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Version finale

43e législature, 1re session
(début : 29 novembre 2022)

Le mardi 29 avril 2025 - Vol. 47 N° 65

Étude des crédits budgétaires du ministère de l'Enseignement supérieur


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Table des matières

Discussion générale

Adoption des crédits

Documents déposés

Intervenants

Mme Amélie Dionne, vice-présidente

Mme Pascale Déry

Mme Michelle Setlakwe

Mme Catherine Gentilcore

M. Sol Zanetti

M. Jean-Bernard Émond

M. Youri Chassin

Mme Shirley Dorismond

*          Mme Paule De Blois, ministère de l'Enseignement supérieur

*          Témoin interrogé par les membres de la commission

Journal des débats

(Neuf heures quarante-cinq minutes)

La Présidente (Mme Dionne) : Alors, bon mardi à tous et à toutes. Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de la culture et de l'éducation ouverte.

La commission est réunie ce matin afin de procéder à l'étude des crédits budgétaires du portefeuille Enseignement supérieur pour l'exercice financier 2025-2026. Une enveloppe de 2 h 45 min a été allouée pour l'étude des crédits.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire : Oui, Mme la Présidente. M. Asselin (Vanier-Les Rivières) est remplacé par Mme Guillemette (Roberval); M. Rivest (Côte-du-Sud), par Mme Dorismond (Marie-Victorin); Mme Tremblay (Hull), par Mme Gendron (Châteauguay); Mme Cadet (Bourassa-Sauvé), par Mme Setlakwe (Mont-Royal—Outremont).

La Présidente (Mme Dionne) : Merci beaucoup. Donc, nous allons procéder à une discussion d'ordre général par blocs d'échange, incluant les questions et les réponses. La mise aux voix de ces crédits sera effectuée à la toute fin du temps qui est alloué, soit cet avant-midi, vers 12 h 30.

Discussion générale

Donc, je suis maintenant prête à reconnaître une première intervention de l'opposition officielle. Donc, pour ce premier bloc d'échange, Mme la députée de Mont-Royal—Outremont, la parole est à vous.

Mme Setlakwe : Merci, Mme la Présidente. Et permettez-moi de débuter avec les salutations d'usage. Bon matin. Bon mardi à vous tous. Je suis heureuse de vous retrouver. Bonjour à Mme la ministre et à vos équipes, à tous les membres de la commission, mes collègues des autres groupes d'opposition, tous les membres de la commission. Donc, bon matin. On attend une discussion importante sur le dossier de l'enseignement supérieur.

Sans plus tarder, écoutez, Mme la ministre, en ce moment, dans nos cégeps et dans nos universités, la situation est loin d'être facile. Il y a des compressions, déficits, et les inquiétudes du personnel, des étudiants ainsi que des recteurs et des directeurs sont bien réelles.

Donc, avant d'entrer dans le détail des crédits et des différents blocs de questions, je voudrais vous poser quelques questions très simples. Premièrement, êtes-vous fière de ce qui se passe actuellement dans nos cégeps et nos universités? Vous martelez que votre gouvernement investit massivement en enseignement supérieur, qu'il n'a jamais autant investi, mais, sur le terrain, est-ce que vous trouvez que ça se voit?

Mme Déry : Merci beaucoup. Alors, je vais juste, moi aussi, faire quelques salutations d'usage. Puis je ne prendrai pas trop de temps, mais je veux saluer au moins mes collègues députés qui sont là parmi nous aujourd'hui, mes collègues, évidemment, des partis d'opposition, toutes les équipes ici du ministère, qui travaillent très fort, évidemment, pour cet exercice de reddition de comptes. Alors, merci beaucoup d'être là parmi nous.

Alors, pour répondre à votre question bien franchement, puis bien honnêtement, puis en toute transparence, oui, je suis fière du bilan que nous avons en enseignement supérieur depuis les dernières années, même, depuis 2018. Je pense qu'on est le gouvernement qui avons investi le plus au cours des dernières années, avons investi de manière très substantielle non seulement dans le réseau collégial, mais aussi dans le réseau universitaire, dans les collèges privés également, donc dans l'ensemble du réseau de l'enseignement supérieur. On a investi des sommes colossales tant au niveau des budgets de fonctionnement que des budgets de PQI, donc, en infrastructures.

Donc, oui, je pense qu'on est fiers des dernières années. Je vais continuer d'accompagner autant les établissements, que le personnel, que les étudiants également. Puis c'est ce qu'on fait depuis 2018 puis c'est ce que je fais aussi, depuis le début de mon mandat en 2022, de continuer d'accompagner les établissements d'enseignement supérieur dans ce sens-là.

Mme Setlakwe : Merci. Bien évidemment qu'il y a des investissements, mais on peut sérieusement se questionner sur les effets concrets que donnent ces investissements sur le terrain. Ils sont plutôt invisibles pour la population étudiante, pour le personnel. Et vous êtes comme moi, vous constatez qu'il y a des mises à pied, des déficits, des bâtiments qui sont mal entretenus, des équipements désuets, qu'il y a des réductions même dans l'achat de livres, que la capacité des établissements à remplir leur mission est mise à mal. Alors, pensez-vous honnêtement que vos investissements ont donné des résultats? À mon sens, tout cela ressemble plutôt à un constat d'échec.

Mme Déry : Alors, je vais faire un petit peu l'inventaire de ce qu'on a investi au cours des dernières années. Vous dites que les gens ne sont pas très conscients de ce qu'on a investi. D'emblée, en enseignement supérieur, si on doit se comparer aux années libérales, si je fais la comparaison entre les investissements tant au niveau des subventions de fonctionnement qu'au niveau du PQI en infras, comme je le disais tantôt, les investissements ont été colossaux. On parle de 40 % d'augmentation des dépenses et des investissements depuis 2018, là, comparativement à 11 % sous l'ère libérale. Je pense qu'il y a... il y a là une explication substantielle du rattrapage qu'on a à faire, puis du laisser-aller, puis de la négligence qu'il y avait.

Moi, là, j'ai rencontré, en début de mandat, des anciens députés libéraux qui nous disaient : Une chance que vous avez été là, une chance que vous avez investi autant. Le ministère de l'Enseignement supérieur... ou l'enseignement supérieur était un peu considéré comme l'enfant pauvre, à l'époque, avec le sous-investissement très important. Donc, on continue d'investir des sommes colossales.

• (9 h 50) •

Juste pour vous donner une idée, depuis 2019-2020, le rattrapage a été significatif, comme je le mentionnais, dans les cégeps. On parle de 1 milliard additionnel qui ont été investis dans les cégeps. On parle de 1 milliard... plus de 1,5 milliard qui ont été investis dans les universités.

Pour ce qui est des étudiants, Mme la députée, 2,8 milliards additionnels ont été investis pour les étudiants. Là, je parle de la bonification dans l'ensemble des... dans l'ensemble des plans d'action, dans l'ensemble de l'aide financière aux études aussi, qui a été augmentée de manière très substantielle au cours des dernières années.

Mme Setlakwe : ...je continue de penser que, sur le terrain, les résultats ne sont pas adéquats. Les étudiants ont faim. Les étudiants vivent une précarité financière comme on n'a jamais vu. Les bâtiments sont désuets, ont besoin d'investissements beaucoup plus importants que ce qui est annoncé, la Vérificatrice générale l'a dit. Les universités s'inquiètent de pouvoir réaliser le mandat ou l'agenda d'innovation. Et la liste se poursuit. En ce moment, jamais les réseaux n'ont été autant mis à mal. Il y a énormément d'insatisfaction, énormément d'inquiétudes de toutes parts.

Alors, débutons avec les étudiants et l'insécurité alimentaire. La précarité financière, je trouve ça extrêmement préoccupant. Et d'ailleurs je vous rappelle qu'en février dernier, quand les chiffres sont sortis, quand l'étude de la FECQ a été rendue publique, nous, ce qu'on s'est dit, à l'opposition officielle, c'est : Travaillons tous ensemble. On a déposé un mandat d'initiative, 18 février dernier. On a demandé... On a tendu la main. On veut comprendre les causes de l'insécurité alimentaire, connaître les initiatives existantes sur le terrain, explorer les pistes de solution. Est-ce que vous avez l'intention de demander à vos collègues, qui sont majoritaires sur cette commission, la Commission de la culture et de l'éducation, de donner suite à ce mandat d'initiative?

Mme Déry : Alors, il y a plusieurs questions là-dedans. Il y a l'insécurité alimentaire, essentiellement. Je suis très, très consciente que les étudiants, avec la hausse du coût de la vie, la hausse des coûts de loyer au cours des dernières années, la montée, évidemment, de l'inflation... on voit que ça commence à se stabiliser plus ou moins, mais je suis très consciente de la difficulté que certains étudiants ont pour traverser, justement, cette période qui est un peu plus difficile.

Ceci dit, en termes d'aide financière aux études... Je reviendrai sur le sondage de l'insécurité alimentaire. On en a pris connaissance, évidemment. Mais je vais revenir sur l'AFE, l'aide financière aux études, qui est sans doute le programme socle pour l'aide financière aux études. C'est le programme socle que nous avons ici, au Québec, puis c'est le programme le plus généreux que nous avons, dont j'en suis fière, évidemment. On a le programme d'aide financière aux études le plus généreux qu'ailleurs, un peu partout dans les autres provinces, et ce programme-là a été bonifié à de multiples reprises depuis qu'on est là, depuis 2018. Encore dans le dernier budget, là, on a augmenté, on a indexé l'AFE à la hauteur de 45 millions par année, donc, 250 millions sur les prochaines années. On a vraiment bonifié sur plusieurs fronts. Que ce soit pour les mères monoparentales, que ce soit pour les étudiants parents, que ce soit pour les gens qui habitent à la maison, les étudiants qui n'habitent pas à la maison, tout a été bonifié. Les frais de subsistance ont été bonifiés. Une série de mesures ont été bonifiées. Même pour les étudiants qui présentent certains handicaps, on a bonifié.

Donc, on continue, à travers l'AFE, de bonifier, évidemment, l'aide financière aux études. Comme je vous le dis, dans le dernier budget, c'est une augmentation de 250 millions. Et, comme je le disais un petit peu plus tôt, on parle de 2 milliards de plus depuis 2018.

La Présidente (Mme Dionne) : ...oui.

Mme Setlakwe : Merci. Donc... (panne de son) ...financière aux études, moi, je reviens à mon mandat d'initiative. Est-ce que, oui ou non, vous avez l'intention d'y donner suite pour qu'on puisse vraiment l'étudier tous ensemble, tous les parlementaires?

Mme Déry : Je vais vous répondre, puis je pense que la députée le sait très bien, que, dans ce genre de mandat d'initiative, c'est l'exécutif, là, qui va prendre cette décision-là. Ce n'est pas tant nous. Donc, je vais suivre les recommandations du législatif à ce sujet-là.

Mme Setlakwe : Je vous encourage — merci, Mme la ministre — à faire tout en... tout ce qui est en votre pouvoir pour qu'on puisse prendre cet enjeu au sérieux. C'est vraiment inquiétant que nos étudiants, aujourd'hui... qu'il y a une part grandissante d'étudiants qui, en raison de ces difficultés financières, de cette insécurité alimentaire... Ce que ça donne comme résultat, c'est qu'ils doivent cumuler des emplois. Ils ne peuvent pas se consacrer à leurs études. C'est leur réussite éducative qui est en jeu. Moi, je trouve ça extrêmement préoccupant. On va attendre de vos nouvelles sur notre mandat d'initiative.

Pour revenir à l'AFE, l'aide financière aux études, vous avez parlé de bonification. Moi, je dirais plutôt que c'est une indexation. Et puis on a eu un échange, vous et moi, lors de l'interpellation de l'automne dernier, et vous reconnaissiez, là, que la méthode de calcul devait être revue, etc. Ma question est la suivante : Où en est le grand chantier? Est-ce que vous avez actuellement un comité de travail avec les étudiants pour revoir le programme d'aide financière aux études?

Mme Déry : On a toujours une collaboration étroite avec les associations étudiantes, que ce soit au niveau du cabinet, que ce soit au niveau du ministère aussi. Le ministère est en étroite collaboration. On a, évidemment, des départements qui sont en étroite collaboration avec les étudiants concernant l'AFE.

On est en train de bonifier un peu la plateforme de l'AFE pour la rendre plus accessible. On a fait des campagnes, justement, au cours de l'été dernier, pour être capables d'augmenter la visibilité puis l'accessibilité, surtout pour certains étudiants qui vont plus au privé que de venir, évidemment, ramasser ce qui leur est dû comme bourses et prêts au niveau de l'AFE. On a quand même eu une augmentation de clientèle au niveau de l'AFE. Dernièrement, on parle de 11 %. Donc, il y a des efforts qui sont faits en ce sens-là, puis on va continuer, évidemment, de bonifier tout ça.

Ceci dit, je veux rappeler qu'on a les droits de scolarité les plus faibles en Amérique du Nord. On a, évidemment, un taux d'endettement moyen aussi, par rapport aux autres, qui est beaucoup plus faible par rapport aux autres provinces.

On a, encore une fois, un programme d'AFE qui a été bonifié et rebonifié. On parle de 2 milliards additionnels en l'AFE. Quand on est arrivés, là, l'AFE n'avait pas été bonifiée largement, comme on l'avait, comme soutien aux étudiants. Les plans d'action qu'on a mis sur pied, le fameux PARES, pour les plans d'action de persévérance et de réussite, puis le plan d'action sur la santé mentale, ça n'existait pas, comme soutien aux étudiants, à l'époque. Il n'y avait pas de plan d'action en soutien aux étudiants à l'époque, quand je parle des libéraux, juste avant qu'on arrive. Ce plan de PARES sur la persévérance et la réussite a des résultats très, très concrets sur des initiatives très concrètes qui nous permettent de mesurer la persévérance et la réussite, surtout au niveau collégial. On sait que la transition au niveau collégial est difficile...

La Présidente (Mme Dionne) : Mme la députée, vous pouvez poursuivre. Il vous reste deux minutes.

Mme Setlakwe : Encore une fois, on parle d'indexation, on parle d'utilisation de fonds suite à des transferts du fédéral. Là, la situation est grave. Selon le Bilan-Faim de Moisson Montréal, les étudiants représentent 14 % de la clientèle, et le recours aux banques alimentaires, ça a augmenté de 540 % entre 2011 et 2023. Ce n'est pas suffisant pour que vous agissiez, Mme la ministre, et que vous en fassiez plus? La demande qui a été faite par les étudiants, elle est chiffrée à 850 000 $ par année. Ce n'est pas un peu gênant de ne pas y donner suite?

Mme Déry : Merci beaucoup. Je ne suis pas gênée de quoi que ce soit quand on parle d'un investissement de 2 milliards additionnels pour le soutien aux étudiants. Il y a eu beaucoup plus d'argent qui a été investi en soutien aux étudiants qu'il n'a été investi depuis les dernières années, puis même, je vous dirais, plus en soutien aux étudiants qu'aux établissements universitaires et le cégep, malgré qu'on ait vraiment augmenté les budgets de fonctionnement et le PQI.

Quand vous dites que c'est juste des indexations, bien, laissez-moi vous faire l'inventaire des mesures : augmentation du seuil de contribution des tiers, bonification de l'exemption des montants reçus à titre de pension alimentaire, augmentation du seuil d'exonération de la prise en compte du montant de bourses — donc, on augmente le montant de bourses — bonification de certaines mesures pour les étudiants stagiaires, augmentation des frais de subsistance — puis là je vous parle de dizaines de millions de dollars à chaque année, à chaque fois — augmentation du seuil de contribution.

J'ai des exemples ici que j'aimerais vraiment pouvoir partager, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Dionne) : ...qu'il reste seulement 30 secondes. Mme la députée.

Mme Déry : Ah! bien, c'est juste pour vous dire qu'en 2018-2019, si je prends un cas type, là, de...

Mme Setlakwe : Merci.

La Présidente (Mme Dionne) : Mme la ministre, oui, désolée, je dois laisser la parole à...

Mme Setlakwe : Il faut... il faut vraiment tenir compte de la réalité du terrain. Aujourd'hui, les étudiants ont faim. Les étudiants ont de la difficulté à joindre les deux bouts. Il y a des demandes spécifiques qui sont faites. Clairement, l'argent ne se rend pas adéquatement à ceux qui en ont le plus besoin. Et ça, Mme la ministre, ça devrait être une priorité.

La Présidente (Mme Dionne) : Mme la députée, merci. C'est malheureusement tout le temps qu'on a. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Terrebonne pour 13 minutes.

• (10 heures) •

Mme Gentilcore : Merci beaucoup. Merci, Mme la ministre. Enchantée. Donc, mon temps est compté, donc je vais aller droit au but, si vous le permettez, puis je vais y aller avec mes questions.

D'abord, premier sujet, déficit de maintien des actifs dans les cégeps et les universités, mais plus précisément le réseau collégial. L'an dernier, la Vérificatrice générale a brossé un portrait accablant de l'état des infrastructures dans le réseau collégial. On s'attendait, dans le milieu, là, et légitimement, à un réinvestissement, mais votre ministère a plutôt annoncé que vous alliez changer la grille d'évaluation des actifs. Les cibles actuelles de votre gouvernement prévoient que 70 % des immeubles du réseau collégial et 75 % de ceux du réseau universitaire vont être dans un état satisfaisant au 31 mars 2026. Ça, c'est dans moins d'un an. Puis vous avez dit aussi que votre ministère allait réexaminer ces cibles-là avec la nouvelle méthode d'évaluation. Ma question, ma première question pour vous : Est-ce que vous vous engagez à ne pas revoir à la baisse les cibles d'entretien des infrastructures collégiales et universitaires?

Mme Déry : Merci beaucoup pour cette question très pertinente, en effet. Ce n'est pas pour embellir les chiffres qu'on fait ça, là. Mes collègues dans d'autres ministères ont procédé au même exercice, puis cet exercice nous est demandé par la VG elle-même, de revoir les méthodes de calcul. Donc, c'est une des recommandations que la Vérificatrice générale nous a demandé de faire. Donc, c'est la raison pour laquelle on a annoncé qu'on allait revoir la méthode de calcul. Pour l'ensemble, c'est une méthode de calcul qui est désuète.

Juste pour vous donner un exemple, la méthode de calcul actuelle intègre, si vous voulez, certaines mesures ou certains aspects... Mettons qu'on va intégrer un stationnement, puis le stationnement aura la même valeur qu'une salle de classe ou une cafétéria à l'intérieur d'une bâtisse, en termes de maintien d'actif, alors qu'il faut probablement essayer de prioriser certaines choses. Mais c'est pour vous dire que la valeur de certains... certains... comment je dirais, certains morceaux de la bâtisse, c'est-à-dire, que ce soit le stationnement...

Mme Gentilcore : ...

Mme Déry : Je n'ai pas fini.

La Présidente (Mme Dionne) : ...

Mme Gentilcore : Merci beaucoup. Donc, ma question, c'est vos cibles. 70 % des immeubles du réseau collégial et 75 % de ceux du réseau universitaire doivent être dans un état satisfaisant d'ici le 31 mars 2026, dans moins d'un an. Ma question, c'est : Avec cette nouvelle grille, dont on pourra peut-être parler plus tard, est-ce que vous vous engagez à ne pas baisser ces cibles-là, qui étaient de 70 % et 75 %?

Mme Déry : Bien, écoutez, je comprends votre question, mais je ne peux pas m'engager à ce que ce soit baissé ou pas baissé, parce que c'est une nouvelle méthode de calcul. Donc, j'ignore quels seront les résultats. Il va falloir qu'on procède, actuellement, à une nouvelle méthode de calcul. Ça fait que je ne peux pas m'avancer sur des cibles à la baisse ou à la hausse, parce que je ne sais pas quels seront les résultats. On revoit toute cette méthode de calcul là. Donc, vous comprendrez que je ne peux pas, aujourd'hui, vous dire si la cible, elle va diminuer ou elle va augmenter. Je ne le sais pas.

Ce que je vous dis, c'est qu'on revoit cette cible-là. Ça fait partie des recommandations qu'on fait, de la VGQ. D'ailleurs, il y a plusieurs recommandations qu'on a déjà mises en place. Puis on avait mis en place des recommandations de la VGQ bien avant le rapport de la Vérificatrice générale. Donc, ça fait partie du lot des...

La Présidente (Mme Dionne) : Merci. Mme la députée.

Mme Gentilcore : Merci. Donc, qu'est-ce qui a été fait d'ici là? Parce que, là, on s'entend que le 31 mars 2026, c'est demain matin. Donc, qu'est-ce qui a été fait dans l'entremise, pendant qu'on revoit cette grille-là? Qu'est-ce qui a été fait pour mettre à jour les infrastructures et s'assurer au moins de se diriger vers ces objectifs-là qui étaient prévus?

Mme Déry : Bien, on travaille sur les infrastructures depuis le tout début, quand on est arrivés, là. Je vous rappelle que, quand on est arrivés, là, les budgets en infrastructures, en enseignement supérieur, étaient de 5 milliards. Puis d'ailleurs je vais vous montrer un tableau qui est très, très éloquent. J'aime bien les tableaux, moi aussi. Bien, alors, quand on est arrivés, les budgets en infrastructures étaient de 5 milliards. On les a augmentés à 9 milliards. Ce budget-ci, là, ce budget en infras, là, en 2025-2026, j'ai 1 milliard additionnel. Ça fait qu'on va continuer de travailler avec le réseau collégial et le réseau universitaire.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci. Merci, Mme la ministre.

Mme Gentilcore : Merci beaucoup. Je vais passer à un autre sujet, facultés de médecine dans les universités du Québec. Les recteurs des universités du Québec sont tous alignés dans une même volonté, et on le sait depuis plusieurs années, celle de créer une faculté de médecine décentralisée au sein du réseau public d'universités. Ils y travaillent depuis plusieurs années. Il y a un projet qui a été déposé et qui n'attend que l'aval de votre gouvernement. Donc, j'aimerais savoir si vous, Mme la ministre, vous êtes en accord avec le principe, soit que les médecins omnipraticiens et spécialistes soient formés au sein du réseau des universités du Québec. Est-ce que vous êtes pour?

Mme Déry : Bien, écoutez, c'est une question très pertinente, puis j'ai eu l'occasion d'en discuter avec Alexandre Cloutier, qui est le président de l'UQ, à quelques reprises. D'abord, on a quatre facultés délocalisées. Il y a... c'est-à-dire, il y a quatre facultés de médecine, et les quatre facultés de médecine au Québec ont des départements délocalisés, déjà, qui forment des médecins en région, que ce soit en Outaouais, à Trois-Rivières. Les quatre facultés sont délocalisées, puis on les suit de très près. C'est d'ailleurs l'engagement qu'on a pris, au dernier mandat, pour être capables d'avoir 600 médecins de plus. D'ailleurs, c'est une cible qu'on va atteindre avec nos facultés de médecine.

Si je reviens à la faculté... au programme de médecine que l'Université du Québec veut déployer, bien, on est en discussion avec eux. L'Université du Québec travaille actuellement là-dessus. Je pense que c'est un projet qui mérite notre attention, mais c'est un projet aussi qu'il faut bonifier, c'est-à-dire, on est encore au stade très, très, très embryonnaire. Alors, toute initiative qui nous permettrait d'augmenter le nombre de médecins de famille en région, je n'y suis pas fermée. Puis M. Cloutier est très, très au courant de nos intentions là-dessus. Mais, comme je vous dis, on a quatre facultés...

La Présidente (Mme Dionne) : Merci, Mme la ministre.Mme la députée. Oui.

Mme Gentilcore : Merci. Est-ce que vous êtes d'accord avec le principe, le principe que les universités du Québec puissent développer un réseau décentralisé, là, une formation décentralisée pour les médecins...

Mme Déry : Comme je le disais, il y a déjà des facultés délocalisées où on a... c'est-à-dire certaines universités de l'UQ participent déjà à ces facultés décentralisées. Maintenant, est-ce qu'on peut en faire plus pour aller chercher davantage de médecins de famille? Peut-être, si on a un bon projet qui se tient. C'est des projets qui, évidemment, prennent énormément de temps à déployer. C'est beaucoup de... c'est beaucoup de ressources, d'argent et surtout de temps. Puis ça dépend aussi du fédéral dans ce temps-là, mais...

La Présidente (Mme Dionne) : Merci. Merci, Mme la ministre. Mme la députée.

Mme Gentilcore : Merci. Rémunération des stages, vous le savez, c'est un sujet qui est extrêmement cher au coeur du Parti québécois. Vous vous êtes... votre gouvernement s'est engagé à plusieurs reprises, là, soit par des votes de motion ou même par des annonces, là, qui nous ont donné espoir, finalement, que les stagiaires étudiantes, étudiants du secteur public seraient tous rémunérés. Donc, ma première question : Est-ce que vous pouvez nous dire si, à la rentrée 2025, les étudiants stagiaires vont... de la fonction publique vont enfin être rémunérés?

