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Version finale

41e législature, 1re session
(20 mai 2014 au 23 août 2018)

Le jeudi 22 septembre 2016 - Vol. 44 N° 51

Consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 105, Loi modifiant la Loi sur l’instruction publique


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Table des matières

Auditions (suite)

Confédération des syndicats nationaux (CSN)

Fédération autonome de l'enseignement (FAE)

Association provinciale des enseignantes et enseignants du Québec (APEQ)

Fédération des commissions scolaires du Québec (FCSQ)

Fédération québécoise des directions d'établissement d'enseignement (FQDE)

Mouvement québécois des adultes en formation (MQAF)

Association montréalaise des directions d'établissement scolaire (AMDES)

Mémoires déposés

Intervenants

Mme Filomena Rotiroti, présidente

M. Pierre Michel Auger, président suppléant

M. Sébastien Proulx

M. David Birnbaum

Mme Nicole Léger

M. Jean-François Roberge

Mme Agnès Maltais

*          Mme Véronique de Sève, CSN

*          Mme Julie Audet, idem

*          Mme Sylvie Tremblay, idem

*          Mme Anne Pineau, idem

*          M. Sylvain Mallette, FAE

*          Mme Nathalie Morel, idem

*          M. Sébastien Joly, APEQ

*          M. Jean-Paul Fossey, idem

*          Mme Josée Bouchard, FCSQ

*          M. Alain Guimond, idem

*          M. Richard Flibotte, idem

*          Mme Lorraine Normand-Charbonneau, FQDE

*          Mme Fatine Kabbaj, MQAF

*          M. Robert Martin, idem

*          Mme Hélène Bourdages, AMDES

*          M. Stéphane Garneau, idem

*          M. Stéphane Gemme, idem

*          M. Carl Vézina, idem

*          Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Onze heures vingt-neuf minutes)

La Présidente (Mme Rotiroti) : Alors, bon matin à tous. À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de la culture et de l'éducation ouverte. Je demanderais à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie des leurs appareils électroniques.

La commission est réunie afin de poursuivre les consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 105, Loi modifiant la Loi sur l'instruction publique.

M. le secrétaire, y a-t-il des remplaçants?

• (11 h 30) •

Le Secrétaire : Oui, Mme la Présidente. Mme Hivon (Joliette) est remplacée par Mme Maltais (Taschereau) et M. Turcotte (Saint-Jean) est remplacé par Mme Léger (Pointe-aux-Trembles).

Auditions (suite)

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci. Nous entendrons ce matin les organismes suivants : la Confédération des syndicats nationaux — merci d'être parmi nous — et la Fédération autonome de l'enseignement.

Alors, sans plus tarder, je souhaite la bienvenue aux représentants de la Confédération des syndicats nationaux. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour faire votre exposé, et, par la suite, on passera à une période d'échange entre les élus. Je vous demanderais juste de vous présenter, ainsi que les gens qui vous accompagnent, et vous pouvez, tout de suite, passer à votre exposé. Alors, la parole est à vous.

Confédération des syndicats nationaux (CSN)

Mme de Sève (Véronique) : Merci. Alors, Véronique de Sève, vice-présidente à la CSN. Je suis accompagnée d'Anne Pineau, adjointe à l'exécutif de la CSN, Sylvie Tremblay, vice-présidente et trésorière de la Fédération des employées et employés du service public, et Julie Audet, conseillère syndicale aux relations du travail, service recherche.

Alors, M. le ministre, membres de la commission, bonjour à vous toutes et tous. Nous remercions la Commission de la culture et de l'éducation de nous recevoir cet avant-midi dans le cadre des consultations sur le projet de loi n° 105. C'est notre deuxième participation dans le cadre d'une consultation concernant une possible réforme des commissions scolaires. Lors de notre dernier passage, nous avions recommandé le rejet du projet de loi n° 86. Permettez-moi d'exprimer notre déception de voir que votre gouvernement récidive avec le projet de loi n° 105, Loi modifiant la Loi sur l'instruction publique, qui reprend plusieurs articles du défunt projet de loi n° 86.

Bon, pour les bons coups, quand même, les consultations menées sur le projet de loi n° 86 avaient mis en lumière l'attachement des différents partenaires à la démocratie locale dans le système de l'éducation, au maintien des commissaires élus au suffrage universel et à l'implication des parents. Nous appuyons donc le droit de vote accordé aux commissaires représentant les parents. Nous saluons aussi la décision du ministre de renoncer à remplacer le conseil des commissaires par un conseil scolaire.

Néanmoins, l'enjeu du faible taux de participation aux élections scolaires demeure. Il faut mettre en place des mesures pour favoriser l'exercice du droit de vote.

Par contre, nous contestons l'obligation d'inclure un commissaire coopté au sein du conseil et au sein du comité exécutif afin, comme vous l'indiquez, de favoriser la prise en compte des saines habitudes de vie dans les décisions des commissions scolaires. Bien entendu, nous sommes favorables à l'adoption des saines habitudes de vie, mais pourquoi cibler cette préoccupation en particulier?

Certains articles du projet de loi n° 86 ciblant l'accroissement des pouvoirs du ministre ont été retirés, notamment en ce qui concerne l'encadrement du directeur général et les fusions de services. Mais le nouveau projet de loi permet au ministre d'intervenir dans la gestion des commissions scolaires tout au long de l'année scolaire, de déterminer des enveloppes budgétaires allouées aux écoles et d'établir des critères au nouveau plan d'engagement vers la réussite des commissions scolaires. Cet ajout de pouvoirs paraît questionnable. Bon, M. Proulx, vous le savez, vous êtes sympathique, mais, malheureusement, ils ne sont pas tous comme vous. Mais, blague à part, la possibilité de modifier des règles budgétaires en cours d'année scolaire nous préoccupe grandement.

Le projet de loi n° 105 vient préciser le caractère subsidiaire de la mission de la commission scolaire. Or, ce concept de subsidiarité — et c'est un mot qui est très difficile à prononcer, je vous le dis — aurait dû être abandonné, comme nous le mentionnons dans notre précédent mémoire, car il risque d'alimenter la confusion sur le partage des responsabilités entre les commissions scolaires et les établissements. Nous réitérons donc notre conviction voulant que les responsabilités qui incombent à la commission scolaire et celles qui sont du ressort des établissements soient clairement définies dans la loi.

Le mémoire que nous avons présenté sur le projet de loi n° 86 soulevait aussi plusieurs questions sur la création d'un comité de redistribution de ressources. Malgré les précisions qu'apporte le projet de loi n° 105, nous continuons à douter de la nécessité d'un tel comité, d'autant plus qu'il bénéficierait de pouvoirs accrus. Il serait plutôt préférable d'améliorer les mécanismes de consultation prévus déjà à la Loi sur l'instruction publique. De plus, un partage de bonnes pratiques sur les mécanismes de consultation serait une solution beaucoup plus simple que la mise en place d'un comité de répartition des ressources.

Autre changement majeur, les références à l'adéquation entre la formation et les besoins de la main-d'oeuvre ont été retirées des priorités des commissaires ainsi que de la mission des centres de formation professionnelle. Toutefois, cela demeure dans leur projet éducatif. Nous tenons à rappeler que le réseau de l'éducation ne saurait être asservi aux seuls besoins des entreprises. Instruire, socialiser et qualifier les élèves dans une perspective d'égalité des chances et d'épanouissement, voilà le vrai rôle du système d'éducation.

Nous profitons de notre passage devant vous pour rappeler notre position quant au financement des services de garde éducatifs en milieu scolaire. Ceux-ci peuvent compter principalement sur deux sources de financement : la contribution parentale, qui représente environ 70 % du budget, et les allocations gouvernementales définies aux règles budgétaires annuelles. Outre les dépenses liées à leur fonctionnement, les services de garde doivent composer avec des ponctions à même leur budget par les commissions scolaires et leur école. Malheureusement, il y a un manque de transparence, il est impossible de connaître les budgets et les justifications pour ces prélèvements. De surcroît, les surplus budgétaires, s'il y en a, doivent être retournés à la commission scolaire à la fin de l'année. Cette situation est inacceptable.

Pour la CSN, il ne fait pas de doute que les objectifs des services de garde éducatifs en milieu scolaire répondent à la définition des services complémentaires au régime pédagogique de l'éducation préscolaire, de l'enseignement primaire et de l'enseignement secondaire et que le gouvernement devrait les reconnaître comme tels. Cette reconnaissance assurerait non seulement la gratuité des services de garde, au même titre que les autres services éducatifs offerts aux élèves, mais elle favoriserait également une meilleure intégration de ces services au projet éducatif de l'école. À cet égard, nous accueillerons favorablement l'ajout permettant aux comités de parents de faire des recommandations sur les services de garde en milieu scolaire.

Finalement, cette consultation devrait être aussi l'occasion de régler de manière définitive les problèmes des écoles illégales. Ces écoles privent les enfants d'un programme d'enseignement reconnu et compromettent leur développement cognitif et affectif, ainsi que leur capacité à participer pleinement à la société. Il s'agit de situations délicates, certes, mais cela ne dispense pas l'État de son devoir d'intervenir efficacement et de manière permanente auprès de ces établissements.

Par ailleurs, il y a quelques années, le Protecteur du citoyen publiait un rapport démontrant que le principe d'égalité des chances est compromis au Québec du fait que plusieurs enfants n'ayant pas de document d'immigration légal se trouvent exclus du droit à l'instruction gratuite. Nous déplorons le fait que le gouvernement recule aujourd'hui dans ses intentions émises dans le projet de loi n° 86 au lieu de procéder aux changements législatifs qui s'imposent. Le ministère aurait tout intérêt à s'inspirer des recommandations des mémoires sur le projet de loi n° 86 de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse et du collectif sans frontières pour modifier, entre autres, l'article 3 de la Loi sur l'instruction publique sur le droit à la gratuité des services éducatifs.

Au cours des dernières années, le réseau de l'éducation a été mis à rude épreuve. Des compressions budgétaires totalisant plus de 1 milliard de dollars ont obligé les gestionnaires des commissions scolaires et des écoles à faire des choix difficiles qui ont eu un impact négatif sur les services offerts aux élèves, sans compter la surcharge de travail subie par l'ensemble de tout le personnel de l'éducation. Le processus ayant conduit au projet de loi n° 86 a également généré beaucoup d'inquiétude. L'incertitude quant au maintien de certaines commissions scolaires, les orientations visant à démettre les commissaires élus au suffrage universel et la menace de fusions forcées sont autant de facteurs qui ont instauré un climat néfaste créant de la division entre les différents partenaires.

En abandonnant le projet de loi n° 86, le gouvernement a démontré, certes, une écoute que nous saluons. Cela dit, et à l'instar de plusieurs autres groupes ou intervenants, nous considérons que le projet de loi n° 105 aurait dû porter sur le développement d'une vision rassembleuse et sur la mise en oeuvre de moyens pour la réussite de tous les élèves plutôt que sur le fonctionnement des commissions scolaires et des établissements d'enseignement. Bref, le projet de loi n° 105 nous distrait des véritables enjeux, notamment la réussite des élèves, la lutte au décrochage scolaire, le système à deux vitesses, pour ne nommer que ceux-ci.

La CSN est donc défavorable à l'adoption du projet de loi n° 105, qui, pour l'essentiel, reprend des éléments du défunt projet de loi que nous avions déjà contesté. Mais, contrairement à ce que nous indiquions dans le projet de loi n° 86, où nous n'amenions pas de recommandations, vous retrouvez à la dernière page de notre mémoire différentes recommandations, comme de mettre en place des mesures pour favoriser la participation aux élections scolaires, d'améliorer les mécanismes de consultation actuels afin de favoriser le dialogue et la prise en compte de besoins locaux, de valoriser l'expertise de tout le personnel de l'éducation — et je répète, de tout le personnel de l'éducation — d'adopter une reddition de comptes axée sur l'allocation de ressources, de régler définitivement le problème des écoles illégales, d'assurer le droit à la gratuité de l'éducation à tous les enfants du Québec, ainsi que de reconnaître le service de garde éducatif complémentaire au régime pédagogique. Je vous remercie.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci beaucoup. Alors, on est maintenant rendus à la période d'échange entre les élus, et je cède la parole à M. le ministre pour environ 16 minutes.

M. Proulx : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Je veux vous remercier de votre présence aujourd'hui. C'est toujours un plaisir de vous revoir et d'avoir l'occasion d'échanger avec vous. Merci également pour votre mémoire. Il y a matière à discussion, à réflexion. Puis je le disais hier, les choses se précisent, alors c'est intéressant de pouvoir aller ailleurs qu'où nous l'avions fait lors des consultations sur le projet de loi n° 86.

Je voudrais vous amener, dans votre mémoire, au principe de subsidiarité, effectivement, le mot du jour à bien épeler. Troisième paragraphe, vous dites : «Actuellement, un débat a cours pour savoir si les écoles devraient avoir plus de responsabilités.» Ce qui m'intéresse, c'est les phrases d'ensuite : «Or, ce ne sont pas les rôles des différents paliers — école vs commission scolaire — qu'il faut réviser, mais bien les pratiques de gestion des commissions scolaires qui, dans certains cas, posent problème. [Alors,] l'ajout du principe [dont on vient de parler], loin de clarifier les choses amplifiera au contraire l'ambiguïté des rôles.»

J'aimerais ça vous entendre sur les pratiques de gestion qu'il faut, dans certains cas, améliorer, sachant que les choses ne sont pas partout pareilles, comme je le disais hier, en le résumant ainsi. J'aurais voulu vous entendre un peu là-dessus si vous...

• (11 h 40) •

Mme Audet (Julie) : Oui, bonjour.

M. Proulx : Bonjour.

Mme Audet (Julie) : Oui. Donc, effectivement, on se rend compte que, dans l'ensemble des commissions scolaires, certaines ont peut-être des pratiques plus décentralisées, centralisées. Des fois, ça fonctionne bien de part et d'autre, ça dépend. C'est au niveau des consultations, on se rend compte que souvent tout le monde n'est pas partie prenante ou il semble y avoir un problème de communication. Parce qu'on a vu que les directions d'établissement étaient très mécontentes de la situation actuelle, mais, dans la loi, il y a deux mécanismes qui sont prévus. Avant de faire la répartition des ressources, les commissions scolaires doivent rencontrer tous les conseils d'établissement, et nous, on dit : Bien, quand on rencontre un conseil d'établissement, on s'attend à ce que le président du conseil d'établissement est là, et, habituellement, ça doit être un parent. Ils sont accompagnés de la direction d'école. On aimerait aussi qu'il y ait un membre du personnel qui est là. Les C.E. sont aussi composés de personnel, donc il y a des enseignants, il y a le personnel de soutien. Lorsqu'il y a un service de garde, il va y avoir le personnel du service de garde et professionnels. On aimerait que ces personnes-là puissent aussi être consultées lors des consultations pour amener une voix différente, une perspective différente aussi dans les problématiques puis dans ce qui est vécu dans les écoles.

Donc, c'est un peu une idée qu'on avait de voir à ce que... Il y a des endroits où ça se fait bien, il y a des commissions scolaires où ils vont avoir leurs consultations en petits districts ou en petites communautés. Donc, il y a quelques C.E. qui sont rencontrés. La prise de parole, d'échange est beaucoup plus facile que si une commission scolaire décide de rencontrer l'ensemble de ses établissements... Donc, c'est un peu dans ce sens-là qu'on se disait : Il y a matière à améliorer sans nécessairement changer la loi sur ce type de processus là.

M. Proulx : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Est-ce que c'est ce que vous voulez dire quand vous dites à la page 13 : «Certes, il faut s'assurer que les commissions scolaires consultent adéquatement tous les conseils d'établissement et tiennent véritablement compte des informations, car force est de constater que toutes les commissions scolaires n'agissent pas adéquatement à cet égard, le mécontentement exprimé par les directions [...] en fait foi.»?

Donc, je comprends que vous vous référez à cela dans votre mémoire, j'aimerais ça vous entendre — et je pense qu'on n'en a pas suffisamment parlé ou pas parlé du tout dans certains cas — sur la relation du personnel dans cet espace-là avec les commissions scolaires, le conseil d'établissement. Parce que, bon, on parle beaucoup du principe de subsidiarité, on dit : Les gens devraient, chacun, être à leur place, avoir leur rôle. On dit qu'il faudrait être capable de prendre des décisions le plus près de l'élève. Mais il n'en demeure pas moins qu'indépendamment de tous les comités, indépendamment de tous les groupes impliqués, il n'en demeure pas moins que le personnel et nos enseignants occupent un espace qui est à l'horizontale, là, présent dans beaucoup de sphères, là, de réflexion, de décision ou de considération. Donc, j'aimerais ça vous entendre là-dessus. Dans le monde idéal, là, la consultation du personnel et des enseignants, elle se fait à quel moment et jusqu'à quel niveau?

Mme Tremblay (Sylvie) : Bien, je peux peut-être répondre, là. Je vous dirais que c'est pas mal à géométrie variable. Dépendamment des écoles, dépendamment des directions, dépendamment de l'équipe-école, en fait. Je pense que le personnel, dans certains milieux de travail, peut être consulté, mais pas assez, malheureusement, encore. Je pense qu'il faut encore faire plus de place parce qu'il fait partie intégrante de l'équipe-école. Donc, je pense qu'il devrait y avoir quelque chose dans ce sens-là.

M. Proulx : Mais... Allez-y, allez-y.

Mme de Sève (Véronique) : Et, si je peux me permettre, on l'a dit dans notre mémoire lorsque vous avez déposé votre... bien, lorsqu'il y a eu un dépôt de projet de loi n° 86. Mais partout on y va, et, même sur notre campagne Un réseau qui fait grandir!, où on inclut le milieu scolaire dans notre revendication sur les services de garde éducatifs, toute la question du personnel de soutien... Souvent, il est peu considéré. Puis, dans un hôpital, ça va être le personnel d'entretien, tout ça. Il y a des professions qui ont la cote, c'est parfait. Mais on le sait et vous l'a dit lorsqu'on est passés en commission parlementaire en avril dernier, il faut consulter tout le personnel parce que chacun n'a pas la même vision de l'élève, on a des rapports différents.

Alors, oui, on a un rapport éducatif, on enseigne, mais, en même temps, on a un rapport aussi, là, de quotidien lorsque c'est le concierge ou même le surveillant d'élèves. Et, lorsqu'on s'en va au service de garde, bien, c'est un autre type de rapport qu'on a avec les élèves. Et parfois, parce qu'on valorise principalement la profession d'enseignant... qui est tout à fait correct, ma mère a été enseignante de deuxième année, je ne peux pas être en désaccord avec ça, mais c'est une équipe-école. Et, si la volonté politique n'est pas indiquée clairement, qu'on doit travailler avec l'équipe-école, l'équipe ensemble et faire la place à ces gens-là, bien, après ça, c'est difficile et ça devient à géométrie variable, selon l'expérience de chacun, selon d'où on provient. Parce qu'il y a des directeurs, des fois, qui ont été très près du personnel de soutien, donc ils vont avoir une écoute plus attentive. D'autres qui — c'est souvent le cas — proviennent plus du personnel d'enseignants, puis là, à ce moment-là, c'est plus compliqué. Et il faut parler aussi des professionnels dans tout ça.

M. Proulx : Parfait. C'est très intéressant, ce que vous dites, puis, dans le fond, ça m'amène à ce qui était pour moi la prochaine question. Ce qui est le défi, je pense, pour tout législateur, c'est d'être capable de mettre en place le cadre qui va permettre de réaliser des attentes comme celles-là. Parce que vous avez décrit, dans le fond, la réalité en disant : Il y a des perceptions, il y a des attentes, il y a des leaderships différents, il y a des gens qui ont des styles de gestion, il y a des décisions locales. À un moment donné, ça sera difficile ou impossible d'arriver avec une loi, quelle qu'elle soit, dans bien des domaines où il y a des services qui sont offerts à des populations qui va faire en sorte que tout le monde va être consulté suffisamment au bon moment, tout le monde va être content d'être consulté au bon moment puis au bon endroit, qu'il n'y aura pas des décisions prises en ayant fait des compromis sur un groupe ou sur un autre.

Donc, il y a la perception, il y a le souhait, il y a la pensée et l'intention puis, vous l'avez dit, le leadership politique de dire qu'il faut être capable de consulter puis d'aller chercher l'ensemble des informations et l'expertise de tous et chacun lorsqu'on prend une décision, la raison pour laquelle j'essaie d'être à l'écoute le plus possible que je peux le faire. Mais qu'est-ce qui est pour vous le meilleur cadre pour s'assurer qu'on vous consulte, mais tout en sachant qu'on ne peut pas obliger tout le monde, puis on ne peut pas obliger personne, et on ne peut pas, comme société, dans chacun des lieux hiérarchiques, donner des obligations de consultation puis de travailler ensemble? Je ne sais pas si vous saisissez bien ma question, il y a... C'est vrai chez vous dans votre type de leadership, c'est vrai chez moi, c'est vrai pour l'ensemble des collègues, il faut être capable de laisser de la place à l'exercice de gestion locale, mais, en même temps, de s'assurer qu'on favorise la concertation puis la collaboration avec tous les groupes puis tous les intervenants parce que, vous avez raison, c'est l'ensemble des intervenants qui doivent être consultés pour la réussite.

Mme Pineau (Anne) : Oui, merci. En fait, je pense qu'on fait référence notamment à un guide des bonnes pratiques. Ça, c'est un outil qui pourrait être intéressant. Mais je pense que notre principal propos, c'est de dire qu'il faut que les rôles soient clairs. Qu'ensuite certaines personnes doivent en consulter d'autres, c'est une chose, et il faut s'assurer que la consultation aura lieu puis qu'elle sera bien faite. Mais ce qu'il ne faut pas faire, c'est créer une espèce de zone grise où on ne sait plus très bien qui fait quoi. Et on estime que le principe de subsidiarité introduit ce brouillage au niveau des rôles qui risque d'être pernicieux, et à ça s'ajoutent des délégations possibles de pouvoirs des commissaires à des directeurs d'école, des enveloppes dédiées. Donc, il y a toute une série de mécanismes dans ce projet de loi là qui risquent d'entraîner un brouillage qui ne sera pas du tout bénéfique pour, justement, les consultations qui devront être tenues.

M. Proulx : Il me reste combien de temps, Mme la Présidente?

La Présidente (Mme Rotiroti) : Beaucoup, M. le...

M. Proulx : Il nous reste-tu du temps?

La Présidente (Mme Rotiroti) : Ah! oui, il vous reste encore six minutes.

M. Proulx : D'accord. J'ai mon collègue de D'Arcy-McGee qui a une question pour vous. Juste avant, je voulais vous entendre sur les services de garde éducatifs qui sont à l'intérieur de nos établissements. Vous y faites référence à l'égard du régime pédagogique. Quelques mots juste pour bien situer vos attentes à cet égard-là, puis, ensuite, je vais laisser mon collègue vous poser sa question.

• (11 h 50) •

Mme de Sève (Véronique) : Bien, on le dit depuis... et ça fait partie de nos revendications, qu'il soit, en fait, inclus dans le régime pédagogique parce que je pense que, quand il a été mis en place, on était dans la mouvance aussi, hein, des services de garde éducatifs, 5 $, etc., tout ça, et il y a eu vraiment un besoin qui a été créé, et, je pense, il y a peu d'écoles qui n'ont pas de service de garde. Souvent, c'est parce que c'est peut-être plus une question du nombre qu'autre chose, mais c'est vraiment quelque chose qui fonctionne.

Sauf que ça a été quand même mis en place de façon parallèle, et c'est là que... et là on le voit, puis on le dit, dans une situation où on sait qu'actuellement 70 % du budget vient de l'allocation des parents, donc, qui paient quotidiennement, et, à la fin de l'année, si le service de garde a des surplus, bien, la ponction se fait ailleurs, et non réinvestir dans le service de garde pour, justement, améliorer soit le matériel, soit le régime pédagogique, etc., donc ça fait en sorte... Et, comme il y a, je dirais, quelque chose de parallèle, bien, c'est sûr qu'à un moment donné jusqu'à quel point ces personnes-là ont vraiment leur mot à dire, encore là, dans le quotidien de l'école? Encore là, c'est inégal, il y en a que ça fonctionne mieux, mais, de façon générale, le programme est fait comme ça.

Alors, c'est pour ça que nous, on dit : Il faut que ça soit comme ça, et ça va être bénéfique pour tous, pour tous, ce service-là. Et, pour avoir été — petite anecdote — éducatrice en service de garde en milieu scolaire pendant quelques mois, lorsque j'étais éducatrice au Centre jeunesse Laval — je ne travaillais pas beaucoup, ça fait que, hein, on cherche des places — bien, moi, ça m'est arrivé, à un moment donné, de détecter une difficulté chez un enfant, puis je ne comprenais pas pourquoi, puis j'ai réalisé que les parents se séparaient. C'est simple, mais l'enfant était bouleversé, et personne n'avait vu qu'il commençait à avoir des problèmes de comportement, plus agressif, et tout ça. À un moment donné, bien, c'est par mon intervention, par le quotidien que j'avais avec ce jeune-là, que j'ai pu dire : Bien, regarde, on va travailler ça, puis on a pu travailler comment on fait ça, c'était quoi, le dialogue qu'on avait avec les parents aussi. Et ça, bien, ça avait nécessairement des répercussions lorsque qu'il a été en classe, et tout ça. Alors, il faut le travailler en équipe-école, j'allais dire, en symbiose, là, mais pour que... puis là on travaille vraiment sur la réussite des tout-petits, là.

M. Proulx : Merci beaucoup. Merci, pour moi, de votre participation. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci. Alors, M. le député de D'Arcy-McGee, il vous reste trois minutes.

M. Birnbaum : Merci, Mme la Présidente. Bonjour, Mmes de Sève, Pineau, Audet et Tremblay. Merci pour votre exposé et votre contribution à notre débat très intéressant, il est très apprécié. Vous avez fait référence à l'adéquation entre la formation et les besoins de main-d'oeuvre, et je cite dans votre mémoire, vous dites : «Nous tenons à rappeler que le réseau de l'éducation ne saurait être asservi aux seuls besoins des entreprises. Instruire, socialiser et qualifier les élèves dans une perspective d'égalité des chances et d'épanouissement, voilà le rôle du système d'éducation.»

Bon, pour avoir oeuvré au sein du réseau des écoles publiques pour 16 ans, je suis très à l'aise avec votre définition de fond. Voilà la tâche fondamentale. En même temps, j'ai l'impression que, les parents du Québec, leurs enfants comptent sur nous aussi de préparer leurs jeunes pour les réalités du Québec. Une de ces réalités, c'est qu'il y a quelque 750 000 postes qui vont s'ouvrir dans les prochaines années. Et le problème actuel au Québec, ce n'est pas le chômage, c'est l'arrimage entre ces postes et les capacités de nos jeunes, de nos futurs employés à combler ces postes-là. Donc, moi, j'ai un petit peu de difficultés à voir un conflit entre cette exigence-là et les réalités bien fondées, on en convient, d'une mission centrale de l'école.

Je suis curieux, est-ce que vous ne voyez pas un arrimage dans ces priorités-là? N'y a-t-il pas un rôle tout à fait légitime à l'école publique, un rôle aux profs, aux employés de soutien des professionnels, d'appuyer nos jeunes en se préparant pour les réalités du monde du travail du Québec?

La Présidente (Mme Rotiroti) : ...

Mme Pineau (Anne) : Oui, merci. Écoutez, on ne nie pas, là, que le système d'éducation, à terme, doit assurer aux gens une formation qui va leur permettre d'occuper un emploi ou d'avoir... mais le premier souci du système d'éducation, et particulièrement au primaire, secondaire, c'est certainement d'éduquer les enfants, de leur donner une formation générale, d'en faire des citoyens épanouis, des citoyens qui vont être ouverts sur le monde, et qui vont pouvoir se débrouiller dans le monde, et auxquels on aura donné les outils pour ce faire.

Donc, le souci de l'adéquation formation-emploi, le problème actuellement, c'est que c'est en train de prendre toute la place en matière d'éducation. Il semble que c'est devenu le seul objectif du système d'éducation à plusieurs égards. On le trouve dans tout ce qui concerne la formation en matière professionnelle, c'est une chose. Mais ici, de plus en plus, on sent que l'adéquation est l'objectif ultime du système d'éducation, ce avec quoi nous ne sommes pas d'accord.

En outre, l'adéquation formation-emploi, c'est aussi souvent une vision très pointue d'une formation. C'est la capacité à répondre aux besoins de l'entreprise «here and now», et non de développer une personne dans toute sa globalité, des techniciens qui sont capables de s'ajuster et qui n'ont pas à revenir régulièrement sur les bancs d'école pour être capables d'avancer avec les nouveautés technologiques.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci beaucoup. Merci. Le temps est écoulé.

Mais je vais juste suspendre quelques instants. On va traverser de l'autre côté, dans le salon bleu, on a un vote, et on vous revient. Alors, demeurez à votre place, oui, on va être de retour dans quelques instants. Merci.

(Suspension de la séance à 11 h 57)

(Reprise à 12 h 15)

La Présidente (Mme Rotiroti) : Alors, merci beaucoup pour votre patience. On est de retour. Alors, on venait de finir le bloc du côté gouvernemental et on passe à l'opposition officielle. Je cède la parole à Mme la députée de Pointe-aux-Trembles pour une période d'environ 10 minutes.

Mme Léger : Merci, Mme la Présidente. Je souris parce que notre vie parlementaire est ainsi faite, on court voter, on rentre, on revient, on repart, on se remet dans le sujet.

Alors, bonjour, mesdames. Contente de vous voir au salon rouge, au parlement. Évidemment, il y a plusieurs questions, mais j'aimerais revenir particulièrement sur celle des services éducatifs. Vous l'avez abordée, mais moi, j'aimerais l'aborder un peu plus dans le sens du régime pédagogique tel quel parce que le régime pédagogique, c'est... Vous aimeriez, en tout cas, dans vos recommandations, de reconnaître les services de garde éducatifs à titre de services complémentaires, tel que défini au régime pédagogique. Pour se remettre dans le bain un peu... Parce que le régime pédagogique, dans le fond, inscrit des services complémentaires dont... Parce que, dans nos classes, on a des activités éducatives, mais il y a aussi des activités en dehors d'une classe, et qui sont des activités, quand même, qui sont des activités d'apprentissage, d'autres types d'activités, et vous voyez que les services de garde... vous aimeriez qu'ils soient vraiment inscrits comme services complémentaires, donc, du régime pédagogique. Est-ce que vous pouvez, un peu, élaborer?

Mme Audet (Julie) : Oui, bonjour. Donc, quand on regarde, en fait, dans notre mémoire, on mettait la définition d'un service complémentaire dans le régime pédagogique. Et on nous donne une liste de caractéristiques de ces services-là, et on donne des exemples comme étant des services de vie scolaire visant à contribuer au développement de l'autonomie, du sens des responsabilités de l'élève, de sa dimension morale et spirituelle, de ses relations interpersonnelles et communautaires, ainsi que son sentiment d'appartenance à l'école et à la société. On nous parle aussi d'autres services qui donnent à l'élève un environnement favorable au développement de saines habitudes de vie, de compétences qui influencent de manière positive sa santé et son bien-être. Et, pour nous, c'est la définition des services de garde en milieu scolaire, ça répond vraiment à ces deux objectifs-là.

Donc, on pense que le pas devrait être fait pour reconnaître que ce sont des services éducatifs, et non des services de garde, de surveillance, qui ne sont là que... Un peu au début, c'était plus une idée, peut-être, de conciliation famille-travail. C'est toujours là, ça demeure comme préoccupation, mais là on voit qu'il y a une partie éducative qui est très importante aux services de garde, et c'est pour ça qu'on pense que ça répond aux services complémentaires. On pense que ça devrait être plus intégré dans le projet éducatif de l'école et qu'il y a des ponts à faire aussi entre ce qui est enseigné et ce qui est, après, vu... ou les apprentissages qui sont faits d'une manière beaucoup plus ludique aux services de garde.

Et souvent ce qu'on se rend compte, même la manière que les services de garde sont faits et les horaires de cours, que l'enseignant et l'éducatrice ou l'éducateur du service de garde ont peu de temps pour se parler, justement, de se parler aussi, comme Mme de Sève disait, lorsqu'il y a une problématique d'un enfant. On voit quelque chose, comment faire cette transmission-là de l'information? Donc, on espère qu'ils soient reconnus partie prenante du projet éducatif, et, vraiment, toute la dimension éducative soit mise de l'avant, qu'il y ait une reconnaissance. Et même, nous, ça fait longtemps qu'on demandait aussi un rehaussement de la formation des éducateurs pour, justement, faire valoir cet aspect-là. Et on se dit : Les enfants, ils passent quatre heures souvent au service de garde en milieu scolaire. Ce n'est pas rien, c'est un nombre d'heures assez important. Donc, il y a des ressources qui sont déjà là, il y a un système mis en place dans les écoles, essayons alors d'en profiter puis de le bonifier au service de la réussite des élèves.

Mme Léger : Je pourrais en parler longtemps, longuement avec vous, de ce dossier, mais on a comme peu de temps, quand même, aujourd'hui.

