Par conséquent, on va aller au-delà de cela. On va effectivement essayer de vous empêcher d'exercer votre métier à l'avenir. Je trouve que c'est un principe juridique inacceptable. Là, on fait la présomption cette fois-là que le contrevenant ou celui qui a été condamné va répéter les mêmes accrocs, va commettre les mêmes délits à l'avenir. Je pense que c'est contraire à tout l'esprit de notre système judiciaire. Je ne peux pas accepter un article comme celui-ci. Si j'avais été présent lors de l'étude du projet de loi sur la protection du consommateur, je suis convaincu que j'aurais voté contre également. Cela va beaucoup plus loin. Là, on dit ceci: Le tribunal pourra diffuser, pourra annoncer au monde entier que cette entreprise ou cette personne a commis des délits. Il faut que tout le monde le sache pour l'empêcher justement - je suppose que c'est pour cela — de commettre de nouveau les mêmes délits à l'avenir. Franchement, c'est une attitude vindicative. C'est une attitude en plus qui suppose encore une fois que cette même personne va commettre les mêmes délits à l'avenir. Elle est condamnée avant même d'avoir commis les actes qu'on présume qu'elle va poser à l'avenir. C'est, encore une fois, un article qui me paraît absolument inacceptable.

Le Président (M. Lacoste): L'article 62 est-il adopté?

M. Raynauld: Sur division.

M. Saint-Germain: Le ministre a-t-il des commentaires là-dessus?

M. Raynauld: Je pense que le ministre est surpris de voir ces articles-là.

Le Président (M. Lacoste): M. le ministre.

M. Joron: Le projet de loi est rigoureux, c'est exact, mais, encore une fois, il y a deux choses qu'il faut qu'il se passe avant qu'on en arrive là. Il faut, d'une part, que le procureur le demande, que la poursuite le demande et, ensuite, c'est au tribunal de l'apprécier. Il ne faut pas prendre les juges pour des gens inconséquents non plus. Il y a évidemment une portée à cela, mais il faudrait que ce soit pour un cas, j'imagine, passablement grave et qui nécessite une correction ou une publication, une correction qui oblige que l'information... C'est un peu la même chose que quand on exige des rétractations en cas de libelle ou pour des trucs semblables. Cela s'apparente un peu indirectement à cela. Un juge qui se servirait de l'article 62, j'ai l'impression qu'il ne le ferait certainement pas à la légère.

M. Raynauld: M. le Président, si on me le permet, je dirais la même chose si tout à coup, le gouvernement décidait qu'il inscrit dans une loi que le juge pourrait faire faire des exécutions publiques en disant: Non, ce n'est pas le gouvernement qui fait cela. C'est laissé à la discrétion du juge. C'est nous, les législateurs. Si on fait une chose comme celle-là, le juge dira: Oui, l'intention du législateur, c'est peut-être que je fasse ce genre de chose dans certains cas bien sûr à apprécier, des cas particuliers; mais il reste que cet article-là ouvre la porte à une violation d'une très longue tradition judiciaire. Je ne vois pas pourquoi le gouvernement juge nécessaire de faire des choses semblables, quand, encore une

fois, cela peut ouvrir la porte à des abus considérables. Même quand on a la plus grande confiance dans les juges, il reste que c'est quand même le législateur qui ouvre la porte et qui dit: Oui, les juges, vous pouvez faire cela. Vous pouvez diffuser la nouvelle et vous pouvez faire de la publicité sur les condamnations que vous avez prononcées dans le passé. Je trouve inacceptable qu'on donne cette permission aux juges. Je trouve que cela viole encore une fois toutes les traditions qu'on a ici. Ou bien c'est pour augmenter la peine, la punition. À ce moment-là, changeons l'article. Mettez des peines de prison, si vous voulez. Une fois parti, pourquoi pas? Ou bien c'est pour prévenir. Je pense que c'est la deuxième hypothèse qui vaut.

M. Joron: C'est pour réparer aussi.

M. Raynauld: C'est pour prévenir des actes à venir. Si c'était simplement pour réparer, j'ai l'impression qu'on n'a pas besoin de réparer en public. On répare envers la personne qui a été victime. L'hypothèse, c'est plutôt de prévenir la répétition de ces actes. L'intention peut être bonne. On s'aperçoit que cela fait quatre fois qu'un type vient devant nous et qu'il continue de nous répéter la même histoire. Maintenant, on s'aperçoit que ce n'est pas suffisant. Les peines qu'on impose ne sont pas suffisantes non plus. Maintenant, on va l'annoncer à la télévision que telle personne, c'est un voleur. A-t-on déjà vu une chose pareille?

M. Saint-Germain: D'autant plus que le président de l'office peut toujours lui enlever son permis, comme punition ultime, en plus. Il peut lui faire perdre sa réputation et, en plus, lui enlever son permis et le mettre dans la rue.

M. Raynauld: C'est cela.

Le Président (M. Lacoste): M. le député de Papineau.

M. Alfred: M. le Président, encore une fois, je ne saurais partager l'argumentation du député d'Outremont. Peut-être que je me trompe, mais je m'aperçois que le député d'Outremont ne fait pas confiance au bon jugement des juges, d'après son argumentation.