Mme Déry : Bien, écoutez, je vais être transparente et très franche, puis je l'ai dit déjà à plusieurs reprises, là, on a fait des choix. C'est vrai que j'avais l'intention de rémunérer les stages. On ne les rémunérera pas, puis je n'arriverai pas à l'automne avec de la rémunération de stages. Puis, ça, je pense que tout le monde sait très bien qu'on a fait des choix qui sont nécessaires.

Puis on est venus bonifier substantiellement les conventions collectives, donc, bonifier, en santé, en éducation, essentiellement, les conditions de travail, la rémunération aussi, donc, les conditions de travail et les salaires. Donc, les jeunes qui finissent, en éducation ou en santé, vont être capables de bénéficier d'un salaire et... un meilleur salaire et des conditions de travail, évidemment, beaucoup plus aptes... bien, beaucoup plus efficaces, de meilleures conditions de travail.

Ça fait que, pour moi, on a bonifié l'AFE. On vient répondre à des enjeux extrêmement importants en termes de PQI aussi, en termes de logement puis de loyer. Ça aussi, ça fait partie du soutien qu'on accorde aux étudiants. Mais, en ce qui concerne la rémunération de stages, je vous l'ai dit, on a fait des choix, et des choix importants et nécessaires dans le contexte actuel.

Mme Gentilcore : Très bien. Fin des bourses... des bourses Perspective. Donc, on le sait, en février, là, vous annonciez la fin du programme, qui n'aurait pas livré les résultats escomptés. C'était pourtant, pour beaucoup d'étudiants, là, à l'université, au cégep, dans des formations de pointe, on le sait, un coup de pouce financier qui était très important. J'ai reçu de nombreux messages à ce sujet-là. J'aimerais savoir c'est quoi, le plan, maintenant. En fait, là, on a mis fin aux bourses Perspective. On a eu l'Opération main-d'oeuvre, aussi, qui n'a pas été un succès, qui n'a pas atteint ses cibles. Est-ce que vous pouvez me dire comment vous comptez, en fait, assurer une hausse des inscriptions dans ces projets-là... dans ces programmes-là de pointe, à forte demande? Puis est-ce qu'il y a une politique qui est en préparation, là, suite à l'annulation des bourses Perspective?

Mme Déry : Bien, en fait, les bourses Perspective, puis j'aimerais vraiment qu'on corrige le tir un petit peu, les bourses Perspective avaient un début puis une fin. C'est un programme incitatif. Ce n'est pas un programme en soutien, mais c'est un programme incitatif pour qu'on puisse inciter les étudiants à aller dans certains programmes qui étaient en pénurie de main-d'oeuvre, qui avaient été identifiés, à l'époque, par le ministère de l'Emploi puis par plusieurs ministères concertés. Et il y a plusieurs mesures en OPMO, donc en main-d'oeuvre, qui se poursuivent.

Pour ce qui est des PBPQ, les bourses Perspective, on continue de financer à la hauteur de 500 millions. Il y a 500 millions qui sont accordés en ce moment à tous les jeunes qui doivent poursuivre. Donc, tous les étudiants qui ont accès à cette bourse, la bourse va être maintenue jusqu'à la fin de leur parcours. Pour les autres, il y aura la bourse persévérance. On vient réintégrer la PBCF, qu'on appelle, donc la bourse persévérance et réussite, où la grande majorité des programmes qu'on retrouve dans les bourses Perspective vont se retrouver aussi, dans le programme de bourses persévérance. On va continuer, notamment, à travers des bourses. Il y a mes collègues, aussi, de d'autres ministères...

La Présidente (Mme Dionne) : Merci, Mme la ministre...

Mme Déry : ...qui ont leurs propres programmes de bourses aussi.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci.

Mme Gentilcore : Mais la raison qui a été donnée, c'est que le programme n'avait pas atteint ses cibles. Est-ce qu'il y a des documents qui ont été produits, qu'on pourrait consulter, pour expliquer, en fait, en quoi le programme n'a pas atteint ses cibles? Parce qu'il y avait un début et une fin, mais on y a mis fin en février en disant : Ça n'a pas atteint ses cibles.

Mme Déry : En fait, il y a certains programmes... Il y avait des effets inégaux. Ce n'est pas des programmes qui n'ont pas atteint des cibles. Il y a eu des effets inégaux, dépendamment des programmes. Donc, en santé, en éducation, ça a été un petit peu plus difficile parce qu'on était en pleine négociation de convention aussi. C'est des métiers, entre guillemets, encore un peu mal-aimés. C'est pour ça qu'on mise beaucoup sur la valorisation de ces professions-là.

Ceci dit, il y a d'autres programmes qui ont fonctionné. En TI, en génie, ce sont des programmes qui ont fonctionné. Puis, en TI, à la limite, on a eu beaucoup plus d'augmentations de cohortes. Et donc je ne veux pas non plus qu'on forme des chômeurs. À un moment donné, il faut aussi suivre... il faut suivre un peu l'évolution du marché de l'emploi, puis c'est ce que je fais en collaboration étroite, de manière mensuelle, avec ma collègue à l'Emploi, pour...

La Présidente (Mme Dionne) : Merci, Mme la ministre. Merci.

• (10 h 10) •

Mme Gentilcore : L'intelligence artificielle générative a pris tout le monde par surprise en 2022. Ça n'a pas été long que les étudiants ont trouvé ça très utile pour les aider dans leurs travaux universitaires. La concertation nationale en IA devait produire ses recommandations en avril. Finalement, ce sera plutôt à la fin de l'été, donc juste avant la rentrée des classes. Est-ce que vous avez l'intention de laisser connaître les orientations qui vont être prises avant cet été pour laisser le temps aux cégeps ou aux universités de s'adapter?

Mme Déry : Écoutez, ça, c'est vraiment un enjeu qui me tient à coeur puis c'est un enjeu qui bouleverse, évidemment, le monde de l'enseignement supérieur, là, tout le monde s'entend là-dessus. Puis ça a été vraiment un effort concerté. Tout le monde a été consulté. On l'a fait de manière concertée, que ce soit avec les étudiants, avec les profs, avec les syndicats. C'était à la demande de tout le monde de faire un comité. Puis c'était un peu la recommandation, aussi, du Conseil supérieur de l'éducation, à l'époque, qui nous avait suggéré de faire un comité puis une concertation, un peu à travers tout le monde. Puis c'est ce qu'on a fait.

Les travaux ont commencé en octobre. C'est vrai qu'il y avait un échéancier du mois d'avril. On a repoussé légèrement l'échéancier pour être sûrs de faire les choses convenablement. Il y a plusieurs discussions qui ont eu lieu, plusieurs échanges qui ont eu lieu. Moi, j'ai demandé à ce qu'on fasse l'inventaire de tout ça puis qu'on puisse produire, éventuellement, un guide pratique. Évidemment, je mets beaucoup d'efforts pour que ce soit fait pour l'été, mais moi, j'ai bon espoir que les établissements d'enseignement supérieur vont pouvoir mettre la main là-dessus avant de commencer l'année suivante.

Ceci dit, il ne faut pas penser qu'il n'y a rien de fait depuis deux ans, là, c'est-à-dire depuis qu'il y a eu la mise en place de ChatGPT puis toutes les... tous les logiciels qui ont été développés puis qui vont à une vitesse grand V. Les établissements d'enseignement supérieur eux-mêmes ont développé aussi des remparts, des garde-fous puis ont déjà, à l'intérieur de leurs propres guides puis de leurs propres codes d'éthique, puis de discipline, puis de plagiat, et tout ça... Eux ont été capables de rentrer aussi certaines balises pour éviter qu'il y ait des cas de plagiat. Mais, oui, il y a des cas de plagiat, on ne le niera pas. Ceci dit, je pense que les établissements d'enseignement supérieur sont quand même très bien préparés.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci, Mme la ministre. Merci. Il vous reste une minute, Mme la députée.

Mme Gentilcore : Parfait. Si vous avez déjà des étapes de franchies, est-ce que vous avez pensé à peut-être produire un rapport intérimaire pour tenir au courant de l'avancement de... puis qu'au moins... que les cégeps et les universités, les étudiants sachent un peu à quoi s'en tenir...

Mme Déry : Bien, ils savent, parce qu'ils ont fait partie de ces discussions-là pendant des mois, là. Depuis le mois d'octobre, ils font partie de toutes ces discussions-là. Tout le monde sait... tout le monde sait très bien ce qu'il en est. Puis on a toujours été très transparents. Le comité a eu beaucoup de discussions sur plusieurs enjeux, sur des enjeux d'éthique, sur des enjeux, évidemment, de... pédagogiques, c'est-à-dire comment est-ce qu'on va continuer à enseigner, en sachant très bien qu'il y a des cas de plagiat, en sachant très bien que ça augmente à une vitesse exponentielle, le nombre de versions de ChatGPT ou d'intelligences artificielles qu'on peut voir aujourd'hui.

Mais, ceci dit, il y a des avantages et des inconvénients à tout ça. Ça fait que les discussions ont aussi porté sur les avantages de ces... de ces nouvelles technologies. Il va falloir qu'on s'adapte. On ne peut pas les éliminer, on ne peut pas les interdire, puis ça a toujours été très clair avec tout le monde, puis je pense que tout le monde adhère à ce consensus...

La Présidente (Mme Dionne) : Merci, Mme la ministre. Merci. C'est malheureusement tout le temps qu'on a pour cet échange. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Mont-Royal—Outremont pour 13 minutes.

Mme Setlakwe : Merci. Revenons aux bourses Perspective. Est-ce que vous ne pensez pas que la fin de ces bourses va avoir un effet négatif sur la précarité des étudiants?

Mme Déry : Sur les bourses Perspective?

Mme Setlakwe : Vous ne pensez pas que la fin des bourses Perspective pourrait avoir un effet négatif sur la précarité des étudiants?

Mme Déry : Bien, comme je l'ai mentionné, Mme la Présidente, je l'ai mentionné il y a quelques minutes à peine avec ma collègue de l'autre groupe d'opposition, ces bourses-là étaient des bourses incitatives. Donc, c'était un programme qui avait un début puis une fin, et donc, de toute façon, je l'aurais mis fin à l'automne 2025. Donc, dans quelques mois, ce programme-là prenait fin. Et il n'a jamais été question de poursuivre ce programme-là ou de pérenniser ce programme-là. On va revenir à des bourses initiales puis on va continuer, à travers l'AFE, de bonifier, justement, certaines mesures, comme on le fait depuis le début. Mais c'est...

La Présidente (Mme Dionne) : Merci, Mme la ministre. Mme la députée, vous pouvez poursuivre.

Mme Setlakwe : Vous avez coupé cette bourse en pleine période d'inscription, alors que les étudiants ont planifié recevoir cette bourse, dans leurs plans d'études. Comment expliquer que vous l'avez coupée à ce moment-là? Puis qu'est-ce que vous allez faire avec les sommes? Allez-vous les réinvestir?

Mme Déry : Écoutez, comme je l'ai dit tantôt, les sommes à réinvestir, le... Il y a 500 millions, là, qu'on prend. Ce 500 millions, c'est énorme, là. Mais il y a 500 millions qu'on doit débourser pour les prochaines années, jusqu'en 2028 ou 2029, si je ne me trompe pas, pour être capables de maintenir tous les étudiants. Puis il y en a des milliers, là. Tous les étudiants qui sont actuellement dans un programme de bourses Perspective, pour n'importe quel programme qui est admissible, vont avoir accès à cette bourse jusqu'à la fin de leur parcours.

Donc, ça a toujours été clair que ce programme-là n'allait pas se poursuivre. C'est un programme incitatif. Le programme de soutien aux études, c'est l'AFE. Puis c'est d'autres mesures qui viennent en soutien, en logement, où le logement étudiant en fait partie aussi. Mais, pour ce qui est des bourses Perspective, il y a un 500 millions qu'on débourse, puis qui assure, et qui garantisse, justement, la fin du parcours académique à tous les étudiants qui en ont droit.

La Présidente (Mme Dionne) : ...merci, Mme la ministre. Poursuivez, Mme la députée.

Mme Setlakwe : ...que vous n'allez pas réinvestir cet argent dans la rémunération des stages?

Mme Déry : Bien, ce que je vous dis, c'est qu'il y a 500 millions... Moi, je ne peux pas laisser des étudiants en plan...

Mme Setlakwe : ...vous l'avez promis.

Mme Déry : Bien, je l'ai dit, puis j'en ai été claire, puis je pense que les assos étudiantes le savent très, très bien, puis je leur dis la même chose que je vous dis aujourd'hui, on a fait des choix. À l'époque, on a fait des choix puis on a misé non seulement sur les choix dans la fonction publique puis d'augmenter les conditions et salaires, mais on a aussi fait des choix... on a mis 200 millions dans le PQI pour le logement étudiant. J'ai toujours dit que je ne veux pas que ce soit un frein à l'accessibilité financière, le logement étudiant. Puis là il y a plusieurs projets. Il y en a encore plein qui sont dans le pipeline...

La Présidente (Mme Dionne) : ...merci, Mme la ministre. Oui, poursuivez, madame.

Mme Setlakwe : Je vous rappelle du vote sur la motion du 30 mars 2023 : «Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement caquiste de mettre en place la rémunération des stages dans le secteur public, dans les délais les plus favorables.» C'était unanime. Vous aviez voté pour. Donc, qu'est-ce qui a changé depuis?

Mme Déry : Bien, comme je l'ai dit... J'ai voté pour. Je n'ai aucun problème à dire que j'ai voté pour. J'avais la bonne intention de le faire. Les négociations dans les conventions collectives sont arrivées. Il y a des choix qu'il faut faire. C'est des budgets pérennisés. La mesure de rémunération de stage, c'est une mesure qui est, au bas mot, à 500, 600 millions, de manière pérenne.

J'aimerais ça vous entendre peut-être de manière constructive. On nous demande aussi de rémunérer les stages, mais on a fait des choix extrêmement importants pour bonifier les salaires, bonifier, évidemment, toutes les conditions que ces étudiants-là vont avoir sur le marché du travail. C'est des choix qu'on a faits. Si vous avez une idée constructive pour nous permettre de savoir comment est-ce qu'on peut pérenniser une telle mesure...

La Présidente (Mme Dionne) : Merci...

Mme Déry : ...à 500, 600 millions, j'aimerais évidemment la connaître.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci, Mme la ministre.

Mme Setlakwe : Vous parlez beaucoup de... Vous lancez des chiffres. Vous parlez d'investissements. On n'a jamais dit que le gouvernement n'investissait pas. Ce qu'on dit, c'est que, parmi vos choix, les choix sont questionnables, parce que, sur le terrain, la situation s'aggrave pour un trop grand nombre d'étudiants. Je vous rappelle les chiffres. 40 % ont vécu de l'insécurité alimentaire au cours des 12 derniers mois, 46 % sont prestataires de l'AFE, 15 % ont recours aux banques alimentaires, 17 % aux aides alimentaires sur les campus.

Il y avait des demandes chiffrées qui étaient faites, qui étaient raisonnables. Vous n'y avez pas donné suite. La rémunération des stages, vous vous engagez. Ensuite, vous revenez sur votre engagement. Honnêtement, comment... Vous ne commencez pas à penser que le lien de confiance que vous avez avec le mouvement étudiant va s'effriter?

Mme Déry : Écoutez, je pense qu'honnêtement j'ai un très bon lien avec les étudiants. Je pense que j'ai... Je suis une femme de terrain. Je suis sur le terrain régulièrement, même après avoir fait les 48 cégeps puis la vingtaine d'universités. Je sais très, très bien que la situation actuelle et les efforts qu'on demande, justement, aux établissements sont importants. Mais là vous me demandez... Je vais revenir à votre début de question, Mme la députée. Vous me reprochez d'investir dans nos infirmières, d'investir dans nos étudiants, d'investir dans nos enseignants. Vous dites que ce sont des mauvais choix d'investir dans le PQI à 1 milliard additionnel en enseignement supérieur, alors que le PQI des libéraux stagnait à 5 milliards. J'y suis, sur le terrain, tout le temps, toutes les semaines, pour faire des annonces et aussi pour constater les préoccupations de chacune et chacun. Je suis celle qui va voir une fois, deux fois, trois fois le même cégep, là. Ça fait que...

La Présidente (Mme Dionne) : Merci, Mme la ministre. Oui, poursuivez.

Mme Setlakwe : Je vais revenir à la... juste pour boucler la boucle. Vous avez demandé si on avait une proposition constructive. Je vous... je vous ramène à notre demande de mandat d'initiative pour qu'on puisse, tous les parlementaires ensemble, se saisir de cette situation qui se dégrade au niveau de la précarité financière des étudiants, pour qu'on puisse examiner les causes, regarder des pistes de solution, regarder quelles sont les initiatives en cours et comment on peut les bonifier pour vraiment mettre un frein à ce... à ce fléau.

Mme Déry : Je veux juste donner un exemple que je n'ai pas pu donner tantôt, puis peut-être que ça va vraiment être pertinent pour que, justement, mes collègues puissent comprendre un petit peu la différence entre ce qu'il y avait en 2018‑2019 puis aujourd'hui. Un étudiant universitaire qui est en deuxième année, qui réside chez ses parents, son revenu annuel est à peu près de 8 000 $. Le revenu annuel combiné de ses parents, c'est autour de 100 000 $, donc 50 000 $ chacun, évidemment, incluant les allocations. Cet étudiant étudie en enseignement. Alors, le prêt... les prêts et bourses, à l'époque, là, sous les libéraux, 2018-2019, c'était 0 $. On avait 45 000 $ en total d'aide, là, à peu près, mais, en prêts et en bourses, il y avait zéro. En prêts, en 2025-2026, on parle de 4 000 $, en bourses, on parle de 347 $, et le total de l'aide, en... 4 379 $. En tout et pour tout, on parle de 60 000 $, alors qu'à l'époque on avait 45 000 $. Des exemples comme ceux-là...

La Présidente (Mme Dionne) : Merci, Mme la ministre...

Mme Déry : ...j'en ai déjà plusieurs, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci. Mme la députée, vous pouvez poursuivre.

Mme Setlakwe : Au niveau des bourses Perspective, bon, on vous a bien entendue, que certains programmes fonctionnaient bien, d'autres non. Vous avez sûrement pris connaissance, comme moi, là, de la préoccupation des étudiants en ingénierie et aussi, là, de la sortie médiatique, hier, de l'Ordre des ingénieurs au sujet de la crise. Mais revenons aux étudiants. Comment est-ce que vous allez vous assurer qu'on forme suffisamment d'ingénieurs dans les prochaines années?

• (10 h 20) •

Mme Déry : Bien, écoutez, le nombre d'ingénieurs n'a pas cessé d'augmenter. On a des cohortes excessivement importantes, que ce soit au niveau de l'ETS ou au niveau de Polytechnique. On a des cohortes qui augmentent d'année en année et qui vont continuer d'augmenter. On a vraiment des institutions extrêmement prestigieuses, très prestigieuses, qui sont capables... très attractives. On est capables d'aller chercher autant d'étudiants québécois que d'étudiants internationaux dans nos facultés de génie, au Québec. Les facultés de génie, au Québec, ne se sont jamais aussi bien portées.

Alors, on continue en subventions de fonctionnement. On continue d'allouer des subventions de fonctionnement très généreuses tant au niveau de l'ETS puis de Polytechnique. Ce sont nos deux symboles, si vous voulez, évidemment, d'écoles de génie. Mais, bien honnêtement, on va continuer de former les ingénieurs. Puis les ingénieurs sont les...

La Présidente (Mme Dionne) : Merci, Mme la ministre...

Mme Déry : Qu'il y ait des bourses Perspective ou pas, les ingénieurs sont...

La Présidente (Mme Dionne) : Merci. Poursuivez, Mme la députée.

Mme Setlakwe : Merci. Mais il faut en former, et puis ce qu'on nous dit, c'est que les étudiants internationaux constituent 35 % des inscriptions dans les programmes de génie, ce qui m'amène, donc, aux effets du décret, parce que... Oui, c'est bien ça, hein, 35 %? Vous reconnaissez qu'il y a 35 % d'étudiants internationaux dans les cohortes de génie? Puis j'imagine qu'il y en a encore plus, maîtrise, doctorat.

Mme Déry : Bien, ça doit être en pourcentage. Oui, oui, il y en a beaucoup dans les cycles supérieurs. Les étudiants internationaux, la grande majorité des étudiants internationaux se trouvent dans les cycles supérieurs, donc deuxième et troisième cycle. Oui, j'en suis consciente.

Mme Setlakwe : Puis là vous avez... bien, suite au projet de loi n° 74, il y a eu un décret ministériel qui a été émis le 26 février dernier. Écoutez, depuis que ce décret a été adopté, bon, les témoignages qui s'accumulent vont tous dans la même direction. Les craintes exprimées par les universités, les cégeps et notre formation politique se confirment. Le terrain parle : Votre décision sème la grogne. Puis on ne vous a pas entendue lors de l'étude du projet de loi n° 74. Donc, permettez-moi aujourd'hui de poser quelques questions, là, en lien avec le décret. Lorsque vous avez rencontré les recteurs et les directeurs de cégep avant l'émission du décret, quels engagements avez-vous pris pour défendre leurs intérêts au Conseil des ministres?

Mme Déry : D'abord, vous m'avez entendue lors de l'interpellation qu'on a eue. Alors, évidemment, le projet de loi a été porté par mon collègue du MIFI, mais on a eu une interpellation puis on en a parlé quand même en long et en large, du p.l. n° 74. On est très conscients qu'au cours des dernières années, au Québec, il y a eu une augmentation substantielle du nombre d'étudiants internationaux. Ceci dit, on avait un rattrapage important à faire. Mais là, maintenant, ce qu'on fait, c'est qu'on stabilise. Je ne viens pas diminuer le nombre d'effectifs d'étudiants internationaux dans les universités. On n'est pas là. On vient vraiment cibler, puis je l'ai dit et je le répète, on vient stabiliser le nombre d'effectifs dans les établissements universitaires et même dans les établissements collégiaux. On vient stabiliser dans tout ce qui est D.E.C., dans tous les diplômes d'études collégiales, parce qu'évidemment on a besoin de ces jeunes-là. On vient stabiliser. C'est dans les A.E.C. qu'on vient cibler la diminution, diminution de 75 %, dans les A.E.C. uniquement. Mais, quand vous dites qu'il y a une diminution du nombre d'effectifs d'étudiants internationaux, le projet de loi, la loi n° 74...

La Présidente (Mme Dionne) : Merci. Merci, Mme la ministre.

Mme Déry : ...ne vise pas à diminuer mais bien à stabiliser les effectifs.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci. Merci... Mme la députée.

Mme Setlakwe : Est-ce que vous avez... Bien là, vous n'avez pas répondu à ma question, à savoir si vous aviez pris certains engagements, là, pour défendre les intérêts des recteurs et des directeurs de cégep. Ma prochaine question, c'est : Est-ce que vous les avez consultés? Avez-vous consulté les directions d'établissement pour établir les plafonds?

Mme Déry : Écoutez, on a consulté les établissements durant des mois. Alors, on avait plusieurs scénarios au départ. Il y avait des scénarios de baisse comme il y avait d'autres scénarios de stabilisation. Il y avait plusieurs scénarios. Tous les scénarios ont été partagés avec les établissements d'enseignement supérieur. J'ai dû consulter le BCI plusieurs fois. Non seulement moi-même, j'ai eu moi-même des rencontres avec les différents recteurs du BCI, mais il y a aussi mes collègues au cabinet, au ministère, qui ont eu ces rencontres-là.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci, Mme la ministre. Merci...

Mme Déry : ...

La Présidente (Mme Dionne) : Merci, Mme la ministre. Mme la députée, il vous reste deux minutes.

Mme Setlakwe : Moi, ce que j'ai lu, c'est qu'ils étaient plutôt déçus de ne pas avoir été consultés. Je vous cite le directeur des études du cégep de Rimouski. Il a dit publiquement : «On n'a aucune information dans la façon dont les plafonds ont été choisis. Je ne me souviens pas d'avoir eu une seule consultation pour nous demander des ordres de grandeur.»

Par ailleurs, il y a une lettre qui a été signée par les huit chefs d'établissement des huit universités à charte du Québec le 28 février dernier ou... Bien, le titre, c'est Universités : le gouvernement crée la tempête parfaite, et ils disent : «Mardi, c'est par les médias que nous avons pris connaissance des plafonds imposés aux étudiants internationaux dans nos universités.»

Pourquoi vous ne leur avez pas parlé, Mme la ministre?

Mme Déry : On leur a parlé. On a partagé ces plafonds-là quelques jours avant. Vous comprendrez que c'est un décret. Ça doit passer par le Conseil des ministres. Il y a des choses, évidemment, que je ne peux pas partager. Par contre, les consultations ont été faites. Tous les cégeps, les D.G. de cégep, la Fédération des cégeps, on les a rencontrés à plusieurs reprises, savaient très bien que le projet de loi s'en venait. Ils ont participé aux consultations mêmes. Ils savent très, très bien qu'on arrivait avec des plafonds, qu'on arrivait aussi avec certaines mesures concernant les A.E.C. Donc, toute la consultation a été faite sur la base des cibles qu'on allait viser. Les A.E.C., ils étaient conscients qu'on allait diminuer. Les plafonds comme tels...

