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Version finale

33e législature, 1re session
(16 décembre 1985 au 8 mars 1988)

Le mardi 6 octobre 1987 - Vol. 29 N° 39

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Consultations particulières sur les projets de règlement des comités confessionnels du Conseil supérieur de l'éducation


Journal des débats

 

(Dix heures onze minutes)

Le Président (M. Parent, Sauvé): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. le secrétaire de la commission parlementaire de l'éducation, est-ce que nous avons quorum?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président, nous avons quorum.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

Le Secrétaire: M. Doyon (Louis-Hébert) remplace M. Khelfa (Richelieu).

Le Président (M. Parent, Sauvé): Alors, le député de Louis-Hébert agit en tant que remplaçant du député de Richelieu.

M. le député de Louis-Hébert, bienvenue à cette commission.

Avant de débuter, je voudrais rappeler aux membres et à nos invités le mandat de la commission, à savoir: tenir des consultations particulières dans le cadre de l'étude des projets de règlement suivants, publiés dans la Gazette officielle du Québec le 13 mai 19B7:

Le règlement du comité protestant du Conseil supérieur de l'éducation sur les institutions d'enseignement reconnues comme protestantes.

Le règlement sur la qualification des enseignants chargés de l'enseignement religieux catholique dans les écoles primaires et les écoles secondaires publiques ou privées autres que les écoles reconnues comme catholiques.

Le règlement sur la reconnaissance comme catholiques et le caractère confessionnel des écoles primaires et des écoles secondaires du système scolaire public.

Le règlement sur la reconnaissance comme catholiques et le caractère confessionnel des institutions d'enseignement privées, du primaire et du secondaire.

Organisation des travaux

Dans le cadre de cette consultation, l'article 170 du règlement de l'Assemblée nationale précise que la commission peut inviter des organismes à donner leur opinion sur la question qu'elle examine. Ainsi, dans le présent mandat, la commission a invité environ quarante organismes à lui soumettre un mémoire sur les projets de règlement à l'étude. Au-delà d'une vingtaine d'organismes ont répondu à notre invitation et nous allons les entendre au cours des prochains jours.

Ce matin, nous débuterons avec des déclarations d'ouverture de la part du ministre de l'Éducation ainsi que de la porte-parole de l'Opposition. Dans l'ordre - j'espère que ce sera dans l'ordre - nous entendrons le comité catholique du Conseil supérieur de l'éducation, le comité protestant du Conseil supérieur de l'éducation, l'Assemblée des directeurs et directrices des offices diocésains d'éducation, le Mouvement pour une école moderne et ouverte ainsi que le Mouvement laïque québécois.

Nos auditions se poursuivront demain le mercredi 7 octobre et le jeudi 8 octobre. Nous prévoyons terminer ces audiences le 21 octobre 1987.

Je rappellerais aux membres de la commission que le ministre et la porte-parole officielle ont chacun trente minutes pour leur déclaration d'ouverture.

Je rappelle aussi à nos invités que chaque audition durera une heure, soit 15 minutes pour la présentation du mémoire et 45 minutes pour échanger des propos avec les membres de la commission. Nous ferons exception, pour le comité catholique et le comité protestant avec lesquels nous serons plus larges dans l'administration du temps prévu, étant donné que ce sont des gens qui ont préparé et qui viennent nous présenter et expliquer les projets de règlement.

Le temps des discussions sera partagé équitablement entre les deux formations politiques. Je vous rappelle que l'ordre des intervenants sera le suivant: nous entendrons l'organisme, puis le ministre sera invité à prendre la parole, suivi du porte-parole de l'Opposition et, ensuite, des députés.

Est-ce qu'il y a des motions préliminaires? S'il n'y a pas de motion préliminaire, j'invite immédiatement le ministre de l'Éducation, de l'Enseignement supérieur et de la Science à nous adresser la parole. M. le ministre.

Déclarations d'ouverture

M. Claude Ryan M. Ryan: M. le Président, je voudrais

tout d'abord remercier les députés du gouvernement et de l'Opposition de l'esprit de collaboration qui a rendu possible la tenue de cette consultation au sujet des projets de règlement concernant la reconnaissance des écoles comme catholiques ou protestantes et les qualifications devant être exigées des maîtres chargés de l'enseignement moral et religieux, catholique ou protestant soumis par les comités catholique et protestant du Conseil supérieur de l'éducation.

En participant à la consultation que nous inaugurons aujourd'hui, le gouvernement a voulu faire droit à deux exigences complémentaires. Saisi par le comité catholique et le comité protestant de projets importants de modification aux règlements actuels de ces comités concernant le caractère confessionnel des écoles, le gouvernement a examiné avec attention la démarche qui a précédé les propositions des comités confessionnels.

Après avoir obtenu à ce sujet toutes les explications requises, le gouvernement prenait à son compte les projets de règlement soumis par les comités confessionnels en les publiant à l'état de projet dans la Gazette officielle du 13 mai dernier. Le gouvernement était disposé à agir en se soumettant à l'exigence de prépublication, que définit désormais la loi des règlements, et voulait toutefois s'assurer que les règlements projetés répondent vraiment aux besoins d'aujourd'hui et aux attentes de la population.

Les premières réactions à la prépublication furent lentes à venir. Vers la fin de juin et le début de juillet, des réactions importantes commencèrent cependant à se manifester. Comme elles nous parvenaient en nombre croissant d'organismes représentatifs et directement intéressés que plusieurs de ces réactions mettaient en cause des aspects majeurs des projets de règlement, il nous a semblé, et en cela, il y eut heureuse convergence de vues entre l'Opposition et le gouvernement, que la façon la plus démocratique de tirer ce dossier au clair serait de le soumettre à l'examen de la commission parlementaire de l'éducation.

Je laisserai aux porte-parole des deux comités confessionnels le soin d'expliquer la nature des changements qu'ils proposent et les buts que poursuivent les comités confessionnels en proposant de nouveaux règlements concernant la reconnaissance des écoles comme catholiques ou protestantes et les qualifications devant être exigées des maîtres chargés de l'enseignement moral et religieux, catholique ou protestant ou de l'enseignement moral dans nos écoles.

Il m'incombe cependant d'indiquer dès le départ de notre démarche comment le gouvernement se situe non seulement par rapport au projet de règlement, mais aussi en regard du sujet plus large des rapports entre la religion et l'école. Je tenterai de le faire brièvement, non sans être conscient du caractère très délicat de ce sujet et des. nombreuses embûches auxquelles il peut donner lieu.

La démarche du gouvernement en ces matières procède tout d'abord d'une attitude de respect envers les valeurs religieuses et surtout envers la place majeure qu'elles ont historiquement occupée dans la vie collective du peuple québécois. Il n'entre certes pas dans la compétence du gouvernement de définir ces valeurs, encore moins de les imposer à la population. Le réalisme politique le plus élémentaire et l'honnêteté intellectuelle obligent cependant à constater la présence très importante des valeurs religieuses dans notre vie collective et le rôle généralement très bienfaisant qu'elles ont joué dans le développement de notre peuple.

L'expérience enseigne également que les familles religieuses, et particulièrement, au Québec, l'Église catholique et les Églises protestantes, ont été et demeurent des intervenants de premier plan dans le domaine de l'éducation. Certains voudraient que les valeurs religieuses se confinent étroitement au domaine personnel et privé. L'expérience enseigne au contraire que chaque fois qu'elles sont vivantes, les valeurs religieuses revêtent une dimension sociale, une portée institutionnelle, un caractère collectif dont la légitimité trouve sa source dans l'exercice libre des droits fondamentaux des personnes et des groupes.

L'école a été historiquement, au Québec, un lieu privilégié de rencontre entre le pouvoir politique et les Églises. Tandis qu'ailleurs, la rencontre de ces deux éléments donnait souvent lieu à des conflits aigus, elle a au contraire donné lieu au Québec à une longue et riche expérience de collaboration historique. Les Églises se sont toujours intéressées à l'éducation, bien souvent, avant l'État lui-même. Celui-ci a tendu, depuis un quart de siècle, à s'impliquer bien davantage dans le secteur de l'éducation. Il aurait pu en découler une opposition entre les deux éléments, voire une séparation radicale entre le champ d'action de chacun. Chaque fois que le débat a eu lieu, on a su, au contraire, faire l'économie de déchirements et de luttes stériles. On a plutôt choisi la voie de l'adaptation et de l'aggiornamento, si bien qu'en moins d'un quart de siècle, toutes nos universités, tous nos collègues publics sont devenus laïcs sans qu'il s'élève, à ce sujet, le moindre conflit d'envergure entre l'État et les Églises.

De même, dans le secteur de l'enseignement primaire et secondaire, le Québec s'est doté, en 1964, d'un ministère de l'Éducation qui exerce une très forte autorité sur tout te système public d'enseignement. Le changement s'est fait dans un climat d'ouverture et de

collaboration que l'on ne saurait oublier.

Ce rappel me paraît important pour bien saisir la signification des changements que le comité confessionnel propose à l'examen de la commission parlementaire. Ces projets de changement émanent, en effet, de deux organismes dont l'origine remonte aux changements institutionnels majeurs qui accompagnèrent la création du ministère de l'Éducation en 1964. La création du ministère de l'Éducation donna lieu à un large consensus dans l'opinion publique de l'époque, mais ce consensus ne fut acquis que moyennant la création parallèle d'un Conseil supérieur de l'éducation, au sein duquel devaient se retrouver deux comités confessionnels investis de pouvoirs substantiels pour veiller au caractère catholique ou protestant des écoles publiques.

La création des deux comités confessionnels fut un élément essentiel du pacte qui intervint alors entre le gouvernement et les familles religieuses. Le maintien des deux comités confessionnels et de l'essentiel de leurs pouvoirs et de leurs attributions faisait également partie de l'entente qui intervint en 1985 entre les évêques du Québec et le gouvernement du temps autour des dispositions de la défunte loi 3, relative aux valeurs morales et religieuses dans le système d'enseignement. Il y a donc, en ces matières, une tradition désormais fort longue de continuité, à laquelle ont d'ailleurs participé, dans une très large mesure, les deux principaux partis politiques présentement représentés à l'Assemblée nationale.

Le gouvernement est d'autant plus enclin à accueillir avec respect et ouverture les représentations des deux comités confessionnels que, depuis leur création, il y a près d'un quart de siècle, ils se sont toujours acquittés de leur tâche avec une conscience professionnelle, un tact et une modération exceptionnels. Les comités confessionnels sont investis par la loi de pouvoirs importants. Ces pouvoirs sont plus concrets, plus substantiels, soit dit en passant, que ceux du Conseil supérieur de l'éducation dont ils font pourtant partie. Les comités confessionnels ont exercé ces pouvoirs avec discernement et retenue. On ne saurait leur reprocher de s'être lancés dans le don-quichottisme ou la chasse aux sorcières.

À l'exemple des interventions auxquelles les comités confessionnels nous ont habitués, les modifications qu'ils proposent aujourd'hui d'apporter à leurs règlements respectifs concernant la reconnaissance des écoles comme catholiques ou protestantes et les qualifications devant être requises des maîtres chargés de l'enseignement moral et religieux, sont le fruit d'une démarche mûrie, d'un long processus d'évolution qui devait déboucher, tôt ou tard, sur un effort important de clarification.

Une précision s'impose à ce stade. Tandis que les règlements proposés par le comité catholique ont provoqué des réactions nombreuses et parfois vives, les règlements proposés par le comité protestant semblent, au contraire, donner lieu à un très large consensus au sein de la communauté protestante. Aussi, les remarques qui suivront visent-elles uniquement les projets de règlement proposés par le comité catholique. Cela ne veut pas dire, cependant, que le gouvernement serait moins concerné par le règlement très intéressant que met également de l'avant le comité protestant.

Nous parlons de plus en plus, depuis quelques années, et non sans raison, de mettre plus de rigueur, plus d'exigence, plus de vérité dans notre démarche éducative. Partout, la recherche de la qualité, de l'excellence et de l'authenticité est devenue un objectif majeur de notre système d'enseignement. Il ne suffit plus d'investir des milliards dans l'éducation, nous exigeons, avec raison, que ces sommes soient utilisées de façon judicieuse, que la qualité des services offerts corresponde à l'importance des sacrifices consentis par la collectivité.

Or, la place des valeurs religieuses dans l'école ne saurait échapper à cet effort de révision et d'approfondissement qui est devenu l'objectif majeur de l'action du gouvernement dans le secteur de l'éducation. Certains se satisferaient volontiers d'une présence sociologique, symbolique et endormante de la religion dans l'école. D'autres veulent, au contraire, que cette présence soit réelle, vivante et dynamique, qu'elle soit empreinte d'une qualité élevée, en un mot, qu'elle soit vraie sans pour cela porter atteinte aux droits fondamentaux de quiconque. C'est cette dernière approche que l'on retrouve dans les projets de règlement du comité catholique. Il me semble que, tout en réservant notre jugement sur les modalités concrètes des changements proposés, nous devrions souscrire à cette démarche et ce, pour diverses raisons que je voudrais préciser brièvement.

En premier lieu, le projet de règlement du comité catholique rappelle que la reconnaissance d'une école comme catholique devrait être le fruit d'une démarche libre engageant à la fois les parents immédiatement concernés, dans certains cas, au deuxième cycle du secondaire, leurs enfants et enfin, la commission scolaire compétente. Il prévoit qu'il devrait y avoir, tous les cinq ans, vérification du vécu confessionnel de l'école, suivie éventuellement, s'il y a lieu, d'une remise en question de son statut confessionnel. Le comité catholique demeure en outre investi du pouvoir que lui reconnaît déjà la loi de révoquer en tout temps une reconnaissance déjà accordée. Ce pouvoir n'a pas été exercé, à ma connaissance, depuis la

création du comité, mais lorsque interviendra la démarche de vérification du vécu confessionnel prévu par le nouveau règlement, il est probable que l'on veuille recourir plus fréquemment à ce pouvoir.

Les changements projetés permettront d'introduire un peu de fraîcheur et de mouvement dans ce domaine où a régné, jusqu'à maintenant, un Immobilisme dangereux, depuis la décision massive qui fut prise en 1974 de reconnaître d'un seul coup comme catholiques toutes les écoles alors existantes dans le giron des commissions scolaires pour catholiques. Sous le nouveau règlement, une procédure de vérification interviendra obligatoirement tous les cinq ans. Cela me paraît une amélioration majeure par rapport à la situation actuelle.

Quant à reconnaître une école comme catholique, le comité catholique veut aussi qu'elle soit réellement et vraiment catholique. Cela peut être dérangeant pour certains, mais, dans ce cas-ci, les inconvénients pouvant découler d'une clarté accrue doivent être préférés au risque d'enlisement et de dilution découlant de l'atmosphère d'imprécision et de flottement que l'on observe d'ores et déjà dans plusieurs endroits.

Nos écoles baignent très souvent, en matières religieuse et morale, dans un climat indistinct, imprécis et flottant qui n'est guère propice à une formation véritable. En durcissant certaines exigences, on risque de créer des situations difficiles en divers endroits, mais l'inverse est non moins préoccupant. En ne faisant rien, en laissant les choses aller leur petit bonhomme de chemin, on risquerait de se trouver tôt ou tard devant des centaines d'écoles qui n'auraient plus guère de catholique que le nom. Le comité catholique opte ici pour la rigueur et la vérité plutôt que pour l'apparence et la facilité. Il propose des exigences devant permettre d'assurer que l'école reconnue comme catholique ne le serait pas uniquement de nom. Il nous appartiendra de vérifier, en cours de route, la portée concrète de ses exigences et de les assouplir au besoin de manière qu'elle ne vienne pas en conflit avec d'autres droits fondamentaux. Mais, sur la nature même de la démarche proposée par le comité catholique, je ne puis qu'être d'accord, assuré que le réalisme bien connu de notre collectivité l'aidera à trouver en cours de route les compromis et les ajustements nécessaires comme elle l'a fait si souvent dans le passé.

L'équation entre école publique et école catholique sera toujours la source d'un certain malaise au plan de la logique pure, voire même au plan d'une vision égalitaire de la société et des institutions politiques pour laquelle j'ai beaucoup de respect. Mais cette équation fait partie de notre héritage collectif. En ces temps où un peu partout à travers le monde industrialisé les peuples sont à la recherche de racines perdues qu'ils ont trop vite et trop allègrement abandonnées, le temps serait mal choisi pour procéder à des chirurgies radicales du genre de celles que proposent certains organismes. La voie évolutive a toujours été la meilleure pour notre peuple. S'il est un domaine où nous devons nous souvenir de cette loi, n'est-ce pas celui de l'éducation?

Mieux centrée sur ses objectifs essentiels, mieux définie à partir de la volonté de ses clientèles immédiates, davantage consciente de sa mission, l'école catholique sera plus à l'aise pour donner sa mesure. Là où elle faillira à la tâche ou ne correspondra plus à la volonté des parents, ceux-ci seront libres de réclamer les changements nécessaires. L'école reconnue comme catholique le sera plus franchement et plus nettement si nous retenons le projet de règlement soumis par le comité catholique. Sera-t-elle pour autant moins ouverte, moins capable de respecter la divergence, moins apte à intégrer dans son sein des enseignants, des élèves et des parents qui ne partageraient pas intégralement ses visées éducatives dans leurs dimensions morales et religieuses? Certains entretiennent à cet égard des appréhensions que nous examinerons avec attention.

Mais je suis enclin à faire confiance aux personnes qui ont charge de nos écoles et qui en assumeront la responsabilité dans l'avenir. Déjà, nous vivons des centaines de situations où une "convivance" harmonieuse s'est implantée de fait entre élèves, enseignants et parents professant des valeurs religieuses ou morales différentes. Nous sommes beaucoup plus avancés en matière de "convivance" que nous ne semblons le croire. Je suis personnellement convaincu qu'une école catholique influençée par des parents et des éducateurs engagés saurait faire une place intéressante à des enseignants et à des élèves qui, sans partager toutes ces valeurs, voudront au moins se montrer respectueux à leur endroit. (10 h 30)

Je suis également convaincu que dans les écoles où les parents opteront plutôt pour un statut laïc de l'école, on trouvera le moyen de faire aussi une place convenable non seulement à l'enseignement de la religion mais aussi à des intervenants animés de convictions religieuses sincères et de respect pour autrui.

Il faut prendre comme un tout la démarche que propose le comité catholique. En même temps que le comité catholique invite à un resserrement des exigences en vue d'une plus grande vérité, il définit aussi des soupapes de sûreté qui permettront en tout temps l'exercice des droits fondamentaux de chacun et de chacune.

Je voudrais en terminant aborder deux

points qui me paraissent se rattacher directement au mandat confié à la commission parlementaire. Certains soutiennent que nous ne devrions pas procéder à l'adoption des nouveaux règlements tant que le gouvernement n'aura pas fait connaître et approuver les changements qu'il entend apporter au cours des prochains mois à la Loi sur l'instruction publique. Je comprends et respecte ce souci. Je veux cependant assurer qu'il n'y a aucune contradiction mais au contraire convergence intéressante entre les propositions du comité catholique et les projets du gouvernement concernant la Loi sur l'instruction publique.

Déjà, on retrouvait dans la loi 3 en matière de confessionnalité de très nombreuses dispositions qui recoupent sur bien des points le texte du règlement proposé par le comité catholique. Or, le gouvernement projette de suivre en ces matières une ligne de conduite sensiblement apparentée à celle que définissait la loi 3. Aussi n'y a-t-il pas lieu de s'inquiéter de contradictions possibles entre les règlements projetés et l'éventuelle loi renouvelée de l'instruction publique. Il y a plutôt lieu de parler de convergence anticipée.

D'autres estiment que le problème posé par le comité catholique, celui de l'authenticité de l'école publique catholique, n'est pas le vrai problème. Ils voudraient plutôt que le gouvernement entreprenne de remplacer par des garanties linguistiques les garanties confessionnelles définies dans la constitution canadienne. Ensuite, ajoutent-ils, il y aurait lieu de procéder à des ajustements correspondants dans le statut des commissions scolaires et des écoles.

Le gouvernement est loin d'être indifférent aux problèmes réels et sérieux qui découlent souvent des structures juridiques actuelles. Il a affirmé à maintes reprises sa volonté de remplacer éventuellement les commissions scolaires actuelles par des commissions scolaires linguistiques. Mais outre que la voie précise à emprunter pour atteindre cet objectif reste à définir, le changement souhaité ne ferait pas disparaître pour autant les besoins de vérité et d'authenticité religieuse au niveau de l'école auxquels veulent répondre les modifications proposées par le comité catholique. Même sous des commissions scolaires linguistiques, il faudrait en effet prévoir, comme le faisait d'ailleurs la loi 3, la possibilité d'écoles publiques qui voudraient être reconnues comme catholiques. Il faudrait également prévoir à l'intention de ces écoles des exigences et des modalités d'existence et de fonctionnement semblables à celles que propose le comité catholique dans le projet de règlement soumis à notre examen.

Pour toutes ces raisons et surtout parce que les milliers d'élèves qui fréquentent nos écoles publiques reconnues comme catholiques ou protestantes ont droit, ainsi que leurs parents, à ce que ces écoles soient fidèles à ce qu'elles annoncent, le gouvernement pense que le Qué.bec aurait intérêt et profit à pouvoir s'appuyer le plus tôt possible sur le nouveau règlement que propose les deux comités confessionnels. Il est cependant disposé à accueillir avec intérêt et attention toutes les représentations que l'on voudrait faire à cette commission dans le but d'améliorer ces projets, de les rendre plus solides, plus cohérents si possible, plus facilement applicables et mieux aptes à servir en définitive les fins très nobles pour lesquelles ils ont été conçus.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci beaucoup, M. le ministre. Je reconnais maintenant la porte-parole officielle de l'Opposition en matière d'éducation, la députée de Chicoutimi. Mme la députée.

Mme Jeanne L. Blackburn

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Je pense qu'il est d'abord nécessaire de rappeler que la tenue de la présente commission parlementaire résulte, en large partie, des démarches entreprises par l'Opposition en juin dernier. En effet, à la suite de la prépublication dans la Gazette officielle des projets de règlement des comités catholiques et protestants du Conseil supérieur de l'éducation, mon collègue le député de Laviolette, alors porte-parole de notre parti pour l'enseignement primaire et secondaire, a saisi la commission de l'éducation d'une proposition de mandat d'initiative concernant l'étude de ces projets.

Nous savons que le contrôle réglementaire fait partie des attributions des commissions parlementaires. Les députés membres de cette commission de l'éducation avaient là une occasion privilégiée de s'y consacrer.

L'importance du sujet, l'acuité des enjeux sous-jacents aux projets de réglementation, le fonctionnement et l'orientation de notre système scolaire justifiaient, à notre avis, notre démarche. Les réserves sérieuses, voire l'opposition exprimée par certains milieux à l'endroit des projets de règlement, nous ont aussi convaincus de la pertinence d'une consultation large et publique des intervenants intéressés et concernés par cette question.

Comme le ministre le rappelait tout à l'heure, le ministre a été comme nous l'objet de nombreuses représentations à cet effet. Il décidait finalement au mois d'août de répondre à notre demande en confiant à la commission parlementaire de l'éducation le mandat de tenir des audiences publiques sur les quatre projets de règlement.

Cependant, j'ai le goût d'ajouter ce

matin qu'à entendre ses propos, je reste sceptique par rapport aux résultats d'une telle consultation tant elle semble endosser la totalité du règlement qui est l'objet de discussions au sein de cette commission.

J'ose espérer quand même que lors de la décision de tenir cette commission parlementaire, le ministre était davantage mû par un désir de participation que par l'intention de s'en arroger les mérites.

Nous aurions pour notre part préféré la tenue d'une consultation générale plutôt que particulière. Finalement, le nombre d'intervenants qui expriment à n'en pas douter l'intérêt que manifestent les intervenants sur cette question nous laisse penser que les principaux intervenants auront quand même l'occasion, au cours de cette commission parlementaire, d'être entendus.

Il reste à savoir - je le rappelle - si l'exercice sera utile, si l'on tiendra compte du fruit de nos discussions ou s'il ne s'agira pas d'une autre de ces consultations bidon qui font la marque de commerce de ce gouvernement. Il serait peut-être utile de rappeler les commissions sur le lac Meech et les commissions sur le libre-échange, la commission sur le financement des universités et la reconnaissance des associations étudiantes.

Je ne saurais en ce moment passer sous silence le traitement accordé par l'actuel ministre de l'Éducation à tout ce dossier de la confessionnalité scolaire. Il a fait preuve, à notre avis, d'une complaisante inaction. Nous savons déjà qu'il a reporté trois fois le dépôt de son projet de réforme majeure de la Loi sur l'instruction publique.

Il semble maintenant que ce serait pour l'automne. Mais rien ne laisse présager qu'on y trouvera des réponses aux problèmes engendrés par le maintien de structures désuètes et même dangereuses, à certains égards. Tout ce que ce gouvernement pouvait faire, c'était de suspendre les procédures d'appel en rapport avec les jugements sur la loi 3 et l'école Notre-Dame-des-Neiges.

De plus, il s'est refusé à inclure dans les négociations constitutionnelles cette question ' de la confessionnalité scalaire et des contraintes que pose à l'évolution de notre structure scolaire l'article 93 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, comme le lui recommandait pourtant le Conseil supérieur de l'éducation.

En résumé, inaction sur le plan constitutionnel, désengagement au plan juridique et manque de volonté politique. Pourtant le Parti libéral a inscrit parmi ses engagements électoraux l'instauration de commissions scolaires linguistiques plutôt que confessionnelles. Point n'est besoin de rappeler le consensus développé à cet effet chez la grande majorité des intervenants du système d'éducation à l'occasion des discussions ayant entouré l'adoption du projet de loi 3.

Comme on le sait, celle-ci s'est vu invalider en vertu d'une constitution datant de 120 ans et inadaptée aux réalités d'aujourd'hui. Je ne répéterai pas ici les arguments en faveur de la déconfessionnalisation des structures scolaires si ce n'est pour rappeler qu'elle est dictée par l'évolution du Québec sur la voie du pluralisme sur le plan des valeurs, des cultures et de croyances. D'autre part, le maintien des structures confessionnelles a de lourdes conséquences dans la mesure où celles-ci contribuent à détourner vers les institutions anglophones que sont les commissions scolaires protestantes bon nombre d'allophones et même de francophones qui ne retrouvent pas dans les écoles franco-catholiques la même ouverture et le même respect du pluralisme. Un aménagement linguistique des structures scolaires offrirait les garanties nécessaires au renforcement de la communauté francophone sans pour autant menacer la communauté catholique.

Il serait peut-être utile de faire un certain rappel historique de l'évolution de cette question. Les comités catholique et protestant du Conseil supérieur de l'éducation, comme le conseil d'ailleurs, font partie de l'édifice mis en place lors de la réforme de l'éducation du début des années 'soixante. La législation scolaire québécoise actuelle leur accorde un rôle majeur, comme le rappelait d'ailleurs le ministre tout à l'heure, dans ce que l'on pourrait appeler l'encadrement de la réalité confessionnelle de notre système d'éducation. Leur pouvoir s'étend de l'approbation des programmes religieux, des manuels et du matériel didactique à la reconnaissance du caractère confessionnel des écoles primaires et secondaires, aussi bien publiques que privées, avec les prescriptions qui en découlent. C'est essentiellement de cette reconnaissance qu'il s'agit dans les propositions de réglementation soumises au gouvernement.

Les règlements présentement en vigueur sur les institutions d'enseignement confessionnel reconnues comme catholiques et les institutions d'enseignement confessionnel reconnues comme protestantes datent pour l'essentiel de 1974. Dans le cas du règlement du comité catholique, il a subi certaines modifications, comme on le sait, en 1983, afin de remplacer le régime de l'exemption de l'enseignement religieux catholique par un régime d'option entre cet enseignement et l'enseignement moral. Cela découlait des difficultés à faire respecter le droit à l'exemption au sein de certaines écoles et commissions scolaires et la nécessité d'offrir un véritable choix.

Par ailleurs, le présent gouvernement a aussi amendé ce règlement au début de cette année pour exempter en tout ou en partie

les élèves admis au nouveau programme d'études professionnelles, au cours d'enseignement moral et religieux catholique ou d'enseignement moral. Il s'agissait là d'une mesure d'harmonisation avec les modifications déjà introduites en ce sens par le régime pédagogique du secondaire. Le comité catholique poursuit en quelque sorte cette démarche de mise à jour en soumettant une nouvelle version du règlement sur la reconnaissance comme catholiques et le caractère confessionnel des écoles primaires et secondaires du système scolaire public auquel viennent se greffer deux autres projets de règlement sur la reconnaissance comme catholiques et le caractère confessionnel des institutions d'enseignement privé du primaire et du secondaire et sur la qualification des enseignants chargés de l'enseignement religieux catholique dans les écoles primaires et secondaires publiques ou privées autres que reconnues comme catholiques.

Bien sûr, il n'est nullement question pour nous de remettre en cause la pertinence d'une éventuelle actualisation de la réglementation en cette matière. Il faut cependant s'interroger sur l'opportunité d'agir maintenant en ces domaines, compte tenu de toute l'incertitude qui subsiste autour de la refonte des structures scolaires. La problématique de la reconnaissance d'écoles catholiques et la notion même de projets éducatifs catholiques sont susceptibles d'être définis différemment selon que les commissions scolaires demeurent confessionnelles ou deviennent linguistiques et neutres, selon que les écoles ont le libre choix d'être reconnues ou non comme catholiques; ce qui n'est pas le cas - faut-il le souligner? - sur les territoires de Montréal ou de Québec, en vertu des privilèges constitutionnels existants. (10 h 45)

C'est ce qu'exprime d'ailleurs le Conseil supérieur de l'éducation dans son avis de janvier 1986, qui se lit comme suit: "La réglementation du comité catholique a déjà introduit dans notre système d'éducation scolaire certaines garanties de liberté individuelle, une certaine ouverture à la pluralité, notamment en remplaçant le régime de l'exemption de l'enseignement religieux par un régime d'option." Mais dans l'économie actuelle de nos lois, tel que les jugements rendus nous la donne à comprendre, il n'y a pas, là où les besoins sont les plus criants, c'est-à-dire parmi les écoles administrées par les grandes commissions scolaires confessionnelles protégées - on parle de Montréal et de Québec - possibilité réelle d'avoir des écoles autres ou non confessionnelles conformes aux attentes de groupes autres. C'est à cette contrainte juridique que se sont heurtées pratiquement toutes les hypothèses envisagées depuis vingt ans pour répondre, particulièrement à Montréal, aux exigences croissantes de la pluralité.

Voilà donc le contexte dans lequel il nous faut examiner les règlements projetés. Sont-ils bien adaptés aux réalités du Québec de 1987? Donnent-ils place au nécessaire respect des convictions de chacun et des libertés inviduelles? Favorisent-ils une évolution harmonieuse de l'école québécoise afin qu'elle réponde mieux au défi éducatif de la pluralité, comme l'invite à le faire le Conseil supérieur de l'éducation dans un avis paru la semaine dernière? Une pluralité qui est celle de la configuration de plus en plus multi-ethnique et multiculturelle du Québec, mais une pluralité qui procède aussi de profondes transformations dans le contexte religieux du milieu catholique francophone lui-même et dont on retrouve des signes révélateurs dans la baisse généralisée de la pratique religieuse, où on estime qu'elle est de l'ordre d'environ 13 % dans la grande région de Montréal et d'environ 25 % dans la région de Québec, la diversité également des doctrines et des formes d'expérience religieuse, l'émergence de nouveaux mouvements religieux.

Dans son document de l'automne dernier, L'école catholique, situation et avenir, le comité catholique évoquait clairement ce défi pour l'école publique catholique de s'ouvrir à la pluralité. Ainsi qu'il l'exprimait, et je cite: Dans une société comme la nôtre où les jeunes seront de plus appelés à fréquenter des citoyens qui appartiennent à d'autres religions et à d'autres cultures, il est indispensable d'assurer ce que l'on pourrait appeler un apprivoisement mutuel. Il est nécessaire que chacun apprenne à découvrir sa propre identité en approfondissant ses convictions personnelles dans le domaine religieux comme dans les autres domaines. Il est nécessaire en même temps d'apprendre à respecter profondément l'identité et les convictions autres.

Avant d'aborder le contenu des projets du comité catholique, je dirai un mot de celui du comité protestant sur les institutions d'enseignement reconnues comme protestantes. Je remarque d'abord qu'un seul mémoire nous a été soumis à ce sujet par la Commission des écoles protestantes du grand Montréal et que ce mémoire endosse le projet de règlement dans son esprit et dans ses modalités. On peut donc penser que celui-ci convient aussi bien aux intervenants impliqués dans le réseau protestant. Cela s'explique évidemment par le contenu même du projet qui, malgré certaines modifications, demeure fidèle aux principes fondamentaux de la version en vigueur.

Il y a aussi tout le climat et les attitudes - je te rappelle - qui prévalent dans les écoles protestantes en matière

d'orientation religieuse. Ce n'est pas d'hier qu'elles accueillent des clientèles très diversifiées sur le plan de l'origine ethnique, des valeurs, des croyances. Elles ont su généralement offrir un climat empreint d'ouverture et de respect. Les projets de règlement du comité catholique ont suscité beaucoup plus de réactions, réactions qui reflètent les débats et à certains égards les tiraillements et les tensions que continue de susciter la confessionnalité scolaire dans le Québec francophone. Je dis "les projets", je devrais plutôt dire "le projet", car la quasi-totalité des mémoires s'intéresse exclusivement è celui portant sur la reconnaissance comme catholiques et le caractère confessionnel des écoles primaires et secondaires publiques. Les deux autres reprennent à peu près intégralement les dispositions pour la reconnaissance comme catholiques des institutions privées et la qualification des enseignants chargés de l'enseignement religieux catholique dans les écoles non reconnues comme catholiques.

Je m'attarderai maintenant à ce projet plus controversé qui consacre l'accentuation du caractère confessionnel de nos écoles. Tout à l'heure, le ministre, parlant de souplesse et d'adaption à la réalité d'aujourd'hui, ' nous disait que dans son prochain projet de loi sur la réforme de l'instruction publique, on retrouverait des dispositions de la loi 3 en matière confessionnelle qui n'entraient pas en contradiction avec l'avis du comité catholique. Je voudrais juste rappeler au ministre en passant que les dispositions prévues dans la loi 3 touchant la confessionnalité venaient s'harmoniser avec une structure linguistique et non confessionnelle. Je pense qu'il y a un monde entre les deux et que de vouloir faire l'inverse, c'est précisément tomber dans ce piège que pourrait constituer un renforcement du caractère confessionnel de l'école catholique, alors qu'on a une structure qui ne laisse pas tout à fait le choix, et particulièrement dans la région de Montréal et de Québec.

J'ai pris connaissance des quelque 25 mémoires qui nous ont été transmis et force nous est de constater que ce projet ne suscite pas un large enthousiasme. C'est là un euphémisme et même si l'on fait abstraction des organismes qui s'inscrivent d'une certaine façon en marge de la problématique actuelle par leur option en faveur de l'école laïque et des organismes qui voudraient nous amener sur la voie de l'intégrisme, les lignes de consensus apparaissent on ne peut plus minces. Je crois qu'il n'y a pas un article du projet qui ne suscite tantôt des objections de fond, tantôt des questions de clarification.

Les propositions de modifications sont nombreuses et souvent substantielles. Je n'ai pas l'intention d'en faire maintenant une synthèse. Je désire plutôt formuler un certain nombre d'interrogations que m'inspirent à la fois ma propre lecture du projet et la lecture des propositions des intervenants.

On peut d'abord se demander si le règlement présenté est trop ou insuffisamment explicite. D'un côté, certains intervenants pour la plupart engagés au niveau de l'éducation chrétienne, de l'animation pastorale ou liés de près à l'Église, accueillent positivement le projet dans la mesure où il favorise un encadrement plus rigoureux de la dimension confessionnelle dans les milieux scolaires, que ce soit au niveau de la définition du projet éducatif catholique, des exigences de qualifications des personnes chargées de l'enseignement religieux ou des services d'animation pastorale. Ils demandent néanmoins plusieurs clarifications que ce soit dans le texte lui-même ou par l'ajout de notes explicatives venant bien cerner le sens de divers articles.

De plus, la plupart des recommandations visent à resserrer les dispositions et à renforcer plusieurs exigences relatives à la gestion, si vous me permettez l'expression, du vécu confessionnel,, À l'inverse, tous les organismes qui regroupent les personnes chargées de l'administration scolaire estiment la réglementation trop contraignante, voire inapplicable, car elle introduit des procédures de gestion et de contrôle tatillon, déresponsabilisantes et contraires à l'autonomie des agents éducatifs. Ils souhaitent l'allégement des procédures et des contrôles et la disparition d'articles jugés superflus ou tracassiers.

Je me permets de rappeler au passage que ce gouvernement, il n'y a pas si longtemps, se targuait de réglementer et de légiférer mieux et moins. Ce nouveau règlement vient alourdir à n'en pas douter la réglementation déjà lourde au Québec.

Enfin, d'autres intervenants s'inquiètent plutôt des conséquences négatives de la définition d'un cadre confessionnel trop strict sur le plan du respect de la liberté de conscience des enseignants, du respect de la pluralité des croyances et des valeurs avec des risques potentiels de discrimination.

Autrement dit, le projet soumis en fait-il trop, pas assez ou les deux à la fois? Nous ne sommes pas convaincus qu'il ait trouvé le point d'équilibre dans un contexte où la quasi-totalité des écoles publiques demeureraient confessionnelles. Je voudrais le dire ici, dans un contexte où on aurait une structure linguistique, il m'apparaît évident qu'une école catholique aurait avantage à avoir un encadrement rigoureux qui respecte à la fois la qualité et la vérité.

Cependant, dans la structure actuelle pour laquelle on ne prévoit pas de changement prochain, on entretient des inquiétudes

importantes. C'est là tout un débat de fond que nous aurons l'occasion d'approfondir pendant cette commission. C'est du sens même et de la portée de la notion centrale du projet éducatif catholique dont il est question. La façon dont il est défini conditionne tout le reste.

Au-delà de cette problématique générale, de cette trame de fond, plusieurs aspects particuliers du projet attirent l'attention. Je me contenterai de souligner ici ce qui me semble le plus important. Concernant les procédures de consultations relatives à la reconnaissance confessionnelle, plusieurs mémoires déplorent leur caractère trop flou. Des balises plus précises seraient-elles souhaitables? Faut-il, par exemple, fixer un minimum de participation des parents à la consultation? Aussi, comme c'est le cas pour l'élection scolaire, un vote de 10 % de la population dont 50 % seraient en faveur, serait-ce suffisant?

De plus, il n'est nulle part question de la révocation du statut catholique d'une école. Il y a une évaluation mais on ne lit pas que cela pourrait mener à une révocation.

Par ailleurs, qu'est-ce que cela signifie concrètement un projet éducatif qui intègre les valeurs et les croyances de la religion catholique? Une école catholique qui s'affiche comme telle, comment cela se traduit-il en ce qui a trait à l'enseignement des matières autres que la religion? Comment concilier le caractère public de l'école et son caractère confessionnel? Faut-il demander à l'école d'en faire plus, par exemple, par l'animation pastorale en remplaçant ici les institutions qui devraient demeurer les premières responsables de l'inculcation de la foi et des valeurs religieuses, c'est-à-dire l'Église, mais aussi la famille.

En effet, si le milieu ne suit pas, c'est-à-dire l'Église et la famille, s'il ne se sent pas concerné par le projet éducatif dans sa dimension religieuse, celui-ci ne risque-t-il pas d'être désincarné? Par ailleurs, l'adhésion des diverses catégories de personnel à la foi catholique soulève des interrogations. Si cela semble aller de soi pour l'enseignant chargé de dispenser l'enseignement religieux catholique, l'interprétation de ce critère ne va pas de soi, comme plusieurs intervenants le soulignent. Par ailleurs, faut-il étendre cette exigence au directeur de l'école, à l'ensemble du personnel, comme certains le souhaitent?

Le projet reprend les dispositions introduites en 1983 au chapitre du régime d'option entre les enseignements religieux et moral. À l'expérience, favorise-t-il l'exercice réel du droit au libre choix? Que penser du ratio minimum de quinze élèves pour dispenser l'un et l'autre des enseignements? Le choix doit-il s'exercer à chaque ou au début de chaque cycle? Est-il acceptable que les mêmes enseignants puissent donner les cours de morale et les cours de religion? Je ne parle pas de morale catholique, évidemment.

La section du projet qui suscite le plus de commentaires et de polémiques est assurément celle des qualifications du personnel enseignant. Tandis que le comité protestant se contente de demander à l'enseignant une formation et une compétence pertinentes en matière d'enseignement moral et religieux protestant, le comité catholique fixe des exigences bien précises sous forme de formation créditée. On comprend que le comité désire, de cette façon, s'assurer de la compétence sur le plan à la fois des contenus et de la didactique des personnes dispensant l'enseignement religieux catholique au primaire et au secondaire. Mais cela n'est pas sans soulever beaucoup de questions et, disons-le, de sérieuses objections, que ce soit pour ce qui est de l'équilibre dans la formation de l'étudiant, du respect de la liberté de conscience du futur enseignant, des risques de discrimination dans l'embauche, des conséquences pédagogiques de l'avènement d'une nouvelle catégorie de spécialistes au primaire, des complications en termes d'organisation scolaire.

Je pense, ici, à tout le problème des affectations et des compléments de tâche. La question n'est pas simple. Par ailleurs, les neuf crédits exigés pour le primaire constituent, pour certains, un minimum, alors que, selon d'autres, c'est trop. Au secondaire, la disparité des exigences entre les deux cycles ne semble pas aller de soi. D'un côté, on propose de niveler les exigences de formation vers le bas à 30 crédits, de l'autre, de les majorer vers le haut à 60 crédits. Par ailleurs, je ne cacherai pas que la lecture des mémoires des intervenants du milieu universitaire m'a également laissée perplexe. À l'exception d'une faculté de théologie, ceux-ci manifestent de sérieuses réserves à l'égard des standards proposés. Au-delà des dangers de programmes trop spécialisés avec les conséquences que je viens d'énoncer, c'est la démarche même du comité qui est remise en question.

