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Version préliminaire

43e législature, 1re session
(début : 29 novembre 2022)

Cette version du Journal des débats est une version préliminaire : elle peut donc contenir des erreurs. La version définitive du Journal, en texte continu avec table des matières, est publiée dans un délai moyen de 2 ans suivant la date de la séance.

Pour en savoir plus sur le Journal des débats et ses différentes versions

Le mercredi 7 juin 2023 - Vol. 47 N° 14

Consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 23, Loi modifiant principalement la Loi sur l’instruction publique et édictant la Loi sur l’Institut national d’excellence en éducation


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Journal des débats

11 h 30 (version non révisée)

(Onze heures trente-huit minutes)

La Présidente (Mme Dionne) : Alors, bonjour à tous. Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de la culture et de l'éducation ouverte.

La commission est réunie afin de poursuivre les consultations particulières et aux auditions publiques sur le projet de loi n° 23, Loi modifiant principalement la Loi sur l'instruction publique et édictant la Loi sur l'institution nationale d'excellence en éducation.

Donc, Mme la Présidente... Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire : Non, Mme la Présidente, il n'y a pas de remplacement.

La Présidente (Mme Dionne) : Donc, cet avant... ce midi, cet avant-midi, ce midi, nous entendrons les personnes et les groupes suivants, donc : l'Association des commissions scolaires anglophones du Québec et l'Association des doyens, doyennes directeurs, directrices pour l'étude et la recherche en éducation au Québec.

Donc, je souhaite, d'entrée de jeu, la bienvenue aux représentants de l'Association des commissions scolaires anglophones du Québec. Donc, nous avons M. Daniel Lamoureux, Stephen Burke, M. Russell Copeman et Mme Kim Hamilton. Donc, je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé. Donc, peut-être vous présenter en entrée de jeu et, par la suite, nous faire part de votre exposé. Je vous cède la parole.

• (11 h 40) •

M. Lamoureux (Dan) : Merci beaucoup. Mme la Présidente, M. le ministre de l'Éducation, mesdames et Messieurs les Députés, nous vous remercions de nous recevoir dans le cadre des consultations limitées sur le projet de loi n° 23. Je suis Dan Lamoureux, président de l'Association des commissions scolaires anglophones du Québec. Je suis accompagné par le président de la Commission scolaire Central Québec, Stephen Burke, notre directeur général, Russell Copeman, et notre directrice des communications et des projets spéciaux, Kim Hamilton. Et, en plus, président de la Commission scolaire Sir-Wilfrid-Laurier, Paolo Galati, et Barbara... Barrasso, «excuse me», qui sont dans la salle.

The QESBA is pleased to be here today to present our brief on behalf of the nine English school boards that we represent across Québec. The public English school system includes roughly 100 000 students in 340 schools and centers in every administrative regions of Québec, except for the Grand-Nord.

Nous sommes très fiers que le taux de... dans le réseau scolaire de langue anglaise est près de 87 %, cinq points supérieurs à la moyenne québécoise.

M. Copeman (Russell) : D'abord, l'ACSAQ déplore le fait que la liste des témoins entendus lors de cette consultation parlementaire ne contient qu'un seul groupe de la communauté anglophone du Québec, en dépit du fait que de nombreux groupes, incluant plusieurs dans le réseau éducatif anglophone, dont les parents et les enseignants, demandaient à comparaître. L'Association des commissions scolaires anglophones du Québec a toujours été guidée par l'impératif que le cadre législatif relatif à l'enseignement au Québec doit d'abord contribuer à la réussite scolaire. L'analyse du projet de loi n° 23 effectuée par l'ACSAQ tient également...

M. Copeman (Russell) : ...compte de l'impératif supplémentaire pour la minorité linguistique anglophone du Québec de veiller à ce que le gouvernement et la législature respectent l'article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés tel qu'il a été interprété par les tribunaux.

À cet égard, notre analyse du projet de loi n° 23 tient compte de l'incidence du projet de loi sur le droit de la minorité anglophone de gérer et de contrôler ses écoles, un droit exprimé à maintes reprises par les tribunaux, y compris la Cour suprême du Canada. Manifestement, soit par manque de compréhension ou, pire, de façon délibérée, le gouvernement du Québec actuel n'apprécie ni la portée ni l'ampleur des droits constitutionnels de la communauté anglophone du Québec de gérer et de contrôler notre système d'éducation. Cette affirmation de notre part se fonde sur les décisions des tribunaux liées à la loi no 21 sur la laïcité, déclarée invalide pour les commissions scolaires anglophones par la Cour supérieure du Québec en 2021, le sursis accordé sur la loi no 40 et sur le fait que le projet de loi no 23 contient des dispositions qui sont manifestement inconstitutionnelles. Nous soutenons que le gouvernement du Québec actuel et, d'ailleurs, l'Assemblée nationale du Québec, ne comprennent pas ni ne respectent la portée et l'ampleur du droit de gestion et de contrôle de la communauté anglophone du Québec garanti par l'article 23 de la charte.

M. Burke (Stephen) :Dans la contestation constitutionnelle récente de la loi no 40, la Cour d'appel a récemment réaffirmé l'importance du droit de gestion et contrôle par la minorité linguistique parmi les garanties protégées par l'article 23 de la charte. Que l'Assemblée nationale soit saisie du projet de loi no 23 avant même qu'une décision sur le fond ne soit rendue par la Cour supérieure du Québec dans l'affaire... et autres contre le Procureur général du Québec sur la constitutionnalité de la loi no 40 est pour le moins regrettable. Cette action de la part du gouvernement du Québec, que certains qualifieraient même de provocante, va manifestement à l'encontre de l'esprit du sursis de la loi no 40 dans le réseau éducatif anglophone accordé par la Cour supérieure en août 2020 et confirmé par la Cour d'appel du Québec en septembre de la même année.

Tous les observateurs informés reconnaissent qu'au chapitre de la gouvernance, le projet de loi no 23 est un pur et simple coup de force du gouvernement du Québec. Les conseils des commissaires scolaires du réseau anglophone et les conseils d'administration des centres de services scolaires du réseau francophone perdront leur autorité sur une multitude de nominations de postes administratifs et pourront voir leurs décisions annulées par le ministre de l'Éducation. Enfin, même dans la loi no 40, l'Assemblée nationale a reconnu la nécessité d'un régime de gouvernance distinct pour le réseau éducatif anglophone en vertu des droits de gestion et de contrôle conférés par l'article no 23 de la charte. Mais le projet de loi no 23 fait fi de ce régime de gouvernance distinct dans la loi no 40 en traitant les commissions scolaires anglophones exactement de la même façon que les centres de services scolaires en matière de gouvernance.

M. Copeman (Russell) : Il est impossible de résumer un mémoire de 23 pages en 10 minutes. Nous allons nous concentrer, donc, sur deux aspects cruciaux de la gouvernance scolaire, le mode de nomination des directeurs généraux et le pouvoir du ministre d'annuler des décisions des commissions scolaires.

Transférer l'autorité au gouvernement du Québec de nommer les directeurs généraux des commissions scolaires est manifestement inconstitutionnel. Dans... contre l'Alberta, la Cour suprême du Canada a affirmé, et je cite : «Les représentants de la minorité linguistique devraient avoir le pouvoir exclusif de prendre des décisions concernant l'instruction dans sa langue et les établissements où elle est dispensée, notamment sur la nomination et la direction des personnes chargées de l'administration de cette instruction et de ses établissements.» Fin de la citation. Ce pouvoir exclusif a récemment été réaffirmé par la Cour d'appel du Québec dans... contre le Procureur général du Québec sur la loi no 40. Avec le projet de loi no 23, les directeurs généraux deviennent les exécutants du ministre, ils sont responsables devant le ministre et non le conseil des commissaires scolaires. Les directeurs généraux désignent les directeurs généraux adjoints et les directions d'école, dans le projet de loi no 23. Ce nouveau pouvoir attribué exclusivement aux directeurs généraux est une forme de contrôle ministériel indirect sur la nomination des administrateurs scolaires et...

M. Copeman (Russell) : ...inconstitutionnel.

Au chapitre du pouvoir ministériel, d'annuler une décision prise par une commission scolaire, le projet de loi autorise le ministre à annuler toute décision, et je cite, «qui n'est pas conforme aux cibles, aux objectifs, aux orientations et aux directives qu'il a établies». Fin de la citation. Ce pouvoir permettrait au ministre de l'Éducation d'annuler une décision d'une commission scolaire tout simplement au motif qu'il est en désaccord avec les priorités établies par les élus de la communauté. Cela constitue une ingérence excessive dans l'exercice des droits de gestion et de contrôle de la communauté anglophone, ainsi qu'une atteinte inacceptable à ses droits.

Le pouvoir ministériel de déterminer les orientations devant être prises en compte pour l'organisation des services éducatifs constitue aussi une ingérence excessive dans l'exercice des droits de gestion et de contrôle de notre communauté ainsi qu'une atteinte inacceptable à ses droits.

Le ministre ne reconnaît-il pas qu'à 87 %, le taux de réussite scolaire dans le réseau éducatif anglophone est de cinq points supérieur à la moyenne québécoise et très proche de la cible de son ministère de 90 %?

M. Burke (Stephen) :Tel que démontré, de nombreuses dispositions du projet de loi n° 23 constituent une nouvelle atteinte aux droits constitutionnels de la communauté anglophone du Québec de gérer et de contrôler notre système d'éducation conformément à la jurisprudence liée à l'article 23 de la Charte. Tout cela pendant que les tribunaux n'ont pas encore statué sur la... pardon, sur la contestation constitutionnelle du projet de loi n° 40 par les commissions scolaires anglophones et qu'un sursis est toujours en place.

Avec le projet de loi n° 23 tel qu'il est rédigé, l'ACSAQ et ses neuf commissions scolaires membres n'auraient d'autre choix que d'initier une nouvelle contestation constitutionnelle. Nous espérons ardemment qu'étant donné le temps à notre disposition, nous réussirons, avec plusieurs autres organismes, à convaincre les membres de l'Assemblée nationale de modifier le projet de loi n° 23 en exemptant les commissions scolaires anglophones de ses dispositions qui portent atteinte à nos droits constitutionnels. Nous invitons le gouvernement à réexaminer son interprétation des droits constitutionnels de la communauté anglophone à la lumière de la jurisprudence et à être à l'écoute de notre communauté afin d'éviter des débats judiciaires inutiles et se concentrer sur des mesures qui contribueront réellement à la réussite éducative de nos élèves.

• (11 h 50) •

M. Lamoureux (Dan) : Thank you for hearing us today. Our full brief was sent to the secretary of the committee yesterday and we will be pleased to exchange points of view with you. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci beaucoup pour votre exposé. Donc, nous sommes maintenant prêts à débuter les échanges. Je cède la parole à M. le ministre.

M. Drainville : Merci, Mme la Présidente. Merci pour votre présentation. Je dois dire d'entrée de jeu, Mme la Présidente, que je ne souscris pas, évidemment, à la... Aux conclusions qui nous ont été présentées aujourd'hui. La position du gouvernement, c'est que le projet de loi n° 23 respecte les droits de la communauté anglophone. Et je me suis gardé de... d'en dire davantage dans les interventions publiques que j'ai faites, parce que, comme on le sait, le projet de loi ou la loi 40 est présentement devant les tribunaux, on attend un jugement... En fait, on attend depuis déjà un certain temps le jugement et donc, on va attendre ce jugement-là et se garder de commenter davantage.

Par ailleurs, j'ai pris bonne note du commentaire de votre directeur général, l'ancien député Russell, que je salue et... N'est-ce pas, Russell, on a siégé ensemble? Et, malgré nos désaccords, il y a toujours eu beaucoup de respect entre nous deux. Je veux juste vous informer que j'ai rencontré le Quebec Provincial Association of Teachers, c'était hier ou avant-hier, et j'ai rencontré également le English Parents Committee Association pour qu'ils puissent me livrer de vive voix les objections qu'ils ont et les observations aussi qu'ils ont. Parce que ce'est pas juste des objections, il y a des bouts de... Du projet de loi n° 23 avec lesquels ils sont d'accord ou en tout cas auxquels ils ne sont pas en désaccord, vous dire ça comme ça, envers lesquels, donc, ils ont une certaine ouverture.

Je veux vous dire également que je me réjouis et je constate aussi le taux de réussite...

M. Drainville : ...plus élevé dans les commissions scolaires anglophones et je m'en félicite. Je m'en félicite et je vous félicite pour ces résultats que vous obtenez. Donc, je comprends très bien les... le grief ou, plus encore, l'opposition de nature constitutionnelle de votre présentation, de votre... qui sous-tend votre position. Mais est-ce qu'il y a, dans ce projet de loi n° 23, des choses quand même qui sont positives? Si on met de côté la question constitutionnelle, là, par exemple le fait que le gouvernement souhaite avoir davantage accès à des données précises en temps réel pour mieux gouverner le réseau, prendre de meilleures décisions et aider, le cas échéant, les élèves, notamment des élèves à besoins particuliers, est-ce que ça, pour vous, c'est une orientation positive?

M. Copeman (Russell) : M. le ministre, la collecte d'informations en temps réel nécessaire à des mesures d'amélioration du taux de réussite est toujours bienvenue. Nous l'avons signalé dans notre mémoire, nous ne sommes pas des experts en informatique, nous posons certaines questions quant à la protection de ces informations nominalisées, mais on ne s'objecte pas du tout à la notion que le ministère et le ministre désirent avoir plus d'informations en temps réel sur la situation dans nos écoles. La même chose pour l'éducation à distance, nous nous comprenons que c'est nécessaire d'encadrer la possibilité de livrer des services à distance pour des élèves.

Nous vous suggérons par contre de s'assurer que les paramètres de ce cadre, que ce soit législatif ou réglementaire, est assez large, hein? Pour le moment, tel que l'on comprend, c'est le ministre qui détermine qui est éligible, dans quelles circonstances, et ainsi de suite. Nous vous suggérons peut-être, pour le bénéfice des étudiants et en respectant la notion de subsidiarité, que cette décision soit prise conjointement avec les écoles, les commissions scolaires et les parents. Ça se peut que, dans votre appréciation de qui est éligible, quand et dans quelles circonstances, il y ait des choses qui vous échappent.

Alors, on suggère une certaine flexibilité avec les pédagogues, avec les parents et avec les commissions scolaires afin de s'assurer que personne n'est laissé de côté dans l'obtention des services à distance, services que les commissions scolaires anglophones livrent depuis de nombreuses années, entre autres à cause du petit nombre, des fois, d'élèves dans nos écoles. Alors, nous avons déjà une expertise là-dedans. Ça fonctionne bien. On vous suggère une certaine flexibilité et une compréhension des particularités de notre réseau.

M. Drainville : Aidez-nous à illustrer pour nous ce qui se fait déjà, dites-vous, dans des petites classes, dans des petits groupes. Bien, donnez-nous des exemples, s'il vous plaît.

M. Copeman (Russell) : Bien, je vous donne un exemple, peut-être, des écoles en Gaspésie, hein, où il y a des petites écoles au secondaire aussi petit que 120, 150 élèves. Alors, il y a des cours avancés, mettons, en physique, en chimie et autres qu'une école ne peut pas donner parce qu'il s'agit, possiblement, de deux élèves dans l'école qui veulent avoir accès à ces cours-là. Alors, sur le plan de l'organisation des ressources humaines, on ne peut pas nécessairement livrer un cours à deux élèves. Alors, par l'entreprise de LEARN, qui est un organisme qui relève des commissions scolaires, on regroupe ces élèves dans plusieurs écoles, même plusieurs régions, et on livre ce cours-là avancée à distance, avec un taux de succès qui est ma foi tout à fait acceptable et identique dans beaucoup de cas de ce qui se passe dans la salle de classe.

M. Drainville : Et est-ce que les élèves, à ce moment-là, sont dans une salle de classe, devant un écran ou est -ce qu'ils sont à la maison?

M. Copeman (Russell) : Non, ils sont... Ceux qui sont capables, évidemment, ils sont dans une salle de classe, oui, absolument. Ils ne sont pas dispensés d'être à l'école, mais, par manque d'effectif scolaire, on ne peut pas livrer le cours dans une école pleine.

M. Drainville : O.K. Et donc vous le faites, vous nous dites que ça donne des résultats... vous utilisez le mot acceptable. Dans certains cas...

M. Drainville : ...je devine que c'est même comparable, là, peut-être, à des classes où le cours est donné en présentiel. Donc, votre inquiétude par rapport à l'enseignement à distance, à ce moment-là, c'est quoi? Parce que ce que vous nous exposez, c'est plutôt une réussite. Donc, votre crainte, c'est que?

M. Copeman (Russell) : C'est le libellé dans le projet de loi, M. le ministre, où on donne... si nous avons bien compris, c'est le ministre qui détermine, de façon exceptionnelle, à qui et dans quelles circonstances ces classes-là peuvent être livrées. Alors, tout ce qu'on vous dit, c'est qu'en partie, puisque nos écoles, notre réseau est relativement petit, dans bien des cas il faut s'assurer que ce n'est pas une question d'exceptions nécessairement, ce n'est pas pour cause de maladie, ce n'est pas pour cause de la COVID et, ainsi de suite. Alors, on veut juste s'assurer, dans la réglementation, que vous comprenez notre situation, puis elle est reflétée dans la réalité.

La Présidente (Mme Dionne) : En terminant, M. le ministre.

M. Drainville : Bien, c'est très bien reçu, M. Copeman, et je comprends très bien que... L'idée, ce n'est pas de vous empêcher de faire ce que vous faites, là, déjà, et que vous faites, visiblement, très bien, là. Donc, il va falloir, effectivement, soit dans le libellé du projet de loi, soit dans le libellé du règlement... Mais je vous assure que notre objectif, c'est de ne pas restreindre la liberté que vous avez déjà de... bien, enfin, de satisfaire aux besoins de vos élèves, des élèves de votre réseau, je vous l'assure. On va essayer de trouver un moyen de faire en sorte que vous soyez rassurés là-dessus.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci beaucoup. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Saint-Laurent.

Mme Rizqy : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Permettez-moi de vous souhaiter la bienvenue à l'Assemblée nationale du Québec. Évidemment, nous avons siégé ensemble lors de la réforme précédente, qui a été adoptée sous bâillon, et c'était à la même époque qu'en huit mois il y a eu quatre bâillons. Je pense que vous, quand... ancien député, M. Copeman, en huit mois, c'était du jamais-vu, avoir quatre bâillons. Et, évidemment, ça a été contesté devant le système judiciaire. Présentement, il y a des ressources du gouvernement qui sont aussi devant les tribunaux. On n'a pas encore fait... Puis on a demandé cette question-là à plusieurs intervenants qui sont venus ici avant vous : Est-ce qu'on a fait le bilan de la dernière réforme? La réponse :  Non. Vous êtes aussi des gestionnaires. Vous, avant d'entreprendre un autre changement, faites-vous des bilans?

• (12 heures) •

M. Copeman (Russell) : Bien, normalement, Mme la députée, une évaluation doit être faite. Et on indique, dans notre mémoire, le but d'une intervention, soit en politiques publiques ou en législation, c'est de corriger un problème. Où est le problème? On n'est pas du tout convaincus qu'il y a un problème.

Par ailleurs, j'étais fasciné de lire le premier ministre, qui a dit, dans un article dans LaPresse... qui justifie la nomination des directeurs généraux par le gouvernement : «Quand les résultats ne sont pas là — je cite au texte — il faut avoir le pouvoir de changer les personnes qui prennent les décisions localement.» Je vous soumets, nous vous soumettons que, dans le réseau anglophone, les résultats sont là. Nous sommes très proches de la cible de 90 %, le taux de succès. Sur les... si vous me permettez l'expression... les «Top 10» de toutes les commissions scolaires et de tous les centres de services scolaires, dans les «Top 10», il y en a cinq commissions scolaires anglophones.

Mme Rizqy : ...je pense que vous voulez dire «le palmarès des 10».

M. Burke (Stephen) :Sur le palmarès, moi, je peux vous dire que Central Québec a été premier, à quelques occasions, et j'en suis très fier. Et, effectivement, il faut faire... il faut regarder avant de changer des choses.

Vous savez, l'excellence, ce n'est pas une question optionnelle pour nous. Nous devons être excellents. Si nous ne sommes pas excellents, nos élèves ont deux autres choix, l'école publique francophone, l'école privée francophone. Sur mon territoire, il n'y a pas d'école privée anglophone. Alors donc, l'excellence, c'est une condition sine qua non. Et moi, je suis très fier... Ça fait 37 ans que je suis commissaire d'école, presque 15 ans que je suis président de la meilleure commission scolaire... bien sûr, mes collègues ne seront pas d'accord... de la meilleure commission scolaire au Québec, possiblement, au Canada. Alors, je m'excuse, là, mais je suis très passionné.

Et, effectivement, avant de toucher à un taux qui a frôlé les 90,7 % l'année passée... C'est beaucoup, là. Alors, on est là pour aider à répondre aux questions. Moi, comme bon Irlandais, je suis toujours prêt à collaborer.

Mme Rizqy : Mon mari aussi est Irlandais...


 
 

12 h (version non révisée)

Mme Rizqy : ...dites-moi, en éducation, pour mobiliser les troupes, habituellement, ça prend une adhésion. Jusqu'à présent, on a senti que les gens sont d'accord pour avoir plus d'information. Ils disent : Effectivement, avoir des informations, on est pour. Par contre, se faire dire par le ministre : Ah! dans la classe à Marie-Ève, en décembre, ça s'est bien passé en français. Donc, est-ce qu'elle devrait avoir 5 h ou 6 h de formation dans la thématique français? Les gens n'ont pas trop aimé ça se faire dire. Vous, dans votre gestion, parce que ça, c'est quand même assez constitutionnel, votre pouvoir de gestion, quand ça va moins bien, vous n'attendez pas en juin, là, pour intervenir? J'imagine que vous intervenez assez rapidement et promptement auprès des élèves qui ont des difficultés ou si jamais il y a un enseignant, par exemple... Ça peut arriver qu'un enseignant, ça ne fonctionne pas très bien. Vous allez faire une intervention, oui ou non?

M. Burke (Stephen) :Bien, écoutez, la langue française... On parlait du français. Le ministre a fait une sortie la semaine... hier ou avant-hier. Pour nous, la Central Québec, le français, c'est majeur, là, je veux dire, quand on dit à nos parents : Faites-nous confiance, envoyez vos enfants à Central Québec. On leur dit par la même occasion, ils vont être très, très forts en français. C'est important. Et j'ai deux graduations cette semaine puis la semaine prochaine. Et les élèves, les gradués. On appelle ça... celui qui nous salue, et à la fin, ces élèves-là, si vous êtes moindrement distraits, quand ils vont parler en français, vous allez jurer que vous êtes dans une école francophone.

Mme Rizqy : Ah! bien, votre français est impeccable, hein?

M. Burke (Stephen) :Bien, c'est important, Mme, on vit au Québec, mais pour ça, ça nous prend la gouvernance et le contrôle de nos écoles. C'est pour ça qu'on est ici.

M. Lamoureux (Dan) : Pour nous, à Riverside School Board, commission... ou Rive-sud de Montréal, c'était le « birth place » de l'immersion française. C'était... elementary school. Ça a commencé à 50... une cinquantaine d'années... des groupes de parents étaient allés aux commissions scolaires. Et la commission scolaire a bien leur... pas de décision, mais leurs recommandations de faire qu'on commence ici d'aller plus en français qu'un anglais. Et ça, ça, ça arrive comme ça, partout à Québec, dans toutes les commissions scolaires. On veut que nos enfants sont bilingues et on veut qu'ils restent à Québec.

Mme Rizqy : Ah! vous avez sûrement vu passer, hein, l'annonce du premier ministre l'an dernier quand il avait dit qu'il voulait implanter... la sixième année, un programme bilingue partout au Québec, hein, moi, je l'ai bien notée, cette intention du premier ministre. Dites-moi, quand le premier... pardon, quand le ministre... j'ai failli dire le premier ministre, mais ça... une projection peut-être pour certains, mais, de façon plus sérieuse, lorsque le ministre dit : Lorsque les résultats ne sont pas au rendez-vous, mais quels résultats fait-il référence? Le savez-vous?

M. Copeman (Russell) : En fait, c'est une citation du premier ministre dans La Presse.

Mme Rizqy : Ah! finalement, je ne me suis pas trompée.

M. Copeman (Russell) : Non, vous... c'est... et... Alors, je ne sais pas. Je ne peux que présumer qu'il s'agit du moyen qui est utilisé au ministère, c'est-à-dire le taux de diplomation après sept ans. C'est...

Mme Rizqy : ...vu dernièrement, en janvier, le ministre est tombé à bras raccourcis sur un D.G. qui dit : Moi, je n'arrive pas à implanter les maternelles quatre ans. Est-ce que ça pourrait être ça?

M. Copeman (Russell) : Oui, bien, ça m'étonnerait. Le plan stratégique du ministère qui est en développement reprend comme... pas la seule cible, Mme la députée, pas le seul moyen, mais principalement le taux de diplomation à l'école secondaire après sept ans, qui est utilisé, la cible est de 90 %. Trois de nos commissions scolaires sont déjà là, à 90 %.

Mme Rizqy : Je m'en voudrais de vous poser la question suivante. On parle beaucoup de gouvernance scolaire, mais les services aux élèves, et il y a eu des annonces qui ont été faites et je l'ai déjà dit, des annonces importantes pour des ressources supplémentaires. Mais malgré qu'on a fait des annonces pour avoir justement des professionnels de soutien, comme les orthophonistes, bien, les postes n'ont pas été attribués par manque de ressources, mais c'est encore plus criant cette pénurie au niveau de la communauté anglophone. Est-ce que je me trompe?

M. Copeman (Russell) : Non, vous ne vous trompez pas, c'est... Très franchement, c'est moins une question de ressources monétaires que de disponibilité de ressources professionnelles, hein? Les professionnels de langue anglaise sont rares, ils sont très rares, très, très rares en région. Alors, ça impose certains défis aux commissions scolaires qui essaient d'aider les élèves en difficulté ou avec des besoins spéciaux...

M. Copeman (Russell) : ...on se tourne vers le privé des fois pour engager ces professionnels-là par manque de ressources dans la communauté.

Mme Rizqy : Dites-moi, le ministre dit souvent aussi que lui, il est capable de marcher et de mâcher de la gomme, «chew and walk at the same time», alors qu'on met beaucoup d'énergie sur la gouvernance scolaire. Donc, moi, je le vois mastiquer sa gomme, mais est-ce que vous le voyez marcher les écoles pour les pénuries qu'on vit présentement, enseignants, les professionnels de soutien et le personnel de soutien pour s'assurer que, finalement, l'argent investi pour améliorer nos écoles soit vraiment décaissé puis que, finalement, on passe aux projets de rénovation d'agrandissement? Ou est-ce qu'en ce moment on fait beaucoup de masticage de gommes, mais pas beaucoup de marcher?

M. Burke (Stephen) : Moi, je peux me permettre de dire que ça va bien. On a une très bonne entente avec le ministère, avec les fonctionnaires. Et le ministre récemment m'a envoyé deux magnifiques lettres qui nous permettent...

Mme Rizqy : Ah!

M. Burke (Stephen) :Oui, oui. Bien, écoutez, je vous le dis, là, je ne suis pas ici... On est ici pour vous dire que notre gouvernance mérite d'être maintenue.

M. Drainville : ...pour annoncer les nouvelles écoles.

M. Burke (Stephen) :Entre autres, et un magnifique gymnase à Jonquière avec des salles de classe et une maison pour... Vous savez, on administre l'école Jimmy Sandy Memorial avec les Naskapis, et vous avez accepté de rénover une maison pour les instituteurs, les professeurs. Alors, il faut donner à César ce qui est à César. Quand ça va bien, ça va bien.

La Présidente (Mme Dionne) : En terminant.

Mme Rizqy : Donc, on ...respectez... Vous, ça va bien, vous demandez de rester maintenus.

M. Burke (Stephen) :Bien, je parle pour Central Quebec, mais...

Mme Rizqy : Alors, pourquoi changer une formule gagnante?

M. Burke (Stephen) :Absolument. On s'entend très bien.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci beaucoup. Merci pour ces échanges. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Mercier.

Mme Ghazal : Merci. Merci beaucoup, messieurs, pour votre présentation et votre présence ici pour nous aider dans nos travaux. Vous parlez des bons résultats, d'excellents résultats en disant : Bien, on les a, les bons résultats, pourquoi est-ce que le ministre sent le besoin d'intervenir, même dans vos commissions scolaires? Mais je suis quand même curieuse de savoir c'est quoi, votre recette. Est-ce que vous avez des données probantes qui expliquent la situation ou c'est plus lié un petit peu à l'histoire, peut être, du réseau anglophone, de la culture, où les parents sont beaucoup plus impliqués. J'aimerais ça en apprendre plus pour peut-être le réseau francophone.

M. Burke (Stephen) :Bien, je pourrais vous répéter ce que j'ai dit tout à l'heure. L'excellence, ce n'est pas une option, c'est une obligation. Parce que moi, j'ai été obligé de convaincre des mamans et des papas dont, mettons, un des deux est francophone, l'autre est anglophone : Viens à nos écoles. Mais des fois, la maman, elle est professeur de français. Alors, elle dit : Ouf, je ne suis pas sûre, moi, que je veux l'envoyer en anglais. On a réussi à convaincre... les petits garçons, c'est des hommes maintenant, ils vont graduer de Québec High School, ils vont peut-être faire comme moi et graduer de l'Université Laval, moi, je ne suis pas bien bon au football, mais pour le reste... Alors c'est ça, c'est ça, notre système.

Mme Ghazal : Mais comment vous l'avez convaincue? Vous l'avez convaincue parce que c'est une façon d'attirer les parents, c'est ça?

M. Burke (Stephen) :Avec nos résultats. Nos résultats... Tantôt, quand Mme Marwah Rizqy disait : Faites-vous des bilans? Oui. Si on sent que dans une matière donnée, ça ne va pas bien dans telle école, on réagit, en réagit.

Mme Ghazal : Ça fait qu'on pourrait conseiller le ministre aussi qui veut réagir partout, dans toutes les écoles.

M. Burke (Stephen) :Je suis certain qu'il veut réagir.

Mme Ghazal : Puis...

• (12 h 10) •

M. Burke (Stephen) :Allez-y.

Mme Ghazal : Allez-y, allez-y, continuez, vous vouliez ajouter quelque chose.

M. Copeman (Russell) : Mme la députée, au début M. Burke a dit : Il y a plusieurs options pour les gens de la communauté anglophone. M. Burke a exclu les écoles privées de langue anglaise parce qu'il n'y en a pas à Québec, mais il y en a à Montréal. Alors, moi, j'avais le choix d'envoyer mes enfants à l'école publique de langue anglaise, école publique de langue française, école privée de langue française, école privée de langue anglaise et école confessionnelle de la communauté juive. Alors, quand on fait face à ces cinq options-là, c'est sûr que l'école publique doit travailler sur l'excellence en éducation.

En réponse à votre question : Avons-nous des données probantes? Je l'ai entendue, le ministre, avec sa candeur habituelle à CJD, quand il s'est fait poser la question hier, qu'est ce qui explique la différence? Il a dit, et je le cite : «I have no idea». On salue la candeur, mais je pense qu'il faut travailler sur ces données probantes là, nous soupçonnons que c'est une multiplication de facteurs, l'implication des parents et de la communauté, une entente très harmonieuse avec nos syndicats, la flexibilité dans l'organisation du travail. Le pourcentage de griefs par nos syndiqués dans nos commissions scolaires est beaucoup moins important que dans les centres de services scolaires.

Mme Ghazal : Donc, des meilleures conditions de travail.

M. Copeman (Russell) : Non, c'est les mêmes conditions de travail. Non, ce sont les mêmes conditions de travail. C'est la question de...

Mme Ghazal : ...la relation.

M. Copeman (Russell) : ...de bonne entente entre les directions scolaires et les employés.

Mme Ghazal : Il y a un... voyons, le... 

La Présidente (Mme Dionne) : Désolée, c'est tout le temps qu'on avait. Je suis désolée. Je cède maintenant la parole à M. le député de Matane-Matapédia.

M. Bérubé : Merci, Mme la Présidente, Madame, messieurs, bienvenue à l'Assemblée nationale. Heureux de retrouver un ancien collègue, Russ. Le ministre et moi, on a siégé avec Monsieur Copeman à l'Assemblée nationale, et je veux témoigner qu'il a très bien servi ses concitoyens pendant toutes ces années.

Bien sûr, il y a un grand nombre d'enjeux sur lesquels on ne s'entend pas, mais on partage une passion commune pour l'éducation, alors c'est ce qui nous réunit.

Une voix : Et le Québec.

M. Bérubé : Bien sûr, le Québec, toujours, le Québec. Et vous savez que, dans ma circonscription, il y a une école anglophone... School, de Eastern Shore, alors une école magnifique qui a une grande tradition, alors que je soutiens de toutes mes forces pour la réussite scolaire de notre communauté anglophone de ma circonscription.

Dans votre mémoire, vous parlez longuement des droits constitutionnels de la minorité anglophone, des procédures en justice contre le gouvernement présentement en cours sur l'article 23 de la charte, c'est bien ça? Tout le monde convient que la communauté anglophone, celle des ayants droit historiques, doit jouir de droits égaux à ceux des autres Québécois. Le Parti québécois souscrit à ça, mais vous soulignez, par ailleurs, que les communautés cries et inuites bénéficient d'exemptions au regard des lois no 21 et du p.l. no 23. Est-ce à dire que vous estimez que la communauté anglophone devrait jouir du même traitement que les communautés autochtones?