La Présidente (Mme Dionne) : Merci, Mme la ministre. Merci.

Mme Setlakwe : Vous avez dû, comme moi, lire les réactions suite à l'adoption du décret. Elles sont très négatives de la part des cégeps, de la part des universités. Vous réagissez comment? Vous êtes satisfaite de ça? Vous êtes en train de nuire au réseau. Est-ce que vous avez défendu les réseaux auprès du Conseil des ministres avant l'adoption du décret?

Mme Déry : Écoutez, on est venus stabiliser les effectifs. Moi, le projet de loi n° 74, là, j'y adhère à 100 %, Mme la députée, parce qu'on vient stabiliser. Est-ce que vous êtes d'accord avec les défauts de paiement de certains étudiants qu'on a dans nos établissements d'enseignement supérieur? Est-ce que vous êtes d'accord avec le nombre de demandeurs d'asile qu'on a? Ils viennent, prennent un CAQ, prennent un permis d'études, puis ça finit en demandeur d'asile. Il y a eu des abus. Il y a eu des choses qui ne doivent pas se reproduire. On a des étudiants internationaux qui nous arrivent, dans certains établissements... Et ce n'est pas tous les établissements, mais la recrudescence qu'on a eue a donné lieu...

La Présidente (Mme Dionne) : Merci, Mme la ministre...

Mme Déry : ...à des cas d'abus, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci. C'est malheureusement tout le temps qu'on a. Donc, je cède maintenant la parole à M. le député de Jean-Lesage pour 13 minutes.

M. Zanetti : Merci, Mme la Présidente. Merci beaucoup, Mme la ministre, tous les collègues, les gens présents du ministère. Dans le dernier budget, on a réalisé qu'il y avait une coupure de 1,2 million qui avait été faite, de l'argent qui était prévu pour une enquête sur les violences sexuelles dans les institutions d'enseignement supérieur. Pourquoi la ministre a-t-elle décidé de faire cette coupure-là?

Mme Déry : Ah! mais vous parlez des violences à caractère sexuel, la campagne nationale. Alors, effectivement, la campagne nationale, on a redirigé... Il y a déjà beaucoup de choses qui se sont faites dans les établissements d'enseignement supérieur. Il y a des plans d'action qu'on est venus bonifier et il y a déjà des façons de recueillir des données. On recueille des données depuis déjà un bon moment à travers les universités, le partage de bonnes pratiques.

Et donc, cette campagne nationale, par souci aussi de saine gestion de finances publiques, on a décidé de l'enlever, donc de ne pas la faire, parce qu'on a déjà des données qui nous sont parvenues de la part des établissements. On a déjà ça depuis quand même plusieurs années. Ça veut dire... Il y a quand même, depuis quelques années, le plan d'action partout en enseignement supérieur. On a d'ailleurs réussi à changer la culture puis on va continuer à changer cette culture. Moi, c'est un enjeu qui me tient extrêmement à coeur. On a d'ailleurs bonifié certains plans dans certains... certaines universités, notamment Concordia, qui continue avec ses initiatives. Mais je pense qu'on a des données, et un partage de connaissances, et un partage d'expertise suffisant pour nous permettre de recueillir ces données-là.

M. Zanetti : Mais c'était une revendication des associations étudiantes nationales, du milieu étudiant en général. Il devait y avoir quelque chose d'insuffisant, dans les données présentement disponibles, pour qu'une revendication d'une enquête nationale soit mise sur pied. Permettez-moi de dire que 1,2 million, par rapport au budget de l'enseignement supérieur, ce n'est pas tant que ça pour quelque chose qui aurait pu donner des résultats très importants. Alors, qu'est-ce qui... Je veux dire, vous avez... Ce n'est certainement pas, disons, avec l'assentiment des associations étudiantes que vous avez décidé de faire cette coupure.

Mme Déry : Bien, en fait, comme je vous dis... c'est-à-dire, on a jugé bon... C'est vrai qu'à l'époque on avait plusieurs mesures, mais on a jugé bon... Parce qu'on a déjà des données qu'on recueille. Il y a des travaux avec des chaires de recherche sur les violences sexuelles qui existent, en enseignement supérieur, celle, notamment, de l'UQAM. Il y a l'enquête aussi sur la santé mentale, de l'Observatoire sur la santé mentale étudiante en enseignement supérieur. Donc, c'est pour des... C'est justement les travaux de ces autres chaires et des autres travaux en parallèle qui ont lieu... qu'on a décidé de ne pas mener la campagne nationale. Je pense qu'on a assez de gens qui travaillent et qui partagent leurs expertises, leurs données aussi, pour qu'on soit capables d'avoir quelque chose d'équivalent. C'est la raison pour laquelle on a misé sur les travaux qui ont actuellement cours dans ces différentes chaires d'études là.

M. Zanetti : Parfait. Merci. Je veux revenir sur le sujet de l'aide financière aux études. Il y a un an, en étude de crédits, on avait réalisé que, dans les dernières années, à peu près un demi-milliard de dollars qui était attribué normalement à l'AFE retournait... était retourné dans le fonds consolidé du gouvernement parce qu'il n'était pas réclamé, pour plein de facteurs, mais dont le fait qu'il y a des facteurs... des critères d'admission, à l'AFE, qui sont désuets. Alors, au moment où la population étudiante est plus vulnérable que jamais, en pleine crise du logement, en pleine insécurité alimentaire, de l'argent qu'on dit qu'on leur donne retourne dans les fonds consolidés. Pouvez-vous nous dire le montant, cette année, qui a été retourné dans le fonds consolidé, provenant de l'AFE?

• (10 h 30) •

Mme Déry : Bien, je peux demander à mes collègues de regarder le montant exact qui a été retourné dans le transfert consolidé, mais ce que je vous dis, c'est qu'on a toujours... on a toujours remis de l'argent dans tout ce qui est soutien direct aux étudiants. Puis ça, on l'a dit l'année dernière, puis je le répète aujourd'hui. Les investissements qu'on fait à l'AFE et en soutien aux étudiants, pas juste l'AFE mais tous les plans d'action qu'on a mis autour de ça, que ce soit le Plan d'action sur la santé mentale, que ce soit le plan d'action sur... le PARES, ce sont toutes des mesures directes qui viennent soutenir les étudiants. On a bonifié largement l'AFE au cours des dernières années puis, comme je le mentionne, on va continuer de bonifier ces mesures-là. On va continuer. Pour moi, c'est... le véhicule le plus important de soutien financier pour les étudiants, c'est l'AFE.

Donc, je peux demander à mes collègues de sortir les données, puis on peut vous les donner tantôt, je n'ai pas le chiffre sous les yeux, mais, comme je vous dis, jusqu'à présent, l'argent qu'on nous retourne est soit remis dans le fonds consolidé, mais, une bonne partie de ces fonds-là, je veux... On va essayer d'avoir ces chiffres-là, mais une grande majorité de ces fonds-là, au cours des dernières années, ont permis de soutenir les étudiants.

La Présidente (Mme Dionne) : ...merci, merci. M. le député, vous pouvez poursuivre.

M. Zanetti : Oui. Merci. Au fond, ce qu'on vous demandait l'année passée, là, c'était dire... Moi, j'émettais le souhait, là, que, cette année, un an plus tard, là, vous auriez consulté les associations étudiantes pour revoir avec eux les critères de l'AFE, pour être sûrs que l'argent qui est dans l'AFE, qui, déjà, est insuffisant, bien, au moins, il soit vraiment donné aux étudiants puis qu'il ne retourne pas dans le fonds consolidé. Est-ce que vous avez entrepris des démarches de consultation des associations étudiantes pour revoir les critères de l'AFE?

Mme Déry : Bien, écoutez, les associations étudiantes nous demandent de revoir les critères de l'AFE, puis on collabore avec eux. J'ai une très bonne relation avec les assos. On les... Mais je leur dis : On a investi 2 milliards additionnels dans le soutien aux étudiants puis dans l'AFE, là. C'est 2 milliards additionnels. Moi, je juge que c'est beaucoup. On va continuer de les soutenir dans un contexte où c'est difficile. On continue de les soutenir, même en logement. Je sais que les loyers, ça a été un enjeu extrêmement important. Puis c'était un enjeu qui était une priorité pour les étudiants à l'époque. On parle maintenant d'un nouvel enjeu qui est l'enjeu de l'insécurité alimentaire.

Mais, l'AFE, on va toujours continuer de la bonifier. Donc, je vais continuer de bonifier l'AFE. Je n'ai pas l'intention, à court terme, de revoir les critères de l'AFE comme tels, mais, comme je l'ai mentionné, on va continuer de soutenir les étudiants à travers les mesures qu'on est venus bonifier au cours des dernières années. Puis, encore une fois, dans le dernier budget, c'est 250 millions additionnels qu'on est venus indexer.

M. Zanetti : Oui, mais il y a aussi 250 millions, à peu près, qui sont... qui étaient liés aux bourses Perspective, qui sont disparues, donc... pas les bourses Perspective... oui, c'est ça, les bourses qui étaient pour... excusez-moi, là, je me perds dans les noms, mais... oui, les bourses Perspective, c'est ça, qui sont disparues, 250 millions.

Il y a une affaire que je voudrais dire, c'est que c'est quand même... c'est quand même navrant, parce que c'est terrible, le fait que de l'argent qui est supposé aller aux étudiants n'aille pas aux étudiants. Ça fait que le fait que la ministre me dise ici, cette année : Finalement, les critères, on ne les a pas révisés, on n'a pas consulté les associations étudiantes sur ce qu'ils voulaient réviser, on n'a pas l'intention de le réviser non plus... Donc, ce qu'elle est en train de dire, la ministre, c'est : On a l'intention de continuer comme ça, c'est-à-dire mettre de l'argent dans l'AFE, que le monde n'y ait pas vraiment accès parce que les critères sont mal faits, puis que ça retourne dans le fonds consolidé. Comme ça, on a l'air d'en mettre plus puis, dans le fond, bien, on économise, au bout du compte. Je vous avoue que je ne trouve pas que c'est de la bonne gestion des fonds publics.

Puis j'espère que la ministre pourrait s'engager, là... C'est ça, ma question : Est-ce qu'elle pourrait s'engager à ce que, d'ici l'année prochaine, on revienne en crédits, là, les derniers crédits de la législature, et puis qu'elle nous dise : On les a révisés, les critères, ce n'est plus vrai, il n'y en a plus, de l'argent de l'AFE qui va retourner dans le fonds consolidé? On peut-tu avoir cet engagement-là de la ministre aujourd'hui?

Mme Déry : Écoutez, je pense que, sur l'AFE, on a un dépassement, justement, des investissements qu'on a faits en AFE. On a une hausse de clientèle de l'AFE. On nous a reproché... Les étudiants nous disaient : On a de la difficulté à faire augmenter le nombre de bénéficiaires à l'AFE. C'est ce qu'on a fait. On a fait une campagne pour que, justement, ces étudiants-là viennent nous voir puis nous dire : On a besoin de l'AFE, pour la rendre plus accessible. Ça nous a coûté plus cher cette année parce qu'on a eu une augmentation de clientèle de 11 %. Les étudiants s'en réjouissent, on s'en réjouit aussi. Je ne vous dis pas qu'il n'y a pas... on ne va pas continuer à le faire. On va continuer. Mais, entre l'augmentation de 11 %, où, visiblement, ça fonctionne, quand on a une plateforme plus accessible, quand on est capables de répondre aux demandes des étudiants... Moi, je souhaite que les étudiants viennent nous voir puis qu'on rende ça plus accessible, puis c'est la raison pour laquelle on a fait cette campagne-là.

Mais, je vous le dis, là, on a dépassé ce qu'on a mis dans l'AFE cette année puis, en plus, on vient aussi indexer. L'indexation, je vous le dis, elle n'est pas automatique. D'ailleurs, elle n'était pas automatique sous les autres gouvernements non plus. On indexe 250 millions. On a le logement où on vient les aider aussi...

La Présidente (Mme Dionne) : Merci, Mme la ministre. Merci. Poursuivez, M. le député.

M. Zanetti : En tout respect, tout ce que la ministre dit ne répond pas à la question, puis ça fait diversion du sujet. Le sujet, c'est qu'il y a de l'argent qui retourne dans l'AFE... il y a encore de l'argent qui retourne, pardon, dans le fonds consolidé, de l'argent de l'AFE. La ministre ne sait pas c'est quel montant. La ministre ne compte pas réviser les critères. Et la ministre ne peut même pas s'engager à dire qu'elle va le faire l'année prochaine, avant la fin de son mandat. Alors, moi, je trouve ça très préoccupant.

Mais maintenant je vais changer de sujet. On a compris ce qu'on avait à comprendre. Le plafonnement des certificats d'acceptation du Québec pour les étudiants étrangers, les étudiants internationaux qui sont dans les cégeps du Québec, là, la ministre prétend que les choses sont maintenues, mais, dans la réalité, il va y avoir une diminution des étudiants internationaux dans les cégeps.

Puis je vais vous expliquer ce qu'on m'a expliqué, là, en donnant un exemple d'un cégep, O.K., un cégep, par exemple, là, qui s'est vu octroyer, là, la permission d'avoir, mettons, 360 étudiants internationaux, O.K.? Au départ, là, on lui dit : Mais 360, c'est à peu près ce que vous avez... c'est ce que vous avez eu l'année passée, il n'y a pas de diminution. Ça, c'est la rhétorique qui est servie.

Dans la réalité, c'est que, pour avoir 360 étudiants internationaux l'année d'avant, bien, il y a eu... il a fallu qu'il y ait à peu près 1 200 certificats d'acceptation du Québec. Et puis là, bien, après, les 1 200 qui avaient leurs certificats, bien là, tranquillement, il y a comme un effet d'entonnoir. Bien là, selon certains critères, il y en a qui ne se qualifient pas parce qu'ils n'ont pas assez de ressources financières. Après ça, il y en a d'autres qui ne se qualifient pas pour d'autres raisons. Puis, au bout du compte, le 1 200 de départ donne un 360, au bout du compte, dans ce cégep-là.

Mais, si, au cégep, on leur dit : Bien, au départ, là, le bassin de CAQ que vous allez avoir, là, autorisés, là, c'est 360, bien, là-dedans, dans les 360, là, il y en a qui n'auront pas les critères, ils ne pourront pas être admis parce qu'ils n'ont pas les fonds financiers, puis là ça va finir qu'au bout du compte il va y avoir peut-être une centaine, peut-être 120, peut-être 150.

Donc, la réalité, c'est que la façon dont la ministre a décidé de plafonner les étudiants internationaux dans les cégeps, ça va amener une diminution. Et ça, c'est les directeurs généraux des cégeps de région qui nous le disent. Est-ce que la ministre est consciente de ça ou elle dit que les directeurs généraux se trompent?

Mme Déry : Bien, écoutez, d'abord, les directeurs généraux ne se trompent pas. Ils savent très, très bien comment ça fonctionne, parce qu'on est en collaboration avec tous les directeurs des cégeps.

Moi, je pense qu'il y a une incompréhension puis... Avec tout respect, là, il y a une incompréhension. Vous mélangez, M. le député, le taux de conversion qu'on a dans les cégeps et dans les universités. Il y a des taux de conversion. Donc, sur 1 000... sur 1 000 admissions, bien évidemment, ce ne sont pas 1 000 CAQ qu'on va distribuer, mais ça va se traduire par du nombre de CAQ puis... par le nombre de CAQ qu'on va distribuer. Autrement dit, le taux de conversion varie d'un établissement à l'autre. Vous mélangez les taux de conversion et le nombre de certificats d'acceptation du Québec qu'on alloue.

Là, ce qu'on a fait pour les cégeps, puis je reviens encore une fois dans les cégeps et les universités, on va leur allouer le nombre de CAQ basé sur le nombre de CAQ qu'ils ont eu l'année d'avant. Donc, c'est pour ça que je parle de stabilisation. Si, mettons, l'Université McGill ou le cégep Untel a eu 500 CAQ, ils vont avoir, en 2025‑2026, 500 CAQ pour la prochaine année, le temps qu'on fasse la planification pluriannuelle en immigration.

Mais il ne faut pas mélanger le nombre de CAQ et les taux de conversion. Les taux de conversion varient d'un établissement à l'autre, puis c'est ce qu'on regarde en temps réel, même. On veut s'assurer qu'on ait le maximum de quotas. Si on leur attribue des quotas, bien, on veut s'assurer qu'ils puissent aller chercher ce nombre d'étudiants étrangers. Mais je pense qu'il y a un mélange entre le taux de conversion puis les CAQ.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci. Merci. Il vous reste 1 min 30 s, M. le député.

M. Zanetti : Je comprends très bien ce que la ministre dit puis je pense qu'elle devrait parler aux directeurs généraux des cégeps de région, parce que, manifestement, là, il y a des choses qu'elle dit qui ne fonctionnent pas avec les échos terrain.

J'ai un autre sujet. Il me reste une minute. Les infrastructures dans les cégeps, on sait qu'en région les cégeps, souvent, sont... Il y a des endroits où est-ce que, dans une ville, c'est la seule piscine publique. Il y a des endroits que c'est la seule salle de spectacle. Donc, lorsqu'il y a des problèmes d'investissement dans les infrastructures de cégep, ça peut avoir des impacts qui sont, évidemment, catastrophiques pour le milieu collégial, mais aussi qui peut avoir des répercussions sur l'ensemble de la communauté. Est-ce que la ministre pourrait envisager de dire que les infrastructures, dans les cégeps régionaux, qui ont... qui sont multifonctions puis qui servent particulièrement, qui sont des piliers de la communauté... qu'il pourrait y avoir... disons, avoir une certaine priorisation dans les autorisations de dépenses en infrastructures du gouvernement?

La Présidente (Mme Dionne) : En 30 secondes, Mme la ministre.

Mme Déry : Oui. Bien, je pense qu'on a été vraiment un gouvernement qui avons investi énormément dans les régions, surtout dans nos cégeps en région. Pour moi, c'est primordial. Que ce soit en termes de PQI ou en termes de cohortes d'étudiants internationaux, il y a des programmes qui sont ouverts et qui ne font... qui se déploient en fonction des étudiants internationaux. Donc, pour moi, c'est extrêmement important de maintenir tous ces bassins-là puis de m'assurer qu'en région on maintienne non seulement les formations, mais aussi qu'on maintienne les infrastructures.

Juste pour vous donner une idée, et je pense que c'est très, encore une fois...

La Présidente (Mme Dionne) : ...c'est malheureusement tout le temps qu'on a. Merci, Mme la ministre. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Mont-Royal—Outremont pour 13 minutes.

• (10 h 40) •

Mme Setlakwe : Merci. Je pense, c'est important qu'on revienne sur les impacts du décret et des quotas de CAQ, des certificats d'acceptation du Québec, par établissement. J'entendais l'échange avec mon collègue, et, moi, c'est le même écho que je reçois du terrain. On parle d'un grave manque de prévisibilité pour les établissements. Effectivement, l'étudiant étranger, il ne peut pas faire sa demande de CAQ une fois qu'il a une lettre d'admission en main. Et ensuite le CAQ est délivré par le MIFI. Mais l'établissement, quand il fait une offre d'admission, il ignore si l'étudiant va y donner suite. Donc, la question se pose : À combien d'offres d'admission doivent-ils s'arrêter pour respecter le plafond qui leur est imposé?

Mme Déry : C'est le même nombre de CAQ que nous avons... que les établissements ont eu l'année dernière. Encore une fois, le nombre de CAQ, donc, le nombre de CAQ qui a été attribué par le MIFI en 2024‑2025, bien, c'est le nombre de CAQ qu'on leur attribue en 2025‑2026 pour la prochaine année, le temps de la planification pluriannuelle, où les établissements pourront, justement, venir faire leurs consultations puis plaider cette cause-là. Mais c'est le même nombre de CAQ, le même nombre de CAQ qu'on a déployés l'année dernière. On va déployer le même nombre cette année. Donc, on vient stabiliser le nombre d'effectifs.

Mme Setlakwe : ...vous allez... vous allez attendre à l'automne, alors que je pense que les universités puis les cégeps veulent être fixés. Eux, ce qu'ils nous disent, c'est que la préparation pour l'automne 2026, bien, c'est maintenant, là. Il ne faut pas attendre trop longtemps. Eux, ils sont très inquiets de ce report. Qu'est-ce que vous leur répondez?

Mme Déry : Le décret est en vigueur un an. Donc, il est en vigueur jusqu'en février prochain, le temps de la planification pluriannuelle. On l'a dit, mon collègue l'a dit publiquement il y a quelques jours, on retarde la planif parce qu'il y a une élection fédérale. On doit connaître un peu le plan de match du nouveau gouvernement à Ottawa pour être capables aussi de fixer nos cibles et d'avoir des consultations qui se font dans un contexte qui est réel, c'est-à-dire, ça nous prend quand même les données, si vous voulez, d'Ottawa pour pouvoir, justement, nous, nous ajuster. Mais le décret est valide, encore une fois, jusqu'en février 2026, le décret qu'on a émis il y a quelques semaines déjà.

Mme Setlakwe : Quand vous parlez, justement, de février à février, il y a comme un décalage aussi avec l'impact sur le terrain. Eux, ils sont même insatisfaits de cette période de temps. Ça ne correspond pas à la réalité, à la façon dont le recrutement se fait sur le terrain. Vous leur répondez quoi?

Mme Déry : Écoutez, on répond ce qu'on répond aux établissements. Les établissements savent très, très bien que le projet de loi n° 74 avait pour but de mieux encadrer les étudiants étrangers chez nous, au Québec, sur le territoire québécois. Donc, ils sont très conscients que ce projet de loi... Puis ça fait plusieurs mois, là, depuis l'été dernier qu'on savait très bien qu'on allait avoir un projet de loi. Ils savaient très bien. On a partagé tous les scénarios. On est allés de l'avant. Ils savent très bien qu'on va diminuer le nombre d'étudiants étrangers sur le territoire québécois parce qu'il y a eu plusieurs abus. Je pense qu'il faut reconnaître que c'est compliqué en ce moment.

Moi, je ne veux pas avoir des universités ou des établissements d'enseignement supérieur qui nous demandent d'absorber les pertes et les défauts de paiement de certains étudiants étrangers. C'est ce qu'on a encore. Il y a quelques jours à peine, il y a encore eu certaines universités en région qui ont des enjeux avec la sélection d'étudiants étrangers. Ça fait que, pour moi, de venir stabiliser...

Il y a eu une augmentation substantielle. On vient la stabiliser pour mieux contrôler, entre guillemets, ou, du moins, évaluer le nombre d'étudiants étrangers sur le territoire.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci, Mme la ministre. Poursuivez, Mme la députée.

Mme Setlakwe : Vous avez utilisé... Vous avez pris l'année 2024 comme référence pour l'imposition des quotas pour 2025‑2026. Ce que les établissements disent, c'est que ça n'a pas été leur meilleure année. Vous leur répondez quoi?

Mme Déry : Bien, on vient stabiliser. C'est sûr qu'en 2023 la croissance était beaucoup plus importante, mais on vous dit qu'on veut venir stabiliser les effectifs. Ça fait que je ne vais pas prendre une année de référence où on ne vient pas stabiliser le nombre d'effectifs. Donc, l'année référence qu'on a prise, c'est l'année 2024‑2025, et on va, pendant un an, appliquer ce décret-là pour être capables d'avoir une stabilisation des effectifs en termes d'étudiants étrangers.

Mme Setlakwe : Est-ce que... Vous semblez, vous, avoir une vision. Vous dites que ça fait des mois que ça se discute. Mais, sur le terrain, ce n'est pas bien reçu. Ils sont inquiets. C'est un manque de prévisibilité. Alors, expliquez-leur quel est votre objectif. Vous en voulez combien, d'étudiants internationaux? Puis comment est-ce que vous avez évalué la capacité d'accueil? C'est quoi, votre chiffre?

Mme Déry : Bien, le chiffre, c'est ce que je vous dis, on est venus plafonner à 2024. Il y a un nombre de CAQ qu'on a établi, puis c'est... Il est là, le plafond. Tout le monde le sait. Le décret, il est là. Donc, le plafond a été établi avec une base de référence à 2024. Donc, le nombre de CAQ pour chacun des établissements utilise la base de référence 2024. Et donc, pendant un an, ce sera les quotas qui seront admis au Québec, et, lors de la planification, bien là, on va être capables de planifier pour les trois prochaines années. C'est la première fois qu'on fait ça, qu'on va inclure le nombre d'étudiants étrangers dans la planification pluriannuelle.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci. Mme la députée.

Mme Setlakwe : Le nombre de CAQ a été fixé à 125 000, environ, pour 2025, mais est-ce que vous êtes en mesure de dire à combien va se chiffrer la baisse réelle du nombre d'étudiants? Êtes-vous capable de dire ça, vous?

