Journal des débats de la Commission de la culture et de l’éducation
Version préliminaire
43e législature, 1re session
(29 novembre 2022 au 10 septembre 2025)
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Le
mardi 22 avril 2025
-
Vol. 47 N° 62
Consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 94, Loi visant notamment à renforcer la laïcité dans le réseau de l’éducation et modifiant diverses dispositions législatives
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9 h 30 (version non révisée)
(Neuf heures quarante-six minutes)
La Présidente (Mme Poulet) : Alors,
bonjour, bonjour à tous. Alors, ayant constaté le quorum, je déclare la séance
de la commission de la culture et de l'éducation ouverte. La commission est
réunie afin de poursuivre les consultations particulières et auditions
publiques sur le projet de loi n° 94, Loi visant notamment à renforcer la
laïcité dans le réseau de l'éducation et modifiant diverses dispositions
législatives.
Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des
remplacements?
La Secrétaire
: Oui, Mme
la Présidente. M. Lemieux (Saint-Jean) est remplacé par Mme Schmaltz
(Vimont) et Mme Gentilcore (Terrebonne); par M. Bérubé
(Matane-Matapédia).
La Présidente (Mme Poulet) :
Parfait. Alors, un petit rappel de fermer tous vos appareils électroniques, les
sonneries. Alors, je vois qu'effectivement on a le réflexe d'aller fermer nos
cellulaires. Merci beaucoup de votre collaboration.
Alors ce matin, nous entendrons les
personnes et les organismes suivants : M. Normand Baillargeon, Pour les
droits des femmes du Québec et la Ligue des droits et libertés. Je souhaite
donc la bienvenue à M. Normand Baillargeon. Je vous rappelle que vous disposez
de 10 minutes pour votre exposé et, par la suite, il va avoir une période d'échange
avec les membres de la commission. Alors, la parole est à vous.
M. Baillargeon (Normand) : Bonjour.
Merci de l'invitation. La question de la laïcité m'intéresse depuis très, très
longtemps. Il y a déjà une quinzaine d'années, je pense, j'avais organisé un
colloque où j'avais invité des gens qui représentaient toutes les tendances de
ce...de ces idées-là. Je suis content de parler aujourd'hui avec vous. Je pense
que ce que propose le ministre est vrai, juste et important, mais que ça ne va
pas assez loin. Je vais essayer d'expliquer pourquoi. Je vais prendre la parole
devant vous en insistant, comme philosophe, sur certains aspects philosophiques
de cette question-là qui me semblent importants de rappeler. Je vais faire un
retour sur les origines de cette idée, philosophiquement, les raisons qui font
qu'aujourd'hui on a des débats et des désaccords parfois inattendus autour de
cette idée, et finalement ce qu'il faudrait faire selon moi pour aller jusqu'au
bout de ce qu'il faut accomplir.
Les origines. Permettez-moi un petit
détour philosophique. Quand la Révolution française lieu, il y a monsieur qui s'appelle
Condorcet, c'est un des grands philosophes de son époque, c'est un des rares
qui est encore vivant. Et quand il va participer à la Révolution française, il
insiste — et c'est lui qui crée ça — sur l'instruction
publique, il crée cette idée d'instruction publique qui va s'incarner ensuite
en France. Est née aussi l'idée que l'homme qui, pour la première fois,
pressent cette idée de laïcité, de neutralité, d'instruction publique.
Quelques années plus tard — on
ne parle pas assez de lui, on devrait quand on parle de ces questions-là — il
y a un monsieur qui s'appelle Ferdinand Buisson, 1842-1932, Ferdinad Buisson, c'est
le monsieur qui fait la loi sur la laïcité en France. La loi de 1905, c'est lui,
il va gagner le prix Nobel de la paix plus tard dans sa vie. Il est ministre de
l'Éducation quand il fait ça. Et je tiens à rappeler, quand il institue cette
loi de 1905, il regroupe, autour de lui, toute la gauche de l'époque. Il y a
même une historienne qui pense que le mot «laïcité» a été inventé par un
anarchiste. Donc, ça dit qu'il s'est passé quelque chose dans ce moment, dans
la vie d'esprit qu'on a.
Qu'est-ce que ça signifie, cette idée de
la laïcité? D'abord, que l'école est un lieu d'instruction, d'accès au savoir
et ceci est central pour la laïcité. Il faut préserver l'autonomie de la pensée
et permettre l'accès au savoir. Ensuite, l'école est le lieu d'entrée dans l'espace
civique. Les enfants pénètrent dans l'espace civique d'abord à l'école. Ceci...
cet espace civique sera ensuite présent partout. Ensuite, l'école est un moyen
pour les enfants d'accéder à un avenir ouvert, d'avoir...
M. Baillargeon (Normand) : …la
possibilité d'avoir un avenir ouvert, c'est-à-dire qui n'est pas limitée par
leur origine, qui leur permet d'accéder à quelque chose d'universel donné par
le savoir. Tout cela fera longtemps consensus à gauche. Aujourd'hui, ce n'est
plus le cas. Pourquoi? Voici quelques raisons qui, selon moi, expliquent ce qui
se passe et on y reviendra dans notre discussion.
• (9 h 50) •
D'abord, on a en ce moment dans notre
civilisation un rapport problématique au savoir qui s'incarne dans quelque
chose qui s'appelle le post-modernisme, où on voit le savoir comme des formes
de pouvoir incarnées et on nie la vérité du savoir parfois. Et c'est
extrêmement problématique pour l'idée de laïcité. Deuxièmement, on a, et il y a
des débats à avoir là-dessus aussi, des théories de l'identité qui valorisent
les communautarismes, les visions particulières du monde qu'ont certains
groupes, ce qui parfois nie l'accès à l'universel. Finalement, aussi, on a
autour de l'idée de droit des visions du droit qui s'opposent à une vision plus
universaliste, civique, laïque, républicaine, incarnée dans l'idée de laïcité,
et des visions différentes de common laws, comme on les appelle parfois, ou
celles qu'on trouve aux États-Unis, on l'appelle The Wall, le mur qui sépare la
religion et l'État. Ces deux visions-là du droit sont discutables. Mais il est
clair qu'une vision de la laïcité conforme à ses origines et à ce qu'elle est
réellement devrait s'incarner dans une vision républicaine et pas dans une
vision common law. Finalement, on a aussi des changements démographiques dans
toutes les sociétés qui ont amené à certaines transformations. Et on a… on ne
le nomme pas assez, mais une religion qui parfois est extrêmement militante et
qui fait partie de la vie politique maintenant et qui cherche à s'imposer. On
a… à la suite de tout ça, on a une assez étonnante inversion qui fait qu'une
idée longtemps portée par la gauche est aujourd'hui niée par une partie de la
gauche, et ça me semble intéressant de le soutenir.
Qu'est-ce qu'il faut faire, modestement?
je l'ai dit, je pense que ce que met de l'avant M. le ministre est sain et
souhaitable, et bien, je pense aussi qu'il faut aller plus loin. Je vais faire
très modestement quelques remarques parce que je ne prétends pas avoir les
solutions aux problèmes qui se posent, mais je voudrais en faire quelques-unes
quand même. Une première, c'est rappeler que l'école, c'est un sanctuaire.
L'école, c'est une institution distincte des autres. C'est une institution
particulièrement importante. C'est l'entrée dans l'espace civique,
l'incarnation de l'espace civique, et toutes les autres institutions vont
dépendre d'elles. Si vous voulez un système de santé, un système juridique, un…
il faudra que l'école ait préparé à ça. Et donc la laïcité est absolument
centrale ici. Si on oublie ça, on risque d'oublier ce que c'est que
l'éducation. J'ai écrit déjà, et je maintiens, ce qui s'est passé à Bedford est
un indice qu'on oublie parfois, certains d'entre nous, peut-être nous tous,
collectivement, ce que c'est réellement que l'éducation. Pour avoir laissé des
choses comme ça se passer, il fallait avoir oublié ce que c'est que
l'éducation.
Ensuite, il faut affirmer et valoriser. Il
faut qu'on affirme et valorise l'universel dans le savoir et dans la culture,
contre le communautarisme, contre le post-modernisme. Ensuite, il faut que
l'école soit un lieu de formation à la pensée critique incarnée dans cet idéal
de laïcité et d'universel. Ensuite, je pense qu'il faut étendre partout l'idéal
de la laïcité, c'est-à-dire aux écoles privées et aux écoles privées
religieuses. Sur 160 écoles privées financées avec des fonds publics, il y
en aurait 50 qui ont une vocation religieuse. C'est absolument inacceptable. On
ne peut pas tolérer ça. De la même manière, je reviens sur la question du
savoir et du post-modernisme, on ne peut pas admettre que des documents
officiels… que l'école soit un lieu qui refuse de reconnaître la réalité
biologique du sexe. Absolument intolérable. Il faut ensuite étendre partout,
donc, la laïcité aux écoles privées, aux écoles religieuses, y compris aux CPE,
selon moi. Pour ce qui est des cégeps, j'avoue que j'ai encore une réflexion à
mener. Je ne suis pas encore convaincu puisqu'il s'agit, pour beaucoup
d'élèves… d'étudiants, ce ne sont plus des élèves, ce sont des étudiants et ce
sont des adultes. Donc, moi, j'ai plutôt une réserve là-dessus. Mais pour le
reste, je maintiens ce que je viens de soutenir.
L'interdiction des signes religieux
partout et pour tous, sans aucune réserve, aucun compromis sur les
accommodements ou les exceptions, comme des salles de prière. La religion est
enseignée comme un fait culturel, sans retenue, en disant tout ce qu'il y a à
savoir là-dessus dans l'histoire, en art, en philosophie, etc. Je pense qu'au
total c'est la vie civique commune qui se joue là, l'avenir de la vie civique
commune qui se joue là. Et en un sens bien réel et extrêmement important, selon
moi, puisque les débats que j'ai dessinés sont profonds, ce qui joue là aussi,
selon moi, c'est pour une part l'avenir de la culture commune au Québec. Et on
ne peut pas niaiser avec ça. Voilà ce que j'avais à vous dire.
La Présidente (Mme Poulet) :
Bien, merci beaucoup. Alors, on va procéder à la période d'échange. M. le
ministre, la parole est à vous.
M. Drainville : Merci
beaucoup, M. Baillargeon, merci pour aujourd'hui, mais merci pour vos
innombrables contributions...
M. Drainville : ...au débat
public, et ce, depuis plusieurs années, pas seulement sur la laïcité, mais sur
nombre d'enjeux, dont plusieurs étaient en lien avec l'éducation. Vous êtes un
citoyen exemplaire à mes yeux. Et je suis très fier que vous participiez à nos
travaux, je dirais même que j'en suis honoré comme parlementaire, que des
citoyens comme vous a acceptiez de venir nous livrer votre vision des choses.
C'est une très belle contribution à nos travaux parlementaires.
Je veux revenir sur un article que vous
avez fait paraître, une lettre d'opinion... (Interruption) ...pardonnez-moi,
que vous avez fait paraître au mois de décembre 2024, donc il n'y a pas si
longtemps. Vous étiez cosignataires avec Romain Gagnon, David Rand, Andréa
Richard, François Dugré, Michel Virard. C'est intitulé Islamophobie ou
islamocécité? Pouvez-vous élaborer un petit peu sur le propos que vous teniez
dans cette lettre? Qu'est-ce que vous voulez dire par islamocécité, par
opposition à islamophobie?
M. Baillargeon (Normand) : C'est
un concept particulier, celui d'islamophobie. On lance facilement cette
accusation-là, hein, des... À chaque fois qu'on en parle, j'ai envie de
dire : Définissez-moi le mot puis je vous dirai si je le suis, là,
islamophobe. Une phobie, c'est une peur irrationnelle. Il y a des raisons
rationnelles de s'inquiéter de l'islam, de l'islam politique. Et je pense que,
quand je parle comme ça, beaucoup de musulmans sont d'accord avec moi parce que
beaucoup de musulmans sont les principales victimes de l'islam politique. Il
faut distinguer l'islam comme religion et l'islam politique. L'islam politique
en éducation, qu'il s'insère dans l'école, ça peut s'appeler Samuel Paty ou
Dominique Bertrand, que vous connaissez sans doute, deux enseignants, deux
professeurs en France qui ont été égorgés parce qu'ils ont osé montrer, dans
leur cas, les caricatures de Charlie Hebdo. Alors donc, on doit être lucide
face à tout ça. Moi qui vous parle, M. le ministre, là, je pense, je suis une
des rares personnes au Québec à avoir écrit un ouvrage complet vantant un
musulman. J'ai écrit un livre sur Omar Khayyam. Omar Khayyam est un poète et
scientifique musulman pour lequel j'ai une grande admiration. Et on peut avoir
une grande admiration pour Omar Khayyam et se méfier de l'islam politique, et
ce n'est pas d'être islamophobe, que de se méfier de l'islam politique. Et,
comme il y a cet entrisme possible dans l'école, on doit être vigilant face à
cet entrisme politique. C'est ce que je maintiens.
M. Drainville : Et donc,
quand vous parlez d'islamocécité, vous parlez d'une sorte d'aveuglement
volontaire, c'est?
M. Baillargeon (Normand) : D'aveuglement
volontaire ou collectif ou... nourri aussi par... encore une fois, cette
accusation très facile d'islamophobie, hein? On peut très bien, encore une
fois, être admiratif devant certaines choses que l'islam a pu apporter, devant
Omar Khayyam, je ne sais pas si vous le connaissez, mais c'est quelqu'un
d'extrêmement intéressant, et aussi s'inquiéter. Il faut être lucide et
s'inquiéter de la possible pénétration de l'islam politique dans les écoles.
Bedford, je ne l'ai pas rêvé. Les 17 écoles sur lesquelles il y a eu
enquête, je ne les ai pas rêvées non plus. Donc, il faut être vigilant face à
tout ça. Et la raison pour laquelle il faut faire preuve de vigilance, ce sont
les raisons philosophiques que je viens de nommer, à savoir l'universel,
l'accès au savoir, etc.
M. Drainville : Et, dans le
cas de l'universel, de l'accès au savoir, de la... de l'école comme sanctuaire
et comme incarnation de l'espace civique, disiez-vous, ça ne vise pas qu'une
religion. Le principe de la laïcité, je pense qu'il est bon de le rappeler,
vise l'ensemble des religions. Quand on parle de laïcité, on parle notamment de
la séparation entre les religions et l'État. Et donc, il y a 50 ans,
60 ans... bien, enfin, maintenant 60... mon Dieu, le temps avance, au
tournant des années 60, bref, j'avance avec, au tournant des
années 60, nous avons décidé de séparer nos institutions publiques des
religions catholique et protestante. Aujourd'hui, on l'étend à l'ensemble des
religions. Puis je le dis parfois dans des entrevues où on m'accuse de cibler
une religion en particulier, je rappelle d'abord l'histoire, comme je viens de
le faire, puis je dis... j'ajoute souvent : Dans 50 ans, on verra
quelle sera la religion qui sera davantage active. Mais je pense qu'il est bon
de rappeler que c'est un principe qui...
M. Drainville :
...s'applique à l'ensemble des religions.
M. Baillargeon (Normand) :
Tout à fait. Et je crois qu'il y a une erreur facilement commise ici, qui est
de dire que puisque ça atteint certaines religions ou certaines manifestations
d'une religion, que c'est ça que ça vise. Mais ce n'est pas le cas. Si vous
avez un barrage policier qui vérifie si les gens ont bu trop d'alcool et que,
pendant les heures où a eu lieu le barrage, ils ont arrêté 100 personnes,
et ils ont constaté qu'il y en a quatre qui avaient trop bu. Et ces quatre
personnes-là, ce sont des hommes blancs de moins de 30 ans. On ne peut pas
dire qu'ils visaient les hommes blancs de moins de 30 ans. On peut dire
qu'ils ont atteint ces hommes blancs de moins de 30 ans. Et c'est ce qui
se passe avec la religion, avec la laïcité.
• (10 heures) •
M. Drainville : Par
ailleurs, dans l'article auquel j'ai fait référence plus tôt, vous mentionnez
que d'exprimer des préoccupations quant à une religion en particulier quant à
ses variantes intégristes, ne relève aucunement d'une phobie. Bien au
contraire, il s'agit d'une attitude rationnelle, fondée sur une vigilance
légitime et parfois salutaire. Vous avez un petit peu parlé de ça dans les
propos que vous avez tenus un peu plus tôt. Mais pouvez-vous élaborer un peu
là-dessus parce que vous avez raison de dire, M. Baillargeon, que les
adversaires de la laïcité, quand ils ne, comment dire, ne... ne s'enfargent pas
dans les fleurs du tapis, si vous me permettez un français un peu... un peu
familier, ils vont tout de suite te lancer à la figure : Islamophobie. Ça
sert, là, c'est une espèce de formule passe-partout qui est utilisée en tout
temps puis qui vise dans le fond à te faire passer pour un raciste et... ou en
tout cas, un antimusulman. Et je rappelle le rapport des 17... sur les
17 écoles, qui disait que, dans certains cas, des responsables scolaires
hésitent à faire appliquer la loi parce qu'ils craignent de se faire taxer d'islamophobie
ou de racisme. Mais je sens quand même, je ne sais pas si vous êtes d'accord
avec moi, mais que cette attaque ou cette épithète a beaucoup moins de prise
qu'auparavant. Les gens se font traiter d'islamophobe et, plutôt que de se
taire, plutôt que de réagir sur la défensive, il y a de plus en plus de
personnes qui vont réagir en disant : Regarde. Ça, c'est ton... Ça, c'est
ton attaque facile. Ça, ça fait des années que vous nous attaquez comme ça,
nous les partisans de la laïcité, pour nous faire taire. Bien, c'est fini ce
temps-là. On ne se taira plus. Même si vous nous taxez de tous les noms, de
racistes, d'islamophobes, on ne se taira plus. Ce ne sera plus suffisant pour
nous faire taire. Je ne sais pas si vous faites la même lecture que moi, il y a
comme un... une... Je pense, j'ose croire, peut-être que je vis d'espoir, qu'il
y a davantage de courage sur cette question-là qu'auparavant.
M. Baillargeon (Normand) :
Un mot d'abord sur les raisons de tout ça, de cette façon d'interdire le débat.
Je pense qu'il y a plusieurs causes derrière tout ça. J'ai parlé tout à l'heure
de refus du savoir. J'ai parlé tout à l'heure des théories de l'identité, du
communautarisme. Il y a la mutation de l'ancienne gauche à une forme de la
nouvelle qui a joué certainement un rôle là-dedans. Tout ça a joué, mais je
pense aussi que les médias sociaux ont joué un rôle là-dedans, dans la
polarisation des débats, et ce qui fait que la conversation démocratique est de
plus en plus difficile sur certains sujets alors qu'on devrait pouvoir en
parler. Plusieurs personnes pensent comme vous, dans des milieux que je
fréquente, les milieux intellectuels que je... que je fréquente, une certaine
gauche, disons, que oui, les temps sont en train de changer. Les gens en ont
assez. Les gens veulent qu'on puisse discuter de ça. J'espère sincèrement que
c'est le cas. Je pense qu'il y a des raisons de penser qu'effectivement c'est
en train de changer. En France, par exemple, on voit ce changement-là en France
où le... Je me rappelle, j'ai parlé tantôt de Marc Ayame sur qui j'avais écrit
un livre, hein? Bien, moi, mon livre, Le petit cours d'autodéfense
intellectuelle, il y avait été illustré par un monsieur qui s'appelle
Charb. Et avec une dizaine d'autres personnes, ils ont été assassinés par des
islamistes dans les bureaux de Charlie Hebdo. C'est une réalité. C'est... On
doit pouvoir nommer ça, on doit pouvoir dire ça et on doit pouvoir être
critique de visions extrêmes d'une religion sans être accusé de phobie, ou sans
être accusé de racisme, sans être... Il faut ramener ça dans l'ordre du jour.
C'est pour ça qu'aujourd'hui je tenais à le dire parmi mes propos.
M. Drainville : Mme la
Présidente, j'ai des collègues très intéressés par cette question. Et le député
de Vanier-Les Rivières me signale qu'il souhaiterait pouvoir poser
quelques questions à M. Baillargeon.
La Présidente (Mme Poulet) :
Alors, M. le député, la parole est à vous.
M. Asselin : Merci, Mme
la Présidente. Merci beaucoup au ministre. Je partage d'ailleurs
l'introduction, la brève introduction que vous avez faite à
M. Baillargeon. On le lit énormément. Et puis c'est plutôt rare d'entendre
parler de Condorcet et de Dubuisson à l'Assemblée nationale. Alors, on est bien
contents. Et je voudrais...
10 h (version non révisée)
M. Asselin : ...simplement
vous permettre d'élaborer un peu sur le mot "civique". Vous parlez
beaucoup de l'entrée dans l'école, en termes de valeurs civiques. J'aimerais ça
que vous élaboriez sur l'importance que ça a pour tout éducateur qui entre en
présence de l'école, les valeurs civiques.
Pour moi, la laïcité implique une certaine
vision de l'école qui est une vision civique. L'école, c'est un lieu où les
gens quittent leur environnement, quittent leur famille, quittent leur milieu
et rentrent pour la première fois dans un sanctuaire, un lieu protégé qui va
les préparer à exercer leur rôle de citoyen plus tard.
M. Baillargeon (Normand) : Ce
qu'on trouve là, d'abord, massivement, foncièrement, extrêmement important, c'est
le rapport au savoir. Il y a un philosophe que j'aime beaucoup, il disait :
Si vous êtes allé à l'école et que vous admettez un théorème de géométrie sans
l'avoir compris, l'école n'a pas joué son rôle. C'est exactement ça. Alors, l'école,
c'est centré sur les savoirs, et on transforme les personnes par l'esprit
critique et par une vision de l'universel. Et ça, je trouve que c'est
extrêmement important aussi.
Et pour moi, permettez-moi d'insister
là-dessus, on insiste sur les savoirs et leur vision universelle. On comprend que
c'est le cas en mathématiques, je viens de prendre l'exemple de la géométrie,
on comprend aussi que c'est le cas en sciences, sans doute, même, si en ce
moment, je ne vous cache pas que, dans le milieu intellectuel, il y a des
attaques postmodernes sur les sciences qui sont absolument délirantes et qui
nient même la valeur de la science. Mais, au-delà de ça, il y a aussi toute la
culture, et là on entre dans une vision de la culture qui n'est plus celle, par
exemple, des milieux qui veulent faire de l'argent avec la culture, on n'est
plus celle où on protège notre culture parce qu'elle est meilleure que celle
des autres. On a, là aussi, une vision universelle de la culture, une vision
grande de la culture, une vision riche de la culture, une vision par laquelle
on va, à l'école, rentrer dans l'univers de la culture, mais on va connaître la
culture d'ici, bien sûr, ce qu'on juge être le meilleur, et c'est ça qu'on
fait, puis on va connaître les cultures étrangères aussi, on va lire
Shakespeare, on va lire Pythagore, on va lire... etc. Vous savez, il y a un
rapport au monde et au savoir, qui, encore une fois, à la culture... qui est
distinct de ce qui se passe dans la société en général, où, parfois, la culture
est dominée par l'argent, par la rentabilité, par ci, par ça. L'école prépare à
ça.
Et ce qu'on espère, avec la laïcité, avec
la vision qu'on se fait de l'école, c'est que les enfants qui sortent de là,
devenus adultes, portent ça en eux. Ce sont des citoyens. Ils n'accepteront pas
n'importe quelle chose parce qu'on leur a dit que c'est la vérité. Ils vont se
questionner là-dessus. De la même manière qu'ils n'accepteront pas un théorème
sans l'avoir compris, ils n'accepteront pas une vision de telle ou telle chose
sans avoir débattu. Et donc, ça, ça suppose aussi, et là, l'école incarne ça
aussi, un lieu où on débat, où on échange, où on reconnaît les mérites de
certaines idées, les torts de certaines... On est capables de nuances, choses
qui disparaissent aujourd'hui en ce moment avec les réseaux sociaux.
Donc, pour moi, l'école, de ce point de
vue là, est extrêmement importante. Et c'est pour ça que je concluais mon topo
en disant : C'est important pour l'avenir de la culture québécoise, l'avenir
de la vie civique, la vie... la vie collective au Québec. C'est là que ça
commence. Si ça va mal à l'école, ça va aller mal ailleurs.
M. Asselin : Merci beaucoup
de cette contribution-là. Ce n'est pas pour rien qu'on a maintenant de la
philosophie dans l'école primaire, dès le primaire. Tous les théorèmes qui sont
avancés sont importants, et celui de la laïcité en particulier. Vous êtes un
philosophe qui a beaucoup insisté sur cette prémisse-là. Et puis on vous rend
grâce pour ça.
M. Baillargeon (Normand) : Merci
beaucoup.
La Présidente (Mme Poulet) : Merci.
Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Oui. La... Mme la députée de Hull. La
parole est à vous.
Mme Tremblay : Oui. Excusez.
J'étais un petit peu loin. Alors, bonjour. Très heureuse de vous recevoir ici
aujourd'hui.
Vous avez abordé plusieurs... plusieurs
parents, là. Mais j'aimerais ça vous entendre tu sais, parce que vous avez
abordé rapidement le changement démographique, donc j'aimerais ça vous entendre
là-dessus. Parce qu'il y a une conséquence dans nos... tu sais, dans les
écoles. Ça change le portrait, le paysage favorablement, je devrais dire. Mais
aussi, tu sais, c'est sûr que là-dessus, là, on... ça amène justement une
diversité de religions. Puis de là, le projet de la laïcité, il est d'autant
plus important. Mais j'aimerais ça vous entendre un petit peu plus sur le
changement démographique.
M. Baillargeon (Normand) : Oui.
J'en ai parlé tout à l'heure. J'espère que vous serez d'accord avec moi aussi.
Il y a maintenant une forme de polarisation qui empêche d'être nuancés sur
certaines questions, dont celle-là. J'ai aimé quand vous me posez la question,
vous dites : Ça apporte des bienfaits. C'est certain. Ça apporte aussi des
débats, et c'est ça dont il faut parler. La laïcité m'apparaît comme une
manière de solutionner certaines des graves questions qui se passent là. Ça
permet de le faire parce que d'abord, à travers la laïcité, la vision qu'on a
de l'école et du savoir, on peut être ouverts au savoir de n'importe où. Hein?
Je donnais, tantôt, l'exemple, mais ça peut se répertorier dans n'importe quel
enseignement au primaire ou au secondaire, là. Moi, je suis un grand admirateur
d'Omar Khayyam. Mais c'est un mathématicien de génie. Il est musulman. Puis là,
bon, je suis familier de ça puis j'aime ça parce que ça s'ancre dans l'universel
également. Vous comprenez? Donc, ça, il faut le faire. Mais je pense aussi, et
je l'ai dit quand j'ai terminé mon exposé, ça demande du courage collectif,
tout ça. Il faut être capables de l'affirmer. Il faut être capables qu'on...
M. Baillargeon (Normand) : ...affirme
collectivement ce que c'est que l'école puis qu'on la respecte, puis qu'on
demande son respect pour ça. L'école, de ce point de vue là, elle est menacée
par toutes sortes de choses, celles que vous avez nommées par exemple. Si on
veut, sans distance critique, accepter dans l'école toutes les tendances
communautaristes ou communautariennes, on va faire du mal à l'idéal de laïcité
puis de vie collective. Et je pense qu'on doit, collectivement, et il revient
là-dessus au ministère de l'Éducation de le faire, de réaffirmer avec force la
valeur de l'école comme lieu de transmission de savoirs, et pas seulement parce
que, on retrouve ça aussi aujourd'hui, je n'en ai pas parlé tantôt, mais comme
lieu de progression sociale, comme lieu d'accès à un métier, comme lieu de
faire de l'argent. Non, l'école, c'est d'abord un lieu de transmission de
savoirs, et cette transmission-là de savoirs, elle a une valeur en soi, pas une
valeur instrumentale. C'est parce que c'est la culture, c'est parce que c'est
le savoir, et je m'emballe un peu parce c'est des questions qui me passionnent,
mais c'est des choses qui font que la vie qu'on mène ensuite est plus riche,
pas simplement la vie collective est plus riche, mais la vie qu'on vit comme
personne est plus riche. On a appris à l'école à aimer tel ou tel poète. On a
connu Alfred Desrochers, on l'adore, et puis on lit ses poèmes, puis on aime
ça, puis on va voir où il est enterré. Vous comprenez, l'école, c'est un lieu
pour ça. Est-ce que ça vous répond?
• (10 h 10) •
Mme Tremblay : Ça répond
très, très bien, puis j'aime ce que vous dites quand, tantôt, vous avez insisté
sur le fait, tu sais, que là, on sort du noyau, on sort de tout ce qu'on nous a
appris puis on rentre dans un milieu neutre. Alors...
La Présidente (Mme Poulet) : Je
m'excuse, Mme la députée de Hull, je dois vous interrompre, c'est tout le temps
que nous avons. Alors, je... Mme, on va... on va poursuivre les discussions
avec la députée de 3bsa pour une période de 12 min 23 s.
Mme Cadet : Il me restait 9
min 54 s, il me semble.
La Présidente (Mme Poulet) : Pardon?
9 min 54 s, pardon.
Mme Cadet : Oui.
La Présidente (Mme Poulet) : Oui,
désolée.
Mme Cadet : Merci beaucoup.
Mais en fait, M. Baillargeon, je vous laisserais peut-être conclure rapidement
votre réponse. Vous alliez répondre à Mme la députée.
M. Baillargeon (Normand) : Merci
beaucoup, mais non, c'est beau.
Mme Cadet : Allez-y.
M. Baillargeon (Normand) : Ah!
non, c'est beau, j'ai conclu.
Mme Cadet : Ah! vous avez
conclu. O.K. Parfait. Merci. Alors...
M. Baillargeon (Normand) : Je
vous laisse tout votre temps.
Mme Cadet : D'accord. Merci
beaucoup. Alors, enchantée. Donc, nous, nous n'avions pas eu l'occasion de nous
rencontrer précédemment.
M. Baillargeon (Normand) : Oui.
Mme Cadet : Donc, vous nous
avez dit... Donc, j'ai essayé de prendre des notes de votre exposé. D'ailleurs,
si c'est possible, à la fin, j'aimerais bien que vous puissiez déposer vos
notes, comme ça, ça nous permettra de... si elles sont... si c'est possible
pour vous de le faire, là.
M. Baillargeon (Normand) : Oui.
Si vous le voulez ici, je...
Mme Cadet : Oui.
M. Baillargeon (Normand) : Moi,
je pourrais prendre ça, puis faire un petit texte plus propre, puis vous
l'envoyer, si ça vous intéresse.
Mme Cadet : Merci. S'il vous
plaît.
M. Baillargeon (Normand) : Je
le ferai.
Mme Cadet : Je pense que ça
va nous aider.
M. Baillargeon (Normand) : Là,
en ce moment, je termine un livre et je n'ai pas eu le temps de...
Mme Cadet : Merci. Donc, vous
nous disiez un peu plus tôt, donc si j'ai bien pris... j'ai pris bonne note de
votre exposé, donc pour vous donc l'école donc a trois... donc répond donc à
trois domaines, donc préserver l'autonomie de la pensée et permettre l'accès au
savoir, accéder à un avenir ouvert et accéder à un espace civique. Donc, un peu
plus tôt, donc, au député de Vanier, donc, il vous posait la question, donc,
sur votre définition de l'espace civique. Je ne suis pas très... je ne suis pas
certaine d'avoir bien saisi ce que vous.... ce que vous vouliez dire par là
parce que, même un peu plus tard, donc dans ce qu'il faut faire, vous nous
parliez donc de... de vie civique commune. Donc, je voudrais peut-être donc
vous réentendre donc sur votre définition de vie civique commune et de ce que
cela signifie pour vous quand vous dites que l'école doit permettre à l'élève
d'accéder à un espace civique.
M. Baillargeon (Normand) : L'école
fournit d'abord à l'élève des savoirs, on est d'accord, et ces savoirs-là sont
indispensables pour exercer sa citoyenneté, mais je vais vous mettre un terme
philosophique. Permettez-moi, je ne suis pas capable de m'arrêter. C'est ça.
Anciennement, on parlait beaucoup de
vertus morales. C'est quelqu'un d'honnête, c'est... De plus en plus, en
philosophie, on parle de vertus épistémiques, c'est un gros mot, mais ça veut
dire des vertus intellectuelles, des vertus intellectuelles, quelqu'un qui est
capable de débattre, qui écoute le point de vue de l'autre, qui est capable de
reconnaître qu'il ne sait peut-être pas avec certitude. Quelqu'un qui a
l'honnêteté de dire : Je n'en sais rien parce que je n'ai pas étudié la
question. Quelqu'un qui a l'honnêteté de dire : Je suis à peu près sûr de
mon coup, mais je vais écouter les autres. Ce genre de vertus là, ça se
retrouve à l'école. L'école peut faire ça. L'école est capable de reconnaître
ça. On pose telle ou telle question et, à part en mathématiques, il peut y
avoir des débats sur ces choses-là, il peut y avoir des désaccords. Je veux que
le citoyen de demain soit empli de ces choses-là, soit empli de ces vertus-là,
soit capable de débattre.
Encore une fois, permettez-moi de le dire
d'une autre manière. Il y a un philosophe de l'éducation notamment, que j'aime
beaucoup, s'appelle John Dewey, d'où il disait en termes très simples : On
peut définir la démocratie par le fait qu'il y a séparation des pouvoirs, qu'il
y a une cour supérieure, il y a une constitution. Tout ça, c'est très bien et
c'est très vrai, mais la démocratie, c'est aussi une manière de vivre-ensemble,
et cette manière de vivre-ensemble fait qu'on peut se parler sur des sujets qu'on
a... dont... auxquels on a des intérêts communs. Et cette conversation
démocratique, comme il le dit, demande justement les vertus dont je parlais
tantôt, et l'école prépare à ça.
Moi, je veux une société civique où les
gens formés par l'école incarnent ce genre de valeurs là. Ils sont au courant
des choses. Si on leur parle de la démocratie comme supposant la séparation des
pouvoirs, ils savent ce que c'est, ils en ont entendu parler. Mais si on parle
du fait qu'au ce moment au Québec, il y a un débat sur l'avenir de la société
québécoise puis de la culture, c'est des gens qui ont les vertus dont je
parlais tantôt, l'honnêteté de dire : Oui, mais ça, je n'y ai jamais pensé
je vais y...
M. Baillargeon (Normand) : ...pas :
J'ai déjà... Avez-vous remarqué comment, de notre époque, les gens ont réponse
à tout tout de suite? C'est fascinant de voir ça. Les réseaux sociaux ont joué
un rôle là-dessus. Il faut être capable de débattre. Moi, je vous parle
aujourd'hui sur certaines questions, là, c'est ce que je pense, mais je suis
ouvert peut-être à discuter puis à reconnaître que je me suis trompé. Vous
comprenez? C'est ça qu'il faut activer. Et l'école est un lieu central pour
créer ça. Et vous comprenez que, quand je parlais de Condorcet au début, là, lui,
il y ait, l'instruction publique, rendre la raison populaire avec la
citoyenneté, parce que ce qu'on veut plus tard, c'est des citoyens qui ont été
formés à ça, qui sont... qui ont ça comme seconde nature, si vous me permettez
de le dire comme ça.
Mme Cadet : Merci.
M. Baillargeon (Normand) :
Merci.
Mme Cadet : Donc, est-ce que,
selon vous, donc, la Loi sur l'instruction publique, telle que nous la
connaissons aujourd'hui, empêche, donc, nos jeunes, donc, d'accéder à un espace
civique, tel que vous l'avez défini? Je pense que votre définition a été très
claire. Merci beaucoup pour...
M. Baillargeon (Normand) : Merci.
C'est... Effectivement... Je l'ai dit souvent, je vais le répéter ici, hein?
Pour moi, ce que les gens qui ont fait la commission Parent ont accompli relève
presque du miracle, O.K., ces gens-là ont fait quelque chose d'absolument
exceptionnel. Et il faut saluer, il vient d'avoir 101 ans, M. Guy Rocher. Ce
que ces gens-là ont légué au Québec, c'est une chose belle, grande et
émouvante, O.K., vous... C'est absolument central. Maintenant, tout ça a été
porté, l'est encore, par la Loi sur l'instruction publique, mais, en ce moment,
c'est menacé par toutes sortes de causes, par toutes sortes de raisons, et il
faut qu'on réagisse collectivement. Selon moi, la Loi sur la laïcité, qu'on
voterait, qui irait dans le sens de ce que je souhaite, serait une manière de
préserver ce que j'ai à cœur. Voilà.
Mme Cadet : Ensuite, donc...
Donc, j'ai nommé, donc, vous nous avez présenté les trois piliers du système
d'éducation, puis ensuite vous avez nommé un peu, donc, les différentes
menaces, dont le postmodernisme. Pouvez-vous le définir aussi?
M. Baillargeon (Normand) : Oui,
je vais le faire avec plaisir. Donnez-moi...
Mme Cadet : De façon concise.
M. Baillargeon (Normand) :
Donnez-moi deux secondes, O.K.? Mais... Puis, en même temps, les gens pourront
débattre de ce que je vais dire là, mais c'est très connu, j'ai beaucoup
travaillé là-dessus, beaucoup écrit là-dessus.
Dans les années 60, ça vient de la
France, il y a des mouvements de pensée qui vont contester les idéaux des
Lumières, l'idée de raison, l'idée de savoir, l'idée de science. Les penseurs
qui incarnent ça s'appellent Jean-François Lyotard, Jacques Derrida, Michel
Foucault, et ces gens-là contestent tout ça et voient partout des rapports de
pouvoir plutôt que l'accès à la vérité qui serait accessible à tous. C'est
quelque chose de profondément troublant, mais ça s'est répandu un peu partout,
surtout dans les universités et ailleurs, mais dans les domaines des sciences
humaines, des sciences sociales, de la philosophie, de l'histoire. Et ça, c'est
profondément troublant.
Je tiens à dire... parce qu'on ne le sait
pas suffisamment, là, mais que Lyotard, qui est un des grands champions de ça,
a écrit un livre en 1979, je pense, qui s'appelle La condition postmoderne,
et il avait écrit ce livre-là à la commande du ministère de l'Enseignement
supérieur du Québec de l'époque. Alors, c'est... on est un peu responsables de
ça, au Québec.
Mais donc, cette idée-là, vous comprenez,
où on remet en question... Laissez-moi donner un exemple concret. Pas de
biologistes sérieux nieront qu'il existe une chose qui appelle les gamètes et
que, si vous êtes une femme, vous produisez des gamètes, des ovules, si vous
êtes un homme... des spermatozoïdes. La définition biologique du sexe est là.
Mais là, en ce moment, il y a aussi... et personne ne va nier que le genre
existe, c'est absolument absurde de nier ça, qu'il y a des incarnations
diverses selon les lieux, etc., de la... d'être une femme ou d'être un homme,
mais, en ce moment, on a l'idée que le sexe lui-même est une construction
sociale et un rapport de pouvoir, ce qui est absolument faux, et c'est une idée
qui vient du postmodernisme.
Mme Cadet : Ici... Bien, en
fait, c'était une des questions que j'avais, mais je pense que vous venez un
peu d'y répondre, parce que plus tôt vous nous disiez, donc, refuser que
l'école n'admette pas la réalité biologique du sexe. Donc, c'est ce que vous
vouliez dire...
M. Baillargeon (Normand) : C'est
ce que... Oui, tout à fait. Je voudrais qu'à l'école... Là aussi,
permettez-moi... J'aime beaucoup votre question. Je vais me permettre de... un
peu, hein?
Mme Cadet : Allez-y.
M. Baillargeon (Normand) :
Moi, je dis : L'école est un lieu d'instruction, un lieu de transmission
des savoirs. L'opposé de ça... c'est très important pour les philosophes de
l'éducation comme moi, ça, l'opposé de ça, c'est l'endoctrinement. Si on ne
transmet pas des savoirs pour que les gens se libèrent par eux, deviennent
autonomes, capables de penser par eux-mêmes, on endoctrine. Et, si on
endoctrine, on ferme l'esprit sur une doctrine en empêchant de penser ailleurs
que là. Au lieu d'ouvrir l'esprit, on l'a fermé. Et ce sont des choses qui
peuvent se produire lorsqu'on ne présente pas tous les aspects d'une question.
Alors, par exemple, sur cette question-là
du sexe et du genre, si on se contente de dire qu'il y a juste des genres puis
ce sont des constructions sociales et on ne rappelle pas qu'il y a une grande
majorité, presque la totalité, des biologistes qui rappellent que le sexe, ça
vient des gamètes, les gamètes c'est des ovules ou c'est des spermatozoïdes, si
on a occulté ça, on est en train d'endoctriner. Et là on est en train de faire
le contraire de ce que l'école doit faire.
Mme Cadet : Peut-être ma
dernière question, parce que je vois que le temps file. Parce qu'effectivement,
donc, le projet de loi n° 94, donc, amène plusieurs...
Mme Cadet : …proposition. Vous
nous avez parlé notamment, donc, de celle qui porte sur le port de signes
religieux. Évidemment, donc, on a déjà la loi sur laïcité de l'État, donc, qui
couvre donc les enseignants. Les dispositions de l'article 32 du projet de
loi, donc, l'élargiraient, donc, à l'ensemble des membres du personnel, mais
également on peut penser aux parents bénévoles, on peut penser, donc, à toute
personne, en fait, qui est en contact avec… qui se trouve, donc, sur les lieux,
qui est en contact, donc, direct avec les jeunes. Et je me demande… parce que
vous avez parlé, donc, d'endoctrinement ici, donc en quoi, selon vous, par
exemple, donc, les… là, je vous ramène sur le plancher des vaches. Donc, il y a
des groupes qui sont sur le terrain qui nous disent : Bien, dans la
réalité, parfois, sur l'heure du midi, pour le service de garde, vont avoir des
parents bénévoles qui vont venir prêter main forte. Donc, comment est-ce que,
selon vous, selon les dispositions actuelles, donc, la direction d'école, donc,
devrait traiter ces cas-là? Je veux dire, dans… alors qu'on ne parle pas donc
de personnes qui sont en situation de pouvoir ou qui pourraient être dans
l'endoctrinement dans ces cas précis.
• (10 h 20) •
M. Baillargeon (Normand) :
J'ai parlé tantôt de vertus épistémiques… j'ai essayé de vous en donner un
exemple. Je ne suis pas trop sûr, là, il faut que je réfléchisse à ça. Tu sais,
je n'aimerais pas que ça se généralise, que ce soit partout. Il faudrait que ce
soit l'exception. Je peux comprendre que ça peut arriver. Je demanderais à voir
au cas par cas. Vous comprenez ce que j'essaie de dire? Je maintiens que le
principe général devrait être pas de signes religieux dans l'école, dans ceux
qui fréquentent... Est-ce qu'après il arrive des cas problématiques,
exceptionnels, rares, qui seraient traités comme ça? Possiblement que oui. Tu
sais, autrement dit, encore une fois, c'est tellement vaste le monde de
l'éducation au Québec. Il se passe tellement de choses qui peut arriver que des
fois on s'accommode d'un accommodement qui n'est pas accommodable.
La Présidente (Mme Poulet) :
Merci beaucoup. Alors, on va poursuivre les discussions avec le député de
Jean-Lesage pour trois minutes, 18 secondes. Merci.
M. Zanetti : Merci, Mme la
Présidente. Merci, M. Baillargeon. Merci pour votre présence ici. J'ai peu de
temps, mais je vais essayer d'aller à l'essentiel. Évidemment, pour ma
formation politique, la laïcité est extrêmement importante et c'est une valeur
cardinale. J'ai l'impression que sur certaines façons d'appliquer la laïcité,
on ne s'entend pas. C'est sur ces questions-là que je veux vous poser des
questions.
L'interdiction des signes religieux, par
exemple. L'École Bedford, vous avez certainement lu le rapport. Aucune des
recommandations ne concerne les signes religieux, évidemment, et aucune des
actions qui a été faite n'a été faite par quelqu'un qui portait un signe
religieux. Alors, il est quand même assez étonnant que finalement on en soit
rendu à faire une loi qui, par ailleurs, dans laquelle il y a des bonnes
choses, qui peuvent servir effectivement à solutionner les vrais problèmes de
Bedford et par lesquels finalement on conclut : Ah! bien là, c'est… il
faut interdire les signes religieux. Ma question, c'est : Quel est
l'impact qui justifie ça? Parce que, pour faire reculer les droits et libertés
quand même, il faut avoir des méchantes bonnes raisons documentées. Alors, une
employée de la cafétéria d'une école secondaire qui porte le voile, est-ce
qu'elle endoctrine ou est-ce qu'elle a, par le simple fait de porter un voile,
un effet endoctrinant qui porte atteinte à la liberté de conscience des élèves?
M. Baillargeon (Normand) : Je
comprends votre question. Je comprends votre inquiétude. Je tiens à dire, si
vous me permettez, qu'on invoque très facilement les droits dans ce genre de
discussion là et on le fait comme si d'invoquer un droit réglait la question.
Or, ce n'est pas le cas. Je ne suis pas un avocat, puis les avocats autour,
s'il y en a, ils me corrigeront, là, mais je me sens assez sûr de moi pour dire
que c'est typique que des droits soient limités par d'autres droits. C'est
typique que des droits qu'on a soient limités par d'autres droits qu'on a,
alors donc, ce n'est pas quelque chose… Je donne un exemple, je… vous avez
18 ans, vous avez un permis de conduire, vous avez le droit de conduire
une voiture, vous avez 18 ans, vous avez le droit de boire de l'alcool,
mais votre droit de boire de l'alcool limite votre droit de conduire, et les
droits qu'on a sont limités par d'autres droits, sont limitées aussi par les
droits qu'ont d'autres personnes. Et tout ça fait que ce n'est pas aussi simple
que d'invoquer un droit.
Maintenant, pour ce qui est de… Vous avez
posé la question que je comprends tout à fait, là, qu'on ne peut pas invoquer
Bedford ou une simple personne qui porte en… qui fait le service à la
cafétéria, qui porte un... On ne peut pas invoquer tout ça, tout à fait, mais
on peut invoquer d'autres choses aussi. On peut invoquer d'autres exemples dans
les pays étrangers, on peut évoquer d'autres exemples un peu partout, puis on
peut invoquer surtout, à mon humble avis, l'idéal de laïcité qu'on porte. Et
c'est au nom de cet idéal de laïcité qu'on porte, qu'on veut faire les actions
qu'on pose, même s'il n'y avait aucun contre-exemple à donner dans la réalité.
Voilà.
M. Zanetti : Parce que je suis
parfaitement d'accord avec vous que les droits ont tous une limite. La liberté
d'expression en est un exemple, etc. Bon. Dans le cas, par exemple, nous
autres, on pense que le… on ne devrait pas financer avec de l'argent public les
écoles confessionnelles. O.K., c'est une contradiction, vous l'avez souligné,
on est d'accord avec vous là-dessus. Cela dit…
M. Zanetti : ...pour limiter
le droit à une personne de porter un signe religieux, il faut quand même être
capable de démontrer que le port du signe religieux en tant que tel a un effet
qui vient brimer la liberté de quelqu'un d'autre. Sinon, il y a... vous êtes
d'accord, il n'y a pas de justification de limiter la liberté.
M. Baillargeon (Normand) : Je
ne pense pas que l'argument...
