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Version finale

41e législature, 1re session
(20 mai 2014 au 23 août 2018)

Le jeudi 24 mars 2016 - Vol. 44 N° 40

Consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 86, Loi modifiant l’organisation et la gouvernance des commissions scolaires en vue de rapprocher l’école des lieux de décision et d’assurer la présence des parents au sein de l’instance décisionnelle de la commission scolaire


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Table des matières

Auditions (suite)

Commission scolaire des Grandes-Seigneuries

Fédération autonome de l'enseignement (FAE)

Association régionale des West Quebecers

Québec Community Groups Network (QCGN)

Regroupement des commissions scolaires de l'Estrie

Commission scolaire de la Pointe-de-l'Île

Intervenants

Mme Filomena Rotiroti, présidente

M. Pierre Michel Auger, président suppléant

M. Sébastien Proulx

M. Alexandre Cloutier

M. Jean-François Roberge

Mme Françoise David

M. Marc Carrière

M. David Birnbaum

Mme Claire Samson

Mme Nicole Léger

*          Mme Marie-Louise Kerneïs, commission scolaire des Grandes-Seigneuries

*          Mme Michelle Fournier, idem

*          M. Sylvain Mallette, FAE

*          Mme Nathalie Morel, idem

*          M. James Shea, Association régionale des West Quebecers

*          M. Walter Duszara, QCGN

*          M. Geoffrey Chambers, idem

*          Mme Sylvia Martin-Laforge, idem

*          M. Gilles Normand, Regroupement des commissions scolaires de l'Estrie

*          Mme Patricia Sévigny, idem

*          M. Jean-Philippe Bachand, idem

*          M. Michael Murray, idem

*          M. Miville Boudreault, commission scolaire de la Pointe-de-l'Île

*          Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Onze heures trente minutes)

La Présidente (Mme Rotiroti) : Alors, bonjour à tous.

Des voix : ...

La Présidente (Mme Rotiroti) : À l'ordre s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de la culture et de l'éducation ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.

La commission est réunie afin de poursuivre les consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 86, Loi modifiant l'organisation et la gouvernance des commissions scolaires en vue de rapprocher l'école des lieux de décision et d'assurer la présence des parents au sein de l'instance décisionnelle de la commission scolaire.

M. le secrétaire, y a-t-il des remplaçants?

Le Secrétaire : Oui, Mme la Présidente. Mme Hivon (Joliette) est remplacée par Mme Léger (Pointe-aux-Trembles).

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci. Nous entendrons cet avant-midi les organismes suivants : la commission scolaire des Grandes-Seigneuries, merci beaucoup d'être là, et la Fédération autonome de l'enseignement.

Auditions (suite)

Alors, je souhaite la bienvenue aux représentants de la commission scolaire des Grandes-Seigneuries. M. Bessette, Mme Fournier, Mme Kerneïs et M. Allard, merci d'être là. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour faire votre présentation, et, par la suite, on passera à une période d'échange entre les élus. Alors, je vous demanderai de vous identifier, ainsi que les gens qui vous accompagnent, et tout de suite partir avec votre présentation. Alors, la parole est à vous.

Commission scolaire des Grandes-Seigneuries

Mme Kerneïs (Marie-Louise) : Alors, merci beaucoup, Mme la Présidente de la commission, M. le ministre, Mmes et MM. les députés et membres de la Commission de la culture et de l'éducation.

Alors, je me présente, Marie-Louise Kerneïs, présidente de la commission scolaire des Grandes-Seigneuries, troisième mandat, accompagnée de M. Éric Allard, vice-président du conseil et parent-utilisateur, Stéphane Bessette, commissaire dans le milieu rural, et Mme Michelle Fournier, directrice générale de la commission scolaire.

Permettez-moi de vous remercier de nous avoir invités à intervenir auprès de la Commission culture et éducation dans le cadre du projet de loi n° 86. Soucieuse de faire avancer les débats, c'est dans un esprit d'ouverture et de collaboration que la commission scolaire des Grandes-Seigneuries vous présente son mémoire. Située sur la rive sud de la région métropolitaine, la commission scolaire vit une importante croissance depuis sept ans et dessert la clientèle scolaire des municipalités de la MRC de Roussillon, en zone urbaine et semi-urbaine, et de la MRC des Jardins-de-Napierville en zone rurale. Au 30 juin 2015, la commission scolaire comptait 25 000 élèves dans son réseau de 55 établissements scolaires, dont 3 600 élèves au secteur adulte. 7 200 enfants fréquentent les services de garde de toutes nos écoles primaires, soutenues entre elles par une péréquation. Près de 14 000 élèves sont transportés. À noter qu'aucun transport régional ne dessert tout le territoire. Un total de 3 831 membres du personnel.

Il est important de préciser que l'amorce de cette réflexion s'est faite avec les représentants des parties interpellées par le projet de loi, soit les parents, les directions d'établissement, les cadres et, bien sûr, les commissaires élus à ce jour. La commission scolaire souscrit au principe énoncé en 2006 par le Conseil supérieur de l'éducation, à savoir que les parents, en raison de leur responsabilité à l'égard de l'éducation de leurs enfants, ont un rôle important à jouer, notamment au sein des instances scolaires. L'éducation est un instrument essentiel de développement des personnes et de la société.

Plusieurs intervenants ou acteurs participent activement au système d'éducation au Québec. Un partage clair des responsabilités et des obligations de chacun est nécessaire. Et, à ceci, je rajouterais la nécessité de collaboration. De plus, nous partageons les mêmes objectifs que le ministre de l'Éducation en termes de réussite scolaire du plus grand nombre d'élèves et nous sommes conscients que tous les partenaires doivent avoir une place importante au sein des différentes instances. Mais ne l'ont-ils pas déjà dans le cadre du projet de loi de l'instruction publique actuel? Quelle place souhaitent-ils prendre? Est-ce que le projet de loi n° 86 leur permettra effectivement de prendre une plus grande place? Ce sont à ces questions que le mémoire qui vous est présenté tentera de répondre. La présentation se déroulera dans cet ordre : la réussite éducative et sociale pour tous; l'autonomie, la décentralisation, la subsidiarité; la démocratie scolaire; et la taxe scolaire.

Réussite éducative et sociale pour tous les élèves. À l'instar des autres commissions scolaires, le taux de diplomation et de persévérance des élèves de la commission, chez nous, est en hausse de façon notable et toujours en progression. Cette hausse est notamment attribuable au fait que la commission scolaire est à pied d'oeuvre et contribue au développement des meilleures pratiques de gestion, notamment avec la gestion axée sur les résultats, pour permettre aux directions d'établissement d'exercer un leadership fort au sein des établissements. À cet effet, voici quelques exemples d'actions mises de l'avant via les services éducatifs : expérimentation et mise en place d'une structure d'accompagnement des élèves à risque au secondaire basée sur le tutorat et le mentorat pour promouvoir et renforcer l'engagement scolaire, ce, suivant la recherche de M. Michel Janosz, chercheur de l'Université de Montréal. Promotion, auprès de l'ensemble des établissements primaires et secondaires, de l'offre de services de l'organisme Fusion Jeunesse dans le but de démarrer des projets en 2016‑2017. Mise en place des communautés d'apprentissage professionnel dans les établissements, axées principalement sur la diminution des sorties sans diplôme ni qualification, en lien avec les travaux de M. John Hattie.

Comme en témoignent ces exemples et les autres déposés dans le mémoire, une approche structurante et supportante auprès des établissements, basée sur les meilleures pratiques, appuyée par la recherche, fait partie du credo pédagogique de la commission scolaire. Par ailleurs, le conseil des commissaires et la direction générale en sont les gardiens par la convention de partenariat. Leurs décisions administratives, dans le cadre de la répartition des ressources, sont prises en ce sens. Nous voyons donc d'un bon oeil les dispositions dans le projet de loi entourant le projet éducatif de l'école et le plan d'engagement vers la réussite.

Trois pistes de travail ou de réflexion. Travaillons ensemble à l'élaboration d'un livre blanc sur l'éducation en concertation avec le partenaire du réseau de l'éducation, organismes communautaires, centres de petite enfance, et élaborer un plan stratégique du ministère. Ayons une vision claire du ministère et de ses orientations à moyen terme au sujet du curriculum et arrêter de gérer le réseau de l'éducation en faveur de la saveur du jour. Permettez aux établissements de la commission scolaire d'être conjointement imputables des résultats des élèves si le projet de loi à l'étude demeure tel quel.

De l'autonomie, de la décentralisation et de la subsidiarité. Le problème actuel se situe dans la perception d'une perte d'autonomie liée aux encadrements de plus en plus serrés qui s'avèrent être des contrôles et des demandes multiples de reddition de comptes, tant aux établissements qu'aux commissions scolaires. À ce titre, le projet de loi n° 86 ne va pas dans le sens de pourvoir une plus grande autonomie et nourrit une certaine illusion. Les conseillers scolaires, les parents, les directions, les enseignants, les membres du personnel non enseignant ne gagnent pas plus de pouvoir et deviendront imputables des nouvelles responsabilités que leur donne le projet de loi. Les contrats de travail nationaux, les règles budgétaires, les encadrements pédagogiques nationaux n'ont pas changé. Et, à l'issue des récentes ententes de principe conclues des dernières négociations nationales, d'autres normes et redditions de comptes s'ajouteront.

Le seul acteur à gagner du pouvoir à ce stade-ci est le ministre de l'Éducation, du Loisir et du Sport. Le conseil des commissaires, préoccupé par ce centralisme ministériel, considère que la place de l'autonomie des établissements se verra considérablement réduite, pour ne pas dire inexistante. Cependant, nous souhaitons attirer votre attention sur des dérives possibles entre les établissements d'une même organisation, tant dans la répartition des ressources que dans l'offre de service aux élèves.

Réflexion en lien avec la notion d'autonomie. Une commission scolaire doit s'assurer de ne pas créer ou augmenter d'écart entre les établissements. Tous les élèves ont droit aux mêmes chances d'accéder à des services et à une éducation de qualité. La commission scolaire doit également s'assurer de garantir le même curriculum et sa continuité d'un établissement à l'autre, compte tenu en particulier de notre réalité dans la croissance et la disparité géographique de la commission scolaire. Pour sa part, le ministre doit augmenter l'autonomie des établissements en déciblant les différentes mesures ministérielles.

À la commission scolaire, le principe de subsidiarité est appliqué, comme en témoignent les mécanismes de participation et de consultation qui existent présentement et dont nous donnons des exemples concrets dans nos mémoires. À la page 8, vous pourrez constater que la décentralisation en lien avec la répartition budgétaire de la commission scolaire... il existe, entre autres, une interinfluence et une interdépendance entre le comité de budget sur lequel siègent, entre autres, des directions d'établissement et de services, le comité de vérification du conseil, le comité consultatif de gestion et le conseil des commissaires. Bien que ce soit le conseil des commissaires qui, ultimement, prenne les décisions, tous travaillent en interrelation et avec l'objectif de partager de façon équitable les ressources disponibles.

Enfin, à titre d'exemple, pour illustrer que le principe de la subsidiarité est pris en compte à la commission scolaire, le conseil des commissaires, lors des exercices de redécoupage des bassins d'alimentation des élèves des établissements, fréquents, compte tenu de l'augmentation de clientèle et la nécessité d'optimisation de nos places-élèves, procède à un exercice de préconsultation auprès des conseils d'établissement de la société civile en général dans une perspective de résolution de problème pour bien définir les hypothèses de travail qui, par la suite, repartiront en consultations officielles auprès des conseils d'établissement. Ce qu'il faut savoir, c'est que cet objet ne fait pas partie des consultations obligatoires en vertu de la Loi sur l'instruction publique. C'est par souci de rapprocher l'école et les parents des lieux de décision que la commission scolaire se prête à cet exercice.

• (11 h 40) •

Tout ne peut se passer exclusivement à l'école. Exemple, dans un secteur donné, certaines écoles peuvent être en surplus d'élèves et d'autres non. Les principes de subsidiarité doivent tenir compte de la répartition des ressources disponibles, de la capacité d'accueil des établissements, d'une offre de services éducatifs égale d'une école à une autre, et ce, dans le respect des différences de tous les milieux et dans le cadre d'une saine gestion des fonds publics, responsabilité du conseil des commissaires. C'est donc possible, dans le cadre de la loi actuelle, de travailler en concertation et de façon décentralisée avec les établissements et d'être près des communautés. Cette volonté de concertation réside dans la culture organisationnelle et est propre à chaque organisation.

Pour ce qui est de la démocratie scolaire, force est de constater que la démocratie élective est en perte de vitesse, et ce, à tous les niveaux. Dans le cadre de la dernière élection scolaire qui s'est tenue à la commission scolaire, la hausse de la taxe scolaire a été un enjeu auprès des citoyens qui n'ont plus d'enfants dans nos écoles. Plusieurs nous ont indiqué ne pas vouloir aller voter pour démontrer leur désaccord face à la hausse de la taxe scolaire. Doit-on en conclure que la population n'a plus confiance dans le système d'éducation et qu'ils sont totalement désengagés? Je ne pense pas. L'intérêt citoyen est encore très présent. En milieu rural, l'école est au coeur du village et a son importance pour sa survie.

Par ailleurs, les parents démontrent peu d'intérêt à choisir leurs représentants lors d'assemblées générales de parents — page 13. Est-ce que le fait de faire croire à plus de pouvoirs fera en sorte qu'ils s'engageront davantage au sein de la commission? Des parents nous ont affirmé que leur intérêt premier résidait à s'impliquer au niveau de leur école d'abord : être informés, consultés, entendus, pouvoir influencer.

Pistes de travail ou de réflexion.

La Présidente (Mme Rotiroti) : En terminant, Mme Kerneïs, s'il vous plaît.

Mme Kerneïs (Marie-Louise) : Alors, j'aurais aimé vous parler d'un sujet comme la taxe scolaire, je ne le ferai pas. C'est à votre disposition. Je passerais à la conclusion dans ce cas.

Une petite phrase quand même concernant la taxe scolaire. Des choix locaux ont été faits par la taxe scolaire, tels qu'investir près de 10 millions de dollars de plus que les subventions prévues aux fins de l'intégration des élèves en difficulté en réduisant les coûts administratifs de plus de 2 millions depuis cinq ans... sont le fait d'armes du conseil.

En conclusion, comme nous le démontrons par notre réalité terrain, le modèle proposé de subsidiarité et de cogestion est possible et réalisable dans le cadre de la loi actuelle. Les différences dans le projet de loi se situent principalement... les articles touchant le conseil des commissaires et le rôle du ministre. De la gouvernance actuelle, en quoi celle-ci est-elle un frein au modèle proposé? Par les processus de sélection allant de la direction générale aux cadres, le conseil des commissaires s'est assuré de choisir des personnes qui correspondaient à ces valeurs, car une culture d'organisation ne se crée pas seulement par des principes, mais surtout par des acteurs qui les mettent en oeuvre. Le plus grand défi de ce style de gestion est la cohérence : ce que l'on dit doit refléter ce que l'on fait.

Ainsi, que devons-nous penser du rôle du ministre qui, dans le cadre d'une loi, exige un exercice de cogestion, alors qu'il s'assure de pouvoir s'ingérer jusqu'à obliger des fusions ou intervenir directement dans les écoles? Nous reconnaissons au ministre la responsabilité relative aux orientations et de s'assurer qu'elles soient respectées, mais serait-il possible que de simples ajustements dans la loi actuelle puissent être faits en donnant le droit de vote aux commissaires-parents et, en ce qui a trait à la reddition de comptes face à ces orientations, que des mesures correctives soient exigées en fonction des grands principes de gouvernance, tout en respectant les choix locaux en matière de services éducatifs à rendre aux élèves? Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci beaucoup, Mme Kerneïs. Alors, on va passer à la période d'échange, et je cède la parole à M. le ministre pour 13 minutes.

M. Proulx : Merci, Mme la Présidente. Merci à vous d'être ici aujourd'hui. Très heureux d'avoir l'occasion de vous entendre. Je veux vous féliciter également pour la préparation de votre mémoire. C'est très explicite parce que vous avez exprimé vos préoccupations, vous avez également fait état de la façon dont ça fonctionne chez vous. Et vous avez fait plus que le dire, vous en avez fait la démonstration à l'écrit, et ça nous permet de visualiser aussi ce que vous dites et ce que je pense être une décentralisation par rapport à d'autres modèles.

Il y a une section de votre mémoire que vous n'avez pas eu l'occasion de traiter. Je sais bien qu'on n'est pas dans l'objet du projet de loi, mais, si vous vouliez prendre quelques minutes pour nous l'expliquer, puisque les occasions de se rencontrer ne sont pas toujours très fréquentes et que vous êtes là, je pense que ça vaudrait peut-être la peine de vous laisser terminer au moins la présentation de votre mémoire pendant quelques minutes.

Mme Kerneïs (Marie-Louise) : Bien, je vous remercie beaucoup. Je vais revenir où j'étais rendue. Je m'excuse. Nous en étions à la taxe. Alors, attendez une minute, page 8... page 7, excusez.

Alors, les pistes de travail concernant la démocratie scolaire, quand même, je vais vous dire quand même qu'au niveau de l'autonomie, la décentralisation et la subsidiarité via la LIP actuelle... qu'ils soient appliqués, que le ministre, via son ministère, en fasse périodiquement l'évaluation dans chacune des organisations, accorder le droit de vote aux commissaires-parents, maintenir un lien entre les différentes instances parentales : conseils d'établissement, comité de parents et conseil scolaire. Et le conseil scolaire a une responsabilité de susciter la participation parentale.

33 établissements sur 55 n'ont pas de représentant de la communauté. C'est quand même un indicateur important sur l'implication, aussi, de la communauté. Le comité de parents. Le message du comité de parents de notre commission scolaire, il est unanime, les représentants de la communauté ne devraient pas avoir le droit de vote au C.E., mettant en péril la parité existante entre les parents et les membres du personnel. Et il faut maintenir une participation élective, citoyenne et participative des parents et de la communauté par la tenue d'élections simultanées, scolaires et municipales.

En ce qui concerne la taxe scolaire, bien que nous ayons fait état plus tôt de l'apparition d'une diminution de l'engagement citoyen face à l'éducation en général, exception faite en période d'austérité, la culture de l'utilisateur-payeur et le citoyen contribuable étant en hausse, le conseil des commissaires, via sa présidente, a toujours fait un exercice pédagogique auprès de la population pour expliquer ce qu'il en est, de la taxe. Un des aspects complémentaires de la taxe scolaire et qui concerne tous les citoyens est la signature de protocoles d'entente entre les commissions scolaires et les municipalités pour l'utilisation des locaux des établissements scolaires pour les besoins des citoyens : gymnase, locaux de loisir. Il s'agit d'une excellente façon pour le citoyen de profiter des installations des établissements scolaires.

Alors, le conseil des commissaires, contrairement à ce qui circule, a toujours eu le pouvoir de déterminer, de hausser ou non le taux de taxe. Ce sont les compressions budgétaires, les compressions budgétaires sans précédent et les règles de péréquation qui l'ont forcé à le faire pour préserver les services aux élèves.

 Deux pistes de solution en ce qui concerne la taxe scolaire, et c'est un petit peu par dérision, je vous le dis. Bien qu'en total désaccord, s'il ne devait plus y avoir de représentation élective citoyenne, évaluer la possibilité d'abolir la taxe scolaire au profit d'une intégration dans le cadre d'une réforme fiscale provinciale. Pourquoi pas? Si le pouvoir entier est remis aux parents, lire les utilisateurs, évaluer la possibilité de taxer uniquement les utilisateurs.

Alors, c'étaient les commentaires que j'avais à vous dire concernant la taxe. Merci beaucoup.

M. Proulx : Merci. Alors, je... au moins, vous aurez eu l'occasion de faire état de l'ensemble de votre mémoire. Bien sûr, ça nous fait plaisir de vous entendre.

Vous dites — j'aurai quelques questions, on va faire ça plus rapidement étant donné le temps que nous avons — vous dites, d'un côté, oui à la présence de gens de la communauté, de l'autre, vous dites : Bien, on ne souhaiterait pas les voir... vous ne souhaitez pas qu'ils aient le droit de vote. Vous dites : Ça met en péril un équilibre. Pourriez-vous...

Mme Kerneïs (Marie-Louise) : On parle au niveau des conseils d'établissement.

M. Proulx : Voilà. Alors, pourriez-vous nous expliquer, dans le fond, à quoi vous faites référence exactement et où est votre crainte de voir des membres de la communauté s'impliquer?

Mme Kerneïs (Marie-Louise) : Ah non! Ce n'est pas une crainte qu'ils s'impliquent, par exemple. Non, non, ce n'est pas ce qu'on vient dire. C'est que ce qui nous été expliqué par les membres de conseils d'établissement, c'est que la loi actuelle fait qu'il y a une parité qui a été vraiment étudiée à l'effet que les membres du personnel et les parents aient un droit de vote égal, à l'exception, effectivement, du président du conseil d'établissement, qui a, comment je vais dire, le vote prépondérant. O.K.? Donc, la majorité doit être automatiquement des parents. Et, si un droit de vote est donné à un membre de la communauté, bien, cette parité-là vient de disparaître, on devient égaux. Donc, les parents ont cette inquiétude, nous ont évoqué cette inquiétude.

M. Proulx : Mais je comprends que vous faites état du conseil d'établissement. C'est moi qui n'avais pas porté attention. Je m'en excuse...

Mme Kerneïs (Marie-Louise) : Je vous en prie.

M. Proulx : ...j'ai bien saisi ce que vous dites. Vous dites également, je pense, dans votre mémoire, que les commissaires-parents pourraient, hein, si on devait aller là, si on souhaitait aller là, avoir un droit de vote à l'intérieur du conseil des commissaires. Les commissaires-parents ne sont pas des gens qui se retrouvent au conseil de la même façon que les commissaires, hein?

Mme Kerneïs (Marie-Louise) : Non, effectivement.

M. Proulx : Ils ne sont pas là par le même mode électif. Alors, ce n'est pas la même façon de se faire élire pour y être un représentant. Alors, est-ce que, pour vous, s'il devait... Dans votre hypothèse, il y a des commissaires élus au conseil, mais il y a également des commissaires-parents avec droit de vote. Est-ce que le fait qu'ils ne se retrouvent pas — je ne dis pas avec la même légitimité, je pose la question — ...

Mme Kerneïs (Marie-Louise) : Oui, oui. Oui. Non, je comprends. Oui, oui.

M. Proulx : ...avec le même mode électif pour arriver là où ils sont, est-ce que, pour vous, ça, ça pose une difficulté?

• (11 h 50) •

Mme Kerneïs (Marie-Louise) : Pas vraiment parce que, de toute façon, dans le mode de fonctionnement qu'on a, actuel, les commissaires-parents sont considérés comme des commissaires autour de la table, comme les autres. Dans les comités de travail, je leur demande toujours leur opinion, et ils votent également dans les comités de travail.

Je sais qu'historiquement, si on revient un petit peu en arrière, c'est déjà quelque chose qui avait été proposé, aux commissaires-parents, d'avoir le droit de vote. Et c'est leur fédération même qui avait écarté cette possibilité sur le fait que tous les sujets traités au conseil des commissaires ne sont pas obligatoirement traités aux comités de parents. Donc, il y avait comme un petit conflit potentiel qui allait exister, que les commissaires-parents allaient donner des opinions sur des choses qu'ils n'ont pas traitées, eux. Donc, c'était un petit peu pour cette réserve qu'ils avaient eue... en tout cas, c'est ce qui m'a été évoqué, et disons que ça peut se comprendre, mais, pour nous, ce n'est pas un problème de fonctionnement.

M. Proulx : Vous avez, à l'intérieur de votre structure de fonctionnement, un comité budget. Est-ce que ça s'apparente de près ou de loin au comité de répartition des ressources que nous souhaiterions mettre en place?

Mme Kerneïs (Marie-Louise) : Dans la composition, premièrement, ça s'apparente, à l'exception que les cadres de services sont présents aussi, O.K., ce n'est pas exclusivement des directions d'école. D'autre part, dans la proposition qui est faite, c'est le lien de communication qui est différent. Les directions d'école qui sont sur le comité budget font référence après ça aux comités de gestion où ils rencontrent toutes les autres directions d'école aussi. Donc, il y a comme une étape qui est là, qui, à mon avis, est nécessaire pour les bonnes relations aussi entre eux. Mme Fournier pourrait peut-être éventuellement, si vous avez des questions complémentaires, vu que c'est de la gestion, cette partie-là, c'est considéré de la gestion, pourrait vous donner des éléments complémentaires, si vous les désirez.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Oui, oui, allez-y, il reste cinq minutes.

M. Proulx : Est-ce que vous pourriez nous donner, par exemple, quelques exemples d'utilité du comité budget? Parce que ce n'est pas vraisemblablement toutes les commissions scolaires qui ont ce type d'organisation. Alors, chez vous, les avantages sur des exemples concrets, par exemple.

Mme Fournier (Michelle) : Bien, en fait, l'utilité, d'abord, c'est qu'il y a une représentation. La commission scolaire est divisée par secteur. Donc, chaque secteur est représenté et chaque secteur présente des caractéristiques différentes. Et, bien sûr, quand on est... en fait, quand vous avez pris connaissance du mémoire, ça fait maintenant plus de quatre ans que nous avons ce type de comité là parce qu'évidemment avec les compressions, quand on prend des décisions courageuses sur la façon dont on va répartir la suite des choses, bien, c'est sûr que, quand tout le monde a son mot à dire et développe sa vision globale de l'ensemble de la commission scolaire, bien, ça nous permet de mieux affronter les épreuves tout le monde ensemble. Alors, je vous dirais qu'il a une grande utilité dans ce sens-là. Et les décisions qui sont prises, elles sont communes et elles sont partagées.

M. Proulx : Vous dites également un peu plus loin, dans le mémoire, que vous proposez d'augmenter l'autonomie des établissements et vous utilisez la formule «en "déciblant" les différentes mesures ministérielles». Je vais retenir la formulation.

Mme Kerneïs (Marie-Louise) : Ce n'est pas très, très français, je dirais, mais disons que l'image est là, l'image est là.

M. Proulx : Mais je dirais que ça vulgarise bien ce que ça doit dire, en tout cas, dans le cadre de votre proposition. À ce moment-là, jusqu'à maintenant, l'argent, les sommes disponibles pour une des mesures ministérielles que vous mettez de l'avant dans l'exemple, doit transiter par la commission scolaire. Actuellement, si elle n'est pas déciblée, vous en faites une répartition...

Mme Kerneïs (Marie-Louise) : Comme le prévoient justement...

M. Proulx : Comme le prévoient les règles budgétaires. Alors, vous seriez favorables à l'idée que le ministère puisse non pas cibler l'ensemble de la mise en application, mais qu'il cible plutôt l'établissement pour qu'il puisse utiliser des sommes de manière...

Une voix : Non, non.

M. Proulx : Non, ce n'est pas ce que vous dites? Alors, dites-moi-le.

Mme Kerneïs (Marie-Louise) : Bien, ce qu'on dit, je pense que ça a été dit, d'ailleurs, par plusieurs, déjà, on écoute religieusement la commission parlementaire, ça a été souligné, c'est la dérive des fameuses cibles qui ne sont pas suffisamment collées aux besoins que l'école peut avoir. Et c'est là qu'on dit que l'autonomie de l'école est importante parce que c'est eux qui connaissent effectivement les besoins spécifiques face aux cibles qu'ils ont, eux autres, de réussite. Bien, c'est eux, avec le personnel qu'ils ont à leur disposition, qui décident comment les utiliser, la meilleure façon de le faire.

M. Proulx : Donc, si je comprends bien ce que vous dites — j'avais l'impression qu'on disait un peu la même chose — vous dites : S'il y a 1 $ qui doit se rendre pour une des mesures ministérielles que vous donnez en exemple vers un établissement, laissez-le localement administrer le dollar pour les raisons que nous les distribuons, ces dollars-là. Non?

Mme Kerneïs (Marie-Louise) : Ce n'est pas tout à fait...

Mme Fournier (Michelle) : Voulez-vous que je donne un exemple?

Mme Kerneïs (Marie-Louise) : Oui, allez-y pour un exemple.

Mme Fournier (Michelle) : Je vais vous donner un exemple vécu du budget actuel. Donc, dans le cadre des compressions, la mesure Agir autrement a été amputée, et on avait eu quand même une certaine latitude dans les règles qui nous permettait, dans le cadre de la mesure, ce qu'on appelle de l'aide individuelle, de compenser. Et c'est ce qui s'est passé chez nous collectivement parce que nous avons moins d'écoles en milieu défavorisé, et elles étaient touchées par cette compression-là. Alors, en comité consultatif de gestion, les directions ont convenu qu'on a pris une partie du budget d'aide aux devoirs pour aller compenser cette mesure-là. Donc, c'est de cette façon-là... Quand on est capable d'identifier quels sont les besoins et que, collectivement, on est capables de répartir les ressources en fonction de ceux où le besoin est plus présent, on se parle d'équité. Alors, c'est comme ça qu'on a travaillé. C'est un exemple.

M. Proulx : Mais, juste pour terminer...

La Présidente (Mme Rotiroti) : Une minute.

M. Proulx : ...ce que je comprends de ce que vous dites, c'est : Vous devriez, dans certains cas, décibler non pas en faisant en sorte qu'elle aille directement vers l'établissement, mais qu'à la commission scolaire, donc au moment où l'argent se retrouve chez vous, vous soyez en mesure, à ce moment-là, de ne pas être pris dans un mode d'application qui ne peut pas fonctionner pour toutes sortes de raisons parce que ça ne s'applique pas bien dans certains milieux, parce qu'il y a d'autres considérations.

Mme Kerneïs (Marie-Louise) : C'est là qu'on donne un sens au comité du budget, justement, où les directions d'école conviennent entre elles plutôt que de dire : J'envoie tout l'argent dans une école, puis qu'ils se débrouillent. Non, non. On est un réseau, et tout le monde se parle ensemble et tout le monde travaille dans le même sens.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci beaucoup. On va passer du côté de l'opposition officielle. Et je cède la parole à M. le député de Lac-Saint-Jean pour neuf minutes.

M. Cloutier : Merci, Mme la Présidente. Alors, à mon tour de vous souhaiter la bienvenue.

Mme Kerneïs (Marie-Louise) : Merci, M. Cloutier.

M. Cloutier : Et peut-être de poursuivre là où on était rendus parce que c'est toujours un peu... il y a une marge entre le discours politique et la réalité. On le vit encore avec le dernier budget où il y a plusieurs mesures qui sont carrément ciblées. Je vois que vous hochez de la tête, oui. Je pense que vous comprenez déjà là où je m'en vais. C'est ça que j'ai de la difficulté à m'expliquer. On me dit : On veut créer un comité de répartition des ressources, mais, du même souffle, on vous dit déjà comment les répartir.

On vit une problématique chez nous, au Lac-Saint-Jean, où il n'y a pas d'orthophoniste pour l'ensemble du réseau. Et là, pour l'embauche de professionnels supplémentaires, on a ciblé les milieux défavorisés, alors que 90 % du reste du territoire, qui ne l'est pas, n'a pas de ressource. Donc, il y a plein d'élèves qui ne sont juste pas dans le milieu défavorisé. Encore une fois, je pense que vous saisissez bien. Peut-être vous donner la parole, justement, sur cette dichotomie entre le budget qui est ciblé et hyper précis puis, du même souffle, le discours politique qui dit : Ah! c'est les écoles qui doivent gérer puis c'est le milieu qui doit davantage...