M. Copeman (Russell) : M. le député, le législateur a choisi d'exempter, en vertu de la Convention de la Baie-James et du Nord québécois, la Commission scolaire Kativik et les commissions scolaires cries de la loi no 21 et de la loi no 23.

Ce que nous disons, c'est que notre compréhension, qui est basée, entre autres, sur la jurisprudence, indique que les pouvoirs de gestion et contrôle de la communauté anglophone constitutionnels sont aussi forts qu'une entente négociée entre des peuples autochtones avec la convention de la Baie-James, absolument.

M. Bérubé : D'accord. Il a aussi fait une exemption, en fait, pas ce ministre, mais ce gouvernement, permettant aux commissions scolaires anglophones de maintenir la démocratie scolaire, ce qu'il n'a pas fait pour les francophones.

M. Copeman (Russell) : Tout à fait.

M. Bérubé : D'ailleurs, ça n'a jamais été beaucoup expliqué. Moi, j'appréciais cette démocratie scolaire, ça me permettait d'avoir des relations d'élu à élu. Donc, il vous a permis ça. Pour le temps qu'il me reste, est-ce qu'il y a un élément que vous voulez aborder qui n'a pas été abordé et profiter de la commission et des membres pour en faire part, un élément de votre mémoire?

M. Copeman (Russell) : C'est gentil, M. le député. Le ministre a traité assez rapidement toute la question constitutionnelle, trop rapidement à notre goût. La jurisprudence est claire : il revient exclusivement à la minorité anglophone de nommer les dirigeants de nos établissements scolaires, de nos commissions scolaires.

La Présidente (Mme Dionne) : En terminant.

M. Bérubé : ...

M. Copeman (Russell) : On ne comprend pas comment le ministre peut suggérer que ça respecte la Constitution. C'est impossible...

La Présidente (Mme Dionne) : Merci beaucoup. Merci...

M. Copeman (Russell) : ...

La Présidente (Mme Dionne) : Désolée, c'est tout le temps qu'on a. Désolée. Monsieur, je parle, merci de respecter la présidence. Donc, merci beaucoup pour votre contribution à ces échanges, ces consultations.

Donc, la commission suspend ses travaux quelques instants pour accueillir notre deuxième groupe.

(Suspension de la séance à 12 h 15)

(Reprise à 12 h 18)

La Présidente (Mme Dionne) : Alors, la commission est maintenant prête à reprendre ses travaux. Donc, nous accueillons maintenant l'Association des doyens, doyennes, directeurs, directrices pour l'étude et la recherche en éducation au Québec. Donc, nous avons nos invités en visioconférence. Donc, Mme Julie Desjardins, Mme Anabelle Viau-Guay, M. Ahlem Ammar et M. Jean Bélanger. Non, il y a un remplacement, je pense... Mme Ahlem Ammar, désolée, oui, et M. Jean Bélanger. Donc, bienvenue. Alors, je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour nous faire votre exposé, et, par la suite, nous débuterons les échanges avec les membres de la commission. Donc, je vous cède la parole.

Mme Desjardins (Julie) : Merci beaucoup. Je m'appelle Julie Desjardins, je suis la doyenne de l'École des sciences de l'éducation de l'Université Bishop's et je suis accompagnée, donc, aujourd'hui du doyen et des doyennes de la Faculté des sciences de l'éducation de l'Université de Montréal, de l'Université de Laval... donc Mme Ahlem Ammar pour l'Université de Montréal, Mme Viau-Guay pour l'Université Laval et M. Bélanger pour l'UQAM. Merci beaucoup de nous accorder ce temps. On va essayer de faire de notre mieux dans ces 10 minutes et on compte évidemment sur la période de questions pour aller un peu plus loin dans les échanges.

• (12 h 20) •

D'entrée de jeu, on voulait quand même vous dire qu'on a abordé le travail d'analyse de la loi 23 avec beaucoup de rigueur, beaucoup d'intérêt, puis je vous dirais aussi sans parti pris initial. Et le travail ou la réflexion qu'on vous présente aujourd'hui, c'est une réflexion qui a fait consensus au sein des 14 institutions... au sein des 14 membres, en fait, qui représentent 14 institutions, francophones et anglophones, donc, des institutions universitaires impliquées dans la recherche en éducation et la formation des professionnels de l'éducation au Québec. Pour nous, la valeur principale derrière notre réflexion, c'est la qualité de l'éducation et en particulier la qualité de la formation des enseignants. C'est à travers cette lentille qu'on a regardé le projet de loi et qu'on vous livre nos réflexions.

Le premier élément de réflexion le plus important, et peut-être qu'il n'a pas été tellement abordé par les autres interlocuteurs que vous avez pu rencontrer au cours de la semaine, ça concerne... c'est une préoccupation que nous avons qui est très, très importante, c'est l'abolition du Comité d'agrément des programmes de formation à l'enseignement. Vous savez, au Québec, il y a un article dans la Loi sur l'instruction publique qui a institué depuis 1997 cette instance qui est ni plus ni moins qu'une instance, un mécanisme d'assurance qualité qui garantit au public et au système d'éducation, à la population la qualité de la formation qui est offerte dans les universités au Québec. Le... La loi 23 abolit ce comité, mais, plus encore, et c'est ça qui nous inquiète, elle fait disparaître le concept même d'agrément. L'agrément, c'est un processus de certification, c'est un processus sérieux, rigoureux qui est mené par une entité qui détient une expertise. Toutes les...

Mme Desjardins (Julie) : ...Profession détiennent des mécanismes d'agrément ou d'accréditation des programmes de formation, parfois sous l'égide d'ordres professionnels, parfois sous d'autres égides.

Donc, au Québec, on s'est donné comme institution le Comité d'agrément des programmes de formation, on l'appelle le CAPFE. Et donc, pour nous, la perte du CAPFE, mais la perte... Parce que le concept d'agrément... (panne de son) ...de certains, je dirais, des avis qui seraient donnés par un Comité consultatif de l'INEE, dans le projet de loi, mais c'est sur demande du ministre, il n'y a pas d'obligation d'Agrément, et il y a... Le concept même d'agrément n'existe pas.

Pour nous, c'est une grande, grande préoccupation. On pourra en parler plus longuement avec vous après. Pour nous, c'est l'abolition ni plus ni moins d'un mécanisme de protection du public, qui a d'ailleurs été reconnu en 2002 par l'Office des professions du Québec, qui disait, finalement... Qui était... Lorsqu'il a étudié l'opportunité de créer un ordre professionnel en enseignement, il a examiné les mécanismes qui étaient en place dans les structures du système d'éducation au Québec et a reconnu que ces systèmes-là étaient fonctionnels et garantissaient la sécurité. Et, s'il n'était pas de ces structures, l'Ordre a clairement énoncé qu'il réviserait sa position sur l'opportunité de créer un ordre professionnel, alors ce n'est pas mince comme conséquence.

On est d'autant plus inquiets que cet élément-là n'est pas... n'est même pas mentionné dans les notes explicatives, d'entrée de jeu, là, dans le projet de loi, comme si c'était anodin, cet exercice-là. C'est important pour nous, les doyens, les directeurs de département en éducation, de... d'attirer votre attention sur cet élément-là.

Deuxième partie de notre énoncé aujourd'hui, bien sûr, on va se donner quelques éléments sur la création de l'INEE. On voudrait commencer en vous disant que, pour les doyens, les doyennes, les directions des départements d'éducation, on salue la volonté derrière le projet de loi de se donner un espace pour faire des synthèses de connaissances. On reconnaît la complexité de la recherche en éducation, on reconnaît sa diversité aussi puis on reconnaît aussi la difficulté, même pour les praticiens, d'accéder à cette recherche-là, puis ce n'est pas facile de s'y retrouver. Alors, avoir un projet de synthèse de connaissances, pour nous, c'est un plus.

Il faut savoir, bien sûr, puis je sais que ce sont des choses que vous avez certainement regardées, il existe toutes sortes de lieux, toutes sortes d'organisations qui ont tenté, avec plus ou moins de succès, de, je dirais, de se donner cette mission. Alors, pour nous, on n'est pas contre l'idée d'avoir un espace pour faire des synthèses de connaissances.

Maintenant, ce qui nous préoccupe en particulier par rapport à l'INEE, il y a plusieurs éléments. Je vais en nommer un d'abord, c'est l'addition des fonctions qui sont... et des rôles et de la mission qui sont donnés à l'INEE.

Alors, pour en dire quelques mots seulement, bien sûr, la synthèse de connaissances, c'est une chose, L'identification des meilleures pratiques, j'y reviendrai, mais là, on parle de diffusion aux intervenants du système, de diffusion d'activités de formation, on parle même de contribuer à la formation du personnel scolaire. Et, évidemment, puisqu'on a retiré le CAPFE, c'est l'INEE qui, maintenant, aurait le rôle de... lorsque le ministre lui en fait la demande, de donner des avis sur les programmes de formation, de donner des avis sur le référentiel de compétences, qui est le socle sur lequel on s'appuie pour garantir la qualité de la formation, et même on lui donne le rôle de reconnaître les contenus des activités de formation continue.

Pour nous, il y a, dans cette liste, un mélange des genres, un risque immense de conflit de rôles et de conflit d'intérêts. Et on est d'autant plus préoccupés que toutes ces fonctions sont... S'inscrivent dans un cadre où l'indépendance des membres de l'Institut n'est pas garantie, n'est pas acquise. Je vais en parler dans le point suivant.

Donc, on pense que, si on donne à l'INEE des fonctions de formation, on entre sur le terrain, bien, je dirais, qui a été réservé aux universités depuis des années. On déstabilise complètement l'écosystème de la formation, et ça nous pose quand même beaucoup de questions.

Alors, je vais essayer d'aller rapidement, je vois qu'il me reste à peu près trois minutes. La valeur d'indépendance, pour nous, n'est pas clairement exprimée au regard... dans ce projet de loi, en ce qui concerne l'INEE...

Mme Desjardins (Julie) : ...la composition de ces comités, la façon de nommer les personnes qui vont siéger dans les différentes instances, l'absence d'instance aussi, qui pourrait, je dirais, apporter la voix. L'éducation, c'est un bien, ça appartient à la population du Québec, c'est un bien social, c'est un élément de culture. Il est important d'avoir de l'espace pour que les voix des différents acteurs de l'éducation puissent être entendues, que ce soit dans le choix des objets qui seront mis à l'étude ou qui font l'objet d'une synthèse de connaissances, que ce soit dans la détermination des recommandations. On a été très intéressés par la structure de l'INESSS, l'Institut national d'excellence en santé et de services sociaux, non pas qu'on pense que ce soit parfait, puis on n'a pas la connaissance, puis on n'a pas la prétention d'avoir la connaissance pour en juger, mais on voit que, déjà, dans cette loi, il y a des éléments de structure qui, en tout cas, sont susceptibles de, à tout le moins, donner une impression d'indépendance par rapport à tout le travail qui pourrait être réalisé par un institut comme celui-là.

Quant à la synthèse de connaissances qui est confiée, donc, la mission de synthèse de connaissances, la préoccupation que nous avons, à l'ADEREQ, c'est de s'assurer qu'on n'a pas une vision réductrice de la recherche en éducation quand on fera cette synthèse des connaissances. Vous savez, on parle beaucoup de pratiques efficaces, de données probantes, on n'est pas contre les données probantes, on n'est pas contre les pratiques efficaces. Mais, vous savez, la recherche en éducation, elle a plusieurs fonctions, elle n'a pas qu'une fonction d'évaluation de l'efficacité pratique. Elle a une fonction aussi de documenter des processus complexes. Quand on regarde, par exemple, pour être plus concret, là, tout le domaine de recherche sur la motivation scolaire, ce que ces travaux-là ont donné au monde de l'éducation, ce sont des grilles de lecture. Si un enseignant, aujourd'hui, dans sa classe, constate...

La Présidente (Mme Dionne) : En terminant, Mme Desjardins.

• (12 h 30) •

Mme Desjardins (Julie) : Oui. Alors, il va pouvoir bénéficier de grilles de lecture qui sont développées, et ça va guider ses pratiques. Alors, on a plusieurs recommandations puis on aura l'occasion de le dire au cours de la période d'échange. Merci.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci beaucoup, Mme Desjardins. Nous sommes maintenant prêts à débuter nos échanges. Je cède la parole à M. le ministre.

M. Drainville : Merci, Mme la Présidente. Merci à vous quatre pour la présentation. Juste peut-être reprendre un peu là où vous l'avez laissé, Mme Desjardins, vous dites : On n'est pas contre les données probantes, mais, dans votre mémoire, vous parlez de fantasme, de fantasme des données probantes. Donc, vous n'êtes pas contre, mais, quand on le qualifie de fantasme, mettons que ce n'est pas très positif comme description ou appellation. Donc, vous êtes pour, mais vous n'êtes pas vraiment pour, là.

Mme Desjardins (Julie) : Bien, c'est-à-dire que toute recherche... les données probantes, tel qu'on les définit, sont le produit de méta- analyses, hein? ce qu'on fait, au fond, quand on crée ou on développe ce qu'on appelle aujourd'hui les données probantes, c'est qu'on analyse un volume, un corpus de recherche qui est immense. Quand on analyse des corpus de recherche, c'est un peu ça qu'on a essayé de mettre dans le mémoire, et beaucoup de chercheurs ont analysé, par exemple, les travaux de... Ce qu'on fait, c'est qu'on crée des métacatégories, et on dit : Bon. Bien, cette recherche-là, elle concerne, par exemple... On va classer l'objet d'étude sous la grande catégorie, l'enseignant facilitateur, par exemple. Alors, c'est sûr que, dans sa construction d'une méta-analyse, on construit des catégories.

Et donc, quand on parle de fantasme, peut-être que le mot est un petit peu, je dirais, provocateur volontairement, c'est que toute recherche, même la méta-analyse a des limites. Les recherches ont toujours des limites, on ne trouvera jamais... Quand on parle de fantasme, c'est le fantasme de dire : Voici la pratique, la recherche le montre. Et ce n'est même pas vrai dans les sciences de la santé, on a toujours des taux de succès, on a toujours des variables. Il y a des choses qu'on ne comprend pas. On ne comprend pas pourquoi certains sujets ne réagissent pas à tel traitement ou à telle approche. Donc, ce qu'on appelle, c'est la nuance, ce qu'on appelle, c'est aussi la place donnée aux enseignants, les outils, des connaissances, des critères...


 
 

12 h 30 (version non révisée)

Mme Desjardins (Julie) : ...des concepts pour mieux comprendre leurs pratiques, puis agir comme professionnels, être capables de lire leurs pratiques. Alors oui, les données probantes, mais un étant conscient des limites, parce que la donnée probante n'est pas une vérité et n'est jamais... ne peut jamais être une prescription. La prescription, c'est l'enseignant qui doit être capable et avoir l'espace dans sa classe pour pouvoir prendre des décisions éclairées, éclairées par la recherche, éclairées par son expérience, éclairées par son analyse du contexte de l'élève. Alors, quand on parle de fantasme, ce qu'on craint, M. le ministre, c'est qu'on arrive avec des prescrits sur une approche, une méthode. Pour nous, c'est presque un retour en arrière, à l'école normale, au temps où on enseignait : Voici la façon d'enseigner la mathématique, c'est comme ça qu'on le fait et faites ce que je fais. Moi, je vais vous le montrer, faites ce que je fais. Donc, la recherche nous le montre, faites-le et vous allez voir. Non, tous les enfants n'apprendront pas, et c'est dans ce sens-là qu'on est préoccupés.

M. Drainville : Merci. Ma collègue de Hull a une question, je crois.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci, M. le ministre. Je cède la parole à Mme la députée de Hull.

Mme Tremblay : Bonjour, Alors, moi, je vais revenir en question avec la formation initiale. Bon, enseignante de formation, j'ai oeuvré quand même les 20 dernières années de ma carrière dans ce monde-là. Et on a souvent entendu, puis je l'ai souvent entendu et je l'ai constaté, les jeunes enseignants et enseignantes aussi disent que la formation initiale, là, ne répondait pas à leurs besoins quand ils arrivent dans le milieu scolaire. Donc, cette formation-là, ce qu'ils nous disaient, il faut absolument la changer puis l'adapter. Moi, je trouve qu'il y a eu une lenteur, puis c'est ce qu'on entend aussi sur le terrain, là, au niveau, là, de s'adapter à la réalité du terrain. Le milieu éducatif est en forte évolution. Puis, malheureusement, on dirait que la formation initiale ne s'est pas adaptée assez rapidement aux besoins de ces jeunes enseignants puis enseignantes là qui arrivent dans les classes puis qui se disent... bien, qui se sentent un peu démunis par rapport à la formation qu'ils ont... qu'ils ont eu. Ça, on l'a entendu, là, abondamment, là. Alors, nous, ce qu'on propose ici, j'aimerais ça vous entendre, parce que, pour moi, c'est clair qu'il faut qu'il y ait des changements rapides au niveau de cette formation-là. Merci.

Mme Desjardins (Julie) : Merci, Mme la députée. Je pourrais vous répondre longuement. En fait, je pourrais aussi vous renvoyer une question, là, je ne sais pas à quels éléments de la loi, là, vous référez, dans le fond, qui vont... qui pourraient, dans le fond, répondre à votre préoccupation. Moi, je voudrais que votre question renforce notre idée qu'il est important que nous nous donnions des balises, puis que les gens du milieu scolaire qui sont présents, hein, sur le comité d'agrément des programmes de formation en enseignement. C'est un comité, par exemple, qui est paritaire avec des gens du milieu, des gens d'universités, qui contribue, justement, à établir ce qu'on appelle le référentiel de compétences professionnelles. Ce n'est pas seulement soit la... je dirais, il y a toute une réflexion autour de la qualité de la formation. Moi, je ne peux qu'accueillir, je dirais, ce que vous me dites sur l'importance que les universités restent connectées sur les milieux. Ça prend des mécanismes pour le faire. Je pense que, dans chacune de nos universités, on en a. Est-ce que les formations sont bonifiables? Toujours. Est-ce que le contexte évolue? Toujours. Est-ce que la loi changerait quelque chose à cette situation-là? Je vous avoue qu'on ne la pas regardé sous cet angle-là, alors c'est difficile pour moi de répondre à votre question, là, dans ce cadre-ci, là, d'auditions aujourd'hui.

La Présidente (Mme Dionne) : Oui, M. le député. Il reste une minute.

M. Émond : Une minute, donc je vais être très bref dans ma question. Bonjour. Merci d'avoir participé aux travaux de la commission. J'aimerais vous entendre sur vos propositions numéro 9 et 10 concernant la gouvernance de l'institut, de l'INE. Vous plaidez pour... afin d'assurer une meilleure représentativité des universités, mais, surtout, vous parlez de la diversité des réalités éducatives au Québec. Est-ce que vous pouvez nous en dire plus? Qu'est-ce que vous aimeriez voir mieux représenté au sein du conseil d'administration de l'INE?

Mme Desjardins (Julie) : Bien, écoutez, merci pour votre question. C'est une question très importante. Le milieu de l'éducation, il est multiple. On peut juste simplement passer aux niveaux, le niveau préscolaire, primaire et secondaire, on peut penser à l'adaptation scolaire, on peut penser à la formation professionnelle et à la formation des adultes qui sont des secteurs de formation, en fait, qui sont multiples. Après, on peut penser, je dirais, aux divers élèves...

Mme Desjardins (Julie) : ...qui habite, là, ces différents profils, les élèves qui ont des besoins particuliers. Alors, pour nous, ce qui est important quand on parle de représentation, représentativité...

La Présidente (Mme Dionne) : En terminant, Mme Desjardins.

Mme Desjardins (Julie) : Oui. C'est facile, si on n'a pas cette diversité autour de la table, on pourrait facilement travailler, je dirais, sur la voie, sur l'autoroute, là, avoir cette vision de... par exemple le primaire, bien, le primaire, c'est multiple, il faut être capable de considérer, là, l'ensemble des contextes scolaires au Québec.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci beaucoup. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Saint-Laurent.

Mme Rizqy : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Bonjour. Merci de participer à nos travaux. J'aimerais peut-être avoir votre éclairage sur la maîtrise qualifiante pour le préscolaire et le primaire. Je regarde les différents programmes qui existent au Québec. On peut faire un baccalauréat en littérature russe, on peut faire un bac par cumul. Et ce que j'aimerais vous entendre, est-ce qu'il ne serait pas peut-être préférable de peut-être circonscrire quel type de bac pour accéder à la maîtrise qualifiante?

Mme Desjardins (Julie) : Merci pour votre question. Vous m'amenez sur des terrains qu'on n'a pas nécessairement discutés, puis comme je parle au nom de l'ADEREQ, pour moi, c'est extrêmement important de m'en tenir aux éléments qui ont fait consensus et qui ont été discutés. Ce que je vous dirais, par contre, parce que je ne voudrais pas ne pas répondre à votre question, ce que vous êtes en train d'amener sur la table, c'est la question des balises de qualité de la formation. Alors, est-ce qu'on a besoin de balises? Là-dessus, je peux vous dire que ça fait consensus autour de notre table, oui, on a besoin de balises.

Est-ce que les maîtrises qualifiantes... Et, lorsqu'il y a eu maîtrises qualifiantes, lorsqu'elles ont été créées en 2007, il y a eu beaucoup de discussions, il y avait des critères, il y avait même tout un travail qui avait été fait et qui a été fait en continu auquel j'ai même participé avec la direction de la formation de la titularisation du personnel scolaire. Quelles sont les... quelles sont les qualités... les formations préalables que nous allons reconnaître pour le profil d'enseignement en sciences, en français, en anglais langue seconde, etc.? Alors, ce travail-là avait été fait pour les maîtrises qualifiantes qui formaient les enseignants du secondaire dans des profils en particulier. Est-ce qu'il a été fait pour le primaire, pour le préscolaire, primaire? À ma connaissance, non. Est-ce qu'on en a besoin? Oui.

Mme Rizqy : ...votre réponse. Parce qu'en ce moment, dans le projet de loi, on parle beaucoup de la formation continue, mais j'ai l'impression qu'on met un petit peu la charrue devant les bœufs. Les gens disent : On est d'accord pour la formation continue. La plupart des intervenants, même les enseignants, les syndicats, ont dit : On est d'accord pour la formation continue. Mais est-ce qu'on peut aussi parler de la formation initiale? Et vous êtes au courant, les classes sont de plus en plus complexes, et nous avons beaucoup plus d'élèves HDAA que jamais. Et, par conséquent, il me semble qu'on devrait aussi s'attarder à cette formation initiale pour s'assurer que, justement, par la suite, la formation continue prenne tout son sens.

• (12 h 40) •

Mme Desjardins (Julie) : Oui. Écoutez, pour nous, pour les doyens, les directions de département, c'est sûr qu'on revient ici au cœur de la question qui est notre question, qui est notre valeur principale, c'est la qualité de la formation, la préparation des enseignants. Puis, vous savez, les doyens, on n'est pas déconnectés des milieux, on travaille avec les milieux, on connaît la réalité des milieux scolaires et on connaît la réalité et la fragilité, là, comment le milieu a été fragilisé par la présence, en fait, l'embauche de personnes non légalement qualifiées. Avant d'être non légalement qualifié, je pense que ce qui nous intéresse, c'est de parler de non qualifié. Le légalement, il renvoie au brevet, voyez-vous, mais le qualifié, pour nous, là, ça veut dire...

Mme Rizqy : Ceux qui, au fond... qui n'ont même pas de tolérance, là. On parle, en fait, dans la portion de 30 000, il y a environ 27 000 qui n'ont pas de tolérance d'engagement, là. Donc, et eux, dans ce cas-ci, c'est simplement avoir à tout le moins un secondaire V et le début de s'être inscrit à n'importe quel cours en enseignement supérieur, donc ça pourrait être une attestation d'études collégiales commencées et non complétées, et ça, ils sont environ 27 000 présentement.

Mme Desjardins (Julie) : Oui, merci beaucoup pour ces données. Donc, pour nous, c'est essentiel. Puis les universités, toutes les personnes autour de notre table sont unanimes, on veut contribuer à qualifier ces gens, mais cette qualification sera progressive, nécessairement, s'ils sont déjà dans le milieu, elle va prendre un certain temps. Les modèles, on est prêts à s'ouvrir, et il y a plusieurs universités qui réfléchissent à des modèles de formation en emploi, par exemple, non seulement...

Mme Desjardins (Julie) : ...ils y réfléchissent mais qui en ont mis en place. Donc, il y a une réalité dont on est très conscients, et ce qu'on ne voudrait surtout pas, c'est que la population ou le gouvernement, les parlementaires pensent que les universités s'en lavent les mains, là. Au contraire, on est extrêmement préoccupée et on est à la table pour trouver des moyens pour qualifier progressivement ces personnes, s'assurer que nos enfants au Québec reçoivent une formation de qualité qui les préparent bien dans leur progression scolaire à eux puis dans le...

Mme Rizqy : Vous êtes, oui, certes, doyens, mais, à la base, vous êtes professeurs, et une des considérations, je pense, les plus importantes pour un professeur-chercheur, c'est l'indépendance. Lorsqu'on regarde l'INEE, tel qu'écrit présentement le projet de loi, ce n'est pas un calque de l'INESSS, qui est son pendant au niveau de la santé et où on peut voir qu'au niveau de la gouvernance il y a une indépendance. Mais aussi, dans ses choix de thèmes de recherche, ils peuvent décider par eux-mêmes qu'est-ce qu'ils vont chercher, où se pencher. Évidemment, le ministre peut toujours, à n'importe quel moment, le ministre de la Santé, s'adresser à l'INESSS et dire : J'aimerais que vous vous attardiez à tel sujet, et me pondre une étude, s'il vous plaît, ou nous faire un état des lieux. Il me semble que c'est une condition sine qua non à une indépendance de la recherche.

Mme Desjardins (Julie) : Évoutez, vous touchez un point, peut-être l'un des points les plus préoccupants pour nous. Puis, pour nous, ce n'est pas une question du ministre en place, O.K., j'aimerais qu'on clarifie ça, là, c'est une question... une loi, c'est quelque chose qui perdure et qui traverse les différents gouvernements, les différentes personnes qui vont occuper des fonctions de ministre. Moi, je l'ai écrit dans mon dossier, je n'ai pas le chiffre exact, mais ça fait 59 ans que le ministère de l'Éducation existe, on a eu quelque chose comme une trentaine de ministres de l'Éducation. Vous imaginez combien on peut fragiliser le système éducatif si on accorde aux ministres, et nous l'avons mis au pluriel volontairement, aux ministres qui passeront la possibilité de reconnaître les programmes sans expertise, sans avoir l'avis d'experts ou de comités d'experts indépendants? Vous imaginez aussi ce que ça veut dire, si ce sont ses ministres qui... Et on le sait, les ministres font partie... s'inscrivent dans une vision politique, et c'est correct, c'est comme ça que notre système fonctionne, et on accepte ça, mais, si on place le système... dans une gouvernance ou, en tout cas, sujette à une gouvernance où ultimement le ministre a énormément de poids dans la prise de décision, dans la détermination des orientations, on fragilise, parce que sinon, on est quand même des gros navires, on est des gros bateaux, là, on ne se retourne pas de bord. C'est normal, on est des institutions, on prend le temps de réfléchir les choses, on prend le temps de réfléchir nos formations, en particulier, mais la recherche aussi.

Alors, c'est sûr que, pour nous, on appelle le gouvernement à installer des structures qui ont une vision de longévité, de durée dans le temps, de stabilité, mais une vision qui va nous amener vers l'avenir. Et, pour ça, effectivement, vous avez absolument raison, on a besoin d'indépendance, indépendance dans la gouvernance.

Écoutez, il n'y a même pas, dans le projet de loi... dans la nomination, le ministre nomme, il n'y a même pas une consultation des organisations pour que celles-ci proposent des noms. On a ça dans toutes les organisations gouvernementales. Donc on peut comprendre, là, que le gouvernement a ce rôle de nommer des gens, mais il faut montrer, assurer... Puis, non seulement ça, c'est toute la crédibilité du travail que l'INESSS... l'INEE, pardon, va faire qui va être en jeu. Si on n'assure pas ça, je peux vous dire, on voit déjà les foudres, là... les gens se soulèvent. Si on n'est pas capable d'aller chercher l'adhésion du monde de l'éducation, une adhésion significative, on n'aura jamais une adhésion à 100 %, cette structure-là est vouée à l'échec. C'est notre point de vue.

Mme Rizqy : Il me reste une minute, alors je poserais deux questions très rapides. Évidemment, le gouvernement est majoritaire, donc ils vont aller de l'avant avec ce projet de loi. Nous, on ne peut que faire des amendements pour essayer évidemment de le bonifier. J'aimerais savoir, si on se projette dans l'avenir, l'INEE est créé, il me semble que la personne dirigeante devrait elle aussi être un chercheur, c'est-à-dire avec un doctorat et ses compétences de recherche bien établies. Et deuxième question, comment vous allez être capables de collaborer tout en maintenant votre autonomie professionnelle mais votre indépendance de chercheurs...

Mme Desjardins (Julie) : ...bon, écoutez, vous dites, je veux juste reprendre votre début, là, que la loi va aller de l'avant. Nous, on a une recommandation, c'est de suspendre le processus d'adoption de cette loi-là, prendre le temps de documenter les impacts de la création d'un organisme comme celui...

La Présidente (Mme Dionne) : En terminant.

Mme Desjardins (Julie) : ...sur l'écosystème de la recherche et de la formation. Alors...

La Présidente (Mme Dionne) : Merci beaucoup, Mme...

Mme Desjardins (Julie) : ...j'espère qu'on va prendre le temps de...

La Présidente (Mme Dionne) : Merci. Avant de continuer nos échanges, est-ce qu'il y a consentement pour aller au-delà de quelques minutes, soit environ trois minutes, passé 12 h 50? Consentement. Merci. Alors, on poursuit avec Mme la députée de Mercier.

Mme Ghazal : Oui. Merci beaucoup pour votre présentation. J'aurais une question sur votre... sur le processus d'agrément, votre recommandation numéro 7 : «Que le processus d'agrément des programmes soit mieux encadré par la loi, afin d'éviter les glissements et d'assurer l'efficience de la démarche.» Qu'est-ce que vous voulez dire par «glissements»? Et, de façon générale, nous expliquer cette recommandation-là.

Mme Desjardins (Julie) : Oui, absolument, parce qu'on a voulu être honnête aussi par rapport à ce processus-là puis à cette recommandation. Par le passé ou, je dirais, dans la dernière année, avec le nouveau référentiel de compétences, etc., le comité d'agrément détermine lui-même son processus d'agrément, quelles questions il va poser, quels documents il va exiger, etc., et avec les années s'est installé une lourdeur, d'une part, mais aussi des questions qui, de notre point de vue, outrepassait le domaine de compétences là du CAPFE lui-même. Alors, d'un côté, on a été un peu critique, je dirais, des processus qui ont été adoptés par le CAPFE. On estime qu'il y a un recadrage qui est à faire, puis on accueillerait véritablement la... je dirais, la part du ministre dans ce travail-là, et on s'inscrit comme des collaborateurs. On a déjà amorcé des discussions avec le CAPFE, avec le ministère, les gens du ministère de l'Éducation. Et c'est pour ça qu'on dit : Oui, le CAPFE, mais attention, on doit être certain que le travail du CAPFE se fait de façon...

Mme Ghazal : Donc, vous... il me reste peu de temps, donc vous, au lieu d'abolir le CAPFE, comme le projet de loi le fait, vous dites : Oui, il y a des choses qui ne marchaient pas, mais il faudrait le maintenir pour que le processus soit indépendant, et tout ça. Par rapport aux 30 crédits, c'est quoi, votre position, les gens qui ont déjà un bac et ce que la TELUQ, là, ajoute pour donner le brevet à quelqu'un pour enseigner?

Mme Desjardins (Julie) : Oui, bien, vous comprenez que vous me placez dans une situation difficile dans la mesure où je vais me répéter, je parle au nom de l'ensemble des doyens. Ce qui a fait quand même consensus autour de la table, c'est cette idée que je reviens à la notion de qualifier progressivement et, pour nous, on pense qu'il faut être très, très prudent, là, par rapport à la capacité de donner, de former correctement les gens avant de les reconnaître légalement qualifiés. Mais on est très ouverts à des processus, je dirais, de formation qui seraient peut-être, par exemple, en étape, en échelon, dans une certaine séquence où on pourrait qualifier progressivement. Mais évidemment, là, je ne suis pas ici pour donner mon avis personnel, mais je suis ici pour parle au nom...

Mme Ghazal : O.K., c'est ça, vous n'avez pas une position de groupe sur le... est-ce que la qualité va être maintenue, est-ce que c'est une bonne chose, est-ce qu'il faudrait peut-être maintenir un 45 crédits, 60... Oui.

M. Bélanger (Jean) : En fait, l'autre position qu'on a tenue aussi, c'est de... ce que le... que tout programme doit respecter cadre réglementaire actuel et futur ou futur, et donc que ça prend un organisme qu'on revient là-dessus pour valider si ces nouveaux programmes-là. Qu'ils soient plus courts ou... ou imbriqués, qu'ils respectent... en bout de ligne, là, quand on donne le brevet à quelqu'un, bien, qu'ils rencontrent le cadre réglementaire.

• (12 h 50) •

Mme Ghazal : O.K. C'est ça. Comme...

La Présidente (Mme Dionne) : Merci beaucoup.

Mme Ghazal : Bon. Mais merci beaucoup.

La Présidente (Mme Dionne) : Je suis désolée. Je cède la parole à M. le député de Matane-Matapédia.