Mme Déry : Bien, on ne peut pas la chiffrer tout de suite parce qu'il y a les demandes d'admission, Mme la députée. Vous comprendrez comment ça fonctionne en enseignement supérieur. Il y a des demandes d'admission qui se font en mars. Jusqu'à maintenant, il y a une baisse. Il y a une baisse de demandes d'admission. J'en suis très, très consciente, qu'il y a déjà une baisse de demandes d'admission, non seulement en raison du projet de loi n° 74, mais aussi en raison des mesures d'Ottawa. Aussi, le fédéral a mis des quotas et des plafonds qui ont aussi une incidence partout au pays en ce moment. Partout au pays, pas juste au Québec...

La Présidente (Mme Dionne) : Merci, Mme la ministre.

Mme Déry : ...on a une baisse de demandes d'admission.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci. Poursuivez, Mme la députée.

Mme Setlakwe : Oui. Vous avez parlé de situations d'abus tout à l'heure. Est-ce que vous n'avez pas l'impression, puis, moi, c'est ce que je lis puis j'entends, que finalement vous avez pénalisé l'ensemble du réseau pour quelques situations d'abus? Qu'est-ce que vous répondez aux universités qui disent : Laissez-nous gérer le recrutement à l'international, on n'a rien fait de mal, on en a besoin, c'est une richesse, on peut compléter nos programmes, etc.? Adressez-vous à eux puis expliquez-leur que vos mesures... en tout cas, vos mesures ont vraiment simplement corrigé les abus ou vous... Pourquoi vous touchez l'ensemble du réseau?

Mme Déry : Bien, écoutez, ça a toujours été... ça a toujours été notre intention de toucher l'ensemble du réseau. On va spécifiquement aussi s'assurer qu'il n'y ait plus d'abus, parce que, justement, en ayant un meilleur contrôle, une meilleure idée de la mobilité de la communauté étrangère ici, sur le territoire québécois, ça va nous permettre d'éliminer certains abus qu'il y a.

Mais, ceci dit, le projet de loi n° 74 a toujours eu l'intention, justement, de plafonner le nombre d'étudiants étrangers. Il y a eu une hausse substantielle. Ça a créé une pression énorme sur les services publics. Parlez-en à mes collègues en santé, en éducation. C'est factuel. Parlez-en à mes collègues à la Solidarité sociale également. Chez nous, en termes de logement, en début de mandat, on me disait : Mme Déry, il y a des enjeux avec le logement, le nombre d'étudiants étrangers crée une pression énorme sur le logement. Donc, on est venus répondre à l'enjeu de logement. On cherche à stabiliser, à trouver un équilibre.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci, Mme la ministre. Merci.

Mme Setlakwe : ...vous parlez de pression sur les services publics, sur le logement, etc. Vous devez avoir des données à l'appui, parce qu'il n'y a pas si longtemps votre plan stratégique parlait... c'est le plan stratégique de 2023‑2027 ou 2028, parlait de la nécessité de l'internationalisation de l'enseignement supérieur. Alors là, vous avez des données concrètes qui démontrent que ce sont les étudiants internationaux aussi qui ajoutent cette pression sur les services publics et le logement étudiant.

Mme Déry : ...deux questions. Il y a deux choses à votre question. Vous me dites... La pression sur les services publics, oui, il y en a une. Mes collègues ont des données. Et parlez-en à mon collègue, à l'Éducation, qui a dû créer une cinquantaine d'écoles, pas de classes, là. On parle d'écoles, une cinquantaine d'écoles qui ont été créées, qui créent une pression sur les services publics. Bien évidemment, on parle de familles de l'étranger qui arrivent ici, qui créent une pression.

Moi, dans les établissements d'enseignement supérieur en région, on a une croissance vraiment substantielle du nombre d'étudiants étrangers. On nous disait... Les recteurs nous le disaient : On a une pression assez forte. Maintenant qu'on va stabiliser le nombre d'effectifs, bien, on va être capables de loger tout le monde. Je n'ai jamais dit que la porte n'était pas ouverte aux étudiants étrangers, bien au contraire. Il y en a encore qui viennent puis qui vont continuer à venir, puis on sera toujours aussi accueillants, mais...

La Présidente (Mme Dionne) : Merci, Mme la ministre.

Mme Déry : ...à un moment donné, il faut respecter aussi la capacité d'accueil.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci. Poursuivez, Mme la députée.

Mme Setlakwe : Le recteur de l'Université Bishop's est dans l'incompréhension. Il prétend que la décision de votre gouvernement de limiter la délivrance des certificats d'acceptation empêche aussi les universités de prédire, comme on le disait, le nombre d'inscriptions. Il a dit publiquement, et je le cite : «Le gouvernement rend les conditions encore plus difficiles pour attirer le talent ici, au Québec, pour assurer notre compétitivité future. On est un peu stupéfaits, honnêtement. C'est une politique qui est extrêmement difficile à comprendre.» Puis il y en a plusieurs qui abondent dans le même sens. Vous leur répondez quoi?

Mme Déry : Je leur réponds que ça a toujours été dans l'intention du gouvernement de réduire le nombre de l'immigration temporaire. Les étudiants étrangers font partie de cette immigration temporaire. Donc, on vient stabiliser les effectifs. Il n'y a pas de réduction. On stabilise les effectifs.

Maintenant, s'il y a une baisse de demandes d'admission... Il y en a une à travers le Canada au complet, pas juste au Québec, pour plusieurs raisons, le contexte actuel, les mesures qu'on a mises de l'avant, les mesures que le fédéral a mises de l'avant.

Mais l'intention du projet de loi, c'est de dire : Il y a eu une croissance exponentielle... Oui, dans le plan stratégique... Pour revenir à votre question de tantôt, oui, dans le plan stratégique, c'était l'intention de faire du rattrapage, parce qu'il y avait plusieurs universités en région qui avaient besoin de cette main-d'oeuvre-là, qui avaient besoin de ce rattrapage, mais le rattrapage a été fait, et ça a...

La Présidente (Mme Dionne) : Merci, Mme la ministre.

Mme Déry : ...donné lieu aussi à certains...

La Présidente (Mme Dionne) : Merci. Merci. Poursuivez, Mme la députée.

• (10 h 50) •

Mme Setlakwe : Oui. Donc, pourquoi les collèges privés, qui sont pourtant au coeur des controverses, obtiennent des quotas de demandes de CAQ comparables, voire supérieurs à ceux de nos grandes universités? On peut prendre, par exemple, McGill, qui dit que... qui demande, en fait : Comment est-ce que vous justifiez qu'à la suite de l'annonce des quotas... qu'il y a... un collège privé, Collège supérieur de Montréal, tous les chiffres sont publics, ait toujours le droit d'avoir autant de CAQ, presque 9 000, alors que les universités, si on prend... Juste McGill, par exemple, en a la moitié, McGill, cette université qui fait notre fierté, qui est... elles font toute notre fierté, mais qui est renommée à l'international. Comment vous expliquez ces chiffres?

Mme Déry : Entre le privé puis nos universités?

Mme Setlakwe : ...

Mme Déry : Oui, absolument. Bien, regardez, je pense qu'on mélange des pommes et des oranges, là. On ne peut pas mélanger les collèges privés et les établissements d'enseignement supérieur parce qu'il y a... En fait, les universités, ils n'ont pas le même taux de conversion encore. McGill a le meilleur taux de conversion. Si McGill a 500 demandes d'admission, ils vont probablement en admettre, les 500. Tu sais, c'est... Ils ont des demandes d'admission qui dépassent, évidemment, le nombre de ce qu'ils peuvent accueillir. Donc, le taux de conversion, pour McGill, est excellent.

Pour les collèges privés, on se base sur une photo. Encore une fois, les collèges privés ont beaucoup plus d'A.E.C. que ce qu'il y en a ailleurs dans les établissements collégiaux. Donc, ils... On a ciblé les A.E.C. Eux vont avoir des baisses quand même assez drastiques, les collèges privés, les collèges privés non subventionnés, parce qu'ils ont beaucoup plus d'A.E.C., parce qu'ils accueillent beaucoup plus d'étudiants étrangers, justement, dans ces programmes courts là qui donnent souvent... des demandeurs d'asile, des demandes de permis rapides, des demandes de résidence permanente. C'est là-dessus qu'on agit.

Mais on ne peut pas comparer le nombre de CAQ d'un collège privé puis d'un établissement comme McGill. La comparaison ne se fait pas. Les taux de conversion ne sont pas les mêmes, encore une fois, là.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci. Mme la députée, il vous reste une minute.

Mme Setlakwe : Oui. Vous l'avez bien dit, là, qu'il ne faut pas mélanger des pommes et des oranges puis qu'il ne faut pas parler, dans la même phrase, de collèges privés, et d'institutions comme l'Université McGill, et les autres universités, mais, avec tout respect, là, permettez-moi de souligner que l'effet de vos mesures du projet de loi n° 74 et du décret fait exactement ça. On met dans le même panier les bons joueurs et les moins bons joueurs, puis, à la fin de la journée, on se pénalise tous, et c'est l'écosystème d'excellence, qui fait notre fierté, qui est brimé, qui est lésé. Puis, à la fin, c'est notre économie qui va en souffrir, la recherche et le développement puis l'innovation.

Et je trouve ça extrêmement, extrêmement déplorable de voir des recteurs d'université et des directeurs de cégep venir dire : Cessez de vous ingérer dans ce qu'on fait, on sait ce qu'on fait, on le fait bien, cessez de nous nuire.

Mme Déry : Bien, quand vous parlez de s'ingérer, ils ont un plafond de CAQ puis ils peuvent le distribuer de la manière dont ils veulent, là. Il n'a jamais été question de dire : On va vous demander tant de CAQ au premier cycle...

La Présidente (Mme Dionne) : Cinq secondes, Mme la ministre.

Mme Déry : ...puis tant de CAQ au deuxième cycle ou au troisième cycle. Je peux continuer?

La Présidente (Mme Dionne) : Désolée, c'est tout le temps qu'on a.

Mme Déry : Ah! O.K. Parfait. Désolée.

La Présidente (Mme Dionne) : Alors, merci pour ces échanges. Je cède maintenant la parole à M. le député de Richelieu. La parole est à vous.

M. Émond : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Mme la ministre, bonjour. Salutations aux collègues qui participent, Mme la ministre, comme vous et comme nous tous, avec une joie à peine dissimulée, à cette étude de crédits, une étape importante après le dépôt du budget par le ministre des Finances. Je veux également saluer les équipes qui vous accompagnent. Ils sont nombreux. Je sais combien c'est beaucoup de travail pour vos équipes, Mme la ministre, de préparation en vue de cette étape qu'est l'étude des crédits.

Je vais vouloir discuter avec vous, Mme la ministre, bien entendu, de sous, là, dans quelques instants, en vous parlant de logement étudiant, mais, tout d'abord, je pense que j'aimerais vous entendre un peu, puis la collègue de Terrebonne a brièvement abordé le sujet tantôt, concernant l'intelligence artificielle. Moi, c'est un sujet qui me fascine. On en discutait avec les collègues, pas plus tard que la semaine dernière, l'impact que la venue de l'intelligence artificielle a dans un contexte pédagogique.

Moi, je suis formé en pédagogie, de l'Université de Sherbrooke, puis j'essayais de me remettre dans le contexte d'être devant une classe ou d'avoir à évaluer un groupe d'étudiants, d'étudiantes dans le contexte actuel, avec la présence de l'intelligence artificielle. Tantôt, vous en avez... vous en avez parlé brièvement. Il y a des avantages, il y a des inconvénients. Moi, je suis de ceux qui pensent qu'on doit vivre avec l'intelligence artificielle, pas la repousser du revers de la main, là. Ça me fait penser un peu à la venue des calculatrices scientifiques à l'époque. Puis tout le monde disait : Bien, ça y est, plus personne ne va être capable de compter, les étudiants ne seront plus capables de faire des calculs simples. Alors, on a... on a... on vit maintenant avec ces outils de calcul que sont les calculatrices, là, qui sont dans nos téléphones intelligents.

Mais tout ça pour dire, là, je m'excuse d'avoir pris un long détour, Mme la ministre... pour dire que je crois que l'intelligence artificielle est dans notre quotidien, elle est là pour rester. Au niveau pédagogique, ça a un impact significatif sur les établissements que vous avez à gérer avec vos... votre ministère. Il y a des outils de détection qui existent. Je les ai testés, Mme la Présidente... Mme la Présidente, oui. Ils sont imparfaits. En en discutant avec des collègues, on faisait une analogie avec le monde olympien, hein, où il y a des tests de dépistage avec les olympiens qui tentent de tricher, puis là, bien, il y a une course à relais. Aussitôt qu'il sort un nouveau... nouveau truc de dopage, les tests sont en arrière. L'intelligence artificielle, c'est un petit peu comme ça présentement. Ce qui fait que les outils de détection existent. Ils sont imparfaits.

Il y avait quelque chose, là, en préparant mon intervention... Parce qu'il faut considérer qu'il y a des étudiants, Mme la ministre, qui ont droit à des mesures d'adaptation qui nécessitent l'utilisation d'un appareil numérique, entre autres lorsqu'ils font les tests uniformes en langue, entre autres. Donc, ces jeunes hommes, ces jeunes filles ont droit à avoir des appareils numériques. Ça fait en sorte... De quelle manière on contrôle, maintenant, l'utilisation de l'intelligence artificielle?

Bon, vous en avez parlé brièvement tantôt avec la collègue de Terrebonne. Vous avez parlé de l'Instance de concertation nationale. J'aimerais peut-être vous donner une minute ou deux, là, pour nous rappeler ce qui s'est discuté ou ce qui s'en vient concernant les recommandations de cette instance de concertation.

Mme Déry : Merci beaucoup, cher collègue. C'est vrai que l'intelligence artificielle, c'est un enjeu extrêmement important partout dans le monde, là. Je pense qu'on... J'ai même côtoyé des collègues à l'étranger qui, eux aussi, sont aux prises avec le même enjeu, parce que ça évolue à vitesse grand V, et on a tenu un sommet.

Après le sommet, on s'est concertés pour être capables de mettre sur pied, justement, cette instance de concertation, puis cette instance de concertation a fini ses travaux. On est en train de travailler, justement, actuellement, à un guide pratique, donc, à ramasser tout ce qui a été discuté, le partage de tous ces échanges-là qui ont été faits. Il y a eu... Ça a commencé en octobre 2024, et les dernières rencontres se sont terminées en mars 2025. Il y a eu, au total, six rencontres, et ce sont des rencontres qui ont porté vraiment sur des objectifs très, très précis, notamment des objectifs qu'on a... qu'on a mis, une vision plus porteuse de l'intégration de l'IA par les réseaux de l'enseignement supérieur. Il y a cinq principes directeurs aussi qui placent l'humain, l'étudiant au centre des préoccupations qui sont liées à l'IA, qui visent une utilisation éthique de l'IA, une utilisation durable, responsable, transparente.

Ça fait que c'est sûr qu'à plus long terme je pense que les pratiques pédagogiques vont changer. Et c'est là-dessus qu'on a été capables d'échanger, non seulement sur la difficulté pour les profs et les enseignants d'avoir la mainmise un peu sur tout ça, d'éviter des cas de plagiat. Il y a des professeurs qui en sont venus à la solution... qui en sont venus à la solution de faire davantage d'examens en classe avec papier et crayon, comme à l'époque, pour éviter, justement, ce genre de chose. Alors, peut-être que c'est le genre de pratique à laquelle il va falloir revenir avec le temps pour être sûrs qu'il n'y ait pas de cas de plagiat.

Ceci dit, il y a des avantages. Il y a une série d'inconvénients, vous l'avez mentionné, il y a des limites. Ce sont... Même moi, pour l'avoir essayé avec mes enfants... Il y a plein de choses dans ces logiciels. L'information est souvent erronée. C'est difficile aussi d'avoir de l'information très, très exacte, puis il faut poser plusieurs, plusieurs, plusieurs questions pour être en mesure vraiment de demander à ChatGPT de nous répondre. Donc, c'est un enjeu qui est extrêmement difficile, mais en même temps qu'on ne peut pas bannir ou interdire, comme je l'ai dit tantôt.

Donc, cette instance nous a permis d'échanger, nous a permis aussi d'avoir une délégation de Toulouse, moi, j'étais à Toulouse, une délégation où on a vraiment parlé d'intelligence artificielle. Et ces gens-là ont déployé quand même certaines pratiques qui sont... qui pourraient être très, très bonnes pour nous aussi au Québec. Et donc ils sont venus, en dernière rencontre, partager leur expertise et leurs connaissances pour que, justement, on puisse s'en inspirer.

D'ailleurs, mon collègue Mario Asselin, qui n'est pas là aujourd'hui, qui est mon adjoint gouvernemental, qui a suivi tous les... tous les travaux sur l'intelligence artificielle et qui est un expert en la matière aussi... Mario est très, très intéressé à ces enjeux-là. Et donc ça aurait été aussi bien de l'avoir aujourd'hui pour qu'il soit capable de nous expliquer vraiment les échanges qu'il y a eu.

Mais, pour moi, le but, c'est d'être capables d'avoir à l'été, avant, évidemment, la session d'automne... pour qu'on puisse avoir une espèce de guide pratique ou des lignes directrices, comme l'ont demandé tous les acteurs qui ont participé à cette commission-là, à cette entité-là de concertation. On nous a demandé de ne pas interdire, de ne pas imposer des cadres aux établissements d'enseignement supérieur, et je suis entièrement d'accord avec ça. Je pense que l'essentiel, c'est d'établir des mesures, ou un encadrement, ou un guide avec des lignes directrices, où on va pouvoir tous avoir une certaine cohérence à travers le réseau de l'enseignement supérieur, parce que, depuis deux ans, les établissements prennent des mesures dans leurs cadres... dans leurs cadres d'éthique, et tout, ils ont des mesures qu'ils ont mises sur pied pour éviter les cas de plagiat, mais je pense que ça prend une certaine cohérence et cohésion à l'intérieur des établissements d'enseignement supérieur.

Donc, on va continuer de les accompagner puis on va continuer de travailler sur les... bien, sur ce fameux plan d'action, et donc ce guide pratique qu'on va... qu'on va mettre en oeuvre au cours des prochaines semaines, des prochains mois, pour être capables de livrer tout ça à l'automne 2025. Je ne sais pas combien de temps il me reste ou je...

• (11 heures) •

La Présidente (Mme Dionne) : Vous avez un peu plus de cinq minutes. Alors...

M. Émond : C'est parfait. Je vous remercie beaucoup, Mme la ministre. Vous l'avez dit, là, je prends la place, à pied levé, du collègue de Vanier-Les Rivières ce matin sur ce sujet. Il aurait été... et il sera à l'avenir, probablement, on a... Mario aura l'occasion de revenir sur le sujet, puisque c'est un sujet qu'il maîtrise beaucoup mieux que moi, en fait, là.

Je trouve ça pertinent de vous entendre sur les différents moyens qui sont pris. J'ai été témoin, moi, dans une... Là, c'est un peu... pas inégal, mais les enseignants, au niveau universitaire, entre autres, prennent des moyens ou acceptent des moyens différents, là. Il y a certains enseignants qui disent : Bien, dans vos références bibliographiques, mettez que vous utilisez l'intelligence artificielle, gardez vos interventions, puis le... comme ça, vous ne cachez pas à l'enseignant que l'intelligence artificielle a été utilisée. Puis il y en a d'autres qui le bannissent tout simplement parce que... Je pense, donc, qu'un guide de bonnes pratiques qui va être un petit peu plus uniforme sera le bienvenu. Puis on a la chance, au Québec, d'avoir des spécialistes, des sommités mondiales en intelligence artificielle.

O.K. Je vous amène maintenant... Puis je vais le faire très rapidement parce que je vais vouloir laisser la parole à ma collègue de Marie-Victorin, qui trépigne d'impatience de s'adresser à vous. Mais, blague à part, Mme la ministre, je veux juste prendre un instant pour vous remercier puis vous féliciter, parce que tantôt, dans les échanges, je vous entendais parler de votre présence sur le terrain. Moi, j'en ai été témoin, comme l'ensemble des collègues de l'Assemblée nationale. Vous êtes venue visiter, à Sorel-Tracy, ce qu'on appelle notre grand petit cégep. Moi, je suis un député de la Montérégie, mais à l'extrémité est. Donc, on se considère comme un cégep de région, Mme la Présidente. Puis j'ai été témoin, là, de votre passage chez nous, qui a été très bien reçu, puis vous l'avez fait dans l'ensemble, je pense, des établissements collégiaux qui se situent dans des comtés gouvernementaux ou non.

Tout ça pour dire que, dans notre coin... Puis je sais que c'est une réalité, Mme la Présidente, qui est... qui se passe partout sur le territoire québécois concernant le logement étudiant, puisque, bien, on entend parler de la crise du logement. Puis, pour des cégeps en région, comme chez nous, par exemple, ça devient un moyen d'attraction supplémentaire. Donc, on sait que les établissements, entre autres collégiaux, dans les grands centres, débordent parfois. La crise du logement est un petit peu plus aiguë, même si elle l'est dans toutes les régions du Québec.

Donc, j'aimerais vous entendre. On va revenir dans les chiffres un petit peu puisqu'on est dans une étude de crédits. Puis, moi, il y a des chiffres que j'ai trouvés, en tout cas, un chiffre que... assez significatif. Depuis 2023, le gouvernement a répondu présent en ajoutant un peu plus de 260 millions de dollars en projets de résidences étudiantes au PQI. Tu sais, on a beaucoup parlé du PQI dans les dernières semaines, puis, moi, c'est un chiffre qui me réjouit, 260 millions en projets de résidences étudiantes, bien, cégeps, universités et autres, là. Puis j'aimerais peut-être vous entendre, parce qu'il y a eu des investissements assez importants dans le développement des logements étudiants. Est-ce que vous pouvez nous partager l'état d'avancement, là, si vous avez des chiffres... ou sur des projets, ce qui a été fait pour mieux répondre aux besoins des étudiants dans ce contexte-là, là?

Mme Déry : Oui. L'enjeu du logement étudiant, en début de mandat, était vraiment en haut de la pile des associations étudiantes. C'était leur priorité. On nous avait demandé d'investir de plus en plus. Puis on voyait que le logement étudiant, avec le taux d'inoccupation extrêmement important partout à travers la province, c'était vraiment un enjeu problématique.

Et donc, en général, le ministère de l'Enseignement supérieur n'a pas cette mission-là de contribuer financièrement au logement étudiant, mais on l'a fait. Et on fait beaucoup de projets nous-mêmes et, ceci dit, en collaboration aussi avec le ministère de l'Habitation. Puis ma collègue à l'Habitation, elle aussi, à travers le PHAQ puis à travers d'autres programmes, est capable aussi de répondre à ces enjeux de logement étudiant.

Donc, oui, effectivement, il y a eu, en 2023... bien, depuis 2023, en fait, il y a des sommes qui ont été allouées. Vous avez parlé de 260 millions de projets de résidences étudiantes au PQI. Ça, ça représente, aux cégeps, 170 millions, à peu près, de projets. Dans les universités, c'est autour de 83 millions. Puis, la SIRCAAQ aussi, il ne faut pas les oublier. On a des projets, justement, pour des milieux de vie autochtones qu'on a faits au cours des dernières années, puis il y en a d'autres qui vont voir le jour aussi, à la hauteur de 6,7 millions.

Je vous donne quelques exemples, rapidement, de projets qu'on a déjà livrés : le cégep de l'Abitibi-Témiscamingue, acquisition de 60 lits, c'est un projet de 4 millions de dollars qui provient du MES; le cégep de Valleyfield, aussi, c'est une autre résidence étudiante de 79 lits, 3,1 millions de la part du MES dans ce cas-ci; Gaspésie—Les Îles, résidence de Carleton-sur-Mer, ce sera complété en 2025, on parle de 24 lits supplémentaires ici; Jonquière aussi, acquisition d'une résidence du côté de Jonquière, plus d'une douzaine de lits, ce sera complété en 2025.

Et ça, c'est des projets qui sont... qui ont déjà cours, mais ça ne s'arrête pas là. On a d'autres projets. Cette année, il y a une dizaine de projets qui vont démarrer sous peu, là. Donc, on va faire des annonces au fur et à mesure un peu partout sur le territoire québécois tant au niveau universitaire... Puis il y a déjà eu une annonce au niveau universitaire avec l'UQO il n'y a pas longtemps, l'UQO et le cégep aussi, le...

Donc, tant au niveau universitaire qu'au niveau collégial, puisque le collégial aussi, il a des besoins, on ajoute, Mme la Présidente, à terme, là, à peu près, je vous dirais, 670 lits d'ici 2027‑2028. Donc, c'est beaucoup d'argent qu'on a mis. Puis, encore une fois, je ne veux pas que ce soit un frein à l'accessibilité en enseignement supérieur.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci beaucoup, Mme la ministre.