M. Raynauld: C'est le jugement du gouvernement que je mets en cause.

M. Alfred: Ce n'est pas vrai. Je pense que si un juge se mettait à lire ce que vous venez de dire, il aurait beaucoup de difficulté à suivre de près cette argumentation. Les juges sont nommés, ils sont censés avoir du jugement et ils sont là pour interpréter les lois au meilleur de leurs connaissances. Nous présupposons que chaque juge a un bon jugement. Si un condamné n'est pas content du premier jugement, il peut en appeler de ce jugement. Jusqu'à preuve du contraire, je fais confiance au bon jugement des juges.

Le Président (M. Lacoste): M. le député de Jacques-Cartier.

M. Saint-Germain: Cet article en particulier, et toute une série d'articles font que même le type le mieux intentionné qui va demander un permis pour être agent de recouvrement prend des risques, par le fait même, terribles, à mon avis. Vous savez, la loi doit être rédigée de façon assez précise, au moins pour qu'un homme sache réellement dans quoi il s'aventure et sache surtout réellement s'il commet une offense ou non. Qu'il sache aussi, s'il commet une offense, au moins jusqu'à quel point c'est grave d'en faire une. Vous arrivez avec une loi très sévère et je suis assuré que les juges ne donneront probablement pas toujours la signification aux articles que le gouvernement a voulu leur donner. On voit facilement qu'il y a de la place là-dedans pour de l'interprétation. Il y a tout un éventail d'interprétations qu'on peut faire. Ce ne sera pas facile pour le gouvernement d'oeuvrer avec une telle loi, hormis que le gouvernement veuille simplement les faire disparaître, qu'il juge qu'ils sont absolument inutiles ou qu'il juge que ce sont des parasites qui vivent des malheurs des autres. C'est un champ d'activité qui va certainement rétrécir énormément dans la province.

M. Joron: Oui. Il faut faire attention...

M. Saint-Germain: Si on veut les faire disparaître...

Le Président (M. Lacoste): M. le ministre.

M. Joron: S'il n'est pas permis à des individus de faire de la diffamation, ce ne sera pas permis à un tribunal non plus. Il ne faut quand même pas aller jusque-là. Par analogie, l'inspiration de cet article qui vient de la Loi sur la protection du consommateur, on pourrait dire que c'est à peu près la suivante: une chaîne d'alimentation annonce tel produit à tel prix, mais le vend plus cher. Il y a un consommateur qui peut être lésé, mais on va demander qu'on se rétracte pour que tous les autres consommateurs sachent qu'ils sont en danger de se faire rouler.

De la même façon, un débiteur, un créancier ou un agent de recouvrement peut être condamné parce qu'il a exigé des frais qu'il n'avait pas le droit d'exiger d'un débiteur, mais de la même façon, il a peut-être pu également imputer la même charge à d'autres débiteurs qui n'ont pas nécessairement porté plainte. Là, le tribunal dit: II faut aviser les autres également. Ce n'est pas une question de s'en aller à la télévision et de dire: Untel est ainsi. C'est la question de protéger, par extension, d'autres qui auraient pu être victimes du même genre d'infraction.

M. Saint-Germain: Oui, je comprends. Vous parlez de prix chez Steinberg. Il semble que c'est clair.

M. Joron: Je n'ai pas dit Steinberg, j'ai dit une chaîne d'alimentation.

M. Saint-Germain: Non, mais une chaîne d'alimentation... D'ailleurs, il y en a qui ont eu des amendes récemment assez retentissantes. C'est clair. J'entends: II y a une annonce qui est là. On vend tel produit $3, puis, au magasin, il est affiché à $3.50. La preuve est facile à faire. C'est entendu que ce n'est peut-être pas nécessairement... Il peut arriver qu'il y ait eu des erreurs de parcours dans une grosse administration, mais, enfin, quelqu'un a été lésé, même par erreur administrative. La preuve est facile à faire et le commerçant sait à quoi s'en tenir. Il le sait, c'est facile d'interprétation. C'est ça. S'il le fait, il est coupable.

Mais là le type ne saura même pas jusqu'à quel point il sera coupable. Il va être inquiet, parce que si vous avez, comme je vous le dis, une organisation avec des règlements et des articles assez flous, le "harassement", enfin, tous les termes dont on a parlé hier, et ainsi de suite, vous le mettez dans une situation... Ce ne sera pas toujours clair, même avec la meilleure volonté. S'il n'y a pas quelqu'un dans son équipe dont il est sûr qu'il n'a pas fait erreur, et ainsi de suite, le gars va être inquiet. Pour ma part, si j'étais agent de recouvrement, avec toute l'honnêteté que je pourrais avoir et même si je faisais de mon mieux pour suivre la loi et les règlements, je serais inquiet d'oeuvrer à l'intérieur d'une telle loi. Je serais réellement inquiet.

M. Joron: Pour ma part, je ne serais pas inquiet. Je ferais attention et je respecterais la loi, c'est sûr.

M. Saint-Germain: Ah! malgré toute la bonne intention voulue, écoutez, ce n'est pas si facile que ça, quand vous avez des employés, des représentants et ainsi de suite.

