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(Dix heures huit minutes)
Le Président (M. Parent, Sauvé): À l'ordre,
s'il vous plaît!
J'invite les députés et nos invités à
prendre place. La commission parlementaire sur l'éducation va commencer
ses travaux incessamment.
Dans le cadre du mandat qui lui a été confié par
l'Assemblée nationale, savoir procéder à une consultation
générale sur les orientations et le cadre de financement du
réseau québécois des universités pour
l'année 1987-1988 et pour les années ultérieures, ce
matin, la commission parlementaire accueille l'Université du
Québec à Trois-Rivières et le Conseil du patronat du
Québec.
Au début de l'après-midi, nous continuerons nos travaux en
accueillant l'Université du Québec à Montréal. Je
tiens à informer les membres de cette commission que nous devions
accueillir, immédiatement après l'Université du
Québec à Montréal, les représentants du Conseil de
l'industrie électronique du Québec lesquels, malheureusement,
nous ont avisés qu'ils ne seraient pas en mesure de venir nous
rencontrer.
Alors, j'accueille en votre nom le recteur de l'Université du
Québec à Trois-Rivières, M. Jacques Parent, qui sera le
porte-parole de ce groupe. M. Parent, d'abord, je vous souhaite la bienvenue et
je vous remercie d'avoir bien voulu répondre à l'invitation de
cette commission parlementaire de venir discuter avec nous de la
problématique du financement et de l'orientation du réseau
universitaire québécois. Je pense que cette réponse
spontanée que vous avez donnée aux gens de la commission va nous
aider à trouver réponse à toutes les interrogations que
nous nous posons face à ces deux problèmes. M. Parent, la
commission a environ deux heures peut-être plus, peut-être moins,
tout dépendra de l'heure, mais je veux que vous vous sentiez bien
à votre aise - on a au moins deux heures à vous consacrer,
dis-je, a vous écouter et à dialoguer avec vous et avec les gens
qui vous entourent. Cela va être une discussion franche, honnête,
peut-être informelle même, pour autant qu'on respecte nos
règles de procédure. Mais le seul but que nous recherchons, c'est
d'aller chercher le plus de renseignements pertinents possible pour nous aider
à atteindre l'objectif que s'est fixé cette commission.
M. Parent, si vous voulez bien nous présenter les gens qui vous
accompagnent, après quoi vous pourrez immédiatement
enchaîner avec la présentation de votre mémoire. Si je me
souviens bien, vous nous avez informés que vous prendriez environ une
vingtaine de minutes pour nous le présenter. Le reste du temps sera
réparti en parts égales entre les deux formations politiques, les
gens qui vous accompagnent et vous-même pour la période
d'échanges avec les membres de la commission.
Nous vous écoutons, M. Parent.
UQTR
M. Parent (Jacques R.): M. le Président, avec votre
aimable permission, j'aimerais vous présenter les personnes qui
m'accompagnent.
Le Président (M. Parent, Sauvé): J'ai fait une
faute technique. Avant de débuter une commission parlementaire, je me
dois de m'informer officiellement s'il y a des changements ou des remplacements
sur la commission parlementaire, et je l'ai omis.
Le Secrétaire: M. le Président, M. Philibert
(Trois-Rivières) remplace Mme Bleau (Groulx). Merci.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Très
bien.
M. Parent (Jacques R.): Je disais donc, M. le Président,
qu'avec votre aimable permission, j'aimerais vous présenter les
personnes qui m'accompagnent à cette table. D'abord, le
représentant de la table de concertation enseignement
supérieur-milieu, M. Gilles Beaudoin, qui est à la droite de M.
le vice-recteur à l'enseignement et à la recherche, M. le maire
de la ville de Trois-Rivières. Mes collaborateurs et mes
collègues, cadres supérieurs: à mon extrême gauche,
M. Jean Asselin, vice-recteur associé à l'enseignement et
à la recherche, à ma gauche, M. Paul-André Quintin,
vice-recteur à l'enseignement et à la recherche, à ma
droite M. André Brousseau, secrétaire général et,
à mon extrême droite, M. Robert Beaudoin, vice-recteur à
l'administration et aux finances.
Si vous me le permettez, M. le
Président, j'aimerais aussi souligner la présence de
membres de la table de concertation enseignement supérieur-milieu qui
sont à l'arrière. Il y a d'abord M. Gérard Kelly, M. Alain
Lai lier et M. Lemire qui sont des directeurs généraux de
collèges. M. Kelly est du collège de Shawinigan, M. Lallier du
collège de Trois-Rivières et M. Lemire du collège de
Drummondville. Ensuite, du monde syndical, M. Edouard Gagnon qui est avec nous
ce matin. Pour le monde des affaires, M. Jean Marineau, M. Raynald Laquerre.
Nous accompagnent également, du monde municipal, M. Dominique Grenier,
maire de la ville de Shawinigan, M. Jean-Yves Dessureault, président du
conseil d'administration de l'Université du Québec à
Trois-Rivières, M. André Pleau, président de la Chambre de
commerce de Trois-Rivières et M. Jean-Claude Beaumier, maire de la ville
de Cap-de-la-Madeleine.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Mesdames et
messieurs, bienvenue.
M. Parent (Jacques R.): M. le Président, M. le ministre,
distingués membres de la commission parlementaire. Une
société qui veut façonner son futur et miser sur son
avenir doit investir dans ses établissements d'enseignement
supérieur pour développer son capital humain et se donner les
connaissances nécessaires à son développement.
C'est parce que nous croyons à cette affirmation que nous
intervenons actuellement auprès de la commission de l'éducation
et notre geste se situe dans la suite du mémoire que nous avons soumis
à la commission permanente de l'éducation et de la main-d'oeuvre
d'octobre 1984. Il constitue aussi un complément au mémoire
présenté à l'actuelle commission par l'Université
du Québec, mémoire avec lequel nous sommes évidemment
d'accord.
Dans ce contexte, il n'y a pas lieu de reprendre ici l'ensemble des
éléments contenus dans notre mémoire de 1964 et dans le
mémoire de l'Université du Québec. Nous voulons
plutôt, sur la base d'une illustration concrète de la vie de notre
établissement, montrer comment l'Université du Québec
à Trois-Rivières doit, si elle veut continuer à se
développer et être en mesure de remplir de façon valable et
satisfaisante ses obligations et ses responsabilités face aux besoins et
aux attentes de la société, pouvoir compter sur des conditions de
vie et de développement améliorées qui soutiennent
adéquatement ses propres efforts.
L'université estime avoir, depuis sa fondation et malgré
son jeune âge, contribué activement et de façon
significative au développement scientifique, technologique, social,
culturel et économique de la société et cela au niveau
national et même au niveau international. Elle estime l'avoir fait tout
en posant des gestes et en agissant de façon permanente pour s'inscrire
de plain-pied dans le développement de la région
Mauricie-Bois-Francs-Drummond, région dans laquelle elle est plus
profondément enracinée et liée dans sa vie quotidienne.
Elle estime l'avoir fait en se développant comme une université
de taille moyenne répondant aux besoins réels des
étudiantes et des étudiants qui la fréquentent,
étudiants provenant aussi bien du Québec entier que de sa
région plus immédiate.
En effet, après dix-sept années d'existence,
l'Université du Québec à Trois-Rivières
considère en toute modestie avoir atteint une certaine maturité
de développement et devoir être reconnue comme un
établissement universitaire à vocation générale
ayant sa propre personnalité et pouvant en ce sens fournir des apports
spécifiques au développement de la société. Encore
faut-il, pour que ces actions portent fruit à court et à moyen
terme, s'assurer que notre établissement puisse compter sur les
ressources nécessaires à la réalisation de ces objectifs.
Or, ce n'est plus le cas.
Déjà il y a deux ans, en novembre 1984,
l'université avait informé la commission permanente de
l'éducation des impacts prévus des compressions
budgétaires annoncées pour 1985-1986 et expliqué comment
elle était, pour sa part, entrée dans l'ère des
compressions et des contraintes budgétaires au moment même
où ses efforts de défrichage commençaient à porter
fruit et auraient dû normalement lui permettre de prendre son plein
élan.
Elle ajoutait aussi qu'elle ne voyait pas comment, après sept ans
seulement d'existence, une jeune université pouvait subir des
compressions budgétaires permanentes et répétées
sans que soit remise en cause, ou à tout le moins mise en danger, la
qualité même de ses interventions. Bien, M. le Président,
nous en sommes là. Disons-le sans ambages, nous avons un déficit
accumulé de 1 500 000 $ et nous continuons à faire, en 1986-1987,
un déficit de fonctionnement de près de 200 000 $ après
avoir coupé pour 800 000 $ dans des éléments souvent
essentiels, réduisant même considérablement le nombre des
activités d'enseignement prévues pour la population
étudiante.
Cela ne peut plus continuer. La situation devient dramatique et l'avenir
de l'université est de plus en plus compromis. Tel est donc l'objet de
ce mémoire: montrer comment, jusqu'à ce jour, l'Université
du Québec à Trois-Rivières a su réaliser sa mission
d'établissement à vocation générale sous toutes ses
dimensions, malgré le contexte exigeant des compressions
budgétaires qui affectent les universités depuis de nombreuses
années; montrer aussi quels efforts ont été faits en son
sein et en
concertation avec d'autres partenaires pour planifier son
développement, augmenter sa productivité et ses revenus et
rationaliser ses dépenses; montrer enfin comment ses conditions
actuelles de vie doivent nécessairement être
améliorées, d'une façon ou d'une autre, si l'on veut
qu'elle puisse remplir sa mission éducative et culturelle et assumer
efficacement l'ensemble de ses responsabilités comme agent de formation,
de développement et de changement social.
Pour bien faire comprendre ces diverses dimensions aux membres de la
commission, il m'apparaît utile de commencer ici par un bref rappel du
profil de l'Université du Québec à Trois-Rivières.
Installée en mars 1969 comme une université à vocation
générale au sein du réseau de l'Université du
Québec, l'Université du Québec à
Trois-Rivières a depuis lors développé des programmes
d'enseignement aux premier, deuxième et troisième cycles et s'est
acquis la réputation d'une université de recherche active et
dynamique dans les principaux champs du savoir.
Elle est comme institution, et par l'intermédiaire de ses
activités et de son personnel, intimement impliquée dans le
développement social, culturel et économique de son milieu. Elle
maintient et développe de nombreuses ententes de coopération et
de développement international en enseignement et en recherche.
Enfin, pour que ses enseignements soient le plus accessibles possible
aux individus et aux groupes désireux de faire des études
universitaires ou devant profiter de programmes de recyclage ou de
perfectionnement, elle offre des activités d'enseignement à des
moments et dans des lieux choisis en fonction des besoins de la population en
général. C'est ainsi qu'elle offre en soirée des
activités dans divers centres comme Drummondville, Victoriaville,
Shawinigan, Sorel, Saint-Hyacinthe et Juliette.
D'un point de vue global, l'Université du Québec à
Trois-Rivières regroupe, en 1985-1986, une communauté d'environ
11 000 étudiantes et étudiants, 310 professeurs et 400 autres
personnes appartenant à divers types d'emploi. Elle a, jusqu'à ce
jour, décerné plus de 17 500 diplômes et ses professeurs
produisent annuellement des centaines de publications scientifiques reconnues.
Ainsi, par exemple de 1982 à 1984, on peut dénombrer plus de 500
publications, 700 communications et une soixantaine de livres.
Les figures contenues dans le texte du mémoire qui est
déjà en votre possession illustrent bien la situation de
l'université dans une perspective historique. Vous y trouverez les
éléments montrant la progression continue de la population
étudiante par cycle d'étude, la stabilisation du corps
professoral depuis 1978, stabilisation qui entraîne inévitablement
un vieillissement de ce même corps professoral, une augmentation de la
scolarité, de la diplômation du corps professoral, résultat
entre autres d'une politique énergique de perfectionnement, un
développement sélectif des programmes d'enseignement aux divers
cyles d'étude et enfin, une nette croissance continue dans l'obtention
de subventions, contrats et commandites de recherche de la part de ses
professeurs, un sommet pour l'année 1986-1987 de l'ordre de 6 000 000
$.
L'ensemble de ces figures permet donc de constater d'un simple coup
d'oeil le développement accéléré de notre
établissement au cours de ces années. Il permet également
de voir qu'à ce développement correspondent aussi une
stabilisation et même une décroissance des ressources, comme nous
le verrons de façon plus précise ultérieurement.
Sans entrer ici dans les détails, il faut rappeler que,
dès sa fondation, l'Université du Québec à
Trois-Rivières a dû se donner un modèle original de
développement et faire des choix pour relever un double défi:
d'une part, pouvoir se développer comme université à
vocation générale sans nécessairement imiter le
modèle urbain centralisé des universités établies
et, d'autre part, répondre aux exigences de son insertion dans la trame
de vie d'une région particulière.
Au plan de l'enseignement, au moment même où
l'université établissait un large éventail de programmes
de premier cycle pour assurer à la population l'accès aux
études universitaires, elle se souciait déjà de
créer des programmes d'études avancées pour assurer le
caractère universitaire global de l'établissement et stimuler la
recherche de ses professeurs et la formation de chercheurs.
Dans ce cheminement et dans ce processus, l'université a
cependant toujours conservé le souci d'un développement
sélectif de ses programmes qui tienne compte à la fois de
l'évolution des disciplines, de l'existence de programmes comparables
dans l'ensemble du réseau des universités
québécoises, de sa capacité de donner des services de
qualité, soutenus par des ressources compétentes et,
évidemment, des besoins de la société
québécoise et de la région
Mauncie-Bois-Francs-Drummond.
Dans la perspective précisément d'assurer la
qualité de ses interventions, l'Université du Québec
à Trois-Rivières a par ailleurs été l'une des
premières universités québécoises, sinon la
première, à avoir un système complet,
intégré, organisé, planifié d'évaluation de
ses programmes, et ce système d'autocritique a accompagné
intimement son cheminement depuis 1978.
Par sa situation, par sa vacation, par ses choix, l'Université du
Québec à Trois-
Rivières a ainsi été amenée très
tôt à formuler et à articuler son développement dans
un cadre rigoureux de planification, soutenue d'ailleurs en cela par le
réseau de l'Université du Québec.
En ce sens, elle s'est dotée de plans triennaux d'action depuis
1976. C'est dans son dernier plan, portant sur les années de 1985
à 1988, intitulé "Vers de nouveaux horizons. Miser sur la
capacité créatrice de la communauté universitaire" que
l'université affirme le plus clairement son intention de maintenir, en
dépit des coupures budgétaires, son modèle et ses
perspectives de développement, ce qui se traduit dans la formulation des
cinq grands objectifs que l'université s'est donnés pour cette
période.
Le premier objectif de l'université, c'est de consolider et de
raffermir sa vocation générale, vocation qui se définit
essentiellement par une intervention aux trois cycles d'études et en
recherche. Au premier cycle, sans prétendre couvrir toutes les
disciplines, l'université a développé un éventail
de programmes qui permet un réel accès aux études
universitaires dans la plupart des grands secteurs disciplinaires et les champs
d'études.
Elle a aussi montré dernièrement dans un Avis relatif au
rapport d'un comité d'étude du Conseil des universités sur
la formation courte que ses interventions auprès de la population adulte
répondaient à des besoins de niveau universitaire et qu'elle
pouvait, de fait, rendre accessibles les études universitaires à
ces mêmes adultes sans diminuer la qualité de ses
interventions.
C'est cependant au niveau des études avancées et de la
recherche que l'université fait surtout porter ses efforts de
développement depuis quelques années, répondant en cela
aux besoins des disciplines et aux attentes de la société
québécoise. Elle se donne ainsi, dans différents domaines,
un développement sélectif et orienté dans des secteurs
originaux ou complémentaires aux autres établissements comme, par
exemple, en pâtes et papiers, en biophysique, en économie et
gestion des systèmes de petite et de moyenne dimensions, en
électronique de puissance, en études québécoises,
en gestion de projet, en sciences du loisir, en hygiène et
sécurité industrielles, sur les insectes piqueurs, sur les
habitats fauniques, sur la Mauricie, en contrôle de la motricité
et sur bien d'autres encore.
En outre, et il serait trop long d'en faire ici la démonstration
détaillée, l'unversité a beaucoup misé, dans sa
planification et son développement, sur la concertation que lui
permettait son appartenance au réseau de l'Université du
Québec visant à animer la "communauté scientifique" de ses
divers établissements et aussi sur son appartenance au réseau des
universités du Québec permettant, bien sûr, diverses
collaborations.
Fidèle à la vocation originelle de l'Université du
Québec visant à soutenir le développement dans les
régions, l'Université du Québec à
Trois-Rivières s'est aussi donné comme deuxième objectif
d'intensifier ses relations avec le milieu sur la base d'interventions
originales et articulées au sein de sa région d'appartenance plus
immédiate.
Ainsi, après avoir piloté le dossier du Bilan scientifique
et technologique de la région 04 sous l'égide du Conseil de la
science et de la technologie et après avoir été
impliquée dans de nombreux projets de développement issus du
Sommet économique de la région ou présentés
à ce sommet, l'Université du Québec à
Trois-Rivières a participé directement à la
création d'une table de concertation enseignement
supérieur-milieu où, avec les collèges d'enseignement
général et professionnel de la région et ses partenaires
socio-économiques du monde municipal, patronal, syndical et financier,
elle contribue activement au développement de la région.
Elle a aussi signé avec les collèges une charte de
collaboration qui contient les principes directeurs de cette collaboration des
établissements d'enseignement postsecondaire, non seulement au
développement social, culturel, scientifique et tehcnologique de la
région, mais aussi à son développement
économique.
Dans un troisième objectif, l'université manifeste son
intention d'intensifier et de diversifier ses actions au niveau international,
d'une part, pour garantir la qualité scientifique de ses interventions
en enseignement et en recherche en les soumettant à la
réalité de l'universel et, d'autre part, pour permettre à
d'autres pays de profiter de son expertise et de ses connaissances. Des
dizaines de protocoles de coopération avec de nombreuses
universités de pays différents viennent témoigner de la
pertinence de cet objectif. (10 h 30)
L'effervescence qui a conduit à la multiplication de ces projets
et de ces ententes a une signification profonde dans la vie de
l'université. Elle peut être interprétée comme le
signe qu'ayant atteint une certaine maturité de développement,
l'université peut maintenant s'ouvrir à des horizons plus
universels auxquels la qualité de ses interventions lui permet
d'accéder. Et cela elle le fait de façon très
sélective, tout en visant un autofinancement de ces
activités.
Enfin, dans un quatrième et dans un cinquième objectif,
l'université manifeste à nouveau sa volonté de continuer
à intégrer les diverses dimensions de sa vie universitaire et
à augmenter ses ressources, tout en favorisant une utilisation optimale
de celles dont elle peut encore disposer en
fonction de ses choix et de ses priorités.
Car, en effet, comment les projets de développement et même
les projets de consolidation de l'université pourront-ils de fait se
réaliser si non seulement le gouvernement ne lui fournit pas de
ressources supplémentaires, mais s'il maintient et continue ses
compressions, ne serait-ce qu'en ne lui fournissant pas une indexation
complète de ses dépenses?
M. le Président, la situation est critique et l'avenir de notre
institution est en danger, dans ce qui a peut-être fait sa force
jusqu'à ce jour, savoir sa capacité d'adapter sa programmation
d'enseignement et de recherche en fonction des besoins prioritaires de la
société et son souci de planifier son développement dans
des actions faisant continuellement appel à la capacité
innovatrice des membres de la communauté universitaire.
Que s'est-il passé avec les ressources de l'établissement
pendant ces années de développement qui, depuis 1978,
correspondent aussi à des années de compressions ou de coupures?
C'est ce que nous avons montré dans notre troisième chapitre que
'nous avons intitulé: "Faire plus avec moins: Jusqu'où peut-on
aller?" En effet, ce développement accéléré dont
nous avons parlé précédemment, avec quels moyens et
quelles ressources a-t-il été rendu possible? Les ressources se
sont péniblement maintenues en certains cas, ont fondu comme neige au
soleil dans les autres cas, alors que les efforts de redressement ont
été constants.
De façon plus précise, depuis 1978-1979, le ratio du
nombre d'étudiants équivalent à temps complet par
professeur a augmenté de façon significative passant de 16,6 en
1978-1979 à 20,8 en 1983-1984; ce qui était à ce moment
plus élevé que la moyenne québécoise et la moyenne
ontarienne. Aussi, depuis 1978, le montant consacré annuellement
à l'acquisition de ressources documentaires a diminué ou est
demeuré stable malgré l'augmentation du nombre de programmes
d'études offerts, particulièrement aux études
avancées, et malgré la croissance numérique de la
population étudiante.
Ainsi, en 1985, les fonds consacrés par l'université
à l'acquisition de ressources documentaires n'étaient
guère plus élevés que sept ans auparavant. La situation
est déplorable si on considère qu'avec un ratio de 42 documents
par étudiant équivalent à temps complet,
l'université est nettement en dessous de la moyenne des
bibliothèques québécoises qui montrent un ratio de 120
documents par étudiant équivalent à temps complet.
L'enveloppe budgétaire consacrée aux dépenses
d'investissement affectées au réaménagement, à la
rénovation et à l'acquisition d'équipements n'a suivi ni
l'augmentation du coût de la vie ni celle des populations
étudiantes. De plus, l'université a dû consacrer
jusqu'à 70 % de cette enveloppe pour soutenir des dimensions de son
développement telle l'implantation de ses nouveaux programmes,
négligeant par le fait même des investissements qui auraient
dû être effectués pour l'entretien et la rénovation
de ses immobilisations. L'université, durant cette même
période de 1978 à 1986, a progressivement augmenté la part
de ses revenus de fonctionnement provenant de sources autres que la subvention
d'équilibre générale du gouvernement et les frais de
scolarité. Si ces divers éléments illustrent bien la
nature des compressions et la baisse dramatique des ressources qui ont
accompagné le développement de l'université pendant les
dernières années, ils témoignent en même temps d'une
augmentation réelle de ce que l'on se plaît à appeler la
productivité ou la "performance" de notre établissement.
Nous devons conclure, M. le Président, en rappelant, comme
l'indique notre texte, notre profonde conviction que le monde universitaire
doit pouvoir contribuer encore à défricher et ouvrir l'avenir de
la société québécoise. Pour sa part, depuis le
moment de sa fondation, l'Université du Québec à
Trois-Rivières s'est développée comme un
établissement à vocation générale et a atteint une
certaine maturité. Elle est devenue une université ayant une
âme, une personnalité, des traits caractéristiques qui
l'identifient bien au sein du réseau des universités
québécoises.
Dans le pénible contexte des coupures et des compressions des
dernières années, elle a fait des efforts remarquables pour
continuer à se développer malgré tout, malgré ce
qui apparaît de plus en plus comme un acharnement à vouloir faire
contribuer les universités de façon presque
démesurée à la diminution des dépenses publiques.
Elle a pris toutes les mesures imaginables pour diminuer ses propres
dépenses. Elle a augmenté considérablement ses revenus de
sources autres que gouvernementales et elle a favorisé la
création d'une fondation pour contribuer à son
développement.
L'université refuse maintenant d'être condamnée
à dépérir et exige qu'on lui offre un avenir ouvert. En
effet, l'Université du Québec à Trois-Rivières
constate qu'elle ne peut plus continuer à assurer une présence
active en région et rendre accessibles les études universitaires,
comme elle l'a fait jusqu'à ce jour, si l'État ne procède
pas à un véritable plan de rattrapage et de relance des
activités universitaires par un financement public adéquat.
En conséquence, l'Université du Québec à
Trois-Rivières réitère sa volonté de
continuer à se développer comme une véritable
université à vocation générale et demande à
cette fin que l'État lui fournisse un financement adéquat. Elle
rappelle qu'elle s'est aussi vu confier, en plus de sa vocation
générale, la responsabilité de rendre accessibles les
études universitaires à la population du Coeur du Québec
et que, dans le cadre de cette mission reconnue expressément par les
autorités publiques, elle a décentralisé un certain nombre
de ses activités. Elle constate maintenant qu'elle ne peut plus
continuer à remplir la mission qu'on lui a confiée et
répondre aux attentes et aux besoins de la population en l'absence des
ressources nécessaires.
Elle demande qu'en plus de cesser toute coupure budgétaire, le
gouvernement procède à un véritable plan de rattrapage et
de réajustement des enveloppes budgétaires en augmentant d'abord
l'enveloppe globale affectée aux universités et en mettant en
oeuvre aussi le plan d'urgence défini par le Conseil des
universités en novembre 1984. Elle formule à nouveau son accord
sur l'idée que le développement des programmes d'enseignement et
des activités de recherche doit avoir un caractère
sélectif et est disposée à continuer ses efforts en ce
sens, autant dans le cadre du réseau de l'Université du
Québec qu'avec les autres universités, les organismes de
coordination et de consultation et les autres institutions. Elle insiste
toutefois sur le fait qu'une université ne peut se contenter
d'être à la remorque des besoins fluctuants de la
société, mais doit aussi garder une perspective et une
prospective globales, ouvertes à toutes les dimensions de la
culture.
Elle rappelle que plus que toute autre, une université qui est
associée au développement social, culturel et économique
d'une région est amenée à développer des
activités particulières, qu'on a appelées services
à la collectivité, ou à développer des
modèles de concertation originaux qui exigent des ressources
matérielles et humaines.
À la lumière de la réalité concrète
de la situation de l'établissement que nous connaissons le mieux, le
nôtre, bien sûr, elle lance à nouveau le cri d'alarme
qu'elle a lancé en novembre 1984 quant au vieillissement et au
non-renouvellement du corps professoral, à la dégradation de ses
bâtiments, è la désuétude de ses équipements
scientifiques et au sous-développement de sa bibliothèque.
Elle demande qu'on reconnaisse concrètement, par des gestes, le
rôle primordial des universités dans le développement
social, culturel et économique d'une société, de notre
société qui doit évoluer en relevant le défi du
futur.
Enfin, M. le Président, l'Université du Québec
à Trois-Rivières et ses partenaires socio-économiques
tiennent à exprimer leurs remerciements à la commission
parlementaire de l'éducation pour l'occasion qu'elle leur a
donnée de venir exposer leurs vues sur les questions qui
préoccupent grandement tous ceux et celles qui s'intéressent
à l'enseignement supérieur.
Si vous me le permettez, M. le Président, j'inviterais M. le
maire Gilles Beaudoin, représentant de la table de concertation,
à présenter la position de la table de concertation.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Bienvenue, M. le
maire. Nous vous écoutons.
M. Beaudoin (Gilles): M. le Président, M. le ministre,
distingués membres de la commission parlementaire, nous sommes venus ce
matin appuyer l'Université du Québec à
Trois-Rivières, notre université, dans ses démarches pour
être entendue et écoutée par cette commission et surtout
dans ses efforts et ses démarches en vue de pouvoir participer plus
activement au développement de la région du Coeur du
Québec.
Quand je dis "nous", il faut comprendre les membres de la table de
concertation enseignement supérieur-milieu de la région, à
savoir: des représentants du milieu municipal, des représentants
des centrales et unités syndicales, des représentants des
associations d'entreprises et du milieu financier et, enfin, des
représentants des collèges d'enseignement général
et professionnel de la région.
Vous savez qu'en 1960 est né, dans notre région, le Centre
des études universitaires. Nous avons mis beaucoup d'espoir dans la
création de ce qui allait rapidement devenir une université
reconnue, participant activement au développement social, culturel et
économique de la région. Nous y avons mis beaucoup d'espoir parce
que nous savions que la présence d'une université à
vocation générale, dédiée à la formation de
nos jeunes et permettant que se fassent de la recherche et du
développement en relation avec nos entreprises, permettant que se
crée un milieu intellectuel dynamique, ne pouvait que contribuer
à l'amélioration de la qualité de vie de tous nos
concitoyens.
M. le Président, distingués membres de la commission, nous
n'avons pas été déçus jusqu'à ce jour.
Évidemment, l'insertion et l'enracinement d'une université dans
un milieu, avec ce que cela suppose de changements dans les habitudes,
d'arrivée d'idées nouvelles et d'expériences
inédites, ne peut se faire que progressivement dans une dynamique de
connaissance mutuelle, de collaboration et de concertation selon des
modalités toujours à réinventer, dans une attitude de
confiance réciproque.
Ce que je viens vous dire tout simplement ce matin, c'est que nous avons
vécu
cette expérience depuis 1960 et que, surtout depuis quelques
années,- nous avons l'impression qu'elle commence à donner plus
que jamais des résultats visibles et tangibles, comme nous l'avons
vécu dans les sommets économiques, comme nous le vivons au sein
de cette table de concertation, comme nous le vivons dans la réalisation
de projets particuliers où, en collaboration avec les collèges et
divers autres partenaires du milieu, l'université s'implique dans la vie
régionale.
Il faut occuper un poste de maire depuis seize ans dans une
communauté pour venir ce matin vous dire l'importance pour notre
communauté du rôle économique, social et culturel que joue
l'université. Ce rôle est devenu absolument indispensable et on
veut absolument qu'il demeure et qu'il s'améliore encore plus.
Ce que nous savons aussi, c'est que cette collaboration est maintenant
menacée. Nous le savons par notre connaissance plus immédiate de
l'université, qui a une attitude ouverte à notre égard.
Nous le savons par les médias d'information. Nous le savons par nos
conseils municipaux qui ont voté des résolutions sur le sujet ou
par des groupes de citoyens qui ont fait circuler des pétitions.
L'université, pour réduire ses dépenses, en est
arrivée à réduire son nombre d'activités
d'enseignement non seulement sur le campus, mais aussi à Drummondville,
à La Tuque, à Victoriaville et dans d'autres sous-centres.
Notre population, qui ne faisait que commencer à avoir
véritablement accès à la vie universitaire, voit tout
à coup cette perspective se rétrécir. De plus en plus
l'université, par suite de sa situation financière et de ses
problèmes de ressources, doit limiter ses initiatives et son support
à la vie régionale. Ce dont nous voulons témoigner ici ce
matin, c'est de notre volonté et notre souhait profond de pouvoir
continuer à compter sur notre université dans notre
développement régional actuel et futur. Nous avons besoin d'elle.
Elle nous dit souvent qu'elle a besoin de nous. Nous sommes fiers ce matin de
venir témoigner du fait que nous l'appuyons et la soutenons. Merci.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Je vous remercie,
M. le maire. Je vous remercie, M. le recteur. Avant de débuter, il
serait peut-être bon de vous informer... Vous nous avez
présenté tous vos gens. Peut-être, pour vous aider,
devrions-nous identifier les membres de cette commission parlementaire. On l'a
fait au tout début de la commission parlementaire. Il y a des gens qui
m'ont dit: Enfin, on ne les connaît pas les membres avant qu'on vienne
les voir. Je veux souligner que les membres de cette commission parlementaire
sont tous des députés, en commençant à ma gauche
par la porte-parole officielle de l'Opposition en matière d'enseignement
supérieur et d'éducation, Mme la députée de
Chicoutimi. Madame. À ma droite, l'adjointe parlementaire du ministre de
l'Éducation, de l'Enseignement supérieur et de la Science, la
députée de Jacques-Cartier. À ma gauche est le
vice-président de cette commission le député de
Laviolette. En ordre, siègent à cette commission
également, le député de Richelieu, le député
de Rimouski, le député de Limoilou, le député de
Charlevoix, le député de Trois-Rivières - aujourd'hui,
d'une façon exceptionnelle - le député d'Arthabaska, le
député de Rousseau, le député de Sherbrooke, ainsi
que le député d'Argenteuil qui siège ici aussi a titre de
ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science. Alors, je
reconnais immédiatement le ministre. M. le ministre. (10 h 45)
M. Ryan: M. le Président, il me fait plaisir de saluer
très cordialement les dirigeants de l'Université du Québec
à Trois-Rivières ainsi que les nombreuses personnalités
qui les accompagnent ce matin. Je voudrais signaler que j'ai été
très heureux de retrouver tantôt, à l'entrée,
d'abord le maire de Trois-Rivières, M. Beaudoin, le maire de
Cap-de-la-Madeleine, le maire de Shawinigan - dont je n'ai pas eu l'occasion de
serrer la main - qu'il va me faire plaisir de retrouver parce que ce sont tous
de vieilles connaissances, et beaucoup d'autres dirigeants d'organismes,
chambres de commerce, syndicats, etc., qui ont voulu se joindre à vous
ce matin. Il y a des gens du cégep également, que j'ai
rencontrés tantôt. Je pense que la composition du groupe qui nous
est venu de la Mauricie est à l'image de la collaboration qu'a
décrite tantôt M. le maire de Trois-Rivières et c'est bon
qu'elle soit illustrée par ce type de présence a notre
travail.
Je voudrais souligner également la présence dans les rangs
de l'équipe ministérielle du député de
Trois-Rivières, M. Paul Philibert, dont l'intérêt pour
l'éducation est très connu. Il a été
président de sa commission scolaire pendant longtemps, également
de la commission scolaire régionale, je crois. Il ne cesse de harceler
le ministre au sujet des problèmes autant aux niveaux primaire et
secondaire qu'aux niveaux collégial et universitaire, toujours dans
l'esprit constructif que nous lui connaissons.
Vous nous avez signalé, au début et à la fin de vos
remarques, ce qui était, je pense, le thème dominant de votre
intervention de ce matin, M. le recteur, à savoir la situation
financière très difficile à laquelle l'Université
du Québec à Trois-Rivières s'est vue acculée par
les politiques gouvernementales des dernières années et aussi,
devrais-je ajouter, par une situation
économique générale qui a été celle
de toute la population du Québec et de l'ensemble du gouvernement. Je
pense que nous devons nous dire, en toute honnêteté, que ce qui
s'est produit dans le secteur des universités a peut-être
été plus intensif que dans d'autres secteurs de l'administration
publique. Mais, cela a été une tendance générale de
l'administration publique, ces dernières années, de comprimer les
dépenses, de vérifier la rationalité de plusieurs
programmes qui étaient en cours depuis longtemps. Cette révision
a entraîné des conséquences qui, parfois, sont
allées trop loin. Nous avons dénoncé souvent, quand nous
étions dans l'Opposition, la tendance aux coupures aveugles,
c'est-à-dire aux coupures horizontales qui frappent tout le monde sur un
pied d'égalité, sans égard aux situations
particulières qui peuvent exister dans tel ou tel secteur. Je pense que
ces coupures ont fait beaucoup de mal ces dernières années et le
plus tôt possible nous pourrons dépasser ce stade pour en venir
à des méthodes plus rationnelles de discipline et de
contrôle des dépenses, ce sera infiniment préférable
pour tout ie monde.
Mais, j'ai enregistré l'insistance que vous avez mise sur cet
aspect de la situation. Je pense que vous savez très bien que vous
n'êtes pas les premiers à le faire devant la commission. C'est
notre devoir d'écouter ces représentations et d'en tenir compte
dans les conclusions que nous tirerons de l'examen général fait
de la situation des universités.
Je voudrais signaler qu'il nous est particulièrement
agréable, ce matin, de causer avec la direction de l'Université
du Québec à Trois-Rivières parce que, dans la famille des
universités québécoises, c'est une institution pour
laquelle nous avons tous beaucoup de respect et d'admiration. C'est une
institution qui s'est développée, je pense pouvoir dire, dans
l'ordre, avec une certaine vision ordonnée des choses qu'elle devait
envisager, des choses qui étaient possibles, également de celles
qui ne l'étaient point. Je n'ai jamais senti, depuis que nous sommes
obligés d'exercer des responsabilités du pouvoir, de pressions
indues ou démagogiques de la part de votre université. Au
contraire, nous avons trouvé chez elle un grand réalisme et une
grande sobriété dans des projets et des plans d'action. Je pense
que c'est une note qui s'impose aujourd'hui. Ceux qui ne veulent pas
l'accepter, je pense qu'ils en seront quittes pour les difficultés
qu'ils se créeront eux-mêmes. Je pense que cette note de
sobriété et de pondération qu'on retrouve dans le dossier
du comportement de l'Université du Québec à
Trois-Rivières vaut d'être soulignée à ce
moment-ci.
Je voudrais souligner une autre dimension avant de passer à
quelques questions, c'est celle qu'a signalée M.
Beaudoin tantôt, cette collaboration intense qui s'est
instituée entre l'Université du Québec à
Trois-Rivières et le collège, ce qui est déjà en
soi une chose très importante, mais également entre ces deux
institutions et l'ensemble de la communauté. Je crois que nous serons
très intéressés à entendre parler davantage de
cette dimension du fonctionnement de l'université, c'est très
important. Je me permets d'ajouter une brève note ici parce qu'on nous
parle souvent de cela. Il est question dans votre mémoire à la
fois de la mission générale et de la mission régionale de
l'université. J'introduirais une légère sourdine ici. Je
ne crois pas que ce soit la mission de l'université de s'embarquer dans
tous les problèmes. Nous avons une spécialisation des
tâches dans une société en vertu de laquelle il y a des
organismes qui répondent à telle vocation et d'autres à
telle vocation.
À lire certains mémoires en provenance des
universités on peut avoir l'impression que c'est leur mission de
s'occuper de tout. Je pense que ce n'est pas vrai. L'université comme
telle a des missions bien définies. L'universitaire, lui, a la
responsabilité de s'engager dans son milieu. Je trouve un peu facile
que, parce qu'un universitaire a participé à tel projet, on dise:
Bien cela, c'est l'université de ceci et l'université de cela. Il
y a des distinctions élémentaires qui s'imposent à tout le
monde. Je ne voudrais pas, en tout cas, avoir l'air de donner un placet
général à toutes les prétentions voulant que
l'université soit mêlée à toutes les solutions et
à toutes les campagnes. Si on arrivait là, cela ne serait pas bon
pour l'université elle-même. Que des universitaires individuels
s'engagent et que des autorités des universités les y invitent,
c'est très bien. Il n'y a pas de confusion sur cela. Je le souligne
parce que c'est un terme qui est revenu souvent depuis le début des
travaux de la commission. Je ne voudrais pas qu'on pense qu'on peut se lancer
dans n'importe quelle direction, en ce qui me touche, moi, modestement, je ne
veux pas parler pour d'autres non plus là-dessus.
Je vais en venir tout de suite à quelques questions. Si les
réponses pouvaient être plutôt concises cela me permettrait
d'en poser davantage. Je voudrais laisser quelques minutes à la fin de
la période de temps qui nous est impartie à mon collègue
de Trois-Rivières qui a sans doute des choses à vous dire ou
à vous demander.
Vous avez parlé dans votre mémoire à la fois de la
vocation générale et de la vocation spécialisée de
votre université. C'est indispensable de souligner les deux volets.
J'aimerais vous demander ceci, par exemple. Vous êtes dans une
région où la population est limitée et où on ne
peut pas envisager - comme vous le dites dans votre mémoire - des
développements dans le sens
d'une multi-université au sens des grandes universités
métropolitaines. Au point de vue des champs du savoir à tous les
cycles, qu'est-ce qui peut distinguer une université comme la
vôtre des grandes universités métropolitaines? Qu'est-ce
qui va être sa caractéristique propre? Comment va-t-elle tracer
son chemin?
M. Parent (Jacques R.): M. le ministre, est-ce que vous pouvez
répéter la dernière partie de l'intervention?
Malheureusement, j'ai...
M. Ryan: Je voulais demander ce qui peut distinguer une
institution comme la vôtre des grandes universités
métropolitaines que nous connaissons. Je crois bien que tout le monde
convient que vous ne pouvez pas développer votre activité dans
tous les champs au même titre que les grandes multi-universités
qu'on a dans les grands centres métropolitains. Quelles vont être
les caractéristiques propres d'une institution qui a à la fois
une vocation générale et une vocation régionale comme la
vôtre? En quoi votre université se distingue-t-elle, par exemple,
de l'Université de Montréal ou de l'Université Laval?
M. Parent (Jacques R.): M. le Président, je vais essayer
d'être très bref, c'est quand même une question qui pourrait
me permettre d'appliquer la théorie des gaz parfaits,
c'est-à-dire d'occuper beaucoup d'espace. Cependant, je voudrais ici
immédiatement souligner que le modèle de développement -
je pense que M. le ministre fait allusion ici au modèle de
développement privilégié par l'Université du
Québec à Trois-Rivières - qui l'amenait bien sûr
à tenir compte de l'existence d'universités comme
l'Université Laval, l'Université de Montréal,
l'Université McGill et l'Université de Sherbrooke... Je pense que
la situation géographique appelait à cela. Je veux aussi
souligner que c'est dès sa fondation que l'Université du
Québec à Trois-Rivières a voulu exercer de façon
entière son mandat et sa mission d'université à vocation
générale. Juste une petite parenthèse, si vous le
permettez: Vocation générale, dans notre esprit, c'est
très clair. C'est une université présente et active aux
trois cycles d'études: baccalauréat, maîtrise et doctorat,
et aussi très dynamique en recherche. Il faut que cela soit bien clair.
Ceci ne veut pas dire pour autant - comme le ministre l'a si bien
mentionné - que nous ayons à couvrir ou que nous désirons
couvrir l'ensemble des champs d'études, c'est-à-dire un
développement complet au plan horizontal; donc, complet au plan
vertical, mais pas nécesairement complet au plan horizontal.
Je voudrais ici rappeler le travail colossal effectué par le
recteur et fondateur,
M. Gilles Boulet et son équipe de direction. Cette équipe
a su proposer à la communauté universitaire de
Trois-Rivières un modèle de développement bien
précis et susceptible -c'est cela le sens de la question de M. le
ministre - de permettre à l'Université du Québec à
Trois-Rivières d'apporter ce que j'appelle une contribution
significative au développement du réseau des universités
québécoises et cela en tenant compte des questions
géographiques auxquelles on a fait allusion.
Ce modèle de développement tient en quatre points: d'abord
une université à vocation générale, comme je le
mentionnais tout à l'heure, pour rendre accessibles les études
universitaires dans le vaste territoire du centre du Québec;
deuxième point: une université sensible aux besoins de
développement de son milieu immédiat. À cet égard,
M. le ministre, je me permettrais une petite parenthèse. Lorsque vous
disiez tout à l'heure que les universités ne doivent pas vouloir
tenter de répondre à tout de façon tous azimuts, vous
savez la problématique des services à la population, nous faisons
cela aussi de façon sélective et en fonction des attentes et
besoins exprimés - vous avez profondément raison - et même
avec une certaine distance critique, M. le ministre, et sans faire de
suppléance. C'est à cela que vous faisiez allusion tout à
l'heure. C'est de cette façon-là qu'on a voulu rendre des
services à notre population.
Le troisième point: c'est une université - et là je
reviens de façon précise à votre question - qui a su,
selon nous, faire preuve d'innovation - elle était d'ailleurs
condamnée à cela dû à ce que le ministre a
souligné tout à l'heure - et de complémentarité par
rapport aux autres universités et, en particulier, les
universités qu'on a énumérées tout à
l'heure.
M. le ministre, à cet égard, l'Université du
Québec à Trois-Rivières l'a fait à tous les plans,
au premier cycle, aux deuxième et troisième cycles et aussi en
recherche. Cette université s'est toujours donnée comme toile de
fond de son développement d'être complémentaire en termes
de créneaux d'enseignement et de recherche par rapport à ce qui
existe dans les universités. Prenons un exemple, même dans un
domaine très classique, celui de la biophysique. Voilà un bel
exemple. Nous avions et nous savions qu'on avait les ressources
compétentes, actives en recherche et reconnues par les organismes
pourvoyeurs de fonds. Nous savions cependant qu'il existait deux
universités: l'Université de Sherbrooke, d'une part, qui
était active en biophysique et l'Université de Montréal,
d'autre part. Cependant, l'Université de Sherbrooke préconisait
l'aspect méthodologique davantage centré sur une approche
médicale alors que Montréal était davantage centré
sur
l'approche physique. À Trois-Rivières, on a donc choisi
l'approche biologique, moléculaire et cellulaire. Cela vient donc
compléter le spectre qui existait dans ce secteur de la biophysique.
Finalement, M. le ministre, c'est une université qui se donne
aussi progressivement - et cela est fort important et j'insiste -une
personnalité. Voilà, c'est ce que je viens de mentionner en
mettant beaucoup d'importance sur son développement qualitatif,
sélectif, pondéré et mesuré, M. le ministre.
M. Ryan: Merci.
Le Président (M, Parent, Sauvé): Merci.
