Journal des débats de la Commission de la culture et de l’éducation
Version préliminaire
42e législature, 1re session
(27 novembre 2018 au 13 octobre 2021)
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Le
jeudi 26 novembre 2020
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Vol. 45 N° 75
Consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 69, Loi modifiant la Loi sur le patrimoine culturel et d’autres dispositions législatives
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Intervenants par tranches d'heure
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Guillemette, Nancy
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Roy, Nathalie
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Melançon, Isabelle
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Guillemette, Nancy
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Roy, Nathalie
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Melançon, Isabelle
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Melançon, Isabelle
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Guillemette, Nancy
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Ghazal, Ruba
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Roy, Nathalie
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Roy, Nathalie
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Guillemette, Nancy
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Melançon, Isabelle
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Ghazal, Ruba
12 h (version révisée)
(Douze heures vingt-deux minutes)
La Présidente (Mme Guillemette) :
Donc, bonjour, tout le monde. Bienvenue à la Commission de la culture et de
l'éducation. Je demanderais à toutes les personnes présentes dans la salle de
bien vouloir fermer leurs appareils électroniques.
Nous sommes réunis aujourd'hui pour
poursuivre les auditions publiques dans le cadre des consultations
particulières sur le projet de loi n° 69, Loi modifiant la
Loi sur le patrimoine culturel et d'autres dispositions légales.
Donc, Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a
des remplacements?
La Secrétaire
: Oui,
Mme la Présidente. Mme St-Pierre (Acadie) est remplacée par Mme Weil
(Notre-Dame-de-Grâce); Mme Labrie (Sherbrooke), par Mme Ghazal
(Mercier) et Mme Hivon (Joliette), par M. Bérubé (Matane-Matapédia).
La Présidente (Mme Guillemette) :
Merci. Y a-t-il des votes par procuration?
La Secrétaire
: Oui,
Mme la Présidente. M. Lemieux (Saint-Jean) dispose d'un droit de vote par
procuration au nom de M. Chassin (Saint-Jérôme), de M. Émond
(Richelieu) et de Mme Foster (Charlevoix—Côte-de-Beaupré). Mme Melançon
(Verdun) dispose, quant à elle, d'un droit de vote par procuration au nom de
Mme Rizqy (Saint-Laurent).
La Présidente (Mme Guillemette) :
Merci. Donc, ce matin, nous entendrons l'organisme Docomomo Québec par
visioconférence. Je souhaite la bienvenue à Mme France Vanlaethem. Vous
aurez 10 minutes pour faire votre exposé aux parlementaires, et, suite à
ça, il y aura un échange avec les membres de la commission. Donc, je vous
laisse la parole tout de suite.
(Visioconférence)
Mme Vanlaethem (Francine) :
O.K. D'accord. Merci beaucoup. D'ailleurs, je voudrais commencer par remercier
la Commission de la culture et de l'éducation de l'Assemblée nationale d'avoir
sollicité Docomomo Québec en audition dans le cadre de l'examen du projet de
loi n° 69.
Quelques mots sur Docomomo Québec, disons,
une dénomination qui peut vous sembler bizarre. En fait, Docomomo Québec est
une association fondée en 1890 vouée à la connaissance et à la sauvegarde de
l'héritage de l'architecture novatrice du XXe siècle du Québec. Docomomo
est l'acronyme de Documentation and Conservation of the Modern Movement,
dénomination que s'est donnée l'organisation internationale fondée en 1988 et
représentée aujourd'hui dans plus de 70 pays et régions du monde, dont le
Québec.
Étant donné la mission de Docomomo Québec,
nous ne pouvons que nous réjouir du projet de loi n° 69 vu son objet
unique, la préservation du patrimoine immobilier, composante majeure du cadre
de vie et de l'expérience <quotidienne…
Mme Vanlaethem (Francine) :
...
dont le Québec.
Étant donné la mission de Docomomo
Québec, nous ne pouvons que nous réjouir du projet de loi n° 69 vu son
objet unique, la préservation du patrimoine immobilier, composante majeure du
cadre de vie et de l'expérience >quotidienne. Nous saluons l'extension de
la délégation de pouvoirs en faveur des municipalités régionales de comté,
tenues d'adopter des inventaires, et de l'obligation faite aux municipalités de
se doter d'un règlement sur les démolitions. Nous nous félicitons des
responsabilités nouvelles que se propose d'assumer la ministre en élaborant, d'une
part, une politique de consultation afin de favoriser la participation des
personnes et des organismes, et, d'autre part, une méthode d'évaluation de
l'intérêt patrimonial des immeubles et des sites.
Par contre, nous nous questionnons à
propos du remplacement des plans de conservation des biens immobiliers classés
par une grille de catégorisation. Nous accueillons très positivement la
création d'une table de concertation en matière de patrimoine immobilier
gouvernemental afin de favoriser l'exemplarité de l'État en tant que
propriétaire. Le mémoire que nous avons déposé souligne l'intérêt pour le
patrimoine moderne de la création de cette table, une bonne part du parc
immobilier gouvernemental datant du milieu du XXe siècle. Nous voudrions
être assurés qu'au sein de la table de concertation le patrimoine moderne
reçoive la même considération que le patrimoine ancien. Notons qu'au Québec, à
ma connaissance, rares sont les édifices gouvernementaux bénéficiant d'un
statut patrimonial, et, parmi ceux-ci, encore plus rares sont les éléments du
patrimoine moderne. Ainsi, ne sont pas inclus dans le site patrimonial de l'Assemblée
nationale les édifices Marie-Guyart et Jean-Talon, construits à la fin des années 60,
malgré leurs valeurs historique, architecturale, technique et urbaine.
Concernant les inventaires que doivent
adopter les MRC, Docomomo déplore la date limite de 1940. Pourquoi? Car arrêter
les inventaires en 1940 conduit à faire l'impasse sur les années 50 et 60,
marquées par un boum constructif sans précédent et sans égal au Québec. Arrêter
les inventaires en 1940, c'est se priver de la connaissance d'une part très
grande du cadre bâti de la province. C'est courir le risque de perdre par ignorance
non seulement des oeuvres architecturales significatives, mais encore d'altérer
par des rénovations et des reconstructions inappropriées des ensembles qui
offrent des milieux de vie familiers de qualité, à l'égal des anciens, vu leur
échelle humaine et leur cohérence bâtie et la maturité de leur couvert végétal.
Aujourd'hui, plusieurs municipalités prennent des mesures pour requalifier leur
coeur de village altéré par des interventions mal contrôlées. Voulons-nous
répéter de telles erreurs dans nos quartiers plus récents? Outre de constituer
des garde-fous contre les démolitions intempestives, les inventaires sont une
source précieuse pour la prise de décision liée aux transformations urbaines et
à la revitalisation des <territoires...
Mme Vanlaethem (Francine) :
...par des interventions mal contrôlées. Voulons-nous répéter de telles erreurs
dans nos quartiers plus récents? Outre de constituer des garde-fous contre les
démolitions intempestives, les inventaires sont une source précieuse pour la
prise de décision liée aux transformations urbaines et à la revitalisation des >territoires.
L'intérêt patrimonial de leurs composantes bâties n'est pas toujours évident, d'autant
plus quand elles sont modernes, non familières.
Concernant l'élaboration de la méthode d'évaluation,
Docomomo demande que celle-ci s'appuie sur les connaissances les plus actuelles
offertes par l'ensemble des disciplines qui ont fait du bâti historique et du
patrimoine leur objet d'étude. S'agissant de la valeur architecturale et
urbanistique du patrimoine moderne, il faut tenir compte des importantes
avancées faites en histoire de l'architecture moderne pour comprendre son
originalité et sa diversité. Les notions que mettent généralement en oeuvre les
professionnels dans les études patrimoniales doivent être complétées par
d'autres qui permettront de cerner la spécificité de cette architecture et de
cet urbanisme non traditionnel, qui a réinventé de manière plus ou moins
radicale, plus ou moins heureuse la ville et le cadre bâti au XXe siècle.
Soulignons de plus que, dans l'évaluation patrimoniale, le contexte du bien
doit être pris en compte. Nous ajoutons que la méthode n'a pas seulement un
intérêt pour accorder un statut, mais qu'elle doit aussi orienter celle suivie
pour établir les inventaires.
Toujours concernant l'élaboration de la
méthode d'évaluation, Docomomo propose qu'elle tienne compte de l'enjeu du développement
durable. Une des membres de la direction du patrimoine a consacré son mémoire
de maîtrise à l'évaluation du patrimoine au développement durable. Je le
mentionne, ce document, car j'ai oublié de le faire dans le mémoire de Docomomo
Québec. Dans ce document, elle propose d'étendre l'exploration des valeurs au
patrimoine... du patrimoine, pardon. Du point de vue du développement durable,
il s'agit de juger de l'intérêt de protéger et de conserver les immeubles ou
les sites du point de vue social, économique et écologique, les fameux trois
piliers, donc de poursuivre l'exploration des valeurs dans le temps présent et
en regard de l'avenir plutôt qu'en lien avec le passé.
Explorons quelques aspects qui pourraient
être cernés : les perceptions et les aspirations de la collectivité en
regard du patrimoine; son potentiel économique, touristique, le coût de son maintien
et l'impact d'une reconversion sur la valeur culturelle; sa performance
énergétique en termes de consommation et d'immobilisation, la fameuse énergie
grise, voire sa valeur écologique. Ce genre d'intérêts échappe à la Loi sur le
patrimoine culturel. Ces valeurs supplémentaires pourraient être considérées
sous l'angle de l'opportunité de conférer un statut, un volet qu'avait
introduit la méthode d'évaluation produite par le ministère des Affaires
culturelles en 1988. Donc, vous voyez que l'idée d'élaborer une méthode
d'évaluation de l'intérêt patrimonial n'est pas, comment dire, nouvelle au sein
du ministère.
• (12 h 30) •
Concernant la politique de consultation,
dont un élément clé est la formation, inscrite dans le projet de loi, d'une
table des partenaires, nous soulignons...
12 h 30 (version révisée)
Mme Vanlaethem (Francine) :
...donc, vous voyez que l'idée d'élaborer une méthode d'évaluation à l'intérêt
patrimonial n'est pas, comment dire, nouvelle au sein du ministère.
Concernant la politique de consultation,
dont un élément clé est la formation, inscrite dans le projet de loi, d'une
table des partenaires, nous soulignons l'intérêt d'une telle instance dont la
portée est à la fois informative et pédagogique. Dans un tel cadre, les
partenaires venus d'horizons divers, administration publique, société civile,
métiers, professions et universités, pourront informer la ministre de leurs
préoccupations et leurs expériences, et échanger leurs points de vue et
savoirs.
Finalement, il nous semble qu'une des recommandations
du Vérificateur général est bien peu prise en compte dans le projet de loi, la recommandation
n° 3 qui souligne l'importance de sensibiliser les citoyens
et les acteurs du milieu à la valeur du patrimoine. Seul le point 6 du
plan d'action y est consacré, sans qu'aucun partenaire ne soit identifié. Nous
pensons que l'élaboration d'une stratégie de mise en valeur du patrimoine est
cruciale. Une telle stratégie présente bien des bénéfices. Les citoyens sont aussi,
pour certains, les propriétaires d'immeubles patrimoniaux qu'il faut convaincre
d'en prendre soin, d'autres oeuvrent, dans leur vie professionnelle, à leur
entretien et à leur actualisation, et, finalement, tous peuvent en jouir et
apprendre des lieux chargés d'histoire et de mémoire.
Pour terminer, je voudrais
attirer votre attention sur le fait que Docomomo Québec a
envoyé, par Les Publications du Québec, au secret de la
commission... à destination des membres de la commission, le livre Patrimoine
en devenir : l'architecture moderne du Québec, publié en 2012 à
l'initiative du Conseil du patrimoine culturel, dont j'ai été membre pendant
plusieurs années. Malheureusement, le livre s'est perdu. Cet ouvrage fait le
point sur la protection et la conservation du patrimoine moderne et propose un
premier inventaire, abondamment illustré, des éléments remarquables du
patrimoine moderne du Québec. Je pense qu'il peut être utile aux travaux de la
commission. Je vous remercie de votre attention.
La Présidente (Mme
Guillemette) : Merci beaucoup. Donc, nous passons
maintenant aux échanges avec les parlementaires. Je laisserais la parole à Mme
la ministre.
Mme Roy
:
Oui, merci beaucoup. Je vais mettre mon chronomètre. Bonjour, madame. Comment
prononcez-vous votre nom? Je veux bien le prononcer, votre nom de famille.
Mme Vanlaethem (Francine) :
Très simplement, madame : Vanlaethem. Vous oubliez toutes les lettres qui
vous dérangent, le h, le e.
12187 Mme Roy:
Bien, je suis bien contente de vous rencontrer. Merci pour le mémoire. Et je
pars mon chronomètre à l'instant. D'abord, merci pour le travail qui est
accompli, merci pour la défense du patrimoine bâti. Et je salue tous les
groupes qui viennent nous rencontrer parce que c'est un travail de longue
haleine, c'est un travail fait par des passionnés et chacun dans leur secteur,
il y a des époques, il y a des styles, et vous en êtes la preuve aujourd'hui
avec votre organisation qui se consacre sur l'architecture du XXe siècle
au Québec.
J'aimerais tout de suite, si vous me
permettez, avant de vous poser quelques questions, juste vous rassurer. J'ai lu
votre mémoire et je vois que vous avez des inquiétudes qui sont soulevées, <et
je pense que...
Mme Roy
: ...
styles,
et vous en êtes la preuve aujourd'hui avec votre organisation qui se consacre
sur l'architecture du XXe siècle au Québec.
J'aimerais tout de suite, si vous me
permettez, avant de vous poser quelques questions, juste vous rassurer. J'ai lu
votre mémoire et je vois que vous avez des inquiétudes qui sont soulevées, >et
je pense que... Je veux me permettre de vous rassurer ici, parce qu'il y a des
choses qui sont dites dans le mémoire et qui ne sont pas tout à fait exactes.
Alors, je vais juste vous préciser où nous allons et où la loi s'en va. Puis je
pense que c'est important pour qu'on soit tous sur la même base.
Par ailleurs, vous nous dites, quand vous
nous parlez des plans de conservation, que nous allions les remplacer par une
grille, on les convertit en grille. Ce n'est pas tout à fait ça. Enfin, ce
n'est pas ça que la loi prévoit. Puis je veux vous rassurer, les plans de
conservation, on ne les jette pas, on ne s'en débarrasse pas. Bien au
contraire, nous souhaitons leur donner force de loi. Alors, ce qu'il adviendra
de ces plans de conservation qui sont faits, entre autres, pour nos
13 sites déclarés, nous les convertissons en règlement. Et vous savez
comme moi qu'un règlement a force de loi, alors qu'un plan de conservation est
un plan de conservation, n'a pas force de loi et peut être changé, interprété
de différentes façons, au gré des personnes qui ont à travailler avec.
Alors, c'est important pour nous de
conserver ces plans de conservation, puisqu'ils se sont faits. C'est du travail
de longue haleine, fait avec les groupes, fait avec le milieu, fait avec les
municipalités conservées, fait avec les gens du ministère. Donc, les plans de
conservation, nous les convertissons, nous les transformons en règlement, et
non en grille. Donc, c'est pour leur donner une force encore... enfin, comme je
vous disais, là, donner force de loi.
Et il y a plusieurs motifs à ça. De un,
comme premier motif, qui est un motif légal, ça a force de loi, donc c'est plus
fort. Deuxième motif, et vous nous évoquez dans votre document le rapport de la
Vérificatrice générale, elle a été très critique à l'égard des plans de
conservation, très critique à l'égard de leur utilisation, très critique à
l'égard de la connaissance de ces plans. Il y a des mots assez durs qu'elle a
dits relativement aux plans de conservation, et c'est la raison pour laquelle
nous les transformons en règlements, donc, pour les rendre... pour leur donner
une force de loi, mais aussi dans un souci de transparence et de prévisibilité.
Lorsque vous avez un règlement, vous
connaissez l'adage légal : Nul n'est censé ignorer la loi, bien, c'est la
loi et ses règlements, là, c'est la même chose. Et ces règlements-là
permettront plus de prévisibilité, plus de transparence. Par exemple, si je
pense à un citoyen qui souhaite s'établir dans un site déclaré, qui est la plus
haute mesure de protection que le gouvernement accorde en matière de protection
du patrimoine, eh bien, les gens pourront référer au règlement sur le site
déclaré, et donc ça leur donnera de la prévisibilité, ça leur donnera de l'information.
Les gens, là, <je vous parle des...
Mme Roy
: ...s'établir
dans un site déclaré, qui est la plus haute mesure de
protection que le
gouvernement
accorde en matière de
protection du patrimoine, eh bien, les gens
pourront référer au
règlement sur le site déclaré, et donc ça leur
donnera de la
prévisibilité, ça leur donnera de
l'information.
Les gens, là, >je vous parle des citoyens, je vous parle d'acheteurs
éventuels, ou de vendeurs éventuels, ou de gens qui souhaiteraient faire des modifications
aux bâtiments qui sont concernés, ou encore aux villes, aux administrations municipales.