Le Président (M. Alfred): Est-ce que l'article est adopté?

M. Saint-Germain: Sur division, M. le Président.

Une voix: Sur division.

Le Président (M. Alfred): Le suivant, s'il vous plaît?

M. Joron: 63.

Le Président (M. Alfred): Article 63.

M. Saint-Germain: Je ne sais pas si mon collègue a quelque chose à ajouter. Quant à moi, je n'ai rien...

M. Raynauld: Je voudrais simplement souligner ici que, si on voulait prévenir la répétition des actes qu'on reproche à certaines personnes, on a, avec l'article 63, le moyen d'empêcher ces répétitions. C'est un argument supplémentaire pour dire qu'on n'avait peut-être pas besoin d'un certain nombre d'articles précédents. Mais, en tant que tel, l'article 63, quant à moi, je ne veux pas m'y opposer. Je pense que...

Le Président (M. Alfred): Donc, l'article 63 est adopté?

M. Saint-Germain: Adopté.

Dispositions transitoires et finales

Le Président (M. Alfred): L'article 64?

M. Saint-Germain: Adopté.

Le Président (M. Alfred): L'article 65?

M. Saint-Germain: Adopté.

Le Président (M. Alfred): L'article 66?

M. Saint-Germain: Adopté.

Le Président (M. Alfred): L'article 67?

M. Saint-Germain: Adopté.

Le Président (M. Alfred): L'article 68?

M. Saint-Germain: Adopté.

Le Président (M. Alfred): L'article 69?

M. Saint-Germain: Adopté.

Le Président (M. Alfred): L'article 70?

Une voix: Adopté.

M. Saint-Germain: À l'article 70, ce serait peut-être là, M. le ministre, une bonne façon de remettre l'application de la loi comme elle était en 1974. Vous avez là un très beau moyen, si vous croyez que la loi est inadéquate, de la laisser en suspens.

Le Président (M. Alfred): On doit donc revenir sur l'article 70 qui a été suspendu, n'est-ce pas?

M. Joron: II y en a d'autres avant...

M. Saint-Germain: II y en a plusieurs, M. le Président.

Articles suspendus

M. Joron: ... on va revenir, si vous le permettez, M. le Président, à l'article 27, d'abord.

Article 27... Vous êtes très efficace, M. le député de Papineau.

Une voix: Tu aurais dû être là la semaine passée...

M. Joron: L'article 27, c'était la question de savoir s'il devait y avoir un seul compte en fiducie ou non.

M. Saint-Germain: Oui.

M. Joron: Nous soumettons, à la suggestion que faisait le député de Jacques-Cartier ce matin, un amendement qui fait disparaître le mot "seul". En fait, on oblige à avoir un compte en fiducie. Comme on le disait plus tôt, le singulier incluant le pluriel en matière législative...

Le Président (M. Lacoste): Est-ce que nous pouvons considérer...

M. Joron: ... ce ne sera plus nécessairement un seul compte, mais ça pourra être plusieurs. (17 h 15)

Le Président (M. Lacoste): Est-ce que nous pouvons considérer l'amendement du ministre comme faisant partie de la loi?

M. Saint-Germain: "Un titulaire de permis doit à tout moment..." Je crois que c'est une amélioration, M. le Président.

Le Président (M. Lacoste): D'accord. Je retiens donc l'amendement du ministre comme faisant partie de la loi.

M. Saint-Germain: Adopté. Est-ce que le nouvel article 27 est adopté?

M. Joron: Maintenant il y avait l'article 49...

Le Président (M. Lacoste): Auparavant, est-ce que le nouvel article 27 est adopté?

M. Saint-Germain: Adopté.

Le Président (M. Lacoste): Le nouvel article 27 est adopté.

M. Joron: L'article 49, maintenant, M. le Président...

Le Président (M. Lacoste): L'article 49...

M. Joron:... avait été suspendu. C'était encore une suggestion du député de Jacques-Cartier qui s'avère pertinente. Le député de Jacques-Cartier n'aimait pas l'expression "la personne touchée par le manquement". Il suggérait de remplacer ces mots par "la personne qui en subit un préjudice". C'est l'amendement que je propose.

Le Président (M. Lacoste): Est-ce que nous considérons l'amendement du ministre comme faisant partie de la loi?

M. Saint-Germain: Je crois que c'est encore une amélioration très sensible. Je n'ai rien d'autre à ajouter. Je ne sais pas si mon collègue...

M. Raynauld: Non, ça va. M. Saint-Germain: Adopté.

Le Président (M. Lacoste): Adopté. Le nouvel article 49 est adopté. J'appelle l'article 51.

M. Joron: À l'article 51, le député de Jacques-Cartier suggérait d'ajouter au huitième paragraphe, que je relis: "8° déterminer les renseignements qu'un titulaire de permis doit fournir au président, à un débiteur ou à un créancier". Le terme "renseignements" paraissait trop large, pouvant peut-être s'appliquer à n'importe quoi et on suggérait de le limiter par l'expression "pour les fins de la présente loi". C'est ce que l'article 51...

