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Version finale

33e législature, 1re session
(16 décembre 1985 au 8 mars 1988)

Le mercredi 23 avril 1986 - Vol. 29 N° 3

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude des crédits du ministère de l'Éducation 1986-1987


Étude des crédits du ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science 1986-1987


Journal des débats

 

(Dix heures six minutes)

Crédits du ministère de l'Éducation (suite)

Le Président (M. Parent, Sauvé): 5i vous voulez prendre place avec vos collaborateurs, nous allons débuter. La commission parlementaire de l'éducation poursuit l'étude des crédits du ministère de l'Éducation. Nous en sommes rendus au programme 4, ayant pour titre Enseignement primaire et secondaire public- La parole est au député de Laviolette. M. le député.

Enseignement primaire et secondaire public (suite)

Intégration scolaire

M. Jolivet: M. le ministre, j'avais dit hier soir en nous quittant que nous reprendrions avec l'intégration scolaire. Donc, je vais tenir l'engagement que j'avais pris hier. On sait très bien que l'ensemble du processus qui n'est pas nouveau d'ailleurs... En effet, même sous l'égide de la Loi sur l'instruction publique, avant même qu'on ait des discussions sur l'intégration en vertu du projet de loi 3, il y avait déjà des processus d'intégration qui avaient été faits. D'ailleurs, plusieurs commissions scolaires avaient fait des demandes en ce sens, mais le ministère demandait toujours qu'il y ait un consensus en vertu de la Loi sur l'instruction publique et disait à cette époque-là qu'il devait y avoir des commissions scolaires de taille raisonnable pour donner des services de qualité à l'ensemble de la clientèle. Donc, le problème d'intégration n'est pas nécessairement un problème politique. Je ne parle pas de politique en vertu de partis politiques, le gouvernement ou l'Opposition. Je parle de politique générale des commissions scolaires où on dit qu'il y a une qualité de l'éducation qui doit être donnée à l'ensemble des jeunes étudiants et étudiantes de niveaux primaire et secondaire.

Donc, ce processus avait été enclenché, il y avait des commissions scolaires qui avaient procédé en vertu de la Loi sur l'instruction publique. Est arrivée la fameuse loi 3 qui avait amené des décisions gouvernementales, mais qui, malheureusement, ont été arrêtées compte tenu de la décision des juges qui a été prise sur la loi 3. Mme la députée de Chicoutimi, hier, mentionnait que, dans certaines circonstances, des décisions comme celles-là qui avaient des effets positifs sur l'ensemble des régions du Québec à cause des problèmes vécus d'abord à Montréal et à Québec, mais à Montréal en particulier, avaient dû être retardées.

Nous sommes donc revenus au processus de la Loi sur l'instruction publique. Selon les chiffres qui nous ont été communiqués, nous avions demandé des documents, des détails qui vont nous être fournis bientôt pour nous permettre de faire les comparaisons qui s'imposent. Sur les 234 commissions scolaires, on en compte présentement 66 qui sont intégrées avec l'enseignement primaire-secondaire. Pour 1986-1987, on prévoit que douze commissions scolaires régionales sont en processus d'intégration volontaire, ce qui devrait entraîner une diminution de 19 commissions scolaires.

De façon générale, les territoires qui avaient été prévus, basés en grande partie sur les territoires des municipalités régionales de comté en vertu de la loi 3, sont respectés. Il y a cependant quelques problèmes qui surgissent à travers le Québec. Le Parti libéral s'était lui-même engagé à fusionner les commissions scolaires primaire et secondaire et le ministre de l'Éducation a déclaré qu'il privilégiait l'intégration volontaire, mais qu'il n'a pas l'intention de forcer la main là où pour le moment il y a mésentente. Je fais mention de l'engagement électoral du Parti libéral à la page 20 de son document et c'est le 23e engagement: les commissions scolaires du niveau primaire et les commissions scolaires du niveau secondaire seront regroupées en des commissions scolaires appelées à fournir l'enseignement aux niveaux primaire et secondaire. Donc, le ministre privilégie pour le moment - et il nous l'a dit hier dans son discours - une intégration volontaire.

Cependant, il est conscient - on en a parlé à différentes occasions - que ce processus d'intégration scolaire va présenter de sérieuses difficultés à certains endroits. On peut parler de façon plus spécifique de la région que je connais qui est la Mauricie -ou du Lac-Saint-Jean ou de l'Estrie, où dernièrement on apprenait que des commissions scolaires commençaient à accepter le processus volontaire, donc, semblaient se plier à ce que le ministre demandait. Là où il sera volontaire, ce sera

au 1er juillet 1987. Dans d'autres cas, cela pourra être entendu que c'est au 1er juillet 1988. Mais une chose est certaine, c'est qu'en fin de compte il va y avoir nécessairement des résistances dans certaines régions du Québec.

Le ministre dit: J'agirai lorsqu'il y a consensus. Est-ce que cela veut dire, pour lui, lorsqu'il y aura large consensus ou lorsqu'il y aura un consensus minimum? Quelle est l'interprétation qu'il fera? De quelle façon devra-t-il procéder si jamais, malgré tout cela, il y a difficulté? Le ministre connaît très bien le dossier de la région de la Mauricie où il a demandé, comme dans quelques endroits au Québec, de retarder le processus qui avait été enclenché pour permettre ce consensus. Au lieu de l'intégration prévue au 1er juillet 1986, il a demandé de la reporter d'au moins un an, ceci lui permettant de faire les discussions avec les commissions scolaires pour les amener à faire cette intégration volontairement.

Compte tenu du fait que, malgré tout cela, il arrivera que des commissions scolaires refuseront pour des raisons différentes d'un endroit à l'autre, de faire l'intégration, de quelle façon le ministre agira-t-il? De quelle sorte de consensus a-t-il besoin pour agir, pour donner le feu vert à l'intégration?

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le ministre de l'Éducation.

M. Ryan: II serait peut-être bon, M. le Président, qu'à ce moment-ci on procède à un certain résumé de la situation et des perspectives qui s'offrent à nous en relation avec l'intégration des commissions scolaires de niveau primaire et de niveau secondaire. Ensuite, je pense que la réponse à la question précise qui a été formulée par le député sera plus facile à énoncer.

Comme vous le savez, à la fin de l'année 1984-1985, nous avions en tout au Québec 246 commissions scolaires. À la fin de l'année 1985-1986, de l'année scolaire actuelle, il en restera 234. Et à compter du 1er juillet, un certain nombre de commissions scolaires procéderont à leur intégration, ce qui amènera le nombre des commissions scolaires à 215. Par conséquent, le processus est en marche, de réduction du nombre des commissions scolaires et de remplacement graduel des commissions scolaires régionales par des commissions scolaires intégrées, offrant de manière intégrée l'enseignement primaire et l'enseignement secondaire à des clientèles généralement réparties sur des territoires plus restreints.

Les commissions scolaires qui avaient déjà fait leur intégration volontaire au 1er juillet 1985 sont les suivantes: Matane-La Tourelle, cela avait entraîné la disparition de la régionale des Monts. Black-Lake, Disraéli, Thetford-Mines avait entraîné la disparition de la régionale de l'Amiante. Troisième cas, Charlesbourg-Des Ilets, la régionale qui est disparue est Jean-Talon. Quatrième cas, Beauport, Côte-de-Beaupré, Chutes Montmorency, la régionale Orléans cessait d'exister par le fait de l'intégration. Ensuite, la commission scolaire régionale des Bois-Francs cessait d'exister le 1er juillet 1985 pour faire place à des commissions scolaires intégrées à Victoriaville, Prince-Daveluy, Jean-Rivard et Warwick. La régionale Lanaudière a fait place, le 1er juillet dernier, à deux commissions scolaires intégrées, Berthier-Dautraie et Nord-Joli. La régionale Papineau a fait place à la commission scolaire Seigneurie et à la commission scolaire Vallée-de-la-Lièvre dans la région de la Petite Nation et de Buckingham comme vous le savez. Joutel-Matagami offre désormais l'enseignement de manière intégrée, mais la régionale Harricana n'a pas cessé d'exister pour autant. Il en va de même des commissions scolaires de Gagnon et de Schefferville qui sont intégrées, mais la commission scolaire régionale du Golfe continue d'exister. (11 h 15)

La commission scolaire régionale Eastern Townships a fait place à la commission scolaire St. Francis annexée à Lennoxville District qui devient Eastern Townships. C'est intégré ici, il n'y a pas de changement majeur de ce côté-là au point de vue légal.

Il y a des commissions scolaires qui vont procéder à leur intégration normalement au 1er juillet 1986. L'autorisation leur a été donnée de procéder à la mise au point de protocoles d'entente concernant les services qui devront être dispensés sur une échelle régionale, les conditions qui seront faites au personnel affecté par les changements structurels, etc. Il n'y a aucune de ces commissions scolaires où l'autorisation définitive a été donnée, parce que nous nous réservons d'apprécier les protocoles d'entente qui seront soumis à l'examen du ministre. Jusqu'à ce jour, il n'y a aucun protocole d'entente qui m'a été soumis pour examen de manière officielle.

Cependant, les fonctionnaires du ministère suivent de près les tractations qui ont cours dans les commissions scolaires concernées et m'informent que, de manière générale, les négociations vont bon train dans la plupart de ces commissions scolaires et qu'on peut présumer que l'on pourra procéder à compter du 1er juillet 1986 à l'intégration dans les cas suivants: la régionale Baie-des-Chaleurs qui sera remplacée par les commissions scalaires intégrées Tracadièche et Ristigouche, Val d'Accueil et Monseigneur Matte. La régionale Bas-Saint-Laurent sera remplacée par les commissions scolaires intégrées la Mitis et la Neigette. La régionale Charlevoix sera remplacée par les

commissions scolaires intégrées du Gouffre et Laure-Conan.

La régionale Tilly sera remplacée par les commissions scolaires intégrées suivantes: Marie-Victorin et Lotbinière, Chaudière-Etchemin-Sainte-Foy. La régionale Carignan sera remplacée par deux commissions scolaires intégrées, Sorel et Tracy. La régionale Châteauguay Valley sera remplacée par la commission scolaire intégrée Ormstown et Lake St. Louis-Châteauguay. La régionale Lignery sera remplacée par deux commissions scolaires, Brossard-Laprairie et Napiervilie. La régionale Honoré-Mercier sera remplacée par Saint-Jean sur Richelieu, Marieville, d'Iberville, Des Rivières, quatre commissions scolaires intégrées. La commission scolaire régionale de l'Outaouais sera remplacée par les commissions scolaires intégrées suivantes: Outaouais-Hull, Gatineau et Champlain ensemble, Aylmer-Pontiac et la commission scolaire dissidente Portage-du-Fort. La régionale Harricana sera remplacée par les commissions scolaires intégrées Quévillon, Barraute-Senneterre et Amos. La régionale du Golfe cessera d'exister et sera remplacée par Port-Cartier, Sept-Îles et Louis-Joliet.

Il y a le cas de la régionale de l'Estrie que je dois ajouter à cette liste. Les discussions sont très avancées entre les commissions scolaires concernées qui composent actuellement la commission scolaire régionale de l'Estrie. Ces commissions scolaires sont au nombre de six. Je peux dire qu'officiellement elles paraissent être unanimes dans le désir de réaliser l'intégration, mais nous leur avons dit avec insistance que nous attendrions, avant de prendre une décision, de connaître le contenu d'un protocole éventuel d'entente. Nous avons eu des représentations très fortes des professionnels non enseignants, des administrateurs scolaires, des enseignants syndiqués, des parents du niveau secondaire nous prévenant contre les conséquences négatives qui pourraient découler pour la qualité de l'enseignement d'une intégration faite dans les conditions qu'on peut envisager actuellement. C'est pourquoi nous avons dit que, tout en voulant traiter cette région sur le même pied que les autres, en voulant éviter de lui infliger toute forme de statut particulier qui pourrait paraître inégal par rapport à celui qui a été accordé aux commissions scolaires des autres régions, nous veillerions avec un soin particulier à vérifier le contenu du protocole d'entente qui pourra nous être soumis dans un avenir très prochain. Il faut que ces protocoles nous arrivent dans un avenir très prochain; autrement, il sera trop tard. Tout cela sera reporté au 1er juillet 1987 dans la meilleure des hypothèses.

Maintenant, parmi les commissions scolaires régionales qui, pour le moment, continuent d'exister ou dont le cas n'a pas été réglé clairement, je mentionne les suivantes: la commission scolaire régionale du Grand-Portage, la commission scolaire régionale Louis-Fréchette; dans ces deux cas, des accords étaient déjà intervenus, mais on nous a informés, depuis quelques mois, que cesdits accords n'existaient plus, les commissions scolaires ayant adopté des résolutions pour annuler celles qu'elles avaient adoptées antérieurement dans le sens de l'intégration.

Parmi les projets d'intégration qui sont présentement en suspens, je mentionne les suivants: la régionale Louis-Hémon au Lac-Saint-Jean. Dans ce cas-ci, les commissions scolaires locales, qui font partie de la régionale, avaient toutes adopté des résolutions demandant l'intégration. Mais, les conditions dans lesquelles allait se faire l'intégration nous paraissaient périlleuses pour la qualité de l'éducation. Nous avons procédé à des vérifications avec les commissions scolaires concernées. Je pense pouvoir dire en toute vérité que, sur la foi des conseils que nous leur avons donnés, elles ont accepté de reporter d'un an la mise en application de leur projet d'intégration. Par conséquent, pour l'année 1986-1987, la régionale Louis-Hémon va continuer de fonctionner et les commissions scolaires locales aussi, à leur niveau. Il y a le cas qui intéresse particulièrement le député de Laviolette, la régionale de la Mauricie.

M. Jolivet: Je la connais et je connais le problème.

M. Ryan: Pardon?

M. Jolivet; Je connais le problème, en plus.

M. Ryan: Je pensais que vous aviez ajouté que vous étiez d'accord avec moi!

M. Jolivet: J'ai dit, M. le ministre, et j'ai répété - là, je parle à titre de député -que, maintenant, c'est vous qui avez les décisions à prendre, prenez-les; j'aurai à les critiquer si je ne suis pas d'accord.

La régionale de la Mauricie

M. Ryan: Merci! Comme vous le savez, nous le faisons volontiers. Alors, dans le cas de la régionale de la Mauricie, je dois rappeler des événements un peu troublants. Après que le gouvernement précédent eut annoncé qu'il ne prendrait aucune décision sans l'accord de toutes les parties intéressées, il adoptait, vers la fin de la dernière campagne électorale, un décret instituant l'intégration de deux commissions scolaires, celle de Normandie et celle du Haut-Saint-Maurice. Nous nous sommes

trouvés aux prises avec ce décret, il n'y avait pas accord des autres parties concernées.

Lorsque j'ai pris la responsabilité du ministère de l'Éducation, j'ai décidé que, pour l'année 1985-1986, l'intégration se ferait sur la base volontaire que définit la Loi sur l'instruction publique, c'est-à-dire moyennant le consentement unanime des commissions scolaires concernées. Alors, j'ai constaté que, de ce côté, il n'y avait pas consentement unanime. J'ai fait faire des médiations, des intermédiations et, même, j'ai fait des interventions personnelles auprès des commissaires concernés. Finalement, j'ai communiqué avec ces gens et j'ai demandé il y a quelque temps - il n'y a pas longtemps, je pense que c'est juste avant Pâques, je pense que je les ai vus le Vendredi saint, pour rendre la situation peut-être encore plus éloquente - aux deux commissions scolaires qui étaient plus particulièrement intéressées à l'intégration de sacrifier leurs aspirations sur l'autel du bien générai et de bien vouloir consentir à ce que le gouvernement décide de différer d'un an l'application du décret qui avait été adopté en novembre dernier, sans doute avec l'approbation du député de Laviolette.

M. Jolivet: Est-ce que le ministre me permettrait ceci afin d'avoir une meilleure discussion de ce dossier? Je ne voudrais pas y aller de façon précise sur celui-là, dans le sens où la question n'était pas de connaître des cas précis. D'ailleurs, la liste que vous avez lue tout à l'heure, celle qui est déjà acceptée et l'autre qui s'en vient, c'est une liste qu'on avait demandée; on nous a dit qu'on nous la ferait parvenir. Malheureusement, il y a eu un imbroglio. On nous a dit qu'on aurait cette liste. Vous nous l'avez lue, mais vous savez que le Journal des débats ne paraîtra que très tard et j'aurais besoin de ces documents le plus rapidement possible afin de voir l'évolution du dossier.

Mais, dans le cas de la régionale de la Mauricie, je ferais remarquer au ministre qu'une décision a été prise au niveau de la régionale, autorisant les commissions scolaires à faire la demande. Et dans le cas de La Tuque, en particulier, cette demande ne causait pas problème. Là où il y a problème, et malheureusement on arrive dans une dialectique politique dans le milieu, chez nous, entre la commission scolaire de Normandie et celle de Shawinigan-Sud, qu'on appelle Val-Mauricie, et Grand-Mère. Et cela, M. le ministre le connaît très bien. Je ne veux pas entrer dans ces détails, parce que ce n'est pas le but de la rencontre de ce matin. C'est seulement pour vous dire qu'effectivement il y avait une décision des commissions scolaires, par la régionale de la Mauricie qui était plus que majoritaire, elle était presque unanime. Dans le cas de La Tuque, elle était unanime; dans le cas de Normandie, majoritaire. Mais je dois vous dire que si on a agi, c'est parce que les gens avaient pris la décision. Qu'ils aient reculé en cours de route parce qu'il y a eu un changement de gouvernement, cela, écoutez on est bien conscient de ce problème.

M. Ryan: M. le Président, est-ce que vous me permettez? Je suis content que vous terminiez votre intervention par cette évocation du changement de gouvernement parce que cela a signifié dans bien des cas un retour à la liberté de penser.

M. Jolivet: M. le ministre, je dois vous dire qu'à ce niveau, c'est simplement pour vous rappeler les problèmes qui existent. Peut-être que je pourrais enclencher sur cette partie, j'avais dit tout à l'heure que je poserais une question. Vous savez très bien qu'il y a eu un conflit à la commission scolaire du Haut-Saint-Maurice au niveau du transport scolaire. Je dois vous dire en même temps qu'il s'est produit des événements, lundi soir, à la commission scolaire du Haut-Saint-Maurice. Huit commissaires sur treize ont démissionné en bloc, justement à la suite de ces événements. Mais, soit dit en passant, sans qu'on fasse l'analyse complète, l'autopsie complète des décisions, les gens ont fort probablement eu en "background" ce que j'ai appelé le dossier Don Quichotte, à La Tuque, où on fonçait à fond de train, peu importent les décisions du ministre de l'Éducation actuel sur l'intégration, alors que, dans le cas de Normandie, on a fait le "low profile", on a décidé de fonctionner de façon différente. Mais c'étaient deux tactiques qui étaient prises dans le milieu pour essayer de forcer la main à un niveau ou à l'autre. Parce que dans le cas de la rencontre avec les commissaires qui, si je ne me trompe pas, était ta journée du lavement des pieds, le Jeudi saint, c'était aussi en même temps le problème: la commission scolaire du Haut-Saint-Maurice n'était pas invitée à cette rencontre, M. le ministre.

M. Ryan: C'est vrai. On doit dire, pour donner le dossier complet, que j'avais rencontré la commission scolaire du Haut-Saint-Maurice dans les jours qui ont précédé et que je lui avais dit, comme il s'agissait de son cas, que je rencontrerais les autres pour les consulter afin de savoir si elles consentaient à ce qu'on lui donne le statut particulier qu'elle demandait. J'avais dit, moi: Si les autres n'ont pas d'objection, nous ferons un cas spécial pour celle-là, étant donné le facteur distance qui est, évidemment, de toute première importance dans ce cas-là. Après cela, je me suis rendu compte, en rencontrant les quatre autres commissions, qu'elles ne voulaient pas donner

le consentement.

M. Jolivet: Ma question portait, sur l'ensemble du dossier, il ne s'agissait pas d'entrer dans ces cas personnels. Je pense qu'on a eu l'occasion de s'en parler. C'est simplement pour vous dire que, malgré ce qu'on a pu dire, je m'occupe des dossiers de mon comté. Lors d'une autre loi proposée en Chambre, je vous posais... Le but du ministre et du ministère était d'arriver è 150 commissions scolaires, environ. Au moment où on se parle, on va être rendu à peu près à 215 avec les acceptations. La question que je pose et que j'ai posée - le reste étant des choses que je pourrais avoir par document, il n'est pas nécessaire d'en faire état ici -c'était: Comment le ministre, dans le cas où il n'y aurait pas consentement, va-t-il agir? Et quand va-t-î! agir? Est-ce que c'est après l'année qui va s'écouler, c'est-à-dire 1988, et non pas 1987, parce qu'il y a toujours des délais à respecter ou est-ce en 1987? Est-ce que le ministre a l'intention d'agir par loi -je ne pense pas qu'il puisse agir par réglementation dans ces cas-là - pour forcer une intégration qu'il juge nécessaire dans des milieux donnés?

Vous parlez de la Mauricie; je pourrais vous parler des Vieilles-Forges. Je sais très bien que le problème de la Mauricie est lié aux Vieilles-Forges. On ne peut pas accorder en Mauricie des choses qu'on va refuser aux Vieilles-Forges, et vice-versa. Dans la mesure où l'intégration aux Vieilles-Forges aurait pour but, à la commission scolaire de Chavigny, d'avoir peu d'immobilisations, la commission scolaire régionale des Vieilles-Forges, Trois-Rivières en particulier, serait prise avec des immobilisations qui profitent à d'autres. Dans ce sens-là, vous connaissez très bien le problème de Louiseville, Chavigny, Pointe-du-Lac, Trois-Rivières, Cap-de-la-Madeleine et autres.

M. Ryan: M. le Président, je crois que j'étais en train de donner un résumé de la situation, tantôt, lorsque j'ai volontiers consenti à être interrompu par le député de Laviolette. Je vais compléter le tableau, cela ne sera pas long, puis je vais répondre à sa question en conclusion, comme je l'avais annoncé au début de mon intervention, s'il veut bien consentir à cela. Je pense que, étant donné que j'ai commencé à donner la situation, cela peut se terminer assez vite, on va avoir le tableau complet pour tout le monde. (10 h 30)

Alors, j'avais commencé à donner des cas où cela n'est pas réglé et où nous n'avons pas de choses claires en vue pour l'avenir prévisible. J'ai parlé de Louis-Hémon, j'ai parlé de la Mauricie et là je ferme la parenthèse sur la Mauricie, quoiqu'on pourrait en parler pendant toute la journée. Le cas des Vieilles-Forges a été mentionné par le député de Laviolette, un cas très aigu, comme il le sait très bien, sur lequel par conséquent nous n'avons pas de perspective d'intégration dans l'avenir prévisible, à court terme. La régionale de Chambly. Tantôt j'ai nommé la régionale Meilleur, j'ai fait une erreur. À la régionale Meilleur, il est survenu des complications en cours de route et nous n'envisageons pas que l'intégration va se faire pour le 1er juillet 1986, parce qu'encore une fois il y a eu ce phénomène que des gens ont repensé à la décision qu'ils avaient prise dans un contexte tout à fait différent. Ne l'oublions point, c'était le contexte de la loi 3, qui par la suite a été jugée inconstitutionnelle par les tribunaux. Cela a amené plusieurs commissions scolaires à reconsidérer la décision qu'elles avaient prise. Dans ce cas-ci, il est arrivé des pépins. Eastern Québec, Lac Saint-Jean, Péninsule, Lapointe, Chaudière, Chauveau, Pascal-Taché, Tardivel, Provencher, Blainville-Deux-Montagnes, Vau-dreuil-Soulanges, Yamaska, La Vérendrye, Gaspésia, South Shore, Western Québec. Par conséquent, il y a encore beaucoup de travail à faire, comme vous le constatez. Beaucoup de travail se présente à nous, à la suite justement du nouveau climat qui a découlé des événements à la fois judiciaires et politiques de la dernière année.

En réponse à la question du député, maintenant que nous avons brossé un tableau à peu près complet - et des renseignements vous seront distribués au cours de la matinée sur tout cela, de manière que vous puissiez les avoir à votre disposition sans délai - nous avons décidé, pour l'année courante, que tout continue sous l'empire de la Loi sur l'instruction publique comme elle existe, c'est-à-dire que ça demande le libre consentement des commissions scolaires concernées pour que nous autres, nous fonctionnions.

Après que nous aurons terminé l'exercice, c'est-à-dire à compter de l'automne prochain - et moi, le délai que je me fixe c'est l'hiver de 1987; à l'hiver de 1987, au début de 1987, nous allons faire un inventaire, nous allons voir où nous en sommes. Nous allons alors nous demander quels sont les pas à franchir pour aller plus loin si nous continuons dans cette direction de manière résolue. Je ferai rapport à la commission parlementaire, à la Chambre, à l'opinion publique également. Pour le moment, nous nous en tenons à la politique que nous avons énoncée quand nous avons pris le pouvoir. Je pense que ce genre de situation que nous avons va permettre que l'intégration se fasse peut-être dans des conditions de consentement plus approfondi de la part des intéressés. Je ne porte pas de jugement sur ce qui a pu se faire avant. Nous autres, peut-être que nous serons

obligés de prendre des responsabilités au terme de l'opération actuelle. Je ne préjuge de rien pour l'instant. Je dois souligner avec force que j'ai continuellement insisté, depuis que je suis impliqué directement dans l'opération, pour que le premier critère ce soit le maintien d'une qualité acceptable d'éducation dans toutes les régions du Québec et non pas le désir de satisfaire à l'ego de certains commissaires d'écoles qui puissent être intéressés par exemple à avoir un empire plus complet sur les affaires scolaires de leur territoire. Notre premier souci n'est pas de créer de petits empires mais de faire en sorte que la responsabilisation des commissions scolaires se fasse, que l'intégration des enseignements se fasse moyennant des garanties satisfaisantes au point de vue de la qualité des enseignements.

M. Jolivet: Je vous remercie, M. le ministre. Donc, je dois comprendre que l'intégration de celles qui seront réticentes pour des raisons diverses et que le ministre examinera au printemps 1987 devra se faire normalement en 1988, selon des décisions qui devront être prises à ce moment-là. Je termine la question de l'intégration, oui?

M. Ryan: Mais je ne voudrais pas que vous me fassiez dire plus que je n'ai dit. J'ai dit que nous examinerons la situation à l'hiver de 1987 et nous tirerons les conclusions qui s'imposeront. J'ai bien dit: si nous considérons à ce moment-là qu'il faut pousser davantage...

M. Jolivet: C'est cela.

M. Ryan: ...dans la ligne de l'intégration. Mais si, d'ici ce temps, on m'arrivait avec toutes sortes de problèmes découlant de la manière dont l'intégration se sera faite et qu'on me disait: faites attention, regardez votre affaire comme il faut... Tout à coup, un certain nombre de commissions scolaires intégrées me diraient: ça ne marche pas notre patente, le genre d'arrangements régionaux qu'on a ce n'est pas bon, c'est bloqué ici et là. On se garde des portes ouvertes de ce côté-là pour examiner la situation. On les suit de très près.

À ce sujet, je voudrais peut-être exprimer un témoignage d'appréciation à l'endroit de mes collaborateurs du ministère de l'Éducation, d'un côté mon cabinet politique et de l'autre côté les fonctionnaires, pour la présence presque quotidienne qu'ils ont à ces situations. C'est vraiment une équipe volante. Quand une situation surgit quelque part, ils sont rendus là le jour même ou le lendemain. Us nous font rapport immédiatement. Ils vont là non pas pour imposer des choses ou dire que le ministre veut ceci ou cela. Le ministre leur a dit qu'il ne sait pas lui-même. C'est pour cela qu'il y a un problème. Ils vont là pour examiner les choses et ils font rapport. Je pense que les commissions scolaires qui ont reçu la visite de nos représentants sont très heureuses de la manière dont elles ont été traitées. Elles voient que c'est vrai qu'on les respecte.

M. Jolivet: Je termine sur cette question de l'intégration en disant que j'espère que les commissions scolaires se mettront d'accord le plus rapidement possible sur la meilleure formule d'intégration pour le milieu en vue d'une éducation de qualité aux jeunes Québécois et Québécoises.

D'un autre côté, je vais vous poser une dernière question concernant le problème qui a surgi justement à la suite de ces phénomènes à La Tuque, en Haute-Mauricie. Juste un dernier détail. Quelles sont les décisions prises par le ministre, étant donné que la commission scolaire existe toujours légalement, sauf qu'il n'y a pas assez de commissaires pour former le quorum qui ont les pouvoirs de prendre rapidement les décisions qui peuvent s'imposer? Est-ce que le ministre a donné des pouvoirs, comme j'y faisais un peu allusion ce matin, plénipotentiaires au directeur général? Est-ce qu'il a l'intention de convoquer une élection générale rapidement pour les postes à combler? Est-ce qu'il a l'intention d'en nommer d'office, compte tenu des pouvoirs qui lui sont conférés?