M. Ryan: En matière de développement de programmes,
vous dites qu'il y a bien des développements que vous aimeriez faire
encore. Vous en avez mentionné un certain nombre surtout au niveau des
deuxième et troisième cycles. Vous avez mentionné
l'exemple de la biophysique. Vous aviez dans votre mémoire l'exemple des
pâtes et papiers, économie et gestion des systèmes de
petite et moyenne dimension, électronique de puissance, études
québécoises, gestion de projets, sciences du loisir,
hygiène et sécurité industrielle, etc. Je voudrais vous
demander ceci: Étant donné les contraintes budgétaires
dont vous avez parlé, y a-t-îl des projets qui vous
apparaîtraient très importants pour votre université et que
vous ne pouvez pas réaliser à cause de la situation
financière dans laquelle vous vous trouvez? Surtout des projets de
deuxième et troisième cycles, des projets de création de
nouveaux programmes que vous seriez empêchés de réaliser
à cause des contraintes financières?(11 heures)
M. Parent (Jacques R.): M. le ministre, le plan triennal de
l'Université du Québec à Trots-Rivières pour
1985-1988 - je voudrais commencer par cette dimension - prévoit, comme
vous l'avez mentionné, une certaine ouverture au deuxième cycle
tout en consolidant ses activités existantes - je veux être
extrêmement clair à cet égard - et prévoit mettre
davantage l'accent sur un développement au 3e cycle, mais, encore ici,
fait de façon sélective, en ce sens que les politiques
d'enseignement de l'Université du Québec à
Trois-Rivières prévoient à ce niveau d'études un
développement en relation très étroite avec les axes de
développement de l'université qui sont au nombre de cinq, M. le
ministre.
Il est clair que nous avons actuellement certaines difficultés
à réaliser ce que je pourrais appeler certaines propositions ou
certains projets de mise sur pied de programmes à cause, entre autres,
d'obstacles sur le plan financier qui sont indiqués dans notre
mémoire. Il arrive que, dans certains créneaux, il y aurait
nécessité d'améliorer de façon importante le
support documentaire. Vous avez vu, dans le mémoire, jusqu'à quel
point la situation de l'université est compliquée et difficile
à cet égard.
C'est la même chose dans certains autres secteurs. Vous parliez
tout à l'heure des pâtes et papiers, M. le ministre. Il est
très clair que mettre sur pied un programme de doctorat en pâtes
et papiers demanderait un support important au plan de l'infrastructure,
c'est-à-dire au plan de l'équipement scientifique
spécialisé.
À cet égard, juste un petit rappel, M. le ministre. Nous
avons sur le métier déjà deux nouveaux programmes de
baccalauréat dans des domaines qui, encore une fois, permettaient
à l'université de s'identifier par rapport au réseau des
universités québécoises. Je pense au baccalauréat
en génie mécanique manufacturier et au baccalauréat en
informatique, mais, encore là, avec une orientation toute
particulière à l'Université du Québec à
Trois-Rivières.
Nous devons actuellement faire j'allais presque dire - des "pirouettes"
-entre guillemets - pour arriver à supporter la mise sur pied de ces
nouveaux programmes, parce que nous n'avons pas reçu des subventions de
démarrage qui sont déjà annoncées, à toutes
fins utiles, depuis deux ans. Alors, vous voyez, M. le ministre, que ça
nous crée des problèmes majeurs face à nos nouveaux
projets.
M. Ryan: Merci. Je fais vérifier tout de suite où
en sont ces deux projets et j'espère pouvoir vous en parler avant la fin
de la rencontre.
M. Parent (Jacques R.): J'ai oublié celui de génie
chimique papetier, M. le ministre. Voilà.
M. Ryan: Nous allons vérifier celui-là
également; très bien. Vous dites, à la page 10 de votre
mémoire, une chose qui m'a vivement intéressé.
L'Université du Québec à Trois-Rivières serait
"l'une des premières universités québécoises, sinon
la première, à avoir un système complet,
intégré, organisé, planifié d'évaluation de
ses programmes et ce système d'autocritique a accompagné
intimement son cheminement depuis 1978."
Pourriez-vous fournir des précisions sur ce système
d'évaluation que vous pratiquez à l'Université du
Québec à Trois-Rivières et peut-être aussi sur
l'évaluation des professeurs, s'il y a lieu?
M. Parent (Jacques R.): M. le Président, M. le ministre,
je suis très heureux que vous me posiez cette question, parce que j'ai
côtoyé intimement la mise sur
pied de ce projet d'évaluation de nos programmes d'enseignement
à l'époque, particulièrement au début, bien
sûr, des programmes d'enseignement de 1er cycle.
M. le ministre, je voudrais vous faire remarquer que déjà
il y a eu un prolongement de cette problématique d'évaluation de
nos programmes de 1er cycle à nos programmes de 2e et de 3e cycle.
Toute la problématique de l'évaluation concerne d'abord la
question de l'évaluation des programmes, mais il y a aussi toute
l'évaluation des enseignements qui sont en relation étroite avec
cette problématique d'évaluation des programmes. II y a aussi
toute la question de l'évaluation des activités de recherche.
J'aimerais que nous prenions deux minutes, M. le ministre, pour vous
illustrer et vous faire réaliser à quel point les
activités fondamentales de l'Université du Québec à
Trois-Rivières sont effectivement l'objet d'évaluation. Il y a
ensuite l'évaluation des professeurs. Il y a aussi l'évaluation
des services à la collectivité. Parfois, on est porté
à s'imaginer que ces choses ne sont pas évaluées. Au
contraire, M. le ministre. Il s'agit de savoir à quel point les
commanditaires - ceux qui investissent dans l'université pour la
réalisation d'objets de recherche - sont exigeants. On peut aussi parler
de la problématique internationale. Là, également, les
organismes pourvoyeurs de fonds et qui endossent ces activités sont
également extrêmement exigeants et fort sérieux. Donc,
à tout prendre, toutes les activités, que ce soient les
programmes, les enseignements, les professeurs, la recherche, les services
à la collectivité et la dimension internationale sont
évaluées.
M. le ministre, je dirai rapidement qu'en ce qui concerne
l'évaluation de nos programmes tous nos programmes de 1er cycle, nos
programmes longs, c'est-à-dire nos baccalauréats, ont
été évalués depuis 1978. Ils ont donc fait l'objet
d'une évaluation depuis 1978, ce qui a conduit à des
résultats comme des modifications en profondeur à la fois des
objectifs de formation et des objectifs des différentes activités
du programme, donc des cours. Cela peut aller jusqu'à la fermeture de
programmes, M. le ministre. D'ailleurs vous avez vu que notre mémoire
est clair et précis à cet égardi Nous avons en 1982-1983,
si ma mémoire est bonne, dû fermer une dizaine de programmes
d'enseignement à l'Université du Québec à
Trois-Rivières.
Voilà, M. le ministre, je vais au plus court, mais je tenais
beaucoup à signaler toute l'importance de la problématique de
l'évaluation.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci.
M. Ryan: Ma question portait surtout sur le comment. Je vais vous
demander seulement une chose: Pourriez-vous nous adresser un document
complémentaire nous disant comment cela se fait?
M. Parent (Jacques R.): Cela nous fera extrêmement plaisir,
M. le ministre, parce que c'est une approche assez particulière, vous
avez raison, qui fait appel à des indicateurs de performance. À
cet égard, si vous le permettez, je demanderais à M. le
vice-recteur à l'enseignement et à la recherche, qui est
responsable...
Le Président (M. Parent, Sauvé): Un instant, je ne
pense pas... Vous avez accepté de fournir au ministre un document
supplémentaire, si possible. Je demanderais au ministre de clarifier sa
question peut-être.
M. Jolivet: Aux membres de la commission aussi.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Aussi aux membres
de la commission.
M. Ryan: Je n'ai aucune objection.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Je tiens toujours
pour acquis que vous l'envoyez aux membres de la commission.
M. Ryan: Oui. C'était bien postulé dans ma
demande.
J'ai une dernière question. J'en aurais plusieurs autres, mais le
temps est très limité. Il faudra que vous répondiez
brièvement.
Vous dites à la fin de vos recommandations qu'il faut un
véritable plan de rattrapage et de rajustement des enveloppes
budgétaires que vous demandez, évidemment, au gouvernement, mais
il y a une question dont vous ne traitez pas du tout dans cette section de
votre mémoire, c'est comment cela va se faire. Où le gouvernement
va-t-il trouver l'argent pour faire cela? Où l'argent doit-il être
trouvé pour procurer aux universités le supplément de
ressources dont vous assurez qu'elles ont grand besoin?
Vous avez avec vous un personnage politique, un maire vous accompagne:
s'il veut donner ses commentaires là-dessus, cela va nous
intéresser vivement également. Mais je veux d'abord
connaître la position de l'université, s'il y en a une.
M. Parent (Jacques R.): M. le ministre, il faut commencer par
dire que l'Université du Québec à Trois-Rivières a
d'abord exercé ses responsabilités eu égard aux deux
facettes, par rapport au financement des universités, qui la concernent
de façon toute particulière. Son niveau de dépenses
d'abord.
Je pense qu'à cet égard le mémoire est clair et, si
vous voulez des exemples, M. le ministre, je peux vous en livrer beaucoup, car
l'exercice a quand même été très
sévère et pénible pour l'exercice 1986-1987 face à
ce redressement de situation au plan de notre niveau de dépenses.
Deuxièmement, l'Université du Québec à
Trois-Rivières a aussi fait beaucoup d'efforts en ce qui concerne les
sources de revenus autres que la subvention d'équilibre ou la subvention
gouvernementale et les frais de scolarité. Vous avez, d'ailleurs, pu
constater que nous sommes passés, de 1978 à 1985, de 12 % par
rapport à l'enveloppe globale à tout près de 20 % à
cet égard; c'est un souci majeur de l'Université du Québec
à Trots-Rivières de jouer sur les dimensions qui la concernent
particulièrement.
M. le ministre, nous avons ici, dans le texte, dit clairement que ce qui
est fondamental c'est d'agir sur l'enveloppe globale, qui est un
troisième élément, si vous le permettez, de
l'équation qui permet, en fait, de trouver l'ensemble des
paramètres qui pourraient arriver à augmenter les subventions ou
l'apport financier des universités. C'est sur cette facette et cette
dimension que nous insistons pour que le gouvernement puisse agir de
façon adéquate et d'une façon qui permettrait aux
universités, à notre université d'être enmesure de rencontrer ses obligations.
Bien sûr, cela peut m'amener aussi à vous parler de la
problématique des frais de scolarité. M. le ministre, à
cet égard, la position de l'Université du Québec à
Trois-Rivières est tout à fait dans l'ordre de ce que
l'Université du Québec a présenté ici en commission
parlementaire la semaine dernière ou il y a deux semaines, à
savoir que, si le gouvernement décidait d'augmenter ses frais de
scolarité, il faudrait d'abord s'assurer d'un redressement de la
problématique des prêts et bourses et s'assurer aussi que cette
augmentation d'argent puisse aller complètement aux universités
pour soutenir l'accessibilité, d'une part, et aussi assurer la
qualité des interventions des universités.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, monsieur.
Je reconnais maintenant la députée...
M. Parent (Jacques R.): M. le Président, M. le maire,
à la demande de M. le ministre, aimerait peut-être dire un
mot.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Je m'excuse, M. le
maire. Je ne voulais pas vous priver de votre droit de parole, surtout pas ici.
Allez!
M. Beaudoin (Gilles): Merci, M. le Président. Vous posez
la question: Est-ce que l'université cherche des moyens de financer ses
projets? La ville de Trois-Rivières, étant partenaire à
100 % de tout ce qui se fait à l'université et dans la ville,
nous avions chez nous un édifice municipal et, avec l'université,
nous en avons fait un complexe sportif communautaire moyennant un loyer de 60
000 $ par année que l'université versait à la ville. Un
jour, selon les normes, ce avec quoi le maire n'est pas tout à fait
d'accord... Les normes, je vous en reparlerai, M. le ministre, un bon jour.
D'ailleurs, vous allez être à Trois-Rivières en fin de
semaine; j'ai des choses à vous dire. De toute façon, au sujet du
complexe sportif, lorsqu'on a vu que les normes ne permettaient plus de payer
le loyer, le conseil de ville a tout simplement dit à
l'université: Logez-vous gratuitement. On va oublier les 60 000 $ parce
qu'on tient absolument à être partenaire de tout ce qui se passe,
dans les succès et les difficultés. Ce n'est pas un geste qui
commande des millions de dollars, mais, dans un budget comme le nôtre, 60
000 $, c'était déjà beaucoup.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Je vous remercie.
Le temps est à peu près écoulé; il reste à
peu près cinq minutes au parti ministériel. Je reconnais
maintenant Mme la députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. C'est avec plaisir
que j'accueille la délégation de l'Université du
Québec à Trois-Rivières. M. le recteur, M. le maire, je
dois dire que cela me fait plaisir de voir autant de personnes et de
personnalités qui vous accompagnent pour venir défendre le
développement de l'Université du Québec à
Trois-Rivières. Vous savez, à défaut d'avoir pu convaincre
cette commission d'aller entendre les mémoires en régions, vous
nous prouvez que cela ne vous gêne pas de vous déplacer; vous
êtes venus nous voir. De cela, je voudrais vous remercier.
J'apprécie particulièrement la présentation que
vous avez faite. Je dirais, un peu comme le ministre, que vous avez fait preuve
de tant de dynamisme et d'originalité dans le développement de
votre université, dans l'approche des compressions que vous avez, comme
toutes les universités, dû subir, qu'on aurait besoin de plus de
temps pour pouvoir faire bénéficier cette commission de votre
expérience.
Parmi les choses que j'ai retenues, il y a la charte de collaboration
avec les cégeps que 'je trouve particulièrement
intéressante. Il me semble qu'il faudrait en parler de manière
que cela donne des idées à d'autres universités dans
d'autres régions et, surtout, dans les grands centres. Vous avez
parlé également d'intensifier et de diversifier vos actions au
niveau international. J'aimerais
vous entendre là-dessus. Ce qui m'a impressionnée
également, c'est le dynamisme dont vous avez fait preuve pour
diversifier vos sources de revenus. Alors que, dans certaines
universités, on planifie encore aujourd'hui des déficits avec les
services auxiliaires, vous avez réussi à faire des revenus. Je
trouve cela intéressant. Vous avez dû consentir des sacrifices
impartants et je pense aux activités d'enseignement que vous avez
dû abandonner.
Par ailleurs - et c'est là-dessus que j'aimerais ouvrir les
questions - vous demandez au gouvernement qu'il reconnaisse dans la mission des
universités une mission de services à la collectivité.
Vous demandez à la page 21 de votre mémoire, dans vos
recommandations, qu'on reconnaisse par des gestes concrets ce rôle
primordial des universités dans le développement social et
culturel. J'imagine que vous n'avez pas abordé cette question sans vous
interroger sur ce que pourrait vouloir dire la reconnaissance financière
d'une telle activité. Quel pourcentage de l'enveloppe cela pourrait-il
représenter? (11 h 15)
Avant de vous entendre, j'écoutais le ministre tout à
l'heure qui disait: Soyez prudents, on n'est pas d'accord avec les
universités qui ouvrent des activités tous azimuts et qui se
sentent responsables de tout ce qui se passe dans leur région. Ici,
c'est important de le dire, je pense qu'il faut faire une distinction avec les
activités des universités en régions où, je le
rappelle, elles sont souvent les seules à détenir un certain
niveau d'expertise. On ne trouvera pas cela dans les grandes métropoles,
à Québec non plus. Il y a plusieurs lieux d'expertise. Les
universités en régions sont souvent les seuls lieux d'expertise
et elles ont, à cet égard et pour cette raison, des
responsabilités qu'on ne reconnaîtrait pas nécessairement
aux universités des métropoles. Je dis là-dessus - le
ministre s'inquiète d'un abus dans ce sens-là - que je trouve
beaucoup plus inquiétant le silence ou l'absence de certaines
universités par rapport aux préoccupations plus sociales ou plus
collectives.
M. le recteur, je reviens à la question. J'imagine que, quand on
parlera d'allocation des ressources, il y aura un paramètre qui devrait
tenir compte de la mission dite régionale. Est-ce que vous avez
évalué le coût de cette mission dans une université
comme la vôtre?
M. Parent (Jacques R.): M. le Président, je pense que Mme
la députée de Chicoutimi répond déjà
à cela en partie en ce sens qu'il y a, bien sûr, deux
possibilités de tenir compte de cette problématique des
coûts des services à la collectivité ou de
l'investissement, plutôt, qu'on pourrait faire dans les services à
la collectivité. Il y a, d'abord, la formule de financement comme telle
où un paramètre pourrait privilégier cette dimension du
rôle des universités et particulièrement
d'universités en régions. Il y a aussi d'autres hypothèses
qui pourraient être envisagées en dehors de la formule de
financement. À cet égard, j'aimerais, pour quantifier une
certaine évaluation de cette dimension des services à la
collectivité, demander à M. le vice-recteur à
l'administration et aux finances de dire quelques mots dans un premier temps
et, ensuite, à M. le vice-recteur à l'enseignement et à la
recherche, si vous le permettez, M. le Président.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Nous vous
écoutons.
M. Beaudoin (Robert): II est très difficile pour une
université de quantifier le coût de ses services à la
collectivité ou de son intervention dans le milieu. En fait, nous
n'avons pas, pour être très précis, quantifié une
activité en particulier, par exemple, l'impact ou le coût de
l'intervention de l'université dans l'ensemble des dossiers qui nous ont
été délégués par le sommet économique
ou le coût de l'intervention de l'université dans la
rédaction du bilan de l'activité scientifique et technologique de
la région. Donc, dans notre mémoire, nous avons fait une liste,
à l'annexe 2, d'une série d'interventions qui démontrent
ce que veut dire présence active dans le milieu.
Parce que c'est un dossier important pour nous, nous avons
développé ce dossier. Il y a un an ou un an et demi, nous avions
fait une demande spécifique à un organisme, l'Office de
planification et de développement du Québec, où on
essayait de mesurer quel était le coût des interventions de
l'université dans ses services à la collectivité. Le
chiffre qu'on avançait à ce moment-là était entre
750 000 $ et 1 000 000 $, ce chiffre provenant de l'évaluation des
heures-années-hommes de tous nos personnels qui interviennent dans
divers dossiers de développement. Évidemment, cela est
approximatif. La seule analyse précise que nous avions faite qui nous
permettait peut-être d'extrapoler un peu et d'avancer ces
chiffres-là, c'est dans l'intervention de l'université dans les
fêtes du 350e de Trois-Rivières. Nous avions des chiffres
précis, ce qui nous permettait de dire: Lorsqu'on cite de 750 000 $
à 1 000 000 $, nous sommes sûrement à l'intérieur
d'une évaluation modérée.
II est bien clair que, si on nous ouvrait une porte pour pouvoir
financer nos services à la collectivité, il nous ferait plaisir
de détailler avec beaucoup de précisions le coût de ces
interventions.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. Monsieur
Quintin.
M. Quintin (Paul-André): J'aimerais simplement -
peut-être que cela rejoint aussi l'intervention de M. le ministre de tout
à l'heure - insister sur le fait que nos interventions dans ce que nous
appelons services à la collectivité doivent nécessairement
avoir une relation avec l'enseignement et la recherche que nous pratiquons de
niveau universitaire. C'est un des critères premiers qui doivent
toujours s'appliquer. Même si dans certaines situations temporaires on
peut être appelés à jouer un rôle de
suppléance, cela ne peut être que de façon très
temporaire. Nous sommes très conscients de notre râle
universitaire à ce niveau.
Cela étant dit, je pense que, lorsqu'on parle de vouloir
quantifier certains types de services à la collectivité, nous
pouvons donner un exemple très précis, celui de la table de
concertation qui existe maintenant et pour laquelle depuis deux ans nous
n'avons pas encore réussi à trouver une modalité de
financement permanent. Des multiples projets sont issus de cette table et,
chaque fois, nous devons reprendre le bâton du pèlerin et faire
contribuer un peu tout le monde, ce que nous sommes prêts à faire,
mais c'est un peu comme dans tout système de bénévolat: il
faut, d'abord, un encadrement de base pour être capable d'aller chercher
les bénévoles et les mettre ensemble. Alors, on a besoin de cette
base pour faire fonctionner aussi notre table de concertation.
La table de concertation est un des moyens privilégiés
qu'utilise l'université maintenant pour être présente dans
le milieu. Il y en a d'autres. Il y a des départements qui ont beaucoup
d'activités ou des laboratoires de recherche qui sont en relation
directe avec les entreprises. Je pense surtout aux départements
d'ingénierie, d'administration et d'économique. Il y a aussi
beaucoup d'autres activités au niveau culturel. C'est l'ensemble de ces
activités qui représente du temps-personne et qui,
évidemment, s'ajoute et s'intègre aussi dans la tâche des
professeurs comme un complément à ce qu'ils font
déjà en enseignement-recherche ou en encadrement
pédagogique.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. Madame.
Mme Blackburn: J'avais un peu abordé cette question tout
à l'heure. Vous allez me parler un peu de votre programme de
coopération internationale. Vous avez, dans vos objectifs, l'intention
d'augmenter, d'accroître et d'intensifier ces activités.
Voudriez-vous nous en parler brièvement? Quand on parle de relations
internationales, j'estime que les universités sont parmi les
ambassadeurs les plus importants et, je dirais, les plus efficaces. J'aimerais
que vous nous en parliez un peu.
M. Quintin: Je voudrais simplement vous dire qu'encore hier,
à notre conseil d'administration, nous avions l'occasion d'approuver
à nouveau des projets en coopération internationale. Il faudrait
rappeler deux choses: d'abord, que nous participons à certains types de
projets internationaux lorsque cela correspond à une expertise
particulière dont nous disposons. Par exemple, nous avons même une
action structurante en pâtes et papiers pour l'utilisation des bois
feuillus pour faire de la pâte; cela intéresse la Chine. On a des
collaborations qui sont déjà instaurées et qui grandissent
avec la Chine sur ce sujet. On a une expertise particulière sur les
insectes piqueurs, qui nous permet d'aller intervenir au Burkina-Faso dans la
lutte contre l'onchocercose. On a comme cela certains types de
spécialité - je pense à l'administration scolaire, au
niveau de la maîtrise - qui nous permettent d'avoir un programme de
coopération avec les îles Seychelles, au niveau de
l'administration scolaire, avec le ministère des Relations
internationales et l'ACDI comme partenaires.
Dans tous ces cas et dans d'autres que je pourrais continuer à
énumérer, au Gabon, au Mexique ou au Pérou, on a certains
types d'interventions selon des modalités différentes. Il s'agit
toujours d'utiliser au maximum le créneau de spécialités
que nous avons et de faire cela en se souciant aussi du perfectionnement
même des professeurs qui y trouvent un moyen d'approfondir leurs
connaissances et leur propre expertise et un moyen aussi, qui n'est pas
négligeable, dans certains cas, de nous soutenir au point de vue
financier parce qu'il y a aussi quelque argent qu'on peut retirer, en frais
administratifs, de certains types de contrats comme cela qui peuvent nous aider
à consolider l'ensemble de la vacation de l'université.
Mme Blackburn: On a beaucoup fait état è cette
commission des coûts relativement élevés de la formation en
régions. Bien que vous ne soyez pas ce qu'on appellerait une
région éloignée, il y a quand même certains
problèmes reliés à l'enseignement que vous dispensez dans
des sous-centres et qui doivent avoir des effets sur les coûts
administratifs. Deux questions: une première sur le coût de la
formation chez vous comparé au coût de la formation dans les
grands centres, dans les grandes universités; deuxièmement, sur
les coûts administratifs comparés aux autres dépenses et
aux autres universités.
M. Parent (Jacques R.): Mme la
députée, M. le vice-recteur à l'administration et
aux finances a des chiffres précis, à cet égard, à
vous fournir.
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le
vice-recteur.
M. Beaudoin (Robert): Bon, je pense qu'on peut répondre
très rapidement à ce type de question. Nous avons estimé
que tout cours qui se donne en périphérie, qui ne se donne pas
sur le campus, entraîne un coût moyen par activité,
seulement pour la prestation de l'activité - on pense, à ce
moment-là, au coût moyen des déplacements - de 1100 $. Pour
Trois-Rivières, la moyenne exacte est de 1100 $ par activité que
l'on doit rajouter sur la facture d'une activité qui se donne en
périphérie plutôt que sur le campus. Cela exclut le
coût des infrastructures ou des secrétariats que nous devons
maintenir dans plusieurs de ces périphéries. Donc, si on
rajoutait un montant conservateur de 500 $ à 600 $, on arriverait
à environ 1700 $ pour chaque activité additionnelle en
périphérie, lorsque l'on sait qu'une activité sur le
campus coûte 2600 $; donc, on est proche du double, finalement.
Vous avez eu raison de mentionner que nos périphéries ne
sont pas tellement éloignées, mais c'est le cas quand
même.
Mme Blackburn: Les coûts administratifs comparés,
pas seulement sur l'enseignement à distance.
M. Parent (Jacques R.): M. le député de Laviolette
parle de son dossier de La Tuque, alors j'imagine que M. le vice-recteur
à l'enseignement et à la recherche va sûrement avoir
l'occasion d'y revenir, M. le Président.
Mme Blackburn: On pourrait lui en offrir l'occasion tout de
suite. Allez donc.
M. Quintin: Vous avez parlé de problématique, elle
m'intéresse dans la mesure où nous avons un objectif
d'accessibilité, de rendre accessibles les études universitaires.
De fait, la formule que nous avons utilisée jusqu'à maintenant,
que nous avons mise sur pied dans les années soixante-dix, consiste
à avoir des secrétariats à temps partiel selon d'autres
modalités à l'intérieur de ce qu'on appelle des centres de
cours, il s'agit de Victoriaville, Drummondville, Shawinigan, Saint-Hyacinthe,
Sorel, Joliette et même Thetford, d'une façon plus limitée.
Le député de Laviolette est sûrement inquiet que La Tuque
ne soit pas là-dedans; cet endroit est hors centre. Il y a aussi un
certain nombre d'endroits où on va donner des cours, mais là
c'est vraiment à la pièce, nous n'avons pas d'engagement à
long terme.
Cela dit, un des effets des compressions budgétaires, c'est que
nous ne pouvons plus, maintenant, nous engager sur de longues périodes
ou nous engager avec de nouvelles cohortes d'étudiants dans un certain
nombre de ces centres, à moins qu'il y ait un changement assez important
sur le plan budgétaire. Je voudrais rappeler, sur la dimension de fond
d'enseignement, de qualité d'enseignement, que dans ces sous-centres
nous avons fait des ententes avec les bibliothèques pour nous assurer -
et là les collèges d'enseignement général et
professionnel nous ont donné un bon coup de main, ainsi que les
commissions scolaires -que la documentation nécessaire soit là
pour les étudiants et pour assurer la qualité des interventions
qu'on fait. Donc, on a des ententes de signées dans chacun de ces
endroits avec les bibliothèques. L'université acquiert un certain
nombre de livres, de documents, les dépose à la
bibliothèque du collège et ils restent là après.
C'est une des formules que nous avions trouvées pour assurer la
qualité de nos enseignements en périphérie.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. Madame.
Mme Blackburn: Une dernière question parce que je voudrais
laisser un peu de temps à mon collègue de Laviolette. Le
président se fait généreux, je vais peut-être en
abuser un peu.
Je voudrais revenir un peu sur des recommandations du rapport Gobeil.
Voilà, je ne reviendrai pas sur la tâche d'enseignement parce
qu'ici je pense qu'il a été largement démontré que
la modulation de la tâche des professeurs existait effectivement et que
ce n'était peut-être pas la meilleure formule que d'augmenter de
50 % ladite tâche d'enseignement pour renouveler le corps professoral
dont on dit, dans la plupart des mémoires qui nous sont venus des
universités, que le vieillissement constituait une menace certaine au
dynamisme et à la qualité des activités d'enseignement et
de recherche.
Je voudrais revenir sur la recommandation touchant l'abolition du
siège social de l'UQ. Pour une université comme la vôtre,
qui fait preuve à la fois de beaucoup de dynamisme, d'une certaine
capacité d'autonomie, je pense bien, qui a su gérer ses
activités avec beaucoup de rigueur et qui s'est donné une
politique d'évaluation à laquelle je suis particulièrement
intéressée, je voudrais voir comment vous réagissez
à ceci: un siège social, c'est toujours utile pour
l'Université du Québec à Trois-Rivières? (11 h
30)
M. Parent (Jacques R.): M. le Président, Mme la
députée de Chicoutimi, la position de l'Université du
Québec à Trois-Rivières, face à l'existence de la
corporation
centrale, le siège social de l'Université du
Québec, est très claire. Nous recevons des services de
qualité. J'aimerais, à cet égard, insister sur trois
dimensions: d'abord sur le dossier de la planification et de la coordination,
ensuite sur la facette fort importante de l'animation de la communauté
scientifique et aussi, bien sûr, sur les services en commun.
Les services en commun, c'est un ensemble de services que les
établissements -j'insiste sur cette dimension, madame - sur une base
volontaire, ont bien voulu se donner, en estimant qu'il en coûterait
beaucoup plus cher de se les donner, ces mêmes services, de façon
individuelle. Cela c'est la facette des services en commun.
En ce qui concerne la planification, voilà, je pense, l'un des
plus beaux fleurons de l'Université du Québec, M. le
Président. Nous en sommes - notre texte de mémoire à cet
égard est très clair - à notre quatrième plan
triennal, donc au quatrième plan triennal de l'ensemble de
l'Université du Québec. Nous le soulignons d'ailleurs dans notre
texte, à cet égard on a été très largement
soutenus, entre autres, par la vice-présidence à la planification
de l'Université du Québec.
J'aimerais aussi m'arrêter quelques instants sur la
troisième dimension, celle de la communauté
d'intérêt scientifique, pour dire que dans les premières
années de l'existence de la corporation centrale - et c'était
tout à fait naturel de fonctionner ainsi lorsqu'on met en place un
système comme le réseau de l'Université du Québec
-on a mis l'accent ou centré les préoccupations sur des
dimensions à caractère davantage administratif. Je pense que la
petite histoire de l'Université du Québec - nous en sommes
à notre 18e année - témoigne bien de l'importance d'avoir,
au début de l'institution ou de l'établissement, mis l'accent sur
cette dimension. Mais avec le temps et avec l'arrivée de M. Boulet comme
président de l'Université du Québec, on a senti bouger les
orientations fondamentales de l'université non pas qu'on mettait en
cause cette problématique financière, bien au contraire, nous
avions un cadre bien défini qui a été largement
utilisé et qui est toujours utilisé par l'ensemble des
constituantes, mais la direction de l'Université du Québec a
senti non seulement le besoin mais le fait qu'il y avait une richesse dans le
réseau de l'Université du Québec, les constituantes, les
unités composantes de ce grand réseau. C'est à ce moment
qu'on a centré nos préoccupations sur l'animation de cette grande
communauté d'intérêt scientifique que constitue le
réseau de l'Université du Québec.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. le
recteur. Monsieur, je vous inviterais à compléter la
réponse.
M. Quintin: Pour compléter, je veux vous faire remarquer
d'une façon très brève que, dans notre premier objectif
institutionnel de raffermissement de la vocation générale, nous
insistons sur le fait que cela doit se faire en concertation avec les autres
universités. En concertation avec les autres universités, cela
veut d'abord dire, pour nous, la grande communauté scientifique que
représentent l'Université du Québec et le réseau.
Nous vivons là. D'une façon très pratique, certains de nos
développements aux études avancées se font maintenant et
deviennent possibles parce que cette concertation existe. Je pense à la
maîtrise en gestion de projets, que l'on partage, à une
maîtrise en mathématiques, à un doctorat des sciences de
l'éducation qui aussi pourrait commencer à fonctionner, cet
hiver, lorsque M. le ministre aura eu le temps de le regarder aussi. Je
l'ajoute à la liste, M. le ministre, doctorat en sciences de
l'éducation, que nous partageons entre plusieurs constituantes
enregistrées. Nous vivons plusieurs prolongements de programmes qui nous
permettent de nous donner mutuellement un coup de main à
l'intérieur du réseau avec l'Université du Québec
à Montréal, l'INRS - énergie, l'Université du
Québec à Chicoutimi ou l'Université du Québec
à Rimouski. Je crois qu'il y a là des moyens de concertation que
nous ne voulons pas, d'ailleurs, limiter à l'intérieur du
réseau. Nous avons aussi des collaborations et même, pour une
dernière action structurante, avec l'École polytechnique de
l'Université de Montréal. Dans certains domaines de recherche,
nous avons des concertations et des collaborations bien précises avec
d'autres universités. Mais c'est d'abord au sein du réseau que
nous vivons le mieux cette collaboration.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci beaucoup, M.
le vice-recteur. Toujours dans un souci d'efficacité et d'une recherche
du plus de renseignements possible, je reconnaîtrai dans l'ordre le
député de Trois-Rivières, le député de
Laviolette, le député d'Arthabaska et la députée de
Chicoutimi. Je vous invite à être concis dans vos questions et
réponses de façon que nous puissions avoir le plus de
renseignements possible. M. le député de
Trois-Rivières.
M. Jolivet: Juste un instant, M. le Président. En donnant
la parole au député de Trois-Rivières, je...
Le Président (M. Parent, Sauvé): Un instant!
Pourquoi voulez-vous la parole, M. le député?
M. Jolivet: Seulement pour vous faire
une suggestion, M. le Président.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Une suggestion,
ah! Je l'accepte volontiers.
M. Jolivet: Puisque la Mauricie, les Bois-Francs et Drummond font
partie d'une région nord-sud par rapport au Saint-Laurent, je n'aurais
pas d'objection à ce que le député de
Trois-Rivières et le député d'Arthabaska prennent la
parole l'un après l'autre pour permettre justement cette jonction
importante de la région 04.
Le Président (M. Parent, Sauvé):
J'apprécie votre générosité au nom des
membres du côté ministériel, M. le député de
Laviolette; je reconnais le député de Trois-Rivières.
M. Philibert: Je vous remercie, M. le Président, et je
remercie le député de Laviolette de sa magnanimité et de
cette vision de la réunion des deux rives du fleuve Saint-Laurent. Je ne
sais pas si je devrais placer maintenant les jalons de la construction d'un
nouveau pont sur le fleuve, mais probablement que notre croyance très
profonde en une prise en main de l'ensemble de la région pour se
développer, malgré qu'il n'y ait qu'un pont, et que
l'unité de pensée vont faire en sorte qu'on va pouvoir
progresser.
Je voudrais souhaiter la bienvenue aux représentants de
l'Université du Québec à Trois-Rivières et les
féliciter de leur mémoire - ceci s'adresse surtout au groupe qui
accompagne l'Université du Québec à Trois-Rivières
- et dire à mes collègues de la commission jusqu'à quel
point cette démonstration de solidarité des intervenants
régionaux de ma région, de la région 04, traduit la
réalité de l'adhésion de l'ensemble d'une région
aux objectifs de l'Université du Québec à
Trois-Rivières. Cela traduit l'appréciation que l'ensemble des
intervenants ont de l'intervention de l'Université du Québec
à Trois-Rivières dans la région.
Dans votre mémoire, à la page 8, vous soulignez, M. le
recteur, que l'université au niveau des études avancées et
de la recherche fait porter ses efforts particulièrement sur la
recherche et vous citez - c'est important - que vous vous inscrivez en
complémentarité avec les autres établissements
spécifiquement en pâtes et papiers, en biophysique, en
économie, en gestion, etc. D'autre part, on retrouve dans le
mémoire du Conseil des universités une recommandation, une
affirmation, un souhait que la recherche doit se confiner à
l'Université Laval, à l'Université de Montréal,
à l'Université McGilI et à l'Université de
Sherbrooke. Je me demande où vous vous situez par rapport à cette
affirmation en ce qui a trait au Conseil des universités. Est-ce un
questionnement de l'efficience de cette complémentarité de
recherche que vous faites? Est-ce l'affirmation que la recherche trouve son
sens seulement dans des murs métropolitains à grande
densité de population? Est-ce une volonté de centraliser? Comment
vous situez-vous vis-à-vis du Conseil des universités?
M. Parent (Jacques R.): Je voudrais d'abord souligner, M. le
Président, que les chiffres qui sont produits dans le texte de notre
mémoire face à la fonction recherche sont des plus
éloquents et cela, bien sûr, compte tenu du nombre de professeurs
et des conditions difficiles que vous connaissez face aux conditions de
fonctionnement des universités, particulièrement dans le domaine
de la recherche où la compétition est très vive.
Le tableau dans le mémoire témoigne de sommets atteints
année après année. En 1986-1987, l'Université du
Québec à Trois-Rivières, avec un corps professoral de 310
professeurs, va atteindre des subventions, des contrats et des commandites de
recherche de l'ordre de 6 000 000 $, M. le député. Si l'on fait
un per capita, ça veut dire que ce per capita se situe autour de 20 000
$, ce qui est très raisonnable et même, à certains
égards et dans certains concours, la situation relative de
l'Université du Québec à Trois-Rivières est bien
reconnue.
Nous sommes fiers comme université d'avoir réussi, et cela
en un nombre d'années relativement peu élevé, à
créer en notre sein un milieu intellectuel, universitaire et
scientifique dynamique, stimulant et reconnu. Nous sommes
particulièrement heureux de cette situation parce que, comme vous l'avez
souligné... Vous avez fait vous-même, M. le député,
la relation entre les études avancées et la recherche. On
pourrait également la faire entre les études de premier cycle,
les études avancées et la recherche car il y a là des
liens, des interrelations d'enrichissement féconds, nécessaires
et fort utiles.
Votre question précise, M. le député, c'est de voir
comment, après avoir atteint ce niveau de progression en recherche
à l'Université du Québec à Trois-Rivières,
on se situe par rapport à cette déclaration contenue dans le
mémoire du Conseil des universités vis-à-vis de ce que
l'on a qualifié les universités de recherche où sont
reconnues l'Université de Montréal, l'Université Laval,
l'Université McGill et l'Université de Sherbrooke.
M. le vice-président à l'enseignement et à la
recherche de l'Université du Québec a été
très clair à cet égard, ici, devant la commission
parlementaire, en soulignant que, si les subventions de recherche dans le
domaine médical et toute la problématique des dons, des legs,
étaient retirées de ce tableau pour en arriver à ce que
l'on a
utilisé comme paramètres pour la performance des
universités en recherche, c'est-à-dire les subventions de
recherche par rapport aux subventions générales de
fonctionnement... Je peux vous dire, M. le Président et M. le
député, que ceci étant fait pour l'année 1982-1983,
d'une part, l'Université du Québec, dans son ensemble, aurait une
image, par rapport aux chiffres qui seraient les chiffres conséquents,
correspondants, beaucoup meilleure.
En ce qui concerne l'Université du Québec à
Trois-Rivières de façon plus précise, elle se retrouverait
à peu près au même niveau que les universités dites
établies.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. le
recteur. Cela répond à votre question, M. le
député? Une question rapide?
M. Philibert: Est-ce qu'il reste encore du temps pour une
question rapide?
Le Président (M. Parent, Sauvé): Rapide et qui
amène une réponse rapide.
M. Philibert: D'accord. En ce qui a trait au financement, vous
parlez de 20 % de financement autonome. Je ne me souviens pas des montants
exacts, mais le financement autonome, c'est quand même important. Est-ce
que vous pourriez nous parler de cette source qu'est le financement autonome et
comment se fait-il qu'avec la possibilité d'aller chercher du
financement autonome par contrat avec des entreprises ou autrement, enfin, vous
pourrez nous le décrire, comment se fait-il que vous êtes
obligé de couper des activités dans la région
actuellement, alors qu'on pourrait se dire que l'université pourrait
aller chercher plus de financement autonome vis-à-vis des
difficultés financières que la société
québécoise retrouve?
M. Parent (Jacques R.): M. le vice-recteur à
l'administration et aux finances.
M. Beaudoin (Robert): Dans notre mémoire à la
figure XIII de la page 19 où on fait état, effectivement, de la
proportion du budget de fonctionnement provenant des revenus d'autres sources,
on énumère dans le bas de la figure le type de sources de
financement, qui sont ces autres sources. On pense aux
prélèvements de frais d'administration pour contrats et
commandites.
Il faut dire que l'université prélève, de
façon systématique, une charge d'un minimum de 15 % sur
l'ensemble des contrats et commandites et ces montants sont versés dans
le fonds général et distribués à l'ensemble des
services lorsque nous n'avons pas trop de problèmes avec certains
ministères, entre autres, qui trouvent le moyen de passer à
côté de ces charges. (11 h 45)
II y a des réalisations de projets de développement
international, également. Tout à l'heure, nous avons parlé
d'un projet de développement international. Il faut insister sur ce
fait: développement international dans nos projets, non seulement on
recherche l'autofinancement, mais on recherche la profitabilité pour
pouvoir réinvestir ces sommes d'argent à l'intérieur du
système global de l'université.
Le vice-recteur à l'enseignement et à la recherche faisait
état d'un contrat que nous avons signé lundi soir ou
approuvé au conseil d'administration. C'est un contrat de 1 000 000 $
sur lequel nous prenons 150 000 $ qui va contribuer à financer
l'ensemble des autres services en dehors du développement international.
On pense aussi à l'École internationale de français qui
doit s'autofinancer et l'implantation du bureau de soutien financier, revenus
de services auxiliaires aussi qui sont profitables. On exige l'autofinancement
chez nous de plusieurs services. On a privatisé depuis le début
la cafétéria, l'entretien ménager, la
sécurité. Donc, ce sont ces ensembles de revenus qui font en
sorte que nous pouvons parler de 19,9 %. Maintenant, malgré ces 19,9 %,
nous sommes en situation déficitaire. Ce qui explique cette
chose-là, c'est carrément le sous-financement de
l'université qui était trop jeune pour subir des compressions
à partir de 1978. Voilà!
Le Président (M. Parent, Sauvé): Je vous remercie,
MM. les vice-recteurs. Je reconnais maintenant, pour une dernière
intervention du côté ministériel, M. le
député d'Arthabaska,
M. Gardner: Merci, M. le Président, de me permettre de
montrer ici le mariage parfait entre le nord et le sud de la région 04,
mariage quasi parfait, et cela a été prouvé lors de la
dernière campagne électorale. Je dis quasi parfait parce qu'il
nous en est resté un.
M. Jolivet: Le plus tannant.
M. Gardner: Le plus tannant, celui de Laviolette. Vous
comprendrez que je suis très heureux de la participation de
l'Université du Québec à Trois-Rivières dans ma
région, la région de Victoriaville, la région
d'Arthabaska, mais il y a quelque chose à la page 20 qui m'a un peu
déçu en ce sens que l'on dit que, si on n'a pas un financement
public adéquat, l'Université du Québec ne pourra plus
continuer à assurer une présence active en régions.
J'aimerais savoir, M. le recteur, combien il y a d'étudiants qui
vous
coûtent environ 1700 $, c'est-à-dire ceux qui sont en
périphérie, et j'aimerais aussi savoir si la proportion des
chargés de cours est aussi importante en périphérie
qu'à l'université même, au centre de Trois-Rivières.
Est-ce par l'engagement de nouveaux chargés de cours que l'on va essayer
de régler le sous-financement pour les régions?
M, Parent (Jacques R.): Devant la responsabilité, M. le
vice-recteur à l'enseignement et à la recherche.
M. Quintin: Oui, j'aimerais d'abord dire que, de façon
très claire pour Vîctoriaville, il y a eu 34 activités en
1985-1986 qui réunissaient un total de 864 étudiants. Ceci dit,
une des raisons pour lesquelles nous devons, je ne dirais pas diminuer
l'ensemble de nos services en périphérie, parce que nous avons
réduit un certain nombre d'activités, mais je peux vous dire que
pour l'automne, en tout cas, on a le même nombre d'étudiants. On a
dans la plupart des cas augmenté un peu le nombre
d'étudiants-cours. Ce que l'on n'a pas réussi à faire,
c'est, malgré les nombreuses demandes, d'ouvrir de nouvelles cohortes
d'étudiants dans un certain nombre de lieux où il y a des groupes
qui sont déjà prêts et qui attendent les services. Cela
fait 17 ans que l'on prépare les gens à accéder à
l'université et, au moment où on nous le demande, on n'est pas
capable d'y répondre pour les raisons financières qui ont
été expliquées tout à l'heure par le
vice-recteur.
La deuxième dimension, vous avez parlé...?