Les représentants universitaires souhaitent le report de l'application du règlement, son intrégration dans le cadre d'une politique d'ensemble de formation et de perfectionnement des enseignants devant prendre en compte les résultats de l'étude sectorielle en éducation du Conseil des universités. Il y a donc là autant de matière à réflexion qu'un appel à la concertation.

Ces audiences nous fourniront l'occasion de discuter plus en profondeur de la pertinence des critères de qualification, en se demandant s'il ne devrait pas aussi y en

avoir pour l'enseignement moral, comme du nombre de crédits de formation devant être requis aux différents cycles du primaire et du secondaire. Il faudra aussi porter une attention particulière aux dispositions transitoires d'application pour les prochaines cohortes de diplômes.

Le volet de l'animation pastorale catholique suscite enfin des commentaires variés. Certains saluent la facture plus détaillée du projet, par rapport à la version en vigueur, ainsi que l'apparition d'exigences de qualification sous forme de crédits en théologie, catéchèse, pastorale catholique, dont on interroge cependant les disparités entre le primaire et le secondaire. D'autres contestent la présence de certaines dispositions à l'intérieur du règlement, notamment les articles 23 à 26. Il faut aussi se demander qui doit assumer les coûts des services d'animation pastorale.

Voilà donc la trame générale des principaux points qui orienteront le travail de l'Opposition tout au long de cette commission. Nous aurons, bien entendu, d'autres questions de nature plus particulière à adresser aux divers intervenants qui se présenteront devant nous.

L'échange, aujourd'hui, avec les représentants du comité catholique du Conseil supérieur de l'éducation devrait nous permettre d'obtenir de plus amples imformations quant aux motifs de sa démarche, aux arguments qui fondent les propositions et de bien cerner les enjeux du débat. Enjeux qui, selon moi, posent la grande question: Est-il possible, est-il souhaitable de renforcer le caractère confessionnel de l'école sans modifier la structure actuelle des commissions scolaires et sans créer un réseau d'écoles neutres? (11 heures)

Le Président (M. Parent, Sauvé): Je vous remercie, Mme la députée de Chicoutimi, porte-parole officielle de l'Opposition en matière d'éducation.

Il avait été prévu, pour les déclarations d'ouverture, 30 minutes pour chacun des deux porte-parole. Je vous ferais remarquer que vous avez utilisé, Mme la députée, 24 minutes, il vous reste six minutes et, M. le ministre, vous avez utilisé 20 minutes, il vous reste dix minutes. Je ne sais pas si vous voulez les utiliser. M. le ministre, non?

Alors, j'inviterais nos premiers invités, le comité catholique du Conseil supérieur de l'éduction, à prendre place à la table.

Mme Charlotte Poulin, la présidente, M. Pascal Parent, membre du comité, Mme Raymonde Venditti-Milot, membre du comité et M. Guy Mallette, secrétaire.

Mme la présidente. Est-ce qu'elle est là Mme la présidente?

Mme Plante-Poulin (Charlotte): Merci, M. le Président.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Je veux vous féliciter pour votre nomination à titre de présidente. C'est la première fois, je pense, que la commission a le plaisir de vous accueillir. Nous vous souhaitons la bienvenue et vous souhaitons aussi tout le succès que Vous méritez certainement dans l'exercice de vos fonctions.

Je voudrais aussi vous remercier. Je sais que le ministre et le porte-parole de l'Opposition vont le faire, mais vous êtes ici les invités non pas dec l'Opposition et non pas du. parti ministériel, mais bien de la commission parlementaire de l'éducation, laquelle veut s'informer et chercher à comprendre ces projets de règlement que vous avez proposés.

Je veux que vous vous sentiez bien à votre aise. Vous n'êtes pas ici devant un tribunal, vous êtes ici devant des gens qui veulent mieux comprendre, qui veulent mieux vous aider aussi et qui veulent faire en sorte que l'éducation ne soit pas retenue au Québec. C'est dans cet esprit-là que nous amorçons, ce matin, ces consultations.

Je vous rappelle que vous avez environ quinze minutes, une demi-heure, si vous voulez, pour présenter votre projet et, après cela, le reste de la période de temps sera réparti également entre les membres de la formation ministérielle et les membres de l'Opposition, de façon que nous puissions avoir un échange enrichissant pour toutes les parties intéressées. Alors, Mme la présidente, nous vous écoutons.

Comité catholique du Conseil supérieur de l'éducation

Mme Plante-Poulin: Merci, M. le Président.

Le comité espère, en effet, que la présentation des projets de règlement puisse répondre à vos désirs d'être mieux informés. Le texte de présentation veut y contribuer, ainsi que le dialogue avec les personnes qui sont ici.

Je vais vous présenter à ma gauche, Mme Raymonde Vendetti-Milot, membre du comité catholique, M. Pascal Parent, membre du comité catholique, à ma droite, M. Guy Mallette, secrétaire du comité catholique et moi-même, Charlotte Plante-Poulin, présidente.

M. le Président, M. le ministre de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur et de la Science, mesdames et messieurs les députés.

La loi institue le comité catholique et lui fait obligation de faire des règlements concernant la reconnaissance comme catholiques des institutions d'enseignement et d'établir des dispositions en vue d'assurer leur caractère confessionnel. Il importe alors en tout premier lieu, aujourd'hui, de situer les projets de règlement soumis à l'étude à

la commission parlementaire de l'éducation à l'intérieur de la juridiction et des responsabilités du comité catholique. Ce sera l'objet de la première partie de la présente intervention.

Dans la deuxième partie de son intervention, le comité catholique précisera certaines raisons qui ont présidé à la mise à jour de la réglementation actuelle, puis il fera une présentation générale des règlements en regard des trois grands défis qu'il prétend relever: défis de qualité, de vérité et de respect.

Enfin, une troisième partie permettra une étude plus immédiate des principaux articles et un résumé des précisions nouvelles qu'ils apportent par rapport à la réglementation actuelle.

La juridiction et les responsabilités du comité catholique. Quelques données historiques: la création du ministère de l'Éducation et la juridiction sur la confessionnalité scolaire. Avant l'institution du ministère de l'Éducation, en 1964, c'était le comité catholique du Conseil de l'instruction publique qui portait presque toutes les responsabilités concernant la confessionnalité catholique scolaire. Les évêques catholiques, formant la moitié des membres du comité catholique, exerçaient donc, de 1875 à 1964, un rôle considérable dans le domaine de l'instruction publique. La création d'un ministère de l'Éducation posait la question d'une gestion de la confessionnalité qui puisse garantir les droits des catholiques. Peut-on assurer cette gestion par un ministère et un gouvernement qui sont neutres, l'État, lui-même, n'étant pas confessionnel? Comment respecter les droits de l'Église en matière de confessionnalité et sauvegarder pour l'État son droit et sa responsabilité de gérer le système public d'enseignement?

Une solution agréée par le gouvernement et les évêques: le comité catholique. Les documents de 1963 démontrent l'agrément du gouvernement et de l'épiscopat sur la solution qu'établit la loi pour résoudre le problème de la juridiction de la confessionnalité scolaire: la création d'un nouveau comité catholique ayant des pouvoirs clairement définis par la loi. Cet agrément apparaît dans la correspondance échangée entre M. Jean Lesage, premier ministre de la province de Québec et le cardinal Maurice Roy, président de l'Assemblée des évêques du Québec.

La nature du comité catholique: Le comité catholique existe en vertu de la Loi sur le Conseil supérieur de l'éducation. Organisme adjoint au conseil, le comité catholique jouit toutefois d'une juridiction distincte que lui confère explicitement la Loi sur le Conseil supérieur de l'éducation qui définit ses pouvoirs. Le comité catholique tient son mandat de cette loi qui le constitue. À cet organisme distinct du ministère de l'Éducation et distinct de l'autorité hiérarchique de l'Église, la loi confère une autorité réelle sur l'éducation catholique en milieu scolaire. Dans l'exercice de cette autorité, le comité catholique a la responsabilité de réglementer les divers éléments de l'éducation religieuse et de la confessionnaiité dans le monde scolaire, que ce soit au primaire, au secondaire ou au collégial. Cette responsabilité l'amène aussi è clarifier les orientations inhérentes à cette réglementation et les lignes d'action qui favorisent la qualité de l'éducation catholique.

Les pouvoirs du comité catholique. La Loi sur le Conseil supérieur de l'éducation, aux articles 22 et 23, définit la compétence du comité catholique et du comité protestant. Elle donne au comité catholique les pouvoirs nécessaires à l'exercice de ses responsabilités: "Ces comités sont chargés: a) de faire des règlements pour reconnaître les institutions d'enseignement confessionnelles comme catholiques ou protestantes, selon le cas, et pour assurer leur caractère confessionnel; b) de reconnaître comme catholiques ou protestantes, selon le cas, les institutions d'enseignement confessionnelles et de révoquer au besoin cette reconnaissance; c) de faire des règlements concernant l'éducation chrétienne, l'enseignement religieux et moral et le service religieux dans les institutions d'enseignement reconnues comme catholiques ou protestantes, selon le cas; d) de faire des règlements sur la qualification, au point de vue religieux et moral, du personnel dirigeant et enseignant dans ces institutions d'enseignement; e) d'approuver, au point de vue religieux et moral, les programmes, les manuels et le matériel didactique pour l'enseiqnement dans ces institutions d'enseignement; f) d'approuver, pour l'enseignement religieux catholique ou protestant, selon le cas, les programmes, les manuels et le matériel didactique et de faire des règlements sur la qualification des professeurs chargés de cet enseignement dans les écoles autres que les écoles reconnues comme catholiques ou protestantes; g) de faire au Conseil, au ministre de l'Éducation ou au ministre de l'Enseignement supérieur, de la Science et de la Technologie, des recommandations sur toute question de leur compétence." "Ces comités peuvent: a) recevoir et entendre les requêtes et suggestions des associations, des institutions et de toute personne sur toute question de leur compétence; b) faire effectuer les études et

recherches qu'ils jugent nécessaires ou utiles à la poursuite de leurs fins; c) édicter pour leur régie interne des règlements qui sont soumis à l'approbation du gouvernement."

La portée des pouvoirs du comité catholique: un pouvoir réglementaire et non de gestion administrative. Le comité catholique établit des règlements qui ont force de loi après leur approbation par le gouvernement. Le comité catholique procède également à la reconnaissance ou à la révocation de la reconnaissance des établissements d'enseignement comme catholiques. Mais, pour le reste, le comité n'administre pas l'application de ces règlements. La gestion du système d'enseignement relève du ministre de l'Éducation et des commissions scolaires. La loi a prévu une structure de gestion administrative répondant aux pouvoirs réglementaires du comité catholique. C'est ainsi qu'au sein du ministère de l'Éducation, se trouve un sous-ministre associé pour la foi catholique. Il est assisté de la Direction de l'enseignement catholique, leurs responsabilités s'exercent en lien avec les orientations et les prescriptions du comité catholique.

Une responsabilité à l'égard de la population catholique: représenter les catholiques. La loi impose au comité catholique la responsabilité d'être en contact avec la population afin de recevoir et d'entendre les requêtes et suggestions des associations, des institutions et de toute personne, sur toute question de sa compétence. Pour l'État et le monde scolaire, le comité catholique se trouve légitimement constitué et autorisé comme représentant des citoyens qui désirent, pour leurs enfants, une école confessionnelle de foi catholique ou du moins, une éducation religieuse catholique. Ainsi, aux yeux du pouvoir civil, le comité catholique est le représentant officiel de la population catholique en ce qui concerne l'éducation catholique scolaire. A cette fin, il est formé de cinq membres nommés par les évêques et de dix autres agréés par eux comme représentant les éducateurs et les parents. Le comité catholique constitue ainsi le canal normal et officiel par où s'expriment les attentes et les revendications de la population catholique.

Exercer une responsabilité civile et ecclésiale. Le comité catholique exerce aussi une responsabilité d'Église précise et limitée. Par leur nomination, les membres du comité catholique sont investis d'une responsabilité réelle dont l'exercice est déterminé en vertu des pouvoirs établis par la loi.

Les évêques, par l'agrément des pouvoirs conférés au comité catholique en 1964, ont consenti à ce que la loi donne au comité catholique la juridiction légale de voir à la dimension confessionnelle du système scolaire. L'entente entre le gouver- nement et l'épiscopat est claire à ce sujet et bien établie par un échange de correspondance.

À la suite de cette entente, le comité catholique, sur un plan institutionnel et légal, reçoit immédiatement son mandat de la loi établie par l'Assemblée nationale. Aux yeux du pouvoir public, il devient représentant officiel de la population catholique en ce qui concerne l'éducation catholique scolaire.

En exerçant son rôle dans le champ de préoccupation des ministères de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur et de la Science ou dans le champ de préoccupation de l'Église, le comité catholique, cependant, n'a institué légalement un lien de dépendance juridictionnel ni de ces ministères ni de l'épiscopat. Le comité catholique n'est ni un comité ministériel ni un organisme episcopal, mais il est appelé, dans l'exercice de ses fonctions, à respecter les deux ordres de juridiction.

Pourquoi de nouveaux règlements? D'abord, une mise à jour de la réglementation de 1974. Le règlement qui régit présentement les établissements d'enseignement confesionnels reconnus comme catholiques remonte à l'année 1974. Ce dernier remplaçait, par ailleurs, celui de 1967.

Depuis 1981, le comité travaille à la révision de ce règlement. Les audiences qu'il effectue lui permettent d'identifier de nouveaux besoins en regard de l'école catholique et des indications pour une réglementation conséquemment plus adéquate. Le livre blanc sur la réforme scolaire de 1982 et les deux projets de loi, le projet de loi 40 de 1983 et le projet de loi 3 de 1984, ont forcé le comité à remettre en chantier ces projets de règlement.

C'est en mai 1986, éclairé par les propos recueillis lors de ces audiences et à la suite d'une consultation d'une centaine de personnes particulièrement représentatives de différents milieux d'éducation et de diverses tendances, que le comité a soumis à l'approbation du gouvernement une révision de sa réglementation de 1974. Ce faisant, il poursuivait un objectif primordial, ordonné à relever trois défis que le comité catholique considère majeur.

L'objectif primordial de ce nouveau règlement sur l'école catholique consiste à édicter une série de règles simples, claires, précises et concrètes, dans le but de guider tous ceux et celles qui fréquentent une école catholique, l'administrent ou y oeuvrent d'une façon ou d'une autre.

Le comité prétend aussi relever trois défis: celui de la qualité de l'éducation catholique dans les écoles reconnues comme catholiques ou, encore, de la qualité de l'enseignement religieux catholique dans les écoles autres que catholiques; celui de la vérité de l'école catholique, qu'elle soit

publique ou privée et celui du respect de tous les jeunes qui fréquentent une école catholique ainsi que des personnes qui y travaillent.

Ainsi, la mise à jour de la réglementation de 1974 a conduit le comité à édicter trois nouveaux règlements: le règlement sur la reconnaissance comme catholiques et le caractère confessionnel des écoles primaires et des écoles secondaires du système public; le règlement sur la reconnaissance comme catholiques et le ' caractère confessionnel des institutions d'enseignement privées du primaire et du secondaire et le règlement sur la qualification des enseignants chargés de l'enseignement religieux catholique dans les écoles primaires et les écoles publiques ou privées autres que les écoles reconnues comme catholiques. M. le Président, le comité a l'intention d'accompagner ces règlements de notes explicatives, comme il l'avait fait en 1974.

Présentation générale en regard des trois grands défis à relever: qualité, vérité et respect. Défi de la qualité de l'éducation catholique. La qualité de l'éducation catholique scolaire est, avant tout, redevable à la volonté et à la créativité du milieu. Aucun règlement ne peut la garantir. Toutefois, il apparaît nécessaire de préciser certaines exigences pour la réalisation de l'éducation religieuse qui s'avère être des conditions indispensables de qualité. (11 h 15)

Ainsi, pour favoriser la qualité de l'éducation catholique, les règlements posent certaines exigences nouvelles concernant les responsabilités du directeur d'école, les conditions de qualification du personnel de l'enseignement moral et religieux catholique, les conditions de qualification du personnel de l'animation pastorale, certaines modalités de réalisation de l'enseignement religieux, certaines modalités de réalisation de l'animation pastorale.

Le défi de la vérité de l'école catholique. Pour favoriser la vérité de l'école catholique, les règlements veulent susciter une meilleure adéquation entre ce que le statut juridique annonce et ce qui est effectivement vécu dans la réalité, tout en permettant une plus grande démocratisation du processus de demande de reconnaissance. Ils apportent des précisions quant à la consultation préalable à toute demande de reconnaissance. Us donnent à l'école la responsabilité de faire connaître son statut, au directeur, une responsabilité en rapport avec le caractère catholique de son école et à tout le personnel, le devoir d'en respecter le caractère catholique.

Le défi du respect des différences. Les règlements ont voulu tenir compte du phénomène grandissant au Québec de la pluralité ethnique, culturelle et religieuse.

L'école catholique doit, en effet, être attentive à respecter les convictions religieuses de tous ceux et celles qui la fréquentent, qu'ils soient catholiques ou autres. Pour favoriser le respect des différences, les règlements visent donc à garantir la liberté religieuse aux élèves qui fréquentent une école catholique en maintenant en application un régime d'option entre l'enseignement moral et religieux catholique et l'enseignement moral; au personnel enseignant, en réaffirmant la possibilité, pour motif de liberté de conscience, d'être exempté de dispenser l'enseignement moral et religieux catholique.

Les projets de règlements. Avant d'entreprendre la présentation détaillée des règlements du comité catholique, permettez, M. le Président, que je fasse trois remarques.

La première: le comité catholique ne vient pas à cette commission avec la prétention de régler toute la question confessionnelle scolaire au Québec. Il vient présenter, selon sa compétence, son nouveau projet de règlement pour les écoles catholiques du Québec, désireux qu'il est de contribuer ainsi, pour sa part, à l'évolution du système scolaire québécois en matière de confessionnalité.

La deuxième remarque: un règlement se devant avant tout d'être précis, clair et concis, des commentaires et* notes explicatives viendront éclairer la compréhension et la portée de chaque article.

La troisième remarque: le comité catholique présente le projet de règlement afférent au système scolaire public. II s'agit du projet de règlement sur la reconnaissance comme catholiques et le caractère confessionnel des écoles primaires et des écoles secondaires du système scolaire public. Les projets de règlement concernant l'école confessionnelle privée et de l'exercice de la confessionnalité dans une école autre étant à plusieurs égards apparentés à celui de l'école confessionnelle publique, le comité catholique les aborde donc indirectement. Il le fera plus directement en réponse à d'éventuelles questions à leur sujet.

Présentation détaillée du projet de règlement. Le projet de règlement sur la reconnaissance comme catholiques et le caractère confessionnel des écoles primaires et des écoles secondaires du système scolaire public, ci-après nommé le "Projet de règlement", se divise en trois grandes sections.

Section I: la reconnaissance, articles 1, 2 et 3. La section I porte sur la reconnaissance comme catholique de l'école publique. En effet, les trois premiers articles du projet de règlement visent à introduire plus de vérité dans le processus de reconnaissance. Vérité signifie ici

transparence et démocratie. À ces fins, le projet de règlement oblige les commissions scolaires qui veulent demander la reconnaissance non seulement à consulter le comité d'école comme le prévoit la Loi sur l'instruction publique, mais à étendre cette consultation à tous les parents dont les enfants fréquentent l'école. De plus, le règlement exige que soit transmis au comité le résultat de la consultation auprès des parents et du comité d'école.

L'intention d'une telle démarche est claire. Le comité désire connaître la volonté des parents et veut que la commission scolaire qui fait la demande la connaisse aussi. La connaissance de la volonté démocratiquement exprimée par les parents demeure l'assise première pour fonder toute décision prise par les autorités supérieures. De plus, la commission scolaire doit remplir un questionnaire qui vise à démontrer que l'école pourra respecter le règlement du comité catholique. Bien plus qu'une formalité administrative, le questionnaire a une double visée: une certaine officialisation et universalisation des exigences à l'égard de l'école catholique québécoise de même qu'une incitation pour chaque école en particulier à une meilleure adéquation entre son statut et son vécu confessionnel.

Le projet de règlement ne traite pas de la révocation de la reconnaissance parce que la Loi sur le Conseil supérieur de l'éducation ne donne pas au comité catholique le pouvoir de déterminer des règlements sur la révocation. Elle lui donne, par ailleurs, le pouvoir de révoquer. Toutefois, le comité catholique compte faire connaître certains critères de révocation et suggérer une procédure aux commissions scolaires qui voudraient demander la révocation du statut catholique d'une école.

Section II: le caractère confessionnel, articles 4 à 27. La section II porte sur le caractère confessionnel de l'école publique reconnue comme catholique. Cette section II est elle-même composée de quatre sous-sections qui correspondent à quatre grandes composantes de l'école catholique: sous-section 1, le projet éducatif; sous-section 2, l'enseignement moral et religieux catholique; sous-section 3, l'animation pastorale catholique; sous-section 4, le respect du caractère catholique par toutes les personnes qui fréquentent l'école.

Sous-section 1, le projet éducatif. Dans l'intention du comité, il ne suffit pas que l'école soit reconnue juridiquement comme catholique. Il importe surtout qu'elle construise, avec tous ceux et celles qui font l'école, un projet éducatif qui reflète, dans le quotidien, le caractère confessionnel de cette école, un projet concret qui intègre ie mieux possible, comme le demande le projet de règlement à l'article 4, les croyances et les valeurs de la religion catholique. Le projet de règlement demande aussi qu'une école reconnue comme catholique affiche le caractère confessionnel de son projet éducatif. II ne s'agit pas de le faire d'une façon intempestive, mais simplement de trouver le moyen de le faire savoir clairement au milieu.

La Loi sur l'instruction publique définit déjà des responsabilités au directeur d'école. Dans son projet de règlement, aux article 6 et 7, le comité veut attirer l'attention sur les responsabilités particulières qui échoient à celui ou celle qui dirige une école catholique. Le comité compte que, lors de l'affectation d'un directeur ou d'une directrice dans une école catholique, les autorités scolaires rappellent au candidat ou à la candidate les responsabilités qui lui incombent en vertu des articles 6 et 1, Dans l'article 6: la réalisation du projet éducatif de l'école, l'orientation, l'animation, la coordination et l'évaluation des activités d'enseignement moral et religieux catholique. À l'article 7: l'évaluation du vécu confessionnel à tous les cinq ans, évaluation dont il fait rapport à la commission scolaire.

À propos de l'évaluation aux cinq ans du vécu confessionnel. L'objectif d'une telle évaluation n'est pas d'obliger les autorités à redemander la reconnaissance de leurs écoles tous les cinq ans. Cette opération vise plutôt à permettre, une fois tous les cinq ans, aux divers intervenants de chaque école de faire le point, de corriger ou d'améliorer ce qui devrait l'être ou, le cas échéant, de constater que le statut confessionnel de l'école n'a vraiment plus sa raison d'être et d'en demander la révocation. Cet exercice, il faut le souhaiter, permettra au milieu de faire la vérité sur la manière de vivre la confessionnalité à l'école, de mesurer l'écart entre l'idéal et le vécu et d'inciter les aqents de l'école à procéder aux améliorations qui s'imposent. L'intention nette et première est de permettre à ceux qui font l'école de faire le point entre eux et de prendre les orientations et les décisions qui s'imposent de manière à éviter que l'école ne soit catholique que de nom. Le rapport de ces évaluations fournira également au comité catholique des informations fort importantes pour guider ses études et ses diverses interventions.

Pour procéder à une telle évaluation, des instruments seront fournis par la Direction de l'enseignement catholique du ministère de l'Éducation. Ces instruments seront construits à partir des orientations que le comité catholique donnait déjà en 1980 et sur la vérification du vécu scolaire au plan confessionnel. Cette évaluation quinquennale du vécu confessionnel, article 7, de même que la démocratisation du processus de demande de la reconnaissance, articles 1 et 2, devraient contribuer à l'avènement non seulement d'écoles plus authentiquement

confessionnelles, mais aussi à l'avènement d'écoles autres que confessionnelles. Le comité catholique souhaite depuis longtemps que des écoles autres puissent voir le jour là où les milieux le décideront démocratiquement et qu'ainsi, le système scolaire public évolue vers une plus large diversité.

Sous-section 2, l'enseignement moral et religieux catholique, articles 8 à 18. Trois articles, 8, 9 et 10, sont relatifs à l'option entre l'enseignement religieux et l'enseignement moral. Les articles 8 et 9 sont les mêmes que dans le règlement actuel, tel qu'amendé en 1983. L'école reconnue comme catholique offre le choix entre l'enseignement moral et religieux qui s'inspire de la foi catholique et un enseignement moral qui s'inspire des orientations morales communément admises dans notre société et exprimées dans les différentes chartes des lois. Cette décision du comité vise à assurer, sous ce rapport, le respect de tous les élèves de l'école et le respect du choix des parents.

On aura aisément compris que le respect ne réside pas dans le seul fait d'obliger les parents à poser un crochet dans l'une ou l'autre des cases du formulaire d'inscription. Bien sûr, il y a là un aspect plutôt symbolique qui n'est pas à négliger. Mais, au-delà du geste, il faut voir justement à quoi le règlement engage les différents partenaires. Aux parents, le projet de règlement impose annuellement la démarche d'un choix volontaire et réfléchi qui les engage, d'une certaine manière, à accompagner et à suivre le cheminement de leur enfant. Aux administrateurs scalaires, le projet de règlement sur l'option demande de respecter de tels choix en organisant l'école de façon qu'une réelle qualité marque légalement les deux types d'enseignement. À cette fin, il y a au moins deux aspects auxquels il leur faut veiller: la place de ces enseignements dans la grille horaire et la qualité du personnel affecté à l'un et l'autre. Aux enseignants, le choix des parents fait savoir que les jeunes qui sont devant eux sont là pour recevoir un enseignement sérieux et authentique, qu'il s'agisse de l'enseignement religieux ou de l'enseignement moral.

L'enseignant qui dispensera l'enseignement moral et religieux catholique pourra donc, en toute vérité, proposer les enseignements de la foi catholique, sans les inconvénients de la présence en classa de jeunes qui seraient là en vertu de la seule obligation que leur en ferait l'école. L'enseignant sera respectueux de ce choix dans la mesure où, d'une part, il tiendra compte des diverses exigences du règlement par rapport au temps à consacrer à cet enseignement et aux programmes qui doivent être dispensés et dans la mesure où, d'autre part, il s'efforcera d'assumer pleinement sa part de responsabilité dans l'éducation de la foi des jeunes tel que le comité s'est récemment efforcé de le décrire en mai 1985 dans un avis au ministre de l'Éducation, "Éduquer la foi à l'école". Le 10e article a aussi trait aux régimes d'option. Il prévoit que là où les élèves sont moins nombreux que 15 et qu'il n'est pas possible d'organiser un cours, l'école devrait prévoir un encadrement pédagogique apte à rencontrer les exigences respectives des deux programmes où d'enseignement moral et religieux catholique ou d'enseignement moral. L'encadrement pédagogique dont il est question consiste généralement en l'accompagnement individualisé ou à la supervision d'un élève dans ses activités d'apprentissage par fiches, recherches, discussions et échanges.

Les articles 11 et 12 statuent sur le temps qui doit dorénavant être consacré à l'enseignement religieux ou à l'enseignement moral. Le nombre de 50 heures-année au secondaire correspond au temps généralement prévu au régime pédagogique pour l'équivalence de deux crédits; un crédit égaie 25 heures. Les programmes d'enseignement moral et religieux catholique au secondaire sont d'ailleurs élaborés en fonction de ce nombre minimal d'heures.

Au primaire, le nombre de 60 heures-année tient compte de la pratique actuelle dans l'application du régime pédagogique. Comme pour le secondaire, les programmes du primaire sont aussi élaborés en fonction de ce nombre minimal d'heures. Par ailleurs, selon l'article 14, liberté est laissée à l'école de ménager et de distribuer le temps prescrit selon un agencement et un rythme appropriés à la pédagogie, aux besoins des élèves et au projet éducatif de l'école.

L'article 15 fait obligation à l'école catholique de procéder pour chaque année du primaire et du secondaire à l'évaluation de la réalisation des objectifs du programme de l'enseignement moral et religieux catholique. Le comité catholique confirme pour l'enseignement moral et religieux catholique une prescription du régime pédagogique. Il veut contrer par cet article 15 la tendance à croire que l'enseignement religieux ne s'évalue pas; il s'évalue effectivement au même titre que les autres matières.

Les articles 16 et 17 font état des conditions de qualifications requises pour dispenser l'enseignement moral et religieux catholique. La première exigence est d'être de foi catholique. Le comité catholique reconduira ici la note explicative du règlement actuel selon lequel l'enseignant ou l'enseignante qui dispense l'enseignement religieux se doit d'être baptisé dans l'Église catholique et se déclarer de foi catholique.

La deuxième exigence concerne la qualification académique. Au primaire, l'enseignant embauché après 1991 devra avoir acquis 9 crédits universitaires portant sur les contenus essentiels de la foi catholique et

sur les programmes d'enseignement religieux ou posséder une formation équivalente.

Rien n'empêche que l'on confie à des personnes plus qualifiées, à des spécialistes, par exemple, l'enseignement religieux au primaire. Cependant, après analyse et tout bien pesé, le comité continue de privilégier que l'enseignement religieux puisse, dans la mesure du possible, être assuré par l'enseignant ou l'enseignante qui dispense les autres matières de formation générale. Cette pratique présente des avantages pédagogiques qui sont fréquemment rappelés par les enseignants eux-mêmes au cours des audiences du comité catholique. Une telle option oblige à poser des exigences de formation en conséquence. Il s'agit évidemment d'un minimum que l'expérience de l'enseignement, le soutien pédagogique et le souci d'éducation permanente viendront normalement enrichir.

Quant aux contenus essentiels, le comité entend signifier par là que ses crédits ne devront pas porter sur des éléments marginaux de la foi mais sur les données majeures de la foi catholique nécessaires pour dispenser avec compétence les programmes d'enseignement moral et religieux catholique du primaire.

Au secondaire, la formation minimale requise comporte 30 ou 60 crédits universitaires portant sur les contenus essentiels de la foi catholique et les programmes d'enseignement moral et religieux, selon que l'on enseigne aux deux premières années ou au trois dernières années du secondaire.

Comte tenu de la nature des programmes d'enseignement religieux de la première et de la deuxième année du secondaire et des avantages que pourrait comporter l'enseignement d'une autre matière, le comité a cru bon de fixer la formation requise pour ces années à 30 crédits universitaires. Dans le cas du premier cycle, il s'agit donc d'un accommodement, entre autres, à une situation qui se généralise, les écoles secondaires du premier cycle.

On ne s'étonnera pas que le comité catholique précise dans ce projet de règlement des exigences à l'égard de la formation des maîtres. Déjà en 1975 dans sa publication du troisième tome de Voie et impasse, Les maîtres et l'éducation religieuse, le comité catholique faisait des recommandations concernant la formation initiale et permanente des maîtres. Leur compétence en pédagogie religieuse apparaissait dès lors comme un élément majeur et déterminant pour la qualité de l'enseignement religieux scolaire. Plus tard, en 1983, le comité catholique alors consulté sur la formulation d'une politique concernant la formation et le perfectionnement du personnel enseignant soulignait le caractère urgent de la mise en oeuvre d'aménagements concrets et satisfaisants destinés à préserver au primaire et au secondaire la qualité de l'intervention pédagogique en enseignement religieux à l'école. Le comité catholique a expliqué davantage ces recommandations en mai 1985 dans un avis intitulé "Éduquer la foi à l'école".

Les exigences décrites aux articles 16 et 17 relatives à la qualification académique du personnel en enseignement moral et religieux catholique paraissent, à ce jour, minimales et indispensables.

Au cours des audiences publiques tenues ces cinq dernières années, le comité catholique a maintes fois constaté des situations qui nuisent à l'enseignement religieux: par exemple, un professeur d'éducation physique parachuté en enseignement religieux; une jeune enseignante qui doit dispenser l'enseignement religieux au primaire sans avoir reçu à l'université une préparation suffisante. Ces situations ne peuvent plus durer. II importe que les centres de formation universitaire pourvoient à la formation initiale et continue du personnel en enseignement religieux. Les projets de règlement veulent y insister. (11 h 30)

Comme dans l'actuel règlement, le comité maintient aux articles 16 et 17 la possibilité pour le personnel enseignant d'être exempté de dispenser l'enseignement moral et religieux catholique pour des motifs de liberté de conscience. Il y aura lieu de prévoir un guide pratique destiné à faciliter l'expression de la volonté d'être exempté de l'enseignement religieux.

Sous-section 3, l'animation pastorale catholique, les articles 19 à 26. Les articles 19 à 26 inclusivement visent à assurer l'existence et la qualité de l'animation pastorale scolaire. Ils s'imposent particulièrement au primaire où les activités d'animation pastorale étaient encore, jusqu'à récemment, réduites aux visites occasionnelles du pasteur de la paroisse à l'école. Ainsi, l'article 19 fait obligation à l'école reconnue comme catholique d'assurer l'animation pastorale à titre de service complémentaire sur le temps consacré aux services éducatifs.

Chaque école doit donc lui faire une place à l'intérieur de l'horaire régulier des élèves. De plus, le projet de règlement exige aux articles 25 et 26 des ressources convenables, un budget de fonctionnement, des locaux afin que l'animation pastorale se déploie dans des conditions qui en favorisent et l'existence et la qualité.

L'article 20 veut garantir que l'animation pastorale n'est pas un prétexte à faire n'importe quoi. Une véritable animation pastorale comporte des activités variées à l'intérieur de si grands domaines généralement reconnus pertinents à l'animation pastorale scolaire.

L'article 24 exige que la planification et l'évaluation des activités soient présentées annuellement au directeur d'école.

Les articles 21 et 22 posent des exigences pour le personne! de l'animation pastorale. Ces exigences sont différentes au primaire et au secondaire en raison de la différence des statuts à l'un et l'autre ordre d'enseignement. Au secondaire, le projet de règlement appuie la pratique actuelle des commissions scolaires de nommer comme animateur de pastorale un professionnel non-enseignant dont les conditions de qualifications se trouvent au document 2701 de la politique administrative et salariale. Au primaire, le projet de règlement parle non pas de l'animateur de pastorale mais de la personne chargée de l'animation pastorale. Il n'est pas dans l'intention du comité catholique d'imposer au primaire l'animateur de pastorale, c'est-à-dire un professionnel PNE comme au secondaire.

Le comité catholique tient compte de la réalité même de l'école primaire, souvent école paroissiale ou de quartier liée pour la réalisation d'un grand nombre de ses activités aux ressources du milieu qui l'entoure. Dans le cas de l'animation pastorale au primaire, c'est généralement une personne reliée à la communauté chrétienne des enfants qui se voit chargée de l'animation pastorale qu'elle exerce de façon significative.

Le comité ne veut pas priver l'école primaire de ces précieuses ressources. Il n'admet pas pour autant que cette responsabilité puisse être dévolue à quiconque. Aussi, à défaut qu'une personne chargée de l'animation pastorale au primaire ne possède au minimum une formation équivalente à 30 crédits, le projet de règlement stipule qu'une expérience pertinente de cinq années pourrait être jugée équivalente. Quant aux personnes collaboratrices à l'animation pastorale - des parents pour la plupart - l'article 23 prévoit qu'elles soient dûment agréées par le directeur de l'école. Cette mesure entend corriger une situation existante: leur entrée à l'école à l'insu du directeur d'école. Le comité ne veut pas pour autant décourager les pratiques de collaboration à l'animation pastorale mais favoriser qu'elles se réalisent avec l'assentiment de la direction d'école qui a la responsabilité première de ce service complémentaire.

Sous-section 4, le respect du caractère catholique. Dans son article 27, le projet de règlement fait obligation au personnel de l'école publique reconnue comme catholique ainsi qu'à toute autre personne qui y travaille d'être respectueux du caractère catholique de l'école.

Cet article implique que, dans l'ensemble, l'orientation catholique de l'école est acceptée et respectée, au moins de façon tacite, comme référence et inspiration du projet éducatif. Pratiquement, cela signifie que toute personne de l'école s'empêche de parler ou d'agir à l'encontre de l'orientation catholique. L'école publique catholique de 1987 manquerait de réalisme si elle prétendait à une homogénéité religieuse plus stricte et plus explicite au niveau de tout l'effectif, de tous les étudiants, parents et enseignants. Le projet de règlement veut pourtant assurer dans l'école publique reconnue comme catholique un seuil de cohérence et un minimum d'intégration de la dimension religieuse. Aussi exige-t-il à tout le moins le respect du caractère catholique de l'école. Toutefois, cette école catholique demeure une école publique qui doit être ouverte et accueillante à ceux et celles qui ne partagent pas la foi catholique. D'ailleurs, depuis plus de cent ans, dans le système public, tant les écoles reconnues comme, catholiques que celles reconnues protestantes ont toujours été des écoles communes, c'est-à-dire des écoles qui avaient l'obligation d'accueillir et d'assurer l'éducation des jeunes qui n'étaient pas de religion catholique ou protestante.

Un phénomène relativement nouveau et inégalement présent sur l'ensemble du territoire québécois est aussi apparu depuis quelques années, celui de l'arrivée d'une population immigrante qui nous vient de tous les continents. Cette population apporte au Québec des cultures variées, donc des modes d'être, de vivre et de penser qui sont différents, et professent des religions qui n'originent pas toujours des traditions religieuses présentes dans notre société. Le Québec se diversifie donc sur les plans ethnique, culturel et religieux. Même la population de souche québécoise traditionnellement catholique ou protestante ne présente plus le même degré d'unanimité. Là aussi des différences apparaissent, différences que l'on ne peut plus ignorer et que l'on doit surtout respecter. Ces différences sont aussi présentes chez le personnel enseignant. Par ailleurs, du côté catholique demeurent les faits suivants: 83,5 % des élèves francophones des écoles primaires et secondaires publiques se sont inscrits en 1986-1987 comme catholiques.

Depuis quelques années, lorsque les parents ont dû se prononcer sur le choix du statut d'une nouvelle école primaire, ils ont toujours majoritairement opté pour une école catholique. Le projet de règlement tente donc de faire justice aux uns et aux autres. Il maintient le régime d'option entre l'enseignement moral et religieux catholique et l'enseignement moral. Il maintient la possibilité pour le personnel enseignant d'être exempté de dispenser l'enseignement religieux. Quant au projet confessionnel lui-même, le comité catholique croit qu'il nécessite la collaboration franche de toutes

les personnes intervenantes, à tout le moins, la capacité d'en respecter les orientations fondamentales. C'est l'objet de l'article 27.

Section III, dispositions particulières, les articles 28 à 33. Six derniers articles encadrent la portée juridique de certains articles précédents. Il faut particulièrement remarquer que la première évaluation du vécu confessionnel prévu à l'article 7 devra s'effectuer au plus tard le 1er juillet 1993, c'est-à-dire 5 ans après l'entrée en vigueur du règlement le 1er juillet 1988. Que les exigences relatives à la qualification deviennent obligatoires le 1er juillet 1991 et s'appliquent seulement aux personnes engagées ou affectées à compter du 1er juillet 1991. L'intention du comité est d'assurer que soient préservés les droits acquis à ce titre du personnel enseignant.

Par ailleurs, le comité veut aussi prévoir trois années, à compter de la date d'entrée en vigueur du projet de règlement, pour que les futurs maîtres en formation puissent satisfaire aux exigences de qualification que requiert l'enseignement religieux. Il est souhaitable que les programmes universitaires de formation à l'enseignement primaire puissent leur offrir le choix entre une formation initiale en enseignement religieux et une formation initiale en enseignement de la morale. La future école primaire au Québec aura besoin de ces deux titres de compétence.

Précisions nouvelles par rapport au règlement de 1974. Comme on le constate, le projet de réglementation de 1987 apporte des précisions nouvelles par rapport au règlement de 1974. Ces précisions se trouvent plus particulièrement au chapitre du projet éducatif, prescriptions quant à l'orientation du projet éducatif, à l'article 4; au chapitre de l'enseignement moral et religieux catholique, prescriptions du temps d'enseignement, articles 11 et 12; évaluation annuelle des apprentissages en regard des objectifs du programme à l'article 15; conditions de qualification du personnel enseignant aux articles 16 et 17.

Au chapitre de l'animation pastorale catholique, obligation de la dispenser sur le temps des services éducatifs; identification des domaines spécifiques d'intervention à l'article 20; conditions de qualification du personnel aux articles 21 et 22; planification et évaluation des activités à l'article 24; exigences d'un local et d'un budget de fonctionnement au primaire autant qu'au secondaire aux articles 25 et 26. Au chapitre du statut confessionnel, clarification et démocratisation du processus de demandes de reconnaissance comme catholiques et évaluation aux cinq ans du vécu professionnel.

En conclusion, M. le Président, qualité, vérité, respect, trois objectifs que les divers milieux pourront atteindre plus aisément, il faut l'espérer, grâce aux nouveaux règlements du comité catholique. Le comité est conscient de poser des exigences sinon plus grandes du moins plus précises et plus nettes. Il sera évidemment plus difficile de les passer simplement sous silence. Par ailleurs - et c'est une intention consciente du comité - si une école ne peut vraiment pas répondre raisonnablement à de telles exigences, elle devrait ou s'amender ou entreprendre des démarches menant à la révocation de sa reconnaissance. Le fait de devoir procéder tous les 5 ans à une évaluation du vécu confessionnel permettra sans doute d'enclencher une telle démarche plus facilement partout où elle s'avérera nécessaire. Le comité suggérera une procédure qui aidera à prendre des décisions en connaissant la volonté des parents.