Mme Kerneïs (Marie-Louise) : Écoutez, je pourrais vous donner un exemple qu'on vient de vivre actuellement concernant les prématernelles quatre ans — entre parenthèses, une excellente mesure qu'on aimerait mettre partout. Et donc un budget a été mis à la disposition de l'école, puisque nous avons une école, actuellement, qui est une prématernelle quatre ans. Et, compte tenu du moment de l'année, on est rendus au mois de février, hein, une mesure qui arrive tout d'un coup comme ça, qu'est-ce qu'on en fait? On a déjà tout mis en place pour les services aux élèves. Et, compte tenu aussi que nous avons l'intention d'ouvrir une autre prématernelle quatre ans dans une autre école, bien, la direction même de l'école concernée, qui reçoit l'argent, propose à l'autre direction de l'aider pour préparer la rentrée de ses futurs élèves. On ne peut pas le faire parce que ce qui a été ciblé, c'est de le faire à cette école-là pour les besoins de ces élèves-là, qui ont déjà ce qu'ils ont besoin. Vous comprenez l'aberration un petit peu, là?

M. Cloutier : Bien, en fait, on la comprend très, très bien. C'est que la mesure qui a été proposée, la mesure gouvernementale, dans le laps de temps qui leur est donné par rapport aux besoins réels du terrain, c'est que ça devient impossible à mettre en oeuvre. Ce matin, j'étais avec les représentants du personnel de soutien. En fait, j'étais avec tous les délégués du personnel de soutien pour l'ensemble du Québec, puis ce qu'ils me disaient, c'est que, dans le 20 millions, là, qui a été annoncé avant les fêtes, il y a un budget pour embaucher des TES, mais, comme l'année est tellement avancée, à ce stade-ci, ça leur est à peu près impossible. Puis ils ne peuvent pas... même s'ils devaient embaucher, ils ont la problématique de maintenir en poste ces gens qu'ils devraient embaucher là pour l'année prochaine parce que, pour l'année scolaire l'année prochaine, il y a d'autres coupures qui doivent être appliquées. Donc, pour eux, ça devient une aberration de mettre en place une ressource qui, finalement, ne pourra pas faire son travail, mais tout ça encore une fois dans une logique de centralisation.

C'est pour ça qu'on a de la difficulté à s'y retrouver. Le gouvernement nous dit : Le projet de loi n° 86 va décentraliser les pouvoirs. Or, on vient de déposer un budget, on fait exactement l'inverse. Puis, en plus de ça, c'est loin d'être évident que... Tant et aussi longtemps, en fait, que le ministère ne changera pas sa façon de travailler, on a beau créer des comités de ressources, mais, s'il n'y a rien à décider... Je ne sais pas qu'est-ce que vous en pensez, mais il me semble que les mesures sont de plus en plus ciblées.

Mme Kerneïs (Marie-Louise) : Ce n'est pas parce qu'on n'en a pas besoin, on convient, hein? C'est clair qu'on en a besoin, excepté que, justement... On a l'impression que ça dénote un manque de confiance, O.K.? Un manque de confiance de la part du ministère. Et je comprends que ce n'est pas facile parce qu'il y a un jeu politique, là-dedans, d'opposition, etc., et il y a toutes sortes de choses qui peuvent se passer. Mais nous, on vous demande : Faites-nous confiance. Lorsque vous nous dites : C'est vers là qu'on va, eh bien, on va trouver les façons de le faire, et vous allez pouvoir contrôler, qu'on atteigne l'objectif. Si vous nous demandez d'atteindre l'objectif et que vous avez la preuve qu'on a atteint l'objectif, ne demandez pas qu'est-ce qu'on a fait avec chaque dollar. On a atteint l'objectif qui nous a été demandé. Donc, je pense que c'est ça, l'essentiel, là.

• (12 heures) •

M. Cloutier : J'ai envie de vous demander, pour l'année scolaire l'année prochaine... je ne sais pas si votre budget est adopté ou non.

Mme Kerneïs (Marie-Louise) : Non. Non, on n'a pas encore les paramètres, on ne peut pas rien faire encore. Non, non.

M. Cloutier : Vous n'avez pas les paramètres pour les prévisions budgétaires?

Mme Kerneïs (Marie-Louise) : On espère qu'ils vont arriver de bonne heure cette année.

M. Cloutier : Est-ce que vous pensez que vos budgets vont être augmentés?

Mme Kerneïs (Marie-Louise) : Ce qu'on a compris... mais, pour l'instant, je veux dire, on n'a pas beaucoup de renseignements, hein, on n'a pas beaucoup d'informations. Ce qu'on a pu lire dans les journaux, ce qu'on a pu entendre, c'est qu'a priori, bien, écoutez, on n'aura pas de coupure supplémentaire à faire. Déjà, nous autres, on dit : Ouf! Au moins, ce n'est pas plus de coupures qu'on en a déjà. Donc, ça nous sécurise.

Maintenant, bien, si, à côté de ça, il y a encore d'autres mesures ciblées, bien, c'est là où on va encore accrocher, là.

M. Cloutier : Je vais poser ma question différemment. Est-ce que, pour l'année prochaine, vous étiez déjà en mesure de restrictions budgétaires, je ne sais pas, soit pour combler un déficit ou pour répondre aux besoins passés?

Mme Kerneïs (Marie-Louise) : On a atteint les objectifs.

M. Cloutier : L'année dernière.

Mme Kerneïs (Marie-Louise) : Ils sont atteints.

M. Cloutier : Mais, de toute évidence, ça ne semble pas être le cas partout à travers le Québec.

Mme Kerneïs (Marie-Louise) : Je reconnais que ça peut être différent, mais je parle pour nous. On a réussi, cette année, avec justement ce comité de budget où tous ces gens ont travaillé ensemble pour trouver des solutions qui fassent le moins mal possible.

M. Cloutier : Est-ce que vous avez eu à réduire les heures de travail du technicien de soutien ou des professionnels? Est-ce que vous avez eu soit à couper des postes ou à réduire des heures?

Mme Kerneïs (Marie-Louise) : On n'a coupé aucun poste, monsieur.

M. Cloutier : Est-ce que des heures ont été réduites?

Mme Kerneïs (Marie-Louise) : À la limite, une réorganisation. C'est une réorganisation qui a été faite. Globalement, il n'y a pas eu d'heure de coupée. Mais effectivement, compte tenu... et puis là ça fait plusieurs fois que je vous le souligne, on est dans une commission scolaire en croissance et en mouvement tout le temps. Donc, si, dans une école, on a énormément d'élèves qui se rajoutent, bien, effectivement que la ressource va suivre les élèves. Donc, ça peut donner l'impression qu'il y a eu des coupures, mais ce n'est pas réel puisque les élèves sont sortis de l'école. Donc, on a sorti des spécialistes parce que les élèves ne sont plus là, c'est comme normal aussi. C'est de la bonne gestion.

M. Cloutier : Vous êtes en croissance, donc en gestion de la croissance, contrairement...

Mme Kerneïs (Marie-Louise) : Oui, tout à fait.

M. Cloutier : ...à ce qui se fait sur la Côte-Nord, l'Abitibi-Témiscamingue, le Saguenay—Lac-Saint-Jean, la Gaspésie, le Bas-Saint-Laurent.

Mme Kerneïs (Marie-Louise) : Je conviens que c'est très différent de ce que nous vivons. Nous vivons d'autres problèmes, je vous dirais, là, au niveau de la croissance, ça, c'est un autre élément, mais, à tout le moins, pour l'organisation, effectivement...

M. Cloutier : Vous nous proposez un livre blanc sur l'éducation.

Mme Kerneïs (Marie-Louise) : Oui.

M. Cloutier : Dois-je comprendre que vous suggérez qu'en réalité toute l'énergie que avez consacrée à votre participation, aux dialogues que vous avez dû avoir sans doute pour la rédaction de votre mémoire au projet de loi... vous nous proposez davantage une réflexion sur l'éducation, sur la réussite scolaire? Sur quoi exactement?

Mme Kerneïs (Marie-Louise) : Moi, je pense que, bon, une fois passé le choc, hein, de ce projet de loi, je pense que ça nous a quand même amenés à une réflexion, ce qui n'est jamais négligeable. Je pense aussi que... Je me fais un devoir d'écouter la commission parlementaire puis j'en apprends tout le temps. Je trouve ça intéressant. Donc, à ce niveau-là, ça peut être une avancée vers le fameux livre blanc où, là, les gens auront eu l'occasion de s'exprimer et faire preuve d'ouverture, à ce moment-là, en connaissant un petit peu plus les besoins des autres.

M. Cloutier : Alors, si je vous comprends bien, on devrait, au lieu de consacrer... En fait, le livre blanc, normalement, précède la loi. Normalement, c'est comme ça qu'on travaille.

Mme Kerneïs (Marie-Louise) : C'est vos traditions, effectivement.

M. Cloutier : Oui, là, c'est assez spectaculaire. Alors là, on est dans un processus d'adoption d'une loi, on n'est pas en train d'adopter, loin de là, mais, quand même, on est dans le processus législatif, puis la consultation vient après. C'est assez... Ça mérite d'être mentionné, on va le dire comme ça.

Mme Kerneïs (Marie-Louise) : Disons que ça fait quelques années qu'on le demande.

M. Cloutier : Oui, mais vous avez entièrement raison de le demander, puis je pense qu'on serait rendus là, au Québec, mais surtout d'identifier les bons picots. Qu'est-ce qu'on essaie de corriger, en fait, avec le projet de loi actuel?

Mme Kerneïs (Marie-Louise) : Bien, je pense que le... Je m'excuse de vous couper, mais je pense que la préoccupation qu'on devrait avoir, puis ça, c'est mon éditorial que je pourrais vous faire, c'est de convaincre la population que l'éducation, c'est essentiel et que nous devons tous nous mettre au travail pour aboutir dans un beau projet sur l'éducation au Québec. Ça, ça serait la plus belle chose qu'on pourrait faire ensemble.

M. Cloutier : Bien, j'aurais tendance à croire que les effets des coupures des derniers mois auront eu au moins ça de bénéfique. Je pense que ça a brassé la population et qu'on l'a vu dans les sondages récemment. Il y avait 83 % de la population qui demandait un réinvestissement, puis j'espère qu'on sera capables de l'identifier comme une réelle priorité pour les Québécois.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci, M. le député. On va passer du côté du deuxième groupe de l'opposition. Je cède la parole à M. le député de Chambly pour six minutes.

M. Roberge : Merci, Mme la Présidente. Merci pour votre présentation. Je vais poursuivre sur la lancée. Effectivement, c'est un mal pour un bien, les coupures puis l'improvisation auront eu l'effet, peut-être, d'un électrochoc. Enfin, je le souhaite. Je vais voir le verre à moitié plein puis je vais me réjouir non pas qu'il y ait eu des coupures, mais qu'il y ait eu une mobilisation des acteurs, des parents autour des écoles. C'était quand même singulier de voir des chaînes humaines autour des écoles, c'était un symbole fort. Prenons le bien dans le mal.

Je vais revenir à votre mémoire. Page 8, vous nous dites au troisième paragraphe : «...le projet de loi [...] ne va pas dans le sens de pourvoir une plus grande autonomie [il] nourrit une certaine illusion.» Qu'est-ce que vous voulez dire dans le sens que le projet de loi ne va pas dans l'autonomie, il crée une illusion? De quoi vous parlez précisément?

Mme Kerneïs (Marie-Louise) : Écoutez, ça a été les premiers fils de presse, hein, quand le projet de loi est sorti, que le pouvoir... c'est devenu une guerre de pouvoirs, toute cette histoire. Et je ne trouve pas sain, O.K.? Ce n'est pas comme ça qu'on va faire avancer, à mon avis, l'éducation. Ce n'est pas par une guerre de pouvoirs, c'est par un travail ensemble. Je me répète.

Toutefois, quand on parle du projet de loi directement, on n'est pas sans ignorer de toute façon la tendance, depuis quelques années, et ce n'est pas de cette année, à vouloir, comme on en a parlé longtemps tout à l'heure, des cibles, etc., par les préoccupations qu'on partage, par exemple, pour la réussite des élèves. Quand on parle de l'autonomie et que... l'exemple qu'on pourrait donner, c'est que le ministre peut intervenir directement sur un projet dans une école ou autre, bien, écoutez, je ne peux pas croire que c'est de donner du pouvoir à l'école puisqu'au bout de la ligne il peut y avoir quelqu'un qui peut venir dire : Non, non, vous n'avez pas fait le bon choix, vous faites autre chose. Ce n'est pas une façon de voir l'autonomie, à mon avis.

M. Roberge : O.K. Voilà. Donc, il n'y a pas vraiment d'autonomie. On parle des fois de décentralisation, mais, dans le projet de loi quand on lit le titre, ça ne dit pas décentraliser, ça dit de rapprocher l'école des lieux de décision. Donc, ce n'est pas une décentralisation, là, c'est l'école qui se rapproche du centre. Ce n'est pas la prise de décision qui se rapproche des écoles. Et il y a aussi ce... Au début, on dit : Ah! on va annoncer, on va certifier que les enseignants sont des experts en pédagogie, et après on n'en parle plus. Ça nourrit un peu l'illusion. Ça augmente les attentes peut-être pour décevoir encore plus.

Je vais vous ramener à... le changement que veut amener le projet de loi n° 86. Bon, c'est un peu alambiqué, là. Ils disent qu'il va enlever les élections scolaires mais, en même temps, qu'il les permet avec un vote de 15 % qui n'est pas dans la loi mais qui est dans les règles. Supposons qu'on tasse le projet de loi n° 86 puis qu'on regarde juste l'état actuel de la gouvernance des commissions scolaires avec les élections au suffrage universel telles qu'elles sont et le taux de participation, si vous aviez le choix, est-ce que ça serait tout simplement le statu quo ou bien si vous amélioriez, bref, la gouvernance du palier régional, qui est la commission scolaire?

Mme Kerneïs (Marie-Louise) : Mais, écoutez, ce qu'on dit dans le mémoire, c'est qu'on tient à la démocratie, on y tient. On est ici des représentants de la population : parents utilisateurs, milieu rural, etc. Cet aspect-là de la démocratie, on veut que ça reste, là. Bon, on se préoccupe effectivement d'une baisse d'intérêt, mais le livre blanc, si tout le monde travaille là-dessus, là, ce serait une belle chose parce que ça démontrerait... puis ça pousserait les gens à réfléchir à l'éducation et à dire leur mot et même pour les commissaires, quand ils se présentent, d'avoir des opinions très précises de ce qu'ils voudraient, une vision de l'éducation dans leur milieu. Je m'excuse, j'ai perdu votre question.

M. Roberge : Ce n'est pas grave. Dans le fond, je comprends. Vous tenez, dans le fond, aux élections scolaires puis à ce qui est actuel.

• (12 h 10) •

Mme Kerneïs (Marie-Louise) : Bien, la solution aussi, quand même, a priori, tellement pratique, tellement facile, hein, des élections scolaires municipales, il me semble que... Ça me semble tellement simple.

M. Roberge : ...facile. Je comprends. Puis, dans le fond... Bon, le projet de loi étant déposé et les consultations ayant lieu, ce qu'on peut souhaiter, ce que vous souhaitez, c'est que, dans le fond, les consultations sur ce projet de loi là... aient tenu des consultations nationales qui vont mener à un livre blanc. On va retirer le projet de loi n° 86 puis on va déposer quelque chose. Je dis on, là, le gouvernement, idéalement, déposerait un projet de loi qui serait vraiment porteur et qui répondrait aux attentes des groupes. Idéalement, c'est ce que vous souhaiteriez?

Mme Kerneïs (Marie-Louise) : Nous, on se dit prêts à travailler pour cette réflexion-là, pour aller plus loin, effectivement.

M. Roberge : O.K. Il faudrait relancer.

Mme Kerneïs (Marie-Louise) : Tout à fait. Tout à fait. Et je n'ai pas eu l'occasion de vous parler, mais ma vision d'une commission scolaire, c'est un réseau d'établissements, O.K.? Ce n'est pas une école toute seule. À la différence des écoles privées ou des cégeps, etc., c'est un réseau. Et ils sont tous interreliés. Un jeune, quand on le reçoit, il a cinq ans ou six ans. Il faut qu'on l'amène à réussir à 17 ans. Donc, il va passer d'une école à une autre.

Nous autres, dans la commission scolaire, on a un réseau qui fait que secondaire I, et II, et III, c'est des écoles intermédiaires. On a neuf écoles intermédiaires comme ça. Donc, le jeune passe de l'école primaire, à l'école intermédiaire, à l'école secondaire pour finaliser son parcours s'il a un parcours régulier.

Écoutez, si on dit l'autonomie de l'école au point où plus personne ne se parle, ça ne va pas non plus, là. O.K.? Il ne faut pas oublier que l'élève handicapé ou en difficulté d'apprentissage, il peut être amené à sortir de son école de quartier pour aller ailleurs. Donc, il faut qu'il y ait des relations entre les écoles. Et la commission scolaire a ce rôle-là à faire, de forcer ce lien-là entre les écoles. C'est un réseau d'écoles et ce n'est pas une seule école, une commission scolaire.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci beaucoup, Mme Kerneïs, Mme Fournier, M. Bessette, M. Allard, pour votre présence aujourd'hui. Je vais suspendre quelques instants pour permettre aux représentants de la Fédération autonome de l'enseignement de prendre place. Merci.

(Suspension de la séance à 12 h 12)

(Reprise à 12 h 16)

La Présidente (Mme Rotiroti) : Alors, je souhaite la bienvenue aux représentants de la Fédération autonome de l'enseignement. Merci d'être parmi nous. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour faire votre présentation, et, par la suite, on passera à une période d'échange entre les élus.

Alors, je demanderais juste de vous identifier, ainsi que les gens qui vous accompagnent, M. Mallette, et vous pouvez commencer tout de suite votre présentation.

Fédération autonome de l'enseignement (FAE)

M. Mallette (Sylvain) : Alors donc, merci, Mme la Présidente. M. le ministre, Mmes, MM. les membres de la commission, je me présente, Sylvain Mallette, je suis enseignant en géographie et en histoire au secondaire. Je suis président de la Fédération autonome de l'enseignement. Je suis accompagné, à ma gauche, de Mme Nathalie Morel, qui est une enseignante au primaire et qui est vice-présidente à la vie professionnelle, et, à ma droite, de M. Yves Cloutier, qui est conseiller au service de la vie professionnelle à la FAE.

Donc, la FAE représente 34 000 enseignantes et enseignants. Depuis sa fondation, en juin 2006, la FAE revendique la reconnaissance et le respect de l'autonomie professionnelle des enseignantes et enseignants.

Le projet de loi qui fait l'objet des travaux de la commission ne permet pas la reconnaissance et le respect de cette autonomie. Depuis la mise en place de la Loi sur l'instruction publique, dont les origines remontent à 1801, de nombreuses modifications ont été apportées, dont les plus importantes dans la foulée du rapport Parent. Malheureusement, faute d'une vision cohérente des besoins de l'éducation, la Loi sur l'instruction publique est devenue, au fil du temps, une véritable courtepointe bigarrée.

Ce projet de loi est destiné à un environnement éducatif déjà lourdement hypothéqué par les effets de la plus récente réforme et de ses échecs retentissants. En plus de fondements trompeurs, cette réforme s'est implantée avec des moyens insuffisants, une communication orientée et un manque de clarté et de cohésion du ministère se soldant par une longue succession d'échecs, tant au primaire qu'au secondaire.

La réforme a engendré deux maux particulièrement virulents, soit le piétinement de l'autonomie professionnelle du personnel enseignant et la prescription d'approches pédagogiques centrées sur l'élève, particulièrement néfaste pour les élèves les plus vulnérables ou ayant des difficultés.

À la lumière des réflexions et des actions entourant l'opposition à la réforme, la FAE a mené d'importants travaux touchant l'autonomie professionnelle du personnel enseignant. Après de nombreuses consultations et des travaux approfondis, nous avons élaboré la plateforme pédagogique de la FAE afin que le ministère nous redonne notre place comme premiers experts de la pédagogie et ainsi revalorise la profession enseignante.

À cet effet, nous vous avons fait remettre deux documents, un feuillet qui s'intitule L'autonomie professionnelle du personnel enseignant ainsi qu'un support DVD qui présente la plateforme pédagogique de la FAE. Nous nous sommes inspirés de la plateforme pédagogique pour analyser et rejeter de nombreux pans du projet de loi. Je cède la parole à ma collègue, Mme Morel.

• (12 h 20) •

Mme Morel (Nathalie) : Alors, bonjour. Ça me fait plaisir d'être ici parmi vous. Je vais vous montrer, j'ai apporté deux photos super importantes aujourd'hui, celle de mon groupe classe, alors mes élèves, ma classe de 2013, et celle de mes collègues enseignantes et enseignants. Et, à tous les jours, je les regarde en entrant au bureau parce que c'est pour eux que je travaille et c'est pour eux qu'on est ici aujourd'hui. C'est un privilège, d'ailleurs, de pouvoir m'adresser à vous. Je sais que plusieurs enseignantes et enseignants souhaiteraient le faire.

Alors, moi, je suis une enseignante de l'est de la ville de Montréal. J'ai toujours enseigné en milieu défavorisé à la commission scolaire de Montréal. Alors, aujourd'hui, on est là pour vous parler du projet de loi n° 86. Je vous dirais que la simple lecture de l'appellation du projet de loi, pour nous, soulève déjà de larges inquiétudes et questions. J'entendais tout à l'heure quelqu'un le renommer, alors je ne vais pas le relire, mais les objectifs, pour nous, y apparaissent très flous, voire dispersés, relevant d'un dangereux mélange des genres.

Nous comprenons que ce projet de loi constitue davantage une réponse politique à des enjeux juridiques, comme l'ancien ministre nous l'avait dit lors du lancement du projet de loi, lors de la conférence de presse. Il ne comporte pour nous aucune réelle mesure pour augmenter la réussite scolaire ni surtout aucun moyen concret permettant de l'améliorer. En fait, pour la FAE, ce projet de loi semble partir d'un faux postulat ou d'un faux problème créé, selon nous, de toutes pièces afin de s'arroger encore plus de pouvoirs sur l'ensemble du réseau en feignant de confier plus de prérogatives à ses différentes composantes. La FAE est d'avis que le débat sur les structures scolaires et les éventuelles modifications à la Loi sur l'instruction publique devraient plutôt porter sur le respect des rôles et des responsabilités de chacun. Je vous dirais que, s'il y a une ligne directrice à notre mémoire, c'est à chacun son métier. Respectons l'expertise de chacun. Les profs ne veulent pas devenir des gestionnaires et ne veulent pas devenir les parents de leurs élèves, mais on pense que la réciproque devrait s'appliquer à nous, et on devrait nous laisser décider de façon unilatérale, en matière de pédagogie, nos approches pédagogiques et ce qui se passe dans notre salle de classe.

Alors, ce qu'on veut aujourd'hui, c'est vous dire que nous croyons que les parents, les membres de la communauté et les autres intervenants extérieurs à l'école peuvent être appelés à donner leur avis sur certains enjeux, bien sûr, mais ne devraient jamais se substituer à l'expertise des différents personnels de l'école.

Quant à la présence des parents au sein des instances de la commission scolaire, nous nous devons de constater que la situation actuelle le prévoit déjà. Plusieurs des commissaires scolaires élus actuellement en poste sont également des parents. Certains sont d'ailleurs élus à ce titre. Un droit de vote octroyé à ces derniers suffirait pour compléter l'oeuvre, selon nous. Ce qu'on pense aussi qui est très, très, très dangereux avec ce projet de loi, c'est que l'actuel système démocratique, avec ses circonscriptions et malgré ses faiblesses, assure tout au moins une forme convenable permettant la représentation de tous les secteurs géographiques d'une commission scolaire, incluant les plus défavorisés. Et, étant donné la constitution de la FAE, pour nous, c'est extrêmement important que ceci demeure.

La FAE n'adhère donc pas aux prétendus objectifs de ce projet de loi et pense que l'ensemble du réseau scolaire et, au premier chef, les élèves et les enseignantes et enseignants, qui en sont les principaux acteurs, ne seraient pas mieux servis par les changements législatifs proposés. Comprenez-nous bien à ce sujet, la FAE n'est ni en faveur de l'abolition des commissions scolaires ni en faveur du statu quo. C'est pour ça qu'on vous a distribué notre proposition de changement.

Alors, on pense que l'actuel projet de loi n° 86 n'apportera rien de meilleur, bien au contraire. Qu'il soit question des nouveaux conseils scolaires, de leur composition ou encore de la nomination, voire cooptation de leurs membres, des tout nouveaux, tout puissants pouvoirs de directive ou d'initiative du ministre ou encore des pouvoirs accrus octroyés au conseil d'établissement, en passant par l'abolition des élections scolaires, il n'y a, selon la FAE, aucun motif pour se réjouir ou que l'on pourrait qualifier d'amélioration de la situation actuelle dans ce projet de loi. L'adopter signifierait, pour les 34 000 enseignantes et enseignants membres des syndicats affiliés à la FAE, un déni encore plus grand de notre expertise. Les propositions de ce projet vont même, dans une très large proportion, dans le sens contraire des changements que nous souhaitons.

Quelle place pour le personnel enseignant dans ce projet de loi? Aucune, sinon l'ombre d'un symbole à l'article 19 de la LIP. Il est en droit d'espérer beaucoup plus de la part du ministère de l'Éducation. Hormis cette reformulation de l'article 19, où on nous dit experts essentiels de la pédagogie, l'ensemble du projet de loi n° 86 vient réduire, rogner, renier et entraver davantage le peu d'autonomie professionnelle que nous avons actuellement. Cette profession éprouve déjà un important déficit de reconnaissance. C'est une profession en souffrance. Le taux ahurissant de désertion de 20 % qui l'afflige durant les cinq premières années d'exercice le démontre bien. Sourd à ces demandes et à ces besoins, le projet de loi n° 86 fait de la profession enseignante la grande perdante de l'exercice. On constate, selon nous, qu'on veut nous ravaler ni plus ni moins au rang de simples exécutants.

Pour nous, l'abolition du suffrage universel des commissions scolaires permet à elle seule de ranger le projet de loi n° 86 dans la catégorie des législations suspectes. En effet, d'un trait de plume, on fait disparaître un palier électif au Québec sans avoir préalablement engagé un débat social large sur la question. Avec ce projet de loi, nous privons des millions de citoyens d'une représentation démocratique à un palier de gouvernance pour lequel ils continueraient toutefois d'être taxés.

Il arrive que l'actualité jette un éclairage croisé sur des sujets reliés. Récemment, il y a eu l'étude en commission parlementaire du projet de loi n° 77 où on a parlé des besoins du marché du travail. Permettez-nous de faire le lien avec le traitement des secteurs de centres de formation professionnelle dans le projet de loi n° 86. On va exactement dans le même sens. Par l'entremise des mentions de l'adéquation de la formation offerte et des besoins régionaux et nationaux de main-d'oeuvre, par l'influence accrue qu'on va donner aux employeurs sur les centres de formation professionnelle, pour nous, on ne forme plus, à ce moment, des citoyens mais des travailleurs, et ce sont les besoins des citoyens qui devraient toujours passer en premier.

Alors que tout un système scolaire public appelle à l'aide, subit des coupes sombres année après année, est victime de la concurrence déloyale et sans vergogne des écoles privées grassement subventionnées, la seule réponse du gouvernement est cette législation. Elle ne réglera aucun des problèmes mentionnés, ne prévoyant aucun réinvestissement massif dans l'école publique et ne revoyant pas les fondements des programmes de formation afin d'y rendre l'instruction prioritaire.

En conclusion, nous vous demandons, M. le ministre, de retirer le projet de loi n° 86. Nous pensons que vous pourriez ainsi faire preuve du leadership tant attendu en éducation. Nous pensons qu'en agissant en ce sens vous poseriez un geste significatif d'écoute envers nous, les enseignantes et les enseignants, celles et ceux qui font l'école au quotidien et qui devraient occuper une place privilégiée au sein de tous les projets de réforme du réseau scolaire. L'école publique vit déjà de nombreux tourments et déchirements. Nous vous demandons de ne pas l'accabler davantage. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci beaucoup, Mme Morel, M. Mallette et M. Cloutier. Alors, on va passer à la période d'échange du côté du ministre. Et, ministre, vous avez 13 minutes.

M. Proulx : Merci beaucoup, Mme la Présidente. M. Mallette, madame, monsieur, merci d'être ici aujourd'hui. Très heureux malgré tout, parce que certains diront : Bien, il ne doit pas être content. Non, je suis très content que vous soyez là, sincèrement, aujourd'hui parce que ça nous donne l'occasion de discuter. Puis une consultation, moi, je l'ai toujours dit puis je pense que les collègues parlementaires sont d'accord avec moi, c'est l'occasion d'entendre tout le monde, tous les points de vue, et d'écouter, bien entendu de réfléchir et se faire une idée. Mais je suis très heureux que vous ayez l'occasion de venir parler des enseignants. Et je reprends ce que vous avez dit dès le début. Malheureusement, on n'a pas la chance de parler à tous les enseignants. On essaie de le faire dans le privé ou dans le travail le plus souvent possible avec le plus de monde possible, mais, vous avez raison, je sais que plusieurs d'entre vous voudraient avoir l'occasion de venir ici s'exprimer, et là vous le faites en leur nom. Alors, on est heureux de vous entendre.

Vous avez dit : Le projet de loi n° 86, ce n'est pas pour nous, là. On ne parle pas de nous là-dedans. À la limite, même, vous dites : On va restreindre notre espace. Vous avez aussi dit qu'actuellement on n'a pas tout l'espace qu'on devrait avoir. Alors, j'ai entendu et lu ce que vous avez dit sur le projet de loi n° 86. Moi, j'aimerais ça que vous me parliez aussi d'aujourd'hui parce que, si on devait faire des améliorations dans le temps, à la lumière de ce que vous dites, que ce soit par une législation, celle-ci ou une autre dans l'avenir, j'aimerais ça savoir quels sont les besoins d'espace que vous avez pour faire votre travail parce que j'ai aussi entendu, et je pense que tout le monde sera d'accord avec ça : À un moment donné, il faut que chacun fasse son métier.

Alors, c'est l'occasion, dans les quelques minutes suivantes au moins, d'être capable de nous dire quel est l'espace que vous souhaitez avoir. Puis ensuite on pourra essayer de se retrouver à l'égard des structures actuelles ou même à l'égard du projet de loi parce qu'il y a, bon, certains pas, peut-être, dans la bonne direction. On verra.

Mme Morel (Nathalie) : Alors, je vais peut-être me servir du document qu'on vous a distribué...

M. Proulx : Oui, j'ai regardé, d'ailleurs, oui.

• (12 h 30) •

Mme Morel (Nathalie) : ...pour vous aider à y répondre. Alors, à la page 2, vous voyez, dans la seconde moitié, les six entraves à l'autonomie professionnelle du personnel enseignant que les membres de la FAE ont identifiées. Alors, je vais les lire rapidement : l'alourdissement de la tâche, le non-respect du jugement professionnel, la bureaucratisation, les ingérences dans notre pratique, les limites de certains encadrements légaux — vous voyez, la Loi sur l'instruction publique est un de ces encadrements — et l'absence de balises claires et de socle commun.