Je voudrais revenir particulièrement... Je sais que vous êtes défavorables aux projets de loi, et antérieur, le 86, et 105 aujourd'hui, pour plusieurs raisons que vous avez élaborées. Vous apportez quand même certaines recommandations. Certaines d'entre elles ne touchent pas nécessairement le projet de loi n° 105. Je pense à la gratuité scolaire, bon, les services éducatifs, il y a un lien. Ça a tout un lien parce que c'est tout le milieu de l'éducation qui touche, dans le fond, à des dossiers ou des enjeux qui sont importants pour notre société. J'imagine que vous allez participer avec les grandes consultations qui vont se faire sur l'éducation. On leur a dit hier, on leur a dit quand même qu'on aurait aimé que ce soit fait avant de faire ce projet de loi là. Mais, en même temps, ça fait longtemps qu'on attend aussi qu'il y ait quelque chose qui soit sur la table par le gouvernement qui est devant nous.

Outre ça, vous faites le lien avec le jumelage... Les premières consultations, personne ne nous en a parlé depuis hier. La dernière fois, au projet de loi n° 86, oui, du jumelage des élections scolaires et municipales. Comme c'est un pan qui a été complètement enlevé du projet de loi maintenant, vous le ramenez quand même parce que vous voulez réitérer cette action-là du gouvernement. Est-ce que vous pouvez en parler un peu?

• (12 h 20) •

Mme de Sève (Véronique) : Bien sûr. En fait, quand on soulignait cette importance-là, lorsque tout l'aspect des élections dans les commissions scolaires était dans le projet de loi n° 86, c'était principalement parce que... Ce n'est pas parce qu'il y a un faible taux de participation à une élection que, nécessairement, ça ne justifie pas cette élection-là. Et on le sait, les élections scolaires, c'est probablement la plus vieille démocratie qu'on connaît, et il faut maintenir ça.

Maintenant, pour améliorer, justement, la... dans le fond, pour s'assurer que les personnes sachent vraiment à quoi ça sert, bien, je pense qu'il y a évidemment de la sensibilisation. Mais, si on était capables de jumeler ça à une autre élection qui est un palier, je dirais, plus «proximatif», donc les élections municipales, bien, ça pourrait être un élément intéressant. Je sais que le directeur des élections était venu vous parler de ça — il était, je pense, l'intervenant avant nous en avril — et lui aussi, il trouvait qu'il y avait des éléments intéressants à faire pour maintenir ce palier démocratique là et aussi le favoriser. Parce que je pense que, parfois, les gens ne vont pas voter parce qu'ils sont désabusés de la politique, mais parfois aussi c'est parce qu'ils ne connaissent pas à quoi ça sert. Et je pense que, sur la question des élections scolaires, il y a plus une méconnaissance qu'un désabusement.

Mme Léger : En tout cas, dans le projet de loi n° 105, c'est retiré, on n'entend plus parler des élections scolaires, on n'entend plus parler de l'abolition des commissions scolaires. On ne sait pas ce que le gouvernement veut faire avec tout ça. Tout ce qu'on sait, c'est que le projet de loi n° 105 qui est devant nous, il n'y a rien de ça.

Par contre, il se garde quand même les pouvoirs du ministre. Alors, c'est sûr que j'aimerais vous en parler parce que je trouve important ce point-là. Le ministre doit être tanné de m'entendre parler du pouvoir du ministre, mais je trouve qu'il en a trop, et il y en a un petit peu trop dans le projet de loi qui est là parce que, là, il donne des directives sur le fonctionnement, sur l'administration. Et vous l'avez glissé tout à l'heure, même en cours d'année, il peut faire certaines modifications. Moi, je pense que ça devrait être assez exceptionnel, tout simplement. Et vous ne l'élaborez pas, là, mais... vous ne l'avez pas dit tel quel, j'aimerais ça vous entendre.

Mme Audet (Julie) : Oui. Bien, en fait, effectivement, un des pouvoirs dans le projet de loi n° 86 qui est ramené vraiment au projet de loi n° 105, et c'est vraiment... on a l'impression que c'est un peu une possibilité de faire de la microgestion parce que, comme vous le disiez, c'est des directives... l'administration, l'organisation, le fonctionnement, les règles budgétaires, une possibilité de changer aussi en cours d'année... Donc, quand on a une école ou une commission scolaire... quand la commission scolaire établit son budget, fait ses prévisions pour ses activités, son fonctionnement, la possibilité qu'il y ait une modification en cours d'année, bien, ça peut déstructurer quand même toute une prévision, et on s'explique mal, en fait, pourquoi... Parce qu'effectivement, quand il y a des cas d'illégalité, la loi actuelle permet au ministre d'intervenir, mais pourquoi intervenir plus précisément dans la gestion quotidienne? Nous, on ne sentait pas ce besoin-là. Au contraire, on a l'impression qu'il faut aussi donner aussi une confiance, redonner la confiance aussi aux élus, les commissaires. Parce qu'on parlait aussi... le taux de participation aux élections, si on a l'impression que les décisions à la commission scolaire sont décidées soit par le ministre ou par un comité de répartition des ressources, bien, ça va intéresser moins les gens aussi à y participer. Des fois, on peut faire des liens entre différents types de gestion.

Mme Léger : C'est parce qu'on parle... Le ministre parle beaucoup d'autonomie, de laisser l'autonomie aux acteurs et de décentralisation, mais, en même temps, il inscrit les pouvoirs du ministre à un niveau beaucoup plus large et beaucoup plus important que ce qu'il devrait avoir comme pouvoirs. Ça, d'une part.

Alors, j'ai peu de temps. J'aurais aimé vous parler un peu du comité de répartition des ressources, que vous semblez en désaccord, et vous trouvez qu'il y a des mécanismes actuellement de consultation qui devraient être, en tout cas, mieux... pas mieux définis, mais y donner, dans le fond, d'autres... je veux dire, renforcir peut-être les mécanismes de consultation, mais on aura une autre occasion.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci, Mme la députée. On va passer du côté du deuxième groupe de l'opposition, et je cède la parole à M. le député Chambly pour environ 6 min 30 s.

M. Roberge : Merci, Mme la Présidente. Mes salutations à tous mes collègues, M. le ministre. Merci pour votre présentation. J'ai bien aimé votre mémoire et je vais m'attarder aux recommandations 5 et 6 que vous faites à la fin. Vous y faites référence aux pages 14, 15; 5, vous parlez des écoles illégales; 6, des enfants qu'on dit sans papiers. C'est quelque chose dont on ne parle pas. C'est vraiment de grands absents de ce projet de loi là. Moi, je les vois en trois catégories : les exclus, les oubliés, les laissés-pour-compte. Les exclus, bien, c'est les jeunes qui fréquentent des écoles illégales ou clandestines. Il n'y a rien dans ce projet de loi là pour ça. Les oubliés, c'est ceux qui font l'école à la maison. Et il y a un rapport de la Protectrice du citoyen qui dit qu'il faut agir là-dedans, il n'y a rien là-dedans, dans le projet de loi. Puis les laissés-pour-compte, bien, c'est les sans-papiers, ceux dont leur situation juridique, là, légale n'est pas clarifiée, touchée là-dedans. Puis, je veux dire, c'est la charte de déclaration des droits de l'homme, ça touche notre Loi sur l'instruction publique. On a un projet de loi qui modifie la Loi sur l'instruction publique, puis on trouve le moyen de ne pas en parler, c'est assez incroyable. Vous, vous en faites deux de vos sept recommandations, je suis d'accord avec vous. Est-ce que vous pouvez nous dire de quelle façon on pourrait améliorer ce projet de loi là pour tenir compte des exclus, des oubliés, des laissés-pour-compte?

Mme Pineau (Anne) : Oui. Bien, merci. Effectivement, vous avez entièrement raison, on peut bien parler de la Loi sur l'instruction publique, mais il y a des enfants qui n'y ont pas accès actuellement ou qui n'y ont pas accès dans toute la mesure possible. Donc, pour nous, on était très déçus de voir que le projet de loi ne reprenait pas les dispositions sur le projet de loi n° 86 concernant les enfants sans papiers. Encore que nous estimions à l'époque que ça n'allait pas assez loin, ce qui était proposé dans le projet de loi n° 86, ici on n'a rien du tout. Bon, nous avons entendu hier le ministre dire que, bon, on était en train de travailler sur la question. Alors, on espère qu'effectivement cette question-là va revenir, et de façon urgente, parce que c'est un problème inadmissible.

Les écoles illégales, c'est un problème récurrent. De façon régulière, ça revient dans l'actualité. Pourtant, c'est le droit à l'éducation, qui est un droit fondamental. La convention des droits de l'enfant, le pacte sur les droits civils et politiques, le PIDESC, la Charte des droits, tout ce corpus de lois là nous dit que l'enfant a le droit à une éducation, et il faut prendre les moyens pour assurer ce droit-là.

À l'heure actuelle, il y a des écoles illégales où on n'enseigne pas les matières qui sont obligatoires, où on a des enseignants sans brevet, où on a des bulletins qui ne sont pas conformes, du matériel didactique qui n'est pas utilisé alors qu'il est prescrit, des temps d'enseignement qui sont prescrits non respectés. Et on sent qu'il y a un problème, là, parce qu'encore en juin dernier — en tout cas, ce que rapportait Le Journal de Montréal — c'est que le ministre n'avait pas les pouvoirs suffisants pour régler ce problème-là. De plus en plus, on va vers l'école à la maison, mais quel suivi sera fait pour assurer que la pédagogie et les connaissances seront bien évaluées?

On en parle depuis longtemps. En juin 2014, on nous disait qu'il y avait un comité interministériel qui avait été mis sur pied. Où en sont les travaux? Alors, nous, on estime qu'il faut s'attaquer à cette question-là, qui est fondamentale, puis c'est pour ça qu'on amène le problème, parce qu'on fait des modifications à la Loi sur l'instruction publique, mais quand s'attaquera-t-on à cette question? Et qui est délicate, mais qui est incontournable.

M. Roberge : La pire des solutions, c'est de ne rien faire. Une solution même imparfaite serait mieux que le laisser-aller. Et il y a des pistes quand même dans votre mémoire, vous dites : «Le ministre aurait tout intérêt à s'inspirer des recommandations des mémoires sur le projet de loi n° 86 de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse et du collectif sans frontières...»

Donc, il y a des gens qui ont fait du travail. Ce n'est pas vrai qu'on part de rien puis que, là, tout à coup, on se réveille, on dit : Oh! qu'est-ce qu'on ferait bien pour ces jeunes élèves sans papiers ou ces exclus, ces laissés-pour-compte? Il y a des gens qui ont travaillé. Et, dans d'autres provinces — puis ça, c'est vraiment gênant — on les scolarise, ces jeunes-là. Comment ça se fait que, nous, c'est trop compliqué? On n'ouvrira pas la Loi sur l'instruction publique à toutes les semaines, donc il me semble qu'on a une occasion à saisir. Il me reste quelques secondes, peut-être une minute, pour vous dire que...

• (12 h 30) •

La Présidente (Mme Rotiroti) : Une minute et quelques secondes, là.

M. Roberge : ...la proposition 3 me semble extrêmement importante, «valoriser l'expertise de tous les personnels de l'éducation». Concrètement, vous souhaiteriez quoi dans ce projet de loi pour valoriser réellement le personnel?

Mme de Sève (Véronique) : Bien, reconnaître leur travail, les consulter. Parce que je l'ai dit dans une de mes interventions, le personnel enseignant est souvent le personnel qui est d'office, on pense à eux comme... Dans le milieu de la santé, c'est les infirmières, c'est les médecins. Et ils ont un rôle extrêmement important. Ça, on le sait, mais il y a tous les autres. Et souvent tous ces autres-là, à géométrie variable, ils sont reconnus un peu, pas du tout. Et souvent, si on pouvait s'en passer dans les consultations, on le ferait. Et ils font partie de l'équipe-école, ils font partie de l'éducation, ils font partie des commissions scolaires, et c'est pour ça que nous, on pense qu'ils doivent être reconnus, valorisés. Pas juste dire : Aïe, bravo! Petite tape dans le dos, mais qu'est-ce que tu en penses? As-tu une solution? Comment tu vois ça? On le sait, à la commission scolaire de la CSDM, s'il n'y avait pas eu les concierges qui n'avaient pas fait de l'entretien ménager, on ne saurait pas l'étendue des dégâts par rapport à la moisissure. Mais ça aussi, c'est important. Et c'est ça, valoriser.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci beaucoup. Alors, je remercie la Confédération des syndicats nationaux pour votre contribution à nos travaux.

Je suspends quelques instants pour permettre au prochain groupe, la Fédération autonome de l'enseignement, de prendre place. Merci.

(Suspension de la séance à 12 h 32)

(Reprise à 12 h 34)

La Présidente (Mme Rotiroti) : Alors, rebonjour. Je souhaite la bienvenue à la Fédération autonome de l'enseignement. Merci d'être parmi nous. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour faire votre présentation. Je vous demanderais de vous identifier, ainsi que les gens qui vous accompagnent. Et vous pouvez, tout de suite, passer à votre exposé. Par la suite, on passera à une période d'échange entre les élus. Alors, la parole est à vous.

Fédération autonome de l'enseignement (FAE)

M. Mallette (Sylvain) : Merci, Mme la Présidente. Donc, mon nom est Sylvain Mallette. Je suis enseignant en géographie et en histoire et président de la Fédération autonome de l'enseignement. À ma gauche, je vous présente Mme Nathalie Morel, qui est enseignante au primaire et vice-présidente à la vie professionnelle. Et, à ma droite, M. Yves Cloutier, qui est conseiller à la vie professionnelle.

Je tiens à préciser qu'une cinquantaine d'enseignantes et enseignants nous accompagnent aujourd'hui. Ceux-ci mènent en ce moment aux abords du Parlement des activités de visibilité et d'information dont le but est de rappeler l'importance de reconnaître l'expertise enseignante.

Franklin Delano Roosevelt, qui fut le 32e président américain, se plaisait à dire : «En politique, rien n'arrive par hasard. Chaque fois qu'un événement survient, on peut être certain qu'il avait été prévu pour se dérouler ainsi.» Le projet de loi n° 105 se veut donc la réponse du gouvernement à des années d'improvisation et de mauvais choix. Bien qu'il laisse de côté plusieurs mesures néfastes contenues dans le défunt projet de loi n° 86, le projet de loi qui fait l'objet des travaux de la commission ne répond à aucun des besoins légitimes exprimés par les enseignantes et enseignants. Cependant, le projet de loi répond à certaines revendications portées par d'autres groupes. Comment expliquer cette étrangeté, si ce n'est que la parole de certains a été relayée par les mêmes vieux réseaux qui fonctionnent toujours aussi bien pour eux, mais jamais pour les profs?

Dans les faits et encore une fois, le gouvernement fait le choix de laisser pour compte les enseignantes et enseignants du Québec. Pourtant, le ministre et le premier ministre eux-mêmes reconnaissent que le temps est venu d'écouter les experts qui sont dans la classe. Les enseignantes et enseignants ont assez attendu. Rien ne justifie qu'aucune des revendications portées par les enseignantes et enseignants ne trouve écho dans le projet de loi n° 105. Rien ne justifie ce silence assourdissant. Dès maintenant, alors que la Loi sur l'instruction publique est ouverte, le ministre peut poser un geste fort à l'intention des enseignantes et enseignants, qui sont celles et ceux qui font la classe, qui sont aussi celles et ceux qui doivent travailler dans des conditions souvent difficiles, qui sont également celles et ceux qui se font imposer depuis trop longtemps des réformes venues d'en haut qui dénaturent leur travail tout en restreignant leur autonomie professionnelle. Le statu quo n'est pas une option.

J'invite Mme Morel à vous présenter brièvement les solutions que nous proposons, particulièrement en lien avec les articles 19, 20, 96.12 et 96.15 et l'abandon de la désastreuse gestion axée sur les résultats.

Mme Morel (Nathalie) : M. le ministre, Mmes, MM. les commissaires, bonjour. Lors de notre audition portant sur le projet de loi n° 86 en mars dernier, nous vous avons illustré la nécessité, pour les enseignantes et enseignants que nous représentons, de faire respecter l'expertise de chacun des groupes en présence en éducation. Vous vous souviendrez peut-être que nous vous avions, à ce moment, dit référer au fait que nous ne souhaitions pas devenir les parents de nos élèves ni nous immiscer dans la gestion des commissions scolaires ou des écoles, mais que nous revendiquions, en contrepartie, la réciproque envers notre profession. En d'autres mots, à chacun son rôle, à chacun son métier. Et le nôtre est celui de la pédagogie et de l'enseignement. Ce que vous aviez, à ce moment, M. le ministre, dit comprendre et même respecter.

Vous avez aujourd'hui l'occasion, en modifiant la Loi sur l'instruction publique avec le projet de loi n° 105 — chose qu'on ne fait que très peu dans l'histoire du Québec, vous avez donc une occasion unique — d'aller dans le sens direct de cette affirmation. En effet, les encadrements légaux actuels donnent très peu de place et de respect à l'exercice de l'autonomie professionnelle du personnel enseignant. Qu'on parle du caractère sibyllin de l'article 19, du pouvoir d'approbation des directions d'établissement à l'article 96.15, qui s'apparente bien plus à un droit de veto, au libellé de l'article 96.12, qui attribue la direction pédagogique d'une école ou d'un centre aux directions d'établissement seulement, aux pouvoirs trop étendus en matière de pédagogie des conseils d'établissement et à leur composition qui marginalise souvent le personnel enseignant, ce sont tous des exemples probants non seulement des limites, mais aussi des obstacles à un espace réel de décision pour les profs au niveau de la pédagogie.

De plus, et particulièrement depuis 2004, les encadrements législatifs et réglementaires de contrôle et de reddition de comptes se sont multipliés. Pensons aux conventions de gestion de réussite éducative, aux conventions de partenariat. On s'immisce de toutes parts et de tous les côtés dans notre pratique, on n'a plus le choix des moyens à utiliser. Mais, en plus, on veut nous rendre imputables des résultats obtenus par nos élèves. Eh bien, nous sommes venus vous demander aujourd'hui, M. le ministre, de mettre fin à ce régime de non-respect et de non-confiance envers le personnel enseignant et d'apporter des modifications à la Loi sur l'instruction publique pour nous démontrer concrètement et véritablement que notre expertise, notre rôle et notre jugement professionnels seront, à l'avenir, expressément reconnus et garantis dans la loi.

En guise d'exemple, nous vous demandons de modifier les articles 19 et 22 et d'introduire un nouvel article qu'on pourrait appeler un 20e article de la LIP afin de délimiter formellement notre espace d'autonomie professionnelle tant d'un point de vue individuel que collectif. À titre d'exemple, la Fédération autonome de l'enseignement vous propose de réécrire l'article 19, qui s'intitule Droits de l'enseignant, de la façon suivante :

«Dans le cadre des programmes de formation et des dispositions de la présente loi, ainsi que dans le respect de son autonomie professionnelle individuelle, de son jugement et de son expertise, l'enseignante ou l'enseignant a le droit de diriger la conduite du ou des groupes d'élèves qui lui sont confiés, de choisir la démarche appropriée pour la préparation et la présentation de ses cours, de choisir ses modalités d'interventions pédagogiques, son matériel didactique et ses instruments d'évaluation.» Tout simplement, mais bien concrètement.

• (12 h 40) •

Dans le même sens, nous vous proposons de modifier également les articles 96.12 et 96.15 de la LIP afin de donner aux équipes enseignantes un espace pour prendre démocratiquement, dans chacun des établissements scolaires, les décisions qui s'imposent en matière de pédagogie, notre expertise première.

Finalement, il est impératif que l'ensemble des outils et mesures de la gestion axée sur les résultats soient retirés de nos établissements scolaires où ils n'ont tout simplement pas leur place. Nous travaillons avec des êtres humains, et non pas avec des objets ou des machines. Il y a une multitude de facteurs qui influent sur les résultats scolaires de nos élèves. Cessons cette approche marchande qui encourage bien plus les mensonges et le nivellement par le bas pour revenir à une planification saine et raisonnable des besoins de nos élèves et des moyens à prendre pour les aider.

En conclusion, MM. et Mmes les parlementaires, vous devez être conscients que les enseignantes et les enseignants du Québec attendent aujourd'hui beaucoup de votre part, soit des gestes concrets de reconnaissance et de respect. Dire qu'on doit nous reconnaître notre expertise, dire qu'on doit valoriser notre profession n'est plus suffisant, il faut maintenant l'écrire dans la loi.

Souvenez-vous enfin que toutes les réformes et tous les changements qui se sont faits en éducation malgré ou en dépit du personnel enseignant et de leurs élèves ont connu un cuisant échec. Comme le médecin qui est au coeur des décisions du système de santé, l'avocat, comme vous nous l'avez fait remarquer, M. Proulx, qui est au centre de celles du système juridique, nous vous demandons, M. le ministre, de placer le personnel enseignant et leurs élèves au coeur des décisions que vous prendrez au sujet du projet de loi n° 105. Merci.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci à vous. Alors, on est maintenant rendus à la période d'échange, et je cède la parole à M. le ministre pour environ 10 minutes.

M. Proulx : Merci, Mme la Présidente. Merci de votre présence. Très heureux d'avoir l'occasion de vous revoir. Ça m'a fait sourire parce que, quand vous avez lu la conclusion que j'avais lue, j'avais l'impression de connaître le gars qui avait dit ça. J'avais comme cette impression-là.

Vous parlez dans votre mémoire... Puis c'est une chose que je pense qu'il est nécessaire qu'on discute, c'est sur la décentralisation de sommes vers les établissements parce que... Et, dans le fond, c'est pour comprendre votre point de vue parce que vous n'êtes pas le seul groupe à le dire ainsi. J'entends des directions d'école, des gens près de l'école dire : C'est une bonne idée d'avoir la possibilité d'avoir une certaine autonomie, de la flexibilité à l'égard des ressources dans l'établissement, de faire parfois des choix un peu différents de ce qui se fait ailleurs, même dans une école pas loin, une école à côté, de pouvoir avoir des projets particuliers. Par contre, vous dites : Ah! bien non, il faudrait que ça demeure, si je vous comprends bien, il faudrait que ça demeure aux commissions scolaires. D'abord, parce que ça va créer de la bureaucratie, mais en même temps... J'essaie de réconcilier la nécessité d'autonomie, la nécessité et l'avantage de la collaboration à l'échelle de l'établissement, mais en n'ayant pas des moyens financiers pour vous permettre de l'exercer.

Mme Morel (Nathalie) : ...quand vous parlez d'autonomie, je ne suis pas certaine qu'on parle de la même chose. Nous, on ne parle pas d'autonomie des écoles, on parle de l'autonomie professionnelle des enseignantes et des enseignants. Donc, on parle des choix individuels ou collectifs que le prof a à faire au quotidien, donc, pour faire son travail correctement, on ne parle pas de prendre des décisions de tous ordres.

Quand vous parlez de décentraliser les sommes vers les établissements, ce n'est pas, dans notre mémoire que vous avez lu, là, une position farouchement contre. On questionne, on questionne la décentralisation parce que — et je vais me permettre de vous le dire comme ça — quand vous dites : On décentralise vers les écoles, donc on donne plus d'autonomie au milieu, on regrette, ce n'est pas plus d'autonomie décisionnelle au milieu, la décision relèvera toujours de la direction d'établissement actuellement dans les encadrements légaux. Si vous nous dites : On va décentraliser des sommes vers les écoles et on va donner au personnel enseignant par écrit dans les encadrements légaux des pouvoirs décisionnels pour ce qui a trait à la pédagogie, qui est notre expertise, là on va se parler d'une autre chose.

Actuellement, les budgets qui sont envoyés dans les écoles... Quand vous dites : C'est les écoles qui décidons, les profs, comme les autres personnels — ou parfois pas — comme nos collègues l'ont dit tout à l'heure, sont consultés, on leur demande leur point de vue, mais ce n'est pas eux qui décident. Alors, ce n'est pas vrai que vous donnez une autonomie décisionnelle aux profs quand vous envoyez des sommes. Vous donnez une complète autonomie et pouvoir décisionnel encore plus grand aux directions d'établissement, qui en ont déjà, selon nous, en matière de pédagogie, trop.

Mais je reviens, on ne veut pas devenir gestionnaires d'école. Les décisions qui ont trait à la gestion de l'école, ça appartient, c'est correct, aux directions d'établissement. Alors, je pense qu'il ne faut pas confondre la question de l'autonomie professionnelle et la question d'autonomie en termes de décisions à prendre dans les écoles. Présentement, les sommes que vous avez décidé, dans les règles budgétaires, d'acheminer pour cette année dans les milieux, bien, ce qu'on entend, c'est que les enseignants n'ont pas voix au chapitre dans les écoles, ou que très peu, on leur annonce des décisions qui ont été prises pour l'utilisation de ces budgets-là. Alors, c'est là le danger, c'est que vous avez une impression que vous décentralisez vers les milieux, vers les écoles, vers les personnels, mais, si ce n'est pas écrit nulle part dans les encadrements légaux ou dans nos contrats de travail qu'on peut ou on a une place pour décider, bien, on n'est que consultés. Puis, si on ne suit pas, même si l'unanimité des profs veulent quelque chose, si la direction veut autre chose, elle a le veto.

Alors, c'est là, je pense, qu'il faut faire attention, quand vous amenez la notion d'autonomie puis de décision en pensant que, parce que vous envoyez des sommes dans les écoles, on va avoir notre mot à dire, les enseignants, en termes de décisions. Oui, on est souvent consultés, mais, si on n'est que consultés puis que notre consultation, dans le fond, ça résulte en... ce n'est pas ce que la direction souhaite, bien, la direction va faire ce qu'elle pensait. Puis elle le peut parce que c'est ça que les encadrements légaux actuels lui donnent comme pouvoir.

M. Proulx : Pour que je comprenne bien, si vous dites... Je ne veux pas vous mettre les mots dans la bouche, là, mais j'entends ce que vous dites, c'est : Votre geste, qui pourrait être le bon geste, m'apparaît incomplet — mettons que c'est un peu ça que vous dites, là — pour pouvoir arriver dans un bon contexte où, au-delà de la consultation, vous auriez votre voix au chapitre.

Mme Morel (Nathalie) : Bien, je vous propose d'aller voir dans notre mémoire. À la fin, dans l'annexe, vous avez l'ensemble des propositions de la FAE. L'article 96.95 en est un bon exemple. Ce sont des enjeux pédagogiques, et présentement le libellé dit : Sur proposition des enseignantes, des enseignants, la direction approuve — et là je vous donne un exemple bien concret — les normes et modalités d'évaluation des apprentissages.

Alors, la réalité actuellement dans les milieux, dans les écoles et les centres, les profs se réunissent, élaborent les normes et modalités d'évaluation des apprentissages qu'ils souhaitent et soumettent ça à la direction. La direction peut, même si la totalité ou la majorité des profs souhaite quelque chose, dire : Je n'approuve pas, et ce ne sera pas ça, ce sera ça. C'est ça, le veto qu'on lui donne. Nous, on vous dit : En matière de pédagogie, on devrait donner aux profs un espace réel de décision. La direction peut, bien sûr, contester, argumenter, on discute ensemble, mais la décision, en matière de pédagogie, comprenons-nous bien, devrait appartenir... Puis c'est pour ça qu'on a un nouvel article 20. Il y a des enjeux qui sont individuels. Donc, article 19, c'est l'enseignante ou l'enseignant. Mais on a pensé à un nouveau libellé, justement, pour ces décisions collectives là, on ne va pas décider d'une classe à l'autre : Moi, je vais donner mon bulletin telle date, puis mon collègue va le donner à une autre date. Non, ça, c'est des décisions école, donc ça devrait appartenir à l'autonomie professionnelle collective des équipes enseignantes ou des équipes-centres.

M. Proulx : J'entends bien ça. Vous avez parlé tout à l'heure des... Je reviens un peu à ce que vous dites, l'exemple que vous m'avez donné, les deux articles à modifier, l'ajout de l'article 20, mais est-ce que c'est suffisant...

Des voix : ...

M. Proulx : .On s'excuse pour le bruit, là, c'est maintenant notre quotidien pendant un certain temps. Est-ce que, pour vous, c'est suffisant pour, je vais dire, protéger l'espace que vous souhaitez? Est-ce que ce sont là les seules propositions que vous faites à l'égard de cet espace pour la pédagogie en tant que telle, là?

Mme Morel (Nathalie) : En matière de pédagogie, je vous dirais que c'est sûr qu'on a plusieurs propositions. Dans 10 minutes, on en a choisi quelques-unes, il y en a d'autres. On a ciblé les plus importantes, qui font en sorte... Rappelez-vous, dans le projet de loi n° 86, là, il y avait quelque chose qui avait été introduit comme : On est les experts essentiels. Ça, c'est sûr que ça ne protégeait pas notre autonomie professionnelle, pas du tout. Il est certain que, s'il n'y a pas quelque chose dans la Loi sur l'instruction publique... Il faut que ça se tienne, c'est pour ça qu'on vous parle notamment de ces articles-là : 19, 20, 22, 96.12, 96.15.

Mais toute la gestion axée sur les résultats, si on regarde, par exemple, l'ensemble, je dirais, des outils qui viennent dire par la porte d'en arrière aux profs : Tu dois travailler de cette façon-là, tu dois utiliser telle intervention pédagogique, tu dois modifier, par exemple, les instruments d'évaluation — puis c'est le cas présentement, on met dans les plans de réussite puis dans les conventions de gestion de réussite éducative plein de choses qui relèvent de la pédagogie — bien là on va venir défaire ce qu'on aurait fait par la modification des articles que je vous ai nommés. Alors, c'est pour ça qu'il faut se pencher aussi sur ce modèle-là qui ne va pas du tout avec un milieu qui s'appelle un service public d'éducation, qui est un modèle qui est pour l'entreprise privée. Alors, il faut aussi abolir ça pour que tout ça se tienne.

• (12 h 50) •

La Présidente (Mme Rotiroti) : Deux minutes.

M. Proulx : Deux minutes. Bien, j'ai une courte question qui touche la gestion par résultats. Dans le fond, dit simplement, les indicateurs, il me semble vous l'avoir entendu également au projet de loi n° 86 et dans différentes discussions que vous êtes contre le principe. Qu'est-ce qui, pour vous, est la meilleure mesure pour le ministère... ou quel est le meilleur moyen pour le ministère de voir qu'on s'en va dans la bonne direction, si ce n'est pas d'établir parfois des cibles, des indicateurs? Je ne m'enfarge pas dans les mots, là, j'essaie juste de trouver ce qui, pour vous, est la mesure concrète, correcte, qui respecte vos principes, mais qui va nous permettre à nous de voir si on fait le pas dans la bonne direction.

M. Mallette (Sylvain) : ...qu'on parle de planification stratégique dans le réseau des écoles publiques pour bien comprendre les enjeux puis se donner des objectifs à atteindre, ce n'est pas là, le problème, c'est qu'on a dénaturé l'idée de la planification stratégique. Actuellement, au Québec, là, dans des écoles, on a mis dans certaines commissions scolaires des systèmes en place où c'est un système de couleurs : lumière rouge, verte ou jaune. Et là, en fonction des cibles à atteindre... Parce qu'on ne parle plus des élèves quand on est en rencontre, là, on parle de cibles. Je dois passer de 72 % à 74 % en français secondaire II. On ne parle plus des élèves, on parle des cibles à atteindre, et là la commission scolaire nous envoie le code de couleurs comme si on était sur la route. Mon Dieu, aïe! L'école est rouge, là, on a un code rouge, là, ce n'est pas bon, là. On est à ça, là. C'est à ça qu'on sert actuellement, les profs à qui on confie des élèves. On nous réunit puis on parle de pourcentages, on ne parle plus des élèves.

Bien, qu'on se donne une planification stratégique, qu'on constate des difficultés dans certaines matières auprès de certains élèves qui vivent dans des milieux particuliers, on ne peut pas être contre ça, mais qu'on ne dénature pas les processus, tel qu'on le constate, depuis une dizaine d'années. C'est ça, la réalité, maintenant, là, on a dénaturé une idée qui n'est pas mauvaise pour en faire un mécanisme où, là, on surveille les profs, puis on te fait rentrer dans le bureau de la direction, puis on te pose des questions. Pas si tes élèves vivent en milieu défavorisé, c'est comment ça se fait que ton voisin d'école a obtenu plus que toi dans les résultats qu'on a observés puis qu'on a analysés? C'est ça aussi, la réalité.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci, M. Mallette. Merci. On va passer du côté de l'opposition officielle, et je cède la parole à Mme la députée de Pointe-aux-Trembles pour environ six minutes.

Mme Léger : Oui. Merci, Mme la Présidente. Bonjour, madame. Bonjour, monsieur. On a une discussion de fond, là, c'est vraiment tout ce qui touche à l'autonomie professionnelle, là, puis vous avez commencé à l'aborder avec le ministre. On a la loi ou les lois. On a la reconnaissance des acteurs dans le milieu de l'éducation à un certain niveau, tous les mécanismes de décision, les mécanismes de consultation, tout le volet réussite éducative, d'une part, et tout le volet pédagogie. Dans la classe, dans l'école, l'équipe-école, la commission scolaire, le ministère de l'Éducation, bon, toutes les balises. Bien, j'essaie de démêler des choses dans le quotidien de ce que vous vivez, qu'est-ce qui, au quotidien, ne vous donne pas l'autonomie professionnelle? Grosse question, là. Il y en aurait peut-être beaucoup, là, mais, je veux dire, pour qu'on comprenne davantage, qu'est-ce qui, dans le quotidien, fait que vous le réclamez, vous le revendiquez, vous le dites haut et fort? On le comprend, je pense. Je pense que c'est bien correct aussi, mais qu'est-ce qui, dans le quotidien, dans le fond, ne vous donne pas cette autonomie professionnelle?