M. Ryan: J'ai appris hier qu'un commissaire avait été l'objet d'un vote de blâme de la part des parents pour son comportement pendant la grève du transport scolaire et que, devant ce blâme, il a démissionné. Il a été suivi dans son geste par sept autres commissaires, y compris le président de la commission scolaire. Ce qui fait que sur une commission scolaire de treize membres élus il y en a une majorité qui a démissionné. Nous sommes placés devant cette situation.

J'attends un avis juridique écrit de nos conseillers, aujourd'hui. Si l'avis juridique va dans le sens que nous prévoyons, il faudra nommer un administrateur intérimaire de la commission scolaire dès aujourd'hui. Ma plume est prête à fonctionner. Dès que j'aurai reçu l'avis juridique dont j'estime avoir besoin, nous procéderons à la nomination d'un administrateur extraordinaire de la commission scolaire.

En deuxième lieu, je pense que nous procéderons dans les meilleurs délais à une nouvelle élection scolaire, parce que je ne veux pas prendre la responsabilité de nommer huit commissaires d'un coup, comme la loi m'autoriserait à le faire. Étant profondément imbu des principes de la démocratie libérale, je pense qu'il appartient aux citoyens eux-mêmes de procéder au remplacement des

commissaires démissionnaires, et qu'il n'appartient pas au gouvernement de s'ingérer dans ce processus.

Par conséquent, dans les meilleurs délais, nous devrions convoquer une élection mais, avant de prendre une décision, je verrai è recueillir l'avis du député de Laviolette. J'espère que, cette fois-là, il aura un avis plus explicite à me donner que dans une autre situation à laquelle nous avons fait face ensemble, il y a quelques semaines.

M. Jolivet: M. le ministre, j'avais dit que ce n'était pas à vous que j'avais à donner ces renseignements, c'était à un autre ministre, le ministre du Travail, à qui j'avais à les donner. S'il m'avait écouté à l'époque, trois semaines plus tôt, le problème aurait été réglé plus rapidement.

Simplement pour vous donner une nouvelle que vous avez peut-être, mais pour les besoins de la cause. Quant à l'intégration, la décision prise par la commission scolaire du Haut Saint-Maurice d'aller de l'avant, après le conflit des autobus scolaires, dans la nomination du directeur général de la nouvelle commission scolaire intégrée... Lors de la démission de lundi soir, juste avant la démission, ils avaient rescindé la résolution. Peut-être que vous ne le savez pas mais je pense que c'est intéressant.

M. Ryan: Je voudrais accueillir cette nouvelle avec beaucoup de joie, parce que j'avais reçu un télégramme vers la fin de la semaine dernière m'informant qu'un décret du Conseil exécutif du Québec n'avait pas l'air de les déranger, eux autres. J'avais demandé l'avis de nos conseillers avant d'agir mais cela m'inquiétait beaucoup. Je suis bien content de voir qu'ils étaient revenus à une vision plus sensée des choses et qu'ils avaient rescindé cette résolution. Je vous remercie de la nouvelle que vous m'apportez parce que je n'en étais point au courant.

M, Jolivet: Sur la question de l'intégration, j'ai terminé pour te moment, M. le Président.

M. Ryan: Je voudrais juste confirmer là-dessus que le Conseil des ministres, effectivement, à une réunion tenue il y a deux semaines, a décidé que la mise en application du décret adopté en novembre 1985 était différée jusqu'à juillet 1987.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Pour les besoins de la transcription du Journal des débats, nous accueillons le député de Chicoutimi...

Des voix: De Lac-Saint-Jean.

Le Président (M. Parent, Sauvé): De

Lac-Saint-Jean.

Une voix: II paraît qu'il ne faut pas les mélanger.

M. Brassard: Merci, M. le Président.

M. Jolivet: C'est simplement pour dire que la question qui sera posée par le député concerne un dossier personnel au niveau de...

M. Brassard: C'est un dossier de comté.

M. Jolivet: Excusez-moi. Un dossier de comté...

M. Brassard: Cela va.

M. Jolivet: II n'y a pas de problème. Mais cela touche les constructions.

École Notre-Dame-du-Lac-Desbiens

M. Brassard: N'étant pas membre de la commission, si je viens ici c'est certainement parce que c'est pour un dossier de comté. Il s'agit, vous le savez sûrement, M. le ministre, du dossier de l'école Notre-Dame de Desbiens qui fait partie de la commission scolaire régionale de Lac-Saint-Jean, la commission scolaire ayant décidé, il y a quelques semaines, pour l'année scolaire 1986-1987 de fermer l'école. C'est une école de secteur avec environ 200 étudiants de niveau secondaire 1, II et III.

À la suite de cette décision, il y a eu une sorte de mouvement au sein de la population contre cette décision de fermeture. Cela a même pris la forme d'une grève scalaire, en quelque sorte, puisque les parents ont gardé leurs enfants à la maison pendant une vingtaine de jours. Je vous signale que les enfants sont retournés à l'école ce matin. Je pense qu'on vous a sûrement avisé de cela. Il y a eu une réunion des parents hier soir et la décision a été prise de faire réintégrer l'école à leurs enfants.

Je sais aussi qu'il y a eu des rencontres entre des membres de votre cabinet politique de même qu'avec le sous-ministre, M. Rousseau, et des représentants du milieu; des contacts, également, avec la commission scolaire, dont le président, en particulier, M. Tremblay. La question est très simple et complexe en même temps parce que décider de fermer une école, vous le savez sûrement comme ministre de l'Éducation, c'est une décision qui relève de la commission scolaire, c'est de la juridiction de la commission scolaire. Par conséquent, le ministère de l'Éducation, dans des cas comme cela, ne peut pas, je pense, imposer une décision ou une solution différente de celle préconisée par la commission scolaire. Donc, la seule voie possible, c'est celle de la

discussion, de la négociation avec les parties pour en arriver à une solution acceptable.

Je voudrais savoir ceci du ministre: Quelles sont les pistes de solution qui existent relativement à ce dossier? Est-ce que, par exemple, il compte utiliser les nouvelles règles de financement qui vont s'appliquer à partir de l'année scolaire 1986-1987, je pense? Compte-t-il utiliser les nouvelles règles de financement pour en arriver à une solution qui soit à la fois acceptable pour les parents qui veulent maintenir ouverte cette école et aussi pour la commission scolaire qui, il faut le reconnaître, fait face à des difficultés financières réelles? Elle a résorbé un déficit assez élevé. Donc, il faut aussi prendre en considération ce volet de la problématique. Comment envisagez-vous ce problème? Quelles sont les pistes de solution que vous comptez ouvrir pour essayer d'en arriver à une solution acceptable pour les parties?

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le ministre.

M. Ryan: M. le Président, je suis content de voir que le député de Lac-Saint-Jean nous parle de ce problème parce que je crois que c'est la première fois qu'il m'en parle depuis que le problème existe.

Dès que nous avons été saisis du conflit qui avait surgi là-bas entre les parents et la commission scolaire, les officiers du ministère et de mon cabinet se sont mis à l'oeuvre pour établir le contact avec les intéressés, c'est-à-dire d'un côté les parents et de l'autre côté la commission scolaire régionale pour chercher d'abord è comprendre le problème, à voir exactement quelle était la nature de la situation qui avait surgi là-bas et, deuxièmement, pour les aider à chercher des solutions. (10 h 45)

Ainsi que le député de Lac-Saint-Jean l'a souligné, la responsabilité juridique, dans une situation comme celle-là, relève de la commission scolaire. Il incombe à la commission scolaire, en vertu de la Loi sur l'instruction publique, de dispenser l'enseignement sur son territoire, sur des modalités qu'elle juge compatibles avec ses ressources et avec les obligations qu'elle a envers la population de tout le territoire. Mais il arrive souvent que la commission scolaire dise, non sans raison, qu'elle est acculée à telle ou telle décision en raison des politiques de financement du ministère de l'Éducation et qu'elle nous renvoie la balle. Les parents, quand ils se heurtent à un mur du côté de la commission scolaire, ont un réflexe très compréhensible qui les incite à venir frapper à la porte du ministère.

Je me souviens, il y a à peu près un mois et demi, j'étais au restaurant du Mini-Débat, au sous-sol du parlement, et il y avait un groupe qui était là un midi. Les gens sont venus me rencontrer et ils m'ont dit: On s'en vient justement vous voir à Québec, M. Ryan. J'étais étonné parce que je n'en avais pas entendu parler. C'étaient des gens de Desbiens qui s'en venaient poser le problème de leur école. J'avais une très grosse journée cette journée-là, je leur ai dit: Prenez contact avec M. Rondeau, il va être bien content de vous rencontrer, et les officiers du ministère également. Ils ont eu des contacts qui se sont multipliés par la suite.

Je pense que notre rôle, dans une situation comme celle-là, c'est d'essayer de mieux faire comprendre aux commissaires d'écoles le point de vue des parents qui sont affectés et de faire comprendre aux parents d'une manière plus approfondie les préoccupations des commissaires d'écoles et, surtout, de les amener à chercher ensemble les éléments de solution possible. Là, c'est ce que nous faisons.

Vous avez annoncé que les enfants, après plusieurs semaines d'absence de l'école, même de l'école primaire d'après ce que j'ai compris, sont rentrés à l'école ce matin. Je pense que le député sait comme moi que c'est en grande partie grâce au travail de médiation qui a été accompli par M. Rondeau et M. Rousseau, et qui va continuer d'ailleurs. Là, au cours des prochains jours, les deux parties ont accepté de collaborer avec des représentants du ministère à la recherche d'hypothèses de solution au problème de planification financière à la commission scolaire régionale. On va étudier, avec la commission scolaire régionale, tout le dossier financier qui accompagne cette décision et l'explique. J'espère qu'en discutant ensemble on va trouver des solutions. Nous allons être là pour aider. À un moment donné, s'il arrive qu'on voie les responsabilités qui nous incombent sous un jour différent, nous nous poserons des questions aussi. Mais, pour le moment, c'est comme ça que le problème se pose.

Je veux vous signaler un autre exemple, si vous me le permettez, qui va aider à comprendre l'approche du ministère dans ces cas. Nous avons eu un cas très douloureux de fermeture d'école anglo-catholique dans la ville de Laval il y a quelque temps. La décision était prise d'une manière irrévocable, c'était final et, là, nous sommes intervenus un peu de la même manière dans le dossier. Nous avons aidé les parties à se parler entre elles et une solution a été trouvée pour la période qui s'en vient immédiatement et qui est acceptable à toutes les parties. On a décidé sur une base plus longue... Là, la tentation des commissions scolaires catholiques dans bien des endroits, c'est de se délester de leurs responsabilités envers leurs élèves anglophones et de les confier à des

commissions scolaires protestantes sans même se demander s'il n'y aurait pas des choses qui pourraient être faites pour les garder sous la responsabilité de commissions scolaires catholiques et leur dispenser des services auxquels ils ont droit. Dans cette région, on va amener des commissions scolaires catholiques du territoire à se poser des questions à savoir s'il n'y aurait pas certaines mises en commun à faire. Des fois, une commission scolaire catholique va parler tout de suite à la commission scolaire protestante pour faire une entente avec elle et il ne lui vient pas à l'idée de parler à la commission scolaire catholique voisine pour voir si elles ne pourraient pas se mettre peut-être trois ou quatre commissions scolaires catholiques ensemble pour trouver une solution. C'est bien plus facile de pelleter le problème dans le jardin de l'autre.

Alors, on est à la recherche d'avenues peut-être inédites de ce point de vue, mais c'est le genre de rôle que le ministère de l'Éducation peut remplir dans des situations comme celles-là. Une chose est sûre, il ne faut pas commencer à dire: Là, c'est très bien, gardez-la ouverte et nous allons mettre tant d'argent de plus dans le dossier. Si on fait cela à une place, il faut le faire à l'autre et à l'autre. Je crois que par le processus de responsabilisation et de dialogue que j'ai évoqué, c'est la meilleure manière dont nous puissions rendre service. Les commissions scolaires qui ont eu à transiger là-dessus avec nous se sont rendu compte que c'était notre approche et elles l'apprécient.

M. Brassard: M. le Président, je suis évidemment parfaitement d'accord avec le ministre quand il indique que le processus qui doit être suivi est celui du dialogue et de l'échange entre les parties. Je suis d'autant plus d'accord - on l'a sûrement informé de ce fait - que ce problème n'est pas nouveau; il a déjà surgi il y a deux ou trois ans. La commission scolaire avait pris une décision semblable. Le ministère de l'Éducation, via le bureau régional et le sous-ministre également, s'était impliquée et je m'étais intéressé aussi au dossier. Finalement, la commission scolaire a modifié sa décision il y a deux ou trois ans. Cela s'est fait par la voie du dialogue et de l'échange, comme vous l'indiquez. Je suis d'accord avec vous, mais je veux simplement vous signaler que le problème a déjà surgi et qu'il va falloir qu'on trouve de nouvelles pistes parce que l'examen de la situation financière de la commission scolaire a déjà été fait par le bureau régional et par le ministère de l'Éducation. Le problème du déficit de cette commission scolaire n'est pas nouveau, il est connu maintenant depuis plusieurs mois. Il y a eu également de la part du ministère un examen approfondi de la situation financière de la commission scolaire pour tenter de trouver des moyens et des solutions visant à résorber ce déficit. Par conséquent, l'opération qui est enclenchée -je tiens à le signaler, vous en êtes sûrement conscient - ce n'est pas une opération qu'on peut qualifier de nouvelle parce qu'il y a déjà eu un examen de la situation financière de la commission scolaire. C'est une opération qui est reprise en espérant qu'un nouvel examen, une nouvelle analyse va peut-être permettre de trouver des solutions qui vont satisfaire les parties, mais ce n'est pas une opération nouvelle.

La dernière question là-dessus, je ne veux pas prendre trop de temps de la commission non plus, c'est simplement ce que j'ai posé au début, vous n'y avez pas répondu: Est-il possible, par le biais des nouvelles règles budgétaires qui vont s'appliquer à partir de l'année scolaire 1986-1987, de ces nouveaux paramètres de financement, d'identifier, de trouver des solutions à un problème comme celui-là qui permettrait à la commission scolaire de garder l'école Notre-Dame-du-Lac-Desbiens ouverte ou si, vraiment, de ce côté, il y a peu de chance de trouver une solution à ce problème?

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le ministre de l'Éducation.

M. Ryan: Nous venons tout juste d'adopter les nouvelles règles budgétaires. Nous avons examiné l'impact qu'elles auraient sur le financement de la commission scolaire régionale du Lac-Saint-Jean et des commissions scolaires locales qui en font partie. Il y a aussi un régime de transition que nous avons mis au point et qui va atténuer certaines conséquences que cela pourrait avoir. Il faut regarder cela à la lumière de la situation financière des commissions scolaires concernées également.

En ce qui touche le problème plus immédiat que vous posez, nous aurons une définition des éléments qui s'appliquent à votre situation, qui va permettre de regarder le problème avec compréhension.

M. Brassard: Juste une petite... Vous vous donnez...

M. Ryan: M. le Président, j'aimerais que nous en venions... Je me souviens qu'un jour un ancien ministre de l'Éducation du gouvernement précédent, je pense que c'était M. Jacques-Yvan Morin, avait annoncé une politique au nom du gouvernement en matière de fermetures locales. Il avait dit: On ne fermera plus les écoles locales. Son dernier successeur du côté de l'ancien gouvernement, qui est ici ce matin, le député d'Abitibi-Ouest, se rend compte que

c'est une politique qui n'est pas applicable dans les circonstances d'aujourd'hui. On n'avait pas prévu que les effectifs déclineraient aussi spectaculairement dans certains endroits à ce moment-là. C'est un problème qui me préoccupe particulièrement vu les nombreux cas dont j'ai été saisi au cours des derniers mois. J'espère trouver une solution, peut-être à l'automne, après qu'on aura eu le temps de voir, d'une manière plus concrète, tout l'impact des nouvelles règles budgétaires, avec des éléments d'une politique qui serait peut-être plus explicite que ce que nous avons actuellement de ce point de vue-là.

Je ne pense pas que ce soit satisfaisant pour le ministre de l'Éducation de dire tout simplement: Cela, c'est ia responsabilité de la commission scolaire, qu'elle s'arrange avec. On a une responsabilité quand il y a des situations qui surgissent. Je vais essayer de la définir plus clairement au cours des mois à venir. Mais, pour le moment, je ne suis pas en mesure d'en dire davantage.

M. Brassard: Une toute petite question, M. le Président. Qu'est-ce que le ministère se donne comme délai pour faire le réexamen avec les parties, de la situation financière de la commission scolaire?

M. Ryan: Je pense que, de notre côté, cela va assez vite. Je tiens à le souligner, il y a une atmosphère d'efficacité, au ministère de l'Éducation, à laquelle je collabore volontiers. Je pense qu'on peut dire que les choses ne traînent pas en longueur. C'est pourquoi le premier examen va se faire à la commission scolaire régionale dès la semaine prochaine. Dès la semaine suivante, il y aura examen, au besoin, avec les commissions scolaires locales également. Cela ne traînera pas.

M. Brassard: Donc, quinze jours, trois semaines.

M. Ryan: Oui.

M. Brassard: Merci.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. le ministre et M. le député de Lac-Saint-Jean. Je reconnais maintenant le député de Richelieu.

M, Khelfa: Merci, M. le Président. Si je peux retourner au dossier de l'intégration et poser une question au ministre sur un point bien précis... M. le ministre, vous avez mentionné que la régionale Carignan sera intégrée et modifiée et qu'il y aura deux commissions scolaires, Sorel et Tracy.

Si je me réfère à la dernière campagne électorale, le porte-étendard du Parti québécois a créé des attentes malgré que c'est lui qui a imposé cette intégration. Il a créé ces attentes en disant que, à la place de deux commissions scolaires, la région sera dotée d'une seule commission scolaire. Le processus de cette intégration s'est fait par une forme d'imposition politique de la part de l'ancien gouvernement. À l'heure actuelle, dans le milieu, à la suite de la campagne électorale et des promesses du Parti québécois de l'époque, il y a eu... C'est vrai, je sais qu'il n'est plus là. Mais il nous rappelle nos engagements, nous lui rappelons les siens, qui sont plus nombreux que les nôtres.

J'aimerais poser la question suivante au ministre: Est-ce que l'intégration, dans le cas de la régionale Carignan, est un processus terminé, qui sera mis en vigueur le 1er septembre 1986, d'une façon non révocable, ou bien s'il pourra y avoir une sorte de modification afin d'avoir une seule commission scolaire sur le territoire?

M. Ryan: Avec plaisir. Je vais essayer de répondre à la question du député de Richelieu. Dans le cas de Richelieu, la demande a été faite pour la création de deux commissions scolaires intégrées. L'autorisation a été donnée de procéder aux tractations en vue d'en venir à ce résultat. Les derniers renseignements qui me parviennent m'indiquent qu'un projet de protocole a été déposé à la Direction régionale du ministère de l'Éducation. Il est actuellement à l'examen et ce projet de protocole devrait me parvenir dans un avenir rapproché. Alors, si le protocole répond aux exigences que nous avons en général, nous donnerons l'autorisation de procéder à compter du 1er juillet 1986, parce que je veux que nous procédions de la même manière partout. Je ne veux pas que nous donnions l'impression que les critères changent, selon que nous sommes dans un territoire où nous avons telle sympathie politique ou telle autre, etc. Je veux que ce soit la même chose partout. (11 heures)

Maintenant, à supposer que cela se fasse, ce n'est jamais définitif et irrémédiable. S'il arrivait au bout d'un, deux ou trois ans que les deux commissions scolaires intégrées veuillent fusionner pour former une commission scolaire intégrée à une échelle territoriale plus large, je pense que ce serait examiné avec beaucoup de sympathie par l'actuel ministre de l'Éducation. J'ai un réflexe, je vous le dis franchement. Je trouve que, dans un certain nombre de cas, les commissions scolaires intégrées vont être trop petites et elles vont se rendre compte que cela crée des problèmes. Je ne voulais pas défaire tout ce qui a été fait jusqu'à maintenant. On a procédé dans une certaine voie. J'essaie de contenir les choses le plus possible. Si on me disait, dans un cas

ou l'autre: On s'est aperçu, à l'expérience, que ce serait mieux d'avoir une base territoriale plus large, il n'y aurait pas de résistance de ma part. Au contraire,' je vais examiner cela avec beaucoup de sympathie.

M. Khelfa: Juste pour compléter. Je sais que nous étions pas ma! orphelins, malgré que le comté était au pouvoir. Depuis l'arrivée du parti libéral au pouvoir, nous avons eu un Cégep à notre dimension qui était demandé depuis 1978. Malgré la conjoncture financière, nous avons obtenu un agrandissement d'envergure qui répond aux besoins. C'est ce soir que l'on parle de cela?

Mais, M. le député de Laviolette, je vous donne une primeur.

M. Ryan: Le député pourra venir le redire ce soir, ça nous fera bien plaisir.

M. Khelfa: Merci, M. le ministre.

Le Président (M. Parent, Sauvé): La députée de Jacques-Cartier.

M. Jolivet: Je m'excuse, M. le Président, pourquoi ça ne serait pas moi en alternance?

Le Président (M. Parent, Sauvé): La règle de l'alternance n'existe pas réellement. Elle existe dans les principes et dans la coutume. Je pense que j'ai donné une opinion lorsqu'on a commencé les travaux. J'ai dit que je reconnaissais le principe que les commissions parlementaires sont un endroit privilégié pour l'Opposition pour interroger le gouvernement et tout cela. Il ne faut quand même pas oublier qu'il y a une majorité de députés qui ont été élus et qui peuvent intervenir. Je ne pense pas que, dans mes décisions, j'aie brimé l'Opposition dans son droit de parole. J'ai reconnu, tout à l'heure, immédiatement le député de Lac-Saint-Jean, qui a fait son intervention et, maintenant, je reconnais la députée de Jacques-Cartier.

M. Jolivet: M. le Président, juste pour bien clarifier la situation. Je ne voulais pas mettre en doute votre décision. Je voulais simplement savoir pourquoi et vous m'avez donné une réponse. Je vous dis cependant que je suis d'accord pour que Mme la députée de Jacques-Cartier, qui a une question à poser, la pose dans les 10 % de temps qu'ils ont à leur disposition.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Mme la députée de Jacques-Cartier va poser sa question dans le temps qu'elle a à sa disposition.

Les professionnels non enseignants

Mme Dougherty: Comptez les minutes; Merci, M. le Président.

M. le ministre, c'est bien reconnu que les problèmes, les enfants en difficulté, toutes sortes de difficultés augmentent dans nos écoles. Je parle des difficultés sociales, des difficultés sur le plan pédagogique, difficultés de comportement. En même temps, malgré cette croissance d'élèves avec des problèmes dans nos écoles, on a vécu, depuis des années, une diminution du personnel qui s'occupe principalement de ces enfants. Je parle des conseillers pédagogiques et des professionnels non enseignants. C'est évident qu'à cause des coupures budgétaires depuis plusieurs années, ces catégories de personnel étaient particulièrement vulnérables parce qu'elles n'étaient pas protégées; il n'y avait pas de ratio, pas de règles de jeu spécifiques pour les protéger et les commissions scolaires n'avaient pas le choix. Elles ont coupé dans ces catégories de personnel parce que c'était une de leurs seules catégories où il y avait une certaine marge de manoeuvre budgétaire.

J'aimerais savoir d'abord quelle est la situation actuelle en ce qui concerne... Je n'ai pas vu les chiffres dans le cahier. Je crois que, l'année dernière, on a vu l'évolution de cette catégorie de personne! par rapport à d'autres effectifs dans nos commissions scolaires. Le pourcentage a diminué depuis longtemps. J'aimerais savoir quelle est la situation actuelle, le pourcentage ou le ratio du personnel non enseignant par rapport au personnel enseignant. Deuxièmement, est-ce que nous avons des chiffres qui comparent la proportion de ces catégories de personnel par rapport à la proportion en Ontario?

Le troisième volet de ma question, c'est: Quel sera l'impact des règles budgétaires à l'égard de ces catégories de personnel? Est-ce que l'impact probable sera de diminuer davantage la proportion? Est-ce que l'impact assurera une stabilisation de ces personnels? Quel en sera l'impact? Je crois que lorsque l'on parle de toutes les difficultés que nous avons dans les écoles, les décrocheurs, les mesures qu'on essaie de prendre pour enrayer une augmentation de ces décrocheurs, toutes ces mesures de prévention qui sont tellement nécessaires, je crois qu'il faut examiner de près la disponibilité du personnel qualifié pour leur aider.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le ministre de l'Éducation.

M. Ryan: M. le Président, tout d'abord, je voudrais signaler à la députée de Jacques-Cartier que, dans le cahier explicatif remis aux membres de la commission parlementaire en vue de l'étude des crédits à laquelle nous procédons, elle trouvera, en pages 44 et 45, les données - au programme 4 - qu'elle a demandées concernant l'évolution des

personnels de chaque catégorie au cours des neuf dernières années.

En ce qui concerne les professionnels non enseignants, on constate que les effectifs sont passés de 4138 en 1976-1977 à 3357 en 1985-1986, soit, pour cette période, une diminution de 18,9 %, alors que la clientèle a connu une diminution de 20,9 %. Par conséquent, suivant ces chiffres du moins, le glissement n'a pas été aussi spectaculaire que certaines affirmations qu'on entend couramment pourraient le laisser entendre.

Ensuite, je crois que la députée a demandé des renseignements sur l'évolution de la clientèle des enfants en difficulté d'adaptation et d'apprentissage. Il y a eu une augmentation de ce point de vue. On constate que, seulement entre 1984-1985 et 1985-1986, il y a eu une augmentation de 9643 élèves considérés comme en difficulté d'adaptation et d'apprentissage, soit 9,7 %. Alors, nous avons un tableau ici, que je pourrai volontiers mettre à la disposition des membres de la commission, sur l'évolution des clientèles en difficulté d'adaptation et d'apprentissage, par catégorie. Je pense que cela va vous donner un tableau complet. On va voir que c'est vraiment un problème auquel la députée de Jacques-Cartier a raison de s'intéresser de manière aussi approfondie et sur lequel elle a encore doublement raison d'attirer constamment notre attention. Franchement, devant les chiffres qui ont été soumis à mon attention, je me suis rendu à l'évidence.

Je voudrais, encore une fois, exprimer ma vive appréciation pour l'inquiétude que manifeste à ce sujet la députée de Jacques-Cartier. Le problème est aigu, il est en croissance. Il fait appel à notre intervention.

Je vois que la députée de Jacques-Cartier fait un signe. Je voulais maintenant indiquer en quoi les nouvelles règles budgétaires vont nous permettre d'agir sur ce problème, d'une manière que je souhaite plus efficace. Mais, si la députée de Jacques-Cartier a des précisions à me demander sur ce qui a déjà été dit, je n'ai pas d'objection à me laisser interrompre à ce moment-ci et à compléter ma réponse ensuite.

Mme Dougherty: M. le ministre, je sais que le nombre d'enfants identifiés en difficulté d'apprentissage a augmenté pour plusieurs raisons, mais je parle aussi d'autres problèmes. On sait très bien que nous avons de plus en plus d'enfants de familles monoparentales. On a des décrocheurs et de la drogue, toutes sortes de problèmes qui sont reflétés dans nos écoles et qui ne sont pas parmi les 10 %. Il y a plus de problèmes que les 10 %. Je n'ai pas examiné les règles budgétaires en détail - j'ai vu quelques réactions aux premières versions - mais j'aimerais assurer que le personnel nécessaire pour s'occuper de ces enfants, de ces problèmes et de ces difficultés est adéquat et qu'encore une fois on ne va pas préjuger des possibilités des commissions scolaires d'embaucher, d'avoir parmi leur personnel un personnel adéquat pour s'occuper de ces enfants. Je ne suggère pas quelque chose de précis, mais je crois que les règles budgétaires sont la clé dans l'administration d'une commission scolaire.

Indirectement, les règles budgétaires imposent certaines priorités aux commissions scolaires. Les règles budgétaires déterminent les secteurs où la commission scolaire a une certaine marge de manoeuvre et les secteurs où il n'y a pas de marge de manoeuvre. Donc, ce que je demande, c'est: Est-ce qu'en préparant les règles budgétaires on était sensible à ce problème? Si le résultat des règles budgétaires était de diminuer encore notre capacité de servir ces enfants, cela serait un résultat très regrettable.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le ministre.