Alors, à l'intérieur de chacune des structures, nous, on a vraiment fait nos travaux, je vous dirais, à l'instar des poupées russes. Donc, on a toujours dit : Nous travaillons dans une école. Ce qui se passe dans l'école, la salle de classe, là, la petite poupée, là, c'est la plus importante pour nous, et tout devrait partir de là. C'est dans la relation maître-élèves que devraient se trouver les solutions et c'est à ça qu'on devrait, tout le monde, travailler à tous les jours.

Alors, on travaille dans une école, bien sûr, les directions sont là, les conseils d'établissement sont là. On travaille dans une commission scolaire et on travaille dans un ministère. Ça, on n'a pas de problème avec ça. Ce qu'on constate actuellement, c'est que toutes les poupées qui nous entourent, en tout cas, qui nous enrobent, font en sorte qu'on n'est plus capables d'avoir l'autonomie, on n'est plus capables de faire ce qu'on veut faire, par exemple, parce que le Programme de formation de l'école québécoise nous impose des approches pédagogiques, parce que, dans votre article 19 de la LIP, vous n'avez pas changé que c'est dans le cadre du projet éducatif puis que vous mettez même des conventions de gestion de réussite éducative. Vous dites : On va les abolir, mais vous les mettez dans le projet éducatif maintenant. Alors, on vient encadrer les enseignants en leur disant : Vous pouvez choisir, mais il faut que ça soit dans le cadre du projet éducatif. Puis le projet éducatif, il peut même dicter des approches pédagogiques, des cibles quantitatives de réussite. Alors, ce n'est pas vrai qu'on a une réelle autonomie.

Nous autres, ce qu'on vous demande dans chacun de ces paliers-là... par exemple, le personnel enseignant, on propose... et, vous allez voir dans le mémoire, dans la seconde partie, on vous a mis une Loi sur l'instruction publique biffée, amendée. On a fait un travail vraiment très, très rigoureux. On vous demande donc d'amender les encadrements légaux, de, par exemple, faire en sorte, au niveau de notre tâche, nos contrats de travail, de nous donner les vraies coudées franches pour choisir nos approches pédagogiques, nos manières d'intervenir auprès de nos élèves.

Par exemple, dans les conseils d'établissement, on pense que vous n'êtes pas allés dans le bon sens du tout de donner des pouvoirs d'adoption supplémentaires pour certains des éléments. Les pouvoirs d'adoption, ça veut dire : la direction se présente au conseil d'établissement, propose quelque chose, et les membres du C.E., sur place, peuvent tout changer de A à Z. Et en plus vous faites en sorte de déséquilibrer la composition des C.E. On se retrouve en nombre minoritaire, les personnels des écoles.

Alors, personne n'est nécessairement de mauvaise foi, mais on est en train de confier à des non-experts le pouvoir de tout changer sur place, puis après ça, bien, nous, on n'a pas le choix parce que le C.E., s'il a un pouvoir d'adoption, bien, nous autres, on doit suivre ce que le C.E. a adopté. Alors, on vous demande de faire le contraire. On vous dit : Tout ce qui relève de la pédagogie, donnez aux enseignants, dans les encadrements légaux, les pleins pouvoirs décisionnels puis pas juste d'une façon individuelle. Vous allez voir aussi dans notre proposition, on a même un article 20 où on dit : Il y a de l'autonomie professionnelle individuelle mais aussi collective parce qu'il y a des éléments... par exemple, les normes et modalités d'évaluation des apprentissages, c'est sur proposition des enseignantes et des enseignantes de l'école. Ce n'est pas chaque classe qui a des normes différentes. Mais ça, ça s'appelle : Les profs, on leur fait confiance. Ce sont des professionnels — on a quand même un bac de quatre ans en pédagogie — et ils sont capables de décider.

Quand eux font une proposition à la direction, pourquoi on dit : La direction peut rejeter complètement ce qu'une équipe enseignante a proposé? C'est ça, présentement, les encadrements qu'on vous demande de changer. On ne veut pas devenir gestionnaires et on ne veut surtout pas devenir dirigeants de commission scolaire. Ce n'est pas notre rôle, puis on n'en veut pas. Ça fait que c'est pour ça qu'on vous dit : Le projet de loi n° 86, ça ne correspond pas du tout à nos besoins.

M. Proulx : Vous avez également dit que vous ne vouliez pas être les parents de tous les élèves non plus...

Mme Morel (Nathalie) : Exactement. Les nôtres, ça va suffire.

M. Proulx : ...et parfois je peux comprendre. On a chacun les nôtres, oui.

Un des défis qu'a toute organisation, et c'est vrai pour le monde de l'éducation, c'est d'être capable de trouver, oui, la bonne gouvernance mais le bon équilibre dans... je vais utiliser «hiérarchie», là, partez du bas ou du haut. Mais ce que je veux dire, c'est que, dans l'organisation des tâches de chacun, il faut être capable de trouver l'espace nécessaire pour que chacun fasse son travail, vous avez raison. Moi, ce que j'essaie de réconcilier un peu dans ce que vous dites, c'est... J'ai l'impression, quand vous dites : Laissez-nous faire notre travail, que vous recherchez de la décentralisation parce que, là, il y en a peut-être trop, de la centralisation. Non?

Mme Morel (Nathalie) : C'est certain qu'en matière de pédagogie ce n'est pas une question de décentralisation...

M. Proulx : Ça, c'est un espace.

Mme Morel (Nathalie) : ...mais je vous répondrais oui parce qu'actuellement dans les commissions scolaires, là, il y a des miniministères de l'Éducation dans les commissions scolaires. Avec la plus récente réforme en éducation, la réforme des années 2000, où on a dit : Ce n'est plus le paradigme de l'enseignement, c'est le paradigme de l'apprentissage, là, on s'est lancés, puis, pour nous, ça n'a pas de sens, dans une approche qui était de réformer le travail des enseignants. Alors, au lieu de se pencher sur le rehaussement... On avait dit : On va rehausser, hein? Les états généraux sur l'éducation, il y avait un consensus social : On va rehausser les curriculums, on va donner plus de temps pour les matières de base. Et ce qu'on a fait dans les faits, c'est qu'on a regardé les enseignants puis on leur a dit : Changez vos façons de faire. J'étais là, j'étais dans les premières formations, et on nous a carrément dit : Ce que vous faisiez, là, on met ça de côté. C'est la page blanche, on recommence. Ça n'a pas de sens, ce qui s'est passé. Ce n'est pas vrai que tout ce qu'on faisait n'était pas bon. Ça ne se peut pas. Puis, en éducation, on est toujours là-dessus, tout le temps à essayer de recommencer, recommencer, mettre le compteur à zéro. Pourquoi on ne part pas des forces? Pourquoi, en matière de pédagogie, on ne dit pas aux enseignants : Proposez-nous des choses? Pourquoi on ne leur fait pas confiance? Pourquoi on ne les écoute pas? Pourquoi c'est toujours l'externe qui vient nous dicter nos façons de faire?

Quand on vous dit que les profs sortent de la profession, quand on vous dit, les enseignantes, les enseignants — je suis certaine de bien témoigner de mes collègues — ce qui fait qu'on reste, là, c'est nos élèves puis notre salle de classe, c'est pour eux autres qu'on reste... Les profs n'en peuvent plus de se faire dire quoi faire puis comment le faire. Donnez-nous un programme qui nous permet une diversité d'approches pédagogiques. Donnez-nous une politique d'évaluation des apprentissages qui nous permet de rendre compte pas juste du développement des compétences, c'est important, d'avoir des habiletés, mais de l'acquisition des connaissances où on va pouvoir dire : On repose sur un socle solide de savoirs avant de développer des savoir-faire, vous allez voir ça, comment les profs vont se sentir valorisés.

M. Proulx : J'entends très bien ce que vous dites, puis vous l'exprimez très clairement. Vous nous dites : La Loi sur l'instruction publique peut changer. Vous l'avez qualifiée de fromage tout à l'heure, je pense. Je l'ai entendu. Vous dites : On n'a pas besoin de faire un projet de loi pour faire ça parce qu'on peut se donner de l'espace, on peut donner de l'espace aux enseignants avec la loi actuellement. Il y a quand même des enjeux d'organisation. Il y a d'autres intervenants dans le monde de l'éducation, il y a une démocratie également dans le monde de l'éducation. Il faut être capable d'avoir cette interrelation-là puis il faut être capable de trouver l'espace pour... je vais dire pour tout le monde. On l'a créé comme ça, le ministère de l'Éducation. C'est comme ça qu'on a mis la gouvernance. Puis un jour ou l'autre, quand elle évoluera, il faut être en mesure, je pense, de conserver certains principes.

Alors, expliquez-moi, là, je sais qu'on n'a pas beaucoup de temps, mais vous dites : Nous, dans l'école, on peut faire plus parce qu'on veut s'occuper des affaires pédagogiques, mais on a une relation à avoir avec des parents — ça, c'est une démocratie très participative — on a une relation à avoir avec les directions d'établissement puis le personnel autour, qui sont l'équipe-école, mais on a aussi une relation à avoir avec le conseil scolaire puisqu'il y a là une démocratie aussi, il y a là une organisation régionale puis il y aura un jour un partage des ressources où il y a des comités du budget, comme la commission scolaire avant vous, mais il y a une organisation.

Alors, un jour ou l'autre... Moi, je veux vous entendre... puis je l'apprécie, vous nous dites : Voici comment nous valoriser : donnez-nous notre espace et permettez-nous de soutenir l'éducation, puis de la faire exploser encore davantage, puis de valoriser pas juste votre travail, mais le monde de l'éducation lui-même en nous donnant un autre rôle. Mais expliquez-moi comment on est capable différemment, parce qu'il va falloir faire différent d'aujourd'hui, de vous donner cet espace-là. Qu'est-ce que vous voyez comme une réforme, si réforme on doit faire, pour vous permettre d'avoir cet espace-là mais de conserver l'équilibre avec les parents, le personnel en place dans une école et éventuellement une commission scolaire et un conseil scolaire, peu importe sa formation? Ce que nous proposons : autre chose ou l'état actuel des choses?

M. Mallette (Sylvain) : Bien, si vous permettez, pour bien... je vais essayer d'utiliser une image. Depuis les 15 dernières années puis dans la littérature du ministère de l'Éducation et dans les commissions scolaires, les profs ont cessé d'être des profs. On est devenus des animateurs, des facilitateurs, des passeurs, à la limite des gentils organisateurs, là. On nous a dépossédés, hein, on nous a dépossédés de notre rôle, ce qui fait qu'aujourd'hui au Québec tout le monde pense pouvoir être prof à la place des profs. Être parent, ça ne veut pas dire être pédagogue. Être pédagogue, ça ne veut pas dire être parent. Et il y a actuellement une confusion des genres. Il y a un refus de reconnaître qu'un prof peut assumer ses responsabilités dans l'espace qui est le sien. Puis, on le répète, on ne veut pas être gestionnaire d'école, on ne veut pas être gestionnaire de commission scolaire., mais je veux avoir le droit, comme prof, devant mes élèves, dans le même groupe, d'utiliser avec certains élèves cette approche pédagogique là qui ne fonctionnera pas avec d'autres élèves.

Actuellement, le programme de formation de l'école québécoise, il dit, il induit — c'est noir sur blanc — certaines approches pédagogiques qui sont centrées sur l'élève, ce qui fait en sorte que des profs qui sont un peu... je dirais qui sont un peu plus âgés, qui ont vu d'autre chose — moi, j'ai vécu, là, l'ancien régime, là — quand la porte est fermée, ils s'entêtent, hein, puis on fait ce qu'on veut. Après, on est rattrapé par la politique d'évaluation des apprentissages. Ça, c'est autre chose.

Mais, s'il y avait déjà... Puis ça, il y a un problème parce qu'actuellement on fait le procès des élus scolaires, hein, on fait le procès des élus scolaires. J'écoute certains travaux, là. Mais qui a le contrôle du système d'éducation au Québec depuis les 20 dernières années? Qui a paramétré le réseau tel qu'on le connaît aujourd'hui? C'est les directions d'établissement puis les gestionnaires de commission scolaire. Depuis la réforme Ryan, là, ils ont de plus en plus eu de pouvoirs, et c'est eux qui ont configuré le réseau, tel qu'on le connaît aujourd'hui, et qui continuent à le configurer. Et eux, ces gens-là, ne répondent pas des gestes et des décisions qui ont été prises. Si on est aux prises aujourd'hui avec un réseau qui s'effondre... parce que le réseau des écoles publiques s'effondre pas juste parce qu'il est sous-financé, parce qu'on l'a utilisé comme un immense laboratoire sans compter sur l'expertise des profs. On nous a transformés en simples exécutants. Ces gens-là devraient aujourd'hui répondre des décisions qui ont été prises parce que c'est des gens qui se sont éloignés de la classe et qui viennent aujourd'hui nous dire comment faire le travail.

Il faudrait donc d'abord qu'au Québec on reconnaisse que les premiers experts de la pédagogie, pas les seuls, que les premiers experts de la pédagogie, ce sont les profs, et ça permettrait de faire en sorte que les profs se sentent reconnus, revalorisés, et ça nous donnerait le goût aussi de participer à des débats. Demain matin, là, le ministère de l'Éducation disparaît, les commissions scolaires disparaissent, les directions d'établissement disparaissent, puis les profs ne s'en porteront pas plus mal. Il me semble que ça devrait vouloir dire quelque chose. Ça devrait témoigner de l'insatisfaction qui est la nôtre.

• (12 h 40) •

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci, M. Mallette.

M. Proulx : C'est tout le temps que nous, nous avions de notre côté. Merci d'être venus. On aura la chance de poursuivre cette discussion-là, bien entendu. Merci.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci, M. le ministre. Alors, on va passer du côté de l'opposition officielle. Je cède la parole à M. le député de Lac-Saint-Jean pour huit minutes.

M. Cloutier : Je vous remercie beaucoup, Mme la Présidente. Alors, d'abord, je dois vous dire que j'aime beaucoup votre franc-parler et votre approche directe. J'ai envie de commencer d'abord en vous félicitant pour les négociations. Je comprends que c'est derrière vous, mais, quand même, c'est un morceau important, et je tenais à vous féliciter.

Maintenant, ce n'est quand même pas banal, ce qui se passe dans cette commission parlementaire parce qu'à peu près tous les intervenants... moi, je dirais à peu près à hauteur de 85 % est venu nous exprimer une insatisfaction vraiment majeure. Là, les deux plus importantes centrales syndicales au Québec, qui représentez des professionnels, des professeurs, le personnel de soutien, vous nous recommandez de prendre le projet de loi puis de le mettre à la poubelle, grosso modo. Je comprends que vous n'êtes même pas dans les amendements au projet de loi. Ça ne donne rien, on ne focusse pas sur les bons picots. Donc, les priorités ne sont pas les bonnes.

L'autre chose qui me préoccupe incroyablement, c'est de voir à quel point vous n'êtes pas dans le coup pour une réforme aussi importante de l'organisation scolaire au Québec et qu'il n'y a pas eu de processus de discussion puis de dialogue préalable parce que je pense que, s'il y avait eu une consultation, de toute évidence, on aurait probablement choisi d'autres priorités. Puis on entend un cri de coeur, je pense, de votre part sur l'approche pédagogique parce que, quand on regarde les études, ce qui frappe, c'est que la relation élève-professeur, c'est un des déterminants les plus importants pour la réussite d'un jeune. Donc, l'approche, justement, qu'un professeur peut avoir est réellement déterminante pour son succès, alors que la réforme scolaire, l'approche pédagogique ou autre, ce que les études démontrent, c'est que l'impact que ça a sur la réussite scolaire est nettement moins important.

Alors, une fois que j'ai tout dit ça, j'ai envie de vous donner la parole sur ce que vous jugez, vous, être les priorités en éducation puis les éléments sur lesquels on devrait se réunir et discuter pour améliorer l'éducation de nos jeunes au Québec.

Mme Morel (Nathalie) : Merci. Premièrement, je voudrais peut-être réagir quand vous avez dit... l'étonnement de savoir qu'on n'est pas dans le coup. Nous aussi, on a été grandement étonnés quand on a vu le projet de loi n° 86. Je ne vous dirais pas qu'on avait des attentes extrêmement élevées, mais on avait quand même certaines attentes. Nous avions été interpellés par, à ce moment-là, le ministre de l'Éducation de l'époque, qui était M. Bolduc, quand on est allés lui présenter, donc, les travaux qu'on avait menés au niveau de la réforme, la plateforme pédagogique, mais aussi dans le dossier de l'autonomie professionnelle. Il nous avait interpellés pour aller lui proposer ce que vous retrouvez dans la deuxième partie de notre mémoire. Et ce que la FAE a choisi de faire à ce moment-là, l'ensemble des composantes, alors, on s'est mis au travail à l'intérieur de deux mois avec de larges consultations. Tous les syndicats affiliés sont allés aux membres, on a eu des instances, on a fait un travail extrêmement rigoureux, on est allés présenter au ministre Bolduc l'ensemble de ce tableau de façon détaillée, là, vraiment. J'étais avec mon collègue, M. Mallette, et un autre de mes collègues, M. Lauzon. On nous a reçus avec beaucoup de félicitations, on a apprécié d'avoir le tableau article de loi par article de loi.

Alors, un peu plus tard, quelques semaines, voire mois, M. Bolduc a quitté, M. Blais est entré en poste, nous avons refait l'exercice, et encore une fois on nous a félicités, encore une fois on nous a remerciés, et on s'attendait vraiment, dans le projet de loi, à être pris en compte, à avoir en tout cas un certain nombre... on ne s'attend jamais à avoir nécessairement l'ensemble de nos demandes répondues, on est bien conscients et réalistes de tout ça, mais ça a été une énorme déception de voir qu'on avait si peu écouté les enseignantes et les enseignants.

Et, à quelques reprises, on nous a dit que nos travaux étaient très intéressants, mais ça ne passait pas la rampe du contentieux, ça ne passait pas la rampe du juridique. On ne sait pas ce que ça veut dire, c'est les réponses qu'on a eues, que nos propositions étaient intéressantes, mais que ça ne passait pas la rampe au niveau juridique. Alors, une fois qu'on s'est dit ça, je tenais à le partager, qu'on avait travaillé très, très consciencieusement et sérieusement et on s'attendait à être écoutés davantage, surtout qu'on a entendu à plusieurs reprises, publiquement, vouloir la valorisation, la reconnaissance des enseignantes, des enseignants, de la profession enseignante. Alors, ça a été une très, très grande déception.

Maintenant, ce qu'on souhaite, nous, à la FAE, et ce n'est pas pour rien qu'on vous a distribué les outils qu'on vous a distribués au début de l'audience, c'est qu'on pense qu'une autre école est possible. Et, au-delà du travail qu'on fait de représenter les enseignantes, les 34 000 enseignantes et enseignants à la FAE, qu'on représente, donc sur les territoires de la FAE, on défend l'école publique. Et, je pense, si, pour moi, il y a un fer de lance ou un cheval de bataille qu'on devrait collectivement avoir comme société, c'est de redonner à l'école publique ses lettres de noblesse. C'est vraiment, vraiment pour nous, je pense, le fil d'Ariane, là, de tout ça. On a parlé tout à l'heure de livre blanc, et d'états généraux, et de système d'éducation, mais, à quelque part, c'est un joyau qu'on s'est donné, hein, cette école publique là. Et l'école publique d'aujourd'hui est devenue l'école de la deuxième, troisième, quatrième vitesse, là, je vais le dire comme ça. C'est vraiment ça. On se retrouve avec toutes sortes de difficultés. Moi, je suis une enseignante et une élève de l'école publique montréalaise. Mes enfants sont allés à l'école publique montréalaise. C'est vraiment hallucinant comment nos écoles ne sont pas juste physiquement tombées en ruine mais sont vraiment dans un état lamentable au niveau aussi des moyens. Puis ce n'est pas juste les ressources financières, c'est les ressources humaines. Puis je vous parlais d'outils tout à l'heure pour les profs. Bien là, on parle aussi des bibliothèques, puis on parle de livres, puis on parle de dictionnaires. Puis on ne parle pas juste de tableaux blancs parce que ça ne prend pas juste des tableaux blancs, c'est un outil parmi d'autres.

Et, s'il y a une bataille qu'on devrait mener, c'est celle de redonner à l'école publique les moyens de sa réussite et d'arrêter de juger les enfants de l'école publique et les parents de l'école publique comme ceux qui ne sont pas capables puis ceux qui sont en difficulté parce que, finalement, bien, on les condamne à devenir des élèves en difficulté. Et on est dans un cercle où ce n'est plus juste à l'école, c'est en dehors de l'école. Il faut aider les familles aussi. Alors, les enseignants puis les enseignantes qu'on représente, pour nous, oui, ils vous demandent des changements au niveau de leur autonomie professionnelle, au niveau des conditions d'exercice mais aussi les conditions d'apprentissage et de vie de nos élèves de l'école publique.

M. Cloutier : Alors, la longueur de votre réponse témoigne bien de la nécessité de vous entendre et de vous écouter. De toute évidence, vous avez beaucoup à dire. Il me reste juste 30 secondes. Je voulais simplement dire que j'espère qu'on va vous revoir pour discuter de la réussite scolaire, et qu'on aura du temps pour le faire et d'approfondir les véritables enjeux, et qu'on mette de côté cette gouvernance, et qu'on se concentre enfin sur l'essentiel.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci beaucoup, M. le député. On va passer du côté du deuxième groupe d'opposition. Je cède la parole à M. le député de Chambly pour cinq minutes.

M. Roberge : Merci, Mme la Présidente. Cinq minutes, c'est très bref. Écoutez, comme parlementaire puis comme père, je vous remercie de ce que vous avez apporté, mais, comme enseignant et collègue, j'ai le goût de dire... Tantôt, je me suis retenu de ne pas applaudir à la fin de votre intervention auprès de la partie ministérielle parce que j'ai l'impression qu'on a entendu... oui, c'est un syndicat, la FAE, mais j'ai vraiment entendu l'écho de mes collègues enseignants au parlement aujourd'hui. Je n'ai pas entendu des négociateurs syndicaux de convention collective, j'ai entendu des gens qui sont venus apporter des solutions.

Puis votre document est très constructif. J'ai l'impression que vous avez fait cette réflexion-là. Évidemment, il faut la refaire avec tous les acteurs, là, je suis d'accord avec votre constat, on retire le projet de loi n° 86 et on fait une vraie consultation, mais par contre vous êtes prêts pour cette consultation. Je trouve que c'est vraiment, vraiment une belle contribution, un cri du coeur que vous avez apporté.

J'aimerais ça maintenant vous entendre sur un élément spécifique. Page 9, vous commencez la déclinaison, je pense, des six entraves restreignant actuellement l'autonomie professionnelle, puis c'est la voie que vous avez fait entendre le plus fortement, l'autonomie professionnelle, et j'en suis, et ma formation politique en est, de cette autonomie. On vous appuie à 100 %. Décentraliser la prise de décision, c'est une chose, mais c'est différent. Il ne faut pas confondre ça avec l'autonomie professionnelle. Le premier obstacle que vous avez identifié, c'est l'alourdissement de la tâche. Pouvez-vous nous dire comment et en quoi l'alourdissement de la tâche, depuis 5, 10, 15... les dernières années, a empêché l'autonomie professionnelle, vraiment, là, des enseignants?

• (12 h 50) •

M. Mallette (Sylvain) : Je vais essayer d'être très bref. Quand on parle de l'alourdissement de la tâche, d'abord, il faut comprendre ce qu'est devenu ce qu'on appelle aujourd'hui une classe ordinaire qui est de moins en moins ordinaire, pourquoi? D'abord, à cause de la concurrence de l'école privée, qui va chercher les éléments, les élèves les plus performants, qui éprouvent le moins de difficultés. Puis je fais abstraction des écoles privées subventionnées qui accueillent des populations d'élèves HDAA, là, je ne parle pas de celles-là. Je parle des autres écoles. Donc, il y a un écrémage, je n'aime pas l'expression, mais c'est celle qui est utilisée. À ça s'ajoute donc une concentration de plus en plus importante dans le même groupe d'élèves qui présentent des difficultés. Et là on dit aux profs... Et il faut se rappeler qu'au cours des 10 dernières années on a imposé des compressions à l'école publique, hein? On l'a privée des ressources dont elle avait besoin.

Donc, les élèves qui se retrouvent dans le groupe ou la classe dite ordinaire éprouvent de plus en plus de difficultés. On demande au prof d'adapter son enseignement. Moi, je suis au secondaire. J'ai des groupes à 35, 36, et on me dit, parce que, là, la moitié de la classe, ce sont des élèves qui ont des plans d'intervention, je dois adapter pour ces élèves-là mon enseignement, mais je dois aussi adapter mon évaluation. Donc, j'ai la moitié de la classe qui est capable de suivre le programme, l'autre moitié, qui est à géométrie variable, aura de la difficulté. Je n'ai pas les ressources, les élèves n'ont pas accès à des orthopédagogues, n'ont pas accès à du suivi dont ils ont besoin pour rattraper les retards. Et donc on me demande d'évaluer. Je dois évaluer en tenant compte non pas du programme que je dois enseigner, mais de la capacité de l'élève.

Et en plus on me dit que, dans certains cas, l'élève, même s'il échoue, il va passer pareil parce qu'on est dans une logique de promotion automatique. Il ne faut pas que l'élève vive d'échec parce que tout est centré sur l'élève, et on va de toute façon le faire passer. Et là, si j'arrive, par exemple, à 57 %, on va me rencontrer, la direction va me rencontrer, parce qu'on a des cibles à atteindre, hein? Mais, dorénavant dans nos rencontres de profs, on ne parle plus des élèves, on parle de cibles. J'ai 2 % de plus à atteindre cette année parce que je vais avoir un carton rouge, hein? Il y a même des systèmes qui ont été mis en place par des commissions scolaires avec un système de couleurs, lumière rouge, lumière verte, lumière jaune. Et, si l'école reçoit la lumière rouge, ça ne va pas bien. Et là la direction d'école va me faire... je vais subir de la pression. Écoute, tu ne penses pas qu'il vaudrait peut-être 60? Parce que, tu sais, on a des cibles à atteindre. Puis là on a une pression. Là, on remet en question mon jugement professionnel. Et, parmi tout ça, là, on ne me fournit pas les outils.

Le programme de formation de l'école québécoise, c'est un fourre-tout. C'est du grand n'importe quoi. C'est un cirque. Les choses sont décalées. Une chose peut être enseignée une année, si l'élève ne l'a pas vue cette année-là, il la verra l'année suivante, ce n'est pas plus grave que ça. Et c'est même nous qui avons... c'est un syndicat, on a libéré une dizaine de profs du primaire, on leur a donné les moyens : Réécrivez le programme de français en première, deuxième année du primaire. Faites le ménage là-dedans. Elles l'ont fait. Bien, il y a des commissions scolaires qui ont cherché à empêcher les profs d'avoir accès à ce document-là parce que supposément qu'il ne répondait pas au programme de formation de l'école québécoise, qui est devenu, hein... c'est devenu un dogme, au Québec, la réforme.

Et donc c'est de ça dont on parle quand on parle de l'alourdissement. On nous demande de faire une chose et son contraire. Les conseillers pédagogiques qui devraient nous accompagner dans l'acquisition de nouvelles approches pédagogiques sont devenus des vendeurs du temple. Ils sont au service des directions d'école puis des commissions scolaires. Ils ne nous aident plus à faire notre travail, ils viennent nous juger.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci, M. Mallette. Malheureusement, il ne reste plus de temps. Alors, je vais passer la parole à Mme la députée de Gouin pour trois minutes.

Mme David (Gouin) : Merci, Mme la Présidente. C'est absolument passionnant mais pas facile aussi, bien, d'abord parce qu'on réalise à quel point votre cri du coeur est important. Mais ce n'est pas facile non plus parce qu'au-delà de votre réalité quotidienne on discute de concepts qui, pour bien des gens, ne sont pas si évidents à saisir. Puis, je vous avoue, même pour moi, par moments, il faut pédaler vite. On n'est pas tous enseignants de formation, là.

Alors, moi, j'ai une petite, toute petite question pour vous. On a trois minutes aller-retour. Par rapport au ministère, vous dites : Ce qui ne va pas, c'est le modèle de gestion axé sur les résultats des commissions scolaires. Ce que vous proposez, c'est donc d'abolir le modèle de gestion que je viens de mentionner et de recentrer la mission d'instruction au coeur des programmes, etc. Pourriez-vous, là, le plus simplement possible, nous dire qu'est-ce que vous voulez changer, qu'est-ce que vous voulez mettre à la place? C'est quoi, votre vision de l'éducation? Je pense que c'est de ça qu'on parle.

Mme Morel (Nathalie) : Je vais essayer le plus brièvement possible.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Une minute, madame.

Mme Morel (Nathalie) : Une minute?

La Présidente (Mme Rotiroti) : Oui.

Mme Morel (Nathalie) : Dans le fond, d'avoir des planifications, nous, on n'est pas en désaccord avec ça. On trouve ça superimportant, superintéressant. Qu'on regarde, par exemple... On en a, des planifications, on en a toujours fait puis on pense qu'on doit continuer à en faire. Qu'on regarde le portrait des élèves d'une école donnée puis qu'on regarde c'est quoi, les besoins, quelles sont les forces, les faiblesses. Qu'on parle de manière humaine et qualitative. Qu'on regarde aussi c'est quoi, les réalités sociales, c'est quoi, les réalités économiques. Qu'on arrête de quantifier, qu'on arrête de faire de l'éducation une marchandise, qu'on arrête de se prendre pour des PME. Premièrement, qu'on arrête de dire «la clientèle». C'est des populations scolaires, ce sont des élèves. Qu'on arrête de voir l'éducation comme une question de j'investis tant, il faut que j'aie un rendement sur mon investissement de tant. Qu'on réalise qu'on travaille avec des êtes humains, comme c'est le cas en santé, puis qu'on donne aux professionnels qui sont là, aux experts, les coudées franches pour choisir leurs approches pédagogiques mais en faisant de la planification. On doit rendre des comptes, on en rend tous les jours, les profs, on en rend dans les bulletins quand on évalue nos élèves, on en rend quand on rencontre les parents, on en rend devant nos élèves. Pensez-vous qu'ils ne nous jugent pas? Puis c'est correct. Alors, pour nous, c'est ça, c'est une reddition de comptes saine, qualitative, humaine. Une planification, oui, on veut s'insérer là-dedans puis on y croit. On ne travaille pas en vase clos puis on n'est pas dans des entreprises privées.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Vous avez quelques secondes encore, Mme la députée Gouin, 30 secondes, si vous voulez ajouter un commentaire.

Mme David (Gouin) : D'autres organismes sont venus nous dire : Il ne faut pas parler de la diplomation ou de l'instruction — je ne me rappelle plus du terme exact — du plus grand nombre d'élèves possible mais de tous les élèves. Partagez-vous cet objectif?