Donc, c'est pour donner plus de prévisibilité à tout le monde. Si quelqu'un
veut venir s'établir puis faire de la construction, bien, il aura beaucoup
plus... toute cette information-là sera colligée dans la loi.
Donc, c'est vraiment... je veux vous
rassurer là-dessus, là. Nous ne jetons pas aux poubelles les plans de
conservation, nous les transformons en règlement, et ce qui nous permettra,
lorsqu'on sera rendus à cette transformation, de faire certains ajustements, à
la lumière de ce que plusieurs groupes et des citoyens ont pu constater dans
l'application des plans, par ailleurs, pour les rendre... pour tenter de les
simplifier et de les rendre encore plus pratiques. Alors, ça, c'était mon
premier point. Je voulais vous rassurer à cet égard-là.
Deuxième point qui est très, très
important, je comprends que, lorsqu'on lit la loi, et lorsqu'on lit... attendez
un petit peu, à l'égard des notes explicatives, je crois, on ne va pas assez
loin dans les notes explicatives. Et, à l'égard de la loi, je veux vous
rassurer tout de suite, il est faux de dire qu'on arrête les inventaires en
1940, comme il est écrit dans votre mémoire. Puis je veux vous rassurer, ce
n'est pas du tout ça, bien au contraire, le 1940, c'est un minimum. Nous disons :
Pour la création des inventaires, vous devez minimalement, là, inventorier ce
qui est patrimonial sous le 1940. Mais on ouvre toute grande la porte à toute
administration, à toute MRC qui souhaiteront aller bien au-delà. Et ça, c'est
important de le souligner. C'est un peu... Dans la loi, c'est à l'article 38.
Alors, l'article 38 crée l'article 120, et on y indique clairement
que la municipalité régionale de comté pourra, comme elle le souhaite, inclure
des immeubles dont la construction est plus récente.
Et ça, c'est par souci aussi d'autonomie,
autonomie des villes et des municipalités, donc, parce qu'elles ont déjà...
certaines d'entre elles qui sont... plusieurs sont exemplaires, ont déjà des
inventaires pertinents qui vont bien au-delà de 1940. Et donc nous souhaitons,
ultimement, que ces inventaires-là soient mis à jour et soient basculés dans un
inventaire centralisé au ministère de la Culture, des Communications. Alors, je
voulais vous rassurer là-dessus, madame. Il n'est pas question qu'on arrête et
puis qu'on bannisse tout ce qui est après 1940, bien au contraire. Oui,
allez-y. Oui, j'aimerais vous entendre parler là-dessus, allez-y. Je vois que
vous voulez me poser une question. Allez-y.
Mme Vanlaethem (Francine) :
Bien, j'aimerais bien, oui.
Mme Roy
: Oui, oui, oui.
Puis après j'ai des questions, mais je voulais vous rassurer en partant.
Mme Vanlaethem (Francine) :
Mais je vais y aller vite pour laisser tout le temps à vos questions. Il y a
une chose que je comprends... Est-ce que vous allez continuer à faire les plans
de conservation pour tous les biens qui doivent en avoir et qui n'en ont pas
encore? <C'est ça...
Mme Roy
: …après j'ai
des
questions, mais je voulais vous rassurer en partant.
Mme Vanlaethem (Francine) :
Mais je vais y aller vite pour laisser tout le temps à vos questions. Il y a
une chose que je comprends... Est-ce que vous allez continuer à faire les plans
de conservation pour tous les biens qui doivent en avoir et qui n'en ont pas
encore? >C'est ça qui n'est pas clair.
• (12 h 40) •
Mme Roy
: Les plans de
conservation sont remplacés par des règlements, et ce seront des règlements qui
gèreront la suite des choses, donc pour donner, comme je vous disais, cette
force< aux obligations >— tiens, je vais dire le
mot — aux obligations qui sont de part et d'autre, là, qui sont en
vigueur avec ces plans de conservation. Donc, pour la suite des choses, ce sera
des règlements.
Mme Vanlaethem (Francine) :
Mais, par exemple… Pardon, excusez-moi.
Mme Roy
: Non, non,
allez-y.
Mme Vanlaethem (Francine) :
Par exemple, vous avez un nouveau site patrimonial classé. Comment vous
l'encadrez pour que les propriétaires puissent savoir ce qu'ils peuvent faire,
ne pas faire? Est-ce que vous allez… le ministère va encore élaborer des plans
de conservation? Je comprends qu'ils deviennent des règlements, mais il y a
tout un travail préalable, qui, en fait, comment dire, consiste… Il y a l'étude
patrimoniale qui sert dans le plan de conservation, elle réapparaît, et puis en
plus, après, on définit des orientations pour le futur. Est-ce que ce genre de
document spécifique à un bien va <être >continué à être produit?
C'est ça que je n'avais pas très bien compris, en effet, ni dans le projet de
loi ni dans les notes explicatives.
Mme Roy
: Maintenant,
il y aura désormais des règlements, mais il est sûr qu'il faudra continuer à
encadrer, là, le… Et c'est pour ça qu'on refait, dans la loi, les grilles
d'évaluation, mais aussi la catégorisation, et on veut mettre ça plus clair,
plus accessible, plus simple. Donc, mais c'est vraiment une disparition des
plans de conservation, mais tout le travail de réflexion demeure le même. Au
lieu que ce soit dans un plan, ce sera dans un règlement, mais le travail de réflexion
demeure. Mais, avant ce travail de réflexion, on fait une mise à jour des
critères, et ça, ce sont dans les articles plus avant du projet de loi. Maintenant,
moi, j'aurais une question à vous poser… Oui, allez-y.
Mme Vanlaethem (Francine) :
Est-ce que je peux encore dire quelque chose sur la date de 1940?
Mme Roy
: Absolument,
allez-y.
Mme Vanlaethem (Francine) :
<Je
suis bien… Excusez-moi. >Je suis bien consciente, vous savez, <je
suis bien consciente >que 1940, comment dire, est la date jusqu'à
laquelle les inventaires doivent aller. Je suis bien consciente que les villes
peuvent, comment dire, aller au-delà, mais moi, ce qui m'inquiète, c'est que
1940 soit inscrit dans la loi. Je pense que, dans le mémoire, on argumente
pourquoi on trouve qu'une date butoire n'a pas grand sens. Je ne vais pas le
redévelopper ici, je vais vous laisser poser votre autre question. J'étais bien
consciente, mais je pense que je ne suis pas la seule… nous ne sommes pas les
seuls à le dire.
Mme Roy
: Non,
effectivement. Alors, on prend… c'est pour ça qu'on fait ces commissions-là,
madame, <pour vous entendre…
Mme Vanlaethem (Francine) :
…
on argumente pourquoi on trouve qu'une date butoir n'a pas grand sens.
Je ne vais pas le redévelopper ici, je vais vous laisser poser votre autre
question. J'étais bien consciente, mais je pense que je ne suis pas la seule…
nous ne sommes pas les seuls à le dire.
Mme Roy
: Non,
effectivement. Alors, on prend… c'est pour ça qu'on fait ces commissions-là,
madame, >pour vous entendre et pour voir comment on peut améliorer le
projet de loi. Cela dit, ce n'était pas une date aléatoire, c'est une date qui
est utilisée dans les analyses. Après la période française, la période
britannique, il y a la période nord-américaine, et on la situe fin 1930,
début 1940. Donc, elle correspond à une époque architecturale, et c'est
pour ça que cette date-là avait été signifiée. Dans la mesure où... Ces
bâtiments étant plus rares, plus anciens, on dit : Minimalement, on doit
les inclure absolument dans nos inventaires.
Maintenant, je vais vous poser une
question. À l'égard, entre autres… Vous dites : Nous saluons l'extension
de la délégation de pouvoirs en faveur des municipalités régionales de comté,
ce qu'on appelle les MRC, qui seront tenues<… elles seront tenues,
pardon,> d'adopter des inventaires, et également nous saluons
l'obligation faite aux municipalités de se doter d'un règlement sur les
démolitions. Pourquoi, selon vous, est-ce que ce sont deux bonnes mesures, qui
vont aider à la sauvegarde du patrimoine? J'aimerais que vous élaboriez. Si
vous le saluez, qu'est-ce que vous trouvez qui est pertinent là-dedans?
Mme Vanlaethem (Francine) : Je
pense qu'au niveau des municipalités régionales de comté, primo, elles gèrent
un territoire plus large, donc le point de vue est plus élargi. <Et aussi
je pense qu'il y a… >Vous savez, ce milieu-là, je ne le connais pas très
bien. J'ai eu quelques expériences. Je pense aussi qu'il y a plus de
compétences à ce niveau-là.
Je vais vous expliquer, comment dire, un
cas que j'ai vécu, qui est le cas, comment dire, de l'Estérel, dont,
d'ailleurs, le centre commercial est classé, enfin, la tête du centre
commercial est classée. Et j'ai eu l'occasion, comment dire, de voir qu'il y
avait une beaucoup plus grande ouverture pour, comment… la protection de ce
bien au niveau de la MRC que de la municipalité.
Parce que la municipalité est aussi
beaucoup plus prise avec, comment dire, des enjeux financiers, elle doit gérer,
comment dire, les citoyens. Enfin, je pense que ce niveau-là est un niveau qui
est préférable. Je sais qu'il y a bien des gens qui disent que le niveau
municipal, même s'il est, comment dire, un niveau supérieur, n'est pas très
efficace, mais cette disposition est tellement inscrite dans la loi depuis si
longtemps que je vois mal comment vous pourriez, au niveau de l'État central,
tout gérer.
Mme Roy
: Et vous
parlez de... Oui, allez-y.
Mme Vanlaethem (Francine) :
Et, comment dire, les règlements de démolition, c'est sûr que ça, c'est un
domaine que je connais moins. <Parce que... >Vous avez vu dans le
mémoire, il n'est pas redéveloppé par la suite, parce que je pense qu'il faut
arrêter les démolitions. Il faut mettre en place des mesures <qui
permettent…
Mme Vanlaethem (Francine) :
...tout gérer.
Mme Roy
: Et vous
parlez de... Oui, allez-y.
Mme Vanlaethem (Francine) :
Et, comment dire, les règlements de démolition, c'est sûr que ça, c'est un
domaine que je connais moins. Parce que... Vous avez vu dans le mémoire, il
n'est pas redéveloppé par la suite, parce que je pense qu'il faut arrêter les
démolitions. Il faut mettre en place des mesures >qui permettent qu'on
puisse, comment dire, se pencher de manière rationnelle sur la démolition des
bâtiments. C'est tout.
Mme Roy
: D'accord avec
vous, et c'est pour ça que, dans notre projet de loi, nous mettons en place un mécanisme.
Hier, il y avait des groupes qui nous expliquaient... même un spécialiste en
droit municipal qui nous expliquait que, lorsqu'une municipalité n'a pas de règlement
de démolition, la municipalité est obligée d'accorder le permis, s'il n'y a pas
de règlement, et que le nouvel acquéreur du bâtiment répond aux critères, là,
et ce qui donne lieu à des atrocités. Et c'est justement ce qu'on veut éviter
avec ce projet de loi, de faire en sorte qu'il y ait un mécanisme, un
processus, une procédure d'analyse avant qu'une municipalité émette son fameux
permis de démolition.
Donc, moi, ce que je souhaite, c'est qu'il
y ait... que nous puissions arriver, avec ce nouveau projet de loi, à faire en
sorte que toutes les instances impliquées l'analysent avant que la ville...
Donc, de un, les municipalités auront cette obligation d'avoir ce règlement de
démolition. Mais ce n'est pas tout. À la suite, il va falloir que les gens
forment un comité, analysent la demande et qu'on réponde également aux citoyens
dans un délai imparti et qu'on informe aussi la ministre puis le ministère.
Parce que ça, c'est le gros, gros, gros
problème auquel je suis confrontée depuis mon arrivée. Il n'y a pas... À partir
du moment où un permis de démolition est accordé ou émis, personne ne nous
avertit, là, on apprend le jour même qu'il y a des pelles mécaniques. Naturellement,
certaines personnes sonnent l'alerte puis il peut y avoir un groupe qui nous
appelle à quelques minutes de l'intervention, mais lorsque c'est fait.
Donc, <ça nous donne... >le
projet de loi, avec le processus que nous voulons mettre en place, nous donne
du temps pour réfléchir, du temps pour le milieu de s'impliquer aussi, pour que
les citoyens soient informés, parce qu'il y a des choix à faire. On ne peut
malheureusement pas tout protéger, pas tout classer, pas tout citer, c'est
impossible puis on n'a pas les moyens de le faire. Mais, si le milieu
s'implique, les citoyens s'impliquent, la population dit : Pour nous,
c'est important, cet édifice, même s'il n'a pas de grande valeur pour être
classé. Bien, tant mieux, on va pouvoir le protéger si tout le monde se
mobilise.
Mais ultimement, c'est une autre réalité,
on ne peut pas tout protéger. Mais par ailleurs le processus pour éviter les
démolitions sauvages, sans que personne ne soit averti, sans qu'il n'il y ait
eu de processus d'étude, c'est à ça qu'on veut mettre fin. Mais c'est un équilibre
fragile, hein, entre les groupes, entre les villes, entre l'intérêt du citoyen,
du propriétaire, puis il faut trouver le juste milieu entre tout ça.
La Présidente (Mme Guillemette) :
Merci, Mme la ministre, c'est tout le temps qu'on avait.
Mme Roy
: Merci,
madame, merci infiniment. Désolée, j'ai...
La Présidente (Mme Guillemette) :
Donc, je passerais maintenant la parole à la députée de Verdun pour
9 min 54 s. Mme la députée.
Mme Melançon : Merci beaucoup.
Alors, à mon tour <de saluer...
Mme Roy
: ...entre
tout ça.
La Présidente (Mme
Guillemette) :
Merci, Mme la ministre, c'est tout le
temps qu'on avait.
Mme Roy
: Merci,
madame, merci infiniment. Désolée, j'ai...
La Présidente (Mme Guillemette) :
Donc, je passerais maintenant la parole à la députée de Verdun pour
9 min 54 s. Mme la députée.
Mme Melançon : Merci
beaucoup. Alors, à mon tour >de saluer Mme Vanlaethem, qui est avec
nous aujourd'hui. Merci infiniment. On a pris beaucoup de temps pour lire les
mémoires, et je dois vous dire qu'il est très bien étayé. Et je veux vous dire
au passage : Concernant les plans de conservation, vous n'êtes
certainement pas la seule à avoir noté qu'il y a peut-être une problématique à
abolir les plans de conservation, bien qu'ils soient transformés en règlement,
puisque, dans les plans de conservation, on donne une orientation, et cette
orientation-là qui a été... parce que des plans de conservation, c'est fait
avec des tables, des gens. Je comprends bien pourquoi Héritage Montréal, Action
Patrimoine, vous avez noté, et j'ai pris bonne note. Donc, pour la suite des
choses, on pourra voir avec les gens du ministère, avec la ministre et son
équipe, à éclaircir certains points, parce que, je vous le dis, vous n'êtes pas
la seule, pour avoir pris le temps de faire lecture des différents mémoires qui
nous ont été envoyés.
J'aimerais vous entendre sur... Vous
parlez des moyens financiers et des moyens humains qui seront nécessaires pour
la suite, hein, à la suite, si jamais le projet de loi était adopté dans sa
version actuelle. Est-ce que vous pouvez nous éclairer un peu sur ce que vous
voyez comme problématique ou, en tout cas, comme danger?
• (12 h 50) •
Mme Vanlaethem (Francine) : Ah!
ce qu'il y a... ce que je vois, bon, c'est qu'au niveau du ministère de la
Culture l'équipe qui s'occupe du patrimoine est assez restreinte. Et j'ai la
mémoire qu'au beau temps du patrimoine, c'est-à-dire dans les années... Bien,
le patrimoine a connu, comment dire, une effervescence très grande dans les
années 70 et 80. À cette époque-là a été mis en place au sein de la
fonction... enfin, au sein de l'administration, au sein du ministère une
direction du patrimoine. Et j'ai lu, dans, comment dire, le rapport de Mme Courchesne
et de M. Corbo, et comme je le souligne d'ailleurs dans le mémoire, qu'à
cette époque-là, si on fait les calculs, il y avait plus de six fois de
personnes au sein du ministère de la Culture qui s'occupaient de patrimoine en
comparaison à aujourd'hui.
Alors, si on a pu être, comment dire, sans
doute très ou moyennement efficace au niveau du patrimoine, c'est parce qu'il y
avait des gens compétents, des gens... <comment dire...
Mme Vanlaethem (Francine) :
…
du ministère de la Culture qui s'occupaient de patrimoine en
comparaison à aujourd'hui.
Alors, si on a pu être, comment dire,
sans doute très ou moyennement efficace au niveau du patrimoine, c'est parce
qu'il y avait des gens compétents, des gens... >comment dire, un assez
grand nombre de fonctionnaires qui s'occupaient du patrimoine. Aujourd'hui, <j'ai
toujours… >bien, je suis quelquefois en contact avec eux. J'ai toujours
l'impression que vous éteignez des feux, mais que comment... c'est bien
difficile d'avoir une gestion rationnelle du patrimoine. C'est de là que vient
ma…
Et puis il y a l'autre volet, qui est le
volet de notre situation contemporaine qui, au niveau économique, est assez
alarmante, par la force des choses. Comment allons-nous nous payer tous ces
moyens dont on aurait besoin pour, comment dire, préserver notre patrimoine?