La Présidente (Mme Poulet) : Je
m'excuse de vous interrompre.
M. Baillargeon (Normand) : Ah!
excusez.
La Présidente (Mme Poulet) : Vous
n'avez pas... Le temps est écoulé.
M. Baillargeon (Normand) : Je
suis désolé. Je suis vraiment désolé.
La Présidente (Mme Poulet) : Vous
ne pouvez pas répondre à la question du député de Jean-Lesage. Mais je... on va
se tourner vers le député du... on va aller vers le député de Matane-Matapédia
pour une période de trois minutes 18 secondes.
M. Bérubé : Merci, Mme la
Présidente. Bienvenue, M. Baillargeon.
Vous parlez de l'école. On a deux réseaux,
un réseau public puis un réseau privé largement financé par tout le monde.
Alors, pour vous, l'école, je présume que c'est les deux réseaux. Or, il se
trouve, dans ce projet de loi comme dans le projet de loi n° 21, qui est
devenu une loi, qu'on fait une distinction dans l'application de la loi entre
les écoles publiques et les écoles privées. C'est le choix du gouvernement.
Donc, ce n'est pas les mêmes règles pour tout le monde. Est-ce que vous trouvez
que c'est justifié de faire une distinction entre les écoles publiques et les
écoles privées pour l'application d'une loi aussi importante?
M. Baillargeon (Normand) : Je
l'ai dit dans mon petit topo, tantôt, je pense que ça n'a aucun sens. Je pense
qu'on doit appliquer partout cette loi-là. C'est financé par des fonds publics.
Alors, on ne peut pas simultanément dire : Nous invoquons la laïcité, les
principes de la laïcité, l'école est un sanctuaire, na, na, na, tout ce que
j'ai dit. Ça vaut juste pour l'école publique, ça. Puis, quand l'école privée subventionnée
et religieuse est en cause, là ça ne s'applique plus.
Alors, je suis conscient aussi, je tiens à
le dire, hein, que c'est un enjeu complexe, celui-là, hein? Ce n'est pas
simple. Je me mets dans la peau du ministre, là, ce n'est pas simple à régler,
cette question-là.
Si je ne me trompe pas, Guy Rocher, dont
je parlais tout à l'heure, là, M. Guy Rocher disait lui-même que... et on le
voit quand on voit la commission Parent dont j'ai fait l'éloge tantôt, tu sais,
ils sont arrivés dans ce contexte-là, puis ils avaient des choses extrêmement
importantes à imposer, et à demander. Et il y avait ces écoles religieuses, là,
ces écoles qu'on avait, où il se faisait un excellent enseignement sur bien des
plans aussi, là. Là, il s'agit... Ils n'ont pas voulu aller jusque là. Ils
n'ont pas touché à ça. Ils ont fait preuve de modestie puis de prudence. Mais
là on a hérité de ça. On est devant cette situation-là.
Moi, personnellement, si j'étais ministre
de l'Éducation, je n'aurais aucune hésitation de dire que la laïcité doit
s'appliquer partout. Je sais que ça va faire du bruit, et je sais que ça va
faire jaser, mais on ne peut pas, surtout qu'il s'agit de fonds publics, faire
une distinction entre les écoles publiques puis les écoles privées
subventionnées religieuses.
M. Bérubé : On est... On est
d'accord, il va sans dire. Célébrer la vie et l'oeuvre de Guy Rocher, ce serait
aussi d'appliquer les propositions qu'il nous fait. Et il nous fait cette
proposition d'appliquer à tout le monde et d'aller plus loin qu'on ne le fait.
Alors, on le fait souvent, célébrer quelqu'un, mais quand vient le temps
d'écouter ses idées, on est moins là. En tout cas, nous, on est là.
Comment... Comment justifier ça? Bon. Vous
me dites que ça devrait être les mêmes règles au privé puis au public. Est-ce
qu'il existe dans d'autres sociétés des raisons que vous avez déjà vues qui
feraient en sorte qu'on pourrait... tu sais, qu'il y a une justification à ne
pas appliquer la même loi pour tout le monde dans une société?
M. Baillargeon (Normand) : Je
pense que ça va de soi. Je ne connais pas de contre-exemple, hein, je ne
connais pas les systèmes d'éducation partout ailleurs dans le monde. Mais je
pense qu'il n'y a ici aucune raison juridique, légale, morale, éthique de faire
en sorte qu'on distingue entre les deux. Surtout qu'encore une fois je... c'est
des arguments d'un ordre philosophie que je veux faire jouer. Mais il me semble
important. C'est la préparation à la vie civique de l'avenir. C'est la
préparation à la culture commune du Québec. D'une certaine manière, c'est
l'avenir du Québec comme institution, comme lieu civique qui se joue ici.
M. Bérubé : Ça donne
l'impression, selon moi, ça n'engage que moi, que si vous payez, vous êtes
exempté. Et, pour moi, ça ne passe.
M. Baillargeon (Normand) : D'accord.
Si les parents paient, vous voulez dire, hein? C'est ça. Oui. Et moi, là-dessus
aussi, je serais très stricte. C'est-à-dire que, est-ce que des gens peuvent
avoir des écoles religieuses? Sans aucun doute, ils peuvent...
M. Bérubé : ...
M. Baillargeon (Normand) : Payez-les.
Payez-les vous-mêmes. Mais pas seulement payez-le. Vous devez, à la lettre,
respecter le programme de formation de l'école québécoise. Et ce qui se passe
chez vous en enseignement religieux se fait ailleurs. Moi, vous le savez
peut-être, certains d'entre vous...
La Présidente (Mme Poulet) : Je
m'excuse de vous interrompre encore une autre fois.
M. Baillargeon (Normand) : Ah!
c'était ma meilleure partie, en plus!
La Présidente (Mme Poulet) : C'est
tout le temps qu'il nous reste. Alors je vous remercie, M. Baillargeon, pour
votre temps consacré à votre... à l'exposé.
M. Baillargeon (Normand) : Merci
beaucoup.
La Présidente (Mme Poulet) : Alors,
je suspends temporairement les travaux, le temps que le prochain groupe se
prépare.
(Suspension de la séance à 10 h 29)
(Reprise à 10 h 33)
La Présidente (Mme Poulet) :
Alors, on reprend nos travaux. Je souhaite donc la bienvenue à l'organisme Pour
les droits des femmes du Québec. Je vous rappelle que vous avez 10 minutes
pour votre exposé, et par la suite, ça va être une période d'échange. Alors, la
parole est à vous.
Mme Gaucher (Dominique) :
Merci. Bonjour, Mme la Présidente, M. le ministre, Mmes et MM. les députés.
D'abord, nous tenons à vous remercier de cette invitation à la commission
parlementaire sur le projet de loi n° 94. Je m'appelle Dominique Gaucher
et je suis vice-présidente de Pour les droits des femmes du Québec. Je suis
accompagnée de la présidente, Mme Michèle Sirois. Je ferai la présentation
et Mme Sirois répondra aux questions. Notre organisme, Pour les droits des
femmes du Québec, aussi appelé PDF Québec, est un groupe féministe
universaliste mixte dont la mission première est la défense des droits des
femmes et des filles. À ce titre, nous considérons la laïcité comme une
condition indispensable à l'émancipation des femmes et à l'égalité entre les
sexes. C'est pourquoi nous appuyons le projet de loi n° 94 dans son
ensemble parce qu'il est urgent d'agir tout en proposant quelques
améliorations.
La laïcité permet de séparer la religion
de l'État, ce qui n'est pas le cas aux États-Unis avec le président Trump, où
l'influence du fondamentalisme chrétien a pénétré dans les plus hautes sphères
du gouvernement et du système judiciaire, ce qui menace les droits des femmes.
Au Québec, le rapport du ministère de l'Éducation est...
10 h 30 (version non révisée)
Mme Gaucher (Dominique) : ...intitulé
vérifications des mesures prévues à la Loi sur la laïcité de l'État divulgué en
janvier 2025 à la suite d'une enquête dans 17 écoles est éloquent. Le
rapport démontre l'urgence de contrer des gestes et des paroles qui attaquent
directement la dignité des femmes et le droit des enfants de ne pas être soumis
à des pressions religieuses intégristes qui briment leur liberté de conscience.
Ce rapport a révélé des cas de plusieurs jeunes filles ayant le visage couvert.
Le port du voile intégral pourrait même s'accompagner de gants pour être bien
sûr de bien recouvrir les jeunes filles. Pour PDF Québec, il s'agit d'une
atteinte à la dignité des femmes qui augmente la difficulté d'identifier ces
élèves et de communiquer avec elles. PDF Québec s'oppose à la ségrégation
sexuelle, tout comme aux autres formes de ségrégation.
La situation ne concerne pas que le
Québec. Des mises en garde nous sont venues de France ou de Belgique concernant
l'entrisme en Occident de militants fondamentalistes islamiques qui ont pris l'école
pour cible afin de faire avancer leurs objectifs religieux intégristes. C'est
ce qui amène à revendiquer des salles de prières et le droit de porter des
signes religieux ostentatoires comme le hijab, ainsi que des vêtements
typiquement islamistes... islamiques comme l'abaya et le niqab. Les femmes
deviennent ainsi les principaux vecteurs qui rendent visible ce
fondamentalisme.
Plus inquiétant encore, selon deux
auteurs, Rachad Antonius et Ali Belaidi, l'application de la charia est
considérée par la majorité des associations islamiques de Montréal comme un
idéal de société juste à atteindre. La charia, rien de moins. Il y a de quoi
inquiéter les femmes du Québec.
La montée du salafisme amplifie les règles
qui se font plus contraignantes pour les jeunes filles. On comprend alors le
rôle primordial que doit jouer l'école pour les outils et les aider à résister
aux pressions familiales et communautaristes.
Rappelons l'importance du visage
découvert, qui est un instrument de communication indispensable. Les
expressions faciales sont essentielles à la compréhension mutuelle et aux
relations sociales. Dans l'enseignement, décoder les expressions du visage est
un avantage pédagogique de premier ordre. L'article 8 de la loi n° 21
de 2019 oblige déjà les employés et les utilisateurs des services publics à
avoir le visage découvert pour exercer leurs fonctions ou pour recevoir des
services de l'État. L'article 4 du projet de loi n° 94 apporte une
correction à une situation inacceptable en obligeant l'élève à avoir le visage
découvert sur les lieux de l'école et lors de la prestation de tout service
rendu par un centre de services scolaire ou une école privée. Mais PDF Québec
recommande d'ajouter à l'article 4 l'obligation d'avoir le visage
découvert afin de faciliter la communication, motif vital qui a été omis dans l'article 8
de la loi n° 21, lequel ne mentionne que la nécessité d'identifier les
personnes et les besoins d'assurer la sécurité.
Précisions, en ce qui concerne le rapport
sur les 17 écoles qui a montré l'urgence d'adopter et d'appliquer le
projet de loi n° 94, que ce sont des personnes de culture musulmane qui
ont été les premières à contester et à dénoncer les faits inquiétants de la
part de coreligionnaires. Cela souligne l'importance de la vigilance exercée
par le personnel des écoles ou des centres de services scolaire par les parents
ou d'autres citoyens. Nous appuyons donc l'article 12 du projet de loi en
faveur de l'adoption d'un code d'éthique et de mesures protégeant les personnes
qui dénoncent ces faits inquiétants et nous recommandons l'adoption de mesures
conséquentes et dissuasives pour tout non-respect du code d'éthique, de la
laïcité et des droits à l'égalité pour les femmes.
Il y a un second point apporté par le
projet de loi que nous trouvons essentiel, il s'agit de l'interdiction des
signes religieux pour l'ensemble du personnel scolaire. Une professeure ou une
technicienne en service de garde portant le voile se trouve à imposer de
manière constante un symbole religieux dans le champ de vision des enfants.
Déjà, en 1999, un chercheur de la Commission des droits de la personne
rapportait que le crucifix accroché au mur était attentatoire pour une
clientèle vulnérable et captive, ce qui est le cas de l'enfant dans une classe.
Or, l'enfant portait peu d'attention au crucifix, alors que l'éducatrice et la
professeure sont des figures d'autorité et des modèles à imiter et avec qui l'enfant
tisse un lien affectif.
Il faut bien le reconnaître, le hijab n'est
pas un vêtement neutre, l'enfant comprend que le foulard est un symbole, un
symbole sexiste, puisque porté uniquement par des femmes. Il est inévitable que
l'enfant pose des questions sur ce voile. Même si une femme est honnête lorsqu'elle
affirme ne pas chercher à faire du prosélytisme, le seul fait qu'elle porte un
symbole au caractère si ostentatoire suscitera inévitablement des occasions
pour elle de parler de sa religion avec les enfants en plus de normaliser ce
symbole dans leur esprit et leur environnement...
Mme Gaucher (Dominique) :
…avec le projet de loi n° 94, le port de signes religieux ostentatoires
sera interdit pour toutes les personnes qui œuvrent auprès des élèves sur les
lieux de l'école ou dans les centres de services scolaires, et non seulement
pour les personnes à la direction ou les enseignants, comme le prévoit la loi 21.
Il faudrait cependant étendre l'interdiction des signes religieux ostentatoires
aux écoles privées et aux centres professionnels.
Autre point positif du projet de loi,
selon nous, c'est de mettre fin aux accommodements religieux. L'idéologie
multiculturelle prône les accommodements religieux, ce qui contribue à
compartimenter la société en communautés qui vivent en silos les unes à côté
des autres. Les faits montrent que ce choix de société n'est pas la bonne voie
pour favoriser le vivre ensemble ainsi qu'une saine gestion des ressources
pédagogiques. L'article 16 du projet de loi vise à assurer que ces
demandes d'accommodement pour un motif religieux ne compromettent ni les
services éducatifs ni les services de garde et ne sauraient permettre l'octroi
d'un plus grand nombre de congés à certaines personnes et pas à d'autres.
• (10 h 40) •
De plus, nous soutenons l'article huit du
projet de loi qui stipule de ne pas accorder de lieu de prière à l'école, car
cela ghettoïse souvent les personnes qui adhèrent aux courants les plus
fondamentalistes. Toutes ces réformes sont urgentes. Voilà pourquoi PDF Québec
appuie l'article 40 du projet de loi qui prévoit d'utiliser la clause de
dérogation permise par la loi constitutionnelle de 1982. C'est essentiel pour éviter
que des contestations judiciaires prolongées viennent retarder les réformes
urgentes pour protéger la neutralité ainsi que les droits et la dignité des
femmes et des filles.
Pour terminer, PDF Québec aimerait
apporter son appui aux propositions apportées par M. Guy Rocher, à savoir
l'extension de l'interdiction des signes religieux aux élèves mineurs du
primaire et du secondaire, ainsi que des cégeps, et ce, pour les secteurs privé
et public. Pour PDF Québec, le respect de la liberté de conscience des enfants
mineurs devrait être considéré prioritaire par rapport au choix vestimentaire
des employés. PDF Québec demande aussi au ministère de la Famille d'interdire
le port de signes religieux pour les enfants et tout le personnel du réseau des
garderies et des centres de la petite enfance.
L'ensemble des personnes mineures doivent
être protégées des pressions familiales et communautaristes les obligeant à
porter des signes religieux dès leur plus jeune âge. Il s'agit en fait d'un
problème de maltraitance dont l'ensemble de la société doit s'occuper. Enfin,
PDF Québec propose aussi une interdiction des lieux de prière dans les
universités. L'adoption du projet de loi n° 94 constitue une étape très
importante pour poursuivre l'émancipation des femmes vers une réelle égalité
entre les sexes. La laïcité est une condition essentielle pour y arriver et
l'éducation à la laïcité reste un projet primordial à mettre en avant. Je vous
remercie.
La Présidente (Mme Poulet) :
Merci beaucoup. Alors, on va procéder à la période d'échange avec M. le
ministre. La parole est à vous.
M. Drainville : Bien, merci
beaucoup. Merci pour cette présentation. Je vous salue, Mme Gaucher. Je salue
également Mme Sirois. Je l'ai déjà dit, je pense, c'était à Marie-Claude Girard
lorsqu'elle est venue nous voir dans le cadre des travaux de cette commission,
mais je tiens à le redire devant vous, que la pensée de Diane Guilbault
m'accompagne et nous accompagne, je pense. Elle a été une formidable militante
intellectuelle de cette bataille pour la laïcité au Québec et elle a beaucoup,
beaucoup contribué à développer l'argumentaire. Elle a fait preuve d'un immense
courage aussi au fil du temps. Donc, je… Et elle était évidemment votre
présidente, la présidente de PDF pendant de nombreuses années, donc je salue sa
mémoire.
Quelques questions en lien… Je ne sais pas
si… Est-ce que vous avez vu le texte ce matin des trois anciens… trois
anciennes députées? Une ancienne députée du Parti québécois, Mme Harel, une
ancienne députée de Québec solidaire, Mme David, et une ancienne députée du
Parti libéral, Christine St-Pierre. Deux des trois des ex-députés ont également
été ministres. C'est une lettre dans laquelle, dans le fond, elles prennent à
parti le projet de loi que nous étudions. La lettre est intitulée Une
surenchère qui discrimine les femmes. Et il y a un passage qui a attiré mon
attention. Et comme vous êtes un groupe féministe, je voulais vous le soumettre
et vous entendre réagir, Mme Sirois, puisque c'est vous qui allez répondre aux
questions. Alors, je cite un extrait de la lettre : «Ce qui importe dans
les écoles, ce n'est pas le signe religieux que portent des femmes et des
hommes qui…
M. Drainville :
...travaille, mais comment elle et il travaille. Ce qui importe aussi, c'est de
jeter sur tout cela un regard féministe. Et là, donc, je m'adresse à vous. Les
mouvements féministes d'émancipation, partout dans le monde, n'ont jamais prôné
de mesures coercitives à l'endroit des femmes, mesures coercitives que vous
proposez vous-mêmes, les féministes de partout, y compris en Iran, pour ne
nommer que ce seul pays, revendiquent la liberté de choix pour les femmes dans
toutes les sphères de leur vie, y compris leur liberté vestimentaire. Nous nous
réclamons de cette école de pensée. Est-ce que vous êtes d'accord avec cette
affirmation à l'effet qu'il n'y a pas d'école de pensée féministe qui souhaite
des restrictions en matière de port de signes religieux?
Mme Sirois
(Michèle) : Bien, je pense qu'elles ont oublié qu'il y avait
une autre école de pensée avec lesquelles... PDF Québec, c'est pour ça qu'on a
créé PDF Québec avec Diane Guilbault. D'ailleurs, je vous remercie pour les
paroles par rapport à Diane Guilbault. Je vous annonce que d'ici trois
semaines, mi-mai, on va avoir un extrait de sa parole, et vous allez voir la
parole exceptionnelle sur la laïcité qu'elle va avoir. Ça sera sur notre site
Internet. Quant au féminisme, et on parle de discrimination et de liberté, on
en est, la liberté. Le problème, c'est qu'il y a tout un système de coercition
aussi. Et puis ça fait longtemps qu'on a voulu séparer la religion et les
droits des femmes. Plus ils ont évolué, plus on s'est séparé de la religion,
plus les droits des femmes et l'émancipation des femmes ont évolué. Alors, ce
qu'on... Le Québec moderne, on s'est mis, dans les années de la Révolution
tranquille, on s'est détaché. Et les employés ont laissé leurs signes religieux
pour être accueillants à la diversité des croyances, des convictions
spirituelles. Et les droits des femmes ont beaucoup progressé là-dedans.
Alors, quand on parle de coercition, le
problème c'est qu'on laisse les droits, les choix personnels des employés
primer sur le droit à la liberté de conscience des enfants. C'est ne pas se
rendre compte de ce que veut dire un signe religieux. C'est un message envoyé.
Écoutez, la Commission des droits de la personne, en 1999, on y fait référence,
qui dit qu'un crucifix dans une classe, ça ne dit pas un mot. C'est
attentatoire à la liberté de conscience des enfants, mais aussi des parents. Eh
bien, une personne qui est dans une classe et qui porte un signe sexiste sur sa
tête, O.K., eh bien, parce que c'est surtout des femmes, il n'y a pas beaucoup
de personnes avec une kippa qui enseigne, pas beaucoup de personnes avec un
turban sikh qui enseigne et autres signes religieux qu'il pourrait y avoir.
Alors donc, il ne faut pas penser que l'enfant ne s'aperçoit pas qu'il n'y a
que des femmes qui le portent, des enfants intelligents. Alors? Et puis ils se
posent la question : Pourquoi c'est juste des femmes qui le portent? Eh
bien, pour cacher la pudeur, par pudeur, modestie. Ah oui? Pourquoi c'est les
femmes qui ont ce devoir de pudeur et de modestie, et non pas les hommes? C'est
tout ça qui est derrière un signe ostentatoire, tu sais, un voile très marqué.
Et également, quant à l'extrait que vous
venez de me donner, quand on parle, on fait souvent référence à la
discrimination, ce seraient les femmes qui seraient discriminées. Le problème,
ce n'est pas que c'est la loi de la laïcité qui va les discriminer, c'est leur
interprétation rigoriste de leur propre religion qui les discrimine parce que
les hommes de la même religion, eux autres, ils s'intègrent sans qu'on ne voile
jamais rien. Alors donc, qui les discrimine? Ce n'est pas la laïcité ni la loi
de l'État, c'est les diktats religieux. Et il y a plus que ça. Il n'y a même
pas d'obligation de porter un voile sur la tête dans un Coran... dans le Coran.
Alors donc, c'est une interprétation rigoriste.
Mme Gaucher (Dominique) :
Si je peux me permettre d'ajouter, je trouve ça... Je trouve que ça frise la
malhonnêteté d'invoquer le féminisme international pour dire que les femmes
réclament le droit de s'habiller comme elles veulent. En Iran, elles réclament
le droit de ne pas porter le voile au péril de leur vie. Donc, ce n'est pas...
Mme Gaucher (Dominique) : ...pas
le droit de le porter.
M. Drainville : Il y a des
femmes qui ont perdu la vie en Iran parce qu'elles réclamaient le droit de ne
pas le porter.
Mme Gaucher (Dominique) : Oui.
Tout à fait. Exactement.
M. Drainville : Sur le visage
à découvert, le voile intégral, j'ai été surpris par la position de certains
groupes qui jugent même que ça va trop loin, l'interdiction du voile intégral,
donc l'interdiction du niqab, l'interdiction du hijab... de la burqa, dis-je.
Je...
• (10 h 50) •
D'ailleurs, je fais une petite parenthèse,
ici. Vous aurez remarqué que l'interdiction du voile intégral s'applique aussi
bien aux écoles publiques qu'aux écoles privées. Et j'ai bien noté que vous
trouvez que le projet de loi ne va pas assez loin, qu'il devrait s'appliquer
aux écoles privées. Je veux juste rappeler, pour les gens qui nous écoutent,
que la question des écoles privées viendra dans un second temps, là. Déjà, ce
que nous avons déposé pour ce qui est de l'école publique, c'est considérable.
Donc, on va... on va y aller par étapes. Donc, je referme cette parenthèse.
Donc, sur la question du voile intégral,
moi, je trouve ça absolument inconcevable qu'on puisse, d'une manière ou d'une
autre, accepter le voile intégral, la burqa, le niqab dans une école au Québec.
Pour moi, c'est comme... c'est inconcevable. Et je suis surpris qu'il y ait des
personnes qui jugent que, non, non, c'est... c'est correct, de l'interdire, ça
brime les droits individuels. Réaction?
Mme Sirois
(Michèle) :Bien, imaginons, quand on a eu
la COVID, qu'il fallait mettre un masque, la première chose qu'on faisait quand
on pouvait, c'était d'enlever le masque. Et là, on accepterait que des jeunes
filles, que des femmes portent des signes qui sont de maltraitance,
maltraitance physique et psychologique, puis on banalise ça? Comment ces femmes
et ces jeunes filles vont pouvoir s'intégrer dans une société, vont trouver de
l'emploi? Non. Alors, on va accepter? C'est contre les droits.
Moi, je pense que l'article cinq, là, de
la Charte des droits humains de... promulguée en 1948, parle de traitements. On
est contre les traitements dégradants. Ça en est un traitement dégradant. Il
n'y a pas... On n'accepterait pas de masquer, de dire : On va masquer des
personnes parce qu'elles ont une couleur de peau noire. On n'accepterait pas de
masquer, de dire : Il faut masquer des... parce que vous êtes en situation
de handicap ou bien parce que vous êtes vieux, cachez votre visage, et puis
c'est... c'est tout à fait banal de cacher le visage d'un seul sexe.
M. Drainville : De cacher le
visage de la femme parce qu'elle est femme.
Mme Sirois
(Michèle) :Bien, exactement.
M. Drainville : Parce qu'il
faut la faire disparaître de l'espace public. C'est ça l'idée du niqab ou de la
burqa. C'est de faire disparaître la femme du regard d'autrui.
Mme Sirois
(Michèle) :Et contrôler le corps de la
femme, contrôler sa sexualité. Quand elle peut devenir fertile, ah! là là, il
se passe des affaires. Et puis on garde ces femmes-là dans notre communauté, et
on les cache, et on les empêche de s'intégrer. Allez... Moi, j'ai déjà dit à un
professeur d'université qui voulait faire une étude sur... avec des fonds
publics sur le voile intégral. Je lui ai dit : C'est facile, vous n'aurez
pas besoin de le faire, allez au mois de juillet ou au restaurant avec un niqab
et vous allez avoir votre réponse. Il faut l'essayer pour ne pas l'adopter.
Alors donc, le conditionnement, là, qu'il faut pour que des jeunes filles et
des femmes acceptent de s'auto-infliger ce traitement-là, qui est un traitement
infériorisant, contrôlant... Le contrôle coercitif, on a pris une position
collective et au fédéral et au Québec. Est-ce qu'on ne va pas voir et ouvrir
les yeux sur le contrôle coercitif qui existe dans certaines familles où il y a
une compréhension radicale, intégriste de leur religion? Et heureusement, ce
n'est pas le cas de la grande majorité, très grande majorité des personnes de
foi ou de culture musulmane.
M. Drainville : Mme la
Présidente, mon collègue le député de Côte-du-Sud souhaiterait intervenir.
La Présidente (Mme Poulet) : À
vous la parole.
M. Rivest : Merci. Merci pour
votre présence ici aujourd'hui.
Vous avez déjà, dans... lors de l'étude du
projet de loi n° 21...
M. Rivest : ...j'ai de
nombreux témoignages sur votre site, là, je parle particulièrement des uns des
éléments vidéo de plusieurs personnes qui sont venues témoigner, et vous étiez
déjà, je vais dire à l'avant-garde dans cette réflexion-là et dans ce
partage-là où il y a un lien vibrant — moi, ça m'a touché beaucoup — entre
la laïcité et la démocratie. Plusieurs de ces témoignages-là rapportent ces
éléments-là. Je peux vous citer quelques éléments, là, qui étaient partagés par
certaines personnes : «La laïcité, c'est le pilier central de toute
démocratie émancipée. D'autres partagent : «Pour le vivre-ensemble en
harmonie, pour l'égalité des citoyens devant la loi sans discrimination de
race, d'origine, de sexe ou de religion, pour le respect de toutes les
croyances.».
Pouvez-vous nous faire un petit résumé de
ces témoignages-là qui dressent ce lien-là entre la laïcité et la démocratie?
Mme Sirois
(Michèle) :Ça dit, ces témoignages, peu
importe son origine — est-ce que ça fonctionne? Oui. O.K. — peu
importe son origine, il y a... on s'entend sur une volonté d'universalisme et
non pas de particularisme qui nous mène dans des ghettos chacun notre bord.
Mais au contraire, si on veut faire société, il faut partager un tronc commun,
ce qu'on a appelé, ce que Mme Françoise David a beaucoup réclamé, un bien
commun. Ça en est un bien commun, ça. La laïcité fait partie de l'histoire du
Québec, c'est ça qu'on nous dit et que ça permet de faire société, d'être
ensemble au lieu de chacun de notre bord. Et ce qui est étonnant, c'est qu'une
certaine gauche, comme a mentionné tout à fait... tout à l'heure, M. Normand
Baillargeon, une certaine gauche a dévié de ça, est allée dans des
particularismes au lieu de garder un maintien ensemble. Mais aussi ça évite de
dérouler le tapis en dessous des pieds de la droite et de l'extrême droite,
parce que, quand on ne respecte pas les conditions du bien commun pour vivre
ensemble, on s'en va dans une polarisation dans laquelle nous sommes tous et
toutes perdants. Alors donc, si on ne veut pas arriver à la même chose qu'aux
États-Unis, il faut arriver à maintenir ces normes communes présentes en ce
moment.
M. Rivest : Nous sommes nombreux
ici, à la commission, d'avoir cette idée-là du bien collectif. En même temps,
on voit bien par la rencontre de chacun des intervenants, comment c'est
polarisant.
Mme Sirois
(Michèle) :Oui.
M. Rivest : On s'entend, il y
a de l'audace dans le travail de notre collègue M. le ministre, mais il y a...
il y a également cette idée-là de nuances qui sont apportées par... Vous aller
loin dans vos propositions, si vous aviez, là, quelques minutes pour nous
parler des arguments que vous pourriez avoir pour dire comment qu'on peut
s'assurer qu'on... que ce bien collectif là soit le plus possible partagé par
le plus grand nombre de personnes. Quels seraient ces arguments-là que vous
pourriez apporter?
Mme Sirois
(Michèle) :Il ne faut pas faire...
épargner sur l'éducation à la laïcité. C'est un concept qu'il y a 20 ans,
les gens ne connaissaient même pas. Alors là, on commence à le connaître.
Qu'est-ce que ça veut dire? Ça ne veut pas dire ségrégation, ça ne veut pas
dire discrimination non plus. Ça veut dire qu'on accepte. Quand on vit, il y a
l'espace privé, la maison, la famille. Hein, quelqu'un a posé la question,
l'espace civique? L'espace privé, la famille, donc nos amis, les voisins.
L'espace public, quand on s'en va dans la rue, l'espace commercial, on s'en va
au Centre Bell pour faire une partie de hockey. Et il y a un espace qui est
celui qui va nous rassembler, qui est l'espace civique, l'espace des
institutions publiques. Et c'est là que c'est si important. Même qu'il y a
des... du personnel à la cafétéria, il faut que tout le personnel scolaire soit
ensemble pour démontrer qu'ici, à l'école, il n'y a pas de distinction, et
c'est pour ça que c'est si important que les élèves, on ne permette pas les
signes religieux parce que, prenez dans une cour d'école, on sait qui sont les
petites filles musulmanes à qui on... avec contrôle coercitif à huit, neuf ans,
porter le voile.
La Présidente (Mme Poulet) : Merci.
Alors, c'est tout le temps qu'on a pour la banquette gouvernementale. On va poursuivre
les discussions avec la députée de Bourassa-Sauvé.
Mme Cadet : Merci, Mme la
Présidente. Bonjour, Mme Sirois. Bonjour, Mme Gaucher. Je suis obligée de
commencer en vous questionnant parce que vous avez employé le terme
«maltraitance» trois fois... trois fois, puis je vous avouerais que je...
Mme Cadet : …surprise du… de
l'emploi du terme. Quand on va voir, donc, dans le Robert, donc on parle en
termes de définition, donc, de traiter quelqu'un, donc, ici un enfant avec
brutalité, lui infliger des mauvais traitements, enfant maltraité, donc, serait
un enfant qui subit des sévices. Donc vous… comme je l'ai dit, vous l'avez
employé trois fois, donc ce n'est pas par hasard que vous l'avez lancé. Donc,
j'aimerais vous entendre un peu plus là-dessus. Ce que ça… J'aimerais vous
entendre un peu plus sur ce que vous voulez dire par là.
• (11 heures) •
Mme Sirois
(Michèle) : Merci de votre question. La maltraitance, on
apprend quand il y a la petite fille, là, de Granby, là, qui est morte. On
pense que ça… c'est associé à ça. Mais ce mot associé aux petites filles qui
portent… à qui on impose de porter un voile, puis pas juste un voile, c'est
souvent des vêtements contraignants où elles ne peuvent pas courir facilement
dans la cour d'école, O.K., c'est un petit kit, on pourrait dire, O.K. Eh bien
la première fois que j'ai entendu le mot maltraitance, moi aussi, j'ai été
surprise. C'est un ancien mufti, un mufti… toujours mufti, mais d'une ancienne…
il avait laissé son emploi justement d'une mosquée à Marseille parce qu'il
s'était aperçu qu'il y avait une pénétration d'un courant intégriste qui était
trop forte, qui ne correspondait pas du tout à la… à ce qu'il croyait de ce
qu'était vraiment l'islam. Et ces personnes-là, qui sont des spécialistes de la
religion, qui ont dit devant moi la première fois maltraitance, ça m'a surpris,
moi aussi, ça fait que je comprends que vous puissiez être surpris.
Mais quand on lit… si vous voyez dans
notre mémoire, il y a une référence à une lettre. Moi, ça a été la première
fois, écrite en 2015 par une spécialiste de l'éducation préscolaire, Danielle
Jasmin, et qui écrit à la presse et qui parle d'une petite fille qui est isolée
des autres. Les autres jouent ensemble. Elle, elle est toute seule. Elle a un
costume, c'est la même chose. Aller à la piscine, aller courir dans la cour
d'école, ce n'est pas possible de la façon… Parce que le simple voile, c'est
aussi des vêtements contraignants et c'est ça que nous dit des spécialistes
comme Ali … et puis Rachad Antonius, c'est que c'est un marqueur, ces
vêtements-là qui vont avec la montée du salafisme. Et c'est à des jeunes de
sept, huit ans, et même plus tôt. Quelqu'un me témoignait qu'une enfant dans
les bras de sa maman qui n'avait pas un an, O.K., qui portait déjà un hidjab
parce que les radicaux intégristes, eh bien, ils disent aux parents : Si
vous voulez qu'à la puberté elle l'accepte le voile, il faut que vous
commenciez très, très jeune.
Alors, c'est tout ça, c'est beaucoup,
comme disait Normand Baillargeon, j'ai aimé son expression, la cécité, on ne
connaît pas. Moi, j'ai enseigné les religions et les mythologies pendant de
nombreuses années. Je suis anthropologue, j'ai enseigné la sociologie des
religions. Et quand on les étudie, c'est éclairant de voir que cette
conception-là varie. On le voit avec les photos de l'université du Caire, les
jeunes filles dans les années 1960, 1950, ils y étaient photographiés, il
n'y en avait pas, de voile. Et puis, à mesure que l'islamisme pénétrait, eh
bien, on arrive dans les années… début des années 80, elles en portent
presque toutes. Donc, il y a un mouvement. Ce n'est pas un choix individuel, il
y a un mouvement collectif et c'est ça qui est révélé dans les 17 écoles
puis l'école Bedford, de ce mouvement. Et puis moi, je remercie le ministère et
le ministre d'avoir été clairvoyant, mais surtout d'avoir… beaucoup de gens
voient, mais ils ont peur, ont peut d'être accusés avec des amalgames
d'islamophobie, de toutes sortes d'amalgames. Il faut être courageux, dire la
vérité. Et, à PDF Québec, on pratique un féminisme qui dérange. C'est ça qu'on
a écrit. Et puis on a l'intention de continuer de déranger parce que ce qu'on
veut, nous, c'est que les droits des femmes, le droit à leur santé physique,
psychologique, l'intégration sociale, on veut continuer la marche des femmes
vers l'émancipation.
Mme Cadet : Merci. Vous parlez
d'intégration. Vous venez de mentionner l'intégration sociale, puis dans votre
exemple, donc, que vous parliez, d'isolement. C'est sûr que… évidemment, je
vous… je n'ai pas votre expertise, vous l'avez nommé, mais sur le terrain, à
l'inverse, je l'ai mentionné lors des dernières consultations il y a une
semaine et demie, ce que je constate parfois, donc, j'en vois des jeunes filles
qui en portent, donc, des signes religieux, sont membres du club de robotique,
elles sont championnes de karaté. Elles font de l'impro, elles...
11 h (version non révisée)
Mme Cadet : ...s'implique dans
les comités écologiques, par exemple... écologistes, par exemple, dans leur
milieu scolaire. Donc, je me demande comment est-ce que vous réconciliez ce qui
me semble être une réalité, ce que je constate sur le terrain, et l'aspect
conceptuel que vous, vous apportez aujourd'hui quant à cet isolement-là?
Mme Sirois
(Michèle) :Ce n'est pas juste une
conception intellectuelle. Quand il y a eu, en France, tout le débat, puis il y
a eu une commission d'enquête où il y a... beaucoup de jeunes filles sont
venues témoigner, puis qu'on avait, dans le... on voulait enlever les...
interdire les signes religieux pour les élèves à l'école, ce qui a été fait en
2004 en France, eh bien, il y a... beaucoup de jeunes filles sont venues dire :
Ça va nous permettre, nous aussi, d'aller voir... de retirer nos signes sans
avoir des mesures de rétorsion.
Moi, des professeurs m'ont témoigné par
écrit, une au secondaire, l'autre était au primaire, qu'il y avait un petit
cousin qui était dans une école, puis sa petite cousine enlevait le signe quand
elle était rendue... son foulard quand elle était rendue dans la cour d'école
pour se mêler aux autres, O.K. Eh bien, il la dénonçait à sa famille, en
retour. Il lui faisait du chantage. C'est ça, le contrôle coercitif. Et elle m'a
même dit, vous allez trouver ça peut-être crû, là, qu'il a commencé par
demander en échange, pour se taire, le lunch de la petite fille, et ça a fini
avec des fellations. Je peux vous dire, ça fait peut-être cru, dire ça, c'est
ça, la réalité. Mais, ça, il n'y a personne ici... tant qu'on ne voit pas des
témoignages, on ne sait pas tout le contrôle coercitif et ce que ça veut dire
derrière. Ce n'est pas juste une différence de vêtements comme un peu
folkloriques. Bien, il faut se plonger sur la réalité pour voir ce que c'est.
Mme Cadet : Ensuite, vous
avez évoqué le témoignage de M. Baillargeon, que nous venons d'entendre. Et,
dans ce témoignage-là, donc, dans cette allocution-là, M. Baillargeon, donc,
du... il donnait l'exemple de ne pas accepter des théorèmes que l'on ne
comprend pas sans les questionner. Ce avec quoi je pense que l'ensemble des
parlementaires ici sont en accord, là, de dire que l'école doit justement être
cet espace qui permet l'accès au savoir et qui permet d'avoir des désaccords.
Maintenant, donc, je vous ramène, donc, à
l'article 32 du projet de loi n° 94, qui étend le port... l'interdiction
du port de signes religieux, qui est déjà prévue à la Loi sur la laïcité de l'État,
à tout membre du personnel. On parlait de la Mme de la cafétéria, on parlait
donc des éducatrices en service de garde, des aides à la classe, etc., donc
tout le personnel de soutien qui est en contact avec les jeunes. Et je me
demande comment est-ce qu'on... sachant que l'espace civique dans lequel ces
enfants-là opèrent fait en sorte que ce sont déjà des réalités avec lesquelles
ils font face dans leur vie quotidienne à l'extérieur de l'école, comment
est-ce que ça va leur permettre... si on enlève l'ensemble du port des signes
religieux, comment est-ce que ça va leur permettre de se... d'eux-mêmes
développer leurs opinions, développer leur esprit critique par rapport au
phénomène que vous-même vous avez évoqué, alors qu'ici, bien évidemment, on ne
parle pas, donc, de personnes qui sont en situation d'autorité?
Mme Sirois
(Michèle) :Moi, je pense que les enfants
vivent un certain nombre d'heures à l'école, mais ils vivent des choses à l'extérieur,
et que la formation... Guy Rocher disait ça justement il n'y a même pas un
mois, que c'est... il faut... apprendre, la meilleure formation, c'est de la
vivre, la laïcité. C'est la meilleure formation qu'on peut vivre.
Regardez pour le cannabis. Le ministre,
quand ils ont légalisé ça au Québec, il faut 21 ans pour pouvoir aller
acheter du cannabis. Pourquoi? Parce qu'on considère que le développement
cérébral se fait jusqu'à l'âge de 25 ans. C'est pour ça que, nous, on est
pour aussi l'interdiction au cégep, parce que la moitié de la population, au
cégep, ce sont des mineurs. Alors, s'ils n'ont pas le droit d'aller acheter du
cannabis, ils auraient le droit des signes religieux? On a vu l'aveuglement
dans un cégep de Montréal. Il y avait un groupe de jeunes qui sont allés faire
le djihad en Syrie. O.K. Comment ça se fait que ça circulait dans un cégep?
Mme Cadet : Mais en quoi le
port de l'interdiction... le port des signes religieux, donc... Je ne vois pas
le lien avec l'exemple que vous venez de donner. Pardon.
Mme Sirois
(Michèle) :Bien, ce que je veux dire, c'est
qu'il se passe des choses et dans les écoles secondaires et dans les cégeps.
La Présidente (Mme Poulet) : Je
m'excuse de vous interrompre. On va poursuivre... On va poursuivre les
discussions avec le député de Jean-Lesage.
M. Zanetti : Oui, merci, Mme
la Présidente. Excusez-moi. Je vais mettre mon chronomètre, trois minutes. C'est
ça, hein? Merci...
M. Zanetti : ...merci d'être
parmi nous. C'est toujours un plaisir d'échanger avec vous, même si on a des
points de vue très différents sur certaines choses. Je... Vous dites, à un
moment donné dans votre présentation, que par rapport aux employés, par
exemple, des écoles, les femmes employées d'une école qui portent un hijab,
essentiellement, vous dites : Ce n'est pas une loi qui leur interdirait le
hidjab qui les discriminerait, ce qui les discrimine, c'est leur interprétation
que vous jugez rigoriste de leur religion. Si on résume ça, là, c'est un peu
comme dire : Il faut protéger, émanciper et libérer ces femmes-là
d'elles-mêmes. Et j'ai de la misère à ne pas voir là-dedans une vision très
paternaliste. Comment est-ce que vous voyez cette espèce de contradiction-là?
• (11 h 10) •
Mme Sirois
(Michèle) :J'aime le mot «paternaliste»
que vous employez parce que ça fait référence justement à la domination
patriarcale. Dans toutes les cultures, les femmes sont infériorisées par toutes
sortes de moyens. Et elles portent... elles-mêmes, les femmes, c'est souvent
celles qui transmettaient ce patriarcat. Parce qu'on les a élevées aussi à
penser qu'elles étaient inférieures ou que c'est elles qui avaient... qui
devaient protéger les hommes de leur désir sexuel en portant un foulard ou
autre vêtement. O.K. Eh bien, une jeune femme ne doit pas rire trop fort, il y
a toutes sortes de codes qu'on a appris. Et l'émancipation des femmes commence,
pour nous, beaucoup, maintenant, à l'école, c'est-à-dire le niveau politique
aussi, le vivre-ensemble. Parce que la discrimination, c'est ça qui devient...
Quand on est dans un espace où il y a beaucoup de gens, c'est étrange qu'on
reconnaisse quelqu'un qui pratique la religion musulmane et puis on ne
reconnaît pas un homme qui pratique la religion musulmane.
Alors, c'est cette autostigmatisation avec
laquelle peut-être qu'elles n'ont pas réfléchi. C'est un cheminement dans la
vie. Et c'est pour ça que c'est si important qu'à l'école il y aille une
formation critique, puis critique par rapport à soi-même, critique par rapport
à l'éducation et aux normes ambiantes, est-ce que c'est des normes qui me
conviennent vraiment, c'est à ça que je pense, pour protéger des choix libres,
des choix libres pour les femmes. Tout choix de femme n'est pas féministe. Tout
choix de femme n'est pas féministe, les choix féministes, des choix qui
permettent l'émancipation des femmes.
M. Zanetti : Il me reste 15
secondes. Ne pensez-vous pas... Moi, ce que je comprends du féminisme, c'est de
dire : Les femmes doivent faire leurs propres choix. Puis sur la formation
à l'autocritique dont vous parlez, je ne peux pas être plus d'accord, mais
est-ce que ce n'est pas manquer de confiance en la possibilité d'avoir une
formation critique philosophique qui remet en question les normes de la
société? Est-ce que ce n'est pas manquer de confiance en soi que de dire :
Ça ne suffira pas, il faut interdire les signes religieux?
La Présidente (Mme Poulet) : Alors,
c'est tout le temps que nous avons. On va céder la parole maintenant au député
de Matane-Matapédia.
M. Bérubé : Merci, Mme la
Présidente. Bienvenue et merci pour votre présentation. On partage beaucoup de
propositions en commun, notamment une qui ne fait pas partie des discussions de
cette commission qui est sur l'assujettissement des collèges à la laïcité. On a
des raisons sérieuses de croire que ce devrait être le cas. Il y a des lieux de
prière, il y a des lieux d'endoctrinement. Ça existe dans plusieurs cégeps au
Québec. Il faudra faire une enquête là-dessus. On est d'accord là-dessus. En
page 15 de votre mémoire, vous parlez de l'importance de protéger les écoles,
les femmes et les enfants mineurs, mais à travers un code d'éthique que vous
évoquez, des gens qui dénoncent les situations, appelons-les, les lanceurs
d'alerte et aussi des sanctions pour les personnes qui dérogeraient au code
d'éthique.
Ce que ça me fait penser, par exemple, des
enseignants, sans même parler de leur habillement, qui feraient preuve de
prosélytisme religieux à travers leurs paroles, à travers des contraintes
qu'ils imposeraient, par exemple, aux jeunes filles, quels sont... qu'est-ce
que vous proposez... Quelle est votre réflexion quant aux sanctions qui
devraient être appliquées? Parce que, présentement, ça fait partie des suites à
donner à Bedford.
Mme Sirois (Michèle) :Quant aux sanctions, je ne me suis pas encore penchée, mais
on veut des sanctions, on veut des mesures dissuasives. Mais la première chose,
c'est, comme on dit au Québec, pas prendre du cash, tout ce qui est dit. Une
école dans le quartier nord de Montréal, O.K., depuis qu'il y a interdiction
des lieux de prière, qu'il était dit : On en a besoin, c'est pratiquement
un dicton religieux, une injonction divine, bien...
Mme Sirois
(Michèle) : …remarquez qu'ils sortent de l'école. Juste en
face, il y a un terre-plein, c'est une rue avec un terre-plein. Ils installent
leur… que des garçons, ils installent leur tapis de prière à côté où est la
rue, puis le trottoir, puis face à l'école. Mais j'ai remarqué quelque chose,
ils ne sont jamais là quand il fait mauvais, quand il fait froid, quand il
pleut. Leur injonction divine n'est pas là. Et c'est là la question, première
chose à réaliser, c'est que tout ce qui est demandé… Il y a beaucoup de
visibilité à l'islam politique. Bien oui, quelqu'un qui croit vraiment que
c'est une injonction divine, pleut, pleut pas, allez, on s'en va prier dehors,
la neige ne nous fait pas peur, on écoute notre Dieu. Bien, quand on choisit
notre moment, puis il faut que ce soit agréable, c'est que la foi n'est pas
très profonde. Donc, c'est la première chose. C'est distinguer pour des
mesures, O.K., puis un code d'éthique, il ne faut pas entrer dans des mesures
d'endoctrinement et de mauvaise interprétation.
M.
Bérubé
: Le
gouvernement, à travers le projet de loi, fait une distinction entre
l'application au public puis au privé. C'est différencié. Ce n'est pas
exactement la même chose. Qu'est-ce que vous pensez de ça?