M. Gardner: La proportion de chargés de cours en
régions.
M. Quintin: Ah! les chargés de cours. Depuis le
début de l'université, nous essayons,.. D'abord, nous avons
intégré l'ensemble de ce que l'on appelle traditionnellement
l'éducation permanente à nos cours réguliers. Nous n'avons
qu'un seul groupe, qu'un seul type d'étudiant ou d'organisation. On n'a
pas de services parallèles, de sorte que ce sont les départements
qui participent à l'organisation des cours en périphérie.
Ce sont les mêmes programmes et, même s'il y a des chargés
de cours, ils sont aussi engagés par les départements et donc les
syllabus sont aussi contrôlés par les départements. Il y a
donc là une liaison qui se fait.
Évidemment, il y a plus de chargés de cours en
périphérie que sur le campus. Même si des professeurs
peuvent donner certaines activités en tâche normale, il reste que,
spontanément, pour les raisons que l'on connaît, si on prend la
peine d'offrir des cours en périphérie pour rendre les
études accessibles, il y a aussi une question de chargés de cours
qui peuvent être plus accessibles et, dans certains cas, nous prenons
l'expertise sur place. Elle existe. Il y a des gens qui ont déjà
un diplôme universitaire qui peuvent donner des cours, étant en
relation donc avec le département chez nous. On règle nos
problèmes d'hiver, parce qu'on a encore aussi l'hiver au
Québec.
M. Gardner: Est-ce que vous évaluez vos chargés de
cours autant que les professeurs réguliers?
M. Quintin: Nous avons depuis un an, comme tout le monde ou
presque, une convention collective pour les chargés de cours. Il y a,
à l'intérieur de cela, des mécanismes pour évaluer
et qui procèdent selon un modèle analogue à cetui que nous
avons pour les professeurs. Les professeurs permaments chez nous sont
évalués tous les trois ans, deux ans pour les professeurs non
permanents, pour l'acquisition de la permanence... À l'intérieur
du système, nous avons l'évaluation des enseignements, parce que
tous ces cours sont à l'intérieur de programmes
gérés par un module. On peut donc évaluer aussi les
enseignements en périphérie. Il y a sur place dans notre
système d'organisation de la périphérie des comités
d'étudiants qui sont chargés de faire la relation avec les
besoins du milieu, de nous aider à identifier les besoins et qui sont
là aussi pour aider à faire l'évaluation des enseignements
selon les besoins.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. le
vice-recteur. Je reconnais maintenant le vice-président de cette
commission parlementaire, le député de Laviolette.
M. Jolivet: Merci, M. le Président. J'ai eu l'occasion, si
je peux faire un court historique, de connaître les débuts de
l'Université du Québec à Troîs-Rivières par
l'intermédiaire d'un de mes professeurs, M. Gilles Boulet, à
l'époque où il mettait en place avec l'organisme régional
le centre des études universitaires de la région. Je dois dire
aussi que je l'ai connue de l'intérieur étant membre
socio-économique au moment de l'implantation des modules d'enseignement
primaire, secondaire - en fait, c'était préscolaire et
élémentaire, à l'époque ayant eu aussi, comme
représentant syndical, à discuter du programme de
perfectionnement des maîtres, le PERMAFRA et, en dernier lieu, par la
fondation du sous-centre de Shawinigan. J'ai connu l'université par
l'intérieur tout comme je l'ai vue agir de l'extérieur.
J'aimerais vous poser quelques questions, le plus rapidement possible.
D'abord, il y a eu un sommet économique. Le sommet économique
n'est pas le départ
de l'université, mais un bon moyen d'aller plus loin. J'aimerais
parler de ce que vous avez mentionné au cours de votre intervention, la
collaboration des cégeps avec l'université, l'ayant vécue
à l'intérieur, qu'on soit de Drummondville, de Victoriaville, de
Trois-Rivières, de Shawinigan et aussi, on peut même aller
jusqu'à Saint-Hyacinthe si on le désire. J'aimerais que vous me
parliez rapidement de la charte de collaboration et, si besoin est, de
documents intervenus entre l'université et les cégeps que vous
pourrez faire parvenir aux membres de la commission.
M. Quintin: Vous l'avez bien dit, le sommet économique n'a
été que l'occasion de raffermir certaines relations que nous
avions déjà avec la plupart des collèges, compte tenu du
système d'enseignement en périphérie, dont je vous parlais
tout à l'heure. Cela dit, nous avons constaté par
l'évolution de la situation qu'il y avait lieu de mieux utiliser, sur
une base régionale, l'ensemble des ressources que nous avions en
enseignement supérieur touchant la recherche, tout le domaine
postsecondaire.
Pour mieux utiliser ces ressources et apprendre à nous parler -
nous avons constaté d'abord que nous ne nous parlions pas assez souvent
et assez longtemps sur des sujets qui nous intéressaient tous dans le
développement de l'enseignement - nous avons donc décidé
de nous rencontrer sur une base périodique pour discuter d'un certain
nombre de dossiers dont nous avions toujours l'occasion de parler dans les
corridors, à l'occasion de sommet économique ou d'autre
rencontre. Ces dossiers sont de divers ordres. Je me contente de faire une
petite nomenclature des dossiers d'ordre académique.
On parle souvent des zones grises entre collèges et
universités, mais on n'a pas encore réussi à
résoudre cela de façon satisfaisante, même sur une base
régionale. Nous souhaitons pouvoir ouvrir des discussions
là-dessus. Ce que nous faisons depuis deux ans de façon plus
systématique, lorsque nous avons des dossiers qui doivent toucher
l'enseignement collégial d'une façon ou d'une autre, c'est que
nous consultons les gens des collèges, comme les gens des
collèges commencent à le faire. Donc, programmes d'enseignement,
d'une part. Développement de la recherche: les collèges ont
maintenant accès à un volet du Fonds FCAR pour la recherche; ils
n'ont pas la même habitude, la même expertise que les gens de
l'université, ils ont des besoins propres. On est prêt à
collaborer avec eux, soit pour renforcer nos propres projets de recherche en
profitant de l'expertise qu'il y a dans les collèges et qui n'est pas
utilisée pour la recherche, soit en aidant les collèges à
avoir leurs propres projets en pouvant leur fournir aussi une expertise
là-dessus. Il faut pour cela aller sur le terrain et parler aux gens,
les rencontrer.
Nous avons constaté aussi, pour l'avoir vécu de
façon directe, que des services pouvaient être mis en commun. Par
exemple, tout ce qui a trait à la conception et à la fabrication
assistée par ordinateurs. Actuellement, c'est le cégep de
Trois-Rivères qui a payé un ordinateur qui est chez nous et nous
avons une entente de services sur l'entretien et l'utilisation. Je viens
d'énumérer un certain nombre de points. La charte ne dit que, sur
une base de principe, ces quatre ou cinq points-là... ce serait utile,
nécessaire et profitable qu'on se rencontre et qu'on se donne une
confiance mutuelle pour travailler sur ces dossiers-là.
Nous nous sommes rencontrés de façon systématique,
depuis un an et demi, presque une fois par mois. Nous avons identifié un
certain nombre de dossiers. Certains vont plus vite que d'autres à cause
de l'urgence de la situation mais nous souhaitons, à moyen et à
long termes pouvoir aller beaucoup plus profondément là-dedans.
Cela étant dit, cette collaboration assez immédiate avec les
collèges nous permet aussi d'être plus utiles à l'ensemble
de notre région au niveau de la table de concertation enseignement
supérieur-milieu. Dans bien des cas... Je prends le dernier exemple: il
y a un cours sur l'entrepreneurshtp qui est en train de se donner maintenant et
qui se donnera dans la région en collaboration avec les médias de
la région, des collèges et des universités. Cela n'est
devenu possible que parce que nous collaborions tout le monde ensemble.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci.
NI. Jolivet: ...ma deuxième question. Je vais maintenant
parler de la suite qui est le sommet économique qui a formé la
table de concertation. D'abord, concertation avec le milieu; et je vais ajouter
un deuxième volet, avec les industries aussi. Ce qui existait
déjà, mais qui s'est accéléré parce que le
milieu est socio-économique... De façon plus précise
j'aimerais parler aussi du milieu industriel. J'aimerais connaître les
projets qui ont pu sortir et qui sont en marche actuellement ou qui ont
été accélérés dans certains cas à la
suite du sommet économique et à la table de concertation.
M. Parent (Jacques R.): M. le député, je pourrais
peut-être donner deux exemples très concrets et ensuite laisser la
parole à mes collègues aussi pour compléter, étant
donné que vous voulez avoir des exemples. Dans un premier temps, dans le
domaine des pâtes et papiers, vous savez que notre centre de recherche
travaille et privilégie une approche d'essences à croissance
rapide. À
cet égard j'apprenais la semaine dernière qu'une
entreprise mettra sur le marché une pâte
chimico-mécanothermique qui est à base même de ce
procédé ou cette façon de procéder.
Un autre secteur qui est encore une fois à l'intérieur de
nos créneaux spécifiques, celui de l'électronique de
puissance. Il y a une firme à Trois-Rivières qui s'appelle
Captel, qui fait appel à notre secteur d'électronique de
puissance pour effectuer la recherche et le développement de
l'entreprise.
M. Quintin: Au niveau culturel on pourrait peut-être
rappeler le dossier du Musée de la tradition et de l'évolution.
Cela fera plaisir aussi à M. le maire qui nous accompagne et à
tous les gens de la région. C'est un dossier qui a été
discuté à la table de concertation, qui est passé par le
sommet économique et sur lequel nous continuons à travailler
ensemble. Il y a donc des dossiers d'ordre relations avec les industries, mais
les industries culturelles existent aussi.
M. Jolivet: Une dernière question. On mentionne toujours
que les cours en périphérie, La Tuque comme exemple typique,
coûtent cher. Vous faisiez mention que donnés sur le campus le
coût revient à 2600 $, alors que donnés à
l'extérieur c'est 4300 $, une différence de 1700 $. À la
suite de ce que vous avez dit tout à l'heure, M. Quintin, 34
activités dans le secteur Victoriaville, 864 étudiants, on peut
dire qu'en moyenne c'est 25 étudiants. Si c'est 25 étudiants et
que nous prenons la différence de 1700 $ pour la diviser par 25, on
arrive au chiffre de 50 $ de plus par étudiant. Est-ce que mon calcul
est bon? S'il n'est pas bon, dites-le-moi au plus vite.
M. Parent (Jacques R.): Pour illustrer la
collégialité de notre administration, M. le député,
le vice-recteur à l'enseignement et à la recherche
répondra à la dimension académique de votre question et M.
le vice-recteur à l'administration et aux finances répondra
à la partie à caractère financier et administratif.
M. Quintin: Je voudrais quand même faire une petite
parenthèse sur les finances pour dire que les gens de Drummondville,
dans une dernière pétition qu'ils m'ont envoyée, se sont
offerts même pour payer les coûts de transport du chargé de
cours si nous allions donner le cours là. Je leur annonce tout de suite
que je vais refuser parce que je veux une solution globale qui permette
à tout le monde de pouvoir avoir accès à ces
études, et non seulement è ceux qui peuvent payer. Il faut
trouver certains types de solutions. (12 heures)
Cela étant dit, ce n'est pas juste une question d'argent. Il faut
dire que la dispensation des cours, si on veut conserver une certaine
qualité, si on veut que le système global soit capable d'y
répondre, il faut qu'on ait l'ensemble des ressources. Ce n'est pas
juste le chargé de cours qui est important, aussi, c'est la
documentation dans la bibliothèque; c'est l'encadrement qu'on peut
donner aux étudiants pour qu'ils sachent mieux se diriger; c'est
l'encadrement que le département doit donner au chargé de cours
pour pouvoir s'assurer à la fois de son engagement et d'un chargé
de cours de qualité et ensuite la supervision du travail qui va
être fait.
Je voudrais juste rappeler qu'il y a cette dimension. Nous ne sommes pas
des boîtes à cours. Nous sommes une université qui veut le
demeurer. L'accessibilité ce n'est pas juste une question de donner des
cours ou de multiplier notre nombre de cours. Cela étant dit, je me
doute que votre système -l'université est un système de
péréquation -j'ai de petits doutes sur vos calculs. Je vais
laisser la parole à M. le vice-recteur.
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le
vice-recteur. Je le reconnais maintenant pour une dernière intervention.
Je m'excuse, monsieur.
M. Beaudoin (Robert): Je vais rapidement...
Le Président (M. Parent, Sauvé): Oui, allez,
allez.
M. Beaudoin (Robert): ...traiter de l'aspect calcul. Vous savez,
la formule de financement c'est une formule qui est un peu plus complexe que le
calcul que vous avez fait. Il faut tenir compte des étudiants
équivalents temps complet, c'est-à-dire 25 n'équivaut pas
tout à fait à 3 étudiants équivalents temps
complet. Chaque étudiant équivalent à temps complet, selon
son appartenance disciplinaire va recevoir une subvention sur chacune des
disciplines n'ayant pas la même valeur parce que n'ayant pas le
même coût. Il y a eu un pourcentage aussi qui fonctionne en
discipline prioritaire et non prioritaire; c'est-à-dire en
administration, c'est 70 % de la subvention, en sciences humaines, c'est 50 %
de la subvention.
De toute façon, nous avons fait des calculs très
précis sur les points morts en périphérie. Je peux vous
assurer une chose: nous n'allons pas en périphérie pour des
raisons économiques.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci.
M. Jolivet: C'est pour remercier les gens de l'Université
du Québec à Trois-Rivières et la table de concertation. Si
j'ai posé cette question c'est parce qu'il y avait
un flou. Quand on écoute un peu et qu'on Ht les documents, si on
n'a pas cette information, on a l'impression que mon calcul est bon. Je savais
très bien qu'il y avait quelque chose qui n'allait pas quelque part.
Merci.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. le
vice-président. Mme la députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: Merci. Je voudrais juste reprendre la toute
dernière phrase du vice-recteur aux finances, à l'administration,
qui disait: Nous n'allons pas en région, en périphérie,
pour des raisons économiques. C'est sous-estimer la valeur
économique de la formation.
Le Président (M. Parent, Sauvé): S'il vous
plaît!
M. Beaudoin (Robert): Ma définition de l'économie
était beaucoup trop...
Le Président (M. Parent, Sauvé): S'il vous
plaît! Je m'excuse, monsieur.
Mme Blackburn: M. le Président.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Mme la
députée de Chicoutimi a la parole.
Mme Blackburn: Merci. Pour revenir brièvement sur la
planification de l'Université du Québec à
Trois-Rivières par rapport è ses activités d'avantages et
services à la collectivité, je vais juste dire ici que ce qui ne
m'a pas paru sortir suffisamment de ces échanges, c'est le rôle
majeur de la table de concertation dans la sélection des
activités ou dans les orientations. Je pense que c'est avec eux et de
concert avec eux que vous estimez les activités les plus importantes
dans lesquelles vous devriez intervenir et j'imagine qu'à ce moment
c'est l'occasion aussi de faire une certaine sélection. Je dis en
passant que cela n'existe pas partout. C'est un exemple de planification
très rationnelle, de rigueur dans votre développement.
J'y reviens. Vous avez des activités d'évaluation, des
pratiques d'évaluation qui sont assez exceptionnelles également
et qui méritent ici d'être soulignées. Ce qu'il faut
reconnaître ici, et cela n'a pas semblé suffisamment se
dégager de nos débats, c'est que les constituantes de
l'Université du Québec ont géré en période
de décroissance et d'émergence, en même temps, de
façon extrêmement serrée, ce qui nous donne un
réseau pour lequel les déficits sont relativement bas, et que
vous pourrez, avec une augmentation décente de revenus, résorber
sans demander des ressources additionnelles.
Par ailleurs, quand on examine comment cela se passe, on a l'impression
que cela a desservi les universités du Québec. Vous avez dû
abandonner des activités d'enseignement. Vous êtes constamment
menacés de voir vos activités diminuer pour des raisons de
rationalisation. Je trouverais cela extrêmement regrettable. Je
trouverais que pour la société québécoise, ce
serait un recul important. Ce serait nier l'importance que jouent les
universités en régions dans le développement
économique.
Vous avez, je pense, assuré aux universités du
Québec, particulièrement aux constituantes, un revenu qui leur
permette de poursuivre et de développer des activités, d'assurer
un meilleur enracinement dans le milieu. Ce n'est pas seulement une question
d'équité à l'endroit d'universités qui ne se sont
pas arrogées le droit de décider d'un niveau adéquat de
financement par le gouvernement en gérant avec des déficits. Je
trouve que c'est important de le reconnaître. Donc, c'est une question
d'équité non seulement pour l'université, mais, de
façon générale, pour la population du Québec. Il
faut se rappeler les objectifs qui étaient poursuivis au moment
où on a créé le réseau des universités du
Québec. C'était une plus grande accessibilité pour les
jeunes et pour les adultes. On vient de faire état des coûts
relativement élevés et de la formation dans les sous-centres,
mais c'était pour cette raison qu'on avait aussi créé le
réseau des universités du Québec. Il faut lui donner les
moyens de poursuivre ces objectifs d'accessibilité aux jeunes et aux
adultes à l'intérieur et par des programmes de qualité et,
le plus possible, dans une gamme de disciplines suffisamment importante pour
que l'on puisse effectivement parler d'accessibilité.
Par ailleurs, cette université avait été
créée pour assurer de meilleurs services aux collectivités
qui se trouvaient privées d'expertises importantes qui sont directement
reliées à la capacité de se développer aux plans
social et économique. Je pense qu'il est important d'attirer l'attention
des membres de cette commission sur le rôle vital que jouent les
universités en régions. Elles le jouent également dans les
grands centres et je pense que c'est reconnu de tous. La semaine
dernière, on a eu l'occasion d'entendre les représentants de la
Chambre de commerce et d'industrie du Québec métropolitain, qui
ont largement fait état de l'importance et du rôle que jouait
l'Université Laval dans le développement de
l'agglomération québécoise. Je pense que le même
raisonnement, la même évaluation peut se faire dans toutes les
régions où se trouvent des constituantes des universités
du Québec.
Alors, j'espère, M. le recteur, madame et messieurs qui
accompagnez la délégation, que le gouvernement prendra en compte
ces
remarques, la performance remarquable des universités du
Québec et saura ajuster le financement en tenant compte des efforts que
vous avez déjà faits et des objectifs qu'on s'était
donnés comme Québécois. Merci.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, madame. Je
reconnais maintenant, pour le mot de la fin, le ministre de l'Enseignement
supérieur et de la Science.
M. Ryan: M. le Président, j'écoutais avec
intérêt la députée de Chicoutimi résumer ses
impressions. J'aurais aimé que les ministres de l'Éducation de
1976 a la fin de 1985 tiennent ce langage...
M. Jolivet: ...coupures...
Le Président (M. Parent, Sauvé): S'il vous
plaît, s'il vous plaît, M. le député de
Laviolette.
M. Jolivet: ...4 000 000 $ cette année...
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le
député de Laviolette...
M. Jolivet: ...mais pas de message comme cela.
M. Ryan: On aurait...
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le
député, s'il vous plaît, personne ne vous a interrompu
pendant...
M. Jolivet: C'est vrai, vous avez raison.
Le Président (M. Parent, Sauvé): ...votre
intervention.
M. Ryan: Si les ministres de l'Éducation...
Le Président (M. Parent, Sauvé): Je reconnais
maintenant le ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science.
M. Ryan: ...de 1976 à 1986 avaient tenu ce langage et agi
en conséquence, je pense qu'on serait moins en situation de crise et
d'alarme aujourd'hui. Mais j'ai noté tout ce qui s'est dit ce matin avec
énormément d'intérêt. Je pense qu'il n'y a pas
à ajouter sur les points qui ont été soulignés au
cours de la discussion; ils étaient très bien signalés
dans le mémoire, dans le résumé qu'en a fait M. le recteur
et dans les réponses qui ont été apportées aux
questions posées des deux côtés, de manière
consciencieuse.
Je vais simplement signaler que nous sommes très attentifs
à cette situation qui a été portée à notre
attention et nous cherchons ensemble les solutions; nous allons continuer de
chercher tant que nous n'en aurons point trouvé. Je vous remercie. De ce
point de vue, je pense que votre contribution sera très utile dans la
démarche que nous continuons de poursuivre cette semaine et la semaine
prochaine.
J'avais promis tantôt de vous donner certains renseignements
à propos de questions que vous avez posées. Je ne voudrais pas
que vous partiez sans que je vous aie donné satisfaction. En ce qui
touche le baccalauréat en informatique, une réponse affirmative a
déjà été communiquée à votre
établissement par des rencontres qui ont eu lieu au cours des
dernières semaines, d'après ce que je comprends. Et, dans les
règles budgétaires pour l'année 1986-1987, que nous sommes
à mettre au point, il y aura des dispositions en conséquence, qui
ne donneront pas nécessairement droit à toutes les demandes que
vous présenteriez de ce côté, mais qui essaieront de
comporter des dispositions administratives et financières convenables.
Pour ce point, je pense qu'on peut considérer que cela va.
En ce qui touche au baccalauréat en génie mécanique
manufacturier, ici encore une réponse positive a déjà
été fournie. La preuve en est que, déjà, dans les
règles budgétaires de 1985-1986, il y avait des dispositions
à ce sujet. Je pense bien que cela va continuer en 1986-1987 et que nous
verrons à tenir compte de ce programme-là aussi.
Vous avez parlé du programme de baccalauréat en
génie chimique. Cela a soulevé des difficultés. Je pense
que c'est une présentation plus large qui avait d'abord
été faite et il a fallu restreindre. Cela a soulevé plus
de difficultés, mais finalement, la décision est positive
également. Dans les règles budgétaires de 1986-1987, il y
aura des dispositions à cette fin.
En ce qui touche au doctorat en éducation, il y avait une demande
en provenance de l'Université du Québec à
Trois-Rivières et une autre en provenance de l'Université du
Québec à Montréal, les deux demandes comportant des
jonctions, si je comprends bien. Le Conseil des universités a
examiné ces demandes et il s'est prononcé affirmativement dans un
avis qui remonte au 17 avril dernier. Il nous reste à prendre des
décisions en conséquence. Il y a des vérifications que
nous continuons de faire de ce côté. Je ne suis pas en mesure de
vous donner une réponse ce matin. Je crois que d'ici peu de temps il y
aura une réponse également à cette question.
Je vous remercie très cordialement. Il y a plusieurs points que
nous aurions aimer continuer à discuter avec vous parce que votre
mémoire ouvrait la voie à des échanges substantiels sur
des questions
centrales. Nous pourrons continuer de le faire comme vous avez
commencé de le faire avec notre ministère et mon propre personnel
ces derniers temps. Nous l'avons vivement apprécié et comptez sur
notre collaboration. Merci.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. le
ministre. M. le recteur, encore une fois, au nom des membres de la commission,
je vous remercie de la façon dont vous avez présenté votre
mémoire. M. le maire, merci beaucoup. MM. les vice-recteurs et les
accompagnateurs de M. le recteur, nous vous remercions encore une fois de votre
collaboration.
La commission parlementaire sur l'éducation suspend ses travaux
quelques minutes et nous aimerions entendre dès midi quinze le Conseil
du patronat.
(Suspension de la séance à 12 h 13)
(Reprise à 12 h 16)
Le Président (M. Parent, Sauvé): La commission
permanente de l'éducation reprend ses travaux. S'il vous
plaîtl
La commission permanente de l'éducation, dans le cadre du mandat
qui lui a été confié par l'Assemblée nationale,
continue la consultation générale sur les orientations et le
cadre du financement du réseau universitaire québécois
pour l'année 1987-198B et pour les années ultérieures.
La commission parlementaire accueille le Conseil du patronat et son
porte-parole, M. Dufour. M. Dufour, bienvenue. Nous vous remercions beaucoup
d'avoir répondu à l'invitation de la commission parlementaire.
Celle-ci a une heure à consacrer au Conseil du patronat, c'est donc dire
que le tout devrait être terminé vers 13 h 15. Je vous invite, M.
Dufour, à nous présenter les gens qui vous accompagnent et
à entamer votre présentation.
Dès la fin de votre présentation, la période de
temps qui restera à la commission sera divisée d'une façon
égale entre les deux formations politiques. M. Dufour, nous vous
écoutons.
Conseil du patronat du Québec
M. Dufour (Ghislain): Merci, M. le Président. Mes
collègues, en commençant à ma gauche, sont: M. Michel
Magnan, analyste-rédacteur au Conseil du patronat; M. Alexandre
Beaulieu, président d'Alexandre Beaulieu Inc., et M. Claude Pichette,
président-directeur général de la Société
d'entraide économique du Québec. À ma droite, M. Denis
Beauregard, directeur de la recherche au Conseil du patronat, et M.
André Boutin, vice-président de Northern Telecom et
représentant patronal au Conseil des Universités.
Le Président (M. Parent, Sauvé):
Messieurs, je vous souhaite la bienvenue.
M. Dufour (Ghislain): Je vous résume brièvement
notre mémoire. 3e dis brièvement parce que le temps ne nous
permettra pas d'aller dans l'ensemble des points que nous abordons.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Je ne voudrais
quand même pas précipiter au point que vous ayez la sensation de
ne pas livrer votre message. Prenez le temps qu'il vous faut.
M. Dufour (Ghislain): Voilà. Le Conseil du patronat s'est
toujours intéressé au développement de l'éducation,
notamment à l'évolution de l'enseignement universitaire. C'est
donc avec grand intérêt qu'il participe aux travaux de la
commission permanente de l'éducation, portant sur le financement des
universités. D'ailleurs, nous félicitons le gouvernement d'avoir
mis sur pied cette commission permanente de l'éducation sur le
financement des universités.
Dans son mémoire, le CPQ précise d'abord les points qui
suscitent son intérêt à l'égard de ce dossier. Il
dresse ensuite un rapide bilan du financement des universités en
soulignant quelques-unes des causes qu'il croit à l'origine des
problèmes généralement identifiés. Et il termine en
soumettant un certain nombre de suggestions pour améliorer la situation
financière des universités.
Compte tenu que la partie statistique a été beaucoup
abordée devant votre commission, vous me permettrez de passer rapidement
lorsque j'arriverai à cette partie de notre mémoire. Ce sont, de
toute façon, des statistiques qui ne sont pas contestées. Tout le
monde fait référence presque toujours aux mêmes sources,
alors on pourra passer rapidement là-dessus.
L'intérêt du CPQ. Toutes les études sur le sujet
l'ont démontré, l'amélioration du niveau de
scolarité moyen de la population contribue largement au
développement global de la collectivité. Qu'on examine la
question sous l'angle social, économique ou culturel, la même
constatation s'impose. Sans aucunement mettre en doute l'importance des autres
facettes de la question, le CPQ, conformément aux priorités que
lui dicte sa mission, s'intéressera particulièrement à
l'aspect économique de l'éducation supérieure. Les chefs
d'entreprise s'entendent pour reconnaître qu'une main-d'oeuvre bien
formée contribue grandement à la capacité concurrentielle
de leur entreprise et ce, à tous les niveaux de fonctionnement. C'est
pourquoi un haut niveau de scolarisation va
généralement de pair avec une bonne performance
économique d'ensemble et un niveau de vie élevé. C'est
donc en prenant en compte l'impact de l'enseignement universitaire sur
l'évolution de notre niveau de vie future qu'il faut discuter des
ressources qu'il convient d'allouer à l'université.
Il ne faut pas perdre de vue, toutefois, non plus le fait qu'il n'existe
pas nécessairement une adéquation entre la quantité de
ressources investies et la qualité des résultats obtenus. C'est
pourquoi il importe de ne pas limiter l'analyse strictement au niveau de
générosité souhaitable qu'une collectivité devrait
atteindre pour assurer un financement suffisant à ses
universités. Il faut également s'intéresser à
l'organisation du réseau et à sa gestion en fonction d'un
rendement optimal des ressources investies, ce que nous ferons un peu plus tard
dans notre mémoire.
Où en est le Québec? C'était notre approche
statistique. Je le répète, je n'y toucherai pas parce qu'il n'y a
pas tellement de désaccord en ce qui concerne le diagnostic, et je vous
amène donc à la fin de la page 3.
Il y a un constat, par ailleurs: II a été largement
démontré que les gouvernements, quels qu'ils soient - le Canada
ou le Québec - ne disposent plus de marges de manoeuvre
financières alors qu'ils doivent répondre à des besoins de
plus en plus coûteux. En conséquence, même si les coupures
budgétaires effectuées au cours des dernières
années ont pu faire mal jusqu'à un certain point aux
universités québécoises, cela aurait été
irréaliste de s'attendre que les ressources distribuées par le
gouvernement s'accroissent substantiellement dans un avenir rapproché.
Il faut donc explorer d'autres solutions pour assurer à nos institutions
universitaires un niveau de ressources suffisant pour qu'elles puissent non
seulement jouer le rôle qu'on attend d'elles, mais aussi se
développer.
Il n'est pas inutile de signaler d'ailleurs qu'il serait malsain que les
institutions universitaires tirent la presque totalité de leurs
ressources financières d'une seule et même source. Les
responsabilités de l'État et des institutions universitaires sont
très différentes. Ainsi, l'État a la responsabilité
de fournir les ressources minimales nécessaires au maintien
d'institutions universitaires de qualité. Les institutions, pour leur
part, ont la responsabilité d'organiser et de dispenser l'enseignement,
tout comme d'effectuer la recherche, avec toute la liberté
nécessaire. Le fait de s'en remettre à un seul bailleur de fonds
ne pourrait que mettre en danger l'économie des universités.
Ayant dit ça, nous sommes bien conscients que le plus grand bailleur de
fonds demeurera toujours le gouvernement.
La perception du monde des affaires.
Vues par le monde des affaires, l'organisation et parfois la gestion du
réseau universitaire présentent des caractéristiques qu'il
conviendrait d'examiner dans un cadre de rentabilisation maximale des
ressources allouées.
Ce que nous exprimons, nous ne vous demandons pas de le partager. C'est
ce que nous dit constamment le milieu des affaires. Ce que nous vous
demanderons de partager, ce sont nos recommandations de tout à l'heure.
Pour l'instant, ce sont beaucoup plus des perceptions, certaines pouvant
prêter à des interrogations souvent nombreuses.
Premièrement, la coordination du réseau. Le réseau
universitaire au Québec s'est développé dans un contexte
d'abondance de ressources, alors que l'État pouvait se permettre
d'accaparer une part croissante de la richesse collective sans trop provoquer
de réactions négatives. Au contraire, une majorité de
citoyens étaient favorables à la prise en main par l'État
d'activités de plus en plus nombreuses et coûteuses et acceptaient
donc, sans trop maugréer, de verser une part croissante de leurs revenus
dans les coffres de l'État. De plus, l'éducation était
considérée comme la plus importante des priorités, ce qui
était justifié dans une province qui s'était laissé
distancer par ses voisins. Enfin, les universités, jalouses de leur
liberté, se sont souvent développées indépendamment
les unes des autres en réussissant à déjouer les quelques
tentatives de coordination.
Il n'en fallait pas davantage pour qu'on assiste au dédoublement
coûteux de certains services dans un contexte où les règles
du marché s'appliquent de façon bien imparfaite. Il
apparaît aujourd'hui qu'une meilleure coordination et même une
rationalisation des activités universitaires est souhaitable,
particulièrement en régions, dans le but non seulement de
réduire les coûts mais de permettre également aux
universités d'offrir, en se spécialisant davantage, de meilleurs
services aux clientèles. Quand on dît: Perception d'une
rationalisation qui n'est peut-être pas satisfaisante, ça ne veut
pas dire qu'il n'y en a pas. Au contraire, actuellement, le réseau
universitaire fait énormément d'efforts pour améliorer la
rationalisation des activités universitaires, notamment avec le
réseau de l'Université du Québec. On peut citer toute une
série d'exemples. Je pense à l'Université du Québec
à Trais-Rivières, qui vient de citer dans le domaine des sciences
biophysiques un certain nombre d'exemples. On pourrait parler de
l'Université du Québec à Chicoutimi et ses contacts avec
l'UQAM, McGill et Laval. Ce phénomène de la rationalisation
existe de plus en plus. Mais, quant à nous, nous devrions la pousser
davantage.
Deuxième perception ou interrogation
au sujet d'un plan de développement. En poursuivant dans la
même veine, ne serait-il pas souhaitable d'exiger de chaque
université - ici on ne parle pas du réseau, on parle de chaque
université - qu'elle établisse un plan de développement
à moyen et même à long terme, plan qui déterminerait
précisément les étapes et les avenues de
développement envisagées? Ce n'est que lorsque de tels pians
auront été établis que le réseau pourra se
développer efficacement et que chaque université pourra
rentabiliser au maximum les ressources.
La charge de travail. Toujours au niveau non pas des recommandations,
mais des perceptions. Même s'il est vrai que toutes les facettes du
travail du professeur d'université ne sont pas nécessairement
connues de la population, il ne faudrait pas rejeter du revers de la main les
critiques nombreuses dont sont l'objet les professeurs. Il y a tout lieu de
croire que le corps professoral reflète assez bien l'ensemble de la
société. En conséquence, plusieurs se passionnent pour
leur travail, d'autres s'en désintéressent, alors que la grande
majorité d'entre eux s'acquittent convenablement de leur tâche.
Dans ce sens-là cela ressemble un peu au monde des affaires ou aux
groupes des parlementaires. Toutefois, compte tenu particulièrement de
l'importance de la masse salariale dans le budget des universités, il
serait peut-être intéressant de tenter d'évaluer plus
précisément le travail des professeurs d'université de
façon que chacun consacre la majeure partie de ses efforts à ce
qu'il peut faire le mieux.
M. le Président, je passe sur le thème qui s'appelle les
sources de financement, parce qu'effectivement ce sont des interrogations du
mandat de votre commission, alors cela serait peut-être faire double
emploi, pour arriver au champ d'action de l'université. II est de
notoriété publique qu'à l'époque où un
accroissement de clientèle entraînait automatiquement un
accroissement des ressources les universités se sont lancées dans
une course effrénée pour tenter d'attirer chacune chez elle - et
c'était bien de le faire - le plus grand nombre d'étudiants
possible. Les changements apportés depuis quelques années au
système de financement des universités, particulièrement
en ce qui a trait au financement des nouveaux étudiants, ont
contribué à freiner ce mouvement. Toutefois, la volonté
d'élargir leur clientèle a amené certaines
universités à offrir des services qui ont parfois peu à
voir avec l'enseignement universitaire. Par exemple, l'université
est-elle justifiée d'offrir des cours à certaines
clientèles qui pourraient, à moindre coût pour la
société, obtenir la même formation dans un cégep? On
pourrait dire la même chose à l'École de technologie
supérieure pour la formation des ingénieurs. Nous croyons qu'il y
aurait lieu d'examiner sous cet angle l'opportunité de certains services
offerts par les universités et qui génèrent des
coûts parfois injustifiés.
Alors, M. le Président, ce ne sont là que quelques
considérations, quelques questions qui nous viennent
régulièrement lorsque l'on discute avec les milieux d'affaires de
ce dossier important que vous regardez. Â la suite de ce diagnostic
partiel, on l'admet, nous en arrivons à vous faire un certain nombre de
propositions concrètes dans le cadre précis de votre thème
qui est le financement des universités.
Première recommandation, majorer les frais de scolarité.
Les frais de scolarité dans les universités
québécoises sont les plus bas au Canada. On ne reprendra pas cet
argument. Par ailleurs il a été démontré que
l'investissement qu'un individu fait pour obtenir un diplôme
universitaire compte parmi les plus rentables. Pourquoi la
société continuerait-elle à assumer presque sans
contribution du principal intéressé le coût de ses
études universitaires? Le CPQ croit donc que les frais de
scolarité doivent être haussés suffisamment pour
représenter une part plus significative des coûts réels
à un rythme cependant qui permette aux étudiants d'absorber
progressivement l'augmentation des coûts. Là, avant que vous nous
demandiez ce que cela veut dire, je dirai que nous ne proposons pas demain de
doubler les frais de scolarité; nous pensons que l'on doit le faire par
étapes et essayer de voir comment on pourrait réaliser ce double
des coûts actuels sur une période acceptable pour à peu
près tous les intervenants.
Nous assortissons notre propositions de trois considérants: Le
premier, le CPQ privilégie une approche qui tiendrait compte, au moins
en partie, de la dynamique du marché, comme cela se fait aux
États-Unis. Cela paraît en effet plus que souhaitable que les
universités ne soient pas tenues de percevoir des frais de
scolarité dont le niveau serait fixé par le gouvernement. Chacune
des institutions devrait avoir le loisir de fixer le niveau de ses frais de
scolarité en fonction de la réputation de ses différents
départements auprès des clientèles visées. La
subvention gouvernementale devrait quant à elle être
établie indépendamment des variations des frais de
scolarité entre les universités. (12 h 30)
Une partie des revenus des universités deviendrait ainsi fonction
du degré d'excellence des services qu'elle met sur le marché
forçant, à la limite, les institutions les moins performantes
à fermer certains départements. La réserve suivante est
importante: Pour s'assurer que les frais de scolarité ne soient pas
augmentés trop rapidement, le gouvernement pourrait établir des
plafonds, les réviser périodiquement, les envelopper, en somme,
de quantités de bons
paramètres. Une telle politique de plafonds s'imposerait
d'ailleurs pour lancer ce nouveau mode de financement.
Un troisième considérant. Il est bien entendu -
j'écoutais le recteur de l'Université du Québec à
Trois-Rivières le dire tout à l'heure et nous aussi, nous le
disons - que le gouvernement ne devrait en aucune façon réduire
ses subventions sous prétexte que les universités auraient alors
accès à d'autres sources de financement. Au contraire,
l'augmentation des revenus ainsi obtenus devrait permettre à nos
institutions universitaires d'assurer leur développement, de faire
davantage de recherche, d'améliorer la qualité des services
qu'elles offrent, etc.
Quatrièmement, parallèlement à l'augmentation des
frais de scolarité, le système des prêts et bourses devrait
être réaménagé pour apporter une aide accrue aux
étudiants qui en ont besoin, quitte à récupérer une
partie importante de cette aide lorsque le diplômé est en mesure
de rendre à l'État une partie des sommes qui lui auront permis
d'acquérir une formation rentable sur le marché du travail.
Deuxièmement, question très difficile, la charge des
professeurs, ce que nous appelons "Réorganiser le travail des
professeurs d'université". Le travail de professeur d'université
revêt plusieurs facettes qui n'exigent pas toutes les mêmes
aptitudes ni les mêmes intérêts. Par exemple, tous ne sont
pas nécessairement intéressés à enseigner, à
faire de la recherche et même à se transformer occasionnellement
en gestionnaires. C'est pourquoi il semblerait tout à fait
approprié de favoriser une spécialisation beaucoup plus
poussée des professeurs. Pourquoi, par exemple, un individu qui n'a
aucun intérêt pour l'enseignement, mais qui présente des
qualités de bon chercheur et qui démontre un intérêt
pour cette activité ne pourrait-il pas à la limite être
libéré de toute tâche d'enseignement? La même
approche pourrait être appliquée aux gestionnaires des
différents départements dans les universités. En
contrepartie, les professeurs dont la tâche se limite à
l'enseignement verraient augmenter sensiblement le nombre de cours dont ils
sont responsables, limitant par ce fait même et parfois
considérablement le temps consacré par certains professeurs
à des activités extérieures à l'enseignement
universitaire.
Bien sûr, une telle approche doit faire l'objet d'une étude
approfondie. Le travail de professeur d'université est complexe et il ne
saurait être question de se livrer à des simplifications
outrancières. Toutefois, même la complexité réelle
de la question ne doit pas bloquer toute tentative pour évaluer la
situation actuelle et adopter les meilleures solutions dans les
circonstances.
Là-dessus, je dois vous dire qu'on est d'accord avec le ministre
de l'Enseignement supérieur et de la Science, M. Ryan, dans l'ouverture
qu'il offrait aux gens de la fédération des professeurs
d'université de discuter avec eux de ce dossier et, en somme, de
vraiment lancer le débat qui, quant à nous, ne trouvera pas ses
solutions nécessairement dans le cadre de votre commission, parce qu'il
y a d'autres tables où on discute de ces problèmes. Ce n'est
peut-être pas l'endroit où on trouvera des solutions, mais nous
appuyons fermement la proposition de M. Ryan.
Une troisième proposition, c'est la fermeture des
départements moins performants. Par "moins performants", on ne parle pas
de qualité, on parle d'absence de coordination, de double emploi. On ne
parle pas de qualité comme telle de ce qui est offert. Sans
planification efficace et sans être soumis aux contraintes qu'impose le
marché, le développement par conséquent incohérent
du réseau universitaire québécois a entraîné
- on l'a dit et d'autres avant nous l'ont constaté - la création
de départements dans certaines universités dont l'existence
demeure parfois difficile à justifier. Compte tenu des coûts
importants produits par de telles situations, le CPQ croit que le gouvernement
serait justifié de prendre les moyens nécessaires pour que ne
soient maintenus que les départements qui offrent des services de
qualité et dont l'existence est justifiée.
Je vous signale immédiatement que, si notre première
recommandation d'avoir une plus grande libéralisation des frais de
scolarité était retenue, cette troisième recommandation
disparaîtrait ou à peu près, parce qu'on reviendrait un peu
à la question de l'excellence dont on parlait dans notre premier
volet.
Quatrièmement, abandon de certaines activités. Pour des
raisons déjà invoquées, certaines universités ont
eu tendance à envahir des champs d'activité qui, manifestement,
ont peu à voir avec la mission de l'université. À titre
d'exemple, certains cours dispensés par les facultés
d'éducation permanente pourraient tout aussi bien et à des
coûts probablement beaucoup plus avantageux être offerts au niveau
collégial. Il y aurait lieu d'identifier les activités des
universités qui ont peu à voir avec la mission de ces
institutions pour ensuite libérer le réseau universitaire des
obligations qui ne lui incombent pas. On peut ajouter ici au réseau des
cégeps toute la formation possible de techniciens professionnels entre
ce que forment les cégeps et nos différentes facultés
d'ingénierie, comme l'École de technologie supérieure
à Montréal du réseau de l'Université du
Québec.
Cinquièmement, développer les fondations universitaires.
Les universités francophones reçoivent très peu d'appui
financier
de leurs étudiants diplômés. Pourtant, certaines
institutions, surtout chez les anglophones et encore davantage chez les
Américains, tirent une partie non négligeable de leurs ressources
de dons qui proviennent d'anciens étudiants fiers d'avoir
été formés à telle ou telle université ou
d'entreprises privées qui contribuent parfois substantiellement à
leur financement.
L'effort de diversification des sources de financement des
universités québécoises doit porter notamment sur la mise
en place de moyens pour susciter un intérêt réel chez ceux
qui peuvent apporter leur contribution. Dans ce domaine comme dans bien
d'autres, M. le Président, l'incitation fiscale pourrait bien être
un moyen approprié. On sait qu'il y en a déjà mais si on
compare notre situation, par exemple, avec la situation américaine, on
réalise qu'on tire vraiment de la patte.
Bien sûr, cette approche entraîne des coûts pour le
gouvernement qui s'y engage. C'est peut-être une façon pour le
gouvernement de donner des sommes additionnelles aux universités.
Toutefois, il y a certains moyens de trouver le point d'équilibre qui
permettrait d'encourager les contribuables qui le désirent à
faire des dons à l'université de leur choix sans priver
indûment le fisc de sommes essentielles au bon fonctionnement de
l'État.
Le point no 6 est excessivement important, il s'agit du paiement des
frais indirects de recherche. Je pense que tous les mémoires qui vous
sont présentés par les universitaires le soulignent. Il est
anormal que le système de financement des projets de recherche ait pour
conséquence de pénaliser les institutions qui,
conformément à la mission des universités, font beaucoup
de recherche. Cette anomalie tient au fait que les organismes qui accordent
généralement les subventions ne considèrent que les frais
directs qu'impliquent les activités de recherche de l'université
qui n'a alors d'autre choix que d'imputer à son budget de fonctionnement
la totalité des frais indirects qui découlent des contrats de
recherche. Selon nos données, cela peut varier, pour chaque dollar, de
0,50 $ à 1,17 $. 5ouvent on met plus en frais indirects qu'on peut
mettre en frais directs.
La conclusion de notre exposé, M. le Président, à
la suite de ces six suggestions, est importante au point où on la
formule sous forme de recommandation, même si, dans le fond, il ne s'agit
pas d'une recommandation comme telle; c'est la stabilisation des subventions.