Sauf qu'au lieu de le rattacher au huitième paragraphe, on le met au tout début de l'article, de façon que ça couvre tous les sous-paragraphes.

L'article 51 se lirait comme ceci: "Le gouvernement peut, en outre des autres pouvoirs prévus par la loi, et pour les fins de son application — les fins de l'application de la loi — faire des règlements pour...". Cela limite les règlements à l'application de la loi.

Le Président (M. Lacoste): Je reçois l'amendement. Est-ce que l'amendement proposé par le ministre est adopté?

M. Saint-Germain: Adopté.

Le Président (M. Lacoste): L'amendement est adopté. Est-ce que l'article 51 tel qu'amendé est...

M. Saint-Germain: Pour le dixième alinéa on avait jugé...

M. Joron: Le dixième alinéa, après consultation avec les juristes et légistes, on a insisté pour le laisser tel quel, de façon à pouvoir prévoir des cas d'exception qui pourraient avoir été omis ou pourraient survenir ou être créés...

Le Président (M. Lacoste): M. le député de Jacques-Cartier à l'article 51.

M. Saint-Germain: J'ai donné ce matin mon opinion à ce sujet. J'ai réellement, à la limite de mes talents, essayé d'expliquer que c'était là une prérogative exclusive de l'Assemblée nationale, qui est absolument fondamentale. Je ne puis accepter qu'un gouvernement puisse déterminer d'autorité, que l'exécutif puisse déterminer d'autorité à qui s'applique une loi ou à qui elle ne s'applique pas, en ce qui concerne les individus aussi bien que les groupes. Je crois que c'est là, dans notre système parlementaire aussi bien que dans notre système démocratique, une responsabilité exclusive de l'Assemblée nationale, de laquelle celle-ci ne peut absolument pas se dispenser. Je crois qu'il y a là un précédent excessivement dangereux et qui n'est absolument pas en rapport avec l'importance de cette loi. Je ne comprends pas que M. le ministre puisse accepter un tel alinéa; je ne comprends pas non plus que les députés, quel que soit leur parti politique, puissent accepter qu'un tel alinéa soit dans la loi.

C'est renoncer, je crois, à ses obligations à titre d'élu du peuple. C'est réellement fondamental à mon avis. Les députés dans leur ensemble devraient se faire un devoir de mettre fin à ces abus des règlements. Je crois qu'on a, avec l'article 10, réellement dépassé les convenances et qu'on agit même contre l'esprit de nos institutions et contre l'esprit et les obligations de l'Assemblée nationale. Je sais pertinemment que mon collègue d'Outremont a certainement autre chose à ajouter là-dessus.

Le Président (M. Lacoste): M. le député d'Outremont.

M. Raynauld: M. le Président, je partage entièrement les réserves fondamentales que mon collègue entretient à ce sujet. Malheureusement, je dirai à mon collègue que ce n'est pas un précédent. J'ai vu, dans la loi 107, au mois de septembre, un article semblable, que j'ai combattu avec toute la vigueur dont nous étions capables et il a été subséquemment limité dans son application de façon assez significative, si je me souviens bien, mais, sur le plan des procédures, c'est un fait qu'un article comme celui-là peut nier l'essentiel du projet de loi. C'est vraiment une espèce d'article fourre-tout où le gouvernement se réserve le droit de dire à la population: J'ai voté un projet de loi et, ensuite, en exempter, à sa volonté, les trois quarts des gens qui y sont soumis. C'est un fait que c'est contraire à toutes les traditions parlementaires, je pense. Je me demande s'il n'y a pas eu aussi un autre exemple similaire dans le cas de la Loi sur la protection des terres agricoles, où on a délégué à la commission la délimitation des terres couvertes par la loi. Je pense que, sur un plan juridique c'est exactement la même chose. On a fourni des cartes et tout cela, mais c'est la commission qui décide finalement quelles sont les terres qui vont être considérées comme terres agricoles et, par la suite, vont tomber sous le coup de la loi ou en être exemptées. Il s'agissait de terres. Ici, il s'agit de personnes.

M. Joron: De catégories et non pas d'individus.

M. Raynauld: De catégories de personnes, oui. Cela me paraît quand même plus important encore que s'il s'agit de catégories de créances, dans ce cas-ci, ou de catégories de terres arables dans d'autres ou de catégories d'habitations, dans le cas de la loi no 107. Encore une fois, je pense que c'est une question de principe plus qu'autre chose. Personnellement, je n'aime pas ce genre de loi. Plus il y aura des gens exemptés de l'application de la loi, à mon avis, mieux ce sera, je le dis en toute franchise. Je n'aime pas ce genre de loi. Cela fait probablement quelques siècles qu'il existe des agences de recouvrement et le ciel n'est tombé sur la tête de personne, s'il y a eu des abus, il y avait des procédures judiciaires qui étaient prévues pour des abus en vertu soit du Code criminel, soit du Code civil, et je ne vois pas que la situation ait empiré au point où il faille, à propos de tout métier qu'on peut exercer aujourd'hui, exiger des permis, exiger des lois spéciales qui s'appliquent à l'exercice d'une profession ou d'un métier. Malheureusement, c'est la tendance qu'on suit au Québec. On veut légiférer sur tout et on veut... On s'imagine qu'il y a tellement d'abus partout que les procédures habituelles de recours aux tribunaux ne suffisent plus. Je le regrette, parce qu'on s'en va dans une société qui va être de plus en plus enrégimentée, de plus en plus encadrée, et on se demande toujours pourquoi. Est-ce qu'il y a vraiment des abus si criants et si généralisés qu'il faille faire des choses comme celle-là. Je dis que c'est une orientation que je déplore.