Mme Morel (Nathalie) : Bien, nous, on n'a jamais pensé qu'il faut parler... Ce n'est pas de la réussite. Pour nous, c'est tout le temps cette question-là, c'est : De quelle réussite on parle? Vous en parlez, dans le projet de loi, la réussite. Nous autres, on dit toujours à la fédé : De quelle réussite on parle? Les trois missions, c'est : instruire, socialiser, qualifier ou on les prendra comme... Pour nous, la mission d'instruction devrait être prioritaire. La réussite, c'est une réussite scolaire et une réussite académique.

Maintenant, notre devoir, c'est de développer le plein potentiel de chaque élève. Si ça veut dire, par exemple, d'aller suivre un D.E.P. ou, par exemple, de finir peut-être son D.E.S. à l'éducation des adultes, bien, ça sera ça. Mais on ne doit pas faire l'inverse parce que, s'ils sont en milieu défavorisé, ils ont des difficultés, on va les amener dans l'approche orientante puis on va les amener, dans le fond, vers des voies, des formations de métiers semi-spécialisés. Dès le primaire, on va décider pour eux. Alors, c'est un peu notre vision, on inverse les choses.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci beaucoup, Mme Morel, M. Mallette, M. Cloutier. Alors, la commission suspend ses travaux jusqu'à 15 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 58)

(Reprise à 15 h 2)

La Présidente (Mme Rotiroti) : Alors, bon après-midi. À l'ordre, s'il vous plaît! La Commission de la culture et de l'éducation reprend ses travaux. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs cellulaires, les appareils électroniques.

Nous poursuivrons les consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 86, Loi modifiant l'organisation et la gouvernance des commissions scolaires en vue de rapprocher l'école des lieux de décision et d'assurer la présence des parents au sein de l'instance décisionnelle de la commission scolaire.

Nous entendrons cet après-midi les organismes suivants : l'Association régionale des West Quebecers, Québec Community Groups Network, le Regroupement des commissions scolaires de l'Estrie et la commission scolaire Pointe-de-l'Île.

Alors, je souhaite la bienvenue aux représentants de l'Association régionale des West Quebecers. Merci d'être là. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour faire votre présentation, et, par la suite, on va passer à une période d'échange entre les élus. Alors, je vous demanderais juste de vous identifier, et, par la suite, vous pouvez commencer tout de suite votre présentation. Alors, la parole est à vous.

Association régionale des West Quebecers

M. Shea (James) : Bonjour, Mme la Présidente. Je m'appelle James Shea. Ça se prononce comme «chez nous».

La Présidente (Mme Rotiroti) : Chez nous.

M. Shea (James) : Alors, je suis chez moi. Alors, je suis le président de l'Association régionale des West Quebecers. Notre motto, c'est de soutenir la communauté anglophone de l'Outaouais or supporting the English-speaking community of the Outaouais. I'm joined by my executive director, Brian Rock, who is sitting behind me, and also, hopefully in the audience, some representatives of the Québec Community Groups Network, of which I also happen to be vice-president.

Alors, l'Association régionale des West Quebecers — puis on appelle ça RAWQ, R-A-W-Q, RAWQ — a bâti sa réputation sur la fourniture de programmes et de services à la communauté anglophone de l'ouest du Québec depuis 1981. A healthy English-speaking community in a secure French-speaking Québec, a strong Québec in a united Canada.

L'Association régionale des West Quebecers est un groupe membre du Québec Community Groups Network. Il est important que le gouvernement du Québec reconnaisse et consulte sa communauté anglophone et plus particulièrement dans l'ouest du Québec avec l'Association régionale des West Quebecers, un partenaire engagé à qui le succès du Québec... à coeur. On se situe principalement dans la ville de Gatineau ainsi que dans les régions rurales du Pontiac et de Gatineau, qui se trouvent dans le territoire desservi par la commission scolaire Western Québec, un organisme pour lequel je suis aussi fier d'être leur président.

Il est grand temps pour le gouvernement du Québec d'impliquer d'une manière substantielle et constructive sa communauté anglophone dans le développement des politiques touchant les enjeux qui affectent et sont importants pour tous les citoyens du Québec.

Lors de l'élection 2014, notre communauté était consciente du fait que la CAQ a plaidé pour l'élimination des commissions scolaires et que le PQ a aussi fait des déclarations au sujet de l'élimination des cégeps, dont je me souviens. Et, considérant mes ressources limitées, il est surprenant que le Parti libéral du Québec n'a fait aucune mention de sa restructuration de la gouvernance des conseils scolaires au cours de leur campagne.

Suite à son élection en tant que gouvernement du Québec, il y a eu une discussion divisive et limitée concernant une réduction significative du nombre de conseils scolaires, réduisant ainsi le nombre des conseils scolaires anglophones de neuf à sept. Cela a été capturé et remplacé par le projet de loi n° 86, qui est la raison de ma présence ici aujourd'hui.

There's a significant assumption, correct or not, that the Liberal Party of Québec, which advocates for a strong Québec within a strong Canada, would propose legislation that eliminates the last and only true vestige of the English-speaking minority. This came as quite a surprise. I'm also the elected chairman of the Western Québec School Board and the only duly elected representative of the English-speaking community in our vast territory covering no less than eight provincial MNA jurisdictions and 10 French-language school boards. It is disturbing that the only visible, meaningful, widespread consultation with the English-speaking community, prior to the drafting of Bill 86, was done by the election system study panel.

The Western Québec School Board, prior to undertaking a position on Bill 86 and with the cooperation of our local parent, home and school and the West Quebecers organization, we undertook community meetings in order to provide an overview of what Bill 86 was and to receive feedback. We had significant town hall meetings in three of our jurisdictions. All three sessions were well-attended, interesting addresses were heard, and the question and answer portion of the evening led to some inspired debates that continued long after the adjournment of the meetings. Representation from the MNAs and our MNA, André Fortin, attended the one in Shawville. It should be noted that these meetings included representation from our Northern community, Maniwaki, Val-d'Or, Noranda, as well as Témiscamingue, and our partner organization neighbours in Rouyn-Noranda also participated.

La communauté anglophone du Québec n'est pas équitablement représentée au sein de la fonction publique provinciale ou au sein des partis politiques du Québec. Il en résulte que la communauté anglophone du Québec n'est pas entendue dans l'espace public, et nos objectifs et préoccupations sont inconnus ou mal compris.

The government of Québec must protect and advance the rights of Quebeckers, not restrict and not confuse, nor camouflage their application in the public domain. In our traditions of democracy, the Government must act in a positive fashion with the delegated authority of the people. The Government must not dictate unilaterally to Quebeckers how individual rights will be enjoyed. The Government must not remove nor restrict individual rights. Every legally qualified Quebecker has the right to be a candidate and to vote in an election. Universal suffrage is a guaranteed political right in school board governance.

Elected school boards date back to 1842, when the Common Schools Act of Lower Canada authorized the establishment of school districts, provided for the election of school trustees, and put in place a property tax to finance the building of schools. These laws form the basis that was designed to include children from all religious background and to receive instruction in English or French.

• (15 h 10) •

This similar process of governance formed the basis of municipal, provincial and national elections under the premise of taxation with representation.

Le gouvernement du Québec doit prendre des mesures pour protéger et améliorer ses écoles anglophones en tant que les dernières institutions anglophones du Québec. Le financement égal n'est pas suffisant. L'équité implique clairement un financement additionnel et du soutien tel qu'il est clairement démontré dans la façon dont la minorité de langue française est traitée en dehors du Québec.

In addition to providing excellent education to students, Québec's English public schools exist to preserve and promote a language and unique culture of English-speaking Québec. Schools are central and key institutions of the English-speaking community of Québec and, in many communities, the school is the last self-governing institution. The Government must recognize and support the linguistic and cultural rights of the English-speaking community. The school is the single most important institution for the survival of the official language minority. Minority educational rights are collective and not individual in nature. Management and control of our educational institutions cannot be unilaterally and capriciously restricted or dictated by government.

Puisque je n'aurai probablement jamais une autre occasion de faire une présentation à un si important groupe de décideurs dans ma province de naissance et dans laquelle j'ai demeuré toute ma vie, permettez-moi de faire quelques observations personnelles. Je suis un éducateur certifié et qualifié qui a reçu toute ma formation de base au Québec. J'ai aussi plus de 35 années de service en tant que leader au Québec, en Ontario et à travers le Canada. J'ai travaillé pendant neuf ans comme défenseur pancanadien pour l'apprentissage du français langue seconde en partenariat avec le Conseil des ministres de l'Éducation au Canada. J'ai servi sur le comité directeur pour le grand Sommet de la Francophonie parrainé avec la fédération canadienne des francophones et acadiennes. Je suis un commissaire d'école depuis la mise sur pied des commissions scolaires linguistiques au Québec. Je suis aussi membre du conseil d'administration du cégep Heritage College.

We have a serious problem in Québec where one in five Quebeckers aged 16 to 65 is likely to encounter reading difficulties. According to la Fondation d'alphabétisation, more than 1 million residents are illiterate. We should be concerned about the number of students who do not finish secondary school. In Québec, we have an elitist school system, and elitism breeds mediocrity. The English school system is elitist in that law 101 forbids enrolment from 80% of its population. This restriction includes a defined population of Canada and the entire new arrival community.

English-speaking parents have the option of sending their children to French-speaking public schools while maintaining their identity as members of the English-speaking community. We do have a choice. Francophone family units...

La Présidente (Mme Rotiroti) : You have about one minute left.

M. Shea (James) : I'll do it.

La Présidente (Mme Rotiroti) : OK.

M. Shea (James) : En français ou en anglais? Francophone family units, who are law 101 eligible, may and are selecting to enrol their children in English schools in order for their children to become bilingual.

Quebec subsidizes private school education. It is not my intention to question where you, as parents, send your children for an education. I truly respect your responsibility as parents to make the best decisions for your children. As elected lawmakers however, how can you justify a school system in which you do not have enough confidence to send you own children? Your mandate and challenges is to make Québec public education, in English and in French, the best school system where you should be proud to enroll your children. It's not governance that needs review. It is a review of the delivery of quality education that needs to be looked at.

Minister Proulx, this should not be a political exercise. I urge you to call a halt to Bill 86 and to engage our communities in dialogue about improving quality education.

M. le ministre, vous avez la possibilité d'améliorer la direction de Paul Gérin-Lajoie et de devenir le vrai ministre de l'Éducation. Je vous demande de conseiller au premier ministre Couillard de retirer le projet de loi n° 86 et de mandater une assemblée des états généraux afin de recueillir des données et d'établir des objectifs éducatifs pour tous les Québécois. Nous sommes prêts à travailler avec vous. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci beaucoup, M. Shea. Thank you for your presentation. On va passer à la période d'échange, et je cède la parole à M. le ministre pour environ 15 minutes.

M. Proulx : Merci, Mme la Présidente. Merci, M. Shea, d'être avec nous. J'ai deux questions pour vous puis j'ai mon collègue de Chapleau qui est député chez vous et qui a également des questions. J'avais envie de vous entendre. Vous parlez de votre organisation. Quelle est la part de votre organisation et de votre implication pour la réussite des élèves?

M. Shea (James) : Bien, premièrement, disons que, dans le secteur du Pontiac, vous savez où que ça, c'est... puis il y a beaucoup de familles exogames, disons. On a été mariés, la loi 101 ne peut pas interrompre les affaires conjugales, alors il y a des mariages en français et anglais. Alors, on trouve vraiment des familles exogames. Le père est Anglais, la mère est francophone ou quoi que ce soit. De mon avis, moi, ma mère est francophone, mon père, il était Anglais. Comment ça se fait? Je ne sais pas. Ils se sont rencontrés à l'église.

Et puis, nous, vraiment, dans le secteur comme tel, on est branchés vers la rivière Outaouais, et puis on a été influencés par l'Ontario. Alors, comme membres, comme... la communauté anglophone dans le secteur du Pontiac et le secteur de la ville de Hull, c'est environ 25 %, 30 %. Les anglophones sont plutôt dans le secteur du Pontiac et dans le secteur de Wakefield, travaillent à Maniwaki ou à l'ouest de la rivière Gatineau. Plus on s'en va vers l'est, vers Montebello puis Papineauville... il y a encore des anglophones, mais pas plus tout.

Alors, on a un membership aussi, mais à travers, pour la communauté entière, c'est plus que... on trouve vraiment... Disons, pour saisir la question, là, on a vraiment un cégep, Heritage College, qui réalise des succès. On a 1 100 étudiants dans le collège Heritage College. Alors, je suis impliqué là aussi. Et puis, pour là, on a vraiment un beau réseau d'écoles anglophones à l'élémentaire, au secondaire, à la «collegeship». On ne veut pas perdre ça. Puis, de mon avis, c'est important que la communauté soit incluse dans les décisions de l'éducation. Ce n'est pas sûr si je réponds à la question, mais le membership aussi de notre organisation, c'est environ 300, 400, et puis on a des fonds. Nos fonds viennent de Patrimoine canadien. J'ai amené une trousse, M. le ministre, je vais vous la donner tout à l'heure, puis peut-être, M. Fortin, on pourra vous en donner une aussi, une trousse de notre organisation parce qu'on a une trousse qui s'appelle «Welcoming Committee» des nouveaux résidents aussi.

M. Proulx : J'ai cru comprendre, à la lecture de votre mémoire, je vous ai entendu le dire, que vous avez également travaillé en Ontario.

M. Shea (James) : Permettez-moi...

M. Proulx : Oui, comme éducateur?

M. Shea (James) : Oui, c'est un vrai... j'ai toujours demeuré au Québec, mais j'étais assez près... surintendant en éducation avec la commission scolaire catholique d'Ottawa-Carleton puis j'ai travaillé là pendant 30 ans comme directeur d'école, comme surintendant et j'ai vécu toujours au Québec. Mes enfants ont tous fréquenté les écoles au Québec en français et en anglais. C'est parce que c'est important pour nous d'avoir des enfants bilingues. Alors, j'ai quatre fils, tous travaillent. Trois des quatre sont au Québec, travaillent comme ingénieur, comme professeur en français ou en anglais. Alors, dans notre vie, c'est important que les anglophones deviennent bilingues, mais «it's a double edge sword», comme on dit. C'est parce que, pour vraiment devenir bilingue, on fréquente les écoles françaises. On perd notre école.

M. Proulx : Si vous aviez à nous parler de la réussite scolaire, est-ce qu'il y a une chose qui vous vient en tête, que vous dites : En Ontario, ils font ça, et, au Québec, on ne le fait pas?

M. Shea (James) : Non. Écoute, moi, je suis impliqué comme président de la commission scolaire Western Québec. De mon avis, c'est mon défi de faire certain que cette commission scolaire soit responsable pour la plus bonne éducation au Canada, O.K.? Ça, c'est mon défi comme président. C'est pour ça que je suis là. Ce n'est pas pour faire des comparaisons avec l'Ontario ou faire des comparaisons avec les écoles francophones. Wherever you are is the best place that you should be. Alors, ça, c'est mon défi, et puis, vraiment, je ne fais pas de comparaison, except for the salaries.

Des voix : Ha! Ha! Ha!

M. Shea (James) : Les salaires sont différents.

• (15 h 20) •

M. Proulx : Bien dit! Non, non, je vous ai bien compris. Je comprends que, de votre côté, il y a énormément de gens de la communauté qui sont impliqués.

M. Shea (James) : Oui.

M. Proulx : Parce que vous êtes une association qui donnez des services à la population anglophone mais également aux élèves, donc aux élèves mais également aux adultes. Est-ce que je peux dire que vous êtes à l'aise de voir qu'on souhaite impliquer davantage la communauté dans les décisions dans le milieu scolaire, prenant en compte toutes vos réserves à l'égard de la communauté, que j'ai compris, là?

M. Shea (James) : Non. Écoute, je n'étais pas né président de la commission scolaire ni comme commissaire d'école. J'ai une expérience à travers le Québec et au Canada, alors j'espère être objectif. Mais c'est important pour la communauté d'être impliqué. Disons, comparez ça avec les commissions scolaires qui sont dans une ville. Nous, on dessert 69 municipalités. Alors, ça serait très difficile.

Moi, ce qui me concerne vraiment, ce sont les petites communautés, les petites écoles which will be overcome by the large schools, et puis ce sont les grandes écoles où les parents vont être impliqués. Pour moi, disons, ils ont un caractère vraiment impliqué dans la commission scolaire, et puis j'ai réussi ça. Tu peux voir mon YouTube, Facebook, j'ai réussi ça par dire : Je veux représenter la communauté anglophone, O.K.? Je suis anglophone et je me définis comme anglophone, je veux les représenter. Alors, je suis impliqué comme président de la commission scolaire puisque c'est le seul leader élu dans le tout le territoire. C'est pour ça que je suis fier de le faire, puis ils ont fait un très bon choix, comme vous le savez, oui.

M. Proulx : On n'en doute pas un seul instant. Merci. De mon côté, j'ai mon collègue de Chapleau qui voulait également vous poser des questions.

M. Shea (James) : Vas-y, M. Carrière.

M. Proulx : Merci, M. Shea.

M. Shea (James) : Oui, on s'est rencontrés. Merci.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci. Alors, M. le député de Chapleau, vous disposez de neuf minutes.

M. Carrière : Neuf minutes? Merci, Mme la Présidente. Pleased to meet you again, Mr. Shea. Welcome. It's your home here, as every Quebecker. So, I'm really happy that you're here to explain what you attend by this bylaw. And West Québec School Board fait une belle job à travers l'Outaouais. Vous l'avez dit tantôt, 69 municipalités, il y a Aylmer, il y en a à Hull, un peu partout, mais c'est surtout dans le monde rural. Moi, quand j'étais maire de Val-des-Monts, il y avait le Poltimore Elementary School où j'ai aidé, puis là... puis je pense que vous l'avez dit, l'arrimage entre la municipalité et l'école, etc., c'est quelque chose d'important. Comment verriez-vous ça, vous? Est-ce que vous êtes en faveur de ça, vous n'en parlez pas dans votre mémoire, mais des élections simultanées avec le monde municipal?

M. Shea (James) : Bien sûr, ça serait... C'est ça que ça serait idéal parce qu'on pourrait approcher les communautés et dire : On représente les municipalités. Puis, disons, il y a trop de municipalités, si on pourrait les... Ce n'est pas votre défi ici, mais, pour s'impliquer dans une élection... Moi, je me suis impliqué, disons, dans le comté de M. Fortin et j'ai réussi plus de 12 000 votes de la communauté anglophone. Ça, c'est «significant», disons, pour un petit comté. Alors, oui, vraiment, d'avoir une élection en 2017, 2018, ça va être 2017, avec le conseil municipal.

M. Carrière : Comment ça se passe à Western Québec? Il y a la commission scolaire puis il y a chacune des écoles. Le projet de loi veut décentraliser vers les écoles, donner plus de pouvoir aux directions d'école. Comment vous, chez Western Québec, vous voyez ça, chacun des directeurs d'école... Et je sais qu'il y a des directeurs d'école qui ont plus qu'une école chez Western Québec. Comment vous voyez ça, plus d'autonomie par école?

M. Shea (James) : Oui. Toutes nos écoles ont un seul directeur. Alors, on ne partage pas.

M. Carrière : C'est nouveau, ça.

M. Shea (James) : Je vais vous souvenir qu'ici je suis ici pour... Non, dans l'école de Poltimore puis l'école de Buckingham, c'est partagé, je m'excuse. Vous le saviez.

M. Carrière : Oui, je le savais.

M. Shea (James) : Alors, disons, je peux parler «more freely», comme vous dites, comme personnel parce qu'ici je suis président de la commission scolaire Western Québec, mais je ne la représente pas ici. Je suis président d'une association communautaire. Mais je n'ai pas peur d'exprimer mon opinion. Et puis, pour nous, dans un cadre de professionnels, c'est important d'avoir un réseau de support parce que nous sommes dans les petits villages, puis on n'a pas... you don't have any confidence in collegial support. C'est important d'avoir des contextes de parrainage avec d'autres écoles. Alors, c'est ça qu'on peut faire. Pour nous, on peut s'impliquer avec la communauté de Poltimore, si vous voulez, la communauté de Maniwaki, et puis s'intégrer, s'aider les uns les autres parce que les directeurs d'école sont des professionnels, mais c'est mieux... Ce qui m'inquiète le plus, c'est l'équité d'avoir vraiment des programmes à part de tout le territoire pour les élèves... un programme dont on sera tous fiers dans toutes les écoles. Puis, pour moi, c'est ça que la commission scolaire fait.

M. Carrière : But my question is : Do you think that the schoolboards, sometimes, put their nose where they don't belong, it should be the school itself or the director of the school that should decide what is good for the school or the students?

M. Shea (James) : Bien, on a des conseils d'établissement. You have governing boards and you have school courts of conduct, and school courts of conduct are in the domain of the schools. And so, there is no interference with... the school court of conduct is developed by the schools, is approved by the schools, and it meets within the policies of the regular schoolboards. And so, for example, drug possession might have a different interpretation in a city school than in a rural school, with that respect. And so, you need policies to take care of the big picture and yet you have to allow for a significant autonomy at the school level. That happens now. There is no question that happens now.

M. Carrière : Rapidement, pour laisser la place à mon collègue, savez-vous par coeur le taux de participation de la dernière élection chez Western Québec et c'est quoi, le taux de diplomation dans les écoles secondaires à Western Québec?

M. Shea (James) : Bien, le taux de diplomation des écoles secondaires, des cinq écoles publiques dans la région... trois ou quatre des écoles étaient des écoles anglophones en comparaison avec des écoles francophones. Mais ce n'est pas bon de faire des comparaisons comme ça. C'est mieux de prendre une école, de dire : C'est quoi qu'on peut faire pour vous aider à avoir une réussite dans votre école propre? Nous, on a des écoles maternelles à la 11e année, on a des écoles secondaires, on a des écoles «junior high» secondaires. Ça dépend où. On a aussi des élèves qui sont dans l'autobus pour une heure à la fois. Alors, ça, c'est important. Mais, si la qualité d'éducation, c'est vraiment réaliste pour que tous les élèves pourront réussir au secondaire et d'aller au collège, c'est ça, notre grand défi, alors on devrait travailler avec ça puis on devrait impliquer la communauté en éducation.

M. Carrière : Merci, je vais laisser...

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci. Alors, merci, M. le député de Chapleau. Alors, M. le député de D'Arcy-McGee, il vous reste trois minutes.

M. Shea (James) : Est-ce que c'est moi qui parle trop ou c'est eux?

La Présidente (Mme Rotiroti) : Non, non, non, ça va bien. C'est parfait, M. Shea.

M. Shea (James) : C'est bon.

M. Birnbaum : Merci, Mme la Présidente. Bienvenue, M. Shea. Ça me fait plaisir de vous rencontrer à nouveau.

M. Shea (James) : Bonjour, David.

M. Birnbaum : On a eu plusieurs opportunités de travailler ensemble. Et je crois que c'est important de vous écouter et de comprendre que votre défense de la communauté d'expression anglaise est offerte en toute bonne foi et suite à votre expérience de toute une vie en éducation. C'est que vous étiez aussi directeur de Canadian Parents for French. Alors, c'est un message, j'espère, qui est reçu en très bonne foi et qui est encadré par une reconnaissance des réalités du Québec d'aujourd'hui.

You said at one point that one of the things that bothers you with the projet de loi, and the oppositions clearly registered, but it was that it would eliminate the last vestiges, one of the last vestiges of English-speaking Québec.

I think it's important for us to hear your reaction to what is in the law. The proposal calls for the universal election of six members. Should there be... 15% or so — that was said by the Minister — of parents who called for that level of universal suffrage. So, you have six members that are selected plus six parents who are presumably, if they are parents of students in English-speaking schools, representatives of the English-speaking community, otherwise... Another way of putting it, 12 of the 15 members would be somehow connected to the English-speaking community. Now, I understand that's not viewed as satisfactory, others have told this is much. But, please, explain why.

• (15 h 30) •

M. Shea (James) : Well, personalize it, it would disenfranchise me, as a resident of the community, of the ability to represent my community. It would leave that decision to 15% of the parents who have children in our schools. And so, to personalize it, it would clearly eliminate... I'm not suggesting that 15% wouldn't want me, 50% might want me, but the point is it totally disenfranchises my right to be a school commissioner or to be chair of the school board and have the community elect me. Quite frankly, that insults me.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Thank you very much, Mr. Shea. Il ne reste plus de temps du côté du gouvernement. Alors, on va passer du côté de l'opposition officielle. Je cède la parole à M. le député de Lac-Saint-Jean pour environ 10 minutes.

M. Cloutier : Alors, à mon tour de vous souhaiter la bienvenue. Peut-être d'abord juste quelques éléments de votre mémoire, là, qui m'ont fait réagir, d'abord sur la déclaration à l'effet que le Parti québécois aurait remis en question la pertinence des cégeps. Oui, vous pouvez peut-être vous expliquer là-dessus.

M. Shea (James) : Alors, vous êtes de ce parti, le Parti québécois. Il y en a, pendant l'élection, de mon avis, qui en ont parlé, de faire partir les cégeps au niveau provincial. Mais pour vous dire franchement que, dans mon territoire, il n'y a pas trop de candidats au Parti québécois qui ont réussi. Alors, je parle de ce que j'ai lu dans les journaux.

M. Cloutier : Bien, j'ai envie de vous rassurer tout de suite, puis ça vous permettra peut-être de...

M. Shea (James) : J'ai fait erreur? Si j'ai fait erreur, je m'excuse.

M. Cloutier : Bien, en fait, je n'oserais pas dire que vous avez fait une erreur. Je vais simplement soumettre qu'à ma connaissance il n'y a personne qui a remis en question et qu'on se bat plutôt pour l'inverse, c'est-à-dire pour qu'il y ait une représentation des cégeps sur l'ensemble du territoire québécois. Et la problématique qu'on vit, particulièrement dans les régions, c'est plutôt le maintien de nos institutions parce que, vous savez, il y a une décroissance importante. Ce matin, j'ai rappelé qu'il y avait une baisse de clientèle dans l'ensemble de nos régions ressources. Et je peux vous dire que le cégep de Gaspé, le cégep d'Alma, le cégep de Matane, le cégep de Saint-Félicien sont tous des cégeps qui sont sur le respirateur artificiel et que, si on ne se bat pas pour leur maintien, on a un sérieux risque de voir éventuellement des fusions d'institutions. Pourquoi? Parce qu'il y a une baisse de clientèle importante.

D'ailleurs, un des bons coups que j'ai voulu souligner du gouvernement dans le dernier budget, c'est les bourses à la mobilité des étudiants. Même si, évidemment, c'est un projet pilote, c'est ce que je comprends, on aura la chance d'en discuter avec le ministre, ça reste une première initiative qui va dans la bonne direction, à mon point de vue, pour nous assurer que les Québécois aient davantage accès à un réseau des cégeps sur l'ensemble du territoire québécois. Et je pense que ce que je viens de vous exprimer est la position officielle de notre formation politique...

M. Shea (James) : Je vous remercie du...

M. Cloutier : ...et, à ma connaissance, la seule.

M. Shea (James) : Et je dois vous dire que, dans ma région, les cégeps, c'est un très grand succès.

M. Cloutier : Je n'en doute pas. J'ai aussi vu que vous êtes financés par Patrimoine canadien.

M. Shea (James) : C'est bien ça, oui.

M. Cloutier : Ça a piqué aussi ma curiosité. Probablement que vous recevez un financement de Patrimoine canadien sous l'angle des minorités linguistiques.

M. Shea (James) : Des langues... minorités, oui, c'est ça.

M. Cloutier : C'est bien ça?

M. Shea (James) : Notre budget, c'est environ 128 000 $ par année. Alors, c'est un petit budget. On a un bureau dans le même... Galeries Aylmer avec M. Fortin. Alors, on est partenaires dans ça. Et puis ce n'est pas gros, mais c'est assez pour nous. Un des grands problèmes pour nous, c'est de faire des recherches et de la traduction. C'est pour ça qu'on appartient à la Québec Community Groups Network, qui va... vous allez entendre un peu plus tard, qui est le niveau provincial qui fait partie de tous les groupes régionaux. Donc, je suis vice-président de la QCGN aussi. Je peux vous dire ça.

M. Cloutier : Donc, vous ne manquez pas de chapeaux, là. Je comprends que vous êtes à la fois président de commission...

M. Shea (James) : Mais c'est toujours... la seule personne, c'est moi.

M. Cloutier : C'est bon. Très bien. Je vous remercie. Vous savez que j'ai eu à dire à plusieurs reprises que nous reconnaissons d'emblée le droit à la communauté anglophone de décider pour ses institutions en éducation et que, pour nous, c'est un droit constitutionnel qui devait être reconnu et maintenu. Et nous avons aussi dit à maintes reprises qu'à notre avis le projet de loi n° 86, dans sa forme actuelle, est inconstitutionnel et va créer... il y a un risque réel de créer un réseau à plusieurs chapeaux. Alors, ceci étant dit, on va continuer de défendre cette position-là pour la suite de nos travaux.

Maintenant, vous pouvez peut-être nous parler davantage des particularités de votre milieu, la grandeur du territoire, la nécessité pour vous justement d'avoir un contrôle sur l'éducation pour la région que vous représentez. Et peut-être nous indiquer également le lien entre la communauté, les parents et le réseau de la commission scolaire.

M. Shea (James) : Bien, d'après moi, on se rencontre avec les parents à tous les mois. Moi, comme défi personnel, je me présente à toutes les réunions des comités de parents, ainsi que notre directeur général. On écoute les parents. On a quatre parents qui font partie de la commission scolaire. Les parents se sont impliqués, avec nous, d'avoir des «town halls» à travers notre territoire. Alors, on a un vrai partenariat avec nos parents. Et, même comme commission scolaire, on exige que les parents devront avoir le droit de vote à la table des commissions scolaires. Pour moi, j'étais étonné quand j'ai réalisé que les parents n'avaient pas de vote.

M. Cloutier : Il y a eu beaucoup d'explications ou de témoignages de parents qui font du bénévolat dans les écoles pour la communauté anglophone pour la région de Montréal. Est-ce que c'est le même cas pour la région que vous représentez aujourd'hui?

M. Shea (James) : Mais, si je comprends la question, disons, la participation des parents, c'est vraiment... pour moi, on avait une petite école qui a réussi à soutenir des fonds de plus de 25 000 $ dans un an. C'est parce que c'est la communauté qui s'est impliquée avec eux. S'il y a un «fund-raiser», disons, dans le territoire, c'est tout le monde qui s'implique dans l'école.

Hier soir, il y avait un souper international à une de nos écoles, toutes les communautés étaient là. C'est parce que la communauté anglophone cherche des endroits où on peut rencontrer les autres anglophones. Et puis moi, j'ai participé à une soirée à Buckingham, par exemple. Toute la communauté anglophone est sortie pour la soirée de l'école à Buckingham, même si elle n'avait pas des élèves dans les écoles.

M. Cloutier : Est-ce que vous...

La Présidente (Mme Rotiroti) : Il vous reste quelques minutes à peine, M. le député. Deux minutes.

M. Cloutier : Peut-être juste une dernière question. Est-ce que vous avez l'impression que l'implication des parents, elle est plus importante du côté anglophone que francophone par rapport à votre expérience à vous ou c'est similaire dans votre région?