Les universités devraient donc être fortement incitées
à diversifier leurs sources de financement puisque leurs coûts
semblent augmenter plus rapidement que le gouvernement n'est en mesure de
majorer ses subventions. Toutefois, les universités doivent être
assurées que même si elles diversifient leurs sources de
financement le gouvernement stabilisera son aide financière, tout au
moins au niveau actuel, et l'accroîtra, si possible. Sinon, les efforts
des universités pour améliorer leur situation financière
seraient vains et le problème financier des universités pourrait
bien devenir insoluble.
Je vous remercie. Mes collègues sont là pour recevoir vos
commentaires et vos questions.
Le Président (M. Parent, Sauvé): C'est moi qui vous
remercie, M. le président. J'invite maintenant le ministre de
l'Enseignement supérieur et de la Science à prendre la
parole.
M. Ryan: M. le Président, je voudrais tout d'abord
remercier le Conseil du patronat de sa contribution à notre recherche.
Je profite de l'occasion pour dire à M. Dufour que j'ai également
beaucoup apprécié l'avis que m'adressait récemment le
Conseil du patronat sur le projet de réorganisation de la formation
professionnelle au niveau secondaire. Quand je vous ai écrit l'autre
jour, je pense que je n'avais pas encore pris connaissance du mémoire.
Je l'ai fait par la suite et, franchement, c'est une contribution qui nous a
été très utile parce qu'elle était empreinte de
sens pratique et, en même temps, très constructive. Je pense que
la même remarque générale s'applique à votre
intervention d'aujourd'hui. Je l'apprécie beaucoup parce qu'elle a
l'avantage de ne pas verser dans les questions de technicité, de calculs
infinitésimaux et de nous amener à des questions qui sont
essentielles. On peut avoir des différences d'opinions sur un point ou
l'autre mais je pense que la présentation est claire, sobre et, dans
l'ensemble, éminemment constructive.
Je voudrais saluer la présence à vos côtés de
M. Claude Pichette, l'ancien recteur de l'Université du Québec
à Montréal dont tout le monde a apprécié le travail
et que nous sommes heureux de retrouver à cette table, surtout
étant donné le sujet dont il est question. Je salue
également vos collègues qui vous accompagnent en leur disant
qu'ils sont tout à fait les bienvenus parmi nous.
Vous avez résumé des avis que vous entendez souvent dans
le monde des affaires à propos des universités. Savez-vous que
j'aime mieux cela qu'un sondage avec des questions impersonnelles? Je pense que
vous avez recueilli sur les lèvres de vos - j'allais dire
coreligionnaires, mais ce n'est pas exactement cela - collègues du monde
des affaires - parce que je sais bien que pour vous-même la philosophie
qui vous anime n'est pas une religion, même sî, des fois, on a
cette impression-là - des opinions qui correspondent en bonne partie
à celles que
nous entendons nous autres mêmes.
Vous avez soulevé quatre points, en particulier. On
s'inquiète parfois de l'extension qui est donnée au champ
d'action d'intervention des universités. Je pense que c'est une question
fort légitime à laquelle nous avons été
appelés à nous arrêter sauvent jusqu'à maintenant.
Nous aurons un certain nombre de dires à la fin de nos travaux à
ce sujet.
Vous avez soulevé la question de la charge de travail des
professeurs. Vous l'avez fait dans des termes qui rejoignent ceux qu'on a pu
entendre à la commission. Je suis content de vous confirmer ce que vous
évoquiez tantôt, à savoir que nous allons constituer un
groupe de travail, ces jours-ci, qui va pousser plus loin l'examen de ce
problème avec la collaboration des intéressés. Le
président de la Fédération des associations de professeurs
me confirmait, ces jours derniers, que sa fédération collaborera
au travail que nous allons instituer de ce côté. Nous allons le
faire avec la participation des autres éléments concernés
également. Je pense qu'un éclairage doit être
recherché sur ce sujet afin que, s'il y a des problèmes, on
essaie de les régler et, s'il n'y a pas de problème, qu'on
dissipe les légendes qui peuvent circuler. J'apprécie que vous
ayez bien compris que ce n'est pas une question qu'on peut régler dans
deux ou trois semaines. C'est une question à long terme qu'il faut
aborder dans toutes ses composantes et à laquelle, je suis sûr,
des solutions vraiment durables ne pourront être apportées que
d'une manière progressive. Vos propos sur la coordination du
réseau et la nécessité de planification de leur
développement par les universités m'apparaissent fort justes
également. Je peux vous assurer que nous cherchons dans la même
voie.
J'en viens maintenant à quelques questions qu'il m'apparaît
opportun de vous adresser. Tout d'abord, à propos des sources de revenu.
J'ai mentionné, depuis le début de la commission, qu'il y a
quatre boutons sur lesquels on peut peser pour essayer d'améliorer la
situation. Il y a le bouton des taxes, il y a le bouton du déficit
gouvernemental, il y a le bouton de la réduction des dépenses des
universités, il y a le bouton de l'augmentation des revenus autres que
les subventions gouvernementales. Vous en mentionnez deux: l'augmentation des
frais de scolarité et l'augmentation des revenus en provenance du
secteur privé. Je voudrais vous remercier d'avoir indiqué avec
précision les boutons sur lesquels vous êtes disposés
à peser. Je pense que c'est une question qu'on est fort justifié
d'adresser à ceux qui viennent nous rencontrer. Quant à nous,
nous serons appelés à préciser nos positions
là-dessus. Mats vous avez bien signalé ici que vous voudriez que
ces revenus en provenance des sources que vous avez indiquées viennent
s'ajouter à ceux qui proviendraient de subventions gouvernementales et
non pas remplacer ceux-là. Pourriez-vous donner des précisions
quand vous dites: II ne faudrait pas que cela vienne diminuer le niveau des
subventions qui viennent du gouvernement, par ailleurs? J'aimerais que vous
nous apportiez des précisions là-dessus, si c'était
possible.
M. Dufour (Ghislain): Je peux donner un premier mot, quitte
à demander à M. Pichette de poursuivre. Vous avez parfaitement
raison. Pour nous, il ne saurait être question d'additionner aux taxes
actuelles. Il ne s'agît pas d'ajouter au déficit. On dit bien dans
notre mémoire de réduire les dépenses gouvernementales,
donc d'autres revenus. Par ailleurs, si les universités, soit par les
frais de scolarité, soit par la hausse ou la baisse, selon le sens
où on le prend, de la charge des professeurs, en tout cas, avec une
réorientation qui est de réduire les coûts, si vous leur
permettez, vous et le fédéral, de réduire leurs frais de
recherche en payant davantage les frais indirects, cela va
générer un certain revenu. On dit: Les universités sont
déjà dans une situation difficile. Si vous baissez vos paiements
de transfert aux universités, on n'a rien amélioré comme
situation. Or, je pense que notre point de vue est aussi simple que cela. Cela
permettrait aussi, peut-être, M. Ryan -je pense qu'on doit vous le dire,
je l'ai oublié tout à l'heure - de faire face à certains
des déficits que certaines universités sont en train de
créer. Car il faut que vous trouviez le moyen de leur donner de l'argent
pour combler ces déficits parce qu'on accepterait difficilement que vous
combliez lesdits déficits: vous ne l'avez jamais fait, on ne voit pas
pourquoi vous le feriez. Devant la commission Rochon, dans un tout autre
secteur qu'est celui des hôpitaux, on a déjà dit: Cela a
été une erreur, probablement, que de racheter les déficits
des universités, année après année. Alors, face
à ce problème - et les universités le vivent - il n'y a
qu'une façon: c'est que vous ne réduisiez pas vos montants
d'argent si elles réussissent à en faire un peu à la fin.
(12 h 45)
M. Pichette (Claude): Écoutez, les universités
vivent des compressions budgétaires depuis de nombreuses années.
Si le gouvernement haussait ou permettait aux universités de hausser les
frais de scolarité, il me semble qu'il va de soi qu'on ne pourrait pas,
en contrepartie, enlever d'une main ce qu'on accorde de l'autre. C'est cela
qu'on veut dire. On dit que, compte tenu du niveau relativement plus faible,
actuellement, que les universités du Québec reçoivent au
plan du financement - parce que je pense que tout le monde s'entend pour dire
que la
position des universités québécoises s'est
détériorée ces dernières années par rapport
aux autres universités canadiennes - par conséquent, si le
gouvernement autorisait un dégel des frais de scolarité, il ne
faudrait pas que les universités perdent d'une main ce qu'elles
reçoivent de l'autre.
M. Ryan: Est-ce que je peux comprendre clairement de votre
intervention que vous favorisez un rehaussement du niveau de financement des
universités?
M. Pichette: Oui.
M. Dufour (Ghislain): Carrément.
M. Ryan: Pardon?
M. Dufour (Ghislain): Carrément.
M. Ryan: Est-ce que vous pouvez préciser de quel ordre, ou
si c'est une chose que vous laissez à des examens plus poussés de
la part du gouvernement et des institutions concernées?
M. Dufour (Ghislain): Je ne peux pas le quantifier.
Peut-être que M. Boutin, au Conseil des universités, peut le
faire, compte tenu des données qu'il a. Sauf que nos contacts du milieu
d'affaires avec le milieu universitaire nous font dire que c'est surtout dans
la recherche, dans l'équipement, dans le recyclage, jusqu'à un
certain point, des professeurs qu'il y a des problèmes très
réels. Or, je me rappelle, par exemple, une lettre - il n'y a pas
tellement longtemps -écrite par un professeur de l'UQAM, un professeur
de chimie, qui établissait vraiment sa situation de recherche dans le
Département de chimie de l'UQAM, en disant qu'il y avait des
problèmes très réels où il fallait vraiment ajouter
des ressources additionnelles. Pour l'ensemble du réseau universitaire,
combien d'argent? Beaucoup.
M. Ryan: Est-ce que M. Boutin a quelque chose à ajouter
là-dessus?
M. Boutin (André): Vous avez déjà
reçu, M. le ministre, les recommandations qui ont été
faites par le comité de financement du Conseil des universités.
J'en parle de mémoire, et si celle-ci est bonne, on faisait état
d'un manque à gagner de l'ordre de 100 000 000 $ à 150 000 000 $
par année, ce qui veut dire de 10 % à 15 %, si je ne m'abuse,
dans l'enveloppe opérationnelle normale, tout en soulignant une autre
carence au niveau des équipements d'enseignement, des équipements
didactiques, lesquels, à la meilleure estimation disponible, se situent
autour des 50 000 000 $ à 70 000 000 $. Ce sont des choses qui sont
déjà contenues - là, je cite les chiffres de
mémoire - dans ce qui vous a été envoyé au
ministère.
M. Ryan: II y a un problème qui s'ajoute à ceux
dont vous parlez, c'est l'inéquité qui découle du
système actuel de financement; il y a des redressements qui s'imposent
dans cela. Il n'en est pas question dans votre mémoire, mais je
comprends facilement qu'on ne puisse pas traiter de tout. On ne peut pas
facilement enlever des sommes à des institutions qui toutes s'estiment
sous-financées pour les redonner à d'autres. Si l'on veut
établir un système plus équitable, il faudra qu'on ait un
système différent, avec un niveau de financement plus
élevé que celui d'aujourd'hui.
Juste un dernier point. Je ne voudrais pas vous retenir davantage parce
que mes collègues ont aussi des questions à vous poser. Vous
mentionnez quelque part qu'il faudrait ne pas hésiter à fermer
certains départements non performants et abandonner certaines
activités qui ne se situent pas dans le champ d'intervention normal de
l'université. Vous avez dit tantôt que vous aimiez autant ne pas
vous engager dans des exemples. Est-ce que vous pourriez nous donner certaines
illustrations de ce que vous entendez par cela''
M. Dufour (Ghislain): En fait, j'ai tenu à préciser
que l'expression qu'on utilisait, "non performant", ne se
référait pas à la qualité des professeurs ou
à la qualité de l'équipement. "Non performant" dans le
sens que, si on a deux ou trois départements alors qu'on devrait en
avoir un, il y a un manque d'efficacité. L'exemple le plus facile qu'on
peut vous donner est probablement celui du développement des
facultés d'éducation permanente. Je ne dis pas qu'on doit
être contre les facultés d'éducation permanente, sauf qu'il
s'est développé dans ces facultés toute une série
de cours que vous connaissez aussi bien que moi, du très
préliminaire, par exemple, enseignement de langue, l'anglais, entre
autres, l'espagnol ou peu importe, simplement pour aller chercher la subvention
que vous connaissez à cause du nouveau système de financement.
Alors, pour nous, ce n'est pas performant, cela, et cela coûterait
beaucoup moins cher d'envoyer cela dans les cégeps.
Le Président (M. Thérien): Merci beaucoup, M. le
ministre. Je céderai maintenant la parole au porte-parole officiel de
l'Opposition, Mme la députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. Dufour, cela me
fait plaisir de vous accueillir ici à cette commission, de même
que les personnes qui vous accompagnent. Le mémoire que vous
présentez a un caractère,
je dirais, particulièrement intéressant et important
d'autant plus que les personnes qui vous accompagnent ont une connaissance
assez réelle et concrète de l'enseignement supérieur. Je
vous salue, M. Pichette et M. Boutin, qui est membre, si je ne m'abuse, du
Conseil des universités.
Comme l'a fait remarquer tout à l'heure le ministre de
l'Enseignement supérieur et de la Science, votre mémoire est
intéressant à divers titres. J'insisterai sur le fait qu'il n'est
pas tombé dans le piège de vouloir se poser en spécialiste
pour suggérer carrément des mesures - je pense
particulièrement à la tâche des professeurs -alors que vous
reconnaissez, comme plusieurs intervenants l'ont souligné ici, que c'est
très complexe et qu'il y a possiblement d'autres tables pour discuter de
ces questions.
Vous posez un diagnostic fort intéressant, mais, je dirais, qui
est partagé par la plupart des intervenants qui sont venus ici en cette
commission. Le premier, c'est l'importance de la scolarisation dans le
développement économique et social. Je vous rappelle la page 2 de
votre mémoire. Vous dites: "C'est pourquoi un haut niveau de
scolarisation va généralement de pair avec une bonne performance
économique d'ensemble et un niveau de vie élevé." Il faut
rattacher cela à votre réflexion selon laquelle les entrepreneurs
et les chefs d'entreprise s'entendent pour reconnaître qu'une
main-d'oeuvre bien formée a des effets réels sur la marge de
bénéfices.
Vous constatez également - cela m'apparaît important - et
vous nous rappelez qu'un écart important demeure entre le niveau de
diplômation au Québec et celui de l'Ontario. On se plaît
tellement à se comparer qu'il faudrait peut-être aussi se rappeler
ce que cela donne à l'occasion. Vous dites au début de la page 3:
...quant au nombre de diplômes décernés par 100 000
habitants, un écart de 1 % - ce qui est l'écart actuellement
entre le Québec et l'Ontario - donne au Québec 50 000
diplômés de moins. Je trouve qu'il est important de le rappeler.
Cela veut dire une capacité de se développer et de créer
qui est en deçà de ce qu'on pourrait faire si on en avait un peu
plus.
M. le Président, je voudrais déposer à cette
commission - on en a souvent parlé -quelques chiffres sur l'état
de la scolarisation des Québécois et des
Québécoises. C'est un document qui nous rapppelle
qu'évidemment, si on a un taux de diplômation qui est encore plus
bas, le problème ne part pas nécessairement des
universités, mais prend sa source beaucoup plus tôt. Il faut dire
que quand on regarde les statistiques et qu'on a une performance
intéressante, on la doit beaucoup à nos anglophones au
Québec qui constituent un actif important; ils sont beaucoup plus
scolarisés que les francophones. Si on pouvait, je le rappelle, prendre
des mesures qui auraient comme effet de relever le niveau de scolarisation des
francophones, on pourrait connaître une performance enviable à ce
niveau-là. Si vous désirez avoir une copie de ces quelques
chiffres, la commission pourrait vous les donner.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Votre document est
déposé.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Et vous concluez
dans votre diagnostic: II y a un sous-financement. Avant d'aborder toute la
question du financement, dois-je lire dans votre mémoire qu'il y a
nécessité de relever le niveau de scolarité au
Québec?
Le Président (M. Parent, Sauvé):
Monsieur.
Mme Blackburn: Pour les raisons que vous vous êtes
situés - je pense que c'est bien - dans la perspective
économique.
M. Dufour (Ghislain): Je ne sais pas quel document vous avez
déposé, Mme Blackburn, mais actuellement le taux de
fréquentation universitaire au Québec est de 31 personnes par
1000 de population; la moyenne canadienne est de 30. C'est surtout l'Ontario
qui nous dame le pion avec 35, mais autrement on se situe assez bien. C'est
pour le taux de participation.
Pour le taux de diplomation, évidemment, vous venez de le
souligner, il y a un problème réel. Je sais qu'en fin de semaine
Mme Bissonnette, dans un éditorial du Devoir, exprimait un certain
nombre de raisons à la base de ça, tenant du fait qu'il y a eu
beaucoup de choix de programmes courts chez les gens inscrits à
l'université et qui comptent dans le nombre de personnes par 1000 de
population, mais qui ne sont pas nécessairement allées chercher
un diplôme ou qui ont lâché en cours de route. Elle
mentionne même un chiffre de 50 %.
Pourquoi tout cela se passe-t-il? Parce qu'il y a un problème de
financement des universités. Les gens peuvent facilement s'inscrire
parce qu'on recherche un peu ce genre de clientèle. À votre
question précise, je pense que oui. Cela rejoint notre
préoccupation première.
Nous savons que, dans certains domaines qui sont carrément dans
le virage technologique actuellement, on ne produit pas dans nos
universités québécoises le nombre de diplômés
dont on a besoin. Il y a certains centres de recherche, comme le centre de
recherche Bell Northern, qui pourraient prendre tous les doctorats qui sont
produits actuellement en certaines disciplines et on ne peut pas les
produire.
Alors, il y a un taux de diplomation qui
devrait être accéléré, sous réserve -
on dit: Sous réserve - que là, sans être d'aucune
façon critique vis-à-vis de certaines sciences humaines, dont je
suis, il y a peut-être lieu de faire les orientations et les projections
de ce que l'on veut aussi comme diplomation.
Mme Blackburn: Alors, vous admettez qu'il faudrait hausser !e
niveau de scolarité si on veut devenir performant.
M. Dufour (Ghislain): Nous faisons quand même, Mme
Blackburn, une petite diversion en disant que c'est surtout dans les
disciplines axées sur le virage technologique. C'est là qu'on est
faible actuellement.
Mme Blackburn: Bien. Pour ce qui est du niveau de financement,
vous nous disiez -c'est ce que tout le monde nous a dît - qu'il
était insuffisant et ne permettait pas aux universités
d'être performantes, bien qu'il n'y ait pas un rapport direct entre le
financement et la qualité de ce qui s'y fait, vous l'avez
rappelé.
Je pense qu'à cet égard vous avez raison. Par ailleurs,
vous dites - et je trouve cela intéressant - en page 4: II n'est pas
inutile de signaler qu'il serait malsain que les institutions universitaires
tirent la presque totalité de leurs ressources financières d'une
même source. S'en remettre à un seul bailleur de fonds ne pourrait
que mettre en danger l'autonomie des universités.
Vous avancez un certain nombre de moyens pour des sources de
financement, une diversification. Dans la première, vous envisagez une
hausse des frais de scolarité. Ensuite, vous parlez des frais indirects
de la recherche, d'incitation, de contribution des diplômés et
d'incitatifs pour ceux qui auraient intérêt à apporter leur
contribution, et particulièrement des incitatifs fiscaux.
À la suite de la recommandation du Conseil des
universités, vous estimez que cela demanderait 150 000 000 $. Entre 100
000 000 $ et 150 000 000 $, c'est variable. On sait que doubler les frais de
scolarité, au total, cela donnerait 80 000 000 $ ou 82 000 000 $. Vous
indiquez que le gouvernement ne pourrait pas en donner davantage. Je voudrais
revenir avec une remarque du ministre tout à l'heure a l'introduction.
Tous ceux qui ont suivi les travaux de cette commission parlementaire ont
constaté que c'était un peu beaucoup dans son habitude; il se
sent obligé d'avoir quelques petites remarques partisanes. J'aurais
juste le goût de lui dire, et de nous dire ensemble, qu'il aurait
peut-être été intéressant, parce qu'il tenait un
discours complètement dévastateur sur la situation
financière des universités, qu'il maintienne à tout le
moins le niveau de financement qui était celui de 1985-1986. Et une
première source ce serait probablement, à mon avis, de
réintroduire dans l'enveloppe des universités les 34 000 000 $
que l'on a prélevés au cours du présent exercice
financier. (13 heures)
Cependant, j'aurais le goût d'une boutade. Vous avez fait un peu,
par rapport à votre mémoire, ce que les étudiants ont
fait. Ils ont regardé toutes les sources de financement pour
eux-mêmes. Vous me semblez avoir fait à peu près la
même chose. À moins que je ne comprenne pas bien, à la fin
de la page 7, vous pariez des frais indirects de la recherche. Je vais y
revenir. Au bas de la page 10, vous parlez de développer des fondations.
Je n'ai pas lu là-dedans quelque chose qui avait un rapport de
contribution de l'entreprise privée.
Pour en revenir au diagnostic de votre mémoire, d'une part, vous
dites que la personne qui reçoit la formation en tire les principaux
avantages et l'entreprise qui embauche la personne. Donc, on peut
reconnaître ici qu'il y a à la fois l'individu et l'entreprise qui
tirent les plus grands avantages d'une forte scolarisation. N'y aurait-il
pas...
Le Président (M. Parent, Sauvé): Je m'excuse, Mme
la députée de Chicoutimi. Ce n'est pas moi, mais ce sont nos
règlements. Il nous faut le consentement pour dépasser 13 heures.
Chaque formation politique a utilisé onze minutes exactement. Ai-je
votre consentement, si vous voulez dépasser 13 heures, pour que tout
soit terminé vers 13 h 20 au maximum? Est-ce qu'il y a consentement?
M. Ryan: M. le Président, vous devriez...
Mme Blackburn: Jusqu'à 13 h 30.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Un instant! Non,
pas jusqu'à 13 h 30,
M. Ryan: Je pense qu'on s'était...
Le Président (M. Parent, Sauvé): Un instant, M. le
ministre, si vous voulez bien. Avant la séance, j'ai rencontré M.
Dufour. Je l'ai informé, et je l'ai dit publiquement aussi, que la
commission avait une heure pour l'entendre. Je lui ai demandé s'il
préférait que nous suspendions pour continuer dans
l'après-midi, Cependant, des engagements pris ultérieurement
l'empêchent de le faire et c'est très compréhensible. Je
demande la collaboration de tout le monde. On avait dit qu'on accordait une
heure. À 13 h 20, cela fera une heure cinq. Je pense que l'on partage
également le temps pour terminer à 13 h 20 et c'est tout à
fait normal.
M. le ministre, je vous écoute.
M. Ryan: Nous vous obéissons. M. Jolivet: On a eu
peur.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Mme la
députée de Chicoutimi, je m'excuse de vous avoir interrompue.
Mme Blackburn: II y a le souffle qui...
Le Président (M. Parent, Sauvé): J'ai brisé
votre rythme. Je m'en excuse.
Mme Blackburn: Oui, en effet. Je disais que si on veut
établir, en raison de l'équité, une responsabilité
entre ceux qui devraient payer la formation, on sait qu'il y a l'État,
d'une part, parce qu'il y a quand même une responsabilité de
société et l'État le fait dans la proportion que l'on
connaît, les deux autres qui en profitent le plus, ce sont les
entreprises et l'individu.
On reconnaît généralement dans votre mémoire
que la compétence des personnels contribue à la capacité
concurrentielle des entreprises et à tous les niveaux
d'activité.
Il y a les représentants de l'École polytechnique qui se
demandaient si on ne devait pas envisager une source de financement, un peu
comme on l'a fait en France, où 2 % du revenu des entreprises
constituent un fonds qui doit être réservé à la
formation du personnel dans les universités. Est-ce qu'on peut envisager
une source de financement de cette nature?
M. Dufour (Ghislaîn): Tout à l'heure, on a dit qu'on
ne pouvait pas être d'accord avec une hausse des taxes des entreprises ou
une hausse des taxes des particuliers. On a dit aussi qu'on ne voulait pas
augmenter le déficit. Je pense que tout le monde est d'accord
là-dessus. Il faut alors trouver des gens qui vont payer.
Dans notre mémoire, je pense que rien ne permet de dire qu'on ne
veut pas participer aussi comme entreprise. Toute la question de la
recommandation no 5, Développer les fondations universitaires, il y a
des grosses chances que cela vienne des entreprises. Vous aurez remarqué
aussi au haut de la page 11, qu'on implique les contribuables, non seulement le
gradué et non seulement l'entreprise, mais le contribuable aussi. C'est
un effort collectif que de financer nos universités.
Je voudrais surtout vous signaler, Mme la députée, et je
sais très bien que vous allez me comprendre pour avoir
déjà eu à en discuter avec vous, que nous participons
déjà beaucoup comme entreprise à l'effort de
l'éducation au Québec, au plan collégial -vous vous en
souvenez - et au plan universitaire aussi. On reçoit constamment des
gens dans l'entreprise. On va à l'université. Mais surtout, et je
termine là- dessus, car mes collègues en ajouteront
sûrement, c'est nous qui payons les frais directs quand on fait faire de
la recherche à l'université. C'est quelque chose qui est
important et dont on ne parle pas.
On dit toujours qu'il faudrait que le gouvernement participe aux frais
indirects, mais quand vous faites une entente avec Northern, l'Alcan ou Du
Pont, on paie les frais indirects et, en plus, on va aller chercher les
professeurs et on va les emmener chez Mitel, à Bromont, ou on va les
emmener dans d'autres entreprises. C'est cela la collaboration
industrie-université qui ne s'exprime pas en termes de dollars, mais qui
s'exprime vraiment en termes de collaboration financière. Si tu veux
ajouter.
M. Boutin: Oui, si vous me permettez. Vous avez mentionné,
Mme la députée de Chicoutimi que, pour l'entreprise
privée, toute diplomation, la qualité des diplômés
c'est une question de profit. Cela l'est oui, mais c'est beaucoup plus que
cela. Sans exagérer, il nous faut reconnaître que c'est une
question de survie nationale. L'entreprise de haute technologie a besoin de
matière grise. Or la matière grise, on va la chercher dans nos
universités.
Vous avez fait état tantôt des taux de diplomation. Je veux
profiter de l'occasion pour rappeler à votre mémoire le tableau
2, qui a été attaché au mémoire du Conseil des
universités, où on fait précisément état du
taux de diplomation tant au baccalauréat qu'au niveau de la
maîtrise et du doctorat. On avait un gros retard au Québec. Au
niveau du baccalauréat on est rendu à environ 90 % de l'Ontario,
au taux de diplomation; mais quand on regarde aux deuxième et
troisième cycles, on est encore à une carence de l'ordre de 50
%.
Par ailleurs, autant vous que le ministre en charge nous faites
remarquer que le financement des universités présume des sommes
d'argent neuf. Je crois que vous avez totalement raison. La liberté
universitaire, le maintien de la liberté universitaire est au prix d'une
diversification des sources de financement. Malheureusement, à l'heure
actuelle, toutes nos universités sont à la traîne de
l'État: quelque chose comme 85 % à 90 % de leur financement vient
du ministre.
Ce qu'on essaie d'avancer dans notre mémoire - et je sais que
nous ne sommes pas les seuls à le faire - c'est de suggérer des
sources alternatives de financement qui vont des augmentations des frais de
scolarité aux augmentations des frais de recherche, et qui vont chercher
des sommes d'argent neuf tant dans les poches des contribuables à l'aide
de la fiscalité que dans les secteurs de l'entreprise privée pour
l'encouragement à la recherche - de l'argent neuf qui vient de là
- et pour des subsides qui s'en vont direct-
ment aux universités. Des encouragements peuvent venir de la
fiscalité aussi, mais c'est de l'argent neuf que cela prend.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. D'autres
interventions?
Mme Blackburn: M. Dufour n'a pas répondu à ma
question à savoir s'il serait favorable à l'impôt, à
l'imposition telle qu'elle existe en France. Par rapport aux incitatifs
fiscaux, vous avez certainement lu avec beaucoup d'intérêt le
rapport touchant la fiscalité et les entreprises, qui a
été déposé la semaine dernière, où on
évalue à quelque 14 000 000 000 $ les revenus nets qui
échappent à l'impôt à cause de mesures
d'évasion fiscale. Je trouve toujours un peu surprenant l'attitude qu'on
a de dire: II faut encore aller dans cette direction. Je trouve qu'à la
différence des autres mémoires, vous reconnaissez que du moment
où on parle d'incitatifs fiscaux, cela a des effets sur les revenus de
l'impôt. Je trouve que cela va de soi.
Le temps passe et on...
M. Dufour (Ghislain): Est-ce que je peux répondre à
votre question?
Mme Blackburn: Oui.
M. Dufour (Ghislain): Parce que là vous êtes
passée de la France aux États-Unis en revenant chez nous, et
votre question était très précise: Est-ce qu'on peut
constituer un fonds de 2 %, 3 %? Je n'ai malheureusement pas lu le
mémoire de Poly. Est-ce que c'est le congé formation,
congé éducation?
Mme Blackburn: En France vous avez, ce qui s'appelle, que vous
connaissez sûrement, une espèce d'impôt qui doit être
consacré à la formation du personnel. S'il n'est pas
consacré à cette formation dans l'entreprise avec la
collaboration des universités, ils le retournent - pas
l'équivalent du fonds consolidé - ils peuvent le retourner en
impôt, mais peuvent également le donner, le distribuer à
d'autres organismes de formation. Cependant, je trouve que ce n'est pas au
niveau des modalités que je voudrais aller, c'est beaucoup trop
complexe, c'est beaucoup plus à la question du principe.
M. Dufour (Ghislain): Sur le principe, nous avons une position,
Mme Blackburn et je demande à M. Beauregard de vous l'exprimer.
M. Beauregard (Denis): En fait, l'expérience
française n'est pas très concluante à ce sujet. La
dernière fois que j'en ai discuté avec des Français, on
s'est rendu compte que, vers la fin de la période
déterminée, l'argent est souvent investi dans à peu
près n'importe quoi pour ne pas retourner, justement, ces
sommes-là sous forme d'un autre type d'impôt.
Donc, semble-t-il que ce n'est pas la bonne formule et nous, ce que nous
privilégions - et nous l'avons déjà fait valoir dans
d'autres mémoires, à d'autres occasions - c'est l'entreprise qui
s'occupe souvent, et qui le fait de toute façon, de sa propre formation,
de la formation de sa main-d'oeuvre, un peu comme M. Dufour le disait
tantôt. L'entreprise doit fonctionner, n'a pas d'autre choix que
d'investir souvent, dans les secteurs qui vont vite, beaucoup d'argent en
formation. Ajouter à ces contraintes une contrainte qui s'appliquerait
de façon générale, nous ne croyons pas que ce soit la
bonne façon de procéder, et l'expérience française
le démontre, d'ailleurs.
M. Dufour (Ghislain): Mme Blackburn, est-ce que c'est dans le
mémoire de Poly?
Mme Blackburn: Oui, vous avez cela dans le mémoire de
Poly, à la page 13, dans l'éventail qu'on fait de ce que
pourraient être d'autres sources de financement.
M. Dufour (Ghislain): Nous allons le regarder attentivement.
Mme Blackburn: Écoutez, je peux vous le dire: "Si
l'État n'est plus en mesure de financer l'accroissement des populations
étudiantes, les règles de financement doivent être
ajustées en conséquence." Non, écoutez, j'ai dit à
la page 13, mais je vais être obligée de rechercher, je pense que
c'est à la page 22. De toute façon, vous allez le retrouver, je
l'ai revu ce matin.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Cela va?
Mme Blackburn: Je n'ai pas le bon mémoire.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. Je
reconnais maintenant le député de Sherbrooke.
M. Hamel: Merci, M. le Président. Â la lecture de
votre mémoire me venait spontanément à l'esprit le dicton:
"Ce qui se conçoit bien s'énonce clairement". Je vous
félicite de la qualité et de la concision de votre
mémoire. Cela facilite notre travail et cela le rend même
agréable.
Il y a un aspect là-dedans qui m'a intéressé
concernant surtout le financement, votre cinquième recommandation
où vous suggérez de développer les fondations
universitaires. Comme j'ai été impliqué très
étroitement dans ce secteur jusqu'au 2 décembre, je suis
très heureux de cette
recommandation. Maintenant, ce n'était pas clair tout à
fait, à savoir si vous vouliez aussi impliquer de façon
très marquée l'entreprise privée autant que les anciens
étudiants, mais je pense que vous avez répondu dans ce
sens-là.
M. Dufour (Ghislain): Oui, je pense que c'est ce que je viens de
dire à Mme Blackburn. Plus que cela même... au haut de la page 11,
cela va directement rejoindre le contribuable. Alors, c'est l'entreprise, le
gradué, le contribuable qui n'est même pas passé par
l'université, mais qui, lui, déciderait que c'est une incitation
fiscale qui lui plaît. Je vais simplement vous donner un chiffre parce
que je sais que vous êtes préoccupé par ce dossier. Aux
États-Unis, un don de 2 200 000 $ coûte à peine 100 000 $
à une entreprise, alors qu'au Canada, il coûte 800 000 $. Alors,
on voit que les incitations fiscales sont totalement
désordonnées.
M. Beaulieu?
M. Beaulieu (Alexandre): M. le Président, sur le plan
d'intéresser les entreprises et les entrepreneurs, il y a quelque chose
que je voudrais ajouter, c'est qu'il faudrait lever certaines
hypothèques aussi. On en discute ici à pas feutrés,
évidemment, on n'ose pas trop... Il y aura des rencontres pour
régler certains problèmes, mais la perception de
l'université par l'entreprise ne peut pas être qualifiée
d'excellente, que ce soit la charge de professeur, que ce soit l'administration
tout court et de bien d'autres choses dont on ne parlera pas ce matin.
C'est évident que, lorsque l'entreprise a confiance dans ses
universités, cela engendre sûrement une contribution plus grande,
même si elle est volontaire. Ce climat-là existe. Souventefois,
l'université ne répond pas toujours à la demande. Je vais
prendre un cas en particulier, juste pour illustrer mon exemple. À
l'Institut de recherche en santé et sécurité du travail,
alors qu'on a besoin de formation de chercheurs au niveau de la
sécurité et de l'ingénierie, on ne réussit pas
à faire lever les projets. On investit de l'argent pour faire notre
propre formation, alors que cela nous paraîtrait être la
responsabilité de l'université. (13 h 15)
J'ai ouvert cette parenthèse pour dire qu'il faudra aussi que le
climat soit meilleur et que l'interprétation que fait l'entreprise du
rôle de l'université soit un peu meilleure. Même si
l'entreprise croit fermement que ces institutions de haut savoir doivent
être privilégiés, comme le dit notre mémoire, la
perception est importante.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Je vous remercie,
monsieur. Mme la députée de
Chicoutimi.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Je vais profiter de
mes cinq minutes de conclusion pour poser quelques questions rapides, mais j'ai
l'impression que cela va aller beaucoup plus au niveau des remarques.
Vous proposez une hausse des frais de scolarité et vous nous
dites qu'on a aussi besoin de hausser la scolarisation. Est-ce qu'il faudrait
maintenir cette voie s'il se révélait que cette hausse ait un
impact sur l'accessibilité? Je voudrais comprendre votre recommandation
touchant les frais de scolarité, en bas de la page 8, où vous
dites: "Parallèlement à l'augmentation des frais de
scolarité... devraient être réaménagés pour
apporter une aide accrue aux étudiants qui en ont besoin, quitte
à récupérer une partie importante de cette aide lorsque le
diplômé est en mesure de rendre à l'État une partie
des sommes qui lui auront permis d'acquérir une formation rentable..."
C'est alambiqué un peu comme phrase, mats ce que je voulais comprendre
c'est si, dans votre proposition, vous envisagez une hausse de l'aide
financière du côté des bourses ou du côté des
prêts.
M. Dufour (Ghislain): Des deux côtés. Actuellement,
il y a les deux. Il s'agit d'une révision complète du
système, je pense, madame.
Mme Blackburn: Mais vous pensez qu'on pourrait et qu'on devrait
continuer à endetter les étudiants, les jeunes, les
diplômés?
M. Dufour (Ghislain): Je le pense.
M. Pichette: Est-ce que je peux dire quelque chose
là-dessus?
Le Président (M. Parent, Sauvé): Oui.
M. Pichette: Vous savez, il faut voir les choses dans leur juste
mesure. Si on hausse les frais de scolarité, si on les double d'un coup,
c'est sûr que c'est quelque chose de difficile à prendre. Mais, si
on les hausse de 10 % à 15 % par année, pour un étudiant
qui fait un programme complet qui lui coûterait, sans la hausse des frais
de scolarité, 500 $ et qui paierait 550 $ après la hausse des
frais, ou un peu plus, j'ai de la difficulté à comprendre qu'on
va faire sortir du système beaucoup d'étudiants et
d'étudiantes.
Ce ne sont pas 50 $, 75 $ ou 100 $ de plus par année qui feront
sortir les étudiants du système. Je pense qu'il faut mesurer les
choses et prendre la juste mesure des choses.
Mme Blackburn: D'accord, finalement vous nous dites que, si on
doublait du jour
au lendemain, cela pourrait effectivement être...
M. Pichette: Oui, et on ne propose pas cela.
Mme Blackburn: D'accord, cela va bien.
M. Pichette: Justement, on dit qu'il ne faut surtout pas faire
cela.
Mme Blackburn: Bien. Une dernière petite question. Vous
parlez des régions et je me demandais jusqu'à quel point vous
aviez, avant d'écrire ce texte, consulté vos membres qui sont
issus des régions. Vous parlez de rationalisation, en page 5,
particulièrement en régions. "Il apparaît aujourd'hui
qu'une meilleure coordination..., particulièrement en
régions...", alors qu'il vient de nous être démontré
que, s'il s'était fait de la rationalisation, de la planification, de
l'évaluation et de la fermeture de programmes, c'était
précisément dans les régions. Je voudrais que vous
m'expliquiez cela un peu.
M. Dufour (Ghislain): J'ai déjà commencé
à répondre tout à l'heure, prévoyant votre
question, en vous disant qu'il y avait déjà de la bonne
rationalisation entre l'Université du Québec à Chicoutimi,
l'Université Laval, l'Université McGill et l'Université du
Québec à Trois-Rivières. Il y en a de plus en plus,
à Montréal même, entre les universités, car il ne
faut pas oublier que Montréal est aussi une région. Il existait
beaucoup de difficultés de coordination entre les universités. On
donnait des doctorats dans presque toutes les universités. Mais,
maintenant le doctorat en administration est uniforme pour quatre
universités, si je me rappelle bien.
Alors, cela existe, mais il ne faut pas s'arrêter là. Il
faut continuer. Ce qu'on entendait ce matin, par exemple, dans le domaine des
sciences biophysiques à McGill, il faut le faire dans d'autres domaines.
On peut les identifier. C'est cela que nous voulons dire dans la
rationalisation en régions. Pourquoi en régions? C'est parce que
ce n'est pas spécifique au réseau de l'Université du
Québec. Vous avez ce problème de coordination entre les
universités anglophones et francophones à Montréal
actuellement.
Je pense qu'il ne faut pas cacher qu'il y a amélioration, mais il
y a encore problème.
Mme Blackburn: Je voulais voir. Là vous nuancez le "en
régions" - je vous remercie - pour l'étendre à toutes les
régions du Québec tel que libellé. Je n'étais pas
certaine.
M. Dufour (Ghislain): On le sait très bien, nous aussi,
qu'à Victoriaville, les hommes d'affaires voudraient avoir une
constituante de l'Université du Québec. On sait cela, on est en
contact avec eux. Sauf qu'il n'est pas certain qu'on institue cela demain
matin. Peut-être, si on rationalisait comme il faut, pourrait-on amener
à Québec ou à Trois-Rivières, justement des
activités qui se font ailleurs.
C'est un peu comme pour le cégep. Vous vous rappelez de la
fameuse expérience où on formait des techniciens en mines
à Gaspé et, à Rouyn-Noranda des techniciens en
pêcherie. Je pense que c'est cela qu'il faut éviter quand on pense
à un réseau cohérent d'éducation universitaire au
Québec.
Mme Blackbum: Bien, M. le Président; vous me permettez, au
nom de ma formation politique, de vous remercier, M. Dufour, messieurs, de
votre participation aux travaux de cette commission. Vous l'avez fait, je
pense, avec beaucoup de justesse sur plusieurs questions et avec les nuances
qui s'imposaient. Par ailleurs, j'aurais souhaité pour ma part qu'on
voie un volet qui aurait été un peu plus développé
sur ce qu'aurait pu être la part de l'entreprise dans le financement des
universités; on l'a longuement démontré. J'aurais
souhaité qu'on puisse le faire de façon un peu plus fine parce
que vous êtes vraiment les personnes avec lesquelles on aurait pu le
faire.
M. Dufour (Ghislain): Voyez-vous, j'avais tout de suite
oublié 16 000 000 $ que mon collègue, M. Beaulieu, vient de me
rappeler.
Le Président (M. Parent, Sauvé): S'il vous
plaît, monsieur. Merci.
Mme Blackbum: Messieurs, on aura sûrement l'occasion de
revenir sur la question. Il n'en demeure pas moins que la décision
finale appartient au ministre de l'Éducation et de l'Enseignement
supérieur et de la Science. Il nous a dit l'autre jour que les questions
qui relevaient de la fiscalité n'étaient pas de son ressort, que,
par ailleurs, lorsqu'il s'agissait d'incitatifs fiscaux cela pouvait être
de son ressort. Peut-être qu'à la fin de la commission on saura
à peu près sur quel ressort il entend peser ou sur quel bouton,
comme il nous l'a dit tout à l'heure. Alors, messieurs, je vous
remercie.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, Mme la
députée de Chicoutimi. M. le député d'Argenteuil et
ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science.
M. Ryan: M. le Président, je voudrais d'abord faire une
petite mise au point. Mme la députée de Chicoutimi a
déposé tantôt un
document intitulé: "Quelques chiffres sur l'état de la
scolarisation des Québécois(es)." Je crois que vous avez
décidé de l'annexer au compte rendu de la séance. Je
voudrais vous demander, si vous l'annexez, que soit bien indiquée la
provenance du document, que c'est un document déposé par la
députée de Chicoutimi, sous sa responsabilité. Il y a des
statistiques là qui sont sans doute exactes, mais peut-être
incomplètes. Je ne voudrais pas que vous pensiez que je suis
identifié à ces statistiques sans que j'aie eu le temps de les
vérifier ou de les faire vérifier par mes services.
Une voix: C'est encore incomplet, d'après vous?
Le Président (M. Parent, Sauvé): S'il vous
plaît. M. le ministre.
Mme Blackburn: Cela pourrait être incomplet.
M. Ryan: Je pense que c'est important car, comme il n'y avait pas
de provenance sur le document, moi-même j'ai commencé à
m'enquérir tantôt pour savoir si cela venait de chez nous. On m'a
tout de suite assuré que non.
Je voudrais remercier le Conseil du patronat de sa collaboration. Je
pense que nous avons eu une discussion fructueuse, constructive que nous
apprécions beaucoup de ce côté-ci. Je voudrais profiter de
l'occasion pour remercier spécialement M. Boutin qui vous accompagne, M.
Dufour, pour la collaboration de première qualité qu'il apporte
au travail du Conseil des universités. J'ai eu l'occasion de
siéger avec...
Mme Blackburn: Vous voulez renouveler son mandat?