C'est ça, mon grand souci, c'est bien de mettre en place des choses, mais il
faut aussi avoir les gens qui peuvent les traiter.
Mme Melançon : Tout à fait.
Merci. Merci beaucoup. D'ailleurs, dans certains mémoires, je pense notamment à
l'Union des municipalités du Québec, à la Fédération québécoise des
municipalités, on parle aussi de devoir augmenter le financement des
municipalités avec les nouveaux pouvoirs qu'on va leur délester. Et, en ce sens-là,
on va devoir aussi chiffrer, à un moment donné, pour, justement, éviter de
faire un cadre dans une loi puis, après ça, dire : Bien, tout ça était
bien beau sur papier, mais, en réalité, on doit… Tout doit suivre, quoi.
Petite autre question pour vous. Sur le
1940, sur la date, j'entendais tout à l'heure la ministre exposer sa position
ou sa lecture. Là aussi, je peux vous dire, il y a de nombreux groupes qui ont
quand même remis en doute la date. Je veux quand même aussi vous rappeler que,
lorsqu'on fait une loi, on ne la fait pas pour cette année, hein, on la fait
pour les décennies. Et je vous entendais bien sur le fait qu'on va vieillir,
nous aussi, avec les bâtiments en fin de compte, et, dans 10 ans, bien, ce qui
aura été retenu ou non retenu par les municipalités, c'est qu'il y a un travail
qui devra toujours être pris, peut-être avec un peu de retard. C'est ce que
j'entends aussi.
Puis j'entends, la place du patrimoine
moderne, à quel point c'est important pour vous. Peut-être nous éclairer un peu
là-dessus, parce que ce n'est pas tout le monde qui nous a parlé du patrimoine
moderne.
Mme Vanlaethem (Francine) :
J'ai bien compris, et je le répète, que 1940, c'était une date butoir et qu'on
pouvait aller au-delà, mais, comme c'est une... ça, c'est l'obligation, il faut
qu'il y ait de la bonne volonté dans les municipalités pour aller au-delà.
<Bon, moi, je suis…
Mme Vanlaethem (Francine) :
...j'ai bien compris,
et je le répète, que 1940, c'était une date butoir
et qu'on pouvait aller au-delà, mais, comme c'est une... ça, c'est
l'obligation, il faut qu'il y ait de la bonne volonté dans les municipalités
pour aller au-delà.
> Bon, moi, je suis une nouvelle
arrivante de très longue date, O.K.? J'ai fait toute ma carrière au Québec. Le Québec
m'a donné des opportunités exceptionnelles, puisque j'ai été à l'UQAM depuis
presque les débuts. Et je trouve que cette période-là, pour l'histoire du Québec,
est tellement importante. Mais toutes les périodes sont importantes, mais
celle-là aussi, elle est très importante. Et le Québec a produit des
architectures tout à fait exceptionnelles, notamment dans le patrimoine
religieux. Je sais qu'on a bougé la date. Il y a des oeuvres, il y a des
églises <qui sont... >qui peuvent être... qui sont comparables à
la production architecturale internationale. On les connaît moins sur la scène
internationale, mais on a des architectes qui sont tellement créatifs, aussi tellement
identitaires. C'est une architecture moderne qui est vraiment québécoise. Et,
je ne peux pas vous dire autrement, pour moi, c'est... il y a des choses qu'on
risque de perdre. Je pense, par exemple, comment dire, à l'église
Notre-Dame-de-Fatima.
Je sais aussi qu'il y a tout... il y a un
autre enjeu qui est tellement important au patrimoine qui est l'usage, parce
que vouloir conserver des biens, mais quand on n'en a pas l'usage, enfin, ou quand
on ne trouve pas d'usage, comment dire, c'est difficile à faire. Je sais que,
comment dire, en matière de patrimoine religieux, il y a un nouveau programme
qui a été mis en place qui, en fait, comment dire, vise à essayer, avec le
milieu local, d'explorer de nouvelles avenues pour trouver des nouvelles
vocations à des lieux de culte, ce qui est très, très bien, alors qu'avant,
c'était uniquement des travaux, comment dire, d'entretien, ou de réparation, ou
de restauration. Je ne sais pas si ça répond à votre question.
Mme Melançon : Oui, oui, bien
sûr, bien sûr. C'est que je sais à quel point Docomomo parle beaucoup du
patrimoine moderne, et ce n'est pas le cas nécessairement de tous les groupes
que nous avons entendus. Donc, c'est pour ça que je voulais tendre l'oreille à
ce sur quoi vous... bien, à ce qui vous anime, en fin de compte. Oui, allez-y.
Mme Vanlaethem (Francine) : Est-ce
que je peux vous dire une chose? En fait, l'héritage de l'architecture moderne,
c'est sûr qu'il est mal aimé, mais c'est parce que c'est une architecture qui a
rompu avec la tradition, c'est une architecture qui est non conventionnelle. Et
donc... Et aussi, <l'autre élément...
Mme Vanlaethem (Francine) :
...c'est sûr qu'il est mal aimé, mais c'est parce que c'est une architecture
qui a rompu avec la tradition, c'est une architecture qui est non
conventionnelle. Et donc... Et aussi, >l'autre élément important, c'est
que le mouvement patrimonial des années 1970‑1980, qui a été particulièrement
vigoureux, quelque part a trouvé sa motivation dans son opposition à
l'architecture moderne, et, j'en conviens, parfois à raison. Et donc <il
y a comme... >sur l'architecture moderne, il y a comme... quelque part,
elle reste stigmatisée. Et je prendrais comme... Je vais m'arrêter, si vous
voulez.
Mme Melançon : Non, non,
allez-y, allez-y, il vous reste quelques secondes. C'est moi qui regardais la
présidente pour voir combien de temps il me restait. Allez-y.
Mme Vanlaethem (Francine) : O.K.
Par exemple, je déplore que les bâtiments modernes de la colline du Parlement
ne soient pas dans, comment dire, le site national de l'Assemblée nationale.
Parce que< je pense que>, comment dire, le bâtiment Jean-Talon, je
pense qu'il est toujours stigmatisé parce que, pour le construire, on a démoli,
comment dire, des maisons de la Grande-Allée. Or, pour moi, ce bâtiment-là,
quand on le regarde dans le paysage, comment dire, de la colline, avec l'Assemblée
nationale au milieu, et puis il y avait ce bâtiment-là qui, dans sa tête,
abritait le bureau du premier ministre et la salle, comment dire, du Conseil
des ministres, pour moi c'était éminemment symbolique. Et, à un moment donné,
comment dire, le bureau du premier ministre a déménagé et est allé dans un
bâtiment plus ancien. Donc, voilà le, comment dire... je pense qu'il faut
comprendre le patrimoine, il faut l'expliquer. Au-delà de l'aimer, il faut le
comprendre, il faut l'expliquer.
Mme Melançon : Merci.
La Présidente (Mme Guillemette) :
Merci beaucoup, Mme Vanlaethem. Donc, merci pour votre contribution
majeure aux travaux de la commission.
La commission suspend maintenant ses
travaux afin de poursuivre à un autre mandat.
(Suspension de la séance à 12 h 59)
15 h (version révisée)
(Reprise à 15 h 2)
La Présidente (Mme Guillemette) :
À l'ordre, s'il vous plaît! Donc, la Commission culture et éducation reprend
ses travaux. Je vous demande de bien vouloir éteindre la sonnerie de vos
appareils électroniques.
Nous poursuivons les audiences publiques
dans le cadre des consultations particulières sur le projet de loi n° 69, Loi modifiant la Loi sur le patrimoine culturel et d'autres
dispositions législatives.
Donc, cet après-midi, nous entendrons
M. Gérard Beaudet et L'Union des producteurs agricoles.
Donc, bienvenue, M. Beaudet. Vous
disposez de 10 minutes pour votre exposé et, ensuite, il y aura une
période d'échange avec les membres de la commission. Donc, je vous invite à
vous présenter et à présenter l'organisme pour lequel vous êtes ici. Et je vous
cède la parole pour 10 minutes.
(Visioconférence)
M. Beaudet (Gérard) :
Merci. Donc, Gérard Beaudet. Je suis professeur titulaire à l'École d'urbanisme
et d'architecture de paysage de l'Université de Montréal.
Donc, bon, la présentation que je vais
faire va s'articuler à quelques éléments du projet de loi. Donc, je ne propose
pas un regard exhaustif mais il y a un certain nombre d'éléments qui ont
particulièrement retenu mon attention.
D'entrée de jeu, je pense qu'il faut
mentionner que certaines initiatives sont fort bien accueillies. Je <pense...
M. Beaudet (Gérard) :
...
faire va s'articuler à quelques éléments du projet de loi. Donc, je
ne propose pas un regard exhaustif mais il y a un certain nombre d'éléments qui
ont particulièrement retenu mon attention.
D'entrée de jeu, je pense qu'il faut
mentionner que certaines initiatives sont fort bien accueillies. Je >pense
que l'idée d'avoir une politique de consultation, d'avoir des méthodes d'évaluation
qui sont bien définies et d'avoir des grilles de catégorisation, c'est tout à
fait souhaitable. Je dirais, par ailleurs, que, si tout ça pouvait se profiler
sur une politique du patrimoine, ça serait encore mieux, parce qu'on aurait,
effectivement, un cadre de référence qui sous-tendrait ces différents éléments
là et permettrait d'établir des liens.
La question de la table des partenaires,
je pense que tout le monde applaudit à cette idée. Comme beaucoup d'autres
intervenants, je souhaiterais qu'elle soit la plus inclusive possible et qu'elle
serve, notamment, à échanger les pratiques exemplaires, parce que les pratiques
sont très, très inégales. Et compte tenu des défis auxquels on va être
confrontés, je pense que, de partager tout ce qui s'est développé, tout ce qui
s'est fait au cours des dernières années, ça serait une bonne manière de bien
asseoir l'ensemble des interventions.
La liste des éléments à considérer lors
des analyses des demandes, ça aussi, ça m'apparaît fort intéressant. Ça
s'apparente d'ailleurs, à certains égards, à ce qu'on connaît en urbanisme avec
les règlements sur les plans d'implantation et d'intégration architecturale,
c'est-à-dire que ça permet de combler une espèce de flou artistique qui existe,
où on ne sait pas trop sur quoi on se base, on ne sait pas trop quels sont les
paramètres qu'on va utiliser. Et donc ça permet à tout un chacun de voir venir
et de mieux situer les interventions des uns et des autres.
La question du permis de démolition, bon,
je pense que c'est central. Je pense que tout le monde attendait qu'il y ait
quelque chose qui soit fait. Les dernières années ont été assez difficiles, sur
le terrain, de ce point de vue là. Par contre, ce qui est proposé m'apparaît tout
à fait insuffisant. Tout à fait insuffisant parce que ça ne règle pas le
problème, notamment, de la négligence. Et on sait que c'est une pratique
immobilière très répandue, où on s'assure que le bâtiment soit dans un tel état
qu'éventuellement il sera facile d'avoir un avis d'expert qui va venir
confirmer que le bâtiment est irrécupérable, et on ne s'attaque pas à ce
problème-là.
On ne s'attaque pas non plus à un autre
problème qui est un peu le... <qui est un peu... >qui est le
conflit d'intérêts, réel ou perçu, dans le cas des municipalités à qui on
demande d'être juge et parti à la fois. Et je m'explique. Pourquoi juge et
parti à la fois? Tout simplement parce que les municipalités sont parfois
responsables des situations qui entraînent des démolitions. J'y reviendrai à la
fin de mon exposé en parlant davantage de l'urbanisme et de la pratique de
l'urbanisme en milieu patrimonial. Mais il est clair que plusieurs
municipalités adoptent des cadres réglementaires, à l'égard des milieux <anciens,
qui...
M. Beaudet (Gérard) : ...
des
situations qui entraînent des démolitions. J'y reviendrai à la fin de mon
exposé en parlant davantage de l'urbanisme et de la pratique de l'urbanisme en
milieu patrimonial. Mais il est clair que plusieurs municipalités adoptent des
cadres réglementaires, à l'égard des milieux >anciens, qui créent des
pressions telles qu'il ne faut pas se surprendre, éventuellement, que des
bâtiments soient démolis ou qu'on doive se résigner — par exemple, à
Montréal — à une pratique qu'on nomme dans le milieu le façadisme,
tout simplement parce que les cadres bâtis anciens sont mis sous une pression
qui devient totalement intolérable, à tel point que, dans certains cas, on sait
que la valeur des terrains peut même excéder la valeur des bâtiments. Et ça, c'est
un problème qui est récurrent, c'est un problème qu'on retrouve dans toutes les
municipalités, qui est lié à la fiscalité municipale. C'est clair que les
municipalités sont parfois un peu coincées et le redéveloppement est parfois la
seule véritable avenue pour être capables de bien ficeler les finances
municipales. Et ça, c'est complètement laissé à l'écart, c'est complètement
laissé dans l'angle mort du projet de loi, que ces pratiques qui sont
contraires, évidemment, à une bonne gestion, à une saine gestion du patrimoine.
La question des MRC, là aussi, j'ai de
sérieux doutes. Quand on sait comment opèrent les élus à la table du conseil
des MRC, quand on sait à quel point, depuis le tout début de l'aventure des
MRC, il est extrêmement difficile d'aller à l'encontre du bon vouloir d'une ou
de quelques municipalités, je vois mal comment les MRC pourraient être tentées,
devant, par exemple, la résistance d'une municipalité, d'aller attribuer un
statut à un bâtiment de cette municipalité-là et comment une MRC pourrait être
tentée de désavouer un permis de démolition, toujours dans le même contexte. Je
pense que les propositions qui sont faites révèlent qu'on comprend très, très
mal la dynamique politique à la table des conseils des MRC, ou, dit autrement,
ça fait preuve, à mon sens, d'une très grande naïveté à l'égard de la manière
dont se jouent les dossiers... dont se négocient les dossiers à la table des
MRC.
La question des inventaires, je pense que,
ça aussi, c'est salué par à peu près tout le monde. Bien connaître, c'est un
premier bon pas pour assurer une saine gestion du patrimoine. La réserve que j'ai,
en fait, c'est dû au fait que, malheureusement, la plupart des inventaires sont
beaucoup trop fragmentés. En fait, les inventaires, la plupart des inventaires
que je connais sont des inventaires architecturaux. Or, le patrimoine ne se
résume pas à une collection de bâtiments, le patrimoine, ce sont aussi des
paysages, ce sont aussi des ensembles territoriaux en milieu urbain, en milieu
rural, en milieu périurbain. Et les inventaires, jusqu'à récemment, sauf
exception, ont beaucoup de difficulté à cerner ces réalités-là.
L'autre élément qui pose problème, avec la
question des inventaires, c'est la portée de cette pratique-là. Ce n'est pas
parce qu'on fait des inventaires qu'on est capables d'avoir une saine <gestion...
M. Beaudet (Gérard) : ...
Et
les inventaires, jusqu'à récemment, sauf exception, ont beaucoup de difficulté
à cerner ces réalités-là.
L'autre élément qui pose problème, avec
la question des inventaires, c'est la portée de cette pratique-là. Ce n'est pas
parce qu'on fait des inventaires qu'on est capables d'avoir une saine >gestion
du patrimoine. L'inventaire a beaucoup, beaucoup d'intérêt, mais comporte aussi
des lacunes importantes. Par exemple, à peu près aucun inventaire ne pose un
réel diagnostic territorial, c'est-à-dire un état de la situation qui permet de
comprendre quelles sont les dynamiques qui affectent les différents territoires,
quelles sont les dynamiques qui affectent les territoires environnants à un
milieu patrimonial et comment est-ce que tout ça peut jouer en faveur ou en
défaveur du patrimoine. Or, il faudrait que nos inventaires aillent bien
au-delà de la collection d'information sur les milieux et bien au-delà d'une
approche qui est beaucoup trop exclusivement architecturale.
• (15 h 10) •
Les plans de conservation, j'ai été étonné
de voir qu'on les faisait disparaître. À ma connaissance et par expérience, un
des principaux problèmes qu'on a, avec le patrimoine, depuis des décennies, c'est
qu'on navigue à vue, c'est qu'on ne sait pas où on s'en va. On improvise. On
s'adapte à chaque conjoncture, on s'adapte à chaque nouvelle pression
immobilière. Il me semble qu'un plan de conservation, c'est quelque chose qui
nous permet au moins d'avoir un minimum d'agenda, qui nous permet d'avoir une
cartographie, qui nous permet un peu de savoir où on s'en va et qui nous permet
aussi d'éviter d'aller où on ne veut pas aller. Et donc il me semble qu'on
devrait préserver la question des plans de conservation.