M. Bérubé : Merci, Mme la Présidente. Ça nous fait un plaisir d'échanger avec vous. Je lis dans votre mémoire que «La création d'un institut national d'excellence en éducation sous-tend une vision — et je cite — étroite de la recherche en éducation...», et surtout qu'elle est, et je cite à nouveau, «...peu ancrée dans les connaissances issu de la recherche.» Donc, c'est des mots durs envers la vision de l'institut telle qu'elle se trouve dans le projet de loi. En commission, on a entendu quelques intervenants, M. Royer, Bissonnette et Maltais, notamment, parler des données probantes, de dire qu'elles vont dans le sens de la recherche universitaire. On a aussi entendu des professeurs réputés hier soutenir l'inverse. Comme vous connaissez bien le milieu de la recherche en éducation, de quel côté, selon vous, penche la majorité des professeurs-chercheurs dans vos universités? Donc, les personnes qui connaissent ça beaucoup mieux que nous. J'aimerais vous entendre là-dessus...

Mme Desjardins (Julie) : ...Oui. Alors, lorsqu'on dit que ça ne s'inscrit pas nécessairement... Ce qu'on a voulu mettre de l'avant par rapport à l'institut puis au travail qu'il va faire, c'est que la recherche montre très, très bien qu'il ne s'agit pas seulement d'identifier des pratiques efficaces, il s'agit... Enseigner, là, c'est un métier relationnel. Enseigner, c'est un métier qui demande un jugement, c'est relationnel. Puis il y a une complexité supérieure, c'est qu'on n'est pas un psychologue, tout seul dans un bureau avec un enfant, on a une classe devant nous. Il y a une complexité, on enseigne avec qui on est, on enseigne avec des valeurs, on enseigne avec des conceptions. Moi, si je pense que... plus j'évalue, plus mon élève va apprendra, là... Quand même que la pratique efficace me dit, tu sais, une évaluation... évaluer plus, ça ne fera pas apprendre plus. Si j'ai ça dans ma conception très, très ancrée, bien, je vais aller la suivre, la formation, mais, quand je vais revenir dans ma classe, je vais me raccrocher à mon savoir, à mes conceptions puis à mes valeurs.

Alors, quand on dit que... Alors, simplement, on a besoin de réfléchir au processus d'accompagnement et de formation du personnel scolaire pour l'amélioration des pratiques, et ça, c'est des choses qui sont montrées par la recherche, on ne change pas de pratique parce qu'on a suivi une formation qui nous dit de changer de pratique.

M. Bérubé : Et c'est partagé par de nombreux collègues qui font de la recherche comme vous. D'accord.

Quant à l'institut, le prochain d'institut, vous écrivez également qu'elle cumulera les fonctions, que ses mandats mélangent les genres, qu'il y a un conflit de rôles et d'intérêts, vous dites même qu'une telle concentration de pouvoir donne froid dans le dos. Vous avez même dit que vous redoutez un retour à l'école normale, il y a quelques instants. Selon vous, est-ce que le ministre, qui veut que l'éducation soit éclairée par la science, est en train, peut-être malgré lui, je vais le dire comme ça, de faire exactement le contraire de ce que dit la science dans vos facultés d'éducation?

Mme Desjardins (Julie) : Bien, je trouve intéressant la façon dont vous l'amener. C'est sûr que le mot «dogme», je pense qu'on l'a mis peut-être quelque part dans notre mémoire, mais quand on dit que ça fait froid dans le dos, c'est que, finalement, on... cette concentration... Écoutez, l'INEE, là, va être un joueur clé pour donner son avis sur le cadre...

La Présidente (Mme Dionne) : En terminant.

Mme Desjardins (Julie) : ...il va faire de la recherche, il va... ou en tout cas, il va faire des méta-analyses, il va faire des choix sur ses méthodologies...

La Présidente (Mme Dionne) : Merci beaucoup, Mme Desjardins. Désolé, c'est tout le temps qu'on avait. Un grand merci pour votre contribution à ces consultations. Donc, la commission suspend ses travaux jusqu'à 15 heures. Merci à tous.

(Suspension de la séance à 12 h 54)


 
 

14 h 30 (version non révisée)

(Reprise à 15 heures)

La Présidente (Mme Dionne) : Bonjour à tous. La Commission de la culture et de l'éducation reprend maintenant ses travaux.

Nous poursuivons les consultations particulières...

Une voix : ...

La Présidente (Mme Dionne) : Excusez-moi, Mme la députée. Nous poursuivons les consultations particulières et les auditions publiques sur le projet de loi n° 23, Loi modifiant principalement la Loi sur l'instruction publique et la loi édictant la... et édictant la loi, pardon, sur l'Institut national d'excellence en éducation.

Donc, cet après-midi, nous entendrons École ensemble, l'Association québécoise des cadres scolaires, l'Ordre des psychoéducateurs et psychoéducatrices du Québec et finalement le Regroupement des organismes communautaires québécois de lutte au décrochage.

Donc, je souhaite immédiatement la bienvenue à notre premier groupe, soit École ensemble. Donc, cet après-midi, nous avons Monsieur Stéphane Vigneault et Monsieur Gabriel Rompré. Donc, je vous rappelle que vous avez 10 minutes pour nous présenter vos propos. Ensuite, nous débuterons les échanges avec les membres de la commission. Donc, je vous cède la parole.

M. Vigneault (Stéphane) : Parfait. Merci beaucoup, Mme la Présidente. M. le ministre, Mesdames et Messieurs les membres de la commission, merci beaucoup de votre invitation. C'est un honneur de pouvoir participer à ces consultations-là. C'est la commission la plus importante de l'Assemblée nationale, donc on est très contents d'être là. Je m'appelle Stéphane Vigneault, je suis coordonnateur d'École ensemble. Et je vous présente Gabriel Rompré, mon collègue...


 
 

15 h (version non révisée)

M. Vigneault (Stéphane) : ...qui est membre du conseil d'administration d'École ensemble. Donc, je laisse tout de suite Gabriel entamer la présentation.

M. Rompré (Gabriel) : Que les élèves du Québec apprennent ensemble, quelle que soit leur origine socioéconomique, ça, c'est la vision d'École ensemble et de ses 5 000 sympathisants. Malheureusement, le marché scolaire qui caractérise l'école québécoise et où doivent se concurrencer les écoles privées subventionnées, les publiques sélectives et les publiques ordinaires, nous éloigne de cette vision. Le projet de loi no 23 a le potentiel de maintenir en l'état le marché scolaire québécois ou au contraire de fournir des outils pour en identifier les lacunes et s'y attaquer.

Nous allons faire des propositions qui iront dans le sens de l'éducation comprise comme un bien commun. Nous allons parler, un, de gouvernance, deux, d'accès aux données et, trois, de l'INEE. Donc, au niveau de la gouvernance, l'article 25 de p.l. no 23 précise qu'un centre de services scolaire doit conclure avec le ministre une entente annuelle de gestion de l'imputabilité. Les écoles privées subventionnées ne sont pas mentionnées à l'article 25. Un élève du secondaire privé subventionné reçoit pourtant en fonds publics 75 % de ce que reçoit un élève équivalent du public. Il n'y a pas de raison de soustraire les écoles... les élèves d'écoles privées subventionnées des bénéfices anticipés de l'entente de gestion. Elles font partie de notre système d'éducation. C'est ce qui nous mène à notre première proposition : Que le p.l. no 23 exige des écoles privées subventionnées qu'elles concluent une entente annuelle de gestion et d'imputabilité avec le ministre.

M. Vigneault (Stéphane) : À propos des données, le p.l. no 23 contient diverses mesures pour nous donner un accès plus rapide à des données de meilleure qualité sur le système d'éducation. Le dernier rapport de la Vérificatrice générale a démontré par l'absurde, là, à quel point le système de collecte de données était défaillant. La Vérificatrice générale a dû faire elle-même des calculs pour connaître le nombre d'enseignants non qualifiés. Donc, on peut dire que le Québec vit une sorte de pénurie de données. Et si le p.l. no 23 peut améliorer cette situation-là, il faut s'en féliciter, et le ministre a tout à fait notre appui là-dessus.

Mais une fois que la mécanique des données est réglée, est réparée, la vraie question, c'est la suivante, c'est de quelles données on a vraiment besoin. Vous avez sûrement vu passer le Bulletin de l'inégalité des chances en éducation qui a été publié il y a deux semaines. Je cite les auteurs du bulletin : «Il n'y a pas de portrait exhaustif de l'école à trois vitesses, de l'enseignement privé et de ses populations d'élèves, des projets particuliers qui se sont développés dans les deux réseaux, de leurs pratiques de sélection, des frais réels assumés par les familles, ni de données concernant le milieu socioéconomique.»

Bref, ce qu'il nous faut prioritairement, ce sont des données socioéconomiques. Et de bonnes données socioéconomiques, ça s'obtient. On a juste à regarder ce qui se passe en France. Je vous donne trois exemples. Il y a un mois exactement, le 7 mai dernier, le ministre français de l'Éducation déclarait : En France, la ségrégation scolaire est la plus importante d'Europe. Sur le site du ministère de l'Éducation français, on peut lire : La France est l'un des pays de l'OCDE où les déterminismes sociaux pèsent le plus sur la réussite scolaire des élèves. Et aussi, la Direction de la performance du ministère français de l'Éducation nous informe par exemple que 18 % des élèves du secteur privé sont de milieux défavorisés, alors que c'est 43 % des élèves du secteur public.

Ce sont des exemples, mais c'est pour vous montrer que, ces affirmations-là, on peut les faire. Ces acteurs politiques là, administratifs là peuvent les faire parce qu'on a les données, on est allé les chercher. Et le ministère de l'Éducation en France a conçu en plus un indicateur très fin qui s'appelle l'IPS, l'indice de position sociale, qui permet de déterminer, à partir de critères liés aux chances de réussite, le profil social des élèves et celui des écoles. Donc, les élus, les journalistes, le grand public, tout le monde y ont accès.

Bien sûr, un tel niveau de connaissance et de transparence au Québec, pour l'instant, c'est inimaginable. Les gouvernements successifs ont préféré une sorte de politique de l'autruche par rapport à ces données. Tout le monde sait, en tout cas, tout le monde, ici, le sait, ce que de vraies données socioéconomiques nous diraient du système scolaire québécois, c'est-à-dire que le système scolaire apparaîtrait pour ce qu'il est, une machine à trier les enfants en fonction du hasard de leur naissance. C'est un système injuste qui est une bombe à retardement pour notre société. Les élèves qui sont écartés des écoles sélectives, publiques ou privées, ça n'a pas d'importance, ces élèves-là, ils comprennent très bien le message qu'on leur... qu'on leur livre : Vous êtes moins importants. Mais c'est sûr que se mettre la tête dans le sable, c'est plus simple. Pas de donnée, pas de problème. Et je sais que le ministère de l'Éducation va nous dire : Ah! on a l'IMSE, l'indice des milieux socioéconomiques. Mais cet indice-là a de graves lacunes et aurait dû être disqualifié depuis longtemps.

M. Rompré (Gabriel) : Et puis on peut avoir des bonnes années, ici aussi, comme en France...

M. Rompré (Gabriel) : ...pour s'en convaincre, on peut juste regarder le travail qu'a fait la vérificatrice générale. Dans son rapport en 2020-2021, elle a rendu publiques des données socioéconomiques au sujet des centres de la petite enfance. On a pu apprendre que le revenu médian des familles des CPE était de 98 000 $, mais que celui des familles de services de garde en milieu familial était de 80 000 $. Les chiffres ont donc soulevé des questions, c'est bien normal, d'accès et d'équité. Ce rapport de la vérificatrice générale a permis aux parlementaires et aux médias d'obtenir un portrait beaucoup plus juste de la situation. Ce que la VG a pu faire pour la petite enfance, ça pourrait assurément être fait pour les écoles. Puis ça me mène à nos trois prochaines propositions.

Notre deuxième proposition, c'est que le PL 23 demande la création d'un indice socioéconomique modernisé pour les élèves et les écoles, à l'exemple de l'IPS en France. On veut aussi dans notre troisième proposition que le nouvel indice socioéconomique distingue clairement les écoles publiques sélectives des écoles publiques ordinaires et que les données sur la sélection intra établissements soient aussi publiées. Et notre quatrième proposition, d'ici à ce qu'un nouvel indice socioéconomique soit activé, que le PL 23 demande au ministère de l'Éducation de publier des données socioéconomiques de base par école, soit le revenu des parents et le niveau d'études des parents.

M. Vigneault (Stéphane) : Et aussi, à propos des données, on remarque que, souvent, les données des écoles privées subventionnées sont exclues des chiffres qu'on reçoit du ministère de l'Éducation. Pourtant, elles font partie du système d'éducation, donc elles ne devraient pas avoir une sorte de privilège de non-transparence. Et ça nous mène à notre proposition cinq, que le projet de loi n° 23 demande au ministère de collecter ces données pour toutes les écoles du système d'éducation et qu'il s'assure que les normes de collecte soient les mêmes pour tous les types d'écoles.

Troisièmement, à propos de l'INEE, le projet de loi n° 23 prévoit remplacer le Conseil supérieur de l'éducation pour tout ce qui concerne l'école par l'INEE. D'entrée de jeu, c'est difficile de comprendre pourquoi le conseil devrait perdre son rôle quant à l'école au profit d'une nouvelle structure. En tant qu'organisme à distance du pouvoir, le conseil supérieur de l'éducation peut accomplir son mandat de façon indépendante, donc. Et vraiment on se pose la question : Pourquoi se priver de cet acquis démocratique que nous avons depuis plusieurs décennies? Toujours à propos de l'INEE, le projet de loi n° 23 indique que sa mission sera de dresser et maintenir à jour une synthèse des connaissances scientifiques disponibles au Québec et ailleurs concernant la réussite éducative et le bien-être des élèves. Toutefois, les déclarations du ministre de l'Éducation, depuis le dépôt du projet de loi, tendent à diminuer la portée de cette mission-là. Et ce qu'on entend, c'est que l'Institut s'occupera de pédagogie et de formation des enseignants, mais, si on veut vraiment disposer d'une synthèse des connaissances scientifiques, on ne peut pas se limiter à la pédagogie. Il y a des recherches qui nous viennent de partout dans le monde qui nous alertent à propos des conséquences du tri social des élèves ou, a contrario, qui nous renseignent sur les bénéfices d'aller à l'école ensemble. Je vous donne seulement quelques indices. Une étude danoise qui suggère que la constitution de classes à habiletés mixtes est la meilleure politique possible pour maximiser les résultats en lecture, une étude récente publiée par Nature qui suggère que la mobilité sociale est améliorée quand les enfants ont la chance d'avoir des amis de toutes les classes sociales, ce qu'ils appellent des environnements interconnectés socioéconomiquement. Bien, ça augmente de 20 % les revenus à l'âge adulte. Et troisième exemple, une étude britannique sur les écoles publiques sélectives qui indique que le fait de diviser les enfants entre les plus aptes d'un côté et les autres de l'autre, dès leur plus jeune âge, ne semble pas conduire à de meilleurs résultats pour ni l'un ni l'autre des groupes, même pour les plus défavorisés. Donc, vous trouverez dans le mémoire d'autres exemples, mais je cite cette dernière étude britannique, une citation qui va vous intéresser : «Dans les zones...

• (15 h 10) •

La Présidente (Mme Dionne) : Il vous reste 20 secondes.

M. Vigneault (Stéphane) : Parfait. «Dans les zones où il existe des écoles sélectives, le système est un moteur évident d'augmentation de la ségrégation sociale et économique dans les écoles, avec tous les dangers que ça comporte.» Donc, en terminant, Mme la Présidente, on se demande si ce genre d'études qui ne sont pas strictement pédagogiques, seront exclues du champ d'action de l'INEE. Parce que penser qu'un effet enseignant...

La Présidente (Mme Dionne) : Merci beaucoup. C'est tout le temps qu'on avait.

M. Vigneault (Stéphane) : Ah! J'y reviendrai. Merci.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci infiniment. Nous allons maintenant procéder au début des échanges. Donc, en tout premier lieu, je cède la parole à M. le ministre.

M. Drainville : Oui. Merci beaucoup, Mme la Présidente. Merci pour votre présentation. D'abord, je tiens à réagir...

M. Drainville : ...d'emblée à la dernière partie de votre exposé, là, on ne se limite pas aux données pédagogiques, là. Il n'est pas question de limiter le mandat de... comment dire? La recherche de données ne sera pas limitée aux seules données pédagogiques. En fait, le projet de loi ne précise pas le type de données. Mais moi, je vous dirais que, de façon générale, les données que nous allons rechercher, le but visé, ça va être toute donnée qui puisse nous aider à améliorer la réussite scolaire des élèves. C'est ça, le mandat. Enfin, c'est ça, le mandat. C'est ça, la vision ou l'objectif. Alors, je tiens à vous rassurer là-dessus, là. Donc, ça, c'est la première chose que je voulais vous dire.

Il y avait un aspect que je voulais discuter avec vous. Hier, on avait... on a entendu un chercheur, M. Prudhomme, qui nous parlait d'enseignement efficace et de politique fondée sur les données probantes et qui nous disait qu'une politique fondée sur des données probantes a un effet positif sur l'équité et l'égalité des chances. Et il y avait aussi le chercheur... ils étaient deux, M. Bissonnette et M. Richard, qui nous ont donné également l'exemple d'un court programme, en fait, le programme de soutien au comportement positif qui nous disait que, là où il a été implanté, dans certaines écoles du Centre de service scolaire Marguerite-Bourgeoys, on s'aperçoit que le nombre de sorties de classes a diminué de 75 % après trois ans. Et donc c'est un programme de soutien au comportement positif qui vise à renforcer les comportements positifs comme ça se dit, mais qui vise aussi à, comment dire, envoyer une sorte de renforcement aux élèves sur certains comportements qui ne sont pas acceptables, qui viennent déranger le reste de la classe, etc. Donc, c'est basé sur l'analyse des données comportementales et on évalue sur une base régulière les résultats de cet enseignement, si on peut dire, ou de ce programme de soutien ou de renforcement des comportements positifs. Et ça aussi, ça donne des résultats très, très probants Il y a une amélioration des comportements, moins de comportements agressifs, par exemple, moins de comportements qui ... de désorganisation des élèves, etc. Donc, je voulais vous entendre là-dessus. Est-ce que vous y croyez, vous, aux données probantes? Est-ce que vous y croyez à l'enseignement efficace?

M. Vigneault (Stéphane) : Oui, tout à fait. Si vous me permettez, M. le... je m'excuse, je ne sais pas si je dois m'adresser à vous, je répondrai au ministre.

La Présidente (Mme Dionne) : Il n'y a pas de problème, vous pouvez vous adresser au ministre.

M. Vigneault (Stéphane) : Oui, ça va. O.K.. D'abord, juste sur ce que vous avez dit au début, sur les données qui vont concerner... qui ne seront pas limitées à la pédagogie, donc, ça, je suis très content de vous entendre là-dessus. Peut-être juste, tout à l'heure, en complément, est-ce que ça sera le cas aussi des études que l'INEE va considérer? Donc, pas seulement les données que le ministère va aller chercher, mais est ce que l'INEE va aussi considérer les recherches un peu, là, comme celles que je vous ai citées qui ne sont pas seulement...

M. Drainville : Il n'y a aucune limite à... L'INEE aura la pleine autonomie de se saisir des recherches qu'il souhaitera... sur lesquelles il souhaitera s'appuyer et qu'il souhaitera rechercher et documenter, etc. Il n'y aura pas de... Il n'y a pas de restriction à l'autonomie, si je peux dire, de l'institut. Le projet de loi tel qu'il est conçu, si vous regardez la mission de l'institut, le premier paragraphe dit : identifier, en concertation avec le ministre et les intervenants du système scolaire, par exemple, l'école ensemble, les sujets prioritaires qui bénéficieraient de ces travaux. Puis après ça, il y a neuf autres paragraphes et, bon, peut être qu'il faudra préciser dans le projet de loi, parce que j'ai entendu des intervenants qui sont venus me le dire, peut être qu'il faudra préciser, comment dire, l'espace d'autonomie auquel l'institut...

M. Drainville : ...pourra... dont l'institut pourra bénéficier. Alors, s'il le faut, on le fera. Mais, dans mon esprit, l'institut va pouvoir décider des études qu'il souhaite investiguer, qu'il souhaite examiner puis documenter. L'important, c'est qu'à la fin on soit confiant que ces études-là sont basées sur les données probantes et qu'on puisse, une fois qu'on a fait... on a dressé l'état de ces recherches-là, les recherches les plus avancées, les connaissances scientifiques, les pratiques pédagogiques les plus avancées... qu'on puisse après ça en faire la synthèse et qu'on puisse surtout la partager avec le corps enseignant.

M. Vigneault (Stéphane) : Parfait. Bien, merci, merci de la précision. Je reviens à votre deuxième question, sur l'enseignement efficace et l'impact sur l'égalité. Il y en a un, impact de l'enseignement efficace sur la réduction des inégalités, mais, comment dire, il ne faut pas s'en tenir à ça.

Il y a un auteur en... j'ai amené son livre ici parce que c'est un peu un livre de chevet, un Britannique, Stephen Gorard, Education Policy, donc les preuves de l'équité et de l'efficacité, et Gorard est très en pointe sur toutes les études en ce qui concerne l'efficacité à l'école, donc la pédagogie, mais pas seulement, tout ce qui est égalité sociale aussi. Et, quand a commencé à circuler cette idée, là, que l'effet enseignant pourrait être un peu dopé aux données probantes puis pourrait compenser pour les inégalités sociales, j'ai écrit à Monsieur Gorard pour lui dire : Il y a cette idée-là qui circule au Québec, qu'on pourrait se passer de s'attaquer à notre problème d'iniquité, d'école à trois vitesses, qu'il connaît bien, simplement en ayant recours aux données probantes. Et il a... très gentil, il a pris le temps de me répondre. Il m'a dit : Écoute, l'enseignement efficace, ça a un impact, mais, sur les inégalités, le fait que les élèves défavorisés ont de moins bonnes notes, la première chose à faire, c'est de s'attaquer aux iniquités du système scolaire. Ça, c'est l'effet de levier le plus puissant. Commencer par ça, c'est ce que moi, je recommande ici, en Angleterre. C'est ce que je recommande à tous les ministres de l'Éducation que... qui me consultent. Commencer par ça. En plus, ça ne coûte presque rien...

M. Drainville : ...pardonnez-moi de vous interrompre. Comme on n'a pas beaucoup de temps, je me permets d'engager le dialogue avec vous. Est-ce qu'il a mesuré... Est-ce qu'il a dit, je ne sais pas, moi : L'enseignement efficace peut compenser pour, je dis n'importe quoi, là, 50 %, mettons, de l'écart, mais l'autre 50 % ne peut pas être compensé, il est trop directement lié à la condition d'origine, et donc ça, ça ne peut pas être... il y a une partie de l'iniquité, entre guillemets, qui ne peut pas être surmontée par l'enseignement? Est-ce qu'il a mesuré ça?

M. Vigneault (Stéphane) : Ça, je ne sais pas s'il l'a fait...

• (15 h 20) •

M. Rompré (Gabriel) : Pas lui personnellement. Parce que, justement... En fait, ce que vous illustrez, c'est probablement un très bon exemple de l'importance de recueillir des données probantes au niveau socioéconomique, parce qu'il y a des études qui ont été faites dans des pays qui ont des meilleurs jeux de données que le Royaume-Uni, dans le cas de M. Gorard, où c'est possible de le faire, puis, à ce moment-là, ils sont capables de mesurer les effets de quartier, les effets de classe aussi. Donc, avec les effets de classe, on est capable, par le biais, de mesurer les interventions qui sont faites, les interventions pédagogiques qui sont faites en classe. Mais, dans toutes les études qui ont été faites à ce niveau-là, l'importance des facteurs socioéconomiques perdure malgré les interventions qui sont faites en classe.

M. Drainville : Ce qui veut dire? Quand vous dites : Les conditions socioéconomiques perdurent, ça veut dire, par exemple, plus d'élèves avec des besoins particuliers, par exemple?

M. Rompré (Gabriel) : Donc, par exemple, des élèves... Donc, par exemple, quand on parle des... par exemple des problèmes comportementaux dans les classes, il peut y avoir effectivement des interventions pédagogiques qui réduisent l'incidence des problèmes comportementaux dans les classes, mais il y a des effets de structure, des effets de la composition de la classe. Par exemple, on peut... on pourrait penser qu'avec une meilleure mixité, que ça soit une mixité socioéconomique ou une mixité de résultats scolaires... qu'il y ait moins un effet de masse critique dans une classe, donc moins d'élèves, par exemple, avec des... avec des problèmes comportementaux qui soient réunis tous dans une même classe, donc qui rendent l'effet, par exemple, des interventions pédagogiques encore plus efficace.

Donc, le fait de recueillir des données au niveau socioéconomique pour savoir quelle est la composition des classes dans laquelle les interventions pédagogiques se déroulent, c'est vraiment essentiel pour être capable d'avoir des vraies bonnes données probantes, même pour... même pour comprendre...

M. Rompré (Gabriel) : ...classe, l'effet des enseignants, il faut connaître aussi un peu le background socioéconomique, le bagage socioéconomique des élèves qui fréquentent la classe.

M. Drainville : Mais votre lecture ou votre... comment dire, le postulat de base avec lequel vous travaillez quand vous parlez des milieux socioéconomiques plus défavorisés... Quel est... quel est l'équation entre le milieu économique défavorisé et certains... certains résultats, ou certains comportements, ou certaines variables que l'on observe dans les... dans les classes et dans les écoles? Quel est le lien... Est-ce qu'il y a un lien de causalité, à votre avis? Et, si oui, quel est-il?

M. Vigneault (Stéphane) : Oui, oui, tout à fait. Je vais vous citer l'OCDE là-dessus qui nous dit : «Le statut socioéconomique a une forte incidence sur la performance des élèves - ça, on est d'accord là-dessus. Mais, dans les systèmes d'éducation plus équitables, davantage d'élèves défavorisés sont performants.» Donc, en d'autres mots, on peut avoir le système comme on l'a, en ce moment, où on sélectionne les élèves puis on les met dans des groupes homogènes entre eux. On pourrait avoir les mêmes élèves, les mêmes enseignants, les mêmes profs, mais y aller de manière équitable et on augmenterait la moyenne générale du Québec automatiquement par la mixité sociale qui tire tout le monde vers le haut.

M. Drainville : Mais, oui, O.K., je comprends que c'est votre... que c'est votre conviction, puis je la respecte, mais j'essaie... Est-ce que... C'est parce que c'est très délicat, mais est-ce que la recherche telle... en tout cas, telle que vous l'appréhendez, est-ce que, dans votre esprit, il est clair qu'élève issu de milieux défavorisés égale plus de chances de quoi, de décrochage, égale moins de chances de réussite scolaire? C'est quoi, le...

M. Vigneault (Stéphane) : Oui, oui, un écart de résultats plus élevé.

M. Rompré (Gabriel) : Toutes les recherches, depuis les années 50, que ça soit aux États-Unis, en France, le démontrent. Il y a toutes sortes de mécanismes de transmission, ça, il y a toutes sortes d'études qui sont plus poussées au niveau qualitatif qui ont été capables d'essayer de démontrer qu'est-ce qui...

M. Drainville : C'est ça. C'est quoi, les explications? Est-ce qu'on le sait?

M. Rompré (Gabriel) : Par exemple, il y a quand même un... il y a quand même une corrélation, par exemple, entre le niveau d'atteinte des diplômes et le revenu. Donc, quand on regarde le revenu, il y a quand même une composante qui est rattachée à ça. En fait, ce qui est le plus important, c'est le diplôme que les parents possèdent...

M. Drainville : En particulier la maman.

M. Rompré (Gabriel) : En particulier la mère, effectivement, c'est vraiment le mécanisme le plus important ici. Puis, dans ce cas-là, on le sait que les élèves, si, par exemple, leur mère possède un baccalauréat, ils ont une chance beaucoup plus importante, eux aussi, d'aller jusqu'à un bac, de réussir, d'aller jusqu'à un baccalauréat.

M. Drainville : D'accord, d'accord. Très bien. Est-ce que mes collègues souhaitent intervenir?

Une voix : ...

La Présidente (Mme Dionne) : Il vous reste trois minutes. Oui, alors, M. le député de Richelieu, la parole est à vous.

M. Émond : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Bonjour, Messieurs. Merci pour votre participation aux travaux de la commission. C'est un plaisir d'échanger avec vous.

Dites-moi, je veux vous amener peut-être sur une autre... une autre piste que je n'ai pas décelée à l'intérieur de votre mémoire, et je serais curieux d'avoir votre opinion là-dessus puisque vous ne semblez pas avoir traité des services éducatifs à distance et la forme d'assouplissement, là, qu'on peut retrouver dans le projet de loi, pour des situations, là, je le rappelle, qui sont exceptionnelles ou imprévisibles. Puis ça, c'est au bénéfice des enfants qui sont les plus vulnérables. Alors, quand on parle d'accès équitable aux services éducatifs, qu'est-ce que vous pensez des services éducatifs à distance? Ou dans quelle situation particulière devraient-ils être utilisés, selon vous, pour être le plus efficace possible?

M. Vigneault (Stéphane) : Je vous dirais que c'est hors de notre expertise, malheureusement. Donc, c'est pour ça qu'on n'a pas traité de ce point-là.

M. Émond : Donc, c'était une omission volontaire de ne pas parler de cette portion-là.

M. Vigneault (Stéphane) : On a un carré de sable bien défini, l'équité en éducation, l'égalité des chances, donc on parle de ce qu'on connaît.

M. Émond : C'est bien. Je respecte... je respecte ça, soyez-en assuré. Peut-être, en terminant, dans ce cas-là, j'aimerais vous entendre à nouveau sur la conversation précédente que vous aviez avec M. le ministre pour les chances égales à tous, peut-être, disons-le comme ça. Vous avez parlé du contexte socioéconomique, là. On parle souvent du fait du code postal, hein, l'influence du code postal dans le développement, où les chances d'un étudiant ou d'une étudiante...

M. Émond : ...d'accéder ou d'avoir besoin à des services particuliers. Qu'est-ce que vous auriez à nous dire là-dessus? Là, je comprends le contexte socioéconomique, mais par zone, là, je ne veux pas faire de ségrégation géographique, là, mais par zone de code postal, dans les milieux les plus difficiles, est-ce que les moyens qui sont en place actuellement sont suffisants, ou qu'est-ce que vous auriez à proposer pour bonifier le tout?

M. Vigneault (Stéphane) : Bien, ce qu'on aurait à proposer, c'est le Plan pour un réseau commun qu'on a rendu public l'année dernière. Et là, donc, ça répond à votre question. C'est sûr que c'est beaucoup plus global que ça. Mais ce qu'on propose globalement, et je vais vous le résumer très rapidement, c'est donc de donner à toutes les écoles publiques et à toutes les... ce qu'on appellera les écoles privées conventionnées, leurs propres bassins scolaires, donc leurs zones pour leurs étudiants, et de ne pas... et de construire ces bassins scolaires là en fonction d'un indice socioéconomique, donc de ne pas voir le fait d'avoir des écoles défavorisées comme une sorte de fatalité, puis dire : Ah! bien, c'est plate, hein, c'est défavorisé, ça fait qu'on va mettre plus d'argent. Prendre un pas de recul puis se dire : O.K., est-ce qu'on ne pourrait pas dessiner le système de manière plus équitable en partant?, ça, c'est un enjeu qui nous a été... Quand on a travaillé sur le réseau commun, on a beaucoup consulté en Europe. Les Européens, les Français surtout nous ont dit : Faites attention à ça parce qu'une carte scolaire peut reproduire des inégalités.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci. C'est tout le temps qu'on a pour ces échanges. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Saint-Laurent.

Mme Rizqy : Merci beaucoup. Bienvenue parmi nous. Est-ce que vous avez besoin de quelques secondes pour compléter votre réponse?

M. Vigneault (Stéphane) : Bien, merci, juste pour dire que, donc, ce qu'on a eu en Europe... Parce que les gens nous ont dit : Faites attention aux cartes scolaires parce que vous pouvez avoir un quartier riche au sud, un quartier pauvre au nord, et donc, là, votre réseau, vous allez perdre les bénéfices. Et donc on a trouvé la solution en Suisse. Ils appellent ça des bassins scolaires équitables. Donc, avec mon exemple nord-sud, bien, on fait un bassin est, un bassin ouest. Donc, automatiquement, tout le monde est aussi près qu'avant de son lieu... de son école, mais les deux écoles sont équivalentes socioéconomiquement. Les élèves le savent, les parents le savent, les enseignants le savent. Et donc on maximise nos chances et on enlève cette peur du système d'éviter de l'école ou de savoir qu'il faut absolument l'école, il faut éviter... On se débarrasse de ça. Merci, Mme la députée de Saint-Laurent.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci et bienvenue à l'Assemblée nationale. Vous avez sûrement entendu le ministre de l'Éducation lorsqu'il était question de l'école à trois vitesses. Bien qu'elle soit largement reconnue par plusieurs intervenants, le ministre, souvent, il dit : Oui, mais c'est comme si on voulait absolument que tous les élèves aillent à l'université, et que ça pourrait dévaloriser ceux qui sont allés faire un DEP, de la formation générale aux adultes ou une attestation d'études collégiales. J'aimerais vous entendre là-dessus, sur cet argument du ministre.