M. Ryan: Justement, je complète ma réponse en abordant le troisième volet auquel j'allais m'adresser. Dans les nouvelles règles budgétaires, il y a des changements qui visent à tenir compte des considérations comme celles qui viennent d'être émises par Mme la députée de Jacques-Cartier. Les rapports maître-élèves qui déterminent l'allocation budgétaire concernant les enseignants qui oeuvrent en adaptation scolaire ont été rajeunis en tenant compte du taux d'incidence et du type d'élèves en difficulté observés en 1984-1985 pour chacune des écoles. Auparavant, les données utilisées étaient celles de l'année 1982-1983. Comme il y a eu augmentation, c'est évident que cela va affecter le rapport maître-élèves d'une manière qui va permettre d'améliorer les services disponibles parce qu'il va y en avoir plus.

Deuxièmement...

Mme Dougherty: Vous parlez des classes spéciales, n'est-ce pas? Le "waiting" donné à chaque enfant?

M. Ryan: Oui.

Mme Dougherty: Mais je parle de tous les problèmes dans les classes régulières qui ne sont pas nécessairement...

M. Ryan: Oui, mais on va commencer par celui-là, on va déjà faire beaucoup. C'est évident qu'il peut arriver que des problèmes de mésadaptation surviennent dans les cas les plus inattendus. Là on est obligé de parler ici d'abord des problèmes qui peuvent être catégorisés comme tels. L'autre problème, il va falloir s'y adresser également. Cela fait partie de l'organisation générale que l'on va

faire dans les écoles.

(11 h 15)

Je continue ma réponse. En deuxième lieu, le nouveau mode d'allocation permet un changement important en tenant compte désormais de l'incidence de la clientèle des élèves en difficulté d'adaptation et d'apprentissage - cela va intéresser particulièrement la députée de Jacques-Cartier - dans le financement du personnel autre qu'enseignant, de même que dans les autres coûts encourus par la commission scolaire: matériel didactique, équipement, etc. On va tenir compte de cela. Je pense que cela va permettre d'enrayer certains glissements qui étaient à l'oeuvre dans de trop nombreux endroits. Ainsi, une des variables qui aideront à déterminer le montant de l'allocation, ce sera le poids de la clientèle en difficulté sur la clientèle totale de chacune des commissions scolaires. Les anciennes règles ne tenaient pas compte, dans ces secteurs, du type d'élèves en difficulté. Là, il y a quelque chose de spécial.

En troisième lieu, nous avons vu à exempter des compressions le montant des allocations supplémentaires qui est consacré à l'adaptation scolaire en vue principalement du financement de centres spécialisés pour ces clientèles. Je pense que c'est une autre illustration de ce que je disais hier: de manière très générale, les compressions n'auront pas d'effet direct sur les services offerts aux clientèles; nous avons vu à ce qu'elles soient effectuées dans des régions que j'appellerais périphériques. Au service à la clientèle proprement dite, il faudra surveiller pour qu'il n'y ait pas trop de glissements de ce côté parce que cela rejoindrait les clientèles tôt ou tard. Mais de manière très générale, il n'y aura pas beaucoup de matière pour des campagnes larmoyantes sur la détérioration des services aux clientèles, parce que nous voyons de manière très générale à les maintenir. Franchement, c'est très exceptionnel que les clientèles soient frappées directement.

M. Jolivet: Est-ce que le ministre pourrait me permettre une remarque à ce moment-ci?

M. Ryan: Volontiers.

M. Jolivet: II y a deux choses - je voudrais passer è d'autres étapes après - que je voudrais mentionner au ministre. À la page 44, quand il parlait de la diminution de 18,9 % au niveau du personnel non enseignant, et en faisant mention du nombre d'élèves qui diminue de près de 20 %, j'aimerais lui faire remarquer que ce sur quoi les gens posent leur diagnostic, ce n'est pas sur la comparaison entre ces deux chiffres, mais c'est plutôt en comparaison avec le chiffre à la doite des 20,9 %, qui est une diminution de 5,7 % au niveau des cadres et hors cadres des commissions scolaires. Ils disent: Vous enlevez du personnel proche de chacun des enfants, mais vous en laissez davantage aux cadres et hors cadres. Comme les commissions scolaires ont pour effet de réintégrer l'élémentaire et le secondaire, on devrait faire disparaître une partie de ce personnel et on ne le voit pas dans les chiffres.

La deuxième partie sur l'aide à la clientèle scolaire, le ministre et M. Rousseau, qui est là depuis un bon moment, j'aurais quasiment voulu faire une boutade en lui disant tout à l'heure de peut-être aider à l'intégration élémentaire-secondaire du secteur de Chambly d'où il provient il y a plusieurs années déjà... Simplement de bien faire remarquer que la Commission scolaire de Shawinigan, à l'époque des années soixante à soixante-dix environ, avait utilisé les règles budgétaires qu'on appelait à l'époque, les moyens des ratios. Une des questions qui se posaient dans le milieu: Comment se faisait-il qu'à Shawinigan il y avait beaucoup d'enfants, presque 30 % à 40 % des enfants, qui étaient en difficulté d'apprentissage léger, profond ou autre? On disait: À Shawinigan y a-t-il un problème majeur, pourquoi? C'est parce qu'ils ont été intelligents, ils ont utilisé à ces fins les règles budgétaires, les ratios, et à partir de cela ils préservaient leur personnel qui était en diminution à l'époque.

Tout le monde connaît cela. Si le ministre veut me dire qu'il favorise cela, je pense qu'on reviendrait en arrière. Ce n'est pas cela je pense qu'il favorise. Dans ce contexte, j'aimerais bien lui faire remarquer qu'on peut bien ne pas vouloir avoir de débats larmoyants sur les difficultés de ces étudiants, mais il ne faudrait pas qu'on utilise ce moyen pour gonfler artificiellement le personnel et en particulier, à l'époque, les cadres.

M. Ryan: Je remarque que le député a fait une observation intéressante en parlant du sous-ministre adjoint à la direction des réseaux quand il a dit qu'il ne semblait pas être prophète en son pays. Il ne semble pas l'avoir été plus que le député de Laviolette dans son territoire.

M. Jolivet: Sur l'intégration, non! En aucune façon. D'ailleurs, doit-on dire que ce problème résulte des années soixante?

M. Ryan: Apparemment il y a seulement le territoire d'Argenteuil qui échappe à ces exceptions, parce que chez nous tout est synonyme de paix et de concorde.

M. Jolivet: Ah bon!

M. Ryan: Je ne sais pas, je suis absent un peu plus depuis quelque temps, j'espère que cela continue de bien aller. Cela étant fermé, je pense que le député souligne un écueil très réel auquel nous sommes sensibles. Il y a deux choses qu'il a soulignées. Il y en a une qui n'est pas tout à fait reliée à ce que nous devons discuter. Oui, cela l'est. Quand il a souligné les chiffres à la colonne de droite, disant que la réduction dans les cadres scolaires avait été pas mal plus basse que celle qui est survenue dans d'autres colonnes, il y a des explications qui sont contenues dans le cahier dont il a sans doute pris connaissance aussi. Il y a une partie de ces explications qui est juste. L'autre partie peut être discutable.

Évidemment, cela fait partie des responsabilités qui sont attribuées de par la loi aux commissions scolaires. Il ne faut pas que nous allions nous substituer à elles dans toutes ces décisions. Tout le problème de "overhead cost", les frais d'administration générale dans notre système d'enseignement, en est un qui doit nous préoccuper et sur lequel nous devons conduire périodiquement des études indépendantes.

Je ne veux pas mettre en cause la bonne volonté de mes collaborateurs immédiats mais, si je leur demande si notre machine est trop grosse en général, ils vont être portés à me dire qu'elle n'est pas assez grosse. À bien des endroits, si nous étions mieux équipés, nous ferions un meilleur travail. Nous avons tous ce réflexe. Cela va être une de mes responsabilités de faire certaines études indépendantes pour qu'on voie si, du point de vue de ces frais de "overhead" dans notre système, il n'y a pas des allégements qui peuvent être recherchés. Le point qu'a souligné le député justifierait des vérifications et des analyses approfondies, nous en sommes conscients. C'est un point, par conséquent, très pertinent dans notre discussion.

Sur le deuxième point, il y a un danger. C'est évident que certaines commissions scolaires, voyant que les allocations ne seront pas les mêmes pour les élèves en difficulté d'adaptation et d'apprentissage, pourront être tentées d'augmenter ou de gonfler même artificiellement le nombre de ces élèves pour soutirer plus d'argent sous forme de subventions. C'est un point dont nous sommes conscients, auquel nous sommes sensibles et sur lequel nous allons veiller de manière particulièrement vigilante au cours des mois à venir. C'est un écueii que le député a souligné avec beaucoup de raisons et que je note soigneusement.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Mme la députée de Chicoutimi.

Les articles scolaires des enfants des assistés sociaux

Mme Blackburn: Le ministre a probablement été informé de la démarche de l'Organisation populaire des droits sociaux de la région de Montréal. Ce groupement réclame que ce qu'on appelle les frais pour matériel scolaire pour les enfants des assistés sociaux passent de 35 $ à 100 $. On sait qu'il y a quelque 143 380 enfants au Québec du primaire et du secondaire qui sont touchés, qui sont enfants d'assistés sociaux, donc qui sont touchés par cette mesure. Je sais pertinemment que la décision ne relève pas du ministère de l'Éducation. Elle relève du ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu. J'aimerais savoir si le ministre a pris connaissance de cette demande. Est-ce qu'il a fait des interventions auprès de son collègue au ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu et est-ce qu'il y a des décisions qui ont été prises sur cela?

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le ministre.

M. Ryan: Je suis au courant des représentations qui ont été faites par le groupement dont Mme la députée de Chicoutimi parle et aussi par d'autres groupements. C'est une question qui me préoccupe, au sujet de laquelle notre ministère a déjà fait des représentations au ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu. Je suis reconnaissant que vous me rappeliez ce point. Je vais en parler de nouveau à la première occasion avec mon collègue, le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, pour lui faire part de mon vif désir qu'on tienne compte de la situation de ces parents.

Mme Blackburn: Vous comprendrez, je pense bien, puisque vous avez partagé assez rapidement mon point de vue, que 35 $ pour faire son entrée à l'école à l'automne, cela établit une distinction très nette entre ces enfants et les autres enfants qui entrent à l'école. On nous dit qu'il y a certains enfants et des professeurs qui attendent plusieurs jours, voire des semaines, avant que les étudiants, les jeunes puissent acquérir le matériel scolaire jugé indispensable. Vous l'avez compris, toute la question qui touche l'accessibilité aux études pour les jeunes issus de milieux défavorisés me préoccupe particulièrement. Il me semble là qu'il y a une mesure qui mériterait qu'on la corrige dans les meilleurs délais. Est-ce que ce sera 75 $ ou 100 $, comme le demande l'Organisation populaire des droits sociaux? Je ne saurais pas le dire. Je ne saurais pas le fixer. Mais il me semble important qu'on se penche là-dessus pour qu'il y ait quelque chose de fait avant la rentrée scolaire.

M. Ryan: Mme la députée de Chjcoutimi peut compter que je vais intervenir auprès du ministre responsable pour lui faire part des préoccupations qu'elle a soumises à notre commission et que je partage entièrement.

Mme Blackburn: Merci.

M. Ryan: Je me souviens que j'étais intervenu à ce sujet dès le temps où j'étais dans l'Opposition. Je l'ai fait en arrivant au gouvernement également. Mais, ces derniers temps, le problème n'avait pas été rappelé à mon attention et je suis bien content que cela ait été fait ce matin.

Mme Blackburn: Merci.

M. Jolivet: Maintenant, M. le Président, est-ce que je peux passer à une autre étape? Oui?

Le Président (M. Parent, Sauvé): Allez, M. le député de Laviolette.

Construction des équipements

M. Jolivet: C'est l'étape de la construction et des équipements. Dans votre document explicatif, à la page 36, vous avez parlé de la programmation de 1985-1986, du plan triennal de conservation et, de développement des équipements de 1985 à 1988, qui a été établi à partir des recommandations des directions régionales et selon les décisions du ministre de l'Éducation. C'est ainsi que 13 nouveaux projets ont été autorisés pour un montant de 18 400 000 $ au programme Ajouts d'espaces. Quelque 259 projets ont été également autorisés pour un montant de 12 000 000 $ au programme Amélioration des écoles, 32 de ces projets avec agrandissement, pour un montant de 6 400 000 $, et 227 projets sans agrandissement, pour un montant de 5 600 000 $. On mentionne aussi les évaluations du parc immobilier scolaire qui sont en cours de réalisation de façon à permettre d'assurer une plus grande adaptation des bâtiments aux besoins pédagogiques et administratifs actuels et à venir.

Dans votre document, à la page 25, dans le programme 4 cette fois-ci - tout a l'heure, c'était dans le programme 1 qu'on faisait les mentions générales - on parle des parachèvements et des initiatives nouvelles. Les parachèvements comprenaient les déboursés prévus en 1985-1986 pour les projets de toute nature autorisés avant le 30 juin 1985 et pour les treize projets d'ajouts d'espaces autorisés en 1985-1986. On parle aussi de l'enveloppe pour la conservation des équipements, c'est-à-dire l'acquisition, le remplacement du mobilier, de l'appareillage, de l'outillage, le maintien en bon état des biens immobiliers et certaines mesures spéciales, telle l'adaptation scolaire, les déboursés, etc. On dit tout cela, avec la micro-informatique et les autres projets dits hors enveloppe à cause de vices de construction ou, dans certains cas, d'actes de Dieu ou de difficultés lors de feux où des choses semblables peuvent arriver.

On dit; Les crédits d'immobilisation, cette année, cependant, passent de 24 800 000 $ en 1985-1986, è 22 000 000 $ en 1986-1987, soit une diminution de près de 12 %. Selon le sommaire des plans de conservation et de développement des équipements, des déboursés de 150 300 000 $ sont donc prévus en 1986-1987 par rapport è 205 000 000 $ en 1985-1986. Ceci va s'expliquer par une diminution de 28 000 000 $, d'après ce qu'on a comme renseignement, pour les projets découlant des plans précédents, soit une coupure de 22 400 000 $ prévue pour la micro-informatique et 6 000 000 $ pour l'amélioration des écoles.

De plus, il est précisé dans le cahier explicatif que ce plan d'équipements comporte des déboursés pour les parachèvements. On entend dire que des discussions ont présentement cours au sein du gouvernement pour de nouveaux investissements. Hier, le ministre nous disait autre chose. C'étaient les renseignements que nous avions avant la déclaration qu'il faisait hier. Dans le discours du ministre, on disait que les ressources totales du ministère font en sorte que, finalement, l'année 1986-1987 ne sera pas une année faste en matière de dépenses d'immobilisations, le Conseil du trésor ayant décidé qu'aucune initiative nouvelle ne serait acceptée à ce chapitre. Il faudra nous borner à donner suite aux projets déjà engagés ou inscrits à la programmation, a dit le ministre, non sans chercher à couper ou à différer certains projets qui ne seraient pas très engagés ou rigoureusement nécessaires. (11 h 30)

La question qui se pose alors est à savoir si... Dans le plan de 1985 à 1988 et pour les années qui suivent, il y avait une programmation prévue. Dans cette programmation, il y a des améliorations et des constructions qui vont être faites parce qu'elles sont déjà trop engagées pour être arrêtées. D'autres vont être arrêtées et d'autres encore, probablement. La question va survenir: Est-ce que le ministre a fait des changements par rapport à ce plan? Pour le savoir, il faudrait qu'il nous donne d'abord le plan de 1985 à 1988, pour les années 1985-1986, 1986-1987 et 1987-1988, quels sont les projets qui étaient prévus et qui ont été réalisés, selon ce qu'il dit, les projets déjà engagés ou inscrits à la programmation ou encore ce qu'il a coupé, ce qu'il a changé dans la programmation qui avait été faite, pour qu'on sache effectivement si les projets

qui avaient été prévus vont l'être avec des retards dans certains cas ou s'ils ont été changés pour d'autres que le ministre a pris le soin de bien examiner et de faire des changements à la programmation. Ce sont donc les réponses que je voudrais avoir, de la part du ministre, aux questions que je pose.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le ministre de l'Éducation.

M. Ryan: M. le Président, le député soulève un problème qui est très intéressant pour notre commission au sujet duquel, dans les commissions parlementaires auxquelles j'ai participé dans te passé, nous avions toujours une minceur de renseignements, qui était une source de déception considérable. Vous le savez, on nous disait généralement que les décisions en ces matières allaient être prises quelques mois plus tard. Jamais, sauf exception très rare, on n'ouvrait d'horizons vraiment substantiels quant aux intentions gouvernementales dans ce domaine.

Je voudrais rappeler tout d'abord ce qu'a évoqué le député concernant le contexte dans lequel nous serons appelés à prendre certaines décisions. Nous avons reçu, comme je l'ai rappelé dans mon allocution liminaire hier, une directive du Conseil du trésor demandant que nous nous abstenions de présenter toute demande d'initiatives nouvelles pour l'année 1986-1987, "initiatives nouvelles" étant une expression technique pour définir des projets qui n'étaient pas inscrits à la programmation auparavant, que nous voudrions ajouter à celle qui était déjà prévue. On nous disait, en outre, d'examiner les projets déjà engagés ou approuvés afin de voir à éliminer ceux qui ne seraient pas absolument essentiels. Cela a donné lieu évidemment à des interprétations variées. Une directive qui est prise à partir d'en haut se heurte souvent à la sinuosité du réel et demande à être interprétée pour être très bien comprise. Il y a eu des discussions, non seulement avec notre ministère, mais avec d'autres également qui étaient affectées par cette directive. Nous avons classé tout ce que nous avions dans nos carnets sous différentes catégories. Nous avons fait un examen approfondi de tout. Il y avait des projets qui étaient déjà sous contrats. Il n'était pas question de sabrer là-dedans. D'autres étaient en soumissions très avancées. Il y avait un fort préjugé voulant que les choses puissent continuer. D'autres étaient en phase 1, 2 ou 3 selon nos définitions techniques. La phase 1 est le stade des esquisses, la phase 2, ce sont les plans et devis préliminaires et, la phase 3, ce sont les plans et devis définitifs. Pour tous ceux qui étaient en phase 3, on s'est dit: II ne faut pas trop jouer là-dedans, on va essayer de garder ces choses-là et recommander que cela continue. Dans le cas de ceux qui étaient en 2 et en 1, cela laisse un peu plus de marge, on s'est dit: On va regarder ces choses-là. Il y avait des problèmes qui ont été soumis à notre attention et qui, parfois, évoquaient des situations peut-être plus urgentes que d'autres qui avaient pu être retenues par le gouvernement précédent, selon les examens objectifs qui pouvaient être faits. Nous sommes en train de regarder cela.

Une chose que nous avons recommandée au Conseil du trésor qui n'a pas encore fait l'examen de ces choses-là - cela va venir dans une semaine ou deux, je pense - c'est qu'il laisse une certaine marge. C'est lui qui va fixer le plafond au-delà duquel nous ne pourrons pas aller, alors qu'il laisse une certaine marge de souplesse à l'intérieur de ce plafond pour qu'il puisse y avoir un peu de mobilité. Si nous avons découvert qu'il y a un endroit où les enfants étudient au grand air, tandis que, dans un autre endroit, on avait un projet qui était raisonnablement justifié mais moins urgent, qu'on puisse faire certaines adaptations nécessaires.

C'est l'esprit dans lequel nous travaillons. La très grande majorité des projets qui avaient été inscrits à la programmation demeure sans conséquence, parce qu'ils étaient déjà rendus à une phase passablement avancée; mais il y a un résidu. Disons qu'il y a 50 projets, il y en a 10 qui vont être possibles. Là il va falloir faire des choix qui seront arrêtés à la lumière des critères que nous nous sommes imposés. Il y aura certains cas, ce seront des jugements d'opportunité. On ne peut pas arriver à une précision mathématique dans ces choses-là. Il y aura certains choix qui devront être faits et dont certains pourront être pénibles pour certains et réjouissants pour d'autres, évidemment.

Nous avons réduit au strict minimum ce que j'appellerais le "hard core", le résidu de ces situations à l'intérieur desquelles nous devrons faire un choix. C'est comme cela que l'opération s'est déroulée jusqu'à maintenant et que nous entendons la mener à terme dans les meilleurs délais.

M. Jolivet: Je comprendrais M. le ministre s'il me disait que si jamais il avait des obligations pour ajout à cause de l'augmentation de la clientèle, cela deviendrait un des critères plus prioritaires que si c'était une réparation non urgente ou un ajout non urgent. Je comprendrais le ministre aussi s'il me disait: II y a eu un feu. Il faut que j'agisse rapidement et que, en conséquence, je dois réaménager mon budget. La question que je posais est: Est-ce que le ministre, dans la partie dont il faisait mention depuis le début de cette commission où il est prêt à fournir des renseignements, est prêt à nous fournir d'abord le plan 1985-

1988, les prévisions des objectifs à poursuivre 1985-1986, 1986-1987 et 1987-1988, nous dire non... Donc je n'irai pas plus loin dans ma question, sachant que M. le ministre ne veut pas me répondre par des documents me permettant de faire une analyse comme critique de l'Opposition.

M. Ryan: Non.

M. Jolivet: Je n'irai pas plus loin dans ma question, puisque M. le ministre me fait signe de la tête que non, mais je voudrais cependant vous signaler des choses qui pourraient survenir. Je vais prendre un exemple qui existe encore chez moi, M. le ministre, pour vous le donner. Il y a des rumeurs à savoir que l'école qui s'appelle le Pavillon d'enseignement professionnel de Grand-Mère pour la commission scolaire régionale de la Mauricie ferme ses portes l'automne prochain. Donc, les étudiants seront transportés à Shawinigan-Sud ou à Shawinigan, selon les options, ou même à Saint-Tite. D'un autre côté, la commission scolaire de Grand-Mère, semblerait-il, au niveau d'une école qui s'appelle Saint-Louis-de-Gonzague, se serait vu signaler certaines difficultés pour cette bâtisse pour la santé et la sécurité des jeunes étudiants. En conséquence, les rumeurs circulent à Grand-Mère de la fermeture et même de la démolition possible de la bâtisse qui renferme l'école élémentaire Saint-Louis-de-Gonzague. La commission scolaire de Grand-Mère se porterait acquéreur de la bâtisse de la commission scolaire de Grand-Mère pour en faire son centre administratif. Au moment même où on n'a même pas discuté de ce que devra être l'intégration. Je mets le ministre au courant de cette situation et je sais très bien, compte tenu de ce qu'il nous a expliqué jusqu'à maintenant, qu'il va porter une attention spéciale pour que la commission scolaire ne se porte pas acquéreur d'une bâtisse alors qu'elle devra en débâtir une autre, ne sachant même pas ce qu'elle va devenir dans un an, deux ans ou trois ans.

C'est simplement une petite remarque en passant. Je sais que ma collègue de Chicoutimi a des questions à poser sur les équipements avant que je passe à autre chose.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Très brièvement, vous me permettrez de parler...

Le Président (M. Parent, Sauvé): Un instant! M. le ministre, vous voulez répondre aux remarques du député de Laviolette?

M. Ryan: Oui.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Nous vous écoutons.

M. Ryan: Tout d'abord, je ne peux pas lui donner les documents qu'il demandait, parce que ce sont actuellement des documents de travail. Par conséquent, ce sont des documents internes au ministère; mais dès que nous aurons pris les décisions nécessaires, il me fera plaisir de communiquer aux membres de la commission la liste des projets qui ont été retenus au point où nous en sommes. Cela devrait venir. Je ne peux pas fixer d'échéancier, mais d'ici...

M. Jolivet: Ce n'était pas dans ce sens-là que je posais ma question, c'était pour comparer avec ce qui avait été décidé et ce que vous allez décider. Si j'ai bien compris, vous me donnerez simplement des décisions finales.

M. Ryan: Oui, évidemment. Le reste, si vous avez le temps de relire toutes les promesses électorales qui ont été faites par l'ancien ministre de l'Éducation, vous allez trouver la liste que vous cherchez. Il avait anticipé pas mal...

M. Jolivet: Je pourrais faire l'inverse aussi et lire les promesses électorales du Parti libéral.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Un instant, s'il vous plaîtl M. le député de Laviolette, il ne faudrait quand même pas que vous fassiez un dialogue comme cela. M. le ministre de l'Éducation, vous avez la parole.

M. Ryan: Je voulais simplement signaler que l'ancien gouvernement avait pris, en notre nom, des engagements qui dépassaient les limites de son mandat et que, par conséquent, nous sommes obligés d'introduire un certain tempérament là-dedans. Deuxièmement, je le remercie d'avoir porté à mon attention les développements appréhendés du côté de Shawinigan et de Grand-Mère. J'ai pris note des renseignements qu'il m'a apportés. Nous allons examiner la situation incessamment. Je tiens à lui rappeler que des décisions de cette nature ne pourraient pas être prises sans l'autorisation préalable du ministère. Par conséquent, il y a une double assurance ici, l'assurance de notre vigilance bien démontrée et, deuxièmement, l'assurance de l'autorisation que nous devons donner en vertu de la loi.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le ministre, étant donné la qualité de votre réponse, je donne l'occasion au député de Laviolette, s'il a d'autres remarques... Non,

ça va. Je reconnais Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Je pense bien que ce ne sera pas très long parce que j'imagine que pour la question que je voulais poser, la réponse sera trouvée dans ces documents dits internes. Il y avait des projets qui étaient passablement avancés et d'autres qui l'étaient moins, à la commission scolaire Valin. Je pense à trois projets, en particulier. J'imagine qu'ici vous ne pouvez pas faire état de vos décisions.

M. Ryan: De quels projets voulez-vous parler?

Mme Blackburn: II s'agissait d'agrandissements à la commission scolaire Valin. Il s'agissait également, à la commission scolaire de Chicoutimi, de construction. J'ai vu que, pour ce qui est de la construction, cette école de Laterrière fait partie des projets qui ont été demandés par les commissions scolaires, pour 1986-1987, et l'analyse est en cours pour certains. Est-ce que je peux savoir si les décisions sont prises concernant Laterrière? Et ensuite, on pourrait peut-être voir les autres projets.

M. Ryan: Dans le cas de la commission scolaire Valin, pourquoi étions-nous saisis de deux projets? Si mes souvenirs sont bons, il y en a au moins un qui est examiné avec grande sympathie parce qu'il s'agit de la troisième étape d'un même projet qui doit, par conséquent, arriver à terme tôt ou tard. J'espère plus tôt que plus tard.

Mme Blackburn: Vous êtes incapable de me dire si cela va être plus tôt que plus tard.

M. Ryan: Dès que nous aurons arrêté la liste définitive, nous allons pouvoir vous le dire, mais là je vous dis que c'est sur la liste des choses que nous examinons très sérieusement.

Mme Blackburn: Parce qu'ils en étaient à la troisième étape... Ce qui avait d'abord été demandé, c'était une école de douze classes. Finalement, devant ce qui semblait être des difficultés financières, des compressions additionnelles en éducation, la commission scolaire s'était contentée, pour le moment, de huit classes, dont une partie des équipements pouvait être défrayée par la municipalité.

M. Ryan: On avait trois projets en provenance de la commission scolaire Valin. Trois projets.

Mme Blackburn: Saint-Henri, Vanier et Le Roseau, je pense.

M. Ryan: Dès qu'on va avoir arrêté la liste définitive des projets qui sont retenus pour 1986-1987, il nous fera grand plaisir de vous informer de nos décisions. Je dois vous dire qu'ils sont sur la liste. Nous avons l'oeil sur ces projets. Je peux vous dire, je pense bien, qu'il y en a une partie qui sera retenue. Il y en a déjà un qui est réglé. Tout ce qui regarde le centre administratif, cela est réglé.

Mme Blackburn: Oui.

M. Ryan: Sur les deux autres, je pense qu'il y en aura au moins un qui sera retenu. Je ne peux pas vous dire davantage pour l'instant. Nous sommes bien saisis du besoin très réel qu'il y a de ce côté.

Mme Blackburn: Merci.

M. Ryan: En ce qui concerne l'école de Laterrière, qui relève de la commission scolaire de Chicoutimi, il s'agit en l'occurrence d'un engagement qui avait été pris par mon prédécesseur, le député d'Abitibi-Ouest, qui avait promis la construction de cette école, mais à même le budget de 1986-1987 sur lequel il n'avait aucune autorité. Je pense que vous admettez cela avec moi.

Mme Blackbum: Oui. Je rappellerais que l'engagement a également été pris par le candidat libéral dans le comté.