Le gouvernement du Québec n'est probablement pas le seul à le faire d'ailleurs, mais je le déplore. Evidemment, quand on arrive à un paragraphe comme le paragraphe 10, je trouve qu'on double les difficultés qu'on peut avoir, en donnant au gouvernement lui-même le choix de décider s'il va y avoir 20% des gens touchés par la loi ou s'il va y en avoir 80% ou 90%.

Je pense aussi que c'est ce genre de protection que le gouvernement se donne, en plus de violer les règlements parlementaires auxquels on adhère tous. En plus de ça, je pense que ça reflète aussi une espèce de manque de préparation. On se donne des pouvoirs au cas où on aurait oublié quelque chose. Le ministre n'est même pas capable de nous dire ce qu'il veut faire avec cet article 10, à moins qu'il l'ait fait ce matin, je n'étais pas ici, je m'en excuse, mais on en a parlé auparavant. On n'est même pas capable de savoir, à l'heure actuelle, qui on veut exempter de ça.

Le ministre dit: au cas, tout à coup il y aurait quelque chose qui surviendrait dans un mois, dans deux mois. Encore une fois, il ne s'agit pas d'un commerce nouveau, c'est un commerce vieux comme le monde, celui de recouvrer les créances. On a tout vu dans ce métier. Tout à coup, on se donne des portes de sortie, une liberté de passer outre à la volonté du Parlement. On se donne des pouvoirs que je trouve exorbitants de la part d'un gouvernement. Il dit: tout à coup, demain matin, on va recevoir un mémoire d'un groupe et on va trouver que cela a bien du bon sens, qu'on s'est trompé dans la loi, on va l'exempter.

Je pense que ce n'est pas la solution. Je pense que la solution, s'il y a des difficultés à l'application de la loi, ces difficultés devraient être résolues par des amendements apportés à la loi et non pas par un article qui donne la discrétion totale au gouvernement d'exempter, purement et simplement, de l'application de la loi tel ou tel groupe, telle catégorie de personnes ou de créances.

M. Joron: M. le Président...

Le Président (M. Lacoste): M. le ministre.

M. Joron: Je ne voudrais pas reprendre les discussions qu'on a eues ce matin à ce sujet, mais

en réponse à ce que vient de dire le député d'Outremont, je me sens quand même obligé de répéter un certain nombre de choses. Je pense qu'il est abusif de dire qu'il s'agit d'un viol des règles parlementaires, puisque ce genre d'optique qui permet, par règlement, de faire des exceptions existe dans nos lois. On en a cité deux ou trois exemples récents, on pourrait en retrouver, en remontant dans les trente dernières années, probablement un très grand nombre.

On nous demande ce qu'on veut faire avec cet article. Pour l'instant, rien, sauf qu'on veut que l'application de la loi soit possible. Par contre, s'il faut exempter des catégories, parce qu'il y en a déjà en grand nombre, l'article 6 doit exempter un certain nombre de catégories de personnes, une douzaine ou à peu près, il peut très bien en survenir une treizième ou une quatorzième dans peu de temps qu'on n'a pas vue à l'heure actuelle. Il ne faut pas penser non plus que les règlements se font en catimini. Les règlements sont publiés, il y a des règles de préavis, il y a tout un mécanisme qui donne le temps aux citoyens concernés de faire valoir leurs opinions. Si on a mis ça, ce n'est certainement pas pour circonvenir à l'application générale de la loi.

Pour répondre à l'autre partie des interrogations, certaines sont partagées par moi et par plusieurs de mes collègues également. C'est vrai que dans les sociétés modernes, le député d'Outremont l'a dit avec justesse - évidemment, ce n'est pas seulement chez nous, c'est dans les autres sociétés également qu'on retrouve le même phénomène — on demande des permis pour ceci, des permis pour cela. Il semble y avoir une multiplication, on a une société qui devient de plus en plus compliquée.

Si c'est vrai qu'elle devient plus compliquée, c'est indéniable, par contre, cette évolution. Comme le dit l'expression anglaise, "you can't have your cake and eat it too". On ne peut pas avoir le meilleur des deux mondes. Il faut faire des choix, parfois. (17 h 30)

Si on a senti le besoin de légiférer dans ce domaine et de demander des permis, etc., malheureusement, peut-être que c'est vrai que cela enrégimente un peu plus les activités d'une partie des gens de la société, mais ce n'est pas pour rien. C'est parce qu'on a constaté des abus.