Mme Déry : Je pense que c'est important de s'y attarder, puis je l'ai fait en collaboration avec la ministre de l'Habitation. Merci.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci infiniment. Je laisse maintenant la parole à Mme la députée de Mont-Royal—Outremont pour 13 minutes.

Mme Setlakwe : Revenons sur les étudiants internationaux. C'est vraiment important. C'est important aussi pour nos établissements en région. La Fédération des cégeps craint des répercussions sur la formation et le développement de toutes les régions. Marie Montpetit a dit qu'«en restreignant l'accès des étudiants internationaux aux cégeps on touche un réseau qui contribue de façon essentielle à la vitalité éducative et économique du Québec. Pour plusieurs établissements, la présence de cette population étudiante est indispensable au maintien de programmes d'études névralgiques.»

Qu'est-ce que vous avez comme mesures spécifiques à proposer pour s'assurer que les universités et cégeps situés en dehors des grands centres soient protégés puis qu'on n'en arrive pas à devoir affecter l'offre de programmes, étant donné les quotas au niveau des étudiants internationaux?

Mme Déry : Bien, comme je l'ai toujours dit, puis même comme M. le premier ministre l'a dit, il n'y a pas un programme en région qui va fermer. Il n'y a pas un programme qui ne sera pas déployé en région, parce qu'on les protège, ces programmes-là. Dans les quotas qu'on a attribués, on protège ces programmes-là qui sont non seulement des programmes en pénurie de main-d'oeuvre, donc, stratégiques pour le Québec, mais aussi d'autres programmes clés qui sont très spécifiques à certaines régions. Il y a certaines régions qui ont des programmes en forêt. Il y a certaines régions qui ont des programmes dans ce qui est minier et dans ce qui est aéronautique. En tout cas, il y a des programmes très, très spécifiques à l'éolien aussi. Ces programmes-là sont protégés partout en région. Donc, il n'est pas question, en région, de fermer de programmes ou de ne pas leur attribuer le nombre de CAQ dont on a besoin pour faire vivre ces programmes-là.

La Présidente (Mme Dionne) : Poursuivez, Mme la députée.

Mme Setlakwe : Bien là, vous énoncez votre intention et vous dites qu'il n'y en aura pas, de programme de fermé, sauf que, sur le terrain, on a entendu des directeurs de cégep en région, notamment le cégep de Baie-Comeau, qui est vraiment inquiet et préoccupé par l'imposition de ces quotas. D'ailleurs, il se compare à des centres privés, Ellis, LaSalle, Universel, qui cumulent à eux seuls un quota total supérieur à celui octroyé aux 48 cégeps publics. Eux, dans ce système-à, ils sont très inquiets de leur attractivité.

Et, pour revenir spécifiquement à la question des programmes, donc, Mme Couturier, à Baie-Comeau, déplore que l'imposition d'un quota vienne aussi compromettre sa capacité à jouer pleinement son rôle dans la communauté en répondant aux besoins de main-d'oeuvre, en assurant la vitalité et la pérennité de leur offre de programmes pour les jeunes de la région de la Côte-Nord. Et, à titre d'exemple, elle dit : «Les 10 étudiants français qui souhaitent intégrer le cégep dès l'automne 2025 en technologie forestière, sans qui il leur serait très difficile de démarrer le programme avec les quatre demandes d'admission en provenance du Québec...»

Donc, comment vous allez sauver ce programme-là? Même chose en soins préhospitaliers d'urgence, il y a six étudiants français qui désirent intégrer le programme. C'est un secteur d'emploi où les besoins de main-d'oeuvre sont extrêmement importants sur l'ensemble de la Côte-Nord. Alors, qu'est-ce que vous allez faire, Mme la ministre, pour vous assurer que ces programmes essentiels là ne soient pas mis en péril?

• (11 h 10) •

Mme Déry : Alors, je peux vous garantir que ces programmes-là ne sont pas mis en péril et ne le seront pas du tout non plus. On travaille très fort avec le cégep de Baie-Comeau. Puis Mme Couture, je l'ai rencontrée à plusieurs reprises. Ils avaient une demande... Ils avaient 100 demandes de CAQ, puis on n'est pas capables d'arriver à atteindre ces demandes-là à Baie-Comeau. Ça fait que, déjà, on a plus de CAQ qu'on leur alloue que le nombre de demandes et d'étudiants qu'ils sont capables d'aller chercher. Donc, je suis très confiante qu'il n'y en aura pas, de problème.

Puis on travaille aussi sur le nombre de CAQ. Si ça leur en prend davantage... Parce qu'ils ont un enjeu particulier à Baie-Comeau. Les étudiants étrangers, à Baie-Comeau, puis on me l'a appris, je ne le savais pas, les étudiants étrangers prennent plus de temps pour finir leurs parcours académiques. Ça fait qu'au lieu de le finir en, je ne le sais pas, moi, trois ans, ou il y a, des fois, des A.E.C. où ça finit en un an, ils finissent en deux ou en trois. Et donc ça prend une continuité. Je suis obligée de m'assurer que le CAQ soit renouvelé.

Donc, c'est ce genre d'enjeu, actuellement, qu'on connaît... ou, enfin, de préoccupation. Ce n'est pas tant qu'il y a un enjeu. On va finir par le régler. Mais il y a des étudiants étrangers qui prennent plus de temps à finir puis il y a d'autres étudiants étrangers qui ont besoin, justement, d'avoir un renouvellement de CAQ. Donc, là-dessus, j'ai été claire avec Mme Couture, la D.G. du cégep de Baie-Comeau, qu'on pourrait, justement, régler tout ça.

La Présidente (Mme Dionne) : ...Mme la ministre.

Mme Setlakwe : Bon, alors, Mme Couturier va être très rassurée de vous entendre ce matin, parce qu'elle a des demandes spécifiques. Elle est très inquiète qu'avec ses 100 CAQ elle ne puisse pas rencontrer ses objectifs puis elle demande de retirer les demandes de renouvellement de CAQ du plafond, d'adapter les dates de mise en vigueur du décret afin de couvrir une seule année scolaire à la fois. Elle demande d'augmenter le nombre de CAQ pour leur permettre de poursuivre leurs actions de recrutement, leur permettant de répondre aux besoins de main-d'oeuvre de leur région, aux prises avec un important problème de dévitalisation.

Donc, tout ça pour dire que c'est une réaction après l'adoption du décret. On est venus... Vous êtes venue déstabiliser le milieu, Mme la ministre. Alors, c'est très important de les accompagner puis de s'assurer que ces programmes-là ne soient pas mis en péril.

Le cégep de Rimouski avait aussi de vives inquiétudes. Son directeur avait anticipé l'imposition de quotas. Donc, il est allé recruter ou concentrer ses efforts à l'étranger pour les programmes qui éprouvent des difficultés de recrutement. L'imposition de quotas pour l'établissement collégial, qui dénombre, avec l'Institut maritime du Québec et le centre matapédien d'études collégiales d'Amqui, environ 160 étudiants étrangers, suscite de l'incertitude. Pour la prochaine année scolaire, le cégep de Rimouski ne pourra accueillir que 67 étudiants étrangers. Jusqu'à maintenant, l'établissement a reçu 105 demandes. Je le cite, là : «Ça vient ramener de la complexité et de l'incertitude dans ce qu'on va faire.» C'est M. Kurt Vignola. Vous lui répondez quoi, à M. Vignola, au cégep de Rimouski?

Mme Déry : Bien, d'abord, répondre au cégep de Baie-Comeau, Mme Couturier, pour le... Il n'y a aucun enjeu pour 2025, là. On a le nombre de CAQ qu'il faut, pour Baie-Comeau, pour déployer tous les programmes, aucun enjeu. Elle l'a même reconnu. Elle nous l'a dit, qu'il n'y avait pas d'enjeu pour 2025. Donc, si jamais il devait y avoir un enjeu de CAQ pour de la continuité ou de renouvellement de CAQ, ils vont les avoir, leur nombre de CAQ, là, tu sais. On n'est pas... Je n'irai pas compter trois CAQ ici puis quatre CAQ à droite et à gauche, là. On est en train de collaborer avec tout le monde.

C'est la première fois qu'on a un plan, en fait, un projet de loi qui nous permet de mieux évaluer la mobilité sur le territoire québécois, puis c'est la première fois qu'on le fait. Donc, il y a des ajustements qu'il va falloir faire, et, ces ajustements, on les fera, que ce soit pour Baie-Comeau, que ce soit pour Rimouski. Rimouski aussi, on est en étroite collaboration avec eux. Il n'y a pas d'enjeu actuellement à Rimouski. On va être capables de déployer, puis ils vont être capables d'avoir le nombre de CAQ qu'ils vont devoir avoir. S'il y a des enjeux d'ajustement ou de renouvellement d'étudiants étrangers, on va les... on va régler ces enjeux-là, là.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci, Mme la ministre. Merci. Poursuivez, Mme la députée.

Mme Setlakwe : Donc, le décret est bon pour un an. Vous allez... On y reviendra, sur vos intentions futures, mais, pour l'instant, j'aimerais vous ramener sur l'impact financier de tout ça. Comptez-vous compenser financièrement les pertes anticipées par les établissements en raison de cette décision de réduire le nombre d'étudiants internationaux au Québec?

Mme Déry : Bien, écoutez, d'abord, la politique de financement permet de pallier, justement, à une volatilité un petit peu... à une volatilité du nombre d'étudiants étrangers. Ça veut dire que, dans la politique de financement, on a alloué des sommes, justement, pour pallier à des variations de clientèle. Donc, déjà là, il y avait une diminution d'étudiants étrangers en raison des quotas aussi imposés par Ottawa et par le fédéral en ce sens-là. Mais il y a déjà des sommes qui sont là pour pallier à ce manque à gagner, puis évidemment on est encore en croissance, là. Moi, je suis encore dans des budgets où on est en croissance. On n'est pas dans des croissances de 6 % et 7 % comme on l'a été au cours des dernières années, mais on est quand même en croissance dans nos budgets de fonctionnement.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci. Poursuivez, Mme la députée.

Mme Setlakwe : Donc, vous vous rabattez sur la politique de financement, mais il me semble que, la politique de financement, une des variables compte sur les étudiants internationaux, justement, compte sur les revenus des étudiants internationaux pour faire une meilleure distribution, selon les souhaits de votre gouvernement, à l'ensemble du réseau. Mais là, si votre intention maintenant, suite à l'adoption — ça ne fait pas longtemps, là, ça ne fait même pas un an — de la politique... Puis, après l'adoption de la politique, il y a le projet de loi n° 74 puis le décret qui veut mieux encadrer... Vous n'êtes pas inquiète de l'impact... pas inquiète de l'impact financier. Vous dites que vous allez pouvoir pallier à la volatilité, mais quand puis selon quels critères?

Mme Déry : La politique de financement, je le répète, est là pour ça. On a, justement, mis en place des enveloppes pour qu'on puisse pallier à cette flexibilité et au nombre d'effectifs qui vont varier au cours des prochaines années.

Ceci dit, partout à travers le pays, il y a des demandes d'admission qui sont en baisse, et, partout à travers le pays, des demandes d'admission sont beaucoup plus drastiques... la diminution est beaucoup plus drastique que chez nous. On est capables encore d'aller chercher des étudiants internationaux puis on a une enveloppe à cet effet-là pour justement qu'on soit capables. Puis les budgets, là, de fonctionnement des dernières années ont tellement été importants qu'ils ont la marge de manoeuvre d'absorber ça.

On est en stabilisation des effectifs. Puis, je le répète, on a eu pendant des années des croissances de 6 % et 7 %, si ce n'est pas plus à certaines années. Les budgets en fonctionnement ont été extrêmement importants. Puis notre politique de financement, à l'heure actuelle, peut pallier à cette fluctuation d'effectifs de clientèle.

Mme Setlakwe : Bien, ça va rassurer le milieu, j'imagine, parce que... J'aimerais citer, entre autres... Là, il y en a plusieurs qui se sont exprimés dans l'espace public. Le recteur de l'Université du Québec à Rimouski, François Deschênes, avait exprimé publiquement cette inquiétude, puisque la formule de financement des universités inclut des variables qui tiennent compte du nombre d'étudiants internationaux. Je le cite : «Il y a donc du financement lié à leur présence. S'il y en a moins, on aura moins de financement.» Donc, vous répondez à M. Deschênes et aux autres recteurs qu'ils n'ont pas à s'inquiéter.

Mme Déry : Je réponds à M. Deschênes... Je lui ai parlé il y a quelques jours à peine, là, la semaine dernière. Je lui ai parlé, à M. Deschênes. Puis on est en collaboration avec notre sous-ministre aux Finances ici, étroite collaboration, pour accompagner tout le monde. Les établissements d'enseignement supérieur doivent aussi faire un effort, là, un effort budgétaire également de leur côté. Alors, ils en sont très conscients. Puis, je le dis en toute transparence aujourd'hui, il y a un effort également qu'ils doivent faire au cours des prochains mois et des prochaines années, puis on les accompagne en ce sens-là.

Encore une fois, il y a non seulement la politique de financement qui vient pallier à cette diminution d'effectifs, on parle d'une enveloppe, dans la politique de financement du... L'enveloppe fixe, là, elle est passée de 6 % à 30 % dans la politique de financement, ce qui leur permet cette marge de manoeuvre là.

Maintenant, je sais que ce n'est pas une situation facile. Ce n'est pas une situation qui est facile pour nos établissements, parce qu'ils ont été habitués aussi à des taux de croissance très, très élevés. Encore une fois, on est en croissance dans le réseau collégial et dans le réseau universitaire, puis on les accompagne en ce sens-là, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci, Mme la ministre. Merci. Poursuivez, Mme la députée.

Mme Setlakwe : Merci. C'est intéressant. Vous dites qu'effectivement... selon vous, là, que les établissements doivent faire des efforts aussi de leur côté. Vous leur demandez quoi exactement? Qu'est-ce que vous leur demandez comme compressions, comme coupures? Déjà, on voit des chiffres sortir, des coupures de poste, des compressions budgétaires, parce que, là, ils n'ont pas reçu une augmentation qui leur permet de couvrir les augmentations salariales, répondre à l'inflation, et tout. Donc, qu'est-ce que vous leur demandez exactement comme effort?

Mme Déry : On est en train de les accompagner. Puis les règles budgétaires sont en préparation puis sont en cours d'approbation. Donc, je ne peux pas m'avancer sur un chiffre, on va le connaître sous peu, mais les établissements d'enseignement supérieur travaillent avec nous étroitement, là. C'est avec eux qu'on va savoir comment les accompagner puis comment eux aussi peuvent nous aider dans ce contexte-là.

Mais, encore une fois, il y a eu des investissements substantiels au cours des dernières années. Eux aussi, maintenant, ont un effort à faire, puis je ne veux pas leur imposer d'effort, eux vont avoir un effort à faire, puis on va travailler ensemble pour être capables, justement, de faire ces efforts-là...

La Présidente (Mme Dionne) : Merci, Mme la ministre. Il vous reste une minute.

Mme Setlakwe : Je pense que l'effort collectif va être assez important. Vous parlez d'un travail qui va devoir se faire en collaboration, mais je vais vous ramener des chiffres qui viennent du milieu, qui représentent un manque à gagner. Les estimations de Christian Blanchette, président du BCI, qu'il a exprimées publiquement à l'automne dernier, semblent toujours tenir. On parle de 100 à... 100 millions de manque à gagner s'il y a une baisse de 30 % des étudiants internationaux, et cette perte, c'est pour une seule année. C'est une perte qui va se perpétuer les années suivantes. Vous en pensez quoi? Ça doit vous préoccuper, là. C'est quand même un impact majeur puis ça va peut-être se répercuter sur la population étudiante.

L'Université Bishop's aussi en a parlé, de ce que ça pouvait entraîner pour eux, une baisse des inscriptions. Ça crée beaucoup d'instabilité pour eux et ça crée une instabilité aussi au niveau des programmes, non seulement la perte de revenus, mais une conséquence qui pourrait mettre en péril des programmes. Donc, vous voyez ça comment, là, ce manque à gagner à combler?

• (11 h 20) •

La Présidente (Mme Dionne) : Malheureusement, c'est tout le temps qu'on a pour ces discussions. On reprendra tout à l'heure. Alors, monsieur... Je cède maintenant la parole à M. le député de Jean-Lesage pour une période de 13 minutes.

M. Zanetti : Merci, Mme la Présidente. Avant d'aborder un autre sujet, je veux revenir au sujet dont je vous ai parlé tout à l'heure, il y a une quarantaine de minutes. Alors, je vous ai demandé combien d'argent de l'AFE n'est pas utilisé et est retourné au fonds consolidé. Vous m'avez dit : Ah oui! on va trouver le chiffre. Je voulais voir si vous l'aviez. Sinon, je vais passer à un autre sujet, mais...

Mme Déry : Est-ce que vous me permettez une explication, justement, sur ces transferts-là par la sous-ministre à l'Enseignement supérieur?

La Présidente (Mme Dionne) : Consentement pour donner la parole à Mme la sous-ministre?

Des voix : Consentement.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci. Veuillez vous nommer juste avant votre intervention. Merci.

Mme De Blois (Paule) : Oui. Bonjour. Paule De Blois, sous-ministre à l'Enseignement supérieur.

Alors, à la question, à savoir quels ont été les transferts fédéraux pour l'aide financière aux études, le dernier chiffre que nous avons est en date de l'hiver 2025, pour couvrir l'année scolaire 2023‑2024, et le transfert fédéral était de 926,8 millions. Le coût pour cette année-là était de 716,6 millions. Donc, il y avait un 210,2 millions qui a servi à l'ensemble des dépenses des autres programmes, là, du gouvernement pour l'enseignement supérieur. Je dois... Par contre, je vous dirais que le total du budget pour le programme 3, qui est le programme qui constitue l'aide financière aux études, les bourses et les prêts, pour l'année 2025‑2026, sera de 1,16 milliard de dollars.

M. Zanetti : Merci. Ça répond à ma question. Je vais passer à un autre sujet. Je veux vous parler de la question de la liberté académique, parce que, bon, il y a des choses qui se passent à l'extérieur du Québec, et évidemment ça crée beaucoup d'inquiétude partout dans le monde. Et je veux entendre la ministre sur ce sujet-là parce que je pense qu'on a besoin d'être rassurés à bien des égards.

Ce qu'on voit de l'administration Trump aux États-Unis, c'est des coupes budgétaires massives et politiquement intentionnées, des pressions idéologiques sur des chercheurs, des professeurs qui s'intéressent à la crise climatique, aux droits des femmes, aux inégalités. On leur demande de bannir des mots. On gèle des subventions. On congédie des profs et des chercheurs. On fouille les téléphones et les ordis à la frontière. Il y a des mises sous tutelle de départements, des censures, des annulations de conférences, des restrictions de visas pour étudiants étrangers et chercheurs étrangers. Le président Trump a même démantelé le département national de l'éducation. C'est quand même... C'est énorme, ce qui se passe. Beaucoup d'observateurs, observatrices internationaux disent : Ce sont là des politiques d'un gouvernement fasciste. Est-ce que la ministre est d'accord avec cette analyse? Est-ce que, selon la ministre, elle dit : Oui, effectivement, ça, ce qu'on voit, c'est le début du fascisme ou de quelque chose comme ça?

Mme Déry : Écoutez, ce que je peux vous dire en ce qui concerne la situation aux États-Unis, dans les universités américaines, je l'ai dit, je le répète, c'est une ingérence politique décomplexée. C'est très, très, très préoccupant, très troublant, ce qui se passe dans les universités américaines.

Puis, on a vu, là, au cours des dernières semaines, il y a des gens de chez nous, des chercheurs de chez nous qui ont l'habitude de faire des échanges, de participer à des panels, des conférences, nos propres chercheurs qui ont des partenariats avec des universités américaines, qui ne vont plus... c'est-à-dire, on les met en garde. On a même annulé certaines conférences, de Mme Liu, entre autres, en tout cas, des choses qui se passent, actuellement, de l'autre côté de la frontière, qui sont très, très, très troublantes et préoccupantes.

Je pense qu'ici on est les seuls, au Québec, et on en est très fiers, d'ailleurs, à défendre la Loi sur la liberté académique. C'est nous qui l'avons mise sur pied, la Loi sur la liberté académique. Je pense que ça sert de rempart, de garde-fou. Puis je sais que les établissements d'enseignement supérieur ici, à travers les lettres ouvertes qui ont été publiées au cours des dernières semaines, que ce soit au niveau de l'UQ, que ce soit au niveau de l'Université de Montréal... Il y a beaucoup de gens qui se préoccupent un peu de ce qui se passe de l'autre côté de la frontière, et avec raison, mais je pense qu'on a ce garde-fou-là sur la Loi sur la liberté académique ici, chez nous.

M. Zanetti : Est-ce que la ministre irait jusqu'à dire que ce sont des politiques fascistes?

Mme Déry : Ce que je suis en train de vous dire... Je ne vais pas m'immiscer dans la politique américaine. Ce que je vous dis, c'est que c'est extrêmement préoccupant, c'est extrêmement troublant, ce qui se passe, puis il n'en est pas question, chez nous, de faire ce genre de pratiques là, de définancer... de définancer des chaires d'études. Ça a un impact sur nous, là, en ce moment. Ça a un impact sur nos chercheurs. On a plusieurs chaires de recherche, au Québec, qui travaillent en partenariat avec des groupes de recherche américains. Donc, il y aura un impact non seulement financier, mais aussi sur des chercheurs, qui ne pourront plus vraiment faire d'allers-retours sur certains sujets parce qu'il y a certains sujets qui sont comme un peu bannis du côté des États-Unis à l'heure actuelle.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci, Mme la ministre. Poursuivez, M. le député.

M. Zanetti : Merci, Mme la Présidente. Dernièrement, bon, j'avais déposé une motion que le gouvernement, finalement, a décidé de battre, là, et je nous rappelle le texte de la motion... Puis on vous avait... On n'a pas eu l'occasion de vous entendre là-dessus. Alors, je vais vous demander si vous pouviez commenter, nous expliquer pourquoi votre gouvernement a battu cette motion. Alors, elle se lisait comme suit :

«Que l'Assemblée nationale dénonce les attaques idéologiques contre la liberté académique en recherche universitaire, qui visent notamment les mesures de diversité, d'équité et d'inclusion ainsi que la recherche sur le climat et la justice environnementale, tant aux États-Unis sous l'administration Trump qu'au Canada, où le chef conservateur Pierre Poilievre souhaite revoir les critères d'attribution des fonds fédéraux pour la recherche universitaire;

«Qu'elle affirme que la liberté académique en recherche doit être protégée et défendue contre toute tentative d'ingérence politique.»

Qu'est-ce qui avait motivé votre gouvernement à battre cette motion?

Mme Déry : On avait proposé des modifications à cette motion-là, particulièrement, plus précisément, sur les critères EDI. On l'a dit depuis le tout début, je n'ai jamais vraiment... on ne s'est jamais vraiment cachés... Puis, en toute transparence, les critères EDI, je l'ai toujours dit, à force de vouloir ne pas discriminer, on finit par discriminer, en quelque sorte. Donc, pour moi, l'unique critère sur lequel on doit se baser, que ce soit pour embaucher des chercheurs ou pour travailler dans des chaires de recherche, l'unique critère qui doit primer, quant à moi, c'est la compétence. On avait, justement, proposé des modifications à cette motion-là quand vous l'avez déposée, M. le député.

M. Zanetti : Et, pour ce qui est... Parce qu'on sait que les politiques EDI, c'est toujours des politiques d'embauche qui sont à compétences égales. Donc, il n'y a aucun sacrifice sur la compétence qui est fait lorsqu'il y a des mesures EDI dans le cas d'un... dans un emploi quelconque. Est-ce que... Comment est-ce que la ministre explique, au fond, la sous-représentation de certaines personnes, certaines personnes racisées, par exemple, de femmes, des fois, dans certains milieux? Comment est-ce qu'elle explique ces phénomènes-là si, dans le fond, elle ne voit pas la pertinence des mesures d'EDI?

Mme Déry : Alors, comme je l'ai dit, encore une fois, les universités, au Québec, c'est vraiment le symbole de l'excellence, là. C'est l'excellence, la compétence, l'expertise, peu importe la représentation de quiconque. Pour moi, c'est le seul critère qui doit primer, l'excellence, l'expertise, la compétence. C'est là-dessus qu'on doit se baser. Et, quand on parle de critères EDI, on a vu qu'à force de vouloir ne pas discriminer... Ça part de bonnes intentions initialement, mais ça ne finit pas toujours avec le meilleur résultat non plus. Donc, je pense que, si on se fie à l'excellence, à la compétence et à l'expertise, on ne se trompe pas dans les embauches qu'on fait puis dans les chaires de recherche... bien, dans les embauches qu'on fait, là.

M. Zanetti : Ce que sous-entend l'affirmation de la ministre, là, c'est que, si, par exemple, il y a une sous-représentation des femmes ou de certaines personnes racisées, par exemple, dans certaines chaires de recherche ou dans certains départements, c'est parce qu'elles sont moins excellentes, si je comprends bien le raisonnement de la ministre. Est-ce qu'elle assume cette affirmation?