Et d'autant plus que, pour moi, un des
grands problèmes en matière de patrimoine au Québec, c'est qu'on n'a pas été capables
de relever le défi d'une prise en charge du patrimoine par l'urbanisme. Déjà,
dans les années 50, Gérard Morisset et Georges-Émile Lapalme souhaitaient
qu'on confie à l'urbanisme la responsabilité de s'assurer, collectivement, que
le patrimoine est bien pris en charge. Quand la Loi sur l'aménagement et
l'urbanisme a été adoptée, on s'est réjouis du fait qu'on prévoyait que les
schémas d'aménagement, les plans d'urbanisme devaient intégrer des références
aux territoires qui présentaient un intérêt patrimonial. Ça a été fait, ça n'a
pas toujours été fait avec un grand enthousiasme, ça a été parfois fait avec un
peu de mauvaise foi, mais ce qu'il faut constater, c'est qu'on n'est pas allés
au-delà de l'identification dans la majorité des schémas d'aménagement et des
plans d'urbanisme. Et même pire, on retrouve, dans plusieurs schémas
d'aménagement et plan d'urbanisme, des contenus, notamment, réglementaires, qui
vont complètement à l'encontre de l'intérêt des secteurs patrimoniaux, que ce
soit parce que les règles d'urbanisme sont trop laxistes, que ce soit parce que
les normes sur les hauteurs, sur les densités, sur les usages sont
incompatibles avec une saine gestion du patrimoine, que ce soit parce qu'on
ouvre toute une série d'avenues qui risquent fort d'être <empruntées...
M. Beaudet (Gérard) : ...les
règles d'urbanisme sont trop laxistes, que ce soit parce que les normes sur les
hauteurs, sur les densités, sur les usages sont incompatibles avec une saine
gestion du patrimoine, que ce soit parce qu'on ouvre toute une série d'avenues
qui risquent fort d'être >empruntées par des promoteurs qui sont peu
soucieux du patrimoine et où, à partir du moment où ça se fait en toute
légalité, bien, évidemment, on ne peut pas revenir en arrière, on ne peut pas
bloquer les projets. Et ça, il y a plein de plans d'urbanisme et de schémas
d'aménagement au Québec qui ont cette lacune, où on n'est pas capables d'être
cohérents, on n'est pas capables d'être conséquents, où, à partir du moment où
on a identifié un secteur patrimonial, il faut jouer les règles du jeu comme
elles se jouent en milieu patrimonial et non pas faire comme si on n'avait même
pas identifié les territoires, en permettant, notamment, des usages
incompatibles avec un milieu ancien.
Et ça, pour moi, c'est un problème qui est
central, parce que plusieurs des démolitions qui ont eu cours au Québec, durant
les dernières années, ont été engendrées par ces mauvaises pratiques
urbanistiques, ont été engendrées parce que… Bien, <je prends... >on
pourrait prendre l'exemple du monastère de Berthier, où on a une réglementation
d'urbanisme qui permet un redéveloppement d'une propriété sans tenir compte de
ce qu'est cette propriété-là, comme si c'était un terrain vacant au milieu de
nulle part et qui pouvait être développé de manière totalement libre. Or, il y
avait un bâtiment, il y avait des aménagements paysagers, il y avait quelque
chose d'inscrit dans ce territoire-là, et on en fait fi complètement. Et ça, c'est
un exemple parmi de très nombreux autres qu'on pourrait évoquer où on a
toujours cette difficulté d'arrimer des pratiques urbanistiques avec la réalité
des territoires et de comprendre que, par définition, il faut se retenir, quand
on est en milieu patrimonial, on ne peut pas permettre n'importe quoi. Et on ne
peut pas penser que le marché va se policer lui-même parce qu'on est milieu
patrimonial. Si on a trop ouvert la machine, on va en payer le prix, et, pour
moi, c'est un des grands, grands défis. Et ça, le projet de loi est totalement
insensible à cette réalité-là.
Je dis régulièrement que, s'il n'en était
que de moi, tout le patrimoine bâti, les paysages, les territoires patrimoniaux
passeraient dans la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme pour qu'on ait une
pratique cohérente, une pratique conséquente du patrimoine plutôt que d'en
faire une espèce d'exclusive qui relève de règles spécifiques, lesquelles
règles, malheureusement, sont souvent bafouées par les municipalités,
lesquelles règles sont souvent mal interprétées par les municipalités, avec les
conséquences qu'on vit aujourd'hui.
La Présidente (Mme Guillemette) :
Merci beaucoup, M. Beaudet. Donc, nous passons maintenant à l'échange avec
Mme la ministre. Je vous laisse la parole.
Mme Roy
: Oui. Et vous
allez me permettre de mettre mon chronomètre. Bonjour, M. Beaudet.
M. Beaudet (Gérard) : Bonjour.
Mme Roy
: Contente de
vous voir, de vous entendre, très intéressant. Je mets ça, voilà, pour nous chronométrer.
D'abord, vous avez parlé, justement, du
fameux monastère de Berthierville. Je vous rassure, il n'est pas démoli, là. J'ai
dû <intervenir...
Mme Roy
: …
Contente
de vous voir, de vous entendre, très intéressant. Je mets ça, voilà, pour nous
chronométrer.
D'abord, vous avez parlé, justement, du
fameux monastère de Berthierville. Je vous rassure, il n'est pas démoli, là.
J'ai dû >intervenir et je l'ai fait classer. Et actuellement, il n'est
pas démoli, puis je l'ai sauvé. Mais c'est justement à l'égard de cette
réalité-là que nous devons, compte tenu de la loi qui existe actuellement et
des lacunes qu'il y a dedans, la Loi sur le patrimoine culturel… je devrais plutôt
dire des manques, des manquements qu'il y a dans cette loi-là, c'est la raison
pour laquelle on l'ouvre. Parce que je suis tannée et les citoyens sont tannés
que nous ayons cette gestion en catastrophe, à la petite semaine, au jour le
jour, d'ensembles patrimoniaux, d'édifices patrimoniaux, <qui sont… >et
ils ne sont pas tous égaux, mais particulièrement lorsqu'ils ont une valeur
exceptionnelle, qui se retrouvent sous le pic des démolisseurs. Dans le cas du
monastère, dont vous avez parlé, je ne peux pas élaborer puisque, lorsque j'ai
exercé les pouvoirs qui me sont conférés par la loi, bien, c'est, à nouveau,
comme vous pouvez comprendre, des poursuites, alors je ne vais pas aller dans
le détail de ce dossier. Cependant, j'ai exercé un pouvoir qui est là,
d'ordonnance, pour stopper une démolition.
Mais ce projet de loi, il est, justement…
au coeur de ça, il y a deux choses : répondre aux problèmes flagrants,
énormes, que la Vérificatrice générale a soulignés, dans la gestion du
patrimoine immobilier au sein du ministère de la Culture… Vous savez qu'elle a
déposé son volumineux rapport en juin dernier, et dans lequel elle trace un
portrait dévastateur de la gestion du patrimoine au cours des dernières années.
En fait, elle remonte à 2012 pour son analyse, mais dans ses exemples, elle
nous parle même de dossiers qui ont pris plus de 10 ans et qui n'ont jamais
été réglés. Donc, c'est pour répondre à deux réalités, que nous cessions,
collectivement, et moi en tant que ministre, et notre gouvernement, de gérer en
catastrophe des démolitions. Parce que nous les apprenons par un coup de
téléphone d'une organisation, d'un comité qui s'occupe de patrimoine qui nous
dit : Mme Roy, la pelle mécanique vient de défoncer la maison
Boileau, par exemple. Alors, ça, c'est deux de mes réalités que j'ai vécues, et
c'est la raison pour laquelle la loi… et ma collègue de Verdun l'a dit à juste
titre, après 10 ans, je pense qu'on peut améliorer une loi, parce
qu'on voit, à son usage, qu'il y a des choses à améliorer, et c'est ce que nous
tentons de faire.
Par ailleurs, vous parlez… je comprends ce
que vous dites quand vous dites qu'il ne devrait pratiquement pas y avoir une
loi sur le patrimoine culturel, mais tout ce qui est patrimonial devrait
basculer dans la LAU pour ce qui est de l'urbanisme et de l'aménagement du
territoire, la loi qui est une loi qui relève du ministère des Affaires
municipales. Sachez que ma collègue la ministre des Affaires municipales et
moi-même avons à coeur le patrimoine et que nous travaillons ensemble. Il y
aura éventuellement d'autres dispositions qui viendront s'ajouter parce qu'on
croit à l'importance de notre patrimoine bâti dans nos villes, dans nos
villages, on y croit. Et donc il faut travailler deux ministères ensemble,
parce qu'actuellement cette loi-là, elle est là, et nous devons gérer un patrimoine.
Donc, il y a urgence d'agir. <Par ailleurs, dans les articles de loi… >Puis
c'est pour ça que c'est intéressant, les audiences, c'est parce <qu'on…
Mme Roy
: …
de
notre patrimoine bâti dans nos villes, dans nos villages, on y croit. Et donc
il faut travailler deux ministères ensemble, parce qu'actuellement cette
loi-là, elle est là, et nous devons gérer un patrimoine. Donc, il y a urgence d'agir.
Par ailleurs, dans les articles de loi… Puis c'est pour ça que c'est
intéressant, les audiences, c'est parce >qu'on peut vous entendre puis
prendre vos connaissances et voir dans quelle mesure on peut améliorer un
projet de loi. Dans ces articles, on vient répondre aux lacunes et également
aux recommandations faites par la Vérificatrice générale à l'égard, entre
autres, des… Donc, ce que je vous dis, en ce qui a trait à l'urbanisme, l'aménagement
du territoire, on travaille ensemble. Pour le moment, il y a urgence d'agir
parce qu'il manque des éléments à cette loi, et nous les fournissons, nous en
ajoutons.
Je suis contente de voir que vous êtes d'accord
avec la politique de consultation, avec la méthode d'évaluation de l'intérêt
patrimonial, avec une grille de catégorisation, avec une table des partenaires.
Et ça, ça fait des années et des années que tous les groupes nous demandent
d'être impliqués davantage. Là, je vous inclus dans la loi, c'est pour vous
dire jusqu'à quel point on considère que les groupes de protection sont
importants, font partie de l'équation. Mais dans l'équation, et c'est là qu'il
y a un équilibre à avoir, il y a les groupes, il y a les citoyens, les
propriétaires de maisons et autres bâtiments, et les municipalités, et les
villes qui, elles, ont des statuts juridiques et qui, elles, ont également une
autonomie. Alors, il faut trouver l'équilibre dans tout ça.
Lorsque vous dites que, pour ce qui est
des permis de démolition, c'est central, mais ce qu'on fait est insuffisant,
moi, je vous dirais que je ne partage pas votre opinion mais, si on peut
l'améliorer, on va l'améliorer. Ce que nous instituons, c'est qu'il y a des
obligations. Nous créons des obligations : obligations, naturellement,
pour les MRC, de tenir un inventaire et obligations pour les villes et les municipalités
qui n'en ont pas d'avoir ce fameux permis de démolition. Et vous le disiez à
juste titre, quand vous nous parliez de Berthierville, il n'y a pas de règlement
de démolition. Et, quand il n'y a pas de règlement de démolition, bien, il se
passe ce qui s'est passé à Berthierville : on a un acheteur qui répond à
des critères, la ville n'a pas d'autre choix que de lui octroyer son permis de
démolition.
• (15 h 20) •
Alors, ce que nous voulons faire, avec ce projet
de loi, c'est de mettre un processus et d'impliquer là-dedans nos MRC, nos
villes, le citoyen, et qu'il y ait un processus d'analyse, de consultation, un
délai pour permettre aux parties prenantes d'être informées, à la population de
le savoir, qu'il y a quelqu'un qui veut démolir un bâtiment, et, par ailleurs,
à la ministre et au ministère de savoir qu'il y a un bâtiment qui est à risque.
Parce qu'ultimement la ministre possède toujours son pouvoir d'intervenir.
Donc, ce que nous tentons de faire, là, c'est de mettre en place un mécanisme.
Et, oui, on est dans l'urgence, parce que, du patrimoine, ça ne se renouvelle
pas, et je crois qu'il faut agir tout de suite. Mais ce qui n'empêche pas de
travailler en collaboration avec les Affaires municipales pour justifier...
c'est-à-dire pour souligner à grands traits l'importance du patrimoine, du
patrimoine bâti dans l'aménagement de notre territoire. Et c'est la raison, d'<ailleurs...
Mme Roy
: ...
Et,
oui, on est dans l'urgence, parce que, du patrimoine, ça ne se renouvelle pas,
et je crois qu'il faut agir tout de suite. Mais ce qui n'empêche pas de
travailler en collaboration avec les Affaires municipales pour justifier...
c'est-à-dire pour souligner à grands traits l'importance du patrimoine, du
patrimoine bâti dans l'aménagement de notre territoire. Et c'est la raison,
d'>ailleurs, pour laquelle on ouvre en partie la loi sur l'aménagement
du territoire, ce qui est assez, en quelque sorte, audacieux, mais c'est mon
opinion.
Par ailleurs, à l'égard des plans de
conservation, je crois comprendre que vous n'êtes pas d'accord avec le fait que
nous les modifiions, nous les transformions en règlement. Pourriez-vous
élaborer à cet égard-là?
M. Beaudet (Gérard) : Bien, en
fait, la réserve que j'ai, c'est qu'un règlement et un plan de mise en valeur
ce n'est pas du tout la même chose, là. Le plan de mise en valeur, dans le
fond, c'est une espèce de guide qu'on se donne sur un certain horizon, et qui
permet de voir venir les choses, qui permet aussi de cadrer autant les
interventions publiques que les interventions privées alors qu'un règlement,
c'est beaucoup plus... c'est plus rigide, ça ne s'exprime pas dans les mêmes
termes non plus.
Là où je serais d'accord à ce que les
plans disparaissent, c'est si on trouvait le moyen, justement, de s'assurer que
les municipalités et les municipalités régionales de comté, quand elles
identifient un territoire d'intérêt patrimonial, qu'elles soient conséquentes
et qu'effectivement il y ait des dispositions dans les plans d'urbanisme, dans
les réglementations d'urbanisme qui soient conformes à ce qu'est un milieu patrimonial.
Par exemple, en typomorphologie, on parle d'une limite de transformabilité. On
sait qu'au-delà d'un certain nombre de transformations un milieu finit par
perdre les attributs distinctifs qui le caractérisent. Et dans beaucoup de cas
d'urbanisme, on n'a absolument pas de sensibilité à l'égard de ces
principes-là, ce qui fait qu'on permet tout et rien, avec comme conséquence
qu'on finit par dénaturer le lieu.
Parce qu'il n'y a pas de mécanique dans la
Loi sur l'aménagement et l'urbanisme qui impose de la cohérence, qui dit :
Écoutez, il faut être sérieux, si c'est un milieu d'intérêt patrimonial, un,
vous allez faire autre chose que juste le circonscrire, vous allez le
caractériser, vous allez vous donner les moyens de comprendre quelles sont les
dynamiques qui y ont cours, quels sont les résultats des interfaces entre ce
milieu patrimonial et tout ce qui l'entoure en termes de dynamique urbaine,
immobilière, etc., et vous allez avoir des règles qui vont répondre, justement,
à cette compréhension fine que vous avez du milieu patrimonial. Si on avait ça,
bien, que les plans disparaissent, ça ne m'indisposerait pas. Mais, si on n'a
pas ces mécaniques-là, pour moi, un plan de mise en valeur, c'est l'équivalent
de ce que je viens de vous décrire, et... (panne de son) ...ne relève pas ce
défi-là convenablement.
Mme Roy
: On vous a
perdu un petit peu, on vous a retrouvé. Mais le fameux plan de conservation… et,
vous voyez, quand je vous disais d'entrée de jeu que, un, c'est pour répondre à
l'urgence, pour <tenter de...
M. Beaudet (Gérard) : …
(panne
de son) ...ne relève pas ce défi-là convenablement.
Mme Roy
: On vous a
perdu un petit peu, on vous a retrouvé. Mais le fameux plan de conservation… et,
vous voyez, quand je vous disais d'entrée de jeu que, un, c'est pour répondre à
l'urgence, pour >tenter de stopper les démolitions sauvages dont nous
sommes informés en catastrophe alors qu'elles viennent de se produire,
malheureusement, trop souvent, et, de deux, pour répondre à ce que la Vérificatrice
générale nous a <dit… >fait comme recommandations et commentaires.
Et dans le rapport de la Vérificatrice générale, elle parlait des plans de
conservation — particulièrement ceux qui touchent les sites déclarés,
puisqu'il y en a très peu, ultimement, qui ont été réalisés, même si le projet
de loi promettait d'en faire pour tout le monde et beaucoup, il y en a très,
très peu qui ont été réalisés, ça, c'est une autre réalité — et elle
disait de ces plans de conservation, à son constat n° 5,
pour ceux qui sont intéressés, que les plans de conservation étaient «incomplets»,
«complexes», «mal adaptés», «ambigus». Alors, il y avait un problème avec les
plans de conservation… pardon. Et de notre côté, ce que nous croyons, c'est que
nous allons conserver le travail qui a été fait. On ne va pas jeter ça, loin de
là, mais nous allons les convertir en règlements. Et un règlement a force de
loi alors qu'un plan de conservation, c'est un plan de conservation — mon
Dieu, je commence à être fatiguée, pardon — et ça n'a pas la même
force. Alors, ça vous démontre le sérieux que nous apportons à la protection du
patrimoine. Par ailleurs, un règlement devient une loi, nul n'est censé ignorer
la loi, et ça donne de la prévisibilité et ça donne de la transparence. Et ce
sont des mots qui revenaient dans le rapport de la Vérificatrice générale, le
manque de prévisibilité et de transparence dans les critères, dans la prise de
décision. Alors, on veut que les gens sachent, comprennent, et c'est la raison
pour laquelle on ajoute ces éléments à notre projet de loi.