Vous disiez tout à l'heure que le recouvrement, c'est quelque chose qui est vieux comme le monde. Mais il se fait aussi des abus vieux comme le monde. Je vais en donner un exemple aux membres de la commission qui a été porté à mon attention tout récemment. C'est une copie de la correspondance qui nous est parvenue. Je ne nommerai bien sûr pas l'agence dont il est question, mais je vais vous donner un exemple de choses plates qui arrivent et pourquoi on pense qu'il est utile de légiférer.

C'est le cas d'une dame de 74 ans qui a dû être transportée par ambulance et qui n'a pas payé son compte d'ambulance, parce qu'elle n'est pas capable de le payer. Le compte va devoir être payé par le ministère des Affaires sociales. L'agence de recouvrement lui écrit ceci, que je cite sans donner les noms bien évidemment: "Madame, suite à vos commentaires relativement à la créance susmentionnée, il me paraît étrange que vous refusiez de payer ce compte ambulancier. Est-ce que votre sénilité a tendance à surpasser vos capacités de réfléchir et de raisonner normalement? Auriez-vous adopté une attitude de sainte nitouche face à cette situation? Il faudrait revenir à vous-même et utiliser un peu plus de sagesse et de dignité. Vous n'êtes pas sérieuse, madame, quand vous racontez que vous emporterez vos comptes avec vous lors de vos funérailles. Une personne qui a du coeur au ventre songe à payer ses dettes. Allons, madame, ne soyez pas dupée par votre propre ignorance et payez donc!"

Cela existe aussi dans notre société des cas comme cela où on terrorise les vieilles personnes et où on insulte. Je dirais même quelque chose: Est-ce du harcèlement? Est-ce une menace? Est-ce de l'intimidation? Ce n'est peut-être même aucun des trois. Ce n'est peut-être même pas couvert, un cas comme cela, par notre loi.

Mais c'est parce que se produisent des choses comme cela qu'on a pensé qu'il fallait légiférer dans ce domaine. C'est "plate" de demander un permis de plus, mais je pense que c'est nécessaire.

M. Saint-Germain: La discussion n'est absolument pas à ce niveau. Personne ne s'oppose en principe à ce qu'il y ait une demande de permis, par exemple. Je crois bien que si une copie d'une lettre semblable était envoyée au président de la protection du consommateur, quelqu'un aurait des comptes à rendre à quelqu'un. Je ne pense pas que ce soit acceptable pour qui que ce soit. Ce n'est pas cela qui est la discussion.

Nous sommes au paragraphe 10, bien spécifiquement. Et il y a des moyens pour exempter des abus comme vous venez de décrire et qui existent. Ce n'est pas nécessaire d'avoir des lois aussi vigoureuses que cela. Pas du tout. C'est un écrit. La preuve, tout le monde l'a dans la figure. Nous n'avons pas besoin d'une loi aussi sévère et de régenter les gens au point où vous le faites par votre loi pour réprimer ou faire disparaître les abus que vous avez mentionnés. Pas du tout.

Au paragraphe 10, c'est un tout autre principe qui est en jeu. Cela n'a pas de relation avec ce que vous faites là, pas du tout. Aucune.

J'aurais une autre question, M. le Président. Vous avez dit que les lois qu'on a mentionnées tout à l'heure, qui avaient été des précédents, étaient des lois tout à fait récentes. Vous avez dit qu'on pourrait revenir trente ans en arrière et qu'il y en avait plusieurs. Il faudrait en sortir la liste pour baser une argumentation valable là-dessus. Je serais extrêmement surpris que vous puissiez trouver plusieurs lois en revenant trente ans en arrière qui contiennent un article comme le dixième alinéa ici. Je serais très surpris.

M. Joron: Quoi qu'il en soit, M. le Président...

Le Président (M. Lacoste): Est-ce que l'article 51 tel qu'amendé est adopté?

M. Raynauld: M. le Président, je voudrais simplement réagir très brièvement aux propos du ministre. Cela ne s'applique pas effectivement à l'article 51 qu'on examine à l'heure actuelle.

Je voudrais dire simplement la chose suivante: Chaque fois qu'il y a un abus dont on peut prendre connaissance, il y a deux réactions possibles. La première, il s'agit de dire: Est-ce qu'on est capable de s'occuper de cet abus et au besoin de faire modifier les pratiques de cet individu, le condamner s'il a commis vraiment un délit?

La deuxième attitude, c'est de dire: II y a un abus ici; maintenant, on va adopter une loi pour prévenir ce genre de chose dans l'ensemble de l'industrie concernée. C'est contre cela que j'en ai. Il me semble qu'il devrait être possible de s'occuper des cas particuliers, parce qu'il y aura toujours des abus, et de ne pas saisir l'occasion d'un cas particulier pour dire: Si cela se pose dans ce cas-là, cela doit se poser partout; par conséquent, je vais adopter une loi et je vais généraliser toute l'affaire. Je pense que c'est cette erreur-là qu'on commet à l'heure actuelle avec toutes les lois qu'on apporte, parce qu'on se dit: On va adopter des lois qui seront de plus en plus englobantes, en ayant toujours à l'esprit la possibilité que quelqu'un va faire un abus quelque part. Je dirai que même avec des lois comme celle-ci, il y aura encore des abus. Il y en aura toujours.