Mme Déry : Écoutez, je pense qu'il n'y a pas un gouvernement... Puis, je pense, ça fait consensus ici, là, l'égalité hommes-femmes, là. Pour nous, c'est extrêmement important puis c'est une valeur fondamentale. On ne reviendra jamais là-dessus. Mais, encore une fois, concernant les critères EDI, spécifiquement sur la motion que vous avez déposée il y a quelques jours, c'est, encore une fois, un critère, pour nous, qui est... Le seul critère qui doit primer, c'est l'excellence, l'expertise, la compétence. Ça ne vient pas jouer sur l'égalité hommes-femmes. C'est une valeur fondamentale que tout le monde ici, autour de la table, défend, là.

M. Zanetti : Donc, je vois la ministre éviter la question, mais je vais passer à une autre question. Il y a eu une lettre, au Québec, de 40 professeurs juifs qui ont écrit en disant, essentiellement, que la ministre avait utilisé l'antisémitisme afin de justifier une ingérence politique dans les contenus de cours de littérature palestinienne dans au moins deux cégeps. Je vais citer un extrait de la lettre puis je vais demander à la ministre de dire un peu qu'est-ce qu'elle en pense, de s'exprimer là-dessus, parce qu'on n'a pas vraiment eu l'occasion de le faire.

Alors, l'extrait de la lettre se lit comme suit : «Soutenir les droits de la personne des Palestiniens ne peut et ne doit pas être considéré comme un acte antisémite, et nous sommes plus qu'inquiets de voir le concept d'antisémitisme déformé dans le but d'attaquer la liberté d'enseignement et de décourager les protestations politiques. Nous considérons que ces mesures représentent une menace pour la lutte contre un antisémitisme avéré dans la province. Les actions de la ministre Déry démontrent qu'elle n'est pas apte à occuper le poste de ministre de l'Enseignement supérieur. Par conséquent, nous demandons sa démission immédiate. De plus, nous demandons au gouvernement du Québec de mettre fin immédiatement aux enquêtes diligentées aux cégeps Vanier et Dawson.»

Qu'est-ce que... Comment est-ce que la ministre réagit à ça? Qu'est-ce que ça lui fait, ce témoignage-là? Est-ce qu'elle est d'accord?

• (11 h 30) •

Mme Déry : Écoutez, moi, je travaille pour tous les étudiants, là, peu importe la confession. Dans ces enjeux-là, il n'y a pas de confession. On ne parle pas d'antisémitisme. On ne parle pas d'islamophobie. On ne parle pas de tout ça. L'important, c'est de gérer un climat, sur certains campus, qui est problématique, voire même toxique. C'est la raison pour laquelle on a déclenché cette enquête-là. Et j'ai mis du temps avant de déclencher cette enquête-là. C'est une enquête où on a reçu plusieurs plaintes. Aujourd'hui, vous me posez des questions comme élu à l'Assemblée nationale. Comme ministre de l'Enseignement supérieur, mon devoir aussi, c'est de poser des questions, comme vous me les posez aujourd'hui. Moi, j'en pose tout le temps, à tous les D.G. puis à tous les recteurs. Il y a des cégeps et des universités qui, en ce moment, sont aux prises avec des enjeux problématiques sur certains campus, puis c'est la raison pour laquelle on a déclenché cette enquête-là.

Donc, comme je vous le dis, là, on mélange des pommes et des oranges. Il n'y a rien à voir avec l'antisémitisme ou la confession. On n'est pas là du tout. Moi, je représente tous les étudiants, et, en ce moment, sur certains campus, il y a des enjeux, et je le répète. Puis je vais limiter mes commentaires à ça parce qu'on attend les résultats de l'enquête. Alors, on va laisser les enquêteurs faire leur travail. Ils ont, encore une fois, 150 jours pour nous remettre un rapport. Alors, j'attends le rapport qui sera remis par les enquêteurs concernant les deux établissements en question.

M. Zanetti : Merci. Je vais vous demander de commenter quelque chose d'autre, parce que, bon, ça fait partie de la discussion publique, là, au Québec, sur la question de la liberté universitaire. Le chef du troisième groupe d'opposition avait... a affirmé, dans un balado, qu'au Québec il y a beaucoup de, entre guillemets, profs militants dans les cégeps et les universités, et qu'il faudrait que les politiciens étudient en commission parlementaire le contenu... les contenus en éducation. Qu'est-ce que vous pensez de cette proposition-là? Est-ce que la ministre a l'intention d'aller dans cette direction-là ou est-ce qu'elle se méfie de cette direction-là?

Mme Déry : ...que je vous réponds, c'est que mon rôle et ma responsabilité, là, c'est de m'assurer que, dans tous les campus, dans tous les milieux d'enseignement supérieur, que ce soit dans les collèges privés, dans les établissements d'enseignement supérieur universitaires, collégiaux... Mon rôle, c'est de m'assurer que ces campus-là soient sains et sécuritaires, que tous les étudiants puissent évoluer sans avoir à se heurter à du harcèlement, de l'intimidation, de l'incitation à la haine. C'est ce qu'on voit actuellement sur certains campus. Il n'y a personne ici qui peut nier ce qu'on voit autour de certains établissements depuis la dernière année et demie, là. Donc, mon rôle, c'est de m'assurer que, justement, on puisse avoir un climat sain et sécuritaire. Donc, pour moi, c'est une question de sécurité.

L'enquête que nous avons déclenchée, c'est parce qu'il y a des enjeux de sécurité. Rappelez-vous, là, on a fermé un établissement. On a fermé le collège Dawson parce qu'on n'était pas capables d'assurer la sécurité des étudiants. Les étudiants ont un droit aussi, le droit d'aller étudier, d'aller sur les bancs d'école. Puis je pense qu'aujourd'hui on est rendus là. On va laisser les enquêteurs faire leur travail, mais, pour moi, la question de l'enquête, c'est une question de sécurité, puis je veux m'assurer que je joue mon rôle de manière responsable.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci beaucoup. C'est malheureusement tout le temps qu'on a pour cet échange. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Mont-Royal—Outremont pour 13 minutes.

Mme Setlakwe : Merci. L'impact, encore une fois, là, des quotas sur les étudiants internationaux est tellement grand que j'ai encore quelques questions. Il y a un impact sur l'image du réseau québécois à l'international. Ce n'est pas juste moi qui le dis, là. Les chefs d'établissement des huit universités à charte du Québec ont cosigné une lettre intitulée Universités : le gouvernement crée la tempête parfaite. Ils écrivent : «Les décisions récentes du gouvernement du Québec risquent de porter un préjudice à la réputation du Québec tant sur la scène académique internationale que sur sa participation à l'économie mondiale. Elles nous obligent à prendre la parole publiquement pour les dénoncer, avec l'espoir de corriger le tir. Nous demandons au premier ministre et à son gouvernement — votre gouvernement — de construire des ponts avec le réseau universitaire, de nous appuyer afin que nous puissions mieux répondre aux défis sans précédent auxquels notre société est confrontée.»

Mme la ministre, c'est assez percutant comme chute. N'est-ce pas là votre rôle de construire des ponts avec le réseau? Ce manque de dialogue, là, il est franchement déplorable.

Mme Déry : Absolument, c'est un réseau avec lequel on a besoin d'un dialogue. Puis je suis une personne qui dialogue avec le réseau tout le temps, là, comme je vous l'ai dit, puis vous le savez très bien. D'ailleurs, je vous ai invitée à quelques reprises, faire le tour avec moi de certains cégeps dans le cadre de l'interpellation de la dernière fois. Je n'ai jamais eu de vos nouvelles à cet égard-là. Je relance l'invitation, si vous voulez bien venir avec moi.

Mais je trouve que la réputation de nos établissements, Mme la députée, la réputation de nos établissements est très enviable. C'est la raison pour laquelle on est capables d'accueillir tous ces étudiants étrangers. Il y en a beaucoup, beaucoup, beaucoup qui viennent chez nous. Il y en a beaucoup qui finissent aussi par être bien intégrés, qui restent au Québec, qu'on est capables de garder, qu'on est capables de franciser. Je trouve ça même déplorable et même désolant de voir ma collègue dire que, justement, la... de dire que nos institutions n'ont pas la bonne réputation. Je pense qu'elles ont une excellente réputation. On a des universités prestigieuses partout à travers le Québec.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci, Mme la ministre. Merci. Poursuivez, Mme la députée.

Mme Setlakwe : Je n'ai absolument pas dit que nos établissements, nos institutions n'avaient pas une bonne réputation. Je porte la voix de ce qui est dit publiquement, de ce que j'entends, de ce que vous entendez aussi, que les mesures, que le projet de loi, que le décret, que tout ça mis ensemble affecte l'attractivité, affecte notre compétitivité, affecte notre réputation enviable, effectivement, et que ça, c'est déplorable. Et là ma question est, donc : Qu'est-ce que vous allez faire pour redresser la situation, sans revenir sur les décisions qui l'ont fragilisée?

Mme Déry : Bien, écoutez, comme je l'ai dit... D'abord, il y a plusieurs mesures. Vous parlez de la mesure du gouvernement provincial, puis je l'assume, là. Le gouvernement du Québec, on va de l'avant avec le projet de loi n° 74 puis on va stabiliser les chiffres, parce qu'il y a eu une croissance qui a été exponentielle, qui a donné lieu, vraiment, à des enjeux problématiques.

Ceci dit, il y a le Canada aussi. Vos collègues libéraux, de l'autre côté, à Ottawa, ont aussi émis des plafonds, émis des quotas, et, justement, ça aussi, ça joue sur les établissements partout au pays. On demeure, justement, au Québec, celui qui a un taux d'admission... enfin, une diminution du nombre d'effectifs d'étudiants internationaux qui n'est pas comparable à ce qu'on connaît ailleurs au pays.

Ceci dit, j'en suis très consciente. On va accompagner nos établissements, mais il fallait stabiliser. Encore une fois, je pense que c'est important de dire qu'on stabilise les effectifs. À un moment donné, là, j'ai comme l'impression que ma collègue, avec tous les enjeux problématiques qu'on connaît... J'ai comme l'impression que ma collègue est d'accord avec le fait qu'on a des étudiants étrangers qui arrivent, qui sont en défaut de paiement. On a des étudiants étrangers qui arrivent, qui ne répondent pas aux critères et au seuil financier qu'on leur demande d'avoir, qui arrivent ici, qui ont besoin d'accompagnement, d'aide. On est capables d'accueillir ces étudiants étrangers, mais il y a une capacité, aussi, d'accueil puis il y a une capacité de payer des Québécois pour les étudiants étrangers qu'on reçoit.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci, Mme la ministre.

Mme Déry : Nous, quand on se promène à l'étranger...

La Présidente (Mme Dionne) : Merci. Merci. Poursuivez, Mme la députée.

Mme Setlakwe : Bon, là, il y a deux, trois choses que moi, je vais devoir rectifier. Premièrement, j'attends une invitation sur une... pour une visite. Ne laissez pas sous-entendre que je n'ai pas donné suite à une proposition. Quand je vais avoir une proposition concrète, on va aller faire une visite ensemble. Moi aussi, j'essaie d'en faire le plus possible. J'ai différents dossiers.

Pour ce qui est de la question qui m'est retournée, est-ce que... est-ce que moi, je n'aurais pas voulu qu'on mette fin à ces situations d'abus, c'est le rôle du ministère de l'Immigration de venir traiter de ces situations problématiques. Moi, ce que je dis, c'est que nos établissements ont besoin de ces étudiants internationaux. Vous l'avez vous-même reconnu. La façon dont vous vous y prenez est problématique, parce que vous venez affecter tout le reste du réseau.

Prenons spécifiquement les cycles supérieurs et le recrutement des chercheurs. Je pourrais citer, là, le recteur Cossette à Sherbrooke, le recteur Jutras à l'Université de Montréal, Maud Cohen à Polytechnique. Ils se sont tous exprimés sur la place publique, disant à quel point ça aurait été vraiment essentiel d'exclure les étudiants des cycles supérieurs du projet de loi n° 74, à tout le moins. Il y a un impact négatif sur notre économie. Les recteurs anticipent plusieurs impacts à votre décret : «Une chute drastique des étudiants internationaux, déjà amorcée, pourrait mener à la fermeture de certains programmes ou mettre en péril certains laboratoires.» Qu'est-ce que vous allez faire concrètement pour empêcher que ça se produise? Quel est votre plan, spécifiquement, pour que le recrutement des chercheurs aux deuxième et troisième cycles ne soit pas impacté négativement?

Mme Déry : Écoutez, comme je l'ai dit un petit peu plus tôt en début de rencontre, nos universités ont toute la latitude d'aller chercher les étudiants étrangers pour les deuxième et troisième cycles. Le nombre de CAQ puis le plafond qu'on émet, ce n'est pas moi qui décide. Ce n'est pas le MES qui va décider comment on attribue ces CAQ. Ils ont toute la latitude pour attribuer les CAQ. S'ils ont besoin d'en attribuer davantage aux cycles supérieurs qu'au cycle... qu'au premier cycle, grand bien leur fasse. Ils vont le faire. Ils vont pouvoir le faire. Moi, je n'ai pas... je n'impose pas de quota en termes de cycles. J'impose un quota global, mais, ces quotas-là, s'ils doivent aller chercher des chercheurs en deuxième cycle ou en troisième cycle, ils l'auront.

Puis, en termes de réputation, j'aimerais vraiment qu'on puisse revenir là-dessus, en proportion, le Québec est troisième, parmi les membres de l'OCDE, pour le nombre d'étudiants étrangers au bac et à la maîtrise, devant la France et l'Allemagne, et on est premiers pour les étudiants étrangers inscrits au doctorat. Donc, c'est presque le double de la moyenne de l'OCDE. Donc, quand on parle de réputation...

• (11 h 40) •

La Présidente (Mme Dionne) : Merci, Mme la ministre. Merci.

Mme Déry : ...de nos établissements, on a une bonne...

La Présidente (Mme Dionne) : Merci. Poursuivez, Mme la députée.

Mme Setlakwe : Mais que répondez-vous aux recteurs quand ils disent que le mal est fait, et que, déjà, il y a un impact sur leur capacité de recruter puis sur l'attractivité? Vous, vous n'en sentez pas, d'impact négatif, pour le moment?

Mme Déry : Je ne vous ai jamais dit qu'il n'y avait pas un impact négatif. Je vous ai dit tantôt qu'on savait très bien que les demandes d'admission sont en baisse. Mais, encore une fois, j'assume entièrement la décision et le choix de gouvernement qu'on fait de s'attaquer à l'immigration temporaire, qui inclut le nombre d'étudiants étrangers. Encore une fois, on est venus stabiliser le nombre d'étudiants étrangers partout à travers le réseau universitaire — on ne vise pas de baisse — et on est venus protéger la grande majorité des programmes qui sont stratégiques pour le Québec, la grande majorité des programmes en région, même des A.E.C. en région. Donc, on protège les programmes qui sont très importants pour le Québec en matière d'innovation, en matière de technologie, en matière de transition énergétique. On protège...

La Présidente (Mme Dionne) : Mme la ministre, merci. Merci. Merci. Poursuivez, Mme la députée.

Mme Setlakwe : Vous avez dû lire comme moi la chronique de Philippe Mercure, dans La Presse, intitulée Attirer des cerveaux, un pied de nez à Trump. Suite à cette chronique, il y a eu énormément de réactions dans le monde de l'enseignement supérieur, notamment, encore une fois, Daniel Jutras, Maud Cohen : «Les attaques frontales de la nouvelle administration américaine — je cite Daniel Jutras — contre la science nous offrent une occasion en or, celle de renforcer notre écosystème de recherche et d'innovation en attirant chez nous des scientifiques d'exception qui envisagent de quitter les États-Unis. L'Université de Montréal sait comment s'y prendre.» Un peu plus loin, je cite encore Daniel Jutras : «Malheureusement, le gouvernement du Québec impose des mesures qui compliquent le recrutement de professeurs et d'étudiants étrangers, limitant ainsi notre capacité à tirer pleinement parti de ce contexte favorable. Ce n'est vraiment pas le moment.»

Est-ce que vous, vous considérez qu'en ce moment nos établissements, nos institutions ont tous les outils et les moyens nécessaires pour attirer les cerveaux ici, au Québec?

Mme Déry : Les universités ont toute la marge de manoeuvre d'aller chercher... d'aller recruter. Ils le font depuis toujours. Ce n'est pas la première fois qu'on recrute des chercheurs, là. Ils ont vraiment des départements spécifiques avec des ressources qui sont... qui ne font que ça, aller chercher et recruter. Et je pense qu'avec ce qui se passe aux États-Unis c'est, effectivement, une opportunité pour le Québec d'aller chercher de manière ciblée des sommités, des talents, même des Québécois qui, actuellement, ont... sont aux États-Unis et, probablement, souhaitent revenir ici, au Québec. Ça aussi, on peut les attirer.

Je sais que mon collègue à l'Économie travaille actuellement avec les Fonds de recherche du Québec pour être capable de voir de quelle manière on peut, de manière ciblée, aller chercher certains talents. Bien, l'Université de Montréal, M. Jutras a fait une lettre ouverte, il y a de la philanthropie aussi là-dedans. Je pense que les fondations peuvent aller chercher ces étudiants.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci.

Mme Déry : Je sais que l'UQ travaille sur un projet similaire que l'Université de Montréal pour...

La Présidente (Mme Dionne) : Merci, Mme la ministre. Merci. Merci. Poursuivez, Mme la députée.

Mme Setlakwe : ...nos institutions sont des leviers incroyables. Puis, oui, la philanthropie peut jouer un rôle, certainement, je lève mon chapeau à l'Université de Montréal, mais il n'en demeure pas moins que le gouvernement du Québec doit mettre les mesures en place, les outils en place pour pleinement exploiter ces leviers que constituent nos établissements d'enseignement supérieur.

On a lu dans le décret, et ce fut une surprise dans le réseau, que le... Il y a eu un retrait des professeurs d'université et des chargés de cours du traitement simplifié d'immigration. C'est une autre menace au développement. Les recteurs dénoncent cet aspect du décret qui vise les professeurs d'université. Ils déplorent que les professeurs aient été retirés de la liste des professions qui font partie du traitement simplifié. Est-ce que vous les avez consultées, les universités, avant d'adopter cette mesure?

Mme Déry : Écoutez, je pense qu'il faut remettre les choses en perspective. Puis il y a une lettre qui a été envoyée, justement, à tous les différents recteurs pour leur préciser un peu le choix qui avait été fait. Donc, évidemment, les professeurs, les chargés de cours, c'est extrêmement important pour le réseau universitaire, puis cet apport-là est important.

Il faut distinguer les deux programmes. Il y a le PTET puis il y a le PMI. Donc, la voie rapide, justement, pour les professeurs et les chargés de cours, a été moins utilisée par les établissements que la voie du PMI. Puis on a les chiffres à l'appui, puis c'est ce que j'essayais de leur partager. J'essayais de leur partager que, même s'il y a une voie rapide, nos institutions l'utilisent moins que la voie moins rapide.

Alors, en novembre, on va regarder. Je pense que c'est des mesures que ma collègue à l'Emploi change continuellement, parce qu'on regarde continuellement l'évolution du marché de l'emploi. Et c'est la raison pour laquelle on a pris cette décision-là. C'est qu'au niveau du marché de l'emploi il n'y avait pas une pénurie ou un déficit de main-d'oeuvre, dans l'ensemble du Québec, pour ce qui est des professeurs et des chargés de cours. Mais, ceci dit...

La Présidente (Mme Dionne) : Merci, Mme la ministre. Merci. Il vous reste deux minutes, Mme la députée.

Mme Setlakwe : Donc, vous défendez cette décision de votre gouvernement. Vous ne voyez pas que ça vient compliquer, ajouter des embûches au réseau universitaire.

Mme Déry : Bien, je viens de vous dire qu'il faut... il ne faut pas confondre. En même temps, je pense qu'on a... on a surpris pas mal d'universités. Il y a deux programmes, un PTET puis un PMI. Il y a un programme qui est plus rapide. La voie rapide, là, elle est moins utilisée par nos professeurs. Donc, maintenant, en novembre, on va regarder. Si, en novembre, on peut faire des ajustements, on les fera. Mais, en même temps, moi, j'ai demandé à mes équipes de sortir les chiffres, quels... combien de professeurs passent par la voie rapide. Semble-t-il qu'on n'utilise pas la voie rapide non plus. Donc, je pense qu'il faut remettre les choses en perspective.

Ceci dit, on est quand même capables d'accueillir ces professeurs et ces chargés de cours. On les accueille encore puis on est capables de les accueillir ici, au Québec, là.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci, Mme la ministre. Merci. Merci. Il reste...

Mme Setlakwe : Les règles budgétaires pour les étudiants hors Québec, c'est quand même tout un gâchis, là. Est-ce que... Vous avez dû reculer sur Bishop's et là, suite au jugement, vous devez remettre la pâte à dents dans le tube et retourner à la table à dessin. Qu'est-ce que vous... Comment vous réagissez à cette décision? Avant de mettre cette politique de l'avant, est-ce que vous aviez fait toutes les analyses et les études nécessaires?

Mme Déry : Alors, d'abord, d'entrée de jeu, je vais revenir, justement, sur le jugement rendu par le juge Dufour, que j'ai lu entièrement vendredi. Ce n'est pas tout noir, ce n'est pas tout blanc. C'est un jugement qui est très nuancé, que je vous invite, d'ailleurs, hein, mes collègues... Je vous invite à prendre connaissance de ce jugement-là. On va prendre le temps d'analyser ce jugement-là puis on va évaluer toutes les options, parce qu'il y a quand même un délai de 30 jours dans lequel les deux parties peuvent faire appel.

Par contre, je veux quand même dire que c'est quand même nuancé. Il y a certaines choses... Contrairement à ce qui est véhiculé, là, depuis quelques jours dans les médias, le jugement nous est favorable à certains égards, notamment aux objectifs généraux de la politique de financement.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci, Mme la ministre. Merci. C'est tout le temps qu'on a pour cet échange. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Terrebonne pour 13 minutes.

Mme Gentilcore : Merci. Merci beaucoup. Votre ministère, donc le ministère de l'Éducation... de l'Enseignement supérieur, pardon, a diminué la capacité des dépenses des universités, dans le PQI, de 90 %, et ce, pour cinq ans. Ça oblige, donc, les universités à piger dans leurs budgets de fonctionnement, dans une année qui est particulièrement difficile, on le sait, là, vu la diminution, entre autres, des étudiants internationaux. Comment allez-vous faire pour vous assurer que les universités ne dépérissent pas pendant ces cinq années-là?

Mme Déry : Écoutez, je pense que les universités ne vont pas dépérir. On est en rattrapage depuis plusieurs années, puis les sommes ont été colossales. Quand on est arrivés, là, en PQI, je le rappelle, on était à 5 milliards, puis c'était vraiment un statu quo, là. Puis, dans le réseau collégial, ça faisait vraiment pitié, là. Le réseau collégial avait vraiment besoin d'amour, comme on dit. On a investi énormément d'argent pour faire ce rattrapage-là puis on continue. Là, j'ai encore des projets d'agrandissement, de rénovation, de réfection, de maintien d'actif. On continue de faire tout ça, mais, en même temps, il faut qu'on puisse... il faut qu'on puisse, à l'intérieur du contexte actuel, avec l'explosion des coûts de projets... Moi aussi, j'ai une certaine responsabilité à devoir évaluer certains projets. Des fois, on doit être capables de retourner à la table à dessin. Moi, j'ai des projets de 90 millions qui sont devenus des projets de 150 millions, 250 millions.

Mme Gentilcore : Dans cinq ans, ces projets-là vont coûter encore plus cher.

Mme Déry : Bien, on est en train d'accélérer les projets en ce moment. Le but du PQI puis des seuils qu'on a établis pour les trois prochaines années... Justement, on est en train d'accélérer le nombre de projets qu'on fait. La grande majorité du milliard qu'on a eu là, il y a... dans les trois prochaines années, ces projets-là vont se faire. On accélère la cadence pour être capables de faire ces projets-là...

Mme Gentilcore : Mais comment vous conciliez ça? Comment vous conciliez...

Mme Déry : Je vais juste finir. On accélère la cadence...

La Présidente (Mme Dionne) : ...sinon, vous vous adressez à la présidence. Merci. Donc, un à la fois. Oui, Mme la ministre, terminez, après ça, Mme la députée.

Mme Déry : Absolument. Comme je l'ai dit, il y a 1 milliard additionnel qui a été injecté cette année, là, pour le budget 2025-2026, puis ça va nous permettre d'accélérer certains projets, que ce soit en maintien d'actif ou en bonifications, qu'on est capables de faire, là, pour les prochaines années.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci. Merci, Mme la ministre. Mme la députée, vous pouvez poursuivre.

Mme Gentilcore : ...finalement, la baisse de 90 % au PQI pour les cinq prochaines années, qu'est-ce que ça va impacter, si vous dites que tous ces projets-là continuent?