M. Ryan: Qui n'est pas ministre de l'Éducation, à ma connaissance. Il n'est même pas député.

Mme Blackburn: Mais il devait parler au nom de quelqu'un.

M. Ryan: Cela fait partie du résidu sur lequel nous nous penchons et au sujet duquel on vous donnera des décisions dès qu'elles auront été prises.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. le ministre. Je reconnais M. le député de Laviolette. (11 h 45)

Éducation des adultes

M. Jolivet: Je vais passer à un autre sujet, M. le ministre, l'éducation aux adultes. J'étais heureux hier quand M. le ministre a parlé de l'éducation aux adultes et, au programme 4, à la page 7 des documents explicatifs, dans la parenthèse j'avais marqué "enseignants, ce qu'on appelait à l'époque enseignants plein jour et enseignants plein soir", pour ne pas dire pleine nuit dans certains cas. Donc le ministre a fait mention justement, lors de la discussion sur les

négociations, de la fameuse demande qui revient continuellement sur le double emploi.

Je suis content que le ministre ait fait cette mention hier parce que c'est une demande qui, à mon avis, permet ce qu'un député du gouvernement demandait hier soit la possibilité de partage de temps pour le personnel pour éviter les mises en disponibilité ou le congédiement de certaines personnes. Je fais cette mention immédiatement en disant que si le ministre peut concrétiser cela dans une formule pour la convention collective mais aussi pour les commissions scolaires... parce qu'il va peut-être falloir un jour utiliser le numéro de l'assurance sociale pour bien vérifier, car on ne connaît dans une commission scolaire que le jour où l'horaire permet de faire de telle heure à telle heure et le soir de telle autre à telle autre heure et on peut faire double emploi. II s'agit de faire en sorte que deux personnes de la même famille n'aient pas quatre salaires qui rentrent à la maison. Dans ce sens, cette question est délicate et difficile à régler mais je suis heureux que le ministre en ait fait mention et je voulais, comme il nous a demandé hier de le faire de temps à autre, le féliciter de l'avoir introduite.

Je dirais cependant que dans les renseignements généraux qui nous ont été présentés par le président du Conseil du trésor et dans les documents qui nous sont présentés par le ministre de l'Éducation, soit au programme 1 dans les généralités, où on fait mention de l'ensemble de ce dossier, on parle, à la page 39, de "l'analyse des impacts de l'ouverture de l'enveloppe et de l'inscription d'environ 30 000 jeunes adultes de plus à l'éducation des adultes, principalement dans le cadre de l'insertion sociale et professionnelle des jeunes et du rattrapage scolaire", dont les 7000 dont on faisait mention aussi. Ce n'est donc pas si mauvais pour un gouvernement qu'on accusait de ne pas avoir permis à des jeunes de revenir dans des moyens d'employabilité et je vous dis simplement que ce n'est pas sous votre règne que ces choses sont faites. Je suis heureux que vous les continuiez parce que, effectivement, ce sont des choses qui permettent à des jeunes d'aller chercher une formule d'employabilité.

Cependant les crédits de l'enseignement aux adultes, dit-on, passent de 89 100 000 $ à 154 800 000 $, soit, dit-on dans les chiffres, une augmentation de près de 65 700 000 $. Et là on se gargarise en disant que c'est extraordinaire l'augmentation qu'on fait. Mais le ministre, dans les réponses qu'il a données, a dit que cette majoration est cependant attribuable, pour une valeur de 34 600 000 $, au report des coûts additionnels de l'année 1985-1986 au budget, aux crédits de 1986-1987. Le ministre nous a dit - je vais appeler cela la formule de bar ouvert - que ne pouvant pas, compte tenu de la décision qu'il a prise sur l'éducation aux adultes, prévoir dans le budget de . donner en cours les deniers qui vont être dépensés, il doit les reporter sur l'année suivante. Ce sont donc des choses qui sont normales, quel que soit le gouvernement en place et en conséquence on n'a pas à se gargariser du fait qu'une augmentation de près de 65 700 000 $ équivaut à un montant extraordinaire. Cependant il faut tenir compte que pour l'année 1986-1987, quand on regarde tout cet ensemble, les subventions prévues à cet effet sont inférieures de 4 300 000 $ à celles établies pour l'année scolaire 1985-1986. Le Parti libéral dit et disait placer l'éducation des adultes parmi ses priorités. Le ministre a souvent critiqué les orientations du gouvernement précédent en cette matière, notamment, le rattachement de la formation professionnelle au ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu. Il a dénoncé l'absence de politique d'éducation des adultes, disait-il à l'époque. Il a promis l'élimination des frais de scolarité pour les adultes inscrits aux cours de formation professionnelle au secondaire. Je dois dire que c'était déjà un engagement qui était une réalité, donc il ne s'agissait pas d'en faire en engagement puisque cela existait et ce n'est pas le Parti libéra! qui l'avait mis en place.

Dans le document que M. le ministre donnait à l'occasion de la campagne électorale, on lisait: Le Québec s'emploiera toutefois avec énergie à faire reconnaître et à assurer dans les faits, sa compétence prioritaire dans tout le domaine de l'éducation des adultes, y compris la formation professionnelle. On aura certainement l'occasion de revenir au niveau de la formation professionnelle lors de d'autres discussions. Mme la députée de Chicoutimi aura l'occasion de revenir sur la formation, au niveau de l'Enseignement supérieur et de la Science.

J'aurais peut-être une petite question qui pourrait entrer dans le sujet. Il y a un comité technique conjoint Québec-Canada et les autres provinces sur la question. Nous avons entendu dernièrement le ministre fédéral Benoît Bouchard, de Lac-Saint-Jean, annoncer qu'il voulait avoir une politique globale canadienne sur l'ensemble de l'enseignement supérieur.

Nous avons aussi entendu parler d'autres ministres fédéraux, sur la forêt, pour une politique nationale de la forêt. Nous avons entendu parler de la récupération que le Parti libéral voudrait donner du Centre de placement du Québec, Centre Travail-Québec, au fédéral, pour éviter des coûts.

Nous entendons parler de différentes choses... à l'environnement... Nous entendons parler dans différents ministères, d'une

politique nationale quelque part au fédéral. Les ministres actuels du gouvernement libéral sont-ils, et le ministre de l'Éducation en particulier, dans cette veine de dire: Oui, si le fédéral veut le prendre, pour nous éviter des coûts, nous leur laisserons à condition de nous assurer certaines garanties. Ou est-ce que le ministre a l'intention de défendre énergiquement la position traditionnelle du Québec sur la question de l'éducation des adultes, de l'enseignement professionnel, au niveau postsecondaire?

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le ministre de l'Éducation.

M. Ryan: À la question du député de Laviolette je réponds oui, le gouvernement du Québec défend les meilleurs intérêts du Québec en ce qui touche les programmes d'appui à la formation professionnelle mis de l'avant par le gouvernement fédéral. L'une des représentations majeures que nous avons faites à maintes reprises au cours des derniers mois porte justement sur le pourcentage des contributions fédérales qui doit être affecté à de la formation donnée dans les établissements scolaires.

Vous savez qu'un des objectifs principaux du dernier programme fédéral, c'était de divertir une partie importante des sommes des budgets de formation, vers les entreprises. Nous insistons pour que la proportion qui allait du côté des établissements de formation soit maintenue. Autrement, nous exposerons nos institutions de formation aux quatre vents. Nous les obligerons à faire des investissements considérables, à se doter de personnel compétent, et d'une année à l'autre, suivant le caprice d'une demande le plus souvent mal éclairée et mal orientée, on sera obligé de marcher en zig-zag, d'introduire un élément d'instabilité, d'insécurité dans le système d'enseignement, ce qui est tout à fait inacceptable.

Par conséquent, nous insistons très fermement sur ce point. Nous sommes parfaitement d'accord, le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu et moi-même, sur la primauté de cet objectif.

M. Jolivet: Est-ce que M. le ministre voudrait me dire aussi, à la deuxième question, s'il a l'intention de nous proposer, compte tenu de ce qu'il a dit alors qu'il était dans l'Opposition et maintenant qu'il est ministre et qu'il a le pouvoir d'agir à ce niveau, la vision qu'il avait de l'éducation, au Service de l'éducation des adultes, dans la mesure où il veut présenter une politique globale ou une politique quelconque? Est-ce que c'est l'intention du ministre?

M. Ryan: J'apprécie vivement cette question dont le député sait sans doute qu'elle est très délicate. Le problème du partage des responsabilités entre les deux principaux ministères concernés, celui de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu et celui de l'Éducation - j'ajouterais celui de l'Enseignement supérieur et de la Science, pour les collèges - en ce qui touche la formation professionnelle, est une des questions auxquelles se sont heurtés avec une impuissance relative tous les gouvernements depuis au-delà d'une vingtaine d'années.

Les mesures instituées par le gouvernement précédent n'ont point contribué, loin de là, à clarifier la situation. Elles ont au contraire, à mon humble avis, contribué à la rendre davantage confuse. Une fois que des situations sont installées dans le secteur gouvernemental, tout le monde sait qu'il n'est pas facile de les corriger, même de les examiner objectivement. Il suffit de mentionner qu'on veut faire un examen pour que tout de suite des conciliabules se tiennent dans les restaurants de la Grande-Allée pour essayer de scruter les intentions profondes de ceux qui ont osé mentionner un mot, examen objectif. Cela fait peur à bien des gens.

Dans ce cas-ci, mon collègue le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu et moi-même avons des rapports de collaboration très cordiaux. Nous savons qu'il y a des questions à examiner, mais nous ne voulons pas faire de perturbation inutile. Nous ne voulons pas faire de gestes prématurés, nous voulons que les questions soient étudiées en temps utile dans un esprit de collaboration et d'objectivité qui permettra peut-être de rattraper les choses claires quelque part dans le processus. Mais pour l'instant, nous fonctionnons jour après jour, semaine après semaine, chaque ministère cheminant suivant les responsabilités qui lui ont été attribuées en vertu de la politique rendue publique par le gouvernement précédent, il y a à peu près deux ans.

On me fait part de difficultés qui surviennent dans différents endroits, de problèmes d'application qui ne sont pas simples. Nous essayons de fonctionner dans le plein respect que nous devons avoir pour les autres ministères concernés, en particulier celui dont j'ai parlé. J'espère que quand la bonne foi de tout le monde aura été parfaitement établie, nous pourrons aborder les questions de fond dans un esprit constructif. Je ne voudrais pas être complice d'une situation qui aboutirait à créer des ministères parallèles dans les mêmes champs d'intervention gouvernementale, parce que cela implique non seulement des querelles inutiles, mais des multiplications de coûts que la société québécoise et son gouvernement n'ont absolument pas le droit de se permettre dans le contexte de contrainte financière dont nous n'avons cessé de parler

depuis des jours.

M. Jolivet: J'aurais deux courtes questions sur le même sujet. Je me réserve le droit, avec Mme la députée de Chicoutimi, de discuter de la formation professionnelle au niveau de l'Enseignement supérieur, de la Science et de la Technologie, lors de la séance de ce soir. Est-ce que mes chiffres sont réels quand on dit que ce n'est pas 65 700 000 $ cette année, mais 67 500 000 $ moins les 34,6 %? Donc, l'augmentation provient d'une politique qui était quand même intéressante, puisque vous la continuez, et que le "bar ouvert" dont je faisais mention tout à l'heure existera l'année prochaine aussi. Donc, l'augmentation du service aux adultes n'est pas une augmentation pour cette année, c'est une augmentation en tenant toujours compte, d'année en année, de l'année qui vient de s'écouler. C'est cela?

M. Ryan: Votre observation est très juste, et nous avions souligné, à l'époque où nous étions dans l'Opposition, notre accord avec cette politique particulière de l'ancien gouvernement. C'est pourquoi je suis très heureux de donner l'assurance que nous la continuons en 1986-1987.

M. Jolivet: Comme vous avez des contacts très cordiaux, m'avez-vous dit tout à l'heure, avec le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, j'aimerais faire mention d'un petit problème - c'est le seul problème dont je vais traiter dans le domaine de la formation professionnelle - qui touche les jeunes qui retournent aux études. Actuellement, en vertu de l'entente et des règlements qui existent pour l'aide à des jeunes assistés sociaux et en particulier pour des familles monoparentales, une première inscription est faite, par exemple, au secondaire général. Là, je touche un sujet qui a été discuté lors de la réunion des États généraux, dans un des ateliers auxquels j'ai participé sur la formation profesionnelle. Il y a des jeunes qui, pour des raisons diverses, décident d'aller au secteur technique parce qu'ils n'ont pas l'intention de continuer au niveau du cégep et que la technique qu'ils vont apprendre au secondaire - on parlait du secondaire V, secondaire VI, peu importe -leur permettra d'entrer sur le marché du travail avec l'équipement nécessaire.

Il y a un problème technique qui surgit, surtout pour les familles monoparentales. Une fois qu'ils sont inscrits au général, ils décident en cours de route de ne pas aller au cégep, ils demandent une réorientation au niveau professionnel. J'avais le cas d'une personne qui suivait un cours technique dans le domaine du secrétariat. Comme elle était au niveau général et qu'elle voulait aller au niveau technique, on lui dit: Tu peux y aller, il n'y a pas de problème, il n'y a aucune difficulté, la commission scolaire accepte. Sauf que, lorsqu'elle s'adresse à l'aide sociale pour obtenir une aide additionnelle pour des besoins spéciaux parce qu'elle s'est réintégrée aux cours de formation, cette personne se fait dire: Tu n'auras rien de cela. N'étant plus équipé, on lui dit: Tu aurais droit à cela pour un an et demi, pour trois sessions environ, si tu allais au cégep. Elle dit: Moi, je n'ai pas l'intention d'aller au cégep; j'ai l'intention d'aller là. (12 heures)

Je veux juste mentionner ce problème qui pourrait, à mon avis, trouver solution dans la mesure où on dit qu'effectivement, après vérification auprès des gens qui sont conseillers en orientation auprès de la commission, pour cette personne, c'est dommage, mais l'orientation qu'elle prend, c'est la meilleure dans les circonstances. On devrait lui permettre d'avoir un suivi continuel et d'avoir le même montant auquel elle aurait droit. Sinon, ce qui va arriver, elle va cesser les études; elle n'est pas intéressée d'aller plus loin. En arrêtant les études, elle retombe sur l'aide sociale, alors qu'elle veut s'en sortir et qu'un des moyens qui avaient été mis, avec le nombre de personnes dont on a fait mention - près de 7000 jeunes qui retournent sur le marché du travail - c'est quelqu'un qui pourrait devenir employable dans un an et demi ou deux ans... J'aimerais que le ministre en fasse mention auprès de son collègue de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu.

M. Ryan: M. le Président, si le député de Laviolette voulait m'adresser une note écrite à ce sujet contenant toutes les précisions nécessaires, cela me faciliterait les choses. J'interviendrai très volontiers auprès de mon collègue de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu afin de plaider cette cause après de lui. Cette cause me semble très légitime.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Hier, au moment où le ministre nous parlait de l'éducation des adultes, il a parlé d'un manque de subventions généralement consenties aux organismes volontaires d'éducation populaire. Je n'ai pas très bien saisi s'il nous a dit que ces organismes auraient à participer aux compressions ou si on les avait épargnés. Est-ce que le ministre pourrait me répondre?

M. Ryan: Le montant total de l'aide réservée aux OVEP est le même en 1986-1987 qu'en 1985-1986. Dans un certain sens, il y aura un certain effort de compression à

faire par eux. À supposer que nous en ajoutions un, deux, trois ou quatre à la liste des organismes bénéficiaires de subventions, cela voudra dire que le montant de la subvention pour chacun pourra être légèrement diminué. Mais nous n'avons fait aucun partage pour l'instant. Il est beaucoup trop tôt. Nous sommes en train de mettre au point, avec la participation des intéressés, un nouveau mode de définition des critères qui doivent présider au partage. Ce que j'ai dit, hier, c'est que le montant total des sommes disponibles à cette fin demeure au même niveau qu'en 1985-1986. Ce que j'ai voulu indiquer en disant qu'ils pourraient peut-être faire leur part de sacrifices, c'est ceci: II m'est arrivé d'examiner la façon dont on confectionne les demandes. J'ai examiné les dossiers de demandes soumises. On va vous dire, par exemple: Pour une heure de cours, cela coûte tant, un montant arbitraire, disons que c'est 20 $; c'est arbitraire; on est dans le domaine du bénévolat dans une grande mesure. Cela pourrait être 21 $, cela pourrait être 19 $; ce ne sont pas des normes qui sont fixées de manière absolument immuable, pourvu qu'on soit le moindrement réaliste. Je leur dis: À ce niveau, quand même vous n'épouseriez pas les catégories qu'on est obligé de suivre avec nos ordinateurs à Québec, il y a des chances que votre patente marche pareil. S'il y avait un peu plus de souplesse dans leur approche, cela aiderait beaucoup à la fin. Quelquefois, j'ai remarqué que les organismes qui transigent avec le gouvernement prennent très vite les mauvaises habitudes du gouvernement et ne gardent pas les bonnes qu'ils pourraient avoir. De ce point de vue, s'ils veulent faire preuve d'un peu plus de souplesse, je pense qu'il y a moyen de faire une utilisation très judicieuse des sommes qui seront mises à leur disposition.

Le Président (M. Parent, Sauvé): II n'y a pas d'autres interventions?

M. Ryan: Je vous dis cela, parce que j'ai fait moi-même autrefois de ces choses-là quand j'étais dans des mouvements de jeunesse. On transigeait avec le gouvernement, ici à Québec. Le ministère de la Jeunesse à l'époque nous disait: Nous, c'est 25 $ l'heure qu'on vous donne pour les cours. Or, on faisait tous du bénévolat. On écrivait: Claude Ryan, dix cours dans la semaine, 250 $. Je ne touchais pas un sou; cela allait à l'organisation générale. Mais les fonctionnaires étaient contents, il y avait des initiales au bout de la formule. Il y a beaucoup de cela dès qu'un système devient général. Je dis è ces organismes: Faites au moins votre part au point de vue souplesse -vous êtes capables - et cessez de nous faire des grandes thèses qui n'ont pas de rapport avec la réalité. Il y a des livres qu'on remet au gouvernement et il y a des pratiques qu'on a dans le concret. Ce n'est pas du mensonge, c'est du conformisme de mauvais aloi, mais on est obligé de vivre avec un peu de cela.

M. Jolivet: On a réglé cela, M. le ministre...

Le Président (M. Parent, Sauvé): Oui, M. le ministre.

M. Jolivet: On a réglé cela, M. le ministre, au niveau des programmes.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le député de Laviolette, demandez-vous la parole?

M. Jolivet: Oui, oui.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le député de Lavioiette.

M. Jolivet: Au chapitre des PADEL, au ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, déjà un pourcentage de bénévolat de 20 % est prévu, selon les formules appropriées. C'est dans le circuit habituel. Je voudrais en arriver à une question dont j'ai fait mention au ministre lors de mon discours du début concernant les écoles alternatives. J'avais parlé de l'école Le Transit.

J'ai reçu une documentation très volumineuse sur ce dossier. Je l'ai lue avec beaucoup d'attention. J'ai parlé avec la personne responsable du dossier pour les parents à cette école. J'ai vu les difficultés qu'a comportées la mise sur pied d'un dossier comme celui-là. J'ai aussi lu avec beaucoup d'attention le discours prononcé par M. L'Allier sur les difficultés des cas comme ceux-là, lors du colloque sur l'école Le Transit.

Effectivement, on a parlé, dans l'ensemble des états généraux, de choses différentes, de difficultés, je ne dirais pas des expériences, mais des choses parfois heureuses qui permettent à des gens des écoles, comme le ministre semble dire, du projet éducatif, des gens ont cru à cela, ils ont fonctionné à l'intérieur de cela. Il y a eu, au départ, un directeur qui était d'accord avec la formule et qui a fonctionné avec les parents, les étudiants et les enseignants, jusqu'à ce que la commission scolaire, pour diverses raisons, pour des décisions qu'elle a le droit de prendre d'ailleurs, décide d'imposer le directeur d'école plutôt que de suivre la procédure qui avait été établie. Cela a fait que l'année a été plus difficile. Les gens ont eu l'impression qu'on avait pour but de quasiment faire tomber le projet et on semble dire que, non, l'année prochaine cela n'existera pas.

La jeune fille qui est venue, lors des états généraux, donner son expérience à l'atelier de départ nous expliquait le goût qu'elle avait et les joies qu'elle éprouvait à fonctionner dans ce genre de travail.

Il est évident que cela a eu pour effet aussi que des étudiants ne se sont pas intégrés et ont repris le cycle normal des autres formes d'enseignement des écoles. Mais, une chose est certaine, c'est que le ministre semble dire, en tout cas j'ai cru le comprendre, qu'il n'était pas en désaccord avec des choses qui peuvent être un projet éducatif dans une école. Les parents ont fait appel à la commission scolaire et au ministère. Le ministère dit: Écoutez, quant à nous, ce dossier est une décision de la commission scolaire. Nous n'avons pas l'intention d'intervenir à l'intérieur du dossier. C'est ce que j'ai cru comprendre, à moins que je fasse erreur. Je sais qu'il y a eu des rencontres et des discussions. Le ministre est-il conscient de cette difficulté qui va arriver pour la réintégrer, si jamais l'école fermait, dans le sens qu'elle est actuellement, dans le cycle normal des écoles dites traditionnelles, dans la mesure où ils ne sont peut-être pas prêts à le faire immédiatement, compte tenu de l'expérience qu'ils étaient en train de faire ensemble...

C'est une première question que j'ai. Selon les réponses que le ministre me donnera, j'en aurai peut-être d'autres.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le ministre.

M. Ryan: M. le Président, étant donné que cette école est dans le territoire que représente la députée de Groulx à l'Assemblée nationale, il me serait très utile d'entendre le point de vue de la députée de Groulx avant de répondre à la question du député de Laviolette, si celui-ci veut bien consentir.

M. Jolivet: Oui.

M. Ryan: C'est bien.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Mme la députée de Groulx.

Mme Bleau: Dans le cas du transit, M. le ministre et les gens de son ministère ont rencontré, à plusieurs occasions, la commission scolaire, les parents et les professeurs. J'ai assisté, entre autres, au colloque dont vous avez parlé tout à l'heure. Je peux vous dire que tout a été tenté pour obtenir un rapprochement entre les deux parties, la commission scolaire, les parents et les élèves de l'école Le Transit. Chacun, jusqu'à la fin, est demeuré braqué sur ses positions et il n'y a rien eu à faire.

Je pense que le ministre a regretté, tout comme moi, ce qui est arrivé à l'école Le Transit qui s'était avérée une école absolument importante dans le cas de certains enfants qui n'arrivaient pas à s'intégrer dans les écoles normales. Tout a été tenté, mais ce qu'on ne voulait pas à l'école de transit, c'est un directeur nommé par la commission scolaire qui avait droit de regard sur les budgets de l'école en question. C'est ce que les parents et les professeurs n'ont pas voulu accepter. La commission scolaire n'a pas voulu revenir sur ses positions non plus. C'est ce qui a fait que l'école de transit est tombée. Nous le regrettons énormément, moi la première, parce que après avoir rencontré les parents et les enseignants à plusieurs occasions, je dois vous dire que j'espérais un règlement. Nous avons même, en colloque régional...

M. Jolivet: M. le Président...

Le Président (M. Parent, Sauvé): Oui, M. le député de Laviolette.

M. Jolivet: Je sais tout cela, j'ai lu tout cela, j'ai parlé avec le monde et ce n'est pas ce que je veux savoir. Ce que je veux savoir...

Le Président (M. Parent, Sauvé): Un instant!

M. Jolivet: Écoutez! J'ai donné une permission.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le député de Laviolette, vous avez donné une permission. Voulez-vous conclure rapidement, maintenant? Très bien.

M. Jolivet: J'aimerais cela parce que... Je la connais, l'histoire.

Mme Bleau: Nous avons même reçu en colloque régional tous les députés de la région et, M. le ministre, tout le monde de l'école Le Transit. On a vraiment essayé par tous les moyens possibles d'arriver à une entente et cela ne s'est pas fait.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, Mme la députée de Groulx.

M. le ministre de l'Éducation.

M. Jolivet: Comme elle a répondu à la place du ministre, j'aimerais bien faire une petite remarque avant que le ministre réponde, parce que ma question ne concernait pas cela du tout. Je sais cela, j'ai tout lu cela, j'ai parlé avec Mme Paquin. Ce n'est pas cela que je veux savoir. Ce que je veux savoir, c'est que, compte tenu justement qu'il n'y a pas de possibilité pour la commission scolaire et les parents... Je regarde le projet éducatif, je sais tout le

cheminement qu'il y a eu, je sais que, finalement, la direction de la commission scolaire, pour des raisons qui lui appartiennent, a décidé de nommer elle-même le directeur alors que cela ne fonctionnait pas comme cela dans le projet présenté.

À partir de cela, je pose ma question: Dans le contexte où cette difficulté existe, où le ministre semble dire è des répondants - par qui que ce soit, je ne le sais pas, ou par ses sous-ministres - qu'ils ne peuvent rien faire parce que c'est une décision de la commission scolaire, je comprends cela, madame. Je voudrais savoir si le ministre a une idée de ce qu'il croit de ces écoles alternatives. Est-ce qu'il a l'intention d'intervenir de façon additionnelle auprès des commissions scolaires pour dire: Oui, je crois en ces projets-là et, si j'y crois, je donne les ressources nécessaires et les moyens nécessaires de fonctionner. Ou bien dit-il: Je me cache sous la responsabilité de la commission scolaire pour ne pas bouger. C'est ce que je veux savoir, le reste de l'histoire je la sais.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le ministre de l'Éducation.

M. Ryan: Mais cela ne paraissait pas quand on vous a écouté tantôt. C'est pour cela que j'ai trouvé très utiles les précisions que nous a fournies la députée de Groulx.

M. Jolivet: M. le ministre, ne faites pas de la politicaillerie, là.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le député de Laviolette!

M. le ministre de l'Éducation, vous avez la parole.

M. Ryan: Elle n'a dit que la moitié des choses qui ont été faites dans ce dossier-là par le ministre et ses collaborateurs, y compris les députés de la région.

En réponse à votre question, je dois vous dire ceci: "If it comes down", si cela se ramène à la question à savoir qui doit nommer le directeur d'une école, je suis obligé de vous répondre que c'est la commission scolaire. Si c'est cela le problème, ma réponse c'est: la commission scolaire. C'est clair.

S'il y a une entente entre la commission scolaire et un groupe particulier en vertu de laquelle la commission scolaire acceptera une suggestion qui lui est faite par un groupe, je suis prêt à regarder cela avec toute la bienveillance possible, mais, dans ce cas-là, il n'y a évidemment pas eu d'entente. Si cela se ramène à la question de oui ou non, de blanc ou noir, je dois faire mon choix du côté de la commission scolaire et je ne cherche pas à me cacher, à ce moment-là, je le fais franchement, à regret, mais suivant les indications que la loi me donne.

L'autre jour, j'ai rencontré M. Éthier, le président de la commission scolaire. Je l'ai rencontré quelque part - je ne me rappelle pas où, ce n'était pas dans un bar -je pense que c'était à une réunion...

Mme Bleau: Au sommet économique.

M. Ryan: Au Sommet économico-social des Laurentides justement. Il m'a dit: J'aimerais vous voir, cela fait longtemps qu'on ne s'est pas vus. J'ai dit: Je vais arrêter chez vous dès qu'on aura fini l'étude des crédits de nos ministères et de nos projets de loi qui sont assez nombreux comme vous le savez. Je me propose de faire une visite et si je peux rouvrir ce dossier-là avec lui pour essayer de l'acheminer vers une solution plus satisfaisante que celle qui se dessine actuellement je vais le faire avec plaisir.

Je dois rendre hommage à mes collaborateurs, surtout à Mme la députée de Groulx, à mon collaborateur M. Rondeau, au sous-ministre adjoint, M. Rousseau, qui ont vraiment déployé tous les efforts humainement possibles dans ce dossier-ci pour favoriser une solution qui eut été plus satisfaisante, et nous ne sommes pas découragés encore. (12 h 15)

M. Jolivet: Je suis heureux d'entendre le ministre dire qu'il va se faire d'autres tentatives. Le but de ma question, c'est d'essayer de voir s'il y a moyen, avec les discussions qu'il pourrait avoir avec le président de la commission scolaire, de régler ce problème. J'en suis très heureux. Je dis à M. le ministre qu'hier, dans mon discours, je disais qu'il y a eu, au niveau de l'école, beaucoup de projets qui ont été pleins d'espoir, pleins d'avenir, mais aussitôt qu'ils arrivaient au niveau d'organismes supérieurs, là, cela bloquait bien raide.