• (15 h 30) •

M. Vigneault (Stéphane) : Oui, oui, bien, en fait, vous l'avez lu dans notre mémoire ou si vous suivez un peu nos activités, là, on ne parle pas de... on ne parle pas de l'université, là. L'école à trois vitesses, ça concerne le primaire, le secondaire et même de plus en plus, malheureusement, le préscolaire. On a vu récemment le cas d'une fillette qui a été a... qui s'est fait refuser l'accès à son école de quartier dans une école dite internationale parce qu'elle n'avait pas d'assez bonnes notes en mathématiques. Donc, ce phénomène-là est rendu même au préscolaire. C'est de ça qu'on parle quand on parle d'école à trois vitesses, on parle de sélection d'enfants. On parle d'élèves, maintenant, au primaire. Moi, ma fille est en quatrième année, là, mais en quatrième année du primaire, ils commencent le magasinage. Ils visitent les écoles au secondaire. À neuf ans, les enfants devraient avoir d'autres choses à faire que se demander où est-ce qu'ils vont aller au secondaire. Ça, c'est... ça m'apparaît, là, évident.

On parle de quoi d'autre? Des projets particuliers. Les projets particuliers sont supposés... on les justifie en disant : Bien, les projets particuliers, ça aide les élèves qui sont plus en difficulté, qui ont peut-être moins d'intérêt, ça les aide à raccrocher. Mais, dans les faits, on leur refuse souvent l'accès parce qu'ils n'ont pas assez de bonnes notes puis ils n'ont pas assez d'argent pour y aller. Donc, ça, ça n'a pas de sens non plus.

On parle aussi des parents qui se demandent : Est-ce que mes deux enfants vont aller à la même école? Est-ce que les deux vont être sélectionnés? Est-ce que mon enfant va rentrer en secondaire I avec ses amis, ou est-ce que le noyau d'amis du primaire va être complètement disloqué à l'arrivée en secondaire I, là où c'est tellement important d'arriver avec ses amis? Des parents qui se demandent : Est-ce qu'il faut que j'engage un tuteur la fin de semaine? Puis pas pour que mon enfant apprenne plus, de plus belles choses, ou de choses plus... non pour qu'il apprenne à faire des examens. On parle de parents qui se demandent s'ils ont l'argent pour aller à la bonne école, des parents qui se disent : Bien, coudonc, c'est tellement stressant...


 
 

15 h 30 (version non révisée)

M. Vigneault (Stéphane) : ...Il n'y aurait pas moyen d'avoir quelque chose de moins... de plus apaisé de parents qui se disent... Qui aimeraient ça pouvoir dire : Moi, je veux le meilleur pour tous les enfants? Donc, c'est de ça qu'on parle, quand on parle d'école à trois vitesses, on parle d'écoles qui sont devenues des silos sociaux.

L'École, ça devrait être l'endroit... C'est peut-être le seul endroit qui nous reste ou en tout cas qui nous resterait pour qu'on puisse se rencontrer, pour que les enfants de tous les milieux, toutes les origines se rencontrent, se connaissent, interagissent, collaborent. Puis là, ce n'est pas ce qui se passe. Puis, on voit, la cohésion sociale, au Québec, la cohésion nationale diminue sans arrêt. Et donc, ça, ça fait partie aussi de l'école à trois vitesses.

Qu'est-ce qu'il y a d'autre? La dégradation des conditions de travail des enseignants. Les jeunes profs qui sortent de l'université et qui se retrouvent dans les classes non sélectives parce qu'ils n'ont pas l'ancienneté pour y aller, et donc, là, ils ont... Quand ils n'ont pas d'ancienneté, ils ont les classes les plus difficiles, bien, la... bien, pas «la plupart», mais beaucoup d'entre eux décrochent, alors qu'on est à un moment où on voudrait absolument qu'ils restent avec nous. On a besoin d'eux en ce moment puis on ne leur donne pas un environnement qui est propice à leur... au fait qu'ils restent à l'école.

On parle de... Du taux de décrochage le plus élevé au Canada. On parle d'élèves qui ne peuvent pas aller à l'école à pied, en vélo, parce qu'ils n'habitent pas près de chez... ils ne vont pas à l'école près de chez eux, ils ne vont pas à l'école du quartier. On les envoie partout sur le territoire faire de la flûte ou du sport en autobus, en auto, ils sont dans le trafic, ils polluent, ils perdent leur temps, ils vont faire du sport en restant assis 2 h pour s'y rendre.

On parle aussi de la notion de choix, le fameux choix : ah! Les parents aiment le choix. Mais il faut se rendre compte que ce n'est pas les parents qui ont le choix. Ceux qui ont le choix, là, c'est les écoles, c'est les écoles privées subventionnées, les écoles publiques sélectives, c'est elles qui ont le choix, qui viennent choisir leurs clients. Je n'aime pas ce terme-là, mais, malheureusement, c'est là qu'on est rendus.

Donc, quand on parle d'école à trois vitesses, c'est de ça qu'on parle, préscolaire, primaire, secondaire. C'est un problème qu'on doit régler, qu'on peut régler. Puis d'ailleurs je veux saluer le fait que le ministre a accepté, là, de nous rencontrer. J'espère qu'on va pouvoir le rencontrer bientôt puis se mettre en mode solution, parce qu'il y en a, des solutions. C'est trop important, là, il faut régler ce problème-là.

Mme Rizqy : Je vais vous donner un exemple bien concret. C'est une maman de Québec à qui j'ai parlé. Elle a déboursé un peu plus de 15 000 $ de frais juridiques, parce que son enfant de quatrième... De quatre ans, là, donc en maternelle quatre ans, veut aller à l'école de quartier, qui est en face de chez elle, mais c'est une école dite 2-40, mais il n'y a aucun projet régulier. Mais ils se sont dit : Ah! on a un autre établissement, qui est à un kilomètre de l'école a, il y a une école B. On va dire : C'est la même école, et là, on voit tous les enfants dire là-bas que c'est la même école. Bien, c'est deux équipes-écoles différentes, les enseignants restent dans chacune de ces écoles-là. Mais il me semble que c'est assez ahurissant de voir qu'on fait passer un examen à un enfant de quatre ou cinq ans pour aller à l'école de son quartier.

M. Vigneault (Stéphane) : Oui. Bien, c'est là qu'on est rendus, c'est... Malheureusement le modèle québécois est fondé sur un marché scolaire. Ça n'a pas... Ça n'a jamais été un choix démocratique, là, une seule fois, on s'est dit : Aïe, c'est donc bon, ça, la ségrégation scolaire, on doit vraiment séparer les enfants, on n'a... ça n'est jamais arrivé. Mais, de fil en aiguille, on a laissé aller ça et aujourd'hui on se retrouve avec ce système-là, malheureusement. Mais il est tard, mais il n'est pas trop tard, on peut agir.

Mme Rizqy : ...Un projet de loi, justement, peut venir corriger cette lacune puis s'assurer qu'une école de quartier reste une école de quartier. Puis évidemment, les projets pédagogiques sont les bienvenus, mais encore faut-il qu'ils soient accessibles. Lorsqu'on a vu les chiffres, souvent le ministre dit : Oui, c'est autour de 200 ou 300 $. Moi, ce n'est pas ça que j'ai comme information. Et les chiffres émanent du gouvernement, on parle de programmes de 4 000 $ en moyenne.

Mais souvent, disons, ils pourront faire, les autres, du parascolaire. Ça envoie quoi comme message à un jeune qui aimerait faire partie de l'équipe de basketball? Comme le jeune Bennedict Mathurin, que... Je tiens à souligner, qui, hier, est allé à son école à Montréal-Nord pour encourager les jeunes. Puis il leur a dit : Moi, mon rêve, ce n'était pas de jouer à la NBA, c'était d'aller à l'université. Mais il a quand même abouti à la NBA, on le souligne au passage. Mais c'est quand même important de savoir qu'on ne sait pas c'est qui, le prochain Bennedict Mathurin.

Puis, quand qu'on a sept, huit, neuf ans, 10 ans ou 13, 14 ans, on commence à découvrir, il me semble que, moi, l'objectif des projets pédagogiques particuliers, c'est aussi susciter la curiosité chez les enfants, chez les adolescents. Oui, les accrocher à l'école, les motiver, mais ça se peut que, si vous commencez au soccer, finalement, vous allez préférer le programme de robotique, mais encore faut-il que ce soit accessible.

M. Vigneault (Stéphane) : Tout à fait, tout à fait. Non, c'est... Ça devrait être un endroit où on peut prendre...

M. Vigneault (Stéphane) : ...les risques. On peut essayer, on peut se tromper. Puis c'est ce qu'on propose, nous, dans le réseau commun. C'est que chaque école puisse offrir ce qu'on appelle des parcours particuliers. Donc, chaque école aura une panoplie de parcours de programmes offerts, gratuits, sans sélection, sans sélection par... sur les notes. Parce qu'il y a des bonnes choses dans les projets particuliers. Donc, il ne faut pas jeter le bébé avec l'eau du bain, mais il faut poser comme principe que tout le monde doit y avoir accès, que ça doit être gratuit et c'est tout à fait possible de le faire. Nous, je veux dire, on n'a rien inventé. On reprend un modèle qui existe, une école à Princeville qui a mis 100 places il y a... ça fait plus de 10 ans que ça existe. C'est une école qui se faisait écrémer par du public sélectif à Drummondville. À un moment, ils ont dit : O.K., il faut réagir. Donc ils ont créé de toutes pièces ce programme-là. Une petite école à Princeville offre 16 programmes différents, donc les élèves en suivent un, un jour pair, jour impair. Tout le monde aime ça. Les parents aiment ça. Les élèves aiment ça,.

M. Rompré (Gabriel) : Les enseignants aussi.

M. Vigneault (Stéphane) : Les enseignants. Ce qu'ils me disaient, c'est que, dans la commission scolaire, le mot se passe, les enseignants veulent aller dans le rang à Princeville parce que l'atmosphère est fantastique.

La Présidente (Mme Dionne) : Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Mercier.

Mme Ghazal : Merci beaucoup. Merci beaucoup, MM. Vigneault, Rompré pour votre présentation puis tout le travail que vous faites aussi pour qu'il y ait plus d'équité et d'égalité des chances dans notre système d'éducation. C'est extrêmement important quand on a une vision de s'assurer... une vision en éducation, de s'assurer que tous les enfants de l'école puissent bénéficier d'une éducation de qualité, peu importe leurs origines socioéconomiques. Vous avez dit : Pas de données, pas de problème. Quand on ne le sait pas, bien, on ne peut pas régler le problème. Et là je parle des données en matière de... pour les écoles privées. Vous avez dit que les écoles privées étaient souvent exclues des données du ministère puis que... bien, c'est ça, on n'en savait pas plus. Est-ce que vous pouvez nous en parler un peu plus de ça?

M. Vigneault (Stéphane) : Oui, certainement. Peut-être pour nous aider, là, je pourrais vous dire d'aller à la page huit, je ne sais pas si vous avez tous une copie du mémoire, mais effectivement, il y a plusieurs cas où on se rend compte que les écoles privées ne sont pas incluses dans les données. Donc, j'ai... Je vous donne, là, trois exemples qui sont dans le document. Le premier, à la page neuf, on voit, là, c'est une... il y a quelques semaines, à l'étude des crédits, l'opposition officielle a fait une demande de renseignements. On voulait avoir une ventilation des crédits accordés pour l'adaptation scolaire. Et là on dit : Bon, pour telle année, ce n'est pas disponible, mais pour l'année 2020-2021, c'est disponible. Voici, les tableaux sont là, allez à l'annexe deux. Puis là on peut voir, les montants pour les établissements d'enseignement privés, agréés aux fins de subvention, ne sont pas disponibles. Pas d'explication, pas de raison, ce n'est juste pas disponible.

Vous avez en dessous l'exemple numéro deux, demande d'accès à l'information, on voulait avoir le nombre d'élèves HDAA dans la formation générale des jeunes. Là, je sais que c'est écrit petit, là, mais en gros, au début, c'est la suite des écoles publiques. Là, on arrive dans la section deux, les écoles privées, et c'est caviardé. Vous voyez, là, les énormes blocs gris, c'est carrément caviardé.

Mme Ghazal : Donc, on a l'info ici, mais on ne la présente pas.

M. Vigneault (Stéphane) : C'est ça.

Mme Ghazal : On ne la rend pas publique.

M. Vigneault (Stéphane) : C'est ça.

Mme Ghazal : Ce n'est pas juste parce qu'on ne l'a pas.

M. Vigneault (Stéphane) : C'est comme une sorte de passe-droit. Vous, vous avez le droit de ne pas rendre disponible cette information-là. Il n'y a pas de justification. On a l'impression, là, qu'on vole des secrets nucléaires ou quelque chose, mais ça... ce n'est pas du tout le cas. L'exemple trois, vous voyez, est un peu plus facile à lire. Encore une demande d'accès à l'information de 2018, le nombre d'élèves handicapés, bon, élèves EHDAA à la formation générale des jeunes. Vous voyez la colonne gouvernementale, on a des chiffres. La colonne privée spécialisée, vous connaissez le privé spécialisé, là, des écoles privées subventionnées à 100 % et qui offrent des services pour les élèves handicapés. Et, dans le milieu, le privé ordinaire, N.D., non déclaré. Alors, la vie est très simple quand on n'a pas à rendre des comptes, apparemment, c'est ce qu'on voit. Je vous rajoute un dernier exemple, une demande d'accès qu'École ensemble a faite elle-même. On voulait avoir le nombre de plans d'intervention avec et sans code, au privé et au public. Je ne parlerai pas de ce sujet-là, mais il y a des chiffres très intéressants, s'il y a des journalistes qui nous écoutent...

• (15 h 40) •

Mme Ghazal : O.K., O.K.. Ça fait que vous avez... vous avez la...

La Présidente (Mme Dionne) : ...secondes.

Mme Ghazal : O.K., bien, est-ce que vous pouvez la déposer? Je ne sais pas, ça marche-tu ça, déposer à la commission?

M. Vigneault (Stéphane) : Bien, le site... le site est là.

Mme Ghazal : Je demande... bien, c'est ça, je demande, s'il y a consentement, que les documents que vous avez reçus de votre demande d'accès à l'information soient déposés à la commission.

M. Vigneault (Stéphane) : Tout à fait. Ils sont là. Puis, juste, en terminant, Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Dionne) : C'est tout le temps qu'on avait, malheureusement, je suis désolée. Je dois passer la parole à M. le député de Matane-Matapédia.

M. Bérubé : Merci, Mme la Présidente. Bienvenue à l'Assemblée nationale. Je veux d'abord saluer la qualité de vos interventions, de votre contribution au débat en éducation. C'est exceptionnel. Le ministre, effectivement, a...

M. Bérubé : ...accepté, lors de l'étude des crédits, à ma demande, de vous rencontrer. Alors, j'imagine que ce n'est pas... La rencontre, ce n'est pas aujourd'hui. Ça sera à un autre moment. Donc, c'est important.

Au Parti québécois on souscrit à une réalité qui est celle de l'école à trois vitesses, c'est une évidence. Et, si on le nie, je m'inquiète sur la conduite des affaires en éducation pour la suite du mandat. C'est la démonstration que vous faites. C'est également ce qu'un récent documentaire qui s'appelle l'École autrement démontre. Tout à l'heure, un collègue évoquait le code postal. Moi, je veux évoquer la capacité de payer, la capacité de payer pour s'acheter des services et s'acheter un statut social aussi dans bien des cas en disant : Bien, je suis diplômé de telle école. C'est une réalité. Moi, dans ma région, il n'y a pas d'école privée. Il n'y a... Ce choix-là n'existe pas à proximité. Et s'il existait, il existe seulement pour les gens qui y ont accès. Je me permettrais d'avancer aussi que, comme parfois notre projet de société actuel semble d'être... de se comparer à l'Ontario, l'Ontario met 0 $ dans l'école privée, rien. Alors, c'est une école semi-privée mais qui a de grands privilèges.

Ceci étant dit, vous dites que la ségrégation scolaire n'a pas été un choix collectif, que le Québec ne l'a pas choisie, qu'elle s'est implantée et imposée à la longue. Ce n'est pas rien. On sait que le ministre, bon, ne souscrit pas à cette réalité, je ne dirais pas une théorie, mais cette réalité. Il indique même, et là ça me m'étonne de lui, un biais idéologique, ce n'est pas rien, et que ceux qui invoquent ça font partie des forces du statu quo, c'est la totale, et de résistance au changement. Alors pourriez-vous nous résumer les étapes qui ont conduit à ce système de ségrégation scolaire, avec le peu de temps qu'on a, tel qu'on le connaît aujourd'hui au Québec, et les raisons pour lesquelles on en est arrivés là?

M. Vigneault (Stéphane) : Oui. Je me transformer un peu en historien. Bien, c'est sûr qu'après le... Le rapport Parent recommandait, pour les écoles privées, deux statuts, école vraiment privée sans aucun financement public, ou ce qu'ils appelaient des écoles semi-publiques, qui ressemblent aux écoles semi-privées conventionnées que nous recommandons. Ce n'est pas ce que l'Union nationale à l'époque a décidé de faire. L'Union nationale a décidé de financer les écoles privées. S'en est ensuivi un lent processus d'écrémage parce que les écoles privées non seulement recevaient de l'argent public, mais avaient aussi le droit de choisir leurs élèves. Et donc, en 1970, il y avait 5 % d'élèves au privé au Québec, et donc on est rendus à 21 % aujourd'hui. Donc, ça a été une lente évolution, si on peut dire.

Mais ce n'est pas tout. C'est qu'en plus, dans les années 90, les écoles publiques qui voyaient bien qu'elles se faisaient écrémer et qu'elles se faisaient priver de leur... de leurs élèves les plus forts, ont dit : Ah! Bien, on va répliquer à ça parce que ça nous cause du tort. Mais au lieu d'aller se battre contre le privilège des écoles privées qu'est la sélection, elles ont dit : Bien, on va aller les concurrencer...

La Présidente (Mme Dionne) : En terminant.

M. Vigneault (Stéphane) : ...sur leur terrain. Et c'est là que sont nés tous les projets particuliers sélectifs. Et donc on a juste empiré le problème 21 % au privé, 23 % au public sélectif. Donc le phénomène a seulement pris de l'ampleur.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci beaucoup. Merci. Je vous demanderais de... Si vous voulez nous transmettre le dossier, ce serait par courriel à la commission. Et ensuite de ça, le document demandé par la députée de Mercier sera distribué à l'ensemble des membres de la commission.

M. Vigneault (Stéphane) : Parfait.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci infiniment pour votre contribution. Donc, pour ma part, je suspends les travaux quelques instants, le temps d'accueillir notre prochain groupe.

(Suspension de la séance à 15 h 45)

(Reprise à 15 h 50)

La Présidente (Mme Dionne) : Donc, la commission reprend maintenant ses travaux. Je souhaite la bienvenue aux représentants de l'Association québécoise des cadres scolaires. Donc, nous avons avec nous aujourd'hui, M. Jean-François Parent, Mme Julie Larouche, Mme Marie-France Dion et Mme Karine Labelle.

Je vous rappelle que vous avez 10 minutes pour nous présenter votre exposé. Par la suite, nous débuterons les échanges avec les membres de la commission. Donc, peut-être d'entrée de jeu vous présenter et nous faire, par la suite, votre exposé. Je vous laisse la parole.

M. Parent (Jean-François) : Bien. Merci. Alors, Mme la Présidente, M. le ministre, Mesdames et Messieurs les députés, bonjour, mon nom est Jean-François Parent, je suis P.D.G. de l'Association québécoise des cadres scolaires. Je vous remercie de nous permettre de vous présenter nos recommandations à l'égard du projet de loi n° 23. Je suis accompagnée aujourd'hui de Mme Julie Larouche, qui est présidente de notre conseil d'administration et qui est également coordonnatrice du transport scolaire et des services alimentaires au CSSS de la Pointe-de-l'Île, Mme Marie-France Dion, secrétaire générale et directrice du Service du secrétariat général et des communications au Centre de services scolaire des Mille-Îles, et Mme Karine Labelle, directrice adjointe des services éducatifs au Centre de services scolaire Marie-Victorin.

Précisons d'abord que l'Association québécoise des cadres scolaires représente plus de 3 000 cadres oeuvrant au sein de... 72, dis-je bien, Centres de services scolaires et commissions scolaires du Québec. Ces gestionnaires occupent des fonctions de conseil et d'encadrement dans les centres administratifs, les centres d'éducation aux adultes de...

M. Parent (Jean-François) : ...formation professionnelle ainsi que dans les établissements primaires et secondaires.

De prime abord, notre association accueille favorablement plusieurs modalités du projet de loi no 23 ainsi que la recherche d'efficience qui semble motiver le ministre. Les dispositions à l'égard de la gestion du transfert des élèves, de l'offre de services éducatifs à distance et de la mise en place de l'Institut national d'excellence en éducation sont, entre autres, tout à fait louables.

Toutefois, notre association est préoccupée par l'impact d'une éventuelle entente annuelle de gestion et d'imputabilité. L'AQCS tient à rappeler que les plans d'engagement envers la réussite permettent déjà au ministère d'effectuer une veille sur les orientations et les réalisations des centres de services scolaires. Selon la Loi sur l'instruction publique, les PEVR doivent être en cohérence avec les orientations et les objectifs du plan stratégique du ministère. Telle que présentée dans le projet de loi, l'entente annuelle de gestion et d'imputabilité semble avoir préséance sur les PEVR. Il deviendra très difficile pour un milieu d'atteindre ses objectifs si le ministère prévoit de nouvelles cibles d'une année à l'autre, alors que le PEVR est établi pour quatre ans. L'AQCS anticipe des enjeux sur le plan de la mobilisation dans les CSS si, après une année de déploiement d'un PEVR, des objectifs différents sont présentés dans l'entente de gestion et d'imputabilité.

L'AQCS recommande donc de clarifier la place du plan d'engagement envers la réussite d'un CSS comme outil de suivi de l'atteinte des cibles ministérielles. Dans l'éventualité où l'entente de gestion et d'imputabilité comprend des objectifs ou des cibles portant sur l'administration, l'organisation ou le fonctionnement d'un CSS, les cadres scolaires devraient être associés au préalable afin d'identifier de bonnes pistes et permettre, à terme, l'atteinte des cibles ou des objectifs visés. Si l'entente de gestion et d'imputabilité demeurait sur une échéance d'un an, nous recommandons que ces cibles s'inscrivent dans la continuité et la prévisibilité, en concordance avec les PEVR.

Par ailleurs, selon notre association, les changements à la gouvernance prévus au projet de loi affaiblissent les pouvoirs des administrateurs des centres de services scolaires, notamment en leur retirant la responsabilité de recruter une direction générale correspondant à un profil adapté aux besoins du milieu. En retirant aux conseils d'administration des CSS le rôle de sélection et d'embauche d'une direction générale bien au fait des enjeux locaux, on s'éloigne du principe de subsidiarité. Dans ce contexte, l'AQCS souhaite que la nomination d'une direction générale demeure sous la responsabilité du C.A. d'un CSS. Si le ministre ne pouvait donner suite à cette demande, l'AQCS propose d'associer les conseils d'administration au processus de nomination des directions générales. Par ailleurs, l'AQCS demande qu'une disposition soit prévue au projet de loi quant à la nomination du personnel-cadre par la direction générale des centres de services scolaires, en vertu des politiques de gestion de chaque centre.

En matière de formation continue, notre association estime que le personnel enseignant, avec l'approbation des autorités compétentes du CSS, devrait pouvoir conserver la latitude de la sélection des formations les plus appropriées en fonction des besoins éducatifs de la clientèle et de la réalité du milieu. Pour ce faire, il faudra s'assurer que les directions d'établissement et les centres de services scolaires ont les leviers nécessaires pour mesurer la pertinence et la validité de la formation ainsi que le temps qui y est consacré.

L'AQCS tient maintenant à exposer ses préoccupations quant aux dispositions qui permettraient au ministre d'intervenir en matière d'organisation des services éducatifs, de réussite éducative et sur toute décision d'un CSS. De notre point de vue, les interventions ciblées auprès d'élèves ou de groupes d'élèves appartiennent à l'équipe-école et, dans certains cas, au service éducatif des CSS. Le ministre ne devrait pas personnaliser ces interventions mais plutôt faire appel aux acteurs du terrain avant de déterminer des cibles, des outils ou des indicateurs spécifiques en lien avec la réussite éducative d'élèves.

Par ailleurs, notre association estime prioritaire que le gouvernement se penche sur un mode de standardisation et de gouvernance des données, sans quoi ces renseignements ne devraient pas être utilisés pour des exercices de comparaison ou de croisements.

Nous tenons également à faire une mise en garde sur le plan du traitement d'éventuelles plaintes liées au service éducatif des centres de services scolaires. Il serait fâcheux, en effet, que le projet de loi provoque la confusion chez les parents et les élèves et les incite à communiquer directement avec le ministère sans se prévaloir du mécanisme officiel de traitement des plaintes prévu à la loi sur le Protecteur national de l'élève puisque le ministre aurait la possibilité d'intervenir directement en leur faveur. Dans cet esprit, l'AQCS recommande de laisser aux centres de services scolaires, incluant les équipes...

M. Parent (Jean-François) : ...le rôle d'analyse des données probantes sur la réussite éducative et d'interventions ciblées auprès des élèves. Et nous recommandons également de préciser, au projet de loi, les situations qui pourraient susciter l'intervention du ministre quant à l'organisation des services des CSS.

La portée du projet de loi n° 23 donne la possibilité au ministre d'annuler toute décision d'un CSS. Cette centralisation du pouvoir fait fi des expertises en place et risque de poser des enjeux d'ingérence et de mobilisation du personnel. L'AQCS souhaite rappeler que les CSS disposent de politiques adoptées par leurs conseils d'administration respectifs sur de nombreux sujets, services aux élèves HDAA par exemple, gestion du transport scolaire, critères d'admission et d'inscription des élèves, maintien et fermeture des écoles, et autres. Ces politiques traduisent la réalité du territoire et sont élaborées et mises à jour collectivement par les acteurs du milieu. Elles régulent la prise de décision des gestionnaires et des conseils d'administration. En annulant une prise de décision d'un CSS, ce sont les bases du fonctionnement des services éducatifs et administratifs qui sont remises en cause. L'AQCS recommande donc de limiter la prise de décision possible du ministre sur un CSS, étant donné les effets négatifs probables sur un milieu en matière de mobilisation et d'engagement.

Comme nous l'avons mentionné au début de cet exposé, plusieurs dispositions du projet de loi nous semblent porteuses. L'AQCS se réjouit des mesures qui font en sorte que les CSS deviendront responsables de toute la gestion des renseignements nécessaires pour les transferts d'élèves. Nous proposons de prévoir la création d'un système de gestion documentaire pour organiser les transferts d'élèves ainsi qu'une réglementation appropriée. Notre association est également satisfaite de l'introduction d'une entente possible avec le Comité de gestion de la taxe scolaire de l'île de Montréal, et ce, sur une base volontaire. Nous soumettons l'idée d'offrir une latitude encore plus grande aux centres de services scolaires qui souhaiteraient un service à la carte. L'AQCS accueille favorablement les dispositions pour l'offre de services éducatifs à distance. Nous y voyons l'occasion de favoriser l'équité. Dans le contexte de la forte pénurie de main-d'œuvre, nous suggérons de réviser le baccalauréat en enseignement afin de permettre aux étudiants de se retrouver plus rapidement dans les classes.

Enfin, notre association salue le projet de mise en place de l'Institut national d'excellence en éducation, pourvu que son caractère indépendant soit préservé. Nous constatons que le mandat de l'Institut concernera essentiellement les offres d'enseignement du primaire et du secondaire, auxquelles il faudra ajouter, et nous insistons sur ce point, la formation professionnelle et la formation générale des adultes. L'offre des services éducatifs étant déployée en continuum du primaire au réseau universitaire, nous suggérons qu'un mécanisme de collaboration soit prévu entre l'Institut et le Conseil supérieur d'éducation.

En conclusion, l'AQCS tient à rappeler que ses membres-cadres sont fiers de collaborer à bonifier les différents mécanismes de suivi de la réussite éducative qui font l'objet du projet de loi n° 23. Merci à vous.

• (16 heures) •

La Présidente (Mme Dionne) : Merci beaucoup pour cette présentation. Nous sommes maintenant prêts à débuter les échanges. Je cède la parole à M. le ministre.

M. Drainville : Oui, merci beaucoup, Mme la Présidente. Merci pour votre présentation. Sur la collecte, bon, vous souhaitez la mise en place d'une méthode de collecte standardisée des données. Bon, vous, vous travaillez... il faut que les gens sachent, là, vous travaillez à l'intérieur des centres de services, donc vous connaissez bien la... au-delà de la... comment dire, de la surface, là, vous... toute la tuyauterie et toute la mécanique du fonctionnement d'un centre de services scolaire, c'est vous, là, c'est vous les opérateurs, là. Je le dis en tout respect, là. Pour moi, le mot «opérateur» ici, c'est très, très, très positif, là. Et donc je pense que vous êtes à même de nous expliquer quelles retombées positives on pourrait obtenir avec une méthode de collecte standardisée pour ce qui est des données, quels résultats on pourrait obtenir sur le plan, je dirais, de l'efficacité mais aussi sur le plan de l'aide aux élèves, de la réussite scolaire. Je ne sais pas si vous pouvez répondre à cette question-là.

M. Parent (Jean-François) : Oui, puis mes collègues compléteront, s'il y a lieu. Plus souvent qu'autrement, on reproche aux centres de services scolaires de ne pas avoir de données, alors qu'en réalité des gens comme nous, qui sont cadres aux services éducatifs, aux technologies de l'information, par exemple, au secrétariat général aux communications, sont des gens qui travaillent beaucoup avec la donnée. On a aussi plusieurs gestionnaires de la donnée et de l'imputabilité. Et on travaille, mais avec... on n'a pas de standard, c'est-à-dire qu'on a certaines données, mais, dans certains centres de services scolaires, par exemple, on va exclure une clientèle, en inclure...


 
 

16 h (version non révisée)

M. Parent (Jean-François) : ...une autre, alors que, dans le centre de services scolaire voisin, c'est l'inverse. Et donc...

M. Drainville : Quand vous dites, inclure une clientèle, en exclure une autre, très concrètement, un exemple.

M. Parent (Jean-François) : Bien, ça pourrait être, par exemple, sur tout ce qui est la question de la diplomation. Alors, si, par exemple, on inclut des élèves qui sont du préscolaire, on ne les inclut pas, par exemple, dans leur cheminement, ou autres, et peut-être que quelqu'un pourrait donner certaines précisions là-dessus. Mais, plus souvent qu'autrement, on a des nuances dans la clientèle. Et là, si on développe, tous ensemble, des standards communs pour s'assurer que la donnée peut se croiser et que la donnée peut se comparer, nous, on est prêts à contribuer à ça. Parce qu'à l'heure actuelle, on travaille, mais on a l'impression qu'on le fait uniquement pour notre centre de services scolaire. Et, lorsque, par exemple, on a des demandes d'accès à l'information, on répond en fonction de la demande, avec les données qu'on a, mais ce sont des données qui ne sont pas toutes comparables, et là, par la suite, on se fait dire : Bien, ils n'ont pas la donnée. Alors qu'en réalité, on en a une multiplicité, de données.

L'autre aspect aussi, peut-être, c'est que, dans les plus grands centres de services scolaires, on est plus en mesure de recueillir la donnée, alors que, dans les plus petits, c'est plus difficile, cet aspect-là.

M. Drainville : Vous proposez un élargissement, je dirais, des dispositions pour les services éducatifs à distance. Si je vous lis bien, là, vous proposez d'en élargir l'application par rapport à ce qui est prévu dans le projet de loi. Vous, vous dites carrément : Écoutez, dans certains cas, ça pourrait être un moyen de pallier à la pénurie de main-d'oeuvre. Nous, on ne va pas jusque là dans le projet de loi. Expliquez-nous pourquoi vous, vous voulez aller là.

M. Parent (Jean-François) : On comprend que le sens du projet de loi, c'est pour les situations de catastrophe naturelle, comme on a connu dans le passé, hein, tornade à l'école secondaire Mont-Bleu, ou les feux de forêt présentement. Maintenant, il y a tout de même des situations où la pénurie de main-d'oeuvre, notamment en région éloignée, dans les petits centres de services scolaires, où ça peut être plus difficile. Par exemple, un prof de mathématiques à l'école secondaire Polyno, à La Sarre, qui doit s'absenter parce qu'il a une intervention chirurgicale, un prof de secondaire IV...

M. Drainville : C'est un vrai exemple que vous nous donnez, là?

M. Parent (Jean-François) : Non, c'est un exemple fictif. Maintenant, si ce prof-là manque, des écoles secondaires dans le centre de services scolaires de Lac-Abitibi, il n'y en a pas plusieurs. Qu'est-ce qui fait en sorte que cet enseignant-là va être disponible pendant quatre semaines, cinq semaines, six semaines, sept semaines si son intervention est plus longue que prévu? Bien, il faut être en mesure d'avoir quelqu'un, dans la classe, qui fait une bonne surveillance, mais quelqu'un qui est en ligne et qui peut enseigner à ces élèves-là, de façon volontaire, peut-être, aussi, avec une certaine prime. Mais je pense que le gros bon sens et la sagesse devraient nous amener vers ces situations-là, exceptionnelles, qui font en sorte que l'enseignement à distance pourrait être approprié dans quelques cas.

Mme Labelle (Karine) : Et, si je peux me permettre, en permettant ça de façon fluide, rapide et agile, sans complexifier la démarche, là, que ce ne soit pas dans le cadre d'un projet pilote, mais que ça puisse être une réaction très rapide à un contexte très particulier.

M. Parent (Jean-François) : En d'autres termes, ne pas nécessairement avoir de projet, vous soumettre de projet pour ça. Le centre de services scolaire de Charlevoix trouvait qu'il était intéressant pendant la pandémie, d'avoir un certain élargissement de l'enseignement en ligne.