M. Shea (James) : L'implication est très importante dans nos écoles. Pour moi, personnellement, les parents sont les premiers éducateurs. Ce sont eux qui sont responsables pour leurs enfants. Les écoles sont là pour les soutenir.

M. Cloutier : Tout à fait. Je vous remercie.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci beaucoup, M. le député de Lac-Saint-Jean. Alors, on va céder la parole au deuxième groupe d'opposition, et je cède la parole à Mme la députée d'Iberville pour environ six minutes.

Mme Samson : Merci, Mme la Présidente. Good afternoon, Mr. Shea.

M. Shea (James) : Bonjour.

Mme Samson : Please allow me to practice my English this afternoon. It's not every day we have the opportunity.

M. Shea (James) : Et, comme moi, de pratiquer mon français.

Mme Samson : C'est ça. Alors, on va bien faire ça. Earlier, the Minister opened the door there for you to tell us a little bit about the services you offer to students. Does you organization offers services directly to students, or to schools, or to school boards?

M. Shea (James) : Our organization acts as a clearing-house for encourage in voluntarism by bringing seniors in particular because there is very significant anglophone... only senior groups within our community who want to continue to be involved in a community. And so, we encourage them to be involved in the school, so we act as a clearing-house for...

And secondly, we act as a purveyor of — the nearest of the English word you have to remember — information with respect to what's going on in communities, crafts sales and things like that that did go off Saturday morning, yes.

Mme Samson : O.K. I understand, thank you very much. Two things strike me from your presentation, and you tell me if I maybe put too much importance on either one of them. The first one was the surprise that was created by the appearance of the project 86 by the Government, that you did not expect that, it was not discussed during the electoral campaign, and this came as a surprise.

M. Shea (James) : Well, it came as a surprise to me, it didn't come as a surprise to you?

Mme Samson : Well, I didn't have much of a heads-up, I'm not with them very often.

M. Shea (James) : O.K. Well, I didn't have a heads-up either and...

• (15 h 40) •

Mme Samson : You didn't get a heads-up on that.

M. Shea (James) : ...I talk to my deputies every chance I get.

Mme Samson : OK. And the second one that strikes me is that there is no hesitation on your part as to the fact that that project should be set aside...

M. Shea (James) : Absolutely.

Mme Samson : ...completely and that, rather, the Minister and the Government should call for a broader, deeper examination of the needs required by the educational system in Québec.

M. Shea (James) : That's correct.

Mme Samson : So, I read that properly?

M. Shea (James) : You read that properly.

Mme Samson : I guess I read not too bad in French. Your mémoire was...

M. Shea (James) : You read very good in English, I thank you. And thank you for sharing that in English because you really did a good job. And you know, we're not the enemy of education. In our community, we want to really have a good education system. So, don't throw us out. Engage us. That's my message here today. On veut participer, alors invite-nous à participer.

Mme Samson : J'ai très bien compris votre message et je vous remercie infiniment.

M. Shea (James) : Merci.

Mme Samson : Ça fait le tour de mes questions, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Parfait. Merci beaucoup, Mme la députée d'Iberville. Thank you very much for your presentation, Mr. Shea.

M. Shea (James) : C'est tout?

La Présidente (Mme Rotiroti) : Thank you for being with us. Alors, j'ajourne les travaux quelques instants pour que le prochain groupe, le Québec Community Groups Network, prend place. Merci.

(Suspension de la séance à 15 h 42)

(Reprise à 15 h 43)

La Présidente (Mme Rotiroti) : Alors, à l'ordre, s'il vous plaît!

Des voix : ...

La Présidente (Mme Rotiroti) : M. le ministre! On est sur les ondes, M. le ministre. Merci. Alors, welcome to the Québec Community Groups Network. Merci d'être là. Alors, je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour faire votre présentation, et, par la suite, on passera à une période d'échange entre les élus. Alors, je vous demanderais juste de vous identifier, ainsi que les gens qui vous accompagnent, et, par la suite, vous pouvez commencer tout de suite votre présentation.

Québec Community Groups Network (QCGN)

M. Duszara (Walter) : Bonjour, madame.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Bonjour.

M. Duszara (Walter) : Walter Duszara. À ma droite, Mme Sylvia Martin-Laforge, et M. Geoffrey Chambers à ma gauche.

Bon après-midi, Mme la Présidente Rotiroti, M. le ministre Proulx et membres de la commission scolaire. Je suis le secrétaire du conseil d'administration du Québec Community Groups Network, un organisme à but non lucratif qui rassemble 48 organismes communautaires de langue anglaise situés aux quatre coins du Québec.

Dans un premier temps, je tiens à remercier la commission parlementaire et les membres de la commission scolaire de la culture et de l'éducation de nous offrir l'occasion à s'exprimer sur les enjeux possibles en lien avec les modifications prévues au projet de loi n° 86 et ses répercussions sur notre communauté minoritaire.

English-speaking Québec is a diverse and confident linguistic minority that actively seeks to participate in and to contribute to the social, economic, cultural and political life of Québec. Our organization is a center of evidence-based expertise and collective action on the strategic issues affecting the development and vitality of the English-speaking Québec. With me today is fellow board member Geoffrey Chambers and Sylvia Martin-Laforge, an authority on linguistic minority education policy in other Canadian provinces and the QCGN's director general.

Pour commencer, nous souhaitons inviter mon collègue Geoffrey à dire quelques mots.

M. Chambers (Geoffrey) : Bon après-midi. Québec's democratic traditions are deep and something we can all be proud of. A Charter of Human Rights and Freedoms recognizes the intrinsic right for every legally capable and qualified person to be a candidate and to vote in an election. In laterally restricting this right, the absence of a pressing and substantial societal goal runs counter to how Québec's democracy is practiced and deeply violates the trust citizens have in their government.

The Government of Québec must protect and advance, not restrict and obfuscate the rights of Quebeckers. Government acts with the delegated authority of the people, it does not decide and... (Interruption) Thank you very much. Produced a grunting. It does not decide and dictates to Quebeckers how individual rights will be enjoyed and it does not remove fundamental rights on a whim. No substantial public consultation was undertaken before Bill 86 was introduced. No objective reasons have been presented in a white paper form or other policy documents that justify the revolutionary changes in Bill 86.

Nous croyons que le projet de loi n° 86 est une mauvaise mesure législative qui n'est ni nécessaire ni souhaitée. Il est clair que nous sommes préoccupés par ses fondements, mais c'est la façon cavalière dont cette loi a été conçue qui nous inquiète le plus en tant que Québécoises et Québécois. Cessez d'imposer vos politiques à Québec. Cessez de centraliser l'autorité politique aux dépens des communautés régionales et minoritaires. Cessez de confondre équité avec égalité. Appliquer les mêmes règles à toutes les sphères de la société fait en sorte qu'une grande partie sera lourdement défavorisée. Le principe d'égalité réelle, quant à lui, est fondé en droit et a démontré depuis toujours que c'est la meilleure façon d'atteindre nos objectifs sociaux. À nos avis, l'approche deux poids, deux mesures, ce n'est pas une solution acceptable.

Mme Martin-Laforge (Sylvia) : Le système scolaire public anglophone du Québec est essentiel au bien-être de la communauté d'expression anglaise du Québec, qui est, rappelons-le, une communauté en situation minoritaire. De plus, la gestion et le contrôle de nos institutions est une question de gouvernance assujettie au droit en matière d'éducation des minorités linguistiques, cité dans la Charte canadienne des droits et libertés, et font partie intégrante de la tradition démocratique québécoise telle qu'exprimée par les droits politiques garantis par la charte québécoise des droits et libertés.

The Government of Québec has a duty to recognize and work in partnership with its linguistic minority community to ensure effective management and control of the English public system. The English-speaking community of Québec recognizes the need for reforms to the governance of its educational institutions. And, as you know, last summer, the community conducted a wide-ranging consultation and prepared recommendations to the Minister of Education and Higher Education on education reform. It's unfortunate these recommendations were somewhat summarily dismissed.

Non seulement les écoles anglophones du Québec offrent une excellente éducation à nos étudiantes et à nos étudiants, mais elles contribuent aussi à préserver, à promouvoir notre langue et notre culture, une culture unique à la communauté d'expression anglaise de la province. Les écoles sont des institutions de première importance, et essentielles au Québec d'expression anglaise, et, dans plusieurs communautés du Québec, les seules et dernières institutions gérées de façon autonome. Le gouvernement du Québec doit reconnaître et soutenir nos droits culturels et linguistiques et se souvenir constamment, et je cite : «...l'école est l'institution la plus importante pour la survie de la minorité linguistique...»

• (15 h 50) •

M. Chambers (Geoffrey) : Le gouvernement du Québec n'entend pas la voix du Québec d'expression anglaise, qui compte pourtant près de 14 % de sa population. Nous ne sommes pas représentés équitablement ni dans la fonction publique ni dans les partis politiques de notre propre province.

Public discourse and policy development reflex a profound gap between the popular myth of English-speaking Quebecers and our minority's reality. As a result, English-speaking Québec is not being heard in the public space, and our goals and concerns are unknown or misunderstood. Government policies and practices put in place to suit everyone and which appear to be non-discriminatory do not address the specific needs and circumstances of the English-speaking community and are consequently often indirectly discriminatory. This is the very definition of systemic discrimination. Result : only a third of English-speaking Quebeckers believe that our community's situation has improved in the last 20 years and 60 % believe that we will continue to weaken in the next two decades. This not only directly affects Québec capacity to keep English-speaking Quebeckers in the province, but adversely impacts our collective need to attract and retain newcomers to secure our future.

M. Duszara (Walter) : There are solutions, which begin with Québec recognizing and working with its English linguistic minority community. Maintaining Québec's English public school system is a partnership between our minority language community and the Government of Québec. Together, we should be striving to achieve substantive equality between our minority school system and that of the majority. The educational experience of children attending English schools must be of meaningful similar quality to the educational experience of majority language students. Moreover, parents cannot be deterred from sending their children to an English school because it is meaningfully inferior to an available majority language school. These are real challenges English-speaking Québec should be addressing with the government, not the distracting and easily addressed annoyances with school governance.

Finally, it is time for the Government of Québec to recognize and constructively engage the English-speaking community of Québec in policy discussions. Nearly 90 % of English-speaking Quebeckers support the creation of an office for Anglophone affairs within the Government of Québec.

Nous sommes ici aujourd'hui pour exprimer notre profonde consternation face au projet de loi n° 86 et ses réformes qui affectent sans conteste notre système scolaire. Il est fort possible que, si cette mesure législative est adoptée, elle sera l'objet d'une contestation judiciaire qui se retrouvera probablement devant la Cour suprême. L'an dernier, nous étions ici pour parler des effets dévastateurs que le projet de loi n° 10 aurait eus sur nos institutions de santé et de services sociaux, ce qui m'amène à poser la question suivante : Why is our community being placed in a position where we must fight our provincial Government? It is unnecessary and counterproductive. We do not want to be adversaries with our Government but constructive partners. We invite you to engage with us and our community. Merci.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci beaucoup, M. Duszara. Alors, on est maintenant rendus à la période d'échange entre les élus, et je cède la parole à M. le ministre pour 16 minutes.

M. Proulx : Merci, Mme la Présidente. Madame et messieurs, merci de votre présence. Je vais partager les questions avec les collègues qui ont également des questions pour vous.

Vous indiquez, dans votre mémoire : «...l'école [c'est] l'institution la plus importante pour la survie de la [communauté anglophone].» Ce n'est pas nécessaire de faire état des résultats des commissions scolaires anglophones, notamment sur la réussite, d'autres l'ont fait. On l'a vu, on a posé des questions à ce sujet-là. J'ai envie de vous demander la question que j'ai posée à tous les groupes qui sont venus nous parler de la spécificité de la communauté anglophone, je veux dire : Qu'est-ce qui explique la grande mobilisation des gens autour de l'éducation du côté anglophone? Et ensuite dites-moi quels éléments ou quelles caractéristiques on pourrait mettre en place dans les commissions scolaires francophones ou chez les francophones pour avoir le même niveau de mobilisation en éducation.

M. Duszara (Walter) : C'est une question difficile. C'est difficile de faire des comparaisons entre un système et l'autre. Mais ce que je peux constater, c'est qu'il y a une implication énorme de la part des parents et de la part de la communauté dans les écoles, surtout dans les régions où on voit l'école comme le centre communautaire, entre guillemets, pour la communauté anglophone.

L'importance de l'éducation est une valeur qui est partagée par la plupart des parents de la communauté québécoise d'expression anglaise. L'importance de donner l'occasion à la personne, à l'enfant, de grandir, de s'épanouir, de développer les habiletés qu'il possède, qu'elle possède est une valeur. Donc, l'éducation était, est et sera toujours une préoccupation importante dans la vie des parents d'expression anglaise au Québec.

M. Chambers (Geoffrey) : Ça relève peut-être un petit peu du fait que c'est une communauté minoritaire. Et autant qu'on voit que les communautés francophones hors Québec sont très liées à leurs commissions scolaires, à leur système de formation secondaire, et maintenant ils poussent un petit peu sur le postsecondaire aussi, pour valoriser, et pour établir, et pour avoir les structures pour offrir les systèmes de soutien pour la communauté, c'est très important pour nous autres, puis avoir nos propres... quelque chose qui est lié avec notre histoire mais qui donne la structure pour les communautés.

Comme un petit peu partout dans les régions du Québec, pour avoir une troupe de scouts, pour avoir une école ou des cours de danse ou de quoi que ce soit, doit-on avoir une location, un bâtiment pour les desservir? C'est les écoles qui nous les fournissent.

M. Proulx : Vous dites, dans les recommandations... avant les recommandations, je l'ai dès le début de votre mémoire, je vais le trouver en vous parlant, c'était dans la première page, voilà, vous dites : «La communauté d'expression anglaise du Québec reconnaît la nécessité de réformer la gouvernance de ses établissements d'enseignement.» D'ailleurs, bon, vous avez fait une consultation. Il y a deux aspects au projet de loi. Il y a un aspect, effectivement, qui touche la démocratie. On vient d'en parler, puis vous l'avez exprimé très clairement. Il y a un aspect qui touche la gouvernance et des exemples de ce que pourrait être une décentralisation. Quand vous dites, dans le mémoire... vous reconnaissez la nécessité de réformer la gouvernance de ces établissements, vous faites référence à quoi exactement?

M. Duszara (Walter) : Quand on parle de la gouvernance, on parle de l'implication puis la participation des personnes avec un «p» majuscule. Le système actuel, on ne peut pas parler du système actuel, on ne peut pas faire l'évaluation du système. Ce qu'on peut dire, c'est qu'on peut réfléchir l'actualité comme ça nous apparaît. Et ce qui nous apparaît, c'est que les gens des milieux avec lesquels nous avons contact presque constant nous ont indiqué qu'ils sont contents avec les structures actuelles, grosso modo. Il y a toujours la possibilité de faire des améliorations, mais, dans la situation actuelle, les gens sont contents.

La consultation qui a été menée cet été par la communauté anglophone a décerné quelques possibilités d'amélioration, et c'est ça qu'on retrouve dans le rapport. La participation des parents, par exemple, ça, c'est le plus important, de notre avis. Il y a d'autres façons pour assurer la participation aux élections, par exemple, en utilisant la technologie moderne. Donc, il y a des choses. Mais, d'après ce que nous savons, les anglophones, les communautés anglophones sont contentes avec leurs possibilités qui existent pour la participation dans les gouvernances des structures d'école.

I would like to add one more comment.

M. Proulx : Yes, no problem.

• (16 heures) •

M. Duszara (Walter) : You've put a focus on the school. It's as if the school is somehow disembodied from the school board. And oftentimes, when we listen to the discussions about school boards, the school board seems to be a structure that is disembodied again. Our perception of the school board is that it's an interactive dynamic relationship between schools, administrators, teachers, professionals, directors general and elected officials. There is a whole, an «ensemble», and it doesn't do justice to the way the system is working now to simply take one section, and remove it, and speak about it as if it were apart from the entire dynamic that's there.

The dynamic that exists in terms of the relationship that the English-speaking minority has with its minority language education system is an active one and a healthy one. And the concern that we have here, in the proposed legislation, is that legislation will end something that is working well, not working perfectly, but working well. And we would deplore seeing that educational resources that we have and that we built over 100 years disappear because of some gesture that is primarily administrative, in our opinion.

M. Chambers (Geoffrey) : Ce n'est pas nécessairement seulement une question de gouvernement, mais une question de mandat aussi un petit peu. Comme «décentralisation», c'est un terme que nous partageons tout à fait mais pas nécessairement une décentralisation du pouvoir ou des responsabilités au niveau de l'école pour que... le contrôle réel va rester ou sera peut-être, dans une condition, augmenté vers son monument... ici, dans le ministère.

So, you know, our school boards have no contribution, no role played in curriculum today. And, whereas the Québec secondary school curriculum is widely recognized to be the amongst the best in the world, certainly measured up best in North America, so let be very proud of it, it is quite rigid. And, without losing any of that high quality, without losing the contribution that our overall structures have provided, we do believe it's possible to create a certain amount of flexibility to reflect community requirements and needs. And, giving some of that responsibility back to school boards, we think it will be a good move.

M. Proulx : Ce que vous dites, avant de passer la parole à mon collègue, c'est que chaque niveau a son défi ou ses défis pour de la décentralisation. C'est ce que je comprends. Alors, merci de mon côté. Mon collègue de D'Arcy-McGee avait également des questions pour vous. Merci de votre témoignage aujourd'hui.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci, M. le ministre. Alors, M. le député de D'Arcy-McGee, il vous reste sept minutes.

M. Birnbaum : Merci, Mme la Présidente. M. Duszara, M. Chambers, Mme Martin-Laforge, on a eu le plaisir de travailler ensemble à plusieurs reprises. I recognize that the position you put forward comes from a certain level of Québec... of a collective expertise : former Executive Director for Alliance Québec, like myself, among other titles, directeur de service du ministère de l'Éducation, un homme qui a dévoué sa vie à l'éducation publique, et un autre... ou fonctionnaire de l'Ontario. Alors, il y a de l'expertise autour de la table.

Je trouve ça important de vous inviter de commenter sur les recommandations qu'on a entendues à quelques reprises sur les élus actuels. Il ne faut pas oublier qu'on s'est trouvés, et les deux formations d'opposition ne manquaient pas d'opportunités pour en parler... de questionnement collectif sur la crédibilité des commissions scolaires, mérité ou non, ça fait partie de ce phénomène devant nous. La recommandation dont je parle, qui vient de plusieurs groupes, c'est d'instaurer un programme obligatoire, au sein des commissions scolaires, de formation, ce qui risquerait peut-être d'augmenter la crédibilité des élus sur la législation en éducation, sur la gouvernance, sur les finances, et tout ça. Comment vous réagissez à cette proposition-là?

Mme Martin-Laforge (Sylvia) : I'll take that question, Mr. Birnbaum. I think, we all think that would be important. I think Quebeckers, whether Francophones or Anglophones, want to see their elected officials fully aware of the work that has to be done. And, in an English community, the commissioners haven't added responsibility around community-building. And so, while many of them have great interest in, you know, curriculum in school achievement, and busing, and all of the administrative issues, I think we, at the Québec Community Groups Network, would like to see them more involved in the promotion of the community and that type of work.

And so, linking school achievement... and I was very interested a couple of times, today and other days, when I have been watching the presentations. It has often been asked to the English-speaking community : To what do you attribute the fact that the kids are doing so well? What do you attribute that fact to? And I think you have had the answers, that it's because of community involvement, not just the parents, but the community. And continued training, within our school board systems for school board commissioners, would be excellent. Making for the English-speaking community the links between, you know, administrative... You don't look at the closing of a school in the same way when you look at it from the linguistic minority lens. You can't look at any administrative work that you do in a school or school board when you are in a minority situation with the same lens. You look at it as part of a bigger activity, of a bigger «projet», un projet de société pour la communauté d'expression anglaise. So, training is important on administrative issues, of course, but linking with everything else, that's important with this.

Le projet de société qu'on vous propose, nous, c'est des jeunes Québécois et Québécoises de langue anglaise qui ont un attachement au Québec, qui réussissent à l'école et qui réussissent au Québec, qui veulent rester au Québec, qui réussissent au Québec. Et puis c'est les professeurs qui donnent ça, c'est les conseillers scolaires qui aident à ça, alors c'est l'ensemble. So, training, for sure, around all of that...

La Présidente (Mme Rotiroti) : Il vous reste trois minutes, M. le député.

M. Birnbaum : Merci. Merci, Mme la Présidente. Vous avez...

M. Chambers (Geoffrey) : Juste... Je peux juste ajouter un tout petit peu?

La Présidente (Mme Rotiroti) : Oui.

M. Chambers (Geoffrey) : Training, obviously, would be very useful, but prescriptive requirements in regard to candidature... I mean, these are publicly elected positions, and I think we have to trust the public to vote for people they want. Just as we wouldn't want to see minimal conditions for candidature to members from the National Assembly, we wouldn't want to narrow the pool of talent by having narrow constituencies.

M. Birnbaum : ...do we know that. Nor would I suggest such a thing.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Il vous reste deux minutes, M. le député.

M. Birnbaum : Merci, Mme la Présidente. Le QCGN a participé dans la confection du rapport Jennings, et c'est en annexe à votre document. Le rapport propose des améliorations tout en défendant le système, en quelque part, actuel. Elle ne se prononce pas plus que ça sur l'idée de jumeler les élections avec les élections municipales. Comment vous réagirez à cette possibilité?

M. Duszara (Walter) : D'après ce que nous avons entendu de d'autres endroits, ça semble être une bonne idée. Par rapport à nos besoins, notre préoccupation, c'est d'assurer que nous avons des institutions qui sont en santé, qui contribuent d'une façon importante à la vitalité de notre communauté. Donc, s'il y a une action, un geste qu'on peut faire pour améliorer la démarche, pour améliorer la participation, tant mieux, mais l'important, c'est l'existence de ces institutions qui sont, pour nous, fort importantes, essentielles pour notre communauté.

M. Birnbaum : Merci.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Il vous reste une minute encore, M. le député. Oui.

M. Birnbaum : Bon, une minute? Merci, Mme la Présidente. Nous avons une responsabilité collective, admettons-le, de bonifier l'exercice démocratique. Je suis très conscient du fait que le taux de participation lors des rendez-vous avec la communauté d'expression anglaise était plus propice que chez nos voisins francophones, mais assez modeste quand même. Qu'est-ce que vous avez à proposer pour bonifier l'exercice démocratique et pour inciter une plus grande participation de la communauté?

• (16 h 10) •

M. Duszara (Walter) : Pour bonifier l'exercice démocratique? Bon, on peut identifier d'une façon honnête et claire les obstacles qui existent actuellement. On peut se donner comme tâche d'enlever ces obstacles. On peut aussi assurer que la population est consciente et bien informée de toutes les démarches nécessaires et des contraintes qui existent pour qu'elle puisse participer. On peut aussi prendre une vision un peu plus large pour assurer que les enfants qui sont dans les écoles aient l'occasion d'apprendre l'importance de leurs implications dans l'avenir dans une démarche démocratique.

Civil history, civil society. Civics is not terribly present in the education system that we have. It can be improved. If we set aside the notion of a citizen's participation in a democracy and leave that to a chapter or a paragraph in a history book at some point, and that's the only time a child is exposed to that idea, we're not doing ourselves, as a society, a service.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Thank you very much, Mr. Duszara.

M. Duszara (Walter) : We have work to do from the beginning through the process and through the mechanics of process of election.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci beaucoup. Alors, on va passer du côté de l'opposition officielle. Mme la députée de Pointe-aux-Trembles, vous avez 10 minutes.

Mme Léger : Merci, merci. Bonjour, madame, bonjour, messieurs. Bienvenue au parlement, votre parlement.

Vous trouvez que le projet de loi n° 86 est... vous dites qu'il est déplorable, vous dites qu'il est indéfendable, vous le soutenez avec des arguments, dont quatre principales observations qui sont celles des droits démocratiques, les droits de la minorité. Le gouvernement n'entend pas la voix des Québécois d'expression anglaise et Un partenaire, non pas un adversaire, qui sont votre... la base.

Vous dites à la fin, en conclusion : «[Vous êtes] ici aujourd'hui pour exprimer notre consternation à l'égard du projet de loi n° 86 et aux réformes qui l'accompagnent en ce qui a trait au système d'éducation. Si la loi est adoptée, il est fort possible qu'elle fasse l'objet d'une contestation judiciaire susceptible de se retrouver devant la Cour suprême du Canada. Nous étions ici l'an dernier pour examiner les effets monstrueux que le projet de loi n° 10 aurait pu avoir sur nos établissements de santé et de services sociaux. Nous ne voulons pas être les adversaires de notre gouvernement; nous souhaitons plutôt que notre relation soit fondée sur un partenariat constructif.»

Particulièrement dans la partie que vous dites «le gouvernement n'entend pas la voix des Québécois d'expression anglaise», vous dites que «l'opinion publique et la manière dont sont élaborées les politiques reflètent un écart important entre les mythes répandus entourant les Québécois d'expression anglaise et la réalité de cette minorité». Voulez-vous m'en parler davantage?

M. Duszara (Walter) : Nous avons combien de temps, madame?

La Présidente (Mme Rotiroti) : Vous avez huit minutes, monsieur, mais je ne pense pas que la députée va...

Mme Léger : J'ai deux, trois autres questions, quand même.

La Présidente (Mme Rotiroti) : C'est ça.

Mme Léger : Mais parce que ça semble de base, c'est ce qu'on voit dans l'ensemble de votre mémoire, là, le fait de n'être pas écoutés. Même, vous parlez du gouvernement... particulièrement, je pense, du gouvernement... que vous n'avez pas une place. Bon, vous exprimez ça beaucoup dans votre mémoire.

M. Duszara (Walter) : Yes. Si vous me permettez, ça sera plus facile pour moi et plus vite d'exprimer nos idées et nos réflexions. Premièrement, we believe that the Government of Québec has to recognize that it has an official linguistic minority and that it has certain duties and responsibilities towards its linguistic minority. To date, we do not feel that that response is a response as open and genuine as it could be. There is work to be done on that score.

Secondly, it is no secret that the participation of people from our community in government services is minuscule. If I'm not mistaken, I don't think we've ever broken 2% of the public service in terms of English-speaking... either employees, managers, professionals, whatever the category, notwithstanding the fact that there's always been a target within the public service, the public sector, to hire more people.

We believe as well that there is perhaps a misunderstanding and a reticence to get to know the reality of English-speaking Québec in 2016 and, sometimes, a nostalgia that brings us back to 1960, or 1950, or 1930. We have moved forward. Our society has evolved, all of our entire society has evolved. And we'd like to make sure that we participate and our children participate in a society that has evolved.

With regards... the importance of participating in policy development, we don't have a mechanism for that. That's why we ask for some sort of a structure, within the Government of Québec, that dedicates its energy and resources to getting to know the English-speaking community better and to giving us the support that we need to be able to communicate our reality to our fellow citizens.

There is also the other aspect of our participation. This law is an example of an absence of engagement of our community in the crafting of the legislation, a total absence. And as a result, the concern that we have is: If you'll go forward with this legislation, and we know that this absence exist, if we risk having to engage in ongoing debate and ongoing argument to pull back something that we can keep here, stop here, and not move forward so that we can really engage in an understanding of what our community's educational needs are, not simply the education provided through the structures of the school board per se, at school board as they exist for now per se, but the educational needs of our community form childhood to adulthood to the golden ages, if you like, or the golden age, the senior years... How do we take care of the needs, in a modern technologically advanced society, of our population that speaks English, that lives in Québec, and loves living in Québec, and wants to live in Québec? How do we deal with their educational needs in the future?

For that reason, we recommend that the Government of Québec provides the resources, provides a mechanism «à la états généraux, par exemple», that will allow us to take the time, to study, analyze, research and put forward evidence based, very, very concrete recommendations to be able to move forward and establish an educational system for the English-speaking minority of this province that will be durable, that will be contributing in a vital fashion and a profound fashion to its development within our Québec society as Quebeckers who are English-speaking.

Mme Léger : Merci. C'est tout un cri du coeur! Vous savez, ces deux dernières années, ce n'est pas la première fois que je le dis puis qu'on le dit que, notre formation politique, on aurait aimé avoir des... depuis un moment, dans le fond, soit un livre blanc ou qu'on ait le temps de parler de l'éducation. Et ce que le gouvernement nous présente depuis deux ans, c'est au pouvoir actuellement, c'est ce projet de loi n° 86 et c'est sur la gouvernance. Alors, on comprend que l'éducation mérite davantage que juste un projet de loi n° 86. Alors, je pense qu'on le partage, d'avoir un moment de plus grande consultation, là, vous parlez d'états généraux, peu importe, mais qu'on ait le temps de parler éducation puis qu'on ait le goût de réinvestir en éducation.

Vous parliez, à un moment donné à la page 5 particulièrement, que... la faible participation aux élections des commissions scolaires : «...pourquoi demeure-t-il sourd — le gouvernement — aux recommandations solides et factuelles concernant la manière d'encourager la participation électorale? De quel droit le gouvernement du Québec menace-t-il et réprimande-t-il les électeurs des commissions scolaires pour avoir exercé ou non leur droit de se présenter et de voter à une élection?»

Vous en parlez aussi, le fait que tout individu peut se présenter. Vous encouragez ça et vous nous le redites aujourd'hui. Est-ce que vous voulez en parler davantage?

M. Duszara (Walter) : On peut répéter les recommandations du rapport Jennings. Ça fait référence à des obstacles que les gens vivent dans la vie actuelle, puis il y a des recommandations qui sont déjà précisées dans ce document-là. Mais, comme j'ai dit tantôt, we know that there are structural obstacles to the participation of English-speaking Quebeckers in an election process. We know as well that there are geographic obstacles to the participation of Quebeckers in an election process. The territories of our school boards are enormous. The Gaspé, the Eastern Shores School Board, I think, cover the same territories than the entire country of Belgium. There are real challenges.

You would not, as a person living in Montréal, want to drive to Sherbrooke to cast a vote in your English school boards election system, but that's the reality for many people in the regions. The reality of driving an hour, two hours to a polling station to be able to do something, that's an obstacle. When you look at the results not withstanding the obstacles, the results are not meaningless. We still have 15%, sometimes 20% of the population voting in the elections. This is not a meaningless gesture. We cannot make that gesture meaningless by saying: Let's eliminate elections because the rate of participation, in someone's opinion, is too low. This is the kind of thing we are talking about. There are ways and means that are available to us, that we can improve : the rate of participation, we can improve the kind of information that goes out, we can stop stacking the deck against English-speaking people by putting them onto French school board list by default and then having them make the gesture that they need to be able to be removed from that list and do that over and over again. That is not achieving the goal that, I think, we share, you as parliamentary and then us as citizens, in making our democracy transparent and responsive to the needs of its population.

• (16 h 20) •

La Présidente (Mme Rotiroti) : Thank you. Merci beaucoup. Il ne reste plus de temps, Mme la députée. Désolée. On va passer au deuxième groupe de l'opposition. Je cède la parole à Mme la députée d'Iberville pour six minutes.

Mme Samson : Merci, Mme la Présidente. Good afternoon and welcome. I will continue in English, Mme President.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Sure, go ahead.

Mme Samson : Unfortunately for you, it usually takes my brains about 1 h 30 min to set in gear, and we only have a few minutes, but I will do my best.