Que ce soit au niveau des commissions scolaires, et même au niveau syndical, il y a des problèmes qui existent. La question que j'ai posée, c'était: Est-ce que M. le ministre, à la suite de ce qu'on a dit aux états généraux et ailleurs, croit à des écoles alternatives? Si oui, quels sont les moyens qu'il a l'intention de prendre? Un des exemples frappants, c'est l'école Le Transit. Pour justement dépasser ce qu'il me disait ce matin, à savoir que parfois il reçoit des recommandations de ses fonctionnaires et qu'après analyse et discussions il arrive à leur faire comprendre que c'est une décision peut-être un peu trop technocrate, dans la réalité des choses, on devrait en arriver à faire en sorte que les gens puissent agir dans des cadres moins rigides que ceux-là.

Je vais donner un exemple vécu aux

états généraux d'un directeur d'école qui parlait de la convention collective. Il disait: Effectivement, j'ai des problèmes d'adaptation en ce qui concerne mes étudiants. Mais la convention dit: L'enseignant est responsable du rattrapage de ses étudiants. Il a dit: Quand je fais cela, l'enseignant est en arrêt de travail dans le sens qu'il fait autre chose parce qu'il n'est pas dans sa classe, mais l'élève est dans la classe. Pendant ce temps, l'autre professeur, qui pourrait s'occuper de ses étudiants, est dans l'autre classe. Au lieu de dire "ces élèves", comme la convention le prévoit, pourquoi ne dirait-on pas "les élèves de l'école" et, ensemble, les enseignants et la direction de l'école ont prévu un moyen d'aider le rattrapage scolaire tout en respectant l'idée générale de la convention collective, mais non pas la lettre.

Donc, l'esprit et non pas la lettre. Dans ce sens-là, dans le cas de l'école Le Transit, M. le ministre me dit que les espoirs ne sont peut-être pas tous éteints, qu'il y a une flamme qui est encore là et que, s'il pouvait convaincre la commission scolaire, comme il le dit, avec les pouvoirs qu'elle a, tant mieux pour les étudiants et les parents.

Je vous dis au départ que, si jamais l'école Le Transit fermait, avec l'expérience qu'ils ont vécue, l'intégration de ces jeunes dans un cycle régulier de l'école pourrait être plus difficile, compte tenu de ce qu'ils ont vécu depuis presque deux ans, dans certains cas. Si le ministre me dit que, oui, il croit à des choses autres que le cadre rigide des présentes façons d'agir et qu'il verra comme ministre à prendre position et le faire savoir aux commissions scolaires, peut-être qu'un jour, à l'intérieur des règles budgétaires, on pourrait voir des rêves faits à l'école devenir des réalités dans un avenir rapproché.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le ministre, voulez-vous réagir? D'autres interventions?

Les élèves "illégaux"

M. Jolivet: J'en ai une autre, M. le Président. Cela concerne la question des "illégaux" dont on a fait mention hier. Si j'ai bien compris le ministre dans son intervention, j'ai cru comprendre qu'il avait une attitude législative, mais aussi une autre qui pouvait être réglementaire ou dans le sens de décisions qui peuvent être prises administrativement. Mais les rapports que nous avons ce matin et les interviews que nous avons entendues nous laissent perplexes. Nous avons aussi dans le rapport de presse d'aujourd'hui quelqu'un, le député de Viau, qui semble être l'adjoint du ministre sur ces questions et qui, dans l'interview qu'il a accordée, a parlé d'amnistie générale.

Je ne reprendrai pas ici les propos tenus par ma collègue, la députée de Chicoutimi, sur les difficultés qui pourraient être engendrées, non plus les éditoriaux qui ont couru à l'époque de la première annonce faite par le ministre sur la question des "illégaux". J'aimerais savoir laquelle des positions il faut bien retenir. Je devrais dire au départ que, normalement, on devrait retenir celle du ministre, mais comme son adjoint a parlé et a travaillé dans le dossier on s'en est inquiété. Est-ce que le ministre veut effectivement, par une loi, faire l'amnistie générale ou s'il veut trouver une autre formule permettant de régler le problème, comme il le disait au mois de décembre, de façon à être juste et équitable pour l'ensemble de ces étudiants?

Une question qui nous est venue à l'oreille, c'est l'histoire des cégeps. Comment se fait-il que des étudiants qui n'ont pas obtenu leur diplôme d'études secondaires puissent se retrouver au cégep? En vertu de quel principe? Est-ce que M. le ministre pourrait répondre à ces questions?

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le ministre, avant que vous répondiez, j'aimerais attirer l'attention de la commission sur le fait qu'il est actuellement pratiquement 12 h 25. J'avais l'intention, à 12 h 25, de demander l'adoption des programmes et l'adoption du budget. S'il y avait consentement des deux côtés, je serais prêt à aller jusqu'à 12 h 35. Mais, à 12 h 25, je vais vous demander s'il y a consentement. S'il n'y a pas consentement, nous allons procéder à l'adoption du budget. M. le ministre de l'Éducation.

M. Jolivet: M. le Président, je voudrais demander une permission.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Oui.

M. Jolivet: Je vais vous dire qu'après vérification - je n'ai pas eu le temps de vous le dire, M. le Président, je m'excuse, j'étais occupé à préparer et à écouter les interventions - que nous avons commencé effectivement à 10 h 10 et que nous aurions jusqu'à 12 h 40 pour nos dix heures.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Alors, s'il y a consentement on pourra aller jusqu'à 12 h 40 et, à 12 h 35 je demanderai le vote. Je reconnais le ministre de l'Éducation.

M. Ryan: J'aurai besoin de tout le temps qu'il reste pour résumer le problème.

M. Jolivet: Je n'ai pas compris, M. le ministre.

M. Ryan: J'aurai besoin de tout le temps qu'il nous reste pour résumer le

problème. J'espère que je trouverai le temps d'en venir aux conclusions.

M. Jolivet: Mon collègue de l'Abitibi avait une question.

M. Ryan: Ainsi que vous le savez, M. le Président, le problème des élèves appelés "illégaux" remonte aux tout premiers temps de la mise en application de la loi 101, c'est-à-dire à la fin de l'été et à l'automne de 1977. À cette époque, de nombreux parents de la région de Montréal en particulier et des parents qui étaient surtout d'origine autre que française ou anglaise ont eu l'impression que le gouvernement, en adoptant la loi 101 dans les dispositions que nous lui connaissons, avait rompu un contrat social qui avait existé jusque là, avait changé en cours de route les règles du jeu qu'ils avaient connues.

La plupart d'entre eux étaient venus s'établir au Québec dans les années qui avaient précédé l'adoption de la loi 101 et avaient fonctionné sous un régime législatif auquel ils étaient habitués. Tout à coup, une guillotine est tombée à leurs yeux, dans leur esprit, avec la loi 101 qui changeait radicalement les règles du jeu, qui introduisait même la division dans les familles à bien des endroits. Puis, il y en a qui ont décidé, non parce qu'ils étaient des malfaiteurs - je pense qu'il est bien important de comprendre cela clairement au départ - et des gens qui méprisaient la loi, mais parce qu'ils estimaient que leurs droits n'étaient pas respectés, d'agir autrement que le prescrivait la loi.

Et ce sentiment était tellement fort à l'époque - je n'y peux rien, je n'étais pas responsable de l'éducation à l'époque, j'étais journaliste au Devoir - qu'il s'est organisé tout un système, avec la participation des parents, la participation des enseignants, la participation des directeurs d'école. Je ne vais pas plus loin parce que je ne peux pas en dire davantage mais je ne serais pas surpris qu'il y ait eu une certaine participation à d'autres niveaux aussi. Les enfants ont été acceptés dans des écoles anglaises. De facto, ils ont reçu la formation qui est donnée dans ces écoles. Ils ont cheminé depuis 1977. C'est pour cela qu'il y en a qui sont rendus maintenant au bout du système. Il y en a quelques-uns qui sont rendus dans les cégeps, il y en a un grand nombre qui sont rendus au niveau secondaire.

Le gouvernement, après avoir adopté la loi 101, avait la responsabilité de voir à son application. Il s'est révélé impuissant. Il a essayé. Parfois, on avait l'impression qu'il faisait ce qu'on appelle en anglais du "shadow boxing". Il faisait semblant. Il n'a jamais touché au problème. C'était un gouvernement. Un gouvernement, c'est puissant. Il avait les moyens d'agir. Il ne l'a pas fait.

Il a laissé pourrir, moisir ce problème pendant des années, si bien que nous sommes arrivés au pouvoir... C'est le 12 décembre de facto que nous avons été assermentés. Jusqu'au 12 décembre, c'est l'ancien gouvernement qui était en place avec le problème sur les bras. Qu'est-ce qu'on va faire avec cela?

D'abord, il fallait voir où en étaient les choses. Nous avions tous des soupçons quant aux forces qui étaient derrière cette situation. Il y avait des groupes de parents, des enseignants, des directeurs d'école, des administrateurs, des intervenants sociaux de différentes sortes.

J'ai vu, dès mon arrivée au ministère de l'Éducation, à établir des contacts directs avec ces gens, afin de me saisir de la situation de la façon la plus concrète possible. Voyant que la situation était assez complexe, j'ai décidé de former un groupe de travail dont j'ai confié la présidence à M. Jean-Claude Rondeau pour différentes raisons mais, en particulier, parce que M. Rondeau, qui a été directeur générai de la Commission des écoles catholiques de Montréal pendant trois ans, avait eu à se saisir assez directement de ce problème et était déjà par conséquent très familier.

Il avait l'attitude d'esprit et d'approche qui me paraissait convenable pour diriger un groupe comme celui-là. J'ai invité d'autres personnes à faire partie du groupe, dont le député de Viau, M. Cusano, dont le directeur général adjoint des écoles à la Commission des écoles catholiques de Montréal, M. Macchia Godena, dont M. Jeff Polenz.

M. Polenz était responsable des questions d'éducation au groupe Alliance Québec. C'est un homme qui a été pendant sept ans attaché au syndicat des enseignants de la commission scolaire du Lakeshore et que j'ai engagé à mon cabinet politique vers la fin de janvier, si mes souvenirs sont bons. J'ai demandé à M. Polenz, qui avait une très bonne connaissance du dossier, de faire partie du groupe de travail également.

En plus de cela, il y avait M. Jerry Brown, qui est le directeur des services anglophones au ministère de l'Éducation. Je lui ai demandé de faire partie du groupe. Il y a peut-être une autre personne dont vous trouverez le nom d'ailleurs dans un document dont je vais vous parler maintenant.

Alors, j'ai demandé à ce comité: Faites l'examen de tout le problème. Rencontrez tous ceux qui sont concernés par le problème. Établissez-moi un état des faits. Présentez-moi des recommandations dans les meilleurs délais. Je leur ai demandé de me soumettre un rapport pour le 31 mars. Cela a été un petit peu plus long qu'on pensait. Le comité m'a, de fait, soumis son rapport la semaine dernière. J'ai été saisi du rapport - je ne sais pas si c'est mardi, mercredi ou jeudi - la semaine dernière et j'en ai pris

connaissance avant la fin de la semaine.

Là, je me suis trouvé devant des recommandations dont le contenu sera dévoilé - je pense pouvoir vous le dire -demain. J'ai causé avec M. Rondeau ce matin. Il n'avait pas eu le temps de lire le rapport de manière précise. Je l'ai fait ce matin en me levant. J'en ai fait une deuxième lecture, c'est-à-dire une lecture encore plus soigneusement annotée que la première et j'ai demandé à M. Rondeau de prendre les dispositions voulues pour que le rapport soit rendu public demain.

M. Jolivet: À la fin de la journée?

M. Ryan: Peut-être.

M. Jolivet: Selon la coutume?

M. Ryan: Ce n'est pas ma spécialité, ce genre de calcul. Vous savez qu'il n'a jamais été caractéristique de ma manière d'agir.

M. Jolivet: Non, mais je parle du Parti libéral.

Le Président (M. Parent, Sauvé): S'il vous plaît, M. le ministre de l'Éducation, vous avez la parole.

M. Ryan: C'est un document qui va être rendu public sous la responsabilité du ministre de l'Éducation. Alors, là, vous établirez vos calculs et s'il y a des procès d'intention à me faire, vous me les ferez la semaine suivante. Le rapport sera rendu public demain avec les recommandations qu'il contient à mon intention et comme il sera rendu public demain, je ne peux pas aller plus loin aujourd'hui dans les précisions que je vais vous donner.

Mais je pense que les délais sont assez courts pour que le député puisse considérer en toute tranquillité que nous ne voulons rien cacher, que nous ne voulons rien retarder et que nous ne voulons rien compliquer.

Je me permets de compléter ma réponse en disant qu'il employait un terme que je n'aime pas beaucoup, le terme "amnistie". Quelles fautes ont commises les élèves dont nous parlons? Je prendrai mes décisions et je ferai mes recommandations en pensant aux élèves. Il y a des parents qui sont déjà morts parmi ceux qui ont pris la décision de les mettre ici où là.

Je n'entends pas me prononcer sur le sort ou l'avenir des parents. J'entends me prononcer sur le cas des élèves. Jamais je n'emploierai le mot "amnistie" pour parler de ces élèves. Ce que je veux, c'est que ces élèves, dont la très grande majorité est déjà rendue en cinquième, sixième, septième, huitième, neuvième et dixième année puissent avoir le droit aux services d'instruction qui sont dispensés par le gouvernement du Québec et les organismes qui le complètent au niveau local et régional dans des conditions d'égalité raisonnables. C'est cela le problème auquel nous avons à faire face et les recommandations dont on m'a saisi vont dans ce sens. (12 h 30)

Le premier point dont je veux tenir compte, ce sont les élèves qui sont concernés. Un deuxième souci dont je devrai tenir compte, c'est celui qui m'amène à considérer que nous devons résoudre ce problème une fois pour toutes cette année. Je ne voudrais pas, pour tout l'or du monde, que nous abordions la prochaine année scolaire avec encore ce problème sur les bras parce qu'à ce moment il va traîner une année de plus. Si nous le laissons traîner encore une autre année, il va traîner une autre année et une autre année, comme sous le gouvernement précédent. Cela a traîné neuf ans sous le gouvernement précédent. Ce ne sera pas neuf sous le gouvernement libéral, ce ne sera même pas une année, si cela dépend seulement de moi.

M. Jolivet: M. le ministre peut-il me permettre de dire que ce n'est pas moi qui ai pris le mot amnistie. Dans un texte qui est paru, j'ai simplement fait référence à ce qui est écrit ce matin. Ce n'est pas moi du tout. C'est écrit: "Amnistie générale pour les illégaux de l'éducation."

M. Ryan: Je suis sûr que, connaissant l'esprit libéral parfois qui refuse de se définir comme tel du député de Laviolette, tout comme moi, il refusera d'appliquer ce mot aux élèves dont nous essayons d'assurer l'avenir dans les meilleures conditions possible. Je suis bien content de voir que...

M. Jolivet: Sauf que l'article dit que c'est le député de Viau qui a fait en sorte que la décision du gouvernement, laquelle découle, etc. "L'adjoint parlementaire du ministre de l'Éducation a apporté cette précision après que le ministre Claude Ryan eût fait part de son intention de présenter un projet de loi concernant les "illégaux"..." Donc, je ne fais que rapporter ce qui est écrit ce matin.

M. Ryan: M. le Président, dès que nous sortirons de cette séance, je vais voir à rencontrer le député de Viau me munissant d'un bon dictionnaire.

M. Gendron: M. le Président.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. le ministre de l'Éducation. M. le député d'Abitibi-Ouest, je vous reconnais pour une courte intervention.

M. Gendron: Très rapidement, M. le Président. Je pense que c'est un problème majeur qui doit être réglé. C'est un problème qui dure, je pense que tout le monde en est conscient. Ce qui est étonnant dans ce dossier, c'est qu'au-delà de l'appellation, que je trouve très dangereuse, d'amnistie générale, à ce moment-ci, qui ouvre la porte à d'autres illégalités, la question précise que je voudrais poser au ministre de l'Éducation est la suivante: Ne trouve-t-il pas que dans ce dossier il est très dangereux d'être d'accord sur une espèce de prime au non-respect d'une loi? J'ai été étonné. Je connais également l'esprit libéral dans tous les sens du terme du ministre de l'Éducation, au sens partisan et au sens libéral du terme, et je n'en reviens pas. Ces gens n'ont rien fait de spécial, ils sont tout simplement en non-conformité avec une loi. Comme cela se passait comme cela avant, en termes d'habitude, il est arrivé une loi qui a changé leurs habitudes de vie. Je veux juste vous dire, M. le ministre de l'Éducation, que c'est toujours comme cela chaque fois qu'une loi est adoptée, cela change des habitudes de vie. C'est pour cela qu'à un moment donné un Parlement doit adopter des lois.

La question que je vous pose: Ne trouvez-vous pas qu'il y a d'autres façons d'envisager le règlement du problème? Ne serait-il pas interprété comme une espèce de prime au non-respect d'une loi? Je pense que c'est très dangereux pour l'avenir. J'aimerais vous entendre en deux phrases là-dessus. Est-ce qu'en ayant cette attitude de vouloir régler rapidement le problème, en disant: On vous donne l'absolution collective... À ce moment, dès demain, il y a peut-être des parents qui seront intéressés à ouvrir la porte à leurs enfants qui actuellement respectent la loi, qui sont en conformité avec la loi du Parlement et qui pourront dire: Si c'est bon pour tous ceux qui ont dérogé à une loi du Québec, on peut faire de même à partir de demain et demander qu'ils puissent s'inscrire à l'école anglaise.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le député d'Abitibi-Ouest, si vous voulez avoir la réponse...

M. Gendron: Oui, j'arrête.

Le Président (M. Parent, Sauvé): ...vous êtes mieux d'arrêter votre question. M. le ministre de l'Éducation, en conformité avec nos règles, si nous voulons adapter les budgets, il vous reste environ une minute, une minute trente pour répondre.

M. Ryan: Je ne pense pas que je dépasserai cette période. La réponse est très simple: S'il existait d'autres moyens de régler le problème, l'ancien gouvernement, qui comprenait des gens très intelligents dont le député d'Abitibi-Ouest et le député de Laviolette, les aurait trouvés depuis longtemps. Il a eu tout le temps voulu pour les trouver, pour les proposer. S'il a eu des retours de conscience depuis le 2 décembre, il pourra nous soumettre des représentations là-dessus que nous étudierons. Je lui dis de se dépêcher parce que le temps se fait court.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le ministre, nous vous remercions. Mmes et MM. les députés, le temps est pratiquement écoulé. Nous venons d'étudier les crédits du ministère de l'Éducation. Est-ce que le programme 4 est adopté?

M. Jolivet: M. le Président, j'aurais eu encore beaucoup d'autres questions, mais le temps étant limité, je réserverai à d'autres occasions les questions que nous avons, soit sur des projets de loi, soit sur des...

Adoption des crédits

Le Président (M. Parent, Sauvé): Est-ce que le programme 4 est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Parent, Sauvé):

Adopté. Est-ce que le programme 5 est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Parent, Sauvé):

Pardon?

M. Jolivet: Sur division. M* Gendron: Sur division.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Le programme 5 est adopté sur division?

M. Gendron: Oui.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Adopté sur division. Est-ce que les crédits présentés par le ministère de l'Éducation sont adoptés?

M. Jolivet: Sur division.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Adopté sur division.

Alors, mesdames et messieurs, M. le ministre, et les personnes qui ont accompagné le ministre, je vous remercie beaucoup de votre collaboration.

La commission parlementaire de l'éducation suspend ses travaux, à moins d'avis contraire de la part de la Chambre, jusqu'à 20 h 30 ce soir, où elle étudiera les crédits du ministère de l'Enseignement

supérieur et de la Science. M. le ministre.

M. Ryan: Me permettez-vous brièvement, avant de nous quitter, d'adresser mes remerciements à tous ceux qui nous ont assistés pendant ces deux jours. D'abord à vous-même, pour la manière magistrale dont vous avez conduit nos travaux, ensuite au personnel qui vous assiste, au porte-parole de l'Opposition et à ses collègues qui ont fait un travail éminemment constructif, à mes collègues du côté ministériel qui ont été d'une assiduité et d'une présence exemplaire, malgré des arrangements fort discutables, qui ont porté atteinte à leur droit d'intervention dans nos débats et sans que l'Opposition en soit responsable. Ce sont des problèmes que nous avons à régler entre nous.

Je voudrais remercier de manière tout à fait spéciale mes collaborateurs du ministère de l'Éducation, les fonctionnaires du ministère de l'Éducation, M. Boudreau, son équipe de sous-ministres adjoints à laquelle est venu s'ajouter aujourd'hui M. Trempe, qui n'était pas avec nous hier parce qu'il était en voyage, et tous les fonctionnaires qui étaient ici également, de même que mon personnel politique.

Je voudrais féliciter et remercier tout le monde de cet échange de vue très constructif que nous avons pu avoir.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Très bien, M. le ministre. Je reconnais une dernière intervention du député de Laviotette.

M. Jolivet: Merci, M. le Président. D'abord merci pour l'ensemble des interventions qui ont été faites de notre part. Nous avons fait les interventions les plus susceptibles de faire avancer le système d'éducation au Québec. Je remercie aussi les collaborateurs du ministre au niveau de l'organisme sous-ministériel et autre, en leur disant qu'ils vont vivre comme nous un changement de mentalité. C'est ce que le ministre nous a dit. Elle sera différente de celle qu'ils ont connue depuis quelques années pour certains, et avec lesquelles nous avons eu à travailler dans le passé.

Je suis heureux de la façon dont se sont déroulés les travaux de cette commission. Je n'ai en aucune façon empêché qui que ce soit de l'Opposition -même je leur ai permis de poser des questions, conformément à cette décision à 90-10 qui permet à l'Opposition de vraiment faire son travail dans les meilleures conditions possibles. Donc, merci à tout le monde et à la prochaine.

(Suspension de la séance à 12 h 39)

(Reprise à 20 h 37)

Crédits du ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science

Le Président (M. Parent, Sauvé): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission permanente de l'éducation est réunie pour l'étude des crédits du ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science. Onze heures sont prévues pour l'étude des crédits de ce ministère.

Avant le début de l'étude des crédits, je voudrais informer les membres de la commission qu'il y a un petit litige concernant le programme 4. On n'a pas encore clarifié de quelle façon ledit programme pourra être critiqué, soit par notre commission ou par une autre commission. Étant donné que nous en sommes à la première séance sur les crédits du ministère de l'Enseignement supérieur et de la 5cience, on aura le temps durant la matinée ou la journée de demain de clarifier la situation.

M. le ministre, je vous souhaite la bienvenue au nom des membres de la commission. J'accueille aussi et je souhaite la bienvenue à toutes les personnes qui vous accompagnent. La commission est réunie pour étudier vos crédits et je répète ce que j'ai annoncé lorsque nous avons étudié les crédits du ministère de l'Éducation, que le président de la commission considère que cette commission est l'endroit privilégié pour se renseigner, pour interroger le gouvernement sur ses objectifs et sur ses orientations budgétaires.

Comme le veut la coutume parlementaire, c'est aussi l'endroit privilégié, pour le parti de l'Opposition encore plus, d'interroger le ministre et le gouvernement sur leurs intentions.

Sur ce, M. le ministre, nous vous écoutons.

M. Ryan: Ce ne sera pas long.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Pendant que vous préparez vos papiers, M. le ministre, on pourrait peut-être en profiter pour présenter les membres de cette honorable commission. À ma gauche, Mme Blackburn, députée de Chicoutimi, accompagnée de M. Jolivet, député de Laviolette. À ma droite, Mme Joan Dougherty, députée de Jacques-Cartier, M. Gardner, député d'Arthabaska, M. Cusano, député de Viau, Mme Bleau, députée de Groulx, M. Thérien, député de Rousseau, et M. Tremblay, député de Rimouski. Tous ces députés sont ici pour vous écouter religieusement, M. le ministre.

Remarques préliminaires M. Claude Ryan

M. Ryan: M. le Président, il me fait bien plaisir que nous soyons réunis pour l'étude des crédits du ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science. Nous avons fait au cours des deux derniers jours l'examen des crédits budgétaires du ministère de l'Éducation.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le ministre de l'Éducation, je m'excuse, mais Mme la députée de Chicoutimi s'informe si vous avez un texte à remettre. Le texte de votre discours est-il prêt ou sera-t-il déposé? Sera-t-il remis à un certain moment?

M. Ryan: Le texte de l'intervention que je ferai ce soir n'est pas complètement terminé. Il sera remis demain aux membres de la commission.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le ministre...

M. Ryan: Peut-être sera-t-il enrichi des choses que j'aurai entendues. Mais, blague à part, il vous sera remis au cours de la journée de demain.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. le ministre.

M. Ryan: Les membres vont être obligés de faire comme les anciens journalistes faisaient, de sortir leur crayon et de prendre quelques notes. Je pense que c'est un exercice qui peut être très intéressant aussi.

Une voix: Une dictée?

M. Ryan: Pas au niveau universitaire, M. le député.

M. le Président, l'étude des crédits budgétaires du ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science revêt un caractère particulier non seulement en raison du changement de gouvernement survenu en décembre dernier et des nouvelles orientations politiques et administratives qui en découlent, mais aussi en raison des changements que le gouvernement a décidé d'apporter au mode de direction politique des organismes qui, a l'intérieur du gouvernement, sont chargés de la mission éducation.

Je voudrais, en premier lieu, ce soir, donner un portrait de la situation générale qui prévaut dans les secteurs relevant de l'autorité du ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science, ainsi que des orientations que le gouvernement entend poursuivre au cours de la prochaine année. De la même façon que nous l'avons fait pour l'étude des crédits du ministère de l'Éducation, je souhaite que les grandes questions relatives à l'enseignement supérieur et à la science puissent être débattues par l'Opposition et les députés ministériels avec le plus d'élévation et de sérénité possible. L'expérience nous enseigne que les critiques et les divergences découlant d'échanges marqués du souci véritable de l'intérêt public sont infiniment plus précieuses que des débats empreints de mesquinerie et de partisanerie étroite.

Avant d'engager plus avant le débat, je voudrais rappeler quelque peu les circonstances dans lesquelles nous avons été appelés à travailler au cours des quatre derniers mois qui ont marqué le changement de gouvernement. Nous sommes arrivés avec une approche très optimiste, croyant que nous aurions à traiter avec une situation dont les paramètres nous étaient apparus à un certain niveau, aussi longtemps que nous étions dans l'Opposition. Mais la première révélation qui nous a été faite à notre arrivée au pouvoir, après quelque trois ou quatre semaines, cela a été la révélation d'une situation financière beaucoup plus difficile que nous ne l'avions anticipée. Je ne veux pas rouvrir le débat que nous avons fait au cours de la journée d'hier à ce sujet, mais je veux ajouter, pour l'information des députés, que la période, je dirais d'anxiété, de recherche fiévreuse, que nous avons traversée a été particulièrement pénible dans le secteur de l'enseignement supérieur. Peut-être parce qu'au cours des dernières années les compressions exercées de ce côté ont été plus lourdement ressenties que celles qui ont été effectuées du côté de l'enseignement primaire et secondaire, peut-être aussi parce que - bien des témoignages nous en assurent - on était rendu de ce côté à un point au-delà duquel il devient très difficile de faire des compressions sans risquer d'attaquer la substance même de la vie collégiale et de la vie universitaire, et de compromettre, par conséquent, la qualité de notre développement tant au plan professionnel qu'au plan scientifique.

Nous avons cherché par tous les moyens à faire en sorte que ce secteur puisse assumer la part de sacrifices qui était requise de lui par le gouvernement, tout en veillant, dans toute la mesure du possible, comme nous l'avons fait pour le secteur de l'enseignement primaire et secondaire - je pense que nous en avons fait la démonstration assez éclatante au cours des deux derniers jours - en veillant è éviter que les services à la clientèle ne soient réduits ou diminués.

Je pense qu'il y a des zones que j'appellerais périphériques à l'intérieur desquelles il est toujours dangereux de faire des compressions parce que des choses qui se passent là conditionnent grandement ce qui se déroule dans l'opération même, dans l'acte d'enseignement, dans l'acte de recherche qui

va se faire dans un laboratoire. Mais, si on coupe trois secrétaires dans le bureau d'un recteur, cela ne compromet pas nécessairement les travaux de recherche d'un physicien nucléaire. Non. Si on enlève le chauffeur de M. Untel ou de Mme Unetelle, je ne pense pas qu'on compromette l'avenir de la nation.