M. Drainville : Ça, c'est un vrai exemple, par contre.

M. Parent (Jean-François) : C'est un vrai exemple, celui-là. Et, avec la fin de la pandémie, dans le cadre d'une pénurie de main-d'oeuvre, ils ont trouvé ça un peu plus difficile, cet aspect-là, parce que là, ils étaient un peu plus contraints, dans leur souplesse, d'offrir l'enseignement en ligne pour un milieu comme L'Isle-aux-Coudres, par exemple.

M. Drainville : O.K., continuez à illustrer cet exemple-là avec plus de détails. Je ne le connais pas, cet exemple-là.

M. Parent (Jean-François) : C'est bon. Si, à L'Isle-aux-Coudres, par exemple, il y a une école secondaire de premier cycle, si, pour une raison quelconque, il y a un bris de traversier ou si, pour une raison quelconque, l'enseignant dont je parlais à La Sarre a les mêmes difficultés de santé, pourquoi ne pas être en mesure, pendant un temps donné, que ce soit un mois ou quelques semaines, de donner cet enseignement-là sans nécessairement passer par un projet reconnu par le ministère? Donc, on trouve qu'il y a là une option intéressante, et qui va dans un sens qui permettrait d'aller au-delà d'un surveillant d'élèves ou au-delà d'un enseignant non légalement qualifié, qui n'est pas nécessairement à l'aise avec la matière. Et là les exemples que je donne, bien sûr, c'est au secondaire, dans des cas spécialisés.

M. Drainville : Juste une dernière, avant de laisser mes collègues participer à la discussion par une question. La députée de Hull...

M. Drainville : ...veut intervenir. Je...

(Interruption)

M. Drainville : C'est quoi, ça?

La Présidente (Mme Dionne) : Alerte AMBER.

M. Drainville : Ah! O.K. Ça sonnait... C'est pour ça que ça buzzait si fort.

M. Parent (Jean-François) : C'est ça, effectivement.

M. Drainville : Quand vous avez dit : Je souhaiterais... Nous souhaitons, comme groupe, si j'ai bien compris, limiter les conditions à l'intérieur desquelles le ministre pourrait renverser une décision de centre de services, vous souhaiteriez que ce soit limité à quoi par exemple?

M. Parent (Jean-François) : Bien, j'ai le goût de vous dire : ce qui est illégal, là où on va au-delà, où on transgresse les limites de la loi.

M. Drainville : D'accord.

M. Parent (Jean-François) : Vraiment plus à ce niveau-là.

M. Drainville : C'est la loi qui serait le... la ligne rouge?

M. Parent (Jean-François) : Oui, mais, par ailleurs, ça n'empêche pas les échanges au préalable.

M. Drainville : Oui, mais ça, ils sont prévus dans le projet de loi, comme vous le savez.

Juste une dernière. Parlez-nous des retombées positives que vous associez à la création d'un institut national d'excellence en éducation, un ou deux exemples, là, parce que je ne veux pas prendre le temps de la députée de Hull, là.

M. Parent (Jean-François) : Oui, bien, je pense que ça va... ça va, dans l'espace public, crédibiliser ou rendre plus scientifique un champ qui est plutôt considéré comme intuitif, celui de l'enseignement. Et celui de l'enseignement, au fond, s'est professionnalisé énormément au cours des dernières décennies, avec les sciences de l'éducation. Et je pense que, dans l'opinion publique, cette professionnalisation-là de ce champ-là n'a pas encore percolé. Et je pense qu'avec l'intervention de l'INEE dans l'espace public ça va permettre de faire évoluer cette pensée-là dans la population et de crédibiliser la... les sciences de l'éducation.

M. Drainville : Pourquoi vous dites que ça n'a pas... À votre avis, dans votre perception, pourquoi ça n'a pas percolé? Qu'est-ce qui vous amène à dire que ça n'a pas percolé?

M. Parent (Jean-François) : Bien, ici, c'est de dire que tous les gens ont intuitivement une opinion sur l'enseignement, sur la pédagogie de par leur expérience personnelle, mais, en crédibilisant ce discours-là avec l'Institut national d'excellence en éducation, ça va permettre aux gens de dire : J'avais un biais en faveur de cette méthode pédagogique là ou de cette opinion-là, mais je réalise que l'institut, en diffusant la recherche... peut-être que je n'étais pas... peut-être que je n'avais pas la bonne opinion finalement, peut-être que je n'étais pas correct. Donc, je trouve que ça va crédibiliser ce secteur-là des sciences de l'éducation.

M. Drainville : Intéressant. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci, M. le ministre. Je cède maintenant la parole à la députée de Hull.

Mme Tremblay : Oui, bonjour. Donc, j'ai quelques questions. Quand vous parlez du transfert de données puis là vous nommez des exemples : certificat de naissance, bulletin, informations sur le parcours scolaire, j'imagine que ça inclut les plans d'intervention d'un CS à l'autre. C'est quand même une donnée qui est importante sur une élève puis qui ne suit pas toujours. Donc, j'imagine que vous avez cette réflexion-là aussi quand vous parlez de ça?

M. Parent (Jean-François) : Oui, effectivement, c'est le cas, tout à fait.

• (16 h 10) •

Mme Tremblay : O.K. Parce que je trouve ça important de le spécifier. Je voulais voir que c'était correct avec vous à ce niveau-là. Donc, ce l'est. Ensuite... Ça, on l'a abordé abondamment. Ensuite, le... oui, le baccalauréat. Donc, moi, je comprends que, dans votre tête, le quatre ans, vous trouvez ça trop long. C'est quoi, votre réflexion? Est-ce que... C'est quoi, le nombre d'années pour vous qui serait... qui serait l'idéal? Puis, après, vous semblez parler d'une certaine forme de mentorat, donc, qui existe, là. Il y en a, du mentorat, puis il y a des sommes importantes que le gouvernement donne en lien avec ça, là. Donc, j'aimerais ça vous entendre.

M. Parent (Jean-François) : Oui. On a précisé dans notre mémoire qu'au fond, après trois ans, il pourrait être intéressant, dans un contexte de pénurie de main-d'oeuvre, je situe bien dans un contexte de pénurie, d'avoir ces jeunes qui ont trois ans dans les classes. Toutefois, ce qui serait intéressant, c'est que, lors de cette première année là de pratique, et probablement la seconde aussi... d'avoir des coachs qui les accompagnent et de leur permettre de suivre en soirée les séminaires de leur dernière année de baccalauréat. Donc, il y a une petite nuance, par rapport à ce que vous retrouvez dans notre avis, sur ce plan. On souhaite que le baccalauréat soit revu, remanié. D'ailleurs, il n'a pas beaucoup évolué au cours des 30 dernières années, ce bac-là. Alors, je pense qu'il faut le regarder. Mais, dans l'état actuel des choses, avec le bac que nous avons, on pense qu'il pourrait être intéressant de permettre dès la troisième année aux jeunes étudiants d'aller tout de suite en classe avec un accompagnement.

Mme Labelle (Karine) : Si je peux me permettre...

Mme Tremblay : Oui.

Mme Labelle (Karine) : ...on pourrait le voir comme un internat en médecine, en fait. On a un enseignant, dont la formation théorique est presque complétée, qui va aller faire, dans le fond, l'apprentissage du transfert de cette théorie vers la pratique en étant soutenu, accompagné et en s'appropriant...

Mme Labelle (Karine) : ...graduellement sa charge de travail.

Mme Tremblay : On le voit de plus en plus, là, des... mais là ce n'est pas sous la forme d'une année complète, mais ceux qui arrivent au stage, au quatrième stage finalement, qui sont en stage emploi, dans le fond, c'est de peut-être mieux les soutenir quand ils arrivent d'abord en stage emploi, c'est ce que je comprends. Mais vous, vous le feriez sur une forme d'une année complète, donc...

Mme Labelle (Karine) : Exact.

Mme Tremblay : Vous avez mentionné quelque chose d'important également dans la formation, vous pensez qu'on doit l'améliorer? Moi, je partage cette opinion-là, là, parce que, bon, j'ai fait du terrain pendant de nombreuses années, puis on l'a entendu même dans nos visites d'école, les jeunes qui arrivent se disent que, bon, ils ne sont pas totalement préparés à faire face à tous les enjeux de l'école. Donc, ça aussi, vous... je pense que...

Mme Labelle (Karine) : Absolument.

M. Parent (Jean-François) : Absolument, on pense qu'il y a une révision qui est nécessaire. D'ailleurs, votre gouvernement fait plusieurs révisions à l'heure actuelle, que ce soit de programme ou autre. Mais, du côté du baccalauréat, il nous semble, il y a un peu de travail, un peu de travail, dis-je bien, à faire de ce côté. Il ne semble pas avoir évolué beaucoup, alors qu'en informatique, vous savez, après 30 ans, on n'enseigne plus le Fortran. Alors, peut-être qu'en éducation ce qu'on enseignait il y a 30 ou 40 ans, on ne devrait plus l'enseigner.

Mme Tremblay : Puis est-ce que vous avez une idée de qu'est-ce qui devrait... qu'est-ce qu'on... Si je vous demande, là, demain on change de programme, vous, c'est... qu'est-ce qui serait... qu'est-ce que vous cibleriez comme priorités dans cette nouvelle formation initiale?

M. Parent (Jean-François) : Bien, moi, je vous dirais, demain on va y réfléchir, puis on va se revoir après-demain, parce que je pense que c'est quelque chose qui nécessite une bonne, une bonne réflexion.

Mme Tremblay : Effectivement, je suis d'accord avec vous sur sur ce point-là. Quand on parle de la formation continue du personnel enseignant, bon, ici vous mentionnez : «...avec l'approbation des CS, de choisir les formations pertinentes et répondant aux besoins du milieu...» du milieu, et aussi j'imagine que vous vouliez peut-être des enseignants puis des enseignantes aussi. Parce qu'il peut y avoir des besoins plus individuels. Est-ce que vous êtes d'accord avec ça aussi? Parce qu'il y a les besoins du milieu, c'est vrai, mais il y a aussi les besoins de l'enseignante et enseignant qui peut être bien différent d'un enseignant à l'autre. Est-ce que ça, c'est dans votre réflexion également?

M. Parent (Jean-François) : Oui, c'est juste. Effectivement, c'est dans notre réflexion. Puis on voit que la très grande majorité des enseignants, sur le plan de la formation continue, là, sont bien là au niveau du 30 heures. Maintenant, pour les quelques réfractaires qu'il pourrait y avoir, je pense qu'il est important de donner les leviers à la direction d'établissement et à la direction des ressources humaines s'il y avait des difficultés particulières dans le respect du 30 heures. Et on pense que ce 30 heures-là, il devrait être cadré pour une partie, parce qu'il peut y avoir des formations obligatoires, parce qu'il peut y avoir aussi des besoins particuliers pour cette personne-là, et je pense qu'à la suite d'une supervision pédagogique, par exemple, où on s'entend mutuellement sur les besoins, à ce moment-là, l'enseignant pourrait parfaire sa formation.

Mme Tremblay : Et également... oui, ce que je voulais... Oui, par rapport à ça, mais ça peut venir complètement d'un besoin, qu'il ait le goût, là, sans encadrement... parce qu'il a été encadré, puis tout ça, ça pourrait venir parce que lui a... l'enseignant, selon... Mettons, l'institut donne différents sujets, tout ne sera pas imposé, hein, le ministre l'a répété fréquemment, mais il pourrait choisir des sujets que, lui, il l'intéresse plus dans le cadre de son domaine. Ça aussi, c'est... ça, je veux être certaine, ça, vous allez de ce côté-là?

M. Parent (Jean-François) : Oui, on pense que l'enseignant doit avoir une marge de manœuvre, une bonne marge de manœuvre sur ses choix de perfectionnement. Par contre, il peut y avoir des situations particulières où là on souhaiterait avoir certains leviers. Puis il y a aussi des formations obligatoires, je pense qu'il va falloir bien préciser si les formations obligatoires, par exemple, sont dans 30 heures. Alors là, c'est peut-être un exemple.

Mme Dion (Marie-France) : Oui. Par exemple, conformément à la Loi sur le protecteur national de l'élève, il y a une formation obligatoire pour l'ensemble du personnel, qui inclut évidemment les enseignants, au sujet des actes à caractère sexuel. Donc, est-ce que ces formations-là obligatoires seront comprises dans le 30 ans de formation des enseignants? Donc, ce sera au gouvernement à prendre la décision.

Mme Tremblay : Est-ce que vous avez des centres de services scolaires qui avaient des façons de consigner jusqu'à date le 30 heures? Rapidement.

M. Parent (Jean-François) : On n'a pas nécessairement travaillé sur cet aspect-là. Par contre, on est prêt à regarder une certaine forme de standardisation là aussi, là, pour savoir ce qu'on doit bien intégrer dans le 30 heures.

Mme Tremblay : Parfait. Merci.

La Présidente (Mme Dionne) : Avant de continuer, j'aimerais savoir s'il y a consentement pour que le temps du député de Matane-Matapédia soit redistribué à Mme la députée de Mercier. Merci beaucoup. Donc, nous poursuivons avec Mme la députée de Saint-Laurent.

Mme Rizqy : Merci beaucoup. Dans le rapport de la Vérificatrice générale, il fait mention justement que, dans les centres de services scolaires, notamment Marie-Victorin...

Mme Rizqy : ...a beaucoup de crochets verts, qui connectent énormément de données, mais que, par contre, ce n'est pas partout pareil, ce n'est pas généralisé, comme pratique, et on n'a pas de définition nécessairement commune. Je vous donne un exemple, j'ai fait une demande d'accès en matière d'actes de violence, j'ai eu des données très précises dans certains centres de services scolaires où ça pouvait être avec un élève, entre élèves, entre enseignants, ou crachat grave, ou comportement grave, et d'autres que c'était : Nous n'avons... nous ne détenons pas cette donnée. Donc, on ne veut même pas la compiler. Moi, je me demande, vous, si, en ce moment, on a des centres de services scolaires qui ont déjà des données, qui n'ont pas eu besoin de faire un projet de loi, est-ce que c'est, au fond, une directive qui devrait être envoyée aussi pour s'assurer que ça soit standardisé?

M. Parent (Jean-François) : Oui. On est à l'aise avec ça, je pense, la standardisation. Déjà, on a travaillé, les cadres, à la standardisation des rapports annuels au cours des dernières années. Alors, on est prêt à regarder cet aspect-là des choses aussi, parce qu'au fond on veut que le travail que l'on fait rende service au réseau et rende justice aussi aux objectifs de transparence et d'imputabilité que le présent gouvernement a, mais que tout gouvernement également souhaite.

Mme Rizqy : Je veux vraiment prendre plus de temps sur la formation à distance. Lors de la pandémie, évidemment, tout le monde a essayé de mettre l'épaule à la roue, de trouver des solutions rapidement. Ça a été une suggestion qui venait de partout, de justement faire de la formation à distance, là. Vous savez, à l'impossible, nul n'est tenu, mais, au moins, on a vraiment, tout le monde, essayé d'aider le plus possible, et ça partait d'une bonne volonté.

Il y a eu des achats qui ont été faits pour installer des caméras dans les classes, pour essayer de faire des groupes en alternance. Mais, par la suite, on a eu le rapport de la Vérificatrice générale, qui a dit : On a dû mettre ça sur pause pour des raisons de confidentialité. Est-ce que vous avez trouvé, de votre côté, une voie de passage? Parce qu'on a quand même un rapport de la commissaire... pardon, de la vérificatrice à ce sujet-là.

M. Parent (Jean-François) : Je pense que la confidentialité, ce n'est pas nécessairement un aspect sur lequel on s'est arrêtés, comme tel. Maintenant, sur la question de l'enseignement à distance, il y a un des éléments sur lequel j'aimerais revenir et qui concerne tout le soutien que les cadres des TI offrent. On a fait des achats massifs, pendant la pandémie, de matériel, et là on a ce qu'il nous faut, actuellement, mais il va falloir voir, par exemple, dans deux, trois ou quatre ans, à mettre à jour ce matériel-là et à le racheter, et il ne faudrait pas être l'univers, tout le monde ensemble, à acheter le matériel en même temps.

Mme Rizqy : Je comprends, mais ma question est vraiment précise puis le temps est serré.

M. Parent (Jean-François) : Oui, c'est beau, je m'excuse.

Mme Rizqy : C'est que, même s'il y a eu des investissements, là, à coup de millions pour l'achat de matériel, en ce moment, on ne l'utilise pas parce que, la vérificatrice le mentionne, c'est qu'il y a un enjeu légal. Alors, même si, demain matin, le ministre rajoute de l'argent, on n'est pas plus avancés. Il y a du matériel qui a été acheté mais qu'on n'a pas été en mesure d'utiliser.

Et là, en ce moment, il y a le rapport de la Commission d'accès à l'information du Québec qui a été déposé. Je pense que tout le monde a maintenant accès à ce rapport-là qui a été déposé, bien... oui, sur Greffier. Alors, j'imagine que probablement vous n'avez pas eu le temps de le lire, parce qu'il vient juste d'arriver, mais, encore là, on fait mention de préserver les droits des élèves, de leurs parents, d'assurer évidemment que le ministre puisse avoir des informations, mais de s'assurer de préserver les droits fondamentaux des élèves en matière de renseignements privés, là.

Donc, j'essaie de voir une voie de passage parce que, d'un côté, si les élèves sont en classe, vous le savez, il y a certains élèves qui ont des besoins particuliers, mais les autres élèves ne le savent pas nécessairement, ils ne savent pas que tel élève à un plan d'intervention, que tel élève a besoin de ci, que tel élève a ci, puis on fait attention à cela parce qu'on ne veut pas ostraciser certains élèves non plus, là. Alors, s'il y a une caméra dans la classe, c'est ça, l'enjeu, qu'en ce moment... légal qu'on fait tous face, là, en ce moment, là. Est-ce que ça vous, vous y avez réfléchi?

• (16 h 20) •

M. Parent (Jean-François) : Je pense que c'est une question qui mérite réflexion. C'est une question qui doit aller en profondeur. On est prêt à regarder cet aspect-là des choses, mais disons que, dans le cadre du projet de loi, ce n'est pas quelque chose qu'on a regardé plus spécifiquement.

Mme Rizqy : O.K., parce que, là, il est question... de formation à distance. Puis, juste pour être sûre, tantôt, vous avez dit oui pour le secondaire, donc je conclus, par déduction, non pour le primaire.

M. Parent (Jean-François) : Non, pas nécessairement. Pas nécessairement. Les exemples que j'ai donnés sont plus pour les spécialistes du secondaire, mais il pourrait y avoir certaines situations au primaire où ça pourrait être intéressant. Maintenant...

Mme Rizqy : Avez-vous des exemples?

M. Parent (Jean-François) : Non, pas spécifiquement, mais, encore là, c'est dans le cadre d'une pénurie en milieu éloigné où il n'y a pas nécessairement de remplaçants, mais où il pourrait y avoir par exemple, un bon surveillant en classe qui fait sa gestion de classe avec quelqu'un qui est en...

M. Parent (Jean-François) : ...mais une chose est importante ici, on souscrira toujours au principe de l'importance d'avoir un enseignant dans la classe. Ça, ce sera toujours pour nous fondamental. Les cas que j'évoque, on en a parlé un peu plus longuement aujourd'hui, ce sont des cas exceptionnels. Donc, c'est dans des situations exceptionnelles, bien, ça va nécessiter des solutions exceptionnelles. Il faudrait donc permettre aux centres de services scolaires, de notre point de vue, dans ces situations exceptionnelles là, de pouvoir avoir recours à l'enseignement à distance.

Mme Rizqy : Bien, je dois vous avouer que, moi, ça me... parce que, depuis quelques années maintenant, en région éloignée, ce n'est plus exceptionnel, là, c'est rendu pratiquement la gestion, là, de... qui est la suivante. Ce n'est pas parce que vous manquez de bonne foi, là, c'est que vous faites face à une réalité qui est accablante et que non seulement on a de la difficulté à retenir nos ressources, mais c'est pire en région éloignée parce qu'il faut les attirer et les conserver. Et on a vu que, dans certaines régions, là, à partir du mois de janvier, ils sont rendus à leur septième remplaçant. Et ça, ce n'est pas parce que vous manquez de volonté, c'est une réalité. Alors, moi, j'ai peur que les régions éloignées, ça devienne des élèves qui eux, vont avoir un parcours qui va être complètement différent des grands centres.

M. Parent (Jean-François) : Et ce qu'on propose, au fond, c'est pour assurer la meilleure équité possible des services aux élèves, qu'ils soient nés à... au nord du Lac-Saint-Jean ou en Abitibi ou encore à Montréal. C'est pour ça qu'on pense que, dans les circonstances, c'est la meilleure des mesures, dans certains cas particuliers où il y a une pénurie qui n'est pas résorbable.

Mme Rizqy : Oui. Peut-être que c'est une déformation professionnelle, là, la fiscaliste en moi a le goût de dire : Bien, c'est parce que, là, on vous propose ça, mais si on a... si on vous propose des leviers fiscaux pour être en mesure d'attirer des gens... Je vous donne des exemples, là, le boni de 7 000 $ pour aller en région éloignée, les gens vont dire : Bien, après impôt, moi, il me reste 3 000 $, 3500 $, ils vont dire : Laisse faire, ton 3 500 $ sur l'année, mais il me semble qu'il devrait y avoir aussi des leviers peut-être, puisqu'on sait entre avoir un enseignant que je vais peut-être un payer un peu plus cher, un psychologue, un psychoéducateur... Sinon, écoutez, les gens... Moi, ma compréhension, c'est qu'en région éloignée, ça va être à distance, là.

M. Parent (Jean-François) : C'est... je veux juste... Et quant aux possibilités ou aux solutions, bien, on n'a pas nécessairement porté attention à ça, mais, s'il y a des leviers fiscaux qui permettent d'attirer plus de gens, bien, c'est sûr que ça sera la meilleure solution dans les circonstances.

Mme Rizqy : Je vais faire des propositions. Je ne sais pas combien de temps qu'il me reste?

La Présidente (Mme Dionne) : Il reste deux minutes.

Mme Rizqy : Ah! mon Dieu! je pensais qu'il restait 30 secondes, alors je m'étais comme pressée. Ah! là, permettez-moi, si vous me permettez, l'INEE, je pose la question à tous les groupes, au niveau de l'indépendance de l'INEE, est-ce que... Nous, on pensait déposer un amendement pour que ça ressemble à l'INESSS, qui est le pendant en santé, qui a vraiment une indépendance totale. Est-ce que ça, vous êtes à l'aise avec ça?

M. Parent (Jean-François) : En fait... pour l'INEE, pour l'INEE, je vous dirais que notre grande préoccupation était l'AFP, la FGA, on l'a mentionné. Sa composition aussi de son conseil d'administration. On souhaiterait un conseil d'administration, là, qui se colle davantage à celui de l'INESSS, un bon concentré de matière grise comme membres du conseil d'administration, pour nous, ça, c'est important. On voit peu de gens du côté universitaire aussi, là, dans ce conseil d'administration là. Alors, peut-être qu'une personne de plus, là, ce ne serait pas nuisible, loin de là. Et des gens qui ont une vision systémique du réseau d'éducation aussi. Donc, nous, cadres des services éducatifs, ce sont des gens qui ont pensé dans différents postes au sein du réseau. Puis des directions générales aussi, qui sont absentes et qu'on souhaiterait voir présentes, là, au sein du conseil d'administration de l'INEE.

Mme Rizqy : Donc, beaucoup plus de parties prenantes qui ont aussi les yeux, les oreilles et surtout leurs pieds dans l'école.

M. Parent (Jean-François) : Oui, c'est ça. Et des gens qui ont une expérience, et des gens qui ont une vision qui est vraiment de système, ça nous apparaît important. Et éventuellement, bien, s'il y a différents comités à mettre en place, des comités délibératifs ou encore des comités scientifiques, bien là, ce sera libre au conseil d'administration à déterminer. Sur le conseil d'administration, aussi, il doit y avoir des gens qui sont capables, sur le plan des comités, là, finances, stratégies, ressources humaines, de mener et de piloter aussi ces comités-là. Ce sont des principes importants en matière de gouvernance. Alors, ça, on tenait à le souligner également.

Mme Rizqy : Parfait. Puis, au niveau du Conseil supérieur de l'éducation, est-ce qu'on est capable d'avoir l'INEE qui fonctionne et de conserver dans son intégralité le Conseil supérieur de l'éducation, selon vous?

La Présidente (Mme Dionne) : En 20 secondes.

M. Parent (Jean-François) : Pardon? Ah! très bien. Alors, ce qu'on souhaiterait, c'est un mécanisme de consultation et de coopération entre les deux. Parce que l'éducation, c'est quand même un continuum, là, entre le préscolaire et l'universitaire. Donc, on souhaiterait qu'il y ait un mécanisme de concertation entre les deux organisations.

Mme Rizqy : Merci beaucoup pour la concision de votre propos et surtout la clarté. Merci.

M. Parent (Jean-François) : Merci.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Mercier.

Mme Ghazal : Merci. Merci beaucoup pour votre présence et votre présentation. J'avais un peu la même question par rapport au Conseil supérieur de l'éducation. Là, je n'étais pas sûre, dans votre mémoire. Vous trouvez donc que c'est une bonne idée de le maintenir pour avoir ce continuum? Puisque le projet de loi...

Mme Ghazal : ...en fait, l'ampute d'une partie de sa mission. Très bien, c'était... c'est clair.

Par rapport à l'enseignement à distance, là, j'ai lu ce que vous proposez puis les discussions que vous avez eues. Pour vraiment être certaine, parce que comment vous l'écrivez, là, c'est : élargir l'offre, services éducatifs à distance, puis là vous le dites que c'est à cause de la pénurie de main-d'œuvre, puis là vous ajoutez «par souci d'équité». Il y a eu des groupes qui sont venus puis qui ont dit... justement, ils ne voulaient pas que ça devienne la solution à cause de la pénurie de main-d'oeuvre, mais vous, vous dites que c'est quand même important parce qu'on est pris avec cette situation-là, même si vous préférez que ce soit l'enseignement à distance. De quelle façon est-ce que vous partagez les risques du fait d'écrire ça, de le garder élargi comme ça, l'enseignement à distance, dans le projet de loi? Vous partagez les risques qui avaient été... qui ont été émis, là, par les autres groupes sur le fait que ça devienne ouvert, là, l'enseignement à distance. Parce que vous dites qu'il faut baliser, mais ce n'est pas balisé dans le projet de loi.

M. Parent (Jean-François) : Ici, on est dans une situation je vais dire de guerre, on est dans une situation exceptionnelle. Quand il y a eu la Deuxième Guerre mondiale, des décisions exceptionnelles ont été prises. Là, on n'est pas en guerre dans le sens littéral du terme, mais on a une sorte de guerre à faire à la pénurie de main-d'œuvre, puis il faut être pragmatique. Donc, le pragmatisme ici, pour nous, est de dire : Ce n'est pas la meilleure solution. La meilleure solution, c'est d'avoir un enseignant en classe. À l'impossible, dans l'impossibilité de, qu'est-ce qu'on fait? Qu'est-ce qui est la meilleure solution? Avoir un surveillant d'élève, point, ou encore d'avoir un enseignant d'élève avec, dans cette situation exceptionnelle là, quelqu'un qui est là, en comodal, puis qui enseigne pour un temps limité? Moi, être parent d'un enfant dans une situation où le centre de services scolaire me dit : Je ne peux pas avoir de prof de physique ou je ne peux pas avoir de prof de chimie, je dirais : Bien, c'est correct pour un mois, faites-le.

Mme Ghazal : O.K. Mais c'est ça, vous dites élargir, parce que, dans le projet de loi, il faudrait donc le baliser, parce que le ministre nous dit tout le temps : Je ne peux pas juste fonctionner par projet pilote. Mais là il y a... Tu sais, vous parlez de la guerre, mais il y a eu la COVID, où on a obligé de le faire, ça fait qu'on n'est pas obligé de remonter très loin, c'était comme une forme de guerre. Et donc le projet pilote, ce n'est pas mieux, dans le cadre d'un projet de loi, d'attendre les résultats, peut-être, du projet pilote, puis après ça de vraiment spécifier pour que ça reste exceptionnel? Parce que, si on garde ça ouvert, je ne sais pas, j'ai peur qu'il y ait des dérives, mais vous, vous ne pensez pas qu'il va y en avoir, vous ne pensez pas?

M. Parent (Jean-François) : Moi, je ne pense pas. Avec la situation qu'on vit, je pense qu'il faut faire confiance au professionnalisme des gens aux services éducatifs.

Mme Ghazal : O.K. Donc, pas plus de balises dans le projet de loi tel qu'écrit, ça vous va?

M. Parent (Jean-François) : Ça nous irait, mais, dans la mesure où il y a ce petit élargissement là ou la définition de situations exceptionnelles qui pourrait inclure une situation dans l'impossibilité d'avoir quelqu'un dans la classe.

Mme Ghazal : Je comprends. J'ai posé la question à plusieurs des organisations, vous êtes à trois associations directions de cadres de centres de services scolaires qui avez participé... en fait, qui avez écrit un mémoire, là, dans le cadre des règles budgétaires. Puis ça a été remarqué, là, le fait que vous disiez : Bien, il faudrait vraiment s'assurer que le projet pédagogique particulier soit ouvert à tous les élèves, sans égard aux notes et à l'argent. Ça, c'est une évolution. Est-ce que c'est... c'est quelque chose de nouveau que vous mettez de l'avant publiquement, le fait de l'ouvrir sans qu'il y ait de sélection, les projets particuliers? Ou c'est juste que là vous l'avez écrit, mais c'est une position que vous aviez? Est-ce que vous avez cheminé? C'est ça que je voulais savoir.

M. Parent (Jean-François) : Comment vous dites?

Mme Ghazal : Est-ce que vous avez cheminé sur cette idée-là de ne plus faire de sélection pour les projets particuliers dans les écoles publiques?

M. Parent (Jean-François) : On n'a pas nécessairement eu de position associative là-dessus, mais nous ne sommes pas contre cette idée-là. On trouve que ça permet aux jeunes de les rattacher à l'école lorsqu'ils font partie d'un projet qui les motive. Et donc, si c'est une mesure qui leur permet de les accrocher à l'école plus longtemps, nous sommes en faveur de ça, mais on n'a pas nécessairement de position officielle.

• (16 h 30) •

Mme Ghazal : Est-ce que c'est possible... Parce que là il y a une sélection à cause du privé. Vous savez pourquoi cette sélection existe, parce qu'il y a comme une concurrence du public avec le privé. Est-ce que c'est quelque chose... Juste le dire, le principe, puis le ministre ne croit pas qu'il y a une école à trois vitesses. Est-ce que c'est possible dans nos écoles de faire ça? Comment est-ce qu'on s'assure... C'est chaque école qui décide elle-même qu'il n'y ait plus de ségrégation puis elle y réfléchit par elle-même ou c'est par centres de services? Comment est-ce qu'on s'assure que ça soit réel et non pas juste un vœu pieux mentionné puis que ce soit sur les épaules de chaque direction d'école avec tous les... Tu sais, il n'y en a pas tant que ça, là, qu'il n'y a pas de sélection, là.

M. Parent (Jean-François) : Oui. Je laisserais peut-être ma collègue répondre.

Mme Labelle (Karine) : ...volonté ferme que ce soit accessible à tous...

Mme Ghazal : De la part?

Mme Labelle (Karine) : De la part du gouvernement, bien sûr, là.

Mme Ghazal : Du gouvernement.

Mme Labelle (Karine) : Bien sûr que ça prend ça, parce qu'après ça, ça va être un changement de culture, qu'on se le dise, hein? Dans les milieux, il y a effectivement une certaine clientèle qui est admise dans certains programmes. Les enseignants trouvent un certain confort là-dedans également. Donc, une position ferme permettra aussi de faire un virage.

Mme Ghazal : Malgré... Puis on pourrait donc aller à l'encontre de cette concurrence...


 
 

16 h 30 (version non révisée)

Mme Ghazal : ...ce qui existe entre les écoles publiques et privées sans toucher aux écoles privées.

Mme Labelle (Karine) : C'est ce que l'on souhaiterait.

Mme Ghazal : O.K. Maintenant, est-ce que c'est possible... ce n'est peut-être pas à vous de répondre à ça...

M. Parent (Jean-François) : ...un autre aspect aussi, là, qui est tout celui de l'organisation scolaire. Alors, s'il y a des projets éducatifs ou des programmes particuliers dans certaines écoles, bien, aussi, il y a toute la question, là, de la gestion de la clientèle à considérer, là. Parce que, dans certaines écoles secondaires, on ne pourra pas offrir une multiplicité de projets, alors il y aura peut-être là des choix à faire.

Mme Ghazal : Qu'est-ce qui fait que vous ne pouvez pas avoir une multiplicité dans certaines...

M. Parent (Jean-François) : Bien, en fait, c'est que, si, par exemple, on a une école secondaire de 800 élèves, ça va peut être être à la fois difficile d'offrir du PEI, du sport, de la culture, etc., parce que des écoles secondaires n'ont pas toutes 2 000 élèves. C'est ce que je veux mentionner. Donc, à partir du moment où tu en as une plus petite, bien, il faut peut-être qu'un gamin dise : Bien, très bien, moi, je vais aller à l'autre école secondaire. Mais dans la mesure où, évidemment, le transport puis la possibilité de fréquenter une autre école...

Mme Ghazal : On s'éloigne de l'école de quartier.

M. Parent (Jean-François) : Oui, c'est ça.

Mme Ghazal : Oui, c'est ça. Donc, par rapport à l'indépendance, vous en avez parlé tantôt, là, l'Indépendance de l'INEE que c'est important que ça reste indépendant, qu'il y ait des gens sur le c.a. des centres de direction, là, ou de centres de services scolaires, mais aussi des chercheurs pour vous assurer...