Enfin, si les règlements, dans l'ensemble, sont plus exigeants pour les agents de l'école sous le rapport de la qualité et de la vérité, cela ne doit pas se faire au détriment de la liberté de choix des élèves ou de la liberté de conscience des enseignants. Le comité souhaite ainsi atteindre un sain équilibre qui favorisera les évolutions nécessaires vers des écoies qui cherchent vraiment à mettre en oeuvre leur caractère authentiquement catholique tout en demeurant vraiment accueillantes et respectueuses de ceux qui ne partagent pas la foi catholique. Là où les gens en décideront autrement, il faut souhaiter que dans le système public, des écoles autres puissent voir le jour, également dans le respect, cette fois, des catholiques qui la fréquenteront. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Parent, Sauvé): C'est moi qui vous remercie, Mme la Présidente, de vous être dérangée et d'être venue nous aider à éclairer notre lanterne concernant ce projet de règlement.

Maintenant, j'informe les membres de la commission et par le fait même vous aussi, Mme la présidente, que la commission parlementaire va siéger jusqu'à 13 heures. Alors, vous avez environ une heure et quinze ou une heure et vingt minutes comme période de questions qui sera répartie équitablement entre les membres de l'Opposition et les membres de la formation ministérielle. Encore une fois, sentez-vous bien à l'aise, vous n'êtes pas devant un tribunal. Vous êtes devant des gens qui veulent mieux comprendre votre travail et l'orientation que vous voulez donner au projet de règlement. Je reconnais le ministre de l'Éducation ou le porte-parole officiel.

M. Ryan: Je remercie tout d'abord la présidente du comité catholique du Conseil supérieur de l'éducation de la présentation qu'elle nous a faite du projet de règlement émanant de cet organisme. Je voudrais tout

d'abord la féliciter aussi de son élection à la présidence du comité catholique. Comme vous le savez, suivant les procédures prévues par la Loi sur le Conseil supérieur de l'éducation, le comité catholique se donne lui-même un président ou une présidente et le gouvernement a la redoutable responsabilité d'entériner son choix, ce que nous avons fait avec plaisir dans votre cas parce que toutes les procédures avaient été dûment respectées.

J'ai écouté avec intérêt la présentation que vous avez faite. Je ne veux pas revenir sur des questions que j'ai déjà traitées dans mon intervention liminaire tout à l'heure. Je voudrais cependant vous poser une question de fond avant d'en venir à quelques problèmes qui touchent davantage les modalités du projet de loi. La porte-parole de l'Opposition nous disait tantôt, si j'ai bien compris, qu'il faudrait reporter cet exercice à plus tard, qu'il faudrait attendre que l'on ait réglé le problème de la confessionnalité des commissions scolaires avant de procéder à des précisions comme celles que propose le comité catholique.

Comme le comité catholique a déjà émis l'opinion qu'il serait préférable d'évoluer vers des commissions scolaires confessionnelles et que nous, du côté du gouvernement, avons précisé notre opposition à ce sujet en indiquant: C'est bien facile d'adopter une loi, mais si on se retrouve deux ans après et qu'elle est désavouée par les tribunaux, on n'est pas plus avancé, personne! On a perdu beaucoup de temps et on se retrouve au point de départ. Nous avons établi deux conditions claires dans notre programme politique. Nous favorisons un changement mais à la condition qu'il y ait un consensus réel dans la population et deuxièmement, que nous soyons assurés que toutes les clarifications judiriques nécessaires aient été obtenues au préalable. C'est ce que nous ferons. Nous donnerons les modalités de notre cheminement en temps utile. Je veux assurer les membres de cette commission que. nous continuons toujours dans la voie que nous avons clairement annoncée avant l'élection de 1985 et que nous avons définie à maintes reprises.

Ceci étant précisé, j'aimerais que vous nous disiez si dans votre jugement il y a une difficulté majeure à ce qu'on procède maintenant avec ce projet de règlement et comment une décision positive maintenant n'affecterait pas l'autre cheminement qui a été proposé par le comité catholique concernant la structure des commissions scolaires.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Mme la Présidente.

Mme Plante-Poulin: M. le Président, le comité catholique du Conseil supérieur de l'éducation a effectivement, dans un dernier avis, souhaité que l'évolution du Québec en matière de confessionnalité se fasse vers des commissions scolaires linguistiques plutôt que confessionnelles. Le projet de règlement se situe donc dans le contexte particulier qui est celui d'aujourd'hui où les commissions scolaires ne sont pas linguistiques. Le comité catholique prétend que son règlement peut faciliter, dans ce contexte, l'avènement d'écoles autres que confessionnelles tout en respectant dans les écoles confessionnelles les droits et la liberté de conscience des non-catholiques qui fréquentent l'école confessionnelle. Il n'y a pas incompatibilité pour le moment à ce que ce règlement s'exerce dans le cadre scolaire actuel des commissions scolaires confessionnelles.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. Est-ce qu'il y a d'autres interventions?

M. Ryan: Oui. Pourriez-vous nous dire en quoi il y a nécessité, selon le comité catholique de procéder maintenant aux modifications proposées? (11 h 45)

Mme Plante-Poulin: Comme on le faisait voir dans la présentation du règlement, depuis bientôt six ans que le comité croit nécessaire d'adapter son règlement au contexte plus réel de la société québécoise tout en répondant de façon plus adéquate aux exigences de la confessionnalité dans les écoles confessionnelles. À l'occasion des audiences, de nombreuses personnes réclament que soient définies plus clairement les exigences pour les conditions de qualification des enseignants et des procédures plus claires quant à la demande de reconnaissance des institutions confessionnelles. Le comité prétend relever le défi de qualité, de vérité et de respect des différences dans le contexte actuel. La mise à jour du règlement vient donc en partie des nombreuses demandes de la population catholique et de la volonté du comité d'adapter son règlement au contexte plus réel actuel en suscitant, d'une part, des écoles autres, là où les parents voudront majoritairement un autre type d'école que confessionnel.

Je ne sais pas si des membres du comité veulent ajouter autre chose, M. le Président.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M.Parent.

M. Parent (Pascal): Je dois dire qu'ayant participé depuis de nombreuses années aux diverses audiences, nous nous rendons compte que presque tous les points qui sont traités ici sont présentés par les parents et les éducateurs des différentes régions. Particulièrement, la grande question

qui revient, c'est qu'il y ait des écoles autres mais en même temps que soit vraiment marqué le caractère confessionnel de l'école qui est reconnue comme catholique. Si elle est reconnue comme catholique, il faut qu'elle ait des exigences au plan du corps professoral - c'est ce que nous avons précisé - et qu'elle ait aussi des exigences au plan de la pastorale. C'est pourquoi nous avons précisé dans ce règlement les points qui touchent la pastorale. C'est surtout notre • conscience du milieu, cela reflète les demandes précises du milieu répétées depuis de très nombreuses années.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. Parent.

M. Ryan: J'ai une autre question à propos de la reconnaissance. Dans le projet de règlement qui nous est soumis, nous avons en annexe une formule qui servirait pour la présentation d'une demande de reconnaissance. Il n'y a pas de précisions quant aux modalités qui devraient être suivies pour la consultation des comités d'école, des parents. Je ne sais pas comment vous voyez cela. Il faudrait un matériel à la disposition des écoles pour qu'elles procèdent aux consultations nécessaires. Est-ce que ce matériel devrait émaner, selon vous, de l'école elle-même, de la commission scolaire, du comité catholique ou du ministère de l'Éducation?

Le Président (M. Parent, Sauvé): Madame.

Mme Plante-Poulin: M. le Président, la volonté du comité catholique est de respecter dans la gestion de la confessionnalité le corps intermédiaire qu'est !a commission scolaire. Donc, localement, la commission scolaire a, comme on l'indique aux articles 1 et 2, la responsabilité de procéder à la gestion du processus des demandes de reconnaissance. La commission scolaire pourra effectivement utiliser des instruments qui pourraient être produits, par exemple, par la Direction de l'enseignement catholique ou même par le comité catholique sans qu'elle y soit obligée cependant, pourvu que le comité catholique puisse être assuré que les parents ont été consultés de façon démocratique et qu'ils demandent majoritairement la reconnaissance catholique pour leur école. Donc, les commissions scolaires pourront avoir accès à de tels instruments qui les aident dans le processus de consultation mais elles ne seront pas tenues d'utiliser ces instruments.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci.

M. Ryan: Une autre question à propos du projet éducatif. Vous dites à l'article 4 que l'école publique reconnue comme catholique intègre les croyances et les valeurs de la religion catholique dans son projet éducatif et s'affiche comme telle. Par rapport à la situation que nous avons aujourd'hui, une école va définir son projet éducatif évidemment en accord avec l'orientation générale qu'elle a, en accord avec les exigences des programmes et en accord avec certaines préférences des parents. Est-ce qu'il y aura vraiment un changement majeur ou si c'est juste une question d'accent qui serait plus clair? Est-ce qu'il y a un changement essentiel dans cette proposition qu'apporte le comité catholique?

Il y en a qui nous ont fait part de craintes voulant que le projet éducatif deviendrait à l'avenir une affaire étroite et possiblement étouffante. Est-ce que c'est vraiment l'esprit de cet article? Comment l'interprétez-vous? Est-ce qu'il apporte vraiment un changement majeur à la situation qu'on observe aujourd'hui?

Mme Plante-Poulin: Dans la pensée du comité catholique, l'école confessionnelle est d'abord une école publique qui demande un statut confessionnel parce qu'une majorité des parents des enfants qui la fréquentent le veut ainsi. Ils décident donc qu'elle sera inspirée des croyances et des valeurs de la religion confessionnelle. Le comité veut tenir ensemble la volonté de respecter le choix collectif d'un certain nombre de parents et leur droit à une école confessionnelle de leur choix, donc qui soit d'inspiration catholique et en même temps, le statut d'abord commun de l'école publique. Donc, on n'a pas à craindre l'embrigadement, l'endoctrinement qui ne respecterait pas le caractère commun de l'école publique.

Le comité catholique a déjà, à propos des valeurs de la religion catholique, laissé entendre qu'il s'agissait de valeurs universellement acceptées, humainement reconnues, comme la solidarité, la justice, le respect, et qui ne sont pas contraignantes pour les non-catholiques.

M. Ryan: Si je comprends bien, le projet éducatif demeure sous la responsabilité de l'école. C'est le comité ou le conseil d'école qui va définir un projet éducatif en accord avec la direction de l'école. La direction de l'école rend des comptes à la commission scolaire. Il n'est pas question de faire approuver ces projets par le comité catholique. C'est la marche régulière de l'école en relation avec le projet éducatif qui va continuer, finalement, en accord avec les dispositions de la Loi sur l'instruction publique.

Mme Plante-Paulin: M. le Président, c'est effectivement le sens des articles 4, 5,

6 et 7. Le directeur d'école se voit confier la responsabilité du projet éducatif de l'école - pour autant qu'elle est confessionnelle, il a la responsabilité à tous égards dans cette école - en lien avec la commission scolaire.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Quel est le pouvoir d'intervention de la commission scolaire dans un cas pareil?

Mme Plante-Poulin: M. le Président, vous voulez dire dans quel cas?

Le Président (M. Parent, Sauvé): Oisons que dans une certaine école, il y a un projet éducatif qui est mis de l'avant par le directeur de l'école. Quel est le pouvoir d'intervention des patrons, des gens qui ont la responsabilité de la diffusion de l'enseignement sur le territoire, soit les commissaires d'école?

Mme Plante-Poulin: La responsabilité de la commission scolaire en matière confessionnelle est de s'assurer que le directeur, au moment de son embauche, puisse assumer la gestion honnête, tel que l'article 6 le dit, des droits des catholiques.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci.

M. Ryan: Deux autres questions avant de terminer. On nous a dit que le projet de règlement présenterait deux risques possibles en ce qui touche les enseignants. Tout d'abord, on dit qu'en haussant les exigences, il y a un danger qu'on en vienne à créer une nouvelle spécialité au niveau de l'enseignement primaire. Si les exigences sont trop élevées, on pourra être obligé, dans un nombre croissant de cas, de confier l'enseignement religieux, moral ou catholique à des enseignants spécialisés. Comme on a déjà beaucoup de problèmes avec l'enseignement des matières spécialisées au niveau primaire, est-ce que cela ne vient pas introduire dans le mécanisme un danger de complication qui pourrait entraîner des coûts et d'autres conséquences administratives considérables?

Le deuxième risque qu'on nous a signalé a trait aux politiques d'embauche des commissions scolaires. Est-ce que les exigences que formule le comité catholique pourraient éventuellement être utilisées par des commissions scolaires comme des critères d'embauche, ce qui entraînerait une situation difficile pour des personnes qui ne seraient pas munies, par exemple, des qualifications définies dans le règlement? Je ne sais pas si vous avez considéré ces deux problèmes et quelle est la réponse du comité catholique à ces questions?

Mme Plante-Paulin: Pour le comité catholique, il n'est pas question, par son règlement, de changer le statut de l'enseignant au primaire. Les audiences que le comité tient dans différents milieux l'incitent à penser que la personne généraliste est encore celle qu'on désire voir affectée à l'enseignement primaire. Les neuf crédits veulent introduire un minimum d'exigences en regard de la compétence de ces enseignants qui font l'enseignement religieux. Pour la plupart, ces enseignants qui finissent leurs études universitaires et qui sont embauchés dans des écoles primaires n'ont pas eu d'enseignement religieux depuis leur secondaire et sont considérés peu aptes à dispenser l'enseignement religieux au primaire. Le comité croit que neuf crédits est un minimum. On parle de spécialisation lorsqu'il y a beaucoup plus de crédits que cela. Neuf crédits, cela représente certains crédits pour l'apprentissage des contenus essentiels de la foi chrétienne et certains crédits plus didactiques qui habilitent à la dispensation des enseignements. Pour le comité catholique, il n'y a pas de volonté de spécialiser l'intervenant au primaire en enseignement religieux, ce qui n'exclut pas que des milieux choisissent de se donner des spécialistes au primaire. D'ailleurs, il y a certains milieux qui font déjà appel je ne dirais pas à des spécialistes nécessairement, mais à des personnes autres que l'enseignant titulaire pour dispenser cet enseignement.

Quant au deuxième risque qui était évoqué - il s'agissait de l'embauche d'enseignants - à savoir si ces nouvelles qualifications ou exigences pourraient être considérées au moment de l'embauche, le comité catholique souhaite en effet qu'au moment du choix du personnel, on puisse considérer les exigences que pose le fait de dispenser l'enseignement religieux et considère normal qu'une personne qui doit dispenser cet enseignement puisse avoir ta compétence pour le faire. Il y aurait donc, de la part des cadres préposés à l'embauche du personnel, des prévisions par rapport aux besoins, une évaluation des besoins de l'école et une embauche de personnel en regard de ces besoins à combler pour dispenser les cours d'enseignement religieux. Ce qui voudrait dire que les mêmes personnes préposées à l'embauche du personnel pourraient aussi désirer des personnes compétentes, par exemple, pour dispenser l'enseignement moral puisque, dans la pensée du comité, ces deux enseignements doivent avoir les mêmes conditions d'exercice et on doit retrouver la même qualité dans l'exercice de ces enseignements.

Est-ce que vous voulez ajouter quelque chose? M. le Président, est-ce que M. Parent pourrait compléter? (12 heures)

M. Parent (Pascal): Si je complétais, ce serait pour parler de cette notion de généraliste et de spécialiste. Dans un

baccalauréat de 90 crédits, pour être spécialiste, il faut avoir un minimum de 60 crédits. Cela peut être un peu moins, mais, règle générale, il faut 60 crédits. Ici, nous n'exigeons que 9 crédits, ce qui n'est pas 10 % du cours; c'est une initiation. Dans un cours de formation au primaire, il y a une formation de base en français, une formation de base en mathématiques et une initiation aux différentes disciplines qui sont enseignées par un professeur généraliste au primaire. Cela peut être les sciences naturelles, etc. Pour être capable de donner décemment l'enseignement religieux, dans notre contexte religieux actuel, nous croyons que neuf crédits ou trois cours sont absolument nécessaires pour que le professeur se sente en sécurité, qu'il puisse aborder avec ses étudiants, selon des méthodes reconnues, l'enseignement religieux et ne le fasse pas dans un contexte complètement différent des méthodes pédagogiques des autres matières. Donc, trois cours ou neuf crédits lui permettraient d'acquérir des notions de base, de connaître les programmes qui sont bien faits, et qui doivent être connus et analysés - cela ne s'apprend pas tout seul - et, enfin, d'avoir de la didactique.

Mme Plante-Poulin: Je rajouterai, M. le Président, que le règlement prévoit des dispositions particulières pour préserver les droits acquis du personnel enseignant actuel et pour permettre que, durant les trois prochaines années, les universités puissent développer des aptitudes à répondre aux nouveaux besoins de la population scolaire catholique., Donc, les qualifications exigées aux articles 16 et 17 concerneront les personnes - le nouveau personnel embauchées après 1991,

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. Est-ce qu'il y a d'autres interventions?

Je reconnais Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. D'abord, permettez-moi de saluer Mme la présidente et les personnes qui l'accompagnent. Dans le prolongement de ce que j'ai dit tout à l'heure, peut-être pour rappeler que, pour moi, une école reconnue comme catholique devrait viser les objectifs que vous donnez à votre projet, c'est-à-dire la qualité et la vérité. Cependant, je le rappelle, dans le cas d'écoles catholiques où tous les élèves et tous les parents font ce choix, je trouve que l'école peut aussi être publique et cela va bien, sauf qu'actuellement on sait qu'au Québec ce n'est pas la situation et c'est là l'objet de mes préoccupations.

En reprenant les réponses que vous avez données au ministre, tout à l'heure, à quelques-unes de ses questions, je voudrais essayer de voir comment cela pourrait s'articuler dans un projet d'école, aujourd'hui. D'abord, le ministre vous demande s'il y a urgence de procéder. Vous justifiez en disant que cela fait déjà six ans. Je dirais que vous procédez un peu par l'absurde en disant: On pense qu'un tel règlement pourrait hâter l'avènement d'écoles autres. C'est votre désir et je pense que ce serait une solution intéressante.

Par ailleurs, vous ajoutez un peu plus loin que cette école dont on renforce le caractère catholique et qui pourra avoir comme effet de hâter l'avènement d'écoles autres n'est pas contraignante pour les non catholiques. Il me semble qu'il y a une espèce de contradiction. Si cela a comme effet de hâter la venue d'écoles autres, cela a certainement comme effet d'être un peu contraignant. C'est toute la difficulté du projet et je pense que vous n'êtes pas sans le savoir. Je suis certaine que c'est le genre de discussion que vous avez eue, c'est toute la difficulté du projet que vous nous présentez, c'est-à-dire une école confessionnelle dans un réseau de plus en plus pluraliste.

On revoit la même difficulté lorsqu'il s'agit des crédits exigés pour enseigner au primaire, mais j'y reviendrai. Il y a là une difficulté réelle et je pense qu'on n'a pas répondu tout à fait à la satisfaction du ministre, et je le comprends un peu, de même qu'à un ex-président de commission scolaire. Du moment où on demande à l'école primaire, aux commissions scolaires primaires, de prévoir à l'avance le choix que les parents feront entre la morale et la religion pour engager le personnel ou encore, on se retrouvera devant des étudiants qui choisiront à la fois la morale et la religion, et jusqu'à quel point l'enseignement moral sera-t-il neutre? C'est vraiment ce genre de question que cela pose.

Je reviendrais un peu au secondraire. Ce n'est pas plus simple non plus. Pourquoi les enseignants en morale, qui sont allés chercher une spécialité dans le cas des 60 crédits ou des 30 crédits pour le premier cycle, pourront-ils enseigner d'autres matières pour compléter leur tâche, alors qu'un enseignant de français ou d'histoire ne pourra pas enseigner la morale ou la religion? Cela pose des problèmes d'application réels. Ce n'est pas simplement dans le but de m'opposer. Je vaudrais voir, dans le concret, comment on peut tenir ce discours, que je partage pour le fond: cela pourrait avoir pour effet d'amener ou de hâter l'avènement d'écoles autres, et dire en même temps que ce n'est pas contraignant. Comment dire qu'on va avoir des écoles qui seront respectueuses de la pluralité en même temps qu'elles s'affichent comme catholiques? Vous comprenez que ce n'est pas... À moins de mal comprendre,

l'intervention du comité catholique est la suivante: On a assez discuté de ces écoles linguistiques et autres, qu'on y passe, et nous, comme on est responsables de parler d'un projet catholique, on le fait comme si, effectivement, on avait des structures linguistiques plutôt que confessionnelles. Je ne sais pas si je me trompe ou si j'erre dans mes...

Mme Plante-Poulin; Je peux essayer de reprendre un peu. Je ne voudrais pas donner l'impression que le comité fait son règlement pour faire créer des écoles autres, quoique...

Mme Blackburn: II faudrait demander au ministre s'il a l'argent.

Mme Plante-Poulin: ...il souhaite l'avènement d'écoles autres, mais il a la prétention de pouvoir améliorer la qualité des écoles confessionnelles. Le règlement se situe, comme je l'indiquais tout à l'heure, dans le cadre de la juridiction et des responsabilités du comité catholique de procéder à la reconnaissance de règlements pour la qualité des écoles catholiques. Faisant un règlement pour les écoles catholiques, il n'oblige pas les écoles publiques à être catholiques. Le règlement n'oblige pas les écoles publiques à devenir catholiques. Le règlement est là dans le cas où des parents, majoritairement, auront choisi que leur école publique sera catholique.

Mme Blackburn: Si vous me le permettez, M. le Président... Mme la présidente, vous savez très bien que les parents de la CECM n'ont pas le choix. Ni ceux de la CECQ. Les écoles sont automatiquement catholiques et le statut est préservé en vertu de la constitution.

Mme Plante-Poulin: M. le Président, la CECM dit d'ailleurs qu'elle ne se sait pas obligée au règlement du comité catholique.

Mme Blackburn: M. le Président, je dois mai comprendre. Que la CECM ne soit pas obligée, c'est évident parce qu'elle est déjà catholique. Elle est dans le milieu où c'est le plus menacé. On a un problème réel et vous le savez très bien. On n'oblige pas les écoles à être catholiques dans le reste de la province de Québec, à l'exclusion de celles de la CECQ et de la CECM; tout le monde comprend cela, je pense. Cependant, les problèmes se posent précisément à la CECM - moins à la CECQ - où, de facto, les écoles sont catholiques. Je me dis que les écoles n'ont pas le choix d'être autres. Le ministre, peut-être en conclusion, nous dira s'il est prêt à accepter la création d'écoles autres et, plus tard, d'un réseau neutre sur les territoires de la CECM et de la CECQ, financés par les deniers publics, évidemment. On ne parlera pas ici d'écoles privées.

On parle d'un réseau public, et tant pour le réseau public que le réseau privé, du moment où le réseau privé est subventionné, je pense que la question se pose également. Comment, dans notre réseau public, concevoir des exigences telles au réseau catholique alors que les exigences du réseau protestant sont minimales? Par exemple, seulement en termes de coûts d'administration, le réseau protestant ne demande pas d'animateur de pastorale ou d'animateur de vie religieuse, il se satisfait de l'enseignement. Là, on a deux mesures et on est toujours dans un réseau public.

Mme Plante-Poulin: M. le Président.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Allez, madame.

Mme Plante-Poulin: Les écoles protestantes sont très différentes des écoles confessionnelles catholiques...

Mme Blackburn: Oui, je le sais.

Mme Plante-Poulin: ...à cause de la multiplicité des dénominations religieuses qui sont difficilement comparables. Pour en • revenir aux écoles publiques, on disait tout à l'heure que le règlement prévoit des dispositions là où des parents choisiront de demander la reconnaissance catholique et, dans le cas de ces écoles, le règlement prévoit des articles qui veulent respecter le caractère public de l'école. Donc, c'est le comité catholique qui a introduit l'option entre l'enseignement moral et l'enseignement religieux catholique; les autres, les non-catholiques, ont donc le choix de l'enseignement moral. Les enseignants, dans ces écoles, qui ne partagent pas ou qui veulent être dispensées de l'enseignement religieux, peuvent se prévaloir de la possibilité de l'exemption. C'est une autre façon qu'a le comité catholique de respecter le caractère public et le respect minimum exigé des convictions catholiques.

Le comité ne souhaite pas que se débloque un réseau d'écoles neutres non plus. Il souhaite que, là où les parents ne le voudront pas, ils puissent se donner des écoles autres et Je comité est bien conscient que c'est difficilement possible à Montréal.

Mme Blackburn: Bien. J'essaie d'imaginer ce que serait une école qui respecterait, comme cela se devrait, votre règlement et ce que cela pourrait vouloir dire par rapport à la neutralité si cette école, à l'article 4, "intègre les croyances et les valeurs de la religion catholique dans son projet éducatif et... s'affiche comme telle". Qu'est-ce que cela peut vouloir dire?

D'abord, dans son projet éducatif, cela veut dire dans la totalité des éléments de son projet éducatif, en français, en histoire, en comportement, en formation personnelle et sociale et dans l'enseignement de la sexualité. Comment pouvez-vous parler d'un projet éducatif qui respecte le caractère catholique, les croyances et les valeurs et, par ailleurs, qui est imprégné dans tout le projet de l'école, ce que je trouve tout à fait correct si on parle d'une école uniforme et homogène, mais difficilement tenable si on parle de choix dans cette école? Comment cela pourrait-il se traduire pour quelqu'un qui enseigne, par exemple, la contraception? Je vous demanderais peut-être en même temps, comme vous avez le mandat de vous pencher sur les différents programmes offerts au primaire et au secondaire, quel est l'avis du comité catholique sur cette question? Vous savez que, là, on travaille un peu dans l'abstrait.

Mme Plante-Poulin: Le règlement exige effectivement que l'école se donne un projet éducatif qui intègre les croyances et les valeurs de la religion catholique et, aux cinq ans, il y a la possibilité d'évaluer ce vécu confessionnel et elle en donne la responsabilité à la direction de l'école. Le règlement ne dit pas ce que, pour telle école de Chicoutimi ou de Montréal, sera le projet éducatif. C'est au milieu, en concertation avec les différents agents, à indiquer comment, sur place, il veut, étant inspiré par l'Évangile, rendre concret son projet éducatif, et il aura à répondre à la question que vous posez: Dans telle école, comment traiter de la sexualité avec les jeunes? (12 h 15)

Le comité catholique prescrit les exigences pour la dispense de l'enseignement religieux qui doit être compatible avec ta foi catholique et il entend que les autres enseignements ne soient pas incompatibles. Dans le concret du quotidien, la plupart des décisions sont à prendre entre les intervenants qui ont à élaborer le projet éducatif. Si, après cinq ans, le milieu se juge inapte à rendre compte du projet catholique, il peut en demander la révocation, il peut décider de le modifier. C'est le milieu qui a en main la gestion de son projet éducatif.

Mme Blackburn: Je veux bien savoir, mais vous venez de nous dire, et cela confirme les appréhensions et les craintes de la quasi-totalité des gens qui expriment des réserves à l'endroit de votre règlement, que, l'école étant reconnue comme catholique, les autres enseignements ne sauraient être incompatibles avec la morale catholique, avec ce caractère catholique, ce vécu confessionnel. Comment peut-on tenir ce discours, par exemple, en enseignement sexuel? Je parle encore de l'enseignement sexuel, de la contraception, des campagnes d'information que l'on connaît actuellement. Comment peut-on tenir un discours qui se veut respectueux, par exemple, des directives très claires du pape à cet égard et du pluralisme d'une communauté qui ne partage pas cet avis, même chez les catholiques, je dirais, mais c'est autre chose, de façon générale, une pluralité qui de plus en plus ne se reconnaît pas dans certains enseignements?

Ma question est toujours la même. Les comités sont chargés, à l'article 22e, d'approuver, au point de vue religieux et moral, les programmes, les manuels et le matériel didactique pour l'enseignement dans ces institutions d'enseignement." Ce sont tous les programmes, tous les manuels et tout le matériel didactique sur lequel vous avez à vous prononcer pour vous assurer - c'est votre responsabilité - qu'ils respectent le caractère confessionnel de l'école. Je comprends votre difficulté, mais c'est toute la difficulté d'un système que l'on veut public et à la fois catholique et respectueux des autres. Votre règlement vient renforcer ce caractère avec des objectifs, que j'ai bien compris, de peut-être amener l'avènement d'écoles autres, mais ce que j'ai bien compris également c'est que le ministre n'est pas vraiment prêt, cela suppose de l'argent. Il faudrait des sommes quasi faramineuses dans la région de Montréal pour créer un troisième réseau.

Ma question en était une de fond: Au moment où on se parle, doit-on renforcer le caractère catholique ou protestant, ou religieux de l'école?

Le Président (M. Parent, Sauvé): Madame.

Mme Plante-Poulin: II y a au moins deux questions dans l'intervention de Mme la députée. D'abord, quand on dit souhaiter l'avènement d'écoles autres, ce n'est pas la création d'un réseau scolaire non confessionnel que le comité souhaite. Ce à quoi le comité pense n'engage absolument pas de fonds supplémentaires. Une école publique ne demande pas... D'abord, on parle des écoles qui seront nouvellement créées et non de celles qui sont déjà en place. Donc, les écoles à venir qui pourraient ne pas vouloir une reconnaissance professionnelle peuvent, au bout de cinq ans, demander un révocation. Il ne s'agit pas d'un réseau nouveau dans le système scolaire.

Deuxièmement, au sujet de l'approbation du matériel didactique, le comité approuve régulièrement Ies programmes, manuels et, dans ce cas, puisqu'on parle de l'éducation sexuelle, le comité a approuvé les programmes actuels qui sont dispensés par les enseignants, que l'on connaît dans nos écoles, et les approuve

pour autant qu'ils ne sont pas incompatibles. Une saine information des méthodes contraceptives aujourd'hui est acceptée et c'est au cours d'enseignement religieux catholique que l'élève, qui a choisi de suivre un tel cours, connaît et se voit proposer la morale catholique sexuelle. C'est ainsi que les enseignants de français, de mathématiques ou d'éducation sexuelle, dans leurs relations professionnelles avec l'élève, doivent être respectueux. C'est-à-dire qu'ils ne doivent pas porter atteinte au caractère confessionnel. C'est un minimum exigé, ce n'est pas un engagement pour les valeurs catholiques qui est demandé du personnel, tel que dit à l'article 27. On leur demande un respect tacite, si je peux dire.

Mme Blackburn: Dans votre document je vais essayer de retrouver rapidement la page - lorsque vous parlez de ce caractère visible de l'école confessionnelle, c'est-à-dire de s'afficher comme tel, à la page 23 de votre document, vous dites qu'il faut que ce soit au moins de façon tacite. Pratiquement, cela signifie, dans le dernier paragraphe: Que toute personne de l'école s'empêche de parler ou d'agir à l'encontre de l'orientation catholique. Connaissant toujours la position de l'Église sur la contraception, sur le divorce, sur le sacerdoce des femmes, est-ce aller à l'encontre de l'orientation catholique que de préconiser le sacerdoce des femmes?

Mme Plante-Poulin: Ou de payer correctement ses impôts? Dans la vie morale, il y a un tas de situations qui, évidemment... L'intention du règlement, c'est de respecter le caractère public de l'école et il le fait, à l'article 27, en demandant un minimun. Donner une information sûre, ce n'est pas enfreindre le caractère. Est-ce que vous voulez ajouter quelque chose, l'une ou l'autre?

Le Président (M. Parent, Sauvé): MmeVenditti-Milot.

Mme Venditti-Milot (Raymonde): Oui, M. le Président. J'aimerais peut-être préciser que, dans le domaine de l'éducation, il est important de transmettre aux jeunes différentes informations et que, s'il y a des prorammes, actuellement, pour les dif-rentes disciplines, c'est justement pour assurer un caractère objectif et assurer la qualité de la formation. Tout le processus de précision de programmes a été justement afin d'éviter qu'un cours, peu importe la discipline, se limite à transmettre, en bonne partie, la position personnelle de l'enseignant. Alors, c'est pour cela que je pense que cet aspect est important à apporter. Vous parliez de programmes de formation personnelle et sociale. Eh bien, dans le contexte de ces programmes-là, comme ils s'adressent aux élèves de l'ensemble de l'école, peu importe qu'ils soient inscrits en enseignement religieux ou en enseignement moral, il est important de respecter le caractère, vous parliez de caractère neutre de ces enseignements, c'est-à-dire que ce n'est pas dans le contexte d'un cours de formation personnelle et sociale qu'il y a lieu de faire la promotion de valeurs qui seraient reliées à une confession particulière, parce qu'il y aura des lieux pour cela. Dans le cadre des cours d'enseignement religieux, un étudiant, dans une perspective d'intégration, peut toujours demander à l'enseignant de le situer, de donner l'information adéquate. Je pense que notre préoccupation est d'informer des jeunes et de bien les informer, pour qu'ils puissent, par la suite, faire des choix libres et responsables. C'est une dimension qui m'apparaît très importante en éducation. Et, pour pouvoir faire des choix libres et responsables, il est important d'aller chercher l'information sur différentes positions.

Le Président (M. Parent, Sauvé): ...

Mme Plante-Poulin: Je voudrais ajouter, M. le Président, que beaucoup de questions de morale et particulièrement, peut-être, en matière de sexualité seraient les mêmes dans une école non confessionnelle. Les intervenants adultes pourraient pertinemment se poser la question du devoir de transmettre telle ou telle information. Comme les familles catholiques, d'ailleurs, n'ont pas réglé...

Mme Blackburn: Mais tel que présenté je pense que je vais arrêter sur ce sujet-là -votre situation est ambiguë, parce que vous semblez réclamer à la fois que cela imprègne tout le projet éducatif et, ensuite, vous en soustrayez quelques éléments. Cela ne peut pas être l'un et l'autre. Dans le cas qui nous concerne, ou cela imprègne la totalité du projet ou cela ne peut pas l'imprégner. Je pense que les cours en éducation sociale et personnelle en sont un exemple. Ou ils s'imprègnent du caractère confessionel de l'école et de son vécu, parce que c'est ainsi que c'est indiqué dans votre projet, ou il ne s'en imprègnent pas.

Je reprends l'article 4 de votre projet: L'école publique "reconnue" comme catholique intègre les croyances et les valeurs de la religion catholique dans son projet éducatif et elle s'affiche comme telle." C'est assez clair. Je le répète, je suis d'accord avec cette perspective et cette approche, dans la mesure où on n'essaie pas, en même temps, de dire qu'elle est neutre. C'est cela, votre difficulté et c'est la difficulté que cela va poser dans l'application.

À présent, je voudrais simplement revenir sur des questions...

Le Président (M. Parent, Sauvé); Un instant, Mme la députée de Chicoutimi; il s'agit d'une question de justice. Est-ce que vous voulez réagir à l'affirmation de la députée de Chicoutimi que votre programme est ambigu? Si vous ne voulez pas réagir, on enchaînera. Libre à vous. Je vais vous donner toutes les chances, parce que vous êtes ici pour vous défendre.

Mme Plante-Poulin: Dans la pensée du comité catholique, ce n'est sûrement pas une école neutre. C'est une école qui affiche son caractère, c'est-à-dire son inspiration qui est l'inspiration catholique, et qui, avec son personnel, prétend, aux articles 6 et 7, qu'elle saura trouver dans la réalisation quotidienne l'ampleur qu'elle veut donner au projet éducatif et comment, dans le concret des questions, elle tiendra compte des différents intervenants et du respect de l'élève aussi qui a droit, dans une école publique, au respect de ses convictions.

Mme Blackburn: Je me demandais, si vous me le permettez... Avez-vous évalué le coût des mesures que vous proposez, c'est-à-dire en locaux, bureaux, l'animateur de pastorale aux frais des commissions scolaires? On sait qu'en partie cela existe. Je voudrais avoir deux réponses là-dessus. D'abord, si vous avez évalué le coût des mesures que vous proposez. Et, ensuite, je pense qu'il a été un temps où les animateurs de pastorale étaient payés par le diocèse. Alors, je voudrais savoir à quel moment on est passé à la situation qu'on connaît actuellement, où ils sont à la charge de l'école, de la commission scolaire, de la situation où ils étaient à la charge du diocèse et si, deuxième question, vous avez évalué le coût de ces mesures.

Comme on sait que les budgets sont alloués également, qu'on soit dans les écoles protestantes ou catholiques, cela veut dire qu'il y a une partie des budgets qui devront nécessairement, selon votre règlement, être affectés à l'enseignement religieux, alors que, dans une école protestante, on pourrait affecter ces budgets à l'animation sociale et personnelle.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Madame.

Mme Plante-Paulin: L'animation pastorale à l'école est un service éducatif complémentaire et la commission scolaire, de par ses responsabilités, doit pourvoir à de tels services dans le cadre scolaire. Depuis une quinzaine d'années, au secondaire, les commissions scolaires engagent des professionnels non enseignants dont la description de tâches est faite au plan de classification 27Q1. On dit que, dans la province, le ratio est de 1 pour 1000. Ce que le règlement rappelle, c'est la responsabilité pour les écoles catholiques de recourir à un tel service, de mettre en place l'existence, de vouloir l'existence, l'insertion et la qualité d'un tel service. Au primaire, la pratique - vous avez raison - est d'avoir recours à des personnes qui viennent, la plupart du temps, de la paroisse. C'est pour cela qu'on parle de personnes chargées de l'animation pastorale. Donc, ce n'est pas dans l'intention du comité de demander l'engagement de professionnels, si bien que le règlement n'engage pas à des frais nouveaux par rapport à l'animation pastorale. (12 h 30)

Quand il est question de locaux, on constate dans les audiences que ce service, surtout au primaire, n'a souvent pas le minimum d'espace pour exister. Il n'est pas dit que l'école fournira, on dit qu'elle devra prévoir; cela pourrait être une classe ou un local occasionnellement disponible pour que ce soit possible de réunir les élèves. On parle d'un budget de fonctionnement. II s'agit ici des budgets courants que les écoles affectent à la réalisation des activités. Le règlement, donc, voudrait que les directions d'école prévoient de telles sommes au moment de répartir leurs ressources. Il n'y a pas de frais nouveaux encourus.

Mme Blackburn: Si vous me permettez, je vais revenir un peu sur la qualification parce que ça aussi ça va poser un certain nombre de problèmes. Je vais essayer de les énumérer dans l'ordre. D'une part, si je comprends bien, si le projet était adopté, les universités, dans les programmes, devraient adapter leurs programmes dès septembre 1988 même si on n'a pas encore procédé à la réforme telle que souhaitée, suggérée et proposée par le Conseil des universités sur la formation mes maîtres.

Seconde question, c'est que vous parlez de l'application de ces exigences quant à la formation pour tous les professeurs, les enseignants qui seraient embauchés à compter de 1991. Qu'est-ce qu'on fait de tous nos professeurs actuellement qui n'ont pas d'emploi et qui ont terminé leur formation ou ceux qui vont la terminer en 1988 et qui n'auront pas eu l'occasion d'aller chercher ces crédits-là? Est-ce qu'on les laisse à la porte? Ce n'est pas prévu là-dedans.

L'autre question, c'est: Comment avoir dans une école ou dans une commission scolaire - parce que ça va être géré, les conventions collectives vont entrer là-dedans deux statuts? C'est-à-dire le statut d'enseignant qui a une formation, ses 30 crédits ou 60 crédits, s'il est au secondaire, et qui pourra compléter sa tâche dans d'autres matières alors que c'est l'inverse pour un enseignant qui ne l'aura pas, qui n'aura pas ses crédits en enseignement

religieux catholique, il ne pourra pas compléter sa tâche. Par rapport au primaire, vous dites vouloir des généralistes, mais comment la commission scolaire peut-elle prévoir à l'avance ce que sera le choix des parents par rapport à la morale ou à la religion? Comme on connaît la rigidité des conventions collectives et la sécurité d'emploi, je pense, qu'il est normal de respecter, ça pourrait vouloir dire au bout de quelques années que, si vous avez de plus en plus de parents qui demandent pour l'enfant la morale plutôt que la religion, vous allez vous retrouver avec des enseignants qui ont été formés à la religion et qui viennent enseigner la morale. C'est un certain nombre de difficultés...

Une voix: Cela va bien ensemble.

Mme Blackburn: Cela va bien ensemble du moment où on est d'accord avec une morale catholique. Mais, quand on parle de pluralisme, c'est autre chose.

Une voix: ...

Mme Blackburn: Je veux bien croire que la morale catholique ou judéo-chrétienne est assez universelle, mais on peut voir que de plus en plus les immigrants nous apportent tout à fait d'autres valeurs et que même ces valeurs-là ne sont pas partagées par la totalité des catholiques. Alors, j'aurais aimé avoir des réponses par rapport à l'état de votre réflexion sur ces questions.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Madame.

Mme Plante-Poulin: M. le Président, il y a des situations qui ont paru au comité, à l'occasion de ces audiences, je dirais pour le moins anormales. Des professeurs absolument non préparés sont obligés de dispenser, à cause de ce qu'on appelle le "bumping", en complément de tâche ou à tâche complète, l'enseignement religieux. Cela se produit assez fréquemment au secondaire et, effectivement, le comité pense, avec les exigences pour les conditions de qualification, mettre un frein à cela. Au primaire, on pense, en regardant les statistiques, qu'il est assez prévisible de voir évoluer le choix des options d'une année à l'autre. On peut voir, en l'espace de cinq ans, qu'il n'y a pas d'amélioration tellement marquée. L'inscription se fait en février. Elle annonce donc à l'avance la répartition de l'effectif. Là aussi, effectivement, le comité, par son article 16, veut exiger plus de qualifications chez le personnel enseignant au primaire.

Mme Blackburn: Bien. Comme on me dit que le temps passe par rapport au temps qui m'est imparti dans le présent exercice, je voudrais revenir brièvement à la page 24 de votre exposé de tout à l'heure, pour savoir comment on pourrait décomposer les chiffres que vous nous avez donnés dans le dernier paragraphe.