Mme Sirois
(Michèle) : Bien, moi, je pense que oui, un enfant mineur, on
ne va pas regarder… bien, il est mineur, oui, mais au privé, ce n'est pas
grave, mais au public ça peut devenir grave. Non, je comprends la… actuellement
la croute à manger pour le ministère de l'Éducation est assez grosse. Je
comprends ça, mais il reste que… il nous reste à montrer qu'il ne faut pas
faire de discrimination entre les enfants.
M.
Bérubé
: Mais
vous savez, ce n'est pas si compliqué, on est déjà dans le projet de loi.
La Présidente (Mme Poulet) :
C'est tout le temps que nous avons. Alors, on va…
M.
Bérubé
:
Nous, on le fera.
La Présidente (Mme Poulet) :
Je vous remercie, mesdames, je vais... Merci, M. le député. Alors, merci,
Mesdames, de votre contribution à nos travaux.
On va suspendre quelques instants pour
permettre au prochain groupe de se préparer.
(Suspension de la séance à 11 h 16)
(Reprise à 11 h 22)
La Présidente (Mme Poulet) : ...je
souhaite la bienvenue à la Ligue des droits et libertés. Je vous rappelle que
vous disposez de 10 minutes pour votre exposé. Par la suite, on va procéder à
la période d'échange. Alors, la parole est à vous.
Mme Lamoureux (Diane) : Bonjour,
Mme la Présidente, mesdames et messieurs de la Commission de la culture et de
l'éducation. Nous vous remercions de l'invitation à commenter le projet de loi
no 94. La Ligue des droits et libertés est un organisme à but non lucratif,
indépendant et non partisan qui vise à faire connaître, à défendre et à
promouvoir l'universalité, l'indivisibilité et l'interdépendance des droits.
C'est ce qui fonde notre critique du projet de loi no 94 et fait que nous en
demandons le retrait.
Soulignons d'emblée que nous sommes tout à
fait d'accord avec la laïcité de l'État et avec l'égalité entre les femmes et
les hommes. Nous différons cependant sur les moyens d'y parvenir, puisque la
ligue est persuadée que tout cela peut se faire dans le respect des droits
humains de toutes et tous.
En ce qui concerne la laïcité de l'État,
notre organisation a joué un rôle actif dans le processus de laïcisation au
Québec, comme nous le mentionnons dans le mémoire. Pour nous, la laïcité, qui
n'est pas une valeur mais un mode pragmatique de gestion du pluralisme
religieux, repose sur deux principes de base : la neutralité de l'État à
l'égard des religions et la séparation des institutions religieuses et
politiques. Ces principes visent à garantir la liberté de conscience, de
religion, d'expression et d'association, le droit à l'égalité, la protection
tant des personnes croyantes que non croyantes et le principe d'universalité,
bref, les droits humains.
En imposant une sécularisation forcée aux
individus et en excluant des personnes du système d'éducation publique en
raison de l'expression de leurs appartenances culturelles et religieuses, le projet
de loi no 94 propose un modèle de gestion du pluralisme de type
assimilationniste et profondément attentatoire aux droits humains. Cette
dissociation entre laïcité et droits humains est hautement problématique et
risque d'encourager et de renforcer une islamophobie présente dans la société
québécoise.
En ce qui concerne l'égalité entre les
femmes et les hommes, nous ne pensons pas que nous nous rapprochons de celle-ci
en stigmatisant un groupe de femmes, les femmes musulmanes qui portent le
hijab, et en leur fermant de facto les portes d'un milieu de travail, le milieu
de l'éducation publique, on en leur refusant de progresser dans leur...
Mme Lamoureux (Diane) : ...certaines
femmes qui n'ont pu devenir enseignantes, suite à l'adoption de la loi sur la
laïcité de l'État, ont oeuvré dans les services de garde. En étendant
l'interdiction du port de signes religieux à ce groupe, ce sont de nouveaux
secteurs d'emploi que l'on interdit à ces femmes. Est-ce le meilleur moyen pour
parvenir à l'égalité entre les femmes et les hommes dans la société québécoise?
En tout cas, ce n'est pas l'avis de plusieurs groupes féministes comme la
Fédération des femmes du Québec... des centres de femmes et les tables
régionales de groupes de femmes. Plusieurs études ont montré l'importance pour
l'autonomie des femmes de pouvoir exercer un emploi rémunéré. Par ailleurs, le
fait de demeurer en emploi est fortement corrélé à celui de ne pas être
soumises à du harcèlement et à des violences en milieu de travail. C'est tout le
contraire que fait le projet de loi n° 94 en étendant de nouvelles... à de
nouvelles catégories d'emplois les effets néfastes déjà mesurés de la Loi sur
la laïcité de l'État.
Les enseignantes musulmanes bénéficiant du
droit acquis dans le contexte de la Loi sur laïcité de l'État font face à un
environnement professionnel chargé de tensions implicites et doivent naviguer
dans des espaces marqués par la suspicion, les stéréotypes et les
microagressions ordinaires. Les gestes et attitudes discriminatoires ne se
manifestent pas toujours ouvertement, mais leur cumul érode le sentiment
d'appartenance professionnelle des intéressés, tout le contraire, donc, d'un
milieu de travail exempt de violence et de harcèlement. Les propositions qui
nous sont présentées dans le projet de loi sont basées sur une vérification
interne du ministère de l'Éducation suite au scandale public soulevé dans les
médias concernant l'école Bedford et d'autres écoles en région montréalaise.
Cette vérification était loin d'être exhaustive et les modifications proposées
par le projet de loi sont loin de correspondre à des... à des problèmes avérés,
entre autres, l'assimilation qui est faite entre prosélytisme et port de signes
religieux. Merci.
M. Rainville (Paul-Étienne) : Mme
la Présidente, on a examiné en fait chacun des articles du projet de loi n° 94
et force est d'admettre que la majorité d'entre eux porte atteinte ou menace un
ou plusieurs droits qui sont inscrits dans les chartes, inscrits aussi dans le
Droit international des droits humains auxquels l'État québécois est lié. Avant
de discuter de ces... de quelques-unes de ces atteintes, j'aimerais souligner
que le projet de loi n° 94, il s'inscrit dans une logique dans d'autres projets
de loi aussi, notamment le projet de loi n° 84 sur l'intégration nationale,
qu'on est venu critiquer ici il y a environ deux mois, en faisant, cette
fois-ci, du système d'éducation, finalement, un instrument d'assimilation et un
instrument d'imposition des soi-disant valeurs québécoises.
Et donc plusieurs de nos critiques sur le
p.l. 84 concernent aussi le p.l. 94, premièrement, sa logique punitive plutôt
qu'inclusive et interculturelle, sa volonté d'imposer des valeurs en violation
complète des droits fondamentaux et en particulier de la liberté de conscience.
Oui... Excusez.
La Présidente (Mme Poulet) :
Veuillez poursuivre, s'il vous plaît.
M. Rainville (Paul-Étienne) :
Oui, oui, parfait. Le fait qu'il participe également à un discours sur la peur
de l'autre et la de la xénophobie. C'est tout ça qui participe. C'est
normal...On pourrait garder pour la période de questions.
Une voix : ....
La Présidente (Mme Poulet) : Bien,M. le ministre, on va juste leur laisser le temps de finir leur exposé,
puis après...
Une voix : ...
M. Rainville (Paul-Étienne) : Xénophobie...
La Présidente (Mme Poulet) : Xénophobie.
M. Rainville (Paul-Étienne) :
...oui, peur de l'autre.
La Présidente (Mme Poulet) :
Alors, poursuivez s'il vous plaît.
M. Rainville (Paul-Étienne) : C'est
tout ça, un projet de loi qui est discriminatoire dans le sens où, même s'il
s'applique à toutes les religions, il va avoir des impacts majeurs sur un
groupe cible et en particulier les femmes qui portent le hidjab et qui portent
aussi le système d'éducation publique. J'ajouterais que cette
discrimination-là, elle n'est pas indirecte, elle est... C'est une
discrimination qu'on dit ouverte et déclarée, qui est non seulement contraire
aux chartes, mais qui est aussi contraire à l'esprit de justice et de solidarité
qui devrait guider les relations entre les citoyens. Je souligne que cette
discrimination à l'embauche aussi a des répercussions sur plusieurs autres
droits pour ces femmes, le droit à l'égalité, le droit à la sécurité, le droit
à un revenu, etc.
Et on souhaite insister aussi sur le fait
que le p.l. 95 fragilise de différentes manières le droit à l'éducation.
Premièrement, les barrières discriminatoires à l'emploi vont accentuer la
pénurie de personnel qualifié, qui est déjà criante dans le réseau d'éducation.
Dans un contexte où les ratios atteignent des niveaux critiques, le projet de
loi va priver de nombreux enfants d'un encadrement éducatif de qualité,
personnalisé et respectueux de leurs besoins. Et d'ailleurs, il y a plusieurs
intervenants, intervenantes, notamment les syndicats, qui craignent qu'on passe
finalement d'un service de garde éducatif à un simple service de surveillance
des enfants, avec ce que ça implique comme bris au niveau du droit à
l'éducation. Et, en adoptant une loi qui est discriminatoire, le gouvernement
nuit aussi à l'établissement d'un système d'éducation pluraliste, respectueux
des diversités...
M. Rainville (Paul-Étienne) : ...et
on pense que les élèves du Québec doivent être exposés à différentes formes de
diversité, y compris culturelle et religieuse. Et d'ailleurs l'UNESCO rappelle
depuis longtemps que le dialogue interculturel, l'éducation à la tolérance font
partie des conditions primaires pour le droit à l'éducation.
Et un dernier mot sur l'article 36, qui
impose l'usage unique du français dans les écoles. À notre avis, ça va
constituer un obstacle supplémentaire au droit à l'éducation, alors que
plusieurs études montrent que l'usage des langues maternelles à des fins
pédagogiques, c'est un outil important pour l'apprentissage du français, pour
la socialisation des enfants et pour leur intégration en milieu scolaire et,
ultimement dans la société québécoise.
Mme Lamoureux (Diane) : En
dernier lieu, nous dénonçons la façon cavalière dont le gouvernement actuel
utilise de manière abusive et répétée les clauses dérogatoires prévues aux
chartes canadienne et québécoise. Des projets de loi proposés ou des lois
adoptées en recourant aux clauses dérogatoires, cela constitue un aveu
implicite qu'ils contreviennent aux chartes, alors que le rôle du gouvernement
devrait plutôt être de mettre en œuvre la charte québécoise et de prêcher par
l'exemple en ce qui concerne son respect.
• (11 h 30) •
Le recours de plus en plus systématique
aux clauses dérogatoires contrevient également aux obligations de l'État
québécois en vertu du droit international des droits humains. Celui-ci est très
exigeant quant aux critères qui peuvent justifier de déroger aux droits et
libertés et extrêmement clair à l'effet que de telles pratiques doivent
demeurer temporaires et exceptionnelles.
L'attitude du gouvernement nous inquiète
pour l'avenir de la Charte des droits humains et pour l'ensemble de la
population du Québec, puisque la Charte des droits et libertés, dont nous
célébrons cette année le 50ᵉ anniversaire, est un des piliers de notre
démocratie. Merci.
La Présidente (Mme Poulet) : Merci
beaucoup pour votre exposé. Alors, on va procéder à la période d'échange avec
le ministre. La parole est à vous.
M. Drainville : Oui. Merci
pour votre participation à nos travaux. Vous demandez le retrait du projet de
loi no 94, parce que, dites-vous, il est contraire à une laïcité ouverte et
inclusive et qu'il est, je cite, là, votre communiqué, il est attentatoire aux
droits et libertés protégés par les chartes. Fin de citation.
Alors, le projet de loi, comme vous le
savez, comprend plusieurs dimensions. Je vais en aborder quelques-unes avec
vous. Est-ce que, selon vous, interdire le voile intégral est une atteinte aux
droits individuels? Interdire la burqa, interdire le niqab à l'école, est-ce
que c'est une atteinte aux droits individuels? C'est ce que prévoit le projet
de loi.
Mme Lamoureux (Diane) : Selon
nous, il n'est pas du ressort de l'État de prescrire la façon dont les gens se
vêtent.
M. Drainville : O.K., donc...
Mme Lamoureux (Diane) : Et,
par ailleurs, il n'y a pas d'enseignante qui portent le voile intégral.
M. Drainville : Mais le
rapport sur les 17 écoles donne l'exemple d'étudiantes qui portent le voile
intégral ou qui s'en fabriquent un. Est-ce que vous jugez qu'en interdisant le
port du voile intégral à ces élèves on porte atteinte à leurs droits
individuels?
Mme Lamoureux (Diane) : On
porte atteinte à leur droit à l'éducation si on les expulse du système
d'enseignement public.
M. Drainville : Donc, la
réponse, c'est oui, on porte atteinte à leurs droits individuels?
Mme Lamoureux (Diane) : On
porte atteinte à leur droit à l'éducation. Je pense que c'est un droit qui est
reconnu dans la charte... dans la Loi de l'instruction publique. C'est un droit
qui est à la Charte des droits et libertés, c'est un droit qui est reconnu en
droit international, également.
M. Drainville : Le rapport
fait état notamment d'un enseignant qui dit : Je ne suis pas capable de
distinguer les étudiantes dans ma classe parce que certaines d'entre elles sont
complètement voilées, sauf pour les yeux. Est-ce que vous trouvez ça normal,
dans une école, qu'un enseignant ne puisse pas identifier les élèves parce
qu'elles portent un voile intégral?
M. Rainville (Paul-Étienne) : En
fait, c'est intéressant, parce qu'il y a les deux aspects. Il y a l'aspect que
l'État n'a pas à régir, effectivement, les tenues vestimentaires des individus,
mais, en contexte scolaire ou même dans des contextes de différentes
institutions... et d'ailleurs il y a des accommodements raisonnables qui sont
allés dans ce sens-là, si ça impose des contraintes excessives à l'institution,
si, pour d'autres raisons, par exemple, la sécurité... là, il y a moyen d'y
aller, mais, encore là, il faut y aller au cas par cas et pas... éviter d'avoir
des lois mur à mur qui encadrent ça et qui peuvent donner lieu à des dérives.
Et donc on a... dans le mémoire, on
insiste aussi sur cette nécessité-là d'aller...
11 h 30 (version non révisée)
M. Rainville (Paul-Étienne) :
...aussi en cas par cas, que ce soit pour d'autres demandes d'accommodement
aussi. Et d'ailleurs on ne l'a pas souligné, mais on demande le retrait des
articles aussi qui concernent les interdictions d'accommodement religieux parce
qu'on croit que les accommodements peuvent favoriser l'inclusion parfois si, ça
ne pose pas de contraintes excessives à l'institution, si ça permet d'assurer
la liberté, l'égalité des gens, si ça se fait aussi dans un mode de compromis,
de dialogue. Donc, c'est quelque chose qui est... sur laquelle on insiste aussi
dans le mémoire.
M. Drainville : O.K. Mais
en résumé, là, l'interdiction du voile intégral n'est pas acceptable pour la
Ligue des droits et libertés.
Mme Lamoureux (Diane) : Je
peux ajouter à ça que, dans le rapport de vérification, on fait état d'un cas
de... intégral. Normalement on ne fait pas des lois mur à mur pour un cas. O.K.
En fait, les accommodements raisonnables sont là pour ça, entre autres. Mais
moi qui ai enseigné longtemps la philosophie politique, des gens aussi Woke qu'Aristote
et Cicéron soulignent qu'une bonne loi doit... ne doit... ne doit pas être une
loi ad hominem ou... si vous préférez, mais doit être une loi générale. D'autre
part, tu sais, on fait état aussi dans ce rapport de vérification de personnes
qui utiliseraient le masque de procédure comme subterfuge. Est-ce qu'on va
demander un certificat médical dans l'état actuel de surcharge de notre système
d'éducation pour vérifier qu'il s'agit bien de raisons médicales qui justifient
le port de masque de procédure?
M. Drainville : Alors, Mme
la Présidente, je vais citer le rapport sur les 17 écoles : «Dans un
établissement scolaire secondaire, les vérificateurs ont observé au moins une
élève portant un signe religieux couvrant l'entièreté de son visage. Selon les
informations transmises au vérificateur, il y aurait environ trois ou quatre
élèves dans la même situation dans cet établissement scolaire. Une élève
porterait également des gants ne laissant voir que les yeux, etc. Les
vérificateurs ont également observé une élève portant un signe religieux ne
couvrant pas l'entièreté de son visage, mais portant un masque médical. L'élève
porte donc le voile et un masque, ce qui ne laisse que son front et ses yeux à
découvert. Selon des témoignages recueillis, il y aurait environ une dizaine d'élèves
dans la même situation dans cet établissement scolaire». Donc, elles se
fabriquent un niqab, si l'on peut dire, en amalgamant le voile et le masque médical.
Il a été confirmé au vérificateur que cette utilisation du masque médical
dépasse les délais associés à une éventuelle maladie respiratoire infectieuse».
Fin de citation.
Je souligne également la note en bas de
page, de la page 8 du rapport qui dit : Bien qu'aucun manquement n'ait
été constaté, fait référence à un passage du rapport, certaines plaintes s'avéreraient
toutefois fondées, mais des correctifs avaient été apportés avant la visite des
vérificateurs. Donc, il y a certaines réalités qui ont été corrigées parce que
l'école avait été identifiée comme étant possiblement le théâtre d'atteintes,
donc, à la laïcité. Donc, on a bien compris votre position. Pour ce qui est du
voile intégral, en tout cas, vous trouvez que ça va trop loin?
Est-ce que le droit d'avoir accès à un
lieu de prière dans une école, est ce que c'est un droit, cela? Parce que le
projet de loi reprend la directive déjà émise à l'effet que l'école n'est pas
une... n'est pas un lieu de prière. Et donc nous interdisons par le projet de
loi les prières dans l'école, les activités religieuses à l'école et sur le
terrain de l'école, d'ailleurs. Alors, est-ce que d'avoir accès à un local de
prière, est-ce que c'est un droit individuel selon la Ligue des droits et
libertés.
M. Rainville (Paul-Étienne) :
Juste souligner qu'il existe plusieurs types, catégories de droits. Dans ce cas-ci,
on a vraiment plutôt un enjeu lié au droit à l'égalité et des enjeux liés à la
liberté de conscience, liberté de culte et de religion. Après, on revient
encore. Dans le mémoire, c'est la même chose. C'est que le projet de loi
propose en fait une, et dans plusieurs domaines, là, de régir les
comportements, de régir les attitudes, de régir les propos des gens, de régir,
bref, d'encadrer d'une façon tellement stricte qu'il n'y a plus aucune
possibilité de faire des accommodements ou de s'adapter dans une société qui
est pluraliste à l'école. Et la logique est un peu la même dans le cas des
locaux de prière. Si on a une classe avec 50 % d'élèves qui sont de
confession musulmane, qui vont prier dehors justement parce qu'ils n'ont pas de
place et qu'on a un local disponible, ce qu'on n'a pas dans les écoles parce qu'on
manque d'investissement, mais si on a un local qui est disponible, pourquoi on
ne ferait pas un accommodement pour ces personnes-là, même si...
M. Rainville (Paul-Étienne) :
...par exemple, pour des collègues à moi que je connais bien qui ont des
classes à Saint-Maxime, par exemple, qui ont des classes avec énormément de
personnes de confession musulmane, et ils ne vont pas faire un examen pendant
le ramadan la fin de l'après-midi parce que les enfants sont fatigués. Et donc
c'est un accommodement qui est normal.
M. Drainville : C'est un
accommodement acceptable...
M. Rainville (Paul-Étienne) :
Ah! absolument, absolument.
M. Drainville :
...de
ne pas d'examen pendant ramadan? C'est ce que vous venez de dire.
M. Rainville (Paul-Étienne) :
Non, non, ils le font le matin, ils le font le matin. C'est ce qu'on
appelle un accommodement, au cas par cas, selon les contraintes possibles ou
non de l'institution. Et la même chose pour les locaux de prière.
M. Drainville : Donc, le
calendrier des examens devrait être fonction des congés.... des activités liées
aux fêtes religieuses. C'est ce que vous venez de dire.
M. Rainville (Paul-Étienne) :
Oui, je vais... je peux répéter.
Mme Lamoureux (Diane) : Nous
venons d'avoir quatre jours de fermeture des écoles pour une fête
catholique. C'est tout ce que je peux vous dire. Alors, pourquoi il y aurait
des fermetures à Noël, à Pâque, les écoles sont fermées? C'est des fêtes qui
sont spécifiques à une... On peut... Noël aux chrétiens, à l'ensemble de la
chrétienté. Pâque, ça tombait bien, cette année, la Pâque orthodoxe est en même
temps que la Pâque catholique, mais le... On vient d'avoir quatre jours, là. On
ferme les écoles pour les catholiques, c'est... donc il n'y a pas d'examen ces
jours-là. Pourquoi il n'y aurait pas d'accommodement pour le jour du Yom
Kippour ou pour la fête de l'aïd-el-fitr?
• (11 h 40) •
M. Rainville (Paul-Étienne) : Peut-être
juste... juste...
M. Drainville : Madame, il y
a longtemps, il y a longtemps que les...
M. Rainville (Paul-Étienne) : Est-ce
que je peux juste compléter?
M. Drainville : ...il y a
longtemps que les fêtes religieuses comme Noël et Pâques sont devenues des
congés fériés pour tous. Ça n'a plus rien à voir avec la religion. L'histoire
de ces congés, évidemment, remonte à l'héritage religieux, mais aujourd'hui,
ces congés ne sont plus religieux, ce sont des congés fériés qui sont pris par
tout le monde, peu importe la religion.
Maintenant, je retiens quand même votre
affirmation à l'effet qu'il faudrait accommoder l'horaire des examens en
fonction du ramadan. C'est ce que vous venez de dire. J'en suis très étonné.
M. Rainville (Paul-Étienne) :
...préciser. Je peux préciser?
M. Drainville : Et j'en suis
très étonné.
La Présidente (Mme Poulet) : Je
m'excuse de vous interrompre. Je veux juste pour la retranscription qu'un ne
parle pas par dessus l'autre, là. Un à la suite de l'autre, s'il vous plaît. Je
vous remercie.
M. Zanetti : Mme la
présidente, je veux faire une intervention juste sur une question de procédure.
La Présidente (Mme Poulet) :
Allez-y, je vous écoute.
M. Zanetti : Je veux juste
appuyer ce que vous venez de faire. Puis j'aimerais que le ministre fasse
attention de ne pas interrompre les invités, parce que ça arrive
particulièrement quand c'est des invités qui ne sont pas d'accord avec lui et
je trouve que ce n'est pas dans les règle du décorum de notre institution.
M. Drainville : Mme la
présidente, je n'ai pas des années de parlementarisme derrière la cravate, et
le genre de dialogue que nous avons présentement est tout à fait normal, et
avisé, et souhaitable. Alors, je vais continuer avec...
La Présidente (Mme Poulet) : Alors,
j'aimerais qu'on reste dans les discussions avec respect, s'il vous plaît, et
qu'un parle à la suite de l'autre.
M. Rainville (Paul-Étienne) :
Une petite précision, parce que vous me prêtez un propos qui n'est pas tout à
fait exact, c'est que... En fait, moi, ce que je constate, c'est que vous avez
une volonté de faire une loi mur à mur pour encadrer tout et très punitive, là,
très... alors que ce qu'on dit, c'est que la pratique d'accommodement
raisonnable, c'est une pratique qui peut permettre, justement, de favoriser
l'inclusion des personnes. Et donc je ne suis pas mur à mur pour, je ne suis
pas mur à mur contre, je suis pour que les... qu'à l'échelle humaine on vérifie
s'il y a des accommodements qui sont possibles et qui ne sont pas des
contraintes excessives à l'institution. C'est un principe qui est reconnu dans le
droit, qui fonctionne bien. Et donc c'est ce que je dis. C'est vrai pour
plusieurs éléments du projet de loi. Voilà.
M. Drainville : Je tiens
juste à dire, madame la Présidente, que le projet de loi que nous étudions ne
permettra plus le genre de comportement et de pratique dont vient de parler le
représentant de la Ligue des droits et libertés. Les calendriers d'examen ne
seront plus, si c'est le cas, comme il semble l'indiquer à partir d'un exemple
qui est... qui lui a été confié par des proches. Si, effectivement, il y a
des... dans certaines écoles du Québec, des examens qui sont fixés par le
calendrier religieux, je vous... j'affirme, madame la Présidente, que le projet
de loi que nous avons sous les yeux ne le permet... ne le permettra plus.
Par ailleurs, madame la Présidente, dans
le projet de loi, dans le... je reprends, dans le rapport sur les
17 écoles, il est écrit ceci : «Un employé pratiquant une religion
peut se voir accorder plus de congés rémunérés qu'un employé ne pratiquant
aucune religion.» Est-ce que la Ligue des droits et libertés est d'accord avec
ça, quelqu'un qui déclare avoir une religion a droit à plus de congés rémunérés
que quelqu'un qui n'a pas de religion?
Mme Lamoureux (Diane) : Les
congés rémunérés pourraient être répartis entre les diverses religions. Je vous
ai rappelé que Pâques et Noël sont quand même très connotés à une religion,
même si, d'après vous, c'est laïcisé. Là, ce n'est pas laïcisé pour tout le
monde. Il y a plein d'affaires religieuses qui ne se passent pas...
Mme Lamoureux (Diane) : …ce
qui ne se passe pas dans les écoles, mais qui se passe à ce moment-là. Et je
veux dire, moi, je pense qu'on pourrait… au cas par cas, on n'a pas besoin. Je
veux dire, s'il n'y a pas d'étudiants juifs dans une commission… dans un centre
de services scolaire, par exemple, au Saguenay, il n'y a pas nécessairement
besoin d'avoir une provision pour donner des congés, mais on pourrait
diversifier les origines des divers congés. On a des flexibilités. Il y a des
trucs comme des journées pédagogiques qui offrent des flexibilités dans le
calendrier scolaire. On n'est pas obligé de tout caler sur une religion.
M. Drainville : Bien, je vous
repose la question parce que vous n'y avez pas répondu. Est-ce que vous êtes
d'accord avec la pratique qui donne plus de congés payés à quelqu'un qui se
déclare religieux plutôt que quelqu'un qui ne pratique aucune religion? Est-ce
que vous êtes d'accord avec cette pratique?
Mme Lamoureux (Diane) : Nous
ne sommes pas d'accord avec ce genre de… Ça contrevient au principe de
l'égalité et de l'équité. Mais le… si on prend comme il faut les accommodements
raisonnables, si on ne prend pas les congés religieux uniquement à partir d'une
seule religion, qu'on tient compte dans les calendriers scolaires de la
composition effective du personnel et des élèves, on peut tout à fait avoir le
même nombre au total de congés et ne pas favoriser indument une religion plutôt
qu'une autre, et ne pas… les chrétiens, les croyants plus que les non-croyants.
M. Drainville : Bon, par
ailleurs, il est beaucoup question de… il me reste combien de temps, Mme la
Présidente?
La Présidente (Mme Poulet) :
Il reste deux minutes.
M. Drainville : Oui, bien, je
vais aller à l'essentiel. Il y a des cas qui nous ont été rapportés.
D'ailleurs, il y en a un certain nombre qui sont cités dans le rapport sur les
17 écoles, de membres du personnel scolaire qui portent un signe religieux
et qui se font rappeler que la loi ne leur permet pas de le porter et qui
acceptent de le retirer et de continuer leur travail sans enjeu.
Pourquoi est-ce que c'est inconcevable
pour la Ligue des droits et libertés que quelqu'un qui porte un signe religieux
puisse le retirer pendant les heures de travail? Pourquoi est-ce que c'est
absolument attentatoire aux droits, ça? Tu as un travail qui comporte des
responsabilités. On parle beaucoup des droits. Il serait bien qu'on parle
parfois aussi des devoirs qui viennent avec ces droits. Et donc le principe du
projet de loi, c'est de dire : Tu as des droits, bien entendu, mais tu as
également des devoirs qui sont rattachés à ta fonction. Et donc, pendant les
heures de travail, tu retires ton signe religieux pour ne pas afficher ta
conviction religieuse au nom de la laïcité.
Il y a déjà des personnes qui le font, ça,
qui accepte ça. Pourquoi est-ce que c'est absolument impossible à concevoir
pour la Ligue des droits et libertés qu'une personne qui a effectivement droit
à la religion, qui a droit à sa liberté de conscience, puisse, pendant les
heures de travail, retirer son signe religieux par respect pour la laïcité et
la liberté de conscience des élèves, notamment des élèves, et retrouver
évidemment son droit de porter son signe religieux une fois qu'elle a quitté l'école?
Pourquoi est-ce que c'est si épouvantable, ça, pour la Ligue des droits et
libertés? En quoi c'est si attentatoire?
M. Rainville (Paul-Étienne) :
En fait, c'est que le projet de loi de la façon dont… Pas juste le projet de
loi, aussi, les discours entourant le projet de loi, il fait un amalgame faux
entre le port de signes religieux et le prosélytisme, parce que c'est ça,
l'idée , dans le fond, c'est de dire : Ces femmes-là portent un message,
peut-être vont faire du prosélytisme, et là l'État veut interdire ces
signes-là, alors que le voile a plusieurs significations… Oui?
La Présidente (Mme Poulet) :
Alors, on va poursuivre les discussions avec la députée de Bourassa-Sauvé.
Mme Cadet : Merci, Mme la
Présidente. Bonjour, M. Rainville. Bonjour, Mme Lamoureux. Merci pour votre
présence ici en commission. Je nous ramène à ce qui nous amène ici, ce qui
sous-tend le dépôt du projet loi 94, c'est bel et bien, donc, la situation
déplorable au sein de l'école Bedford. C'est une situation qui a choqué
l'ensemble du Québec, que nous avons unanimement dénoncée. Maintenant, il y a
le pourquoi, mais ensuite il y a le comment on répond à Bedford. Le ministre,
donc, lors du dépôt du projet de loi nous a dit qu'il s'agissait de sa réponse.
À la lumière de ce que vous avez lu du projet de loi n° 94, est-ce que
vous considérez que les dispositions qui s'y retrouvent empêcheraient un autre
Bedford de se réaliser au Québec?
Mme Lamoureux (Diane) : Bien,
je veux dire, les manquements qui ont été faits… Moi, ce que j'ai compris du
rapport, en tout cas…
Mme Lamoureux (Diane) : ...c'est
que c'était du personnel masculin qui ne portait pas de signes religieux
ostentatoires ou ostensibles. Et donc je ne vois pas pourquoi on ferait... en
quoi ça résolverait un problème tel qu'il s'est passé à Bedford, bon. Je ne dis
pas que c'est bien, ce qui s'est passé à Bedford, qu'on me comprenne, mais je
dis que ce projet de loi ne résout pas le... je veux dire, ne résout pas le
problème et, là, en même temps, impose des contraintes excessives à beaucoup de
monde.
Mme Cadet : M. Rainville,
vous...
M. Rainville (Paul-Étienne) : ...
Mme Cadet : Parfait. Merci
beaucoup. Donc, j'ai bien saisi votre réponse, ce que vous dites, c'est que
c'est... évidemment, donc vous êtes contre, donc, tout ce qui s'est passé. Et
je constate, à la lumière des réponses que vous avez offert au ministre, que
vous avez vu ce rapport, que vous avez lu celui, également... donc, le rapport
de vérification sur les 17 écoles, et vous dites : Bien, ici, on va
beaucoup plus loin que ce qui nous a été présenté comme problématique à
résoudre et, à certains égards, donc, on va même, donc, trop loin.
• (11 h 50) •
Maintenant, donc, vous avez parlé, donc,
distinctement des signes religieux, donc de l'article 32 du projet de loi no
94. Selon vous, qu'est-ce qui risque de se passer dans le réseau si
l'interdiction, donc, qui est visée à l'article 32, entrerait en vigueur... si
elle entrait en vigueur?
M. Rainville (Paul-Étienne) : Bien,
en fait, une des choses qu'on déplore dans une mémoire aussi, c'est qu'on a
fait, oui, des enquêtes dans les écoles, et tout ça, mais est-ce que le
gouvernement a fait une étude d'impact sur les discriminations en lien avec la
Loi sur la laïcité? Ce serait une bonne idée avant d'en prévoir l'extension, si
je peux... ou le renforcement, comme on dit. Et il y a des études qui existent
qui documentent les effets sur les femmes musulmanes dans le réseau scolaire.
J'inviterais peut-être le ministre à lire l'étude d'Ana Zaiani, par exemple,
qui a vraiment documenté dans un mémoire la manière dont la Loi sur la laïcité,
la loi no 21, a eu des impacts sur les femmes, donc, impacts en milieu de
travail, impacts pour les élèves aussi, et même pour les familles, d'ailleurs.
Donc, un climat aussi...
Mme Cadet : ...familles?
M. Rainville (Paul-Étienne) : Oui...
Bien, en fait, impacts sur les élèves, c'est beaucoup les microagressions,
qu'on appelle, donc des petits commentaires de la part de collègues sur le port
de leurs signes religieux.
Et je dirais que l'effet qui est peut-être
le plus grave, dans un contexte où on veut valoriser l'intégration nationale,
c'est le sentiment d'exclusion des gens, et ça, c'est la première chose :
Je ne me sens plus québécoise, je me sens exclue. Parce qu'effectivement c'est
une loi qui est attentatoire, discriminatoire, leurs droits en particulier. Il
y a les effets liés au fait de réorientation forcée de carrière, de perte de
revenus, de... et aussi de simple questionnement sur la place dans sa société,
tu sais. Ça fait que les conséquences sont multiples. Et plusieurs font état
aussi de la montée du discours islamophobe, et ça, c'est une réalité qui est
documentée aussi, là, oui.
Mme Cadet : Merci beaucoup.
Pour répondre à votre question, je peux vous confirmer que nous, comme
parlementaires, nous n'avons pas reçu une analyse d'impact réglementaire, là,
comme il se fait lors du dépôt d'autres projets de loi.
Maintenant, donc, vous avez parlé, donc,
de l'impact sur l'emploi. Je suis aussi porte-parole en matière d'emploi. Et
vous avez vu, donc, le projet no 94 comporte, donc, une clause grand-père qui
est attachée, bon, des intervenants avant vous, donc, nous disaient :
Attaché aux postes plutôt qu'à la personne, donc je vais étudier leur
nomenclature.
Votre sommaire des recommandations, là, ne
couvre pas cet aspect-là du projet de loi. J'aimerais savoir, d'abord, ce que
vous en pensez, et si, vous, vous avez une recommandation pour nous, comme
législateurs.
Mme Lamoureux (Diane) : Sur
ce qu'on a pu voir en lisant un certain nombre d'études, c'est justement les
malaises au travail pour les personnes qui bénéficient ou pour des postes qui
bénéficient, d'une part, O.K., les microagressions, les insécurités, etc., et
d'autre... et une forme d'isolement, ce qui s'apparenterait à du harcèlement en
milieu de travail, selon nous.
Et, d'autre part, il y a le fait qu'on
interdit à certaines personnes de progresser dans la carrière puisque les
exceptions ou la clause grand-mère que l'on... dans les circonstances, ne
s'appliquent que si on reste au même poste, dans la même école. Donc, ça pose
un problème. Il y a des mobilités qui sont prévues aux conventions collectives,
dans le milieu de l'éducation, et qui ne sont pas accessibles à ces
personnes-là.
Mme Cadet : ...et on
comprend, ici, on parle beaucoup, donc, du personnel de soutien. Souvent, donc,
l'enseignant va être attaché, donc, à... il y a moins de mobilité, en fait, de
l'enseignant, interinstitution, mais on va... Je comprends du réseau que c'est
possible qu'un membre du personnel de soutien puisse aller d'un
établissement...
Mme Cadet : ...un autre pour
combler différents besoins de main-d'œuvre au sein du même centre de services
scolaire. Donc, non seulement, donc, ça limiterait cette mobilité-là qui est
présente selon les conventions collectives, mais empêcherait, donc, la mobilité
à plus long terme d'une personne qui voudrait se perfectionner et avoir un
autre poste. Donc, dans les circonstances, donc, vous, vous nous dites, est-ce
qu'on devrait élargir la clause grand-père, est-ce que c'est votre
recommandation?
M. Rainville (Paul-Étienne) : Notre
recommandation, c'est le retrait du projet de loi n° 94 et le retrait des interdictions
du port de signes religieux. Donc...
Mme Cadet : Merci beaucoup.
Un peu plus tôt, je pense que vous étiez présents quand vous avez entendu M.
Baillargeon, et j'ai posé la question aux intervenants juste avant vous sur la
question des théorèmes. Donc, lui, donc, il nous enjoignait à faire en sorte
que l'école québécoise, donc, soit un lieu où on n'accepte pas tout théorème
sans avoir compris, sans le questionner. Vous m'avez peut-être entendu poser
cette question au groupe précédent, en disant : Mais justement, si cette
pluralité des croyances, la croyance, pas au sens religieux du terme, mais au
sens, donc, de la liberté, donc, de conscience ou la faculté, pour chaque
élève, de se faire sa propre idée de son environnement. Si on souhaite la
préserver, ne faudrait-il pas, au contraire, avoir, donc, une école, donc, qui
soit un peu, donc, le reflet du quartier, de l'environnement dans lequel des
enfants... dans lesquels les enfants, donc, sont déjà exposés?
Donc, quand on parle, donc, des
interdictions ici au personnel de soutien, on parle de la cafétéria, de
l'adjointe administrative qui est à la réception, ne faudrait-il pas, pour
préserver cette faculté de challenger des institutions et de se faire sa propre
idée de son environnement, plutôt permettre que l'école soit le reflet de cette
société-là?
M. Rainville (Paul-Étienne) : Bien,
en fait, c'est une des recommandations d'ailleurs de notre mémoire. Ce n'est
pas simplement que l'école soit le reflet de cette diversité... de ces diversités — au
pluriel — mais c'est aussi que l'école encourage le dialogue
interculturel, la rencontre des cultures, etc., que ce soit un milieu de vie
pluraliste à l'image de la société québécoise. Et l'autre élément qui
m'apparaît extrêmement dangereux qu'on a parlé, c'est tous ces articles de loi,
là — on a fait la longue liste — qui commentent des propos,
des attitudes, des...J'oublie tous les libellés des comportements qui devraient
être en adéquation avec la laïcité de l'État et les valeurs québécoises.
Là... pour tous les acteurs du réseau de
l'éducation dans tous les niveaux, l'État essaie d'imposer des comportements,
des façons de penser, des valeurs, et ça, on trouve que c'est extrêmement
dangereux. Et c'est pour ça qu'on parle d'assimilationnisme, en fait, c'est
comme si on voulait proposer une espèce d'image fermée des... de ce que
seraient les valeurs québécoises, en sous-texte, en pensant qu'il y a certaines
personnes qui ne respectent pas les valeurs québécoises, et on essaierait
d'imposer ça aux individus à partir d'une logique punitive. Et, nous, ce qu'on
dit, c'est l'inverse, si on veut favoriser un vivre-ensemble, ça prend des
politiques d'intégration, francisation, donner des moyens aux classes
d'accueil, etc.
Donc, on est dans un autre paradigme qui
n'est pas celui... répressif, et qui n'est pas celui de s'attaquer aux libertés
fondamentales de croyance, de conscience, de religion, de réunion, de... Donc,
on est dans un autre paradigme et dans un paradigme de politique positive
aussi, pour favoriser cette diversité-là dont vous parlez, le fait que ça
reflète véritablement la société dans laquelle...
Mme Cadet : Merci. J'ai le
temps pour une toute dernière question. On a entendu plus tôt, donc, des
exemples, encore une fois, inacceptables, donc, de contrôle par rapport, donc,
au port de signes religieux chez certains élèves. Est-ce que, selon vous, le
cadre juridique actuel nous permet déjà d'éradiquer, donc, ces situations-là?
Mme Lamoureux (Diane) :
Effectivement, on peut y procéder avec du gros bon sens, par du cas par cas, au
lieu de faire du mur-à-mur.
La Présidente (Mme Poulet) :
Alors, on va poursuivre les discussions avec le député de Jean-Lesage.
M. Zanetti : Merci, Mme la
Présidente. Merci beaucoup pour votre présence en commission. Je pense, votre
point de vue est précieux. Je vais vous amener sur la question de la définition
de la laïcité, parce qu'évidemment, bon, le ministre lui-même utilise le terme
«laïcité», se présente comme un grand défenseur de laïcité, comme si la
définition même de la laïcité ne posait pas problème, c'est-à-dire ne posait
pas... ne suscitait pas des questionnements dans la société, etc. Et puis,
évidemment, ça donne l'image que les opposants sont contre la laïcité, alors
qu'il y a probablement simplement une différence de conception.
La façon dont, moi, je comprends la
laïcité, on parle de neutralité religieuse de l'État puis de séparation de
l'État avec les institutions religieuses. Et la façon dont s'incarne la laïcité
dans le point de vue du...
M. Zanetti : ...mon avis,
mais je voudrais vous entendre là-dessus. On dirait plutôt quelque chose comme
un athéisme d'État, un athéisme militant, voire, qui tente de s'imposer plutôt
qu'une attitude neutre, je ne sais pas. Qu'est-ce que vous pensez de ça?
Mme Lamoureux (Diane) :
Bien, comme on l'explique dans le mémoire, il y a effectivement plusieurs
modèles de laïcité et il y a plein de modèles de laïcité qui peuvent permettre
de respecter les, bon, ce qu'on a dans les débats québécois. C'est la laïcité
ouverte qui permet de concilier laïcité et respect des droits humains. Donc,
effectivement, il n'y a pas un seul modèle de laïcité. Je veux dire, si vous
lisez les écrits de Jean Baubérot, qui est vraiment un spécialiste francophone
de la laïcité, il va vous expliquer qu'il y a des modes, il y a des modèles
de... il y a plusieurs modèles de laïcité et qu'on ne peut pas dire que la
laïcité, c'est telle affaire, sauf deux trucs, O.K., le respect, la séparation
de l'église et de l'état, donc la neutralité religieuse de l'état et la
garantie des libertés individuelles de croyance ou de non-croyance.
M. Zanetti : C'est ça.
• (12 heures) •
Mme Lamoureux (Diane) :
Et à part ça... Après ça, on peut broder sur bien, bien des modèles de laïcité.
Il y a le modèle belge et pas le modèle français. Bon. Et le modèle américain,
on peut en reparler, mais ça, c'est une autre affaire.
M. Rainville (Paul-Étienne) :
Est ce que je peux faire juste un petit ajout? Parce que c'est très
intéressant, ce que vous venez de dire, parce que dans le débat public on mise
beaucoup. Si vous êtes contre la loi no° 21, vous êtes contre la laïcité.
C'est une... En tout cas, pour nous, ce qui est absolument, bon, c'est une
aberration si on regarde l'historique de la Ligue des droits, par exemple.
Parce qu'effectivement on s'est battu à différentes époques pour que ce soit
contre la censure de l'Église, on s'est battu... et même pour la
déconfessionnalisation du système scolaire. Et ce qu'on dit, c'est que le
mouvement d'affirmation des droits humains, ça a été un moteur de la promotion
de la laïcité de l'État. Donc, quand on adopte un projet de loi qui viole des
droits et qui déroge aux chartes des droits, on fait un recul historique. C'est
évident pour nous. Et l'autre élément, c'est qu'historiquement pourquoi la
laïcité de l'État s'est imposée comme modèle, surtout dans des sociétés
pluralistes?
La Présidente (Mme Poulet) :
Merci. Je m'excuse.
M. Rainville (Paul-Étienne) :
Liberté.
La Présidente (Mme Poulet) :
On va poursuivre la discussion avec le député de Matane-Matapédia.
M.
Bérubé
:
Bienvenue. La question des droits des enfants à une éducation. Dans le rapport
de Bedford, on indique qu'il y a des élèves qui ont été privés d'enseignement
de la communication orale, des sciences de la technologie, de l'éthique et de
la culture religieuse, de l'éducation à la sexualité. Des jeunes filles ont été
privées de jouer au soccer. Tout ça à cause des convictions de certains enseignants.
Alors, on parle ici... Je vous amène de façon différente sur le dossier qui
nous a amenés ici, Bedford. Est-ce que vous considérez que ces enfants, ces
élèves ont été privés de leurs droits? Est-ce que vous dénoncez ce qui s'est
passé à Bedford?
M. Rainville (Paul-Étienne) :
Bien, absolument. Et la question du respect du programme, c'est quelque chose
qui est extrêmement important aussi. Donc, dans ce ça-là, tu sais, tantôt on
parlait d'accommodements qui peuvent être raisonnables ou déraisonnables. Dans
ce cas-là, on a un manquement, clairement. Bon, ça relève de la régie interne
aussi de l'école, mais effectivement, on dénonce les débordements qu'il y a eu
à Bedford, là, c'est...
M.
Bérubé
:
...pour légiférer. On est en accord avec l'essentiel, nous, de ce projet de
loi. On trouve même qu'à certains égards, il devrait y avoir des précisions.
Dans votre mémoire, qu'on a reçu et que j'ai bien lu, vous parlez de la
question de la langue qui est parlée dans les corridors, par exemple, à l'extérieur
des classes. Vous, vous êtes contre le fait que ça soit le français qui soit
imposé, qui soit la norme. C'est comme ça que c'est écrit. Donc il n'y aurait
aucun problème à ce que, dès qu'on sort d'une classe, on ne parle qu'arabe, par
exemple? Ça n'envoie pas un message particulier? Tout à l'heure, vous avez
évoqué l'histoire de votre organisation, 1963. Ça fait quand même un bout de
temps, puis y a eu beaucoup de débats. Je ne sais pas quelle était votre
position sur la loi 101 en 1977. Est-ce que vous étiez... Votre
organisation était pour ou contre?
M. Rainville (Paul-Étienne) :
Moi, je ne suis dans les... Je suis historien, puis je m'excuse de ne pas le
savoir, mais je dirais, sur...
M.
Bérubé
:
Moi, j'ai la réponse.
M. Rainville (Paul-Étienne) :
Favorable, quoi.
M.
Bérubé
:
Bien, il y avait de sérieuses réticences sur les droits.
M. Rainville (Paul-Étienne) :
Bien, peut-être... Bien, si vous voulez qu'on refasse le... Je n'ai pas absolument
envie de refaire le débat de la loi 101, mais pour la question sur la
langue, par contre, ce qui est intéressant, c'est qu'encore là, on... Bon, tout
le monde convient que la langue publique commune, c'est le français et que
c'est le français qui doit être en usage dans les écoles. Il n'y a pas de
problème. Après, c'est d'adopter une loi qui régit les comportements, les
attitudes des élèves, des professeurs pour leur empêcher toute possibilité.
Donc, c'est un peu ça qu'on a contre le projet, c'est qu'on... Plutôt que...
12 h (version non révisée)
M. Rainville (Paul-Étienne) : ...aller
au cas par cas puis d'avoir une sorte de raisonnabilité, mais là... Oui?
Pardon. Oui?
M.
Bérubé
: Je
n'ai pas beaucoup de temps. Si vous le permettez... Vous ne trouvez pas qu'il y
a une nécessité d'envoyer des messages clairs en matière de langue que l'école...
il doit y avoir la liberté de conscience, mais aussi le français langue
commune? Il y a plein d'autres endroits où parler la langue de son choix :
dans un centre communautaire, avec ses amis, à l'extérieur, dans un parc. Mais
à l'école, vous ne trouverez pas qu'il y a une nécessité d'envoyer un message
comme celui-là?