M. Ryan: Je crois que son mandat continue, mais s'il était
question qu'il soit renouvelé à brève
échéance, nous serions très honorés de pouvoir le
faire. J'ai eu l'occasion de vérifier que M. Boutin prend une
participation active et vigoureuse aux travaux du Conseil des
universités et je le remercie beaucoup d'être venu avec la
délégation du Conseil du patronat du Québec ce matin. Je
retiens de votre intervention un terme dont j'aurais aimé parler dans
les échanges que nous avons eus, mais le temps ne le permettait point,
c'est le mot stabilité. Vous terminez votre mémoire en disant que
peut-être le plus important de tous les objectifs, c'est de viser
à procurer un financement plus stable aux universités du
Québec. Je crois qu'elles sont en droit de s'attendre à un
financement plus stable que celui qui leur a été imposé au
cours des dernières années. J'espère que c'est un des
éléments que la commission retiendra des échanges que nous
avons eus ensemble, à savoir que nous devons non seulement trouver le
niveau de financement qui convienne aux besoins réels des
universités, trouver les sources de financement
équilibrées, diversifiées, dont vous avez parlé, je
pense avec justesse, mais surtout créer des conditions qui permettront
d'assurer une stabilité plus grande dans le réseau. Il n'y a rien
de plus dangereux pour la qualité de notre système universitaire
que ce climat d'insécurité et d'instabilité qui le ronge
depuis déjà plusieurs années. Merci beaucoup.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. le
ministre. Avant de conclure, une mise au point concernant le document ayant
pour titre: "Quelques chiffres sur l'état de la scolarisation des
Québécois(es)." Je fais remarquer aux intéressés
que c'est de la responsabilité du président d'accepter ou de ne
pas accepter un document. Lorsque Mme la députée de Chicoutimi a
déposé le document tout à l'heure, j'en ai pris
connaissance, j'ai regardé les sources et je l'ai déclaré
déposé, mais en indiquant que la provenance était bien de
la députée de Chicoutimi. Ce n'est pas un document quelconque,
c'est un document qui est déposé par un membre de cette
commission. Tout le monde n'est pas obligé de l'endosser, mais il
devient une partie du procès-verbal de la commission parlementaire qui
se déroule aujourd'hui.
Je vous rappelle aussi que nous allons suspendre la séance dans
quelques minutes pour reprendre avec l'Université du Québec
à Montréal, à 15 heures.
Je veux remercier nos invités ainsi que les membres de la
commission de la collaboration qu'ils m'accordent dans la présidence de
cette commission parlementaire. Je vous remercie et nous suspensons nos
travaux.
(Suspension de la séance à 13 h 26)
(Reprise à 15 h 17)
Le Président (M. Parent, Sauvé): À l'ordre,
s'il vous plaît!
La commission de l'éducation reprend ses travaux dans le cadre du
mandat qui lui a été confié par l'Assemblée
nationale, à savoir de procéder à une consultation
générale dans le but d'étudier les orientations et le
cadre de financement du réseau universitaire québécois
pour les années 1987-1988 et pour les années
ultérieures.
Cet après-midi, la commission reprend ses travaux en accueillant
les représentants de l'Université du Québec à
Montréal. Alors, soyez les bienvenus parmi nous, messieurs. J'invite le
porte-parole de l'Université du Québec à Montréal,
M. Goyette, à nous
présenter les gens qui l'accompagnent. Université du
Québec à Montréal
M. Goyette (Pierre): Merci, M. le Président. D'abord, je
me présente, Pierre Goyette, président du conseil
d'administration de l'Université du Québec à
Montréal. Nous accompagnent aujourd'hui, à mon extrême
droite, M. Marcel Belleau, directeur des services financiers à l'UQAM,
et, à ma droite immédiate, Mme Florence Junca-Adenot,
vice-rectrice aux finances et à l'administration à
l'université. À mon extrême gauche, M. Louis Chapelain,
directeur adjoint des services financiers à l'UQAM; M. Yvon Lussier,
à sa droite, directeur du Bureau de recherche institutionnelle, et,
finalement, M. Claude Corbo, recteur de l'UQAM.
Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le
président, madame, messieurs, soyez les bienvenus. La commission a
prévu vous entendre durant environ une heure et demie. Il est quinze
heures quinze. À la suite de votre exposé, M. Goyette, le reste
du temps sera réparti également entre les deux formations
politiques. Après cela, le dialogue s'engagera entre vous, les gens qui
vous accompagnent et les membres de la commission parlementaire.
On vous invite à nous livrer votre message d'une façon
claire pour tâcher de faire ressortir toutes les questions susceptibles
de surgir. Cela se fait dans un cadre très formel ici, dans le salon
rouge. Par contre, on voudrait que ce soit une rencontre informelle à
l'intérieur de nos règles de procédure de façon que
nous puissions échanger nos vues très librement. Nous vous
écoutons, monsieur.
M. Goyette: Merci, M. le Président. M. le ministre,
mesdames et messieurs de la commission, on voudrait d'abord vous remercier
d'avoir permis cette rencontre et d'avoir permis à l'Université
du Québec à Montréal de faire une présentation
à cette commission.
Nous vous avons transmis un mémoire dans les délais
impartis; nous n'avions et nous n'avons pas l'intention de le lire. Ce
mémoire est de nature particulièrement technique. Par ailleurs,
Mme Junca-Adenot, M. Corbo et moi-même ferons chacun un court
exposé qui fera ressortir les points saillants de ce mémoire,
points sur lesquels nous voulons insister particulièrement. Nous avons
aussi remis au secrétaire de la commission les notes que nous allons
vous livrer tous les trois dans les minutes qui nous sont allouées.
C'est à titre de citoyen et, dans mon cas, d'homme d'affaires
soucieux de l'avenir du Québec, que je profite de cette occasion pour
vous communiquer quelques commentaires sur l'enseignement supérieur et
témoigner de mes perceptions et des réalisations de notre
université, l'Université du Québec à
Montréal, des problèmes auxquels elle est confrontée et de
l'impasse vers laquelle elle se dirige. Cette impasse durera si des mesures ne
sont pas prises rapidement pour améliorer notre situation
financière.
Dans un avenir qui n'est pas si lointain, il y a de fortes chances que
la mesure de la richesse d'un pays se fasse particulièrement en termes
de potentiel intellectuel. Les idées seront la richesse la plus
précieuse de la fin du XXe et du XXIe siècle. Sera
prospère la nation qui aura su les faire naître, les
développer, les appliquer aux différents problèmes
scientifiques et humains. Les fonds qui sont mis à la disposition des
universités devraient être considérés comme un
investissement et non comme une dépense, l'un des meilleurs
investissements qu'un État puisse faire pour son avenir. Consciente de
cela, l'industrie fait déjà sa part en multipliant les accords et
les échanges université-industrie dans différents secteurs
de recherche et de formation. Si tel ne devait pas être le cas,
serons-nous prêts à justifier nos décisions devant les
générations futures? Nous pouvons dès maintenant constater
que le système universitaire, celui de l'UQAM en particulier, est
affaibli dangereusement en termes de ressources, qu'il a besoin d'une
transfusion rapidement et que toute saignée supplémentaire
pourrait lui être fatale.
En ce qui concerne l'UQAM, je voudrais vous entretenir de quelques
sujets qui m'ont frappé à titre de président du conseil
d'administration à . travers les divers documents et décisions
que nous avons à traiter au conseil. À lire les statistiques qui
ont été présentées en annexe à notre
mémoire, on pourrait être tenté de conclure à la
superefficacité, au miracle de la gestion, au modèle à
suivre, en ce qui nous concerne. Mais, attention! II est vrai que l'UQAM a
démontré clairement qu'elle était performante, qu'elle
avait accompli la mission de favoriser l'accessibilité aux études
universitaires, qu'elle a une situation financière virtuellement
équilibrée et qu'elle s'est même développée
d'une façon extraordinaire dans les programmes d'études
avancées et en recherche. Mais à quel prix tout ceci a-t-il pu
être accompli? Ces performances ont pu être réalisées
grâce à la collaboration de toute la communauté
universitaire. Comme le disait le recteur qui a précédé M.
Corbo et qui nous a précédés ici à cette tribune,
M. Claude Pichette, nous avons, année après année,
réussi à faire plus avec moins. Mais il y a des limites à
l'élasticité et il y a lieu de s'interroger sur les signes
importants d'essoufflement à
l'UQAM qui, s'ils ne sont pas pris en compte rapidement, risquent
d'affecter son développement et sa capacité de continuer à
offrir des programmes de qualité à ses diverses
clientèles. Qu'il suffise de rappeler qu'en dollars de 1978-1979, donc
en dollars constants, la subvention par étudiant équivalent
à temps complet, qui était de 3600 $ cette
année-là, est passée à 2750 $ l'année
dernière, soit une réduction de près du quart. Durant
cette période, le nombre d'étudiants à l'UQAM a
doublé. Nous pouvons facilement constater l'appauvrissement lorsque,
à ces chiffres, nous ajoutons que la subvention par étudiant
équivalent à temps complet était, l'année
dernière, de 4770 $ à l'UQAM, alors qu'elle était de 6942
$ dans les autres universités, plus de 2000 $ de différence, et
de 5118 $ dans les cégeps.
L'UQAM a tenu le pari de la saine gestion et de la responsabilité
de la bonne citoyenne. Ainsi, nous avons pu constater que des efforts
sérieux sont faits année après année pour que les
entreprises auxiliaires s'autofinancent à l'université, selon les
principes émis par le ministère, et que la subvention de
fonctionnement ne soit pas amputée pour financer ces services. La
situation financière globale de l'université est virtuellement
équilibrée, ainsi que celle des entreprises auxiliaires. Le 31
mai 1986, le déficit accumulé de l'UQAM était
inférieur à 1 % du budget annuel. Donc, c'est ce qui nous permet
de dire que l'Université du Québec à Montréal est
virtuellement équilibrée dans ses finances.
Il ne faudrait pas conclure par un raisonnement trop simpliste que ceci
a été réalisé grâce aux augmentations de
clientèle et au financement additionnel que celle-ci a rapporté.
Mme Junca-Adenot reviendra plus loin sur ce point.
En 1978-1979, notre dépense par étudiant équivalent
temps complet était de 5049 $ alors qu'en 1985-1986, en dollars de 1979,
en dollars constants, elle est de 3559 $, donc passée en dollars
constants, les effets de l'inflation éliminés, de 5000 $ à
3500 $. C'est donc dire que l'UQAM a à la fois accepté le
défi de l'accessibilité et de la responsabilité
financière, ce qui est presque un tour de force, si vous me permettez de
faire ce commentaire. Tout en doublant sa clientèle elle a dû
réduire les services, fonctionner avec une proportion de près de
50 % de ses activités d'enseignement qui sont assumées par des
chargés de cours, une moyenne d'étudiants par cours très
élevée, un ratio de personnel de soutien de 1 par 23
étudiants, alors qu'il est de 1 par 14 dans les autres
universités, etc.
Pour apporter un autre éclairage sur la gestion de l'UQAM,
j'ajouterai qu'elle accueille 20 % de la clientèle universitaire du
Québec alors que son déficit, le déficit de l'UQAM, par
rapport à l'ensemble des déficits accumulés des
universités, ne représente qu'environ 1,5 %. Ces données,
sans l'ombre d'un doute, démontrent que les réclamations de
l'UQAM pour corriger son sous-financement chronique et réajuster
à la hausse sa base financière, donc, que cette
démonstration doit être faite que ces ajustements sont
particulièrement justes.
M. le Président, M. le ministre, mesdames et messieurs de la
commission, je laisserai maintenant mes deux collègues parler des
réalisations académiques de l'université, ce que M. Corbo
fera, et expliquer en quoi l'UQAM est pauvre et comment cette pauvreté
remet en question son développement. Merci.
M. Corbo (Claude): M. le Président, M. le ministre,
mesdames et messieurs de la commission, en vous remerciant de votre accueil
aujourd'hui, je souhaite vous entretenir d'un certain nombre de
réalisations de l'UQAM en matière d'enseignement, de recherche,
de création et de service aux collectivités en regard des
missions que le gouvernement, à l'origine, nous a attribuées et
en fonction de la toile de fond qui a commencé à être
dépeinte par le président Goyette et que ma collègue, la
vice-rectrice, complétera.
En créant l'Université du Québec et en
créant l'UQAM, le gouvernement nous assignait deux grands objectifs. Un
premier objectif, c'est l'article 3 de la loi qui l'exprime:
"L'université - je cite - a pour objet l'enseignement supérieur
et la recherche;" incluant le perfectionnement et la formation des
maîtres. Mais, dès la création de l'université,
dès l'adoption de la loi par l'Assemblée nationale, il
était clair que l'université avait également une mission
d'accessibilité qui a été signalée très
clairement en Chambre par le parrain de la loi d'alors. En bref et en clair, on
a demandé à l'Université du Québec à
Montréal d'être une université au sens complet du terme, se
préoccupant d'enseignement supérieur et de recherche et
d'être aussi une université préoccupée
d'accessibilité. (15 h 30)
Avec modestie et fierté, si vous me permettez de vivre les deux
sentiments en même temps, je veux vous dire que nous croyons avoir
réalisé, malgré des débuts très difficiles
et des moyens très frugaux, les mandats que le législateur nous a
confiés.
Je m'arrête d'abord à la question de l'accessibilité
et de la démocratisation. L'UQAM accueille, cette année, 37 000
étudiants; elle a plus que doublé ses effectifs étudiants
depuis 1978-1979, parce qu'il existe une très forte demande de formation
universitaire, notamment chez les adultes. Elle a développé une
large gamme de programmes. Au 1er cycle, 55 baccalauréats et 61
certificats, mais 28 maîtrises et
bientôt 30 maîtrises, 5 certificats de 2e cycle et 8
doctorats qui seront bientôt 10 doctorats. Elle est active dans un
certain nombre de secteurs disciplinaires: les arts, la formation des
maîtres, les lettres, les sciences, les sciences de la gestion, les
sciences humaines et nous nous proposons une présence modeste, mais
résolue dans le domaine des sciences appliquées.
Je veux vous signaler que notre université se réjouit
profondément d'avoir intégré les adultes à la
programmation régulière par le biais des certificats,
également par le biais des programmes de baccalauréat. Nos
certificats, je le rappelle, comportent pour 85 % des cours qui sont les
mêmes cours que ceux que l'on trouve dans les baccalauréats et
ceux-ci peuvent conduire à un grade de bachelier, mais en fonction de
règles d'appariement très rigoureuses et très exigeantes.
En moins de 20 ans, l'UQAM compte plus de 45 000 diplômés, dont 32
000 bacheliers, 11 000 certificats et environ 2000 maîtrises et
doctorats.
L'UQAM a élaboré, toujours au titre de
l'accessibilité, une nouvelle mission dite mission de service aux
collectivités, dont le Conseil des universités a reconnu la
pertinence il y a un an et demi et qu'il a présentée au ministre
de l'Enseignement supérieur et de la Science et aux universités
comme devant désormais faire partie des tâches de
l'université québécoise.
La formation qui est donnée par l'UQAM aux étudiants aux
différents cycles se compare très avantageusement, à notre
avis, à ce qui se fait ailleurs. Je n'en veux pour seul
témoignage que les prix et les bourses de toute espèce, comme
celle des étudiantes et des étudiants diplômés de
l'UQAM et également, par exemple, les succès observés aux
concours de certains ordres professionnels, notamment en sciences comptables.
Je pense donc, M. le Président, pouvoir dire que l'UQAM a réussi,
avec ses moyens et avec beaucoup de difficultés, à atteindre la
mission ou l'objectif que lui assignait le gouvernement à sa
création, c'est-à-dire d'assurer l'accessiblité.
Il me paraît très important aujourd'hui de vous dire que
l'Université du Québec à Montréal s'est aussi
beaucoup préoccupée de l'autre aspect de sa mission: être
une université d'enseignement supérieur, être une
université où se fait de la recherche. Il se fait de la recherche
à l'UQAM depuis les débuts. Il se fait de l'enseignement de 2e
cycle depuis les débuts, mais au cours des récentes
années, au cours des années quatre-vingt, nous avons
consacré un énorme effort de développement des
activités de recherche. De 1980-1981 è 1985-1986, les fonds de
recherche ont augmenté de 3 500 000 $ à 10 500 000 $. Les fonds
de recherche ont doublé de 1983-1984 à 1985-1986 dans un contexte
où le nombre de professeurs à l'UQAM n'a pas doublé et
dans le contexte où les fonds des organismes subventionnaires n'ont
certainement pas connu d'augmentations semblables.
En contrepartie de cet effort très important que les professeurs
ont effectué pour aller chercher des fonds de recherche à
l'extérieur, la proportion des fonds internes dans l'ensemble des fonds
de recherche de l'UQAM a chuté de 24 % à 12 % en 1985-1986. Le
taux de réussite des professeurs de l'UQAM dans les concours des
organismes subventionnaires est souvent plus élevé que la moyenne
nationale. C'est le cas en particulier au CRSH et c'est le cas en particulier
au CRSNG. L'UQAM est suffisamment engagée en recherche pour que 2 des 17
organismes de service à la recherche du fonds FCAR lui soient
confiés et pour qu'on lui ait confié deux actions structurantes
et reconnu sa participation à deux autres.
Les contrats de recherche en 1985-1986, qui sont dirigés en
particulier vers des organismes publics et privés, représentent 1
022 000 $, soit une augmentation de 47 % en un an. Le tiers des professeurs est
financé à l'extérieur pour ses activités de
recherche. Nous nous proposons bien de porter cette proportion à 50 %.
40 % des fonds externes de recherche vont au secteur des sciences naturelles
qui, jusqu'à cet automne, n'avait pas de doctorat. Malgré tout,
on réussit à aller chercher des fonds de recherche importants au
secteur des sciences.
Il est clair que la proportion des fonds de recherche de l'UQAM par
rapport à l'ensemble de son budget est différente de ce que l'on
trouve dans d'autres universités plus anciennes, mieux nanties. Je veux
faire allusion à la jeunesse de l'établissement, à
l'absence de certains secteurs pour lesquels il existe, à
l'extérieur de l'université, des fonds très
considérables de recherche. Je pense à tout ce qui s'appelle
médecine, sciences de la santé et génie, que nous n'avons
pas à l'UQAM et qui nous prive d'avoir accès à des fonds
de recherche. Je veux rappeler que la jeunesse de notre premier doctorat en
sciences n'a pas aidé à l'obtention de fonds externes.
Ce qu'il est important d'observer quand on parle des fonds de recherche
de l'UQAM, c'est la progression au cours des dernières années,
progression que nous espérons soutenir même si on ne peut pas
faire des augmentations, de 40 % d'une année à l'autre pendant
plusieurs années.
Au cours des dernières années également, l'UQAM a
rempli son mandat en termes d'études de 2e et 3e cycles. Nous avons
été la première université à adopter et
à implanter une politique globale et intégrée de soutien
pédagogique, administratif, financier et matériel aux
étudiants de 2e et 3e cycles.
Nous avons appliqué méthodiquement une recommandation du
Conseil des universités et du FCAR visant à accréditer les
professeurs oeuvrant dans les programmes de 2e et 3e cycles. Nous nous sommes
méthodiquement associés à d'autres universités pour
développer de nouveaux programmes de 2e et 3e cycles dans des
créneaux peu ou pas exploités.
Au cours de la dernière année et demie environ, le Conseil
des universités, qui est appelé à approuver des projets de
nouveaux programmes et qui se montre de plus en plus exigeant à
l'endroit des universités, a approuvé pas moins de cinq projets
de doctorat de l'Université du Québec à Montréal et
trois nouvelles maîtrises. C'est un signe de reconnaissance de la
qualité, de la pertinence et de la valeur des activités
d'enseignement et surtout de recherche qui se font à l'UQAM.
Au total, donc, M. le Président, en regardant derrière
nous, nous avons l'impression qu'au niveau de l'accessibilité, de
même qu'au niveau du développement des études
supérieures et de la recherche nous avons répondu avec
détermination aux objectifs que nous assignait le gouvernement.
À cette heure-ci, nous disons en particulier qu'avec une
quarantaine de programmes de 2e et de 3e cycles et des fonds de recherche en
croissance soutenue et régulière l'UQAM refuse toute
volonté de la stratifier dans un rôle mineur qu'elle jugerait
incompatible avec la notion même d'une université
intégrale, ce qu'elle croit être devenue.
Vous me permettrez de conclure, M. le Président, en parlant un
peu de notre avenir. Depuis longtemps, l'Université du Québec
à Montréal, dans le cadre du réseau de l'Université
du Québec, pratique la planification. Nous avons des plans triennaux. Le
plan triennal actuel est inspiré par deux grandes convictions. D'une
part, nous croyons que l'université est un élément
extrêmement important du développement économique, social
et culturel de la société et que c'est un investissement pour le
Québec. Nous croyons également que nous n'avons pas à tout
faire à l'UQAM. Nous nous sommes assignés, pour demain comme pour
hier, le respect de l'équilibre budgétaire. Nous voulons,
toutefois, poursuivre un développement intégral en concertation
avec d'autres universités. Ce ne sont pas là des promesses. C'est
la poursuite d'actions déjà entreprises.
Quand nous pensons à nos projets de développement - je
vais vous les résumer rapidement - nous sommes toujours très
sensibles à la notion d'accessibilité. C'est une valeur centrale
pour l'Université du Québec à Montréal; ce n'est
pas une course à la croissance, mais une volonté de
répondre à des besoins socio-économiques et culturels du
Québec. Pour nous, l'accessibilité est conditionnée par
les ressources mises à notre disposition. Nous ne voulons pas admettre
dans les programmes plus d'étudiants que ce que nous pouvons former avec
la plus haute qualité possible. Nous souhaitons également qu'il
soit clair dans l'esprit de tout le monde que, pour nous,
l'accessibilité est indissociable du concept de qualité.
La qualité de la formation à tous les cycles est
indissociable de la notion d'accessibilité et, à son tour, la
recherche de la qualité suppose que les étudiants soient
formés dans l'état le plus actuel des connaissances et des
pratiques professionnelles. Cela n'est possible que dans une université
où se pratique largement la recherche.
Donc, pour nous, accessibilité, qualité,
développement de la recherche sont des choses qui vont de pair dans le
développement d'une université. Il en résulte un certain
nombres d'objectifs précis. Notre première préoccupation,
c'est de renforcer méthodiquement la qualité des programmes
d'études, y compris les programmes d'études de 1er cycle. Nous
allons tenir un colloque sur cette question à la fin du mois
d'octobre.
Nous voulons aussi renforcer - comme cela a été le cas au
cours des dernières années - l'effort de recherche et de
création dans la perspective d'impliquer un nombre croissant de
professeurs dans des activités de recherche en association avec d'autres
universités et avec des partenaires de l'entreprise et de
l'industrie.
Nous voulons consolider les grands axes disciplinaires de
l'université en étant soucieux d'assurer à notre
université une présence minimale dans le domaine des sciences
appliquées et du génie, préférablement en
association avec une autre université et très certainement dans
des créneaux qui ne sont pas actuellement desservis.
Nous sommes encore disposés - c'est une de nos
préoccupations des prochaines années - è multiplier les
efforts conjoints, la collaboration avec d'autres universités, avec les
entreprises et avec tous les partenaires qui se présenteront à
nous.
M. le Président, l'UQAM a démontré qu'elle pouvait
concilier un développement dynamique et pertinent et le respect de
l'équilibre budgétaire. Son passé, qui est bref, est
garant, croyons-nous, d'un très bel avenir au profit de la
société québécoise.
La réalisation de cet avenir repose, pour l'essentiel - nous en
sommes conscients - sur nos propres efforts, sur les efforts des professeurs,
des étudiants, des chargés de cours, des cadres, des
employés. Cela repose également sur l'appui de notre fondation.
Mais nous croyons que vous voudrez bien persuader le gouvernement d'y apporter
sa
propre contribution. Je vous remercie, M. le Président.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. M. Corbo,
c'est Mme Adenot, j'imagine?
M. Goyette: Oui.
Mme Junca-Adenot (Florence): M. le Président, M. le
ministre, mesdames et messieurs les membres de la commission parlementaire, se
développer rapidement, comme vous venez de l'entendre, en maintenant
l'équilibre budgétaire au cours d'années de compressions,
tient peut-être du miracle de gestion. Cependant, l'appauvrissement
progressif qui en a résulté est un poids très lourd que
supporte injustement la communauté de l'UQAM, poids d'autant plus
injustifié que l'UQAM fait la preuve de son sous-financement depuis
plusieurs années et se fait promettre régulièrement un
réajustement de sa base financière.
Ce sont les thèmes de la justice et du sous-financement que je
vais essayer brièvement de vous présenter. Depuis huit ans,
l'UQAM réclame le réajustement de sa base financière que
tout le monde s'entend à trouver insuffisante. Vous avez entendu mes
collègues vous indiquer comment, en 17 ans, l'UQAM a réussi
à relever un triple défi: se développer aux trois cycles
d'études en recherche, répondre aux objectifs d'accroissement de
la scolarisation des francophones, tout en se dotant de plans de
développement systématiques. Malheureusement, ce défi,
l'UQAM a eu à le relever dans une période où les fonds
disponibles pour les universités décroissaient. Le financement
au-dessous de leur coût réel des nouveaux étudiants a
progressivement miné la base financière de l'UQAM. Nos
mémoires de 1984 et 1986 en font une démonstration
évidente et ils font des propositions réalistes que je reprendrai
en conclusion, en particulier celles concernant le secteur des sciences
administratives.
Faut-il rappeler que le ministère lui-même, comme le
Conseil des universités, considère que l'UQAM continue
d'être largement sous-financée et, dans son avis de
décembre 1985, le Conseil des universités recommandait de revoir
en priorité la base de financement de l'UQAM.
Rappelons quelques données générales. Vous avez vu,
dans le mémoire de la CREPUQ, que les dernières mesures
annoncées pour 1986-1987 produiront probablement un écart
négatif de 30 % pour les universités québécoises
par rapport à leurs collègues de l'Ontario. Que diriez-vous pour
l'UQAM qui, elle, reçoit 30 % moins de ressources que la moyenne des
universités québécoises? Notre président du conseil
d'administration a mentionné le per capita de l'UQAM, des autres
universités et celui des cégeps: l'UQAM, 4770 $, les autres
universités, 6942 $, les cégeps, 5118 $, des chiffres qui parlent
tout seuls. (15 h 45)
On peut estimer à 25 000 000 $ les sommes que l'UQAM devrait
recevoir pour disposer des mêmes ressources que les autres
universités. Aurions-nous dû choisir comme voie de nous faire
justice nous-mêmes et d'accuser un déficit annuel de cet ordre?
Quel est le prix pour l'UQAM de son sens de la responsabilité civique et
de l'espoir qu'elle a mis dans les promesses de réajustement financier
qui lui ont été faites? Ce prix est le suivant au chapitre du
fonctionnement. Au cours des sept dernières années, l'UQAM a
accueilli un tiers des clientèles additionnelles du Québec. Elle
a doublé en taille pendant que sa subvention en dollars constants
décroissait de 25 %. Force nous est de constater que le financement n'a
pas suivi. Pour maintenir l'équilibre budgétaire, l'UQAM a
dû couper et prendre des mesures qui rendent sa situation encore plus
précaire maintenant qu'au début de la période. Une
étude du ministère montrait qu'en 1984-1985 le ratio
d'étudiants équivalent temps complet par professeur atteignait
26,4 à l'UQAM. La moyenne des autres universités? 21,8, alors que
la limite reconnue par l'économiste américain Bowen est de
16.
En 1985-1986, 54 % de nos activités sont données par des
chargés de cours. En plus de ce recours aux chargés de cours,
l'UQAM a dû accroître de façon majeure la taille moyenne des
groupes cours. Â l'UQAM, le nombre d'étudiants par employé
est de 65 % supérieur aux autres universités. Le budget
d'acquisition des bibliothèques est de 80 $ alors que, dans les autres
universités, en 1983-1984, il était de 117 $. C'est d'autant plus
inquiétant que les bibliothèques québécoises font
figure de parent pauvre dans l'ensemble des universités canadiennes.
Mais c'est également vrai pour les autres fonctions: audiovisuel,
informatique, administration, terrains et bâtiments, dont les
dépenses de fonctionnement par étudiant équivalent temps
complet sont inférieures en 1985-1986 de 20 % à 34 % à
celles des autres universités. Faut-il donc alors s'étonner que
les files d'étudiants s'allongent devant les services, que les
techniciens manquent dans les laboratoires, que l'on coupe les abonnements aux
périodiques, qu'un professeur encadre jusqu'à 40 chargés
de cours, que la frustration s'accroisse chez les employés qui, pour la
majorité, ont bâti l'UQAM? Phénomène paralysant pour
une jeune université décidée à se développer
vigoureusement en recherche, études avancées et sciences
appliquées.
Le prix est encore plus coûteux au chapitre des espaces et des
budgets d'investissement. Comment passer sous silence un des effets les plus
pernicieux de
l'appauvrissement de l'UQAM au chapitre de son budget de fonctionnement?
Il s'agit de son sous-équipement en espaces. En 1985-1986, l'UQAM occupe
140 000 mètres carrés dont 58 000 loués un peu partout
à Montréal. Pour l'UQAM - et c'est paradoxal - le
sous-financement et le respect de l'équilibre budgétaire se
traduisent par une faiblesse correspondante au niveau des espaces
normalisés puisque les dépenses de fonctionnement
déterminent en grande partie la quantité d'espaces
autorisés. En clair, si nous faisions des déficits, nous aurions
droit à plus d'espaces.
La pauvreté de l'UQAM et le maintien de l'équilibre
budgétaire la conduisent à loger ses activités dans
beaucoup moins d'espaces que les autres universités - le rapport peut
être du simple au double - et à multiplier les
déménagements. Au cours des trois dernières années,
nous avons déménagé et réaménagé,
pour faire face à notre croissance, l'équivalent de la phase I du
campus, 52 000 mètres carrés nets. À titre d'exemple,
cette année, au pavillon des sciences, nous détruisons le salon
des étudiants qui est le dernier local utilisable pour construire un
laboratoire. Après, serons-nous obligés de refuser les
subventions de recherche obtenues par nos professeurs par manque d'espaces
convertibles en laboratoire? À la bibliothèque des sciences de
l'éducation - et vous me pardonnerez ces exemples - les responsables
envoient les livres vieux de plus de trois ans dans des dépôts
stockés dans des sous-sols, faute d'espace. Les étudiants mangent
debout ou assis par terre, faute de places assises aux
cafétérias. Les étudiants gradués disposent
rarement d'espaces de travail.
Le comble de tout cela, par manque d'argent, le ministère nous
autorise à louer de façon parcimonieuse des espaces et nous
contraint à payer une part grandissante des loyers à même
notre maigre budget de fonctionnement, ce qui n'est pas le cas des
universités logées dans des espaces en propriété.
En 1986-1987, cette année, nous évaluons à 2 800 000 $,
soit 2 % de notre budget annuel, la somme que nous devons ainsi absorber. Pour
finir, les enveloppes annuelles d'investissement qui permettent d'acheter les
équipements et d'aménager sont liées à la
quantité d'espaces autorisés. Donc, le retard de l'UQAM
s'accroît aussi à ce titre, ce qui forme l'équation
infernale: plus on a d'étudiants et de subventions de recherche, plus on
est pauvre; plus on est pauvre et responsable, moins on a d'argent pour
fonctionner; moins les dépenses de fonctionnement sont
élevées, moins on a d'espaces loués et en
propriété; moins on a d'espaces, moins on a d'argent pour acheter
des équipements et, quand on loue, on devient encore plus pauvre pour
faire fonctionner l'université. C'est cela que j'appelle
l'équation infernale.
En conclusion, je ferai un bref rappel des recommandations et des
demandes de l'UQAM. Vous les avez dans le mémoire de 1984 et dans celui
de 1986. Nous recommandons et nous demandons de hausser le niveau global des
ressources du réseau des universités québécoises,
de relever le plus rapidement possible la base de financement de l'UQAM pour
rejoindre la moyenne des universités québécoises en toute
justice, de réviser la formule de partage de nos subventions. Dans notre
mémoire de 1984, nous avons fait un certain nombre de recommandations
que nous espérons cons-tructives. En particulier, nous recommandons - et
nous rejoignons en cela les HEC dans leur mémoire - de redresser la
norme de financement du secteur des sciences administratives qui, pour
l'année 1981-1982, aurait dû être haussée de 1400 $
par ETC.
En ce qui concerne les loyers, le ministère devrait
reconnaître que le coût des loyers au centre-ville de
Montréal n'est pas le même qu'en province et ajuster sa norme en
conséquence. Tout comme Concordia, nous considérons que les
loyers devraient être remboursés au coût réel une
fois les baux acceptés par le ministère.
En contrepartie de cela, l'UQAM s'engage et s'est engagée dans
ses mémoires à: maintenir son équilibre budgétaire
grâce è une gestion rigoureuse et imaginative de ses ressources si
sa base financière est réajustée; poursuivre son effort de
développement, particulièrement en matière d'études
avancées, de recherche et de création; accroître par
elle-même son financement en matière de recherche et de
création; collaborer aux études sectorielles du Conseil des
universités et aux travaux du ministère de l'Enseignement
supérieur pour la mise en place de systèmes d'information tels
5IFU ou RECU, les devis pédagogiques et plans directeurs
d'aménagement, systèmes qui, assurant l'uniformité des
données, visent des objectifs certains de rationalité et
d'équité.
M. le Président, tel est sommairement brossé le tableau
d'une jeune université, coincée entre l'étranglement
financier et l'étiolement de ses missions, qui réclame seulement
ce qui lui revient en toute justice et qui ne voudrait pas avoir à
regretter le pari de gestion responsable qu'elle a fait.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Je reconnais
maintenant le ministre de l'Éducation, de l'Enseignement
supérieur et de la Science. M. le ministre.
M. Jolivet: Et de la Technologie.
M. Ryan: Oui, je vois que le député de Laviolette
ne veut pas que je sois responsable de la technologie.
M. Jolivet: On le voudrait.
Mme Blackburn: On n'est vraiment pas responsable du départ
de la Technologie.
M. Ryan: Merci. Je pense que vous conviendrez que ce n'est pas
dans le sujet de la discussion d'aujourd'hui.
Le Président (M. Parent, Sauvé):
Comme ce n'est pas dans le sujet de la discussion d'aujourd'hui, M. le
ministre, je vous invite à enchaîner.
M. Ryan: II me fait grandement plaisir, M. le Président,
de dire aux représentants de l'Université du Québec
à Montréal que j'ai écouté avec un vif
intérêt les éléments qu'ils nous ont
communiqués dans les trois textes dont ils viennent de nous donner
lecture. Je voudrais féliciter de manière particulière M.
Goyette qui, venant du milieu des affaires, consacre, à titre
complètement bénévole, j'en suis sûr, une bonne
partie de son temps et de son énergie à assurer, au point de vue
de la gestion, le bon fonctionnement de l'Université du Québec
à Montréal. Je pense que ses collègues apprécient
sûrement sa présence à leurs côtés
aujourd'hui. Je souhaite la bienvenue également au recteur de
l'Université du Québec à Montréal, M. Corbo, dont
c'est, je pense, la première rencontre publique avec nous depuis sa
nomination il y a quelques mois, ainsi qu'à Mme Adenot et aux autres
collaborateurs qui sont ici avec le groupe de l'Université du
Québec.
L'Université du Québec est un phénomène
inusité dans le développement de notre famille universitaire.
Lorsqu'elle a pris naissance à Montréal, ce fut dans un contexte
très spécial. C'est une université qui se
caractérisait par sa volonté de mettre l'accent sur
l'accessibilité. On faisait beaucoup de comparaisons, à
l'époque, avec un modèle qui existait du côté
anglophone et qui s'appelait encore, je crois, quand l'UQAM a été
fondée, l'Université Sir George Williams. On disait: II y a
longtemps que, du côté anglophone, l'accès aux
études universitaires est grandement facilité par une institution
qui offre des régimes de reconnaissance des acquis et d'assouplissement
des horaires pouvant convenir aux conditions particulières dans
lesquelles vivent les adultes soucieux de parfaire leurs connaissances.
L'Université du Québec à Montréal a fait
beaucoup pour mettre davantage la formation universitaire à la
portée des citoyens ordinaires, des milliers de citoyens qui, à
cause des mille et un défauts de notre système d'enseignement
passé ou de notre système économico-social, n'ont pas pu
connaître dès leur jeunesse le développement intellectuel
et académique auquel ils aspiraient. Je pense que c'est un actif
remarquable dont nous sommes tous redevables à l'Université du
Québec à Montréal. Le développement de l'UQAM s'est
fait, comme vous l'avez dit, M. le recteur, autour de six axes principaux: les
arts, la formation des maîtres, les sciences de la gestion, les sciences
humaines, les lettres et les sciences. Je constate qu'il y a des grands pans de
la réalité qui ne sont pas embrassés par ces six lignes de
force. Je pense qu'il était normal qu'il en fût ainsi parce que
nous ne pouvons pas reproduire sur toute la ligne, dans toutes les
universités ce qui se fait déjà dans l'une ou l'autre
d'entre elles. Il y a un minimum de cohésion et d'économie qui
s'impose dans le développement de nos universités. Je pense que
ce sont là des points extrêmement importants qu'il convenait de
souligner à l'occasion de la rencontre d'aujourd'hui et je le fais
très volontiers.
Vous avez mentionné, également, que le financement de
l'UQAM s'est fait à un niveau fortement inférieur à la
moyenne des autres universités. Il y a des différences
très importantes, évidemment. Je crois que nous sommes conscients
de ces différences. Il y a eu quelques ajustements au cours des
années passées, mais le problème qui se pose à
nous, c'est qu'il est impossible de procéder à des ajustements en
profondeur et durables tant qu'on n'aura pas réexaminé toute la
base de financement des universités.
Je me souviens que l'ancien gouvernement avait mis au point un nouveau
cadre de financement en 1984-1985. Ce cadre de financement prévoyait des
ajustements importants pour l'UQAM, en particulier. Il a fait l'objet de
contestations. Non, ce n'était pas pour l'UQAM. Je pense qu'il arrivait
à la conclusion que l'UQAM n'était pas sous-financée,
contrairement à ce qu'affirmait votre mémoire. Il concluait qu'il
y avait d'autres universités qui l'étaient. De toute
manière, vous l'avez contesté. Il a été
contesté par d'autres institutions. Finalement, il n'y a rien qui a pu
se faire et moi, je peux vous assurer que rien ne pourra se faire en fait de
modification du mode de financement tant que nous n'aurons pas trouvé le
moyen de hausser le niveau de financement parce qu'autrement ce serait prendre
dans la caisse d'une université qui s'estime sous-financée pour
le donner à une autre qui dit qu'elle l'est encore davantage.
Si on enlève à un pauvre pour le donner à un plus
pauvre, on appauvrit toute la société. Je crois qu'il y a un
réajustement de la base de financement et vous le dîtes dans votre
mémoire. Sur ce point, je voudrais tantôt que vous nous le disiez
bien explicitement pour qu'il n'y ait aucun doute là-dessus. Je pense
que c'est la condition préalable de toute amélioration dans le
sens que vous proposez.
Avant que nous allions plus loin, je vaudrais peut-être que vous
expliquiez davantage une affirmation qu'on trouve à la page 23 de votre
mémoire de base soumis à la commission. Là on est en face
de quatre textes. Il y a le mémoire de base, le texte de M. Goyette, le
texte de M. Corbo et le texte de Mme Junca-Adenot. On va essayer de partir du
texte de base pour les fins de la discussion. Vous dites à propos des
compressions: L'effet des compressions, "c'est un peu comme l'érosion
qui fait lentement son oeuvre et qui ne se traduit pas par des effets
immédiats. Le processus de dégradation de la fonction
universitaire s'installe progressivement au Québec. Ses effets sont
déjà visibles dans notre université, comme en
témoigne la nature des difficultés que nous rencontrons." (16
heures)
J'aimerais peut-être que vous expliquiez davantage ce que vous
voulez dire par ce processus d'érosion. Parce que le langage que vous
nous tenez, vous le comprenez facilement, est paradoxal. D'un
côté, vous nous dites: Notre histoire, c'est une histoire à
succès, c'est un "success story" considérable; nous étions
l'équivalent de 7295 étudiants à temps plein, 8871
à temps partiel il y a huit ans, en 1978-1979; aujourd'hui, ce total de
16 000, il est rendu à 35 000 et, en étudiants équivalence
temps complet, vous êtes passés de 10 700 à 21 000. On
regarde cela et on se dit: Les choses ont bien été, cela
progresse. Si cela avait été ainsi dans mon journal, quand je
dirigeais un journal, j'aurais été très fier. Cela montait
moins vite que cela.
Alors, d'un côté, beaucoup de succès; de l'autre,
vous nous dites qu'il y a un processus d'érosion. J'aimerais que vous
nous expliquiez clairement comment cela se fait. Est-ce que ce ne serait pas
attribuable, en partie, au fait que vous avez peut-être couru un peu trop
après les étudiants?
M. Goyette: Mme Adenot va tenter de dénouer ce
dilemme...
M. Ryan: Pardon?
M. Goyette: ...cette apparence de contradiction.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Mme Adenot.
Mme Junca-Adenot: Je vais essayer. L'érosion, elle existe
et elle est factuelle. Pour l'expliquer, il faut se reporter à la
façon dont les universités sont financées. Il y a une base
pour les dépenses de fonctionnement. Les bases actuelles n'ont jamais
été normalisées. Il y a des règles annuelles de
financement de fonctionnement qui financent les clientèles
additionnelles notamment et qui sont modifiées annuellement pour tenir
compte de l'indexation, des clientèles additionnelles, des nouveaux
programmes et de certains projets comme le financement de la
micro-informatique, des actions structurantes, etc.
Or, l'érosion, qu'est-ce que cela veut dire? Cela veut dire que
sous le joug, sous l'effet conjugué des compressions de budgets pas
suffisants pour financer les clientèles additionnelles, les sommes
d'argent qui se rajoutent chaque année pour faire face à la
croissance des activités ne sont pas suffisantes pour payer le
coût réel de ces activités, notamment des clientèles
étudiantes. Je pense qu'une démonstration a été
faite de façon excellente et on l'a reprise à l'UQAM; ce sont les
HEC qui l'ont faite dans leur mémoire. Et comme nous aussi, nous avons
connu de très fortes croissances, notamment dans le domaine des sciences
de la gestion, il y a une démonstration assez systématique qui
est faite et qui montre que, sous l'effet combiné pendant quatre ou cinq
ans de compressions, de prélèvements et d'ajouts de ressources
pour les clientèles additionnelles, cela fait qu'en net, au bout, on
recevait entre 1100 $ et 1200 $ nets par année par étudiant
équivalent temps complet. Qu'est-ce que cela permet de faire? Cela
permet juste de faire face à des dépenses de chargés de
cours, d'engagement de ces chargés de cours pour donner les cours et les
dépenses afférentes et puis un peu de dépenses au niveau
des employés de soutien requis. Alors, c'est le phénomène
d'érosion. Cela se fait année après année,
progressivement. C'est un peu aussi le sens de l'équation infernale dont
je parlais dans ma présentation.
Maintenant, est-ce que ce n'est pas -parce que vous l'avez aussi
évoqué - la course aux clientèles? Là, je laisserai
peut-être le recteur en parler. Je pense que la démonstration
financière fait que c'est le contraire: plus on a d'étudiants,
plus on s'appauvrit.
M. Ryan: Généralement...
Mme Junca-Adenot: Sauf que l'université...
M. Ryan: Je vais adresser une sous-question à M. Goyette,
je vois qu'il s'apprête à parler. Il sait très bien
qu'à la banque qu'il dirige, si des nouveaux clients coûtent trop
cher, il va se faire dire par ses administrateurs: Là, on est rendu
à un point de saturation, c'est mieux d'arrêter parce que
l'affaire va éclater.
M. Goyette: En fait, M. le ministre, un journal qui augmente son
tirage augmente ses revenus de deux sources. Il augmente ses revenus au poste
des abonnements et au
poste de la publicité, ce qui permet de demander plus cher la
ligne agate pour un plus grand tirage. À l'université, nos
étudiants additionnels, au cours des sept dernières
années, nous ont rapporté, si je peux me permettre cette
expression, en subvention un peu plus que 1000 $ par étudiant
additionnel. C'est clair et net qu'on n'a pas fait d'argent avec ces
étudiants additionnels qui sont entrés à
l'université. On souffre de notre popularité.
Le Président (M. Parent, Sauvé): M.
Corbo.
M. Corbo: Si vous le permettez, M. le Président, j'ai deux
ou trois réflexions sur la course aux étudiants. D'une part, les
étudiants ont voulu venir à l'UQAM. Nos enquêtes de relance
auprès des diplômés indiquent que, pour les trois quarts
d'entre eux, l'UQAM est l'université du premier choix.