Vous dites que du côté catholique demeurent les faits suivants: 83,5 % des élèves francophones des écoles primaires et secondaires publiques se sont inscrits comme catholiques en 1986-1987. Lorsqu'on demande à une telle inscription d'être catholique, c'est-à-dire baptisé et pratiquer, elle est de deux ordres. Cela me dit et à n'importe qui, je pense, qu'on doit avoir baptisé au Québec 98 % de tous ceux qui étaient francophones catholiques. On peut même parler de 99 % ou de quelque chose comme cela. Les parents font encore baptiser leurs enfants et il ne semble pas y avoir de distinction là-dessus. Est-ce que cette question est formulée dans le sens de "baptisé"? Est-ce qu'on fait une distinction entre "baptisé" et "pratiquant"? Vous savez très bien que cela ne signifie pas tout à fait la même chose et que des personnes baptisées ne demanderaient peut-être pas nécessairement le baptême une fois adultes. C'est un fait. Elles tiennent pour acquis qu'elles sont catholiques parce que baptisées. Je voulais seulement savoir si votre formulaire prévoyait cela parce que de l'entendre comme cela, c'est impressionnant. Je trouve même étonnant qu'il n'y en ait pas plus de 83 % alors qu'on devrait en retrouver environ 98 %.

Mme Plante-Paulin: Les statistiques rendent compte d'une compilation d'inscriptions à l'école où les parents ont à dire, comme quand ils vont à l'hôpital ou ailleurs, qu'ils sont catholiques. Il ne s'agit pas non plus de ceux qui choisissent l'enseignement religieux, à qui, d'ailleurs, on ne demande pas s'ils pratiquent ou non. On constate aussi que la majorité des parents qui choisissent l'école confessionnelle, depuis plusieurs années, est très grande.

Mme Blackburn: Quant à la consultation qui est menée auprès des parents pour choisir le statut de l'école, je lisais un document que vous avez publié: "L'école catholique, situation et avenir", en septembre 1986. Comme vous n'avez pas nécessairement le document en main, je vais me permettre de le rappeler. Vous disiez, à la page 5: Depuis 1980, le comité catholique a accordé la reconnaissance comme école catholique à plus d'une centaine de nouvelles écoles. La plupart de ces demandes ont été précédées d'une consultation auprès des parents.

Est-ce à dire que jusqu'à l'adoption de ce projet de règlement, il y a des écoles qui peuvent être reconnues comme confessionnelles sans que les parents aient été consultés? Puisque vous dites que "la plupart de ces demandes ont été

précédées...", cela suppose donc qu'il y en a qui n'ont pas été précédées de consultation.

Mme Plante-Poulin: La Loi sur l'instruction publique faisait obligation de consulter le comité d'école. Ce qu'on disait...

Le Président (M. Parent, Sauvé): Mme la Présidente, vous avez la parole.

Mme Plante-Poulin: Oui, M. le Président. La Loi sur l'instruction publique faisait obligation de consulter le comité d'école pour une demande de reconnaissance. Ce que dit le document auquel vous faites allusion, c'est qu'en plus des commissions scolaires prenaient l'initiative de consulter les parents. En fait, le projet de règlement qui est devant nous reconnaît la pratique grandissante de consulter les parents en plus du comité d'école et veut effectivement plus de démocratie en instaurant la consultation des parents.

Mme Blackburn: Quel devrait être le pourcentage de participation des parents, selon vous, pour que la consultation soit valide? Je voudrais juste rappeler que pour un syndicat c'est 50 % et plus et pour une association étudiante dans un collège ou une université c'est un minimum 25 % de tous les étudiants inscrits dans le collège ou une université. Quel serait le pourcentage de participation des parents pour que ce soit considéré comme étant démocratique? Vous y revenez d'ailleurs à quelques occasions.

Mme Plante-Poulin: Le comité ne se prononce pas là-dessus. Le jugement est réservé au milieu. Je pourrais vous citer un exemple d'une commission scolaire qui avait rapporté les chiffres de sa consultation. Le comité devant aller en audience a voulu vérifier comment la commission scolaire jugeait l'importance de la participation. Au jugement même de la commission, le taux de participation était plus grand que dans la plupart des consultations qu'elle fait sur d'autres sujets, peut-être 25% à 28 %. Cependant, 80 % de ce 25 % avaient voté majoritairement pour la confessionnalité. Donc, le comité ne juge pas arbitraire de préciser un pourcentage de participation. C'est au milieu de juger lui-même de la validité dans son processus. On peut penser que là où les parents se présentent, comme dans toute élection, on respecte qu'ils soient là et leur vote.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, Mme la Présidente.

Le temps dévolu au parti de l'Opposition était...

Mme Blackburn: M. le Président, me permettez-vous une question complémentaire?

Le Président (M. Parent, Sauvé): Je peux vous la permettre à une condition, c'est que le parti ministériel accepte de dépasser l'heure parce qu'on est limité à une heure. Est-ce que vous acceptez une dernière question de l'Opposition?

Alors, je reconnais M. le député d'Arthabaska.

M- Gardners Merci, M» le Président.

Vous allez comprendre que mes questions vont aller surtout sur la question des enseignants puique je fus, un jour, appelé à enseigner pendant un an l'enseignement moral et religieux. Il y a quelques années... Je pense que cela a changé un petit peu mais vous avez mentionné tout à l'heure quelques situations semblables où des professeurs de mathématiques peuvent être obligés d'enseigner en bout de ligne l'enseignement religieux.

La première exigence, c'est à la page 19 de votre message. J'ai été drôlement surpris qu'on mette, comme première exigence, qu'il faut être de foi catholique. Cela m'a fait penser à l'annonce de la télévision qui disait? "On ne donne pas ce qu'on n'a pas". Vous vous souvenez de cette annonce? Cela m'a même surpris qu'on demande... Je reviens un peu sur la question de Mme la députée de Chicoutimi tout à l'heure. On dit qu'il faut être baptisé dans l'église catholique et se déclarer de foi catholique. On ne demande pas du tout si vous êtes pratiquant ou si vous êtes reconnu de bonne réputation. Sans vouloir qu'il y ait inquisition, je ne veux pas un tribunal d'inquisition, c'est sûr, mais je me demande pourquoi on est si mou dans cette question-là ou qu'on soit si ouvert à cela. Vous êtes sans doute au courant qu'il y a certains enseignants qui ne sont même pas reconnus de bonne réputation et qui enseignent l'enseignement religieux. Est-ce que vous êtes au courant de cela? Vous en avez parlé un petit peu tout à l'heure mais sans dire qu'ils n'étaient pas de bonne réputation. Est-ce que vous ne pensez pas - je comprends que vous ne vouliez pas répondre - que nous devrions être un. peu plus sévères? J'ai hâte d'entendre les gens de la foi protestante parce qu'eux je suis certain qu'ils doivent être un plus sévères que les catholiques.

Des voix: Ha! Ha! Ha!

Mme Plante-Poulin: M. le Président.

M. Gardner: Je reviendrai sur d'autres... J'aimerais avoir votre rire.

Mme Plante-Poulin: Dana la pensée du comité, une personne qui se dit de foi catholique... Le comité veut respecter la prétention d'une personne qui se dit de foi catholique et sa liberté de conscience dans

l'expression de ses convictions religieuses.

M. Gardner: Mais vous ne faites pas... Vous permettez, M. le Président, j'ai d'autres questions qui s'ajoutent à celles-là.

Le Président {M. Parent, Sauvé): Allez, allez, monsieur.

M. Gardner: Donc, vous restez sur l'idée de liberté de l'enseignant, vous n'allez pas plus loin que cela? Vous ne voulez pas du tout aller plus loin que cela? (12 h 45)

Mme Plante-Poulin: Le comité veut respecter la parole de la personne qui se déclare catholique.

M. Gardner: Oui, cela me... Vous savez fort bien, M. le Président, qu'enseigner la religion ce n'est pas la même chose qu'enseigner les mathématiques. J'ai été surpris de la déclaration de l'autre dame à droite, je ne sais pas son nom.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Mme Milot.

M. Gardner: Mme Milot. On ne veut pas, vous l'avez dit tout à l'heure, que la position ' personnelle de l'enseignant soit reconnue par les élèves, je suppose. Vous savez fort bien que l'enseignement religieux, cela implique la personne de l'enseignant; l'enseignant est vraiment impliqué dans ce qu'il enseigne, bien plus que s'il enseignait les mathématiques. C'est d'ailleurs pour cela que j'ai enseigné seulement un an l'enseignement religieux, c'était tellement prenant. C'est un fait. Cela fait rire les députés de l'Opposition, je le sais bien, mais je pense qu'ils m'appuient. C'est vraiment tellement prenant que ta vie personnelle entre en ligne de compte. Si tu es pour l'avortement et que tu enseignes la religion, tu vas avoir de drôles de difficultés. Est-ce que vous comprenez ma question? Je sais que je suis très ambigu, ce matin, les vacances ont été un peu plus longues que prévu. Est-ce que vous comprenez? Je me demande comment on peut faire, comment on peut dire que la position personnelle de l'enseignant ne ressortira pas, ne paraîtra pas devant l'élève? J'aurai une autre question complémentaire à celle-ci.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Mme Milot.

Mme Venditti-Milot: Alors, je pense que ce que je voulais dire, c'est qu'il faut assurer un minimum... C'est le caractère professionnel de l'enseignant que je voulais souligner ici. Je pense que si en classe - j'ai fait de l'enseignement religieux pendant près de huit ans, donc, je peux comprendre votre discours - des élèves demandent la position personnelle de l'enseignant, à ce moment-là, il n'est plus en train d'assumer les programmes d'enseignement religieux. Si on lui demande sa position personnelle, il aura à se situer personnellement parce que l'élève le lui aura demandé, mais toujours en étant très honnête, de façon à relativiser sa position personnelle par rapport à la position officielle de l'Église. Dans le cadre de l'enseignement religieux, pour avoir fait de l'animation avec les enseignants, je pense que cela fait partie des exigences que l'on doit demander à un enseignant, soit de communiquer la position de l'Église, que ce soit sur l'avortement, la contraception, etc. Je pense qu'il est engagé à ce titre et non pas au titre de présenter et de faire valoir sa position personnelle si elle est différente de celle de l'Église. Ce serait tout un défi à relever que de se situer ici actuellement autour de la table et de dire qu'il n'y a personne qui, par rapport à certains points, peut avoir des remises en question. Je pense qu'il faut respecter cela, cela fait partie de l'évolution de la personnalité de l'enseignant et de toute personne également.

Alors, c'est un peu en ce sens que je voulais m'exprimer. Quand je pariais de formation personnelle et sociale, je disais qu'il y a des situations où ce sont des enseignants, dans l'enseignement moral et religieux, qui dispensent le cours de formation personnelle et sociale. Dans ce cas, quand ils dispensent le cours de formation personnelle et sociale, ils n'ont pas à se servir de cette tribune pour faire la promotion des valeurs catholiques. Je pense qu'il est important de situer les objectifs spécifiques de chacun des programmes et qu'on peut être un excellent éducateur en sachant se situer par rapport à ce qui est spécifique.

M. Gardner: Toujours...

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, madame. Allez, monsieur.

M. Gardner: ...dans le même esprit, je voudrais peut-être un petit peu plus de rigueur - peut-être que je suis moins libérai que d'autres - l'article 24 exige que la planification et l'évaluation des activités soient présentées annuellement au directeur de l'école, mais on ne dit pas du tout qu'elles soient évaluées. On dit: Cela doit être présenté au directeur d'école, point. Est-ce que vous avez prévu un peu plus loin... Je lis cela dans votre mémoire à la page 22. Est-ce que le directeur d'école a l'autorité d'évaluer ce qui est enseigné au point de vue enseignement religieux dans son école?

Mme Plante-Poulin: M. le Président, je

répondrai à cette question et je rajouterai, si vous permettez, un complément à la question que vous posiez tout à l'heure. Je pense qu'il faut lire l'article auquel vous faites allusion avec l'article 6 qui dicte les responsabilités au directeur d'école: 6.2° "l'orientation, l'animation, la coordination et l'évaluation des activités d'enseignement moral et religieux catholique et d'animation pastorale". Donc, obligation est faite à l'animateur de présenter et, dans l'article 6, au directeur d'évaluer.

Je voulais rajouter que les enseignants ont toujours la possibilité de se dispenser de l'enseignement religieux. S'ils ne peuvent plus soutenir leur déclaration d'être de foi catholique, en conscience, l'école doit respecter aussi leur droit, leur possibilité de s'exempter.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Cela va, M. le député d'Arthabaska?

M. Gardner: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Je ferais remarquer à la formation ministérielle qu'il lui reste environ neuf minutes et que j'ai une demande d'intervention de la part de la députée de Jacques-Cartier, du député d'Argenteuil et ministre de l'Éducation et de la part du député de Châteauguay. Alors, Mme la députée de Jacques-Cartier.

Mme Dougherty: Je cède mon temps au ministre, parce que je crois qu'il a quelque...

Le Président (M. Parent, Sauvé): Mme la députée, vous avez le temps de poser des questions. Soyez à votre aise.

Mme Dougherty: Ma préoccupation, pour ce qui est de mon collègue, à savoir si on fait du "bumping", quant à la formation et à la responsabilité des directeurs... J'ai même eu connaisance qu'une personne qui était considérée comme athée ou n'ayant aucune formation religieuse ou qui ne croyait à rien enseignait la morale dans nos écoles. J'en ai eu connaissance personnellement; elle enseignait la religion. Cela réapparaissait tout à fait aberrant parce qu'on ne peut pas communiquer... Selon l'explication de madame, c'est sûr qu'on devrait faire abstraction de ce que nous sommes en tant qu'individu, sauf que si vous voulez pourvoir certaines valeurs et les rendre avec fermeté et réalisme... Vous savez, on défend très bien ce à quoi on croit, sans cela on fait son cours et c'est tout. Il m'apparaîtrait important de statuer un peu plus sur la qualité des enseignants qui devront enseigner et la morale et la religion.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Y a-t-il une autre intervention? M. le ministre de l'Éducation.

M. Ryan: M. le Président, je voudrais faire le point sur certaines questions qui ont été soulevées au cours de la discussion. Il y a un point en particulier qui mérite qu'on s'y arrête un peu, c'est le reproche d'ambiguïté que la députée de Chicoutimi semble vouloir adresser à l'entreprise du comité catholique. Je pense que les inquiétudes de la députée de Chicoutimi portent en particulier sur l'article 4 relatif au projet éducatif. Je crois franchement que ses inquiétudes sont exagérées. Je vais essayer de vous expliquer pourquoi, bien simplement. Tout d'abord, on parle d'intégrer les croyances et les valeurs de la religion catholique dans le projet éducatif. Si l'école est catholique, je pense qu'il y a trois choix qui se posent. Est-ce qu'on va exclure les valeurs et croyances catholiques du projet éducatif? Est-ce qu'on va en faire abstraction ou si on va les intégrer? Il y a trois choix qui se présentent. Je crois qu'il y a seulement un choix qui soit sérieux, c'est celui de les intégrer. Autrement, cela ne veut rien dire.

Là où, à mon point de vue, il y a une exagération d'inquiétude selon Mme la députée de Chicoutimi, c'est que le concept d'intégration peut se réaliser suivant des modalités infiniment variées qui tiendront compte des réalités. Dans certains cas, cela voudra dire qu'il y aura une ou deux activités précises qui seront intégrées à l'ensemble des activités qu'on prévoira pour une période donnée; dans d'autres cas, cela pourra vouloir dire davantage. C'est justement la détermination du projet éducatif. Il faut voir comment cela fonctionne suivant les dispositions législatives actuelles.

Suivant les dispositions législatives actuelles, au bout de la ligne, c'est le directeur de l'école qui a autorité là-dessus. Le comité d'école va être consulté s'il le veut. Le conseil d'orientation participe à l'élaboration du projet éducatif mais au bout de la ligne celui qui a la responsabilité de s'assurer qu'il y a un projet éducatif conforme aux orientations générales du ministère de l'Éducation et de la commission scolaire, c'est le directeur d'école. En conséquence, il n'y a pas de changement majeur qui est introduit ici. Jusqu'à maintenant, nous avons eu... Il y a des erreurs dans les projets éducatifs comme dans tous les aspects de l'entreprise éducative, mais de manière très générale je pense que les gens sont assez réalistes en ce qui concerne l'école pour définir le projet éducatif d'une manière qui va être en harmonie avec les attentes des parents, avec les possibilités du personnel enseignant qui se trouve là et aussi avec les orientations générales de la commission scolaire et du ministère de l'Éducation. En conséquence, je ne pense pas que cela ajoute beaucoup à ce

que l'on a déjà connu et observé.

Il y a quelque chose qui me semble laisser à désirer dans l'argumentation implicite de la députée de Chicoutimi. Elle semble signaler que, si on veut que l'école soit plus authentiquement catholique, cela veut dire qu'elle sera plus étroite, moins généreuse, moins accueillante pour les autres. Le fardeau de la preuve est sur la députée de Chicoutimi et non pas sur moi à cet égard, parce que si l'école comprend bien ce qu'est sa mission catholique...

Une voix: ...l'histoire.

M. Ryan: La députée de Chicoutimi se nourrit de souvenirs du passé. Je la comprends, mais on ne peut pas vivre en 1987 d'après les souvenirs de 1887. L'expérience qui a été faite ces dernières années enseigne que ce concept d'école catholique peut être interprété et appliqué d'une manière qui sera très profondément respectueuse de la diversité et des différences. Cela a été tout le sens du message adressé par le comité catholique depuis 20 ans. Ce qu'il nous propose ici, il faut que ce soit clair, a été défini dans toutes leurs publications depuis 20 ans. Je lisais un texte qui remonte à 1980 en préparation de la commission parlementaire et ce texte-là va beaucoup plus loin que ce qui est défini dans le projet de règlement. Ce sont des orientations qui sont au vu et au su ou connues de la population depuis longtemps.

Encore une fois, personnellement, je rejette l'argument suivant lequel, en étant plus authentiquement humaine, l'école publique catholique deviendrait de ce fait plus étroite, plus négative à l'endroit des autres. Au contraire, si elle est catholique, la première dimension qui va la caractériser, ce sera la charité et le respect d'autrui. Il y a une place considérable. De même, comme je l'ai dit dans mon texte liminaire, si les parents choisissent à un endroit un modèle laïc d'école, ils seront assez intelligents, ceux de la majorité, pour se rendre compte qu'il faut qu'ils fassent une place aux parents qui veulent des valeurs religieuses dans l'école. De ce point de vue là, théoriquement et logiquement, il y a des problèmes, c'est sûr, l'équation n'est pas parfaite, c'est un équilibre que nous recherchons et celui qui est proposé est meilleur que les autres.

L'exemple que l'on prenait du programme de formation personnelle et sociale dans son volet "éducation sexuelle" est particulièrement éloquent. J'ai eu l'occasion de l'examiner de près ces derniers temps à la suite de la polémique qui a surgi concernant toute la question des maladies transmissibles sexuellement. Moi-même j'avais des préjugés à l'endroit de ce programme-là.

Je l'ai examiné avec un regard plus objectif et je dois dire que c'est un programme très bien fait et qui fournit toutes les possibilités de présenter les éléments dont faisait état la députée de Chicoutimi. C'est écrit en toutes lettres. On peut présenter tous les volets et, lorsque l'on présente des modèles de comportement possible chez les jeunes, on évoque toutes les possibilités, parce que c'est un programme qui vise à faire une présentation objective de l'ensemble des perspectives qui s'ouvrent de ce côté-là. Je ne pense pas que l'on doive se nourrir d'inquiétudes obsessives à ce sujet-là parce qu'il va tout à fait dans le sens d'une saine éducation empreinte d'esprit d'ouverture et, comme on le disait tantôt, il doit être prolongé par des références aux mêmes réalités dans des cours de religion ou morale proprement dite. Dans bien des cas, cela se fait et, dans d'autres cas, cela ne se fait pas, mais structurellement parlant il n'y a pas beaucoup de problème.

Il y a un troisième point que je voudrais soulever, c'est le cas de Montréal. Dans le cas des commissions scolaires en dehors de Montréal, ce que nous faisons aujourd'hui' n'aura pas beaucoup de répercussion parce que déjà la plupart de nos commissions scolaires, de facto, sont des commissions scolaires linguistiques, fonctionnent comme telles et ce n'est pas souvent qu'on les voit se promener avec la croix de l'évêque dans les rues ou dans leurs réunions. Ce sont des commissions scolaires linguistiques, de facto. Elles conduisent leurs écoles comme telles. À Montréal, nous avons une situation constitutionnelle différente. C'est vrai que, d'après la jurisprudence, les écoles relevant de la Commission des écoles catholiques de Montréal doivent être des écoles catholiques et, quand le comité catholique a voulu enlever le statut d'une de ses écoles, il s'est fait dire par le juge Deschênes qu'il était en dehors de ses frontières...

Une voix: ...

M. Ryan: Très bien. Il n'y a rien qui empêche actuellement... Dans la Loi sur l'instruction publique... Je ne sais pas si vous pouvez me donner juste une minute pour compléter... J'accepterai de me faire interrompre, je le dirai en d'autres occasions, cela ne me fait rien.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Cela me prend l'acceptation de l'Opposition.

Mme Blackburn: Autant vous m'avez refusé une question tantôt... M. le ministre, on dit "bon prince" ou "bonne princesse", c'est plus péjoratif un peu, mais j'accorde une prolongation.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. M. le ministre.

M. Ryan: Nous avons une disposition, dans le chapitre qui traite du Conseil scolaire de l'île de Montréal, en vertu de laquelle le conseil scolaire pourrait prendre l'initiative d'organiser des cours d'étude pour les personnes autres que catholiques au protestantes. C'est déjà dans la loi. Maintenant, je ne crois pas qu'il y ait de demande qui ait été formulée parce que peut-être que les gens n'étaient pas au courant de cette disposition ou n'étaient peut-être pas intéressés à s'en prévaloir pour une raison ou pour une autre. En plus, si on demandait... Disons qu'un groupe se présenterait chez le ministre de l'Éducation pour lui dire: On voudrait avoir une commission scolaire qui organiserait des écoles neutres à Montréal. Actuellement, d'après l'économie de la Loi sur l'instruction publique, je pense que ce serait un petit peu difficile, il y aurait des précisions à apporter. Mais nos conseillers juridiques m'assurent que nous pourrions le faire en procédant à certaines modifications dans la loi sans qu'il ne soit nécessaire pour autant d'avoir un changement constitutionnel. Alors, il y a des possibilités.

Il y a beaucoup de gens qui se lamentent - et c'est l'argument que je voudrais soumettre, en terminant - sur le carcan que nous impose la constitution canadienne, mais qui ne se sont pas toujours donné la peine d'explorer toutes les possibilités concrètes qui existent déjà sous la régime juridique actuel pour faire des percées. Il y en a beaucoup, ces dernières années qui, s'ils s'étaient moins lamentés, s'ils avaient fait moins d'impropères à tout propos, s'ils avaient examiné les possibilités sérieusement, auraient peut-être abouti à ouvrir des sentiers, ce qui ferait que nous-mêmes, nous serions plus éclairés dans l'action à entreprendre.

Je n'élimine pas pour autant l'opportunité de regarder des changements de plus grande envergure, je n'enlève rien à ce que nous avons déjà dit de ce côté. Je pense que ce sont des précisions importantes à apporter, quand on discute de ces choses, pour mieux situer, dans sa portée exacte, la nature des modifications qui nous sont proposées par le comité catholique du Conseil supérieur de l'éducation.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. le ministre. Merci particulièrement à Mme la députée de l'Opposition...

Mme Blackburn: M. le Président...

Le Président (M. Parent, Sauvé):Pardon, madame.

Mme Blackburn: ...vous m'accordez une minute, également?

Le Président (M. Parent, Sauvé): Si on ouvre des portes, cela ne se terminera jamais!.

Mme Blackburn: Alors, comme je l'ai accepté...

Le Président (M. Parent, Sauvé): Je voudrais vous remercier de votre générosité d'avoir permis au ministre, d'une façon si généreuse, de continuer. Je vous remercie et je remercie les membres de cette commission. Je remercie Mme Plante-Poulin, Mme Venditti-Milot, MM. Parent et Mallette. La commission parlementaire suspend ses travaux jusqu'à quinze heures.

(Suspension de la séance à 13 h 3)

(Reprise à 15 h 12)

Le Président (M. Parent, Sauvé): À l'ordre, s'il vous plaît! La Commission parlementaire de l'éducation, qui a entrepris ses travaux ce matin, entend le comité protestant du Conseil supérieur de l'éducation. Alors, j'inviterais ses représentants à prendre place à l'avant. J'inviterais particulièment la présidente, Mme Ann Cumyn, et le secrétaire, M. Harry Kuntz. Je vous rappelle que nos règles de procédure s'interprètent comme suit; Une heure est accordée à chacun des organismes, dont environ 15 minutes pour la présentation du document, si vous le jugez à propos; le reste du temps consiste en des échanges de vues avec les membres de la commission et, après 50 minutes, j'inviterai la porte-parole de l'Opposition officielle à faire ses remarques de la fin et j'inviterai le ministre à clore, pour les cinq dernières minutes. C'est la façon dont j'espère pouvoir procéder d'ici la fin des audiences.

Alors, Mme la présidente et M. le secrétaire, nous vous souhaitons la bienvenue. Nous vous remercions aussi d'avoir répondu à l'invitation de la commission permanente de l'éducation de venir nous entretenir de votre projet de règlement. Ces rencontres ont pour but d'éclairer les membres de la commission sur ces projets de règlement et de tâcher de les bonifier ainsi que de les rendre le plus apte possible à rendre service à l'ensemble du système éducatif du Québec.

Sans plus de préambule, Mme la présidente, nous vous écoutons.

Comité protestant du Conseil supérieur de l'éducation

Mme Cumyn (Ann): Merci, M. le Président. Je veux commencer par présenter

à la commission parlementaire mon collègue, M. Harry Kuntz, secrétaire du comité protestant. Moi, je suis Ann Cumyn.

M. le Président, M. le ministre de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur et de la Science, mesdames, messieurs. Premièrement, je tiens à vous remercier sincèrement d'avoir invité le comité protestant à ces audiences de la commission parlementaire de l'éducation. C'est un honneur et un privilège, pour nous, de pouvoir vous rencontrer aujourd'hui et de pouvoir discuter sur des sujets d'intérêt commun.

Deuxièmement, je serai brève, car nous vous avons récemment transmis un document d'information sur le sujet. Donc, cette présentation, aujourd'hui, sera une explication plutôt qu'une lecture de ce que vous avez déjà reçu.

Le règlement du comité protestant est rédigé afin d'assurer que l'école protestante respecte les valeurs protestantes et surtout d'assurer, auprès de l'étudiant, qu'il reçoive une éducation morale et religieuse appropriée à son intégration sociale au monde d'aujourd'hui.

Vous avez reçu, avec notre documentation, un préambule qui servira d'introduction au règlement lorsque celui-ci sera diffusé, à la suite de son approbation. Ce préambule définit les buts d'une éducation protestante, à savoir: fournir une éducation favorable au plein épanouissement de la personnalité; contribuer au discernement des valeurs humaines; développer une compréhension critique de son héritage culturel dans toutes ses dimensions, y compris les corrélations de judaïsme et de christianisme, civilisation gréco-romaine, pensée scientifique et technologique; manifester le respect des convictions religieuses ou philosophiques des parents ou des tuteurs des élèves fréquentant les écoles protestantes; encourager la recherche de la vérité dans tous les champs de l'expérience humaine, y compris les dimensions morales et religieuses, tout en reconnaissant que chaque individu doit être libre de juger lui-même de ses choix; promouvoir des critères pédagogiques de qualité et, le cas échéant, mettre à l'essai des notions novatrices.

Le nouveau règlement est une mise au point pour mieux répondre à notre situation actuelle. Nous avons apporté des modifications concernant la reconnaissance des écoles. Aux articles qui visent l'enseignement moral et religieux, nous avons ajouté la possibilité qu'une école puisse avoir un enseignement confessionnel plus particulier. En réponse à une demande du ministre de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur et de la Science, nous avons ramené les exigences pour les élèves qui suivent les cours qui mènent au diplôme ou au certificat d'études professionnelles. Les modifications à la reconnaissance des écoles ont été introduites car, selon le règlement actuel, c'est la tâche du comité protestant d'assurer qu'une école reconnue comme protestante réponde aux conditions nécessaires à la reconnaissance. Nous trouvons que c'est une tâche qui est difficile à réaliser. Donc, le comité se fie aux commissions scolaires afin d'accomplir cette tâche.

Il y a deux raisons aux modifications des articles relatifs à l'enseignement moral et religieux protestant» Premièrement, selon le règlement actuel, une institution scolaire protestante doit offrir un enseignement moral et religieux, mais, pour l'étudiant protestant, recevoir cet enseignement n'est pas un droit. Une école peut donc, dans certains cas, très bien offrir le cours, mais en pratique ne pas le donner» Deuxièmement, notre nouveau programme est non seulement un programme qui renseigne les étudiants sur l'effet du christianisme, mais il les informe sur les autres grandes religions, le phénomène de la religion et, de plus, la vie morale qui en résulte. Nous avons donc fait des modifications pour que les institutions assurent que tout élève suive le programme d'enseignement moral et religieux, tout en gardant la disposition pour l'exemption de l'élève.

Dans notre document d'information envoyé aux membres de la commission, nous avons expliqué la philosophie sur laquelle est basé le programme de l'enseignement moral et religieux. Et je vais lire cette philosophie: "Les Églises dites protestantes regroupent plusieurs Églises chrétiennes qui croient dans la centralité de la Bible comme guide de la foi et de la vie; leurs divergences sont le résultat d'interprétations différentes de la même Bible. Donc, l'enseignement moral et religieux protestant à l'école publique - protestante - n'est pas doctrinal et n'entend pas à former l'élève, mais plutôt à l'informer au sujet de l'histoire et des croyances des Églises protestantes. "De la même manière que le christianisme fait partie intégrante de l'héritage culturel de l'Occident, il y a aussi d'autres religions qui font partie de notre héritage culturel et d'autres religions qui font partie de l'héritage culturel de grands pays du monde. Les protestants croient qu'une connaissance des religions du monde est indispensable non seulement pour comprendre nos collègues et nos amis qui pratiquent ces religions, mais aussi pour nous amener à une meilleure connaissance de la nôtre. Nous croyons que chaque individu devrait avoir une certaine connaissance du phénomène de la religion. "Également, nous soutenons que les valeurs et les jugements moraux sont solidement enracinés dans la religion et nous insistons en disant que le lieu convenable

pour le développement et la discussion dans ce domaine est le programme de l'enseignement moral et religieux. "Vu l'éducation chrétienne non doctrinale dispensée dans le programme d'enseignement moral et religieux protestant et, en même temps, l'occasion donnée d'étudier d'autres traditions religieuses aussi bien que l'occasion de développer des dispositions morales et sexuelles dans le cadre de leurs croyances personnelles, le comité protestant croit que le programme d'enseignement moral et religieux protestant devrait être dispensé à tous les élèves. Néanmoins, nous acceptons que tout parent ne sera pas a l'aise de voir son enfant dans un tel programme et nous nous entendons sur son droit à demander l'exemption de celui-ci."

En ce qui concerne la possibilité pour une école d'avoir un enseignement confessionnel plus particulier, nous sommes conscients qu'il y a, dans notre milieu protestant, certains groupes qui voudraient avoir un enseignement religieux plus intense ou plus spécifique. Nous avons donc modifié le règlement afin de permettre un enseignement confessionnel plus particulier, à la demande des parents, à condition que l'école donne d'abord l'accord officiel de l'enseignement moral et religieux protestant et que, dans tout enseignement, la tradition religieuse de chaque étudiant soit respectée.

Les dernières modifications, telles que demandées par le ministre de l'Education et de l'Enseignement supérieur et de la Science, veulent permettre l'exemption du cours de l'enseignement moral et religieux pour ceux qui sont admis à un programme d'études conduisant au diplôme d'études professionnelles ou bien dès la deuxième année d'un programme d'études conduisant au certificat d'études professionnelles.

M. le Président, mesdames, messieurs, en guise de conclusion, je tiens à vous remercier de nous avoir permis d'expliquer le règlement du comité protestant. Le secrétaire du comité, M. Harry Kuntz, et moi-même serons heureux de discuter avec vous sur le sujet qui nous concerne. Nous nous ferons un plaisir de répondre à vos questions.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Mme la présidente, je vous remercie beaucoup de votre exposé. Je reconnais maintenant le porte-parole officiel du parti ministériel, le ministre de l'Éducation. M. le ministre.

M. Ryan: Mme la présidente du comité protestant, je voudrais vous rappeler que nous avons accueilli avec beaucoup d'intérêt les modifications proposées par le comité à son règlement concernant la reconnaissance des établissements d'enseignement comme protestants.

Vous avez très bien expliqué, tantôt, les caractéristiques de la conception qui a présidé au développement des écoles protestantes au Québec. Mes collègues auront peut-être des questions à vous poser là-' dessus tantôt. Moi, je n'en ai pas, pour ma part. J'aurais seulement une brève question peut-être à vous adresser, deux questions, en fait.

Premièrement, est-ce que le comité protestant s'est prévalu, jusqu'à maintenant, du pouvoir que lui reconnaît la loi de reconnaître des étalissements comme protestants? Et combien d'écoles relevant des commissions scolaires protestantes au Québec ont été reconnues par le comité protestant comme protestantes?

Le Président (M. Parent, Sauvé): Mme Cumyn.

Mme Cumyn: M. le Président, nous reconnaissons toutes les écoles des commissions scolaires protestantes. Nous tenons à ce que toutes les commissions scolaires protestantes soient les racines des commissions scolaires dissidentes et ce sont toutes les écoles des commissions scolaires protestantes qui sont reconnues par le comité protestant.

M. Ryan: Dois-je comprendre que, même lorsqu'une école nouvelle est construite, vous la versez tout de suite dans le trésor commun sans autre examen, sans consultation auprès des parents, c'est automatique?

Mme Cumyn: C'est automatique, oui. M. Ryan: Merci!

M. Kuntz (Harry): Dans le livre blanc, on a parlé des reconnaissances des écoles. Il s'est glissé une erreur dans le livre. Le comité protestant a reconnu les écoles comme protestantes, dans l'année 1966 et l'année 1967, comme un fait général. Après, il a commencé à reconnaître, année par année, les écoles. Ce n'est pas une fois pour toute, mais c'est année par année qu'il a reconnu les écoles comme protestantes. Il a envoyé une lettre au sous-ministre associé à l'enseignement protestant chaque année disant que toutes ies écoles de toutes les commissions scolaires protestantes sont reconnues comme protestantes pour l'année prochaine.

M. Ryan: Est-il arrivé que vous ayez eu des requêtes de la part de parents ou de commissions scolaires demandant que la reconnaissance soit retirée à une école? Y a-t-il eu révocation?

Mme Cumyn: Non.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Y a-t-il d'autres interventions? Mme la porte-parole de l'Opposition.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Permettez-moi d'abord de saluer madame et monsieur et de leur souhaiter la bienvenue.

Je voudrais peut-être, avant de passer à quelques questions, voir, dans la suite de la question qui vient d'être posée par le ministre de l'Education, s'il serait, effectivement, juridiquement possible pour la commission scolaire protestante de reconnaître une école non protestante, comme c'est possible pour une commission scolaire catholique de reconnaître une école non catholique. Est-ce qu'en vertu de la charte... Je ne pense pas que ce soit possible. Est-ce que le ministre pourrait nous éclairer là-dessus ou peut-être madame?

Le Président (M. Parent, Sauvé): Mme Curnyn.

Mme Cumyn: Merci, M. le Président.

Si nous recevons une requête d'une école protestante pour que sa reconnaissance soit retirée, nous avons le droit de dire: Oui, vous n'êtes plus, à partir de maintenant, une école protestante. C'est possible, mais il n'y a pas une école qui ait fait une demande. (15 h 30)

Mme Blackburn: Pour les nouvelles écoles de même que pour les écoles dissidentes.

Mme Cumyn: C'est la commission scolaire dissidente.

Mme Blackburn: D'accord.

Mme Cumyn: Je ne sais pas pour les commissions scolaires dissidentes ni pour la commission scolaire, la CEPGM.

Mme Blackburn: Le document que j'ai en main sur le règlement du comité protestant est daté du 13 mai 1987; le document que je retrouve commenté ici, que vous nous avez remis, je ne l'ai pas. Est-ce qu'il a été publié dans la Gazette officielle?

Le Président (M. Parent, Sauvé):Maintenant, M. le ministre.

M. Ryan: M. le Président, le document qu'on a fait circuler est une version démodée, il y a eu erreur. Il y a un texte qui est paru dans la Gazette officielle au mois de mai, c'est celui-là qui doit servir à nos discussions de ce matin. Il y a eu des changements par rapport au texte qui vous a été remis.

Le Président (M. Parent, Sauvé):Excusez-moi, juste pour la compréhension de la commission, d'où provient ce texte qui a été distribué aux gens?

Mme Blackburn: Celui-ci?

Le Président (M. Parent, Sauvé): Oui.

M. Ryan: De nos services.

Mme Blackburn: C'est du 6- juin.

Le Président (M. Parent, Sauvé): On m'a dit qu'il a été envoyé au secrétaire de la commission pour distribution.

M. Ryan: J'ai demandé tantôt...

Le Président (M. Parent, Sauvé): S'il vous plaît! À l'ordre!

M. Ryan: M. le Président, j'ai demandé tantôt qu'on fasse remettre aux membres de la commission la toute dernière version de ce texte qui va vous être remise d'une minute à l'autre. Il y a eu une erreur dans la préparation de ce document-ci.

Mme Blackburn: Donc, si je comprends bien, le document officiel, c'est celui qu'on a en main et qui est paru dans la Gazette officielle du 13 mai 1987.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Nous l'avons, celui-là.

Mme Blackburn: Bien, merci, M. le Président. Sinon, cela me posait des problèmes. Mme la présidente, je sais que cela ne relève pas de votre compétence, mais probablement que vous avez l'information: Dans les écoles protestantes, quel est le pourcentage de parents qui demandent que leurs enfants soient exemptés de l'enseignement protestant et qui choisissent l'enseignement moral?

Mme Cumyn: Je ne connais pas exactement le nombre, mais il y en a très peu. Nous avons les parents qui sont "Jehovah's Witness" qui, parfois, exemptent leurs enfants, mais pas les autres parents. C'est le seul cas.

Mme Blackburn: Dans la section française également.

Mme Cumyn: Dans la section française également, oui.

Mme Blackburn: Donc, on choisit l'enseignement protestant plutôt que l'enseignement moral?

Mme Cumyn: II n'y a pas de choix.

Dans notre règlement, l'enseignement moral et religieux est obligatoire excepté si le parent ou le tuteur veut que son enfant en soit exempté.

Mme Blackburn: Mais, dans le cas où l'enfant est exempté à la suite de la demande d'un parent...

Mme Cumyn: Oui.

Mme Blackburn: ...est-ce qu'il reçoit l'enseignement religieux? Qu'est-ce qu'il reçoit en échange comme formation? Je n'ai pas très bien compris.

Mme Cumyn: Nous préférons que, comme programme de morale, l'enfant suive deux des trois volets de notre programme moral et religieux. Nous avons trois volets, le premier porte sur le christianisme, c'est une information sur le christianisme. Le deuxième est un volet sur les autres religions, on étudie la célébration et les autres grandes religions. Le troisième volet porte sur la morale et la sexualité. Et, pour nous parce que nous pensons que la connaissance des autres religions et du phénomène des religions est essentielle pour tous les élèves et que la morale suit la religion, n'importe quelle religion, nous pensons que c'est meilleur pour les enfants exemptés de suivre deux volets. Mais, sinon, c'est le cours de morale.

Mme Blackburn: J'aimerais aborder avec vous la question des qualifications ■ du personnel enseignant comparées aux exigences qui sont celles du comité catholique. J'ai l'impression qu'il y a comme un monde. Je lis l'article 12 de votre projet: "L'institution reconnue doit affecter à l'enseignement moral et religieux l'enseignant qui a une formation et une compétence pertinentes en matière d'enseignement moral et religieux protestant." Vous n'avez pas d'exigences particulières autres que celles que je retrouve là.

Pour vous, est-ce suffisant, les cours de morale que, par exemple, les futurs enseignants reçoivent dans nos différentes institutions universitaires?

Mme Cumyn: Ce n'est pas suffisant. Nous n'avons pas inscrit dans le règlement les choses que nous demandons pour nos enseignants, mais nous avons envoyé au ministre, il y a deux ans, un avis sur les qualifications des professeurs de religion et de morale. Dans cet avis, nous avions demandé comme connaissance de base - je m'excuse, les mots en français me manquent - knowledge of the development of the child, la connaissance du développement moral chez les enfants.

Pour les enseignants dans les écoles primaires, nous demandons, comme base, un cours de méthodologie pour le cours de morale et de religion. Pour ceux qui enseignent dans les écoles secondaires, nous demandons qu'ils suivent des cours plus particuliers en "ethic", dans votre religion et dans les autres religions. Nous ne l'avons pas inscrit dans le règlement, parce que nous savons qu'il y a la convention collective et d'autres choses qui empêchent un peu cela.

Mme Blackburn: Je reviendrais, si vous le permettez, à l'article 10s "L'autorité scolaire doit mettre des services d'animation religieuse à la disposition de l'institution reconnue." Comme elles sont toutes reconnues ou presque automatiquement, comme vous le dites, depuis 1966-1967, est-ce que vous pouvez nous parler un peu de la pratique en cette matière chez vous?

Mme Cumyn: La pratique est différente dans les diverses commissions scolaires. Il y a, je pense, quatre ou cinq commissions qui ont des animateurs et les autres, non. C'est une chose que noua voudrions encourager, parce que nous pensons qu'il y a un côté spirituel à côté des services de conseil que les élèves reçoivent dans les écoles.

Mme Blackburn: Bien, pour le moment, ça va, M. le Président.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Alors, Mme la députée de Jacques-Cartier.