M. Rainville (Paul-Étienne) : Oui,
c'est la langue commune, c'est clair, mais je vais donner un seul exemple. En
ce moment, ma fille est en sixième année, est en bain linguistique puis elle
est obligée de parler en anglais. Donc, c'est la manière dont ce projet de loi
là...
M.
Bérubé
: C'est
autre chose.
M. Rainville (Paul-Étienne) : Non,
mais il est tellement... c'est tellement mur à mur que ça ne donne plus de
place à des possibilités d'accommodement. Puis on parlait là-dedans de la
langue... pour les jeunes qui arrivent, dont la langue maternelle n'est pas le
français, d'avoir des personnes-ressources qui sont capables de...
M. Bérubé : O.K. Les
enseignant, par exemple, est-ce que vous seriez en faveur qu'ils ne parlent que
français entre eux?
La Présidente (Mme Poulet) : Je
vous remercie de votre participation à nos travaux.
Alors, la commission suspend ses travaux
jusqu'après les avis touchant les travaux des commissions.
(Suspension de la séance à 12 h 05)
15 h (version non révisée)
(Reprise à 15 h 26)
La Présidente (Mme Poulet) : Alors,
à l'ordre, s'il vous plaît! La Commission de la culture et de l'éducation
reprend ses travaux. Nous poursuivons les consultations particulières et
auditions publique sur le projet de loi n° 94, Loi visant notamment à
renforcer la laïcité dans le réseau de l'éducation et modifiant diverses
dispositions législatives.
Alors, cet après-midi, nous entendrons les
représentants des personnes et les organismes suivants : la Fédération
québécoise des directions d'établissements d'enseignement, la Fédération des
comités de parents du Québec, le Regroupement des comités de parents autonomes
du Québec, la Fédération des centres de services scolaires du Québec et la
Fédération des établissements d'enseignement privés.
Alors, je vous souhaite donc la bienvenue.
Je vous rappelle que vous… que vous avez un 10 minutes pour votre exposé.
Par la suite, on va procéder à la période d'échange. Alors, la parole est à
vous.
M. Prévost (Nicolas) : Mme la
Présidente, M. le ministre. Messieurs, mesdames les députés, merci de nous
recevoir en commission parlementaire concernant le projet de loi n° 94, Loi
visant notamment à renforcer la laïcité dans le réseau de l'éducation et
modifiant diverses dispositions législatives. Je me présente, Nicolas Prévost,
président de la Fédération québécoise des directions d'établissements d'enseignement.
J'ai le plaisir d'être accompagné aujourd'hui de Mme Elizabeth Joyal, vice-présidente
de la fédération.
Notre fédération représente 2 400 directions
adjointes et directions du secteur public qui travaillent en formation générale
des adultes, en formation professionnelle et aux secteurs jeunes, donc primaire
et secondaire. La Fédération accueille favorablement le dépôt du projet de loi
n° 94, Loi visant notamment à renforcer la laïcité dans le réseau de
l'éducation et modifiant diverses dispositions législatives. Nous comprenons
que ce projet de loi vise principalement à renforcer la laïcité au sein du
réseau de l'éducation en apportant plusieurs modifications à la Loi sur l'instruction
publique.
Cependant, il est important de noter que
ce projet de loi s'attaque à beaucoup plus large que la laïcité dans le réseau
de l'éducation. En effet, près de 50 % du contenu du projet de loi touche
à des aspects cruciaux de la qualité des services éducatifs. La FQDE rappelle
que la Loi sur l'instruction publique encadre le système d'éducation québécois
et définit les rôles et responsabilités des différents acteurs.
La Fédération a toujours plaidé pour que
les décisions et les orientations soient prises par ceux qui connaissent les
besoins précis des élèves. Dans cette perspective, la FQDE souhaite exprimer
son avis et formuler des recommandations concernant les modifications proposées
par le projet de loi n° 94, en s'assurant qu'elles favorisent la réussite
du plus grand nombre d'élèves et tiennent compte de la réalité des
établissements d'enseignement d'aujourd'hui…
M. Prévost (Nicolas) : ...la
FQDE reconnaît l'importance des valeurs démocratiques et québécoises, dont
l'égalité entre les femmes et les hommes ainsi que la laïcité de l'État comme
fondement... fondement essentiel de notre système scolaire public.
Nous sommes en accord avec le fond du
projet de loi, mais nous y voyons des enjeux d'application concrets et un
alourdissement important de notre tâche au quotidien.
C'est donc sous ces deux prémisses
importantes que nous abordons avec vous le projet de loi n° 94. Nous souhaitons
qu'une formation des rencontres d'information soit donnée à l'ensemble du
personnel pour une compréhension et une application commune du principe de
laïcité au Québec. Vous trouverez dans le mémoire que nous avons déposé neuf
recommandations.
Pour ce qui est de l'obligation d'avoir le
visage découvert, la FQDE est consciente de l'importance d'assurer une
communication claire et une identification sécuritaire au sein des
établissements. Nous y voyons des enjeux d'application au début. Notre rôle n'étant
pas de jouer à la police, mais bien d'être un leader de la gestion pédagogique.
Nous voulons aussi que la loi soit plus
précise concernant la prestation de services quant à l'enseignement à la
maison. On devrait aussi peut-être nommer explicitement dans le règlement du
projet de loi, tant sur le... sur l'enseignement de la maison ou le projet de
loi n° 94, si la notion de prestation de services inclut des services qui
pourraient être rendus à distance.
Nous estimons également que la mesure
visant à obliger le parent à découvrir son visage sera difficilement applicable
à la maison.
• (15 h 30) •
Mme Joyal (Elizabeth) : Pour
ce qui est du principe de l'égalité hommes femmes, du racisme ou de l'identité
sexuelle, nous sommes bien en accord avec le principe. Pour ce qui est de
l'application et d'une position commune, cela sera beaucoup plus difficile.
Nous ne souhaitons pas de reddition de comptes supplémentaires au plan de lutte
existant. Nous insistons sur la nécessité de fournir aux écoles et aux centres
les ressources humaines et financières adéquates pour mettre en œuvre
efficacement les plans de lutte contre l'intimidation et la violence et pour
soutenir les élèves victimes et les auteurs d'actes répréhensibles.
Nous recommandons également de modifier
l'article 13 du p.l. n° 94 afin de laisser la latitude nécessaire aux
éducateurs de répondre adéquatement aux situations en permettant des
interventions éducatives et non seulement répressives.
Concernant les obligations et droits des
enseignants, la supervision du personnel enseignant est importante et
incontournable. Cependant, l'obligation d'une supervision annuelle de
l'ensemble du personnel enseignant par la direction représente un
alourdissement significatif de la tâche. Des choix devront être faits quant à
la portée et à la fréquence de cette supervision. Nous jugeons également que
l'évaluation de la contribution de l'enseignant aux projets éducatifs soulève
d'importantes limites sur le plan de la pertinence et de la faisabilité. Nous
recommandons que le guide de bonnes pratiques soit pertinent et adapté à la
réalité des différentes disciplines et niveaux d'enseignement élaborés en
consultation avec le milieu, que la supervision puisse se faire par la
direction adjointe et que des modalités plus réalistes soient envisagées comme
une supervision bisannuelle ou ciblant un certain pourcentage d'enseignants.
Enfin, nous proposons que soit retirée la
portion prévoyant l'évaluation de la contribution de l'enseignant au projet
éducatif.
Pour ce qui est du conseil
d'établissement, nous appuyons l'importance de l'éthique et de la déontologie.
Cependant, le processus d'enquête pourrait refroidir certains parents, et nous
avons déjà de la difficulté de recrutement. Nous recommandons que l'élaboration
du code d'éthique et de déontologie se fasse en consultation avec les milieux
scolaires et tienne compte de la spécificité du rôle des membres. Une formation
adéquate sur ce code devrait être offerte. De plus, nous proposons que la
gestion des manquements au code soit confiée au Centre de services scolaire.
Pour la location des locaux de l'école,
encore là, des enjeux de vérification et d'application. Nous compterons sur la
bonne foi des gens et qu'ils utiliseront les locaux pour la raison invoquée
lors de la location. Nous prenons note de l'interdiction des pratiques
religieuses manifeste. Nous comprenons la volonté d'assurer la cohérence des
principes de laïcité dans les contrats et ententes conclus par les centres de
services scolaires. Nous recommandons l'élaboration de clauses types pour
faciliter l'intégration de ces nouvelles obligations.
Nous réitérons nos préoccupations
concernant la concentration des pouvoirs du ministre. La mise en place d'un
comité sur la qualité des services éducatifs nous apparaît inutile, nous
n'avons pas besoin d'une autre structure supplémentaire puisque les centres de
services comptent déjà sur du personnel pouvant nous guider et nous supporter,
notamment le Comité d'engagement pour la réussite des élèves, le directeur des
services éducatifs et les conseillers pédagogiques. Nous recommandons de
retirer la création de ce comité...
15 h 30 (version non révisée)
Mme Joyal (Elizabeth) : ...l'utilisation
du français dans les établissements francophones nous apparaît comme
incontournable. Comme nous l'avons mentionné plus haut, nous ne souhaitons pas
jouer le rôle de policiers, mais bien viser une compréhension commune des
valeurs qui nous sont chères.
M. Prévost (Nicolas) : En
conclusion, la FQDE reconnaît la volonté du gouvernement du Québec de renforcer
la laïcité au sein du réseau de l'éducation et de réaffirmer l'importance des
valeurs démocratiques et québécoises. Nous sommes conscients du rôle essentiel
des directions dans la mise en œuvre de ces orientations et la réussite des
élèves.
Sous réserve de nos recommandations et de
nos commentaires, la FQDE se montre disposée à collaborer activement avec le
ministère de l'Éducation afin d'assurer une mise en œuvre efficace et
harmonieuse du projet de loi no 94, dans le meilleur intérêt des élèves et de l'ensemble
de la communauté éducative.
Nous insistons cependant sur la nécessité
de fournir aux directions d'établissement et à l'ensemble du personnel scolaire
le soutien, la formation et les ressources nécessaires pour relever les défis
liés à l'application de cette nouvelle loi. La FQDE souligne une inquiétude
légitime face à l'alourdissement des tâches dans un contexte où la relève au
sein des établissements scolaires est déjà problématique. Cette situation
nécessite une attention particulière de la part du MEQ et de son ministre, non
seulement pour apporter un soutien concret mais aussi pour reconnaître et
valoriser l'engagement des directions d'établissements dans l'accomplissement
de la mission qui leur est confiée à travers les multiples encadrements légaux.
Nous vous remercions de votre attention et sommes à votre disposition pour
répondre à vos questions.
La Présidente (Mme Poulet) : Merci
beaucoup à vous deux. Alors, on va commencer la période d'échange. M. le
ministre, la parole est à vous pour une période de 16min 30 s.
M. Drainville : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Merci beaucoup, M. Prévost. Content de vous
retrouver, Mme Joyal. Merci d'être présente également. Bien, d'abord, je note
votre, je dirais, prédisposition généralement favorable, hein, sur le fond des
choses, mais vous soulevez à plusieurs reprises la question de l'application,
ce qui est une question tout à fait légitime. Alors, je ne ferai pas,
évidemment, le tour de toutes vos recommandations, parce qu'il va nous manquer
de temps, mais je veux quand même vous poser quelques questions. Par exemple,
sur l'obligation d'avoir le visage à découvert, vous dites : Nous sommes
conscients de l'importance d'assurer une communication claire et une
identification sécuritaire au sein des établissements, mais vous y voyez un
enjeu d'application au début, avez-vous dit, M. Prévost, au début. Pouvez-vous
élaborer un petit peu?
M. Prévost (Nicolas) : Oui,
bien, comme tout changement, hein, comme toute période de changement, bien, il
y aura une période d'adaptation. Donc, on entrevoit effectivement, peut-être,
qu'au début il y aura un peu plus d'interventions à faire pour sensibiliser les
gens à avoir le visage à découvert dans nos établissements scolaires, là, peu
importe que ce soit le secteur primaire, secondaire, formation professionnelle
et générale des adultes. Mais on compte aussi sur la... je vous dirais, la
compréhension des gens, sur l'application de cette partie-là pour que, par la
suite, on n'ait pas à intervenir de façon fréquente et que ce soit bien
instauré dans nos établissements scolaires.
Cependant, bien, on l'a mentionné dans
notre mémoire, on y voit quand même des enjeux plus... je vous dirais, un peu
plus grands concernant l'enseignement à la maison.
M. Drainville : Oui, oui, c'est
un enjeu, là-dessus comme sur beaucoup d'autres questions, hein, l'enseignement
à la maison, on le sait.
Sur la question de la... supervision,
dis-je bien, annuelle du personnel enseignant, là aussi, vous soulevez la
question de la mise en œuvre, bon. Vous notez, évidemment, que cela représente
un alourdissement dans un contexte où les ressources sont limitées. Et là vous
dites : Des choix devront être faits quant à la portée et à la fréquence
de cette supervision. Est-ce que vous pouvez élaborer, s'il vous plaît?
Mme Joyal (Elizabeth) : Bien,
sur la méthodologie utilisée pour lesdites supervisions en question, si on doit
utiliser quelque chose d'exhaustif chaque année pour chacun, ça s'avère être
une lourde tâche, effectivement, c'est ce qu'on soulève. Donc, ce qu'on pense,
c'est que, déjà, la supervision existe par les directions d'école, elle peut se
faire, la supervision, donc de devoir passer tout le personnel chaque année, on
entrevoit là quelque chose d'assez exhaustif. Donc, de pouvoir faire des choix,
ou de cibler, ou d'avoir une rotation...
Mme Joyal (Elizabeth) : …de
pouvoir partager la tâche avec l'adjoint également dans le cas où il y a des
adjoints dans les écoles.
M. Drainville : Mais ça, ça
se fait déjà, n'est-ce pas?
Mme Joyal (Elizabeth) : Oui,
ça se fait de partager la tâche, mais effectivement les rotations, là… En fait,
c'est tout dépendant comment il faut interpréter le libellé que nous avons lu.
Mais nous avons compris qu'il fallait dorénavant voir tout le monde chaque
année, ce qui pourrait s'avérer effectivement assez lourd.
M. Prévost (Nicolas) : Parce
qu'effectivement, c'est… ce que nous on souhaite, dans le fond, c'est de garder
un peu la pratique qui est connue présentement. Donc, il y a, oui, une
supervision pédagogique qui est faite auprès des enseignants. Parfois, elle est
biannuelle, on rencontre nos enseignants aux deux ans, on fait 50 % de
notre personnel, une année, 50 % l'autre. Parfois, il y a dans des
établissements scolaires où… cette supervision-là peut être plus, je vous
dirais, précise envers certains enseignants sur qui on questionne peut-être
certaines applications ou applications du programme ou problématiques de
gestion de classe. Parce que, comme Mme Joyal l'a dit, de le faire annuellement
avec l'ensemble du personnel scolaire... Parce que dans une école secondaire,
il faut savoir qu'il peut y avoir plus d'une centaine d'enseignants, si c'est
seulement la direction d'école qui doit faire cette pratique de supervision,
bien, avec 180 jours de classe, ça va commencer à faire beaucoup de temps
pour la direction d'école, qui a déjà beaucoup d'autres choses à faire.
• (15 h 40) •
M. Drainville : O.K., mais
quand vous dites, dans votre mémoire : «La Fédération propose que soit
retirée la portion du libellé prévoyant l'évaluation de la contribution de
l'enseignant au projet éducatif.», qu'est-ce que vous voulez dire?
M. Prévost (Nicolas) : Parce
que dans la loi, au-delà de la… du dépôt de la planification annuelle de
l'enseignant, on parle aussi de mesurer l'implication de l'enseignant au projet
éducatif de l'école. Pour nous, mesurer l'implication d'un enseignant, c'est
très, très, je vous dirais, subjectif, là, cette notion-là d'évaluation de
mesures. Donc, pour nous, oui, je vous dirais, la supervision, c'est un outil
de gestion important, mais de calculer l'apport de l'enseignant à son
implication au projet éducatif, on y voit là des enjeux de comment on pourrait,
nous, comme direction d'école, évaluer et mesurer l'application des
enseignants. Et on tient compte aussi, bien entendu, du guide des bonnes
pratiques dans cette évaluation-là, qu'on souhaite bien entendu, là, construite
avec des partenaires du réseau éducatif, dont les directions d'établissement,
directions adjointes.
M. Drainville : Alors,
dites-moi sur quoi l'évaluation devrait porter à ce moment-là, si ce n'est pas
sur la contribution au projet éducatif? Parce que pour moi, une formulation…
puis je suis… je suis très ouvert à préciser une formulation qui serait
peut-être trop vague, mais pour moi, de dire : on s'assure que les
planifications pédagogiques soient conformes au projet éducatif de l'école,
moi, je... C'est une formulation qui met l'accent évidemment sur la réussite
scolaire, puisque l'objectif ultime d'un projet éducatif, c'est de favoriser la
réussite scolaire. Mais c'est un espace tellement large qu'il vous permet, je
pense, comme… Et du… comme direction d'école, d'y aller avec votre bon
jugement, d'y aller avec vos connaissances pédagogiques, avec votre expérience
également. Donc, si vous jugez que c'est une formule qui est trop imprécise, à
ce moment-là, sur quoi devrait porter l'évaluation, si ce n'est pas la
contribution des enseignants au projet éducatif de l'école? Qu'est-ce que ce
serait? Est-ce que ce serait, je ne sais pas, par exemple, le référentiel des
compétences, le respect par les enseignants du référentiel des compétences?
Est-ce que ça pour vous, ce serait mieux?
Mme Joyal (Elizabeth) : Bien
oui, parce qu'à la… c'est ça qu'on utiliserait, là. Tu sais, le référentiel de
compétence pour pouvoir superviser les enseignants, c'est ce qu'on utilise
déjà. J'avais… à la lecture du projet de loi, personnellement, je n'avais pas
fait la corrélation directe avec ce que vous venez de dire, c'est-à-dire que
vous voulez une évaluation qui se collerait sur l'apport précis du projet
éducatif qui couvre les quatre ou cinq années. Je l'avais vu dans un… on a vu
ça dans un ensemble plus large en se disant : Bien, l'enseignant doit
couvrir l'ensemble de son programme, nonobstant ce qui se fait au projet
éducatif présentement, les objectifs qu'on a mis là de façon précise, puis le
plan d'action qu'on a cette année à l'école. Donc, cette supervision-là ne se
fait que sur ces éléments. Et effectivement, c'est peut-être plus vivable, mais
c'est… il s'agit d'une supervision générale pour l'ensemble des enseignants.
Donc, c'est pour ça que notre commentaire à l'effet de retirer cet apport-là
pour la…
Mme Joyal (Elizabeth) : ...mesure
de cet apport et qu'est-ce que j'en fais, de la mesure ensuite, tu sais, il y a
aussi ça. Si j'ai mesuré l'apport d'un enseignant, et je constate, par exemple,
qu'il n'a pas mis en œuvre certains aspects du projet éducatif, qu'en fais-je?
Est-ce que ça veut dire que cet enseignant a mal enseigné toute l'année? Pas
nécessairement. Est-ce que ça veut dire qu'on a passé à côté des objectifs
éducatifs tels que le programme le prescrit? Pas nécessairement. On avait
peut-être des objectifs plus précis, cette année, au projet éducatif, qui n'ont
pas été atteints pour toutes sortes de motifs. Donc, il y a quand même une
nuance que vous venez d'apporter, qui n'était pas celle de notre lecture
initiale.
M. Drainville : O.K., parce
qu'il faut lire le reste du paragraphe : «Il procède annuellement à
l'évaluation des enseignants afin, notamment, de mesurer leur contribution au
projet éducatif de l'école dans un objectif d'accompagnement et de soutien à
l'enseignant et à son développement professionnel, en tenant compte du guide
des bonnes pratiques établi par le ministre.» Donc, l'objectif, c'est vraiment
d'évaluer l'enseignant, l'enseignante afin de pouvoir l'accompagner pour
qu'elle... pour que cette personne-là devienne meilleure dans les enjeux que
vous aurez identifiés dans le cadre de la discussion que vous aurez, avec cette
personne, comme direction d'école.
Mme Joyal (Elizabeth) : Oui,
bien, c'est pour ça qu'on voulait les cibler, parce qu'effectivement le «afin,
notamment», donc, on fait l'ensemble. Tu sais, on les évalue surtout et afin,
notamment, de pouvoir identifier si certains objectifs du projet éducatif ont
été bien ciblés, bien travaillés et couverts. Donc, on va peut-être cibler les
enseignants plus nouveaux dans la profession, on va... tu sais, oui,
effectivement...
M. Drainville : Mais cette
formulation-là ne permet pas de le faire, d'après vous?
Mme Joyal (Elizabeth) : Mais
non, non, je ne dis pas que la formulation ne permet pas de le faire, c'est
que, dans sa première formulation, dans le début, du moins, du libellé, on
comprenait qu'on devait le faire avec tout le monde. Donc, l'enseignant très
expérimenté qui, habituellement, travaille bien ou travaille selon les critères
qu'on s'est donnés cette année, qui couvre le projet éducatif et qui couvre
tout, on doit quand même le superviser selon la lecture qu'on en avait faite.
M. Drainville : Vous avez
raison, le mot «annuel» ou le mot «annuellement, il est là, vous avez raison.
Maintenant...
Mme Joyal (Elizabeth) : Oui,
mais c'est celui-là qui est lourd.
M. Drainville : Je je
comprends, mais rencontrer un enseignant pour dire ou une enseignante pour
dire : Ça va superbien, continue, tu fais de l'excellent boulot puis on se
revoit l'année prochaine, ça aussi c'est possible. Tu sais, moi, je ne suis
pas... Je vous fais confiance, là. Puis, pour moi, pour moi, c'est comme — bien,
peut-être que... puis ça vaut la peine de le dire — mais, pour moi,
c'est une évidence que vous n'allez pas accorder le même... la même attention à
tous les enseignants de l'équipe-école. Il y en a un certain nombre, ça va
bien, tape dans le dos, on continue, parce qu'il faut donner des tapes dans le
dos aussi, hein? Puis ceux et celles avec lesquels c'est plus difficile, bien
là, on passe plus de temps, puis là on y va avec le libellé. Mais, honnêtement,
dans mon esprit, moi, ça vous donne toute l'autonomie pour continuer à faire ce
que vous faites.
Mme Joyal (Elizabeth) : Heureuse
de l'entendre.
M. Drainville : Oui, ça vous
va? Donc, si on conservait... avec ce que je vous dis là, si on conservait le
libellé, ça vous irait?
M. Prévost (Nicolas) : Oui,
avec vraiment ce que vous nous dites là, d'avoir une certaine latitude comme
dirigeants d'établissements scolaires, d'avoir cette latitude-là d'évaluer ou
non un enseignant. Puis je veux revenir sur l'aspect projet éducatif, parce
que, oui, c'est une partie de l'évaluation. Peut-être que vous le percevez
aussi comme...ça englobe le programme de formation, ça englobe la gestion de
classe, parce que l'enseignant va superviser...
M. Drainville : Oui, ça
englobe tout ça, M. Prévost.
M. Prévost (Nicolas) : O.K.
Parfait.
M. Drainville : C'est pour ça
que je vous dis, c'est un terme qui se veut générique, à escient, qui se veut
volontairement large pour vous permettre, après ça, de faire votre travail.
M. Prévost (Nicolas) :
Parfait.
M. Drainville : C'était
l'état d'esprit que nous avions quand nous avons rédigé le projet de loi. Je sais
que ma collègue la députée de Hull souhaite intervenir, mais je veux juste vous
dire, par rapport au Comité sur la qualité des services éducatifs, vous avez
compris qu'il pourrait intervenir à la demande d'une direction d'école, hein?
Puis l'objectif ici, là, c'est vraiment de vous donner à vous, les directions
d'école, pas seulement vous, mais vos directions de centres de services
également, mais à vous, aux directions d'école, tout autant, sinon plus, un
outil, quelques... des personnes d'expérience vers lesquelles vous pouvez vous
tourner pour aller chercher de l'aide. Si jamais vous n'obtenez pas l'aide que
vous souhaiteriez obtenir, vous auriez cette soupape, cet outil, ces personnes
vers lesquelles vous pourriez vous tourner. Je pense que dans le cas de
Bedford, ça aurait pu être utile à un moment donné. Vous n'êtes pas d'accord,
M. Prévost?
M. Prévost (Nicolas) : Très
honnêtement, M. le ministre, je pense qu'avec la structure actuelle qu'on a
dans nos centres de services, vous savez, d'ajouter un comité de plus,
souvent...
M. Prévost (Nicolas) : ...et
c'est... comme nous comme direction d'école, présentement, avec tout ce qu'on a
en place, avec le comité, justement qu'on a parlé tantôt, qu'on a mentionné
dans notre mémoire, sur la réussite éducative des élèves, avec une directrice
des ressources éducatives qui est accompagnée de coordonnateurs, de personnes,
là, qui l'accompagnent, de conseillères pédagogiques qui peuvent, nous, nous
soutenir comme directions d'établissement. Nous, avec la structure actuelle, on
a les choses qui peuvent répondre à ces besoins là de demande de direction.
M. Drainville : Mais moi, je
vous dirais, M. Prévost, si vous n'en avez pas besoin. Parfait! Si l'aide
que vous avez est suffisante. Excellent!
M. Prévost (Nicolas) : Oui,
nous, on considère que...
• (15 h 50) •
M. Drainville : Moi, c'est
plus dans des cas peut-être qui s'avéreront exceptionnels de directions d'école
qui crient à l'aide, puis qui n'ont pas l'aide qu'elle souhaiterait obtenir, et
qui là pourront dire : Bien, écoute, la loi me donne le choix, je fais
appel au Comité sur la qualité des services éducatifs, parce que j'ai besoin de
cette aide-là que je ne reçois pas d'ailleurs. C'est plus ça. C'est comme une
espèce de plan b, là, pour ne pas vous laisser à vous-même, parce que moi, j'ai
été pas mal...
M. Prévost (Nicolas) : Estomaqué?
M. Drainville : ...traumatisé,
estomaqué. Oui, vous pouvez tous les défiler, là, sur ce qui s'est passé à
Bedford. Puis de voir les directions d'école les unes après les autres qui
crient à l'aide puis malheureusement l'appel n'est pas entendu, ou on les
laisse tomber, ou on les déménage, on les change d'école. Ça, pour moi, c'est
un petit peu éprouvant.
M. Prévost (Nicolas) : Bien, effectivement,
il y a des choses... puis il y a peut-être des directions d'école aussi qui
n'ont pas demandé d'aide, là. Ça, il faut le savoir aussi. Est-ce que la
réponse à l'aide d'une direction d'école est toujours la réponse adéquate?
Est-ce qu'elle a toujours été correcte? Non. Mais on a présentement quand même
le personnel qui devrait être capable de répondre, parce que si c'est plus,
bon, judiciaire ou tout ça, il y a un secrétaire général, on a une direction
générale, on a des gens qui sont outillés dans divers domaines qui seraient
outillés pour nous répondre.
M. Drainville : D'accord.Je
veux laisser du temps à la députée de Hull.
La Présidente (Mme Poulet) :
Il reste 1 min 24 s.
Mme Tremblay : Ah, oui.
Parfait. Alors, mais moi, je voulais voir avec vous, là, les sanctions
disciplinaires. Puis là vous venez ajouter un si applicable. J'aimerais ça vous
entendre parce que vous avez déjà la latitude là-dessus. Donc, pourquoi c'est
si important, à ce stade-ci, de venir un petit peu modifier le libellé?
Mme Joyal (Elizabeth) : Mais
pour s'assurer justement qu'il y a cette latitude-là qui persiste, latitude
qu'on souhaite continuer d'utiliser puis de ne pas avoir nécessairement dans un
code, là, je vais appeler le code de vie, je vais dire ça comme ça,
l'application directe d'une sanction liée à un événement ou à une situation, un
manquement d'élève, par exemple. Cette corrélation là directe doit être
nuancée. Vous avez raison qu'on l'utilise déjà, mais on souhaite que ça continue
comme ça. Ça fait qu'on veut être certain qu'on a encore cette latitude là
d'application de sanctions qui reste dans un contexte où on est en éducation
puis que c'est important d'apprendre les bons comportements et de réprimer les
mauvais quand c'est le moment.
Mme Tremblay : O.K. Donc, si
le libellé pour vous amène à interprétation...
Mme Joyal (Elizabeth) : Oui,
c'est ça.
Mme Tremblay : Je comprends
bien. Rapidement, je voulais vous entendre parce que... en amont sur la
planification pédagogique. Donc, ça, c'est déjà demandé à l'heure actuelle dans
la majorité des écoles au Québec. Donc, ça, est-ce que ça vous va, d'aller
plus... tu sais, de venir plus l'appuyer dans le projet de loi, la
planification pédagogique?
M. Prévost (Nicolas) : Bien,
nous, on est très, très à l'aise avec cet outil de gestion là...
La Présidente (Mme Poulet) : Je
m'excuse de vous interrompre dans votre réponse, mais maintenant on va
poursuivre les discussions avec la députée de Bourassa-Sauvé.
Mme Cadet : Merci, Mme la
Présidente. Bonjour, M. Prévost. Bonjour, Mme Joyal. Merci beaucoup
pour votre allocution ainsi que la transmission de votre mémoire.
Dans votre échange avec la partie
gouvernementale, vous avez parlé quelques exemples d'alourdissement. Donc, dans
les minutes qui précèdent, on a longuement, donc, élaboré sur la question de
l'évaluation de l'enseignant, mais quand on lit, donc, dans votre introduction,
donc, que vous voyez des enjeux, bon, d'application et un alourdissement important
de la tâche des directions et directions adjointes, je comprends que ça va bien
au-delà de l'évaluation d'enseignants. Donc, j'aimerais peut-être vous entendre
sur d'autres éléments qu'on n'a peut-être pas abordés précédemment au niveau
des exemples d'alourdissement.
M. Prévost (Nicolas) : Bien,
il y en a... on en a quelques-uns dans ce projet de loi là. Bon. On en a parlé
tantôt, on l'a dit puis on le spécifie dans notre mémoire, on pense qu'au début
de visage à découvert pour l'ensemble de nos élèves, ça va nous demander un
ajustement, une compréhension des parents, des élèves sur le respect de ça.
Quand sur l'aspect d'enseignement à la
maison, parce que oui, il y a des défis sur plusieurs choses, mais encore là
si... parce que, dans le projet de loi, on a la notion de prestation de
service. Donc, si un enseignant se présente à la maison, parce que ça peut
arriver, c'est une prestation de service, est ce que le parent va être à visage
découvert? L'enseignant va... Tu sais, ça va être plus difficile à appliquer.
Donc, encore là, si c'est... ça va revenir sur nos bureaux, nous, comme
directions d'école...
M. Prévost (Nicolas) :
...sur la location des locaux, on est tout à fait d'accord qu'il n'y ait pas
d'activité de nature religieuse. Mais encore là, ça va demander des
vérifications. Nous, on va faire confiance à la bonne foi des gens qui vont
louer nos locaux le soir, la fin de semaine, qui se présente dans nos
établissements pour dire : Bien, moi, je vais organiser un cours de danse,
de karaté ou peu importe. Donc, est-ce que nos locaux sont utilisés à cette
fin? Bon, encore là, ça va demander des vérifications. Quand on parle aussi de
parler français dans nos établissements scolaires, on en est. On le dit aussi
dans notre mémoire, dans nos recommandations. C'est important, le respect de
cette langue, cette belle langue. Mais encore là, ça sera la direction
d'établissement avec son personnel à s'assurer de l'application du projet de
loi, puis on veut le faire en équipe. Tout ça, on veut le faire avec
l'équipe-école, avec la collaboration des parents, mais au bout de la ligne,
tout ça va retomber quand même sur le bureau, sur nos bureaux. Donc, c'est pour
ça qu'on parle d'un alourdissement de notre tâche, là, qu'on prévoit avec le
projet de loi.
Mme Cadet : Merci,
M. Prévost. Donc, vous venez de nommer plusieurs exemples, donc, de ce qui
reviendrait un peu, donc, sur les bureaux des directions et directions
adjointes d'école. On sait qu'en ce moment, donc, on a des grands défis de
recrutement. Donc, quel est l'impact, selon vous, de ces potentiels
alourdissements-là, sur le recrutement au sein du réseau?
Mme Joyal (Elizabeth) :
Bien, c'est... c'est le... c'est toujours parmi les mêmes personnes que nous
recrutons. Donc, ce sont les enseignants qui constatent le travail qui est à
faire et qui soit lèvent la main ou ne la lève pas pour devenir directeur
d'école. Il y a plusieurs facteurs qui peuvent les influencer. Je pense qu'un
de ces facteurs-là, c'est celui où les journées sont longues en direction
d'école, là. On n'est pas en train de s'en plaindre, mais la réalité est
celle-là. Le calendrier annuel de travail n'est pas le même non plus. Donc,
jusqu'à un certain point, quand on voit que les tâches s'accumulent puis que
les responsabilités puis l'imputabilité des différentes responsabilités qui
sont sur le dos de la direction, bien, c'est peut-être moins tentant de vouloir
faire le pas et faire le saut. Il y a d'autres considérants dont je ne parlerai
pas aujourd'hui.
M. Prévost (Nicolas) :
Et très concrètement, parce qu'on a des chiffres à l'appui et on aura les
nouveaux chiffres qui vont sortir bientôt concernant nos directions, directions
adjointes, bien, on voit dans les dernières années que les gens quittent la
fonction de direction, direction adjointe, retournent à l'enseignement parce
qu'ils font un choix personnel puis ils y voient des désavantages à une
conciliation travail, tout ça. Ce qui ressort, nous, chez nos membres, c'est
l'alourdissement de cette tâche-là. C'est le premier critère justement du fait
que les gens quittent. Et ça, c'est documenté. On a deux études qui viennent
nous dire, celle de l'INSPQ et du GRIDE, qui nous disent que le personnel le
plus affecté au niveau de la santé mentale dans le réseau de l'éducation, ce
sont les cadres, les directions d'établissement. Et les banques de relève,
parce qu'on fait le tour présentement, moi, je parle avec des directions
générales qui nous appellent, pas quotidiennement mais très souvent, pour nous
dire : Bien, aidez-nous à trouver du monde. Mais on en a plus qui veulent
y aller pour différentes raisons, dont l'alourdissement de la tâche.
Mme Cadet : Merci
beaucoup. Bien, justement, votre première recommandation vise à ce que des
ressources suffisantes et une formation adéquate soient mises à la disposition
de l'ensemble du personnel scolaire, bon, ici, pour favoriser le renforcement
de la laïcité, des valeurs démocratiques et québécoises. Vous allez un peu,
donc, dans le même titre lors de votre troisième recommandation. Vous l'avez
énoncé d'ailleurs dans votre allocution, au niveau de, bon, de... du... de ce
qui relève de l'intimidation et de la violence. Est-ce que, vous, vous avez
confiance que ces ressources-là, donc, ressources suffisantes et avec la
formation adéquate, soient mises à votre disposition et soient développées une
fois le projet de loi adopté, le cas échéant?
M. Prévost (Nicolas) :
L'enjeu de pénurie de personnel en éducation touche tous les secteurs. Donc,
oui, on y voit quand même certains défis. Si on veut des exemples, des exemples
concrets d'outils ou de formations qu'on pourrait avoir, on le sait puis on l'a
dit souvent comme fédération, quand il arrive des incidents de violence,
d'intimidation dans nos établissements, bien, une des mesures les plus... qui
donnent le plus de résultats, c'est une suspension à l'interne. Là, je veux
faire attention pour ne pas que ce soit... Donc, l'élève, on le garde à
l'école, on ne l'envoie pas à la maison où il va être souvent laissé seul à
lui-même. On veut le garder à l'école dans un local distinct, pas les pauses en
même temps que tout le monde, puis qu'il prenne le temps de réfléchir à son
comportement. Mais pour ça, bien, il nous faut des locaux, la première des
choses. Puis il me faut du personnel qui serait disponible pour superviser,
suivre ces quelques étudiants-là qu'on garderait dans nos établissements et qui
auraient un changement de comportement. Parce qu'on le sait, cette mesure-là,
elle est porteuse comparativement à... Mais c'est un exemple parmi tant
d'autres que je pourrais vous nommer une... Pas une liste, là, mais oui.
Mme Cadet : Oui. Donc là,
vous faites référence, donc, à des ressources matérielles...
Mme Cadet : ...la
disponibilité des locaux. Mais je comprends ici, quand vous faites cette
recommandation-là sur les ressources suffisantes et la formation adéquate,
j'imagine, vous parlez aussi de ressources financières, humaines, bien
évidemment, là, sur la formation, là, s'assurer que les dispositifs
pédagogiques, là, soient mis à votre disposition pour bien mettre en œuvre ces
recommandations-là. Donc, sur ces autres éléments, est-ce que... bon,
évidemment, l'aspect de la disponibilité des locaux, c'est... est peut-être un
peu moins fluide, mais sur les autres éléments, est-ce que vous avez confiance
que ces ressources-là seront mises à votre disposition?
M. Prévost (Nicolas) : Bien,
je pense que le ministre a quand même... et le gouvernement en place, ainsi que
les gens de l'opposition ont quand même, je pense, une volonté d'aller dans ce
sens-là. Est-ce que ça va se concrétiser? J'aimerais bien ça, parce que,
souvent, il y a beaucoup de choses où on a beaucoup de bonne volonté, mais on
ne voit pas nécessairement le fruit au bout de la ligne, malheureusement. Mais
je pense qu'il y a une compréhension de cet enjeu-là. Maintenant, il y a
beaucoup d'autres défis auxquels vous devez faire face. Mais, oui, on y voit
quand même certains enjeux.
• (16 heures) •
Mme Cadet : Merci. Sur le
conseil d'établissement, en commentaire, vous vous inquiétez de «l'effet
dissuasif que pourrait avoir un processus d'enquête formel sur l'engagement des
parents dans un contexte où le recrutement déjà difficile.» J'aimerais
peut-être vous entendre là-dessus. On ne vous a pas trop entendus sur cette
recommandation-là, sur le point 3.5 du conseil d'établissement.
Mme Joyal (Elizabeth) : Bien,
c'est... ce n'est pas toutes les écoles qui ont un conseil d'établissement bien
garni ou qui arrivent à le faire assez rapidement. Des fois, c'est un enjeu,
les parents n'ont pas tant le souhait de s'impliquer. Donc, de savoir que
peut-être il y aurait des enquêtes à leur sujet, et tout ça, il y en a qui vont
trouver le truc rébarbatif. Même si on sait que ce ne sera pas nécessairement
quelque chose qui va être utilisé régulièrement et à outrance, ça peut quand
même être un élément supplémentaire qui va venir ajouter dans la réflexion
parentale, à savoir est-ce que je m'implique ou je ne m'implique pas.
Mme Cadet : Je comprends. Sur
3.8, pouvoirs du ministre, vous... puis vous émettez des préoccupations
concernant «la concentration des pouvoirs au niveau ministériel quant aux
certaines dispositions, là, qui visent à déterminer le calendrier applicable
aux épreuves... aux centres de services scolaires... aux dispositions d'une loi
ou d'un règlement relevant de sa compétence sanctionner les membres du conseil
d'établissement.» Donc, j'aimerais vous entendre sur votre préoccupation et,
bien, la recommandation que vous faites, donc, de réitérer l'importance de
s'assurer que les pouvoirs conférés au ministre servent véritablement à
favoriser une décentralisation effective.
M. Prévost (Nicolas) : Bien,
on a un beau principe qui est entaché dans... ensaché dans la loi, qui est le
principe de subsidiarité, donc, qui laisse une latitude aux gens qui sont dans
les établissements scolaires ou au niveau du centre de services, de prendre des
décisions concernant la réussite, le bien-être, la sécurité de leurs élèves. Je
peux comprendre que le ministère, le ministre ait une préoccupation d'être au
courant de ce qui se passe. Ça, on n'a pas de problématique à ce niveau-là.
Mais maintenant, sur... Parce qu'on voit
aussi, dans le projet de loi, on parle de probabilité d'imposer certaines
règles au niveau du code de vie, d'ajouter, justement, les sanctions au niveau
des parents ou des membres du conseil d'établissement. Pour nous, cette
gestion-là peut être une gestion qui est faite par les centres de services, par
les gens qui sont là, au niveau des centres de services, qui vont supporter et
appuyer leur direction d'établissement. Donc, pour nous, on voit un enjeu de
transmission d'informations, mais on souhaite que ce principe-là, de décision,
soit... soit au niveau des gens qui travaillent près des élèves.
La Présidente (Mme Poulet) : Merci
beaucoup. Alors, on poursuit la discussion avec le député de Jean-Lesage.
M. Zanetti : Merci, Mme la
Présidente. Sur la question de l'évaluation annuelle, là, je sais que là, on en
a parlé, mais moi, personnellement, ça ne me rassure pas du tout. Parce que,
quand on lit le projet de loi, là, ça veut dire 104 000 à peu près évaluations
de professeurs par année dans un réseau où les cadres sont surchargés et déjà
même croulent sous la bureaucratie.
D'ailleurs, dans le rapport Bedford, à la
page 62, déjà on dit qu'une des raisons pour lesquelles il n'y a pas eu
tant de suivi d'évaluations, c'est parce que les cadres étaient surchargés, tu sais.
Alors là, ils sont surchargés, puis on va
rajouter 104 000 évaluations. À mon avis, on s'en reparlera en étude
détaillée, mais juste : Ah oui, vous ne serez pas vraiment obligés de les
faire en commission, je pense, ça ne suffira pas, là. Il va falloir être
certains qu'il n'y a pas là-dessus un poids bureaucratique qui est imposé plus.
Puis, juste pour comme peut-être en
convaincre à l'avance le ministre, vu que vous êtes ici maintenant, comment
vous voyez ça, disons, 140 000 évaluations de profs à faire par année
de plus pour toutes les directions d'école du Québec? Je dis «104 000» parce
que c'est le nombre estimé d'enseignants de ce que je comprends au Québec, là.
M. Prévost (Nicolas) : D'enseignants
au Québec. Bien, vous avez raison sur l'importance de bien s'entendre, parce
que, vous savez, une fois qu'une loi est...
16 h (version non révisée)
M. Prévost (Nicolas) : ...écrite.
Maintenant, son interprétation et son application peuvent être très
différentes. J'ai bien entendu M. le ministre, comme vous, dire qu'on garde,
nous, comme direction d'établissement, cette latitude-là, mais, de prime abord,
ce n'est pas l'interprétation qu'on a fait du projet de loi. On y voyait
vraiment une supervision obligatoire de l'ensemble du personnel enseignant
faite de façon annuelle. Donc, oui, c'est sûr que ça vient alourdir, comme on l'a
mentionné dans notre mémoire, une tâche qui est déjà bien, bien, bien remplie.
M. Zanetti : Quand on lit le
rapport Bedford, au fond, l'analyse qui est faite par les gens qui ont fait le
rapport, c'est que les directions d'école ou le centre des services scolaire n'avaient
pas les outils réglementaires entre les mains suffisants pour évaluer ces
professeurs-là. Est-ce que c'est une bonne analyse, selon vous, ou, dans votre
compréhension peut-être plus fine du milieu parce que vous en êtes issus... il
y aurait-tu moyen, dans le fond, avec les outils actuels, d'évaluer comme il
faut les professeurs?
M. Prévost (Nicolas) : Mois,
avec l'ajout du projet de loi no 47, qui est venu quand même ajouter certains
outils, certaines façons de faire au niveau des directions, entre autres, le
dossier du personnel qui va suivre l'enseignant... pour nous, on y voit là un
ajout d'outils qui viennent nous aider dans, justement, cette supervision-là
qui devenait très difficile quand on faisait face à des membres du personnel
qui changeaient souvent d'établissements scolaires pour diverses raisons.
Est-ce que c'est complètement parfait? M.
le député, je vous dirais non, mais je vous dirais qu'on possède quand même
beaucoup, beaucoup d'outils, comme directions d'établissement, comme centres de
service. Est-ce qu'on a toujours l'appui, est-ce que c'est est ce que c'est
difficile et ça devient exhaustif de faire ce type de suivi là? Je vous dirais
que oui, mais on possède quand même certains outils pour le faire.
M. Zanetti : O.K. Donc, un
ajout dans un projet de loi pour donner des...
La Présidente (Mme Poulet) : Je
vous remercie. On va poursuivre les discussions avec le député de
Matane-Matapédia.
M. Bérubé : Merci, Mme la
Présidente. J'ai envie de vous offrir mon temps pour un enjeu qui n'aurait pas
été abordé que vous auriez envie de partager avec les membres de la commission,
quelque chose que vous voudriez mettre de l'avant pour la connaissance des
membres de la commission. Est-ce qu'il y a un enjeu sur lequel vous avez
travaillé que vous avez envie de nous partager?
Mme Joyal (Elizabeth) : Bien,
on a pas mal travaillé sur le projet de loi dans son ensemble.
M. Bérubé : ...plus précis
qui n'a pas été questionné.
Mme Joyal (Elizabeth) : Bien,
non, nous, on s'est exprimé, là, sur ce qu'on pensait être important. Ce qui
soulève toujours notre attention quand on prend connaissance d'un nouveau
projet de loi, ça va être son applicabilité. S'il faut mettre l'accent sur
quelque chose, c'est là-dessus, parce qu'il existe déjà beaucoup d'encadrements
légaux, puis il faut les utiliser tels qu'ils sont déjà rédigés. Puis, des
fois, c'est ça qui devient difficile, c'est l'application d'une loi, quelle qu'elle
soit, là, c'est dans l'applicabilité de la chose. Donc, c'est pour ça qu'on a
soulevé quelques enjeux de cet ordre-là dans notre présentation et dans le
mémoire, également. L'importance ne sera pas tellement sur ce qu'il y a d'écrit,
mais sur comment on va pouvoir le faire.
M. Bérubé : Vous voulez le
voir.
Mme Joyal (Elizabeth) : Oui.
M. Bérubé : O.K. Tantôt, vous
avez évoqué le fait qu'il y a plusieurs comités, avec les centres de services
scolaires, c'est ça que vous avez dit. Pouvez-vous nous parler un peu de ça?
Comment ça se passe? C'est une nouvelle réalité, c'est-tu pour le mieux?
M. Prévost (Nicolas) : Bon.
On a vu beaucoup de changements législatifs dans les dernières années au niveau
de l'éducation.
M. Bérubé : Nous aussi.
M. Prévost (Nicolas) : Première
chose. Beaucoup de changements, beaucoup de nouveaux comités. Il y a des
comités qui sont... qui ont apporté beaucoup d'eau au moulin. Je pense, entre
autres, au comité de répartition des ressources, où nous, comme direction, on
en est là, mais l'ajout de comités... souvent vient l'ajout avec reddition de
comptes. Bien, un comité qui se rencontre, bien, on jase puis là on va voir nos
directions adjointes, directions d'écoles, puis là... ah! puis j'ai une
nouvelle façon de faire, une nouvelle façon de voir, maintenant, on s'en va
comme ça, puis tu dois me rendre des comptes sur ce qui est fait. Un autre
comité va arriver avec de nouvelles demandes.
Parce que je comprends que le but est de
supporter, mais, malheureusement, dans le concret, ce n'est pas toujours ça qu'on
voit. Ce n'est pas le support, c'est plutôt l'ajout administratif de tâches qui
nous est demandé.