Une voix : ...

Mme Samson : Thank you. My first question is this one: What is the most important threat in Bill 86 to your school boards as they are not going to be abolished, but what is the main threat?

M. Duszara (Walter) : Bill 86 in an unnecessary piece of legislation. The kind of improvements that are being described in the conversation are improvements that can be done within the actual existing legislation. So, for us, the problem with Bill 86 is Bill 86. Remove it.

M. Chambers (Geoffrey) : Just to second that, it's the direction in which the reform is going. We believe that, notwithstanding the description of the law as being «décentralisateur», it really, in fact, is not. And, consequently, activities, and power, and energy that currently exist at community level will be drawn away. We believe that the process, should there be a reform, and it requires a great deal of studying in order to come up with the details, should be pushing those activities closer down towards our communities and the schools. We don't believe the mechanics of Bill 86 do that, we believe a reform that is going to really improve our schools should do that.

Mme Samson : So, you would qualify Bill 86 as being more cosmetic than...

M. Chambers (Geoffrey) : No. I believe that Bill 86 is extremely material. It's got structural consequences which would have the effect of making school boards less capable of making decisions for their schools, less capable of making decisions for their regions, for their communities and having more decisions essentially located in the Ministry.

Mme Martin-Laforge (Sylvia) : I'm going to add one other thing, it is that Bill 86, once again, does not recognize the specificity of the English-speaking community. All the shenanigans about 15%, and this, and that, and the other... you know, it's for the whole of Quebeckers. It's not the recognition that the English-speaking community has different needs, a different place, space to make decisions that are needed in our English-speaking community. So, anytime you put one size fits all on the English-speaking community, it is... you know, one more... C'est un recul incroyable pour être vus encore une fois dans la majorité. On n'est pas la majorité. On contribue à la majorité, on aime la majorité, on parle la langue de la majorité, mais on a une façon différente de vouloir gérer nos écoles, nos institutions. Et puis cette loi fait abstraction complète...

Mme Samson : De votre spécificité.

Mme Martin-Laforge (Sylvia) : ...de notre spécificité.

Mme Samson : Très bien. Je vous remercie and I understand your arguments.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Il vous reste deux minutes, Mme la députée.

Mme Samson : Thank you, Mme President... Mme Chair. One question : You specify, in your recommendations, that the elections for school boards should be held by either online, mail or telephone. What do you think of the idea that was put forward that the school board election should run simultaneously with the city elections? Would that seem, for you, one way to go?

M. Duszara (Walter) : Based on the recommendations of the panel of the committee that was established... that committee recommended what you said, and it seems to be the position that the majority of interveners and witnesses of that committee seem to propose. So, if that's what the majority of our community says and it feels it would be useful, then we will support them.

Mme Samson : ...

M. Duszara (Walter) : Yes.

Mme Samson : Thank you very much. That will be all for me, madame...

La Présidente (Mme Rotiroti) : Very well. Thank you. Alors, merci beaucoup au Québec Community Groups Network. M. Duszara, Mr. Chambers et Mme Martin-Laforge. Je suspends quelques minutes afin de permettre au prochain groupe de prendre place. Alors, merci.

(Suspension de la séance à 16 h 26)

(Reprise à 16 h 32)

Le Président (M. Auger) : Nous reprenons nos travaux en souhaitant la bienvenue aux représentants du Regroupement des commissions scolaires de l'Estrie. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre présentation, et, par la suite, nous allons procéder à une période d'échange. Dans un premier temps, bien vouloir vous présenter. Par la suite, vous pourrez commencer votre allocution.

Regroupement des commissions scolaires de l'Estrie

M. Normand (Gilles) : Merci, M. le Président. Gilles Normand, président de la commission scolaire de la région de Sherbrooke et président de la table des présidents et directeurs généraux de l'Estrie. À ma gauche, vous avez M. Jean-Philippe Bachand, président de la commission scolaire des Sommets, à ma droite, Mme Patricia Sévigny, vice-présidente de la commission scolaire des Hauts-Cantons, et M. Mike Murray, président de la commission scolaire Eastern Townships. Et je vous souligne que la commission scolaire Eastern Townships fait partie de notre table des présidents et directeurs généraux depuis presque 10 ans en Estrie. Ça fait que c'est une collaboration de longue date. D'ailleurs, nous allons faire une présentation commune et nous allons répondre aussi de façon commune à vos questions lors de cette rencontre.

Les commissions scolaires de l'Estrie sont reconnues pour leur travail de concertation et de collaboration entre institutions et avec les acteurs du milieu que nous desservons. Les fruits de cette concertation sont tangibles, et, pour la première fois, nous avons abaissé le taux de décrochage sous la barre des 20 % en Estrie. Et le taux de diplomation se situe maintenant autour de 73,5 % et il est en hausse constante. Dans ce contexte, nous nous sentons interpellés par le projet de loi n° 86, qui propose de changer considérablement les règles du jeu.

Mme Sévigny (Patricia) : D'entrée de jeu, nous tenons à mentionner que certains éléments du projet de loi n° 86 nous apparaissent des améliorations porteuses, dont les suivantes.

D'abord, la simplification de la structure de suivi des plans d'engagement vers la réussite et la diminution de la reddition de comptes qui y est associée. Les efforts des commissions scolaires doivent être, selon nous, concentrés sur la réussite des élèves et non sur les opérations administratives. Ensuite, nous sommes en accord avec l'idée d'un comité de répartition des ressources. Par contre, puisque nous avons déjà, en fait, un processus rigoureux et large de consultation qui nous permet une répartition équitable et qui respecte la réalité des besoins et particularités de nos milieux... Finalement, nous sommes aussi d'avis que le ministère de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur doit avoir un rôle de soutien et d'accompagnement pour la mise en place des meilleures pratiques de gestion plutôt que de s'en tenir à une approche de contrôle.

La grande région de l'Estrie se démarque par son dynamisme et sa capacité d'offrir à sa population l'enseignement dans les deux langues officielles du préscolaire à l'université. Ces caractéristiques démographiques lui ont permis de composer avec des réalités fort différentes, présentes dans des milieux urbains autant que dans des milieux ruraux. C'est pourquoi les organisations du territoire, appuyées par une structure d'élus représentatifs, ont pu faire les arbitrages nécessaires au développement de chacune des communautés.

La répartition équitable des ressources sur tout le territoire en soutien à la réussite de tous ses élèves est au coeur du fonctionnement de chacune de nos organisations. C'est pourquoi les commissions scolaires de l'Estrie s'expliquent mal en quoi le remplacement d'élus au suffrage universel améliorerait la réponse aux besoins des élèves et favoriserait leur réussite. Les élus sont les représentants légitimes de toute la population. Ils vivent dans la communauté, sont à l'écoute et portent les préoccupations de leurs concitoyens. À cet égard, plusieurs exemples de réalisations se trouvent dans notre mémoire.

On questionne également ce qui nous semble être une entorse sérieuse au principe même de la démocratie en abolissant le statut de commissaire élu par la population tout en continuant de prélever une taxe scolaire. Le fait de taxer une population ne devrait-il pas s'accompagner du choix par celle-ci de ses propres représentants?

Les commissions scolaires de l'Estrie ne se reconnaissent pas dans le projet annoncé pour différentes raisons, dont les suivantes. Elles ont déjà un processus de répartition des ressources qui répond adéquatement aux besoins des différents milieux en favorisant une large consultation et l'atteinte du consensus. Cela permet aux petits milieux de faire une gestion adaptée à leurs besoins en plus d'assurer la même qualité, très élevée, des services à tous les élèves. Elles estiment que les élus scolaires, par leur connaissance fine de leurs milieux respectifs, doivent demeurer afin d'assurer que tous les élèves de tous les milieux aient accès à la même qualité de services. Enfin, elles aspirent, les commissions scolaires de l'Estrie, à ce qu'on reconnaisse l'importance du travail de proximité des élus des milieux ruraux pour la conclusion de partenariats nécessaires à la réponse de tous nos élèves.

M. Bachand (Jean-Philippe) : Chers collègues de la démocratie, bonjour. Le projet de loi n° 86 propose un changement de gouvernance des commissions scolaires et des élus. Il faut se rappeler que ce projet de loi tire son origine du faible taux de participation aux dernières élections scolaires. En faisant quelques recherches sur les taux de participation aux élections municipales des dernières années, on peut constater que le nombre d'élus par acclamation y est encore plus important. Pourtant, on ne parle pas d'abolir ces structures.

Le réel problème en est un de participation, et c'est à ça que le projet de loi devrait s'attaquer. À cet égard, des chercheurs de renommée, comme Fullan et Hattie, M. Julien Prud'homme et M. Égide Royer, que vous avez connu ici, sont catégoriques : les débats de structure n'aident en rien à la réussite des élèves et sont même nuisibles. Alors, pourquoi certains enjeux de nature politique nous poussent-ils parfois à nier l'évidence?

Les élus scolaires, qui comptent 51 % de femmes, sont des représentants visibles de la commission scolaire dans leur milieu. Pour y vivre, ils connaissent la réalité vécue par les élèves et sont donc en mesure de porter leurs préoccupations, à leur population, à l'instance décisionnelle de la commission scolaire dont ils sont partie prenante. Bien que présente partout, cette réalité est particulièrement importante en milieu rural, marquant ainsi l'importance de l'école du village comme vecteur de développement pour une petite communauté. Ils sont d'ailleurs les seuls élus dont la mission première est l'éducation.

Un des grands penseurs de notre système d'éducation, que vous avez reçu, M. Paul Gérin-Lajoie, disait ceci en 2013 : «L'élu scolaire joue un rôle politique aussi fondamental que l'élu municipal, provincial et fédéral. La seule différence entre eux est leur champ d'intervention.» Si le problème en est un de participation, des solutions existent. Les commissions scolaires de l'Estrie proposent d'établir les élections scolaires en même temps que les élections municipales et de changer la date des élections pour le premier dimanche d'octobre afin de rejoindre le plus d'électeurs possible.

Le projet de loi n° 86 souhaite une plus grande participation des parents aux instances du conseil scolaire. D'abord, il aurait fallu regarder de plus près la composition des actuels conseils des commissaires, car, chez nous, la majorité sont aussi des parents. De plus, les commissions scolaires de l'Estrie recommandent d'accorder le droit de vote aux commissaires parents afin qu'ils soient impliqués et engagés dans leurs décisions mais aussi de leur permettre de maintenir leur implication aux conseils d'établissement desquels ils sont issus. Finalement, si on veut améliorer leur participation, qu'on leur donne le droit de vote, nul besoin de revoir toute la structure. D'ailleurs, des conseillers nommés par les assemblées générales, où la participation est très souvent plus faible qu'à l'élection générale, n'amélioreraient pas la représentativité, tout comme l'a mentionné le DGE lors de son passage cette semaine.

Nous croyons donc que la structure actuelle, avec bonification, devrait répondre davantage en ce qui concerne la représentativité et l'efficacité, et je crois personnellement, sincèrement, qu'à la fin de mon mandat comme président de commission scolaire j'aurai fait une différence et non de l'indifférence.

• (16 h 40) •

M. Murray (Michael) : Le projet de loi n° 86 propose la décentralisation des pouvoirs vers l'école. Il ne tient malheureusement pas compte des effets néfastes et négatifs sur les milieux ruraux avec de très petites écoles, ceci nécessitant plutôt un arbitrage dans la répartition des ressources humaines, pédagogiques et de soutien qui va bien au-delà de la répartition au prorata du nombre d'élèves. Ils doivent tenir compte des besoins particuliers de chaque milieu. La structure actuelle permet une gestion isométrique qui donne à chaque école les services éducatifs et de soutien à l'apprentissage dont les élèves ont besoin dans une perspective d'égalité des chances.

Au-delà des paramètres de financement, cette gestion centralisée à la commission scolaire permet de répondre plus équitablement aux besoins des élèves de tous les établissements.

Paradoxically, the draft law 86, that promises to offer greater autonomy to the establishment, actually increases the powers of the Ministry. He can impose on the new school councils the orientations and objectives to reach and even the means to achieve them. We are forced to ask whether the Minister has any confidence in the structure being proposed. A striking example of approach to be avoided in the future is the latest reinvestment in Education, providing resources to improve student success that takes no account, whatsoever, of the differences in regions or the highly varied native students.

Nous convenons que les mesures sont basées sur les données de la recherche, mais elles ne tiennent aucunement compte de la vie de nos professionnels sur le terrain quant à l'intensité, la forme ou les caractéristiques du milieu. On y précise qui, le quoi, le comment, la fréquence. Est-ce la nouvelle façon de rapprocher la décision à l'école?

Nous croyons que les commissions scolaires ont besoin de leur autonomie afin de bien répondre aux besoins de leurs élèves et de leurs milieux. Leur gestion de proximité répond adéquatement à l'ensemble de ces besoins.

M. Normand (Gilles) : Les parents occupent une place déterminante dans la réussite des enfants, et nous souscrivons tout à fait à l'objectif de leur faire plus de place. Il est à noter qu'aux dernières élections il y avait plus de commissaires-parents qui prenaient place autour de la table du conseil, et nous sommes prêts à leur donner leur droit de vote et leur permettre aussi leur implication aux conseils d'établissement d'où ils proviennent.

Alors, nous concluons cet exposé en regard du projet de loi n° 86 en disant que les CS de l'Estrie estiment que la structure actuelle des commissions scolaires répond bien aux besoins de la population que nous desservons et nous faisons une répartition équitable des ressources selon nos réalités, même si elles sont fort différentes. Et la présence d'élus scolaires assure à tous les élèves l'accès à la même qualité des services sur l'ensemble de nos territoires.

Nous sommes d'avis que le gouvernement devrait faire la promotion de la démocratie, quelle qu'elle soit, et de faire en sorte de soutenir la stabilité de nos organisations en ces années fort difficiles que nous venons de vivre, et ce, dans l'intérêt de tous les élèves. Il serait beaucoup plus utile présentement de tenir des états généraux afin de créer une politique nationale sur la persévérance et la réussite de tous les élèves. Merci.

Le Président (M. Auger) : Merci beaucoup pour votre présentation. Avant de commencer la période d'échanges, j'aimerais souhaiter la bienvenue au député de Saint-François, qui semble être très intéressé par votre présentation. Donc, M. le ministre, vous avez 15 minutes à votre disposition.

M. Proulx : Merci beaucoup, M. le Président. Merci de votre présence, messieurs et madame, aujourd'hui. Merci de nous faire part, hein, de votre expérience et de vos préoccupations et également de nous indiquer les éléments qui, pour vous, sont des éléments qui sont porteurs dans le projet de loi.

Vous dites, dans votre mémoire, que les changements proposés pourraient se faire sans modifier les structures. Vous faites référence au comité de répartition des ressources, vous dites : Nous, on a déjà un comité semblable à celui-là. Il n'y en a pas partout, des comités comme celui-là. Je comprends... puis vous me répondrez par la suite si vous êtes ou non sur un modèle plus décentralisé que d'autres, mais ça me donne l'impression que vous avez effectivement un modèle plus décentralisé que d'autres.

Comment faire, sans une législation, pour s'assurer d'impliquer tout le monde dans toutes les commissions scolaires, de faire ce que vous dites faire bien, c'est-à-dire être capables de consulter, de faire affaire avec les gens dans l'équipe-école, de répartir à un autre niveau que seulement au conseil des commissaires les ressources en équité notamment, comme vous le spécifiez? Comment faire pour s'assurer que, si le modèle que vous avez... Vous dites : C'est un bon modèle, et les autres devraient le faire. Comment on peut s'assurer de cela sans faire une législation qui va établir des éléments comme celui-là, comme votre modèle, si c'est le cas, pour l'ensemble du Québec?

Le Président (M. Auger) : M. Murray.

M. Murray (Michael) : Si vous me permettrez...

M. Proulx : Allez-y.

M. Murray (Michael) : ...la problématique me semble d'éviter d'imposer des réglementations ou des législations qui vont de mur à mur parce que chaque région, et, dans chaque région, chaque commission scolaire, a des particularités et des façons de faire qui répondent aux besoins de leurs localités.

Alors, un échange de ce qu'on appelle en anglais des «best practices», ce que nous essayons de faire dans la pédagogie, serait de mise aussi pour les pratiques d'administration. Il me semble ne pas avoir un mécanisme nulle part, dans le ministère de l'Éducation, d'encourager de tels échanges de «best practices».

M. Proulx : Vous dites : Il faut donner plus de... je vais dire d'autonomie ou de flexibilité, là, aux commissions scolaires. D'autres sont venus ici dire : Il faut donner plus d'autonomie aux écoles. Alors, vous comprenez, là, juste là, on ne dit pas la même affaire. En tout cas, assis ici, on n'entend pas la même chose. Je ne juge pas aujourd'hui ce qui est le mieux, j'écoute, nous écoutons. Mais vous ne dites pas la même chose, vous et certains groupes.

Alors, dans ce contexte-là, dites-moi comment le modèle que vous pratiquez actuellement, celui qui est le vôtre, favorise plus la réussite que le modèle proposé, ça en est un dans le projet de loi, ou que d'autres sont venus nous proposer, disant qu'il faut rapprocher les pouvoirs de l'école où il faut donner de la place à l'équipe-école pour réaliser des progrès plus importants dans la réussite scolaire.

M. Normand (Gilles) : Au départ, si on se permet de donner plus d'autonomie aux commissions scolaires, ça nous permet de libérer des argents et des moyens pour que les écoles puissent agir aussi plus simplement et plus précisément sur la réussite des jeunes. Pour nous, l'importance de la commission scolaire est de garder le mandat, l'orientation. C'est le gardien, dans le fond, de l'orientation, de la réussite. On ne peut pas laisser aller les écoles dans le sens qu'elles veulent aller parce que l'importance de la réussite, c'est de donner une orientation. D'ailleurs, c'est M. Michael Fullan qui en a parlé en Ontario : l'importance de garder l'orientation, garder les processus pour être capable d'amener toutes les organisations à réfléchir. On peut laisser des moyens, quand on a des libertés financières, une certaine autonomie, pour permettre aux écoles de faire les choix mais dans les orientations qui ont été données à toute l'organisation. Pour nous, ça, c'est important, c'est fondamental.

On veut que les écoles travaillent avec nous et on travaille avec les écoles pour amener le plus de jeunes à réussir. Il ne faut pas que ça prenne tous bords tous côtés, peu importe la direction. Il faut vraiment qu'il y ait une orientation de donnée, comme le gouvernement doit nous donner des orientations de cibles et nous donner plus de liberté pour pouvoir agir facilement avec nos organisations. On connaît nos milieux, on connaît nos réalités et on adapte nos actions en fonction de ça.

M. Proulx : Vous avez dit dans votre réponse : On ne peut pas laisser les écoles aller. Qu'est-ce que vous faites ou qu'est-ce... À la limite, j'ai l'impression que vous dites : Il faut prendre des précautions pour ne pas qu'ils fassent des choses qu'il ne faudrait pas qu'ils fassent. Je ne suis pas capable de donner d'exemple, donc je le prends dans le sens le plus général. Êtes-vous capable de donner un exemple de ce que vous ne voudriez pas qu'il arrive dans une école pour... qui, à leur sens, serait une façon de favoriser la réussite scolaire mais, de votre point de vue, n'en est pas?

• (16 h 50) •

Mme Sévigny (Patricia) : En fait, si je peux répondre partiellement, parce que c'est une question large, le projet de loi n° 86 propose une décentralisation des pouvoirs vers l'école, mais, en ruralité, l'école, c'est parfois des écoles de 30 élèves, c'est des fois des cohortes de finissants de cinq élèves. Nous, on en vit dans la MRC du Granit, la MRC du Haut-Saint-François. Vous connaissez le territoire de la commission scolaire des Hauts-Cantons. Donc, dans les petits milieux, il y a des petites écoles, et, nécessairement, ça prend un arbitrage mitoyen pour faire en sorte qu'effectivement les ressources soient réparties non seulement de façon équitable, mais en fonction des besoins des milieux.

Et donc dans le rôle double, dans le double rôle du commissaire scolaire, il y a aussi ce rôle-là d'agent de liaison. Oui, nous sommes — moi, j'ai la chance d'être commissaire depuis huit ans — administrateurs d'un côté, mais, de l'autre, nous sommes aussi des agents de liaison avec nos milieux. Donc, on va à la fois avec nos conseils d'établissement sur le terrain... on fait des représentations pour être les yeux, les oreilles. On remonte les préoccupations à nos conseils et, inversement, on peut, dans ce rôle-là, venir répondre de nos décisions.

Donc, lorsqu'on parle de répartition équitable des ressources, c'est aussi d'être à même de bien les expliquer. Dernièrement, il y a eu effectivement des nouvelles injections de sommes qui sont descendues directement dans les écoles. On pense qu'il faut avoir une répartition au-delà du prorata, surtout en milieu rural.

M. Normand (Gilles) : Est-ce que ça vous précise un peu plus...

M. Proulx : Oui, oui, non, mais... puis, écoutez... et je n'ai pas de problème avec ça, pas du tout. Il faut répondre comme vous le sentez, là. Vous dites... je prends l'école, je vais appeler ça l'école rurale. Nous, notre travail, c'est de poser des questions pour être capables de voir quelles sont les conséquences ou l'impact de ce qui peut se retrouver dans la législation. Vous dites : Le transfert direct d'enveloppe vers l'école — je paraphrase un peu votre mémoire — ça complexifie la répartition équitable des ressources. Mais, je prends un exemple, décentraliser une enveloppe pour un projet particulier vers une école n'est pas là une occasion de maintenir localement un projet très local adapté à une école qui a ses particularités, peut-être moins d'élèves, peut-être pas beaucoup d'élèves sur plusieurs niveaux, peut-être quelques enseignants plutôt que le nombre qu'on retrouve ailleurs?

J'essaie juste de voir comment... parce que, quand vous dites : La commission scolaire a un rôle d'arbitrage, je comprends quand vous l'expliquez en matière de ressources. Puis là vous dites : Bien, nous, on doit maintenir des effectifs, les immobilisations. Mais là, par rapport à la réussite, par rapport à l'équipe-école, donc ce qui se trouve autour de l'élève et de la classe, j'essaie de voir comment une structure moins décentralisée que ce qu'on propose favorise la réussite dans la classe.

M. Murray (Michael) : Il est en partie le fait encore des petites écoles, qui fait que, lorsqu'on attribue un certain prorata par élève, par tête d'élève, d'une somme d'argent pour un projet, on va prendre l'aide aux devoirs, par exemple, c'est fait pour toutes les fins pratiques de saupoudrage. Il y a un peu d'argent dans chacune de plusieurs écoles, tandis qu'en centralisant ces budgets on est capables de diriger les ressources là où le besoin est le plus aigu et, entre-temps, développer d'autres programmes pour d'autres écoles comme contrepartie.

Alors, l'importance, c'est d'être souple et d'être sur place, tandis que le ministère, tout bonnement donnant cet argent, est loin du terrain et ne peut pas réagir... la même souplesse que la commission scolaire.

M. Bachand (Jean-Philippe) : ...

M. Proulx : Allez-y. Allez-y, bien sûr. On est là pour échanger. Allez-y.

M. Bachand (Jean-Philippe) : ...M. le ministre, très, très rapidement. Présentement, en tout cas, dans les commissions scolaires de l'Estrie, on pourrait dire que nous avons d'excellentes commissions scolaires. C'est très décentralisé par rapport au modèle du projet de loi n° 86 parce qu'on le fait déjà. Évidemment, l'important, c'est d'avoir une direction puis aussi une information qui se fait transversale. Il y a l'équipe-école, il y a le conseil de gestion des directeurs, donc tout le monde se parle. Mais, moi, pour qu'une enveloppe soit directement envoyée à l'école, c'est une chose, mais, même si elle passe par la commission scolaire, je ne pense pas que ce soit pénalisant pour l'école. Ça fait que, s'il y a un bon projet et si on peut donner une plus-value à l'intérieur du territoire d'une commission scolaire, bien, pourquoi pas? Donc, je ne pense pas que ça...

Vous savez, il y en a qui ont des problèmes, j'ai écouté une couple d'auditions, au niveau de la décentraliser, mais moi, je veux dire, c'est-u une majorité? Est-ce que c'est des organisations qui en parlent au nom de tous les membres? Mais, en tout cas, dans nos organisations, ce n'est pas le cas parce qu'on travaille très efficacement, entre autres, pour la réussite scolaire, mais, s'il y a des projets intéressants, on va de l'avant.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Deux minutes, monsieur...

M. Proulx : Pardon?

La Présidente (Mme Rotiroti) : Deux minutes.

M. Proulx : Deux minutes, oui. En tout cas, il y a clairement des groupes qui l'expriment, mais j'entends aussi des groupes qui disent ce que vous avez dit. Là-dessus, on a entendu les deux points de vue.

Je veux vous entendre quelques instants sur l'implication de la communauté. Le conseil scolaire proposé n'est pas celui du conseil des commissaires que vous connaissez, dans lequel vous oeuvrez. Est-ce que, pour vous, c'est possible de penser qu'il pourrait y avoir un nouveau conseil scolaire dans lequel il y a effectivement des gens élus, mais il y a aussi des gens qui viennent de la communauté pour... je vais dire bonifier ou pour apporter quelque chose de différent dans le conseil scolaire? C'est-à-dire, donc, changer, oui, la formule, mais avoir... on va dire une formule hybride, dans le sens conserver une démocratie mais avoir également des gens qui seront là, je veux dire, élus par des collèges électoraux, qui se retrouvent des représentants du milieu scolaire ou de la communauté. Est-ce qu'il y a chez vous une ouverture d'avoir des gens autour de la table qui ne sont pas des commissaires scolaires élus, tel que c'est le cas actuellement?

M. Normand (Gilles) : Bien, en premier, nous, nous venons ici parce qu'on croit à la démocratie, on croit aux élus, on croit à cette implication. D'ailleurs, aux dernières élections, les territoires électoraux ont changé sur l'ensemble des commissions scolaires, et il y a eu moins d'élus. Alors, on s'est repartagé ces territoires-là. Et notre mandat, à ce moment-là, il est vraiment de prendre contact avec la communauté puis aller chercher tous les besoins pour les ramener au conseil pour amener les décisions, les ramener dans le sens d'amener les meilleurs services possible à nos élèves. Il y a déjà la possibilité, c'est pour ça qu'on dit qu'il n'y a pas grand changement à faire au niveau de la loi, il y a déjà des cooptés potentiels, autour des tables de conseil, que l'on peut faire, que l'on peut choisir. Nous, on ne l'a pas fait au début. Vous comprendrez, j'avais, à la commission scolaire de la région de Sherbrooke, 75 % de nouveaux élus qui sont arrivés. Ça fait qu'on a commencé par former et bien faire comprendre aux gens quel était le fonctionnement d'une commission scolaire pour les mettre dans leur rôle, les faire participer à des comités qui, justement, s'occupent de bien répartir et de bien s'occuper des ressources de nos organisations.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci beaucoup.

M. Bachand (Jean-Philippe) : ...

La Présidente (Mme Rotiroti) : Ah! bien, allez-y, M. Bachand. Oui, en quelques secondes. Allez-y, oui.

M. Bachand (Jean-Philippe) : Rapidement, vous comprendrez, après l'élection de 2014, le lendemain des élections, on apprenait qu'il était pour y avoir des fusions de commissions scolaires. Donc, inviter davantage de monde autour de la table du conseil sachant très bien qu'on était sur un siège éjectable, c'est un peu délicat. Donc, on voulait travailler avec les gens qui ont été élus, dûment élus, représentés par la population. Comme j'aime dire, 5 % d'élus, c'est quand même mieux qu'une nomination. Donc, il y a eu un travail qui s'est fait, les gens ont mis leur photo sur des poteaux de téléphone. Vous le savez, hein, la majorité d'entre vous, moi aussi également, autant municipal que fédéral, on fait cet exercice-là.

Donc, il faut reconnaître la légitimité. Souvent, 5 %, 15 %, 20 % de pourcentage de vote, c'est un chiffre, ça, mais il faut reconnaître qu'on ne voulait pas mettre ça quand même en place, surtout qu'avec les dialogues qu'il y avait à l'époque... là, ça a échangé, ça évolue, là, ça change, mais on s'est dit : On va prendre un temps d'arrêt là-dessus.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci, M. Bachand.

M. Proulx : Merci de votre témoignage, merci.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci, M. le ministre. On va passer du côté de l'opposition officielle, et je cède la parole à Mme la députée de Pointe-aux-Trembles pour 10 minutes.

Mme Léger : Oui. Bonjour. Bonjour, madame, bonjour, messieurs. Bienvenue au parlement. Vous dites au début de votre mémoire : «Les commissions scolaires de l'Estrie ne se reconnaissent pas dans le projet annoncé pour [plusieurs] raisons...» Vous les élaborez. Entre autres, vous exprimez le désir de garder le suffrage universel, évidemment. Vous avez parlé d'un dimanche d'octobre, je pense, le premier dimanche d'octobre, l'élection simultanée avec le municipal. Il y en a même qui ont parlé d'un lundi, alors de mettre ça un lundi, pour une plus grande participation. Qu'est-ce que vous pouvez nous exprimer?

M. Bachand (Jean-Philippe) : Bien, au niveau municipal, vous avez toujours une histoire par rapport au premier dimanche de novembre. Pour avoir été moi-même maire et conseiller municipal, vous savez très bien qu'en novembre, premièrement, on reçoit beaucoup d'information à savoir que les snowbirds, ceux qui s'en vont vers la Floride, ne pourront pas voter parce que le vote par anticipation a lieu une semaine avant, et souvent, c'est le 30, 31 octobre. Donc, ils partent pour la Floride sans même avoir voté. Évidemment, l'activité de la chasse, beaucoup plus intense que l'activité de la pêche... donc, il y a beaucoup de chasseurs, surtout dans le coin de l'Estrie mais à la grandeur du Québec.

Donc, en mettant ça le premier dimanche d'octobre, on favoriserait possiblement davantage de gens à aller voter, et surtout les personnes âgées, qu'on sait très bien que, s'il ne fait pas beau, elles n'iront pas voter. Et, une petite parenthèse, vous savez très bien qu'en octobre il y a une fête qu'on appelle l'Halloween, et faire campagne électorale pendant l'Halloween, ce n'est pas nécessairement l'idéal. Donc, ça, ce n'est pas évident, je vais vous avouer.

Et toujours est-il qu'en faisant ça en octobre ça permet aux élus municipaux d'avoir un mois de plus pour la fameuse préparation du budget municipal parce que quand on rentre en novembre, le mois d'après, il faut adopter un budget. Donc, ça donne un mois davantage pour les élus municipaux et ça donne un mois davantage pour les élus scolaires de comprendre l'appareil scolaire. Et davantage, ça permet aussi de faire une plus belle campagne avec des jours plus ensoleillés que des tempêtes de vent, de grésil. En tout cas, vous le savez, on est au Québec, là, on est à Québec en plus. Donc, vous savez, la température est très changeante.

Donc, pour ces motifs-là, je crois sincèrement qu'il y aurait une réflexion à faire de devancer seulement d'un mois l'élection municipale, scolaire simultanée pour favoriser davantage de participation, entre autres, pour les gens qui vont dans le Sud, entre autres.