Mme Dougherty: Merci, M. le Président. Nous avons lu avec beaucoup d'intérêt le mémoire du comité protestant, parce qu'il semble que le contexte et la situation sont tout à fait différents du contexte et du problème auxquels nous sommes confrontés dans les écoles catholiques, I am going to make it easy for you. I will pose my questions in English, because I think that the difference between the two systems is very important in relation to the problems that have been raised in relation to the Catholic Committee regulations. I want to know why in many instances the regulations of the Protestant Committee are being elaborated in the direction of, for instance, setting out a sort of procedure or criteria for revoking recognition of a school as protestant. Do you feel that there is pressure from some quarters or there will be pressure from some quarters to revoke that recognition? I am trying to figure out why you did this, except, perhaps, to create a sort of mirror image situation. Is it a real need, the fact that it has always been automatic, has that been a constraint on certain school boards or schools, or perceived as such?

Le Président (M. Parent, Sauvé): Mrs.

Cumyn.

Mme Cumyn: M. le Président, est-ce que je peux répondre en anglais?

Le Président (M. Parent, Sauvé): Feel free to answer in English, if you like.

Mme Cumyn: That is what I will do. Thank you. I do not think we have received a pressure from schools to have a revocation. I think, perhaps, we have felt that the every year almost stamp of approval was perhaps too much and, if we recognized for five years, then, that indicated to the community that there might be an opportunity for them to say "Hey", at the end of the five years. It is not that we are hearing any request for revocation, it is perhaps we have not been fair to our community just to go through the motion at the beginning of each year.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Mr....

M. Kuntz: The regulation, as you know, has been in revision since 1980, at least I hope you are aware of that, and we have been waiting because we were put off by various laws. But the reason that we began the revision was because there were certain schools that came to us and said they would like another stamp, they want to know how they could be more protestant and in general protestant. I do not know why that came about, but that was the origine of it. They made the committee members think that may be there is something wrong with just sort of passing it through quickly.

Mme Dougherty: The pressure, if there ever was, was in the other direction.

M. Kuntz: Yes.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. Kuntz. Est-ce qu'il y a d'autres interventions?

Mme Dougherty: No. Do you think that the fact that the many protestant schools have, over the years, accommodated more and more pluralistic clientele, do you think that, given the philosophy of being protestant in protestant education in accordance with the committee's division of things, do you think that the protestant character of the schools has been necessarily diluted by that pluralistic presence?

Le Président (M. Parent, Sauvé):Madame.

Mme Cumyn: I do not think it has at all. In fact, I would say it has been reinforced because, as I said earlier, one of our tenets is to teach a respect of others, a respect for our friends that may be different and till learn about religion that is not ours. In that situation, you in fact have a better opportunity of carrying out the full intent of our program.

Mme Dougherty: Just a last one. In article 11, for the first time, I think, you say qu'un nouveau règlement permette un enseignement confessionnel plus particulier à des demandes des parents. Again, I am wondering; has there been a demand for specific religions other than protestant or is it a question of degree or a question of difference?

Mme Cumyn: It is a question of degree. There have been demands not to us but to at least a couple of school boards that they would permit a school within the public system to have a stronger Christian focus.

Mme Dougherty: A school or a program within a school? (15 h 45)

Mme Cumyn: Well, a school. That was what they were asked for. Part of this is a program within a school and we do have at least one or two schools that exist where they do have a very much strong denominational focus of a particular denomination. We felt that if there was a growing need for this, as long as the protestant moral and religious education was taught in its full and properly, and as long as the tenet of respecting everybody, the teachers respecting the beliefs and the religious heritage of all the students, then we will be prepared to permit additional teaching, if the community so desire it. But it is to be at the demand of the parents.

Mme Dougherty: Thank you.

Le Président (M. Parent, Sauvé): II n'y a pas d'autre intervention? Je reconnais Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Je n'aurais pas d'autre question. En fait, le règlement qui nous est proposé ne comporte que des modifications mineures par rapport au règlement antérieur. Ce que j'aurais davantage souhaité, M. le Président, c'est que la Commission des écoles protestantes de Montréal accepte également de venir nous faire part de ses commentaires. Malheureusement, à ce que j'ai vu, ces gens ne seront pas présents. Cela nous aurait permis de mieux voir comment s'articulait le projet...

Le Président (M. Parent, Sauvé): Nous avons eu leurs commentaires par écrit.

Mme Blackburn: Oui, mais ils ne se

présenteront pas et il y avait peu de commentaires. Leur présence nous aurait permis de mieux voir comment s'articulait dans la pratique le règlement du comité protestant au sein de la commission scolaire. Pour ma part, étant donné qu'il y a peu de modifications, j'aurais terminé.

Je vous dis le plaisir qu'on a eu de vous avoir avec nous et je souhaiterais, si la chose est possible, que le règlement du comité catholique soit un peu plus élagué plutôt que renforcé. Je trouve l'approche du comité protestant, comme cela a toujours été le cas dans votre tradition, beaucoup plus ouverte aux différentes communautés et permettez-moi de déplorer aujourd'hui qu'on n'ait pas choisi d'avoir à peu près la même attitude du côté des écoles catholiques. Je vous remercie de votre participation.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, Mme la députée. M. le ministre, en conclusion.

M. Ryan: M. le Président, je ne veux pas ouvrir de débat à ce moment-ci. Je pense que nous sommes en face d'un projet de règlement et qu'il, faudra vérifier s'il suscite l'approbation générale ou l'indifférence générale. Nous n'avons eu que très peu de réactions de la part des milieux protestants, cela m'inquiète un peu d'un côté. Je n'ai reçu aucune lettre d'aucune Église protestante à ce sujet. Je n'ai reçu de lettre d'aucune association, d'aucun groupe. Je ne sais pas si le projet a circulé beaucoup parmi ces groupes. Nous avons fait le travail qui nous incombe, nous l'avons fait publier dans la Gazette officielle et je pourrais peut-être vous poser cette question: Est-ce qu'il y a eu des discussions assez étendues dans les milieux protestants au sujet du projet de règlement ou si ce sont des choses qu'on tient pour acquises, qui vont de soi?

Le Président (M. Parent, Sauvé): Madame? Monsieur?

M. Kuntz: Chaque fois qu'on a rencontré des représentants des Églises protestantes, on a dû recommencer le dialogue et recommencer à expliquer la situation scolaire au Québec, parce qu'ils ne savent pas comment cela marche dans les écoles. Il y a peu de prêtres protestants qui comprennent la situation scolaire. On recommence à expliquer à chaque fois les choses qui se passent et on tente d'inciter les prêtres à expliquer à leurs congrégations les choses qui se passent dans les écoles, à demander un soutien pour le programme d'enseignement moral et religieux, mais ils ne savent pas comment le faire.

M. Ryan: Est-ce que cela vous préoccupe qu'il n'y ait pas plus de relations que cela entre les écoles protestantes et les Eglises protestantes? Est-ce que le comité a déjà examiné cette question?

M. Kuntz: Oui, plusieurs fois.

M. Ryan: Est-ce qu'il en est venu à des conclusions?

M. Kuntz: Non, il a rencontré les Églises, peut-être aux deux ou trois ans, pour expliquer le règlement, mais il n'y a pas de résultat de ces consultations.

M. Ryan: Je ne sais pas, je ne veux pas prolonger le débat là-dessus, M. le Président. Dans la circonscription que je représente, nous avons une commission scolaire protestante à laquelle siège un pasteur protestant et ces gens ont des rapports de collaboration assez fréquents avec les pasteurs des différentes Églises. Ceux-ci ne sont pas institutionnalisés, mais ils sont fréquents. Je pense que la distance n'est peut-être pas aussi grande que le laisseraient entendre les textes ou les rapports officiels qu'on peut avoir.

Quoi qu'il en soit, si ce projet de règlement ne suscite pas de difficultés dans les milieux protestants et paraît acceptable è tout le monde, je pense bien que du côté du gouvernement nous donnerons suite à l'intention que nous avons déjà exprimée en faisant la prépublication dans la Gazette officielle, c'est-à-dire que nous procéderons à l'étape suivante. À moins d'avis contraire, je pense que c'est l'intention que nous conserverons.

Alors, je vous remercie beaucoup. J'en profite pour vous remercier, Mme la présidente, de l'excellente collaboration que vous apportez, à titre de présidente de ce comité protestant, au développement de notre système d'enseignement au Québec.

Mme Cumyn: Merci, M. Ryan.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Alors, merci, M. le ministre. Mme Cumyn, M. Kuntz, merci beaucoup. La commission parlementaire suspend ses travaux pour quelques minutes.

(Suspension de la séance 15 h 52)

(Reprise à 15 h 56)

Le Président (M. Parent, Sauvé): Nous accueillons immédiatement l'Assemblée des directeurs et directrices des offices diocésains d'éducation, qui est représentée par Mme Raymonde Jauvin, présidente pour le diocèse de Saint-Jérôme, par M. André Vincent, directeur de l'Office diocésain

d'éducation de Saint-Hyacinthe, par Mme Micheline Mayrand, directrice de l'Office diocésain d'éducation de La Pocatière et par M. Bertrand Cloutier, directeur de l'Office diocésain d'éducation de Trois-Rivières.

Mme la présidente, nous vous souhaitons la bienvenue, ainsi qu'aux personnes qui vous accompagnent. Je veux, au nom de ses membres, vous remercier d'avoir bien voulu répondre à l'invitation de la commission de venir nous faire connaître vos commentaires sur ces projets de règlements qui ont été déposés par les comités catholique et protestant du Conseil supérieur de l'éducation.

Mme la présidente, la commission va vous consacrer une heure. Vous pourrez prendre comme vous le jugerez, mais nous vous suggérons de prendre quinze minutes pour la présentation de votre document. Le reste du temps sera séparé en parts égales entre l'Opposition et le gouvernement et, au bout de cinquante minutes, j'inviterai la porte-parole de l'Opposition à conclure et, ensuite, je ferai de même avec le ministre de l'Éducation.

Mme la présidente, nous vous écoutons.

Assemblée des directeurs et directrices des offices diocésains d'éducation

Mme Jauvin (Raymonde): M. le Président, M. le ministre de l'Éducation, de l'Enseignement supérieur et de la Science, mesdames et messieurs les députés, c'est avec empressement que notre Assemblée des directeurs et directrices des offices diocésains d'éducation a répondu à l'invitation que vous nous avez faite de vous présenter notre avis dans le cadre de la présente consultation.

Nos interventions porteront principalement sur le règlement concernant les écoles primaires et secondaires du système public. Cependant, comme il y a plusieurs articles qui font aussi partie des deux autres règlements, nos réflexions auront une portée sur ces deux autres règlements.

Comme vous avez déjà reçu notre mémoire, nous ne pensons pas utile d'en faire ici une lecture exhaustive. Je vais tout simplement passer rapidement à travers par une lecture en diagonale en soulevant les points que nous trouvons les plus importants.

L'Assemblée des directeurs et directrices des offices diocésains d'éducation que nous représentons est donc le regroupement des responsables des offices et services d'éducation oeuvrant dans chacun des diocèses de l'Église catholique du Québec. C'est par une nomination de leur évêque respectif que chacun de ces directeurs et directrices exerce ses fonctions.

Tous partagent une responsabilité commune qui est celle d'assurer, de maintenir, relativement à tout dossier concernant le caractère confessionnel catholique des écoles, des concertations entre le réseau scolaire et les différents paliers de l'Église locale, régionale et diocésaine.

Ce rôle s'exerce principalement par le maintien de liens privilégiés et significatifs avec les répondants régionaux de la Direction de l'enseignement catholique, avec les directions générales des commissions scolaires, avec les commissaires et les conseillers en éducation chrétienne, de même qu'avec les directions des écoles primaires et secondaires.

C'est donc en vertu de notre implication dans le monde de l'éducation et tout particulièrement dans celui de l'éducation catholique que nous apportons aujourd'hui un appui non équivoque au projet de règlement concernant les écoles primaires et secondaires du système scolaire public.

Nos commentaires porteront principalement sur les points suivants: la reconnaissance comme catholique de l'école publique, son projet éducatif, l'enseignement moral et religieux catholique, l'animation pastorale, de même que le respect du caractère catholique de l'école.

Nous apprécions que soit clairement défini le processus que la commission scolaire doit suivre quand elle demande la reconnaissance d'une école catholique. Nous sommes d'avis que cette consultation doit être la plus large possible, s'exercer avec rigueur et dans le respect de tous.

Pour favoriser une conception commune de l'école catholique, nous souhaitons que soient intégrés les trois caractères principaux reconnus pour définir cette école catholique.

En regard du projet éducatif, nous appuyons fortement l'exigence qui est faite à toute école catholique de s'identifier, de présenter à la connaissance de tous un projet clair et explicite. C'est pour nous une question d'authenticité. Nous sommes très heureux que l'article 6 rappelle la responsabilité du directeur de l'école publique reconnue comme catholique en ce qui regarde toute l'orientation, la réalisation et l'évaluation de ce projet éducatif et nous considérons que c'est là un des apports les plus positifs de ce règlement.

Nous tenons aussi à manifester notre appui à l'exigence de concertation rattachée au processus d'évaluation du vécu confessionnel de l'école, vécu qui vise d'abord et avant tout l'amélioration du vécu confessionnel lui-même.

En regard de l'enseignement moral et religieux, l'article 8 reconnaît le droit de l'élève de pouvoir choisir entre un cours d'enseignement moral religieux catholique et un cours de morale. Nous appuyons fortement cet article et nous souhaitons que des mesures soient prises pour que ce choix, autant le choix des parents que le choix des enfants, soit rigoureusement respecté.

En regard du temps prescrit pour

l'enseignement moral et religieux catholique, nous regrettons une diminution du temps. Cependant, nous constatons qu'il y a là un facteur de réalité.

Nous appuyons fortement, d'autre part, les exigences définies aux articles 16 et 17 pour toute personne qui dispense l'enseignement moral et religieux catholique. Être de foi catholique nous apparaît une exigence minimale. Se présenter avec une formation spécifique pour dispenser l'enseignement religieux nous apparaît aussi une exigence minimale, telle qu'elle est définie dans ce règlement. Ce règlement marque sur celui de 1974, à ce niveau, un progrès réel.

Nous vouions ici insister sur les raisons qui nous permettent d'appuyer fortement ces articles. D'abord, la qualité de l'enseignement moral et religieux exige une formation spécifique qui porte sur les fondements de la foi chrétienne et une capacité de comprendre et d'interpréter les textes fondateurs et doctrinaux qui les explicitent. La nature même de l'enseignement moral et religieux catholique exige de ceux qui en sont responsables une capacité qui leur permet de situer clairement les implications du message chrétien dans une culture en constante évolution et, enfin, il y a les exigences de la proposition du message au plan d'une formation pédagogique spécifique.

Nous sommes conscients des répercussions que ces exigences de formation risquent d'avoir dans les facultés universitaires qui, nous devons bien le reconnaître, sont au service d'une population et se doivent de répondre aux formations spécifiques dont elle a besoin.

En regard de l'animation pastorale, l'article 19 réaffirme le devoir de l'école publique reconnue comme catholique d'assurer des services en animation pastorale. Nous sommes heureux de voir qu'il y a une note qui précise que ces activités d'animation pastorale doivent être réalisées à l'intérieur du temps qui est consacré aux services éducatifs. Nous espérons que, dans les notes explicatives, il sera clairement explicité qu'un temps doit être défini pour les activités d'animation pastorale.

Nous apprécions au plus haut point l'article 20 qui identifie les différents domaines dans lesquels se situent les activités d'animation pastorale. Sans être exhaustive l'énumération de ces domaines permet à l'animation pastorale catholique de répondre à sa manière aux exigences de formation globale de la personne, tout en privilégiant les dimensions spirituelles et religieuses de l'être humain.

Enfin, l'article 21, qui définit les exigences minimales de formation pour les responsables de l'animation pastorale au primaire, s'inscrit avec réalisme, nous semble-t-il, dans l'évolution actuelle de l'animation pastorale catholique au primaire.

Dans un premier temps, cet article reconnaît la valeur des cours spécialisés en animation pastorale qui sont offerts au niveau de l'éducation des adultes. Cette mesure ou cette exigence minimale trouve sa raison d'être dans le contexte actuel de l'évolution de l'animation pastorale au primaire. Dans un deuxième temps, cet article permet de retenir les services de personnes sans qualifications universitaires, mais ayant déjà acquis une expérience pertinente. Il nous semble que l'apport éducatif de ces personnes constitue une richesse réelle dont on ne saurait facilement se départir.

Enfin, les articles 19, 20, 21 et 22, relatifs à l'animation pastorale, manifestent à juste titre le sérieux que l'on doit accorder à cette activité comme activité éducative de toute la personne de l'élève. Cependant, il nous apparaît important que les notes explicatives soulignent la nécessité de considérer, à toutes fins utiles, les personnes affectées à l'animation pastorale au primaire comme des membres du personnel de l'école.

Les articles 23 à 27 représentent un progrès réel sur le règlement de 1974 en assurant à l'exercice de l'animation pastorale des conditions viables. Comment, en effet, fonctionner sans fonds et sans espace réel? Nous tenons à dire que, lorsque nous parlons de fonds affectés à l'activité de l'animation pastorale en termes de fonctionnement, nous voulons ici signifier les ressources à la fois matérielles et humaines requises.

Enfin, nous trouvons importants les articles qui rappellent la nécessité de respecter le caractère catholique de l'école et nous apprécions que cette exigence soit exprimée en regard de tout le personnel de cette école, de toute personne qui y travaille, ainsi que des parents et des élèves.

À plusieurs reprises, le règlement du Comité catholique, aux articles 6, 7 et 23, par exemple, fait mention du conseiller en éducation chrétienne. Étant donné le rôle important de ce conseiller pour la vie de l'éducation chrétienne dans les écoles, nous saisissons donc l'occasion que nous offre cette tribune pour exprimer au ministre de l'Éducation notre ardent désir que soient mieux définis le statut et le rôle de cet intervenant.

Assurés que ce règlement aidera l'école québécoise à donner un service toujours meilleur et des plus adéquats, nous recommandons que les trois éléments qui caractérisent l'école catholique soient intégrés à l'article 1, à savoir; une présentation explicite et respectueuse de la foi chrétienne, une attention prioritaire au climat des relations et une volonté d'éducation globale de la personne. Nous recommandons que le processus à suivre dans la demande de reconnaissance d'une école comme catholique, tel que défini à l'article

2, soit maintenu; que l'exigence faite à l'école catholique d'intégrer les croyances et les valeurs de la religion catholique et de rendre public son projet éducatif soit maintenue; que la responsabilité du directeur en regard du caractère catholique de l'école soit affirmée et reconnue selon l'esprit de l'article 6; que des mesures soient prises afin d'assurer l'application rigoureuse du régime d'option; que soient prises les mesures nécessaires pour assurer le respect du temps prescrit pour • l'enseignement moral et religieux catholique, tel que défini aux articles 11 et 12; que soient maintenues les exigences minimales d'adhésion à la foi catholique et de formation spécifique telles que définies aux articles 16 et 17 du règlement, pour toute personne affectée à l'enseignement moral et religieux catholique tant au primaire qu'au secondaire; que soient maintenus dans leur contenu les articles 19, 20, 21, 22, 23 et 24 relatifs à l'animation pastorale au primaire et au secondaire; que des notes explicatives à l'article 20 fassent explicitement référence aux cinq apprentissages de base pour le processus de croissance dans la foi identifiés dans "Voies et impasses"; que les articles 25 et 26 soient reformulés de la façon suivante: "Dans l'école publique reconnue comme catholique, des fonds doivent être affectés pour le fonctionnement des activités de l'animation pastorale" et, à l'article 26: "L'école primaire doit fournir un local pour les activités pastorales et le personnel de l'animation pastorale". Enfin, nous recommandons l'adoption, par le ministère de l'Éducation, de ce règlement du Comité catholique et son entrée en vigueur au plus tard le 1er juillet 1988.

L'Assemblée des directeurs et directrices des offices diocésains d'éducation a tenu à apporter sa collaboration, en exprimant un appui ferme à ce règlement. Nous tenons à vous rappeler les principales raisons qui motivent cet appui. Tout d'abord, nous trouvons que ce règlement précise un ensemble de critères qui clarifient ce qu'est une école publique à caractère confessionnel catholique. Ce règlement tient compte des mutations culturelles profondes qu'ont connues nos milieux, notamment au chapitre des convictions religieuses. Ce règlement reconnaît aussi l'importance du projet éducatif. Il repose également sur une philosophie de l'éducation où, à juste titre, le directeur de l'école est l'artisan premier de la concertation nécessaire à la réalisation d'un projet éducatif. Et, enfin, ce règlement se préoccupe de la qualité de l'enseignement moral et religieux catholique et de la qualité de l'animation pastorale, en précisant les exigences minimales de compétence requises pour toute personne affectée à ces activités.

Nous croyons fermement à la pertinence de ce règlement. Aussi, souhaitons-nous qu'un climat d'accueil, de tolérance et de vérité s'installe dans toutes nos écoles et permette à tous, parents, élèves, éducateurs, administrateurs, de respecter le caractère catholique de ces écoles.

Cependant, nous sommes conscients que l'efficacité d'un tel règlement demeure étroitement liée à une volonté commune de tous les intervenants en éducation de prendre les mesures concrètes qui s'imposeront. Aussi souhaitons-nous qu'une très grande solidarité dans ce sens s'établisse à tous les niveaux.

Nous vous remercions de nous avoir invités à cette commission parlementaire. Nous vous prions de croire a la confiance que nous accordons à l'apport dynamique de l'école publique catholique dans la formation intégrale des jeunes. Merci.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci beaucoup, Mme Jauvîn. Je vous remercie aussi pour avoir bien voulu nous présenter votre mémoire. Je reconnais maintenant le ministre de l'Éducation.

M. Ryan: Mme la Présidente, je vous remercie de votre présentation. Je ne pense pas innover en constatant que vous approuvez le projet de règlement et, par conséquent, je n'engagerai pas le débat sur ce point puisque c'est déjà un élément qui est acquis chez vous. Tout d'abord, avant de faire une remarque générale, je voudrais peut-être vous adresser une question. Pourriez-vous préciser un peu le rôle d'une directrice ou d'un directeur diocésain d'éducation chrétienne? Quelle est sa responsabilité exacte? De qui relève-t-il? Avec qui travaille-t-il? Quelle est son activité par rapport aux écoles? Je pense que cela pourrait être très utile que nous ayons une identification plus claire de votre travail.

Mme Jauvin: Le directeur de l'office de d'éducation dans un diocèse est quelqu'un qui est mandaté directement par l'évêque pour le représenter dans le diocèse pour toutes les questions qui concernent l'éducation religieuse dans le domaine scolaire. Globalement, je pense qu'on peut dire cela. Pour aller plus vite, je vais reprendre ce que nous avons dit à l'article 4 de notre mémoire à ce sujet pour rappeler le rôle premier de ce directeur ou de cette directrice de l'office d'éducation. Donc, il se préoccupe d'une façon toute particulière, dans son travail auprès des commissions scolaires établies sur le territoire de son diocèse, d'une "recherche du sens et des modalités d'application les plus justes des orientations épiscopales touchant la vie des écoles reconnues comme catholiques." De même, son rôle s'exerce au chapitre de "la promotion et de la réalisation des divers projets de perfectionnement et de ressourcement mis sur pied à l'intention du

personnel affecté à l'éducation catholique."

C'est encore le directeur ou la directrice de l'office d'éducation qui voit à la demande, à l'attribution et à l'évaluation des mandats pastoraux requis pour l'exercice de la fonction, soit comme animateur de pastorale, soit comme conseiller en éducation chrétienne dans les différentes écoles scolaires. II y a aussi un rôle de lien à faire avec les différentes communautés chrétiennes pour assurer une collaboration avec les différentes écoles sises sur le territoire de ces communautés chrétiennes en regard du projet scolaire dans son ensemble et de la réalisation de certaines activités en particulier. Je pense que le directeur d'un office d'éducation est aussi très attentif à se mettre à l'écoute du milieu pour essayer de découvrir, les besoins de l'école reconnue comme catholique et les besoins de l'éducation catholique en particulier. Enfin, je pense que c'est aussi le directeur qui essaie de voir quelles sont les ressources que l'église pourrait offrir à l'école reconnue comme catholique pour lui permettre de mieux réaliser son projet éducatif.

M. Ryan: Étant donné les fonctions que vous occupez, je voudrais vous poser une question qui peut nous apporter des informations utiles. D'après vos observations, quelle est la situation présente de l'animation pastorale dans nos écoles primaires? Quels sont les besoins de ce côté? Est-ce que le règlement proposé par le comité catholique permet d'entrevoir des améliorations?

Mme Jauvin: Je pourrais demander à un de mes collègues de répondre à cette question quitte à ce que nous puissions compléter par la suite.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Monsieur?

Mme Jauvin: M. André Vincent. (16 h 15)

M. Vincent (André): En réponse à votre question, il y a une situation très variée d'un milieu à l'autre dans le Québec. La situation pourrait se décrire de la façon suivante: dans certains milieux, l'animation pastorale au niveau primaire est la visite à l'école qu'effectue le pasteur de la paroisse, dans certains cas, au besoin, sur demande ou à l'occasion de temps important de l'année liturgique. Cela part de cette situation pour aller jusqu'à l'autre bout de l'échiquier où vous avez des personnels qui sont engagés directement par la commission scolaire pour s'occuper des activités d'animation pastorale, activités qui sont décrites dans le projet de règlement. On les trouve de façon plus spéciale au no 20.

Entre les deux, il y a une multitude de situations. Dans le détail, évidemment, étant donné la variété, on ne peut pas aborder cela de façon très précise en peu de temps, mais cette situation-là est aussi en mouvement. Cela vient principalement de décisions prises localement, au niveau des groupes de commissaires, d'accorder une importance à cela ou d'accorder une importance à d'autres priorités. Cela vient aussi d'une orientation récente du côté des évêques du Québec, entre autres, qui ont demandé aux communautés catholiques de là province de prendre un peu plus complètement en charge l'initiation des petits enfants aux sacrements de la réconciliation, de l'eucharistie et de la confirmation. Ceci a amené une modification dans la pratique de l'animation pastorale. Là ou cela consistait à la préparation des sacrements, l'animation pastorale a dû se redéfinir et elle l'a fait avec l'aide de documents déjà publiés au ministère, qu'ils viennent du comité catholique pour les grandes orientations ou de la Direction de l'enseignement catholique pour le détail de ces choses-là, pour les objectifs, pour le type d'activités propres à l'animation pastorale. Je ne sais pas si en peu de mots, cela vous donne un survol.

Il y a la question du financement qui est aussi un élément important. Là aussi, il y a une grande variété d'un milieu à l'autre dans le Québec qui va d'une prise de responsabilité plus grande des paroisses à une prise de responsabilité plus grande des commissions.

M. Ryan: II y a peut-être un commentaire général que je voudrais faire. Je remarque qu'à plusieurs endroits vous formulez des propositions afin de rendre le règlement encore plus complet. Je me demande si c'est la voie à suivre. Un règlement ne dit pas tout, un règlement dit un minimum. Autant que possible, il doit affirmer des choses qui sont susceptibles d'être mesurées de manière verifiable. Si on allait ajouter certains des éléments que vous avez suggérés, ce serait peut-être intéressant, pour le texte, à lire, mais je ne sais pas si ce serait la place de le faire dans un règlement comme celui-là. Par exemple, dire qu'un des critères d'une école catholique, cela va être l'attention prioritaire au climat des relations, ce n'est pas facile à vérifier, cela, parce que, même à l'intérieur d'un groupe, il y en a qui trouvent que cela va mal, il y en a d'autres qui trouvent que cela va bien; cela dépend des jours, cela dépend de tellement de facteurs. Je ne sais pas si... Moi, je ne serais pas porté à aller trop loin de ce côté-là, en toute franchise pour vous autres, mais je comprends, quand même, l'idée qu'il y a derrière cela.

Dans ce genre de problèmes, il y en a un qui me préoccupe. Vous dites, à un moment donné: II serait logique que le

directeur d'une école catholique soit de foi catholique. Je pense que c'est à dessein que le comité catholique n'est pas allé aussi loin, parce que si on allait écrire cela dans un règlement, cela voudrait dire, aussi longtemps qu'à peu près toutes nos écoles sont reconnues comme catholiques, qu'une personne qui ne serait pas de foi catholique se verrait interdire, à toutes fins utiles, l'accès à une fonction de directeur d'école, alors qu'il y en a qui sont très qualifiés. Je pense qu'on pourrait même aller jusqu'à soutenir que certaines personnes, sans être de foi catholique, sont peut-être parfois plus aptes à conduire une école dans un esprit chrétien que d'autres qui sont baptisées, qui s'affichent catholiques, mais qui n'ont pas l'esprit. Je ne sais pas si c'est une suggestion à laquelle vous tenez beaucoup. Avez-vous des moyens à suggérer pour l'appliquer d'une façon humaine et pratique?

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. Cloutier.

M. Cloutier (Bertrand): M. le Président, nous avons voulu insister surtout, à ce moment-ci, sur le fait de la grande responsabilité du directeur de l'école par rapport au projet d'éducation catholique. On remarque qu'il a à intervenir à bien des niveaux. Il a à intervenir pour l'évaluation. Il a à intervenir pour la demande de reconnaissance. Il a à intervenir auprès des agents d'éducation catholique. Nous comprenons qu'administrativement, il peut être impossible de réaliser cela, mais nous avons voulu souligner qu'il devait manifester une véritable compréhension de l'éducation catholique pour bien accomplir sa fonction.

M. Ryan: Une dernière question. Vous demandez que soit mieux défini le rôle du conseiller en éducation chrétienne au niveau de la commission scolaire. Pourriez-vous donner des précisions sur cela? Pourriez-vous dire ce que vous attendez et un petit peu donner une idée du genre de rédaction améliorée que vous souhaiteriez?

Mme Jauvin: Dans une première réaction, nous n'avons pas ici trouvé place dans le règlement catholique pour définir le rôle du conseiller en éducation chrétienne puisque le règlement porte sur les écoles et non pas sur les commissions scolaires. D'autre part, nous trouvons très important qu'il y ait pour une commission scolaire un responsable du dossier de l'éducation chrétienne dans nos milieux. Le rôle de cette personne nous apparaît primordial pour le vécu quotidien et concret, disons, dans nos écoles publiques reconnues comme catholiques. Ce rôle consisterait, à mon sens, à se préoccuper dans un premier temps du respect du choix que fait l'élève ou le parent en regard de l'enseignement catholique ou de l'enseignement moral, de voir qu'au niveau administratif on trouve les moyens de respecter ce choix.

Un deuxième rôle qui m'apparaît très important pour le conseiller en éducation chrétienne, c'est de voir à trouver les moyens pour que soit respecté le temps prescrit pour l'enseignement moral et religieux catholique; que cela ne soit pas tellement facile de toujours laisser tomber les périodes dévolues à l'enseignement religieux catholique. Ce serait aussi, dans le contexte de ce nouveau règlement qui dit que l'animation pastorale doit trouver du temps au niveau des services éducatifs, faire preuve de créativité pour concrètement, avec les administrateurs scolaires, avec les directions d'école, voir comment on pourrait faire une place et un espace aux activités d'animation pastorale. Je parle ici particulièrement des difficultés qui sont rencontrées au primaire. II y a aussi nécessairement, pour l'explicitation d'un projet éducatif qui intégrerait les valeurs chrétiennes, les valeurs portées par la religion catholique, un rôle important du conseiller en éducation chrétienne, ne serait-ce que pour fournir les dossiers relatifs à cette question, pour alimenter la réflexion des administrateurs scolaires. Peut-être que mes collègues pourraient compléter en ce qui concerne le rôle du conseiller.

M. Ryan: Peut-être que vous me permettrez, M. le Président, seulement une sous-question pour alimenter votre complément de réponse. D'après votre observation, le conseiller en éducation chrétienne actuellement, est-ce une personne à temps complet ou une personne qui a beaucoup d'autres fonctions à remplir? Oeuvre-t-elle dans des conditions propices à un travail efficace?

Mme Jauvin: Je vais parler en faisant référence à la situation plus particulière que je connaisse dans mon milieu. Je peux dire qu'aucun des conseillers qui travaillent au diocèse de Saint-Jérôme n'est à plein temps, ils sont uniquement sur le dossier de l'enseignement religieux catholique ou de l'animation pastorale. Ils cumulent d'autres dossiers, très souvent l'enseignement moral et aussi très souvent le dossier de la formation personnelle et sociale, quand ce n'est pas aussi des dossiers de géographie, etc., de sorte qu'ils sont un peu écrasés sous la tâche. Ils ont, quand même, mathématiquement parlant, souvent peu de temps à consacrer au dossier qui est prioritaire, celui de l'éducation catholique.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, Mme Jauvin. Je reconnais maintenant la députée de Chicoutimi et porte-parole

officielle de l'Opposition en matière d'éducation. Mme la députée.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. C'est à mot de vous souhaiter la bienvenue à la commission parlementaire et de vous remercier d'avoir accepté de participer aux travaux de cette commission. La participation d'un nombre accru ou important d'organismes aux débats qui ont cours autour de cette question m'apparaît d'autant plus importante que je pense que ce n'est pas un débat qui est simple en soi. Qu'on se tourne du côté des anglophones, majoritairement, de ce qu'on prétend être la faction anglophone au Québec, du côté de la pratique des écoles protestantes et des écoles catholiques, il y a un monde entre les deux. On a pu le voir tout à l'heure exposé de façon assez brève et succincte. C'est une tout autre philosophie.

Je me permettrais, Mme la présidente, de revenir sur quelques questions de clarification, d'abord. Vous utilisez à plusieurs reprises dans votre texte les mots suivants: les exigences posées sont des exigences minimales. Si ces exigences sont minimales, que seraient les exigences souhaitables? "Que soient maintenues les exigences minimales d'adhésion à la foi catholique." Cela revient à quelques reprises. Autrement dit, ma compréhension, ma lecture de votre texte, c'est que le règlement, c'est un minimum et ce qui serait souhaitable, c'est qu'on aille plus loin. Est-ce que je me trompe?

Mme Jauvin: Non, je pense qu'effectivement il s'agit là d'exigences minimales qui tiennent compte, comme nous le soulignions tout à l'heure, d'une évolution dans la réalité scalaire, mais qui laissent place à beaucoup plus dans un avenir souhaitable. Par exemple, si vous me le permettez, M. le Président, exiger que les enseignants qui dispenseront l'enseignement moral et religieux et catholique soient de foi catholique, c'est-à-dire soient baptisés et se déclarent catholiques, cela nous apparaît minimal.

Mme Blackburn: Qu'est-ce qui vous apparaîtrait souhaitable?

Mme Jauvin: Ce qui pourrait nous apparaître souhaitable, c'est qu'en plus ils puissent manifester vraiment qu'iis adhèrent globalement, disons, aux valeurs chrétiennes, qu'ils soient capables d'en rendre compte d'une certaine façon. Quand je dis cela, je ne veux pas dire par une pratique étroite de la religion catholique d'abord et avant tout. Je veux surtout dire être à l'aise pour parler du mystère chrétien, être à l'aise pour faire des références à Jésus-Christ, être capables de porter un peu à la connaissance des jeunes les principales réalités du mystère chrétien. Il y a toute une marge entre cette exigence-là et se dire catholique ou baptisé.

Mme Blackburn: Prenons un exemple concret. Est-ce qu'on trouverait acceptable qu'un enseignant qui voudrait dispenser l'enseignement moral et religieux catholique soit divorcé et remarié? C'est une façon de témoigner sa foi ou ses divergences.

M. Cloutier: Dans nos écoles québécoises, ce n'est pas de la catéchèse où le témoignage est premier, mais on parle de l'enseignement moral et religieux catholique. Bien sûr, quand il y a un témoignage comme on est en train de le dire, c'est une plus grande valeur qui s'ajoute à cet enseignement. Mais je pense qu'on ne peut pas l'exiger de tout le monde. Il y a des personnes qui sont peut-être en situation matrimoniale irrégulière quant à l'Église catholique et qui peuvent très bien accomplir cette tâche d'être professeurs d'enseignement religieux. Maintenant, si vous demandez quel est l'idéal, on vous dirait que ça serait des personnes qui puissent témoigner de leur vie. Nous sommes conscients que, dans un système public, commun, ouvert, cela ne peut pas toujours se réaliser.

Mme Blackburn: Bien. Vous parlez d'un système public et ouvert et votre volonté, c'est de le rendre encore plus exigeant, je ne dirais pas fermé, mais je dois dire que ça finit par ressembler à cela. J'aurais le goût de vous demander une réaction à la suite de commentaires de la présidente du comité catholique ce matin qui, à une question du ministre, répondait que, si on avait voulu resserrer le règlement, le rendre plus exigeant, c'était peut-être une façon - et je reprends ses termes - "de hâter la venue d'écoles autres". (16 h 30)

Est-ce que votre action se situe dans cette perspective? Autrement dit, la difficulté de vivre à la fois l'école catholique et l'école qui donne des choix, des options semble si grande qu'il faut que le projet l'imprègne nettement, de manière que ceux qui sont dissidents, qui ne le partagent pas ou qui veulent avoir des exemptions se retrouvent dans une autre école.

Mme Jauvin: La compréhension que nous avons de l'esprit du règlement, c'est qu'il ne veut pas faire la promotion rigoureuse de l'école autre. Tel que je le comprends, en tout cas, tel que nous avons ici, à notre assemblée, tenté de le comprendre, c'est un règlement qui veut situer dans une plus grande vérité et authenticité l'école publique qui se déclare catholique. Que cette exigence de vérité amène dans les faits, en tenant compte du

pluralisme de plus en plus grand dans notre société, un moins grand nombre d'écoles publiques reconnues comme catholiques, je pense, dans une vision réaliste, qu'il faut regarder cette éventualité. Je pense que ce n'est pas voulu par l'esprit même du règlement.

Mme Blackburn: Vous insistez beaucoup sur la nécessité que le le projet éducatif d'une école reconnue comme catholique s'imprègne bien de toute cette philosophie et de la pensée catholique. Peut-on décemment voir un projet pédagogique, un projet d'école, qui s'inspire des valeurs du catholicisme et en même temps qui respecte le pluralisme?

Qu'est-ce que s'afficher comme catholique peut vouloir dire pour vous? Que le directeur d'école soit aussi catholique. Qu'est-ce que cela peut vouloir dire pour quelqu'un qui, par exemple, choisit l'enseignement moral pour avoir un enseignement plus neutre et moins inspiré de la pensée catholique? Est-ce possible? On parle ici d'un réseau public et c'est le seul qu'on a au Québec. Il est public catholique ou public protestant, au moment où on se parle. On sait bien que, dans les faits, en dehors de Montréal et Québec, on dit que ce sont des commissions scolaires linguistiques. Ce n'est pas aussi vrai que cela vous le savez aussi bien que moi. Je pense bien que c'est utile d'essayer de faire semblant que cela existe, cela n'existe pas. Quand on parle actuellement de réseau public au Québec, il est catholique ou protestant. Dans cette perspective, dans cette situation, que veut dire le choix et le respect de cette différence, de ce choix, le respect de cette pluralité?

Vous me dites qu'il faudra envisager tantôt, dans un avenir plus ou moins prochain, qu'il y aura moins d'écoles catholiques. Elles seront authentiques, mais on ne sera pas obligé d'y intégrer ceux qui font d'autres choix, ils se retrouveront ailleurs et pourront recevoir un enseignement ailleurs. Ceux qui ne choisiront pas l'enseignement catholique devront s'en aller ailleurs où on ne donne pas d'enseignement catholique. Ce serait normal. Je dois vous dire que le projet qui est présenté - je l'ai dit ce matin - m'apparaît prometteur d'une école très axée sur les valeurs de l'Église. Je trouve cela bien, pour autant qu'on puisse avoir un autre réseau. Est-ce un de vos voeux?

Je sais que le temps va passer vite, le temps va me manquer à un moment donné, j'aurais trois questions au sujet de la reconnaissance de l'école. On parle de la consultation pour déclarer une école confessionnelle. On parle ici de consultation des parents, ce qui est, je pense, une amélioration indéniable qui a été apportée par les modifications au règlement du comité catholique. Quel est, selon vous, le pourcentage souhaitable de participants à cette consultation? Peut-on se contenter d'avoir l'équivalent de participation qu'on a actuellement pour l'élection des commissaires? Est-ce que le fait de renforcer votre règlement n'aura pas comme effet de renforcer également les oppositions? En parlant d'activités pastorales, vous dites les activités pastorales vont être enfin à la grille-horaire. Quels cours devrions-nous remplacer et comment envisagez-vous les modifications au régime pédagogique du primaire pour tenir compte de l'ajout d'activités touchant l'animation pastorale?

Mme Jauvin: M. le Président, si vous me le permettez, dans un premier temps, je voudrais apporter une petite précision pour lever une ambiguïté. Comme nous posons ici, comme appui au règlement du comité catholique, les exigences de vérité et d'authenticité pour qu'une école publique réponde davantage à ce qu'est une école catholique, je trouve important de signifier ici que c'est une école qui demeure ouverte. Et ceci tient, justement, au caractère catholique de cette école qui se veut, d'abord et avant tout, très respectueuse des autres confessions et des autres personnes qui fréquenteraient cette école. Je pense que les valeurs portées par la religion catholique, la religion chrétienne, sont des valeurs de respect, d'accueil et de tolérance qui sont très compatibles avec un projet qui intègre ces valeurs, un projet d'une école qui soit publique.

Ceci paraît le premier niveau disons d'exigences d'un projet éducatif d'une école publique dite catholique. Viendra un second niveau, plus exigeant, qui s'exprimera en termes de propositions explicites du mystère chrétien et de la personne de Jésus-Christ, À ce chapitre, nous prenons les mesures pour respecter les confessions autres que catholique en appuyant très fortement l'option, qui est possible pour ces élèves, d'un cours qui ne soit pas un cours d'enseignement religieux catholique, mais un cours d'enseignement moral.

Voilà la précision que je voulais apporter pour lever un peu l'ambiguïté et je laisserai mon collègue, M. Cloutier, compléter la réponse à votre question touchant la conciliation d'une école catholique publique.