Deuxièmement, tout au long de l'histoire de l'UQAM et dès 1981
dans le secteur des sciences de la gestion où il y avait une croissance
importante, nous avions établi des mécanismes soit de
régulation de la croissance, soit de contingentement: 40 % de nos
programmes sont contingentés. Troisièmement, on a donné
à l'UQAM une mission d'accessibilité et nous avons essayé
de recevoir les gens qui voulaient venir à l'université parce
qu'il y avait une demande de formation. Je n'aime pas beaucoup la notion de
course aux clientèles parce que les messages qui nous étaient
envoyés, c'était qu'il y avait du monde à former au
Québec et à Montréal et on a fait notre part pour
cela.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. M. le
ministre.
M. Ryan: J'aimerais que vous me donniez votre politique en
matière d'admission d'étudiants aux études de certificat.
L'Université du Québec à Montréal est connue en
particulier pour la grande popularité de ses programmes de certificat.
Ces programmes sont plus nombreux que tous les autres. Je voudrais d'abord
savoir quelle est la proportion. Disons que vous avez en tout 35 000 personnes
inscrites à des études à l'UQAM, combien y en a-t-il sur
cela qui sont inscrites à des programmes de certificat?
Deuxièmement, je voudrais vous demander quelle est la
réaction de l'UQAM devant les recommandations qu'a faites le Conseil des
universités au sujet des programmes de formation courte? Je pense que
chez vous les études de certificat, on peut les accumuler. Vous prenez
un certificat, vous en prenez deux. Je pense que, lorsqu'il y a une
accumulation successive de trois, là c'est considéré comme
l'équivalent d'un baccalauréat. Le Conseil des universités
a demandé que cela ne se fasse plus. Il a fait valoir qu'une formation
de baccalauréat, c'était plus qu'une accumulation de certificats.
J'aimerais connaître votre position sur toute cette question, qui est
l'une de celles que l'on pose le plus souvent en relation avec le
développement de l'UQAM.
M. Corbo: M. le Président, les certificats de l'UQAM sont
des programmes de 1er cycle qui font l'objet d'une approbation par les
instances de l'UQAM et par les instances de l'Université du
Québec avec recours à des experts externes. Ce sont des
programmes qui sont assujettis aux mêmes règlements que les
baccalauréats et ce sont des programmes pour lesquels les conditions
d'admission de base sont les mêmes que pour les baccalauréats.
Pour être admis dans un baccalauréat, il faut avoir un DEC
(diplôme d'études collégiales), avec ou sans concentration
dépendant de la nature du programme, ou avoir 22 ans et une
expérience professionnelle pertinente. Pour être admis dans un
certificat, il faut avoir, dans plusieurs cas, un DEC et dans plusieurs cas un
DEC avec une spécialisation au niveau du cycle d'études
collégiales, des cours nommément identifiés, ou il faut
avoir 22 ans. Donc, ce sont les mêmes conditions d'admission parce que ce
ne sont pas des programmes de deuxième catégorie. Non seulement
ce sont les mêmes conditions, d'admission mais je disais tantôt, M.
le Président, que 85 % des cours, les morceaux qui composent les
certificats font partie également de baccalauréats. Dans une
salle de cours donnée, on va trouver côte à côte un
étudiant qui est inscrit à un baccalauréat qui suit tel
cours d'administration et un étudiant qui est inscrit à un
certificat qui suit le même cours. Alors, il a le même bon ou
mauvais professeur, il a le même bon ou mauvais chargé de cours.
À cet égard, nous avons choisi d'intégrer la programmation
de certificats.
Les certificats peuvent conduire au grade de bachelier selon des
règles de cumul précises: ce n'est pas n'importe quel certificat
qui conduit à n'importe quel grade. Il y a des combinaisons possibles
qui conduisent à l'un ou l'autre des grades de bachelier. Nous faisons
en sorte que l'étudiant qui veut sortir, avoir son propre chemin vers le
grade de bachelier par cumul de certificats, fasse l'objet d'un examen
particulier. Autrement il y a des combinaisons possibles, Dans certains
secteurs, on a poussé cela extrêmement loin, en identifiant des
cours obligatoires qui doivent être faits dans l'un ou l'autre des trois
certificats. Je crois que le système qui conduit à un grade de
bachelier par cumul de certificats n'est pas un système
anarchique, c'est un système pensé. Une remarque
supplémentaire: dans les programmes de certificat, les étudiants
sont assujettis à la même réglementation et à la
même sanction graduée que dans les programmes de
baccalauréat.
Vous avez fait allusion à la position du Conseil des
universités sur les programmes courts. Le Conseil des universités
a commandé dans un premier temps un rapport à un groupe de
travail qui s'est montré extrêmement sévère à
l'égard de la formation courte. Le Conseil des universités a
procédé à un certain nombre de consultations. Les
universités ont eu l'occasion de faire valoir leur point de vue et,
finalement, le Conseil des universités a pris une position où il
se distinguait, il se démarquait même vis-à-vis du rapport
du groupe de travail. Certaines questions ont été
soulevées par le Conseil des universités et nous avons dit,
à l'UQAM, au Conseil des universités qu'on chercherait à
parfaire des choses dans notre système de certificats.
Premièrement, on allait s'interroger très soigneusement - et
c'est en cours - sur la présence de jeunes étudiants à
temps complet dans les certificats alors que nous pensons qu'ils devraient
être dans des baccalauréats puisqu'ils sont capables
d'étudier à temps complet. Nous allons nous interroger encore
davantage sur le mécanisme d'obtention d'un grade de bachelier par cumul
de certificats de façon que ce soit encore plus serré comme
cheminement.
Je veux vous signaler, M. le Président, que, contrairement aux
gens qui disent: Ahi un bac par cumul de certificats, c'est trois
premières années ajoutées l'une par-dessus l'autre, nous
avons constaté qu'environ 60 % de l'ensemble des cours qui figurent dans
les certificats de l'UQAM sont des cours qui, au niveau des
baccalauréats, se situent en deuxième, souvent en
troisième année. Donc, ce n'est pas une formation de
première année; ce ne sont pas trois premières
années ajoutées l'une à l'autre.
La dernière remarque que je veux faire, M. le Président,
sur les certificats, c'est que, oui, les certificats ont amené beaucoup
d'adultes à l'université, mais, quand on est adulte, en situation
de travail ou avec des responsabilités familiales, s'aligner pour
obtenir un baccalauréat en trois ans de formation à temps complet
ou en six, sept, huit ou neuf ans de formation à temps partiel, cela
demande un courage héroïque. La formation par certificats a
l'avantage de définir des programmes qui correspondent aux besoins de
clientèles particulières, ces clientèles mêmes qui
ne sont pas allées à l'université quand elles
étaient d'âge à y aller et auxquelles on assure un
rattrapage.
Donc, M. le Président, les programmes de certificats sont tout
à fait défendables et j'en veux pour preuve la dernière
position du Conseil des universités.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Je vous remercie,
M. Corbo, de nous avoir expliqué la valeur des certificats de
l'Université du Québec, mais ce que le ministre demandait, c'est
le nombre d'inscrits à un programme de certificat. L'avez-vous?
M. Corbo: 50 % des étudiants à temps partiel sont
dans des certificats.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Dans les
certificats, merci. M. le ministre.
M. Ryan: Une autre question. Vous parlez de vos besoins en
matière de développement. Vous dites que vous voulez ajouter des
développements significatifs en génie appliqué. J'aimerais
avoir des précisions là-dessus. Sur cette question-là, il
y a un problème plus général que je voudrais vous poser.
Chaque fois que nous rencontrons une université, elle nous laisse
entendre qu'elle veut avoir une grande liberté pour se développer
au 2e et au 3e cycle. Je suis porté à me demander jusqu'où
on peut aller dans cette direction. On ne peut pas avoir des
développements de 2e et de 3e cycle dans toutes les disciplines partout.
La question que je vous poserais brutalement: Si nous avions les moyens au
Québec, disons, d'avoir trois bons départements d'histoire, par
exemple, est-ce mieux d'en avoir trois bons ou six, ou huit, ou dix
médiocres? Comment va-t-on essayer de voir clair dans ces questions? Ce
sont des questions dures auxquelles il va falloir qu'on vienne à mesure
que nous avançons. J'aimerais que vous me disiez si on a
réellement besoin d'une autre école de génie
appliqué au Québec; on en a quatre présentement.
M. Corbo: M. le Président, sur les départements
d'histoire, je vous dirai, à ma conviction, qu'il y aurait
sûrement un des trois bons départements d'histoire qui serait
à l'UQAM. Sur le développement des programmes de doctorat,
l'Université du Québec...
M. Ryan: Je crois qu'on a plusieurs départements qui
vivotent actuellement dans l'une ou l'autre université, dans des
disciplines difficiles qui exigent une masse critique qu'on n'a point. Ce sont
les étudiants qui paient la note.
M. Corbo: M. le Président, il y a actuellement en cours
une opération d'évaluation sectorielle de tout ce qui se fait en
sciences sociales; c'est la troisième du genre après le
génie, les sciences de l'éducation, la formation des
maîtres. L'Université du Québec à Montréal
a
collaboré à ce jour à ce genre d'opération
et s'est engagée à continuer à collaborer parce qu'on
pense que c'est important.
Puis-je vous dire, M. le Président, qu'au mois de mai, puisque le
ministre évoquait l'histoire, nous avons reçu à l'UQAM le
comité qui fait l'étude sectorielle sur les sciences sociales,
qui venait nous présenter les disciplines, qui voulait étudier la
méthode de travail? Le département d'histoire de l'UQAM s'est
battu pour être intégré à l'étude et le
comité a refusé, mais cela est un autre problème. Nous
sommes prêts à faire des études de ce genre. (16 h 15)
Deuxièmement, sur le génie, M. le Président, nous
avons été très clairs et très précis en
cette matière. Nous croyons qu'il y a des domaines du génie qui
ne sont pas couverts actuellement par la gamme des programmes existants.
Nous sommes intéressés à l'Université du
Québec à Montréal à occuper un petit créneau
dans le domaine du génie, un créneau inoccupé - pas
à refaire l'École polytechnique - et on essaie de le faire
conjointement avec un autre établissement précisément pour
minimiser les coûts et éviter de faire du dédoublement. Si
ce n'est pas possible, ce ne sera pas possible, mais nous croyons qu'une
université de la taille de l'UQAM doit avoir une présence
minimale dans un domaine comme les sciences appliquées et comme le
génie.
Troisièmement, M. le Président, l'UQAM ne prétend
pas établir tous les doctorats. Nous avons fait un plan triennal et nous
y avons identifié un certain nombre de projets de doctorat. Mais ce qui
est important à noter, c'est que maintenant à chaque fois que
l'on présente un doctorat au Conseil des universités, il exige
que l'on précise le ou les créneaux dans lesquels les professeurs
sont qualifiés pour agir.
Nous ne demandons pas d'avoir un doctorat en linguistique omnibus. Nous
disons: En linguistique, on est bon dans tel ou tel domaine et c'est là
qu'on veut donner le doctorat. Le Conseil des universités l'a
accepté. Je souhaite, M. le Président, avec le même souci
d'équilibre du système universitaire québécois qui
inspire le ministre, qu'on fasse le tour des universités qui ont pu
établir des programmes de doctorat, avant que l'avis du Conseil des
universités ne soit requis, et qu'on voie si là aussi il ne
convient pas de faire en sorte que telle université ne donne du doctorat
en sciences politiques ou du doctorat en mathématiques que ce qu'elle
est capable d'assumer avec son équipe de recherche.
En ce sens, on va permettre d'établir des doctorats là
où on peut en établir et nous pensons qu'à l'UQAM, il y a
deux ou trois places où on peut en établir - le Conseil des
universités est d'accord avec nous - sans éparpiller les
ressources, en faisant en sorte que chaque université se centre sur ce
qu'elle est capable de faire.
En tout cas, nous, à I'UQAM, quand bien même on voudrait
établir des doctorats tous azimuts, nous passons
régulièrement au Conseil des universités et,
rassurez-vous, les exigences sont hautes, les créneaux sont
étroits et quand nous allons en chercher un au Conseil des
universités, nous pensons que nous sommes tombés sur quelque
chose où nous pouvons le faire.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. Corbo.
Je reconnais maintenant le porte-parole de l'Opposition en matière
d'enseignement supérieur et de la science, la députée de
Chicoutimi. Madame.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. le recteur,
madame et messieurs. Cela me fait plaisir de vous accueillir ici et d'avoir
reçu les informations touchant l'Université du Québec
à Montréal. Je pense que ça nous permet d'avoir une vision
un peu plus juste du sous-financement qui a été le vôtre au
cours des dernières années.
Probablement que quand le ministre reprendra la parole, comme il le fait
chaque fois, il dira que c'est aussi la faute du gouvernement
précédent, un peu comme il l'a dit tout à l'heure, sauf
qu'il s'est ajouté, par rapport à 1985-1986, une ponction de 34
0Q0 000 $.
Alors, avec la même ténacité qu'il met à me
rappeler qu'on avait commencé les coupures, j'ai le goût de lui
dire: Heureusement qu'on avait commencé avant. Qu'est-ce que ça
aurait été si on ne l'avait pas fait avant que vous arriviez,
alors que déjà malgré que nous ayons comprimé
considérablement, il estimait que vous en aviez encore probablement 34
000 000 $ de trop.
J'ai eu beaucoup de plaisir à lire la documentation qui est
volumineuse. Évidemment, l'ajout des quelques textes que vous nous
apportez en enrichit l'information. Je pense bien qu'il faut reconnaître
que l'UQAM a contribué beaucoup à la scolarisation des
francophones de même qu'aux services à la collectivité.
C'est dans votre mémoire que vous rappelez que le Conseil des
universités, dans un avis qu'il rendait récemment, encourageait
et invitait les autres universités à en faire autant. Cela
m'étonne un peu toujours quand on met les constituantes de
l'Université du Québec sur la défensive lorsqu'il
s'agît de planification, alors qu'on sait qu'il y a de nombreux
programmes de doctorat qui ont été créés quasi sans
autorisation et sans aucune évaluation.
Cela se passe toujours comme si on visait les dernières
universités, les plus fragiles, celles qui ont moins de moyens pour
se défendre. Malheureusement, en même temps, elles se
trouvent à être les moins financées. Ce sont elles qui ont
fait les plus grands efforts de rationalisation. Je pense que c'est important
de dire ça ici à la table de la commission pour que cela soit
entendu.
Cela ne se veut pas un jugement négatif à l'endroit des
autres universités, mais davantage contre une attitude qui semble
vouloir faire porter la responsabilité du sous-financement ou d'une
qualité moins grande de la formation toujours sur les universités
de création plus récente qui s'adonnent être les
universités du Québec.
Je dois dire que le sous-financement... Si on a plus de
difficultés à obtenir un consensus dans les universités,
il y en a au moins un qui a été fait dans toutes les
universités - j'ai rencontré différents recteurs - c'est
sur le niveau de financement de l'UQAM. Tout le monde reconnaît qu'il y a
là sous-financement. Alors, là-dessus au moins, on a
réussi à faire un consensus. Je dois dire que cela m'a
étonnée, mais on reconnaît cela. Je ne sais pas s'ils vous
le diront sur la place publique, mais dans une conversation privée, ils
l'admettent.
Si vous le permettez, je vais passer aux questions, car cela va nous
permettre d'avoir un éclairage additionnel à la fois sur vos
objectifs et votre planification. À la page 2 de votre mémoire -
et vous le reprenez un peu partout, à la conclusion de votre
mémoire en particulier - vous dites que vous prenez un certain nombre
d'engagements. Il faut dire que j'ai apprécié la lecture du
mémoire, en particulier parce qu'on pouvait y lire les moyens que vous
entendez mettre en place pour atteindre ces objectifs.
Quand même, je voudrais y revenir. Vous dites en parlant des
objectifs - mais là, je ne le retrouve pas dans le même
mémoire - on retrouve cela à la page 9, mais formulé
autrement: "renforcer la qualité de nos programmes, notamment de premier
cycle, en participant aux évaluations sectorielles au Conseil des
universités". Vous nous avez parlé de la tenue prochaine d'un
colloque. Est-ce que vous songez à des activités très
concrètes pour relever le niveau de diplomation? Je voudrais savoir quel
est l'état de la diplomation chez vous au premier cycle. Est-ce que vous
avez pensé à des actions concrètes visant à hausser
le niveau de diplomation? Pourriez-vous nous dire ce que le 50 %
d'étudiants à temps partiel qui sont au certificat veut dire
comparativement aux autres universités?
Le Président (M. Parent, Sauvé): M.
Corbo.
M. Corbo: M. le Président, nous avons réussi
à mettre en place une politique concernant le soutien et l'encadrement
des étudiants de deuxième et de troisième cycles qui sera
expérimentée au cours des prochaines années. Je pense que
là on a pris toute une panoplie de moyens pour que les étudiants
de deuxième et de troisième cycles finissent leur programme plus
rapidement et plus efficacement. De ce côté, le dossier est
clair.
En ce qui concerne le premier cycle, nous allons tenir - et je vous y
invite tous -un colloque à la fin d'octobre. C'est la première
fois depuis plusieurs années que, à l'UQAM, et même dans le
réseau UQ, on s'engage dans une réflexion sur le premier cycle.
Aujourd'hui, je ne serais pas honnête de vous dire que nous avons les
réponses à toutes les questions. Nous cherchons des
réponses aux questions. C'est très difficile d'arriver à
une position très précise dans l'immédiat, dans la mesure
où nous avons des clientèles hétérogènes au
premier cycle, des jeunes, des adultes, des gens en situation de travail, des
gens qui ne travaillent pas, mais beaucoup en situation de travail, dans la
mesure où les programmes n'ont pas les mêmes exigences et dans la
mesure où les départements qui fournissent les ressources aux
programmes ne sont pas également bien nantis.
Donc, c'est à travers un effort de réflexion collectif
qu'on va essayer d'identifier des moyens. Nous avons tout de même
posé certains gestes dans le passé. Nous avons mis au point un
instrument méthodologique qui en est rendu à sa troisième
édition et qui est un guide méthodologique pour les
étudiants. Nous avons inscrit au budget de l'université cette
année, de façon permanente, un budget modeste, un fonds de
développement pédagogique qui amène les professeurs
à soumettre des projets pour améliorer leur enseignement.
Ce sont autant de moyens... Encore une fois, je vous le dis, on commence
une réflexion sur la question, car on se rend compte que, une fois qu'on
a ouvert l'université à des clientèles diverses et
nouvelles, il faut assurer à ces clientèles le meilleur soutien.
Je ne pense pas qu'on puisse avoir des réponses universellement
identiques dans tous les programmes.
Il y a des principes qu'on essaie de mettre de l'avant comme, par
exemple, de dire aux départements: Vous savez, vos professeurs seniors,
ceux qui ont la plus riche expérience de la discipline, vous devriez
leur confier, même si ce n'est pas toujours très aisé, les
enseignements aux étudiants qui débutent leur programme, de
façon qu'ils soient très bien introduits à la discipline.
On essaie de faire en sorte que les étudiants soient mieux
conseillés quant à leur choix de cours. On procède
à des évaluations régulières de nos programmes.
Mais, c'est au cours des prochains mois qu'on va commencer à voir un peu
plus clair là-
dedans.
Mme Blackburn: Quel est votre taux de diplomation au premier
cycle? C'est un taux moyen évidemment.
M. Corbo: Le taux de diplomation dépend sans doute des
catégories d'étudiants. Il y a une déperdition
significative de l'ordre de 40 % à 50 % selon les programmes de
baccalauréat ou de certificat. Mais je ne pense pas que ce soient des
statistiques absolument uniques au Québec. Effectivement, il y alà une tâche d'encadrement à parfaire auprès des
étudiants.
Mme Blackburn: D'accord. Ce que je dis... Vous me permettrez de
faire une réflexion sur cette question. Il serait aussi
intéressant de s'assurer d'avoir un taux de rétention plus
élevé que de chercher de nouvelles clientèles quand on
parle de diplomation, d'échecs ou d'abandons.
Toujours au sujet de vos objectifs, vous vous engagez à
accroître votre financement en amplifiant la participation aux concours
des organismes subventionnaires publics, en développant des modes
nouveaux de collaboration avec l'entreprise et l'industrie. En raison de votre
profil, je me demandais avec quelle société commerciale ou
industrie l'UQAM a le plus de rapports et si vous deviez développer ces
secteurs? C'est votre troisième engagement. Est-ce que vous avez
identifié une action précise là-dessus?
M. Corbo: M. le Président, dans la composition des
disciplines de l'Université du Québec à Montréal,
nous avons comme position générale que toutes les disciplines
doivent pouvoir participer à des activités de recherche conjointe
ou de développement conjoint avec l'entreprise. Il est évident
que, dans certains cas, c'est moins immédiatement facile. Mais du
côté de l'informatique, du côté des sciences de la
gestion, il y a des possibilités de collaboration. L'absence
complète du domaine du génie nous prive justement de certaines
possibilités de collaboration avec l'industrie. Il y a des domaines qui
apparaissent relativement peu propices, mais on ne désespère pas.
Il y a des domaines, comme par exemple la chimie, les sciences de la terre et
la géologie où on a déjà des liens avec des
entreprises ou des organismes gouvernementaux pour des fonds de recherche en
particulier. Nous avons une politique institutionnelle qui encourage les
professeurs qui le désirent à participer à des
activités de recherche conjointe avec l'industrie. Nous sommes
présents au Centre de recherche informatique de Montréal qui
réunit les établissements universitaires et les grandes firmes
d'informatique de la région montréalaise. Nous avons
affecté à notre service de la recherche et de la création
une personne dont la tâche exclusive est de prospecter des contrats avec
l'industrie en faisant le lien entre le potentiel de recherche des professeurs
et les besoins des entreprises. Mais, ce qu'il est très important de
signaler, c'est qu'on ne devient pas du jour au lendemain un fournisseur de
services de recherche d'une entreprise. Il faut bâtir la base de
recherche dans l'université. Très souvent, les entreprises, avant
de vouloir signer un contrat de recherche avec un professeur ou une
équipe de professeurs de l'université, vont vérifier si
ces derniers ont eu un financement externe d'organismes comme, par exemple, le
CRSNG ou le Fonds FCAR. Je pense qu'il faut bâtir avec les ressources
universitaires dont nous disposons, mais la volonté est là et
l'intérêt des professeurs est croissant.
M. Goyette: Et les succès récents aussi semblent
indiquer qu'on est dans la bonne voie. M. Corbo soulignait tout à
l'heure le fait que les fonds obtenus de l'industrie et aussi pour fins de
recherche par des organismes subventionnaires de recherche ont doublé en
deux ans.
Mme Blackburn: M. le Président, parlant de collaboration
avec l'entreprise, le vice-président exécutif du Conseil du
patronat nous disait ce matin... C'est le président? Je croyais que
c'était le vice-président exécutif. M. Dufour - tout le
monde connaît M. Ghislain Dufour, on ne se trompera pas sur son titre -
nous disait ce matin que les entreprises dans leurs contrats de recherche avec
les universités payaient la totalité des frais indirects. J'ai
entendu des positions qui étaient plus nuancées par rapport
à cette pratique. Il y avait la recherche en commandite qui était
généralement payée en totalité. Mais je voudrais
savoir quelle est la pratique. Là, on parle beaucoup des organismes
subventionnaires qui ne le font pas mais, par rapport aux entreprises, est-ce
que, de façon générale, on peut dire quasiment dans tous
les cas, on paie aussi les frais indirects? (16 h 30)
Mme Junca-Adenot: Dans la plupart des cas et selon le type de
projet ou le type de contrat négocié, les coûts indirects
sont payés par l'organisme qui commandite en tout ou en partie. Il faut
se comprendre aussi sur la notion de coûts indirects. Il y a les
coûts directs de recherche ou de contrat, c'est-à-dire les
coûts nécessaires pour réaliser le contrat proprement dit,
il y a les coûts indirects qui sont constitués de deux parties:
une première partie qui concerne des coûts moins directement
rattachés aux projets de recherche mais qui sont des frais
généraux nécessaires pour réaliser le contrat, par
exemple l'utilisation du temps d'un agent d'administration ou l'utilisation du
temps des
services financiers; il y a d'autres types de coûts indirects qui
sont les coûts d'infrastructure, l'utilisation des locaux, etc. De
façon générale, on arrive à faire payer une partie
des coûts indirects, c'est-à-dire les coûts de la
première catégorie. À l'UQAM, on a une politique, M. Corbo
en parlait tout à l'heure... on s'est doté, il y a deux ans,
d'une politique des contrats et commandites incitatives pour amener les
différents groupes à aller chercher ce type de contrats dans la
mesure où c'est possible et où les disciplines dans lesquelles
ils oeuvrent permettent d'aller chercher ce type de contrats. Ces coûts
indirects sont, en grande partie, réutilisés à
l'intérieur de l'université pour faire de l'incitation pour
développer des subventions de recherche. Au fond, cela ne sera pas
utilisé directement pour payer les coûts indirects, mais c'est
réutilisé en grande partie à l'interne pour aider les
professeurs à aller chercher d'autres subventions de recherche. Donc, on
l'utilise comme facteur d'incitation, ce qu'on est capable d'aller facturer
comme coûts indirects, pour aller chercher ensuite d'autres subventions
de recherche plutôt que pour couvrir les coûts indirects
directement rattachés aux contrats.
Mme Blackburn: Pour avoir une idée un peu plus juste de ce
que cela peut représenter, selon les mémoires et les groupes
qu'on a entendus, les coûts indirects de la recherche peuvent
s'élever entre 35 % et 50 % du coût de la subvention. C'est ce
qu'on entend généralement. Cela dépend évidemment
de ce qu'on veut imputer aux activités de recherche, comme vous l'avez
expliqué tout à l'heure.
Quand vous avez un contrat de cet ordre-là, que ce soit en
contrat ou en commandite, quel pourcentage estimez-vous être porté
aux coûts indirects de la recherche?
Mme Junca-Adenot: 35 %.
Mme Blackburn: Chez vous, c'est 35 %. Et c'est variable?
Mme Junca-Adenot: C'est variable selon le projet.
Mme Blackburn: D'accord. Vous dites que ce ne sont pas tous les
contrats avec lesquels vous êtes capables d'avoir ces 35 %.
Mme Junca-Adenot: C'est cela.
Mme Blackburn: Donc, un examen un peu plus attentif nous
permettrait de voir qu'on subventionne un peu les entreprises.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Un instant!
Mme Blackburn: Vous pouvez toujours poursuivre et ensuite, on
passera à une autre question. J'avais toujours cru comprendre que
lorsqu'il s'agissait de contrats de recherche en contrat ou en commandite, la
totalité des frais indirects, comme le disait M. Dufour ce matin,
était incluse dans le contrat, alors que vous dites que ce n'est pas
toujours la réalité. Est-ce que cela ne constitue pas une
subvention indirecte à l'entreprise?
Mme Junca-Adenot: J'ai répondu de façon
générale à votre question pour l'ensemble de ce qu'on
appelle les contrats et commandites. Si on essaie de stratifier par groupes de
commanditaires, si je peux m'exprimer ainsi, de façon
générale, au niveau de l'entreprise on arrive à facturer
à peu près ce que cela nous coûte en termes de coûts
indirects. C'est plutôt au niveau des gouvernements qu'on a un peu plus
de mal à facturer et faire payer les coûts indirects.
Mme Blackburn: Quand je parlais des entreprises, je faisais
référence à la déclaration de M. Dufour de ce
matin.
Vous avez longuement parlé de la situation
particulièrement difficile vécue par l'université en
raison d'inéquité dans l'allocation des ressources et
compressions budgétaires. Cela me ramène à la question
suivante. Les journaux ont fait état de tensions internes entre votre
gros département, celui des sciences administratives, au sujet
précisément du partage de l'allocation des ressources entre les
différentes activités, et les différents
départements. D'ailleurs, dans le texte que nous a donné tout
à l'heure Mme Adenot, en page 9, vous recommandez entre autres de
redresser la norme de financement du secteur des sciences administratives au
niveau moyen des disciplines lettres et sciences humaines. La question que je
me posais était la suivante: Comment sont établies les
règles d'allocation entre les différents départements?
Est-ce que vous avez prévu un certain nombre de moyens pour, j'allais
dire, diminuer les tensions ou répondre davantage aux demandes de votre
département de sciences administratives?
M. Goyette: Peut-être que Mme Adenot pourrait prendre la
première partie et M. Corbo terminer sur la deuxième.
Mme Blackburn: Très bien.
Mme Junca-Adenot: Je vais laisser le recteur répondre plus
spécifiquement aux questions concernant le département de
sciences administratives. Je vais intervenir plutôt sur de l'information
sur notre planification interne. Tout d'abord, quand on a peu d'argent à
distribuer, qu'on a peu d'argent pour le développement, on est
obligé, si on ne fait pas de déficit, de vivre avec ce
type de contrainte. Je l'ai expliqué tout à l'heure. J'ai pris un
exemple illustrant la discipline administration. Cela peut s'appliquer aussi
ailleurs, dans tous les secteurs qui étaient en développement au
cours des dernières années.
Nous avons introduit à l'UQAM, depuis maintenant trois ans, un
système de planification des ressources et activités, qui nous
amène à établir des priorités annuelles
conformément à nos plans triennaux, qui nous amène
à demander aux différents groupes de préparer un budget en
fonction des activités qui sont prévues et qui est un mixte entre
un budget à base zéro qu'il était au départ et un
budget par activité. Chaque année, lors du processus de
préparation des budgets, nous passons à travers l'ensemble des
activités de l'université pour retenir en priorité celles
qui sont conformes aux priorités qu'on s'est données pour
l'année.
Nous faisons la même opération pour toute décision
qui a des incidences budgétaires, des incidences sur les ressources. Par
exemple, un nouveau programme, une révision de programme qui a des
incidences et qui déclenche ce qu'on appelle des coûts marginaux
un peu importants est évalué, et nous n'ouvrons le programme
donnant suite à l'implantation que si nous sommes capables de mettre un
minimum de ressources. Mais tout cela c'est dans un environnement de contrainte
où, quand on a 30 % de moins d'argent que les autres universités,
les marges de manoeuvre sont pratiquement inexistantes.
Avant de passer la parole au recteur, je voudrais revenir aux
commentaires que nous faisions en 1984 dans notre mémoire et qui
explique peut-être, qui est peut-être un autre volet de
réponse.
Dans nos commentaires sur les modifications peut-être à
apporter à la formule de financement telle qu'elle a été
proposée en 1984, l'un portait sur la façon dont la base de la
formule était établie. Cette base était la suivante:
L'année 1981 était prise comme une année
photographiée où on évaluait les coûts moyens
observés dans chacune des disciplines dans l'ensemble des
universités. Cela servait de base à la fois pour établir
la position relative des universités, celles qui étaient
sous-financée ou surfinancée, mais aussi, ultérieurement,
pour financer les clientèles additionnelles dans ces mêmes
secteurs. Or, il y a eu une distorsion que l'on a notée en 1984 et qui
est la même pour toutes les universités, En prenant l'année
1981 comme photographie, dans le cas des sciences de la gestion, c'était
une année où les sciences de la gestion étaient en pleine
explosion, en pleine croissance, les clientèles augmentaient beaucoup et
les ressources humaines, notamment professorales, n'étaient pas encore
entrées dans les universités. Si bien que le coût moyen se
trouvait évidemment sous-évalué et cela s'est
transporté dans le temps. C'est ce qui explique la recommandation que
nous faisions dans le mémoire de 1984 et que nous reprenons dans le
mémoire de 1986 et que vous allez sans doute retrouver dans les
mémoires des autres universités probablement, qui ont dû le
noter aussi.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Bien madame. M.
Corbo, vous voulez compléter?
M. Corbo: Le Département de sciences administratives de
l'UQAM a posé publiquement un problème important qui fera l'objet
de discussions à l'intérieur de l'université. Il me
paraît toutefois utile de vous signaler que dans la Presse du 25
septembre dernier, donc, dans les jours où le Département de
sciences administratives a rendu public un certain nombre de commentaires qu'il
avait a formuler, on lit à la page B-8, un article qui s'intitule comme
suit: "Les facultés d'administration réclament davantage
d'argent". Alors, le mal est général. Et, de l'autre
côté de la page, il y a une citation qu'on impute à M.
Jacques L'Écuyer: "Mais elles ne doivent pas devenir des écoles
autonomes". Alors, il y a un problème qui est posé par un
département. Cela intéresse l'ensemble de la collectivité
de l'UQAM. C'est un problème que nous allons regarder attentivement et
rapidement dans l'avenir.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Alors, merci.
J'invite maintenant la députée de Chicoutimi à conclure au
nom de sa formation politique.
Mme Blackburn: Peut-être que je prendrai deux minutes de
mon temps pour vous demander des corrections à la base des règles
d'allocation des ressources de financement. Si on tient compte de cette
recommandation touchant à un redressement par rapport au
département des sciences administratives, dans l'ensemble, qu'est-ce
qu'un redressement pourrait dire? Vous dites que c'est 25 000 000 $ qu'il
manque dans l'enveloppe de l'UQAM annuellement, si on voulait seulement
être financé au même niveau que les autres? Dans
l'hypothèse où il y aurait un redressement, cela voudrait dire un
ajout de combien dans l'enveloppe de i'UQAM?
Le Président (M. Parent, Sauvé):
Madame.
Mme Junca-Adenot: Nous avons évalué
grossièrement à 25 000 000 $ les ressources qui nous manquent
à l'intérieur de l'université pour rejoindre la moyenne,
en bas de la moyenne, des universités comparables
au Québec. 25 000 000 $, c'est justifiable avec des
données plus quantitatives et c'est pour l'ensemble de l'UQAM.
Mme Blackburn: Au nom de ma formation politique, je voudrais vous
remercier d'être venus nous présenter votre point de vue à
cette commission. La qualité de votre mémoire et l'importance des
remarques que vous nous avez faites devraient permettre, tout à l'heure,
dans quelques mois, au ministre de l'Enseignement supérieur et de la
Science de prendre des décisions plus éclairées quant
à l'avenir des universités. Comme toutes les autres, vous avez
insisté sur l'importance des universités et sur leur râle
dans le développement économique et social du Québec.
J'aimerais ajouter que le rôle ou la mission particulière
qui vous avait été donnée de hausser la scolarisation des
francophones au Québec, je pense bien que malgré des conditions
particulièrement difficiles, vous avez connu une performance fort
intéressante. Il demeure quand même des questions qui sont
préoccupantes, je pense, et qu'il faudra poser de façon
très claire; c'est toute la question de la diplomation au premier cycle,
des taux d'abandon, des taux d'échec et des conditions qui vous
permettent d'assurer une bonne qualité dans la prestation de vos
services. Quand je lis votre mémoire - j'ai trouvé cela quasiment
effarant - vous dites que les activités d'enseignement sont
assurées par des chargés de cours dans 54 % des cas. Cela peut
aller, mais là où j'ai trouvé que c'était assez
étonnant, pour ne pas dire inquiétant, c'est qu'un professeur
encadrait jusqu'à 40 chargés de cours. Alors, de là
à parler de l'encadrement des étudiants, puis d'un encadrement
qui permet un peu de voir ou de prévoir certaines de leurs
difficultés, il me semble qu'il y a quelque chose là qui devrait
nous préoccuper.
Écoutez, je voudrais vous remercier à nouveau de votre
participation et souhaiter que les conditions qui vous seront faites dans les
prochaines années permettront à l'Université du
Québec à Montréal de poursuivre la mission
d'accessibilité de services à la collectivité. Merci.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, Mme la
députée de Chicoutimi. Je reconnais maintenant le ministre de
l'Enseignement supérieur et de la Science.
M. Ryan: M. le Président, avant de conclure, je voudrais
adresser une dernière question à la délégation de
l'UQAM. Dans sa deuxième recommandation, à la page 46 du
mémoire de l'université, l'UQAM estime que le ministère de
l'Enseignement supérieur et de la Science devrait hausser le niveau des
subventions au réseau des universités québécoises
afin d'arrêter la détérioration du système
d'enseignement supérieur. Nous avons omis de vous demander
jusqu'à maintenant: Où suggérez-vous que le gouvernement
trouve cet argent?
Le Président (M. Parent, Sauvé): Alors, qui veut
répondre, M. Goyette, de votre équipe? Le grand argentier?(16 h 45)
M. Goyette: Bien entendu, le gouvernement a ses propres
problèmes d'allocation des ressources parmi tous les ministères
qui demandent son aide. En réponse à la question du ministre, je
voudrais souligner que le niveau d'imposition en ce qui concerne certaines
catégories d'impôt est déjà passablement
élevé par rapport aux provinces avec lesquelles nous sommes en
concurrence, si l'on peut dire. Par conséquent, je crois que c'est
peut-être plus du côté d'une réallocation des
ressources que d'une augmentation du niveau fiscal, si je peux me permettre un
commentaire personnel sur cette question.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. Goyette.
J'invite le ministre à conclure.
M. Ryan: Sur la question des frais de scolarité vous
n'avez pas dit un mot dans votre mémoire. Est-ce que c'est à
dessein? Est-ce parce que vous n'avez pas d'opinion sur cela ou que vous ne
voulez pas en exprimer ici?
M. Goyette: C'est à dessein que nous avons
décidé de ne pas parler de cette question. Nous avons conclu que
le gouvernement, qui avait imposé ce gel des frais de scolarité
il y a déjà plus de 15 ans, 16 ou 17 ans en fait, a
décidé à plusieurs reprises au cours de ces années
de poursuivre dans cette politique de gel des frais de scolarité et que
par conséquent il appartenait au gouvernement de traiter de cette
question. C'est pourquoi nous avons décidé lors de la
préparation du mémoire de l'Université du Québec
à Montréal de ne pas en parler.
M. Ryan: Alors, il me reste à tirer des conclusions.
J'aurais aimé que ce fut plus clair sur ce point. Nous avons d'autres
témoignages, évidemment. Je voudrais vous remercier des
renseignements que vous nous avez apportés sur le fonctionnement de
l'UQAM, sur sa situation particulière et sa contribution au
développement de l'enseignement universitaire au Québec. Il nous
faudra d'abord, au gouvernement, trancher la question du niveau du financement
des universités. Je crois que c'est la question qui se dégage
comme, peut-être, la plus brûlante de toutes celles qui ont
été posées devant cette commission parlementaire
jusqu'à ce jour. En deuxième lieu, il faudra décider
du
mode de partage des ressources mises à la disposition des
universités par la collectivité. Je peux vous assurer que,
lorsque cette deuxième démarche devra être faite, nous
examinerons avec une attention particulière les problèmes que
vous nous avez soumis en ce qui touche la part réservée à
l'Université du Québec à Montréal. Je crois que
vous avez étayé le problème d'une manière claire.
Il y aura d'autres précisions qu'il faudra obtenir, évidemment,
mais je peux vous assurer que nous avons bien noté cette dimension de la
présentation que vous avez faite aujourd'hui. J'espère
qu'ensemble nous allons pouvoir mettre au point des solutions. Je vous
remercie.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. le
ministre. Merci, M. le président, M. le recteur et Mme la vice-rectrice.
La commission parlementaire de l'éducation suspend ses travaux pour
quelques minutes et nous reprendons nos auditions avec le Regroupement
régional pour le développement des services universitaires sur la
Côte-Nord.
(Suspension de la séance à 16 h 48)
(Reprise à 16 h 56)
Le Président (M. Parent, Sauvé): La commission
permanente de l'éducation a repris ses travaux. Nous accueillons le
Regroupement régional pour le développement des services
universitaires sur la Côte-Nord dont le porte-parole est le
président, M. Claude Boisjoli. Bienvenue, M. Boisjoli. Il nous fait
plaisir de vous accueillir à cette commission parlementaire et de vous
remercier aussi d'avoir répondu à l'invitation des membres de la
commission de venir nous aider dans notre recherche dans le cadre de
l'étude qu'on nous a demandé de faire sur l'orientation et le
financement du réseau universitaire québécois.
M. Boisjoli, la commission a prévu d'accorder une heure à
votre organisation. C'est donc dire que nous suspendrons nos travaux vers 17 h
55.
La première partie sera consacrée à l'exposé
de votre mémoire que les membres ont déjà lu. Si vous
voulez le lire, vous pouvez le faire et si vous voulez en faire un
résumé, libre à vous. Le reste du temps sera
réparti également entre les deux formations politiques à
l'occasion d'un dialogue qui s'établira entre vous, les gens qui vous
accompagnent et les membres de la commission. On veut que vous vous sentiez
bien à l'aise, c'est une rencontre sur laquelle nous comptons beaucoup
et nous avons besoin de toute l'information possible.
M. Boisjoli, si vous voulez bien nous présenter les gens qui vous
accompagnent et enchaîner avec votre présentation.
Regroupement régional pour le
développement des services universitaires sur
la Côte-Nord
M. Boisjoli (Claude): Très bien, M. le Président.
Vous avez à ma droite, Mme Ginette Tremblay qui est membre du conseil
d'administration du regroupement; à ma gauche immédiate, M.
Gaétan Gauthier et M. Nepveu qui sont aussi tous deux membres du conseil
d'administration du regroupement.
Le Président (M. Parent, Sauvé):
Bienvenue.
M. Boisjoli: Je voudrais vous souligner au départ que nous
allons lire le mémoire; il n'est pas tellement long et cela nous permet
de faire un tour rapide de la situation. Je voudrais vous indiquer aussi au
départ que nous sommes tous des gens qui travaillons
bénévolement dans ce regroupement.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci.
M. Boisjoli: La Côte-Nord étant la seule
région du Québec à ne pas être dotée d'une
structure universitaire autonome, vous comprendrez facilement que sa population
désire se faire entendre, particulièrement à l'occasion de
cette commission parlementaire qui traite des orientations et du cadre de
financement du réseau universitaire québécois pour les
années à venir.
En effet, les citoyens de la région comprendraient fort mal que
nos parlementaires prennent le temps d'écouter, d'étudier,
d'analyser et de commenter des mémoires pour enfin formuler des
recommandations sans qu'une voix, d'aussi loin qu'elle vienne du Québec,
de la Côte-Nord puisse être, elle aussi, entendue,
étudiée, commentée et retenue pour que les
nord-côtiers puissent dire qu'ils sont considérés comme des
citoyens du Québec à part entière.
Disons tout de suite que nous sommes conscients de ne pas
répondre complètement aux grands objectifs de cette commission.
Nous n'avons tout simplement pas les ressources spécialisées qui
sont généralement nécessaires à la
préparation d'un tel mémoire.
Qu'à cela ne tienne, tout Québécois que nous
sommes, nous vous ferons part de nos besoins, le plus simplement et humblement
du monde. Puissiez-vous recevoir nos propos dans le même esprit et y
référer dans les grandes orientations qui se dégageront de
ces travaux.
Quant à l'organisme que nous représentons, le Regroupement
régional pour le développement des services universitaires sur la
Côte-Nord, qu'il suffise de signaler pour le moment, que les appuis que
nous recevons de partout en région nous
permettent de parler haut et fort au nom de la Côte-Nord à
cette commission.
En tout cas, ces appuis nous habilitent à exiger de notre
gouvernement que la Côte-Nord soit considérée au même
titre que les autres régions du Québec et qu'au moment de parler
des orientations et du financement du réseau universitaire
québécois, il soit tout aussi opportun de réfléchir
sur le fait qu'encore aujourd'hui notre région ne dispose pas d'une
structure universitaire autonome, situation qui nécessitera des
solutions à plus □u moins brève échéance.
Les informations qui suivront se présentent comme un rapide tour
d'horizon des problèmes et besoins auxquels nous joindrons quelques
hypothèses de solutions. (17 heures)
Au printemps 1985, sous l'impulsion de la Conférence
administrative régionale, un comité provisoire d'administrateurs
régionaux était formé. Son mandat principal: confirmer,
chiffres et faits à l'appui, ce qu'individus et organismes
déploraient depuis quelques années, soit la
médiocrité des services universitaires offerts aux citoyens de la
région, qui plus est, par des centres universitaires hors
région.
Quelques mois plus tard, à l'été 1985, une
étude établissant "La problématique globale des services
universitaires dans la région Côte-Nord" confirmait que la
population avait raison de décrier les services. Des exemplaires de
cette étude vous ont d'ailleurs été transmis avec ce
mémoire.
Cette étude fut l'élément déclencheur,
à l'automne 1985, de la formation du regroupement, ses principaux
objectifs étant de promouvoir, de coordonner et de concerter les actions
des différents intervenants de la région, particulièrement
en ce qui concerne le développement des différentes fonctions
universitaires: l'enseignement, la recherche, les services à la
collectivité et la promotion collective.