Par ailleurs, vous, qu'est-ce que vous
suggéreriez, M. Beaudet, plus précisément, comme pistes de solution? Vous
avez parlé des conflits d'intérêts tout à l'heure. Qu'est-ce que vous suggérez
comme pistes de solution pour conserver les bâtiments d'intérêt patrimonial à
l'échelle municipale?
M. Beaudet (Gérard) : Bien, je
pense qu'il faudrait avoir une instance d'appel, d'abord. Parce que, bon, je
rappellerai que, dans le cas de Berthier, la municipalité prétendait que le
bâtiment n'avait pas de valeur patrimoniale alors que la MRC l'avait identifié
formellement comme étant un bâtiment d'une grande valeur patrimoniale. Dans le
cas de Chambly, on sait très bien que c'est la municipalité elle-même qui a été
responsable. Et donc je pense qu'il faudrait que les municipalités comprennent
que c'est sérieux, tout ça, et qu'elles ne peuvent pas jouer au chat et à la
souris en permanence, parce que, des municipalités de mauvaise foi, sur le
terrain patrimonial, il y en a quand même un bon nombre. Et donc, s'il y avait
une instance d'appel, ça permettrait d'éviter, par exemple, qu'il y ait une
forme de complaisance entre certains promoteurs et certaines municipalités où,
on s'entend, par exemple, dans le milieu du patrimoine, tout le monde sait
qu'il est relativement facile de <trouver un…
M. Beaudet (Gérard) :
...
des municipalités de mauvaise foi, sur le terrain patrimonial, il y
en a quand même un bon nombre. Et donc, s'il y avait une instance d'appel, ça
permettrait d'éviter, par exemple, qu'il y ait une forme de complaisance entre
certains promoteurs et certaines municipalités où, on s'entend, par exemple,
dans le milieu du patrimoine, tout le monde sait qu'il est relativement facile
de >trouver un... (panne de son) …qui va vous dire que le bâtiment est
irrécupérable. On va fouiller un peu, on va trouver un peu d'amiante...
Mme Roy
: D'ailleurs,
vous allez me permettre d'intervenir ici. Parce que, dans les deux cas que vous
avez nommés, Berthier puis Chambly, si la loi les... si ces amendements avaient
été dans la loi, ils n'auraient pas pu démolir, dans les deux cas. Ils
n'auraient pas pu intervenir, ils n'auraient pas pu faire les modifications,
dans les deux cas. Alors, vous voyez qu'on tente d'apporter des moyens de
sécuriser davantage notre patrimoine avec cette loi. Mais poursuivez avec votre
instance d'appel.
M. Beaudet (Gérard) :
Oui. Bien, écoutez, j'ai des réserves quand vous dites : «Ils n'auraient
pas pu.» Le comité de démolition fonctionne sur des informations qu'on lui
transmet, sur quel est l'état du bâtiment, est-ce qu'il est récupérable, est-ce
que, financièrement, c'est un projet qui est viable, etc. On peut toujours
trouver moyen de démontrer qu'un bâtiment n'est pas récupérable, qu'un bâtiment
est un danger public, ça se fait régulièrement, même dans les municipalités qui
ont des règlements sur les démolitions, là. Et c'est pour ça que je dis que, s'il
y avait une instance d'appel, ça permettrait de garantir une forme de sérieux
où on comprendrait bien qu'à un moment donné quelqu'un pourrait fouiller le
dossier un petit peu plus et faire valoir qu'il y a des choses qui ne vont pas.
C'est la même chose pour les comités
consultatifs d'urbanisme. Je connais des comités consultatifs d'urbanisme où on
passait à peu près n'importe quoi alors qu'il y a d'autres comités consultatifs
d'urbanisme qui jouent réellement leur rôle avec beaucoup de sérieux. Ça reste
des instances qui ne nous offrent pas, d'emblée, d'entrée de jeu, une garantie
totale, il peut y avoir des dérives, il peut y avoir des dysfonctionnements. Et
je pense qu'il faudrait qu'on s'assure que, dans les causes, ça s'avérerait
qu'il y ait une instance d'appel qui permette de garantir que, par exemple, si
les citoyens disent : Écoutez, ce dossier-là n'a pas été traité
convenablement, qu'on puisse dire : Bon, bien, on va y voir d'un peu plus
près avant de donner suite.
Mme Roy
: Et, dans les
deux cas que vous mentionnez, le fait que les immeubles aient été… ou sont sur
un inventaire, automatiquement, les aurait amenés au processus. Ce n'était pas
une question de désuétude ou quoi que ce soit. À partir du moment où l'immeuble
est dans l'inventaire, le processus doit s'enclencher avant qu'on en arrive à
émettre ce fameux permis de démolition. Mais, cela dit, je vous entends très
bien. On prend des notes.
Et là on m'a passé un petit papier, j'ai
terminé, je regarde la présidente. M. Beaudet, je vous remercie beaucoup.
Puis je cède la parole aux collègues. Merci.
M. Beaudet (Gérard) :
Merci.
La Présidente (Mme Guillemette) :
Merci beaucoup, Mme la ministre. Donc, je donnerais la parole à la députée
de Verdun.
• (15 h 30) •
Mme Melançon : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. M. Beaudet, merci beaucoup d'être avec
nous aujourd'hui. Merci de nous éclairer de votre savoir, notamment.
Et j'ai une petite question toute simple
pour vous, d'entrée de jeu : Est-ce que vous allez déposer quelque chose à
la commission? Parce que j'ai trouvé... vous nous avez donné beaucoup, beaucoup
d'informations, j'ai fait aller le crayon pas mal, mais est-ce que vous
entendez déposer quelque...
15 h 30 (version révisée)
Mme Melançon : ...merci de nous
éclairer de votre savoir, notamment. Et j'ai une petite question toute simple
pour vous, d'entrée de jeu : Est-ce que vous avez déposé quelque chose à
la commission? Parce que j'ai trouvé... vous nous avez donné beaucoup, beaucoup,
d'information, j'ai fait aller le crayon pas mal, mais est-ce que vous entendez
déposer quelque chose?
M. Beaudet (Gérard) : Je
pourrais déposer un petit papier. Je pourrais peut-être trouver un peu de temps
pour...
Mme Melançon : Vous m'en voyez
très heureuse, parce que c'était... Non, mais c'est vrai, c'était très
éducatif. Il y a des passages que j'ai tentés... Puis là je vais aller dans les
questions, justement. On va tenter de mettre des choses en relief avec vous.
Puis, moi, ce que je veux à l'intérieur du 10 minutes, c'est de vous
entendre, parce que j'ai des questions.
Alors, vous avez parlé tout à l'heure que
c'était insuffisant, justement, de pouvoir encadrer, parce qu'il peut y avoir
des... il y a des pratiques immobilières qui ont cours actuellement. Puis vous
parliez, justement, de la valeur de certains terrains versus le même terrain
avec la maison qu'il y a dessus. Disons que la valeur du terrain sans maison
est beaucoup plus élevée et plus alléchante. Vous le voyez souvent, ça?
M. Beaudet (Gérard) : On le
voit souvent. Et je pense qu'il faut mentionner un phénomène qui est relativement
récent, mais qui est en croissance à beaucoup d'endroits, c'est le phénomène de
la patrimonialisation des banlieues pavillonnaires d'après-guerre. Il y a beaucoup
de municipalités dans la grande région métropolitaine de Montréal qui sont
interpellées par des citoyens qui veulent bloquer des processus de
transformation des quartiers de bungalows, de split-level des années 50,
60. Il y avait un reportage récemment, à Longueuil, où les pressions sont extrêmement
fortes. Et c'est une dynamique qui est en plein essor présentement. Il y a de
plus en plus de citoyens qui se mobilisent pour qu'on reconnaisse la valeur
patrimoniale de ces quartiers-là, et ça veut dire que le nombre de cas sur
lesquels on devra se pencher va augmenter considérablement.
Parce que je dois dire que la limitation qu'il
y a dans la loi, où les inventaires doivent porter sur les bâtiments d'avant
1940 en mentionnant qu'on peut ajouter, moi, ce que je vous dirais, c'est que non
seulement on peut ajouter, mais il va y avoir de plus en plus de pressions des
groupes de pression des citoyens pour qu'on ajoute les patrimoines d'après la Deuxième
Guerre mondiale. Et donc ça veut dire que le nombre de dossiers où les
distorsions entre les mesures urbanistiques et les lieux qu'on va considérer
patrimoniaux vont augmenter, et le nombre de dossiers qu'on va devoir traiter
selon les modalités de gestion des démolitions va augmenter de manière
exponentielle au cours des prochaines années.
Mme Melançon : ...
M. Beaudet (Gérard) : Et donc
on est dans...
Mme Melançon : Allez-y,
allez-y, pardon.
M. Beaudet (Gérard) :
<On
est dans un contexte où... >Je comprends la mesure, mais on est dans un
contexte où on est en mode réactif. Il faudrait qu'on soit en mode actif pour
éviter d'être toujours à la dernière minute, et avec toujours la possibilité de
dire : Bien, si ça ne va pas, on va interpeller la ministre.
Mme Melançon : Dites-moi, j'ai
trouvé aussi intéressant... Si j'ai <bien saisi, là...
M. Beaudet (Gérard) : ... on
est dans un contexte où on est en mode réactif. Il faudrait qu'on soit en mode
actif pour éviter d'être
toujours à la dernière minute, et avec
toujours
la
possibilité de dire : Bien, si ça ne va pas, on va interpeller
la
ministre.
Mme Melançon : Dites-moi,
j'ai trouvé aussi intéressant... Si j'ai >bien saisi, là, toute la
présentation que vous nous avez faite, vous, vous voyez le patrimoine comme un
ensemble, alors que, dans le projet de loi qui est proposé, dans le projet de
loi n° 69, la lecture que vous en faites, c'est plutôt où on essaie de
sauver maison par maison plutôt que de le voir dans un ensemble. C'est un peu
ce que Phyllis Lambert nous a dit aussi, hier, là, où on devait avoir une
perspective plus globale. C'est aussi votre opinion?
M. Beaudet (Gérard) : C'est tout
à fait mon opinion, depuis très longtemps d'ailleurs. Quand j'enseigne à mes
étudiants, je leur dis toujours : À quoi bon sauver la plus belle corniche
si je perds le quartier? Et, pour moi, ça résume un peu mon point de vue sur
ça. Et on n'est pas capables, on n'y est pas arrivé au Québec, pas plus dans
les inventaires que dans les mécanismes d'intervention.
J'ai écrit un livre sur le
Vieux-Terrebonne, d'ailleurs, pour expliquer qu'est-ce que c'est qu'une
approche urbanistique du patrimoine, qu'est-ce que c'est qu'une approche qui
sort de ce contexte où on aborde des choses les unes après les autres. Et, à
titre d'exemple, la définition qu'on avait d'un arrondissement historique dans
l'ancienne loi, c'était une concentration de monuments historiques. Comme si le
Vieux-Montréal n'avait pas une existence autre que la simple accumulation de
plusieurs bâtiments sur un morceau de territoire. Et, au Québec, on est
encore.... Et d'ailleurs la plupart des groupes intéressés au patrimoine qui
sont intervenus depuis quelques années pour contester les démolitions ont cette
approche-là également. C'est-à-dire que l'approche territoriale, on n'est pas
arrivés à la déployer convenablement.
Mme Melançon : Merci. Vous
dites aussi... vous avez dit que les inventaires étaient quasi uniquement
architecturaux. Je fais un petit peu de pouce sur ce que vous venez de nous
dire aussi. Lorsque vous parlez des inventaires, le «sauf exception» que vous
nous avez parlé, là, pour qu'on puisse peut-être tenter de voir les bons coups,
pouvez-vous me donner un ou deux exemples?
M. Beaudet (Gérard) : Oui. La
ville de Montréal a procédé dans le cadre de l'élaboration du plan d'urbanisme,
là, qui concerne l'ensemble de l'île Montréal. Donc, les services de la ville
de Montréal ont réalisé des documents qui s'appellent Évaluation du patrimoine
urbain pour chacune des villes défusionnées et puis chacun des arrondissements
de Montréal, et c'est vraiment une perspective d'ensemble. On identifie des
secteurs, des territoires, et on a débordé allègrement la limite de 1940, donc
il y a plusieurs secteurs beaucoup plus récents qui ont été identifiés. Et
c'est disponible sur le Web. À ma connaissance, c'est un des rares inventaires
qui a une approche aussi globale, mais ce qu'il manque, comme je l'indiquais
tantôt, c'est le diagnostic territorial qui nous permet de comprendre quelles
sont les dynamiques qui affectent ces territoires-là, parce que, si on ne
maîtrise pas les dynamiques, bien, évidemment, on a peu d'emprise sur <ce
qui va...
M. Beaudet (Gérard) : ...rares
inventaires qui a une approche aussi globale, mais ce qu'il manque, comme je
l'indiquais tantôt, c'est le diagnostic territorial qui nous permet de
comprendre quelles sont les dynamiques qui affectent ces territoires-là, parce
que, si on ne maîtrise pas les dynamiques, bien, évidemment, on a peu d'emprise
sur >ce qui va faire évoluer ces milieux-là dans le bon sens ou dans le
mauvais sens.
Mme Melançon : Je vais faire
un petit clin d'oeil à Verdun ici, là. J'espère que la ville de Montréal va
pouvoir commencer à aller vers Pointe-Saint-Charles, justement, Verdun, où il y
avait aussi... où ça devient un arrondissement ouvrier, puis, là aussi, où on
doit se rappeler de notre patrimoine pour savoir d'où on vient, toujours très important.
M. Beaudet (Gérard) : Mais le document
existe pour Verdun. Il existe tous les territoires de l'île de Montréal.
Mme Melançon : Oui, mais c'est
ça, exactement, vers Pointe-Saint-Charles, là, où on pourra se diriger par la
suite. C'est pour ça que je voulais m'enorgueillir un peu de ce petit
passage-là. Quand on peut le faire, c'est toujours intéressant.
Il y a un passage aussi où... Vous venez
de parler de 1940, qui est une date, là, qui a été arrêtée à l'intérieur du projet
de loi. Puis, la ministre, on l'a entendu dire à quelques reprises que ce
n'était pas une obligation. Mais à partir du moment où les coûts d'inventaires
peuvent être assez importants, là — les municipalités nous ont parlé
de ça aussi — est-ce que vous croyez que les municipalités vont
dire : Bien, allons-y jusqu'à 1980, ou vont s'arrêter à une date qu'il y a
à l'intérieur d'un projet de loi?
M. Beaudet (Gérard) : Ça peut
être tentant de se limiter à ce que le projet définit comme obligatoire. Moi,
je pense que ce serait une erreur de ne pas reconnaître où on en est rendus,
collectivement, dans notre relation au patrimoine au Québec. Le bâti
d'après-guerre, que ce soit les bâtiments d'exception à signature
architecturale ou les bâtiments plus ordinaires, ça fait de plus en plus partie
du patrimoine. Il y a de plus en plus de mobilisation citoyenne pour qu'on
contrôle la nature des interventions qui se font dans ces secteurs, notamment
les secteurs résidentiels des Trente Glorieuses. Les municipalités pourraient
bien dire : Nous, on se limite, mais les pressions vont être très fortes
pour qu'on aille au-delà. Et, déjà, sur le terrain, il y a des sociétés
d'histoire, il y a des groupes de citoyens qui ont déjà commencé à se mobiliser
et qui ont déjà commencé à approprier ce patrimoine-là.
Mme Melançon : Extra.
Madame... Une minute? O.K. Je vais... Oui, on va se reconcentrer pour aller
rapidement, parce que c'est intéressant, puis vous me donnez des pistes, puis
je voudrais aller un peu plus loin avec vous. J'ai bien entendu que, pour vous,
le pouvoir de désaveu, finalement, d'une MRC face à une ville, vous n'y croyez
pas.
M. Beaudet (Gérard) : Non, je
n'y crois pas. Je fréquente les MRC depuis suffisamment longtemps pour savoir
que ce n'est pas jouable.
Mme Melançon : Ce n'est pas
jouable pourquoi?
M. Beaudet (Gérard) : Tout
simplement parce qu'il y a un modus operandi sur la scène politique. <Il
faut comprendre...
Mme Melançon : ...
vous
n'y croyez pas.
M. Beaudet (Gérard) : Non,
je n'y crois pas. Je fréquente les MRC depuis suffisamment longtemps pour
savoir que ce n'est pas jouable.
Mme Melançon : Ce n'est pas
jouable pourquoi?
M. Beaudet (Gérard) : Tout
simplement parce qu'il y a un modus operandi sur la scène politique. >Il
faut comprendre que la table du conseil des MRC, c'est un principe
d'organisation institutionnelle qui va à l'encontre de nos principes
démocratiques. Un élu est redevable à ses citoyens et pas au voisin. Il ne peut
pas aller prendre une décision à l'encontre de ses citoyens. Puis il ne peut
surtout pas aller imposer quelque chose aux citoyens de la municipalité
voisine, ça ne se fera pas.