Mme Morel (Nathalie) : En partant, je vais vous dire plusieurs encadrements légaux. Et, pour en nommer un premier de taille, c'est le Programme de formation de l'école québécoise. L'actuel Programme de formation de l'école québécoise, avec comme fondement une approche socioconstructiviste, c'est-à-dire basée sur le développement des compétences, vient, dans un premier temps, être constitué de façon à créer davantage des enseignantes et des enseignants, des guides, des accompagnateurs, et là il y a un problème de fond. On s'imagine qu'on va en reparler dans un horizon de quelques semaines ou de quelques mois lors des travaux sur une politique de réussite éducative, mais c'est la première grande entrave.

Actuellement, nous évaluons, nous rendons compte du développement des compétences. Ce qui est correct, on développe les savoir-faire, mais on ne rend pas compte de la maîtrise des connaissances. Donc, on ne donne pas comme fondation au programme actuel celui de l'instruction, celui de la transmission. On a une liste d'épicerie des savoirs essentiels, mais on ne dit pas à l'enseignant : Par exemple, à la fin d'une première année d'études, l'enfant doit avoir acquis tel bagage de connaissances et développer, oui, un certain nombre de compétences. Alors, ça, c'est une première entrave. J'enseigne, mais je dois jeter un regard juste sur le développement des compétences, et non pas sur le bagage de connaissances acquis par mes élèves.

Deuxième encadrement légal, politique d'évaluation des apprentissages avec ce que je viens de vous dire. Régime pédagogique, bien sûr, Loi sur l'instruction publique avec ce qu'on vient de discuter sur le choix des approches pédagogiques parce que, quand on nous dit actuellement dans la Loi sur l'instruction publique, à l'article 19, qu'on a supposément le choix des approches pédagogiques, on le met dans le cadre du projet éducatif de l'école. Et, dans le projet éducatif, souvent on rentre le plan de réussite et là on vient inscrire — je vous donne un exemple concret — des approches dites à la mode qui ne sont pas nécessairement des approches qui ont, disons, été prouvées par, disons, la science.

Un exemple bien probant, justement, la pédagogie par projets. On s'est fait dire, il y a à peu près 15 ans, qu'on devait tourner la page. J'étais en classe en 2001, c'est fini, maintenant c'est la pédagogie par projets, c'est le socioconstructivisme, donc les enfants vont découvrir par eux-mêmes. Ça, c'est une attaque frontale à notre autonomie professionnelle. Et vous avez raison de dire que c'est un débat de fond, et c'est ce qu'on souhaite, un débat de fond. Mais, aujourd'hui, on se fait dire que la LIP va être ouverte, ce n'est pas rien, ouvrir la Loi sur l'instruction publique. Alors, oui, on souhaiterait que ça soit l'ensemble de l'oeuvre qui soit discuté puis qu'on soit capable de se reparler. On espère le faire dans un second temps, mais l'occasion actuelle, c'est la LIP, c'est la Loi sur l'instruction publique.

Mais l'ensemble des encadrements légaux, selon la FAE, c'est pour ça qu'on a élaboré une plateforme pédagogique, de nouvelles progressions des apprentissages. C'est une des raisons pour lesquelles la Fédération autonome de l'enseignement est née, parce qu'on choisit de lutter depuis 2006 pour une autre école. On croit qu'une autre école est possible qui est une école qui, fondamentalement, reconnaît la transmission, l'instruction, l'enseignement. Oui, le développement des compétences, mais, dans «savoir-faire», avant «faire», il y a «savoir», puis c'est ça qu'on a perdu de vue avec l'ensemble des encadrements légaux, puis c'est ça qu'on vient demander particulièrement au ministre d'inscrire dans la LIP, c'est cette possibilité-là de pouvoir choisir nos approches pédagogiques. C'était une grosse question.

Mme Léger : Oui, oui, je le comprends. Je le comprends très bien. Est-ce que vous travaillez avec le ministère actuellement sur cet enjeu-là que vous parlez aujourd'hui? Est-ce qu'il y a un groupe de travail? Après tant d'années, j'imagine que le ministère, quelque part, vous a écoutés? Parce qu'un groupe de travail peut être mis sur place pour élaborer, dans le fond, davantage ce que vous apportez.

Mme Morel (Nathalie) : Alors, il y a eu de multiples tentatives. Nous continuons, nous avons présenté la plateforme pédagogique à au moins trois ministres de l'Éducation. On travaille dans tous les comités, que ce soit le comité des maternelles quatre ans temps plein, le comité du bulletin. Récemment, on a eu des travaux qui se sont échelonnés sur près de deux ans sur le bulletin unique, là, on attend la conclusion de ces travaux-là. Alors, la FAE est au jeu, la FAE est présente dans, je vous dirais, l'ensemble des comités de travail, mais, pour l'instant, il n'y a pas eu d'avancées de fond. Parce qu'on l'a dit tout à l'heure, c'est des questions de fond, dans le sens... Mais, petit à petit, on se rend compte qu'il y a des changements. Ce qu'on aimerait, c'est qu'on regarde l'ensemble de l'oeuvre et surtout qu'on revienne au fondement pour se dire, là, la question, la grande question : De quelle école on veut?

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci beaucoup. On va passer du côté du deuxième groupe d'opposition, et je cède la parole à M. le député de Chambly pour environ quatre minutes.

M. Roberge : Ça va être vite. Merci beaucoup, Mme la Présidente. Je vais parler vite, je vais faire un Louis-José Houde de moi. Donc, j'aime bien votre dernière phrase : «Après tout, l'expert dans la classe, c'est le prof.» Et c'est quand même particulier parce que, dans le projet de loi précédent, 86, c'était dans le préambule, supposément, que le prof était un expert, mais après il n'y avait plus rien. Vous, vous le mettez à la fin, mais c'est comme la conclusion : «Après tout, l'expert dans la classe, c'est le prof.» Mais vous, ça transcende le document, contrairement au projet de loi, où il n'y avait que ça.

Je vais vous questionner sur une chose que vous avez dite tout à l'heure qui m'a interpelé. Vous avez parlé de la gestion axée sur les résultats, qui peut poser problème. Dans le modèle actuel, est-ce que vous pensez que cette façon-là, de la façon que ça s'actualise, il peut y avoir une pression sur les enseignants et les enseignantes dans l'évaluation et, donc, sur les notes carrément? Puis là je ne suis pas en train de jeter la pierre aux enseignants, là, mais plutôt je pointe du doigt le système.

• (13 heures) •

M. Mallette (Sylvain) : Clairement, actuellement, il y a des enseignantes, des enseignants qui, après que les commissions scolaires aient analysé les résultats... convoquent des enseignantes et enseignants, et là on nous demande des comptes, et là littéralement, là. Puis ce n'est pas que c'est arrivé une fois, là, ça arrive fréquemment auprès de profs qui comptent, pour beaucoup, plusieurs années d'expérience, où la direction d'école ou la direction adjointe dit aux profs : Bien là, il y a quelque chose qui ne fonctionne pas, puis il y a de la pression actuellement — parce qu'il faut dire ces choses-là — il y a de la pression qui est exercée sur les profs pour que les profs changent les résultats. Écoute, là, il a 57 %, là, tu ne pourrais pas... Tu sais, 57 %, ce n'est pas loin de 60 %. Puis, oups! des fois, il arrive aussi que des profs reviennent de vacances, puis ils vont fouiller dans le système pour voir si les notes sont restées les mêmes, et étrangement les notes se sont mises gonflées. Probablement le facteur humidex, là, qui a joué, là, mais étrangement les résultats ont été modifiés.

Puis là, après, on vient, cependant, nous dire qu'on est des experts. Mais est-ce qu'on accepterait qu'un médecin, au Québec... est-ce qu'un médecin accepterait que la prescription qu'il donne soit modifiée, que le jugement qu'il porte sur son patient soit modifié? Bien, au Québec, là, dans la classe, il y a le prof puis les élèves, puis il y a une pléthore d'individus — le directeur d'école, le conseiller pédagogique, parfois le parent, des fois le directeur de la commission scolaire, le sous-ministre de l'Éducation, des fois même le ministre — qui viennent dire au prof comment faire le travail. C'est ça.

Nous, ce qu'on dit, là, notre expertise, on l'exerce dans la classe. Laissez-nous l'espace qu'on a besoin pour travailler, on va faire le travail qu'on a à faire, on va rendre compte de ce qu'on fait parce qu'il faut rendre compte aussi de ce qu'on fait. Mais ce n'est pas vrai qu'on va nous dire comment faire le travail puis qu'on va nous rendre responsables des résultats. Ça, ça ne fonctionne plus. Ça ne fonctionne plus, les profs n'en peuvent plus. Puis, aujourd'hui, la LIP est ouverte, puis le ministre peut tout de suite... le gouvernement et les oppositions peuvent poser un geste fort, nous reconnaître l'espace dont on a besoin.

Puis, quand on dit reconnaître l'expertise, là, c'est quoi, c'est de nous remettre un certificat à la fin de l'année en collant des étoiles dessus, des étoiles qu'on va s'être nous-mêmes payées, là? Parce que c'est ça aussi, c'est ça, quand on parle de revalorisation de la profession enseignante au Québec, un certificat une fois par année, une tape dans le dos, puis tu as fais un bon travail? Non, l'espace qui est le nôtre, on veut l'occuper. Puis on va faire le travail qu'on nous demande de faire, mais ce n'est pas vrai qu'on va continuer à écouter tous ceux qui nous disent comment faire le travail, mais qui ne savent pas ce que c'est que d'enseigner, par exemple.

La Présidente (Mme Rotiroti) : ...30 secondes, M. le député.

M. Roberge : Vous pouvez compter sur moi pour porter ce message-là quand on va faire les modifications article par article parce qu'on a une occasion, là. On ne l'ouvre pas tous les jours, fort heureusement, la Loi sur l'instruction publique, mais il va falloir que ça transparaisse, il va falloir corriger les erreurs.

J'ai hâte de travailler dessus, mais, en même temps, je vous pose une question vite, vite : Est-ce que ça presse? Est-ce qu'on ne devrait pas attendre la fin des consultations sur la réussite éducative avant de refermer le couvercle sur la Loi sur l'instruction publique?

M. Mallette (Sylvain) : Le résultat final témoignera de la volonté qu'a le Parlement de reconnaître l'expertise des profs. C'est tout ce que je peux vous dire.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci beaucoup. Alors, ça met fin à notre intervention. Je remercie la Fédération autonome de l'enseignement pour votre présence ce matin.

Je suspends les travaux de la commission jusqu'à 15 heures, cet après-midi. Merci. Et bon dîner.

(Suspension de la séance à 13 h 4)

(Reprise à 15 h 4)

La Présidente (Mme Rotiroti) : Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Bon après-midi. S'il vous plaît, prenez place, on va débuter. Merci. Bonjour. Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! La Commission de la culture et de l'éducation reprend ses travaux. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.

Nous poursuivrons les consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 105, Loi modifiant la Loi sur l'instruction publique.

Nous entendrons cet après-midi les organismes suivants : l'Association provinciale des enseignantes et enseignants du Québec — merci d'être là — la Fédération des commissions scolaires du Québec, la fédération des directions d'établissement d'enseignement, le Mouvement québécois des adultes en formation, l'Association montréalaise des directions d'établissement scolaire. Je vous rappelle que nous terminons nos travaux à 18 h 45.

Alors, sans plus tarder, je souhaite la bienvenue aux représentants de l'Association provinciale des enseignantes et enseignants du Québec. Merci d'être parmi nous. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour faire votre présentation, et, par la suite, on passera à une période d'échange entre les élus. Je vous demanderais de vous identifier, ainsi que les gens qui vous accompagnent, et vous pouvez, tout de suite, passer à votre exposé. Alors, la parole est à vous.

Association provinciale des enseignantes
et enseignants du Québec (APEQ)

M. Joly (Sébastien) : Sébastien Joly, président de l'APEQ. Je suis accompagné de Jean-Paul Fossey, conseiller à l'APEQ. Je vais faire la présentation, et il complètera au besoin.

Donc, Mme la Présidente, M. le ministre, membres du Parlement, je commencerais en vous remerciant de l'opportunité que vous donnez à notre organisation de présenter notre mémoire dans le cadre de ces consultations particulières sur le projet de loi n° 105. L'Association provinciale des enseignantes et enseignants du Québec représente plus de 8 000 enseignantes et enseignants qui oeuvrent au sein du réseau public anglophone au Québec, tant en milieu urbain que rural. Le projet de loi qui est l'objet de la présente consultation a certainement une portée plus limitée si on le compare au défunt projet de loi n° 86.

L'APEQ voit d'un bon oeil la suppression de certains éléments lourds dans la nouvelle mouture qui nous est présentée. Néanmoins, pour l'APEQ, deux irritants majeurs demeurent dans le nouveau projet. D'une part, le présent projet poursuit le mouvement vers une plus grande décentralisation des budgets et également une plus grande décentralisation des pouvoirs aux écoles, en plus de proposer la création d'un comité de répartition des ressources, qui, pour nous, aura des impacts importants sur l'allocation des ressources dans les établissements d'enseignement et également sur le respect de la convention collective. Deuxièmement, la poursuite d'une orientation qui consolide la gestion axée sur les résultats et qui continue de nous éloigner de ce qui devrait constituer notre priorité en éducation, c'est-à-dire l'apprentissage des élèves, en plus d'affecter davantage l'autonomie des enseignants.

Donc, l'approche décentralisatrice qui, entre autres, introduit le principe de subsidiarité a pour effet de retirer aux commissions scolaires leur rôle premier dans l'organisation des services, remettant encore plus en question, à notre avis, l'égalité des chances pour tous les élèves du Québec. La commission scolaire ne pourrait plus organiser la planification des services de façon efficiente et attribuer les ressources dans une perspective élargie, ce qui remettrait en question la capacité de certaines écoles d'accéder à des services suffisants, en plus d'augmenter les disparités entre les écoles. Également, la décentralisation de certains fonds directement au niveau de l'école, tendance qui est déjà présente dans les règles budgétaires actuelles, pose pour nous plusieurs problèmes. La distribution per capita ou par tête des enveloppes budgétaires défavorise particulièrement les petites écoles, comme ça a été mentionné dans plusieurs présentations hier et aujourd'hui, et défavorise particulièrement les petites écoles dont les allocations ne seraient pas suffisantes pour qu'elles puissent remplir leur mission.

Les économies d'échelle et de regroupement des services permettent actuellement aux commissions scolaires de dégager les marges suffisantes pour soutenir les plus petites écoles, leur permettant d'offrir un service équivalent. Dans le secteur anglophone, ce mouvement vers une plus grande décentralisation des budgets risque d'affecter grandement et même de remettre en question le niveau de service dont bénéficieront les élèves qui fréquentent les petites écoles anglophones dans plusieurs régions du Québec, et surtout en région éloignée. On a un grand nombre d'écoles de moins de 100 élèves dans plusieurs régions, dans plusieurs commissions scolaires du Québec qui devraient aussi être affectées par cette mesure. Pour ces raisons, nous sommes d'avis que le niveau général d'autorité des commissions scolaires doit être maintenu, en particulier la responsabilité d'organiser les services, afin d'assurer l'équité à l'échelle du système.

En ce qui concerne le comité de répartition des ressources, bien que certaines améliorations aient été apportées dans la nouvelle mouture, sa composition et l'étendue de ses pouvoirs continuent de nous préoccuper et de soulever certaines questions fondamentales. Sans affirmer que la répartition des ressources se fasse parfaitement dans toutes les commissions scolaires, elle a l'avantage de se faire avec une certaine neutralité et, la plupart du temps, avec une vision d'ensemble des besoins des établissements et des caractéristiques de leur clientèle. Bien que la composition de ce nouveau comité ait été nettement améliorée dans le nouveau projet, elle continue, pour nous, de poser problème. Les directrices et directeurs d'école siégeant sur ce comité risquent, à notre avis, d'être mis en concurrence pour l'obtention de ressources pour leur école, ce qui aurait pour effet de menacer, selon nous, la neutralité du processus. En ajoutant à leurs responsabilités une fonction de gestionnaire de commission scolaire, ce mode d'organisation aura pour effet d'éloigner davantage ces directrices et directeurs de leur fonction première, c'est-à-dire celle d'être des leaders pédagogiques présents dans leur école pour soutenir les élèves et leur personnel.

• (15 h 10) •

De plus, en exigeant des commissaires une majorité des deux tiers pour rejeter une proposition émise par ce comité, on rendra plus difficile aux élus l'exercice d'un certain contrôle sur le budget de la commission scolaire, ce qui constitue pour nous une atteinte à la démocratie scolaire.

Les pouvoirs du comité de répartition des ressources pourraient aussi entrer en conflit avec ceux du comité paritaire EHDAA. Sa présence pourrait, selon nous, miner le rôle important du comité paritaire et faire en sorte que les décisions concernant l'allocation et la répartition de ces ressources ne tiennent pas compte de l'expérience et de l'expertise du personnel enseignant vis-à-vis ces élèves. C'est pourquoi nous considérons que la notion d'un comité de répartition des ressources doit être éliminée, tout en maintenant une structure qui permettrait à chaque directrice ou directeur d'être consulté sur la répartition des ressources. Mais l'établissement d'un comité décisionnel, tel que proposé dans le projet de loi, pose pour nous tous ces problèmes susmentionnés.

Le second élément qui nous préoccupe est la poursuite d'une gestion axée sur les résultats. L'abolition des conventions de gestion et l'ajout de leurs composantes principales au projet éducatif des écoles risquent de susciter une fois de plus une dérive vers une recherche de statistiques et un focus sur les cibles à atteindre au détriment de l'apprentissage des élèves. Au lieu d'être au niveau de la commission scolaire, ça va être au niveau de l'école, mais ces dérives, à notre avis, seront présentes. L'expérience des dernières années nous indique, au contraire, que l'approche axée sur les résultats et les taux de succès suscite l'adoption de pratiques discutables — et, si vous en voulez, des exemples, je pourrai vous en donner au moment des échanges — au sein de plusieurs établissements et commissions scolaires qui sont cause d'anxiété tant pour les élèves que pour les enseignants.

Cette orientation nous préoccupe également à un autre niveau, le fait que tous les éléments principaux de la convention de gestion et de la réussite éducative soient inclus dans le projet éducatif de l'école. Comme le projet éducatif doit, en vertu de la LIP, être adopté par le conseil d'établissement de l'école, cela pourrait impliquer que des non-enseignants pourraient s'ingérer dans l'analyse de résultats, le choix de moyens et des approches à inclure dans le projet éducatif, ainsi que constituer une menace à l'autonomie professionnelle des enseignantes et enseignants.

En matière de réussite scolaire, nous affirmons que le gouvernement devrait s'inspirer des meilleures pratiques au niveau international, et non des pires. Si on regarde du côté des États-Unis ou de l'Angleterre, qui se sont engagés, ces dernières années, dans une approche de gestion axée sur les résultats particulièrement restreinte et punitive, nous constatons l'impact négatif de cette orientation sur l'apprentissage des élèves, en plus de contribuer à agrandir dans ces pays les écarts. La Finlande, quant à elle, qui a décidé, il y a plus de 20 ans, de transformer complètement son système d'éducation en éliminant notamment — ce qui est contre-intuitif — les devoirs, les évaluations sommatives au primaire, en plus de laisser aux enseignants toute la latitude dans la mise en oeuvre du curriculum national, nous indique, au contraire, que c'est ce type d'approche que nous devrions privilégier. La Finlande est maintenant l'un des pays de l'OCDE qui réalisent les meilleurs scores dans les tests PISA, alors que les États-Unis et l'Angleterre se maintiennent à un niveau proche du 20e rang, un petit peu en bas, un petit peu en haut, dépendant des années.

La réussite scolaire véritable est le produit d'un accent sur l'apprentissage, et non sur la création de stress et de pression quant aux cibles. C'est pourquoi nous maintenons que le projet éducatif de l'école ne devrait pas adopter l'approche de la gestion axée sur les résultats. Et nous maintenons que les CGRE, donc les conventions de gestion en réussite éducative, et les conventions de partenariat devraient être supprimées et que soit supprimée également la référence au projet éducatif dans les articles 19 et 22 de la LIP.

En terminant, nous nous questionnons quant à l'urgence, pour le gouvernement, d'adopter immédiatement un tel projet de loi. Dans un contexte où une large consultation a été lancée vendredi dernier — et c'est avec plaisir que nous avons pris connaissance du document de consultation, en passant — avec pour objectif d'aboutir à une politique nationale portant sur la réussite éducative, ne serait-il pas opportun ou plus sage d'attendre les résultats de cette consultation et la formulation d'une politique globale avant de prendre des décisions quant aux modifications à apporter à la Loi sur l'instruction publique? Cette consultation est, à notre avis, l'occasion pour nous tous, partenaires de l'éducation, de développer une vision commune — ou de tenter d'en développer une — ainsi que de déterminer ensemble quels seront les meilleurs moyens pour les atteindre. Merci.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci beaucoup, M. Joly. Alors, on va passer maintenant à la période d'échange entre les élus, et je cède la parole à M. le ministre pour environ 16 minutes.

M. Proulx : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Merci de votre présence aujourd'hui. Et merci de votre témoignage. Et, pour votre mémoire, vous avez parlé, vous m'avez dit... Et puis vous avez capté mon attention, de toute façon, du début à la fin, mais vous avez dit : Si j'ai des exemples pour vous, je vais vous en donner. Alors, vous inscrivez même «ce qui entraînera la prolifération de pratiques pédagogiques douteuses» dans votre mémoire. Je voulais vous entendre là-dessus, sur les indicateurs, les cibles et ce que vous décriez comme étant une pression. Dans les deux aspects, je comprends, il y a des exemples, j'en ai déjà entendu, puis, pour le bénéfice de tous, je suis toujours heureux d'entendre ceux qui sont capables de nous dire comment les choses se passent.

De l'autre côté, j'aimerais ça aussi qu'on ajoute dans la réflexion l'aspect nécessaire ou la nécessité de trouver une façon d'identifier si nous faisons les pas dans la bonne direction, alors, si notre démarche est la bonne. On pourra parler de meilleures pratiques et d'indicateurs sur les pratiques plus tard ou de reddition de comptes sur les améliorations ou non qu'on ferait, fera dans notre projet d'école, mais, sur la pression que vous ressentez à l'égard des cibles actuelles, des exemples de comment corriger cela et, ensuite, comment trouver les bonnes façons de se donner... Je vais utiliser «indicateurs» pour fins d'exemple, là, pour qu'on puisse bien se comprendre, le mot n'a pas d'importance. Comment est-ce qu'on fait pour identifier le meilleur outil ou les meilleurs indicateurs, si je peux le reprendre, pour faire le point et l'état sur la démarche qu'on s'est engagés à prendre?

M. Joly (Sébastien) : D'accord, M. le ministre. Écoutez, depuis l'implantation des conventions de gestion, conventions de partenariat, ce que nous avons observé depuis quelques années, c'est une tendance vers une cueillette de données, là, j'ai appelé une maladie... la cueillette de données aiguë, là, donc une cueillette de données, là, très, très large au niveau des commissions scolaires. Quand je parlais de la Finlande, on parle de l'enseignement primaire, où on n'a pas d'examens sommatifs, leurs indicateurs sont les enseignants, c'est le jugement des enseignants, on fait confiance aux enseignants. Les enseignants sont assez professionnels pour déterminer, bon, quelles sont les forces et les faiblesses de chaque élève.

Si on parle d'exemples de dérive dans les dernières années au niveau des commissions scolaires, on a vu la multiplication d'examens sommatifs au niveau du primaire, particulièrement, là, problématiques au niveau de la fin du premier cycle. Ceux qui sont enseignants ou qui sont familiers avec la pédagogie savent très bien que le niveau d'évolution des élèves et de développement des élèves, du premier cycle jusqu'à la quatrième année, peut varier beaucoup d'un à l'autre. Et ce que ça a comme impact, même si l'objectif est simplement d'avoir des indicateurs, de faire de la cueillette de données, ce que ça a comme impact, ce qu'on entend de nos enseignants, c'est que ça crée un énorme stress sur les enfants, puis particulièrement sur les enfants EHDAA, qui sont en difficulté d'adaptation ou d'apprentissage. Souvent, ces examens-là en fin de cycle sont mandatés, puis c'est permis dans le régime pédagogique de les mandater ou de les rendre obligatoires par les commissions scolaires, donc, fin de cycle I, fin de cycle II. Dans certains cas, on impose des examens à la troisième année, à la cinquième année, dépendant des matières. Puis, dans certains cas, on en impose dans les trois matières principales dans le secteur anglophone : français langue seconde, anglais, mathématiques.

Donc, facteur de stress pour les enseignants, facteur de stress pour les élèves, les élèves EHDAA aussi. Et on recueille ces données-là, par la suite on s'attelle à l'analyse de ces données. Et puis, dans certains cas, les données peuvent être biaisées. On espère que non. Donc, on espère que les résultats ne sont pas biaisés, on s'attelle à l'analyse des données. Puis ce que j'ai observé, ce que nous avons observé dans les milieux, c'est que souvent l'analyse des données est biaisée, et on utilise ça pour prendre des décisions sur les pratiques pédagogiques les meilleures à adopter, là, pour le succès des élèves. Donc, ce que nous avons observé, c'est qu'on n'a pas de preuves que ce type d'approche — et surtout appliqué au niveau du primaire — puis les indicateurs qui sont utilisés ont une incidence sur l'apprentissage des élèves. Au contraire, on disait qu'on manque de temps à l'école pour couvrir le curriculum à cause de l'administration de ces examens-là, qui sont souvent assez longs. Les situations d'évaluation d'apprentissage, là, les situations d'évaluation qui sont mises en place au niveau des commissions scolaires, des fois, ça prend deux semaines. Donc, deux semaines pour les mathématiques, deux semaines pour l'anglais, deux semaines pour le français, on commence à se préparer en avril, on est rendu à la fin juin, là c'est pas mal terminé.

• (15 h 20) •

Autre exemple de dérive sur lequel je pourrais développer, encore une fois, dans une optique de recherche de données pour, évidemment, comparer et essayer d'avoir des indicateurs pour voir l'évolution des élèves, c'est l'obligation pour les profs, dans certaines commissions scolaires, d'administrer des tests diagnostiques, le test diagnostique, en secteur anglophone, le DRA, qui est essentiellement un test où on va diagnostiquer le niveau de lecture de l'élève. Et, dans plusieurs cas, on leur fait faire en début d'année et en fin d'année. Donc, énorme perte de temps, ça prend à peu près une heure à administrer pour chaque élève. Pendant ce temps-là, les enseignants doivent organiser leurs élèves, là, pour qu'ils s'occupent pendant ce temps-là. Et puis, encore une fois, on n'a pas de preuve de l'utilité de ça, surtout de le faire deux fois par année.

Et, dans certaines commissions scolaires, on fait aussi le GB+, qui est pour le français langue seconde, et certains tests diagnostics qui ont été développés au niveau des mathématiques. Donc, vous voyez un petit peu le portrait, on demande aux enseignants de passer beaucoup de temps à collecter des données, à recueillir des données pour essayer de faire l'analyse de ces données-là puis de déterminer si on a eu une progression ou non.

Pour répondre à votre question quant à comment est-ce qu'on fait pour avoir des indicateurs, je pense que vous avez des indicateurs... Encore une fois, là, je dis : Il faut faire confiance à nos enseignants, d'une part, mais l'examen du ministère de sixième année, qui va demeurer, est pour nous un indicateur de la réussite. Et également il y a encore les épreuves uniformes de quatrième secondaire et de cinquième secondaire.

Je viens de vous parler de dérive, je pourrais vous donner d'autres exemples sur d'autres dérives qui surviennent aussi. La production de plans d'intervention, par exemple, pour s'assurer du succès des élèves... Ça, on l'a vu dans plusieurs commissions scolaires, dans plusieurs milieux, des élèves qui n'avaient aucun diagnostic, aucun trouble d'apprentissage diagnostiqué, pour lesquels rien ne justifiait l'établissement d'un plan d'intervention, mais, comme ils échouaient, bon, on met un petit peu de pression pour faire un plan d'intervention, établir des adaptations et faire en sorte que les élèves paraissent bien au niveau des statistiques. Donc, ça, c'est un autre exemple de dérive. Je ne sais pas si vous en voulez d'autres.

M. Proulx : Je veux vous entendre sur le comité de répartition des ressources parce que vous dites dans votre mémoire qu'il faudrait supprimer la référence. Là, il me semble que c'est comme ça que vous l'avez écrit, là, dans les recommandations, si ma mémoire est bonne. Dans les faits, beaucoup de commissions scolaires sont venues nous dire ici — puis on va avoir l'occasion d'entendre la fédération tout à l'heure — qu'il existe déjà des comités s'apparentant à. Je n'ai pas entendu souvent que c'était une mauvaise idée, sincèrement.

Je veux juste vous entendre. Vous dites : Il faut supprimer la référence. Est-ce que c'est une nuance de dire : C'est bien d'avoir un comité de répartition des ressources tel qu'il est actuellement, c'est-à-dire laisser les commissions scolaires faire le choix d'en avoir un ou pas, avec des résultats qu'on pourra juger, là... vous et moi, on n'est pas obligés d'avoir la même opinion, mais à la fin... ou vous dites : Bien non, on n'en veut pas parce que ça me donne l'impression que vous souhaitez confirmer ou, en tout cas, soutenir une plus grande centralisation?

M. Joly (Sébastien) : Le comité de répartition des ressources qui est proposé dans le projet de loi n° 105, on n'a pas de problème à ce que les directions d'école soient consultées. En ce qui concerne la répartition des ressources au niveau de la commission scolaire, je pense qu'ils doivent avoir une voix et être en mesure d'exprimer les besoins de leurs établissements. Le problème qu'on a, c'est le caractère décisionnel puis la majorité des deux tiers qui est requise pour pouvoir renverser leur décision, là, par rapport à la répartition des ressources.

J'ai eu l'expérience de faire partie d'un comité paritaire EHDAA pendant huit ans à la commission scolaire où j'étais en tant que libéré syndical, et puis on travaillait en collégialité avec la commission scolaire pour s'assurer, là... On enlève le chapeau syndicaliste, là, puis on est des éducateurs autour de la table, que ce soit côté patronal, côté syndical, puis l'objectif là-dedans, c'est de s'assurer de la répartition équitable, de la distribution équitable des ressources. Mais c'est un exercice qui n'est pas évident, qui n'est pas facile, et c'est clair que l'expérience, l'information que les directeurs de service des commissions scolaires ont, qu'un directeur dans son école ou qu'un enseignant, dans son école, ne peut pas avoir... Moi, j'en avais un petit peu parce que je faisais le tour des écoles, des réunions de délégués, et ainsi de suite. On s'en va chercher de l'information là puis on développe un portrait, je dirais, général de l'état des besoins, des différences au niveau des besoins. Il y a des écoles qui ont la même population, mais qui n'ont pas les mêmes besoins, les mêmes caractéristiques au niveau des clientèles, et cette expertise-là est requise, à mon sens, pour prendre les bonnes décisions puis arriver à une répartition des ressources qui soit le plus équitable possible puis qui permette à tous les élèves de chaque école d'avoir un service équivalent.

Maintenant, je ne sais pas comment ça se traduirait avec ce qui est proposé dans le projet de loi, mais nous avons exprimé nos inquiétudes quant à la composition, mais au caractère décisionnel. On est conscients que le directeur général de la commission scolaire ainsi que certains directeurs de service feraient aussi partie de ce comité-là, mais on exprime nos inquiétudes quant au caractère décisionnel. Nous, pour nous, pourrait être maintenue la structure, mais qu'on le rende plus consultatif, c'est notre position.

M. Proulx : Vous dites dans votre... C'est la recommandation 5 : La référence au projet éducatif aux articles 19 et 22 de la loi doit être supprimée. Pouvez-vous m'expliquer ce que vous entendez par cette recommandation-là?

M. Joly (Sébastien) : En fait, cette recommandation-là, c'est qu'on attache les responsabilités des enseignants et des prérogatives des enseignants au projet éducatif. Est-ce que je peux demander à Jean-Paul de développer un petit peu là-dessus?

La Présidente (Mme Rotiroti) : Oui, M. Fossey.

M. Fossey (Jean-Paul) : Excusez-moi. Oui, la notion étant ici que, dans les articles 19 et 22, où on parle des rôles, des responsabilités des enseignants, ça dit très clairement que c'est dans le contexte du projet éducatif que cela doit être fait. La crainte ici, c'est que le projet éducatif serait un projet éducatif différent, ce qui est proposé dans la loi, comparé à ce qui existe maintenant, surtout. Et, comme il a été indiqué dans la présentation initiale, c'est que le projet éducatif, puisqu'il est adopté, et maintenant on cherche à mettre plus directement des choses qui touchent à l'acte pédagogique dans le projet éducatif, on veut s'assurer que les enseignants peuvent maintenir leur autonomie à travers les articles 19 et 22 pour être capables, dans leur salle de classe, de prendre les décisions qui ont le plus de sens pour leur salle de classe et ne pas se voir imposer ces décisions par le biais des décisions prises au conseil d'établissement.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Il vous reste trois minutes.

M. Proulx : Je veux vous entendre sur la relation à l'intérieur de l'école, avec les directions d'école parce que vous êtes le troisième groupe, là, de représentants d'enseignants, puis j'ai souvent entendu avant : Bien, on peut être consultés, mais on n'a pas toujours notre mot à dire, il faudrait être capables de protéger notre espace. Si on dit, tous et toutes, que c'est à l'école que ça se passe, qu'il faut être capable de trouver un lieu de décision à l'école, que ça prend un espace... puis je vais faire attention avec le mot «autonomie», ne pas l'utiliser à toutes les sauces, mais un endroit où on est capable de prendre quelques décisions significatives qui font que, dans la journée, on n'a pas fait ce que les autres ont fait, là...