Enfin, vous nous permettrez d'insister encore sur le caractère
véritablement régional de notre organisme, puisqu'il rallie
à sa cause les individus et les organismes, d'où qu'ils originent
de la Côte-Nord, qu'ils oeuvrent dans l'entreprise privée,
parapubli-que ou publique.
La problématique des services universitaires sur la
Côte-Nord en regard des caractéristiques régionales. Une
population dispersée. Bien qu'environ 50 % de la population soit
répartie entre les villes de Baie-Comeau, de Sept-Îles et de
Port-Cartier, le reste est disséminé dans près d'une
quarantaine de localités de moins de 5000 personnes. C'est une
population jeune: près de 40 % de la population de la Côte-Nord a
moins de 20 ans, comparativement à la moyenne nationale de 31 % et sept
nord-côtiers sur dix ont moins de 35 ans.
Un taux de roulement élevé de sa main-d'oeuvre
spécialisée. Les difficultés pour recruter du personnel
qualifié sont notoires dans la région, notamment dans les
domaines de la santé et des services publics.
Un niveau de formation universitaire peu élevé. Seulement
22,5 % des 25-45 ans ont atteint un niveau universitaire comparativement
à la moyenne nationale qui atteint 40 %.
Une clientèle universitaire potentielle grandissante. Pour
être convaincu de l'existence d'une clientèle universitaire
réelle et potentielle, il suffit de rappeler la jeunesse de la
population nord-côtière et de souligner l'accroissement
marqué du nombre d'étudiants réguliers du collégial
inscrits en deuxième année, secteur général,
étudiants qui forment la clientèle potentielle de base d'une
université. Dans notre région, ce sont autant de jeunes qui
devront s'expatrier pour entreprendre des études universitaires.
L'importance de la clientèle adulte dans les cégeps de
Baie-Comeau et de Sept-îles était d'environ 1400 entre 1982 et
1984. Il y a un grand nombre d'adultes inscrits à des cours
universitaires à temps partiel et ce, malgré une offre
limitée de cours. Il y a également les demandes pour la mise sur
pied d'un nouveau programme universitaire.
En regard des fonctions attribuées à l'université:
la fonction enseignement. L'enseignement universitaire vise
généralement deux types de clientèles: les
étudiants issus des cégeps et les étudiants adultes issus
de divers milieux. Or, dans la région de la Côte-Nord,
l'enseignement universitaire se résume à la formation à
temps partiel pour les adultes dispensée principalement par deux
constituantes de l'Université du Québec qui se partagent le
territoire. Cet enseignement s'inscrit dans une perspective d'éducation
permanente.
En effet, il n'existe actuellement aucune facilité permettant aux
jeunes et aux adultes de la région de s'inscrire à temps plein
dans un programme universitaire sans s'expatrier. De même, aucune
formation universitaire générale n'est accessible.
Quant à l'enseignement aux adultes, l'offre de cours ne
répond pas à toutes les demandes. Des besoins sont insatisfaits
du côté de la formation des maîtres et
l'impossibilité pour les professionnels et cadres des diverses
entreprises et organismes régionaux de se perfectionner dans la
région constitue une barrière importante à
l'amélioration de leurs connaissances. Un certain nombre d'entre eux,
pour ne pas dire beaucoup d'entre eux, choisissent d'ailleurs de quitter la
région pour accéder à des études plus
avancées.
La fonction recherche. La recherche est considérée comme
un des outils fondamentaux du développement d'une région. On dit
que l'université joue un rôle majeur
dans le développement de la recherche et qu'elle constitue sa
mission de base, avec l'enseignement. On dit aussi que l'université sise
en région possède des atouts particuliers pour entreprendre
l'étude de problèmes régionaux.
Or, notre région est celle où s'effectue le moins de
recherche universitaire: moins de 1 % des budgets de recherche des
constituantes de l'Université du Québec, Les organismes qui ont
besoin de faire effectuer des recherches doivent généralement
faire appel à des chercheurs de l'extérieur. Les retombées
régionales de ces recherches sont généralement
négligeables.
Les fonctions services à la collectivité et promotions
collectives. En plus d'offrir certains services publics, l'université
joue un rôle d'animation et de support à l'action. Elle devient
également un pouvoir d'interrogation, d'examen, de jugement critique
suscitant des débats et des échanges d'idées desquels
peuvent émerger des suggestions nouvelles pour la région.
Le Conseil supérieur de l'éducation reconnaissait en 1981
l'importance incontestable d'une université pour le milieu, surtout dans
les régions périphériques où elle est
appelée à jouer un rôle de suppléance majeur.
Malgré l'implication de quelques universités dans la
région, principalement l'Université du Québec à
Chicoutimi et l'Université du Québec à Rimouski, les
fonctions de services à la collectivité et de promotion
collective sont inexistantes. On constate donc qu'une seule des fonctions
dévolues aux universités revêt une "certaine" importance,
soit l'enseignement.
Je passe immédiatement aux principales constatations et
recommandations. Nous vous avons exposé rapidement la situation qui
prévaut sur la Côte-Nord, situation que l'on peut
caractériser d'unique au Québec. Vous retiendrez que des
individus de cette région se sont regroupés en poursuivant
l'objectif d'améliorer les services universitaires sur la
Côte-Nord et que différentes actions ont été
réalisées à ce jour.
C'est dans ce contexte que le Regroupement pour te développement
des services universitaires sur la Côte-Nord formule les demandes
suivantes: Considérant que la Côte-Nord est la seule région
du Québec qui n'a pas de structure universitaire autonome; que la
Côte-Nord a des besoins importants de formation qui restent insatisfaits;
que les besoins de formation, de recherche et de support au
développement régional sont méconnus des deux
constituantes qui, pourtant, desservent leur partie de la région depuis
environ dix ans; que, de l'aveu même des responsables de ces deux
constituantes de l'Université du Québec, la Côte-Nord a peu
d'espoir de voir s'accroître les services dispensés par celles- ci
à court terme; que les universités québécoises sont
aux prises avec des problèmes sérieux de financement auxquels
n'échappent pas l'Université du Québec è Chicoutimi
et l'Université du Québec è Rimouski, nous demandons
à cette commission qu'elle reconnaisse la situation de
sous-développement de la Côte-Nord en ce qui a trait à
l'accessibilité des services universitaires; qu'elle reconnaisse que les
citoyens de la Côte-Nord sont dans une situation d'inéquité
par rapport aux autres citoyens du Québec et qu'elle déclare
prioritaire la nécessité de compléter le réseau des
services universitaires québécois de façon à
desservir véritablement la population de la Côte-Nord.
Considérant que le développement des services
universitaires repose sur l'expression de la volonté du milieu et la
prise en charge régionale, ce qui s'est traduit dans notre région
par la création du regroupement; que la formule à implanter dans
la région Côte-Nord devra être originale, nouvelle et
adaptée aux caractéristiques régionales; que les
modalités de financement actuelles des services universitaires ne
semblent pas suffisamment souples pour permettre l'émergence d'une telle
formule; que le regroupement ne dispose pas de l'ensemble des ressources
professionnelles et financières nécessaires è la
conception et à l'implantation d'une structure universitaire
adaptée à la Côte-Nord; que le développement des
services universitaires dans la région Côte-Nord repose
également sur une volonté politique, nous demandons è
cette commission qu'elle reconnaisse la nécessité d'implanter un
modèle particulier de services universitaires pour que les citoyens de
la Côte-Nord aient accès à des services adéquats;
qu'elle demande au gouvernement de s'associer au regroupement dans
l'élaboration et l'implantation de ce modèle et qu'elle propose
au gouvernement des mécanismes souples de financement permettant
l'implantation du modèle qui sera retenu.
En conclusion, nous ne pouvons terminer ce mémoire sans vous
rappeler la nécessité et l'urgence, pour la population
nord-côtière, d'avoir accès à des services
universitaires adéquats, d'autant que, dans les autres régions du
Québec, nous observons des impacts majeurs parmi lesquels nous retenons:
le relèvement du niveau moyen de scolarité et de connaissance de
la population; un élément important de rétention de
l'exode des "cerveaux"; le recrutement plus facile de professionnels et de
cadres par les industries en place et par les divers organismes des secteurs
publics et parapublics; l'organisation d'événements
régionaux susceptibles de consolider une identité
régionale et d'entraîner des retombées économiques
plus importantes pour la région; la création
d'activités et de centres de recherche en relation avec la
réalité régionale et susceptible de développer une
économie plus diversifiée; le développement des secteurs
d'activité dans lesquels la région possède des atouts; la
création d'emplois et, finalement, l'impact positif sur la
qualité et la quantité de l'ensemble des services offerts dans
une région.
Nous estimons que la Côte-Nord est en droit, elle aussi, de
s'attendre à profiter de ces retombées sociales et
économiques. Conscients que les recommandations de la commission quant
à l'orientation du système universitaire québécois
risquent de toucher les grandes fonctions généralement
attribuées à l'université, à savoir l'enseignement,
la recherche et les services à la collectivité, nous soulignons
à cette commission que la Côte-Nord n'a pas encore
bénéficié des retombées de ces fonctions et qu'il
nous apparaît important de les maintenir comme élément
essentiel des services universitaires, sans quoi nous risquons de demeurer en
situation de sous-développement par rapport aux autres régions du
Québec. Que ces fonctions et leurs impacts deviennent visibles par le
biais de services universitaires qui conviennent aux caractéristiques et
aux besoins régionaux, voilà le défi de chacun d'entre
nous. Notre organisme est prêt à y travailler. En sera-t-il de
même pour notre gouvernement?
Le Président (M. Hamel): Merci, M. le Président, de
nous avoir brièvement résumé votre mémoire. Cela
nous permettra d'échanger des points de vue plus longuement avec vous.
Je reconnais maintenant M. le ministre de l'Enseignement supérieur et de
la Science.
M. Ryan: M. le Président, il nous est agréable de
saluer la présence parmi nous de la délégation qui nous
est venue de la Côte-Nord du Québec sous la présidence de
M. Claude Boisjoli. Je voudrais tout d'abord féliciter M. Boisjoli et
les personnes qui l'accompagnent du sens social dont ils font montre en
s'intéressant au développement des services universitaires sur la
Côte-Nord, Souvent, on peut être tenté de tirer son
épingle du jeu soi-même sur une base individuelle. Je pense que
chacun de vous serait capable de le faire et n'en avait peut-être pas
besoin. Je ne vous connais pas d'une manière détaillée
mais que vous vous soyez regroupés pour chercher l'amélioration
des conditions de vie collective dans votre région, en particulier en
matière d'enseignement postsecondaire, vous méritez d'en
être félicités. Je vous dis que cela m'inspire une vive
admiration.
Vous avez bien signalé en conclusion de votre mémoire les
conséquences bienfaisantes qu'engendre dans une région la
présence d'un établissement universitaire. À la page 9,
vous soulignez très bien parmi ces conséquences le
relèvement du niveau moyen de scolarité dans la population, les
meilleures conditions pour la rétention dans la région des
personnes ayant reçu une formation plus poussée au point de vue
académique, une facilité à recruter des professionnels et
des cadres pour les industries en place et pour les grands besoins de la
population en matière de services professionnels, une fonction
d'animation intellectuelle et culturelle de la vie et d'activités
communautaires sous les facettes multiformes qu'elle peut revêtir. Je
pense qu'on pourrait continuer longtemps. Il faut tout de même mentionner
l'impact économique également. Il est sûr que la
présence d'une institution universitaire représente des emplois
intéressants et des possibilités de développement, dans
les secteurs de l'activité économique, qui ne sont pas
négligeables.
Tout cela, vous le signalez très bien, est un ensemble de
bienfaits dont la région que vous représentez auprès de
nous est, à toutes fins utiles, privée.
Il y a un problème majeur qui se pose. C'est celui de
l'éloignement physique et la dispersion de la population. Je pense que
c'est une donnée de base qu'on ne peut pas ignorer. Il faut en tenir
compte, il faut chercher à se demander comment on peut trouver des voies
d'action. Des solutions complètes, je pense que c'est plutôt
difficile à envisager à l'heure actuelle, mais il y a
sûrement des avenues d'action qui peuvent être explorées. On
va essayer de le faire avec vous. Une de mes collaboratrices, Mme Germain, est
allée chez vous vous rencontrer pour discuter de ces choses il y a
quelque temps. Je pense que nous aurons l'occasion de reprendre ces
conversations qui sont entamées afin de chercher avec vous et les
institutions concernées les possibilités d'amélioration.
Il n'est pas question dans mon esprit, du moins dans l'état actuel de
mes connaissances, de créer une nouvelle université sur la
Côte-Nord. Je pense que vous ne l'avez pas demandé, d'ailleurs,
vous avez été bien réalistes dans votre mémoire.
Vous savez très bien que la création d'une université
demande un regroupement de ressources intellectuelles, humaines et
financières qui ne serait pas pensable dans l'état de dispersion,
de faiblesse relative au point de vue numérique de la population dans
votre région. Mais il faut se demander ce qui peut être fait dans
la situation que je viens d'évoquer. Évidemment, il faut tout de
suite se demander ce que peuvent faire les universités qui sont proches
de votre région. Vous en avez mentionné deux dans votre
mémoire: il y a l'Université du Québec à Chicoutimi
et l'Université du Québec à Rimouski. Je pense que c'est
très heureux que vous soyez passés avant ces deux
établissements parce que cela nous permettra de leur adresser des
questions au sujet des problèmes que vous nous soumettez. Vous pouvez
être sûrs que c'est une des questions qui leur seront
adressées par nous: Qu'est-ce que vous faites à l'endroit de la
population de la région que vous représentez? Et, surtout,
qu'est-ce que vous pourriez faire pour améliorer les choses? (17 h
15)
Nous allons examiner cela avec attention. C'est un problème qui
pourra donner lieu à des développements graduels et
peut-être plus d'initiatives que celles qui existent actuellement. Il
faudra délimiter clairement la responsabilité des
établissements là-dedans aussi. Soyez assurés, en tout
cas, que votre problème a été très bien
présenté à la commission et que nous allons noter les
difficultés dont vous nous avez fait part afin d'en tenir compte dans
les recommandations qu'il y aura lieu de faire au gouvernement en temps
utile.
J'ai bien aimé ce que vous avez dit à propos de l'absence,
pour le bénéfice de votre population, de certaines fonctions que
l'université met à la disposition des populations dans d'autres
régions où elle est impliquée. Il y a les services
d'enseignement et les services de recherche. Il y a aussi les services de
participation à l'activité collective par l'intermédiaire
des professeurs parfois, par l'engagement d'un département ou d'une
section de l'université et des fois par l'université toute
entière. C'est assez rare et plus difficilement concevable, à mon
point de vue, mais de toute façon.
Il y a une chose que je voudrais vous demander. Dans ce que vous
rêvez d'obtenir, est-il question d'enseignement régulier pouvant
conduire à des diplômes de baccalauréat par exemple? Est-ce
que vous pensez que vous avez chez vous la concentration d'effectifs
étudiants potentiels et qu'on peut envisager la concentration minimale
de ressources professorales qui permettraient des développements en
matière d'enseignement régulier devant conduire à des
diplômes réguliers, en particulier au baccalauréat, ou si
vous envisagez plutôt un nombre plus grand de cours de formation
d'adultes comme ceux que vous avez reçus jusqu'à maintenant?
M. Boisjoli: D'abord, je dirais qu'il est certain que nous visons
la mise en place de l'enseignement régulier. Quand je dis
"l'enseignement régulier", je pense à des choses relativement
simples. Nous sommes en train d'examiner présentement quelles sont les
décisions d'orientation qu'ont prises les finissants de nos deux
cégeps dans la région et voir s'il y a un nombre suffisant de ces
élèves qui pourraient permettre un regroupement pour donner une
première année universitaire dans certaines disciplines, par
exemple. Nous en sommes là dans nos réflexions. Nous n'avons pas
encore envisagé des cycles complets d'enseignement régulier. Nous
sommes d'accord avec vous pour dire que ceci est relié aussi à la
quantité d'étudiants et à une certaine masse critique qui
est nécessaire pour que ce soit viable en quantité et en
qualité.
Il est certain aussi que nous visons une amélioration des
services de perfectionnement aux adultes. Nous aimerions obtenir de ce
côté-là plus de stabilité et une
compréhension plus grande de nos réalités
géographiques, de sorte que les groupes ne se fassent pas et ne se
défassent pas au gré des cohortes, pour utiliser un langage avec
lequel je ne suis pas tellement familier mais que j'ai entendu à
l'occasion.
On est conscient qu'on est un peu victime du fait que notre
réalité géographique et notre réalité de
population font en sorte que les modèles habituels applicables dans les
milieux où le bassin de population est élevé semblent
assez rigides et, quand on les applique chez nous, ils produisent des effets de
distorsion assez importants.
M. Gauthier (Gaétan): Si vous me le permettez, M. le
Président, je voudrais juste ajouter quelques commentaires à ce
que M. Boisjoli vient de dire. D'abord sur la dispersion de la population, je
pense qu'il ne faut pas oublier que, malgré le fait qu'on ait une
population restreinte, elle est concentrée dans deux pôles
principaux, Baie-Comeau et Sept-Îles, région
Sept-Îles-Port-Cartier. Environ 50 % de notre poulation est
concentrée dans ces deux pôles. Si on pense à un
développement au niveau du secteur régulier, on se rend compte
aussi que ces deux pôles se caractérisent par des données
économiques différentes: un pôle est concentré
principalement sur les activités minières alors que l'autre l'est
sur les activités forestières. Il est peut-être possible de
développer des choses au niveau universitaire au secteur régulier
tenant compte des caractéristiques de ces deux pôles et de
clientèles extérieures qui pourraient aussi venir se greffer
à la clientèle régionale si on développait des
disciplines particulières à la région.
Le Président (M, Parent, Sauvé): M. le
ministre.
M. Ryan: II y a une chose qui me vient à l'esprit en vous
écoutant. Il me semble que, logiquement, ce qui devrait être
envisagé, ce serait un prolongement des services offerts. Vous avez deux
cégeps dans votre région: à Baie-Comeau et à
Sept-îles. Eux autres, ajouter une année, ce ne serait pas la fin
du monde. S'il y avait une meilleure intégration, une meilleure
collaboration avec le monde universitaire, peut-être qu'ajouter
une année c'est un chose qui est envisageable. Créer une
université là-bas, on n'y pense pas, personne. Plutôt que
de faire venir tous les exportateurs de cours de Chicoutimi et de Rimouski, si
vous aviez ces deux bases qui étaient mieux exploitées chez vous,
peut-être qu'il y aurait des choses à sortir de là. Est-ce
que c'est une possibilité que vous avez examinée? En a-t-il
été question? Est-ce que ces deux cégeps participent
à votre travail? Est-ce qu'ils sont représentés dans votre
regroupement et est-ce qu'ils se font aller les méninges un peu pour
créer des voies nouvelles?
M. Boisjoli: D'abord, les deux cégeps de la région
sont représentés, sont membres du regroupement et travaillent
avec nous à trouver des solutions. Deuxième élément
de cette réponse à votre question, c'est que, comme vous le voyez
dans notre mémoire, on désire s'associer au ministère de
l'Enseignement supérieur et de la Science et à d'autres
établissements, s'ils sont intéressés, pour essayer de
trouver quel pourrait être le modèle applicable dans notre
région. Il est certain qu'on a pensé à la suggestion que
vous mentionnez. C'est une des hypothèses qui pourraient être
regardées, que les cégeps actuellement en place puissent
commencer à dispenser des premières années universitaires
dans certaines disciplines.
On a pensé aussi qu'il pourrait être possible qu'il y ait
une espèce de direction régionale des services universitaires qui
ait comme seule préoccupation de s'occuper des besoins de formation de
la Côte-Nord, ce qui n'existe pas actuellement. On a pensé aussi,
peut-être, dans la foulée, je dirais, de la popularité du
Nord... Peut-être qu'il faut repenser les problèmes reliés
à certaines universités ou à certaines constituantes dans
la région périphérique et regrouper cela sous une nouvelle
formule qui pourrait permettre une certaine souplesse et une capacité de
desservir les régions avec des caractéristiques semblables aux
nôtres. Enfin, il y a quelques hypothèses qui mériteraient
d'être regardées. Nous sommes ouverts à toutes ces
hypothèses. Ce que nous voulons, nous l'avons dit et nous le
répétons, c'est une amélioration des services. Pas
nécessairement une université ou du béton, pour employer
le langage plus financier.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. M. le
ministre.
M. Ryan: Est-ce que vous vous sentez plus proches, vous autres,
de l'Université du Québec à Chicoutimi ou de
l'Université du Québec à Rimouski? De laquelle des deux
recevez-vous la meilleure collaboration?
M. Boisjoli: C'est difficile pour moi, au niveau du regroupement,
parce que cela fait à peine huit mois qu'on existe. Toutes les fois
qu'on a eu à communiquer avec ces deux universités, elles se sont
montrées disponibles, ouvertes et collaboratrices. Quant à la
quantité des services, on ne l'a pas regardé sous cet angle.
Comme chacune des constituantes dessert une partie de la région,
évidemment, il y a des façons différentes de faire: dans
le secteur de Baie-Comeau, c'est l'UQAR et, à Sept-Îles, c'est
l'UQAC.
M. Ryan: Avez-vous eu des réactions sur la nouvelle
politique du gouvernement en matière d'accessibilité à
l'enseignement post-secondaire pour les étudiants des régions
éloignées?
M. Boisjoli: Vous faites allusion aux montants d'argent
supplémentaires qui sont disponibles pour ces étudiants. Vous me
demandez si nous avons des réactions. Ma première réaction
a été de dire que c'est une amélioration. La
deuxième, je me suis demandé si on ne pouvait pas avoir une
politique dans ce sens qui tienne compte de la région d'origine de
l'étudiant. Je ne le sais pas, un étudiant de la région du
Bas-Saint-Laurent et de la Gaspésie qui a accès à
l'Université du Québec à Rimouski, pourquoi
bénéficierait-il d'avantages tout à fait identiques - je
ne dis pas qu'il ne doit pas avoir d'avantages - à ceux de la
Côte-Nord où il n'y a pas d'accès du tout dans la
région? Je me suis posé cette question.
M. Nepveu (Raymond): Vous permettez, M. le
Président...
Le Président (M. Parent, Sauvé): Oui, monsieur.
M. Nepveu: Je pense aussi que ce type de solution que vous
évoquez, M. le ministre, corrige évidemment une certaine forme
d'injustice que les étudiants de niveau universitaire en régions
éloignées peuvent ressentir à l'occasion parce qu'ils ont
à défrayer des coûts pour se déplacer et se loger en
milieu urbain, mais cela ne règle pas le problème de fond qui est
de retenir chez nous nos cerveaux, si l'on veut, parce qu'il est
extrêmement difficile - on le vit régulièrement - de
réussir à non seulement retenir chez nous, comme on le disait
dans notre mémoire, la main-d'oeuvre spécialisée, nos
professionnels ou nos cadres, mais il est également très
difficile de ramener chez nous nos jeunes qui nous quittent pour aller
étudier à Québec, à Montréal ou à
Sherbrooke. Une fois, évidemment - on connaît le
phénomène - qu'ils ont goûté à la vie des
grands centres urbains, il est extrêmement difficile après cela de
les rapatrier chez nous de façon qu'ils viennent
faire profiter leur collectivité des bénéfices
qu'ils ont reçus à même les fonds publics.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, monsieur.
Je reconnais maintenant la députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Madame et
messieurs, il me fait plaisir de vous voir ici. On a peu entendu, finalement,
de représentants particulièrement des régions plus
éloignées, réellement éloignées, si je peux
me permettre l'expression. Comme travailleurs bénévoles de cet
organisme, vous avez toute mon admiration. Le dévouement et
l'intérêt que vous manifestez à l'endroit du
développement de votre région est tout à votre honneur. Je
dois dire que la jeunesse du groupe que vous représentez illustre la
jeunesse des gens de votre région également. Je pense que c'est
cet aspect que je trouve le plus préoccupant, compte tenu de la jeunesse
de votre population, que de manquer de services de formation que je
qualifierais de quasi élémentaires. Parlant de jeunesse, je pense
que vous êtes, à part les étudiants qu'on a
rencontrés ici, les représentants les plus jeunes qu'on ait
rencontrés. On a souvent vu des têtes grises, un peu comme la
mienne et celle du ministre, mais peu de jeunes représentants.
Vous tracez un portrait relativement sombre de la situation des services
universitaires sur la Côte-Nord. Le ministre, tout à l'heure, vous
demandait si les services étaient meilleurs, selon qu'ils venaient de
l'Université du Québec à Rimouski ou de
l'Université du Québec a Chicoutimi. J'aurais davantage le
goût de vous demander: Avec quelle université vous sentez-vous le
plus d'affinités? Parce que c'est souvent au-delà de
l'université elle-même, c'est beaucoup sa situation
géographique. Cela a toujours été une question que je me
suis posée par rapport à la Côte-Nord. Est-ce que la
population a tendance à aller davantage en direction du Saguenay ou
plutôt du Bas-Saint-Laurent? C'est plus une question d'affinité
et, souvent, il faut respecter cela parce que c'est beaucoup dans cette
direction que se développent les services. Je me demandais si vous y
aviez réfléchi.
À présent, le problème que vous posez par rapport
à la sous-scolarisation et à l'exode des cerveaux, c'est
réel et cela pénalise lourdement une région.
Là-dessus, je me demandais si vous aviez fait des études. Est-ce
que vous avez des chiffres là-dessus?Des jeunes issus de vos
régions et qui, finalement, s'installent un peu partout dans la
province.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Un des deux,
à votre goût.
Une voix: D'accord.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Choisissez qui va
répondre, on n'a pas d'objection.
M. Boisjoli: D'accord. Quant à l'affinité avec les
universités, je vous avoue que je n'ai pas répondu tantôt
directement à cette question parce que je suis incapable d'y
répondre. On n'a pas eu ce genre de discussion au niveau du
regroupement; alors, il m'est difficile de le faire, à moins d'y aller
d'une opinion tout à fait personnelle.
Cependant, dans les discussions que nous avons eues, si on allait vers
une espèce de ministructure régionale, ou ce que j'ai
appelé tantôt une direction régionale des services
universitaires, nous n'avons aucune objection à être situés
à l'intérieur du cadre de l'Université du Québec et
pouvoir faire affaire avec diverses constituantes de l'Université du
Québec.
Quant à être arrivé en retard, on voit
peut-être certains avantages à conclure des ententes avec
différentes constituantes et à ne pas être tributaire des
problèmes qu'une constituante en région éloignée a
déjà et qui se refléteraient automatiquement dans notre
région. Si on pouvait faire affaire avec plusieurs, on y voit des
avantages. C'est pour cela que, dès les premières
démarches faites auprès de ces deux constituantes et de
l'Université du Québec, nous avons demandé d'être
traités comme une région et non pas comme étant deux
parties de territoire desservies par deux constituantes différentes.
Cela nous apparaissait fondamental aux gens de la côte que, si nous
étions traités comme une région, nous avions des chances
de pouvoir développer des choses régionalement mais, dès
que nous serions divisés en territoires distincts, nous étions
condamnés à être tributaires ou à demeurer dans
notre situation actuelle. (17 h 30)
Quant à l'exode des cerveaux, c'est difficile pour moi de
répondre à cette question parce qu'on n'a pas de données
statistiques. Je vous dirais que tous les jeunes sortent de la Côte-Nord
pour faire des études universitaires présentement. Je vous dirais
aussi que c'est d'un sens commun ou d'une répétition permanente
et continuelle; tous les directeurs de service ou d'établissement ou
d'organisme public vous diront en régions qu'ils ont une mobilité
de personnel très grande; très souvent, c'est relié au
fait que les gens n'ont pas accès à du perfectionnement. S'ils
aspirent à améliorer leurs conditions à moyen terme, il
faut qu'ils continuent à pouvoir se perfectionner et, le cas
échéant, ils choisissent facilement d'aller à
l'extérieur.
M. Gauthier (Gaétan): Pour répondre à la
deuxième question de façon un peu plus précise,
l'accroissement marqué du nombre
d'étudiants au niveau régulier dans les cégeps, au
cours des trois dernières années, nous amène à
penser qu'il y a de plus en plus de jeunes qui terminent leurs études
collégiales pour accéder à un niveau universitaire. Par
exemple, à l'automne 1984, il y avait dans la région de la
Côte-Nord 409 étudiants inscrits en deuxième année
dans les collèges de la région, au secteur général.
On retrouve, à l'automne 1984, 191 étudiants inscrits à
temps complet qui provenaient de la région Côte-Nord, uniquement
dans le réseau de l'Université du Québec. On peut
peut-être supposer que 70 % à 75 % des finissants du secteur
général au niveau collégial dans la région
poursuivent leurs études universitaires à l'extérieur.
Cela est sans compter les étudiants qui, peut-être parce qu'il n'y
a pas d'université dans la région, s'inscrivent à des
cégeps qui sont déjà situés à
l'extérieur de la Côte-Nord. Par exemple, si je suis un jeune de
la Câte-Nord qui veut poursuivre ses études universitaires,
éventuellement, j'aurai peut-être tendance à choisir un
cégep dans une région où il y a déjà une
université.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci.
Mme Blackburn: La population étudiante inscrite dans les
cégeps chez vous est de moitié moins élevée que
celle des collèges de Rouyn-Noranda. Ma question est la suivante. Vous
avez fait l'inventaire d'un certain nombre de services que vous choisiriez de
même que d'une structure qui vous permettrait de vous les offrir. Vous
n'avez pas parlé du tout du rôle que pourrait jouer et les
services que pourrait rendre la Télé-université. Vous
savez que dans plusieurs pays nordiques on a développé beaucoup
les services - il n'y a pas que tes pays nordiques, je pense à
l'Angleterre - par le biais de la télévision éducative qui
est beaucoup plus mobile, qui offre beaucoup plus de possibilités et
vous n'en parlez pas.
Mme Tremblay (Ginette): Je peux ajouter une chose à ce
sujet. L'objectif principal visé par la
Télé-université était d'atteindre justement des
populations un peu plus éloignées. Il n'y a pas très
longtemps, on s'est fait dire que finalement la clientèle qui
adhérait à la Télé-université provenait
davantage des grands centres. Dans la région de la Côte-Nord, il y
en a un certain nombre qui sont abonnés à la
Télé-université et qui utilisent ce système, mais
cela ne répond pas aux besoins de formation générale dont
on parle. Cela semble très marginal, même sur la
Côte-Nord.
Mme Blackburn: Vous semblez nous dire que la
Télé-université serait plus prisée dans les grands
centres que chez vous. Est-ce que vous avez une explication? Cela devrait
être comme à l'inverse, parce que les universités sont sur
place. On nous a expliqué que ce n'était pas parce qu'elles
étaient sur place que tout le monde voulait y aller. Cependant,
lorsqu'on a eu ici la Télé-université, est-ce qu'il y a
vraiment eu de telles tentatives de faire des percées chez vous? Est-ce
que cela a une présence significative? Vous nous dites non, mais est-ce
qu'il y a des raisons qui expliquent cela?
Mme Tremblay: II faudrait sans doute poser des questions aux gens
dans les réseaux de l'Université du Québec pour avoir plus
de renseignements. Je pense qu'il y a plus de gens dans les grands centres, la
proportion est plus importante; mais je n'ai pas de raison précise pour
expliquer cette indifférence à l'endroit de la
Télé-université, je crois qu'il faudrait poser la question
à d'autres gens aussi.
M. Gauthier (Gaétan): L'une des raisons
déterminantes dans le cas de la Téléuniversité,
c'est le fait que, étant donné qu'on n'a pas
d'établissements universitaires dans notre région, les gens sont
peut-être moins sensibilisés aux besoins universitaires. Si vous
vivez dans la région de la Côte-Nord actuellement, vous entendez
très peu parler de la Télé-université et des
services qu'elle offre. Il faut pratiquement courir après les
dépliants de cours de la Télé-université
actuellement pour être informé. J'ajouterais aussi que la
Télé-université ne répond pas aux problèmes
qu'on veut régler dans le cas de la Côte-Nord parce que cela ne
nous donne pas une présence universitaire dans la région et cela
ne nous donne pas non plus une présence d'individus aptes à
travailler et à développer la région au point de vue
économique et social. Tout ce que la
Télé-université peut nous donner dans la région,
c'est de permettre à un certain nombre de personnes d'améliorer
leur formation personnelle, mais la présence de cerveaux, comme on
dît, reliée à la présence d'une université
dans une région, Télé-université ne peut pas nous
donner cela.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci,
monsieur.
Mme Blackburn: Évidemment, cela ne répond pas
à vos besoins particuliers qui sont bien exprimés et fort
légitimes, je dois dire. Par ailleurs, je me dis que, si au moins il y
avait ces services qui venaient compléter les services imparfaits,
faut-il le dire, offerts par les deux autres constituantes de l'UQ, cela
pourrait constituer un moyen de relever le niveau de scolarité en
même temps que d'avoir des personnes un peu plus scolarisées. Je
trouve étonnant qu'on n'ait pas essayé d'explorer un peu ces
possibilités.
M. Boisjoli: Je pourrais ajouter seulement un commentaire
là-dessus pour dire que dans toutes nos discussions il n'a jamais
été question de la Télé-université. Enfin,
je vous écoute et j'ai l'impression de comprendre que la Côte-Nord
devrait être une région à clientèle prioritaire pour
la Télé-université, mais c'est absent de nos discussions.
Je veux dire que la présence n'est pas îà. Pourquoi? On ne
le sait pas.
Le Président (M. Parent, Sauvé): C'est assez
révélateur parce que, moi aussi, comme la députée
de Chicoutimi, j'étais convaincu que la
Télé-université était faite spécialement
pour vous, les régions isolées. Je vous remercie du
renseignement, Si vous voulez conclure, madame, au nom de votre formation
politique.
Mme Blackburn: Tout à l'heure, quand vous avez
commencé à faire votre présentation, vous vous êtes
excusés en disant que votre mémoire n'entrait peut-être pas
tout à fait dans les objectifs de cette commission. Je voudrais vous
rassurer tout de suite. On n'en a pas beaucoup parlé, mais le mandat de
cette commission est de parler à la fois des orientations et du
financement. Ce dont on entend le plus parler évidemment, c'est le
financement; d'entendre parler des orientations, d'entendre parler
d'accessibilité pour les régions éloignées, je
pense que c'était tout à fait dans le mandat de cette
commission.
Au nom de ma formation politique, je voudrais vous remercier de votre
présence ici, d'avoir consacré de votre temps, de votre
énergie pour venir bénévolement présenter ici votre
point de vu sur les services d'enseignement universitaire dans votre
région. Je m'interroge beaucoup sur ce qu'il serait possible de faire
pour le moment avec la Télé-université, mais j'admets avec
vous que ce n'est pas ce qui contribue de façon immédiate et
directe à l'enrichissement et au développement d'une
région. Pour le reste, évidemment, le ministre avance des
hypothèses, peut-être celle de prolonger le collège d'une
année; il faudrait voir ce que cela donnerait au Québec si
l'expérience était reprise ailleurs.
Je ne peux que vous inviter à poursuivre. Comme vous savez et
comme je sais que dans les régions on fait toujours preuve de beaucoup
de ténacité, je veux vous inviter à être très
tenaces et très persévérants. Peut-être qu'un jour
on verra des services universitaires de qualité dans votre
région. C'est ce que je vous souhaite. Au nom de ma formation politique,
je vous remercie de votre présence ici.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, Mme la
députée de Chicoutimi. Je reconnais maintenant M. le ministre de
l'Enseignement supérieur et de la Science, M. le ministre.
M. Ryan: M. Président, dans la présentation qu'on
nous a faite tantôt, on ne nous a pas donné une liste
complète de tous les services universitaires qui ont pu être
offerts dans la région chez vous. Je m'aperçois en regardant les
données qu'on m'a soumises qu'il n'y a pas eu seulement
l'Université du Québec à Chicoutimi et l'Université
du Québec à Rimouski qui sont allées chez vous, mais
l'Université Laval est allée, l'Université de
Montréal est allée également ces dernières
années et l'Université McGill également.
Une voix: Sherbrooke.
M. Ryan: L'Université de Sherbrooke également au
temps où M. Hamel oeuvrait dans cette institution. II y avait des
visées de rayonnement, sans doute.
Je pense qu'il va falloir qu'on fasse un examen complet de tout ce qui
s'est fait, qu'on ait le bilan des expériences faites par chaque
établissement, qu'on cause avec les cégeps chez vous
également pour voir comment ils envisagent leur vocation, puisqu'ils
sont déjà implantés dans votre territoire. On va prendre
tout ça en considération. Il y a sans doute des
améliorations qui peuvent être envisagées. Je ne sais pas
exactement de quelle nature elles sont.
Il y a deux choses à préciser: premièrement, la
nature des besoins qui peuvent trouver une réponse par des initiatives
prises sur le territoire chez vous, et deuxièmement la nature des
intervenants ou des agents éducatifs qui pourront assurer ces
réponses.
Vous nous posez un problème. Nous l'enregistrons, mais nous
allons essayer de travailler sur les deux questions que j'ai essayé de
résumer après avoir pris les conclusions que chaque
établissement qui a déjà été impliqué
- il y en a plus que je pensais, encore une fois - a pu tirer de ces
expériences faites jusqu'à maintenant.
Cela a été très utile pour nous de vous rencontrer
directement. J'avais eu un rapport immédiatement à la suite de la
rencontre que Mme Céline Germain est allée tenir chez vous, avec
vous, en mon nom et nous allons reprendre ces contacts. On va les pousser plus
loin, et j'espère qu'à une prochaine commission parlementaire,
nous pourrons enregistrer des progrès à la direction d'un service
peut-être plus proche et mieux adapté dont les formes restent
à déterminer.
Je vous remercie infiniment et, encore une fois, je vous félicite
et vous remercie de l'intérêt que vous portez au
développement de l'enseignement secondaire, postsecondaire et
universitaire dans votre région. Merci.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Je vous remercie,
M. le ministre. M. le Président, madame, monsieur, je vous remercie
d'être venus rencontrer la commission parlementaire de
l'éducation. Je veux aussi souligner l'effort que vous avez dû
faire pour partir de la Côte-Nord et venir ici avec des moyens
très précaires, comme vous l'avez souligné. Je vous
remercie beaucoup.
Une petite remarque. Au début de votre intervention, vous nous
avez dit: Nous sommes conscients que notre mémoire ou notre intervention
n'entre pas nécessairement dans le cadre de la commission parlementaire.
Au contraire, elle cadrait beaucoup. La commission parlementaire a pour
objectif d'étudier le financement des universités. Mais il y a
aussi l'orientation des universités. Je vous remercie de nous avoir
informés de la problématique universitaire dans votre
région. Je pense que cela a enrichi les membres de la commission.
Sur ce, M. le président, madame, monsieur, la commission
parlementaire de l'éducation suspend ses travaux jusqu'à 20
heures alors qu'elle accueillera l'Office des personnes handicapées du
Québec.
(Suspension de la séance à 17 h 43)
(Reprise à 20 h 6)
Le Président (M. Parent, Sauvé): La commission
parlementaire de l'éducation reprend ses travaux dans le cadre du mandat
qui lui a été confié par l'Assemblée nationale,
à savoir de tenir une consultation générale sur les
orientations et le cadre de financement du réseau universitaire
québécois pour l'année 1987-1988 et pour les années
ultérieures.
Office des personnes handicapées du
Québec
La commission parlementaire accueille actuellement l'Office des
personnes handicapées du Québec. Au nom des membres de la
commission, je veux saluer leur porte-parole, M. Paul Mercure, qui en est le
vice-président. M. Mercure, nous vous saluons et nous vous remercions
aussi d'avoir bien voulu répondre à l'invitation de la commission
parlementaire de l'éducation, pour venir nous aider dans notre recherche
sur les orientations et le mode de financement du réseau universitaire
québécois.
M. Mercure, la commission parlementaire va vous entendre durant environ
une heure. On m'a dit que vous aviez un mémoire à nous
présenter et que cela vous prendrait entre quinze et vingt minutes
environ. Après votre présentation, un dialogue sera établi
entre les membres de la commission et vous, ainsi que les gens qui vous
accompagnent. La période restante sera répartie également
entre les deux formations politiques.
M. Mercure, veuillez nous présenter les gens qui vous
accompagnent et enchaîner avec votre présentation.
M. Mercure (Paul): Je voudrais vous présenter la
délégation de l'QPHQ. Je suis Paul Mercure, vice-président
du conseil d'administration. Je tiens à signaler que le fait que le
vice-président dirige la délégation n'est pas du tout un
signe de non-intérêt aux travaux de la commission, mais bien parce
que Mme Robillard, comme vous le savez, a sollicité un autre poste. Le
poste de président de l'Office des personnes handicapées est
maintenant vacant pour une courte période, nous l'espérons. Les
gens qui m'accompagnent sont M. Robert Capistran, directeur des services au
milieu et, à mon extrême gauche, M. Normand Lucas, directeur du
service de la recherche. Un autre membre du conseil d'administration
m'accompagne également, M. Marius Jacques.
Je tiens, d'abord, à vous remercier et à remercier chacun
des membres de la commission de nous avoir permis de nous exprimer devant cette
commission.
Je voudrais d'abord rappeler le mandat de l'OPHQ et le situer par
rapport au mandat de la commission parlementaire. L'adoption des orientations
proposées par la politique d'ensemble "À part... égale",
comme objectifs fondamentaux de l'action gouvernementale envers les personnes
handicapées, constitue la preuve d'une volonté d'assurer à
ces personnes leur place dans la société, au même titre que
leurs concitoyennes et concitoyens.
L'Office des personnes handicapées du Québec a pour mandat
de veiller à ce que cette intégration sociale se fasse dans les
meilleures conditions passible et dans le meilleur intérêt des
personnes handicapées.
En collaboration avec les associations de personnes handicapées
ou de parents de personnes handicapées, il doit veiller à faire
connaître les besoins des personnes de façon qu'on en tienne
compte systématiquement lors de l'élaboration de lois,
politiques, règlements, au même titre qu'on le fait pour la
population en général.
Mandat de la commission parlementaire. Dans le cadre de son mandat qui
est l'étude des orientations et du cadre de financement du réseau
universitaire pour l'année 1987-1988, la commission aborde
différentes questions qui sont des points d'intérêt pour
l'OPHQ. Ces questions abordées par la commission sont: les
modalités d'aide financière aux étudiants; les frais
directs et indirects de la recherche; le financement de celle-ci à
l'intérieur des universités et particulièrement les
nouveaux modes de
collaboration entre l'université, les centres de recherche
publics et privés, et l'entreprise publique et privée; la gestion
des ressources humaines et matérielles des universités; les modes
de concertation entre les établissements, particulièrement en ce
qui a trait à la rationalisation des programmes offerts et à
l'identification des champs d'enseignement et de recherche jugés
prioritaires.
Ces questions sont des points d'intérêt pour l'OPHQ parce
qu'elles touchent les éléments suivants de la
problématique d'intégration sociale des personnes
handicapées, soit les modes d'aide financière aux
étudiants handicapés, le plan de développement de la
recherche sur les personnes handicapées, la formation des intervenants
dans le secteur de la prévention, du traitement des déficiences
et de l'adaptation-réadaptation, la formation des intervenants offrant
des services directs à la population handicapée, le plan
d'embauche des universités.
L'OPHQ n'a pas produit de mémoire exhaustif sur ces questions
à l'intention de la commission. Toutefois, il a déposé,
à titre complémentaire, le mémoire traitant de
l'implication du ministère de l'Enseignement supérieur et de la
Science et de ses partenaires dans l'intégration sociale des personnes
handicapées. Ce mémoire a été envoyé avant
aujourd'hui, c'est un mémoire qui est très récent et qui a
été adopté lors de la dernière réunion du
conseil d'administration de l'OPHQ.
Je traiterai ce soir brièvement, pendant les quelques minutes qui
me sont allouées, des quatre sujets suivants: l'accessibilité,
les programmes, la recherche et les plans d'embauche.
Accessibilité aux études universitaires pour les personnes
handicapées. Dans un premier temps, le soutien financier. Pour
l'instant, les personnes handicapées qui présentent des besoins
particuliers liés à leurs déficiences et qui
nécessitent une assistance financière pour y répondre
doivent effectuer une demande de bourse pour personne gravement
handicapée. Ce programme, qui se présente sous forme de bourses
exclusivement, attribue une aide financière à l'étudiant
qui peut attester, par un certificat médical, que la déficience
dont il est atteint lui crée un handicap fonctionnel majeur apparaissant
sur une liste préétablie et que cette déficience limite
vraiment les possibilités du candidat quant à ses études
et à son emploi futur. Il s'agit d'une citation des règles
d'attribution des bourses aux étudiants gravement handicapés.