• (15 h 40) •
Par contre, il y a des MRC qui sont des
coopératives de services, par exemple, en matière de patrimoine, ça existe, où
les très petites municipalités peuvent demander à la MRC d'assurer certaines
responsabilités, par exemple, en matière d'inventaire, en matière de
sensibilisation des citoyens. Mais, de là à aller à l'encontre des... d'une
municipalité locale, je n'en ai jamais vu d'exemple.
Mme Melançon :
M. Beaudet, je veux terminer en vous disant un grand merci. Et je trouve
vos étudiants très chanceux de vous avoir parce que vous êtes tellement
intéressant. J'aurais passé le restant de l'après-midi avec vous sans aucun
problème. Merci beaucoup d'avoir été avec nous.
M. Beaudet (Gérard) : Merci.
La Présidente (Mme Guillemette) :
Merci beaucoup, Mme la députée de Verdun. Donc, je passerais maintenant la
parole à Mme la députée de Mercier.
Mme Ghazal : Merci, Mme la
Présidente. Merci beaucoup, M. Beaudet, pour votre présentation. J'ai
2 min 40 s ou 45 s, donc ce sera... ça va aller très vite.
Moi, ce que je sens, c'est beaucoup d'inquiétude de votre part. En fait, je
vais vous poser la question très clairement. Est-ce que vous avec l'impression
qu'avec ce projet de loi là<... est-ce que> c'est un pas ou on
stagne, c'est le statu quo? Est-ce que c'est un pas en avant, un petit pas, ou
on stagne?
M. Beaudet (Gérard) : Il y a
un petit pas, mais je pense qu'il faut aller plus loin, je pense qu'il faut
faire un plus grand pas. On ne règle que très accessoirement beaucoup de
problèmes, et, comme je l'indiquais tantôt, des problèmes qui vont aller en
croissant parce que le terreau patrimonial est en pleine croissance
présentement.
Mme Ghazal : Comme j'ai peu de
temps, je vais... O.K. En fait, ce que j'aimerais savoir, parce que vous avez
parlé beaucoup... Il y a beaucoup d'éléments qui manquent dans le projet de
loi. Vous avez parlé de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, de plans
d'urbanisme, de fiscalité municipale. Est-ce qu'on est dans la bonne commission
pour protéger le patrimoine? Est-ce qu'on est dans le bon ministère? Ça ne
devrait pas plutôt relever du ministère des municipalités et de l'Habitation?
M. Beaudet (Gérard) : Bien,
c'est ce que j'ai mentionné, moi, depuis longtemps. Quand on a lancé les deux
chantiers concurremment des révisions de la LAU et de la Loi sur le patrimoine
culturel, bon, on a abandonné le chantier LAU, mais je me disais : Voilà
une occasion en or pour balancer tout le patrimoine bâti, les paysages dans la
Loi sur l'aménagement et l'urbanisme et de donner des dents à cette loi-là pour
que ça soit pris au sérieux, cette question-là, alors qu'actuellement on joue
sur deux tableaux avec des complémentarités qui sont très difficiles à établir,
et toujours avec cette situation... On parlait du monastère de Berthier. Ça me
rappelle les années 70, notamment, quand Jean-Paul L'Allier classait les
bâtiments un après l'autre au centre-ville de Montréal parce que le maire
Drapeau s'en fichait, du patrimoine, <qu'il n'y avait pas...
M. Beaudet (Gérard) : ...
qu'actuellement
on joue sur deux tableaux avec des complémentarités qui sont très difficiles à
établir, et toujours avec cette situation... On parlait du monastère de
Berthier
. Ça me rappelle les années 70, notamment, quand Jean-Paul
L'Allier classait les bâtiments un après l'autre au centre-ville de Montréal
parce que le maire Drapeau s'en fichait, du patrimoine, >qu'il n'y avait
pas d'urbanisme patrimonial à Montréal. Je trouve ça un peu désolant qu'on soit
encore dans cette situation-là.
Mme Ghazal : En 2020. Qu'est-ce
que vous nous conseillez, nous, comme... Moi, je suis dans le parti d'opposition,
et on va être dans l'étude détaillée. On fait quoi avec ça?
M. Beaudet (Gérard) : Bien, je
pense qu'il faut régler certains problèmes qui sont urgents, parce qu'effectivement
il y a du laxisme sur le territoire, il y a des municipalités qui ne prennent
pas les choses au sérieux, mais je pense qu'il faudrait avoir un chantier beaucoup
plus ambitieux qui serait mené en parallèle et qu'on comprenne qu'on veut aller
ailleurs. Et, pour moi, il serait temps qu'on aille ailleurs pour que,
justement...
Mme Ghazal : Il faut de la
volonté. Sentez-vous de la volonté d'avancer dans cette matière-là, dans la
protection du patrimoine? Est-ce que vous sentez qu'il y a une volonté?
M. Beaudet (Gérard) : Je vous
répondrai quand on aura commencé à discuter d'une politique nationale du
territoire, à laquelle on risque de nous convier prochainement. Je pense qu'on
pourra mesurer le sérieux des intentions quand on commencera à évoquer la possibilité
qu'il y ait une politique nationale du territoire.
Mme Ghazal : Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Guillemette) :
Merci beaucoup, M. Beaudet, merci pour votre contribution aux travaux de
la commission.
Donc, nous suspendons les travaux quelques
instants, le temps d'accueillir nos nouveaux invités. Merci beaucoup.
(Suspension de la séance à 15 h 43)
<
>
(Reprise à 15 h 45)
La Présidente (Mme Guillemette) :
Donc, la commission reprend ses travaux. Je souhaiterais la bienvenue aux gens
de l'UPA. MM. Groleau, Dorion et Blouin, merci. Ah! On vous a perdus. Ah! oui,
vous êtes de retour. Donc, comme je le disais, bienvenue à vous. Vous aurez
10 minutes pour présenter votre exposé, <donc je vous... >et
par la suite il y aura un échange avec les membres de la commission. Donc, je
vous invite à présenter votre organisation, M. Groleau, à présenter les
gens qui vous accompagnent. Et je vous cède la parole pour les 10 prochaines
minutes.
M. Groleau (Marcel) : Alors, merci
beaucoup. Alors, Mme la Présidente, Mme la ministre, Mmes, MM. les députés, mon
nom est Marcel Groleau, président général de l'Union des producteurs agricoles.
Je suis accompagné pour cette commission... devant cette commission par M. François
Blouin, président du syndicat local de L'UPA de l'île d'Orléans, et de M. Paul
Racette Dorion, urbaniste et conseiller en aménagement et en environnement à
l'UPA. Nous sommes heureux d'être entendus sur le projet de loi n° 69.
Les producteurs et productrices agricoles
du Québec occupent le territoire souvent depuis plusieurs générations. Ils sont
fiers de contribuer au maintien du patrimoine et des paysages par leurs
activités et leur occupation dynamique du territoire. Mais l'agriculture est
d'abord et avant tout une activité économique qui nourrit des Québécois et qui
fait vivre des centaines de villes et villages. Au moment où on souhaite
augmenter l'autonomie alimentaire du Québec, il faut s'assurer que notre
agriculture puisse continuer d'évoluer et de s'adapter aux exigences des
marchés. Il faut donc éviter d'imposer des contraintes inutiles qui viendraient
figer ou restreindre le développement de l'agriculture.
La protection du patrimoine n'est pas
incompatible avec l'évolution de l'agriculture, mais des ajustements au cadre
légal sont nécessaires. Je pense notamment au cas spécifique de l'île d'Orléans,
qui est un site patrimonial déclaré en vertu de la Loi sur le patrimoine
culturel. En étant trop stricts, on risque de complexifier le transfert des
entreprises agricoles et de nuire à leur pérennité. Face au poids des
exigences, on pourrait assister, au fil des ans, à une décroissance de
l'activité agricole et à l'abandon des bâtiments.
Au cours des dernières années, l'UPA a
porté maintes fois à l'attention de la ministre et du ministère les problèmes
vécus par les producteurs en raison des mécanismes de protection du patrimoine
parfois inadaptés qui sont prévus à la loi. Le projet de loi n° 69,
en ce sens, est un pas <dans la bonne direction...
M. Groleau (Marcel) :
...au cours des dernières années, l'UPA a porté maintes fois à l'attention de
la
ministre et du
ministère les problèmes vécus par les
producteurs en raison des
mécanismes de protection du patrimoine parfois
inadaptés qui sont prévus à la loi. Le
projet de loi
n° 69, en ce sens, est un pas >dans la bonne
direction, même si certaines questions se posent sur trois éléments, alors les
changements qui concernent les sites patrimoniaux déclarés, les nouveaux
pouvoirs et obligations confiés aux municipalités et aux MRC, de même que le
rôle de l'État en matière de protection du patrimoine.
Comme je l'ai indiqué, les modifications
prévues au processus d'octroi des autorisations sont un pas dans la bonne
direction pour les producteurs de l'île d'Orléans. La loi actuelle était
devenue insoutenable et devait changer. Les producteurs de l'île étaient
confrontés à des exigences démesurées et devaient négocier longuement avec le
ministère, à partir de critères flous du plan de conservation. Il n'y avait
aucun délai de prévu, et les demandes de révision étaient impossibles, ce qui
laissait les producteurs en attente pendant plusieurs mois. Le mécanisme de
révision inclus dans le projet de loi est donc une bonne nouvelle.
Le droit de recours prévu dans le projet
de loi mérite d'être souligné. Les demandes des producteurs étaient souvent
refusées sans pouvoir demander une révision. C'est une grande amélioration qui
va augmenter la transparence des interventions du ministère et la confiance des
producteurs, mais la personne en charge de revoir la décision sera un collègue
de la personne qui l'a refusée précédemment. On peut se questionner sur la
marge de manoeuvre réelle de cette personne et sur sa capacité de critiquer
librement l'analyse d'un collègue. Pour cette raison, l'UPA demande que la
personne en charge de réviser les demandes d'autorisation ne soit pas liée
directement au ministère.
Le projet de loi prévoit aussi de
remplacer les plans de conservation par un règlement du gouvernement. N'ayant
pas vu le règlement, nous réservons nos commentaires, mais c'est une bonne
décision. Il devra par contre prévoir des exemptions ou des exceptions pour le
secteur agricole, parce que la majorité des interventions n'ont pas d'impact
sur la préservation du patrimoine. Je parle ici d'interventions en agriculture.
Les producteurs de l'île d'Orléans ont souvent été confrontés à cette
problématique, ces dernières années, pour des travaux pourtant très simples.
Certaines mesures de protection peuvent être justifiées, mais il faut faciliter
le travail des producteurs ou, minimalement, clarifier les attentes.
• (15 h 50) •
Dans un souci de cohérence
gouvernementale, il nous apparaît aussi nécessaire que les projets qui sont
financés par un ministère d'un côté puissent aller de l'avant sans qu'un autre
ministère ne mette les bâtons dans les roues. Par exemple, les projets financés
par le programme Prime-vert, qui relève du MAPAQ, devraient pouvoir aller de l'avant
sans l'autorisation du MCC.
Pour ce qui est des corrections des titres
fonciers, beaucoup de producteurs sont confrontés à des enjeux de régularité.
Des vérifications qui auraient dû être faites mais qui n'ont pas été faites au
moment de la transaction sont souvent constatées par la suite. L'article 100
du p.l. n° 69 répond en partie à ce problème, mais il semble limité aux
secteurs de l'île d'Orléans qui n'ont pas fait <l'objet d'une...
M. Groleau (Marcel) :
...
vérifications qui auraient dû être faites mais qui n'ont pas été
faites au moment de la transaction sont souvent constatées par la suite.
L'article 100 du p.l. n° 69 répond en partie à ce problème, mais il
semble limité aux secteurs de l'île d'Orléans qui n'ont pas fait >l'objet
d'une rénovation cadastrale.
Nous comprenons que l'article 67.3 de
la loi modifiée permet de régulariser la division, la subdivision ou le
morcellement d'un immeuble par une autorisation délivrée a posteriori, mais les
propriétaires doivent demander une autorisation qui pourrait être refusée. Le problème
resterait donc entier parce que l'annulation d'une transaction après l'effet
est pratiquement impossible. Le projet de loi doit régulariser tous les titres
déjà inscrits au régime foncier au moment de sa sanction. Par la suite, le
ministère devrait améliorer ses outils de communication pour que les
propriétaires et, surtout, leurs conseillers juridiques sachent qu'une
autorisation est requise pour procéder au morcellement d'un terrain. Cela
permettra d'éviter de nouveaux cas. Le projet de loi est un bon prétexte pour
repartir en neuf et corriger les problèmes rencontrés jusqu'à maintenant.
L'encadrement par les municipalités.
Alors, le projet de loi prévoit l'obligation pour les municipalités d'adopter
un règlement sur les démolitions d'immeuble. Il est vrai que trop de joyaux
architecturaux et historiques ont disparu sous le pic des démolisseurs, mais
des exagérations sont à craindre en rendant l'adoption du règlement obligatoire
en plus d'un transfert du fardeau de la preuve sur les propriétaires.
Dans la Loi sur l'aménagement et
l'urbanisme modifiée, on prévoit que le règlement sur les démolitions peut
exiger une étude patrimoniale avant l'analyse d'une demande de démolition par
le comité, ledit comité de démolition. Comme le nom de «valeur patrimoniale»
est matière à discussion, il est certain que les municipalités vont préférer
exiger une étude au propriétaire pour éviter d'autoriser par erreur la
démolition d'un joyau potentiel, ce qui amènerait des coûts importants et des
délais. Il faut éviter des situations où les propriétaires doivent débourser
systématiquement des frais d'étude importants.
Le règlement sur les démolitions pourra
aussi prévoir des exclusions au champ d'application du règlement basées sur des
catégories d'immeuble, des parties du territoire ou une combinaison des deux.
Cette adaptation est nécessaire et doit demeurer inchangée. Il faudra par
contre sensibiliser les municipalités à l'importance d'inclure des exceptions
pour le secteur agricole.
Exemplarité de l'État. Le patrimoine est,
par définition, d'intérêt collectif, mais la responsabilité de conserver la
mémoire collective revient en grande partie aux propriétaires individuels, qui
voient leurs opérations quotidiennes se complexifier et leurs coûts d'entretien
parfois exploser. L'État, en tant que gardien de l'intérêt collectif, a un rôle
à jouer pour supporter une partie du fardeau imposé aux propriétaires.
Il existe des programmes de subventions
pour la préservation et la restauration des éléments architecturaux d'origine <sur
un bâtiment...
M. Groleau (Marcel) :
...
se complexifier et leurs coûts d'entretien parfois exploser. L'État,
en tant que gardien de l'intérêt collectif, a un rôle à jouer pour supporter
une partie du fardeau imposé aux propriétaires.
Il existe des programmes de subventions
pour la préservation et la restauration des éléments architecturaux d'origine
>sur un bâtiment, mais la loi a des effets sur beaucoup plus de
bâtiments et de constructions. Par exemple, les bâtiments agricoles doivent
respecter un nombre important de critères. Certains producteurs doivent parfois
se priver de techniques de production modernes ou devront le faire parce qu'ils
n'ont pas l'autorisation d'implanter ou d'ériger certains équipements. Le choix
des matériaux est un autre exemple. Le gabarit des bâtiments, leur implantation
ou leur taille sont dictés par les normes patrimoniales, ce qui a des impacts
financiers majeurs. Toutes ces mesures devraient être compensées. Il est
impossible de transférer ces coûts supplémentaires dans le marché, ce qui
signifie, à terme, que ces entreprises pourraient disparaître ou ne plus être
rentables, et de même que le patrimoine qu'elles hébergent.
Alors, je vous remercie de votre écoute.
Comme je le disais, je suis accompagné de M. François Blouin, lui-même
producteur agricole et président du syndicat local de l'île d'Orléans, donc il
sera en mesure de répondre à des questions plus précises concernant l'île, de
même que de notre aménagiste, M. Paul Racette Dorion. Alors, nous sommes
ouverts à vos questions.
La Présidente (Mme Guillemette) :
Merci, M. Groleau. Donc, je passerais maintenant la parole à Mme la
ministre pour sa période d'échange avec vous.
Mme Roy
: Et voilà.
Bonjour. Bonjour à vous trois, messieurs. M. Groleau, M. Racette
Dorion, M. Blouin, merci, merci d'être là, merci pour votre mémoire.
L'île d'Orléans, dossier n° 2
qui est atterri sur mon bureau en tant que ministre de la Culture, et ça,
c'était trois jours après mon assermentation ou quatre jours après, nous sommes
très, très conscients qu'il y a eu des problématiques avec le fameux plan de
conservation. Et autant on a des groupes qui viennent nous dire que le plan de
conservation est une chose extraordinaire, autant d'autres groupes y voient des
problématiques. Vous y avez vécu, théoriquement et en pratique, des
problématiques. À l'île d'Orléans, il a fallu intervenir pour une foule de
raisons, je le mentionnais un peu plus tôt cette semaine, entre autres, des
gens attendaient pour des travaux. Il y avait une liste d'attente de travaux de
restauration pour les bâtiments. Alors, nous sommes intervenus, on a mis de
l'argent, quelques millions sur la table pour débloquer cette liste, parce que
les gens voulaient restaurer, ce qui est une bonne chose.