M. Bérubé : Ça pourrait faire
l'objet d'une autre loi sur l'efficacité des structures scolaires, puis on
serait là pour vous encourager.
M. Prévost (Nicolas) : Vous
savez qu'on parle depuis plusieurs années du rôle de l'école, M. Bérubé, puis
on bien hâte, justement, là, parce qu'on y parlerait justement des trois
missions de notre école et de se recadrer sur les choses essentielles.
M. Bérubé : Vous ne l'avez
pas vu venir, ce projet de loi là, hein, une nouvelle ronde sur la laïcité?
M. Prévost (Nicolas) : Oui et
non. On l'a vu venir, quand même.
M. Bérubé : Oui? Avec Bedford
ou avant Bedford?
M. Prévost (Nicolas) : Non,
avec les rapports, les derniers rapports.
M. Bérubé : D'accord. L'application,
ça va être beaucoup pour les enseignants aussi, ceux qui font du prosélytisme,
qui mettent de côté certains élèves s'ils sont réprimandés...
M. Bérubé : ...ça va prendre
quelle forme? Est-ce que ça va dépendre des centres de services scolaires? Ça
aussi, c'est un enjeu. On se questionne.
Mme Joyal (Elizabeth) : Oui.
Puis les enjeux de laïcité, ils sont... il y en a partout, de plus en plus,
mais...
M.
Bérubé
:
Partout au Québec.
Mme Joyal (Elizabeth) : Oui,
c'est ça, effectivement. Mais ça reste qu'ils sont concentrés dans certains
lieux plus que dans d'autres. Donc, il y a certaines applications aussi dans
cette loi-là qui font en sorte que, dans certains milieux, on y verra
probablement moins d'impact direct. Puis là c'est nonobstant le fait qu'il
pourrait effectivement y avoir des enjeux de laïcité partout...
La Présidente (Mme Poulet) : Je
vous remercie. Je m'excuse de vous interrompre, Mme Joyal,
M. Prévost. Merci à vous deux de votre contribution à nos travaux.
Alors, je suspends temporairement, là, les
travaux, le temps que le prochain groupe prenne place. Merci.
(Suspension de la séance à 16 h 10)
(Reprise à 16 h 13)
La Présidente (Mme Poulet) : Alors,
on poursuit nos travaux. Je souhaite la bienvenue à la Fédération des comités
de parents du Québec. Je vous rappelle que vous avez 10 minutes pour votre
exposé. Par la suite, on va procéder à une période d'échange. Alors, la parole
est à vous.
Mme Laviolette (Mélanie) : Merci,
Mme la Présidente. Chers membres de la Commission de la culture et de
l'éducation, je me présente, Mélanie Laviolette, présidente de la Fédération
des comités de parents du Québec et parent bénévole dans les instances
scolaires depuis une douzaine d'années. Je suis accompagné de Jérôme Maltais,
vice-président de la Fédération des comités de parents et parent bénévole
également, de Corinne Payne, directrice générale de la Fédération, et de
Stéphanie Rochon, directrice des communications et des affaires publiques.
Merci de recevoir la Fédération des
comités de parents du Québec pour commenter ce projet de loi portant sur la
laïcité, la qualité des services éducatifs, l'utilisation de la langue française
et de la gouvernance de notre réseau scolaire. Notre fédération a pour mission,
depuis maintenant plus de 50 ans, de défendre et de promouvoir les droits
et les intérêts des parents et des élèves de l'école publique. Nous
accompagnons et nous soutenons nos membres, soit les comités de parents de plus
de 90 % des centres de services scolaires. Nous portons la voix des
milliers de parents bénévoles de toutes les régions du Québec qui participent à
la gouvernance du milieu scolaire.
D'entrée de jeu, je tiens à dire que la
situation révélée à l'école Bedford, dans les médias et dans le rapport
d'enquête, est inacceptable. La FCPQ adhère aux grands principes de laïcité et
d'égalité entre les personnes, ce que le ministre met de l'avant dans le projet
de loi. Pour notre fédération, il apparaît clair que les problèmes de
non-respect de la laïcité rencontrés à l'école Bedford et dans certaines autres
écoles où il y a eu enquête ont été exacerbés par le manque de connaissance et
de respect de la Loi sur l'instruction publique, du régime pédagogique, du rôle
et des responsabilités...
Mme Laviolette (Mélanie) :
…personnes et des instances impliquées et des politiques internes, notamment
celles contre le harcèlement. La connaissance de la loi sur l'instruction publique
et le respect du rôle des parents engagés se détériorent. C'est ce que nos
communications avec nos membres et avec les parents engagés dans le milieu
scolaire partout au Québec nous révèlent depuis quelques années. Que ce soit
grâce à notre service d'accompagnement et de conseil aux parents, par nos
consultations et nos sondages, via notre mentorat des comités de parents, le
constat est clair et très inquiétant.
Voici quelques commentaires des parents
tirés de notre dernier bilan sur la gouvernance scolaire. «L'école semble
vouloir tenir les parents à l'écart. Le conseil d'établissement est peu à
l'aise avec les débats. Les parents ne sont pas écoutés. Ils n'osent pas amener
leurs préoccupations ou leurs points, car ils se sentent dénigrés, intimidés et
ont l'impression de déranger. Et finalement, on a l'impression qu'on nous
demande d'adhérer aux projets… aux décisions. Mais lorsque vient le temps de
les mettre en œuvre, les commentaires des parents sont souvent ignorés.» Voici
ce que les parents ressentent actuellement. Pourtant, la recherche démontre que
les parents peuvent avoir une réelle influence positive sur la réussite des
élèves en s'impliquant dans la prise de décision au sein du milieu scolaire. En
ce sens, nous voulons souligner deux points tirés de notre mémoire dans le
cadre de cette tribune.
M. Maltais (Jérôme) :
Premièrement, l'introduction d'un code d'éthique pour les membres du conseil
d'établissement est bien accueilli par 90 % des comités de parents
membres. Cependant, un code d'éthique sans une meilleure connaissance et un
plus grand respect du rôle et des responsabilités du conseil d'établissement et
de ses membres, est-ce que cela sera vraiment utile? Atteindrons-nous
l'objectif souhaité?
La FCPQ recommande que le conseil d'établissement
adopte le code d'éthique applicable à ses membres sans distinction de
catégories de membre à partir d'un gabarit national qui inclut un engagement à
réaliser la formation obligatoire des membres des conseils d'établissement
ainsi que les mécanismes de suivi nécessaires pour en assurer sa complétion.
Nous ajoutons que les parents engagés ne sont pas favorables à ce que le
ministre puisse renverser les décisions des instances locales, que ce soit
durant les conseils d'établissement ou les conseils d'administration. Il faut
reconnaître et respecter les leviers déjà en place dans nos milieux. C'est le
principe de subsidiarité. La grande majorité des parents qui s'impliquent dans
les instances scolaires le font avec de bonnes intentions et ne devraient pas
être pénalisés pour les quelques exceptions. Nous avons de grandes inquiétudes
que ces mesures supplémentaires, si mal interprétées ou mal expliquées,
découragent davantage l'implication parentale dans le milieu scolaire.
Mme Rochon (Stéphanie) : Deuxièmement,
la situation à l'école Bedford expose de nouveau une lacune maintes fois
constatée dans les dernières années, partout au Québec, il nous manque un
mécanisme de recours lorsque la loi d'instruction publique est bafouée. Ce
n'est pas seulement une question de respect de laïcité. La FCPQ insiste sur la
nécessité d'un véritable mécanisme indépendant de recours pour permettre aux
parents de faire respecter leurs droits en cas de manquement. Un mécanisme qui
n'est pas lié aux services aux élèves, mais bien au fonctionnement des
instances scolaires.
Mme Laviolette (Mélanie) :
Avant de conclure, nous voulons mentionner que la mise en œuvre de ce projet de
loi soulève plusieurs inquiétudes. Les parents appellent à la vigilance dans
l'interprétation et l'application du projet de loi une fois adopté. Il est
crucial que les mesures soient appliquées dans l'esprit de la loi, soit dans le
respect de la laïcité et de l'égalité femme-homme, et non d'une manière qui
pourrait accroître la discrimination ou engendrer des inégalités. Il faut
éviter que des dérives ne viennent nuire à l'inclusion, à l'égalité entre les
personnes et à la qualité des services éducatifs.
Tout ce qui est réalisé dans le milieu
scolaire doit viser à favoriser la réussite et le bien-être des élèves. C'est
la raison pour laquelle les écoles existent. C'est la raison pour laquelle nous
sommes ici aujourd'hui et c'est la raison pour laquelle les parents bénévoles
consacrent temps et énergie dans les comités de participation du milieu scolaire.
À chaque étape du cheminement de ce projet de loi et surtout dans sa mise en
œuvre, une seule question doit guider nos décisions : Est-ce dans
l'intérêt de l'élève? Le respect de cet objectif fondamental est la seule voie
possible vers une école plus juste, inclusive et tournée vers l'avenir.
Je vous remercie de votre attention. Nous
sommes maintenant prêts à répondre à vos questions.
La Présidente (Mme Poulet) :
Merci beaucoup. Alors, on va continuer avec les… la période d'échange. M. le ministre,
la parole est...
La Présidente (Mme Poulet) : ...à
vous.
M. Drainville : Oui. Alors,
d'abord, merci pour votre engagement, votre implication. Moi, je dois vous
dire, d'emblée, que je juge très importante, essentielle la participation des
parents aux décisions des conseils d'établissement. Je... j'ai déclaré déjà, il
y a un certain temps, que... j'ai rappelé que les premiers éducateurs des
enfants, ce sont les parents, que l'éducation commence à la maison. Il me
semble que ce sont des vérités qui ne devraient pas être... en fait, qui
devraient être tellement évidentes qu'elles n'auraient... qu'elles ne devraient
pas devoir être rappelées. Mais, malheureusement, j'ai senti le besoin de le
faire puis je pense que c'est important de le redire une fois, de temps en
temps, de se rappeler que les premiers éducateurs des enfants, ce sont les
parents, et que l'éducation commence à la maison. Et pour ce qui est du
fonctionnement de l'école et de son conseil d'établissement, notamment de son
conseil d'établissement, c'est très important que les parents y participent.
Donc, je suis très content que vous soyez là pour nous rappeler à quel point le
rôle des parents est essentiel dans le fonctionnement de notre réseau scolaire.
• (16 h 20) •
Là, je veux juste comprendre, là. Pour ce
qui est du code de vie, vous êtes favorables à ce que le code de vie qui régit,
donc, le comportement attendu des élèves à l'école... vous êtes favorables au
fait que le code de vie, tel que prévu dans le projet de loi, prévoirait que
les élèves, dorénavant, doivent respecter un certain nombre de choses, comme
l'égalité entre les hommes et les femmes, par exemple. Parce qu'on a eu vent...
et, enfin, on a eu plus que vent, des cas particulièrement troublants nous ont
été rapportés d'élèves qui, par exemple, vont dire à leur enseignante
femme : Toi, tu dois te comporter comme ma mère à la maison, tu me dois
respect. Des élèves masculins qui disaient ça à leur enseignante féminine, là.
Totalement inacceptable. On s'entend là-dessus, n'est-ce pas, Mme Laviolette?
Le projet de loi prévoit aussi que les
élèves, dorénavant, devront respecter, dans leur comportement, l'orientation
sexuelle des autres élèves, qu'ils ne pourront pas avoir de comportement
discriminatoire sur la base de l'orientation sexuelle. Parce qu'on a vu, là
aussi, des comportements dans des écoles, ça a été abondamment rapporté,
documenté, diffusé : mort aux gais.
Mme Laviolette (Mélanie) : ...que
vous disiez que le parent est le premier éducateur de son enfant. Ce que vous
soulignez présentement, c'est des règles de respect de base, c'est du respect
élémentaire, en fait...
M. Drainville : Voilà.
Mme Laviolette (Mélanie) : ...d'accepter
l'autre, de le comprendre dans qui il est, dans ce qu'il est, dans sa
globalité. Et effectivement que ces discriminations là, non seulement elles
sont inacceptables, mais je dirais qu'elles sont révoltantes. Donc, il faut
s'assurer que qui que ce soit puisse évoluer dans un environnement qui est sain
pour lui, et dans le respect, et dans l'acceptation de qui il est.
M. Drainville : Et là, si
j'ai bien compris 1.2 de votre mémoire, vous souhaiteriez que ce code de vie,
qui prévoit notamment ce dont on vient de parler, respect de l'égalité
hommes-femmes, des comportements qui ne sont pas discriminatoires, etc.... vous
souhaiteriez que le... qu'il y ait une espèce de code de vie modèle qui soit
soumis aux écoles?
Mme Laviolette (Mélanie) : En
fait, ce qu'on suggère, c'est un gabarit national, qui est modulable en
fonction de la réalité de chacun des milieux, mais pour s'assurer que les
grandes lignes importantes qui doivent s'y retrouver pour mettre de l'avant ces
règles-là, justement, de base, élémentaires, selon moi, se retrouvent dans
chacun des codes de vie de chacune des écoles de la province. Donc, ensuite de
ça, on l'adapte à notre réalité, parce que c'est différent d'un endroit à
l'autre, et les enjeux sont différents.
M. Drainville : Oui, un peu
comme on l'a fait avec le gabarit pour le plan de lutte à la violence et à
l'intimidation.
Mme Laviolette (Mélanie) : Exactement
ça.
M. Drainville : On a
déposé... on a transmis, en fait, aux écoles... on a transmis aux écoles un
modèle de gabarit qui est le même pour tout le monde, et ils peuvent... les
écoles peuvent, les conseils d'établissement peuvent prendre ce gabarit et puis
l'ajuster selon leur réalité locale, avec le concours, bien entendu, des
directions d'école et des équipes-écoles.
Mme Laviolette (Mélanie) : Effectivement.
Et, de cette façon-là, on s'assure que les éléments qui sont importants pour la
société québécoise d'aujourd'hui ne soient pas oubliés, et oubliés pas de
mauvaise foi...
Mme Laviolette (Mélanie) :
...parce que, parfois, on passe à côté parce que ce n'est pas une réalité qui
nous rejoint dans notre milieu nécessairement.
Mme Payne (Corinne) :
Pour moi, c'est très important. Présentement, les codes de vie dans un conseil d'établissement
sont approuvés, ils ne sont pas adaptés. Puis ces deux verbes-là sont très
importants dans un conseil d'établissement parce que...
M. Drainville :
Attendez. Répétez ça, Mme Corinne.
Mme Payne (Corinne) :
Sont approuvés, pas adoptés. Alors quand le code de vie est approuvé, les
parents au conseil d'établissement peuvent l'accepter ou pas. Ils ne peuvent
pas changer. Adopter, les parents puis les membres du conseil d'établissement
peuvent changer qu'est ce qui est dedans. Alors, c'est une nuance très
importante dans le conseil d'établissement, approuver versus adopter.
M. Drainville : Alors,
est-ce que vous comprenez que... de notre projet de loi, qu'ils seront
dorénavant adoptés ou approuvés?
Mme Payne (Corinne) :
Bien, présentement, il y a juste qu'il faut ajouter ça dans le code de vie.
Mais si on veut ajouter ça, puis on veut vraiment mettre tout le monde à la
pâte... la main à la pâte, il faut qu'on fasse le changement que le code de vie
est adopté par le conseil d'établissement parce que...
M. Drainville : Et pas seulement
approuvé.
Mme Payne (Corinne) : Ce
n'est pas seulement approuvé.
M. Drainville : Parce
que le code de vie, actuellement, dites-vous, il est quoi? Il est proposé par
la direction de l'école au conseil d'établissement?
Mme Payne (Corinne) :
Bien, c'est l'équipe-école. Exactement.
M. Drainville : Hein?
Mme Payne (Corinne) : Il
est proposé par la direction puis l'équipe-école. Alors, je dois dire que quand
ça va bien, là, on ne fait pas la différence entre adopter puis approuver, mais
quand ça va mal, tout le monde sait c'est quoi, puis c'est là que ça peut créer
des situations très difficiles. Alors, mais quand c'est «adopter», les parents
peuvent dire on veut changer telle affaire dans ce code de vie là.
M. Drainville : Et par
rapport au plan de lutte contre la violence et l'intimidation, qu'en est-il?
Mme Payne (Corinne) :
C'est «adopter».
M. Drainville : Celui-là
est adopté?
Mme Payne (Corinne) :
Oui.
M. Drainville : Donc, il
y a discussion.
Mme Payne (Corinne) :
Exactement...
M. Drainville : Sur le
plan de lutte, il y a discussion, mais pour le code de vie de l'école, il n'y a
qu'approbation, pour ou contre.
Mme Payne (Corinne) :
Voilà.
M. Drainville : O.K.
C'est une distinction qui est très importante, je vous l'accorde.
Mme Laviolette (Mélanie) :
C'est toute la différence dans l'application et dans la mise en œuvre également
parce qu'un conseil d'établissement, il faut comprendre qu'il y a un
renouvellement des membres, souvent à chaque année, et des membres qui sont moins
habitués de siéger vont se faire présenter le code de vie et vont l'approuver
d'emblée sans nécessairement le remettre en question. D'avoir la possibilité de
le travailler, de repenser les points, d'ajouter des choses qui nous manquent
également en tant que membre du conseil d'établissement peut faire une grande,
grande différence sur l'acceptabilité également de ce code de vie là.
M. Drainville : Il me
reste combien de temps, Mme la Présidente?
La Présidente (Mme Poulet) :
Il reste neuf minutes.
M. Drainville : O.K.
Parce que mon collègue le député de Vanier-Les Rivières aimerait bien
intervenir. Je note. Et vous avez entendu le groupe précédent, qui n'est pas...
qui n'était pas très favorable à la création du comité sur la qualité des
services éducatifs. Vous, vous vous prononcez en faveur de cette création.
Pouvez-vous m'expliquer quelles sont les raisons qui vous... qui vous amènent à
vous prononcer en faveur de la création de ce comité?
Mme Laviolette (Mélanie) :
On croit que d'avoir un organe qui permet de garder un œil sur ce qui se passe
dans la qualité des services éducatifs va être intéressant. D'autant plus qu'il
faut aussi se rappeler que la... Excusez-moi, j'ai perdu mon temps en cherchant
à lire autre chose. C'est ça. Il faut juste faire attention de ne pas dédoubler
cependant les comités. Donc, il y a déjà des choses qui se font sur les C.E.,
sur les C.A. également. C'est de s'assurer d'une plus-value, mais également de
s'assurer d'une place d'un parent sur ce comité-là, considérant que la qualité
des services, là, on en est un peu l'utilisateur aussi. Donc, de pouvoir avoir
notre mot à dire sur ce qui est... sur ce qui est offert et la façon dont les
services sont dispensés est important pour nous.
M. Drainville : Très
bien. Vous êtes également favorables au fait que ce soit la langue française
qui soit utilisée dans les communications entre membres du personnel.
Mme Laviolette (Mélanie) :
Hum, hum.
M. Drainville : Par contre,
dites-vous, il faut... il faut tenir compte de l'accueil des personnes qui ne
parlent pas français. Vous parlez des parents, notamment, ici, j'imagine, hein?
Mme Laviolette (Mélanie) :
Oui, tout à fait. Il y a des parents qui sont... qui sont issus de
l'immigration, que leur enfant peut parler français parce qu'il y a le
processus de francisation, mais il faut s'assurer de garder un lien de
communication avec ces parents-là qui ne maîtrisent peut-être pas la langue
aussi bien.
M. Drainville : Mais
vous êtes conscients du fait qu'on n'impose pas le français dans les
communications entre le personnel et les parents. C'est souhaitable,
évidemment, mais un parent qui ne parle ni français ni l'anglais, qui arrive au
Québec, qui ne parle qu'espagnol, par exemple, s'il y a un membre du personnel
qui peut au départ l'aider à comprendre un petit peu...
Mme Laviolette (Mélanie) :
À établir les liens.
M. Drainville : ...puis
parler, je veux dire, là, à un moment donné, il faut aussi être de bon
jugement, là.
Mme Laviolette (Mélanie) :
Oui, tout à fait.
M. Drainville : Puis il
faut penser à l'enfant, là. Et ultimement, là, l'école existe pour les enfants,
là. Alors, à un moment donné, il faut faire preuve aussi de...
M. Drainville : ...de bons
jugements justement. Alors, je vais laisser mon collègue issu lui-même du
milieu de l'éducation, n'est-ce pas, prendre le relais, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Poulet) : Alors,
M. le député, la parole est à vous.
M. Asselin : Merci beaucoup,
Mme Laviolette, Mme Rochon, Mme Payne, M. Maltais. On me considère comme issu
du monde de l'éducation, j'ai travaillé avec la Fédération des comités de
parents pendant un bout de temps, et puis j'en suis sorti grandi. C'est
toujours un intérêt de travailler avec les parents. J'aimerais quand même — j'ai
lu votre mémoire qui est bien fait — vous entendre sur la question de
l'évaluation. J'ai cru comprendre à la lecture du mémoire qu'il y a certains
parents qui disaient : Mais ça n'a pas été échelonné sur trois... cinq
ans. Mais vous vous prononciez en fonction de l'évaluation annuelle, j'aimerais
peut-être ça, vous précisiez ce que vous voulez dire. Je ne sais pas si vous
étiez là au moment où on a rencontré M. Prévost de la FQDE, puis j'ai trouvé
intéressant les discussions avec M. le ministre. Moi-même, je crois beaucoup à
l'évaluation annuelle. Alors, je vous laisse la place, là, pour faire le point
sur ce sujet-là.
• (16 h 30) •
Mme Laviolette (Mélanie) : L'évaluation
des enseignants reste quelque chose qui est important, on ne se le cachera pas.
J'ai pris... J'étais présente effectivement lorsque M. Prévost a souligné la
part — je vous dirais qu'à chaque année ça peut être exhaustif — effectivement,
dans nos consultations, un trois à cinq ans ressortait de la part de certains
comités de parents membres, disant que ça pouvait être suffisant de faire ce
retour-là sur une base peut-être un petit peu plus grande, enlever un peu de
chaleur et de pression sur les épaules de nos amis des directions d'école
également. Mais on veut s'assurer aussi que l'enseignant soit suffisamment
encadré pour, un, bien faire son travail et recevoir l'aide qu'il a besoin dans
le cadre de son travail également, et de corriger certaines lacunes qui
pourraient y arriver au besoin. Donc c'est toujours dans l'intérêt et la
protection des enfants. C'est toujours notre première priorité dans le cadre de
recommandations comme celles-ci.
M. Asselin : Donc, vous êtes
à l'aise avec ça?
Mme Laviolette (Mélanie) :
Oui.
M. Asselin : Vous avez eu les
dispositions du projet de loi qui concernent l'évaluation. Parfait. Alors, je
vous remercie.
Mme Laviolette (Mélanie) :
Merci.
La Présidente (Mme Poulet) : Oui,
M. le ministre, il reste quatre minutes.
M. Drainville : Combien?
La Présidente (Mme Poulet) :
Quatre.
M. Drainville : Tout à
l'heure, j'ai dit, par rapport aux évaluations, j'ai insisté sur le fait que le
mot «annuellement» apparaît au projet de loi, moi, ça me semble important de
rappeler que ce qui est proposé dans le projet de loi, c'est une évaluation
annuelle, mais, dans la façon de se faire, je pense que là il doit y avoir un
espace d'autonomie. Et puis, dans certains cas, l'évaluation peut se faire au
terme d'une courte discussion, tout va bien, continue, mais elle doit se faire.
Il faut quand même que cette rencontre-là ait lieu pour signifier tu es... On
s'entend, ça va bien, tu es dans la... tu es bon, tu es bonne, continue, tu sais,
bon.
Mme Laviolette (Mélanie) : Je
suis certaine que les enseignants vont apprécier cette marque de
reconnaissance.
M. Drainville : Bon, alors,
oui, moi aussi, je pense. Mais ça m'amène quand même à vous poser la
question : À travers les discussions que vous avez avec vos parents,
est-ce que vous avez le sentiment ou la conviction que cette évaluation-là,
elle se fait présentement dans les écoles ou est-ce que c'est à géométrie
variable? Est-ce que c'est... Comment... Parce que c'est supposé se faire, si
ce n'est que pour guider le corps enseignant vers les bonnes formations. Parce
que, je vous rappelle, la loi dit : Il faut faire... Il faut qu'une
enseignante, un enseignant fasse 30 heures de formation aux deux ans. Donc, si
on veut que la direction d'école identifie avec l'enseignante les bonnes
formations, il faut d'abord qu'on identifie ce sur quoi il faut mieux se
former, ce sur quoi il y a des choses à travailler, puis on a tous des choses à
travailler.
Ce n'est pas... Moi, je ne suis pas en
train de faire une critique urbi et orbi des enseignants. Chaque enseignant a
ses forces puis a ses choses sur lesquelles travailler. Puis, nous tous, comme
êtres humains, avons aussi nos forces et les dimensions sur lesquelles on doit
travailler. Alors, si on veut que les directions d'école puissent jouer ce
rôle, identifier avec les enseignants les bonnes formations, bien, il faut
d'abord qu'il y ait une évaluation. Et est-ce qu'elle se fait présentement
d'après les discussions que vous avez?
Mme Rochon (Stéphanie) : Mais
les parents ont formulé beaucoup de commentaires pendant la consultation, puis
ça nous a permis aussi...
16 h 30 (version non révisée)
Mme Rochon (Stéphanie) : ...de
l'écrire, notre mémoire, puis de faire des recommandations ou de ne pas faire
de recommandations. Puis, certains des commentaires, c'étaient qu'ils étaient
surpris que ça ne se fasse pas déjà. Donc, on est certains que, dans plusieurs
centres de services scolaires, ça se fait déjà, d'autres, probablement non.
Mais c'est... c'est un commentaire qu'on a eu.
Mme Payne (Corinne) : Puis si
je peux ajouter.
M. Drainville : Oui.
Mme Payne (Corinne) : Quand
vous avez un bac en ressources humaines, on apprend à un très jeune âge que la
bonne pratique de ressources humaines, c'est de faire une évaluation avec
chacun de vos employés, chaque année. Alors, ça, c'est comme nature. Mais, je
pense, c'est... il faut mettre en place, un petit peu comme M. Prévost dit, les
guides de bonnes pratiques, c'est quoi.
Puis, je pense, vous avez dit vous-même, M.
le ministre, vous avez dit, tu sais, comme il y a des bons employés, que l'évaluation
annuelle, elle ne dure pas si longtemps que ça. Parce que vous disiez :
Aïe! Tout est beau, ça va bien, continue. Mais, même les bonnes... des bonnes
employées, elles ont besoin d'entendre ça. Puis, les autres, bien, il y en a
certaines qu'il faut que tu fais une évaluation à tous les mois parce qu'il y a
des choses à corriger. Puis, il y en a d'autres, tu fais au moins une fois par
année. Chaque humain qui travaille, n'importe où, il mérite d'avoir une
rétroaction de son patron au moins une fois par année. Alors, je pense, c'est
la base des ressources humaines générales.
M. Drainville : Donc, vous
trouvez ça, vous... une fois par année, vous trouvez ça raisonnable?
Mme Payne (Corinne) : Oui.
Puis, peut-être, ça... comme M. Prévost a dit, ça prend un bon guide, un guide
de bonnes pratiques pour aider les gestions. Parce qu'il y a beaucoup de jeunes
gestionnaires, on sait, sa banque est vide. Il y a beaucoup de jeunes
gestionnaires...
La Présidente (Mme Poulet) : Je
m'excuse de vous interrompre. On va poursuivre les discussions avec la députée
de Bourassa-Sauvé.
Mme Cadet : Merci, Mme la
Présidente. Bonjour, Mme Laviolette, M. Maltais, Mme Payne et Mme Rochon. Merci
beaucoup pour votre... votre présentation et votre volumineux mémoire que vous
nous avez transmis.
Je commencerais peut-être avec vous avec
le dernier point que j'ai abordé avec le groupe précédent, avec M. Prévost, qui
concernait la question de la centralisation des pouvoirs. Donc, vous les avez
entendus, donc, émettre certaines préoccupations, préoccupations d'ailleurs qu'ils
ressassaient, là, de leur présentation au projet de loi n° 40 dans la
législature précédente. Vous-mêmes, donc, vous dites, dans votre mémoire, à la
page 25, bon, que «vous n'êtes pas favorables aux mesures introduites par
l'article 12 du projet de loi qui prévoient que le ministre a le pouvoir d'imposer
des sanctions et de renverser les décisions des instances. - Ici, on parle,
donc, des conseils d'établissement. - Une centralisation du pouvoir de
renverser des décisions prises localement pourrait avoir comme effet de
décourager la participation parentale bénévole dans les instances. Le ministre
devrait être informé, mais la fédération demande de la vigilance pour l'ajout d'un
pouvoir centralisé dans les mains du ministre. Plusieurs membres craignent de l'ingérence.»
Donc, j'aimerais vous entendre, donc, développer sur cet aspect-là et ensuite,
donc, de la recommandation que vous émettez à la page 26, donc, liée à la
préoccupation que vous évoquiez.
Mme Laviolette (Mélanie) : Tout
à fait. Alors, bien évidemment que, dans le cas d'une faute grave, qu'on s'entend
que le ministre peut, peut et se doit d'intervenir dans une situation comme
celle-là.
Cependant, dans le cas de nos instances de
participation, incluant les instances de participation parentale, donc les
comités de parents, les conseils d'établissement également, les conseils d'administration,
il faut quand même garder une certaine indépendance de ces organisations-là
pour leur permettre de faire leur travail. C'est impossible de faire un débat
de fond en ayant toujours la crainte que notre décision soit renversée ou que
quelqu'un vienne s'ingérer dans notre décision.
L'autre chose, et M. Prévost l'a mentionné
juste avant nous, le recrutement des parents, c'est difficile. C'est vraiment
difficile. C'est... C'est des choses qu'on fait sur notre temps personnel. Si
on rajoute un... Si on rajoute ceci derrière l'implication du parent, ça
pourrait en déranger certains. Et d'autant plus que le roulement de parents qui
peut siéger sur ces organisations-là fait que juste juste le... juste la
première année, pour comprendre les mécanismes et faire un premier tour de
roue, c'est déjà quand même demandant. Donc, il faut s'assurer que les parents
qui s'impliquent, mais les autres personnes aussi, parce qu'un conseil d'établissement,
ce n'est pas que des parents, s'assurer que chacun se sente à l'aise d'exprimer
et d'apporter des solutions, ou des recommandations, ou de s'opposer à
certaines choses aussi qui sont... qui sont apportées par les directions d'école.
Puis ne pas avoir peur de parler. Je pense que c'est ça qui est important pour
nous. C'est de garder ce pouvoir-là, de s'exprimer librement.
Mme Cadet : Oui. C'est sur...
C'est vraiment sur la question, donc, du libre arbitre, donc, des parents qui s'impliquent,
là, sentir qu'ils ont un véritable rôle et que le rôle ne pourrait pas être
renversé de façon unilatérale. Et vous faites bien de mentionner la question de
la faute grave, là, bien évidemment, à l'article 26 de la LIP, donc, la
personne... toute personne peut porter plainte au ministre pour une... pour une
faute grave. Donc, ici, donc, c'est au niveau de l'enseignant, mais on comprend
très bien, là, cette distinction-là puis on la partage...
Mme Cadet : ...merci. Puis là,
donc, je comprends que votre recommandation ici, donc, c'est donc la question
d'un comité dans chaque centre de services scolaire, composé notamment d'un
membre volontaire du conseil d'établissement, pour examiner les signalements de
manquements à l'éthique dans les conseils d'établissement. Là, pour vous, ce
serait la manière de faire qui serait la plus décentralisatrice possible.
Mme Laviolette (Mélanie) :
Tout à fait.
Mme Cadet : O.K. Parfait.
Ensuite, vous nous dites «aider le conseil d'établissement à jouer son rôle».
Bon. Vous élaborez donc plusieurs exemples qu'on n'aura pas le temps d'évoquer
dans notre échange, des situations d'ingérence ou de non-respect du rôle, des
responsabilités des membres du conseil d'établissement prévus par la LIP. Donc,
dans ce cadre-là, vous dites, donc il faudrait plus de formation pour que ce...
• (16 h 40) •
Mme Laviolette (Mélanie) : On
a ce qu'on appelle la formation obligatoire pour les membres de conseils
d'établissement, mais elle n'est obligatoire que de nom si je me fie à ce qui
se passe sur le terrain. Donc, il faudrait y avoir des mécanismes de contrôle,
s'assurer que cette formation là, elle est faite. Et je tiens à souligner que
la formation ne s'adresse pas qu'aux parents, cette formation-là s'adresse aux
enseignants qui siègent, au personnel de soutien, aux directions
d'établissement également. Et souvent la perception qu'on a, c'est que c'est la
formation des parents pour siéger sur un conseil d'établissement et c'est la
formation du conseil d'établissement, donc s'assurer que tout le monde l'a vu
de cette façon-là, les échanges, le rôle et responsabilités de chacun sera
mieux déterminé également. Et on va s'assurer d'avoir une organisation qui
fonctionne dans le bien de l'établissement qu'on contrôle. Donc, ça, c'est bien
important.
L'autre chose, et ça, on en discutait un
petit peu avant en préparation, mais la Loi sur l'instruction publique dans
certains établissements est considérée comme un outil de travail, un document
de travail et non pas une loi. Donc, on prend les morceaux qui font notre
affaire, on met de côté ceux qui nous tentent moins, puis donc l'application de
la loi n'est pas égale partout, n'est pas prise au sérieux de la même façon non
plus. Et ça, pour nous, c'est un enjeu.
Mme Cadet : Mais c'est
intéressant que vous souleviez ce point-là, parce que... bien, en fait, ça me
ramène un peu, donc, à la... votre conclusion, parce que vous faites un peu,
donc, ce constat-là, vous dites : «Pour notre fédération, il paraît clair
que les problèmes ici — donc, on se réfère bien évidemment à la
laïcité — mais les problèmes de non-respect de la laïcité rencontrés
dans certaines écoles ont été exacerbés par le manque de connaissance et de
respect de la Loi sur l'instruction publique». Donc, on est un peu, donc, dans
le phénomène que vous, vous évoquez, soit que... bien, je trouve ça
intéressant, la manière dont vous le mentionnez, là, que, pour certains
établissements, on le considère comme un outil de travail et non pas comme une
loi. Et là, donc, je me demande, à certains égards, ici, est ce que vous
considérez que nous disposions déjà des leviers pour agir, pour répondre à la
situation qui nous amène ici en commission parlementaire, dont le cas Bedford,
puis vous l'avez mentionné même d'entrée de jeu en introduction, qui est
absolument choquante et inacceptable? Est-ce que vous considérez qu'il y a déjà
des leviers qui étaient possibles dans la Loi sur l'instruction publique, mais
qu'il y a un autre aspect qui s'est fait, parce qu'on le considère... on tasse
qu'est-ce qu'on n'aime pas, on utilise qu'est ce qu'on aime, puis on le... on
s'ajuste en conséquence, dans notre milieu?
Mme Laviolette (Mélanie) : Un
secrétaire général, avocat de formation, m'avait déjà dit «selon mon
interprétation». Alors, c'est certain que selon mon interprétation, si tout le
monde fait ça, elle peut être interprétée de toute façon... de toutes les
façons du monde, là, cette loi-là.
On manque de recours, on manque de
leviers, on manque de recours. À qui on s'adresse dans le cas où la Loi sur
l'instruction publique n'est pas respectée? Et ça, c'est important. Et je crois
que c'est ce frein là qui fait qu'il y a des problématiques qui s'installent,
parce que, quand on le constate, à qui on s'adresse, de quelle façon on peut
s'assurer que les leviers seront mis en place pour régler la situation. Donc,
tout est là. Si on lit la loi, tout est là, mais comment est-ce qu'on
l'applique et qu'on s'assure de l'application de ces règlements-là? Je pense
que le problème est plutôt là.
Et il faut la voir comme une loi. Il n'y a
personne qui va remettre en cause la Loi sur la sécurité routière, mais on se
permet de remettre en cause la Loi sur l'éducation publique. Donc, je crois que
c'est... Il faut réfléchir à comment donner un peu ce mordant-là à la loi puis
faire comprendre le sérieux de cette loi-là également pour son application.
Mme Cadet : Vous, est-ce que
vous proposez quelque chose à cet effet? Je sais que vous avez un bout sur les
recours, un extrait sur une demande pour un mécanisme de recours indépendant,
mais là je comprends que ça concerne que le conseil d'établissement, ici.
Mme Laviolette (Mélanie) : Ça
pourrait concerner les conseils de... des conseils d'administration des centres
de services scolaires également, je crois, qui ont la même problématique dans
certains milieux où ils n'ont pas les recours nécessaires pour l'application de
la loi, puis on constate qu'il y a des manquements à cette loi-là, et ça
pourrait être quelque chose d'équivalent, ou protecteur national de l'élève,
mais où est ce qu'on peut se référer pour ça? On ne peut pas écrire à M. le
ministre, aussi sympathique soit-il, à toutes les fois qu'on constate un
manquement à la loi. Donc, il faut s'assurer qu'il y a une organisation ou
un... ou un levier qu'on peut utiliser pour s'assurer de l'application de cette
loi-là.
Mme Cadet : O.K. Merci. C'est
vraiment très clair. Puis, dans, justement, dans votre recommandation sur un
recours indépendant, donc, vous proposez un mécanisme d'arbitrage ou de
règlement des différends, ce que vous faisiez déjà dans...
Mme Cadet : ...cadre du projet
no 40, là, à ce que je peux lire, notamment accessible aux parents. Donc, c'est
pour ça que vous dites que ça pourrait s'appliquer ailleurs... «notamment
accessible aux parents membres des instances de participation parentale en cas
de non-respect de la LIP». Donc, c'est...
Mme Laviolette (Mélanie) : Bien,
je vous dirais que... Bien, de un, nous, ça vient des parents, les
recommandations ou les plaintes que nous recevons, mais également parce que le
parent peut se faire tasser un petit peu, dans un conseil d'établissement ou
dans un conseil d'administration, sous prétexte qu'il n'est qu'un parent. Donc,
tu sais, on ne comprend pas ce qui se passe trop, trop puis on se fait tasser.
Donc, il y a des manquements qu'on constate, puis on ne sait pas à qui
s'adresser pour régler tout ça.
Mme Cadet : Merci. Sur le
recours aux clauses dérogatoires, donc, vous dites : Avant même de
connaître le contenu du projet de loi, les parents délégués ont indiqué en
janvier 2025 qu'ils ne souhaitaient pas que le projet de loi requière l'usage
des clauses dérogatoires à la Charte des droits et libertés de la personne.
Donc, aussi... il n'y a pas de recommandation qui vient avec ce constat-là, en
fait, simplement, pour vous, il devrait y avoir, donc, le retrait de ces
dispositions-là?
Mme Laviolette (Mélanie) : Disons
que, dans le cadre des consultations, on nous a rapporté que ça avait provoqué
des débats relativement houleux dans certains de nos comités de parents, ce qui
fait qu'on n'a pas de recommandation, comme telle, à faire. De un, on n'a pas
de consensus clair par rapport à ce qui s'est passé, et c'est des enjeux qui,
c'est ça, qui ont provoqué de forts débats chez nos membres. Donc, on a préféré
laisser ça de côté pour l'instant.
Mme Cadet : Je comprends
bien. Bien, merci beaucoup de votre participation. Je comprends que notre
temps...
La Présidente (Mme Poulet) : Il
reste neuf... huit secondes.
Mme Cadet : Huit secondes. Je
les laisserai à mes collègues. Merci beaucoup. Merci
La Présidente (Mme Poulet) : Alors,
on va poursuivre les discussions avec le député de Jean-Lesage.
M. Zanetti : Merci beaucoup.
Merci de votre participation à la commission. Je voudrais parler de la question
de l'évaluation des enseignants. J'ai compris que vous voyez ça très
positivement puis que vous trouvez ça très important. Nous aussi. En même
temps, on dirait que tout le monde veut que les directions soient aptes à
évaluer facilement n'importe quand. J'ai l'impression que le moyen pris par le
ministre qui est de dire : Évaluation annuelle pour tout le monde, ça
vient répondre à une espèce de volonté que personne ne passe sous le radar. En
même temps, ça apparaît comme étant quelque chose qui, avec les ressources qui
sont données aux centres de services scolaires et aux écoles, actuellement,
est, d'un point de vue comme bureaucratique, juste irréalisable, tu sais...
pourrait dire : On a investi 1 milliard de plus juste pour ça, puis là, je
ne sais pas, il faudrait calculer, mais, en tout cas, là, ce qu'on ce qu'on
comprend, c'est que les gens sont à bout de souffle.
Je vous ai entendus aussi dire, dans votre
présentation, qu'une évaluation, disons, obligatoire à tous les trois à cinq
ans, ça pourrait être satisfaisant pour votre sentiment que personne ne passe
sous le radar. Est-ce que c'est une position officielle? Est-ce que j'ai bien compris
votre position?
Mme Laviolette (Mélanie) : Ce
n'est pas tant une position officielle que des commentaires qui ressortaient de
certains de nos comités de parents qui ont répondu à notre consultation en
prévision de ce mémoire-là.
Mme Payne (Corinne) : ...suggestions.
Quand vous représentez 18 000 parents en dehors de Québec, je vais vous dire
qu'il y en a de toutes les couleurs, puis toutes les formes, puis toutes les
réponses. Alors, sur certaines choses, tu peux voir vraiment des lignes de... claires
que... tu sais, comme code d'éthique, 90 % ont dit : Oui, let's go!
Quand on parle d'évaluation annuelle, il y a du monde qui sont comme : Ah
bien, peut-être que c'est trop, peut-être que ce n'est pas assez. Alors, à ce
moment-là, on ne peut pas faire une recommandation nette et précise, on peut
vous donner qu'est-ce que nos parents nous disent, puis c'est à vous de prendre
les décisions après, c'est vous qui... vous avez le gros du travail. Nous, on
présente qu'est-ce que les parents nous disent. C'est vous qui va écrire les
articles de la loi au final.
M. Zanetti : Je comprends
bien, merci. Puis, de façon générale, là, vous n'êtes pas les premiers à
souligner la question, l'enjeu de la concentration du pouvoir auprès du
ministre, là. Est-ce que, selon vous... Comment vous l'avez senti? Depuis le
projet de loi no 40, avez-vous l'impression que les parents ont perdu de
l'influence dans le réseau en général? Je décolle un peu du projet de loi, là,
mais c'est pour avoir un peu de contexte quand on va en parler dans le cadre du
projet de loi.
Mme Laviolette (Mélanie) : Quand,
il y a quelques années, on a introduit dans notre vocabulaire le principe de
subsidiarité, ça nous a pris du temps à apprendre à le prononcer, puis, par la
suite, à le maîtriser, mais je vous dirais que c'était quelque chose qui était
intéressant pour les parents, dans le sens où on se sentait impliqué et que les
décisions se prenaient le plus près possible de l'élève. Donc, le plus près
possible de l'élève, c'est difficile de faire autrement que de se sentir
concerné.
En même temps, il faut toujours garder à
l'esprit qu'il y a certains enjeux pour lesquels le milieu le plus près de
l'élève ne peut intervenir pour s'assurer sa protection, s'assurer, également,
de...
Mme Laviolette (Mélanie) : …la
qualité des services qui nous sont rendus.
La Présidente (Mme Poulet) :
…merci. Alors, on va poursuivre les discussions avec le député de
Matane-Matapédia.
M.
Bérubé
: Très
intéressant. Merci d'abord de votre engagement auprès de l'éducation. C'est
vraiment apprécié puis c'est important. Quand on dit : l'école commence à
la maison, c'est avec vous, les parents, évidemment. D'ailleurs, parfois même
le ministère vous interpelle. Je vois passer à la télévision ces jours-ci une
publicité où les parents se disent : il faut faire attention à ce qu'on
dit pour ne pas que ce soit amené à l'école. Est-ce que vous l'avez apprécié,
cette publicité-là?
Mme Laviolette (Mélanie) :
Oui, elle est bonne.
M.
Bérubé
: Elle
est bonne. C'est une des meilleures. Il y en a des moins bonnes, mais celle-là
est bonne.
Mme Laviolette (Mélanie) :
Mais je la trouve bonne parce que c'est un message qu'on tente de sortir
beaucoup et de rejoindre. Et là, mon Dieu! ça, c'est fait pour moi. Alors,
j'étais bien heureuse de ça.
M.
Bérubé
: On
est d'accord. Le religieux, ça…
M. Drainville : …
• (16 h 50) •
M.
Bérubé
: Bon,
mais celles qui sont moins bonnes aussi? O.K. alors, celles sur les enseignants
auxquels je pensais.
La Présidente (Mme Poulet) :
M. le ministre, s'il vous plaît. Alors, on poursuit avec…
M.
Bérubé
:
Alors le religieux, on pourrait penser à du personnel, mais il y a aussi
l'influence des parents auprès des enfants qui entrent déjà avec une influence
religieuse. Alors, c'est évident. Puis là les parents, vous pouvez intervenir,
mais tantôt, d'entrée de jeu, vous avez dit que c'est difficile, qu'on ne vous
écoute pas tant que ça, ça fait qu'avant de vous poser d'autres questions, je veux
vous entendre là-dessus. Qu'est-ce qu'on pourrait faire de façon générale pour
que ce soit plus attractif aussi pour la relève des parents qui veulent
s'impliquer? Puis ça m'a… ça m'a beaucoup apporté dans le sens que je trouve ça
triste. Vous considérez que vous ne vous faites pas assez entendre avec ce que
vous avez à dire puis votre implication.
Mme Laviolette (Mélanie) :
C'est… ce qui est difficile dans un rôle de porte-parole comme ça, de parents,
qu'on tente de porter ce message-là de respect et d'enseignement auprès de
notre enfant. C'est que ceux qui le font déjà, ils l'écoutent, ils nous
disent : ça va de soi. C'est ceux qui sont plus difficiles à rejoindre,
ceux qui sont plus récalcitrants, qui ont peut-être moins l'oreille, c'est ces
gens-là qui sont plus difficiles à aller chercher.
M.
Bérubé
: Si
on avait une publicité à faire avec cette intervention-là pour recruter des
parents, qu'est-ce qu'on pourrait dire?
Mme Laviolette (Mélanie) :
Ah! seigneur, aïe!, c'est une bonne question, ça.
M.
Bérubé
: Si
vous, vous êtes convaincante, là, on va y réussir… donner un coup de main.
Mme Laviolette (Mélanie) :
L'enseignement, l'école, le respect, ça commence à la maison. Et de dire
comment j'aimerais, moi, être traitée quand je sors de chez moi, de quelle
façon j'aimerais que les gens s'adressent à moi, de quelle façon je voudrais
qu'on m'écoute, qu'on m'estime, et c'est de cette façon-là qu'on agit envers
les autres. C'est…
M.
Bérubé
:
C'est très bien. Il y a de la diversité dans les parents. Il y a des parents
qui sont plus religieux, évidemment. Est-ce qu'il y a des parents s'impliquent
aussi pour s'assurer que le côté religieux puisse demeurer? Ça existe-tu dans
la diversité des parents que vous représentez?
Mme Laviolette (Mélanie) :
Certainement que ça existe. Je suis certaine que oui. En même temps, c'est là
toute l'importance de faire comprendre que la laïcité à l'école, c'est-à-dire
l'importance, ce n'est pas tant d'enseigner la religion, parce que la religion,
c'est personnel et ça s'enseigne à la maison, mais pas à l'école.