Nous avons essayé de chercher dans ces zones des objets qui pourraient se prêter aux compressions qui nous ont été demandées. Évidemment, le résultat de l'opération a été que la cible première qui s'est dégagée de notre travail a été les coupures faites au chapitre des prêts et bourses. On en parlera tantôt. Nous l'avons fait après mûre considération de tous les facteurs impliqués dans la situation. Plus nous examinions l'ensemble de la situation, plus nous étions obligés de conclure que de ce côté-là la société québécoise ne fait pas l'effort équilibré, l'effort balancé qu'on peut observer dans les autres provinces du Canada. On s'est dit que, si certains ajustements peuvent se faire, cela ne sera pas nécessairement un suicide national. Nous aurons l'occasion d'en reparler plus tard, y compris dans l'exposé que je vais faire. C'est là une première remarque liminaire que je voulais soumettre à votre attention.

Il y en a une deuxième aussi. Vous remarquerez que, dans l'examen que nous vous proposons de faire - évidemment, les questions que vous soulèverez, les interventions que vous ferez des deux côtés de la Chambre pourront prendre une tout autre tournure - les observations que nous avons à vous communiquer à ce stade-ci ne portent pas tant sur la substance même de l'activité universitaire ou collégiale que sur l'encadrement dans lequel se dispense la formation collégiale et universitaire et dans laquelle s'exerce l'activité de recherche scientifique.

Nous avons fait une constatation lors de l'étude des crédits du ministère de l'Éducation. Pour la première fois, je pense, dans l'histoire de l'examen annuel des crédits du ministère, nous avons discuté beaucoup plus cette année des contenus de l'éducation et des choses qui nous intéressent vraiment comme hommes et femmes politiques finalement, la qualité même de l'éducation. En ce qui regarde les collèges et les universités, nous pourrons sûrement avoir des échanges intéressants là-dessus. Mais celui qui vous parle, à son titre de ministre, n'est pas encore rendu au stade où il se sentirait prêt à vous soumettre des observations solides de ce côté.

Il a fallu que nous nous débattions pendant deux ou trois mois dans toutes ces discussions relatives aux compressions et à l'aménagement du budget. Il a fallu que nous voyions à beaucoup de problèmes pressés qui s'étaient accumulés depuis plusieurs mois et qui ont surgi depuis le mois de décembre dernier. Il y en a quelques-uns qui sont loin d'être réglés encore.

Tout ceci pour vous expliquer que, après quatre mois de pouvoir, je ne pense pas qu'il serait sage, je ne pense pas qu'il serait vrai, je ne pense pas qu'il serait utile que je prétende vous donner la vue de fond à laquelle nous tendons comme gouvernement et dont, j'espère bien, nous pourrons débattre dans des échanges semblables au cours des années à venir.

On se pose des questions. C'est facile de parler de ce qu'on va faire de la formation courte, par exemple. Il y a des gens, même dans l'appareil gouvernemental, qui ont déjà tiré des conclusions du rapport qui a été fait par le Conseil des universités là-dessus. Je les trouve bons parce que le Conseil des universités lui-même n'en a pas tiré encore. Il nous a soumis un résumé des faits qu'il a observés. Lui-même ne s'est pas aventuré dans les contenus. Il n'en était pas capable encore avec les données qu'il avait. Il y en a au gouvernement qui étaient déjà prêts à tirer des conclusions qui engageaient l'avenir pour 25 ans. Il a fallu leur dire que ce n'est pas comme cela qu'on travaille. On l'a dit bien amicalement, parce que je pense qu'on a un gouvernement où les gens se parlent franchement et amicalement.

C'est ce genre de travail qu'il a fallu que nous fassions, un travail de débroussaillage. Il faut dire que nous n'avions pas été au pouvoir depuis neuf ans. Cela n'aide pas, non plus, dans certaines choses. Je voudrais ajouter une dernière remarque à ce sujet: ceux qui veulent savoir quelles sont nos orientations en date d'aujourd'hui, je pense qu'ils ne sauraient mieux faire que relire le document d'orientation que notre parti a publié pendant la campagne électorale qui contient un chapitre rédigé à la suite de longues études et réflexions et de nombreuses consultations. Dans l'ensemble, ce chapitre, comme les autres de ce document d'orientation, est encore la plate-forme de notre parti et l'objectif vers lequel nous tendons comme gouvernement.

Cela dit, je continue mon exposé à partir des notes que j'ai devant moi. Le ministère de l'Enseignement supérieur a connu depuis la fin de 1984 de nombreux changements de structures qu'il importe de rappeler avant d'aborder les solutions propres aux secteurs regroupés sous ma responsabilité. Le gouvernement précédent décidait tardivement, en décembre 1984, de détacher les secteurs de l'enseignement collégial, de l'enseignement et de la recherche universitaire, ainsi que de l'aide financière aux étudiants, du ministère de l'Éducation et de les regrouper avec le ministère de la Science et de la Technologie au sein d'un nouveau ministère. Le ministère de l'Enseignement supérieur, de la Science et de la Technologie créé à ce moment se voyait aussi attribuer un titulaire distinct de

celui du ministère de l'Éducation. Le gouvernement d'alors consacrait ainsi le principe d'une direction bicéphale de notre système d'enseignement québécois.

Le Parti libéral du Québec s'était opposé fortement à l'époque à la division du ministère de l'Éducation d'où découlait la rupture de l'unité de direction politique. Tout en réservant notre jugement sur les structures, nous croyons important qu'une seule autorité politique ait compétence sur l'ensemble des niveaux d'enseignement du système d'éducation québécois. Cela, afin d'éviter que ne se créent des divergences et des incohérences dans les choix politiques d'un gouvernement qui pourraient avoir pour effet de priver le Québec d'une vision intégrée des orientations qu'il doit poursuivre en matière d'éducation. Cette vision unifiée est importante non pas pour les structures elles-mêmes qui ne sont que des instruments au service des dirigeants et de la population, mais bien pour assurer que les étudiants, qui cheminent et chemineront pour passer d'un niveau d'enseignement à un autre, puissent le faire dans un cadre où les objectifs propres à chaque niveau, aux niveaux primaire et secondaire, aux niveaux collégial et universitaire, voient les différentes phases de leur cheminement s'imbriquer harmonieusement les unes dans les autres dans un ensemble de finalités communes.

C'est pourquoi le 12 décembre dernier, conformément à l'engagement qu'avait pris le Parti libéral du Québec en période électorale... Il me vient une remarque à l'esprit. Depuis deux jours, cela fait déjà un certain nombre d'engagements qui sont réalisés. Il y en a quelques-uns qui ne le sont pas encore. L'Opposition se chargera de nous les rappeler tantôt. Mais il y en a un bon nombre qui sont déjà réalisés, un nombre encore plus grand qui sont en voie de réalisation. Je ferme la parenthèse. C'est pourquoi, le 12 décembre, le premier ministre nommait à titre de ministre de l'Éducation et de ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science un seul et même titulaire. Les premiers mois d'exercice de cette double fonction m'ont démontré que cette orientation est sage et fonctionnelle. Dans plusieurs secteurs, comme la formation professionnelle, l'éducation des adultes, la formation des maîtres, les seuils et prérequis de passage d'un niveau à un autre, l'étude des problèmes communs à plusieurs niveaux, comme l'enseignement des sciences, la qualité du français écrit ou parlé, l'équilibre à établir dans la répartition des dépenses de l'État pour fins d'immobilisations, par exemple, il est nécessaire que des orientations arrêtées à un palier puissent être analysées à la lumière des conséquences précises qu'elles entraîneraient à un autre palier.

Pour ne prendre qu'un exemple, si nous devions avoir au niveau universitaire des installations qui soient à la fine pointe de la modernité alors que nous aurions encore, dans nos campagnes, des écoles qui seraient complètement impropres à l'éducation, il y aurait sûrement un déséquilibre qu'il ne serait pas facile de corriger.

Ceux qui ont l'expérience du pouvoir savent très bien que, sous notre système de gouvernement, une fois qu'une responsabilité est exercée par un ministère, la coordination horizontale est une chose extrêmement difficile. On en parle beaucoup, on multiplie les structures, mais, finalement, chaque ministre tient à ses responsabilités et est happé par elles à compter du moment où il est appelé à les exercer. La coordination est beaucoup plus difficile qu'on ne peut se l'imaginer théoriquement.

En plus de se retrouver sous l'autorité d'un ministre qui assume à la fois la responsabilité de l'enseignement primaire et secondaire et de l'enseignement supérieur et de la science, le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science, avant même d'avoir complété une seule année comme entité autonome unique, a été invité à se départir d'une partie de ses activités et de ses services au profit d'un autre ministère. Cela, c'est une autre situation qui a surgi avec la formation du nouveau gouvernement, qui n'était pas aisée à gérer.

En confiant au nouveau ministre du Commerce extérieur la responsabilité du développement technologique, le chef du gouvernement se devait de prévoir le transfert de certains programmes, de budgets et de personnel qui se retrouvaient alors au sein du ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science et qui devaient être transférés de l'autre côté. De concert avec mon collègue, le ministre du Commerce extérieur et du Développement technologique maintenant, M. MacDonald, j'ai cherché les éléments qui pourraient nous permettre de procéder à un partage, à la fois rationnel, fonctionnel et économique. C'est une opération qui était d'autant plus difficile pour nous deux que nous n'étions pas vraiment familiers avec les opérations d'un bon nombre des entités dont nous étions appelés à discuter.

Il s'est créé sous la responsabilité du ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science, ces dernières années, un bon nombre d'organismes nouveaux: le Centre de recherche, par exemple, le Centre d'application des découvertes scientifiques avec lesquels nous n'étions pas vraiment familiers. On peut bien se réunir dans un bureau, un soir, et décider que telle chose devrait s'en aller dans la colonne de droite et l'autre, dans la colonne de gauche, mais si on veut travailler sérieusement, ce n'est pas ainsi que les choses se font.

Nous en sommes venus à établir un

principe de base qui a présidé au partage que nous avons fait et dont nous aurons l'occasion de parler lors de nos échanges. Nous nous sommes dit: Au point de vue de l'enseignement, il n'y a pas de problème; l'enseignement collégial, l'enseignement supérieur, la recherche qui est faite dans les universités ne donnaient lieu à aucune discussion. C'était clairement entendu entre nous que cela restait sous la responsabilité du ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science. Lorsqu'arrivaient, par exemple, des cas comme le Centre des applications pédagogiques de l'ordinateur, le Centre pour l'informatisation de la production au Québec, le Centre pour la valorisation de la biomasse, on peut épiloguer là-dessus, mais il n'y a pas d'autre manière de voir clair que d'essayer de comprendre ce qui se passe là-dedans.

Le critère que nous avons retenu, finalement, était le suivant. On s'est dit: Là, où un centre ou un service fonctionne à partir de ressources financières et humaines qui émanent surtout du système d'enseignement, cela va rester rattaché au ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science et là où un centre fonctionne à partir de ressources qui émanent surtout de l'industrie ou de l'entreprise, même s'il a des rapports avec les universités ou les collèges, ce sera plutôt déversé de l'autre côté. (21 heures)

II a été convenu également qu'une large place serait laissée à l'évolution possible. Il pourrait arriver qu'un centre, aujourd'hui, soit rattaché davantage à l'université en raison des ressources qu'il en tire tant au plan humain qu'au plan financier, mais que, dans cinq ou dix ans, sa situation soit différente, qu'il devienne davantage en symbiose avec l'entreprise et l'industrie. Les transferts pourront se faire. Ce ne sont pas des dogmes que nous avons établis, ce sont des critères pratiques en vue d'un partage judicieux et sérieux.

C'est pourquoi le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science conservera la responsabilité des activités reliées à l'approfondissement et à la diffusion des connaissances scientifiques, ainsi que des activités de recherche exclusives aux universités et aux centres de recherche créés en vertu de l'article 12 de la loi sur le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science. Le ministère du Commerce extérieur et du Développement technologique héritera pour sa part des activités qui visent le soutien direct à la recherche dans l'industrie. Il assumera également la responsabilité de l'entente Canada-Québec en matière de développement scientifique et technologique. Nous discutions ce matin, à un comité ministériel, du nouveau plan de développement spatial canadien qui a été soumis à l'examen des gouvernements provinciaux par le gouvernement fédéral. Il y a à peu près un an ou deux, ce plan aurait été soumis au ministère de l'Enseignement supérieur, de la Science et de la Technologie. Il nous avait été effectivement soumis, mais, maintenant, la responsabilité principale est assumée dans ce domaine par le ministère du Commerce extérieur et du Développement technologique et le ministère des Communications. Nous sommes en étroite relation avec ces deux ministères. Nous leur offrons notre collaboration. Mais ce secteur, où l'on vise surtout, par la nouvelle politique canadienne, à développer des structures industrielles qui vont pouvoir s'intégrer dans les grands programmes nord-américains de développement spatial, nous paraît relever plus du monde de l'entreprise et de l'industrie même s'il est, de toute évidence, de très haute connaissance scientifique.

En ce qui a trait aux activités conjointes qui se multiplient entre les institutions d'enseignement et l'industrie, elles relèveront de l'autorité de l'un ou l'autre ministère suivant que l'effort en ressources humaines, matérielles et financières proviendra en majeure partie des maisons d'enseignement ou encore des entreprises qui ont des liens d'association avec les maisons d'enseignement. Un projet de partage pour la période à venir est présentement à l'étude au Conseil du trésor. Il doit être soumis sous peu au Conseil des ministres, mais je pense que, dans l'ensemble, le résumé que j'ai donné est assez fidèle, et, lors de la période de discussion que nous aurons, nous pourrons vous donner les précisions que vous voudrez sur les transferts précis qui ont été faits. On conçoit dans ces conditions que des énergies considérables aient été consenties au cours des quatre derniers mois afin de réaménager le fonctionnement interne du ministère et de l'adapter au changement de structures qui avait été décidé par l'autorité politique.

Je voudrais maintenant dire qu'étant sauf ce principe de l'unité de direction politique des réseaux d'éducation au Québec, qui demeure une position de fond du gouvernement actuel, le gouvernement n'entend procéder avec aucune précipitation à la fusion structurelle du ministère de l'Éducation et du ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science. Cette question reste ouverte dans notre esprit. Nous ne l'avions jamais résolue avant de prendre le pouvoir. Nous trouvions que le gouvernement précédent avait procédé avec beaucoup trop de précipitation, et nous ne voudrions pas faire le mouvement inverse avec la même précipitation. Par conséquent, nous examinons les choses avec tout le temps voulu. Nous voulons que nos collaborateurs du ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science se sentent à l'aise, qu'ils fassent leur travail avec le plus d'application possible. Ces

questions ne sont pas des questions dominantes dans notre esprit. Dès que nous verrons clair, cependant, il pourrait arriver que nous tirions des conclusions et que nous en fassions part au chef du gouvernement de même qu'à tous ceux qui pourront avoir une contribution à faire dans le débat. Mais, pour le moment, par conséquent, ce n'est pas une question qui nous occupe pendant les heures de la nuit.

Je voudrais dire un mot sur l'enseignement et la recherche au niveau universitaire. Les universités assument une mission fort exigeante au sein des sociétés modernes. Cela est d'autant plus vrai pour le Québec que, communauté francophone minoritaire dans un ensemble nord-américain essentiellement anglophone, nous disposons d'institutions de haut savoir qui sont pour nous un outil privilégié de formation et de développement sur les plans intellectuel, social, culturel, économique, voire politique. Nous sommes tous conscients, des deux côtés de la Chambre, de la place exceptionnelle qu'occupent nos universités dans le développement de notre société. C'est pourquoi comme société nous avons investi des ressources énormes dans les universités depuis 20 ans. Nous demeurons convaincus pour notre part que, sans les universités et sans des universités en bonne santé, le Québec ne pourra pas occuper la place qu'il est en droit de revendiquer dans l'ensemble du monde nord-américain et des pays industrialisés.

Le Conseil des universités nous rappelait, dans son récent avis qu'il m'a remis au début de janvier dernier sur les orientations du financement universitaire, que les universités vivent présentement une situation de crise à laquelle il faut tenter de toute urgence de trouver une solution afin de leur permettre de s'acquitter honorablement de leur mission. Pour illustrer ce constat que le Conseil des universités formulait pour la nième fois dans ce dernier avis, en 1984-1985, les universités ont enregistré un déficit de fonctionnement s'élevant à 48 700 000 $ comparativement à un déficit de 13 300 000 $ en 1983-1984. Le déficit accumulé par l'ensemble du réseau universitaire s'élevait, à la fin de 1984-1985, à 45 500 000 $.

Cette année financière 1984-1985 est cruciale car elle marque un tournant important pour la santé financière des institutions universitaires. En effet, nous pouvons dire que, depuis 1984-1985, l'ensemble des universités du Québec ont épuisé les réserves dont elles disposaient. Dorénavant, les déficits de fonctionnement viennent s'ajouter automatiquement aux déficits accumulés du réseau. Jusqu'à 1984-1985, il y avait un surplus accumulé, des réserves accumulées qui permettaient d'absorber en tout ou en partie les déficits mais, depuis ce temps, ce n'est pas la situation qui se présente.

J'ai causé à de nombreuses reprises avec les dirigeants d'institutions qui étaient réputées naguère - il n'y en a pas tellement au Québec, vous les reconnaîtrez facilement - pour la richesse de leurs "endowments", de leurs fonds de dotation permettant à des étudiants ou à des chercheurs de poursuivre leur développement, de poursuivre des travaux spécialisés. Ces réserves que ces institutions avaient pu constituer pendant des générations ont été joliment érodées au cours des dernières années. Il reste des fonds de dotation qui ne sont pas négligeables, qui sont "earmarked", comme on dit, qui sont marqués de manière précise pour telle et telle fin. Mais des fonds qui pourraient être utilisés à des fins générales d'équilibre budgétaire ou de rééquilibre du financement institutionnel, il n'en reste pas beaucoup.

Suivant les prévisions que le Conseil des universités établissait dans l'avis qu'il me donnait au début de l'année, la situation était destinée à s'aggraver en 1985-1986 car on anticipait pour l'année courante qui va finir le 30 juin un déficit de fonctionnement dépassant les 30 000 000 $, ce qui allait porter le déficit accumulé des universités à plus de 80 000 000 $. On connaît les conséquences pénibles de cette situation. Je pense que tout le monde a entendu parler de ce qui s'est passé à l'Université de Sherbrooke au cours des dernières semaines. L'Université de Sherbrooke fait face à un déficit accumulé qui est considérable. Le recteur et ses collègues, pour enrayer le phénomène d'érosion qui se produisait sous leurs yeux, avaient décidé de fermer certains départements. Il en est résulté une réaction très dure de la part de la communauté universitaire. Ils ont été obligés de revenir sur leur décision, mais le problème n'est pas réglé à cause de cela. Le problème est toujours là.

On pourrait faire le tour des universités. Je vous le dis en toute simplicité, une des plus grandes gênes que j'ai éprouvées depuis que nous sommes au pouvoir, c'est la gêne de rencontrer des recteurs d'université qui, je le sais, viennent me parler de problèmes extrêmement difficiles et qui, je le sais, sont bien mal à l'aise pour m'en parler, parce qu'ils sont au courant aussi de la situation. C'est leur devoir de m'en parler et c'est mon devoir de les écouter. Les conditions d'une solution ne sont pas faciles à réunir à court terme.

L'Ontario a réussi à se rapprocher de la moyenne canadienne dans ses efforts en vue de redresser la situation financière de ses universités. L'Ontario, comme vous le savez, avait glissé durant ces dernières années. L'Ontario, qui a toujours donné le ton dans l'ensemble canadien en matière de dépenses pour le haut savoir, pour les

services hospitaliers et pour la santé, est passé pratiquement au dernier rang ces dernières années et a commencé, comme je l'ai dit ce matin ou hier, sa campagne de restrictions budgétaires environ sept ou huit ans avant le Québec. Mais elle a commencé à remonter depuis une couple d'années et, pendant ce temps-là, nous, on continue de descendre.

Le Québec traîne toujours de l'arrière par rapport à l'Ontario. Ainsi, les dépenses totales de fonctionnement par étudiant étaient supérieures de 6,5 % au Québec, en 1981-1982, par rapport à l'Ontario. Aujourd'hui, elles sont inférieures de 7,4 % au Québec. Cela est pour l'année 1985-1986, par conséquent, pour une année dont la responsabilité ne relève pas du gouvernement actuel. On est passé de 8596 $ par étudiant en 1981-1982 à 9478 $ en 1985-1986, alors qu'en Ontario on passait de 8073 $ en 1981-1982 à 10 230 $ en 1985-1986.

Si le Québec veut maintenir une position quelque peu concurrentielle par rapport à l'ensemble de ses partenaires canadiens en matière de développement universitaire, il lui faut procéder rapidement à des redressements afin de contrer ce processus d'érosion qui afflige le secteur universitaire. Le Parti libéral du Québec s'est engagé à réviser l'ensemble de la situation financière des universités è l'aide des travaux d'une commission parlementaire qui aurait pour mandat d'énoncer les voies les plus propices à emprunter dans le contexte de discipline budgétaire que nous connaissons tous.

Le gouvernement, dans le cadre des travaux qu'il propose en 1986-1987, fera donc motion demain, devant l'Assemblée nationale, afin de confier à la commission parlementaire de l'éducation le mandat d'étudier les orientations que devrait retenir le gouvernement en matière de financement universitaire à compter de l'année 1987-1988.

Selon le mandat qui lui sera confié demain par l'Assemblée nationale, puis-je souhaiter, la commission devra se pencher en particulier sur les sujets suivants. Premièrement, le niveau des subventions aux universités et leur répartition entre les établissements; deuxièmement, l'endettement des institutions universitaires; troisièmement, la participation du gouvernement fédéral au financement des universités; quatrièmement, les sources de revenu des universités autres que les subventions gouvernementales; cinquièmement, les modalités de l'aide financière aux étudiants; sixièmement, les frais directs et indirects de la recherche, le financement de la recherche à l'intérieur des universités et, de manière plus particulière, les nouveaux modes de collaboration entre les universités, les centres de recherche publics et privés et l'entreprise publique et privée. (21 h 15)

Un autre volet du mandat est la gestion des ressources humaines et matérielles des universités. Enfin, un dernier volet, les modes de concertation entre les établissements universitaires, particulièrement en ce qui a trait à la rationalisation des programmes offerts et à l'identification des champs d'enseignement et de recherche jugés prioritaires.

La question du niveau des subventions gouvernementales ainsi que des autres sources de financement et du mode d'allocation des ressources est déterminante dans la recherche de solutions aux difficultés budgétaires que connaissent les universités. Les perspectives des finances publiques pour les prochaines années ne nous permettent pas d'envisager que les problèmes que connaissent actuellement les universités pourront se résorber uniquement et exclusivement par une hausse du niveau de financement. Des actions importantes devront aussi être consenties en ce qui touche la réduction des déficits universitaires et la rationalisation des programmes, des services et des activités des universités.

Je pense que nous devrons établir très clairement à l'occasion de ce travail qui se fera au cours des prochains mois qu'il est absolument inadmissible que des institutions à caractère public puissent accumuler année après année des déficits comme on en a vus dans différents secteurs de l'administration paragouvernementale et dans le secteur parapublic au cours des dernières années. Je pense qu'il faut que nous revenions - dans le secteur de l'éducation nous allons le faire -à des règles de discipline beaucoup plus sévères. Si nous décidons qu'il n'y a pas d'argent une année, il n'y aura pas d'argent et personne ne doit se croire affublé d'un mandat qui lui permettrait d'aller endetter pour l'avenir l'ensemble de la collectivité québécoise, surtout s'il n'a pas été élu par les citoyens.

En 1986-1987, le ministère, après avoir complété une étude détaillée des états financiers de chaque université, entend établir avec chacune d'entre elles des modalités d'un plan de redressement qui permettraient de corriger la situation que nous connaissons en cette fin d'année 1985-1986. J'attends également des universités qu'elles entreprennent dès maintenant de se concerter et pas seulement d'en parler, afin de mieux cerner les voies d'un développement rationnel pour l'avenir, d'identifier les secteurs où des économies de déploiement doivent s'effectuer et d'identifier aussi les secteurs où il y a peut-être lieu de mettre fin à certaines activités de manière que, là où elles continueront d'exister, elles puissent se déployer à un niveau qui permette d'atteindre le seuil minimum d'excellence sans lequel on n'a d'universitaire que le papier et non pas le contenu.

Dans le secteur universitaire comme dans les autres, la société québécoise est en droit d'exiger un développement planifié et ordonné. Je m'excuse, M. le Président, je me cite moi-même mais ce ne sera pas long. "Dans la mesure où les universités voudront assurer elles-mêmes, par le jeu d'une concertation librement consentie, les émondages et les mises en commun que requerra une participation responsable, elles auront l'appui du Parti libéral. Si elles devaient faillir à la tâche, le Parti libéral n'hésitera pas à réclamer que le gouvernement prenne ses responsabilités." Ces mots, je les prononçais à l'occasion d'un discours tenu à l'Université de Montréal le 17 octobre dernier, juste à la veille ou au lendemain du déclenchement de la campagne électorale.

Nous avons insisté dans nos discours, comme l'Opposition nous l'a rappelé à juste titre depuis deux jours, sur la nécessité d'un effort plus libéral de la part du gouvernement pour l'éducation parce que, historiquement, la générosité envers l'éducation a toujours été identifiée au Parti libéral, comme le sait très bien mon ami de Laviolette. Nous avons également insisté pour signaler que cet effort demandé à la collectivité par l'entremise de son gouvernement doit s'accompagner d'un effort de discipline et de rationalisation de la part de ceux qui sont chargés de réaliser la mission universitaire dans les universités.

Tandis que les universités entreprendront ces réflexions, je me permets de les inviter à porter une attention toute particulière à la nécessité d'une promotion accrue des études de baccalauréat. Le taux de diplomation au niveau du baccalauréat chez les personnes âgées de 20 à 24 ans a légèrement augmenté entre 1981-1982 et 1985-1986, passant de 3,37 % à 3,70 %. 11 y a lieu de se réjouir de cette augmentation. Cependant, l'écart avec l'Ontario s'est accru en faveur de l'Ontario. Tandis que le taux progressait de 4,58 % à 5,06 %, l'écart est passé de 1,21 % à 1,36 % au cours de la période 1981-1982 à 1985-1986. En contrepartie, nous avons progressé par rapport à l'Ontario au chapitre des diplômés du deuxième et du troisième cycle chez les personnes âgées de 25 à 29 ans. De 0,61 % en 1981-1982, nous sommes passés à 0,71 % en 1985-1986, tandis que, pendant la même période, l'Ontario passait de 0,98 % à 0,96 %, soit une légère diminution. Mais, si l'augmentation du taux de diplomation chez les 25-29 ans pour le deuxième et les troisième cycle est significative et encourageante pour le Québec, vous constatez comme moi que l'écart entre le Québec et l'Ontario, en ce qui touche le nombre des diplômés de deuxième et troisième cycle, demeure encore trop grand pour que nous puissions être vraiment satisfaits.

Ces objectifs dont je viens de parler sont intimement reliés. Les études et les recherches de deuxième et troisième cycle assurent certainement le développement et le rayonnement des connaissances et aussi le prestige d'une institution, mais c'est surtout le premier cycle, la formation au niveau du baccalauréat, qui est la raison d'être première, en pratique, dans l'ordre concret, de l'université. Sur les 155 546 étudiants équivalence temps complet dénombrés aux inscriptions de l'année scolaire 1985-1986, 133 104 étaient inscrits au premier cycle, soit 85,6 % de la clientèle universitaire. C'est ce contingent d'étudiants de premier cycle qui fournira demain les chercheurs, les étudiants diplômés dont nous avons un grand besoin, mais ce sont surtout ces étudiants du premier cycle qui se retrouveront assez bientôt sur le marché du travail, dès la fin de leurs études de baccalauréat.

Ce rôle de formation et de préparation au marché du travail est tout aussi crucial pour notre société et pour la mission de l'université que ne l'est la promotion de la recherche fondamentale et appliquée. Un nombre important de rapports en provenance des États-Unis illustrent l'effort que nos voisins du Sud déploient ces années-ci pour la revalorisation de l'enseignement universitaire de premier cycle, non pas au détriment de la recherche, mais bien en reconnaissant le rôle de préparation, le lieu de maturation et d'éclosion pour les carrières de chercheurs qui doivent s'exercer au niveau des études de premier cycle. Nous aurions tort, par conséquent, dans le choix des orientations et des priorités que nous devons retenir pour les universités, de ne pas tenir compte de cet objectif fondamental. Aux États-Unis, M. le Président, on a constaté une tendance dans les études de premier cycle. Une spécialisation ultrapoussée est souvent la négation de tout humanisme véritable. Il y a un mouvement très fort à l'heure actuelle pour qu'un meilleur équilibrage se fasse à ce niveau de façon que les professionnels qui sortent de l'université soient aussi, dans une certaine mesure, des humanistes. Je pense que c'est vrai pour nous aussi. Nous pourrions nous inspirer avec profit de ce mouvement d'un retour aux sources qui s'effectue aux États-Unis non seulement, comme nous l'avons vu depuis deux jours, au niveau de l'enseignement primaire et secondaire, mais aussi au niveau de l'enseignement supérieur.