Je voudrais vous entendre là-dessus, sur cette relation-là que vous avez avec eux, parce qu'il y a là peut-être une espèce d'enjeu, là — je ne sais pas si c'est un enjeu de perception ou un enjeu réel — par rapport à ce qu'il faut faire dans la loi, mais, je veux dire, vous, là, l'espace qui est le vôtre à l'égard de la pédagogie, actuellement vous le trouvez comment, vous le qualifiez comment, puis de quelle façon vous souhaiteriez le voir, je vais dire, protégé, là, pour les fins de l'exemple? Dans le cadre de vos relations, bien entendu, avec l'école, avec l'équipe-école.

• (15 h 30) •

M. Joly (Sébastien) : Évidemment qu'on veut le voir protégé. Là, il y a le premier aspect, là : Comment vous voyez les relations au niveau de l'école, entre la direction et les enseignants, et l'espace qu'ils ont au niveau de la consultation? Moi, je ne veux pas être radical, là, par rapport à cet enjeu-là, ça dépend des milieux, mais je peux vous dire qu'il y a un lien direct entre le niveau de consultation et de respect de l'espace des enseignants au sein d'une école et le succès de cette école-là. Quand une équipe-école se sent supportée, se sent respectée par sa direction d'école, se sent consultée — mais de bonne foi, parce qu'il y a consultation de mauvaise foi, on consulte puis, après ça, on fait différemment — ça va assez bien à l'heure actuelle.

Puis, au niveau décisionnel, ce que je comprends, c'est que vous voulez déplacer un peu davantage le centre de décision vers l'école, vers l'unité école. Nous, ce qu'on considère, c'est que, dans le régime actuel, ils ont l'espace voulu pour donner la couleur qu'ils veulent à leur école, adopter des programmes particuliers s'ils le veulent. Donc, moi, je ne vois pas en quoi on aurait besoin de changer quoi que ce soit à la Loi sur l'instruction publique pour leur permettre d'avoir un peu plus d'autonomie. Évidemment, il va varier, l'ascendant des commissions scolaires, d'une commission scolaire à l'autre, sur les écoles. Mais, néanmoins, je dirais que le facteur qui a été le plus important dans les dernières années au niveau de retirer l'autonomie aux écoles, ça a probablement été l'introduction des conventions de gestion et de réussite éducative et les conventions de partenariat parce que, là, on est un petit peu attachés, il faut rendre des comptes, mais tout ce processus-là, là, ça mène une charge administrative supplémentaire sur les épaules des directeurs.

J'ai été en contact avec beaucoup de directeurs d'école, et ce que j'entends constamment, c'est : On est débordés, on a beaucoup de charges administratives, beaucoup de reddition de comptes, on n'a pas le temps d'occuper le rôle qu'on devrait occuper, c'est-à-dire d'être leaders pédagogiques, de gérer notre personnel, de supporter notre personnel, de supporter les élèves.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci, M. Joly. On va passer du côté de l'opposition officielle, et je cède la parole à Mme la députée de Taschereau pour 10 minutes.

Mme Maltais : Merci, Mme la Présidente. Alors, bonjour tout le monde. Bienvenue. Ça fait plaisir d'être avec vous aujourd'hui. M. Fossey, M. Joly, le président, ça fait plaisir de vous entendre aujourd'hui sur ce projet de loi.

Vous avez soulevé quelques problèmes qui méritent, je pense, notre attention, c'est de voir comment on peut améliorer le projet de loi ou éviter qu'en voulant améliorer la réussite scolaire on nuise à la réussite scolaire des élèves. Il y en avait quelques-uns, je vais vous les souligner, puis on les regardera un par un si vous voulez : problème du comité de gestion des ressources versus la façon dont on travaille avec les élèves EHDAA; la gestion par résultats et l'impact sur les résultats scolaires des jeunes, la différence entre avoir un diplôme et avoir appris, c'est ce dont vous parlez dans votre mémoire; l'autre, c'est les petites écoles, puis ça, ça m'interpelle aussi beaucoup.

Alors, j'aimerais ça, d'abord, que vous me disiez quel est le problème spécifiquement pour les EHDAA, s'ils travaillent de façon parallèle avec le comité de gestion des ressources humaines.

M. Joly (Sébastien) : De la façon dont ça fonctionne à l'heure actuelle, O.K., la direction générale de la commission scolaire va attribuer un budget particulier au comité paritaire EHDAA, qui fait partie de la convention collective des enseignants, chapitres VIII, IX. Puis, à ce moment-là, ce comité-là, qui est composé à moitié de représentants des enseignants, donc ça peut être des enseignants qui sont de la classe, des enseignants... des orthopédagogues, en fait des enseignants-ressources dans le secteur anglophone et des libérés syndicaux, et, l'autre moitié, c'est directeurs de service, dans certains cas, directions générales, directeurs de services complémentaires qui s'occupent de ce dossier-là, EHDAA, dans les commissions scolaires... et, donc, on va discuter de la répartition des ressources.

Nous, ce qu'on a exprimé ici, c'est : La création d'un tel comité, d'un comité de répartition des ressources composé de directeurs d'école qui serait décisionnel, en quoi ça va peut-être venir en conflit avec ce qui existe déjà à l'heure actuelle par rapport à la répartition des ressources pour les élèves EHDAA? Est-ce que le comité de répartition des ressources va décider, tout d'un coup, de couper de moitié le budget qui va être attribué au comité paritaire, lui coupant un petit peu, là, l'herbe sous le pied? Parce que ces comités-là, selon ce que nous entendons dans le secteur anglophone, fonctionnent assez bien. En collégialité, dans l'intérêt des élèves EHDAA, on essaie de s'assurer, dans la plupart des cas, une distribution équitable des ressources en répondant aux besoins. C'est complexe, ce n'est pas évident, mais ça fonctionne. Puis notre inquiétude, c'est que ça remette en cause le rôle qui est joué actuellement par ces comités-là.

Mme Maltais : Est-ce que vous avez une solution par rapport à ce comité de répartition des ressources? Est-ce que, pour vous, c'est qu'il ne devrait pas exister ou bien c'est qu'il faudrait ajuster un mécanisme de façon à, bien, équilibrer les pouvoirs, je ne sais pas?

M. Joly (Sébastien) : Notre recommandation, c'est qu'il soit consultatif. On propose... le statu quo avec un espace pour les directions d'école. Je ne sais pas comment les commissions scolaires fonctionnent en général à ce niveau-là, de quelle façon ils consultent leurs directions d'école. Mais, si ce n'était pas le cas, nous recommandons que peut-être qu'ils se donnent un espace pour les directions d'école afin qu'ils puissent exprimer leurs besoins et puis... Mais qu'il soit décisionnel, ça pose problème pour nous.

Mme Maltais : O.K. Dans le même ordre d'idées, c'est un peu ce que vous dites aussi tout de suite après. D'ailleurs dans votre mémoire, en page 2, on voit que ça se suit, là, un derrière l'autre, c'est comme un peu relié, vous dites que «dans le secteur anglophone, les commissions scolaires ajoutent des fonds à l'attribution initiale par tête pour qu'une petite école puisse offrir des services de base et embaucher le personnel requis, ce qui serait autrement impossible». Donc, vous semblez craindre que la façon dont vous répartissez sur le territoire puisse vous empêcher de privilégier parfois les petites écoles.

M. Joly (Sébastien) : En fait, ce que nous avançons à ce niveau-là dans le mémoire puis dans la présentation, c'est qu'au niveau des petites écoles — je vais vous donner un bon exemple, là, encore une fois relié au comité paritaire EHDAA — si, au départ, là, on décide de... Puis on fait référence à la distribution per capita, donc la décentralisation des enveloppes. C'est ça, le problème qui se pose, là, en termes d'enjeux. Donc, lorsqu'on fait une distribution per capita, les petites écoles n'auront pas suffisamment de ressources pour pouvoir offrir le service. Je vais donner un exemple, là, hypothétique, si on disait qu'on distribue le nombre d'enseignants-ressources aux écoles per capita, la petite école de moins de 100 élèves va peut-être avoir un 20 % d'un enseignant-ressource. Imaginons que cette école-là se trouve à Arundel ou en Gaspésie, éloignée de tous, ce n'est pas si évident que ça de trouver quelqu'un qui va occuper ce 20 % là. Puis est-ce que c'est suffisant, 20 % pour offrir le service? Donc, dans le comité dont je faisais partie, on avait décidé d'établir une allocation de base. Donc, chaque école va avoir son enseignant-ressource, puis, après ça, on va ajuster en fonction des besoins, en fonction des caractéristiques de la clientèle.

Donc, c'est ça, notre inquiétude, c'est que, si on se dirige... O.K? Il y a certaines règles budgétaires, là, qui sont décentralisées vers les écoles. Mais, si c'est la direction qu'on prend de façon plus large, pour nous, ça va retirer la prérogative de la commission scolaire de prendre les enveloppes et de vraiment s'assurer qu'elles soient distribuées équitablement, ce qui risquerait d'affecter particulièrement les petites écoles. Les grosses écoles vont recevoir plus de fonds alors qu'avec un regroupement des ressources dans les grosses écoles elles n'ont probablement pas autant besoin de personnel ou de ressources avec l'organisation des ressources dont elles disposent. Donc, c'est ça, un petit peu, le contraste que je veux faire entre les grosses écoles, et les petites écoles, et nos préoccupations.

Mme Maltais : O.K. Je comprends bien que c'est une préoccupation, que c'est une crainte. Ce n'est pas dans la loi actuellement, il n'y a pas de directive dans un sens ou dans l'autre, mais ça n'empêcherait pas d'ajouter une directive ou de donner une souplesse qui permette ce travail-là par commission scolaire.

M. Joly (Sébastien) : Voilà.

Mme Maltais : O.K. Donc, il faudrait trouver une solution à votre appréhension.

M. Joly (Sébastien) : Il faudrait trouver une solution qui permette de s'assurer d'une distribution équitable des ressources. Donc, si on ne passe plus par la commission scolaire, comment est-ce que ça va être fait? Est-ce que ça sera au niveau du ministère quand ils décideront de distribuer les ressources? Est-ce qu'ils vont aller voir dans chaque école ou essayer de demander des rapports? Je ne sais pas. Mais ce que j'expliquais, ce que j'exprimais, c'est que c'est éminemment complexe, puis la connaissance qui a été acquise par les commissions scolaires au cours des années... la majorité des commissions scolaires ont une bonne connaissance de leur culture, de leur clientèle, des parents qui en font partie, particulièrement au niveau du secteur anglophone, et puis c'est ce qui leur permet vraiment de jouer leur rôle puis de redistribuer de façon équitable, puis de s'assurer que chaque école peut offrir le même service.

Mme Maltais : Je vais, avec un brin d'ironie, vous dire que, de toute façon, vous pourrez toujours faire appel au ministre, puisque, dans cette loi, il aura le droit d'intervenir n'importe quand dans les budgets des commissions scolaires. Mais ce n'est pas ce qu'on souhaite, on souhaite que la répartition se fasse équitablement.

Dernière chose, l'urgence de ce projet de loi. Vous avez parlé de cohérence avec le fait qu'il y ait une consultation, voulez-vous ajouter quelque chose là-dessus?

• (15 h 40) •

M. Joly (Sébastien) : J'ai exprimé dans mon préambule, dans ma présentation le fait que nous considérons qu'il serait plus sage d'attendre parce que, si on doit rouvrir la Loi sur l'instruction publique, d'y faire des modifications, bien, j'ai l'impression, là... Puis c'est avec enthousiasme qu'on anticipe la consultation qui s'en vient dans les prochaines semaines puis dans les prochains mois. C'est quelque chose qu'on attendait en tant qu'organisation syndicale, puis on est contents de pouvoir y prendre part, et j'espère que nous arriverons à développer une politique d'éducation globale qui répondra à nos besoins. Puis je pense qu'il faut regarder aussi quelles sont nos forces, quelles sont les qualités de notre système d'éducation — puisque je pense qu'on a un système d'éducation de qualité — puis, là, qu'est-ce qu'on peut faire pour l'améliorer.

Maintenant, de notre point de vue, ce qui est proposé dans le projet de loi n° 105 n'apporte pas des changements qui, à notre sens, puis selon notre expérience, et ce qu'on connaît du système, vont nécessairement contribuer à l'amélioration de la réussite scolaire. Donc, moi, je dirais : Attendons. Attendons de voir quelles solutions seront adoptées, là, pour la suite, puis mettons ça sur la glace. C'est notre point de vue.

Mme Maltais : O.K.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci, M. Joly. On va passer du côté du deuxième groupe de l'opposition, et je cède la parole à M. le député de Chambly pour environ 6 min 30 s.

M. Roberge : Merci, Mme la Présidente. Merci pour votre mémoire, votre présentation. J'ai entendu beaucoup de vos préoccupations par rapport à l'approche de gestion axée sur les résultats. E, si je lis entre les lignes, il y a un problème, selon vous, entre cette approche-là et l'autonomie des enseignants. Pouvez-vous nous dire quels écueils on devrait éviter pour éviter de s'attaquer à l'autonomie professionnelle des enseignants? Voilà.

M. Joly (Sébastien) : Encore une fois, c'est une préoccupation, c'est une inquiétude que nous exprimons, c'est l'intégration des éléments des conventions de gestion. Donc, on est très contents, comme on a vu, bon, on élimine les conventions de gestion puis le partenariat, on veut éliminer la paperasse. Mais là on l'intègre dans le projet éducatif de l'école. Et, comme je l'ai exprimé dans la présentation, ces éléments-là dans le projet éducatif, qui doit être adopté par un comité, le conseil d'établissement, qui est composé de parents, de membres du personnel de soutien, d'enseignants, mais en majorité pas d'enseignants, est-ce qu'il n'y a pas un danger que, dans certains cas, sur certains conseils d'établissement, on essaie de commencer à dire aux enseignants quelles approches utiliser, de quelle façon faire leurs évaluations, de les questionner sur leurs évaluations, de se transformer en entité qui demande des redditions de comptes aux enseignants au niveau de l'école?

Puis on a des inquiétudes au niveau du danger, là, de dynamique conflictuelle qui pourrait survenir dans les conseils d'établissement. Maintenant, est-ce que ça va arriver partout? Nous ne croyons pas. J'ai l'impression que, dans plusieurs écoles du Québec, ça fonctionne très bien, les conseils d'établissement, que les relations sont respectueuses. Mais nous avons été témoins de dérapages à plusieurs reprises dans le régime actuel. Donc, l'addition de ces éléments-là au projet éducatif nous préoccupe beaucoup puis, pour nous, présente un danger d'affecter davantage l'autonomie professionnelle, qui est déjà affectée, je dirais, par les conventions de gestion puis de la façon dont elles sont gérées au niveau des commissions scolaires.

M. Roberge : Parce qu'il faut le savoir, là — et ça a de l'air des nuances, mais les mots sont importants, là — entre «adopter» puis «approuver» au conseil d'établissement, il y a une grosse marge, là. «Approuver», c'est-à-dire que ce n'est pas nous qui pouvons écrire le document et qu'on ne peut pas le modifier...

M. Joly (Sébastien) : Voilà.

M. Roberge : ...tandis qu'«adopter», on reçoit quelque chose, mais on peut le modifier puis, après ça, l'adopter. Or, en ce moment...

M. Joly (Sébastien) : C'est ce qui nous inquiète.

M. Roberge : ...dans cette version-ci, le conseil d'établissement peut adopter, donc modifier quelque chose qui touche directement à la pédagogie. C'est votre préoccupation?

M. Joly (Sébastien) : Exactement. C'est exactement la préoccupation parce que c'est déjà inclus dans la loi actuelle qu'ils doivent adopter le projet éducatif. Mais, lorsqu'on inclut des éléments de reddition de comptes à l'intérieur du projet éducatif, c'est là qu'on fait face à ce danger-là. Puis je vois des scénarios dans ma tête, on est conscients de certaines situations sur certains conseils d'établissement où, déjà, on essaie de questionner les enseignants sur leurs pratiques, ainsi de suite. Là, on ouvre la porte grande ouverte à une situation qui pourrait affecter grandement l'autonomie professionnelle quant au choix de ses méthodes d'enseignement, de ses approches, de ses outils d'évaluation, ainsi de suite.

M. Roberge : Pour vous, les conventions de gestion ne doivent pas seulement être séparées du projet éducatif, elles doivent être éliminées. C'est bien ce que je comprends?

M. Joly (Sébastien) : Oui.

M. Roberge : Est-ce que ce n'est pas parfois une façon de motiver les troupes que de se donner des objectifs chiffrés?

M. Joly (Sébastien) : Les objectifs chiffrés, comme je l'ai expliqué tout à l'heure, en théorie, ça semble être une bonne idée. O.K.? Puis l'idée de la reddition de comptes, à un moment donné, il faut s'asseoir puis regarder qu'est-ce qu'on fait, est-ce que ça donne des résultats. Bon. Ça prend des indicateurs, comme disait le ministre, M. le ministre. Donc, ça prend des indicateurs, et nous en convenons.

Maintenant, nous, nos préoccupations sont basées sur ce que nous observons dans les milieux. Et ce que nous observons, c'est que cette approche-là de gestion axée sur les résultats ne donne les résultats escomptés. Au contraire, c'est un créateur de stress puis c'est contre-intuitif. Quand on parle de la Finlande, par exemple, puis de leur approche par rapport à leur système d'éducation, particulièrement au primaire, c'est contre-intuitif. Comment est-ce qu'on peut dire qu'on élimine tous les examens, les indicateurs, ainsi de suite, puis qu'ils finissent par faire mieux à l'âge de 15 ans lorsqu'ils font les examens internationaux PISA? Bien, c'est le cas. On fait confiance au professionnalisme de nos enseignants, on se concentre... Je crois, si je ne me trompe pas, qu'on a simplifié le curriculum, on s'est concentré sur les matières de base, sur la consolidation des connaissances de base en langues, en sciences, en mathématiques afin qu'ils soient prêts, rendus au niveau du secondaire, à, évidemment, là, être mis face à des problématiques plus complexes dans leurs cours, mais il semble que ça fonctionne.

Maintenant, c'est contre-intuitif, j'en conviens, et, évidemment, la tendance est de toujours vouloir mesurer. De notre point de vue, l'existence des examens du ministère en sixième année, c'est une façon de vérifier, là, en fin de parcours au primaire, si on a atteint les objectifs. Après ça, on a d'autres indicateurs en quatrième et cinquième secondaire.

Je pense qu'il y a des orientations... On aura l'occasion d'en reparler lorsqu'il y aura les consultations sur la réussite éducative, mais c'est clair que l'intervention précoce et rapide, ce sont des orientations que nous partageons complètement. Mais il y a une question de ressources ici, puis il y a des ressources qui ont été coupées pendant les 10 dernières années et qui ont un impact réel sur la capacité des écoles de rendre le service, et d'offrir le meilleur service aux élèves, puis de soutenir les élèves et les enseignants.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci, M. Joly. Alors, merci beaucoup, M. Joly, M. Fossey, pour votre contribution.

Je vais suspendre quelques instants pour permettre à la Fédération des commissions scolaires du Québec de prendre place. Merci.

(Suspension de la séance à 15 h 48)

(Reprise à 15 h 51)

La Présidente (Mme Rotiroti) : Alors, je souhaite la bienvenue à la Fédération des commissions scolaires du Québec. Merci d'être là. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes...

Des voix : ...

La Présidente (Mme Rotiroti) : À l'ordre, s'il vous plaît! La commission est partie. Merci. Alors, je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour faire votre présentation, et, par la suite, on passera à une période d'échange entre les élus. Alors, je vous demanderais de vous identifier, ainsi que les gens qui vous accompagnent, et vous pouvez, tout de suite, partir avec votre exposé. Alors, la parole est à vous.

Fédération des commissions scolaires du Québec (FCSQ)

Mme Bouchard (Josée) : Merci, Mme la Présidente. M. le ministre, Mme la députée de Taschereau, M. le député de Chambly, membres de cette commission parlementaire, mon nom est Josée Bouchard, présidente de la Fédération des commissions scolaires du Québec. Et je suis accompagnée par M. Richard Flibotte, vice-président de la fédération et président de la commission scolaire de Saint-Hyacinthe, ainsi que du secrétaire général de la fédération, Me Alain Guimont.

Je salue également les présidents, présidentes et commissaires présents qui nous écoutent actuellement aussi sur le Web. Je salue également nos collègues francophones du Canada qui sont présents ici avec nous aujourd'hui.

Alors, le 6 avril dernier, nous terminions un long exercice autour de l'étude projet de loi n° 86, lequel aura permis, pour plusieurs, de mieux connaître les élus scolaires élus au suffrage universel. Alors, que le projet de loi n° 86 proposait de modifier en profondeur la gouvernance scolaire. Votre travail parlementaire aura permis le maintien de la démocratie scolaire telle qu'elle s'exerce actuellement. Nous souhaitons tous que ce débat soit pour le Québec, et pour tous partis confondus, une chose du passé.

Lors de notre présentation, le 6 avril, nous avions insisté sur l'importance de respecter le rôle de chaque acteur du milieu de l'éducation. À nos yeux, le projet de loi n° 86 semait la confusion quant au rôle et aux responsabilités des acteurs en éducation. Bien qu'atténué dans le projet de loi n° 105, cette confusion persiste encore. Nous souhaitons que les présents travaux clarifient le tout, car, pour la fédération, il ne fait aucun doute qu'un des principaux ingrédients de la réussite des élèves, c'est que chaque acteur agisse à son niveau. Or, nous constatons cette volonté gouvernementale de donner plus de contrôle au ministre. Toutefois, le modèle de gouvernance des commissions scolaires s'apparente davantage à celui des municipalités, soit une gouvernance de proximité pleine et entière. Malheureusement, le projet de loi actuel introduit un pouvoir de directive du ministre qui s'apparente à une forme de microgestion. Ainsi, le ministre se réserve le pouvoir d'intervenir en tout temps dans une commission scolaire sur des questions portant sur l'administration, l'organisation, le fonctionnement ou les actions de celle-ci, y compris de compléter ou de préciser les règles budgétaires en cours de l'année. Il s'agit, à notre sens, d'une sorte de droit de veto du ministre dans les activités et décisions prises par une gouvernance élue.

Cela est contraire au principe démocratique, au respect des rôles de chacun et à la confiance que le ministre doit avoir envers les acteurs du réseau. Ce pouvoir de directive est d'autant plus surprenant qu'il va à l'encontre même des principes de décentralisation et de subsidiarité évoqués dans ce projet de loi. Ainsi, comment expliquer que le ministre intervienne en cours d'année sur un budget adopté par la commission scolaire? Comment justifier que le plan d'engagement vers la réussite, après consensus au sein de la commission scolaire, puisse être refusé ou modifié par le ministre? Nous demandons qu'en toute cohérence avec les principes qu'il propose dans ce projet de loi — et en tout respect, M. le ministre — que le ministre renonce à ces pouvoirs. Par contre, si certains pouvoirs extraordinaires devaient demeurer, ils devraient être mieux définis et s'exercer en concertation étroite avec les commissions scolaires. Nous pensons notamment au guide des bonnes pratiques en matière de décentralisation.

Cela dit, nous rappelons que la Loi sur l'instruction publique donne actuellement tous les pouvoirs au ministre d'agir dans des cas d'exception. Nous demeurons convaincus que la mission de la commission scolaire et le rôle des élus scolaires en particulier doivent demeurer, en premier lieu, centrés sur la réussite des élèves. Ainsi, nous estimons que les insertions proposées aux articles 25 et 32 détournent l'attention de cette mission première. Nous demandons notamment qu'à défaut de définir clairement la notion de subsidiarité que celle-ci n'apparaisse pas dans le libellé de la mission.

Au chapitre de la gouvernance, encore, le projet de loi rend obligatoire l'ajout d'un commissaire coopté au sein du conseil des commissaires. La législation actuelle offre la possibilité d'avoir un coopté. Pour la fédération, il appartient aux décideurs locaux de juger de la pertinence de cet ajout au regard des compétences déjà présentes au sein de chaque conseil des commissaires.

Le projet de loi prévoit aussi un rôle accru des parents en octroyant, entre autres, le droit de vote aux commissaires-parents. Comme elle l'a affirmé par le passé, la fédération est d'accord avec l'exercice du droit de vote des parents au sein du conseil des commissaires.

Plusieurs inquiétudes ont été manifestées depuis hier en lien avec les responsabilités et le fonctionnement du comité de répartition des ressources. La fédération suggère, elle aussi, de bonifier sa composition afin de mieux refléter la réalité et les responsabilités devant être assumées par chacun au sein des commissions scolaires en cette matière. Nous convenons que la répartition des ressources touche directement les directions d'établissement et que celles-ci doivent être adéquatement représentées au sein du comité. Cependant, pour assurer l'équité et l'équilibre dans la représentation, il est nécessaire que les responsables des divers services de la commission scolaire fassent partie du comité. Ces personnes détiennent toute l'expertise nécessaire pour en soutenir les travaux.

Dans le même ordre d'idées, un certain équilibre doit être préservé quant à la représentation de chaque ordre d'enseignement, puisque le nombre d'établissements est beaucoup plus important au primaire et au secondaire qu'en formation professionnelle et à l'éducation des adultes. Par conséquent, la fédération souhaite que la composition du comité soit paritaire. De plus, dans le respect des rôles des élus scolaires et du personnel des commissions scolaires, il est important que le comité de répartition des ressources demeure un comité strictement administratif, au même titre que le comité consultatif de gestion, qui peut en exercer les pouvoirs.

Nous recommandons aussi que le projet de loi contienne des dispositions obligeant le ministre à fournir aux commissions scolaires les règles budgétaires dans un délai raisonnable, leur permettant ainsi de respecter ce nouveau processus de concertation.

Nous demandons enfin que les objectifs et les principes de la répartition des revenus ne soient pas établis de façon annuelle, mais plutôt sur une période de trois ans.

Par ailleurs, le projet de loi prévoit qu'une recommandation du comité portant sur la répartition annuelle des revenus de la commission scolaire est réputée adoptée par le Conseil des commissaires, à moins que ce dernier ne rejette la recommandation par un vote d'au moins les deux tiers des commissaires présents et ayant le droit de vote. La notion de recommandation réputée adoptée relève déjà de l'exception, et la fédération comprend difficilement que le législateur impose en plus un vote aux deux tiers sur cette question. Pour la fédération, cette décision doit être absolument soumise aux règles d'usage par un vote à la majorité simple.

Le projet de loi prévoit aussi que le comité de répartition des ressources recommande annuellement au conseil des commissaires l'affectation des surplus des établissements d'enseignement de la commission scolaire. Pour la fédération, l'arbitrage sur l'affectation des surplus entre les établissements devrait continuer de relever entièrement du conseil des commissaires pour assurer l'équité.

Le législateur propose de remplacer les conventions de gestion actuelles par un plan d'engagement vers la réussite. La fédération est soucieuse de l'arrimage qui pourra être fait entre l'actuel plan stratégique d'une commission scolaire et son plan d'engagement vers la réussite. Alors que le premier se veut large et en lien avec les communautés locales, le second se concentre exclusivement sur un objet, soit la réussite éducative. À cet effet, un complément d'information du ministère sera essentiel à l'harmonisation des plans, principalement en ce qui a trait aux indicateurs nationaux qui serviront dans l'évaluation des atteintes des objectifs des plans d'engagement vers la réussite.

La réussite des élèves est en tête des priorités au Québec, et il est heureux qu'il en soit ainsi. D'ailleurs, le ministre de l'Éducation et le premier ministre annonçaient la semaine dernière des consultations, comme vous le savez, cet automne en vue de l'adoption rapide d'une politique sur la réussite éducative. Comme acteur de premier plan en matière de réussite, la fédération demande que les élus scolaires et les commissions scolaires soient associés de près aux travaux devant mener à l'élaboration de cette politique et que sa mise en oeuvre respecte encore une fois les rôles, les responsabilités et l'obligation de résultat de l'ensemble des parties prenantes. Dans l'esprit même des remarques de plusieurs chercheurs, dont M. Égide Royer lors de son témoignage en commission parlementaire le printemps dernier, basons nos actions en matière de réussite sur des données probantes. Par la suite, il sera plus facile de mobiliser tous les acteurs autour d'objectifs communs.

En conclusion, la fédération comprend qu'en choisissant de maintenir la gouvernance actuelle le gouvernement du Québec accepte maintenant de mettre en place toutes les conditions nécessaires afin que les élus scolaires puissent assumer pleinement leur leadership politique. Cela est d'autant plus important que le gouvernement maintient son intention de tenir des élections scolaires en 2018. D'ici là, il apparaît donc essentiel de mettre en place toutes les mesures pour favoriser la participation électorale, et de tout faire pour valoriser le travail des élus scolaires, et de consolider leur rôle, notamment dans les fonctions et les pouvoirs que leur confère la Loi sur l'instruction publique. Merci.

 (16 heures)

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci beaucoup, Mme Bouchard. Alors, on va passer à la période d'échange entre les élus, et je cède la parole à M. le ministre pour environ 15 minutes.

M. Proulx : Merci beaucoup, Mme la Présidente. D'abord, merci beaucoup. Très heureux d'avoir l'occasion de vous revoir et d'échanger avec vous. J'ai quelques questions en regard de votre mémoire. Et, à la recommandation 3, vous dites : «...la fédération ne juge pas approprié qu'un conseil des commissaires puisse déléguer "certaines fonctions et certains pouvoirs" à un conseil d'établissement ou au comité de répartition des ressources...» Dans l'éventualité d'un comité de répartition des ressources, le pouvoir de délégation, il est pour vous. Ce n'est pas moi qui le décide, c'est vous. Expliquez-moi pourquoi vous n'êtes pas à l'aise avec le fait que vous pourriez déléguer vous-même selon vos choix à un comité de répartition des ressources certains pouvoirs.

Mme Bouchard (Josée) : Bien, en fait, on fait appel dans cet énoncé-là, vous savez, au concept de l'imputabilité. Dans le fond, c'est ça que ça touche comme tel, et on veut être assuré qu'avec la future adoption de ce projet de loi là qu'effectivement ce principe-là va être absolument respecté. Vous savez, ça nous amène à parler, effectivement, en fait, du pouvoir qu'on prévoit, donc, au comité de répartition des ressources. Comme vous l'avez vu, on n'est pas contre comme tel, hein, c'est ce qu'on dit, mais il faut s'assurer que vraiment on va garder, je dirais, le contrôle, en fait, en rapport avec les obligations du conseil des commissaires, de prendre toutes les décisions nécessaires.

M. Proulx : Actuellement, lorsqu'on a fait le débat sur le projet de loi n° 86, on a introduit la possibilité de la création d'un comité de répartition des ressources dans l'ensemble des commissions scolaires, il a été dit par plusieurs — il y a beaucoup de commissions scolaires qui sont venues se faire entendre — et par vous, que, dans la grande... peut-être pas la grande majorité, je me corrige moi-même, que plusieurs commissions scolaires avaient déjà des comités s'apparentant à celui-là. Dans les faits, ces comités-là, s'ils ne sont pas prévus dans la loi avec les pouvoirs, c'est qu'il y a une pratique ou il y a une détermination qui a été faite dans chacun des lieux d'avoir ce comité-là, d'avoir un comité qui s'apparente à, de lui confier certaines responsabilités, d'y avoir des membres. Alors, dans ce contexte-là, vous avez déjà exercé, si c'est vrai qu'il y en a dans plusieurs commissions scolaires, ce pouvoir-là, non?

Mme Bouchard (Josée) : Bien, en fait, c'est une délégation par rapport, je dirais, à déjà une préparation, hein, du budget parce que... C'est important de le dire parce que ce n'est pas clair, ça non plus, dans la loi. Puis c'est une demande qu'on vous fait, c'est de s'assurer que le travail qui est fait là, hein, qui, soi-disant, est délégué, va respecter aussi tout le processus qui nous amène à adopter un budget, finalement, et à affecter toutes les ressources dans une commission scolaire, et qui est décidé, en bout de course, par le conseil des commissaires. Et ça, c'est un travail qui s'échelonne sur plusieurs mois, qui respecte plusieurs niveaux de consultation, plusieurs comités sont interpelés, on a même des obligations dans la loi, et tout ça. Alors, c'est de s'assurer de ça.

Puis, comme je vous l'ai dit, on n'est pas du tout contre ce comité-là parce que vous et moi, on n'est pas capables de savoir exactement qui le fait vraiment puis qui, peut-être, le fait moins ou, en tout cas, à vitesse variable. On n'a pas le portrait, mais ce n'est pas le mandat de la fédération d'aller chercher ça non plus. Mais on comprend le ministre de vouloir s'assurer qu'en tout cas ça va être fait partout. Par contre, comme je vous dis, il faut s'assurer, dans la loi, qu'en fait le travail qui va être fait là ne viendra pas, comme on dit... ne se fera pas en parallèle avec déjà tout le processus, en fait, qui est requis déjà dans la loi dans la commission scolaire. Vous le savez, là, il y a le comité consultatif de gestion qui est interpelé, et tout ça. Alors, c'est important, absolument, de respecter ça.

Je pourrais vous faire l'énumération, vous savez, de tous les... c'est ça, toutes les étapes qu'on a à traverser, mais c'est parce que ce n'est pas bien...

M. Proulx : Ah! non, non, ça va.

Mme Bouchard (Josée) : Je ne ferai pas ça, mais c'est parce que ce n'est pas précisé dans la loi, puis, évidemment, on veut que les choses soient bien respectées.