• (17 heures) •

Mme Léger : Sur un autre ordre d'idées, et le ministre l'a abordé tout à l'heure, mais je voudrais aller plus loin sur l'autonomie des commissions scolaires. Il se demandait : D'un côté, les écoles en veulent plus, les commissions scolaires aussi. Ça semblait paradoxal. On peut avoir les deux en même temps. On peut avoir plus de pouvoirs aux écoles et plus de pouvoirs aux commissions scolaires. Les deux ne sont pas nécessairement en contradiction. C'est faisable. Mais vous avez quand même dit, puis ça m'a accrochée un peu, vous avez dit... Vous dites que vous voulez travailler avec les écoles. Vous travaillez avec les écoles, puis ça, je pense que c'est le but de votre... les commissions scolaires. On le voit, vous avez énuméré quelques éléments qui sont intéressants, comme... si j'ai le temps, on va essayer de revenir. Mais les écoles, elles veulent plutôt que vous travailliez avec elles. Il y a une différence parce que, quand on entendait les écoles... les directions, d'ailleurs, d'école disent : On veut avoir plus de marge de manoeuvre. On voudrait que les décisions viennent plus de nous dans les écoles. Et tout à l'heure vous dites... oui, vous donniez la... Dans le fond, je pense que vous exprimez le désir de s'assurer d'un bien commun, d'une répartition des ressources. Il faut quelque part un palier qui fasse ça, puis c'est le vôtre, puis je pense qu'on en convient. Mais il y a quand même un appel des directions d'établissement parce que la plupart sont venues dire qu'on veut plus de marge de manoeuvre, on n'en a pas assez. Il y a des commissions scolaires qui nous écoutent bien, d'autres ne nous écoutent pas du tout. Comment vous voyez ce que je vous apporte là? Parce que vous me dites que ça... bien, en tout cas, ça semble être bien chez vous, mais vous me...

M. Normand (Gilles) : On parle d'un... bien, si on peut parler du modèle que l'on vit chez nous, un modèle qui est décentralisé, et je me rappelle d'avoir entendu justement dans les présentations des directions d'établissement qu'il y avait un modèle qui ressemblait beaucoup à ce qu'on vit chez nous, un modèle créé sur une zone de territoire d'une école secondaire avec les écoles primaires et la répartition des ressources. Ça fait qu'on donne les ressources à ce secteur-là, et ils se repartagent entre eux les ressources qu'ils ont besoin. Des fois, c'est des besoins plus ponctuels. Alors, c'est eux autres qui font cette gestion-là de ressources à l'intérieur de leur quartier, ce que nous, on appelle quartier, qui est en lien avec une école secondaire. Ça a été souligné ici quand les directions d'établissement sont passées.

Nous, on travaille avec les directions d'établissement puis on fonctionne beaucoup avec le CCG et avec le comité de régie pour avoir le pouls, pour avoir leur idée, pour être capables... Nous, au conseil des commissaires quand on a des décisions à prendre, les gens ont été consultés. C'est pour ça qu'on disait tantôt, quand on parlait de comité de ressources : C'est fait de façon très large déjà. Et ce comité des ressources là, s'il est en place, nous donne l'impression d'être plus à l'étroit, dans le fond, dans le sens d'être gérés par seulement un petit groupe de personnes, alors que, présentement, dans le fond, c'est une consultation en continu avec les gens des établissements, avec nos gestionnaires à la régie et toute notre organisation. Alors, nous, c'est un modèle que nous considérons qu'il fonctionne très bien.

Dans d'autres commissions scolaires, ça peut être un modèle qui est un peu différent de par le fait qu'il y a des plus petites écoles qui ne peuvent pas faire appliquer, peut-être, de cette même façon. C'est pour ça qu'on dit qu'on ne peut pas toujours appliquer de la même façon, à la grandeur du Québec, la même chose partout. Il y a des endroits qui sont plus axés vers ces choses-là puis il y a d'autres endroits qui sont plus axés vers d'autres choses, et c'est aussi efficace. Nous, dans le modèle que l'on a, qui est un modèle de collaboration et participation entre les CS d'abord et avec nos organisations, c'est un modèle que l'on considère qu'il fonctionne bien.

M. Murray (Michael) : Il y a une partie de ce phénomène, si vous me permettez, qu'il est très important de constater dès le début, et c'est qu'il n'y a jamais assez de ressources. Si on est dans une école, on a comme l'impression qu'en quelque part dans la commission scolaire il y a des ressources qui ne sont pas réparties, qui sont conservées, qui sont mises de côté, ou dirigées ailleurs, ou en quelque façon. Si seulement ils avaient plus de contrôle sur les ressources, qu'ils pourraient en avoir plus. Mais je vous assure, et on les assure régulièrement, on n'a pas de poche cachée en quelque part où on met les surplus qu'on ne les donne pas. Mais même phénomène lorsque vous recevez des commissions scolaires, et on vous crie qu'on manque de ressources. Et c'est la même chose dans la santé puis dans toutes les institutions publiques. Il y a toujours des besoins criants qui ne peuvent pas être comblés à cause de la limite réelle que la société doit imposer sur les ressources disponibles.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Deux minutes à Mme la députée.

Mme Léger : Ouf! Ça passe vite. Je voudrais quand même parler d'une spécificité que vous avez apportée, c'est celle de la proximité des élus en milieux ruraux, et même le titre : Si le grand perdant était l'élève en région? Je veux revenir sur les régions puis sur les milieux ruraux. Est-ce que vous retrouvez, dans le projet de loi n° 86, des éléments de réponse à cet aspect-là que vous avez?

Mme Sévigny (Patricia) : Bien, en milieu rural, effectivement, c'est des petits ensembles, c'est des petites communautés. J'ai des collègues, des amis qui habitent Sherbrooke, qui habitent des grandes villes et qui magasinent leurs écoles. En milieu rural, on ne magasine pas notre école. Alors, nous appartenons à un territoire, puis le territoire nous offre ses services via ses établissements.

Présentement, nous, la perte principale qu'on voit, c'est le fait que le milieu ne puisse plus ou moins avoir sa voix au sein de l'école. Je suis une parent de jeunes enfants, mais j'ai aussi commencé à être commissaire scolaire avant même d'être parent. Je souhaitais, comme membre de la communauté, voir à la bonne gestion d'un ensemble qui est beaucoup plus grand que soi. Donc, ce faisant, on pense qu'il y a une perte, entre autres, au niveau de la gouvernance si, effectivement, il y aurait moins de membres de la communauté dans ce petit ensemble où tout le monde se connaît, tout le monde se côtoie et où finalement il n'y a pas de magasinage. Alors, c'est l'un des éléments marquants qui nous a amenés effectivement, dans les considérations, à vous dire qu'on se retrouvait moins comme milieu rural.

Maintenant, longtemps au Québec, on a eu la chance d'avoir une politique nationale de la ruralité qui a été reconduite à trois reprises, dans laquelle il y avait un souhait évoqué, un projet de modulation de programmes. Nous, à la commission scolaire des Hauts-Cantons, qui est la MRC du Granit, du Haut-Saint-François et de Coaticook, on vit la modulation quotidiennement dans la gestion. Alors, on pense que ce n'est pas un voeu, on pense qu'on fait cette gestion-là équitable et non pas égalitaire parce que l'équité et l'égalité sont différentes. Ce qu'on souhaite, en fait, c'est en donner le plus possible à nos enfants, à notre relève. Alors, assurément que les milieux ruraux, dans la forme de répartition proposée, qui ne propose pas d'asymétrie ou d'arbitrage, on ne se reconnaît pas. Et, inversement, on ne se reconnaît pas non plus dans la perte de la représentation communautaire au sein de l'école.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci, Mme Sévigny. On va passer du côté du deuxième groupe de l'opposition, et je cède la parole à Mme la députée d'Iberville pour six minutes.

Mme Samson : Merci, Mme la Présidente. Bonjour, messieurs mesdames. Je sais, parce qu'on a eu l'opportunité de jaser dans le passé un peu, que vous avez une organisation qui diffère un peu, souvent, de d'autres regroupements ou de d'autres commissions scolaires. J'apprécie que vous soyez là aujourd'hui.

Vous avez parlé de l'importance que vous accordiez à la réussite scolaire. Ça, je pense que c'est très rafraîchissant. Vous avez parlé de répartition équitable des ressources, mais je ne dois pas comprendre, par répartition équitable des ressources, ressources adéquates nécessairement. Est-ce que je me trompe?

• (17 h 10) •

M. Normand (Gilles) : On peut parler aussi de ressources adéquates. Quand on parle justement de cette liberté d'action, de cette opportunité à avoir de l'autonomie, quand les écoles ont des besoins plus particuliers, quand on a cette autonomie-là en ressources, d'être capable de désigner, on a besoin d'un blitz, excusez l'expression, à donner pour aider des jeunes, mais ce comité-là que l'on met en place, de répartition, chez nous, au niveau secondaire, complète, dans le fond, là, cette répartition-là. C'est important.

Tantôt, ma collègue parlait des élus, justement, là, au niveau rural. L'importance de ça, c'est justement leur rôle d'amener aussi cette préoccupation-là au conseil parce que, dans le modèle qui est évoqué présentement, il n'y aura plus d'élu, possiblement plus d'élus. Alors, qui va être capable de souligner l'importance, le besoin d'une école en besoins particuliers pour un service de garde dans une petite école — parce que j'en ai aussi, même, sur mon territoire, des petites écoles — qui est mieux placé d'amener au centre de décision qui est le conseil? Les élus du coin qui connaissent bien leurs milieux.

Moi, je me rappelle des réunions au conseil où il y a une commissaire qui protégeait et qui défendait ses milieux ruraux comme ça, qu'elle nous amenait l'importance de la répartition, mais il faut toujours... et ne jamais oublier l'importance de nos petites municipalités.

M. Murray, je pense qu'il veut ajouter quelque chose.

M. Murray (Michael) : Un effet pervers aussi dans les petites écoles rurales, c'est l'impact du déménagement d'une famille. Deux, trois élèves qui ont des besoins particuliers, qui vont d'une école de 100 élèves à une autre à 80 élèves, changent complètement l'attribution nécessaire des ressources supplémentaires. Et ça prend une souplesse de réponse, réponse rapide, que les parents ne soient pas obligés de courir après la commission scolaire, ou qui que ce soit, ou le ministère, pour avoir ce qui est leur dû dans les programmes.

Mme Samson : Je comprends. J'ai beaucoup remarqué également, monsieur, votre suggestion de possiblement encourager un échange soutenu entre les commissions scolaires sur les «best practices» — si vous me permettez, je reprends votre expression — que vous mettez de l'avant. Ça pourrait bénéficier certainement à d'autres joueurs dans le domaine de l'éducation.

M. Murray (Michael) : Comme mon collègue a mentionné, ça fait plus de 10 ans qu'on travaille ensemble, qu'on collabore, et inévitablement on partage les «best practices». Alors, on apprend de l'un, de l'autre, et les bonnes idées sont réparties pas juste dans nos 20 écoles primaires, mais dans les plus que 100 écoles primaires de la région.

Mme Samson : De vos régions.

M. Normand (Gilles) : Et, quand on a cette possibilité-là de travailler ensemble, bien, ça nous permet de créer des avantages pour nos jeunes. On partage des mêmes locaux. Alors qu'on avait des problèmes d'espace chez nous, côté Eastern Townships, il y avait de l'espace, une école à côté, ça fait qu'on partage nos locaux à ce moment-là. Tout est gagnant pour les jeunes à ce moment-là.

Mme Samson : C'est bien. Vous mentionnez dans votre mémoire qu'une de vos inquiétudes... et je vous ramène à la page 4. Vous estimez que «les élus scolaires [ont une] connaissance fine de leurs milieux[...], doivent demeurer afin d'assurer que tous les élèves, de tous les milieux, aient accès à la même qualité de services». C'est un peu le point que vous avez soulevé tantôt.

M. Normand (Gilles) : C'est ce que j'expliquais, tout à fait.

Mme Samson : Est-ce que c'est le fait qu'il ne soit pas élu qui va empêcher que le nouveau conseil scolaire soit composé des gens qui ont aussi une connaissance fine du milieu?

M. Normand (Gilles) : Les gens qui seront là, ce sont des parents. Ils ont déjà beaucoup de choses à faire, s'occuper, d'ailleurs, de leur famille. Est-ce qu'ils ont comme mandat d'aller dans la communauté pour aller chercher qu'est-ce que les gens ont besoin, alors que, nous, comme élus... vous le savez, vous le connaissez, vous êtes élue vous aussi. C'est notre principal mandat d'aller voir ce que la population a besoin puis qu'est-ce qu'elle veut pour leurs élèves, qu'est-ce que nos collaborateurs veulent pour la réussite, qu'est-ce qu'ils veulent comme orientation dans nos organisations, mais c'est le travail que l'on doit faire.

M. Bachand (Jean-Philippe) : Oui, bien, rapidement, c'est sûr que les élus... bien, entre autres, c'est nouveau depuis 2014 que le président soit élu au suffrage universel, c'est tout à fait nouveau, mais aussi, la proximité d'avoir fait campagne électorale, à un moment donné on connaît davantage notre territoire bien décerné. Donc, évidemment, la transmission des informations se fait plus.

Juste vous rappeler que, dans le projet de loi n° 86, qui a été déposé le 4 décembre 2015, c'est un rôle de figuration, hein? Il n'y a pas de représentativité au niveau du nouveau conseil scolaire qui est élaboré dans le projet de loi n° 86. Donc, ils vont là pour prendre des décisions, merci beaucoup, on repart. Donc, il n'y a pas de connexion avec le milieu. Ils sont là, mais ils n'ont pas de droit de représentation là-dedans.

Mme Samson : Je comprends.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Mme la députée, il vous reste quelques secondes.

Mme Samson : Bien, je vous dirais que j'ai une dernière, une toute dernière : Parmi vos recommandations, vous souhaitez augmenter l'autonomie des commissions scolaires pour leur permettre plus de souplesse. Donnez-moi un exemple où les commissions scolaires...

La Présidente (Mme Rotiroti) : Rapidement, M. Normand, oui.

M. Normand (Gilles) : Rapidement, je vous dis ça rapidement, les dernières enveloppes qui ont été ciblées vers les écoles mettaient en problème, justement, des choses qu'on avait déjà en place. Alors, on avait à choisir : Est-ce qu'on enlève quelque chose pour recommencer quelque chose à côté? Ça devient un petit peu complexe à ce moment-là et inutile pour le moment.

Si vous me permettez...

La Présidente (Mme Rotiroti) : Oui, allez-y.

M. Normand (Gilles) : ...j'aurais juste à vous faire une petite démonstration. Quand on parle d'élections scolaire et municipale en même temps, j'ai ici un bulletin de vote, malheureusement, on parle de la Belgique, qui représente un peu la complexité là-bas. Puis les gens s'y retrouvent. Alors, je pense qu'une élection scolaire et municipale en même temps, il y aurait quand même possibilité pour les gens ici de comprendre comment ça fonctionne.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci beaucoup, M. Normand, M. Bachand, M. Murray et Mme Sévigny. Je vais suspendre quelques instants pour permettre au prochain groupe, la commission scolaire de la Pointe-de-l'Île, de prendre place. Merci.

(Suspension de la séance à 17 h 15)

(Reprise à 17 h 18)

La Présidente (Mme Rotiroti) : Alors, je souhaite la bienvenue aux représentants de la commission scolaire de la Pointe-de-l'Île. Merci d'être parmi nous. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour faire votre présentation, et, par la suite, on passera à la période d'échange entre les élus. Alors, je vous demanderais juste de vous identifier, ainsi que les gens qui vous accompagnent. Et vous pouvez commencer tout de suite votre présentation.

Commission scolaire de la Pointe-de-l'Île

M. Boudreault (Miville) : Très bien, merci, Mme la Présidente. Je me présente, Miville Boudreault, je suis président de la commission scolaire de la Pointe-de-l'Île. Je suis accompagné, à ma droite, de Mme Renée-Chantal Bélinga, qui est vice-présidente de la CSPI et commissaire de Montréal-Nord, et, à ma gauche, de M. Sylvain Lapalme, qui est commissaire de Montréal-Nord et président de la commission des affaires pédagogiques de la CSPI.

Mme la Présidente de la Commission de la culture et de l'éducation, M. le ministre de l'Éducation, Mmes et MM. membres de la commission, merci tout d'abord de nous recevoir aujourd'hui afin que nous puissions commenter certains aspects du projet de loi n° 86 à la lumière de la situation qui prévaut à la commission scolaire de la Pointe-de-l'Île.

Précisons ici que l'île dont il est question est l'île de Montréal et que la Pointe-de-l'Île est sa portion est et extrême est, territoire qui recoupe quatre arrondissements : Anjou, Montréal-Nord, Saint-Léonard, Rivière-des-Prairies—Pointe-au-Trembles et une ville liée, Montréal-Est. C'est un territoire relativement restreint en superficie, mais qui accueille une population de plus de 300 000 personnes. Quant à la CSPI, notre commission scolaire compte 43 000 élèves, emploie plus de 7 000 personnes et gère un budget de plus de 360 millions de dollars.

• (17 h 20) •

Tout d'abord, nous reconnaissons que le projet de loi n° 86 et les modifications majeures qu'il propose sur le plan de la gouvernance et de l'organisation scolaire s'appuient sur des prémisses qui ont trouvé un écho largement favorable au sein de la population : accorder une place plus grande aux parents et rapprocher le pouvoir de décision de l'école. En filigrane, le projet de loi accroît aussi de façon significative le pouvoir d'intervention du ministre de l'Éducation dans l'ensemble du réseau scolaire. Cependant, après analyse des impacts que ce projet de loi aurait sur une commission scolaire comme la CSPI, nous en arrivons à la conclusion que les changements apportés risquent fort de produire des effets secondaires indésirables qui freineront l'élan de notre commission scolaire, laquelle, depuis quelques années, affiche une progression réelle et significative sur le plan de la réussite scolaire. Toute proportion gardée, freiner la progression des résultats scolaires à la CSPI, c'est freiner la progression des résultats scolaires sur l'île de Montréal et c'est, par le fait même, freiner la progression des résultats scolaires pour l'ensemble du Québec.

Est-ce à dire qu'il faille renoncer à améliorer la gouvernance des commissions scolaires et la gestion de nos écoles publiques? Certainement pas. Par exemple, les avancées proposées par le projet de loi quant aux pouvoirs et aux responsabilités du conseil d'établissement méritent d'être considérées. Est-ce aussi à dire qu'il faille enlever tout pouvoir d'intervention au ministre de l'Éducation? Non, mais il est essentiel que ce pouvoir d'intervention ministériel demeure l'exception qui confirme la règle et non la règle.

Permettez-nous ici de brosser un tableau sommaire de notre commission scolaire et de son fonctionnement, car on ne peut comprendre les fondements de notre position face au projet de loi n° 86 qu'à la lumière des particularités de notre territoire. L'est de île de Montréal est un milieu urbain diversifié, autant au niveau de sa situation socioéconomique qu'à celui de sa population. C'est un territoire parfois méconnu où se côtoient, souvent à quelques pâtés de maisons de distances les uns des autres, secteurs favorisés et milieux défavorisés. Cette mixité ainsi que la présence de milieux qui se classent parmi les plus défavorisés non seulement au Québec, mais également au Canada est une caractéristique majeure de la CSPI, dont les impacts se répercutent sur ses établissements.

Autre élément important, la CSPI accueille une forte proportion d'élèves issus de l'immigration. Dans certains établissements, le pourcentage d'élèves nés à l'étranger ou dont l'un des deux parents ou les deux sont nés à l'étranger avoisine les 90 %. Dans bien des cas, ces élèves et leurs parents maîtrisent peu ou pas du tout le français. De plus, parmi ces élèves, bon nombre ont commencé leur parcours scolaire dans un système et une culture différents des nôtres. Les problématiques sur le plan de l'intégration et de la réussite sont multiples. Et pourtant, malgré ces défis importants, la CSPI est en mesure d'atteindre et de dépasser, quatre ans avant l'échéance prévue de 2019‑2020, les cibles ministérielles en matière de diplomation et de qualification. De plus, le décrochage scolaire a enregistré un recul notable, ce dont nous sommes particulièrement fiers.

Comment sommes-nous parvenus à de tels résultats? Tout d'abord, par le maintien d'une situation budgétaire saine. À la CSPI, chaque dollar qui nous est confié compte, et nous sommes constamment à la recherche de moyens d'optimiser notre efficience. Mais il ne s'agit pas ici d'une vision strictement comptable de l'éducation. Cette discipline et cette rigueur ne visent qu'un seul et unique but : préserver et, si possible, augmenter les services directs qui sont offerts à nos élèves et donner à tous la possibilité de réussir. Notons ici qu'en 2014‑2015, malgré un contexte de compressions budgétaires en éducation, la CSPI a été en mesure de présenter un budget équilibré qui ne contenait aucune suppression de poste ou de service en lien direct avec les élèves et avec la réussite éducative.

Arrive ensuite l'établissement de priorités fondées sur l'atteinte d'objectifs collectifs. Le mot «collectif» prend ici toute son importance, car, pour atteindre ces objectifs, il est nécessaire d'avoir une vue d'ensemble, et, pour articuler cette vue d'ensemble, une coordination entre les différents établissements et une répartition non pas égale, mais équitable des ressources sont des ingrédients essentiels. À cet égard, une des propositions prévues dans le projet de loi n° 86 nous préoccupe particulièrement, soit la création d'une nouvelle structure qui a pour nom le comité de répartition des ressources. Ce mode d'organisation et de gestion peut-il être garant d'une répartition équitable des ressources confiées à chaque commission scolaire? Permettra-t-il d'assurer une coordination essentielle entre différentes écoles dont la taille et la clientèle sont tout sauf homogènes? Cette nouvelle structure ouvrira-t-elle plutôt la porte à une concurrence accrue entre les établissements quant à la répartition de ces ressources, chacun essayant de récupérer son butin? Poser ces questions, c'est un peu y répondre. Ce questionnement prend encore beaucoup plus d'acuité dans notre commission scolaire en raison des disparités plus qu'importantes qui existent entre les secteurs qu'elle dessert et parfois même à l'intérieur d'un même secteur.

Nous mentionnions tout à l'heure les progrès enregistrés par la CSPI sur le plan de la diplomation et du décrochage. Est-il utile de rappeler ici que ces résultats positifs ont été obtenus non seulement à l'intérieur de la structure actuelle, mais avec une instance de gouvernance, le conseil des commissaires, qui représente la population? Le projet de loi n° 86 rend facultative cette gouvernance citoyenne pour la remplacer par une gouvernance d'usagers et d'intérêts particuliers. Permettre aux seuls comités de parents de décider de l'opportunité de tenir ou non des élections créera des disparités non seulement entre les différentes commissions scolaires, qu'elles soient francophones ou anglophones, mais également entre les différentes régions du Québec. Ces élections facultatives à géométrie variable nous apparaissent comme un déni de démocratie, en particulier dans une commission scolaire comme la nôtre, où un nombre important de parents qui n'ont pas le droit de vote décideraient de priver les citoyens contribuables du leur. De plus, comment une gouvernance scolaire constituée de personnes nommées pourra-t-elle répondre au principe communément admis d'une nécessaire représentation en matière de taxation scolaire?

Le Conseil des commissaires de la CSPI prend cependant acte des préoccupations exprimées par le gouvernement au sujet de la participation aux élections scolaires. À ce chapitre, nous joignons notre voix à d'autres pour proposer la tenue d'élections simultanées municipales et scolaires à l'exemple de la pratique dans d'autres provinces canadiennes, notamment en Ontario. Sur l'île de Montréal, l'occasion serait propice pour amorcer une réflexion plus large sur les gouvernances de proximité que sont la gouvernance scolaire et municipale. Ainsi, à titre d'exemple et en accord avec nos homologues du milieu municipal, il serait envisageable de réserver officiellement un des deux postes de commissaire coopté sans droit de vote actuellement prévus par la loi à un élu municipal. Une mesure du genre pourrait se faire sans qu'il soit nécessaire d'apporter des modifications législatives majeures à la Loi sur l'instruction publique.

La présence au conseil des commissaires de parents désignés par les instances de parents demeure un élément essentiel pour une saine gouvernance d'une commission scolaire. Ces commissaires-parents peuvent faire état des préoccupations du comité de parents directement au conseil des commissaires et vice-versa. Par conséquent et dans la mesure où les instances qui représentent les parents en expriment le souhait, nous sommes en faveur de l'octroi du droit de vote aux commissaires-parents.

Par ailleurs, et toujours en matière de gouvernance, inclure dans l'instance de gouvernance des membres issus du personnel de la commission scolaire pour en faire une espèce de superconseil d'établissement nous apparaît pour le moins problématique. En plus de laisser en plan certaines catégories d'employés, le personnel de soutien administratif et les cadres scolaires, par exemple, cette proposition soulève de nombreuses questions sur le plan éthique et ouvre la porte à d'éventuels conflits d'intérêts.

En considération des commentaires et des propositions que nous venons d'énoncer, rappelons en conclusion que le système d'éducation public du Québec ne se résume pas à ses parties constituantes. C'est plutôt la somme de ses parties qui assure sa vitalité et son essor.

À cette fin, les conditions doivent impérativement être réunies pour permettre à l'école de remplir son mandat et d'assurer la réussite des élèves. Et, parmi ces conditions, il demeure primordial que l'on cesse de mettre en opposition ce qui ne doit pas l'être. Les parents ne sont pas en opposition avec les élus scolaires, les directions d'établissement ne sont pas en opposition avec la direction générale, les élus scolaires ne sont pas en opposition avec les élus municipaux. Une commission scolaire n'est pas une instance bureaucratique déconnectée de la réalité qui flotte au-dessus des écoles. C'est une organisation dynamique et vivante qui, certes, ne s'adapte pas toujours aussi vite qu'on le souhaiterait à la société qu'elle dessert mais qui s'efforce néanmoins de répondre du mieux qu'elle peut à la mission qu'on lui confie. Élèves, parents, enseignants, professionnels, employés de soutien, gestionnaires élus, nous sommes tous la commission scolaire. Merci de votre attention.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci beaucoup, M. Boudreault. Alors, on va passer à la période d'échange, et je cède la parole à M. le ministre pour environ 14 minutes.

M. Proulx : Merci, Mme la Présidente. Très heureux d'avoir l'occasion de vous entendre. Il a fallu travailler un peu pour vous avoir, et il y a eu une disponibilité. Alors, je sais qu'on en a discuté, les parlementaires...

M. Boudreault (Miville) : La malchance des uns fait la chance des autres.

• (17 h 30) •

M. Proulx : Bien, en tout cas, je sais qu'il y a eu une volonté de vous avoir ici. On est très heureux de vous avoir avec nous.

J'ai eu l'occasion de lire votre mémoire. Je veux vous parler du comité de répartition des ressources. On a entendu beaucoup de choses et on a entendu beaucoup de gens nous dire : Voilà une bonne idée. Il y a eu des gens qui nous ont dit : C'est une bonne idée, mais il faut que le comité soit bien constitué pour être certain que ce soit toujours une bonne idée. Je vous donne le portrait au complet.

De votre côté, vous ne me semblez pas très confiants à l'égard du comité. Vous dites : S'il y a des directions d'établissement, même, il pourrait y avoir des iniquités. Je me pose la question, je comprends qu'on est dans un milieu urbain, alors il y a des situations où il y a des milieux ruraux, c'est des réalités différentes de la vôtre, mais actuellement comment se fait l'arbitrage, ce n'est peut-être le bon mot, mais les discussions, les compromis pour en arriver à une répartition équitable des ressources? Qui arbitre ou qui fait les représentations au sein du conseil des commissaires pour une école où il y a des problèmes particuliers? Dans votre cas encore là, je comprends que vous êtes dans une situation urbaine, mais comment on peut s'assurer que le rôle qu'on souhaite donner au comité de répartition des ressources, ça se fait au sein du conseil scolaire? Du conseil des commissaires, pardon.

M. Boudreault (Miville) : Oui, d'accord. Bien, écoutez, je voudrais d'abord vous préciser qu'au niveau de la commission scolaire de la Pointe-de-l'Île cette décentralisation existe déjà. Les écoles sont tout de même autonomes au niveau de leur budget. Elles sont autonomes à un point tel que, lorsqu'elles sont capables de dégager un surplus dans leur budget d'exercice, elles le conservent, le surplus. Si elles veulent préparer un projet qu'il pourrait y avoir sur deux ans et ramasser les sommes nécessaires pour le faire, elles peuvent se faire un surplus et le garder. Nous, on les laisse totalement libres de ça. C'est vraiment l'équipe-école au sein de l'établissement qui le fait.

La question que vous me posez, c'est : Pourquoi un comité de répartition des ressources tel que proposé dans la commission 86? Bon, un des problèmes qu'on y voit, c'est évidemment parce que c'est sa constitution. Il serait composé majoritairement des directions d'établissement. Et, vous savez, nous, dans toutes les instances de décentralisation où il y a des discussions, parce que c'est des discussions continuelles entre les réseaux, on est... Les écoles sont regroupées en réseaux, entre les réseaux, entre elles, et, pour savoir comment on va répartir les ressources, nous, ce qu'on attend justement des directions d'établissement, c'est qu'elles nous fassent valoir qu'est-ce qui se passe dans leurs milieux, quels sont leurs besoins. Et c'est à eux aussi de défendre pourquoi on devrait leur donner les ressources qu'ils exigent. Et chacun doit le faire. Une fois que tout a été mis en commun, nous, évidemment, au niveau de la commission scolaire, on ne travaille pas, justement, de façon désincarnée, on regarde les statistiques, on regarde la situation de chaque école, et là on regarde, après ça, là où les ressources vont donner le plus de résultats.

Dans la présentation, je vous rappelle qu'on parlait de vue d'ensemble et d'objectifs collectifs. Demander aux directions d'établissement de défendre leur propre établissement et d'avoir en même temps une vision collective, c'est leur demander beaucoup, et je pense qu'on dénature un petit peu leur rôle. Ce qui est important, c'est que les établissements aient les ressources dont ils ont besoin, et nous, notre rôle, c'est de viser à ce que nos objectifs collectifs de réussite, on puisse les atteindre. Je vous rappelle simplement, à la commission scolaire de la Pointe-de-l'Île il y a cinq ans à peine, notre taux de diplomation était de 54 %. Aujourd'hui, nous... Excusez-moi, je vais prendre un peu d'eau...

M. Proulx : Allez-y, on comprend ça, nous aussi.

M. Boudreault (Miville) : ...parce que, là, plus ça avance, plus je ralentis.

M. Proulx : Ça nous arrive.

M. Boudreault (Miville) : Notre taux était de 54 %, ce qui était tout de même... c'était un taux... on l'avoue, c'était catastrophique. On a passé, cette année, à 70 %. C'est parce qu'il y a eu des objectifs collectifs avec une vue d'ensemble, et nos directions d'établissement travaillent avec nous. Vous savez, le succès de la commission scolaire, c'est le succès de ses écoles. On ne peut pas passer à côté de ça. Je ne sais pas si j'ai répondu à votre question.