Mme Déry : C'est que je ne parle pas d'une baisse. On a établi des seuils. Moi, j'ai une responsabilité d'établir des seuils, puis ils ne sont pas habitués. C'est vrai que c'est une nouvelle façon de faire. Avant, il n'y en avait pas, de processus, du tout, là. Il y avait zéro processus quand on est arrivés. On a établi des processus pour pouvoir suivre les projets, puis les processus sont à parfaire.

Donc, en établissant des seuils, des seuils qu'on a relevés au cours des derniers mois, qu'on va probablement relever avec le PQI qu'on a eu de 1 milliard aussi, ça va nous permettre d'accélérer les projets. Mais le PQI n'a jamais été aussi élevé en enseignement supérieur. On fait des projets d'infras, que ce soit en maintien d'actif... Et, en même temps, on est allés cégep par cégep, université par université pour établir les seuils, pour être sûrs, sûrs, sûrs qu'en 2025-2026 puis les prochaines années on était capables de faire les projets de manière prioritaire. Ce n'est pas moi qui priorise les projets, c'est les réseaux. Donc, on va se fier sur les réseaux, qui priorisent certains projets, qu'on va faire au cours des prochaines années.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci, Mme la ministre. Poursuivez, Mme la députée.

• (11 h 50) •

Mme Gentilcore : L'an dernier, avec le projet de loi n° 44, la responsabilité des Fonds de recherche du Québec sont passées de vos mains aux mains de votre collègue au ministère de l'Économie. Il y a beaucoup de gens, dont moi, là, qui n'ont pas compris pourquoi on a fait ce changement-là d'attribution au sein du Conseil des ministres, mais je suis persuadée que vous suivez quand même, vous gardez à l'oeil, là, les bourses de recherche.

Les bourses des Fonds de recherche du Québec ne font plus le poids devant le coût de la vie. On le sait, on l'entend partout sur le terrain. Après un quasi-gel de 20 ans, les boursiers reçoivent, à la maîtrise, 20 000 $, à l'université, 25 000 $, alors que, du côté du conseil de recherches du Canada, c'est plutôt 27 000 $, 40 000 $ par année. Donc, ma question est la suivante : Est-ce que vous avez entrepris des démarches ou des discussions avec votre collègue à l'Économie pour, justement, s'assurer qu'on va rehausser le montant de ces bourses-là de recherche?

Mme Déry : Écoutez, je suis consciente de l'écart des bourses de recherche puis... pour avoir parlé à certains étudiants aussi qui sont aux cycles supérieurs puis à Rémi Quirion des FRQ. On travaille en étroite collaboration avec Rémi Quirion. Puis on a déjà augmenté le nombre... les bourses. Est-ce qu'on va être capables de combler l'écart, qui est quand même assez important? On l'a déjà augmenté au budget de 2023-2024. Je pense que ça a été augmenté. Là, maintenant, on ne les augmentera pas. On ne les a pas augmentés dans le budget-ci. On est conscients de l'écart puis on est conscients de l'effort qu'il faut faire. Ceci dit, Ottawa s'y est mis, de la partie. Eux aussi devaient financer. Ils ont augmenté leur financement.

Donc, on va continuer de travailler tous ensemble pour voir de quelle manière on peut davantage accompagner ces chercheurs-là, mais, dans ce budget-ci, on n'a pas comblé davantage cet écart-là. On avait déjà mis 50 millions dans le budget précédent en ce qui concerne les bourses de recherche.

Mme Gentilcore : Donc, vous jugez que, pour l'instant, c'est suffisant. On n'a pas besoin d'aller plus loin.

Mme Déry : Bien, pour l'instant, je n'ai pas les moyens d'aller plus loin. On n'a pas les moyens d'aller plus loin. Donc, on a déjà financé... On a déjà réduit cet écart-là, dans les budgets précédents, à la hauteur de 50 millions... au budget précédent, pas ce budget-ci, mais le budget précédent.

Mme Gentilcore : J'aimerais revenir sur un événement... en fait plutôt une pratique qui a eu lieu à la TELUQ puis qu'on a découverte dans un reportage de Marie-Michèle Sioui, là, l'été dernier. On pouvait lire que la TELUQ a versé, depuis 2011, plus de 280 000 $ au Groupe Proxima, qui est une entreprise, là, de formation détenue par deux professeurs en éducation de la TELUQ, et que cette entreprise-là a reçu de 100 $ à 135 $ par étudiant inscrit dans ses cours. Donc, moi, ma question pour vous, c'est : Est-ce que vous avez l'intention de mettre fin à ces pratiques-là? Puis est-ce que vous avez mené des enquêtes à la suite de la sortie de cet article-là de Mme Sioui?

Mme Déry : Bien, écoutez, les enquêtes ont été faites bien avant mon arrivée, là. Ça a été fait vraiment... même bien avant l'arrivée de la CAQ, là. C'était sous le gouvernement libéral. L'ancienne ministre de l'Éducation... Il y avait eu des poursuites pour un professeur qui avait poursuivi l'ancienne ministre de l'Éducation. Donc, il y avait une enquête qui s'en est suivie. Cette enquête-là est terminée. Il y a... Je ne reviendrai pas sur un litige qui est terminé, là. Ça a fait... ça a fait l'objet d'une enquête. Ça a fait l'objet d'une entente avec les avocats du prof en question, M. Noël, pour ne pas le nommer. Donc, c'est une histoire... un épisode, à la TELUQ, qui est très malheureux, là. C'est clair qu'il y a eu un enjeu.

Mais il y a eu, depuis 2018, des changements, donc, un changement de l'administration, puis il y a eu des changements aussi. Il y a eu le Conseil du trésor qui a suivi jusqu'à maintenant, jusqu'en 2023, qui a suivi... les recommandations qu'avait demandé Trésor à la TELUQ de faire. Notamment, dans leurs ententes contractuelles avec certaines entreprises privées, il y avait des lacunes dans ces ententes-là, dans la manière de... la gestion contractuelle. Et donc ce sont... Ils se sont conformés, au fil des années, à toutes les recommandations de Trésor, parce que, justement, il y avait ce genre de lacune là. Puis, jusqu'en 2023, Trésor les a accompagnés pour s'assurer de la mise en place d'une série de recommandations à ce niveau-là.

Mme Gentilcore : Donc, il y a des directives qui ont été publiées depuis pour empêcher que des dérives comme celles-là se produisent de nouveau.

Mme Déry : Il y a un accompagnement qui a été fait de manière très étroite jusqu'en 2023, là, pour s'assurer que la nouvelle administration est... soit mieux outillée puis soit vraiment consciente, là, de la manière dont on gère les ententes contractuelles. Je pense qu'ils n'étaient pas habitués ou, du moins, il y avait des lacunes qui avaient été... qui avaient été montrées du doigt. Et, juste pour s'assurer de la conformité de tout ça, le Conseil du trésor s'en est mêlé, puis il y a une série de recommandations qui s'en est suivie. Mais la série de recommandations a été... Ils ont eu le feu vert. Ils ont été suivis pendant trois ans, je vous dirais, puis la série de recommandations de Trésor a été remplie.

Mme Gentilcore : O.K. Donc, dossier réglé.

Mme Déry : Bien, je ne reviendrai pas sur un litige qui concerne... un litige entre une...

Mme Gentilcore : Non, mais... (panne de son) ...maintenant...

Mme Déry : ...entre une ministre de l'Enseignement supérieur...

Mme Gentilcore : Maintenant, ça n'a plus lieu puis...

La Présidente (Mme Dionne) : ...à la fois, s'il vous plaît. Sinon, vous vous adressez à la présidence.

Mme Gentilcore : Je vais prendre la parole.

Mme Déry : Désolée.

La Présidente (Mme Dionne) : Poursuivrez, Mme la députée.

Mme Gentilcore : Donc, on s'est assuré de mettre des directives en place pour ne plus que ça se reproduise. Et maintenant c'est vous qui êtes en poste. Donc, vous avez la certitude que ça ne se reproduit plus en ce moment, que ça n'a plus lieu, d'abord, et que ça ne se reproduira plus.

Mme Déry : Moi, j'ai la certitude que... Je ne reviendrai pas sur une enquête qui est close. L'enquête a fait son travail. Les recommandations du Conseil du trésor ont été mises sur pied, ont été mises en place. Alors, la TELUQ nous dit qu'ils sont conformes. Le Conseil du trésor aussi nous dit, à partir de 2023, qu'ils sont conformes.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci, Mme la ministre. Merci.

Mme Gentilcore : Maintenant...

La Présidente (Mme Dionne) : Il vous reste cinq minutes.

Mme Gentilcore : Oui. Un sujet qui revient d'année en année, parce que ce n'est toujours pas réglé, le rapatriement des budgets fédéraux de la recherche, donc, votre gouvernement, dans son nouveau projet pour les nationalistes, le manifeste de la troisième voie, promettait de mettre fin à cette ingérence, comme à toutes les autres, d'ailleurs. Est-ce que vous reconnaissez que les sommes versées par le CRC, étant de loin supérieures à celles versées par le Fonds de recherche du Québec, constituent une atteinte à l'autonomie du Québec en enseignement supérieur?

Mme Déry : Bien, écoutez, comme je l'ai déjà dit... Puis je pense qu'on a déjà manifesté aussi, auprès de certains ministres au fédéral au dernier mandat... bien, en fait, au début de mandat, qu'il y avait... Effectivement, il y a des sommes importantes du côté fédéral, puis souvent, dans l'attribution de ces montants-là dans nos chaires de recherche à nous, bien, on s'ingère dans les compétences et les spécificités, je vous dirais, du Québec. On a demandé à ce qu'on ait compensation pleine et entière, justement, de ces montants-là pour pouvoir gérer, nous autres, les chaires de recherche, parce qu'il faut comprendre qu'on ne sera pas capables, au Québec, de combler ou de pallier financièrement aux sommes que nous donne le fédéral. Mon collègue aux Relations canadiennes travaille aussi là-dessus.

Mais je pense qu'on va toujours continuer de demander à ce que, justement, il y ait des spécificités au sein de ces chaires de recherche, des spécificités du Québec qui soient prises en compte, non seulement financièrement, mais aussi sur certaines spécificités et critères d'attribution de ces montants-là dans nos chaires de recherche.

Mme Gentilcore : Mais, pour l'instant, ce ne l'est toujours pas. Ça ne nous a pas été accordé.

Mme Déry : Non, ça ne nous a pas été accordé. Les chaires de recherche sont toujours... bien, financent toujours nos... les chaires de recherche canadiennes... En fait, les organismes subventionnaires subventionnent toujours nos chercheurs ici, au Québec.

Mme Gentilcore : O.K. Bon, concernant la politique de financement des universités — il faut se ramener à 2017-2018, là, quand les libéraux puis ensuite la CAQ ont changé le mode de financement de nos universités — on est passés, là... un système de répartition où Québec fixait les montants pour les étudiants étrangers et percevait l'essentiel des droits de scolarité avant de les redistribuer équitablement entre les universités. Donc, c'est un système où, grosso modo, là, les universités sont en compétition pour attirer les étudiants les plus payants, comme on le dit dans le jargon.

Sept ans plus tard, je pense qu'on peut affirmer que ce système-là ne fonctionne pas. D'une part, les universités reprochent aux gouvernements québécois comme canadien de restreindre leur capacité à recruter, puis, d'autre part, les universités, surtout francophones, sont défavorisées, parce que les pays... francophones ou francophiles dans le monde viennent de pays où l'enseignement supérieur est très abordable, voire gratuit. Ils ne sont pas prêts à payer 10 000 $, 15 000 $, 20 000 $ pour une année de bac. Donc, ma question pour vous, c'est : Est-ce que vous admettez que la nouvelle politique de financement n'a pas permis d'atteindre un équilibre financier entre les universités francophones et anglophones?

Mme Déry : Bien, la... C'est un peu tôt pour répondre à cette question. La nouvelle politique de financement, elle est entrée en vigueur il y a quelques mois à peine. Donc, on est en train, justement, de voir comment elle va se déployer. Les règles budgétaires ont été faites, et tout. Mais, en même temps, cette politique de financement, on l'a rouverte, comme on doit la rouvrir après cinq ans, puis on a fait en sorte que, justement, tous les établissements francophones y aient cette équité au sein de tous les établissements francophones. Il y a même une règle budgétaire, justement, pour récupérer les sommes, pour qu'on soit capables de partager ces sommes-là, parce qu'il y a eu un déséquilibre financier important que le juge, d'ailleurs, reconnaît dans son rapport, dans son jugement rendu public vendredi.

Mais il y a plusieurs changements, dans la politique de financement, qui ont été faits, justement, pour donner plus de flexibilité aux établissements. On a augmenté, comme je l'ai dit tantôt, le financement fixe, le financement inconditionnel, qui est passé de 6 % à 30 %, pour réduire la course aux effectifs. Puis il y a aussi des montants...

La Présidente (Mme Dionne) : Merci, Mme la ministre. Merci. Merci. Poursuivez, Mme la députée.

Mme Gentilcore : Merci. Là-dessus, est-ce que votre ministère a produit une évaluation sur l'écart financier, là, entre les universités francophones et anglophones?

Mme Déry : Bien oui, absolument. Mais c'est la... C'est pour ça que je vous invite à lire le jugement qui a été rendu vendredi par le juge Dufour. Dans le jugement, le juge Dufour indique clairement... Puis on en a parlé plusieurs fois, là, concernant les étudiants étrangers, il y a un déséquilibre qui n'est plus à prouver, et même financièrement. Il y a un déséquilibre entre les universités anglophones et francophones qui a été engendré, entraîné par la déréglementation libérale de 2018, où il y a un écart important. Sur à peu près 400 millions ou 400 quelques millions de revenus qui ont été engendrés par les étudiants internationaux, il y a 280 millions, 282, pour être plus précis, qui a été engrangé par uniquement les universités anglophones. Donc, il y a un déséquilibre que reconnaît le juge dans son jugement. Donc, on s'attaque à ce déséquilibre dans la nouvelle politique de...

La Présidente (Mme Dionne) : Merci, Mme la ministre. Merci. Il vous reste 40 secondes, Mme la députée.

Mme Gentilcore : Ah! c'est bon. Merci.

La Présidente (Mme Dionne) : Vous pouvez terminer, Mme la ministre, ou...

Mme Déry : Bien, écoutez, la politique de financement, évidemment, c'est une politique qu'on rouvre à chaque cinq ans. Donc, c'est quand même ardu, comme exercice. C'est un exercice qui dure quand même plusieurs mois. Ça s'est fait sur le long de l'année puis en collaboration, bien sûr, avec tous les établissements d'enseignement supérieur. Bien, je pense qu'on vient répondre, avec cette nouvelle politique, aux enjeux plus régionaux. On répond aussi au siège social de l'UQ. On a permis à l'UQ d'aller avoir une certaine somme qui va pouvoir se décliner à travers le réseau de l'UQ pour qu'on renforce aussi le réseau de l'UQ, mais qu'on crée une certaine équité aussi au sein des établissements.

• (12 heures) •

La Présidente (Mme Dionne) : Merci, Mme la ministre. Donc, c'est tout pour cet échange. Je cède maintenant la parole à M. le député de Saint-Jérôme pour une période de deux minutes.

M. Chassin : C'est rapide. C'est un peu le ping-pong. Bonjour, Mme la ministre. Le Conseil du trésor a pris la décision que le réseau collégial allait être soumis à des mécanismes de contrôle budgétaire, un plafond des heures rémunérées, un plafond de dépenses d'investissement, un gel de recrutement. Ces mécanismes-là ne s'appliquent pas qu'aux cégeps, je pense. Si vous pouvez me confirmer, ce n'est pas qu'aux cégeps qu'on applique un...

Mme Déry : Bien, tous ceux qui sont dans le périmètre comptable sont sujets à un gel de recrutement.

Une voix : ...

Mme Déry : Non, pas l'UQ, mais tous ceux qui sont dans le périmètre comptable, mais pas les universités. C'est les cégeps.

M. Chassin : Oui. Bien, le gel de recrutement, c'est un peu différent, mais ça... Puis est-ce que, dans le fond, le mécanisme du plafond de dépenses d'investissement... Puis là vous êtes ouverte à peut-être le réviser. On vient de vous entendre là-dessus. Le réseau collégial disposait d'une certaine marge de manoeuvre avec une planification pluriannuelle des investissements. À prime abord, a priori, est-ce que ça vous semble, ce nouveau mécanisme de plafond d'investissement, un bon mécanisme de contrôle?

Mme Déry : Bien oui, absolument. Ça prend un mécanisme de contrôle. Moi, j'ai des projets, comme je l'ai dit tantôt, qui ont doublé puis triplé de coût. À un moment donné, on ne peut pas arriver à la dernière minute puis retourner à la table à dessin. Il faut être capable de contrôler les coûts. Puis, pour mieux contrôler les coûts, c'est la raison pour laquelle on a établi certains seuils. On a rehaussé, au cours des derniers mois, les seuils en raison, justement, des projets qui nous ont été soumis par les différents établissements. Moi, je voulais être sûre que chaque établissement puisse, au moins cette année...

M. Chassin : Mais ce n'est pas aux cégeps...

La Présidente (Mme Dionne) : Oui, allez-y. Il vous reste 35...

M. Chassin : Oui, c'est ça. Est-ce que ça ne pourrait pas être aux D.G. des cégeps qu'on fait confiance pour prioriser mais aussi pour gérer leurs propres enveloppes?

Mme Déry : Mais c'est les cégeps qui priorisent. Moi, je ne priorise aucun...

M. Chassin : Mais il y a un plafond qui est nouveau.

La Présidente (Mme Dionne) : Un à la fois, s'il vous plaît. Sinon, on s'adresse à la présidence.

Mme Déry : Je ne priorise aucun projet. Les projets sont priorisés par les établissements, puis ensuite on nous soumet cette priorisation, puis là on leur donne les seuils qu'il faut puis les enveloppes qu'il faut pour que, justement, on puisse ne pas...

La Présidente (Mme Dionne) : Merci, Mme la ministre. En terminant, M. le député.

M. Chassin : Je comprends qu'il y a la priorisation, une chose, mais, pour utiliser leurs enveloppes, ils ne peuvent le faire si ça dépasse un plafond.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci beaucoup. C'est malheureusement tout le temps qu'on a pour cet échange. Donc, je... Peut-être... Oui, Mme la députée de Mont-Royal—Outremont, la parole est à vous pour 13 minutes.

Mme Setlakwe : Merci. Revenons sur l'affaire TELUQ. J'écoutais l'échange avec la députée de Terrebonne, ses questions, vos réponses. Je ne suis pas sûre que vous parliez du même dossier, mais, moi, le dossier sur lequel vous répondiez, les fonds qui ont été perdus, là, des sommes d'argent, des dizaines de millions qui ont été versés à des étudiants vulnérables qui venaient de la Syrie, je crois... Ils ont reçu beaucoup d'argent en vertu du programme d'aide financière aux études. Et, à travers ce stratagème, il y a une entreprise privée qui a empoché 9,5 millions en se faisant passer pour une université. Il y a un directeur général qui a été suspendu, réintégré avec un chèque de 260 000 $ suite à une entente confidentielle. Je pense qu'il faut continuer sur ce dossier-là parce que c'est beaucoup d'argent public. La population pourrait penser qu'il y a eu du gaspillage. Donc, moi, j'aimerais savoir combien d'argent a été perdu dans cette histoire au programme d'aide financière aux études.

Mme Déry : Bon, d'abord, c'est une histoire qui remonte à votre gouvernement, à l'époque, avec l'ancienne ministre de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur. C'est... Initialement, tout ce dossier-là, c'était un litige entre la ministre de l'Enseignement supérieur et de l'Éducation de l'époque et un des professeurs, le Pr Noël, comme je l'ai mentionné tantôt. C'est un litige qui remontait à cette date-là puis à cette époque-là, puis, depuis, bien, il y a eu beaucoup... on en a tiré des leçons, là. Comme je l'ai dit tout à l'heure, c'est un événement malheureux. Non seulement il y avait une entreprise privée là-dedans qui était... qui avait une relation contractuelle avec la TELUQ, mais il y avait aussi l'aide financière aux études, le programme d'aide financière aux études là-dedans.

Donc, c'est clair qu'on a tiré des leçons, là, sur les pratiques de l'aide financière aux études pour s'assurer de la conformité des dossiers. Il y a plusieurs choses qu'on a mises en place au cours... bien, on a... On est venus parfaire, si vous voulez, les processus pour s'assurer que ça ne se fasse plus puis que ça ne se reproduise plus. Donc, il y a des processus en place...

La Présidente (Mme Dionne) : Mme la ministre, merci. Merci, Mme la ministre. Oui, poursuivez, Mme la députée.

Mme Setlakwe : Merci. Bien oui, vous parlez de l'ancienne ministre qui avait, suite à un rapport intérimaire, suspendu un directeur. Et par la suite votre prédécesseur avait affirmé que cette histoire avait été un peu gonflée par le gouvernement précédent, en référant au gouvernement libéral. Étant donné le stratagème, les dizaines de milliers... de millions, en fait, qui ont été versés à des clients vulnérables, le stratagème, l'entreprise privée qui empoche près de 10 millions de dollars, désolée, mais je ne suis pas sûre que c'est une affaire qui est gonflée. Comment vous... comment vous voyez ça? Vous trouvez toujours que c'est... ça avait été gonflé à l'époque?

Mme Déry : Écoutez, moi, je vous dis que le litige remonte à 2018... plus que 2018, 2017... en tout cas, le litige remonte à l'époque du gouvernement libéral, où il y a eu enquête, il y a eu une poursuite. Ça a été judiciarisé. Je ne reviendrai pas sur un processus qui a été judiciarisé. Ça a fait l'objet d'une entente entre les avocats et ça concernait, comme je le répète, les choix du gouvernement libéral de l'époque, là.

Alors, comme je vous le dis, là, c'est très malheureux, ce qui s'est produit avec la TELUQ. Je ne veux pas que ça se reproduise. Il y a eu quand même beaucoup de choses qui ont été faites depuis, tant au niveau de l'AFE, donc de l'aide financière aux études, de s'assurer de la conformité puis des vérifications d'assurance qualité, mais il y a aussi eu, comme je l'ai dit tantôt à ma collègue députée de Terrebonne... qu'il y a eu aussi le Conseil du trésor qui est arrivé avec une série de recommandations pour qu'on soit capables de s'assurer que la gestion contractuelle se fasse...

La Présidente (Mme Dionne) : Mme la ministre, merci. Poursuivez, Mme la députée.

Mme Setlakwe : Merci. Mais il n'en demeure pas moins que, sous votre gouvernement, il y a un dédommagement de 260 000 $ qui a été octroyé à M. Noël, qui a été réhabilité en 2019 en vertu d'une entente confidentielle. Quels sont les termes de cette entente-là? Pourquoi est-ce qu'on a versé ces sommes-là?

Mme Déry : L'entente confidentielle relève de ce litige entre la ministre de l'Éducation de l'époque et le professeur en question. Je vous rappelle que le professeur en question a poursuivi l'ancienne ministre. Donc, c'est judiciarisé. Puis, au terme de tout ce processus devant les tribunaux, il y a eu une enquête, puis là, bien évidemment, l'enquête est terminée, puis les résultats ont donné... multiples recommandations de la part du Conseil du trésor, notamment, là. Mais il y a... Tout le processus a été judiciarisé. Initialement, il y a eu une poursuite du professeur à l'endroit de l'ancienne ministre de l'Éducation.

Mme Setlakwe : Il y a eu une fraude dans ce dossier. Il y a eu beaucoup d'argent public qui a été perdu. Vous n'avez pas répondu. Combien d'argent a été perdu dans cette histoire au programme d'AFE?

Mme Déry : On n'a pas le chiffre. Puis je l'ai déjà dit publiquement, qu'on n'avait pas ce chiffre-là. Mais ce que je peux vous dire, c'est qu'on a tiré des leçons, justement, pour l'aide financière aux études. Il n'y a jamais une histoire comme celle-là qu'on... qu'on veut que ça se reproduise, là. Ce sont des événements extrêmement malheureux, puis je ne veux pas que ces événements-là se reproduisent. Donc, c'est la raison pour laquelle, d'abord, avant mon arrivée, il y a eu des recommandations du Conseil du trésor. Mais, nous aussi, à l'AFE, il y a eu des processus qui ont été mis en place pour les vérifications d'assurance qualité, pour nous assurer de la conformité des informations qu'on retrouve dans les dossiers étudiants. Donc, c'est une responsabilité partagée, là. Il y a... il y a le statut d'étudiant, qui est fait par le personnel du bureau d'aide financière aux études des établissements. Puis aussi c'est le devoir des établissements d'enseignement supérieur de nous donner la bonne information concernant les profils des étudiants. Donc, c'est pour ça que je dis que c'est une responsabilité partagée.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci, Mme la ministre. Mme la députée, vous pouvez poursuivre.