M. Proulx : J'aimerais ça qu'on parle des pouvoirs du ministre parce que je vous ai entendu dire : Il y a déjà des pouvoirs dans la loi. Il me semble que c'est ça que vous avez dit.

Mme Bouchard (Josée) : Oui, j'ai dit ça.

M. Proulx : C'est quoi, les pouvoirs du ministre actuellement pour intervenir dans une commission scolaire?

Mme Bouchard (Josée) : Alors, si vous voulez, Mme la Présidente, je demanderais à Me Guimont qui... Il pourrait, je pense, répondre à cette question-là vraiment de façon très concise et précise.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Allez-y, M. Guimont.

M. Guimont (Alain) : Alors, Mme la Présidente, il s'agit d'une question qui comporte des éléments juridiques. Alors, la Loi sur l'instruction publique actuelle accorde au ministre de l'Éducation des pouvoirs lui permettant d'intervenir dans des situations d'exception, des situations exceptionnelles auxquelles vous référez depuis deux jours.

Le premier pouvoir que le ministre possède, c'est celui prévu par l'article 477 qui lui permet de retenir, en tout ou en partie, une subvention versée à une commission scolaire si la commission scolaire n'observe pas une disposition de la loi. Alors, il m'apparaît, il nous apparaît qu'il s'agit d'un pouvoir important que le ministre possède déjà.

Par ailleurs, au niveau des dispositions concernant la tutelle — et, bon, on propose de modifier le titre maintenant pour que ça devienne des mesures de contrôle — l'article 478.3 de la LIP, donc, accorde au ministre le pouvoir d'ordonner une enquête se rapportant à l'administration, l'organisation et le financement d'une commission scolaire. Alors, c'est un pouvoir qui est important que le ministre peut exercer.

Le projet de loi n° 105 prévoit, d'ailleurs, une modification à ce pouvoir, un complément de pouvoir à ce premier pouvoir qui se lit comme suit. C'est l'article 50, qui vient ajouter l'article 478.5, qui dit ceci : Le ministre peut, pendant ou après une enquête qu'il a déjà demandée, recommander ou ordonner à une commission scolaire de se soumettre à des mesures de surveillance ou d'accommodement ou d'appliquer les mesures correctrices qu'il indique.»

Alors, c'est un pouvoir que le ministre se propose d'ajouter à ceux qui existent déjà, et il nous apparaît que ce pouvoir est conséquent avec le maintien des élus scolaires, respectueux des élus scolaires.

M. Proulx : Est-ce que vous considérez que, dans le cas de la commission scolaire des Navigateurs, ça nécessite une intervention exceptionnelle?

Mme Bouchard (Josée) : Bien, écoutez, dans ce cas-là, là on est dans quelque chose de vraiment d'actualité, effectivement.

M. Proulx : Bien, c'était à la TV.

• (16 h 10) •

Mme Bouchard (Josée) : Bien, écoutez, je pense que oui, vous avez, M. le ministre, effectivement, utilisé, bon, ce qui était prévu, donc, déjà à la loi. Et, dans un cas d'impasse... on était dans une situation exceptionnelle, et, effectivement, je pense que c'était même souhaité par le président de la commission scolaire des Navigateurs. Alors, on est dans une situation exceptionnelle où, effectivement, le ministre — bon, à ce moment-là, c'est vous qui êtes en fonction — pouvait, effectivement, venir, bon, intervenir, nommer quelqu'un, et... Bon, comme on dit, j'ai bien hâte de voir qu'est-ce qui va en résulter, mais il reste qu'on est devant un conseil d'élus, puis qui aura ses décisions, effectivement, à prendre à la lumière de l'intervention exceptionnelle, mais souhaitée du ministre.

M. Proulx : Est-ce que vous êtes d'accord avec moi que, lorsque j'ai constaté les pouvoirs à la loi... Parce que c'est un exemple, c'est un cas réel qui vient après la rédaction du projet de loi n° 86 et la rédaction du projet de loi n° 105. Donc, voilà une application, je dirais, un peu inusitée, là, ça n'a pas été écrit pour ça. Mais il y a, effectivement, un pouvoir d'enquête, j'ai autorisé la tenue d'une enquête. La suite, c'est un rapport d'enquête qui constatera des choses. Le pouvoir qui viendra ensuite, c'est la tutelle de la commission scolaire, il n'y en a pas d'autre.

Mme Bouchard (Josée) : Vous avez raison, mais c'est ça aussi... Écoutez, on n'est pas un conseil d'administration quand on dirige une commission scolaire, on est un conseil d'élus. Alors, les élus sont conscients de ça et, bien, devront vivre avec les conséquences, je dirais, de leurs gestes. Et ça, bien, ça fait partie du jeu, et on ne peut pas être contre ça, écoutez, il y a des situations qui appellent ça. Comme, bon, je ne sais pas, une mauvaise utilisation d'une subvention, par exemple, ou quelque chose comme ça, vous avez déjà, justement, un droit d'intervention. Alors, moi, je pense, en tout cas, les commissions scolaires, les conseils des commissaires sont capables de gérer de façon générale toutes leurs difficultés qu'elles traversent. Maintenant, l'intervention d'un ministre, ça doit être, à mon avis, à notre avis, à l'avis de la fédération et de mes membres, vraiment dans un cas exceptionnel.

M. Proulx : Est-ce que vous seriez à l'aise... Ou, en tout cas, ma perception, prétention, la vision que j'en ai est la suivante, il me semble que nous pourrions avoir la possibilité d'intervenir autrement que par la mise en tutelle de la commission scolaire dans l'éventualité d'un cas comme celui-là où on est incapable de prendre des décisions financières pour la commission scolaire et surtout pour les contribuables et les élèves. Dans ce contexte-là, avoir certains pouvoirs pour être capables d'agir de manière exceptionnelle, très inhabituelle, pas dans la gestion quotidienne, m'apparaît un éventail plus utile pour faire en sorte de nous assurer, comme parlementaires, que le travail est fait correctement et en respect de la Loi sur l'instruction publique. Dans ce contexte-là, ça m'apparaît être le pouvoir extrême, la tutelle. Alors, ce qui me surprend — ça va vous donner l'occasion de répondre — c'est que vous n'ayez pas — en tout cas, ce n'est pas ce que j'ai entendu — cette même analyse là que c'est peut-être trop fort parfois, la tutelle, alors que, là, ça me semble être le chemin tout désigné à la fin de l'enquête si je n'ai pas d'autre choix.

Mme Bouchard (Josée) : Mme la Présidente, là-dessus, je pense que ce qui est prévu aussi comme ajout, là, puis qui a été cité par Me Guimont tout à l'heure dans la loi n° 105, qui m'apparaît quelque chose de très respectueux envers les élus, c'est-à-dire de proposer un accompagnement, hein, par le ministre, on est vraiment franchement d'accord avec ça. Je pense que c'est à la hauteur de ce que des élus doivent recevoir comme traitement.

Maintenant, vous savez, il y a ce pouvoir-là. Mais ce qu'on a visé aussi essentiellement dans le mémoire lorsqu'on a parlé des pouvoirs du ministre, c'est vraiment toute la question, en fait, des directives, c'est-à-dire, qui pourraient être adressées pendant l'année ou d'intervenir en cours d'année, encore une fois, sur des règles budgétaires. C'est plus ce volet-là qui nous interpelle vraiment directement.

Puis je vais vous dire que, quand on était dans le projet de loi n° 86 puis qu'on prévoyait l'abolition, là, pure et simple des élus, peut-être qu'il aurait été justifié... ou justifiable, en tout cas, qu'un ministre puisse vouloir intervenir, là, dans l'organisation comme telle. Mais, au moment où le projet de loi n° 105 reconnaît à sa pleine valeur le rôle des élus scolaires, bien, on ne voudrait pas que le ministre, en fait, lance un message, dans le fond, de manque de confiance envers sa base. Et je pense que c'est, en fait, élémentaire entre élus, les gens, ils sont capables, je pense, après... En fait, après tout ce que le ministre met en place dans le projet de loi n° 105 en termes, bon, de consultation, il s'assure par le comité de répartition des ressources que la distribution équitable se fasse, bien, mon Dieu! on se dit : Il y a tellement un gros travail de consultation, plusieurs étapes à franchir, et tout ça, on ne voit pas pourquoi le ministre devrait arriver en plein coeur d'année puis aller à l'encontre de ce qui a déjà été travaillé tous ensemble, puis avec beaucoup de sérieux et de rigueur.

M. Proulx : J'entends la distinction, en tout cas, entre les directives et des pouvoirs...

Mme Bouchard (Josée) : C'est important, oui, absolument.

La Présidente (Mme Rotiroti) : 28 secondes.

M. Proulx : ...qui sont utilisés dans des moments très critiques par rapport à l'application de la loi puis à l'autonomie des...

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci.

M. Proulx : J'entends ça. Merci pour... Est-ce qu'il me restait du temps?

La Présidente (Mme Rotiroti) : 18 secondes.

M. Proulx : Alors, je vous remercie de votre participation, et on prend bonne note de tout ça, et c'est lu. Et merci.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci, M. le ministre. On va passer du côté de l'opposition officielle, et je cède la parole à Mme la députée de Taschereau pour environ neuf minutes.

Mme Maltais : Merci beaucoup. Merci, Mme Bouchard, M. Flibotte, Me Guimont. Bienvenue à cette commission parlementaire. Un plaisir de vous entendre. Après tout, vous êtes toujours là. C'est donc intéressant. Toujours là à la défense des commissions scolaires, mais je vois là-dedans aussi du plan de réussite des élèves, des choses comme ça. C'est quelque chose de fondamental chez vous.

Moi, j'aimerais ça continuer la conversation que vous aviez avec le ministre parce que c'est assez intéressant. Je sais que vous demandez le retrait de l'article 459.6. Si on le regarde, c'est vraiment le pouvoir de directive du ministre, là. En fait, c'est dans l'article 47 pour nous, les parlementaires. Le ministre plaide : Je n'ai que le pouvoir de tutelle. Ça, c'est ce qu'il dit : Est-ce que je ne devrais pas avoir d'autres pouvoirs pour intervenir autrement qu'un pouvoir de tutelle? J'ai l'impression que, sous une bonne idée, peut-être, c'est-à-dire trouver le moyen d'intervenir quand c'est moins grave autrement, on se dirige vers une immense tutelle. En fait, c'est de la supratutelle parce qu'il n'a même plus besoin de pouvoir d'enquête pour intervenir directement.

Puis là je vais lire la ligne, puis je veux avoir vos commentaires sur ce que ça peut vouloir dire, pourquoi il y a autant de mots qui sont inclus. 459.6 : «Le ministre peut [...] émettre des directives à une commission scolaire portant sur l'administration, l'organisation, le fonctionnement ou les actions de celle-ci.» Pouvez-vous nous dire ce que ça comporte comme diversité de... Quand on dit «les actions», qu'est-ce que vous entendez sur : Vous pouvez recevoir des directives sur des actions?

Mme Bouchard (Josée) : Mme la Présidente, si vous permettez, je vais demander à mon vice-président de nous donner un exemple bien concret.

M. Flibotte (Richard) : Il y a plusieurs actions, naturellement, qui peuvent être posées par la commission scolaire. Bien sûr, ces actions-là tiennent toujours compte des particularités puis des spécificités du milieu, et les actions qui sont posées par la commission scolaire, les décisions qui sont prises par celle-ci sont toujours prises avec les gens qui y travaillent, les différents intervenants.

Et, un peu comme Mme Bouchard le disait, si on reprend l'exemple notamment de tout ce qui touche les décisions par rapport aux budgets, il y a toute une équipe, il y a tout un système quand même assez complexe et assez contraignant dans toute l'étape de budgétisation des commissions scolaires. Et, si le ministre intervient directement dans ces décisions-là, qui ont un impact directement à l'école ou même dans la salle de classe, bien, en fait, c'est tout le travail, en fait, de toute une équipe qui ont pris des décisions en toute connaissance de cause, puis en respectant les choix qu'ils font chez eux, notamment des choix qui sont en lien avec leurs couleurs locales, leurs spécificités aussi. Alors, nous, ce qu'on a interprété... Mme Bouchard l'a bien mentionné tantôt, nous, on l'interprète un peu comme un manque de confiance, d'une part, du ministre envers son propre réseau, mais également aussi une entorse aussi à un principe de décentralisation qu'on retrouve dans la loi, même de subsidiarité également aussi.

• (16 h 20) •

Mme Maltais : Mais, quand même, il y avait une tutelle suite à une enquête, puis là le ministre pouvait intervenir. D'ailleurs, c'est déjà arrivé, puis, ça, c'est de façon exceptionnelle. Là, maintenant, les directives peuvent être émises. Il n'y a pas d'avis préalable, il n'y a pas d'enquête préalable, il y a une directive sur l'administration, l'organisation, le fonctionnement ou les actions de celle-ci. Est-ce qu'il reste en dehors de ça une autre activité de la commission scolaire qui ne serait pas couverte par une directive du ministre? Dans le sens où vous le comprenez, là, est-ce que toutes les activités d'une commission scolaire — ça, je comprends, là, légalement — sont couvertes — parce que, ça, c'est une loi — par le nouveau pouvoir de tutelle du ministre?

Mme Bouchard (Josée) : Mme la Présidente, bien, en fait, c'est la lecture qu'on fait parce que, là, c'est la description du fonctionnement d'une organisation, et c'est pour ça qu'on dit... En plus, ce n'est pas précisé qu'il pourrait intervenir de façon exceptionnelle. C'est important, ça, ce mot-là. Alors, écoutez, c'est pour ça que je vous dis que c'est comme... il y a un illogisme avec, dans le fond, ce que le gouvernement a reconnu en mettant de côté le projet de loi n° 86 puis en reconnaissant la valeur, en fait, des conseils des commissaires, des élus au suffrage universel, qui ont une reddition de comptes à faire, à livrer à la population par la suite.

Vous savez, c'est la même chose aussi dans les pouvoirs qui sont décrits par rapport aux règles budgétaires. Là encore, d'intervenir durant une année alors que, bon, on a, effectivement, adopté notre budget, qu'on y a travaillé fort, et tout ça, qu'on a réparti équitablement, qu'on a réparti aussi des ressources humaines en fonction aussi des conventions collectives, bien, d'arriver en plein coeur d'année parce qu'il arrive un cas... On le sait, des fois, c'est une... en fait, ça vient de différentes... c'est des pressions qui s'exercent, hein, quotidiennement par toutes sortes de voies, des voies de communication parfois, et qui font que, bien, on va décider... oui, du jour au lendemain, le ministre va dire : Oui, je vais régler ça. Et puis, bien, c'est sur quelque chose qui est plus à caractère populiste, puis qui n'est pas basé nécessairement sur les données probantes, puis qui va faire que, là, oups! il arrive une nouvelle directive ou règle, puis, bon, il faut qu'on... comme on dit, on a l'obligation de répartir la somme qui va descendre dans la commission scolaire ou directement dans les écoles, comme ça a été fait au printemps dernier.

Alors, c'est pour ça que je vous dis, Mme la Présidente, c'est important de respecter, encore une fois, le travail qui se fait. Puis, en tout cas, vous savez, hier, le président de l'ADIGECS disait : Je pense qu'on a fait la démonstration que le travail, en tout cas, il est vraiment bien fait, puis il est toujours en voie d'amélioration. Avec 4 % de coûts d'administration, les ressources sont vraiment dans les écoles.

Mme Maltais : D'autant qu'il y a un autre article que vous demandez aussi de retirer qui fait même intervenir le ministre dans le plan d'engagement vers la réussite, possibilité, carrément, de refus d'un plan d'engagement de la réussite. Donc, à ce que je comprends — c'est parce qu'il me reste une minute à peine, madame..

Une voix : ...

Mme Maltais : Deux minutes? Ah! je viens de gagner une minute. Merveilleux, deux minutes! Mme Bouchard, est-ce qu'il y a une partie... Je sais que vous voulez que... Moi, je pense qu'il faut vraiment revoir tous ces pouvoirs du ministre, mais est-ce qu'il y a... Le ministre nous parle beaucoup de l'argent public, de l'argent... Ça, ça s'appelle l'administration. O.K.? Mais est-ce qu'il n'y a pas moyen, à tout le moins, d'enlever les autres pouvoirs, fonctionnement, organisation, action, plan... On vous a laissé vivre. Laissons-les travailler, si j'ose dire, deuxièmement. Et puis d'ajouter, par exemple, «de façon exceptionnelle» ou «après avis», tu sais, qu'est-ce qu'on pourrait faire pour éviter... C'est l'équivalent de la loi n° 10, pour moi, là, c'est une tutelle directe ministérielle.

Mme Bouchard (Josée) : Mme la Présidente, effectivement, je pense, le caractère exceptionnel... Depuis hier, je suis à l'écoute, en fait, de ce qui se discute ici, je pense que ça... en tout cas, ça rallierait aussi vos discussions entre le gouvernement et l'opposition. C'est ça que j'ai vu, là, à travers le caractère exceptionnel. Mais, une fois de plus, c'est important de respecter le travail local qui se fait. Puis dans, effectivement, l'élaboration des nouveaux plans d'engagement vers la réussite, vous savez que c'est un travail énorme qu'on va devoir faire, ça remplace le plan stratégique. Souvent, ce sont des travaux qui s'échelonnent sur près d'un an avec beaucoup de consultations. Alors, je ne vois pas comment le ministre, là, pourrait venir dire aux gens qui ont travaillé fort, là, de changer les choses.

Mme Maltais : Il me reste 20 secondes.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Vas-y. Oui, vas-y.

Mme Maltais : L'autre intervenant a dit : On devrait peut-être mettre ça sur la glace en attendant la fin de la consultation. Pensez-vous que ce serait une bonne idée?

Mme Bouchard (Josée) : Ça va me faire plaisir de répondre à ça.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Oui ou non.

Mme Maltais : Oui ou non.

Mme Bouchard (Josée) : C'est parce que... Oui, je pense que c'est une bonne idée et je pourrais expliquer peut-être à travers l'autre intervention.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci, Mme Bouchard. Alors, M. le député de Chambly, vous avez environ six minutes.

M. Roberge : Merci, Mme la Présidente. Merci pour votre présentation et pour la brièveté de votre dernière réponse, avec laquelle, d'ailleurs, je suis en accord. On se revoit pour une deuxième fois en quelques mois, mais, dans l'intervalle, il y a eu de l'actualité, on a parlé d'éducation dans les médias, puis il y a eu des problèmes. On dirait que cette nouvelle version du projet de loi n° 86, maintenant 105, ne tient pas compte des crises qu'on a vécues. Depuis l'hiver dernier puis le printemps dernier, il y a eu la DPJ qui a été obligée de débarquer dans des écoles illégales. Donc, les écoles illégales, les écoles clandestines, il y en avait, il y en a encore, la DPJ a été obligée de débarquer avec les policiers. Puis, dans la nouvelle version du projet de loi, on n'en parle pas. Il y a des parents qui choisissent de faire l'école à la maison, ils ont bien le droit de le faire, mais la Protectrice du citoyen a émis un rapport disant qu'il fallait modifier la Loi sur l'instruction publique. On ouvre la Loi sur l'instruction publique, on ne parle pas de ça.

Et il y a... Ils étaient déjà là, ils sont encore là, les enfants qu'on appelle «sans-papiers», les enfants qui arrivent ici dont la situation des parents, côté immigration, n'est pas régularisée. Moi, je les appelle les exclus, les oubliés, les laissés-pour-compte. Les exclus, bien, c'est ceux qui sont dans des écoles illégales. Les oubliés, c'est ceux qui font l'école à la maison, mais des fois... Et vous le savez parce que les commissions scolaires ont très peu de balises pour encadrer les parents qui font l'école à la maison. Puis les laissés-pour-compte, c'est ceux qui ne sont même pas là, à l'école.

Est-ce que vous pensez que, pour ces trois problématiques-là bien spécifiques, on ne devrait pas profiter du fait qu'ensemble on ouvre la Loi sur l'instruction publique? Avec, j'espère, l'intention de l'améliorer, est-ce qu'on ne devrait pas profiter de cette opportunité-là extraordinaire pour corriger ces trois situations?

Mme Bouchard (Josée) : Je suis très heureuse de votre question parce que ça va me permettre aussi d'ajouter quelque chose. Moi, j'ajouterais aussi la taxe parce qu'on n'en parle pas, puis vous savez que ça a fait la manchette aussi cet été.

Mais j'ajouterai aussi le fait que ce qui nous interpelle énormément, je dois vous le dire, à travers toutes nos discussions qu'on a eues, c'est le fait que, bien, le projet de loi arrive, mais avant la politique aussi sur la réussite éducative, où il y a encore des questions, comme vous le dites, qui ne sont pas réglées. Et je pense que, sincèrement, le ministre a sûrement l'intention — en tout cas, la volonté — de vouloir les régler, là, on a eu des discussions, entre autres, sur les enfants sans papiers, et tout ça, mais le fait que, là, on est en train de discuter ce projet de loi là, qui devrait être adopté avant la politique puis avec aussi... En fait, le plan stratégique du ministère non plus, qui n'est pas fait et qui devrait arriver après, mais moi... Déjà, nous autres, on se disait : Après, en fait, l'adoption de la politique sur la réussite éducative, probablement que ça va nécessiter la réouverture du projet de loi. Alors, c'est pour ça que, tout à l'heure, j'ai dit : Oui, on devrait peut-être le mettre sur la glace, dans le sens où... En tout cas, il y a des choses qui nous apparaissent vraiment évidentes à l'effet que c'est évident que des... Et oui, il y a des discussions qui doivent avoir lieu dans les prochains mois, au cours de la prochaine année, et assurons-nous que, bien, mon Dieu! le travail va être très bien fait.

M. Roberge : Ce que je comprends, c'est que c'est tellement tout croche depuis deux ans et demi qu'on a baissé nos attentes sérieusement. Juste le fait qu'on arrête de couper dans l'aide directe aux élèves, on dit : Fiou! Juste le fait qu'on ait un projet de loi qui propose certaines améliorations, on dit : On va arrêter de détériorer, on va peut-être améliorer un peu. Le fait qu'il y ait une consultation, tout le monde est content parce qu'avant c'était via bulldozer. Donc, on a tellement réduit nos attentes que ça passe. Mais, dans la vraie vie, ça n'a juste pas de bon sens de déposer un projet de loi dans lequel il n'y a aucun article qui traite des enfants exclus, oubliés, laissés pour compte. On ne peut même pas débattre d'améliorer ces articles-là, ils ne sont juste pas là. Puis, après ça, il y a une consultation pour faire une politique sur la réussite, mais après qu'il y a eu le projet de loi. On se dit : Bien, c'est moins pire que début de 2014, là, c'est moins pire que début 2015, mais c'est encore un petit peu du n'importe quoi. Vous ne pensez pas?

• (16 h 30) •

Mme Bouchard (Josée) : Mme la Présidente, en fait, pour nous... la fédération puis les membres, leur prérogative, ce pourquoi, en fait, ils se sont engagés aussi en politique scolaire, c'est de faire réussir les jeunes. Et donc je me souviens que M. le ministre a présenté le projet de loi n° 105 comme étant un projet de loi sur la réussite lorsqu'il l'a annoncé. Oui, il y a des éléments qui nous démontrent là-dedans qu'il y a un souci de vouloir trouver l'équité, hein, dans... puis dans la répartition des ressources, et tout ça, mais il nous apparaît davantage axé sur la gouvernance. Et, bien sûr, la politique de la réussite éducative apportera sûrement son lot de réponses, en fait, à toute notre préoccupation par rapport à la réussite des élèves, alors c'est dans ce sens-là que je vous dis : Pour nous, effectivement, il y a... en tout cas, ça représente... on a à se questionner, dans le fond, sur l'ordonnance, en fait, des étapes qui ont été choisies par le gouvernement.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci. 20 secondes.

M. Roberge : Ah! c'est bon. Vous vous questionniez sur la subsidiarité, hein, vous avez dit : Oui, là, c'est quoi, cette affaire-là? Est-ce que vous auriez une suggestion de définition? Parce que de le mettre dans le projet de loi, c'est une chose, mais il faudrait le définir. Auriez-vous une suggestion de ça?

Mme Bouchard (Josée) : Alors, pour nous, il est bien clair, on en discutait encore cet après-midi... Écoutez, tout le monde qui s'est présenté ici, il n'y a personne qui a la même définition, puis ça va vraiment requérir — comment dire? — un resserrement, une clarification de cette définition.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci. Merci beaucoup, Mme Bouchard, M. Guillaume et M. Flibotte, pour votre présence aujourd'hui.

Je vais suspendre quelques instants pour permettre au prochain groupe, la Fédération québécoise des directions d'établissement d'enseignement, de prendre place.

(Suspension de la séance à 16 h 32)

(Reprise à 16 h 35)

La Présidente (Mme Rotiroti) : Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! On va reprendre les travaux. Merci. Prenez place, s'il vous plaît. M. le ministre, vous êtes...

Une voix : ...

La Présidente (Mme Rotiroti) : Oui, vous pouvez les saluer à la fin. Alors, je souhaite la bienvenue à la Fédération québécoise des directions d'établissement d'enseignement. Merci d'être parmi nous. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour faire votre exposé, et, par la suite, on passera à une période d'échange entre les élus. Je vous demanderai juste de vous présenter, ainsi que les gens qui vous accompagnent, et vous pouvez, tout de suite, commencer votre présentation. Alors, la parole est à vous.

Fédération québécoise des directions
d'établissement d'enseignement (FQDE)

Mme Normand-Charbonneau (Lorraine) : Bonjour. Je suis Lorraine Normand-Charbonneau, présidente de la Fédération québécoise des directions d'établissement d'enseignement. Les gens qui m'accompagnent aujourd'hui : Mme Lise Madore, vice-présidente de la fédération — Mme Madore est présidente de l'association des directeurs et directrices d'école du Nord-Est du Québec; et, à ma droite, M. Jean-François Drouin, président de l'Association des directeurs et directrices d'établissement d'enseignement du Suroît.

Petit rappel, la fédération, c'est un regroupement professionnel de 2 050 directions d'établissement d'enseignement des trois ordres d'enseignement, soit le primaire, le secondaire, formation générale adultes et formation professionnelle. Nos membres constituent 20 associations à travers le Québec, et on oeuvre dans 47 des 60 commissions scolaires francophones au Québec.

Donc, je tiens à remercier les membres de la Commission de la culture et de l'éducation de nous accueillir et nous permettre de nous exprimer quant au projet de loi n° 105. Nous saluons aussi les efforts du gouvernement de vouloir permettre, entre autres, aux directions d'établissement d'enseignement de participer à certaines décisions entourant la répartition des ressources. Les directions, de par leur rôle et leurs fonctions, ont l'habitude de travailler en collaboration, en concertation. Entourées de leur équipe-école et du conseil d'établissement, elles sont les mieux placées pour bien analyser et répondre aux besoins des élèves. Elles s'assurent que toutes les conditions nécessaires à la réussite des élèves sont mises en place.

Avant de débuter, nous allons aller à l'essentiel, considérant qu'il y a beaucoup de choses qui ont été dites lors de la présentation, là, du projet de loi n° 86. Nous avons remis notre mémoire et nous avons aussi remis un document avec nos recommandations, qui pourront vous servir, là, ultérieurement pour poser, là, des questions. Mais vous comprendrez que nous irons globalement avec certains éléments lors de notre présentation, qui est de courte durée.

Donc, comme je le disais tantôt, de par ses rôles et fonctions, la direction d'établissement d'enseignement est appelée à jouer équitablement un rôle de leader dans la prise de décision touchant de près ou de loin la réussite des élèves dans l'école ou le centre. Celle-ci a l'habitude de travailler en collaboration et en concertation avec l'ensemble des acteurs. Comme le stipule la Loi sur l'instruction publique, la direction assure la direction pédagogique et administrative de l'école ou du centre.

Présentement, il y a des tristes constats. Les constats sont que, présentement, la direction d'établissement est freinée dans l'application de ses rôles et responsabilités à l'école ou dans les centres. On manque de marge de manoeuvre pour prendre des décisions qui tiennent compte des particularités des différents milieux, mettant en péril l'atteinte du projet éducatif et, par le fait même, de la réussite des élèves.

Vendredi dernier, M. le ministre lançait une période, là, de consultation, on annonçait qu'à travers le Québec on devrait se doter d'une politique nationale de la réussite. La réussite éducative, qu'on disait, et la réussite éducative... L'âme d'une politique, c'est quoi? L'âme de la politique, c'est les élèves, c'est l'école. Donc, notre premier constat, c'est de voir que la différence entre la mission de l'école et du centre... du projet de loi n° 86 avec le projet de loi n° 105, c'est qu'on a évacué le rôle central, le rôle fondamental de l'école, qui est au coeur de la réussite des élèves. Donc, une des premières recommandations, ce serait de remettre dans la mission de l'école le rôle fondamental, le rôle central de l'école dans le cheminement des élèves. La réussite des élèves, c'est dans l'école que ça se passe.

Et il ne faut pas oublier que, dans un contexte de subsidiarité, il importe de mentionner que la plus petite entité qui a de l'impact sur la réussite des élèves est l'école parce que ça pourrait créer de la confusion quand on travaille dans un contexte de subsidiarité. Il y a une étude de l'OCDE datant de 2014 qui souligne que les systèmes d'éducation qui prévoient davantage de mécanismes de responsabilisation et où... lorsque les enseignants et les chefs d'établissement collaborent à la gestion de leurs établissements, ces élèves-là sont plus performants. Je pourrais vous en nommer d'autres. Il y a PISA, il y a même... en Ontario, vous avez Michael Fullan, qui dit que, dans un système, il doit y avoir un partenariat vers le haut, mais aussi un partenariat vers le bas. La mission de la commission scolaire, la fédération est en accord avec le fait de confirmer le rôle de la commission scolaire comme celui de soutien aux établissements d'enseignement. Et on reconnaît le besoin d'avoir un palier intermédiaire, et on reconnaît aussi l'expertise des gens qui y travaillent.

• (16 h 40) •

Le comité de répartition des ressources. C'est une marque de confiance de la part du gouvernement d'avoir gardé le comité de répartition, là, des ressources, de permettre aux directions de participer à la prise de décision. Présentement, depuis qu'on a déposé le projet de loi n° 86, on a vu beaucoup, dans les commissions scolaires, de formation de comités de répartition des ressources. Je vous dirais que certains de ces comités-là ne respectent pas les principes de bonne gouvernance. Et, lorsque le comité de répartition des ressources sera adopté, il faudra que le ministre s'assure de bien encadrer et de bien structurer ce comité-là.

Le comité consultatif de gestion. Une autre différence d'avec le projet de loi n° 86 et le projet de loi n° 105 est qu'avec le projet de loi n° 86 on disait que le comité consultatif de gestion devait être un comité conjoint de gestion. Le mot «conjoint» réfère à «participation». Et le mot «participer», c'est l'aboutissement même du principe de subsidiarité. Donc, la fédération demande que l'appellation du comité consultatif de gestion soit le comité conjoint de gestion.

Adopter le projet éducatif. Avec le projet de loi n° 105, maintenant les moyens que l'école doit mettre en place pour atteindre les cibles et les objectifs recherchés en matière de réussite pédagogique, en réussite scolaire, maintenant, ils seront adoptés. Donc, ce que la fédération recommande, c'est que les éléments de nature pédagogique demeurent approuvés au lieu d'être adoptés au conseil d'établissement.

Les pouvoirs du ministre. On est d'accord, nous, que le ministre ait des pouvoirs. Je ne débattrai pas de la légalité du pouvoir du ministre, mais il faut que le ministre ait une porte d'entrée pour... et non pas mettre en tutelle, là, des commissions scolaires, mais d'aller vérifier si on applique bien l'essentiel, là, du projet de loi sur l'instruction publique. Par exemple, on dit que le ministre devrait élaborer à l'intention des commissions scolaires un guide de gestion décentralisée avec des pratiques, là, efficaces et efficientes, un guide qui se doit d'être inspiré de certaines pratiques gagnantes de gestion dans le réseau de l'éducation. Les pratiques à certains endroits, ce ne sont pas des pratiques de bonne gouvernance. Donc, il va être important que le ministre vérifie si l'application des bonnes pratiques se fait correctement. Et nous souhaitons, évidemment, de participer activement à l'élaboration du guide afin de faire profiter les gens, les membres, de l'expertise de terrain que nous détenons.

Les ressources financières doivent prioritairement être allouées aux établissements. Vous remarquerez que nous ne vous disons pas que les ressources financières doivent être allouées aux établissements. Effectivement, lorsque les règles budgétaires arrivent dans les commissions scolaires, certaines commissions scolaires ont en place un comité de répartition des ressources où on va mettre sur la table les sommes d'argent qui arrivent du ministère. On a vu dans les règles budgétaires 2016-2017 l'apparition d'une volonté, là, du gouvernement d'envoyer directement l'argent dans les établissements et de laisser la latitude de choisir des moyens à mettre en place. Lorsque l'argent arrive directement dans l'école, ce que ça fait, c'est que ça évite, premièrement, de faire des ponctions. Mais, lorsque l'argent arrive dans l'école, elle n'arrive pas par un chèque, elle est à la commission scolaire. Lors d'une rencontre en table de gestion, dans les endroits où il y a des bonnes pratiques, on met sur la table les montants d'argent, et, ensemble, les directions d'école, qui travaillent en collaboration, qui travaillent en partenariat, regardent comment on peut répartir équitablement et également les sommes d'argent.