M. Parent (Jean-François) : Oui, tout à fait.

Mme Ghazal : ...pour avoir les données probantes. Très bien. Je ne sais pas combien de temps il me restait.

La Présidente (Mme Dionne) : Il vous reste deux secondes.

Mme Ghazal : Oh mon Dieu, mais je n'étais plus habituée d'avoir autant de temps. Je ne suis pas habituée, en fait. Merci. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci infiniment pour votre contribution à ces consultations. Donc, la commission suspend ses travaux quelques instants, le temps d'accueillir notre prochain groupe.

(Suspension de la séance à 16 h 33)

(Reprise à 16 h 36)

La Présidente (Mme Dionne) : La commission reprend maintenant ses travaux. Donc, nous accueillons maintenant l'Ordre des psychoéducateurs et psychoéducatrices.

Une voix : ...

La Présidente (Mme Dionne) : M. le député, excusez-moi. Merci. Alors, nous accueillons...

Une voix : ...

La Présidente (Mme Dionne) : Nous avons repris la séance, M. le député. Alors, pardon. Je recommence, donc l'Association des psychoéducateurs et psychoéducatrices du Québec, donc M. Félix-David Soucis...

La Présidente (Mme Dionne) : ...Mme Isabelle Legault et Mme Nathalie Lacombe. Donc, bienvenue. Je vous rappelle que vous avez 10 minutes pour nous présenter votre exposé. Alors, d'entrée de jeu, je vous demanderais de vous présenter. Et, suite à votre exposé, nous allons débuter les échanges avec les membres de la commission.

M. L. Soucis (Félix-David) : Merci beaucoup, Mme la Présidente. M. le ministre, Mmes et MM. les députés membres de la commission, bonjour. Je me présente Félix-David Soucis. Je suis, oui, psychoéducateur et président de l'Ordre des psychoéducateurs et psychoéducatrices du Québec. Je suis accompagné d'Isabelle Legault, qui est psychoéducatrice et directrice de l'encadrement et du soutien à la pratique, et de Nathalie Lacombe, psychoéducatrice également, coordonnatrice aux affaires professionnelles et au soutien de la pratique à l'ordre.

Tout d'abord, nous souhaitons remercier la commission pour cette invitation et pour nous offrir l'opportunité de mettre en lumière l'importance capitale qui doit être accordée à la réussite éducative des élèves. Rappelons que l'un des aspects de la mission sociétale de l'ordre est de prendre position pour que les personnes vulnérables ou aux prises avec des difficultés d'adaptation reçoivent des services adaptés à leurs besoins. C'est donc sous cet angle que nous vous présentons aujourd'hui les réflexions et recommandations de l'ordre en lien avec ce projet de loi.

Les psychoéducatrices et les psychoéducateurs sont des professionnels qui interviennent auprès des personnes de tous âges qui vivent avec... qui vivent des difficultés d'adaptation. Ceux-ci détiennent une formation universitaire de deuxième cycle au cours de laquelle ils développent leurs compétences en matière d'évaluation et d'implantation des meilleures pratiques dans les environnements dans lesquels ils interviennent. On les retrouve dans une diversité de milieux, dont plus de 1 800 œuvrent dans le réseau scolaire québécois.

Leur rôle est de soutenir l'ensemble des personnes impliquées autour de la réussite éducative des élèves. Ils peuvent évaluer et accompagner ces derniers dans la gestion de leurs émotions et de leur comportement, faciliter une meilleure compréhension du personnel face aux défis d'adaptation rencontrés par un groupe d'enfants, animer des activités visant le développement des habiletés sociales ou orienter les équipes-écoles vers les meilleures pratiques grâce à leur rôle-conseil. En fonction de leur mandat, ils interviennent selon les besoins à satisfaire afin d'assurer, ultimement, le bien-être et la réussite éducative des élèves et de leur milieu.

Les psychoéducatrices et les psychoéducateurs font également partie des professionnels autorisés à effectuer certaines activités réservées, tel que le stipule le Code des professions. Ils peuvent être... ils peuvent entre autres évaluer un élève handicapé ou en difficulté d'adaptation dans le cadre de la détermination d'un plan d'intervention, selon la Loi sur l'instruction publique, ou évaluer une personne atteinte d'un trouble mental ou neuropsychologique attesté par un diagnostic.

Face aux défis auxquels est confronté le milieu scolaire, il est important d'agir en entreprenant des actions visant à apporter des améliorations. L'ordre est d'avis que ce projet de loi est un premier pas dans la bonne direction. Dans cette perspective, notre objectif est d'apporter une contribution par nos recommandations dans le but d'en bonifier les orientations. Nous sommes parfaitement conscients des défis qu'engendrera ce projet de loi, mais il sera essentiel d'intégrer la gestion du changement comme élément clé du projet de loi pour assurer la réussite concrète des découlant sur le terrain, dans les établissements scolaires.

Ainsi, à la suite de l'analyse du projet de loi, l'ordre a identifié cinq principales actions à mettre en place afin de bonifier et d'en soutenir l'implantation des mesures qui en découleront. La première est d'accorder une importance au facteur de protection de l'élève et du milieu scolaire. La seconde est d'adopter un modèle préventif plutôt que curatif dans le système éducatif. La troisième est d'inclure des indicateurs nationaux évaluant la réussite éducative qui englobe la réussite scolaire. La quatrième est de s'assurer de mettre à contribution les professionnels des services éducatifs complémentaires dans la mise en place du futur Institut national d'excellence en éducation, et, finalement, mettre en place des mécanismes d'accompagnement efficaces pour faciliter cette amorce de transformation du système éducatif.

• (16 h 40) •

Premièrement, le projet de loi porte une attention particulière aux besoins des élèves ainsi qu'aux facteurs de risques qui les concernent. Nous recommandons que les notions de facteurs de protection soient ajustées au projet de loi pour favoriser une compréhension exhaustive des leviers d'action à privilégier afin de favoriser la réussite éducative des élèves. Ainsi, par leur connaissance des facteurs de protection, il sera possible de mettre en place des mesures qui préviendront les difficultés d'adaptation des élèves avant le développement de problématiques plus graves, par exemple une bonne connaissance des intérêts des élèves, des mesures favorisant l'implication des familles, un partenariat accru avec les organismes communautaires, des services sociaux de la région, etc.

Deuxièmement, l'importance de favoriser un modèle préventif dans nos écoles. Le réseau scolaire actuel met l'accent sur les difficultés des élèves de manière curative plutôt que d'adopter une approche préventive. Trop souvent, le personnel du milieu scolaire est appelé à intervenir d'urgence auprès d'élèves ou de classes. On réagit aux difficultés des élèves une fois qu'elles surviennent plutôt que de se concentrer en amont sur les mesures qui favoriseraient le développement et leur adaptation aux défis qu'ils rencontrent au quotidien. Par exemple, on peut penser à la mise en œuvre de programmes visant la promotion des comportements positifs...

M. L. Soucis (Félix-David) : ...ou encore l'intégration d'activités axées sur le développement des compétences psychosociales dans le parcours scolaire des élèves afin de prévenir l'émergence de la violence dans les écoles. Une façon d'y arriver par le biais du projet de loi consisterait à inclure un tableau de bord... au tableau de bord envisagé, pardon, des indicateurs portant sur la mise en place de mesures de prévention.

Cela m'amène au prochain élément qui nécessite une attention particulière, à savoir la réussite éducative des élèves. Après avoir identifié les grandes orientations à suivre et établi les objectifs précis, la mise en place d'un tableau de bord d'indicateurs nationaux pourrait favoriser une certaine harmonisation des pratiques et des services. Cependant, il est essentiel de souligner que ces indicateurs ne doivent pas se limiter aux critères de performance des établissements scolaires ou à la réussite scolaire des élèves. Ils doivent également inclure des indicateurs liés aux aspects sociaux et comportementaux nécessaires pour que les élèves puissent atteindre leur plein potentiel. En d'autres termes, il faut prendre en compte la réussite éducative dans son ensemble.

Notre quatrième élément se réfère à la création nationale d'excellence de l'éducation... en éducation, pardon, qui veut s'inspirer des meilleures pratiques mondiales, notamment celle du secteur de l'éducation nord-américaine. La mission de ce nouvel institut peut favoriser... peut s'avérer fort... fort intéressante, pardon. Il faudra cependant mieux comprendre les façons d'actualiser la mise en œuvre au sein des différents milieux.

En ce qui concerne la formation, il est important de soulever les difficultés liées au réinvestissement des apprentissages. Ainsi, une enseignante ou un enseignant pourrait recevoir de la formation sans pour autant être en mesure de réinvestir le contenu reçu dans la pratique auprès de ses élèves, faute de temps ou de ressources.

Il serait judicieux de prévoir un soutien sous la forme d'un accompagnement pour assurer un réel réinvestissement dans la pratique. Cet accompagnement serait bénéfique pour soutenir l'enseignante ou l'enseignant ayant un jeune présentant des comportements problématiques dans la classe. Les professionnels des services complémentaires, dont les psychoéducateurs et les psychoéducatrices devraient être considérés comme des acteurs incontournables pour assurer cet accompagnement.

Enfin, notre cinquième élément met l'emphase sur l'importance de préserver à tout prix le climat positif scolaire. Comme l'ont mentionné plusieurs chercheurs, le climat scolaire réfère à la qualité et au style de vie de l'école. Il reflète les normes, les buts, les valeurs, les relations interpersonnelles, les pratiques d'enseignement, d'apprentissage, de management et la structure organisationnelle incluse dans la vie de l'école. Ainsi, il ne se limite pas seulement à l'expérience de l'élève dans son environnement scolaire, mais également à celle de toutes les personnes impliquées dans la vie de l'élève de l'école.

Les résultats des recherches montrent clairement qu'un climat scolaire positif est un puissant levier de motivation pour l'apprentissage des élèves et constitue un facteur de protection face aux risques socioéconomiques auxquels certaines familles peuvent être confrontées. De la même manière, un climat positif exerce une influence positive sur tout le personnel. Une importante préparation de l'implantation de ce projet impliquant l'ensemble des intervenants concernés est impératif et gage de succès. Ce projet de loi entraînera une réorganisation et un changement de culture dans le milieu scolaire et, par conséquent, avoir un impact, entre autres, sur le climat scolaire. Ainsi, ces éléments sont importants à prendre en considération pour la protection du public, plus particulièrement pour les plus vulnérables de notre société, nos enfants.

En guise de conclusion, nous réitérons l'importance de l'influence positive du milieu de vie des écoles et sur le développement de nos enfants qui les fréquentent. Ces milieux ont le potentiel d'offrir à nos jeunes une panoplie d'expériences mémorables et formatrices qui leur permettront de forger leurs apprentissages, leurs connaissances, leur identité et leur capacité à créer de nouvelles relations. Cessons de tenter de catégoriser les élèves en fonction de leur comportement et tentons de répondre adéquatement aux besoins qui ont engendré ces difficultés. Ce projet de loi ne doit pas... je recommence, ce projet de loi doit permettre aux établissements d'être davantage à l'écoute des besoins des élèves, mais surtout de fournir aux écoles les moyens d'y répondre selon leurs réalités locales respectives.

Un grand merci pour votre écoute. Mme la Présidente, on est prêt à recevoir vos commentaires.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci, M. Soucis. Donc, nous allons débuter les échanges. Je cède la parole, en premier lieu, à M. le ministre.

M. Drainville : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, très intéressant, vous avez dit il va falloir intégrer la gestion du changement à l'implantation du projet de loi si l'on souhaite que ce projet de loi soit un succès, je paraphrase, mais je pense que c'était l'idée. Qu'est-ce que vous voulez dire par gestion du changement?

Puis je me permets d'ajouter, je pense que vous étiez pas mal dans le même esprit, là, vers la fin, quand vous avez dit : Ce projet de loi entraînera certainement une réorganisation, un changement de culture dans le milieu scolaire, par conséquent, aura un impact sur le climat scolaire. Est-ce que ces deux idées sont proches, non, impact sur le climat scolaire et gestion du changement?

M. L. Soucis (Félix-David) : Oui, bien, nécessairement, la gestion de changement interagit directement sur le climat des classes. En fait, ce qu'on veut dire...

M. L. Soucis (Félix-David) : ...L'importance, par l'implantation surtout d'un Institut national d'excellence en éducation... On peut avoir les meilleures pratiques, chose pour laquelle on est d'accord, on a beau avoir les meilleures pratiques, mais il faut s'assurer que l'ensemble des écoles puisse avoir accès à ces bonnes pratiques là et les mettre en application également dans le... dans leur environnement, selon les...

M. Drainville : Comment on fait ça? Comment on fait ça?

M. L. Soucis (Félix-David) : Bien, en fait, c'est en accompagnant surtout les mesures, mais c'est de voir un peu comment les... comment qu'on va réussir, avec les équipes-écoles... De favoriser ce changement-là. Ça va demander, justement, aux gestionnaires un très grand leadership et une très grande capacité de gérer ce changement-là pour justement mobiliser l'ensemble de l'équipe-école autour des besoins de l'élève et des projets qu'ils vont pouvoir mettre en place en lien avec l'INEE, nécessairement.

M. Drainville : Oui, vous avez raison. Ça fait combien d'années, Félix-David Soucis, vous êtes psychoéducateur?

M. L. Soucis (Félix-David) : 12 ans.

M. Drainville : 12. Puis, avant d'être le président de l'Ordre, vous avez été dans... vous avez oeuvré dans une école ou dans des écoles?

M. L. Soucis (Félix-David) : Non.

M. Drainville : Non?

M. L. Soucis (Félix-David) : Pour ma part, j'ai fait mes stages seulement à la maîtrise, mais je n'ai pas fait mes... non.

M. Drainville : O.K. Mais vous travaillez avec des psychoéducateurs qui sont dans des écoles?

M. L. Soucis (Félix-David) : Oui, c'est souhaitable.

M. Drainville : Et la... Quand vous discutez avec vos collègues qui sont dans des écoles et que vous discutez du leadership, qu'est-ce qui fait un bon directeur ou une bonne directrice? Qu'est-ce qui fait la différence? Tu sais, quand on parle... Il y a l'effet classe, ça, c'est l'enseignant, l'enseignante, il y a l'effet centre de services, direction générale, et, entre les deux, il y a l'effet direction d'école, qui est important pour la réussite scolaire, la science de l'éducation démontre que ça a un impact important. Dans vos discussions avec vos collègues, si vous deviez nous décrire le directeur ou la directrice qui a les qualités, qui a des belles qualités de leadership, du genre dont on aura besoin pour implanter ce nouveau climat qui va découler, dites-vous, du projet de loi, ce serait quoi?

M. L. Soucis (Félix-David) : Bien, en fait, l'importance surtout d'une école... Pour une école, c'est d'avoir une structure d'intervention qui va pouvoir venir soutenir l'ensemble des besoins des élèves. C'est important que l'école puisse se fédérer autour des meilleures pratiques, mais qu'on ait une vision d'ensemble qui est commune.

Comme je le disais dans mon allocution, mais également je pense qu'on en parle, là, dans le mémoire, actuellement, ce qui arrive, c'est que les professionnels doivent éteindre trop souvent des feux. Donc, quand qu'on parle d'intervenir, des feux, c'est qu'on intervient auprès des enfants une fois que le comportement est arrivé plutôt que se concentrer sur qu'est-ce qu'on met en place pour favoriser l'accueil des différents besoins des élèves dans l'école.

Donc, pour répondre à votre question, si je peux essayer de le faire d'une façon... Le plus clair possible, ce serait d'être en mesure d'implanter, si on veut, des meilleures pratiques afin de soutenir... Surtout un modèle préventif qui va pouvoir venir soutenir l'ensemble des besoins, pas juste les besoins nécessairement émergents liés au comportement, donc d'éteindre des feux, comme je le disais, mais plutôt de réussir à intégrer l'ensemble des besoins des élèves à travers l'ensemble du projet éducatif.

M. Drainville : Sur la question des données, comment estimez-vous que le transfert du dossier de l'élève en cas de changement d'organisation scolaire pourrait faciliter le suivi des interventions professionnelles comme celles d'un psychoéducateur ou d'une psychoéducatrice dans le cas de ces élèves-là?

• (16 h 50) •

M. L. Soucis (Félix-David) : Bien, tout dépendamment. Encore une fois, là, je ne peux pas extrapoler à l'ensemble des écoles, je pense que toute école est issue d'un milieu différent, mais je pense que ces données-là, dont on parlait beaucoup l'importance de mettre les facteurs de protection, peuvent justement aiguiller les intervenants, à savoir qu'est-ce qui peut favoriser une réussite éducative pleine et complète pour l'ensemble des élèves. Donc, ces indicateurs-là, si on inclut surtout les facteurs de protection ainsi que les facteurs de risque, les interventions peuvent justement se modifier en fonction de ça.

M. Drainville : Mais est-ce que ça vous arrive, dans les discussions que vous avez avec vos collègues qui sont dans des écoles, qui travaillent dans des écoles, est-ce que vous entendez ça parfois, un collègue qui dit : je m'occupais d'un élève, il a changé de centre de services scolaire, les parents ont déménagé, changement d'emploi, tata, puis le dossier n'a pas suivi, ça fait que je ne sais pas ce qu'il va lui arriver, je ne sais pas, je l'ai aidé, j'ai vraiment... tu sais, je m'étais attaché à cet élève-là, je pense que j'ai vraiment fait une différence, puis là, bien, il déménage puis je ne sais pas ce qu'il va lui arriver. Puis, il a raison. La personne a raison de se poser la question parce que le dossier... Actuellement le dossier de l'élève ne suivra pas dans un autre centre de services. Le projet de loi va changer ça, va permettre justement le transfert du dossier d'un centre de services scolaire à un autre centre de services scolaire pour que ceux et celles qui vont accueillir l'enfant dans sa nouvelle école sachent quels sont ses besoins, quels sont les services auxquels il ou elle a eu droit pour justement qu'ils ne tombent pas dans les cracs du système, là.

M. L. Soucis (Félix-David) : Complètement...

M. Drainville : ...ça, c'est...

M. L. Soucis (Félix-David) : Bien, on est d'accord, en autant que ça puisse respecter, là, certains critères de confidentialité, notamment, là, comme on l'a inscrit, là, dans notre mémoire. Tout à fait.

M. Drainville : Bien, le projet de loi le prévoit à tout le moins. Le projet de loi le prévoit : «...communique dans les plus brefs délais au centre de services scolaire — donc, au nouveau — ou à... l'établissement les renseignements qui concernent cet élève et qui sont nécessaires à l'organisation et à la prestation des services éducatifs.» Donc, on l'encadre.

Par ailleurs, vous parlez des meilleures pratiques, puis effectivement, ce sera l'objectif de l'INEE de les identifier puis de les partager aux enseignants. Parfois, il y a des inquiétudes par rapport à cette idée, donc, d'identifier les pratiques efficaces. Parce que les gens disent... enfin, ceux qui ont des préoccupations, des inquiétudes disent : Ah! mais attention, les pratiques efficaces, c'est mesuré par les résultats. Hein, ce qui est efficace, c'est ce qui atteint les résultats, c'est ce qui permet d'atteindre les résultats. Et là les gens nous disent, certaines personnes nous disent : Comme c'est axé sur l'atteinte des résultats, il peut y avoir une tentation de manipuler les résultats pour bien faire paraître l'école ou la classe. Est-ce que vous voyez ce danger-là, vous? Vous comprenez ce que je veux dire?

M. L. Soucis (Félix-David) : Bien, plus ou moins. En fait, vous faites référence à?

M. Drainville : Un enseignement axé sur les résultats peut amener, pourrait créer la tentation de manipuler les résultats pour bien faire paraître l'école, bien faire paraître les enseignants dans l'école. Il y a des... je pense, il y a des personnes, des représentants syndicaux qui nous ont dit ça : Faites attention à l'enseignement axé sur les résultats parce que, par le passé, ce qu'on a vu, c'est que ça mettait beaucoup de pression... Mettons, le centre de services scolaire mettait de la pression pour, dans le fond, améliorer artificiellement le rendement pour bien paraître sur les statistiques, pour bien paraître dans les statistiques. Vous me suivez?

M. L. Soucis (Félix-David) : Oui, tout à fait.

M. Drainville : Est-ce que vous partagez cette inquiétude, vous?

M. L. Soucis (Félix-David) : Bien, en fait, non, parce qu'en fait, là, si on parle de données probantes puis on parle de données qui sont démontrées, je veux dire, ça, ce n'est pas la... seulement le travail de l'ordre de se pencher sur ces données-là. Mais l'importance de l'institut, d'une part, c'est de fournir les meilleures données qui vont permettre une réussite éducative complète des élèves. Donc, maintenant, pour être sûr de bien répondre à votre question, on ne partage pas, là, nécessairement, cette... ce n'est pas quelque chose auquel l'ordre s'est penché nécessairement, là, ces inquiétudes-là. L'idée vers laquelle on s'est plus penchée dans notre mémoire, c'est que, oui, pour les données probantes, mais tant qu'on soit en mesure des opérationnaliser sur le terrain. Maintenant, en lien avec votre question, je ne sais pas si ma collègue pourrait compléter, s'il y avait quelque chose à dire. Mais c'est vraiment l'idée à travers laquelle on voulait transmettre dans le mémoire, de vouloir avancer, là, des... oui, des données probantes, mais il faut encore qu'elles soient accessibles.

M. Drainville : O.K. Je crois que mon collègue de Côte-du-Sud.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci, M. le ministre. M. le député de Côte-du-Sud.

M. Rivest : Je vous remercie pour votre contribution et votre présence ici aujourd'hui. Tout à l'heure, vous avez parlé du modèle préventif du fait de pouvoir... Si on avait une baguette magique, là, puis les services, exactement, de... que vous offrez dans ces meilleures pratiques là puis dans les services complémentaires, en faisant peut-être la nomenclature des services complémentaires possibles, pouvez-vous me dire de quelle façon on peut arriver à arrêter d'être dans une situation d'urgence de gestion de classe? Quels seraient les mécanismes, les façons de faire, avec les ressources nécessaires aussi pour y arriver?

M. L. Soucis (Félix-David) : Bien, je pourrais compléter puis mes collègues pourront... Je pourrais commencer puis mes collègues pour compléter. Mais l'idée à travers laquelle... puis qui... dans notre mémoire, c'est l'importance d'implanter une mesure préventive. Quand on parle de favoriser une mesure préventive, c'est de s'assurer que l'école soit en mesure de répondre aux besoins des élèves, de la population qui intègre l'élève. Quelles sont les pratiques qui vont permettre d'y répondre ultimement? Donc, c'est ce qu'on voyait en termes d'aspects intéressants de la part de l'INEE, d'y avoir accès. Ceci étant dit, par rapport aux différents contextes, c'est de voir comment maintenant on va réussir à les intégrer en fonction des différents milieux. Mais ça, il va falloir vraiment, là, qu'on puisse se...

M. Rivest : J'apprécie toutes vos réponses, mais vous me répondez par ma question, dans le sens, si on veut les définir ensemble, on est en équipe, là, puis on veut que M. le ministre, il reparte ici puis il se dise, ces mesures préventives-là, quelles sont-elles, on peut-u en nommer deux, trois? Est-ce que c'est la présence de psychoéducateurs au préalable, de plus d'heures de services complémentaires...

Mme Lacombe (Nathalie) : ...dans notre mémoire, en fait, ce qu'on met de l'avant, c'est que chaque école doit avoir un... un modèle théorique permettant l'organisation de leurs services à la lumière des besoins des élèves de leur milieu, donc comment structurer leurs services pour qu'il y ait une prévention à la base. On vous a mis le modèle de la RAI à titre indicatif, qui est un modèle de réponse à l'intervention qui permet un peu d'organiser l'école, de dire : À un premier niveau, de manière universelle, qu'est-ce qu'on doit mettre en place auprès de nos élèves pour répondre à une grande majorité des besoins de ceux-ci? Ensuite, on a le deuxième et le troisième niveau où on aura toujours des élèves qui auront besoin d'une intervention plus personnalisée, plus intensive. Pour... des exemples, un peu, un code de vie éducatif. Que... S'assurer que l'école ait un code de vie basé sur des valeurs, par exemple le respect, c'est sûr que ça va susciter l'adhésion des élèves puis du personnel. D'assurer une surveillance active dans les lieux de l'école, dans les corridors, sur la cour d'école. Tu es en mesure de détecter que des élèves sont sur le point de vivre une tension, on voit leur non-verbal, tout de suite l'adulte se présente pour désamorcer la crise.

Donc, il y a différentes stratégies. Évidemment, les experts et le futur Institut national d'excellence en éducation pourra très certainement s'y pencher, mais il y a beaucoup, beaucoup... puis la littérature, beaucoup d'avis également qui démontrent qu'une base avec vraiment des... d'assurer la prévention répond à une grande proportion des besoins des élèves.

M. Rivest : Vous avez mentionné, dans votre recommandation numéro un, le modèle de gouvernance qui reflète l'ensemble des personnes impliquées dans la réussite éducative. Ça serait quoi, exactement, votre modèle idéal de gouvernance?

M. L. Soucis (Félix-David) : Bien, en fait, c'était plus un constat qu'on émettait dans ce mémoire-là par rapport au fait qu'actuellement, pour avoir un poste, en fait, là, au niveau de quelconque gestion, au niveau de quelconque établissement scolaire, il faut avoir un brevet d'enseignement. L'idée à travers laquelle on arrive avec une réflexion, c'est comment que, selon les besoins que manifeste une école, par exemple, du Bas-Saint-Laurent versus une école de l'Outaouais ou encore une école de Montréal... comment, justement, une vision issue d'un professionnel qui est issu des services complémentaires pourrait venir soutenir les grandes orientations de l'école, du centre de services éducatifs ou d'un autre... d'un autre environnement. C'est plus d'avoir une idée où on peut inclure les services complémentaires... éducatifs complémentaires à l'intérieur d'un système... d'avoir cette réflexion-là, ce réflexe-là de pouvoir les intégrer à travers ces gouvernances-là.

M. Rivest : Puis, à l'intérieur, comme dernière question, de cette réussite éducative là, qu'on souhaite... qu'on souhaite tous, hein, bien, l'ordre, vous dites tenir à souligner l'importance également de prendre en considération les facteurs de protection des élèves et les facteurs de risque et de protection du milieu scolaire. Pouvez-vous me les définir, ces facteurs de protection là?

M. L. Soucis (Félix-David) : Bien, un facteur de protection, essentiellement, c'est... en fait, c'est... c'est dans l'environnement directement, c'est comment qu'on va réussir à, par exemple, avoir une très bonne relation, un très bon partenariat avec les familles, les relations qu'on tisse avec le réseau de la santé pour, justement, avoir des services ou des collaborations en lien avec les enfants qui ont des difficultés, quel genre de structure, en fait, de service... en fait, de structure de service qui est à l'intérieur de l'école pour permettre une réponse à l'ensemble des besoins, donc tous les plus qu'on peut ajouter d'emblée dans une école, la disponibilité des activités parascolaires, il y en a plusieurs. Vous comprenez? Donc, c'est tous les ajouts plutôt que les facteurs de risque, qui sont plus à titre négatifs, donc de dire... Tu sais, on peut penser au statut socioéconomique, donc ces choses-là. Donc, c'est vraiment d'avoir une approche qui est plus axée sur le positif pour vraiment bien déceler : Bien, si on a ça, on a plus de chances de réussir.

• (17 heures) •

M. Rivest : Merci.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci, M. le député. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Hull. Il vous reste un peu moins de deux minutes.

Mme Tremblay : Parfait. Donc, je voulais revenir, dans mon cas, sur l'enseignement, les services éducatifs à distance. Vous l'avez abordé dans votre mémoire. On comprend qu'il y a certaines craintes en lien avec ça. Mais ça reste des situations exceptionnelles. Ça, vous l'avez... vous l'avez compris. Puis vous nous dites : «déterminer une diversité de solutions». Ça fait que vous, dans votre cheminement, ce que vous avez réfléchi, c'est quoi, cette diversité de solutions là? Est-ce que vous y avez pensé?

M. L. Soucis (Félix-David) : En fait, ce qui est important de comprendre au niveau de cette recommandation-là, c'est : chaque cas est différent, O.K., on comprend très bien, chaque mesure est... chaque mesure exceptionnelle est différente l'une des autres. L'importance qu'on voulait soulever, c'est plus le processus à travers lequel ces choses-là pourront être définies, l'importance d'avoir une évaluation complète de la situation incluant les parties prenantes, on peut penser à un médecin, la famille, les intervenants, l'enseignant, la direction, et j'en passe... pourraient venir... en fait, dresser la possibilité de différentes possibilités qui pourraient venir soutenir avant d'en arriver à la possibilité d'avoir une scolarisation à distance. C'est vraiment dans cette optique-là. On...


 
 

17 h (version non révisée)

M. L. Soucis (Félix-David) : ...ajouté aussi, dans la recommandation, «défini dans le temps», simplement pour ne pas que cette solution-là soit stable dans le temps, en fait, soit constante, soit la même pour une très longue période. Donc, l'importance de réviser cette évaluation-là. C'est de voir : Est-ce qu'on a encore toutes les mêmes composantes qui permettent de juger que l'enseignement doit être à distance? Ça peut être pour un enfant ou pour un groupe d'élèves. Donc, c'est cette idée-là d'avoir une vigie pour éviter les glissements, mais de s'assurer, en même temps, qu'on puisse réellement... le définir que c'est réellement une situation exceptionnelle, plutôt que ce soit un passe-droit pour une difficulté organisationnelle exclusivement, donc, toujours en réflexion avec la protection des élèves, ultimement, là.

Mme Tremblay : D'accord. Moi, je n'ai pas d'autres questions.

La Présidente (Mme Dionne) : Le temps est terminé, de toute façon.

Mme Tremblay : C'est ce que je pensais.

La Présidente (Mme Dionne) : Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Saint-Laurent.

Mme Rizqy : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Bonjour et bienvenue à l'Assemblée nationale du Québec. Moi, je tiens à souligner que j'ai eu le bénéfice de pouvoir avoir accès à plus d'informations, avec une séance, parce que, souvent, les gens ne saisissent pas chacun des acteurs dans le réseau de l'éducation, et les psychoéducateurs, ce n'est pas tout le monde qui connaissent leur rôle. Et vous m'avez dit : Nous, on aide l'enseignant, parce qu'on ne peut pas se multiplier pour tous les élèves qu'il y a, à notre rôle. Si on est capables d'outiller l'enseignant à gérer en amont, on va être capables, notamment, de réduire des débordements en classe ou, même, des risques d'actes de violence en classe. Mais que, présentement — vous l'avez souligné, tantôt, dans votre présentation — vous gérez des feux.

Êtes-vous capables de me dire... de nous dire, pardon... En ce moment, les psychoéducateurs, dans le réseau de l'éducation, dans leurs tâches, là, il y en a combien qui, en pourcentage ou... dans une semaine, est-ce que c'est 15 %, 20 %... La FSE a fait un sondage. Eux, les enseignants, 37 % du temps, c'est de la gestion de classe, là, donc ce n'est pas des apprentissages. C'est 37 %... Il est arrivé une situation de débordement, on sort les élèves de la classe, on s'en va à la bibliothèque, le temps que quelqu'un termine sa colère.

M. L. Soucis (Félix-David) : Bien, en fait, je ne peux pas parler pour tous les établissements scolaires. Là où on trouve qu'il y a une difficulté, souvent... Les trois grandes difficultés qu'on peut ressortir, d'une part, la première, c'est... une surcharge, hein? On va... Puis comme... Puis un peu la situation que je définissais. Souvent, ce qu'on entend, c'est : on est surchargés, on a beaucoup de demandes dans lesquelles on n'est pas en mesure d'organiser l'ensemble des services, parce que, justement, soit l'enseignant nous réfère vers l'enfant. Donc, l'idée à travers laquelle vous avez défini, c'est une des choses qui est difficile. Il y a aussi un aspect qui est l'isolement aussi des professionnels, du fait qu'ils ne peuvent pas nécessairement échanger entre eux. Donc ça, c'est une autre difficulté. Pour revenir un peu à votre question, l'idée à travers laquelle... en fait, là...

Une voix : Bien, pour compléter...

M. L. Soucis (Félix-David) : Oui, excuse-moi, je suis comme un peu... j'ai perdu... Juste me répéter votre question initiale. 

Mme Rizqy : Bien, en fait, je voulais savoir si vous êtes capable peut-être d'évaluer il y a combien de temps qui est consacré au fonds.

M. L. Soucis (Félix-David) : Oui, merci. Bien, en fait, le temps consacré, ça dépend des secteurs, ça peut être beaucoup comme ça peut être... ça dépend de... si on est en mesure de mettre une structure de prévention dans l'école, on est capable de le mettre en amont, bien, on peut réduire de beaucoup les cas les plus... bien, en fait, les besoins des élèves. On peut venir les soutenir en amont plutôt que d'intervenir sur leur comportement. Dons, de là l'importance de pouvoir instaurer une mesure préventive. Donc, c'est un peu dans cette idée-là. Le rôle-conseil, ce qu'il vient faire, c'est que, comme vous l'avez dit, on vient évaluer un peu les besoins de l'enseignant en lien avec sa classe. Ça peut être un enseignant, mais ça peut être aussi un groupe d'enseignants. Donc, ça peut être aussi une équipe-école en lien avec l'intégration de nouvelles pratiques, s'assurer que le professionnel est en mesure de les appliquer... en fait, pas les professionnels, mais les enseignants ou l'équipe-école sont en mesure d'appliquer les meilleures pratiques dans une école. Donc, ça, c'est ce qu'on ressort que quand cette organisation est présente, la surcharge diminue énormément puis, en même temps, on est capable de davantage utiliser... je ne dirais pas exploiter, mais d'utiliser les compétences des professionnels, psychoéducateurs à leurs pleines capacités.