M.
Bérubé
: Vous
comprenez pourquoi je dis ça? Parce qu'il faut y avoir des mobilisations,
quelles que soient les confessions, où les gens se mobilisent et c'est eux qui
sont présents, les gens qui veulent maintenir la religion. Et puis il y a des
gens qui sont plus pro laïcité. Alors évidemment, il y a une élection, il y a…
ça dépend des milieux, mais je trouve ça important parce que localement, on
vous entend bien au national, vous faites tout le temps des bons travaux, des
bonnes représentations, mais localement, les dynamiques sont moins connues. Je
connais celles chez nous, mais moins celles ailleurs.
Mme Laviolette (Mélanie) :
Tout à fait. Je crois que c'est… tu sais, on parle de l'importance de
l'implication et du rôle du parent dans l'éducation, si on est capable de
valoriser réellement ce rôle-là, si on nous laisse réellement la place et qu'on
a l'impression d'être entendus dans nos instances, il n'y a pas juste les gens
qui ont quelque chose à gagner qui vont s'impliquer, il y a les gens qui vont
s'impliquer pour l'ensemble des jeunes.
La Présidente (Mme Poulet) :
Merci beaucoup de votre contribution. Merci à vous quatre. Alors, la commission
suspend ses travaux pour quelques minutes, le temps que l'autre groupe prenne
place.
(Suspension de la séance à 16 h 54)
(Reprise à 16 h 57)
La Présidente (Mme Poulet) : Alors,
on reprend nos travaux. Je souhaite la bienvenue au regroupement des comités de
parents autonomes du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de
10 minutes pour votre exposé. Par la suite, on va procéder à la période
d'échange. Alors, la parole est à vous.
M. Martel (Sylvain) : Merci.
Bonjour, M. le ministre. Bonjour, membres de la commission. Le regroupement des
comités de parents autonomes du Québec est heureux d'être ici pour porter la
voix des parents francophones et anglophones engagés dans la gouvernance
scolaire, qui représentent les parents de 200 000 élèves sur plus de
la moitié du territoire. Je suis Sylvain Martel, conseiller stratégique
pour le RCPAQ et parrain engagé depuis une douzaine d'années dans la
gouvernance scolaire. Je suis accompagné de Marie-Pierre Bessette, conseillère
au développement organisationnel du RCPAQ, un parrain engagé depuis une dizaine
d'années et aussi présidente du comité de parents du Centre de services
scolaire ses Chênes.
D'entrée de jeu, commençons par dire que
nous sommes d'accord avec les principes de laïcité qui sont mis de l'avant dans
le projet de loi n° 94. C'est clair pour nous que l'école publique doit
être un lieu où chacun évolue dans un environnement neutre et exempt de toute
forme d'emprise ou d'influence religieuse. Par contre, l'adhésion aux principes
qui motivent le projet de loi n'efface pas la complexité des enjeux humains,
sociaux, culturels qui impliquent... qu'implique leur application, tout comme
les effets collatéraux possibles. Ce qui est important, c'est que les solutions
à certaines problématiques bien précises, ciblées et somme toute
exceptionnelles, ne créent pas de nouvelles difficultés sur l'ensemble du
réseau scolaire québécois. Notamment, dans le contexte incessant de la
pénurie de personnel, des parents craignent des bris de service dans leur école
si les environnements scolaires sont perçus comme moins accueillants ou
deviennent carrément inaccessibles pour certaines personnes ou communautés qui
sont prêtes à y venir œuvrer en toute bonne foi, sans aucune intention
idéologique.
Notre message est donc le suivant :
nous appelons à la prudence et à la réflexion profonde à long terme plutôt qu'à
une réaction basée sur des situations relativement rares que les outils
administratifs et réglementaires actuels qu'on a déjà en main auraient pu traiter
en bonne partie.
Notre mémoire contient
28 recommandations. 23 de ces recommandations-là traitent de
l'article 12 du projet de loi n° 94. Ce qui est proposé dans
l'article 12, ce n'est pas anodin, ça vient changer les fondements et les
dynamiques des conseils d'établissement. Soyons clairs, nous ne sommes pas
contre l'imposition de normes éthiques à cette instance, mais les mesures
proposées doivent être ajustées afin de protéger les rôles et responsabilités
des conseils d'établissement et l'équité...
M. Martel (Sylvain) : ...d'abord,
l'équité parmi les membres des conseils d'établissement et les participants au
conseil d'établissement, et ensuite une équité d'un C.É. à l'autre partout au
Québec.
Nos recommandations visent à favoriser la
clarté, la cohérence et l'efficacité dans la gestion éthique des conseils
d'établissement, tout en évitant certaines dérives potentielles. Bien entendu,
des ajustements seraient nécessaires pour les conseils d'établissement au sein
des commissions scolaires.
Mme Bessette (Marie Pier) : Les
conseils d'établissement sont des instances décisionnelles locales créées par
la LIP, où siègent des parents, des membres du personnel scolaire et des élèves
qui sont dûment élus ou nommés par leurs pairs pour les représenter. La direction
y participe sans en être membre.
L'article 12 du p.l. 94 introduit la
possibilité de confier au centre de services scolaire, donc à un fonctionnaire,
le soin de juger de la conduite des représentants élus. Ce pouvoir
administratif entier sur des représentants élus sans garantie d'indépendance ni
de contrôle externe manque certainement de légitimité. C'est aussi une
incohérence majeure avec les valeurs démocratiques défendues à plusieurs
reprises dans le p.l. 94.
• (17 heures) •
Nos recommandations sont assez détaillées
dans notre mémoire, mais en résumé, nous demandons une uniformisation des
normes pour tous les membres et participants des C.É. dans tous les C.É. du
Québec. Des normes dictées par règlement ministériel nous semblent la façon la
plus équitable et juste d'y arriver. Et il y a un précédent chez les membres
des conseils d'administration des CSS.
Il faut aussi considérer l'effet
concurrent du code d'éthique du p.l. 47, applicable aux membres du personnel et
aux personnes en contact avec les élèves. Ce code exige de faire preuve de
réserve et de modération dans ses opinions et d'agir avec loyauté envers les
écoles et les CSS. Sans tenir compte de cette incompatibilité, l'espace de
réflexion et de décision, qui est le conseil d'établissement, perd
automatiquement l'apport des membres du personnel, de la direction et
possiblement d'une partie des parents. N'oublions pas que les parents qui font
du bénévolat dans les écoles sont souvent les mêmes qui siègent au C.É. Il ne
faut pas oublier non plus de prévoir des procédures de révision en cas d'erreur
et d'abandon en cas de démission.
Nous connaissons bien le réseau scolaire
et nous sommes pragmatiques. C'est dans cette optique que nous avons construit
nos recommandations sur l'article 12 autour des structures déjà existantes
au sein des CSS, soit le responsable du traitement des plaintes, le conseil
d'administration, le comité d'enquête à l'éthique et à la déontologie, le
comité d'éthique et de gouvernance, la présidence du C.É. et la direction de
l'école. Mais, comme parents engagés dans la gouvernance scolaire, nous pouvons
aussi constater au quotidien les divergentes... les divergences, excusez-moi,
entre ce que dit la loi et les pratiques courantes au sein des instances,
notamment les C.É. Par exemple des directions qui animent ou covoquent les
séances au lieu des présidences, des membres qui ne reçoivent pas tous les
documents pertinents et informations essentielles aux décisions, des activités,
des sorties ou des dépenses du fonds à destination spéciale sans autorisation
préalable, ou encore des interprétations inexactes ou carrément fausses des
rôles et responsabilités de chacun. Ce ne sont pas des exceptions que je vous
cite là. C'est fréquent et répandu. Toutes les semaines, le RCPAQ répond à des
parents de partout au Québec qui cherchent à faire respecter la loi, leur rôle
et leurs responsabilités.
C'est pourquoi le respect des règles qui
encadrent les C.É. et le respect des rôles et responsabilités de chacun qui y
participe doivent absolument faire partie des normes d'éthique et de déontologie.
Ces normes doivent également s'appliquer aux directions, parce que ce sont des
participants actifs, essentiels et systématiques aux séances et aux travaux du
conseil d'établissement.
La formation obligatoire pour les membres
des C.É. qui a été instaurée en 2020 est un outil clair, concis et efficace
pour bien comprendre ces règles, rôles et responsabilités. Nous l'utilisons
couramment pour renseigner les parents. Mais, dans les faits, l'obligation
inscrite dans la LIP de suivre cette formation n'est pas réellement suivie. Il
n'y a pas de mécanisme pour s'assurer de cette participation. Afin de mettre
tout le monde à la même page, nous devons inclure les directions dans
l'obligation de suivre cette formation et créer ce mécanisme pour s'assurer du
suivi de la formation.
De plus, comme parents, le p.l. 94 nous
semble sortir de la compétence de l'école à l'article 13. En décrétant que
les règles de conduite peuvent prévoir le rôle des parents dans leur mise en
œuvre, on pourrait déduire qu'il serait possible pour l'école de nous imposer
des façons de faire, des attitudes et des devoirs à appliquer chez nous, dans
nos familles. Aussi, comment peut-on gérer, observer ou vérifier l'application
réelle et quotidienne de ce rôle, qui serait prescrit aux parents par l'école?
La collaboration entre les familles et les écoles ne se... se construit par la
confiance, la communication et le respect. Elle ne s'impose pas parce qu'elle
entre dans la...
17 h (version non révisée)
Mme Bessette (Marie Pier) : ...familiale,
et qu'en pratique elle est impossible à appliquer, cette mesure devrait être
retirée.
M. Martel (Sylvain) : En
terminant, comme ça fait partie de notre mission de valoriser et promouvoir l'engagement
parental dans les instances scolaires, nous recommandons d'ajouter une
représentation parentale au sein du nouveau comité sur la qualité des services
éducatifs. Les parents portent un regard unique sur la qualité des services
éducatifs, un regard ancré dans la réalité quotidienne des élèves et les effets
concrets des mesures pédagogiques. Et comme ce comité n'est pas le seul qui
bénéficierait d'un point de vue parental, nous suggérons d'aller corriger, dans
la LIP, la liste des 18 membres qui composent le comité d'engagement pour la
réussite des élèves, qui existe dans chacun des CSS, pour y ajouter également
une représentation parentale, qui est tout aussi importante.
Le RCPAQ valorise le dialogue, le partage
d'opinions, de savoirs, d'informations, la recherche de consensus et le travail
collaboratif. Ces principes sont au cœur de notre approche, pour influencer les
orientations politiques. Et, au nom des parents que nous représentons, nous
remercions la commission de nous avoir offert l'occasion de participer à ces
consultations particulières. Merci.
La Présidente (Mme Poulet) : Alors,
merci beaucoup. Alors, on débute la période d'échange avec M. le ministre.
M. Drainville : Merci, Mme la
Présidente. Bien, bravo, encore une fois, pour votre engagement, pour le temps
que vous accordez à l'amélioration de notre réseau scolaire, à la voix des
parents que vous portez. Je vous connais un petit peu moins, Mme Bessette, mais
M. Martel est quelqu'un d'engagé depuis nombre d'années, et on le voit
couramment dans les médias, et puis je... on vous sent animé par des
convictions sincères, M. Martel. Et donc on n'est pas toujours d'accord,
évidemment, c'est normal, mais je reconnais en vous quelqu'un qui est
sincèrement engagé pour donner une voix aux parents puis je veux vous remercier
pour le travail que vous faites. Et vous aussi, Mme Bessette. J'apprendrai à
vous connaître avec le temps.
Là, je veux juste être clair sur le code d'éthique.
D'un côté, vous me dites, vous nous dites : Attention au code d'éthique, là,
il pourrait porter atteinte, dans le fond, aux droits, aux pouvoirs, aux
responsabilités des parents, mais, en même temps, si je vous comprends bien,
vous me dites : Si tu es pour aller là... si vous êtes pour aller là,
bien, assurez-vous que ce soit un code d'éthique ministériel, qui s'applique à
l'ensemble des écoles, que le... que le code d'éthique de base soit le même,
là, quitte à ce qu'il soit ajusté sur une base locale, par les membres des
conseils d'établissement. Mais vous souhaitez, si je vous comprends bien, un
code d'éthique ministériel pour l'ensemble du Québec.
M. Martel (Sylvain) : En
fait...
M. Drainville : Est-ce que j'ai
bien ou mal compris?
M. Martel (Sylvain) : Bien,
il y a juste... où est-ce que ça peut empêcher... je pense qu'on... c'est... on
parle de l'autre code d'éthique, celui qui s'applique au... par rapport au
projet de loi n° 47, donc celui qui s'applique aux employés et aux gens
qui sont en contact avec les enfants, des parents bénévoles, par exemple. Mais
les parents bénévoles, s'ils siègent aux conseils d'établissement, ils sont
soumis à ce code d'éthique là. Et donc dans ce code d'éthique là, il y a une
loyauté à avoir envers l'organisation scolaire, il y a une modération dans ses
opinions. C'est tout à fait l'inverse du rôle du conseil d'établissement. Tu
sais, on doit avoir, au conseil d'établissement, des débats pour pouvoir faire
progresser les choses. Donc, c'est là qu'il faut faire attention dans... Il y a
comme une concurrence de deux codes d'éthique.
Maintenant, dans le code d'éthique
proposé, oui, effectivement, pour nous, il devrait y avoir une uniformisation, c'est-à-dire
que ça devrait être le même partout au Québec, parce que ça devrait être, de
toute façon, des principes assez généraux, qui s'appliquent dans tous les
conseils d'établissement. Donc, oui. Et on a un exemple, c'est-à-dire que le
code d'éthique, pour les membres des conseils d'administration, c'est un
règlement ministériel. Donc, pour nous, on voit là un précédent, qu'on pourrait
suivre. Nous, on a essayé de travailler en se disant : N'essayons pas de
créer trop de nouvelles affaires. On a déjà des outils, allons-y avec ce qu'il
y a en place et puis c'est comme ça qu'on a bâti nos recommandations. C'est
pour ça que ça fait beaucoup de recommandations, mais, en même temps, tu sais,
ça s'inscrit plus... selon nous, plus facilement, là, dans la structure
actuelle.
M. Drainville : Mais vous
comprenez que, sur le code d'éthique prévu par la loi n° 47, qui s'applique,
donc, au personnel scolaire... je pense que vous avez bien saisi le fait que l'essentiel
de ce code d'éthique, c'est de prévoir l'obligation, pour un membre du
personnel, de dénoncer tout comportement qui pourrait laisser croire... qui
pourrait faire craindre, dis-je, pour la sécurité physique et psychologique des
élèves. Le devoir de loyauté, il est important, bien entendu, mais ce n'est pas
l'élément central du...
M. Drainville : ...code
d'éthique, l'élément central du code d'éthique, c'est vraiment : Si tu
observes un comportement qui met à risque la santé physique ou psychologique
d'un élève, tu as le devoir de le dénoncer auprès de la direction du centre de
services scolaire. Le cœur du projet de loi, le cœur de cette loi... en fait,
du projet de loi, de la loi, maintenant, c'est vraiment ça, c'est-à-dire de
responsabiliser l'ensemble du personnel scolaire par rapport à des
comportements qui pourraient être observés et qui doivent dorénavant être
dénoncés, la loi les y oblige.
Là, si je comprends bien ce que vous me
dites, vous me dites : Cette personne qui est assujettie, qui est,
mettons, une enseignante, qui est assujettie à ce code d'éthique sera également
assujettie au code d'éthique à titre de membre d'un conseil d'établissement. Et
là, donc, cette personne-là serait assujettie à deux codes d'éthique, un code
d'éthique à titre de membre du personnel et à un code d'éthique à titre de
membre du conseil d'établissement.
M. Martel (Sylvain) : Oui,
parce que vous l'avez bien dit, c'est... le code d'éthique qui vient du projet
de loi n° 47, qui est une loi maintenant, c'est pour la sécurité des élèves,
c'est autre chose. Maintenant, vous dites la loyauté, la modération des
opinions, ce n'est pas le... mais c'est dans le modèle prescrit, il est là.
Donc, je veux dire, les statistiques, on y adhère au complet, on ne peut pas
choisir, là.
• (17 h 10) •
M. Drainville : Non, non,
non, bien entendu, mais vous êtes conscients du fait que les centres... Là on
s'éloigne un petit peu de notre projet de loi, mais je pense que c'est
important quand même qu'on profite de notre présence respective pour clarifier
certaines choses. Vous comprenez quand même que c'est ce devoir de loyauté, il
est déjà prévu dans nombre de codes d'éthique de centres de services scolaires.
En d'autres mots, on a pris ce qui existait déjà puis on l'a intégré au code
d'éthique national, on n'a pas créé quelque chose de nouveau. Et, par ailleurs,
dans le même projet de loi qui est devenu la loi 47, il y a une protection pour
les lanceurs d'alerte, des personnes qui dénoncent des situations inacceptables
sont protégées par la loi. Je voulais juste clarifier ça.
M. Martel (Sylvain) : Oui,
mais je reviens aussi, c'est que, dans le travail d'un conseil d'établissement,
je ne vois pas comment la sécurité d'un élève peut être affectée, en fait, il
faudrait vraiment stretcher beaucoup une décision pour y arriver,
c'est-à-dire... parce que ce n'est pas...
M. Drainville : Mais, par
exemple, je vais vous donner un exemple, M. Martel. Comme on a vu à Bedford, en
fait, ce qu'on a vu à Bedford, c'est des membres du conseil d'établissement
qui, à un moment donné, ont fait pression sur la direction de l'école ou, en
tout cas, sur l'équipe-école, prenons-la au sens large, ce qui inclut, dans ma
définition, la direction de l'école. Donc, on fait pression sur les
équipes-écoles pour que certaines notions ne soient pas enseignées, des notions
en lien avec la science et l'éducation sexuelle. Certaines de ces pressions
sont venues des membres du conseil d'établissement de Bedford, des membres
parents.
Mme Bessette (Marie Pier) : Mais
si je peux me permettre...
M. Drainville : Et c'est pour
ça que — excusez-moi, ce ne sera pas long — c'est pour ça
qu'on propose, dans le projet de loi, un code d'éthique pour les membres des
conseils d'établissement, c'est parce qu'on tire justement les enseignements de
ce qui s'est passé à Bedford, puis on veut s'assurer que les représentants,
bien, notamment des parents, mais les représentants, de façon générale, qui siègent
au conseil d'établissement, respectent un certain nombre de choses.
Mme Bessette (Marie Pier) : Mais
si je peux me permettre, si la loi avait été appliquée au conseil
d'établissement Bedford, si la LIP avait été appliquée, ce n'est pas au conseil
d'établissement à décider, parents, enseignants ou peu importe, le membre du
conseil d'établissement n'a pas le pouvoir de décider ce qui est enseigné, on
s'assure que le régime pédagogique est appliqué. Donc, si la loi avait été
appliquée correctement à Bedford, on n'en serait pas là. Le point est que,
c'est au niveau du code d'éthique, le point est que, moi, en tant que parent
bénévole dans une activité parascolaire, je suis assujettie par ce code
d'éthique, ce qui est correct, mais qui m'impose un devoir de loyauté envers
mon CSS, qui va faire que si, après ça, je siège sur mon... ou jusqu'où
s'arrête mon devoir de loyauté dans un débat démocratique sain. C'est un peu
notre point que les deux codes d'éthique vont se...
M. Drainville : Mais, Mme Bessette,
on n'avait pas de levier nous autres, par rapport au conseil d'établissement à
Bedford, là, on n'avait pas de levier, là on s'en donne un avec le code
d'éthique. Parce que là le code d'éthique va prévoir justement qu'un membre du
conseil d'établissement, qui manque à ses obligations éthiques et
déontologiques, pourrait se voir imposer une réprimande, pourrait se voir
imposer une...
M. Drainville :
...participation à une formation pourrait être suspendu et pourrait même être
révoqué. Mais ces pouvoirs-là, là, ils n'existaient pas et, en fait, ils
n'existent pas actuellement, ces pouvoirs-là.
Mme Bessette (Marie Pier) :
Mais on est d'accord. Ce que je dis, c'est que moi, qui suis membre de conseil
d'établissement depuis une dizaine d'années, ça n'a jamais été mon rôle à moi
de décider quelle matière est enseignée. Mon son rôle en tant que membre d'un
conseil d'établissement, c'est de m'assurer que le nombre d'heures prescrit est
respecté. Donc, selon moi, le conseil d'établissement, et code d'éthique ou
pas, n'a pas à décider que... les matières qui sont enseignées, là.
M. Drainville : Mais
ça...
Mme Bessette (Marie Pier) :
Moi, je suis d'accord avec vous que la...
M. Drainville : Ça,
c'est la...
Mme Bessette (Marie Pier) :
...la LIP, c'est une loi qui n'a pas de dents puis qui n'est pas capable
d'avoir de sanction. Ça, je suis d'accord avec vous.
M. Drainville : Dans ce
cas-ci. Dans ce cas-ci. C'est ça, exactement. Puis dans le fond, ce que vous
nous dites, c'est, de façon générale, les personnes qui sont membres des
conseils d'établissement font leur travail correctement à l'intérieur des
responsabilités qui devraient être les leurs ou qui... ou qui sont les leurs.
Mais moi, ce que je vous dis, c'est qu'à Bedford il y a des parents qui ont
décidé de jouer un tout autre rôle, et là essentiellement de décider quelles
étaient les matières qui allaient être enseignées à l'école. Et là, avec la loi
actuelle, je ne peux pas intervenir quand ça arrive. C'est pour ça qu'on arrive
avec le code d'éthique, c'est pour se donner un moyen, quand il y a des parents
qui décident de prendre le contrôle de l'école ou en tout cas de prendre le
contrôle du conseil d'établissement. C'est problématique, là.
M. Martel (Sylvain) : Si
je peux me permettre, on dit la même chose. En fait, on est d'accord avec le
code d'éthique pour le conseil d'établissement, tout à fait. Et on fait des
propositions d'ailleurs pour le bonifier, on fait des propositions pour vous
dire : Incluez là-dedans le rôle, les responsabilités, le respect de la
LIP dans le code d'éthique. Il faut que ce soit là, absolument, parce que c'est
une grosse lacune. On... Ça, on est absolument d'accord pour qu'il y ait un
code d'éthique au conseil d'établissement. Notre mémoire propose des façons de
l'améliorer dans sa mise en œuvre et aussi dans sa couverture. Parce que, nous,
on dit : Écoutez. Oui, il y a des membres au conseil d'établissement, des
membres de l'équipe-école, des membres parents. Il y a aussi la direction qui
est assise là. La direction, c'est systématique, elle est là, elle travaille
avec les membres. Il faut qu'il y ait une responsabilité éthique qui soit...
qui soit liée à cette participation-là aussi. Si on veut que tout le monde soit
à la même place, tout le monde ait les mêmes règles du jeu qui soient... qu'ils
aient à suivre, les mêmes... les mêmes... le même petit carré de sable, là,
qu'ils soient dans le même petit carré de sable, bien, il faut que tout le
monde ait les mêmes règles. Présentement, dans le projet de loi, on peut... on
peut mettre des normes différentes selon les groupes. Pour nous, ça, c'est...
c'est...
M. Drainville : Selon
les...
M. Martel (Sylvain) :
C'est courir après le trouble, en fait.
M. Drainville : Selon
les écoles, selon les écoles.
M. Martel (Sylvain) :
Bien, selon les écoles, mais aussi juste ouvrir cette porte-là, je veux dire,
ça... On est un membre du conseil d'établissement. Moi, je représente des
parents. Cette personne-là représente des employés du service de garde. Cette
personne-là représente des enseignants. Il y a des élèves parfois dans les
écoles secondaires. Donc, c'est sûr qu'il faut avoir un code d'éthique qui
s'applique à tous, même si c'est pour donner un code d'éthique qui est
peut-être un peu plus général, parce que c'est sûr qu'on ne peut pas aller
dans... tout à fait dans le particulier si on fait ça. Alors, c'est pour ça
que, nous, on se disait, si on part avec un code d'éthique au niveau national,
bien, on est sûrs que ça s'applique partout et puis on est sûrs que tout le
monde comprend ce que ça veut dire, puis on est sûrs qu'il y a une... Parce
que, là, je veux dire, on l'a entendu tantôt, ma collègue disait : La loi,
elle n'est pas toujours respectée. Puis là, il y a des interprétations de ça.
Si on se met à interpréter des codes d'éthique différents dans chacun des C.E.,
on n'a pas fini, là, tu sais.
M. Drainville : Non. Mme
la Présidente, ma collègue la députée de Vimont souhaite intervenir.
La Présidente (Mme Poulet) :
La parole est à vous, Mme la députée de Vimont. Il reste
3 min 20 s.
Mme Schmaltz : Parfait.
Je vais aller rapidement. Merci, Mme la Présidente. Merci. Bonjour à vous.
Merci d'être présents. C'est toujours agréable d'avoir les gens en présence
comme vous. J'ai besoin de votre aide pour que je comprenne bien. Au niveau du
comité d'enquête à l'éthique et déontologie, il y a plusieurs recommandations,
la recommandation 7, 8, 9 et 10. Je comprends que c'est... que ce sont des
recommandations pour un petit peu expliquer de quelle façon vous voyez la
responsabilité des enquêtes au sein, bon, de l'organisation, c'est-à-dire
d'avoir cette cette indépendance dont vous parliez depuis tantôt, etc., qu'il y
ait également...
Mme Schmaltz : ...une
approbation par le conseil d'administration avant que le rapport se rende donc
au ministre, etc. Donc, il y a quatre recommandations là-dessus. Puis j'arrive
à la recommandation 11 qui dit qu'on met fin automatiquement aux processus
disciplinaires lors de la démission ou du retrait volontaire d'un membre ou
participant concerné. Est ce que ça veut dire que si la personne est visée par
cette enquête là, si elle décide soit de démissionner, c'est ce que je
comprends ou peu importe, là, mais, en tout cas, démission, retrait, tout s'arrête,
il n'y a plus rien qui se passe?
M. Martel (Sylvain) : Bien,
en fait, c'est parce que quand la personne démissionne, elle n'a plus de mandat
au conseil d'établissement.
Mme Schmaltz : Je comprends.
Non, ça, je comprends. Mais vous ne pensez pas qu'il y a un risque que cette
personne-là a un dossier qui est ouvert, mais qui, finalement, restera toujours
ouvert puis qu'il n'y aura jamais de... une conséquence ou quelque chose,
c'est-à-dire que si elle est visée par une enquête puis la personne, elle
démissionne, qu'est ce qui arrive avec ça? On trouve où cette information-là?
• (17 h 20) •
M. Martel (Sylvain) : Le but
de l'enquête, est ce que c'est de blâmer la personne ou c'est qu'elle ne
participe plus au processus du conseil d'établissement? Parce que si elle
démissionne, elle ne participe plus. Le problème est réglé.
Mme Schmaltz : Non, je
comprends, mais si, à quelque part, on a un soupçon sur cette personne là, si
une enquête est déclenchée, c'est parce qu'il y a un soupçon, hein, on va se le
dire, à moins que, vraiment, il y a une vendetta à l'interne puis que c'est une
question de personnalités qui ne s'entendent pas, mais si l'enquête est
déclenchée, c'est qu'il y a un soupçon de quelque chose qui ne fonctionne pas.
Puis le fait que si la personne, elle se retire comme ça, bon, pour des raisons
qui lui sont propres, ça, moi, ça ne me regarde pas, mais cette espèce... moi,
c'est un point d'interrogation, ça me laisse un peu perplexe en me disant :
Qu'est-ce qu'on fait avec ça?
M. Martel (Sylvain) : D'abord,
je suis content que vous soulignez qu'il pourrait avoir une vendetta
personnelle parce que c'est une de nos craintes.
Mme Schmaltz : Oui, je le
sais que vous le... Oui. Exact.
M. Martel (Sylvain) : Dans la
forme actuelle, il pourrait y avoir des gens qui font des plaintes, mais moi,
je pense que le fait qu'il y ait une procédure comme ça de plaintes et puis de
sanctions qui vont, bon, du simple avertissement jusqu'à retirer quelqu'un,
mais si la personne se retire elle-même, elle s'autodonne la sanction la plus
grave qu'il pourrait y avoir. Donc, selon moi, ça règle le problème.
Maintenant, bon, est ce que cette
personne-là pourrait se représenter? Bien là, on est dans une autre partie de
la loi.
Mme Schmaltz : Mais quand
même, il faut y penser parce que c'est quand même quelque chose, là, qui mérite
réflexion aussi, là.
M. Martel (Sylvain) : Oui,
mais il faut faire attention. S'il y a une plainte...
La Présidente (Mme Poulet) : Merci
beaucoup. Je m'excuse de vous interrompre. Alors, Mme la députée de
Bourassa-Sauvé, la parole est à vous.
Mme Cadet : Merci beaucoup,
Mme la Présidente. Bonjour, M. Martel. Bonjour, Mme Bessette. Ravie
de vous avoir en commission. À mon tour de vous remercier pour votre
engagement. Je ne sais pas, vous étiez sur une lancée, je vous laisserais
peut-être conclure si vous vouliez terminer votre phrase.
M. Martel (Sylvain) : J'allais
juste dire qu'il faut faire attention, parce que s'il y a une plainte et que la
personne se retire, la plainte, ça va être difficile d'arriver... d'aller
jusqu'au bout. Donc, il n'y aura peut-être pas de conclusion. Donc, il ne faut
pas non plus condamner quelqu'un avec un processus qui n'est pas fini, là.
Mme Cadet : O.K. Merci
beaucoup. Mais avec grand plaisir, Mme la députée de Vimont. Donc, vous avez
vu, donc, les deux intervenants précédents, donc, mes propos, mes interventions
ont beaucoup porté, donc, sur l'article 12 et sur la question de la
concentration des pouvoirs, de façon peut-être un peu moins élaborée que ce qui
se retrouve dans votre projet de loi... dans votre projet loi, dans votre
projet... dans votre mémoire. Donc, vous allez nous donner l'occasion, donc, de
vraiment plonger dans cette question.
Peut-être, juste de façon générale, est-ce
que, déjà, donc, dans vos... dans vos observations, bon, sur la laïcité, sur
l'empiétement sur la vie familiale, donc, vous nous dites, et vous l'avez dit,
Mme Bessette, dans votre intervention un peu plus tôt, que «la
collaboration avec les familles et les écoles se construit par la confiance, la
communication et le respect, elle ne s'impose pas». J'ai trouvé ça très
intéressant, ça m'avait frappé. Puis, ensuite, vous l'avez évoqué verbalement.
Donc, juste dans l'économie générale de ce qui est présenté au niveau des
articles 12 et 13 du projet de loi, est-ce que, si je comprends bien votre
propos ici, c'est un peu la conclusion que vous faites, là, que le projet de
loi, donc, dans sa mouture actuelle, dans les dispositions ici qui nous sont
présentées à 12 et 13, impose cette collaboration?
Mme Bessette (Marie Pier) : Mais,
d'entrée de jeu, là, j'aimerais juste dire que le fait qu'on demande à
l'article 13 d'être retiré, ce n'est pas parce qu'on ne pense pas que le
parent doit collaborer avec l'école. Pour nous, le parent est un acteur
essentiel. C'est juste que c'est un peu incohérent de dire qu'on va venir
dicter aux parents avec aucun moyen, aucune sanction, c'était un peu... ça débordait
du cadre selon nous. Par contre, on veut que les parents continuent à
collaborer, on veut pouvoir continuer à collaborer. Puis, pour nous,
l'article 12 vient juste rajouter des roches dans le sac des parents
bénévoles. Les parents sont de bonne foi en majorité, quand ils s'impliquent
dans...
Mme Bessette (Marie Pier) : ...dans
les écoles. Donc, de venir contraindre avec des processus législatifs, parfois,
ça vient alourdir tout ça. On l'a vu avec les codes d'éthique au niveau des
C.A. Il y a des... Il y a des métiers dans la vie de tous les jours. Parce que
les parents doivent travailler dans la vie de tous les jours, qui sont frileux
au niveau des codes d'éthique autre que... tu sais, je pense aux comptables, je
pense aux médecins, je pense aux gens dans le personnel, dans les réseaux de la
santé. Donc, c'est sûr que, quand on vient rajouter «code d'éthique», peu
importe que la raison soit bonne ou mauvaise, ça vient rajouter un petit peu un
pas de recul à ces parents-là. Donc, on demande d'être prudents. On s'attend
aussi à protéger cet espace démocratique là. Souvent, les parents nous nomment
qu'ils ont l'impression d'être des spectateurs sur les C.É., qu'on ne respecte
pas nécessairement leur droit d'élus, parce qu'ils sont des élus, donc de... Il
faut faire attention avec l'article 12. Si on vient imposer des devoirs de
loyauté, bien, je vois difficilement comment je peux avoir un débat d'idée
démocratique, sain, si je dois une loyauté totale envers mon CSS. Parce que
c'est juste sain que je sois... pas... tu sais, que j'aille voir de l'autre
côté, que je mette des oppositions, des craintes, que... Je ne suis pas obligée
de dire tout le temps en blanc parce que le CSS a dit blanc. Puis, c'est sain,
ce débat-là. Il faut que cet espace démocratique là soit protégé et qu'on
redonne aux membres leurs pleins pouvoirs. Parce que ce n'est pas le cas
présentement. Donc, c'est vraiment... c'est... c'est ça, pour nous, qui est
important, que le C.É. soit protégé pour tous les membres, et qu'on laisse cet
espace de débat là, et qu'on arrête d'empiéter en ne respectant pas la loi
parce qu'elle n'est pas respectée. Puis ce n'est pas... ce n'est pas
méchamment. Je ne pense pas que personne le fait de façon volontaire, de
dire : Ah! bien, on n'approuvera pas le code de vie parce que je ne veux
pas que les parents voient ce qui est sur le code de vie. Non, non. Le
roulement va vite. Il y a une méconnaissance de la loi et du fonctionnement du
C.É. par les directions, même, souvent, qui fait que des parents qui veulent
prendre cet espace démocratique là, bien, n'ont pas la chance de le faire.
Mme Cadet : Un peu comme le
groupe précédent, vous nous dites, donc : Aidez-nous à jouer pleinement
notre rôle.
Mme Bessette (Marie Pier) : Oui,
oui, oui.
Mme Cadet : Oui, M.... M.
Martel, oui.
M. Martel (Sylvain) : Je
pense qu'on a ici l'occasion de justement mettre en place certains mécanismes
pour venir renforcer les conseils d'établissement dans le respect des rôles et
des responsabilités de chacun des groupes et de l'institution qu'est le conseil
d'établissement.
Mme Cadet : Oui. Puis ça m'a
frappée. Puis, Mme Bessette, donc, je reviens sur la question du devoir de
loyauté, parce que vous l'avez... vous l'avez évoqué dans votre échange avec le
ministre ici. Vous dites, bien, ce... et vous venez de le faire, donc, ce
débat, donc, il est sain parce qu'en fait vous êtes... vous dites, donc,
vous... ce sont des grands bénévoles, ne sont pas des employés du centre de
service scolaire. Donc, à ce moment-ci, donc, le devoir de loyauté qu'on aurait
à l'égard de son employeur, habituellement, ne s'applique pas en l'espèce.
Mme Bessette (Marie Pier) : Puis
je vais aller plus loin, sans nécessairement m'étendre, parce que ce n'est pas
mon jardin à moi, mais même pour les professeurs, les professeurs qui siègent
au sein du C.É., s'ils sont attachés à un devoir de loyauté, bien, le débat
d'idées ne sera pas le même. Il faut que tous les membres assis et
participants, donc j'inclus la direction, soient à la même page et aient le
même espace démocratique afin que l'échange soit sain.
Mme Cadet : ...le conseil
comme institution et non pas, donc, les parents, donc, les membres, de façon
individuelle, mais, comme institution, ne soit pas assujetti à ce devoir de
loyauté là. Parce que sinon, donc, qui sera... Et, je pense... je sais que le
ministre a parlé, donc, de la protection des lanceurs d'alerte, mais c'est la
première question que je me suis posée avant même qu'il fasse le commentaire.
Quand je vous entendais, j'ai dit : Bien, comment est-ce que vous faites
pour dénoncer justement des situations, comme institution, comme les cas qui
nous sont évoqués, donc, de parents qui eux-mêmes décideraient d'outrepasser
leur mandat et d'imposer du contenu religieux?
Mme Bessette (Marie Pier) : Je
suis totalement d'accord avec ce que vous dites, là. C'est vraiment ça.
Mme Cadet : Vous êtes en
accord! Parfait. Donc, ensuite, donc, vous nous dites... bon, ça, c'est au
niveau, donc, de l'article 13, il y a un ajout à l'article, bon, 76 de la
LIP qui déborde dans la sphère privée des familles d'élèves. Je vais peut-être
vous laisser... sur cet aspect-là, donc, d'empiétement sur la vie familiale,
donc au-delà de l'aspect de la gouvernance du conseil d'établissement. Puis je
peux peut-être vous...
M. Martel (Sylvain) : Bien,
en fait, ça dit : «Les règles de conduite peuvent en outre prévoir le rôle
des parents dans leur mise en œuvre.»
Mme Cadet : C'est ça, ce
bout-là, oui.
M. Martel (Sylvain) : Mais,
le parent, il n'est pas à l'école, là. Donc, s'il a un rôle dans la mise en
œuvre, bien là, on est en train de me dire comment il faut que j'agisse chez
nous. C'est... C'est... Ça va un petit peu trop loin. Puis on ne dit pas qu'on
n'a pas un rôle. On a un rôle. Mais c'est... lorsque, dans les règles de
conduite, il y a un rôle dicté aux parents, il faut que ce rôle-là se fasse à
la maison. Je veux dire, les parents viennent de temps en temps faire du
bénévolat, mais ils ne sont pas... ils ne sont pas là tout le temps à l'école,
donc.
Mme Cadet : O.K. Merci. O.K.
Je...
Mme Cadet :
...comprend. Effectivement, au paragraphe
suivant, vous écrivez : Cependant, tel que libellé, on pourrait déduire
qu'il serait possible pour l'école de dicter les comportements parentaux à la
maison.
M. Martel (Sylvain) : Voilà.
Mme Cadet : Ça fait que c'est
ce que vous nous expliquez ici. Puis, un peu plus tard... En quoi l'école et le
ministre de l'Éducation sont-ils habilités à dicter des règles de conduite aux
parents en dehors du milieu scolaire? Comment allons-nous gérer, observer et
vérifier l'application réelle et quotidienne de ce rôle prescrit par l'école
et, le cas échéant, le ministre qui aura le mandat et l'expertise de juger de
la bonne exécution de ce rôle par les parents et quelles seront les sanctions?
Moi, quand je lisais ça, je me suis... j'écoutais votre échange, je me suis
demandé : Est-ce que vous pensez qu'on vous a offert une réponse
satisfaisante aujourd'hui, là, quant à cette préoccupation-là?
M. Martel (Sylvain) : Bien,
en fait, la réponse satisfaisante... juste qu'on l'enlève, cette phrase-là, tu
sais, ça va être ça, parce que...
Mme Cadet : Tout simplement.
M. Martel (Sylvain) : ...vraiment,
il y a une maladresse, ici, dans... On va vraiment trop loin.
• (17 h 30) •
Mme Cadet : O.K. Donc,
nonobstant, donc, les échanges, là, vous n'êtes pas rassuré, vous n'étiez pas
toujours...
M. Martel (Sylvain) : Sur le
principe du rôle des parents, on est tout à fait d'accord, on a un rôle à jouer
dans l'application des règles de conduite. Ça, c'est sûr. Il faut qu'on dise à
nos enfants c'est quoi, le respect, il faut qu'on dise à nos enfants c'est
quoi, de prendre soin des autres, donc, il faut absolument faire ça.
Mme Bessette (Marie Pier) : Tu
sais, si... Je pourrais... Tu sais, dans ma tête, à moi, le parent, dans la
majorité des écoles, souvent, va signer le code de vie. Donc, à un certain
point, le parent collabore ou connaît les règles de l'école jusqu'à un certain
niveau. Donc, à mon sens, le parent collabore déjà, là. Je vois mal comment
est-ce qu'on peut renverser ça puis venir juger, tu sais, comment je l'applique
chez moi, là, est-ce que je l'ai lu, est-ce que je ne l'ai pas lu? Rendu là,
c'est un peu de bonne foi et de collaboration, comme, de respect entre les
deux...
Mme Cadet : Merci. À l'instar
de vos prédécesseurs, vous avez corroboré le point qu'ils ont amené quant à
l'application de la Loi sur l'instruction publique. Donc, dans l'intervention
précédente, on entendait... j'aimais bien le terme, là, je trouvais ça
intéressant, on nous parlait d'un outil de travail qu'à certains égards...
qu'on parle des enjeux de laïcité ou non, qu'à certains égards, donc, on
l'applique puis que, dans d'autres circonstances, bien, on se dit : Ah
bien, ce bout-là, je n'ai pas besoin de l'appliquer. Ce n'est pas
nécessairement de la mauvaise foi, c'est juste, donc, une perception qu'on
n'est pas nécessairement, donc, toujours assujetti à l'ensemble des
dispositions, mais qu'on peut prélever, donc, celles, donc, qui font notre
affaire en fonction de notre façon, donc, d'évoluer dans notre milieu.
Donc, est-ce que vous diriez... Je vous ai
entendu parler, donc, de manque de mordant, là, je pense, qu'il faudrait avoir
plus de dents. Donc, quelles dents, donc, faudrait-il ajouter au projet de loi
pour permettre que les dispositions actuelles soient, en fait, respectées,
au-delà des dispositions additionnelles supplémentaires qui sont prévues au
projet de loi no 94?
Mme Bessette (Marie Pier) : Déjà,
je pense que la première étape, là, la première marche, à mon sens, c'est de
s'assurer que les directions fassent partie de la... suivent la formation
obligatoire. Donc, ce mécanisme de suivi de la formation, pour moi, c'est la
première étape.
Mme Cadet : La formation dont
on parlait plutôt, là, qu'on... c'est comme si c'était une formation pour les
parents, mais c'est vraiment pour tout le monde qui est sur le conseil.
Mme Bessette (Marie Pier) : Oui.
Exactement. Tu sais, à mon sens, là, c'est un des plus grands facteurs de
désengagement parental. Régulièrement, j'ai des parents qui me disent : Ça
sert à quoi que je sois à l'OCI, j'arrive avec mes petites fiches toutes
imprimées, de formation, puis je dis : Regardez, voici, puis on continue,
on passe... Tu sais, mon engagement ne sert à rien parce que ce n'est pas
respecté, de toute façon. Ça fait que les parents s'épuisent et se brûlent,
donc.
Puis souvent ce n'est pas parce qu'on ne veut
pas la suivre, c'est parce qu'on ne la connaît pas, c'est par méconnaissance.
Ça fait que, déjà, pour moi, la première étape, de s'assurer qu'elle est suivie
et qu'il y a une sanction x, y, z si elle n'est pas suivie, cette formation-là,
bien, déjà, je pense qu'on vient d'avancer beaucoup dans ce débat-là, à ce
niveau-là, là.
Mme Cadet : Parfait. Donc,
au-delà de la formation, est-ce que vous voyez d'autres éléments? Je sais qu'un
peu plus tôt, on nous parlait de mécanisme d'arbitrage de mécanismes
indépendants de règlement des différends. Est-ce que... Je ne pense pas que
votre... en fait, votre projet de loi... dans vos recommandations, vous n'allez
pas nécessairement là. M. Martel.
M. Martel (Sylvain) : En
fait, nous, on n'est pas allé jusque-là, mais, comme ma collègue disait, la
formation, c'est la première étape. Je pense que d'inclure règles, rôles et
responsabilités dans des normes éthiques, ce serait une deuxième étape,
certainement. Et puis, naturellement, s'il y a un manquement aux normes
éthiques, bien, il y aurait un processus pour pouvoir y remédier. Donc, oui, je
pense que déjà là, ce serait beaucoup plus que ce qu'on a présentement, parce
que présentement, on n'a rien. Et puis, tantôt, bon... Naturellement, ce n'est
pas toujours de mauvaise foi. Il ne faut pas l'exclure, par contre,
malheureusement.
Mme Cadet : Parfait. Merci
beaucoup. Combien de secondes, Mme...
La Présidente (Mme Poulet) : 15.
Mme Cadet : Quinze. Est-ce
qu'il y a un dernier élément que vous souhaitez mettre de l'avant, alors...
17 h 30 (version non révisée)
Mme Cadet : ...Alors, je vous
remercie pour votre passage en commission aujourd'hui, merci beaucoup.
La Présidente (Mme Poulet) : Alors,
il nous reste... il restait 15 secondes à la députée, mais il reste 12... 4 min 8 s
au député de Jean-Lesage. Alors, la parole est à vous.
M. Zanetti : Merci beaucoup.
Je vous ai bien entendus, là, sur la question du devoir de loyauté, là. Bien d'accord
avec vous, ça... il y a quelque chose de pas démocratique là-dedans. Est-ce que
vous avez une position par rapport à l'interdiction des signes religieux qui
est proposée par le projet de loi ou, dans le fond, ce n'est pas là-dessus,
vraiment, que vos membres se sont exprimés de façon unanime?
M. Martel (Sylvain) : Bien,
il y a... c'est sûr qu'il y a des inquiétudes... comme on l'a dit tantôt, il y
a des inquiétudes au niveau de la pénurie de personnel, si ça empêche des gens,
notamment dans les services de garde. En même temps, vous savez, les principes
de laïcité puis d'avoir un espace neutre, ça va au-delà du signe religieux. Et
puis il y avait des inquiétudes à savoir, bon, qu'est-ce qui est un signe
religieux ou pas. Parce que, bon, il y a des signes religieux qu'on connaît.
Les grandes religions, on connaît les signes religieux. Mais il pourrait... Tu
sais, moi, je ne connais rien de certaines cultures, puis, s'il y a des gens
qui arrivent de cette culture-là, puis ils sont habillés d'une façon, est-ce
que c'est un... est-ce que c'est un signe religieux, est-ce que c'est culturel,
est-ce que c'est une mode, dans cette culture-là? Je... on ne le sait pas.
Alors, c'est très difficile.
Il faut penser aussi que nous, on
représente des parents qui soit sont athées, soit qui sont croyants, qui sont
non pratiquants, croyants et pratiquants dans toutes les religions, qu'ils
soient très orthodoxes ou très... je ne sais pas, qui soient, en fait, un peu
plus lousses dans l'application de leurs... de leurs principes religieux. Mais
donc c'est sûr que c'est difficile d'avoir un consensus. Le consensus qu'on a,
c'est que l'école doit être un espace neutre, parce que la neutralité, c'est ce
qui garantit le respect de chacun. Mais ça, là-dessus, on est... on est vendus
puis on est... c'est sûr qu'on adhère à ça.
Il faut faire attention dans l'application.
C'est plein de petits détails qui vont ressortir, puis de petits bouts qui vont
dépasser, et puis la crainte, c'est qu'on se perde là-dedans un peu. Donc, il
faut faire attention. On comprend qu'on veut se créer des nouveaux mécanismes,
donc se donner des nouveaux outils. Tantôt, le ministre disait : On a
besoin des outils pour pouvoir intervenir. On le comprend tout à fait, puis on
est d'accord avec ça, mais il faut faire attention pour ne pas venir mettre en
place des choses pour des situations qui se sont produites dans quelques
écoles, là. Puis ça reste quand même exceptionnel, là.