Donc, il est faux de dire que, lorsqu'on décentralise des sommes d'argent dans les écoles, que des écoles vont être pauvres, que des écoles vont être riches. Ces sommes d'argent là, elles sont à la commission scolaire, la commission scolaire, elle a un rôle de chasse gardée au niveau de l'équité et de l'égalité, et c'est ce que l'équipe de direction de la commission scolaire fait.

Une voix : ...

Mme Normand-Charbonneau (Lorraine) : Une minute?

La Présidente (Mme Rotiroti) : Je vais vous laisser une minute, oui.

Mme Normand-Charbonneau (Lorraine) : Une minute? O.K. La conclusion. Nous accueillons positivement les changements proposés, sous réserve des observations et recommandations contenues dans notre mémoire. Nous voulons participer activement au processus de réflexion initié par le gouvernement visant à assurer la réussite des élèves. Une gouvernance de proximité permettra une prise de décision locale. La direction d'établissement d'enseignement, en tant que leader en gestion administrative et pédagogique de l'établissement, est la mieux placée pour mettre en place des conditions optimales de succès. Il faut que la réorganisation proposée favorise une prise de décision allégée où la créativité, la capacité d'innover, le leadership de l'établissement et la contribution des parents auront préséance sur les intérêts politiques et administratifs grevant, malheureusement, la structure actuelle.

Nous remercions les membres de la commission, M. le ministre, et nous réitérons notre volonté d'un accompagnement proactif.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci beaucoup, Mme Normand-Charbonneau. Alors, on va passer à la période d'échange, et je cède la parole à M. le ministre pour environ 15 minutes.

M. Proulx : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Bonjour. Très heureux d'avoir l'occasion de vous revoir, de vous entendre. Merci pour votre mémoire. Concernant les pouvoirs du ministre, je pense que je peux passer plus rapidement. J'entends également — puis je le vois dans votre mémoire à la page 11 — vous dites dans le dernier paragraphe, là, qu'il faut être capable de bien l'expliquer, par exemple, et il y a un lien à faire avec le guide, il y a un lien à faire avec la loi, il y a un lien à faire avec les pratiques, et je pense que ça va faire la démonstration, en tout cas, jusqu'à maintenant, que je n'avais pas l'intention... En tout cas, mon intention puis l'intention législative n'est pas de travailler dans le quotidien des autres — j'ai assez du mien, sincèrement — mais la réalité, c'est d'agir là où on devrait le faire. Puis je pense que vous l'avez exprimé également, la tutelle n'est pas la réponse à tout, et je ne pense pas que c'est nécessaire à chaque fois de se retrouver dans le psychodrame que ça amène.

Je veux vous entendre un peu sur la décentralisation parce que deux choses... La première, c'est que, bien entendu, s'il y a un esprit décentralisation, on va se retrouver plus près des écoles. À partir du haut, on va aller vers le bas. Si on va vers le bas, ça veut dire, si on y voit des avantages, que ça va bénéficier à plus de monde. Ça veut dire que ça va impliquer la direction, ça va impliquer les enseignants, ça va impliquer les professionnels, l'équipe-école, les parents des élèves. Est-ce que vous êtes en mesure de m'expliquer ce qui, pour vous, sont les avantages d'aller vers une décentralisation, tel qu'on en a abondamment parlé et qu'on en parle au cours des dernières semaines, des derniers mois, parce que des groupes précédents à vous proches de l'école, dans l'école, n'ont pas la même perception, je pense, à l'égard des avantages de soutenir un espace de discussion, et de réflexion, et de décision, de transférer des ressources vers l'école? Donc, je voulais vous entendre à cet égard-là.

Mme Normand-Charbonneau (Lorraine) : Oui, puis j'ai peut-être un exemple à vous donner.

M. Proulx : Allez-y.

Mme Normand-Charbonneau (Lorraine) : Pour une école primaire de 708 élèves, une des mesures transférables, là, qu'on a eues dans les règles budgétaires, l'aide à la réussite, là, ça équivaut à 15 000 $, donc 21 $, 22 $ par élève. Ce que ça permet à l'école, c'est que ça permet à l'école d'avoir de la latitude dans l'organisation des services. Donc, on ne parle pas d'autonomie complète.

Tantôt, dans mon allocution, quand je disais d'allouer majoritairement ou d'une façon prioritaire des allocations, on ne veut pas que toutes les sommes d'argent soient décentralisées. Mais ce que ça fait, c'est que ça donne des marges de manoeuvre à l'école. Parce que, présentement, il y a des endroits — et ce n'est pas minoritaire — où on ne laisse pas l'école choisir ses moyens, donc on ne peut pas aller en équipe-école et choisir comment on va faire réussir les élèves. Même si présentement, dans les règles budgétaires, il y avait des mesures utilisées avec souplesse où on demandait de transférer les sommes dans l'école et de les laisser choisir les moyens, il y a certains endroits qu'on ne leur a pas laissé choisir les moyens. Donc, il faudra que le gouvernement s'assure que, dans les règles budgétaires, lorsqu'on demande de décentraliser vers les écoles, que ça soit fait puis que les moyens soient laissés à l'école, donc ça laisse cette latitude-là. Parce que l'école, les enseignants, le personnel, qu'on parle du psychologue, qu'on parle de l'orthopédagogue, du personnel de soutien, qu'on parce des parents... Parce que les parents qui sont à l'école, qui ont des enfants, ils connaissent les besoins de leurs enfants, donc on n'a pas besoin de remplir un formulaire pour avoir, par exemple, une heure de plus de service lors d'une rencontre de plan d'intervention, on veut être capables de mettre en place rapidement le service que l'élève a de besoin.

• (16 h 50) •

M. Proulx : Ce que j'entends avec un exemple concret, c'est ce qu'on a fait pour une première fois, c'est un pas dans la bonne direction.

Mme Normand-Charbonneau (Lorraine) : Effectivement.

M. Proulx : C'est une excellente nouvelle.

Mme Normand-Charbonneau (Lorraine) : C'est un petit pas dans la bonne direction.

M. Proulx : Mais c'est un pas dans la bonne direction.

Mme Normand-Charbonneau (Lorraine) : Mais il faut enlever la notion parce que j'ai entendu les gens précédemment... que l'autonomie dans les... envoyer de l'argent dans l'école, l'autonomie, il y a des écoles qui vont être riches, il y a des écoles qui vont être pauvres. La commission scolaire, sa mission, c'est toujours de tenir compte de l'équité puis de l'égalité. Puis, les directions d'école, on est habitués, dans l'école il y a une multitude de comités dans l'école. Qu'on parle, là, du conseil des enseignants, du comité EHDAA, qu'on parle du comité de la cour d'école, le comité de la fête de l'Halloween, de la fête de Noël, il y a une multitude de comités. On travaille avec le conseil d'établissement, il n'y a rien qui se passe dans l'école... Le comité EHDAA, on est toujours en collaboration. On est toujours en concertation avec notre équipe-école. Donc, pour nous, ça va continuer, ça va être la même chose.

Puis les commissions scolaires qui avaient des bonnes pratiques, c'est exactement ce qu'ils font. Il y a des membres qui m'ont dit que, dans leur commission scolaire, ils ont formé un CRR, et tout a été mis sur la table, et ils ont décidé ensemble comment ils étaient pour répartir les ressources. Puis nous, ce qu'on se dit, c'est : Ça va aider à la démocratie scolaire. Quand les commissaires vont recevoir les recommandations du CRR, ils vont savoir que les recommandations viennent du terrain, viennent des gens qui sont à chaque jour avec les élèves, avec les parents. Il me semble que c'est bonifiant pour une démocratie de savoir que le milieu, que les gens s'intéressent à la prise de décision puis que, dans le fond, on veut remonter le fruit de nos concertations puis de nos collaborations, là, à la démocratie qui est le conseil des commissaires.

M. Proulx : Vous faites état dans votre mémoire du comité de répartition des ressources, comme vous l'avez bien expliqué, et vous dites : Il y a là des gains d'efficacité. C'est ce que vous dites, il y a possibilité d'avoir des gains au niveau de l'efficacité. Pourriez-vous nous donner des exemples, comme vous l'avez fait au niveau de la décentralisation?

Mme Normand-Charbonneau (Lorraine) : Je peux reprendre les mêmes exemples aussi. Il y a des projets dans certaines commissions scolaires où c'est du mur-à-mur. Il y a des élèves qui reçoivent de l'aide de l'orthopédagogue qui n'en ont pas de besoin parce qu'on a décidé avec des pratiques probantes... Il faut faire attention, les pratiques probantes peuvent être bonnes pour un milieu, mais ne pas être bonnes pour d'autres milieux. Donc, ce que ça fait, c'est qu'on met de l'argent à quelque part, puis il y a des jeunes qui n'en ont pas, d'aide, puis qu'on n'a pas de sous. Donc, de savoir que l'argent est dans l'école, on connaît les besoins des élèves, c'est ça qui est de gérer une école d'une façon efficiente. Puis l'argent, c'est l'argent des contribuables. Puis ce qu'on veut, c'est que les enfants, que le personnel d'école aient le soutien, aient le service dont ils ont besoin.

M. Proulx : Je fais, avant de vous poser la prochaine question, une petite parenthèse à l'égard de ça parce que vous savez qu'à l'égard des enfants avec des besoins particuliers la façon actuelle de fonctionner, pour donner des résultats, ne donne pas les résultats en matière de diplomation. Je pense que c'est évident. Et, à chaque personne qu'on va rencontrer, il semble y avoir une solution différente. Alors, je pense que, là, voilà un bel exemple pour la consultation, et pas pour le projet de loi maintenant. Ça, je pense que c'est un bel exemple de séparer les deux. Quand on est prêt à poser un geste puis à faire quelque chose, on le fait. Quand il faut encore réfléchir à comment on peut faire mieux, on le fait. Mais on ne va pas s'inscrire dans la loi maintenant quand on n'a pas encore trouvé la meilleure façon de le faire ou qu'on n'a pas établi ensemble que ça devait être la meilleure façon.

Concernant le comité de répartition des ressources puis le comité consultatif de gestion, bon, vous proposez de revenir à l'appellation qui était dans le projet initial. Ça, je l'ai vu et entendu. Hier, des gens nous disaient : Il faudrait changer le chemin. Indépendamment que certains disent : Il ne devrait pas être décisionnel parce qu'il prend des décisions et qu'ensuite un conseil des commissaires doit en prendre acte ou de faire un choix différent en s'exprimant au conseil des commissaires... Mais, sur le chemin à parcourir, certains ont dit : Bien, si le comité de répartition des ressources, qui, en passant, semble-t-il, est présent dans bien des commissions scolaires, alors il ne devrait pas être trop, trop difficile à mettre en place... Mais, si le comité de répartition des ressources était comme une étape avant le comité consultatif de gestion, bien, le jour ou ça va arriver au conseil des commissaires, il y a encore plus d'adhésion ou pas... bien, surtout d'adhésion si on a une recommandation positive à mettre de l'avant, mais il y aura encore plus de gens interpelés, intéressés qui auront donné leur avis, et là on aura fait le terrain, la base, la structure avant d'arriver au conseil des commissaires. Vous en pensez quoi à cet égard-là, vous? Est-ce que c'est pour vous un chemin supplémentaire, donc un détour, ou c'est un passage obligé d'aller, par exemple, vers le comité consultatif?

Mme Normand-Charbonneau (Lorraine) : Nous recevons les règles budgétaires dans une commission scolaire, et de partager comment ça fonctionne, c'est quoi, les sommes d'argent, c'est quoi, la tarte qui est arrivée en argent dans la commission scolaire, ce n'est pas évident de faire ça à 25, 30, 40, 50 ou en amphithéâtre. O.K.? L'important de ce projet de loi là, en disant que les directions d'école font partie du comité de répartition des ressources, ça assure les directions d'école de voir les sommes d'argent qui arrivent, de pouvoir y participer.

Donc, je ne peux pas répondre oui ou non parce qu'à certains endroits... Il y a des petites commissions scolaires, par exemple, pour qui le comité de répartition des ressources, ça va être le comité consultatif de gestion ou le comité conjoint. Mais les endroits où c'est plus nombreux, c'est impossible. Mais c'est un pas à dire que la direction d'école va avoir accès à toutes les données, à tous les montants d'argent qui sont versés présentement. Et, même s'il y a des comités de répartition des ressources qui ont été formés de par le projet de loi n° 86, il y a des endroits que le directeur des finances ne fait même pas partie du CRR. Ce n'est pas logique. La personne, à la commission scolaire, qui est la personne la plus importante au niveau de l'argent, ce n'est pas normal qu'elle ne soit pas au comité de répartition des ressources. Donc, oui dans les petites commissions scolaires, mais, dans les grandes commissions scolaires, dans les nombreuses, c'est assez difficile, là, à faire.

M. Proulx : Je vous ai parlé de la décentralisation tout à l'heure, je voudrais vous entendre sur le corollaire de la décentralisation, qui est : Si on a à assumer un pouvoir ou une responsabilité, on a à rendre compte de cette responsabilité-là ou de ce pouvoir-là dans la mesure où, en plus — vous l'avez dit tout à l'heure très justement — ce sont des deniers publics. Les gens qui se sont exprimés — la possibilité d'une décentralisation — ont dit : Bien, il va falloir que ce soient les écoles qui prennent en charge la reddition de comptes. J'essaie juste de voir... Il y a quelque chose de logique dans le principe que, si vous administrez des sommes nouvelles, que vous ayez à rendre compte de ça. Il y aurait quelque chose d'illogique de vous laisser complètement seuls et de ne pas s'inscrire dans la collaboration qui devrait exister dans la répartition de cette ressource-là et, surtout, dans son transport du ministère jusqu'à l'école, pour prendre une image facile à comprendre.

Alors, comment vous percevez cette nécessité-là de reddition de comptes? Comment ça peut s'inscrire dans les façons de faire actuelles, d'autant qu'actuellement une commission scolaire — ça a été bien expliqué — ça a un compte de banque, une école, ça n'a pas un statut juridique, et, si le ministère veut diriger les sommes vers une école, il doit inévitablement passer par une commission scolaire, ce qui va de soi, mais identifier que cet argent-là doit aller vers les écoles?

Mme Normand-Charbonneau (Lorraine) : Présentement, c'est la direction d'école qui fait la reddition de comptes. Les données qui sont envoyées au ministère proviennent de l'école. À certains endroits, à certains égards, on peut avoir de l'aide de la commission scolaire, mais, dans un contexte où la commission scolaire va être en support, en service aux écoles, c'est normal. Qu'il y ait des gens du réseau qui vous aient dit ça, ça vous démontre comment il y a du travail à faire au niveau de la collaboration, de la concertation dans le réseau. Ce n'est pas normal que les gens qui ont un palier supérieur disent : L'argent va s'en aller dans l'école, bien, c'est toi qui vas faire la reddition de comptes. De toute façon, présentement, c'est nous qui la faisons, la reddition de comptes. À certains égards, on a du support. Mais, si une direction d'établissement a besoin de support, on s'attend à ce que le palier intermédiaire soit en support à la direction d'école.

Donc, il y a du travail à faire au niveau de la collaboration, au niveau de la concertation. Ce n'est pas normal qu'un réseau réponde de cette façon-là. C'est comme dire : Je te donne l'argent, bien, organise-toi, puis tu vas me faire la reddition de comptes. Voyons donc! On est là pour les enfants, on est là pour travailler avec les parents, avec l'équipe-école. On n'est pas là pour dire : Je te donne l'argent, bien, fais-le seul. On est là pour travailler en partenariat avec le réseau.

M. Proulx : C'est un peu la raison pour laquelle j'avais posé la question puis que je vous la pose aujourd'hui. Je veux vous entendre sur la... s'il nous reste encore...

La Présidente (Mme Rotiroti) : Une minute.

• (17 heures) •

M. Proulx : Une minute? Rapidement, sur la perception à l'égard qu'une direction d'école et les enseignants dans une école, bien, ce n'est pas la... il y a consultation, mais est-ce qu'il y a consultation véritable? Est-ce que la position des enseignants est bel et bien entendue à leur juste valeur? Je voulais juste vous entendre quelques instants là-dessus parce que, ça aussi, il y a eu mise en garde, mais, en même temps, la réalité chez vous, l'envers de la médaille, c'est quoi?

Mme Normand-Charbonneau (Lorraine) : Le CRR, on demande que ça soit administratif. Pourquoi on demande ça? Parce qu'il y a quand même des lieux où est-ce que les enseignants... Par exemple, tout ce qui est conventionné, toutes les sommes d'argent conventionnées, il y a des tables avec les syndicats, là, de relations de travail pour débattre de ça. Les sommes d'argent qui sont envoyées dans les écoles, par exemple, au niveau des EHDAA, il y a un comité EHDAA dans toutes les écoles... former des enseignants. La direction d'école doit écouter son comité, doit entendre leurs préoccupations. Et, lorsque la direction présente son plan au niveau, là, des ressources, elle doit motiver pourquoi, si, oui ou non, elle accepte ce que le personnel enseignant, là, a demandé. Il y a déjà un travail de concertation dans les milieux. Tout ce qui est conventionné, il y a des rencontres avec les syndicats. Et, dans l'école, il faut présenter ça au conseil d'établissement, et il y a un travail de concertation, et la direction d'école doit dire pourquoi elle ne mettra pas en place ce que les enseignants, par exemple, ont décidé au niveau de l'allocation des EHDAA.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci beaucoup. On va passer du côté de l'opposition officielle. Mme la députée de Taschereau, vous disposez de 10 minutes.

Mme Maltais : Merci. Bonjour, Mme la présidente. Je salue aussi les personnes qui vous accompagnent. Bienvenue à cette audition en commission parlementaire.

J'ai bien compris que vous avez fait, je dois dire, un vibrant plaidoyer pour le comité de répartition des ressources, pour la présence des directions scolaires. Mon collègue qui est ici d'habitude, le député de Lac-Saint-Jean, m'en a parlé, ça semble véritablement importer aux directions d'école. En général, toutefois, c'est sur le reste de la composition qu'on se demande qui va être là-dessus, là. De la façon dont l'article est écrit, à la limite, il pourrait y avoir un comptable, un avocat complètement à l'extérieur, pas parent du tout. C'est-à-dire qu'on essaie de voir comment on pourrait bonifier ce comité si jamais il existe.

Est-ce que vous avez une idée de comment il pourrait être bonifié? Est-ce que ça devrait être des parents? Est-ce que ça devrait être peut-être des cadres des commissions scolaires? Vous parlez du gestionnaire des ressources, avez-vous une idée?

Mme Normand-Charbonneau (Lorraine) : Bien, la première chose, c'est la commission scolaire qui va décider, ce n'est pas les directions d'école.

Mme Maltais : Oui, mais on est là pour bonifier la loi.

Mme Normand-Charbonneau (Lorraine) : Exactement. Et la chose qui est intéressante aussi, c'est que les directions d'école, elles vont être élues par leurs pairs. C'est un beau geste de démocratie scolaire de dire que les directions vont pouvoir choisir leurs membres. Il y a des gens qui travaillent à la commission scolaire qui ont de l'expertise. Si on parle, par exemple, des ressources au niveau des services éducatifs, bien, c'est certain que nous, on voit, entre autres, la personne qui est responsable, là, des services éducatifs. Parce que, dans la loi, on dit qu'il y a aussi la personne responsable des services complémentaires. Mais, si on parle d'autres revenus, on n'a pas nécessairement à avoir toujours les mêmes personnes. Donc, dépendamment... Parce que ce n'est pas la direction qui va choisir, hein, c'est probablement le conseil des commissaires avec la direction générale, il pourrait y avoir alternance de personnes. Il se peut qu'à un moment donné ce soit quelqu'un de la communauté qui vienne s'asseoir parce que cet organisme-là fournit des ressources à l'école.

Mme Maltais : On pourrait s'entendre, ça devrait être dans le secteur éducatif ou supportant le milieu de l'éducation, à tout le moins. On pourrait au moins... vous tenez à ce que ce soit quand même des gens qui ont rapport avec le milieu scolaire.

Mme Normand-Charbonneau (Lorraine) : Ça dépend parce que les municipalités, à plusieurs endroits, il y a des locations de locaux dans les écoles, la piscine, les gymnases. Donc, quand on parle, à certains moments, location... si on parle de location, là, de salles, il pourrait peut-être y avoir quelqu'un de la municipalité, mais c'est quand même le comité qui pourrait faire des recommandations. Mais c'est le conseil des commissaires et la direction générale qui vont décider.

Mme Maltais : Vous êtes directrice d'école... ou vous avez été, je ne sais pas...

Mme Normand-Charbonneau (Lorraine) : J'étais dans une école de 2 000 élèves, quatre centres spécialisés.

Mme Maltais : C'est quoi, l'impact de modifier les règles budgétaires en cours d'année?

Mme Normand-Charbonneau (Lorraine) : Ce n'est pas facile. Ce serait plus facile si, les règles budgétaires, on était capables de les... On l'a dit lors du projet de loi n° 86, là, si on était capables d'avoir des sous pour un plus long temps, on serait capables, là, de bonifier. Parce que, présentement, la direction d'école, si elle reçoit des sommes d'argent, par exemple, au mois de novembre, au mois de janvier, au mois de février, bien, il faut qu'elle se dépêche à dépenser les sommes d'argent. Donc, nous, la planification, là, de notre école, là, on la fait au printemps pour le septembre d'après. Donc, ça serait intéressant qu'au niveau des sommes d'argent qu'on ait une vision globale des montants qu'on va envoyer et qu'on ait du temps pour planifier avec notre équipe-école les montants d'argent qui vont être envoyés.

Mme Maltais : En femme politique d'expérience, je vous dirais qu'à ce moment-là ce que vous venez de faire, c'est peut-être un petit peu sans... bien sûr, ce n'était pas votre intention, mais critiquer un peu cette idée que le ministre peut envoyer de l'argent directement dans les écoles parce que, là, à ce moment-là, c'est une volonté politique qui intervient, et une volonté politique intervient quand il y a une opportunité politique souvent. Alors, ça peut être délicat parce que...

L'autre chose, c'est que, dans l'article 47, le ministre dit qu'il peut modifier les règles budgétaires n'importe quand, y compris en plein milieu d'année. Moi, j'ai un doute sur ce nouveau super pouvoir du ministre d'intervenir en cours d'année. C'est pour ça que je vous posais la question.

Mme Normand-Charbonneau (Lorraine) : Bien, je vais vous donner un exemple. On a envoyé dans le réseau, là, de l'argent pour des pratiques probantes au secondaire, pour mettre de l'étude dirigée en fin de journée. Mais, quand tu as des élèves, par exemple, autochtones qui, eux, c'est le matin qu'ils ne viennent pas à l'école, ce n'est pas la place pour organiser, là, l'étude dirigée le soir. Donc, s'il y avait des changements dans les règles budgétaires, il pourrait y avoir, par exemple, assouplissement et de dire : La règle budgétaire qu'on a envoyée, il faut regarder, là, ça ne répond pas aux besoins, il y a une souplesse... Dans cette optique-là de changement, de venir, là, changer les règles budgétaires, ça pourrait être bon pour les écoles.

Mme Maltais : Ça fait que, quand on dit les mots «des directives qui peuvent en outre»... Non, «le ministre peut [...] émettre des directives à une commission scolaire portant sur l'administration, l'organisation, le fonctionnement ou les actions[...]. [...]compléter ou de préciser les règles budgétaires en cours d'année scolaire.» Il peut être vu de façon négative comme de façon positive, il n'y a pas de précision là-dedans, là.

Mme Normand-Charbonneau (Lorraine) : Oui. Peut-être, présentement, là, les sommes d'argent décentralisées qui ont été envoyées, bien, il y a des endroits qu'on n'a pas respecté ce que le gouvernement nous avait demandé au niveau des règles budgétaires. Ça va être important qu'il y ait quelqu'un qui aille vérifier comment ça a été fait parce que, sans ça, ça ne donne rien de dire : On décentralise certaines mesures si on ne vient pas vérifier. Donc, à certains égards, oui, que le ministre se serve d'un pouvoir de directive pour venir vérifier l'administration, les bonnes pratiques de gestion, je pense que c'est triste, là, mais c'est ce qu'on dit, nous. Le ministre, on ne veut pas l'avoir dans notre école, là, on veut qu'il vienne voir les belles choses qui se passent. Mais, quand c'est rendu que les directions d'école disent : On a un petit retient, là, oui, par moments, dans certains endroits, il faudra que le ministre vienne voir comment ça se passe au niveau de la gestion.

Mme Maltais : Mais ce n'est pas de la décentralisation, là, c'est le contraire.

Mme Normand-Charbonneau (Lorraine) : Vous mélangez deux choses, là. On ne parle pas de décentralisation, on parle de l'argent qui est envoyé, mais qui n'est pas reçu dans les écoles.

Mme Maltais : Ah! bien là, ce n'est pas ça, moi, c'est si le ministre émet des directives puis change les règles budgétaires en cours de route.

Mme Normand-Charbonneau (Lorraine) : Exactement.

Mme Maltais : O.K. Ça, c'est ça que j'appelle le contraire de la décentralisation. Mais une question, il y a des gens qui sont venus dire depuis... deux intervenants disant : Écoutez, on comprend, il y a des bonnes intentions là-dedans, un comité de répartition des ressources, bon, il faudrait juste vérifier, ta, ta, certains pouvoirs au ministre, mais est-ce qu'on pourrait attendre la consultation? Il se passe une grande consultation à l'école. Ce qu'il y a là-dedans, on n'est pas en état d'urgence, mettons ça sur la glace, attendons le résultat de la consultation parce que, de toute façon, il va falloir rouvrir la loi. Est-ce que vous avez une opinion là-dessus?

Mme Normand-Charbonneau (Lorraine) : Oui. La glace, elle commence à être fondue, là, hein? On n'a pas eu le projet de loi n° 86. Il y a des gens qui ont mis des efforts, il y a des gens qui ont travaillé en partenariat pour venir présenter des choses. De dire que, maintenant, le projet de loi n° 105 n'a pas d'impact sur la réussite des élèves, c'est faux. Parce que, même si on développe une politique nationale de réussite éducative, quand ces fondements-là vont être trouvés, décidés, adhérés par les gens du Québec, s'il n'y a pas des pratiques de gestion efficaces et efficientes, il va y avoir des problématiques. Il ne faut pas se le cacher, le nerf de la guerre, c'est l'argent. Puis, si les sommes d'argent, elles n'arrivent pas dans l'école, quand même qu'on aurait une belle politique éducative d'équité et d'égalité, si, à divers paliers, il y a de la bureaucratie puis que, dans le fond, l'école ne reçoit pas d'argent, la politique, elle ne donnera rien. Donc, ce projet de loi n'était pas... ce n'est pas un... Comment je pourrais dire? C'est un projet qui a de l'impact sur la réussite des élèves. C'est faux de dire que ça n'a pas d'impact parce que les directions d'école...

Je vous donne un exemple, le projet de loi sur l'intimidation. La direction de l'école, là, la loi lui confère 19 responsabilités. Mais, si tu ne me donnes pas les marges de manoeuvre pour être imputable de ces 19 responsabilités là, ça ne donne rien de demander à l'école de prévenir l'intimidation puis la violence. Donc, il faut que les sommes d'argent suivent dans les écoles. Puis la meilleure façon, c'est de s'assurer que les directions d'école sont au palier où on va parler d'allocation de ressources. C'est ça qu'on demande, les directions d'école. On ne demande pas de tout décider, on demande d'être informés et de voir les chiffres pour être capables de décider ensemble comment répartir les ressources.

• (17 h 10) •

Le Président (M. Auger) : Merci. Merci beaucoup.

Mme Maltais : ...

Le Président (M. Auger) : Désolé, c'est tout le temps que nous avions.

Mme Maltais : O.K. Bon.

Le Président (M. Auger) : Nous allons poursuivre avec le porte-parole de la deuxième opposition pour six minutes. M. le député de Chambly.

M. Roberge : Merci beaucoup, M. le Président. Merci pour votre présentation. Je trouve ça intéressant, la fin de votre échange, parce qu'on entend dire des fois : Il faut évacuer les débats de gouvernance puis de structures, là, il ne faut pas... parce qu'on veut se concentrer sur la réussite. Puis vous, vous nous dites : Bien non, ça fait partie, hein... un est dans l'autre. Je ne me trompe pas en disant ça? Vous êtes d'accord pour dire que, quand on parle de règles de gouvernance, on parle aussi de moyens de faire réussir les jeunes?

Mme Normand-Charbonneau (Lorraine) : ...un ne passe pas sans l'autre. On ne peut pas évacuer la gouvernance, les bonnes pratiques, comment on dépense l'argent, l'argent qui s'en va dans les écoles puis parler de réussite des élèves, là, parce que, moi, dans mon école, je peux être avec mon équipe-école, je peux être avec mes enseignants, je peux être avec l'enseignante qui est dans une classe de jeunes qui ont des troubles spécifiques, là, d'apprentissage, et l'enseignante me dit : Madame, j'ai besoin de telle, telle, telle chose, si moi, je n'ai pas de mesures, si je n'ai pas de sous, je veux l'aider, l'enseignante, mais je ne suis pas capable de mettre en place un service... Puis là on ne parle pas seulement d'un service matériel, là, on parle aussi, là, d'aide humaine, de l'aide humaine, là, dans les écoles. Mais un ne va pas sans l'autre. Puis on ne peut pas dire que, présentement, le projet de loi n° 105 — parce qu'on l'a entendu — il faut le mettre aux oubliettes, là, parce que, quand la politique nationale va arriver, là, on va avoir le même problème, que l'argent n'arrivera pas dans les écoles, que les directions d'école vont être imputables et qu'on ne leur donnera pas les marges de manoeuvre.

M. Roberge : Donc, on ne peut pas parler que de structures, mais de dire : Ne parlons pas de structures, car nous voulons parler de réussite, c'est une erreur. Bon.

Avec la création du comité de répartition des ressources, on a une espèce d'intention d'impliquer davantage les directions d'école dans la prise de décision. Mais, quand on regarde entre 2002 et 2013, les indicateurs du ministère nous disent qu'il y a eu une baisse du nombre de directeurs d'école puis une augmentation du nombre des autres cadres. Une baisse du nombre de directions d'école puis une augmentation du nombre des autres cadres, comment justifier ça? Est-ce que ça ne vous inquiète pas un petit peu?

Mme Normand-Charbonneau (Lorraine) : Ça nous inquiète beaucoup. Nous avons des directions d'école, des chefs d'établissement, là, qui ont huit établissements scolaires répartis sur un territoire immense. Il y a des endroits où la direction d'établissement, au primaire, a 700 élèves, sept préscolaires. Elle a comme aide trois jours de direction adjointe. Comment vous voulez qu'une direction d'école avec des enfants qui arrivent, là, au préscolaire, qu'on doit mettre en place des services... comment vous voulez que ces gens-là offrent un bon service aux élèves, aux parents, mais aussi au personnel de l'école? Il y a une problématique au niveau, là, de... Présentement, là, dans le cadre des coupures, là, il y a eu beaucoup de coupures dans les postes de direction d'établissement d'enseignement, et les gens sont épuisés parce qu'ils ont beaucoup de bâtiments à gérer. Vous avez touché un bon point aussi.

M. Roberge : Oui. C'est quelque chose qui nous inquiète énormément, ce...

Mme Normand-Charbonneau (Lorraine) : Oui. Ce n'est pas normal.

M. Roberge : Ce n'est pas normal d'avoir une baisse du nombre de directions d'école qui sont en contact direct, direct...

Mme Normand-Charbonneau (Lorraine) : Exactement.

M. Roberge : ...puis une augmentation du nombre de...

Mme Normand-Charbonneau (Lorraine) : Ce n'est pas normal que la base...

M. Roberge : Ce n'est pas que les cadres scolaires ne font pas un bon travail, mais il y a certainement un débalancement, et ça va en sens contraire... Quand on dit qu'on veut impliquer les directions d'école dans la gestion, mais qu'on réduit le nombre de directions d'école, ça ne marche pas, il faut inverser la tendance.

Mme Normand-Charbonneau (Lorraine) : Bien, assurer la gestion pédagogique et administrative de huit bâtiments... Je l'ai déjà vécu, moi, à quatre bâtiments, c'est assez... À grande distance entre les bâtiments, tu n'es jamais dans l'école, là, tu es toujours par téléphone. Tu règles les feux dans l'école, les problématiques, tu ne peux pas être en soutien avec le personnel enseignant face à des problématiques qu'il éprouve.

M. Roberge : Très important. Merci.

Vous avez, comme beaucoup d'autres personnes, mentionné ce terme, «subsidiarité». C'est le mot à la mode, là. Au scrabble, ça doit valoir beaucoup de points sur l'échiquier du ministre. Mais ça veut dire quoi pour vous? Parce qu'il va falloir le définir dans la loi. Vous, ça serait quoi, votre définition du principe de subsidiarité?

Mme Normand-Charbonneau (Lorraine) : Quand on a commencé à parler du principe de subsidiarité avec le projet de loi n° 86, on a fait des recherches, nous, à la fédération. Et c'est drôle parce que, tantôt, on disait : Le principe de subsidiarité, c'est quoi? Bien, en Europe, ils l'utilisent, le principe de subsidiarité. On s'est aperçu qu'au Québec on ne connaissait pas ce mot-là, le principe de subsidiarité, ce n'est pas nouveau. Le principe de subsidiarité, ce que ça dit, c'est que, quand tu as une plus petite entité qui est capable de prendre une décision, tu lui laisses prendre la décision. Puis ce que ça va faire, ça va la mobiliser, ça va faire que la personne va plus s'impliquer, puis elle va en donner plus dans son milieu de travail. Mais ce n'est pas un mot qui est nouveau. Au Québec, oui, mais, en Europe, plusieurs pays fonctionnent avec des principes... Le Parlement européen, par exemple, c'est un principe de subsidiarité, hein? C'est un regroupement de pays, mais chaque pays est respecté dans sa prise de décision, et ils fonctionnent en principe de subsidiarité.