M. Proulx : Oui, non, non, mais, écoutez, tout à fait. D'un côté, vous me dites : On n'a... Je ne comprends pas. Dans le fond, le comité de répartition des ressources, pour vous... je ne suis pas certain. En même temps, vous me dites : Bien, chez nous, on a déjà un modèle de décentralisation qui fait qu'on fait — je raccourcis, là — un peu la même chose. Vous faites une répartition parce que des gens viennent à un endroit vous exposer leurs besoins, et c'est là qu'on fait la répartition en fonction de ce que vous avez entendu.

D'autres sont venus dire, d'autres commissions scolaires : Tant mieux pour ceux qui le font. Ils ne disent pas : Tant pis pour ceux qui ne le font pas, ils disent : Mais ça, ça nous regarde. Ça fait que c'est comme s'il y a des gens qui sont chanceux d'être dans une commission scolaire où ça décentralise, puis d'autres sont moins chanceux d'être dans une commission scolaire où ça ne décentralise pas. Moi, j'aurais tendance à penser... je réfléchis encore avec les collègues parlementaires, mais j'aurais tendance à penser que, s'il y a quelque chose qui fonctionne, si c'est dans l'esprit de la réussite scolaire, si c'est la façon, je vais dire, un peu plus moderne de faire les choses parce qu'on retrouve de l'efficacité, on a du mouvement, on a de l'implication de plusieurs personnes, des intervenants qui, autrefois ou dans d'autres endroits, ne sont pas impliqués correctement, pourquoi on ne peut pas, par un changement législatif, faire le pas en avant pour s'assurer que tout le monde ait une bonne pratique dans la gouvernance?

M. Boudreault (Miville) : C'est toujours... non, mais c'est une bonne question que vous posez puis c'est une réflexion très importante.

M. Proulx : Oui, puis je n'ai pas dit qu'on avait toute la réponse, là.

M. Boudreault (Miville) : Non, mais c'est une réflexion importante. C'est : Comment réussir à avoir une solution qui conviendrait à tout le monde en même temps? Et ça, évidemment, je pense que les expériences passées nous ont montré que c'est extrêmement difficile à atteindre. Moi, je peux parler pour la commission scolaire de la Pointe-de-l'Île.

M. Proulx : Tout à fait, oui.

M. Boudreault (Miville) : Je pense qu'on prêche par l'exemple. Nous, ce qu'on offre, c'est notre exemple, et c'est les résultats qu'on obtient. Alors, c'est un peu ce que je peux vous dire. Est-ce qu'il faut passer par une législation pour en arriver là? Je pense qu'avant d'en arriver là il faudrait peut-être voir aussi s'il n'y a pas moyen, disons, là... de concertation au niveau des commissions scolaires, de travailler pour que les meilleures pratiques... Vous savez, j'ai entendu un de vos intervenants hier, M. Prud'homme, qui parlait d'un institut national de l'éducation. Je ne sais pas si j'ai le terme exact qu'il a employé.

M. Proulx : Tout à fait.

M. Boudreault (Miville) : Je pense que ça, ça peut être une avenue porteuse, c'est-à-dire de montrer les meilleures pratiques, parce qu'évidemment chaque commission scolaire doit travailler avec son environnement, avec ses contraintes à elle, et elles peuvent être très différentes, évidemment, d'une région à l'autre. Mais je pense que ça, ça pourrait être une avenue intéressante, d'offrir aux commissions scolaires quelles sont les meilleures pratiques au niveau de la gestion, au niveau de l'organisation et de la répartition des ressources. Et peut-être que ça permettrait d'en arriver à l'objectif que le gouvernement vise sans nécessairement passer par une législation.

M. Proulx : Il nous reste du temps, Mme la Présidente?

La Présidente (Mme Rotiroti) : Oui, oui, allez-y. Il vous reste huit minutes.

M. Proulx : Parce que nous avons un échange intéressant, et c'est le fun d'avoir du temps. Là où je vous rejoins, c'est de dire : Un modèle mur à mur où il n'y a pas de flexibilité pour personne, pour reprendre l'exemple ou les propos de quelqu'un, ce matin, de la Fédération autonome de l'enseignement qui disait : Chacun son métier, donc chacun son espace de décision parce que chacun a son expertise et la capacité de prendre des décisions, c'est une chose. Mettre en place, je veux dire, un cadre dans lequel vont évoluer ces espaces-là, et les différents groupes, et les intérêts, c'en est une autre. Alors, j'entends ce que vous dites par rapport à la flexibilité, je me questionne encore sur : Doit-on laisser ça complètement comme c'est le cas? Ça, ça fait partie des réflexions que nous aurons puis que nous avons, mais je suis heureux d'entendre des points de vue différents ou, en tout cas, d'ouvrir les horizons pour la réflexion.

Concernant la simultanéité, tenir les élections scolaires au même moment que les élections municipales, deux élections le même jour, en même temps, deux bulletins de vote ou pas, exemples donnés par le Directeur général des élections, j'ai posé la question une fois puis je vais vous la reposer parce que, moi, c'est une question que je me suis posée. Je suis convaincu... en tout cas, d'après moi, si une élection scolaire se tient au même moment qu'une élection municipale, il est fort possible que les taux de participation augmentent à l'élection scolaire.

M. Boudreault (Miville) : Ce serait l'objectif visé.

M. Proulx : Si on a deux bulletins, on pourrait avoir tendance à signer le deuxième ou à faire le x à l'endroit où on le souhaite dans le deuxième.

La question que je me pose : Mais est-ce que, oui, si ça augmente la participation, ça augmente aussi la qualité du débat sur l'éducation? Parce que moi, qui vis des élections provinciales au Québec, suis pleinement conscient de l'espace pour un candidat pour se faire connaître, se faire entendre. Quand on vit une élection municipale, et notamment dans un milieu urbain, il y a de la densité pas à peu près d'information qui circule. Je me demande quel espace il y a pour un candidat à une élection scolaire pour se faire entendre, se faire connaître, exprimer un point de vue et donner une valeur ajoutée à : Nous sommes dans un espace de démocratie où, un contre l'autre, s'il y a élection, on a des points de vue parfois qui se ressemblent mais souvent des points de vue contradictoires sur les choses.

Alors, moi, j'entends, là, que les gens disent : Mettez-les ensemble, les élections, ça va augmenter la participation. Ça, j'entends ça. Mais est-ce que vous pensez qu'il y a là une valeur ajoutée à la qualité pas de la candidature, pas du tout, à la qualité du débat sur l'éducation ou de l'éducation dans la région pour l'école, pour les élèves, dans un contexte donné? Je ne sais pas si je m'exprime clairement...

M. Boudreault (Miville) : Absolument.

M. Proulx : ...mais, pour moi, c'est une question légitime, ça, quant à la valorisation de la démocratie.

• (17 h 40) •

M. Boudreault (Miville) : Oui. Bien, écoutez, je répondrais de deux façons à votre question. Par rapport au taux de participation, j'aimerais vous rappeler que votre prédécesseur, qui a déposé le projet de loi, lorsque tout ce processus-là a été amorcé, c'est une des premières choses qu'il a mises de l'avant en disant : Le taux de participation est trop faible. La légitimité est insuffisante, il faut revoir tout ça, c'est un modèle dépassé. Alors, le taux de participation a été mis au coeur de cette réforme de la gouvernance des commissions scolaires en partant. Alors, ça, c'est sûr.

La deuxième chose que je répondrais à votre question, vous savez, en 2008‑2009, un gouvernement précédent, c'était Mme Michelle Courchesne qui était ministre de l'Éducation à l'époque, a introduit des modifications importantes au conseil des commissaires, à la composition du conseil, et surtout une des plus importantes, c'est qu'elle a permis l'élection d'une présidence au suffrage universel.

M. Proulx : Tout à fait.

M. Boudreault (Miville) : Je peux vous dire que ça, ça fait une différence importante. Pourquoi? Parce que ça met un visage, ça met un nom, ça met une voix, ça met une parole qui est beaucoup plus visible que lorsque ce n'est que des candidats qui sont isolés chacun de leur côté. Et je pense que ça a déjà donné, je pense, des résultats en 2014, pas nécessairement au niveau du taux de participation, je vous l'accorde, mais ça a donné des résultats au niveau de la cohérence, au niveau d'une équipe qui se présente pour faire des élections.

Je pense qu'en faisant, avec les élections municipales, la même chose on va augmenter nos chances d'avoir un meilleur taux de participation et surtout d'avoir, comme vous dites, un débat sur l'éducation. Ça, je pense que c'est très important.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Deux minutes.

M. Proulx : Parfait. Je comprends ce que vous dites par rapport à ma question. Est-ce que vous êtes favorable, à l'aise, est-ce que vous êtes en mesure d'envisager que, sur un conseil scolaire, il y ait des élus, comme vous l'êtes, mais également des gens qui viendront non pas du même horizon, c'est-à-dire qui n'auront pas passé par la même élection, mais qui seront des gens peut-être de la communauté, des gens qui viendront du milieu scolaire, des gens qui viendront du personnel de soutien, des gens qui seront des représentants des enfants avec des besoins particuliers, des gens qui viendront des centres professionnels de formation, de l'éducation aux adultes? Donc, vous avez plusieurs... Plus de groupes viendront. Les gens ont chacun et chacune une proposition à faire. Alors, il faudra, à un moment donné, regarder tout ça dans son ensemble.

Mais, à la base, là, est-ce que, pour vous, un conseil scolaire, c'est un conseil des commissaires ou un conseil scolaire, c'est un conseil où il y a, oui, des élus, donc une démocratie représentative comme vous l'êtes, et également des gens qui ont... je ne dirais pas des intérêts parce que ce n'est pas le mot, je dirais une expertise ou un profil qui vient, à mon avis, bonifier? Et puis je ne dis pas ça de façon péjorative, pas du tout. Je dis juste qu'ils apportent une expérience différente ou, vraiment, un apport, là, ciblé, par exemple, la formation aux adultes. Je prends cet exemple pour le... J'aurais aimé ça vous entendre là-dessus.

M. Boudreault (Miville) : Bien, je suis heureux que vous me posiez la question parce que la CSPI, je pense, nous sommes une des rares, peut-être pas la seule, mais une des rares à avoir joué le jeu au complet de la réforme qui a été faite en 2009.

M. Proulx : Bien, vous avez des cooptés, vous.

M. Boudreault (Miville) : On a des cooptés, on en a deux, on les a depuis le tout début.

M. Proulx : Je l'ai vu.

M. Boudreault (Miville) : Et on est allés chercher des gens que l'élection ne vous avait pas permis d'aller chercher. On est allés chercher des gens qui représentaient des communautés importantes au sein de notre territoire, mais qui n'avaient eu aucun élu. Il y a eu des candidats qui venaient de cette communauté-là, mais aucun n'avait pu être élu. Alors, nous sommes allés chercher quelqu'un de cette communauté-là parce qu'on trouvait que c'était important que ces gens-là participent au débat du conseil des commissaires. Nous sommes aussi allées chercher une autre personne qui représentait le secteur privé parce qu'on n'avait personne qui était vraiment... on avait ides gens qui venaient beaucoup d'horizons mais personne qui venait vraiment du secteur privé et qui était de plus spécialisé en ressources humaines, ce qui nous aidait beaucoup parce qu'on était, au conseil des commissaires, avec beaucoup de nouveaux commissaires. Et, vous savez, les ressources humaines sont une partie importante de notre travail.

Alors, ça, vous voyez, ce jeu-là, nous, on n'a aucun problème, on l'a fait dès le départ et on est très heureux de ça. Et, pour nous, il n'y a pas de problème. Ça, on accueille... Évidemment, il ne faut pas non plus, là, ouvrir les portes toutes grandes, on vous l'a dit, par rapport aux membres du personnel. Ça, là-dessus, on a de très sérieuses réserves, et je ne suis pas sûr que ce serait la voie la plus avisée à suivre.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci, M. Boudreault.

M. Proulx : Merci de cet échange. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci, M. le ministre. Alors, on va passer du côté de l'opposition officielle. Je cède la parole à Mme la députée de Pointe-aux-Trembles pour environ 10 minutes.

Mme Léger : Oui, merci, Mme la Présidente. Alors, bienvenue, M. Boudreault.

M. Boudreault (Miville) : Merci.

Mme Léger : Mesdames messieurs à l'arrière aussi. Je vois M. El-Khoury, d'autres personnes, M. Lortie, je crois. Alors, bienvenue.

Alors, je suis contente, comme porte-parole de l'opposition officielle, de prendre la parole, mais aussi comme députée de votre territoire. Et je salue ma collègue qui est présidente ici, en avant, qui a un rôle d'arbitrage de nos travaux, qui est aussi une députée de votre territoire. Je remercie le ministre et je remercie la députée de Jeanne-Mance et le député de LaFontaine aussi d'avoir permis... on a travaillé ensemble pour que vous puissiez y être. Alors, je suis très contente que vous êtes là aujourd'hui parce qu'il y a eu, à un moment donné, une discussion, puis je veux le rappeler, même si ce n'est pas le projet de loi n° 86 qui est sur la table, je rappelle la discussion qu'il y a eu sur la possibilité des fusions des commissions scolaires. Et on avait beaucoup d'inquiétudes, et je le rappelle au ministre aujourd'hui qu'il y avait sur la table de fusionner la commission scolaire de la Pointe-de-l'Île avec peut-être la CSDM ou de faire deux commissions scolaires francophones au lieu de trois qu'ils ont sur le territoire. En tout cas, ça nous a causé... on a eu un manque de sommeil quelque part pour être sûrs que ça ne fonctionne pas.

Alors, je suis contente que la fusion ait été abandonnée. À un moment donné, ça devenait volontaire. En tout cas, là, le gouvernement n'a pas l'air à aller dans ça, mais je tiens à le dire aujourd'hui que l'est de Montréal, on a une commission scolaire de la Pointe-de-l'Île pour s'assurer que l'est de Montréal a sa voix forte pour s'assurer que les fusions n'aillent pas dans ce sens-là, si moindrement ça existerait.

Je veux revenir sur le comité de répartition des ressources. Je ne m'en allais pas dans ça, mais, comme le ministre m'a ouvert la porte un peu... puis le ministre, je vois qu'il s'interroge aussi sur les bonnes pratiques par rapport à ça parce que vous avez comme votre comité de répartition des ressources, si on peut le dire ainsi, là. La pratique de la commission scolaire de la Pointe-de-l'Île semble donner un bon travail de consensus, une participation des gens, bon, etc., et le ministre s'interroge s'il ne doit pas le faire... il ne veut pas faire, quand même, du mur-à-mur puis il vous a posé cette question-là, puis je pense que ça serait intéressant d'aller plus loin, M. Boudreault.

Est-ce que vous aimeriez vous faire imposer un comité de répartition des ressources? Ça me semble être non, mais comment aider le ministre à ce que, si ce n'est pas imposé, si on ne veut pas faire du mur-à-mur nécessairement, si on veut que cette pratique-là, que vous ayez cette possibilité-là de garder la façon que vous faites, comme d'autres commissions scolaires qui réussissent, parce qu'il a posé la question : Certaines commissions scolaires fonctionnent bien de cette... Alors, comment l'aider aujourd'hui en lui disant qu'il faut garder votre modèle, puis, en même temps, il y en a d'autres qui ne l'ont pas, ce modèle-là, puis qu'il y a des petites frictions dans d'autres commissions scolaires? Qu'est-ce que vous lui suggéreriez?

M. Boudreault (Miville) : Merci. Merci, Mme la députée de Pointe-aux-Trembles. Écoutez, évidemment, lorsque je parlais du comité de répartition des ressources et des préoccupations qu'on avait, vous avez bien compris que c'était au sein de notre propre fonctionnement. Et je pense qu'on a les résultats pour montrer qu'on est capables de faire une répartition des ressources équitable et que le succès de nos établissements, c'est d'abord ça qui nous préoccupe, premièrement.

Ceci étant dit, bien je reprendrais un petit peu ce que j'ai dit tout à l'heure. Évidemment, faire ça dans une législation, on ne pourra pas commencer à dire, encore là, à géométrie variable : Ceux qui veulent le comité en prendront un, ceux qui ne veulent pas n'en prendront pas. Je ne crois pas que le législateur peut fonctionner de cette façon-là. S'il décide de s'engager dans cette voie-là, il devra dire : Nous devrons imposer ce comité-là à l'ensemble des commissions scolaires.

Je dirais peut-être, c'est une possibilité, je garderais peut-être dans ma manche la possibilité, peut-être, d'aller au-delà, d'aller plus loin, mais avant il y a eu des propositions qui ont été faites, entre autres, au niveau des pratiques. Nous, évidemment, je peux vous dire, on a parfois des demandes des commissions scolaires collègues qui nous demandent comment on fonctionne pour telle et telle chose parce que, comme vous savez, la commission scolaire de la Pointe-de-l'Île, au niveau de son efficience financière, est une première de classe, je n'ai pas de gêne à le dire. Alors, c'est sûr que les gens viennent nous voir en disant : Comment vous faites pour arriver à telle et telle chose. Alors, nous, ça nous fait plaisir d'expliquer comment on procède. Si les gens peuvent adapter notre modèle à leur propre situation, tant mieux.

On parlait de l'institut national de l'éducation, ça peut être une voie intéressante à poursuivre pour justement valider les meilleures pratiques. Je pense que la CSPI, sans être une commission scolaire parfaite, a des pratiques intéressantes qu'elle pourrait partager avec d'autres, d'une manière tout à fait volontaire. Donc, avant de s'engager dans une voie législative, parce que, vous savez, une fois qu'on s'engage là-dedans, comme vous le savez très bien, là, il faudra vraiment y aller d'une façon large, et, sans même vouloir... même si l'intention du législateur n'est pas de faire du mur-à-mur, forcément, c'est plus ou moins ça qui va arriver. Et ça, pour notre commission scolaire, comme je vous le disais...

Vous savez, la commission scolaire de la Pointe-de-l'Île était la dernière sur l'île de Montréal, nous étions la bonne dernière. Maintenant, nous sommes passés en deuxième. Lorsque je dis que... Lorsque la pointe de l'île progresse, l'île de Montréal progresse, et, quand l'île de Montréal progresse, le Québec progresse.

Alors, c'est sûr que c'est pour ça que je viens ici en vous disant : Nous, notre modèle, s'il vous plaît, si on est capables de le maintenir tel qu'il est là... Il est toujours perfectible. Nous sommes une organisation dynamique, nous sommes toujours en discussion, mais c'est sûr que, là, si on nous impose un autre modèle, bien, évidemment, ça va être plus difficile, sans compter le temps qu'il va falloir pour mettre ça en place. On parle peut-être d'un an, deux ans. Il va y avoir du mouvement à l'intérieur de notre commission scolaire, alors que nous sommes en plein élan. Nous voulons poursuivre notre progression au niveau de la réussite. Alors, c'est pour ça que j'essaie de voir est-ce qu'il y a moyen, justement, de trouver une autre façon, une façon peut-être moins contraignante, plus douce. J'aimerais avoir la solution miracle à vous proposer, malheureusement, M. le ministre, je ne l'ai pas. Mais, en tout cas, je sais que vous réfléchissez beaucoup à la question et de voir comment vous pourriez le faire, mais c'est la meilleure réponse que je peux vous donner pour le moment.

• (17 h 50) •

Mme Léger : Merci, M. Boudreault. Je veux revenir sur l'est de Montréal en revenant sur toute la réflexion du mur-à-mur malgré tout dans l'est de Montréal particulièrement. Vous avez parlé tout à l'heure de Montréal-Nord, entre autres, en tout cas, de certains quartiers, Saint-Léonard et d'autres, on a aussi des microquartiers, des micromilieux de vie qui sont davantage défavorisés.

Est-ce que vous avez la marge de manoeuvre dans une commission scolaire? Est-ce que vous avez les ressources nécessaires? Est-ce qu'il n'y a pas, dans le fond, des revendications que vous voulez apporter, que vous pourrez dire aujourd'hui que vous avez des besoins par rapport à cette problématique-là?

M. Boudreault (Miville) : J'aurais envie de vous répondre à cette question-là de la façon suivante : Depuis quelques années à la Pointe-de-l'Île, nous nous sommes engagés dans un processus où chaque nouvelle mesure que nous adoptons, nous essayons qu'elle soit validée, qu'elle s'appuie sur des recherches concrètes. On veut... parce que, vous savez, parfois, quand on parle de ressources, dépenser plus, ça ne veut pas nécessairement dire qu'on va avoir de meilleurs résultats. Si on dépense plus, mais on fait toujours les mêmes choses, on va toujours avoir les mêmes résultats. Ce n'est pas nécessairement une question de ressources.

Qu'on me comprenne bien, c'est sûr qu'au milieu de l'éducation, nos prédécesseurs l'ont dit, les besoins sont toujours en excédent par rapport aux ressources qui sont disponibles. Mais je peux vous dire qu'avec les ressources qu'on a présentement ce qu'on essaie de faire, nous, ce n'est pas nécessairement qu'on en ait plus, c'est qu'on essaie de mieux dépenser. On veut que, chaque fois qu'on dépense 1 $, on ait un meilleur résultat. Alors, pour ça, on s'appuie énormément sur la recherche. Je pense que ça, c'est une avenue aussi gagnante pour l'éducation au Québec, de vraiment... puis l'institut national de l'éducation pourrait aider énormément dans ce sens en étendant ça à l'ensemble du territoire du Québec.

Mais, au niveau des ressources, nous, présentement, ce qu'on essaie de faire, ce n'est pas nécessairement d'avoir beaucoup plus d'argent, c'est de mieux dépenser et dépenser le mieux possible en s'appuyant sur des données concrètes et sur des recherches sérieuses.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Une minute, Mme la députée.

Mme Léger : Mais vous avez la possibilité aussi de dire qu'il y a besoin de réinvestissement en éducation malgré tout.

M. Boudreault (Miville) : Bien, toujours.

Mme Léger : Alors, je pense que...

M. Boudreault (Miville) : Toujours, il y en a... Bien, ça, c'est sûr.

Des voix : ...

Mme Léger : Vous l'aviez oublié un peu.

M. Boudreault (Miville) : Toujours, toujours. Je crois même que ça peut être... Je n'ai pas... C'est dans le sous-texte tout le temps.

Une voix : ...

M. Boudreault (Miville) : Oui, absolument. Non, mais vous avez raison, Mme la députée, effectivement. Vous savez, les besoins, ils ne sont pas en diminution, ils sont en augmentation. J'ai mentionné évidemment la présence de milieux extrêmement défavorisés, parmi les plus défavorisés au Canada. Et en plus, avec l'immigration... Il n'y a pas une adéquation nécessairement à faire, hein, parce que cette défavorisation-là n'est pas nécessairement une défavorisation économique. Parfois, ça va être dans des milieux où les mères monoparentales...

Une voix : ...

M. Boudreault (Miville) : Oui. Et parfois, des fois, au niveau de la clientèle issue de l'immigration, souvent, les parents, ils sont éduqués, ils sont instruits, ils sont diplômés, mais ils ont de la difficulté à trouver un travail dans leur domaine. Alors, c'est sûr qu'ils poussent énormément sur leurs enfants au niveau scolaire. Vous savez, c'est une mosaïque absolument complexe. Et, oui, avoir des ressources, c'est important, en avoir plus est important, et surtout il faut bien les utiliser, nos ressources, et aller là où ça compte le plus.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci, M. Boudreault. Alors, c'est au tour du deuxième groupe de l'opposition. Je cède la parole à M. le député de Chambly pour six minutes.

M. Roberge : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Merci pour votre présentation. Je vais continuer sur le sujet de ma collègue. Bon, des ressources, on en manque toujours, on travaille avec des enfants, les besoins sont illimités, puis il y a toujours place à la création, à une idée nouvelle qui exige davantage d'investissement. Alors, je le comprends.

Par contre, depuis quelques années, on ne se posait pas la question où est-ce qu'on affectait de nouvelles ressources, c'était plus où est-ce qu'on coupait. Et là je ne veux surtout pas vous blâmer pour ça, je veux juste savoir ce qui s'est passé. Est-ce que vous avez été obligés de couper dans des ressources professionnelles, des orthopédagogues, des techniciens, techniciennes en éducation spécialisée depuis deux ans?

M. Boudreault (Miville) : Non.

M. Roberge : Vous me faites signe que non. Donc, comment avez-vous fait pour absorber des milliers, sinon des millions de dollars de coupures sans toucher les professionnels?

M. Boudreault (Miville) : Bien là, évidemment, je vous parle pour la commission scolaire de la Pointe-de-l'Île.

M. Roberge : Oui, je parle pour vous, bien sûr.

M. Boudreault (Miville) : Bien, évidemment, je dirais qu'il y a deux principes de base généraux que je pourrais vous donner par rapport à ça. D'abord, chaque dollar qu'on reçoit, qui est destiné aux écoles, retourne entièrement aux écoles, mais on ne dépense pas plus que ce qu'on reçoit. Parfois, c'est facile de dépenser un petit peu, de dire... parce que les besoins, les sollicitations sont immenses. Et évidemment, aussi, on a à coeur la réussite et on veut que le plus de gens réussissent. Et ça, ça fait partie de notre philosophie de gestion, par exemple, de notre rigueur. Chaque dollar qu'on reçoit pour les écoles retourne directement aux écoles. Alors, on n'étire pas trop ce dollar, on n'en rajoute pas un par-dessus qu'on n'a pas vraiment. Alors, ça, ça a été une philosophie de la gestion à la CSPI.

Et, à la CSPI, la deuxième chose qu'on a faite, qui nous a permis, actuellement, d'avoir cette situation financière saine, que, lorsqu'une compression arrive... Évidemment, là, j'aimerais faire un petit message d'historien pour M. le ministre. Heureusement que, cette fois-ci... parce que, là, même nous, on était rendus... Une compression supplémentaire, et je pense que nous, on aurait peut-être été arrivés au point où il aurait fallu couper des ressources, mais, dans notre cas, ce n'est pas arrivé. Alors donc, on a été encore capables, l'an dernier, d'absorber les compressions sans toucher, absolument pas, à aucun service aux élèves, aucune ressource professionnelle.

Une des raisons qui nous permet de faire ça, entre autres, je vais vous donner un exemple très simple, vous savez : la photocopie. La photocopie, on a 70 établissements. Il y a quelques années, il y avait 70 établissements, il y avait 70 contrats de photocopies. C'était extrêmement variable d'un contrat à l'autre. Vous savez, certaines directions d'établissement sont d'habiles négociateurs, d'autres ont un peu plus de difficulté à trouver le contrat le plus avantageux. Alors, j'avoue, c'était une situation extrêmement problématique puisque ça coûtait très cher.

Alors, la décision qui a été prise par la commission scolaire a été de regrouper tous les services de photocopie dans un service central, c'est centre de photocopie de la commission scolaire de la Pointe-de-l'Île. Et savez-vous, à chaque année, combien de surplus on dégage en photocopies juste en regroupant ça? Un demi-million de dollars récurrent à chaque année. Et, au début, les établissements nous disaient : Ah! mais là quelle sorte de services qu'on va recevoir, et tout? Puis je n'aurais aucune gêne à vous dire... Demandez à chaque direction d'établissement s'ils préfèrent le nouveau système par rapport à l'ancien, puis je suis certain que tout le monde va dire : C'est le nouveau qui est le meilleur.

M. Roberge : Bien, je vous félicite. Si vous avez dégagé 500 000 $ puis vous avez pu justement l'affecter aux services aux élèves, c'est formidable. C'est ça, la mission...

M. Boudreault (Miville) : C'est ce qu'on essaie de faire.

M. Roberge : ...des commissions scolaires ou des centres de services. Nous, on appelle ça un centre de services aux écoles. Ça revient au même. Vous avez créé un centre de services aux écoles. C'est ce qu'il faut.

Je vais vous amener sur un autre sujet : les conseils d'établissement. Vous dites à la fin : «Quant aux conseils d'établissement, nous sommes ouverts à la possibilité de leur confier de plus grandes responsabilités.»

Beaucoup de groupes sont venus nous voir en disant : Attendez un petit peu, là. Dans le projet de loi, il y a une dérive, là, qui est de dire que les conseils d'établissement pourront maintenant adopter plutôt qu'approuver beaucoup de choses, même sur tout les sujets de nature pédagogique. Et plusieurs personnes nous ont dit qu'il y avait danger à ce que le conseil se saisisse de dossiers pédagogiques, exemple, une sortie d'élèves avec un prof. Ils veulent aller au musée, ça s'en va au conseil d'établissement. Ils ne peuvent plus juste l'approuver, ils peuvent le modifier : Ah! finalement, tu ne vas pas au musée, tu vas au théâtre. Bon, qu'est-ce que vous pensez de ça, là, adopter versus approuver, ce qui est dans le projet de loi n° 86?

M. Boudreault (Miville) : Bien, là-dessus, écoutez, je vais parler de mon expérience personnelle puisqu'avant d'être un élu scolaire j'ai été, pendant sept ans, un président de conseil d'établissement d'une école primaire, celle que fréquentaient mes enfants. Et je peux vous dire qu'on a eu des débats, à ce moment-là, par rapport à cette question-là, d'approbation et d'adoption. Là, je parle évidemment... Sur la question des conseils d'établissement, on préfère laisser les instances de parents indiquer qu'est-ce qu'elles préfèrent à ce sujet-là. Nous, notre optique, on se disait : Dans la prémisse, le postulat de départ de ce projet de loi là, qui disait : Accorder une place plus grande aux parents, à notre humble avis, l'endroit où on pouvait le faire, c'est au niveau justement du conseil d'établissement parce que c'est là que les décisions les plus proches de l'élève se prennent, c'est-à-dire le projet éducatif. Vous parlez des sorties. Tout ce genre de choses là, c'est au conseil d'établissement que ça se décidait.

Alors, je peux comprendre, peut-être, qu'il y ait des réticences parce que, là, on avance quelque part dans un territoire un peu inconnu. Je laisse aux instances de parents dire si elles voudraient le faire. Moi, personnellement — et là, vraiment, ça n'engage que la personne qui s'adresse à vous, là, présentement — j'irais vraiment un peu plus pour laisser plus de latitude aux parents au sein des conseils d'établissement. Il faut faire attention parce que, vous savez, nous, dans notre commission scolaire, on a des conseils d'établissement où il y a des parents qui sont des nouveaux arrivants. Le premier contact qu'ils ont avec leur société d'accueil, entre autres, notre société démocratique, c'est à travers les conseils d'établissement. Si on va dans cette voie-là, je pense qu'il faut veiller à assurer une formation, ce que la commission scolaire, c'est un rôle qu'elle peut très bien assumer. Il faut aider les parents, il faut les outiller parce qu'il ne faut pas qu'on arrive non plus avec des parents avec leurs histoires individuelles, leurs cas qu'ils veulent régler en disant : On va régler ça. C'est sûr que ça reste toujours un danger. Moi, j'aurais tendance à être, disons... à tenter la chance de donner plus d'espace aux parents au sein des conseils d'établissement, au sein de l'école.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci, M. Boudreault, Mme Belinga, M. Lapalme. Et je voudrais aussi souligner la présence de M. Lortie et M. El-Khoury. Merci d'être là.

M. Boudreault (Miville) : Qui est directeur général adjoint. Je m'excuse, j'ai oublié de le présenter.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Exactement. Merci beaucoup.

Alors, la commission ajourne ses travaux au mardi le 5 avril, à 9 h 45, où elle poursuivra son mandat. Merci, bonne soirée à tous.

(Fin de la séance à 18  heures )

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