Malgré la situation difficile des finances publiques, les crédits budgétaires pour les universités affichent, pour 1986-1987, une hausse de 3,6 % par rapport aux crédits de 1985-1986. Les crédits prévus pour 1986-1987 représentent ensemble un montant au total de 1 147 300 000 $. On prend toujours les deux points de comparaison, soit les crédits qui avaient été inscrits dans le

livre des crédits déposé l'an dernier vers le mois de mars, et les dépenses probables. Par rapport aux crédits déposés l'an dernier, augmentation de 3,6 %. Par rapport aux dépenses probables que nous croyons devoir enregistrer à la fin de l'année de l'exercice budgétaire, les crédits 1986-1987 sont en hausse de 4,2 %. C'est un peu plus haut que le taux de l'inflation.

Le ministère n'a pas modifié la formule de financement des universités pour l'année 1986-1987. Comme le gouvernement s'y était engagé, nous préférons attendre, avant de faire cet exercice, les conclusions de la commission parlementaire de l'éducation.

L'enveloppe des subventions aux universités tiendra compte cependant du financement des clientèles additionnelles, pour un montant de 27 600 000 $. Cela est très important. Quand nous avons fait nos discussions avec le Conseil du trésor et le gouvernement, nous avons bien insisté qu'il fallait partir de l'objectif du maintien du niveau de financement de l'année 1985-1986, qui avait connu, comme vous vous en souvenez, des améliorations notables par rapport aux six années précédentes.

Les deux grandes améliorations apportées en 1985-1986 avaient été d'abord le plein financement des clientèles additionnelles. Par plein financement, il faut s'entendre. Les clientèles des disciplines identifiées au virage technologique, je pense que c'était 70 %, et les autres, 50 %. On calcule que le cent quarante et unième mille étudiant coûte moins cher que le premier. C'était quand même un niveau d'augmentation jugé acceptable par les universités. Nous avons insisté pour que ce soit maintenu.

L'autre montant, l'an dernier, c'était l'indexation. Avec l'indexation, il y avait l'équivalent de 34 000 000 $, 35 000 000 $. En tout cas, cela faisait en tout un ajustement qui était beaucoup plus satisfaisant que ce qui avait eu lieu avant. Nous avions souhaité pouvoir maintenir cela intégralement. Ce que nous avons réussi à maintenir, c'est la base de financement de l'an dernier. Avec l'augmentation normale... Ce sont les mêmes membres de la commission qui ont étudié les crédits du ministère de l'Éducation. Je leur ai dit que nous avions fait une projection de ce que serait l'augmentation de dépenses, en ne tenant compte que du mouvement qui était déjà imprimé au fonctionnement des institutions et des services gouvernementaux. Dans le secteur universitaire, si nous avions suivi cela, l'augmentation des dépenses aurait été supérieure de 15 000 000 $ è ce que nous avons inscrit. Au lieu d'être 1 147 300 000 $ cela aurait été 1 162 000 000 $.

Alors, nous avons réussi à sauver l'essentiel. Nous avons sauvé le financement des clientèles additionnelles. Nous avons sauvé une partie de l'augmentation du reste des dépenses. Quand vous calculez 15 000 000 $ sur un total de 1 100 000 000 $, je ne crois pas qu'il y ait lieu de crier à la catastrophe. Nous aurions mieux aimé que ce fût 15 000 000 $ de plus mais il fallait tenir compte de l'ensemble des secteurs. Le principe que le gouvernement s'était imposé c'est que chaque secteur devait porter une part de responsabilité, pas la même dans chaque secteur. Les routes ont été coupées beaucoup plus que l'éducation et les hôpitaux. Le ministère de l'Industrie et du Commerce a subi des coupures beaucoup plus sévères, des vraies coupures. Nous, il n'y a pas de coupures, il y a une légère compression. Nous l'avons dans le livre des crédits qui a été déposé et dont nous avons déjà parlé. Pour les universités, c'est ceci: Nous avons voulu maintenir le financement des clientèles additionnelles.

Le gouvernement continue aussi d'assurer le financement de certaines actions prioritaires pour un montant de 15 800 000 $. Le programme d'actions structurantes, commencé il y a maintenant deux ans, entrera dans sa troisième année. Nous y consacrerons, en 1986-1987, un montant de 11 300 000 $ dont 8 000 000 $ pour le maintien des 29 équipes déjà en place, et 3 200 000 $ pour la création de 11 nouvelles équipes. (21 h 30)

Les services à la collectivité se voient attribuer un montant de 300 000 $, le Fonds de développement pédagogique se voit accorder 1 200 000 $. Pour les locations d'espaces supplémentaires, une somme additionnelle de 3 000 000 $ est prévue en 1986-1987.

Les crédits budgétaires comportent cependant une compression en crédits budgétaires de 15 500 000 $, ainsi répartie: réduction des dépenses générales de base, 11 000 000 $; annulation des subventions forfaitaires pour les programmes de perfectionnement des maîtres en français et des maîtres en enseignement professionnel, 900 000 $ - Sur ma feuille il y a eu une erreur de transcription, c'était marqué 9 000 000 $, je voyais tout de suite la députée de Chicoutimi s'inquiéter avec raison - programme de développement de la micro-informatique, 3 200 000 $; programme de résidences multidisciplinaires en art dentaire, 240 000 $; programme de formation des maîtres de niveau collégial, 37 500 $.

La compression sera imputée à chaque université au prorata de l'importance de ses dépenses de base par rapport à l'ensemble des dépenses de toutes les universités. Comme je l'ai dit tantôt, nous aurions aimé apporter des ajustements au mode de partage des subventions entre les universités parce que le mode de partage que nous avons est un mode qui est fondé sur ce que nous

appelons la méthode historique, c'est-à-dire qu'à un moment donné, il y a peut-être une quinzaine d'années maintenant, on a établi un système de financement des universités à partir du point ou chaque université en était à ce moment. On a ajouté, après cela, suivant certains critères qui n'étaient pas toujours absolument égalitaires, mais en partant de cette base, de manière que des universités qui avaient pu avoir l'air d'avoir une avance pendant longtemps pouvaient la conserver, on a ajouté d'autres critères et favorisé certains types d'universités plutôt que d'autres. Finalement, on se retrouve aujourd'hui avec une espèce de mélange qui défie toute explication rationnelle.

Il y a des universités qui sont traitées très inégalement par rapport à d'autres. Je mentionne quelques cas en particulier. Vous avez le cas de l'Université Concordia. Quand on parle de déficit universitaire, c'est un facteur important. L'Université Concordia fait face à une demande croissante au cours des dernières années, mais la subvention par étudiant qu'elle reçoit est bien plus basse que celle que reçoit l'Université de Montréal ou l'Université Laval. L'Université du Québec à Montréal reçoit une subvention per capita qui est plus basse. L'Université McGill, cela a été démontré par les travaux qui ont été faits, reçoit des subventions qui sont proportionnellement inférieures à celles que reçoivent d'autres institutions de niveau comparable. Nous sommes très conscients de ces inégalités qui ont été créées par des décisions prises en toute bonne foi, je pense, pour des raisons qui ont pu être valables a une époque ou l'autre.

Nous ne pouvons pas commencer à corriger cela cette année. Le gouvernement précédent avait fait une tentative en ce sens, je pense qu'il y a deux ans de cela. Je ne sais pas si les porte-parole qui sont à la table s'en souviendront. Je pense que non parce qu'ils sont plutôt récents à cette table-ci. Le gouvernement avait tenté de faire une ponction à même l'enveloppe de financement des universités. Il avait dit: On va réserver un montant - je pense que c'était 6 000 000 $, 7 000 000 $ ou 8 000 000 $, je ne me souviens pas, pour le redistribuer aux institutions qui sont défavorisées dans le partage des subventions. Là, ç'a été un tollé de protestations parce que, comme il ne mettait pas d'argent frais dans le système, cela veut dire qu'il l'enlevait à d'autres. Alors, il y a eu tellement de protestations qu'on a été obligé de reporter cette opération à plus tard.

Nous autres mêmes n'avons pas osé l'entreprendre cette année. Tant que nous ne pourrons pas mettre un peu plus d'argent dans le système... D'une manière ou d'une autre, c'est une opération qui va être très difficile que ce recalibrage des subventions de manière qu'il y ait une égalité véritable dans le partage des subventions. Je dis, à l'intention des institutions qui sont défavorisées par le mode de partage actuel, que nous comprenons leur situation et que nous sommes résolus à y apporter un remède, mais qu'il va falloir nous donner encore un peu de temps pour que nous disposions des ressources voulues pour le faire.

Je voudrais dire un mot, maintenant, sur l'aide financière aux étudiants, sujet qui est d'actualité au Québec présentement. Le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science entend maintenir, en 1986-1987, les orientations fondamentales que nous avons au Québec, depuis plusieurs années, en matière de soutien du gouvernement aux personnes qui s'engagent dans des études supérieures. Nous entendons garantir la même accessibilité au régime des prêts et bourses. Nous entendons également apporter le support informatique adéquat pour la gestion du système d'aide financière.

Il nous a fallu constater en arrivant au pouvoir l'échec coûteux de l'implantation du système informatisé Girafe-2000. Nous allons déployer tous les efforts nécessaires afin d'assurer l'efficacité administrative du système d'attribution de l'aide financière aux étudiants.

L'enveloppe des crédits accordés à l'aide étudiante en 1986-1987 est de 280 000 000 $. Cela représente une augmentation de l'ordre de 5 000 000 $ par rapport aux crédits de 1985-1986 et de 10 000 000 $ par rapport aux dépenses probables de 1985-1986. Cette augmentation se traduira par une augmentation de l'aide moyenne disponible pour chaque étudiant, d'environ 3,5 %. Heureuse coïncidence avec le montant de l'augmentation qui est offerte dans les propositions patronales aux organismes syndicaux qui négocient présentement avec le gouvernement. Je crois que ce résultat est arrivé a posteriori et n'était pas voulu d'avance, mais nous sommes très heureux de cette coïncidence qui témoigne de la rationalité de nos politiques.

M. Jolivet: ...pour bien des choses.

M. Ryan: Merci. La volonté du gouvernement de prendre ses responsabilités face à la situation financière difficile de l'État se traduit par des compressions au niveau de l'aide financière. Ces compressions ne remettent toutefois pas en cause les caractéristiques fondamentales de notre système des prêts et bourses. Ces compressions vont chercher, nous l'avons dit à maintes reprises, 24 300 000 $. Essentiellement, nous avons dû convertir en prêt une somme de 270 $ qui était versée jusqu'à maintenant sous forme de bourse.

L'indexation des paramètres qui servent au calcul de l'aide sera de 2 % au lieu de 3,1 %. J'ajoute à ceci qu'en plus de

l'indexation proprement dite nous faisons entrer en ligne de compte, pour établir le montant de l'aide financière versée aux étudiants, des facteurs que nous appelons des facteurs d'alourdissement, c'est-à-dire des facteurs qui établissent le seuil des besoins de l'étudiant à partir de conditions qui lui sont propres. Par exemple, on dit, pour établir ces besoins: on va postuler qu'il a travaillé tant de semaines pendant l'été. S'il a gagné tel salaire, il faut qu'il déclare tout ce qu'il a gagné mais, à supposer qu'il n'a pas gagné des revenus clairement identifiés, on va prendre le salaire minimum. Comme le salaire minimum n'a pas évolué depuis cinq ans parce que le gouvernement l'a laissé gelé là pendant ce temps, cela veut dire que le seuil des besoins augmente.

On tient compte également de l'incidence du chômage et de quelques facteurs comme ceux-là. Cela fait que le montant réel de l'ajustement au coût de la vie est plus élevé que 2 %- Cela va être beaucoup plus proche de 4 % que de 2 %. C'est pour cela que si on veut dire qu'il y a une réduction de l'indexation de 3,1 % à 2 % il faut être très prudent parce que, de fait, l'ajustement réel va être plus élevé et la preuve en est que le montant moyen de l'aide qui va être versée à l'étudiant va augmenter de 3,5 %. Ça, je pense que c'est important de s'en souvenir, parce qu'on entend toutes sortes de choses, ces temps-ci, qui n'ont pas beaucoup de rapport avec la réalité véritable.

Ce que nous demandons aux étudiants n'a rien d'exagéré. Comme vous le savez, dans les autres provinces, l'aide financière se répartit en moyenne comme ceci: 70 % sous forme de prêts, 30 % sous forme de bourses. Au Québec, c'est 50 % sous forme de prêts, 50 % sous forme de bourses. Alors, avec les changements que nous allons apporter, je crois que le pourcentage pour les bourses va descendre à 46 % et le pourcentage réservé aux prêts va monter à 54 %. Nous sommes encore bien en deçà des normes canadiennes.

Nous avons calculé ce qu'est le niveau d'endettement moyen d'un étudiant qui sort des études et qui entre sur le marché du travail. Nous entendons toutes sortes de choses là-dessus aussi. Et, à entendre certaines choses qui sont formulées publiquement, on croirait que l'étudiant sort des études avec des dettes de 10 000 $, 15 000 $ ou 20 000 $. Ce n'est pas le cas. Le niveau moyen d'endettement de l'étudiant qui relève du régime des prêts et bourses est de l'ordre d'à peu près 3000 $ quand il sort des études. Et nous avons constaté une chose, c'est qu'il n'est pas pressuré du tout par les obligations de remboursement qui lui sont faites, parce que la grande majorité réussissent à acquitter leur dette beaucoup plus vite que ne le prévoient les normes de remboursement établies par le gouvernement.

Par conséquent, il y a ici une marge de souplesse que nous pouvons nous permettre.

Et nous avons établi que l'endettement additionnel qui découlera des ajustements que nous faisons cette année va donner à peu près, pour un étudiant ou une étudiante qui irait acquérir une formation professionnelle de niveau collégial, trois années d'études, un endettement additionnel de 780 $ à la fin de la période; et pour celui ou celle qui irait chercher un baccalauréat, cinq ans d'études y compris le collégial, c'est 1285 $. Si vous calculez que l'inflation va jouer là-dedans et que cela n'est pas compté - sa dette n'augmente pas au rythme de l'inflation, elle va rester au montant où elle était quand il a fait son prêt - et que, tout compte fait, ses chances de s'engager sur le marché du travail sont beaucoup plus élevées que l'étudiant ou l'étudiante qui sort du secondaire, même du collège, à ce moment-là, je pense que les conditions ne sont pas étouffantes. En plus, vous savez comme moi que s'il ne trouve pas à s'employer tout de suite sur le marché du travail sa dette est gelée au montant où elle était et il peut commencer à rembourser après, et, tant qu'il n'a pas trouvé un emploi sur le marché du travail, si mes souvenirs sont exacts, l'intérêt est défrayé par le gouvernement.

Je ne pense pas qu'on va pouvoir faire de grosses révolutions avec ces changements. Je crois qu'on aurait mieux aimé ne pas les faire, mais je pense et je rappelle cela souvent, quand on connaît la situation dans un comté comme le comté d'Argenteuil... Je rencontre des travailleurs de mon comté régulièrement et combien j'en recontre dont le revenu moyen est de 12 000 $, 15 000 $, 16 000 $ ou 18 000 $ par année, qui sont bien contents de travailler avec un revenu comme celui-là, et c'est avec les taxes de ces citoyens qu'on finance toutes sortes de programmes. Il faut qu'à un moment donné on se mette les pieds à terre, je pense bien, et qu'on se dise: On va essayer d'équilibrer les charges, les désavantages d'une manière un peu plus équitable et surtout de manière que celui qui a moins puisse respirer un peu plus librement.

Ce sont des considérations, je pense, qui nous sont assez familières mais qu'il n'est pas mauvais de rappeler dans un contexte comme celui d'aujourd'hui, surtout à la veille d'une journée comme celle que nous passerons ensemble demain à Québec.

Quelques mots sur l'enseignement collégial, M. le Président. Le réseau des collèges d'enseignement collégial et professionnel célébrera en 1987 sa vingtième année d'existence. C'est un réseau unique qui joue un rôle charnière entre les études secondaires et l'enseignement universitaire et qui assure en même temps la formation de techniciens hautement qualifiés, prépare par milliers chaque année des jeunes aux études

universitaires. Le niveau collégial a connu un développement phénoménal depuis que le rapport Parent en a recommandé la création. Nous retrouvons aujourd'hui dans 46 cégeps et campus publics une clientèle de 138 000 étudiants, équivalence temps complet, alors qu'on en trouvait à peine 58 000 en 1967. À ces 138 000 étudiants qu'on retrouve dans les collèges publics, il faut en ajouter à peu près 20 000 dans les collèges privés. (21 h 45)

Cet anniversaire sera le moment propice pour faire le point sur certains aspects de la mission des collèges. Ces institutions, qui regroupent presque autant d'étudiants que les universités et qui représentent un investissement presque aussi important que les universités, n'ont pas fait l'objet d'une attention aussi soutenue de la part des pouvoirs publics si on compare l'attention que les pouvoirs publics ont accordée aux niveaux primaire et secondaire et au niveau universitaire. Il serait essentiel au cours des mois à venir de donner une plus juste place dans nos préoccupations aux institutions d'enseignement collégial. Personnellement, je me propose de visiter un bon nombre d'institutions d'enseignement collégial au cours de la prochaine année, parce que je pense que c'est la responsabilité des parlementaires, surtout ceux qui ont des charges ministérielles, de connaître de plus près ces institutions qui rendent des services précieux et qui exigent des sacrifices considérables de la part de notre communauté.

L'un des premiers aspects à privilégier sera sans contredit une meilleure connaissance des résultats et des performances enregistrés par les étudiants au cours de leurs études collégiales. Au ministère de l'Éducation, nous faisons cette année un effort pour faire connaître certains indicateurs de performance qui aident le public à se faire une idée sur les progrès accomplis au cours des dernières années. Nous en sommes encore à des balbutiements dans ce domaine. Nous en sommes encore à des données qui traitent surtout de l'accessibilité et qui n'ont pas encore de prise sur la qualité même des apprentissages qui sont faits dans notre système scolaire. Alors, a fortiori, les initiatives s'imposeront à cet égard au niveau des collèges.

En matière d'évaluation de la formation donnée dans les collèges, je pense que nous en sommes encore à pied d'oeuvre et nous avons beaucoup de travail à faire. Au chapitre de l'abandon scolaire, nous observons, entre 1979 et 1984, un taux moyen de 20 % entre la première et la deuxième année des programmes de deux ans du secteur général. C'est beaucoup. Pour les programmes de trois ans du secteur professionnel, 25 % des étudiants inscrits abandonnent à la deuxième année. À l'inscription de la troisième année, nous perdons en moyenne 40 % des étudiants présents en première année. Ce taux est en légère baisse au secteur général, mais il est en hausse au secteur professionnel. Les étudiants prennent plus de temps è compléter leurs études que ne le prévoient les programmes. La durée moyenne des études afin d'obtenir le diplôme est en hausse. En 1980, on mettait en moyenne 4,3 sessions pour compléter un programme du secteur général. En 1983, on en était rendu à 4,4 sessions. Au professionnel, la durée moyenne passe de 6,2 à 6,5 sessions pour la même période. De plus, 7 % des étudiants inscrits pour une année donnée mettent un an de plus que ne l'exigent les programmes pour compléter leurs études et 2 % mettent deux ans de plus.

Le taux de diplomation des étudiants du collégial est passé quant à lui - j'attire votre attention sur ces chiffres - de 65,9 % en 1976 à 60,9 % en 1980. Il semble que ce taux se soit stabilisé autour de 60 %. Devons-nous conclure que 40 % des étudiants du collégial ne compléteraient pas leurs études ou échoueraient à la fin des études? Ces données sont suffisamment inquiétantes pour que nous consacrions des efforts importants au cours de la prochaine année afin de préciser notre perception de ces phénomènes, d'en identifier les causes et de mettre en route les éléments de solution. Cela est d'autant plus important que la clientèle étudiante dans les cégeps tend maintenant è se stabiliser après avoir connu une progression constante jusqu'à il y a environ deux ans. Si la proportion d'échecs devait se maintenir à son niveau actuel, cela veut dire que chaque année nous devrions accuser au niveau collégial un taux d'échecs de 55 000 étudiants, ce qui est absolument renversant.

Pour l'année 1986-1987, nous procéderons à une évaluation systématique de l'expérience des premiers centres spécialisés, centres qui ont été mis sur pied ces dernières années afin d'évaluer la pertinence et l'atteinte des objectifs qui étaient visés lors de la création de ces centres. Nous serons à même de compléter l'étude d'impact sur l'expérience des sous-centres d'enseignement collégial en régions afin d'en arriver à déterminer une politique d'accès è l'enseignement collégial en régions. Des révisions importantes aux programmes préuniversitaires des sciences humaines et des sciences de la nature viendront donner suite aux consultations entreprises à partir de documents d'orientation qui sont déjà rendus publics depuis plusieurs mois. Nous prendrons en considération les commentaires et les avis reçus des intervenants du milieu, de même que ceux du Conseil des collèges. Dans l'ensemble, le cadre de révision des programmes devra tenir compte des indica-

tions que nous aurons relevées quant aux performances du système collégial. De même, au cours de la prochaine année, un document d'orientation sur la recherche en milieu collégial sera soumis à la consultation.

Les crédits de l'enseignement collégial sont en hausse pour 1986-1987, passant de 893 000 000 $ à 935 000 000 $, soit une augmentation de 4,2 %. Mais cette augmentation comporte un ajustement technique qui permet de maintenir le financement des collèges è un niveau constant, è la suite d'un surfinancement qui avait été consenti par le Conseil du trésor, en 1984-1985, et qui diminuait d'autant les subventions nécessaires en 1985-1986.

Les collèges, comme l'ensemble des secteurs de l'administration publique, doivent assumer une certaine compression. En 1986-1987, cette compression sera de l'ordre de 5 400 000 $. Elle est répartie ainsi. Sur la base générale des subventions aux collèges, une compression de 1 000 000 $ est effectuée. Ensuite, on retrouve les compressions suivantes: réduction des achats de logiciels dans le programme de développement de micro-informatique: 1 700 000 $. On a beaucoup moins de quincaillerie, cette année, à tous les niveaux. On a beaucoup acheté ces dernières années. Réduction du volume des cours financés à l'éducation des adultes: 1 600 000 $. Réduction du volume des cours financés en sessions d'été: 1 000 000 $. D'autres postes plutôt mineurs. Secteur des sciences. Les crédits du programme 4 seront étudiés au cours de nos travaux. Nous ferons part à ce moment du détail des activités et des compressions qui s'imposent.

Je termine par un mot sur le Fonds FCAR dont les activités sont reconduites pour l'essentiel en 1986-1987. Le plan triennal préparé en 1985-1986 par le fonds m'a été remis au mois de janvier. Je n'ai pas encore eu le temps d'en faire un examen systématique avec mes collaborateurs. C'est un examen que nous ne pourrons pas faire avant l'été. L'évaluation de ce programme d'activités réparties sur trois ans sera faite, par conséquent, d'ici à l'automne et, à partir de cette évaluation, nous serons en mesure d'établir les orientations futures du Fonds FCAR.

Je ne sais pas quelles structures seront retenues pour ce fonds dans l'avenir. Un effort de révision de bien des structures gouvernementales est présentement en cours au gouvernement et je pense que des questions seront posées à propos d'un organisme comme celui-ci. Mais, de manière générale, l'activité fondamentale qui a été assumée par le fonds, au cours des dernières années, va continuer. Nous avons absolument besoin d'un organisme dispensateur de subventions de bourses d'études et de recherche comme celui-là et nous entendons faire en sorte que cette activité continue et se maintienne a un niveau élevé, au cours des prochaines années.

Je termine ici, M. le Président. Je m'excuse d'avoir été un petit plus long que je ne l'avais prévu et je veux vous remercier de votre bienveillance.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Ah! vous n'avez pas été long, M. le ministre. Pour votre information, vous avez pris une heure et quinze minutes; c'était édifiant. Je remets la parole è la députée de Chicoutimi.

Mme Jeanne L. Blackburn

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Je dois dire que j'hésite un peu à prendre la parole. L'an passé, en relisant le Journal des débats des commissions parlementaires, un ministre disait: Je me demande si on peut accuser l'Opposition de cruauté mentale. Il parlait de la longueur des débats. Alors, je ne voudrais pas être accusée de cruauté mentale.

Je vais quand même présenter un certain nombre de considérations. Je voudrais d'abord, si vous me le permettez, saluer ceux et celles qui se sont ajoutés ici ce soir, en particulier les collaborateurs, les hauts fonctionnaires du ministère. J'en reconnais et j'en connais plusieurs et il me fait toujours plaisir de les rencontrer. J'ai eu l'occasion, à plusieurs reprises, de constater leur niveau de compétence.

Mon prédécesseur à ce siège, l'actuel ministre de l'Éducation, disait à cette commission parlementaire l'an passé: C'est le devoir de l'Opposition de faire la critique la plus impitoyable des gestes du gouvernement.

M. le Président, je veux placer ces quelques considérations préliminaires à l'étude des crédits de 1986-1987 du ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science à l'enseigne de la qualité et de l'accessibilité. La qualité de la recherche et de la formation dispensée dans nos institutions d'enseignement collégial et dans nos universités et la possibilité d'accéder aux études postsecondaires pour les différents membres de notre collectivité, quelle que soit leur condition, sont des objectifs qui, il me semble, doivent guider l'action gouvernementale et, bien entendu, celle du ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science.

Bien que l'actuel gouvernement soit encore bien jeune, le ministre de l'Éducation est, quant à lui, loin d'être un novice dans le domaine. En effet, depuis plusieurs années, d'abord dans le dossier de l'éducation des adultes, puis comme porte-parole officiel de l'Opposition en matière d'éducation, le député d'Argenteuil a défendu avec vigueur et énergie les principes qu'il jugeait fondamentaux, voire essentiels. Ses grands thèmes: la qualité de l'enseignement,

l'accessibilité des enfants des milieux socio-économiques faibles aux études postsecondaires, la promotion de l'éducation des adultes, la gratuité au cégep, la nécessité d'un environnement et d'un équipement propices à la poursuite d'une formation adéquate, l'excellence, et j'en passe. C'est pourquoi, je le rappelle, la population en général, les réseaux d'éducation, les divers intervenants, le monde de l'éducation se sont réjouis de cette nomination, et je dois dire, ce gouvernement étant élu, que je partageais ce sentiment comme j'ai eu l'occasion de l'exprimer à quelques reprises.

Cet homme jouissait, auprès des différents intervenants du domaine de l'éducation et de la population en général, d'une grande crédibilité. Il avait su se faire le défenseur de valeurs partagées par ces derniers. Tous voyaient donc en lui un homme capable de respecter ses engagements, capable de faire respecter par son parti les engagements qu'il avait pris en son nom.

Cet homme est ministre aujourd'hui. Qu'en est-il maintenant de ces valeurs et de ces principes pour lesquels il s'est si ardemment battu, plus particulièrement alors qu'il était critique officiel de l'éducation? Aujourd'hui, on nous annonce des coupures de près de 90 000 000 $ dans l'enveloppe de l'Éducation, dont quelque 24 300 000 $ dans l'aide financière aux étudiants, 15 500 000 $ dans le financement des universités, 8 000 000 $ dans celui des cégeps, et ajoutons des frais de scolarité pour les cours d'été dans les collèges.

On me répétera sans doute, comme l'a fait tantôt le ministre, qu'en campagne électorale le présent gouvernement n'était pas au courant de l'état réel des finances du Québec. Pourtant, et on va le répéter pour la dizième et peut-être la centième fois, les membres du gouvernement d'alors, les fonctionnaires, les économistes, les journalistes, tous étaient en mesure d'évaluer cette situation et tous s'entendaient pour dire que la marge de manoeuvre était inexistante. (22 heures)

En dépit des avis de tous, ce parti prenait de nombreux engagements, et plus particulièrement è l'endroit de la jeunesse du Québec. Je m'étonnais encore tantôt, en écoutant le ministre de l'Éducation nous dire qu'ils ignoraient la situation financière du Québec. Permettez-moi d'être un peu sceptique. Quand vous me répétez ignorer cette situation, comment pouvoir porter un peu de crédibilité à cela quand vous savez pertinemment qu'un gouvernement qui décide ce que le gouvernement précédent a décidé par rapport aux employés de l'État, à savoir d'aller chercher des centaines de millions dans des engagements conventionnés, cela nous en a tous dit très long sur l'état des finances du Québec et j'imagine qu'à ce moment-là vous étiez aussi un peu branchés.