Mme Rizqy : Je tenais à avoir la présence d'au moins un groupe d'ordre professionnel, donc vous êtes notre seul ordre professionnel, donc la pression est grande. Vous, vos membres, vous avez de la formation continue obligatoire, dans le projet de loi actuel tel que rédigé, c'est inscrit que tout membre du personnel scolaire doit suivre un 30 heures. Comment on peut s'assurer d'arrimer le tout avec le nombre d'heures que vous avez déjà d'obligatoire, mais aussi que ça réponde aussi aux besoins de l'ordre professionnel? Parce que, quand bien même que... je vous donne un exemple, le ministre dirait, dans la thématique : Vous devez tout suivre, membres de l'équipe-école, cinq heures en français ou six heures en français, peu importe le choix, mais un psychoéducateur, disons qu'il ne corrige pas de travaux, là, on s'entend, là, mais n'empêche que je suis convaincu, je vous écoute parler, vous avez un excellent français.

M. L. Soucis (Félix-David) : Mais l'idée... Bien, c'est intéressant parce que ça peut...

M. L. Soucis (Félix-David) : ...amener un facteur qui va être très fédérateur au sein des équipes. Donc, le fait d'avoir les mêmes pratiques, la même approche, la même façon de procéder, donc, ça amène une certaine cohérence aussi aux interventions qui vont pouvoir en être dégagées. Toujours étant, quand qu'on parle de formation continue, c'est important que ça réponde aux besoins du professionnel en question, donc, pour que... je veux dire, on ne va pas aller former... on ne va pas aller... on ne va pas demander à un professionnel de faire une formation pour laquelle il l'a suivie l'année précédente ou qui l'a déjà faite de son propre chef. Donc, l'idée, c'est d'avoir une formation qui répond aux besoins de la clientèle, à ses besoins personnels comme professionnels, mais aussi aux besoins de la clientèle sur laquelle il intervient. Donc, ça, c'est important de faire la nuance, là, par rapport à la formation continue.

Mme Rizqy : Parfait. Quand les psychoéducateurs dans le réseau scolaire interviennent, par exemple, auprès d'un enseignant, disons, légalement qualifié versus un qui n'a pas non plus, là, ce qu'on appelle le brevet, la tolérance d'engagement, là, ceux qui n'ont pas, au fond, le bac, là, qui ont soit un secondaire V avec un début d'attestation d'études collégiales ou un DEC, ou peu importe, là, complété ou pas, est-ce qu'à ce moment-là ça demande plus de temps? Parce que les directions d'école, c'est ce qu'ils nous disent, ils consacrent beaucoup plus de temps à essayer d'encadrer, d'un point de vue pédagogique, un enseignant qui n'est pas qualifié, là.

M. L. Soucis (Félix-David) : Dans le fond, au niveau du rôle-conseil, vous dites, est-ce que ça prend plus de temps? Bien, ça, je ne pourrai pas nécessairement répondre, là. Nous, à l'ordre... l'ordre ne s'est pas positionné nécessairement sur ces enjeux bien précis. Ceci étant dit, c'est important, je crois, là, que pour toute personne qui offre des services aux élèves, qu'il ait les compétences en lien avec la clientèle, autant pour l'enseignant ou la personne qui enseigne que pour le groupe d'élèves, donc s'assurer que les meilleures pratiques soient... Donc, l'accompagnement est très, très important à ce niveau-là.

Mme Rizqy : Présentement, il y a certains... en fait, beaucoup de membres qui nous écrivent, qui sont dans le réseau public, ou d'autres qui sont dans le réseau public, mais à contrat, donc ils sont au privé, mais ils reçoivent le contrat, par exemple, d'un centre de services scolaire pour intervenir dans x, y, z écoles, d'autres... un contrat, par exemple, d'un parent, mais ont des difficultés à rentrer dans l'école lorsqu'ils sont dans le secteur privé même s'il ont un contrat de faire ce que... disons, le portrait de 360 d'un élève. Est-ce que ça, vous l'entendez, vous, à votre... dans le réseau?

Mme Lacombe (Nathalie) : Bien, c'est sûr qu'à ordre on va mettre de l'avant la collaboration puis l'ouverture, puis on va mettre de l'avant aussi l'importance de travailler avec les acteurs présents dans le milieu, qui connaissent bien l'ensemble du portrait soit de l'élève, de sa classe, mais pas juste ça, le service de garde, la cour d'école, les partenaires, le communautaire. Donc, il y a une vision globale. Ils travaillent avec les parents aussi. Donc, on va mettre ça de l'avant au niveau de la collaboration.

Mme Rizqy : Si je vais maintenant sur l'INEE, donc l'institut, comment qu'on peut, justement, s'assurer qu'il y ait aussi de l'information de votre part au niveau de la gouvernance scolaire? Est-ce que vous souhaiteriez aussi être... peut-être, je ne sais pas, avoir un siège au niveau du conseil d'administration ou qu'au moins un ordre professionnel qui intervient dans le réseau scolaire puisse aussi avoir peut-être une place à la table?

M. L. Soucis (Félix-David) : Mais ce n'est pas quelque chose sur lequel l'ordre s'est positionné non plus par rapport à ça, donc je ne pourrais pas vous répondre nécessairement clairement. Mais on croit, là oui, nécessairement la mission de l'INE, mais on n'a pas réfléchi nécessairement au niveau de la gouvernance, là.

Mme Rizqy : En terminant, vu qu'il me reste moins de temps, au niveau des interventions que vous faites, juste pour distinguer correctement, parce que, si vous me permettez, dans votre rôle, on a souvent parlé des aides à la classe que, nous, on salue, on trouve que c'est une mesure qui est ajoutée, qui vient aider, mais ça ne remplace pas nécessairement, lorsqu'on est avec des élèves en difficulté, de troubles de comportement, une expertise qui est dite professionnelle, n'est-ce pas?

• (17 h 10) •

M. L. Soucis (Félix-David) : Oui.

Mme Rizqy : O.K. Et vous, en ce moment, comment... je vais le dire comme ça, on a plusieurs de vos membres qui sont à temps partiel, mais plusieurs nous disent qu'il y aurait des besoins pour du temps plein. Est-ce vous entendez ça aussi, à l'ordre?

M. L. Soucis (Félix-David) : Bien, c'est un peu... pour faire du parallèle un peu sur ce que je disais un peu plus tôt, c'est très difficile, pour un professionnel qui est là deux jours-semaine, d'instaurer ou d'accompagner une équipe-école à travers l'implantation très globale d'une approche qui est plus préventive, le modèle qui est plus préventif, un peu comme celui de... Si on est souvent deux jours-semaine, ça risque d'être plus difficile, oui, en effet, de pouvoir implanter l'ensemble des bonnes pratiques qui va permettre à l'école, au bout du compte, de favoriser une réussite... répondre aux besoins des élèves dans le but de favoriser la réussite éducative des élèves.

Mme Rizqy : Au niveau du partage des informations, lorsqu'un élève change d'école ou de centre de services scolaire, comment on peut s'assurer... Parce qu'une des craintes des parents, c'est que son enfant soit étiqueté, alors comment on peut répondre à cette crainte des parents?

M. L. Soucis (Félix-David) : Par rapport à...

Mme Rizqy : À son dossier? C'est parce que, des fois, il y en a qui vont changer, parce qu'il y a une mésentente avec le centre de services scolaire. Il y en a... que leurs enfants soient étiquetés...

Mme Rizqy : ...arrive déjà avec... dans un autre centre de services scolaire ou dans une autre école, avec une appréhension de l'équipe-école en disant : Ah! ça, c'est un enfant qui est problématique, entre guillemets. Alors, comment qu'on peut s'assurer, oui, d'avoir un transfert de connaissances, mais pas avoir ce stigma sur l'enfant?

M. L. Soucis (Félix-David) : Je vais répondre dans un premier temps, je laisserais peut-être ma collègue compléter. Par rapport au transfert, si on parle du consentement, hein, le consentement peut être très important pour l'adhésion, d'une part, à des services. Donc, c'est quelque chose qui se fait en tenant compte...

La Présidente (Mme Dionne) : Il reste 10 secondes.

M. L. Soucis (Félix-David) : Parfait. C'est quelque chose qui permet... Il faut favoriser un accompagnement du parent pour que réellement... et du parent, et de l'équipe-école pour que ce transfert-là se fasse de façon adéquate, pour que l'élève puisse recevoir les bons services, ultimement. Donc, c'est un accompagnement que doivent comprendre toutes les parties prenantes.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci infiniment. Mme la députée de Mercier.

Mme Ghazal : Oui. Merci beaucoup pour votre présence ici parmi nous, c'est important, là, pour nos travaux. Je me posais justement la question... Je comprends que c'est peut-être la collègue qui a soumis votre nom, parce que vous dites, par exemple, dans une de vos recommandations, c'est important, là, qu'il y ait... la gouvernance reflète la diversité des expertises professionnelles, mais vous êtes le seul ordre. Il y a aussi... tu sais, il n'y a pas d'orthophonistes, psychologues, pourquoi c'est vous qui avez été invités? Normalement, je devrais poser la question au ministre, je le sais, mais, par exemple, selon vous? Est-ce que c'est parce que ça chapeaute, c'est plus...

Mme Lacombe (Nathalie) : Peut-être parce qu'on est très présents aussi en milieu scolaire.

Mme Ghazal : Pardon?

Mme Lacombe (Nathalie) : On est des professionnels quand même très présents en milieu scolaire, c'est le tiers de nos membres actuellement qui oeuvrent dans le réseau de l'éducation. Donc, c'est près de 2 000 membres.

Mme Ghazal : Oui, c'est ça, donc c'est l'ordre le plus présent.

Mme Lacombe (Nathalie) : Bien, les autres aussi. On parle... c'est pour ça que, dans notre mémoire, on parle beaucoup des services éducatifs complémentaires, parce que ça inclut d'autres professionnels qui ne sont pas aujourd'hui présents, donc, qui sont quand même dans le milieu scolaire, oui.

Mme Ghazal : Exact. Vous disiez que c'est important que ça reflète, qu'il y ait cette diversité des expertises qui soit reflétée puis qu'on... dans la gouvernance.

Peut-être, je ne sais pas si vous vous êtes prononcés là-dessus, vous avez parlé de l'INEE, son importance d'avoir des données, mais peut-être pas sur la gouvernance. Sauf que c'est quand même un conseil, un organisme important, le Conseil supérieur de l'éducation. Il y a une unanimité en ce moment qui dit que l'INEE ne devrait pas... il pourrait exister puis être créé, tout à fait, mais en maintenant le Conseil supérieur de l'éducation, qui a un mandat beaucoup plus large du début jusqu'à la fin. Vous n'en parlez pas, ce n'est peut-être pas votre réflexion, mais est-ce que... peut-être pas votre réflexion dans votre mémoire, mais est-ce que vous y avez quand même pensé, est-ce ce que vous pouvez vous prononcer là-dessus, sur le maintien du Conseil supérieur de l'éducation, qui existe depuis 60 ans?

M. L. Soucis (Félix-David) : Mais comme vous le dites, on n'a pas nécessairement abordé la réflexion. On a vraiment été davantage sur l'ensemble des données probantes qui soient diffusées et accessibles. C'est vraiment l'aspect important. Maintenant, ce qu'on peut comprendre puis entendre aussi parce qu'il y avait une certaine complémentarité qui pouvait être intéressante, là, de la part des différentes personnes qui ont été consultées.

Mme Ghazal : C'est ça, ils ont... ils ont produit plein, plein de... de mémoires et de... des... d'avis et tout ça, je le sais. Je ne m'en rappelle pas s'ils en ont... s'ils ont parlé aussi des... des professionnels ou des services professionnels dans les écoles. Probablement, je me dis. Peut-être que, bon, en tout cas... C'est parce que je me dis peut-être qu'il y a eu un avis qui a parlé aussi de la présence de professionnels dans les écoles, de comment utiliser mieux ça. Je posais la question, mais pas...

M. L. Soucis (Félix-David) : Non.

Mme Ghazal : Peut-être oui, peut-être non, on ne le sait pas. Mais donc vous ne pouvez pas vous prononcer sur le fait que le Conseil supérieur de l'éducation soit maintenu.

M. L. Soucis (Félix-David) : Bien, lors de la...

Mme Ghazal : Ce n'était pas dans la... dans votre réflexion.

M. L. Soucis (Félix-David) : Non, exactement. On ne l'a pas abordé dans notre réflexion. Mais ce qu'on comprend, c'est qu'il y avait peut être...

Mme Ghazal : Un consensus.

M. L. Soucis (Félix-David) : ...justement... Bien, il y avait peut-être certaines choses qui pouvaient être mises en complémentarité.

Mme Ghazal : Oui, parce que j'ai failli faire changer l'avis...

M. L. Soucis (Félix-David) : Non, on n'a pas...

Mme Ghazal : ...l'avis de ministre. Peut-être qu'il a déjà changé d'avis? Je ne le sais pas. On va le... on va le découvrir, on va le savoir, du maintien du Conseil supérieur de l'éducation. Il y a comme un consensus. Bien, on ne sait pas. On va... on va peut-être le découvrir.

Pour la santé mentale, dans votre recommandation 9, vous parlez d'inclure comme indicateurs nationaux les actions découlant de la mise en œuvre du plan d'action ministériel... interministériel en santé mentale. Peut-être nous en parler plus, que vous aimeriez voir se concrétiser l'entente de complémentarité de services entre les réseaux et... le réseau du service de la santé et de l'éducation. Donc, peut-être nous en parler plus. Et est-ce que ça serait quelque chose que l'INEE devrait suivre?

M. L. Soucis (Félix-David) : Ce serait... Peut-être ma collègue...

Mme Ghazal : C'est à la page 13 de votre mémoire.

M. L. Soucis (Félix-David) : Oui.

Mme Lacombe (Nathalie) : Oui. Bien, en fait, effectivement, il y a le projet... référentiel, pardon, Équipe que vous avez très certainement déjà entendu parler, qui découle de l'approche École en santé, puis c'est un cadre de référence pour des actions intégrées de promotion de la santé qui décline différentes compétences au niveau de la santé mentale, du développement personnel et social de chacun des élèves, donc, qui peut être réfléchi puis amené au niveau... pour les milieux. Puis effectivement, comme vous le dites si bien, ça peut être des questionnements, une base, en fait, à amener pour le futur ou éventuel Institut national d'excellence en éducation, pour guider les milieux dans les orientations qui devraient être prises. Parce que dans les différentes actions qui sont proposées dans le référentiel Équipe, ça peut être adapté à...

Mme Lacombe (Nathalie) :  ...à la réalité des différents milieux, à la lumière des besoins des élèves.

Mme Ghazal : ...de le voir concrétiser, c'est parce que ça existe, mais c'est... cette entente-là de complémentarité ne l'est pas, quand vous dites que vous aimeriez que ce soit concrétisé? Ça veut dire... Qu'est-ce qui manque en ce moment par rapport à ça?

Mme Lacombe (Nathalie) : C'est peut-être que ce n'est pas appliqué... d'une manière très variable d'un milieu à l'autre.

Mme Ghazal : En fonction des gens qui sont là, qui ont plus une grande sensibilité sur la question de santé mentale, peut-être?

Mme Lacombe (Nathalie) : Bien, c'est ça, c'est qu'en ce moment les milieux... chaque milieu fait un peu à ses façons, à sa manière. Donc, c'est un peu d'uniformiser, peut-être, les pratiques. Ce serait dans cette optique-là.

Mme Ghazal : O.K. Puis donner ce mandat-là à l'INEE. Que l'INEE, vu qu'ils regardent les données, ça serait quelque chose qui... ce serait de leur ressort à eux ou pas nécessairement?

Mme Lacombe (Nathalie) : Bien, si c'est souci de voir si, dans les bonnes pratiques qu'on veut que le gouvernement... en collaboration avec l'INEE veut instaurer.

Mme Ghazal : O.K.. Très bien. Il me reste combien de temps?

La Présidente (Mme Dionne) : Il vous reste une minute 30.

Mme Ghazal : O.K. Est-ce que... je ne suis pas habituée d'avoir autant de temps. Est-ce qu'il y avait d'autres éléments qu'on n'a pas parlé, que vous voulez préciser, qu'on n'a pas eu de questions là-dessus dans votre mémoire ou sur le projet de loi de façon générale.

• (17 h 20) •

M. L. Soucis (Félix-David) : L'essentiel était pas mal là. Je veux dire, l'idée d'ensemble dans laquelle on s'est vraiment positionné, on est allés plus dans une réflexion pour vraiment contribuer à l'implantation de ce projet de loi là. L'important, c'est si on avait un mot clé, là, vraiment à retenir, c'est l'importance de la prévention puis d'inclure vraiment des facteurs de protection. Dans le fond, ce qu'on veut mettre en place, ce qu'on veut avoir comme philosophie d'une école, c'est que c'est un milieu de vie, ultimement, c'est un milieu de vie dans lequel un enfant va s'épanouir sur une multitude de facteurs dans lesquels on doit réfléchir à implanter ça dans ces écoles-là, dans l'ensemble des écoles québécoises, pour s'assurer que, si on a une inquiétude ou si on a un besoin à répondre, bien, l'enfant puisse y avoir accès à l'intérieur de son milieu, selon la population qu'il...

Mme Ghazal : Puis il y a une pénurie aussi de professionnels, de... comme... Il y a une pénurie partout.

M. L. Soucis (Félix-David) : Oui, bien, ce qu'on comprend... Oui, tout à fait. On se comprend tout de suite, donc...

Mme Ghazal : Mais il n'y a rien dans le projet de loi qui peut... Ce n'est pas... ce n'est peut-être pas dans le projet de loi... qui est l'outil pour régler ce problème-là?

M. L. Soucis (Félix-David) : Peut être, mais, en fait, c'est vraiment dans l'organisation, puis surtout dans... en fait, selon les compétences de chacun, que ce soit un directeur, que ce soit un enseignant. Comment qu'on peut vraiment fédérer l'ensemble d'une équipe-école pour s'assurer que les besoins des élèves soient répondus?

La Présidente (Mme Dionne) : En terminant.

Mme Ghazal : Très bien. Bien, merci beaucoup, merci.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci infiniment pour votre contribution à ces consultations.

La commission suspend ses travaux quelques instants, le temps d'accueillir notre prochain groupe.

(Suspension de la séance à 17 h 19)

(Reprise à 17 h 22)

La Présidente (Mme Dionne) : La commission reprend maintenant ses travaux. Donc, nous accueillons... Je souhaite la bienvenue au dernier groupe de la journée, donc le Regroupement des organismes communautaires québécois de lutte au décrochage. Donc, nous recevons aujourd'hui mesdames Véronique Thibeault, Mélanie Marsolais et Jennifer Robitaille. Donc, vous avez 10 minutes pour faire votre exposé. Suite à cela, nous procéderons aux échanges avec les membres de la commission. Donc, à vous la parole.

Mme Thibault (Véronique) : Oui, bonjour. Merci beaucoup, Mme la Présidente. M. le Ministre, Mesdames et Messieurs les élus, bonjour, je suis Véronique Thibeault, présidente du Regroupement québécois... excusez-moi, du Regroupement des organismes communautaires québécois en lutte au décrochage, le ROCLD, et aussi directrice générale de l'organisme Pro-Jeune-Est situé à Rimouski. Je suis accompagnée de la directrice générale aussi du ROCLD, Mélanie Marsolais, ainsi que de Jennifer Robillard, directrice générale de la Coalition Interjeunes, que je vais laisser se présenter.

Mme Robillard (Jennifer) : Merci, Mme Thibault. Donc, Jennifer Robillard, je suis ici à titre de directrice de la Coalition Interjeunes. La Coalition Interjeunes regroupe sept regroupements et associations d'organismes communautaires autonomes jeunesse, dont le ROCLD est membre et je suis présente aujourd'hui au nom de notre coalition de nos membres qui reconnaissent l'expertise du ROCLD sur les sujets dont il est question aujourd'hui et appuie leur position dans cette consultation. Merci.

Mme Thibault (Véronique) : Le Regroupement des organismes communautaires en lutte au décrochage, le ROCLD, représente 61 organismes communautaires répartis dans 13 régions du Québec, ce qui est plus de 900 employés et plus de 2 000 bénévoles actifs.

Mme Marsolais (Mélanie) : Mme la Présidente, M. le Ministre, Mesdames, Messieurs les élus, nous vous remercions de nous avoir interpellés. Comme vous le savez, le regroupement est un regroupement d'organismes d'actions communautaires autonome. Alors, nous sommes reconnus en vertu de la politique de l'action communautaire, une contribution essentielle à l'exercice de la citoyenneté et au développement du Québec. C'est dans notre rôle, nos mandats de collaborer avec le gouvernement, de contribuer au mieux, et tout ça dans une perspective critique. Alors, évidemment, nous sommes un partenaire de longue date du milieu scolaire et nous inscrivons en collaboration avec un espace critique pour faire évoluer les réflexions au Québec.

Mme Thibault (Véronique) : Donc, M. le ministre, de manière plus générale, nous commencerons par vous signifier que nous sommes en désaccord avec plusieurs éléments du projet de loi no 23. En premier lieu, le projet de loi est sans équivoque une centralisation des pouvoirs au ministre au niveau politique. Or, dans une démocratie, il est souhaitable de garder un espace critique entre le gouvernement élu, l'administration publique et ses organismes. Nous croyons que le gouvernement doit être à l'écoute des besoins et des réalités exprimés par les écoles et travailler à trouver des solutions communes pour renforcer l'école publique et le système de l'éducation au Québec, car ce n'est pas le terrain qui doit s'adapter aux besoins du gouvernement, mais plutôt l'inverse. Il y a des responsabilités qui vous sont octroyées au niveau du suivi des parcours des élèves, par exemple, et qui pourtant devraient relever des personnes qui travaillent auprès des élèves. Il nous apparaît une confusion des rôles et des responsabilités en termes de gouvernance, de gestion et d'opérationnalisation.

Cela dit, nous sommes en accord avec l'objectif lié à la nécessité et voire même l'urgence d'avoir un portrait, un état de situation sur différents aspects des élèves et des personnels scolaires. Le ROCLD revendique depuis plusieurs années la nécessité d'un tel portrait au niveau des jeunes afin d'avoir des données actuelles qui permettraient de dégager et de mettre en lumière des difficultés et des enjeux non pas individuels, mais bien collectifs, structurés et systémiques. Toutefois, nous ne croyons pas que le projet de loi soit la bonne solution actuellement aux problèmes que nous percevons. Il semble y avoir un problème non pas législatif, mais plutôt un manque de collaboration entre le ministère de l'Éducation et ses institutions et entre les institutions elles-mêmes.

Donc, il y a plusieurs questions en suspend. Pourquoi les institutions ne collaborent pas? Quels sont les freins et les entraves? Les causes qui sous-tendent à cette résistance sont importantes de les connaître. En fait, il était essentiel de miser sur un leadership partagé et rassembleur qui mise sur l'autonomie professionnelle et la confiance...

Mme Thibault (Véronique) : ...dont les partis ont besoin pour contribuer pleinement. Restons brièvement sur le portrait, l'état de situation. Nous sommes fortement préoccupés par le type de données qui vous intéresse. Nous vous demandons, M. le ministre, de faire un portrait qui va bien au-delà des résultats académiques. Le portrait et leurs données ne devraient pas servir à déterminer des cibles, mais à soutenir les élèves dans leur parcours, à comprendre les causes et les difficultés, ou au contraire des situations de réussite et à agir sur ces causes de manière préventive et constructive.

Au-delà des résultats académiques, il faut documenter le vécu scolaire, le bien-être des jeunes, la médicalisation, les besoins exprimés par les personnels scolaires et par les jeunes, les parents, les services offerts en soutien, en accompagnement. Ce ne sont là que quelques exemples qui impliquent des indicateurs tout aussi importants, sinon plus, que les résultats académiques. Et nous croyons qu'il faut des indicateurs qui sont en lien avec les objectifs de mission et la vision du ministère d'offrir sur le territoire québécois des milieux de vie propices à la réussite éducative et à la pratique régulière d'activités physiques, sportives, de loisirs et de plein air, des milieux de vie inclusifs, sains et respectueux de la diversité de personnes et de leurs besoins et de leurs conditions.

Mme Marsolais (Mélanie) : J'attirerais votre attention par la suite sur un autre élément qui nous semble préoccupant, mais c'est la création de l'Institut national d'excellence en éducation. On ne peut pas être contre le principe d'accessibilité. On a bien pris connaissance de ce projet-là, du projet... du rapport, aussi, du comité qui avait été dirigé... sous la direction de Martin Maltais. Nous comprenons les préoccupations. Comme Véronique Thibault le disait, ma présidente, on pense que ce n'est pas nécessaire de créer un institut pour avoir des données pertinentes, rigoureuses. Et, pour l'accessibilité, bien, on espère la collaboration des différents organismes de l'appareil gouvernemental.

• (17 h 30) •

Nous, le ROCLD, on va s'appuyer sur l'expérience et... l'expérience de collaboration, de concertation qu'on a avec les différents milieux de la recherche pour vous signifier qu'il y a énormément, déjà, beaucoup d'acteurs qui font sensiblement ces travaux-là. On se questionnait à savoir pourquoi les partenaires comme le CRIRES, le RIRE, le CTREQ, des partenaires comme l'ensemble des chaires de recherche spécialisées en éducation au Québec, qui offrent une diversité de fondements théoriques et d'approches de pratiques, en fait, tout le nécessaire pour vraiment soutenir la pratique dans le milieu de l'enseignement, et plus largement au-delà des murs de l'école, pourquoi les mandats de ces organisations-là ne seraient pas tout simplement bonifiés? Pourquoi on ne miserait pas sur ces ressources-là, déjà bien, bien implantées dans nos communautés et qui font quand même... qui rassemblent énormément de chercheurs, comme je le disais, de différents horizons? Alors ça, c'est une préoccupation qu'on avait, qu'il y ait un dédoublement. C'est quelque chose qu'on observe beaucoup dans les dernières années et on se demandait à quel point est-ce pertinent. Voilà.

Par ailleurs, bien, on a évidemment fait nos devoirs aussi de se tenir au courant de la commission et nous avons pris connaissance de votre rencontre plus à... qu'il y a eu précédemment avec, justement, Martin Maltais et son partenaire, et nous étions ravis de voir qu'il avait une position favorable au maintien du Conseil supérieur de l'éducation. C'est un autre de nos questionnements. Personnellement, j'ai eu l'occasion de siéger à deux mandats au Conseil supérieur de l'éducation. On a entendu aussi plus tôt le Conseil supérieur, la rencontre avec avec vous, la commission. On ne s'explique pas la volonté de vouloir... de vouloir dissoudre le Conseil supérieur de l'éducation. Évidemment, le Conseil supérieur du Conseil de l'enseignement supérieur, ce n'est pas du tout, du tout le même mandat.

Le Conseil supérieur de l'éducation, bien, encore une fois, l'éducation relève d'enjeux et de décisions, de défis, de priorités et surtout des valeurs de la société québécoise, et c'est vraiment un beau lieu, un des seuls et rares lieux de démocratie sur l'éducation au Québec. Et c'est un lieu qui est hautement reconnu par l'ensemble du milieu de la recherche, qui regroupe une multitude de chercheurs, de citoyens citoyennes, d'organismes qui ne sont pas des gérants d'estrade, mais qui ont vraiment une approche, une pratique, un savoir expérientiel auprès de populations marginalisées. Alors, nous, nous souhaitons vivement, M. le ministre, et nous nous le demandons à la commission, s'il vous plaît, de ne pas... de ne pas... de ne pas bafouer le Conseil supérieur de...


 
 

17 h 30 (version non révisée)

Mme Marsolais (Mélanie) : ...c'est quelque chose, vraiment une richesse. J'entendais... J'ai entendu quelques mots à l'effet que ce serait un privilège d'avoir un Conseil supérieur de l'éducation avec autant d'années d'expérience et de recherches. Je ne crois pas, non, que c'est un privilège, dans une société comme le Québec. Je pense qu'un Conseil supérieur de l'éducation, bien, c'est beaucoup plus grand que toutes les... Que tous les chercheurs, que tous les... Que toutes les orientations des différents partis politiques qui se succèdent. Ça transcende le temps et c'est un porteur des valeurs québécoises pour l'édification de notre société avec les jeunes.

La Présidente (Mme Dionne) : ...En terminant.

Mme Marsolais (Mélanie) : En terminant, bien, évidemment, la formation continue du personnel, on sait aussi que l'INEE, c'est une de vos préoccupations, et le projet de loi aussi répond à ça.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci beaucoup. Merci infiniment. C'est malheureusement le temps qu'on avait, votre 10 minutes est écoulé. Nous allons débuter les échanges avec les membres de la commission. Je cède la parole à M. le ministre.

M. Drainville : Merci, Mme la Présidente. Utilisez mon temps pour finir votre réponse, s'il vous plaît, sur la formation continue.

Mme Marsolais (Mélanie) : Oui. Bien, je vous dis... Merci beaucoup, M. le ministre. En fait, vous savez, dans le milieu communautaire, on est constamment en formation continue et on se rend compte que souvent, la formation, bien, ça peut s'appuyer... Évidemment, je ne veux pas me faire porte-parole des enseignants, enseignantes, là, c'est à eux à déterminer, et des personnels scolaires, c'est à eux à déterminer les bons moyens, mais on peut s'inspirer, dans le communautaire, de ce qu'on connaît. En vous disant que ne serait-ce que d'avoir des temps d'échange, des temps de mise en commun, des temps de partage d'expertise entre les personnels enseignants d'une même école, ça peut être très formateur.

Mme Marsolais (Mélanie) : On a participé, dans les derniers mois, à plus d'une dizaine de rencontres de Parlons éducation, les rencontres, les forums ouverts, là, dont vous avez certainement entendu parler, et c'est toujours la même chose, qu'on parle avec les jeunes dans nos grandes consultations jeunesse ou avec les citoyens et citoyennes ou avec les personnels scolaires, c'est une question de beaucoup de temps, pas nécessairement d'ajouter des formations, des contenus ou quoi que ce soit, on est les experts sur le terrain. Il faut de l'autonomie professionnelle. Il faut donner du temps à ces gens-là pour réfléchir ensemble sur les défis spécifiques de leur école, sur les enjeux auxquels ils font face, et leur donner le temps de trouver les solutions. On croit beaucoup à cette cette façon de faire là, c'est d'ailleurs une des richesses du communautaire de pouvoir s'appuyer sur les leviers dans nos communautés pour vraiment pouvoir s'entraider et développer des nouvelles pratiques.

M. Drainville : O.K., donc, vous ne sentez pas le besoin de mieux structurer la formation continue, vous?

Mme Marsolais (Mélanie) : En fait, ce qu'on dit surtout, c'est on reconnaît, tout comme vous, que c'est très, très important. Pour nous, peut-être qu'est-ce qu'on pourrait vous dire aussi, c'est que c'est peut-être prématuré, ce projet de loi là. Peut-être qu'il pourrait arriver à un autre moment. Si les personnes sont consultées sur le terrain au niveau de comment structurer la formation sans que ça leur soit imposé, on pense que ça serait vraiment une formule gagnante avec un leadership beaucoup plus rassembleur.

M. Drainville : Oui, mais comme vous le savez, il n'est pas question d'imposer les formations continues aux enseignants, là. La seule chose que j'ai dite, et je la répète régulièrement, c'est que sur les 30 heures que prévoit la loi, les 30 heures aux deux ans, je pourrais, à un moment donné, moi puis éventuellement, il y aura quelqu'un, là, d'autre qui... tu sais, des ministres de l'Éducation et on souhaite qu'il y en ait encore beaucoup, beaucoup, là, puis que ça dure longtemps, et donc l'idée, c'est sur les 30 heures, peut être, à un moment donné, dire trois des 30 heures ou six des 30 heures pourrait porter sur un thème ou deux thèmes. Mais une fois que le thème a été identifié par le ministre ou la ministre de l'Éducation, après ça, quelles sont les formations continues qui vont avec ce thème là? Ça, ce n'est pas le ministre qui va décider ça, ce sont les enseignantes et les enseignants qui vont choisir à l'intérieur d'un bouquet de formations laquelle ils souhaitent ou lesquels ils souhaitent.

Donc, sur les 30 heures, pour l'essentiel, ce sont les enseignants qui vont décider quelle formation continue ils souhaitent suivre, puis peut-être que, sur trois ou six heures, il y aura un thème qui sera priorisé. Mais même une fois que le thème a été donné, après ça, à l'intérieur de ce thème-là, il y aura un certain nombre de formations parmi lesquelles l'enseignante ou l'enseignant pourra choisir. Donc, ce sera vaste autonomie, là, essentiellement, là, presque une autonomie, je dirais, complète, là. Ça vous va, ça?

Mme Marsolais (Mélanie) : Bien, tant mieux. Oui, c'est certainement un beau moyen. On espère que les conditions pour suivre ces formations... c'était aussi, entre autres, une des recommandations dans le rapport du comité dirigé par M. Maltais, mais c'est aussi les recommandations du CTREQ, du conseil...

Mme Marsolais (Mélanie) : ...supérieur de l'Éducation, et de toutes les tables auxquelles on a participé, il faut que les conditions soient favorables pour que les enseignants, enseignantes, et l'ensemble du personnel scolaire d'ailleurs, puissent participer à ces formations-là. Les formations, bien, on s'entend aussi, les formations, ça va au-delà de la formation classique. C'est vraiment, je crois, important que les gens aient des moments, à l'intérieur de leur charge de travail, qui peuvent avoir l'espace-temps pour faire de la réflexion ensemble. C'est quelque chose qui nous est ramené. Comme je vous disais, on ne peut pas prétendre ici parler au nom du personnel scolaire, ça serait très malvenu. Mais c'est quelque chose qu'on entend puis que c'est une belle opportunité à saisir, pour le ministère, de leur octroyer ces moments-là pour qu'ils puissent réfléchir à des solutions ou être en mode solution.