M. Zanetti : Parfait, je vous
remercie. Moi, ça va être... ça va être tout pour moi, oui.
La Présidente (Mme Poulet) : Bien,
parfait. Alors, merci beaucoup de votre participation.
On va suspendre quelques minutes, le temps
que le prochain groupe s'installe.
(Suspension de la séance à 17 h 38)
(Reprise à 17 h 42)
La Présidente (Mme Poulet) : Alors,
on reprend nos travaux. Alors, je souhaite donc la bienvenue à la Fédération
des centres de services scolaires du Québec. Vous avez 10 minutes pour
votre exposé. Par la suite, on va procéder à la période d'échange. Alors, la
parole est à vous.
M. Robert (Dominique) : Merci,
Mme la Présidente. M. le ministre, Mmes et MM. les députés de la commission, je
suis Dominique Robert, président directeur général de la Fédération des centres
et services scolaires du Québec. Je suis accompagné de M. Jean-François
Collard, président-directeur général adjoint, de même que de Mme Sophie
Laberge, directrice des affaires juridiques et secrétaire générale.
Nous vous remercions de nous donner
l'opportunité d'exprimer notre position eu égard au projet de loi n° 94.
Ce projet de loi propose de nombreuses modifications à la Loi sur l'instruction
publique. C'est par des règles claires, un déploiement harmonieux et une
application cohérente que nous pourrons faire de notre école publique un milieu
de vie accueillant qui favorise le développement des élèves. Nous aborderons
aujourd'hui les deux grands volets du projet de loi : la laïcité dans le
réseau de l'éducation et la qualité des services éducatifs.
Tout d'abord, l'interdiction du port des
signes religieux s'accompagne d'une clause de droits acquis pour le personnel.
Une telle clause n'est pas inédite puisque la Loi sur la laïcité de l'État a
déjà prévu un droit acquis pour le personnel enseignant et de direction
d'établissement. Nous nous retrouvons donc avec deux régimes distincts, un
premier institué par la Loi sur la laïcité de l'État et un deuxième par la Loi
sur l'instruction publique. Bien que l'existence de ces deux régimes parallèles
puisse s'expliquer, il n'en demeure pas moins qu'en cas de cumul de fonctions,
la notion de prédominance risque d'engendrer des difficultés pratiques dans sa
mise en œuvre, en plus de susciter une perception d'iniquité.
Prenons un exemple qui illustre bien la
différence d'application de ces deux lois pour des situations analogues. En
vertu de la Loi sur l'instruction publique, une orthopédagogue qui cumulerait
une fonction de conseillère pédagogique pourrait conserver son signe religieux
dans ces deux fonctions tant qu'elle exerce les fonctions d'orthopédagogue de
façon prédominante. En revanche, en vertu de la Loi sur la laïcité de l'État,
une enseignante qui bénéficierait d'un droit acquis et qui cumulerait
aujourd'hui une même fonction de conseillère pédagogique pourrait porter un
signe religieux, mais uniquement dans l'exercice de la fonction d'enseignante.
Il s'agit d'un enjeu important. En effet, le cumul des fonctions est chose
fréquente dans le réseau de l'éducation. Selon nous, ce contexte n'exige
toutefois pas de prévoir un régime distinct de droit acquis. Afin d'assurer un
même traitement pour l'ensemble du personnel d'un même employeur, la
disposition relative au cumul de fonctions devrait donc être retirée. Par
ailleurs, pour assurer une application ordonnée et cohérente, la
cristallisation des droits acquis devrait être minimalement fixée à la date de
sanction du projet de loi plutôt qu'au 19 mars 2025.
En matière d'accommodement, le projet.
M. Robert (Dominique) : ...loi
vient encadrer les demandes d'absence du personnel pour motif religieux. Ainsi,
le directeur doit s'assurer que les services éducatifs et les services de garde
ne soient pas compromis. Pour y parvenir, les balises en matière
d'accommodement devraient viser toutes les catégories de personnel nécessaires
au maintien des services aux élèves et au bon fonctionnement des
établissements. En effet, une école ne saurait fonctionner sans concierge, sans
secrétaire d'école, sans techniciens et techniciennes en éducation spécialisée
ou encore sans préposés aux élèves handicapés.
Le projet de loi interdit à toute personne
d'exercer une influence motivée par ses convictions ou croyances religieuses.
Même si cette disposition s'inscrit dans les objectifs du projet de loi, aucune
forme de sanction n'est actuellement prévue. Nous sommes d'avis que le
non-respect de ces comportements devrait être sanctionné, comme d'autres
manquements déjà prévus à la Loi sur l'instruction publique.
L'analyse du projet de loi nous permet de
constater que les procédures et les pouvoirs d'intervention du ministre sont
différents pour le conseil d'établissement et pour le conseil d'administration.
Or, ces procédures et ces pouvoirs devraient être harmonisés. Par souci
d'efficacité et de cohérence, l'enquête pour le manquement d'un membre du
conseil d'établissement devrait être confiée au comité d'éthique et de
déontologie. Ce comité, déjà bien établi pour le conseil d'administration,
possède toute l'expertise et la neutralité requise pour le faire.
Le projet de loi propose plusieurs
nouvelles dispositions relatives à la qualité des services éducatifs.
L'obligation pour le personnel enseignant de transmettre une planification
pédagogique et celle, pour la direction d'établissement, d'évaluer annuellement
le personnel enseignant reposent sur un guide à être élaboré par le ministre.
La planification pédagogique ne doit pas être une exigence purement
administrative, mais elle doit ultimement contribuer aux apprentissages et à la
réussite éducative des élèves. Le projet de loi devrait donc préciser que la
planification pédagogique doit avoir pour objectif de soutenir les apprentissages,
l'évaluation et la réussite des élèves.
À ce chapitre, les encadrements relatifs à
l'évaluation du personnel enseignant devront offrir toute la flexibilité
requise afin que cet exercice soit en adéquation pour tous les acteurs
impliqués. En effet, le besoin d'accompagnement et de soutien varie d'une
personne à l'autre, notamment en fonction de son expérience, ses compétences,
ses qualifications. Les modalités d'évaluation des enseignants doivent être
adaptées afin de considérer ces multiples facteurs. Ainsi, pour assurer un
déploiement harmonieux et atteindre les objectifs visés, les obligations
relatives à la planification pédagogique et à l'évaluation des enseignants
doivent impérativement entrer en vigueur après la publication du guide.
Quant au Comité sur la qualité des
services éducatifs, les fonctions que le législateur entend lui confier sont
certainement louables. Dans un souci d'efficience, nous sommes d'avis que ces
fonctions pourraient être confiées à des instances déjà existantes et dont les
fonctions sont compatibles. Ainsi, tout le volet de la promotion des bonnes
pratiques en matière de qualité des services éducatifs et d'assistance à la
direction générale pourrait être confié aux comités d'engagement pour la
réussite des élèves. Les fonctions de vérification et de recommandation
pourraient, quant à elles, être confiées à la direction générale qui pourra
mandater la personne ou le comité de son choix.
Le projet de loi prévoit de nouvelles
obligations relatives à l'usage exclusif du français. Or, plusieurs activités,
tant pédagogiques que parascolaires, sont au cœur de la mission éducative de
l'école et nécessitent une langue autre que le français. L'utilisation d'une
langue autre que le français devrait être permise lors d'activités parascolaires
qui se déroulent dans un contexte... dans le contexte de l'apprentissage
structuré d'une langue étrangère. Dans ce contexte, le personnel est amené à
utiliser une langue autre que le français dans ses interactions avec les
élèves. Cette souplesse devrait également être accordée dans le cadre de la
francisation.
En terminant, ce projet de loi est un pas
déterminant pour assurer un environnement indiqué... éducatif où chaque élève
peut s'épanouir pleinement. Pour atteindre les objectifs visés, il est
essentiel d'accompagner sa mise en œuvre d'un cadre clair, cohérent et soutenu.
En résumé, nos recommandations visent
principalement la souplesse dans l'encadrement de la planification pédagogique
et de l'évaluation des enseignants, la cohérence d'ensemble de l'application
des différentes mesures en matière de laïcité et de qualité des services
éducatifs...
M. Robert (Dominique) : ...l'utilisation
du français et du processus d'enquête en éthique et déontologie, le déploiement
harmonieux des nouvelles obligations, notamment en matière de qualité des
services éducatifs et d'utilisation du français, également.
Au Québec, des services éducatifs de
qualité basés sur les valeurs et les principes qui fondent notre société, c'est
un droit. Le projet de loi doit s'assurer qu'il soit respecté. Je vous remercie
de votre attention. Il nous fera plaisir de répondre à vos questions.
La Présidente (Mme Poulet) : Merci
beaucoup. Alors, on va procéder à la période d'échange. M. le ministre, la
période... la parole est à vous.
M. Drainville : Oui. Merci,
Mme la Présidente. Bienvenue. Félicitations pour votre nomination, M. Robert,
c'est quand même assez récent. C'est encore plus récent pour M. Collard. Et,
quant à vous, Mme Laberge, je ne saurais dire, mais je vous remercie pour votre
participation à cette commission.
• (17 h 50) •
Là, j'essaie de comprendre. D'abord, une
question peut-être un petit peu plus technique, là, sur l'entrée en vigueur de
la clause de droit acquis. Vous souhaitez qu'elle entre en vigueur au moment de
la sanction du projet de loi plutôt qu'au moment de son dépôt. On se rappelle
que, pour la loi no 21, le droit acquis s'appliquait au moment du dépôt. Donc,
on a voulu être cohérent avec ce qui avait été prévu à la loi no 21. Et là
vous, vous souhaitez que ce soit plutôt au moment de la sanction du projet de
loi. Expliquez-nous pourquoi, là. Qu'est-ce que ça change?
M. Robert (Dominique) : En
fait, l'objectif, c'est d'assurer à chacun des milieux, évidemment, la
souplesse pour l'entrée en fonction, permettre à chacun. Les recommandations
que vous retrouvez dans le mémoire sont de deux ordres. Évidemment, c'est le
double régime et de reporter l'entrée en vigueur pour permettre à chacun des
milieux, d'une part, de s'y préparer, et de ne pas limiter l'effet de la
prédominance des fonctions. Parce que, exemple, au 19 mars, la photo du 19
mars... celle d'aujourd'hui est fort différente dans les fonctions. Et donc,
dans la mesure où il y a une prévisibilité et les centres de services scolaires
sont au fait du moment de l'application, seront en mesure d'avoir un portrait
global de la situation pour s'assurer de l'applicabilité et de l'application
uniforme, dans les faits. Donc, c'est une des raisons pour s'en assurer, en
termes de simplification.
M. Drainville : O.K. Sur la
prédominance, est-ce que vous avez une solution? Vous soumettez un problème. Je
ne suis pas nécessairement convaincu qu'il y a problème, mais, de votre point
de vue, il y en a un, alors discutons de la question depuis votre point de vue,
puisque c'est bien de votre point de vue qu'on veut... enfin, c'est votre point
de vue que vous êtes venu nous présenter. Est-ce que vous, de votre point de
vue, il y a une solution?
M. Robert (Dominique) : La
solution que l'on propose, en termes de prédominance, c'est de se rapprocher de
la Loi sur la laïcité de l'État. Donc, ce qu'on souhaite, c'est qu'il n'y ait
pas deux régimes applicables, donc un en lien avec la laïcité de l'État et un
avec la Loi sur l'instruction publique, et d'y ajouter le volet de la
prédominance. Donc, la recommandation qui est... et là je la cherche, là, le
numéro de la recommandation, de retirer le principe de prédominance. Donc,
c'était la solution que...
M. Drainville : C'est la
recommandation deux, je pense.
M. Robert (Dominique) : ...la
deux. Oui. La recommandation deux, il y avait deux volets. Il y avait sur la
prédominance et sur l'application de la sanction, exactement.
M. Drainville : Mais ça, ça
veut dire que certaines personnes pourraient perdre plus rapidement leur droit
acquis. Dès qu'elles changent de fonction, il y aurait perte du droit acquis,
alors que nous, la raison pour laquelle on a ajouté la dimension prédominance,
c'était justement pour s'assurer que la personne préserve son droit acquis tant
et aussi longtemps que sa fonction première est prédominante. Donc, on voulait,
d'une certaine manière, protéger le droit acquis en ajoutant cette notion de
prédominance. En la retirant, vous fragilisez le droit acquis.
M. Robert (Dominique) : Deux
choses. La première... Sur la recommandation deux, il y a deux volets. La date,
donc, la date d'entrée en vigueur. Ça, ça fait en sorte que ça permet de, je
dirais, décaler, mais de garder également l'équilibre, parce que ce à quoi vous
faites référence, sur... de conserver les droits acquis ou, en tout cas, d'y
aller en gradation dans la période de transition, c'était effectivement une
préoccupation. Donc, comme ce que vous soulevez, là, l'intention, c'est une
préoccupation pour s'assurer d'avoir une rétention de personnel dans un
contexte de...
M. Robert (Dominique) : …donc
la recommandation de décaler.
M. Drainville : Le fait d'y
aller avec la date de la sanction, si je vous comprends bien, ça donne plus de
temps aux centres de services scolaires de planifier la mise en œuvre de la
loi.
M. Robert (Dominique) : Tout
à fait.
M. Drainville : O.K., donc
ça, ça va. Mais sur la prédominance, n'êtes-vous pas d'accord avec moi que, si
on enlève cette notion-là, on fragilise le droit acquis? Parce que dès que
quelqu'un, mettons, va changer de fonction, cette personne-là va perdre son
droit acquis. Alors que là, ce qu'on… ce qu'on veut… ce dont on veut s'assurer,
c'est que si cette personne-là occupe une deuxième fonction, mais que sa
première fonction à laquelle est rattachée le droit acquis reste prédominante,
à ce moment-là, même si… mettons, elle a deux jours semaines, dans la deuxième
fonction, si elle garde trois jours semaine dans sa première, la première reste
prédominante, le droit acquis reste établi, reste protégé. Si on enlève la
prédominance, on risque d'enlever le droit acquis à ce moment-là.
M. Robert (Dominique) : Il y
a plusieurs cas de figure. À titre d'exemple, j'en donnais un dans mon
allocution d'introduction, je laisserais peut-être Mme Laberge donner un
exemple pour compléter.
Mme Laberge
(Sophie) : Notre analyse est plutôt à l'effet que d'exiger une
prédominance dans un cumul de fonctions va faire en sorte que les personnes
vont perdre leurs droits acquis de façon plus rapprochée, parce qu'il n'est pas
rare, dans notre réseau, qu'une même personne cumule plusieurs petites
fonctions. Donc d'exiger d'avoir une fonction à… prédominante, ça fait en sorte
que la personne qui exerceait à raison de 40 % une tâche et 20 %
d'une tâche en cumul, si elle inverse le cumul de ces deux tâches-là, elle perd
complètement ses droits acquis, alors que notre proposition, en retirant la
notion de cumul et prédominance, elle va conserver son droit acquis tant et
aussi longtemps qu'elle occupera cette fonction-là, ne serait-ce qu'à
20 %, qu'à 10 % ou 5 %.
M. Drainville : Donc, elle
pourrait… C'est ça que j'allais vous dire. Elle pourrait ne l'occuper qu'à cinq
ou 10 % de son emploi du temps. Tant qu'il y a encore un lien, aussi ténu
soit-il, avec la première fonction à laquelle est rattaché le droit acquis, à
ce moment-là, le droit acquis serait préservé, peu importe la suite des choses.
Mme Laberge
(Sophie) : Exact. À l'instar de ce qui s'applique pour les
enseignants et les directions d'établissement dans la loi sur la laïcité, on
n'a pas cette notion de cumul là, alors qu'il y a plusieurs enseignants qui
cumulent des fonctions d'orthopédagogue, de conseiller pédagogique. Donc, ce
n'est pas une situation qui, à nos yeux, nécessite une mesure particulière pour
venir distinguer le régime des droits acquis de la loi sur l'instruction
publique, de celle de la Loi sur la laïcité de l'État. Puis je vous dirais
qu'au contraire, on y voit une application, en cas… un suivi dans l'application
qui est beaucoup plus exigeant. C'est correct de faire une photo de nos
effectifs à une date, mais il n'est pas rare qu'une même personne cumule des
fonctions dans deux établissements différents. Donc, la gestion du caractère
prédominant risque d'être un aspect, une difficulté supplémentaire.
M. Drainville : D'accord, je
vous soumettrais, sous forme de questionnement, pas d'affirmation, mais sous
forme de questionnement que peut-être que la loi 21 n'est pas appliquée
correctement. C'est une possibilité que je vous soumets.
Mme Laberge
(Sophie) : Alors, si tel est le cas, il serait peut-être
souhaitable d'avoir un seul régime applicable pour l'ensemble du personnel et
qu'il soit appliqué adéquatement. Là, si on applique… on introduit un deuxième
régime, on risque peut-être d'avoir des différences d'application ou
différentes interprétations qui, de toute… de toute évidence, va nous amener à
passer outre l'objectif poursuivi par le projet de loi.
M. Drainville : Donc,
minimalement, minimalement, ce n'est pas tout à fait ce que vous dites, là,
mais minimalement, si je vous comprends bien, le projet de loi n° 94 est
l'occasion de préciser certaines choses dans l'application du droit acquis.
Mme Laberge
(Sophie) : Et d'assurer une uniformité pour l'ensemble des
membres du personnel.
M. Drainville : D'accord.
Très bien, c'est bien noté. Sur les congés religieux, moi, là, les bras m'ont
tombé quand j'ai lu dans le rapport sur les 17 écoles, là, qu'il
s'agissait…
M. Drainville : ...bon.
Juste... On le savait déjà, là, mais de le lire, là, dans un rapport, là, qui
est le produit d'un travail de professionnels qui sont allés dans
17 écoles et vous reviennent puis ils vous disent : Écoutez,
quelqu'un qui déclare avoir une religion a droit à plus de congés payés que
quelqu'un qui n'a pas de religion... qui ne déclare pas de religion. Et là,
entre-temps, on a appris que juste pour le centre de services scolaire de
Montréal, c'étaient au-dessus de 3 500 congés religieux qui avaient été
donnés en deux ans et demi à peu près, là, dans un contexte de pénurie de
main-d'oeuvre, dans un... Alors, on s'imagine le coût qui est rattaché à ça, le
sentiment d'iniquité qui est vécu par certains collègues. Là, je vous vois
hocher de la tête. Parlez-moi-en un peu, de comment ça se vit par les centres
de services scolaires, cette histoire de congé religieux, là. Il s'agit que tu
déclares que tu as une religion, puis dans certains cas, tu as plus de... tu as
plus, puis même beaucoup plus de congés payés que ton collègue d'à côté ou ta
collègue d'à côté. Dites-moi comment ça se vit. Puis j'imagine que, si ça se ne
vit pas bien puis qu'il y a des collègues qui vivent des sentiments
d'injustice, j'imagine que le projet de loi a été bien reçu pour ceux et celles
qui vivent cette injustice. Mme, je vous vois, là, réagir.
• (18 heures) •
Mme Laberge
(Sophie) :Certainement. Je vous dirais
que, dans certains milieux, le problème ne se présente pas, mais, dans les
milieux plus urbains, des grands centres, où, effectivement, la gestion de ces
congés-là est quand même un enjeu important.... Actuellement, on tente de
convenir de mesures locales pour adapter, en fonction des réalités de notre
milieu, les différents congés. Mais actuellement, devant les tribunaux, les
arbitres, l'analyse de l'accommodement raisonnable et du critère d'exigence
excessive ne joue pas en faveur des centres de services scolaires. Le besoin de
l'élève, le bris de service ne sont pas des critères qui sont analysés par les
tribunaux dans l'analyse d'un accommodement ou non.
M. Drainville : C'est
incroyable!
Mme Laberge
(Sophie) :De sorte que les nouvelles
dispositions proposées donnent des leviers supplémentaires pour s'assurer que les
centres puissent maintenir le service aux élèves effectivement.
M. Drainville : C'est ça.
Avec le projet de loi, là, on protège le service éducatif, là.
Mme Laberge
(Sophie) :Tout à fait. Mais il faut...
puis c'est un petit peu ce qu'on dit dans le mémoire, les services éducatifs,
oui, mais dans le cadre d'un environnement sain et sécuritaire, non pas se
limiter à un enseignant dans sa classe. Mais, si la préposée aux élèves
handicapés qui donne des soins aux élèves, elle, n'est pas visée par les mêmes
balises d'accommodement, on rate la cible parce qu'il ne peut pas recevoir des
services adéquats si la préposée n'est pas là pour lui prodiger les soins.
M. Robert (Dominique) : On y
rajoute une notion... si vous me permettez, on y rajoute une notion d'«au bon
fonctionnement de l'école». Ce à quoi Mme Laberge fait référence tout à
l'heure, oui, pour les services éducatifs, oui, pour les services de garde,
mais «au bon fonctionnement de l'école», qui peut faire référence à la santé et
bien-être. Pensons aux secrétaires d'école, aux concierges ou à d'autres types,
c'est ce à quoi on faisait référence. Et donc c'est l'élargissement, là, qu'on
y fait référence dans notre mémoire également.
M. Drainville : Mais, bref,
là-dessus, le projet de loi vous donne des moyens qui vont vous permettre de
gérer beaucoup mieux cet enjeu des congés religieux?
M. Robert (Dominique) : Oui.
Tout à fait.
M. Drainville : Oui? M.
Robert.
Mme Laberge
(Sophie) :Et des bris de service.
M. Robert (Dominique) : Et
des bris de service. Tout à fait. Et même, comme je le nommais, on veut
s'assurer d'avoir aussi une uniformité dans l'application pour s'assurer qu'il
n'y ait pas de disparité. Parce que, oui, services éducatifs, priorité,
services de garde également, mais au bon fonctionnement. Parce que, pour offrir
des services éducatifs, il y a aussi le personnel de soutien, secrétaires
d'école, concierges, etc. Donc, on veut éviter qu'il ait des problématiques
d'application à cet égard-là, et c'est la raison pour laquelle on propose cette
recommandation.
M. Drainville : Ma collègue
la députée de Vimont veut intervenir. Mais juste une petite dernière juste
avant ça. Le Comité sur le maintien de la qualité des services éducatifs, vous
l'accueillez positivement, mais vous dites : Ce serait peut-être mieux que
ces fonctions soient déléguées à des instances existantes. Donc, vous êtes
d'accord sur le fond, mais la forme ne vous plaît pas. Vous aimeriez
davantage...
18 h (version non révisée)
M. Drainville : ...que ce
soit...
M. Collard (Jean-François) :
Bien, en fait, c'est qu'on estime que le CERE, le Comité d'engagement pour la
réussite exerce déjà en partie certaines de ces fonctions-là. Alors, plutôt que
de créer une nouvelle instance, on se disait : Bien, il serait peut-être
judicieux de mettre à profit cette instance-là qui existe déjà pour trois des
deux.
M. Drainville : Mais ce n'est
pas tout à fait la même chose, M. Collard. Ce n'est pas tout à fait la
même chose.
M. Collard (Jean-François) : Vous
avez raison, il y a une disparité, mais dans le...
M. Drainville : C'est le
comité, c'est... il est plus... celui que nous proposons, il est davantage
opérationnel, là, tu sais. Tu as une direction d'école qui est dans le trouble,
elle n'obtient pas l'appui de son centre de services scolaire pour des raisons xyz,
il y a cette possibilité-là, là. Il y a une espèce de swat team qui est
disponible pour venir l'aider, là.
M. Collard (Jean-François) : Puis,
en fait, nous, ce qu'on met de l'avant, c'est qu'à certains égards, dans le
comité que la loi propose, il y a l'évaluation des services éducatifs. Donc,
ça, c'était le volet CERE. Puis, dans le volet que vous exposez, là, ça
revenait davantage à la direction générale de s'assurer de déployer l'espèce d'équipe,
swat team, à laquelle vous faites référence à l'intérieur de ce qui existe déjà
dans l'organisation. Donc, on distinguait un peu... Tout n'allait pas au CERE,
il y a une portion qui revenait à la direction générale.
M. Drainville : À la
direction, oui, j'ai bien noté. Très bien. Merci, Mme la Présidente. Mme la
députée de Vimont.
La Présidente (Mme Poulet) : Mme
la députée de Vimont, il reste 52 secondes.
M. Drainville : ...
Mme Schmaltz : Je vais faire
ça rapidement. Vous avez mentionné tantôt activités pédago-parascolaire, vous
demandez que l'utilisation d'une autre langue que le français soit permis. Sauf
qu'on sait que, dans un contexte d'intégration réussie, justement, l'usage du
français est souvent impératif. Je voudrais connaître rapidement... juste
comprendre pourquoi vous demandez cette exception, finalement.
M. Robert (Dominique) : Je
laisserais mon collègue, là, vous exposer les cas d'espèce.
M. Collard (Jean-François) : Bien,
vous l'avez nommé, hein, on parle vraiment d'une exception, donc on est tout à
fait à l'aise effectivement à ce que la langue soit... courante utilisée, soit
le français de façon prédominante. Maintenant, à notre avis, il existe un
aménagement qui est plus le reflet de ce qui se passe sur le terrain. Pensons
par exemple à une activité structurée et encadrée, là, ce n'est pas du... n'importe
quoi, ou dans le cadre de l'apprentissage d'une langue seconde, on a des
consignes particulières de sécurité à donner.
La Présidente (Mme Poulet) : Je
m'excuse de vous interrompre. Alors, on va poursuivre les discussions avec la
députée de Bourassa-Sauvé.
Mme Cadet : Merci, Mme la
Présidente. Je ne sais pas si vous voulez... souhaitiez compléter votre phrase.
M. Collard (Jean-François) : ...rapidement
pour ne pas prendre sur votre temps. Mais donc des consignes où même parfois d'assurer
un jeune enfant qui, dans sa langue, n'est pas en mesure au départ de saisir ce
qu'on lui dit puis là il est comme en détresse. La réalité sur le terrain, c'est
qu'on va se permettre, dans certaines circonstances très précises, d'aller vers
ça. Alors, nous, tout ce qu'on soumettait, l'idée, c'était dire : Bien,
plutôt que de faire un mur à mur, soyons conscients qu'entre autres dans des
enjeux comme la francisation ou l'apprentissage d'une langue seconde, il peut
exister de rares exceptions où l'utilisation d'une langue autre que le français
peut être utile, mais ce n'est pas quelque chose qu'on ouvrait largement.
Voilà.
Mme Cadet : Merci beaucoup.
Alors donc, à mon tour de vous remercier pour votre présence, donc, beaucoup
plus formellement cette fois-ci. M. Robert, M. Collard et Mme Laberge,
merci beaucoup pour les échanges que nous venons d'écouter. Je vais peut-être
revenir moi aussi, en premier lieu, sur la question du cumul de fonctions.
Merci pour vos explications. Mme Roberge... M. Roberge, Laberge, pardon,
puisque... Moi aussi, donc, j'avais de la difficulté un peu à saisir ce que... le
propos, donc, de votre deuxième recommandation. Mais en fait, là, ce que j'entends
ici, là, c'est que vous nous dites, la question, donc, de la prédominance, en
fait, vous, ce que vous recommandez, au-delà de la date d'entrée en vigueur,
là, ce que vous recommandez : on enlève donc ce critère de prédominance
là, parce que le cumul de fonctions au sein du personnel de soutien est assez
fréquent. Puis les enseignants aussi, mais ici on vise le personnel de soutien,
donc si...
Mme Laberge (Sophie) :
...également.
Mme Cadet : ...les
professionnels, O.K., personnel de soutien, personnel professionnel comme les
orthopédagogues.
Mme Laberge (Sophie) :Effectivement, ça vise plusieurs membres du personnel. Le
cumul, c'est fréquent. Et là on vient créer un système de droits acquis
parallèle pour ces gens-là, puisque le cumul n'est pas prévu dans la Loi sur la
laïcité, ça fait qu'il y a disparité de traitement dans les... des cas d'espèce
similaires. Puis il peut... ça peut aussi créer un sentiment d'iniquité entre
les membres du personnel. Les deux clauses n'ont pas la même... elles s'appliquent
différemment, de sorte que la conclusion n'est pas la même. Donc, ça peut
susciter certainement un sentiment d'iniquité à l'égard des membres du même
personnel.
Mme Cadet : ...de façon
générale, vous m'avez peut-être entendu poser cette question-là à d'autres
intervenants avant vous, soit aujourd'hui ou il y a une semaine et demie, sur
le... bien, en fait, justement, sur la portée de la clause grand-père. Donc, certains
intervenants, donc, la semaine dernière nous disaient : Bien, en fait, il faudrait
que...
Mme Cadet : ...en gros, grosso
modo, que la portée de la clause soit associée à la personne et non pas nécessairement
au poste, et donc qu'il pourrait y avoir, donc, cette variation-là au sein du
réseau, sachant qu'étant donné la pénurie de main-d'oeuvre que le réseau subit,
que cette personne-là pourrait, donc, on parlait de 5 % tantôt, mais qu'en
fait, parfois même, donc, dans certains... à certains moments, donc,
occuperait, donc, 0 %, donc, des tâches qu'elle occupait au moment de la
sanction du projet de loi.
Mme Laberge
(Sophie) :En fait, on a voulu... on n'a
pas analysé cette possibilité, on lui a réfléchi. Mais l'objectif, c'était
d'avoir l'uniformité d'application. Donc, avec cette solution-là qui est
intéressante, mais on crée encore deux régimes distincts en vertu des deux
lois. Donc, pour nous, notre recommandation était la même application. Donc,
tant que la personne exerce ses mêmes fonctions au sein du même centre de
services scolaire, donc, une application identique à tous.
• (18 h 10) •
Mme Cadet : Donc, tout ça,
donc... En fait, bien, le fondement de votre... la portion de votre mémoire qui
porte sur les droits acquis relatifs au port de signes religieux est d'abord,
donc, fondée, donc, sur cette équité que vous venez de mentionner, mais aussi
sur, si je vous lis bien, sur la question de la pénurie de main-d'œuvre, alors
que la réalité du réseau, vous dites «l'occupation d'une double fonction est
une réalité fréquente en éducation a fortiori dans une période de pénurie de
main-d'œuvre».
Donc, je comprends que cet élément-ci vous
préoccupe. Je l'ai mentionné plus tôt nous, comme parlementaires, nous n'avons
pas eu... On ne nous a pas transmis une analyse d'impact réglementaire. Donc,
je voulais savoir si vous vous êtes penchés sur la question de l'interdiction
du port de signes religieux envers, donc, les autres membres du personnel
scolaire, quel impact que ça, ça pourrait avoir sur la pénurie de main-d'oeuvre
que subit le réseau dans certains centres de services scolaires.
M. Robert (Dominique) : En
fait, en termes d'analyse, évidemment, c'est trop tôt, c'est spéculatif, hein,
c'est de la prospective. Mais évidemment c'est la raison pour laquelle on
propose des recommandations qui permettent d'atténuer la transition en douceur,
donc, de s'assurer d'avoir une meilleure rétention du personnel, donc,
faciliter la préparation. Et les principes dans le projet de loi, c'est
d'établir, à partir du moment où on prend une photo, donc, que la loi
s'applique à partir de telle date, 19 mars ou au moment de la sanction,
mais à partir de ce moment-là, ce sont les règles qui s'appliquent.
Et donc, pour répondre à votre question
sur les conséquences, c'est spéculatif, mais déjà on peut présumer qu'on
veut... en fait, on veut s'assurer d'atténuer le plus possible les effets pour
faciliter la rétention de personnel.
Mme Cadet : Merci. Si je
continue dans la lecture de votre mémoire, donc, par la suite, vous nous parlez
des demandes d'accommodement du personnel, qu'une partie des réponses ont été
répondues dans votre échange avec le ministre. En fait, moi, je me demandais
est-ce que... encore une fois, sachant que nous n'avons pas eu d'analyse, donc,
en fait, combien de personnes ont bénéficié d'un congé religieux payé au cours
d'une certaine période définie? Je ne sais pas si c'est une analyse que vous,
vous avez faite en amont de votre préparation du mémoire.
M. Robert (Dominique) : On
n'a pas cette information-là fine, là, auprès de nous... Mais ça dépend…
évidemment, ça dépend de chacun des centres de services scolaires qui ont des
réalités fort différentes. Donc, non, on n'a pas cette information-là avec
nous.
Mme Cadet : O.K. donc ce n'est
pas une information qui remonte, là, des centres de services scolaires à la
fédération. Vous n'avez pas sondé nécessairement vos membres.
M. Robert (Dominique) : Non,
on n'a pas fait cette analyse-là fine, mais on sait que chaque centre de
services scolaire peut avoir évidemment les informations propres à leur milieu.
Mais nous, à la Fédération, on n'a pas cette information-là à ce jour.
Mme Cadet : O.K. est-ce que
vous diriez dans certains milieux, donc, c'est… que c'est très prévalant? Je
sais que… encore une fois, qu'il y a d'autres… des intervenants, donc, encore
une fois, il y a une semaine et demie, qui nous disaient : Il y a en fait…
bon, il y a un certain encadrement. Les personnes, donc, au niveau des
conventions collectives, vont aller chercher dans leur banque d'heures, donc
que… dans la réalité terrain, que selon ce qu'eux ils ont constaté, et c'était,
donc, leurs propos. Qu'ils voyaient, donc, une certaine équité, donc, je ne
suis pas si c'est un… C'est un phénomène qui vous a été partagé comme une
pratique courante dans certains centres de services scolaires, où vous voyez
une grande iniquité.
M. Collard (Jean-François) :
Bien, en fait, c'est des propos, effectivement, ce qui vous a été rapporté
n'est pas étranger à ce qui se vit effectivement sur le terrain. C'est des
choses qu'on entend. Maintenant, ce qui est difficile pour nous comme
fédération, c'est la disparité de l'application de ça. Alors, bien que c'est des
propos qu'on entend, on n'a pas un portrait, comme disait M. Robert, une
analyse fine, donc des chiffres à vous fournir. Maintenant, ce sentiment-là,
évidemment, qui est de l'ordre plus du subjectif, bien, c'est quelque chose
qu'on entend. Maintenant, il faut savoir effectivement que tous ces
encadrements-là sont aussi prévus à l'intérieur, vous l'avez nommé, des
conventions collectives locales. Alors, ça, c'est un élément supplémentaire qui
vient complexifier l'analyse que vous souhaitez en faire. Parce que dans le
fond…
M. Collard (Jean-François) :
...comment la convention locale a été négociée, comment elle est négociée dans
son application. Là, on est en droit du travail pur, mais ça vient s'ajouter à
la dynamique, effectivement, de comment j'ai le droit d'utiliser les congés,
comment c'est octroyé, j'ai droit à combien de suite, donc, les conventions
nationales qui donnent les grandes lignes, mais au plan local, il est possible
de faire autre chose et de négocier des choses localement. Alors, cet élément-là,
conjugué au fait qu'il y a des disparités régionales reliées à ce type de
demande de congés là, Mme Laberge l'évoquait précédemment, dans certains
centres de services plus urbains où il y a davantage de concentration de
multiethnicité, c'est quelque chose qui va être très présent, alors qu'en
région un peu moins.
Mme Cadet : Merci. Un peu
plus tôt dans votre présentation, M. Robert, je pense que vous évoquiez
des sanctions. J'imagine que, vous, vous faisiez référence à ce moment-là à la question
d'interdiction d'influence religieuse, là. Je voulais savoir si vous aviez,
donc, des exemples parce que, dans le fond, vous souhaitez une introduction,
donc, des suppositions pénales. Quand vous disiez, donc, sanctions, je me suis
dit que vous aviez en tête certains exemples.
M. Robert (Dominique) :
Volontairement, nous n'avons pas été dans des recommandations de sanction.
C'est par souci de cohérence dans la loi sur l'instruction... de l'instruction
publique. On sait déjà qu'il y a des sanctions prévues pour d'autres motifs
alors que, là, il y avait des obligations à respecter, mais pas de sanction
dans la mesure où ça ne l'est pas. Par souci de cohérence, donc, on laissait
les parlementaires, là, définir les sanctions.
Mme Cadet : Parfait.
Merci beaucoup. Pouvoir d'enquête du ministre. Donc, vous m'avez entendu cet après-midi,
donc, poser plusieurs questions, donc, sur cet élément-ci, principalement,
donc, sur l'article 12. Donc, votre mémoire évoque aussi la question du
pouvoir... des pouvoirs qui sont dévolus, donc, au ministre. Vous nous dites,
dans votre 10 ᵉ recommandation, donc, qu'il faudrait, donc, modifier
certains articles du projet de loi afin de circonscrire le pouvoir
d'intervention du ministre lors d'un manquement commis par un membre du conseil
d'établissement, ou du conseil d'administration, ou sur les cas qui
contreviennent à une disposition de la Loi sur l'instruction publique et au
Règlement sur les normes d'éthique et de déontologie applicables aux membres du
conseil d'administration d'un CSS francophone. Donc, j'aimerais vous entendre,
donc, sur cet élément-ci, là, sur le pouvoir d'intervention du ministre.
M. Robert (Dominique) :
Et je laisserais Mme Laberge, là, vous exposer...
Mme Cadet : Oui, bien sûr.
Mme Laberge
(Sophie) : En fait, il faut voir une recommandation précédente
où on demandait que les normes d'éthique applicables aux membres des conseils
d'établissement soient déterminées par le gouvernement, à l'instar de ce qui se
fait pour les membres du conseil d'administration. Donc, je pense...
Mme Cadet : ...ce que
j'ai vu...
Mme Laberge
(Sophie) : Exactement.
Mme Cadet : ...mais de
bien nous éduquer comme parlementaires sur cette distinction.
Mme Laberge
(Sophie) : Et dans la mesure où notre recommandation précédente
n'était pas suivie et que chaque centre de services scolaire devait adopter ses
propres normes d'éthique et de conduite, à ce moment-là, et qui peuvent
englober bien d'autres choses de ce qui est prévu dans le cadre de la Loi sur
l'instruction publique, mais en matière d'éthique, on peut prévoir plusieurs
sujets. Donc, notre... on s'interrogeait sur le pouvoir du ministre
d'intervenir, de sanctionner un manquement prévu à un code d'éthique, mais dont
la norme ne se retrouve ni dans la Loi sur l'instruction publique en matière de
laïcité ni en vertu de la Loi sur la laïcité de l'État. Donc, c'est un peu pour
ça qu'on se disait si effectivement le ministre a un pouvoir d'intervention sur
les codes d'éthique que les centres devront adopter, les conseils
d'établissement. Le pouvoir d'intervention devrait être limité à ceux édictés,
aux pouvoirs qui sont établis dans les deux lois.
Mme Cadet : Je comprends.
Alors, c'est une recommandation subsidiaire à votre...
Mme Laberge
(Sophie) : Oui.
Mme Cadet : ...à votre
neuvième recommandation, qui est d'avoir un processus de... Encore une fois,
vous êtes dans l'équité, là, s'assurer que ce qui se passe d'un côté, donc,
soit un miroir, un reflet, là, de ce qu'il se passe ailleurs. Et pouvez-vous,
donc, un peu, donc, élaborer? Donc, vous souhaiteriez, donc, que le pouvoir du
ministre au conseil d'établissement soit collé au pouvoir qu'il a envers les
conseils d'administration?
Mme Laberge
(Sophie) :D'administration. Oui, le
ministre intervient uniquement lorsqu'il n'y a pas de sanction de retenue.
Donc, à ce moment-là, ça évite aussi probablement beaucoup, beaucoup de
dossiers qui monteraient vers le ministre. Quand on parle d'éthique, là, on
parle de toutes règles d'éthique confondues, pas seulement en matière de
laïcité. Donc, on voyait une... une opportunité d'équité, encore une fois, là,
tu sais, le double régime applicable au C.E. ou au C.A.
La Présidente (Mme Poulet) :
Merci beaucoup. Alors, on va poursuivre la discussion avec le député de
Jean-Lesage.
M. Zanetti : Merci, Mme
la Présidente. J'aimerais vous entendre davantage sur la recommandation...
M. Zanetti : ...de votre
mémoire que vous dites : «Modifier le libellé des références aux valeurs
démocratiques et aux valeurs québécoises afin que le texte se lise ainsi :
"les valeurs démocratiques et les valeurs québécoises" — et
là vous ajoutez — exprimées par la Charte des droits et
libertés".» Pourquoi est-ce que c'est important pour vous de faire cet
ajout-là?
M. Robert (Dominique) : Bien,
je vous dirais que, dans la réflexion... évidemment, vous avez pu voir que,
dans les recommandations que l'on fait, c'est des éléments de cohérence pour
s'assurer de clarifier, simplifier, qu'on ait une compréhension commune de
l'ensemble de ces aspects-là, et sur le plan, je dirais, de cohérence de
différentes lois. Donc, la charte, de l'intégrer et d'y faire référence, ça
enlève toute forme d'ambiguïté. Je laisserais également Mme Laberge... s'il y a
des éléments à compléter à cet égard-là.
Mme Laberge
(Sophie) :Parce que les valeurs dont il
est question sont les valeurs qui découlent de la charte des droits et
libertés. Donc, à partir du moment où les employés, notamment, les enseignants,
ont l'obligation de s'assurer de l'application des valeurs démocratiques et des
valeurs québécoises, il faut s'assurer de bien connaître les valeurs
québécoises et démocratiques. Donc, une référence à la charte, pour nous, est
une cohérence juridique qui nous permet, à ce moment-là, de bien connaître
quelles sont... de quelles valeurs on parle, et non pas de faire une recherche
pour bien connaître nos obligations. Donc... voilà.
• (18 h 20) •
M. Zanetti : ...avec vous, je
pense que c'est un ajout vraiment judicieux. En même temps, moi... je pense que
je vais proposer un amendement, là... mais, en même temps, comment voyez vous
le fait que cette loi là, au fond, dont les valeurs québécoises devraient être
inspirées de la Charte de langue française, bien, on la met à l'abri de
l'examen de la Charte de la langue... pas de la langue française, pardon, la
Charte de la langue... de... voyons, la charte québécoise des droits et
libertés? Excusez-moi, il est tard... bien, il est tard... en tout cas, on
s'est réveillés tôt. Donc, comment... est-ce que vous trouvez là qu'il y a un
paradoxe? Est-ce qu'au fond... est-ce que vous avez une position sur la
question de la clause dérogatoire, si je veux être plus simple, là? Vous avez
le droit de dire non, là, c'est bien correct, là.
Mme Laberge
(Sophie) :On ne s'est pas questionnés,
parce que l'ensemble du projet de loi est basé sur cette clause-là, puis, bon,
les intentions du gouvernement sont manifestes. Donc, on ne s'est pas
interrogés à ce sujet là.
M. Zanetti : Merci. Puis sur
les congés, là, j'entends qu'une des difficultés à l'heure actuelle, pour
assurer l'égalité... qui est importante, là, l'égalité entre le nombre de
congés payés pour tout le monde, toutes les travailleuses et tous les
travailleurs, là, il y a des... bon, il y a des... le fait que les conventions
locales, certaines conventions locales, amènent, là-dedans, de l'hétérogénéité,
là, O.K. Vous ne pensez...
On a, par ailleurs, entendu des gens qui
ont dit : Il y a vraiment moyen d'atteindre l'égalité, mais en
augmentant... disons, en améliorant la souplesse, et peut-être même en
augmentant le nombre de congés, pour que tout le monde ait un nombre de congés
égal, peut-être supérieur à ce qu'il est à l'heure actuelle, ou qu'il y ait des
congés qui soient transformés en congés personnels, plutôt qu'en congés...
strictement congés de maladie, ou tout ça, qui ferait en sorte qu'au fond tout
le monde pourrait avoir le même nombre de congés sans qu'on bouge trop les
échiquiers. Est-ce que ce genre de solution là, pour vous, c'est quelque chose
qui est applicable, possible? Si le gouvernement voulait faire ça, là, est-ce
qu'il pourrait?
M. Robert (Dominique) : Bien,
il faudrait voir, parce qu'évidemment là, on fait référence à des conventions
collectives, donc conventions collectives nationales, qui viennent d'être
négociées, donc, jusqu'en 2028, par la suite, des conventions collectives
locales, et on vient y intégrer la Loi sur l'instruction publique. Donc, est-ce
que... à votre question, est-ce que c'est applicable, faisable, etc., bien, ça
aussi, ça demeure, en ce moment, à ce jour, hypothétique. Est-ce que ça
pourrait être évalué, analysé ultérieurement? Les propos, dans notre mémoire,
étaient encore à l'effet de dire... on voulait s'assurer d'avoir l'uniformité,
parce qu'en ce moment on y voyait des disparités, là, à l'égard de différents
services, bien qu'on vienne s'assurer que les services éducatifs et les
services de garde ne soient pas compromis. On voulait s'assurer de l'élargir.
La Présidente (Mme Poulet) : Je
vous remercie beaucoup de votre contribution à vous trois.
Alors, la commission suspend ses travaux
quelques instants, le temps que le prochain groupe prenne place.
(Suspension de la séance à 18 h 24)
(Reprise à 18 h 28)
La Présidente (Mme Poulet) : Alors,
on reprend nos travaux. Je souhaite la bienvenue à la Fédération des
établissements d'enseignement privé. Je vous rappelle que vous dites que vous
avez 10 minutes pour votre exposé. Par la suite, on va procéder à la période
d'échange. Alors, la parole est à vous.
Mme Brousseau (Nancy) : Il
faut peser pour que ça fonctionne?
La Présidente (Mme Poulet) :
Non, vous ne touchez à rien.
Mme Brousseau (Nancy) : On ne
touche à rien. Parfait. Alors, bonjour, tout le monde, MM. et Mmes les députés,
M. le ministre, bonjour. Je m'appelle Nancy Brousseau, je suis la directrice
générale de la Fédération des établissements d'enseignement privé. Je suis
accompagnée de notre vice-président, M. Stéphane Mayer, qui est aussi le
directeur général du Collège Saint-Sacrement de Terrebonne, et de Mme Jacinthe
Robert, qui est conseillère à la direction générale et à l'administration des
écoles, qui est notre CRHA en résidence. Alors, je vais céder la parole à notre
vice-président.
M. Mayer (Stéphane) : Alors,
Mme la Présidente, M. le ministre, Mmes, MM. les députés, merci de nous
recevoir. Permettez-moi d'abord quelques remarques sur notre fédération pour le
bénéfice de tous. La fédération est un OSBL d'une trentaine d'employés qui
offre à ses écoles-membres des services- conseils, de la formation, de
multiples occasions d'échange ainsi que la possibilité d'effectuer des achats
groupés. Nous sommes en quelque sorte le centre de services scolaire des écoles
privées du Québec.
Notre fédération compte parmi ses membres
119 écoles préscolaires-primaires, 146 écoles secondaires, réparties dans 14
des 17 régions administratives du Québec. Elle compte 12 écoles spécialisées
qui fonctionnent en partenariat avec les centres de services scolaires et les
commissions scolaires anglophones...
M. Mayer (Stéphane) : ...elle
compte aussi 15 résidences scolaires qui offrent des services essentiels à de
nombreuses familles. Enfin, elle accueille plus de... pardon, plus de 137 000
élèves, soit 97 % du total des élèves au privé au Québec.