M. Cloutier: On peut faire des thèses sur le lien entre les valeurs chrétiennes et les valeurs humaines. Certains le font. On peut simplement, aujourd'hui, indiquer que les valeurs chrétiennes supposent des valeurs humaines au départ, par exemple, la capacité d'accueil des étrangers ou des gens qui sont différents. C'est souvent une partie importante d'un projet éducatif. Dans des

écoles vraiment catholiques, ce devrait être très important cette ouverture aux autres et notre travail nous a amenés à être témoins de situations semblables où le projet éducatif d'une école d'inspiration chrétienne va favoriser l'intégration des minorités visibles, des Amérindiens, par exemple ou va favoriser l'insertion ou l'intégration de personnes handicapées ou en difficulté» Ce n'est pas du tout contradictoire, les valeurs qui sont proposées par notre société et les valeurs qui sont proposées par l'Église catholique II y a une connivence très grande entre les deux, si ce n'est que, pour un catholique, il y a cette inspiration qui vient de Jésus-Christ et cette énergie, ce courage de vivre ses valeurs.

Je . voudrais aussi réagir, M. le Président, à une question de Mme la députée de Chicoutimi au sujet du processus démocratique de reconnaissance dont il est question dans le projet de règlement à l'article 2. Nous sommes très heureux qu'il y ait une participation démocratique prévue par ce projet de règlement. Je voudrais simplement rappeler un fait qui a existé au diocèse de Trois-Rivières, à Trois-Rivières-Ouest exactement, où, il y a quelques années, il a été question de la reconnaissance comme catholique d'une école nouvelle, récemment construite, dans un milieu urbain où il y a beaucoup de jeunes familles. Il y a eu un peu de tapage autour de cela. Il y a eu une consultation où 60 % des parents ont pu s'exprimer et au-delà de 85 % des personnes qui se sont exprimées ont manifesté de l'intérêt pour l'école catholique, ont demandé l'école catholique et, comme cela se situe dans une paroisse très bien identifiable, nous savons que la pratique religieuse dans ce coin-là est entre 10 % et 15 %. Donc, pour réagir à un commentaire de ce matin, il ne faut pas du tout relier l'intérêt pour l'école catholique avec la pratique religieuse. Ce sont deux réalités tout à fait différentes.

Je pourrais peut-être demander à un de mes collègues d'intervenir sur la question de la pastorale à la grille-horaire.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Mme Mayrand.

Mme Mayrand (Micheline): M. le Président, je voudrais d'abord réagir sur la question de l'option dont on a fait mention tout à l'heure. Oepuis 1983, on sait bien que le comité catholique a demandé qu'il y ait un choix véritable pour l'enseignement moral et religieux catholique et l'enseignement moral parce que, avant, c'était une exemption que les parents devaient demander pour les enfants pour ne pas avoir les cours d'enseignement moral et religieux. Il nous apparaît que cela a été un progrès réel pour respecter la liberté des personnes et pour ne pas, non plus, être discriminatoire. Tout le monde a à faire ce choix entre l'enseigne- ment moral et religieux catholique et l'enseignement moral chaque année. Aussi, en ce qui regarde les enseignants qui ont à demander l'exemption, on sait très bien que, dans une perspective d'authenticité et de vérité, les enseignants devraient être capables de demander une exemption à l'enseignement moral et religieux catholique s'ils ne se sentent pas capables de donner cet enseignement, pour respecter leur liberté de conscience. Je pense qu'il y a encore des progrès à faire pour que les enseignants puissent se prévaloir de ce droit.

Maintenant, en ce qui concerne l'animation pastorale, il est proposé que ce soit à l'intérieur de la grille-horaire, à l'intérieur des services éducatifs. Cela ne veut pas du tout dire que ce sera un cours d'enseignement comme toutes les autres matières scolaires. Cela veut dire que l'animation pastorale telle qu'elle est proposée, ce sont des activités de pratique évangélique. Ce n'est pas un cours. Ce n'est pas quelque chose qui va être évalué de la même façon qu'un autre cours. Cela ne doit pas remplacer les cours qui sont proposés à l'intérieur du régime pédagogique. Alors, c'est à l'intérieur de cette grille-horaire. Il peut y avoir des activités d'animation pastorale qui sont à l'intérieur, au moment d'un cours. Il peut y en avoir qui sont à l'extérieur d'un cours, à la période du dîner ou après la classe. Cela fait aussi partie de l'animation pastorale d'une façon globale. Mais on propose que ce soit à l'intérieur des services éducatifs. II y a du temps prévu pour les services éducatifs à l'école qui ne fait pas partie de la formation académique de l'enfant. Je ne sais pas si cela répond.

Mme Blackburn: Mon inquiétude vient du fait que, à l'article 4 il est dit: "L'école publique reconnue comme catholique intègre les croyances et les valeurs de la religion catholique dans son projet éducatif et elle s'affiche comme telle." Comment peut-on avoir de telles exigences et respecter les libertés individuelles de ceux qui sont d'autres confessionnalités? À mon avis, c'est inextricable. Je ne pense pas que c'est demain la veille qu'on va trouver une solution équitable à ces situations, car on se trouve - je le rappelle - dans un système public, où vous n'avez pas le choix de l'école. À Montréal, de plus en plus, ils font le choix de l'école. Plutôt que d'avoir ce type d'enseignement, ce type d'encadrement, un projet très collé à la morale catholique, ils vont dans une école plus ouverte qui est protestante. Il ne faut pas se cacher les choses ici. Je pense qu'on est tous conscients de cela.

Maintenant, je me demandais - et cette préoccupation, pour moi, n'est pas nouvelle -jusqu'à quel point l'Église catholique, confortée par les privilèges qu'on lui a

reconnus, pour des raisons qui se justifient et qui s'expliquent parfaitement dans l'histoire et dans le temps, cette Église qui se laisse conforter pour ne pas dire porter par l'école, n'est pas plus menacée si vous me dites - et je trouvais que cela vient confirmer mes appréhensions là-dessus -: On demande que l'école remplace l'enseignement que la maison ou la famille ne donnent plus. On me dit que la pratique, dans la grande région de Montréal est de 13 %; dans la région de Québec, elle est de 25 % et 80 %, me dites-vous, dans la région de Trois-Rivières, demandent que ce soit une école catholique alors qu'on ne pratique plus. (16 h 45)

Dans les textes du comité catholique et ils sont clairs là-dessus, on dit qu'il est important qu'on mette l'enfant en contact avec sa foi - j'ai cependant beaucoup de difficulté à comprendre "foi" dans ce sens-là - à l'école puisqu'il n'a jamais été mis en contact avec cet enseignement dans la famille. Alors je ne vous dis pas que c'est simple, mais exclusivement sous cet aspect, jusqu'à quel point ce ne serait pas beaucoup plus dynamisant et le défi ne serait pas beaucoup plus grand si l'on ne cherchait pas à faire faire par l'école ce que la famille et souvent la communauté catholique ne réussissent plus à faire?

M. Le Président (M. Parent, Sauvé): M.

Vincent.

M. Vincent: M. le Président, je pense que, dans le cas de la question de Mme la députée, l'un n'exclut pas l'autre dans le sens que, depuis quelques années, surtout avec les orientations des évêques du Québec mettant au premier plan la prise de responsabilité familiale et communautaire, entre autres, dans l'initiation des petits enfants aux sacrements, il faut remarquer qu'il y a eu une volonté clairement exprimée de la part de l'Église, par la bouche des évêques, de prendre en main ce que vous dites. Mais, en même temps, notre foi, si je puis dire, au sens de confiance ou notre vision des choses est que l'école n'est pas que le reflet de la société; elle est aussi un projet. Dans ce sens-là, autant elle a à s'inspirer de la vérité de la situation, de la volonté des parents, autant elle a à s'inspirer du respect de l'individu et des racines qu'elle a, de toute sa continuité, historiquement. Elle a à trouver, dans cet ensemble de facteurs, une espèce de viabilité. Notre réflexion, qui s'est portée sur le projet de règlement, s'est articulée autour de ces facteurs.

Dans ce sens, les questions que vous posez, nous les portons aussi, mais nous exprimons notre conviction que l'un n'exclut pas l'autre, ainsi que je vous le disais au début. Éliminer d'un milieu ce qui, depuis longtemps, a été une préoccupation portée par ce milieu - je veux dire, le milieu des écoles - n'est pas nécessairement une solution, si dynamique fût-elle, qui fait que l'accent du côté des parents sera promu davantage. Alors, notre conviction est que le travail est à faire sur les deux plans. C'est dans ce cadre que nous avons présenté notre réflexion.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. Cloutier.

M. Cloutier: Je crois que l'article 4 du projet de règlement pose une question. Je voudrais seulement rappeler que ça s'inspire drôlement du texte des préambules du règlement de 1974, les préambules qui, malheureusement, ne semblent pas se retrouver dans le projet actuel, et que cette identification bien évidente de l'école comme catholique a permis, jusqu'à présent, dans l'ensemble des situations, de respecter les minorités à la fois étudiantes et du personnel. Il ne faudrait pas voir, dans l'article 4, un désir d'inspiration sectaire d'éliminer et d'encadrer absolument. Il y a de la souplesse dans cela.

Il y a peut-être cette vision du catholicisme qu'on a eue, de quelque chose d'absolument radical, mais qui est dépassée actuellement. Je connais bien des intervenants en éducation chrétienne qui ont fait des démarches dans leur école, dans leur polyvalente, par exemple, pour que le régime d'options soit véritablement respecté et que l'enseignement moral soit de qualité. Sauvent, des animateurs de pastorale vont intervenir, proposer des activités afin de favoriser l'intégration de jeunes d'autres origines, d'autre langue ou d'autre foi. On voit des activités de toutes sortes comme cela. Donc, l'article 4 n'est pas absolument catégorique et ne vise pas à éliminer tous ceux qui ne penseraient pas de la même façon.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, monsieur. Est-ce qu'il y a d'autres interventions du côté ministériel? Je reconnais la députée de Chicoutimi pour une courte conclusion.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Comme vous le voyez, c'est un sujet qui n'est pas simple, qui est certainement très complexe. M. Cloutier nous rappelle, justement, qu'effectivement, dans le préambule du projet de règlement de 1974, c'était déjà presque prévu, sauf qu'on a aussi trouvé qu'il n'allait pas assez loin, le projet de règlement de 1974, et on est en train, ici, de le renforcer, de le rendre, pour utiliser l'expression des administrateurs scolaires, tatillon et difficilement applicable. Il y a comme un double discours d'ouverture, de

tolérance et d'intolérance vis-à-vis de ceux qui se distinguent un peu dans votre projet éducatif. C'est un peu ce que je retiens de cette volonté d'aller plus loin que ne va le comité catholique dans la proposition qui a été rendue publique.

Je voudrais quand même vous dire que j'ai apprécié l'échange de vues qu'on a eu et vous remercier à nouveau de votre participation aux travaux de cette commission.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci! M. le ministre de l'Éducation.

M. Ryan: Je ne sais pas, je suis un petit peu perplexe devant les paroles que je viens d'entendre. Il me semble que, si aller vers plus de vérité vis-à-vis de soi-même, c'est aller vers une plus grande intolérance, il ne restera pas beaucoup de place pour une existence intéressante.

Mme Blackburn: Avec sa vérité, on est "préjugé" aussi.

M. Ryan: Non, je ne crois pas que ce soit le cas. Je ne pense pas qu'on puisse demander à une communauté de refuser de se définir elle-même clairement sous prétexte que c'est de nature à déplaire à d'autres. U y a moyen de le faire. Je pense que c'est l'essence même de la vie démocratique de se définir, que chaque famille se définisse franchement et explicitement, tout en reconnaissant le droit à d'autres familles de se définir différemment. Là, il va rester à faire la preuve, si vraiment on veut faire oeuvre utile, que certaines dispositions du projet de règlement vont dans un sens contraire à une saine "convivance" de personnes d'adhésions religieuses qui peuvent être différentes ou de valeurs morales qui peuvent avoir des sources différentes, mais, jusqu'à maintenant, je ne pense pas qu'on soit même au seuil d'un début de preuve.

En particulier, à l'article 4 au sujet duquel la députée de Chicoutimi s'inquiète, je lui ai expliqué clairement, à midi, qu'il n'y a pas de problème là, à mon point de vue. Je crois que, si on l'interprète d'une manière littérale en prenant "intègre" comme si cela voulait dire qu'il y a seulement cela et pas autre chose, que cela passe avant tout, ce n'est pas l'esprit de cela du tout. On pourrait donner plusieurs exemples, mais je ne veux pas prolonger la discussion pour rien. Il me semble qu'on peut intégrer dans un projet éducatif les croyances et les valeurs de la religion catholique suivant des modalités infiniment variées qui répondront à la réalité propre de chaque milieu, au stade évolutif de chaque école. Il pourra même arriver une année que, dans le projet éducatif, il n'y ait aucune mention explicite, mais que ce soit prégnant dans l'ensemble du projet, dans la trajectoire de cette institution-là.

Si le comité catholique avait dit: Nous autres, on veut exercer un droit de veto sur chaque projet éducatif pour s'assurer que ce soit rigidement conforme à la doctrine, là, je serais moi-même inquiet, je dirais: Cela n'a pas de sens, on ne veut pas créer une grosse affaire de contrôle encore une fois comme on l'a fait dans d'autres domaines, dans celui de la langue, par exemple, où on a des bureaucraties formidables pour surveiller des détails. On ne veut pas cela dans le domaine religieux, pour rien au monde. Ce n'est pas cela qui est dans l'article 4 et, si on fait la preuve que c'est cela, je suis prêt à ouvrir mon esprit et à dire: Attendez, le comité catholique et on va faire attention. Jusqu'à nouvel ordre, le fardeau de la preuve repose sur ceux qui posent ces questions-là, puis je ne trouve pas d'indication de cela dans le texte que j'ai sous les yeux.

Je vous remercie beaucoup, je vous ai fait part de ma réserve quant à des additifs qui pourraient donner lieu à des difficultés quand on traite d'un règlement. Par ailleurs, il y a d'autres propositions dans votre intervention. Vous demandez qu'on ait des ajouts de nature explicative pour permettre de mieux comprendre la portée de certaines dispositions du projet de règlement. Je pense bien que le comité catholique verra à examiner de très près ces choses-là et la Direction de l'enseignement catholique du ministère de l'Éducation verra également à examiner ces propositions pour explorer la meilleure façon d'y donner suite dans l'esprit du règlement.

Je vous remercie beaucoup. Cela a été très utile de vous rencontrer et si vous aviez un complément d'information ou d'intervention à nous communiquer concernant des articles qui traitent du rôle du conseiller en éducation chrétienne, cela pourrait être une contribution très appréciée parce qu'il me semble qu'on ne peut pas vider des points aussi importants en l'espace de quelques minutes de discussions, mais on recevra avec intérêt tes choses que vous aurez à nous communiquer là-dessus.

Je vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Mme Jauvin, Mme Mayrand, M. Vincent, M. Cloutier, merci beaucoup!

On suspend les travaux pour quelques minutes. Nous entendrons, à 17 heures, le Mouvement pour une école moderne et ouverte.

(Suspension de la séance à 16 h 56)

(Reprise à 17 h 3)

Mouvement pour une école moderne et ouverte

Le Président (M. Parent, Sauvé): Les

travaux vont débuter immédiatement et je souhaite, au nom des membres de cette commission, la plus cordiale des bienvenues au Mouvement pour une école moderne et ouverte. Le Mouvement pour une école moderne et ouverte est représenté par Mme Marie-France Cloutier, qui en est la présidente, par Mme Monique Mus-Plourde, membre du comité du programme et candidate aux élections scolaires dans le quartier 17 à Montréal, et par M. Kenneth George, aussi membre du comité du programme et candidat aux élections scolaires du quartier 14. Alors, je vous souhaite la bienvenue. Je veux aussi vous remercier au nom des membres de cette commission d'avoir accepté l'invitation de venir nous faire connaître votre perception et votre pensée face au projet de règlement que nous avons la responsabilité d'étudier. Je veux que vous vous sentiez bien à votre aise. C'est la commission qui vous doit quelque chose. Ce n'est pas vous qui devez quelque chose à la commission. On vous doit nos remerciements encore une fois et toute notre gratitude d'avoir bien voulu venir nous rencontrer.

La commission a prévu une heure pour vous rencontrer. Nous vous suggérons de présenter votre mémoire dans à peu près quinze minutes de façon à avoir la chance d'échanger avec les membres du côté ministériel et les membres du côté de l'Opposition. Au bout de 50 minutes, je donnerai la parole - 50-52 minutes, on ne coupera pas ça à la hache - aux membres de l'Opposition officielle pour le mot de la fin et je ferai de même avec le ministre. Alors, Mme la présidente, messieurs les membres de la commission, je vous invite à prendre place et nous vous écoutons, madame.

Mme Cloutier (Marie-France): M. le Président, je vous remercie beaucoup. Avant de commencer, j'aimerais d'abord annoncer à la commission que la dernière page du mémoire a été corrigée et que les copies sont disponibles auprès de la secrétaire en arrière, ici. La dernière page est remplacée par deux pages nouvelles. Il est possible de les distribuer, je pense. Oui?

Le Président (M, Parent, Sauvé): D'accord.

Mme Cloutier: L'autre remarque que j'aimerais faire avant de débuter, c'est que les trois personnes ici présentes représentant le MEMO sont d'abord toutes les trois des parents. Les enfants de Mme Mus-Plourde ont été, du temps où ils étaient à l'école, en catéchèse. Deux des trois enfants de M. George sont à l'école publique, à l'heure actuelle, et vont au cours d'enseignement religieux, et j'ai trois enfants à l'école publique qui vont en enseignement moral. Juste pour vous dire qu'on a l'idée d'un peu tout le monde.

Alors, M. le Président, M. le ministre, mesdames, messieurs les députés, le Mouvement pour une école moderne et ouverte (MEMO), est un regroupement de personnes désireuses de susciter un changement dans la situation scolaire à Montréal. Notre mouvement s'est précisément constitué en vue des élections scolaires à la CECM.

Malgré le pluralisme ethnique, culturel et religieux de plus en plus manifeste à Montréal, nous devons constater que les structures scolaires n'ont pas su s'adapter pour répondre adéquatement aux nouveaux défis que cela pose. L'article 93 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique impose, en effet, à la population de la métropole un modèle unique des écoles catholiques sur tout le territoire de la CECM.

De plus, notre commission scolaire est contrôlée depuis trop longtemps par les membres du mouvement scolaire confessionnel qui ont réussi à bloquer ou à freiner toute possibilité d'ouverture et d'adaptation de l'école à la réalité sociale d'aujourd'hui. C'est dans ce contexte que nous avons développé notre analyse du projet de règlement du comité catholique, c'est-à-dire en tenant compte de la dynamique sociale à Montréal et des contraintes institutionnelles et politiques existantes.

Nos principes de base au plan des structures scolaires. Sur 1» question de la confessionnalité, le MEMO joint sa voix à tous ceux qui réclament au Québec l'instauration de commissions scolaires linguistiques en remplacement des commissions scolaires confessionnelles. Cette nécessité n'est plus à démontrer et c'est d'ailleurs l'avenue préconisée jusqu'à maintenant par le gouvernement. Le MEMO s'engage d'ailleurs à appuyer le gouvernement dans ses efforts pour en arriver à une telle situation.

En ce qui a trait à l'école, nous reconnaissons le droit des parents d'exiger pour leurs enfants un cours d'enseignement religieux ou un cours de formation morale laïque. Ces cours devraient faire l'objet d'un libre choix authentique, sans les contraintes que l'on constate encore dans les faits, contraintes d'ordre organisationnel ou administratif.

En corollaire de cette reconnaissance, il nous semble que le projet éducatif de l'école devrait prendre en compte la pluralité des convictions et la diversité culturelle présentes dans l'institution.

Par ailleurs, si nous croyons que l'enseignement religieux doit être de haute qualité, si nous comprenons que l'enseignement religieux doit avoir une extension à l'extérieur de ce qui se vit et se dit en classe, nous ne croyons cependant pas qu'il faille reconnaître une préséance d'office aux questions relatives à l'enseignement religieux

catholique dans la liste des besoins de l'école, nous ne croyons pas que la nécessité du témoignage catholique doive donner le ton à l'ensemble des apprentissages ainsi qu'à l'organisation et à la vie de l'école. C'est à partir de ces principes que nous formulons notre jugement sur le projet de règlement soumis à notre attention.

Une démarche prématurée aux assises incertaines. Nous avons assisté, ces dernières années, à une certaine évolution au sein de l'Église catholique en ce qui concerne sa façon d'assumer son rôle pastoral. Cette évolution s'est manifestée, entre autres, par le retrait de la préparation sacramentelle des programmes de catéchèse scolaire; désormais, cette préparation n'incombe plus aux titulaires de classe, mais aux responsables paroissiaux appuyés par les parents. L'esprit de cette réforme qui rapatrie l'évangélisation vers les paroisses nous paraît en harmonie avec l'évolution des mentalités et des moeurs de la population québécoise et montréalaise en particulier. Cette population n'est plus monolithique sur le plan des valeurs et des convictions et l'Église catholique n'est plus son seul pôle de référence.

De plus, à Montréal surtout, l'immigration a considérablement modifié le tissu urbain à un point tel que, dans quelques années, un élève sur deux de la CECM sera d'origine ethnique, d'autre origine que québécoise de vieille souche. Cette immigration ajoute au pluralisme des valeurs déjà manifeste chez les Québécois francophones. Dans ce contexte, il faut reconnaître les risques de non-pertinence sociale que peut représenter tout projet de règlement du type de celui qui nous est soumis et force nous est de reconnaître que le règlement proposé est très risqué à Montréal.

Certes, l'esprit du règlement catholique s'inscrit en partie dans le sens de l'évolution sociale à Montréal. Ainsi, le règlement reconnaît à l'élève le droit de choisir entre un cours d'enseignement moral et catholique et un cours d'enseignement moral sans référence à une confession particulière. Il n'exige plus que l'ensemble des membres du personnel d'une institution soit de foi catholique, mais là s'arrête l'évolution.

Les articles 2 et 4 donnent le ton à l'ensemble du règlement en stipulant que l'école publique reconnue catholique intègre les croyances et les valeurs de la religion catholique dans son projet éducatif. Le comité catholique reconnaît donc que son projet de règlement ne trouve sa cohérence que dans le contexte où le caractère confessionnel d'une école résulte essentiellement d'une adhésion réfléchie et volontaire de l'ensemble des parents de l'institution. Or, jusqu'à preuve du contraire, cette condition de base ne peut exister à la CECM. Que l'on se souvienne des cas de Notre-Dame-des-

Neiges ou de la loi 3.

Les conséquences de ce projet de règlement nous paraissent d'autant plus dangereuses que nous avons vu avec quelle étroitesse d'esprit les commissaires du Mouvement scolaire confessionnel s'acquittent de leur mission de défendre les croyances et les valeurs de la religion catholique. Interprété par eux, le projet éducatif confessionnel risque fort dans la pratique de s'avérer éminemment discriminatoire pour ceux qui ne professent pas la foi catholique. Son aspect englobant ne laissera que peu de place pour l'expression des convictions autres et il est à parier que des tracasseries de toutes sortes finiront par annuler purement et simplement le droit à la libéré de conscience et au libre choix entre l'enseignement religieux et la formation morale. On assistera plus que jamais à des tentatives de récupération à l'endroit des non-catholiques. Citons, à titre d'exemple, le cas réel d'une école où une campagne d'appui au tiers monde à laquelle tous les étudiants ont participé a été couronnée par la célébration d'une messe pour les catholiques. Rien d'équivalent n'avait été prévu pour les non-catholiques qui n'ont pu alors que se sentir en marge d'un projet de leur école. Des situations comme celles-là ne sont ni rares ni exceptionnelles et elles entraînent de nombreuses conséquences dont, entre autres, une amplification du mouvement d'exode de la clientèle française vers les écoles du CEPGM.

Outre l'adhésion des principaux intéressés, c'est-à-dire les parents et les élèves, la réussite d'un projet éducatif confessionnel dépend également des convictions du personnel enseignant. Or, nous ne savons rien des dispositions réelles des enseignants à cet égard. Il nous faut reconnaître qu'une donnée très importante manque au débat. On se leurre si on veut faire reposer la qualité du témoignage chrétien sur un texte de loi. Pour être authentique et sincère, un tel projet éducatif demande une adhésion volontaire de tous. Ce n'est pas le cas actuellement, la confessionnalité étant imposée à toutes les écoles de la CECM.

Dans ce contexte, nous devons lancer un appel à l'Église catholique du Québec, en particulier à l'Eglise de Montréal pour qu'elle dépasse les textes juridiques et manifeste publiquement, politiquement et dans le quotidien une très grande ouverture, de la disponibilité et de la tolérance face à ceux qui ne sont pas membres de l'Église ou ne veulent plus assumer leur baptême.

Le témoignage chrétien, tout témoignage suppose d'abord une capacité d'accueil et d'écoute. Nous osons croire que l'Église catholique de Montréal insistera sur la nécessité de servir la communauté entière plutôt que de se soumettre à des obligations

légales de plus en plus dépassées.

Les amendements suggérés. Nous avons toujours espoir qu'un amendement à l'article 93 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique accordera enfin aux parents de la CECM le droit de se poser la question de savoir s'ils veulent ou non une école catholique pour leurs enfants. Entre-temps, il faut travailler à l'intérieur des lois existantes et, dans ce contexte, nous voulons commenter d'autres articles du projet de règlement.

L'article 2. Tel que formulé, l'article 2 crée une dichotomie entre les parents et le comité d'école. Il nous semblerait plus pertinent de fondre les paragraphes 1 et 2 de sorte que la consultation des parents se fasse en collaboration avec le comité d'école.

L'article 3. La reconnaissance d'une école catholique pourrait avoir un caractère provisoire. Il n'est pas souhaitable qu'une telle reconnaissance soit un acquis permanent. Une période de trois ans au terme de laquelle le statut serait réévalué serait de mise. Le règlement devrait aussi prévoir la possibilité de révocation de cette reconnaissance confessionnelle.

L'article 9. Cet article comporte certaines ambiguïtés qu'il conviendrait de clarifier. Le choix exercé par les parents implique-t-il l'accord des deux parents? Qu'advient-il dans le cas de la garde partagée? Quelques précisions seraient nécessaires ou, si on ne croit pas réglementer ces choses, il conviendrait alors de retenir la formule adoptée dans le règlement sur l'école protestante.

Les articles 10, 11 et 12. Les pouvoirs du comité catholique devraient être restreints au programme d'enseignement religieux catholique. Il conviendrait donc de lui retirer toute responsabilité de réglementation concernant le cours de formation morale. Cela assurerait l'entière autonomie de la formation morale et un partage net des responsabilités institutionnelles serait ainsi établi. (17 h 15)

L'article 13. Cet article est en contradiction avec la conception québécoise de la formation fondamentale. Comment peut-on considérer la formation morale ou religieuse comme fondamentale et en exempter tout un secteur de l'école? On doit reconnaître aux élèves du secteur professionnel les mêmes droits que ceux que l'on reconnaît aux autres et leur permettre l'accès à la même formation fondamentale. Les contraintes de la grille horaire ne sauraient être une raison suffisante pour y déroger.

L'article 15. Il nous semble que, si l'on recherche la qualité de l'enseignement, on doit vérifier l'atteinte des objectifs dans toutes les écoles où se donne l'enseignement religieux catholique et pas seulement dans les seules écoles reconnues comme catholiques.

L'article 16.3. Cet article est un recul par rapport au règlement actuel où le droit de l'enseignant d'être exempté de l'enseignement religieux pour motif de liberté de conscience est explicitement reconnu. En le formulant par la négative, on crée une équivoque qui risque, dans la pratique, de nier ce droit. Si le comité catholique veut véritablement faire la vérité, il devrait plutôt établir un régime de libre choix pour les enseignants.

Article 18. Le programme d'enseignement religieux catholique devrait comporter un volet sur la dimension culturelle des autres religions comme cela existe dans le programme de formation morale. Le pluralisme actuel nous oblige à cette ouverture et cela n'est pas incompatible avec les objectifs de la catéchèse.

Articles 25 et 26. L'obligation qui incombe à l'école de prévoir des budgets et des locaux pour la pastorale nous semble prendre une importance démesurée par rapport à d'autres besoins beaucoup plus vitaux. Certaines écoles manquent d'espace pour une bibliothèque ou une salle des professeurs. L'utilisation rationnelle des locaux et des fonds nous empêche d'accepter le caractère impératif de ces articles. De plus, puisque le ministère de l'Éducation du Québec accepte de financer la pastorale catholique au niveau secondaire, nous considérons qu'en toute justice il devrait également prévoir des budgets pour un service d'animation s'adressant aux non-catholiques.

En conclusion, le projet de règlement pourrait avoir un certain sens s'il prenait place dans le contexte de l'application de la loi 3 sur la restructuration scolaire. Cette loi établissait des commissions scolaires linguistiques et n'accordait de reconnaissance confessionnelle aux écoles que sur demande.

En dehors de ce contexte et tel que rédigé, le projet de règlement nous apparaît non pas comme une solution à un problème, mais comme une source de problèmes nombreux. Tant que ne sera pas dénoué l'imbroglio juridico-constitutionnel qui bloque la restructuration scolaire sur le territoire de la CECM, la mise en place de mesures comme celles proposées continuera de provoquer d'inutiles tensions et de mobiliser des énergies qui devraient être investies ailleurs. Merci.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci beaucoup, Mme la présidente. Je reconnais maintenant le ministre de l'Éducation. M. le ministre.

M. Ryan: M. le Président, je ne pensais pas que nous aurions la chance de

commencer la campagne électorale scolaire de Montréal à Québec. Je suis très heureux de faire connaissance ou, plus exactement, de renouer connaissance avec les personnes ici présentes, du Mouvement pour une école moderne et ouverte à Montréal. Sans m'exprimer sur la lutte électorale qui aura lieu au cours des prochaines semaines, je veux quand même les féliciter de l'intérêt qu'ils portent à la chose scolaire et de l'initiative qu'ils ont prise de se regrouper pour offrir à la population un choix qui sera sûrement l'objet d'un examen attentif pendant la campagne.

Ceci dit, j'apprécie également que le mouvement soit venu à Québec nous faire part de son avis sur le projet de règlement du comité catholique, j'ai noté à divers endroits du mémoire des remarques qui me sont apparues intéressantes et qui pourraient même permettre d'améliorer le projet de règlement dans certaines de ses dispositions. Je vous les signalerai peut-être un peu plus tard dans la discussion, mais je ne voudrais pas donner l'impression que j'essaie d'annexer le MEMO à ce projet de règlement au sujet duquel, si je comprends bien, il a plus de réserves que de tendances à l'approuver. Je ne veux pas déformer votre pensée, car la meilleure façon de bien discuter, c'est d'indentifier d'abord la pensée de l'interlocuteur le plus honnêtement possible. Vous soulevez un problème dans votre intervention à propos d'une modification constitutionnelle. Vous dites: Finalement, ce qu'on souhaiterait, nous autres, c'est qu'un amendement soit apporté à l'article 93 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, qui ouvrirait la porte à d'autres changements qui permettraient de voir ces questions-ci dans une perspective plus aérée.

Le gouvernement actuel n'est pas opposé à des modifications constitutionnelles, mais, en ce qui touche l'article 93, ce n'était pas une priorité majeure pour nous. Il y avait d'autres questions à clarifier avant. L'héritage que nous avions reçu des gouvernements précédents, fédéral et provincial, nous imposait une tâche ardue de redressement, qui a été commencée avec l'entente du lac Meech, mais qui est loin d'être terminée.

Alors, en ce qui touche l'article 93, moi, je pense que le gouvernement pourra l'aborder le jour où, d'abord, on aura vérifié avec minutie ce qu'il adviendra des droits garantis aux catholiques et aux protestants. Je suis toujours étonné d'une certaine légèreté avec laquelle les gens disent: Changeons ces droits pour d'autres. Je ne pense pas qu'on puisse disposer des droits d'autrui sans d'abord s'être enquis de ce qu'autrui en pense.

Pous nous, du Québec, il y a deux dimensions à cela. Il faut d'abord vérifier comme il faut ce que les milieux catholiques pensent de ces questions, de même que les milieux protestants. Deuxièmement, nous avons le devoir de vérifier aussi quelles seraient les répercussions d'une éventuelle modification sur les droits des catholiques et des protestants dans les autres provinces du Canada. Des contestations considérables ont eu lieu en Ontario au cours des derniers mois, et même des trois ou quatre dernières années, des contestations judiciaires de très grande importance» Si le Québec avait dit tout simplement: Nous autres, ces questions ne nous intéressent plus, d'abord, il aurait été en désaccord avec sa propre population et, deuxièmement, je ne suis pas sûr qu'il aurait rendu le meilleur des services. Alors, nous ne connaissons pas exactement le moment où viendra s'insérer une démarche comme celle que vous proposez et, avant de la faire, nous devrons faire des vérifications sérieuses auprès des dépositaires des droits que l'on vaudrait modifier.

Il y a une chose sûre, c'est qu'on ne peut pas facilement superposer des droits les uns aux autres. Supposons qu'on garde tout le plancher des droits confessionnels qui existent actuellement et qu'on veuille y surajouter des droits linguistiques, on va avoir un régime qui ne sera plus administrable, qui ne sera plus gérable. Et, déjà, l'effet combiné que l'on peut appréhender, la Charte canadienne des droits dans son article 23 avec l'article 93 dans ses dispositions relatives aux droits confessionnels, donne naissance à des situations extrêmement complexes, dont le développement dépendra de la jurisprudence. Alors, si la jurisprudence est le moindrement libérale dans le sens de l'extension des droits, ceux qui gouvernent vont se trouver devant des problèmes pratiquement impossibles à résoudre. Il faut penser à tout cela. C'est un immense enchevêtrement qui n'est pas facile à dénouer. C'est dans ce sens-là que nous préférons agir, en attendant, d'une manière ponctuelle, sans rejeter la perspective d'une action éventuelle sur ces grandes questions quand nous aurons réuni tous les éléments nécessaires.

La même chose s'applique à la loi 3. Nous avions prévenu le gouvernement du temps qu'il fallait vérifier la constitutionnalité de cette loi étalée de manière téméraire, en s'appuyant sur des avis limités qu'il avait pris pour un consensus. Les tribunaux ont dit que ce n'était pas bon, de fait, et c'était tellement péremptoire que cela n'aurait absolument rien donné de poursuivre les démarches pendant cinq ou six ans jusqu'à la Cour suprême.

Ceci pour vous dire que cette partie-là du mémoire est un très bon sujet de débat public, et que, moi, j'accueille toujours avec plaisir l'occasion d'en parler, mais je ne peux pas vous promettre au nom du gouvernement

que nous serons prêts à passer à l'action demain matin. Sur le reste, je pense que ce qu'il y a de mieux à faire, c'est peut-être d'examiner une à une les suggestions que vous faites. Je pense qu'il y a des possibilités d'améliorations importantes ou peut-être même de clarification du règlement proposé et je ne vous arracherai pas de conclusion à la fin. Je n'essaierai pas, je sais bien que ce serait vain de ma part, mais on prendra vos réponses pour ce qu'elles sont et on va les examiner au mérite, en toute objectivité.

Vous dites d'abord qu'à l'article 2 vous aimeriez qu'on fonde les paragraphes 1 et 2, mais ce n'est pas clair. Vous dites: "de sorte que la consultation des parents se fasse en collaboration avec le comité d'école".

Je n'ai pas d'objection. Je crois que ce que le comité a voulu éviter ici, c'est que le comité d'école se prenne nécessairement pour tous les parents. Nous admettons tous qu'il y a une différence. Un comité d'école sera parfois choisi par une assemblée de parents où il y a 25 personnes sur peut-être 1 500 parents possibles. On ne peut pas dire que la consultation du comité d'école va être suffisante. Les deux sont prévues. Est-ce que vous voulez éliminer une des deux ou envisagez-vous plutôt une collaboration, et de quelle nature?

Mme Mus-Plourde (Monique): Nous n'avons pas du tout l'intention d'éliminer l'une des deux parties. C'est véritablement pour établir une collaboration entre la commission scolaire, qui a une responsabilité devant le comité catholique, et le comité d'école qui, lui, est le représentant officiel des parents. Ce sont donc ces deux groupes qui doivent consulter conjointement les parents. Il y a d'ailleurs un règlement à la CECM qui dit que la commission scolaire doit consulter les parents, qu'elle doit s'entendre avec le comité d'école sur les modalités de consultation auprès des parents. Cependant, ce règlement interne est appliqué selon les sujets avec plus ou moins de laxisme. Il serait donc intéressant et nécessaire de mettre dans le règlement du comité catholique que cela doit se faire en collaboration avec le comité de parents qui est le représentant officiel.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci.

M. Ryan: Cela répond à ma question, je vous remercie.

Vous dites ensuite qu'il serait mieux que la reconnaissance ne soit pas accordée pour une période indéfinie, mais pour une période de trois ans, au terme de laquelle le statut serait réévalué. Vous dites qu'il faudrait prévoir une possibilité de révocation de la reconnaissance. J'ajoute seulement une petite précision: dans les premiers projets qui nous ont été soumis, il y avait des dispositions traitant de la révocation. Elles ont été enlevées, parce que ce pouvoir de révocation est déjà dans la loi. Le comité catholique le détient de par la loi. Comme la loi est formulée, c'est écrit: au besoin, elle la révoque. Nos conseillers juridiques nous ont dit qu'il n'y avait pas matière à réglementation, vu la manière dont la loi prévoit ce pouvoir du comité catholique. En conséquence, ce n'est pas du tout pour l'effacer ou l'oublier que le comité catholique a laissé tomber cette partie de son projet, mais parce que c'est déjà là de toute façon.

La période de trois ans. Je crois comprendre qu'en évitant de mettre une période de trois ans, en mettant plutôt une opération de vérification tous les cinq ans, on voulait éviter au maximum la bureaucratie. Si on met cela tous les trois ans et renouvelable de manière obligatoire, cela veut dire un échange de paperasse énorme qu'il va falloir faire circuler de l'école à la commission scolaire et de celle-ci à Québec. Je pose la question et vous me direz pourquoi vous préférez cette formule-ci: N'est-il pas préférable d'avoir un régime souple qui laisse ouverte la possibilité d'une révision du statut en tout temps, d'une révocation en tout temps, plutôt qu'une opération obligatoire comme celle-ci, qui va encore multiplier les échanges de paperasse que, nous, comme gouvernement, nous nous sommes engagés à alléger?

Mme Mus-Plourde: M. le Président, j'aimerais répondre aux deux points. Premièrement, quant au fait qu'il n'est pas nécessaire de préciser que le comité a un pouvoir de révocation parce que c'est déjà inscrit dans la loi, bon, très bien, sauf que je remarque que, dans le projet de règlement, par exemple, il est dit à l'article 6 que le directeur de l'école publique reconnue comme catholique a la responsabilité d'assurer la réalisation du projet éducatif de l'école. Cette responsabilité est pourtant écrite dans la loi 71, mais le comité catholique a jugé nécessaire de le reprendre dans son projet de règlement. Je pense qu'il serait également bon, s'il juge nécessaire sur un point de reprendre la loi, qu'il reprenne également une autre loi pour le préciser. (17 h 30)

Quant au deuxième point, nous avons choisi trois ans. En effet, c'est vrai que cela a peut-être l'air d'apporter beaucoup de paperasse, surtout que vous aviez suggéré à l'article 7 la possibilité de cinq ans. Cependant, nous croyons que l'évaluation d'un projet éducatif ne doit pas se faire seulement tous les cinq ans. Cela doit se faire de façon continue et, s'il y a des redressements à faire, il faut pouvoir y procéder au plus tôt. Or, comme tous les trois ans il y a déjà

une bonne partie de la population de l'école qui a changé, il se pourra fort bien qu'au bout de trois ans le projet éducatif tel que planifié, tel que vu, ne corresponde plus à une population qui a changé d'au moins 50 %. Peut-être que mes collègues ont quelque chose à ajouter?

M. George (Kenneth): La norme de trois ans correspond au changement de clientèle scolaire dans une école particulière.,

M. Ryan: Sûrement, mais je vous pose la question. Dans le projet comme il nous est soumis, il n'y a rien qui interdit une remise en question du statut à n'importe quel moment. Si la clientèle d'une école a changé ou si l'orientation idéologique des parents a changé au point de requérir une modification du statut, en tout temps le comité d'école peut convoquer une assemblée des parents et ceux-ci peuvent présenter une demande à la commission scolaire. Cela va faire un événement. On va être obligé d'en tenir compte, et je crois bien que le comité catholique devant une manifestation de volonté majoritaire sera obligé de s'incliner, à toutes fins utiles. Je comprends votre intention, mais je m'interroge sur le moyen.

M. George: Effectivement, l'objectif reste le même, c'est-à-dire de ne pas reconnaître ad vitam aeternam le statut demandé à un certain moment et de prévoir l'occasion où les gens pourront s'interroger à nouveau sur le projet qu'ils avaient mis de l'avant, quelques années auparavant.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci.

M. Ryan: Un autre point m'intéresse. Vous demandez que soit soustrait à l'autorité du comité catholique le pouvoir sur l'enseignement moral dans les écoles catholiques et vous demandez en retour, que la responsabilité du comité catholique . s'étende au programme religieux ou à l'enseignement religieux dans les écoles autres que catholiques. Pourriez-vous nous expliquer ces deux propositions?

Mme Mus-Plourde: II nous semble que la compétence du comité catholique, elle, porte sur la confessionnalité qui lui est propre, c'est-à-dire la religion catholique. Donc, se prononcer sur le cours de morale qui n'a pas de référence confessionnelle, préciser qu'il faut au moins quinze élèves, par exemple, lorqu'il y a moins de quinze élèves, ce type de précision, eh bien, on trouve que cela ne relève pas de son autorité. Qu'il vérifie par contre dans une école qui n'est pas reconnue comme catholique, mais où il y a des catholiques! Son objectif, quand même, c'est de vérifier qu'un enfant qui est de religion catholique dans une école non catholique se voit assurer un bon cours dans sa confessionnalité.

Nous trouvons que la responsabilité du comité catholique ne doit pas porter uniquement sur les écoles reconnues, mais que le comité doit se préoccuper de la qualité de la formation de tous les gens qui sont de sa confessionnalité.