M. Roberge : J'ai fait des recherches, j'ai regardé plusieurs... j'ai vu ça dans le traité de Maastricht, justement, là, par rapport à ça, mais il va falloir carrément le...

La Présidente (Mme Rotiroti) : ...secondes, M. le député.

M. Roberge : Je veux juste dire que c'est quelque chose qui nous parle. Je ne m'oppose absolument pas à ça, mais il va vraiment falloir le définir dans le projet de loi.

Mme Normand-Charbonneau (Lorraine) : C'est novateur.

M. Roberge : Merci. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Alors, merci beaucoup à la Fédération québécoise des directions d'établissement d'enseignement d'être là.

Je vais suspendre quelques instants pour permettre au prochain groupe, le Mouvement québécois des adultes en formation, de prendre place. Merci.

(Suspension de la séance à 17 h 17)

(Reprise à 17 h 19)

La Présidente (Mme Rotiroti) : Alors, je souhaite la bienvenue aux représentants du Mouvement québécois des adultes en formation. Merci d'être là. Alors, je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour faire votre présentation, et, par la suite, on passera à une période d'échange entre les élus. Je vous demanderais de vous identifier, ainsi que les gens qui vous accompagnent, et vous pouvez, tout de suite, commencer votre exposé par la suite. Alors, la parole est à vous.

Mouvement québécois des adultes en formation (MQAF)

Mme Kabbaj (Fatine) : Fatine Kabbaj, secrétaire générale du mouvement.

M. Martin (Robert) : Et Robert Martin, président du Mouvement québécois des adultes en formation.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci.

• (17 h 20) •

M. Martin (Robert) : Je voudrais, tout d'abord, remercier tous les membres de la commission de nous recevoir aujourd'hui pour nous permettre de pouvoir s'exprimer dans le cadre du projet de loi n° 105, Loi modifiant la Loi sur l'instruction publique.

Je voudrais vous dire au départ que ce n'est pas comme délinquants que nous allons agir, mais il est évident que nous allons discuter d'un sujet qui n'est pas, à proprement dit, compris dans les éléments de modification que propose la loi n° 105. On va aborder un sujet qui touche les étudiantes et les étudiants qu'on retrouve dans les commissions scolaires, plus particulièrement les étudiants adultes, qui, actuellement, ne jouissent pas du droit de pouvoir se représenter par le biais d'associations accréditées.

Donc, le sujet porte sur l'inégalité des droits qui sont à corriger dans les commissions scolaires au Québec. Nous avons joint à nos documents que vous avez reçus un mémoire intitulé Pour mettre fin à une erreur historique : De l'inclusion des CEA et des CFP dans le champ d'application de la Loi sur les associations étudiantes, que nous avons produit en 2012 et qui explique notre point de vue en long et en large.

Cela dit, le coeur de notre propos peut se résumer dans les termes suivants : accorder aux étudiants adultes des centres d'éducation des adultes et des centres de formation professionnelle des commissions scolaires des droits similaires à ceux dont bénéficient les adultes du cégep et de l'université. Nous ne voyons aucune raison justifiant que tous les étudiants du système public d'enseignement ne puissent bénéficier des mêmes droits d'association.

Comme vous le savez, les regroupements d'étudiants sont principalement régis par la Loi sur l'accréditation et le financement des associations d'élèves ou d'étudiants. Cette loi accorde des droits importants aux associations accréditées : le droit de percevoir auprès de leurs membres des cotisations à la source sur le modèle de la formule Rand en vigueur dans le monde syndical, le droit de désigner leurs représentants dans les instances des établissements où la présence d'étudiants est prévue, le droit d'occuper un local dans l'établissement et le droit d'affichage. Tous des droits fondamentaux.

Cette loi ne s'appliquant que dans les cégeps et les universités, les adultes des CEA et des CFP en sont exclus. À l'origine, notre revendication portait sur l'inclusion des CEA et des CFP dans le champ d'application de la loi sur les associations étudiantes. Cette voie reste certes possible, mais, au fil du temps, nous avons bien dû constater que ni les fédérations étudiantes ni le gouvernement ne sont intéressés à ouvrir cette loi et à l'amender. Nous n'avons pas à spéculer sur les motifs des réticences qu'éprouvent les uns et les autres, mais nous prenons acte de la réalité.

Par ailleurs, il y a quelques années déjà, la Direction de l'éducation des adultes et de l'action communautaire nous a donné une information qui nous a soufflés : les articles 96.5, 96.6 et 96.7 de la Loi sur l'instruction publique, qui portent sur la création de comités d'élèves dans les établissements du secondaire, ne s'appliquent qu'au secteur des jeunes. Pour ce qui est du droit d'association, les adultes des CEA et des CFP se trouvent donc dans un vide juridique, puisqu'ils ne sont couverts ni par la loi sur les associations étudiantes ni par la Loi de l'instruction publique.

La solution ne consiste certes pas à appliquer aux CEA et aux CFP les articles 96.5, 96.6 et 96.7 de la Loi de l'instruction publique, car les comités d'élèves n'ont aucun pouvoir significatif, ce qui est compréhensible, compte tenu qu'il s'agit de jeunes d'âge mineur. Il s'agirait plutôt d'ajouter des dispositions — et de là l'importance de notre présentation — au chapitre IV de la Loi sur l'instruction publique afin d'accorder aux adultes de ces établissements des droits similaires à ceux que confère la loi sur les associations étudiantes, droits que nous avons énumérés précédemment.

La proposition suivante du Mouvement québécois des adultes en formation résume la question : Considérant que les centres d'éducation des adultes et les centres de formation professionnelle des commissions scolaires sont exclus du champ d'application de la Loi sur l'accréditation et le financement des associations d'élèves ou d'étudiants, qui régit le mouvement étudiant au cégep et à l'université;

Considérant que les articles 96.5, 96.6 et 96.7 de la Loi de l'instruction publique, qui portent sur la création de comités d'élèves dans les établissements du secondaire, ne s'appliquent qu'au secteur des jeunes;

Considérant qu'il n'existe, de ce fait, aucun cadre juridique permettant aux adultes des CEA et des CFP de créer des associations étudiantes accréditées;

Considérant qu'il est de la responsabilité du législateur de remédier à ce vide juridique et de s'assurer que tous les étudiants adultes du secondaire, du cégep et de l'université bénéficient des mêmes droits;

Considérant que, dans un rapport publié en 2004, intitulé Ajuster la loi au réel, le comité d'accréditation responsable de l'application de la loi a recommandé l'inclusion des centres d'éducation des adultes et des centres de formation professionnelle dans le champ d'application de la Loi sur l'accréditation et le financement des associations d'élèves ou d'étudiants;

Considérant que l'application des articles 96.5, 96.6 et 96.7 de la Loi de l'instruction publique aux CEA et aux CFP ne règlerait nullement le problème, puisque les comités d'élèves dans les établissements du secondaire n'ont aucun pouvoir significatif, ce qui est compréhensible, compte tenu qu'il s'agit de jeunes d'âge mineur;

Le Mouvement québécois des adultes en formation demande au gouvernement du Québec :

D'inclure les centres d'éducation des adultes et les centres de formation professionnelle dans le champ d'application de la Loi sur l'accréditation et le financement des associations d'élèves ou d'étudiants;

Ou seconde façon de faire : d'ajouter des dispositions au chapitre IV de la Loi sur l'instruction publique — Centre de formation professionnelle et Centre d'éducation des adultes — afin d'accorder aux adultes de ces établissements des droits similaires à ceux que confère la loi sur les associations étudiantes, soit le droit de percevoir une cotisation à la source auprès de leurs membres, le droit de désigner des délégués de leur choix pour les représenter auprès des autorités, le droit d'occuper un local dans l'établissement et le droit d'affichage.

Comme le dit un considérant de notre proposition, le vide juridique relatif au droit d'association des CEA et des CFP constitue une anomalie, et nous estimons qu'il est de la responsabilité du législateur d'y remédier. Nous vous invitons, par ailleurs, à lire notre mémoire de 2012, auquel nous avons fait référence plus tôt, car il existe d'autres bonnes raisons pour que les adultes des CEA et des CFP puissent se donner une voix collective en créant une association étudiante digne de ce nom. Je vous remercie pour votre écoute.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci beaucoup, M. Martin. Alors, on va passer à la période d'échange, et je cède la parole à M. le ministre.

M. Proulx : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Merci de votre présence avec nous aujourd'hui. Je comprends, en ayant lu votre mémoire et en vous écoutant, que vous n'avez pas abordé le projet de loi n° 105 et ses différentes modalités. Est-ce que, par contre, avant, peut-être, de vous poser une question plus directement, là, sur votre propos... est-ce que vous avez eu l'occasion de le lire? Est-ce qu'il y a à l'intérieur du projet des éléments que vous souhaitiez, de vive voix, apporter à notre attention ou vous n'avez pas...

M. Martin (Robert) : Bien sûr, nous avons lu le projet de loi, mais c'est sûr que notre mouvement ne dispose pas de ressources pour faire des analyses très approfondies pour le moment. Puisque nous n'avons aucune cotisation, on vit par l'aide qu'on peut recevoir par ci et par là.

Par contre, il y a des points, oui, qui nous ont vraiment fait comme plaisir ou qu'on a trouvés très positifs dans le projet de loi, comme aussi d'assurer la participation des directeurs à certaines décisions — des directeurs des CEA, des CFP — à des décisions que les commissions scolaires peuvent prendre, là, sur toutes les questions de la répartition des ressources. On trouve que ça, c'est une action qui est très, très, très positive et qui serait certainement de grand intérêt dans les résultats pour les étudiants puis pour les étudiantes, on trouve ça excellent. On aurait pu l'écrire dans le mémoire, mais on a choisi de faire en sorte, là, d'apporter la proposition surtout au chapitre IV, qu'on trouvait qu'il était très important pour le moment.

M. Proulx : Juste pour que je comprenne bien la problématique que vous exposez dans votre mémoire et que vous avez faite dans votre présentation, c'est que vous dites : Les étudiants des centres de formation professionnelle et de l'éducation aux adultes, s'ils veulent se regrouper en association, ils ne sont pas soumis au même régime qu'en enseignement supérieur. Est-ce que c'est ça?

• (17 h 30) •

M. Martin (Robert) : Oui, c'est exactement ça. C'est qu'au Québec, vous le savez sans doute, là, il y a la Loi sur l'accréditation et le financement des associations d'élèves et d'étudiants qui donne des droits et des protections aux associations étudiantes. Cette loi-là a été créée, d'ailleurs, parce que, dans le passé, les associations qui étaient créées, là, en vertu des efforts que les gens pouvaient faire, n'étaient nullement protégées et se retrouvaient souvent confrontées dans les établissements. Donc, à un moment donné, le législateur a jugé opportun et important de faire en sorte que les associations qui naissaient dans les établissements d'enseignement puissent être protégées, et de là pourquoi cette loi.

M. Proulx : Juste pour bien comprendre, donc vous dites : Les étudiants en formation professionnelle et en éducation aux adultes, selon vous, devraient bénéficier des mêmes protections et avantages que dans le cas des associations en enseignement supérieur, qui sont soumises à la loi que vous avez énoncée. Pouvez-vous me donner des exemples d'étudiants en centre de formation professionnelle ou d'éducation aux adultes qui sont actuellement... je ne veux pas vous mettre des mots dans la bouche, mais lésés par rapport à des groupes en enseignement supérieur? Juste pour comprendre.

M. Martin (Robert) : Oh oui! Vous savez, pendant 12 ans, on a tenu annuellement... Dans le cadre surtout de la semaine québécoise, là, qui a été abolie, à chaque année on tenait un colloque qui durait deux jours où on réunissait environ 150 étudiantes et étudiants venant des centres d'éducation des adultes et des centres de formation professionnelle au Québec. On a tenu 12 colloques sur différents sujets et, à quelques reprises, on a discuté de toute cette question-là du droit d'association. Il existe quelques associations, mais il en existe très peu. Et elles sont très fragiles, dans le sens qu'elles ne peuvent pas... Je vous donne un point qui est très important, s'ils veulent s'entendre... Même comme étudiants, ils demandaient à la direction : Pourrions-nous recevoir une cotisation pour qu'on puisse s'assurer des activités, avoir un local, se pourvoir d'un ordinateur, d'autres instruments qui sont nécessaires? Bien, c'est impossible. Juridiquement, là, c'est comme pas possible, et l'établissement se retrouve lui même dans une certaine difficulté d'autoriser ces choses-là, tandis que la loi sur l'accréditation, elle pourvoit à toutes ces questions-là.

Et puis l'autre point qui est très important, si vous permettez, M. le ministre, c'est qu'on considère... Et ce que les gens nous ont dit au cours des années, au cours des différents colloques, c'est que le feed-back qu'ils peuvent avoir à l'intérieur de l'établissement est très important. Que ça soit sur les questions académiques, que ça soit sur les questions des services, que ça soit sur la question des budgets, que ça soit sur toute la question de la vie, ils sont ceux qui sont le plus touchés, ils sont le nombre le plus important à l'intérieur de l'établissement.

Actuellement, en ce qui concerne les adultes, même dans la Loi de l'instruction publique, ils ne peuvent pas participer au conseil de l'établissement, là, il n'y a aucun article qui prévoit ça. Mais aussi, comme on dit, on ne voudrait pas qu'on fasse un papier collé de ce qui existe pour les jeunes puis qu'on répète ça pour les adultes parce que ça ne leur donnerait aucun pouvoir, là, encore se retrouver dans une situation qui serait encore embêtante. On pense qu'il doit y avoir une équité au niveau du droit des adultes.

Puis, si vous me permettez de pousser un petit peu plus loin, je pourrais dire que ce n'est pas dans tous les centres d'éducation des adultes puis les centres de formation professionnelle qu'on pourrait voir naître des associations accréditées parce qu'il y a tout un processus, incorporation en vertu de la loi sur... Il y a beaucoup d'obligations qui sont importantes, la tenue d'un référendum... Il faut qu'il y ait un nombre de personnes suffisant. Il y a beaucoup de conditions. Mais ça permettrait, dans beaucoup d'endroits où est-ce qu'il y a des nombres importants d'étudiants, d'étudiantes, de se regrouper, d'assurer leur représentation et d'être capables de se regrouper aussi puis se représenter politiquement. Que ça soit auprès du gouvernement, auprès des commissions scolaires, ils joueraient un rôle de régularisation, Au niveau de représentation politique, ils auraient leur mot à dire, et on pense que cela est très important pour notre santé démocratique.

M. Proulx : Vous avez répondu à ma question. Merci beaucoup. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci, M. le ministre. On va passer du côté du l'opposition officielle. Mme la députée de Taschereau, vous disposez d'environ huit minutes.

Mme Maltais : Merci. M. Martin, Mme Kabbaj, bienvenue à cette commission parlementaire. Simplement quelques questions supplémentaires. Est-ce qu'il y a des comités où ça permettrait, par exemple, à ces étudiants d'être représentés, le fait d'avoir une association?

M. Martin (Robert) : Vous voulez dire à des comités?

Mme Maltais : Dans les établissements ou...

M. Martin (Robert) : Ah oui! Bien, écoutez, je pense que l'endroit qui est le plus important, c'est qu'ils puissent faire partie du conseil de l'établissement, qu'ils puissent jouer un rôle de représentativité et qu'ils puissent se choisir leurs propres représentants, d'être capables de les nommer et de participer à tout comité aussi qui peut être créé de temps à autre ou un comité permanent qui est créé par la direction de l'établissement, que ces représentants... ces étudiantes, ces étudiants aient l'assurance d'avoir des représentants de ces comités-là pour être capables d'assurer leur représentation et apporter aussi leur collaboration, leur part à faire en sorte pour que l'établissement puisse progresser, puis aller dans le bon chemin, puis...

Mme Maltais : ...que je me pose quand je vois que quelque chose traîne comme ça et n'a jamais été réglé depuis longtemps : Quel est le problème? Il y a sûrement quelque chose qui arrive. Est-ce que c'est le coût? Est-ce que c'est de pouvoir... Qu'est-ce qui fait que ça ne s'est pas réglé? Vous devez en avoir une idée depuis le temps que vous défendez cette position.

M. Martin (Robert) : Vous me ramenez un peu sur le plancher des vaches, comme on dit, quand vous me posez cette question-là...

Mme Maltais : Ah! ça, c'est ma spécialité, mon cher ami.

M. Martin (Robert) : ...parce que le principal problème que je pourrais dire, c'est qu'on peut retrouver surtout dans les centres d'éducation des adultes... Parce que je les fréquente depuis plusieurs années, parce qu'on a organisé ces colloques où ils pouvaient s'exprimer sur différents sujets, et c'est souvent... la cause principale, c'est que ce n'est pas des gens qui sont riches et qui disposent de sommes importantes. Ils ont des difficultés à être capables, tu sais, d'assurer leur fonctionnement. Il n'y a pas de sous, il n'y a rien.

Dans le cadre de la semaine québécoise, lorsqu'elle avait été créée, ça a permis, pendant au moins 12 ans, d'être capables de réunir à chaque année ces personnes-là pour qu'ils puissent analyser une difficulté qu'ils rencontraient dans la vie, là, plus particulièrement dans leur monde de l'éducation. Mais, depuis que la semaine québécoise a été abolie, il n'y a plus rien qui existe, là, on n'est plus capables de regrouper... ou de faire en sorte que ces gens-là se rencontrent. Ça fait qu'alors, oui, c'est une... puis on a souvent demandé... On a eu de l'aide, là, dans le passé parfois de députés ou on avait de l'aide même du ministère de l'Éducation de temps à autre pour organiser les colloques, mais ça n'a jamais été régulier, puis on n'a jamais pu avoir une aide, là, qui pouvait nous rassurer.

Mme Maltais : Alors, ce que je comprends de ce que vous dites, c'est que ça ne s'est jamais concrétisé parce que le ministère ou les gens craignent l'impact sur... les adultes, l'impact financier, qu'ils n'aient pas assez de sous. C'est ce que j'ai compris de votre réponse, là.

M. Martin (Robert) : Non. Je dis que c'est dur que ces personnes-là puissent... Bon, ces personnes-là se retrouvent dans notre territoire, notre immense territoire québécois, 400 centres répandus. Quand vous travaillez à l'organisation de pouvoir unir ces personnes-là, faire en sorte qu'ils puissent se rencontrer, ce n'est pas facile et ça demande des sommes énormes. O.K.? Ça demande des sommes.

Mme Maltais : La difficulté, c'est d'organiser l'association?

M. Martin (Robert) : C'est ça, oui. Bien, en fait, nous, là... comme le Mouvement québécois, notre objectif, ce n'est pas de créer l'association, que nous allons diriger par la suite, c'est de, tout simplement, faire modifier la loi pour qu'ils aient le droit, eux, de s'organiser et de créer des associations comme on retrouve dans les cégeps, dans les universités, puis, après, ils pourront se donner une fédération ou un regroupement, puis ils pourront s'assurer politiquement... Nous, le jour que la loi sera modifiée, on se retire, on n'a plus de rôle. Notre rôle, c'est de conscientiser les gens qu'actuellement il y a une anomalie, puis il y a une injustice, si on veut, il y a comme une discrimination parce que ces gens-là n'ont pas les mêmes droits que les autres.

Mme Maltais : Ça, je le comprends bien, mais je ne comprends toujours pas pourquoi ça ne s'est pas fait depuis si longtemps que vous plaidez.

M. Martin (Robert) : Bien, en tout cas, on a sensibilisé l'ensemble du monde politique...

Mme Maltais : O.K. Mais vous n'avez pas d'idée. O.K.

M. Martin (Robert) : ...depuis fort longtemps, puis, bon, on n'a pas eu de réponse qui était...

Mme Maltais : À cette question.

M. Martin (Robert) : ...positive à ça.

Mme Maltais : Merci.

M. Martin (Robert) : Bon. En fait, je pourrais retourner la question : Pourquoi les politiciens ne nous ont pas dit oui à toutes les demandes qu'on a faites? Puis c'est une question qui reste chez nous, là, vraiment une question. J'aimerais ça, avoir la réponse.

Mme Maltais : Vous n'avez pas la réponse.

M. Martin (Robert) : J'aimerais ça, avoir la réponse.

Mme Maltais : O.K.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci. Merci, Mme la députée. Alors, M. le député Chambly, vous disposez d'environ cinq minutes.

M. Roberge : Merci. C'est trop facile, je vais... Normalement, on pose des questions, vous dites les réponses, mais je le goût de vous dire : Ce n'était peut-être pas le bon monde qui était au gouvernement.

Des voix : ...

M. Roberge : Bien, écoutez, si vous dites les bonnes choses puis que les mauvaises décisions sont prises, c'est peut-être parce que ce n'est pas les bons décideurs. Bien, c'est trop...

M. Martin (Robert) : Mais je vais laisser à l'ensemble de la population décider de cette question-là.

M. Roberge : Bien, ça s'en vient. Ça s'en vient, faites-vous-en pas. Je vais dire, j'ai 42 ans, il y a 20 ans précisément, j'étais dans le mouvement étudiant et j'ai rencontré des gens... J'avais un flash-back, j'ai rencontré des gens de la formation des adultes qui voulaient précisément créer des associations. Je me souviens — aïe! Ça fait longtemps, là — on avait écrit une lettre d'appui — bon, pour ce que ça vaut, une lettre d'appui d'un étudiant dans le mouvement étudiant — puis c'était tombé lettre morte pour vrai, vraiment. Mais j'ai l'impression que vous avez eu l'oreille du ministre. Je ne sais pas s'il va trouver une raison de dire non après, mais là je pense que vous avez eu l'oreille du ministre parce qu'il y a une inéquité certaine quand on dit qu'il y a des jeunes de, quoi, 17, 18, 19 ans et plus au cégep qui ont le droit d'association puis que ces mêmes étudiants de 17, 18, 19 ans en formation générale aux adultes n'ont pas le droit d'association. J'ai envie de vous dire : Comment ont-ils pu vous dire non? Mais vous ne le trouvez pas vous-même.

À part ça, bon, il y a le droit à l'association. C'est une chose, le droit de créer une association étudiante puis de faire valoir son point de vue, mais il y a aussi, outre ça... il y a juste les comités d'étudiants. Puis même ça, il semble que des fois... Les conseils étudiants, est ce que même ça, ça vous est refusé? Parce que, là, ça, on n'a pas besoin de changer la loi pour ça, il suffit de la respecter, là.

• (17 h 40) •

M. Martin (Robert) : Bon. Ce qui s'est produit, justement, c'est que Mme la ministre à l'époque, Mme...

Des voix : Line Beauchamp.

M. Martin (Robert) : ...Line Beauchamp, était venue dans un de nos colloques, et puis, bon, elle avait participé activement avec l'ensemble des personnes, et puis elle nous avait dit : À la fin de notre colloque, on aimerait que vous communiquiez avec nous. Ça fait qu'alors on avait communiqué avec elle pour lui dire : Écoutez, les comités d'élèves dans l'ensemble des centres, des 400, il n'y en a pas 50 % qui fonctionnent. Puis, dans la loi, on marque à l'article 96, que je disais tantôt, que le directeur d'école devait faire en sorte de rendre ça actif à chaque mois de septembre. Ça fait qu'on a dit : Pourriez-vous nous aider, communiquer aux commissions scolaires puis leur dire de dire aux directeurs ou directrices de centre : Activez ça en septembre? Là, on a reçu une réponse, elle a dit : Bon, M. Martin, vous êtes invité à aller rencontrer la direction générale de l'éducation des adultes, ils ont des choses à vous dire.

Puis, quand on est arrivés à cette rencontre-là — on était plusieurs, puis ils étaient plusieurs de l'autre côté — là on nous a annoncé : Vous savez, les articles que vous parlez pour les comités d'élèves, ça ne touche que les jeunes, ce n'est pas inscrit dans le chapitre IV, ça ne touche pas l'éducation des adultes. Ça fait que tous les comités que vous travaillez à mettre sur pied ne sont pas légaux. Ça fait qu'alors on s'est retrouvés... ça fait qu'on s'est dit : Bon, on va continuer à les faire vivre pareil. On a continué à faire notre promotion, mais disons que, psychosocialement, là, ça commençait à être difficile. On faisait fonctionner quelque chose qui n'existait pas dans la loi, qui n'était pas protégé, puis là on encourageait les gens à faire ça. Et puis, si vous allez sur notre site du Mouvement québécois des adultes en formation, vous avez toute une section qui traite de cette question de ces comités d'élèves qu'on a fait vivre pendant plusieurs années, chose de juste qui arrive là-dessus pour régler ça une fois pour toutes.

M. Roberge : Donc, il y a deux choses. Il y a la loi sur les associations étudiantes, qui n'est pas la loi qu'on étudie aujourd'hui, mais je trouve ça... Je nous trouve chanceux d'avoir eu l'occasion de vous entendre quand même parce que vous nous avez éveillés sur quelque chose d'autre. Par contre, pour des conseils d'élèves, ça, c'est dans la Loi sur l'instruction publique.

M. Martin (Robert) : Pour les jeunes.

M. Roberge : Oui, mais, à ce moment-là, ça dit pour les jeunes. Mais on est des législateurs, puis on travaille sur la Loi sur l'instruction publique. Peut-être qu'il faudrait modifier pour que ça ne soit pas seulement les jeunes. C'est ça, là.

M. Martin (Robert) : Oui. Bien là, c'est ça qu'on propose, mais on dit de faire attention parce qu'on ne voudrait pas qu'on donne à ces adultes-là ce que c'est qu'on donne aux jeunes, parce qu'ils sont des mineurs. On vous dirait que... Au chapitre IV de la Loi sur l'instruction publique, on pourrait... Parce que, là, ils relèvent de la Loi de l'instruction publique. On ne considère pas que c'est une mauvaise chose que ça soit là. Ça pourrait être très bien à la place de la loi de l'accréditation, mais là il faudrait qu'on y inscrive, par contre, les mêmes droits qu'on retrouve sous la loi de l'accréditation pour qu'ils puissent se développer pleinement au sein de leurs organisations puis assurer une véritable représentation. Donc, il y a un certain nombre d'éléments juridiques qui sont très importants que ces gens-là puissent disposer pour être capables de s'épanouir.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci, M. Martin, Mme Kabbaj. Merci pour votre contribution.

Je vais suspendre quelques instants pour permettre à l'Association montréalaise des directions d'établissement scolaire de prendre place.

(Suspension de la séance à 17 h 44)

(Reprise à 17 h 46)

La Présidente (Mme Rotiroti) : Alors, bienvenue à l'Association montréalaise des directions d'établissement scolaire. Merci d'être là. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour faire votre présentation. Je vous demanderais de vous identifier, ainsi que les gens qui vous accompagnent, et vous pouvez, tout de suite, passer à votre présentation. À la fin de votre présentation, on va passer à une période d'échange entre les élus. Alors, la parole est à vous.

Association montréalaise des directions
d'établissement scolaire (AMDES)

Mme Bourdages (Hélène) : Merci, Mme la Présidente. M. le ministre, Mmes et MM. les parlementaires, je suis Hélène Bourdages, présidente de l'Association montréalaise des directions d'établissement scolaire. Je suis accompagnée des trois vice-présidents de l'association et de notre directeur administrateur : à mon extrême gauche, M. Stéphane Gemme, V.P. pour la commission scolaire de la Pointe-de-l'Île, la CSPI, qui est aussi directeur de l'école Saint-Vincent-Marie; à sa droite, M. Stéphane Garneau, vice-président pour la commission scolaire de Montréal, la CSDM, qui est aussi directeur de l'école Saint-Jean-de-la-Lande; à ma droite, M. Carl Vézina, pour la commission scolaire Marguerite-Bourgeoys, qui est aussi directeur de l'école Victor-Thérien; à sa droite, M. Mario Boutin, directeur administratif de l'AMDES.

Je suis fière de vous dire que, depuis notre dernier passage en commission, l'AMDES a accru sa représentation en accueillant les collègues de la commission scolaire Marguerite-Bourgeoys. Avec nos 600 membres, nous représentons maintenant plus de 83 % des directions des trois commissions scolaires francophones de Montréal, qui desservent plus de 200 000 élèves.

Nous revoici donc face à un nouveau projet de loi. Que sont devenues nos attentes en matière de décentralisation, de diminution de la bureaucratie et d'augmentation de la marge de manoeuvre des directions d'établissement? Avons-nous tous les outils pour apporter des solutions aux problèmes particuliers qui se vivent à Montréal? Notre réponse à ces questions est mitigée. En fait, nous déplorons que le p.l. n° 105 ne favorise pas davantage une véritable décentralisation. Certes, il tend à favoriser la concertation et à promouvoir le principe de subsidiarité, mais il ne s'attaque pas à la répartition des fonctions et pouvoirs entre les différents acteurs de la gouvernance scolaire.

En effet, le comité de répartition des ressources serait un comité de la commission scolaire doté d'un simple pouvoir de recommandation. À cet effet, la délégation de pouvoirs qui y est prévue est intéressante, mais rien n'empêcherait une commission scolaire de se réapproprier plus tard les pouvoirs qu'elle aurait délégués. C'est un peu comme le principe de subsidiarité, l'intention est bonne, mais elle n'est pas assortie de dispositions visant sa mise en oeuvre.

Quant au CRR, nous l'appuyons. Il s'agit d'une instance structurante qui permettra aux directions d'établissement d'exercer une influence réelle. Ce comité doit être composé exclusivement de directions d'établissement élues par leurs pairs et de cadres de la commission scolaire sous la présidence du directeur général.

Pour une meilleure représentation des différents acteurs, nous demandons qu'un directeur d'établissement pour élèves handicapés ou en difficulté d'adaptation et d'apprentissage, les EHDAA, soit ajouté au CRR. De plus, pour la formation générale aux adultes et la formation professionnelle, nous considérons que deux directions, soit une par ordre d'enseignement, devraient y participer au lieu d'une seule pour les deux, comme cela est prévu.

• (17 h 50) •

En termes de processus pour assurer une véritable concertation, nous demandons que le comité consultatif de gestion, le CCG, qui regroupe les directions de tous les établissements de la commission scolaire, soit consulté avant que ne siègent les représentants élus au CRR. Par la suite, le CRR fera des recommandations qui seront portées au conseil des commissaires par le directeur général.

Le comité de répartition des ressources devrait permettre de renforcer l'essentielle concertation et coopération entre la direction générale, les cadres de la commission scolaire et les directions d'établissement. Évidemment, il faudra que tous les membres du CRR puissent compter sur une information juste et complète et disposer du temps et des moyens d'en prendre connaissance.

Le p.l. n° 105 prévoit que, si le conseil des commissaires ne donne pas suite à une recommandation du CRR, il devra motiver sa décision séance tenante, et ce, pour l'ensemble des sujets. Aussi, une recommandation du CRR sera présumée adoptée par le conseil des commissaires si elle n'est pas rejetée par les deux tiers. Nous sommes d'accord avec ces dispositions.

Le projet de loi permet de porter au crédit d'un établissement les surplus de l'exercice financier précédent si le CRR en fait la recommandation et que le conseil des commissaires y donne suite. Considérant que ces budgets ont déjà été alloués, l'AMDES demande que leur reconduction se fasse automatiquement. En effet, pourquoi faudrait-il que les établissements demandent à nouveau une autorisation pour obtenir des crédits qui ont déjà été attribués. Un tel automatisme diminuerait la bureaucratie, et reconnaîtrait la capacité de gestion des directions d'établissement, et leur permettrait de réaliser des projets comme l'achat d'équipement informatique et sportif, l'aménagement de coins lecture dans les bibliothèques, etc.

Nous voulons aborder la question des enveloppes budgétaires dédiées par le ministère. Il en existe au moins une vingtaine que nous avons listées en page 8 de notre mémoire. Une mesure dédiée, c'est l'impossibilité d'utiliser l'argent à d'autres fins, même si les résultats ne sont pas au rendez-vous. C'est l'absence de marge de manoeuvre doublée de formulaires de dizaines de pages à compléter pour obtenir, dans certains cas, quelques milliers de dollars par mesure. L'AMDES considère qu'il faut se pencher sur ces budgets dédiés dans un esprit d'efficacité et de bonne gouvernance.

Concernant le guide des pratiques de gestion décentralisée, nous demandons à participer à son élaboration et que des mesures périodiques d'évaluation de sa mise en oeuvre, en concertation avec les directeurs et les directrices d'école et de centre, soient prévues dans la loi. L'AMDES tient à exprimer sa satisfaction relativement au retrait des dispositions prévues dans le p.l. n° 86 concernant l'évaluation des directions par les conseils d'établissement. Nous avons été entendus.

Le p.l. n° 105 maintient le regroupement dans le projet éducatif du plan de réussite et de la convention de gestion et de réussite éducative, la CGRE, trois documents que devaient produire les écoles. L'AMDES y est favorable, car cela permettra aux directions d'être davantage disponibles pour se consacrer avec leur équipe à la réussite éducative.

Nous sommes aussi en accord avec l'adoption par le C.E. du projet éducatif, sauf pour ce qui est des moyens retenus. Lorsqu'on parle de moyens, il est question, par exemple, du choix des manuels, des lectures, de l'utilisation des services d'orthopédagogie au préscolaire, etc. Ces choix pédagogiques doivent relever des experts en pédagogie, les enseignants avec les directions d'établissement.