Certains de ces engagements, d'ailleurs, ont été réitérés en Chambre à l'ouverture de la session alors que, de son aveu même, le gouvernement connaissait l'état des finances du Québec. C'est écrit en toutes lettres dans un document déposé lors de l'ouverture de la session. Je dis donc que ces engagements pris et réitérés par le ministre de l'Éducation ont été reçus par les jeunes comme parole d'évangile, si vous me permettez l'expression. Le jeunes y ont cru et, au risque de me répéter, ils y ont cru parce que le porte-parole était crédible et parce que, quand on a 18 ou 20 ans, on ne demande qu'à croire. Aujourd'hui, ils se trouvent devant la dure réalité des faits: on les a leurrés.

Ce que je trouve déplorable - je pense que le ministre doit me comprendre -condamnable même dans cette attitude, c'est qu'elle aura comme effet de miner le peu de crédibilité que les jeunes accordaient encore en la parole des aînés. Je m'étonne d'entendre le ministre défendre les coupures dans l'aide financière aux étudiants. À l'entendre, je suis en train de penser qu'il est en train d'essayer de se convaincre en même temps qu'il est en train d'essayer de nous convaincre que c'est une bonne décision. Je trouve cela déplorable parce que les jeunes qui ont déjà peu confiance dans les aînés risquent de la perdre totalement. Ensuite, on s'étonnera de voir la jeunesse peu engagée, individualiste, défaitiste, voire cynique. La jeunesse serait, selon le Parti libéral, la nouvelle question nationale, disions-nous en campagne. Si on en juge par les gestes posés par ce gouvernement è son endroit, on peut s'interroger sur l'avenir de cette nation.

Après d'autres, je dirai que l'éducation ne doit pas être considérée, surtout par le ministre, comme une dépense, mais bien comme un placement. L'éducation, c'est la voie privilégiée, pour ne pas dire unique, d'émancipation d'un peuple, de développement économique d'une société. Toute action qui vient mettre un frein à l'accessibilité aux études constitue une entrave à notre développement futur. On ne semble pas avoir compris que l'arme la plus efficace contre le chômage est encore la scolarisation.

La décision de respecter certains engagements - je le répète ici parce qu'on a fait état avec raison de la situation financière du Québec - prise par ce gouvernement, c'est son droit, on peut la respecter, mais, à mon avis, elle demeure extrêmement discutable. En décembre, on convoquait un peu à la hâte - je pense qu'on est tous capables ici de l'admettre - la Chambre pour présenter un document qui, finalement, pour l'essentiel, permettait au gouvernement d'annoncer - cela faisait un

beau cadeau de Noël et cela préparait bien les élections du chef - qu'il respectait ses engagements. C'est une décision qui a coûté 169 000 000 $ et qui va coûter 169 000 000 $ au cours des prochaines années - c'est récurrent - alors qu'on est en train de défendre des coupures en éducation. C'est là que je mets en doute les choix de ce gouvernement et c'est là que les jeunes ont raison de les contester.

Cela veut donc dire que les décisions qu'on a prises, qui ont eu comme effet de retourner des montants d'argent à ceux qui ont les plus hauts salaires au Québec, qui ont eu comme effet d'abolir la taxe sur l'assurance-vie personnelle... Allez demander à vos courtiers qui peut se payer les plus hautes primes, les primes les plus élevées en assurance-vie personnelle? Ce sont les haut salariés.

Quand on vient ensuite me dire qu'il est normal que les jeunes les plus démunis du Québec contribuent à l'effort de compression, vous admettrez avec moi qu'il y aurait peut-être eu lieu de l'exercer ailleurs ou autrement.

En coupant 24 300 000 $ dans les prêts-bourses le gouvernement libéral met en péril les résultats de 20 années d'efforts soutenus visant à doter le Québec d'un système d'éducation plus démocratique et plus accessible. En posant ce geste, il vient de frapper les plus démunis de notre système. À ceux qui en doutent, je pense que les fonctionnaires pourraient expliquer que ceux qui peuvent avoir accès à la totalité du prêt - d'ailleurs, il faut d'abord qu'ils aient accès au prêt pour avoir droit à la bourse - ce sont effectivement les plus démunis.

Il faut savoir que les critères d'admission à l'aide financière tiennent compte de plusieurs paramètres, comme le rappelait tantôt le ministre, mais que le premier, celui qui conditionne tous les autres... Je peux continuer?

Le Président (M. Parent, Sauvé): Vous avez la parole, madame.

Mme Blackburn: Je vous remercie, M. le Président. C'est peut-être parce qu'ils sont réveillés.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Peut-être. Peut-être êtes-vous assez dynamique pour les réveiller, comme vous le dites. Je vous félicite.

Mme Blackburn: Je disais donc que le critère qui conditionne tous les autres, c'est le revenu des parents ou encore celui de l'étudiant s'il est autonome. La base de calcul du revenu qui établit l'accès à ce régime se situe en deçà de ce qui est estimé comme étant le seuil de la pauvreté par

Statistique Canada. De plus, dans ce calcul, on tient compte de revenus, comme le rappelait le ministre tout à l'heure, que l'étudiant est censé tirer d'un emploi d'été. Je dirais que même au salaire minimum il n'est pas certain que les jeunes vont se trouver un emploi d'été. Dans ces conditions, que les jeunes bénéficiaires refusent de contribuer à l'effort collectif de compression, cela ne devrait étonner personne.

Pour justifier les coupures au régime d'aide financière aux étudiants et aux étudiantes, le gouvernement nous rappelle que notre régime est plus généreux ici que chez nos voisins. Si je voulais être un peu maligne, je dirais, comme l'a fait le président de la Commission Jeunesse du Parti libéral: Le parti savait tout cela avant les élections.

En effet, nos jeunes voisins issus de milieux démunis s'endettent plus qu'ici et, on le sait, les États voisins et l'Ontario connaissent malgré tout une meilleure performance en matière de scolarisation. Comme on sait, d'ailleurs, que bientôt le gouvernement va utiliser les mêmes arguments pour hausser les frais de scolarité à l'université.

Comment tirer une telle conclusion sur la seule base d'un étudiant pour un étudiant, qu'il soit d'ici ou d'ailleurs, sans tenir compte du contexte socio-économique et culturel qui nous distingue de nos voisins, contexte qui, d'ailleurs, a fondé le choix de moyens particuliers ici au Québec au regard de nos voisins?

Qu'est-ce qui nous distingue de nos voisins et qui justifie le choix de moyens particuliers? Je me contenterai d'énumérer quelques faits: un taux de chômage de 18 % chez les moins de 30 ans, des emplois d'été rares et des décisions gouvernementales qui viendront encore les réduire l'été prochain, une tradition d'éducation moins forte chez les francophones au Québec, le ministre le sait, le phénomène, d'ailleurs, s'observe chez les francophones hors Québec. Et s'il est besoin d'ajouter, je vous rappellerai que l'Institut de recherche CD. Howe nous disait que la richesse collective per capita accuse chez nous un retard de 25 % sur la province voisine et stagne à ce niveau depuis 1971. Autant de faits qui expliquent que notre régime se doit d'être plus généreux si on veut donner un minimum de chances aux jeunes issus de milieux socio-économiquement faibles d'avoir accès aux études supérieures.

Dans ces conditions, on comprendra que la perspective d'un endettement de 1734 $ par année d'études risque de constituer un frein pour ces jeunes issus de milieux défavorisés où, on le sait et le ministre le sait, l'encouragement à poursuivre des études supérieures est faible et la stimulation est pour ainsi dire absente dans le milieu familial.

Ajoutons à cela que pèse sur eux la menace d'une hausse des frais de scolarité à l'université. On peut déjà prévoir que le gouvernement ira chercher sa caution chez certains intervenants à l'occasion de la commission parlementaire que le ministre nous a annoncée tout à l'heure sur le financement des universités. Curieuse attitude, d'ailleurs, que celle du ministre qui, l'an dernier, il n'y a même pas tout à fait un an parce que c'était en mai, à cette commission parlementaire, réagissant à l'annonce du gel des frais de scolarité à l'université, déclarait: "Nous ne pouvons que nous réjouir étant donné la position très ferme adoptée à ce sujet par notre formation politique lors du congrès d'orientation tenu en mars dernier." J'ajouterais, si besoin était - vous y étiez - que cette position a été réitérée en Chambre le 16 décembre dernier.

Pour 1986-1987, il semble bien qu'on épargnera les étudiants du niveau universitaire. On aurait pu s'en réjouir si le ministre ne venait pas de nous annoncer que la gratuité à l'enseignement collégial risque bientôt de n'être plus qu'un souvenir. Périlleux privilège que le pouvoir, nous disait hier le ministre de l'Éducation, en cette Chambre. En effet, je dois constater qu'il métamorphose une personne. Défenseur acharné de la gratuité au niveau collégial pour toutes les clientèles, jeunes et adultes, à temps complet ou à temps partiel, c'est la même personne qui vient d'imposer des frais de scolarité de 45 $ à 75 $ par cours pour les cours d'été. En plus, comme s'il fallait en ajouter, il déclare: "Cela ne fera mourir personne. Ce ne sera pas un suicide national. On ne les égorge pas." Je suis en train de me demander si c'est ça, finalement, la mesure de ce gouvernement.

Les frais de scolarité pour les cours d'été affecteront, on le sait, les plus démunis de notre société, ceux qui n'auront pas l'argent pour payer ces cours de rattrapage. Le ministre sait-il vraiment ce que représentent ces cours d'été? Je le sais fort informé et fort savant de la quasi-totalité des dossiers de l'éducation, mais j'en doute par rapport à cette décision. Ces cours d'été répondent à des besoins spécifiques d'une clientèle (fin de DEC pour entrer sur le marché du travail ou aller à l'université, rattrapage, insertion ou réinsertion dans la séquence normale des cours du programme -pour ceux qui connaissent cela un peu, il y a des cours qui se donnent par séquences -désir d'accélérer sa formation). Â la limite, on impose à cette clientèle une et peut-être même deux sessions additionnelles. A-t-on évalué les économies réalisées en regard des coûts générés par le prolongement des études? (22 h 15)

Par ailleurs, le président du Conseil du trésor - et le ministre tout à l'heure en faisait état - déclarait la semaine dernière vouloir prendre des mesures contre ceux et celles qu'il appelle les éternels étudiants. Le ministre s'inquiétait, d'ailleurs, de ceux et celles qui prolongent d'une année leurs études. On comprendrait mieux cette décision d'examiner cette situation si, en même temps, on n'était pas en train de mettre des entraves qui auront comme effet de prolonger les études.

Le ministre de l'Éducation a-t-il été informé des décisions du président du Conseil du trésor? J'ai quasiment eu ma réponse tout à l'heure, je pense que oui. J'espère qu'en temps et lieu il nous fera part de la décision à ce sujet-là. Il m'a semblé lire dans la déclaration du président du Conseil du trésor une autre trouvaille de ce comité de bénévoles.

Par ailleurs, il faut se rappeler que le gouvernement actuel, qui se plaît à comparer le système universitaire de l'Ontario à celui du Québec, le sait: le Québec accuse - d'ailleurs, le ministre le rappelait tout à l'heure - un retard encore élevé, considérable même, au chapitre des premier, deuxième et troisième cycles universitaires. Ces mesures ne sont pas faites pour améliorer notre performance.

Ce que le gouvernement doit comprendre, c'est que ce qu'il refuse d'investir aujourd'hui en éducation, il devra en payer la note demain. On sait depuis longtemps, en effet, qu'un faible taux de scolarisation a tendance à confiner l'individu dans le ghetto du chômage, de l'aide sociale, bref dans la pauvreté. Dans une étude menée dans la région de Montréal, on notait que les personnes possédant moins de huit années d'études avaient un taux de chômage deux fois plus élevé, soit 30 %, que celles qui avaient terminé leurs études secondaires, soit 14 %, alors que ces dernières avaient aussi un taux de chômage deux fois plus élevé que les diplômés universitaires.

Le lien entre le chômage, la pauvreté et le niveau de scolarité est donc très étroit et ce qui n'est pas investi dans un cas aujourd'hui sera un jour ou l'autre investi dans l'autre. Si la scolarisation est une arme efficace contre le chômage et la pauvreté, toute action ayant pour effet de freiner l'accès des plus démunis aux études universitaires et collégiales doit être vue comme un refus de donner aux jeunes les outils nécessaires pour assurer leur avenir.

Non seulement le gouvernement libéral ne tient-il pas ses engagements, mais il n'hésite pas à poser des gestes qui auront des conséquences tragiques pour l'avenir de nos jeunes. En sabrant dans le régime d'aide financière, en levant des frais de scolarité au collégial, en menaçant de sanctions ceux qui prolongent leurs études, le gouvernement hypothèque l'avenir des jeunes et, par le fait

même, celui du Québec.

J'aimerais maintenant aborder la question cruciale du financement de nos institutions d'enseignement collégiales et universitaires à la lumière de l'objectif que tous devraient viser, celui d'une plus grande qualité de la formation et de l'accessibilité. Il ne s'agit pas de prétendre que la qualité est uniquement fonction du financement, mais tous conviendront qu'elle en dépend largement. C'est, d'ailleurs, en ces termes que M. le ministre s'exprimait en commission parlementaire lorsqu'il disait: "Vu les effets très coûteux de ces politiques - en parlant des compressions budgétaires - sur la qualité de l'enseignement et de la recherche, sur le processus de renouvellement du personnel enseignant et sur la qualité des équipements... le programme annoncé pour 1985-1986 (l'ajout de 37 000 000 $ dans l'enveloppe des universités) ne saurait être que l'amorce très modeste d'un programme de redressement qui devra s'échelonner sur plusieurs années." Il ajoutait: "Toute augmentation des crédits accordés aux universités doit être accueillie avec soulagement."

Qu'est-ce que nous apprend la lecture des cahiers de crédits déposés par le président du Conseil du trésor? Que les budgets accordés au financement des universités sont amputés de 15 500 000 $. Mes remarques à ce sujet seront de deux ordres. D'abord, on ne peut que s'étonner que le ministre ait endossé ces compressions en se présentant en quelque sorte auprès des différents représentants du monde de l'éducation comme le sauveur de l'éducation. Ces compressions auraient moins frappé ce secteur par rapport à d'autres champs d'activités gouvernementales, nous l'a dit encore tout à l'heure le ministre. Alors, il faut se demander quelle était la menace, et de qui et de quoi le ministre a-t-il sauvé l'éducation, l'enseignement supérieur. Il l'aurait sauvé de son propre gouvernement, des crocs acérés, si vous me permettez l'expression, du président du Conseil du trésor. Si, pour le Parti libéral, l'éducation devait être une priorité au moment où on a fait les choix en décembre dernier - l'actuel ministre n'a pas manqué de le clamer depuis plusieurs années, notamment à l'occasion de la campagne électorale - alors, comment se fait-il qu'il doive se faire le protecteur de l'éducation vis-à-vis des membres de son gouvernement?

Par ailleurs, lorsqu'il affirme que l'Éducation et l'Enseignement supérieur ont été épargnés comparativement à d'autres ministères, il faut signaler que nos institutions scolaires, plus particulièrement les universités et les collèges - et le ministre le sait - ont eu à assumer au cours des dernières années un effort important de rationalisation budgétaire. Cela, tout le monde le reconnaîtra. Dans ce contexte, les compressions additionnelles n'ont pas besoin d'être faramineuses pour affecter lourdement le bon fonctionnement de nos établissements et compromettre la relance amorcée l'an passé.

À une époque pas si lointaine, le ministre, alors critique de son parti, ne se gênait pas pour accuser le gouvernement d'avoir, par des compressions, selon lui, "arbitraires et sauvages" - je le cite - acculé les universités à une véritable crise financière. Il ne manquait pas de qualificatifs pour décrire leur situation jugée insupportable, intenable à divers égards, entre autres, en ce qui concerne les équipements, les bibliothèques et le renouvellement du corps professoral.

Il reprochait au gouvernement d'avoir diminué les subventions per capita en dollars constants. Le ministre actuel tenait à peu près le même discours en ce qui concerne les collèges.

En résumé, un discours alarmiste au cours des dernières années, beaucoup de promesses à l'occasion de la campagne électorale et maintenant, à peine quelques mois plus tard, le ministre entonne, lui aussi, l'hymne des compressions, de la participation de tous, y compris les jeunes - j'ajoute démunis, - à la réduction du déficit. Est-ce que le ministre signifie par là que la situation est moins difficile que ce qu'il laissait entendre alors qu'il siégeait dans l'Opposition ou plutôt que les besoins sont pressants, mais que, finalement, les priorités sont ailleurs?

Sur la question plus précise du financement des universités, le Parti libéral s'est engagé à instaurer une nouvelle méthode de financement devant reposer sur des données fiables et comparables et ceci, après un débat public approfondi en commission parlementaire, commission, d'ailleurs, que nous a annoncée le ministre. C'est avec plaisir que nous participerons à ces travaux de façon constructive. Le cadre actuel comporte assurément des lacunes importantes auxquelles il convient de remédier. Le ministre sait, cependant, que l'exercice est nécessairement périlleux, compte tenu de la diversité et de la complexité des paramètres à faire intervenir pour en arriver à un mode équitable de répartition. Les débats tenus à l'occasion de la commission parlementaire convoquée à l'automne 1984 sur cette question du financement des universités témoignent de la difficulté de réaliser un consensus à ce sujet.

Une autre question qui doit nécessairement nous préoccuper dans le contexte actuel, c'est le vieillissement du corps professoral. Le Conseil des universités a, il y a déjà quelque temps, attiré l'attention à ce sujet. Dans un document d'orientation, le député d'Argenteuil évoquait l'importance d'un renouvellement et d'un

rajeunissement du corps professoral. Mais cela apparaît difficilement conciliable avec la compression imposée aux universités.

Il y a deux dimensions qui sont liées de très près à la qualité de la formation. Ce sont le perfectionnement des enseignants et des enseignantes et les besoins qui s'expriment, notamment dans les collèges, besoins auxquels les mécanismes en place n'apportent pas toujours les réponses adéquates.

Concernant l'évaluation - le ministre y a fait allusion tout à l'heure - on le sait, il reste beaucoup à faire. Les politiques institutionnelles d'évaluation des apprentissages dans les collèges sont à se mettre en place. J'aimerais savoir - et nous aurons l'occasion d'y revenir - quel suivi le ministre entend apporter à ces dossiers et quelle part il entend prendre dans l'établissement des politiques institutionnelles d'évaluation.

Permettez-moi de formuler quelques remarques et interrogations relatives à l'organisation même du ministère. Le ministre nous en a assez longuement parlé tout è l'heure. Je dois dire que j'étais un peu étonnée qu'il débute son discours en parlant des structures, mais passons. On se rappelle que le gouvernement précédent avait procédé, en 1984, à la division du ministère de l'Éducation en deux entités distinctes: l'une responsable de l'enseignement préscolaire, primaire et secondaire; l'autre responsable des niveaux collégial et universitaire, à laquelle venait fusionner le ministère de la Science et de la Technologie.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Mme la députée de Chicoutimi, je regrette de vous interrompre. Dans quelques secondes, il sera 10 h 30. Alors, je sollicite le consentement des deux côtés de l'assemblée pour qu'on puisse continuer jusqu'à 10 h 40 étant donné les dix minutes que nous avons perdues au début. Il y a consentement de l'autre côté? Consentement. Je m'excuse, Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Parlant toujours de la division du ministère, sans revenir ici sur les différents arguments qui fondaient une telle décision, on ne peut manquer de souligner que bon nombre d'intervenants du milieu de l'enseignement supérieur ont exprimé leur satisfaction de transiger avec un interlocuteur désigné, entièrement voué à ce secteur. Au fait, j'estime - et on l'estimait aussi alors - que l'attention que requièrent les nombreux dossiers, la complexité des questions est telle que cette attente des milieux de l'enseignement collégial et universitaire nous semble encore aujourd'hui tout è fait légitime. Ajoutons que les deux ministères se sont donné - je pense que le ministre a pu l'apprécier - à divers niveaux des liens de concertation et de coordination assurant l'unité et l'intégration des politiques. Le ministre nous disait il y a un moment qu'il n'entendait pas pour le moment, dans l'immédiat, refusionner ces deux ministères bien qu'il n'y ait qu'une seule direction. Pour avoir relu les débats de la Chambre au moment où le gouvernement prenait la décision de diviser ces ministères, on se rappellera que l'actuel ministre de l'Éducation, alors critique et porte-parole officiel en matière d'éducation en Chambre dénonçait le gouvernement, l'improvisation dans ce dossier, le fait qu'il n'ait pas consulté, le fait qu'il n'ait pas tenu de débat sur cette question.

Je voudrais juste souhaiter, s'il y a des modifications aux structures, qu'il tienne ces débats, ces consultations qu'il a déploré ne pas avoir été tenus à l'époque.

Par ailleurs, l'actuel ministre de l'Éducation, de l'Enseignement supérieur et de la Science avait mal accueilli cette division. Pour l'instant, il cumule deux portefeuilles, sans qu'on sache trop s'il a l'intention de mettre son projet de fusion à exécution. C'est quasiment le premier engagement que le ministre avait pris; il l'a en partie réalisé puisqu'il dirige les deux ministères. (22 h 30)

M. Ryan: Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Parent, Sauvé):

Question de règlement, M. le ministre de l'Éducation.

M. Ryan: Est-ce que la députée me permettrait de rectifier une affirmation qu'elle vient de faire et qui est fausse?

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le ministre de l'Éducation, vous aurez l'occasion, au moment de... Vous avez eu le temps de faire vos...

M. Ryan: Merci.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Je reconnais la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Généralement, on attend que la présentation soit terminée et, si on estime avoir été mal interprété, on intervient. J'ai appris cela dans mes trois mois.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Sans commentaires, Mme la députée. Vous avez la parole, Mme la députée.

Mme Blackburn: Je vous remercie. Je pensais que le président était là.

II m'apparaît un peu paradoxal que le ministre, qui se faisait l'apôtre du regroupement que l'on sait et qui le défend encore aujourd'hui, ait dû assister au dépeçage de son ministère de l'Enseignement supérieur, de la Science et de la Technologie. Il a gardé la Science, on le sait; il a perdu la Technologie devenue le Développement technologique dont hérite le ministre du Commerce extérieur. Évidemment, la question qui se pose tout de suite est: Y a-t-il une rationalité derrière cette décision, une décision annoncée au moment de la nomination des membres du Conseil des ministres et de la répartition des diverses attributions, une décision, selon toute apparence, improvisée? J'ai hâte d'entendre les réactions du ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science à ce sujet.

La fusion du ministère de la Science et de la Technologie à l'Enseignement supérieur répondait à des objectifs très précis. Si j'avais un moment, je rappellerais les propos de Mme la députée de Jacques-Cartier là-dessus qui reconnaissait que cette fusion visait, entre autres, à permettre le renforcement des liaisons, la création de ponts entre l'université et l'entreprise, à la fois en ce qui concerne la formation de la main-d'oeuvre qualifiée et le développement de la recherche. Ceci ne peut qu'être fructueux compte tenu des retards que connaît le Québec à cet égard. En somme, il s'agissait d'une meilleure coordination entre les efforts de développement scientifique et technique avec nos institutions d'enseignement supérieur qu'assurent à la fois des missions de formation et de recherche.

Et voilà que le gouvernement a décidé de couper la science et la technologie comme s'il s'agissait d'une poire que l'on peut couper en deux. La ligne de partage -je pense que, tantôt, on en a eu un peu un aperçu - entre les divers éléments, les diverses activités qui seraient, d'un côté, à caractère scientifique et, de l'autre côté, à caractère plutôt technologique, est loin de pouvoir se tirer aisément. D'après les renseignements que l'on a pu obtenir, c'est loin d'être évident au sein même de la direction science et technologie du ministère.

Pourquoi séparer? C'est la question que l'on se pose. Il y a différentes conceptions, d'ailleurs, et le ministre les connaît sûrement, différentes pratiques, si l'on regarde ce qui se passe ailleurs, quant à la place de la mission science et technologie à l'intérieur de l'organisme gouvernemental. On la retrouve généralement soit dans un ministère autonome rattaché à l'Enseignement supérieur ou rattaché à un ministère à vocation industrielle.

Mais tenons-nous bien, le gouvernement a choisi d'innover: le Développement technologique est relié au Commerce extérieur, pas à l'Industrie et au Commerce, mais au Commerce extérieur. Probablement que le dossier du ministre du Commerce extérieur n'était pas assez imposant. On veut bien croire que la compétitivité de nos entreprises et leur effort de recherche - développement sont reliés à leurs capacités exportatrice mais vous admettrez que le choix a de quoi laisser songeur.

Avant de terminer, j'aimerais formuler quelques remarques et interrogations en ce qui concerne les accords Québec-Canada en matière d'éducation. On peut s'interroger sur l'avenir de ceux-ci dans les prochaines années à en croire M. Benoît Bouchard, secrétaire d'État au gouvernement fédéral. Selon ce dernier, en effet, il serait temps de redéfinir le rôle présentement joué par le gouvernement central. Dans une entrevue qu'il accordait à la Presse le 14 avril dernier, M. Bouchard prétendait, en effet, que ce rôle ne devait plus se limiter à fournir de l'argent aux provinces sans vérifier où vont les fonds. Tout en portant un jugement sévère, d'ailleurs, sur la qualité de l'éducation, il déclarait: "On donne de l'argent aux provinces, qui nous disent de ne pas nous mêler de leurs affaires et nous ne sommes pas sûrs que les fonds vont bien à l'éducation."

En raison des caractéristiques qui lui sont propres et des différences considérables entre les systèmes d'éducation québécois et canadien-anglais, il importe que le Québec conserve cette liberté d'action dans le domaine de l'éducation. À ce chapitre, nous attendons la réaction du ministre.

Permettez-moi de revenir, en conclusion, sur les principes fondamentaux sur lesquels doit reposer toute politique d'éducation, principes qui, quoi qu'en dise le ministre, sont actuellement grandement menacés. Je parle, bien sûr, de l'accessibilité et de la démocratisation de l'enseignement postsecondaire. Les efforts faits en ce sens, au cours des dernières années, n'ont d'ailleurs pas été sans résultats. La population étudiante de nos établissements, tant collégiaux qu'universitaires, a connu des progressions plus que significatives avec la réforme de l'éducation. Le taux de passage du secondaire au collégial est en croissance. Le taux d'accès des jeunes générations aux études supérieures a aussi augmenté pour se situer à un niveau qui se rapproche de celui, entre autres, de l'Ontario. On sait, cependant, que les programmes courts comptent chez nous pour une part beaucoup plus importante de la fréquentation des études universitaires, le programme de certificat en particulier.

De plus, la démocratisation de l'éducation postsecondaire est loin d'être un objectif atteint comme en font foi les écarts importants dans l'accessibilité selon les milieux socio-économiques d'origine, aussi, selon les régions. D'autres groupes, comme

les handicapés, certains groupes ethniques, rencontrent des obstacles dans leur cheminement scolaire également. En somme, Il y a encore beaucoup à faire à ce chapitre pour réaliser une véritable égalité des chances.

Les choix à faire en cette matière sont nécessairement fonction d'un équilibre à réaliser entre les besoins, les exigences posées par la qualité de la formation souhaitée et les moyens que nous pouvons, comme société, y consacrer. La répartition des ressources dont dispose le gouvernement entre ses différentes missions est, par définition, le fruit de l'arbitrage. Mais celui-ci ne peut faire abstraction d'un contexte où seront de plus en plus sanctionnés les États qui n'auront pas consacré le maximum d'efforts et de ressources à la scolarisation de leur population, à la formation d'une main-d'oeuvre qualifiée. Ce sont là les exigences d'une forte concurrence internationale d'une ère de changements technologiques accélérés.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci beaucoup, Mme la députée de Chicoutimi. Il est exactement 22 h 40. La commission parlementaire sur les états financiers de l'Enseignement supérieur et de la Science ajourne ses travaux à demain matin, 10 heures. Maintenant, demain matin, dans l'ordre, je reconnaîtrai la députée de Jacques-Cartier et le député de Laviolette. M. le ministre de l'Éducation.

M. Ryan: À demain matin.

Le Président (M. Parent, Sauvé): À demain matin. Bonne soirée.

(Fin de la séance à 22 h 39)

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