Par ailleurs, on s'est rendu compte qu'il
y avait vraiment un problème de relations entre le citoyen, les citoyens, les
élus et le ministère. Donc, il fallait nous assurer qu'il y ait un bon dialogue
puis que tout le monde se comprenne. On a décidé... J'ai décidé de mettre sur
pied une table, une espèce de table de concertation pour qu'on puisse se parler
puis trouver des solutions. Je pense que ça a permis de faire débloquer
plusieurs dossiers, mais tout n'est pas réglé, à l'égard entre autres des
terres, des fameuses terres agricoles. <Et Dieu sait que l'île...
Mme Roy
: ...
puis
que tout le monde se comprenne. On a décidé... J'ai décidé de mettre sur pied
une table, une espèce de table de concertation pour qu'on puisse se parler puis
trouver des solutions. Je pense que ça a permis de faire débloquer plusieurs
dossiers, mais tout n'est pas réglé, à l'égard entre autres des terres, des
fameuses terres agricoles. >Et Dieu sait que l'île d'Orléans, cette
magnifique île, compte aussi beaucoup de producteurs.
Vous le disiez à juste titre, l'île
d'Orléans est un site patrimonial déclaré. Un site patrimonial déclaré, c'est beaucoup
de choses. Ce sont aussi les paysages que l'on protège. M. Beaudet nous
parlait tout à l'heure de l'importance des paysages. Donc, ce sont des endroits
qui sont protégés, les bâtiments mais aussi les caractéristiques paysagères, c'est
le terme que l'on emploie, et ça soulève effectivement des questions, des
questions pour les travailleurs agricoles qui sont là, à l'égard de leurs terres,
le morcellement par exemple. Peut-on ou ne peut-on pas subdiviser et diviser
nos terres? Doit-on être pris dans ce carcan qui fait qu'on ne peut pas faire
certaines choses? Je vous entends, parce que c'est, en gros, ce que vous nous
dites aujourd'hui.
J'ai une question, mais, avant, je vais peut-être
arriver avec... Bien, je vais y aller avec ma première question. Quand vous
nous dites, dans les demandes que vous faites, «d'exclure, par exemple, par le règlement
pris en vertu de l'article 80.1 du projet de loi, tous les travaux
réalisés d'urgence et qui ne modifient pas l'enveloppe ou l'apparence d'un
ouvrage ou d'un équipement, ou encore qui visent à remplacer une infrastructure
souterraine existante, comme une conduite d'eau ou de gaz», pouvez-vous nous
expliquer dans quelle mesure actuellement le plan de conservation est
problématique pour vous dans l'exercice de votre profession?
M. Groleau (Marcel) : Bien,
je pourrais... je peux donner un exemple qu'un producteur m'a raconté.
M. Blouin pourra poursuivre. Mais un bris d'aqueduc exige qu'on remplace
le tuyau qui amène l'eau à l'étable ou à la maison. Alors, ça a déjà été creusé
à cet endroit-là, là. C'est... Le délai pour obtenir l'autorisation de faire
des travaux aussi simples mais importants nous apparaît injustifié, là. Donc,
c'est cette lourdeur-là qui est inacceptable ou invivable, là, pour les
entreprises agricoles, entre autres, là. Peut-être que François a d'autres
exemples à donner, là, mais...
Mme Roy
: Oui, moi, si
monsieur Blouin veut s'exprimer... Oui.
M. Groleau (Marcel) : Est-ce
qu'il est... Oui.
Mme Roy
: Allez-y. On a
peut-être perdu M. Blouin. Cela dit, pour le bénéfice des gens qui nous
écoutent, quand vous nous... Pardon?
La Présidente (Mme Guillemette) :
On me dit que M. Blouin n'est pas...
Mme Roy
: Il n'est pas
en ligne?
La Présidente (Mme Guillemette) :
Non.
• (16 heures) •
Mme Roy
: Bon, d'accord.
Mais quand vous nous dites : C'est trop long d'attendre d'avoir les
autorisations, il faut que les gens qui nous écoutent comprennent que,
lorsqu'on vit sur un site déclaré, il y en a 13 au Québec actuellement, on doit
demander une autorisation au ministère, donc à la ministre, pour pouvoir faire
des interventions sur le site...
16 h (version révisée)
Mme Roy
: ...Bon, d'accord.
M. Groleau (Marcel) : …
Mme Roy
: Mais
quand vous nous dites : C'est trop long d'attendre d'avoir les autorisations.
Il faut que les gens qui nous écoutent comprennent que, lorsqu'on vit sur un
site déclaré — il y en a 13 au Québec, actuellement — on
doit demander une autorisation au ministère, donc à la ministre, pour pouvoir
faire des interventions sur le site. On est plus familiers avec les interventions
sur les bâtiments, mais également sur les terres et sur les sites. Et ça, c'est
dans le plan de conservation. Et, oui, effectivement, je voulais avoir la
réalité dans le pratico-pratique.
Donc, vous faites des demandes au
ministère…
M. Groleau (Marcel) :
C'est ça.
Mme Roy
: …et il y
a un grand... il y a un délai. Et la vérificatrice...
M. Groleau (Marcel) :
...
Mme Roy
: Oui,
allez-y.
M. Groleau (Marcel) : Ça
peut même aller à encourir des pénalités pour réparer un aqueduc qui est brisé
parce qu'on n'a pas fait la demande, préalablement, avant de faire les
réparations qui étaient urgentes. Il y a une ferme qui a été aux prises avec
une situation semblable, là.
Alors, c'est pour ça qu'on demande d'être…
qu'il y ait certaines exemptions pour le secteur agricole ou exceptions pour le
secteur agricole, là.
Mme Roy
: Je pense,
entre autres, à d'autres de vos collègues, d'autres collègues agriculteurs qui
m'ont fait part de plusieurs circonstances urgentes, par exemple, ou bris qui
nécessitaient des interventions, et qu'on perd un temps fou parce qu'il faut
demander les demandes pour toucher à la terre, pour toucher au terrain, pour
faire ces travaux. Et de là toute la complexité, M. Groleau, du dossier, puis
vous le voyez, c'est qu'on a ici plusieurs intérêts en présence, de différents ministères.
M. Groleau (Marcel) : C'est
ça. C'est ça.
Mme Roy
: On a
l'Agriculture. On a la Culture. On veut protéger le territoire agricole. On
veut protéger les interventions agricoles, le travail d'agriculteurs et, de
l'autre côté, on veut protéger ses caractéristiques paysagères. Et on a le
plan, le fameux plan de conservation.
Je veux vous dire que j'ai été très
sensible à toutes ces représentations qui nous ont été faites depuis deux ans
maintenant. Ce n'est pas pour rien qu'on a agi puis qu'on a décidé de mettre en
place une table pour que nous puissions nous parler puis essayer de... comment
dirais-je, de mettre là-dedans un peu de gros bon sens aussi. Parce que, tu
sais... Qu'est-ce qu'on dit, là, le mieux est l'ennemi du mal ou quelque
chose...
Une voix : …
Mme Roy
: Le mieux
est l'ennemi du bien, pardonnez-moi. Le mieux est l'ennemi du bien, voilà.
Et il faut garder cette part aussi, oui,
de protection patrimoniale, et, oui, d'humanisme et d'humanité, je pense. Et il
faut trouver un équilibre. Je vais vous dire tout de suite que le fait que nous
allions convertir les plans de conservation en règlement sera aussi une
opportunité de les rouvrir.
M. Groleau (Marcel) :
C'est ça.
Mme Roy
: Alors,
il y a fort probablement des choses qui pourraient être améliorées en tout
respect de l'environnement. Mais encadrer les pratiques qui pourraient vous
permettre de faire votre travail sans avoir à en subir des conséquences qui ne
sont pas nécessaires, donc on pourrait trouver place à un règlement pour vous
aider à cet égard-là.
M. Groleau (Marcel) :
C'est ça.
Mme Roy
: Vous
parliez également du processus de contestation d'une demande. Et ça, ce que
vous dites là, c'est quelque chose que j'ai <constaté...
Mme Roy
: ...
sans
avoir à en subir des conséquences qui ne sont pas nécessaires, donc on pourrait
trouver place à un règlement pour vous aider à cet égard-là.
M. Groleau (Marcel) :
C'est ça.
Mme Roy
: Vous
parliez également du processus de contestation d'une demande. Et ça, ce que
vous dites là, c'est quelque chose que j'ai >constaté dès mon arrivée en
fonction. J'ai lu la loi qui existe actuellement, mais je me suis dit :
Bon Dieu! <Il y a… >Un, il n'y a pas de règlement, puis, deux, il
n'y a pas de processus d'appel. Il y a une loi qui existe sans règlement et
sans processus d'appel, aucun.
Alors, nous mettons sur pied un processus
d'appel pour permettre au justiciable... Parce qu'actuellement c'est l'État, le
fonctionnaire qui reçoit la demande qui dit un oui ou qui dit un non. Par la
suite, le justiciable, il retourne, peut y retourner, s'il le souhaite, mais
c'est le même fonctionnaire qui va lui redire le même oui ou le même non. À cet
égard-là, bien, j'ai insisté pour qu'on mette sur pied un processus d'appel, un
processus de révision administrative, et, par la suite, qui peut mener
ultimement à un appel devant le Tribunal administratif du Québec, ce qui est
beaucoup moins lourd qu'un appel devant un tribunal de droit commun, qui coûte
une fortune.
Alors, je voulais vous entendre là-dessus.
Vous pensez quoi du fait que nous voulons instaurer ce processus administratif
de contestation et d'appel pour le citoyen?
M. Groleau (Marcel) :
Bien, nous, c'est sûr qu'on est d'accord avec ça. C'est ce qu'on... Là, il y a
de… O.K., maintenant, c'est correct... C'est ce qu'on demande dans le mémoire
qu'on vous a présenté, que ce processus d'appel là soit mis en place. On est
contents que c'est l'intention du ministre. Là, j'apprends que... bien, j'étais
sous l'impression que l'appel serait... pourrait être déposé au ministère et
peut-être considéré par un collègue, plutôt que par la personne qui avait une
première fois refusé. Là, si vous me dites que ça peut aller devant le TAQ,
alors c'est encore mieux pour nous, là.
Mme Roy
: Oui. En
fait, c'est...
M. Groleau (Marcel) :
C'est évident que...
Mme Roy
: Oui,
allez-y.
M. Groleau (Marcel) : …Non,
je termine. C'est évident pour nous que le TAQ est la tierce partie qui peut
porter un jugement, ou un autre jugement, ou entendre le plaignant sur la
décision dont il fait l'objet, là. Alors, <c'est… >pour nous,
c'est préférable.
Mme Roy
: Bien, en
fait, c'est ce que nous tentons de faire, vraiment, cette révision
administrative là, donc on ne retourne pas devant la même personne. On retourne
devant une autre personne à l'administration même. Et, par la suite, si la
réponse ne convient pas, il y a une ouverture pour un appel devant le Tribunal
administratif du Québec. Je pense que nous devons ça, en tant que gouvernement,
au justiciable, d'avoir le droit de se faire entendre et de ne pas avoir à
passer devant la Cour du Québec ou la Cour supérieure, dépendamment du montant
du litige.
M. Groleau (Marcel) : …
Mme Roy
: Oui,
vous alliez…
M. Groleau (Marcel) :
Oui. J'ajouterais que les fonctionnaires, sachant que la demande ou que le
refus peut mener à une contestation devant le TAQ, naturellement, vont traiter
dès lors les demandes de façon différente et s'assurer de les argumenter solidement,
ce qui va probablement empêcher des contestations aussi.
Mme Roy
: Chose
certaine, c'est que les demandes seront traitées avec de nouvelles grilles et
de nouveaux critères, que nous <voulons plus...
M. Groleau (Marcel) :
...
naturellement, vont traiter dès lors les demandes de façon différente
et s'assurer de les argumenter solidement, ce qui va probablement empêcher des
contestations aussi.
Mme Roy
: Chose
certaine, c'est que les demandes seront traitées avec de nouvelles grilles et
de nouveaux critères, que nous >voulons plus facilement compréhensibles,
plus clairs et surtout les rendre publics. C'est pour ça qu'on met tout ça dans
la loi. Parce qu'actuellement la Vérificatrice générale nous a bien fait
comprendre que tout le processus décisionnel était… n'était pas très visible ou
était… n'était pas très transparent pour...
M. Groleau (Marcel) : …
Mme Roy
: Oui?
M. Groleau (Marcel) : Et
c'est ce qu'on dit dans notre mémoire. On a l'impression que c'est basé sur des
critères flous, et que le ministère manque de transparence. Alors, ce que vous
proposez va sans doute... va corriger cette impression-là que les gens ont avec
des critères précis et une possibilité de contester les décisions lorsqu'elles
seront rendues.
Mais il faut aussi accélérer la prise de
décision dans le cas du secteur agricole. Quelqu'un qui a une maison à rénover…
Bon, on peut prendre un certain temps si elle est habitable, pendant que les
analyses se font, ça peut toujours aller. Mais quelqu'un qui a une entreprise à
faire fonctionner ne peut pas se permettre des délais de 18 mois, de
24 mois avant d'avoir une réponse, peut-être de ne pas pouvoir faire ce
qu'il entendait faire.
Donc, c'est sûr que, pour le secteur
agricole, qui est un secteur qui répond à des enjeux économiques de marché et
autres, on a… il faudrait peut-être prévoir dans le règlement, si c'est là que
ça doit s'inscrire, bien, des délais plus courts ou des façons de traiter ces
demandes-là en priorité et de façon urgente lorsqu'elles vous sont déposées.
Mme Roy
: En fait,
le projet de loi... Parce que la Vérificatrice générale disait aussi que
certaines demandes sont traitées dans un délai beaucoup trop long et certaines
demandes ne sont jamais traitées. Et on a vraiment mis dans ce projet de loi...
Parce qu'il faut comprendre qu'il y a de bons morceaux de la loi initiale qui
demeurent là, là. On la bonifie. On rajoute des choses qui n'y étaient pas. <On
se rajoute l'obligation... >Parce qu'il y a quand même des spécialistes
incroyables au sein du ministère de la Culture, mais là on rajoute des
obligations et de la transparence pour que les citoyens voient avec quoi on va
travailler, voient avec quoi les fonctionnaires vont travailler et dans quel
cadre. Et nous mettons des délais pour répondre aux demandes qui sont
demandées. Certains vont peut-être dire : C'est ambitieux. On dit qu'on
devrait répondre à une demande, à un citoyen, là, à l'intérieur de
90 jours ou 120 jours, à moins d'exception. Et ça, c'est nouveau dans
la loi.
La Vérificatrice générale nous disait :
Il n'est pas normal que ça prenne 10 ans pour prendre une décision. Bien,
je suis tout à fait d'accord avec elle. Et, à cet égard-là, bien, c'est ce qu'on
va tenter d'améliorer, d'avoir des délais plus que raisonnables pour répondre
aux citoyens qui posent des questions. Et...
M. Groleau (Marcel) : …
Mme Roy
: Oui,
allez-y.
M. Groleau (Marcel) :
Bien, avant de passer la parole à Paul, qui a un point à ajouter, je vous
dirais que ces règles-là du 90 jours, on les vit déjà au niveau des
certificats d'autorisation du ministère de <l'Environnement...
Mme Roy
: ...
d'améliorer,
d'avoir des délais plus que raisonnables pour répondre aux citoyens qui posent
des questions. Et...
M. Groleau (Marcel)T :
…
Mme Roy
: Oui,
allez-y.
M. Groleau (Marcel) :
Bien, avant de passer la parole à Paul, qui a un point à ajouter, je vous
dirais que ces règles-là du 90 jours, on les vit déjà au niveau des
certificats d'autorisation du ministère de >l'Environnement, et, quelquefois,
c'est qu'au 89e jour on reçoit une note comme quoi il manque un élément au
dossier. Et là le compteur repart. Alors, juste vous assurer que 90 jours,
c'est réellement 90 jours. Et, si le dossier n'est pas complet, bien,
qu'on ne nous avise pas à la 89e journée.
Mme Roy
: C'est un
bon point. C'est un bon point. Mais, cela dit, je considère que 90 jours
ou 120 jours, c'est mieux que 10 ans. Vous aviez quelque chose à
rajouter?
• (16 h 10) •
M. Racette Dorion (Paul) :
Oui, absolument. Il y a aussi les demandes d'urgence auxquelles on faisait
référence un petit peu plus tôt. C'est arrivé, là, comme on… qu'il y a des
travaux d'urgences qui soient faits. Même un délai de 48 heures, là, quand
vient le temps de réparer une conduite d'aqueduc qui alimente une résidence
pour des travailleurs étrangers, où logent peut-être 12, 15, 20 travailleurs
étrangers, ou un établissement d'élevage, même un délai d'urgence de
48 heures, c'est trop long pour une telle intervention. Ça fait qu'il y
aurait lieu de revoir aussi ces délais-là, là.
Mme Roy
: C'est
pris en note, monsieur. Je sais que la présidente me regarde et que...
La Présidente (Mme Guillemette) :
10 secondes.
Mme Roy
: 10 secondes.