M. Ryan: Juste une question là-dessus, si vous me permettez» L'étendue de l'autorité du comité catholique dépasse la seule dimension catholique qu'on a interprétée dans un sens un petit peu technique. Cela embrasse les écoles catholiques et la jurisprudence en matière de confessionnalité, la jurisprudence la plus récente, indique que la responsabilité des écoles confessionnelles va plus loin que la seule dimension religieuse. C'est un débat qui est complexe et que je ne veux pas ouvrir aujourd'hui. Je vous dis seulement une chose: Moi, je comprendrais et je suis sympathique à votre point de vue, mais j'ai une interrogation dans l'autre sens en même temps. Je ne vois pas pourquoi le comité catholique ne serait pas capable d'approuver un bon programme de morale naturelle pour les écoles catholiques. Il me semble qu'il n'y a pas d'incapacité à faire cela, parce qu'il est catholique. Autrement, cela voudrait dire que la morale naturelle serait le monopole de gens qui ne sont pas catholiques.

Mme Cloutier: M. le Président je ne voudrais pas m'étendre là-dessus, mais, concernant la morale, je pense qu'il y a une certaine morale que les catholiques et tous les autres croyants embrassent à la fois. Si on ne cite que le cas de la sexualité, je pense que la morale peut varier et de beaucoup dans les notions. Je serais très inquiète, si à ce point de vue le comité catholique avait préséance sur les contenus des programmes.

M. George: Est-ce que je puis ajouter une phrase, M. le Président? S'il n'y a pas incapacité, il n'y a pas nécessairement justification non plus.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Mme la présidente, madame, monsieur, au nom de l'Opposition, permettez-moi de vous souhaiter la bienvenue à cette commission et de vous remercier d'avoir posé votre candidature, si je puis m'exprimer ainsi, pour participer aux travaux de cette commission. Comme nous aurons à recevoir la CECM qui, de son propre aveu, n'est pas plus concernée par ce débat que vous ne l'êtes, finalement, je pensais que vous aviez bien place ici.

J'avais un certain nombre de questions.

II y a, pour moi, une question qui n'est pas très claire et peut-être en avez-vous la réponse. À la CECM, où ce projet ne s'applique pas nécessairement, est-ce qu'on peut révoquer le statut d'une école catholique? On vient de savoir que, protestantes, elles étaient toutes protestantes et que, catholiques, elles étaient toutes catholiques. Quand on parle de révoquer le statut, je ne pense pas que cela ait rapport avec la CECM.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Mme la présidente.

Mme Cloutier: On ne le peut pas effectivement. On a juste à se rappeler le cas de l'école Notre-Dame-des-Neiges qui a tenté de le faire.

Mme Blackburn: Donc, un tel projet ne trouve sa pertinence que dans la mesure où on a effectivement la possibilité d'avoir et de reconnaître des écoles catholiques ou protestantes, catholiques dans le cas qui nous concerne.

Mme Cloutier: Oui.

Mme Blackburn: Dans votre mémoire, vous avez des objections à ce que les écoles puissent se doter dans le contexte actuel d'un projet éducatif catholique. Si je me le rappelle bien* - j'essaie de retrouver la phrase, il me semble l'avoir entendue tout à l'heure - vous dites qu'il serait important que l'école catholique ait la responsabilité de se doter, de voir au contenu du cours d'enseignement religieux et moral catholique, mais ne devrait pas en imprégner l'ensemble du projet. Pourquoi pensez-vous que le projet éducatif de l'école ne devrait pas s'inspirer de la morale catholique?

Mme Cloutier: Compte tenu du contexte qu'on connaît à l'heure actuelle à Montréal. D'abord, les parents dans les écoles de la CECM n'ont pas le choix de la confessionnalité de leur école. Secundo, avec la multiplicité des ethnies qui fréquentent nos écoles et la diversité des croyances religieuses, nous croyons que le comité catholique devrait limiter ses pouvoirs à l'enseignement religieux, et je m'explique. Je peux en parler en connaissance de cause, mes trois enfants sont en enseignement moral à l'heure actuelle. Je ne trouverais pas du tout intéressant que mes enfants subissent des enseignements à valeur ou connotation religieuse dans les autres cours qui leur sont proposés, par exemple, en français, en mathématiques, en géographie ou même au cours d'éducation sexuelle. Évidemment, je l'ai mentionné tantôt, mais le cours d'éducation sexuelle est peut-être le meilleur exemple, parce que le plus facile à identifier. Quel serait un cours d'éducation sexuelle régi par le comité catholique? Est-ce qu'on pourrait parler de contraception, d'avortement, etc., dans un cours régi par le comité catholique? Je n'en ai aucune idée, mais il est certain que, pour une bonne proportion de la population montréalaise', les valeurs ne sont pas les mêmes et il est très important que les autres matières demeurent scientifiques et qu'on se limite à l'enseignement religieux dans le cadre d'un cours d'enseignement religieux.

M. George: Est-ce que je pourrais compléter, M. le Président? Nous avons identifié, dans le mémoire, le cas d'une école pour laquelle on a décrit ce qu'a pu signifier un projet d'éducation catholique, c'est-à-dire qu'une certaine partie des étudiants - c'étaient des étudiants du secondaire - avaient été littéralement marginalisés, structurellement mis de câté et marginalisés.

Je pourrais vous raconter beaucoup d'autres faits de ce type et je précise que mes enfants sont en catéchèse. Ma fille, ma plus vieille, va faire sa première communion à la fin de cette année. Je pourrais vous raconter ce que j'ai vu et ce que mes voisins et voisines, citoyens qui sont dans le mouvement chez nous, ont pu vivre. Par exemple, se faire dire au téléphone: N'envoyez pas votre enfant en sciences morales, on n'a pas de place pour lui, ou, encore, il devra sauter un cours de...

Une voix: Mathématiques.

M. George: Un cours de mathématiques pour qu'on l'occupe.

La faisabilité dans le milieu de Montréal du type de chose qui est proposé, le projet éducatif tel que défini soulève des questions. Si c'était un cas exceptionnel, je pourrais dire que cela ne pose pas de problème. Si c'était un deuxième cas exceptionnel, ce serait une exception. Quand on est rendus au cinquantième cas exceptionnel, peut-être qu'il ne s'agit plus d'exceptions, mais bien d'une possibilité réelle de vivre de cette façon.

C'est la raison pour laquelle, dans le mémoire que nous soumettons, on ne se gêne pas de présenter l'Église catholique comme pouvant faire des pas de plus que ceux qu'elle a faits. C'est l'Église catholique qui, maintenant, s'occupe seule, à l'intérieur de ses structures, en signifiant aux parents catholiques les démarches qu'ils doivent faire, de la dimension sacramentelle. Elle pourrait faire un pas de plus, elle pourrait faire beaucoup de pas de plus. C'est dans ce sens que nous signifions qu'elle manifesterait ainsi une ouverture à la réalité quotidienne des Montréalais qui n'est pas celle qu'on a connue il y a une dizaine d'années. Je donne

simplement comme exemple la très grande difficulté de créer consensus parmi les catholiques sur ce que peut signifier, dans la vie quotidienne, être catholique.

Je vous avouerai que j'ai sursauté tantôt quand on a qualifié d'irrégulier le statut d'hommes et de femmes séparés. La vision de ce que signifie dans le quotidien l'adhésion aux valeurs chrétiennes, ce n'est pas aussi simple que le laisse entendre le projet de règlement qui est là, et surtout pas dans une agglomération comme celle de Montréal. Cela explique pourquoi nous avons beaucoup de réticences à la faisabilité, à la pertinence et à la valeur d'un projet éducatif catholique. .

La députée de Jacques-Cartier, tantôt, a dit: what in the project be deluted by a pluralistic presence. It won't be deluted, its relevance can be questioned.

Mme Blackburn: Ce que vous nous dites, finalement, c'est qu'on ne peut pas concevoir la chose suivante, c'est-à-dire une école qui inspire tout son projet éducatif de la morale catholique et, en même temps, qu'elle soit respectueuse des libertés individuelles.

M. George: L'école au coin de chez nous est une école régulière, mais avec classes d'accueil, avec des Asiatiques, des Arabes, des musulmans. Ce n'est pas une situation exceptionnelle, ils sont plus nombreux que dans les autres écoles, mais ils sont aussi dans les autres écoles et ce n'est pas possible - les politicologues appelleraient peut-être cela de l'impérialisme - d'avoir un projet prônant uniquement la vision catholique des choses pour une telle communauté. Ce n'est pas possible d'être à la fois plus catholique que le pape et respectueux de l'ensemble des croyances.

Mme Blackburn: Tout à l'heure, vous avez souligné le commentaire d'un intervenant précédent, lorsqu'il a dit que le statut des personnes séparées, divorcées ou remariées était irrégulier. Est-ce que vous avez une idée du pourcentage d'enfants reçus dans les écoles qui sont issus de familles monoparentales ou dont les parents sont séparés, divorcés ou remariés? Est-ce qu'on a des données là-dessus?

Mme Cloutier: On n'a pas les données sur le plan de la fréquentation scolaire, mais on sait qu'à Montréal les familles monoparentales représentent un fort pourcentage de la population, donc, évidemment, ces enfants se retrouvent aussi en fort pourcentage à l'école. Il y a aussi, évidemment - on parle de familles monoparentales - celles qui ne sont plus monoparentales parce que le parent est remarié ou a trouvé un autre conjoint, mais il reste que, dans la tête d'un enfant, si vraiment la vision catholique de ce qu'il vit à la maison est irrégulier, c'est un peu difficile à vivre. (17 h 45)

Mme Blackburn: D'accord. Vous dites, à la page 6, en parlant des articles 10, 11 et 12î "Les pouvoirs du comité catholique devraient être restreints aux programmes d'enseignement religieux catholique» II conviendrait donc de lui retirer toute responsabilité de réglementation concernant les cours de formation morale. Cela assurerait l'entière autonomie de la formation morale et un partage net des responsabilités institutionnelles serait ainsi établi." Je n'avais pas compris - il faudrait qu'on éclaire ma lanterne là-dessus - que le comité catholique avait droit de regard sur les programmes de formation morale. Alors, l'enseignement catholique et moral, du moment que c'est dans une école catholique.

Mme Mus-Plourde: Dans le règlement, il n'est pas dit que le comité catholique a pouvoir sur le contenu du cours de formation morale, mais il est dit... Ce sont des articles qui portent uniquement sur des détails, le nombre d'élèves, le nombre de minutes de cours. C'est justement sur l'accessoire même que le comité catholique continue de se prononcer. Alors, l'enlever complètement...

Mme Blackburn: D'accord. Alors, ce que je sais, c'est que le comité catholique a droit de regard sur tout le matériel didactique, les manuels des autres cours dont celui de la formation morale - c'est ce que je comprends - dans une école catholique.

Mme Mus-Plourde: Le problème, c'est que, pour le côté technique, on fait référence aux articles 10, 11 et 12; il est sûr que ce sont uniquement des modalités de temps et de nombre. Par contre, lorsqu'il est dit, à l'intérieur des articles 4 et 5, que le comité reconnu comme catholique suit les programmes d'activité de formation et d'éveil ainsi que les programmes d'enseignement approuvés par le comité catholique, il n'est pas dit "...ainsi que les programmes d'enseignement religieux catholique approuvés", il est dit "d'enseignement"; c'est large. Rien ne nous empêche donc de croire, surtout quand on dit que le projet éducatif doit englober l'ensemble des activités de l'école, qu'il se pourrait que le comité catholique influence ce qui se passe dans les autres cours afin de vérifier que ses propres valeurs correspondent aux valeurs transmises dans le cours. Je veux bien croire que les valeurs de la religion catholique sont très souvent des valeurs universelles. La charité, il est sûr que ce ne sont pas seulement les catholiques qui peuvent se dire charitables. Mais on vient de vous donner des exemples,

comme en éducation sexuelle, où les valeurs de la religion catholique par rapport à la sexualité, par rapport au mariage, peuvent être très différentes des valeurs que les Québécois privilégient. Les valeurs chez les Québécois deviennent de plus en plus pluralistes, il y en a de plus en plus... Il s'agit beaucoup plus de voir à ce que le cours de formation morale corresponde aux valeurs que le Québec veut donner à ses enfants.

Mme Blackburn: C'est bien ce que je comprenais, c'est que les comités sont chargés, je le rappelle, d'approuver les programmes aux points de vue religieux et moral, les manuels et le matériel didactique pour l'enseignement dans leurs institutions d'enseignement. Donc, dans une école reconnue catholique, le comité catholique peut et doit approuver, aux points de vue religieux et moral, le contenu de toutes les formations qui sont données dans l'école, donc la formation morale également. Vous dites qu'il faudrait au • moins, en toute intelligence, si on veut respecter le choix des parents et des élèves, qu'au moins le cours de morale soit soustrait au regard d'évaluations du contenu du cours de morale. On ne peut pas préconiser une certaine neutralité dans la formation morale si le contenu en est édicté par un comité catholique.

Mme Cloutier: C'est effectivement ce qu'on dit, mais ce qui est très important, c'est de se rendre compte qu'à Montréal les parents n'ont pas le choix. Les parents doivent inscrire leurs enfants dans une école catholique. Ce sont les seules qui existent. Il y a évidemment le secteur protestant. À part catholique et protestant, il y a beaucoup d'autres choses, mais il n'y a pas de choix, c'est le seul secteur public qui existe.

Mme Blackburn: Oui.

Mme Mus-Plourde: Je voudrais ajouter que le règlement sur les écoles publiques ne doit pas être envisagé, il me semble, comme le règlement sur les écoles privées. Supposons que, dans une école privée, il y ait un projet éducatif confessionnel et qu'un parent, bien que n'étant pas catholique et ne partageant pas nécessairement toutes les valeurs de la religion catholique, décide d'envoyer son enfant dans cette école par choix personnel pour x raison et, à ce moment-là, il décide de donner priorité à l'enseignement qui se donne dans cette école, il donne priorité à ce choix d'école, plutôt qu'à sa conception de la vie. Dans les écoles publiques, ce n'est pas la même chose. Je pense que, dans les écoles publiques, si on demande d'avoir un projet éducatif aussi englobant qu'on peut l'avoir dans une école privée, plus il sera englobant, plus il risque de créer des problèmes de marginalisation des autres enfants. Est-ce qu'on va dire à ces enfants: Vous n'êtes pas heureux dans cette école, changez, il y a d'autres écoles publiques? Toutes les enquêtes ont démontré que ce que les parents veulent, c'est avant tout une école de quartier. C'est dans l'école de quartier qu'ils veulent recevoir tous les services. Si on disait aux enfants d'aller dans une autre école, il reste que l'école est publique, cela devrait donc dire que le gouvernement serait obligé de transporter ces enfants par autobus d'écoliers, s'ils sont au primaire, parce qu'on l'éloigne. Est-ce qu-on a pensé aux coûts que cela engendrerait, uniquement pour soutenir des projets éducatifs confessionnels plus ou moins englobants, alors que l'on coupe, au contraire, dans d'autres types de services? Je pense qu'il faut véritablement séparer le type de projet éducatif qu'on peut avoir dans une école publique et celui qu'on peut avoir dans une école privée.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Je vous remercie, madame. Je dois maintenant reconnaître quelqu'un de la formation ministérielle. M. le ministre.

M. Ryan: Je pense qu'il est aussi important de ne pas s'enliser dans la confusion. On parle des programmes depuis tantôt et je pense qu'on est complètement à côté de la réalité. Les programmes d'enseignement moral, ce ne sont pas des programmes fabriqués par le comité catholique, ni par le comité protestant. Tous les programmes sont fabriqués par le ministère de l'Éducation, à l'aide de collaboration, d'expertise recrutées dans les différents milieux. D'après la Loi sur le Conseil supérieur de l'éducation, tous les projets de programmes sont soumis, aux points de vue religieux et moral, à l'approbation des deux comités confessionnels. Par conséquent, le programme d'enseignement moral, que vous soyez dans une école protestante, une école catholique ou une école laïque, c'est le même. C'est comme cela, il me semble, que cela doit être. Par conséquent, sur cette partie, il y a maldonne quelque part. Je ne vois pas ce qu'on pourrait réformer dans la manière de faire cela. Peut-être que le programme n'est pas bon. On change de gouvernement, on change les fonctionnaires, on change les consultés, on en fait un autre. Mais on ne peut pas trouver un système meilleur que celui qu'on a pour la fabrication des programmes. Si vous pensez qu'ils sont fabriqués par le comité catholique, il faut vous dire que ce n'est pas cela.

J'ai remarqué qu'il y a une autre confusion dans votre intervention. Vous vous

inquiétez au point de l'enseignement professionnel. Cela part d'un bon naturel. Voici pourquoi on a fait ces changements. On a augmenté les exigences de formation de base. Autrefois, c'était l'équivalent de trois ou deux ans, on a mis cela à trois ans et quatre ans. Pour ceux qui avaient seulement trois ans de formation de base et qui s'en vont au certificat d'études professionnelles, on a dit; On va laisser une année de formation religieuse obligatoire pour qu'ils aient au moins l'équivalent de quatre ans»

Dans le cas de ceux qui vont au diplôme, ils vont faire une sixième année, dans la très grande majorité des cas, cinquième et sixième. On a dit: On n'est pas pour imposer la formation religieuse obligatoire en sixième année, on ne l'a pas dans les cégeps. On va mettre tout le monde sur un pied d'égalité. Je pense que les dispositions qu'on a prises de ce côté voulaient tenir compte de l'exigence de formation concentrée qui existe à ce niveau. Cela n'empêche pas, pour ceux qui sont intéressés, qu'il y ait des cours optionnels disponibles à leur intention. J'espère aussi qu'il y en a beaucoup qui vont les prendre. On trouvait que, avec la concentration de formation professionnelle qui va leur être imposée par les nouveaux programmes de formation professionnelle, on ne pouvait pas ajouter ce surcroît, pas plus qu'on ne pouvait leur mettre d'autres cours de formation générale. Nonobstant ces choses, je pense que nous avons eu un échange de vues extrêmement intéressant. Je ne veux pas prolonger la discussion davantage. On aura l'occasion d'en reparler. Mais, sur les programmes en particulier, c'est important qu'on se comprenne clairement.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Brièvement, je voudrais de nouveau vous remercier de votre participation et peut-être rappeler, pour les fins de la discussion, qu'à plusieurs occasions au cours de la présente journée il a été question des modifications qui devraient être éventuellement apportées à la structure scolaire pour en faire des structures linguistiques plutôt que confessionnelles.

Le ministre nous dit qu'il continue à persévérer dans la recherche de solutions touchant les structures confessionnelles ou linguistiques. Cependant, l'engagement du Parti libéral était clair. Il s'engageait, et c'était le voeu du ministre, en tout cas, du porte-parole de l'Opposition d'alors, à trouver des solutions juridiques au problème des structures confessionnelles, particulièrement par rapport au problème posé sur l'île de Montréal. Un peu plus tard, on apprenait que cela ne ferait pas partie des négociations constitutionnelles. Il n'y avait pas d'urgence et, au sujet du glissement qu'il y a dans l'île de Montréal, le ministre n'estimait pas qu'il y avait là urgence suffisante pour que cela puisse faire partie des premières discussions touchant les accords constitutionnels.

Au moment où on était en commission parlementaire sur l'accord du lac Meech, plusieurs ministres sont venus au moment où venaient, par exemple, les gens de l'UPA et d'autres organismes, le ministre responsable assistait à la présentation des mémoires et prenait l'engagement, à la suite du ministre des Relations internationales, M. Rémillard, que ces questions seraient l'objet d'une seconde ronde de négociation au moment où on a parlé de négocier une entente devant revoir les structures confessionnelles des commissions scolaires. Le ministre de l'Éducation n'était pas, à ce moment, à la commission parlementaire.

M. Ryan: Vous m'avez exclu. Vous avez voté contre le fait que je sois là.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Je vous rappelle à l'ordre, M. le ministre. Mme la députée, vous avez la parole.

Mme Blackburn: Ce qui fait, M. le Président, qu'à ce moment on a connu l'opinion des autres ministres, mais qu'on ignore encore l'opinion du ministre de l'Éducation concernant cette prochaine ronde de négociation.

Seconde chose, le ministre nous a dit: Cette question des structures scolaires ne fera pas partie de la première ronde de négociation. Cependant, je m'engage, dès que possible, à revoir les structures des commissions scolaires qui ne sont pas à la CECQ et à la CECM. Les dernières interventions du ministre ne me laissent pas voir que, là non plus, par rapport aux autres commissions scolaires, il soit prêt à procéder.

Je pense que cette question des structures confessionnelles plutôt que linguistiques, si elle ne pose pas de problème majeur dans les régions en dehors de Québec et de Montréal, elle pose quand même certains problèmes réels. Si le règlement du comité catholique devait s'appliquer tel qu'il est prévu, il va avoir comme effet de marginaliser les enfants pour lesquels les parents ne feront pas le choix de l'enseignement catholique dans les régions en dehors de Montréal et de Québec parce qu'ils seront une minorité à choisir la morale plutôt que l'enseignement catholique, donc pas en nombre suffisant pour justifier la création d'une école.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Veuillez conclure, Madame!

Mme Blackburn: Plus ce projet se resserre, plus cela pose des problèmes en ce qui a trait à la liberté individuelle et au respect de cette liberté. Je termine là-dessus, M. le Président, vous remerciant de votre tolérance et de votre patience.

Le Président (M. Parent, Sauvé): ô madame, vous me connaissezl

Mme Blackburn: Et je vous remercie également, mesdames et messieurs, de votre participation.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Alors, Mme la présidente, Mme Mus-Plourde, M. George, merci beaucoup. Je vous souhaite bonne chance. Un prochain politicien? Alors, la commission suspend ses travaux jusqu'à 20 heures.

(Suspension de la séance à 18 h 1)

(Reprise à 20 h 6)

Le Président (M. Parent, Sauvé): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission parlementaire de l'éducation reprend ses travaux et accueille le Mouvement laïque québécois représenté par Mme Micheline Trudel qui en est la présidente, M. Luc Alary, son conseiller juridique, M. Paul Drouin, conseiller, Mme Diane Baril, conseillère, et Mme Réjeanne Cyr-Reed, responsable du Mouvement laïque québécois pour la région de Québec.

Mesdames et messieurs, bienvenue à cette commission parlementaire et merci beaucoup d'avoir accepté l'invitation qui vous a été faite de venir rencontrer les membres de cette commission pour nous faire connaître votre point de vue sur les projets de règlement présentés par les comités catholique et protestant du Conseil supérieur de l'éducation.

Mmes et MM. les membres de la commission, je vous informe que le mémoire qui vous a été présenté dans vos documents est remplacé par un nouveau document qui vient de nous être remis par le porte-parole du Mouvement laïque québécois. Le document qui vous sera présenté a pour titre "Les règlements des comités catholique et protestant et nos droits fondamentaux." Si je me trompe, vous me le direz, monsieur, mais je crois que le premier document avait pour titre "Les règlements du comité catholique". C'est cela? Alors, on y a ajouté le mot "protestant".

Qui est le porte-parole de votre mouvement?

Mme Trudel (Micheline): Micheline Trudel, présidente.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Madame, nous vous écoutons.

Mouvement laïque québécois

Mme Trudel; M. le Président, M. le ministre de l'Éducation, mesdames et messieurs les députés. Je veux d'abord vous présenter, pour que vous puissiez mettre un nom sur les figures, à ma droite, faisant partie du conseil national, M. Luc Alary; à ma gauche, Mme Diane Baril; plus à gauche, Mme Réjeanne Cyr-Reed, qui est responsable de la région de Québec.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Mme Reed, soyez la bienvenue.

Mme Trudel: Comme le temps nous est compté, je vais entamer tout de suite une lecture du mémoire que nous vous avons présenté. Si le document a été remplacé, c'est que nos membres et le conseil national se sont rendu compte, après les délais d'expédition du mémoire, que le règlement du comité protestant méritait aussi d'être étudié. C'est ce qui a été ajouté.

Le Président (M. Parent, Sauvé): D'accord. Je vous rappelle brièvement, avant que vous commenciez, qu'on a une heure à passer avec vous. Vous prenez à peu près le temps que vous voulez pour présenter votre mémoire. On vous suggère de prendre environ quinze minutes et le reste du temps sera utilisé pour un échange de vues entre les membres de la commission. Nous vous écoutons, madame.

Mme Trudel: Merci, M. le Président.

Nous sommes heureux de cette invitation qui nous permet de nous interroger sur les enjeux confessionnels du système scolaire public québécois.

Comme vous le savez, nous sommes d'avis, au Mouvement laïque québécois, que l'enseignement religieux devrait être dispensé sans coercition et que les intéressés devraient y souscrire de façon libre et volontaire. Il nous a toujours paru évident que les Églises concernées devraient être les premières responsables de cet enseignement afin d'en assurer la qualité et l'authenticité.

Le fait qu'au Québec cet enseignement ait été traditionnellement dispensé à l'école publique ne devrait pas être considéré comme une réalité immuable. Le problème de la cohérence que pose cet enseignement avec le rôle de l'école et surtout les problèmes de discrimination que sa présence entraîne à l'égard des droits fondamentaux doivent nous inciter à remettre cette tradition en question.

À notre avis, l'enseignement religieux devrait être retiré du curriculum de l'école publique, à l'exemple de plusieurs autres

démocraties de même nature que la nôtre. Il ne s'agit pas de nier le droit à la liberté de religion, mais de refuser des accommodements aux conséquences discriminatoires. Dans cette position, les comités confessionnels n'ont plus leur raison d'être.

Notre intention en nous présentant devant cette commission n'est donc pas de bonifier les règlements des comités confessionnels, mais bien d'indiquer en quoi leur adoption pourrait entraîner l'aggravation d'une situation déjà déplorable. Nous aborderons, dans un premier temps, le projet de règlement du comité catholique pour nous pencher ensuite sur le projet de règlement du comité protestant.

L'intégrisme du comité catholique. Dans son avis précédent, en 1985, le comité catholique - cet avis était intitulé "Éduquer la foi à l'école" - constatait que le Québec était pluraliste au niveau des croyances, des valeurs et des ethnies. Le comité catholique reconnaissait également que plusieurs enseignants appelés à dispenser cet enseignement religieux n'avaient bien souvent pas la fût eux-mêmes ou s'avouaient incapables d'en témoigner. Qualifiant la situation de "climat de fausseté et d'hypocrisie", le comité catholique s'engageait à "faire la lumière".

Le projet de règlement que le comité catholique présente aujourd'hui s'inscrit toutefois dans une vision résolument intégriste de l'école et oublie donc le premier constat du pluralisme social. On lit, en effet, à l'article 4 de ce projet de règlement que l'école publique reconnue comme catholique intègre les croyances et les valeurs de la religion catholique dans son projet éducatif. Un tel projet éducatif, M. le ministre, a déjà été reconnu discriminatoire par la Commission des droits de la personne. On ne voit pas comment, en effet, un projet éducatif qui intègre des croyances religieuses particulières dans les activités et les divers enseignements de l'école pourrait en même temps être respectueux de la liberté de conscience ou de croyance autre des élèves.

Le comité catholique a établi un régime d'option entre l'enseignement moral et religieux catholique et la formation morale, apparemment pour respecter davantage les convictions de chacun. Pourtant, un projet éducatif confessionnel englobant comme celui proposé contredit cette mesure par les dangers de récupération qu'il représente.

Le projet de règlement ne prévoit par ailleurs aucune possibilité de révocation de la reconnaissance catholique. Cette reconnaissance a un caractère permanent, même si la moitié de la clientèle scolaire se renouvelle à tous les trois ans. Soit dit en passant, il est un peu surprenant de voir cette position du ministère de l'Éducation alors qu'on voit ailleurs au gouvernement du Québec des programmes d'accès à l'égalité au niveau de l'emploi, quand au niveau des subventions qui sont attribuées par le gouvernement à des entreprises on demande à celles-ci de prévoir un programme d'accès à l'égalité pour les femmes, pour les ethnies et, dans le secteur de l'éducation, on se retrouve avec quelque chose qui est assez loin de cette vision.

Le caractère "presciptif" de cet article 4 obligera donc toutes ces écoles à se doter d'un projet éducatif catholique. Si le règlement est appliqué à la lettre nous nous retrouverons avec un réseau d'écoles uniformément catholiques dans tout le Québec, ou protestant, sans qu'il ne soit jamais possible d'en modifier le projet ou l'orientation. L'impossibilité de révoquer le statut confessionnel se double d'une obligation à l'article 27 de le respecter. Ainsi, le personnel, les parents et les élèves d'une école catholique "doivent, être respectueux du caractère catholique de l'école." Cet article ouvre la porte à toutes sortes de mesures arbitraires.

Être respectueux, qu'est-ce que ça signifie? "Ne porter aucune atteinte" selon le Larousse. Dans ce cas, l'article 27 pourrait très bien être interprété comme une interdiction de remettre en question, de contester ou de demander la révocation du statut confessionnel de l'école. Si c'est d"'égard" à l'endroit des croyances catholiques dont il est question, cet article pourrait contrevenir à la liberté d'expression. Rappelons que le gouvernement québécois amendait en décembre dernier la Loi sur la liberté des cultes pour ta rendre conforme à la charte. L'article interdisant les injures à l'endroit des croyances religieuses a dû être abrogé au nom de la liberté d'expression et de l'égalité des convictions, sans compter que tout le monde dispose dans tous les domaines d'un certain recours, par exemple, en libelle diffamatoire. (20 h 15)

Et quelles seraient les sanctions dans le cas de non-respect? Le comité catholique aurait-il l'autorité juridique pour imposer un comportement aux élèves et aux parents des écoles publiques?

Simulacre de démocratie. Le règlement proposé prévoit à l'article 2 par ailleurs que, pour obtenir une reconnaissance catholique, la commission scolaire devra avoir consulté les parents de l'école concernée. Le règlement ne prévoit rien sur les modalités de cette consultation, mais la conduite que te comité catholique a toujours observée par le passé a été de reconnaître le voeu de la majorité. Ce n'est là qu'un simulacre de démocratie. Un vote, même majoritaire, sur un projet éducatif discriminatoire dans son essence n'enlève rien au caractère discriminatoire de ce projet. En aucun cas, l'exercice des droits fondamentaux ne doit être soumis au bon vouloir d'une majorité.

Considérant que la loi 131 a pour effet de priver du recours à la charte ceux qui verraient leur droit à la liberté de conscience ou leur droit à l'égalité brimé par les aménagements confessionnels ou privilèges accordés à une religion particulière, il n'y aura dorénavant aucune protection contre les abus possibles qui pourraient se glisser dans les projeta éducatifs confessionnels. Vous avez vous-même déclaré, M. le ministre, que la loi 131 se justifiait afin que les garanties séculaires accordées aux catholiques et aux protestants ne puissent être . contestées devant les tribunaux par différents groupes, associations ou confessionnaiités au nom de la liberté de conscience ou du droit à l'égalité. C'est explicitement reconnaître que ces garanties séculaires vont à l'encontre du droit à l'égalité et à la liberté de conscience. C'est également reconnaître que le gouvernement refuse que toutes les communautés autres que catholiques et protestantes soient traitées sur un pied d'égalité à l'école publique.

Tout nous porte à croire que la loi 131 traçait la voie aux projets du comité catholique et du comité protestant. Ces deux éléments mis ensemble nous font craindre le pire pour le respect des convictions de ces groupes qui ne bénéficieront jamais de ces garanties séculaires.

Les critères d'embauche, un autre point très important. Aux articles 16 et 17 du projet de règlement du comité catholique, on indique que, pour dispenser l'enseignement religieux catholique, l'enseignant doit être de foi et de formation catholiques. Ce postulat, tout à fait défendable dans un autre contexte, conduit à modeler toute l'organisation scolaire en fonction des besoins de l'enseignement religieux. S'il faut être catholique pour enseigner la religion catholique, il serait logique d'en confier la tâche à un organisme catholique. Au lieu de cela, le comité catholique choisit le chemin le plus facile, mais aussi le plus lourd de conséquences.

Son exigence vise tous les titulaires du primaire puisque, dans l'organisation scolaire actuelle, l'enseignement religieux fait partie de leur tâche globale et normale. Au secondaire, le professeur de français, de mathématique ou de toute autre matière peut aussi être appelé à compléter sa tâche par de l'enseignement religieux. Les articles 16 et 17 feront-ils de la foi catholique un critère d'embauche dans les commissions scolaires où se donne de l'enseignement religieux catholique? Le candidat non catholique ou refusant de dispenser ce cours pour motif de liberté de conscience sera-t-il considéré comme moins qualifié ou moins polyvalent que le candidat catholique?

À la CECM, par exemple, le critère de foi catholique est déjà et encore exigé pour tous les postes. Cette mesure risque de devenir la règle générale dans la plupart des commissions scolaires. Qui pourra définir ce que signifie être de foi catholique? Pour les uns, cela signifie être baptisé; pour les autres, ce mot désigne l'adhésion à l'humanisme chrétien, alors que certains y incluent la pratique du culte et des rites. Ce critère abstrait ouvre ainsi la porte à des mesures inquisitoriales. De plus, il faut remarquer que le projet proposé ne reconnaît que par défaut le droit à l'exemption pour les enseignants.

L'intégrité de la formation morale. Les mesures concernant le projet éducatif et la qualification des enseignants pourraient donc avoir des répercussions sur l'ensemble des activités éducatives de l'école. Le seul lieu où les dissidents pouvaient encore se réfugier, c'est-à-dire le cours de formation morale, est lui-même menacé.

Il est d'usage courant, tant au primaire qu'au secondaire, de confier la tâche de l'enseignement moral et de l'enseignement religieux au même spécialiste. La convention collective des enseignants place ces deux cours, ainsi que la formation personnelle et sociale, dans le même champ d'enseignement. C'est ainsi qu'un professeur qualifié et expérimenté en enseignement religieux est automatiquement reconnu qualifié et expérimenté en enseignement moral non confessionnel.

De nombreux élèves qui auront choisi la formation morale non confessionnelle se retrouveront avec des maîtres de foi et de formation catholiques pour dispenser ce cours. Pourtant, l'enseignement moral a ses exigences propres. Il demande une formation et des attitudes différentes de celles de la catéchèse.

Pour les mêmes raisons qui amènent le comité catholique à demander que les enseignants chargés de l'enseignement religieux catholique soient de foi catholique, nous serions en droit d'exiger que les personnes en charge de la formation morale laïque fassent preuve d'esprit laïque, c'est-à-dire un esprit qui respecte avant tout les droits fondamentaux de la personne et qui s'engage à respecter la liberté de conscience de tous les étudiants sans les endoctriner, sans les orienter dans des convictions ou des valeurs prédéterminées. Ce qui est vrai dans un cas devrait aussi être reconnu dans l'autre.

Nous sommes aussi en droit d'exiger que ce cours ne tombe en aucun temps sous la juridiction du comité catholique. Avec les articles 10, 11, 12 et 13, le comité réglemente certaines conditions selon lesquelles doit se donner ou non le cours de morale. Si ce cours a besoin d'encadrement, il ne nous apparaît pas convenable que le tuteur en soit le comité catholique.

Les mesures qu'il prévoit n'ont d'ailleurs comme seul but que d'assurer la

concordance avec l'enseignement religieux. Pour se gagner une crédibilité, le cours de formation morale a besoin de toute l'autonomie possible.

La pastorale. Le projet de règlement oblige les écoles publiques catholiques à se doter d'un service de pastorale et à prévoir, à cet effet, des budgets et des locaux, aux articles 25 et 26. Le caractère prescriptif de ces articles pourrait conduire à des aberrations alors que, dans certaines écoles, on manque déjà de place pour des services essentiels comme une garderie ou une bibliothèque. Les sommes que l'école devra y consentir limiteront nécessairement les fonds disponibles pour les autres activités de vie étudiante s'adressant à toute la clientèle scolaire sans distinction de religion, comme les sports et les loisirs.

Pendant que les commissions scolaires ferment des postes d'orthopédagogues et de conseillers pédagogiques, elles devront assurer l'embauche d'animateurs de pastorale. On y voit une espèce d'antithèse.

Le règlement du comité protestant: un net recul. Bon nombre de remarques et d'observations faites précédemment au sujet du projet de règlement du comité catholique s'appliquent aussi au projet de règlement du comité protestant. L'impossibilité de révoquer le statut ou la reconnaissance confessionnelle d'une école, les critères d'embauche et d'exemption pour les enseignants, la pastorale, appelée ici animation religieuse, créent ou créeront les mêmes problèmes dans le secteur protestant que dans le secteur catholique.

Actuellement, à Montréal, la clientèle des écoles protestantes est majoritairement non protestante. Plusieurs Québécois et Néo-Québécois y trouvent un refuge contre l'intégrisme de la Commission des écoles catholiques de Montréal. On ne trouve plus l'esprit d'ouverture qu'avait, dans le règlement encore en vigueur, le comité protestant. Il va, lui aussi, à contre-courant de l'évolution sociale. Le comité protestant traîne de l'arrière en demeurant attaché à l'insidieuse pratique de l'exemption de l'enseignement religieux, à l'article 5.

Avec le régime pédagogique qui accorde deux crédits à l'enseignement religieux au secondaire et avec la christianisation des écoles protestantes destinée è justifier la division confessionnelle, l'enseignement religieux fait maintenant partie du curriculum de la plupart des écoles protestantes. Ces écoles perdent ainsi graduellement le caractère laïc qu'elles avaient dans bien des cas. Dans ce contexte, il est inacceptable que le comité protestant ne se mette pas à l'heure du Québec et maintienne l'odieuse pratique de l'exemption.

Le comité protestant exige également une demande d'exemption distincte pour les activités à caractère religieux à l'article 8.

Si un parent n'est pas au courant de la tenue de telles activités et n'a pas présenté de demande écrite, son enfant sera donc tenu d'y assister, même s'il est exempté de l'enseignement religieux. Pourtant, en février dernier, le service juridique du ministère de l'Éducation émettait un avis juridique dans lequel il affirmait: L'animation pastorale étant, à toutes fins utiles, le prolongement de l'enseignement religieux, on ne peut concevoir comment on pourrait imposer ces activités à l'élève inscrit en enseignement moral. Ce que le comité protestant appelle animation religieuse et activités à caractère religieux rejoint ce que le comité catholique appelle animation pastorale. Si cet avis juridique est fondé, on ne saurait donc exiger une exemption supplémentaire.

L'esprit d'ouverture à l'égard du contenu de l'enseignement religieux est également disparu. L'article 8 du règlement encore en vigueur précise que la substance et l'administration de ce cours ne doivent pas avoir pour objectif: D'endoctriner par un enseignement basé sur l'appartenance à une secte religieuse particulière.

Non seulement ne retrouve-t-on plus cette interdiction dans le projet de règlement, mais celui-ci prévoit exactement le contraire. L'article 7 du projet permet à l'école de dispenser: Un enseignement confessionnel plus particulier sur demande des parents. L'école protestante pourra donc, dorénavant, endoctriner par un enseignement basé sur l'appartenance à une secte particulière.

Cet élément, de même que les ajouts d'activités à caractère religieux et des services d'animation religieuse dans le projet éducatif de l'école, font que le secteur protestant se rapproche de plus en plus de la notion catholique de la confessionnalité scolaire, conception marquée par l'intégrisme.

Notre système scolaire public sera ainsi formé de deux réseaux intégralement confessionnels. Quelle place restera-t-il pour les non-catholiques et les non-protestants dans le système scolaire québécois? Sûrement pas le système privé qui est fortement confessionnel aussi. Loin de nous l'idée de suggérer un troisième réseau public. C'est plutôt le sytème actuel qui doit s'ajuster aux exigences des droits fondamentaux et faire en sorte que tous y soient traités sur un pied d'égalité.

Une antithèse. Les projets de règlement des comités catholique et protestant contiennent une antithèse. L'article 13 du règlement du comité catholique et l'article 6 du règlement du comité protestant prévoient en effet que les élèves du secteur professionnel ne seront pas tenus de suivre le cours de morale ou de religion. Cette exemption serait rendue nécessaire à cause de contraintes relatives au nombre d'heures d'enseignement. Les comités confessionnels

reconnaissent donc qu'il y a des matières plus importantes et plus fondamentales que l'enseignement religieux et que celui-ci doit leur céder la priorité. Si c'est vrai pour le secteur professionnel, c'est aussi vrai pour les autres secteurs. Lorsqu'il se donne, l'enseignement religieux occupe donc du temps qui pourrait être utilisé à meilleures fins. Le temps libéré par le retrait de ce cours pourrait être aussi indispensable et profitable aux élèves de sciences humaines ou de sciences pures qu'aux élèves du secteur professionnel.

M. le ministre, l'école québécoise a besoin de toutes les ressources disponibles pour répondre aux défis que lui pose notre société en profonde mutation. La qualité de l'éducation, le virage technologique, l'aide aux milieux défavorisés, l'intégration des groupes ethniques - qu'on oublie complètement, entre autres, en parlant d'embauche d'enseignants catholiques - nécessitent des investissements de temps, d'énergie et d'argent qui empêchent de voir, dans les visées des comités confessionnels, l'ombre d'une nécessité.

Outre ces importants défis, la priorité d'action devrait, selon nous, viser à rendre nos lois sur l'éducation conformes à l'esprit des droits fondamentaux contenus dans la Charte des droits et libertés. L'école québécoise ne pourra accomplir sa tâche si on persévère dans la ligne suivie jusqu'à maintenant et qui consiste à retrancher tout le monde de l'éducation de l'application des droits fondamentaux pour préserver des garanties séculaires. Ces garanties datent effectivement d'une époque où les chartes des droits n'existaient pas. Il serait temps que le système scolaire québécois s'ajuste à cette nouvelle réalité.

M. le ministre, nous vous demandons de faire en sorte que la liberté de conscience et l'égalité des croyances soient enfin reconnues en droit et en pratique dans les écoles du Québec. (20 h 30)

Le Président (M. Parent, Sauvé): Je vous remercie, Mme Trudel, de votre exposé. Comme premier intervenant, je reconnais le ministre de l'Éducation. M. le ministre.