Pour bien situer nos interventions,
permettez-moi de prendre quelques minutes pour vous fournir certaines
perspectives sur les écoles privées québécoises. Les écoles privées agréées aux
fins de subvention ou non sont des OSBL gérés par un conseil d'administration.
Elles fonctionnent selon un modèle similaire à celui des CPE ou des cégeps. Le
coût d'un élève du réseau privé subventionné représente moins de 50 % de
celui d'un élève du réseau public. Les écoles privées sont responsables de
leurs bâtiments, souvent patrimoniaux, elles n'ont pas d'autres... elles n'ont
pas droit aux sommes du PQI ni à l'argent des taxes scolaires. De plus, les
écoles privées affichent des taux de réussite élevés et dans les délais prévus,
ce qui représente des économies substantielles pour l'État à court, moyen et
long terme.
• (18 h 30) •
Par ailleurs, certains mythes sont à
déconstruire. L'école privée n'est pas uniquement pour les élèves ayant de la
facilité. 22 % de nos élèves ont un plan d'intervention établi à la suite
d'un diagnostic. L'école privée n'est pas un milieu homogène. 44 % de nos
élèves sont issus de l'immigration de première ou deuxième génération. C'est
34 % au public. L'école... le Québec, pardon, n'est pas la province la
plus inégalitaire en éducation, contrairement à ce qu'on entend. Constamment
cité dans les médias, le Conseil supérieur de l'éducation a lui-même publié un
rectificatif en 2023 au sujet de son rapport de 2016. Au contraire, le Québec
est l'un des endroits au monde où l'écart entre les élèves issus des milieux
défavorisés et favorisés est le plus faible. L'école privée n'est pas exclusive
aux familles nanties. Plusieurs familles font d'énormes sacrifices, et plus de 6 %
de nos élèves bénéficient d'un soutien financier de leur école. Nous jugeons
également important de vous faire part que le privé jouit d'un fort appui de la
population.
Un sondage Léger de 2023 révèle que
76 % de la population croit qu'il est important de préserver la liberté
aux gens d'opter pour l'école de son choix et 72 % de la population
considère que la coexistence de l'école publique et de l'école privée est un
avantage pour le Québec. L'enseignement privé bénéficie de l'appui de parents
satisfaits et très mobilisés. Selon un sondage CROP tout récent, le taux de
satisfaction des parents qui ont choisi une école privée québécoise est à plus
de 93 %. En région, les écoles privées jouent un rôle-clé dans
l'attraction et la rétention d'une main-d'oeuvre spécialisée. Dans des villes
comme Sept-Îles, Shawinigan, Rivière-du-Loup ou Drummondville, l'école privée
reçoit l'appui de la municipalité ou de la chambre de commerce car sa survie
est primordiale pour la région. Les écoles privées contribuent à la
préservation du patrimoine bâti. Dans plusieurs municipalités du Québec, les
bâtiments qu'elles occupent sont des jalons historiques importants.
Le Québec n'est pas la seule province à
subventionner les élèves qui fréquentent une école privée. Le Manitoba, la
Saskatchewan, l'Alberta et la Colombie-Britannique le font, également, parfois
dans des proportions plus importantes. C'est d'ailleurs la Colombie-Britannique
qui a la proportion la plus élevée d'élèves fréquentant une école privée.
Plusieurs pays, par exemple la Belgique, le Danemark, la Suède et la Finlande,
subventionnent aussi des écoles privées de façon à éviter la stratification des
classes qui se crée lorsque le choix se fait uniquement entre l'école publique
et l'école privée non subventionnée. Selon les données de la Banque mondiale,
la proportion d'élèves qui fréquentent l'école privée est en croissance dans la
plupart des pays occidentaux, alors qu'au Québec cette proportion est plutôt
stable depuis une quinzaine d'années.
Enfin, les parents des élèves des écoles
privées injectent des centaines de millions de dollars annuellement dans le
réseau de l'éducation du Québec, en plus de contribuer au réseau public par
leurs impôts, les taxes scolaires, notamment.
Parlons maintenant du projet de loi no 94
et de son impact sur les écoles privées québécoises. Tout d'abord, il faut
savoir qu'environ la moitié des 206 écoles membres de notre fédération ont été
fondées par des communautés religieuses, à très grande majorité catholique,
mais hormis quelques exceptions, elles ont traversé un processus de relève
institutionnelle. Ils sont maintenant des OSBL gérés par des personnes laïques.
Les écoles membres de la fédération ont évolué avec la société québécoise.
Rappelons que la fédération a été une
alliée du ministère en 2008, alors que le cours Éthique et culture religieuse a
été implanté en remplacement des cours de morale ou de religion. La fédération
a appuyé ce changement et a joué un rôle-clé dans la transition en offrant de
nombreuses formations et de l'accompagnement personnalisé à ses membres pour
l'enseignement des nouveaux contenus. À partir de 2020, la fédération a
participé, avec le ministère de l'Éducation à l'implantation du cours Culture
et citoyenneté québécoise, conçu pour remplacer le cours d'Éthique et culture
religieuse.
Globalement, les modifications apportées
par le projet de loi no 94, tel que déposé et les changements qu'il imposerait
à la Loi sur l'enseignement privé, ne posent pas d'enjeux spécifiques...
18 h 30 (version non révisée)
M. Mayer (Stéphane) : ...aux
écoles privées.
Regardons ensemble les changements
apportés à la Loi sur l'enseignement privé par le projet de loi n° 94.
L'article 41 ajoute «les membres du
personnel d'un établissement non agréé aux fins de subvention dans l'obligation
d'exercer leurs fonctions à visage découvert.» La Fédération ne s'oppose pas à
cette modification.
L'article 42 vient préciser les
règles de conduite des élèves et fait appel à la collaboration des parents et
des membres du personnel. La Fédération ne s'oppose pas cette modification,
mais suggère que «la croyance religieuse» soit ajoutée à la liste des sujets
pouvant motiver l'intimidation et la violence. Donc, on ajouterait «la croyance
religieuse.»
L'article 43 demande que toute personne
appelée à dispenser des services à des élèves doit le faire à visage découvert.
La fédération ne s'oppose pas à cette modification.
L'article 44 demande que les contrats
de service éducatif soient modifiés pour prévoir, sous peine de nullité, l'obligation
pour l'élève d'avoir le visage découvert. Encore une fois, notre fédération ne
s'oppose pas à cette modification.
Dans tous ces cas, la Fédération veillera
à diffuser auprès de ses membres les outils développés par le ministère de l'Éducation
pour bien informer le personnel, les parents et les organismes partenaires.
Pour conclure cette partie, un rapide
sondage maison fait auprès de nos écoles il y a quelques jours a souligné que
près de 94 % des écoles répondantes n'entrevoyaient aucun problème à l'application
de ces modifications.
Nous aimerions partager un questionnement
survenu lors... lorsque nous avons étudié ce projet de loi. Rappelons d'abord l'obligation
de fréquentation scolaire jusqu'à 16 ans au Québec. Qu'arriverait-il si
une famille souhaitant se soustraire à cette loi et, dans un cas hypothétique,
retirait son enfant de l'école et refusait l'enseignement à domicile si ce
service devait être donné à visage découvert? Pourrait-on se trouver dans la
situation où un élève serait privé de son droit fondamental à l'éducation? Dans
ce cas, quel mécanisme utiliser pour signaler le tout aux autorités?
En guise de conclusion, nous aimerions
souligner trois points qui, à notre avis, sont importants dans la discussion
sur l'école et la religion.
Rappelons d'abord que les problèmes mis en
lumière récemment dans les médias sur les dérives dans certaines écoles ne
sont... ne se sont pas produits dans des écoles privées. L'enjeu n'est d'ailleurs
pas le statut religieux ou non d'une école, mais bien le respect des lois et
des règlements qui encadrent l'école, la conformité aux programmes de formation
de l'école québécoise, des valeurs québécoises et l'usage du français comme
langue commune dans les écoles francophones.
Les écoles privées québécoises sont
excessivement bien encadrées par la Direction de l'enseignement privé du
ministère, qui délivre et renouvelle nos permis. Les écoles qui ne
respecteraient pas les nombreuses réglementations, le régime pédagogique, le
programme de formation ou qui n'utiliseraient pas du matériel conforme
perdraient leur permis. C'est aussi simple que ça.
Rappelons, en terminant, que le Québec, en
imposant à toutes les écoles de suivre le programme de formation de l'école
québécoise, est un chef de file en matière d'équité en éducation et dans l'encadrement
des élèves à l'égard de la place de la religion à l'école. Dans la plupart des
juridictions, les écoles autonomes, et tout particulièrement celles qui ne sont
pas subventionnées, n'ont pas de reddition de comptes quant aux contenus à
enseigner.
Nous vous remercions pour votre attention
et nous sommes prêts à répondre à vos questions.
La Présidente (Mme Poulet) : Merci
beaucoup. Alors, on va procéder à la période d'échange avec le ministre. La
parole est à vous.
M. Drainville : Oui. Merci de
votre participation.
Permettez... Permettez-moi d'exprimer d'abord
une déception. Parce que, quand vous parlez du patrimoine bâti, vous avez
oublié le collège de Lévis, l'école Marcel-Mallet, le Juvénat Notre-Dame. Donc,
je vous suggérerais, là, Terrebonne, Rosemère, Trois-Rivières, Sherbrooke,
Nicolet, Québec, Sainte-Anne-de-la-Pocatière et Lévis. Juste comme ça.
Une voix : ...
M. Drainville : Comment?
M. Mayer (Stéphane) : ...
M. Drainville : La Pocatière.
Bon. La Pocatière.
Mme Brousseau (Nancy) : Il y
en a partout. Il y en a partout.
M. Mayer
(Stéphane) :
Sherbrooke.
Partout.
M. Drainville : Sherbrooke.
Sherbrooke est déjà là par contre.
M. Mayer (Stéphane) : Ah!
Chicoutimi.
M. Drainville : Mais je vois
que vous avez... mais vous avez... vous vous êtes assuré que Terrebonne soit
là, par contre, M. le D.G. Là, vous êtes un petit conflit d'intérêts ici. Mais
c'est... Ça se veut très constructif. Vous avez compris.
M. Mayer (Stéphane) : Je vous
invite à visiter notre beau collège à Terrebonne.
M. Drainville : Mais je l'ai
déjà visité, mon cher monsieur.
M. Mayer (Stéphane) : Ah oui?
M. Drainville : Oui, oui,
oui. Absolument. Absolument.
Bon. Alors, d'abord, je veux juste
vérifier quelque chose. Quand vous dites que vous souhaiteriez que le critère
de croyance religieuse s'applique ou au code de vie, donc qu'on interdise les
comportements discriminatoires des élèves sur la base des croyances
religieuses, si je ne m'abuse... puis ce n'est pas un reproche, là, ça se veut
très constructif, si je ne m'abuse, vous ne l'avez pas mis dans votre mémoire.
En tout cas, je le cherche, je ne le trouve pas.
Une voix : Non, non, c'est
vrai. Vous avez tout à fait raison.
M. Mayer (Stéphane) : Vous
avez raison.
M. Drainville : C'est exact?
Mme Brousseau (Nancy) : Oui.
C'est des conversations qu'on a eues par la suite.
M. Drainville : C'est bien. C'est
parce que vous n'êtes pas le premier groupe à nous soumettre cette
suggestion-là. Lors de notre première journée, il y a un groupe également qui l'a
fait. J'ai oublié lequel. Mais...
M. Drainville : …vous êtes…
J'avais dit à ce moment-là que c'était une suggestion que j'accueillais avec
beaucoup d'ouverture. Sur le visage à découvert, comme vous le savez, la loi
actuelle prévoit déjà l'interdiction du visage couvert pour le personnel
scolaire des écoles publiques et des écoles privées subventionnées. Donc, dans
le projet de loi, nous, nous obligeons évidemment le visage à découvert pour
tous les élèves, public et privé, privé subventionné ou pas. Mais on ajoute à
ça également l'interdiction du visage couvert pour les institutions privées non
subventionnées, ce qui n'était pas le cas jusqu'à maintenant. Est-ce que vous
avez eu des réactions dans vos rangs? Est-ce qu'il y a des… possiblement des
directions de collèges privés non subventionnées qui ont levé la main pour
dire : Là, ça nous pose problème parce qu'on a chez nous du personnel qui
porte le voile intégral? Aucune?
• (18 h 40) •
Mme Brousseau (Nancy) : Aucune
école n'a réagi. Puis, comme le disait mon collègue tout à l'heure, on a fait
un petit sondage maison, là, pour voir les problématiques d'application.
94 % des gens nous ont dit : Il n'y aura aucun problème
d'application. Là où il y avait peut-être un peu de doute, c'était concernant
les personnes autres. Tu sais, quand on dit : Bien, il y a les parents…
pardon, il y a le personnel, il y a les élèves, mais il y a aussi, par exemple.
Les parents sur le terrain de l'école ou quand on va chercher des activités
pédagogiques à l'extérieur des murs de l'école.
M. Drainville : Oui, pour les
projets particuliers.
Mme Brousseau (Nancy) : Donc,
ça, il y avait une petite… en tout cas, il y a… les gens ont émis dans un
pourcentage très faible, là, la possibilité qu'il y ait des problèmes, mais à
l'intérieur de l'école, ça ne semble pas poser de problème.
M. Drainville : Et chez les
élèves, maintenant?
Mme Brousseau (Nancy) : Non,
vraiment, chez les élèves, le pourcentage était pratiquement zéro.
M. Drainville : O.K., très
bien. Sur le code de vie, je note que vous vous raliez également. Vous n'avez
pas d'enjeu là-dessus.
Mme Brousseau (Nancy) :
Absolument. Non.
M. Drainville : Vous
souhaitez même sa bonification comme on vient… comme on vient le dire. Bon,
vous n'êtes pas… On va ouvrir la discussion un petit peu. Vous n'êtes pas sans
savoir que parmi les critiques du projet de loi, il y a ceux et celles qui
trouvent que nous n'allons pas assez loin. Il y en a qui trouvent qu'on va trop
loin. On les a entendus, on en a entendu certains déjà ce matin ou, enfin,
aujourd'hui, il y en a d'autres qui trouvent qu'on ne va pas assez loin en
n'assujettissant pas les institutions privées au projet de loi. Moi, ce que
j'ai dit, puis je l'ai répété encore aujourd'hui, c'est que toute la question
de la place du religieux au sein des institutions privées, ça viendra dans une
deuxième étape. Quand vous m'entendez dire ça, est-ce que vous avez des
inquiétudes? Et, si oui, lesquelles?
Mme Brousseau (Nancy) : Les
gens dans nos écoles en ont, des inquiétudes. Quand vous dites ça, c'est sûr,
puis nous, on les prépare, puis c'est pour ça qu'on est venu honnêtement, parce
qu'on avait jasé de la possibilité de venir ou pas. Puis on disait : Bien,
écoutez, nous, ça nous touche relativement peu, ce projet de loi. Mais j'ai
l'impression que les gens auront des questions au-delà de ce qui touche le projet
de loi. Mais ça nous inquiète, et pas, parce que, dans le fond, les écoles ont
un caractère religieux, des fois pas mal plus culturel ou historique,
patrimonial que réel, là, à l'intérieur des écoles, surtout quand on parle du
régime… du respect du régime pédagogique, du respect du programme de l'école
québécoise. Tu sais, tout le monde s'en tient à ça. Puis dans nos écoles, ce
qui diffère peut-être, mais je ne veux pas m'avancer, là, parler pour toutes
les écoles puis tout le réseau au grand complet, mais chez nous, il y a
certaines caractéristiques qui font que le… je dirais, le contrôle est
peut-être plus dur à perdre, d'une part…
M. Drainville : …
Mme Brousseau (Nancy) : Bien,
de ce qui se passe dans les classes, puis, tu sais, bon, des dérapages.
M. Drainville : Dans le sens
de l'encadrement, là.
Mme Brousseau (Nancy) : Disons
ça comme ça, un, bien, d'abord, disons, le projet… le programme de l'école
québécoise est obligatoire partout. Ça, c'est vraiment une caractéristique du
Québec. Si, par exemple, je parle à des collègues dans d'autres juridictions,
l'école autonome ou l'école privée, ils font ce qu'ils veulent. Alors, ils
n'ont pas à suivre de programme nécessairement. Alors, ça donne vraiment des
choses très différentes et très éclectiques. Alors, déjà que nous, on l'oblige,
ici, au Québec, on est déjà encadrés.
Deuxièmement, Stéphane en parlait tout à
l'heure, la direction de l'enseignement privé… nous, on a des permis, ils sont
renouvelables, ils sont surveillés, on a des… On les appelle les inspecteurs,
là. C'est peut-être un vieux terme, mais il y a encore… tu sais, il y a toute
une structure qui fait que les permis durent entre un à 5 ans, ils sont
très, très, très surveillés, les écoles privées. Puis le troisième élément qui
nous caractéristique… qui nous caractérise, c'est que le personnel est beaucoup
à l'intérieur de l'établissement. Par exemple, la direction pédagogique, la
direction générale, tu sais, tout est à l'intérieur de l'établissement. Tant et
si bien que la surveillance...
Mme Brousseau (Nancy) :
...de ce qu'il se passe dans la classe d'un point de vue pédagogique ou c'est
les parents appellent. Ce n'est pas trop long, tu sais, ça ne se peut pas que
ça prenne du temps avant de savoir que quelque chose dérape dans les écoles,
là. Il y a... Il y a... Structurellement, on n'est pas mal organisé pour que ça
n'arrive pas.
M. Drainville : Et quand
vous dites : On n'a pas trop d'inquiétude, poursuivons. Moi, évidemment,
je suis en lien avec mes institutions privées dans mon comté. Je connais très
bien les trois directions. Puis je dis toujours : On a des très bonnes
écoles publiques à Lévis puis on a des très bonnes écoles privées. Puis moi, je
vis très bien avec les deux. Je... Ce n'est pas une nouvelle. Moi, je pense que
le fait qu'on ait un régime scolaire mixte au Québec, je pense que ça nous a
très bien servi, très bien servi, historiquement puis encore aujourd'hui. Puis
je rappelle tout le temps que c'est à peu près 10 % de tous les élèves au
Québec qui vont dans les écoles privées, là. Ça fait qu'à un moment donné, tu
sais, pousse, mais pas égal, là. Quand j'entends dire parfois : Ah! Bien,
si on cessait de financer les écoles privées, on réglerait l'essentiel des
problèmes de l'école publique. Là, franchement, c'est de la grosse démagogie,
cette affaire-là. Alors, dans mes discussions avec certaines... avec certaines
directions des écoles privées, pas nécessairement juste à Lévis, de façon
générale, on me dit souvent : Tu sais, on a une histoire religieuse, mais
au fil du temps l'école privée est devenue laïque. Notre école privée me parle,
là, tu sais, je parle à une direction, mettons. Ils vont dire : Bien,
notre école privée, elle est devenue laïque. Alors, est-ce qu'il y a encore des
références religieuses parfois sur les murs? Est-ce qu'il y a des peintures?
Est-ce qu'il y a une chapelle? Est ce qu'il y a... Bien, oui. Mais de là à dire
que l'école est religieuse, que l'enseignement n'est pas laïque, que l'esprit
n'est pas laïque, c'est faux. Bon. Et donc je me posais la question, puis là
c'est très, très, très hypothétique, là, puis je le répète, là, pour les
journalistes qui nous écoutent, là, la question de l'école privée viendra dans
un deuxième temps, là. Il n'est pas question d'ouvrir le projet de loi
n° 94 sur d'autres aspects, là. On en a déjà beaucoup, beaucoup sur notre
planche à dessin avec le projet de loi actuel. Mais je pose quand même la
question. Si un jour on devait regarder, parmi les écoles privées
subventionnées, combien est-ce qu'il y en a qui sont religieuses, dans votre
esprit, quel serait le résultat? Puis je comprends que... Je ne vous en
tiendrai pas rigueur, là, parce que je ne vous ai pas prévenu que j'allais vous
poser cette question-là, là. Ça fait que je ne vous en tiendrai pas rigueur,
mais je veux juste avoir votre évaluation spontanée, là.
Mme Brousseau (Nancy) :
Bien, j'ai quand même des chiffres. Parce que quand tous ces... Tout est arrivé
à Bedford. Là, le premier regard, ça a été vers le privé.
M. Drainville : Oui,
oui.
Mme Brousseau (Nancy) :
Nous, on a dit : Mon Dieu! Qu'est-ce qu'il se passe? Il se passe quelque
chose au public et tout le monde parle du privé religieux. Alors on est allé de
coups de sonde, mais honnêtement, là, tu sais, le travail minutieux n'a pas été
fait ni par nous ni par le ministère, mais on a des grandes lignes. En fait,
85 % des écoles sont complètement laïques et on fait leur...
Une voix : ...
Mme Brousseau (Nancy) :
...leur relève institutionnelle. Merci, Stéphane.
M. Drainville : Ils ont
fait leur quoi?
Mme Brousseau (Nancy) :
Leur... Ça s'appelle la relève institutionnelle.
M. Drainville : C'est
quoi, ça, la relève institutionnelle?
Mme Brousseau (Nancy) :
Ils sont passés d'une corporation religieuse à un organisme, un OBNL laïc.
M. Drainville : O.K. On
parle des...
Mme Brousseau (Nancy) : O.K.
Donc, 85 % sont comme ça.
M. Drainville : Les
lettres patentes et tout ça, là.
Mme Brousseau (Nancy) :
Exactement.
M. Drainville : Oui. O.K.
Mme Brousseau (Nancy) :
Là, mettons qu'il y en a 15 % qui ont encore un passé religieux ou qui
ont... qui sont encore une corporation de type religieux, soit parce qu'il y a
les membres du C.A. qui sont encore là ou ils ont encore un coup de main
financier parce que...
M. Drainville : D'une
communauté religieuse.
Mme Brousseau (Nancy) :
Oui, parce que mener une école privée sans coup de main, ce n'est pas facile.
Et là, parmi ceux-là... Alors là, on prend 15 %. Parmi ceux-là, il y en a
80 % que leur passé est catholique et...
M. Drainville : Dans ce
15 %, dites-vous...
Mme Brousseau (Nancy) :
Oui.
M. Drainville : ...il y
en a 80 %?
Mme Brousseau (Nancy) : 80 %,
c'est un passé catholique. Et quand c'est arrivé, là, il y a eu de l'inquiétude.
Et savez-vous la question que j'ai eue le plus souvent à répondre? On va-tu
encore pouvoir faire une messe à Noël? Tu sais, c'était ça, là, l'inquiétude,
là, tu sais, pour certaines écoles qui avaient cette...
M. Drainville : Dans ce
80 %...
Mme Brousseau (Nancy) :
Exactement.
M. Drainville : ...du
15 %.
Mme Brousseau (Nancy) :
C'est ça. Puis de ces éléments-là, aussi, honnêtement, je ne veux pas dire
100 %, là, mais c'est quasiment, tu sais, c'est comme 98 %, là, il
n'y a jamais, jamais, jamais de...
Mme Brousseau (Nancy) : ...à
l'intérieur des 25 h obligatoires de cours, là. Tu sais, c'est... La
religion est comme, tu sais, sur les murs ou dans la culture, mais elle n'est
plus là, là.
M. Drainville : D'accord. Mon
cher collègue Mario, qui a été... que je ne peux pas nommer «Mario», mais je
viens de le nommer pareil, député de Vanier-Les Rivières, qui a été lui-même
directeur de quelques établissements privés, n'est-ce pas...
M. Asselin : Trois.
M. Drainville : ...trois,
souhaiterait, Mme la Présidente, participer à la discussion.
La Présidente (Mme Poulet) : M.
le député de Vanier-Les Rivières, la parole est à vous.
M. Asselin : Merci beaucoup,
Mme la Présidente. Alors, bienvenue ici. Vous comprenez que je tenais à vous
adresser quelques mots et peut-être vous interroger un peu.
Je ne suis pas très surpris de votre
réponse parce que, de mon côté, j'ai vu pas mal l'évolution, tout ça, ayant été
impliqué dans trois relèves institutionnelles. Et puis la religion a occupé
quand même peu de place... relativement peu de place aux gens. Mais je
remarque, Stéphane, que tu as dit : 44 % des élèves des écoles
privées sont issus de l'immigration de première ou de deuxième génération,
34 % au public. Le réalisez-vous, les gens qui nous écoutent? 44 %
des élèves. Comment est-ce que vous expliquez cette évolution-là? Parce qu'on
s'imagine souvent l'inverse, il y a moins... il y a moins de gens issus de
l'immigration qui adoptent le privé. Puis ce n'est pas le cas. Puis ça ne me
surprend pas du tout, ce que tu as dit.
• (18 h 50) •
M. Mayer (Stéphane) : Bien,
je peux parler pour mon école.
M. Asselin : Oui.
M. Mayer (Stéphane) : Ce que
j'entends des parents de mon école, il y a beaucoup de familles issues de
l'immigration qui ont vécu des situations pas faciles, qui voient le Québec
comme une terre d'accueil incroyable, qui veulent donner toutes les chances
possibles à leurs enfants et décident de se serrer la ceinture au maximum pour
envoyer leurs enfants dans le réseau privé pour différentes raisons. Mais,
notamment, ils essaient de mettre leurs enfants dans un contexte le plus
favorable possible pour qu'ils réussissent dans leur vie. Donc,
essentiellement, c'est des questions de valeurs familiales, je vous dirais, qui
guident ces choix-là.
M. Asselin : Est-ce que j'ai
le temps pour une autre question?
La Présidente (Mme Poulet) : Il
reste deux minutes 15.
M. Asselin : Deux minutes.
Bon. Vous avez fait des enquêtes, deux ou trois enquêtes, voilà un certain
temps, concernant la croyance des gens. Puis vous vous êtes aperçu que,
progressivement, il y avait de moins... de moins en moins de personnes qui
croyaient. Est-ce que c'est de nature, disons... Est-ce que vous accueillez
mieux le projet de loi actuel ou si c'est... ça suscite plein d'interrogations
comme telles, le fait que les gens croient moins?
Mme Brousseau (Nancy) : Bien,
je vais te tutoyer!
M. Asselin : Oui, oui, oui.
On se connaît.
Mme Brousseau (Nancy) : Tu
fais référence à l'enquête qu'on fait auprès de nos élèves. Il y a quand même
45 000 élèves qui ont répondu à ça. Puis c'est l'enquête de 2023.
C'est ce qu'elle dit. C'est que sur 44 % d'élèves issus de l'immigration, donc
quand même, ça donne le bassin, il y a 90 % de nos élèves qui vont soit
jamais dans un lieu de culte ou pour un mariage ou un décès. C'est
complètement...
M. Asselin : ...
Mme Brousseau (Nancy) : Oui.
Alors, c'est la société québécoise qui évolue. Même parmi les gens qui viennent
s'installer chez nous. Puis, nous, bien, on évolue avec la société québécoise
dans nos écoles aussi, là.
M. Asselin : ...expérience,
c'est que vous êtes le reflet de la société dans ce sens-là, hein?
Mme Brousseau (Nancy) : Tout
à fait.
M. Mayer (Stéphane) : Puis si
je peux peut-être ajouter.
M. Asselin : Vas-y.
M. Mayer (Stéphane) : Compléter
à ce que le ministre nous posait comme question. Je vais prendre encore
l'exemple de mon collège, qui est un ancien séminaire, où on formait des
prêtres dans les années 60. Le conseil d'administration est devenu laïque
en 1973. Et... Bien, au début de l'année scolaire, ils nous ont demandé de
refaire le projet éducatif pour affirmer certaines valeurs, notamment l'égalité
hommes-femmes, la laïcité de notre école, de notre collège et la langue
française, l'utilisation de la langue française, parce que c'est un défi dans
nos écoles de parler français. Donc, nous, on accueille favorablement cette
disposition-là. Et, nous, on l'applique, chez nous, dans notre collège.
Et, pour nous, pour moi puis, je pense,
pour l'ensemble des écoles du réseau, il faut voir que même si on porte le nom
de Collège Saint-Sacrement, très religieux, bien on est laïque depuis 1973.
Notre conseil d'administration est laïque, et ils veulent l'affirmer clairement
dans notre projet éducatif.
M. Asselin : Merci beaucoup
de votre témoignage.
La Présidente (Mme Poulet) : Alors,
merci beaucoup. Merci. On va poursuivre les discussions avec la députée de
Bourassa-Sauvé.
Mme Cadet : Merci, Mme la
Présidente. Bonjour, M. Mayer, Mme Brousseau et Mme Robert. Merci beaucoup pour
votre présence en commission. C'était très intéressant de vous entendre il y a
quelques minutes. Et...
Mme Cadet : ...en fait, de
renforcer nos apprentissages, donc, sur votre réseau et comment il fonctionne.
La première question que moi j'avais...
donc, moi aussi, en fait, je me questionnais, là, j'essayais de me... de
regarder votre mémoire et de voir votre recommandation sur le critère de la
croyance religieuse. Là, j'ai entendu, donc, que ça ne fait pas partie de votre
mémoire, mais juste pour être sûr, là, que j'ai bien saisi le tout, là, c'est
vraiment... Donc, à l'article 3 qui modifie l'article 18.1, là, sur
les motifs de discrimination. Donc, c'est à cet article-là vous voudriez
ajouter, donc, un motif supplémentaire, donc que l'environnement soit exempt de
toute forme d'intimidation et de violence motivée notamment par... Et là vous
ajoutez la croyance religieuse?
M. Mayer (Stéphane) : Exact.
Mme Brousseau (Nancy) : Oui,
on pense que c'est une bonne idée dans le contexte.
Mme Cadet : Parfait. Oui,
c'est ça, c'est très clair, parce qu'évidemment c'est une liste qui est non
exhaustive, parce que le libellé nous dit «notamment», mais étant donné donc la
liste qui est mise de l'avant dans le libellé actuel, donc il pourrait être
opportun d'ajouter le vôtre pour le compléter de façon encore plus substantielle.
O.K. Donc, ça, je le comprends bien.
Mme Brousseau (Nancy) : ...44 %
des élèves... Tu sais, nous, nos écoles sont vraiment multiculturelles.
Mme Cadet : Oui, bien, c'est
ça. Donc, dans ce contexte-ci, tu sais, vous le voyez, même si en fait cet
article-là ne... en fait, modifie tout simplement la LIP parce que celui-là ne
s'appliquerait pas aux réseaux des...
Mme Brousseau (Nancy) : Oui,
oui, oui, il s'applique.
Mme Cadet : Celui-là, il
s'applique. O.K.
Mme Brousseau (Nancy) : Oui,
dans le code de vie, oui, les modifications à ajouter.
M. Mayer (Stéphane) : Je
pense, c'est l'article 47.
Mme Cadet : Il est répété à
l'article 47 par la suite.
M. Mayer (Stéphane) : ...dans
La loi sur l'enseignement privé. Oui.
Mme Cadet : O.K. Merci.
Ensuite, bien évidemment, je pose souvent, donc, la question, donc ici on
est... bien, ce qui nous nous amène, en fait, je fais souvent ce constat-là, ce
qui nous amène, nous, parlementaires, autour de cette table-ci, on le sait,
bon, c'est le cas de Bedford, puis ensuite, donc, le rapport, donc, sur les
17 écoles qui nous amènent, donc, à nous questionner sur certains
aménagements, donc, à faire dans le réseau de l'éducation. Vous l'avez
mentionné, donc, ce qui s'est passé à Bedford s'est passé dans le réseau
public, et, bon, je vous écoutais, je n'ai pas l'impression, mais je voudrais
quand même, donc, avoir une réponse plus claire de votre part, à savoir est-ce
que vous, vous avez été témoin ou vous ont été rapporté des cas de situation à
la Bedford dans le réseau de l'enseignement privé?
Mme Brousseau (Nancy) : Non,
non, non. En tout cas, jamais on n'a eu de situations comme ça qui nous ont été
rapportées. Puis, en même temps, ça se pourrait très difficilement, parce que
le ministère, à travers la direction de l'enseignement privé, veille à ça de
manière très rigoureuse et à un bon rythme. Tu sais, je le disais tout à
l'heure, les permis sont donnés pour une période de 1 à 5 ans. Donc,
c'est... ça vient souvent, là, cette évaluation là de ce qui se passe dans la
classe, du respect du régime pédagogique, du respect du programme de l'école,
bref, de tous les encadrements. Alors, à notre sens, c'est des éléments qui
sortiraient assez rapidement.
Mme Cadet : Là, vous disiez
un peu plus tôt, je pense, en réponse au gouvernement, à la partie
gouvernementale que, bon, les directions, les directions adjointes d'école,
donc, sont à l'intérieur de l'établissement, donc il y a cette proximité là qui
fait en sorte que, selon vous, c'est plus difficile.
Mme Brousseau (Nancy) : C'est
une hypothèse, c'est une hypothèse qu'on émet, que le fait que tout le personnel
de direction soit à l'intérieur des murs, qu'une direction pédagogique
responsable du respect du programme de formation soit à l'intérieur des murs et
fasse le suivi, l'évaluation des enseignants fait partie de ça aussi, hein, le
suivi, l'évaluation des enseignants, le fait de signer des contrats avec des
familles donne beaucoup d'obligation de résultat.
Mme Cadet : O.K.
Mme Brousseau (Nancy) : Alors,
c'est sûr qu'un parent pas satisfait de ce qui se passe ou un... ou à travers
un enfant dans une classe qui rapporte à son parent, tu sais, l'information
circule assez rapidement et des décisions importantes doivent être prises. Tu
sais, il n'y a pas d'option de laisser aller les choses ou de les... tu sais,
il faut agir. Alors, c'est une hypothèse qu'on émet qu'il peut y avoir une
différence, là.
Mme Cadet : Oui, M. Mayer,
vous vouliez intervenir.
M. Mayer (Stéphane) : Bien,
j'ajouterais...
Mme Brousseau (Nancy) : C'est
un directeur.
M. Mayer (Stéphane) : Je suis
un directeur d'école. Moi, c'est clair que si ça se passe dans mon école, ce
qui s'est passé à Bedford par exemple, on est au courant rapidement, très
rapidement, et on intervient. C'est clair qu'on interviendrait sur une
situation comme ça. C'est inacceptable. 19261
Mme Cadet : Et vous avez les
leviers pour agir, déjà, au niveau de la Loi sur l'enseignement privé?
M. Mayer (Stéphane) : Oui.
Puis on a... tu sais, on a une convention collective, oui, on a des... on a un
syndicat. Mais, ceci étant dit, ça ne nous empêche pas de faire notre job de
gestionnaire, notre travail de gestionnaire, puis d'appliquer... ce qui est
inacceptable, on agit. Et puis, ça, pour moi, ça prend un peu de...
M. Mayer (Stéphane) : ...puis
on le fait, puis ça se règle, là.
Mme Cadet : Oui, allez-y.
Mme Robert (Jacynthe) : ...même
aussi qu'il y a des nouveaux... des nouveaux paramètres législatifs, là, qui
obligent les organisations à agir quand il y a des situations de harcèlement
psychologique, de violence au travail. Moi, je pense que ça ferait partie de
ces situations là, où la direction n'aurait pas le choix d'agir. Donc, il y a
déjà un encadrement législatif au niveau des normes du travail, donc, à cet
égard là, là, je pense que ce serait inopportun qu'une direction ne fasse rien
dans une situation comme telle.
Mme Cadet : O.K., donc on
regarde à ces obligations au niveau de la Loi sur les normes du travail...
Mme Robert (Jacynthe) : Exact.
Mme Cadet : ...en matière de
prévention, politique de prévention...
Mme Robert (Jacynthe) : Exactement,
avec le p.l. n° 42.
Mme Cadet : ...et
l'obligation d'agir lorsqu'il y a un signalement ou une plainte, et... Je
comprends bien.
Ensuite, vous parliez des mécanismes pour
signaler le tout aux autorités. Vous parliez, en fait, du droit fondamental à
l'éducation, je pense, dans votre allocution, en fin d'allocution, dans votre
conclusion. Donc, vous nous disiez, M. Mayer, bon, qu'il pourrait y avoir donc,
certaines... certains cas où le droit fondamental à l'éducation pourrait ne pas
être respecté avec le possible, donc, retrait d'un... d'un parent... en fait,
qu'un parent donc, pourrait tenter, donc, de retirer son enfant du réseau de
l'éducation avant l'âge de 16 ans. J'aimerais peut-être vous réentendre
là-dessus, peut-être clarifier votre propos ici. Puis, ensuite, quand vous
dites qu'il n'y a pas de mécanismes pour signaler le tout aux autorités, donc,
quels mécanismes que vous voyez?
• (19 heures) •
M. Mayer (Stéphane) : Bien,
on se questionnait... C'est un questionnement. Ce n'est pas une position, c'est
un questionnement. Une famille qui veut se soustraire à cette loi, quels
mécanismes on a pour signaler qu'un enfant n'est pas scolarisé? Est-ce que c'est
par la DPJ? Est-ce que c'est par un appel au ministère de l'Éducation?
Qu'est-ce qu'on fait si une famille veut soustraire son enfant à cette loi-là?
Donc...
Mme Cadet : ...donner des
exemples, là, quand vous dites qu'une famille, donc, voudrait...
M. Mayer (Stéphane) : Par
exemple, une famille qui ne veut pas envoyer son enfant à l'école, ou ne veut
pas recevoir l'enseignement à la maison, parce qu'elle veut que son enfant ait
le visage couvert, par exemple. Donc, il se soustrait à l'application de la
loi, et demande à sa fille de rester à la maison, puis il n'y a pas de
scolarisation. C'est un questionnement. C'est très, très, très hypothétique,
mais c'est une... c'est peut-être un petit angle qu'il faut quand même prévoir
éventuellement. On ne sait pas, ça pourrait peut-être arriver. Mais c'est un
petit questionnement que nous avions.
Mme Cadet : O.K. Et vous
dites, donc : Il faudrait...
M. Mayer (Stéphane) : Bien,
en fait, quels mécanismes utiliser pour signaler une non-scolarisation. C'est
davantage cela.
Mme Cadet : O.K., je
comprends. Merci. Bien, en fait, vous parliez... donc, l'enfant pourrait
demeurer à domicile. Il y a des dispositions, dans le projet de loi n° 94,
qui concernent l'enseignement à la maison dans le réseau public. Est-ce que
c'est une pratique qui existe dans le réseau privé aussi?
Mme Brousseau (Nancy) : L'enseignement
à la maison?
Mme Cadet : Oui.
Mme Brousseau (Nancy) : Bien,
en fait, non. L'enseignement à la maison, c'est un autre.... c'est un autre
volet, là. Pour moi, il y a... il y a l'école publique, il y a l'école privée,
puis il y a l'enseignement à la maison. Mais, actuellement, il y a... si je ne
me trompe pas, il y a 8 500 enfants, actuellement, qui sont scolarisés à
la maison, avec un support ministériel, qui n'existait pas avant, d'ailleurs,
là. Ça, c'est un... c'est une belle avancée qu'il y a eu.
La question un peu théorique qu'on s'est
posée, c'est : L'enfant qui n'a pas 16 ans, que les parents obligent à
avoir le visage couvert... ils vont aller où? Tu sais, c'est un peu théorique,
là, si... Peut-être que... peut-être qu'il n'y aura même pas de cas, puis c'est
anecdotique. Mais on s'est quand même dit : Bien, comment on va les
socialiser, comment on va les scolariser? Est-ce qu'ils seront condamnés à...
bien, à ne pas être scolarisés, alors qu'il y a une obligation de scolarisation
jusqu'à 16 ans, là, tu sais? Mais, cela dit, c'est probablement, en tout cas,
on l'espère, très anecdotique.
Mme Cadet : Effectivement, on
l'espère. Merci beaucoup. Et, ensuite, bien, évidemment, là, je vais aller sur
les questions que le ministre vous a posées aussi, là, sur le... donc, les
possibles inquiétudes. Donc, disons, dans un deuxième temps, donc, il pourrait
y avoir, donc, des... un projet de loi qui concerne un peu plus le réseau
privé. Et donc vous avez mentionné que vous n'avez pas trop d'inquiétudes, mais
ça, ça ne signifie pas qu'il n'y en a aucune. Donc, le cas échéant, donc,
j'aimerais peut-être vous entendre sur qu'est-ce qui pourrait inquiéter vos
membres donc, quand le ministre dit : Dans un... dans un deuxième temps,
donc, il pourrait y avoir un dépôt d'un autre projet de loi qui concernerait
votre réseau.
Mme Brousseau (Nancy) : Bien,
je ne vous dis pas qu'il n'y a pas d'inquiétudes du tout. C'est sûr que les
gens sont inquiets, mais on s'inquiète de quoi, en fait? Je veux dire, on va
attendre de voir qu'est-ce qui sera déposé, puis qu'est-ce qui sera demandé. Tu
sais, est-ce que ce sera... Tu sais, je veux dire, on n'est pas soumis au
projet de loi n° 21 non plus. Alors, est-ce qu'on s'en va là? Est-ce qu'on
parle d'évaluation, de remise de planification? Tu sais, ça ratisse assez
large, là, le projet de loi n° 94, alors, tant qu'on ne sait pas où ça
s'en va...
19 h (version non révisée)
Mme Brousseau (Nancy) : ...on
ne s'inquiétera pas pour rien, on va dire ça comme ça, on va attendre de voir.
M. Mayer (Stéphane) : Dans
certaines de nos écoles, il y a des traditions qui ont été mises en place au
fil des ans. Je pense que M. le ministre vient d'une école qui avait la... on
fêtait la Saint-Viateur, là, donc, est-ce que... Je le vois sourire, ça vous
rappelle de...
M. Drainville : Ça me
rappelle mes exploits sportifs.
M. Mayer (Stéphane) : Donc,
ce type de traditions là, qui ont été mises en place au fil des ans, est-ce qu'elles
vont pouvoir demeurer? Donc, c'est sûr, c'est peut-être à ce niveau-là, les
inquiétudes que nos membres manifestent à ce moment-ci.
Mme Brousseau (Nancy) : Je
vous donnais l'exemple de la célébration de Noël, de la messe de Noël, là. C'est
le genre de question qui a été posée, tu sais, est-ce qu'on va quand même...
est-ce qu'on va encore pouvoir souligner des fêtes de ce type-là?
Mme Cadet : Je comprends,
oui.
Mme Brousseau (Nancy) : Mais,
autrement, dans l'action de tous les jours, dans les cours, dans le respect du
régime, des encadrements du programme de l'école québécoise, c'est déjà fait,
il n'y a pas de souci là-dessus. On n'est plus dans le périphérique.
Mme Cadet : Je comprends. Je
ne connais malheureusement pas la Saint-Viateur, donc, je n'ai pas le loisir de
connaître cette tradition-ci, mais je suis certaine que si certains réclament
que ce soit encore le cas, qu'elle a tout à fait sa place.
Contrat de services éducatifs. Ici, bien,
en fait, dans plusieurs de vos recommandations... j'y vais avec celle-ci, les
autres, on les a quand même assez abordées, visage découvert, les règles de
conduite... des écoles non agréées. C'est ce sur quoi, donc, vous vous penchez.
Donc, bon, cette disposition-ci, article 44, non plus, vous ne vous opposez,
puis pas à chaque fois vous nous dites que vous verrez à diffuser auprès de vos
membres les outils d'information aux parents développés par le ministère de l'Éducation
et à soutenir ces membres qui devraient apporter des modifications à leur
contrat de service afin de s'y conformer. Est-ce qu'il y a des inquiétudes par
rapport à...
Mme Brousseau (Nancy) : La
clarté. Les documents... bien, déjà, on a vu des documents très, très bien
faits et très clairs du ministère pour... Tu sais, des fois, c'est important de
dire qu'est-ce que c'est, mais c'est important aussi de dire qu'est-ce que ce n'est
pas, hein, à quoi on s'attend, qu'est-ce qui sera permis, qu'est-ce qui ne le
sera pas. Bref, ce qu'on a vu à date était très aidant, je vais dire ça comme
ça.
Puis nous, notre rôle, c'est d'être la
courroie de transmission aussi, de faire en sorte que les écoles respectent les
encadrements qui seront demandés aux termes du projet de loi puis d'aider nos
écoles, par exemple, s'il y a des modifications au code de vie, s'il y a des
modifications aux contrats de services éducatifs qui sont réclamés dans le
projet de loi. Bien, nous, on les aide en donnant des modèles, par exemple,
pour être sûr que tout le monde respecte, là, les encadrements.
La Présidente (Mme Poulet) : Merci
beaucoup. Alors, M. le député de Jean-Lesage, la parole est à vous.
M. Zanetti : Oui. Merci, Mme
la Présidente. Avant de vous poser la question, là, je veux juste, comme...
Vous parlez de quelque chose qui me frappe, c'est qu'il y a eu l'école Bedford,
O.K., une école dans laquelle il y a des choses terribles qui se passent. Un
rapport est fait. Rien, là-dedans, des problèmes ne sont liés à des signes religieux,
aucune recommandation n'est liée à un signe religieux. Le ministre commande une
enquête sur 17 écoles dans laquelle il y avait des signalements. Une école dans
laquelle il y a une élève qui porte un niqab, on entend dire : trois,
quatre autres, et là 10 qui portent un masque de procédure plus longtemps que
le temps d'une grippe, qu'on dit : C'est un subterfuge, O.K.? Ça, c'est la
quantité de cas qui justifient le p.l. no 94.
Puis, à côté, on a la Fédération des institutions...
des établissements privés qui nous dit : 15 % de nos écoles sont
confessionnelles. Le ministre vous le demande, donc il ne le sait pas. Vous,
vous dites ce n'est pas un décompte exact, c'est comme une approximation. Puis
là, exactement, ce qui se passe dans ces écoles-là, on ne le sait pas. Ça
porte-tu atteinte à la liberté de conscience, en tout cas, on ne le sait pas,
mais on les finance, en tout cas. Puis ça, bien, le ministre, il ne fait même
pas une enquête là-dessus, ça ne dérange pas, ce n'est pas grave, c'est
peut-être parce que, tu sais, 80 % de ces 15 % là, confessionnelles,
sont catholiques, ça fait que ça, ça ne l'inquiète pas, je ne sais pas. Mais
moi, je vous dis, il y a quelque chose qui ne marche pas là-dedans. Et, si on
était vraiment ici pour la laïcité, là, ça ne se passerait pas de même, on ne
se comporterait pas comme ça, puis les études seraient différentes, et puis on
aurait la lumière là-dessus.
Alors, moi, la question que je vous pose,
c'est peut-être pour la prochaine fois, parce que ce thème-là ne va pas sortir
de l'actualité tout de suite : Bien, pouvez-vous, comme, nous donner un
portrait de la situation dans les écoles privées du Québec? Puis le ministre,
est-ce qu'il peut s'en enquérir de façon sérieuse, avec des gens qui vont
chercher la vraie information, s'il s'intéresse véritablement à la laïcité? C'est
tout pour mes commentaires de la soirée.
La Présidente (Mme Poulet) : Est-ce
que c'est un commentaire ou vous voulez que nos invités répondent?
M. Zanetti : Je n'ai pas de
question qui suit ce commentaire.
La Présidente (Mme Poulet) : Parfait.
Alors, on... C'est tout pour votre intervention...
La Présidente (Mme Poulet) :
…alors merci beaucoup à vous trois de votre présence à nos travaux, de votre
contribution.
Alors, compte tenu de l'heure, la
commission ajourne ses travaux, au mercredi 23 avril, après les avis
touchant les travaux des commissions. Merci.
(Fin de la séance à 19 h 10)