M. Drainville : Très bien. Sur la question des données, vous êtes favorables à ce qu'on ait davantage accès aux données, à des données plus précises en temps réel, qu'on ne soit pas obligé de faire des collectes d'info, envoyer 72 courriels dans 72 centres de services et commissions scolaires pour essayer de savoir ce qui se passe, être capable d'avoir accès à des données qui vont nous permettre, dans certains cas, d'aider... de mieux aider les élèves. Est-ce que ça, ça vous va?

Mme Marsolais (Mélanie) : Nous sommes tout à fait en accord avec l'accès en temps réel avec les données. Notre préoccupation, c'est que ces données-là ne doivent pas servir à évaluer la qualité de l'enseignement parce que ça ne se peut pas. Le décrochage scolaire, les difficultés des jeunes dépassent largement souvent les compétences d'un enseignant, d'une enseignante, ou du personnel scolaire. Ça fait qu'il ne faut pas faire, on est équipe, hein, faire des raccourcis intellectuels, comment ça serait utilisé, d'établir des cibles. Mais ce qui nous préoccupe, comme Mme Thibault vous le disait, c'est pourquoi c'est si difficile que ça d'obtenir les données. Pourquoi les commissions scolaires, les écoles... Et moi, je ne suis pas dans l'appareil gouvernemental, mais, en tant que citoyens et citoyennes, on ne les a pas, ces données-là, nous non plus.

• (17 h 40) •

Alors, il y a quelque chose qui est très peu transparent, et puis c'est quelque chose qu'on se questionne et qu'on se questionnait, ça nous a donné l'occasion de ça, le projet de loi, de dire : Mais qu'est-ce qui se passe? Comment ça se fait qu'on est obligé de passer par une loi, parce qu'une loi, bien, c'est quand même quelque chose d'une certaine façon, qu'on peut se mettre en défaut de loi? Comment ça se fait que les gens, il faut une loi pour qu'ils puissent collaborer à quelque chose qui fait du gros bon sens? Et ça, ça voudrait la peine, éventuellement, de se pencher là-dessus. Je ne sais pas,  peut-être, vous avez déjà, vous, les réponses pour vous, mais il nous semble... Ça nous semble important, parce qu'on le sait qu'il y a beaucoup de compétition, il y a peut-être une volonté, une méfiance par rapport à : Est-ce que ces données-là vont servir à faire des cibles ou va, contrairement, servir à donner davantage de ressources dans le milieu scolaire pour répondre aux besoins des jeunes, pas nécessairement en termes de résultats, notes académiques?

Vous savez, la réussite éducative, ce n'est pas juste des notes, on le dit toujours. Il y a beaucoup de jeunes qui ont besoin soit de plus de temps, plus d'outils, et on espère vraiment que les résultats, les données que vous allez percevoir va pouvoir desservir les jeunes et non pas d'autres intérêts.

M. Drainville : Bien, la raison, si vous me permettez, la raison pour laquelle on doit procéder de cette manière-là, vous avez raison de dire que, dans un monde idéal, les données circuleraient, puis on pourrait y avoir accès d'une manière colligée, bien organisée, des données comparables, et tout ça. Mais le problème, c'est que ça n'existe pas présentement, notamment parce qu'il y a.... les centres de services scolaires n'ont pas les mêmes moyens pour se donner... je dirais, pour acquérir les moyens technologiques et informatiques d'accéder à ces données-là. Donc, il y a une grande disparité d'un centre de services à l'autre. Ils ne collectent pas nécessairement les mêmes données de la même manière. Donc, on essaie, par ce projet de loi là, d'uniformiser la manière avec laquelle on va capter les données, les organiser pour qu'on puisse les colliger, qu'elles soient comparables, pour qu'on puisse avoir justement un portrait qui nous permette de comparer, de voir : Ah! à tel endroit, il y a une difficulté plus grande. On va mettre une attention particulière dans ce centre de services ou dans certaines écoles de ce centre de services pour essayer d'aider les élèves qui s'y trouvent.

L'autre difficulté, c'est qu'en vertu de la loi actuelle, les données appartiennent aux centres de services. Donc, ça nous prend un cadre législatif qui nous permette de créer des banques de données...

M. Drainville : ...qui vont nous permettre, comme ministère de l'Éducation, d'avoir accès à ces données-là. Donc, c'est pour ça qu'il faut une loi. Je réponds à la question que vous avez, parce que la question que vous posez, elle est très pertinente. Je suis certain qu'il y a bien des citoyens qui se disent : Mais oui, mais pourquoi c'est si compliqué? S'il y a des données, effectivement, pourquoi est-ce qu'ils ne les partagent pas? Pourquoi est-ce qu'ils ne se parlent pas? Bien, il y a des obstacles, notamment juridiques.

J'ai des collègues, si vous me permettez, j'ai des collègues qui souhaitent discuter avec vous, alors je vais leur céder la parole. Merci beaucoup pour votre présentation.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci, M. le ministre. Donc, je cède la parole à Mme... la députée de Hull. Je n'étais pas certaine.

Mme Tremblay : Alors, bonjour. Au niveau de l'institut, bon, qu'est-ce que vous pourriez voir de positif dans la création de cet institut-là? Donc, j'aimerais ça voir votre vision, parce qu'on le voit dans le projet de loi, puis on a vu plusieurs intervenants qui y voient vraiment quelque chose de positif, dont vous. Est-ce que... Avec l'analyse que vous en faites, qu'est-ce qu'il peut y avoir de positif?

Mme Marsolais (Mélanie) : Pour nous, on ne voit pas qu'est-ce qu'il y a de positif, pour nous, c'est un dédoublement. Pour nous, il y a déjà des organisations en place, que ce soit au niveau du milieu de la recherche, que ce soit même, par exemple, à Montréal, le bel organisme du ministère de l'Éducation, Montréal... une école montréalaise pour tous, ou c'est peut-être leur ancien nom, ça fait longtemps que je suis dans le secteur, mais je pense que c'est encore une école montréalaise pour tous. Ce sont tous des lieux qui colligent beaucoup de données et qui concertent les chercheurs des différentes universités, des différents départements au niveau de l'éducation. Alors, si c'est un organe de concertation, dont le ministère a besoin, tant mieux, mais le mandat actuel que nous voyons, c'est un mandat... On a fait la recension des différents objectifs de mission de différentes organisations, que je nommais tantôt, dont le... le CRIRES, le Conseil supérieur de l'éducation et autres. Pour nous, c'est un dédoublement, c'est ne pas s'appuyer actuellement sur les ressources déjà existantes, en place, et qui fonctionnent très bien.

Mme Tremblay : Mais vous comprendrez que l'objectif de l'institut, c'est d'aller chercher, tu sais, des données, des données qui sont probantes, mais aussi un mandat de faire en sorte que la diffusion de ces données-là, donc que le terrain, que ça atteigne ceux... les enseignants, les enseignantes, alors qu'à l'heure actuelle on voit que la diffusion n'est pas facile à atteindre, les enseignants et les enseignantes. Puis on a cet objectif-là, nous, de rendre la diffusion de ces données-là accessibles aux enseignants, aux enseignantes par le biais de formations, puis on en a parlé, là, puis le ministre l'a clairement dit, pas nécessairement imposé, peut-être une partie, mais de laisser la liberté à ces enseignants. Mais, pour nous, il y a une préoccupation de diffusion de ces données probantes là, d'outiller les enseignantes puis les enseignants, c'est ça aussi, l'objectif en arrière de tout ça. Je tenais à vous le dire, là, puis peut-être à réitérer.

Mme Marsolais (Mélanie) : Mais merci. Mais, en fait, je vous dirais que c'est finalement le défi et la volonté de tous les organismes qui font de la recherche et du transfert de connaissances, tous vos partenaires, vos collaborateurs, que vous financez, le ministère de l'Éducation, leur défi, c'est la diffusion et la volonté de vouloir le diffuser. Alors, je pense qu'il y a une belle zone de convergence, là, dans les intérêts, c'est peut-être juste au niveau du moyen choisi.

Mme Tremblay : Alors, est-ce qu'il me reste quelques minutes?

La Présidente (Mme Dionne) : Il reste un gros quatre minutes.

M. Drainville : Un gros quatre minutes, bon, mais parfait, je vais poursuivre. Donc, au niveau de l'enseignement à distance, on ne l'a pas abordé, je ne sais pas si vous avez des choses à nous mentionner, vous savez que, nous, on parle vraiment de garder ça pour des situations qui sont exceptionnelles. Donc, j'aimerais avoir votre avis, là, si vous avez pensé puis réfléchi au niveau des services éducatifs à distance.

Mme Marsolais (Mélanie) : Oui, effectivement, on avait bien compris que votre volonté, c'était au niveau de situations exceptionnelles. Ainsi, c'est nommément inscrit que c'est pour des situations exceptionnelles pour nous. Évidemment, on s'inscrit dans des approches qui offrent souplesse, agilité. Le but, c'est vraiment de répondre aux besoins de chaque jeune au Québec. Alors, si, pour des situations exceptionnelles, il faut l'enseignement à distance, bien, c'est tout à fait logique. Après ça, évidemment, bien que ce soit même au niveau... jusqu'à universitaire, on a été sur des comités consultatifs, dans des universités, auprès des étudiants. Il ne faut pas surévaluer l'enseignement à distance. Ce n'est pas fait pour tout le monde, ça n'a pas les mêmes vertus au niveau de la motivation, de l'organisation du travail, l'organisation de l'apprentissage. Alors, il ne faut pas miser là-dessus à long terme, nécessairement, mais pour des situations exceptionnelles. On ne peut pas s'inscrire en faux contre quelque chose qui offre encore un moyen de plus dans la diversité des mécanismes pour rejoindre...

Mme Marsolais (Mélanie) : ...La réussite de tous les jeunes.

Mme Tremblay : Vous avez parlé justement, là, que vous avez rencontré, là, des étudiants dans des universités, puis je vais aborder avec vous, là, le sujet de la formation initiale. Est-ce qu'ils vous ont parlé? Parce que vous savez que l'Institut jouera un rôle au niveau de la formation initiale, donc, elle va améliorer la formation initiale. Est-ce qu'ils en ont parlé, ces étudiants-là? Parce que souvent, nous, ce qu'on sait puis ce qu'ils nous ont dit sur le terrain, c'est qu'elle ne répond pas, à l'heure actuelle, à leurs besoins. Ils arrivent souvent pas aussi bien préparés qu'ils le souhaiteraient sur le terrain, dans les écoles.

Mme Marsolais (Mélanie) : Oui. En fait, moi, c'était dans un programme très spécifique, que les... qu'on a évalué plusieurs programmes à l'université... Dans différentes universités. Mais, ce qui ressortait, c'était vraiment que, pour les élèves qui sont plus en difficulté, la relation avec les enseignants, le lien de confiance qui se crée dans le présentiel à l'école, peut-être d'aller deux jours... bien, «deux jours», deux cours, là, que ce soit le soir, le jour, à l'université, c'est très facilitant, alors que, lorsque c'est du 100 % en ligne, même souvent les étudiants les mieux outillés, les mieux organisés, quand, justement, c'est leur transition vers l'université, bien, là, il y a toute la culture universitaire qui ne se découvre pas de façon implicite à travers un écran.

Mme Tremblay : Parfait. Il me reste... est-ce qu'il me reste du temps?

La Présidente (Mme Dionne) : Une minute.

Mme Tremblay : Il te reste une minute. Bien, je ne sais pas si j'ai bien été comprise aussi dans ma question, là, mais, au niveau de la formation, leur formation à eux, qu'est-ce qu'ils vous disent sur le... pas nécessairement en lien à avec la distance, mais leur formation qu'ils reçoivent pour arriver sur le terrain, est-ce qu'ils sont prêts, les enseignants et les étudiants? Est-ce que vous en avez abordé, ce sujet-là, au niveau de leur formation à eux, qu'ils reçoivent à l'université?

Mme Marsolais (Mélanie) : ...la formation des maîtres. Bien, au niveau des personnels scolaires, c'est sûr, il y a à l'université puis au niveau du collégial, qui est non négligeable. Après ça, bien, c'est vraiment... Il faut valoriser, je pense, au niveau... il y a beaucoup... En fait, ce qui nous a été rapporté, c'est que, selon les disciplines, que ça soit de la formation en enseignement ou que ça soit au niveau des formations au niveau de la psychoéducation ou de la technique en éducation spécialisée, bien, il y a des... il y a une nécessité d'arriver devant le... sur le terrain avec des compétences au niveau de la gestion des difficultés, faire face à des populations qui ont des difficultés et des vulnérabilités importantes, sortir de la dimension purement pédagogique. Alors, il semblait qu'à certains niveaux, bien... C'est toute une équipe, hein?, une école.

La Présidente (Mme Dionne) : En terminant.

Mme Marsolais (Mélanie) : Oui. Bien, c'est ça, il faut tout le monde pour faire une équipe avec des compétences diverses, que ça soient des techniciens en éducation spécialisée, qui ne sont pas des spécialistes en... Pédagogues ou des enseignants, qui sont davantage formés pour la pédagogie, avec tout le soutien des équipes-écoles autour d'eux.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci beaucoup. Merci. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Saint-Laurent.

Mme Rizqy : Merci beaucoup. Bienvenue parmi nous. Juste pour... avant de poursuivre notre échange, je veux juste clarifier quelque chose, pour nous assurer qu'on parle tous sur la même base d'informations, ce qui est... Quand même, qui est assez important. La députée vient de dire que... De Hull, que l'INEE va... L'information collectée va être distribuée par l'INEE. Est-ce que ça peut être clarifié? Parce que, ce n'est pas ça que je lis, moi, dans la loi.

Une voix : ...

Mme Rizqy : Ce n'est pas l'INEE qui distribue. Oui, oui, c'est ce que vous venez de dire. Ce n'est pas l'INEE qui... l'information collectée au niveau du réseau scolaire, ce n'est pas l'INEE qui distribue, qui la diffuse.

M. Drainville : Non. C'est ce dont on parlait, c'était la... Les données probantes, là.

Mme Rizqy : Non, mais les données du réseau, lorsque, par exemple, on parle de la planification, de combien d'enseignants qui nous manquent, les départs à la retraite?

M. Drainville : Non, non, non.

Mme Rizqy : O.K.

M. Drainville : Elle parlait de dresser l'état des connaissances scientifiques.

Mme Rizqy : Oui, ça, c'est l'INEE.

M. Drainville : Et, à partir de ces données scientifiques, de ces pratiques pédagogiques éprouvées, les... Dans le fond, les toutes dernières connaissances scientifiques en matière d'éducation, ces connaissances-là vont servir à développer des formations.

• (17 h 50) •

Mme Rizqy : Oui, ça, on est d'accord.

M. Drainville : Et ces formations-là vont être diffusées auprès des enseignantes et des enseignants.

Mme Rizqy : O.K. c'est parce que, là, peut-être qu'on va peut-être réécouter l'échange, là, parce que... Pour être sûrs qu'il n'y a pas de... Parce que, moi, ma compréhension de la loi, c'est ce que vous venez d'expliquer, c'est ce que le ministre...

Mme Tremblay : ...

M. Drainville : Bien, laissez-la s'expliquer, mais, moi, j'ai... c'est ce que j'ai compris.

Mme Rizqy : Non, mais, moi... C'est sur mon temps, si vous me permettez?

La Présidente (Mme Dionne) : Oui, oui, allez-y.

Mme Rizqy : Moi, l'explication du ministre me convient, c'est ça que j'avais compris du projet de loi, puis au niveau des données qui sont collectées par le ministère, là, dans d'autres sections de la loi. Puis, à ce moment-là, moi, c'est là maintenant ma question pour vous. Moi, je fais beaucoup de demandes d'accès à l'information et je me rends compte que le ministère de l'Éducation a cette information-là, mais nous envoie des informations qui sont... Je vais vous le dire très franchement, utilisent plus d'encre pour caviarder que pour me répondre. Moi, j'ai peur que, si le passé est garant de l'avenir, là, il me semble, qu'est-ce qu'on devrait peut-être ajouter dans le projet de loi, c'est que... L'information dont c'est diffusé, là. Parce que, présentement, c'est pour répondre aux besoins du ministère et du ministre. Mais, vous, quand vous faites des... quand vous essayez d'intervenir, vous avez aussi besoin de comprendre le milieu, n'est-ce pas?

Mme Marsolais (Mélanie) : Bien oui, tout à fait. En fait, il faut... c'est...

Mme Marsolais (Mélanie) : ...en éducation, il faut avoir vraiment une vision globale des différents milieux scolaires, du portrait vraiment détaillé de l'école, des enfants qui sont là, des familles, tant au niveau socioéconomique qu'au niveau de la diversité culturelle, au niveau de ceux qui maîtrisent le français, langue d'enseignement ou non, tant au niveau de combien d'enfants sont en difficulté, il y a-tu des enfants là-dedans... puis d'aller dans un niveau aussi beaucoup plus qualitatif, est-ce que c'est dans cette école-là. Il faut consulter aussi les jeunes, pas... C'est pour ça qu'on dit, oui, des données, mais les données, c'est bien... Nous, quand on rencontre les jeunes, il y a des jeunes qui nous font des témoignages, pas sur les notes, sur, à l'école, ça ne va pas parce qu'il y a de la violence, il y a du... il y a de la discrimination de différentes formes entre les élèves, mais aussi de la part des enseignants envers les élèves ou du personnel scolaire, là, ou entre le personnel scolaire eux-mêmes.

Alors, on veut s'assurer, dans la mission de l'éducation sur le site même du ministère de l'Éducation, les objectifs... Bien, il y a des objectifs qui parlent de milieu de vie sain, de milieu de vie inspirant. Dans l'énoncé même des objectifs de mission, il y a des très belles valeurs inscrites là, d'à quoi devrait ressembler le milieu. On ne parle pas ici nécessairement de résultats académiques. Puis, quand on parle, évidemment, des pratiques éprouvées, bien, quelles sont les pratiques dans les milieux scolaires qui font leurs preuves pour même le développement au-delà de l'acquisition de résultats économiques, qu'un jeune se sente bien et qu'il soit connecté avec lui-même, qu'il soit en respect de... que l'école lui permet de développer ses aspirations, ses intérêts, que l'école soit un véhicule pour explorer différentes connaissances, habiletés et compétences? Est-ce que l'école permet ça actuellement? Là, on n'est pas en train ici d'évaluer est-ce que le personnel scolaire fait bien son travail, non, on est en train d'évaluer une multitude de facteurs qui sont d'autant plus importants puis qui veulent dire beaucoup plus qu'un résultat académique. Quand on parle... j'entendais le ministre en arrière parler de données probantes, bien, les sciences humaines, là, vous l'avez déjà entendu, c'est beaucoup plus complexe que les sciences de la santé dans la mesure où il y a nombreux facteurs. Puis les pratiques éprouvées, bien, il faut faire attention avec quelles sont les pratiques éprouvées en regard de quels résultats nous recherchons.

Mme Rizqy : Merci beaucoup. Puisque vous avez... vous êtes un groupe vraiment axé sur le décrochage scolaire, permettez-moi de vous parler de la formation générale de la FP mais aussi de la formation à distance. De par votre expérience, là, est-ce que la formation à distance aide les raccrocheurs?

Mme Marsolais (Mélanie) : Non, non... Vas-y...

Mme Thibault (Véronique) : Je peux prendre le relais. En fait, pour avoir parlé à plusieurs de mes collègues qui font du raccrochage directement, je peux vous dire que non, en fait, parce que ça crée une distance encore supplémentaire. Souvent, les gens qui... les jeunes qui ont décroché et qu'on doit ramener, qui souhaitent se raccrocher ont besoin d'être dans un lieu physique, qu'on les encadre. Parce que ça va bien au-delà du raccrochage scolaire, ça va aussi au niveau du raccrochage social. Il y a beaucoup de choses à retravailler avec ces jeunes-là. Ça fait qu'on revient toujours sur : il n'y a pas juste les données académiques, ou les résultats académiques, ou la version académique, oui, il y a une certaine importance, mais il y a autre chose aussi. Donc, c'est très difficile, effectivement, pour ces jeunes-là, la formation à distance.

Mme Rizqy : Dites-moi, en ce moment, comment que le projet de loi est écrit, c'est que la formation à distance, c'est en cas exceptionnel ou imprévisible. Pour vous, qu'est-ce qui serait exceptionnel?

Mme Thibault (Véronique) : Mais on avait entendu et on trouvait aussi que c'était logique au niveau des élèves ou des enfants qui doivent avoir des soins particuliers, au niveau du cancer par exemple, qui ne peuvent pas être avec d'autres jeunes pour ne pas avoir de... attraper de bactérie, par exemple, ou d'avoir des situations très, très particulières qui devraient être très définies, je pense que le projet de loi aurait, là-dessus, avantage à bien définir ce qu'est une situation exceptionnelle. Mais ce sont des situations qui font en sorte que, pour le bien être des jeunes, il est vraiment mieux à la maison qu'à l'école.

Mme Rizqy : On devrait faire un amendement puis venir ouvrir avec des exemples plus concrets, donc, par exemple, notamment pour ne pas que ça entraîne un bar ouvert ou que... Surtout, moi, je m'inquiète davantage pour des élèves en régions plus éloignées, que c'est plus difficile d'avoir une équipe-école stable et complète. Pensez-vous que ce serait une bonne, une bonne avenue à ce moment-ci?

Mme Thibault (Véronique) : Je me permets de répondre, pour être aussi dans une région éloignée, effectivement, ça peut être une avenue, mais il faut quand même faire attention. Moi, je pense qu'on doit aussi donner accès, à ces régions-là, au matériel nécessaire, au réseau Internet, qui n'est pas profitable partout. Donc, ça l'a causé aussi beaucoup ce qu'on appelle une fracture numérique entre...

Mme Thibault (Véronique) : ...certaines... je pense à la pandémie, par exemple, certaines familles n'avaient aucune difficulté à offrir des ordinateurs portables, des tablettes, d'autres familles étaient incapables de le faire. Il y a eu une espèce de fossé majeur qui a vraiment fait en sorte de toucher l'estime de soi des jeunes, la confiance, la motivation. On est vraiment encore en train de travailler avec les jeunes à ce niveau-là. Ça fait que c'est certain qu'il faut faire attention. Pour ce qui est des régions éloignées, il faut peut-être trouver d'autres... d'autres solutions pour... vous parliez que certains enseignants ou autres personnels du réseau scolaire vont moins dans les régions éloignées, peut-être trouver des façons de les encourager à venir dans les régions.

Mme Rizqy : La fiscaliste en moi a toujours des solutions fiscales, donc, pour inciter les gens de façon positive à aller, justement, dans les régions plus éloignées. Parce que je ne veux pas qu'il y ait deux classes d'élèves, au Québec, et je crains que ça devienne la solution facile si jamais il y a cet outil, parce qu'il n'y a rien de plus permanent que le temporaire, n'est-ce pas? Et...

Mme Marsolais (Mélanie) : Si vous me permettez.

Mme Rizqy : Oui, allez-y.

Mme Marsolais (Mélanie) : En fait, aussi, c'est parce qu'au niveau de l'enseignement on le dit, hein, c'est l'enseignement, et on n'est pas là en termes d'éducation ou de milieu de vie. Chez un enfant, chez un jeune aussi, la principale motivation scolaire, c'est vraiment de se retrouver avec ses amis, de se retrouver dans un milieu de vie ou est-ce qu'il peut, comme on le disait tantôt, développer le sport, la culture, les arts, alors, où il y a des limites quand même.

Vous savez, en ce moment, les jeunes, ce qu'on observe, nous, sur le terrain, au niveau de la montée de la violence, la violence, c'est une conséquence, hein, c'est un symptôme de quelque chose, l'anxiété aussi. Nos jeunes, on les voit, là, il y a beaucoup de jeunes qui vont de moins en moins bien. En fait, les jeunes sont très isolés dans leur... dans leur souffrance. Et on en est en train de regarder au niveau des technologies, bien, qu'est-ce qu'on peut faire pour mieux les soutenir. Parce qu'un écran, ce n'est pas ça qui permet de développer réellement les liens. Alors, on espère vraiment que ça ne sera pas en suppléance de... à défaut d'avoir des écoles dans les villages, dans les régions. On sait que c'est difficile, que c'est un défi, mais il faut s'en faire une fierté, au Québec, de rejoindre les jeunes dans tout leur milieu.

La Présidente (Mme Dionne) : Il reste 20 secondes.

Mme Rizqy : En terminant, je vous écoute puis je suis vraiment contente que vous participiez à nos travaux. J'ai l'impression qu'on a mis beaucoup l'accent sur la transmission du savoir et du savoir-faire mais peut-être pas sur le savoir-être. Alors, merci pour votre apport à la Commission.

La Présidente (Mme Dionne) : C'est beaucoup. Mme la députée de Mercier.

Mme Ghazal : Merci. Merci beaucoup, mesdames, pour votre présence, votre présentation. C'est vraiment très éloquent et très, très important. Tu sais, souvent, on dit que le système d'éducation, oui, c'est l'école, les parents, les professionnels, les profs, mais il y a toute la communauté aussi autour, puis les organismes communautaires contribuent à ça. L'école n'est pas juste comme ça, suspendue dans la théorie, là, elle est vraiment ancrée dans le milieu. Puis vous faites partie de tout le milieu, là, dans lequel nos écoles évoluent, et votre contribution est importante.

Je voulais d'ailleurs savoir est-ce que... C'est peut-être en dehors du projet de loi lui-même, là, mais, de façon générale, est-ce que... comme organisme communautaire, est-ce que vous sentez que vous êtes suffisamment reconnue par le ministère de l'Éducation, votre contribution, etc.? Est-ce que vous le sentez, là? Le ministre n'écoute pas là, vous pouvez dire tout ce que vous voulez. C'est une blague, il écoute très, très... Il écoute toujours, c'est une blague. Est-ce qu'il y a une insuffisante valorisation ou reconnaissance de ce que vous faites dans les écoles?

• (18 heures) •

Mme Marsolais (Mélanie) : En fait, c'est sûr que c'est... Un des défis qu'on voit, c'est : on n'est pas considéré comme la cour, là, la cour, la préoccupation... L'école... l'école est la responsable, dans notre société, de la dimension éducative des enfants, mais, à l'entour de cette école-là, il y a des partenaires, puis, souvent, les jeunes vont arriver dans nos organismes quand ils sont en très grande difficulté, quand il est trop tard. D'une part, ça peut être difficile pour le milieu scolaire d'admettre que là ils sont arrivés à leurs limites, alors que ce n'est pas possible, pour l'éducation d'un enfant, avec tous les facteurs... C'est des facteurs familiaux, des facteurs à l'entour de l'enfant, des facteurs autres sur l'école, l'école n'a pas nécessairement de prise. Ce n'est pas possible de travailler seul, l'école en... elle-même, l'école fermée sur elle-même avec un enfant, d'y arriver. Alors, ce n'est pas possible.

Alors, à la place de voir ça comme un échec et d'éviter de faire du référencement ou d'avoir de la collaboration ou d'hésiter, c'est vraiment de voir avec les partenaires du milieu où souvent on a aussi énormément d'informations sur la vitalité économique, sociale, culturelle, sur les changements en dehors de la clôture d'école, de la cour de récréation, sur qu'est-ce qui se passe dans la communauté qui met à mal, en ce moment, les jeunes?

Mme Ghazal : Donc, la... juste la pédagogie ne peut pas 100 % améliorer, là, la réussite, le bien-être des élèves, juste avec la pédagogie, ce n'est pas juste la...


 
 

18 h (version non révisée)

Mme Ghazal : ...responsabilité du prof. Malgré, je ne sais pas si vous avez suivi ce qui s'est discuté, là, les différents groupes qui sont venus, il y en a qui disaient que, je pense, c'est M. Steve Bissonnette si ma mémoire est bonne, là, de la TÉLUQ, qui disait qu'avec la pédagogie, là, même dans des milieux défavorisés, bien, on pouvait annuler tous les effets négatifs des facteurs socioéconomiques que cet enfant-là vit en dehors de l'école juste avec, tu sais, un bon prof qui a les bonnes méthodes basées sur de la recherche probante, ça, vous n'adhérez pas à ça, là?

Mme Marsolais (Mélanie) : En fait, on pense que c'est super important d'avoir des profs motivés et engagés, des modèles positifs. Les jeunes, qu'est-ce qu'ils revendiquent? C'est d'avoir des enseignants, enseignantes, du personnel scolaire qui les respectent. Ça a l'air vraiment très de base, là, mais c'est le principal problème, le principal défi, le respect, la reconnaissance : Je ne suis pas bon en mathématiques ou en français, mais je ne suis pas juste un nul ou une nulle dans la vie, je sais faire d'autres choses. Ces autres choses-là ne sont pas valorisées à l'école.

Nous, c'est sûr, dans le milieu commentaire, on va beaucoup travailler avec des projets à partir des intérêts des jeunes, de qu'est-ce qui le fait vibrer? La motivation, il faut avant tout qu'elle soit intrinsèque, ne pas qu'elle vienne de l'extérieur d'une personne autre, ou quoi que ce soit. Puis bien évidemment, là, un enseignant, bien, on souhaite un super bon enseignant pour tous les enfants, ça a tellement un impact non négligeable, super important, mais on ne peut pas faire fi des conditions de vie, de qu'est-ce qui se passe dans la famille que c'est tellement précieux, d'où pourquoi on va toujours, nous, soutenir l'enfant, mais plus largement la famille pour l'aider à faire face aux défis auxquels elle vit.

Mme Ghazal : C'est ça, on ne peut pas mettre sur les épaules de l'enseignant.

Mme Thibault (Véronique) : Je me permets...

Mme Ghazal : Oui, oui, allez-y.

Mme Thibault (Véronique) : Excusez-moi, je ne veux juste pas perdre... une petite formation supplémentaire, mais au niveau des régions éloignées, par exemple, dans un village où il n'y a pas d'emploi, où il y a vraiment une vulnérabilité majeure, ce ne sera pas juste la pédagogie qui va faire en sorte que les enfants vont manger à leur faim, vont se sentir en sécurité, et autres, vous comprendrez. Ça fait que c'est à ce niveau-là.

Puis au niveau de votre première question, lorsque vous parlez de la reconnaissance, je veux juste tout simplement rajouter aussi que la reconnaissance varie beaucoup présentement sur le terrain au niveau des spécificités régionales et au niveau d'un centre de services scolaire à l'autre. Donc, il y a des endroits où ça va super bien, des endroits où c'est plus difficile, donc on travaille là-dessus. On travaille avec des humains, donc il faut apprendre à travailler en ce sens-là.

Mme Ghazal : Puis comment est-ce qu'on peut s'assurer que là où ça se passe bien, il y a une bonne reconnaissance, que ça se transpose aussi ailleurs? Est-ce qu'avec le projet de loi ou c'est avec des données que l'INEE peut avoir pour dire : Bien là, il faudrait qu'on... il faudrait assurer... s'assurer qu'il y ait... qu'on reconnaisse la contribution des organismes communautaires, ou c'est à l'extérieur de ça?

Mme Marsolais (Mélanie) : Mais en ce moment, il y a le PAGAC, le chantier... le nouveau plan d'action gouvernemental en matière d'action communautaire. On espère vivement que notre ministère, que le ministre s'intéresse à ces travaux-là. On est très heureux, là, de l'avènement du plan d'action avec... qui est arrivé l'an passé en 2022.

Alors, il faut vraiment que l'action communautaire soit perçue comme une richesse, une valeur ajoutée, une alternative, et qu'on travaille ensemble. C'est ça la reconnaissance, on le disait d'entrée de jeu, qu'on soit interpellé pour avoir un esprit... pour notre esprit critique, pour un autre angle, on n'est pas des spécialistes ni de l'enseignement, ni de la pédagogie, ni du milieu de la recherche, mais on est... le communautaire, on est capable d'amener une autre perspective, point de vue. Qu'on soit invité à la commission, c'est quelque chose qu'on apprécie, qu'on reconnaît parce qu'on travaille avec les mêmes jeunes et on a les mêmes partenaires au niveau des écoles. Mais à l'intérieur des écoles, ça reste un libre choix. En fait, les directions et les équipes-écoles nous disent qu'ils sont tellement sous pression et, des fois, ils ne savent pas vers qui se tourner. Il y a 60 000 OSBL, ce n'est pas un chiffre abstrait, là, il y a 60 000 OSBL au Québec, il y en a 5 000 organismes communautaires. OSBL, ça peut même être une fondation, là. Mais il y a des organismes communautaires spécialisés en lutte au décrochage, spécialisés en action communautaire autonome jeunesse avec les 400 groupes avec Jennifer, il y a des écoles de la rue. Tous ces organismes-là, on a une expertise avec des gens formés en éducation, mais qui ont choisi une autre voie que l'institutionnel, justement pour avoir davantage d'autonomie et de latitude dans nos approches, dans nos pratiques, pour répondre aux besoins spécifiques.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci infiniment.

Mme Ghazal : Merci. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci infiniment. Alors, avant de conclure les auditions, je procède au dépôt des mémoires des personnes et des organismes qui n'ont pas été entendues lors des auditions publiques.

Sur ce, je vous remercie infiniment pour votre contribution à tous. Compte tenu de l'heure, la commission ajourne ses travaux sine die. Bonne soirée à tous. Merci.

(Fin de la séance à 18 h 06)


 
 

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