Parlons un peu de gouvernance. Le p.l. n° 86 prévoyait la présence de deux directeurs d'établissement au sein du conseil scolaire. Le p.l. n° 105 a fait table rase de ce conseil scolaire. Cependant, l'AMDES demande de maintenir la présence d'au moins deux directions d'établissement élues par leurs pairs au conseil des commissaires, notamment pour soutenir la direction générale dans son rôle de porte-parole des consensus du CRR. À l'heure actuelle, les directions d'établissement qui veulent se faire entendre lors des séances du conseil doivent s'inscrire lors de la période de questions comme n'importe quel citoyen. Cela ne correspond pas à leur rôle et ne reflète pas l'esprit de concertation et de collaboration qui doit exister entre les décideurs de la commission scolaire et les gestionnaires.

En ce qui concerne les comités consultatifs de gestion, nous recommandons de rendre obligatoire la formation de comités régionaux pour les commissions scolaires qui sont divisées en régions. Autrement, de 130 à 225 personnes participent aux travaux d'un comité unique, ce qui est peu productif.

Terminons en parlant de Montréal, qui fait face à des phénomènes comme l'immigration, la défavorisation, les écoles à mandats suprarégionaux, les tensions interconfessionnelles, la vétusté de nombreuses écoles, le déficit cumulé à la CSDM, et j'en passe. Il faut sortir de l'approche en silo. C'est pourquoi nous demandons au gouvernement de convoquer et présider une table de travail entièrement dédiée à soutenir l'école publique montréalaise. Son mandat serait de mieux coordonner les efforts et d'apporter des solutions durables aux nombreux problèmes. Bref, de tout mettre en place pour la réussite des élèves, jeunes et adultes. Notre école a besoin de moyens, de réinvestissements massifs. Soyez assurés qu'au quotidien les directions d'établissement de Montréal continueront de contribuer à la noble mission d'instruire, socialiser et qualifier. Les enfants et les adultes de notre territoire ont besoin de cela. De notre succès dépend l'amélioration de la réussite éducative au Québec.

La Présidente (Mme Rotiroti) : ...Mme Bourdages. Alors, on va passer à la période d'échange, et je cède la parole à M. le ministre pour environ 15 minutes.

M. Proulx : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Merci beaucoup de vous être déplacés. Et vous êtes les derniers, et non les moindres, mais très heureux d'avoir l'occasion de discuter avec vous en fin de journée.

Plusieurs choses intéressantes dans votre mémoire. D'abord, vous réitérer mon intérêt et ma préoccupation à l'égard de l'école publique montréalaise. On a souvent eu l'occasion d'en parler ensemble, et je tiens à le redire, il y a une spécificité, là, qu'il faut observer. Il y a des moyens à mettre en place qui se distinguent des autres et il faut trouver, bien entendu, des solutions qui sont concrètes, là, pour des défis qui vous sont propres et qui sont... Et, quand j'ai la chance... Puis je le dis souvent, c'est vrai, je lis pas mal, pas mal, pas mal tout ce qu'on m'envoie et ce que je reçois, je lis beaucoup, beaucoup, beaucoup de choses, mais je m'intéresse régulièrement à ce qui se fait et les défis que vous avez à l'égard de la population à desservir. Et vous avez des particularités qu'on ne doit pas laisser de côté, et, dans le cadre d'un projet de loi, d'une politique, mais surtout dans la loi ou dans les règlements que le ministère mettra en place ou dans les pratiques que le ministère décidera de mettre en place en collaboration avec le réseau scolaire, c'est toujours vous donner des outils qui vous permettent d'oeuvrer à l'intérieur de cette spécificité-là.

J'avais donc parlé de l'école. J'avais quelques questions à l'égard de vos propositions. J'entends bien qu'il y a des choses qui, pour vous, ne sont pas présentes et qui devraient l'être. Je veux vous entendre sur le guide relatif aux pratiques de gestion décentralisée. Je suis bien en accord avec, dans le fond, l'esprit de votre proposition. D'abord, consulter pour le rédiger m'apparaît essentiel. Si j'accorde de l'importance à l'école montréalaise, ça va de soi que vous y soyez impliqués.

L'autre chose, c'est sur des mesures périodiques d'évaluation de sa mise en place, et, là-dessus, peut-être vous entendre rapidement sur qu'est-ce qui devrait être pour vous ces mesures-là ou comment on devrait, dans le temps... ou quel devrait... soit peut-être notre agenda... comment on devrait se gouverner à l'égard de ce guide-là pour s'assurer que, dans l'élaboration, oui, travailler ensemble, mais surtout, dans sa mise en application, comment on fait pour s'assurer qu'on est toujours en marche dans la bonne direction,

Mme Bourdages (Hélène) : Pour nous — évidemment, on est pédagogues d'origine, hein — c'est certain qu'une évaluation permet des corrections, dans le fond. C'est dans ce sens-là, là, le fait d'avoir un consensus, de prime abord, qui regroupe tous les acteurs pour établir ce guide de bonne gestion.

Ensuite, c'est sûr que, dans la mise en oeuvre, il faudra s'assurer d'évaluations pour faire des correctifs au fur et à mesure parce que simplement l'application du CRR comme nouveau comité, ça ne se fera pas nécessairement comme fredonner un air qu'on connaît, là, puisqu'on s'en va vers du nouveau. C'est certain que, quand on partage le pouvoir, il y a des grincements de dents, il y a des gens qui doivent apprendre à travailler autrement. Nous, on arrive dans un esprit de collaboration, de concertation. Ce qu'on dit, c'est qu'avec la vision du terrain qu'on a, on est là pour bien apprécier ce dont les enfants ont besoin. Alors, on apporte notre point de vue au CRR, et, quant à l'application de ce nouveau comité ou de l'ensemble des nouvelles pratiques, bien, oui, on pense qu'il faut être partie prenante de la définition de celle-ci et de son évaluation.

• (18 heures) •

M. Proulx : Vous avez parlé du comité de répartition des ressources, vous avez parlé du comité consultatif de gestion, j'ai deux questions. D'abord, le cas où vous me parlez des comités consultatifs de gestion régionaux après, mais avant? Hier, on nous a proposé un chemin différent de celui qu'il y a dans le projet de loi. Est-ce que j'ai bien saisi — je fais mes devoirs comme il faut d'écoute — que, dans le fond, le chemin que vous proposez, ce n'est pas le même? J'avais l'impression qu'hier on me proposait de passer au comité de répartition des ressources, d'aller au comité consultatif de gestion et, ensuite, au conseil des commissaires. Vous dites, vous : Travaillons différemment, travaillons au comité consultatif de gestion, allons au comité de répartition des ressources et allons au conseil des commissaires. Je me trompe-tu? C'est ça que j'ai saisi.

Mme Bourdages (Hélène) : Vous avez très bien résumé l'esprit dans lequel on désire travailler. On part de la base. Les gens qui sont élus au CRR, ensuite, portent la parole, font comme vous faites, vous autres, les parlementaires, là, font la mesure de ce qui devrait être le meilleur, dans le fond, pour les gens qu'on représente, et ensuite le ballon est porté par le directeur général. Faire l'inverse, on devine que ça revient à faire ce qu'on fait en ce moment, c'est annuler la mesure. C'est comme si, ici, là, à chaque fois que vous avez une bonne idée, vous partez un référendum. Je veux dire, ça annule le travail de concertation qu'on fait quand on est élu.

Puis évidemment, quand on est élu, bien, on parle pour les autres, on ne parle pas en son nom personnel. Et ça, ça libère aussi la parole. Il y a plein de gens qui n'osent pas parler en CCG parce que ça peut les mettre sur la sellette par rapport à un éventuel mouvement dans l'ordre de leur carrière, par exemple. Alors, le fait d'être élu, d'être représentatif, ça amène une autre force à la parole. Alors, pour nous, c'est : Oui, les gens doivent être entendus au niveau du CCG. Ensuite, la parole est débattue au niveau du CRR, et c'est apporté au conseil des commissaires.

M. Proulx : Votre explication est intéressante parce que vous dites qu'agir à l'inverse... Je le reçois, puis on va analyser tout ça, bien sûr, ensemble, mais agir à l'inverse a l'effet contraire. Pour vous, c'est plus porteur d'agir dans l'ordre que vous le dites.

Mme Bourdages (Hélène) : Agir à l'inverse, pour être encore plus clair, pour moi, M. le ministre, c'est annuler la mesure du CRR. C'est comme s'il n'y avait pas de CRR.

M. Proulx : Parfait. J'entends bien. Ou, en tout cas, je réfléchis au fait que je comprends que, dans certaines commissions scolaires, là, on n'a pas la capacité de multiplier les comités, étant donné l'étendue, la grandeur, la grosseur de la commission scolaire. Donc, il y a des fois où les comités seront plus limités. Mais je comprends que, dans les plus grandes organisations, il y a pour vous, là, un ordre qui est logique et efficace.

Ça m'amène à la deuxième question. Parce que vous parlez de la création automatique de comités consultatifs de gestion régionaux. Là, je suis peut-être moins familier avec ce qui s'y passe, mais expliquez-moi l'état des lieux actuellement et pourquoi souhaiter ou... en tout cas, souhaiter que ça devienne automatique. Là, je comprends que c'est facultatif.

Mme Bourdages (Hélène) : Oui.

M. Proulx : Bon, bien, il y en a-tu pour vrai?

Mme Bourdages (Hélène) : En ce moment, c'est facultatif, effectivement, puis nous, on désire que ça devienne obligatoire, la formation, en CCGR, donc en comité consultatif de gestion régionale. Pourquoi? C'est qu'on a connu des temps où le seul temps où on était consultés, c'était le CCG, donc la grande assemblée qu'on appelait aussi... je ne sais pas si c'était méchant, ou quoi que ce soit, mais la grande messe. Mais c'était pour dire que les gens étaient tannés d'y aller.

Je ne le sais pas si mon collègue de la CSDM veut ajouter un mot parce que la plus grande des paroisses, c'est la CSDM, alors il y avait 225 personnes qui se retrouvaient là. M. Garneau. Si vous permettez, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Oui, oui. M. Garneau, allez-y.

M. Garneau (Stéphane) : Oui. Bien, je peux témoigner. C'est sûr que tout le monde ici peut en témoigner aussi, à 225 personnes, discuter, décider, prendre un vote, ce n'est pas réaliste, même en trois heures, parce qu'avant ça il faut exposer la problématique. Donc, ce à quoi Mme Bourdages faisait allusion, c'est que, dans des... Évidemment, j'entendais, avant la présentation, parler d'une autre commission scolaire où une direction d'école peut faire quatre, cinq, six écoles. Je ne parle pas de ça, là, je parle des grosses commissions scolaires. Et, si vous en avez trois où c'est déjà divisé, puis là... Et, d'ailleurs, nos trois commissions scolaires fonctionnent de façon complètement différente. Donc, c'est pour rendre, dans le fond, légal de façon à ce que, demain matin, on n'est plus là, personne, bien, c'est écrit dans la loi qu'à Montréal, étant donné la taille de la commission scolaire, il faut fonctionner. Parce que, demain matin, le directeur général change, puis tout peut changer. C'est ça qu'on veut éviter, là.

M. Proulx : Vous dites, dans le fond : On est trois commissions scolaires, trois commissions scolaires importantes, trois commissions scolaires sur le territoire de l'île de...

Une voix : ...

M. Proulx : ...à l'écoute de... sous l'école montréalaise. Puis vous dites : On est trois, puis on fonctionne tous différemment. Ça vient d'où, ça... Vous dites : Là, nous, un jour, on ne sera plus là, il faut que ça soit inscrit dans la loi. Je veux juste approfondir un peu tout ça parce que c'est aussi ça qu'il faut expliquer aussi aux gens, je pense. Il y a énormément de possibilités à l'intérieur de la structure actuelle, du cadre législatif actuel, et, si vous avez trois façons différentes de travailler, c'est sûrement en soi une bonne chose parce que vous avez établi des pratiques, mais il n'en demeure pas moins qu'il va falloir qu'il se recoupe des choses. Un jour ou l'autre, là, si la meilleure façon de travailler puis les meilleures pratiques sont ailleurs, il faudra préciser les exigences à cet égard-là. Alors, je pense que, là-dessus, sur le comité de répartition des ressources, on entend beaucoup de choses. Puis, pour les gens, j'ai bien l'impression qu'on est à la bonne place.

Sur les mesures dédiées, j'ai vu la page 8, et, quand on aura du temps, un jour, je vous expliquerai comment j'ai trouvé ça particulier, toute cette période-là des règles budgétaires, parce que ce n'est pas simple, ça. Ce n'est pas simple parce que faire en sorte de permettre à des établissements, des écoles, des milieux école d'obtenir certaines discrétions à l'égard de... et de projets de ressources, bien, ça nécessite un encadrement qui est très réglementé. On a tenté, il me semble, dans les règles budgétaires — en tout cas, c'est ma perception à la lumière du produit — non pas de dédier jusque dans les moyens, mais, dans certains cas, d'avoir de la flexibilité dans les moyens. Il y a quand même, pour une première fois, une certaine décentralisation vers les écoles. Mais ce que je voudrais entendre de votre part, c'est est-ce que, dans les faits, dans la pratique, c'est le cas.

Mme Bourdages (Hélène) : Le cas?

M. Proulx : Est-ce que ces mesures-là, mises en place dans les règles budgétaires — qui sont apparues assez tard, j'en conviens, et qui pourraient apparaître plus tôt, je l'ai bien entendu — est-ce que ces mesures-là, aujourd'hui, ont pour vous, dans les milieux, dans les établissements, dans vos commissions scolaires, des avantages et des bénéfices actuellement?

Mme Bourdages (Hélène) : C'est sûr que la qualité de l'enveloppe dédiée, là, c'est qu'elle arrive dans l'école. Ça, c'est une qualité indéniable de l'enveloppe dédiée.

M. Proulx : ... quelque chose.

Mme Bourdages (Hélène) : Oui. Mais c'est tellement serré comme mesure qu'on n'arrive pas nécessairement à l'utiliser d'une manière qui nous permet d'exprimer l'intelligence, la connaissance qu'on a de notre milieu. Je ne sais pas, Stéphane, si tu veux...

M. Gemme (Stéphane) : Oui.

Mme Bourdages (Hélène) : Je vais laisser la parole à M. Gemme, qui a reçu un petit pactole tardivement ce printemps. Je vais le laisser vous exprimer son vécu.

M. Gemme (Stéphane) : Bien, dans le cadre des mesures II, qui sont arrivées l'année dernière, je suis chanceux, j'ai eu 485 000 $. Donc, oui, c'est intéressant, sauf qu'on doit engager orthopédagogues, enseignants-ressources, alors que, peut-être, le besoin aurait été d'avoir un peu plus, hein, de services de psychologie. Ce qu'on veut dire, c'est que le choix des ressources devrait être en fonction des besoins du milieu au lieu de... Parce que 485 000 $, vous comprenez que c'est plusieurs personnes à engager. J'ai engagé quatre enseignants-ressources, mais j'aurais peut-être eu besoin d'un peu plus de support soit en psychologie ou dans d'autres services, alors que l'enveloppe est vraiment dédiée à de l'engagement d'enseignants. Et, oui, il y avait un petit peu pour le professionnel, mais les ressources professionnelles dans les écoles sont déjà déficitaires, donc le peu que j'ai eu en orthophonie ne suffisait pas. Donc, quand on parle d'avoir plus de marge de manoeuvre, de choix pour répondre aux besoins de nos écoles, de faire confiance à la direction, avec son équipe, de choisir les bonnes ressources pour son milieu, c'est un peu ça qu'on veut dire.

M. Proulx : Alors, si je comprends bien, donc — parce que ça, j'ai bien saisi ça — lorsqu'en juin on intervient pour, au moins, vous permettre de continuer à travailler avec l'enveloppe reçue plutôt que de devoir — je vais l'exprimer comme ça — la dépenser tout de suite ou sinon la retourner — à mon avis, un non-sens — c'est aussi un pas dans la bonne direction?

Mme Bourdages (Hélène) : Oui, effectivement.

M. Proulx : Mais vous dites : Il faut aller plus loin dans la décentralisation.

• (18 h 10) •

Mme Bourdages (Hélène) : Ça fait partie des choses dont il faut discuter. Je pense que personne ne sera mieux placé que les gens dans les écoles pour en discuter. Est-ce qu'on devrait en discuter en CRR? Est-ce qu'on devrait en discuter quand on va établir les pratiques de bonne gestion? On pourra, alors là, échanger sur les capacités, par exemple, d'engager des personnels pointés dans la mesure. Si ça n'existe pas sur le territoire, bien, on fait quoi avec l'argent qui est là quand on pourrait, par exemple, engager un orthopédagogue, alors que c'est d'autre chose qui est pointé dans la mesure? Moi, je dis simplement qu'il faut absolument ouvrir ce débat-là et ne pas poursuivre cette pratique sans qu'on puisse en discuter. Puis c'est dommage de le dire maintenant, puisque les sommes, quand même, étaient importantes, mais, pour vrai, ça a amené des imbroglios dans les milieux qui n'étaient pas possibles, par exemple devoir refaire les tâches dans une fin de semaine.

M. Proulx : Mais ce qui est...

La Présidente (Mme Rotiroti) : Il ne reste plus de temps, M. le ministre.

M. Proulx : Bien, je vous remercie beaucoup. On aura l'occasion de poursuivre cette discussion-là de temps à autre, je le sais. Je l'apprécie. Merci.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci. On va passer à l'opposition officielle, et je cède la parole à Mme la députée de Taschereau pour neuf minutes.

Mme Maltais : Merci. Bonjour, Mme Bourdages. Bonjour, messieurs qui accompagnez votre présidente. Je vous remercie de votre mémoire , qui est très intéressant puis qui a des suggestions vraiment précises sur certains points du projet de loi. On voit que vous l'avez étudié, vous voulez l'améliorer.

En page 7, vous nous dites que, «de la stricte perspective de la décentralisation, le comité de répartition des ressources ne déplace pas véritablement le centre décisionnel [...] vers les directeurs d'établissement». Vous dites «véritablement», puis on le sent en filigrane, là, que ce projet de loi ne vous satisfait pas. Vous dites même que ce n'est pas un projet de loi de décentralisation, c'est un projet de loi plus de meilleure concertation. J'aimerais ça que vous élaboriez un peu là-dessus, s'il vous plaît, et voir s'il y a des choses qui permettraient d'avoir une meilleure décentralisation. Je sais que vous avez parlé des 20 mesures dédiées. J'étais impressionnée par le chiffre 20, là, vous les alignez...

Mme Bourdages (Hélène) : Nous autres aussi.

Mme Maltais : Oui. Ça doit être tout un casse-tête quand vous recevez les sommes. De toute façon, je me rappelle, à un moment donné, dans le monde des services sociaux, on disait : Arrêtez d'envoyer ce qu'on appelait des sommes taguées, dédiées parce que ça devient impossible à gérer et ça ne répond pas du tout, du tout à la spécificité de chaque région. Alors, j'aimerais ça vous entendre sur la décentralisation contenue ou non dans ce projet de loi et comment on pourrait faire mieux.

Mme Bourdages (Hélène) : C'est sûr que le CRR, au fond, c'est le grand survivant de ce qui a été le projet de loi n° 86. C'est une mesure structurante. Nous, on y croit fermement, à cette mesure-là, mais, évidemment, la décision va quand même se prendre au niveau du conseil des commissaires. Alors, finalement, le centre de décision, il est au même endroit qu'avant. Il est écrit que le conseil des commissaires peut déléguer certains pouvoirs selon le principe de subsidiarité, mais celui-ci n'est pas très défini. Ce n'est pas très clair, on ne sait pas encore quoi faire avec ça.

Qu'est-ce qui pourra être délégué au niveau des conseils d'établissement? Bien, c'est ça qu'il va falloir regarder. Notre point de vue, c'est le point de vue du plancher, là, des gens qui marchons les écoles, qui les faisons avec les personnels, avec les parents et les enfants. Notre point de vue, c'est de dire : Il n'y a personne qui connaît mieux les écoles que nous. Et entre collègues, quand on se parle, peut-être, contrairement à ce que vous avez pu entendre ici dans les deux derniers jours, on est capables de partager la manne pour répondre aux besoins de la collectivité. Ça se fait déjà dans les quartiers qui rayonnent autour d'une école secondaire.

Alors, le CRR, c'est un plan important et structurant. Puis c'est vrai qu'en éducation les choses avancent lentement, et on va prendre cette avancée-là, puis on va essayer de construire autour de ça dans un esprit de collaboration.

Mme Maltais : O.K. Vous parlez, entre autres, du fameux vote aux deux tiers, du fait qu'une recommandation de la CRR va être automatiquement considérée comme appliquée, à moins qu'elle ne soit rejetée par les deux tiers.

Puis vous parlez de l'influence des partis politiques dans des commissions scolaires, j'aimerais que vous m'expliquiez... Moi, je connais moins la réalité montréalaise que vous. Ici, il n'y a à peu près pas de partis politiques dans les commissions scolaires. Est-ce qu'il y a un danger? Parce que vous parlez d'ajouter peut-être le vote à scrutin secret, alors je veux comprendre pourquoi vous vous rendez jusqu'à dire : Peut-être qu'on devrait ajouter le vote à scrutin secret.

Mme Bourdages (Hélène) : Bien, pour que les individus puissent s'exprimer en dehors de la ligne de parti s'il y a partis politiques. Je sais que...

Mme Maltais : ...le vote libre.

Mme Bourdages (Hélène) : Vote libre, un vote selon la conscience, on commence à le voir. Mais c'est ça, pour que les individus puissent s'exprimer. Quand on tente de battre une recommandation du CRR, il faut comprendre que celle-ci va être quand même une voie forte, là. On parle d'un consensus qui est fait avec les directeurs d'établissement, les cadres de service, qui connaissent leur affaire. Alors là, on dit : Le conseil des commissaires va contre cette voie-là. Bien, qu'est-ce qui motive le conseil des commissaires à aller contre cette voie-là? On est dans des instances démocratiques, il faut donc s'exprimer et le faire clairement. Donc, le deux tiers, c'est assez clair. Et, éventuellement, est-ce que le vote secret ne serait pas une avenue pour dénouer une impasse? C'est la suggestion qu'on faisait.

Mme Maltais : O.K. Au point de l'inscrire dans la loi, vous croyez ou...

Mme Bourdages (Hélène) : D'inscrire la possibilité, d'inscrire que, si quelqu'un le demande, on peut le faire?

Mme Maltais : Ah! O.K. À toutes sortes de membres, là, les membres du conseil, par exemple, oui.

Mme Bourdages (Hélène) : Oui, de le faire, oui.

Mme Maltais : Je veux vous entendre, je sais que Montréal a vraiment des problèmes particuliers, là. Je vois des amies qui sont directrices d'école à Montréal, elles m'en parlent souvent et beaucoup, de leur situation, entre autres la difficulté de voir... Vous appelez ça des écoles qui sont quasi hôpitaux à cause de la concentration des jeunes EHDAA. Tout l'accueil de l'immigration, qui se fait beaucoup sur le territoire de Montréal. Bon, on sait que, dans les dernières années, on a eu beaucoup de discussions sur les déficits budgétaires des commissions scolaires, les mesures de compression qui ont été appliquées sur le territoire montréalais, dont vous avez sûrement vu les impacts. Et je ne veux pas entrer dans un débat partisan et vous amener là-dedans, mais j'aimerais comprendre pourquoi une table de travail pour soutenir l'école publique montréalaise et pourquoi cette proposition de table là alors que vous avez des commissions scolaires. Est-ce que les commissions sont d'accord avec ça? Comment vous voyez ça? Moi, je trouve l'idée intéressante, je vous le dis. Si c'était dans la Capitale-Nationale, je partirais avec ça, moi. Mais je connais mon territoire. J'aimerais ça que vous me plaidiez pour cette table et est-ce que vous avez l'appui des commissions scolaires.

Mme Bourdages (Hélène) : J'ai l'appui informel d'une commission scolaire, oui. Pourquoi cette table? C'est qu'il n'y a pas de lieu pour parler aux ministères — aux ministères avec un x et un s, là — hors silo. On ne peut pas, par exemple, adresser... Quand on parle des écoles-hôpitaux, il y a des ententes avec le ministère de la Santé puis le ministère de l'Éducation, ces ententes n'ont pas été revues depuis 25 ou 30 ans. Alors, il faut les revoir, là, il y a un alourdissement des cas d'élèves, mais l'entente est comme... elle répond aux besoins des enfants d'il y a 20, 25 ans. Aujourd'hui, on ne peut plus dire que ça répond. D'ailleurs, c'est des écoles qui sont toujours en déficit. Comment ça se fait? Moi, je pense que le ministère de l'Éducation fait sa part, mais il y a peut-être d'autres ministères qui pourraient faire plus encore. Alors, il faut créer un endroit pour parler de ça.

L'autre chose, c'est l'immigration, bien sûr. Les gens arrivent à Montréal, et, quand ils ont des enfants, c'est nécessairement l'école qui est le bassin pour leur enseigner comment ça fonctionne dans notre territoire. La situation financière de la CSDM, en termes financiers, c'est grave.

La situation est extrêmement grave, et, quand on aura atteint l'équilibre financier à la fin juin, il restera à absorber un déficit de 90 millions. Comment on fait? Je veux dire, dans les écoles, on est déjà à sec, là. Puis la commission scolaire fait sa part, mais, en même temps, le mal est fait depuis longtemps, et comment on va faire pour s'en sortir? Il faut sortir, à notre avis, d'une ligne qui n'implique que le ministère de l'Éducation ou que la commission scolaire, il faut que ce problème-là soit adressé à une échelle plus vaste.

Mme Maltais : Je vous remercie. Vous voyez...

La Présidente (Mme Rotiroti) : 40 secondes.

Mme Maltais : 40 secondes. Cette table, vous la voyez permanente ou provisoire, c'est-à-dire pour régler les premiers problèmes urgents?

Mme Bourdages (Hélène) : Cette table, je la vois permanente pour répondre à votre question rapidement. Et on me glisse à l'oreille, du bout de papier, là, qu'il y aurait peut-être aussi des choses à voir avec le municipal. Quand on pense, par exemple, aux tensions interconfessionnelles, il y a des initiatives municipales qui sont prises sans vraiment qu'il y ait un lien qui soit fait avec le milieu scolaire. Moi, ça m'inquiète un petit peu. Alors, je la verrais plutôt permanente, cette table, madame.

• (18 h 20) •

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci beaucoup. On va passer du côté du deuxième groupe de l'opposition, et je cède la parole à M. le député de Chambly pour six minutes.

M. Roberge : Merci, Mme la Présidente. Merci pour votre présentation. C'est toujours intéressant d'entendre les gens qui sont directement sur le terrain, on n'est pas dans le théorique.

Vous nous parlez à la page 5 spécifiquement du CRR, le comité de répartition des ressources, et vous entrez un peu dans la composition. Je trouve ça bien intéressant, vous dites : «Selon l'AMDES, le CRR doit être une instance administrative composée exclusivement de directions d'établissement et de cadres de la commission scolaire...» Donc, vous incluez des cadres. Il y a des cadres qui sont venus nous voir qui nous ont dit : 15, ce ne sera pas assez. Si on compte les directions d'école, puis tout ça, avec le D.G., il n'y a pas de place pour un nombre suffisant de cadres. Est-ce que vous, vous considérez que 15, c'est suffisant? Et, sinon, vous seriez prêts à aller jusqu'où?

Mme Bourdages (Hélène) : Un groupe qui veut travailler, échanger, ça a un certain format, hein? 15, c'est un chiffre qui est très correct, là. Un groupe qui veut échanger, travailler ensemble, neuf, 12, 15, c'est quand même important. Est-ce que les cadres, pour discuter de tel point, peuvent être différents, dépendamment du point de discussion, etc.? Possiblement, là. Si on veut parler des ressources humaines le jour J, bien, les gens des ressources humaines sont là parce qu'ils connaissent leur affaire, puis ils sont là au service des établissements. Et, un autre jour, ce sera les gens des ressources financières. Mais on aurait peut-être toujours les mêmes personnes pour représenter les directions d'établissement.

M. Roberge : Je pense que c'est une avenue très, très intéressante d'avoir les directions d'établissement qui sont là toujours, mais d'avoir les cadres en fonction des dossiers. Donc, pas des gens qui sont nommés en tant que personnes, nécessairement, pour ce qui est des cadres scolaires, mais qu'ils soient là en fonction des dossiers. Est-ce que c'est bien ça?

Mme Bourdages (Hélène) : Tout à fait. Je ramène aussi le fait, comme vous le savez très bien, que les directions d'établissement sont élues à ce comité. Les cadres, ils y vont en fonction, d'après moi, d'après nous, en fonction de la problématique adressée. Donc, ce n'est pas nécessairement des gens qui ont un siège permanent à cette table.

M. Roberge : O.K. Très intéressant. On n'avait pas entendu ça jusqu'à date. Merci.

Je vais rapidement, là, j'ai peu de temps. Donc, là, c'était... J'aime ça, ça va rapidement. Page 7, vous parlez des fameux surplus... bien, enfin, le report des surplus de l'exercice financier précédent. Vous dites : «Considérant que ces budgets ont déjà été alloués, l'AMDES demande que la reconduction des surplus se fasse automatiquement.» Dans le projet de loi, on dit que, bien là, ça s'en va au CRR, puis ça revient peut-être, mais peut-être pas parce que le CRR peut en disposer. Quand vous dites : Que les surplus restent automatiquement aux écoles, au fond vous êtes en train de demander des budgets pluriannuels parce que c'est-à-dire qu'on peut... Un surplus, ce n'est pas nécessairement un accident, là, on peut le prévoir en sachant qu'on va le garder. Est-ce que je vous comprends bien?

Mme Bourdages (Hélène) : Vous me comprenez bien. Puis, si vous permettez, Mme la Présidente, je vais céder la parole à M. Vézina, qui va pouvoir parler de l'administration des surplus.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Oui, M. Vézina.

M. Vézina (Carl) : Oui, bonjour. En fait, ce qu'on a vécu, nous, à notre commission scolaire, d'une façon virtuelle — je vais l'appeler comme ça — les surplus des écoles étaient quand même conservés. On n'avait pas la possibilité de pouvoir les récupérer à 100 %, mais on avait quand même une certaine marge de manoeuvre qui était octroyée par la commission scolaire en fonction des différentes compressions. Mais on avait toujours un chiffre virtuel, comme je tiens à le préciser, qui était rattaché à notre établissement.

C'est sûr que, dépendant de l'exercice financier, du résultat de la commission scolaire, il y avait moyen d'aller en récupérer une partie, un certain pourcentage. Et, là-dessus, il y avait un effort qui a été fait par la commission scolaire pour nous permettre d'aller en récupérer généralement plus que 10 %. On est déjà arrivés à 20 %, je crois, au maximum, là, mais... Donc, à ce moment-là, ça nous permettait de pouvoir disposer de certaines sommes annuelles, c'est-à-dire sur plusieurs années. Voilà.

M. Roberge : Allez-y.

Mme Bourdages (Hélène) : Mais, quand on pense à acheter, par exemple, des équipements de gymnase, là, ça coûte une fortune. Alors, si on ne peut pas accumuler son surplus, on ne fera jamais, par exemple, de mur d'escalade fantastique pour le prof d'éducation physique, on n'achètera pas un piano neuf. Sinon, c'est la commission scolaire qui prend les décisions, puis c'est là qu'on augmente la bureaucratie. Si moi, je ne peux pas acheter de l'équipement informatique pour mon école — d'abord, ça prend des mois, et des mois, et des mois à centraliser un achat de cet ordre-là — bien, ça augmente la bureaucratie. Augmentant la bureaucratie, on diminue l'argent qui descend directement dans l'école pour répondre aux besoins des élèves.

M. Roberge : Et vous avez parlé d'informatique, justement, quand on change un laboratoire portable, supposons, des portables sur chariot, quelque chose comme ça, on ne veut pas en changer trois par année, on veut les avoir tous en même temps, la même année, pour être capables d'avoir des logiciels qui soient tous de la même édition puis faciliter le travail.

Mme Bourdages (Hélène) : On est d'accord.

M. Roberge : C'est comme ça que ça fonctionne au jour le jour. Quand on veut être efficace, on a besoin de cette marge de manoeuvre là. Puis il y a un lien direct, ce que vous dites en page 8, avec — je cherche le mot, là — les tabarnouche d'enveloppes dédiées. Il y en a une, d'ailleurs, que ça dit «ressources numériques». Or, si on n'avait pas les enveloppes dédiées, et donc qu'on était capable de jouer à l'intérieur des enveloppes, puis qu'en plus on avait des budgets pluriannuels on serait beaucoup plus efficace.

Mme Bourdages (Hélène) : C'est très intéressant, le budget pluriannuel, pour une école, absolument, absolument, vous avez raison.

M. Roberge : Amen.

La Présidente (Mme Rotiroti) : Merci beaucoup, Mme Bourdages, M. Boutin, M. Vézina, M. Garneau et M. Gemme, pour votre contribution à nos travaux.

Mémoires déposés

Alors, avant de conclure les auditions, je procède au dépôt des mémoires des organismes et des personnes qui n'ont pas été entendus lors des auditions publiques. Je vous remercie, tous les collègues et tous les groupes que nous avons entendus aujourd'hui et hier.

Et la commission ajourne ses travaux sine die. Merci. Et bon retour à Montréal.

(Fin de la séance à 18 h 26)

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