Bon, bien, écoutez, merci pour votre contribution. C'est noté. Et il y a place
à amélioration. Nous allons améliorer les choses. Merci à vous, messieurs. Merci
beaucoup.
M. Groleau (Marcel) :
Merci, Mme Roy.
La Présidente (Mme Guillemette) :
Merci beaucoup, Mme la ministre. Donc, je céderais maintenant la parole à Mme
la députée de Verdun?
Mme Melançon : Merci.
Bonjour, M. Groleau. Bonjour, M. Dorion. Un plaisir de vous
retrouver. Ce n'est pas la première fois où on ne sera pas tout à fait du même
avis, parce que je me rappelle lorsque... puis je vois M. Dorion sourire.
Lorsque j'avais l'immense privilège d'être ministre de l'Environnement, on
s'est rencontrés à plusieurs reprises. Mais, mais, mais je me rappelle quand
même, M. Groleau, que vous m'aviez dit que c'était la première fois qu'une
ministre de l'Environnement prenait elle-même le téléphone pour parler avec
l'UPA dans les quelques heures qui ont suivi ma nomination. Et je pense qu'on ait
gardé une excellente relation en ce sens-là. On a été capables d'avancer, même
pour les pesticides, bien qu'il y avait beaucoup de craintes à l'époque. Bref,
ce n'est pas la première fois où on ne sera pas tout à fait d'accord, mais
permettez-moi de vous dire à quel point d'abord j'apprécie de vous voir aujourd'hui
et que je suis très heureuse.
Moi, j'ai pris le temps de lire, de
surligner. Je me suis fait un résumé de ce que vous avez apporté aujourd'hui,
là. En bref, dans le fond, vous dites : Contraintes inutiles qui viennent
empêcher la croissance de l'agriculture, contraintes et craintes d'une
décroissance de l'activité agricole, changement aux protections de sites
patrimoniaux. Les producteurs doivent négocier longuement avec le ministère
avec des règles floues. Donc, flou, je ne sais pas si c'est parce qu'il y a une
<mécompréhension...
Mme Melançon : …de
l'agriculture, contraintes et craintes d'une décroissance de l'activité
agricole, changement aux protections de sites patrimoniaux. Les producteurs
doivent négocier longuement avec le ministère avec des règles floues. Donc,
flou, je ne sais pas si c'est parce qu'il y a une >mécompréhension ou si
c'est flou de la façon que c'est écrit. Ça, je pourrai y revenir. Le droit
d'appel est une grande amélioration, mais il faut une révision indépendante — vous
venez d'en parler — nécessaire d'un projet financé par un ministre ne
doit pas être stoppé par le ministère de la Culture et des Communications,
correction des titres fonciers, autorisations cadastrales ne sont pas
suffisamment nombreuses.
Bref, <c'est… A>aujourd'hui,
moi, ce que je comprends tout de même, et je le dis en tout respect, là, c'est
qu'on va ouvrir… on est dans un projet de loi où on veut s'assurer de pouvoir
préserver le patrimoine, le protéger, où on va vouloir aller même un peu plus
loin que… Puis je reprends les paroles de la ministre, là, qui, elle, veut
éviter justement qu'il y ait du patrimoine qui disparaisse sous nos yeux de
façon quasi quotidienne parfois. Il y a de nouvelles façons de faire en plus.
On l'a vu avec les différents groupes qui sont venus devant nous. Je ne suis
pas sûre que notre position pourra être tout à fait… pourra se rapprocher. Puis,
pour moi, c'est difficile. J'entends des problématiques. J'avais une ou deux
questions. Mais je ne pense pas qu'on va être dans une position où on va être
capables de concilier tout ce que vous demandez dans l'actuel projet de loi.
M. Groleau (Marcel) :
Bien, écoutez… Bien, tout d'abord, le plaisir est partagé, là, de pouvoir
commenter, cette fois-ci, sur un projet de loi qui concerne le patrimoine. On a
une préoccupation commune, la protection du patrimoine. Puis je crois qu'on a
un enjeu commun, c'est de permettre à l'agriculture de se développer sur l'île
d'Orléans tout en préservant le patrimoine qu'elle abrite ou qui l'entoure.
90 % de l'activité économique de l'île d'Orléans, c'est l'agriculture,
alors c'est indissociable de soutenir ce secteur-là tout en préservant le patrimoine.
Donc, c'est pour ça qu'on souligne que les
contraintes inutiles qui sont imposées au secteur agricole devraient être
levées, qu'on les étudie. Mais il y a des choses, selon nous, qui sont
inutiles, parce que, par exemple, il y a peu de bâtiments patrimoniaux dans le
secteur agricole. Parce que ce n'est pas comme les maisons qui étaient
construites en pierre où c'est… Souvent, les bâtiments agricoles étaient
construits en bois. Donc, des choses qui datent de centaines d'années dans le
secteur agricole, il y en a beaucoup moins, et ils sont <très peu…
M. Groleau (Marcel) :
...
de bâtiments patrimoniaux dans le secteur agricole. Parce que ce
n'est pas comme les maisons qui étaient construites en pierre où c'est…
Souvent, les bâtiments agricoles étaient construits en bois. Donc, des choses
qui datent de centaines d'années dans le secteur agricole, il y en a beaucoup
moins, et ils sont >très peu nombreux au niveau des bâtiments.
Donc, nous, par contre, on travaille le
sol. Lorsqu'on travaille le sol et que... En surface, il n'y a pas de problème,
mais aussitôt qu'on veut excaver, bien là, c'est sûr qu'on est... les questions
commencent <à se… >à être posées. On n'a pas de problème si on
doit faire des fouilles ou si on doit faire des... oui, des fouilles. Mais est-ce
qu'on peut agir plus vite lorsque ça concerne le secteur agricole pour ne pas
que l'entreprise attende des mois, et des mois, et des mois? Est-ce qu'on peut
savoir déjà… ou avoir des autorisations? Par exemple, un aqueduc qui a déjà été
placé en terre, si j'ai à le réparer, je creuse au même endroit, est-ce que c'est
nécessaire d'avoir un permis puis d'attendre encore les délais qui viennent
avec? Donc, c'est des choses comme ça.
Donc, c'est d'ajuster la protection du territoire...
du patrimoine à l'enjeu de la production agricole. C'est ça qu'on souhaite. Et
là, là-dessus, je pense qu'on va s'entendre sur le principe.
Mme Melançon : …contraintes
inutiles, là, vous pensez à quoi, là, spécifiquement? <Puis avez-vous… >Je
ne sais pas puis je pose la question sans... Habituellement, on ne veut jamais
poser des questions sans connaître vraiment la réponse, mais est-ce que vous
avez des exemples puis est-ce que les… est-ce que vous pourriez y aller, là? Je
sais qu'il vous manque un de vos joueurs, là. M. Blouin n'est pas là, mais
peut-être M. Dorion…
M. Groleau (Marcel) : Paul…
Oui, oui…
M. Racette Dorion
(Paul) : Tout à fait. Bien, définitivement, M. Blouin aurait été la
meilleure personne, mais on a quand même quelques exemples. Bon, les travaux d'urgence,
on en a parlé. Ça, c'est une chose. Par exemple, une autorisation pour excaver
pour implanter un tuteur, pour retenir des jeunes plants de pommiers. Donc, ça
prendrait une autorisation pour excaver, pour creuser un trou pour entrer un
tuteur, un tuteur en cèdre, par exemple, donc ça peut apparaître exagéré.
Tout ce qui est non
visible de la rue, par exemple, certains travaux dans des cabanes à sucre, dans
des érablières, par exemple, n'ont pas d'impact sur le paysage ou sur la
protection du patrimoine, du moins visuel. Lorsqu'il y a excavation dans un
secteur qui n'a jamais été excavé, c'est autre chose. Je pense que tout le
monde s'entend là-dessus. Mais, dans certains cas, lorsque c'est non visible de
la rue, il faudrait revoir les normes qui s'appliquent. De la même façon, un
bâtiment qui n'est pas visible de la rue, donc pourquoi vouloir insister sur
certains gabarits? Donc, l'activité agricole implique une évolution des
pratiques et notamment de répondre aux normes sur le bien-être animal, ce qui
implique un agrandissement des bâtiments. C'est de plus en plus difficile, notamment
à l'île d'Orléans, parce qu'il y a des contraintes, là, sur le gabarit des
bâtiments qui doivent respecter celui des bâtiments patrimoniaux.
Donc, ce genre d'exemples là… Et ces
bâtiments-là ne sont pas visibles de la rue, encore une fois, je le répète, là.
Mme Melançon : Dites-moi,
en page 15, vous parlez des coûts qui sont engendrés par les mesures, là,
lorsqu'on est dans l'exemplarité de l'État, et vous <dites...
M. Racette
Dorion (Paul) : ...
bâtiments patrimoniaux.
Donc, ce genre d'exemples là… Et ces
bâtiments-là ne sont pas visibles de la rue, encore une fois, je le répète, là.
Mme Melançon :
Dites-moi, en page 15, vous parlez des coûts qui sont engendrés par les
mesures, là, lorsqu'on est dans l'exemplarité de l'État, et vous >dites
que «tous les coûts engendrés, donc, par ces mesures devraient être compensés
par l'État…». Est-ce que vous avez chiffré cette demande-là?
M. Groleau (Marcel) :
Non. Non, non, parce que c'est des coûts qui sont calculables à chaque fois
qu'un projet fait l'objet d'une étude ou... Mais, sur le long terme ou à terme,
combien ça a coûté, c'est difficile à évaluer.
Mme Melançon : ...à
évaluer, oui, pour savoir…
M. Groleau (Marcel) :
Bien…
Mme Melançon : Parce que...
M. Groleau (Marcel) :
Bien, c'est ça.
Mme Melançon : ...moi, je
veux juste essayer de voir on se base sur peut-être combien d'activités depuis,
je ne sais pas, moi, je veux dire, depuis 20 ans. Est-ce qu'on sait
combien d'activités puis les coûts que ça a pu exiger de la part des
producteurs?
M. Groleau (Marcel) :
Non. Mais je vais vous donner, à titre d'exemple, si je rénove une maison
patrimoniale avec une vue sur le fleuve <avec…> sur un beau site,
en tant que propriétaire, je vais sans doute y retrouver mon compte par la
valeur que cette maison-là va représenter sur le marché. Lorsque j'ai des
contraintes sur un bâtiment agricole ou que je suis obligé de procéder à
certains aménagements sur le bâtiment pour respecter certaines hauteurs, et
autres, donc je suis obligé de travailler différemment, les coûts sont
supplémentaires. C'est sûr que je ne vendrai pas mon lait ou mes fruits plus
cher dans le marché. Ma ferme n'aura pas une valeur supplémentaire lors de la
revente, donc ces coûts-là dans notre cas sont irrécupérables. Donc, ils sont
difficiles à chiffrer aujourd'hui, mais ce qui est certain, c'est qu'ils sont irrécupérables.
C'est ce qu'on veut dire dans notre...
La Présidente (Mme Guillemette) :
...
Mme Melançon : Pardon?
• (16 h 20) •
La Présidente (Mme Guillemette) :
20 secondes.
Mme Melançon : Bien, je
vous dis merci. Je vous dis qu'il y a de la lecture qu'on va probablement
devoir faire autrement. Mais comprenez une chose, je pense qu'avec les plans de
conservation, s'il y avait des flous, on pourra... on va voir dans l'article
par article, de toute façon. Il reste beaucoup de travail à faire,
là — je regarde la ministre — là-dessus.
Mais une chose est sûre, on est là pour
quand même donner des dents à la loi. Je ne veux pas que vous soyez surpris du
fait qu'on veut donner des dents à la loi en matière de patrimoine. Et ce que
je voyais ici, c'était de demander plus d'assouplissement à certains égards. Je
ne voulais juste pas que vous soyez trop surpris des travaux qui vont avoir
cours, parce que c'est en ce sens-là. Nous, ce qu'on veut prévoir, c'est
justement d'éviter de perdre encore du patrimoine au fil des prochaines années.
Sur ce, je vous dis : Merci <beaucoup
et...
Mme Melançon : ...plus
d'assouplissement à certains égards. Je ne voulais juste pas que vous soyez
trop surpris des travaux qui vont avoir cours, parce que c'est en ce sens-là.
Nous, ce qu'on veut prévoir, c'est justement d'éviter de perdre encore du
patrimoine au fil des prochaines années.
Sur ce, je vous dis : Merci >beaucoup
et bon jeudi après-midi.
M. Groleau (Marcel) : Merci.
La Présidente (Mme Guillemette) :
Merci, Mme la députée. Donc, je passerais maintenant la parole à Mme la députée
de Mercier.
Mme Ghazal : Merci, Mme
la Présidente. Merci, messieurs, pour votre présentation. Moi, j'ai une
question à la page 13 par rapport aux règlements sur les démolitions. Vous
dites : «Trop de joyaux architecturaux et historiques ont disparu sous le
pic des démolisseurs. Nous craignons toutefois que l'adoption obligatoire du
règlement ne pousse à l'exagération et que le fardeau soit sur les
propriétaires.»
Vous avez donné des exemples sur les
contraintes. Quand vous dites «exagération» ici, est-ce que vous pouvez donner
des exemples concrets? Est-ce que c'est juste une crainte que vous avez, ou c'est
parce que, sur le terrain, il y a quelque chose qui a été vraiment vécu, ou,
finalement, il a fallu faire une étude qui a été assumée par le propriétaire, parce
que vous dites aussi que les coûts sont faramineux, et c'était totalement
inutile, finalement, il n'y avait pas de valeur patrimoniale…
M. Racette Dorion (Paul) :
Bien, en fait…
Mme Ghazal : …ou c'est
une crainte que vous avez?
M. Racette Dorion (Paul) :
Je pense que, dans notre mémoire, il faut distinguer deux choses, là, très
clairement. Les préoccupations sur l'île d'Orléans, c'est une chose. Le cadre
n'était pas appliqué ou pas applicable au secteur agricole, donc ça, on en a
parlé largement.
Pour ce qui est du règlement sur les
démolitions, il s'applique à l'échelle du Québec. Les municipalités seront
tenues d'adopter un tel règlement. C'est plutôt des craintes, effectivement, qu'à
partir du moment où on veut démolir une grange ou un hangar, à la limite un
cabanon agricole, on soit tenu de demander un permis de démolition, qui sera
analysé par un comité de démolition. Ça nous semble excessif puis ça pourrait
être une contrainte trop élevée qui aurait peu d'impact sur la protection du
patrimoine. C'est plus en ce sens-là.
Mme Ghazal : C'est ça. Parce
que ce n'est pas une situation qui existe en ce moment, c'est juste une crainte
pour le futur. O.K.
M. Racette
Dorion (Paul) : Exactement. Puis c'est la raison pour laquelle on dit
qu'il faut sensibiliser le monde municipal à ces cas-là agricoles. Donc, ce n'est
pas parce qu'une grange est d'apparence intéressante qu'elle <a… elle >représente
un patrimoine, nécessairement. Peut-être dans certains cas, mais ce n'est pas
nécessairement le cas. Donc, elle ne devrait pas être automatiquement
assujettie à une autorisation pour être démolie, par exemple.
Mme Ghazal : C'est ça. Donc,
peut-être… Parce que, dans le fond, le règlement, il n'existe pas pour des… juste
pour exagérer. Le règlement va exister parce que, vous le reconnaissez
vous-même, il y a eu tellement de bâtiments qui avaient une valeur, qui...
Mais, dans le fond, ce que vous demandez, ce n'est pas qu'il n'y ait pas de
règlement, si je regarde votre…
M. Racette Dorion (Paul) :
Exactement. On demande…
Mme Ghazal : Ce que vous…
M. Racette Dorion (Paul) :
…de sensibiliser le monde municipal à ces cas-là, puis notamment à certaines
exclusions agricoles, certains secteurs agricoles, ou certains bâtiments, ou
ouvrages agricoles qui pourraient ne pas être assujettis. Puis le règlement, la
façon dont il est libellé dans la LAU modifiée, est tout à fait satisfaisant.
Il faut juste que les municipalités comprennent cette réalité-là. Puis le
ministère de la Culture a possiblement un rôle à jouer là-dedans.
Mme Ghazal : Très bien. Je
comprends. Merci.
La Présidente (Mme Guillemette) :
Merci beaucoup, Mme la députée. Merci beaucoup. La période d'échanges avec les
parlementaires est terminée. Merci, M. Groleau et M. Racette Dorion,
pour votre contribution aux travaux de la <commission...
M. Racette Dorion (Paul) :
...
que les municipalités comprennent cette réalité-là. Puis le ministère
de la Culture a possiblement un rôle à jouer là-dedans.
Mme Ghazal : Très
bien. Je comprends. Merci.
La Présidente (Mme Guillemette) :
Merci beaucoup, Mme la députée. Merci beaucoup. La période d'échanges avec les
parlementaires est terminée. Merci, M. Groleau et M. Racette Dorion,
pour votre contribution aux travaux de la >commission.
Donc, avant de terminer, je dépose les
mémoires des personnes et des organismes qui n'ont pas été entendus durant les
consultations. Et je vous remercie tous de votre contribution à nos travaux.
La commission ajourne ses travaux sine
die.
(Fin de la séance à 16 h 24)