Mme Setlakwe : Merci. Est-ce qu'il y a des sommes qui ont été... que votre ministère aurait tenté de récupérer auprès de l'Institut MATCI?

Mme Déry : Bien, écoutez, l'AFE, là, c'est les étudiants, là, c'est-à-dire, il ne faut pas non plus pénaliser les étudiants qui ont bénéficié de cette AFE là. Comme je le dis, la responsabilité est partagée pour l'aide financière. Il faut aussi que les établissements d'enseignement supérieur nous fournissent les bons dossiers d'étudiants. C'est ce qui n'a pas été fait. C'est la nature du litige. Puis il y a des correctifs qui ont été... qui ont été apportés à la suite de cette enquête-là.

(Interruption)

La Présidente (Mme Dionne) : Désolée pour ce petit bruit. Vous pouvez poursuivre, Mme la députée.

Mme Setlakwe : J'aimerais revenir sur les compressions en enseignement supérieur. À la page F.54, là, du budget, il est écrit que la variation des dépenses sera de moins 0,3 % en 2026‑2027. Est-ce que vous pouvez nous dire quel montant cela représente et quelles seront les conséquences financières pour les établissements?

Mme Déry : Bien, écoutez, pour l'instant, je n'ai pas cette information-là. Puis on pourra demander à mon collègue sous-ministre aux Finances de réagir s'il souhaite réagir. Mais on est en pleine approbation des règles budgétaires. Donc, pour l'instant, tant que les règles budgétaires ne sont pas approuvées, avec la collaboration, bien sûr, des établissements, je ne peux pas vous donner ces chiffres-là. Mais je vais pouvoir les... Je vais pouvoir vous donner la suite des choses quand les règles budgétaires seront approuvées. On est en cours d'approbation actuellement au niveau de toutes les règles budgétaires suite au budget, là, de 2025‑2026.

Mme Setlakwe : C'est bien... c'est bien à compter de 2025‑2026, là, qu'il va y avoir cette variation qui s'explique par la fin du financement de l'Opération main-d'oeuvre. Vous ne voyez pas qu'il va y avoir une conséquence négative au niveau des universités?

• (12 h 10) •

Mme Déry : Non. Nos budgets de fonctionnement sont encore en croissance, là. Je vous les ai mentionnés tantôt. Je peux les rementionner. Les budgets de fonctionnement actuellement, tant au niveau collégial qu'au niveau universitaire, on est en croissance. Évidemment, je ne parle pas des taux de croissance qu'on a connus. Tout le monde doit faire cet effort budgétaire, puis on va les accompagner. Mais, comme je vous dis, là, au cours des dernières années, les investissements en enseignement supérieur ont été colossaux. Je pense qu'on a investi énormément d'argent, parce qu'on avait un rattrapage important. Puis on va continuer de soutenir tous les établissements dans ces efforts-là. On va les accompagner. On travaille étroitement avec eux sur les règles budgétaires. Donc, on veut les entendre aussi, la manière dont on peut les aider, les accompagner, parce que cet effort-là est un effort collectif. Ils doivent faire aussi leur effort, puis je pense qu'ils en sont très conscients. Puis on est en train de, justement, à travers les règles budgétaires...

La Présidente (Mme Dionne) : Merci, Mme la ministre. Merci. Poursuivez, Mme la députée.

Mme Setlakwe : Vous répondez quoi aux universités, là, qui sont aux prises, malheureusement, de plus en plus, avec des déficits? Il y en a plusieurs qui l'ont déjà annoncé. Il y en a d'autres qui vont probablement être annoncés dans les prochaines semaines. Ils n'arrivent pas, là, avec ce gel du financement, à couvrir l'augmentation... les augmentations salariales, etc., l'inflation qui s'applique à eux aussi. Donc, vous ne venez pas adéquatement les financer. Comment est-ce qu'on va maintenir nos universités de classe mondiale dans ce contexte-là?

Mme Déry : On va maintenir les universités classe mondiale. Je n'ai aucun doute là-dessus. Il y a des contextes qui sont plus difficiles que d'autres. On est dans un contexte difficile, mais, en même temps, le financement, en subventions, là, pour les universités, entre 2019 et 2020 jusqu'à aujourd'hui, on est passés de 3 milliards à 4,2 milliards. On a quand même investi des sommes colossales. Puis je ne vous sortirai pas les autres tableaux que j'ai sortis déjà deux, trois fois, mais, comparativement au mandat libéral, je pense que les augmentations sont très substantielles. Dans le réseau collégial, on passe de 10 % à 50 %, là, de budget de fonctionnement, 50 %, là. On a vraiment investi énormément d'argent.

Donc, oui, c'est un contexte un peu plus difficile où les taux de croissance sont plus ralentis, le rythme de croissance est ralenti, mais on va continuer de les accompagner. Puis, comme je vous dis, les règles budgétaires vont sortir au cours des prochaines semaines. On pourra éventuellement vous partager toute l'information. Ce sera rendu public, de toute façon.

Mme Setlakwe : McGill a annoncé qu'elle couperait son budget de 45 millions, ça correspond à 5 % de ses dépenses, et qu'elle pourrait éliminer jusqu'à 500 emplois. McGill fait face à un déficit de 15 millions cette année, qui pourrait monter à un déficit accumulé de 194 millions en 2028 si aucune action corrective n'est prise. Concordia est aux prises avec un déficit de 34,5 millions, alors elle coupe aussi dans ses dépenses. Bishop's coupe son budget de 2 millions. La liste se poursuit. L'Université de Montréal également, un léger déficit de 5 millions, l'équivalent de 0,5 % du budget total, est attendu en raison notamment de la mise en oeuvre de la nouvelle politique de financement des universités de votre ministère et d'un manque à gagner provenant du financement des coûts de système.

Vous n'êtes pas inquiète du tout pour nos universités. Ça vous fait quoi, là, quand vous lisez, là, ces coupures, ces mises à pied, dans le contexte actuel où, au contraire, il faut donner tous les leviers, mettre tous les outils et les ressources à la disposition de nos universités?

Mme Déry : ...vous répéter ce que je répète depuis tantôt, je pense que le rattrapage a été extrêmement important. Je ne dis pas que je ne suis pas consciente des enjeux puis des préoccupations qu'ont les universités. Je suis consciente que le contexte budgétaire est un peu plus difficile. Mais, quand vous me parlez de McGill, ou de Concordia, ou de Montréal, juste pour vous donner une idée, en 2019‑2020, Université McGill, on parlait d'un budget de 378 millions, on l'a augmenté à 502 millions; Concordia, 276 millions, 361. Puis Concordia a des enjeux financiers bien avant les mesures qu'on a mises de l'avant, là. Je sais qu'on fait toujours ce lien-là, mais l'Université Concordia avait quand même des enjeux et un plan de redressement...

La Présidente (Mme Dionne) : Merci, Mme la ministre. Merci. Il vous reste deux minutes, Mme la députée.

Mme Setlakwe : Concordia avait des enjeux, puis là on en remet une couche. Moi, quand je me suis assise avec le recteur, il m'a dit : Je trouve ça tellement déplorable, on était déjà dans une situation difficile puis, avec la nouvelle politique de financement, on a l'impression d'être... d'être vraiment perdants. Graham Carr.

Mme Déry : Oui. Non. Je connais très bien le recteur Graham Carr. Vous parlez de la politique de financement, mais on...

Mme Setlakwe : Oui, et je trouve qu'en ce moment... Oui. À la fin de l'exercice, vous ne sentez pas que Concordia a été pénalisée davantage?

Mme Déry : Écoutez, Concordia, on les accompagne depuis plusieurs années. Il y a eu un plan de redressement parce qu'il y a des choix, probablement, qui ont été faits par l'université, qui étaient peut-être les... moins bons, là. Mais l'Université Concordia avait déjà des enjeux financiers bien avant certaines politiques que nous avons mises de l'avant. On les accompagne depuis, mais l'Université Concordia a été aussi hautement financée et subventionnée, là.

Ce n'est pas des universités qu'on laisse tomber. Les subventions de fonctionnement pour nos universités, que ce soit McGill ou Concordia... Je vous ai donné l'exemple de McGill. On est passés à 500 millions, de 378 à 500...

La Présidente (Mme Dionne) : Merci, Mme la ministre. Merci.

Mme Déry : ...Concordia, de 276 à 361.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci. Mme la députée, poursuivez. Une minute.

Mme Setlakwe : Aux pages 107 et 108 des règles budgétaires, le calcul de subventions de fonctionnement aux universités, on voit que le montant qui est alloué dans la norme... au niveau attraction, rétention, intégration, le montant passe de 21 millions, en 2024‑2025, à 85 millions à compter de 2027‑2028. Expliquez-moi la logique, là, comment, d'un côté, vous souhaitez un coup de frein dans le recrutement des étudiants internationaux puis, de l'autre, vous faites passer le budget de 21,5 à 85 millions en 2027‑2028.

La Présidente (Mme Dionne) : En 30 secondes, Mme la ministre.

Mme Déry : On avait un rattrapage à faire. Donc, les montants qu'on avait mis substantiellement au cours des dernières années, c'était justement pour être capables d'aller attirer des étudiants étrangers francophones. Puis c'est ce qu'on a fait, là. On a réussi à aller attirer des étudiants étrangers francophones, à régionaliser aussi cette immigration, puis là les montants diminuent. On a... On avait un rattrapage à faire. On l'a fait, ce rattrapage-là. Donc, le fait qu'on ait plafonné le nombre d'étudiants étrangers, c'est... Justement, on vient stabiliser le nombre d'étudiants étrangers qu'on a dans nos...

La Présidente (Mme Dionne) : Merci beaucoup. Merci. C'est tout le temps que nous avons pour cet échange. Merci à tous. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Marie-Victorin pour 13 minutes.

Mme Dorismond : Bonjour à tous. Bonjour, Mme la ministre. Je tiens à saluer tous mes collègues présents aujourd'hui, et incluant votre équipe, Mme la ministre. Je tiens aussi à saluer l'innovation et l'accélération du ministère de l'Enseignement supérieur au niveau de la santé. Vous avez été très présents depuis la pandémie. Vous avez mis en place plusieurs projets structurants et innovants pour accélérer certains corps de profession, dont les soins infirmiers, la formation accélérée. Et je regarde aussi tout le volet en lien avec la pandémie, aussi en lien avec la santé mentale. Il y a eu des impacts majeurs. Et on avait besoin de certains professionnels pour répondre aussi à... le nouveau projet de loi, qu'on dit : Le bon professionnel au bon endroit, et de faire en sorte que les professionnels fassent de la prise en charge.

On a parlé... On a constaté, en 2021, qu'il y avait 1 620 bacheliers en psychologie qui sont sortis de l'université et... comparativement à 360 doctorats. Vous avez mis en place un projet dont vous avez confié à Hélène David, en 2022, le mandat de former un groupe de travail pour identifier de quelle manière et à quelles conditions les bacheliers en psychologie pouvaient aider le réseau de la santé, et améliorer la prise en charge, et améliorer l'accès à la santé mentale. Donc, pour moi, ça, c'est important. Il faut valoriser les professions. On peut trouver une entente avec le réseau de la santé, à savoir comment on peut utiliser les 1 620 bacheliers en psychologie. Pour moi, c'est très important.

Donc, depuis le début du suivi du rapport qui a été dévoilé en juin 2023, est-ce que la ministre peut revenir sur les principaux axes d'intervention que contient... dans le rapport?

Mme Déry : Oui. Bien, merci. En fait, c'est un de nos bons coups dont je suis très fière, parce que j'avais expliqué, à l'époque... Puis, à l'époque, il y avait plusieurs journalistes qui s'intéressaient, justement, à la fuite des psychologues dans le public vers le privé. Puis, pour pallier à ça, non seulement on a augmenté puis... on a réduit l'écart des salaires et on a augmenté substantiellement les salaires pour garder ces psychologues dans le réseau, mais aussi il y avait beaucoup de bacheliers... Ils font un bac, passent trois, quatre ans à faire un bac, puis après ça c'est un cul-de-sac s'ils ne sont pas admis au doctorat. Puis il y en a très peu qui sont admis. C'est très contingenté. S'il y en a peu qui sont admis, ils sont obligés de refaire un baccalauréat. Donc, ils sont obligés... Ils sont un peu dans un cul-de-sac puis ils sont obligés de refaire un autre bac au complet au lieu de pouvoir intervenir en première ligne, puis de pouvoir nous aider en première ligne, puis de pouvoir accéder à d'autres microprogrammes ou d'autres formations passerelles.

Donc, Mme David, que je salue d'ailleurs aujourd'hui, parce qu'en très peu de temps, entourée de deux experts, puis évidemment c'est une experte du milieu, a pu nous fournir une solution ou, du moins, a collaboré avec les ordres professionnels, avec les recteurs d'université, avec, évidemment, plusieurs experts, et de professeurs, et de recteurs, et de gestionnaires pour être capables d'arriver à déployer plusieurs microprogrammes dans plusieurs universités. Il y en a déjà qui sont... qui sont déployés. Il y en a d'autres qui le seront au cours des prochains mois aussi. Mais ça nous permet de donner des voies de passage aux étudiants bacheliers en psycho, qui peuvent répondre à la première ligne. Donc, je vous donne des exemples. Ça peut être en protection de la jeunesse. Ça peut être en santé mentale. Ça peut être en intervention criminologique, en psychoéd aussi, psychoéducation. Il y a des programmes micropasserelles où on peut, justement, avoir accès à ces programmes-là.

Donc, ça va nous permettre d'augmenter le nombre de personnes qui graduent ou qui diplôment en première ligne puis ça va nous permettre de répondre à la première ligne. Donc, c'est vraiment... C'est une première. Avant, c'était... ça n'existait pas, puis l'ordre était très réticent à le faire. Puis là on a eu vraiment la collaboration de l'ordre pour aller de l'avant avec ces modifications-là.

• (12 h 20) •

Mme Dorismond : ...vous pouvez faire état aussi des travaux dans le réseau, vous pouvez identifier déjà des partenaires dans le réseau de la santé, publics ou privés, par rapport à... les nouveaux psychologues bacheliers? Ils sont déjà sur le terrain où ils s'en viennent?

Mme Déry : Bien, en fait, vous parlez des microprogrammes puis des micropasserelles?

Mme Dorismond : Oui.

Mme Déry : Bien, les programmes, il y en a déjà qui sont... qui sont déployés. Il y en a à la TELUQ, à l'Université de Montréal. Il y en a à l'UQAM aussi, à l'ULaval. Il y a plusieurs universités qui ont levé la main pour avoir, justement, des microprogrammes, que ce soient des certificats ou des microprogrammes eux-mêmes, pour que, justement, quand on... quand on est dans le tronc commun, qu'il y ait des cours qui nous permettent, dans le tronc commun, de faire, justement, ce cheminement passerelle par la suite, pour ne pas pénaliser ces étudiants qui n'ont pas... qui ne veulent pas, ou qui ne souhaitent pas, ou qui ne peuvent pas avoir accès au doctorat, de premier cycle.

Mme Dorismond : Merci. Je vais continuer avec... dans la même portée, en santé mentale, mais plus au niveau de la diplomation des garçons, qui est un sujet qui revient souvent, mais qu'on sait que c'est assez international. Il y a un plan d'action qui est fait pour la réussite en enseignement supérieur, le... 2021‑2026, le PARES. C'est un programme qui vise à soutenir les collèges et les universités pour la mise en oeuvre d'initiatives favorisant l'accès à l'enseignement supérieur pour les garçons.

Il y a aussi tout le volet de prévention. On travaille beaucoup en amont déjà. Il y a l'augmentation aussi des enfants à besoins particuliers, la recherche le prouve aussi, puis il y a des... certains cégeps qui font des initiatives, comme mon cégep, à Édouard-Montpetit, qui a créé ÉpiSens, dont j'ai pu aller aussi voir, une belle activité dont les jeunes ont apprécié. Mais on voit que les cégeps utilisent toutes sortes d'initiatives pour chercher une façon d'intéresser les jeunes, de faire comprendre, de les faire participer. Il y a aussi le cégep de Matane qui a réussi une diplomation chez les garçons, qui les a... puis on a évité le décrochage scolaire.

Mais notre gouvernement travaille en amont depuis des années, que ce soit au primaire, au secondaire. On le sait, que, des fois, les écoles font différentes approches pour que les jeunes garçons ne décrochent pas. Des fois, ils séparent les classes. Donc, pouvez-vous nous parler de qu'est-ce que nous, on fait depuis cinq ans, au ministère de l'Enseignement supérieur, pour que les garçons restent et soient diplômés?

Mme Déry : Bien, c'est un enjeu qui est préoccupant. C'est un enjeu qui n'est toutefois pas unique chez nous, au Québec, puis la pandémie est venue vraiment exacerber ce phénomène-là. On en parle beaucoup. Puis je pense que l'idée d'avoir un continuum puis de travailler en continuum, donc en étroite collaboration avec mon collègue à l'Éducation, bien, ça nous permet d'avoir certaines mesures qu'on est capables de cibler.

Du côté de l'enseignement supérieur, j'ai toujours dit que la transition du secondaire au collégial est une transition qui est la plus difficile, là. Le premier semestre est probablement le plus difficile, et c'est là où il faut vraiment mettre les bouchées doubles. Puis on ne veut pas les échapper. On veut les échapper le moins possible. Puis d'ailleurs je salue vraiment tous les D.G. de cégep, puis les gestionnaires de cégep, puis les professeurs de cégep, qui, vraiment, sont capables de diagnostiquer, entre guillemets, les lacunes qu'ont ces élèves-là, ces garçons-là, puis de les intéresser dès le début pour justement ne pas les faire décrocher. Donc, il y a plusieurs, plusieurs mesures, dont le plan pour la réussite 2021‑2026. On investit des sommes importantes pour venir en aide à cette clientèle particulière, là, de garçons, là.

Mme Dorismond : Pouvez-vous dire aussi combien d'investissements qu'on a... qu'on a instaurés pour ces programmes-là puis les 19 mesures du PARES?

Mme Déry : Alors, oui, effectivement, le PARES, c'est un programme qui a été très, très, très bien accueilli, puis il y a eu des dizaines et des dizaines d'initiatives. C'est 450 millions sur cinq ans. C'est un programme qui a un début puis une fin. Donc, en 2026, ce sera la fin du programme. On verra, à ce moment-là, ce qu'on fera, mais on a déjà pérennisé les sommes pour les ressources qui ont été embauchées. Donc, on pérennise déjà les sommes. Ça rentre dans le budget de fonctionnement des établissements. Donc, les établissements craignaient qu'on doive se débarrasser... en fait, qu'on mette fin aux embauches qu'on avait faites. Mais, non, on est capables de garder les embauches qu'on avait faites, tant sur la santé mentale que sur le PARES, pour que, justement, ces ressources-là qui sont très, très, très importantes puissent rester dans le réseau et continuer de fournir des services aux étudiants.

Mme Dorismond : Donc, on peut dire que la persévérance scolaire est bien ancrée dans les cégeps.

Mme Déry : Bien, les cégeps font vraiment un très bon travail, puis ce programme-là, PARES, a été vraiment déployé de manière très, très ingénieuse et créative, je vous dirais, à certains endroits. J'ai eu vent de plusieurs initiatives, partout à travers le réseau, qui ont été déployées. Puis ils avaient toute la marge de manoeuvre pour déployer des initiatives qui répondent vraiment aux... à leurs étudiants, à leur population étudiante. Ça varie d'un cégep à l'autre ou d'une université à l'autre, mais je pense que c'est un programme qui a été très, très, très généreux aussi et qui a pu donner un vrai coup de pouce à la réussite et à la persévérance, qu'on est capables de mesurer un petit peu mieux aujourd'hui, là.

Mme Dorismond : Merci.

La Présidente (Mme Dionne) : Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Il reste moins de quatre minutes.

M. Émond : ...y aller.

La Présidente (Mme Dionne) : Allez-y, M. le député.

M. Émond : Oui. Merci beaucoup, Mme la Présidente. Mme la ministre, j'aimerais vous entendre... Je disais tantôt, dans mon intervention précédente, que, dans mon coin de pays, à... à l'est, pardon, de la Montérégie, Sorel-Tracy, notre grand petit cégep, on le considère un peu comme un cégep de région. Puis il y a des mesures qui ont été mises en place pour aider les cégeps comme le nôtre puis un peu partout à travers la province, pour parler des bourses Parcours. C'est un modèle de bourse qui est très intéressant, à mon idée, et j'aimerais vous entendre parce que... Chez nous, on a pu en bénéficier, puis ça permet, avec des moyens financiers, d'accueillir des étudiants qui viennent de d'autres régions du Québec, en fait, pour... On arrive à combler certaines cohortes de cette façon-là.

La mobilité étudiante, on le sait, ça peut avoir des effets pour inciter nos jeunes à s'installer puis à travailler dans la région où ils ont fait leurs parcours d'études. Puis, chez nous, à Sorel-Tracy, bien, ça s'avère bénéfique, parce que moi, j'ai été témoin, là, de cohortes de jeunes étudiantes, de jeunes étudiants qui arrivaient de la région de Montréal par transport en commun, en autobus ou regroupés ensemble en voiture, là, à trois, quatre, cinq dans la même voiture, pour venir étudier, entre autres, en soins infirmiers au cégep de Sorel-Tracy. Alors, j'aimerais vous entendre peut-être sur où on en est, là. On est en avril 2025. Quel constat faites-vous des bourses Parcours, Mme la ministre?

Mme Déry : Bien, c'est un... c'est un programme qui a été vraiment victime de son succès, là. Je vous dirais que ça a été un programme qui a été extrêmement bien accueilli puis utilisé, puis beaucoup, beaucoup d'étudiants en ont bénéficié. Votre cégep, le petit grand cégep de mon collègue à Sorel-Tracy, bien, on a une allocation, en 2024‑2025, de 900 000 $, puis ça a permis d'allouer une centaine de bourses. Donc, c'est très important. Puis ça nous permet aussi, ces bourses Parcours, non seulement de délocaliser des étudiants en région, mais, le fait qu'on ait des déficits d'espace dans certains cégeps à Montréal, bien, on encourage vraiment, avec cette bourse, à aller en région, vers les régions, pour que non seulement... Évidemment, on veut des étudiants en région, mais, en même temps, ça nous aide aussi en termes d'infras, parce qu'on a ce déficit d'espace dans certains cégeps à Montréal. Donc, on est en surplus d'espace aussi dans plusieurs cégeps en région. Donc, ça nous permet de les attirer, ce qui est une bonne chose. Donc, ça contribue aussi à la vitalité des cégeps en région puis ça permet aux étudiants de vivre cette expérience unique.

Donc, juste rapidement, à terme, en 2026‑2027, c'est des investissements qui totalisent à peu près 108 millions sur cinq ans, qui auront permis une bourse annuelle de 7 500 $, je le rappelle, à des... à peu près 4 000 étudiants, je vous dirais, qui ont bénéficié de ces bourses-là à date.

La Présidente (Mme Dionne) : En 30 secondes, M. le député.

M. Émond : Oui. Bien, je vous remercie pour votre réponse puis je joins ma voix à la vôtre en disant que ça a un impact qui est significatif dans chacune des régions du Québec. Le moindre petit étudiant, étudiante qui s'en vient dans nos régions, qui tombe en amour pour notre coin de pays puis qui décide de s'installer, bien, c'est très bénéfique. Puis je vous remercie pour ces bourses Parcours. Merci, Mme la Présidente.

Adoption des crédits

La Présidente (Mme Dionne) : Merci. Donc, étant donné... Le temps alloué à l'étude des crédits budgétaires du portefeuille Enseignement supérieur étant presque écoulé, nous allons maintenant procéder à la mise aux voix des crédits. Le programme 1, intitulé Administration, est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Des voix : Sur division.

La Présidente (Mme Dionne) : Sur division. Le programme 2, intitulé Soutien aux organismes, est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Des voix : Sur division.

La Présidente (Mme Dionne) : Sur division. Le programme 3, intitulé Aide financière aux études et bourses incitatives, est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Des voix : Sur division.

La Présidente (Mme Dionne) : Sur division. Le programme 4, intitulé Enseignement supérieur, est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Des voix : Sur division.

La Présidente (Mme Dionne) : Adopté sur division. Le programme 5, intitulé Régimes de retraite, est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Des voix : Sur division.

La Présidente (Mme Dionne) : Adopté sur division. Finalement, l'ensemble des crédits budgétaires du portefeuille Enseignement supérieur pour l'exercice financier 2025‑2026 est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Des voix : Sur division.

La Présidente (Mme Dionne) : Adopté sur division.

Documents déposés

Donc, en terminant, je dépose les réponses aux demandes de renseignements des oppositions.

Et, compte tenu de l'heure, la commission ajourne ses travaux au mercredi 30 avril, à 11 h 30, où elle entreprendra l'étude du volet Éducation primaire et secondaire incluant formation professionnelle des crédits budgétaires du portefeuille Éducation. Alors, merci infiniment à tous pour votre contribution.

(Fin de la séance à 12  h  30)

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