M. Ryan: M. le Président, j'ai écouté avec intérêt la présentation du Mouvement laïque québécois. Les idées que nous a présentées Mme Lamarre-Trudel ne m'ont pas étonné parce que j'en ai vu la présentation à plusieurs reprises auparavant. J'ai eu l'occasion d'échanger, avec Mme la présidente du mouvement, une correspondance assez substantielle sur ces questions. J'apprécie qu'on fasse la critique ouverte de nos politiques. Je pense que, selon les lois du dialogue démocratique, il est normal que, si le gouvernement est critiqué, il expose sa position de manière à la rendre plus claire.

Je voudrais le faire de nouveau, ce soir, dans l'esprit de courtoisie qui caractérise généralement nos rapports.

Je pense que vous attaquez le fond même du projet de règlement. Je ne veux pas discuter des détails particuliers parce que vous nous dites bien que c'est tout le règlement qui devrait être laissé de côté, même le comité catholique devrait être éliminé, si j'ai bien compris votre présentation. Peut-être qu'il est bon qu'on discute, à ce sujet pour commencer. Il y a d'autres remarques sur les points plus particuliers du règlement qui me paraissent moins importantes, mais, si on a un peu de temps, je n'ai pas d'objection à en discuter non plus, au contraire.

Sur le fond, je crois qu'il y a un malentendu entre nous ou peut-être des façons différentes de voir les choses. Un mouvement laïc s'inspire d'une philosophie résolument égalitaire et, procédant de cette philosophie, voudrait qu'il n'y ait pas de distinction fondée sur la religion dans l'aménagement des structures scolaires et même des services scolaires.

La position du gouvernement, comme d'ailleurs de tous les gouvernements qui se sont succédé à Québec depuis la confédération, même avant, est, au contraire, en ce sens que les valeurs religieuses sont un actif pour la société québécoise, qu'elles ont eu une présence centrale dans le développement de l'éducation au Québec depuis des générations, que leur présence a été généralement bienfaisante pour le développement du peuple québécois et que, dans toute la mesure où on peut leur faire une place qui soit compatible avec le respect des convictions ou des positions religieuses de citoyens d'autres allégeances, non seulement il est légitime de leur faire cette place, mais il serait illégitime de la leur enlever.

Nous soutenons cette position par respect pour les libertés fondamentales, estimant que les libertés de caractère religieux sont parmi les plus fondamentales, les plus importantes de toutes et que ces libertés ne sont pas seulement des libertés privées ou particulières, mais des libertés qui aspirent très normalement à des prolongements publics également. Alors, l'effort de ce gouvernement-ci et des gouvernements qui l'ont précédé, y compris le dernier, a toujours consisté à chercher des équilibres qui feraient droit à ce rôle que les familles religieuses veulent jouer dans l'éducation en même temps qu'il assurerait le respect des droits fondamentaux.

Nous croyons, peut-être erronément, que le gouvernement, dans ses législations, respecte les libertés fondamentales. En matière scolaire, par exemple, je croîs que vous conviendrez avec moi que n'importe qui peut se présenter aux élections scolaires au Québec, n'importe qui peut être commissaire

d'école aujourd'hui. Il y a un article de la Loi sur l'instruction publique qui dit clairement: Une personne peut envoyer ses enfants aux écoles d'une commission scolaire pour catholiques même si elle n'est pas catholique elle-même. C'est l'article 39. Nous avons fait des amendements en vertu desquels, lorsqu'une personne envoie ses enfants aux écoles d'une commission scolaire pour catholiques, elle a le droit de voter aux élections de cette commission scolaire et même de se porter candidate sans billet de confession, sans test de foi, sans examen d'aucune sorte. C'est dans la loi, à l'article 39, telle que nous l'avons amendée au cours des derniers mois. Une personne peut envoyer ses enfants à des écoles fonctionnant sous l'autorité d'une commission scolaire pour catholiques ou pour protestants. La commission scolaire est obligée de les accueillir.

Dans le territoire de la ville de Montréal, nous avons deux commissions scolaires principales, la CECM et la CEPGM. Les écoles de ces commissions scolaires sont confessionnelles, mais elles sont également publiques, suivant la jurisprudence. À ce dernier titre, elles sont tenues de recevoir dans leurs murs les enfants que les parents veulent y envoyer. Elles ne peuvent pas les refuser ou les laisser à la porte. Une fois qu'elles les admettent dans leurs écoles, elles sont obligées de respecter les convictions religieuses de leurs parents ou celles des enfants, s'ils sont en âge de les exprimer d'une manière responsable. C'est tellement vrai qu'il y a. encore eu un cas, dans mon comté, il y a quelques mois. Il y avait un enfant, je pense, de parents qui sont des Témoins de Jehovah, qu'on avait soumis à des examens de composition française qui étaient pas mal imprégnés de valeurs religieuses. Les parents ont protesté; ils ont dit que les enfants n'étaient pas tenus de se plier à ces examens. Comme la commission scolaire considérait ces examens comme des examens de français, elle a décidé de mettre l'enfant en dehors de l'école. Les parents ont pris une injonction et ils ont gagné. Le jugement a été rendu par un juge de la Cour supérieure. La commission scolaire a été obligée de reprendre l'enfant et de l'exempter de ce genre d'exercice.

Il y a toute une tradition, de ce côté, qui est très forte chez nous. C'est vrai qu'il y a tout un côté confessionnel qui a été très fort à certaines époques et qui, aujourd'hui, est appliqué de manière différente. La tradition fondamentale du Québec en matière scolaire repose sur ce concept d'école commune. Il y avait une sagesse profonde, il suffit de lire la littérature des années 1840, 1850 et 1860 pour constater que ce n'était pas un bloc monolithique, comme on peut penser par la lecture d'une histoire superficielle; il y a toute une histoire extrêmement riche qui montre que même nos ancêtres du siècle dernier étaient déjà fort avertis des questions de respect des convictions d'autrui ou d'aménagement des divergences d'opinions religieuses dans une société démocratique.

Quoi qu'il en soit, le pari du gouvernement est plutôt dans l'autre sens, dans le sens d'un accueil positif des valeurs religieuses, mais dans le souci du respect des libertés. C'est pour cela que je suis obligé de vous dire que notre position de fond, je ne pense pas qu'elle va changer. Nous écoutons votre intervention avec respect, évidemment, mais je ne pense pas qu'elle sera suffisante pour changer notre position.

Cela dit, il m'incombe de vous dire que le règlement va passer par le fond. Je l'ai clairement dit ce matin, le gouvernement est engagé à faire adopter ce règlement. S'il y a des points qui clochent, nous sommes intéressés à entendre les représentations, mais nous ne remettons pas en cause tout l'exercice. S'il y a des points sur lesquels les libertés sont ou menacent d'être violées ou mutilées, on doit en discuter avec respect. Il y a des améliorations que nous sommes volontiers disposés à rechercher. C'est le fond de notre position.

Maintenant, il y a un certain nombre de points particuliers, j'en mentionne un. Vous pariez dans votre mémoire du pouvoir de révocation, par exemple; vous dites qu'il n'en est pas question dans le règlement. J'ai eu l'occasion de donner l'explication à ce sujet, cet après-midi; je répète brièvement. La Loi sur le Conseil supérieur de l'éducation accorde déjà aux deux comités confessionnels ce pouvoir de révoquer, au besoin, une reconnaissance déjà attribuée. Nos conseillers juridiques nous ont fait valoir que, comme il s'agit d'un pouvoir discrétionnaire accordé par le législateur aux comités confessionnels, il n'était pas concevable d'en réglementer l'exercice, puisqu'il s'agit d'un pouvoir discrétionnaire dans la manière dont il a été donné. Qu'éventuellement ces choses puissent être formulées législativement, d'une manière améliorée, c'est une chose qui peut très bien se concevoir, mais, en n'en parlant pas dans le règlement, je pense que le comité ne voulait pas l'escamoter; au contraire, il l'avait mis. C'est après examen par les juristes du gouvernement qu'il a été décidé de le laisser tomber parce qu'on essaie de laisser tomber, dans nos textes réglementaires, tout ce qui n'est pas rigoureusement nécessaire, il y en a déjà beaucoup trop. Nous, nous sommes arrivés au pouvoir avec un préjugé, celui ds réduire le volume de la législation réglementaire. Alors, c'est cela l'explication. Il n'y a pas autre chose derrière cela. Le pouvoir de révocation demeure entier et peut être exercé en tout

temps par le comité catholique dans le cas de n'importe quelle reconnaissance.

J'ajoute une explication sur les programmes de formation morale. Ils relèvent du comité catholique uniquement dans la dimension religieuse. Je pense qu'on peut concevoir facilement qu'il peut arriver, dans une école catholique, qu'un cours de formation morale soit organisé à l'intention d'un certain nombre d'enfants dont les parents l'ont demandé. On est dans une école catholique. Je pense qu'on ne pourrait pas concevoir que, dans une école catholique, on enseignerait des doctrines absolument opposées aux doctrines catholiques. En matière de morale naturelle, il y a un très grand terrain d'entente entre des gens de différentes confessions religieuses et de différentes allégeances philosophiques. C'est pour cela que la loi donne au comité catholique un droit d'approbation sur tous les programmes enseignés dans les écoles catholiques, mais sous l'aspect moral et religieux uniquement. Pas d'autre chose. C'est pour cela que le programme de formation morale actuel est le même dans toutes les écoles protestantes et catholiques. C'est un programme du ministère de l'Éducation, non pas du comité catholique ou du comité protestant. Eux, s'ils voient là-dedans des choses absolument inacceptables au point de vue catholique, ils ont un droit qui leur est donné par le législateur, pas d'autre chose. Mais franchement, en matière de morale naturelle, les esprits de bonne volonté peuvent faire un très grand bout de chemin ensemble. Et je pense qu'on recherche tous cela. Nous, nous le cherchons dans la politique. C'est essentiellement l'objet de l'action que nous menons. Dans toute la mesure du possible nous cherchons cela.

Alors, je ne vois pas, pour être franc avec vous, sauf sur des points très particuliers que vous pourrez m'indiquer si vous le voulez, les menaces que ceci peut entraîner pour l'avenir des libertés fondamentales au Québec. Maintenant, s'il y a des points que vous voulez signaler à mon attention, je vous écoute avec attention parce que j'aime le débat civil et je pense que vous en avez donné un bon exemple ce soir.

Mme Trudel: Je pense que Mme Cyr-Reed, sur la question de candidat commissaire, aurait quelque chose.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Mme Reed.

Mme Cyr-Reed (Réjeanne): Je suis de la région de Québec comme on vous l'a dit précédemment. En ce qui concerne la Commission des écoles catholiques de Québec, qui est la deuxième ou troisième grosse commission scolaire au Québec, je dois vous dire que je me suis personnellement présentée comme commissaire, il y a trois ans, et qu'on a refusé ma candidature parce que je ne professais pas la religion catholique romaine et que quinze autres personnes ont été refusées dans les dix dernières années concernant le fait de pouvoir briguer un poste de commissaire. Alors, je ne crois pas que le règlement ait été changé. Beaucoup de demandes ont été faites à la Commission des droits de la personne, mais ce n'est pas de sa juridiction. Donc, je ne crois pas qu'on puisse affirmer que les citoyens sont traités ici sur un pied d'égalité.

Le Président (M. Parent, Sauvé): M. le ministre.

M. Ryan: Madame, vous avez soulevé un exemple, celui de la Commission des écoles catholiques de Québec. Je crois que vous avez raison de signaler que, dans la charte particulière de la Commission des écoles catholiques de Québec, il y a une disposition comme celle dont vous parlez et qui n'a pas été modifiée. Nous avons failli la modifier. Je crois que c'est sous l'ancien gouvernement. Un projet avait été soumis pour obtenir cette modification et les élections sont arrivées. Je pense qu'on n'a pas eu le temps de le reprendre. Nous, nous n'en avons pas été saisis encore. Mais il y a un problème là que vous signalez à juste titre. Je vous donne raison sur ce point-là. Mais, pour l'ensemble des commissions scolaires pour catholiques, la loi a été modifiée l'an dernier. En tout cas, vous avez soulevé un point que nous allons examiner de très près et je pense qu'il y a des changements à faire à ce sujet-là.

Mme Trudel: Maintenant, Luc Alary aimerait intervenir, si vous pouvez...

Le Président (M. Parent, Sauvé): Monsieur.

M. Alary (Luc): M. le ministre, vous avez parlé tantôt de l'objectif de votre gouvernement de tenter de réduire le volume de la réglementation. Mais c'est un peu surprenant de voir ici que vous avez devant vous, devant cette commission, trois projets de règlement: un pour les écoles publiques catholiques, un pour les protestantes et un pour pour les écoles privées. C'est un peu surprenant, justement, de voir comment on peut soumettre les citoyens du Québec à trois régimes juridiques différents dépendamment de la religion qu'ils professent. On pourrait ajouter un quatrième régime pour ceux qui ne professent aucune religion et, en fait, ceux-là sont un peu dans les limbes parce qu'il n'y a absolument rien

de prévu. Vous ne croyez pas que, pour atteindre cet objectif de diminuer la réglementation, un seul régime juridique serait suffisant pour assurer l'exercice de la liberté de religion? Je vous pose cette question. (20 h 45)

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci. M. le ministre.

M. Ryan: Aussi longtemps, M. Alary, que nous avons l'organisation de notre système scolaire en tenant compte du facteur confessionnel qui est l'objet de garanties constitutionnelles et qui est aussi l'expression d'une réalité historique, sociale et culturelle importante, nous ne pouvons pas avoir un seul règlement pour ordonner ce domaine d'activités. Ce que nous proposons, nous le faisons d'abord à la demande des comités confessionnels. Ce n'est pas nous qui avons demandé aux comités confessionnels de nous fabriquer des règlements; ce sont eux qui, après avoir fait une expérience consciencieuse pendant plusieurs années, nous ont soumis ces propositions qui avaient été mises en chantier sous le précédent gouvernement. On me les a soumises très peu de temps après notre arrivée au pouvoir et c'est un changement, ce ne sont pas de nouveaux règlements. Ce sont des règlements existants qu'on veut remplacer par des règlements qu'on prétend mieux adaptés aux exigences de l'enseignement catholique et protestant aujourd'hui.

M. Alary: Mais ne croyez-vous pas, M. le ministre, qu'en adoptant des régimes juridiques différents pour chacune des commissions scolaires ou selon le type d'école confessionnelle dans laquelle les enfants seront inscrits, c'est un peu créer un genre de régime d'apartheid dans chacune des écoles, c'est-à-dire que, si vous avez un enfant qui ne professe pas la religion de la majorité de cette école, il va subir un régime juridique différent de celui de la majorité religieuse de cette école?

Nous sommes dans des institutions publiques. Ce ne sont pas des institutions privées. Alors, il me semble qu'au Canada, selon les principes reconnus dans la Charte canadienne des droits et libertés, chacun a droit au même bénéfice de la loi, chacun peut bénéficier des mêmes avantages de la loi. Tout citoyen canadien doit être soumis au même régime juridique et voilà que, dans une école, des enfants seront gérés par des régimes juridiques différents, soit selon la religion qu'ils professent. C'est un peu aberrant. Vous avez la loi 131, entre autres, que le gouvernement a adoptée. Si on parle de régimes juridiques différents, on pourrait peut-être mentionner que, dans cette loi-là, on prive les gens, qui ne pourront pas exercer leur liberté de religion dans les écoles, d'exercer les recours prévus par les différentes chartes, soit la charte québécoise et la charte canadienne.

En fait, on est la seule province au Canada a avoir adopté, en matière d'éducation, une loi qui exclut expressément les recours à la charte pour les gens dont les droits fondamentaux sont brimés. C'est peut-être ce qu'on appelle une société distincte au Canada, mais c'est un peu surprenant que, dans nos écoles, on apprenne à nos enfants que c'est uniquement au Québec, dans le fond, qu'on ne peut faire valoir les droits fondamentaux. Cela me semble un peu aberrant.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Je reconnais une dernière intervention du côté ministériel,, M. le ministre.

M. Ryans Je voudrais tout d'abord vous signaler que, dans chaque école, il n'y aura pas trois régimes juridiques différents; il y en aura un, celui qui sera défini par le règlement du comité catholique ou du comité protestant. Ce règlement est conçu pour s'appliquer à tout le monde,, C'est tellement vrai que, si un enfant, par la volonté de ses parents ou par la sienne, s'il est en âge de l'exprimer, ne doit pas être soumis à l'enseignement religieux catholique ou protestant, il aura le choix d'être soumis à l'enseignement moral non confessionnel. Il faudra lui fournir ce service. C'est dans ce sens qu'on a un régime qui est le même pour tout le monde, mais qui comporte des applications différentes selon les catégories d'élèves, que nous n'avons pas inventées, que nous photographions dans la réalité et que nous accueillons comme telles dans les écoles. Je ne pense pas qu'on puisse dire qu'il y a deux régimes différents; il n'y en a qu'un dans chaque école. Si, éventuellement, un nombre grandissant de parents allaient choisir des écoles non catholiques ou non protestantes, il faudrait bien un règlement pour faire fonctionner ces écoles aussi. Ce ne serait peut-être pas un règlement formel, mais ce serait un régime, de toute manière, qui serait adapté à la volonté qu'auront exprimée les parents à ce moment-là. Je ne pense pas qu'il y ait d'incompatibilité fondamentale avec les droits dans ce cas.

Au sujet de la loi 131, on a eu l'occasion de s'expliquer amplement là-dessus, le problème du gouvernement est un problème pratique. Quand je suis arrivé au ministère, j'avais 10 ou 12 causes en marche devant les tribunaux. On était menacés de passer notre temps à discuter avec des avocats et des juges. Ma "job", ce n'est pas de passer mon temps devant les tribunaux, c'est de faire fonctionner le système de l'enseignement. On a regardé cela concrètement et on a décidé de faire exactement ce que le gouvernement précédent avait fait dans la loi 3.

Dans la loi 3, vous le savez parce que vous l'avez critiquée, il y avait l'article 80 qui disait qu'un projet éducatif intégrant des croyances ou des valeurs religieuses ne pouvait être considéré comme violant des droits fondamentaux sous le seul prétexte qu'il y aurait des enfants qui ne partagent pas ces valeurs. Pourquoi disait-il cela? Non pas parce qu'il était contre les droits de ces enfants, mais parce qu'il disait: Nous avons d'autres moyens de voir à ce que les droits de ces enfants soient respectés et l'objectif est strictement pratique. Je vous le répète, nous ne pouvions pas accepter de passer tout notre temps, d'investir tous nos oeufs dans des causes judiciaires qui menaçaient de s'éterniser pendant cinq à dix ans. Oès qu'il y en avait une qui était réglée, il y avait encore un morceau de spaghetti qui sortait, qui n'était pas réglé et on recommençait un autre procès et un autre procès et on risquait de ne plus en finir. On a décidé de ne pas aller dans cette voie parce qu'on avait des raisons valables.

C'est la raison pratique. C'est tellement complexe que le législateur canadien l'a reconnu lui-même dans sa charte des droits, il y a un article qui dit que cela n'affecte pas les droits définis par l'article 93. Tellement que le ministre de la Justice me disait l'autre jour: M. Ryan, peut-être que la loi 131, avec le dernier jugement de la Cour suprême, on n'en a plus autant besoin qu'avant. iI y a un jugement de la Cour suprême qui vient de nous donner raison, qui vient de dire que c'est vrai que les droits de l'article 93 passent avant les autres. C'est comme cela que toutes les chartes de tous les pays se constituent. Il y en a qui font des chartes purement théoriques et, après cela, ils font un paquet d'exceptions. C'est cela, la réalité historique n'est jamais aussi claire que le voudraient les livres de grammaire et les dictionnaires.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, M. le ministre. Je reconnais maintenant la porte-parole de l'Opposition en matière d'éducation, Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Mesdames et messieurs, au nom de l'Opposition, je vous souhaite la bienvenue à cette commission. Il est important à cette commission, je le rappelle, qu'on entende les différents points de vue. Je me permettrais quand même de faire quelques commentaires et, ensuite, de poser quelques questions par rapport à votre conception de ce que devrait être l'école. J'aimerais quand même relever ce qui m'apparaît être des contradictions assez fondamentales dans ce discours qui veut absolument que soit possible le respect des libertés religieuses fondamentales pour quelqu'un qui choisit l'enseignement moral dans une école parce qu'il n'a pas la même confessionnalité ou parce qu'il ne partage pas les mêmes valeurs. Du moment où le comité catholique a la responsabilité d'approuver -non pas de confectionner comme le ministre laissait entendre que je le comprenais, tantôt - les programmes en matière de contenu catholique et moral... Je lis textuellement le mandat du comité: "approuver, au point de vue religieux et moral - religieux, comme c'est le comité catholique, on peut penser que c'est religieux catholique - les programmes, les manuels et le matériel didactique pour l'enseignement dans ces institutions d'enseignement", et ceci inclut la formation morale.

Il faudra qu'on fasse un exercice beaucoup plus approfondi que celui-là pour dire qu'en même temps on respecte les libertés fondamentales. Le ministre disait tout à l'heure que les libertés de caractère religieux sont les plus fondamentales. Comment peut-on s'assurer que ces libertés soient respectées dans une école, à moins qu'on fasse comme les parents de cette école dont il nous parlait tout à l'heure, chaque fois que vous estimez que votre enfant reçoit un enseignement qui n'est pas conforme à celui que vous attendez qu'il reçoive à l'école, dans une école qui peut paraître neutre ou qui devrait l'être du moment que vous choisissez l'enseignement moral... C'est votre droit. Â moins que tout le monde estime aller en contestation chaque fois. Dans la situation actuelle, il me semble que cela ne se tient pas.

Comment, en effet, ne pas être soumis à l'enseignement religieux, à moins qu'on parle d'enseignement seulement dans un cours, mais, du moment où les autres cours en sont imprégnés, comment ne pas parler d'enseignement religieux dans tous les cours dispensés à l'école? Ce n'est pas faisable en même temps qu'on tient un discours sur le mandat du comité catholique. Je pense que c'est à ce sujet qu'il faut poser la question. Le resserrement du règlement vient ajouter à la menace d'embrigadement de la part d'une communauté religieuse à l'endroit de toutes les autres dans une école.

À mon avis, il y a une chose avec laquelle on ne peut pas composer de façon très honnête, à moins qu'on veuille parler, je le rappelle, de l'enseignement pour le limiter exclusivement aux cours de religion, ce qui n'est pas vrai, lorsqu'on entend les grands enseignements au sens large du terme, du moment où les autres programmes s'en inspirent, c'est-à-dire vérifier que cela soit respectueux de la religion et de la morale. Je pense que cela demeure un discours extrêmement difficile que de tenir ces deux morceaux, à un point tel que les écoles privées l'ont compris. Les écoles privées ne se mettront pas dans l'obligation d'offrir l'option, parce que maintenir les deux, cela se défend mal. Demandez aux écoles privées:

il y a celles qui vont le tolérer, mais ne prétendront pas offrir un enseignement qui ne soit pas religieux, qui ne soit pas de morale catholique. Je trouve qu'elles sont beaucoup plus cohérentes que ce qu'on essaie de défendre ici un peu artificiellement.

Le ministre disait que, traditionnellement, le Québec avait été très respectueux des libertés fondamentales,. II faisait un parallèle, à titre d'exemple, il citait le fait de reconnaître le droit à l'éducation, qu'on n'interdisait à personne d'entrer dans une école de son choix. C'est l'éducation obligatoire et, dans des écoles publiques, c'est dans l'ordre des choses. Cela ne vient pas, ici, démontrer qu'on est respectueux des libertés fondamentales. J'ai déjà connu le ministre plus rigoureux sur certains avancés» Celui-là, à mon avis, il est plutôt boîteux.

Le ministre rappelait que le précédent gouvernement s'était également inscrit dans cette perspective, par exemple, en permettant l'adoption, je dirais en ne niant pas ces droits fondamentaux reconnus à des communautés religieuses protestantes et catholiques ici. Cependant, la démarche du précédent gouvernement se situait dans une perspective de modification des structures scolaires. C'est peut-être important de le rappeler ici.

J'aurais quelques questions. Cela m'a semblé assez clair, mais j'aimerais que vous me le disiez de façon plus claire: Selon vous, l'école publique devrait-elle ou non, dans un cours particulier, enseigner la religion?

Le Président (M. Parent, Sauvé): Madame.

Mme Trudel: Selon nous, comme vous dites, c'est très clair. Selon nous, cet enseignement relève des Églises, des communautés de croyants parce que, on le voit, si on intègre cela au système public, on crée de la discrimination. On ne peut soutenir également tous les types d'enseignement religieux. On en choisit donc quelques-uns, c'est-à-dire l'enseignement religieux des majorités. Ce n'est même plus un soutien puisque ce sont les majorités qui auraient les meilleurs moyens financiers et les ressources humaines pour mettre sur pied leur propre enseignement religieux. La confusion vient souvent, quand on parle de respecter les valeurs et les croyances religieuses, de respecter la liberté religieuse, du fait qu'on s'imagine que, si l'enseignement religieux, catholique ou protestant, n'était pas dispensé par l'école publique, on priverait les parents et les enfants catholiques de l'enseignement religieux. (21 heures)

Dans la situation actuelle, puisque, en particulier, l'Église catholique s'est toujours remise de cette responsabilité à l'école publique, les parents avaient presque raison.

Mais il y a moyen d'encourager ce qui se fait présentement, ce qui est un progrès, c'est-à-dire les comités de pastorale paroissiaux qui commencent à prendre la responsabilité et l'autonomie de cette formation religieuse, comme, d'ailleurs, toutes les Églises protestantes et les autres sectes religieuses le font au Québec. C'est vraiment une accommodation que l'on fait à la majorité d'offrir aux enfants cet enseignement religieux à l'école, ce qui cause ces problèmes quant à l'égalité des croyances religieuses, du respect que l'on doit également à toutes les croyances religieuses. Quand on parle d'accueillir et de respecter l'expression des valeurs et des croyances religieuses, nous aussi, nous en sommes. Mais il y a tout un pas entre accueillir l'expression de valeurs et promouvoir certaines valeurs et certaines croyances plutôt que d'autres.

Je vous donnerai simplement quelques cas qui sont vécus, actuellement, en octobre 1987, dans des écoles du Québec. Dans une école secondaire, l'enfant arrive en secondaire I, la mère, qui a vécu avec cet enfant le régime d'exemption et d'option au primaire, était donc fière d'arriver au secondaire pour qu'enfin les problèmes soient terminés. Le jeune reçoit son horaire, il â de l'enseignement religieux, alors qu'elle avait toujours demandé, pour cet enfant, l'enseignement moral. Elle proteste, téléphone à l'école. On lui confectionne un autre horaire dans lequel il a le cours de formation morale mais pas de cours d'éducation physique. Elle proteste, on lui raccroche même la ligne au nez - parce que, vous savez, nous sommes très fatigants, nous dérangeons beaucoup. Finalement, ce jeune reçoit un troisième horaire sur lequel il a un cours d'éducation physique et une période libre.

Un autre cas. Quand on établit des horaires dans une école, surtout quand il y a une forte clientèle, il n'y a pas simplement la contrainte de l'option entre l'enseignement moral et l'enseignement religieux. Un autre étudiant de secondaire I, dans une autre école. Dans cette école, on offre trois voies: les forts, les moyens, les faibles, enrichi ou allégé. Le jeune ne peut plus être groupé avec les forts s'il tient à son option morale, parce que l'ordinateur a mis l'enseignement religieux avec le groupe fort. Tous les forts sont en enseignement religieux. Les parents, évidemment, tout le monde, on veut que nos jeunes réussissent. On tient à nos convictions, mais on veut qu'ils réussissent. On a le choix: ou on le change de groupe, lequel sera peut-être moins adapté à son rythme d'apprentissage, pour maintenir l'option philosophique, ou bien on plie pour lui donner les meilleures chances de succès.

Un autre cas, sur la rive sud de Montréal, à Longueuil. Des parents, qui ont

toujours demandé que leur enfant ne soit pas soumis à l'enseignement religieux, apprennent à la réunion d'information du mois de septembre que le professeur responsable des cours de formation morale non confessionnelle est l'animateur de pastorale de l'école. On ne veut pas porter d'accusation, avoir des préjugés et dire que l'animateur de pastorale est un homme à l'esprit fermé. Mais, quand même! Quand on parle de faire approuver les programmes, de donner une petite marge de liberté aux jeunes qui ne veulent pas - quelquefois, c'est pour la vie et, d'autres fois, c'est pour un certain temps - être soumis à l'enseignement religieux, quand on soumet ces programmes à l'approbation des comités confessionnels, il y a comme une question de principe, de dignité, de fierté et de crédibilité. Ces programmes devraient être approuvés par la direction générale des programmes et arrêter là.

Qu'est-ce que les jeunes, les Néo-Québécois, par exemple, qui ont une tout autre tradition religieuse... Si tout passe par le crible des valeurs chrétiennes des comités confessionnels, qu'est-ce qu'on a à offrir à quelqu'un qui est différent? Les adultes ne peuvent pas intégrer, comme professionnels, le système d'éducation parce qu'ils doivent être de foi catholique ou protestante.

Je suis intervenue l'année dernière au primaire, à Montréal. Je peux vous dire qu'une jeune laotienne de neuf ans n'a pas pu supporter toute l'année d'être avec seulement une autre de son groupe en formation morale. Elle voulait tellement s'intégrer aux autres et vivre avec ses amis, les Québécois, que cette exclusion de la classe pour un cours de formation morale, elle la trouvait très pénible. Il ne faut pas se le cacher, je ne dirais pas que c'est majoritaire ni proportionnel, mais on retrouve encore, dans nos écoles, des professeurs qui ne sont pas toujours capables de faire la part des choses entre leurs valeurs et les valeurs de la famille de ces enfants. En tout cas, le professeur qui a accueilli cette enfant en enseignement religieux, elle faisait vraiment de la lévitation, elle avait converti une âmei

II faut essayer de se mettre dans l'esprit d'une minorité pour comprendre toutes les difficultés auxquelles on a à faire face. Dans les cas dont je vous a parlé, de parents qui se sont plaints de difficultés d'horaire au secondaire, ces gens ont été les seuls à se plaindre. Dans la même école, cela concernait une dizaine d'étudiants. Mais il y a neuf parents qui se taisent parce qu'ils ne veulent pas avoir d'ennui. Nos jeunes, rendus à la préadolescence et à l'adolescence, ne veulent surtout pas que leurs parents fassent du trouble à l'école parce qu'ils savent que des représailles peuvent se faire de façon très subtile parfois. Ce n'est pas tout le monde qui a les moyens. l'énergie et le courage d'intenter une injonction chaque fois que ces libertés fondamentales sont piétinées.

Nous savons très bien que ce que nous venons présenter n'est pas dans les orientations de M. Ryan. On le sait et je n'espérais pas faire changer M. Ryan d'orientation. Mais j'espère qu'avec la bonne foi qui le caractérise il va pouvoir s'attarder aux conséquences qu'on a pu essayer de mettre en lumière pour la minorité. Quand on fait partie de cette majorité confortable qui a tous les services, on ne voit pas toujours automatiquement les difficultés qui sont créées pour ce qui est de la dignité humaine des minorités.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Y a-t-il d'autres interventions?

Mme Blackburn: Oui, M. le Président, brièvement cependant, parce que je vois que le temps passe. Vous avez cité un certain nombre d'exemples qui prouvent hors de tout doute les difficultés que cela pose de tenir compte des choix des parents en matière d'enseignement moral, surtout au secondaire. J'ai eu l'occasion de le voir à ma commission scolaire où le directeur des services pédagogiques disait simplement: On ne peut pas tenir compte de toutes les contraintes et la première avec laquelle on compose et on invite les jeunes à composer, c'est vraiment l'enseignement moral. On dit: Écoute, cela ferait mieux notre affaire que tu ailles en enseignement religieux. Ils le reconnaissent comme cela, simplement. Ils ne vous font pas de cachette avec cela. Alors, parler de liberté fondamentale et de liberté par rapport au choix de l'enseignement religieux, je pense que c'est se leurrer. Ce n'est pas possible à certains niveaux. Et pour les administrateurs, je vous le dis, même s'ils font preuve de bonne volonté, souvent, à l'occasion, ce n'est pas possible.

Tout à l'heure, le ministre vantait l'histoire riche du Québec en matière de tolérance et d'accueil. Il serait peut-être intéressant de lui rappeler que, quelque part dans les années cinquante, alors qu'on avait une forte migration d'Italiens dans la région de Montréal, on ne les accueillait pas dans les écoles. Les Grecs ont réussi à mettre les pieds dans les écoles catholiques françaises en 1969 ou après. Parler de grande tradition d'ouverture dans nos écoles catholiques au Québec, c'est, à mon avis, un peu biaiser l'histoire. Je dirais qu'il y avait une certaine tolérance, mais cela glissait plus facilement, et sous n'importe quel prétexte, du côté de la commission scolaire protestante qui, l'histoire le prouve, a toujours été plus ouverte et plus accueillante. Le prétexte était bon. À une époque, il y avait évidemment le "baby boom". On manquait

d'écoles. C'était le prétexte pour dire: On ne prend que les purs et les durs, évidemment, les francophones d'origine et catholiques, de préférence.

Cependant, je voudrais seulement vous dire que, pour l'exemple que vous citez, en disant qu'il est inacceptable que l'on donne même un cours de religion parce que ce serait discriminer les autres religions qui, elles, parce que le nombre est insuffisant dans les écoles, ne pourraient pas recevoir la même attention, je me dis qu'il y a un moment donné où il y a une certaine discrimination qui s'exerce. Lorsqu'on enseigne l'histoire dans nos écoles, il est évident qu'on va enseigner l'histoire, je l'espère, du Québec, du Canada, de l'Amérique. Souvent, ensuite, c'est celle de l'Europe. C'est comme normal. On ne s'attend pas à ce que ce soit très également et équitablement réparti parce qu'on a des Laotiens ou des Chinois, ou encore, des Africains au sein de l'école. On aura toujours cette difficulté.

Je voudrais vous dire que bien que je pense qu'on devrait viser à avoir des écoles catholiques et des écoles neutres - je pense que c'est la solution - pour le moment, je n'exclurais pas cette espèce de cohabitation. Elle m'apparaîtrait plus harmonieuse si tout le projet n'était pas inspiré de la morale catholique, s'il y avait un cours de religion ou deux ou trois ou quatre dénominations religieuses dans la même école, parce que c'est ce qui pourrait se présenter dans la région de Montréal, actuellement, où 50 % des jeunes sont de nouveaux arrivants. Vous avez, me dit-on, une quarantaine de dénominations religieuses, actuellement dans les écoles de la CECM.

Mme Trudel: Mme Blackburn, je trouve que, dans votre exemple, la comparaison avec l'histoire, l'histoire, c'est collectif, alors que la religion, c'est privé et individuel. Puis...

Le Président (M. Parent, Sauvé): Un instant. Les deux formations politiques ayant largement dépassé le temps qui leur était dévolu, j'ai une autre demande d'intervention de la part de Mme la députée de Groulx. Est-ce qu'il y a consentement à ce que Mme la députée de Groulx fasse une intervention? Je la reconnaîtrai si l'Opposition... C'est à vous de...

Mme Blackburn: C'est la contrepartie, M. le Président. Je n'ai pas d'objection.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Quand je m'engage pour la contrepartie, je respecte ma contrepartie. Mme la députée de Groulx.

Mme Blackburn: Accordé!

Mme Bleau: Madame, lorsque vous avez émis la pensée tout à l'heure qu'avec M. Ryan vous ne vous attendiez pas à ce que votre projet soit accepté, je pense qu'il n'est pas le seul à défendre ces convictions. Je voudrais bien que, dans la tête de tout le monde, vous ne pensiez pas M. Ryan seul dans cette position, parce que nous sommes plusieurs autour de la table à avoir les mêmes convictions. C'était la seule remarque que je voulais faire.

Le Président (M. Parent, Sauvé); Madame.

Mme Trudel: En fait, je ne parlais pas des convictions personnelles de M. Ryan. Il y a droit. Vous aussi, madame. Je pensais aux orientations politiques fondamentales sur lesquelles nous ne sommes sûrement pas d'accord.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Est-ce qu'il y a une autre intervention? Une intervention de la part de l'Opposition.

Mme Blackburn: M. le Président, seulement pour remercier Mme Trudel et les personnes qui l'accompagnent de leur présence ici en commission parlementaire. Je pense bien que vous avez mis le doigt sur certaines contradictions. Je pense en particulier au projet de loi 131 qui vient rendre très difficile, sinon impossible, toute forme de contestation de personnes qui souhaiteraient avoir autre chose dans les écoles publiques du Québec, je le rappelle. On pourra aussi se demander ce que pourrait vouloir dire: Les personnes qui fréquentent l'école doivent être respectueuses du caractère catholique de l'école. Jusqu'à quel point une association étudiante, par exemple, pourrait mener campagne pour éviter qu'il y ait certaines activités d'animation pastorale dans l'école? Est-ce que c'est passible? Cela s'est déjà vu, mais est-ce que ce serait possible dans le cadre d'un tel règlement? On aurait de multiples exemples. On a un Québec de plus en plus pluraliste, ce qui n'est pas vrai - je le dis, je le rappelle; d'autres l'ont rappelé différemment à Ottawa - pour ma région. C'est plus homogène, mais l'homogénéité culturelle ne veut pas pour autant dire, actuellement, l'uniformité dans les valeurs véhiculées. On semble tenir pour acquis que c'est souvent, malheureusement, exclusivement dans la grande région de Montréal, mais ce n'est pas le cas, c'est partout au Québec où les valeurs véhiculées par les parents ou qu'ils voudraient voir transmettre à leurs enfants ne sont pas celles régulièrement transmises par l'Église catholique ou la morale catholique.

Alors, en gros, je conclurais là-dessus, en vous remerciant de votre participation.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Merci, Mme la députée. M. le ministre.

M. Ryan: M. le Président, je me réjouis tout d'abord du ton qui a présidé à nos échanges. Je me souviens des discussions que nous avions sur ces sujets, il y a une vingtaine d'années; elles se faisaient dans un climat beaucoup plus crispé, beaucoup plus chargé, d'un côté, d'une mentalité peut-être défensive à l'excès et, de l'autre côté, d'une tendance très fortement agressive. J'ai énormément apprécié le ton des interventions que j'ai entendues ce soir. Je pense que Mme la présidente avait raison de dire que même si on a une position claire, ce que souhaite vivement l'Opposition dans ces choses, on est capable de prendre conscience des difficultés qu'elle peut présenter. Il n'y a pas de position parfaite en politique. Vous avez soulevé un certain nombre de difficultés que nous allons continuer d'examiner avec intérêt. Je peux vous assurer que, chaque fois que l'on porte à mon attention une situation concrète où il y a des valeurs fondamentales qui sont piétinées ou blessées, cela m'impressionne profondément. Je me dis: II faut qu'on fasse quelque chose pour . essayer de redresser la situation.

Tantôt, il y a un point que j'avais oublié de mentionner à propos de la loi 131. Je crois que la députée de Chicoutimi m'en a fourni l'occasion. Elle a semblé dire qu'à cause de la loi 131 une personne dont les droits seraient violés dans une école ou une commission scolaire ne pourrait pas recourir aux tribunaux. C'est absolument faux, je pense que tous les recours que vous avez au titre de vos droits fondamentaux peuvent être invoqués devant les tribunaux en tout temps. J'ai donné l'exemple de la commission scolaire du Long Sault, de Lachute, où il s'est présenté un cas très concret il y a quelque temps. C'est vrai que ce n'est pas tout le monde qui peut aller devant les tribunaux. On a quand même, aujourd'hui, des services d'aide juridique et autres, des organismes qui prennent souvent ces causes en charge et qui multiplient les chances d'intervention à un degré qu'on ne connaissait pas autrefois. Ce n'est pas parfait, mais je pense que c'est bon de circonscrire les choses dans leur dimension réelle. L'effet de la loi 131, c'est uniquement d'empêcher les contestations de caractère constitutionnel interminables sur la validité même des lois. Mais, sur le reste, je pense que tous les recours des citoyens demeurent ouverts comme ils l'étaient auparavant.

Maintenant, j'ajoute un dernier point. Je sais que le Mouvement laïque conteste le fondement même, le principe même du projet de règlement. J'indiquais tantôt que l'intention du gouvernement, c'est de le faire adopter, mais j'ai indiqué, ce matin, très clairement que, si dans certaines de ces dispositions le projet de loi contient des éléments qui seraient susceptibles d'améliorations ou qui pourraient constituer des menaces directes à des droits fondamentaux, c'est important que nous en soyons saisis. Je peux vous assurer que nous ferons un examen attentif. Nous ferons part de nos observations en temps utile au comité catholique avant que tout ceci ne devienne un règlement en bonne et due forme.

J'apprécie, encore une fois, M. le Président, l'échange de vues que nous avons eu. Je sais que ces choses-là continuent. J'ajoute simplement que tout ce que font les gouvernements repose finalement sur un consensus qu'ils croient constater. Si leur diagnostic est faux, les mesures qu'ils prennent ne dureront pas longtemps. Et si le consensus sur lequel nous croyons pouvoir nous appuyer pour faire ce que nous envisageons de faire n'était pas existant, l'affaire va nous éclater en pleine figure, ça ne prendra pas beaucoup de temps. Je peux vous assurer que nous veillons au grain également et que s'il y a des ajustements à faire nous les ferons. Nous ne définissons pas des dogmes, nous faisons des aménagements concrets et, dans la mesure où la réalité nous indiquera que ces aménagements ne répondent pas aux exigences de la réalité, au test de la réalité, il faudra bien que nous examinions la possibilité d'ajustements. Et, dans cette perspective, je pense que le dialogue peut continuer longtemps.

Le Président (M. Parent, Sauvé): Alors, cette dernière intervention met fin à nos délibérations pour ce soir. Mesdames, messieurs, nous vous remercions beaucoup. La commission de l'éducation suspend ses travaux à demain matin, dix heures, alors que nous accueillerons l'Alliance des professeures et des professeurs de Montréal.

(Fin de la séance à 21 h 21)

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