Ce programme répond pour l'instant à un besoin. Le nombre
de demandes qui lui sont adressées l'atteste. L'OPHQ croît,
cependant, qu'il y aurait possibilité d'apporter une meilleure
réponse aux besoins des personnes handicapées, sans qu'il soit
nécessaire d'en faire une mesure spécifique comme c'est le cas
maintenant. Les personnes handicapées devraient être soumises aux
mêmes critères d'attribution et aux mêmes programmes de
prêts et bourses que l'ensemble de la population étudiante. Elles
devraient donc, elles aussi, obtenir tout d'abord un prêt étudiant
pour ensuite avoir droit à une bourse, s'il en a été
déterminé ainsi. Cependant, parce qu'elles peuvent
présenter des besoins particuliers dus à leurs déficiences
ou à leurs limitations fonctionnelles, les personnes handicapées
doivent pouvoir faire part de ces besoins et obtenir une aide financière
pour y répondre. Il s'agit alors de donner à l'étudiant
handicapé une chance égale de pouvoir poursuivre ses
études.
Ces besoins particuliers ne devraient pas trouver réponse dans un
programme particulier, mais devraient plutôt être traités
comme une dimension supplémentaire à considérer dans
l'analyse de la demande d'adhésion au régime des prêts et
bourses régulier. L'identification de ces besoins et les moyens d'y
répondre devraient être déterminés dans le cadre
d'un plan d'intervention de l'étudiant. L'aide financière
pourrait alors être accordée conséquemment à cette
évaluation plutôt qu'en fonction d'une liste de déficiences
majeures reconnues et d'équipements spécialisés
autorisés comme c'est le cas présentement. Elle serait ainsi
mieux adaptée à la situation réelle de chaque
étudiant.
Les aides techniques. Au niveau universitaire, les besoins en aide
technique pour compenser les limitations fonctionnelles de la personne
handicapée sont en général bien connus. Certains ont
même été reconnus au cours des expériences
d'apprentissage antérieures. Par ailleurs, outre les appareils
sophistiqués, il existe également des équipements simples,
d'usage courant, qui peuvent être utilisés à profit pour
faciliter le travail de l'étudiant handicapé;
rétroprojecteur, photocopieur, magnétophone, machine à
écrire, etc. Il s'agit de faire preuve d'un peu de
créativité et surtout de bonne volonté pour constater
qu'il n'est pas toujours coûteux ou compliqué d'aider
l'étudiant handicapé. Il faut donc démystifier en partie
les coûts associés à la prise en charge des
étudiants handicapés. Il est primordial que les milieux
universitaires reconnaissent leur responsabilité dans ce domaine et
qu'ils mettent à la disposition des personnes handicapées les
équipements spécialisés nécessaires pour compenser
leur limitation fonctionnelle et leur permettre ainsi de poursuivre leur
apprentissage en ayant en main les outils nécessaires.
L'accessibilité des lieux. L'accessibilité physique aux
lieux de formation demeure encore un des principaux obstacles auxquels ont
à faire face les personnes handicapées.
Rendre les lieux de formation accessibles, ce n'est pas seulement
prévoir une rampe d'accès pour permettre l'entrée au
bâtiment principal, mais c'est aussi s'assurer que les salles de cours,
les salles de laboratoire, les salles de visionnement, l'auditorium, les lieux
de stage sont également accessibles à toute personne
handicapée, quelle que soit sa déficience. C'est donc aussi
prévoir que les indications ou signalisations fournies sur le campus,
dans les ascenseurs par exemple, sont accessibles aux personnes ayant des
déficiences sensorielles.
Il importe donc que l'accessibilité des lieux ne soit pas une
simple formalité à remplir, mais qu'elle devienne plutôt un
moyen très concret d'éliminer un obstacle important pour les
personnes handicapées et favoriser ainsi, d'une certaine façon,
leur accès aux études.
Modifications aux programmes. L'intégration de la formation
spécifique. Plusieurs des recommandations de "À part...
égale" portent sur les mesures qui devraient être prises pour
combler les besoins en matière de programmes de formation. Je citerai
quelques recommandations de "À part... égale":
nécessité d'intégrer et de développer la dimension
de la santé communautaire, les connaissances relatives à la
prévention et au dépistage, aux conséquences des
traitements, et d'introduire ces dimensions dans la formation des personnels
des domaines médicaux et paramédicaux, ainsi qu'auprès des
corporations de professionnels.
En second lieu, nécessité d'élaborer et
d'intéger dans des programmes de formation à la
responsabilité professionnelle les règles d'éthique et les
éléments nécessaires à l'information, au soutien,
à l'orientation et à la référence de la personne
ayant une déficience physique ou mentale, de façon à
améliorer les systèmes de référence et à
prévenir ainsi ou à intervenir au plus tôt sur les
limitations fonctionnelles de la personne et sur son handicap.
En troisième lieu, nécessité de développer
et d'implanter des programmes obligatoires de formation continue sur la
problématique de l'adaptation et de la réadaptation des personnes
handicapées.
En ce sens, il faudrait étudier la possibilité que ces
programmes de formation prennent la forme d'un baccalauréat en
adaptation-réadaptation qui servirait de tronc commun aux disciplines
médicales et paramédicales. L'intérêt de cette
proposition réside dans le fait que les différents intervenants
qui ont à travailler dans ce domaine, incluant les spécialistes,
pourraient avoir accès à une formation de base solide et commune
assurant une meilleure qualité d'intervention et une plus grande
cohérence. De plus, la rencontre dès la période de
formation des professionnels des diverses disciplines qui auraient à
travailler conjointe- ment dans le milieu favoriserait l'existence et le bon
fonctionnement des équipes multidisciplinaires.
Sensibilisation des divers professionnels à la
problématique. D'autre part, il est d'une grande importance de mettre
sur pied d'autres programmes de cours visant la sensibilisation et
l'information de divers intervenants, particulièrement ceux qui, par
leurs fonctions, offrent des services directs à la population:
enseignants, médecins, policiers, dentistes, etc., en vue
d'améliorer leurs connaissances sur la problématique des
personnes handicapées et particulièrement sur le processus
d'apparition du handicap.
Je voudrais ici donner un exemple. Je suis père d'un
garçon handicapé qui a maintenant 23 ans. Je vous dis que ce
n'est pas trop facile d'obtenir des services dentaires, parce que les dentistes
ont été formés pour la plupart dans une période
où les personnes handicapées, les personnes déficientes
intellectuelles étaient en institution où, malheureusement, on se
souciait assez peu de la santé dentaire des personnes. Donc, les
dentistes qui travaillent dans la population sont très peu
habitués à avoir dans leur clientèle des personnes
handicapées intellectuelles. Ils ont tendance à avoir recours
immédiatement à l'anesthésie générale -
c'est une pratique qui n'est pas recommandable - parce qu'ils n'ont pas
l'habitude et ils ne connaissent pas la problématique. On pense que,
s'ils étaient sensibilisés, de même que les policiers, les
médecins et tout le monde qui a affaire aux services
génériques, à l'existence dans la société
des personnes handicapées, cela aiderait beaucoup.
L'OPHQ aimerait être associé ou consulté lors de la
préparation de ces cours puisqu'il est important de s'assurer de
l'esprit dans lequel ils seront construits. Il serait tout à fait
à l'encontre de l'objectif visé que ces cours soient
perçus comme étant une forme de marginalisation. Ils doivent donc
être intégrés dans le cadre des programmes réguliers
offerts sur un sujet donné. Cette façon de procéder est la
plus conforme à l'esprit qui devrait guider toute mesure s'adressant aux
personnes handicapées et elle devrait être
privilégiée toutes les fois que cela est possible.
Régionalisation des services. La formation des
spécialistes devrait leur permettre d'être outillés pour
travailler dans le milieu naturel de vie des personnes et cela, dans toutes les
régions du Québec. Cet aspect est identifié très
souvent par les intervenants et les milieux, tels les centres de
réadaptation, comme un frein important à la
régionalisation des services, au retour et au maintien dans le milieu
des personnes ayant des déficiences et des limitations
fonctionnelles.
Approche individuelle. Il est important
que les programmes privilégient l'approche individuelle des
besoins de la personne quel que soit le domaine d'intervention visé. Il
s'agit de la meilleure façon, sinon la seule, pour que les interventions
soient vraiment adaptées aux besoins de la personne. Cette approche
individuelle qui peut se traduire par la préparation d'un plan
d'intervention ou plan de service à la personne constitue, d'ailleurs,
le fondement même de toute la politique d'ensemble "À part...
égale".
Développement de la recherche. Par le mandat qui lui est
conféré par la Loi assurant l'exercice des droits des personnes
handicapées, l'OPHQ doit jouer un rôle majeur dans le
développement de la recherche portant sur la connaissance des besoins
spécifiques aux personnes handicapées. Il est donc de la
responsabilité de l'office d'influencer en ce sens le milieu de la
recherche en lui fournissant les orientations de base et les pistes à
suivre pour améliorer les connaissances sur les personnes
handicapées et les services qui lui sont nécessaires.
Afin de bien remplir ce rôle, l'office s'est donné comme
première préoccupation la préparation d'un plan de
développement de la recherche. Ce plan "vise à augmenter, dans le
réseau de la recherche scientifique, le rôle de l'OPHQ et à
assurer des mécanismes d'échange et de collaboration. II vise
également à accroître le rôle de l'OPHQ dans
l'orientation des priorités de recherche et à augmenter son
expertise".
Il est essentiel que les universités comprennent la
nécessité de tenir compte des besoins des personnes
handicapées dans le développement de la recherche et qu'elles
prennent les mesures nécessaires pour que ces besoins soient
considérés. En ce sens, elles se doivent d'intégrer dans
leur politique de recherche la préoccupation de la problématique
des personnes handicapées dans le respect des orientations
proposées par "À part... égale".
Le plan de développement de la recherche proposé par
l'OPHQ devrait servir de guide pour orienter le développement de la
recherche sur les personnes handicapées. Il identifie, entre autres, les
secteurs à prioriser et donne des indications sur les pistes à
suivre pour répondre aux besoins dans ce domaine.
Trois secteurs d'interventions et deux clientèles devraient
être priorisés. II s'agit des domaines de prévention,
adaptation-réadaptation, intégration sociale et des personnes
ayant une déficience intellectuelle ou du psychisme.
Le dernier point, les universités comme employeurs. Il est un
autre secteur où les universités ont un rôle
prépondérant à jouer, c'est celui du marché du
travail et de l'intégration professionnelle des personnes
handicapées. En tant qu'employeurs, les universités ont des
responsabilités vis-à-vis de cette problématique. La Loi
assurant l'exercice des droits des personnes handicapées
détermine clairement l'obligation pour les entreprises de 50
employés et plus de préciser un plan d'embauche. Pour
répondre à cette demande, le gouvernement du Québec a
préparé un plan d'embauche qui s'applique à l'ensemble de
ses ministères et organismes. Le plan d'embauche est une mesure
incitative dont l'objectif est l'intégration en emploi des personnes
handicapées. Il comporte six thèmes: le recrutement, la
sélection, l'intégration en emploi, la
réintégration en emploi du salarié devenu handicapé
sans égard à la cause du handicap, le développement de
l'emploi à l'intention des personnes handicapées et, enfin, le
développement des capacités à exercer un emploi.
Les universités peuvent être un exemple en matière
d'organisation de stages de formation pour les personnes handicapées
à leur emploi et en matière d'embauche d'étudiants. Ainsi,
le fait d'avoir des travailleurs et travailleuses handicapés è
l'emploi des universités peut contribuer à présenter des
modèles valorisants pour les étudiants et les étudiantes
handicapés, de même que pour les personnes qui, plus tard, auront
un rôle dynamique à jouer dans les entreprises. Cela peut leur
faire voir que les personnes handicapées peuvent jouer un rôle
utile en milieu de travail. Les universités devraient en tenir compte
dans la réalisation du plan d'embauche puisqu'elles doivent
refléter une société sans discrimination.
Je termine en soulignant l'importance d'une implication des
universités en faveur du mouvement d'intégration sociale des
personnes handicapées. Nous comptons beaucoup sur chacun des membres ici
présents et sur les membres qui pourraient être absents de la
commission pour que les travaux de la commission reflètent les
préoccupations de l'Office des personnes handicapées du
Québec et qu'ils s'inspirent des grands principes de la politique
gouvernementale en matière d'intégration sociale des personnes
handicapées "À part... égale". Merci, M, le
Président, Nous allons répondre dans la mesure du possible aux
questions qui peuvent se présenter.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Je vous remercie
beaucoup, M. Mercure, d'être venu sensibiliser les membres de cette
commission parlementaire à la problématique de la vie des
handicapés à l'intérieur du réseau universitaire.
Je reconnais maintenant le ministre de l'Enseignement supérieur et de la
Science, le député d'Argenteuil.
M. Ryan: M. le vice-président, c'est un grand plaisir pour
nous de vous rencontrer à l'occasion des travaux de la commission
parlementaire de l'éducation sur les orientations et le
financement de nos universités. Le mémoire que vous nous apportez
ce soir attire notre attention sur une dimension importante des
problèmes de l'accessibilité à l'éducation et des
problèmes de la participation des personnes handicapées à
la vie communautaire, en particulier dans le secteur que nous abordons à
l'occasion de nos travaux, c'est-à-dire celui des institutions
universitaires. Il aurait manqué quelque chose à notre
perspective si le point de vue que vous apportez n'avait pas été
présenté par vous à la lumière de votre
expérience et des travaux que vous faites sur les questions relatives
aux difficultés et aux aspirations des personnes handicapées. (20
h 30)
Votre mémoire traite de différents volets du
problème qui sont tous importants et qui sont complémentaires. Je
pense qu'on sent que vous cherchez une approche intégrée sans
laquelle toutes les mesures qu'on pourrait prendre pourraient être
coûteuses, mais relativement inefficaces. Par conséquent, je
voudrais vous assurer que nous allons étudier avec soin les
recommandations que vous faites. Il y a toujours certaines limites d'ordre
financier qu'il faut indiquer aussi. Nous ne pouvons pas faire tout ce qui est
recommandé. Je crois que nous serons conditionnés par les
restrictions financières dont nous devons tenir compte dans toute notre
action et pas seulement à propos des personnes dont nous parlons
actuellement, mais à propos de l'ensemble de l'action que nous devons
faire. Vous nous rappelez nos responsabilités de ce côté et
nous allons essayer d'être à la hauteur des attentes que vous
formulez.
Je voudrais peut-être commencer par vous poser une question au
sujet du problème de l'aide financière aux étudiants,
surtout s'il s'agit de personnes handicapées. Si j'ai bien compris votre
mémoire, vous dites: On a un programme particulier pour les personnes
qui souffrent de graves difficultés qui créent des handicaps
sérieux pour elles, mais vous aimeriez mieux que toutes les personnes
handicapées soient d'abord admissibles au programme régulier et
qu'en second lieu, s'il y a des problèmes spéciaux
dérivant de leur situation propre, l'on ait un élément
additionnel dans le programme pour tenir compte de cette difficulté.
J'aimerais que vous nous expliquiez votre position, que vous nous disiez
pourquoi vous préférez cette approche et en quoi elle pourrait
être meilleure que la politique qui existe actuellement.
M. Mercure: Je voudrais mentionner au départ que toute la
politique "À part... égale" est basée sur le fait que nous
désirons créer une société sans discrimination, ni
privilège. On pourrait dire qu'un programme spécial qui ne fait
appel qu'aux bourses spécifiques aux personnes handicapées
pourrait être appelé un privilège. Remarquez que les
privilèges sont tellement peu présents pour les personnes
handicapées que je ne voudrais pas trop insister là-dessus.
Le point principal, c'est qu'il s'agit encore une fois d'un canal
particulier auquel les personnes doivent s'astreindre. Autrement dit, il y a
une continuité, de toute façon, dans la population
handicapée et non handicapée, et l'on pense que les personnes
handicapées doivent être considérées d'abord, comme
vous le disiez si bien, dans le cadre de la politique régulière,
mais cette politique régulière doit tenir compte des besoins
spécifiques qui concernent les personnes handicapées.
Disons que la politique actuelle prévoit un certain nombre de
handicaps sérieux et prévoit aussi une certaine liste
d'équipements spécialisés, alors que nous aimerions que
l'approche soit un peu plus ouverte à de nouvelles situations et qu'elle
s'adapte au fur et à mesure que les élèves de
différentes catégories ont l'accès à
l'université. C'est quand même quelque chose d'assez récent
et il faut concevoir que de nouvelles clientèles de personnes
handicapées iront à l'université. Si c'est dans le cadre
d'un programme ouvert où l'on tient compte des besoins individuels, on
pense que la politique va s'adapter plus facilement.
M. Ryan: II y a un autre point dans votre présentation qui
m'a vivement intéressé, c'est le point qui traite des
modifications souhaitables aux programmes de formation qui sont
dispensés par les universités soit à l'intention de
certaines personnes qui se destinent à des professions plus directement
reliées à la santé, soit plus spécialement à
des personnes handicapées. J'aimerais que vous précisiez un peu
cela. À la lumière de votre expérience, quels sont les
secteurs où il y a des besoins de formation plus accentués, par
exemple, ceux sur lesquels on devrait davantage mettre l'accent auprès
des universités?
M. Mercure: Je vais demander à un de mes collègues,
Normand Lucas, de traiter de cette question.
M. Lucas (Normand): D'abord, il faudrait dire qu'il n'y a pas,
comme tels, de programmes de formation qui soient vraiment orientés vers
les besoins des personnes handicapées. C'est peut-être une des
premières revendications que l'on voudrait voir s'accomplir, dans le
sens qu'il serait important de mettre l'accent sur des dimensions comme
l'adaptation et la réadaptation de la personne handicapée et de
voir ces deux volets développés dans le cadre d'un programme de
formation où, finalement, les finissants seraient mieux
préparés à
répondre aux besoins des personnes.
En deuxième partie, on doit dire que l'on cherche aussi à
définir un rôle complémentaire aux programmes qui sont
déjà en place dans le sens où il est important de chercher
à bien comprendre la problématique de la personne
handicapée et d'être en mesure, dans le cadre des services
existants, autant au niveau des corporations professionnelles actuelles que
dans le cadre des programmes de formation actuels, de chercher à bien
comprendre quels sont les besoins de la personne handicapée et,
finalement, de définir des modalités de traitement ou de
fonctionnement pour que, dans le cadre de l'action professionnelle qui serait
exercée par le finissant de l'université, on puisse vraiment
tenir compte des besoins.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Allez, M, le
vice-président.
M. Mercure: II y a donc, effectivement, deux dimensions: une
dimension pour les spécialités qui sont éventuellement des
intervenants dans la problématique des personnes handicapées et
une autre dimension pour l'ensemble des professionnels qui rendent des services
à la population en général.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, Je
reconnais maintenant la députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Au nom de ma
formation politique, M. le vice-président, messieurs, cela nous fait
plaisir de vous recevoir à cette commission.
Dans votre mémoire, vous présentez la situation de la
personne handicapée comme étudiant dans des universités,
parce que c'est ce qui nous concerne. Je sais que vous avez fait les
mêmes représentations pour les autres niveaux d'enseignement. Je
trouve cela particulièrement important, parce que je pense que tous
savent que, parmi les mesures qui ont pour effet d'améliorer la
qualité de vie des personnes handicapées, la scolarisation
demeure une des plus utiles et des plus efficaces. Dans ce sens, les
barrières physiques ou architecturales ou pédagogiques qui ont
comme effet de nuire à cette intégration doivent être
examinées avec beaucoup de soin.
Il faut reconnaître aussi, bien qu'on ne le dise pas souvent, que
la personne handicapée qui est plus scolarisée devient, ou a plus
de chance de devenir autonome. Cela demeure un investissement pour la personne
comme pour la société. C'est pourquoi j'ai plaisir ici à
vous recevoir, à vous entendre.
J'aimerais peut-être que vous m'apportiez quelques
éclaircissements sur deux aspects de votre mémoire. Vous parlez
de la formation et vous parlez de l'accès à une formation
à distance pour les personnes qui ne peuvent se déplacer: "Les
personnes handicapées qui ne peuvent se déplacer de chez elles
à cause de limitations fonctionnelles trop importantes devraient pouvoir
bénéficier elles aussi d'une possibilité de formation
adaptée à leurs besoins.".
Vous soulignez le fait que les milieux collégial et universitaire
n'aient pas suffisamment adapté leur programmation de cours à
distance pour répondre aux besoins de cette clientèle. Est-ce que
vous avez déjà fait des représentations devant la
Téléuniversité?
M. Mercure: Est-ce que Robert, tu pourrais...
Le Président (M. Parent, Sauvé): M.
Capistran.
M. Capistran (Robert): Nous avons déjà
rencontré à quelques reprises la
Téléuniversité. Toutefois, le système n'est pas
toujours approprié. Ce n'est pas n'importe qui qui peut suivre un cours
à distance, qui peut, de chez lui, à partir de documents et de
rencontres avec un animateur, faire lui-même le processus
d'apprentissage. Très souvent, cela demande des explications
supplémentaires. Si vous avez déjà essayé de faire
l'expérience d'un cours par correspondance, c'est assez difficile
à suivre. En plus, la Télé-université n'apporte pas
nécessairement un diplôme universitaire qui permet d'exercer une
profession. C'est une autre difficulté.
Mme Blackburn: Ce que vous demandez irait plus loin que ce
qu'offre la Téléuniversité, si je comprends bien. À
quoi faites-vous référence? En page 36, cela continue à la
page 37, qu'est-ce que cela pourrait vouloir signifier, cet enseignement
à distance. Est-ce que c'est l'enseignement individualisé? Si la
Télé-université, si l'enseignement à distance n'est
pas adéquat comme mode de formation, à quoi pensez-vous? C'est
â la fin de la page 36, au début de la page 37.
M. Mercure: Normand, voudrais-tu apporter des précisions
sur cette question?
M. Lucas: Je pense que la dernière phrase de la page 37
est assez révélatrice de ce point de vue, là où
l'on parle de média substitut. De façon classique, on peut
constater que les cours diffusés par la
Télé-université ne sont pas traduits en langage gestuel,
par exemple, pour les personnes sourdes. On pourrait développer un
ensemble de programmes ou un ensemble de cours qui correspondrait bien aux
besoins des personnes handicapées, particulièrement des personnes
aveugles dont M. Jacques qui est ici ce soir
l'un des représentants.
On pourrait, par exemple, penser à offrir des notes de cours sous
la forme braille. C'est une des possibilités. On pourrait encore
sous-titrer de façon systématique les cours actuellement
diffusés afin de permettre, par exemple, aux personnes sourdes de
régler leur problème de communication. C'est le genre de
communication auquel on pensait de façon plus spécifique.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci.
Mme Blackburn: Je n'avais pas vraiment lu cela. Vous faisiez
référence aux "personnes handicapées qui ne peuvent se
déplacer de chez elles à cause de limitations fonctionnelles trop
importantes".
M. Lucas: D'accord. Dans le cadre des personnes qui ont des
limitations fonctionnelles importantes, il faut souvent savoir aussi que ces
personnes ont besoin d'appareils spécialisés ou particuliers pour
être en mesure de fonctionner dans un environnement normal. Ces appareils
sont souvent très spécifiques et difficilement adaptables
à des médias normaux comme celui de la
Télé-université, par exemple. C'est aussi dans cet esprit
qu'est faite la remarque.
M. Mercure: Nous avions aussi une mention à l'intention
des personnes alitées qui sont quand même en mesure de faire des
études universitaires, mais qui sont alitées, qui peuvent se
déplacer uniquement en civière, et pour lesquelles des moyens
d'accès autres que le déplacement seraient utiles.
Mme Blackburn: Bien. Une dernière question pour moi;
ensuite, je laisserai à ma collègue de Marie-Victorin la
possibilité de poursuivre.
Vous parlez de développement de la recherche et de
détermination des champs de recherche prioritaires. Vous avez à
ce sujet fait une longue réflexion. Avez-vous réussi à
intéresser le monde universitaire à ces créneaux de
recherche que vous estimez prioritaires?
M. Mercure: M. Lucas.
M. Lucas: II faut dire qu'actuellement la réflexion est en
cours à l'office sur le développement des programmes de
recherche. Les universités sont des partenaires très importants
dans le cadre de ce développement, dans le sens que c'est souvent chez
elles qu'on va chercher à identifier les programmes à
caractère de recherche fondamentale pour ce qui est, par exemple, de
l'intégration de la personne dans son milieu, du développement
technologique et aussi des phénomènes d'adaptation et de
réadaptation.
C'est dans cet esprit qu'on cherche à définir ce que
pourraient être les objectifs, à les affiner et, ensuite, dans une
seconde période, à rencontrer les différents intervenants
et, soit dit en passant, les universités et les centres de recherche
aussi, pour les associer et les intéresser à cette
démarche.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. Je
reconnais maintenant Mme la députée de Jacques-Cartier.
Mme Dougherty: Merci, M. le Président. Pour mieux situer
notre débat ce soir, voudriez-vous nous préciser le mandat de
l'office? Je sais que, dans votre mémoire, il n'y a pas beaucoup de
chiffres qui démontrent les besoins, surtout au niveau secondaire. Mais
pourriez-vous me préciser si vous êtes surtout
préoccupés par les besoins des personnes handicapées
physiquement ou est-ce que votre mandat est plus large? À
l'intérieur de votre mémoire, votre mandat vise les personnes
ayant des troubles d'apprentissage. Évidemment, elles ont des besoins
similaires à ceux des personnes ayant un handicap physique. (20 h
45)
M. Mercure: Le rôle de l'OPHQ doit s'exercer autant pour
les personnes qui ont des handicaps intellectuels ou du psychisme que pour les
personnes qui ont une déficience physique ou encore une
déficience sensorielle. Cependant, quand on parle de troubles
d'apprentissage, il y a autre chose. Il y a des gens qui ont des troubles
d'apprentissage par suite de difficultés temporaires et qui ne font pas
nécessairement partie de notre clientèle. Les gens de notre
clientèle sont des gens qui souffrent d'une déficience et qui ont
des limitations fonctionnelles d'une durée assez permanente. Dans les
clientèles scolaires, il y a des troubles d'apprentissage qui ne visent
pas nécessairement notre clientèle. Je voulais faire cette
précision. Dans les recommandations faites à cette commission, il
est bien entendu que, lorsqu'on parle d'accès à
l'université, la clientèle des personnes ayant une
déficience intellectuelle n'est pas directement visée; elle est
visée indirectement par les programmes. Comme on l'a mentionné
tout à l'heure, on voudrait que les programmes reflètent les
besoins de toutes les personnes handicapées. Quand il s'agit
d'accessibilité, c'est bien le cas qu'on pense davantage aux personnes
ayant des handicaps physiques ou sensoriels.
Mme Dougherty: Très bien. Votre mémoire fait
état de nombreux problèmes que rencontrent les personnes
handicapées
surtout sur le plan physique lorsqu'elles veulent poursuivre des
études postsecondaires. Votre organisme a-t-il l'impression que les
universités font trop peu pour faciliter l'accès de ces personnes
à ces études? Si oui, y a-t-il un manque de fonds, un manque de
volonté, de sensibilisation ou de concertation?
M. Mercure: D'abord, on est convaincu que les universités
comme d'autres milieux ne font pas un effort suffisant pour rejoindre notre
clientèle. Je dois dire que ce n'est pas nécessairement à
cause de mauvaise volonté; directement, ce n'est pas toujours
relié à un manque de fonds. II s'agit peut-être de
mentalités qui font que les universités sont habituées
à avoir des clientèles qui sont directement déjà
présentes et habituellement des clientèles qui vont sur le
marché du travail, alors que les personnes handicapées,
jusqu'à maintenant, ont eu moins accès au marché du
travail. Mais c'est une situation qui connaît une évolution
rapide. C'est pour cela que dans notre mémoire - je n'en ai pas fait
état ce soir - on touche la question des normes d'accès à
l'université. On voudrait que ces normes d'accès puissent prendre
en considération qu'un certain nombre de personnes handicapées
n'ont pas eu la possibilité d'accès à cause d'un manque de
stimulation précoce et d'un manque d'adaptation du réseau
scolaire. Il y a des exemples très concrets de personnes qui ont des
talents pour devenir des musiciens célèbres mais qui n'ont pas
les prérequis pour entrer à l'université. Parmi les
personnes handicapées, il y a de ces gens qui n'ont pas le bagage de
connaissances académiques préalables. On voudrait que les
universités pensent à ces gens-là aussi. Je pense que ce
ne sont pas toujours les budgets, mais cela peut l'être dans certains
cas. C'est pour cela qu'on s'adresse à cette commission. On vaudrait que
les recommandations budgétaires tiennent compte de ces dimensions
d'accessibilité, de prêts et bourses. On voudrait, par exemple,
que les dépenses additionnelles des étudiants qui sont
directement reliées au handicap puissent être ajoutées
à l'aspect bourse. Si on prévoit que les personnes
handicapées seront sur le marché du travail, on voudrait qu'elles
soient, comme toutes les autres, considérées dans l'aspect
prêt, ce qui n'est pas le cas maintenant. Ce sont des ajustements aux
mentalités, ce sont des préoccupations à un
développement nouveau de notre clientèle qu'on voudrait bien
présents à l'esprit des administrateurs du réseau
universitaire.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. Mercure.
Y a-t-il d'autres interventions?
Mme Dougherty: Oui, une dernière question concernant
l'adaptation nécessaire du programme postsecondaire. Est-ce que vous
pourriez nous citer des exemples, des modèles, hors du Québec
peut-être, où les programmes sont mieux adaptés aux besoins
des handicapés?
M. Mercure: Personnellement, je ne suis pas directement
préparé à répondre à cette question. Je ne
sais pas si quelqu'un d'autre peut citer des exemples. Ayant été
président de l'Association canadienne en déficience
intellectuelle pendant quelque temps, j'ai eu l'occasion de constater que
plusieurs milieux - je ne parle pas particulièrement du milieu
universitaire - sont beaucoup plus avancés en ce qui concerne
l'adaptation domiciliaire. J'imagine que cette préoccupation peut
être véritable pour les domiciles en milieu universitaire.
Aujourd'hui, il y a des efforts considérables faits à Toronto
pour adapter des domiciles à des personnes qui sont pratiquement
incapables de bouger. J'ai visité personnellement des logements de
personnes qui contribuent considérablement à notre vie
associative et qui sont capables de contribuer à beaucoup de secteurs de
notre société mais qui sont handicapées au point que seuls
les doigts bougent un peu. Elles arrivent quand même à un
degré d'autonomie important quand on adapte leur environnement. Je ne
sais pas si d'autres personnes peuvent donner des exemples,
particulièrement en milieu universitaire?
Le Président (M, Parent, Sauvé): M.
Lucas.
M. Lucas: À titre de renseignement, j'aimerais vous citer
l'Université de Berkeley en Californie qui est un exemple hors pair d'un
lieu de très haut savoir totalement accessible aux personnes
handicapées qui, d'ailleurs, sont extrêmement actives dans leur
milieu et revendicatrices pour ce qui est de la définition de leurs
besoins et de l'adaptabilité de leur environnement à leurs
besoins spécifiques.
Les étudiants sont répartis dans plusieurs
facultés. On en rencontre un peu partout. C'est un milieu vraiment actif
à ce point de vue-là. Ce que je peux vous raconter, c'est une
expérience personnelle. À ma connaissance, il n'y a effectivement
pas de relevé qui ait été fait de façon
systématique sur l'environnement. Je pourrais au moins vous citer ce
cas-là qui est tout à fait exceptionnel, je pense, du point de
vue de la qualité de vie de la personne handicapée.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. Lucas.
Je reconnais maintenant la députée de Marie-Victorin.
Mme Vermette: M. le Président, ma question est beaucoup
plus proche de nous.
Compte tenu des services d'accueil et de référence qui se
donnent actuellement dans des établissements postsecondaires,
pourriez-vous nous décrire un peu l'expérience? Serait-il
possible que cette expérience soit reproduite dans le milieu
universitaire?
M. Mercure: Les expériences d'accueil dans les
collèges, par exemple?
Mme Vermette: Oui.
Le Président (M. Parent, Sauvé):
D'abord, est-ce que vous en connaissez? Il y a eu un effort,
réellement.
M. Mercure: On n'est pas arrivé à une connaissance
directe de ces questions-là, sauf qu'on sait que des collèges
sont, mieux équipés que d'autres.
M. Capistran: II existe deux collèges
spécialisés pour certains types de déficience.
Nécessairement, ils ont pu mettre en place des services d'accueil
beaucoup mieux que des universités dispersées.
Généralement, ces services d'accueil vont impliquer beaucoup
d'autres étudiants. Ce seront des associations d'étudiants qui
vont recevoir d'autres étudiants handicapés et qui vont les aider
aussi durant leurs études. Il est peu probable que tout ce dont une
personne handicapée peut avoir besoin dans un cours universitaire
l'université puisse Je lui fournir entièrement.
Généralement, il y a le soutien des autres compagnons et
compagnes qui vont aider, par exemple, à la lecture de certains textes,
à prendre des notes. À ce moment, i! est assez impartant qu'il y
ait des étudiants qui aient un service d'entraide.
Cela existe dans certains cégeps, surtout dans des cégeps
qui sont spécialisés pour recevoir les personnes
handicapées.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Vous voulez dire
que jusqu'à maintenant, par l'expérience que vous avez connue au
niveau des collèges, l'encadrement était beaucoup plus de
l'encadrement humain que de l'encadrement matériel, que de l'accueil
matériel.
M. Mercure: M. Marius Jacques voudrait peut-être
compléter la réponse.
M. Jacques (Marius): Pour avoir passé par
l'université, il y a trois ans maintenant, je peux vous dire qu'au
début il y a une grosse démystification à faire parce
qu'on n'est quand même pas beaucoup de personnes handicapées qui
fréquentent les universités. Et moi, pour avoir passé par
l'Université Laval, lorsqu'on réussit à faire comprendre
et à la direction... D'abord, l'accueil; je pense que du
côté de l'accueil on est très bien reçu dans les
universités. On tente beaucoup de nous aider. Souvent, c'est qu'on ne
sait pas trop comment faire. Même si ce sont des écoles de haut
savoir, je pense que la réadaptation cela commence là où,
justement, le savoir de certains finit.
Moi, mon expérience à l'université m'a permis,
justement, d'apporter à l'université des commentaires. Entre
autres, je me souviens que, quand j'allais à la bibliothèque,
évidemment, je ne pouvais pas lire les livres comme les autres, mais,
s'il y avait eu une télévisionneuse à la
bibliothèque, j'aurais pu le faire. En m'adressant à
l'Association des anciens de Laval, j'ai réussi à leur faire
investir 10 000 $ pour équiper la bibliothèque d'une
télévisionneuse, d'un magnétophone, etc. Je pense que,
même avec les anciens, cela a été aussi pour eux une
espèce de démystification. Il ne faudrait pas qu'on se fie
uniquement sur le gouvernement pour faire cela ou sur les universités.
Je pense aussi que ce sont les personnes handicapées elles-mêmes
qui doivent faire ce travail. Cela fait partie de l'intégration sociale.
Quand on parle de vouloir être intégré, moi, j'étais
quand même vice-président de ma classe à
l'université, je disais aux gens: Écoutez, il y a une affaire. Je
pense que tout le monde ici on ne sait pas trop où on va quand on nomme
un vice-président qui ne voit pas clair!
Je pense que les problèmes se posent surtout en ces termes. Je
pense que ce n'est pas de la mauvaise foi ni de la mauvaise volonté.
C'est l'habitude qu'on n'a pas parce que, vous savez, autrefois, on campait les
personnes handicapées et, moins on faisait de bruit, mieux
c'était. Les gens nous voient arriver à l'université et
cela les surprend.
Je me permettrai de terminer avec une petite anecdote. Un soir je
suivais un cours, je me souviendrai toujours du professeur qui était une
dame qui vint me trouver à la pause-café en me disant: Coudon,
comprenez-vous'' J'ai dit: J'entends et je comprends. Je n'ai pas trop de
problèmes au cerveau. C'est avec les yeux que j'ai des problèmes.
Je dis: Attendez les examens. Justement, quand est arrivé le jour des
examens, j'ai été obligé, moi aussi, de faire composer
l'université, dans le sens que je ne pouvais pas passer mes examens dans
la même classe que les autres. Je me suis organisé pour que
l'université envoie mes questionnaires au Centre Louis-Hébert et
je me suis organisé aussi pour qu'on me consente une période de
temps plus longue parce que je ne pouvais pas exécuter les mêmes
travaux dans la même période de temps que les élèves
dits normaux. Finalement, j'ai traversé toute ma période
universitaire sans aucun problème. Je pense que les professeurs en ont
appris autant que moi à travailler avec des personnes
handicapées.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci,
M. Jacques, de votre témoignage. Madame. (21 heures)
Mme Vermette: J'aurais une dernière question à vous
poser: Qu'en est-il, actuellement, de l'évaluation que vous faites de la
situation des barrières architecturales dans le milieu universitaire?
Est-ce que cela répond réellement aux besoins des personnes
handicapées? Est-ce qu'on fait vraiment une évaluation? Vous
êtes habitués de faire des plans de services. Est-ce qu'on fait
vraiment des évaluations à partir de vos plans de services?
Le Président (M. Parent, Sauvé): M.
Mercure.
M. Mercure: On n'a pas fait une évaluation exhaustive des
bâtisses universitaires. Cependant, on s'est fait dire aà
plusieurs reprises que, dans bien des milieux, à l'université,
les bâtisses elles-mêmes étaient accessibles, mais certains
laboratoires ou certaines salles de cours ne l'étaient pas. Cela rend
difficile l'accès à tous les programmes de l'université.
Je ne sais pas si Robert veut ajouter quelque chose.
M. Capistran: II y a aussi tout le problème de la
signalisation, principalement pour les gens qui ont une déficience
visuelle, mais, le plan de services, c'est le plan d'une personne.
Généralement, cela ne fait pas tellement référence
à l'accessibilité des édifices publics. L'office ne fait
pas de plan de services pour l'accessibilité des édifices
publics; il devrait y avoir une loi et des règlements à ce
sujet.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Je vous remercie.
Une dernière intervention de la part de la députée de
Chicoutimi.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. le
président et messieurs, au nom de ma formation politique, je voudrais
vous remercier pour votre contribution aux travaux de cette commission. Bien
qu'étant assez sensibilisée à votre situation, pour avoir
eu l'occasion de vous rencontrer à quelques reprises, je dois dire qu'il
n'est pas certain qu'on aurait pensé à cette clientèle
particulière si vous n'étiez pas venus nous présenter vos
demandes ou faire état des problèmes que posait, pour les
personnes handicapées, la fréquentation des maisons
d'enseignement.
Alors, votre contribution aux travaux de cette commission aura
été pour nous fort utile et très enrichissante.
Évidemment -sûrement que le ministre ne manquera pas de le
rappeler - certaines mesures ou certaines recommandations contenues dans votre
rapport exigent des investissements, sinon majeurs du moins assez importants
dans certains cas. Je pense particulièrement aux barrières
physiques dans certains établissements. On sait que c'est relativement
eoûteux.
Par ailleurs, j'estime que les montants d'argent qu'on place ou qu'on
investit dans l'accès à l'enseignement supérieur pour les
personnes handicapées et en éducation de façon
générale, c'est un investissement et non pas des dépenses.
Alors, je vous remercie de votre participation; vous nous avez rendu un service
qu'aucun autre organisme ne pouvait nous rendre, en l'occurrence.
Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, madame. Je
reconnais maintenant le député d'Argenteuil, ministre de
l'Enseignement supérieur et de la Science.
M. Ryan: Je me permettrai seulement, M. le Président, de
rappeler à ma collègue, la députée de Chicoutimi,
qu'un investissement se solde aussi par des dépenses. On a tendance
à faire des distinctions faciles entre dépenses et
investissement. Un investissement, c'est une dépense qu'on reporte sur
une période plus longue, mais qui doit se solder, chaque année,
par des déboursés concrets aussi. On ne peut pas, sur toute la
ligne, toujours reporter les choses à plus tard. À un moment
donné, on décide de les comptabiliser plus vite pour avoir une
meilleure idée des obligations qu'on contracte aussi. Je conviens qu'il
y a une distinction entre les deux.
J'étais aux états généraux sur
l'éducation, en avril dernier. Je me souviens que le président de
l'Association des enseignants protestants du Québec, qui est un de mes
bons amis, avait eu un succès de foule avec cette distinction. Mme
Blackburn s'en souvient probablement, c'est-à-dire Mme la
députée de Chicoutimi. Je lui avais dit après: Je pense
que ta distinction est brillante, mais elle ne nous avance pas beaucoup dans la
solution du problème.
Ceci dit, je voudrais féliciter d'abord M. Plante de
l'expérience qu'il a faite, qui est une leçon pour nous tous. Je
le félicite bien cordialement. Est-ce que je pourrais vous demander dans
quelle discipline vous avez étudié, M. Plante?
M. Jacques: Marius Jacques. M. Ryan: Pardon. M.
Jacques.
M. Jacques: J'ai étudié en relations publiques et
en administration.
M. Ryan: Magnifique! Je vous félicite. Je pense que vous
nous avez dit des choses très intéressantes sur la manière
dont les services et le contexte général de l'université
peuvent être adaptés aux besoins des personnes handicapées
sans que cela
entraîne nécessairement et automatiquement des
déboursés pour les autorités publiques. Vous avez
montré comment a l'Université Laval, par l'initiative des
diplômés de l'université, si j'ai bien compris, vous aviez
réussi à obtenir des améliorations très importantes
en matière d'instruments dont vous aviez absolument besoin pour la
lecture de textes, par exemple, et pour le travail que vous aviez à
faire. C'est formidable et c'est une des voies que nos universités
devront développer à l'avenir. Elles devront recourir davantage
à des ressources qui ne sont pas nécessairement et surtout pas
exclusivement celles du gouvernement. De ce point de vue, je pense que vous
nous avez apporté un témoignage qui est bien simple, bien direct
mais extrêmement intéressant pour nous qui avons la
responsabilité de chercher des solutions au problème du
financement des universités par la mobilisation de toutes les
énergies et de toutes les ressources possibles. C'est une voie qui est
modeste à court terme, mais qui, à long terme, peut
s'avérer profitable. Je ne veux pas profiter de cela pour
éliminer et essayer de faire oublier d'autres responsabilités qui
incombent au législateur et au gouvernement. C'est une dimension que
vous nous donnez l'occasion de signaler et je l'apprécie vivement.
En terminant, je voudrais vous dire tout le respect que nous inspire le
travail que vous accomplissez à l'Office des personnes
handicapées du Québec. C'est un travail considérable et
nous sommes à pied d'oeuvre encore dans beaucoup d'aspects de ce
travail. Je pense que nous devons cheminer ensemble. Ne vous gênez point
si, dans le secteur de l'éducation à tous les niveaux, il y a des
problèmes que vous jugiez devoir porter à notre attention;
faites-le en toute liberté. Nous serons très heureux de vous
entendre et de vous dire exactement ce qui peut être fait à court
terme, à moyen terme et à long terme également. Merci
beaucoup et meilleurs voeux de bon travail à l'Office des personnes
handicapées du Québec et à toutes les personnes qui sont
ici avec la délégation de l'Office des personnes
handicapées du Québec ce soir.
Le Président (M- Parent, Sauvé): Merci beaucoup, M.
le ministre. Merci beaucoup, messieurs, d'avoir répondu à
l'invitation de la commission parlementaire de l'éducation.
Celle-ci va maintenant ajourner ses travaux à demain matin, 10
heures, alors qu'elle accueillera - on pourra dire que demain est une
journée thématique - les gens de la région de Chicoutimi.
Elle commencera à 10 heures avec l'Université du Québec
à Chicoutimi et un Groupe d'organismes de la région 02. Dans
l'après-midi, nous allons accueillir le Syndicat des professeurs de
l'Université du Québec à Chicoutimi suivi de l'Association
générale des étudiants de l'Université du
Québec à Chicoutimi. Alors, la commission ajourne ses
travaux.
(Fin de la séance à 21 h 8)