Il y a un cas que je raconte de temps à autre qui vient d'agents de recouvrement — on peut les appeler comme cela — du ministère du Revenu. J'ai eu un très beau cas, il n'y a pas tellement longtemps, d'un homme de 72 ans qui se faisait — est-ce qu'on peut dire harceler? je ne sais pas — faire des représentations par des agents du ministère du Revenu pour payer un impôt qu'il n'aurait pas payé en 1968 pour un montant de $200 qui, avec les intérêts accumulés, représentait $1200 en 1978. Ne me demandez pas tous les détails, pourquoi cela a été de 1968 à 1978. Il y a eu des choses entre-temps. Le règlement qu'on a proposé à ce monsieur, vous savez ce que c'est? Vous allez payer $10 par mois, de sorte que cet homme aurait payé le ministère du Revenu jusqu'à l'âge de 82 ans. Je suis intervenu sur ce cas, mais j'ai eu toutes les misères du monde à le résoudre. Je trouvais que c'était un abus, parce qu'à l'origine de tout cela, il y a eu des mécanismes, des modifications aux méthodes du ministère qui ont fait que le compte a été perdu pendant un certain temps. Quoi qu'il en soit, je dis: Ce n'est pas...

Cela me paraît odieux la lettre qui vient d'être lue. On peut se retourner de côté, ce n'est pas le même cas, ce n'est pas du tout la même chose, mais il y a aussi dans l'application de n'importe quelle loi, même souvent avec de la bonne volonté... Je ne suppose pas que les agents de recouvrement ou les officiers du ministère du Revenu sont des gens stupides. Je ne suppose pas cela. Ils ont des ordres: Recouvrez ces comptes-là. S'ils tombent sur un gars qui dit: Oui, je le paie tout de suite, tant mieux, ils ont sauvé cela. Si le type se rebiffe un peu, à ce moment-là, on commence à voir les complications.

Je dis cela simplement pour dire la chose suivante, c'est la conclusion que je veux tirer. En supposant qu'il y ait des officiers du ministère du Revenu qui se comportent comme cela et qui proposent des règlements qui sont un peu idiots, je trouve que ce ne serait pas une raison pour adopter une loi générale. Ce serait simplement une raison pour dire: II y a eu un cas d'abus comme celui-là. Y a-t-il des possibilités qui nous sont offertes à l'heure actuelle pour empêcher ce genre d'affaire-là, pour intervenir dans un cas particulier comme celui-là? Est-ce qu'il en existe ou est-ce qu'il n'y en a pas? S'il n'y en a pas, je le regrette beaucoup, mais j'en doute fortement. Je me dis: Ce n'est peut-être pas sur cette base-là qu'on doit décider d'adopter des lois comme celle-ci, comme on en a adopté une sur les courses de chevaux, il y a deux ans, où...

M. Joron: Elle vous a marqué celle-là. Vous en parlez souvent.

M. Raynauld: Ah oui, elle m'a marqué. Ah oui, les courses de chevaux, là... En réalité, c'est la même chose. Il y a une histoire qui se passe là, un montant de $50 a été volé à un autre gars, on adopte une loi, et houp! tout le monde va avoir un permis, même le gars qui vient porter le foin à un cheval et qui n'a absolument rien à voir avec les courses, mais il lui faut son permis, un certificat médical et trois ou quatre autres affaires à part cela, les cautionnements, etc. Alors, on embrigade tout le monde de l'industrie.

Là, avec les agences de recouvrement, j'ai l'impression qu'on fait un peu la même chose ici. Je dis simplement que je le déplore parce que je pense que ce n'est pas le genre de société dans laquelle j'aimerais vivre si on doit multiplier de plus en plus ce genre d'intervention. J'imagine, j'ai l'impression qu'on n'a pas de justification suffisante pour faire cela, même avec des cas pénibles comme ceux qu'on peut relever de temps à autre et qu'il faut dénoncer, bien sûr.

Il me semble que ce n'est pas parce qu'on trouve un abus à une place qu'il faut nécessairement faire adopter des lois générales.

Le Président (M. Lacoste): Est-ce que l'article 51...

M. Saint-Germain: Je vais proposer un amendement à l'article 51, qui ferait simplement disparaître la dixième...

M. Alfred: Vous proposez un amendement. J'avais demandé la parole avant vous. Etant donné que vous avez un amendement à apporter, allez-y!

M. Saint-Germain: Allez!

Le Président (M. Lacoste): M. le député de Papineau.

M. Alfred: L'exemple apporté par le député d'Outremont, concernant le recouvrement datant de 1968, et qui a été retrouvé en 1978, qui devait s'élever à $10 par mois, si vous intervenez pour en payer plus, je trouve que vous avez un cas exceptionnellement intéressant, parce qu'ordinairement, dans les cas de recouvrement, les montants réclamés par les recouvreurs sont tels que les gens ne peuvent pas payer le plein montant. Le cas que vous avez mentionné est un cas extrêmement exceptionnel. Je dois vous dire aussi que, pour ce cas exceptionnel que vous donnez, j'ai quelques explications à vous donner. Malheureusement, il fut un temps où le recouvreur n'avait pas la totale liberté, en allant chez l'homme d'affaires, de récupérer les taxes imposées, parce qu'il suffisait que l'homme d'affaires fasse un appel téléphonique au député en place, et comme il y avait des liens étroits entre l'homme d'affaires et le député, le député faisait un appel téléphonique au recouvreur et celui-ci, ayant peur de perdre son emploi, suspendait cela. Cependant, l'ordinateur gardait cela en mémoire. C'est la raison pour laquelle on fait face maintenant, que M. Parizeau fait face à la difficulté énorme que, dans des administrations antérieures, le travailleur de l'État était dans l'impossibilité de faire son travail, parce que les hommes politiques l'empêchaient de le faire.

M. Saint-Germain: Ils faisaient adopter une loi pour régir le comportement des députés dans leur comté.

M. Alfred: Cela ne se fait plus, monsieur.

Le Président (M. Lacoste): M. le député de Jacques-Cartier.

M. Saint-Germain: Oui, j'aimerais faire un amendement qui ferait que le paragraphe 10 serait tout simplement biffé.

Le Président (M. Lacoste): Biffer le dixième paragraphe, c'est-à-dire enlever "exempter, aux conditions qu'il détermine, une catégorie de personnes ou de créances de l'application totale ou partielle de la présente loi." Le député propose que ce paragraphe soit biffé. L'amendement est reçu. Est-ce que l'amendement du député de Jacques-Cartier est adopté?

M. Joron: Non, de ce côté, nous ne pouvons accepter cet amendement.

M. Saint-Germain: Vote enregistré, M. le Président.

Le Président (M. Lacoste): Sur I'amendement du député de Jacques-Cartier. M. Lavigne (Beauharnois)? M. Alfred (Papineau)?

M. Alfred: Contre.

Le Président (M. Lacoste): M. Goulet (Bellechasse)? M. Marquis (Matapédia)? M. Raynauld (Outremont)?

M. Raynauld: Pour.

Le Président (M. Lacoste): M. Michaud (Laprairie)?

M. Michaud: Contre.

Le Président (M. Lacoste): M. Baril (Arthabaska)? M. Joron (Mille-Îles)?

M. Joron: Contre.

Le Président (M. Lacoste): M. Saint-Germain (Jacques-Cartier)?

M. Saint-Germain: Pour.

Le Président (M. Lacoste): Donc, l'amendement du député de Jacques-Cartier est rejeté par trois contre, deux pour. Est-ce que l'article 51, tel qu'amendé, est adopté?

M. Saint-Germain: Sur division, M. le Président.

Le Président (M. Lacoste): Adopté sur division. (17 h 45)

M. Joron: Finalement, M. le Président, il y a l'amendement proposé par le député d'Outremont. Si vous voulez le lire.

M. Raynauld: Oui, M. le Président, à l'article 56, l'amendement aurait pour effet de modifier l'article qui se lirait maintenant comme ceci: "Lorsqu'une corporation commet une infraction à la présente loi ou à un règlement, un administrateur ou un représentant de cette corporation, qui y a consenti, acquiescé ou participé, est réputé être partie à l'infraction et est passible de la peine prévue au premier alinéa de l'article 54."

Le Président (M. Lacoste): Est-ce que l'amendement du député d'Outremont, qui se lit comme suit: "Lorsqu'une corporation commet une infraction à la présente loi ou à un règlement, un administrateur ou un représentant de cette corporation qui y a consenti, acquiescé ou participé est réputé être partie à l'infraction et est passible de la peine prévue au premier alinéa de l'article 54.", est adopté?

M. Joron: Oui, M. le Président, il nous fait plaisir d'adopter l'amendement du député d'Outremont.

M. Saint-Germain: Adopté.

Le Président (M. Lacoste): L'amendement est adopté. Est-ce que l'article 56...

M. Alfred: Adopté.

Le Président (M. Lacoste): ... tel qu'amendé, est adopté?

M. Saint-Germain: II ne peut pas revenir avec la mienne? Il a l'air plus chanceux que moi, lui.

Le Président (M. Lacoste): Est-ce que l'article 56, tel qu'amendé, est adopté?

Des voix: Adopté.

M. Raynauld: Adopté.

M. Joron: Tout est dans la manière.

M. Saint-Germain: Oui, je vois ça.

Le Président (M. Lacoste): Est-ce que le projet de loi no 54, Loi sur le recouvrement de certaines créances, est adopté?

M. Alfred: Adopté.

Le Président (M. Lacoste): Adopté tel qu'amendé. Je demanderais au rapporteur de bien faire...

M. Michaud: Avec plaisir, ce sera fait jeudi.

Le Président (M. Lacoste): ... rapport à l'Assemblée nationale.

Nous ajournons nos travaux sine die.

M. Joron: Merci, messieurs, de votre participation.

(Fin de la séance à 17 h 48)

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